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PIÈCES JUSTIFICATIVES
DES
Conclusions des sieurs Louis DUPIC
M a g d e l a i n e CH A B R ILLA T *
et
CONTRE
Sieur L ouis-A nnet DAUBUSSON et autres.
J P a r d e v a n t nous, Espinasse et notre collègue, notaires à ClermontFerrand, y résidans,
Ont comparus sieur Louis Dupic, propriétaire, habitant de cette
ville de Clermont-Ferrand, d’une part, et Magdelaine Chabrillat,
aussi propriétaire, habitante de la d ite ville, d’autre part; lesquels,
chacun à leur égard et néanmoins par les mêmes motifs, ont
exposé être créanciers de sommes considérables des mêmes dé
biteurs, dont ils ne peuvent en ce moment loucher les remboursemens assez promptement pour remplir leurs engagemens
personnels envers MM. leurs créanciers présens, lesquels ils
invitent à accepter l’abandonnement volontaire qu’ils leur font
par ces présentes, i° des créances ci-après énoncées; 2° des im
meubles ci-après désignés. Les créances consistent en trente-neuf
dossiers, suivis d’autant de jugem ens, tous rendus au Tribunal
de Commerce de Clermont-Ferrand.
D’après les lettres de change relatives auxdits jugemens, dûment
signifiés et suivis de bordereaux d’inscription, les premiers dé
biteurs desdits exposans, sont les sieurs Maximilien de Bosredon
de Sugères, et Antoine Pradier d’A uzelles, pour une somme en ca
pital, intérêts et frais, de deux cent trente-quatre mille sept cent;
quatre-vingt-quatre francs tournois, portée par neuf jugemens ;
�l’un en date du douze mai; trois, du vingt-cinq juillet; deux, du
vingt-deux, août; u n, du douze septembre; l’autre, du douze dé
cembre de l’an mil huit cent six, et le neuvième, du seize janvier
mil huit cent sept; ci
234,784 fr.
Les seconds sont les mêmes ci-dessus solidairement
avec sieur Pierre-Jean-Antoine-Maximilien Duclos de
l’Etoile, liabitan t de Brenet, arrondissemen t de Moulins,
pour une somme de quatre-vingt-trois mille huit cent
cinquante-neuf francs tournois, portée par deux jugemens des douze juin et dix juillet mil huit cent sept; ci.
83 , 85 g
Le troisième article de créance est dû par ledit sieur '
Pradier, comme débiteur principal, et ledit sieur de
Bosredon, endosseur, condamnés solidairement par
sept jugem ens, en date des vingt-cinq juillet, vingtdeux août, douze septembre et douze décembre mil
huit cent six; seize janvier, douze juin et quatre
septembre mil huit cent sept, lesquels se montent, en
principal, intérêts et frais, à la somme de soixantedeux mille vingt-cinq livres; c i.....................................
62,025
Le quatrième article de créance est dû par Adliète
Massole, veuve Ligondet, Georges de Ligondet, ha
bitant au château Beaudeant, commune de Bou
gnat; Julien de Ligondet, Pierre-Etienne Chailhe, de
Iiiom; Annet Collaine, du bourg de Fonlainère, et
par ledit sieur de Bosredon, d’après neuf jugem ens,
du vingt-six décembre mil huit cent sept, et deux,
du quinze avril de la présente année, et il se porte à
la somme de cent neuf mille six cent soixante-qua
torze livres, en principaux intérêts et frais; c i . . . 11)9,674
Les cinquièmes débiteurs sont Gilbert-Jacques
Bandynalèche, et Léonore-Alexis T ix ie r-D u b re il,
habitant de la ville de Felletin, d’après sept jugemens, dont quatre du huit avril de la présente année,
cl trois du quinze dudit mois, pour une somme de
A reporter.
490,342
�Report................
soixante-six mille huit cent quatre-vingt-quatorze
francs ; ci...............................................................................
Enfin, le dernier article de créance est dû par ledit
sieur Tixier et Louis son frère, habitans de SaintMare, arrondissement d’Aubusson, d’après trois jugemens du vingt-cinq mars dernier, et ils se portent
à la somme de séf)t mille sept cent quatre-vingt-quatre
490,342 fr.
06,894
francs; ci...............................................................................
7 >784
Le total des créances se monte à la somme de cinq
cent soixante-cinq mille vingt francs; c i ...................
565,020 fr.
Les immeubles abandonnés consistent en deux maisons situées
en cette ville; l’une au haut de la rue des Chaussetiers, ayant
appartenu au nommé Ilurtin, confinée par ladite rue, de bise;
l’autre avec ses dépendances et jardin y attenant, au pont de Font,giève, occupée, à titre de loyer, par le nommé Sénéchal, corroyeur,
lesquels objets ont été maintenant acceptés par lesdits créanciers
ci-présens> audit titre d’abandonnemeiU de biens en direction,
auxquels, pour pouvoir céder et vendre les créances sus-énoncées,
ont été remis tous les titres ci-dessus relatés , ainsi que toutes
les lettres de change et autres pièces y jointes, pour par eux agir
à leur gré dès ce moment ainsi qu'ils aviseront bon être envers
et contre tous, procéder pareillement à l’aliénation des immeubles
toujours en direction à la charge de l’exécution des baux, et aux
prix qu’ils jugeront convenables.
D’après l’acceptation présentement faite dudit, abandonnement
de biens en direction, aux considérations y énoncées, et confor
mément à la lo i, MM. les créanciers, pour la mise en exécution
du présent traité, ont nommé pour syndics et directeurs Messieurs
Daubusson frères, négocians, e tG e n eix , propriétaire, tous habi
tans de cette ville de Clermont-Ferrand, et pour adjoint à MM. les
syndics, M° AntoineDupic aîné, avocat, habitant auFouilloux, com
mune d’Ecoutoux, lequel aura seulement voix consultative et non
délibéraiive; auxquels, par ces présentes, lesdits créanciers donne
�ront pouvoir absolu de traiter et transiger à raison desdites créances,
circonstances et dépendances dans tout état de cause ainsi que
bon leur semblera, à défaut d’accord am iable, commettre avoués
dans tous tribunaux compétans, les révoquer, en nommer d’autres,
plaider, opposer, appeler, poursuivre jusqu’à solde entière, tant
par la contrainte par corps que par expropriation forcée, tous dé
biteurs desdites créances, en recevoir le montant, en fournir
quittances, faire remise des titres, consentir à toute subrogation
au besoin envers les tiers, mais sans garantie, et comme ne re
cevant que ce qui est bien et légitimement dû, en vertu desdites
créances, en capitaux, intérêts et frais, donner main-levée de
toutes inscriptions faites, en faire d’autres, au besoin, à solde en
tière consentie à radiation;
Comme aussi, jusqu’à ladite solde, faire procéder par saisieexécution, par saisie-arrêt, à rencontre de qui il appartiendra
et sur qui de droit, y donner suite aux vœux de la loi;
Quant aux immeubles, les vendre de la part desdits syndicsàtelle
personne, prix, clauses et conditions que MM. les syndics jugeront
convenables; employer, pour lesdiies ventes, telles formalités qu’ils
désireront; recevoir les capitaux et intérêts desdites ventes, etc.;
Pourront aussi MM. les syndics substituer tout ou partie du pré
sent pouvoir à qui bon leur semblera, et généralement faire tout
ce que les circônstances nécessiteront, quoique non prévu aux pré
sentes, lesquelles ne seront point sujettes à surannation.
MM. les syndics, au nombre de deux, dans le cas d’absence du
troisième, sont autorisés à agir et à mettre ces présentes à exécu
tion par tous actes nécessaires et tout ce «pii sera fait par eux deux
vaudra comme s ils étaient tous trois réunis.
Lesdits syndics seront tenus de distribuer les deniers provenans
de leur recettes à qui de droit, aussitôt qu’ils auront une somme
«le douze mille francs en caisse.
Au cas ou le sieur Dupic, [»ai* d’autres ressources, s’acquitterait
envers lesdits créanciers, MM. les syndics sont autorisés à régler
compte avec lui et à lui remettre tous les objets qu’ils n’auront
pas cédés et vendus, et à en retirer décharge.
�A l’exécution tics présentes les parties se sont obligées, dont acte
fait et passé et lu au comparant, maison du sieur Lacombe, sise à
Clermont-Ferrand, rue des Chaussetiers, par moi Espinasse, mon
collègue présent, tous deux soussignés avec le comparant, le trente
juin mil huit cent huit; et à la minute ont signé Dupie, Cbabrillat,
Joseph Daubusson, François Daubusson, Geneix Dùfournoux,
Lacombe, Rolant, Espinasse et son collègue, notaires; enregistré
à Clermont-Ferrand,le huit ju illetm il huit cent huit,/’.0 io 5, v. 6, c. 5 ;
reçu cinq francs cinquante cintimes. Signé Guillaume.
Mandons et ordonnons à tous huissiers, sur ce requis, de mettre
ces présentes à exécution selon leur forme et teneur, aux commandans et officiers d’y tenir main forte lorsqu’ils en seront léga
lement requis, à nos procureurs-généraux d’y prêter main forte;
en foi de quoi, ces présentes ont été signées et scellées par moi
Espinasse, notaire, qui en ai gardé minute, lesdits jour et an.
Délivre en première grosse.
ESPINASSE.
Conventions verbales corrélatives à lacté qui
précède.
Nous soussignés Louis Dupie, propriétaire, habitant de la ville
de Clermont-Ferrand, et dame Magdelaine Cbabrillat, y habi
tant, chacun à leur égard, d’une part;
Sieur et. MM. François et Louis Daubusson, Biaise Gcnest et
autres soussignés, créanciers du sieur Dupie et de la dame Chabrillat, d’autre part; avons fait entre nous les réglemens et con
ventions (pii suivent :
A
rticle
premier.
Quoique, par acte de ce jo u r, reçu Espinasse et son collègue,
notaires audit Clermont, la dame Cbabrillat, et particulièrement
le sieur Dupie, nous aient fait Yabandon des créances mobilières
détaillées audit acte, ainsi que dés deux maisons y désignées,
�la vérité est que ledit abandon ne nous a été fait que jusques
et à due concurrence des sommes dont ils nous sont, chacun
à leur égard, débiteurs par des effets qu’ils j i o u s ont négociés de
différens tireurs, particulièrement des Taillandier, frères et sœurs,
de Faidides, d’Antoine Dupic aîné, de Dupic Filère et de Blanchier,
et p a r des bons du sieur Louis Dupic ; que le montant de ces effets
et bons qui ne sont pas tous, en ce moment, en nos mains, pour
les avoir négociés, peut s’élever à la somme de trois cent mille
fra n cs 3 ou plus, ou moins, sans que la présente évaluation puisse
nuire ni préjudicier à aucune des parties, bien entendu et convenu
que, sur les sommes qui rentreront ès-mains de MM. les syndics,
pour l’exécution dudit abandon, sous la modification ci-ap rès,
chacun des créanciers en recevra par contribution jusques et à due
concurrence de ce qui sera v érifié et reconnu l u i être du, en prin
cipal et intérêt, au taux légal du commerce, à partir de l’échéance
desdits effets et bons.
A
rt.
2.
Quoique, par ledit abandon, il soit dit que nous pourrons céder
et vendre les créances qui y sont détaillées, nous reconnaissons
qu’elles ne nous ont été données que pour en faire le recouvre
ment , et nous nous obligeons, à cet égard, envers le sieur Dupic
de nous fixer à ce recouvrement, à l’exception des maisons que
nous pourrons vendre, quand nous voudrons.
A rt.
5.
Les autres créanciers du sieur Dupic, dont il nous a donné état,
et qui n’ont pas voulu accepter ledit abandon, pourront y prendre
part, quand bon leur semblera; mais si, lorsqu'ils se présen
teront, il y avait déjà eu distribution de deniers rentrés, ils n’y
auront aucun droit, mais seulement sur les distributions à venir.
Art.
4-
D après les dispositions du précédent article, s’il venait s’ad
joindre à nous plus de créanciers que nous le présumons, et que
soit ce qui leur sera dû, et tout ce qui nous est du, s’élève à
�plus de la somme de
Dans ce cas, nous pour
rons exiger du sieur Dupic d’autres créances ou effets jusqu’au
double de la valeur de ce qui excédera ladite somme, à quoi le
sieur Dupic s’oblige.
Art.
5.
Après l’acquittement final de tous nos dus, ainsi que de l’in
térêt au taux fixé par la loi du commerce, nous nous réglerons
par nous-mêmes, ou par MM. nos syndics, avec ledit sieur Louis
Dupic, et nous lui donnerons, s’il le requiert alors, et à ses frais,
reconnaissance et décharge de tout ce qu’il ne devait pas. Nous lui
remettrons en conséquence ses effets quittancés, et le surplus de
ses créances à recouvrer aussi exigibles quelles le sont aujourahui
pour le tout, avec l’excédant de ce que, au moyen du règlement
ci-dessus, nous nous trouverons avoir reçu de nos dus et acces
soires, si excédant il y a.
A
rt.
6.
Jusqu’à entière solde, la force et vigueur de nos effets sont, du
consentement du sieur Dupic, maintenues, afin de le faire con
damner, et contraindre, par toutes les lois commerciales, au paie
ment de ce qui restera à recouvrer, si en définitif, et par la dis
cussion de ses débiteurs, déclarés audit acte, et par le produit
des deux maisons, nous n’étions pas remplis de nos dus et ac
cessoires.
Cependant nous remettrons de suite audit sieur Dupic les effets
signés par les Taillandier et par Feidides, pour raison desquels
il nous donnera reconnaissance et décharge.
A
rt.
7.
Attendu (pie nous 11c sommes pas tous porteurs d e ,ces effets,
et ([ue même ceux qui les ont sont créanciers de [»lus fortes sommes,
les uns plus (pie les autres;
Il a été convenu que, pour remplir, autant que faire possible,
ceux de nous qui en sommes porteurs, nous aurons droit jus(jucs et à due concurrence du montant d iceux, reconnus par la
�décharge dudit Dupic, et des intérêts sur la rentrée de la créance
des Tixier frères et Nalèche, de préférence aux porteurs des au
tres eifets, sans nullement déroger aux droits par contribution
que nous avons sur les autres créances et prix de ventes des maisons.
A
rt.
8.
En considération desdites conventions est intervenu sieur An
toine Dupic, habitant au Fouilloux, commune d’Ecoutoux, fai
sant tant pour lui que se portant fort pour ses frères et sœurs
absens; lequel audit nom a renoncé en faveur de nous, susdits créan
ciers de Louis Dupic, son frère, à toute répétition et demande,
soit par contribution qu’autrement, sur les objets mobiliers cidessus cédés, jusques et à due concurrence de notre dû, ainsi
que sur le prix des ventes des maisons, et généralement pour lous
autres objets appartenans audit sieur Louis Dupic.
A
rt.
9.
Ledit sieur Louis Dupic nous a remis un double} fait triple
le 18 aout 1807 entre lu i, ses créanciers, de Pradier, et ses ac
quéreurs, lequel nous promettons de lui remettre après acquit
tement; convenu (pie, si l’inexécution des présentes en nécessitait
l’enregistrement, il sera aux dépens de la personne qui y don
nerait lieu.
A rt.
10.
Le contenu en ces présentes a été accepté par toutes les parties,
qur à l’exécution de ce qui les concerne se sont obligées.
Fait quatre originaux des présentes. Un a été pris par MM. les
créanciers; le sieur Louis Dupic, la dame Cliabrillat et Antoine
Dupic en ont pris chacun un autre. Suivent les signatures.
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dupic, Louis. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
créances
sociétés
femme courtière et agente de change
syndics
lettres de change
tribunal de commerce
Description
An account of the resource
Pièces justificatives des conclusions des sieurs Louis Dupic et Magdelaine Chabrillat contre sieur Louis-Annet Daubusson et autres.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Joseph Vaissière (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1808
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV18
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_DVV17
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rougnat (23164)
Escoutoux (63151)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
Femme courtière et agente de change
lettres de change
sociétés
syndics
tribunal de commerce
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MÉMOIRE
P
o u r
le fieur M
o n t g o lfie r
,
R ec e v e u r-G é n é ra l
de
j
l 'a r c h e v e c h é de Paris , a c c u ffé ;
C
o n t r e
le
fi e u r
M
onroy
, E nt e p r e n ur
d e B âti-
m e n s , a c c u fa te ur ;
;
>
E N préfence du f ieur CARDON , Marchand de v in , de
M e. D u f r e n o y , Procureur au Châtelet , & de la
dame G l R A R D , co-accufés.
f
----- ,---------------------------------------------------^
,
,
H ic r.iurus ahtreus t jl o
N il con fcirt f i b i nulLi pallcfccre culpâ.
H o r . , Epift. i o . Liv. n . Ad Mæcen.
L e fieur Montgolfier eft acc ufé de complicité dans
une faillite prétendue frauduleufe........................ E h !
q
u
de
i nous eft : à l’ab ri d’une accufation ? q ui de nous
eft à l’abri des incurfions de ces corfaires domeftiques,
A
j.
j
{
�\i ‘ Av
■
v
ç<a.> '. »»•' ,
W**^Aî '
- A K&kV^ib V«
* * V A
• < >xaSÎÏ'
; iy h
4 ,
q u i , ne vivant que de méfaits & d'intrigues 3 épient la.
fimplicité pour en abufer ; qui 3. armés de tout ce que"
la calomnie a d'effrayant, mettent à prix leur inaction y&Z qui , s’ils ne réufliiTenr pas par la terreur qu’ils infpiren t, efent dérober jufqu’au glaive de la loi f pour-
égorger ou dépouiller leurs viét-imes.
,
Mais fe pourroit - il que le fieur Montgolfier fût
coupable ? Se pourroit-il même qu’il fût fufpe£t ? Non..
E t vous tous hommes honnêtes qui , parvenus comme
lui au terme d'une carriere irréprochable , joui il c z en
paix de votre vie pailec ; croyez, avec une douce fécurké , qu’il n’eft pas polîîble de démentir une réputation
acquife par plus de cinquante ans de délicateiTej croyez
donc d’avancc à fa pleine juftification.
Croyez même que sJil cft réduit à paroître aux pieds
de la juftice comme fc défendant d ’être, coupable ;
G’efl: qu’une affociation clandefline , ipéculant fur fe s
dépouilles, a ourdi contre lui la trame la plus odieufe ;
c’eft qu’incapable de tranfiger fur fon honneur, il n’a
pas voulu acheter fon repos aux dépens d’ une juitification folemnelle ; c’eft q u e, fort de fon innocence,,
il n*a pas craint de livrer à fes ennemis un combat à
outrance, & de leur difputer , devant des juges équi
tables , la proie qu’ils ofent encore fe promettre do
Iburs machinations.
F A I
T S.
Au mois de juin 1 7 8 3 , le fieur M ontgolfier, créan
cier du. iieur Diot de Blanchard, s’eft trouvé, par une*
¿¿légation judiciaire, celui du fieur Cardon..
�î
Alors le fieur Cardon , marchind de vin traiteur,
fai Toit un commerce floriflant : il avoit du bien, & ce
bien il l'avoir amaiTé par l'on travail ; une fortune aor
quife préfentoit ainfi à un prêteur une iïïreté matérielle :
des iuccès d’ induftrie lui prometcoienc même l ’accroiffement de ion Oça^e.
¿5
Le fieur Montgolficr fc détermina donc aifément à
Jaiffer entre les mains du fieur Cardon une fomme de
10,000 livres. Ce p rêt, quoique le fieur Montgolficr
eût déjà fait quelques négociations avec le fieur Cardon.,
e i t , à parler exactement, le premier qu’il lui ait fait.:
il eft , fi nous pouvons parler ainfi , la racine de la
créance qu’il répète aujourd’hui.
Tous les jours le .fieur Cardon cherchoit à agrandir
fon commerce, & il formoit des entreprifes d’ un avan
tage très-apparent; mais pour rcalifer fes efforts il lui
falloit des avances , il en obtint du fieur Montgolficr.
Eh ! de quel capiralifte n’en eut-il pas obtenu , tant
la confiance qu’il infpiroit étoit grande , tant les appa
rences lui étoient favorables ?
En 1 7 8 4 , il vend une|maifon , & les lettres de ratifi
cation de fon acquéreur font fcellées fans oppofition.
En 17^ 5 > ü ie préfente pour acquérir des économats
trois mille toifes de cerrein ; on les lui cède, moyennant
une redevance annuelle de 3000 livres, & à la charge
de conftruire un bâtiment au moins de 100,000 livr. ;
& fa fortune j fa réputation fo n t , pour l’exécution d’un
engagement auili important, des fûretés dont fc contente
ür* confeil adminiftratif.
Enfin t & c’eit à l’aeeufateur même du fieur Mont*A z
�41
golfier qu’il faut s-’adreflfer pour favoir la confiancequ’infpiroit le iieur Cardon ; c’eft dans Tes écrits ( i )
cju'on apprendra que ion commerce en vins étoic coniidérable ; qu’il avait des magafins en Bourgogne , aux
environs de Paris Ù dans cette capitale,• que ion auberge
jouijfoit de la plus grande vogue ; que fept domejîiquss
étoient continuellement occupés a. en fàire le fervice ;
qu’il confommoit annuellement pour 40 h 50,000 livres
de poiffon, fans parler des autres comefltbles ; qu’il
faifo it pour 500,000 d'affaires par an ; ôc qu’il avoic
pour plus de deux millions de crédit.
Scra-t-on maintenant étonné que le ficur Montgolfier
ait fait des prêts confidérables au fieur Cardon ? Le
fera-t'On fur-tout,./! 011 réfléchit avec quelle facilité un
premier prêt en amene d’autres , lorfque le débiteur
a une fois gagné la confiance de fon créancier ? Ec
ne craignons pas de le dire, le fe r a - t - o n , fi on fais
avec quel abandon le ficur Montgolfier fc livre à Tattraic
de rendre fervice ?.
,
Au mois de juillet 178 6 , le fieur Montgolfier s’eft
donc trouvé créancier du ficur Cardon , d’une fomme
de 80,189 livres, portée par. portions x en plufieurs bil
lets, à diverfes échéances.
Sans doute cette fomme étoic confidérablc , & l’in
térêt de la conferver pouvoir caufer quelques follicirudes ; d’ailleurs le ficur Cardon avoit déjà promis des
rembourfemens, &c il ne les avoit pas faits; déjà.il avoit
eu befoin de répit.
) Premier mémoire du fieur Monroy, page 10* 11 & 12.
�f
D ’ailleurs encore le fieur Montgolfier le voyoic oc
cupé à ia conitru&'ion d’un bâtiment ; &C ce bâtiment',
dcftiné cependant à fervir d’auberge, éraloic dans for»
architeclure un luxe moniïrucux ; même des coldnnes
en décoroient la façade.
Il conçut donc quelque défiance , non pas pourtant
encore fur la folvabilité de fon débiteur, mais fur la
prudence de fa conduite ëc la diferétion de fes entreprifes.
H témoigna des inquiétudes : malheureufement elles
furent calmées. Cardon lui préfenta un étal général de
fes affaires, duquel il réfultoit qu’il avoit pour plus de
Joo,ooo livres de bien libre & c ffe& if; il lui annonça
de plus des rembourfemens très-prochains ; en un moc
il réuflit à le tranquiUifer.
Mais de nouvelles échéances arrivèrent , &. il paroîc
que le fieur Cardon n’éroit guère alors plus qu’aupara
vant en état d’y faire honneur : il avoit pourtant a
craindre de réveiller les foupçons du fieur M ontgolfier,
& il fentoit bien que le feul moyen de prolonger fa'
fécurité étoit de lui propofer quelque rembouricmcnrEn conféquence, le 28 a o û t, il lui offrit l’ordre dequatre effets, l’un de 4000 livres, fur le comte d’Harcourt, & les autres de 3000 livres chacun, fur un fieur
Hapillon.
Quoique le fieur Montgolfier eût de fortes raifonS
^ ne pas croire à la folidité de ces effets , il les accepta
pourtant, mais h valoir fur fa créance.
Depuis cette époque, près de deux mois s’écoulèrent
fans que le fieur Montgolfier conçût de nouvelles inquié-*-
�6
•tudcs ; le fieur Cardon continuoit Ton commerce 5c fes
conilru£lions ; rien dans fes affaires apparentes n’annoncoic
une mauvaiie iituation»
On conçoit donc fans peine quel fut Ton étonne
ment lorique M e. Dufrcnoy , procureur au Châtelct s
vint lui faire parc du dérangement des affaires de Car
don ; & on prévoie déjà fa conduite en femblablc con
joncture.
I l devoit prendre des précautions p ou r, s’il écoit poffible , affurer fa créance : fes titres étoient de fimples
billets , fans privilège, fans hypothéqué ; il avoir donc
à leur donner une date certaine, de pour cela il falloic
en faire prononcer la condamnation.
Mais alors tous fes billets n’étoient pas échus, & la
faillite n’étant pas ouverte, les échéances étoient en
core de rigueur ; il ne fît donc ailigner le fieur Cardon
que pour 54,089 livres, montant des billets échus : i!
ne fe préfenta pas , & le 13 octobre fentence de con
damnation intervint contre lui.
Pendant les délais de cette procédure le mauvais état
des affaires de Cardon avoit éclaté : faute de payement,
les ouvriers employés à fes conftrudtions avoient quitté
Je travail , & quelques créanciers, affemblés chcz
dame Pourrin , avoient inutilement tenté de le leur
faire reprendre.
D ’un autre côté , la fituation pcrfonnelie de Cardon
empiroit h chaque intlanc ; pluficurs ièntenccs étoient
déjà rendues contre lui ; des contraintes par corps
menaçoient fa Iibcrté\; enfin fa faillite éroit inévitable:
.cependant 9 difoit-il, fes affaires n’étoient qù’engorgées.
�7'
& le moindre répit, pouvoit les remettre dans leur circu
lation naturelle.
Il étoic donc intéreflant pour Tes créanciers de venir
à fon fccours : auffi fe réunirent-ils le 13 o&obrc , 2c
convinrent-ils de follicucr un arrêt de l'urféance : on
dreiïa. fur-le-cham p le placet ,\ il fut ligné même par
le 'ficur Monroy.
Mais des vues pacifiques n’animoient pas rous lescréanciers; quelques-uns, mus par toute autre envie que
celle de conferver au ficur- Cardon les moyens de ré
parer fa fituation, s’oppoferent à l'obtention de la furléancc.
L a liberté du ficur Cardon reità donc expofée auxmêmes exécutions : il s’abfenta.
C ’cit encore M e. Dufrcnoy qu i,-le 29 oeiobre , ap
porta au ficur Momgolficr la nouvelle de cette diiparu-'
tion , qui ouvroit irrémiiîiblcmcnt la faillite.
•
Le ficur Montgoifier étoit créancier de 80,289 Jiv.
8c il avoir titre exécutoire pour la plus grande partie'
de cette fomme j il pouvoir donc commencer les pourÎliitcs : il croit même le plus intérefl'é à le faire.
M c. Du frenoy lui ofFrit ion mini-flic re j il l’accepta.
En conféquence , le 29 ottobre plainte fut rendue y,
information -faite , 8c décret d’ajournement perfonnel
prononcé contre Cardon. Le même jour les fccllés furent
aPpofés fur fes effets.
Le
} faifie reelle de les deux maifons, l’une au
Gros-Caillou &c l'autre à la Râpée : tout cela à la requête
du fieur Montsolfier.
O
�8
Pendant ces pourfuitcs , les créanciers s’étoient fouv-cnr
aflemblés pour aviier à un parti convenable; mais rien
n’écoic encore arrêté, lorfque le 13 novem bre, 5c à
une aflembléc extraordinaire , le fieur Cardon , après
avoir donné l'état de fes affaires, fie propofer l’abaiidoji
eén éral de fes biens.
Sans contredit on ne pouvoir exiger de lui rien de
plus ; il abandonnoit tout : auiîi fa propofition fut ac
ceptée ; &C on croira difficilement qu’un a&e de cette
nature ait ¿té fiiivi d’une plainte en banqueroute fraud-uleufe.
Quoi qu'il en foit , l’acbe d’abandon fut dreiTé : les
créanciers qui compofoient l’ affenïblée le fignere-nt ; ils
s’ unirent Sc nommerentles iieurs Montgolfier Sc Soi fions
fyndics de l'union.
Ces fyndics fe tranfportcreni à. Sain t-Cloud , où b
fieur Cardon s’étoit réfugié ; mais ce ne fut pas fans
difficulté qu’ils le déterminèrent à iigncr. De noûvellcs
réflexions avoient changé fes réfolutions : il ie croyoi.c
cncord riche ; il étoit fur-tout perfuadé qu’il abandon^
noit à fes créanciers plus qu’il ne leur devoir ; il rjépugnoit à fe mettre «à leur merci par un abandon général :
il refufa donc d’abord de figner, & il ne s’y détermina
que quand le fieur Montgolfier lui cut fair entendre que
l’abandon entier de ia fortune, quelle qu en fut la fituatio n , étoit un hommage qu’il devoit aux bpnnes inten
tions de fes créanciers.
Quoique cet a£te fût figné par beaucoup de créanciers,
il ne l’etoit pas par la pluralité, 6c on ne pouvoit par
conféquent en pourfuivre l’homologation. Cardon reftoit
donc
�9
donc toujours expofé à des contraintes } il ne pouvoir
agir pour acquérir ccttc pluralité : il étoit ainfi impor
tant de lui obtenir un arrêt de furféance : les créan
ciers le folliciterent, & l'obtinrent le 13 décembre.
Alors le fieur Cardon, tranquille fur fa liberté , tra
vailla«! acquérir la pluralité : il y réulîir. le 3 mars 1 7 8 7 ,
2c le 13 du même mois ce traité fut homologué provi*
foiremcnt avec les créanciers accédans.
Mais^ déjà fe formoit un orage contre le fieur Cardon.
Le'fieur Monroy , fon créancier de 1 5 , 3 5 7 livres, animé
par la cupidité & par d’autres motifs odieux que nous
lai fions au fieur Cardon à développer , avoit formé le
projet de ie ruiner fans reiTource, & pour cela de fe
rendre maître de la difeuifion judiciaire de fes biens.
D e - là , comme moyen de parvenir à fon b u t, une aceufation de banqueroute frauduleufe.
Effe&ivement , le 7 avril 1 7 8 7 , il a rendu plainte 6c
fait entendre dix-huit témoins.
Le premier juin, le décret d’ajournement perfonnel
déjà prononcé contre Cardon a été converti en décret
de prife de corps ; fa femme & M e. Dufrenoy ont été
décrétés d’aifignés pour être o u ïl; ils ont tous iubi in
terrogatoire.
O
Tout ce qui avoit été fait jufqu’alors ne laifibit matière
à aucun foupçon contre le fieur Montgoîfier ; cependant,
on (aura bientôt pourquoi, le fieur M o n ro y, dans fes
Manœuvres, vifoit direâemcnt à lui ; il falloir donc
dreffer de nouvelles batteries.
E n conféquence, le 14 juin , nouvelle plainte & infor
mation , compofée de
témoins,
B
�ro
Ces efforts ont encore été impuiflans cont re le fieur
M o n t g o l f i c r , mais le fieur M o n r o y ne s’eft pas pour cela
d é c o u r a g é ; il a encore ajouté h (a plainte, il a fait en
tendre c n c o r c j n e u f t é m o i n s , Sc il cil enfin parvenu h
obtenir ce qu’il pourfuivoit fi c h a u d e m e n t : le fieur Moncrçolfier a été décrété {faffigné pour être oui.
Q u e le fieur M o n r o y ait fait du fieur Montgolficr un'
objet particulier de
(es pourfuites, tout le m on de en'
pénètre les m o t i f s ; .Y peine les a-t il lui m ê m e déguifés;
h peine a-t-il dilRmulé qu’il fc flattoit que le fieur M o n t
golficr, impliqué dans une affaire criminelle , s’emprefferoit d’en acheter c hèr em ent l’cxtin& ion . Il vouloir
d’ailleur» fc rendre maître de la difcuilion des biens de
Cardon, &
pour cela il falloir en dépouiller
le fieur
Montgolficr ; pour cela il falloit le rendre fufpecl.
Mais combien pourront fc méprendre fur les caufes de
Uacharncmcnt de cet a c c u l a t c u r , fur les caufcs de la per(écotion lourde &- raffinée qu’il lui a fait éprou ve r!
faut donc
Il
leur apprendre que fes e n n e m i s , ou Tes en
vieux , fc font ligués, fitût qu’ils ont vu qu’on pouvoir tirer
parti cont re lui d’une affaire malheureufe; qu’il fc font
emparés du fieur M o n r * y , o n t dirigé tous fes c o u p s , l ’ont
aidé de leurs manœuvres ic m i m e de Uur plume: il faut
leur apprendre que le fieur Montgolficr a eu a redouter
la p^rfiJn: »le cette cabale m o n l l f u t u f c , plus ericorc que
r ir d f t ic c
du fieur M ^ n r o v
,
Q . j o quM en f o i * , le û-—:r Montgolficr ctoit
te il I* icroit pîefr:«te pp jr prerer ic* t c p o n f e i , fi , a ru**
de I» c o n f c i c n c ^ , il n\ ût c l o u t é que Ion imp n ;
J j î c U fcntC : mat» s'il dcroi t compte J ,
t
fa codyM,;c •
�Tt
ctoic-ce avec l'appareil humiliant des formes rigoureufes de
la juftice ? N ’étoic-cc pas plutôt pour éclairer l'opinion
publique & raffurer la propre d é lic a tc fle , que pour r e m
plir le premier devoir d’un h o m m e fufpc&?
Aufli interjetta-t-il appel de fon d é c r e t ; mais il fuccom ba:
Sc cette défaite viendroic en co re effrayer fou
i n n o c e n c e , s'il ne pouvoir pas dire hautement q u e , lié à
des c o- a ccu fé s cont re Icfqucls s’élevoient fans doute des
p r é e m p t i o n s fAcheufes , il a été la vi&ime f o r c é e du
principe de l’ordre judiciaire, qui veut qu’c* matière cri
minelle , tinjlruclion fo it indiv 'tfible ; s’il n’avoit pas furtout la douce & ineftimablc confolation de fc rappelIcr l’h o m m a g e publiquement rendu à
la pureté de f i
c o n d u i t e , par un magiftrat aufli glorieufement
co nnu
par fon intégrité que par fes rares talcns ( i ) .
Le ficur Monrgolficr cft d o n c revenu devant les pre
miers juges: il a ioutenu y interrogatoires ic répondu à
2 j)
interrogats ,
prcfque
tous adminiftr¿s p a r l e fteur
S io n r o y , c ’eft-i-d.re prcfque tous c a p t i e u x , dérifoircs,
étranger» \ la conrcftjtion , fie pourtant infidiculemenc
»■^produits fous toutes les formes. Scs rcüiftrcs ont été
compulfé* , fie p r o c è s -v e rb a l , t i n t J e leur defeription que
de l’expédition J e» articles relatif) i Î* c r é a n c e ,
a été
joint au procès : il x été c o n f r o n t é , ifcc. en un m o t , il a
fubi toutes
les é p r e u r e t
de la
procédure la
plus ri-
goureuf?.
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�12
Sans doute ces épreuves ont coûté à fa fenfibiüté ; fans«doute il a été bien cruel pour lui de fe voir étroitement
e n v i r o n n é de la défiance & des menaces de la juftice;
mais maintenant, arrivé à une juftifîcacion éclatante , il
retiendra Tes plaintes, il oubliera toutes Tes peines, il at
tendra avec confiance les réparations qui lui font dues.
Et nous, voués à fa défenfe par affection 6c par un
fentiment intime de fon innocence, plus encore que par
les devoirs de notre mi'niftcre ; nous à qui les fourdes
manœuvres de fes ennemis font connues, & qui avons
pour ainfi dire vu de près , les rciForts tendus pour le
perdre ; puiffions-nous, maîtrifantl’ indignation dont nous
fommes pénétrés, ne pas franchir les bornes d’une iage
modération! Puiffions-nous ne pas perdre de vue que il
la calomnie artaque avec fureur , l'innocence ne fe dé
fend qu’avec courage, que la vérité eft fa juftificationi,.
qu’elle eft même fa vengeance !
M
O
Y
E
N
S
.
Etonné de voir le fieur Montgolfier impliqué dans
une affaire criminelle , on fe demande d'abord ce qu'il
a fa it;
bientôt il faut renoncer à trouver dans fa con
duite quelqu’a&ion fufpe£te.
Avant la faillite du fieur Cardon , il lui a fait des
avances, il lui a donné des fecours, >1 l’a aidé à amélio
rer le fort d*unc famille nombreufe ; & féduit, aveu
glé même fi l’ on veu t, par les apparences, il s’eft de
prêts en prêts, de ménagemens en ménagemens, trouvé
ion créancier de 80,2.89 livres, à l’époque du dérange-
�*5
ment cíe fes affaires. Cela eil malheureux; mais cck*
cft-il blâmable?
Ma is , entendons nous dire, la créance du fleur Mont j
/ golficr efl f i confidérable ! E h bien Í qu’importe fî elle cft
Jincere? Au furpîus & indépendamment de toute preuve
de fa iinceriré, que conclure de. la quotité de cette
créance? qu’elle eft invraifemblablc, qu’elle cil fufpe&c.Loin de nous pareille conféqucnce! Il n’y a qu’une ma
ligne prévention, il n’ y a peut-être qu’une probicé équi
voque qui puiiTe la concevoir ; car ceux-ià feulement qui
en font capables, préfument hardiment le dol. Quel eft
en effet l’homme honnête qui ne fait pas que l’excès
de confiance^ ordinairement produit par l’excès de droi
ture , produit à fon tour un abandon qui ne calcule pas,
& qui ne s’arrête que quand il eft pleinement détrompe.
Ignore-t-on d'ailleurs que le ficur Monrgolficr n’a pa3
prêté 80,189 livres en un fcul prêt, mais par des prêt!?
divers, fucceffifs, amenés les uns par les autres, pendant
pluiîeiirs années? A-t-on oublié qu’il a été induit à ceá
différens prêts par la fituation floriflante du ficur Cardon,par la profpérité apparente de fon com merce, par l'exiftence matérielle d’une fortune adez c on f i d é r a b l e , par
fon exactitude dans plufieurs opérations, par le défaut
de pourfuites publiques contre l u i , par des promefles
^êm e des indications de rembourfement total.
Et combien d’autres ont été abufés auffi cruellement
que lui : le fieur Soldons a fait des avances pour 81,000 liv.,
le fieur Gourct eft créancier de 38,000 liv ., la femme le
S*eur répète 56,000 l i v . , & c . Enfin, car tout eft relatif,beaucoup d’autres perfonnes, en prêtant au fieur Cardon’
�•14
des fommes moindres , ne lui ont-elles pas confié la plus
grande partie de leur fortune? Son pailif ne s’éleve-c-il
pas à près de 500,000 livres? Que de créances feroient
donc fufpe&es, ii pour cela il fuffifoit qu’elles fuflent
confid érable s !
Après la fa illite , le iieur Montgolfier s’ efl: comporté
en créancier qui, pour l’intérêt général, veut éclairer la
conduite de fon débiteur & conférvcr le gage commun;
il a provoqué contre Cardon une procédure févere, 6c
mis Tes biens fous la garde de la juftice.
C e débiteur a-t-il expofé l’écat de Tes affaires & de
mandé à traiter avec fes créanciers? Le fieur Montgol
fier a été le premier à exiger qu’il fît un abandon géné
ral de fes biens; il s’eft même employé perfonnellemenc
pour l’engager à cette abnégation de toute propriété.
Le traité du 13 novembre a-t-il été conclu , &. le fieur
Montgolfier nommé fyndic? Il a conilamment fervi la
confiance de l’union ; il s’eft efforcé de prévenir le dépériflement des effets de C ard on , Sc il en a fuivi la difeuffîon avec le moins de frais poilible.
En un m ot, toutes les démarches du fieur Montgol*
jier ont eu d’abord pour but l’avantage de fon débiteur, ÔÇ
^depuis fa faillite, l’intérêt commun des créanciers.
Ec de fon côté qu’A fait le fieur M onroy ?
Avant la faillite , il a faic quelques négociations avec
C a rd o n , il lui a fait quelques avances, mais il l’a ufuré»
Sc il a ainfi ^contribué au dérangement de fes affaires (0*
( 1 ) « P a r l’ événement de toutes nos négociations, il s’eit trouvé mon créait-
p
cier ; je lui ai fait des billets ; a l’époque de leur échéance je les ai re*ouvel-t;S
�Après la fa illit e , il a, fans intérêt légitime, puifque le
fieur Cardon avoir abandonné tous Tes biens , rendu
plainte contre lui; il l’a fait emprifonner ; &. abuiant ainil'
<î;s formes criminelles, il lui a ôté les moyens de conti
nuer fon commerce &: d'augmenter le gage de fes créan*
ciers. Sacrifiant à fa cupidité l ’intérêt de tous, il a traverfé
les arrangemens pris par la pluralité unie ; il s’eft oppofé
à une difeuffion amiable, pour y fubftituer une difcüilîon
judiciaire & ruineufe; il a retardé la vente des vins 8c ils:
ont dépéri; il a empêché la continuation du bâtiment du!
Gros-Caillou ,• &. ce bâtiment s'eft détérioré : la plupart
des matériaux réfervés pour l’achcvcr font même deve
nus hors de fcrvice.
En un m o t, le fieur Monroy , par toutes fes démai'-'
ches, n’a pas feulement travaillé à la ruine du fieur Car
don, niais même à la dilapidation complccte du gage des
créanciers (i).
» faute d’argent, 6c M onroy a toujours exigé que j’y compriffe les intérêts. Ces
» billets ont été renouvellés fi fo u v e n t,& il y a eu à là fin tant d’intérêts cum ulés,
» que la totalité de ma dette s’eft trouvée formerune forr.me de 1 5,000 livres. (Mém.
» de C ardon , p. 1 7 ) ».
( 1 ) L i fieur L argiliere, un des témoins du fieur M o n ro y , a obfervé, lors de
ion récolem ent, que « M o n ro y étoit un malheureux qui étoit caufe que lui t é - ’
» moin ctoit dans la m ifere, & que fans toutes fes chicanes infâmes, les créan” ciers de Cardon ne feroient p is dans la détrefie ; que fi Cardon n’eût pas été
” chaffé de fa m aifon, il l’auroit payé ;
6c
que M onroy lui a dit que fon plus ‘
}> grand plaifir étoit de confommer tout en frais ».
L e fieur M onroy a dévoilé à cet égard fes intentions défaftreufei; il en a fait
Part à plufieuri perfonnes , & c’eft d’après cela que les créanciers , unis dans une
délibération du 23 ju in , ont d éclaré« qu’ils font unanimement convaincus que le
^*eilr M on roy ne peut avoir d'autre but que de multiplier les frais , que l’union
"
ne peut qu’applaudir aux efforts du fieur M ontgolfier, pour empêcher qu’il ne
ct féuflifle dans fon projet ; qu’elle l’invite a ies continuer, & c , » .
�lé
Qu4on prononce maintenant lequel du fieur Montgoifier ou du fieur Monroy devroit aujourd'hui jouer le rôle
d ‘accufateur. Qu’on dife pour lequel des deux c’ cft un de
voir de fe jufiijîer.
M a is, quelque droit de s’en plaindre qu’ait le fieur
M ontgoliîcr, telle eft la fatalité de fa fituation, qu'il faut
qu’il repoufife une accufation , que c ’eft à lui à fe juftifier.
Il s’agit donc de remplir cette tâche, facile il eft vrai, mais
douloureufe à celui qui, defcendu.dans faconfcience pour
vifiter auftèrement fes a v io n s , n’en trouve aucune qui ,
bien loin d’émouvoir fon repentir, ne lui faiTc goûter la
douce fatisfa&ion d’avoir tout fait pour le bien.
L ’accufation intentée contre lui pofe fur deux bafes ca
pitales: l’exagération de fa créance, 6c la collufion de fes
pourfuites. Sa juftification fe divife donc naturellement en
deux branches: il a à. établir la fincérité de fa créance
Ja légitimité de fes pourfuites.
§.
I.
L a créance du fieur Montgolfier ejlfncere.
Le fieur Montgolfier cft porteur de treize billets du
fieur C ard on , qui forment en total la fomme de 80,289 !•»
il établit donc fa créance par des titre ; & très-certainefnent des titres méritent croyance, fur-tout quand ils font
jnattaqués 6c inattaquables par l’infcription en faux.
Rem arquons même que la nature de ceux du fieur M ont'
golficr cd une preuve 'de leur fincérité. S’il eût été capable
de
�*7
de fimuler des créances ; éft-ce qù’il fe préfenteroit avec
de fimplcs billets, fans dare certaine, fans hypothèque?
■Eft-ce que fa créance auroit été expofée à fe confondre
dans la maffe des chirographaires? cft-cc qu’ une partie
confidérable fe rrouveroit en ce moment réduite à une
condition fi défavantageufe?* Non , certainement; la
fraude a (Turc fes pièces & épuife les précautions, pour ne
pas manquer la proie qu ’elle convoite.
Ce n'eft pas au refte à l’exiftcnce de fes titres que le
fieur Montgolfier borne les preuves de la réalité de fa
créance. Il a mis fes regiftres fous les yeux du magiftrac
inftru&eur, & ce magiftrat j-ufte'& éclairé (i) , y a re
connu tous les caradleres de la fincérité ; il a trouvé le rap
port le plus exa£t entre les énonciations des différentes
portions de la créance & les titres divers de cette créance.
» Vérification faite, eft-il dit à la fin du procès-verbal
» de compulfoire, du regiftre couveic en pa-chemin
” v e rt, avons remarqué que les dates, numéros & fommes
M y portées cadrent parfaitement avec les dates, numéros
6c fommes portées au regiftre, couvert en peau verte;
>3 8c pour d ’autant plus nous affurer, de la part du fieur
» Montgolfier, la fincérité & la légitimité de fes créances,
,s il nous a repréfenté , pour notre inftrucbion feulement,
’5 les effets dont il fe trouve porteur, au bas dcfquels
*» nous avons remarqué des numéros conformes à ceux
,J énoncés esdits regiftres, ainfi que les fommes ».
Le f i e u r Montgolfier invoque d’ailleurs, fur la fincérité
de fa créance, la rcconnoiffance formelle qu’en fait la
( l ) M . Judde,
�i8
pluralité unie des créanciers 3 6c les aveux ou témoignages
multipliés qu’en contient la procédure de Monroy.
Peut-on d’après cela former une preuve plus complette de la iïncérité d’une créance , &. le fieur Monroy *
qui ofe y réfifte* , ne feroit-il pas bien embarraffé fi on
en exigeoit une pareille <îe la fincérité de la fienne £
Ne le feroit-il pas même fi on lui demandoic quelle
preuve de plus
dans l’ordre naturel des choies , le
lîcur Montgolfier pourroit apporter ?
C e n’eft pourtant pas encore allez poi r le fieur Mont
golfier -, il veut à des preuves pofuivea réunir des preuvesen quelque maniere négatives ; il veut examiner les infor
mations du fieur Monroy , & rcpouilèr d’ailleurs les impu
tations particulières de cet accufateurSix témoins ont été confrontés au fieur MontgolfierCe font ainfi , fur plus de 60 , les feuls qui aient été'
préfumés faire charge contre lui. Ces témoins font l'esficurs Hollicr Ifaac C a lm e r , Charpentier, Pierre &C
Nicolas M ercier, &. la dcmoifelle Dcgouy..
Nous allons rapporter dans toute leur force les dépofuions de ces témoins ; mais auparavant il nous paroîc
cflentiel de donner une idée de l'information en général t
èc de dévoiler les manœuvres qui l'ont produite : il
n’en faudra fans doute pas davantage pour la juftement
apprécierOn ienc combien il doit être difficile de prouver,,
foit la partialité d’un commiiTaire-informateur , foit la
corruption des témoins, & c’cfl: pour cela qu’on voit il •
peu d’infurre&ions contre les procédures dont les abus
�*9
font couverts par une régularité extérieure ; mais il fort
quelquefois du fein même de cette procédure des traits
de lumière , q u i , en tant qu’ils éclairent les juges fur
la c o n f i a n c e qu’ils doivent accorder à certaines déposi
tions , font propres à tenir lieu d’une procédure vrai
ment épuratoire ; or le fieur JVlontgolfier peut fc flatter
de réunir des moyens généraux de fufpicion contre la
plupart des acteurs qui ont figure dans les informations
du iieur Monroy.
On lit dans la dépoiition du troifieme témoin de la
fécondé information , que M e. Petit Dufrcnoy 0 le
Jieur Montgolfier fe font permis de lui tenir des propos,
dont il s’eit tenu offenfé , relativement à un billet àt
ordre pour lequel il cil créancier de Cardon.
Et ce témoin a déclaré , à la confrontation, ne pas
connoîcre le Jieur Montgolfier , qui le voyoic au/fi pour
la prçmiere fois.
-Ain il de deux chofes l’ une ; ou le témoin , à la follicitation de Monroy , a fauflement & fous des rapports
nuifibles compris le fieur Montgolfier dans fa dépoiition;
ou le commifTaire-réda&eur s’eit lui même rendu cou
pable de cette prévarication.
Le fieur Nicolas Mercier a dit auiîi à la confronta
tio n , « que le commiflaire lui a demandé comme un
■» confeiTeur ce qu’il favoit fur chaque fait, qu’il lui
a répondu ce qu’il favo it, que le commiflaire lui
demandoit chaque fait féparément, ave^-vous vu telle
& telle chofe , que lui témoin répondoit «.
Eil -ce là , nous le demandons, la conduite que doit
tenir un commiflaire ? D o it - il provoquer la dépoiition
C ij
�20
d’ un témoin î D o i t - i l , par des queftions, dirigef cette
dépofition /ur certains faits &c certaines pcrfonncs ( i ) ?
Ec lorfqu’il a tenu une pareille conduite, n’efl- il pas.
au moins fufpcct de partialité?. N e doit-on pas ie méfier
de ia réda&ion, fur-tout Iorfqu’on voit le même témoin %
à qui on a fait dire que le fieur Montgolfier Sc le fieur
Dufrcnoy mangeoient fouvent enfemble chez le fieur
Cardon , Iorfqu’on le v o i t , diions- nous, déclarer, à laconfrontation ,. qu’il ne les a jamais vus enfemble?
Enfin le fieur Charpentier interpellé........... a dit : « qu’:t
»s ne fe rappelle pas avoir été chez le commiflaire ,
» qu’on lui a apporté ia dépofition chez lui pour la'
»1 figner, qu’il l’a fignéc & s’en eft convaincu depuis
m qu’il a été confronté aux autres accufés,.ne fe rap>3 pelle pas qui. la lui a apportée, croit fe rappcller que
» c’étoit vers les une heure, que M onroy ne l\a point
» prié de depofer en fa faveur, puis a dit que oui y
« puis non ».
Que s’ils le peuvent, le commiffaire & le fieur
Monroy effacent les terribles indu£tions qu’il fauc
tirer de pareilles déclarations. Que s’ils le peuvent,
ils détournent la fufpicion qui doit rejaillir des aveux
de ces témoins fimples & timorés, fur les dépofitions
de ceux qui, plus fidellcs à leurs criminels engagemens,
ou naoins fcrupuleux., ont perfiilé d a ns leurs impofturcs.
( i ) Les recueils font remplis d’arrêts qui ont défendu aux juges d'interroger
fcs témoins. Il y en a même qui les ont punis pour l’avoir fait, O n diftingue
celui du 43 j u>lie* 1618 dans 1 affaire de la Pivardiere , & ceux des 16 janvier
1 6 1 7 , 15 mars 1723 & X mars 1728 , qui font rapportés dans Brillon Denifaro,.
J» Répertoire, &.c.
�it
Mais le fieur Montgolfier peut encore fe pniTer de
ces moyens généraux de réprobation ; il ne doit fûrement pas craindre d’aborder 5c de combattre les dépo
lirions qu’on lui oppofe.
\
L e iîeur Hollier a dépofé que la femme Cardon lùi
avait montré une lettre de fon m ari, par laquelle il
l ’engageoit à fe rendre caution pour les ¿6,000 livres
q u il devoit au fieur Montgolfier.
A la confrontation , il a obfervé « qu’il ne fait que
» de ouï-dire, que le fieur Montgolfier a reçu des fom« mes à compte de fes créances , & qu’il n’en a pas de
« connoiflancc perfonnelle ; & de plus, que d’après la
» lettre que la dame Cardon lui a montrée , il pouvait
» croire qu’il ne lui étoit du que 25,000 livres, mais» qu’il n’a jamais prétendu dire ni ne prétend pas cn« corc que fa créance ne foit pas réelle de ne s’éleve'
» point à 81,000 livres
La dépoiition du fieur Hollier fe réduit donc d’abord à
de fimples oui-dire , d’ailleurs vagues, & auxquels il attache
lui-même fi peu de confiftance , q u il n'a jamais prétendu ni
ne pretend pas encore en ce moment, que la créance du Jielir
Montgolfier ne foit pas réelle & ne s’éleve pas a 8i,oüo
livres. Tout le monde f a i t , au refis , que les dépofitions
fondées fur des ouï dire ne méritent aucuttc confidérarion : Teftes ex auditu alieno fidem non faciunt ( 1 ).
Et tout le monde faura bientôt ce qui a pu donner lieu
a des bruits d’tf compte reçu par le fieur Montgolfier.C* ) E n un m u ij de ouï-dire , il n 'y a point de phin. L oilîl. reg. de dr. coiit«
�il ne refte donc de la dépofition du ficur Hollicr
..que ce qui efl: relatif à la prétendue lettre du ficur
C a rd o n ; mais à cet égard il eft témoin unique, ôc par
conféquent il ne fait pas preuve, fuivant cetce maxime ?
Teftis unus , teflis nuUus ( I ). Mais le fieur Montgolficr
veut bien fuppofer Pexiilence de la lettre, &: en expli
quant ce qui a pu y donner lieu , mettre au grand jour
tous les détails de fa conduite.
II avoir, on fe le rappelle, obtenu le 13 o£tobre fen.jtencc pour 54,089 livres, montant de huit billets échus ,
& il écoit encore porteur de cinq billets non échus ,
formant z6,zoo livres. Le fieur C ard on , comme on fc
le rappelle encore, n’ayant pu obtenir un arret de fur{eance, s’étoit réfugié à Saint-Cloud , & fon abfence
avoit ouvert fa faillite. Le ficur Montgolfier fe trouvoic
donc, à l’époque de cette abfence, avec un titre exé
cutoire pour 54,089 livres, mais avec de fimples billets
pour 26,200 livres. Cette dernière fomme étoit donc
deilinéc à être appellée très-défavantagçufcment dans
l ’ordre des payemens : il voulut acquérir pour elle une
fureté particulière, & il crut que l’époufc du fieur Car
don confentiroit volontiers à fc rendre caution ; mais
elle s’y refufa , & de-là la lettre de ion mari pour
l’engager à fc rendre caution pour les î.6,000 livres
qu'il devoit, au fieur Montgolfier.
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( 1 ) G .tte regle fi f r g e , établie par l.’ s loix de M oyfe & confirmée par lcs
■ P-omains , a été adoptée par tous les tribunaux de l’univers. Non flabit teflis
unus contra aliquemquidquid iliudpeccati & ficinoris fucrit. Douter,
cap. 19. v. ¡ 1Manifeflc fancitnus ut unhis omnímodo teflis rcfponfîo non audiatur ^ ctiàinfi
p rx d a rx curia honore filg e a t. L . 9. §. 1. Cod, de teftib.
I
�Certainement il n’y a dans tout cela rien de répré“
ienliblc. Le ficur Montgolfier pouvoir chercher à affii-rer fli créance par tous les moyens ne portant point
atteinte aux droits acquis à la maiTe des créanciers : or
les créanciers n’avoient aucun droit fur la fortune par
ticulière &C libre de la dame Cardon ; le ficur Mont
golfier pouvoir donc prétendre à fon cautionnement*
Sa dem ande, au refte , n’a pas eu d'eiFct , & il n’y a
pas perfevéré dès qu’il a été queftion de comprendre
la dame Cardon dans l’abandon général fait par fon
mari : il s'eft alors cmpreifé de confondre fon intérêt
particulier dans l’intérêt commun.Mais paiTons aux indu£lions qu’il faut tirer de cet
incident.
Le fait énoncé dans la prétendue lettre du fieur Car-don cil clairement expliqué; il effc évident que lorfque
le iîeur Cardon a parlé des 16,000 livres qii"d deveit ait
fieur Montgolfier y il a entendu les 16,200 qu’il lui devoir,
outre les 54,089 portées par la fentcnce du 13 octobre,
il ne pouvoit en ciFet , & indépendamment de la connoiiTance intime qu’il avoit de la créance totale, igno-rcr la portion qui faifoic l’objet de cette fcntcncc ; car
elle lui avoit été fignifiée. Pourquoi d’ailleurs n’a-t-il
Parlé que de i 6 yooo livres? parce que le (leur M ont
golfier ayant titre-exécutoire pour 54,089 l i v r e s n ’avoic
pas befoin & fur-tout ne demandoit pas de fûreté particulicre pour cette fom m e: eh un m o t , parce que cette
fomnic étoit entièrement étrangère
relaO à la négociation
O
tive au cautionnement de la dame Cardon.
Sien loin donc qu’on puifle conclure de la préten
�'14
due lettre du fieur Cardon qu’il ne devoit que ¿6,ooo
livres au iîeur Montgolfier , il faut la regarder com qc
une reconnoiflancc formelle
involontaire qu’il lui
dcvoic 80,289 livres. Car au moment ou a été écrite
cette lettre le lîcur Cardon devoit déjà 54,089 livres.
Cela écoic conftaté par la fentence du 13 octobre ; de
forte qu’en convenant pofierieurement à cette fentence
( 1 ) qu’il devoit 2.6,000 livres, il a articulé bien pofitivement qu’outre 54,0.89 livres il en devoit z6,ooo;
ce qui forme la créanc.ç totale du fieur Montgolfier.
«
»
»
*
»5
«
«
»
m
»
«
>î
»
«
Le fieur Ifaac Calmer a dépofé.......... : « qu’il étoit
allé trouver au Châtelet le iieur Cardon pour l’engager à arranger l’affaire pour laquelle il étoic arrêté,
en lui expofant le danger qu’il courroit fi l’affaire
du fieur Monroy continuoit à fe pourfuivre, d'autant
plus que le fieur Cardon n’ ignoroit pas que lui dépofant fa voit la connivence qui regne entre ledit fieur
Cardon
le fieur Montgolfier, pour une créance de
80,000 livres dont ledit fieur Montgolfier paroîc
créancier ; tandis que la femme dudit Cardon avoic
dit à tous ceux qui ayoient voulu l’entendre que
le fieur Montgolfier n’étoic créancier que de 25,000
livres , & que même le fils du fieur Cardon avoit
avoué ce fait à lui dépofanc , que ledit fieur
Cardon a répondu au dépofanc qu’il ç’en moquoic
( 1 ) La lettre a ¿té écriie ils Sjint-Ç lou d , «Sc le fieur Cardon ne s’y çft
¡rpfngié q u i le 29 oftobre,
» puifqu’U
�a5
M puifqu’il étoic arrêté, que l’éclat étoit fait, qu’on ne
l’avoit arrêté que comme un voleur en plein jo u r ,
« que fcs créanciers n’avoient qu’à le faire pendre &
» rôtir s'ils vouloienc, qu’ils en étoient entièrement
» les maîtres, qu’il étoit las de vivre; qu’alors le dépo-» fant obfcrva audit Cardon que quand on étoit pere
>3 de famille on devoit fe conduire autrement..............
» qu’il étoit inconcevable que ne pouvant prouver une
»3 perte de plus de 6o}ooo livres fur les effets qu’il a
« négociés , il préfente aujourd'hui une ma fie de 5 à
” 600,000 livres ; ce qui prouve que plufieurs des créan« ciers qu’il a portés dans fon état font des créanciers
*s fimulés ôc frauduleux ; que ledit Cardon fur ces ré» flexions répondit au déposant que les créanciers q u il
» avoit annoncés dans fon état p a ÿ if étoient fnceres &
» véritables , ôc finiilanc toujours par dire que le fieur
« Monrgolfier étoic fon ami intim e, ainiî que la veuve
» Girard, &. qu'il s’arrangeroie avec eux dans le cas où
« fcs créanciers ne voudroient pas les rcconnoîtrc ».
Le ficur Calmer interpellé à la confrontation de dé
clarer comment il favoit qu’ il régnoit une connivence
entre le fieur Montgolficr Sc le fieur Cardon pour une
créance de 80,000 livres a d it , par Cardon ô fa femme
ù qu'il nO. pas de connoifjance perfonnelle de cette conni
vence.
La dépofition du fieur Calmer repofe, comme on le
v o it, à l’égard du fieur M ontgolfier, fur des propos
qu’il attribue à Cardon j & le premier point à txamincr cil fans contredit celui de favoir s’ il cil prouvé que
ces propos aient réellement été tenus. Or très-certaincD
�inent il n’en exîfte aucune preuve : le fieur Calmer eÆ
à cet égard témoin unique , & de plus fa dépofition eit
formellement contredite par Cardon,
Mais fuppofons l’exiftence ôc la preuve de ces propos,
& voyons , dans le fait ôc dans le d ro it, de quel poids,
ils pourroient être contre le fieur Montgolfier.
Que Cardon air dit quyon lravoit arrêté comme un vo~
leur, que fes créanciers pvuvoient le faire pendre & rôtir p
q u il ¿toit las de■ vivre , ôc. ce font des extravagances ,,
©u du moins des propos fans conféquence, & produits
par le défefpoir de fa c a p t i v i t é . Qu’il ait die enfuite que le
fieur M onigolfitr étoit fo n ami intime , & qu il s'arrange
rait avec lui f i les créanciers ne vouloient pas le reconnoitre ;;
tout cela efir vague & in fi g ni fiant; & fi l’on prétendoic
en induire quelque foupçon , il ne faudroit que s’adrefieEau fieur Cardon , ou plutôt au fieur Calmer lui-m êm e*
pour le difïïper.. Que lui a effectivement répondu le fieur
Cardon fur le reproche qu’il lui faifoit de fimulation de
créances ? Que les créanciers qu il avoit annoncés dans fort’
état p a jfif étoient finceres ô véritables. Cela eft fansdoutc afl'ez poiitif &. aflez clair pour lever route équi
voque,. pour fervir d’interprétation sûre à tout ce qui
pourroit en avoir befoin.
Enfin , dans le droit & en fuppofant que Cardon eûc
avoué au fieur Calmer une c o n n i v e n c e , il n’en pourroit
encore rien réfultcr c o n t r e le fieur Montgolfier.
En général, une dépofition fondée fur un oui-dire ne
mérite aucune confederation ; mais lorfque le oui-dire
tombe fur une partie contre laquelle le témoin dépofe,.
il. en réfulte une confeffion extrajudiciaire.. Une feule
�£7
chofe feroit donc confiante dans notre hypothèfe: le
fieur Cardon auroit cxtrajudiciairement confeiTé une
connivence entre le fieur Montgolfier 8c lui.
O r , il efl: de principe, en matiere criminelle, qu’ uher
confeiîîon extrajudiciaire , même lorfqu'élle efl. réitérée
dans les interrogatoires, ne fuffic pas pouraiTeoir une con
damnation contre celui qui l’a faite ; 8c qu’à plus forte raifon elle ne fait pas preuve contre les complices par lui
déclarés (1).
Mais à quoi bon une difcufîion fi férieufe pour une dépoficion du fieur Calmer? Efl>ce que des reproches cîef
tous les genres ne s'élèvent pas contre lui ?
Jouant le rôle de médiateur pour en abufer, il s’adreiTe au fieur Cardon & lui d i t , qu'il fa it la connivence
qui regne entre lui & le fieur M ontgolfier; 8c à la con
frontation il déclare n’avoir point de connoiflance /><?/'formelle de cette connivence.
11 dépofe que le fils Cardon lui a avoué que le fieur
Montgolfier n'étoit créancier que de 25000 livres; Sc à
la confrontation il n’efl: plus queftion que de Cardon
& de fa femme.
N e font-ce pas là des variations choquantes ? n'eft-ce
pas le cas d’appliquer la loi : Tefies qui adversiis fidem
fuam tejlationis vacillant audiendi non furtt , 1. 2 , ff. de
teftib.
E t dans la bouche de qui encore fe trouvent ces vanations? Dans celle du fieur I s a a c C a l m e r . ............ du fieur
0 ) On peut vo ir entr’ailtre* crim lualiiles, L a c o tn b :, p a rt., I l l ch. 1 1 , ° - * * 4 *
D 'i
�i8
Calmer reproché, nous le difons à regret, pour avoir
eiTtiyé une condamnation au blâme.
Eft-ce là un témoin fur lequel l’œil de la jufticc puifle
fe repofer avec quelque abandon ? Eft-ce la le témoin
de Jaloi : teflis intégra, frontis & inculpâtes v 'uce ?
Remarquons même que ‘pour qu’ un témoin foit reprochable par défaut de bonne renommée, il n’eft pas néceflaire qu’il ait été flétri par un jugement exprès. Il eft
dans l’ordre focial certaines taches qui heureufement
nJont pas befoin du fceau de la juftice, pour rendre
plus ou moins indignes de foi ceux à qui une conduite
répréhcnfiblc les a imprimées ( i ) Enfin, Sc cette derniere réflexion d ç ;t écarter fans re
tour la dépofition entiere du fieiu Calmer > il paroît
que le dérangement des affaires de Cardon a eu pour
eaufe principale , fes négociations avec les fleurs D oligny* Mardochée Dupin , du Pougetj Henris & Ifaac
Calmer l u i - m ê m e , qui l’ont fait dupe de plus de
iooooo livres ( i) . Or il efl: confiant que la plupart de ces
agioteurs, Sc en particulier le fleur C alm er, font Intime
ment liés avec le fleur Monroy ; 6c il y a tout lieu de croire,
qu’intérefles à mettre le défordre dans les affaires de Car
don, 8c même à le perdre pour échapper à fes juftes pourfuites, ils ont chargé le fleur Monroÿ de cette entreprife , en fe réfervant de l’aider de leur témoignage. On
peut donc confldérer le fleur Calm er dépofant contre
(1)
Tejlium fides diligenter cxaminanda ejl. ldeàque in ptrfonâ eorum txplo-
ztnda trunt in primis..... & an honejlœ & inculpatce
reprehcnjrbilis, 1. 3 , ff. de T eftib.
an verà notatus quis
(2) Voy. le pitmicr mcm. de Cardon, pag. 7 & fuiv,
�*9
C ardon, comme témoin intéreiTé & mcnle comme té*,
moin dans fa propre caiife; cc qui fuffic très-certaincmenc
pour anéantir fa dépofitiôn: Omnibus in re propria dicendi
tcjiimonii facultatcm jura fub moveruni , I. 1 0 , ff. de Teftib.
A l’égard des quatre autres témoins confrontés au fieur
Montgolfier, il feroit fuperflu de nous occuper de leurs
dépofitions. T outes, hors celle du fieur Pierre M ercier
ont été, par le choc de la confrontation, réduites à ne
faire aucune charge contre le fieur Montgolfier, & cellelà n’ayant aucun rapport avec fa créance, mais feule
ment aux procédures faites à fa requête 3 il ne peut en
être queftion que fous le paragraphe relatif à ces pro
cédures.
Nous pouvons donc pafTer de fuite aux imputations
particulières du fieur M o n ro y , & en entreprendre la dif-
cuifion avec d’autant plus d’aiTurance , que manquant
de toute efpece de fondement dans les informations,
eHes ne peuvent être qu’hafardées & calomnieufes.
On fc rappelle qu’au mois d’août 178 6 , le fieur C ar
don remit au fieur Montgolfier , a valoir fu r fa créance 3
Quatre lettres-de-change, trois de 3000 livres chacune ÿ
fur un fieur Hapillon , & une de 4000 livres fur le
comte d'Harcourt. Hé bien, le fieur Monroy argumente
cette opération ; il prétend que la créance du fieur
■Montgolficr a été réduite de 1300 0 livres par la remife
ces effets, & que* foit le fieur Montgolfier en n’en
ant pas compte ; foil le fieur Cardon en ne les dé-
�30
iduifant pas dans fon bilan , fe font rendus coupables
r'- Vk'l! V
¿ ’exagération de créance.
; »
Il fuffit, pour effacer cette inculpation, de rendre
» « »’•t
*
¿compte des circonftances particulières de l'opération
qui y donne lieu.
Les lettres fur le fieur Hapillon avoient été remifes
¡au iieur Montgoliîer, fous l’endoffement en blanc du
fieur C ard on , & l’échéance étant arrivée , il les remir
lui-même au fieur Chatain , un de fes commis, pour
qu’ il pn allât recevoir le payement ; mais le ficur Ha
pillon les laiiTa protefter & il fut aifigné; alors il fouiint d’une parc, qu’il n’avoit pas reçu la valeur, 8c de
l’autre, que le fieur Chatain n’étoit que prête-nom, Sur
ces entrefaites arriva le dérangement des affaires de
Cardon : plufîeurs créanciers, comme nous l’avons dit,
s’aiïemblerenr le 23 o&obrc ; & ce qu’il eft ciienriel de
remarquer , le fieur Montgolfier les inftruifît, que créan
cier de 80,189 livres, il étoit porteur de 13000 livres
d'effets à valoir fur fa créance; il les prévint qu'il en
feroit dédu&ion s'ils étoient acquittés, mais que le
payement en étoit très-douteux, foit par le peu de folvabilieé des débiteurs, foit à caufe des conteftations qui
s’étoient déjà élevées fur ce payement. Le fieur Pain
porteur d’une lettre-de-change auflî de 3000 livres, fur
le fieur H apillon, en fit également fa déclaration. Le
ficur M onroy &. le fieur Hollier étoient à l’affemblée.
Quoi qu’il en fo it , 1.x prétention du fieur Hapillon
donna lieu à plufîeurs procédures, dont le réfultat fut
une fentcnce rendue le 30 offcobre, par laquelle le
/leur Chatain fut déclaré prête-nom du fieur M ontgol*
�fier,, en conféqucnce les pourfuites faites à fit requête’
nulles , & il fut ordonné que les lettres-de-change refïeroient dépofées au greffe.
L e fieur Montgolfier ou le fieur Châtain auroient pu
fans doute fe plaindre de TmjufHce de cette fentenee ^
& fi les chofes fuiTent reilées dans leur état naturel y
ils en auroient certainement demandé la reformation
mais peu de temps après le fieur Hapillon a fait failli ce
les lettres-de-change font devenues fans valeur , & parconféquent toutes pourfuites ultérieures,, inutiles.
Alors les- recours ont eu lieu , & le fieur Montgolficr,
dénonçant au fieur Cardon la fentenee du 30 o£lobre,, Im a fait ( de droit feulement, à caufe de leur dépôt
au greffe) la remife des trois lettres-de-change fur H a
pillon.
Q uanta celle fur le comte d’ FÎarcourc, elle a été pro
f i l é e le 25 o& obre; le fieur Montgolfier a-obtenu fentcncc le 6 novembre, ô£ le 10 on lui a fait fignifier un
arrêt de furfé'ancc.
Il cil donc inconteflable que le fieur Montgolfier
n’a pas dû tenir compte des effets dont il s’agit ; il ne
les avoit reçus qu’à valoir , & ils n’ont pas valu ; partant
il c il, malgré la remife de ces effets, reilé créancier
80,189 livres; & il fuffît pour cela qu’il les ait rap
portés non-acquittés , & qu’il ait juftifié de fes diligencesPour en obtenir le payement ; ce qu’il a1 fait.
A l’égard du fieur Cardon & de la1 mention qu’il a1
foite du fieur Montgolfier fur fon bilan , comme créanClct de 80000 liv,, malgré la remife de ces effets, elle:
cft'indifférente au fieur Montgolficr car le fieur Mon1*
�to y n’a fans doute pas l’intention de le rendre refponiàble de l’exa&itude de ce bilan.
A quelle époque, au furplus, le fieur Cardon a-t-il
donné ion bilan ? Le 13 novembre. Quelle valeur avoient
alors les lettres de-change pour le fieur Montgolfier ?
A u cu n e; car le 30 octobre écoit intervenu, en faveur
d’Hapillon , la fentcnce des confuls , & le 10 novem
bre le comtc d’Harcourt avoir fait fignifier fa furféance.
Le fieur Montgolfier étoit donc alors créancier, comme
auparavant, de 80,289 livres; le fieur Cardon a donc
dû le comprendre dans fon bilan pour cette créance to
tale ; 6c s’il ne l’avoit pas fait , il y a grande apparence
qu’aujourd’hui le fieur Monroy l’accufcroit, à cet égard,
de fouftra&ion de créance.
Ici devroic fans doute fc terminer toute difc.uilion
relativement à la négociation des lettres-de-change donc
il s’agit. T out foupçon d'exagération de créance à cc
iujct cil difiipé, &. le fieur Monroy n'a droit de porter
fes recherches que fur cc point ; mais ce n’en cil pas
affez pour le fatisfaire; ayant befoin de coupables, il
voit des délits dans les choies les plus innocentes; ayant
prémédité des outrages , il en a impudemment créé les
occafions. C ’eil la marche du calomniateur : ea efi
calumniatoris natura , omnia in crimen vocare , omnia ad
injuriarn vertere. Démofth.
11 a donc prétendu que les lettres-de-change fur Hapillon avoient été excroquées par Cardon , au fieur M ardochée Dupin ; que le fieur Montgolfier les avoit rece
lées ; que pour fc les approprier, il en avoit paffé l’ordre
fiour Chatain &; qu’il n’en avait pas tenu rpgiftrc »
�33
d a enfin avancé que pour s’en aiïiirer le payement, il
»voit offert de fe parjurer , c’eft-à-dire d'affirmer que
le fieur Chatain nJétoit pas fon prête-nom.
C e fonc-Ià autant d’atroces impoilurcs. ni._
i ® . Les Iettres-de-changc n’ont pas été escroquées à
D u p in , ôc il s en faut b ien , car elles ont tenu lieu de
reftitution d’effets excroques par ce juif. Cela eft prouvé
par la procédure.
Rien au refte de plus indifférent au fieur Monto-olfier; car il eft encore confiant qu’ il n’à eu aucune parc
à la tranfmilîion de ces effets dans les mains de Car
don, qu’il a même parfaitement ignoré la maniéré dont
elle s’étoit faite. E h , comment préfumer le contraire ?
Dans quelles circonftances ces lettres ont elles été né
gociées au fieur Montgolfier? On ne Ta pas oublié; lorfqu’ unc partie confuiérable de fa créance étant échue, il
attendoit journellement les rembourfem?ns promis par
Cardon ; lorfquc nouvellement affoupi fur la folvabilicé
de ce débiteur, il étoit important de prolonger fa féCurité au moins par quelques à compte. Ec l’on croiroic
que dans de pareilles conjonctures, Cardon ne s’eil pas
appliqué à cacher au fieur Montgolfier roue ce qui pourroit lui faire fufpe&er la légitimité des effets qu’il lui
ftégocioit! Quelle abfurdicé!
x°. Le fieur Montgolfier porteur des lettrcs-de-changc ,
fous l’endoflement en blanc de Cardon, 6c voulant s’en
procurer le payement, les remit, à l’échéance, au fieur
Chatain , l’un de fes commis, pour les préfenter au dé
biteur ; ma;s ¡1 lui falloir le pouvoir d’acquittcr, & il
^es paiTa à fon ordre. Cela fe pratique journellement dans
E
�34
Je commerce* Le fieur Montgolfier a d’ailleurs il pet»
cherché à.fe fervir par-là d’ une voie oblique & déguifée,,
qu’il a accepté fous fort nom la lettre-de-change fur le
comte d’H arcourt, provenante aulîi de la reftitution
faire par Dupin ; & enfin qu’il a paffe celles fur Hapillon fous celui d\in de Tes commis. Etoit-ce l a , en vé
rité,. la pcrfonne qu’il aurait choifie s’il eût cherché à,
détourner les recherches ?
3°. Si le ficur Montgolfier n'h pas tenu rcgiftre de
l ’opération relative aux lctrres-de-change d’Hapil!on„
c’eit qu’elle n’étoit pas de nature à demander cette for
malité. D e quoi s’agiilbic-i! ?. D ’une remife h valoir; or.
une remife de ce genre étant éventuelle , ie fait toujours'
de confiance:: elle ne devient véritable négociation que
lorfqu’clle cft réalifée par le payement. Alors elle n'eifc
plus a. valoir elle a valu, e lle e il confommée
il faut
en tenir compte ; alors donc feulement elle devient fujette à regiftre : or la remife faite au. fieur Montgolfier
n’a pas va lu ; les effets n’ont pas été p ayés, il les a.
rendu non-acquitfés, il n’a donc jamais été dans le cas
d’en faire regiftre.
4°. Et à l’égard de PofFre de fe parjurer , eft-il poffible que le lieur Montgolfier, ait befoin de defeendre àune juftification ? Sans doute,, s’il n’avoit à parler qu’à,
ceux qui le connoiffent, elle ieroit inutile : ils ont d é jà ,
de toute leur indignation, rcpouiTe une telle calomnie.
Mais il s’adircfTe à la juftice & il veut la convaincre. II>
s’adrciTe peut-être à cette partie du public qui croit tout
fans examen , auprès de laquelle la hardieffe dent lieu de'
preu ve, qui confond toujours le menfonge. impudent avec-
la vérité,
il veut la détromper*.
�Hapillon ayant foutenu que Chatain n’ étoît que prêtenom du fieur M ontgolficr, le fomma de déclarer quand
& comment il avoit acquis les effets dont il étoit
porteur.
' '
L e fieur Chatain dit que « la valeur en ^voit été
« fournie à Cardon par le iicur M ontgolfier, Sç'qüe et•» lui-ci les avoit négociées à lui demandeur fous la
•» iîgnaturc de Cardon ».
Sur c e , Hapillon demanda la mife en caufe du fieur
Montgolficr, & elle fut ordonnée.
Il s'eft donc préfenté aux Confuls , & il a déclaré
«5 que les trois lettres de-change acceptées par Hapillon,
♦» lui avoient été remifes 6c négociées par le fieur Carn don fur fa ûgnature en blanc, à valoir fur plus forte
« fomme qui lui étoit due par ledit Cardon ; que fous
« le même cndaiîcmcnr er> blan c, iJ a négocié lefdites
« lettres-de-change au fieur Chatain , qui lui en a compté
>3 la valeur, de auquel il en a donné fon aval de ga« rantie; laquelle déclaration il eft: prêt & offre d’affirmer fous la religion du ferment fincere & véritable
« fi nous l'exigeons: nous obfervant qu'il n’ a tenu au« cune cfpece de regiflre de cettc opération « .
C ’eft de cette prétendue déclaration qu’abufe fi étran
gement le fieur Monroy.
Nous difons prétendue, car elle ne peut être regardée,
fur-tout littéralement, comme étant du fait du fieur
Montgolficr. Elle ne lui a pas été lue & elle n'eit point
(ignée de lui ; il pourxoit donc la défavouer en entier ;
il pourroit du moins la rcétifier ; mais il veut bien la
fuppofer rigoureufement cxa&e.
E ij
�3^
Q u’a-t-il offert d’affirmer ? que le (leur Chatain lui
avoit compté la valeur des lettres-de change, ccft-à-dire
qu’il ¿toit dé-fintéreffé par ce porteur d 'o rd re, qu’il ne
lui demandoit & ne lui demanderoic rien: Sc non p a s ,
comme- l'avance M o n ro y , que Chatain lui en avoit
fourni la valeur comptant, c’eft-«\-dire en efpeces; cc
q u icil bien différent; or, très-certainement le fieur Mont;golficr pouvoir offrir cette affirmation , il pourroit même
ia faire encore aujourd’hui.
E t qu’ on ne penfe pas que ceci cil une interprétation
bénignement imaginée pour !c befoin d’ une juftification
difficile. Continuons.
Les Confuls ne trouvant pas fans doute leur but rem
pli par la déclaration du fieur Montgolfier, ont jugé à
propos de l'interroger de nouveau , & (après avoir auiîï
fait fubir un interrogatoire fecret au fieur Chatain ) ,
ils l ’ont fait appcller dans la- chambre du confeil , cfii'
ils l’ont interpellé de déclarer « comment 6c en quels
» objets il avoit reçu la valeur des 9000 livres, mon» tant des lettres-de-change ».
Le fieur Montgolfier avoit à faire une réponfe bien
lïmple. Il pouvoir dire qu’il avoit reçu les 9000 livres
en efpeces ayant cours , & tout auroit été terminé ; car
on ne pouvoir exiger de lui des détails plus particuliers.
C ’eft effectivement la réponfe qu’il auroit faite , fi pré
cédemment il avoit offert d’ affirmer qu’il avoit reçu la
valeur en deniers comptans ; mais ce n’étoit pas là ce que
le fieur Montgolficr avoit fait ; ce n’étoit pas- là ce qu’il
avoit offert ¿ ’affirmer ; aufïï ce n’eft pas ce qu’il a ré-
�SI
» À quoi le fieur Monrgolfîcr a répondu qu’ il a reçu
» valeur à fa fatisfa&ion ».
Voilà bien fans équivoque l’interprétation de ce qu’ il
a offert d’affirmer, qu'il avoit reçu une valeur qui le dé~
fintérejfoit ; mais pourfuivons, 6c cela devient encore plus
évident.
et: Par nous interpellé d’office de nous- déclarer cathé« goriquement en quels objets ; » il a répondu que ci cette
» valeur n’a été qu'entendue entre lui 6c le ficur Cha-*
» tain ; pourquoi il ne peut nous en donner le détail ».
(Cette déclaration eft la feule qui ait été lue au fieur
M ontgolfier, Sc qu’il ait (ignée).
Le fieur Montgolfier a t-il d o n c , ainfi que M o n ro y ,
oie le répéter jufqu’à fatiété , offert de Te parjurer? îï
peut mentir impunément, Ton intérêt le demande , Sc
pourtant il ne le fait p as: il peut dire qu’ il a reçu en
4 tJpeceTi ’&"Ton payement ne doit plus lui être dénié j mais
il n’a reçu que valeur entendue, 6c il le déclare ingénu
m e n t, quoiqu’on puifle (comme on l’a fait) fc fervir de *
€et aveu pour lui contcfter fa créance.
A h ! fans doute > on a Confpiré contre la réputation
6c le repos du ficur Montgolfier! mais devoit-on abufer
auiîi impudemment d’une procédure irrégulière ôc étran
gère à la co n ten tio n ? Devoit-on jamais ofer en faite
fortir l’offre de fe parjurer contre quelqu’un qui n’a pas
même voulu meïïtir.
Et comment au furplus concilier quelqu’idée de fraude
avec la conduite franche & ouverte du fieur Montgol
fier? N ’a-t-il pas, fitôt le dérangement des affaires de
C a rd o n , inftruit les créanciers, qu’il é.toit porteur des
�38
llettres fur Hapïllon ? Sc dès-lors n’a-t-il pas prévenu tout
foupçon fur Tes pourfuites à cet égard? N ’a-tril pas pré
venu ces lâches imputations du fieur M onroy ? q u ii avoit
deux objets en f e fervattt du nom de Chatain, pour s'ap
proprier les lettres en quefiion : le premier , de ne point pa~
roître porteur d’effets qu'il favoit ne pas appartenir légiti
mement a celui qui les lui paffoit > & le fécond , d'en rece
voir s'il pouvait le montant , fans en faire déduclion fu r
f a créance. Premier m é m ., p. 44.
Que le fieur M onroy ne fe lediffimule donc pas, l'a
charnement qui a conduit fa plume fort lui-même de
contre-poifon à la calomnie qui en cil découlée.
A quoi bon par conséquent nous occuper des reproches
de dérail auxquels s’eil livré le fieur M onroy? Ce feroic
nous aiTujettir à relever des injures prodiguées fans pu
deur; ce feroit fouiller gratuitement notre plum e; car
il n’eil aucune des impoilures de ce témémsasss^miksa*—rairc accufateur , qui ne foit démentie par la procédure
gée avec Part le plus perfide.
Croiroit-on , au demeurant, quJil cil néceflaire de ju£
tifier le fieur Montgolfier fur cette remarque du fieur
JVJonroy, que le 10 mai ï 786 , un billet de 8600 livres
¿toit échu , que Cardon ne Pavoic pas payé , 6c que ce
pendant le fieur Montgolfier lui avoit prêté 4601 livres;
que le 10 juin un autre billet de 10000 livres etoit auifi
éch u , que Cardon ne l’avoir pas non plus payé , & que
pourtant le fieur Montgolfier lui avoic encore prêté
8000 livres? Rien de plus facile que cette juilification.
Avant la faillite, quelle étoit la fituation du fieur
Montgolfier à 1égard du fieur Cardon? J 1 étoic dans k
�35>
plus parfaite fécuriré ; il avoit dans f;i folvabilité une.
pleine confiance. L ’échéance d’un billet n’étoic done'
pas un motif d’en exiger le payement, n’étoit pas même
un obftacle à prêter encore.Et la conduite du fieur M onroy lui même cft uiï
exemple bien frappant de ce que la confiance dans la1
fortune de Cardon a été capable d’ opérer, même à la1
veille de fa faillite & poiléricurement à tous les prêts
du fieur Montsrolfier.
Ses billets écheoient au mois- de
Í7
feptembre 1-786,. il n’en demande pas le payement, il*
confent à les renouveller , & ils le font effectivement
le 10 ôc 1 1 de ce mois.
M a is , dit encore le fieur M o n ro y , les billets du fieur
Montgolfier étoient fuccefïivement échus , 5c pourtant'
ii n’en demandoit pas même le renouvellement.
Y a-t-il encore là quelque chofe d’étonnanr, fi on1
fait attention au rapport de fituation dans lequel fe trouvoit le fieur Monto-olficr avec fon débiteur?
Cardon annonçait journellement des rembourfenlens,»
& le fieur Montgolfier, confiant en íes promefles, çompr-oit même iur celui de fa créance entière. Il fc gardoic’
donc de demander le renouvellement de fes billets ; il
ne vouloit pas, par une femblable novarion , faire de'
nouvelles échéances ôc éloigner ainfi fon rembourfement.
Enfin il fc gardoit biende preiTer fon payement à chaque
échéance : il n’auroit pu le faire que par une adtion ju
diciaire ; or certainement 011 conviendra qu’ un parti d e ’
cette nature doit êtte abfolument la dernicre reifource
d’un créancier de fommes confidérables, de fur-tout d’un 1
créancier dont la créance totale cft divifée- en échéances*
�40
fucceflives. Écrafer fon débiteur à la premiere échéance,
ce n’effc sûrement pas fe préparer l’acquit des autres.
L e Heur Monrgoliîer endormi par les promettes de
C ard on , s’eft: donc trouvé, au mois d'octobre 1 7 8 6 ,
créancier de 54,089 livres, montant de différons billets
. fucceifivement échus; 8c il l’avouera hardiment, fa con
fiance dans la fortune de Cardon étoit telle, qu’ il auroit
encore attendu, fi M c. Dufrenoy ne fût venu le dé
tromper.
Enfin faut-il répondre au fieur M o n r o y , quand il pré
tend qu’au mois de juillet 1 7 8 6 , le fieur Montgolfier a
travaillé à l’inventaire du fieur Cardon, de concert avec
lui ; d’ou il conclut qu’il en connoiÎloit parfaitement les
affaires.
A cette époque le fieur Montgolfier a feulement exigé
que Cardon lui fît parc de l’ctat de fes affaires, 8c Car*
don lui a communiqué feulement un tableau général,
duquel il réfultok qu’il avoit pour plus de 300000 livres
d,e bien libre 8c effeélif.
Eh , de bonne fo i, croira-t-on que fi le fieur Monto-olfier
avoir, au mois de juillet, eu connoiiTance de
£5
rér'ac au vrai des affaires de C a rd o n , il auroit attendu
plus de quatre mois pour prendre les précautions nér
oeflaires à la sûreté d’une créance de plus de 80000 liv. ?
Répétons-le donc , nous aurions pu nous difpenfer
de répondre à ces reproches du (leur M onroy, 8c notre
filcncc ne les auroic sûrement pas accrédités. Il n’en au
roit pas moins été confiant que le fieur Montgolfier eft
créancier finccrc de 80,289 livres. Etoit-il cffe&ivemcnc
£ préfumer que le fieur Monroy pue jetter quelques
foupçons
�4i
foupçons raîfonnables fur la. fincérité d’une créance
portée en des titres, juftiiîée par des livres en regie, re
connue par la pluralité des créanciers
, ce qu’ il n’auroic jamais du perdre de vue, répétée par un hpmmc
notoirement incapable de fraude.
§.
I
I.
'
Les pourfuites du Jicur Montgolfier font légitimes.
L a fincérité de la créance du fieur Montgolfier une
fois certaine: nous pourrions dire que la caufe eft finie.
Quel intérêt peut4 l avoir eu à tremper dans un complot
frauduleux? Nous défions même le fieur M onroy & les
génies malfaifans qui l’infpirent, de lui en trouver un
vraifcmblable.
Nous pourrions donc éca rte r, fans le moindre dé
tail , tous les reproches relatifs aux pourfuites du fieur
M ontgolfier : étant fans objet déterminé ils tombent
d ’ eux mêmes.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier a dans fes
pourfuites civiles uié de ménagemens pour Cardon ;
bien loin de pouvoir lui en faire un crime , le fieur
M onroy même lui en devroie de la reconnoiffance. Ces
ménagemens auroient produit l’abandon général des
biens du failli ô£ l’économie des frais de difeuffion. Eh i
que peut défirer de plus une mailc de créanciers! Heureufe la faillite dont la difeuffion ne tombe pas entre les
mains d’ un pourfuivant , qui par une activité inconsi
dérée } confume le gage commun. Ils le favent déjà, les
F
�4*
créanciers du fieur Cardon , combien il leur eut été avan
tageux que les pourfuites contre ce débiteur ne fuiFent
pas paiTées des mains du fieur Montgolfier en celles du
fieur Monroy : la dilapidation de leur gage eft déjà bien
avancée.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier n’a pas donné
des fuites aiTez meurtrieres à fa procédure criminelle^
de quel droit pourroit-on le lui reprocher? Avoit-il con
tracté,* par exemple envers le fieur M o n roy, l’engage
ment de pourfuivre Cardon comme banqueroutier frau
duleux , &c n’a-t-il pas été le maître d’abandonner fes
pourfuites à cet ég ard , fitôt qu’il les a cru mal fondées,
ou haiardeufes ?
Enfin , découvriroit-on quelques irrégularités dans les
procédures faites au nom du fieur Montgolfier, nous le
demandons, feroient-elles de fon fait? Pourroic-on les
ïui imputer 5c fur-tout en former contre lui la matière
d ’une accufaiion ? Depuis quand donc une partie peu
©u point verfée dans la fcience des formes ? une partie
qui eft purement paifive dans tout cc qui fe fait de ju
diciaire , feroit-clle criminellement refponfable de la con
duite des officiers publics auxquels elle a remis fes inté
rêts,. & dont le choix a été le plus fouvent forcé pour
clic ?
M ais voyons en particulier fur quoi le fieur M on ro y
fonde fes reproches.
U n fcul témoin, Pierre Mercier,, a dit « que le 24
» oftobre 1 7 8 6 , le fieur Cardon fils, accompagné d’un
» particulier qui s’efi: dit huiificr, font venus chez le ré» pondant, à la. Nouvelle France,, 6c lui ont fait figner
�45
* un papier, que ce particulier &: ledit iîeur C a rd a *
*> dirent au dépofant que tout cela n’étoit que des for-
y
t c
» malités de juftice, & q u e , fous huit à quinze jburs, /M>uZ*c$c^ x C f i
*> les affaires du fieur Cardon feroient terminées, 8t que
m toutes ces opérations fe faifoient de concert entre le
iieur Montgolfier 8c le Heur Cardon pere , 8c que lo:s
« de I’appofition des fcellés du 30 o & o b r e , le commif» faire a d i t , à lui dépofant, que tout ce qu’ on faifoit
»3 étoit d’accord, & convenu entre le fieur Cardon 8c
» le iïeur Montgolfier ».
Nous ne dirons pas que le fieur Mercier érant témoin
unique , fa dépofition doit être rejectée: elle efl: de trop
peu de conféquence pour qu’il foit befoin de Pattaqutfr
«n forme. Sur quoi repofc-t-elle ? fur des oui-dire. Elle
ne mérite donc aucune coniidération ; & cela efl: d’au
tant plus certain qu'on a évité de faire entendre en témoignage ceux de qui font venus ces oui-dire. On a donc
négligé le feul moyen de conftater légalement le fait ;
& pourquoi cette négligence? Sans doute pour ne pas
révéler le menfonge du témoin.
Quand au refte, il feroit vrai que le commifTaire ,
l’huiffier 6c cent autres auroient dit qu’il exiftoit un con
cert entre le fieur Montgolfier Sc le fieur C ard o n , pourroit-on foutenir qu’il y a preuve de ce concert. Eft-ce
que pour former une preuve, la juftice fe contenta ja
mais de propos vagues? elle ne reçoit dans fa balance
que des faits & des faits cowftans. Or ici y en a t-il un
feul de cette nature ? Il n’y >n a pas même d’articulé.
Quand d’ailleurs le fils Cardon auroit cherché à donner à une faille faite fur fon pere êlcs couleurs favoriF ij
j
,j
�V* ’ 1
44
Wessÿ. quand le Commiffaire auroit, des. mêmes traits:
peint l’appofition des fcellés, afin de déterminer le fieur
Mercier à être gardien eft-ce qu?il faudroit e a conclure
une colluficn entre le fieur Montgolfier & le fieur Cardon.?
Le pourroit - on ,. furtout en confidérant l’iiTue des
procédures qui ont eu lieu ?
D ’un côté elles ont produit contre le fieur Gardon
un décret d’ajournement perfonnel r or cft-on. de con
cert avec quelqu'un lorfqu’ on le fou met à une procé
dure féve re, lorfqu’on provoque & obtientj contre lui
un décret rigoureux. A la vérité ce décret n’a pas été
lignifié 'y mais pourquoi? Parce que les circonftances s’y
l'ont oppofées. Sirôt l’abfence de Cardon & par conféquent fitôt le décret ce failli a parlementé avec fes;
créanciers, il leur a propofé des arrangemens, & ces
arrangemens ont été acceptés. Quand eil-ce donc que
le fieur Moutgolfier auroit pu raifonnabîement pourfuivte
ia procédure criminelle ?. C e n^étoit pas avant l’a â e du:
,1.3 novembre,, car il auroit rompu toute voie de con
ciliation ,. &: par-là compromis l’intérêt des créanciers®.
C e n’efl: pas enfin après l’aile du 13 n o v e m b r e c a r
au moyen des conditions de ce traité,. tous les créaaciers accédans ont ccnfenti à ceÎlcr toutes pourfuites.
D ’ un autre c ô té , les pourfuites du fieur M ontgolfier
ont amené un abandon des biens du fieur Cardon en
quoi qu'ils puijjent conjifler ô en quelque lieu qu'ils foientr
fituées ; or cft-on frauduleufement de concert avec quel
qu’un, lorfqu’ on l’amene à fe dépouiller fans réferve?;
jEc quand il feroit vrai qu o n auroit eu quelques m énagemens pour l u i , feroit-on répréhenfible ? N ’auroit-on
�4'f
pas mérité la- rcconnoifTance des créanciers, plutôt que
leur animadverfion ? N ’auroit-on pas donné une preuve
de Ton zele pour leur avantage , plutôt que de ion atta
chement pour le failli.
t II faut donc encore écarter les inductions que pré
tend tirer le fieur Monroy de ce que les-.pourfuites du
fieur Montgolfier ont été faites par le miniftere de
M c. D u fren o y , procureur au Châcelcc
& celui du
fieur Cardon avant ia faillite. Encore une fois,, quand
on fuppoferoit une efpccc de concert entre ce procureur
& le fieur M o n t g o l f i e r pour ufer de ménagemens en
vers C ard o n , quel en auroit été l’effet? L ’abandon gé
néral de fes biens 6c Féconomie des frais de difeuffion.
Il n’auroit donc eu lieu que pour l’avantage de la maffe
des créanciers.
Au furplus, il n’y a eu ni pu avoir de premeditation
frauduleufe entre M c, Dufrenoy & le fieur Montgolfier.
Lorfque ce procureur cft venu l’avertir du dérangement
des affaires de Cardon , i l lui êtoit parfaitement inconnu :
cela eft établi par la procédure ; enforte que lorfque
M °. Dufrenoy lui a offert Ton miniftere pour, autant
qu'il feroit poffible, mettre à couvert Ces intérêts dans*
la faillite , il n’a vu ni pu voir en lui qu’un officier pu
b l ic , revêtu du caraftere néceflaire, 6c il a , fans autre
exam en , accepté fes offres. S’il y a là quelque chofe
d’irrégulier , ce n’eft, certainement pas au fieur M o n t
golfier qu’il faut Fimputer. Si M c. Dufrenoy n’a pas dû’
fe charger de fes intérêts, c’eit à lui à fe difculper.
Finalement, &■ à l’égard de Fappofition des ficelles, de
ïavente des effets 8c de toutes les opérations judiciaires ,•
�4<S
on n’a ríen à imputer perfonnellement au fleur Montgol
fier ; ce font des opérations auxquelles il n’a pas même
aflifté, dont les irrégularités ne pourroient tendre qu’ à
des fins civiles , & qui ne regardent, fous tout autre
point de vue, que les officiers publics qui y ont procédé
Que le fieur Monroy s’adrefle donc à M . le lieutenantcriminel, à M. le procureur du R o i , aux commiilaires „
procureurs, & c. C e feroit à eux à Ce juftifier, fi, cc que
le fieur Montgolfier eft bien éloigné de croire, il s’étoic
pafte quelque chofe d’jrrégulier dans l’exercice de leurs
fonctions. Il remarquera donc feulement que tous les re
proches hafardés par le fieur M o n ro y , relativement aux
détails de cet exercice , d’abord dénués de vraifemblance,
le font aujourd’hui de toute preuve.
Ainfi difparoifTent les inculpations du fieur Monroy,,
6c fans doute l’opinion publique vengera le fieur M ont
golfier de leur témérité; nous ofons même croire qu'elle
le venge déjà. Mais ce n’efi: pas afîcz pour la juitice : il
faut qu'elle puniiTe. E t certes qui le mérita davantage
que le fieur M onroy & fes complices ? Qui plus honteuiement qu’eux Te rendit jamais coupable de diffamation
atroce? Qu’on ouvre leurs écrits, fie, fi on le peut, qu’on
en foutienne la le&ure fans les repoufler vingt fois d ’unp
bouillante indignation.
Si encore ils s’écoienc bornés à des injures ! mais ils fe
font rendus coupables des infidélités les plus groifierer
nient iniques. Taire ou traveftir les faits, tranfpofer les
d ates, tronquer les a i l e s , fuppofer des charges & des
preuves, fupprimer des cirçonft^jiccs ciTentielles &
�47
rapprocher de totalement étrangères ; tels font les élémens de ces écrits ( 1).
C ’eft ainfi que déchiré par des libelles fcandaleux, atta-^
qué par des manœuvres perfides, & pour ainfi dire traîné'
d' humiliations en humiliations,'* le fieur M ontgolfier a été
pendant quatre années entieres la victime de fes enne-mis. C ’eft ainfi que pendant quatre années entières, Ia!
calomnie a lentement promené dans fon fein fes poi
gnards empoifonnés. Mais le jour de la juftice approche..,..
& ce jour fera celui de la vengeance de l’innocence
outragée.-
M onsieur
J U D D E , Confeiller, Rapporteur.
M c. D E F R E S S E N E L , A vocat.
T
a il la n d ie r
,
Procureur.-
( 1 ) Ils font fignés pat M . Guillaume, alors avocat au parlement & maintenant5
aux Confeils,
De l’imprimerie de la Veuve Hérissant , rue Neuve Notre-Dame,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Vernet
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Description
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montgolfier. 1786?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Judde
Defressenel
Taillandier
Subject
The topic of the resource
créances
banqueroute
fraudes
lettres de ratification
commerce de vin
cessation de travail
saisie
prise de corps
témoins
lettres de change
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Montgolfier, receveur-général de l'Archevêché de Paris, accusé ; Contre le sieur Monroy, entrepreneur de bâtiments, accusateur ; En présence du sieur Cardon, marchand de vin, de maître Dufrenoy, procureur au Châtelet, et de la dame Girad, co-accusés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Herissant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1786
1783-1786?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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banqueroute
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Text
P O U R
&
les
P rieu r
,
P ro cu re u r,
C h a n o in es R é g u lie r s
L e fte r p , O r d r e
g a tion
de
C O N T R E
de S ain t
de
S yn d ic
l'A b b a y e
de
A u g u ftin , Congre-
F r a n c e , In tim és ;
J
e a n
G
r
E
l l i e r
,
Huiffier
en l'Election de Conjolens } Appellant.
L
ES Juges de la Sénéchauffée d ’A ng ou lê me ont jugé
rente foncière , ou réputée telle , ap p arten an te
aux Chanoines de Lefterp, n’a pas été purgée par des
L ettre s de ratification , feellées fans oppo fitio n d e leur
part , fur la c e ffion faite à G r e llie r par fo n p è r e , d e d e u x
corps de do maines fujets à la rente.
L a loi qui a établi les Lettres de ratification leur a
refufé , dans tous les c a s , l'effet de purger les rentes
A
qu’ une
C
des
hambre*
E n qu êtes.
�foncières \ niais quand elles 1 auroient en geneial , la
fraude cara&érifée qui éclaté dans le fp ece p aiticuliere,
en fcroit un cas d exception.
F A
I T S .
I l cil dû à l’ A b baye de L e fte r p , fur le V illa g e de
C h e z le-Brun, autrement M âs-de-Tarnac, Paroifle d ’EiTe,
en A n g o u m o is, une rente de v in g t-q u a tre boiiîeaux de
f c ig le ,f c i z e boiilcaux ra s d ’avo in e, mefure de C o n fo le n s ,
6c 5 fous d’argent.
Plufieurs anciens monumens exiftans de cette rente
porteroient à croire qu’elle f u t , dans l'o rig in e , de nature
icigneuriale. T els f o n t , i w. une rcconnoiiT’a ncc du 3
M ars 147 3 , qui fc trouve dans un terrier latin de l’A b
b a y e , où cette rente eft qualifiée de cens perpétuel rend a b le , perpetuo ccnfu renduali; z°. une ailîgnation donnée
à un Particulier en 1 6 1 9 , p o u r, « en qualité de Tenan» cier du V illa g e de Che^-le-Brun, fe voir condamner à
« bailler par déclaration , les lieux , domaines & héri>5 tages qu’il tenoit dans les fonds & f i e f s de la S e i>5 gneurie Sc A b b a y e de L e fte rp , les cens , rentes Sc
« autres droits qu’il devoit pour raifon d’ic e u x , &cc. « ;
30. un régalement proportionnel fait en 1 7 0 2 , entre les
différens détenteurs du V illa g e de C h e z-lc -B ru n , de tou
tes les redevances dues fur ce V il la g e , en tête duquel rég a lc m e n t, dans rénumération qui y eft faite de ces rede
vances , la rente duc h l’A b b a y e de Lefterp eft énoncée
en ces termes : « A u d evoir, par chacun a n , au Seigneur
» A b b é dudit L efterp , de f c i g l e , &cc. m.
D ’autres circonftanccs plus déterminantes, il faut l ’a
vou er , forcent de regarder la rente dont il s’agit com m e
limple fo n c iè r e , foit qu'elle ait été créée telle dans l’o
r i g i n e , in traditione fu n d i, foit qu’il ne faille lui attri
buer les privilèges de la foncialité qu’en la regardant
�3
com m e conftituéc par don ou legs f a it a U E glifepour fo n
dations pieùfes.
A u refte , com m e G rellicr n’accorde pas moins aux
C h an oin es de Lcfterp que la conftitution de cette rente
par don ou le g s, & que d ’un autre côté il ne difeonvient
pas du point de D r o i t , que de pareilles rentes jouiflent de
tous ¡es privilèges des foncières ( 1 ) , il cft inutile d’entrer
ici dans de plus grands dérails pour fixer la nature préci ie de la n o tr e , pour laquelle nous nous contentons de
cette donnée.
T ou tefois l’opinion q u ’elle étoitfcigneurialc s’eft perpé
tuée jufqu’à ces derniers temps. C'efl: dans cette opinion
que lorfqu’au mois d ’O & o b r e 1 7 6 7 , la dam e veuve de
D r e u x Sc la demoifelle R o ch o n , fœ urs, propriétaires de
la métairie dite de C he-^ -le-B run , qui fait partie de la
tenue &C village de ce n o m , affermèrent cette métairie
au fieur Jacques G r e llic r , Huiiîier en l’Eledtion de C o n fo le n s , père de l’A p p ella n t, elles le chargèrent feule
m e n t , par le bail , de payer L A R E N T E N O B L E due fu r
ladite métairie, par où on entendoit l ’cnfemble des re
devances q u i, p a rle régalcm ent de 1 7 0 1 , étoient échues
en charge aux propriétaires de cette m éta irie, & q u ’en
effet ils avoient toujours payées feuls depuis : or de ce
n om b re étoit la rente due à P A bbaye de Lcftcrp. C ’cil
dans cette opinion que lorfqu’en 1 7 6 8 , les mêmes pro
priétaires vendirent au m êm e Jacques Grellicr cette m êm e
métairie de C hez-le-B run 3 elles le chargeront feulem ent
de payer à l’avenir cous droits R o ya u x Sc S e i g n e u r i a u x ,
déclarant la mécairic vendue mouvante en principal du
Comte de Confolens , n ayant f u ( porte Pacte ) déclarer
les A U T R E S S e i g n e u r s : claufe d ’ufage quand on croit
( 1 ) Voy.Loyfrau, de la DiflinÜion des Rentes, chap. 8 ,n° m; Argou , In/lit.
au Droit Français, Liv. III, chap. 25 ; Pocquet de Livonnièrc, Réglés du Droit
français, Liv. III, ^aP- 3»«°. 3 i du Rou{Teau de la Combe, V°. Rente*,
Se(f, 3 , no, a.
A .j
�■4
relever de pluficurs Seigneurs donc on veut s’épargner
J’énumération j & claulc qui deiigne ici I A bbaye de
L e f t c r p , entr’autres Seigneurs qu’on fuppofoit nu V illa g e
de C h e z - l e - B r u n , d’après l’énoncé du régalement de
1702.
Q u o i qu’il en Toit, G rcllier père étant d e v e n u , par fon
acquilition , propriéraire de la métairie de Chez-lc-Brun ,
ce fut déformais à lui q u e , félon l’ ufage obfervé depuis
ce réga lem en t, les Chanoines de Lcitcrp s’adrefferent
pour le fervice de leur rente. Le ficur D a le n s , P ro cu
reur-Syndic de P A b b a y c , lui écriv it, après la récolte de
1 7 6 9 , pour lui demander l’arrérage de cette année èc
celui de la p ré c é d e n te , qui avoient couru de fon temps;
mais alors Grcllier avoir -appris , par le paiement qu’il
av oi r fait des lods &: ventes de fon acquifition au lcul
Seigneur de C o n fo le n s , à ne plus regarder la rente due
à PA bbayc de Lcfterp com m e Seigneuriale ; cela lui fit
naître l’i d é e , non pas de la contcftcr aux Chanoines ,
car il n’y avoit pas moyen , mais de s’en faire garantir
par fes ven d ereffes, apparemment fous prétexte qu’il n’étoit chargé par fon contrat que du paiement à l’avcnir de tous droits R oyau x &c Seigneuriaux.
T e l paroît ê tre , en effet , Pefprit de la lettre qu’il
écrivit en réponfe au fieur D a l e n s , le premier O d lobre
1 7 6 9 , lettre infiniment précieufe dans l ’a ffa ir e , par la
circonftancc que le corps & PadreiTe en fon t entiè
rem ent écrits de la main de G r c llie r , fils , ( P A p p e lla n t),
n ’y ayant que la fignaturc qui foit de la main du père.
L a voici :
M
o n s i e u
»
m e demandez.
“
J
e
r
,
fuis b i e n emb a r r af le d e p a y e r la rente qu e VOUS
Je n ’ai
pas a i l e z
amaiTé d e bl é p our
» tourner d an s la t err e, ( c ’e f t - à - d i r é , pour enfemencer )
» S i j e vous la dois > ce n e f l que parce que j e poflède le
�5
« fonds : j’en dois être garanti par mes vendeurs. Tout
” ce que j e puis f a i r e , ce fera de vous en déduire le mon” tant fu r les frais qui me fo n t dûs contre le f e u r M au” cœur: » ( c ’étoit un débiteur des C h a n oin es, contre le
quel Grcllier avoir fait quelques pourfuites pour eux
en fa qualité d ’Huiflier). « J e jouhaiterois, de tout mon.
» cœur, avoir du blé a vous donner, parce que j e n 'y
« penferois plu s.
« J’ai l’h o n n e u r d ’ ê t r e , & c . S ig n é , G r e l l i e r .
» A C o n f i a i s , ce premier Oclobre 176 9 . «
Les choies en fon t reftées là jufqu’en 17 73 : mais avant
de dire ce qui s’efl: pafle à cette époque entre les G relli e r , père & fils , & les Chanoines de L eftcrp , il eft cffentiel de faire connoîtrc le Procès que ces deux H uiffiers ont eu fucceiïivem cnt avec les Prêtres de la C o m
munauté de Saint N i c o l a s , établie en l’E g life de Saint
M a x im e de C o n f o l e n s , pour pareille rente que celle
duc aux C h an oin es de Leilerp.
P
,
des Grellier^ père & f i ls avec les
Prêtres de la Communauté de Saint Nicolas
de Conjolens ;
rocès
Oit f e trouve le détail des manoeuvres pratiquées entre ces
deux H uifjiers, pour faire paffer fecrétem ent, de la tête
du père fu r celle du f ils , la propriété de ce que le père
avait acquis dans la tenue de Che^-le-Erun.
P arm i les rentes dont étoit chargée la tenue de C h e zle -B r u n , il paroit qu’il y en avoit originairem ent deux
dues à la C om m u nauté a e Saint N ic o la s de C o n fo le n s ,
�6
l’une de trois’ boiffeaux d'avoine Sc 1 6 fous d’a r g e n t,
( c e lle - là , q u ’il paroît que la C om m unauté de Saint N i
colas a lai lié perdre , fut m ile , par le régalement de
17 0 1 , à la charge de la- mérairie de C h e z - l e - B r u n ,
dice lu Grande , car on en diftinguoit alors d e u x , la
Grande &c la P e t it e , ) l ’a u tr e , de vingt quatre boiiïeau x
de f c i g l e , (c e lle -là , qui a été co n fe rv é e , fut m ife , par
le régalem ent de 1702 à la charge de la petite métairie
de C h e z le-B ru n , réunie depuis à la grande.)
G re liier, père, ayant acquis en 1768 la métairie de
C h c z - lc - B r u n , com p oféc des deux de ce n o m , n’entre
prit p o in t, ni fous prétexte de garantie contre fes V c n d e re fle s , ni a u tre m en t, de fe ioiiftrairc à la charge de
cette dernière rente de vingt-quatre boiffeaux de fcigle :
au co n tra ire, pendant les deux années 1768 & 1 7 6 9 , il
paya pour chacune à la C om m unauté de Saint N icolas ,
huit b o iiïe a u x , à valoir fur la totalité. C e tte C o m m u
nauté lai fia arrérager le reftant de ces deux années Sc
les fuivantes entières jufques
compris 17 72 .
T ro u v a n t apparemment la fom m e f o r t e , G reliier père
imagina un fingulier m oyen de fe libérer de tous ces
arrérages. C e fu t, en coniéquence de PEdit de 1771 qui
vint à paraître dans ces entrefaites, d’obtenir dés L e t
tres de ratification fur fon contrat d ’acquilîtion de 1768.
Il le dépofa en cfFct , dans cette v u e , au G reffe de la
Sénéchaulîec d ’A ngou lêm e. Les Prêtres de la C o m m u
nauté de Saint N i c o l a s , qui avoient déjà traité avec lu i,
co m m e folidairement obligé à leur re n te , puifqu’il étoit
entré en paiement avec eux , n’en lurent rien &c ne
s’aviferent p^s m êm e d ’y veiller : il n’y eue d on c point
d ’oppoiîtion de leur part au fceau des L e t t re s de ratifica
tion qui furent expédiées à G r el i i e r le 1 1 Mars I7 7 2 .
V ers la fin de cette a n n ée , les Prêtres de la C o m m u
nauté de §aint N ic o la s , ne voyant point que perlonne
fc m ît çn devoir de fervir leur r e n te , firent alîîgncr
�7
tant G r e l li c r , p èr e, que les. autres tenanciers du village
de C h e z le-Brun pour être iolidairement condamnés à
leur payer les arrérages depuis & compris 1768 , jufques &c compris 1 7 7 2 , à la déduction des feize boilTeaux
reçus fur les années 1768 & 1769.
Ils ne furent pas peu furpris de voir que G re llier,
défendant à cette demande , leur oppofa fes Lettres de
ratification ; mais on font com bien il leur fut facile
d ’écarter une prétention qui t e n d o it , de la part d ’un
d éb iteu r, à fe libérer par cette voie de fa dette propre
& perfotinelle ÿ ( car il s’a g iiloit d’arrérages é c hu s du
temps de G r e llic r ) . Aufli par la Sentence définitive qui
in te rv in t, fans s’arrêter à la ridicule fin de n o n - r e c e voir que Grellier avoit prétendu tirer de fes Lettres de
ratification , fut-il , com m e les autres tenanciers , c o n
damné folidairem ent à payer aux Prêtres de la C o m m u
nauté de Saint N i c o l a s , les arrérages de leur rente pour
toutes les années demandées , fous la feule d éd u & io n
des feize b oifleaux reçus.
M ais avant que cette S e n te n c e , qui n’eft que du 13
A v r il 1 7 7 4 , fût rendue , Sc pendant la conteftation qui y
donna lieu , G r e llie r , père , conçut avec fon fils, un pro
jet bien plus im p o r ta n t, que de ie libérer de quelques
années d’arrérages d ’une rente. Il eft de notre fujet de
le développer ici , puifqu’il en doit fortit un moye'n
tranchant de défenfc pour les Chanoines de Lefterp.
Grellier , père , dont toute la fortune apparente en
biens fo n d s , avec celle de fa fem m e , n’alloit pas à
v in g t mille livres, avoit fix e n fa n s , dont PAppellant eft
Painé, Il y avoit
long-temps qu'il étoit noyé de
d e t t e s , mais fans que cela eût encore fait d’éclat. U n e cer
taine réputation de probité dont il avoir joui ju fq u ’a lo r s ,
lui avoit donné la facilité de n’emprunter guères que fur
de fimplcs billets : il n’avoit ainfi prcfque que des créan
ciers chirographaires, q u i , ne fe connoiiTant point entre
�8
e u x , ne l ’inquiétoicnt point e n c o r e , parce qu’ils ignoroient fes embarras. Il s agiiToic , en rendant tous ces
créanciers du|n s de leur crédulité , de faire paffer ion
bien à íes enfans fans charge de dettes.
D e donner ou de vendre dirc& cm ent fes fonds à fes
e n fa n s , par des a£tes publics, &L faits par des Notaires
du c a n t o n , ç’aurojt été un mauvais moyen ; les créan
ciers auroient pris l’alarme , ils auroient fondu tous à
la fois fur un débiteur qu’ils auroient vu s’occuper des
m oyens de les fruftrer, 8c le projet auroit manqué infail
liblement. Il valoit bien mieux trouver un expédient qui
réunît le double avantage , & de donner dans le public
une haute idée de l’aifance de Grellier , p ère, afin nonf e u l e m e n t de ne pas alarmer les créanciers qu’il avoit
d é j à , mais même d’en engager d’autres à être pris au
m êm e piège , & tout à la fois de d o n n e r a fes enfans,
fur íes biens , un titre préférable à ceux de fes créan
ciers par limpies b ille ts , fie m ême à ceux des hypothécai
res. O r , cet e x p é d ie n t, Grellier le trouva.
' D e fix enfans qu’il a v o i t , avec une fo r tu n e , com m e
il a déjà été dit , tout au plus d’une vingtaine de mille
livres en fonds , &C o b é r é e , il en maria deux par le
m êm e contrat en 1 7 7 1 •' l’A ppcllant en eft un Par ce
c o n tra t, il leur conftitua à chacun en dot une fom m e
de q u i n z e m i l l e l i v r e s , payables (porte le co n tra t)
dans un m o is , en effets fur B o r d e a u x , la R o ch lie 2c
R o ch efort. Il conftitua en outre à l’ A p p e lla n t, fon fils
a i n é , une maifon & un pré.
Il faut noter ici que G re llie r , fimple Huiiïïer en l’EIcction de Confolens , n’avoit de la vie eu de com m erce
dans a u c un e des places n o m m é e s dans ce c o n tra t;
q u ’il n’ y avoir certainement dans aucune de ces places,
aucun N é g o c ia n t ni Banquier difpofé à acquitter des
Lettres-de-change tirées ou en-iotlecs par lui , ni qui
çût des fonds pour cela. AuiTi v a - t - o n bien voir que
celles
�9
celles d o n t il s’agit , iî feulement G rcllier s’eft
donné la peine de les fa ire, n'on t jamais été préfentées
à leurs adreiles. Mais toujours , voilà Grellier parvenu
à fes fins; le voilà q u i , co m m e un homme r ic h e , de
fix enfans q u ’il a , en marie d e u x , & leur conftitue des
dots coniidérables qu’il s’oblige à payer prefque com p
ta n t fans coucher à fes immeubles. Q u o i de plus p ro
pre à tranquilliier fes créanciers actu els, & à lui en faire
trouver d ’autres? C e p e n d a n t, com m e tous ces prétendus
effets fur B o rd eau x, la R ochelle lie R o ch e fo rt n ’auront
rien de réel, il eft clair que fes enfans reviendront fur
lui pour leur p a ie m e n t,
que pour ce recours ils au
r o n t , par leur contrat de m ariage, une hypothèque fur les
immeubles de leur père qui fruftrera tous fes créanciers
par fimples billets : les créanciers hypothécaires , du
m oins ceux q u i, raffurés par les apparences, & par le
leurre du contrat de m a ria g e , n’auront pas form é d ’oppofition de précaution fur les biens de G r c llie r , ne fe
trouveront pas moins fruftrés , pourvu que le recours
des enfans fur le père s’exerce il fecrétcm cnt que perio n n e ne puiiTe s’en douter jufqu’à ce que la loi ait
pris foin elle-m êm e d’en confacrer l'effet. O r , voilà
bien les deux objets que G rellier, père, s’étoit propofés.
11 faut voir co m m en t fa conduite poftérieurc 6c celle de
fo n fils y ont répondu.
O n a dit que les prétendues L e t tr e s -d e - c h a n g e fur
B o r d e a u x , la R ochelle 8c R o c h e f o r t , ( i l elles ont feu
lem ent été fa ite s ,) n ’ont du m oins jamais été préfentées
à leurs adrefles.
Il auroit été en effet fort m a l-a d ro it de faire reve
nir ces Lettres fur G re llie r , p ère, par des protêts, ce
qui n’auroit pas manqué d ’arriver fi elles euffent été pré
fentées. L a publicité de pareils a£tes ne convenoit nulle
m en t au deffein d'entretenir les créanciers dans leur
erreur fur la prétendue aifancc de G re llie r, père; il étoic
beaucoup plus court d’opérer tout fimplement fur ces
�IO
L e ttre s , com m e n’étant pas a cq u ittées, mais fans en faire
plus de b ru it; & c’cft auflî le parti que prirent G re llier,
p è r e , Sc l’A p p e ll a n t , fon fils ainé , par un a£te du 22
Septembre ^773 » Par le q u e l, attendu que G rellier, f i l s ,
ri avoit pas été payé de f a conflitution dotale , fon père
lui céda deux corps de métairies , l’une au village de
Che-{-le Brun , ( c’eft celle-là Aiême qu’il avoit acquifc en
176K , de la dame veuve de D re u x & de la demoifelle
llo ch o n -, ) l’autre au lieu du d u r o n , ( c e l l e - l à q u i fait
auffi partie de la 'ten u e de C hez-lc-B run , avoit été acquife par G re llie r, p è r e , en 1772 , ) l’ une & l’autre pour
une fom m e de 10,000 livres à com pte de fa conilitution dotale. A l’égard des 5000 livres reftantes , il fut
die qu’il feroit fait com pte entre les P a rties, à N o ë l ,
lors prochain.
Mais cet a & e qui venoit fi bien au but de Grellier
père & de fon fils , auroit encore pu tout gâter s’il eût
été connu : il étoit donc queftion de le faire i e c r e t , quoi
qu’authentique. Qufc fit-on pour cela ? O n ne le pafla
point devant des Notaires de C o n fo le n s , où G r e llie r, fils,
dem euro it, où Grellier, père, avoit toujours demeuré auiîi,
& où il avoit toujours eu le fiége de fon é ta t, de fa fortunrôc de fes affaires , quoiqu’il p aroifleq u e pour le m o
m en t il habiroit au village de C h e z - P o u g e a r d , qui en
eft à deux pas. N o n , ce ne fut point à C o n fo le n s qu’on
pafla F aite du 22 Septembre 1773 : les G r e llie r , père
fils, y étoient trop connus : un a£te de cette nature y
auroit fait trop de fenfation. O n alla d o n c le pafler :
o ù ? à C h a b a n o is , V ille éloignée de trois grandes lieues
Limoufincs de celle de C o n fo len s , avec laquelle d ail
leurs clic n’a a u c u n e relation.
V o ilà , par cc (cul a£te , tous les créanciers chirographaircs fruftrés : reftent les h yp oth écaires, dont i l f a u t
tâcher de purger les hypothèques. 11 s’agit pour cela ,
de la part de G re llie r, fils, d’obtenir & de faire fc c llc f
des Lettres de ratification fur fon c o n t â t , avant qu’aï»-
�1I
cun d’eux ait fon gé à y former oppoiîtion. L e m oyen ,
c ’efl: de continuer à tenir l ’a i l e dans Je plus profond
fe crc t, jufqu’au fceau de ces Lettres. O r , voici les pré
cautions qu’on prit pour cela.
D ans la C ou tu m e d’A n g ou m ois qui régit les métai
ries de C h c \ -le - Brun & du Chlron, le retrait lignager
a lieu pour les acquêts com m e pour les propres \ il fe
régie d ’ailleurs com m e les fucceffions , en forte q u e ,
quand la vente a ete faite a un lig n a g e r, les lignagers en.
m êm e degré , fon t admis à exercer Je retrait pour leur
part ; G rcllier , fils , avoir des frères & des fœurs
qui étoient dans ce cas ; il auroit donc été intérciTanc
pour lui de faire courir l’an de délai que la C o u tu m e
leur accordoit pour exercer le retrait. M ais pour faire
courir cet an de d é la i, il auroit f a llu , fuivant l’art. 7 6
de cette C o u tu m e , notifier Jbn contrat au Greffe de la
Junfdiction en laquelle les héritages acquis étoient fitués.
O r cette Juriididtion éroit précifément celle de C o n folcns : en confequ cncc point de notification.
L a ceflïon dont il s’agit étant faite en paiement de
co n ilitu tion dotale par le père au fils , ne devoir point
de centième denier ; cependant G rc llie r, père, 6c ion fils,
étoient dans l’opinon qu’elle en d evo ir, Sc leurs N o ta i
res de Chabanois y étoient com m e e u x , car on voit à
la fin de Pacte qu’ils avoient renvoyé au Bureau de Confo len s pour le centième denier. Mais porter Pacte au Bu
reau de C on fo ie n s , ç’auroit été le moyen de le faire
co nnoître à tout le m onde. O n artendit d on c , pour l’y
porter , le temps où on croyoit pouvoir le faire fans dan°-er, c’eft à-dire après l’obtention des Lettres de ratifi
cation. Il fut en effet préfenté pour la première fois en
ce B u re a u , le 27 D é ce m b re 1773 , & G rcllier fils, avoit
des Lettres de ratification dès le 6 du m ême mois , épo
que qui répond à celle à laquelle io n contrat avoit été
expofé dans PAuditoire de la SénéchauiTée d ’A n g o u lê roe» favoir , le 4 O c to b r e 17 73 , co m m e le Greffier
B ij
�11
en a fait mention au bas , c cft - a - dire en temps de
pleines vacances ■ circonftance qui n cft point indifiérente.
M ais cc qui ccoit encore bien plus fait pour entrete
nir le p u b lic , & fur-tout les Prêtres de la Com m unauté
de Saint N icolas , dans l’opinion que Grellier , p ère , étoit
toujours propriétaire de fes domaines du village de
C h e z l c - B r u n , c’eft que pendant qu’il faifoit avec ion
fils, tous les honnêtes arrangemens qu’on vient de v o ir,
il n’avoit pas ceiié un inftant de plaider avec les Prêtres de
la C om m u nauté de S. N ic o la s , com m e tenancier du village
de C h ei-le-B ru n , fans dire un m ot de la ccfiîon qu’il avoit
faite à fon fils de tout ce qu’il poflédoit dans ce village , &
fans même la donner à foupçonner ; en forte que cc ne fut
que plus de fix mois après ce ttecciIïon ,& . le 13 Avril 1 7 7 4
fe u le m e n t, q u ’intervint la Sentence dont il a été p a rlé ,
qui le condam na com m e tenancier du village de Cke\-leBrun , à payer folidaircrr.cnt avec les autres tenanciers,
aux Prêtres de la C om m u nauté de Saint N ic o la s , les arré
rages de leur rente de vingt - quatre boifléaux de fe igle ,
pour les années depuis & compris 1768 , jufqucs ôc
compris 1 7 7 1 .
M ais alors il n'y avoit plus aucuns ménagemens à
garder ; toutes les précautions qu’on avoit pu prendre
étoient prifes ; G rellier, fils , avoit obtenu des Lettres de
ratification fur fon contrat ; c ’étoit-là ce qui devoit lui
fervir de fauve-garde contre tous les créanciers de fon
p è r e , quels qu’ils fuflent 3 fi quelque chofe pouvoit lui
en fervir, vu ce qui s’étoit paiTé. Q u a n t au p è r e , il ne
rifquoit plus rien , ne pofledant rien. C e fut donc alors
que le fils crut pouvoir , fans d a n g e r , préienter fon
contrat au Bureau de PInfinuation à. C onfolens.
L a nouvelle s’en répandit bientôt ; les Prêtres de la
C o m m u n a u té de Saint N icolas en furent inftruits des
premiers ; leur furprife fu t telle qu’on peut le penfer ,
d’après le rôle qu’on a vu que G re llie r, p è r e , venoit de
�13
jouer avec eux , dans tout le cours d ’une conteftation
judiciaire. Q u o i qu’il en f o i t , com m e G r e llic r, fils, de
quelque manière que cela eut été f a i t , avoit pris la place
de fon p è r e , quant à la propriété de l’héritage fujet à
leur rente, c ’éroit déformais à lui qu’ils dévoient s’adreirer
pour le fervice de cette rente à l’avenir ; & c’eft auffi
ce qu’ils firen t, en l’aflignanr, pour fe voir condam ner
à leur en paffer titre nouvel. D ’un autre c ô t é , com m e
ils ne voyoient plus aucune rcflourcc pour fe faire payer
par le père, des arrérages dont ils avoient obtenu c o n d a m
nation contre lu i, &L que le fils , c o m m e détenteur de
l ’h éritage, n’étoit pas moins tenu hypothécairement de ces
arrérages , que le perc ne l’étoit p e rfo n n e llcm e n t, ils
prirent le parti de cumuler cette action hypothécaire con
tre le fils, pour les arrérages , avec l ’adtion perfonnelle 8c
h yp oth écaire, pour la paiTation du titre nouvel.
Ici va com m encer de la part de Grellicr, fils, l’application
de Tes Lettres de ratification , non pas au fonds m ême des
rentes dont les héritages par lui acquis de fon père
étoient ch a rg é s ^ -c a r on verra qu’il étoit bien éloigné
encore de croire pouvoir faire de ces Lettres un u lagc
j^uili étendu ; mais aux arrérages de ces rentes , échus
vivant fa détention. Sans s’expliquer en effet par fes
d é fe n fe s , fur le premier & le plus important c h e f des
demandes des Prêtres de la C om m unauté de Saint
N ic o la s , qui étoit le titre nouvel èc la reconnoifTance de
leur rente pour l’a v e n ir, il les foutint non-recevables à
lui demander les arrérages dont la condam nation avoit
été prononcée contre fon p ère, prétendant q u ’ils avoient
été purgés par fes Lettres de ratification. Les Prêtres de
la Com m unauré de Saint N icolas fe défendirent de
ce prétendu effet de ces L e ttre s , en oppofant la fraude
& la col luf ion pratiquées entre le père & le fils, dont ils
d é t a i l l è r e n t quelques circon fta n ccs, moins parfaitem ent,
ce p en d a n t, que leur exemple ôc le temps n ’ont mis les
Chanoines de Lefterp à portée de le faire ici ; & cette
�14
défen fe de leur part fit tant d ’impreiïïon fur les Juges de
la Sénéchauflee d’A n g o u lê m e , que ces Juges n’héiitcrent
pas à leur adju ger, par leur Sentence du 4 Septembre
1 7 7 4 , l’ un & l’autre c h e f de leurs conclu fions.
G r c l lie r , fils , q u o iq u e , com m e on l’a d i t , il n’e û t , dans
Pinftruttion de la C a u f e , prétendu fe prévaloir de fes
Lettres de ratification , que relativement au c h e f de
conclufions des Prêtres uc la C om m unauté de Saint
N i c o l a s , qui avoir pour objet les arrérages du temps
de (on père , ne laifla pas d ’interjetter indéfiniment
appel en la C o u r , de cette S e n te n c e , &: d’y furprendre
m êm e des défenfes indéfinies contre fon exécution.
M ais c o m m e par la fuite il eut Padrcfle de reftreindre à
propos fon appel , au c h e f qui concernoit les arrérages
antérieurs à fa détention , offrant de payer ceux échus
d ep u is,
de pafler titre nouvel de la r e n r e , il paroît
que parle mérite de cette o ffre, quifem bloie défintérefler,
jufqu’à un certain p o in t, les Prêtres de la C om m u nauté
de Saint N i c o la s , au moyen de ce que , pour les arrérages
antérieurs à la détention du fils , ils avoient pour ob ligé
le p è re , la G r a n d ’C h a m b rc de la C o u r fe dércrmina à
infirmer vis-à-vis du fils , par fon A rrêt du 21 M ai 1 7 7 ^ ,
la Sentence de la Sénéchauflee d ’A n g ou lêm e , au c h e f
qui co n cern oit ces a rrérages, en le condam nant fuivant
/on o ff r e , à payer ceux échus depuis fa d étention , & à
pafler titre nouvel de la rente.
T e ls ont été les circonilances & l’événem ent du procès
que les manœuvres des G r e lii c r , père & fils, ont mis les
Prêtres de la C om m unauté de Saint N ico la s dans le cas
d ’a v oi r avec e u x , pour la rente de vingt quatre boiffeaux
de f e i gl c due à ccctc C o m m u n a u t é fur le village de
ChcZ-le-Brun.
Les C hanoines de Lefterp ont eu auifi pour la le u r ,
fucceiïïvcm cnt affaire au père 8c au fils.
�1J
P r o c é d u r e s des Chanoines de Leflerp contre Grellier ,vère
& contre G rellier, f i l s , en la Juflice de Confolens , & en
• la SénéchauJJee et Angoulême.
détail circonftancié de ces procédures feroic
inutile ici. Il fuffira de dire en un m on, à l’égard de
G r e llie r , p è r e , que les C hanoines de Lefterp , dans
l ' i g n o r a n c e où ils étoient- avec tout le public , de ce qui
s’étoit pafle entre Ion fils 8c l u i , l’ayant affigné en la
Juftice de C o n fo len s le Z9 D écem bre 1773 , feulement ( 1 )
p o u r, en qualité de Tenancier du village de Che^-le- Brun
être condam né lolidaircm ent à payer les arrérages échus
de leur re n te , 6c à en paiFcr titre n o u v e l, celui c i , au
lieu de d ir e , ce qui étoit fi .naturel, qu’il n’étoit plus
Tenancier du village de ChcT^-le-Brun, ayant cédé à fon
fils tout ce qu’il y avoir , ne trouva rien de plus expédient
que de Te laiiler doublem ent contum acer , en laiflant
d ’abord rendre contre lui une première Sentence par
défaut faute de comparoir , adjudicativc des c o n c lu io n s
des C h a n o in e s , ôc enfuite une fe co n d e p a r défaut faute
de p la id e r , qui le débouta de fon oppofition à la
première.
E t à l’égard du fils , il fuffira de dire auilî q u ’il tint
en la Juftice de C o n f o le n s , abfolum cnt la m êm e co n
duite que fon père , lorfqu’inftruits enfin par la vo ix
publique, de la ceiîion que fon pcrc lui avoit faite des
métairies de C h e z-le -B ru n 8c du C hiron , les C hanoines
de Leftcrp l’y aifignerent, pour être condam né à leur
paffer titre nouvel de leur rente. Il laiila , en eiFct , à
l ’exemple de fon père, rendre en la Juftice de C o n f o le n s ,
deux Sentences confëcutives par défaut contre l u i , fans
feulement avoir l’idée d’oppofer fes Lettres de ratification
Un
,
( 1 ) Sa ceflion à fon fils étoit du 22 Septembre précédent.
�I
6
à la dem ande des C hanoines de Leilerp , qui n’y avoient
pas co m p ris, com m e les Prêtres de la C om m u nauté de
Saint N ic o la s , des arrérages antérieurs à fa détention,;,
& ce ne fut que dans l’inftru&ion , en la SénéchauiTéc
d ’Ano-oulêm e, de l’appel par lui interjette de ces S e n
tences , qu’on s’avifa de mettre en avant pour lui ,
le prétendu m oyen de ces Lettres de ratification qu’il
n ’avoit jamais deftinées à cet ufage.
C e moyen , quoiqu’auili foiblem ent réfuté par le
D éfenfeur des Chanoines de Lcfterp , qui ne le jugea pas
digne d ’une plus férieufe attention , que chaudem ent
défendu par celui de G re llie r, q u i , l’ayant im a g in é , mit
fon honneur à le foutenir , ne féduifit point les Juges de
la Sénéchauflee d ’A n g o u lê m c . Ils rendirent, en e ffe t, le
10 A o û t 1781 , fur les conclufions du M iniftère p u b lic ,
leur Sentence p^r laquelle ils confirmèrent purement 6c
(implement celles de la Juftice de C on fo len s. Il s 'a g it
de faire voir qu’ils ont bien jugé,
M O Y E N S ,
Nous aurons abondam m ent rempli cette tâ c h e , iï nous
d ém o n tro n s,
i°. Q u e les Lettres de ratification ne purgent pas les
rentes foncières ou réputées telles ;
20. Q u e quand même , dans la thèfe générale , les
Lettres de ratification auroient cet effet , celles
obtenues par Grellier ne l^ u roien t pas dans Pefpèce
particulière.
P R E M I È R E
P R O P O S I T I O N .
L es Lettres de ratification ne purgent pas les rentes
foncières.
II
fem ble que pour établir cette p r o p o f u i o n il devroic
fuffiro
�17
fuiïïre de rapporter ici ces termes de l’article 7 de l’Edit
du mois de Juin 1 7 7 1 : « fans que néanmoins lefdircs
« Lettres de ratification puiffent donner aux acq uéreurs,
» relativement à la propriété, d r o i t s r é e l s , f o n c i e r s ,
« ieivitudes ■& a u tre s, plus de droits que n’en auront
» les vendeurs; l’effet defdites Lettres étant r e s t r e i n t
» à purger les privilèges & hypothèques S E U L E M E N T ».
M a is puifqu’une difpofition a c Loi aufli précife n’a pu
retenir Grellier de mettre en thèfc la proportion c o n
traire , il faut bien entrer en lice avec l u i , pour lui
prouver en form e ce que la L o i lui dit inutilement.
P o u r c e l a , il eit néceilaire de co m m encer par bien dé
finir la rente foncière.
L o y f e a u , liv, ier^ chap. 3 , n. 8 , de fon traité de la
diftin£tion des re n te s, la d é fin it, U ne redevance prin
cipale de l ’héritage 3 impofee en Valiénation d ’içelu i, pour etre
payée & fupportée par fo n détenteur.
Il efl; d it , en l ’aliénation d 'ic e lu i, parce qu'en effet le
bailleur à rente aliène l’héritage q u ’il d o n n e à ce tirre ,
& que la propriété de cet héritage eft transférée de fa tête
fur celle du preneur. T o u te fo is cela n’a pas lieu ii plei
nem ent 8c lî parfaitem ent, qu’il ne refte au bailleur aucune
efpèce de dom aine,aucune cfpèce de propriété de l’héritage.
Auili Loyfeau d it - il, au chap. 7 , n. 4 , du m êm e trairé,
que la rente foncière e ji impofée par manière d'une retenue,
& réfervaùon fu r le fon d s & propriété.
O r , veut-on avoir une idée bien jufte de cette rete
nue & réfervaùon faite par le bail à rente fur le fonds
& la p r o p r i é t é de l’héritage , qu’on fe repréfente celle
faite par le bail à c e n s ;
qu’aux différences près qui
réfultent de la différente nature de la propriété n ob le
& de la p r o p r i é t é roturière , on foit perfuadé que le
bail à. cens ÔC le bail à rente font abfolum cnt fernblablcs
dans leurs effets.
J°. L a rente foncière co m m e le cens eft d u e , prinC
�i8
¿ p a ie m e n t par l'héritage ; le poiTeiTeur de l’héritage n e
doit la rente f o n c i è r e com m e le c e n s , qu’en fa qualité
de poiTeiTeur de l’héritage ; auiîi , peut-il fe décharger
pour l’avenir de la rente foncière com m e du cens , en
aliénant ou en déguerpiflant l'héritage.
2°. L a rente foncière retenue par le bail à re n te ,
prend , com m e le cens retenu par le bail à cens , la
m êm e qualité de propre ou d’acquêt qu’avoit l'héri
tage.
3°. L e bail à rente foncière ne d onne point ouver
ture aux droits de lods &C ve n te s, com m e le bail à cens
ne donne point ouverture aux droits de quint,
4°. M ais la vente de la rente foncière donne ouver
ture aux droits de lods &: ventes , com m e la vente du
cens donne ouverture aux droits de quint.
50. Le retrait lignager ni le ccnfucl n’ont pas lieu par
le bail à r e n te , com m e le retrait lignager ni le féodal
n ’ont pas lieu par le bail à cens,
6°. M ais le retrait lignager & le ceniuel ont lieu par
I a vente de la renre, com m e le retrait lignager & le féo
dal ont lieu par la vente du censO n voit d on c que le bail à rente produit en roture
a bfolu m en t les mêmes effets que le bail à cens en fief ;
pour peu qu’on y rcfléchiffe, on verra que cette parfaite
co n form ité dans les effets vient precifément de ce que l’un
co m m e l’autre de ces a£tes c o n t i e n t , iuivant Pexpreffion énergique de L o y f c a u , une retenue & réfervatïon fu r
le fon ds S propriété ; ce qui fait que l’héritage , quoique
bail lé à c e n s ou à re n te , effc t ouj our s c e n f e être dans les
mains du b a i l l e u r , (oit v i s - à - v i s de la famille de ce bail
le u r , (oit vis-à-vis du Seigneur de qui il relève..
E n un m o t , la rente foncière due principalement par
l’h é rita g e , & accidentellem ent feulement p a rla perfonne
qui le p o fs è d e , cil , proprement & en f o i , un de ces
�droits que les Jurifconfultes appellent droits dans la
c h o f c ^ ju s in re, qui par conféquent doit avoir toute
la folidité des droits de cette efpèce ; bien différente e a
cela de H y p o th è q u e , m êm e privilégiée , qui eft bien
a u ili, fi l’on veut , un droit dans la chofe , un jus in
re , puifqu’ellc l’aifedtc de la fuit p a r - t o u t , mais qui
cependant n’a cette qualité qu’a c c c ifo irc m e n t, & dépend am m en t de l’obÜgacion p erfon n clle, du droit ad rem ,
auquel elle eft jointe ( *-) , & par conféqu cnt ne peut
(*)Loyfeau,ib,<î
avoir plus de folidité que cette a£tion perfonnelle , que n‘ l l ce droit ad rem dont elle dépend.
Après avoir ainii bien fixé l’idée qu'on doit fe for^
mer de la nature de la rente fo n c iè re , voyons fi l’in
tention de la L o i qui a établi les Lettres de ratification,
a été qu’elles purgeaifent un pareil droit.
L a premiere ch o fe qui fe préfente à confulter pour
c e la , c ’eft le préambule de cetre L o i. L e préambule eft
l ’introduction naturelle a l’intclligence de fes difpofitions ; c’t f l là que L égiflatcur a eu foin de rendre'
com pte en peu de mots des objets fur leiquels porte fa
L oi , des morifs qui l’ont déterminé à la fa ir e , des avan
tages qu’il s'eit propofé d ’en faire retirer à fes fujets > Sc
des inconvéniens d ont il a voulu les garantir.
O r , l ’objet de la L o i fur les Lettres de ra tifica tio n ,
quel cit-il, iuivant le préambule ? C ’cft de fix er d'une ma•
mère invariable l'o ’ dre ù la (labi[ite DES H Y P O T H È Q U E S ,
fj de tracer une rouie J'ùre & fa c ile pour les conferver.
Les motifs qui ont d t e r m i n é le L é g i f l a t cu r à faire cette
L o i , les avantages qu’il s’eft propofé d’en faire retirer à
fes f u je t s , quels fo n t-ils , fuivant ce même préambule ?
CV-ft d'un côté que les acquéreurs puiffent traiter avec
fo lid ité , & f e libérer valablement ; & d un autre c ô té , que
Les vendeurs puijfent recevoir le. p rix de leurs biens, Jans
attendre les longueurs d'un décret volontaire. Enfin , quels
inconvéniens a-t-il voulu prévenir ? C e fon t les pertes
C ij
w
�q u ‘ éprouvent fo u v e n t ce u x qu i a y a n t a cquis des biens t
f o n t obligés de les d é g u e r p ir , ou d ’en p a y e r d e u x f o i s le
pi LX p a r l'e ffe t D ES D E M A N D E S E N D É C L A R A T I O N
D ' H Y P O T H È Q U E S , formées par LES CRÉANCI ERS DES
VENDEURS.
de la Loi paroît b ie n , par ce préam bule,
dirigée fur les hypothèques , c ’e f t - à - d i r e ,
fur les droits in re , Amplement a c c e flo ir e s , Sc dépendans
d ’un droit a d re/n , d ’une obligation perfonnelle : il n’y
a rien qui annonce que le Législateur ait eu le moins
du monde en vue les droits dans la chofe , les droits
in re a b fo lu s , &. indépendans de tout droit a d rem J de
route obligation p e r f o n n e l l e , tels qu’e i l , proprement Sc
de fo i, une rente foncière.
L ’i n t e n t i o n
uniquement
G reilier répond que le but d e là L o i , manifefté dans le
préam bule, a été de mettre les acquéreurs «à l’abri de
toute éviction de la part des tiers , après le paiement de
leur p rix , 6c de mettre les vendeurs a l’abri de toute
a & io n en garantie de la part des acquéreurs pour raifon
de ces évictio n s; que par co n féq u cn t les Lettres de rati
fication doivent auiïï bien purger les rentes foncières que
les fimples hypothèques.
L e b ut de la L o i, manifefté dans le préambule, eil fi peu
ce que dit G r e ilie r , q u e , de Ton aveugles Lettres de ratifi
cation n’ont aucune prife fur la propriété ; or tout le m on d e
fait que ce droit efl: le fujet le plus ordinaire des évictions
que les acquéreurs fouffrent de la part des tiers, & des
recours de garantie qu’ils exercent c o n t r e leurs vendeurs.
A in fi , le p r é a mb u l e d e la L o i refte entièrem ent pour nous.
E ntrons maintenant dans le détail des difpofitions.
En prenant les articles par o r d r e , nous lifons d ’abord
dans l’article 6 , que , » tous propriétaires d ’immeu» bles , & c . , qui vo u d ro n t purger les hypothèques d o n t
�w Iefdirs immeubles feront grévés , feront tenus de
»* prendre des Lettres de ratification. «
L'article 7 dit que « les lettres de ratification purge» ron t les hypothèques & privilèges a l'égard de tous les créanv ci ers des vendeurs qui auront négligé de former leurs
» op p ofitions, & c . »
Les hypothèques & les privilèges , & non pas, les droits
fo n cier s......... A l'égard de tous les créanciers des vendeurs ,
c ’efc-à-dirc, ri l’égard de toutes les perfonnes à qui il
fera dû par les perfonnes des vendeurs , 2c non pas , à l’é
gard des perfonnes à qui il fera dû directem ent par les
chofes vendues , ce qui cil le cas de la rente f o n
cière.
T o u t cela , fi l’on v e u t , 11c fait encore qu’ une preuve
negative .par la regie qui dicit de uno } negat de altero ;
mais voilà qui c ft p ofitif:
“ Sans que néanmoins ( ajoute l’article 7 ) lefdites
« Lettres de ratification puiiTcnt donner aux acquéreurs,
« relativement a la propriété , droits RÉE L S , F O NC I E R S ,
« fervitudes & autres , plus de droits que n ’en auront
» les vendeurs ; l'effet defdites Lettres étant R E S T R E I N T
» à purger les privilèges & hypothèques S E U L E M E N T ».
G rcllier ne fc rend pas à l’évidence de cette difpofition. L e L ég iflateu r, felon lu i, n’a point entendu par
cet article difpcnfer ceux qui auroient des droits réels ,
fo n ciers, fervitudes ou autres , de s’oppoièr aux Lettres de
ratification; c ’eût é té , dit-il, contredire lui-même la difpofition de l’article 34 de fon E d it, qui ne porte cette
difpcnfe qu’ en faveur des Seigneurs , pour raifon du
fonds du cens , rentes foncières & autres droits feigneuriaux S>c féodaux. Il a feulement voulu dire que fi les
contrats portoient aliénation de propriété , droits réels ,
fo n cie rs, fervitudes ôc autres, non appartenans aux vendeurs , les acquéreurs ne pourroient fc m ain ten ir, fous
pretexte de Lettres de ra tifica tio n , dans les biens ou
�12
droits niai à. propos vendus. En un m o t , les droits rcelsy
fo n ciers, fervitudes & autres, dont il efl^parlé dans l’ar
ticle 7 , ne d o i v e n t s’entendre, fuivant l’Adverfaire , que
des droits réels accifs, qu’on ne peut acquérir par des
Lettres de ratification , mais non des droits réels pqffifs^
que tout acquéreur peut purger par cette voie.
Rtponfc,
Mais d ’a b o r d , par quelle regie de logique G rcllierparviendroit-il à nous prouver que deux articles fc concrarieroient , parce que l’un porteroit une exception & que
l ’autre en porteroit une autre ? Q u e ne dit-il au (fi que
l ’article 3 4 , qui ne porte exception qu’en faveur des S c io-neurs eil en contradiction avec les articles ) i & 3 3 ,
d o n t l’un porte exception feulement en faveur des fem m es,
pour leurs hypothèques fur les biens de leurs m a ris , pen
dant la vie de ceux-ci , &. en faveur des enfahs , pour
leurs hypothèques fur les biens de leurs p eres, pour raiio n des douaires non ou verts, & l’autre porte excep tio n
feulem ent en faveur des appcllés à la lubftitution des
biens vendus? Il y auroit autant de raifon à piétendre ces difpofitions contradictoires avec celle de l’arriclc 3 4 , que celle de l’article 7 , dans le fens que nous
lui donnons. Mais la vérité cft qu’il n’y a de contradic
tion ni d’une part ni de l’autre , parce qu’on ne peuc co n
cevoir de c o n t r a d i c t i o n qu’entre des chofes contraires
cntr’elles, & qu’il y a fort loin de dire dans différons
articles des chofes différentes, à dire dans Jifférens ar
ticles des chofes contraires entr’elles.
En fécond l i e u , non-feulement le foi.s que nous d o n
n o n s à la difpofition de l’article 7 de l'Edu ne contrarie
pas la difpofition de l’arcirlc 3 4 , mais même la dllpoii¿¡011 de l’arcicle 34 d e m a n d e , fit par équité & par raifon,
le fens que nous donnons à la difpofition de l’articl ■7.
En effet
ce n’eft pas ieulemcnt pour raifon du fpncls
du cens
( fcul droit vraim ent 'fe ig n e u r ia l, & auquel
r é p o n d , par cette rai(on , le m o t feigneuriaux de l’arr
�23
ticle 3 4 ) , que les Seigneurs font difpcnfés de form er
oppoficion au iceau des Lettres de ratification ; cet ar
ticle 34 difpenfe encore les Seigneurs de former oppolltion , pour raifon du fonds des fur-cens , r e n t e s f o n
c i è r e s , 6c autres droits non feigneuriaux, auxquels ré
p o n d , par cette r a ifo n , le m ot fé o d a u x , pour fignifïcr
des droits apparrerians, à la v é r ité ,a u x S e ig n e u rs , mais
cependant non feigneuriaux (1).
O r , il des droits limpies fonciers , appartenans au x
Seigneurs, font mis par cet article dans l’e x c e p t io n ,
pourquoi ceux de même n a tu re, appartenans à d ’autres
particuliers, n’y feroient-ils pas mis par l’article 7 ? C e
n ’eil pas la qualité des p e rio n n e s, mais la nature desdroits qui produit l’exception.
V o y o n s maintenant li l’article 7 , en lui-m êm e, peut
fupporrer un autre fens que celui que nous lui donnons,
C ’cít de droits fonciers a ctifs, dit G re llie r, que cet ar
ticle p a rle, & non pas de droits pafjîfs.
D ’a b o rd , pourquoi le Légiflateur auroit - il fait cette
difliii£tion ? Pourquoi auroit-il refuié l’efFcc de faire ac
quérir avec l’héritage vendu des droits qui n’appartiens
nenepasau ven deu r, a u n e formalité à laquelle il auroit ac
cordé celui de purger cet héritage de droits de m êm e
nature dont il eit grevé ? O n feroit fort embarrafle d’en
dire la m oindre raifon ; d ’autant plus que chacun fait
q u ’en termes de D r o ic , l'ufucapion qui eft une manière
d’ a cq u érir, ne demande ni plus de q u a lité s, ni plus de
temps que la prefeription qui eft une manière de fe li
bérer ; & que m ê m e , en matière de droits réels & fon
ciers,, on peut dire que l’ufucapion & la prefeription fe
”
»
”
”
( i ) “ Il y a une grande différence à fa ire, ( dit M . Pocquet de L iv o n niùre , dans fon T raité dos F ie fs , livre 6 , chapitre p re m ie r, page 5 3 8 , )
e.i re ]e ccm f & la rente , m êm e féodale , c’eft-à-dire , im pofée par f a it e d’in *?°diition ou d’accn U m en t, lo ifqu ’elle eft jo in te à un cens particulier , & n e
tl2Iî>
t P-is lieu duc^ns.
”
feroit ici le lieu de parler des rentes féodales ou foncières, Stc..
�*4
confondent abfolumetit, parce que co m m e un droit de
cette nature eft une forte de propriété retenue fur l’hé
ritage qui en eft grçvé , libérer paiîîvement fon héritage
d ’un pareil droit , c ’eil: acquérir activement un droit qu’on
n ’avoit pas. A u d i , parmi trois manières d ’a c q u é r i r ^ # / *
prefcripùon les droits réels fu r les héritages, que nous
enlc ign e un A u t e u r , rccommandablc fur t tout par la
netteté Sc la préciiîon de fes idées, ( l’Au tcur des Principes
delaJurifprudenceFrançaife, tom. 2 , t i t . d e laPrefcription,.
n. 6 3 9 ) , met-il c e l l e - c i , « lorfque le propriétaire d ’un
« héritage fujet au droit de c h a m p a r t , a joui de fon
» héritage librement pendant 30 ans, fans que j’aye perçu
» pendant tout ce temps le champart qui m ’étoit du,
» Ce détenteur , ( dit-il ) , en acquérant la libération du
» champart, a a c q u i s l a p a r t i e d e l a p r o p r i é t é
» q u i l u i m a n q u o i t H Ainfi f e libérer en pareil c a s ,
c ’eft a c q u é r i r ; d’où il fuit que ce qui , dans cette
matière , n ’a pas la vertu de faire acquérir, ne peut avoir
celle de libérer. Le Législateur n’a d on c conftamment
point eu de raifon de faire la diftmetion imaginée par
Grellier. V o y o n s actuellement s’il l’a faite.
« Sans que néanmoins, ( porte l’art. 7), lcfdites Lettres de
ratification puiiTent donner aux acquéreurs, relativement
>5 cl la propriété, droits réels. yfonciers ^fervitudes & q.utres,
>j plus de droits que n’en auront les vendeurs ».Si le L é g i s
lateur eut entendu faire la diftiniHon de droits fonciers
pajftfs Sc de droits fonciers actifs^ pour foumettre les uns à
la purgation par les Lettres de ratification,
déclarer que
les autres ne pourroient être acquis par c e t t e voie, il y avoit
une mani è re toute fimple de dire cela fans prêter a 1 équi
v o q u e : il n’y avoic q u ’ à dire,
fans que l’acquercur puifle,
jî ious prétexte defdites Lettres de ratification, fe main-r
>3 tenir dans un droit de propriété, ou tout autre droit:
« foncier a e lif qui lui auroit été vendu par celui à qui
» il n’appartenoit pas ; l'effet defdites Lettres étant feuvi lement de purger tous droits fonciers pajjifs , qui pourroicnc
�*5
” roient être prétendus par des tiers fur l’héritage vendu ;
” enfcmble les privilèges & hypothèques dont il pourroit
” être grevé ». A u lieu de s’exprimer ainii, q u ’a fait le
Légifiateur ? V o u la n t proferire égalem ent &: l’acquifition
des droits fonciers a c t if s , &: la purgation des droits fonciers
P 'a ffifs, il a choiii une expreflion générique qui renfermât
l’une &c l’autre égalem ent: « fans que néanmoins leidites
33 Lettres de ratification puiiïent donner aux acquéreurs,
33 r e la tiv e m e n t a la p ro p riété, droits r é e ls , f o n d e rs , fervLtu.de s
33 & autres , plus de droits que n’en auront ies vendeurs 33.
L a rente foncière cft un droit de propriété quelconque fur
l ’héritage qui la d o i t , puifque nous avons vu qu’elle cil en
roture abfolum ent la même chofe que ce que le cens cft: en
f ie f , qu’elle cil créée, fu iv a n tl’expreffion de L o y fe a u , par
manière de retenue & réfervation f u r le fo n d s & p rop riété de
r h é r ita g e , qu’elle cft: enfin un droit réel &c foncier , un ju s
in re indépendant ôc abfolu. O r , le vendeur n’avoit pas
cette cfpècc de propriété de l’héritage qui réfide dans la
rente fo n c iè r e ; il n’avoit pas le droit foncier dans lequel
cette rente confifte : il avoit toute propriété de l’h éritage,
m oins celle qui réfide dans la rente; il avoit tous droits
fonciers fur l’héritage , moins celui dans lequel elle
confifte. D o n c fi ion acquéreur avoit par l’efFet des
Lettres de ratification cette cfpècc de propriété , ce droit
fon cier qui manquoit à fon v e n d e u r , il feroit vrai de
dire que fes Lettres de ratification lui d o n n e ro ie n t,
rela tivem ent à la p r o p r ié té , droits réels ô f o n c ie r s , plus
de droits que n’en avoit fon ven deu r, ce qui cft form el
l e m e n t contraire à la difpofition de l ’Edit.
Et certes, fi cette difpofition en e ll e - m ê m e pouvoir1aider quelque doute fur ce point , ce doute ne feroitil pas levé par les termes qui fuivent : l'effet defdites
Lettres étant R E S T R E I N T à purger les privilèges & Jiypoi
tkèques S E U L E M E N T ?
Q u e l e ft, en to ut, l’efFet des lettres de ratification? C ’efl de
purger les privilèges & hypothèques. C ’efl: à c e la , c’efl à cela
D
�que leur effet cil R E S T R E I N T . Q u e peuton de plus fore, tic plus én erg iq u e? R i e n , abfolumenc
rien autre ch o ie que les privilèges & hypothèques n’eft
purgé par les Lettres de ratification. M a is une propriété ,
telle q u ’elle foir., & telle q u o n voudra luppoler celle qui
réiide dans la rente foncière , mais un droit r é e l, un
droic fo n c ie r , un jus in rc indépendant & abl'olu , tel
q u ’on ne peut difeonvenir qu’clt cette rente , n’clt pas un
iimplc p rivilège, une limpie hypothèque. L ’h y p o th è q u e ,
le privilège , ne font des droits clans la c l i o k ', des droits
in rc , q u ’accefloirem ent & dépendam m ent d ’un droic
a d rem y d ’une obligation pcrfonncllc. La rente foncière
n ’eit donc pas purgée par les Lettres de ratification ,
pulique reflet de c i s L c t t r c s . it II F. s r m .i s T \ purger Us
privilèges 0 hypothèques S E U L E M E N T .
SEULEMENT
Objfttion.
M a is , dit G r e llic r , la rente foncière n’clt autre ch o fc
qu’une créance privilégiée : puis d on c qur les Lettres de
ratification purgent les créances p rivilég iées, elles d oi
vent purger les rentes foncières.
Rtpvnft.
L a définition de la rente f on c i è r e par G rellicr n’a
que deux mots , auiTi ne contient-elle que deux erreu rs,
mai» c lk s font capitales.
i ”. La rente ton-rierc n’eft point proprement une
créance. O n n’appelle de ce nom que ce q u ’une perfonne doit à une autre , & dans l'L d it do: Lettres de
ratification n o t a m m e n t , c ’cll ainfi que ce mot cft en
tendu , puifqu’il ne ^’v agit de purgation q u i I c g a id Je
tout le s crejnutrs ¿es ven Jeun. O r , dan» la rente t o r r i è r e ,
c^ ft
ch o H qui doit à u n e r c : f r “ c. O n n i e l l e du
nom
«
c«; qui c 1« T ^ jp b ie , ou du moins
p■
vable à »»“ cffiPfiîr tî?rfT»e. O r , d :• la rcüte fon cière,
j ^ fonne ne p r u t jamais ft? -rr 'a
dette , qui
crt le fon d*. J e !i rente ; pcrlonnc ne p t’j t non plus |âm aii le p*»ycr i qui .1 cA d ù , fan* que ccîü»ci le veuille.
�17
i° . L a rente foncière n’eil point non plus Un priviUge»
T o u t Peifec du privilège cil que le créancier foie payé
par préférence iur le prix de l’héritage. L ’cifct de la
foncialité de la rente cil que l’héritage ne puilfe palTcr
dans les mains de l’acquéreur fans la charge de la rente.
L e privilège n’efl qu’une hypothèque qui prime les autres;
l’hypothèque ti’cil oue le droit de faire vendre l’héritage
pour être payé fur le p rix , d ont le lu rp lu s, li furplus y
a , doit être rendu au débiteur. Le droit de rente fo n
cière cil bien plas que cela ; c ’ell le droit de le faire
lervir de la rente par le détenteur de l'h éritage, ou de le
forcer k le d é g u e r p ir , fans aucun égard s'il vauc plus
ou moins que le fonds de la rente.
O n voit d o n c q u ’il y a une différence énorm e entre
le droit de rente foncière 6c une (impie créance privilé
giée , & que par conféquenc G rc llic r fc fait l’illufion la
plus grofîière, q u a n d , de ce que les Lettre* de ratification
purgent les créances privilégiées , il veut en conclure
qu'elles doivent aufli purger les rentes foncières.
O n a vu quel argum ent réfulte dans les termes de
l’art. 7 , contre la purgation de la rente foncière par les
Lettres de ra tifica tio n , de cc que la rente foncière c o n
tient u nr r;!erve de p r o p r r i i que conque (ur 1‘héritaçc
baille a i c titre , de ce qu’enfin , lu ivam l’cxpiotlion de
L o y lc ju , i !L* cil t t w c pur formé Je reu*ue O niervttuon
Jur
/ fvii Ù p'opriJu Je i'kiritufft. Vou.» la rcponlc
que GrcHicr fan À ü ’t argum ent.
U n e rente c o n llu u r t f, die i l , pour le prix d ’un fo n d s ,
une prop reté -uin b e n qu'une rente Îoc>c>èr«\ O r ,
c o n it s m t n e n :, cette renie conilttu ee l e t r u purgée par
1e Urcui Je» lettre* d? r4t>Heot;on ; pourt|ttoi d o n c La
rente foncière oc U t< t o u i l l e pa% amîi ?
U n r rente
elk une p ro p rict' , Un« doute ,
l) ■
�28
dans la main de celui à qui elle eft duc ; mais par rap
port à Phérirage pour le prix duquel elle a été co n ftitu ce,
cc n’eft point une forte de propriété de cet héritage;
ce n’eft q u ’ une créance portant hypothèque : au lieu
q u’ une rente fo n ciè re , créée lors de l’aliénation de Phcritao-e , p a r fo r m e de retenue & réfervation f u r le fo n d s ô
p ropriété c t i c e l u i , cit une forte de propriété de cet héri
tage m êm e qu’elle repréfente. D e cette différence de
nature dérive la différence des effets que doivent pro
duire les Lettres de ratification relativement à l’une
relativement à l’autre. Les Lettres de ratification doivent
purger l’u n e , parce que le Légiflatcur a voulu que leur
effet fût de purger les p riv ilèg es ô hypothèques. Elles ne
d o i v e n t pas purger l ’autre , parce que le Légiflatcur a
vou lu que leur effet fût R E S T R E I N T à purger les privi
lèges & hypothèques S E U L E M E N T , & qu’ une rente fon
cière eft plus qu’une hypothèque ou qu'un privilège ; que
c ’eft une forte de propriété représentative de l ’h éritage,
un droit réel & foncier enfin dans l’héritage.
R
estreint
a p u rg er les p r iv ilè g e s & hyp othèqu es
seu
! O h , c ’cit bien d ’après une difpofition Sem
blable que le Légiflatcur ne pourroit , fans contradic
tion , ordonner par une autre , que les Lettres de ratifica
tion purgeaffent les droits réels
fonciers! C ette difpofition n’eft pas conçue en termes dém onftratifs, com m e
celle de Particle 34 , mais en termes abfolumcnt limi
tatifs & impéricuScment prohibitifs de toute e xten fio n ,
restreint
S E U L E M E N T . Aufli va-t-on bien voir que
toutes les autres difpofitions de la L oi que nous allons
parcourir , ont été di£técs par le m ême cfprit.
A u x termes de l’ arc. 1 z, f a u t e par Pacquéreur d’avoir fait
Sceller Ses Lettres de ratification, dans chacun desBailliao-es
o ù feront fitués les biens vendu s, qu’arrivcra-t-il, à quels
incon ven ien s, a quelles charges l’acquéreur fe trouverat-il fujet ? « Il fera fujet aux hypothèques des créanciers
» des v e n d e u rs , pour raifon des immeubles qui fe trou-
lem ent
�29
” veront iicués dan.î l'étendue des Bailliages où les Lettres
” de ratification n’auront pas été icellées ». T o u t cc que
l ’acquéreur atiroit donc gagné en foi Tant iccller fes L cttres dans tous les Bailliages , ç'auroit été de n ’être pas
fujet aux hypothèques des créanciers des vendeurs. T o u t
ce que les Lettres de ratification pu rgent, ce le n t d on c
les hypothéqués des créanciers des vendeurs. Elles ne pur
gen t donc pas les droits réels, fo n c ie r s , en un m o t , ' / «
rentes foncières.
L ’art. 1 5. eft ainfi conçu : ci Les créanciers & tous ceux
« qui prétendront droit de privilège & hypothèque, fur
« les immeubles tant réels que fictifs de leurs débiteurs
Les rentes foncières ne font point dettes des perfonnes,
mais des fonds ; elles n’emportent point une fimple hy
pothèque , un {impie p riv ilè g e , mais un droit fon cier:
ainfi , il n’y a rien dans cc com m en cem en t d ’a r tic lc ,
dans l’énum ération q u ’il contient de ceux qui « feront
« tenus de form er oppofition entre les mains des C o n fe r« vateurs créés par l'art. 2 n , il n’y a rien , d ifo ns-nou s,
qui convienne aux créanciers, o u , pour parler plus per
tin e m m en t, aux propriétaires de rentes foncières : la fuite
de l’art, ne leur convient pas mieux. « A l'effet, ( y lit« 011 ) , par les cré a n ciers, de conferver" leurs hypothèques
» ô privilèges, lors des mutations de propriété des im« m e u b le s , &cc. n. Faut-il répéter ici que les rentes fo n
cières ne font pas de Jîmples hypothèques, de fimpies pri
vilèges fur les fo n d s ; que par conféqu cnt l'effet de l’oppofition aux Lettres de ratification n’eft pas de les co n
f e r v e r , ce qui fuppofe que celui des Lettres de ratifica
tion n’eft pas de les purger ?
M a is ces conféq u ences, toutes fortes q u ’ e ll es f o n t , le
cè d e n t peut-être encore à celle qui réfulte de l ’art. 19.
L e L é g i f l a t c u r s’eft propofé dans cet article de régler
le fort des différons oppofans au fccau des Lettres de
ratification. Certainem ent fi les c r é a n c ie r s , ou p lu tô t,
les propriétaires de rentes fon cières, cuiTent été du nombre
�50
de ceux à qui il entendoit itnpofer la néceiHté de former
oppofition , il fc feroic occupé d ’eux , il auroit réglé leur
f o r r , il auroit d i t , à l’exemple d’Henri II dans les articles
6 &c i i de fon £dir fur les criées en décret forcé t ce
qui feroic réfulté de leur oppofition ; avec d ’aurant plus de
raifon que leur créance étant due par la ch ofe m ême , iis
étoient bien préférables fur la ch ofe aux créanciers de la
perfonne. Mais non , l’article 19 porte feulem ent ,
« qu’entre les créanciers o p p o fa n s , les privilégiés feront
m les premiers payés fur le prix defdites a cq u ittio n s :
« après les privilégiés acquittés , les hypothécaires feront
» colloqués fuivant l’ordre & le rang de leurs hvpo>1 thèques : &c s’il refte des deniers après l’entier paiement
>5 defdits créanciers privilégiés & hypothécaires , la
diftribution s’en fera par contribution entre les créan»3 ciers chirographaires oppofans , par préférence aux
»; créanciers privilégiés ou hypothécaires qui auroienc
»> négligé de former leur oppofition ».
E t les créanciers de rentes foncières , quel fera donc
leur fort en cas ou à défaut d ’oppofition de leur part ?
L ’article n’en dit rien : le Légiflateur ne s’y cft pas plus
occupé d ’eux , que des propriétaires mêmes. C ’eft
qu’il n’a pas plus voulu aitreindre les uns à former
oppofition , qu’il n’a voulu y aitreindre les autres. C ’effc
q u ’il n’a pas plus voulu que les Lettres de ratification
puro-eâfTent les rentes fo n c iè r e s , qu’il n’a voulu qu’elles
purgeâflcnt la propriété. G ’eft qu’en un m ot , co m m e
il l’a déclaré lui-même dans l’article 7 , il n'a pas plus
voulu que les Lettres de ratification pu fient d o n n e r aux
acquéreurs relativement aux charges fo n d e r a , plus de
droits que n’en a v o i c n c les v e n d e u r s , qu il ne l’a vou lu
relativem ent a la propriété.
Sur l’article zo nous nous contenterons de faire
r e ma rq u e r ces exprcflîons,
les oppofitions qui pourront
« être formées fur les propriétaires des immeubles réels
>3 & fictifs, pour fureté des créances hypothéquées fu r lefdits
�31
immeubles ». C o m b ie n de fois le Légiflateur répète
l ’objet & re fle t des oppoficions , com m e s’il craignoic
q u ’ils ne fufient pas bien entendus !
Sur l’arcicle ?.3 nous obferverons que « le créancier
” oppofant au fceau de Lettres de ratification , eft tenu
m de déclarer par ion oppofition , le nom de famille ,
» les titres, q u a lité s , & demeure de fo n débiteur». C e
créancier n’eft fûrement point celui d ’une rente fo n ciè re ;
car le créancier d ’une pareille rente n’a proprement
pour débiteur que le fonds m êm e fur lequel elle eil
alîife : auiîi dans les oppoficions à fin de c h a r g e , q u i ,
en iaiiie réelle, font formées pour rentes fo n c iè r e s , le
créancier n’eft-il tenu de déligner autre chofe que
l ’héritage m êm e qui lui doit.
Enfin nous obferverons fur l’article 17 , que fuivanc
c e t a rtic le , ci dans le cas où avant le fceau des Lettres
» de ratification , il auroit été fait quelques oppoiitions
» d o n t les confervatcurs n'enflent pas fait m ention ,
» ( fur le repli des Lettres ) , lefdits confervatcurs
» demeureront refponfables en leur propre Si privé nom ,
» des fommes auxquelles pourront m onter les créances
» defdits oppofans qui vitnar oient en ordre utile ».
Si le Légiflateur eût entendu aftreindre les propriétaires
de rentes foncières à former oppofition pour la confervation de leurs rentes , & fi les Lettres de ratification
avoient Pcfl’e t de purger ces rentes faute que les rentiers
cuiTcnc form é oppofition , ou que leur oppofition eut
été mentionnée par le confervateur fur le repli des
L e t t r e s , les rentiers n ’a u ro ie n t-ils , dans ce dernier c a s ,
aucun recours contre le confervateur pour la perte de
leurs rentes , tandis que les fimplcs créanciers pcrfonnels
du vendeur en ont un fi com plet pour la perte de leurs
hypothèques ? C ela ne fe préfumera pas. C ependant le
Légiflateur n’a point parlé de recours de la part des
rentiers , tandis qu’il a eu fi grand foin de pourvoir à
celui des fimples créanciers pcrfonnels. Q u e lle peut être
�3*
!a raifon de cette d iffe re n ce , fi ce n’cft que les rentiersi
n’avoient pas befoin qu’on s’occupât de leur indemnité
en pareil cas , parce que leurs rentes ne fou d roien t
aucune atteinte par les Lettres de ratification ?
V o ilà t-il aflfez d ’articles , aifez de difpoiitions dans
l ’E d i t , toutes aboutiflantes, com m e à l’e n v i, au point que
nous voulons prouver ? Trouveroit-on un autre p o in t,
quel qu’il f o i t , fur l ’eiFet des Lettres de ratification ,
qui fut iufceptible de preuves fi m ultipliées, tirées de
l’efprit &Z d elà lettre de la Loi ? O n en doute. Q u e devient,
d ’après c e la , la diftin£tion de Grcllier entre les droits
fonciers actifs, que les Lettres de ratification ne fon t pas
acquérir , 6c les droits fonciers p a jffs , q u e , felon lu i ,
elles p u rg en t? Quand une difpofition de L oi eft claire
précifc , com m e l’eft celle de l’article 7 de l’E d ir , pour
exclure de la purgation par les Lettres de ratification
tous droits fonciers indiftinctcm ent, on eft difpenfé d ’en
chercher l’explication & la confirmation dans les autres
difpoiitions ; mais quand cette difpofition claire 6c précife
par elle-m êm e , fe trouve encore expliquée , appuyée ,
confirm ée par prefque tous les autres articles , prcfquc
toutes les autres difpoiitions , prefque tous les mots enfin
de la L o i, de forte que fi on 11e prenoit pas cette difpofition
dans toute l’étendue du fens qu’elle préiente, prefque toutes
les autres fe trouveroient injuftes ou im parfaites, il y a
de la folie à prétendre rcltreindrc fon fens par des d iftin& ions qu’elle n ’a pas faites ; & c ’ell: le cas plus que
jamais d’appliquer cet adage fi connu : V b i lex non dijllngiàt,
nec nos diflitiguere de bemus.
D a n s l’impoiïïbilité de répondre à tant d argumens
précis , Grcllier fe r e t r anch e dans des raifonnemens
minéraux. T o u t l'objet de la Loi fur les Lettres de rati
fica tio n , d i t - i l, a été d’abroger les décrets volontaires
do n t les formalités croient longues 6c difpendieufcs ,
pour y fubilitucr les Lettres de ratification d ont l’o b
tention
�33
tention eft moins coûteu fe & moins longue. O r , les
décrets volontaires purgeoient fans contredit les rentes
foncières. D o n c ces rentes d oivent aufli être purgées par
les L ettres de ratification.
L ’abrogation des décrets volontaires , ou p l u t ô t , la
fuppreifion de cet ufage , de cette formalité fimulée
cjui n’exiftoit par aucune L o i , eft bien encrée dans le
plan du L é g iila te u r , com m e une fuite de l'établiiTlment
de la nouvelle formalité des Lettres de ratification ; mais
cette abrogation , cette fuppreiîion n’ont point été fon
objet ,
encore moins fon unique objet. Son o b j e t ,
( perfonne n’en eft fans doute mieux inftruit que luim ê m e ) , a é t é , com m e il s’en eft expliqué dans fon.
préambule , de fix e r d'une manière invariable l'ordre & la
fia bilité des hypothèques, & de tracer une route sûre & facile,
pour les conjerver. A in f i, tout ce q u i , dans l’ufaee des
décrets vo lo n ta ires, avoit le m êm e b u t , le L égiilateur
a dû le confervcr dans fa Loi ; mais par la m êm e raifon ,
to u t ce q u i , dans l’ ufage des décrets v o lo n ta ire s , ne
te n d oit pas à ce b u t , il a dû le rejetter ; il a dû ne pas
m odeler fur cela les effets de fa L o i. O r , la purgation
des droits réels & fo n c ie r s , des rentes fo n ciè re s, en un
m o t , qui avoit lieu par le décret volontaire , n’a aucun
rapport a la fixation invariable de l'ordre & de la fia b ilité
des hypothèques y ni aux moyens de les conferver ; car les
droits réels &c fonciers ne fo n t pas moins differens des
h y p o th è q u e s, que les ch ofes le fon t des perfonnes. D o n c
d é j à , en réfléchiflant fur le but que le L égiilateur s’eft
propofé dans l’établiiTement de fa L o i , il eft évid ent
q u ’il n’a pas dû en régler les effets fur ceux des décrets
v o lo n ta ire s , relativement à la purgation des droits réels
& fonciers : & de fait , il ne les y a pas réglés co m m e
nous l’avons démontré par une foule de difpofitions de
cette Loi.
M ais pour en donner ici une dernière p r e u v e , nous
E
Rêponfe,
�34
reviendrons encore une fois fur l’article 3 4 ; & c e t
article p ré c ifé m e n t, que G rellier a cru pouvoir invoquer
en fa fa v e u r, fervira ainfi d oublem ent contre lui.
Il eft certain que les décrets volontaires purgeoient,
n o n - f e u l e m e n t les rentes foncières ordinaires , mais
e n co re les féodales , c ’eft-à-dire , celles qui fans être
feigneuriales , appartiennent néanmoins au Seigneur du
fonds. A in f i,le fu r-ccn s,les droits de champart 8c d’agrière
n on feigneuriaux , étoient p u r g é s , fans c o n tr e d it, par
les décrets volontaires.
C ependant il eft auiïï certain , d’un autre cô té , que
les Lettres de ratification ne purgent pas les rentes féodales
non feigneuriales , ( l’article 34 de l’ Edit y eft formel ).
Il eft d o n c vrai de dire que les effets des Lettres de
ratification ne font pas calqués en to u t fur ceux des décrets
volontaires ; qu’au c o n tr a ir e , ils en diffèrent efTentiellc m e n t , notam m ent au fujet des droits réels 8c fonciers.
I/a rticle 7 de l’E dit a précifément pour o b je t d’établir
cette différence. Les décrets v o lo n ta ires, à l’înftar des
décrets forcés qu’ils im itoien t, purgeoient tous droits réels
fo n ciers, fervitudes & autres de cette nature ; ils pouvoient
ainfi donner à l’ acquéreur, relativement à tous ces o b je ts ,
plus de droits que n’en avoit le vendeur. Les Lettres de
ratification n’ont point un tel effet ; elles ne peuvent'
d o n n er à l’a cq u é re u r, relativement à tous ces o b je ts ,
plus de droits que n’en avoit le vendeur ; & leur effet eft
r e s t r e i n t
à purger les privilèges &c hypothèques s e u
l e m e n t
.
E t s’il ne fuffit pas d’avoir dém ontré dans le fait:
cette différence entre l’effet des décrets volontaires 8c
celui des Lettres de ratification , s’il faut aller jufqu’à
fonder les raifons que le Légiflatcur a eues pour l’éta
b l i r , on en trouve de très-dignes de fa fageile.
Il convient que les décrets forcés purgent & les droits
fo n c ie r s , & la propriété m ê m e ; parce qu’il eft de la
dignité ôc de l’autorité de la Juftice, qu’une vente faite
�35
par ¿H e, ne foie fufceptible d’aucune a tt e in te , ni dans
fa fubftance , ni dans fes conditions : ceux d on t on a
m al-à-propos compris les biens dans une faifie férieufe ,
ou qui ont des d r o i t s , de telle nature qu'ils io ie n t, fur
les biens d écrétés, fon t avertis, par la publicité que les
formalités des criées donnen t au d écret, de fe prefenter
pour les re cla m er: s’ils le n é g lig e n t, ils doivent fe j ’invputer a e u x - m ê m e s ; & la vente faite par la Juftice ne
d o it pas fouffrir de leur négligence.
A l’inftar des décrets fo r c é s , un ufage abufif avoit
introduit les décrets volontaires , form alité fim u lé c ,
au m oyen de laquelle on avoit voulu donner aux
conventions des Parties la m êm e force qu’aux décrets
de la J u ftice , d o n t on empruntoit le mafquc. Mais f i ,
jufqu’à ce qu’ une L o i fage vîn t faire ceifer cet abus in
décent de ce qu’il y a de plus re fp e£ tab lc, on pouvoit
tolérer que de fimples feintes allaffent jufqu’à mettre un
acquéreur à l’abri des recherches des créanciers perfonnels & hypothécaires de fon vendeur , créanciers qui ,
d'un c ô t é , n’avoient q u ’ un droit acceiToire fur la ch o ie
v e n d u e , puifqu’en effet l’hypothèque n’eft qu’un acceffoire de l’obligation pcrfonnelle ; 6c q u i , d ’un autre côté ,
n ’éprouvoient pas néceffairement par-là une perte réelle
de leur créance , mais feulement d ’une de leurs sû retés,
puifqu’ils confervoient toujours l’obligation pcrfonnelle
fur leur d éb iteu r, &c leur hypothèque fur fes autres biens;
il j, difo ns-nou s, on pouvoit tolérer qu’une vente v o lo n
taire d’h om m e à h o m m e , ôc pour laquelle rien ne follicito it une fe rm eté , une irréfragabilité fur tous les points ,
fem blablo à celle que la dignité & l’autorité de la Juf
tice dem andent pour une vente qui émane d ’e l l e , fi on
pouvoit tolérer qu’une pareille v e n t e , au m oyen de quel
ques formalités fimulées, eût l’effet de mettre l’acquéreur à
l’abri des recherches de pareils créanciers , quel abus
criant n’y avoit-il pas à fouffrir qu’elle eût celui de pur
ger jufqu’à la p rop riété, co m m e cela fe pratiquoit dans
E ij
�36
Jes premiers temps ; jufqu’aux droits réels 8c fo n c ie rs ,
co m m e cela s’cil toujours pratiqué; c’eil-à-dire , de don
ner à un h om m e le droit de vendre avec effet ce qui
n e lui appartient p a s , ou plus qu’il ne lui appartient ; &C
>ar-là, ( d a n s le cas de rentes f o n c i è r e s ) , de fruftrer
ans refïburce les Propriétaires de ces rentes ? Nous difons
fa n s reffource , parce q u e , co m m e la rente foncière eil
Ja dette propre de l’h é rita g e , & n’eil duc par la perfo n n e qu’autant qu’elle pofsède le fonds fur lequel elle
eft a iîîfe , le fonds en étant une fois lib é r é , la rente eil
anéantie, & n’eil plus exigible fur aucune perfonne.
O r , c ’eft cet abus que le Légiflateur a voulu corriger
dans fa L o i fur les Lettres de ratification. Il a d onné à
ces Lettres tout l'effet qui étoit néceffaire au but qu’il
fe p ro p o fo it, de fix e r d'une manière invariable F ordre ù
la fia b ilité des privilèges & hypothèques, & de tracer une
route fû re ô fa c ile pour les conferver. Il a voulu que qui
c o n q u e auroit de pareils d r o it s , & voudroit les confer
v e r , en cas de vente volontaire des objets qui y feroient
a ffe £ lé s , prît pour cela la route fûre & facile qu’il trace
par fa Loi. M ais il n’a pas été plus loin. T o u t ce qui
excèd e les privilèges & hypothèques, eil hors de fon objet.
L ’article 7 de fa L o i le dit exprcfTément ; toutes les au
tres difpofitions de cette L o i le fuppofent : & à cet égard ,
c o m m e on v o i t , l’intention du Légiflateur cil aufli fage
dans fes m o t ifs , que certaine dans le fait.
Î
G rellier cherche à fon tour à rendre com pte des m o
tifs de la L o i pour être telle qu’il la fuppofe. La ra ifo n ,
d it - il, de la néceiîité de l’oppofition , en cas de rente
fo n c iè r e , c’cft qu’une r e nt e f o n c i è r e eft auifi prefcriptible
que toute autre c ré a n c e , & que les Lettres de ratifica
tion ne fo n t qu’une voie abrégée de prescription , co m m e
l ’etoient les décrets volontaires quand ils avoient lieu.
5 1 y par 1 article 3 4 , les Seigneurs fon t difpenfés de for
m er oppofition pour le fonds des c e n s , rentes foncières
�37
& autres droits feigneuriaux èc féodaux fur les héritages
étant dans leur ceniive & m ouvance , c’eft parce que ces
droits font imprefcriptibles de leur nature.
D o u b le erreur de fait & de droit.
Erreur de fait. T o u s les droits compris dansTart.-34.
ne jouiflent point du privilège de l ’imprefcriptibilité. Il
n ’y a que le c e n s , proprement d i t , qui foit impreferiptible : la rente fo n ciè re , quoiqu’appartenante au S e ig n e u r,
eil fujette à la prefeription.
Erreur de droit. L ’imprefcriptibilité du cens fuffiroit bien,
fans d o u t e , pour l’exempter de la purgation par les Lettres
d e ratification ; mais ce n’eft pourtant point dire£tement k
raifon de cette impreferiptibilité feule q u ’il en eft exem pt ;
a u tre m e n t, il faudroic dire que tout ce qui eft prescrip
tible devroit être purgé : o r , o n a un exemple du c o n
traire dans la propriété ; ce d roit, quoiqu’auifi preferiptible que tout autre , n’eft pas purgé par les Lettres de ra
tification : il faudroic dire auili que dans les pays où le
cens eft prefcrip tible, co m m e il y en a quelques-uns, il
d evro it être purgé ; ce qui n’eft p a s; car la difpofition de
l ’article 34 de PEdit eft générale pour tout le R oyaum e.
L a preferiptibilité des rentes foncières ne co n clu t d o n c
rien pour leur purgation par les Lettres de ratification.
Après tant de dém onftrations accumulées de la v é r ité ,
iue les Lettres de ratification ne purgent pas les rentes
o n c iè rc s , prendrons-nous la peine d’oppofer ici G rcllier
à lui-même? Lui rappellerons-nous fa conduite avec les
Prêtres de la C om m u n auté de Saint N ico la s de C o n f o l e n s , au fujet d’une rente toute fem blable à celle récla
m ée par les C hanoines de Lefterp ? Lui dirons-nous que
par A rrêt ( 1 ) de cette m êm e C o u r devant laquelle il
?
„ C 1 ) C e t A rr ê t du 21 M a i 1 7 7 9 , fait partie de la p ro d u â io n principale de
G rellier.
�38
plaide aujourd’h u i , il lui a été donne a£te de Ton offre ,
en qualité de détenteur du village de C hez-le-B run, de
paffer déclaration aux Prêtres de la Communauté de Saint
N icolas y de la rente de vingt - quatre boijjeaux de fe ig le ,
( d on t il s’agifloit ) , & d'en payer les arrérages échus de
fo n temps ; 8c qu’en co n féq u en ce, cet A rrêt l ’a c o n d a m n é ,
de fo n confentement, à faire l’un &. l'autre? C e tte remar
que n ’ajoureroit rien fans doute à la force de nos preu
ves ; mais au moins on y verroit quelle opinion Singu
lière il faut que G rellier ait des M agiftrats Souverains ,
pour venir leur propofer aujourd’hui de juger que le fccau
des Lettres de ratification purge les rentes fo n c iè re s , après
leur av oi r fait j u g e r , il y a quatre ans ,f u r fo n confente
m ent, qu’il ne les purge pas.
■Objeition,
Rcponft.
M ais fi l u i , G r e l l i e r , a fait juger à ces M agiftrats que
le fceau des Lettres de ratification ne purge pas les rentes
fo n c iè re s , un au tre, à l’en c r o ir e , leur a fait juger qu’il
les purge. Il nous cite en effet un A rrêt rendu à l’A u d ience de relevée de la G ra n d ’C h a m b r e , le 6 A vril
1 7 8 1 , A r r ê t , q u i , félon l u i , a jugé la queftion in terminis pour la p u rg a tio n , en faveur d'une dam e A u g ier
co n tre un fieur Arnauld. Il ajoute qu’il a été fait note
de cet A rrê t à la Bibliothèque des A vocats ; &: fon P r o
cureur en a produit une copie au p r o c è s , ainfi qu’un
exemplaire du M ém oire imprimé qui fut fait pour le fieur
A r n a u l d , créancier de la rente foncière.
i ° . Plus nous fom m es pénétrés de refpcct p our les dé
cidons de la C o u r , plus nous avons de peine à croire que
la queftion ait été jugée t o u t e nue par PA rrêt qu’on nous
c i t e , & que des circonftances particulières que nous igno
rons n’aient pas influé fur la décifion. N o u s ne v o y o n s
que la d éfenfc du fieur Arnauld qui a fu c c o m b é ; c ’eft
dans celle de la dame A ugier qui a réuifi, que pour
voient fc trouver ces circonstances.
�39
i°.. U n A rrêt fo lit a ir e , quand m êm e on fuppoferoit
qu'il auroit jugé la queftion in terminis , ne fuffiroit pas
pour former une jurisprudence : il f a u t , pour cela rfer ie s
rcrum perpetuo fini aliterjudicatarum - &C la C o u r , pour avoir
igé une feule fois une q u e ftio n , ne s’interdit pas de
examiner de nouveau.
3°. O n a f a i t , à la vérité , co m m e le remarque G r e llie r ,
n ote de cet A rrê t à la B ibliothèque des A vocats ; ou
p lu tô t, ( car il ne faut pas q u ’on attache à cela plus d ’im
portance que la ch ofe n’en mérite ) , un des A vocats fréquentans cette Bibliothèque , a mis dans un des car
tons qu’on y c o n fe r v e , une note fur feuille v o la n t e , de
l’A rrê t en queftion. M a is c ’eft précifém ent parce qu’il a
caufé beaucoup de fu rp rife, qu’on en a fait note : s’il eût
jugé la queftion , com m e tout le m o n d e penfoit qu’elle
auroit dû l’être , on ne l’eût point remarqué.
4^. C ’eft avec l’air de la m êm e fu rp rife, qu’il eft rap
porté dans un O u vrage qui vient de p a ro ître , fous le
titre d’ Obfervauons & jugem ens fu r les Coutumes d'A m ien s
fj f u r plufisurs matières de D ro it civ il & coutumier. L e
trente -huitièm e chapitre de cet O u vra g e eft un petit
rraité fur l’Edit des Lettres de ratification. A u n°. 15
de ce ch apitre, l’A u tcu r fe fait la queftion , iî le créan
cier d’une rente foncière eft obligé de form er oppoficion..
» Plufiturs perfonn.es inflruites des principes, d it - i l, ont:cru
m que l'oppofition n éioit pas nécefjaire. Je m ’en vais dire ce
» qui a été jugé m. Il rapporte enfuite l’efpèce de l’A rrêt
de 1781 , avec les m oyens des Parties. N ous y v o y o n s ,,
ainiï que dans le M ém oire imprimé du fieur A r n a u ld , que
l’affaire ne fut p o i n t , à beaucoup p r è s , traitée co m m e
elle devoir l’être. O n mit en queftion , fi le bail à' rente
co n rcn oit ou non aliénation ; & ce fut principalement
fous prétexte qu’il ne co n tcn o it pas d’aliénation , mais
que la propriété form elle de l’héritage baillé à rente réfidoic toujours fur la tête du bailleur, que le fieur Ar~
nauld ioutint que fa rente n’avoit pas été purgée par les*
�40
Lettres de ratification de la dam e A u g ie r ; co m m e s’ il
n ’y avoir que la propriété form elle qui fût exempte de
la purgation ; co m m e fi-, dans les termes de l’Edit ,
l ’exemption ne portoit pas aulli expreflem ent fur les
droits réels 2c fonciers ! T o u t ce qu’on peut d on c dire que
l ’Arrêc a jugé , en confidérant a défenfe du fieur À r n au ld , c ’e(t que le bail à rente contient réellement alié
nation ; 8c cela eft vrai : c ’eft que le propriétaire d ’une
rente foncière fur un h é rita g e, n’eft pas propriétaire de
l'héritage ; 8c cela eft encore vrai. Si , fans porter les
chofes jufques-Ià, le fieur A rnauld fe fût borné à foutenir que fa rente é ta n t, non pas une propriété fo rm elle ,
mais une forte de propriété repréfentative de l'h éritage ,
un droit réel ôc foncier enfin fur l’héritage , elle n’avoit
pu être purgée par les Letrres de ratification de la dame
A u g i e r , on ne peut fe perfuader qu’il eût perdu fa caufe
co m m e il a f a i t , puifqu’il eft certain que l’exemption eft
précife dans P E d it , pour les droits réels 8c fonciers ,
auiïï-bien que pour la propriété.
T e l le eft la défenfe des Chanoines de L e fte r p , en con
sidérant la queftion dans la thèfe générale. M ais s’ils y
o n t tant infifté fous ce point de vue , c ’e ft, en quelque
forte , plus pour l’honneur des principes que pour le befoin de leur c a u f e ; car le point de droit en lu i-m ê m e
leur eft à-peu-près indifférent, vu les circonftances parti
culières qui accom pagn ent l’efpèce. C ’eft ce q u ’on va
voir dans la propofition fuivante.
S E C O N D E
�4i
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
Q uand même dans la thèfe générale les Lettres de rad~
fc a tio n auroient l'effet de purger les rentes fo n cières,
celles obtenues par Grellier ne i*auroient pas dans t e f
pèce particulière..
D e u x circonftances décifives co ncou rent pour I’établiffem ent de cctre propofition :
i°. La connoiiïance perfonnelle que Grellier avoit
de la rente donc il s’agit avant fo n acquifition ;
2°. L a fraude & la collufion pratiquées entre fon père
Sc lui pour dérober au p u b lic , & n otam m ent aux C h a
noines de Lefterp , la co n n oiiïan ce de la tranilation de
propriété du père au fils , &c l’obtention des Lettres de
racificacion.
Chacu ne de ces circonftances mérite d ’être déve
loppée.
P
r e m i è r e
C
i r c o n s t a n c e
.
Connoiffance perfonnelle que G rellier avoit de la rente
dont i l s'agit.
Il eft, en matière de d é c r e t , un principe confacré par
une Jurifprudcnce conftante , c ’eft que le décret ne purge
point les Servitudes patentes ou vi/ibles. Et pourquoi ? Parce
que celui qui veut le rendre adjudicaraire d ’un héricage
quelconque , étant préfumé 1 avoir examiné d’avance ,
puifqu’il doit lui ctre adjugé tel qu’il f e pourfuit & com
porte ; & la Servitude patente n ’ayant pu lui échapper
•F
�4l
dans cet e x a m e n , il a dû la regarder com m e une charge
naturelle de Ton adjudication.
U n e ' rente foncière due fur un h é rita g e , cft bien une
efpèce de fervitude : to u te fo is , com m e elle n’eft pas de
nature à être apperçüe à l’in fp e& ion de l’héritage , il
p y a qu’ u n cas où le principe puifle y être appliqué }.
c e f t celui où le créancier de la rente pourroit prouver
q u e l’adjudicataire fur décret a eu une connoiiTancé perfon n ellc de la rente avant l’adjudication. M a i s , dans ce
c a s , la connoiiTancé perfonnelle d e là rente qu’avoir l’ad
jud icataire, d o i t , & même à plus forte raifon que dans le
cas de fervitude patente , faire mettre cette rente au
nom bre des charges de fon adjudication. N o u s difons „
à plus forte r a ifo n , parce qu’en e ffe t, tandis que dans
l e cas de fervitude p aren te, on fe décide d ’après une
iim p lep réiom p tion de d ro it, très-forte, à la vérité, mais
toujours p ré fo m p tio n , ladécifion dans le cas de connoiffance prouvée de l a r e n t e , eft fondée i ur la certitude
même.
C e la étant vrai en matière de d é c r e t , m êm e fo r c é ,,
qui eft le plus folem nel de tous les concrats de vente y
T e f t , ou plutôt le f e r o i t , à plus forte raifon , en m a
tière de Lettres de ratification , qui n’étant que le co m
plément d’une convention particulière t participent beau
coup de fon cara£tère privé.
O r , il eft certain que G rellier a eu avant l’obtention
de fes Lettres de ratifica tion , & m êm e avant fon acquifition , une connoiiTancé perfonnelle de la rente dont il
s’agit. C ela réfulte de ce que c ’eft lui qui a écrit de f a i
main le corps entier & l ’ adrejje de la L e t t r e du premier
O cto b re 1 7 6 9 , adreflee par fon père au Procureur-Syn
dic de l’A b baye de L c it* r p , par laquelle la rente d o n t
il s’agit eft form ellem ent reconnue , & le paiement des
arrérages offert par compenfation.
C e fa it, fur lequel les défenfeurS de Grellier ont ju fq u 'ic i évité de s’expliquer , fous prétexte q u ’ils n ’o n t
�45
point à cet égard d ’inftru£tions de la part de leur C l i e n t ,
com m e iî depuis plus de trois ans que le procès dure ,
ils n’avoient pas bien eu le temps de s’en procurer , eft
fubiidiairenient articulé par des concluiions préciies de
la part des Chanoines de Lefterp. Les défenfeurs de
G r e llie r , qui fans doute n ’attendent pas d’inftructions
qui les autorifent à le n ie r , o n t pris le parti de raifonner d eflus, en le fuppofant vrai ; & leurs raifonnemens à
cec égard tendent à deux fins : la première , de prouver
que la Lettre de 1769 , q uoiq u ’écrite de la main de
G r e llie r , ne lui a pas donné une connoilfance perfonnelle de la rente d ont il s’a g i t ; la fé c o n d é , que quand
m êm e elle lui auroit donné cette c o n n o iiïa n c e , il n ’en
auroit pas moins purgé la rente par fes Lettres de rati
fication.
P o u r remplir le premier o b j e t , ils nous difent que
la reconnoifîance de la r e n te , l'engagem ent de la payer
porté par la Lettre de 1769 , n’étoit que conditionnel.
G re llier, père , ign oroit s’il la devoir. S i j e vous la dois ,
(marquoit-il aux C h a n o in es). O r , G re llie r, fils, en écri
vant fous la diCtée de Ton p è r e , ces expreflions de doute
& d ’in certitu d e, n’a pas pu en recueillir une connoiflance
certaine de l’exiftence de cette rente.
L a conjon£tion f i n’efl pas toujours conditionnelle.
Elle ne l ’eft que lo rfq u ’elle peut fe refondre en ces fa
çons de parler : E n cas que, Pourvu que , A moins q u e,
ou autres femblables. Dans d ’autres c a s , clic eft caufative ; c’eft-à-dire, qu’elle exprime la raifon pourquoi la
ch o ie eft. C e s cas font ceux où elle peut fc réfoudre
en cette façon de parler : L a raifon qui fa it que telle
ckofe e j l , c 'e jlq u e , &c. ; 5c alors, loin d ’être une expreffion de doute & d ’in certitu d e , elle a m ême plus de force
9 ue la lîmplc affirmation s puifquc c’eft une affirmation
m otivée. D ’après cette règle qui eft des élémens de la
langue , il eft évident que la conjonction f i dans la
F ij
�f
Obje&ion;
Reponfe.
44
phrafe' citée de la L ettre de 176 9 , n’eft pas condition
n e lle , mais ca u fa tive ; car cette phrafe ne peut pas erre
tournée en c e lle s-ci; E n cas que je vous doive la renie y
Pourvu que j e vous doive la rente , A moins que je ne vous
doive la rente , j e pofsède le fonds y mais bien en celleci : L a raifon pour laquelle j e vous dois la rente, c e f l que
j e pofslde le fonds. A in iî d o n c , nulle condition , nulle
incertitude dans cette p h r a fe , qui dût tenir en fufpens
l’efprit d e celui qui l’écrivoit»
i
O n répond pour G r e lli e r , qu’au iurplus, depuis 1 7 6g
qu’il a écrit pour fon père , ju fq u en 1773 que fon père
lui a cédé les héritages fujets à la rente , il a eu le
temps d’oublier ce que contenoit une L e t t r e , très-indiffé
rente pour lui lorfqu’elle a été écritePerfon n e ne croira que G re llie r, fils , à l’âge où il étoit
en 1 7 6 9 , ( s ’étant marié en 1773 ) , in itié , co m m e il
l ’é c o i t , dans les affaires de ion p ère, fe m êla n t, co m m e
il faifoit , de l’exploitation de fcs petits d o m a in e s, eûr
oublié en fi peu de temps, une redevance de vingt-quatre
boifléaux de fe ig le , feize b oiiïcaux d'avoine de 5 fous
d ’a rg e n t, fur une métairie de 3 ou 400 livres de reve
n u ; " mais au refte , cet oubli imaginé de fa part fi à
p ro p o sj ne lui feroit ici d’aucun fecou rs; parce qu’en
Jufticc on n ’eft: point admis à alléguer l’oubli de ce
q u ’on a fu une fo is , & fu r-to u t, de ce qu’on a fait : ii
une pareille défenfc étoit a d m ife , on ne verroit que des
mémoires qui manqueroient du jour au lendemain.
V o y o n s a&uellem ent le raifonnement qu’on fait pour
prouver que quoique G r e l l i e r ait eu avant fon acqui
sition une co n n oiu an cc pcrfonnclle de la rente dont il
s’a g i t , il ne l’en a pas moins purgée par fes Lettres de
ratification.
Ohjeftion.
Il arrive tous les jours, nous dit-on, que l'adjudicataire
l
�45
ou l’acquéreur d’un héritage , a c o n n u , fo it dans des
contributions de m o b il i e r , Toit dans une direction y ley
créances auxquelles l’hérirage vendu ou décrété étoit
hypothéqué ; cependant fi les créanciers , foie (impies
h y p o th é ca ires, ioit m êm e p r iv ilé g ié s , ne form ent pas
leurs oppofitions au d é c re t, ou au fccau des Lettres de
ratification obtenues fur la v e n t e , la connoiifance perfonnelle que l'adjudicataire ou l’acquéreur avoit de leurs
créances n’ empêche pas qu’il ne les ait purgées. La connoiflance perfonnclle eft d on c une circonftance tout-àfait indifférente en matière de purgation par le décret ou
par les Lettres de ratification.
P o u r q u o i , dans le cas de la fimpîe hypothèque ou du
p rivilège, l’adjudicataire ou l’acq u éreu r, quoiqu’en ayant
eu connoifTance avant l’adju d ica tion , ou avant le fceau
des Lettres de ratification, les purge-t-il? C ’eft que co m m e
ces droits n’ont lieu que pour des dettes du V endeur ou
Saiii , ÔC non pour des dettes de la chofe vendue ou dé
crétée , l’adjudicataire ou l’acquéreur n’eft cenfé s’en êtr<
ch a rg é , ni pcrfon n ellcm en t, ni fur la ch ofe vendu e, parce
que rien ne lui d ifo it qu’en acquéranc i l 'd û t époufer les
d ettes de fon vendeur ; au lieu que la rente foncière
étant proprement la dette de la ch ofe ve n d u e , & n on
celle du v e n d e u r , l'adjudicataire en ayant eu c o n n o iffance , eft cenfé s'en être chargé fur la chofe en l ’ac
q uéran t; parce que tout lui d ifoit qu’une chofe ne va pas
fans fes charges.
Ces motifs de différence entre la rente foncière & la.
iimple hypothéqué en ce c a s , fo n t tres-bien expliqués
par M . Pothier dans fon traité de PH ypothèque ,,
chap. z , fe c i. première , art. 3.
» L a raifon de différence ( d i t - i l ) vient de la difFe” rente nature du droit de rente foncière & du droit
» d’hypothèque. L a rente foncière étant due par Phéri»» tage plutôt que par la p e rfo n n e a> ce droit confifte &
Rcponfe,.
�4<5
m exiger du pofleiïeur de l’héritage la preftation de la rcn„ te. P a r conféquent celui qui achète l ’ héritage avec la con« noiffance de cette charge , efi cenfé s’y fo u m en re, &
« ainfi s’obliger a la preftation de la rente. A u co n tra ire ,
m le droit d ’hyp othèq ue, m êm e fp éciale, qu’a fur un héri»j tage le créancier d’une rente conftituée , ne coniifte
» pas dans le droit d’exiger du poiTefleur de l’héritage
sj la preftation de la rente qui eft due par la perionne
ïj qui l’a conftituée...................D e-la i l Ju.it que celui qui
n achète l ’ héritage, quoiqu'avec connoiffance delà rente, ...
m n e f pas pour cela cenfé s’ obliger a la preflation de la
»3 rente. «
Il
faut d on c en cette matière bien diftinguer la dette
d e l ’ h é r i t a g e , d e celle de la perfonne du vendeur.
L ’ a c h e te u r , quand il a connu Ja p re m iè re , eft cenfé
s’en êrre chargé fur l’héritage ; & c ’eft à celle-là qu’il faut
appliquer la déciiion qui a lieu pour la fervitude paten
t e , avec laquelle toutes les charges de cette efpèce ont
ce rapport effenriel d’être chargés de l’héritage. A u
contraire , quoique l ’acquéreur ait connu la f é c o n d é ,
qui réfidant principalement fur la perfonne du v e n d e u r,
n’ affcctoit qu’accidentellem ent & acccffoirem ent l’héri
tage , il n’eft nullement cenfé avoir voulu s’en c h a r g e r ,
ni p erfon n ellem en t, ni fur l ’héritage : c’eft pourquoi la
purgation doit avoir lieu en ce c a s , malgré la connoiffance qu’il en a eue.
S
e c o n d e
C
i r c o n s t a n c e
.
Fraude & collufion pratiquées entre G rellier, p ir e , <£
G rellier , f i s .
Q u ’on fe rappelle ici la conduire que G rc llic r, p ère, &
fon fils, ont tenue dans cette affaire.
D ans quelles vu es, & par quels m o y en s, G rellier, p è r e ,
�47
a fait pafler fur la tête de fon f i l j , les biens fujets à la.
rente des Chanoines..
C ’eft dans la vue de fruftrer fes créanciers. C ’efl: par le
m oyen de deux a£tes , d o n t le p r e m ie r , tout en,d onnant
fur lui à fon fils,,, des droits qui de.voient a b f o r b e r , &
a u -d e là , le peu d ’a & i f qu’il a v o i t , ne pouvoit pourtant
ue tranquillifer beaucoup fes créanciers , en donnant
ans le public une idée très-avantageufe de fon aifance
&; m êm e de fa richefle ; 6c l’autre co n fo m m o it cette
œuvre d ’in iq u ité , en faifant pafler à fon fils fes b ie n s ,
en paiement d’une prétendue d ot qu’il n’avoit jamais été
dans le cas de lui d o n n e r , & en rem placem ent de pré
tendus effets de com m erce qui n’ont jamais pu exifter.
Q u ’on fe rappelle actuellement par quels m oyens 6c
par quelles précautions^Grellier, p è r e , & fon f i l s , fon t
parvenus à cacher aux Chanoines de L e fte r p , ôc à to u t
le m o n d e , & la ceilion du père au fils, ôc les Lettres de
ratification obtenues par le fils fur cette ceiîion.
C 'e ft en allant pafler l’a£be de ceiîion à trois grandes
lie u e s .d e C o n f o l e n s , fiège unique de leur d o m ic ile ,
de:leur é t a t , de leur fo r tu n e , de leurs affaires, de leurs
connoiffances.
C ’e f t , de la part du p è r e , en p la id a n t, d’abord avec les
Prêtres de la C om m u nauté de Saint N icolas de C o n fo le n s ,
enfuite avec les C hanoines de Lefterp , en qualité de
tenancier du lieu ô village de C h ez-le-B ru n , avec les u n s,
pendant plus de fix m o is , & avec les autres, pendant plus
d ’un an après qu’il avoit cédé à fon fils couc ce qu’il avoit
dans c e village ; & en ic laiilanc condam ner vis à-vis des
uns &. vis-à-vis des autres en cette qualité.
C ’eft j de la part du fils , en ne faifant point notifier fon
a£te de ceiîion pour faire courir l’an du retrait.
C ’eft en ne le préfentant au Bureau de l’Infinuation a,
q u’après l’obtention de fes Lettres de ratification.
C ’eft enfin en dépofant cet acte au G re ffe de la Sénéchauffée d ’A n g o u l ê m e en temps de pleines vacances pour;
3
�48
obtenir deflus des Lettres de ratification. ( C irco n fta n ce
qui n’eft fûrement pas indifférente i c i , vu fa réunion à
toutes les autres ).
Q u ’ on joigne à tout cela le fait certain que G re llie r ,
p è r e , a toujours paru jouir des biens cédés jufqu’après le
fceau des Lettres de ratification obtenues par le fils fur
la ceilîon , & Pim poifibilité, d’ailleu rs, d’appercevoir une
m u tation de propriété & de jotiifiance du père au fils , par
les foins que prendroit le fils des biens de fon père-, n ’y
ayant rien de plus naturel que de préfumer qu'il les prend
pour fon père.
D e cette réunion de circonftanccs naiiTent trois
obftacles infurmontables à la purgation de la rente d o n t
il s’agit par les Letrrcs de ratification de G r e llie r , fils ,
q u a n d m êm e on fuppoferoit que régulièrement 1 effet
de pareilles Lettres fut de purger les charges foncières
ou réputées, telles.
Prem ier Objiacle.
L a ceiïîon de G r e lli e r , père, à fon fils , des dom aines
d ont il s’a g i t , étant faite en fraude de fes c ré a n c ie rs ,
s'il en fut ja m a is, tant à caufe des précautions qu’il a
prifes pour leur en dérober la connoiiTancé , qu’à caufe
de fon excès relativement à fa fortune , eft nulle félon
toutes les L oix du titre du D ig efte Quoe in fraudem creditorum} qui réprouvent généralement toutes les manières donc
les débiteurs diminuent frauduleufcmcnt le fonds de leurs
biens , pour en priver leurs créanciers. » A it prceior, Q u æ
» fraudationis causa gefta erunt. Hoec verba generalia fu n t;
» & continent in Je om nem omnino fraudem fadtam ,• vel
»> alicnationcm , velquemcumjuecontraclum. Q u o d cu m q u e
w igitur fraudis causa fadtum eft , videtur his verbis revo» c a r i, qualecumque fuerit ; nam latè vtrba ifla patent.
» S ivè trgo rem alienavit, f v è acceptilatione v el paclo
» ahqutm lib erâvit, idem erit probandum. »
C ’cft
�49
C es L oix di& ées par l’équité & la raifon , & dignes
à tous égards de la ia g e iïe d e leurs A u t e u r s , loin d ’avoir
été mitigées dans notre ufage , y ont au contraire reçu
une jufte extenfion ; car au lieu que dans le D ro it R o m ain
o n ne regardoir régulièrement co m m e aliénations faites
en fraude des cré a n ciers, que celles des chofes qui étoient
d é jà in bonis du d é b ite u r, parmi nous la renonciation à de
iïmples d roits, quoique non encore e x e rcé s , com m e la re
nonciation à une fucceifion, tom be dans le cas de la f ra u d e ;
enforte que les créanciers du renonçant fon t admis à fe
faire fubroger à fes droits pour accepter la fucceilïon ré
p u d ié e , s’ils efpèrent y trouver leur compte.
L a ceifion faite par G re llie r,p è re , à fon fils, des héritages
d o n t il s’a g i t , eit d on c nulle fuivant la difpolîtion de
c e s L o ix générales , avec d ’autant plus de raifon que
G r e llie r , fils, a été com plice de la fraude de fon p è r e , 2c
q u ’elle n’a m êm e été com m ife que pour lui.
C e t t e ceifion eft encore nulle par la difpoficion par
ticulière de l’O rd o n n a n ce du C o m m e r c e , tirre 1 1 , arc. 4 ,
ui déclare nuls tous tranfports, ce[Jions } ventes & donations
ebiens meubles ou immeubles, faits E n f r a u d e des créan
ciers ; & plus particulièrement encore par la difpofition
de l’E d it du mois de M ai 1609 , qui annulle tous tranfports,
ceffïons, ventes ô aliénations , fa its a u x e n f a n s e t h é r i
t ie r s pr ésom ptifs
ou amis du débiteur ; &. veut que s 'il
paraît que ¿es tranfports , ceffions , donations & ventes ,
fo ien t fa its & acceptés e n f r a u d e des créanciers , les
cejfionaires, donataires & acquéreurs , fo ien t punis comme
complices des fraudes & banqueroutes.
3
C e la p o fé , com m e les Lettres de ratification ne f o n t ,
fuivant m êm e la fignification propre de leur n o m , qu’une
confirm ation d e là v e n te , ceifion, ou autre a£te fur lequel
elles font obtenues , c ’eft une conféquence néceflaire que
l ’adte à confirmer étant nul , Pacte confirm atif le ioit
aufîï ; parce que ce qui eft nul en f o i , n’eft pas fufceptible
de confirmation.
G
�5°
S eco n d Obflacle..
*
G rc llie r nous apprend lu i- m ê m e , & c’efl: la vérité ,,
que l'effet du fceau des Lettres de ratification for les droits
q u ’il p u r g e , n’eft autre chofe qu’une cf|>èce deprefeription
de ces d r o it s , faute par ceux à qui ils appartiennent d ’avoir
fo rm é leur oppofirion ( i ) .
C e tte prefeription eft proprement fo n d é e , co m m e la
prefeription de dix ou vingt a n s , fur la pofleflion de bonnefoi que l’acquéreur à ju fte titre de l’héritage a eue de
cet h é rita g e, fans la charge dont il s’agit , pendant l e temps réglé pour le fceau de fes Lettres de ratification;,
enforte que cette prefeription réfultanre des Lettres de
ratification , n’ eft proprement que celle de dix ou v in g t
ans abrégée.
D e - là il fuit que les mêmes exceptions qui ont lieu
co n tre la prefeription ordinaire de dix ou v in g t a n s ,
o n t auifi lieu contre celle réfultante des Lettres de rati
fication.
E t ainfi, i°. de m êm e qu’ en matière de prefeription de
dix ou vingt ans , co m m e la bonne foi fur - tout y eft
n é ce fla ire , celui contre qui on .veut s’én prévaloir eft ad
mis à s’en défendre , en prouvant qu’on a eu c o n n o iffance de la charge réclam ée; de m êm e en matière de
Lettres de ratification , celui à qui on les oppofe doic
auiîï être admis à en repouiTer l’eiF et, en prouvant q u e
l’acquéreur qui les a ob ten u es, avoit connoifTànce de la
charge qu’il prétend avoir purgée. ( M o y e n qui rentre dans
celui tiré de la première circon fta n ce, développée ci-deffus ).
( i ) D e H e r i c o u r t , dans fou traité de la v en te des im m eubles p a r d é cre t»
cfaap. 9 , n. J , fait la m ô m e rem arq u e fur l’effet di» d é c re t.
�S1
2 ° . D a n s la prefcription ordinaire de dix ou vin g t a n s,
pour que le nouvel acquéreur de l’héritage puifle le pré
tendre libre dans fa main de la charge ré cla m ée , il faut
que la rranilation de propriété en fa perfonne ait été
fe n fib le , tellem ent que celui qui réclame la charge n’ait
pu l’ignorer. C ’eft la difpofition précîfe de l’art. 115 d e là
C o u tu m e de P a r is , qui fait à cet égard le D r o it com m un.
» Si le créancier de la re n te , ( porte cet art. ) , a eu jufte
» caufc d'ignorer l'aliénation , parce que le débiteur de
»» ladite rente feroit toujours demeuré en poffeilion de
» l’héritage , par le m oyen de location rétention d ’ufu» fr u it, ou autres fem blables, pendant ledit te m p s , la
» prefcription n’a cours ».
D e m êm e d o n c , s’il éto.it poflîble d ’admettre que les
L ettres de ratification purgeaiTent les rentes foncières ,
au moins cela ne p o u rro it-il avoir lieu que lo rfq u ’elles
auroient été obtenues fur une vente de laquelle il feroit
réfulté une véritable dépoiTciîîon, une mutation fenfible
de jouifïance du vendeur à l’acquéreur, qu’autant enfin ,
( pour parler le langage de la C o u t u m e ) , que le créa n
cier de la rente n’auroit pas eu ju fle caufe d'ignorer ta lié
nation.
O r , dans notre e fp èc e, non -feulem en t rien n’a mar
qué latranilation de propriété, de la tête d e G r e llie r , père,
fur celle de G re llicr, fils , n o n -ie u lcm e n t la jouifïance des
héritages d ont il s’agit n’a pas paru changer de mains
un feul in fta n t, n on-feulem ent e n f i n , G r e llic r , p è r e ,
& G r e llie r , fils, ont pris toutes fortes de précautions frau dulcufes pour dérober a tout le m onde la connoiiïance
de ce qui s’étoit paÎTé entr’ eux , mais en core ils ont par
des faits directs, induit les C hanoines de L eilcrp & to u t
le Public en erreur à cet égard. Q u e p e u t - i f en effet y
avoir de plus directement fait dans cette v u e , que d ’avoir
de la part du p è r e , continué de plaider en qualité de proG ij
�*.5 Î ,
priétaire des héritages dont i l s 'a g it, tant avec les Prêtres
de la C om m u n a u té de Saint N ico la s de C o n fo le n s , qu’avec
les Chanoines de Lefterp e u x -m ê m e s , pendant plus d ’un
an après la ceilion qu’il en avoit faite à Ton fils? C e r t e s ,
par une telle c o n d u it e , les C hanoines de Lefterp ont
bien été m i s , non - feulem ent dans une ju fle ignorancey
mais encore dans une ignorance invincible de l’aliéna
tion ; & par c o n fé q u e n t , quel que fût régulièrement
PefFet des Lettres de ratification fur les rentes fon cières,
ou réputées te lle s , l’efpèce de prefeription qui en réfulte
ne fauroit avoir lieu co n tr’eux.
Troifikme Objlacle,
Enfin,abftra&ion faire des deux obftacles précédons, fon
dés fur des L o ix poiitives, il en eft un troifième plus général
& plus puiflant encore , s’il eft p oiîible, fondé fur une L o i
de droit n atu rel, fous-entenduc par toutes celles de droit
p o fitif: c’eft que la fraude & le dol pcrfonncl vicient
tous les a&cs où ils fe trouvent : c’eft que les difpofitions
de toutes les Loix s’entendent to u jo u rs, ceffant la fraude :
c ’e ft, en un m o t , que les L o ix prêtent leur fecours dans
toutes les occaiions , aux vi&im es & non pas aux m a c h i'nareurs de la fraude. N em ini fraits fâ a prodeffepotefi. D e cep tis, non decipientibus/ju rapfu bveniu n t.
O r , la fraude &. le dol pcrfonnel de la part de G r e llie r ,
è r e , & de G r e lli e r , fils , font manifeftes dans l’efpèce.
eft clair que ce n’èft que par ce m oyen que le fils eft!
parvenu à fe procurer des Lettres de ratification fans
oppofition de la part des C hanoines de Lefterp. Il eft
d o n c également certain que q u a n d m êm e on voudroit
adm ettre contre l’évidence d é m o n t r é e , que les Lettres,
de ratification euiTent l'effet de purger les rentes f o n
cières , ou réputées t e lle s , G re llie r , fils , feroit indigne de
E
�53
cette faveur qui ne pourroit jamais
bonne foi.
être due qu’à la
Grellier com m ence d'un grand’ f a n g - fr o i d fa réponfe
au moyen de fraude &: aux trois obftaclcs qui en réfultent contre la purgation de la rente dont il s’a g i t , par
dire que ni dans le f a i t , ni dans le d r o i t , ce moyen ne
peut produire aux C h a n oin es de Leftcrp plus de fruit que
tous les autres. C e la veut bien dire apparemment que
dans le fa it, il n 'y a point de fraude dans la conduite de
fon père &. de lui ; & que dans le d r o i t , quand il y en
auroit cela ne Pauroit pas empêché de purger la rente
d on t il s’a g it par fes Lettres de ratification. L a première
de ces propofitions feroit permife à G re llie r, s’il la prou vo it ; mais il n’y a perfonne qui ne dût rougir d ’avoir
ieulem ent im aginé la fécondé. C ependant G rellier eil
entré en p r e u v e , m êm e de c e lle - là , tant il eft intrépide
défenfeur de paradoxes! C o m m e n ço n s par examiner fes
défenfes contre le fait.
D ’a b o rd , quant à la fraude de G r e llie r , père, envers fes
créanciers 3 d ’où r é f u lt e , par la nullité de l ’a£te à rati
fie r , le premier obftacle à l'effet que G rellier 3 fils , voudroit attribuer à fes Lettres de ratification , il n’en voit
p o i n t , d it - i l, ( c’eft-à-dire, de f r a u d e ) , ni dans la conftitution de d ot de 15,000 liv. que fon père lui a fa ir e ,
ni dans la promeffe de paiement de cette doc en L e t t r e s - d e - c h a n g e fur Bordeaux ; la R o c h e lle fie R o c h e fo r c ,
ni enfin dans le rem placem ent de ces Lettres par le tranfport clandeftin des métairies de C h e z - le - Brun & d u
Chiron.
Q u a n t à la conilitution de d o t de 15,000 livres, fans
d o u t e , d i t - i l , que m o n père pouvoit la f a i r e , puifqu’il'
l’a faitç.
O b je ilio n . ■
�54
Mponfe.
Belle raifon ! G r e llie r ,p è r e , le pouvoit fans doute abfolum ent ; il pouvoit m ême en ce fens conftituer à fon fils
une d ot dix fois & cent fois plus forte ; il pouvoit lui en
conftituer une d’un million ; car la poilibilité de s’ obliger
n ’a point de bornes. M ais le pouvoit-il relativement ? tJn
père qui avec moins de 20,000 livres de fortune apparente,
& m oins que rien peut-être de fortune effective , ( 1 ) eft
ch argé de fix enfans , peut-il donner à deux de ces enfans
en les m a ria n t, chacun 1 5,000 liv. ? Il eft évident que non.
O r , c ’eft cette impoflibilité relative d o n t nous voulons
parler ; & il ne nous en faut pas d ’autre pour notre m oyen
de fraude.
Objcilion.
L a promette du paiement de la d ot en Lettres-de-changc
fur B o r d e a u x , la R o ch e lle 6c R o ch e fo rt , n ’a rien que
de très-naturel non p l u s , félon Grellier ; parce que fon
père faifant le com m erce de beftiaux , pouvoit recevoir
des Lettres - de - change fur les différentes places de
com m erce.
Réponfe.
i°* G re llie r, père, n’a jamais vendu d ’autres beftiaux que,
ceux de fes petits d o m a in e s, &C on fent que dès - lofs il
n’en a jamais pu vendre aiïez pour qu’il lui fût dû 10,0 0 0 1.,
m o n ta n t des prétendues L e t t r e s - d e - c h a n g e remplacées
par la ceiîïon des domaines de Chez-lc-Brun & du C hiron t
& encore moins 30,000 livres, m ontant des deux dots
q u ’il s’étoit en g ag é de payer en cette monnoie.
20. Q u a n d m êm e Grellier auroit pu accum uler un débet
de 30,000 liv r e s , ou feulement de 10,000 livres fur les
marchands , ce n’ auroit jamais été à Bordeaux , la R o -
(1)
D a n s ce meme te m p s , ou peu ap rès, il fut emprifonné pour dettes , à
« q u ê t e du receveur des tailles d’A n go u lcrae,
la
�55
chelle ou R ocheforc , que cet argent auroit pu lui être
du. A ucune de ces Villes ne tire de beftiaux de C o n fo le n s ,,
ni des environs..
3 °. L e fa it, non dénié par G r c l l i e r , que les prétendues
Lettres-d e-change n’ont jamais été présentées à leurs
a d r e ffe s , 'fair bien voir que ce n’étoient que de vains’
fimuiacrcs fans aucune réaliré.
4°. E n fin , quand m êm e G r c llie r , père, auroit fait véri
tablem ent le com m erce de beftiaux , quand m êm e il
auroit pu accumuler un débet de 30 ou de 10,000 livres f
quand m êm e ces 30 ou ces 10,000 livres auroient pu lui'
être dues à B o rd e a u x , la R o ch e lle o u R o c h e f o r t , quand
m ê m e , en un m o t , les prétendues Lettres-de-change par
lui promifes à fon fils en paiement de fa d o t , auroient
été auifi réelles qu’elles étoient évidem m ent fu p p o fé e s ,
le fait ieul d ’avoir promis à fon fils par fon contrat de
m a ria g e , le paiement de fa d ot en effets de c o m m e r c e ,
pour enfuite , fous prétexte que ces prétendus effets
n ’étoient pas acquittés , lui donner des immeubles à la
place par un a£te clandeftin , ce fait fe u l, ( d i fo n s - n o u s ) ,
fc roic une fraude qui rendroit nulle la ceffion d ’immeubles
vis-à-vis de to u t créancier de G r e llie r , p.ère ; parce que ce
fait feu l renfermeront une intention frauduleufe de préfenter toujours co m m e exiftans dans fa main pour la fureté
de fes créan ciers, des immeubles qui n’y étoient plus.
D e c e que les prétendus effets de comm erce n’avoienc
rien de réel , il s’enfuit feulement que la fraude eft
doublement prouvée ; parce qu’il n’y a que la fraude qui*'
puiffe appeller le m en fo n g e à fon fecours.
Grellier fait de vains efforts pour pallier le vice
clandeftinité que les Chanoines de Lefterp reprochent
à l ’a£te de ceifion qui lui a été faite par fon p è r e , desv
métairies de C h e z-le -B ru n & du C h iro n , en rempj^.?-t
cernent des prétendus effets de co m m erce non payés.
i ° . D i t - i l , cet A Û c pouvoit être fait~à C h aban o is auiji-
ObjçOion. •
�5^
bien qu’à C o n fo len s ; car on n’ cft pas obligé de pafler
les a£bes au lieu de Ton domicile.
Riponfe.
O b je ftio n .
C e l a eft vrai ; mais quand on n’a point de raifon d’aller
paifer un a£te ailleurs qu’au dom icile des Parties , on n’y
va point ; 2c quand les Parties on t intérêt que cetsa£le
ne foit pas connu dans le lieu de leur d o m ic ile , fi elles ;vont
le paiTer ailleurs, elles' fon t de droit pré-fumées n’y-avoir
été que pour en dérober la connoiiïance à ce u x à; qui .
elles avoienf intérêt de Je cacher.
*
a°. Q u a n t à l’in iin u atio n , dit G r e lli e r , les C hanoines
de Lefterp conviennent eux - mêmes que l’a£te de ccilion
d ont il s’agit n’y écoit pas fujet.
. •
•
»
Rêponfe.
Objeâion.
Rêponfe.
O b je& io n ,
C e la peut être ; mais les G r e lli e r , père & fils , ainii que
leurs notaires de C h a b a n o is,- étoient dans l ’opinion qu’il
y étoit fujet : la preuve , c ’eft que le fils l’y a réellement .
préfenté. G r , c’eft dans la circonftance du temps où
ce tte préfentation a été f a i t e , qu’eft la fraude. P o u r q u o i,
en e f f e t , G r e llie r , fils , auroit-il attendu à la f a i r e , jufqu’après le fceau de fes Lettres de ratification , fi ce n’eût
été pour empêcher que l’a£le ne fût connu avant ?
5°. Pou r ce qui eft de la notification au G re ffe de
C o n f o l e n s , néceiTaire pour faire courir l ’an du re trait,
Grellier dit q u ’il a bien été le maître de la faire ou de ne
la pas faire.
C e la eft vrai ; chacun eft bien le maître de négliger fes
* affaires; mais quand l’omiflîon doit procijrcr plus d ’avan*
tages que la d ilig e n c e , l’omiflîon eft cenfée faite à dciTein
pour fe procurer l’avantage<j;ui d oit en réfulter.
4°. Enfin , à l ’égard de la circonftance du temps où
l ’a d c
\
�*
57
Ta&e d ece ifio n a été dépofé au Greffe de la Sénéchauilec
d ’A n g o u lê m e , Gr-ellïer dit , que la Loi qui ordonne cc
dépôt ne marque aucun temps de l'année dans lequel il
ne puiiïe ,pas être fait utilement.
C e la eft encore vrai ; mais lorfqu’à tout ce qu’on peut
im aginer d’autres précautions fraudulcufes,.pour dérober
la co n n oiiïan cc de cet a£te à ceux qui avoient intérêt de
le connoître , fe joint encore la circonftauce que le dépôt
en a. été fait au G reffe pour l'obtention des Lettres de
ratification , en temps de pleines vacances , lorfque le
Palais d ’A n g o u lê m e étoit vuide d’Ofiiciers & de plaideurs,
& que par conféquent c e t a & e n’y pouvoir être vu de
perfonne , cette c ir c o n fla n c e , peu confidérable peut-être,
fi elle étoit fe u le , emprunte une grande force de toutes
les autres , &. leur en donne à fon tour.
Rcponfi
G rellier paile de-là aux faits de fraude , defquels nous
avons fait réfulter notre fécond obftaclc à la purgation
de la rente dont il s’agit. D éfa u t d ’indices de translation
d e propriété du père au fils. Indices contraires.
D éfa ut d'indices. G rellier répond que fon père a été
véritablement deffaiii des métairies de C h e z-lc-B ru n &
du C h ir o n , par la ce/lion qu’il lui en a fa ite ; &, que lu i,
fon fils , en a été faifi par le m ê m e a£te„
C ’eft éluder la difficulté & non pas la réfoudre. O n fait
bien que l'’a£fcc de ceiîion é t o i t , de fa n a tu re , tranflatif
d e propriété ; mais on dit que la tranilation de propriété
qui en eft r é f u l t é e , n’a pas été fenfible. O r , l ’article 11 5 de
la C ou tu m e de Paris , qui eft bien auffi dans l’efpèce d’un
a.&e, de fa nature , tranflatif de propFiété, exige que la
ïranflation de propriété aie été tellem ent fenfible que
H
obje&îon'
Rÿonfe.
�58 A
ceux qui avoîent in térêt d ’en être inftruits, n’ aient pas:
eu ju jle caufe de l'ignorer..
O b jectio n .
Rèponfc..
Grelli'er prétend que c’eft: m a l - à - p r o p o s que nous
raifonnons en matière de Lettres de ratification, com m e
il faudroit le faire en matière de prefcription de dix ou v in g t
ans , les Lettres de ratification , felon lui , produifant
l’efFet de la plus longue prefcription.
Q u an d m ême il feroic vrai que l’effet des Lettres de
ratification pût être comparé à celui de la prefcription
du plus long temps , l’un & l’autre raifonnement que
nous avons faits à cet égard n ’en feroient pas moinS>
concluants.
L e premier porte fur la mauvaife foi réfultante de la
connoiiTance perfonnclle que GrelHer avoit de la rente
d o n t il s’agit- O r , dans la prefcription , m êm e du plus
lb n g tem ps, celai qui l’oppofe n’eft pas, à la v é rité , obligé,,
c o m m e dans la prefcription de dix ou vingt ans, de prouver
fa bonne foi par le rapport d’un jufte titre; mais au moins
ne faut-il pas qu’on prouve conrre lui qu’il a été en
mauvaife foi. et L e feul laps du temps fait préfumer la
» bonne foi dans cette prefcription , tant que le contraire.
» ne paroît p a s , ( dit M . Pothicr , dans fon traité de
» la P re fcrip tio n , partie 1 , article premier, §. 3, n. 1 7 3 ) ,
m c ’eft-à dire , tant que celui a qui La prefcription -e fi
m oppofée , n'apporte pas des preuves fu ffij antes « ( de
mauvaife f o i . ) I c i , la mauvaife foi de G r c llie r , fa c o n noillance perlonnclle de la rente donc il.s’a g i t , eft litté
ralement prouvée par la Lettre écrite de fa m ain ,.,en
1 7 6 9 , a u P r o c u r e u r - S y n d i c de PAbbaye de Lefterp.
N o tre p r e m i e r raifonnem ent fondé fur la néceflicé de la
b o n n e foi en matière de prefcription1, vaudroit d on c
contre lui ,, quand même nous ferions dans un cas
analogue à la prefcription du plus lo n g temps.
�59
L e fécond v fondé fur le défaut de publicité de la trans
lation de p rop riété, de la tête du père fur celle du fils ,
vaudroit également ; car à cet égard , il n’y a aucune
différence entre la prefeription de dix ou vingt ans, & ccllc
de trente ans. C ’eftcn core ce que nous enfeigne M. Pothier,
loc. cit. a A ces différences près , (dit-il en effet ) , la pof»5 feiîion pour la prefeription de trente ans, doit avoir les
a m êm es qualités que celles qui fon t requifes pour la
m prefeription de dix ou v in g t ans : elle doit pareillement
» être une poffeflion qui ait été p u b liq u e ; la C o u tu m e
» s’en explique par ces tcrme§: il aucun a joui publiquem ent
» & c . ; « & cela eft d ’ailleurs marqué dans cet adage
fi c o n n u , applicable à toute efpèce de prefeription; N ec
v i , NEC c l a m , n e c p r e c a r io .
A u furplus, c ’effc pure com plaifance de notre part de
nous prêter à cette h ypothèfe ; car ce n’eft point du
to u t à la prefeription de trente a n s, mais bien à celle
de dix ou vingt a n s , qu’efl analogue Pefpèce de p r e f
eription qui rélulte des Lettres de ratification. Il fuffit,
pour s’en c o n v a in c r e , de faire attention aux cas dans
Îcfquels l’une 6c l’autre prefeription o n t lieu. L a pref
eription de trente ans a lieu dans le feul cas où il n’y a
>as de titre ; celle de dix ou v in g t ans au contraire dans
c feul cas où il y a un jufte titre. E h bien ! les Lettres
de ratification n’ont lieu non plus qu’en cas de jufte tit r e ,
puifque c ’eft précifém ent ce jufte titre q u ’il s’agit de ra
tifier. C ’efl donc aux qualités requifes dans la poffeflion
en cas de prefeription par dix ou vingt ans , qu’il faut
avoir égard en matière de Lettres de ratification ; & m êm e
il faut y redoubler de rigueur , parce que l ’cfpècc de
prefeription réiultante des Lettres de ratification eft déjà
un r e l â c h e m e n t de la •prefeription de dix ou vingt a n s ,
<]ui y eft tellement abrégée , que deux mois y tiennent
lieu de dix ou vingt ans.
f
H ij
�6o
O bje& ion_
A l’article des indices contraires, GreÎlier ré p o n d , i°. que
fi Ton père a été traduit en juitice depuis la ce flio n , foie
par les Prêtres cfe la C om m u nauté de Saint Nicolas , (oie
par les C hanoines de L e i t e r p , c’étoir pour les arrérages
du temps de fa pofleiïïon , arrérages que la celîion ne
p ou voir le difpenfer de p a y e r ; d’où il veut conclure ap
parem m ent que fon père n’avoit que faire de parler dé
cette ceiïïon ; 2°. que co m m e fon père ne s’eft pas dé
fendu , on n’a obtenu contre lui que des Jugemens par
défaut ; d’où il veu t conclure apparemment que fon père
n ’eft pas caufe il dans la procédure & dans les Sen ten ces,
on l’a qualifié de tenancier du village de C h e l e - Brun y
dans un temps où il ne l’étoit plus-
Rcponfe.
T o u s ces faits manquent d ’exa&itude. Il n’eil pas vrai
d ’abord que l’aétion des Chanoines de Leiterp contre
G re Ilie r, p ère, ait eu pour objet des arrérages feu lem ent:
on lit en propres termes dans ¡’Exploit : « E t pour en
>5 outre être condam né à paiTer titre nouvel de ladite
n rente par nouveaux renans, Sic. «. Q u a n t a l’adtion
des Prêtres de la C om m u nauté de Saint N ic o la s , nous
ne pouvons aflurer qu’elle fur dans les. mêmes termes ,
n ’ayant point l’Exploit pour le vérifier; mais ce qu’il y
a de certain , c ’eft que la Sentence qui intervint fur leur
dem ande fut rendue bien contradictoirem ent , & non
point par défaut contre G re Ilie r, p è r e ; & d è s - l o r s fa
manvaife foi eft évidente , non - feulement pour s’être
laïiTé qualifier dans toute cette p ro c é d u re , de tenancier
du village de Che^-le-Brun, ne l’étant p lu s, mais encore
pour avoir procédé lui-même dans tout le cours de l’inftru6tion , en cette qualité. Sa contumacevis-à-vis des C h a - '
noines de L cfterp , ne le fauve pas davantage du reproche
de mauvaife foi à cet é g a r d ; car il n’y en a pas moins
�6i
a. fe taire t o u t - à - f a i t , pour ne pas dire ce qu’on doit
dire , qu’ à raire ce qu’on doit dire lorfqu ’on s’eft déter
miné à parler.
T e l le e f t , en point de fait ,. la défenfe de G rellicr
contre le m o y e n de fraude qui lui eft oppofé : on a vu
il elle eft fatisfaifante. Sa defenfe en point de droit e ft,
co m m e on doit s’y a tte n d r e , encore bien plus pitoyable.
it-il , les L o ix Romaines fur les a£tes faits en
fraude des créanciers, n’ont aucun trait à l’cfpècc : elles
ne peuvent s’appliquer qu’à tous autres a£tes que ceux
dont il s’agit.
ObjaiVtoni-
C ep en d a n t ces L o ix fon t en termes abfolum ent g én é
raux : Quodcumque ig itu r, . . . qualecumque fu&rit , . . . nam
latkverba ifla patent. Q u e G rellier nous m ontre c o m m en t
des a£tes aulli pleins de fraude que ceux faits entre fon
père &t l u i , pourroient échapper à la difpoiition de pa
reilles Loix.
R-ponfe. ■
G rellier répond à l’art. 4 du tit. 11 de l’O rd o n n a n ce
de 1 6 7 3 , clue
difpoiition ne regarde que les cas de
faillite & de banqueroute : il ne répond rien à la difpofition de l’E d it du m ois d e M ai 1609.
Objeilion.1
Il
eft vrai que la première de ces L o ix eft fous le titre
des faillites & banqueroutes ; mais elle difpofe g én érale
ment pour toutes fortes de c a s : « D é c la r o n s nuls tous
» tranfports, ventes & donations de b iens, meubles ou
» im m e u b le s , faits en fraude des créanciers ». Q u i dit
tout^. n’excepte rie n ; & en e f f e t , co m m en t y a u r o it - i l
¿es cas où de pareils actes puffent fe foutenir ?
D ’ailleurs , Grellier père étoit bien dans le cas de la
Réponfi. ■
�6i
b a n q u e ro u te , & de la banqueroute ouverte , du m oins
aux yeux de Ton fils parfaitement initié dans le fecret
de Tes affaires , puifcjiie d è s - lo r s il étoit hors d’état de
payer fes d ettes; qu’il faifoit o u e n d o ffo it des Lcttres-dech an ge qui n’écoient pas acquittées, & qu’il fe laiffbit emprifonner pour d e t te s , à Ja requête du R eceveur des
T aille s d’A ngou lêm c.
Enfin la difpofition de l’Edic de 1 6 0 9 , à laquelle
Grellier ne répond rien , reçoit une application tout-àfait directe à l’e fp èc e, puifqu’elle regarde p réciiém ent les
tranfports faits aux e n fa n s , héritiers préfomptifs ou amis
du débiteur. C es perfonnes étanc plus fufpe£tes de fe
prêter à la f r a u d e , le L é g i f l a t e u r a cru devoir faire une
L o i exprès contre elles.
G rellier , co m m e s’il eût craint que nos preuves de
fraude ne fuiTent pas affez- fortes contre lui, a eu foin
d ’y ajouter le dernier trait par une produ&ion nouvelle
qu'il a faite au procès. Se dem andant en effet à lui-même ,
quel peut avoir été le m o t if de fa condam nation devant
les premiers Juges, ( com m e s’il n’y en eût pas eu à c h o ifir) , il a très-fpiritucllem cnt imaginé que p e u t - ê t r e
étoit-ce la qualité que ces Juges lui avoient iup p ofée, d 'hé
ritier de fon père ; & pour prévenir ce m oyen en la C o u r ,
en cas que les Chanoines de Lefterp fuilent tentés d’en
faire u f a g e , il a produit par production nouvelle fa
renonciation à la fuccciTion de fon père.
L a prévoyance de G rellier va loin aflurémcnt., car les
Chanoines de Lefterp ne fe feroient jamais avifés de
motiver la demande d ’ un droit réel par une qualité d ’hé
ritier : mais fi fa p r o d u c t i o n n o u v e l l e eft inutile p ou r'fon
o b je t , elle ne le fera pas pour prouver de plus en plus
la fraude & la collufion pratiquées entre un père qui a
trouvé le m oyen de faire paffer, de fon v iv a n t, tous fes
biens à fon fils, au prejudice de fes créanciers, & un
�63
fils qui après avoir épuifé par une conftitution de d ot
e x c e ffive toute la fortune de fon p è r e , a re n o n cé , après
la m ort de ce p è r e , à fa fucceffion infolvable.
O n voit donc q u e , quand m êm e l’efprit & la lettre de
la L o i fur les Lettres de ra tifica tio n , ne répugneroient
pas auffi fenfiblem ent qu’ils le fon t à ce que les rentesfoncières , ou réputées telles,.fu ffent purgées par ces L e t
tres , to u t s’oppoferoit dans l 'e fpèce particulière à la
purgation prétendue par G re llie r , de celle dont il s’agit.
M onfieur C L É M E N T D E B L A V E T T E , Rapporteur.
M r M A R C H A N D D U C H A U M E , A v o c a t.
L e v a s s e u r , Procureur-
D e l’im p rim erie de la V e u v e H é r i s s a n t ,
n ie N e u v e N o tr e -D a m e . 1785.
�
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Factums Vernet
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Les prieur, procureur, syndic et chanoines réguliers de l'Abbaye de Lesterp. 1785]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Clément De Blavette
Marchand Du Chaume
Levasseur
Subject
The topic of the resource
hypothèques
créances
abbayes
terriers
fiefs
droits féodaux
rentes féodales
cens
lettres de change
coutume d'Angoumois
métairie
retrait lignager
successions
lettres de ratification
doctrine
créances
droits d'agrières
rentes foncières
prescription
droit romain
fraudes
Description
An account of the resource
Mémoire pour les prieur, procureur, syndic et chanoines réguliers de l'Abbaye de Lesterp, Ordre de Saint Augustin, Congrégation de France, intimés ; Contre Jean Crellier, huissier en l'élection de consolens, appellant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Herissant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1785
1473-1785
Avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
63 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chez-le-Brun (village de)
Confolens (16500)
Esse (paroisse d')
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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abbayes
cens
coutume d'Angoumois
Créances
doctrine
droit Romain
droits d'agrières
droits féodaux
fiefs
fraudes
hypothèques
lettres de change
lettres de ratification
métairie
prescription
rentes féodales
rentes foncières
retrait lignager
Successions
terriers
-
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71c8e7e89f71f4491425ed5edc8d4e18
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Text
CONSULTATION.
L
E C O N S E I L S O U S S I G N E , qui a v u le mémoire imprimé
,
répandu par M ich el-A m able U rio n , ancien magistrat, demeu
rant à R i o m , appelant d ’un jugement rendu par le tribunal de
police correctionnelle de C le r m o n t, le 3 fructidor an 10 ;
Contre M agdelaine C h a b r illa t, m archande de la ville de
Clerm ont-F e r ra n d , intimée ;
E t les pièces relatives à cette affaire, qui lui ont été com m u
niquées;
que la plainte rendue par le citoyen U r i o n ,
contre M agdelaine C h a b rilla t, est une algarade qui ne serait
E st
d
’AVIS
que ridicule, si elle n’était pas une diffamation atroce. L e tribunal
correctionnel de Clerm ont en a fait ju s tic e , et elle n ’aura pas
un meilleur sort au tribunal d’a p p e l, quand même la fatalité
des circonstances réduirait ladite Chabrillat à l ’impossibilité de
faire entendre sa défense : car l’absence évidente de tout d é lit,
dans les négociations q u ’elle a exécutées par commission pour
le plaignant, lui garantissent la confirmation du jugement qui
l ' a acquittée, avec
3oo
francs de dommages-intérêts. Les trib u -
naux ne s’arment pas contre des chim ères, lors même q u ’ils
prononcent par contumace.
A
�(O
A P E R Ç* U
SO M M A IR E
DES
F0A I T S .
D e quoi s’a g i t - i l dans cette affaire? U n ancien m agistrat,
ruiné par des spéculations m al c o n ç u es, sans être guéri de sa
m anie, spécule aujourd’hui sur les tracasseries judiciaires et les
procès, pour réparer sa fortune délabrée. E n essayant de vendre
le repos de ceux que leur malheureuse étoile a mis en relations
d ’intérêts avec l u i , le citoyen Urion a marché d ’un pas rapide
vers sa ruine, par des spéculations.
Sur le commerce des immeubles , par lequel il espérait arriver
à la fortune sans a v a n c e s , il spéculait sur les rêveries acadé
miques des agriculteurs de ca b in ets, qui l ’ont souvent laissé à
découvert de ses mises de fonds , loin de tripler ses r e v e n u s ,
com m e il s’en était flatté ; il spéculait sur la lo te rie , qui lu i
promettait des m illio n s , et ne lui a valu que des regrets,
Sa seule ressource, pour alipienfer des spéculations si rui
neuses , a été celle des emprunts.
'*
A in s i, il emprunte jusqu’aux frais de contrats pour ses acqui
sitions; il emprunte pour les premiers paiemens à courts délais;
il emprunte pour cultiver dans le genre systématique ; ij em
prunte enfin pour se mettre à la poursuite des ternes et des quaternes,
E t comment emprunte-t-il? Il n ’y a pas deux manières aujour
d ’hui : lettres de change à trois ou quatre mois de date; signa
tures multipliées; agiot immodéré.
II jetait d o n c , sur la p l a c e , des lettres de change à courte
échéance , endossées, tantôt par la demoiselle A r n o u x , sa bellesœ ur, tantôt par le citoyen Girard - Labatisse , son be au -frè re ;
o u , dans les premiers teins, avec sa simple signature : toujours
le nom du porteur en blanc. T r o u v e z - m o i de l ’argent à tout
prix sur ces effets, d is a it-il à la Ch abrillat, lorsqu’il voulait
les négocier i'i Clerinonf.
L a Clmbrillat remplissait ses v u e s , moyennant un droit de
�(3 )
commission convenu, et souvent elle donnait sa signature, pour
la tranquillité des prêteurs : à l ’é c h é a n c e i l fallait, ou p a y e r,
ou renouveler, ou faire des revireinens avec de nouveaux prê
teurs, et rassasier l ’agiot. Rarem ent le citoyen Urion avait des
fonds à sa disposition pour ses opérations ; et d ’ailleurs des
besoins renaissans commandaient de nouveaux emprunts : nou
velle émission d’effets négociables , nouvel agiot , nouveaux
frais de commission. L a boule grossissait à mesure, ainsi qu’elle
roulait sur l’agiot ; et en deux années et quelques mois de tem s,
depuis vendémiaire an 7 jusqu’en pluviôse an 9 , elle fut si
c h a r g é e , q u ’elle s’arrêta dans sa course.
L a catastrophe approche ; l’embarras des affaires de l ’em
prunteur Urion s’a nnonce; les protêts, faute de paiement ou
d ’acceptation, se multiplient : alors il faut en venir aux remèdes
extrêmes. L e s créanciers sont assemblés ; le bilan est déroulé :
le dénouement fut un traité d’aterm oiement, ’s igné avec le plus
grand nombre des créanciers, le 19 germinal an 9 , et homo
logué avec les refusans, le
suivant.
L à nous voyons le tableau de la situation du citoyen Urion :
la masse de ses dettes est grave ; mais il s’ en faut bien qu’elles
aient toutes été créées par l’entremise de la Ghabrillat. On n ’en
trouve
dans cette origine que pour 98,110 livres en capital, inté
rêts et frais. Urion les a toutes reconnues légitimes; et il est re
marquable que la Ghabrillat ne figure dans l’état que pour une
niodique somme de
5oo
liv re s, résultat d’un arrêté général de
c o m p te , par lequel il lui fut souscrit un effet au terme de sa
mission , le 2 pluviôse an 9. T out paraissait terminé entr’elle
et le citoyen U rio n , par le jugement d’homologation du traité
d ’atermoiement que provoqua contr’elle ce débiteur , pour la
forcer à s’y soumettre; cependant son esprit inquiet ne la laissa
pas long-tems en repos. L e
25
frimaire an 10 , il imagina de se
présenter à la justice, comme une victime de l’escroquerie la plus
effrénée de cette commissionnaire, et rendit plainte contr’elle :
mais l’impossibilité de donner du corps à des fantômes de délits
A z
�(O
que son imagination avait créés, fit bientôt abandonner cetfepremière attaque; et il essaya de se venger de ses échecs, en faisant
un procès civil à la G habrillat, au sujet de deux lettres de change,
montant ensemble à 10,000 livres, dont il voulut la rendre ga
rante envers le cit. G e r m a ix , prêteur; il succomba au tribunal
de commerce, il succomba encore au tribunal d ’appel.
L a défaite l’irrita : il jura de nouveau la perte de la Ghabrillat,
et il revient à sa plainte du mois de frim aire, q u ’il renouvelle
l e *24 messidor. L ’instruction criminelle est faite; l ’affaire est ré
glée et renvoyée à la police correctionnelle ; on en vient à l’au
dience; une nuée de témoins paraît sur l’ horison ; mais point de
charges : en conséquence un jugement du
de la plainte avec
3 oo
3
fructidor la renvoie
livres de dommages-intérêts applicables
aux pauvres, de son consentement. T e l est le jugement dont la
révision est soumise au tribunal crim inel, com m e juge d’appel
des tribunaux correctionnels; mais quelle sera l’issue des nou
veaux efforts de l’appelant ? la honte d’une nouvelle défaite.
Nous avons d i t , que dans cette bruyante affaire, il 11’y a que
de vaines déclamations , et point de délits : nous allons le
prouver.
:
§• T.”
P oin t d'escroqucric.
L a loi du 7 frimaire an 2 , qui contient une rédaction nouvelle
de l’article 3 5 , section 4 de celle du 22 juillet 1 7 9 1 , définit
l ’escroquerie, et nous y voyons qu’elle est le crime de ceux qui
• par dol , et à l’aide de faux noms, pris verbalement et sans
» signature ;
« Ou de fausses entreprises,
» Ou d’ 1111 crédit imaginaire ;
» Ou d’espérances ou de craintes chimériques ;
* » auraient abusé de la crédulité de quelques personnes, et eacroquü tout ou partie de leur fortune ».
�( s ;
O r , qu’ont de commun de pareilles manœuvres de la ruse,’
de la duplicité et de la charlatanerie, avec Magdelaine Chabrillat ? Elle a été l'intermédiaire entre les prêteurs d’argent et
l’emprunteur Urion , pour lui procurer des fonds; et elle n’a été
que, cela. Ce n’ est pas à l ’aide d’un faux nom qu’elle a surpris la
confiance; ce n’est pas non plus en alléguant de fausses entre
p r is e s ,n i un crédit imaginaire. Quel crédit faut-il pour trouver
de l’argent avec de bonnes signalures, et un intérêt au cours de
la place? Il ne s’agit pas de remuer des puissances; et certes,
si le crédit qui procure de l’argent n’avait été qu’ une jactance
imaginaire dans la bouche de la C habrillat, elle n’aurait pas à
se justifier aujourd’ hui; car elle n’aurait pas placé les effets de
l ’emprunteur Urion.
Est-elle allée le chercher à R iom , pour lui soutirer ses effets
à l’aide d’espérances ou de craintes chimériques? Non; c’est lui
qui est venu la c h e r c h e r à Clermont, pour employer son active
entremise auprès des prêteurs d ’argent. Il n’y a v a i t d a n s u n e
négociation de ce genre, ni espérances, ni craintes chimériques
à mettre en jeu.
O u me faisait espérer , dit-il , qu’en échange de mes effets ,
j ’obtiendrais de l’argent. Cette espérance n’était pas chimérique ,
et n’a pas été trompée.
On me faisait craindre , lorsque mes effets étaient échus, que
j’allais être vivement poursuivi, si je ne me pressais pas de renou
veler ou de couvrir la même dette par un nouvel emprunt. Certes,
ces craintes n’étaient pas une chimère non plus , car les porteurs
de lettres de change ne s’endorment pas au terme.
Concluons donc, que rien ne ressemble moins à /’escroquerie
que les relations de la Chabrillat avec A niable Urion.
A
3
�C 6 )
§ H.
P oin t de vol ni d'infidélité.
Des vols ! L a Chabrillat aurait-elle donc enlevé -furtivement
la bourse d’A m a b le Urion , ou son porte-feuille? N o n , on n’a
garde de lui imputer de telles bassesses. Mais A m a b le Urion lui
dit : L o rs du renouvellem ent, c’est-à-dire, lors de l’échange des
anciens effets que j ’avais souscrits, contre de nouveaux, vous avez
retiré les anciens, vous les avez gardés , vous vous les êtes ap
propriés sous des noms empruntés; double emploi de ci’éance
pour le même prêt, vol manifeste: V o ilà une imputation atroce
par sa fausseté , et par la mauvaise foi avec laquelle elle est faite.
1.° L es anciens effets , tirés par le cit. U rio n , n’ont pas été
retenus par la Chabrillat , puisque Urion a déclaré lui-même,
dans les mémoires manuscrits joints à sa production, q u ’il est
porteur de 74,55o liv. de ces elfets anciens, retirés en payant
ou en renouvelant; et que dans le nombre il y en a poui’ 40,35o
liv. endossés, et conséquemment officieusement cautionnés par
D u p ic et par la Chabrillat ;
2.° L a Chabrillat n’aurait pas p u , quand elle l’aurait v o u l u ,
faire tourner les effets anciens à son profit , en les reten ant ,
puisqu’ils étaient remplis des noms des prêteurs;
3 .°
Elle n’ en a pas profité de fa it , ni directement, ni indi
rectem ent, puisque de tous les créanciers qui ont pa ru , soit au
traité d’atermoiement, soit dans le jugement d’hom ologation, il
n ’en est aucun qui soit porteur d ’aucun effet, et qu’ils fondaient
tous leurs créances sur des lettres de change ou récemment échues,
ou qui nu l’étaient pas e n c o re , et n’avaient été protestées q u ’à
défaut d’acceptation. Comment retenir son indignation à la vue
d’une imputation , dont la calomnie artificieuse et réfléchie , est
si victorieusement démentie par le fait et par le témoignage
propre de celui qui se l’est permise ?
�(7)
Ce n’ est pas avec plus de réflexion ni de fondement , qu’on
reproche à la Chabrillat un second genre d’infidélité. A entendre
A m a b le U r io n , il délivrait des effets par torrens pour se pro
curer du numéraire ; et il ne relirait de l’argent en retour que
goutte à goutte. A peine a-t-il touché 24 à 26 milles fr. effectifs,
sur le produit de n o ou 112 milles fr. d’effets actifs ou passifs,
qu’il a négociés par l’entremise de la C h a b rilla t, dans le courant
des années 7 et 8. L a Chabrillat a retenu le reste, c’est-à-dire,
qu’elle a retenu plus des trois quarts de la recette.
On ne veut pas être cru quand on exagère de cette force ; mais
aussi A m a b le Urion ne prétend-il pas qu’on ajoute foi à ses fables,
lorsqu’il dément son mémoire public par ses mémoires manuscrits
joints au procès. T ous les effets qu’il avait mis en circulation,
en l’an 7 et en l’an 8 , avaient du être renouvelés et même plu?
sieurs fois pour la plupart ; aussi il nous apprend qu’il en a en
ses mains p o u r 74,550 liv. ; qu’il en a égaré pour 6,000 livres
retirés de Guiot - Gauthier ; et il eu r é c l a m e p o u r 1 0 , 0 0 0 livres,
encore que la Chabrillat était, dit-il, en retard de lui remettre.
O r , qui croira qu’il eût retiré ou renouvelé cett.e masse d’effets,
sans demander compte à la Chabrillat de leur produit , s’il ne
l’avait pas reçu à mesure q u ’ils avaient été négociés? Qui croiia
qu’il eût fourni de nouveaux effets pour renouveler les anciens,
ou des fonds pour les retirer , si la Chabrillat avait retenu les
trois quarts et davantage , des sommes dont les effets anciens le
constituaient débiteur? N ’aurait-il pas rompu avec elle, et jeté
les hauts cris ? Bien loin de là , le 2 pluviôse an 9 , au terme
de toutes les négociations, il compte avec elle ; il se reconnaît
débiteur de
5oo
fr. pour solde , et il souscrit un effet de cette
somme, et il fait déclarer l’atermoiemept général fait avec les
trois quarts des créanciers, commun ave c elle pour cette créance
par le jugement d’homologation.
E n voilà trop pour confondre la calomnie et pour détruire
jusqu’au soupçon des infidélités absurdes, dont elle a tissu son
roman injurieux.
�C « )
§.
III.
Usure.
•Apparemment qu’A m a lîle U rio n , quand il parle d’ usure, vent
parler de l'intérêt excessif que les prêteurs exigent des emprun
te u r s , depuis la disparution du papier-monnaie, et le retour du
n um éraire; mais sur ce point-là, qu’il s’en prenne donc aux
créanciers avec lesquels il a atermoyé , ave c lesquels il a fait
homologuer le contrat d’atermoiement ; car ce sont eux qui ont
exigé et reçu l’intérêt exorbitant qui excite sa vocifération. Quant
à la C h a b rilla t, elle n’a été que l’agent intermédiaire des négo
ciations. A propos de quoi la punirait-on de la cupidité des prê
teurs , si elle était criminelle; mais d ’ailleurs les prêteurs ne sont
pas plus à punir que la commissionnaire, quoique puisse dire
A rnable Urion. L ’argent est toujours marc handise en ce sens que
le taux de l’intérêt est absolument librej et dépend uniquement
des conventions. C ’est un malheur p u b lic , sans doute, que la
cupidité en abuse , mais la loi permet et ne punit point.
On cite à pure perle au reste, et d ’.iilleurs à contre-sens, les
décrets du 11 avril 1793, 2 prairial an 3 , et i 3 fructidor suivant.
Ces lois 11’ont d ’application qu’à la vente du numéraire m étal
lique contre assignats, qui étaient tombés alors dans un discrédit
total; et elles n’ont aucune sorte de rapport à l’intérêt ni de l’ar
gent , ni des assignats.
D ’ailleurs, ce fut la loi du 2I) vendémiaire an 4 , qui finit In
dernier étal del à législation commerciale, sur la vente du num é
raire contre assignats , et ce commerce 11e fut pas prohibé , il
fut seulement régularisé.
A u resle, ce sont là des recherches et des souvenirs purement
cpisowiquo.s, et totalement étrangers an W.nx de l’intérêl. Oublions
donc encore l'accusation d’usuro que l’on cherche à clayer sur
du» lois , et passons au dernier chef d’inculpation.
�(
9 .),
)
i :!
i
V
'
)
D éjaut de registres des négociations. Contravention aux lois
sur tâchât et la vente du numéraire.
V o u s avez exercé les fonctions d’agent de change , puisque
vous avez négocié des effets de co m m e rce , dit-on, encore à la
Chabrillat: vous deviez donc en remjjlir les obligations-, et tenir
.registre de toutes les négociations qui s’opèrent par leur entre
mise: vous n’en avez tenu a u c u n , de votre propre a v e u , vous
voilà donc coupable.
1
i’
i
.. *
Plusieurs Réponses:
y' ' ' .
i
i.° C e ne sont point des fonctions d’agent de change que la
Chabrillat a faites, car les fonctions des a^ens de change ne
sont pas de procurer des prêteurs sur lettres de change à un
intérêt convenu ; elles consistent uniquement dans les places de
co m m erce, où il y en a d’établis, ainsi qu’à des bourses, comme
à Paris , L y o n , Bordeaux, Marseille , ;etc., à faire les négocia
tions des lettres de change sur l’étranger. On peut s’en convaincre
en lisant la loi du 28 vendémiaire an 4 , invoquée par A m able
Urion. Ce n ’est que par extensionqu’o n y ajoute les négociationsdes leltres de change de place en place, dans l’intérieur, sur
les villes de commerce où il y a bourse. L e but de ce règlement
de police commerciale est de iixer le cours du change pour
chaque pays et pour chaque place , mais sans aucun rapport
quelconqueanx prêts d’argent, qui se font sur leltres de change,
tirées par remprunteur. Or , c’est uniquement de ce dernier
genre de négociation que la Chabrillat s’est mêlée; d’où il suit
que les réglemens relatifs aux agens de change, lui sont com
plètement étrangers.
a .0 Q u’011 lise et qu’on relise la loi cité e , on 11e verra dans
�aucun de ses articles, l ’obligation imposée aux agens de change
qu’elle c r é a , en supprimant leurs prédécesseurs, de tenir in
dividuellement aucun registre des négociations qui s’opéraient
par leur entrem ise, sous aucune peine quelconque; la loi avait
pourvu par d’autres m o y e n s , à la sûreté des négociations.
E n fin le citoyen Urion ne s’entend pas lui-même lorsqu’ il
reproche à la C h a b rilla t, com m e un d é l i t , de l’avoir s e r v i,
dans l ’échangé de ses effets contre du numéraire : et c’est un
c r im e , à ses y e u x , qui mérite la peine des fers. P our toute
r é p o n s e , nous le renverrons au x lois q u ’il invoque , et nottam m ent à celle du 28 vendémiaire an 4 , qui est la dernière
de toutes. Q u ’il les lise et les relise, il y verra que la vente
de l ’argent contre des assignats était réputée a g io ta g e , lors
q u ’elle se faisait à terme ou à 'prime. Il y verra q u ’aucune
,
vente de ce genre ne pourrait avoir lieu qu'au c o m p ta n t
sou s les peines les plus sévères. M ais q u ’a cette sévérité de
com m un , encore une fo is , avec les emprunts faits par la
C habrillat, sur lettres de c h a n g e , pour le compte du citoyen
U rion ?
,v n
'
x
A in si s’évanouissent tous les délits imaginaires dont A m able
r
Urion a vo u lu noircir la réputation de la Chabrillat. Son in
nocence de tout crime caractérisé tel par la l oi , reste; et par
conséquent la confirmation du jugem ent du
3
fru c tid o r, qui
l ’a p ro c la m é e , ne saurait faire la matière d’un doute.
D élibéré à C lerm ont-F erran d , par les jurisconsultes sous
signés, le premier nivôse , an onze.
BERGIER,
A
ABRAHAM.
RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrillat, Magdelaine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Abraham
Subject
The topic of the resource
diffamation
créances
agiotage
escroqueries
usure
lettres de change
Description
An account of the resource
Consultation [Michel-Amable Urion contre Magdelaine Chabrillat]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
Circa An 9-An 11
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0743
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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agiotage
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lettres de change
Usure
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53904/BCU_Factums_M0709.pdf
b9c01d4835469f1e7711292658524437
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MÉMOIRE
EN
TRIBU N AL
ds
CASSATION.
RÉPONSE,
P O U R
J
ean
- B
apti st e
-C
èsar
CHAM PFLOUR-
D ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
P u y - d e - D ô m e , défendeur
C O N T R E
P
B O Y E R , juge au tribunal civil de
l arrondissement de la même ville, demandeur,
i e r r e
Quod genus hoc hominum
VIRG.
Pierre B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de Clerm ont, a été long-temps mon procureur et mon
A
�c o
homme d’aflaires; il me servoit avec exactitude, je le
récompensois avec générosité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
I l devoit à l’une de ses filles une dot de 20,000 francs;
il expose, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
.dot.
U n jugement solennel du tribunal d’appel, séant à
R iom , a réduit les prétentions de Boyer, i°. ¿1 une
somme de 1,800 francs 13 centimes, qui étoit due par
iéu mon frère', et que je ne contestais pas ; 20. à une
somme de 2,400 francs que je paye deux fo is, parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
Boyer m’a fait signifier le jugement, avec sommation
de l'exécuter. J ’ai p ayé; il a reçu. Aujourd’hui il se
pourvoit en cassation.
On sent que cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugement du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homme aussi peu délicat, siégeât parmi
^es magistrats du département.
Il a cru détruire cette première impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore ; je m’étois
contenté de faire valoir mes moyens h l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intérêts. Je croyois devoir cette con-
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que ¿'honneur lui survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance; il a soixantesept ans : il pourvoit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. 11 aficcte de rappeler souvent qu’il est juge :
un plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nommé parce q u il le connaissait, et que le gouverne
ment îavoit conservé parce q u il ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon ami; il m’a dénoncé comme
émigré! Boyer se dit mon a m i, et il m’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m’étoient dûs!
( i ) U n citoyen de C lerm ont réclam e contre l ’assertion de B o y e r,
et lui fait au contraire de grands reproches : c ’est le cit. Bourdier.
11 devoit à défunt B e ra u d , mon beau -p ère, une rente annuelle de
5 o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années d’ai rérages : le
citoyen B oyer étoit chargé d ’en poursuivre le recouvrem ent. Bour
dier lui donna douze louis en or à com pte ; mais il n ’eut pas la
précaution de retirer de qu ittan ce, parce que B oyer prom ettoit de
la lui faire donner par la dam e Beraud. B oyer a oublié cette cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la m ontre, a toujours dit le
délicatB oyer : etles douze louis seroient perdus pour le cit. B o u rd ier,
si je n ’avois eu connoissance du fa it. Je les alloue au citoyen B our
dier : c’est encore une somme à ajouter à toutes celles que j ’ai
données à B o y e r , qui voudra bien la regarder com m e une nou
velle marque de reconnaissance,
A 2
�( 4 )
Boyer se dit mon am i; il fut cause de ma réclusion,
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jou r, cri sa qualité de
commissaire de Couthon , il se rendit à la maison des
Ursulines, où on avoit entassé une foule de victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les femmes, et de
les conduire dans un autre cachot. Non seulement il se
permit de.les traiter avec une rigueur digne de ces temps
affreux, qui lui convenoient si bien, mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœur César.
M oi Champflour, ami de Boyer!mais l’âge, la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations, les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. 11 convient lui-mêm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des marques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B oyer, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
Enfin, cette amitié ne remonte pas bien lo in , puisque
au l’apport de B oyer, ce n’est qu’en 1.783 ou en 178 4,
que je lu i a i été présenté. Quel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors ; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérémonie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et aumois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoître. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à R iom , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
�Ma famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite*, mes ancêtres se sont illustres dans la magis
trature , et l’un d’eux fut annobli pour services rendus a
l’étut. G’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
vm citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. La propriété principale
que je possède est située près de Clerm ont, clans un
des plus beaux cantons de la Limagne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p lacé, dans un temps où il
existait des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit forcé, dans la v ie , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m’étoit ouverte de toute
part, et quoi qu’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
Boyer , qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un roman, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m’appliquer; mais personne ne m’a reconnu à ce portrait
touchant.
La charge de receveur des décimes du clergé, apparienoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exex’C’ée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par Boyer, que j’avois chargé
de mes affaires -, le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer fit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai ses soins et son zèle-, je lui iis
�. c 6 )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleu x , et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu, il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de la charge de receveur
des tailles, qui venoit également de ma famille. 11 est
connu de tout le département, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l’en ai jamais occupé.
En 1789, j’eus besoin de quelques fonds *, Boyer me
p rêta, le premier novembre de cette même année, une
(1)
Il n ’est pas inutile de détailler ici les différens cadeaux que
j ’ai faits à B o y e r ; vingt couverts d’a rg e n t, dont huit à filets; huit
cueillers à ra g o û t, douze cueillers à café , six salières d 'a r g e n t,
une écuelle d ’argen t, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d ’a rg e n t, à b a te a u , trèsbien ornés ; six flam beaux d ’argent , deux cueillers à s u c r e , à
jour ; deux tabatières d ’or pour le m ari et la fem m e'; une m ontre
d ’or à répétition, deux m outardiers et deux cafetières d ’argent ; un
c a b rio le t, un fusil à deux co u p s, deux pistolets et une se lle , cin
quante cordes de bois à b r û le r, une feuillette de B o rd ea u x , tout
Je bois nécessaire pour parqueter sa m a iso n , faire ses alcoyes et
séparations , le tout en planches de n oyer et p o irie r , et tant d ’auIres choses qui ne reviennent pas à m a m ém oire.
En a r g e n t, soixante-dix louis , q u ’on lui fit accepter com m e
bénéfice du jeu , quoiqu’ il n ’eût rien avancé.
J’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis ; je
ne parle de cette largesse , que parce que je sais (ju’ à m onsieur
çfle en rendait cjuçlijiie ch ose.
�( ? }
somme cle 5,ooo francs, avec intérêts a cinq pour ccnl,
sans retenue. L ’année suivante 1790? je renouvelai mon
billet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novembre 1790, il me prêta encore une somme
de 2, 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. Je voulus retirer mon b illet; il n’eut pas
le temps de le chercher au même moment ; je négligeai
de le redemander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792, je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois émigré ; il me dénonça comme
tel, le 27 octobre 1792 ; sa déclaration (1 )contient l’énu
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son profit les 1 et 1 x
novembre 1790, quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
(1) V o y ez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o yer , que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1 7 9 3 , il me iaîsoit
rembourser deux fois la som m e de 2,5oo francs. Q ue vous ai-je
rép o n d u , me dit-il ? — Q u 'il falloit vous payer encore une fois !
A lors m ’adressant au'juge de paix et à ses assesseurs, je m ’écriai :
Quelle opinion d evez-vou s avoir d ’un hom m e qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà re çu ? I^e juge de paix et ses asses
seurs sont très-m ém oratifs de ce f a it , et peuvent l'attester.
�( 8 )
mars 1793; Boyer ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. On sent que ce u’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit ;
je crus ne pouvoir mieux faire que de le mettre hors
d’intérêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Gouthon.
Mais Boyer s’étoit encoi’e fait un autre titre de créance;
il me.dit avoir emprunté d’une nommée Martine .Delarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pouvoit-il qu’il
eût fait cet emprunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dames, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retii'é d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune mémoire : point de recon-*
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut payer ( 1 ).
(1) À propos de M artine D e la rb re , B oyer lui avoit em prunté
cette somme de 800 fr . le i 5 avril 1790. C ’est le
23
du m êm e
m o is , huit jours après ce billet , qu'il fit le com pte des dames
Beraud et Cham pflour , et il ne fait nulle m ention de cet em
prunt pour leur com pte. Je me suis procuré ce billet des m ains
des héritiers de M artine D elarb re. J'ai rem arqué qu ’il étoit de la
somme de 840 fr. payable dans un an ; la som m e de /to fr. étoit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossemens en
m arge, de la som m e de 4 ° fr* chaque ; Tun , du 12 septembre
1792 ; l’a u tre , du 27 m ai 1793. O n y voit encore , que sur la date
du i 5 avril 1790, B oyer a effacé lç mqt d i x de la fin de la d a te ,
' ‘
Mes
�( 9 )
Mes rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme ju g e , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendémiaire ; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les, regards ; il ne fut pas même
lort en crédit jusqu’au 18 fructidor an 5 ; mais à cette
époque, il reparut avec a u d a c e il étoit cependant hu
milié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
iil parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro- '
chemcnt. Le prétexte fut un arrangement par lui fait
avec feu Champilour-Desmoulins, mon frère, en 1789.
Suivant Boyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement comptée, et c e qui a voit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le m ot onze ; ce qui donne au billet la date de
1791 au lieu de 1790. L ’encre qui a trace le trait sur le m ot d i x ,
et écrit le m ot o n z e , l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infinim ent plus noii’e que celle du corps du b illet et
de la signature qui le term ine. Ges changem ens ne paroissent
avoir été faits que lors de l’endossement de la som m e de 40 fr.
du 27 mai 17 9 3 : cet endossement est postérieur au rem bourse
m ent que je lui ai fa it, Il.voulqt alors rem bourser M artine D elarbre
en assignats, sur le prétexte que je l’avois rem boursé de m êm e.
C elte fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et q u ’elle ne lui avoil pas prêté pour m on com p te;
alors il effaça le m ot d ix pour y substituer le m ot onze. 11 avoit
deux objets ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l ’a u tre , de rendre plus probable l’em prunt qu ’ il
disoil avoir fait pour ces d a m e s, en lui donnant une date posté
rieure au com pte qu ’il avoit fait avec elles , et qui se trouvoit
trop rapprqclié de Iq dfite du billet pour qu’on ne soupçonnât pas
su délicatesse,
B
�C IO )
"aucun bénéfice sur ces payemens ; maïs comme je lui avoxs
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790? il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte qùe je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un compromis, pour nous en
rapporter définitivement ù deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i, et que Boyer ne cherchoit
qù’un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m’avoit prêtées en 1790? Il crut s’être
fait un titre polir me forcer à lui donner une indemnité;
et bientôt, révoquant le compromis, il me traduisit au
tribunal civil du Puy-de-D ôm e, où il étoit juge.
Mais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’étrange marché que Boyer
avoit fait avec mon frè re , le 28 mai 1789*
Champflour-Desmoulins, mon frère, étoit un jeune
m ilitaire, généreux, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et me devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les m ains une quittance de m on fr è r e , de la tota
lité de sa lé g itim e , en date du 1 " avril 17 8 4 ; un billet de l u i ,
du 1 " m ars 1 7 8 9 , par lequel il se reconnolt m on débiteur de
4,fioo fra n c s; et un second, du
25
août 1791 , par lequel il re-
connoît m e devoir la som m e de 15,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n ’ai cessé de venir au secours de m on frère dans
tous les Icinps ; j ’ai une foule de lettres de l u i , par lesquelles il
m ’exprim e sa reconnoissance.
�C ïi )
II lui restoit pour toute ressource une creance de
16,000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cent,
sur le prix de la charge de receveur des tailles de
l’élection de Clermont, dont le tiers appartenoit a notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V iry 5 notre
oncle, titulaire de cette charge.
Mon frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les moyens de le tranquilliser. Il proposa ù mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V ir y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se cliargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Dèsmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
Mais un actc.de ce genre seroit bien coûteux, entraîneroit des droits, d’enregistrement considérables; il faut
eviter cette dépense, et il -y a un moyen tout simple.
Donnez-moi, dit - il à Desmoulins , une procuration
notariée, pour m’autoriser*à recevoir les 16,000 francs
et les intérêts que vous doit votre oncle ; vous recounoîtrez, par celte p r o c u r a t i o n , que f ai déjà payé les
12.000 fra n cs ¿1 vos créanciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne cette somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans avoir donné un sou ; et ce n’est point
B 3
�ici une assertion aventurée ; Boyer l’a reconnu dans le
compromis du 1 5 fructidor an 7-, il a renouvelé cet aveu
'd evan t le juge de p aix , devant les premiers juges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
■pour cause ¿fausse, ou sans cause -préexistante (1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi importante $ sans bourse délier! et Boyer
veut-il que Thonneur lui survive, lorsqu’il est condamné
i\ remettre une obligation consentie pour causej^ausse !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) E n m êm e.tem ps que m on frère sousçrivoit cette ob ligation ,
¡1 avoit donné à B o yer l'état de ses dettes. C ç t état étoit ainsi
conçu :
1“. A M . L a v ille , M .B Ia u d c a u tio n ................................. i , 5oo fr .
A la N anon , cuisinière de m on f r è r e .......................
A D u fra isse -L a p icrre , dom estique de M . d eFlagbeac,
cî . ...............................................................................................
Goo
1,200
M . B o yer , ma c a u t io n .....................................................
2,800
A m adam e S a u z a d e ...................................... .................. 2,900
A C a ze , p e r r u q u ie r .........................................................
5i5
A F a b re , c o n f i s e u r .........................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r .....................................................
1,200
A B l a t i n ................................................................................
260
A B r a c h e t, t a i l l e u r ...............................» ......................
3Go
T
o
t
a
l ..........................................................................1 2 , 3 5 5
fi-
V oilà les dettes que devoit payer B oyer ; il n ’en a acquitté
d’autres que celles de C a z e , Fabre et Blatin , que je lui ai allouées.
( E x tr a it (lu livre jo u r n a l de mon fr è r e , dans leq u el il avoit in s
crit les dettes dont B o y e r é to it ch a rgé).
�( 13 )
un 8, Boyer obtient une ccdule du juge de paix de
la section de l’Ouest de Clermont - F errand, où je
suis domicilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m’a rendu des services nota
bles -, qu H a reçu d’abord de m oi des marques de re
connaissance • il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 1790 ; que l’époque des remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’échelle de
dépréciation, ‘ suivant les conventions des parties; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et Louyrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les aveux ; e t , comme les arbitres n’avoicnl autre
chose à faire qu’un calcul qui seroit pén ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
H me demande au principal, i° . la somme de 8,55ofr.
pour les causes énoncées au compromis; 2°. les intérêts
de cette somme, à compter depuis l’échéance des eiïels;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen Lescuricr, pour le compte de mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; plu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l’obligation de 12,000 fr. 4°. la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen Bugheon,
le 28 mai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 1792, avec 135 fr. pour intérêts ou frais.
Boyer demande encore une somme de 267 fr. 20. cent.
I
�C *4 )
payée à B latin , négociant, le 8 juillet 1789; celle de
315 fr. payée au nommé Gaze, coiffeur, le 10 du même
m ois; celle de 1,218 fr. donnée à Fabre, marchand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desmoulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclamoit aussi une somme de 2,400 fr.
qvi’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un eifet souscrit par mon frère, et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme, à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B oyer, par une suite de confiance; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , Boyer demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr. qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en Javeur de qui.
Telles étoient les demandes principales, et comme
Boyer se trouvoil dans le besoin , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
bref d élai, pour être condamné à lui payer, par pro
vision et à bon compte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il doue dans le délire? à qui persuadera-t-il
qu’il a emprunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
cî’une part, et 3,180 fr. d’autre, sans se faire donner
aucune reconnoissancc par celui pour lequel il faisoit
les emprunts ? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas même
déclaré aux créanciers ? P o u rq u o i, quand Bugheon a
obtenu contre lui une sentence do condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi n’a-t-il p;is fait dénoncer les poursuites de
Jiuglieon ù mon frère ou à ses héritiers ?
�C l5 )
Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l’obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’etre creanciei ?
Mais cette obligation est contenue dans une procumtion q u il’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo Francs par année ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il etoit
donc tenu de rendre compte de sa procuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescuner
■et de Bugheon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient toui'né à son profit. Reçues par mon
frère! mais cela étoit impossible, Boyer ne devoit lui
rien compter ; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu, il n’a l'ien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets minutieux de
Blatin, Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs :
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de Lescurier, Desmoulins étoit
à son régiment -, j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-moi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour ‘le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m’a fait assigner.
N on, ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789, et eut l’adresse de tirer sur
moi la lettre de change de Bugheon , et c’est avec ce
�( 16 )
môme argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus d élié, il retiroit deux fois son argent ,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai remboursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frère : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adi’oit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argumens, qui
étoient simples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m oi, et que cet écrit étoit accablant.
Mais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoîlre
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et de m’attérer par cette preuve que j’avois moi-même donnée.
Ce fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A vant d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît connoîLre le montant des sommes qu’il disoit avoir emprun
tées pour mon frère.'
Boyer me présente une feuille de papier, et me prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Boyer a emprunté
« pour mon frère ,
« 1°. A M . Buglieon 3,000 francs.
« 20. A M . l'abbé A u b ier 1,800 francs.
« 3°. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je de
mande is
�( *7 ) ‘
, '
mandais comment ccs prétendues créances etoient éta
blies. Eoycr prend de l’hum eur, et retire le papier:
c’est cette même note qu’il a eu l’indignité de produire,
et q-i’il annonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il? Il ne produisit qu’un papier
coupé, de la longueur de quatre lignes, dont il vouloit
se s e rv ir:1il avoit supprimé le reste, et l’avoit côupé
avec cles ciseaux ( x ).
Pour le coup, ce fut Boyer qui fut attéré, et publi
quement couvert de honte. Malheureusement pour lu i,
la créance de Yabbé A u b ier se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de l'abbé A ubier. S’il avoit supprimé les
autres qu’il ne demandoit plus •, il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A ubier; cependant il convenoit qu’elle
ne lui étoit pas due. O r, il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Bugheon et Lescurier , quecelle
d’Aubier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou cette préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables?
Qu’on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Bughçon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
xn avoit prêtées eu 1790 î et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'au d ien ce, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des c ise a u x , ils
firent éclater un m ouvem ent d ’indignation contre l’infidélité du
citoyen B oyer. Plusieurs citoyens de C le r m o n t, qui étoient éga
lement à l ’audience, s’en aperçu ren t, et ont publié que les rieurs
n ’ éloient pas du côté du citoyen B oyer.
G
�C iS )
Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m’ùvoit. fait
écrire sous sa dictée, et sur le môme papier, il^avoit
porté entre autres, une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen LenormandFlagheac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dii’e si mon frère avoit été son débiteur, et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
I>e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
devoit rien, et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
Je présentai cette lettre à l’audience , et fis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé différons créanciers ! Quand
on connoît B o yer, il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B oyer, procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l’audience sur l’interpellation du président!! !
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon Irère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu’il me demande, et celles qu’il ne in’a pas
(1) B oyer a ajoute de sa m ain son p ré n o m , qui avoit été laissé
en blanc dans le double du com prom is que j ’ai en mon pouvoir.
�( l9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent a
1789, et qu’il est établi que mon frère a reste à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 1 7 9 1 5 sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C’est ici le cas de parler de la lettre de change de
Laliousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
1A
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 ’francs , au profit du
citoyen Laliousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788 -, il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de parler principalement de la créance de Laliousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrois
a diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Laliousse; je n’àvois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la dette; je priai le
citoyen Iiiiliousse de vouloir bien me remettre la lettre
de change de mon frère, et j'offris de souscrire à son
profit un effet de pareille somme.
lie citoyen Laliousse s’empressa d’accéder à ces arrangemens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’cifet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
famille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ignoroit les arrangemens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dernier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le montant, et l’engage
à mettre son acquit au bas de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots .nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’ctoit-rfe.y deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien connue, malgré la malignité
de B o y e r, refusa de signer l’acq u it, en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa . bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature ; il a osé depuis former
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payement, sur le fondement
que Boyèr étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a enü’aîiié les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme juge, sans le juger comme homme', mais
cet homme est un juge!!!
Mais je demanderai à B o yer, comment et à quelle
époque il a payé cette somme à Lahousse ?
Boyer a d it, en plaidant, qu’il l’avoit acquittée î\
l’échéance : 011 se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 1789; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de cette obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
' nanti avant d’être créancier; il en convient lui-même.
�( 21 )
II ne l’a pas pavée depuis, puisque la lettre île change
étoit sortie d’entre les mains de Laliousse , lo n g -temps
avant son échéance. Tous les laits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Laliousse’:, déclaration que j’ai produite u
l’audience (i) : aussi,lorsque j’ai satisfait auxeondanmations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre cette lettre de change, afin d’en
poursuivre le recouvrement contre Laliousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à cette remise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel de Riom.
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l’impudeur de réclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C’est ainsi que j’ai payé 1,800 francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 1786, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C’est ainsi que j’en ai payé Lien d’autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en note, à l’ex
ception de celles de F a b rc, Caze et Blalin.
Je pouvois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Laliousse est im prim ée à la suite d u me«noire.
1
�C 22 )
.T’avois présenté nn autre état qui m’avoit été donné
par mon frère, et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cctte
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M on frère avoit fait la note des sommes que j’a vois pré
cédemment payées pour lui, et m’avoitremis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une demi-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa m ain , et que
mon frère n’existoit plus , cet état étoit une pièce pro
hante qu’on ne pouvoit contester : je m’en iis un grand
moyen, lors dé la plaidoirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. Boyer, qui ne connoissoit pas cette pièce, en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de *
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoient avec
intérêt la discussion de cette cause. X>a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est membre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
L e défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit a la main;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates.
L a cause est continuée à une nuire audience; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit à mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
jiqiis demandons tous deux avec confiance, soit à Boyer,
v
�( 23 )
soit à son. défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouve.
Alors Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou rature
les dates. On voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, n’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la partie, lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la pièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse- : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté ceLte créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en co n vin t, et Boyer fut
jugé par le public. Aujourd’h u i, Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son mém oire, lui Boyer, le seul eu
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blamera-t-on maintenant de m’être refusé à 'payer
une indemnité à Boyer, à raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
2°. J ’ai remboursé, dans le courant de mars 1793, dans un
temps où les papiers avoient encore une grande valeur (1).
(1) Boyer ne peut pas équivoqner sur l ’époque de ce rcm hour-
�Cm )
Il est vrai qu’en m’acquiliant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il 11e restoit plus de traccs
du remboursement.
Qu’a fait l’ingénieux Boyer, pour me donner plus de
défaveur sur ce remboursement? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
On lui observe que cela est impossible -, qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation; alors il
Tépond que c’çst au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut mériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et Louyrette,
par nous réciproquement choisis : Boyer a révoqué le
compromis.
40. E nfin, je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit récipi*oque, et que Boyer m’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payemens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé *, il n’y a donc pas de réciprocité.
6cm cnt.
J’cn aî fa it un , clans le m êm e tem p s, au cit. L o u y r e tte ,
l ’un des arb itres, que B o yer lui-m ême pressoit d ’exiger son paye
m en t c l d ’im iter son exem ple , sur-tout à raison de m a prétendue
ém igration.
Depuis le co m p ro m is, il eut la m auvaise foi de prétendre que
le rem boursem ent avoit été fa it beaucoup p l u s tard ( en messidor
ail 4. ) L ’ arbitre L o u y re tte le releva sur cette assertion. L e dé
licat B o ye r se liàta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire com m e m o i, puisque nous avons été rem boursés dans le m êm e
temps. O n conçoit actuellem ent le m o tif de la grande colère de
B oyer contre L o u y rette.
T els
�(a5).
•Tels furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
mon défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les p r o p o s de taverne
et de café , qui furent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
_ Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pns été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut couvert, dit-il, par mes vociféra
tions , et le tribunal, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un délibéré, et n’a prononcé qu’après
le plus mûr examen.
E n fin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9, qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clermont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m oi, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 1789, et de celle de 3,180 francs d’a u tr e ,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même année, intérêts et frais qui leur sont acces
soires ;
1
20. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement de la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obligagation de 2,804 francs, prétendue contractée par Chain»)ilour-Desmoulins, au profit cCune personne inconnue;
3°. En ce que les intérêts ont été adjugés à E o yer,
à compter des époques des payemens; 40. Enfin, en ce
que j’ai été condamné aux dépens; cmendunt, Eoyer est
D
�( 26 )
débouté de toutes scs demandes relatives à ces diiïerens
chefs, sauf à lai à agir en garantie, le cas échéant; (c’està-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de i,8ôo fr. 13 cen.
montant des sommes payées à Blatin, Eabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné à payer les 2,4oof.
montant de la lettre de change de Lahousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour à me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
frè re , comme faite pour cause fa u s se ou sans cause
-préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugement auquel
je suis condamné.
Ce jugement, dont Boyer a pris la peine de faire im
primer les motifs et les dispositifs , est principalement
m otivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à Boyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champlîour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de Boyer, dans le compromis
devant le juge de p aix, devant le tribunal d’appel, qu’au
moment de cette obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère ;
Le tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
�( 27 )
ficatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et dôcumens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement de
la somme de 8,55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i °. que cette somme a été par moi payée à Boyer,
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquement Bôÿer se soumettait à ne ré
péter les sommes qu’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon frè re , que suivant la môme propor
tion, et d’après l’échelle ;
4°. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. Le tribunal décide , quant à l’indemnité du caution
nement , qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet présent, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne -pas.
La condamnation des sommes; dues à B latin , Cazc et*
Fabre, est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change de Lahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
-
D a
�C rf)
À l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depui«
l’époque de ses prétendus payeinens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
convention , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
JLa demande.
B o yer, présent à la prononciation de ce jugement,
croit avoir fait un assez grand profit; il part, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content, qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement à mon avoué,
le 5 floréal an 9 , sans approbation préjudiciable, pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon domicile,
soit,y les mêmes réserves ,* mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugement, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire un acte d’ofFre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal et intérêts ; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage au procès, notamment la lettre de
(1) C es réserves et protestations de B o yer m e rappellent l ’anecdole d'un vieux p ra ticie n , qui voyageant dans les tén èb res, fu t
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à sc reconnoître dans l'obscurité. Il s’écrioit ;i chacun : J e t’ accopie en tant que lu m e s e r s , ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
C om m e l u i , B oyer ne m arche jam ais sans protestations.
�( 29 )
clinnge souscrite par feu mon frère au profit de Laliousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient inscrits les noms de Ijescurier, Vabbé A ubier
et Buglieon, comme créanciei's de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendroit, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Laliousse.
Boyer ne laisse pas échapper l’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. {cellefa ite pour cause
Jausse); mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, dit-il, la lettre de change et la, note, sous le
vain prétexte qu’il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’appel, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
Il me parut d’autant plus extraordinaire , que B o yer,
qui m’avoit fait sommation d’exécuter le jugem ent, qui
reeevoit le montant des condamnations qu’ il prononce en
sa faveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
Je pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d une rébellion à justice ; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugement, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je présentai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
inc permet de l’assigner à jour fixe sur cette demande.
L e i 5 du même mois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à ce jugement dans le
d élai, et a fait paroître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité, également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m’appi'end, par
ce lib elle, qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
Telle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-être été
minutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire -, je laisserai ensuite à
mon conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose,
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la plum e, le fait bon et
compatissant! R isum teneatis. B oyer compatissant ! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les hal)itans de la commune
de Solignac , que Bo3Ter habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des ruloirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand.
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu’il m’a rendus , Boyer a mal choisi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Qu’on examine cette vente, du 16 janvier 1786 (1); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avois pas encore été présen té au citoyen B o ye r à celte
époque.
�31 ^
l ’acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 *-r* au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi formel.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de mes filles. J ’en ai trois , toutes établies ; elles ont porté
à leurs maris une fortune au moins égale, et j’estime assez
ines gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (1) ,
(1) B oyer dénature les fa its , relativem ent au citoyen B onnet.
C e n ’est pas l u i , com m e il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointem ent et cum ulativem ent
le 9 août 1790. J’ai heureusem ent conservé le b ille t; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m o n ta n t, partie en im
m eubles , partie en num éraire. J’ai donné en im m eubles , au m ois
de juillet 17 9 2 , douze jo u rn au x'd e te rre , situés dans les appar
tenances de C le r m o n t, dans le m eilleur ca n to n , près les jardins
des Salles ; plus , une grange située à C lerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai com pté en outre , en num éraire , la somme
de 8,400 fr a n c s , intérêts co m p ris, à la demoiselle B o m p a rt, 4
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. C es payem ens
ont été faits les 21 m essid o r, 21 et
25
therm idor an 6 : j ’en rap
porte les acquits de la demoiselle B om part.
�( 32 )
et quelques autres créanciers dont il fait rémunération.
.Mais Boyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Qu’il
le dise , s’il l’ose. Mais de ce que Boyer a été ma caution,
tons ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’avcnturoit rien lorsqu’il se prétoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
§ur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre moi , comme émigré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il persécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit ù R iom , chez le citoyen
Grenier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de Riom ; et malgré sa moralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterminer ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E st-il bien étonnant, d’après ces services signales,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon émigration? Il n’en falloit pas tant en 1793; et
j’aurois eu moins d’inquiétude, si j’avois été dans cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
On sait qu’il falloit cire propriétaire pour, être- inscrit
sur la liste fatale,
Boyer,
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sut
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût iuterpellee.
Accoutumée à vivre dans la retraite , loin du tumulte de
la société, elle fit avec effoi't le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti ; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la iis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus
qu’à m o i, cette imposture m’afiecteroit plus vivement.
Lorsque vous dites que j’ai connu l’obligation consentie
par mon frè re , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai cn-
( 0 B o ycr prétendit en p la id a n t, que les som m es empruntéesde Bugheon avoient été versées dans le tablier de m a sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm o u lin s, m on frère, : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressément m on défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-m ême pour lui
donner un d ém en ti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de m a sœ u r , étoit
celle de 2,900 fr. prêtée par la dam e S au zad e, que j’a i'a c q u itté e ,
B oyer ne l ’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-m êm e de celte m an ière
au citoyen B o y e r , lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dam e Sauzade répondit à B o y e r , que la som m e
prêtée par le citoyen Bugheon son fr è r e , n ’avoit pas été comptée
à Pesm oulins : elle est toujours prête à attester ce que j’avance,
Ë
�(
3
4
} .
'
core par le mentiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur moi la lettre de change, que j’en passai l’ordre à
Bugheon ; mais je ne le fis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
neur, qu’il ne fut point question de mon frère : vous
saviez trop bien que dans ce moment je ne me serois pas
engagé pour lui.
Un des grands argumens de B oyer, pour prouver que
l’emprunt fait à Lescurier n’étoit pas pour son compte,
est de dire qu’il a pris de Baptiste, notaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être ; mais cette
quittance est pour le droit de contrôle : or, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs; et,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en x-etirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution ne devoit pas échapper
à Boyer.
M ais, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère, puisqu’elle est
comprise dans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez Chevalier, notaire, le premier complé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur cette pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avecinoi, et nous avons été di/isés, lorsque je
�( 35)
vous en ai demandé le compte. Vous prétendiez en
avoir fourni le montant, à la vérité en assignats; vous
m’offriez de me faire raison du bénéfice, à condition q u i
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez ; e t , lorsqu’après plusieurs années de discussion,
j’ai voulu éclaircir ce fa it, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usage à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent*que j’avois toujours refusé d’allouer d e,
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation:
en changeant le lieu de la scène , il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider ; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion‘; c’est le billet sans date, où j'ai projtitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus apprendre au public, lorsqu'il en fit parade ,
les motifs qui l’avoient dicté. C’est après la journée du
18 fructidor. J ’nppartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme ém igré; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoit fait des menaces; il
disoit h tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu’il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma famille, mes amis, étoient alarmés; 011 m’engage i
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
�cède. Bover étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
f'réquens de cette ville à celle de Glcrmont ; il clierchoit
surtout à épargner les voitures ; j’envoyois la mienne à
R iom , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta bien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance ; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste :
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calomnies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? Il me semble
entendre ce voleur qui erioit bien haut de peur qu’on
l’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore ridicule, lorsqu’il prétend que j’écarlois
rafiluence des honnêtes gens qui accouroient chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la fo u le, et qui n’a jamais pex-sonne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
desti tuer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernement
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il obtint, par importunité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest’tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si souvent manqué
de mémoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut pins
s'étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres , quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrette. Mais tous
•deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
feslime publique, et tous les deux commissent trop bien
B oyer, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( r , ) __
.
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
triomphe.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; j’ai le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugement, je donnai à dîn er, à Beaumont, à plusieurs
citoyens , parmi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœux pour le gouvernement, pour le premier
magistrat de la république, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion publique, à lui-même , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent son volumineux et insignifiant mémoire.
Signé, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
i i E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examiné la
procédure et le jugement rendu contradictoirement,
entre les citoyens Cliampflour et B o y e r, le 27 germinal
an 9 ; le mémoire en cassation du citoyen B o y e r, et
celui en réponse du citoyen Champflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen Boyer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du procès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les différens chefs de créances réclamées par le citoyen
Boyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaix-es, si foibles, qu’on seroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen Cliam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un mémoire contre lui.
En .effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen Boyer, une fin de non recevoir invincible. l i a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l’exé
cuter , en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
¿■afts se fa ire aucun préjudice.
Il est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête p;>s
�l’exécution d’un jugement en dernier ressort. M ais, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles etre
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
qui a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement*, alors, s’il croit avoir éprouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p ou rvo ir, il ne doit payer
que comme conti’aint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention , sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescement préjudiciable.
Mais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; dans ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l’acceptation.
O r, le citoyen Boyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Champflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Champilour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc terminé, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrement, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Champflour seroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condamné, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugement, et donneroit à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudroit syncoper le jugement, le casser dans
�( 40 )
une partie, et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugement, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chois
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i, dans l’état où
en sont les pai’ties : les choses ne sont plus entièi'es, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
Boyer, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus mûr examen ?
Il oppose, iQ. que la cause a été plaidée pendant deux
audiences ; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ, Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7 , sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui, suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , qui, dans ce cas, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
Avant de proposer un pareil moyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il attaque,
et qu’il a lui-même fait signifier. Ll y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été pi’ononcé. Boyer dçvroil surtout se rappeler, puisqu’il
étoit
�(4 0
étoit présent à l’audience; qu’il assistoit Son avoue pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut^prononee.
Ce fait, au surplus, est constaté par le •jugement qui ,
sans doute, mérite plus de confiance, que 1’assertion de
Boyer. Il porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant'dèûx précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i, après en avoir délibéré, etc ». Voilà
qui répond , sans doute , à l’objection d’une manière
péremptoire.
- D ’ailleurs, un délijbéré n’oblige point à un rapport,
Joussc, sur l’article III du titre V I de l’ordonnance de
1667 ■
>explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des pro« curcurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience; auquel cas, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur.le registre,
K sans mémoires ni écritures. L e greiïier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : 011 en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« 1 audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
« plus prochain , cl le jugement se prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sorles de délibérés sont autorisés par l’article III
du' titre V I , et par l ’article’X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rapport , écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugement, qu’il
a été ordonné un délibéré.ès mains de l’un des juges,
F
�( 42)
ce seroit la stricte’exécution de l’ordonnance,loin d’être
.une infraction a la loi»
11 est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brum aire, d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l’exécution de l’ordonnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure, et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute procédure*, l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
-abroge donc nécessairement la loi du 3 brumaire , si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’expliquer, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boyer pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
espèce de rajyport à la cause ; il p orte, « que si les parties
« comparaissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
.« de demande et le jugement définitif; si l’une d’elles ne
« comparait point, il lui sera notifié de plus le jugement
u préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« cédure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
On- ne voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’article X n’est pas plus déterminant:
« Les juges cîes tribunaux, porte cet article, pourront,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet exam en, ils rentreront à l’audience pour y déli« bérer en public, y opiner à haute voix , et prononcer
« le jugement. Ils pourront encore, si l’objet pnroît
« l’exiger, nommer un rapporteur, qui fera son rapport
�« le jour indiqué dans le jugement de nomination, lequel
c< a p p o rt devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétondra pas que le
jugement est nul , parce que les juges n ’ont pas opine
à haute voix. Ce mode, qui a entraîné tant de. dénon
ciations , n’est plus usité. L ’objet de la cause n’exigcoit
pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de çoin
les diilerens chefs de demandes', et le citoyen Boyer doit
se féliciter de cette précaution ; elle lui a valu la con
damnation du billet de Lahoussë, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
A in s i, ce premier moyen de cassation est absurde et
inadmissible, d’après la teneur du jugement, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second lie u , que le ju
gement viole la disposition de l’article I du titre 111 de
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le citoyen Champilour
est condamné \ il se fonde sur ce que le citoyen Cliampflour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il n’avoit point fait d’olïïes; d’où il tire la consé
quence que tous les dépens étoient h la charge du citoyen
Cham pilour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses a p p l i
cations : il est vrai que l’article qu’il invoque veut que
toute partie qui succom be, soit condamnée aux dépens
F 2
�( 44)
indéfiniment, sans que pour quelque cause que ce, soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Champflour a-t-il succombé? L e citoyen
Boyer a formé contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient ù une somme de 23,317 f.
10 cent. 11 n’a réussi que sur deux chefs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r, il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
gagne , surtout lorsque ces.chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des. dépens. C’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyer. V oici com
ment il s’explique, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l’assignation, et que le doman
te deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les compenser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagne, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
« sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Champflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le premier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoient
contenus dnns le même exploit, et ont bien évidemment
occasionné autant de frais les uns que les autres. L e
�( 45 )
.
.
citoyen Champflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens ; cependant ils ont été compenses ,
et le coût du jugement a été entièi’ement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en plaindre, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-môme dans
son troisième moyen. Sans doute 011 doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairement contractées.
Mais lorsque les conventions ou les obligations sont
purement conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accomplies, avant que la
convention, soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention-, l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur une vérité aussi,certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être controversé.
O r, quelles sont donc les conventions des parties? En
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Champflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qui l lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fuit
un compte entre les parties, et que Boyer l’indemniseroit
à son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’étoit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Champflour
n’étoit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-meme. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties'*, Boyer n’a fait aucun payement pour le compte
�du citoyen Chnmpflour-Desmoulins, ou, ce qui est la
‘même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il n’y a donc plus de consentement, dès
que Boyer révoque le compromis ; il n’y a donc plus de
réciprocité, dès que Boyer n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir en compensation aucune indemnité,
et cependant la compensation avoit été la cause première
et essentielle du contrat; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
condition, la convention est demeurée imparfaite. C’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce qui a été parfaitement
développé dans les motifs ; et si Boyer prétend que dans
un contrat synallagmatique et réciproque, le citoyen
Champflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-même;
qu’il pouvoit se jouer de ses engagemens, tandis que le
citoyen Champflour étoit obligé d’exécuter les siens,
cette prétention paroîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation, parce qu’il n’y a ni vio
lation de form e, ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frimaire, 5 thermidor an 4, i 5 fruc
tidor an 5, sont également mal appliquées.
Premièrement, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le disci'édit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frimaire : Boyer avoit reçu volontaire
ment, et r oient i non f i l injuria.
Les lois des 9 thermidor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nu se sont occupées que des obligations pures et simples,
�( 47)
et non des conti*ats conditionnels; il étoit donc inuLile
de grossir un mémoire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut examiner le fond du
procès.
L e quatrième moyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
grief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Bugheon et Lescurier ; il va jusqu’à
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de 12,000 f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend que cette not e, qui émane
du citoyen Cliampflour , prouve que Desmoulins, son
frère, a louché les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l’emploi
de 12,000 francs*, mais il prétend avoir prouvé , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
Cliampflour, que Desmoulins, son frère, avojl louché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rempli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugement; la confession de celui qui est muni d’un
pareil titre, ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
Tout est erreur et confusion dans ce grief, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
Il se plaint de ce que celte obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Qu’on lise son exploit inlroductif de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; o n ’verra que
�. u 8)
loin de conclure au maintien de cette obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
C h a m p ilo u r a demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l’a ordonné en motivant, sur les aveux de Boyer,
que l’obligation étoit consentie pour cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
■
A l’égard des lettres de change souscrites par Boyer,
au profit des citoyens Bugheon et Lescurier, rien n’établissoit que l’emprunt eût tourné au profit du citoyen
Çhampflour-Desmoulins ; il n’en a pas reçu le montant ;
il ne devoit pas même le toucher, d’après les conven
tions, puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Çhampflour-Desmoulins;
çt Boyer n’a payé aucune de ces dettes.
Pour l’écrit prétendu émané du citoyen Champilour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. La forme de cet écri t, la
créance de Tabbé A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de Buglieon, et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payement, dénotent assez le cas qu'on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroît dû
précédemment supprimer; mais le jugement ne pou voit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas formé la demande : le tri
bunal ne pou voit condamner le citoyen Champ.flour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen Boyer; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celle partie, ce scroit un grief d’appel, et non
un moyen de cassation.
Dans
�( 49 )
.
Dans son cinquième et dernier m oyen, le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 17 8 9 , qui perm et a l a v e n i r
de prêter de l ’argent à term es fix e s , avec stipulation
d’in té rêts, suivant le tau x déterm iné par la loi , sans
eutendre rien in n o ver au x usages du com m erce.
L e citoyen B oyer argum ente de cette l o i , p o u r p ro u ver
que le jugem ent dont il se plain t auroit dû lu i adjuger
les intérêts de la somme de 4?200 francs qu i lu i a été
allouée , à com pter du payem ent q u ’il d it en a v o ir fait.
L e jugem ent ne lu i adjuge cet in térêt qu ’à com pter de
la demande ; d o n c , suivant le citoyen B o y e r , il y a in
fraction à la lo i du 3 octobre 1 7 8 9 , p ar conséquent ou
v e r tu r e à cassation.
E t range conséquence ! S u ivan t les anciens prin cipes,
l ’argent étoit stérile de sa n a tu re , et ne p o u v o it p rod u ire
d’in té r ê t, lorsqu’il s’agissoit de p r ê t, qu’autant que le p rin
cipal étoit aliéné entre les mains du d é b ite u r , ou qu ’ il
existoit une dem ande judiciaire en payem ent.
L a lo i citée n’a pas d éro g é à ce p rin cip e ; elle a seu
lem ent laissé la faculté, p o u r l’aven ir, de stipu ler l’in térêt
au taux ordinaire , par l’obligation ou le b illet ; c’est-àdire , que lorsque cet in térêt est stipulé par l’écrit ém ané
du d éb iteu r, les tribun au x do iven t l'a d ju g e r, con form é
m ent a la convention ; mais s’ il n’existe aucune stipula
tion , l ’intérêt n’est d û , com m e a u tre fo is, que du jo u r
de la demande.
O r , il n’y a aucune convention de cette nature entre
les p arties, puisqu’au contraire les sommes réclam ées par
le citoyen B o yer étoient contestées ; que d ’ailleurs le
p réten d u p rêt étoit antérieur à la loi*, il y a p lu s , c’est que
G
�( 5° )
dans les emprunts prétendus faits par Boyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payement, et que cet intérêt
avoit été confondu avec le principal. C’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier et Bugheon, et pour les
sommes adjugées à Boyer; tel est d’ailleurs l’usage abusif
et usuraire qui s’eSt introduit dans le commerce.
Ainsi les prétentions du citoyen Boyer ne tendraient
à rien moins qu’à se faire adjuger l’intérêt des intérêts,
et à faire admettre l’anatocisme dans les tribunaux.
Il
invoque une clause du compromis, où il est dit que
les citoyens Louyrette et Costes, arbitres, feront aussi le
compte des intérêts, conformément à la loi. Mais celte
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à compter
les intérêts légitimement dûs , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créanceLahousse , auroient
au contraire rejeté le principal.
Mais le citoyen Boyer a l’évoqué le compromis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés ; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-même détruit.
L e citoyen Boyer, en terminant son mémoire, annonce
que scs moyens sont encore mieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est communi
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cliampflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R i o m , p a r l e s anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendémiaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
Le
c o n s e i l
s o u s s i g n é
est
du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrand, le 30 vendémiaire
an dix.
DARTIS-M ARCILLAC.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. Délibéré à R io m , le 3 brumaii*e
an 10.
ANDRAUD.
�P I È CE S
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C I A T I O N
DE
P IE R R E
B O Y E R ’,
A n térieu re à l’inscription du cit. Cham pflour, sur la liste des ém igrés.
E x tr a it des registres , contenant le s déclarations des créanciers
sur ém ig rés, tenus au ci-deva nt d istrict de C lerm on t, n°. 74*
A o , o . a d ’ j i u i vingt-sept octobre m il sept cent quatre-vingtd o u ze, a été déclaré par le procureur syndic du d istrict, q u ’il lu i
avoit été signifié un a c te , en sadite qualité , par le m inistère de
W e l l a y , h u issier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette co m m u n e ,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit B oyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisteCésar Cham pflour-d’A la g n a t , pour lequel il avoit fa it des affaires
im p ortan tes, et s’étoit p rê té , à son égard , à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant h o m m e ; q u ’il l ’avoit fait de la m a
nière la plus gén éreu se, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , 11e
s ’attendant à d ’autre reconnoissance qu ’à celle que se doivent des
amis ; qu’il l ’avoit principalem ent obligé , en souscrivant d iffé rens emprunts faits par ledit C h am pflour, notam m ent un billet de
la som m e de 17,000 francs au profit du sieur R o c h e fo rt, et autres
quatre de
85o francs
ch acu n , le
3
m ars 1 7 9 1 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d ’indem nité : 20. d ’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur C ham pflour par le citoyen B r u n e i, pour lequel il y
avoit égalem ent indem nité ; qu ’il avoit en outre passé l’ordre de d if
férentes leltres de change tirées sur lui par ledit sieur Charnpflour, dont il étoit dans l’im possibilité de donner
le d é t a il,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notam m ent celles
�dos sieurs Bonnet chirurgien, G u y o t de V ic-le-C om te, et- a u lie s, qu i
lui étoit dû à lui-m ême par billet 7,9^0 francs : p lu s , qu il lu i
eto it dû par le d it G ham pjlour-D esm oulins la somme de 12,000
fra n cs par acte devant notaire , lesq u els 12,000 f r . (1) lu i B o y er
avoit emprunte’s pour le s com pter audit Cham pjlour ou à ses créan
c ie r s , e t fo u r n i de se s deniers ce q u i n’ avoit pas é té emprunte ;
m ais que cette somme lu i avoit é té déléguée ci prendre sur les
sieurs de V iiy père et f i l s
par le m êm e a cte du 28 'm a i 1789 ,
lesq u els devaient audit Cham pjlour la som m e de 16,000 fr a n cs
portant quinze cents fr a n cs d’ intérêts ; q u ’i l é to it m êm e porteur\
du titre obligatoire q u i é to it com m un avec le sieu r Champjlour.
a în é e t la dam e B l o t , a u x q u e ls i l étoit dû p a reille som m e.
. Q u ’il avoit été instruit par bru it public que ledit sieur Gésar
Cliam pflour étoit ém igré; q u ’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts , e t de faire en conséquence la pré
sente d éclaratio n , avec protestation de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte éloit signé dudit sieur B o yer et de l’huissier.
Q u e M . le procureur-syndic croyoit ne devoir être tenu à autre
chose sur cette sign ification , que de la déposer au secrétariat du
d is tr ic t, pour valoir et servir audit B o yer ce que de raison ;
que les lo is, soit du 8 avril, soit du 2 septem bre d e rn ie r, ne le
rendoient en aucune m anière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d ’émigrés ; que l ’article V I de la loi du 2
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce q u ’ils avoient
h faire , pour être conservés dans leurs droits , privilèges et hypo
thèques , et être colloqués utilem ent sur les deniers provenans de la
vente des biens des émigrés ; que par conséquent l’acte du sieur
B o yer, q u i, sans être un acte inutile, ne rem plissoit pas néanm oins
(1) O n voit que B o y er ne c o m p to it pas sur m on r e t o u r , lorsqu'il v o u lo it
s'approprier les 12,000 francs énoncés en l'obligation de m o n frère ; q uoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , p o u r c a u s e f a u s s e , il ne la portoit pas moins com m e une créan ce légitim e q u ’il vo u loit s’a p p r o p rie r , saut
doute p o u r l'i n t é r ê t d e la n a tio n . Y o i l à ’cet h om m e qui veut que l'h o n n e u r
l u i survive !
�.
(
5 4
}
..
le but de la loi $ur scs intérêts ; et q u ’il ne pouvoit sans autrem ent
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
faire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
nu secrétariat ; ce qui a été l a i t , sa u f audit B o y e r , s’il le juge à
p ro p o s, à parer aux inconvéniens qui résulteraient de cette décla
ration im parfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé
procureur-syndic. N °. 406.
L e d it jour
5
B
e r n a r d
,
décem bre 1 7 9 2 , est com paru au m êm e directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r , avoué au tribunal du district
de C lerm o n t, y h a b ita n t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment* rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen Bernard , procureur-syndic de ce d istrict, le 27 octobre
d e rn ie r, a décla ré qu’ i l croyuit devoir la réitérer, e t Vétendre
notamment:sur des objets
qui
doivent
profiter
a
la
républiq ue
,
clans la supposition que J ea n -B a p tiste-C ésa r Cham pjlour-B eaum ont , d o m icilié en cette 'ville ju s q u ’au 14 ou 1 5 ju ille t d ern ier,
s o it ém ig ré, ce que le requérant ignore a bsolu m en t, le sieur
Cham pflour ne lu i ayant a n n on cé son voyage que pour la v ille
de L y o n ,
ne
se
tr o u v a n t
tas sur la
liste des
ém ig rés
,
dans la
q u elle Joseph Cham pjlour son frè re e st inscrit. E n conséqu ence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d ’ affirm er s}i l en e s t
req u is, ou s i cela p eu t être nécessaire (1) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Cham pflour , pour
lequel il a fa it des affaires im portantes et heureuses égalem ent
notoirem ent connues ; que par su ite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu ’on peut faire pour obliger un galant hom m e ; q u ’il l’a
lait de la m anière la] plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fa m ille, ne s’attendant à d ’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalem ent obligé en souscrivant
( l ) Mîi feintne nt l’ un dp mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la d ém arche <Ie B o y e r ; ils offrire n t de le rassurer, par des «ngagemens soli
daires sur leur furtune personn elle, de ;out ce q u ’il pourroit perdre : m.iis
Boyer avoit d ’autres v u e s; il com pto it se faire adjuger m on bien de Be.uw
;npnt.
�( 55 )
.
différens emprunts fa ils par ledit sieur Cliam pflour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient com m uns , notam m ent cinq billets à ordre.
L e F \ de i 7,000 francs en p rin cip al, au profit du sieur R o clieiort de R io m , et les autres quatre de
3
85 o
francs ch acun, le
mai 1 7 91 , pour lesquels ledit sieur Cliam pflour a fourni le
meme jour une indem nité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
20. Q u ’il a souscrit avec ledit C ham pilour Un autre billet de
la somme de ia,Goo francs prêtée ù ce dernier par le citoyen
B ru n e i, habitant de cette v ille , du
5
5
m ars 1791 , payable au
mars de la présente année, ignorant le requ éran t, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indem nité du même jo u r, et qu’ il
a également déposé.
6 . Q u 'il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur C h am p ilo u r, et dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des p rêteu rs, desquels ¡1 est dans l ’im pos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n ’en
ayant pas gardé des notes, com ptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur C h am pilour; m ais qu’il en connoit plusieurs, notammeuL
celle du sieur B on n et, chirurgien de cette v ille , dç 8,400 fr a n c s ,
et qui éloit auparavant de 27,300 francs.
4
• Q u ’il a souscrit et accepté deux lettres de change de 3,000 f.
chacune, en faveur du citoyen G u y o t, ’de V ic - le - C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le i " - février 179$, pour
lesquels il y a indem nité du 1 " . février 178 9 , de la part du sieur
C ham pilour , en faveur dudit in stan t, laquelle le requérant a éga
lem ent déposée.
5°. Q u ’il a passé l ’ordre
en faveur du citoyen C h arb on n ier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24 ° fr a n c s , tirée par le
sieur C h am p ilo u r, en faveur du req u éra n t, le i 5 m ars 1791 ;
G\ Q u ’il est dû au requérant, i°. la somme de
5, 25o
fr. suivant
le billet consenti par le sieur C h am p ilo u r, le 1 " . octobre 1790 ;
2 . autre somme de 2,5oo f. portée par billet du 11 novem bre 1790;
�( 5G )
5*. enfin d ’une som m e de 400 f . payée en son acquit au citoyen
D essaignes, pour le m ontant d ’un billet de pareille somme , du 22
août 1790» suivant sa q u itta n ce , au dos du 17 janvier 179 1.
T o u s lesquels billets le .requérant a déposé à l’in s ta n t, en exé
cution de l’art. V I de la loi du 2 septembre dern ier, sa u f à les
re tire r, s’il est n écessaire, lesquels ainsi que les indem nités sont
tim brés et non contrôlés.
l i a d écla ré d é p lu s , e t c e
tour
l ’in t é r ê t de
i. a
n a tio n
, sauf
à réaliser sa déclaration à la m u n icip a lité de cette v ille j con
form ém ent à la l o i , q u ’ i l a en ses m ains le s objets suivons , con
cernant le sieur Cham pjlour e t son fr è r e : i°. un dou ble de
traité p a ssé sous sein g privé entre les sieurs A r ta u d -d e-V iry ,
père et fils, et les sieurs Jean-César C bam pflour, Josepli C h am p flo u r, o fficier, et Claudine Cbam pflour et Jean G érard B l o t , son
m a r i, du 14 octobre 17 8 2 , par lequel les sieurs de V ir y se sont
obligés à leur payer la som m e de ,48,000 fr. pour leur portion ,
dans la charge que possédoit le sieur de V i r y , et l’intérêt de cette
so m m e , sans pouvoir la rem bourser de dix années , à com pter de
l’époque du tr a ité , sur le pied de
4 >5 oo
fran cs p ar a n n é e , c ’est-
à-dire, i,5 o o francs c h a cu n , en in térêts, et 16,000 en p rin cip al,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette v ille ,
du 29 janvier 1 784? portant condam nation de ladite som m e et
des in térêts, sur laquelle som m e de iG,ooo fr. revenant au sieur
C b a m p flo u r, o fficier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 m ai 1 7 8 9 , en sorte q u ’il n ’est plus dû au sieur
Cbam pflour cadet que /¡,ooo ira n c s, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ i l a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Cbam pflour et B lo t , au sujet de la com ptabilité des béné
fices de la m êm e charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V i r y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mém oires
et relevés pris sur les registres-journaux et som m iers pris par le cit.
L o u •/v rctle
�( 57 >
Lonyrette qui y a , de sa p a r t , em ployé au niôilïS trois m o is , sans
désemparer", et qu’il sem b le, d ’après le com pte de clerc à m a ître ,
que le sieur de V ir y est débiteur d ’environ 120,000 fr . envers les
sieurs Cliam pflour et B l o t , le sieur C ham pflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, com m e héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dam e E spin asse, sa fe m m e , e lle s
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliam pflour p è re , époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie r s , entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
sont co m m u n es, tan t avec ledit B lot et le déclarant q u ’avec les
irères C liam p flou r, et qu’il en est de m êm e de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offran t cependant de com m uniquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , m êm e avec déplacem ent.
3°.
E n fin , qu’ i l a en ses m ains trois contrats de 'vente sous
seing prive' -3 de d e u x parties de m aison situ ée en ce lte v ille ,
v i s - c i - v i s le s c i- d e v a n t A u g u s t in s } e t d ’ un m oulin sur le
chem in de Clerm ont ,
a lla n t à C liam alières ; les deux pre
m ie r s , du a 5 septembre 1 79° > l
consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat a în é , et l’autre en laveu r de M agdelaine
C h a rles, veuve de Claude D o n ces, sellier ; et le tro isièm e, du 1'*.
avril 1791 , en faveur d ’H crm cnt Jaco b , tra ite u r, habitant de
celte v ille , m oyennant les prix y én o n cé s, desquels il a pareille
m ent fait le dépôt présentem ent, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B eraud, épouse du sieur C liam pflour a în é ,
com m e faisant partie de la succession du sieur B era u d , son père,
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposes, sans préjudice à lui de tous ses droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
C op ie certifiée conjorm c :
L A B R Y ,
secrétaire.
II
oyer
.
�d é c l a r a t io n
J
e
du
c it o y e n
l a u o u s s e
.
soussigné recon n ois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Cham pflour - D esm oulins, la som m e de
2,400 fr a n c s , de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
p ayable au com m encem ent du m ois de janvier 1 7 8 g ; que long
tem ps avant l’éch éan ce, le citoyen Cham pflour aîné me dit que
son frère D esm oulins étoit inquiet à raison du payem ent de cette
lettre de ch a n g e , et me p ro p o sa , pour le tran q u illiser, de m e
faire lui-m êm e un effet de pareille so m m e , payable à m a volonté ;
ayan t accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frè re ,
je lui rem is ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
so m m e , q u ’il me paya ensuite.
D éclare et co n fesse, en o u tre , que lo n g -tem p s après avoir été
payé du m ontant du b illet représentant ladite lettre de ch an g e,
le citoyen B oyer me présenta la m êm e lettre de ch a n g e, en me
disant : V o ilà un effet dont vous avez été p a y é ; il faut y m ettre
votre acquit ; lequel il me dicta : et com m e il m ’avoit fa it écrire
que c ’étoit des deniers de lui B o y e r, je refusai de le sig n e r; dé
clarant en outre que le citoyen B oyer ne m ’a jam ais rien p a y é ,
ni pour les citoyens C h am pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolum ent pourquoi celte lettre de change s’est trouvée entre les
m ains de B o y e r , de laquelle je n’avois plus entendu p a rle r, que
depuis l ’année dernière que le citoyen Cham pflour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et m e dirent que le citoyen B oyer prétendoit s ’en faire payer par le citoyen Cham pflour aîné.
C e 29 n iv ô se , an g de la république.
D éclaration de ce que dessus.
LA U O U SSE .
Enregistre à R io n i, le d i x - s e p t germ inal an n e u f, fo lio 48 ,
recto e t verso. Jieçu un f r a n c , p lu s d ix centim es.
P O U G I I O N.
�Saint - A rn aud, le 7 frimaire an 8.
J'ai reçu ta lettre, m on cher C h a m p flo u r, par laquelle tu me
demandes un éclaircissem ent sur une créance de 600 francs que
le citoyen B oyer réclam e de la succession de ton f r è r e , qu’ il d it
n' a voir p a yée au nom de ton fr è r e , je ne puis te dire que ce que
j' ai répondu au citoyen B o y e r, qui est venu m e voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à m e rap
peler , et depuis j’ai encore tâché de m e ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur ce tte affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’il m ’a toujours parfaitem ent payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclam er : mais je ne m e rappelle pas que
jam ais il ne m ’ait rien été payé , au nom de D esm o u lin s, par
le citoyen B o y e r; je le lui ai déclaré com m e je te le m ande ic i,
parce que j’e n ’en ai pas la m oindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire to rt, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B o y e r, à qui j’ai fait la m êm e déclaration que
je te fais là. M ille respects à m adam e de C h am pflo u r; et re ço is,
m on cher a m i, l’assurance de m on bien sincère attachem ent.
L E N O R M A N D .
A R I O M , de l ' im prim erie de L a n d r i o t , seul im prim eu r du
T rib u n a l d ’appel. — A n 10.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour-d'Alagnat, Jean-Baptiste-César. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Champflour
Toutée
Pagès
Dartis-Marcillat
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Couthon
émigrés
inventaires
contre-révolution
Blatin
Aubier (abbé)
lettres de change
notables
opinion publique
séquestre
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-de-Dôme, défendeur ; contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1789-Circa An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0709
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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assignats
Aubier (abbé)
Blatin
contre-révolution
Couthon
Créances
émigrés
inventaires
lettres de change
notables
opinion publique
séquestre
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53485/BCU_Factums_G2431.pdf
5cc80560c1b54c4c33d979e01276a6bf
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Text
MEMOIRE
EN
P O U R le sieur
Ju lien
RÉPONSE,
J O U V A I N R O U X , propriétaire,
en qualité de père et légitime administrateur de
C
l a u d i n e
- F
JO U V A IN R O U X ,
l a v i e
sa f i l l e,
intim é
.
.
i •
CONTRE
1
~
L e sieur L o ui s L E G R O I N G j chevalier de ju stic e
de l ' Ordre de Saint-Jean de Jérusalem , chevalier
de l ' Ordre royal et
militaire de S a in t-L o u is
appelant.
sieur Jean -B aptiste, comte L e g r o i n g , maître
d ’une fortune q u ’il ne tenait p o i n t de sa fam ille,
L
e
n ’ayant pour héritiers naturels que des collatéraux,
a fa it, le 24 décembre 1 8 1 6 , un te s ta m e n t olographe.
�( 2 )
Ce testament contient une institution d ’héritier en
faveur de Claudine-Flavie Jouvainroux, alors âgée de
cinq ans. Ce jeune enfant est chargée de payer à sa
mère une pension viagère de 800 f r . , et de lui laisser
la jouissance de quelque mobilier.
Le testateur ne se borne point à remplir les forma
lités exigées par l ’article 970 du Code civil, pour
assurer la validité de ses dispositions ; toutes les pages
de son testament sont encore numérotées et signées par
l u i } il le met sous enveloppe 7 le cachète au sceau de
ses arm es, et écrit : « Ceci est mon testament olo« graphe,
déposé de confiance entre les mains de
]\ï- E spiaiasse „ n o taire- ro y a l, à C le r m o n t. — C e 2 4
« novembre
f8 i 6
». Il signe cette suscription.
Le sieur Legroing décède en août 18 17. Pendant
ces huit mois de survie > non seulement il ne montre
aucun regret, mais encore, le 17 mai suivant, il ac
quiert, au profit, de Claudine-Flavie Jouvainroux, une
propriété assez considérable j et bientôt après, craignant
que. ses volontés ne fussent pas pleinement exécutées,
il passe à cet enfant l ’ordre de différentes lettres de
changes dues par le chevalier, son frère.
Il était difficile de penser que ce testament serait
attaqué; jamais, en effet, la volonté d’un testateur
11’avait été plus régulièrement manifestée \ jamais l ’in
tention de persister- dans des dispositions faites avec
liberté, m’était re^sor^ d ’actes austsi positifs.
Aussi, aaidécC'S du comte, l’on put remarquer un
�( 3 5
contraste assez frappant dans la conduite de ses héri
tiers naturels.
i
L a dame chanoinesse Legroing, sa sœur, et le che
valier, son frère, étaient également appelés à lui suc
céder ab intestat. L a sœur a respecté les volontés
du comte : quoique réduite à une fortune modique ,
si on la met en comparaison avec celle du chevalier,
elle a pensé qu’il ne lui convenait pas de s’associer à
ce dernier, pour outrager la mémoire de celui q u ’elle
avait l ’habitude de respecter} elle a voulu conserver
intact l ’honneur de la fam ille, et ne point s’exposer
à rougir d ’une augmentation de fortune, q u ’elle n ’au
rait pu essayer d ’o b ten ir, qu ’en méprisant une vo
lonté qui lui -était con n ue, et en élevant une voix
sacrilège pour insulter aux mânes de son frère.
L e chevalier, au contraire, célibataire, comblé de
richesses, a cru devoir , dans l ’intérêt de la morale
publique ( \ ) , et pour resserrer les liens de la société
et d e s fa m ille s , attaquer ce testament, q u i, suivant
lu i, prouve Valiénation mentale ou Vabrutissement
de Vauteur. U n mémoire de 58 pages, signé par le
chevalier, distribué en première instance avec profusion
et sans nécessité, devait apprendre au public que le
comte, réputé par tous pour homme d ’ honneur, d’une
probité austère } sur dans ses principes, ami c h a u d ,
citoyen écla iré} sujet f i d è l e , était devenu l ’esclave
( i) T o u t ce qui est en caractères italiques est textuellem ent extrait
du Mémoire du chevalier.
�C4 )
d ’iine
f il l e
de
p e in e
cVune servante sans éducation ,
et qui ne possédait aucun des charmes de son sexe y
que , sexagénaire et malade j ce débile amant, dont
des attaques réitérées d ’apoplexie avaient paralysé
une partie de la bouche, et affaibli les ja m b e s, avait
cédé à la captation et à la suggestionne sa concubine
(qu i avait déjà, en sa faveur, un premier testament
authentique, du 28 avril 1807), pour écrire un tes
tament olographe, qui fait passer sa succession, à qui? à
Claudiue-Flavie Jouvainroux, enfant âgée de cinq ans,
que le chevalier suppose être la personne interposée
de sa mère.
Jouvainroux avait épousé F r a n
çoise Boudon. Cet homme adroit et rusé 3 convoite
Ma i s le sieur J u l ie n
les trésors de son maître j i l est le père p u ta tif
d ’une f i l l e q u ’il a eue de son mariage $ i l V instruit à
em ployer toutes les ruses qu i peuvent toucher un
'Vieillard im bécille ; et comme i l 11 avait ja m a is eu
personnellement aucune espèce de crédit sur l ’esprit
de son m aître, q u ’il mangeait même toujours à la
cuisine (1), et que la femme, en changeant de véteteuiens et d ’état} en se form ant une société nouvelle ,
en négligeant son maître et le laissant dans un état
d ’abandon 3 dont tous les voisins étaient indignés, en
fa isa n t des dettes } suite du lu x e auquel elle se l i
vra itj et qui excédait ses moyens a c tu e ls, avait in
disposé le comte qui manifestait sa colère par des
(1) Conclusions signifiées.
�( 5 )
im précations f o r t énergiques et q u ï l répétait avec
fo r c e ; Jouvainroux q u i, en outre, s’apercevait depuis
quelques tems que le com te L eg roin g tém oignait de
l ’hum eur et de la colère contre la m ère, q u ’il résistait
peut-être à fa ir e un testament en sa fa v e u r , lu i f i t
entendre q u ’il valait mieux faire porter le legs uni
versel sur sa fille que sur elle.
Mais A P R È S L E T E S T A M E N T O L O G R A P H E , JUSf/u’ ail décès
du co m te , on ne v o it p lu s q u ’ horreurs , menaces et
mauvais traitemens de la part de Jouvainroux............
d ’où le chevalier, induit que la violence a été jointe à
la captation et à la suggestion, pour arracher à la
faiblesse du comte, la disposition'testamentaire dont
il s’agit.
Il faut convenir que l ’a t t a q u e d u c hevalier ne p o u
vait présenter aucun m otif de crainte à l ’héritière d u
comte; les idées de captation et de suggestion , non
seulement devenaient invraisemblables , mais encore
s’évanouissaient entièrement, si on voulait les appli
quer à Jouvainroux et à son épouse; il était même
avoué que l ’un et l’autre avaient perdu toute leur
influence sur l ’esprit du testateur; de manière que la
captation et la suggestion étant reconnues l ’ouvrage
d ’un enfant de c i n q ans_, il était peu dangereux de ne
pas repondre aux plaintes du chevalier à cet égard.
Que dire également d ’actes de violences exercés après
le testam ent? N ’était-il pas é v i d e n t , d ’une part,
q u ’ils ne pouvaient être
impuiés à
Claudine-F lavie
Jouvainroux, seule partie dans la cause; et de l’autre,
�s’ils eussent existé, loin d ’être propres à obtenir les
dispositions testamentaires du comte, ne devaient-ils
pas, au contraire, le porter à les révoquer ou à les
anéantir ?
L e chevalier disait encore qüe le testament de son
frère était l ’ouvrage de la haine et de la colère ; mais
le rapprochement de différens passages de son Mémoire
prouvait que le comte et le chevalier, d ’un caractère
absolument opposé, ne pouvaient avoir une vive affec
tion l ’un pour l ’autre. L e com te, sur dans ses prin
cip es, alliant l'honneur à la fie r té } avait cru devoir
s ’expatrier et suivre le sort de nos princes. Il était
rentré dans sa p a t r i e ; mais sa s a n té é ta it a lté r é e 3 et
son humeur changée , ce qui était sans doute l'effet
d e ses longs voya g es, de ses souffrances, et des pertes
q u ’il avait éprouvées.
Le chevalier , au contraire , moins sûr dans ses
principes , tenant moins à d ’anciens souvenirs , et
appréciant mieux les avantages de la fortu n e, avait
rendu le fo j't Saint-Ange au conquérant de M alte. I l
suivit le vainqueur en E g y p te, et rentra en France
avec des cap itaux considérables , débris d'un service
a c t if et de ses spéculations maritimes, à l ’aide desquels
il acheta à son profit une partie des biens qui avaient
appartenu à sa fam ille, et se créa une existence plus
douce et plus indépendante que celle q u ’il pouvait
espérer avant la révolution.
'
‘
Cette différence de principes devait éloigner les
deux frères. L e comte no manifestait contre le chevn-
�( 7 )
lier ni Haine ni colère ; mais sa froideur et son indiffé
r e n c e , lorsqu’il en était question , pouvaient facilement
faire deviner quel sentiment il lui inspirait........
Ainsi le Mémoire du chevalier apprenait tout ce
qu’il était nécessaire de savoir pour apprécier sa de
mande : aussi le p u b lic , ses amis même l’avaient jugce.
avant qu ’elle fût présentée au tribunal de Clermont.
Il était dès-lors inutile d ’ajouter à ce que le sieur
Legroing avait écrit ; on pouvait, par reconnaissance,
ne pas lui demander compte de certains principes
légèrement avancés , et lui faire remise du ton de
supériorité et d’audace qu ’il avait pris clans sa défense j
dédaigner ses outrages, et mépriser même ses calomnies.
Le chevalier fut laissé à lui-même, l ’héritière du comte
garcla le silence,, et le t es t a m e n t f u t conf irmé.
Mais sur appel, le sieur Legroing réunit tons, ses,
moyens et renouvelle ses efforts. Il a fait un voyage à
Paris : il y a obtenu une consultation signée de cinq
jurisconsultes, qui lu i permettent d ’espérer de faire
annuller le jugement de Clermont. Fort de ces suffrages,
le chevalier jouit déjà de son triomphe, et il ne re, connaît pour amis que ceux qui le complimenlent à
l’avance sur le gain futur de son procès.
Il faut détruire cette illusion : l ’intérêt de la léga
taire du comte Legroing lui impose a u j o u r d ’ h u i le
devoir de publier sa défense. E lle aurait v o u l u ne point
rompre le silence j mais déjà sa r é s e r v e est présentée
comme l ’effet de la crainte. Ne
pouvant
plus se taire
sans d a n g e r, elle expliquera du moins avec modération
�( 8 )
es circonstances et les moyens de sa cause. Forte de
son d r o it , c’est au magistrat seul qu ’elle prétend
s’adresser. E lle doit dédaigner les vains efforts de l ’in
trigue, et mépriser les passions de certaines coteries,
q u ’à défaut d ’autres moyens le chevalier cherche à
exciter, et appelle à son aide.
/
F A IT S.
L e sieur comte Legroing avait épousé la dame
Demadeau; elle lui porta une grande fortune, et lui
assura des reprises considérables en cas de survie.
L e c o m te émi gr a : tous le§ biens provenus de son
père furent soumissionnés et ven d u s, de manière qu ’à
son retour de l ’émigration, qui eut lieu en 1804, il
ne lui restait d’autres ressources que de faire liquider
les reprises q u ’il avait sur la succession de la dame
son épouse. Ces reprises, réunies à quelques sommes
peu considérables provenues de la succession de sa
mère, composent toute la fortune du comte.
A u retour de l ’émigration, le comte Legroing vint
dans la maison paternelle : l ’état de sa santé exjgeait
un service continuel 5 sa mère, qui l ’ a v ai t a c c u e illi avec
bonté, le confia aux soins de Françoise B ou d on , dont
les qualités lui étaient oonnuesj depuis, cette do
mestique ne l ’a plus quitté.
Le chevalier était à Malte en 1798 : il rendit le
fort Saint-Ange, où. il avait l’ honneur de commanderj
«’embarqua sur l’escadre du vainqueur 5 assista à
�( 9 )
l ’expédition d ’E g y p t e , et revint en France comblé des
dons de la fortune, et honoré secrètement, d it-o n , de
la faveur de son nouveau maître.
Dès leur première entrevue, les deux frères purent
se juger*, le comte Legroing crut s’apercevoir que le
chevalier s’éloignait un peu des principes q u ’il jugeait
ne pouvoir être abandonnés sans d é s h o n n e u r - , il v it,
sans l ’envier, mais peut-être avec pein e, l ’état d ’opu
lence de son frère. On apercevait, en effet, dans leur
position , un contraste si p a rfa it, qu ’il eût été difficile
de deviner q u ’ils avaient servi sous les mêmes dra
peaux, et combattu pour la même cause.
Le chevalier, de son c ô té , pouvait par fois être
blessé de la fierté de son frère. Au tems où il vivait,
sa fidélité à ses anciens
souvenirs d e v a i t ¿-tonner celui
qui savait avec art se plier aux circonstances.
Le
comte n’était plus q u ’un censeur chagrin et incommode :
le chevalier dut s’en éloigner et ne plus penser q u ’à
utiliser les capitaux que son séjour chez Vétranger et
un service a c tif lui avaient procuré.
L e chevalier s’entremit dans les affaires de la fa
mille : il est inutile d ’examiner s’il agit dans ses in
térêts ou dans celui de ses proches ; mais l ’on doit
remarquer que cette circonstance ne fit q u ’augmenter
le refroidissement des deux frères, et que bientôt ils
cessèrent de se rechercher et de se voir.
Le comte avait pris un logement particulier5 il y
habita pendant trois ans : b o r n é à la société intime
de quelques personnes, il ne s o r t a i t de sa maison que
�pour rendre fréquemment ses devoirs, à sa respectable
mère.
Cependant la santé du comte était altérée; son
état d ’infirmité l ’alarmait. Dans cette position, il
crut, devoir disposer de ses biens : en conséquence, il
f[t, le 8 avril 1807, un testament par acte public;,
[)ar lequel il donna à Françoise B oudon, sa. gouver
nante, la propriété de tous les biens meubles et im
meubles dont il mourrait vêtu, et saisi. Ce-testam ent,
très-régulier en sa forme, fut
reçu par Me Cailhe ,
notaire R io m , en présence de quatre témoins.
Cependant le comte sentait la nécessité de se pro
curer q u e l q u e s distract ions et de se créer un genre de
v.ie plus conforme à ses goûts. Il fut se fixer à» Clerm o n t ,. où il avait beaucoup de connaissances , et
çomptait. quelques amis; il y fréquenta plusieurs
maisons quix l ’accueillirent avec égards et am itié , et
fi.tj ijienje long-tems partie d’une société connue à
Çlermont sous la dénomination de Salon delà Poterne.
lin 1 8 1 1 , Frajiçoise Boudon fut recherchée en
niftriçtge«par Julien Jouvainroux; cet homme, né dans
u»p classeï industrieuse et utile de la. société, était
alo^s sacrjstajn,de; latcathédrale; la surveillance et la
conservation, des orneinens et des trésors de l ’église
lui étaient confiées; son honnêteté, sa fidélité à remplir
ses devoirs, et ses vertus modestes lui avaient concilié
l’estime et; la., confiance des ecclésiastiques dont il
dépendait, d e:mnnièrc que le comte Legroing dut voir
avec satisfaction) une union
qui
lui promettait de
�( lï )
nouveàux secours, et q u i , d ’ailleurs, était devenue
indispensable.
L e mariage est du 17 septembre 18 11. ClaudineFlavie Jouvainroux est née le 4 mars 1 8 1 2 , et a été
présentée à l ’officier de l ’état civil par son père, qui
a signé son acte de naissance.
Cette enfant devint bientôt l ’objet de l'affection du
comte. La douce symphatie qui existe entre l ’enfance '
et la vieillesse, les rendit nécessaires l ’un à l ’autre ;
les jeux et les caresses de Flavie charmaient les ennuis
et calmaient les souffrances du vieillard. Les petits
cadeaux et les empressemens de ce dernier captivaient
h. leur tour la légèreté de l ’enfant, qui ne quittait
plus .ton bon ami y le séclitisait à ehacjue instant dll
jour par de nouvellés preuves d ’attachem ent, se joi
gnait h ceux qui lüi prodiguaient des secours, et
appaisait, par ses énipressemeris et ses innocentes pré
venances , les plaintes et les emportemens que la
douleur pouvait lui arracher. C ’est ainsi que Flavie
devint, par les qualités aimables de son âge, si chère
au comte Legroing, q u ’il l’a présentait comme son
héritière à tous ses amis et îi toutes ses connaissances;
ne dissimulait ni l’attachemént q u ’il avait pour elle,
ni la sollicitude dont elle était l ’objet, et ne se plai
gnait des pertes q u ’il avait éprouvées et des dépenses
que nécessitait son état de maladie, q iic parce q u ’il
craignait ne pouvoir assurer à c e t t e enfant une existence
aussi douce qu ’il l ’aurait désiré.
Le testament du comte est du 24 décembre 181G.
�( 13 )
Claudine-Flavie est la seule personne qui occupe sa
pensce; il l ’institue son héritière universelle, et ne
lui impose d ’autre charge que celle de payer à sa
mère une pension alimentaire de 800 francs, et de
lui laisser la jouissance de quelque m obilier; i l ré
voque, au r e s t e t o u s testamens anciens, et même
tous codicilles.
Ainsi l ’institution d ’héritier, de 1807, est complète
ment anéantie, et Françoise Boudon ne reçoit, dans
ce dernier testament, que la récompense due à ses
longs servicesL a forme de ce testament est également remarquable.
L article 970 du Gode civil fuit dépendre la v a l i d i t é
des testamens olographes de l ’accomplissement de for
malités extrêmement simples; la disposition, la signa
tu re, et la date écrite de la main du testateur, sont
les trois seules choses nécessaires et exigées; mais le
comte Legroin g, se complaisant dans son ouvrage, et
voulant donner à sa volonté un caractère d’authenticité
qui lui fut propre, ajoute à la volonté de la lo i; ainsi
toutes les pages de son testament seront numérotées et
signées par lui ; cet acte se trouvera sous une enveloppe
cachetée au sceau des armes du testateur, et déposé
dans l ’étude d ’un notaire, avec cette suscription datée
et signee: « Ceci est mon testament, déposé de confiance
« entre les mains de M. Espinasse, notaire royal à
« Clerm ont-Ferrand, le 2/, décembre 181G. »
La suggestion et la captation, sur-tout la violence,
exigent-elles des soins aussi minutieux pour la coufec-
�9 3
( .3 )
tion des actes arrachés aux malheureùx q u ’elles dé
pouillent...... ? Non : presque toujours la contrainte sé
décèle par l ’omission de quelques formalités essen
tielles.
Mais poursuivons : ce testament n ’était q u ’un acte
de précaution. L e comte Legroing, familiarisé avec
ses m aux, et accoutumé à souffrir, espérait encore
vivre assez long-tems pour assurer la fortuné de son
héritière de prédilection, en réalisant en immeubles
les capitaux q u ’il lui destinait 5 il paraît même que
ce projet aurait été promptement *et pleinement exé
cuté , si le comte avait encore vécu quelques années ,
et si, sur-tout, il eût pu être certain de la rentrée
prochaine cle fonds considérables prêtés avec générosité
mais dont le recouvrement devenait
difficile.
L e 17 mai 1 8 1 7 , c’est-à-dire, cinq mois après le
testament olographe, déposé chez Me Espinasse , le
comte L e g ro in g , Julien Jouvainroux et Françoise
Boudon, son épouse, stipulant pour F la v ie , le u r f ille ,
acquièrent de Marien C ou steix, différens immeubles
situés a Laroche-Blanche, moyennant la somme de
33 ,Goo francs. Cet acte assure ¿1 F la vie la nue pro
p riété de ces im m eubles, moyennant 20,000 fr a n c s/
le comte doit en avoir la jouissance ¿a vie durant ;
et le p r ix de cet usufruit entre dans la vcnie pour
1 3 , 6 oo francs.
Cet acte manifeste bien é v i d e m m e n t la volonté il il
comte. Comment résister aux inductions qui s’en
déduisent naturellement? D ’abord on no cl ira point
‘v
�0 4 )
q u ’il a été arraché par la suggestion, la captation ou
la violence. L a nature de l ’acte repousse.cette idée;
ensuite, s’il n ’eut pas été consenti librem ent, Jouvainroux et sa femme seraient seuls acquéreurs ; ils
n ’auraient point acquis pou r le compte de F la v ie , et
M. Legroing ne se serait pas réservé Vusufruit des biens
compris dans cette acquisition.
Il est évident que la même voloulé qui avait dicté
le testament du 24 décembre, a présidé à la- vente
du 17 m ai; le comte Legroing ne fait rien dans les
intérêts de Jouvainroux et de son épouse; il acquiert
pour J^lavie 3 leur f i l l e . Dans ses intentions, l ’ u s u f r u i t
des biens ne d o it p o i n t leur a p p a r t e n i r , il s 'en réserve
la jo u issa n ce, et y met un p rix, qui prouve q u ’il
conservait l ’espérance d ’élever, et peut-être d ’établir
lui-même cette enfant. Enfin, Jouvainroux et sa femme
ne sont rien dans la pensée du comte; Flavie est la
seule personne dont il s’occupe; elle seule sera pro
priétaire lorsque son usufruit aura cessé.
Peu de tems après, les infirmités du comte devinrent,
plus graves : une maladie cruelle, des plaies q u i s’élaicnt formées aux jambes et qui
exigeaient
des pan-
scineus aussi multipliés que douloureux, rendirent les
soins de plusieurs médecins nécessaires, et obligèrent
d ’appeler une garde-malade. MM. Monestier, Voiret et
Blatin lui donnèrent successivement , et ensemble ,
leurs soins; ils l ’ont vu jusqu’à sa mort. L a nommée
Terrasse, gerde-malade, n’a point, quitté le chevet de
son lit. Les uns el les autres ont éié témoins de l ’af-
«
�( >5 )
fection du comte pour Flavie; il la désignait constam
ment comme son héritière ; recommandait la plti£
stricte économie, et se lo u a it, d ’ailleurs, des soins et
des services de ceux qui l ’entouraient.
F l a v i e était, en effet, 'constamment présente à la
pensée du comte. Les douleurs les plus vives ne pou
vaient le distraire de cette idée unique qui le m aî
trisait entièrement, et q u i, parfois, l’aidait à supporter
ses maux. S’il s’agissait de cette e n fa n t, il devenait
soupçonneux et défiant; les précautions q u ’il avait
prises pour lui assurer sa fortune, lui paraissaient, par
fois, insuffisantes; il aurait désiré pouvoir imprimer
à chacun dés objets qui devaient composer sa succession,
un signe tellement ineffaçable, q u ’ilr fut propre à les
faire reconnaître par tous, c o m m e apj-ïartenant: à son
héritière, et à rendre toute soustraction impossible.
L e comte Legroing était créancier de son frère d'une
somme àssei considérable : il était porteur de tiois
lettres de change; il ne voulut point en laisser la
disposition au sieur Jouvainroux. Se défiait-il de lui?
Avait-il le pressentiment que lés circonstances pourraient.'
lui faire désirer d ’acheter la paix au prix de quelques
sacrifices...... ? Quoi q u ’il en soit, il signala ces effets,
et en passa l ’ordre h Claudinc-Flavie.
Cette précaution du comte sera-t-elle aussi regardee
comme l’effet de la suggestion et de la violence ? Mais
quel avantage présentait-elle à Jouvainroux et à sa
fem m e.....? F ile n ’ajoutait rien à 1» force de la dis->
position faite par le com te, en faveur de Flavie; Îe
�( i6 )
testament était suffisant pour la rendre propriétaire
de la succession, et en exclure le chevalier*, le comte
n ’avait donc, en écrivant cet ordre, d’autre but que
celui d ’assurer la propriété de Flavie contre ses propres
parens, et d ’ôter u ces derniers la possibilité d ’abuser
du dépôt que la loi leur confiait. Les père et mère de
Flavie n ’ont pu désirer cet acte : il est évident q u ’ils
n ’ont point employé la suggestion et la violence contre
leurs propres intérêts; il est aussi certain que le testa
m ent, la vente et les ordres émanent de la même per
sonne, ne forment, pour ainsi dire, q u ’un seul acte, dont
l’objet est d ’assurer à F la v ie s e u le , et au détriment
de ses ascendans 3 la propriété des biens du c omte .
Comment d onc p our r ai t -o n diviser u n ensemble de
faits si propres à manifester une volonté libre et éclairée?
Ne prouve-t-il pas, au contraire, de la part du testa
te u r,
une
anéantit
à
persévérance dans
ses dispositions, qui
l ’avance les reproches de captation et de
violence que le chevalier a osé articuler?
A u mois d ’août, l’état du comte Legroing était
devenu
plus inquiétant; sa maladie avait
fait des
progrès rapides; il était livré à des souffrances cruelles;
il eut recours aux douces consolations de la religion.
MM. C aban e, curé des Carmes, et M o u lh o t, vicaire
de Notre-Dame-du-Port, étaient venus constamment
le voir pendant les 1 5 derniers jour de sa maladie ; il
s’entretenait avec l ’un d ’eux au moins deux fois par
jo u r; il remplit tous ses devoirs avec une respectueuse
soumission, çt mourut en chrétien résigné. Les mal
�heureux espérait peut-être que samémoire serait honorée,
ou q u ’au moins ses héritiers se respecteraient assez
eux-mêmes pour ne pas attaquer les dispositions d ’un
frère auquel, depuis long-tems, ils étaient devenus
étrangers.
Flavie ne pouvait apprécier combien était grande la
perte q u ’elle venait de faire ; cependant ses regrets
furent amers. Mais Jouvainroux et sa femme sentirent
ce q u ’ils devaient à la mémoire du comte. Ses obsèques
furent magnifiques ; sa dépouille mortelle repose dans
un terrain acquis par Jouvainroux, et consacré à con
server le souvenir du bienfaiteur de Flavie.
Les faits principaux qui ont entouré le testament
du comte Legroing étant connus, il convient de tracer
rapidement l ’esquisse de la p r o c é d u r e , d ’i n d i q u e r la
marche tenue par le chevalier, et de mettre sous les
yeux de la C ou r les dispositions du jugement qui a
rejeté ses prétentions.
On a dit que le comte était mort le i 3 août 1 8 1 7 ,
c’est-à-dire huit mois après la confection et le dépôt de
son testament.
L e 1 4 , M® Espinasse, notaire, assisté du
sieur
Julien
Jouvainroux, présenta ce testament à M. le président
du tribunal civil de C lerm on t, qui dressa procès-vcrbal
de son ouverture et de sa forme e x t é r i e u r e , e t rendit
une ordonnance qui en continua le dépôt chez le no
taire Espinasse.
Il a fallu parler de celte
circonstance
pour détruire
les allégations que le chevalier Legroing a osé se per-
3
�svp
(' 18 )
mettre clans son mémoire imprimé (pages 24?
et 2^)Suivant lu i, le testament a été déposé par Jouvainroux
seul; donc il est demeuré, contre la volonté du comte,
possesseur de cet acte important jusqu’au décès de ce
dernier. La signature de M. le président n’est pas suf
fisante pour le rassurer sur la sincérité d’un renvoi qui
indique Me Espinasse comme étant celui qui a présenté
le testament, « parce q u ’on n ’ignore pas ce qui se passe
« à l ’hotel, lorsqu’on vient demander des signatures.
« On présente ordinairement une foule d ’actes rédigés
«■la veille ou le jour même; le président, qui en a
« connaissance,
signe avec confiance , apostille les
« r e n v o i s sa n s a u t r e m e n t y
r e g a r d e r ............. »
Que répondre à une pareille imputation consignée
dans un Mémoire signifié, et que l ’on a osé faire ré
péter dans une consultation?......... E lle est fausse : le
magistrat respectable et éclairé auquel elle était adressée
a cru devoir la dédaigner; et l’héritière du comte ne
doit plus s’en occuper que pour manifester ses regrets
d’avoir été privée, par ce fait, de l ’autorité q u ’aurait
pu ajouter au jugement q u ’elle a obtenu, le suffrage
de M. le président, qui crut devoir
s’ abst eni r.
Le i 5 août, le sieur Jouvainroux, tuteur de Flavie,
lit apposer les scellés sur le mobilier du défunt.
Le 19 , le chevalier Legroing forma opposition à la
rémotion.
U ne ordonnance du
août 1817 avait envoyé le
sieur Jouvainroux en possession des biens ayant appar
tenu au comte Legroing, conformément aux art. 1006
«
�V
( *9 )
et 1008 du Code civil. L a rémotion dös scellés avait
eu lieu , et l'inventaire était même presqu’achevé ,
lorsque le chevalier crut pouvoir prétendre que le mo
bilier d evait'lui être remis, comme héritier naturel,
sauf à le représenter, et déclara q u ’il formait opposition
à l ’ordonnance du 2 3 août.
Une ordonnance rendue en référé, le 2 6 , donna
au chevalier acte de son opposition, et renvoya à l ’au
dience du 27 pour y être statué.
Le chevalier présenta alors une requête où , sans
préciser aucuns faits, il soutint que le testament était
n u l, comme étant l ’eifet de la captation, de la vio
lence,’ de l ’obsession, du d ol, et fait ab ircito. 11 de
manda en conséquence à être envoyé provisoirement en
possession 5 mais le j u g e m e n t d u 27 le déclare non
recevable dans son opposition à l ’ordonnance du a 3 5
maintient, en conséquence, l’envoi en possession pro
noncé en faveur de Jouvainroux, et ordonne q u ’au
fonds les parties procéderont en la manière ordinaire.
Bientôt le chevalier
fait signifier et publier un
mémoire.
Suivant lui ,
i°.L e testament est fait ob irato : il est l ’ouvrage de ■
la haine et de la colère \
20 II est l’ouvrage de la captation et de la suggestion
de la part d ’une concubine.
Pas un seul mot de la v i o l e n c e comme cause de
nullité du testament; ce moyen n ’a même jamais été
présenté au tribunal de Clerm ont, et ne l’est pas
f
�( 20 )
encore dans les consultations distribuées en la Cour.
Ce mémoire est suivi d ’une requête signifiée le 28
mars 1818.
Le chevalier y demande la nullité du testament de
son irère, sous un double point de v u e ,
1" Comme fait en faveur d ’ une f i l l e naturelle du
sieur comte Legroing et -de Françoise Boudon,
sa
gouvernante, laquelle f i l l e naturelle ne s t pas légalement reconnue, et ne p e u t, à ce titr e , espérer que
des alimens;
20 Com me fait ab irato,
co n tre
sa
fa m ille ,
et
comme étant l ’effet de l ’obsession, de la captation et
de
la
s u g g e s t i o n d e la . p a r t d e
JU LIEN
F ra n ço ise
boudon
e t de
JO U V A IN R O U X .
Passant ensuite à la preuve de ces propositions, il
soutient que C laudin a-F la vie Jouvainroux est née du
concubinage de la dame Jouvainroux avec le comte
Legroing.
Parce qu e, i° il est prouvé (suivant lui) que Fran
çoise Boudon est devenue enceinte une première fois,
en 18065 que son enfant, nommée Joséphine, a été re
connue par le comte Legroing, tant dans son acte de
naissance que dans celui de décès;
20 Que Françoise Boudon a continué de cohabiter
avec son m aître, et de vivre avec lu i, soit à Riom ,
soit à C le rm o n t, notoirement et publiquement en
concubinage 5
3 ° Que Françoise Boudon est devenue enceinte une
deuxième fois en 18115 que sa grossesse était de plus
�( 21 )
de trois mois, lorsque M . Legroing a p ig é à propos
de la marier avec Julien Jouvainroux. Q u e, conséquemment, Claudine-Flavie est le fruit du concubi
nage ; ce qui est, au surplus, confirmé par la présomption
de la loi, suivant la maxime : A n cilla m prœgnantem
in dubio vid eri prœgnantem à domino m axim e ;
4 ° Que ces faits se trouvent justifiés par les circons
tances de cohabitation du mari et de la femme avec le
comte,
Par la différence q u ’il mettait entre e u x, faisant
manger la femme avec lu i, et le mari à la cuisine-, par
les soins q u ’il avait pour Flavie : il l ’appelait habi
tuellement sa fille , et celle-ci lui répondait en lui
d o n n a n t le n om de papa.
Enfin, par la tendresse que le comte avait pour cette
enfant. « E lle était si grande, que lorsqu’il s’élevait
« des querelles entre lui et les Jouvainroux, ce qui
« arrivait souvent 3 on le menaçait de lui ôter la petite
« Flavie, pour l ’appaiser et obtenir dé lui tout ce q u ’on
« désirait. »
E n conséquence, le chevalier conclut à ce que C lau
dine-Flavie Jouvainroux soit déclarée enfant naturel
non reconnu du comte Legroing; à ce que l ’institution
contenue au testament du 24 décembre 1 81 6 , et te
donation indirecte faite par la vente du 17 mai 1817,
ainsi que la donation indirecte r é s u l t a n t des ordres
qui se trouvent au dos des lettres de change souscrites
par le chevalier, soient annullées; à ce que toute la
succession lui soient remise, s’en rapportant d’ailleurs
�• f(
22 )
à la prudence du tribunal sur la quotité de la pension
alimentaire qui doit être accordée à C laudin e-F lavie.
Il faut convenir que le chevalier ne pouvait créer
un système qui outrageât plus ouvertement les mœurs
et la dignité du mariage. Ainsi c’est vainement que
les rapports qui existent entre le père et l ’enfant sont
liés à l ’institution la plus sainte et consacrée par les
lois les plus positives : un étranger, mu par un vil
intérêt, peut, en invoquant les. mœurs, troubler le
repos des familles, tenter de détruire l ’état d ’un enfant
légitime, pour le classer parmi les enfans naturels non
reconnus; e t, se jouant de la religion et des lois, les
i n v o q u e r p o u r d ét ru ir e ce q u ’elles ont de pl us sacre,
à l’eiFet de se rendre maître de la succession d ’un frère
dont il ne craint point de flétrir la mémoire.
Tel était cependant le moyen principal employé par
le chevalier en première instance. Les faits de capta
tion et de suggestion, ceux même q u i, suivant l ui ,
tendaient à prouver que le testament du comte avait
été dicté par la colère, n ’étaient articulés que subsidiaireinent.
Les voici :
i u Françoise Boudon a vécu en concubinage avec le
sieur Lcgroing depuis q u ’elle est entrée à son service;
2° A compter de cette époque, elle a mis tous ses
soins pour séparer et éloigner son maître de toute sa
famille. F ile et son mari ont em pêché toute commu
nication avec son frère, ses parens et ses amis ;
3 " F ile avait inspiré à son maître une telle haine
�9*3
( ’3 )
contre ses proches, et notamment contre~le chevalier,
que lorsque le nommé Ghantelot emporta, dans le
mois de juillet 1 81 7 , 8000 francs, de la part du che
valier, à-compte de ce q u ’il lui devait, le comte refusa
de les recevoir, en désavouant le chevalier pour son
frère, et en tenant contre lui les propos les plus inju
rieux ;
4° Que le chevalier s’étant présenté chez le comte,
le 12 du même mois de ju ille t, pour régler ses comptes
avec lui et lui payer une partie de ce q u ’il lui devait,
il ne p ut pas parvenir ju s q u ’ à lu i; q u ’il fut en con
séquence obligé d ’avoir recours à des tiers, et spécia
lement à un jurisconsulte de C le rm o n t, qui se trans
le c o m t e , rédigea la quittance des sommes
q u ’il recevait, et du mo de de p a i e m e n t de ce q u i res
tait d û ; que ce jurisconsulte lui ayant fait lecture de
po rt a chez
cette quittance, dans laquelle il lui faisait dire q u ’il
avait reçu telle somme de son frère, il se mit en fu
reu r, se leva sur son séant, quoique dans un état qui
le privait, en quelque sorte, de tout mouvement; dit
que le chevalier n ’était pas son frère, vomit contre lui
toute espèce d’injure , et ne consentit à signer la
quittance, que lorsque le jurisconsulte présent, qui
l ’avait rédigée, «ut rayé ces mois : Mon frère ;
5 ° La dame Jouvainroux était toujours présente
toutes les Ibis q u ’il arrivait quelques personnes auprès
de son maître. Lorsqu’elle sortait, elle l ’enfermait sous
clef, pour q u ’il y eût impossibilité de sortir ou de
communiquer avec qui que ce fût;
�Fvo
( H )
6° E lle a souvent maltraité son m aître, qui a fait
entendre ses plaintes, et se mêttait à la fenêtre , en
criant au secours! à Vassassin! que ses cris ont attiré
les voisins, le p ub lic, et même la police;
7° Q u ’elle s’emparait des lettres qui venaient de la
fa m ille , et spécialement du chevalier, pour que son
maître n ’en eût aucune connaissance; et q u ’une de
ces lettres a été trouvée dans la commode de la dame
Jouvainroux, lors du proccs-verbal du juge de paix ;
8° Que le comte était absolument dans la dépenda nce de' sa domestique-gouvèrnante, qui s’était em
parée de tous ses biens et facultés, et que le comte
é ta i t t o m b é dans u n é t at de faiblesse et d ’ i mb éc il li tC
tel, q u ’il ne lui restait ni volonté, ni discernement.
L e vague et l ’insuffisance de ces faits se laissent
facilement apercevoir : aucune circonstance n ’y est
déterminée; ils sont d ’ailleurs anéantis par le rappro
chement que l ’on peut en faire des faits connus et
constans au procès.
Les premiers juges les ont appréciés; ils ont examiné
cette cause dans son ensemble et dans tous ses détails.
Il convient de faire connaître leur jugement. }
P remière question : en la forme ;
L e testament du comte L egroin g est-il valable?
A tten d u q u e , conform ém ent à l ’article n eu f cent soixante-dix du
Code c iv il, il a <He écrit en entier, daté et signé de la main du testateur;
que la loi ne l ’assujétissait à aucune autre form alité ; qu ’il n’est môme
pas attaqué en ce point.
D euxièm e question : au fond ;
L e comte L egroing avait-il capacité pour disposer par tostament?
�(
25 )
A ttendu q û e , d'après l ’article n eu f cent deux du Code c iv il, toutes
personnes peuvent disposer, par testa m en t, excepté celles que la loi en
déclare incapables ;
A ttendu que le comte Legroing n’était dans aucun des cas de l'article
guatre cent quatre-vingt n eu f du Code civ il ; qu’il est m ort iiitegri
statds, et que son testament même prouve qu ’il était sain d’esprit.
Troisième question.
L e comte Legroing a-t-il pu disposer de l ’universalité de ses Liens?
A ttendu que le comte L egroing n’avait ni ascendans ni descendans ;
Q u ’a in si, et aux termes de l ’article n eu f cent seize du Code c iv il, ses
dispositions testamentaires ont pu épuiser la totalité de ses biens.
Q uatrièm e question.
L e comte Legroing a -t-il fait son testament par colère et en haine do
sa fam ille ?
A tten d u q u e , quoique le Code civil ne dise rien du cas où un testa
m ent serait attaqué pour cette cause, il faudrait examiner s’ il peut
encore y avoir lieu à l ’action en n u llité admise par l'ancienne jurispru
dence , dans q u e l q u e s - u n s de c e s c a s ;
Mais attendu q u e , quand les faits allégués par le dem andeur seraient
é ta b lis, il n’en résulterait aucune preuve que ce testament a été reflet
de la haine et de la colère du comte L egroing contre sa fum ille, ou ,
pour m ieux d ir e , contfe le dem andeur ; car la dame L e g ro in g , leur
sœ u r, a pensé qu’elle n’avait pas le droit de s’en plaindre.
Ces faits de haine et de colère seraient :
L e p rem ier, un rëfus de la part du comte L egroing de recevoir une
somme de huit m ille francs, que le dem andeur lui aurait envoyée par
le sieur C lia n telo t, le premier ju illet m il h u it cent d ix -sep t, et d’avoir
accompagné Ce refus d’injures contre le demandeur.
L e dem andeur ne dit pas quelles furent ces injures , ni le m otif dû
refus.
L e deuxièm e fait serait que le dem andeur s’étant
p ré s e n té
Iui-mômc,
le douze du mémo m ois, chez son frè re, pour r é g i« 'ses comptes et
payer une partie de ce q u ’ il lu i d e v a it, il ne put pas parvenir jusqu’il
!«»•
L e dem andeur ne dit pas non p lu s pourquoi et par qui il fut empêché
de parvenir jusqu’à son frère,
4
�L e troisième fait est que le dem andeur ayant alors invité un juris
consulte à porter pour lui la somme à. son frère, de rédiger la quittance,
et de régler le mode du paiement de ce qui resterait dû , et le jurisconsulte
ayant fait lecture de la quittance au comte L e g r o in g , celu i-ci se m it
en fu re u r, parce qu ’il y était dit que le chevalier Legroing était son
frère; il vom it contre lui toutes sortes d’in ju res, et ne signa la q u it
tance que lorsque le jurisconsulte eut rayé les mots : M on frère.
L e dem andeur a laissé également ignorer quelles furent ces injures ,
/
et cependant il serait possible que les expressions du comte L egroing ne
fussent pas reconnues injurieuses ; le dem andeur aurait pu regarder
comme injures quelques paroles seulem ent désobligeantes , qu ’un mo
ment d’hum eur ou le m écontentem ent aurait pu p ro d u ire, sans que le
coeur du comte L egroing y prît aucune part.
A u surplus, les frères L egroing auraient pu vivre en m ésintelligence r
ne pas s’aimer ; mais entre la haine et l ’amitié il y a tant d’autres sentim e n s q u i n e t r o u l i l c n t n i l'esprit n i la r a i s o n , q u i ne s o n t n i de la
haine ni de la colère !
E t s i , par de semblables motifs , il était possible d ’annuller les testamens faits au préjudice des collatérau x, il serait presque inu tile d’en
faire.
Enfin , et cette observation serait seule décisive sur ce point :
'A ttendu que le testament dont il s'agit est du vingt-quatre décembre
m il huit cent s e iz e , et que les fa its de colère et de haine allégués ne
seraient que du mois de ju ille t mil huit cent d ix - s e p t;
Q u ’a in s i, ils n ’auraient pas pu influer sur des dispositions testa
mentaires fa ite s sept mois avant leur existence.
Cinquièm e question.
Si ce testament n’a pas élé l ’effet de la haine et de .la co lerc, a-t-il
été celui de la captation et de la suggestion ?
il'
A tten d u que U\s moyens de captation et de suggestion sont comme
ceux de hnine et de coli-rc , méconnus par le Code c iv il; q u e, néanm oins,
s'il en existait, il faudrait encore examiner .aussi s’ils peuvent encore
fonder l’action en nullité, d’ un testament: olographe ;
Mais attendu qu’ il serait ridicule de prétendre qu'un enfant de cinq
ans a employé lu r u se , l'artifice, la mauvaise f o i , lés insinuations per
fides, pour tromper le comte L e g ro in g , lui rendre sa fam ille odieuse,
�V
)
le faire changer de volonté, et surprendre, en sa faveur, des dispositions
qu’il aurait eu l ’intention de faire en faveur du dem andeur;
A ttendu qu’il n'est pas vraisemblable que la force d’esp rit, la fierté
du caractère du comte Legroing aient jamais cédé aux volontés de Fran
çoise B o u d o n , au point sur-tout de faire ce q u ’il n’aurait pas voulu
faire ;
Q u ’il n’est pas presumable que la femme Jouvainroux eût tenté ce
triom phe; elle eût cra in t, sans d ou te, de déplaire à son m aître, et
m ême de l ’offenser ; s’il eût pensé qu ’elle vonlait le dom iner, elle eût
craint
d'achever de perdre une confiance déjà tant affaiblie par son
mariage ;
A ttendu , q u ’en supposant même que la femme Jouvainronx eût
quelque pouvoir sur l ’esprit de son maître , il n'est pas vraisemblable
qu’ elle Veût em ployé pour fa ir e exercer envers sa f i lle une libéralité
qu'elle eut désiré conserver en vertu du testament de m il huit cent sept >
ou fa ir e renouveler pour elle ;
,
A ttendu qu ’il e s t, au contraire , tout naturel de croire que c’ est par ses
caresses , par ses assiduités, par s e s s o in s , e x c i t a s peut-âtre par de petits
cadeaux que l ’âge mûr et la vieillesse ont coutum e de faire à l ’en fan ce,
que Claudine-Flavie a o b te n u , sans le savoir ni le d ésirer, cette marque
de sensibilité , d ’affection et de toute la bienveillance du comte L egro in g ;
q u e , ce dernier a pu penser qu’il ne devait aucun témoignage d’aflcction
ni de reconnaissance au chevalier Legroing , son frère , q u i , célibataire
comme l u i , ne transmettrait qu’à des étrangers ou à des collatéraux
éloignés les biens qu’ il lui laisserait ;
A ttendu q u e , comme le disent les auteurs, le testament olographe
est celui qui dépose avec plus de sûreté de la volonté du testateur;
A ttendu que les précautions surérogatoires que le comte Legroing a
prises pour assurer et conserver saine et entière l ’existence du sien, en le
cotant, et signant à chaque page , et en le mettant sous une enveloppe
cachetée au sceau de scs arm es, avec une inscription
sa main ;
Q ue la facilité qu’ il avait de révoquer d’un
é c r ite
m om ent
et signee de
à l’autre ces dis
positions, d’en faire de nouvelles, ou de n ’en pas laire du tout , et dç
c o n fie r
l’écrit de sa dernière volonté, soit à un des médecins qui lui
prodiguaient des soins pour prolonger ses jo u r s , soit ¿1 un des ministres
�c
( »8 )
q u i lu i portaient souvent les consolations de la religion, et le préparaient
à bien m o u rir, soit à toute autre personne qu ’il aurait choisie pour eu
être le dépositaire, fa cilité q u i, comme le dit R ica r d } a v a itfa it établir,
comme m a x im e indubitable au palais , que les fa its de suggestion n'é
taient pas recevables contre un testamen t olographe ;
Q u e , Vacquisition qui fu t faite au nom de C laudine-Flavic Jouv a in r o u x , le dix-sept mai m il h u it cent d ix -se p t, environ cinq mois
après le testam ent,
Q u e l ’ordre passé par le comte L e g r o in g , en sa faveur , sur lçs effets
de commerce à lu i consentis ;
Q ue le silence du comte L e g r o in g , ou p lu tôt sa persévérance pendant
les huit mois qui s’écoulèrent entre le testament et son d écès,
P ro u ve n t, d ’une m anière incontestable, que le comte L egroin g u ’a
été subjugué par personne ; qu’ il n’a cédé ni à l ’obsession ni aux solli
citations ; qu’ il n’ a été entraîné par aucune volonté étrangère ;
Q u il
h'u
a g i ( ju e p a r
l ’ im p u ls io n d e so n c œ u r d ’ a p r is
s e s s e f lt i m e n S
et ses affections personnelles.
L e dem andeur a lui-m êm e reconnu les affections du com te pour
F la v ie , en disant : « Q u e , quand le comte avait des momens de colère
« et d ’ im patience, elle allait se jeter dans ses b ras, et que ce petit
« manège calm ait sur-le-cham p le maître em porté. »
L e choix de F lavie pour son héritière a donc été l ’effet de sa volonté
lib r e , ferme et constante.
A ttendu que l’ acte qui le renferme , contient la preuve aussi que le
comte Legroing l ’a fait avec réflexion et tranquillité d ’esprit et de raison ;
Q ue l’ordre mis par le comte L egroin g sur les effets de com m erce,
n’a sans doute été imagine par lui , que pour conserver 1« valeur de ces
effets à C la u d in c-F la v ie , et em pêcher que son père et sa mère pussent
les lui soustraire, «t s’en approprier le montant.
l) ’où s’en suivrait une nouvelle preuve que rien n’a été fait ni suggéré
par la femme Jouvainroux , ni par son mari.
E t une observation qui ne laisse aucun doute à cet égard , c’est que
le dem andeur est lui-m ônic convenu que la mère de F lavie n’u v a it, h
l’époque du testam ent, aucune influence sur l’esprit de son m nître, en
disant : « Q u e , depuis quelque tems avant ce testam ent, le comte
t Legroing témoignait de l'hum eur et de la colère contre elle. »
�( =9 )
'A tte n d u q u e , quand il serait vrai que le comte Legroing se fût
procuré un modèle pour rem plir les formes d u testament qu ’il voulait
fa ire , cette circonstance serait absolum ent insignifiante, et ne pourrait
pas autoriser la critique des dispositions ;
Q ue d’officiers publics ont souvent recours aux formulaires !
Sixièm e question.
Claudine-Flavie Jouvainroux était-elle capable de rece v o ir, par testa
ment , le legs universel que lui a fait le comte Legroing ?
A ttendu q u e , d’après l ’article n e u f cent six du C o d e , il su ffit, pour
être capable de recevoir par testam en t, d ’être conçu au décès du tes
tateur ;
E t attendu qu’au décès du comte L e g r o in g , C laudine-Flavie Jou
vainroux était âgée de près de six ans ;
A tten d u que C laudine-Flavie Jo u va in ro u x, née le cent soixanteonzième jour du mariage de Françoise Boudon sa mère et de Julien
Jo u vain ro u x, ne peut pas être considérée comme enfant naturel du
c o m te L e g r o in g ;
Q ue le mariage fait présum er que Jouvainroux était l’nnteur de la
grossesse de Françoise B o u d o n , avec l ’intention réciproque de s’unir
par le mariage ;
Q ue le dem andeur n’a pas été exact dans sa citation de la maxime
suivie dans l ’ancienne ju risp ru d en ce, et justement abolie par nos lois
nouvelles ; en voici les termes : Crcditur virgini ju ra n ti se ah aliquo
cognitam et e x eo prœgnantcm.
E lle n’établissait, comme l ’a prétendu le dem andeur, aucune pré
somption , pas même les soupçons contre le m a ître , sur l ’état de la
grossesse de sa servante ; et le serment qu ’était obligée de faire la fille
en cein te, avait seulement l ’cflet de faire contraindre celui qu’elle avait
déclaré l ’auteur de sa grossesse, à lu i payer une somme modique pour
frais de gésine.
Q ue la présomption que Jouvainroux était l ’auteur de la grossesse de
Françoise Boudon , c'est q u ’au lieu de désavouer V evfun t, c’est Jou
vainroux lui-m êm e q u i l'a f a it inscrire
s u r
h registre de l ’état c iv il ,
comme étant son enfant d'avec Françoise B ou don, et qui en a signé
l'a cte ;
E t q u e , d’après les articles trois cent dix-neuf et trois cent vingt du
�( 3o )
Code c iv il, cet acte seul eût suffi pour constituer Claudine-Flavie ênfant
légitim e d u dit Jouvainroux ;
Q ue C laudine-Flavie a en outre obtenu la possession d’état d ’enfant
légitim e de Jouvainroux , par tous les faits que l ’article trois cent vingtun du Code désire ,
Puisqu’elle a toujours été regardée comme te lle , soit par sa fa m ille ,
soit par le public ;
Q u ’elle en a toujours porté le nom , et que Jouvainroux l’a toujours
traitée comme son enfant.
A ttendu q u e, d’après l’article trois cent v in g t, cette possession aurait
elle-m êm e suffi pour constituer cet état ;
A ttend u q u e , d’après l ’article trois cent vingt-deu x, nu l ne peut
contester l ’état de celui qui a une possession conforme à son titre de
naissance ;
Q u ’ainsi il n’est pas permis d’examiner com m ent Françoise Boudon a
v é c u a v a n t so n m a r ia g e ;
Q u ’ainsi il n’est pas permis d’alléguer que C laud in e-F lavie est le fruit
d ’un concubinage de sa mère avec le comte L egroing ;
Q ue la loi ne reconnaît même pas de concubinage après le mariage ;
Q ue le commerce illicite d’ une épouse avec tout autre que son ép oux,
est qualifié adultère ;
E t que le mari a seul droit de s’en plaindre.
A ttendu que l ’article trois cent tren te-n eu f du C o d e , qui autorise
tous ceux qui auraient intérêt à contester toute reconnaissance de la
part du père et de la mère , ne s’applique qu’aux enfans nés hors
mariage ;
,
Q ue toutes les dispositions qui composent la section 2“ du chapitre
des enfans naturels, et particulièrem ent celles de l’article trois cent
trente-sept, sont positives à cet égard ;
Q u ’ainsi la disposition universelle eut pu être valablem ent faite en
faveur de la fem m e, après le mariage ;
Q u ’ainsi l’on ne peut considérer C laudin e-F lavie Jouvainroux comme
personne interposée pour faire passer la libéralité sur la tête de sa inere.
Eh ! pourquoi aurait-on conçu celte idée plulAt en faveur de la mère
qu ’en faveur du père ? et cependant l’on n’ allègue aucune iucopacitü
contre le père..
�( 3i )
Comment concevoir aussi qu ’un en fa n t, q u i, dans l ’ordre de la n a tu re,
¿Levait survivre à ses père et m è re , eût etc choisi pour leu r transmettre
une libéralité?
Q u ’ainsi, et quand on supposerait que le maître ne peut pas faire un
legs universel à son domestique , l ’état de domesticité de la mère n’ in
fluerait en rien sur les dispositions testamentaires faites en faveur de
Claudine-Flavic Jouvainroux ;
Q ue l ’article m ille vingt-trois du C ode permettant de disposer en
faveur d’un dom estique, et ne lim itant pas la disposition, elle peut
s’étendre pour l u i , comme en faveur de toute autre personne non
prohibée ;
Q u ’ainsi la raison, la m orale, l ’honnêteté p u b liq u e , la sainteté du
m ariage, l ’ordre s o c ia l, le repos et la tranquillité des familles sont ici
en harmonie avec la loi pour assurer à C laudin e-F lavie Jouvainroux son
état d’enfant légitim e et le legs qu’elle a reçu ;
A ttendu que les faits allégués par le dem andeur sont ou vagues ou
insignifians, et ne seraient pas suffisans pour fonder l ’ action en nullité
d u te s ta m e n t ;
Q u ’ainsi la preuve offerte est non recevable et inadmissible , d ’après
la maxime : Frustrà probatur quod probatum non relevât.
L e tr ib u n a l, sans s’arrêter
à
la preuve offerte par le dem andeur,
ni
avoir égard à la demande en nullité par lui fo rm ée, le déboule de
toutes
ses
demandes, et reçoit les parties de Bayle opposantes
à
l ’ordon
nance obtenue par le dem andeur, partie de Pages; fait m ain-levée de
la surseance, et ordonne qu’ elle demeurera sans effet; leur fait m ain
levée des saisies-arrêts faites à la requête du dem andeur ; met hors de
cause sur les autres demandes des parties de B ayle, et condamne celle
de Pagês aux dépens ; et attendu que la partie de Bayle est fondée en
titres, ordonne que le
présent
jugem ent sera exccule provisoirem ent,
nonobstant et sans préjudice de l ’ a p p el, et sans qu’ il soit besoin de
donner caution.
X
■ '
?
■
L ’appel interjeté par le chevalier Legroing a soumis
les questions que présente cette cause,.et le jugement
Je
Clerm ont, à l ’examen de la Cour.
�( 3= )
D ISC U SSIO N .
L ’exposition du fait a déjà donné tous les élémens
nécessaires pour apprécier les prétentions du sieur
chevalier Legroing.
Que demande-t-il ?
L a nullité de toutes les dispositions directes ou in
directes faites par le comte Legroing, son frère, en
faveur de Claudine-Flavie Jouvainroux. Le testament
du 24 décembre 1 81 6 , la vente du 17 mai 1 8 1 7 ,
et
les ordres passés en faveur de Flavie , des lettres de
change dues par le chevalier, sont à-la-fois et égale
ment attaqués par lui.
Il convient que le testament est régulier en sa forme;
que le comte pouvait disposer de l ’universalité de ses
biens.
Quels sont donc ses moyens ?
Il répond :
i ° Q u e Claudine-Flavie Jouvainroux était incapable
de recevoir une institution du comte Legroing, parce
q u ’elle est son enfant naturel non reconnu, et q u ’en
cette qualité elle n ’avait droit q u ’à des alimens ;
20 Que le comte Legroing lui-même était incapable
de donner, parce q u ’il était en état d ’imbécillité ;
3 ° Que le testament du comte a été fait ab irato,
et en haine do ses proches, notamment de lui chevalier,
et que cette haine a été inspirée au comte par les
manœuvres de Jouvainroux et de sa femme;
%
�( 33 )
4 ° E n fin , que ce testam ent, et les actes qui l ’ont
suivi, ont été arrachés à la faiblesse du comte, par
l ’obsession, la suggestion, la captation, et même la
violence, également pratiquées ou exercées^par les père
et mère de Claudine-Flavie Jouvainroux.
Les moyens employés par le sieur chevalier Legroing
tracent naturellement l ’ordre de la défense de l ’héiitière du comte; elle doit les examiner successivement,
mais elle ne fera q u ’indiquer sés m oyens, et tâchera
de les resserrer dans le cadre le plus étroit.
Claudine-Flavie Jouvainroux était-elle incapable
de recevoir ?
Pour faire admettre l ’affirmative, il faudrait que le
chevalier Legroing put prouver :
Q u ’il est reeevable à a t t a q u e r l ’état d ’enfant légi
time de Claudine-Flavie Jouvainroux, état cjui est
établi et lui est assuré, soit par son acte de naissance,
soit par sa possession ;
Il faudrait q u ’il eût la faculté de substituer un état
incertaiu à un état acquis;
Q u ’il pût faire descendre un enfant légitime dans
la classe des enfans naturels, et prouver même que
Claudine-Flavie est l’enfant naturel du comte ; car
sans cette condition elle aurait été également capable
de recevoir.
Il faudrait enfin que le chevalier put , pour servir
ses intérêts, faire tout ce que les lois défendent, tout
ce que la religion et les moeurs réprouvent; q u ’il pût
outrager la dignité du mariage, détruire les rapports
5
�( 34 )
qui existent entre les enfans et les pères, rompre enfin
les liens les plus sacrés de la société.
Il est inutile d’insister sur le premier m oyen; il ne
doit rester dans la cause que pour apprendre q u ’il n ’est
rien de respectable aux yeux de celui q u ’un vil intérêt
aveugle; que, quels que soient d’ailleurs son rang, ses
lumières et sa réputation, l ’ambition peut l ’égarer,
jusqu’au point de lui faire manquer aux devoirs les
plus saints, en l ’obligeant à soutenir un système scan
daleux , que tous les amis de l ’ordre doivent repousser,
et q u ’il rejetterait lui-même avec une noble indigna
tion , si les passions qui l ’égarent lui permettaient d ’en
calculer les conséquences.
L e C o m te e tcn t - i l i n c a p a b l e cle d o n n e r ?
L e chevalier déduit cette incapacité de l ’état d ’im
bécillité de son frère; il ne cote aucun fait propre à
prouver son assertion : il se contente d’alléguer que le
comte était tombé dans un état de faiblesse et d ’imbé
cillité, tel q u ’il ne lui restait ni volonté ni discernement.
Quels sont les principes?
L a première condition pour la validité d ’un testa
ment est que le testateur soit sain d ’esprit (Code c i v i l ,
art 901).
Ce principe général, commun à tons les actes, à
tous les contrats, e s t , pour les testamens et donations,
iine disposition spéciale qui les régit particulièrement,;
de manière que l’article 5o 4 du Code 11e leur est point
applicable;
q u ’ils sont spécialement régis par l ’ar
ticle 901; et q u ’en conséquence ceux qui veulent at-
«
�/ ô û / ï,
( 33 )
laquer
un testament peuvent articuler et être admis
à prouver tous les faits qui sont de nature à établir
que le testateur dont l ’interdiction n’avait pas été
prononcée de son vivant, n ’était pas sain d ’esprit à
l ’époque du testament. Cette preuve est même admise,
quoique les notaires aient inséré dans l ’acte la clause
inutile que le testateur était sain d ’esprit ( i).
Mais pour pouvoir user de cette faculté, il faut
alléguer et prouver des faits de démence positifs et
concluans, parce que la présomption est toujours en
fa'veur de l’acte, et que la démence ne se présume ja
mais. Ce principe est si certain, que la Cour de cas
sation, par arrêt du 18 octobre 1809,
a jugé que
l ’dge a va n cé d u d on a teu r, l ’o u b li de sa f a m ille ,
l ’im portance d u le g s , la q u a lité p e u élevée d u d o
nataire , ne suffisaient pas pour faire décider que le
donateur n’était pas sain d ’esprit. Il s’agissait du tes
tament du sieur Leguerney de Sourdeval, qui avait
été jugé valable par la Cour royale de C aen; le testa
teur était âgé de quatre-vingt-six ans : ses légataires
universels étaient ses dom estiques , et les biens légués
excédaient
i
, 5 o o , ooq francs ( a ) . U n arrêt de la Cour
royale de Paris, du 26 mai 1 8 1 5 , a consacré ces prin
cipes en termes même plus absolus, et a maintenu le
testament du sieur Debermont, quoique le testateur
\
(1) Arrêt de cassation, du 22 novembre 1 8 1 0 . — Conclusions de
M. Merlin.— S i r c y , 1 8 1 1 , pag. 7 3 .
(2) Sircy, 1810, page $7.— Denevers, 1809, page/J^-
�(36)
eut été pourvu d ’un conseil, et que l ’on alléguât des
faits qui tendaient à prouver qu e, depuis 1788 jus
q u ’au 21 février 1809, il était dans un état habituel
de démence, facile à reconnaître par l'affaiblissement
de ses organes, son défaut de mémoire, et la facilité
de lui suggérer des opinions qui auraient pu compro
mettre sa fortune et sa liberté (1).
Ces principes s’appliquent spécialement aux testamens rapportés par des notaires; mais si le testament
est olographe, la présomption de sagesse augmente;,
elle est toute entière en faveur du testateur*, qui prend
le soin d ’écrire ses dernières volontés : dans ce cas, il
faut que le testament fasse naître par lui-même des
soupçons de faiblesse et d ’égarement d ’esprit; autre
m ent, il doit être respecté.
Tels sont les principes : sont-ils favorables aux pré
tentions du chevalier...... ?
D ’abord , il n’allègue aucun fait dont la preuve puisse
être ordonnée. L ’état de faiblesse d ’esprit et d ’imbé
cillité de son frère, aurait du se manifester par des
signes propres à le caractériser et à le faire reconnaître;
le chevalier n’arlicule rien , et cependant ses recherches
oiit été faites avec trop de soin, trop d ’ardeur et de
passion peut-être, pour que l ’on puisse supposer que
tous les faits ne sont point parvenus à sa connaissance.
Mais que pourrait-il prouver? L a solidité d ’esprit
du testateur n ’est-elle pas connue?
( 1) S iro y, 1 8 1 G, 2 e p artie, page a 38.
'
�fO ù ï
( 37 )
Au retour de rém igration, il liquide les reprises
qu’il pouvait avoir sur les biens de la dame son
cpouse; il en conserve seul l ’administration, jusqu’à
l ’instant de son décès; surveille ses nombreux débiteurs,
et écrit lui-même aux gens d ’affaire chargés de ses in
térêts , pour stimuler leur zèle ou leur indiquer la
marche q u ’ils ont à tenir.
E n 1807, il veut disposer de ses biens : un testament
fait par acte public, les transmet à Françoise Boudon,
sa gouvernante; il persiste dans cette disposition jus
q u ’en 181 G; mais , à cette époque , ses affections
changent d ’objet; sa volonté se manifeste de nouveau;
un testament olographe indique Claudine-Flavie .Touvainroux pour l ’ héritière du comte : une vente vient
b i e n t ô t après a ppr end re q u ’il persiste d an s cette vo
lonté, et il donne une dernière preuve de sa p r é vo y an c e,
en passant , au profit de son héritière, l ’ordre d«
certains effets, dont il pouvait craindre le mauvais
emploi.
Ces faits rendent toute autre explication superflue;
le comte pouvait disposer; son testament émane d’une
volonté éclairée; ainsi, l’étrange allégation du chevalier
est dénuée de fondement, et les conséquences s’en
rétorquent contre lui.
L e testament d u co m te a - t - i l é t é f a i t a b i r a t o ,
et en haine de ses proches ^ notamment du chevalier
L eg ro in g ?— Cette haine a-t-elle é té inspirée au com te
^ b
”
par les manœuvres de Jouvainroux et “ e sa fem m e?
On sait que les coutumes reconnaissaient un moyen
�( 38 )
d ’attaquer les testamens lorsqu’ils étaient faits en Iiainc
des présomptifs héritiers; l ’aversion générale des cou
tumes pour
les donations, avait
fait imaginer
ce
m oye n , à l ’exemple de la querelle d ’inofficiosité inventée
par les préteurs ro m ains, en faveur des enfans oubliés
ou prétérits dans l e te sta m en t de
l e u r s ascendans,
ou même exhérédés injustement. On appelait disposi
tions ab ir a to , celles qui étaient faites entre-vifs ou
par te s t a m e n t , par une personne injustem ent irritée
contre u n ea u tre; et action ab ir a to , la demande formée
pour annuller cette disposition. Tous ceux q u i se livrent
à. l ’étude des lois savent aussi que cette action faisait
naître une foule de procès scandaleux, dont la décision,
par la nature même
de
la d e m a n d e , était presque
nécessairement arbitraire.
L e C o d e garde le silence sur cette ac tio n , et de ce
que l ’article du projet q ui portait que la loi n ’admet
point la p r e u v e , que la disposition n ’a été faite que
par haine, colère, suggestion et cap tatio n, a été omise,
en faudrait-il
conclure que l ’action ab ir a to , do'ive
continuer d ’être
admise ? Bien
évidemment non :
puisque d ’ un côté, le Code permet les testamens ,|sans
permettre aux juges de créer d ’autres nullités que
celles qui existent dans la l o i , et que de l ’a u t r e , la loi
du
3o
ventôse an 12 abroge les coutumes q ui a u t o
risaient l ’action ab irato.
Dirait-on que celui dont les dispositions sont déter
minées par la haine et la colère, n’est pas sain d*esprit^
et que l ’article 901 exige celle co n d iti o n , po u r que la
�/Û
( 39 )
donation ou le testament soit valable? Mais doit-on y
en jurisprudence, rechercher la moralité des actions?
Le testament du célèbre lieutenant civil le Cam us,
fut annullé en 1712 , comme dicté par la haine et la
colère; qui aurait osé dire que ce magistrat, qui fu t ,
ju s q u ’à sa m o rt, l ’oracle le plus sûr de la justice, dans
la capitale du royaum e, n’était pas néanmoins sain
d ’esprit? On doit dire, avec M. Toullier, q u ’annuller
un testament, sous un prétexte aussi visiblement faux,
ce serait imiter les préteurs romains, q u i, dans l'im
puissance de faire des lois nouvelles, imaginèrent la
querelle d’inofiiciosité, sur le prétexte reconnu faux
par les jurisconsultes, que le testateur 11’était pas sain
d ’esprit.
pourrait-elle être
intentée? Appartiendrait-elle aux collatéraux, en fa
D ' a i l l e u r s , par q u i
c et t e ac t io n
veur de qui la loi ne fait point de réserve...? Faudraitil que les motifs de haine fussent écrits dans l ’acte ?
Quels caractères devraient avoir les faits, pour servir
de base à l ’action? De quelle manière la haine devraitelle être prouvéee— ?
Plus on réfléchira, plus on louera la sagesse du lé
gislateur, qui a écarté cette action de notre jurispru
dence (1).
Les arrêts des Cours sont conformes à ces idées. Trois
arrêts, l ’un du 3 i août 1810, de la Cour royale de
Limoges, l’autre du 16 janvier 1808, de la Cour royale
(1) Toullier, tome 5 , pages 7 1 4 et suiv.
�( 4o )
d ’A ix , et le troisième, du 2 5 juillet 18 16 , de la Cour
royale de L y o n , jugent uniformément que l ’action ah
irato n’est pas formellement conservée par le C o d e ,
q u ’elle ne peut être exercée que comme suite du prin
cipe q u ’il faut être sain d ’esprit pour disposer ; que la
disposition est valable, quoique faite par une personne
en c o l è r e si cet état ne lui a pas ôté la liberté d ’esprit
et atténué sa raison ; q u ’enfin , il faudrait que la haine
et la colère eussent été assez fortes pour occasionner
l ’aliénation des facultés intellectuelles du testateur (1).
Ces principes pourraient rendre inutile l ’examen
des faits. L e chevalier n ’avait autun droit à la succes
sion de son frère; e t , dans l ’ancienne jurisprudence,
1 action ab irato n ’ ét ai t admise cjii’cn f av eur des descendans en ligne directe (1).
D ’un autre côté,
le
testament ne laisse apercevoir aucun m otif de haine;
il est écrit avec sagesse; le chevalier Legroing n’y est
pas même nommé : comment
donc pourrait-il se
plaindre d ’un acte où le testateur ne s’est pas occupé
de lui ?
Mais le système d ’attaque, adopté par le chevalier
Legroing, repousse l’action q u ’il a intentée. Il a soutenu
que le comte avait une vive affection pour ClaudineFlavie Jouvainroux; c’est cette affection qui lui a fait
dire que Claudine-Flavie était la fille naturelle du
(i)Sir<*y, tome 10,
partie,page 5 a i ;torné i l , a* partie, page f\Qi ;
tome 17, a* partie, page i 3 .j.
(a)
Ricard, partie i r% cliap.
3,
section i 4 *
�comte; ce sont les preuves de cette affection, que le
chevalier voulait employer pour ôter à Claudine-Flavie
son état d ’enfant légitime. Les tribunaux ne peuvent*
point admettre ce genre de preuve, que la loi repousse;
mais les assertions du chevalier demeurent, pour ap-,
prendre que le comte avait pour Claudine-Flavie Une
préférence si marquée, q u ’il ne peut être permis de
s’étonner q u ’il ait voulu être son bienfaiteur.
Pourquoi donc chercher de la haine, là où il est
prouvé que l ’affection a dicté le testament ? Quelle est
la loi qui oblige de disposer en faveur d ’un parent in
différent, au préjudice de l ’étranger que l ’on préfère?
Comment serait-il perm is, sur-tout à un collatéral,
d ’outrager la mémoire d’un parent décédé, pour spo
lier l ’ héritière de son c h o i x ?
Mais encore il serait peu important que le testament
du comte eut été dicté par la haine, si elle avait été
conçue par le disposant lu i- m ê m e ,, et si elle était
fondée sur ses idées personnelles. Ce sentiment aurait
pu diriger sa volonté , sans que pour cela le chevalier
eût une action, parce q u ’en matière de testament, la
volonté assurée du disposant fait loi.
Si l'on supposait cette haine, qui oserait décider
qu ’elle fût injuste? qui oserait indiquer le caractère
q u ’elle devrait avoir, pour servir de base à.une action?
qui oserait enfin imposer à un testateur l ’obligation
de choisir, pour son héritier, celui q u ’il aurait sujet
de haïr?
Les faits ont appris que le
6
com te
et le chevalier son
�( 4a )
Irène devaient vivre dans une espèce d’éloignem etit;Le
niémoirè du chevalier donne les raisons qui pouvaient
légitimer la froideur du comte envers lu i; la différence
de lèivr conduite dans des tems difficiles; l ’entremise
du chevalier dans les affaires de la fam ille, pour de
venir le propriétaire des débris d ’une fortune, auxquels
lé comte croyait avoir des droits; une foule de nuances
q u ’ il ne peut être permis d ’indiquer : tout devait
l'aire désirer au comte de vivre éloigné de son frère.
Lorsque sa mémoire lui rappelait certaines circons
tances, il pouvait même se livrer U quelques emportemens:
1
.
,
s
^ Mills q u ’a de co m mu n cette haine avec Cl au d in e-
Flavie Jouvainroux? Ce n ’est point elle qui l ’a excitée;
on ne peut pas plus justement prétendre q u ’elle serait
** -
\f
'
l ’ouvrage de ses père et m ère, puisque le testament
qui institue Claudine-Flavie héritière du com te, ré
voque l ’institution fa ite , en 1807, en faveur de la
dame
Jouyainroux.
On
pourrait
donc
croire que
ce dernier testament a été fait non point en haine du
sieur chevalier"LegrQing, qui n ’avait pas un seul ins
tant été appelé à la sucqession de son frère, mais bien
en haine de celle que le comte
a v a it
honorée d ’une
institution, q u ’ uu changement d ’affection lui a ensuite
fait anéantir.
Q u e penser d ’ailleurs d ’une action ah ir a lo , intentée
contre un testament fait en 1 8 1 6 , et dont les causes
remonteraient à une époque antérieure à 1 8 0 7 ? ....
�( 43 )
JJi5Si l ’on examine les faits cotés par le chevalier,
quel eifet peuvent-ils produire?
Peut-on supposer que Françoise Boudon ait eu assea
d ’influence sur le, comte pour l ’éloigner de toute sa
fam ille?f
' •'
^ ■
Mais le chevalier convient, dans son mémoire, que
son frère avait eu des relations avec tous ses parens; il
convient q u ’il est accouru pour rendre ses devoirs à sa "
respectable mère , lorsqu’elle devint sérieusement ma
lade; q u ’il se montra’ pénétré, et donna des marques
de sensibilité dans ces dernières et touchantes en
trevues.
n ’est donc-point" contre sa famille q u ’il avait de
la haine : aussi la dame chanoinesse Legroing iie'se
plaint pas d ’avoir inspiré cet odieux sentiment à sou
frère.
•
L e décès de la dame Legroing mère est du 12 juillet
1 8 1 6 ; le testament est du 24 décembre suivant : il n ’a
donc eu lieu q u ’après une entrevufc assez touchante,
pour changer les intentions du com te, si sa volonté
n’eut été aussi ferme q u ’irrévocable.
Sous un autre point de v u e , de quelle importance
peuvent être les faits qui ont eu lieu en 1817 ? N ’est-il
pas insignifiant que le comte ait refusé *dé recevoir une
somme plus ou moins considérable des main s de Chantelot? q u ’il ait montré plus ou moins d ’impatience au
jurisconsulte qui lui présentait une quittance à signer?
tous ces faits seraient au moins personnels au testateur.
11 pouvait arriver que cette circonstance lui rappelât
�( 44 )
certains souvenirs peu favorables au chevalier; mais au
moins cette colère ne lui était inspirée par personne :
c ’était la
présence des intermédiaires
du
chevalier
qui l’excitait , et elle ne peut être regardée comme
suggérée par Jouvainroux ou son épouse. D ’ailleurs ces
faits étant postérieurs au testament et aux autres dis
positions du comte,
ne pourraient influer sur sa
validité.
Mais le chevalier n ’avait pu être admis auprès de
son frère! Une lettre écrite par lui n ’a point été-lue ;
elle n’a même pas été remise! Q u ’importerait à la
cause? Le sieur Legroing serait-il en état de prouver
que son frère désirait de le vo i r ; que les domestiques
s’étaient opposés à leur entrevue ; q u ’ils avaient sous
trait les lettres du chevalier, pour lui créer des torts
auprès de son frèré?
L e chevalier ne peut répondre affirmativement à
aucune de ces questions : tous ceux qui connaissaient
les deux frères savaient q u ’ils vivaient dans un éloi
gnement absolu, que le comte ne craignait point de
manifester. Les explications q u ’il a eues avec Chantelot
et le jurisconsulte chargé de la confiance du chevalier,
prouvent invinciblement que la présence de ce dernier
ne pouvait lui être agréable. Pourquoi donc rejeter
sur le compte de Jouvainroux et de sa femme la haine
dont il s’est plaint? Ces derniers devaient-ils faire vio
lence à la volonté de leur m aître, et le contraindre h
recevoir le chevalier, ou à lire ses lettres?...... Non; le
chevalier est réduit à se demander compte à lui-même
�( 45 )
d ’un sentiment dont les motifs lui sont connus. Il a
dédaigné l ’indifférence de son frère , tout le tems
q u ’elle n ’a pu lui être désavantageuse. Comment oset-il aujourd’ hui en faire reproche à sa mémoire, et
s’en créer un moyen pour arracher un bienfait q u i,
dans tous les cas, ne lui aurait été refusé, que parce
que le disposant l ’en aurait jugé indigne?
E n f a it , le testament du comte est une preuve de
son affection pour Claudine-Flavie ; il
ne montre
aucune haine contre le chevalier : son indifférence pour
lui a toujours été la même. Si le testament de 1816
est fait ab irato contre quelqu’un , c’est contre la
dame Jouvainroux.
du chevalier? Ce sentiment
est né des idées personnelles que le comte p o u v a i t avoir
sur son frère. Les faits qui peuvent l ’indiquer seraient
S e r a i t - i l fait on haine
postérieurs au testament. Ils ne peuvent donc influer
sur sa validité, ni être imputés à Jouvainroux et h
son épouse.
�I ( A V'
( 46 )
; . .
•
‘
L e testament et les actes r/ui l ’ ont suivi ont-ils été
arrachés p ar suggestion et captation ?—^L e chevalier
est-il recevable à proposer ces m oyens? — E xam en
des faits.
!
à
L a captation est l ’action de celui qui parvient II
s’emparer de la volonté d ’ un autre, à s’en rendre
m a ître , à la captiver ; elle s’opère par des démonstra
tions d ’attachement et d ’am itié, par des soins assidus*^
par des complaisances et des prévenances affectueuses,
des services, en un mot par tous les moyens qui peuvent
nous rendre agréables aux autres. L a captation . est
donc lcmaljle en cllc-meme j clic entretient l !umon
dans les familles et dans la société; elle ne peut être
vicieuse que par l ’intention, que par le but q u ’on sé
propose, et par l ’abus q u ’on en fait.
Aussi Furgole a-t-il remarqué que le mot captare ,
d ’où nous vient celui de captation , n ’était pas
toujours pris en mauvaise part ( i) . Dans le droit
romain, les institutions capta toires y étaient défendues;
mais cette prohibition ne concernait que les disposi
tions conditionnelles qui tendaient à s’attirer à soimême, ou ;i une autre personne, des libéralités de même
nature que celles que faisait le testateur; au reste, les
lois romaines permettaient des’atlirer des libéralités par
des caresses, des services, même par des prières (2).
(1) Fu rg o le , des T cs la mc n s , clxap. 5 , scct. 3 , n° 9.
(2) F ur gole , n° 19.
%
�/ û / b J è-j
( 47 )
L a suggestion suit la captation-, elle consiste en ce
que celui qui est parvenu à captiver la volonté d ’un
autr e, use de l ’ascendant q u ’il a pris sur son esprit, pour
lu i faire faire des dispositions q u ’il n ’aurait pas fa ite s,
s’il avait été abandonné à lui-même.
L e mot suggestion 3 qui vient du latin suggestio 3
et qui dérive du verbe suggerere 3 signifie proprement
avertir, inspirer, faire ressouvenir. Ainsi suggérer un
testament, c’est donc avertir, conseiller, persuader de
le faire (i).
L a suggestion par elle-même n’a rien de vicieux. Les
jurisconsultes romains, qui suivaient les austères prin
cipes d uP o rtique, n ’en tenaient pas moins pour maxime
q u ’il n ’est pas d é f e n d u de se
par des soins, des caresses, des
des prières (2).
des libéralités
c o mpl ai sanc es, et même
procurer
Cependant l ’on sait q u ’à Rome, plus que chez aucun
autre peuple, on abusait de la captation et de la sug
gestion; q u ’on en avait fait une sorte d’a r t, que culti
vaient avec fruit une foule d’ hommes méprisables ,
flétris du nom d ’ hére'dipètcs.
Mais comme la jurisprudence ne s’occupe que des
actions extérieures, et q u ’elle 11e doit ni rechercher,
ni juger rin tem ion des hommes, les viles pratiques des
(1) L a b b c , sur B cr r y, titre 18 , part. 8 , dit : « Suggerere cnim
est
« indicate, monerc. »
(2) F ur g ol c, ubi suprà, et n°
— Domat, 2e partie, Iiy. 3 , tit. 1 " ,
sect. 5 , u° a 5 , à la note ; et n° ^7.
�10** : ' ô .
1
( 48 )
hérédipètes n'étaient réprimées par aucune l o i , lors
q u ’on n ’avait à leur reprocher ni violence, ni dol, ni
surprise. On trouve même des lois formelles qui con
firment les dispositions provoquées par des soins, des
complaisances, et même des prières (i).
L e principe consacré par les lois romaines n ’est donc
pas douteux ; la suggestion et la captation simples
n ’entrainent point la nullité des dispositions testamen
taires, parce q u ’elles ne détruisent point la volonté du
testateur, à moins q u ’elles n ’aient le dol pour fon
dement.
Plusieurs coutumes de France proscrivaient les testamens faits par suggestion ; mais ce mot y était pris
par opposition à. l ’ a ct ion de dict er Çu) , c o m m e si 7 a u
moment de l ’acte, il y avait eu auprès du testateur
une personne qui lui suggérât les dispositions q u ’il
devait dicter; car ces coutumes exigeaient, comme le
Code civ il, que le testateur dictât son testament.
Bientôt quelques auteurs allèrent
plus loin , et
soutinrent que la captation et la suggestion, dégagées
de violences, de dol et de surprises, suffisaient pour
faire annuller les donations entre-vifsou testamentaires.
On
peut même dire que l ’ordonnance de i y 35 parut
favoriser cette opinion, q u a n d , après avoir ordonné,
sous peine de n u llité , l’observation des formes q u ’elle
prescrit, elle ajouta (article l\7) : « Sans préjudice des
( 3) Fnrgolc, ubi suprà, n° a 5 .
(1) Voyez Furgole cl le Nouveau Deni sai t, au mot Captation,
�C 49 )
IÛ
« autres moyens tirés de la suggestion ou de la capta^
« tion desdits actes ». Dès-lors il n ’y eut plus de règle
certaine;, ce moyen vague devint un prétexte pour at
taquer ^les testamens auxquels on n’avait à opposer
aucun yice réel ; et bientôt naquirent rune foule de
procès, scandaleux, dans lesquels des héritiers peu dé
licats
cherchaient
parens
i
* à flétrir la mémoire
1
I*de
/ leurs A
descendus dans la ]tombe, pour disputpij les dons q u ’ils
avaient faits à des.^légataires dont on ne manquait
jamais-def noircir , plus ou moins. gri^yement la répu
tation.
•
...•• i l; 1, {r jxr
.. . \j *%j ^ .il.
,
....
»
. Les .rédacteurs du projet du C od e-cjvil voulaient
prévenir ces abusjj;^ et .i}nr,article portait : « L a loi
« n’admet point la pr^uve^que la disposition n V é t ç
« fuite :<jue par , haine , ¡suggestion.! OU. captation. » ...
L e conseil d!Etat fut arrêté par la crainte d ’e n c o u
rager la cupidité. L ’article fut supprim é, mais avec
regret. i:«iLa ’ loi V 1 dit’ Forateur du Gouvernement ,
«' garde le silen ce'su r'lè défaut de 'liberté qui peut
« résulter de la suggestion et de la captation, et sur
« le vice d ’une volonté déterminée par là colère ou
« par la h a in e............. Peut-être vaudrait-il mieux ,
« pour Y intérêt g é n é r a l,r que cette source de procès
« ru in eu x et sca n d a leu x f û t ta rie, en déclarant que,
u ces causes de n u llité ne seraient pci s qçlm isesj mais
« alors la fr a u d e et les passions auraient cru »avoir
'
' ' -r '
•
a dans la loi même un titre d ’impunité. Les circons« tances peuvent être telles, que la v o lo n té de celui
disposé n 'a it, p a s é té libre ,, ou q u ’il ait
« qui a
7
�"
C
50 )
« été clolîiiné éntièrcnient par une passion injuste. »
L e m otif du silence de la loi prouve q u ’elle n 'au
torise point l ’action en nullité d ’un testament pour
cause de captation et de suggestion. L e Code exige
que lie tëstateui^ ait Tesprit sain , que sa volonté soit
lib r e , q u ’il n’ait pas été surpris où induit en errëUr:
cés principes sont fondés sur la raison^ Mais comment
la suggestion , qui rie consiste que dans la simple per
suasion tîégagée1 de fraude et de dol, pourrait-elle être
. un moyen ‘d'attaquer un acte? Détruit^élle la liberté,
lors même que les caresses et les prières seraient vive^,
pressantes et réitérées, et même importunés? Il n ’y a
que les moyens frauduleux: qui soient réprouvés par
la justice et lu morale j dans tous les attires V:as ‘ tbut
se réduit au point clé savoir si le testateur ¡n’était point
inibécille, ou si sa volonté tétait libre (r).
A in si, la captation et la suggestion nre pont pas, dans
notre d r o it , des ¡moyens différons du d o l, de la fraude
et de l ’erreur. La preuve n ’en peut être admise,, que
lorsque les faits tendent à prouver le dol* Ces1maximes sont célleâ de notre jurisprudence. Ôn
peut consulter lès arrêts rendus sur celle matière* on
y ven'a (pie la captation n’est cause de nullité d ’un
testament, qu'autan i q u ’elle est empreinte de d o l et
de fr a u d e / qu autant q u ’elle a tendu à tromper le
(r) Furgolc,'t<&i suprà, n° i S . — Mallevillc, torao a , p^go
�7èstctïeûr', et à 'anéànlir sa v o lo n té'( i j . j E lî s^écartant
rfe’ ces''principes-, ori retomberait nécessairement-dans
-l’arbitraire.
!
| e L
uJiipoùi’ être admis ti la'preuve d ’une suggestiou artb■ficieùsb, il faut encore poser des' faits précis j ’des faits
qui caractérisent des machinations, des artifices^ des
fourberies*, en un m ot, le dol et la fraude.
~ De simples présomptions, telles que celles que définit
l ’art. i 353 du C o d e , ne suffisent pas. On a déjà v u ,
"dans un arrêt de la'C o ur de cassation, du 18 novembre
1809^(2) , que l ’importance du. legs, l ’oubli de sa
"fam ille, la qualité1des légataires , qui les tenait perpé
tuellement attachés ‘à la personne du testateur1, en
qualité de domestiques, ne pouvaient être^une preuve
<que-le testateur ¡fût en c lémence, et que le .testament
lui eut-été artificieusement suggéré.
; ■
Mais la difficulté augmente , si l ’on veut prouver
la suggestion et la captation contre un testament
olographe. Tous les auteurs conviennent q^u’il çst, plus
difficile d’attaquer un testament olographe , q u ’un
testament notarié^ Dans /celui-ci on ne trouve, que la
s i g n a t u r e du testateur : c’est la.seule part, qiie l ’acte
prouve q u ’il y ait eue; le reste est une pr^spnrçtjlon. iy.e
. testament olographe, au co n tra ire ,.\est parUçuÎièvèWtiHt
et tout entier l ’ouvrage du testateur; iL pst ontit^ement
(1) Bruxelles, 21 ’avril 1808.— Si re y, 2* partie, pag. »46 el suiv.— •
Poitiers, 27 mai 1809. ■
— Si rey, , 1 81 0, a ” partie, pag. 23 et suiv.—
Agen , 18 juin 1812.— Si rey, tome
i rc partie, pag. 219.
�écrit’, -daté et . signé de sa main : ce f acte est consé»
quemment moins exposé aux surprises; et il est difficile
de supposer dans un homme faible d ’esp rit, ou qui
agit contre sa volonté, assez de patience, de docilité
et' de Soumission , pour écrire de sa main son testa
ment (i).
Aussi la forme olographe d ’un testament forme-t-elle
une fin de non-recevoir contre le reproche de sugges
tion et de captation.
Les auteurs les plus recommandables nous appren
nent q u ’il a passé comme maxime au palais, que les
faits de suggestion et de captation ne sont pas recevables contre les testamens olographes.
O n p e u t c onsult er le J o u rn a l d u P a l a i s d e P a r i s ,
itom. i er, pag. 907. — Ricard, part. 3 e, chap. i«r,
n° 49 * — B a rd e t, tom. 1 " , liv. 2 , chap. 67. —
Basnage, art. 7 3 , sur la coutume de Normandie. —
Soëfve, tom. i er, centurie 4 ? chap. 8 4 La jurisprudence nouvelle est aussi conforme h ces
maximes. L ’arrêt de la C our d ’A g e n , du 18 juillet
1812 , confirmé par arrêt de la C ou r de cassation,
du 6 janvier 1814 > a consacré, en principe, que la
fo r m e olographe d u testam ent, la survie du testateur
p en dan t un tems m o r a l, son éloignem ent et son in
d ifféren ce envers ses su cccssib le s , étaient autant de
présomptions exclusives de suggestion et de captation,
contre lesquelles elles élevaient une fin de non-recevoir.
[ ( 1 ) Œ u v re s de d’Agucsscau, lome 3 , page 3 6 8 .
�(
«3 )
Ces principe^ établis, le chevalier Legroing est-il
recevable à opposer (les moyens de suggestion et de
captation contre le testament de son frère?
Ce testament est olographe ; non seulement
il
est écrit en entier, daté et signé par le testateur, mais
encore toutes les pages en sont signées et numérotées -,
il est sous enveloppe et cacheté au sceau de armes du
comte : la suscription est écrite et signée par lui -, le
dépôt est aussi de son fait : tous ces caractères ne
sont-ils point autant de preuves de la liberté et de la
volonté du testateur ? ne détruisent-ils point à l ’avance
toutes les allégations du chevalier?
L e testateur a survécu pendant huit mois à son tes
tament. Cette survie n ’est-elle point encore une nou
velle p r e u v e de sa v ol onl d ? C h a q u e jo u r, chaque
moment n ’en sont-ils point une ratification s o le n n e lle ?
L e comte avait mille moyens pour changer ou dé
truire ses dispositions; il n ’en a employé aucun; il est
entouré de trois médecins et d ’une garde-malade; il
reçoit les consolations de la religion; pas un seul mot
de regret dans ses derniers instans; il ne manifeste
q u ’ u n e seule volonté, celle de
maintenir l'institution
d ’héritière faite en faveur de Claudine-Flavie Jouvainroux; q u ’un seul regret, celui de ne pouvoir lui
une fortune plus considérable.
Les avocats généraux les. plus célèbres, les oracles
de la justice et les docteurs, consacrent la survie du
tra n sm ettre
testateur pendant un teins moral, comme une fin de
non-reccvoir insurmontable : nu arrêt a même décidé
�q u ’ un espace de trois semaines était une présomption
qui devait faire rejeter la preuve ( i). :‘f
A insi, le simple silence du testateur*serait suffisant
pour faire rejeter les moyens de suggestion et de cap
tation; mais Claudine-Flavie peut encore prouver que
son bienfaiteur a persisté dans ses volontés d ’une ma
nière très-expresse. E n effet, la vente du 17 mai 1817
et les ordres des lettres de change sont autant d ’ap
probations du testament de 1816 : ces actes démontrent
aussi que la volonté et l ’intention du comte d ’exercer
ses libéralités envers tout autre qtie le chevalier, ont
été immuables; et il est impossible, depuis 18 0 7, de
t ro uve r
aient
un seul instant où les dispositions du comte
p a r u f a vor ab le s à sou frère.
Il importe peu que le testament olographe ne reçoive
de date que par le décès du te stateur, et que rien ne
prouve que le testament soit antérieur à la vente et
aux ordres: d ’abord ce moyen ne serait pas exact ,
puisque l ’acte de dépôt fait preuve de la date du tes
tam en t; mais le fut-il? il serait insignifiant. De quelque
manière q u ’on place ces actes, les conséquences sont
les mêmes; en effet, si la vente et les ordres sont an
térieurs au testa m en t, ils prouveront
que
l ’intention
du comte a toujours été d ’être libéral envers Claudine(1) Arrêts du parlement de Paris, du iG janvier 16G4; a 3 avril 1709.
Journal des Audiences, tome
, livre 3 , chapitre t\ . — To me 5 ,
partie a ” , livre 9 , chapitre 19.— Soëfvu, tome a , centurie a , clinp. 19.
Arrêts du parlement de Toulouse , 3 o août 1735 ; 11 septembre 1722 ;
ao aoûl 1726 , etc.
�(55)
'
fldvie Jouvainroux, et que son testament* n’est que
l ’accomplissement de sa volonté déjà manifestée; si,
au' contraire, ces actes sont postérieurs au testament,
ils en seront la ratification et l ’approbation la plus
complette.
xi Que l ’on se fixe actuellement sur la suggestion et
captation reprochées à Jouvainroux et à son épouse :
la plus légère ¡attention convaincra de la faiblesse et
de la nullité de ce moyen.
h
D ’abord , il était contre l ’intérêt de la mère de
suggérer ,un testament olographe qui anéantissait son
institution d ’héritier; si elle avait eu quelque influence
sur l ’esprit du. com te, elle s’en serait servie pour fixer
ses dispositions en sa faveur; si elle avait dicté le tes
t a m e n t olographe de 18 16 , il ne serait autre, chose
que la confirmation de celui du 18 avril 1807.
Le chevalier répond par un moyen d ’incapacité.
Suivant l u i, la mère de Claudine-Flavie Jouvainroux
vivait en concubinage ayçc le comte; depuis,.,qu’julle
était entrée k son service, elle ne( pouvait recevoir, de
lui : Claudine-Flavie Jouvainroux est donc la personne
interposée de sa mère incapable. .
j
.
M ais, d’une part, si l ’ancienne législation rejetait
les dispositions faites entre personnes qui avaient vécu
dans un commerce illicite; si on y tenait pour maxime
que don de concubin à concubine ne v a u t , il est cer
tain aujourd’hui que cette prohibition n’existe plus;
qu e, suivant l ’article 902 du Code, toutes ¡personnes
peuvent disposer et recevoir, excepté celles que la loi
�( S6 )
en déclare incapables. Gom m ent, avec un texte aussi
formel, les juges pourraient-ils, sans excéder leurs
pouvoirs, faire revivre une incapacité prononcée par
l ’ancienne loi? Plusieurs arrêts ont fixé la jurisprudence
sur ce point (i).
D ’un autre côté, comment proposer un pareil moyen
contre une épouse et une mère! La preuve d ’un pareil
fait blesserait à-la-fois la morale publique et la dignité
du mariage ; il est évident q u ’elle serait plus scanda
leuse que le fait lui-même.
Il n ’y a donc point d ’incapacité, conséquemment
point d ’interposition de personne; et l ’idée de concubi
comme celle de l ’illégitimité de la naissance de
Claudine-Flavie Jouvaiuroux ne restent « q u e pour
nage
« apprendre q u ’il ne faut pas confondre la captation
« qui inspire, par ruse ou par fraude, une volonté dif« férentedecellequ’auraiteueledisposant,quisubstitue
« une volonté étrangère à la sienne, avec le motif qui
« dirige une volonté qui lui est propre. Dans le pre« mier cas, la volonté est dirigée par le fait d ’autrui ;
« dans le second, il ne peut y avoir du fait d’autrui :
« c’est la volonté du disposant qui agit » (M. Grenier,
« Traité des donations).
Ainsi les moyens les plus puissans du chevalier se
( i ) Arrôt de la Cour île Tïlincs , du 29 tlicrinidor an i a . — Jurispru
dence du Code c i v i l , loinc S , page 198.
Arr6t de la Cour de T u r i n , du 9 juin 1 8 0 9 . — Voyez M. Grenier,
des D onation s, tome i ,T, p»g(,s 3q3 cl suiv.
�rétorquent contre lu i, et viennent l ’accabler. La loi
repousse la preuve des faits q u ’il allègue ; s’ils conservent
quelque vraisemblance, c’est pour manifester la vo
lonté' du testateur; prouver q u ’il n’a point agi par
le fait d ’autrui, mais bien par une détermination qui
lui était propre, et par des motifs dont la loi ne de
mande aucun compte.
Que reste-t-il donc au chevalier? Dira-t-il encore
que la dame Jouvainroux était toujours auprès de son
maître? que celui-ci était dans sa dépendance? q u ’elle
s’était emparée de tous ses biens et facultés?
Mais que signifient de pareilles imputations? Quels
sont les faits précis? les faits propres à caractériser les
machinations, les artifices, les fourberies, en un mot,
le tlol et la f raude <jue la loi a v o u l u réprimer? L e
chevalier ne cote pas un seul fait dont la preuve puisse
être ordonnée.
Toutes ces allégations seraient même insignifiantes,
si elles étaient prouvées. E n effet, le comte Legroing
était malade et infirme : il était naturel q u ’il désirât
la présence de ceux qui devaient lui accorder des soins;
et si le besoin de son service obligeait ses domestiques
à le laisser momentanément livré à lui-m êm e, il était
aussi convenable de fermer son appartement, pendant
ces courts instans, pour le soustraire à des visites que
son état de souffrance pouvait lui rendre importunes,
et lui éviter le désagrément d ’aller ouvrir aux étran
gers , ce que d ’ailleurs il était hors d’état de faire dans
J.a dernière année de sa vie.
�( 58 )
E n fin , la suggestion et la captation ne peuvent être
produites que par les prévenances et les conseils de la
personne que l ’on aime : elles ne sauraient être imputées
à celui qui n ’aurait ni la confiance, ni l ’amitié du
testateur au moment où il écrit ses dernières volontés.
O r , que l'on suive, dans le mémoire et les conclu
sions signifiées du chevalier, l ’état de l ’in térieu r; du
comte.
Jouvainroux nravait aucune influence sur l ’esprit de
son maître; le comte le tenait éloigné de lui : il man
geait à la cuisine.
L a femme, depuis son mariage, méconnaissait son
état; elle s’était fait des sociétés nouvelles; elle négli
geait son maî t re , le laissait dans u n é t a t d ’a b a n d o n ,
faisait des dettes, excitait enfin sa mauvaise h u m eu r,
qui se manifestaiti fréquemment par des imprécations
énergiques et souvent répétées.
Claudine-Flavie Jouvainroux, au contraire , était
l robjet de toutes les caresses du comte. Sa tendresse
pour cette enfant était si grande, q u ’une prière, une
prévenance de Flavie pouvaient appaiser sa colère, et
que le chevalier n’a pu la dépeindre, q u ’en la compa
rant aux effets de la tendresse paternelle.
Si la captation e f l a suggestion ont été pratiquées, il
serait dès-lors évident q u ’elles ne peuvent être imputées
à Jouvainroux et à son épouse. L 'u n avait toujours été
indifférent au comte; rautre s’était attiré sa haine. L e
comte lui donnait même des preuves de son ressenti
m e n t, en anéantissant le testament q u ’il avait fait en
�¡ ( ù 'k ?
(i 59 )'
¡¿a laveur.
L ’auteur dé ces manœuvres serait donc
Claudine-Flavie Jouvainroux!...... Son jeune âge inté
ressait le comte : les caresses, les tendres soins del ’enfant soulageaient les douleurs du vieillard. Les empressemens de Claudine-Flavie ne pouvaient ressembler
aux démonstrations d ’ une amitié feinte; ses complai
sances n’avaient point un sordide intérêt pour mobile
la récompense q u ’elle en a reçue doit donc être sacrée
pour les tribunaux. La religion, la morale et la loi se
réunissent pour approuver et faire respecter le testa
ment du comte Legroing.
* Il faut dire un mot de la violence prétendue exercée'
sur la personne du testateur.
Les principes sont simples. Des excès réels , de
mauvais traitemens , la soustraction des a l imens ou
*
des services au testateur malade, la menace même de
le laisser sans alimens ou sans service , ou d ’user
d ’excès réels sur sa personne , pourraient être des
raisons suffisantes pour annuller un testament.
Mais il faudrait que la violence fût intervenue
et que les faits propres
& la prouver fussent articulés; car elle ne doit pas être
avan t
la
faction
du t e st a m e n t
,
présumée (i).
E n fait : les reproches du chevalier sont dénués de
vraisemblance. On supposera difficilement que la fierte
de caractère du comte se fût abaissée jusqu’au point
de souffrir de mauvais traitemens de la part de ses
I
(1) F u rg o lc , l'e s t. , cliap. 6 , scct. i ” , n°* 4 > 5 , 6 , 8 çt io.
í-l¿}
�11^
1
( 6o
gens. Il n ’est pas plus possible de croire que Jouvainr o u x , que l ’on se plaît à peindre comme un homme
a d ro it, ru sé, dissim ulé, ne perdant ja m a is de vu e
son o b jet, ait essayé de l ’atteindre en employant la
violence.
E t où aurait-elle été pratiquée? A Clerm ont! dans
une ville populeuse, dans une maison où habitaient
d ’autres locataires!
Dans quel t e m s P A p R È s
du
te sta te u r
!
le
testam en t
, ju sq u ’a u décès
Ainsi Jouvainroux et sa femme auraient
cherché à anéantir, par la violence, une disposition
q u ’ils s’étaient attirée par la suggestion et la cap
tation !
T out ce système est inconcevable; il n ’y a point
eu de violence, puisque , d ’après le chevalier luiméme, loin d ’être une cause impulsive du testament,
elle aurait été exercée dans un tems où elle ne pou
vait avoir d ’autre objet que d ’en provoquer la révo
cation ; et si elle eût existé, elle prouverait plus
fortement
encore l ’attachement que le comte avait
pour Claudine-Flavie Jouvainroux, puisqu’il aurait
persisté dans ses dispositions bienfaisantes, malgré les
justes motifs de plainte q u ’il pouvait avoir contre les
père et mère de sa légataire.
Mais toutes ces imputations ne sont qu'un roman
monstrueux, odieux, enfant de l ’imagination du che
valier. Le comte a reçu, tous les secours et toutes les
consolations que son état pouvait exiger : les souilrànces
ont pu lui arracher quelques cris de douleur; des voi-
�( 61 )'
éîns, la police même ont bien pu s’introduire dans son
domicile : q u ’y a-t-on vu ? le m alade dans les bras
de ses dom estiques, q u i le caressent, le d ésh a b illen t,
et prennent les p lu s grandes précautions p o u r soulager
ses m a u x ........ I ( i )
Il faut terminer :
i
• i
Claudine-FlavieJouvainrouxaremplila tâche q u ’elle
s’était imposée.
■
>
Elle était capable de recevoir, et ne doit point être
regardée comme la personne interposée de ses père et
m ère, puisqu’on ne peut leur reprocher à eux-mêmes
aucune espèce d ’incapacité.
Le comte, de son côté, était capable de disposer;
s o n t e s t a m e n t a é t é d i c t é par 1’afïection ; aucune trace
de haine ne s’y fait remarquer ; lors même q ù ’il au
rait eu de l ’éloignement pour son frère, ce ne pourrait
être un m otif pour annuller ses dispositions.
Les faits de suggestion, de captation et de violence
sont dénués de vraisemblance; ils sont vagues et insignifians; ils sont même détruits par les aveux du che
valier : en point de d ro it, la preuve en est inadmis
sible.
Que peut donc espérer le chevalier Legroing?.........
Fallait-il outrager la mémoire de son
frère
? Essayer
d anéantir 1 état d u n j eu ne enfant? Se montrer si peu
difficile dans le choix de ses moyens, pour n’en obtenir
aucun résultat ? Convenait-il sur-tout de descendre
( i) Mémoire du chevalier, page 1 5 .
' v
1,1
�(6 2 )
jusqu’à la calomnie pour capter la fa v e u r ,e t inspirer
un intérêt qui devait si .promptement être remplacé
par la plus juste indignation:
...
L e chevalier s’est abusé; il s’est même exposé à de
justes représailles; mais la légataire d u co m te . doit.
oublier que le chevalier n’a respecté n i son âge, ni sa
faiblesse. Son devoir est. de consoler ses parens des
chagrins q u ’ils ont éprouvés, et dont elle est la cause
innocente.
E lle attendra d o n c , avec confiance et respect,
l ’arrêt qui doit statuer sur ses plus chers intérêts;
mais il peut lui être permis de désirer que le chevalier
n e sente jamais que les faiblesses, produites par l’ambi
tion et l ’avidité des richesses , peuvent quelquefois
avilir et dégrader un homme d ’honneur; et que les
excès auxquels peuvent entraîner c e s p assions ne
sauraient, en aucun tems, trouver d ’excuse auprès des
hommes qui ont quelques vertus ou quelque générosité
dans le caractère.
'
‘
J u lie n
J O U V A IN R O U X .
Jn - C h . B A Y L E ain é, ancien A vocat.
B R E S C H A R D , A vo u é.
RIOM, IMPRIMERIE DE SALLES, PRÈS LE PALAIS DE JUSTICE.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jouvainroux, Julien. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Breschard
Subject
The topic of the resource
testaments
abus de faiblesse
domestiques
servante-maîtresse
enfants naturels
créances
séquestration
mobilier
maltraitance
émigrés
ordre Saint-Jean de Jérusalem
fraudes
fisc
inventaires
lettres de change
doctrine
nullité du testament
captation d'héritage
testament olographe
jurisprudence
concubinage
legs universels
egyptologie
code civil
bedeau
vie intellectuelle
garde-malade
atteintes aux bonnes mœurs
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour le sieur Julien Jouvainroux, propriétaire, en qualité de père et légitime administrateur de Claudine Favie Jouvainroux, sa fille, intimé ; contre le sieur Louis Legroing, chevalier de justice de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, appelant.
Table Godemel : ab irato : 2. l’action ab irato contre les testaments est-elle admise par le code civil ? peut-elle appartenir à l’héritier collatéral ? Etat (question d') : 3. l’héritier du sang a-t-il le droit, pour prouver l’interposition de personne, de rechercher si le légataire, qui a dans une famille le titre et possession d’état d’enfant légitime, est, ou non, l’enfant naturel du disposant, surtout, lorsque cette recherche conduirait à la preuve d’un commerce adultère ? Sanité d'esprit : d’après quels principes se résout la question de savoir si le testateur était sain d’esprit ? Suggestion : La suggestion et captation sont-elles moyens de nullité pour la législation actuelle ? peuvent-elles être opposées contre un testament olographe ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1807-1819
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
62 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2431
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2429
BCU_Factums_G2430
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53485/BCU_Factums_G2431.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Biozat (03030)
Fontnoble (terre de)
La Roche-Blanche (63302)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
atteintes aux bonnes mœurs
bedeau
captation d'héritage
Code civil
concubinage
Créances
doctrine
domestiques
egyptologie
émigrés
enfants naturels
fisc
fraudes
garde-malade
inventaires
jurisprudence
legs universels
lettres de change
maltraitance
mobilier
nullité du testament
ordre Saint-jean de Jérusalem
séquestration
servante-maîtresse
Testament olographe
testaments
vie intellectuelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53484/BCU_Factums_G2430.pdf
37bcf9e52774cffcac992e7f1aaf5206
PDF Text
Text
L ’ANCIEN AVOCAT SOUSSIGNÉ,
V u le mémoire imprimé à Riom, pour le chevalier
Legroing, contre Julien Jouvainroux, Françoise Boudon, e t c .
V u aussi les pièces jointes, et notamment copie du
jugement rendu sur cette affaire, au tribunal civil de
C lermont-Ferrand, le 11 mai 1 8 1 8
E S T IM E , en droit, que le double moyen de capta
tion et de suggestion , contre les testamens, peut tou
jours être légalement opposé depuis la promulgation
du Code civil ;
t
E t en fa it, que les circonstances qui ont précédé,
accompagné et suivi le testament de Jean-Baptiste ,
comte Legroing, du 24 décembre 1816, sont denature
à être articulées et admises en preuve qu e, si elles
sont prouvées, elles devront faire prononcer la nullité
de la disposition testamentaire dont il s’agit.
Dans le droit, d’abord, on a tout lieu de s’étonner
que le tribunal de première instance ait mis en doute
que, dans les principes du Code civil, l’action en nul
lité des testamens en général, fondée sur la captation
et la suggestion, ait été conservée. La seule nature des
choses ne permettait pas de controverse sur ce point de
jurisprudence ; et les discussions au conseil d ’E tat ,
�( 2 )
dont il y a tradition, impriment à cet égard, au juge
ment attaqué, le caractère d ’un pyrronisme into
lérable.
Suivant la définition du droit romain, le testament
est un jugement réfléchi, conforme à la loi, que l’homme
prononce sur ce q u ’il entend être exécuté après lui ;
c’est une ordonnance de sa dernière volonté, exempte
de toute iniluen.ce étrangère.
T esta m en tu m est ju s ta v o lu n ta tis nostrœ sententia
de eo q u o d q u i p o st m ortem "suani f i e r i v e l i t .
On a dû dès-lors considérer comme nulle et non
.avenue, dans tous les teins, la disposition, à cause de
inort ,
f £ ui
était
le
fru it
é v i d e n t , t i e l a c a p t a t i o n , SOlt
des artifices frauduleusement employés pour dominer
les facultés morales des testateurs, soit des mauvaises
voies pratiquées par des tiers pour substituer leur
propre volonté à celle des disposans.
Aussi la loi- romaine s’en était-elle expliquée caté
goriquement en plusieurs endroits 5 elle avait statué
que tous ceux qui avait dissuadé l’auteur de la dispo
sition de tester comme il l’aurait v o u l u , (.levaient être
déchus des. avantages q u ’ils s’étaient fait concéder; elle
avait même réputé crime toute violence employée pour
faire écrire à un testateur rien de contraire à ses in
tentions.
Q ui j du/n copiât hœ reditatem lé g itim a n t, v e l e x
tostfïnientos p ro h ib u it teslam entarium introire3 volente
�(
3
)
eo fa c e r e testa m en tu m , v e l m u ta r e
,
e i denegaritur
acliones.
E t crim en a d ju n g itu r , s i testa to r, non su d sponte
testam entum f e c i t ,
se d
co m p u lsu s 3 (juos
,
n o tu e n t
s c r ip ù t hœ redes.
Ces principes, comme raison écrite, avaient été
universellement reçus parmi nous 5 ils ont été pi'ofessés
par tous nos auteurs, et consacrés par des monumens
nombreux de notre ancienne jurisprudence.
»
Lors de la rédaction du Code civil, on avait d ’abord
été tenté d ’abolir l ’action en nullité des test.amens,,
pour cause de captation et de suggestion, sous prétexte
que ces exceptions faisaient naître.une foule de procès
fâ c h e u x d o n t il importait de tarir la source. On avait,
dans c et t e v u e , inséré au projet du Code un article
ainsi conçu :
« L a loi n’admet pis la preuve que la disposition n’a
« été faite que par haine, colère, suggestion et cap:i :i
« tation. »
1
Mais de toutes parts on réclama contre rimmoralité
' i l
•J)
et le danger d’une semblable proposition.
)
#
Plusieurs
Cours souveraines observèrent sur-tout q u e lle livrerait
la fortune des personnes laibles au crim e, à la fraude:
« Que de m aux, que de brigandages, s’ écrièrent-elles,
« pour éviterdes procès et d e s poursuites dont la cramte
« arrêtait le crime! N e serait-il pas p l u s juste., plus
« digne de la sainteté de la loi, de laisser aux tribunaux
�( 4 )
« le jugement des faits, des circonstances qui pourront
« donner lieu à admettre la preuve que des gens cupides
« ont su , par leurs artifices, substituer leur volonté
« à celle du donateur ? »
Ces considérations prévalurent, et déterminèrent à
retrancher du projet l ’article qui abolissait les argumens de captation et de suggestion.
E n conséquence , l ’orateur du Gouvernement ,
j
s’adressant au Corps législatif, s’exprima ainsi : « La
« loi garde le silence sur le défaut de liberté qui peut
« résulter de la suggestion et de la captation, et sur
« le vice d’une volonté déterminée par la haine ou par
« la colè re................... E n d éc lar ant q u e ces causes de
« nullité ne seraient pas admises, la fraude et les
« passions auraient cru voir, dans la loi même, un
« titre d ’impunité.
Les circonstances peuvent être
« telles, que la volonté de celui qui a disposé n ’ait
« pas été lib r e , ou qu ’il ait été dominé par une passion
« injuste. C ’est la sagesse des tribunaux qui pourra.
« seule apprécier les faits et tenir la balance entre la
« foi due aux actes et l ’intérêt des familles-, ils empê« chcront q u ’elles ne soient dépouillées par les gens
« avides qui subjuguent lesmourans, ou par l’effet d ’une
« haine que la raison et la nature condamnent. »
D ’apres des déclarations aussi solennelles du légis
lateur, n ’est-il pas éirangcquele tribunal de Clermont
ait affecté des doutes sur le point de droit, et q u ’il
�(
5
)
a it , en quelque sorte, disputé aux tribunaux cette
puissance qui leur fut si positivement attribuée ?
Pour achever la réfutation de sa doctrine, on pour
rait invoquer le suffrage de tous ceux qui ont écrit sur
le Code civil ; tous s’accordent à maintenir que les
causes de captation et de suggestion sont toujours
admissibles en matière de testament. Il suffit d ’en
indiquer deux dont le nom fait plus particulièrement
autorité : M. Toullier, avocat de Rennes; M. Grenier,
en son T ra ité des D onations,
M. Toullier professe que tous les vices d’erreur, de
crainte, de violence, de dol et de fraude, que l ’on peut
opposer aux contrats, peuvent être objectés contre les
testamens. Il donne la définition dés mots captation
et suggestion, il rappelle, en j"KirtiG, le discours ¿m
Corps législatif, de l’orateur du Gouvernement, que
nous avons transcrit. Il relève, dans l’article 901 du
Code, la condition que le testateur doit être sain d 'es
p rit ; il pèse sur-tout, avec M. M alleville, sur les moyens
frauduleux, tels que les calomnies employées auprès
du testateur contre ses héritiers naturels.
:
M. Grenier, page 33 g , tome i er, dit à son tour :
«
«
«
«
L a crainte de voir triompher l’artifice et la fraude,
qui se montreraient avec d’autant plus d ’audace ,
que la loi ne leur opposerait plus de frein , empêche
de se* rendre Iv l ’idée de la suppression »le cette
« action : elle existe sans être é tay.ee d ’une disposition
�« positive de; la loi, On la ¡mise dans ces principes de
« justice, .que le silence de la loi ne peut détruire,
« que ce qui est l ’ouvrage du dol et de la fraude ne
-u"p eu t Subsister. Lors même que la^Ioi dispose, les
« cas de fraude, en général, sont exceptés. >>
1
A toutes ces autorités vient se joindre, sur le^ oint
de droit, pour le confirmer, l ’arrêt de la Cour royale
de Paris, du 3 i janvier i 8 i 4 > dont le chevalier, ¡Legroing s’était, aidé dans son mémoire.
. , . j » wn
■ 'y
Y w :». it‘:
Ayant tergiversé sur la doctrine, les premiers juges
se sont donné libre carrière sur les.faits; ils ¡n'en, ont
trouvé aucun pertinent ni admissible, .Jl faut convenir
q u e , sous ce d e ux iè me aspect de la c a u s e , leur tolerance a été loin-, Car, sans vouloir ni S’appesantir sur
les détails qui appartiennent plus spécialement à la
plaidoirie, il était difficile de rencontrer un cadre plus
repoussant que celui des dispositions prétendues du feu
comte Legroing.
TJn legs universel très-considérable, fait au profit
d ’un enfant de quatre ans et dem i, fille de sa domes
tiqu e, avec laquelle il avait vécu en c o n c u b i n a g e , et
d o n t il .avait eu lui-même une au tr e fille pai’j. lui
r e c o n n u e mais décédée le 11 janvier 1807 ! Quelle
affection légitime le comte Legroiïig jmuvait-il avoir
pour cette fille de quatre ans, qui,lui élait étrangère,
étant née du mariage de sa d o m o t iq u e , Françoise
Bûtidon > avec Julien Jmivainroux. ? Aucuns soins ,
�( ( 7 ;)
aucuns services encore ne pouvaient l'attacher à la
Claudine Jouvainroux, qui était évideriinïént
ici une personne interposée , pour parer à l ’inconVénient de tester au profit de la mère , Son ancienne
petite
concubine, et restée vis-à-vis de
la domesticité.
lui
dan& leS liens de
Cette tournure, imaginée dans la vue manifesté de
m asquer, de déguiser le véritable objet d’une telle
libéralité, n’est-elle pas la preuve que le testateur a
été dominé pas ses alentours ?
Un
fait non moins pertinent pour proclamer la
suggestion à laquelle le testateur était livré, est celui
de l’acquisition immobilière de 40,000 fr. au nom
de la petite Jouvainroux ; celui encore de lettres de
change pour fortes sommes , passées h son ordre.
Quoique ce soient dès- actes entre-vifs, leur' Singularité
est telle, que l ’état d’assujétissement du testateur aux
volontés de ceux qui l ’entouraient, en ressort avec la
plus grande évidence : rien de plus insolite, notam
ment, que cette négociation des lettres de change, dont
il est impossible que la petite Jouvainroux ait fourni
la valeur.
U n troisième fait déterminant est dans l ’articula
tion des calomnies journellement débitées par les
Jouvainroux, auprès du testateur, contre lé chevalier
TLegroing, son frère ; les odieuses suppositions, que
celui-ci voulait attenter à ses j ours, ou le faire inier-
�( 8 )
dire, etc. : toutes impostures, dont les suites sont
signalées par l’aversion que le testateur avait conçue
contre son frère , et dont il a donné une preuve si
frappante, en supprimant la qualité de frère qui lui
était donnée dans une quittance.
;
Une quatrième articulation , digne de toute la
sollicitude de la justice , est celle des violences , des
mauvais traitemens sous lesquels gémissait le comte
Legroin g, et dont la manifestation avait été te lle , que
plusieurs fois des officiers publics avaient été appelés
pour faire cesser l ’oppression des Jouvainroux.
*.,;U lie cinquième circonstance, quoiqu’extérieure au
testament , q u o i q u e su rv en u e s e u le m en t depuis , et
assez difficile à établir judiciairement, est sans con
tredit celle relative au dépôt du testament. La volonté
du testateur avait été q u ’il fut déposé entre les mains
du notaire Espinasse ; il l ’avait à cet effet renfermé
dans une enveloppe cachetée, et il avait couvert cette
enveloppe d ’une suscription indicative du dépôt, datée
du ït\ décembre, dix jours après la confection du titre,
et signée.
11 parait cependant que le d é p ô t, aussi rigoureuse
ment vouluj n’a jamais été effectué; que Julien Jouvainroux s’est emparé du testament, et que c’est lui
qu i, après la mort du testateur, l ’a présenté en justice.
Cette particularité est remarquable , en ce q u ’elle
donne la mesure de l’ascendant dç$ Jouvainroux sur
�( 9 )•
(
l ’esprit du testateur, et des abus de confiance q u ’ils se
permettaient. Qui dira que si le testament avait été
Jivré à la foi d ’un officier public dépositaire, le comte
Legroing , alors qu ’il s’est vu le jouet de la famille
Jouvainroux, n ’aurait pas donné l ’ordre de le sup
primer? au lieu que, la pièce étant au pouvoir des
domestiques du testateur, dans l ’état de paralysie et
d ’incapacité où il était tom bé, ils se sont mis à l ’abri
de toute révocation.
On regrette de ne trouver au jugement de première
instance, sur ces diverses articulations, que de vains
palliatifs ou pointilleries, comme quand les premiers
juges reprochent au chevalier Legroing de n ’avoir pas
précisé les injures débitées sur son compte , à son
frère, par les Jouvainroux. Y avait-il rien à préciser
au -d el a des supposit ions d ' e m p o i s o n n e m e n t ,
d ’assas-
sinat, de plan d’interdiction, etc. ?
Que signifient encore les réflexions glissées au juge
m ent, sur la fierté du caractère du comte Legroing,
pour en induire q u 'il n ’avait pu s’abaisser jusqu’à
condescendre aux désirs de Françoise B oudon , sa do
mestique? lorsqu’il est prouvé q u ’il avait vécu avec elle
en concubinage. Que signifie cette invraisemblance ,
que la domestique ait jamais songé à dominer son
maître ? lorsqu’il est si bien avéré, si notoire, q u ’elle
faisait de ce vieillard tout ce qu ’elle v o u l a i t ; q u ’elle
l’accompagnait par-tout; q u ’elle ne laissait approcher
de lui que qui bon lui semblait.
�E t ces huit mois de persévérance, écoulés depuis la
confection du testament ? lorsqu’il est de notoriété
p u b liq u e , que l ’état physique et moral du testateur,
k celle du période de Sa v i e , était celui d’une débilité
excessive , et de l ’aiFaissement extrême de toutes ses
facultés.
‘
t
Des juges qui avaient débuté par réduire en pro
blème toute pertinence , toute admissibilité des faits
de captation et de suggestion, ont dù naturellement
se donner libre carrière sur l ’appréciation de ces faits.
Il était difficile q u ’a leurs yeux aucun de ces faits
conservât la couleur qui lui était propre.
Il n ’ en peut pas être de même devant une C o u r
souveraine, impassible, mieux pénétrée de la vraie
doctrine, plus éminemment placée pour le maintien
des règles qui protègent la morale-publique, les pro
priétés des fam illes, et qui répriment les iniques
combinaisons de la domesticité, incessamment dirigées
vers la spoliation, dans les derniers momens de l ’exis
tence d ’un maître q u ’elle a su cerner et subjuguer.
Délibéré à Paris, le 4 avril 1819.
BERRYER.
�I - Æ S C O N S E IL S S O U SS IG N É S, qui ont pris lecture
d ’un jugement du tribunal de Clerm ont-Ferrand, du
i i
mai 1818, lequel, sans s’arrêter à la preuve offerte
par le chevalier Legroing, ni avoir égard à la nullité,
par lui demandée, du testament du comte Legroing ,
son frère, portant legs universel en faveur deClaudineFlavie Jouvainroux, fille de sa domestique, l ’a débouté
de toutes ses demandes ,
que M. le chevalier Legroing doit espérer
de faire annuller, sur l ’appel, ce jugement qui met en
doute si un testament peut être annullé pour des
E
stim ent
causes qui, quoique non exprimées dans le Code civil,
parmi celles qui emportent nullité des testamens ,
résultent évidemment de l ’esprit de ses dispositions,
et qui tippiecic, de la manicre la plus otriingGj des
faits articulés pour justifier que le testateur n ’avait
pas, disposé librement et par l ’effet de sa propre
volonté.
Le comte L egro in g, par testament olographe du
24 décembre 18 16 , a nommé légataire universelle de
ses biens, qui peuvent se monter de 3 à 400,000 fr.^
Claudine-FlavieJouvainroux, déclarée, à la naissance,
fille de Françoise Boudon, sa domestique, et de Julien
Jouvainroux, bedeau de la cathédrale de Clermont ,
son mari. Cette disposition compose tout le testament
avec celle du legs d ’ une rente viagère de 800 francs,
et d ’un
mobilier assez considérable, en faveur de
Françoise Boudon elle-même.
�( 12 )
Françoise Boudon, sous le nom de Claudine, était
fille de peine dans la maison de madame la comtesse
Legroing, mère; le comte Legroing, son fils, l ’avait
prise à son service, où elle était encore à son décès,
arrivé le i 3 août 1817.
v
Cette fille vivait en concubinage avec son maître.
De ce commerce est né %le 7 septembre 1806, un enfant
du sexe féminin, présenté à l ’officier de l ’état civil ,
par le comte Legroing lui-m êm e, qui lui a donné le
nom de J o sé p h in e , et q u ’il a déclaré avoir eue de
Françoise Boudon, s’en reconnaissant le père. C e t
enfant est décédée le 11 janvier 1807; l ’acte mortuaire
la dénomme Joséphine L egro in g, fille de J- B. Legroing
et de F ra nç oi s e B o u d o n .
Françoise Boudon , lorsqu’elle s’est mariée avec
Jouvainroux, était enceinte ; son mariage est du 16 sep
tembre i'811 j et la naissance de Claudine-Flavie, du
5 mars 1812.
O11 a prétendu que cet enfant provenait des œuvres
du comte L egro in g, et q u e , pour la rendre capable
d’une disposition universelle, que sa mère méditait
de lui faire faire par son maître, elle avait préféré lui
donner un père étranger.
La sainteté des nœuds du mariage et la foi due aux
actes qui constituent l ’état des familles, ne nous per
mettent pas d ’insister sur cette présomption, lorsque
sur-tout le concubinage est suffisamment prouvé par
l ’acte authentique de la naissance du premier enfant.
�( i3 )
Quoi qu ’il en soit, le chevalier Legroing a attaqué
le testament de son frère, comme une suite du con
cubinage, comme fait dans la démence, comme l’effet
de la haine et de la colère suggérées au testateur envers
sa fam ille, et comme le fruit de sa suggestion et de la
captation.
Il a articulé divers faits analogues à ces causes, et
il a demandé à en faire preuve.
,
Le jugement du tribunal de Clermont décide net
tement que le concubinage n’est point une cause de
nullité des testamens; il le décide aussi, mais avec
l ’expression du doute, pour la démence, la haine et
la colère, et la suggestion et la captation; et cepen
dant, en en supposant l ’efficacité possible, il discute
les faits articulés et les déclare insuffisans.
Il faut donc exa mi ne r d a b o rd si les causes sur les
quelles M. le chevalier Legroing fondait son attaque
contre le testament de son frère, sont admissibles,
sous l’empire de la législation du Code civil.
On fera ensuite quelques réflexions sur le mérite des
faits articulés, et des motifs sur lesquels le tribunal
les a écartés.
j
�\
( «4 )
EXAM EN DES CAU SES D E N U LLITÉ .
Une liaison illégitime entre un donateur ou un
testateur, et la personne en faveur de laquelle il a '
disposé; sa démence au tems de la disposition; la haine
et la colère q u ’il aurait manifestées envers son héritier,
et la suggestion et captation étaie n t, dans l ’ancienne
législation , considérées, comme autant de causes de
nullité des dispositions à titre gratuit; du concubinage
ressortait, dans l ’intérêt des mœurs, une incapacité
de donner et de recevoir; et l ’on jugeait que les autres
causes produisaient, sur l ’esprit d ’un disposant, une
in.ilu.ence cjui ne laissait pas à sa v o l o n t é le caractere
de liberté requis pour disposer.
Les auteurs du Code civil n ’étaient pas sans doute
moins zélés pour la cause des mœurs que les anciens
magistrats, mais ils ont cru les mieux servir en effaçant
une incapacité qui donnait toujours lieu à des discussions
scandaleuses, dont les mœurs étaient plus offensées que
de la chose même.
L e Code civil ne fait donc pas, du concubinage,
une cause de nullité des testainens.
Au
contraire ,
lorsque, par l ’article 9 0 2 , il est dit q u e toutes personnes
peuvent disposer et recevoir, soit par donation entre
vifs, soit par testament, excepté celles que la loi en
déclare incapables, et qu'immédiatement, signalantles
incapacités, il n ’exprime rien par rapport aux liaisons
illégitimes, il en faut
nécessairement conclure que
�(
>5
)
Ceux mêmes qui ont des rapports que les mœurs
improuvent, ne sont point dans une exception quant
au pouvoir de donner et de recevoir.
Cependant si, de ce fait seul, il n ’est pas permis de
tirer une nullité contre un testament, il faut convenir,
q u e , lorsque, justiiié par un acte public, il se joint à
d ’autres causes qui agissent sur la volonté du disposant,
il est un point de départ probab le, et favorise la
preuve de l ’influence étrangère qui a contraint cette
volonté.
Parmi ces causes qui agissent sur la volonté, se
rangent incontestablement la haine et la colère du
disposant envers les siens, la suggestion et la captation,
même la faiblesse d’esprit, et à plus forte raison la
démence.
L a c o l e re , prise i s o l e m e n t , serait, sans effet
sur un
testament; c’est un mouvement impétueux de l a m e ,
qui se calme comme il s’élève; mais uni avec la haine,
la colère en devient une conséquence; son mouvement
se répète toutes les fois que l ’objet haï se représente
à l ’imagination, et par là elle se constitue en passion
d urable, q u i , nécessairement détourne de la personne
qui en est l ’objet, tous les sentimens de bienveillance^
même de justice, et lui fait préférer, dans l ’esprit du
testateur, des individus auxquels, autrement, il n’eût,
pas pensé.
Il faut cependant convenir que cette cause de nul
lité dégénérerait en arbitraire, si elle était légèrement
adoptée; s’il suffisait à celui que la loi donnait pour
�( >6 )'
héritier à un testateur, d’articuler, de prouver même
q u ’il était pour lui un objet de haine et de colère ,
il faudrait encore établir que le testateur a ya n t, par
la loi, le pouvoir absolu de disposer, n’a pas été dé
terminé par un juste m otif, en faveur de la personne
q u ’il a préférée.
Mais où la haine et la colère peuvent devenir un
moyen puissant contre la disposition, c’est lorsque ce
sentiment ne s’est formé dans l ’ame du testateur que
par des rapports, des manœuvres, des suggestions in
téressées de la part de celui en faveur duquel la dis
position est faite.
Cette cause alors rentre dans le suggestion et la
c apt a ti on , et en forme un des moyens les plus efficaces.
Que la suggestion et la captation soient des causes
de nullité des dispositions à titre gratu it, point de
doute. Sans entrer dans la différence que les anciens
auteurs mettaient entre la suggestion et la captation ,
il faut les entendre dans le sens de manœuvres em
ployées pour captiver la volonté d ’autrui à son profit,
pour séduire et tromper le disposant, suivant l ’expres
sion de INI. Grenier, dans la vue d ’attirer ses biens au
préjudice de sa famille, et pour enfin substituer une
volonté étrangère à la sienne.
S i , dans les moyens pratiqués pour séduire la volonté
du disposant, est entré celui de lui donner de l ’éloignement, et de lui inspirer de la haine et de la colère
pour sa fam ille, alors la captation et la suggestion
prennent un caractère de dol et de fraude ? qui ne
�V *7 )
permet pas de laisser subsister la disposition; car,
outre que le dol et la fraude ne peuvent jamais
produire des effets légitimes, comme le testament doit
être l ’effet de la volonté libre du testateur, il s’en suit
q u e , quand il a cédé à des manœuvres frauduleuses,
il n’a pas suivi sa volonté; et par conséquent sa dis
position est viciée dans son essence.
Cette doctrine a été professée par tous les bous es
prits qui se sont occupés de cette matière ; elle est
disertement développée dans l ’excellent Traité des
Donations de M. Grenier; elle est partagée par M. Toullier, dans son ouvrage estimé sur le Code civil.
Des arrêts l ’ont consacrée; il en existe un du i 4
avril 1806, de la Cour de Grenoble; un du 14 juin
de la même année, de la Cour de Bruxelles; et un
dernier, de la même C o u r, du 21 avril 1808 , qui
tous ont reconnu que la cause de nu llité, résultant de
la suggestion et captation, n ’est point abrogée.
Le Code civil ne s’en explique pas. Mais il a été
remarqué que le premier projet de ce grand ouvrage
avait un article portant que la loi n’admet pas la
preuve que la disposition n ’a été faite que par haine,
colère , suggestion et captation , et que cet article ,
dans la discussion, a été supprimé.
L ’orateur chargé de présenter le Titre des Donations
et Testamens au corps législatif, s’est exprimé de
manière à faire connaître quel a été l ’objet de la sup
pression de l ’article.
« L a loi garde le silence, disait-il, sur le défaut de
3
�liberté qui peut résulter de la suggestion et de
la c a p ta tio n , et sur \e vice d’une volonté déterminée
p a r la colère ou p a r la haine. Ceux qui ont entre
pris de faire annuller des dispositions pour de
semblables motifs, n ’ont presque jamais réussi à
trouver des preuves suffisantes pour faire rejeter des
titres positifs; et peut-être vaudrait-il m ieux, pour
l’intérêt général, que cette source de procès ruineux
et scandaleux fut ta rie , en déclarant que ces causes
de nullité ne seraient pas admises; mais alors la
fraude et les passions auraient cru avoir, dans la
loi-même, un titre d’impunité. Les circonstances
peuvent être telles, que la volonté de celui qui a
disposé, n ’ait pas été libre, ou q u ’il ait été e n ti è
rement d o m in é par u ne passion injuste. C ’est la
sagesse des trib u n a u x , qui pourra seule apprécier ces
faits, et tenir la balance entre la foi due aux actes
et l’intérêt des familles. Ils empêcheront q u ’elles ne
soient dépouillées par les gens avides qui subjuguent
les mourans, et par l'effet d ’une haine que la nature
et la raison condamnent. »
Il faut s’en rapporter à l’orateur du gouvernement y
qui n’eût point pris sur lui de suppléer au silence
du projet q u ’il venait proposer au corps législatif de
convertir eu lo i, et qui n’a du dire que ce qui avait
été dans l ’esprit de la rédaction.
Il faut donc regarder comme certain, que l ’action
en nullité pour haine et colère, pour captation et
suggestion subsiste, mais que seulement le mérite de
�( ]9 )
cette action et l’appréciation des faits sur lesquels on
la fonde, sont abandonnés à la sagesse des tribunaux.
Quant à la démence du testateur, elle doit être
aussi une cause de nullité des testamens. L ’article g o i
du Code civil, d ’accord en cela avec le droit romain
et les coutumes qui régissaient la France avant lui ,
dispose « que pour faire une donation entre-vifs ou
« un testament, il faut être sain d ’esprit. » Il y aurait
contradiction entre cette disposition et son applica
tio n , si le testament cI’u r c personne en démence pou
vait avoir son effet.
L ’article 5 o/|. du même Code porte : « Q u ’après la
« mort d ’un in d ivid u , les actes par lui faits ne peu« vent être attaqués pour cause de démence, q u ’autant
■
« que feon interdiction aurait été prononcée ou pro« v o q u é e a v a n t son décès, à moins que la preuve de
« la démence ne résulte de l ’acte même qui est at« taqué; »
Cet article fera-t-il obstacle à l ’action en nullité
pour cause de démence, lorsque le testateur sera dé
cédé integri s ta tu s , lorsque l ’interdiction n’aura été
ni prononcée ni provoquée avant le décès?
Non : il est généralement reconnu aujourd’hui que
l ’article 5 o 4 ne s’applique point aux testamens.
« Q uoiqu’avant la disposition , dit M. Grenier ,
« T ra ité des D o n a tio n sy il n’y ait point eu , contre
« le disposant, une prononciation ou une provocation
« d’interdiction, il faut, pour juger de sa capacité
« morale, se reporter uniquement à l ’mstant de la
�( 20 )
« disposition, abstraction faite de toutes autres cir« constances. Il est aisé de comprendre les motifs de
« l ’article 901. Le législateur n ’a pas dù considérer
« les dispositions gratuites, du même œil que
les
« autres actes. L a loi redouble de prévoyance, pour
« prémunir l ’homme contre les pièges de la cupidité
« qui peut épier un instant de faiblesse, ou le pro« voquer, pour extorquer une libéralité5 or, ce mo« ment peut exister, quand il aurait même un usage
« habituel de la raison. »
L ’auteur étaye son sentiment du résultat qui eut
lieu au conseil d’É t a t , lors de la discussion de l ’ar
ticle 901 , dont le projet ajoutait à ce que l ’article
c o nt i ent aujourd’hui « que ces actes (les donations
« entre-vifs et les t es tame ns) ne p our r ai ent être atta« qués pour cause de démence, que dans les cas et de
« la même manière prescrite par l ’article 5 o 4 du
« Titre de la majorité et de l ’interdiction. »
Plusieurs conseillers d’É tat s’élevèrent contre la se
conde partie de l’article. Il fut reconnu que l ’art. 5 o 4
ne pouvait pas s’appliquer aux donations entre-vifs et
aux testamens 5 et l ’article 901 fut réduit à ce qui en
reste dans le Code.
Plusieurs arrêts l ’ont décidé ainsi , et notamment
un arrêt de la Cour de cassation, d u 22 novembre 181 o ,
qui a rejeté le pourvoi formé contre un arrêt de la
Cour de Poitiers, par un m otif ainsi conçu : « Con«
sidérant
que Particle 5 o 4 du Code civil n ’est point
,< applicable aux donations entre-vifs ni aux testamens
«
�«
«
«
«
«
régis par l ’article 901 du même C o d e , qui a été
définitivement adopté et promulgué en ces termes
(Pour faire une donation entre-vifs ou un testament,
il faut être sain d ’e s p r i t : q u ’il résulte de la généralité d’expression de cet article, que, nonobstant
« les articles 1 3 4 1 ? ^ 4 7 ? i 352 et 1 353 dudit Code,
« il est permis aux parties d ’articuler, et aux tribu•« naux de les admettre à prouver tous les faits qui
« sont de nature à établir que l ’auteur d’une dona« tion entre-vifs ou d’un testam ent, n ’était pas sain
« d ’esprit., à l’époque de la confection de ces actes ,
« sans distinguer si ces faits ont ou n ’ont pas constitué
« un état permanent de démence. »
L a jurisprudence est donc bien établie sur ce point.
Il est incontestable, en d roit, q u ’un testament peut
être a t t a q u é de n u l l i t é p our cause de démence du tes
tateur , quoi q u ’il soit mort integri s ta tu s , sans inter
diction prononcée ou provoquée, comme pour cause
de haine et de colère, de suggestion et captation; et
la décision du tribunal de Clermont et ses doutes en
droit, sont en opposition avec la doctrine générale
ment adoptée par les jurisconsultes et par les arrêts.
A la vérité, il ne suffit pas de la cause; il faut
q u ’elle soit soutenue par des faits qui la justifient,
qui prouvent que la disposition en a été l ’effet.
M. le chevalier Legroing attaquait le testament de
son frère par les causes réunies de la haine et de la
colère, de la suggestion et captation et de la démence ;
�( 22 )
il a rticu la it, sur. ch a cu n , des faits que le tribunal de
Clermont ne l ’a point admis, à prouver.
Il faut passer à l ’examen de ces faits, et des motifs
par lesquels ils ont été écartés.
E X A M E N D E S F A IT S E T D E S M OTIFS.
C om m e f a i t s p ro b a tifs de haine et de colère étaient
a rticu lés:
PREMIER
FAIT.
U n refus , de la part du comte L egroin g, de rece
voir une somme de 8000 f r . , que son frère lui avait
envoyée p a r le sieur C h an telot, le
avait a c c o m p a g n é l e r e f u s d ’ i n j u r e s
Legroing.
juillet 1 8 1 7 ; i l
c o n t r e le chevalier
I er
« L e demandeur , porte le jugement , ne dit pas
« quelles furent ces injures. »
In ju r e est un mot générique qui exprime un outrage ;
des injures proférées sont des paroles outrageantes contre
une personne. Quant à l ’espèce de ces paroles, c’est à
celui qui les a entendues à les déclarer. Il a suffi d ’arti
culer le fait, l ’occasion, l ’époque, et de dénommer le
tém oin, pour que l ’articulation soit pertinente et
complète.
SECOND
FAIT.
Le chevalier Legroing s’étant présenté lu i-m êm e,
le l2 du même mois , chez son frère, pour régler ses
1
�( ¿3 )
comptes, et lui payer une partie de ce q u ’il lui devait,
il ne put parvenir jusqu’à lui.
« Le demandeur, dit le jugement, ne dit pas non
« plus p o u rq u o i et p a r q u i il fut empêche de parvenir
« à son frère. »
L e p o u rq u o i est nécessairement connu, puisque le
fait est articulé pour établir l ’indisposition et l ’éloignement de son frère contre sa famille.
P a r q u i! l ’information le dira; d ’ailleurs le p a r
q u i il fut empêché de parvenir jusqu’à son frère est
assez indifférent, quand il ne s’agit que du fait de
l ’éloignement. Il suffira q u ’il soit prouve que le sieur
Legroing ne pouvait pas voir son frère ; que sa porte
lui était fermée. Le comte Legroing était infirme, ne
sortait pas : ce n’était donc pas une cause accidentelle
q u i p o u v a i t e m p ê ch e r son frère de le v oi r chez l ui .
TRO I S I ÈME
FAIT.
L e chevalier Legroing ayant invité un jurisconsulte
à porter pour lui la somme à son frère , de rédiger la
quittance, et de régler le mode de paiement de ce qui
restait d û ; et le jurisconsulte ayant fait la lecture de
la quittance au comte L egroin g, celui-ci se mit en
fu re u r, parce q u ’il y était dit que le chevalier Legroing
¿tait son fr è r e . Il vomit contre lui toutes sortes d ’in"
jures, et ne signa la quittance que lorsque le juris
consulte eut rayé cet mots : M o n fr è r e .
Le jugement répond : « Le demandeur a laissé
�(* 4 )
« également ignorer quelles furent ces injures ; et
« cependant il serait possible que les expressions du
« comte Legroingne fussent p a s reconnues injurieuses.
« L e demandeur aurait pu regarder comme injures
« quelques paroles seulem ent désobligeantes , q u ’un
« moment d ’humeur ou de mécontentement aurait pu
« produire , sans que le cœur du comte Legroing y
« prit aucune part. Au surplus , les frères Legroing
« auraient pu vivre en mésintelligence et ne pas
« s’aimer ; mais entre la haine et V a m itié il y a tant
« d 'a u tres sentim ens qui ne troublent ni l ’esprit ni la
« raison, qui ne sont ni de la haine ni de la colère I
« S i, par de semblables motifs, il était possible d ’an« nuller les testamens faits au préj udice des c ol l at ér aux ,
« il serait p re sq n’ i n u t i l e cl’ en faire. E n f i n le testament
« dont il s’agit est du i!\ décembre 1 8 1 6 , et les faits
« de colère et de haine allégués seraient du mois de
« juillet 1817. »
Quelles furent les injures? Ne sont-elles pas assez
caractérisées, quand elles viennent à la suite du fait
que le comte Legroing entra en fureur, quand il
s’e n t e n d i t
qualifié fr è r e du chevalier?
Les juges qui ont pénétré dans les replis du cœur
h u m ain ,'q u i ont creusé la m éthaphysique, pour dé
couvrir qu ’il y a tant d’autres sentimens entre la haine
et l ’am itié, que jusqu’ici on avait cru 11’avoir d ’in-termédiaire que l’indifférence, n ’ont pas pu calculer
les effets de la fureur; ils n ’ont pas senti ce q u ’a de
dénaturé le mouvement d ’un homme qui renie, qui
�( *5 )
méconnaît, qui repousse son frère, qui s’emporte sur
le titre de frère, que lui donne celüt qui l’est: en effet.
E t ils veulent que, dans l ’état de fureur, il ait prononcé
des paroles seulem ent d éso b lig ea n tes, auxquelles le
cœur n?a point de part!' S’il est un fait révoltant qui
caractérise la haine et la colère, c’est celui-là ; et;
certes, pour l ’honneur de la nature, dans l ’intérêt des
moeui's et de l ’ordre social-, les tribunaux doivent s’em
presser d’anéantir un testament fait sous de tels aus
pices.
Q u ’importe que le fait articulé soit antérieur ou
postérieur au testament attaqué? D ’abord un- testament
olographe n’a point de date jusqu’au décès du testateur ;
mais ensuite, q u ’a-t-on à prouver? la passion furieuse
que l ’on avait suggérée au comte Legroing, sa haine
p o ur son frère. U n s e n t i m e n t , une passion, ne sont
pas des choses matérielles qui se distinguent ;Y la
vue ou au toucher; ils se manifestent par des effets
que des occasions produisent ; or , un effet aussi
marquant que la fureur qui' s’empare d ’un frère>
parce que son frère l ’appelle son- frère dans une q u it
tance, et qui ne veut recevoir l ’argent qui lui' est
offert, que quand cette qualification (q u i lui» est
odieuse) est effacée de l ’écrit; cet effet, qui:vient à la
suite de deux autres, ne peut être accidentel; il dé
montre nécessairement la disposition habituelle de
l ’ame et la passion, dont, elle est occupée. Il faUt donc
reconnaître que cette passion doit avoir une influence*
pour ainsi dire exclusive, sur des dispositions testa-
4
�méntaires, consacrées sur-tout à la bienveillance, et
dont l ’idée réveille les haines comme les affections.
De la haine et de la colère, le jugement passe à la
suggestion et captation.
L e chevalier Legroing articulait des faits : i 0 de
suggérée par Jouvainroux et sa femme, soit à
l’occasion du partage du mobilier de la succession de
liaine
la mère commune, soit lorsque le comte, se plaignant
de l ’obsession dans laquelle il était tenu, et menaçant
de son frère, le mari et la femme lui disaient : « A
« qui vous adresseriez-vous? A votre plus mortel en« n e m i, qui n’en veut q u ’à.vos biens, cherche à vous
« faire passer pour fou , et veut vous faire interdire? »
20 D e chartre privée : le comte, éloigné de tout ce qu i
n’est pas la cotterie des J o u va i n ro u x ; le chevalier, son
frère, qui ne peut pas parvenir jusqu’à lu i; l ’abbé
Legroing de la Romagère, son parent et son ami, et
la demoiselle Henriette Legroing, chanoinesse, sa cou
sine, qui ne sont point admis à le voir; 3 ° de Vob
session p erp étu ellem en t p ratiquée su r l u i , résultant
de l ’empire que donnent naturellement à une femme
jeune, sur un vieillard, une intimité avérée et des
familiarités habituelles; de ce que le comte ne voit
que les Jouvainroux , n’est entouré que de leur famille,
n’a de distraction que par l ’e n fa n t dressé à l ’appeller
p a p a 3 à le rechercher, à le caresser, et dont on lui a
persuadé q u ’il était le père; de ce q u ’on lui a fait re
tirer un testament où, ne suivant que sa volonté et son
penchant, il transmettait sa fortune à sa famille; et
�(< 27 )
enfin de ce q u e , non content d ’une disposition uni
verselle au profit de l ’enfant, on lui a fait acquérir,
sous le nom de celle-ci, une propriété de 40,000 f r . ,
et on lui a fait passer des lettres de change à son
3^5
ordre.
!
1
Le jugement ne discute pas ces divers faits articulés;
il les élude et s’attache à diverses considérations.
« Ainsi l ’enfant a été incapable, par son âge, d ’em« ployer la ruse', l ’artifice, la mauvaise foi^des insi« nuations perfides, pour tromper le comte Legroing,
« lui rendre sa famille odieuse, le* faire changer de
« volonté, et surprendre en sa faveur des dispositions. »
Comme si toutes ces manœuvres étaient imputées à cet
enfant; comme si elles n ’étaient pas visiblement l’œuvre
des Jouvainroux; comme si enfin il n ’y avait pas eu
plus d ’art et (le perfidie à diriger sur un enfant l ’effet
de toute l ’intrigue, que de l ’avoir applique aux père
et mère eux-mêmes !
« Il n’est pas vraisemblable, dit le jugem ent, q re
« la fo r c e d ’esprit , la f i e r t é d u caractère du'comte
« Legroing, aient jamais cédé aux volontés de Fran« çoise Boudon, au point sur-tout de faire ce q u ’il
« n’aurait pas voulu faire. Il n’est pas présumable que
« la femme Jouvainroux eût tenté ce triomphe; elle
« eût craint sans doute de déplaire à son maître , et
« même de l' offenser, s’il eût pensé
v oulait le
« dominer; elle eût craint d ’achever de perdre une
q
« confiance déjà lant affaiblie par
son
u
’ e l l e
mariage. »
C ’est une fort mauvaise manière de. raisonner et de
�( =8 )
conclure;, que cle tirer cjes inductions de laits contestés ,
et des conséquences de principes qui sont précisément
en question. On demande k prouver, d ’un côté, que
le comtç Legroing n’ayait ni force d ’esprit, ni -fierté
de caractère; et d ’autre côté, que la femme Jouvainroux le dominait m4 me tyranniquement. Où trouve-t-on
fie la forpe d ’.esprit et de la fierté de caractère dans un
homme d ’upe naissance distinguée, qui ne craint pas
de s'abandonner à une fille des derniers rangs de la dor
mesticité^ q u i, pour se consacrer à elle tout entier ,
quitte et abjure sa fam ille; qui ne craint pas d ’avouer
publiquement un enfant q u ’il a eu de son commerce
honteux avec elle y et q u i, frustrant ses propres parens *
m e t sa f or t une sur la tète
d ’ u n e n fa n t q u i
a p our
mère sa domestique, et pour père, le bedeau de la
pathédrale? Comment supposer à cette fille, sa con
cubine, la crainte de déplaire à son maître? lorsqu’elle
le tient en chartre privée; lorsqu’elle le dérobe à la
famille et à gps amis; lorsque, pour le dom iner, elle
le m altraite, et que les voisins et l’officier de police
peuvent attester que, las de sa position , il crie par la
croisée : au sçcQifrs / à l ’assassin !
. L e jugement continue ; « E n supposant même que
« Ja femme Jouvainroux eut q u e l q u e pouvoir sur l’es« prit de son inaiiro, il n ’est pas vraisemblable q u ’elle
<î l'eut employé pour faire exercer envers sa fille une
» libéralité qu'elle ei\t désiré conserver en vertu du
« testampnt de 1807; q u ’il est,
au contraire, plus
( naturel de crpjre que c’est par ses caresses? par ses
�(
«
assiduités,
29
)
par ses soins excitéé peu t-être par de
„ petits cadeaux, que l ’âge mûr et la vieillesse ont
« coutume de faire à l ’enfance, que Claudine-Flavie
« a obtenu, sans le savoir ni le désirer, cette marque
« ide sensibilité, d ’affection et de toute la bienveillance
« du comte Legroing; que ce dernier a pu penser q u ’il
« ne devait aucun témoignage d ’aiFec-tion ni de recon« naissance au chevalier L egro in g, son frère, q u i, cé« libataire comme lu i, ne transmettrait q u ’à des
« étrangers ou à des collatéraux éloignés, les biens
« qu ’il lui laisserait. »
Ici ce sont encore des inductions et des suppositions
morales ^ qui sont opposées à des faits dont la preuve
est offerte.
. On ne peut mettre en doute que la femme Jouvainroux ait eu un gra nd p o u v o i r sur l ’esprit de son
maître , q u ’autant que la preuve par témoins offerte
ne répondrait pas à la conséquence des faits articulés.
Pourquoi n ’est-il pas vraisemblable que cette femme
eût fait substituer un testament en faveur de sa iille, à
celui qui avait été fait en sa faveur en 1807? E lle y a vu
apparemment quelqu’intérêt. N ’a-t-elle pas pu penser
que la critique en serait moins facile? et 11e serait-elle
pas confirmée dans l ’utilité de cette prévoyance, par le
jugement de Clerm ont, qui se sert du nom de reniant,
pour écarter les justes reproches faits à la mère? N al-elle pas pu croire aussi lier davantage le comte
Legroing, par une disposition en faveur de l’enfant,
sur-tout si elle lui avait persuadé q u ’il en était le père?
�( 3° )
\ne
»
Déjà elle avait fait retirer le testament que le comte
avait fait pour sa famille : elle a pu craindre un retour
dans sa volonté. D ’ailleurs Jouvainroux , son m ari,
avait aussi ses vues; et il a pu espérer, pour son propre
compte, plus de chances de la disposition faite en
faveur de son en fan t, que de celle qui aurait donné
la fortune exclusivement à sa femme.
Il n ’y a , en cela , que des conjectures; mais elles
sont aussi
exprime.
probables que
celles que
le
jugement
N ’est -ce pas outrer toutes les vraisemblances, que
de prétendre que l ’enfant aura tout fait par ses ca
resses , par ses assiduités et par ses soins ? Des assiduités
et cles soins de la part d ’un enfant de cinq ans ! Ses
assiduités et ses soins ne peuvent convenir q u ’à ses
père et mère. Les caresses, à la bonne heure : encore
sont-elles l ’eifet de la direction donnée à son jeune
âge. Les caresses d ’un enfant étranger peuvent bien
porter l ’àge mûr et la vieillesse à de petits cadeaux ;
mais il n’y a que la démence qui peut payer ces caresses
du legs d ’une fortune de 3 à 400,000 francs, enlevée
à une famille.
s
« Le chevalier Legroing, dit le jugement, est céli« bataire comme le comte l ’était : il transmettrait lui« même à des étrangers ou à des collatéraux éloignés. »
L a morale 11e peut pas avouer une conjecture aussi
hasardée, pour justifier un fait déraisonnable.
Le chevalier est célibataire, mais il peut encore se
marier. Il a de proches parons, qui l’étaient aussi du
�( 3x )
comte, et qui portent leur nom. De tels collatéraux,
qui sont l ’espoir cl’une famille honorable, ne peuvent
point être assimilés à des étrangers. Si le comte eût
disposé pour eu x, toute la famille eût applaudi à son
choix , et eût béni sa mémoire ; mais prendre pour
héritière un enfant qui n ’avait aucun titre personnel
à une telle libéralité, la fille de sa domestique, de sa
concubine! c’est l’oubli de tous les devoirs de famille,
et de toutes les convenances sociales.
Il faut donc convenir que le jugement de Clermont
n ’a point détruit les faits de suggestion et de captation-,
il ne les a pas même appréciés , puisqu’il ne s’est
attaché à les combattre que par des considérations
fondées sur des suppositions.
Ce jugement n’est pas plus convaincant , lorsqu’il
s a t ta ch e a la forme d u t e s t a m e n t , au soin que le
comte Legroing a pris de le signer à. toutes les pages,
et de le mettre sous enveloppe cachetée au sceau de ses
armes, et à la facilité q u ’il aurait eue de révoquer
son testament et d’en faire un au tre, qu’il eût confié
à son médecin ou à son confesseur.
Ricard a bien prétendu que l’action en suggestion
n’était pas recevable contre les testamens olographes;
mais il est resté seul de son avis : des arrêts contraires
ont prouvé q u ’il s’était trompé. U n arrêt récent de la
Cour royale de Paris, du 3 i janvier i 8 i 4 > a annulle,
pour cause de suggestion et captation, 1« testament
olographe d’une demoiselle Lefèvre.
E t pourquoi le testament olographe serait-il excepté
�( 3a )•.
de la règle commune? Le testament olographe, écrit,
signé el mis sous envoloppe cachetée du sceau du tes
tateu r, n ’offre pas plus de garantie que le testament
p u b lic , qui porte au moins celle de la présence de
notaires et de témoins.
L ’influence qui fait écrire le testament en dirige
les autres circonstances; et l ’enveloppe et le sceau
peuvent être Touvrage d ’une autre main que celle du
testateur.
Cette même influence s’exerce sur les démarches
ultérieures^ et protège le testament contre la révoca
t io n , q u i , parce q u ’elle est possible, est exactement
surveillée; et il n’y a pas médecin ou confesseur qui
t i e n n e , lorsque le malade est subjugué, que sa raison1
est perd ue, que les parties intéressées ne le quittent
pas.
*
Le jugement enfin propose, comme preuve de la
volonté libre du testateur, l’acquisition q u ’il a faite,,
sous le nom de Flavie Jouvaiuroux, le 17 mai 181-7 >
cinq mois après le testament; l ’ordre q u ’il a passé plus
ta r d , à cet enfant de cinq a n s , d ’effets de commerce;
à lui consentis, et enfin sa persévérance dans son tes
tam ent, pendant les huit mois qui se
sont
écoulés
entre cet acte et son décès.
Il n’est pas bien certain que le testament soit de la
date q u ’il porto. Les deux actes cités comme subséq;liens
déposeraient que le testament n ’était pas encore fait;
car le legs universel fait à la jeune Flavie comprenant
tous les biens, il devenait inutile de faire une acqui
�(33
)
sition sous son nom , et de lui passer l ’ordre des billets.
L ’ordre était, suivant le jugem ent, une précaution du
testateur pour empêcher que les billets ne fussent
soustraits par les père et mère. Mais aurait-on pu sous
traire des billets à l ’ordre du comte, qui ne pouvaient
être touchés que par lui ou par son ayant-cause ?
Cet ordre, au contraire, ne porte-t-il pas l ’empreinte
de l ’absence de la raison ? Il est absurde d’avoir passé
un ordre au profit d ’un enfant de cinq ans, p o u r
v a le u r reçue com ptant. La démence seule peut donner
la raison d ’un'tel fa it, comme la démence seule a pu
porter le comte Legroing, q u i, dans les tems de sa
raison, avait, ainsi que le jugement le déclare, de la
force d’esprit et de la fierté de caractère, à mettre sur
la tête d’un enfant étranger, à qui il ne devait rie n ,
une fortune de 3 a 4ooj°o0 francs dont il prive sa
famille.
Une telle disposition sera sans doute reconnue par
la C ou r, saisie de 1 appel du jugement du tribunal de
C le rm o n t, comme 1 œuvre ténébreuse de la suggestion,
de la captation, du dol et de la fraude réunis, pour
abuser d ’un vieillard qui n ’avait plus sa raison.
L a société est intéressée au succès de la réclamation
du chevalier Legroing. Il importe à l ’ordre public,
au repos et à la prospérité des familles, q u ’il soit mis
un frein à la cupidité des gens qui spéculent sur les
successions. Les plus dangereux sont les domestiques,
les femmes sur-tout, q u i, par l'habitude de leur pré
sence et de leurs soins, plus encore par les familiarités
5
�q u ’elles perm ettent, ou q u ’elles exciten t, acquièrent
un ascendant sur l ’esprit de leur maître, que l’âge et
les infirmités ne font q u ’accroître. Devenues néces
saires, elles l ’indisposent contre ses parens q u ’elles
écartent de sa maison ; et quand l ’affaiblissement des
organes ne lui laisse plus de volonté, elles le font
disposer, et la fortune est envahie.
L e legs d ’une fortune opulente, en totalité, en
faveur d ’un domestique., porte en lui-même un ca
ractère de séduction de la part de celui-ci et d ’as
servissement de la part du maître. Il n'est pas naturel
q u ’un homme raisonnable se porte
à
laisser de grands
biens à un individu étranger, que ni son éducation,
ni ses habitudes n’ont préparé à la richesse, et dont
il peut récompenser les services l a r g e m e n t , sans man
quer aux convenances et aux devoirs que les biens de
famille imposent. Les tribunaux ne sauraient être
trop attentifs
à
de tels excès, qui sont toujours un
abus de la loi.
Délibéré par nous , anciens avocats, ce 18 avril 1819.
C H A M P IO N - V IL L E N E U V E .
BONNET.
D E L A C R O IX -F R A IN V I L L E .
T R IP IE R jeune.
RIOM, IMPRIMERIE
de
SALL E S , PRÈS LE P AL A I S DE J USTI C E .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Legroing, Louis. 1819]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Berryer
Champion-Villeneuve
Bonnet
Delacroix-Frainville
Tripier jeune
Subject
The topic of the resource
testaments
abus de faiblesse
domestiques
servante-maîtresse
enfants naturels
créances
séquestration
mobilier
maltraitance
émigrés
ordre Saint-Jean de Jérusalem
fraudes
fisc
inventaires
lettres de change
doctrine
nullité du testament
captation d'héritage
testament olographe
jurisprudence
concubinage
legs universels
egyptologie
code civil
bedeau
Description
An account of the resource
Titre complet : [consultation]
Table Godemel : ab irato : 2. l’action ab irato contre les testaments est-elle admise par le code civil ? peut-elle appartenir à l’héritier collatéral ? Etat (question d') : 3. l’héritier du sang a-t-il le droit, pour prouver l’interposition de personne, de rechercher si le légataire, qui a dans une famille le titre et possession d’état d’enfant légitime, est, ou non, l’enfant naturel du disposant, surtout, lorsque cette recherche conduirait à la preuve d’un commerce adultère ? Sanité d'esprit : d’après quels principes se résout la question de savoir si le testateur était sain d’esprit ? Suggestion : La suggestion et captation sont-elles moyens de nullité pour la législation actuelle ? peuvent-elles être opposées contre un testament olographe ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1819
1807-1819
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2430
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2429
BCU_Factums_G2431
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53484/BCU_Factums_G2430.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Biozat (03030)
Fontnoble (terre de)
Egypte
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
bedeau
captation d'héritage
Code civil
concubinage
Créances
doctrine
domestiques
egyptologie
émigrés
enfants naturels
fisc
fraudes
inventaires
jurisprudence
legs universels
lettres de change
maltraitance
mobilier
nullité du testament
ordre Saint-jean de Jérusalem
séquestration
servante-maîtresse
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53483/BCU_Factums_G2429.pdf
38d5071a225b8a7916f9cb3f8f6975b1
PDF Text
Text
M. L o u i s
MÉMOI RE
f 4AA*4 r * '%
POUR
o m ît .
L E G R O I N G , Chevalier de justice de J
l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, Chevalier de
l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis , demandeur ;
CONTRE
J u lie n
J O U V A IN R O U X
Cathédrale, et Cordonnier
,ancien Bedeau de La
F ra n ço ise
sa femme et encore contre Ledit
BOUDON,
J u lie n
JO U -
V A I N R O U X , en qualité de père et légitime ad
ministrateur de Claudine-F lavie J o u vain ro u x, sa
f i l l e , mineure, défendeurs.
Gvavius agendum cum servis, quam cum alus.
(Maxime duDroit.)L
e
chevalier Legroing dénonce à la justice un acte
de ténèbres, fruit de la violence, d e la haine, et de la
plus honteuse débauche; un acte arraché par la plus
I
�(2 )
vile et la plus dangereuse séduction ; un acte scandaleux
qui blesse la morale publique et rompt tous les liens de
la société; un acte qui est la récompense du crime et
de l’opprobre, qui dépouille un frère et une sœur d’un
antique patrimoine, pour leur substituer les personnes
les plus abjectes; un testament enfin portant legs uni
versel et sans réserve d’une succession de plus de
, 3 oo,ooo francs au profit d’ un enfant de six ans, lille
de la domestique, de la concubine du feu comte L e groing.
Qui osera élever la voix pour faire maintenir une
libéralité exorbitante, qui ne peut être que l'effet de
la démencfe, ou la suite d ’hàbitudos crapuleuses qui
'énervent, avilissent et détrüièent la Volonté? Toutes
les familles, la société entière est intéressée à faire
proscrire ces libéralités abusives arrachées à la faiblesse,
et qui prouvent l’aliénation m entale, ou l’abrutissenient de l’auteur. L o in de nous ces philosophes du jour,
qui ont si souvent outragé les mœurs, sous le piélexte
de venger la nature; qui vantent avec tant d’éclat cetle
liberté indéfinie dans les dispositions, ne voient dans
ces spoliations criminelles qu'un simple mouvement de
fortune. L o in de nous ces praticiens officieux et vils,
dont la complaisance servile, mais largement p a y é e ,
facilite ces odieuses manœuvres, et choisit avec ait le
moment opportun pour en présenter le modèle.
, A quel d fgi’é de dépravation serions-nous donc par
venus, s’il était vrai q u e T a c t e dénoncé trouvât des
partisans? Dans quelle classe pourrait-on rencontrer
�( 3 )
des hommes assez déhontés pour.maintenir un testa
ment qui,est un scandale ,public, çt que la,société re
pousse avec indignation?
Serait-il vrai que le Code civil proscrit les attaques
de l’hérilier du sang? qu’il exclut toute action en nullilé pour cause.de suggestion?(q u ’il a déclaré les ser
viteurs capables de recevoir un.legs universel, à l’ex
clusion des héritiers?
On ne trouve rien dans le Code qui puisse appuyer
celte assertion; on ne voit pas.que le législateur ait
voulu être im moral, qu’il ait dérogé aux anciens prin
cipes, à l'ancienne jurisprudence ^o.n sait, au contraire,
qu’une section avait voulu proposer d’abolir l’action en
suggestion, et que cette propositioniut rejetée.
L e Code civil n’a rien changé à ce qui s’observait
autrefois dans cette matière; il a voulu qu’un testament
ne fût valable qu’autant qu'il serait l’expression des
dernières volontés de l’auteur; il le rejette toutes les
fois quJil est établi que cette volonté a été captée, sur
tout parles personnes qui, parleur état, ont un empire
trop grand sur l’esprit du testateur.
Les questions de cette nature ont toujours été aban
données ù la sagacité et à la sagesse du magistrat, qui
se détermine suivant les circonstances et les présomp
tions plus ou moins graves de captation et d’obsession.
L e chevalier Legroing ne doit donc pas redouter ces""
impuissantes clameurs; il peut user de tous ses moyens;
la loi les protège, la justice les.réclame et l’encourage;
�( 4 )
et il encourrait le blâme de tous les hommes de bien, *
s’il ne cherchait à venger un aussi grand outrage à la
morale publique.
F A ITS.
J ean -B ap tiste, comte L e g ro in g , ancien capitaine
au régiment de dragons d’Artois, avait épousé la de
moiselle de Madeau , qui lui porta une grande fortune,
et lui assura des reprises considérables en cas de survie.
Ses père et m è r e , le marquis et la marquise L e groin g, l’instituèrent leur héritier universel, à la charge
d’une légitime modique envers ses frères et sœurs. Ses
deux frères, suivant l’anlique usage de celte illustre
m aison, étaient entrés dans l’ordre de M alte ; deux
sœurs, dont l’une est décédée, avaient été nommées
chanoinesses de l ’ordre.
L a révolution a détruit les espérances des deux frères,
et les prébendes des deux sœurs. Ils étaient donc ré
duits à leur légitime.
L e comte Legroin g, connu par ses sentimens de fidé
lité à la dynastie régnante, crut devoir s’expatrier, et
suivre le sort de nos princes. L a marquise L e g r o in g ,
sa mère, vint s’établir à R iom ; elle conserva la propriétédela terre deF ontnoble, qui venait de son estoc,
seul reste de l’opulence de la famille : tout ce qui pro
venait du père avait été soumissionné et vendu.
L e sieur comte Legroing avait eu le malheur de
perdre son épouse. D e retour de l’ém igralion, en 1804,
il vint se réunir, à sa famille. Il retrouva une mère
�( 5 )
octogénaire, qui le reçut avec la plus vive tendresse.
Ses deux frères et sa sœur aînée cherchèrent à lui offrir
toutes les consolations de l’amitié.
On crut s'apercevoir que sa santé était altérée et son
hum eur changée. C ’était, sans doute, l’effet de ses longs
voyages, de ses souffrances, et des pertes qu'il avait
éprouvé.
r,J
L e sieur comte Legroing était hom m e d’honneur,
d ’une probité austère, sûr dans ses principes, ami
chaud, citoyen éclairé, sujet fidèle; on pouvait peutêtre lui reprocher une certaine fierté qui tenait à d’an
ciens souvenirs, à une haute naissance, et à tous les
avantages de la fortune.
Mais bientôt des infirmités qui devançaient la vieil
lesse , des attaques réitérées d ’apop le xi e, le réduisent h
un état d’inanition et de débilité qui le mettent dans
la dépendance de tout ce qui l’approche ou l’environne.
Il avait alors tout ce qui peut tenter la cupidité; il
avait récupéré des capitaux considérables; il tran
sigea avec les héritiers de sa fem m e, et recouvra des
effets d’un grand prix. Il se retrouvait encore à la têt©
d’ une brillante fortune, toute mobilière, qui pouvait
aisément devenir la proie du plus vil intrigant.
,
Si le comte Legroing avait joui de toutes ses facultés,
s’il avait pu consulter son cœur et ses anciennes affec
tions, il eût jeté un regard d’amiliéisur deux frères
dépouillés de toutes ressources, privés des pensionsque
leur avaient mérité leurs longs services dans les armées,
�(
6
)
ét des récompenses q u i n ’échappaiehf jamaisiaux che
valiers i dé Malte. - - >rv,,:iîr- ' j-.. ■i - .
Mais qui pourrait le croire? c’estidans les plus vils
emplpis'de la cuisine-qu’il va chercher des consolations;
et cette-circonstances va faire paraître celle qui.Revint
l’objet de ses'affections, et qui depuis a e u , non-seu
lement la plus grande influence>mais un empire absolu
sur _s.es volontés,
f•
. »/
#
Françoise-Boudon, née à Effiat, d’ un pauvre jour
nalier hors d’état de nourrir sa nombreuse, famille ,
*
avait quitté de bonne heure la chaumière paternelle
p()ur.fse mejtre e n (servicô; elle ne paraissait pas douée
d’ une gronde int elligence , car elle ne s’est jamais élevée
au-dessus des derniers emplois de la domesticité telle
fut toujours ce. qu’on appelle vulgairement fille de
peine.
Quelles ressources pouvait donc trouver le comte
Legroing, sexagénaire, malade, à la compagnie d’une
servante sans! éducation, et qui ne possédait aucun des
charmés de son sexe. Cependant cette fille rusée, lourà-tour complaisante et grossière, esclave et maîtresse
attentive’ou mënacahlfe,a su Conserver son empire jus
qu’à la m'oit ilë celui dont elle avait séduit les sens et
capté les volontés.
On sent que pour tout obtenir, il fallait ne rien re
fuser. Survint un enfant, dont le comte Legroing se
crut le
p è r e , 'dont
il prit soin , mais qui n’a vécu que
quelques années. L a naissunce et la mort de celle iille
6onl constatées au procès. .
.
�( 7 )
C ’est après la mort de cet' en fan t, que Françoise
-Boudon voulut faire le premier essai de son autorité,
et obtint de son débile amant un premier testam ent,
reçu Cailhe, notaire ¿1 R i o m , sous la date du 18 avril
i8oy_, par lequel le comte Legroing institue sa gou
vernante son héritière universelle de tous les biens dont
il mourra saisi.
Ce testament fut l’efîet d’ une adresse qui annonçait
que cette fille avait l’esprit plus fin et plus délié qu’on
ne le supposait. L e comte Legroing avait éprouvé du
chagrin de la mort de l’enfant qu'il avait eu de Fran
çoise Boudon. On voit par les détails que lui donne le
chirurgien qui l’avait soigné, qu’il répond à plusieurs
questions précédentes, lui assure que sa fille a eu tous
les soins possibles. L e chirurgien n ’oublie pas ses salu
tations à mademoiselle Fanchette, cette mère malheu
reuse.
Cette lettre est sous la dale du 5 février 1807. File
a été trouvée à R io m , après le départ du comte L e
groing.
Il fallait bien consoler une mère affligée qui perdait
-toutes ses espérances, et qui était sur le point de faire
■reconnaître cet enfant par son maître. On ne put tarir
la source de ses larmes qu'avec un testament qui lui
assurait la succession entière du sieur comte Legroing.
11 se contenta de demander le secret. Il ét;iit de la
•plus grande importance pour Françoise Boudon , et
par conséquent elle devait être discrète. Personne de
la famille n ’aurait osé en concevoir l’idée. On con-
�'T?*( 8 )
■naissait bien le singulier et nouveau penchant du comte
Legroing; on s’apercevait de ses habitudes et des fa.miliarités qu’il avait avec cette fille : on le plaignait,
maison ne se permettait aucunes remontrances. Fran
çoise Boudon, enhardie par la protection du c o m te,
fut quelquefois audacieuse, insolente m êm e envers
quelques personnes de la famille; on dissimula, on.
méprisa ces grossières incartades.
Une affaire plus sérieuse porta l’allarme dans la fa
mille. La terre de Fonlnoble, son berceau, était la seule
propriété qui eut échappée à la rapacité nationale.
C ’était l’unique ressource d elà m ère, qui en partageait
le produit avec ses enfans. Tout-à-cou p ce seul m oyen
d’existence va lui être enlevé.
L a baronie du Jaun et, achetée en 1 7 6 5 , par le
marquis Legroing père , n’avait pas été entièrement
acquittée; une partie notable du prix restait d u e ; les
intérêts;avaient cessé d’êlre payés pendant rém igra
tion du comte Legroing : celui-ci, héritier de son père,
donataire de la terre d e F o n tn o b le, sauf l’usufruit de
la m ère, était tenu personnellement et hypothécaire
ment du paiement de celle dette. Les créanciers, pen
dant la révolution, avaient gardé le silence, et n’avaient
fait aucunes démarches pour la liquidalion de leurs
créances. Une loi du 3o ventôse an 12 les autorisait ¿1
prendre des inscriptions sur les biens que possédaient
encore les débiteurs émigrés. Les inscriptions sont prises ;
les poursuites com m encent, le commandement est
lancé: on va faire vendre la nue propriété deFontnoble.
�( 9 )
L e comte Legroing, affaibli par ses maux, tout occupé
de celle qu’il appelait sa Fanchette, ne voyant, n’écoutant qu’elle, apprend l’événement avec indifférence,
el déclare netlement qu’il ne veut pas s’en occuper, ni
faire le plus J é g e r sacrifice. Fanchette était de cet
avis; une terre ne lui convenait pas; elle ^préférait
une succession mobilière, dont elle disposait en maî
tresse, qui élait toute sous sa main.
Cependant il fallait prendre un parti; la chose était
urgente : il n 'y avait pas un moment à perdre. Il res
tait au chevalier Louis Legroing quelques capitaux,
les débris d’un service actif, de ses spéculations mari
times dans un long séjour chez l’étranger; il se déter
mine à traiter avec sa famille, et à se charger de l’é v é
nem ent; il paye les dettes de sa m ère, lui assure une
rente viagère de 6,000 francs, en constitue une de
3.000 francs à l’aîné de ses frères, et un capital de
3 0.000 francs payable au décès de sa mère ; prend des
engagemens personnels de payer les légitimes de sa
sœur et de son frère le chevalier, qui existait alors;
vend la terre de F ontnoble, et fait face à tous ses en
gagemens avec la plus scrupuleuse exactitude.
Il fallait autant d’activité que d’honneur et de cou
ra ge , pour déterminer le chevalier Legroing à se char
ger d ’un aussi pesant fardeau, qui ne lui a pas laissé
un moment de repos pendant dix années, qui sont
encore une longue période dans la vie; mais il fut le
bienfaiteur, le sauveur de sa famille, et le comte L e
groing se réveilla parfois de son apathie, pour lui té2
�( 1° )
moigner qu’il lai savait quelque gré de cette conduite
généreuse.
Les choses ont bien changé. Françoise Boudon , ou
plutôt Fanchette, voulait se débarrasser de ceux qu’elle
regardait comme des surveillans incommodes. Elle fait
entendre à son maître qu’il avait autrefois habité la
ville de Clerinont, qu’il y avait des amis, que sa santé
avait toujours été meilleure dans cette ville; elle lui
fait bien vite prendre celte résolution; et malgré les
larmes d’une mère octogénaire, l’empressement de ses
frères et de sa sœur, il quitte le toit m aternel,'et se re
tire à Çlermont.
Dans les premiers momens, le comte Legroing vi
sitait ses anciens a m i s , allait à la ca m pa gn e; il visita
même son frère Louis dans son habitation, distante de
vingt lieues de Clermont, où le chevalier avait l’habi
tude de passer la belletsaison. Mais ce genre de vie fut
rapidement changé; il devint taciturne, sédentaire; sa
porte est fermée à ses amis; Fanchette introduit deux
de ses sœurs dans la maison de son maître : il n’a plus
d’autre société; ses amis le plaignent ; on savait l’em
pire que ses domestiques avaient sur lui. Il arrivait
m êm e souvent des scènes singulières, qui ont parfois
attiré dans son domicile la visite des commissaires de
police. On aura occasion d’en parler plus en détail.
Fanchette fait doter par son maître scs deux sœurs;
elles sont mariées par ses largesses. Fanchette veut aussi
prendre un établissement ; elle a besoin de secours pour
soigner les infirmités du comte Legroing. Elle avait
�V i f
(II
)
distingué Julien Jôuvainroux, bedeau de la!cathédrale,
et cordotinier'de profession.
C ’est un personnage qu’un bedeau de paroisse! Il
fait commodément placer les personnes qu’il affec
tionne; iTse vantait d’avoir la 'protéction des'prêtres,
qui tous agiraient en ;sa faveur :>bref, il épouse Fran
çoise .Boudon, et vint grossir le ménage du comte L e groing. *11 n?avait plus besoin de *son métier.
Mais Fanchctte disparaît ; c’est madame Julien ;
d’autres vêtemens annoncent son changement d’état ;
elle affecte la réserve et l’austérité qui conviennent à sa
nouvelle condition; plus de 'liaison avec les domestiqu es'; elle forme une société n ouvelle, vante sa for
tune à venir, néglige sonYnaître, et le laisse dans un
état d ’abandon dont tous les voisins sont indignés. Elle
se livre à un luxe qui excédait ses moyens actuels; elle
fait des dettes; les créanciers importuns ne veulent pas
attendre, parviennent jusqu’au m aître, q u i, malgré
son asservissement, n ’entendait pas raillerie lorsqu’il
fallait donner de l’argent; delà deà imprécations fort
énergiques, et répétées avec tant de fo rce, que les
voisins et le public en étaient toujours informé.
M adam e Julien fut imprudente; son époux craignit
les suites des boutades de son maître : il chercha à cal
mer l’ôrnge; il avait les talens nécessaires pour y par
venir.
Julien est adroit et rusé; pale, taciturne, dissimulé,
les yeux toujours fixés en terre, lie perdant jamais de
vue son objet, il convoitait les trésors de son maître;
�( 1 2 ')
mais il n’était pas asse2 maladroit pour en gratifier sa
fem m e; dont l’humeur dissipatrice commençait à l’in
quiéter.
Il avait eu une fille de son mariage, ou du moins il
en était le père putatif; il conçut le projet de faire
tourner au profit de cet enfant toute la fortune de son
m a ître; il y parvint par son adresse, et sut employer
toutes les ruses qui peuvent toucher un vieillard imbécille.
Cet enfant fut instruit à prodiguer ses caresses au
sieur Legroing : elle l’appelait papa; elle ne manquait
jamais d’aller se jeter dans ses bras quand il avait des
mouvemens de colère ou d’impatience, et ce petit ma
nège calmait sur-le-champ le maître emporté.
Mais le comte Legroing ne disait rien encore. Un
événement funeste sembla, pour un m om ent, sus
pendre cet acte si désiré, et donna les plus grandes
inquiétudes. L a marquise Legroing devient sérieuse
m ent malade; son grand â ge , ses infirmités font craindre
une fin prochaine : elle a en effet succombée après de
longues souffrances. Elle est morte le 12 juillet 1816.
L e comte Legroing, instruit du fâcheux état de sa
m è re , donne encore des preuves de sensibilité ; il ac
court pour lui rendre ses devoirs :Fanchette l’accom
pagne. Ces dernières entrevues furent touchantes. L e
comte Legroing se montra pénétré; il semblait faire
une nouvelle connaissance avec sa famille : le cri du
sang se fait entendre; un regard sur lui-m êm e, sur
l’état d’avilissement dans lequel il était tombé, lui ar-
�( i3 )
•rache des larmes; il rougit de lionte et* d’effroi. On
l ’emmène bien vite; on ne le laisse pas m êm eren d re
les derniers devoirs à sa m ère; et alors ses tyrans, ses
serviteurs, devenusses maîtres, mettent tousleurs soins,
-emploient tous les mouvemens pour le séquestrer à tous
les regards, pour l ’empêcher sur-tout de voir personne
de sa famille. On calomnie son frère, on le noircit dans
son esprit, on va jusqu’à lui prêter des vues ambitieuses
et criminelles. Il n’a pas été possible au chevalier L e groing de parvenir jusqu’à son frère. U n respectable
ecclésiastique, M. l’abbé Legroing de la R o m agère,
parent et ami des parties, que le roi vient d'élever à
l’épiscopat, n’a pas pu être admis. L a porte a été fer
mée à madame Henriette L e g io in g , chanoinesse, cou
sine du d éfun t, à qui il payait annuellement une pension
de 200 francs, et qu'il a depuis oublié.
Enfin tout fut consommé le 24 décembre 1 8 1 6. Jouvainroux fit entendre à sa femme qu'il valait mieux
faire porter le legs universel sur sa fille que sur elle;
que depuis quelque tems le comte Legroing témoignait
de l’humeur et de la colère contre la m ère; qu’il résis
terait p e u t- ê tr e , et qu’on courrait le risque de tout
perdre.
Les batteries étaient dressées, le modèle du testa
ment tout prêt ; les sollicitations sont pressantes; on
redouble de soins, on fait entendre au sieur L e g r o i n g
qu'il est le père de cet enfant. L e comte Legroing
prend le modèle, le co p ie, et le signe. 11 a la maladresse
de laisser tomber son encrier sur lu feuille, mais on ne
�(■14
)
i,veut, pas lui donner Jarpeine de le-transcrire de nou
v e a u i:; on le prend; tel qii’iliest. Jouvainroux s’en emcpare, le fermecsoigneusement.illne.s’agit plus que do
.surveiller,-et dïempêeher qu’il en soit fait un autre.
iPour prouverque le comte Legroingin’estipas l'au
teur; de. ceitestainent, et,qu’on^ui aiprésenté un modela
tout prêt, iffa u t faire.connaître cet acte dans toute sa
, teneur.; -u
r<
- « Je' soussigné , 'Jean-Baptiste , • comte Legroing ,
je ancien capitaine de dragons.au régiment d’A rto is ,
p« dem eurant à Clerm ont, ai fait mon testament oloif< graphe, ainsi qu’il ¡suit :
« Je ,n omme et .institue pour mon héritière géné■
r raie et universelle de tous les biens meubles et im,*< meu,bles, d ro its, raisons et actions-dont je mourrai
« vêtu et saisi, Claudine^Flavie Jouvainroux, fille de
<r Julien et de Françoise Boudon, aux charges hérédi* tai.res, ,e,t de plus, de payer annuellement à sa mère
« la somm eide .800 francs, moitié de six mois en six
jk m ois, et d’avance, sans aucune retenue, pendant la
« vie de,la^dame Boudon , de laquelle somme annuelle
« je lui ‘fais don et legs, par forme de pension alimen
te taire; plus, sa chambre bien garnie pour elle, et une
« chambre! pour: sa domestique; plus, la jouissance de
six couverts et une écuelle d ’argent pendant sa vie;
« plus., quinze paires de draps, tant de maître que do
« domestique; douze douzaines de serviettes, et de la
«r batterie de cuisine., Je révoque tous testamens antérieurs, même loul codicille. T e l est mou testament
�(
»5
)
* ¡olographe, q u é 'j’ai écril de m a'm ain, et signé; le-1
« quel j’ai déposé ès-m ains de M e Espinasse, notaire r
« royal à Clermont-Ferrand. Je prie M. le président du ’
« tribunal de celte ville de lui confier ce dépôt. Fait à
«■ Clerm ont-Ferra nd, dans ma m a i s o n , l e i 4 d é c e m b r e ,;
«■1816. Sign é, J e a n - B À p t i s t e , comte L E G R O I N G .J» '
Sur l’enveloppe étaiUécrit :<
«■Ceci est‘mon testament olographe, déposé d e c o n <r fiance entre les mains de M e Espinasse,1 nôtaire ro ya l'1
« à Clermont, ce 24 décembre 1816. Signé', J . - 'B y «r comte ’L egRoitîG.-» *
•1
■- : i.< )
Tiff comlç LegrOing1n avait aucune Connaissance dans
les affaires; i l ‘ignorait1 sur-tout les term'ës techhrqu'ës
du m étier, et la rédaCtiôn d e ’ce testament’ annonce*'1
plutôt un praticien à protocole,: qu’un hom m e r'du"i
m onde; le préambule sur-ibüPést d’une^oridilé peu
commune. *11 est’ rare que l’hom m e'bien né ne fasse
précéder un acte aussi important de quelques réflëxiohsir*
morales, des motifs qui' le déterminent ; mais qüand
011 lit, Les droits, raisons et-dotions, les biens meublés ;
et immeubles; quoique le comte Legroing n ’eût'pas ’
d’im m eubles, ces mots'ès-m ains, qui ne Sont’ pa's une '
locution de société, on est bientôt convaincu qiid ‘cér''
ne fut pas son ouvrage, et qu’il en copia'Servilerrieïit’
le mod<Me;quJon lui a présenté. On dit servilenlent, car ‘
on a remarqué qu il était tout d’üne;:suifé^ sans £iccens:,
et sanfc'ponctuation.
On suspend pour un liiomént la discussion de cet ’
acte, dans lequel on répète si souvent le mot oldgraphè,
�(
16 )
sans doute parce qu’o n y attachait quelqueimporfance,
pour revenir sur des faits antérieurs bien importons à
connaître.
L a dame marquise Legroing m ère, peu de tems
avant son décès, avait fait quelques dispositions au
profit de la dame sa fille, et des dons à ses domestiques.
.Après sa mort, les scellés furent apposés, à raison de
l’absence du chevalier Louis Legroing. Les choses traî
nèrent en longueur, et le frère aîné s’occupait peu de
ces détails; mais madame Julien s’en occupait beau
coup; elle convoitait le mobilier, qui devait revenir à
son maître : elle le tourmentait; son mari se joignait à
elle pour le contrarier, et souvent on allait jusqu’aux
mauvais traitemens; alors l’infortuné menaçait de son
frère, qui mettrait ordre à tout, et punirait leur inso
lence. A qui vous adresseriez-vous, s’écriait-on? A votre
plus mortel ennem i, qui n’en veut qu’à vos b ien s,
cherche à vous faire passer pour un fou, et veut vous
faire interdire, peut-être pis encore.........On exaspère
par ces calomnies le frère aîné. On se rappelle qu’a
près le décès de la m ère, le chevalier devait compter
h son frère un capital de 3o,ooo francs, indépendam
ment de la rente viagère de 3 ooo francs : le comte les
exige sur-le-champ; il menace par écrit de prendre
tous les moyens de l’y contraindre, de faire enregistrer
les actes qui contenaient les arrangemens de famille;
il injurie sou frère dans toutes les lettres qu’il écrit à
son conseil. L e frère veut se présenter; il ne veut rien
entendre; enfin le chevalier est obligé de payer de suite
�( I? )
uno partie, et de faire des lettres de change à termes
très - rapprochés ; il n’obtient c e court délai que par
riulermédiaire d’un jurisconsulte estimable, qui voulut
bien interposer un ministère de paix, mais q u i , ne
connaissant pas le comte L egroing, crut, en l’écoutant,
que son frère avait eut envers lui les torts les plus
graves. Son étonnement augmenta encore, lorsqu'en
lui présentant à signer la quittance des sommes qu'il
recevait, s’étant aperçu qu’il y était dit : R eçu d u
chevalier Legroing, mon fr è r e , il raya ces derniers
mots avec la plus grande violence.
En vertu des actes de famille, le chevalier Legroing
devait aussi remettre à son frère une certaine quantité
de mobilier désigné, comme faisant partie du mobilier
paternel, mais en Cétat où ces meubles se trouveraient.
M . et madame Julien arrivent pour faire l’enlève
ment de ces meubles; ils prétendent avoir le choix des
articles sur la totalité du mobilier, e t, comme déraison,
ils prennent le meilleur. L e chevalier garde le silence;
mais les autres paraissent fort mécontens de ce que les
lits et les couches n’étaient pas neufs, et de ce que le
linge était usé. D e retour à Clermont avec leur proie,
ils recommencent leurs imprécations ordinaires contre
le chevalier, disent à l’aîné qu’ils n ’ont pu obtenir que
le rebut : l’aîu6 s’emporte en vociférations; et ce mo
ment est choisi pour présenter le modèle du testament.
11 a été copié à cette époque.
Com me le comte Legroing a survécu encore longtems à cet acte de démence et de colère, on craignait
3
*
�V, *' ( 18 )
toujours un retour de sa part, et de meilleurs sentimens
pour sa famille, il fallait s’assurer une planche dans le
naufrage. Il avait des capitaux très-considérables placés
dans des maisons opulentes et respectables. Les débi
teurs , la plupart ses anciens amis, sont sommés devenir
s’acquitter; on se refuse c'i tous renouvellemens.
L a majeure partie rentre. On fait acquérir par le
comte Legroing une propriété de 40,000 francs, payés
de suite, sous le nom de la petite Flavie. On fait plus,
on pousse l’impudeur jusqu’il faire passer à l’ordre de
cet enfant les lettres de change non encore acquittées,
et notamment celles qui avaient été souscrites par le
chevalier T^egroing à son frère. On ve rra dans un mo
ment l’usage qu’en a fait le tuteur.
Mais M. Julien n’a ara-t-il pas fait une maladresse ?
L e comte Legroing n’a donné à Flavie que les objets
dont il mourra saisi et vêtu. Bien certainement il n’est
pas mort saisi et vêtu des lettres de change qu’il a
transmises, par son ordre, à Flavie Jouvainroux. Celleci en est évidemment propriétaire, au moyen de l’ordre
passé à son profit; M. Julien ne voudra pas prétendre
que Flavie ait fait les fonds de ces lettres de change :
ce ne serait donc alors qu’un don m an u el, une libé
ralité indirecte, nulle dans son essence, puisqu’elle
ne serait pas dans la forme des donations entre-vjfs
ou à cause de mort; e t, dans ce cas, ces lettres de
change 11e feraient pas partie de la succession du feu
comte Legroing : il faudrait les rapporter aux héritiers
du sang.
�( I9 )
Revenant au récit de ce qui s’est passé après le tes
tament olographe jusqu’au décès du sieur Legroin g,
on ne voit plus qu’horreurs, m enaces, et mauvais
traitemens; on fait peser une verge de fer sur un mal
heureux moribond privé de toutes ses facultés p h y
siques et morales, ne pouvant se donner aucun m ou
vem ent, et dans la dépendance la plus absolue de ses
tyrans.
l i s e révolte parfois; on entend des cris concentrés
de fureur : M alheureux! vil cordonnier ! tu veux être
mon héritier; tu m ’as trom pé, trahi. Il se traîne jusqu’à
la croisée, crie au secours! à l ’assa ssin ! Les voisins
s’assemblent, le commissaire de police, les gendarmes
s’introduisent dans son domicile; on trouve le malade
dans les bras de ses domestiques, qui le caressent , le
déshabillent, prennent les plus grandes précaulions
pour soulager ses maux. 11 est va in cu , déclare qu’il a
pardonné, et renvoie la force publique qu’il venait
d’invoquer à grands cris.
Ces scènes se sont renouvelées souvent, et terminées
d e là même m anière;au point que ses cris deviennent
impuissans et vains : on y est accoutum é; on le regarde
comme un maniaque, un insensé qui revient à luimême lorsque sa colère est calmée.
Ses derniers momens ne sont pas plus paisibles. Il
renouvelle encore ses crisdécliirans, il répète les mêmes
menaces, manifeste son repentir. Des amis de Jouvainroux sont témoins, et lui entendent proférer les injures
�;
.......
(
)
les plus atroces contre le moribond, les menaces de s’en
débarrasser., et de Le jeter par les fenêtres.
C e n’est pas seulement ici un emportement brutal,
ou la menace d’ un homme grossier : peut-être que
l ’agonie dans laquelle le malade était entré, la certitude
d’ une mort prochaine, ont empêché un grand crime.
Iiabitans de Clermont! vous en avez vu un cruel et
funeste exemple. Il est trop récent pour être oublié.
Leçon terrible pour les malheureux célibataires livrés
à des domestiques ambitieux et infidèles !
j
L e sieur Legroing est mort le i 3 août 1817. L e len
demain 14 , Jouvainroux se présente à l’hôtel du pré
sident , porteur du testament olographe de son maître ,
que J o u v a in ro u x avait toujours gardé en sa puissance,
quoiqu’il soit dit que le comte Legroing en avait fait le
dépôt chez M e Espinasse; que cette déclaration fait
partie de la disposition, et même est répétée sur l'enve
loppe portant suscription du testament.
L e président, après avoir dressé procès-verbal de
l'acte, le remet ès-mains du greffier, qui en devient
dépositaire, pour le rendre à M e Espinasse, notaire.
Julien avait caché la mort de son maître pendant toute
la journée du i 3 . Personne de la famille n'avait été
averti : le chevalier arrive plusieurs jours après. Il ap
prend qu’on avait posé les scellés chez son frère le
i 5 août, qu ainsi on avait eu le teins, pendant trois
jours, de dévaster et d’enlever tout ce qu’il y avait de
précieux; qu’en effet il y avait eu spoliation complète
à côté du corps, qui reposait encore dans la maison.
�(
21)
On ne doit pas omettre une anecdote précieuse que
fournit cette apposition descellés du i 5 août. L e juge
de paix était absent; le suppléant fut appelé. C e sup
pléant se trouve l’avoué des Jouvainroux. 11 met les
scellés sur tout ce qui est apparent ; mais lorsqu’on ar
rive à l’appartement occupé par Monsieur et madame
Jou va in roux, on s’incline respectueusement. Com m ent
mettre les scellés sur le boudoir de madame? Et pour
rait-on sans crime gêner la maîtresse de la maison dans
ses habitudes et dans son secret asyle? B ref, cet appar
tement , où il y avait des placards et un secrétaire, reste
intact.
L e juge de paix se transporte, le 25 août, pour pro
céd era la rémotion; et la première chose qu’il aperçoit,
c ’est que cet appartement est resté libre ; il demande
pourquoi cet oubli ou ce ménagement? On lui répond
que c’est ici l’appartement de M a d a m e . — Mais des
valets ont-ils quelque chose à eux chez leurs maîtres?
Huissier, je vous confie cet appartement; vous le garde
rez jusqu’à ce que mon opération soit terminée: je vous
l ’ordonne; tout est sous votre responsabilité. Madame
Jouvainroux tombe en syncope.Pendant qu’on emploie
à grands îlots l’eau de Cologne et qu’on fait flairer des sels
pour rappeler les sensde madame Julien, le juge de paix
continue, et se met en devoir de poser ses scellés sur
/
l ’appartement. L ’évanouissement avait cessé. M ad am e
s’oppose à ce que les scellés soient mis, et demande
un référé chez le président. Il est ordonné; on se rend,
h près de neuf heures de relevée, chez le président, qui
�( 22 )
renvoie l’incident à l’audience du lendem ain, sans rien
ordonner sur l’objet principal. L e juge de paix, informé
de ce qui s’est passé à l’hôtel, croit qu’il est de son de
voir d’aller en avant, et appose ce scellé fatal...........
Proh doLor. Lorsqu’il a fallu les lever, on trouve dans
un des tiroirs du secrétaire cinquante jetons d’argent,
sur cent qu’en avait le comte Legroing, et qui avaient
été réclamés lors de l’inventaire. Madame Julien dit
agréablement que ces jetons sont le jouet de sa fille j
que le comte les a livrés à cet enfant, à peine âgé de
six ans, pour son amusement.
On continue les recherches. Dans un des tiroirs se
trouvent huit sclials de prix, destinés à la parure de
madame Julien. On lève ces scl i al s, et tout-à-coup sort
de l’un d’eux des papiers qui se trouvaient renfermés
dans les replis; on examine ces papiers : il n’y avait
que pour 23 , 8 oo francs de lettres de change, parmi
lesquelles figure une lettre de change du modeste
notaire de confiance.
Pourquoi ces lettres de change sont-elles cachées si
soigneusement dans un schal? Jouvainroux, seul pré
sent, avec toute la pilleur et la lividité qui caractérisent
sa physionomie anguleuse, r é p o n d à cet interrogat sé
v è r e , qu’il ne veut faire tort à personne, el qu’il avait
détourné ces effets par de bonnes vues, pour diminuer
d’autant les frais delà régie, pourles droits de mutation.
Survient nindame Julien. Malheureusement , elle
n’avait pas entendu la réponse de son mari ; elle répond
à son tour que son maître lui avait fait personnellement
�( *3 )
cadeau de ces effets. L e procès-verbal du juge de paix
contient le récit de l’incident, les interrogáis, et les
réponses.
Louis Legroing, habile à succéder à son frère, forme
opposition à la rémotion des scellés le 19 du même
mois d’août. L e 2 1 , Jouvainroux présente requête au
président, pour demander la rémotion des scellés : or
donnance conforme. L e juge de paix du canton fixe
au 2 3 août la levée des scellés; le mêm e jou r, Jou
vainroux fait notifier au chevalier Legroing , et au
subrogé-tuteur, le testament du défu n t, le procès-verbal
d’ouverture, et acte du dépôt d’icelui, la requête et
l’ordonnance, avec sommation d’être présens à la ré
motion des scellés et à l’inventaire du mobilier.
L e 2,3 août, nouvelle requête du lu leur, pour.de
mander l'envoi en possession de la succession du comte
Legroin g, en conformité, est-il dit, des articles 1006
et 1008 du Code civil. Il obtient ; ne ordonnance qui,,
sur le vu du testament et de l’acte de dépôt, envoie la
mineure en possession.
On procède a 1 inventaire. L e chevalier demande ;i
y faire des dires, et il déclare qu'il entend attaquer le
testament de nullité, par tous les moyens de droit, et
qu’il forme opposition à l’ordonnance qui envoie Jou
vainroux en possession de la succession ; il soutien! q u ê
tant habile ¿V succéder, comme héritier du sang, le
mobilier doit lui être remis, sauf à le représenter. Il
demande, dans tous les cas, qu’il soit nommé un sé
questre judiciaire; il se plaint principalement des en-
�( H )
lèvemens, des spoliations qui ont été commises, des
transports qui ont étéfaitsen main tierce, qu’il indique,
de ce qu’il y avait de plus précieux, en diamans, o r 7
argent et effets ; il insiste sur son opposiiion, et demande
qu’il en soit référé à l’hôtel du président.
Il est remarquable que le chevalier Legroing, qui ne
fut instruit de la mort de son frère que trois jours après,
se transporta, en arrivant à Clerm ont, au greffe du
- tribunal, où il prit connaissance de l’acte de dépôt, qui
avait été fait par Jouvainroux, du prétendu testament
olographe, le 14 août, c’est-à-dire le lendemain du
décès.
I l avait principalement observé que J o u v a in ro u x
seul s’était présenté, quoique, d’après ce testam ent,
•le comte Legroing déclarât qu'il avait déposé son tes
tament ès-mains d’Espinasse, et priât M . le président
de confirmer ce dépôt.
E n conséquence,. après avoir obtenu le référé qu’il
demandait, il présente sa requête au tribunal le 27
août. On y lit l’exposé suivant :
« L a présentation faite par Jouvainroux, porteur de
« ce prétendu testam ent, est d’autant plus remar« quable, qu’on lit en termes exprès, dans le corps du
« testament , ces lignes : Suit La mention du, dépôt èsk m ains d ’E sp in asse, etc.-«
I l ajoute : « On voit ici une condition d’autant plus
r essentielle, qu’elle est dans la disposition, et en fait
ce partie. L e défunt y avait attaché la preuve de la nia
it niieslation de sa volonté et do sa confiance. Il était
�-(*5)
« heureux encore qu’il eut obtenu celte faculté de ceux
« qui exerçaient leur empire et leur violence sur son
* esprit. Ce dépôt chez un notaire de confiance lui lais« sait au moins l’espoir de pouvoir révoquer ou changer
«• ses dispositions, qui, dans un moment lucide ou l i b r e , .
«• lui auraient paru extraordinaires et bizarres.
«■Il paraît que le défunt tenait d’autant plus à ce
« dépôt, que sur l’enveloppe qui contient la suscription
«■du testament, il répète comme chose fa ite que ce
« testament est déposé de confiance entre les mains de
« M e Espinasse. »
L e demandeur atteste, sur son honneur, que cet
exposé n'a eu’lieu que sur le vu de la m in u le, qui ne
contenait aucun renvoi. Il en avait pris une co p ie , et
c ’est sur celte copie qu’il avait cru pouvoir invoquer ce
m oyen en sa faveur.
Mais bientôt il apprend que la minute n’est plus dans
le même état , que la marge contient plusieurs renvois,
et qu’il résulte notamment de ces renvois que M e Espinasse aurait présenté lui-même le testament, accompagné de Jouvainroux.
/• '
•’
.-j s • *-i
11 y a plus, dans la copie qu'on lui a fuit signifier;
le 23 août, de cet acte de dépôt, à la requête de Jou- ,
vainroux, il paraîtrait q u e M e Espinasse seul a présenté
le testament au président; il n’y est pas même clïl qu'il
était accompagné de Jouvainroux; et quoique le gref
fier Fauverteix eût été personnellement dépositaire,
et chargé de remettre le testament à Espinasse, cq
4
�'(
20)'
n’ést^lusqLÎeCombétj'cômmisdugrëiïej'qui comparaît
dëvànt Espinàsse pour effectuer cette remise.
'L é ‘ ¿hëvâlier L e g ro in g , instruit, et sur-tout fort
étonhé ^ e bes vàriaritesldaris uïi'dépôt publient sacré,
a vdlila;iâVbir tinè expédition vidiméë*ét[figurée de cet
acte de défiât qui üV£Îïtusübi cette métamorphose. Il
est) porteur d e ’ceite exp éd ition ;‘on fy voit sans inter
ligne , ique Jôuvainroux seul a présentéde testament ;
mais>par ûn'renvoi quiippécèdé le prénom tel le nom
de Jouvainroux^-on «ajbute.,*à la m arge, ces mots :
M ‘ E sp in a sse, notaire en cette ville, assisté de , etc.;
ce qui ferait croire qu’Espinasse était porteur de l’acte,
et qu’il était seulement accompagné de Jo uvain ro ux.
A la fin , le président ren voie le dépôt à Espinasse ^en
ajoutant :« E t-a vo n s signé-avec ledit comparant el lo
« greffier ». On a surchargé le mot ledit, et m êm egrossièrement, pour y ajouter Lesdits. L e greffier n’a pas
nianqüe‘'dèafaire menfion clé*cette surcharge dans l’exjiédi lion1figurée‘qu’il a délivrée.
~ Q u e ll e ^ é s t dO’ric la fàlalilé'qùi'règne dans celle afflure^'Jouvàinroüx né Sait doncêniployer que des voies
tortueuses? et ne peui-on pas croire que le doigt de
jD itu ub'stJtâl‘ jj)du redécouvrir les f r a u d e s et les rusés?
JtjtivnirticMx^a è u 'p e u r ; il a traint l’obsirvalion du
sidur Légm itig; il y a remédié |iiir‘ 'un renvoi q u ’il a
dbl&hu■
ou^hiit1 insérer bn 'he' sdit comment ; ‘mais le
jytge- è,st°grb^ier.* Si PEs[JiH;i's^e/ élail pOrlëur du lesiamefit j s’il Pa1 p'réiëhlé, ^oüYquoiie président a-l-il rejiiis la- pièce1au gréflibr?’ 11 élïiil si ¿impie de lit rétidre
�( 27 )
à Espinasse, et d’en faire mention dans le procèsv e r b a l ? Pourquoi a^tron surchargé ledit, popr mettre
le singulier au pluriel? Pourquoi
Qh! combien
de questions il y aurait à fa ir e , et auxquelles on ne
répondrait rien de raisonnable !
On ne manquera pas de dire que ce renvoi est pa
raphé par le président, des lettres iniliales de son nom.
A Dieu ne plaise, que le chevalier Legroing ou son
conseil veuillent adresser ici le plus léger reproche à
ce vénérable magistrat; ils se plaisent, au contraire, à
rendre un hommage public h ses lum ières} sa sagacité,
ses vertus, et à son inaltérable probité. .
Mais on ,n’ignore pas ce qui se passe à l ’hôtel j lors
qu’on vient demander des signatures. On présente or
dinairement une i'o^le d ’actes rédigés la veille ou le
jour m êm e; le président,, qui en,a çonnaissance, signe
avec confiance, apostille les renvois sans autrement y
rpgarder, parce qu'il doit avoir la plus entière confiance
dans les fonctionnaires qu’il emploi,ç. Il est trop juste
et 1rop généreux pour vouloir priver le chevalier d’un
de ses principaux moyens de.dé£ep,se, et pour ne .pas
reconnaître la justesse de cette observation.
Quoi qu’il en soit, sur Je référé qu’avait demandé
Louis Legroing, le,président renvpya à l’audience; et
le 27 août 1 8 1 7 , le tribunal, prqnpn.cymt sur l’incident,
ordonna qu’au principal, sur la demande en nullité,
les iparties procéderait en la manière ordinaire ; mais
débouta l e . chevalier I-egroing .d.e ,(son opposition h
l'ordonnance d’envoi en/possessiçn, pav le m qtif qu’on
�( *8 )
ne pouvait annuller par provision un litre, et q u e ,
d’après ce titre, Jouvainroux, jusqu’au jugement du
fo n d , avait un droit universel à la succession.
L a chose était toute simple. C'est sans doule une
fatalité et une lacune dans la loi, qu’il n’y ait pas de
moyens d’empêcher l’exécution provisoire d’un litre,
sur-tout lorsqu’il y a péril dans la dem eure, que les
nantis n’offrent aucune responsabilité; mais ce n’estlà qu’un inconvénient particulier qui doit céder à
l’intérêt général.
Néanmoins, on croit pouvoir dire que si le président
et le procureur du roi eussent eu connaissance de
l ’anecdote de l ’appartement , de la soustraction des
jetons et des effets, le président n’eût pas envoyé en
possession un tuteur infidèle; il eût nommé un sé
questre; et le procureur du roi aurait sans doute requis
la destitution de la tutelle, dans l’intérêt même de la
mineure. Malheureusement, on n’en fut pas informé;
le procès-verbal qui constate l’enlèvement fut ignoré.
Les Jouvainroux ont cru avoir une pleine victoire;
ils se sont livrés à la plus insolente jactance. On ne ré
pétera pas leurs expressions grossières; on devine assez
tout ce que peut dire celte classe d’hommes, vile hotninuni genus. L e chevalier Legroing a pris le seul parti
qui lui convenait; il a gnrdé le silence.
Il n’ignorait pas même avec quelle joie brutale les
Jouvainroux jouissaient de leur bonne fortune; il savait
que madame Julien avait étalé la plus ridicule parure
au spectacle, et aux premières loges, le i 5 ao û t, le
�'
( 29 )
surlendemain de la mort de son maître; que son époux
avait passé la même journée au cabaret, et que peu
de jours après, ils avaient fait nommer leur fille reine
d ’une fête baladoire, où elle parut revêtue de brillans
ajustemens qui annonçaient sa nouvelle fortune. M al
heureux frère! dans quelles mains avez-vous placé vos
bienfaits !
Reste un dernier épisode pour embellir cette narra
tion. On se rappelle que le chevalier Legroing était
débiteur envers son frère d’ün capital de 3 o,ooo f r . ,
payable après le décès de la mère commune. Il sem
blait, sur-tout entre frères, et d’après toutes les cir
constances qui avaient accompagné le traité de famille ,
que le chevalier pouvait espérer un délai moral pour
s’acquitter de cette def le. 11 est difficile de penser qu’on
puisse avoir dans le moment même un capital aussi
important; et la justice lui aurait accordé un terme
raisonnable, s’il l’avait demandé. Mais l’aîné était tel
lement excité et irrité contre lui, qu’il se vit obligé de
prendre les moyens les plus prompts pour l’appaiser,
et éviter des droits énormes. Il était à Clermonf ; il
souscrivit différentes lettres de change qui furent datées
de R io m , tirées sur D om ergue, banquier. Ces lettres
sont sous la date du 12 juillet 181 y 5 l’une d’elles., de
la somme de 4997 francs, était à échéance le i 2 oc
tobre, lors prochain. L ’ordre, comme on l’a dil, était
passe au profit de Flavie Jouv ain roux, voleur reçue
comptant. (/<>1 une véritable jonglerie; mais ce qui
est sérieux, c ’est qu'à l’échéance, il y a eu protêt à
�( 3o)
la requête du tuteur, très-soigneux, de Flavie; signifi
cation du protêt au domicile du tireur ^ jugement par
défaut, du tribunal de commerce de Clerm orit, qui
n’y regarde pas de si près sur la forme des lettres de
change. L e chevalier Legroing en a interjeté appel en
la Cou r, tant de juge incompétent qu’autrement. L ’ap
pel est pendant en la Cour; il sera l ’objet d’ une dis
cussion très-sérieuse; et c’est ici que se termine le récit
des faits. On a cru devoir abréger des détails minutieux
qui ne sont d’aucune im portance, pour ne pas dimi
nuer l’intérêt qu’inspire naturellement une cause qui
est celle de toutes les familles.
'Le chevalier Legroin g s’oblige à établir différentes
propositions pour démontrer que le prétendu testament
olographe ne peut avoir aucun effet.
i° Il démontrera que le testament dont il s’agit est
ab iratoj qu’il a été dicté par la colère, qui tient de si
-près à la dém en ce;
2° Q u ’il est le fruit de la captation et de la sugges
tion; qu’il a eu lieu au profit d’une concubine et d’une
fem m e adultère;
3° Que le Code civ^il laisse subsister les actions ab
irato, et les moyens de captation et de suggestion;
4° Que les domestiques sont incapables de recevoir
un legs universel;
5° Et très - subsidiaireinent, que l’acquisition faite
sous le nom de F la v ie , et les lettres de change passées
ù son ordre, ne font pas partie de la succession du
�( 3i )
comte L egro in g, et ne sont pas comprises dans son
testament.
§ I er.
L e testament est fa it ab irato. IL est l’ouvrage de La
haine et de La colère.
Tous les interprètes du droit sont d’accord qu’un
testament est vicié par la liaine et la colère; on en trouve
plusieurs textes de droit au Code de inojf. test. Personne
n ’a mieux traité cette question que le célèbre Cotliin,
dans son plaidoyer pour'JVL le duc de Richelieu, contre
M . l’abbé de Laval. Il n’avait pas dans cette cause les
mêm esavantagesqu’a aujourd’huile chevalierLegroing.
Mais celui-ci n’a pas les mêmes talens pour le défendre.
M . Cochin demandait la n u l l i t é du t e s t a m e n t delà dem oiselle D acigné, tante de M. le duc de Richelieu, qui avait
institué pour son légataire universel le sieur abbé de
Laval,hom m e'dequalité. Mais le testament était attaqué
pour cau^e de haine, de colère et de suggestion, comme
fait d’ailleurs au profit d’un agent. La haine est ainsi
définie : «C’est un mouvement du cœ ur, inspiré par une
« mauvaise volonté contre l’héritier présomptif, qui
* h’éçoule plus ni la voix du sang, ni les impressions de
« la nature.« D ’argent ré l’avait déjà dit fort énergique-'
ment sur l’article 218 delà coutum ede Bretagne: Motus
anim i contra . prœsumptum hœredem ex rnalevolencïa
prœterqjficuan riaturœ et charitatem uulitam sanguine.
I-ie testament fait par une personne en colère n’est
�( 32 )
pas plus valable : il ne suffit pas que l’auteur ait lesté
recle, il faut aussi qu’il ait testé ex ojjicio pietatis; sans _
quoi son testament est comparé à celui du furieux et de
l ’homme en dém ence, quasi non sanœ mentis fu isset.
C ’est encore ce qui est répandu en différentes lois du
titre de inojjicioso testamento. On peul aussi voir Ilenrys
sur celle matière, tom. 2 ,li v . 6 , queslion 7.
11 est vrai, et 011 ne doit pas le dissimuler, quoique
tous les docteurs soient d’accord sur ce principe général,
que la colère et la haine annullent le testament; que
plusieurs ont douté qu'il pût être attaqué, sur ce motif,
en ligne collatérale; on s'est principalement attaché à
établir que ces moyens avaient plus de force contre ceux
faits par le père ou la m è r e , ou m ê m e le iils, en haine
de son ascendant. Mais les auteurs qui ont adopté cette
distinction y ont cependant apporté une modification ,
et ont pensé que les moyens ab irato reprenaient toute
leur force, même en faveur des collatéraux, lorsque le
testateur avait institué une personne vile, n isi turpis
persona sit instituía ; c ’est ce qui est enseigné par
.Boniface, tom. 4 , liv. 1 ., cliap. 1.
Cocliin n’a pas embrassé cette opinion; il pense, au
contraire, fortement que ces motifs doivent faire annuller le testam ent, tant en ligne collatérale qu’en
Jigne directe. Mais quand on ferait celle concession ¿i
Ja fem m e Julien, on se trouverait dans l’exception do
toutes les manières, turpis persona f u it instituía. E n
effet, sur qui le comte Legroing a - t - i l répandu ses
bienfaits? Sur un enfant de six ans, pour qui il no
�( 33 )
pouvait éprouver aucun mouvement d’affection, ou s’il
en éprouvait, ils étaient criminels; c'était la suite d’un
adultère honteux, d'un concubinage qui le dégradait,
q u ’il manifestait par des familiarités publiques et indé
centes, qui ont si souvent fait rougir ses anciens amis,
témoins du dégré d’avilissement dans lequel était tombé
un homme d’honneur, qui jusqu’ici ne s’était jamais
oublié, et n’avait eu aucunes faiblesses.
Sur qui a-t-il versé ses largesses? Sur la fille d’une
servante, d’un domestique, devenus tous deux ses
tyrans et ses m aîtres, dont les moindres volontés
étaient des ordres pour cet infortuné. L e chevalier
Legroing n’a pas besoin de descendre à aucune preuve
pour établir la haine et la colère du testateur, dont le
frère a été tout à-la-fois l ’objet et la victime. Ces mouvemens de haine et de colère sont prouvés par les lel 1res
qu’il a écrites après la mort de sa m ère; par la rature
injurieuse qu’il s'est permise sur la quittance, en ne
voulant pas reconnaître son frère, par les propos et
les injures qu’il a proférées en présence de lém oins,
dans des emportemens tels qu’il ressemblait à un furieux
et à un insensé, quasi non sanœ mentis / ulsset. L e
chevalier est, au surplus, en état de faire la preuve de
tous ces faits d’emportemens çt de colère.
5
�( 34 )
§ II.
L e testament est Couvrage de la captation et de la
suggestion de la part d ’une concubine.
Cet article ne donne point matière à une longue
discussion. Un testament doit être l’expression d ’une
volonté libre et éclairée; toutes les fois qu’il est prouvé
que cette volonté a été enchaînée, que les dispositions
à cause de mort ont été suggérées, alors le testament
est déclaré nul;, le texte des lois, la doctrine des au
teurs, la jurisprudence des arrêts sont également uni
formes, sur le point de droit.
Il ne s’agit donc que de prouver la. suggestion; et
pourrait-elle être douteuse dans l’espèce particulière?
L a notoriété publique apprend que peu de teins après
le retour du comte Legroing auprès de sa mère, à R io m ,
il eut des attaques réitérées d ’appoplexie. Ces atteintes
successives avaient paralysé une partie de la b o u c h e ,
affaibli les jambes, et surtout affecté le m oral; ce
ij’était,plus le m êm e hpmrpe; faible et pusillanime,
il< n ’exprimait, que difficilement sa pensée, com men
çait une phrase sans pouvoir la finir, perdait la m é' m o ire, répétait dans le même moment ce qu’il venait
de dire , confondait les noms et les choses, en un m ot,
était parvenu h cet état de débilité sénile, qui rap
proche de l’enfance, et réduit à une sorte de dégra
dation l’homme q u i , peu de tems a v a n t, avait des
%
�connaissances agréables, s’exprimait avec pureté, an
nonçait des principes et des sèritimens d'honneur.
On sait que ces attaqués d’appoplexie, l’ennemi lè
plus cruel du genre hum ain , réduisent à un état pas
sif, lorsqu’elles ne sont pas foudroyantes, pardonnent
rarem ent, font toujours craindre de nouvelles secousses,
et prévoir une fin prochaine.
L e comte Legroing était dans cet état, lorsqu’il se
livre à Une fille de peine, domestique de sa mère. Se
serait-il oublié à ce point, lui connu par des sentimens
d'honneur et de fierté, qu'il poussait quelquefois trop
loin ? Quels charmes aurait-il trouvé
dans les bras
d’une fille grossière qui n’offrait aucun agrém ent? Il
fallait bien, sans doute, que le moral fût affaibli, pour
excuser cette eâpèce de dégradation que rien ne jus
tifie. Cette fïiie prend sur son maître un empire absolu;
elle devient mère : l’enfant est éloigné; on l’envoie
dans une terre qui appartient au sieur de l’Estrangës,
ancien ami du comte. On l’élève comme la fillè de‘ ce
dernier; elle est soignée, entretenue suivant la condi
tion du père. Elle tombe malade ; les médecins sont
appelés : le père s’informe de son état avec une grande
sollicitude, apprend sa mort avec chagrin.
Privé de cet enfant, et p ou f consoler la m è r e , il
fuit un testament secret, portant institution universeïÎe
au profit de sa concubine, qui l’avait maîtrisé au point
de lui faire faire cet acte de démence. Si dans la suite
il a changé ses dispositions, ce n’est que par une ruse
du mari, qui a fuit tomber le bienfait' sur son enfant,
�( 36 )
parce qu’il en aura l’ usufruit jusqu’à ce que sa fille
aura d ix -h u it ans, et que s’il venait h la perdre, il
lui succéderait pour moitié; il n ’a pas voulu laisser
entre les mains de sa femme une succession opulente,
toute extra-dotale, et dont elle eût été maîtresse. Ainsi
la femm e avait sous sa dépendance le maître; elle
f ■
*
élait aussi sous la dépendance de son époux , plus
rusé qu’elle ; mais ces deux personnages règlent la
destinée de celui qu’ils opprim ent, qu’ils maltrailent,
qui ne peut se passer d’e u x , et qu’ils tiennent sé
questré à tous les regards. Il ne lui était permis de
recevoir aucune visite. Ses parens, ses amis ne peuvent
s’introduire, et ils se contentent de gémir sur son sort;
parfois il résiste , appelle du secours, soutient qu’on
veut l’assassiner. L a police arrive; on l’a caressé, ama
doué : il pardonne. Ces scènes se renouvellent; elles
ne font plus de sensation; on le considère comme un
homm e aliéné, qui a les caprices d’un enfant ou d’un
furieux : on ne croit plus devoir s’en occuper.
T e l est le triste état dans lequel il a consumé le reste
d’ une vie languissante et douloureuse. Son testament
lui-m êm e n’esl-il pas l’ouvrage de la captalion? Il a
servilement copié le modèle d’un praticien à proto
c o l e , d ’une aridité et d’ une sécheresse qui ne peut
émaner d’ un hom m e qui réfléchit dans le silence et
la solitude, et qui se met en présence de l’Être suprême,
lorsqu’il n’attend plus rien des hommes, qu’il va payer
le dernier tribut à la nature. Un individu qui lienl à
une classe élevée, qui a goûté les douceurs delà société,
�( 37 )
et joui des plaisirs que donnent le luxe et l’o p u len ce,
ne va pas prendre son testament dans le Praticien
fr a n ç a is , s’occupe peu des mois raisons, droits et
actions, mots techniques et barbares qu'on n'entend
qu’au barreau, et qu’on ne lit que chez les notaires
de campagne, ou dans les actes du siècle dernier; c’est
une copie mecanique qu’il a faite avec langueur, sans
soin, sans ponctuation, versant son encrier dans des
momens d ’impatience,, et sentant qu'il signe sa honte.,
qu’il va se couvrir d’opprobre; si on fait attention
qu’on lui recommande sur-tout de déposer cet acte
chez Espinasse, notaire, qui ne peut plus é c rire , et
par conséquent ne peut recevoir un testament; que
ce dépôt lait partie essentielle d e l à disposition;
esl répété dans la suscriplion , et que cependant il
en la puissance de Jouvainroux, qui veillait à ce
n’en pût faire un autre.
qu’il
reste
qu’il
^
Que lout-à-coup on oublie la disposition du dépôt,
que Jouvainroux a l’impudence de présenter seul ce
testament au président; que l’acte de dépôt est dressé
en conséquence; que la minute en est connue; qu’on
lé remarque dans la demande du chevalier Legroing,
qui s’est aperçu de la maladresse, qui a fait usage du
m o y e n , après avoir lu et tenu l’acte, l ’avoir lait lire
à plusieurs personnes, et que cependant on trouve dans
la suite un renvoi aussi gauchement exprimé, qui an
noncerait tantôt que c ’est l’Espinasse accompagné de
Julien Jouvainroux, tantôt que c ’est l’Espinasse seul,
suivant la copie qui en a été notifiée; que Ledit com
�( 38 )
parant est métamorphosé par une surcharge, pour y
substituer lesdits comparans,• que malgré la présence
de l’Espinasse, on remet le testament au greffier, lors
qu’il était si simple de le rendre à Espinasse présent;
on demeure inlimément convaincu que ce testament
n’est pas l’ouvrage de celui qu’on en dit l’ auteur; qu’il
a été gê n é , tyrannisé dans ses dispositions, et que le
doigt de Dieu a marqué du sceau de la réprobation
cet acte scandaleux.
Qu'on vante maintenant les testamens dits olo
graphes! qu’on vienne soutenir qu’un acte de cette
nature est le fruit d’une mûre réflexion ! Ce n’est pas
ainsi que Justinien l'avait pensé, lorsqu’il bnnnit cette
form e de tester dti code de ses lois; qu’il révoqua
expressément la disposition du code Théodorien , qui
autorisait ce mode ou cette form e; ce n’est pas ainsi
qu’ont pensé tous les auteurs du droit écrit, qui ensei
gnaient que les testamens olographes n'étaient pas
valables, et qu’il fallait la solennité de sept témoins
pour un testament, qui est le dernier acte de la puis
sance , de l’affection, et d’une volonté qui doit survivre
h l’auteur.
C e n’est pas ainsi que pensait M* Terrasson, dans
un éloquent mémoire pour le sieur d’E p in ay, où il
fit annuller un testament olographe de Louis d’E p in a y,
en faveur de sa femme : « Il y a des acles si importans,
c< disait-il, pour l’intérêt des familles, qu’on ne peut
« y apporter trop de solennité et d’exactitude. Les
* dernières dispositions, reste précieux des m ourans.
�( 39 )
«• sont du nombre de ces actes solennels que les diffék
rentes lois ont assujéti à diverses formalités; on pré-
« tendra que toutes les formalités n’ont été introduites
«• que pour assurer les preuyes de la volonté; qu’011
« est aussi sûr de l’intention du testateur par le témoi« gnage de six personnes que par celui de sept; qu’on
«■Test encore plus par l'écriture et signature du testa« teur, que par la présence des témoins. Tous les paror ticuliers s’érigeront en critiques des lois établies; et
<r par la licence des raisonnemens, les règles perdront
«- leur autorité, et la jurisprudence deviendra arbi« traire. »
L e lestament olographe e st-il donc si recom m andable? doit - il avoir la préférence sur un testament
solennel? quel pourrait en être le m otif? T e l homm e
dans la solitude, et dans la fougue de ses passions, écrit
rapidement cinq à six lignes, qui dépouillent, déshé
ritent les héritiers dursang ; t e l autre se permettra des
dispositions bizarres, ridicules, honteuses, qui le désho
norent, et qu’il n’aurait pas osé faire devant un officier
public et des témoins; tel autre encore sera forcé par
un misérable, un audacieux intrigant, d’écrire quelques
mots qui transmettentrà son ennem i, son tyran , une
fortune qu’il destinait à sa famille, tandis que devant
notaire1il eût été parfaitement libre, il eût dicté ses
volontés hors la présence de celui qui en gênait 1 exer
cice, ou osait donner ses ordres absolus.
Disons au contraire, malgré tout le respect qu’on
doit à la loi qui autorise cette form e de tester, qu’elle
7
�u
( 4° )
n ’est ni plus précieuse, ni plus favorable; qu'elle n'est
pas une preuve de la volonté du testateur, qu'elle peut
être commandée par la crainte ou la tyrannie; qu'elle
étouffe le sentiment et anéantit la^volonté, favorise
le caprice d’un homme im m oral, et que sous lousles
rapports les solennités sont plus recommandables, as
surent la volonté, et préviennent souvent de grands
'
crimes.
Fanckette d ir a - t - e ll e qu’en tout cas il existe, en
faveur de La gouvernante, un testament ancien et
solennel qui reprendrait toute sa force; mais ce pre
mier testament, fait dans les premiers momens d’ une
passion v éh ém en t e et grossière, qui agissait encore
avec plus de force dans un hom m e qui se trouvait
dans un état d’aliénation m entale, prouverait la sug
gestion d’une concubine devenue m ère , et qui avait
alors les plus puissans moyens de séduction.
Ceci conduit naturellement à l’état de concubinage,
dans lequel a constamment vécu Fanckette avec le
comte Legroing. Sa grossesse, ses couches, les familia
rités indécentes qu’elle autorisait, qu’elle provoquait
m êm e en public, ne sont ignorées d ’aucun de ceux
'
qui fréquentaient la maison de la dame Legroing m ère,
et ont souvent servi d’alimens à la malignité.
D écriée par ses cam arades, méprisée par les per
sonnes au-dessus d’elle, elle a bravée l’opinion publique
pour parvenir à ses fin s, et ce concubinage si cons
ta n t, si notoire, est encore un des plus grands vices
pour annuller les dispositions dont elle est l’objet.
�( 4i ) '
L e maintien des bonnes mœurs exige que les parens
des personnes que leur passion a aveuglées au point
de préférer les objets de leur attachement criminel à
ceux à qui ils tiennent par les liens du sang, soient
admis à prouver le désordre. Lorsque la preuve en est
faite, les dispositions qui ont eu lieu au profit des
concubines1sont annullées, ou réduites à de simples
alimens. Un arrêt du 2 5 février i 6 6 5 , rendu sur les
conclusions de M. l’avocat général T a lo n , prononce
la nullité des ventes, et d’un bail à rente, consenties par
le baron de Saint - G em m es, au profit de Jacqueline
R ig o f, sa concubine et sa servante. U n second, du
2.2. août 16 7 4 , annulle deux contrais de constitution
de deux rentes j|au principal de 1900 francs, créées, par
l’abbé Lapinardière, au profit de sa domestique, qui
était aussi sa concubine; ces arrêts sont rapportés
dans le dernier recueil de jurisprudence, au mot Con
cubinage. On en trouve un troisième au Journal des
Audiences, du 3 juillet i 6 8 5 , q u ia annullé une obli
gation de 3 , 5 oo francs, souscrite par la dame F au veau ,
au profit d'un sieur L atou r, avec lequel elle vivait en
mauvais commerce. Un autre, de 17 2 4 , qui a annullé
les billets du chevalier de Graville, au profit de la fille
T rico t, etc.; en un m o t, les recueils sont remplis de
semblables décisions, et la jurisprudence est uniforme
sur ce point. I>e concubinage ne peut avoir que les
suites les plus funestes; il altère les sens et détrrit la
raison; et celui qui a le malheur de se livrer à cette,
passion, méconnaît, dans son délire, les obligations les
�( 42 )
plus sacrées, pour suivre sans pudeur le penchant ir
résistible qui l’entraîne. Comment 'dès-lors les tribunaux
pourraient-ils laisser subsister un acte qui est l’ouvrage
de la débauche et le monument honteux d’ une passion
criminelle ?
Elle le devient bien davantage lorsqu’il y a adultère;
lorsqu'un mari pervers n’est qu’un manteau pour cou
vrir le désordre; lorsque sur-tout sa bassesse tend à
faire supposer, à attribuer la paternité à celui qu’on
dépouille.
L e chevalier offre la preuve de tous les faits de
suggestion qu’il vient d’annoncer, ainsi que les faits
de concubinage et d’adultère. Qu'on ne dise pas que
le Code çiyil a abrogé les peines que les lois anciennes
prononçaient contre le concubinage, plus encore contre
l’adultère, puisque, dans ce cas, elles refusaient même
des alimens. L e silence du Code sur les effets de ce
désordre, n’est pas une abrogation des anciennes lois.
C ’est ce qu'on va établir dans le chapitre suivant.
§
III.
L e Code civil Laisse subsister les actions ab irato, ainsi
,que les moyens de captation et de suggestion.
Tous les auteurs sont d’avis que pour abroger une
l.pi reçue, il faut une abrogation spéciale. L e silence
d’une loi nouvelle, sur certaine matière de çlroil, n’en
est pas une dérogation. L e savant Dumoulin, dont
�( 43 )
l'autorité est si grande parmi les docteurs, a d it , sur
l’ancien style du parlement, partie 7, n° i c 5 : Constitatlo générales non derogat speciali legi. Il prend
pour exemple la loi si pater puellœ cod. de inojf. test.,
avec la loi quoniam , du mêm e titre. Par la prem ière,
l ’empereur Alexandre décide que la substitution réci
proque entre deux enfans fait cesser la plainte d’inofficiosité. Par la deuxièm e, Justinien ordonne que
même dans ce cas, la légitime soit laissée pleine et
entière aux enfans, sans aucunes charges. C e savant
auteur examine si la deuxième loi déroge à la pre
m iè r e , et tient pour la n é g a tiv e, parce que la loi
quoniam, ne contient pas une abrogation spéciale de
la loi si pater. Cependant cette séconde loi paraissait
bien contraire à la pr em iè re; car en voulant conserver
la légitime entière, on donne à l'enfant, m êm e appelé
à une subslitution réciproque, le droit d’attaquer le
testament d’inofïiciosité pour obtenir sa légitime ;
néanmoins la première ne laisse pas de subsister.
O r , s’il faut une dérogation spéciale pour anéantir
une loi précédente, comment vouloir que le silence
d’une législation nouvelle, qui n’a pu embrasser tous
les cas, puisse déroger aux anciens principes sur les
points qu’elle n’a pas prévus? On sait bien que dans
ces premiers instans d’engouement sur le bienfait d’une
législation uniforme , quelques novateurs orft pense
que tout ce qui n’était pas prévu dans le Code, cessait
d’exister; qu’ils en ont m êm e conclu que l’action ab
irato, celle en suggestion, e tc ., étaient abrogées. Mais
�( 44 )
bientôt la réflexion et la raison ont fait place à cet
instant de délire , et peut-être d’immoralité. N ’est-il
pas, en effet., immoral de soutenir ou de protéger des
actes qui sont la récompense du crim e, bouleversent
l’ordre social, outragent les mœurs, la religion, et tout
ce que les hommes ont de plus saint et de plus sacré ?
Quant à l’action ab Lrato, deux arrêts, l’un du 28
frimaire an 1 4 , rendu par la Cour de Paris, dans la
cause des enfans de Farges ; l’autre par la Cour de L y o n ,
du 2,5 juin 1 8 1 6 , tous deux rapportés dans la collec
tion de Denevers et Jalbert, le premier an 1806, le
deuxième an 1 8 1 6 , ont décidé en principe que Fac
tion ab irato n’était pas abrogée. 11 est vrai que dans
les deux, la demande a été r e j e t é e , parce que les
circonstances n’ont pas paru assez graves; et les ma
gistrats ont observé que le silence du législateur sur
cette action, démontre assez qu’elle n’est pas proscrite,
mais qu’il faut en restreindre les effets pour le repos
des familles.
L ’auteur du nouveau Traité des Donations professe
sur celte matière une sage doctrine, tome 1 , png. 286
et suivantes. Il examine si le sentiment d’aversion
qu’on prétend avoir dicté la disposition, aurait été
conçu par le testateur lu i-m ê m e , ou si ce sentiment
de haine aurait été produit par des insinuations étran
gères, par des moyens de fraude et de calomnie mis
en œuvre par ceuxr-mêmes qui profiteraient de la dis
position , et qui auraient rendu odieux au disposant
l ’héritier appelé par la loi.
�_ A u premier cas, il pense que loufe action devrait
être interdite; mais au second cas, il décide que l’ac
tion doit être admise; et pourquoi? «-C’est qu’alors il
« n’y a plus, à proprement parler, une volonté de la
« part du disposant ; des manœuvres odieuses ont substi«r tué une volonté étrangère à la sienne. L ’action rentre
« alors dans celle de captation ou suggestion, etc. »
Cet auteur,, comme on le vo it, ne tranche pas d ’une
manière absolue sur la première hypothèse, et il y '
aurait bien des observations à faire; car la colère et
la haine, quelque soit le m otif qui les aient inspiré,
détruisent la raison et la volonté, et doivent vicier le
testament. Ce n’est pas tester ex officio c h a rita tis,
pour se servir du langage de la loi. Mais le chevalier
Legroi ng n ’a nul besoin de discuter sur la première,
et se place naturellement dans la seconde.
11 est victime des insinuations perfides de cette gou
vernante; c’est ainsi qu’elle est qualifiée dans le pre
mier testament. C ’est elle qui a fait entendre à son
maître que son frère voulait le faire passer pour fou,
et le faire interdire; qu’il en voulait à sa fortune; c’est
elle qui a excité son maître à poursuivre le chevalier,
dans les premiers tems du décès de la mère; c’est elle
qui, par les plus odieuses manœuvres, a fait fermer
la porte au chevalier Legroing, lorsqu’il voulait s’ap
procher de son frère; c ’est elle enfin q u ia p r o f i t é , par
la plus abominable calomnie, de toute une fortune, au
préjudice des héritiers du sang.
L e chevalier Legroing a également offert la preuve
�( 46 )
de ces faits, e tc e tle preuve est incontestablement ad
missible.
Quant aux faits de captation et de suggestion, il y
a encore bien moins de doute que cette action est con
servée sous l’empire du Code civil. Un arrêt de la Cour
de Grenoble, du 14 avril 1806, a jugé contre les héri
tiers du sieur Denis M on tlevin , que la preuve des faits
de captation et desuggestion n’était point expressément
réservée par le Code civil; il a , par conséquent, laissé
aux juges la liberté d’admettre ou de rejeter cette
preuve suivant les circonstances (D en evers, an 1806,
pag. i 52 , sup.). U n arrêt plus ré ce n t, rendu en la Cour
de Paris le 3 i janvier 18 14 , rapporté dans le même
recueil, an 1 8 1 6 , pag. 2.6 et suiv., a jugé en ihèse que
les téstameos faits depuis le Code ne pouvaient être
annullés pour cause de suggestion, et que ce moyen
de nullité était admissible contre un testament olo
graphe. Il s’agissait du testament olographe d’une de
moiselle L e fè v r e , âgée de trente-quatre ans, portant
institution universelle au profit d’un sieur M o u tie r,
jeune homme de dix-sept ans, àvéc lequel elle avait
vécu en concubinage. 11 est delà plus haute importance, ,
pour la cause, d éfaire connaître lès principaux motifâ
de cet arrêt. La Côur considère ¿que 1 état de concu« binage où elle vivait avec celui qu’elle a institué son
« héritier universel, est une présomption immédiate h
i la suggestion; que cet état où la passion aveugle, où
«■l’acne, subjuguée par un sentiment im périeux, n’est
* plus à soi, et où les docteurs, lorsqu’il s’agit de dons
�C 47 )
9
« faits par les concubins l’un à l’autre, ont unanime« ment reconnu, non-seulement un motil et un m oyen,
« mais l’indice le plus violent et une présomption légi«■time de séduction.,..
«
«
«•
«
« Qu’il est hors de doute que la captation et la suggestion annulle le testament sous l’empire du C ode,
comme dans la législation ancienne; que le Code n’en
contient pas de texte form el, mais que cela résulte
manifestement de son esprit et de l’ensemble de ses
c dispositions; que ce Code proscrit tout ce qui est te
« fruit du dol et de la fraude, et qu’il n’y a point de
« dol plus caractérisé, de fraude plus certaine, quoi« qu’en même tems la plus fine et la plus délipe, et
* par cela même la plus dangereuse, que la caplation
<r et la suggestion; que suivant le Code civil, etd apiès
<r tous les Codes, un testament est la déclaration que
«• fait un homme de ses dernières volontés sur la dis—
« position de ses biens; qu’il doit être conséquemment
«■l’expression pure et franche de sa volonté, et non de
« celle d’un autre; qu’enfin on a rem a rq u é, dans le
* projet du Code civil, qu’il y avait un article, qui, du
« nombre des moyens admis pour attaquer un tesfa« ment, retranchait celui de caplation et de sugges<r tiou, et que dans la discussion et la rédaction défi« n iliv e , l’arliclç a été. supprimé. Ce qui fait voir que
« 1 intention du législateur a été que ce moyen demeurât
« toujours ouvert, et ffit soumis à la prudence des juges
«r pour y avoir., selon les circonstances, tel égard ç^e
«• de raison. »
�( 48 )
« P a r ces MOTIFS, la Cour, en infirmant le jugement
<r du tribunal civil de Paris, déclare le testament 0/0«• graphe de la fille L efèvre , en date du 9 octobre 1 8 1 1 ,
« nul et de nul effet. »
M adam e
moyens de
cipes, sont
m êm e n’est
Julien d ir a - t - e lle m aintenant, que ces
suggestion sont exhumés des anciens prin
abrogés par le C od e, que le concubinage
pas un motif de captation,une présomption
de fraude, etc. Mais, dans cette cause, nous n’en
sommes pas réduits à de simples présomptions. L a
notoriété publique accuse la fem m e Julien; il y a
séduction, concubinage, adultère, captation, oppres
sion, co lère, haine, suggérées par ses calomnies; en
un m o t, on trouve i c i , dans le sens le plus propre,
et avec des caractères qui peut-être ne se sont jamais
rencontrés au même d é g r é , tout ce que les juriscon
sultes ont qualifié de captation et de suggestion.
§
IV.
L e s domestiques sont incapables de recevoir un legs
universel.
U n ancien au teu r, Brillon, dans son Dictionnaire
d e s Arrêts, au mot domestiques, les traite avec sévé
rité.
« D o m e s t i q u e s , serviteu rs
<r q u e f o i s
a
des p a r t i c u l i e r s , e t q u e l -
leurs maîtres. Il y a b i e n d e s c h o s e s à d i r e
contre cette n a l i o n i n f i d è l e et i n g r a t e » .
�ï 4 9)
Il est dans la justice d’arrêter ce m ouvem ent, qi i
n’est que trop appuyé sur des exemples sinistres.
Mais il est des exceptions honorables!
Dans ces leras malheureux de désordres et de crimes,
dont on voudrait perdre le souvenir, on a vu des do
mestiques fidèles, respectables par leur courage et leur
généreux dévouement.
Qui ont bravé la mort pour sauver la fortune et la
vie de leurs maîtres, et se sont quelquefois immolés
pour eux.
Hom m age et respect à ces hommes rares et précieux
qui ont su ennoblir les offices d e là servitude, et dont
les noms devraient passer à la postérité.
Mais ces serviteurs si recommandables ont reçu un
legs modique, une pension exiguë qui les met à peine
au-dessus des besoins de la v ie , plus souvent n'ont ob
tenu aucune récompense.
Tandis que Fanckette, par ses déportemens, désho
nore le ch ef d’une famille illustre, et arrache un legs
universel de plus de 3 oo,ooo francs ! !
Pour revenir h l’auteur c i t é , lorsqu’il rappelle le
texte des lois qui les concernent , il invite à par
courir celles des Institules et du Code, au titre de
JNoxaUbus aciionibus. 11 rappelle la maxime du
droit, gravius cigendum cum servis. 11 ne balance pas
à déclarer qu’ils sont incapables de recevoir un legs
universel; il cite plusieurs exemples, parmi lesquels eu
choisira un arrêt rendu en la grand’ehambre du p ai-
7.
�(
)
Jement de Paris, le i er juillet 17I17, dans l’espèce
suivante :
«•Un maître de pension de cette ville de Paris, dit-il,
avait fait un legs de 12,000 francs au profit de sa gou
vernante, rpar un premier testament.
« Par un second testament, il lui avait fait un legs
universel. Les héritiers offrirent les 12,000 francs du
premier legs; ils contestèrent le legs universel.
« Sentence du Châtelet, qui fait délivrance du legs
universel. Par l’arrêt, la sentence fut infirm ée, et la
gouvernante déboutée de sa demande. TVL Joly de
ï l e u r y observa que si les héritiers n'avaient pas offert
les 12,000 francs, il aurait eu de la peine à se déter
miner pour un pareil legs, qui paraît être l’ouvrage
de l’autorité et de la séduction, suivant les ordon
nances ».
R icard, Traité des D o n a tio n s, partie i re, chap. 3 ,
section 9, pense également que les domestiques ne
peuvent recevoir de leurs maîtres .un legs univèrsel.
'Le dernier annotateur de Ricard a dit sur celte ma
tière les choses les plus justes et les plus raisonnables,
dl remarque v que les dispositions faites aux domes« tiques sont favorables quand elles ne sont pas exces« sives; mais que l’homme sage ne doit récompenser
* qu’avec mesure : l'excès est une présomption pres
te qu irrésistible de suggestions de la part des domes« tiques. Ils savent quelquefois prendre sur l’esprit de
« leurs, maîtres.un ascendant qu’il serait dangereux de
« favoriser, j*
�( 5i )
• 11 rapporte un arrêt du n août t 7 i 3 , que l’on
trouve au Journal des A u d ien ces, qui refusa la déli
vrance d’un legs universel d’environ 30,000 francs ,
fait au profit du valet de chambre du testateur, et ne
lui accorda que 3 oo francs de pension viagère, pour
récompense de ses services.
Autre arrêt du 22 avril 1 7 6 6 , réduit un legs universel,
fait par le sieur Potier en faveur de sa domestique, à
6,000 fr. une fois p a y é e , et 200 francs de pension.
O11 regarde, en général, les domestiques comme
incapables de recevoir des libéralités trop considérables
de leurs maîtres. Quand elles sont trop fortes, la justice
les réduit ordinairement à une valeur proportionnée
à la qualité des domestiques, à l’importance des ser
vices q u ’ils ont rendus, à l ’état et à la fortune des
maîtres. Il est du devoir des magistrats de mettre un
frein à ces libéralités excessives qui dépouillent les
familles, et qui peuvent raisonnablement faire soup
çonner que les volontés des testateurs ont été captées.
Personne, sans doute, ne contestera ces principes;
mais on s’attend à cette perpétuelle objection, que ce
sont des principes gothiques, et que toutes ces règles,
qui gênent la liberté des donateurs, ont été abrogées
par le Code civil. On dira que sous l’empire du Code
les domestiques sont capables de recevoir de leurs
maîtres des legs universels, puisque l’article 902 du
Code fait rémunération des i n c a p a c i t é s qu’il déclare,
et n’en prononce aucunes contre les domestiques ; que
l’article i o a 3 détermine que le legs fait au domestique
�( 52 )
ne se compense pas avec les gages qui lui sont dus;
d’où il suit qu’ils sont capables de recevoir un legs
universel.
Eh quoi! parce que la loi a cité ou a fait ré n u m é
ration de certaines incapacités, il en résultera qu’on
ne peut pas les étendre à un autre cas? L a loi écarte
les médecins, les confesseurs, les conseils, les notaires,
parce qu’ils sont présumés avoir trop d’influence sur
l ’esprit de leurs malades ou de leurs cliens; et les do
mestiques seraient exempts de cette suspicion, eux qui
savent prendre sur l’esprit de leurs maîtres un empire
absolu, qui peuvent dans tous les instans emplo}7er tous
les m oye ns de séduction! C e serait supposer une ab
surdité dans la lo i, qui cile des exem ples, mais qui
n ’est pas limitative; qui établit des incapacités absolues,
et laisse à la prudence des juges les incapacités relatives
qui naissent dés circonstances; et il faut sans doute tirer
une conséquence toute contraire à la prétention des
domestiques, de la disposition de l’article 1023 du
C ode; car si le Code dit que le legs fait aux domes
tiques ne se compense pas avec les gages qui leur sont
dus, la loi, bien certainem ent, n’a entendu parler que
du legs particulier, n’a supposé dans aucun cas un legs
universel, puisqu’il aurait bien fallu alors que les gages
fussent compensés forcément.
On ne prétendra pas, sans doute, que le legs uni
versel n’étant pas fait au profit de la domestique, mais
h sa lille, l’incapacité cesse.
On répondrait péremptoirement à celte objection
�( 53 )
avec l’article 9 1 1 du Code. Il n’y aurait ici qu’une
interposition de personnes, et le legs fait à la fille est
censé fait à la mère.
§ V
ET
DERNIER.
L'acquisition' fa ite sous Le nom de F la vie, les lettres
de change passées à son ordre ne fo n t pas partie
du legs universel, et doivent être restituées a u x héri
tiers du sang.
\
Ce n’est' que très-subsidiairement que le chevalier
Legroing donne quelques détails sur ce singulier inci
dent. Il ne l’aurait pas même discuté dans le moment
actuel, s'il n ’y trouvait une nouvelle p re uve de la haine
et de la colère du testateur contre lui„ des insinuations
perfides, et de l’infidélité des Jouvainroux.
Il est p ro u vé, p a rle procès-verbal du juge de paix,
que les lettres du chevalier Legroing ne parvenaient
pas à son frère.
1
On voit dans le procès-veabal, que dans le même
endroit où on avait caché les effets soustraits, se trou*
vait une lettre du chevalier, du 3 décembre 1 8 16 , à
son frère le com te, dans laquelle il lui marquait «-que
»
«
«
«
ne voulant ni l’aigrir, ni lui donner des su jets de
m écontentem ent, étant m alade, il lui e n v o i e son
domestique pour savoir positivement ses intentions,
et les époques des paiemens du c api ta l qu’il lui doit
«■après la mort de sa m ère, et à qui il veut que ces*
�( 54 )
<r sommes soit pdyées, quand, et dans combien d?é « poques. »
Cette lettre est cachée avec soin dans*les sclials; et
aussitôt après la mort du frère^ les Jouvainroux ont
l’insolence de
traduire le chevalier au tribunal de
commerce !
Mais quelle est donc la sottise ét la' maladresse de
ces ambitieux? Ce n’était pas assez d’avoir arraché un
legs universel, d’être porteur de cet acte d ’iniquité,
dont Julien s’est emparé du moment qu’il a contraint
le feu comte Legroing d’écrire et signer le modèle qu’il
lui a présenté, on veut encore ajouter aux odieuses
manœuvres qu’on a emplo yées; on’ ne v e u t lui laisser
aucuns effets disponibles dans les mains ; on le dépouille
à l’avance, on entoure son lit de m ort, sicut vuLtus
cadaver expectàns ; on fait acheter par lu i, sous le nom
de F la v ie ,u n e propriété de 40,000 francs; ou le force
de passer son ordre au profit de cet enfant de six ans,
sur les lettres de change qu’il a dans son porte-feuille.
E h quoi! c ’est lorsqu’on l’excife contre son frère, qu’on
force ce dernier à s ’acquitter d’une dette qui devient
exigible après le décès de la m è r e , et lorsque sa d é - ‘
pouille mortelle fumait e n c o r e ,le chevalier n’obtient.,
n ’arrête les poursuites q u ’en souscrivant dos billets sous:
la forme de lettres de change; on lui tient le pied sur
la gorge, il ne peut quil 1er d’un instant; il y a suppo
sition de lieu, puisqu’ il les souscrit à Clerm ont, datées
d e B i o m ; e t ¿1 peine a-t-il signé, q u e , sans intervalle,
ceseflets passent dans les mains de Flavie ; qu’à récliéance1
�( 55 )
.du premier, on traduit le chevalier, sous le nom de cet
enfant, au tribunal de com m erce, pour obtenir contre
lui une condamnation par corps.
N ’est-ce pas le comble de l’infamie! et que doit-on
attendre de gens de cette espèce, qui veulent s’élever
jusqu’à une famille dont ils ont dépouillé le c h e f3 tout
autre à leur place .aurait usé de procédés, aurait attendu
au moins qu'il ait été statué sur la demande en nullité
du testament. Jusques-là les Jouvainroux ,n’ont qu’un
titre précaire, q u i‘va s’évanouir et s’échapper de leurs
mains infidèles et avides. Les moyens du chevalier ¡sont
victorieux ; tous ceux qui ont quelques principes d’hon,neur se réunissent à sa voix pour demander justice et
«vengeance contre une spoliai ion dévastatrice, contre
le vol le plus dangereux^ et contre les auleurs, qui sont
•le plus cruel iléau de la société.
En attendant, le chevalier Legroing s’est rendu
appelant en la C ou r, du jugement par défaut qu’on a
surpris contre lui. Il l’atlaque, tant de juge inçom pé-tenl qu’autrement. Il établira devant la C ou r, qu^l
n’y a ici aucune spéculation de com m erce,.qu e des
lettres de change souscrites de frère à frère, pour des
co n v e n io n s de famille, ne sont que de simples billets;
qu’il n’y a pas eu de change ni de remise de place en
place, qu’il y a supposition de lieu, erreur dans la
dénomination de l’effet.
A u fond, il prouvera que Flavie n ’est pas proprié
taire de ces effets, malgré l’ordre valeur reçue comptant.
-Qu’il est impossible qu-un4enfant de six ans ait fourni les
�( 56 )
fonds; que cet ordre n ’est autre chose qu’une'libéralité
indirecte, un don manuel que les lois annullent, une
donation entre-vifs qui n’est pas revêtue de la forme
prescrite par le C od e; enfin que ces effets et les im
meubles acquis sous son nom , ne font pas partie de la
succession du sieur comte L egro in g; que celui-ci n’a
légué que ce dont il mourrait vêtu et saisi, et qu’il
n ’est mort saisi, ni des immeubles, ni des prétendues
lettres de change. Cet incident donnera la mesure de
la moralité des Jouvainroux, et fera connaître à la
Cour leurs odieuses manœuvres. Ce sera un épisode,
le prélude de l’action principale ; on verra si l’ancien
b edeau dé la cathédrale aura la protection des prêtres,
s’ils agiront en sa faveur. Misérable! qui s’avise de
comprometlre les ministres d’ un D ieu vengeur, dont
la justice doit s’appesantir sur des têtes coupables! Ce "
serait un sacrilège.
C e Jouvainroux ne laisse pas’ aussi que d’avoir sa
malignité. L e chevalier Legroing est informé que cet
individu se permet de répandre contre lui des calom
nies, qu’il s’avise de critiquer sa conduite politique;
il insinue adroitement qu’il était à Malte lors de l’in
vasion de l’île; qu’il a peut-être facilité la reddition
de lu. ville; qu’il a suivi en E gypte l’armée fran
çaise, etc.
N e sutor ultra crepidani. Sans d o u te , le chevalier
Legroing devrait mépriser ces insinuations ou^ ces
calomnies; mais il est ])ien aise de saisir l ’occasion de
rendre compte de sa conduite ù celte époque mémo-
�( 5? )
rabie, et de rappeler des faits qui sont connus de
l ’ordre e n tier, ainsi que de l’armée française.
O u i, sans doute, le clievalier Legroing était à M¿ilte
lors de l’invasion. Renferm é dans le fort S a in t-A n ge,
il voulait vaincre on mourir. Ce fort inexpugnable
domine l ’entrée du port ; de triples batteries s’oppo
saient à l’entrée de l’escadre de débarquement. L e
chevalier sut comprimer l’insurrection de la garnison,
résister aux sommations du vainqueur, et ne se rendit
ensuite que sur les pressantes sollicitations ,■l’ordre
exprès du grand-maître , qui' avait déjà fait son traité.
L e chevalier Legroing suivit les Français en E gypte!
que pouvait-il faire de m ieux? Inscrit sur la liste’fatale
des émigrés, tous ses biens ayant été vendus, il n’avait
plus de patxiej il ne devait pas, sans d o u t e , se confier
au Directoire, qui renouvelait ses proscriptions contre
les émigrés, et faisait encore périr une loule de vic
times.
. L e chevalier eut l’honneur d’être aggrêgé à la
commission des arts et des sciences faisant partie de
l ’institut d ’Egypte ¿^il chercha ù se consoler de son
espoir déçu, parcourant une terre classique et visitant
les monumens, et vit enfin arriver le moment où il
pourrait revoir sa patrie.
Pourrait-on d’ailleurs suspecter la conduite politique
d’ un chevalier français qui a su défendre l’ordre dont
il est membre, et de sa plume et de son épée, et q u i,
dans les premiers m o in en s, s’est rallié autour des
défenseurs du trône?
8
�( 58)
On répand encore avec adresse que le chevalier
Legroing est célibataire comme son frère, qu'il aura
les mêmes faiblesses, et que ce n'est pas la peine do
lui rendre une fortune que la.nature et la loi lui attri
buent, pour la transmettre peut-être en des mains qui
ne seront pas plus pures.
D e quel droit Jouvainroux vient-il attaquer le che
valier L eg ro in g , et calomnier ses habitudes? Q u’il soit
célibataire ou n on , n’en e s t-il pas moins le frère et
le plus proche héritier du défunt? A-t-il un reproche
à se faire dans son intérieur, et son existence dans la
société n’est-elle pas honorable? S’il avait des faiblesses,
il sait comment un h o m m e d’ honneur les ré pare , mais
on ne le verra jamais s’avilir ou se dégrader.
Signé le Chevalier L o u is L E G R O IN G .
M e P A G E S , Bâtonnier des A vocats à La Cour royale.
F L E U R Y , A v o u é licencié.
A RIOM , DE L’IMPRIMERIE DE J.-C. SALLES, IMPRIMEUR DU PALAIS.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Legroing, Louis. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Fleury
Subject
The topic of the resource
testaments
abus de faiblesse
domestiques
servante-maîtresse
enfants naturels
créances
séquestration
mobilier
maltraitance
émigrés
ordre Saint-Jean de Jérusalem
fraudes
fisc
inventaires
lettres de change
doctrine
nullité du testament
captation d'héritage
testament olographe
jurisprudence
concubinage
legs universels
egyptologie
code civil
bedeau
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour M. Louis Legroing, Chevalier de justice de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, Chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, demandeur ; contre Julien Jouvainroux, ancien bedeau de la Cathédrale, et cordonnier ; Françoise Boudon, sa femme ; et encore contre ledit Julien Jouvainroux, en qualité de père et légitime administrateur de Claudine-Flavie Jouvainroux, sa fille, mineure, défendeurs.
note manuscrite : « 28 juin 1819, chambres réunies, arrêt, journal des audiences, p. 493 ».
Table Godemel : ab irato : 2. l’action ab irato contre les testaments est-elle admise par le code civil ? peut-elle appartenir à l’héritier collatéral ? Etat (question d') : 3. l’héritier du sang a-t-il le droit, pour prouver l’interposition de personne, de rechercher si le légataire, qui a dans une famille le titre et possession d’état d’enfant légitime, est, ou non, l’enfant naturel du disposant, surtout, lorsque cette recherche conduirait à la preuve d’un commerce adultère ? Sanité d'esprit : d’après quels principes se résout la question de savoir si le testateur était sain d’esprit ? Suggestion : La suggestion et captation sont-elles moyens de nullité pour la législation actuelle ? peuvent-elles être opposées contre un testament olographe ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1807-1819
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
58 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2429
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2430
BCU_Factums_G2431
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53483/BCU_Factums_G2429.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Biozat (03030)
Fontnoble (terre de)
Egypte
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
bedeau
captation d'héritage
Code civil
concubinage
Créances
doctrine
domestiques
egyptologie
émigrés
enfants naturels
fisc
fraudes
inventaires
jurisprudence
legs universels
lettres de change
maltraitance
mobilier
nullité du testament
ordre Saint-jean de Jérusalem
séquestration
servante-maîtresse
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53482/BCU_Factums_G2428.pdf
ec829954436d5f72046b7c0b92223edd
PDF Text
Text
CONCLUSIONS
M O T IV É E S,
P O U R le Sieur A R O S B E R G , Marquis de S T R A D A ,
I n t i m é , et incidemment A p p e l a n t;
C O N T R E le Sieur J
ean
G R A N C H I E R , ancien
Receveur des C o n sig n a tio n s, à R i o m , A p p e la n t;
E t contre Les H éritiers R E Y N A R D et N A L L E T
a u ss i appelans.
A T T E N D U q u’il est c e r ta i n , en fa it , que le 24 janvier
1 7 9 1 , le sieur de Saincy a consigné ch ez le sieur Granc h i e r , re c eveu r des consignations, à R i o m , la som m e
de
36 1,856
francs, provenant de la terre de B rialles,
ve ndu e par le sieur M a r c - A n t o i n e de Strada, et dont
le prix devait être distribué à ses créanciers;
Q u ’il
est également
c e r tain que les R e y n a r d et
N a l l e t , créanciers opposans du sieur de Strada, ont re-
�( 2 )
tiré de la caisse du receveur des co n sig n a tio n s} le 29
mai 1 7 9 1 , la somme de i
35,ooo
francs, à compte de
celles qui leur étaient adjugées contre le sieur de Strada,
par
différentes sentences delà sénéchaussée d’ A u vergne,
et pour lesquelles ils devaient être colloqués dans l’ordre
qui devait être fait, avec les autres créanciers,d e s de
niers provenans de la vente de La terre de B r ia lle s ,.
Laquelle somme Us promettent fa ire allouer au sieur
G ranchier ;
A t ten d u que les expressions de cet act e, prises iso
l é m e n t ou réunies aux aveux, faits .par le sieur G ran chie r, dans son interrogatoire sur faits et articles, du
9 mars 1811, p r o u v e n t :
i° Q ue les 1
35,000
francs retirés par les héritiers
Rej^nard et Nallet, le 29 mars 1 79 1, provenaient de la
consignation faite par le sieur _de S a in c y , le 24 janvier
même année;
20 Qu e cette somme avait été retirée par les héritiersR e y n a rd et Nallet, en qualité de créanciers du sieur
de Strada, et donnée par le sieur Granchier en sa qua
lité de receveur dps consignations ;
-
3° Que cette somme était en
t
à-com pte de celles que
les héritiers R e y n a r d et Nallet avaientdq droit .d’exiger
du sieur de Strada , et pour lesquelles ils devaient être
colloqués sur les. deniers, provenans de la terre de
Brialles ; •.
• 4 <T Q u e les héritiers R e yn a rd et Nallet s’é.laient en
gagés à faire, allouer au sieur Granchier les i
35;ooo
fr.
�C 3 )
sur la consignation appartenant au sieur de Strada, et
à laquelle ils avaient droit c o m m e créanciers;
A tte n du dès-lors que les termes et les conditions de
l ’acte du 29 mai 1 7 9 1 , ne laissent aucun d o u t e , ni
sur la qualification q u ’il doit recevoir, ni sur les effets
q u ’il doit produire, et q u ’il est é v i d e m m e n t une q u it
tance à compte des i
35,ooo
francs, donnée au sieur
G ra n ch ie r, rec eve u r des consignations, par des créan
ciers ayant droit à la somme consignée ;
At te ndu que cet acte a été reconnu c o m m e quittance
par les héritiers R e y n a r d et N a l l e t , q u i , après avoir
fait fixer, par jugement du 16 pluviôse an
5 , 1a
tota
lité de leurs créances à 14 2,314 francs, avaient pris,
en l ’an 7 , une inscription contre le sieur de Strada,
de la somme de 7 à 8000 francs, faisant la différence
approximative des 1 4 2 , 3 1 4 francs, que les héritiers
R e y n a r d et Nallet prétendaient avoir le droit d ’exiger
du sieur de Strada, aux 1
35,000 fr. qu’ils avaient
reçus
du sieur G ra n c h ie r, suivant l ’acte du 29 mai 1 7 9 1 ;
Que si , postér ieu reme nt, cette inscription a été
portée à 96,612 francs, c ’est par suite du projet conçu
par le sieur Granchier, adopté par les héritiers R e y n a r d
et Nallet, et exéc uté par les uns et par les autres, de
cacher au sieur marquis de Strada la quittance de 1 7 9 1 ,
dont il ne pouvait avoir aucune connaissance; que la
certitude de ce point de fait résulte, i° de la corres
pondance du sieur Granchier avec l’un des héritiers
R e y n a r d et Nallet 5 20 de ce que le bordereau d’ins
�(4 )
cription qui fixe la créance de ces derniers à 96,612 f r . ,
est en entier écrit de la main du sieur Grancliier 5
A t t e n d u q u e , de son c ô t é , le sieur Grancliier a re
connu et accépté l ’acte du 29 m ai 1791 c o m m e quit
tance j
Q u ’assigné, en 1808, par le sieur de Strada, pour
rendre com pt e de la consignation S a i n c y , il a , par
exploits des
3 et
17 nove m bre 1809, appelé les h é ri
tiers R e y n a rd et Nallet en assistance de cause, pour
fa ir e Leur déclaration de La somme quiLs avaient reçue
sur La co n sig n a tio n , la lui faire a l l o u e r ou
r estitu er
;
qu'après s'être départi de cette dem ande , le
27 février i 8 i i j il a , dans u n interrogatoire sur faits
Attendu
et articles,, du
5 mars
prêté 1
francs aux R e y n a rd et N a lle t , s ’ an
35,ooo
môme a n n é e , avoué qu’il avait
n on çan t comme créanciers ; que ce prêt fut fait
TONDS A
VALOIR,
des
quiL pourrait se retenir sur Leurs
créances, Lorsqu'on procéderait à Cordre j que les h é
ritiers lui ont fourni un récépissé j que ce prêt fut fait
en assignats,
tels
que
le
répondant
les
a v a it
REÇUS 5"
Q u ’il ajoute ensuite que les sieurs:R.eynard et Nallet
n ’ayant été colloqués que pour 7 3,7 61 francs, par 1«
jugeme nt du i er thermidor an 2, il s’est retenu celte
som m e en ses mains, en diminution de la somme
p r ê t é e , et que les R e yn ard sont restés ses débiteurs
de 61 ,2 3 9 fr* »
Que ce récépissé ne peut être considéré c o m m e pièce
com p ta b le , et doit être regardé c o m m e un effet de
�particulier à particulier, q u i f u t f a i t alors d a n s les
form es que Les Lois autorisaient ;
A tte n d u qu’ un ju gem ent du 2
3
août 1 8 1 1 a y a n t
ordonné que le sieur G ranchier serait interrogé sur
les termes du récépissé dont il venait de reconnaître
l’e x i s t e n c e , ce dernier a judiciairement indiqué au
sieur marquis de Stra da , c o m m e dépositaire d e l à quit
tance du 29 mai 1 79 1, un jurisconsulte de R i o m , frère
de l ’un des héritiers R e y n a rd et Nallet, et q u ’il a m ê m e
donné copie certifiée de cet acte ;
Attendu que l’impossibilité où était le sieur G r a n cliier de rendre son compte au sieur de Slrada , liors
la présence des héritiers R e y n a r d et N a l l e t , et sans
la quittance de 1 7 9 1 , qui était sa seule pièce c o m p
ta b l e , l ’a mis dans la nécessité de renou veler la de
mande des
3
et 17 no vem b re 1809, et d’appeler, par
exploit du 20 mai 1812, les sieurs R e y n a r d et Nallet
en assistance de cause, à l ’effet de remettre les pièces
ju stifica tiv es de Leur collocation , et donner quittance j
que cette demande a él é jointe à celle principale',
form ée par le sieur de Strada contre G ran clii er, à la
requê te de ce dernier 3
A tte n du que des a ve ux aussi positifs rendent aujour
d ’h u i , soit les R e y n a rd et Nallet, soit le sieur G r a n
chier, non recevables à faire considérer l’acte du 29
mai 1791 c o m m e un billet contenant obligation, de la
part de R e yn a rd et Nallet , h G ra n ch ie r, et que cette
idée n’est vraie q u ’autant q u ’elle se restreint h la pro_
messe faite par les sieurs R e y n a r d et N a l l e t , de faire
�( 6 }
allouer
au sieur Granchier la quittance de
1791
c o m m e pièce c o m p ta b le ;
J
A t te n d u que 'le sieur Granchie r est obligé de re
connaître que la quittance du 29 mai 1 7 9 1 , est sa
pièce comptable pour la so mme de 7 3,7 6 1 fr., montant
d el à collocation contenue au jugement du
I er
thermidor
an 2 , en fa v e u r des héritiers R e y n a r d et Nallet ; q u ’il
n ’y a aucune raison pour diviser cet a c t e , et en faire
tout à la fois en fa ve ur du sieur Granchier, une quittance
contre le sieur de Strada, et un billet contre les héritiers
R e y n a r d e t N a l I e t ; q u ’au contraire, l’a c t e d u 2 9 m a i 1791
doit conserver son caractère de quittance pour la
somme entière de i
,ooo francs, puisque d’ une part
35
elle a été versée en ent ier entreles mains des créanciers
du sieur de Strada, qui l'ont reçue ave c la charge de la
faire allouer sur les collocations q u’ils pourraient o b teuir, et que de l’autre il est irrévocablement reconnu
par le
sieur Granchier
q ue les 1
35,000 fr. provenaient
de la consignation Saincy, et appartenaient au sieur
de Strada.
Atte nd u que le sieur de Strada, en allouant
cette
quittance au sieur G ra n ch ie r, a le droit de s’en e m
p a r e r, puisqu’elle porte sur des capitaux reconnus lui
appartenir, et que dans cet acte y ayant stipulation
au profit du sieur de Strada, de la condition que les
1 35,ooo francs étaient donnés et reçus à la charge de
les tenir à co m pte sur ce qui qui était dû aux R e y n a r d
et .Nallet, par le sieur de Strada, la stipulation
de
l’engagem ent contracté par les R e y n a r d et N allet, de
�(
7
>
faire allouer cette so m m e au sieur Granchie r, étant
dépendante de cette c o n d i t i o n , l’acte du 29 mai 1 7 9 1
devient co m m u n au sieur de Strada, qui a déclaré
vouloir en profiter, déclaration qui s’oppose à ce que
soit le sieur G ran ch ie r, soit les héritiers R e y n a rd et
N a i l e t , puissent'révoquer les stipulations qui y sont
contenues, et dont ils sont les auteurs (C od . civ. 1 1 2 1 ) ;
Atte nd u que lorsqu’il serait vrai q u ’à l’époque ou
les fonds ont été retirés par les sieurs R e y n a r d et Nailet,
des mains du sieur G r a n c h i e r , ce dernier se serait
contenté de billets ou de lettres de c h a n g e , la novation
qui aurait eu l i e u , et la confusion qui se serait faite
de ces effets, dans la quittance du 24 mai 1 7 9 1 , n’ en
devrait pas moins profiter au sieur marquis de Strada,
puisqu’en rappelant l’origine des fonds reçus par les
héritiers R e yn a rd et Nailet, elle avait pour objet de
les faire imputer sur la consignation Sa in c y, et de
mettre le s i e u r G r a n c h i e r à l ’abridu d a n g e r q u ’il pouvait
courir, résultant de la résistance q u’il avait mise à
exécuterles lois qui supprimaient sa charge,et à remplir
les obligations qui lui étaient imposées;
Atte ndu que le sieur de Slrada étant reconnu pour
le propriétairè des fonds, il serait indifférent que l’acte
de 17 9 1 fut considéré c o m m e q uittan ce , ou c o m m e
billet. Qu e c o m m e q u it tan ce , cet acte étant pièce
comptable en faveur de Granchie r, le sieur de Slradaserait créancier des héritiers R e y n a r d et Nailet ; que
c o m m e simple billet, les héritiers
seraient
Reynard
et Nailet
débiteurs de G ra nch ie r; mais que dans ce
�(
8
)
dernier ca s, le sieur de Strada ayant droit à un compte,
et l’ayant d em an d é, les héritiers R e y n a rd et Nallet
d evan t, aux fermes de l ’acte de 1 7 9 1 , et de la demande
du sieur Granchier, se réunir à lui pour le rendre et
faire allouer les sommes par e u x reçues, le sieur de Strada,
oya nt c o m p t e , aurait toujours la faculté de reprendre
les fonds convenus provenir de sa co n sig n a tio n , en
quelques mains q u ’ ils se trouvassent ;
A tte n du que le sieur Granchie r ne pourrait se pré
valoir de la faculté
qui lui était accordée par les
édits, de placer les fonds consignés, q u ’autant q u ’il
prouverait qu'il les a remplacés dans l’intérêt du
sieur de Strada, et qu’il les a em ployés h payer les créan
ciers de ce dernier; mais qu’il est au contraire établi
que le sieur Granchier, bien loin de remplacer ces fonds,
bien loin de
les em plo ye r dans l’intérêt du
sieur
de Strada, n’a fait aucun versement dans la caisse du
district, co nform ém ent à la loi du
23 septembre 1793,
et q u ’il serait hors d’état de rendre son c o m p t e , si l’on
rejeltait la quittance de 17 9 1 ;
Atten du que le s}'stème du sieur Granchier est fondé
sur celte i d é e , que les capitaux compris dans la quit
tance du 29 mai 1 7 9 1 , reconnus appartenir au sieur
d e S tra d a , auraient pu périr pour le propriétaire, tandis
q u ’ils auraient été conservés pour le rec eveur 011 dépo
sitaire, et auraient formé en sa faveur une créance q u ’il
aurait aujourd’hui le droit de réclamer au détriment
de celui auquel ces capitaux appartiennent ;
A tte n du que celte prétention si contraire à la justico
�(
9 )
et à l'hon nête té, fait de plus fort sentir la nécessité de
conserver à l’ucte du 2 9 mai 1 7 9 1 , les effets que le
sieur Granchier et les héritiers R e y n a rd et Nallet'ont
voulu lui faire produire lors de sa rédaction ;
Attendu q u ’il ne peut plus être question, en consi
dérant l’acte de 1 7 9 1 , c o m m e une pièce comptable
en faveur du sieur G ra nch ie r, que d ’examiner quel
effet il doit produire, soit sur la demande en reddition
de compte formée p a r le sieur marquis deStrada, contre
ledit Granchier,soit sur celle en restitution aussi intentée
p a r l e sieur de Strada, contre les R e y n a rd et Nallet.
E n ce qui touche la demande intentée contre
sieur G ran chier:
le
¿3
At te ndu que la loi du
septembre 1 7 9 3 , en sup
primant définitivement les offices de receveurs des
consignations, en avait attribué les fonctions aux re
ceveurs de district; que cette loi, en ordonnant le
versement des consignations dans les caisses de district,
a prescrit le mode de ce v e r s e m e n t , les conditions essen
tielles de Létat que devaient former les receveurs des
consignations supprimés, des sommes dont ils faisaient
le d é p ô t, les reconnaissances que devaient leur délivrer
les receveurs de district, et le mode des restitutions des
sommes consignées;
At te ndu que cette loi était promulguée et e x é c u
toire au
I er
thermidor an
2
3
( o juillet 179 4), date du
ju geme nt de collocation; q u a cette é p o q u e , le sieur
Granchier devait l’avoir e x é c u t é e , et q u e , dans les
termes de la loi, il n'avait plus qualité pour recevoir,
�( ÏO )
retenir ou conserver aucun dépôt judiciaire; que conséquemment le jugement de ihermidor an 2, en ac
cordant un sursis de deux mois pour faire liquider les
articles incertains de la créance R e y n a r d et N a l l e t , et
en ordonnant q u e , pour y iaire face, une som m e de
107,240 francs demeurerait en dépôt entre les mains
du receveur des consignations, n ’a pu et voulu indi
quer que le receveu r reconnu par la loi , c’est-à-dire
le rec ev eu r de district, entre les mains duquel le sieur
Grancliier était censé avoir fait remise des londs con
signés dans sa caisse ;
Attendu que le sieur Grancliier reconnaît q u’à celte
é p o q u e il n’avait fait aucun versement ; que? posté
r ieure m en t, il n’y a eu aucune remise de sa part, au
r ec ev eu r de district, de la som m e de 107,240 francs,
qui devait dem eurer en d é p ô t , aux termes du juge
ment du Ier thermidor an 2; que m ê m e .cet le remise
était impossible, puisque, de l’aveu du sieur Grancliier,
la!plus grande partie de ce lle somme était entre les
mains des héritiers R e y n a rd et Nallet;
A tte ndu que le seul versement qu'ait fait le sieur
Grancliier, est d’ une so m m e de 62,000 fr. en assignats,
q u’ il a déclaré lui resler de la consignation faite par
Gilbert S a i n c y , o a des consignations postérieuresj que
la quittance informe qu il rapporte du receveur du
district, sous kl date du
3
prairial an
3,
n ’indique ni
Ip nature des assignais déposés, ni les propriétaires des
f< nds, ni les so.nnies apprirUjn;mtes a chacun d’e u x ;
q u ’il (.st ainsi évident q u e c ? versement tardif, irrégulier,
�( II )
et
en tous les points contraire aux dispositions de
l ’article 8 de la loi du z
3
septembre 17 g'è, né peut
être opposé par le sieur Granchier au sieur marquis
de Slrada ;
Attendu que le sieur Granc hie r n ’ayant satisfait a
aucune des obligations qui lui étaient imposées par là
lo i, n’ayant fait aucun versement ré g u l ie r , n’a y a n t
présenté aucun c o m p t e , a y a n t , au contraire, négligé
avec affectation, et da n s ses in tétêts, de se-soumettré
aux formalités et aux règles qui pouvaient assurer sa
libération, et 1 affranchir de la responsabililé attachée
à la place de rec eveur des consignations,, d e v r a i t ,
con fo rm ém en t aux dispositions des lois des
5
5
3o pluviôse
an
et
nivôse an 7 , rendre com pt e de la valeur
léelle de la consignalion au m oment où elle a été faite}
c ’est-à-dire au 24 janvier 1 7 9 1 ; que cette mesure
pourrait être adoptée ave c d’autant plus de raison, que
le sieur G ran ch ie r, avouant avoir placé les fonds con
signés, et les avoir fait valoir à son profit, devait seul
supporter les pertes qui auraient pu arriver; que dans
ce c o m p t e , le sieur marquis de Strada n ’aurait pu être
tenu de lui allouer que la quittance de 1
et celles des ^sommes qu'il aurait
35,000 francs,
payées à d ’autres
créanciers colloqués ;
Attendu que le sieur marquis de Strada, pour éviter
les longueurs d’ un co m pte aussi difficile à faire,à préféré
adopter celui présenté par le sieur Granchier, et par
lequel il se reconnaît l u i- m êm e débiteur de la somme
de 42,929 francs.
�( 12 )
A tte n du que le sieur Grancliier ne peut raisonna
b le ment soutenir que ces 42,929 francs ont été dé
monétisés dans sa caisse, au préjudice du sieur marquis
de Strada; que ce dernier n’a aucune action à exercer
contre lui pour cet objet, et ne peut avoir que la
faculté de se présenter à son bureau, pour y retirer
ces assignats démonétisés;
Q u e cette objection se détruit, i° par la déclaration
faite par le sieur Granchier, q u’il avait usé de la faculté
que lui donnait sa charge de placer les fonds des con
signations; 20 par l’impossibilité où le sieur Granchier
s’ est toujours tr ouv é de représenter ces 4 2 , 9 2 9 francs
d’assignats à face royale de l’émission de 1 7 9 1 ; ° enfin
3
par le versement qu’ il a fait dans la caisse du receveur
dudistricl, le
3 prairial an 3 , de la somme de 62,000 fr.
q u’il a déclaré lui
rester
de la consignation Saincy,
ou des consignations postérieures; que ce versement
prouve q u ’il n’avait rien de plus dans sa caisse que
ces 62,000 francs, et q u’ainsi il est aujourd’hui inad
missible à prétendre q u’ il y avait conservé 42,9 29 fr.
d ’assignats démonétisés , à face royale.
E n ce qui louche la demande en restitution fo rm ée
p a r l e ' sieur marquis de Str ada , contre les héritiers
R e y n a r d et Nallet :
.
8 5
Atte ndu q u ’au 11 avril i o , époque du traité entre
M e Joseph P a g è s , agissant tant pour lui que pour ses
cohéritiers, et le sieur marquis de Strada, ce dernier
ignorait absolument l’existence de la quittance du 29
mai 179 1 ; q u ’ il est constant dans la cause que q ue l-
�(
*3
)
qùes-unes des stipulations qui en font l’ob je t, n'ont
été connues du sieur de Slrada que lors de l’inlerrogatoire prêté par le sieur Granchier, le 5 mars 1 8 1 1 ,
et que copie de cet acte ne lui a été donnée ave c in
dication du dépositaire de la m in u t e, que dans le cou
rant d ’a o û t , m êm e année.
" A t t e n d u que soit le sieur G ra nch ie r, soit les héritiers
R e y n a rd et Nallet, ont fait tous leurs efforts pour dissi
muler cette quittance au sieur de Strada,et le maintenir
dans l’idée qu’il était débiteur des R e y n a r d et N a l l e t 5
que ces derniers, après avoir pris en l ’an 7 , une insc r i p l i o n d e 7 a 8000 francs, Conformément à la quittance
de 1 7 9 1 , ont consenti à ce que le sieur Granchie r la
reclifiiit en leur n o m , et la portât dans un bordere au
d ’inscription du 27prairialan 7 , à la somme de 96,61 2 f.;
que le sieur de Strada leur ayant demandé la main
l e v é e de ces inscriptions, ils ont déclaré à la ju s ti ce,
le 21 ventôse an i
3 , q u ’ils
n ’avaient rien touché du,
m ontant de Leur co llo ca tion , ce qui força le tribunal
de Clermont a ordonner, a v a n tJa ire d r o it, que le re
ceveur des consignations serait m is en cause; q u e ,
dans cette position, le sieur de Slrada dèvait penser
que les héritiers R e y n a r d et Nallet étaient encore ses
créanciers, et qu’il n’avait l u i - m ê m e q u’ une action
en reddition de co m pte à
Granchier;
intenter contre le sieur
»
A tte n d u que les liéritiers-Reynard et Nallet..avaient
au contraire une connaissance pal-faite de la so m m e
�( i
4
)
à c o m p t e , qui avait été retirée par leur p è r e , de la
recette des consignations, le 29 mai 1791 ; que l’acte
qui constatait ceipaiement, leur était connu avec toutes
ses stipulations et conditions; que la certilude de ce
fait résulte, i ° d e la première inscription de 7000 f r . ,
q u ’ils ont prise en l'an 7 ; 20 de ce que la quittance de
1 7 9 1 est constamment resiée dé posée, et est encore
entre les mains d ’un jurisconsulte de R i o m , frère de
l’ un des héritiers R e y n a r d ; que le sieur Granchier a
l u i- m ê m e indiqué ce dépositaire au sieur marquis de
Strada ; que la co nséquence forcée de ce fait reconnu dans
la cause j est
au trailé du
que le frère de ce jurisconsulte, seul partie
n avril i8 o 5 , connaissait à cette époque
la quittance de 1791*5
3°
enfin de la correspondance
entière du sieur Granchier, a vec l ’unique représentant
des héritiers R e y n a r d et Nallet, correspondance rqui
fait parfaitement connaître et les moyens em ployé s
pour rendre invincible l’erreur du sieur de Strada, et
le projet d ’en profiter, m ê m e antérieurement au traité
de i o ;
8 5
Atten du que dans ces circonstances les parties au
8 5,
traité du 11 avril i o
n’ont pu transiger sur les
s om m e s re q u e s p a r le s R e y n a rd e t Nallet, l e 29 m a i l 7 9 i ,
puisque d’ une part les R e yn a rd et Nallet se disaient,
et étaient en apparence créanciers du sieur de Strada,
de la totalité de leurs créances non liquidées par le ju
gem ent de l ’an 2 ; et que de l'autre, le sieur de Strada
étaït darisTimpOssibilité de leur proposer aucune com'pon.salio^i j 011
leur prouver sa libération dont le
�( i
5
)
titre lui était inconnu et retenu par ses adversaires;
A t te n d u que la difficulté de savoir si les héritiers
R e y n a r d et Nallet devaient être payés de leur créance
sur les fonds conservés, ou si au contraire ces fonds
avaient péri ’pour le sieur Jde Strada, ou po uvaient
être réclamés par lui exc lusive m en t, contre le sieur
G ran chier; difficulté prévue transitoirement dans l ' e x
posé du traité de
1 7 8 5 , ne naissait point en f a i t ,
puisque dès 1 7 9 1 , les héritiers R e y n a r d et Nallet avaient
retiré de la caisse du recev eu r ce
q u ’ils avaient à
prétendre sur cette consignation, c o m m e créanciers du
sieur de Strada; q u’ainsi elle n’avait été imaginée que
pour confirmer le sieur de Strada dans son erreur, en
tirer parti, et se donner la facilité de combiner avec
le sieur Granchier, les moyens de r en d re son c o m p f e ,
çu.pr.ofitanti du prix du règlement qui devait être fait
sur les créances non liquidées par
l ’an 2 ;
le ju gem ent de
i
8 5
Attendu que le traité du 11 avril i o
se borne a
régler toutes les créances, répétitions, droits et pr é
tentions généralement quelconques , résultant et à ré
sulter des jugemens de l’an 2 et de l’an
5,
et que lous
ces objets sont réglés e\ f ix é s définitivement >et
de forfait
IRRÉVOCABLE,
A titr e
à la somme de 47,250 fr.,
sans exception ni réserve ;
Q ue ce règlement était d ’autant plus nécessaire, que
les objets non liquidés p a r l e jugement de l’an 2 étaient
très - m o d i q u e s , et se réduisaient à l’estimation de
�C 16 )
quelques réparations k faire a u x
bâtimens ; 'd’ une
cou pe de bois faite par le sieur de Strada, de seize
bêles à cornes, et de trois mille fagots enlevés par lui;
que tous ces objets avaient été estimés par des experts,
opérant à l’époque où le papier-monnaie était le plus
en discrédit, à la somme de
68,553
francs; et que le
j u g e m e n t , par d é f a u t , d ’hom ologation, oblenu parle s
B e y nard et N a l l e t , est du 16 pluviôse an
5,
c'est-à-
dire postérieur de peu de tems aux lois qui anéantissent
les assignats, et du jour m ê m e de la loi qui ôte aux
mandats le cours forcé de monnaie entre particuliers;
Qu e dans celte position, le sieur de Strada avait la
f acu lté, ou de faire réduire l’estimation des experts à
sa valeur représentative du numéraire suivant l’échelle
de dépréciation , ou de se plaindre de l’exagération de
c e ll e estimation, en interjettant appel du j u g e m e n t ,
voie qui lui élait encore ouverte lors du traité du
Ji
8 5
avril i o ; q u ’il pouvait également offrir en c o m
pensation les prix des baux à ferme que les sieurs
R e y n a r d et Nallet n’avaient point payé s, quoiqu'ils
eussent joui de la terre de Brialles pendant plusieurs
années;
Q u ’ainsi sous tous les rapports , il y avait lien à traiter
sur les condamnations prononcées par le jugement du
16 pluviôse an
5 , de
leur nature susceptibles de réduc
tion , et qui n’ont été réglées déf initiv em ent, et à titre
DE f o r f a i t s I R R É V O C A B L E S ,
8 5
i l avril i o ;
que par la transaction du
�(
*7
)
A t t e n d u ' q u e tous les articles de cette transaction
s’occupent exclusivement du règlement et de la fixa
tion des droits des sieurs R e y n a r d et Nallet; q u ’ils
en fixent la valeur à 47,260 francs, qui sont payés
comptant en argent et en effets, et que cette somme
est supposée due par le sieur de Strada;
Attendu que sans attaquer la transaction,le sieur de
Strada, ayant re couvré la pièce qui opère sa libération,
et prouvant d ’ une part q u e c’est par err eur q uJil s’é
tait laissé constituer débit eur , lorsqu’il a acquitté cette
s o m m e , et que de l ’autre les héritiers R e y n a rd et
Nallet ont reçu sciemment ce qui 11e leur était pas d û ,
il a le droit confo rm ém en t aux articles 1 3 7 6 , 1377 et
1378 du C od e civil d ’exercer l'action en répétition, et
en restitution de la som m e par lui indûment pa y é e ;
A tte n du que le sieur de Strada a toujours dem andé ,
et demande encore l’exécution complète et entière
des conventions contenues en la transaction du 11 avril
8 5
i o , et q u ’il y a erreur dans la confusion que l’on veut
faire de 1 action en rescision, a v e c la demande en restitution 011 répétition ; que ces deux actions, n V y a n t
rien de c o m m u n entre elles, ne peuvent être jugées
par les m êmes principes;
'
A tte ndu que la dette du sieur de Strada est irrévo
cablement réglée par le ju gement du i er thermidor
8 5
an 2 , et par le traité du 11 avril i o , à la som m e
de 12 1,0 1 1 francs, et que les sieurs R eyn ard et Nallet,
ayant r e ç u , suivant la quittance du 29 mai
3
179 1 ,
�( i8 )
celle de i 3 5 , o o o francs, doivent restituer au sieur de
Strada la somme de 13,989 francs ; '
A t te n d u que les héritiers R e y n a r d et Nallet lui
doivent également les intérêts d e ce capital depuis
l ’époqu e de sa réception ;
Parc e que d’une p a r t , étant de principe que le
créancier colloqué par p r o v is io n , doit les intérêts du
jour de la réception de ses fonds, à plus forte raison
ces inlérêts sont-ils dus par celui q u i, avant l’ordre,
a touché plus q u ’il n’avait le droit de prendre ( Arrêt
de ja nvier 1672, J o u r n a l des ¿Ludiences, tome
3 x Uv. 6,
chap. 2 2 ) ;
Que de l’autre , le sieur de Strada, ayant été obligé
de p a y e r les créanciers postérieurs dans Tordre des
collocations aux sieurs R e y n a r d et Nallet* peut aussi
exiger ces inlérêts à litre d’inde mnité;
Attendu q u ’aux fermes des articles 1 8 7 6 , 1377 et
1378 du C o d e civil, le sieur de Strada a encore droit
à la restitution de îa somme de 47,260 francs indû
m en t reçue par les héritiers R e y n a r d et Nullet, lors
8 5
du traité du 11 avril i o , et q u e cette somme doit
lui être restituée avec les intérêts à dater de sa r é
ception ;
Parc e que les héritiers R e y n a r d et Nallet connais
saient à l’ép oqu e dit tr ait é, et bien anCéuîeurement, la
quittance du 24 mars-i79i; q u e , malgré cette connais
sance, ils n’en ont pas moins requis un© inscription
de 96,612 francs contre le sieur de Slrad’a , q u i , dans
l’ignorance où il était de sa libération avant L’acte-
�( i
9
)
de i 8 o 5 , a été obligé pour l ’o p é r e r , d’ un côté, d ’e m
prunter à gros intérêts, et de l’autre, de vendre ses
propriétés à vil prix;
A tte n du dès-lors que ces intérêts sont loin d’inde m
niser le sieur marquis de Strada, du préjudice q u’il a
ép rouvé par le fait du sieur G ra n ch ie r et des sieurs
R e yn a rd et Nallet réunis, el que tout dans ce ll e cause,
fait sentir la nécessité d’appliquer rigoureusement les
dispositions de l’article 1378 du code civil;
Par ces motifs et ce u x expliqués au ju g e m e nt dont
est appel :
Il
plaise h la Cour mettre au néant l ’appel interjetté
par le sieur Granchier, et les R e y n a r d et N a lle t , du
ju geme nt rendu au tribunal civil de R i o m , le 29 jan
vier 1 8 1 7 , et les condamner à l’am ende et aux dépens;
Statuant sur l ’appel incident interjetté par le sieur
de Slrada, du m ê m e j u g e m e n t , par requête du 7 juil
let 1817 , dire q u ’il a été mal j u g é , en ce que les
R e y n a r d et Nallet n’ont été condamnés aux intérêts
des deux so m m es, l’ une de 13,989 francs, et l’autre
de
francs, qu a com pter de la demande fo rm ée
par le sieur marquis de Strada;
E m en d a n t quant à c e , condamner les R e y n a r d et
N a lle t , à co m pt er au sieur de Strada les intérêts depuis
le jour de la réception q u ’ils ont faite de ces capitaux,
c ’ e s t - à - d ir e , pour les
mars 1 7 9 1 , et pour les
[
avril i o ;
8 5
13,989 francs, depuis le
45 , 25 o
i3
francs, depuis le 1 1
�(
20
)
C o n d a m n e r le sieur Granchier et les R e y n a rd et
Nallet , aux dépens de la cause d’a pp el, et o rd o n n e r
que
l’a m e n d e consignée sur l ’appel
incident sera
rendue.
■
* • *'
•\
‘
L e M a rq u is
de
STRADA.
J n.-Ch. B A Y L E , a î n é , ancien A voca t.
M A N D E T , je u n e , A v o u é licencié.
M
f
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DE J.-C. SALLES, IMPRIMEUR DU P ALAIS.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Strada, Marquis de. 1818?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Mandet
Subject
The topic of the resource
assignats
receveur des consignations
créances
ventes
domaines agricoles
receveurs de district
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions motivées, pour le sieur Arosberg, Marquis de Strada, intimé, et incidemment appelant ; contre le sieur Jean Granchier, ancien receveur des consignations, à Riom, appelant ; et contre les héritiers Reynard et Nallet, aussi appelans.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1818
1789-1818
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2428
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2423
BCU_Factums_G2424
BCU_Factums_G2425
BCU_Factums_G2426
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53482/BCU_Factums_G2428.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
receveurs de district
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53481/BCU_Factums_G2427.pdf
8e39f9bd75b88b252031a064f5cfbc99
PDF Text
Text
COUR ROYALE
OBSERVATIONS
i
.
'
DE RIOM.
I
1re Chambre.
.................... P O U R
M. le marquis D E S T R A D A , intim é et
incidemment appelant ;
r,
CONTRE
Les héritiers R E Y N A R D et N A L L E T ,
ET
__
CONTRE
1
M. GRAN CHI E R , ex-receveur des consigna
tions , appelans.
■
✓
.
.
.
.
iw w m w w v w T O
ir
,
imbroglio des deux mémoires publiés ,
l’un par les héritiers Reynard et Nallet, l’autre par le
sieur Granchier , ancien receveur des consignations, à
l’appui de l’appel qu’ils ont hasardé du jugement rendu
contre e u x , le 29 janvier 1 8 1 7 , ne seroit que ridicule,
si le complot déprédateur qu’ils y d é v o i l e n t , n’étoit
pas un scandale.
L
’im p é n é t r a b le
A
�( O
Héritiers R e y n a rd , héritiers N a lle t, vous qui avez
des droits à l’estime publique , et qui êtes jaloux de
les conserver, quel est votre aveuglement! Vos auteurs
étoient créanciers de la maison de Strada , d’une in
demnité liquidée, en deux temps, à 121,011 l i v . , en
capitaux et intérêts, calculés jusqu’aux époques d’une
première collocation qui leur fut accordée par jugement
d’ord re, du 2 thçrmidor an 2 , et d’une seconde col
location supplémentaire, rectifiée par traité du 21 ger
minal an i 3 , c i ................... ......................... 121,011 liv.
Ils reçurent par anticipation, le 29 mars
1791 , cent trente-cinq mille francs d’assi
gnats , à peu près au pair avec l’argent,
en payement à com pte, en attendant liqui
dation, ci................................................ .. . . . 1 35,ooo
Ils reçurent donc treize mille neuf cent
v
quatre-vingt-neuf francs de plus qu’il ne
s’est trouvé leur être dû par l'événement
.
des liquidations -postérieures , c i ................ *3,989.
L e jugement attaqué a néanmoins déclaré
cette dernière somme passible d’une déduc
tion de soixante francs , c i ..........................
60
à cause de la perte des assignats h l’époque
de la réception anticipée ; mais il reste tou
jours un surpayé par anticipation incon
testable, puisqu’il est justifié par une quittance fo rm elle, de treize mille neuf cent
vingt-neuf francs, comme le porte le jugement, c i ............................................................. 1^,929
Malgré ce surpayé, vous vous prétendiez
�Report. . . .
encore créanciers de 68,000 fr. et plus, en
l’an i 3 ( i 8 o 5 )*, et le sieur de Strada, igno
rant le payement anticipé de 17 9 1, et ne
connoissant que le seul acquittement de la
première collocation de thermidor an 2 ,
eut la bonhommie de vous reconnoître ses
créanciers de quarante-sept mille deux cent
cinquante francs, pour solde , par traité du
21 germinal, répondant au 11 avril i 8o 5 ;
et il vous fît une seconde fois le payement
de ce prétendu reliquat : le traité en porte
13,929 liv.
-Î '
V •
quittance , ci...................................................... 47>2^0
Voilà donc soixante-un mille cçnt soixantedix-neuf francs de surpayé ré e l, bien authen.
tiquement établi par quittance, ci ................ 4 61,179 liv.
Que conclure de ces faits bien irrésistiblement prouvés?
Héritiers Raynard et Nallet, lisez les articles 1276 et 1277
du Gode civil, et répondez franchement: pourrez-vous
méconnoître l’indispensable obligation que vous imposent
ces deux articles de la loi, de restituer ce que vous avez
indûment reçu, avec les intérêts, au moins depuis la
demande, môme en supposant une entière bonne foi dans
votre conduite, d’après l’article 1378? O r , c’est unique
ment à cette restitution que le jugement attaqué vous
condamne-, comment osez-vous donc vous plaindre?
A a
�I re O B J E C T I O N .
Oui, nous sommes débiteurs des 61,179 fr., auxquels
nous sommes condamnés, et même de 61,2.38 fr. («),
reçus nu delà du montant de notre créance, soit du
sieur Grancliier, soit de vous-même. Mais ce n’est pas
à vous, sieur de Strada , à répéter cette somme : c’est
seulement au sieur Grancliier que nous devons en faire
compte; car c’est de lui ‘que nos auteurs reçurent, en
mars 1791» les, i 35,ooo livres dont l’imputation sur nos
créances est la base principale de votre réclamation ;
et ce ne fut point à titre de payement anticipé qu’ils
la reçurent d’aJàord; cq fut seulement à titre d’emprunt,'
et il la charge de l’intérêt. L,a n égociation qui se passa
à ce sujet, entre eux et le sieur Grancliier, n’a rien de
commun avec vous. Demandez un compte au sieur
Grancliier, ancien receveur des consignations, de l’em
ploi du prix de Votre terre de Brialle, déposé dans sa
caisse le 24 janvier 1791, comme vous l’entendrez j mais
ne vous adressez pas à n ou s, ni pour répéter les 47>25o fr.
que nous avons reçus directement de vous, en exécu
tion de la transaction du 11 avril i 8o 5 , parce que cette
somme n’a fait qu’acquitter la dernière collocation accor
dée à notre créance ; ni pour recevoir de nous, à la
place du sieur Grancliier, les 61,938 liv. 18 s. 6 d .,
dont nous sommes ses débiteurs, pour le remboursement
de cc dont le prêt de 1 35,000 f r . , qu’il nous fit le
(a) V . page
6
de leur Mémoire imprimé.
�( 5 )
29 mars 1791 ? excède la compensation opérée avec lui,
de notre première collocation de 73,761 liv. 1 s. 6 d. ;
car il ne nous admit point à compenser également notre
seconde collocation avec le reliquat des 1 35,000 francs,
retirés de la caisse en 1791 , et remis à nos pères,
sous le prétexte que nous n’étions colloqués que sur
les assignats sans valeur, par lesquels il avoit remplacé
les assignats circulant au p air, qu’il en avoit retirés,
pour les remettre à nos pères en 1791, et que la créance
qu’il avoit sur nous, par le résultat de cette première
opération, étoitsa créance personnelle, et non la créance de
sa caisse, ainsi qu’il le prétend encore dans son mémoire (a).
RÉPONSE.
L e sieur Grancliier fait chorus, il est vrai, avec les
héritiers Reynard et Nallet*, il s’écrie comme eux et avec
e u x (£ ): Oui, la créance des soixante-un millejet quelques
cents livres, que les héritiers Reynard et Nallet reconnoissent me devoir, m’appartient personnellement, et
non à ma caisse j car les assignats qui la formèrent en
1 7 9 1 , une fois sortis de ma caisse, où je les puisai
pour les placer à mon profit, devinrent ma chose propre
aussitôt qu’ils furent sortis de ma caisse, sous ma res
ponsabilité'. Je ne de vois à ma caisse qu'un remplace
ment toutes fo is et quand il servit besoin pour le service.
Ce remplacement, je l’ai fait par d’autres assignats qui
(a) Voir les pages
(b) Ibidem.
A
3
�( G ) .
.
ont péri pour le sieur de Strada cl ses créanciers, par
la force majeure : tant pis pour lui. La créance Reyuard
et Nallet, conservée dans toute sa valeur, est gagnée pour
moi et pour les sieiirs Reynard et N allet, que je veux
Lien associer, jusqu’à un certain point, à ma bonne
fortune. Pour vous, M . de Strada, je ne puis que
vous plaindre des coups du sort qui vous ont frappé.
Dans les débâcles, sauve qui peut ; et c’est aux lieureux
à en rire : gaudeant bene nati!
Quel étrange langage ! et c’est un jurisconsulte éclairé,
lin magistrat probe, un homme d’honneur, qui le tient!
O temps ! ô mœurs ! ô aveuglement de la soif du bien
d’autrui !
Q u o i ! vous prétendez l’avir au fils du sieur de Strada,
vendeur de la terre de Brialles, dont le prix fut dépoié
en vos mains en 1791, non pour le faire éclipsera votre
profit, mais afin qu’il fût loyalement conservé au ven
deur et à ses créanciers j vous prétendez ravira ce légi
time propriétaire à peu près le cinquième du dépôt,
pour faire votre proie de cette importante portion du
patrimoine de ses pères, parce que vous usâtes, ditesvous, en 1791, pendant que les assignats circuloient
au pair avec l’argent, de la permission que donnoient
les règlemensaux receveurs des consignations, déplacer,
pour leur compte, et faire profiter au denier vingt, les
deniers de leurs caisses, à condition qu’ils en demeureroient responsables, et tenus de les remplacer toutes fo is
et quand il en seroit besoin! Vous croyez avoir loya
lement satisfait à l’obligation de remplacer, en remplaçant
fictivement dans voire caisse, lors de l’extreme avilis
�{7 )
sement du papier-mo/z/jo/e ou de sa cliute , les assignats
circulant au p a ir, que vous en aviez retirés en 1791,
pour les faire fructifier à votre profit, par des assignats
sans valeur, lors du remplacement, et qui ont totale
ment péri depuis? et vous voulez que le sieur de Strada
en supporte la perte! que sa propriété soit évanouie,
tandis que la valeur intégrale des assignats mis en dépôt
chez vous en 1791, et placés à votre profit, vous sera
conservée en pur gain ! O délire de la cupidité!
O uvrez, ouvrez les yeux à l’évidence, et le cœur à
la justice et à l’honneur, vous, sieur Gianchier, et vous
ses associés d’injustice, héritiers Reynard et Nallet, qui
ne parlez son langage que parce que vous êtes secrè
tement convenus de partager avec lui les 61,000 francs
dont votre complot a pour but de faire votre proie
commune.
Ouvrez les y e u x , encore une fois; reconnoissez le
délire de votre entreprise, et pleurez sur sou ini/uoralité.
L e délire de votre système! eh! ne frappe-t-il pas
tous les esprits judicieux?
Vous déployez à l’unisson toute l'adresse de la sub
tilité et du prestige, vous, sieur Grancliier, dépositaire
des G 1,000 francs dont vous brûlez de vous rendre pro~
priétaire ; et vous, créanciers surpayés, qui brûlez d’al
léger le poids de la restitution que vous ne pouvez pas
éviter.
Vous croyez tous atteindre le but, en vous efforçant
de changer l’essence des actes, et de faire passer la quit
tance du 29 mars 1791, donnée à compte'de vos créances
A 4
�m
'sur la maison de Strada, par une obligation des créanciers
au profit du dépositaire du pr'uc de la terre de Drialles,
qui pnya la dette du vendeur avec une partie de son
dépôt! lié bien, l’ambition vous aveugle, car ce change
ment de position ne cliangeroitrien aux résultats. Portons
la démonstration de cette vérité au dernier degré d’évi
dence; etpourcela nous demandons aux héritiers Reynard
et Nallet:
i°. Que devez-vous, dans l’hypotlièse adoptée par le
jugement attaqué, où l’on donne au récépissé du 29 mars
1791 l’effet indiqué par son texte, nous voulons dire
l’effet d’une quittance justificative d’un payement fait
par anticipation, à compte d'une créance acquise, mais
n o n encore liquidée} que ce payement aura éteint, en
y appliquant u n e partie du p r ix de la terre de Brialles,
déposé à la recette des consignations pour cette destina
tion? Fous devez le surjjayé de 61,179 francs que le
jugement attaqué vous a condamnés à restituer au sieur
de Strada. Ce premier point est déjà prouvé plus haut.
20. Et que devriez-vous, dans l’hypothèse opposée, où,
en adoptant votre système et celui du sieur Grancliier,
on donncroit au môme récépissé de caisse, du 29 mars
1791 ’
d’une obligation pour p rêt, souscrite parles
prétendus emprunteurs Reynard et Nallet, vos pères, au
profit du sieur Grancliier, préteur des fonds de sa caisse ?
Dans ce système, vous devriez la même somme de 61,179 fr.
que dans la première hypothèse; mais ce ne seroit pas au
meme créancier, car vous la devriez au sieur Grancliier,
prêteur. Ce second point n'est pas contesté.
A son tour, le sieur Grancliier devroit cette somme
�( 9)
à sa caisse, de laquelle il l’avoit tirée en 1791, pour ïa.
prêter sous sa responsabilité envers sa caisse, puisque si
les receveurs des consignations étoient autorisés à placer
les fonds de leurs caisses pour en tirer profit, ce n’étoit
. qu’à la cliarge de les remplacer toutes fo is et qualités, lors
qu’il en étoit besoin, afin de les délivrer aux créanciers,
ou de les rendre au propriétaire ; car telle fut toujours la
loi du dépôt judiciaire.
3°. Enfin, dans le même cas, le sieur de Strada seroit
créancier de la caisse du même capital de 61,179 francs,
q u i, n’ayant été employé à payer aucune de ses créances
dont il étoit le gage, rentreroit au dépôt d’où il avoit
été tiré en 1791 '•>et il ne pourroit y rentrer que pour lui
être rendu *, car tous ces créanciers ont été désintéressés
par d’autres fonds.
Nous venons d’observer que de ces quatre points le'
premier a déjà été prouvé plus haut ;
Que le second n’est pas contesté.
Il ne reste donc plus qu’à achever la démonstration du
troisième et du quatrième, en écartant les fausses suppo
sitions et les subtilités par lesquelles on a essayé d’en obscurcir l’évidence.
IIe O B JE C T IO N .
L e sieur Grancliier nous dit: (a) « Je représente en
« quittances ou en nature la totalité des deniers consignés:
» toute consignation remplie, il reste un excédant que je
(a) Page 11 de son Mémoire,
�( 10 )
» réclame pour l’avoir fourni de mes propres deniers. Eu
» voici la preuve :
» Payé (aux créanciers colloqués par le jugement d’ordre
» de thermidor an 2) jusques et compris la trente-unième
» collocation ( a ) ..............................................256,927 liv.
» Versé dans la caisse nationale soixante» deux mille livres (d’assignats à face royale
» démonétisés (Z>), ci....................................... 62,000
».Reliquat représenté en nature............... 42?029
» T o tal............. 36 1,856 liv.
* Somme égale à la consignation.
» Ainsi, la x’econnoissance de 1 35,000 liv. m’est restée
» en propriété. Elle n’éloit qu’un titre pour moi seul, un
» titre nécessaire pour répéter les sommes q u ’on ne in’au» roit pas fait allouer-, et je me trouve dans ce cas. La forme
v et le contexte de cet acle m’empêchoient de le présenter
» comme pièce de comptabilité. »
r
RÉPONSE.
D eux observations frappantes se présentent d’ellesmêmes sur ce tableau, qui n’est qu’une pure parade des
tinée à éblouir les yeux par des chiffres et des illusions
trompeuses.
La première observation s’applique à l’allégation d’un
versement de 62,000 fr. en assignats à fa ce royale, sup(a) Qui ¿toit la première des sieurs Reynard et Nallct, de
livres.
73,769
Cette circonstance est enonece pnge 5 du Mémoire»
�( 11 )
posés provenus de la consignation dg Brialles, que le sieur
Granchier prétend avoir déposés à la caisse nationale,
après la démonétisation, en exécution des lois du temps,
afin qu’ils ne restassent pas pour son compte.
L a seconde est relative au reliquat de t\2,929 fr. des
assignats de la même consignation, qu’il prétend avoir
toujours resté en stagnation dans sa caisse, depuis la con
signation du 2/j janvier 17 9 1, et qu’il représente, dit-il,
en nature.
Nous devons renvoyer plus bas ce que nous avons à dire
sur l’offre dérisoire de ces 42,929 francs d’assignats abolis,
qu'on représentera en nature ; mais c’est le moment de
parler des 62,000 francs d’assignats à face royale prétendus
versés à la caisse nationale, parce que c’est par la fausse
application qu’il en fait à la consignation de Brialles, à la
quelle ils n’ont jamais appartenu, qu’il voudroit remplacer
les 61,179 fr. d'assignats, faisant partie des i 35,ooo ir.,
retirés de la caisse le 29 mars 1791, desquels dérive la créance
de cette somme dont les héritiers Reynard et Nallct se reconnoissent débiteurs, et qui est le principal objet du litige
actuel. Nous disons que l’origine qu’il plaît au sieur Grancliier de donner à ces assignats, en les supposant provenus
de la consignation de Brialles, est une allégation menson
gère-, et voici comment nous le démontrons.
La consignation de Brialles avoit été de. . 361,929 liv.
Il en fut retiré, pour l’opération faite avec
Reynard etNallet le 29mars 1791, cent trentecinq mille livres, c i ......................................... i35,o00
Par conséquent, il ne resta plus en caisse
que....................................................................... 226,929 liv.
�( »
)
Report. . . . 226,929 liv.
Après le jugement d’ordre du mois de
thermidor an 2, il en fut encore retiré en
effectif, pour acquitter les trente premières
collocations, cent quatre-vingt trois mille
cent soixante-cinq livres, c i ............................. i 8 3 , i 65
Lesquelles jointes à la retenue de 73,762 liv.,
montant de la trente-unième collocation, qui
étoit celle des sieurs Reynard et Nallet, for
ment la somme totale de 256,927 liv. portée
gur le tableau du sieur Grancliier.
Il ne resta donc plus définitivement en
caisse, sur la consignation de Brialles, que . 43j238 liv.
C ’est-à-dire, à 307 francs d’excédant près, le résidu de
42,929/mncj seulement, que le sieur Grancliier offre de
représenter en nature.
Donc la supposition du sieur Grancliier, qu’il y restoit
en outre les 62,000 fr. qu’il prétend avoir versés depuis à
la caisse nationale, est complètement démontrée fausse:
donc, encore, il est impossible que ces 62,000 francs d’as
signats que le sieur Grancliier versa à la caisse nationale,
après leur démonétisation, et qu’il met en ligne de compte
pour justifier la libération de sa caisse, proviennent de la
consignation primitive de Brialles : donc cet article de
dépense du tableau qu’il présente, de l’emploi de celte
consignation, doit être rejeté avec dédain : donc il est
démontré enfin, que le sieur Grancliier a toujours resté
et reste encore débiteur de sa caisse, pour la consigna
tion de Brialles, des 61,938 fr., qui, dans son système,
�constituent la dette des héritiers Raynard et Nallet envers
lui personnellement.
O r, s’il doit cet important capital à sa caisse à cause de
la consignation de Brialles, qui appartenoit au sieur de
Strada, c’est au sieur de Strada que ce même capital doit
nécessairement revenir, puisque encore une fois il a désin
téressé tous ses créanciers avec d’autres fonds qui lui étoient
personnels.
C o n sé q u e m m e n t l’adoption du système des sieurs R e y
nard et Nallet, auroit nécessairement le même résultat que
celui du plan de comptabilité qu’ont adopté les premiers
juges, à cette seule différence près, qu’au lieu de recevoir
les 61,929 fr. que le jugement attaqué lui attribue, immémédiatement de la première main, elle ne lui parviendroit
qu’à la troisième cascade, puisqu’ils passeroient des héri
tiers Reynard et Nallet au sieur Granchier, de celui-ci à
sa caisse, et de sa caisse au sieur de Strada ; et certes, ce
dernier n’auroit pas à regretter les lenteursdu circuit, puis
qu'il en retireroitl’avantaged’avoirle sieur Granchier pour
garant de la solvabilité des premiers débiteurs, avantage
auquel il déclare bien positivement qu’il ne renonce pas.
QUELQUES MOTS SUR LE SECOND CHEF DU JUGEMENT.
Il ne nous resteplus, en terminant, qu’à faire quelques
réflexions sur la condamnation prononcée par le second
chef du jugement, contre le sieur Granchier particulière
ment, à raison de 42,929 fr., pour résidu de la même con
signation de Brialles, dont sa caisse est débitrice, pour
laquelle il offre des assignats en nature, anéantis depuis
�(
>4
)
quatorze ans. L e tribunal de première instance a rejeté
ses ridicules offres, et l’a condamné à payer la somme de
42,(p9fr., sur le pied de quarante pour cent, valeur qu’avoient les assignats, lors..de la publication de la loi de
septembre 1793, qui supprima les receveurs des consigna
tions, et leur prescrivit le dépôt des sommes qu’ils avoient
çn caisse dans celle de la nation. Il jette les hauts cris sur
cet acte de justice, et s’agite en tout sens pour s’en faire
décharger, sous le prétexte que cette somme d'assignats
a péri dans sa caisse. L e sieur de Strada auroit un bien
plus juste sujet de se plaindre de ce que les premiers juges
ne lui ont rendu que demi-justice, en usant de tant d’in-r
dulgence envers un dépositaire judiciaire qui en méritoit
si peu} et que l’application exacte des lois qui régloient
ses obligations, devo it faix-e condam ner à plus du double,
La Cour n’en doutei'a pas, si elle daigne peser les ob
servations qui suivent:
i°. La consignation de Brialles, faite en papier-monnoie
le 24 janvier 1791, n’a pu l’être qu’en assignats à fa ce
royale, puisqu’alors il n’y en avoit pas d’autres en circu-*
Jation,
20. Il suit de ce fait, que si les 4 2?929 francs d’assignats
offerts labialement en nature, ne sont pas à face royale,
ils ne peuvent pas provenir de la consignation de Brialles.
Ils ne peuvent pas en provenir non plus, quand ils sevoient hfaca royale, s’ils ne sont pas d’une émission anté-r
ricuro au 24 janvier 1791, jour de la consignation du prbç
de cette terre. O r, s’ils ne proviennent pas de la consignar
tion de Brialles, ils ne peuvent pas avoir péri pour le*
PQippte du sieur de Stra^at h qui ils n’appartenoient pas.
�( .5)
3°. Enfin, s’ils sont tout à la fois à face royale et d’émis
sion antérieure au 24 janvier 1791, ils pourroient bien
provenir de la consignation de Briallesj mais le sieur
Granchier n’en seroit pas plus avancé, car ils auroient
également péri pour son compte, dans ce dernier cas, faute
de les a v o i r échangés en temps utile, ainsi qu’il nous l’ap
prend lui-même à la fin de la page 3 de son mémoire.
Tout ce concours de circonstances prouve que le sieur
Granchier ne laissa en stagnation dans sa caisse aucune
portion des assignats consignés le 24 janvier 1791, pour
prix de la terre de Brialles, qu’il les avoit tous placés à son
profit dans le temps même, pour en retirer des intérêts
comme il étoit en usage de le faire. O r, l’article 12 de la
loi du 11 frimaire an 6 , obligeoit tous dépositaires et sé
questres volontaires ou judiciaires, à rembourser en numéraire métallique, tous les capitaux qu’ils auroient employés
à leur profit, à l’échelle du jour, où ils leur auroient fait
produire des intérêts. L e sieur Granchier donc auroit du
être condamné à payer les 42,929 fr. d’assignats dont il s’agit,
à l’échelle du mois de janvier 1791, qui étoit de 96 francs
pour cent, au lieu de 40 fr. seulement, taux sur lequel il
est condamné-, et il a encore l’indiscrétion de se plaindre!
Revenons, avant de finir, aux sieurs Raynard et Nallet,
pour répondre à une objection qui nous a échappé. Ils
crient à la violation des règles les plus élémentaires, de
la part des premiers juges, sous le prétexte que le tribunal
de première instance a annulé les clauses de la transaction
du 11 avril i 8 o 5 , qui leur étoient favorables, et maintenu
toutes celles qui leur étoient contraires, au lieu de la
rescinder <les deux côtés, et pour le tout. Fiat l u x , leur
�( i 6)
dirons-nous d’abord: que voulez-vous dire, avec cette
censure vague du jugement de première instance? A u
f a i t , il n’a annulé aucune clause de la transaction
du i i avril i 8 i 5 , ni pour ni contre. Que contient eu
effet cette transaction ? elle réduit une liquidation dedommages-intérêts, exagérée jusqu’au délire, par unjugement
rendu par défaut, au fort de la dépréciation des assignats,
qui égaroit même les esprits les plus sages; elle la réduit
de 68,555 livres 10 sols, à prendre e/z assignats, sur la
caisse des consignations en l’an 2, à 47,2 5o francs écus,
payés comptant en i 8o 5. N i la liquidation, ni le paye
ment n’ont été attaqués ; rien n’a été annulé par le
jugement dont est appel; s’il parle de la transaction,
ce n’est que pour y puiser, i°. la connoissance du mon
tant de la seconde partie de la créance Reynax*d et Nallet,
liquidée par ce traité à 47, 25o fr., somme fort supérieure
à la juste valeur de l'objet, et surtout à celle de 68,000 fr.
d’assignats de l*an 2; 20. la preuve du payement de cette
somme, sévèrement exigé, à une époque où ces créan
ciers avoient déjà été surpayés de 13,929 f r . , à l ’insçu du
sieur de Strada, et en conclure,
Premièrement, que le surpayé total est de 61,000 fr.
et tant;
Secondement, que ce surpayé ayant été indûment
reçu, doit être restitué, conformément aux articles 1376
et 1377 du Code.
O ù est en cela la partialité qui annule tout ce qui est
favorable u un contractant, et tout ce qui et>t contraire à
l’autre? Les visionsde l’aveugle prévention peuvent seules
Vy trouver. Quant à la raison calme, qui ne voit que co
�( 7 )
qui est, elle ne verra rien d’annulé, mais seulement
l ’indue perception de 62,000 f r , condamnée en exécution
de la loi.
La Cour ne peut donc manquer d’applaudir à la justice
comme à la sagesse du jugement de première instance, et
de le maintenir.
M quis D E S T R A D A .
M e B E R G I E R , avocat.
M c. M A N D E T avoué licencié.
A
C L E R M ONT,
de l'imprimerie de L a n d r i o t , L ibraire,
Imprimeur du R o i et de la Préfecture.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Strada, Marquis de. 1818?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Mandet
Subject
The topic of the resource
assignats
receveur des consignations
créances
ventes
domaines agricoles
receveurs de district
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour M. le marquis de Strada, intimé et incidemment appelant ; contre les héritiers Reynard et Nallet, et contre M. Granchier, ex-receveur des consignations, appelans.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1818
1789-1818
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
17 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2427
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2423
BCU_Factums_G2424
BCU_Factums_G2425
BCU_Factums_G2426
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Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
receveurs de district
ventes
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86b61bdef03b498e38ca86908c3abe10
PDF Text
Text
CONCLUSIONS
POUR les héritiers R E Y N A R D etN A LLE T,appelans;
CONTRE
Le Marquis de S T R A D A intimé ;
Et contre le Sieur G R A N C H IE R , appelant et intimé
E
n
c e q u i to u ch e le sieu r d e Strada :
A tte n d u que le ju g em en t d u 16 p lu viôse an
Strad a person n ellem en t à p a ye r aux appelans
5 con d am n ait le sieu r d e
68 , 55o fra n cs; q u e s i,
par u ne disposition secondaire , il est accorde un recours sur des deniers
co n sign és, ce n ’est q u ’à titre d e fa c u lté , e t p o u r respecter
le gage
h yp o th éca ire des sieurs R ey n a rd e t N a l l e t
A tte n d u q u e , ju sq u ’à cette é p o q u e , les sieurs R ey n a rd e t N a lle t
n ’ avaient a u cu n d ro it c e r ta in , n i con tre le sieur de S tra d a , n i sur
les deniers co n sig n és, et par co nséqu ent au cu n e action co n tre le re
ceveu r des consignations ; que dès-lors ils ne p o u v a ie n t être passibles
d e la perte des assignats, su rven u e p en d a n t le procès ;
A tte n d u q u e c ’est dans cette p o sition q u ’est in terven u le traité d u
21 germ in al an 1
3;
q u e le tra ité com p ren d tou tes les difficultés que
les parties avalen t et p o u va ie n t avoir e n se m b le, lesquelles se réduisaien t
évid em m en t ,
1° au règlem en t
d u quantum des dom m ages-intérêts
au xq u els le sieu r de Strada éta it condam n é personn ellem en t ; 2° au.
p o in t de savoir q u i su p p o rterait la perte des assignats q u i p o u vaie n t
être dem eu rés dans u n e caisse q u elco n qu e ;
�> >1
\î
C» )
A tte n d u q u e , sur ces d ifficu lté s, les parties se so n t ten u es q u ittes
d e tou tes préten tion s et d e toutes pertes d ’assignats ;
Q u e l ’acte renferm e une transaction générale su r tous les points de
d ifficu lté s , relatifs à la condam n ation d u 16 p lu viôse an
5,
pron on cées par les jugem en s an térieurs : difficultés qui
et à celles,
étaien t les
seules ex ista n tes, pu isqu e la p rem ière c o llo c a tio n , réglée d éfin itive
m en t en l ’an 2 , était r e m p lie ; q u ’ il n ’y a jam ais eu de con testation ,
à cet égard , en tre les p a rties, et qu e le fait est re co n n u , soit dans la
tra n sa ctio n , soit dans le m ém oire d u sieu r de Strada ;
Q u ’il est d on c constant qu e la transaction in te r v in t,
des d om m ages-intérêts r é g lé s , le 16 p lu viôse an
5,
x° sur l ’o b je t
p a r condam n ation
p ersonn elle contre le sieu r de Strada ; 20 su r la perte des assignats ;
3°
q u ’ elle co m p ren ait tou tes les d ifficultés nées et à n aître ; 4° q u ’e lle
fu t gén érale et absolue ;
A tte n d u q u e , dans cette occu rren ce , la d éco u verte d u b ille t de 179 1
ne saurait d on n er ou vertu re à la rescision d u traité ,
»
i° P arce q u e le b ille t n ’a p o in t été ten u caclié p a r le s a p p e la n s, c e ''''
q u i est reconn u par le ju g em en t d o n t est ap pel ;
20 P arce qu e ce b ille t n 'a u ra it pas éta b li q u e les h éritiers R ey n ard et
b a lle t n ’avaien t a u cu n d ro it con tre le sieu r de Strada ;
Q u e , d ’ u ne p a r t , le ju g e m e n t d e l ’an
5 le
con d am n ait p erso n n el
lem en t ;
Q u e d ’ un autre c ô t é , la co llo ca tio n de l ’an 2 , et la cond am n ation de
l’ an
5 s’élevaien t à
des som m es excéd an t le m on tan t d u b ille t ;
Q u e t sous u n autre r a p p o r t, il aurait f a l lu , com m e il le fa u t en core,
ju g e r si le b ille t d evait être ré p u té a p p arten ir au sieu r de Strada ; d ’où
il suit q u e la p ièce n’ est p o i n t , et n’ aurait p u être d écisive sur la lib é
ration absolue d u sieur de Strada ;
A tte n d u q u ’ e n e llc t le b ille t 11’ eta it q u ’ une sim ple reconnaissance de
p r ê t , en fa ve u r d u sieu r G ra n cliicr, p o u r les som m es excéd an t celles
d e la co llo ca tio n de 1 an 2 , et q u ’ il ne p eu t être considéré com m e u n e
q u itta n ce co m p tab le et lib ératoire d u m on tan t d ’ u n e co llo ca tio n non
existante ;
Q ue
le sieur de Strada
a u rait p u , selon les é v é n em e n s, refuser
�(
3
)
d’ a llo u er au sie u r G ra n cliier la som m e ainsi p a yée et recon n ue , et q u 'il
serait contraire à tou tes les règles de la récip ro cité , d ’adm ettre le sieu r
d e Strada à s’ em parer de l'e ffe t d ’ u n e o pération q u i lu i était étra n g è re,
s i , par la n atu re de cette o pération m ê m e , il ne p ou vait être forcé à
l ’accepter contre sa vo lon té ;
A tte n d u q u ’ il est in d ifféren t qu e l ’é c r it , daté d e 1791» soit p résen té
par le sieur G ran cliier com m e u n e p re u v e de lib é ra tio n d u m on tan t de
la collo catio n d u I er th erm id or an 2 ; q u ’il n ’est pas raisonnable d ’en
co n clu re q u ’ il est in d ivisib le et p e u t être accepté dans sa t o t a lit é , par
ce lu i à q u i on le présente p o u r-u n e p o rtio n ;
Q u ’ il résultait de cet écrit l ’ o b lig a tio n person n elle , d e la p art des
sieurs R ey n ard et N a lle t , de fo u rn ir q u itta n ce au sieu r G ra n cliier d u
m on tan t des sommes colloqu ées ;
Q u e cette o bligation autorisait le sieu r G ra n cliier à se reten ir la som m e
c o llo q u é e , tandis q u ’ il éta it léga lem en t d épositaire ; m ais q u e , p o u r le
s u rp lu s , le sieu r G ran cliier n’ avait q u ’ u n e actio n en r e stitu tio n ;
A tte n d u
q u e cette d istin ctio n
des effets qu e p o u v a it p ro d u ire le
b ille t d e 1 7 9 1 , s’est ré a lisé e , p o u r 7 ^ ,76 1 fr a n c s , de la co llo ca tio n d u
I er th erm id o r an 2, en o péran t, d e p ia n o t la lib é ra tio n d u sieu r G r a n c h ie r, et par la cond am n ation p e rso n n e lle , p ro n o n cée en l'a n 5 , co n tre
le sieu r d e Strada ;
Q u ’à la prem ière é p o q u e , le sieu r G ra n cliie r était d é b ite u r , com m e
d é p o sita ire, e t q u ’ il p o u vait se reten ir ce q u ’ il avait avancé à ses périls
et risques ;
Q u ’à la seconde é p o q u e , au c o n tr a ir e , le sieur G ra n cliie r n ’ était
p lu s dépositaire et co m ptable p u b lic ; q u ’ il éta it c e n s é , à l ’ égard des
tie rs , avoir versé tou s les deniers co n sign és, dans u n e autre caisse; q u e ,
d ’ailleu rs , les assignats n’avaient p lu s de va leu r ;
Q u ’^ i
cc ju g em en t de l ’an
5
n ’ accorde pas u n e c o llo c a tio n , et
n ’ ordonne pas la d éliv ra n ce d ’ u n bord ereau exécu to ire co n tre le dépo
sitaire des deniers c o n sig n é s, m ais q u ’il p ron on ce u n e condam nation
d irecte contre le sieu r de Strada ;
A tte n d u , d ’ailleu rs , qu e le ju g e m e n t d o n t est a p p e l a u rait vio lé
toutes les règles d u d r o it , en a n n u lla n t la transaction de l ’an i
3,
dans
la p a rtie contraire a u x intérêts d u sieu r d e S t r a d a , et m ain tenant en
�m ême tems la réduction de créance consentie ; 'dans le même acte, par
les héritiers R ey n ard et Nallet ;
A tte n d u en core q u ’en considérant le sieur de Strada com m e p ro
priétaire d u b ille t de
1 7 9 1 , et des deniers q u i en ont fait l ’ o b je t, il
fa u d ra it qu e le sieur de Strada ad o p tât les opérations q u i ont form é les
é lém ens de ce b ille t ; q u ’ il ne p o u rrait reven d iq u er q u e les cap itau x
fou rn is par le sieur G r a n c h ie r , et q u ’ il est év id en t q u e les ca p ita u x ne
sont qu e de la som m e de 120,000 francs ;
Sans s’ arrêter à l ’ appel in cid en t d u sieu r de S tr a d a , d ire q u ’ il a été
m al ju g é ; é m e n d a n t, d éclarer le sieur de Strada non recevable dans
sa dem ande à l ’égard des h éritiers R ey n ard et N a lle t , et le condam n er
au x dépens.
E n ce q u i to u ch e l ’appel d u sieu r G ra n ch ier :
A tte n d u q u ’ il est im possible d ’y d éfen dre ju sq u ’ à ce que la C o u r ait
réglé le sort des appels d irigés con tre le sieur de Strada ;
Q u ’ il p e u t résu lter d e la décision sur ces a p p e ls , qu e les héritiers
R e y n a rd et N a lle t aien t à prend re des conclusions en restitu tion contre
le sieu r G ra n ch ier ;
A t te n d u , d ’ailleu rs , q u ’ il y a eu arrangem ent co n clu en tre les h é ri
tiers R ey n ard et N a lle t et le sieu r G r a n c h ie r ; q u e ce t arrangem ent a
reçu u n co m m encem en t d ’ex écu tio n par le p aiem en t avoué de la som m e
d e 9,000 francs ;
O rd o n n er qu e les h éritiers R e y n a rd e t N a lle t contesteront p lu s
am p lem en t avec le sieu r G r a n c h ie r , si m ieu x n ’ aim e la C o u r o rd o n n e r,
dés à p r é s e n t, la preu ve par é crit ou par té m o in s , q u e la créance d u
sieur G ra n ch ier sur les h éritiers R ey n a rd et N a lle t a été réglée à la
som m e de 1 8 4 5 0 fra n cs, et au p aiem en t des frais exposés par le sieur
G ra n c h ie r, ju sq u ’à l ’ép o q u e de 1806 , su r la q u e lle som m e p rin cip ale ila été p récom pté 9,000 fraucs.
G A R R O N , jeune.
A RIOM, D E L ’IMPRIMERIE DE J.-C. S A L L E S , IMPRIMEUR DU PALAIS.
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Reynard. 1818?]
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Garron jeune
Subject
The topic of the resource
assignats
receveur des consignations
créances
ventes
domaines agricoles
receveurs de district
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lettres de change
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Titre complet : Conclusions pour les héritiers Reynard et Nallet, appelans ; contre le Marquis de Strada, intimé ; et contre le sieur Granchier, appelant et intimé.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
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De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1818
1789-1818
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
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The nature or genre of the resource
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BCU_Factums_G2426
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
receveurs de district
ventes
-
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b7629dca42aa7b43038a19aafde27eec
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vtyj.
CONSULTATION
POUR
LES
h é r it ie r s
R E Y N A R D et N A L L E T , Appelans;
CONTRE
I.
M . le M arquis de S T R A D A , In tim é ;
E t contre le sieur G R A N C H I E R , ancien Receveur
des Consignations.
~ ....... ..
j — Q-
L e s SO U SSIG N E S, qui ont pris connaissance du
jugement rendu entre les parties, par le tribunal de
Riom , le 29 janvier 1 8 1 7 , ainsi que des pièces et
mémoires produits, et qui en ont plusieurs fois conféré
entre e u x , ont reconnu que, pour arriver à une solu
tion facile et certaine des questions agitées dans cette
cause, il suff it de fixer clairement, soit les faits demeurés
constans entre les parties, soit ceux qui sont e n litige.
�( O
L e 9 février 1 7 8 1 , le père et la mère du marquis
de Strada affermèrent, aux sieurs Reynard et Nallet,
leur terre de Biiailles, pour dix-huit années, au prix
annuel de 9000 livres.
L es fermiers payèrent, par anticipation, une somme
de 72,000 livres, et firent des réparations que leurs
héritiers portent à plus de 100,000 livres.
Troublés bientôt après dans leur jouissance, les fer
miers firent prononcer la résolution du bail, le
3i août
1787, avec dommages et intérêts.
Leurs répétitions et leurs dommages furent liquidés
en deux fois.
L e 1er thermidor an 2, sentence d’ordre qui leur
alloue une somme de 73,761 liv. 1 sou 6 deniers, et
qui les renvoie à contester et instruire plus amplement
pour le surplus.
L e 16 pluviôse an
5,
jugement qui complète la
liquidation, en leur allouant une autre somme de
68,553
livres 10 sous 6 deniers.
Cependant la terre de Briailles avait été vendue le
22 août 1 7 8 9 , au sieur de Saint-Cyj et le prix, porté
à 3^1,856 livres, avait été déposé ¿ le 24 janvier 1791 ?
entre les mains du sieur Granchier, alors receveur des
. . .
> . . I- •
•.
. I
■ • 11 "
consignations à R i o m , et qui est partie au procès.
Avant ces deux liquidations, et à lajdate du 10 mars
Ï791, les sieurs Reynard et Nallet souscrivirent, en
faveur clu sieur Granchier, deux lettres de change de
5o,000 livres,chacune.
,
1
;
�C3 )
L e 6 avril 1792 le sieur Nallet écrivit au sieur
Granchier une lettre ainsi concue :
« Voici le moment où je dois vous compter, soit
« pour moi , soit pour M. R e y n a r d , la somme de
5
« ooo livres pour Les intérêts échus au 10 mars passé.
« Faites moi le plaisir de me dire en réponse, si vous
« désirez que je vous les fasse parvenir par la messacf gerie ou par la poste, en une lettre de change.
ï Vous conviendrail-il mieux de laisser cette somme
« pour vous porter intérêt à raison de pour 100 l’an?
5
« Pour lors, nous vous ferions passer noire billet. »
L e sieur Granchier ayant fait connaître ses intentions
par une lettre du 28 du même mois, les sieurs Reynard
3
et Nallet y répondirent, le
mai, en ces termes:
« En réponse à l’honneur de votre missive du 28
« expiré, M. Pagès partant pour votre v il l e , nous
« l’avons chargé de vous remettre notre promesse de
« i o , o livres, payable le 10 avril 1793.»
25
Les héritiers Reynard et Nallet expliquent que cette
somme de
i° D e
io,25o
livres se composait :
5ooo liv. pour les intérêts échus des 100,000 liv.
de traites, pendant une année, conformément à leur
lettre du 6 avril 1792 ;
25
a° D e
o livres d'intérêts à échoir, pendant une
année , pour cet le somme de 5ooo livres laissée en
dépôt aux débiteurs ;
3° D e pareille somme de 5ooo livres pour les intérêts
à échoir, d’une seconde an n ée, des 10,000 livres de
lettres de change.
�'2Ç
(
4
)
L e 10 du même mois de m a i, une troisième lelfre
de change de 20,000 livres fut souscrite en faveur du
sieur G ra n ch ie r, non parles sieurs Reynard et Nalle t,
mais par les sieurs Reynard et Pagès.
Enfin, le 6 nivôse an , un compte courant fut ar
3
rêté entre le sieur Granchier et les sieurs Reynard et
Nallet.
I i à , sont rappelées les trois lettres de change.
, L à , sont calculés les intérêts des trois sommes
capitales.
L à , sont calculés aussi les intérêts des intérêts, de
meurés en dépôt entre les mains des débiteurs.
E n sorte que le sieur G ra n ch ie r, à cette é p o qu e ,
se considérait toujours comme créancier des sommes
portées par les trois lettres de change, et des intérêts
qu’elles avaient produits.
Cependant, à côté de ces pièces, vient se placer^
sous la date du 29 mars 1 7 9 1 , un écrit qui n’a été mis
au jour que vingt ans après; qui, au premier coupd’œil, paraît peu en harmonie avec ces pièces, et qui
est devenu le pivot sur lequel roule toute la contes
tation.
Il est ainsi concu :
»
« Je soussigné, faisant tant pour moi que pour
« M. Nallet, mon beau-frère et mon associé, recon« nais avoir reçu de M. Granchier, receveur des conc< signalions, la somme de 1
35,000 livres,
à-compte
«; de celles qui me sont adjugées par des sentences de
la ci-devant sénéchaussée d’A u ve rgn e , et pour les-
�>5/
C5 )
« quelles je dois être colloqué dans l’ordre qui doit
r être fail avec les autres créanciers, des deniers proa venant de la vente de la terre de Briailles, lesquelles
« sommes je promets faire allouer au sieur Granchier.
« Fait
à
L y o n , le
29
mars 1 7 9 1. {Signé)
R
eynard
.
»
L e sieur de Strada prétend que cette reconnaissance
constate un paiement qui aurait éteint les créances des
sieurs Reynard et Nallef.
' Ceux-ci a f f i r m e n t a u contraire, que cette recon
naissance a été antidatée, qu’ elle ne fut ni ne peut
être un paiem ent, mais seulement un gage ou nantis
sement fourni au sieur Granchier, pour sûreté des
sommes qu’il leur avait prêtées.
Les parties conviennent d’ailleurs que la reconnais
sance du 29 mars 1791 se compose des mêmes sommes
qui ont été la matière des lettres de change, circons
tance importante à remarquer.
L e I er thermidor an 2 , intervint une sentence d’ordre
' laquelle ordonna une distribution de 265,927 livres, où
furent compris les sieurs Reynard et N a l le t , pour
73,761 livres. Quant à leurs autres réclamations, il fut
ordonné qu’ une somme de 107,240 livres, restant à
distribuer, demeurerait en dépôt entre les mains du
sieur Granchier, pour fa ire fa c e , s 'il y avait Lieu, aux
autres articles de collocation réclamés par les sieurs
Reynard et Nallet, et a raison desquelles c e u x - c i furent
renvoyés à fa ir e leurs diligences.
Pendant ces procédures, les assignats dépérissaient
de jour en jour. Une loi du 22 messidor an 1 défendit
3
�(6 )
de les employer à des reniboursemens anticipés. Une
autre loi du
3 frimaire
an 4 , prohiba, comme autant
de vols, tous paiemens, mêm e de dettes échues, faits
en cette monnaie; et une loi du 28 ventôsp suivant y
substitua ce papier éphémère qui a été connu sous le
titre de-mandats territoriaux.
Les mandats, à leur t o u r , ou plutôt les promesses
de m andats, qui seules ont existé, cessèrent de circuler,
5
en vertu d’une loi du 16 pluviôse an .
Ce fut ce même jour, 16 pluviôse an , que les sieurs
5
Reynard et Nallet obtinrent un nouveau ju ge m e n t,
mais par défaut, qui liquida le reste de leurs répétitions
à
livres 10 sous 6 deniers, avec intérêts et
63,553
dépens.
Ce jugement n’ayant pu s’exécuter sur les assignats
déposés, qui étaient démonétisés, et dont l’emploi était
depuis long-tems interdit, laissa les sieurs Reynard et
Nallet débiteurs du sieur Granchier, et créanciers du
marquis de Strada.
Les choses demeurèrent dans cette position jusqu en
8 5
l’année i o . :i
Pendant cet intervalle , le
sieur
R e y n a r d m o uru t,
laissant sa succession à ses filles, qui l’acceptèrent sous
bénéiice d’inventaire.
L e sieur de Strada fut aussi représenté par son fils,
h qui il fit donation de ses biens.
Il fallut enfin s’entendre sur la consommation de cette
¿{faire.
D e u x traités furent conclus par les héritiers Reynard
�ty*H"
(7 )
et Nallet, l’un avec M. de Slrada fils, dans une forme
3
régulière, le 2.1 germinal an i j l’autre avec le sieur
Granchier, en 1806, mais par convention verbale,
d ’a b o r d , et ensuite par correspondance.
Les différends qui furent la matière de l ’un et de
l ’aulre, méritent une attention particulière.
Ceux qui donnent lieu à la première transaction ,
sont constatés par l'acte m êm e; on y lit : :
• « Que les assignats consignés n’avaient pu périr que
«pour le compte des créanciers;
1
•« Que M. de Strada pouvait encore contester la
«• quotité des indemnités adjugées par la décision du
« 16 pluviôse an . »
5
Pour terminer ce différend , les parties conviennent
que la créance des sieurs Reynard et Nallet liquidée
à
68,553
livres 10 sous 6 deniers, en principal, et les
intérêts éclius de cette somme depuis environ n e u f an
nées , sont réduits à moins de moitié , c’est-à-dire ,
5
à 47,250 francs, dont i ,ooo francs furent payés comp
tant en espèces, le reste en lettres de change acquit
tées plus tard.
D ’après cette composition, « Les parties déclarent
« qu’elles se désistent respectivement de toutes, de* mandes et répétitions.quelconques, à raison du bail
« de la terie dt^ Briailles, des fermages d ’ic elle, ainsi
que des contestations, indemnités, frais, perles d ’as« sig na t c nsig né s., et pitres objets y relatifs, énoncés
« on non en ces dites présentes. E u conséquence, tous
�(3 )
«• procès nés ou à naître, sont et demeurent éteints
<*• et terminés. »
. Voilà le traité du marquis de Strada.
Voici celui du sieur Granchier.
Les discussions qui le provoquèrent avaient poiK1
objet la réduction à faire en argent, des sommes qui
restaient dues au sieur Granchier, et qui consistaient
en assignats plus ou moins dépréciés.
Il parut se fixer d’abord à une somme de i ,ooo f.
5
en espèces, sur laquelle il reçut bientôt après 9000 fr.,
et ne demeura créancier que de 6,000 francs; mais par
deux lettres postérieures, l’ une en date du 26 a v r i l,
l ’autre du
mai 1806, il porta ce solde à 9,460 fr.,
3
qui furent mis à sa disposition chez un banquier à
R i o m , mais qu ’il ne paraît pas avoir retirés.
Ainsi semblait irrévocablement consommée la libé
ration respective, lorsqu’une nouvelle contestation toutà-fait inattendue, est venue remettre en question tout
8 5
ce qui avait été réglé en i o et 1806.
Ce procès a pris naissance dans une demande portée
en conciliation, le 7 juin 1808, par le marquis de
Strada, contre le sieur Granchier, et ensuite devant le
tribunal de R i o m , le 24 août 1809, et qui avait pour
objet la reddition du compte des sommes consignées,
en 1791, au sieur Granchier.
L e sieur Granchier, à son tour, met en cause les
héritiers Rey nard, et leur demande, soit leur quittance,
soit la remise des pièces justificatives de leur collo-
�(9 )
L e sieur Nallet décède dans ces circonstances , et
l ’instance est reprise par ses héritiers.
Après quelques combats de p ro céd u re, inutiles à
rappeler, le sieur de Strada eut connaissance de l’acte
du 29 mars 1 7 9 1 , dont les bériliers Reynard et Nallet
avaient ignoré le contexte, mais qui, au moment où
le sieur Granchier reçut 9000 francs, fut déposé par
lui en mains tierces, pour êlre rendu à ces héritiers
lorsqu’ils compléteront les i ,ooo francs convenus. L e
5
sieur de Strada s’en empare, prétend y trouver une
quittance qui l’aurait libéré, par anticipation, envers
les sieurs Reynard et Nallet, pour qui seuls dès-lors
auraient péri, selon lui, les assignats consignés.
Il en conclut que c’est par erreur qu’il a promis et
payé
, o francs, suivant le traifé du 29 germinal
an i .
Il préten d, en conséquence, faire tout à-la-fois
3
47 25
annuller et maintenir le traité, le faire annuller quant
au paiement, le faire maintenir quant à la réduction
de sa delle.
Ce n’est pas tout.
11 remarque que les deux collocations obtenues par
les sieurs Reynard et Nallet, ne s’élèvent en se m b le,
d’après cette réduction, qu’à 121,011 francs; que la re
connaissance est de 1 ,ooo fr., et il réclame 13,989 fr.
pour cet excédant.
35
L e sieur Granchier, qui, dans le principe , n ’avait
appelé les tiers Reynard que pour déclarer s’ils avaient
reçu la somme allouée par la première collocation, fait
�( IO )
V
connaître alors le véritable but de la mise en cause, et
réclame contre les héritiers Reynard et Nallet la tota
lité de ses créances, sous la seuleimputation des sommes
reçues; comme si, indépendamment des conventions
faites entre lui et ces héritiers, ceux-ci avaient pu tout
à-la-fois compter du montant de la reconnaissance de
1791, et à lui et au marquis de Strada.
C ’est dans cet état, et à la date du 29 janvier 1 8 1 7 ,
que les parties ont paru devant le tribunal civil de
Riom.
L a réclamation personnelle du sieur Granchier fut
accueillie par une disposition générale de hors de cou r,
qui ne parut pas même mériter d’être motivée.
Il n’en fut pas de même des demandes du marquis
de Strada.
L e tribunal crut reconnaître :
Que la somme de i
35,ooo
francs, supposée, reçue
par les sieurs Reynard et Nallet du sieur Granchier, en
1791 , était un paiement anticipé des collocations
qui leur furent faites dans la suite, non un simple
prêt ,*
Que cette somme provenait des deniers consignés,
n c n des propres fonds du sieur Granchier;
Que le marquis de Strada, en allouant à Granchier
la somme entière de 1
35,000 francs, se la
rendait pro
pre, et avait clroit de s’en emparer ;
Que les deux collocations, faites aux sieurs Reynard
et Nallet, ayant été réduites à 121,011 francs par le
�traité de l’an i
3,
cable;
Que dès-lors,
( n
)
le traité en ce point était irrévo
leurs héritiers
devaient
restituer
13,929 francs, exigés en excédant de leurs allocations,
et les 47,2Ôo francs qu’ils avaient reçus, et qui n’étaient
pas dus;
Mais que ces héritiers, étant de bonne foi, et ayant
ignoré l’acte du 29 mars 1791, ne devaient les intérêts
que depuis la demande.
Il furent en conséquence condamnés au paiement
des deux sommes.
T e l est le jugement sur lequel on demande l’opinion
des jurisconsultes.
Les soussignés se sont convaincus, en méditant les
faits et les pièces, que la transaction de i8 o 5 aurait
seule dû suffire pour imposer silence au marquis de
Strada, et que rien n’a pu autoriser les premiers juges
à le relever des engagement qu’il y a pris.
Ils sont encore demeurés convaincus que ce traité
ne se recommande pas seulement à la protection des
magistrats, par l’autorité que la loi y attache, mais
qu’au fond, l’acte, daté du 29 mars 1 7 9 1 , n’étant
point un paiement qui ait libéré le marquis de Strada,
et dont il puisse s’emparer, les stipulations de la tran
saction ne le lèzent point. Et enfin, ils sont d’avis que
ce qui doit achever la démonstration du niai jugé ,
c’est l’oubli des notions les plus élémentaires sur les
transactions, qui a été poussé par les premiers juges
jusqu’à leur, faire diviser un acte indivisible de sa na-
�( 12 )
ture, pour le confirmer seulement dans les poinls favo
rables au sieur de Slrada, et l’annuller dans ceux qui
lui étaient contraires; tandis que, dans l’opinion même
adoptée par les premiers juges sur l’ensemble de l’af
faire, ils ne pouvaient toucher à la transaction de Tan
3
i , sans rannuller*ên entier, et sans remettre les par
ties au même état où elles étaient auparavant.
Trois propositions que nous allons développer.
PREMIÈRE PROPOSITION.
Que la transaction de Can, i
3
8 5
( ou n avril i o ) ne
peut, en aucun c a s , être attaquée.
D e tous les contrats autorisés pour assurer les intérêts
privés, il n’en est point de plus importans et de plus
respectables que les transaclions sur procès nés ou ¿1
naître. Destinés à prévenir ou à faire cesser les con
testations qui trop souvent divisent les citoyens et
troublent les familles, ces actes ont toujours été con
sidérés comme un des premiers élémens d ’ordre et de
paix dans la société civile; c’est là que les préventions
se dissipent, que les animosités expirent, que les for
tunes se fixent ou se consolident; c ’est là que chacun,
faisant une part aux incertitudes et aux risques, tem
père ses prétentions par ses craintes, substitue son
propre jugement aux chances de celui que le magistrat
�( .3 )
pourrait prononcer, renonce, eh un mot, à d’incer
taines espérances, pour'des avantages certains.
A in s i, concessions pour concessions, sacrifices pour
sacrifices, voilà toute la théorie des transactions.
Les lois les ont investies, dans tous les tems, de la
plus grande protection. Soit qu’on les conclue sur un
procès existant, de Lite incerta, ou en considération
d’un procès à naître, propter timorem Litis; soit qu’elles
aient pour objet de régler le sort d’un jugement déjà
rendu, mais soumis à l’a p p e l , s i appellation s it, la
loi leur accorde toute l’autorité d e là chose jugée; plus
de lésion à alléguer, point d’erreur de droit à proposer,
plus de recours : tout est consommé, s’il n’y a eu ni
violence, ni fraude, ni erreur de fa it.V e u importe que
de grands sacrifices aient été consentis pour de faibles
molifs : la loi ne mesure point l’autorité de la transac
tion sur la force et l’étendue des considérations a u x
quelles ont pu céder les contractans; il suffit qu’ils aient
eu un motif quelconque de transiger, pour que la
transaction soit irrévocable : Receptum est ut transac~
tionibas pro modico magna am ittamus. Leg. 8 , cod.
de transact.
Dans le droit romain, la transaction était assimilée
à un jugement en dernier ressort : N on minorent auctoritatem transactionu/n , quàm rerum jud ica taru m
esse3 rectâ rahone plaçait. Leg. 20, cod. de transac.
56
L ’ordonnance de i o s’était emparée de cette doc
trine, et n’admettait aucune restitution, entre majeurs,
�( i4 )
quelle que fût la lé sio n , s’il n’y avait eu ni d o l , ni
violence.
2 52
L e Code civil, article o , consacrant les mêmes
principes, décide aussi que les transactions ne peuvent
être attaquées pour cause d ’erreur de droit, n i pour
cause de Lésion.
Com ment les premiers juges ont-ils donc pu m é
8 5
connaître l’autorité de la transaction du 11 avril i o ,
au point d’ordonner la restitution des sommes reçues
ou conservées par les héritiers R e y nard et lesieurNallet,
en exécution de cette convention? C ’est ce que l’on ne
peut comprendre.
D ’a b o r d , aucun e action de répétition n’est jamais
ouverte pour une somme donnée en vertu de transac
tion; c’est la disposition textuelle de la loi
23 ,
cod. de
transact., ainsi conçue : C uni ja m questionem tran
sa c tio n decisam , et à te d a ri placitam numeratani
pecuniam proponas, h u ju s indebiti solutc prœtexta
improbe tibi petitionem decerni postulas.
M ê m e décision dans la loi
, § 1, ff. de cond. ind.:
et quidem quod transactionis nomine datur, iicet res
65
nulla media fu e r it, non repetitur.
L a raison qu’en donne le législateur est que, s’il y
a eu contestation, le désir d elà terminer est une cause
suffisante pour la transaction : Nam si iis f u i t , hoc
ipsum quod à Lite disceditur causa videtur.
Et telle était bien la condition respective des parties:
d’un c ôté , les sieurs Reynard et Nallet réclamaient le
paiement des 68,000 livres qui leur avaient été allouées
�par le’ jugement du 16 pluviôse an
5,
avec les intérêts
des huit années et les frais; de l’au tre , le marquis de
Strada prétendait contester et la quotité de l’adjudi
cation.. én menaçant de relever appel du jugement
qui l’avait liquidée, et la totalité de la créance ellemême, én soutenant que les assignats consignés avaient
péri pour le créancier. C ’est en cet état que le marquis
de Strada, pour s’affranchir d’une répétition de plus
de 100,000 livres, paye
, o livres. C ’est en consi
47 25
dération de cette composition, que les parties se d é
sistent réciproquement de toutes autres demandes et
répétitions a raison du bail de La terre de BriaiLLes,
des pertes d ’assignats consignés, et autres objets y
reLa tifs.
Voilà bien tous les élémens d’une transaction : sa
crifices pour sacrifices, concessions pour concessions ;
voilà bien le cas de dire que tout ce qui a été promis en
considération d’un procès à terminer, fut légitime et
irrévocable : hoc ipsum quod à Lite disceditur. V oilà ,
sans contredit, l’occasion la plus favorable qui fût ja
mais de décider que ce qui a été payé en vertu d’une
transaction si sérieusement motiv ée, ne saurait, en
aucun cas, se répéter : quod tra n sa ction s nomine datur, non repetitur.
Mais il faut aller plus loin.
Quel a élé le molif qui a déterminé les premiers
juges à ordonner la restitution de la somme payée en
vertu de la transaction? C ’est la découverte supposée
faite, depuis la transaction, de celte reconnaissance du
�'
( i6 )
29 mars 1 7 9 1 , laquelle, suivant e u x , avait éteint d’a
vance les adjudications qui devaient être ultérieurement
faites aux sieurs Reynard et Nallet.
Mais sans chercher à pénétrer s’il s’est mêlé beaucoup
de loyauté dans la prétendue découverte, il eût dû
suffire aux premiers juges de remarquer que la décou
verte d’une pièce depuis la transaction, est un cas expres
sément prévu par la loi, et qu’il ne donne point lieu
à rescision.
**\
C ’était déjà ce que décidait l’ancien droit : sub prætextu instrum enti postreperti, transactionem bonâJide
fin ita m rescindi, ju r a non patiuntur. Leg. 19. cod. de
transact.
L a loi 29 allait plus loin; elle ne permettait pas
même de recours contre une transaction générale, dans
le cas où l’une des parties, après la transaction, dé
couvrait des espèces ignorées au tems du traité ; sub
prœtextu specierum post repertarum.
L e code c i v i l , article 2067 , décide aussi que les
titres qui auraient été postérieurement découverts, ne
sont point une cause de rescision, à moins qu’ ils riaient
été retenus par le f a i t de Cune des parties.
O r , ici il a été formellement reconnu au procès et
même parles premiers juges, que «les héritiers Reynard
« et Nallet n’ont point eu connaissance de cet acte (du
8 5
« 29 mars 1791 )> avant la transaction du 11 avril i o ;
« qu’ils ont pu croire qu’ils étaient encore créanciers
«du marquis de Strada; qu’ils doivent être considérés
» comme ayant reçu seulement par erreur.*
�w
( 17 )
Ce fait si décisif se vérifie même par les instructions
que leur fournit le sieur Granchier sur cette affaire ,
dans une lettre du 12 thermidor an 8.
« Je viens, disait-il au sieur Pagès, mari de l’une
« des trois sœurs, je viens vous parler de la créance
« que vous et vos cohéritiers avez contre M. de Strada ;
«• J e doute que vous en connaissiez les détails : « et il
avait raison.
Il entre ensuite dans des explications fort étendues
sur la cause des deux collocations, sur le sort qu’elles
avaient e u , sur les sommes que M. de Strada restait
devoir aux héritiers Reynard et N a lle t, sur celles enfin
qu’ils redevaient eux-mêmes au sieur Granchier.
Puis il continue ainsi : « Instruisez vos cohéritiers de
« vos justes prétentions contre M. de Strada. Ils sont
«■assez éclairés pour sentir que Cexcédant qu’avaient
»reçu M M . Reynard et Nallet, était une avance de
« ma part. »
Cet excédant n ’est autre chose que ce qui a été fourni
en sus des 78,000 livres adjugées en l’an 2 , et compen
sables à cette époque.
Or, si le sieur Granchier, maître de la reconnaissance
du 29 mars 1 7 9 1 } soit qu ’elle eût été ou n’eût pas été
mise en dépôt, n’en dit pas un mot dans ses instruc
tions ; si le sieur Granchier considère les sommes comp
tées par lui aux sieurs Reynard et Nallet, non comme
un paiement mais comme 1111e avance, comme un
prêt, dont il fut encore créancier; s’il regarde les hé
ritiers Rfvnnrd et Nallet comme créanciers eux-mêmes
3
�c
IS )
da marquis de Strada; s’il leur donne tous les détails
renfermés dans sa lettre, il est indubitable que les héri
tiers Reynard etNallet ignoraient comme le marquis de
Strada lui-même, l’existence de l’acte du 29 mars 1 7 9 1 ,
8 5
en traitant le 11 avril i o , et qu’ils agissaient tous
avec une égale bonne foi.
L a découverte de cet acte du 29 mars 1791, ne sau
rait devenir une cause de rescision de la transaction.
Il faudrait qu’il eût été retenu par le fait d'une des
parties, et il est assez avéré qu ’aucune fraude de celte
nature ne peut être imputée à ceux qui ont traité. L e
jugem ent de prem ière instance en a'rnême rejelté la
supposition; ainsi une pareille imputation ne saurait
être reproduite utilement.
L a transaction étant ainsi maintenue, toutes les con
damnations prononcées contre les héritiers Ileynard
et Nallet, demeurent sans prétexte.
Et cependant telle est la condition des héritiers ,
que fussent-ils même privés du secours de celle tran
saction, il serait impossible de considérer comme ac
quittée, en vertu de l’acte du 29 mars 179 1, la seconde
collocation qu ils ont obtenue, et a l exemple du liiburiül
civil, de tenir le marquis de Slrada pour libéré de te lle
seconde collocation envers eux. Cel le discussion sera
le sujet de la seconde proposition que nous avons subsidiuirement annoncée.
�( i9 )'
DEUXIÈME
PROPOSITION.
L 'a cte du 29 mars 1 7 9 1 , ne peut être considéré
comme un paiement, et n a pas Libéré Le sieur de Strada.
envers Les sieurs Reynard et Naliet.
L ’acte de 1791 n’a jamais pu servir à libérer le mar
quis de Strada.
On ne l’a pas voulu.
On ne l’aurait pas pu.
M. de Strada n’aurait pas droit de s’en prévaloir.
i° On ne l’a pas voulu.
Première époque, 10 mars 17 91 : c’est celle d'un
premier versement de 100,000 livres, fait par le sieur
Grancliier aux sieurs Reynar d et Naliet; mais ce ne
fut pas à titre de paiement, et par une quittance à
imputer sur les sommes consignées que les 1 00,000 liv.
furent remises, ce fut à titre de prêt et sur deux Lettres
de change remboursables dans une année avec intérêt.
D euxièm e époque, avril et mai 1792 : prorogation
du prêt de 100,000 livres pour une année ; compte des
intérêts échus et à échoir ; compte encore des intérêts
d ’intérêts ; promesse par les sieursReynard et Naliet au
sieur Grancliier de i o , 2 5 o livres pour le produit total
de ces intérêts accumulés. Un versement qui produisait
des intérêts n’était pas un paiement, dans l’intention
des parties.
Troisième époque, 20 mai 1792 : nouvelle lettre de
change de 20,000 livres, opération d’autant plus exclu
�( 20 )
sive de toute supposition d’un emploi de fonds con
signés, que cette traite, ouvrage particulier des sieurs
Reynard et Pages, dont’ Tun n’avait rien à prélendre
dans les fonds consignés,
Nallet.
était étrangère
Quatrième époquey 6 nivôse, an
3
au sieur
: compte courant
arrêté entre le sieur Granchier et ses débiteurs; calculs
d ’intérêts jusqu’à ce moment.
O r , tout ce qui s’est fait à ces quatre époques est
virtuellement exclusif de toute idée de paiement ou.
d’emploi de fonds consignés.
Si les parties avaient eu l’intention de disposer des
deniers consignés, en acquittement du sieur de Strada,
et en imputation sur la créance des sieurs Reynard et
Nallet, ceux-ci se seraient présentés comme créanciers,
et ils ont agi comme débiteurs! Ceux-ci auraient exigé
des intérêts, et ils en ont au contraire promis! Le sieur
Granchier à son tour eût stipulé et payé comme dé
biteur, et il a agi comme prêteur, et il s’est fait allouer
des intérêts, même des intérêts d ’intérêts comme
créancier!
L'intention des parties ne fut donc point de disposer
des sommes consignées : c’est un point de lait qui jus
que-là paraît plus clair que le jour.
Ou serait la raison de douter? Elle serait dans l’écrit
qui, sous la date du 29 mars 1791, semble se mettre en
contradiction avec toutes les autres pièces, et exprime
positivement que les sieurs Reynard et Nallet entendent
�( 21 )
imputer et promettent de faire allouer au sieur Grancliier la somme de i
35 ,ooo
livres reçue par enx : qui
l’emportera de ces pièces contraires? Comment se re
connaîtra la véritable intention des parties?’ 1
L a difficulté n’est qu’apparente ; au moindre examen
elle s’évanouit.
• cj
On pourrait d’abord remarquer que., même en don
nant la préférence à l’écrit du 29 m a r s ' 1 7 9 1 , il serait
impossible de justifier la sentence des premiers juges et
les prétentions de M. de Strada.
En effet, la somme de 1
35,000 livres
ne se compose
pas tout entière de versemens faits par le sieur Grancliier aux sieurs Reynard et Nallet.
Il faudrait au moins en retrancher les intérêts portés
aux comptes des sieurs Reynard et N alle t, et qui n’ont
pu profiter au sieur de Strada, dont les fonds consignés
11e produisaient point d’intérêts pour lui, et qui en
devaient, au contraire, porter à‘ ses créanciers.
Il n’y avait donc, dans les 1
35,000 livres
énoncées
en l’acte du 29 mars 1791 , que les capitaux prêtés
d’abord par les lettres de change qu’il remplace, qui
eussent pu fournir le prétexte d’une imputation sur
les sommes consignées; alors même les héritiers R e y nard et Nallet eussent encore été créanciers du marquis
de Strada, soit en principal, soit en in térêts, d’ une
somme à peu près équivalente à celle pour laquelle
ils ont transigé, et non ses débiteurs des 13,989 francs
adjugés.
Ainsi, dans la supposition la plus favorable au mar-
�( 22 )
quis de Strada, il n’y avait pas même de prétexte de
lai accorder la restitutionqa’il a ob tenu e,d e 47,260 fr.,
et encore moins le remboursement de 13,989 fr. pour
le prétendu excédant supposé, exigé au-delà des col
locations.
Mais c ’est trop se prêter à une supposition chimé
rique; il faut remettre les choses à leur place, et as
signer son vrai caractère à l'acte du 29 mars 1791.
,
Ce caractère est celui d’un écrit simulé comme
quittance, et qui n’a été autre chose, dans l’intention
des parties, q u ’un gage ou nantissement accordé au
sieur G ran ch ier, pou r sûreté de ses avances.
Il était simulé, puisqu’il représentait une somme de
20,000 fr. non reçue par la société Reynard et N a lle t,
mais par les sieurs Reynard et Pagès en particulier,
dont l’un était étranger à la consignation.
Il était simulé, puisqu’il représentait des intérêts
accumulés, et que si les sieurs Reynard et Nallet avaient
agi comme des créanciers qui recevaient, non comme
des débiteurs qui avaient emprunté, c’est à eux qu ’on
eût pu devoir des intérêts; ce n’est pas eux qui en
auraient promis.
Il était .simulé, puisqu’il comprenait des intérêts
non dus le 29 mars 1 7 9 1 , et échus beaucoup plus tard.
Il était simulé, puisqu’il était incompatible avec tous
les autres actes qui ont reçu le jour pendant cinq an
nées, a,vec des lettresde change, desbillets, descomptes
d’intérêts de sommes prêtées, toutes pièces inconci
liables avec la supposition d’un paiement réciproque
-
�agréé, et qui portent l’empreinte d’une parfaite bonne
foi.^
^
L ’acte était môme antidaté.
En'effet', le sieur Granchier n'avait versé, le 29 mars
1791 , que 100,000 livres; il n’a été créancier de
1 ,ooo livres qu’en Tannée 1 7 9 3 , par la cumulation
des 100,000 livres de let tresde change fournies en 179 1,
des 20,000 livres de la lettre de change fournie le 20
mars 17 9 2, des i o , o livres dantérêts, ou intérêts
35
25
des intérêts, convertis en billet dans le mêm e mois de
mars, et de quelques intérêts échus depuis cette der
nière épo que, et 110a réglés auparavant.
L ’antidate est donc évidente.
Si d’ailleurs, il était nécessaire de fixer la vraie date
de la p ièce , 011 pourrait choisir d eu x époques a vec une
égale vraisemblance.
L ’ une serait celle de l’année 1 7 9 3 , c’est-à-dire du
premier moment où le prêt se serait élevé à i
,000 liv.,
35
au 20 mars 1 7 9 3 , en vertu de trois lettres de change,
et du billet qui existaient alors; on pourrait raisonna
blement. penser que l’acte a été souscrit aussitôt q u e ,
par des échéances d’intérêts postérieurs au 20 mars
17 9 3 , la dette s’est portée aux i
35,ooo
fr.
8 5
l/autre serait celle du compte du 11 avril i o . Les
parties s assemblaient alors, examinèrent, et fixèrent de
concert leur situation; c ’était le m om ent de compléter
leurs arrangcmens, et de donner au sieur Giancliier
les sûretés qu’il pouvait désirer. H est vrai q u e , dans
l’aclc de 1 7 9 1 , on parle de jugemens de collocation
�( ^4 )
comme non encore rendus, et qu’à l’époque du compte
3
de l’an , il en existait un sous la date du i er ther
midor an 2; mais on a pu aisément tenir ce langage
après coup, en raisonnant, comme on l’a fait, par
antidate.
Quoi qu'il en soit de l ’époque,' il demeure toujours
avéré que l’acte du 29 mars 1791 ne peut être sincère
ini à cette date,' ni à raison de son contenu,
Cet acte ne pouvant être admis comme quittance
35
de i
,ooo livres à la date du 29 mars 17 91’, qu’esl-il
donc? C’est ce qu’il faut chercher; car la loi s'attache
moins h la form e et aux expressions d’un acte, qu'à
. son esprit : l n contractcùus rei veritas, potliis quàm
scriptura perspici debet. Leg. 1, cod. plus, valere quod
agitur.
Cet acte ne pouvait être qu ’un gage , un nantisse
ment éventuellement fourni par les emprunteurs à leur
créancier.
Il est évident que le receveur des consignations
voulut ajouter aux sûretés que lui présentait la fortune
des personnes , un nantissement éventuel des fonds
qu’elles pourraient avoir à prélever un jour sur la con
signation, et que les fonds consignés étant entre ses
mains, il voulut s’assurer au besoin la ressource d’une
compensation conventionnelle, ou, si l’on v e u t , d’une
délégation sur ces fonds.
Il n’est pas moins évident que lesemprunteursavaient
intérêt à leur tour d ’aflecter leurs futures collocations
�( 25 )
à l’extinction de leur dette, et qu’ un' virement facile
leur convenait mieux qu’ un, remboursen^ent efîectif.
L'acte dalé du 20 mars 1 7 9 1 , ne.fut donc fju’ une
mesure de précaution, un vrai gage fourni au prêteur.
E t , on le répète, il peut d’autant rnoinst être consi
déré com m e un paiement réel et définitif de i ,co o fr .,
35
q u ’à c e lle époque les sieurs Reynard et Nallet n ’avaient
encore reçu que 100,000 livres.
Cetle seule mise en compte des intérêts suffirait
pour fixer péremptoirement la commune intention des
parties; car, on le répète, si les sieurs Rey nard et Nallet, en recevant les 100,000 livres du sieur Granchier,
avaient entendu recevoir leur propre chose, au lieu
d ’un prêt, ils n’en auraient pas payé l’intérêt, et le
sieur Granchier ne l’aurait pas exigé;
[•
On est donc bien fondé à dire :,Les remises de fonds
faites par le sieur Granchier aux deux associés, n’étaient
pas un paiement ; elles ne l ’ont 'pas voulu.
Et elles ne l’auraient pas pu.
Toute remise de fonds n’est pas un paiement; il s’en
fait à titre de prêt, à titre de dépôt, à d’autres titres
encore.
Chaque remise de fonds tient de la nature de6 choses^
comme de la loi, un caractère qui lui est propre, et
qui ne dépend point des imaginations o u des préten
tions ultérieures des parties.
Il y a dépôt général, lorsqu’une personne reçoit la
chose d’autrui, à la charge de la garder et de la res
tituer. (Code civil, art. 1915.)
**■.-
^
4
�( *6 )
Il y a prêt, lorsqu’une personne remet à une autre?
une somme d’argent que celle-ci peut appliquer à son
u s a g e , et qu’elle doit rendre ensuite, avec ou sans
intérêts.
L e paiement, dans le sens où nous devons ici envi
sager cette matière, n’a aucun de ces caractères; il
n’est autre chose que l’acte par lequel on se libère d ’une
obligation qu’on a contractée : SoLvere dicim us eum
qu i fe c it quod facere promisit ( i) ; ou, en d’autres
termes, une restitution faite par l’emprunteur, d’ une
somme qu’il a reçue du prêteur, ou pour son compte.
- U ne observation importante à faire à ce sujet, c’est
que la loi reconnaît moins la libéralion dans la numé
ration et le mouvement des espèces, que dans l’extinc
tion du lien c i v i l , vinculum j u r i s , c ’est-à-dire de
l ’obligation qui a été contractée r Solutionis verbum
pertLnet a d omnem liberationem quoque modo^factum '
magisque a d subslantiam obligationis re/ertur, quàrn
a d nummorum solutionem (aj.
A quels
paiement?
appartient
justement
reçue.
j
signes la loi peut*elle donc reconnaître urt
C ’est lorsque la chose donnée en paiement
à celui qui en a disposé, et qu’elle se trouve
et irrévocablement acquise à celui qui l’a
Pour que ces -deux circonstances concourent, il faut
donc nécessairement que celui qui paye soit maître de
.A ■ t
'
(1) Leg. 1)6',Jf. deverb. signe/.
(2) Lcg. 6, 4, Jf. de solut. et Liber,
.
;
•
�27
(
)
la chose payée, et puisse en conférer une véritable et
légitime propriété à celui qui la reçoit Ce principe.,
attesté parPothier ( i ) , est tiré de cette loi si naturelle,
que nul ne peut transférer à autrui une propriété qu’il
n’a pas : Nemo plus ju r is a d alium transferre polest
quàm ipse kabet (2). Il n ’y a point, en effet, de pro
priété transférée , si elle peut être évincée : Q uod
evincitur in bonis non est ( ).
3
Ce sont les mêmes maximes qui ont été mises en
action dans cette disposition du Code civil (4) : P ou r
payer valablementy il fa u t être propriétaire de la chose
donnée en paiement, et capable de l’aliéner.
Voilà les principes.
11 ne reste donc plus qu’à savoir si le sieur Granchier
était propriétaire des fonds consignés, et supposés payés
le 29 mars 1 7 9 1 , et s’il était capable de Les aliéner.
Propriétaire? On ne le prétend pas; il n ’était que
c o s ig n a t a ir e , séquestre.
Comme séquestre ou c o s ig n a t a ir e , était-il capable
d ‘aliéner les fonds déposés dans sa caisse? Pas davange.
Autre chose est prêter, autre chose est payer ou
aliéner.
Si le sieur Granchier n’a fait que confier ses propres
fonds aux sieurs Reynard et Nallet, comme il l’a for-
(1) Traité dei Obligations, no* 45g et S07.
(2) Leg. S4 , j r . de reg. ju r.
(3) Leg. 190, J f. cod.
(4) Article 1238.
�( 28 )
mellemènt
so u ten u
dans sa lettre de Tan 8, et dans son
Précis im prim é, de l’année 1814, page 8, cetle opéra
tion est totalement étrangère au marquis d e S lra d a , et
à ¡’affaire de la consignation; en ce cas, le procès n’a
pasimême de prétexte.
S’il a opéré avec les ionds consignés, M. de Strada
'ne'peut pas mieux s’ en prévaloir, et voici pourquoi.
Les receveurs des consignations étaient autorisés,
c om m e chacun sait, ¿1 prêter les deniers corisignés, et
à retirer a leur profit l’intérêt légal de ces prêts; M. de
Strkda'eri est convenu dans sa requête d’intervention.
Cette faveur ^ contraire aux lois générales reçues en
matière de dépôt, leur fut accordée en considération,
d it TLacombe (1 ), des grandes taxes qu’ils avaient élé
contraints de payer.
1
Voici en quels termes lès réglemens, cités au procès
par lé sieur Granchier, autorisent de telles dispositions.
« Permettons aux receveurs des consignations de faire
« p r o f i t e r , ‘ ait d enie r-vingt, les deniers qu ’ils ont et
.«■auront ci-après, provenant des consignations, à con« dilion d’en retenir dans leurs coffres suffisamment
<r pour payer les créanciers qui seraient mis en ordre
« sur les deniers, en sqrte qu’il n’y ait aucun retarde« ment au paiement de ce qui sera par eux dû , desquels
« deniers ainsi baillés ils demeureront responsables, et
« tenus de les remplacer toutefois et quantes ils en se« ront requis. »
(1) Jurisprudence c i v ., v° Consignation.
�m
( 29 )
Ainsi, les 100,000 livres remises aux associés le 10
mars 1 7 9 1 , o u ; si Ton ve u t, le 29 du même mois,
provinssent-elles des fonds consignés,' celle circonslauce,
réunie même à l’inlention de payer, au lieu de prêter,
ne suffirait pas pour conférer au Versement le caractère
d’ un paiement légal. Ce fut une disposition faite pour
le compte personnel du sieur Granchier, et qui ne le
libérait pas, puisque les réglemens l’en déclaraient
responsable.
L e receveur des consignations n’est ni maître des
fonds consignés, ni débiteur personnel des prétendans
ou opposans; il n’est, comme son titre l’indique assez,
qu ’un dépositaire passif, qui ne peut agir qu’au signal
que lui donne la justice. L e mot consigner vient de
consignare, qui signifie cacheter, à cause qu’ancienne
ment on ne donnait pas par compte l’argent que l’on
déposait, mais dans des sacs où l’on apposait son cachet.
C ’est ce que nous rappelle Loiseau, en son Traité des
Offices (rj. Cet us age, quoique changé, révèle la
matière du dépôt.
Aussi les réglemens, soit anciens, soit n o u v e a u x ,
n’abandonnent-ils jamais l’emploi des fonds, c’est-àdire les paiemens, à lu volonté des receveurs, ou aux
prétentions des créanciers; il faut toujours que la jus
tice prononce; et ce n’est qu’après sa décision, que le
receveur peut faire un emploi légal et valable.
C ’est là une
doctrine clairement développée an
( 1) Liv. I I , cliap. 6 , nomb. 23.
�( 3o )
nouveau 'Répertoire de jurisprudence, v° Consignation.
On y lit, n° 20 : «• L a forme ordinaire (pour retirer
« les deniers consignés), en fait d’immeubles, cest
« L'ordre du p rix.
t
«■Les prix d’immeubles vendus en direction, sont
* payés aux créanciers, par les receveurs des consigna
it tions, sur ¿es mandtmens des directeurs des créan« ciers. »
Ou y lit, n° a
3 : <r Quant
aux consignations prove-
« nant de choses mobiliaires, on les relire en vertu des
k jugemens qui en font la distribution, ou qui en or« donnent la délivrance. *
D an s l’ancien usage, et suivant les mêmes auteurs,
« les créanciers colloques, soil dans les ordres faits au
« parlem ent, soit dans ceux du C hâtelet, et mêm e
* dans ceux des directions, se présentaient aux recer«- veurs des consignations, avec Les titres ju stific a tifs
« de Leurs créances, de Leurs qualités, etc.
cc Aujourd’h u i , et dans toutes les juridictions, le
« procès-verbal d’ordre reste au greffe, et le greffier
«• délivre, à chaque créancier qui y est colloqué, un
« bordereau de collocation, à la vue duquel la caisse
a d’amortissement, ou son préposé, paye.-" Voye% le
Code de procédure, art. 7 7 1 , et la loi du 28 nivôse
an i
3,
art, 4*
Il faut donc que la justice ordonne de p a y e r , pour
qu ’on puisse opérer un paiement légal; jusque-là les
fonds ne sont point disponibles dans les rapports res
pectifs des intéressés, et toutp distraction qu’on en peut
�(3 0
faire ést absolument nulle à l’égard de ces intéressés*
La règle, à cet égard, est si positive, si inflexible,
qu’ un arrêt de règlement, du 26 août 16 7 8 , voulait
qu’avant d’exercer aucune contrainte contre le rece
veur des consignalions, on lui communiquât les pièces
et les litres en vertu desquels on prélendait agir. Il
prescrivait même des formalités particulières pour as
surer la remise fidèle des copies, et pour garantir les
receveurs contre toute surprise. L a même communi
cation est prescrile aujourd’hui, avec de semblables
préçautions, par l'article 4 de la loi du 4 nivôse an i 3 ,
combiné avec Tarlicle 1039 du Code de procédure
civile.
Les auteurs du Répertoire de "Jurisprudence, au
même mot C on signation , n° z 3 , d ’accord avec le
Nouveau Denisart, ajoutent : « Il ne se fait pas tou«• jours un ordre en règle du prix d’une adjudication.
«• Lorsque la somme consignée est modique, le créan«• cier, s’il n’y en a qu’u n , ou celui qui précède les
te autres, s’il y en a plusieurs, demande au ju ge , pour
«• éviter les frais d’un ordre qui diminuerait encore ce
« prix, que, sans qu*il soit besoin d’ordre, la somme
«■consignée soit délivrée, tant à lui qu’aux autres
* créanciers, suivant l’ancienneté de leurs titres. L a
« sentence qui intervient étant remise au receveur des
'’ J •
4*«
•
*
« consignations, il délivre le prix.»
1 è\
Cette modification confirme encore la règle.
'
Nous n’ajouterons plus qu’un m o t; mais ce m o t ,
�(
32
)
toujours tiré du Répertoire de Jurisprudence ( i ) , por
tera au dernier degré d’évidence l'indispensable néces
sité,, non seulement d’un jugement, maisd’ un jugemeut
d ’ordre, seul capable d’auloriser le paiem ent, el d’opérer
la double libération, soit du receveur, soil du débiteur
principal.
« Lorsqu’il y a un ordre, y est-il dit, le receveur
« des consignations ne paierait pas valablement en vertu
te d'autres jugem ens que de ceux qui ju g en t L’ordre,
«• ou de mandemens des commissaires au Cbâtelet, ou
« des directeurs des créanciers. D ’autres jugem ens par<r ticuliers ne seraient point dans la réglé, parce que
« c’est à l’officier n o m m é pour faire la distribution du
« prix, à juger des titres de tous les créanciers, afin
« que chacun soit colloqué en son rang. U n jugem ent
« isolé pourrait ordonner un paiement qui ne devrait
«„pas avoir Lieu, et qui d'ailleurs, ignoré de celui qui
« fait l’ordre, dérangerait toutes ses opérations. •»
C ’est pour cela qu’ un arrêt de rè g le m e nt, du 18 juin
1 6 9 3 , fait défenses aux receveurs des consignations,
de rien payer aux procureurs sur leurs frais, quoique
privilégiés, avant l'a rrêt, sentence, o u jugem ent por
tant liquidation desdits fr a is .
Si des frais reconnus et privilégiés ne peuvent être
payés à un officier public, sans arrêt qui l’ordonne; si
des jugem ens particuliers , autres que le jugement
d’ordre, ne peuvent autoriser aucuns paiemens; si le
( 1) Môme m o l, infime n° 23#
�(
33
)
créancier ne peut valablement recevoir qu’après avoir
notifié le jugement d ’ordre avec toutes les solennités
prescrites, comment se persuader que le 29 mars 1 7 9 1 ,
époque où les sieurs Reynard et Nallet n’éfaient encore
que des prétendans, et n’avaient obtenu aucune adju
dication définitive, le sieur Grancliier eût pu payer
valablement 100,000 livres, ou toute autre somme,
aux deux associés? Comment ces prétendans auraientils p u , à leur tour, recevoir légalement? On n ’a pas
besoin de pousser plus loin ces réflexions.
Ainsi quand il serait vrai, ce que nous sommes loin
d ’admettre, que le sieurGranchier et les sieurs Reynard
et Nallet eussent opéré, le 29 mars 1 7 9 1 , sur les fonds
consignés, et avec intention de consommer un paie
ment légal, tous leurs efforts auraient été inutiles; ils
ne Cauraient pas p u , ainsi que nous l'avons annoncé.
L e sieur Grancliier n’était pas propriétaire des fonds;
il n’était pas capable de les aliener, ou, ce qui est la
m êm e chose, de les appliquer à un vrai paiement, d’en
conférer la propriété aux prétendans qui recevaient.
La loi lui défendait de faire un paiement dans les cir
constances où il se trouvait.
, L e prétendu paiement eût donc été illicite, et conséquemment sans effet.
L e prétendu paiement ne l’eût donc point libéré
envers M. de Strada, si, par l ’événement) les deux
associés avaient été déclarés non créanciers?
L e prétendu paiement n’eût donc point été admis
comme pièce comptable, si le gouvernement lui eût
�( 34 )
alors retiré son emploi, ou lui eûl prescrit le versement
de ses dépôts dans les caisses publiques, comme il en a
usé dans d’autres circonstances.
. ^
L e prétendu paiement n’eût donc pas dispensé les
sieurs Reynard et Nallet de rapporter les sommes em
ployées, soit au sieur Granchier, soit aux caisses pu
bliques, soit h M. de Strada ou à ses créanciers, dans
les suppositions que nous venons de faire.
Un prétendu paiement que ni le sieur Granchier,
ni les sieurs Reynard et Nallet n’auraient évidemment
pu opposer à personne, n’est donc pas un paiement
qu’on puisse, en aucun cas, leur opposer.
Ou plutôt il n’y a plus de paiement, aux yeux de
la loi, que dans l’intention des parties.
• Est-il nécessaire, après cela, de demander à quel
titre M. de Strada vient ici s’emparer de l’acte du 29
mars 1 7 9 1 , quelle qu’en soit d’ailleurs la valeur?
M. de Strada n’était partie ni dans cet acte, ni dans
toutes les autres opérations des sieurs R e y n a r d , Nallet
et Granchier.
M. de Strada n’y était point représenté. Cet acte lui
fut donc toujours étranger : R es inter aUos acta, quæ
altcri nec nocere nec prodesse potest.
On n a pas besoin d insister sur la force et la sagesse
de ce principe : personne ne peut se faire un titre à
soi-même; tout le monde le sait : personne ne peut
donc nuire ù des tiers, par aucune stipulation, dans les
actes où ces tiers ne sont pas appelés.
Par la môme raison, on ne peut pas davantage leur
�(
35
)
conférer, sans leur participation, des droits qu’ils n’au
raient pas. C ’est cette juste réciprocité, cetle récipro
cité négative qui est le fondement très-équitable d e l à
règle res inter altos acta.
i
O r , dès qu’il dépend d’un tiers d’écarter, par la
simple manifestation d’une volonté contraire , toute
stipulation dont il se croirait blessé dans un acte auquel
il n’aurait pas concouru, ou dans un jugement non
rendu avec lui, il est impossible d’admettre qu’il lui
fût permis d’en profiter. Il n ’y a point de lien civil sans
réciprocité, hors un petit nombre de cas qui ne se ren
contrent point dans l’espèce. Dans le droit c o m m u n ,
il n’y a point de contrat, si l’exécution dépend de la
volonté de l’une des parties; il n’y a donc, à plus forte
raison, aucun droit acquis à un tiers par un acte auquel
il n’a point participé, qui ne le lie pas lu i- m êm e, et
q u ’il a droit de désavouer.
Admettre une doctrine contraire, ce serait accorder
au tiers un privilège inoui dans notre législation, et
révoltant par ses conséquences.
Ce qui ne serait pas moins choquant, ce serait de*
voir le marquis de Strada, non seulement s’étayer d’un
acte qu’on n’aurait jamais pu lui opposer, et qu’il eût
lui-même rejeté en plusieurs cas, mais encore faire un
choix dans la foule des actes intervenus entre ses créan
ciers et le dépositaire; adopter l’u n , c ’est-à-dire celui
011 il croirait entrevoir une quittance à ses vues actuelles,
rejeter les autres, c ’est-à-dire les lettres de change, les
billets, les comples, et loutes les pièces qui, au lieu
�(
36
)
d’ un paiement ou d'une quittance , constituent des
prêts ou des obligations : voilà où serait le comble de
l’injustice et de la dérision. Une pareille f a c u lté , si
elle pouvait exister, serait la honte de notre jurispru
dence , le renversement de tous les principes qui ré
gissent les rapports respectifs des citoyens.
Les héritiers Reynard etNallet n’ont point à craindre
une erreur si étrange auprès d’ une Cour aussi éclairée
et aussi recommandable que l’est celle de Riom.
Elle reconnaîtra sans peine :
Que M. de Strada est étranger à tous les actes dont
il s’agit, et qu’il ne pourrait sur-tout les diviser;
Que de droit, comme de fait, ces actes constituent
des prêts, non un paiement.
TROISIÈME PROPOSITION.
On ne pourrait maintenir La rescision de ta transaction,
sans remettre entièrement les choses dans L’état où
eLLes étaient auparavant.
Toutes les stipulations d’un traité sont censées con
senties les unes en considération des autres, et sont
indivisibles. On ne peut en infirmer une partie sans
les anéantir toutes, à moins que, par leur nature et
leur o b je t, elles soient indépendantes les unes des autres;
hors ce cas, on ne peut loucher au contrat sans re
mettre toutes choses en l ’état qu’elles étaient avant
l’acte. C ’est une doctrine consacrée pav une multitude
�( 37 )
de textes de droit, et non moins aisée à justifier par
les simples lumières de l’équité et de la raison.
Il suffit de citer un seul de ces textes, celui de la
loi unique, § Ier, cocl. de reput, quce fiu n t.
Il y est dit que si celui qui est restitué en entier ne
doit souffrir aucun dommage de l’affaire contre laquelle
il est restitué, il ne doit pas non plus en retirer du,
profit j c’est pourquoi il doit restituer tout ce qu’il a
reçu, sous quelque forme que ce puisse être.
Ce principe est appliqué, par cette loi, au mineur
lui-même; il y est dit que si un débiteur a délégué
au mineur, le créancier doit rentrer dans son action
*
contre l’ancien débiteur.
Il y est même dit que si le mineur a commis du dol
en quelque chose, il doit en être tenu.
Voici les termes de la loi : Q u i restituitur in cnteg ru m , sicut in damno morari non debet, ¿ta nec in
lu cro , et ideo quicquid a d eum pervenit, hoc debet
restituer i. Sed etsi intercessor minor 2
5 annis
interve
n a it , in veterem debitorem debet restilui actio • verum
et si quid dolo ejus J a c tu m e s t , hoc eum prœsiare
convertit.
Ce qui est vrai à l’égard du mineur ^ doit être vrai,
¿1 plus forie raison, à l’égard du majeur. Il serait bien
injuste, en effet, que l’une des parties se faisant resti
tuer contre les concessions qu’elle aurait frites, l’autre
partie ne rentrât pas, à son tour, dans celles qu’elle
aurait consenties en vue des premières. H est trop évi
dent que les stipulations consenties par la partie atta-
�( 38 )
quée en rescision, n’ont plus de cause dès que la res
cision est prononcée. Les seuls titres de la plupart des
lois qui gouvernent la matière des rescisions, suffiraient
pour avertir que la rescision remet les choses entières
et telles qu ’elles étaient avant le traité : D e in
grum
restitutionibus.— D e in
minoruni. — D e in
la t a , etc. etc.
in teg ru m
in teg ru m
in te
restitutione
restitutione postu-
Et dans le fait, la position particulière où se trouvent
les héritiers Reynard et Nallet commanderait, avec la
plus évidente justice , leur restitution en entier, si
M. de Strada pouvait l’obtenir pour lui-même.
E n e ffe t , sans rappeler ici tous les élémens de la
transaction et toutes les considérations qui détermi
nèrent respectivement les parties, il suffit d’en saisir
un seul point de v u e ; et le voici:
Les héritiers Reynard et Nallet se présentaient
comme créanciers d’une somme de
68,553
livres en
capital, laquelle, accrue des intérêts échus, se portait
à plus de ioo,ooq francs. U n jugement avait prononcé
cette adjudication.
M. de Strada prétendait, h son tour, qu ’il était en
droit de relever appel de la sentence qui avait accordé
ces
68,553 livres,
et q u e , d’un autre côté, les assignats
consignés avaient péri pour les créanciers.
C ’est sur ces prétentions contraires que l ’on transige.
M.
de Strada donne 47,250 livres pour n’être pas
exposé ¿1 en payor plus de 100,000 ; les créanciers,
�(39 )
à leur tour, se réduisent d e '100,000 liv. à 47,260 liv.,
pour n’être pas exposés à tout perdre.
Assurément il serait difficile de concevoir un traité
plus raisonnable, quelle que soit l’opinion que l’on pût
se former du fond des droits respectifs j et il faudrait
des motifs bien graves pour anéantir une pareille tran
saction.
Quoi qu’il en soit, comment serait-il possible, en
admettant la rescision, de ne pas restituer toutes les
parties dans les droits quelconques qui pouvaient leur
être acquis avant le traité rescindé?
Comment les premiers juges ont-ils p u , en retirant
aux héritiers la somme promise ou payée par M. de
Slrada, pour prix de leurs propres sacrifices, ne leur
pas rendre en même teras les droits., fondés ou n o n ,
qu’ils avaient sacrifiés pour obtenir cette somme? on
ne le conçoit pasr; c ’est une erreur que rien ne peut
expliquer; c’est violer ce principe élémentaire^ base
sacrée de toutes les conventions : D o ut des, fa cio ut
facLas ; c’est détruire la réciprocité, qui seule fait la
validité des engagemens. Un jugement qui méconnaît
des principes aussi sacrés, doit paraître injuste et cho
quant aux esprits les plus faibles. L a Cour royale de
Riom ne le confirmera jamais.
S il était possible qu ’elle maintînt la rescision, elle
admettrait nécessairement alors les parties h faire valoir
leurs droits de la même manière que s’il n’y avait jamais
cîu de transaction.
D u reste, la Cour no sera pas long-tems incertaine
�(
4o
)
dans sa décision. La découverte de l’acfe du 29 mars
1 7 9 1 , que toutes les parties avaient ignoré en traitant,
et qu’aucune d’elles ne retenait ni par dol-, ni autre
m e n t, ne lui paraîtra jamais de nature à produire la
rescision du traité du 21 germinal an i . Elle recon
naîtra sans peine que l'acte même du 29 mars 1 791 ,
3
qui n’est point un paiement, et qui n'avait pu libérer
ni le sieur Granchier envers le sieur de Strada“, ni le
sieur de Strada envers les héritiers Reynard et Nallet,
ne peut ni ne doit profiter, en aucune manière, au
sieur de Strada.
J.
Les héritiers Reynard et Nallet doivent donc at
tendre avec confiance la réformation du jugement dont
ils se plaignent.
A
1 égard
de la demande du sieuroGranchier, les
héritiers Re}7nard et Nallet ne doivent pas en redouter
les effets. Tout concourt à démontrer que les répéti
tions qu’aurait à faire celui-ci, ont été réglées avant
3
le traité de germinal an i .* 11 n'est pas présumable,
en effet, que ces héritiers, avertis par le sieur Gran
chier lui-mêine, qu ’en même tems qu’ils étaient ses
débiteurs, ils étaient créanciers du sieur de Strada, ne
se fussent pas assurés, à l’avance , de ce qu’ils avaient
à p a y e r a l’un, avant de consentir les réductions qu’ils
pourraient faire à l'autre. Cette prélention nese changet-elle pas.en certitude, lorsqu’on voit qu’immédiate
ment après le traité avec le sieur de Strada , les sieurs
Reynard et Nnllet se sont empressés de faire compter an
sieur Grqnchier les premiers 9000 fr., et que celui-ci, h
�( 41 )
l’instant m êm e, a déposé son titre dans les mains de la
personne qui agissait pour les héritiers Reynard? Cette
remise du titre en mains tierces peut-elle être considérée
autrement que com me une garantie des conventions
antécédentes? Il est clair que s’il n’en eût pas existé ,
le sieur Granchier ne se serait pas désaisi de son titre/'
Ce qui achève de déterminer la conviction, c’est le
différend même qui est survenu à l’échéance du terme
où les héritiers Reynard ont dû compléter le prix
convenu.
L e refus fait par le sieur Gran ch ie r, de recevoir la
somme de
63 oo livres,
comme complément du traité,
et son insistance à exiger un supplément de
3 1 5o livres,
ne démontreraient, dans l’acception la plus favorable
pour lui, autre chose, si ce n’est qu ’il y aurait eu un
malentendu de sa part avec l’intermédiaire des héri
tiers Reynard, sur le-plus ou m oin s; mais il résulte
de l’ensemble1 de ces circonstances, la preuve invin
cible de l’existence d’une convention préalable.
Ainsi les héritiers Reynard ayant mis à la disposi
tion du sieur Granchier la somme de 9460 francs,
réclamée par lui comme son u ltim a tu m , le contrat a
bien été, celte fois , irrévocablement f o r m é , et le
sieur Granchier doit être déclaré non recevable dans
ses prétentions nouvelles.
A u surplus, comme on croit ra v o ir démontré dans
T le cours de la consultation, l’acte sous la date de 1791
est évidemment simulé; il ne pourrait donc, dans aucun
cas^.servir de base pour arriver,à un règlement çlè
6
�(
42
)
compte. L e sieur Granchier n’était plus créancier des
auteurs des a p p e la n s , que par compte courant. L e
dernier qui a fixé leur position respective, est l’arrêté
du 6 pluviôse an
3.
Ce serait de cette époque qu’il
faudrait partir pour opérer le règlement définitif, con
formément à la loi du 6 nivôse an 6. Sous ce rapport,
le sieur Granchier ne serait pas aussi avantageusement
traité qu'il l’a été par la convention faite entre les
parties. Ainsi, quel que soit le point de vue sous lequel
on envisage ses prétentions, elles sont dénuées de fon
dement , et on ne peut que s’étonner qu’il se soit
déterminé à les former.
Délibéré à L y o n , le 2 avril 1818.
S ig n é s, J. G U E R R E .
GRAS.
PICHOIS
MENOUX.
D. SEGAUD,
A'RIOM,
DE
L’IMPRIMERIE DE J.-C.SA LLES, IMPRIMEUR DU PALAIS.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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A name given to the resource
[Factum. Reynard. 1818]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guerre
Gras
Pichois
Menoux
Segaud
Subject
The topic of the resource
assignats
receveur des consignations
créances
ventes
domaines agricoles
receveurs de district
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour les héritiers Reynard et Nallet, appelans ; contre M. le Marquis de Strada, intimé ; et contre le sieur Granchier, ancien Receveur des consignations.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1818
1789-1818
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2425
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2423
BCU_Factums_G2424
BCU_Factums_G2426
BCU_Factums_G2427
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
receveurs de district
ventes
-
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96b43ceccb4efb02c4eb690c05ea6d85
PDF Text
Text
CONSULTATION
A L ’A P P U I D U M É M O I R E
PUBLIÉ
POUR
les
h éritiers
REYNARD
et N A L L E T ,
Appelans;
»
1
C O N T R E M . le M arquis d e S T R A D A , In tim é ;
i*
E t contre Le sieur G R A N C H I E R , ancien Receveur
des Consignations.
L e C O N S E IL S O U S S IG N E , qui a vu le jugement
rendu le 29 janvier 1 8 1 7 , Parle
tribunal de R i o m ,
contre les héritiers Reynard et Nallet, et le mémoire
publié pour eux devant la Cour royale,
�(a )
E s t i m e q u e les m o y e n s d é v e l o p p é s dans ce m é m o i r e
sont décisifs, et ne p e u v e n t m a n q u e r de faire r é f o r m e r
le j u g e m e n t c o n t r e l e qu el ils sont dirigés.
Il est victorieusement démontré que les premiers
juges ont donné à l’acte du 29 mars 1791 un sens et
des effets dont il n’est pas susceptible.
D ’abord, en ne s’attachant qu’aux faits, on est déjà
convaincu que les sieurs Reynard et Nallet ont reçu la
somme portée dans cet a cte , à titre de prêt, et non de
paiement. ■
-, r,
» \.
j
■y
D e quoi se compose cette somme? Du capital et des
intérêts de diverses lettres de change par eux souscrites
au profit du sieur Granchier.
L ’acte du 29 mars 17 91 n’a fait que remplacer les
engagemens précédens.
Il ne s’est opéré de changement que dans la forme
du titré. Son objet est resté le même. C ’était fonjours
un emprunt fait par les sieurs Reynard et Nallet.
Mais il y a plus, c'est qu’en principe, et dans la
position respective des parties, ce ne pouvait pas être
autre chose.
L e sieur Granchier était dépositaire judiciaire du
prix de la terre vendue par le sieur de Slrada.
lies sieurs Reynard et Nallet, qui se présentaient à
Tordre, 11’üvaient sur co prix aucun droit certain, tant
que leur collocation n était pas ordonnée.
En cet état, le sieur Granchier pouvait bien leur
�(3 )
prêter, soit ses propres fonds, soit ceux de sâ caisse,
que les réglemens l’aulorisaient à faire valoir.
( ■'
Mais il ne pouvait pas leur payer valablement une
créance non encore colloquée.
s
]p.o\: 00
Il faut donc reconnaître q u e , s’il leur a remis des
fonds, ce n’est point un paiement qu’il leur a fait, c ’est
un prêt à ses risques et périls.
^
L e principal m o lif du tribunal pour décider le con
traire, est que les termes dé l’acte du 29 mars 17 91
expriment une quittance.
.
On ne conçoit pas qu’il ait à ce point méconnu les
principes les plus élémentaires sur l’interprétation des
actes.
V
Une première règle, c’est qu’il faut rechercher la
commune intention des parties contractantes , plutôt
que de s’arrêter au sens littéral des termes : VoLuntatem contrahentium potiits quàm verba spectari plaçait.
I/. 2 1 9 ,
if. de verb. sig n . — Article n 56 du Code
civil.
U11 autre axiome non moins certain, c ’estr qu’il
faut entendre Î’acte dans le sens où il peut être va
lable, plutôt que dans celui où il serait sans effet :
Comm odissimum id est accipl quœ res de quâ agitur
m agis valeat quant pereat. L. 1 2 , ff. de reb. dub. ‘
L. 3o, de verb. obi.— Article 1 1 67 du Code civil.
O r , quant à l'intention des parties, il est conslanf
que l’écrit du 29 mars 1791 n'a eu d’autre objet que
�(4)
de remplacer divers'titresqui constataient bien posi-v
tivement un prêt fait par le sieur Grancliier.
E t quant aux effets de l’acte , il est démontré'que
ce n’est que comnfe reconnaissance d’un prêt qu’il
pouvait être valable.
g,
,_
Impossible donc d’y voir un paiement ; impossible
de le considérer comme une quittance.
'
;
i •'
L e sieur de Strada, ainsi qu’on l’a parfaitement établi
dans le mémoire , restait étranger à cette opération.
X^e sieur Granchier en courait seul les chances. Il devait
seul en supporter la perte, en. cas de non collocation
ou d’insolvabilité des sieurs Reynard et Nallet.
L ’acte du 29 mars 1791 ne pouvait devenir propre
au sieur de Strada, ne pouvait former pour lui un titre
libératoire, qu’au moment ou il serait pièce comptable
pour le sieur Grancliier.
• Et il ne'pouvait être comptable qu’après la collo
cation des sieurs Reynard et Nallet, pour les sommes
dont le sieur Granchier se trouvait alors dépositaire ,
et dont il aurait encore à rendre compte.
O r, il existait bien des valeurs en dépôt chez le
sieur Granchier, lors de la première collocation pro
noncée au profit dessieurs Reynard et Nallet, le 1e1 ther
midor an 2.
Et conséqueniment, jusqu’il concurrence du mon
tant de cette collocation, l’acte du 29 mars 1791 est
devenu tout à-la-fois libératoire pour le sieur Granchier
�(5 )
/i7
vis-à-vis du sieur de Strada, et pour le sieur de Strada
vis-à-vis les sieurs Reynard et Nallef.
Mais il n’en a pu être de même pour la seconde
collocation, arrêtée seulement le 16 pluviôse an 5.
Alors ce qui reslait d’assignats déposés chez le sieur
Granchier avait péri. Il n ’avait plus dans ses mains
aucune valeur appartenant au sieur de Strada. II n’y
avait donc plus de compensation possible entre la somme
avancée par lui aux sieurs Reynard et Nallet, et celles
qu’ils avaient à exiger comme créanciers du sieur de
Strada.
Celui-ci est donc resté débiteur de la seconde collo
cation. L ’acte du 21 germinal an i 3 ; par lequel il s’en
est libéré, a une cause réelle, légitime; il ne peut être
rescindé.
C elle première proposition nous paraît d ’une telle
évidence, que nous croyons qu’elle est seule plus que
suffisante pour faire infirmer le jugement attaqué. Ainsi
c’est bien surabondamment qu’on s’est o c c u p é , dans
le mémoire, de la proposition subsidiaire, qui consiste
à soutenir, d’une paî t , q u e , s’il y a erreur dans la
transaction du 21 germinal an i 3 , les parties doivent
être remises au même élat qu’avant qu’elle fût con
sentie; et, d’autre part, qu’on ne peut imputer sur la
créance des héritiers Reynard et Nallet les sommes
comprises pour intérêts dans la reconnaissance du 29
mars 17 91.
Si cette proposition fixe l ’attention de la Cour, ce
�(6 )
ne sera sans doute que pour faire ressortir davantage
les erreurs dans lesquelles sont tombés les premiers
juges.
Quoi de plus étrange, en effet, que d’annuller une
transaction dans l'intérêt de l’une des parties, et de la
maintenir contre l'autre, quand elle a pour cause une
erreur de fait commune à toutes deux?
E t , d’un autre côté, ne serait-il pas aussi absurde
qu'injuste, de précompter aux héritiers Reynard et
INallet les intérêts des sommes qu’ils auraient reçues
à-compte d’une créance qui en produisait elle-même?
Quant à la demande du sieur Granchier, elle n’a rien
qui puisse les inquiéter.
L e règlement fait avec lui est, dès-à-présent, telle
ment établi, que probablement il n’osera pas le nier.
On ne voit pas, d’ailleurs, quel intérêt il pouvait y
avoir ; car l’arrêté du 6 nivôse an 3 le place dans le
cas prévu par l'article 22
qui veut que le solde du
l’échelle de dépréciation
être soldé, et la créance
de la loi du 16 nivôse an 6 ,
compte soit réduit, d’après
à l’époque où il aurait dû
du sieur Granchier, évaluée
d’après celte base, ne s’élèverait pas même à la somme
qui lui a été allouée.
A u surplus, si, contre toute attente, il persistait à
demander un nouveau règlement ,et qu’il restât quelque
doute dans l’esprit des magistrats, sur l’existence du
�(7 )
premier, on ne pense pas qu’ils pussent h é s i t e r d’après
la correspondance produite , à ordonner la preuve
testimoniale.
Délibéré à Paris., le 2 5 mars 1818.
Sign és:
D ARR IEU X .
D E LA C R O IX FRAIN VILLE. '
GRAPPE,
CH AM PIO N VILLENEUVE.
,
TH EVENIN.
PERIGNON.
MANUEL.
F. N I C O D .
/
A RIOM, DE L'IMPRIMERIE DE J.-C. S A L L E S , IMPRIMEUR DU PAL A IS.
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Reynard. 1818]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Darrieux
Delacroix Frainville
Grappe
Champion Villeneuve
Thévenin
pérignon
Manuel
Nicod
Subject
The topic of the resource
assignats
receveur des consignations
créances
ventes
domaines agricoles
receveurs de district
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
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Titre complet : Consultation à l'appui du mémoire publié pour les héritiers Reynard et Nallet, appelans ; contre M. le Marquis de Strada, intimé ; et contre le sieur Granchier, ancien Receveur des consignations.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1818
1789-1818
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2424
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2423
BCU_Factums_G2425
BCU_Factums_G2426
BCU_Factums_G2427
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
receveurs de district
ventes
-
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4ac279943177ef1a0d524747b0a93e1a
PDF Text
Text
COUR RO YALE
DE RIOM.
M
É
M
O
I
R
E
1 e r . CHAMBREM . R edon - E c u y e r
POUR
Les Héritiers R E Y N A R D et N A L L E T , Appelans;
CON TRE le sieur Marquis D E S T R A D A , Intim e,
Et le sieur G R A N CH IER, ancien receveur des consignations.
D
eux questions se sont élevées dans ce procès :
1°. Lorsqu’un dépositaire judiciaire, qui, par le bénéfice de sa
charge , avait le droit de faire valoir les fonds deposés dans sa caisse ,
a usé de ce droit en faveur d’un créancier opposant en ses m ains,
pour une somme qui pourrait être imputée sur celles pour lesquelles
ce créancier prétendait se faire colloquer, est-il possible de v o ir ,
dans celte opération, au lieu d'un prêt fait par le dépositaire, à
ses risques et périls, avec délégation à son profit sur la collocation
future , un paiement effectué en l’acquit du débiteur saisi, et opérant,
des ce moment, sa libération?
C ’est la question principale.
2°. Les clauses d’une transaction qui se trouverait viciée par une
erreur de fait commune aux deux parties, peuvent-elles être scindées,
de telle sorte qu’on annulle celles qui sont favorables à l’un des
contractans, en maintenant celles qui lui sont contraires?
C ’est la question subsidiaire.
N i l’une , ni l’autre de ces questions ne semble difficile à résoudre.
1
premier Président.
�(2)
II paraît (l’abord Lien évid en t, que l’avance faite par le dépositaire,
sur une collocation non encore ordonnée, lui est purement person
n elle, qu’elle reste étrangère au débiteur saisi, et ne peut avoir
aucun ellet, ni à son préjudice, ni à son prolit.
li t , quant à la transaction, s’il y a erreur dans sa base, on ne
conçoit pas qu’il soit possible de ne l’annuller qu’en partie, et de
ne point remettre les contractans dans la position où ils étaient avant
dé la souscrire.
Ce n’est pas ainsi, néanmoins, qu’en a jugé le tribunal de R iom ;
il a résolu les deux questions dans un sens contraire à celui que
nous venons d’indiquer.
Faudra-t-il de grands efforts , pour démontrer l’erreur et ¡’injustice
de cette décision? Nous ne le pensons pas.
11 nous paraît facile d’établir que le tribunal a méconnu, sur l’un
et l’autre point, les principes de droit les plus constans et les pre
mières règles d’équité.
. Exposons d’abord les faits.
F A I T S .
r
Par acte du g février 1 7 8 1 , les père et mère du sieur Dcstrada
affermèrent, pour dix-huit années , leur terre de JBriailles aux sieurs
Reynard et N allet, auteurs des appelans.
Les fermiers payèrent d’avan ce, sur leurs ferm ages,72,000 francs^
Ce ne fut que la moindre partie des fonds qu’ils eurent à mettre
dehors. La terre de B riailles, long-terns négligée, était dans le
délabrement le plus complet. Les fermiers dépensèrent, pour la
remettre en valeur, plus de 100,000 francs.
Ils ne recueillirent point les fruits de ces énormes avances. Pour
prix de leurs sacrifices, ils ne trouvèrent, dans les propriétaires,
que de la mauvaise foi. Ceux-ci violèrent ouvertement les clauses
�du bail. Ils poussèrent le mépris de leurs engagemens , jusqu’à vendre
des coupes de bois par eux affermées.
Les fermiers se virent forcés de demander la résiliation de ce
b a il, qui avait mis toute leur fortune'daus les mains du sieur Dcstrada. Cette résiliation fut prononcée par une sentence de la séné
chaussée de Riorn, du 5 i Août 1 7^7 ? fi lli condamna les bailleurs
en des dommages-intérêts à donner par état, et à la restitution de
l ’avance de 72,000 f r . , au prorata du teins restant à courir sur la
durée du bail.
La créance des sieurs Reynard et Nallet fut depuis, fixée par
experts , à 207,000 f r ., avec intérêts, à partir du i er. Décembre 178c).
Le sieur D estrada, ayant appelé au parlement de P aris, de la
sentence de Riom ; cet appel se trouva, lors de la nouvelle orga
nisation judiciaire, dévolu au tribunal du district de Clerinont; et
là il intervint, le
I er.
Août 1792, un jugement qui maintint la plus
grande partie des condamnations prononcées au profit des fermiers.
Avant cette époque, et dès le 22 Août 1789, le sieur Destrada
avait vendu sa terre de Briailles au sieur de Saint-Cy.
Ce dernier avait obtenu des lettres de ratification, scellées, à la
charge d’un grand nombre d’oppositions, et notamment de celle
que les sieurs Reynard et. Nallet avaient form ée, en vertu de la
sentence du 5 t Août 1787.
Le ‘i[\ Janvier 1791 , l’acquéreur déposa le prix de la v e n te , mon
tant en principal et intérêts, à 5 6 i , 85 (i liv. , entre les mains du sieur
Graneliier, receveur des consignations, à Riom.
Les sieurs Reynard et N allet, prives des sommes importantes qui
leur étaient ducs p a rle sieur D estrada, furent contraints, en atten.
dant qu’ils pussent les recouvrer ; d’avoir recours à des emprunts.
Ils s’adressèrent au sieur Graneliier. Celui-ci leur prêta, le 10
Mars 1791 , une somme de 100,000 l i v , , pour laquelle ils lui sous
crivirent deux lettres de change de 5o,ooo liv. chacune.
�c
( 4 )
Vannée suivante, une autre somme de 20,000 fr. fut prêtée par
le sieur Grancliier au sieur P a g es, gendre du sieur R eyn ard , et
forma l’objet d’une troisième lettre de change, que ce dernier sous
crivit conjointement avec son gendre.
Ces faits sont importans. Ils servent à fixer la véritable date et
la nature d’un autre titre que se procura plus tard le sieur Gran
cliier, et dont nous parlerons tout-à-l’lieure. ils sont prouves par
des pièces non suspectes , et qui ont acquis date certaine par le
décès du sieur Reynard, long-tems avant la contestation actuelle.
i° . On v o it, par une lettre du sieur R e y n a r d au sieur G rancliier,
en date du (! A vril 1792, transcrite par celui-ci dans son précis
imprime', qu’il lui était dû alors 5 ,000 li v ., pour intérêts échus le
10 Mars précédent. C’étaient évidemment les intérêts à 5 pour 100
des 100,000 fr. portés dans les deux lettres de change du 10
Mars 1791.
20. Une autrelettre écrite au sieur Grancliier, par les sieurs Reynard
e tN a llet,le 3 mai 1798, lui annonce l’envoi de leur promesse de
i o , 25 o
fr. au 1 5 avril suivant. Cette somme se composait 1 °. des 5 ,000 fr. d’in
térêts échus le 10 mars 1792 ; 20. de 230 fr. pour les intérêts de cette
somme pendant un an, et 3 .° d’une autre somme de 5 ,000 fr. , pour
les intérêts d’une seconde année d elà somme principale.
5 °. Un compte arrêté entre les sieurs Reynard et Grancliier, le 6
Nivôse en 5 , et portant règlement des intérêts dûs à ce dernier jus
qu’au 9 Août 1794 ( 22 Therm idor an 2 ) , établit encore plus clairement
l’existence des divers titres dont il vient d’être parlé.
Y oici les articles qui s’y rapportent.
« Nous avons réglé les intérêts des cleux lettivs de change de
» 5o,ooo fr. chacune , d u 9 mars 179 1, jusqu’au 9 août 179^, faisant
» trois ans et cinq mois à la somme de 17,082 liv. 5 s.
» Les i rite rets de laletirede change île a0,000 fr. , depuis le 9 mars
> 1792 , jusqu’au 9 aoul i794,pour deux ans cl cinq mois, à la somme
» de 2,4i(ifr.
�)> L ’intérêt de 5 ,ooo liv. contenues a u billètdu 3 mai 17 9 3 , jus» qu’au g août I 7g 4 7 faisant un an et trois mois, à 3 i2 Ü v. 10 sols.
» E t l’intérêt des autres 5 ,000 fr. contenues au même b illet, depuis
» le 9 mars 1794, jusqu’au 9 Août suivant, pour cinq mois, à la somme
» d e io 4 1iv . »
Là se trouvent bien positivement rappelés les quatre effets succes
sivement souscrits au prolit du sieur G rancliier, tant pour le capi
tal , que pour les intérêts de ces prêts.
Antérieurement à cet arrête de compte du 0 Nivôse an 5 , et par
jugement du i er. thermidor an 2 , les sieurs Reynard et Nallet
avaient été colloque's dans l’ordre du prix delà terre de B riailles, pour
une première somme de 76,761 liv. 1 sol (ï deniers.
Ce même jugement avait ordonné que le surplus de leur créance
seroit de nouveau liquidé par experts, que la distribution resterait
à cet effet suspendue pendant deux m ois, et que le receveur des
consignations garderait dans ses mains une somme de 107,000 liv.
pour faire face à leurs répétitions.
Si avant cette époque les sieurs Reynard et Nallet eussent affecté
au remboursement des sommes par eux dues au sieur Grancliier,
celles pour lesquelles eux-mêmes devaient être colloque's sur le prix dé
posé dans ses mains, ils auraient ete libérés envers lu i , lors de ce
jugement du i cr. Therm idor an 2 , jusqu’à concurrence de la pre
mière collocation par eux obtenue.
Néanmoins comme 011 l’a vu , le sieur G ran cliier, dans l’arrêté
de comple du <i nivôse su ivan t, se considérait encore comme créan
cier de la totalité des sommes portées dans les engagemens sous
crits à son profit ; preuve certaine qu’il n’existait alors aucun acte
qui le subrogeât aux droits des sieurs Reynard et Nallet sur le jirix
dont il élait dépositaire.
Ce ne- lut donc qu’après cet arrêté de com pte, qu’il fut fait,
entre le sieur Grancliier et le sieur R eyn ard , agissant, tant pour
�( 6 )
/
lui que pour le -siçur- N allet, son associé, un nouvel arrangement
par lequel ils se libérèrent, envers le sieur Grancliier , d’une partie
de ce qu’ils lui devaient, et lui donnèrent sûreté pour le surplus.
Le moyen employé pour atteindre ce double b u t, fut de déléguer
au sieur Grancliier le montant des collocations des sieurs Reynard
et JNallet, sur le prix d e là terre de Briailles.
Le sieur Reynard, ne doutant point que la première collocation
déjà ordonnée, ne fut bientôt suivie d’une autre plus que suffisante
pour rembourser entièrement le sieur Grancliier , ne vit aucun in
convénient à reporter l’origine de la totalité de sa créan ce, au mois
de Mars 1791 , date du prêt de 100,000 fr.
Voici le texte de l’é c r it, par lequel la délégation fut consentie ,
et qui remplaça les autres engagemens dont le sieur Grancliier était
porteur :
« J e , soussigné, faisant, tant pour moj que pour M. N allet,
» mon beau-frère et mon associé, reconnais avoir reçu de M. Gran» chier, receveur des consignations, la somme de cent trente-cinq
» mille livres, à compte de celles qui me sont adjugées contre
»
»
»
»
»
»
M. Destrada et son épouse , par les sentences que j’ai obtenues
contre lui à la ci-devànt sénéchaussée d’Auvergne , et pour lesquelles je dois être colloque dans l’ordre qui doit être fait avec
les autres créanciers des deniers provenant de la vente de la
terre de Briailles ; laquelle somme je promets faire allouer audit
sieur Grancliier. Fait à R io m , le 29 Mars 1791.
» S ig n e R e y n a r d . »
C elte délégation ayant reçu son effet, quant à la somme de
75,7(11 liv. 1 s. (> d . , pour laquelle les sieurs Reynard et JNallet se
trouvaient colloques par le jugement du i er. Therm idor an 2 , ils
11c restèrent plus débiteurs , envers le sieur G ran cliier, que de
( il,208 liv. 18 s. ()d .
La liquidation ordonnée par ce jugement, fut depuis opérée; et
alors un second jugement rendu par défaut, le i(î Pluviôse an 5 ,
�( 7)
alloua au sieur Nallet et aux héritiers benéiic bures du sieur Roynard ,
décédé dans l’intervalle, une autre somme de G.S,553 liv. 10s. Gd.
avec intérêts et dépens, pour toutes les indemnités par eux réclamées.
A u m om ent où cette seconde partie de leur créance leur fut ad
jugée, les deniers sur lesquels devait s’en faire le paiement avaient péri;
les assignats qui les représentaient étaient démonétisés.
E t ainsi, faute de valeurs sur lesquelles put s’exercer la déléga
tion faite au sieur Graueliier pour le surplus de ses avances, elle
resta sans ellet. Les héritiers Reynard, et le sieur JYallet continuèic .it d’être ses débiteurs et créanciers du sieur Destrada. L ’unique
changement qu’apporta dans leur ¡position le jugement du iG P lu
viôse an 5 , fut de rendre leur créance liquide et exigible ; mais il
restait toujours à en faire le recouvrement.
Des inscriptions furent prises à cet effet sur les biens du sieur
Destrada.
Dans une première inscription à la date du i 5 Germinal an 7 , la
créance ne fut portée par erreur qu’à 9,574 fr. ; mais bientôt le sieur
Granchier fit connaître aux héritiers Reynard leur véritable situa
tion , tant à son égard que vis-à-vis du sieur Destrada; et l’erreur
fut rectifiée par une seconde inscription requise , le 25 Prairial de la
même année, pour sûreté d’une somme de c)G,o 12 liv. 17 s; 1 d.
L e sieur D estrada, après avoir retardé de tout son pouvoir la li
quidation des indemnités reclamées contre lu i, se montra prêt, lors
qu’elle fut terminée, à élever de nouvelles difficultés..
11 prétendit que c’était aux Reynard et N alletà supporter la perte
des assignats consignes ; qu il se trouvait ainsi non-seulement libéré
envers eux, mais en droit de répéter l’excédent de la somme restée
en dépôt au-dcla du montant de leur seconde collocation.
11 se prévalut aussi de ce qu’il pouvait encore in terjeter appel du
jugement par défaut du iG pluviôse an 5.
On lui répondit que c ’était par sa faute et à ses risques que h; dé-
�(8)
pot avait eu lieu ; qu’il ¿tait resté propriétaire des assignats jusqu’à
leur distribution effective, et qu’ils avaient par conséquent péri pour
l u i , suivant la maxime res périt domino ; que son a p p e l, en le sup
posant recevable, n’était point à redouter , attendu que les Reynard
et Nallet se trouvaient plutôt lésés qu’avantages par le jugement
contre lequel il menaçait de se pourvoir.
Durant ces discussions , le sieur Destrada fils devint le donataire
de son p è re , et le représenta en cette qualité.
Il entra en négociation avec les héritiers Reynard. Leurs diffé
rends furent terminés par une transaction du 21 Germinal an ia .
II fut d’abord reconnu dans cet acte que les Reynard et Nallet
avaient reçu la somme de 7^,701 liv. 1 s. (> d . , montant de leur pre
mière collocation. Il ne restait plus qu’à régler le paiement de la se
conde.
En considération de l’offre que fit le sieur Destrada de se libérer
sur-le-cham p, tant en espèces qu’en lettres de change, les héritiers
Reynard, agissants tant pour eux quepourle sieur Nallet, consentirent
à un grand sacrifice. Leur créance s’élevait en principal et accessoires
à plus de 100,000 fr. Ils la réduisirent à 47 , 25 o fr.
Sur cette somme le sieur Destrada paya 1 5 ,000 fr. en espèces. Il
fournit pour le surplus des lettres de change qui ont depuis été ac
quittées.
Par un arrangement que les héritiers Reynard firent à la même
époque avec le sieur G ran chier, il fut convenu que ce dernier les
tiendrait quittes moyennant une somme de i 5 ,o o o fr. à compte de
laquelle il lui fut payé 9,000 fr.
La reconnaissance souscrite par le sieur R eyn ard , le 29 mars 1791,
dont le texte était reste complètement inconnu îi ses héritiers , et
au sieur N allet, fut alors déposée par le sieur Granchier entre les
mains de leur fondé de pouvoir, pour leur être remise après le paie
ment des G,000 fr. dont ils restaient débiteurs.
�w
(9)
Lorsqu’ils offrirent cette somme au sieur Granchier, celui-ci, abu
sant de ce qu’il n’avait point ¿le dressé acte de la convention à la"
quelle il avait souscrit, porta plus haut ses prétentions, il exiga 9,4^0 f.;
on accéda encore à cette condition ; ces 9,45o fr. furent mis à sa dis
position chez un banquier de Riom. Il ne s’en tint pas davantage à
ce nouvel arrangem ent, et forma des demandes tellement exagérées
qu’on 11e put terminer avec lui.
T elle était la position des parties lorsque le procès actuel a pris
naissance.
Voici maintenant ce qui s’est passé depuis cette époque jusqu’au
jugement dont l’appel est porté devant la Cour.
L e 7 juin 1808 , le sieur Destrada fait citer le sieur Granchier en
conciliation sur une demande qu’il sé propose de former contre lui,
à fin de reddition de compte du prix de la terre de Briailles.
L e sieur Granchier se présente au bureau de paix et offre de
rendre compte. Les parties ne peuvent néanmoins se concilier.
Les choses restent en cet état jusqu’au 24 Août 1809.
L e sieur Granchier demande alors la radiation d’une inscription
prise sur ses biens par le sieur Destrada pour une somme de
i 5o,ooo liv.
Les
3 et 17 Novembre suivant, il fait assigner les héritiers Reynard
en assistance de cause, pour lui remettre les pièces justificatives de
leur collocation et lui en fournir quittance.
Le 17 Février 1811 il se désiste de cette assignation.
Pressé par le sieur Destrada de s’expliquer sur l’existence et
sur le contexte de la reconnaissance du 29 Mars 1791, il en indique
/ le dépositaire et consent qu’elle soit communiquée au sieur Des
trada.
Se prévalant ensuite de ce que les héritiers Reynard avaient né
gligé d’accepter son désistem ent, il le révoque par une seconde as2
�( 10 )
signatîon qu’il leur fait donner le 20 Mai 1812, aux mêmes fins que
la première.
Le sieur Destrada qui jusques là n’avait point eu d’autre adversaire
que le sieur Granchier, intervient dans l’instance introduite par ce
dernier contre les lie'ritiers Reynard et le sieur Nallet.
Le 28 Août *1812, jugement par défaut contre les lie'ritiers Rey
nard et le sieur Nallet, qui admet l’intervention et joint toutes les
demandes.
Le sieur Nallet étant décédé, l’instance est reprise avec ses enfans,
par jugement du 22 Décembre i 8 i 3 .
Le procès prend alors une face toute nouvelle.
Les héritiers Reynard et Nallet qui 11’étaient appelés qu 'en assis
tance de cause et pour donner des renseignemens, deviennent toutà-coup parties principales. Ils ont en même temps à se défendre et
des attaques du sieur Destrada et de celles du sieur Granchier.
L e sieur Destrada s’empare de l’acte du 29 Mars 1791. C ’est la
base sur laquelle il fonde toutes ses prétentions contre les héritiers
Reynard et Nallet.
Peu im porte, suivant lu i, qu’il s’agisse dans cet écrit d’une somme
qui leur a été avancée par le sieur G ranchier, à ses risques et périlsr
avant leur collocation , sans autorisation de justice , sans le consen
tement du sieur Destrada leur débiteur, ce n’en est pas moins un paie
ment fait en l’acquit de ce dernier.
Quoiqu’étranger qu’il ait été à cet^acte, il est impossible d’y voir
autre chose qu’une quittance à sou profit.
Par là les sieurs Reynard et N allel ont été remplis d’avance du
montant de leurs deuxcollocalions. Il devient indiñérenl que les assi
gnats consignés se trouvassent démonétisés lorsque la seconde a été
prononcée.
E t dès-lors c’est par erreur que l’on a supposé dans la transaction
�( ■' )
du 21 Germinal an i 5 , que cette seconde collocation restait encore
due. Les
fr. que les héritiers Reynard ont reçus pour cet
objet leur ont été payés sans cause; ils doivent les restituer.
Le sieur Destrada va plus loin ; il prétend que non-seulement il
s’est, par celte transaction, mal à propos reconnu débiteur, niais
qu’elle l’a constitué créancier.
Elle doit, à l’en croire, être annullée, en ce qu’il s’est obligé de payer
pour la seconde collocation 47?25o f r . , mais maintenue en ce que
cette seconde collocation a été réduite à cette somme d e4 7525ofr.
E t ainsi , les
deux collocations ne s’élevant ensemble qu’à
121,011 f r ., il a encore à répéter la différence de cette somme à
celle de i 55 ,ooo f r ., portée dans l’acte du 29 Mars 1791, c ’est-à-dire
15,989 fr.
De son côté le sieur Granchier a formé contre les héritiers Reynard et Nallet une demande absolument inconciliable avec celle du
sîeur Destrada.
Il a commencé par établir , et c’est ce qui lui était peu difficile,
que les sommes par lui remises aux sieurs Reynard et Nallet avant
leur collocation n’étaient alors qu’ une avance à lui personnelle, et
non un paiement sur les deniers consignés dans ses m ains, parce
que l u i , dépositaire judiciaire, ne pouvait payer valablement les
créanciers opposans que lorsque la justice l’avait ordonné ; que l’im
putation de cette avance sur les créances des sieurs Reynard et Nallet n’a pu se faire qu’au moment où elles ont étécolloquées; qu’elle
n’a eu lieu par conséquent que pour le montant de la première col
location, puisqu’à la date de la seconde , les deniers consignés n’exis
tant plus , il n’y avait plus de paiement possible.
L e sieur Granchier en a conclu qu’il était resté créancier vis-à-vis
des sieurs Reynard et Nallet, de l’excédent de ses avances sur le mon
tant de la première collocation.
Jusques-là rien qui 11c soit exact,
�( i» )
Mais ce qui doit surprendre, c’est que sans nvoir e'gard aux con
ventions par lui faites avec les héritiers R eyn ard , le sieur Grancliier
ait prétendu se faire payer intégralement cette créance , sauf seule
ment la déduction des 9,000 fr. qu’il a reçus en vertu de ces mêmes
conventions.
Au milieu de ce conflit de prétentions contradictoires, les héritiersReynard et Nallet se sont d’abord étonnés qu’on formât contre eux
des demandes directes et principales devant d’autres juges que ceux
de leur domicile. Ils ont proposé un déclinatoire ; le tribunal ne
l’a point accueilli, et la Cour a eru devoir confirmer son jugement.
Les héritiers Reynard et Nallet ont alors demandé qu’il fût préa
lablement décidé laquelle des deux actions intentées contre eux ils
auraient à combattre , attendu qu’elles sont exclusives l’une de
l’autre.
Ces conclusions aj'ant encore été écartées par jugement du i 5 dé
cembre 1816 , les héritiers Reynard et Nallet ont défendu au fond,
tant sur la demande du sieur D estrada que sur celle du sieur Gran
d i ier.
A l’égard du sieur Destrada ils ont soutenu :
i°. Que si aux termes de la reconnaissance datée du 29 Mars
17 9 1, les sommes avancées par le sieur Grancliier à leurs auteurs
devaient se compenser avec celles que ceux-ci auraient à recevoir sur
les deniers consignés, ce ne pouvait être qu’à l’instant de leur collo
cation ; et qu’autant, qu’à cette époque ces deniers existeraient en
core; que cette compensation ne s’était par conséquent opérée que
jusqu’à concurrence de la prem ière collocation ; que le sieur Destrada
étant ainsi resté débiteur delà seconde, le traité du 21 Germinal an
15 , qui en a réglé le paiement, avait une cause légitime et devait être
maintenu ;
20. Qu’en supposant qu’il y eut erreur dans ce traité, il fallait l’annuller pour le tout et remettre les parties au même étal que lors
qu’elles l’avaient consenti.
�.
)f
C i3 )
Quant au sieur Granchier, les héritiers Reynard et Nallet en réité
rant l’oiïre d’exécuter la convention faite avec lui, l’ont soutenu nor\
recevable dans toutes autres demandes.
Leur défense n’a point eu le succès qu’ils devaient en attendre.
Toutes les prétentions du sieur Deslrada ont été accueillies par
un jugement du »y Janvier 1817.
Le tribunal s’est proposé sur celles qu’il a élevées contre les
héritiers Reynard et N a lle t, les questions suivantes :
/ « L ’acte du 29 Mars 1791 est-il une quittance de la part des
» héritiers Reynard et N allet, en faveur du sieur G ranchier, sur
» leur collocation dans la distribution du prix de la vente de la
» terre de Briailles , ou seulement une promesse en faveur du sieur
» Granchier?
» S ’il est une quittance, le sieur Destrada peut-il s’en emparer et
» s’en servir pour établir ses demandes? En résulte-t-il la preuve
v qu’en recevant 155 ,000 fr. , les sieurs Reynard et Nallet ont été
» surpayés du montant de leur créance sur le sieur D estrada, de
» la somme de 10,929 fr.? Doivent-ils être tenus de rendre cette
» somme au sieur Destrada, comme provenant des deniers con» signés sur lu i, s ui v a n t la valeur des assignats du jour de la réception,
» ensemble les intérêts, à compter de la même époque?
» Doivent-ils également être tenus de rendre et restituer per» sonnellement et solidairement au sieur D estrada, la somme de
>v 47,260 f r . , qu’ils ont induement reçue de lu i, suivant le traité
» du 21 Germinal an i 5 , aussi avec intérêts, à compter dudit
» traité, comme ayant reçu ladite somme sans cause?
\ o ic i comment ces questions ont été décidées :
« Attendu , dans le fa it, qu’il a été déposé, le 24 Janvier 1791 ,
» dans la caisse du sieur G ranchier, ancien receveur des consigna« tîons, la somme de 5 l>i,85 () fr. par le sieur de S a in t-C y , eu
�( *4 )
» principal et intérêts, pour le prix de la terre de Briaillcs , qui
» lui avait été vendue par le marquis Destrada.
» Attendu en fait pareillement qu e, le 29 Mars 1791 , il fut
» reçu par le sieur Reynard père, faisant tant pour lui que
» pour le sieur N a lle t, son beau-frère et son associé, du sieur
» G ranchicr, sur la somme de 5 0 1 ,850 fr. , celle de i 55 ,ooo fr. à
» compte sur les condamnations qui avaient été prononcées par dif« férentes sentences de la ci-devant sénéchaussée d’Auvergne contre
» le marquis Destrada, au profit des sieurs Reynard et Nallet ,
» avec promesse de la part de ces derniers de faire allouer la
» somme de 1 55 ,000 fr. au sieur Granchier , dans l’ordre qui de» vait être fait du prix de la terre de Briailles , entre un grand
» nombre de créanciers opposans aux lettres de ratification, obte)> nues par le sieur de Saint-Cy, acquéreur de celte terre;
» Attendu qu’il est impossible de voir dans l’acte dudit jour 29
» Mars 17 9 1, qui fut souscrit par le sieur R eyn ard, autre chose
» qu’une quittance à compte des créances des sieurs Reynard et
» N allet, et un aveu manifeste que la somme de 1 55 ,000 fr. pro» venait des deniers consignés de la terre de Briailles ;
» Que cela résulte, i° . de la tenue et du contexte de l’acte , qui
» ne peut pas recevoir d’autre interprétation ;
» 20. De l’acceptation que fit le sieur Granchier de cet acte;
» car il est évident qu’il entendit que cet acte opérerait sa libération
» dans l’ordre envers le sieur D estrada, jusqu’à concurrence de la
» somme de 155 ,000 fr. ;
5 °. Que cela résulte encore de l’action en recours et gai’antie,
» qui a été formée par le sieur Granchier contre les sieurs Rey» nard et N a llet, alin qu’ils fussent tenus de lui faire allouer celte
» somme de la part du sieur D estrada, lorsque ce dernier a demandé
w au sieur Granchier le compte de la somme de 5 0 1 ,850 f r . , qui
» avait été consignée dans ses mains ;
» Enfin , que cela résulte de l’interrogatoire sur faits et arlicles ,
�rsr
( , 5')
» du sieur G ran cliier, qui a eu lieu le 29 Mars 1811 , et dans le» quel M. Grancliier a dit que les sieurs Reynard et N allet, peu
» de tems après la consignation, s’étant présentés chez lui et s’an« nonçant créanciers de sommes considérables sur le marquis Des» trada , ils avaient prié le sieur Granchier de leur prêter des fonds,
» à valoir sur leurs créances , et que ledit sieur Granchier pourrait
» se retenir dans l’ordre qui devaitêtre fait ; il avait prêté i 55 ,ooo fr.
» en assignats, tels qu’il les avait reçus peu de tems auparavant;
» Attendu que le sieur Granchier reconnaît encore cet écrit pour
» quittance , quant à la première collocation des héritiers Reynard
» et N allet, de la somme de 75,769 f r . , et qu’il 11e peut y avoir
» aucune raison pour que le même acte ne tienne pas lieu de quittance
» de la deuxième collocation, parce qu’il n’y a aucune distinction
» dans cet acte , et que la somme de 155 ,000 fr. couvre l’une et
» l’autre des collocations;
» Attendu que le sieur D eslrada, en allouant l’acte du 29 Mars 1791
» pour la somme entière de 1 55 ,000 fr ., se l’est rendu p ropre, et
» qu’il avait droit de s’en emparer, parce que le montant de cet
»’ acte provenait de ses fonds ;
» Attendu qu’il serait impossible de dire que l’acte du 29 Mars 1791
» doit être regardé comme un billet et une reconnaissance, qui
» constituerait le sieur Granchier créancier personnellement des
ir sieurs Reynard et jV allet, qui auraient fait au porteur em prunt
» de la
somme de
155 ,000 fr. ; que la lecture seule de l’acte
>v réfuterait suffisamment celte objection, et qu’elle serait détruite
» par des conséquences subversives de tous les principes ; il im» pliquerait en effet de supposer que les assignats qui furent con» signés , auraient péri pour le propriétaire , et qu’il en aurait été
»■autrement pour le receveur, à qui sa qualité de dépositaire ne
»• pouvait pas permettre de s’arroger les objets qxii lui étaient
i> confiés;
\
�( i6 )
» Attendu que , dès deux collocations obtenues par les sieurs
» Reynard et Nallet contre le marquis Destrada , l’une a été' por» tée par le jugement d’ordre du premier Therm idor an 2 , à la
» somme de 76,761 fr. , l’autre pour dommages-inte'réts à 68,1 55 ,
» par jugement par défaut du 16 Pluviôse an 5 ; mais attendu que
» ce jugement étant susceptible d’opposition et d’app el, la liquida» tion des dommages-intérêts a été lixée à ¿+7,a 5o fr. par traité du
» 11 A vril i 8o 5 , en sorte que le total des deux collocations forme
» 121.011 fr ;
»
»
»
»
«
» Attendu que les héritiers Reynard et Nallet ont été entièrement remplis de cette somme par le paiement fait le 29 Mars
1791 au sieur Reynard père, faisant tant pour lui que pour le
sieur N allet, son associé, d e là somme de 155 ,000 fr. à valoir sur
leurs collocations dans l’ordre qui devait avoir lieu du prix de la
terre de Briailles ;
» Attendu que les sieurs Reynard et Nallet étaient même sur-
» payés à cet égard de la somme de 10,989 fr. dont ils sont auv jourd’hui débiteurs envers le marquis Destrada en qualité d’héri» tiers de leur père ;
» Attendu que lorsque, par la transaction du 11 A vril i 8 o 5 , le sieur
» Destrada a payé aux héritiers Reynard et Nallet la somme de
»
»
»
»
»
47j25o f r . , à laquelle fut réglée la seconde collocation, pour dommages-intérêts liquidés par jugement par défaut du 16 Pluviôse de
la même année , il ignorait la quittance de 155 ,000 fr. du 29 Mars
1791, dont il n’a eu connaissance que par l’interrogatoire sur les
faits cl articles du sieur Granchier du a 5 Août 181 1 ;
p A ttendu qu’en recevant du sieur D estrada, lors de la transac» tion de i 8 o 5 , la somme de 47 ?25 o f r . , les héritiers Reynard et
» N allet reçu ren t ce qui 11e leur était pas d û , et se sont obligés, par
» cette raison, <* la restitution d’après tous les principes anciens et
» nouveaux, et particulièrement l’article 1,376 du Code civil;
i> Attendu néanmoins que la quittance du 29 Mars 1791, de i 55 ,ooofr.
�( r7 )
» n’est point du fait de ces he'ritiers , mais de celui du défunt R e y -;
» nard, p è re , que rien ne justifie que les héritiers Reynard et Nallet
» aient eu connaissance de cet acte avant la transaction du 11 A vril
)> i 8 o 5 , qu’ils ont pu croire qu’ils étaient, encore créanciers duinar» quis Destrada, du montant de la dernière collocation, et que la
» fraude ne se présumé pas ;
» Attendu qu’ils doivent être considérés dans ces circonstances
» comme ayant reçu seulement par erreur ce qui ne leur était pas
» dû , et qu’ils ne doivent par conséquent les intérêts que du jour
» de la demande :
v
» Par ces m o tifs, le tribunal condamne les he'ritiers Reynard et
» N allet, savoir , les héritiers lleynard en qualité' d’héritiers be'né» ficiaires de leur père , à payer au marquis Destrada la somme de
« 13,929 fr. valeur des assignats au mois de Mars 1791 , suivant le
» tableau de dépréciation du papier-monnaie ;
» Condamne les he'ritiers Reynard et Nallet personnellement à
» rendre et payer au sieur Destrada ]a somme de 47 ?25 ofr. ?avec les
y inte'rêts des dites deux sommes, depuis la demande jusqu’au paie» ment. »
T el est le jugement dont les héritiers Reynard et Nallet viennent
se plaindre devant la Cour. Ils n’ont point à craindre qu’elle le con
firme. Il résulte déjà de l’expose des faits, que le tribunal les a mal
appréciés. Nous allons achever de démontrer ces erreurs.
D I S C U S S I O N .
L e plan de notre discussion est tracé d’avance :
i°.N o u s prouverons que le montant de la reconnaissance du 29
Mars 1791 , n’ayant pu s’imputer que sur la première collocation des
sieurs Reynard et Nallet , ils restaient réellemeut créanciers de la
seconde, lors de la transaction du 21 Germ inal an 13 , et qu’il n’y. a
0
�( i8 )
point lien à restitution de ce qui leur a été paye par le sieur D es
trada, pour les remplir de cette cre'ance.
2°. Suhsidiairement et dans l’hypothèse où les sommes avancées
par le sieur Granchier seraient par impossible considérées comme
i mputables non-seulement sur la première collocation, mais sur la
seconde, nous prouverons que la transaction n’ayant été consentie
de part et d’autre que dans la confiance que le sieur Destrada n’était
pas libéré du montant decette seconde collocatior, elle ne pourraitpns
é re annullée partiellement; que si alors il y avait lieu à rescinder
l’a c te , il devait l’étre dans la totalité et sans division ; et que dans
tous les cas il est impossible d’imputer sur la créance des héritiers
Eeynard etN allet contre le sieur Destrada,les i 5 ,ooo fr. compris pour
intérêts dans la reconnaissance souscrite au profit du sieur Gran
chier.
5 °. Nous terminerons par quelques observations sur la demande
formée par ce dernier.
§ I erLes premiers juges ont décidé que l ’acte du 29 Mars 1791 était
a ie quittance de la créance des sieurs Roynard et Nallet contre le
sieur Destrada.
Nous soutenons, nous, que cet acte ne pouvait être que laj'econnaissance (Fun jnét fait par le sieur Granchier, avec délégation h son
profit sur les sommes pour lesquelles les sieurs Reynard et Nallet se
raient colloques dans l’ordre.
De quel côté est l’erreur ? C ’est ce que les principes vont nous
apprendre. Ceux que nous invoquerons se présentent d ’eux-mêmes *
ils sont aussi simples que constans.
J1 ne peut y avoir de quittance qu’autant qu’il y a paiement.
Voilà une première vérité sur laquelle nous ne pensons pas qu’on
élève des doutes.
�(
*9 )
Dès-lors, et avant de s’occuper des termes de l’acte du 29 Mars 1791,
la première chose à faire pour vérifier s’il est ou non une (¡uittance , c’est de voir si le sieur Granchier pouvait, le 29 Mars 1 7 9 1 ,
faire, aux sieurs Reynard et N allet, sur les deniers déposés dans ses
mains, un paiement valable, un paiement qui lui fut alloué dans le
compte qu’il aurait à rendre de ce dépôt.
Si nous prouvons la négative, il faudra bien convenir qu’il ne
s’agit p a s , dans l’acte du 29 Mars 179 1, d’une somme payée par
le sieur Grancliier, en sa qualité de dépositaire ; mais d’une somme
'avancée, prêtée par lui à ses risques et périls ; il faudra bien convenir
que cet acte n’est point une quittance, mais la reconnaissance d’un
emprunt.
Or , il est de toute évid en ce, que le sieur Grancliier ne pouvaitt
à cette époque du 29 Mars 17 9 1, payer valablement la créance des
sieurs Ileynard et Nallet contre le sieur Destrada.
Q u’était en effet le sieur Granchier? J1 était dépositaire judiciaire
de deniers appartenans au sieur D cstrada, et saisis par ses créan
ciers.
En cet é ta t, il n’y avait de paiement possible au profit de l’un
des créanciers, que d’après une convention faite entre eux, ou en
vertu d ’un jugement d’ordre.
U n principe si évident n’a pas besoin d’être confirmé par des
autorités. V o ic i, au surplus , comment il est rappelé dans le nou
veau Denizart :
« Il ne se fait pas toujours un ordre en toute règle du prix d’une
»
»
»
»
»
»
adjudication. Pour l’ordinaire, lorsque la somme consignée est
m odique, les créanciers, pour éviter les frais d’un o rd re, demandent aux juges qu’elle soit distribuée de concert entre eux,
suivant l’ancienneté de leurs titres. Dans ce cas , les créanciers
peuvent toucher sur la sentence qui intervient en conséquence,
et qui énonce les titres de ceux qui se trouvent utilement colloD quéfr. Mais lorsqu'il y a 1111 o rd re, le reoe\eur ne peut payer
5 *
�( 20 )
<( valablement qu’en vertu du jugement d’ord re, ou des mande» mens des commissaires et directeurs. » ( V . Consignation, §. (i,
n°. 5 . )
Nombre d’arrêts de règlement ont défendu aux receveurs des
consignations de payer par avance les créances dont la collocation
était demandée. Nous nous bornerons à rapporter celui du 18
Juini(H ) 5 , frelatif aux frais des procureurs , q u i, quoique privilé
giés , n’ont point été exceptés de la prohibition.
»
»
»
»
»
»
« La Cour fait défenses à tous les receveurs des consignations
de payer aucune somme de deniers aux procureurs, sur leurs
quittances, à compte et par avance des frais ordinaires et extraordinaires de criées , qui peuvent leur être d us, avant l’arrêt, sentence et jugement portant liquidation desdits frais, à peine contre
lesdits receveurs des consignations, de perte desdites som m es,
et de ne les pouvoir répéter contre lesdits procureurs, leurs liéri-
» tiers et ayant-cause ; et à l’égard des procureurs, d’interdiction
» et de io o liv. d’amende. » ( I b id , n°. 4 -)
Ainsi, au 29 Mars 17 9 1, rien ne pouvait légitimer un paiement
au profit des sieurs Reynard et N allet, puisqu’il y avait un ordre
ouvert, et que ce n’est que long-tems après que leur collocation
dans cet ordre a été prononcée.
A in si, point de titre de leur part pour exiger du sieur Grancliier le montant de leur créance ; point de possibilité pour lui de
la leur payer valablement. Ce qu’ils ont reçu, ils l’ont réellement
emprunté.
Sn;>p(s:>ns qu'immédiatement après leur avoir fait cette avance,
le sieur Granehiei dit d e loi ce de îendre compte du prix de la
terre de B riaillcs, lui aurait-on alloue dans ce compte les sommes
par lui remises aux sieurs Reynard et N allet? N o n , assurément.
Quel m oyen, en eü et, de justifier un paiement entre leurs mains,
quand il n’existait point encore de collocation à leur profit? L e
sieur Grauchier n’avait de tilre que contre eux 5 ce n’est qu’à eux
�( »> )
qu’il pouvait s’adresser pour se remplir de ce qu’il leur avait compté.
Comment donc ne pas reconnaître que c’était un prêt qu’il leur
avait fait?
Voyons encore ce qui serait arrivé, s i, en définitif, les sieurs
Reynard et Nallet n’avaient pas élé colloques. Est-ce à une action
contre eux que se seraient réduits les droits du sieur Destrada?
Est-ce lui qui aurait supporté la perte des sommes par eux reçu es,
s’ils se fussent trouvés insolvables? N o n , sans doute, se hâterat-on de nous répondre. Le sieur Destrada aurait actionné le sieur
Granehier ; il n’aurait tenu aucun compte de tout ce qui avait été
fait sans son consentement et sans autorisation de justice : c’eût été
au sieur Granehier à poursuivre à ses risques les sieurs Reynard
et N allet; c’est lui qui aurait perdu les sommes qu’il leur avait
com ptées, s’il eut été impossible d’obtenir le remboursement. M ais,
dès-lors, ne devient-il pas de plus en plus évident que c’était, de
sa p art, un p ro tê t non un paiement?
S ’il a été exprimé dans la reconnaissance du 29 Mars 171)1 , que
les sieurs Reynard et Nallet en avaient reçu le montant à valoir
sur leur créance contre le sieur Destrada ; s’ils se sont obligés à
faire allouer cette somme au sieur G ranehier, tout ce qui a pu
résulter de cette clause, dans la position où se trouvaient les parties ,
c’e s t , comme nous l’avons plusieurs fois ré p é té , une délégation'
imparfaite , une indication de paiement au profit du sieur Granehier.
L ’eilet de col te délégation était d’opérer, lors de la collocation
des sieurs Rivyuard et N allet, une compensation entre les sommes
que le sieur Granehier leur avait avancées , et celles qu’ils auraient
à exiger de lu i, en sa qualité de dépositaire.
11 fa IIait bien , pour lui donner celte garantie, une stipulation
expresse; autrem ent, il n’aurait pu opposer la compensation ; elle
n’est point admise en matière de dépôt.
Ce n’est qu’à l’instant de celte compensation , et jusqu’à concur
rence do la somme com pensée, qu’il y a eu paiement eh l’acquit
�( 22 )
du sieur Destrada , car ce n’est qu’alors que le sieur Grancliicr a pu
ee faire allouer celte somme dans le compte à rendre par lui du
montant de la consignation.
Mais évidem m ent, . pour que cette compensation s’opérât , il
fallait qu’au moment'clfe la collocation des sieurs .Roynard et N allet,
il existât encore des deniers déposés entre les mains du sieur Gran<’liier; autrement il restait leur créancier, sans être leur débiteur;
plus de compensation possible.
Il n’y a donc eu compensation des sommes avancées par le sieur
Granehier; il n’y a eu paiement par ses mains, en l’acquit du sieur
D estrada, que jusqu’à concurrence de la première collocation.
Point de com pensation, point de paiement de la seconde col
location , puisqu’à l’époque où elle a été prononcée, les assignats
laissés en dépôt pour l’acquitter, avaient péri ; puisque le sieur Granchier n’avait plus dans ses mains de valeurs sur lesquelles pût
s’exercer la délégation consentie à son profit.
Cette seconde collocation est donc restée due aux héritiers Reynard et N aliet; le paiement qui leur en a été fait par le sieur
D estrada, a donc une cause réelle et légitime; ils ne peuvent donc
être tenus de restituer la somme qu’ils ont reçue.
Comment le tribunal de Riom a-t-il pu méconnaître des principes
si élém entaijes, des conséquences si évidentes?
Parcourons scs m otifs, et relevons ses erreurs.
Pour établir que l’écrit du 29 Mars 1791 est une quittance, le
tribunal dit d’abord : « Que cela résulte de la teneur et du contexte
» de l’acte, qui ne peut, suivant lu i, recevoir d’autre interpré« tation. »
C ’est s’arrêter à la superficie ; c ’est ne voir que la lettre de
l’acte, tandis qu’il fa u t, avant tou t, en rechercher l’esprit et en
apprécier les clfeLs.
Quelle règle plus certaine en matière d’interprétation , que celle
�( aS y
qui veut que les tenues d’un acte soientf expliqués dans le sens
ou il peut être valable ?
Qu’importe donc que l’on trouve dans l’acte du 29 Mars 17 9 1,
des expressions en usage dans les quittances , s i , comme nous l’a
vons dém ontré, le sieur Grancliier ne pouvait alors, valablement,
ni payer, ni par conséquent obtenir quittance.
Dans une telle position, de quelque manière que l’acte soit conçu,
n’est-il pas impossible de v o ir , dans le prétendu paiem ent, autre
chose qu’un p r ê t, et dans l’imputation convenue, autre chose qu’une
délégation?
Non-seulement l’a c te , quoiqu’en aient dit les premiers juges ,
reçoit très-naturellement cette interprétation ; mais elle est la seule
qu’avouent les principes.
Aati'e m otif du jugement.
« L ’acceptation que fit le sieur G ranchier, de cet acte; car il
» est, dit-il, évident qu’il entendit que cet acte opérerait sa libe—
» ration dans l’ordre envers le sieur Destrada , jusqu’à concurrence
» de la somme de i 55 ,ooo fr. »
L e sieur Granchier entendit que cet acte opérerait sa libération!
S o it; m ais, envers quelle personne, à quelle époque, et dans quel
cas? Envers les sieurs Reynard et Nallet seulement, ou leurs ayantcause, à l’époque où il pourrait leur faire un paiement valab le,
c’est-à-dire, après leur collocation, et dans le cas où il serait encore
a’o .s dépositaire d’une somme dont il aurait à justifier l’emp’oi.
O r , plus de dépôt lors de la seconde collocation; plus d’emploi
à faire d’assignats démonétisés.
E t ainsi, les circonstances dans lesquelles l’acte du 29 Mars 1791
aurait pu être employé comme quittance de la seconde collocation
ne se sont point réalisées.
Il n’est devenu l’équivalent d’une quittance que jusqu’à concur-
�1
( 24 )
ronce du montant de la première collocation. J1 est reste', pour
le surplus , ce qu’il était originairement pour le tout; c’est-à-dire,
une reconnaissance au profit du sieur Granchier , et la seconde
collocation n’a pas cessé d’être due par le sieur Destrada.
Troisième motif.
« L ’action en recours , qui a été formée par le sieur Grancliier
»
>i
«
»
contre les Reynard et jNiallct, afin qu’ils fussent tenus de lui
faire allouer cette somme de la part du marquis Destrada, lorsque
ce dernier a demandé au sieur G ran ch ier, le compte de la
somme de 5 ( ii, 85(> fr ., qui avait été versée dans ses mains. »
Toujours le tribunal confond les deux collocations, toujours il
étend à la seconde ce qui ne peut s’appliquer qu’à la première.
Quel a été l’objet du recours du sieur G ranchier, contre les
héritiers Reynard et ÜNallet? Quelle justification, quelle déclaration
leur a-t-il demandée? Il a demandé qu’ils vinssent justifier de leur
première collocation , et déclarer qu’ils en ont été payés, au moyen
de la compensation opérée jusqu’à due-concurrence, avec la somme
de 1 55 ,ooo fr. qu’il leur a prêtée; mais en même tems , il a con.
clu contre eux au remboursement de l’excédent de cette somme
de i 55 ,ooo f r ., sur le montant de leur première collocation. Pour
quoi? P a r c e que cet excédent n’a pu s’imputer sur la seconde collo
cation.
IS’est-il pas étrange que le tribunal lire de l’action du sieur Granchicr , la conséquence qu’il a regardé la seconde collocation comme
payée d’avance, aussi-bien que la prem ière, lorsque cette action
à précisément pour base le système contraire ?
Quatrième motif.
« L ’interrogatoire sur faits et articles du sieur Granchier qui a
„ ou lieu le «y mars 18 11 , et dans lequel le sieur Granchier a dit
�( ■=5)
» que les sieurs Reynard et N allet, peu de tems après la consigna» tion ,s ’etant présentés chez lui et s’annonçant créanciers de sommes
)> considérables dues au marquis D estrada, ils avaient prié le sieur
» Granchier de leur prêter des fonds à valoir sur leurs créances ’
» et que ledit sieur Granchier pourrait se retenir dans l’ ordre quj
» devait être fait ; il avait prêté 1 55 ,ooo fr. en assignats tels qu’il les
» avait reçus peu de tems auparavant. »
Le sieur Granchier a déclaré qu’on était venu le prier de prêter
des fo n d s qu’il pounnit se retenir dans Fordre, et qu’il avait prêté
1 55 ,ooo fr.
E h bien ! y a-t-il là autre chose que ce que nous y avons tou
jours vu ; un emprunt avec délégation
Comment de cette déclaration , que le sieur Granchier a prêté ,
le tribunal a t-il pu conclure que le sieur Granchier a payé et que
le titre qui lui a été donné n’est pas la reconnaissance d ’un prêt
mais une quittance ? c’est ce qu’il ne nous parait pas facile de com
prendre.
Il nous semble que , pour répondre à ce m o tif, il suffit de l’op
poser à lui-même.
» Le sieur Granchier, ajoute le jugement, reconnaît encore cet
» acte pour quittance , quant à la première collocation des héritiers
» Reynard et Nallet de la somme de 75,7(19 f r ., et il ne peut y avoir
» aucune raison pour que le même acte ne tienne pas lieu de quit» tance de la deuxième collocation, parce qu’il n’y a aucune distinc» tion dans cet acte, et que la somme de 1 55 ,000 fr. couvre l’une
» et l’autre des deux collocations. »
Point de raison pour que l’acte ne tienne pas lieu de quittance de
la seconde collocation comme de la première ! mais il y a au con
traire pour cela une raison tranchante, c’est que la compensation
qui s est opérée lors de la première collocation n’était plus possible
lors de la seconde,
4
�*j
«
(»6 )
P oin t clc distinction dans l ’acte ! Mais la distinction résulté do lit
nature m:"me des choses; elle résulte de l’événement de force ma
jeure survenu dans l’intervalle des deux collocations , et de l’impos
sibilité absolue que l’acte eût pour la seconde les mêmes effets que
pour la prem ière.
» L e marquis D estrada, continue le tribunal, en allouant l’acte
» du 29 Mars 1791 , pour la somme entière des 155 ,000 fr. se l’est
» rendue propre, et il avait droit de s’en emparer, puisque le mon» tant de cet acte provenait de ses fonds.»
L e marquis Destrada n’est pas le maître de s’emparer d’un acte où
il n’a point été partie, d’un acte qui ne pouvait faire titre vis-à-vis de
lui tant qu’il n’y avait point de collocation prononcée , et qui n’a pu
faire titre vis-à-vis de lui pour la seconde collocation puisque , lors
qu’elle a été prononcée , les deniers destinés à la payer n’existaient
plus.
Que le montant de cet acte provînt de ses fonds, c’est ce que rien
ne constate; mais quand on le supposerait, dès-lors que le sieur Granchier tirait celle somme de sa caisse à ses riques, dès - lors qu’il
pouvait être forcé en recette pour cette somme, tant que les sieurs
Reynard et Nallet n’étaient pas colloqués , dès-lors que cette somme
devait être perdue pour lu i, s’ils n’étaient'pas colloqués et ne pou
vaient la rem bourser, il reste constant que c’était un prêt qu’il leur
faisait, que ce prêt ne pouvait devenir un paiement qu’à l’instant de
leur collocation, et par compensation avec ce qu’illc u r devrait alors,
et que ce prêt n’a pu devenir un paiement quant à la seconde col
location , puisqu’au moment où elle a été prononcée, il n’y avait,
plus de compensation possible.
En soutenant , comme nous l’avons fait, que l’acte du 29. Mars
17«)! ne peut être considéré que comme une reconnaissance au pro
fit du sieur Grancliier , on arrive, s’il faut en croire le tribunal, « à
des conséquences subversives de tous les principes : il implique»
�(
»
»
»
»
27
)
rait, dit-il, de supposer que les assignats qui furent consignés auraient péri pourlepropriétaire, et qu’il en aurait été autrement pour
le receveur à qui sa qualité de dépositaire ne pouvait pas permetIre de s’arroger les objets qui lui étaient confiés, h
Nous croyons avoir prouvé que c’est le système du tribunal qui
est subversif des principes.
E t quant aux considérations d’équité, nulle preuve comme on l’a
déjà fait observer, que les fonds prêtés aux sieurs Reynard et Nallet
fussent pris sur la consignation faite par l’acquéreur de la terre de
lîriailles, qu’ils n’app;ulinssent pas au sieur Granchier, ou ne pro
vinssent pas d’autres consignations.
Mais en raisonnant dans l’ hypothèse gratuitement admise par le
tribunal, c’est d’ailleurs de sa part une erreur manifeste que de dire
que le sieur Granchier 11e pouvait disposer des fonds versés dans sa
caisse ; il est constant au contraire que celte faculté était positive
ment attribuée aux receveurs des consignations, par les réglemens
concernant leurs offices , à charge par eux de représenter, lorsqu’ils
en seraient requis, les sommes dont ils étaient com ptables; qu’y
aurait-il donc de si étrange, de si injuste que le sieur Granchier eût
tiré un avantage d’une opération faite à ses risques? De quoi vient
se plaindre le sieur Destrada ? En quoi son sort a-t-il été aggravé ?
Si le sieur Granchier n’eût point voulu courir de chance, s i,
comme il le pouvait, il eût attendu que les sieurs Reynard et Nallet
fussent colloques, pour leur remettre le montant de leurs colloca
tions , les deniers laissés en ses mains pour faire face à la seconde
co.location ne seraient-ils pas restés consignés jusqu’à la démoné
tisation des assignats? N ’auraient-ils pas alors péri pour le sieur Des
trada? Ne serait-il pas resté débiteur de cette seconde collocation ?
Comment le résultat serait-il différent, parce que le sieur Granchier
a pris sur lui de faire personnellement et à ses risques une avance
�o
( aS )
aux sieurs Reynarct etN allet, avance que le sieur Destrada aurait bien
certainement me'connue et laissée pour le compte du sieur Grancliier , s’il eût trouvé à cela le moindre avantage.
E st-il juste que le sieur Destrada puisse invoquer aujourd’hui un
acte qui lui est étran ger, un acte que dans des circonstances diffé
re n t's , il n’aurait pas manqué de rejeter ?
Non, une telle prétention n’est pas plus conforme à l’équité qu’aux
règles du droit.
Concluons donc que le montant de la reconnaissance du 29 Mars
1791 , 11e s’est point imputé sur la seconde collocation , que le sieur
Destrada était encore , en l’an i 5 , débiteur de cette seconde col
location, et qu’il 11e peut revenir sur le paiement qu’il en a fait.
§ II.
Quelque certaine , quoiqu’évidente que soit la proposition que
no; s venons d’établir, abandonnons-la pour un instant, admettons
que les sommes avancées par le sieur Granchier aux sieurs Reynard
et Nallet se sont imputées sur les deux collocations, que c’est par er
reur qu’on a supposé dans la transaction du 21 Germinal an i 5 ,
qu’il n’avait rien été payé sur la seco n d e, et v o y o n s, dans cette
hypothèse , quel sera le sort de cette transaction.
F a u t-il, comme l’a jugé le tribunal de Riom, que cette transaction,
anéantie en tant qu’ellepréjudicie au sieur Destrada , subsiste en tant
qu’elle lui est favorable? Faut-il, en condamnant les héritiers Rcynard à lui restituer ce qu’il a payé, maintenir la réduction de leur
créance, les sacrifices consentis par eux en considération de ce
paiement?
Dès le premier abord on sent que ce système est injuste; on en
est convaincu lorsqu’on l’examine.
�rv
/
(
29)
L'équité veut que, si l’erreur de fait dans le paiement donne lieu
à restitution, cette même erreur soit une cause de nullité dans la tran
saction.
C ’est là un principe consacré par la législation de tous les tems et
auquel l’article 20*55 du Code civil n’a fait que donner une sanction
nouvelle.
« Une transacliou , dit cet article, peut être rescindée lorsqu’il
» y a erreur dans la personne ou sur l'objet delà contestation. »
Venons à l’application. Quelle question s’est élevée entre les par
ties , lors du traité du a i Germinal an i 5 ? Sur quoi ont-elles tran
sigé ?
De part et d ’autre on est parti de ce point de fait que les héritiers
Reynard et Nallet n’avaient rien reçu sur lu seconde collocation.
Si c’était une erreur, elle était commune aux deux parties. L e tri
bunal de Rioin l’a positivement déclaré. L ’acte du 29 Mars 1791 ,
souscrit par le sieur R eyn ard, seul, était resté jusqu’alors entreles
mains du sieur G rjnchier. Son contexte n’étaitpas plus connu des hé
ritiers Reynard et Nallet que du sieur Destrada lui-même. Us n’en
savaient que ce que leur en avait dit le sieur Granchier. Ils ne dou
taient pas, d’après les explications qu’il leur avait données, qu’ils ne
fussent en même temps et ses débiteurs et créanciers du sieur Des
trada.
Dans cette position , il s’agissait de savoir qui devait supporter la
perte des assignats laissés en dépôt pour faire lace à la seconde col
location , et démonétisés avant qu’elle fut prononcée.
Le sieur Destrada prétendait que les héritiers Reynard et Nallet
devant, aux termes du jugement du iG Pluviôse an 5 , être payés
avec les assignats consignés, ces assignats étaient leur chose etavaient
péri pour eux.
Les héritiers Reynard et Nallet soutenaient au contraire que le
�( 3o )
/rieur "Destrada restaitpropriétaire des deniers déposes j su qu’an paie
ment effectif, et qu’ils avaient péri pour lui.
Voilà l’effet de la contestation.
L e sieur Destrada ajoutait, il est vrai, qu’il pouvait encore ap
peler du jugement du i(> Pluviôse an 5 ; mais dans la réalité il n’atta
chait aucun prix à cette faculté, puisque c ’est précisément sur les
dispositions île ce jugement qu’il fondait sa prétention de faire re
tomber la perte des assignats sur les héritiers Reynard et Nallet.
Nous ne disons rien qui ne soit écrit dans la transaction. V oici
dans quels termes elle explique les difficultés qui divisaient les
parties :
« Dans cet état le sieur Destrada a
» nard et le sieur îia lle t ne pouvaient
» contre lu i, que suivant les termes
» tm '5 , ils devaient être payés sur les
prétendu que les héritiersReyexerc<ir aucune action directe
âu jugement du itî Pluviôse
deniers consignés par l’acqué-
» reur de la terre de Briailles , et qu’il s’était formé à ce sujet un
» contrat judiciaire et irrevocable.
'« Le sieur Destrada ajoutait que ce
n’était pas sa Tante si 1ns
» valeurs remises ou receveur des consignations étaient péries, et
» qu’il ne pouvait sonffrir du coup de la force majeure, puisque c’é»
«
»
»
tait par le fait de l’opposition des créanciers que le prix avait été
consigné ; que la collocation utile avait un effet rétroactif et qu’ elle
faisait réputer le créancier propriétaire du jour de la consignalion. »
» Ledit sieur Destrada 'observait d’nillcitrs qu’il était encore dans
» le« délais d ’appeller du jugement du iG Pluviôse an 5 , qui avait été
» rendu par défaut contre l u i , et qu’il pourrait le faire réform er, en
» r e ■qu’il avait accordé «les indemnités excessives.
» Lesenfans Reynard objectaient que si le sieur Destrada usait de
» la faculté de 1’a p p d , il ne ferait que renouvcller-et prolonger d’une
�A ?*
(5 0
» manière nuisible pour lu i, une contestation dans laquelle îî serait
» toujours condam ne, parce que rien n’était mieux établi que les in» demnités qu’il devait aux ferm iers, et qui avaient été fixées et li)> quidées par plusieurs rapports d’experts faits avec le plus mûr
» examen; que quant au contrat judiciaire, le jugement n’a pas pu
» ordonner leur paiement dans une monnaie qui n’avait plus de cours,
» que la perte des assignats consignés ne pouvait sous aucun rapport
»■leur être im pulée, qu’elle n’avait eu lieu que par Je fait même du
» sieur Destrada , et par la demeure où il avait été de payer ses créair
». ciers ; que les oppositions hypothécaires que ceuxrci avaient for» mées n’avaient, été de leur part qu’une mesure conservatoire quj
» leur donnait une sûreté de plus, mais qui ne les avait pas rendus
» maîtres de disposer du dépôt tant qu’un jugement ne les y aurait
» pas autorisés ; qu’ ainsi la perte qui était survenue demeurait né» cessairement pour le compte du sieur Destrada , qui n’avait pas
»
»
»
»
»
»
cessé d’être leur débiteur, qui. avait conservé la propriété de la
chose déposée , et qui ne pourrait être libéré que par la distributîon effective ; qu’au surplus le sieur Destrada avait toujours pu
faire cesser les oppositions et reprendre les sommes consignées eir
désintéressant les-créànciers , et qu’au, lieu d e ce la , il avaitprolongé lui-même les contestations , en profitant de toute lav longueur
)> des- délais après lesquels il s’était laissé condamner par défaut.
» Dans cet état, les parties considérant que les prétentions respecj> tives pouvaient les jeter dans un procès long et dispendieux , se
» sont rapprochées , etc.
On voit que, comme nous l’avons dit, le point de difficulté, l’objet
de la transaction éLail de savoir qui devait supporter la perte d«s assi
gnats restés en dépôt, et frappés par la démonétisation.
O r, nous le demandons , cette conteslationaurait-ellc pu s’élever;
y aurait-il eu matière à transaction, s’il eût été reconnu en fait que
�* ,
( 3 0
les héritiers Reynard ét Nallet avaient reçu d’avance le montant de
leur seconde collocation? j\on assurément.,non; car alorsles assignats an
lieu d’être restés en d é p ô t, se trouvaient avoir été utilement em
ployés , avant la démonétisation; ils n’avaient point péri dans la
caisse du receveur, il ne pouvait donc être question de savoir pour
qui ils avoient péri; nulle discussion sur ce point, nulle matière à
transaction.
Il y aurait donc e u , dans l’hypothèse très-subsidiaire où nor*
raisonnons, erreur sur l’objet de la transaction ; elle serait rîidicalem ent nulle, et ainsi tomberait la clause portant réduction de la
créance liquidée au profit des héritiers Reynard et N allet, par le
jugement du i(» Pluviôse an 5 . Les premiers juges l’ont cependant
maintenue cette clause, et pourquoi? Uniquement parce que ce juge
ment de l’an 5 était susceptible d’appel.
Combien de réponses à ce motif! E t d’abord, bien qu’il soit parlé
dans le traité du a i Germinal an i 5 de la possibilité d’un appel de
la part du sieur D estrada, n’cst-il pas évident que, dans la pensée des
parties, ce n’était point là le véritable objet de la tranasetion ?
Quel espoir pouvait avoir le sieur Destrada de faire réformer ce
jugement? T outne se réunissait-il pas au contraire, pour garantir aux
héritiers Reynard et Nallet que les condamnations qu’ils avaient ob
tenues, si elles étaient attaquées, seraient augmentées plutôt que
restreintes?
Il était constant que les fermiers avaient déboursé avant leur en
trée en jouissance, un capital de 72,000 fr.
Il était constant qu’ils avaient fait, dans les batimens et dans les
fon d s, des réparations énormes autorisées par un jugement.
Il était constant que, par sa déloyauté, M. Destrada les avait forcés
�ïïf
( 55 )
à demander la résiliation de leur b ail, qui, contracté pour dix-huit
années, n’en avait duré que deux, etqu’il leur était du. des indemnités
proportionnées aux dommages que l’inexécution de ce bail leur avait
causés.
J1 était constant qu e, par un premier jugem ent, leurs répétitions
avaient été fixées à 207,000 avec intérêts à dater du Ier. Décembre
1789; et quoique les bases de cette évaluation eussent souffert des
modifications, ce 11’en était pas moins un préjugé favorable pour eux.
Qu’avaient donc à redouter, ou plutôt, que n’avaient pas à espé
rer les ferm iers, d’une attaque dirigée contre le jugement du 0 Plu
viôse an 5 , qui ne leur accordait pas même les sommes qu’ils avaient
déboursées ?
Le sieur Destrada n’aurait donc eu garde d’interjeter cet appel.
C ’eût été d’ailleurs ruiner par sa base, le système dans lequel il met
tait toute sa confiance, celui qui consistait à soutenir que les héritiers
Reynard et Nallet ne pouvaient exiger autre chose, en vertu du ju
gement de l’an 5 , que les assignats restés en dépôt et affectés à leur
paiement. Sur quoi en effet le sieur Destrada fondait-il ce système?
Sur les dispositions de ce même jugem ent, sur le contrat judiciaire
qui, suivant lui , s’était alors formé; mais commentpouvait-i! y avoir
contrat judiciaire, s’il n’y avait point acquiescement du sieur Des
trada? L ’appel n’exeluait-il pas les prétentions appuyées sur le jugegement? Concevra-t-on que, dans le moment même où le sieur Destrada
soutenait que la collocation des héritiers Reynard etN allet avait eu
l’effet de le libérer avec des assignats sans va leu r, il remît en ques
tion cette collo calio n ;.il provoquât une liquidation nouvelle, dont
le montant devait, être nécessairement payable en numéraire? Concevra-t-onque, pour obtenir une simple réduction de sa dette, il ap
pelât d’un jugement d’où il prétendait faire résulter son entière li
bération? Non sans doute , on n’admettra point de sa part une conti -
�(
34)
diction si évidente, un si étrange oubli de ses prétentions et de son
intérêt. La faculté qu’avait le sieur Destrada d’interjeter appel n’a
donc été d’aucun poids dans Ja transaction ; l’unique difficulté, nous
le répétons , était de savoir pour qui les assignats avaient péri ; et
s’il n’était pas vrai qu’ils eussent p é ri, si cette difficulté ne pouvait
s’élever, la transaction ne peut être maintenue.
20. En supposant même que l’appel qui pouvait être formé par
le sieur Destrada ait été l’un des élémens de la transaction, l’un des
motifs qui ont déterminé les héritiers Reynard et Nallet à la con
sentir , au moins faudrait-il reconnaître que ce n’était là qu’un mo
tif bien accessoire , bien subsidiaire ; toujours serait-il vrai qu’il y au
rait eu erreur sur la question principale, sur l’objet essentiel de la
transaction; toujours y aurait-il nécessité de l’anéantir.
La transaction étant réputée non avenue, les créances des h é
ritiers Reynard resteraient telles qu’elles ont été fixées par les
jugernens des I er. thermidor an 2 et iG pluviôse an 5 , et sur ces
créances viendraient s’imputer les sommes qu’ils ont reçues, tant
du sieur Granchier que du sieur Destrada. Ce serait l ’objet d’un
compte à régler entre les parties.
Pour quelle somme entrerait dans ce compte la reconnaissance
dite du 29 Mars 1791 ?C en e serait certainement pas pour les i 55 ,ooo fr.
qu’elle énonce, s’il est constaté que les Reynard et Nallet n’ont
pas réellement reçu la totalité de cette som m e, et qu’elle se com
pose en partie d’intérêts.
U s e ra it, en effet, par trop étrange de les forcer à tenir compte
des intérêts de ce qui leur était dû , de ce qu’ils auraient reçu en
paiement d’une créance portant elle-même intérêts.
O r, il est constant qu e, dans les i 55 ,ooo fr. énoncés dans la
reconnaissance du 29 Mars 1791 , il entre pour i 5 ,ooo fr. d inté
rêts. C ’est ce qui résulte positivement de la lettre du sieur Reynard, du
G A vril 1792 , de celledes sieurs Reynard et N a lle t, du
5 Mai 1795?
�7
//
(35)
de l’arrête de compte fait entre les sieurs Reynard et Granchier, le
6 JNivose an 5 , toutes pièces ayant acquis date certaine par le
décès du sieur Reynard, et faisant pleine foi contre le sieur DesIradat
Il ne pourrait donc y avoir que 120,000 fr. imputables sur les
créances des héritiers Reynard et JNallet.
Mais c ’est trop s’arrêter à une supposition inadmissible. Il est
tcms de revenir au véritable état de la question , et de rappeler que
l ’opération qui a eu lieu entre le sieur Granchier et les sieurs R ey
nard et N allet, n’a eu pour objet qu’un emprunt de la part de
ceux-ci; qu’il est impossible de le considérer autrement, puisque
les uns et les autres n’ont pu faire que ce qui n’était pas défendu
par les lois ; or la loi défendait expressément aux reçcveurs des
consignations de faire des paiemens par anticipation, au lieu qu’ils
étaient autorisés p a rle s règlemens et déclarations R oyales, à faire
valoir à leur profit les fonds de leurs caisses.
Dès-lors, les sieurs Reynard et Nallet ont pu emprunter lieiteteinent au receveur Granchier ; mais ils n’ont pu recevoir de
paiemens sur la somme consignée, qu’au moment où leur créance
a été liquidée, etaprès que la justice 1 a eu ordonné. E t comme leurs
doinm ages-intérets n’ont etc liquides qu en 1 an 5 , qu’a cette époque
les assignats consignés étaient dém onétisés, ils n’ont donc pu re
cevoir alors aucun paiement du receveur , ni faire avec lui aucune
compensation. Leur créance pour cette partie était entière, et M. le
marquis Destrada restait indubitablement débiteur de cette deuxième
collocation.
A insi, il n’y a point eu erreur dans la transaction, et cet acte
oppose un obstacle invincible aux prétentions du sieur Destrada.
§
III.
.Nous arrivons h la demande du sieur Granchier, et sur ce point,
�( 56)
nous nous bornerons à peu de mots , parce que rien n’est plus simple
que notre défense.
S i , contre toute attente, le système du sieur Destrada pouvait
prévaloir; s’il était jugé que lui seul a droit de s’emparer de l’acte
du 21) Mars 1791,11011s n’aurions point à nous occuper des con
clusions du sieur Granchier. Loin d’être créancier des héritiers
Reynard et N allet, il devrait leur restituer les 9,000 fr. qu’ils lui
ont comptés.
Mais telle ne sera p o in t, telle ne peut être la décision de la
Cour.
Il faut donc voir ce que peut réclamer le sieur Granchier,
comme personnellement créancier de l’excédent des 1 35 ,000 fr .,
sur le montant de la première collocation.
Ce qu’il peut réclamer! Mais , est-ce encore là une question ? Tout
n’est-il pas réglé à cet égard? Comment le sieur Granchier ose-t-il
revenir sur des conventions formelles?
Par une première convention faite en i 8 o 5 , sa créance a été fixée
à 1 5 ,ooo fr. ; sur quoi il lui a été payé 9,000 fr. La preuve s’en
trouve dans ce fait, reconnu par lu i, qu’il s’est alors dessaisi de
son titre , qu’il l’a déposé entre les mains du fondé de pouvoir des
héritiers Reynard.
E l qu’on ne s’étonne pas qu’ une créance s’élevant en valeur
nominale à (>1,000 f r ., ait été réduite à 1 5 ,000 fr. ; c’était encore
plus que le sieur Granchier ne pouvait rigoureusement exiger.
Les prétentions étaient réglées par l’article 22 de la loi du iC> N i
vôse an 0 5 relatif aux comptes-courans pendant la durée du papiermonnaie.
Suivant cet a rticle, si le débiteur, par compte-courant, justifie
qu’il a tenu les fonds à la disposition du créan cier, il n’est tenu
�( 37 )
<pic do vendre on même nature ce qu’il a reçu, ou sa valeu r, sui
vant l’échelle , à l’époque de la suppression des assignais. Dans le
cas contraire, le solde du compte est réduit d’après l’éch elle, u
l’époque où le compte aurait dû être arrêté et soldé.
O r, il y avait compte-courant entre les sieurs Reynard et Nallet et
le sieur Granchier; c’est ce qui est prouvé par l’arrêté de compte
du 0 Nivôse an 5 , où l’on voit que les intérêts se capitalisaient
chaque année.
C ’était donc à l’époque de cet arrêté de com pte, qu’il fallait se
fixer pour opérer la réduction , et les assignats perdaient alors
82 pour 100.
Ainsi , la créance du sieur Granchier valait à peine 12,000 fr.
Néanm oins, abusant, et du défaut de preuve écrite du règlement
fait avec lu i, et des dispositions conciliantes des héritiers Reynard,
il ne craignit pas de leur demander i),45 o fr- au lieu de (>,000 f r .,
qui lui restaient dus.
Cette somme lui fut allouée; et cette fois, la convention fut
constatée par écrit, non pas , il est vrai, dans un a cte , mais dans
une correspondance tout aussi positive.
Le sieur Granchier écrivait au sieur P ag ès, à la fin d’A vril 1806 :
« Je me contenterai définitivement de 9 / p o f r . et des f in is que j ’ai
« avancés. »
i l lui disait encore , le 5 Mai suivant : « Pour la dernièj'e f o i s ,
» j e demande g , 45 o f r . et les fra is d ’inscription} ou rien. »
L e sieur Pagès lui répond it, le 10 du même m ois, qu’il accédait
à sa dem ande, et qu’il envoyait au fondé de pouvoir des héritiers
Reynard la somme nécessaire pour compléter les 9,45o fr. deman
des , et cette somme a é t é , plus d’une année, déposée chez le
sieur A lb e r t, banquier à Ilio m , et tenue ù la disposition du sieur
Granchier.
�C 38 )
Ainsi , proposition d’une part, acceptation de l’autre : voilà Lien
le contrat irrévocablement forme'.
E t d elà, une fin de non-recevoir, irre'sistiLle contre les prétentions
actuelles du sieur Granchier.
Si l’absence d ’un acte en forme pouvait laisser quelque doute
sur l’existence de ce co n trat, au moins ne serait-il pas douteux que
les lettres du sieur Granchier n’oifrent un commencement de preuve
par écrit, plus que suffisant pour faire admettre la preuve testimo
niale. Mais , faudra-t-il en venir à cette extrémité?
Les héritiers Reynard ne feront point à M. Granchier l’injure
de croire qu’il se respectera assez peu pour tenter, sans succès, de
manquer à ses engagemens.
Il
n’est pas inutile de rappeler à la suite de cette discussion ,
que la fortune des auteurs des appelans a été entièrement compro
mise par le fait seul du sieur marquis Destrada , père ; que c’est après
avoir été traînés, pendant plus de trente ans, de tribunaux en tri
bunaux , que les héritiers Reynard se sont rapprochés du sieur
marquis Destrada, fils; et que c’est pour éteindre toutes dissensions
entre e u x , qu'ils ont consenti, et qu’ils croyent avoir réellement
fait d’inonnes sacrifices, par la transaction du ix A vril i 8 o 5 ( 2 1
Germinal an i 5 ).
L e sieur marquis Destrada, égaré par une illusion trompeuse,
voudrait-il cesser dYtre juste envers deux familles qui lui ont aban
donné plus de la moitié d’une créance légitim e? Méconnaîtrait-il
assez ses propres int rets pour vouloir, après trente-cinq an s, recom
mencer un procès, et remettre en question ce qui a été décidé par
la sentence du iO Pluviôse an 5 ? Les héritiersIJeynard 11e dissimu
leront pas qu’ils verraient avec beaucoup de peine celte lutte se
renouveHer; mais ils h» soutiendraient avec persévérance, parce
que le succès ne pourrait eu être douteux.
�( 39)
Au surplus, ils espèrent que ce ne sera pas en vain qu’ils auront
réclamé auprès des Magistrats, supérieurs en lumières comme en
autorité, la réformation d’un jugement qui a consacré l’infraction
d’un acte solennel.
Joseph
PAGES ,
Pour la dame R e y n a r d , son épouse, et pour les autres co-intéressés.
M e. P A G E S , p è r e , A vocat plaidant
Me. GAR RO N , jeune , Avoué.
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Reynard. 1816?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès Joseph
Pagès père
Garron jeune
Subject
The topic of the resource
assignats
fisc
créances
ventes
domaines agricoles
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
receveur des consignations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les héritiers Reynard et Nallet, appelans ; contre le sieur Marquis Destrada, intimé, et le sieur Granchier, ancien receveur des consignations.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1816
1789-1816
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2424
BCU_Factums_G2425
BCU_Factums_G2426
BCU_Factums_G2427
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
fisc
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
ventes
-
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64554d5741fd2bf8bbf1f7480bb9a950
PDF Text
Text
«
COUR
M
É
M
O
I
R
E
IMPÉRIALE
DE R IO M .
EN
R E P O N S E
i . re C h a m b r e .
POUR
L e Sieur
J e a n - J oseph
J O U B E R T , intimé;
C O N TR E
L e Sieur J
ean
-
Jo sep h
C O U R B Y -C O G N O R D ,
appelant.
l
e
sieur Courby-Co gnord a fait gémir deux fois la
presse pour défendre, suivant lui, son honneur et sa
libellé.
En appelant ainsi l’attention publique, il a du se
proposer d’établir que sa conduite était à l’abri de
toute censure, et qu’il était injustement l 'o bjet d’une
demande en stellionat.
Mais ce bu t, louable en lui-mêm e, s’il était inspiré
par un sentiment noble, a-t-il été rempli?
L e sieur Courby a-t-il dissipé les soupçons que font
naître ses propres dires? s’est-il lavé des inculpations
�( 2 )
qui'lui ont élé faites? a-t-il mérité, a-t-il obtenu les
suffrages flatteurs de l’opinion et l’approbalion hono
rable de la Cour ?
«
C ’est ce que l’avenir apprendra.
On reproche amèrement au sieur Joubert d’avoiu
méconnu les droils du sang et les devoirs d’une
affinité religieuse; de s’être montré en n e m i, tandis
qu’il devait être protecteur.
Mais ces titres qu’invoque le sieur Courby-Cognord,
ne les a-t-il pas violés cent fois lu i- m ê m e , en abusant
de l’affection de son oncle pour se procurer des res
sources et fournir à ses dissipations; en se débarras
sant, par des moyens frauduleux, de dettes énormes,
pour en charger celui qui le traitait en père ; en ob
tenant chaque jour de nouveaux sacrifices sous la foi
de ventes trompeuses ou de gages illusoires; en en
levant à ce créancier légitime , par des manœuvres
obliques, la possibilité de récupérer la moindre partie
des deniers quJil a su lui arracher; en empoisonnant
enfin, par la plus noire ingratitude, ses nombreux
bienfaits, du fiel de la calomnie.
Et il ose après c e l a , réclamer sa tendresse et sa
bienveillance !
Les motifs du sieur Joubert, qui n’avait pas cru
devoir répondre
au premier cartel de son n e v e u ,
n ’ont pas été appréciés par celui-ci : enhardi par cet
acte de modération, il n ’a pas craint d’avancer, contre
son oncle , des imputations odieuses et les plus h a
sardées.
Dans la nécessité de faire connaître à la Cour l’origine
�(3)
et les détails de la cause soumise à sa décision, l e —
sieur Joubert prouvera qu’il respecte encore les liens
qui rattachent à son adversaire, en se dispensant de
dérouler un tableau dont lui-même aurait à rougir,
et en se bornant à présenter les faits dans toute leur
pureté.
Père d’ une famille nombreuse, propriétaire d’une
fortune • assez considérable et liquide, éloigné des
affaires: auxquelles il est parfaitement étranger, et
n’ayant d’autre occupation que celle de faire valoir
ses propriétés rurales, le sieur Joubert vivait heureux
à la campagne qu’il habite, lorsque son repos a été
troublé,' ’sa1"fortune ébranlée par ses relations avec
le sieur Courby-Cognoi’d.-1
‘ :i
rf Celui-ci , qui était entré dans le monde sous des
auspices assez brillans relativement à la fortune, et
que quelques succès dans les affaires avaient aveuglé,
ne crut pas la ville d e Thiers un théâtre assez vaste
pour ses spéculations. Il transféra son domicile à Clermont, où beaucoup de causes, qu’il est mutile de rappe
ler , le jetèrent dans la gène et dans un discrédit absolu.
Pour couvrir ce que peuvent avoir de répréhen
sible ses dissipations, le sieur Courby en indique la
source dans la piété filiale; si on veut l’en croire,
les secours qu’il a prodigués à son père ont préparé
sa ru i rie.
. Serait-ce par oubli que le sieur Cou rby a
tu le
prix qu ’il mettait h ses bienfaits envers son père?
ils furent considérables sans doute, ces bienfaits, puis-
�que ce dernier, accablé de leurs poids, n’a pu les
reconnaître qu ’en se désaisissant bientôt de toutes ses
propriétés.
Faut-il également attribuer à la modestie du sieur
Couib y-Cognord le silence qu ’il a gardé sur le mode
de sa mise en possession du bien de Bicon, en usant des
mesures les plus coercilives, parce qu’il savait que
son père n’avait pas les fonds nécessaires pour faire
enregistrer une contre-lettre à la vente authentique.
Ce n’est donc point à son père que le sieur Courby
doit imputer le dérangement de sa fortune; la cause
en est moins belle, et il serait difficile de l’excuser.
L a première négociation qui eut lieu entre Joubert
et Cou rb y, eut pour objet la cession de cinq contrats
de rente appartenant h la dame Courby ; le sieur
Joubert ne se décida à faire cette acquisition que pour
procurer à son neveu le prix de ces contrats dont
il disait avoir le plus grand besoin. On peut même
noter sur ce point une particularité assez remar
quable. Postérieurement à cette cession le sieur Courby
n ’en a pas moins touché le revenu de la plus forte des
rentes, parce qu’au moment de l’échéance du terme,
le transport n’avait pas été notifié aux débiteurs. Sa
quittance le contasfe.
Peu de tems après, le
3 octobre 1806, Cou rby-
Cognord vendit à J o u b e r t , par acte sous seing-privé,
un jardin et un pré appelés de l’A b b a y e , qu ’il avait
acquis de son père. L e prix convenu fut de 8,000 fr.
qui furent payés en huit effets de 1,000 fr. souscrits
par l’acquéreur et livrés au vendeur.
�(5)
C ’est postérieurement, ainsi, ’ qu ’on le dira bien
tôt, que cet acte de vente a reçu une forme authen
tique.
L e sieur Courby, qui, depuis l’an n , s’était rendu
acquéreur du bien de Sarliève , avait eu recours à des
emprunts pour payer une partie du prix; pressé par le
banquier qui lui avait fourni des fonds, poursuivi d’ail
leurs pour d’autres dettes personnelles et exigibles, il
s’adresse au sieur Joubert pour le tirer de l’embarras
où il se trouve : il lui annonce qu’il est perdu, malgré
sa fortune brillante, s'il ne lui prête son appui; il ininvoque tous les titres qu’il peut avoir à ses bienfaits,
l ’intéresse à sa position, et obtient enfin de sa faiblesse
et de sa complaisance la promesse de venir à son secours.
L e crédit de Courby était é pu is é, sa signature re
butée; il avait besoin de ressources considérables. L e
sieur Joubert souscrivit, en conséquence, le 16 no
vembre 1806, pour
38 ,ooo fr. d’eifets à l’ordre du
sieur Courby qui les retira, et qui, de son côté, remit
des effets, pour pareille somme, à une échéance plus
rapprochée , pour tenir lieu de garantie. Dans le nom
bre se trouve
il est parlé à
Les places
circuler, des
la lettre de change de 10,000 fr. dont
l’art. 5 du mémoire de Courby.
,
de Thiers et de Clermont virent alors
mains de Courby seul, des lettres de
change du sieur J o u b e rt, pour une somme considé
rable. Quelle pouvait en être la cause?
Joubert n'avait rien acquis de C ou rby , que l’objet
modique dont on a parlé ; il lui avait encore moins
emprunté. Acquéreur depuis peu de lems du domaine
�(6)
des Baraques, où il avait fait des constructions impor
tantes Joubert n ’élait pas lui-même en situation de
placer des fonds. C'est donc sans fondement, que le
sieur C ou rby , familiarisé avec le mensonge, a avancé
dans son m é m o ire , et pour la première fois, que son
oncle avait été un des prêteurs auxquels il avait eu
recours, et que son taux n’avait pas été plus modéré
que celui des autres.
Cette assertion, aussi faussé1qu’indécent.e, serait dé
mentie hautement par tous les liabitans de Thiers ,
qui savent parfaitement que les effets distribués par
Courby, et revêtus de la signature de Joubert, lui ont
été donnés sans intérêt et à titre gratuit.
Cou rby ne fut pas dans cette circonstance, comme
dans beaucoup d’au tres, exact à. remplir ses engage^
mens; car le sieur Joubert fat obligé de solder à l’é
chéance plusieurs de ces effets.
L e s bienfaits du sieur Joubert ne se bornèrent pas
à' cette unique opération. D e
nouvelles demandes
furent faites : elles furent accueillies par de nouveaux
effets ou des cautionnemens.
Rien n’était négligé pour obtenir des ressources;
la dame C o u r b y e l l e - m ê m e secondait parfaitement
son mari dans ses projets, dans ses spéculations et dans
ses moyens. Des voyages fréquens et des séjours pro
longés au Brasset, habitation du s.r Joubert, avaient
toujours pour objet quelques sollicitations nouvelles. Ce
dcmicir s’abandonnait d'autant plus facilement à 1 im
pulsion de son cœur franc et généreux, que cl une part
ses bons offices profitaient îi l’amilié, et que de 1 autre
�(7)
la fortune apparente de C o u r b y , propriétaire de Bicon
et de Sarliève, ne lui laissait aucune crainte sur les suites
de sa complaisance.
Il était loin alors de suspecter sa loyauté, Seul il
était dans l’aveuglement.
'
<, '
. !• i.
Pour d o n n e r , en e ffe t, une idée de l’opinion que
l’on avait du sieur C o u rby-C o gn ord , dans sa ville na
t a l e , il suffira de rappeler le trait suivant : ,
,
!
A u commencement de 1807 , Courby arrive au
Brasset, où il avait été précédé par son: épouse, qui.,
munie de divers effets, avait tenté vainement depuis
plusieurs jours, de les faire endosser par le s.r Joubert,
atteint de la goutte à la main droite. On redouble
d ’efforts. La dame Joubert, séduite par des prières et
des larmes, sollicite èlle-même, et arrache à son mari
un consentement. C o u rb y , satisfait, s’élance sur son
cheval, et vole à Thiers présenter ses effets- L e ban
quier les refuse ; il méconnaîtra signature tremblante
de Joubert. Courby insiste vainement; son attestation
est méprisée; et il est forcé de revenir le même jour
au Brasset, auprès de son oncle qui lui reinet un billet
ainsi conçu.: i 5 février 1807. — J ’a i la goutte, j e n a i
pas pu nueux signer, J o u b e r t .
';
Ce billet fut joint à la lettre de change. ¡Le sieur
Joubert ayant été contraint de payer, comme endos
seur, et en vertu de jugement du tribunal de c o m
merce, qui condamne C o u r b y , tireur-, à l e ’garantir,
l’ un et l’autre lui furent remis: i l ’ en est porteur.
Ou profitera de celle circonstance, pour répondre,
une fois pour toutes, à une inculpation é!t ràngëf que
�(8)
le sieur Courby fait; à son oncle, dans une note h la
page 18 de son mémoire. *
En supposant que le sieur Joubert eut été excité
Jcontre son neveu, comme on veut le dire, p a r'u n e
colère a v e u g le , et qu ’il eût-voulu le contraindre par
corps, il n'aurait eu besoin de pratiquer aucune ma
nœuvre, pour se procurer contre lui une lettre de
cliange, afin de le poursuivre devant les tribunaux de
¡commerce. Pour son propre malheur, il n ’en a que
trop reçu. Forcé^de1payer pour son.neveu, il a obtenu
plus de dix jugemens emportant contrainte par corps,
sans en mettre un seul à exécution. Il peut les repré
senter encore.
•
i l :
Que le sieur Courby abandonne donc le vaste champ
du subterfuge et dé la calomnie!
r
.j
Cependant Joubert exige'que l’on donne une forme
authentique à la,vente du
3 octobre 1806. Cet acle
fut,reçu par Tourrau d, notaire, île! 11 avril 1807; il
eshun de ceux qui établissent les stellionats du sieur
Courby.
Il vend le jardin et le pré de l’A b b a y e , avec pleine
et çntièrç garantie, sans déclarer les hypollièques nom
breuses qui en absorbaient plusieurs fois la valeur, et
rendaient sa propriété incertaine et précaire.
Il reconnaît que le prix en a été payé avant l’acle.
..
Il oblige spécialement, à l’exéculion de la v e n l e ,
un ténement de terre, appelé le champ de la Honche,
faisaijtiparlie du domaine de Bicon ; et il 110 déclare
point les hypothèques qui grevaient cet liérilagc.
.Cependant} comnie dépendant du bien de 13icon , il
était
�(9)
était frappé de treize inscriptions de la part des créan
ciers du sieur Courby père , se portant, en totalité, à
72,348 f r., et de sept inscriptions prises par les cré a n
ciers personnels du sieur Courby-Cognord, toutes exi
gibles , pour une somme de 100,000 francs.
Ce même domaine était également frappé de l?h y pothèque légale de la dame Courby. L e vendeur la
dissimule également nonobstant l’obligation expresse
que lui imposait la loi d’en faire la déclaration.
Pour pallier sa conduite , le sieur Courby prétend
que la venle de ces jardin et pré n’a pas élé réelle ;
qu’il n’en a jamais reçu le prix ; et que l’abandon
qu ’il en a fait n’a eu d’autre objet qu’ une indemnité
exigée par Joubert , à raison de cautionnemens par
lui fournis.
• j
. . - r
, Il faut encore prouver le mensonge sur ce point.
A la vérité l ’acte énonce que le prix a élé reçu avant
ces présentes j mais la, raison, s’en trouve facilement.
L a vente de 1807 n’a fait que remplacer celle du
3 octobre 18 06, qui avait été payée au moyen d ’efï'els
souscrits par Jo u b e rt, et par lui soldés depuis. Lors de
la. vente authentique, le sous seing-privé, devenu inu
tile fut déchiré. L e notaire et les témoins pourraient
1 attester. Mais ce qui vaut mieux encore que toutes
lesi attestations possibles, c ’est l’existence des efiets
souscrits le 3 octobre , et qui , par un hasard heureux ,
se trouvent encore entre les mains du sieur Joubert.
Indépendamment de cette circonstance matérielle et
concluante, les clauses de l’acte ne repousseraienl-çlles
pas l’asserlion vaine du s.r Courby ? Si réellement il eut
3
�(
*)1â
10
)
4
fait un don gratuit du jardin h son oncle , se seraitil soumis aux chances d’ une garantie formelle , el à
loules les conséquences d’ une hypothèque spéciale?
Joubert lui-même recevant l’immeuble h titre de li
béralité, eût-il été si exigeant pour ses sûretés?
Mais s’il fallait encore des témoignages plus imposans sur la sincérité de la vente du 11 avril 18 0 7 ,
le sieur Joubert en invoquera qui ne seront point
récusés par son neveu.
L e sieur Courby-Cognord , pour qui la reconnais
sance est un fardeau dont il se débarrasse facilement,
s'était permis quelques propos sur le compte de son
oncle qui en est instruit. Une lettre portée par un
domestique à Courby lui reproche vivement l’indi
gnité de sa conduite : celui-ci s’empresse de démentir
les propos et les faits e u x - m ê m e s . Sa lettr e, datée
du 9 mai 1808, fait disparaître plus d’une des mille
imputations fausses auxquelles il s’est livré dans son
mémoire (1).
( 1 ) Y o i c i le contenu de la le ttre , telle qu’elle est éc rite :
Clermont, te 9 mai 1809.
M on cher o n c l e ,
.
J e suis bien surpris, qu’à T h ie r s , l’on me fasse parler quand
je d o r s , que je vous ai donné d ix m ille Hures pour me contre
signer des effets, ensuite le jardin et puis douze cents livres.
Je n’ai jamais parlé de cela à personne, et que cela n'est pas.
D ans le cas de dire cela. J e passerai au Brasset en allant à Thiers,
pour prendre jour pour te faire compter le montant du billet
que tu as endossé pour m oi et f a i t pour moi.
Je te salue am icalem ent,
C o u bby -C ognord.
�(
II
)
L e sieur J o u b e rt , qui avait payé un grand nombre
d’effets pour le compte de son n e v e u , et qui luimême , à raison de c e , avait eu recours aux emprunts ,
désire être remboursé; il le sollicite viv e m e n t, mais
sans succès; n'obtenant rien, il fait protester et m e
nace de poursuivre.
Dépourvu de fonds , Courby propose à son oncle
de lui abandonner en paiement l’effet d’un bail à ferme
de Bicon ; Jo ubert, pressé de Irouver des ressources,
acceplela proposition; et Courby lui fait cession de cinq
années du prix de la ferme du bien de B ic o n, qui
étant annuellement de 6 , 25 o francs, formait un total
de 3 1,260.francs.
L e transport ne porte, à la vé rité, le prix qu’à la
somme de 27,000 francs; mais il fallut nécessaire
ment calculer les intérêts des différens termes annuels
du bail, qui n’arrivaient qu’à des échéances successives
et éloignées. Celle différence du prix à la somme cédée,
démontre que le taux d’intérêts du sieur Joubert n’a
pas été excessif.
L e sieur Courby n’a pas manqué de renouveler,
sur cette cession, son assertion bannale, q u ’ une partie
du prix servit d’indemnité pour des cautionnemens
postérieurs.
Il avoue que , dans la réalité, il reçut i 5,ooo fr. en
effets de commerce; mais il ne prend point pour a r
gent comptant les effets dont le sieur Joubert lui fît
remise, et qu’il n ’avait pas payés. U ne de ses letIres,
du 6 mai 1808, établit cependant qu’avant le trans
p o r t , il se reconnaissait débiteur de son oncle, puii-
4
�qu'il lui demande comment il fa u t qiùil fa sse pour
le payer • il Lui apprend qu’il a des terres à vendre à
Sarlieve■q u i l ne se tient plus que pour 2,000 f r . , et
que d ’un moment à l'autre il peut terminer. Il se plaint
enfin des poursuiles exercées contre lui.
11 est très-vrai que le même jour, Joubert sous
crivit des cautionnemens sur cinq effets, s’élevant à
10,000 f r.; mais ils ne firent point partie du prix d e l à
cession, et si, dans la suite, il a exigé qu’on lui fît
compte de ces effets ( page 9 du m ém oire ), c ’est par la
raison bien simple qu'il les a soldés comme endosseur,
et qu’il devait en recouvrer le prix contre le tireur.
Il est porteur des billets portant acquit de ses deniers.
Un nouveau bienfait du sieur Joubert envers son
neveu résulte encore du cautionnement qu ’il lui prêta
le 8 juillet 1808; ce cautionnement est devenu la
source et l’occasion de tous les désastres qui pèsent
sur lui.
Par cet a c t e , passé h Clermont, Courby reçoit du
s.r D u m a y , banquier, une somme de 26,000 liv ., qu’il
emploie à payer une parlie du prix resté dû sur l’acquisition par lui faite des biens de Sarliève. L e sieur
Deslradut,
qui
touche les fonds, subroge le sieur
D um aij à,son privilège de vendeur.
D ’un autre côté, Courby et Joubert cèdent conjoin
tement et solidairement à D umay 26,000 liv. sur ce
qui peut être dû au dit sieur Courbij des prix en prin
cipaux et intérêts des ventes par lui consenties à plu
sieurs particuliers de diirérentes parties des biens qui
composent le domaine de Maison-JS^euve.
�( >3 )
p
Courby donne pour hypothèque le bien de Bicon
qu'il présente comme Libre, puisqu’il ne déclare au
cune des hypothèques inscrites qui, à cette épo qu e,
le grevaient de plus de 290,000 fr.
11 garde également le silence sur l’hypothèque lé
gale qui, dans la suite, a été évaluée par la femme
à 110,000 fr.
On a reconnu dans tous le cours de l’instance, que
le sieur Joubert n’avait paru dans cet acte que comme
simple caution; on le répète encore dans le mémoire,
et l’on entreprendrait en vain de le nier, puisque toutes
les expressions de l’acte tendent à manifester cette
vérité.
11 est bon d’observer que dans toutes les négocia
tions relatives au bien de M ais on -N e u ve , ainsi que
dans beaucoup d’autres, C o u rb y - C o g n o rd , que l’on
représente comme un jeune homme sans expérience
( page 48 du mémoire ), a trompé tous ceux qui ont
eu le malheur d’y prendre part.
Il a trompé les acquéreurs de ce b i e n , en le leur
vendant comme sa propre chose; et par ce m oye n, il
est parvenu ¿1 toucher la plus grande partie du prix.
Dans l ’acte du 8 juillet, il cède même à D u m a y
les 26,000 liv. comme une créance personnelle.
Enfin il a trompé tout à la fois et le sieur D u m a y ,
cédalaire, et Joubert, sa caution, en ne leur offrant
pour sûreté de ses engagemens qu ’une hypothèque
illusoire.
Comment ose-t-il, après c e l a , répéter que le cau
tionnement de son oncle ne lui a été accordé qu'à
ï
�( i4 )
des conditions onéreuses (pag. 8 du mémoire)! Peutil espérer d’en imposer par ses déclamations ? Quels
sont ses litres pour inspirer la confiance?
Sa mémoire ne lui rappellerail-elle pas, au contraire,
qu’après la clôture de la cession du 8 juillet, le sieur
D u m a y lui dit en termes énergiques, et en présence
de témoins , que jamais il ne pourrait ressentir et té
moigner assez de reconnaissance au sieur Joubert, pour
les services qu ’il en avait reçus.
Cette observation n ’a pas fructifié : le terrain était
ingrat.
Postérieurement J o u b e r t , contraint de payer de
nouvelles lettres de change, pour le compte de son
neveu , se /ait consentir par ce dernier une obliga
tion de 10,000 francs. Bientôt il solde au sieur Grangeon une autre somme do 10,000 francs, montant
des effets qu’il avait caulionnés lors de la cession du
bail de Bicon.
D ’un autre côté, D u m a y qui avait agi contre les
acquéreurs de M aison -N euve, en vertu de la cession,
éprouva de la résistance de leur part; ils avaient dé
couvert que ce bien était dotal. Ils refusèrent de payer.
Un jugement du tribunal de Thiers les autorisa à re
tenir en leurs mains le prix de leur acquisition. Alors
le sieur D u m a y , qni veut être p a y é , s’adresse à son
cédant.
Des obligations, des lettres de change n’étaient pas
de l'argent. Joubert, pressé, poursuit à son tour Courby;
il fait protester différons effets. Courby sollicite des dé
lais pour vendre le bien de Sarliève , cui’il avait a f -
�( .
5)
fiché dequis long-fems; il le lui offre à lu i- m ê m e ; une
correspondance active s’établit en treux. Trois lettres,
sous les dates des 10, 12 et 27 avril, justifient tout à
la fois et la nature des propositions du sieur Courby à
Joubert, et la réalité des créances de ce dernier. (Voir
ces lettres à la fin du mémoire.)
Beaucoup de personnes peuvent se rappeler qu'à
celte époque les acquéreurs qui se présentèrent furent
éloignés par les prétentions outrées du sieur Courby,
qui, en exagérant les revenus du bien, le portait à une
valeur excessive. Lassé d’attendre, le sieur Jo ubert,
conseillé de se rendre lui-même acquéreur, pour as
surer au moins ses créances personnelles, fit enfin l'ac
quisition de Sarliève, par acte du 9 juillet 1809.
L e sieur Courby lui vendit le corps de bien situé
à Sarliève, tel qu’il l’avait acquis du sieur Destradat,
par les ventes des 29 messidor an 10 et 9 nivôse an
11 , à l’exception des objets vendus au sieur Dumay.
H vendit également différons objets qu’il avait réunis
h sa propriété , et notamment une vigne et terre pro
venues du nommé C h o sso n , suivant les actes reçus
D o h j, notaire au lieu de Cournon.
Les prix de ferme de l’année courante et la récolte
qui pouvait alors être pendante, firent partie de la
vente. Cou rb y ne se réserva que la récolte de trois
septerées de luzerne.
L e prix de vente fut porté ¿1 74,074 fr., dont 4,074 fr.
pour les récoltes et le prix de ferme.
I,’acquéreur est chargé de supporter les inscriptions
conservatoires prises sur le bieïi vendu parles nommés
�(
16
)
Cornez, d’Auzolles, Lachenal et autres, ayant pour
objet la garantie des ventes consenties par le sieur
C o u rb y, des biens de son épouse. Il doit supporter de
mêm e quelques autres inscriptions conservatoires prises
par des acquéreurs nominativement désignés.
On lit encore que le vendeur a hypothéqué spéciale
ment , pour la garantie de la vente, son bien de Bico n,
lequel bien est déjà grévé de différentes hypothèques
dont l’acquéreur déclare avoir connaissance.
Enfin, F a d e est terminé par l’engagement que con
tracte le vendeur de faire la remise, dans le délai d’ un
mois, de son titre d’acquisition, de la quittance finale
de sa libération vis-à-vis le sieur d’Estradat, et des baux
à ferme de la propriété vendue.
Il n’est pas une seule clause, dans cet a cte , qui ne
constitue un stellionat, ou qui n’ait donné lieu à un
acte de mauvaise foi de la part du sieur Courby.
i.° L e sieur Jo ubert, qui a acheté le bien de Sarliève,
tel qu il avait été acquis du sieur cV E slradat, a néan
moins été actionné par ce dernier, en désistement de
six septerées de terre, faisant partie de l’un des objets
compris dans la vente du g nivôse nn 1 1 ; vainement
il a appelé en garantie le sieur C o u r b y , son vendeur;
celui-ci ne s’est pas mis en peine de faite valoir sa
v e n t e , et depuis p e u , un jugement du tribunal de
Clermont a ordonné le désistement.
2.0
D e tous les objets particuliers qui avaient été
réunis par le sieur Courby au bien principal de Sarliève, et qui faisaient partie delà vente, le sieur Joubert
n ’a joui quo de six quartelées de terre provenant d'un
nommé
�'nommé Beldon; il n’en a point connu 'd’autres, et
quelques recherches qu’il ait faites, il n’a jamais pu
parvenir à découvrir La vigne et la terre provenues du
nommé Chosson, et qui avaient été notamment com
prises dans la vente. Il y a plus, c’est que nonobstant
la déclaration formelle que les actes d ’acquisition ont été
reçus par D o ly , notaire à Cournon, le sieur Joubert
ne craint pas d’affirmer qu’il n’en existe point.
Ainsi le sieur Courby a évidemment commis un
stellionat, en vendant des immeubles dont il savait
n ’être pas propriétaire , puisque jamais il ne les a
acquis.
3.° Les prix des fermes faisaient partie de la vente;
le sieur Courby ne manqua pas d’en retenir les baux
bien au-delà du délai dans lequel il devait en faire
la remise, nonobstant une sommation de les délivrer:
il lit plus, il eut l’indélicatesse d’en toucher une grande
partie. Les fermiers ont ses quittances.
A u lieu de trois septerées de luzerne qu’il s’était
réservées, il en lit couper huit.
4.0
La iixation du prix de vente, porté pour les im
meubles à 70,000 fr. n’est pas la moindre des fraudes
de Courby. Elle est le produit de saJidêUtê dans 1 in
dication des revenus. Sa lettre du 10 avril 1809 apprend
qu’il les portait à 5,686 fr. Un tableau justiiicatif et
détaillé qu’il remit, avant l'acquisition, au sieur Jou
b e r t , qui en est porteur, fait mention de baux alors
expirés, d’autres dont les prix'étaient enilés, ou qui
même n’avaient jamais existé.
L e sieur Joubert croit au surplus inutile d’obseivcr
5
�que ce p r i x , tout énorme qu’il est, a été payé
intégralement, soit par l’abandon de ses créances per
sonnelles, soit par des délégations sur des créanciers
qu’il a soldés, dont il a les quittances. Cela est établi
par la contre-lettre dont on a donné copie : elle prouve
même par le calcul des sommes que le prix réellement
payé par Joubert monte à 76,625 fr., en ne comptant
même le prix de la cession du bail de B i c o n , que
pour
25 , 5 oo fr. ; aussi fut-il expliqué par Cou rby,
qu’il ne serait fait aucune répétition de part ni d’autre.
5.® L ’acquéreur a bien été chargé de supporter
quelques inscriptions conservatoires qui frappaient le
bien ven d u, mais il a dû naturellement trouver dans
cette obligation spéciale qui lui était imposée, l’as
surance qu’il n’en existait point d’autre, et la dispense
formelle d’en souffrir un plus grand nombre.
Ce p e n d a n t, indépendamment de ces inscriptions
conservatoires, il en existait, au moment de la ve n te ,
vingt-cinq autres, qui toutes avaient pour objet des
créances exigibles et personnelles à Courby, et dont
l ’évaluation se porte ¿1 la somme énorme de 2 1 5,000 fr.
On ne peut douter que le but de C o u r b y , en trom
pant son acquéreur sur les hypothèques qui grevaient
Sarliève, ne fût d’obtenir quittance des dettes dont
celui-ci était personnellement créancier, et de se dé
barrasser, par l’eilet des délégations de celles de ses
autres dettes qui lui parurent les plus pressantes. Joubert
se serait-il dépouillé, s’il eût été instruit ?
6.° L e sieur Courby a également dissimulé les hypo
thèques légales qui frappaient soit le bien vendu, soit
�( I9 )
l’objet qu’il présentent pour sûreté de ses engagemens ;
c’est une vaine subtilité de conclure de la déclaration
faite par J o u b e rt, qu’il avait connaissance des hypo
thèques qui grevaient Le domaine de B ico n , la consé
quence qu ’il connaissait aussi les hypothèques légales
non inscrites.
Comment donc, après tant de supercheries, de dol
et de fraude , le sieur Courby pourrait-il espérer d’é
chapper à la peine du stellionat ?
L e sieur Joubert connut bientôt la profondeur de
l’abîme dans lequel il s’était précipité, par ses rela
tions avec son neveu.
L e prix des jardin et pi*é de l’A bb aye , qu ’il avait
vendus au nommé Gaudissier, devint l’objet d’un
ordre ouvert entre les créanciers de Courby père et
ceux de Courby-Cognord. Ce qu’il y a de plus re
marquable , c’est que ce dernier y figure en qualité
de créancier poursuivant, du chef de sa m è r e , et il
se fait colloquer par privilège pour les frais d’ordre,
sur le prix de la revente d’un immeuble qu’il avait vendu
lui-même , tandis que son acquéreur perd tout à-Iafo i s , la chose, le prix et le gage qui lui avait été
promis.
L e sieur Joubert , déçu de l ’espoir de touc her le
prix du jardin , fut réduit à la fâcheuse nécessité de
so dépouiller lui-même, par l’aliénation de son do
maine des Baraques. La valeur de cette propriété,
qui s’éleva à 46,080 francs, fut employée ¿1 solder
lesxréanciers délégués par la vente de Sarliève , et
6
�(
20
) „
partie de la créance du sieur D u m a y , portée dans la
cession de 1808.
Ces sacrifices considérables n’en provoquèrent point
de semblables de la part du sieur Cou rby, qui depuis
long-teins s’inquiétait peu de ses engagemens. Les res
sources pécuniaires de Joubert, bientôt épuisées, furent
insuffisantes. Pressé vivement par D u m a y qui le pour
suivait comme caution solidaire, et l’avait fait e x é
c u te r, il sollicita son neveu de prendre des mesures
convenables pour terminer ses affaires.
Courby propose alors de céder à son épouse le bien
de B i c o n , pour remplacer le domaine de MaisonN e u ve par lui vendu, et pour acquitter ses autres re
prises. Celte aliénation, disait-il, en assurant tous les
droits de sa fe m m e , consoliderait la vente qu’il avait
faite de son bien dotal; les acquéreurs deviendraient
sans intérêt à maintenir les inscriptions conservatoires
prises sur Sarliève qui serait dégrèvé d’autant; ils s’em
presseraient de verser le prix de leur acquisition, qu’on
emploierait à éteindre la cession du 4 juillet 1808,
soit entre les mains du sieur D u m a y , pour ce qui lui
restait d û , soit dans celles du sieur Joubert, pour la
porlion qu’il avait payée lui-même.
Ce projet fut alors goûlé par Joubert qui concourut
à son
exécution , d’après l’assurance formelle que
Cou rby mettrait tout en œuvre pour arriver ¿1 ces
résultats. Mais celte convention qu ’on v e u t , pour
eu déduire un moyen de c a u s e , faire remonter ¿1
l ’époque de la venle de Sarliève, qui avait eu lieu
cinq mois auparavant, n'a été réellement arrêtée que
�(
21
)
^^3
long-lems après, et lorsque le sieur J o u b e rt , éclairé
sur les manœuvres dont il avait été v ic t i m e , et sur
sa véritable situation, se vit contraint d’adopter aveu
glément toutes les mesures qui paraissaient devoir le
préserver du naufrage.
Les pièces qu’on a publiées (pag. 16 du mémoire) dé
mentent même formellement l’assertion du s.r Courby,
puisque la première a pour date le 5 novembre 1809,
antérieure, de trois jours seulement , à la vente qui
est du 8, et que la seconde pièce lui est postérieure.
Celte vente du bien de Bicon à son épouse ne fu t,
de la part de Courby, qu’ une nouvelle fraude qui
mit le comble aux désastres de Joubert, en paralysant
tous les moyens d’exécution qu’il pouvait avoir contre
son neveu.
D ’une p a r t , l’acquisition de Sarliève ne lui offrait
aucune ressource, puisque les inscriptions considéra
bles qui grevaient ce bien, enlevaient au propriétaire
la possibilité de l’aliéner utilement.
D ’un autre c ô t é , C o u r b y , infidèle à sa promesse,
n ’agissait point pour faire cesser les motifs que les
acquéreurs de Maison-Neuve avaient eus pour retenir
en leurs mains le prix des ventes, cédé au sieur D u
may. 11 avait même laissé confirmer par arrêt le ju
gement qu ’avaient obtenu les acquéreurs au tribunal
de Tliiers.
Enfin, le bien de Bicon était devenu un gage pu
rement illusoire , soit par l’effet des inscriptions dont
il était frap pé, soit par l’aliénation qui en avait été
faite à la dame Courby.
�(
22
)
Telle élail la position critique de Joabert. Courby
cependant sembla prendre plaisir à l’aggraver, en lui
enlevant jusqu’aux plus iaibles ressources auxquelles
il aurait pu s’attacher.
Il fait d’abord requérir, par son épouse, deux ins
criptions sur le domaine de Sarliève, à raison de ses
droits, reprises et gains éventuels, le tout évalué à
1 10,000 francs. Ces inscriptions sont bientôt suivies de
sommations hypothécaires, notifiées les 24 juin et 19
août 1811 par la dame C o u r b y , alors séparée de biens ,
sous Cautorisation de son mari.
11 cherche à soustraire ses récolles de Bicon , par
une cession simulée, qu ’il en fait le i er. avril de la
même année à un nommé M a rtin et, tapissier à Clermont ; il y comprend même le mobilier qui garnissait
sa maison.
S’affranchissant de toute pudeur, Courby pousse
plus loin ses précautions. Il prévoit que le décès de sa
m ère, en lui attribuant une porlion de son hérédité,
pourrait offrir un gage à ses créa liciers ; rien ne l’e m
barrasse pour les en frustrer. 11 se rend auprès du lit
de sa mère agonisante, lui lait souscrire un acte sous
seing-privé, par lequel elle déroge à tous les réglemens
de famille qui avaient eu lieu entre ses enfans, et fait
une démission, au profit de tous, de l’universalité de
ses biens et droits. C e u x - c i consislaient en reprises
considérables contre son m ari, liquidées par jugement.
Muni de cet acte, Courby s’empresse d’en recueillir
reflet'; il en passe cession authentique, le 6 novembre
1810, en faveur de Joseph Martinet, son prête-nom
�(2
3)
ordinaire. Il est bon d’observer que sa mère existait
encore à cette époque. Quoique le vice d’un acte sem
blable soit é v i d e n t , il n’en démontre pas moins les
intentions coupables de "celui qui l’a souscrit.
Ce n’est pas tout : il craint d’avoir laissé quelque
chose en prise. Créancier de Philippe C o u r b y , son
f r è r e , d’une somme de 1 8,700 fr., que celui-ci lui avait
déléguée à prendre sur Pierre C o u rb y , leur père com
m u n , il veut encore c h erch era dénaturer sa créance,
et feint de s’en dépouiller par acte notarié du r 1 février
18 11. Pour cette fois, soit qu’il n’osât plus user de la
complaisance de son cédataire en litre, Martinet, soit
que celui-ci lui refusât son entremise, il alla découvrir
un sieur Gervy, charron à Clermont, qu’il constitua
son cédataire, moyennant une somme de 5 ,000 f r . ,
prétendue payée lors de l’acte.
Après de pareils faits, le sieur Courby voudrait-il
se présenter encore comme un jeune homme sans
expérience? Persuadera-t-il qu’il a été la victime d’un
oncle qui n’aurait pris la connaissance des a flair es que
dans le tumulte des camps, où il a figuré avec hon
neur, et à la campagne, qu’il a constamment habitée
depuis? Certes, ce
bien des coups de
Cependant lout
Jouberl. D u in n y ,
ne sont pas là de simples essais, mais
maître.
se réunissait pour accabler le sieur
qui n ’était point p a y é , exerce les
droits et privilèges du sieur d’Estradat, auxquels il avait
été subrogé par la cession du 8 juillet 1808, et pour
suit Joubert comme détenteur de Sarliève; après un
cômmandement du 27 mars 1 8 1 1 , il frappe ce domaine
�d’une saisie immobiliaire. L e procès-verbal est du 2 5
mai suivant.
Toutes ces poursuites sont dénoncées à C o u r b y , qui,
selon son usage, garda le silence. Jouberl était dans
l ’impuissance absolue de satisfaire D u m a y; l’expropria
tion fut consommée, et le 1 3 décembre 18 12 , le bien
de Sarliève passa sur la tête du sieur Rochefort, qui
s’en rendit adjudicataire.
Un ordre est ouvert au tribunal civil de Clermont
pour la distribution du prix, et l’on voit figurer, dam
le procès-verbal, la dame Cou rby, comme créancière
inscrite.
Quel était le résultat des relations d’affaires qui
avaient eu lieu entre Joubert et son n eveu ?
Dépouillé du domaine des Baraques,-chargé de dettes
à raison des emprunts qu’il avait été obligé de faire,
exproprié du bien de Sarliève, Joubert avait néanmoins
des créances considérables à répéter contre Courby. Ces
créances comprenaient, i.° la somme de 8,000 fr., prix
de la vente du jardin; 2 ° celle de 26,000 fr., portée
par la cession de 1808, qu’il avait payée comme cau
tion; 3.° la somme de 74,074 f r . , prix de Sarliève*
4.0 enfin , les intérêts de ces différentes sommes, et les
dommages - intérêts résultant des pertes qu ’il avait
éprouvées par le fait de son débiteur.
Quelles ressources lui offrait le s.r Courby ? aucune,
puisqu’au moyen des actes frauduleux qu’il a passés,
il s’est mis dans un état réel ou apparent d’insolva
bilité.
Rassuré par les mesures dont il s’est entouré , le
sieur
�C'a 5 ;)
siéur Courby se refuse à toute espèce d’arrangemens -,
ou ne les écoute que pour gagner du tems. Des sa
crifices sont offerts : il les rejetle avec obstination, ou
ne donne aucune garantie de ses engagemens.
Que pouvait faire alors le sieur Joubert ? placé dans
l’alternative cruelle!, de livrer à la censure de la justice
les actions d’ un neveu ingrat et coupable, ou de perdre
la fortune de ses enfans, il a dû céder aux devoirs
les'plus sacrésj Aucun esprit de vengeance n ’a pré
sidé au choix de son action; un sentiment si vil est
loin de son cœur ; il aurait volontiers épargné à Courby
la honte d’une condamnation rigoureuse, s’il n’eût
été certain que là contrainte par corps est le seul
moyen qui puisse assurerison paiement.
C ’èst par exploit du 20. décembre 1 8 11 , et après
un procès-verbal de non conciliation , que le sieur
Joubert saisit le tribunal civil dé sa demande, et con
clut à ce que Courby fût déclaré stellionataire, et
condamné par corpsau paiement detoutes sescréances.
Cinq mois de délais furent accordés au s.TCourby, qui
se plaint néanmoins de l’impatience de son adversaire.
Un jugement du 20 mai 1812 a condamné p a r corps
le sieur C o u rb y , déclaré stellionataire, à payer au
sieur Joubert la somme de 51,649 ifr., montant des
créances définitivement liquidées, el celle de 8,000 fr.
pour dommages-inlérôts.
Il est sursis à statuer sur le surplus des sommes
qui reviennent au sieur Joubert, pour raison de la
vente de Sarliève, jusqu’après la confection de l’ordre
ouvert au tribunal de Clerm ont, et la distribution
7
�( *6 )
du prix de ce domaine; en suile duquel les parties
viendront à c o m p te , relativement aux sommes que
le sieur Joubert pourra reprendre comme représentant
ceux des créanciers utilement colloqués , et qu’il a
payés.
)
L ’exécution du jugement est ordonnée nonobstant
appel et sans caution.
L e sieur Joubert est si étranger aux mouvemens
de la vengeance, quoiqu’on l’accuse de s’être laissé
guider par une colère aveugle, qu’il n’a pas mémo
usé de cette faculté.
L'appel du sieur C o m b y a investi la Cour du droit
de prononcer sur le mérite de ce ju ge m e n t, qui sera
mis en entier sous ses y e u x , à la suite du mémoire.
Cette décision porte avec elle sa recommandation
et les preuves de sa sagesse; tous les efforts du sieur
Cou rby n’ont pu l’atteindre. Les principes qui y sont
consacrés demeurent dans toute leur force, et l’ap
plication qui en est faite dans la cause, ne souffre pas
la moindre critique ni la plus légère objection.
Les motifs adoptés par les premiers juges ne lais
sant rien à désirer sous le rapport du droit, l’objet de
ce mémoire a dû naturellement se borner au déve
loppement des faits, étrangement dénaturés par le
sieur Courby-Cognord ; aussi le sieur Joubert se ferat-il un devoir de renfermer sa discussion dans un cadre
resserré.
En adoptant les divisions établies par le sieur C o u r b y ,
on examinera d’abord s’il y a , de.sa part, stellionat.
�C *7 )
^;"£n second lieu, si le jugement renferme des erreurs
sur la quotité des condamnations qu’il prononce.
J. v. . . IIP R ' E
j. s;
M I È R E
‘i
1 Q U E S T I O N .
Y a - t - il stellionat?
\
■
-
*
• •
• •
■ ■
r
Y
a - t - i l stelUonat, à défaut de déclaration des
créances inscrites? n • ' r .
L ’article 2069 du Code Napoléon détermine tout àla-fois la peine du stellionat et1 les principaux carac
tères auxquels on peut le reconnaître. Il est aS’nsi concu:
« L a c o n t ra in t e par corps a lieu, en matière civile,
pour.le stellionat.
- a II y a stellionat,
‘1
>'
« Lorsqu’on vend ou qu’on hypothèque Ün immeuble
dont on sait n’être pas propriétaire;'
1 -
« Lorsqu’on présente comme libres des» biens h y p o
théqués , ou que l’on déclare des hypothèques moindres
que celles dont ces biens sont chargés ».
L e sieur Courby voudrait se soustraire’1 l’application
de cet article, qui cependant offre, avec une exacti
tude frappante, le tableau de sa conduite envers son
oncle.
Il prétend que le premier cas prévu est étranger à
la cause; que les autres ne peuvent s’appliquer à lui,
parce qu’il n’a pas présenté ses biens comme libres, ni
déclaré des hypothèques moindres que les hypothèques
8
�(
28
)
réelles, et que la loi n’admet l’existence du stellionat,
que dans le cas d’une déclaration expresse contraire à
la vérité.
Les erreurs fourmillent dans ce système, en droit
et en fait.
B ie n n’autorise.; en d ro it ,'la distinction subtile et
immorale que l’on veut établir entre la déclaration
expresse du franc et quitte et le silence prémédité sur
les hypothèques existantes. L ’une et l'autre conduisent
au même but ;■ils produisent les mêmes effets , la
tromperie du créancier ; ils doivent donc être soumis
aux mêmes peines.
Cette conséquence incontestable résulte de la na
ture des choses. L ’acquéreur ou le créan cie r, qui
refusant de s’en remettre à la foi de l’individu avec
lequel il traite, exige une h y p oth è qu e , entend bien,
sans doute, recevoir une sûreté réelle et solide , puis
que sans cela, il n’eût pas contracté. L e vendeur ou
débiteur, qui, de son cô té, s’est soumis à la condition
imposée , doit la remplir dans toute son étendue. Si
donc il viole ses engagemeus, dans leur essence même
et dans leurs effets les plus immédiats, en ne livrant
qu’ un gage illusoire, il mérite également l ’animadversion de la justice, soit qu’il ait trompé par une
fausse déclaration, soit qu’il ait trompé par un silence
perfide dont on n ’a pas dû se défier.
A u surplus, l'esprit et les termes de la loi repous
sent formellement la distinction proposée.
L ’objet de la loi est de pourvoir à ce que des tiers ne
soient pas trompés, do prévenir toutes stipulations
�( 29 )
frauduleuses, d’assurer l ’exécution des contrats, et d’ef
frayer , en donnant une nouvelle force à l’obligation,
tous ceux qui pourraient concevoir la pensée de se sous
traire à leurs engagemens. L a sollicitude du législateur
a dû s’étendre sur toutes les espèces de fraude, les com'prendre dans ses dispositions, et les punir avec une
égale sévérité, sous quelque forme qu’elles se présen
tassent ; aussi, dans l’impossibilité de prévoir tous les cas
de dol, et de déterminer les manières infinies qui peu
vent être employées pour t r o m p e r , il nous apprend
lui-même dans la discussion élevée au conseil d’état,
qu’il s’est exprimé d’une manière générale, en aban
donnant à la prudence des tribunaux le soin de re
chercher, de reconnaître et de réprimer ce genre de délit.
Les termes de la loi sont également remarquables.
Elle ne dit pas qu ’il y a stellionat lorsqu’on déclare
libres des biens hypothéqués, mais lorsqu’on présente
comme libres des biens hypothéqués; ce qui est trèsdiflérent. Cette expression, qui fixe le sens d e là dispo
sition, est d’autant plus importante que l’art, 2,069
fournit lui-même la preuve que sa rédaction a été le
résultat des plus profondes méditations, puisque dans le
second membre de la phrase, il est ajouté : « ou lors
qu’on déclare des hypothèques moindres que celles
dont les biens sont chargés ».
Il ne faut donc pas, pour constituer un stellionat,
la déclaration expresse que les biens sont libres; il suffit
de les présenter comme tels. O r , n’est-ce pas présenter
des biens comme libres, que les vendre ou les hypo
théquer purement et simplement, sans déclarer qu’ils
�(
3o )
sont grevés de charges préexistantes? L e silencè, en
ce cas, n’est-il pas équipollent au mensonge? Ne pro
vo que-t-il pas l ’erreur du créancier? Ne trompe-t-il
pas également sa bonne foi? L e fait, dans ce cas, n’estil pas plus fort que la parole? El le législateur, en
employant ces mots , présenter comme libres , n’an
nonce-t-il pas clairement que ses dispositions con
courent avec le but qu’il s’était proposé?
N ’y aurait-il pas d ’ailleurs une absurdité révoltante
à c o n d a m n e r / c o m m e stellionataire, l ’individu q u i ,
en déclarant certaines hypothèques, en aurait passé
d’autres sous silence; et à excepter de l’application
de l’article précité celui q u i , affichant une désobéis
sance plus formelle à la lo i, aurait affecté ses biens
sans en déclarer aucune. Telles'seraient cependant les
conséquences immédiates du système proposé.
S’il était nécessaire d’invoquer des autorités pour
déterminer le véritable sens de la loi nouvelle , on
trouverait ais ément, dans tous les monumens de la
jurisprudence, les principes qu ’elle a consacrés.
L e savant Domat définit ainsi le stellionat, 1. i . er,
lit. 18 j secl. 3 , art. 5 :
« L e stellionat est cette espèce de dol don! use celui
qui c è d e , vend ou engage la même chose qu’il avait
déjà c é d é e , vendue ou engagée, et qui dissim ule cet
engagement ».
Il justifie sa définition par le texte de plusieurs lois
romaines dont les ternies sont précis. La même doc
trine est enseignée par les auteurs les plus recommandables ; et plusieurs arrêts ont déclaré stelliona-
�(
3i
)
iaires des débiteurs qui avaient assigné leurs biens,
en dissim ulant les hypothèques dont ils étaient grevés.
A in s i, le stellionat n’est donc pas essentiellement
attaché à la circonstance d’une fa u sse déclaration.
Il a lieu lorsqu’on assigne des biens en dissim ulant
les charges dont ils sont grevés ;
Lorsqu’on présente ces biens sans déclarer les h y
pothèques.
L a dissim ulation et le silence constituent le délit.
Cependant on insiste : on soutient qu’au moyen
de la publicité des hypothèques, le silence du v e n
deur ou du débiteur n’offre pas les mêmes dangers
qu’autrefois , où souvent il était impossible aux tiers
de reconnaître les hypothèques dont étaient grevés
les biens; et on en déduit la conséquence qu’il faut
puiser dans cette considération des motifs pour res
treindre les cas du stellionat.
Il est facile de pénétrer les vices de ce raisonne
ment. D ’abord le recours aux registres publics n’est
point une obligation pour le créancier ou l’acquéreur,
mais une simple fa c u lté dont il peut user ou se dis
penser a son g r é ; tandis que la bonne foi et la loi
exigent du débiteur ou du vendeur une déclaration
franche et expresse.
11 n’est pas vrai, en second lieu, q u e , dans notre
s37slème hypothécaire, le silence du vendeur ou du
débiteur soit moins dangereux qu’autrefois.
D ’une part, en ordonnant la spécialité des hypo
thèques, le législateur a voulu qu’elle produisît un
effet réel ^ et donnât la certitude d’ un gage assuré j
�(
32 )
ce qui n’arriverait pas, si le débiteur ou le vendeur qui
doit connaître les charges dont ses biens sont frappés,
pouvait les affecter , sans déclarer les hypolhèques
préexistantes.
D e l ’au tre, en dispensant d e l à formalité de l'ins
cription certaines espèces de créances, telles que les
privilèges énoncés en l’article 2 i o r , les hypothèques
légales et autres de cette nature, la loi aurait 1endu
un piège à l’acquéreur ou au'créancier, qui les ignore
nécessairement, si elle n’eût pas imposé l’obligation
de faire connaître ces créances et toutes autres qui
peuvent affecter les biens.
Enfin , la faculté qui est accordée aux créanciers
de requérir, pendant un certain délai, apiès la trans
cription des ventes, l’inscription de leurs hypolhèques
qui viennent néanmoins frapper le bien vendu', four
nirait encore des moyens de fraude, si, par une
mesure sage et expresse, le législateur n’eût constitué
en mauvaise foi le vendeur qui dissimule ses dettes et
les hypothèques dont ses biens sont grevés.
A i n s i , loin que le nouveau sysleme hypothécaire
com por te, sans danger, le silence du débiteur ou du
ve ndeur, et qu’il autorise quelques limitations aux cas
de stellionat, toutes ses dispositions
concourent à
réclamer la plus grande sévérité, soit dans l’appré
ciation des faits qui caractérisent ce délit, soit dans
l’application des peines encourues par celui qui s’en
rend coupable.
En fait, on ne peut se dissimuler que les trois actes
produits
�( 33 )
produits par le sieur Joubert ne renferment tous les
cas prévus par l ’article invoqué.
L e sieur Courby s’est rendu stellionataire envers le
sieur Joubert ;
i.° En vendant, par l’acte du 9 juillet 1809, les
terre el vigne qui sont dites provenir du nommé Chosson,
suivant les acles reçus D o l y , notaire, tandis qu’il n’a
point acquis ces héritages, et qu’il n’en a jamais été
propriétaire ;
2..0 En vendant, par l’acte du 11 avril 1807, les
jardin et pré de l’A b b a ye , absorbés plusieurs fois par
des créances qui ne lui laissaient qu’une propriété
incertaine et précaire, dissimulant , à dessein , les
hypothèques inscrites dont il était g r e v é , pour en
toucher le prix ;
3 .° En présentant comme libres, pour hypothèque
spéciale , savoir ;
Dans l’acte du 11 avril 1807, la terre de la Ronclie,
q u i , comme dépendant du domaine de Bicon , se
trouvait grevée de près de 200,000 fr.
Et dans celui du 8 juillet 1808, le même bien de
Bicon, sur lequel reposaient alors pour plus de 290,000 fr.
de créances inscrites.
4.0 Enfm, en déclarant, dans l’acte du 9 juillet 1809,
des hypothèques moindres que celles dont les biens
étaient grevés, puisqu’il n’avait chargé l’acquéreur que
de supporter nommément des inscriptions conseivatoires désignées, qui frappaient le bien de Sarliève,
objet
v e n d u , tandis qu’à cette
époque il existait
sur le môme bien, vingt-cinq autres inscriptions, ayant
9
�( 34 )
\
pour fondement des jugemens ou des obligations
personnelles au sieur C o u rb y , et qui donnaient un
total de 2 1 5,ooo fr. exigibles.
Ainsi le jugement attaqué se trouve complettement
justifié sous ce premier rapport.
§.
Y
I I.
a-t-il stellionai, faute de déclaration des hypo
théqués légales?
L'affirmative est évidente; elle résulte des art. 2 i 36
et 2194 du Code Napoléon.
L e premier de ces articles impose d’abord aux maris
et tuteurs Yobligaùon de faire sur eux-mêmes une
inscription ; pour assurer l’exéculion de cette mesur e,
dont l'objet est de pourvoir à ce que des tiers ne soient
pas trompés, il ajoute : « Que les maris et tuteurs qui,
ayant manqué de requérir et de faire faire les inscrip
tions ordonnées par le présent article, auraient consenti
ou laissé prendre des privilèges ou des hypothèques
sur leurs im meubles, sans déclarer expressément que
lesdits immeubles étaient affectés à Yhypothéqué légale
des femmes et des mineurs, seront réputés stellionataires, et comme tels, contraignables par corps ».
Il résulte de ces termes, aussi clairs que formels,
plusieurs conséquences :
i.° L a loi prescrit impérieusementVinscription) pour
faire connaître a u x tiers l’existence de l’hypothèque
légale ;
2.0 Elle considère déjà comme une faute Xomission
�(
35 )
du mari 011 du tuteur à faire cette inscriplion, parce
que celte omission est une désobéissance à ses injonc
tions;
3 .° Si l’inscription n ’ayant pas été requise, le mari
ou le luteur consent ou Laisse prendre des privilèges ou
hypothèques sur ses immeubles, sans déclarer les h y
pothèques légales de la femme ou du mineur, il est,
par son silence seul, réputé stellionataire, et puni
comme tel, parce qu ’alors la loi présume que la fraude
se joint à la désobéissance;
4,° E n f i n , la déclaration qu’est tenu de faire le
mari ou le tuteur, doit être expresse, et résulter de
l’acte l u i - m ê m e ,
suppléée.
sans pouvoir être présumée
ni
I/art. 2194 confirme encore ces principes; après
avoir établi le mode de purger les hypothèques légales
des femmes et des mineurs, il porte que les maris,
tuteurs, etc., pourront prendre l’inscription dont il
s’agit dans les deux mois de l’affiche cju’aura fait faire
le tiers-acquéreur, « sans préjudice, y est-il d it , des
poursuites qui pourraient avoir lieu contre les maris
et les tuteurs, ainsi qu 'il a été d it ci-dessus, pour
hypothèques par eu x consenties au profit des tierces
personnes, sans Leur avoir déclaré que les immeubles
étaient déjà grevés d’hypothèques, en raison du ma
riage ou de la tutelle ».
Les dispositions de ces deux articles peuvent être
rigoureuses, mais elles sont irritantes et positives : elles
doivent être respectées.
Dans la première partie de la discussion, le sieur
�Courby bornait ses préienlions à restreindre les termes
de la loi, et à en éluder l’application par une équi
voque spécieuse et subtile; mais devenu plus liardi,
il ne propose à la Cour rien moins que d’usurper la
puissance législative, et d’effacer du Code les deux
articles qui viennent d’être cités.
A Fentendre , l’exécution littérale de ces articles
constituerait stellionataires tous les maris, tous les tu
teurs de l’empire; et cette généralité révoltante doit
provoquer dans la loi une restriction que l’équité ré
clame. Il invoque m ê m e , pour colorer l’absurdité de
sa proposition , un passage d’un auteur à jamais cé
lèbre.
Mais ce raisonnement, spécieux au premier aperçu,
ne supporte pas le plus léger examen.
D ’une part, la loi existe; fût-elle vicieuse, il fau
drait l’exécuter.
Secondement, le grand nombre des coupables, loin
d'être un motif pour modifier la loi, et la restreindre
dans ses effets * prouverait, au contraire, la sagesse
de ses dispositions et la nécessité de maintenir avec
vigueur l ’exécution d’une mesure qui a pour objet
de prévenir la fra u d e , et de pourvoir à ce que des
tiers ne soient pas trompés.
Enfin le législateur n’a pas ignoré les inconvéniens
qui peuvent être attachés à l’exécution de ses décrets;
il a pensé sans doute qu ’ils n ’en balançaient
avantages , puisqu’il ne s’y est pas arrêté. Il
lui - même les motifs qui l’ont déterminé ;'i
de sévérité contre les maris ou tuteurs qui,
pas les
indique
s’armer
au m é -
�pris de ses injonctions, auraient consenti , ou laissé
prendre des privilèges ou hypothèques sur leurs im
meubles, sans faire la déclaration des hypothèques lé
gales. ( V o i r les motifs de la loi.)
E n se pénétrant de ces motifs, on reconnaît à la
fois la sagesse du législateur, l’utilité de la loi, el la
nécessité d’en maintenir l ’exécution.
L e passage c i t é , de D o m a t , est sans application.
L e sens des art. 2 1 36 et 2194 du Code ne conduit
ni à de fa u sses conséquences ni à des décisions injustesj
la loi est claire et positive : elle n’a pas besoin d etre
interprétée, puisqu’elle dit elle-même ce quelle veut.
Contraint de céder à la rigueur des principes, le
sieur Courby voudrait échapper à la condamnation
qui pèse sur sa tête, à la faveur de quelques ihifs par
ticuliers.
Il prétend que l’existence des hypothèques légales
a été connue; et pour l’établir, il invoque la qualité
du sieur Joubert, qui est son oncle et son parrain,
sa présence au contrat de mariage , l’acquisition des
rentes dotales et quelques autres circonstances aussi
peu importantes.
Sans examiner en ce moment la valeur relative do
chacune de ces circonstances, qui, d'ailleurs, ont été
réfutées par les motifs du jugement ,on repoussera, par
un moyen général, les conséquences qu’on veut en
induire, que le s.r Joubert a été instruit des hypothèques
léga les, el qu’une déclaration lui était alors inutile.
L a loi, dans les articles 2 1 36 et 2194 est générale,
expresse, absolue ; elle n admet aucunes circonstances
�U‘>0
( 38 )
particulières qui puissent modifier ses dispositions ; elle
s’est exprimée en termes formels, soit par rapport
aux obligations qu'elle a imposées aux maris et tuteurs,
soil relativement aux effets qu’emporterait contr’eux
l ’infraction à ses règlemens ; elle ne souffre, dans
son exécution, aucune exception, et n’a point atta
ché sa volonté à un fait connu , ou présumé connu
de la partie qui contracte.
A i n s i , fût-il établi, ce qui ne peut ê t r e , que le
sieur Joubert a connu l ’existence des hypothèques
légales; cette connaissance de sa part deviendrait in
différente pour la décision de la cause, puisque la loi
a attribué au défaut de déclaration des hypothèques
légales, le caractère et la peine du stellionat, indé
pendamment et abstraction faite de toutes considéra
tions particulières.
Si l’on examine actuellement les trois actes qui ont
été consentis p a r l e sieur C o u r b y , on y reconnaîtra,
sans beaucoup de recherches, tous les caractères qui
constituent le stellionat-aux termes des art, invoqués.
1°. I.e
ii
avril 18 0 7, il vend au sieur Joubert un
jardin et un pré.
II ne déclare pas les hypothèques légales qui frap
pent les objets vendus.
Il affecte spécialement à l'exécution de la vente,
le champ de la Ronche , sans déclarer l’existence de
ces mêmes hypothèques.
On oppose*que le sieur Joubert a purgé les biens
vendus de ces hypothèques légales, et qu’ainsi il les
connaissait, quoique non déclarées.
�( 39 )
Ce fait n’exclut pas le stellionat : d’une p a r t , il
ne prouve pas que la connaissance de l'hypothèque
légale ait précédé ou accompagné l’acte. D e l’autre,
cette connaissance n’ayant pas été donnée par le v e n
d e u r , ne peut le soustraire à l’application de la loi.
A u surplus, l’hypothèque légale de la dame Courby
frappe encore sur l'immeuble affecté à la garantie de
la vente.
2.0
Dans l’acte du 8 juillet 1808, Courby d o n n e ,
pour sûreté de ses engagemens, le bien de Bicon , et
il garde le silence sur l'hypothèque légale.
On voit enfin, dans le troisième acte, que le sieur
C o u r b y , vendant à Joubert le bien de Sarliève, le
charge de supporter quelques inscriptions conserva
toires , mais il garde le silence le plus absolu sur les
hypothèques légales.
Il en agit de même à l’égard du domaine de Bicon ,
qui a été spécialement affecté à la garantie de la vente.
Il est à remarquer que depuis la vente de Bicon à la
dame C o u r b y , qui remonte au 8 novembre 1809, et
qui parait avoir été homologuée par jugement du sa
mai
1 8 1 2 , Cou rby n’en a pas moins laissé subsister
1 hypothèque légale sur Sarliève 5 qu ’il n’a /ait aucune
diligence pour faire le ve r l’opposition des acquéreurs
de Maison - N e u ve ; et qu’il n ’a pas même lait con
naître la vente ni le jugement d'homologation.
Après des infractions si répétées, des fraudes si ma
nifestes , pourrait-il s'élever le moindre doute sur
l’exislence du stellionat ?
Cependant le sieur C ou rb y, accablé p a rla masse des
�'
(
40
)
preuves qui l’accusent, fait un dernier effort. Il ose
invoquer sa bonne foi ! Il rejette sur une erreur ou
sur l’oubli le défaut de déclaration des hypothèques
légales. Il affirme, pour justifier cette bonne foi, que,
lors des divers actes, il n’a touché aucune somme, et
que le sieur Joubert n’a pas été trompé.
Sa bonne foi ! ! !
Elle est établie
Par sa conduite ;
Par tous les actes qu ’il a passés ;
Par sa réputation ;
Par sa fidélité à remplir ses engagetnens ;
Par la vérité des faits qu’il atteste pour la justifier.
Il n’a louché aucune somme.
Le
3 octobre 1806 n’a-t il pas reçu 8,000 fr. pour
le prix du pré et du jardin ?
Les 26,000 liv., qui ont fait le prix de la cession
du 8 juillet 1808, n’ont-elle pas été versées, à sa dé
charge , dans les mains du sieur d’ Estradat.
N ’a-t-il pas reçu réellement, lors de l’acte du 9
juillet 1809 ;
1,800 fr. pour pot de vin ;
3,3oo fr. en un effet de com m e r ce ;
1 0,000
fr. portés par l’obligation reçue T o u r r a u d ,
dont il s’est libéré vis-à-vis de Joubert ;
25 , 5 q o f r . , pour la valeur du bail de Bicon, dont
Joubert se départit à son profit, et qu’il a touchés
depuis ?
N ’a-i-il pas aussi profilé de l’effet des délégations
qu ’il a faites par le même acte au profil de plusieurs
de
�(
4i )
de ses créanciers, et qui ont été payés par Jouberl?
L e montant de ces délégations donne un total de
35,442 fr.
Et il n’a rien touché!
l i e sieur Joubert n’a pas été trompé.
Serait-ce Courby qui aurait été trompé par Joubert?
Il ne réclame rien contre son oncle; et lui même
se reconnaît débiteur de sommes considérables.
Quelle garanlie offre-l-il à son créancier?
11 est donc prouvé que le sieur Courby n’a pas rempli
les obligations qui lui étaient imposées par la loi;
Q u ’il n’a pas déclaré les hypothèques légales;
Q u ’il a trompé Joubert avec lequel il contractait;
Q u ’il n’a point commis un stellionat imaginaire.
lie jugement doit donc être maintenu dans la dispo
sition qui déclare le sieur Cou rby slellionataire.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert ?
Cette partie de la cause n ’a qu ’un mot.
On critique' la liquidation des premiers juges, re
lativement aux objets acquis le 11 avril 1807, et on
vent la réduire à la somme de 6,913 fr. 60 c. , prix
de la vente consentie par le s.r Joubert à Gaudissier.
Cette observation pourrait paraître fo n d é e , si la
Cour ne pensait pas que Joubert , qui a acquis le
jardin moyennant 8,000 francs, et qui en est pri vé,
par le fait du vendeur, doit répéter tout ce q u ’il a
payé.
�(40
L a fixalion de la somme de 18,074 francs, que
les premiers juges ont allouée à Jo ubert, pour la dif
férence fixée entre le prix de la vente de 1809 et
celui de l’adjudication, est également contestée.
Il
paraît juste de rectifier Terreur qui s’esl glissée
dans le jugement, en confondant la valeur d e l à ré
colle pendante et du prix des baux de l’année courante,
évalués 4,074 f r . , avec le prix des immeubles.
Mais le sieur Joubert fera de son côté quelques
réclamai ions.
L e sieur Courby lui doit compte,
i.° Des sommes qu’il a touchées sur les baux à
ferme qui faisaient partie de la vente, et dont il a
fourni quit lance aux fermiers.
z.° D e la valeur des vigne et terre provenues du
'nomm é Chosson, et comprises dans la ve n te , dont
il n’a jamais été mis en possession, ainsi que des jouis
sances depuis la vente.
3.° L e jugement n’a pas adjugé au sieur Joubert
les frais et loyaux coûts de l ’acte du 9 juillet 1809.
Néanmoins ayant été exproprié par le fait de Courby,
vendeur, il a droit à cette répétition qui excède la
somme de 4>000 f rancs*
On soutient qu’il y a erreur de droit dans la dé
cision dont est appel,’ en ce qu’elle a accordé au s.r
Joubert la différence du prix des deux ventes. Pour
jusiifier celte e rr eur, on allègue que Joubert n’a pas
été évincé comme acquéreur, mais seulement comme
débiteur solidaire, ou comme caution solidaire, faute
de paiement ; et que conséquemment il ne peut exiger
�b o /
( 43 )
que le remboursement de ce qu’il a payé pour le
sieur Courby , débiteur direct , et les intérêts
de
celle somme.
L ’erreur est dans l’objection.
Joubert a été évincé, comme acquéreur ou tiersdétenteur, et non comme débiteur solidaire.
L e sieur D u m a y n’a fait exproprier Sailiève, que
comme subrogé de fait et de droit, au privilège du
sieur d’Estradat, premier vendeur qu ’il avait payé.
Comme créancier de J o u b e r t , en vertu de la cession
de 1808, D umay n’avait aucune hypothèque sur Sarliève, puisqu’alors Joubert n’en était pas propriétaire,
et qu ’il n’avait assuré d ’hypothèque que sur son do
maine des Brassets.
L ’éviction a donc eu lieu du ch ef de C o u rb y, v e n
deur, et sur Joubert, en qualité d'acquéreur. Courby
ne peut donc refuser une garantie complet le.
L e jugement a bien décidé en se conformant sur
ce point aux articles 2,178 et i , 63 o du Code N a
poléon.
On a
1 air de critiquer l’évaluation des dommages-
intérets; Joubert a seul le droit de s’en plaindre, si
1 on considère les pertes considérables qu ’il a essuyées
par le fait de C o u r b y , et l’état de délabrement de
ses affaires.
Les premiers juges ont pu condamner par corps au
paiement de ces dommages-intérêls ; et jamais, peutêtre, il n’a été fait un meilleur usage du pouvoir dis
crétionnaire accordé aux tribunaux, par l’article 126
du Code de procédure.
12
,
�( 44 )
En dernière analyse, des fraudes multipliées, des ma
nœuvres obliques, des actes odieux accusent le sieur
Courby.
Par des
stellionats
géminés , il
est
parvenu
à dépouiller le sieur Joubert d’ une grande partie de
sa fortune.
Il
se trouve dans tous les cas prévus par la loi, et
ne peut échapper à une condamnation qu’il a jus
tement méritée.
C ’est avec un sentiment pénible que le sieur Joubert
s’est vu fo r c é , par les imputations qui lui ont été faites,
îi prendre la plume pour éclairer la Cour et le public
sur la nature et les suites de ses relations avec le sieur
Courby.
S i, par la force des choses, il a été conduit à ma
nifester des vérités fâcheuses, que le sieur Courby
n ’impute qu’à lui-même la honte qu’il en éprouve!
C ’est dans les actes qu’il a passés, que l’on découvre
ses sentimens et sa conduite. Pourquoi a-t-il pro
voqué son oncle par une récidive insultante? Pour
quoi l’a-t-il placé dans la dure nécessité d’une dé
fense légitime?
L e sieur Joubert le répète : il ne réclame que jus
tice. Aucun sentiment de haine ni de vengeance ne
le domine. S’il insiste sur une condamnation par corps,
c’est parce que, dans l’état réel ou apparent d’insol
vabilité où le sieur Courby« s’est placé, par des ma
nœuvres obliques, il n’a pas d’ autre voie pour assurer
le paiement, de ses créances. '
■" '
Pour ne laisser aucun doute sur ses véritables in-
�.
. . .
(.45.) .
..
. .
t e n t i o n s le sieur. Jouberl r é i t è r e , e n présence de la
^ Cour les offres qu’il,a faites cent fois, avant et depuis'
.
l'instance. Que le sieur- C ourby se montre avec fran_
c h i s e et b onne loi;q u ' i l assure , par des moyens convenables, le paiement des sommes dont il est débiteur;
e t l e s i eur J oubert, renonçant aux droits qu’il tient
“
1
de la loi s’empressera de lui accorder tous les délais,
facilités et tempéramens raisonnables qu’il pourra
„désire r Que le.sieur C u
o r b y soit sincère dans ses offres;
.qu'il soit fidèle à ses nouveaux engagement. L e tems
.
qui calme tout, effacera quelques torts. L ’indulgence
p e r d o n n e r a l e reste et peut-être un jour retrouvera-t-il
a v e c satisfaction dans le coeur de son oncle, l’amitié
et la bienveillance qu’il e n avait aliénéés.
•Signé J O U B E R T .
‘
- M E G O D E M E L , avocat.
M e V E R N IE R E
A v o u é lic e n c ié ,
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Joubert, Jean-Joseph. 1813?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Vernière
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
enfant prodigue
lettres de change
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé ; contre le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant.
note manuscrite : texte de l'arrêt du 5 mars 1813.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2220
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Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
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Brassets (domaine des)
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Clermont-Ferrand (63113)
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MÉMOIRE
JUSTIFICATIF,
P o u r L o u i s BOISSON, aîné, citoyen de la com
mune de Riom
Sur une plainte en fau x , rendue contre lu i, par
LASTEYRAS.
C e mémoire devroit-il avoir cet intitulé? Par quelle
fatalité l’innocent tient-il la place du Coupable ?
C ’est après vingt-six ans d’exercice des fonctions les plus
délicates ( 1) , sans qu’aucun reproche soit venu ternir une
aussi longue jouissance d’une réputation sans tache , qu’un
homme déjà écrasé par la foudre de la justice (2), vient
faire planer sur ma tête, plus que l’odieux soupçon du
crim e, et m’enlacer dans une affreuse procédure.
(1) Il ne peut y en avoir de plus délicates que celles qui rendent
dépositaires de la fortune du citoyen.
(2) Un décret de prise de corps, rendu contre lui, en la senechaussée de Clermont, sur une plainte en subornation de témoin
�( o
vous! mes concitoyens, qu’un injuste ressentiment7
îa haine ou la jalousie n’animent pas ; et vo u s, dont l ame
droite et juste sait se défendre de la fureur du préjugé, de
l’enthousiasme de l’illusion, quel seroit votre étonnement,,
si vous pouviez connoître tous les détails de cette affaire
affreuse, dont un court délai ne me permet que de donner
une esquisse.
Que sous le régime affrcux de la terreur, et le règne si
justement détesté des Robespierre et des Couthon, l’on ait
vu d’infames débiteurs, chercher à faire perdre la trace de
leurs dettes, en livrant à la proscription et à la mort les fa
milles entières de leurs créanciers',c’étoit l’effet deces secous
ses violentes qu’ont produites toutes les révolutions; et nousn’avons dû nous étonner, ni de ces forfaits, ni des suites
q u ’ils aot eues dans ces temps orageux où la justice étoit
paralysée.
Mais aujourd’hui que ces époques malheureuses sont
loin de nous,-aujourd’hui qu’elles sonten horreur à ceUx-là
même qui purent le moins se garantir des erreurs du temps,
aujourd’hui que nous vivons sous lTempire des lois, un
débiteur in grat, et trop long-temps supporté, après avoir
reconnu sa dette, par un retour à Ses principes de mauvaise
foi > n’ait eu besoin que de hardiesse et d’irelpostures, noil
seulement pour arrêter le cours de la justice ,-dan$ ces cas
mêmes où les législateurs ont voulu qu’elle soit la plu»
prompte , mais encore pour précipiter son créancier dans
une procédure crim inelle, et lui ravir les biens les plus
précieux, l'honneur et la liberté ; qu’il ait suili à cet homme
de dire à la. justice, V o ila un crim e, pour que la, justice
ait vu un crim ej V oilà le coupable, pour qu’elle ait tum*
o
�w
’( 3 )
pour coupable celui qu’il a désigne ; qu’ielle a it, sur sa
simple dénonciation, suivi la marche indiquée par la lo i,
dans les seuls cas où le crime est constaté, où les preuves
sont acquises, et le coupable connu ; que ce miracle ait été
produit par un homme entaché d'inculpations graves, qui
ont attiré sur lui les regards de la justice, et dont il n’est
point encore lavé ; qu’enfin, ce miracle ait été produit par
Lasteyras-Tixier, cet homme si connu par la multiplicité
des affaires où l’on Pineulpoit dè mauvaise foi : voilà ce
que l’on ne peut pas même concevoir.
F A I T S .
Lorsque j’achetai en 1770 , l’étude du citoyen M ayet,
j’y trouvai la clientelle de Lasteyras, et dès les premiers
temps de nos relations , l’intimité s’établit entre nous, au
point de m’aveugler complètement sur son compte.
Lasteyras me donnoit peu d’argent (1); mon attachement
lui en tenoit lieu ; d’ailleurs il avoit beaucoup d’affaires ;
il passoit pour rich e, et je me contentois de l’espoir de
retrouver complètement un jour mes peines et mes avances j
seulement, par fois, après de gros déboursés ¿j’en retirais
quelques effets de commerce, dont je lui fournissois dea re
connaissances ,, lorsqu’elles auraient pu faire double emploi
avec les procédures qui me demeuraient.
(1)
U ne m ’a pas m êm e en co re p ayé une belle ju m en t et ses har-
n o is , que j^ lui cédai com plaisam m ent en 17 8 4 , p o u r 3 o a l i v . , e t
d o n t p eu de jo u rs après il. refusai 5oo* liv. £ t j’ai r e ç u dans
v in g t
ans 960£ p o u r à-com pte de p rocédures qui passent 5 ooo£ , e t deux.
püyag_es, en h ville 4 a Paris«
�<4 ) .
T./oui’ effet, comme on le conçoit bien , ¿toit de lui tenir
lieu de quittance, après leur acquittement (i)
Lasteyras faisoit donner à ces reconnoissances la forme
d’indemnité, sous prétexte que,, sous cette form e, elles
serviroient à tranquilliser sa fem m e, dans le cas où elles
viendroient à p ro tê t, et que la dénonciation tomberoit
entre ses inains ; je n’a vois pas intérêt à le contrarier.
Mais je ne m’en tenoispas à faire à Lasteyras des avances
dans ses affaires; ma bourse et mon crédit étoient à sa dis
position dans les fréquentes occasions qu’il avoit d’y re
courir.
C ’est ainsi qu’il sortit dans les années 1786,1787,0 11788,
différons effets, mais ils furent peu considérables ; le plus
fort n’a pas été à rooo
En l’année 1789, Lasteyras fit décréter en la justice de
M osun, seigneurie de l’évêque, dont il étoit ferm ier, des
nommés Royat et Dourigheau, pour prétendus vols de
bois , etparvint à les faire emprisonner. D e s obligations
qu’ils consentirent devinrent le prix de leur liberté ; mais
bientôt ces particuliers réclamèrent contre leurs engagemens, rendirent plainte en la sénéchaussée de Clermont y
en suborn;:ti')n de témoins ; e t, après une information de
trente-sept témoins, Lasteyras et son associé Vauris furent
à leur tour décrétés de prise de corps. Vauiis fut constitué
prisonnier, et Lasteyras vint se jeter dans mes bras , et
chercher dans ma maison un asile qu’il étoit sûr d’y trou
ver (2).
( 1 ) C elles qu’il a acqu ittées ne fero n t pas niasse co n tre m es
créances.
(2) A lo is son fils, celu i qui figure si avantageusem en t dans c e tte
�w f
'Ç s y
Cette cruelle affaire , qui Je surprit dans un des inslans
oii il étoit le plus gêné clans scs moyens ( ce sont ses propres
expressions dans l’une de ses lettres ) , le mit plus que jamais
dans le besoin de recourir à la bourse de ses amis. Je ne fuà
pas le dernier à venir à son secours. J ’cpuisai la mienne,
j’épuisai celle de mes amis. De là , divers effets de sa part -,
tien plus considérables (i) que les premiers. Ils donnèrent
aussi naissance à des indemnités, mais elles avoient alors
un autre principe. .
1
Lasteyras ne faisoit jamais les fonds de ses effets, et j’étois
a ffa ire , ce t a c t if agent de la p ersécu tion que j’ép ro u ve, jeune ertc o r c , ven oit visiter so u ven t son père* et j’essuyois ses larm es en
en répandant a ve c lui. L a belle am e l Q ui p o u rro it croire a u x
signes de sa reconnoissance? D ans une des perquisitions faites ch ez
m o i, à sa so llicita tio n , on l’a v u au nom bre des satellites , les en
c o u r a g e r , les suivre k m o n jardin, leu r recom m an d er de fouiller
a v e c leurs sabres et leurs b a ïon n ettes dans la p aille, insulter ines
enfans et a leu r m a lh e u f. . . S o n cœ u rn e dém ent pas la féro cité qui
se peint sur sa figu re. I l savoit que je ne pouvoisi te n ir au sè c o u ri
de mes enfans,* il e n a b u so it, le lâ ch e. O m onstre d’ingratitude î
h o m m e a tro c e ! c ’est m oi qui iis ré v o q u e r, à fo rce de peines e l
✓d ’a r g e n t s o rti de m a p o c h e , le d écret qui fra p p o it l’a u teu r de tes
jo u r s ; tu le sais, tu fa s v u , et c ’est to i qui viens en personne a id ei
à l’exécution de celu i so u sle q u e l je g é m is;:tu l’as.fàis en préseùce
(le mes e n fa n s, en riant de leu r douleur. T u h è inéritois pas d’avoir
un p è r e , tu ne seras ja m J s digne de l’ê tr e ; la société d evro it te
revo m ir.
(0 A
>! ‘ j '
cet te époque L a s fe y ras em p runta 30,000 livres de la maisoiï
P e tit de R a v e l, q u ’il v o u lu t p ayer lorsque la va leu r dii papier-monn o ie fu t réduite à zéro ; niais les eflorts de sa m auvaise foi ont été
sans succès auprès des trib un aux.
�( 6 )
obligé de les rembourser après le protêt; mais quelquefois
il prévenoit le temps de leur échéance, et me prioit d’en
reculer l’époque. S’ils étoieut en m>es m ains, il les retirait,
et les remplaçoit par d’autres; si je leç avois mis en com
mence , dans, l’impossibilité de les lui rendre, je lui donnois
en place une indemnité, mise pour l’ordinaire à leur même
date.
, A. l’égard d<?3effets protestes, que j’ayois remboursés, je
me contentois de les garder en main, ( il falloit ou prendre
ce p a r tiio u se brouiller aivec Lasteÿras ( i ) , et je les préferois à de nouveaux ^parce que le protêt leur faisoit porter
intérêt.
Parmi ces divers effets, qui se cumuloient ou se succès
doient eu mes main&,'se trouve l’effet qui donne lieu au
procès. Il fût souscrit par Lasteyras, h ‘¿ fé v r ie r 17 9 1,
payable s u r L am o th e, banquier ù Q erm ont, le 30 sep
tembre 17 97,
Ce termt* étoitlong sans doute , mais nous le préférâmes
J,’un et l’autre >quoique par des pio.tifs différens.
A la même époque, Lasteyras devoit, d’après nos arran*
gemens, me-donner 1,236
il promit dje me les envoyer
(l)
N p » seu lem en t il,m o n tro it de l’h u m e u r , si je deveqois près*
san t, m ais en co re il fâllo it m é n a g e r son am o u r-p ro p re a u ta n t q u e
aa b o iu m ILsIoffensoit siifa cile m e n t, que-,. daas une de ses le t tr e s ,
d ont je suis m u n i, il m e faisoit des plaintes am ères de c e que^ j’avoia
dem andé, la di^traQtjQn.des dépens dans une de ses affaires lp sp lu s
copsidi'rables,: e t,, p o u r m.e rendre plus sensible à c e r e p r o c h e , i i
joignit de cro ire q u a ce, bm iit ^.voit. çu, pg«r„ tjbjot de.üjfi desservie
auprès de lui.
�-<?te Qerm ottt, parce q a ’il comptait, th’s o it- ii, f e roce^oi*
Sur une vente -qu’il aVoit faite de bais à briller ; mais à ce
payement il substitua un -effet de cette somme>en me man
dant qu’il n’avoitpas reçu le sou. Cet effet fut tiré de Cierrinorit, le ^ fé v r ie r 1 7 9 1, sur le citoyen Chassaigne , ban
quier à R io m , pour être pqyé le 20 octobre 1797.
«ïadhiî'ai ces deux effets, presqu’aussitôt que j ’en fus
n a n t i, et je voulus en réparer la perte : ce ne fut pas sans
peine que j y parvins. Lasteyras, dont les anciennes •affaifés
tftoient suspendues par les nouveaux établissement, ire
paroisèait presque plus à R iom , et loi'sque je le voyois t t
que je lui demandais des seconds effets, il éludoit ma de
mande sous le prétexte qti’ils feroient double emploi. Ge
lie fut que le i 5 novembre de la même année 1791 /q u ’il
îîie souscrivit sur ufi chiffon de papier,la promesse !de m’en
■consentir de semblables >,powr les tnénves sommes èïp o u r
les mêmes échéances \ et comme il devoit partir lô Jende■tnain de bohnç heure, je fus obligé de m’en contenter pour
:cette fois 3 mais ello fut rènoitvelée le 3 avril 1793 , sur du
papier timbré. Il n’est utile dé parier ici que de la teneur
¿ e c e dernier écrit; il est conçu en tes termes : J e soufr
*ign é, reconnais qu'en Tannée 179t , et en jan vier ou
¿février fic e lle , je consentis deux lettré* de Change, méri
tantes , jointe#ensèm bU yà lasçitoïm dè 3 * 4 ôü %Ç> #*,
payables, Tient chez Lam othe¿et Ttciitrech&& G/iti&sà/gné,
dans le c o u r a n t de septembre etd'ocïobns 17 9 7 dont là
dernière est de 12367 et attendu ÿuô ledit B oisson les à
ad hirées, je prom ets lu i en Consentir de nouvelles dis
Paréille'vtiïeur, etpour semblables échéances, ¿an# préju
d ice à toutes autres lettres de, change , que je peux lu i
,
�(8 )
avoir consenties , protestées ou non protestées, q u i de
meureront dans toute leur fo r c e et vigueur, s a u f à moi
les indemnités que je peux avoir contre celles quelles cou-vriront. F a it à R io m , le 3 avril 1793.
II.paroît qu’au moment où Lasteyras tenoit la plum e,
pour approuver et sig n e r, je m’aperçus qu’il ne conti>jioit de réserve en ma faveur, que de mes lettres de clienge,
et comme j’étois créancier, soiten vertu d’arrêtés décompté
/et de promesse, soit pour procédures et vacations, soit du
montant de deijx voyages que j’avois faits pourluienla ville
de Paris, pour parer au danger dém on omission à cet égard,
j’engageai/^asteyras à étendre mes réserves; en conséquence
il m it, de sa main, à la suite de l’écrit, sans préjudice à>
autre -,billet, à autre promesse que ledit B oisson a en
.mains , et autre objet. A. R iom , ce 3 avril 17 9 3 , suit lç>
signature L - a s te y r a s , et en suite, Can a de la républi
que française.
On voit que cet écrit est un renouvellement et une con**
Urination des d^jjx lettres (le change ci-dessus énoncées^:
.cette circonstance, ainsi que sa date", sont essentielles fi
¿retenir. A u reste, il n’est pas le seul énonciatif de lettres de
change non échueç j un autre écrit de l^merne année *793>
en fait également mention,
Pepuis cette année J793, lasteyras cessa d’être visible
pour m oi, et nos relations furent entièrement interrouir
pues, jusqu'à une lettre que je lui écrivis, peu après le
retour du num éraire, pour le prier de m’eu envoyer : lettre
ijui demeura sans réponse.
,.
Cependant, le 22 nivôse, an 5 , je négotiai au citoyeqt
jVlurat l’elTet de 2 1 9 0 ^ 1 7 / , du 3 féyricr Ï791 ; je lui
passai
�ye\
(9)
.
...
passai également mon ordre de celui de 1236 #"du 13 du
mcme mois : la première fut protestée le...............
Sur la dénonciation du p ro têt, Lasteyras père et fils
accourent, prennent communicaion des effets, demandent
du temps, promettent au citoyen Murât un à-compte pour
la Saint-Martin, offrent de nouveaux effets pour le sur
plus (1).
Lasteyras manque à sa parole ; le citoyen Mural obtient
jugement au tribunal de commerce.
’ 1
Appel par Lasteyras : il espère , à la faveur de la multi
plicité des causes qui chargent le rôle/de gagner du temps *
mais le citoyen Murât suit l’exécution provisoire, et Las
teyras presse encore pour avoir un nouveau délai. Il ne
peut l’obtenir, et plaide; il chicane sur la caution • il de- ’
mande un délai pour s’assurer de ses facultés. Il ajoute que 1
l’effet dont il s'agit, n’est entre mes mains,commebeaucoup
d’au très, qu’une pièce de crédit, que son père m’a fournie
par complaisance, et contre lequel il a des in d e m n ité s
E n fin , en dernière ressource, il dit que l’effét peut
présenter de la s u s p i c i o n p a r s o n é t a t \ que dans son prin- *
cipe,il étoit payable«« 30 s e p t e m b r e 1791, et que cette date
a voit été convertie en celle d e s ô p tè m b r è 17 97': s a n s d o u t e ,
■pour é v i t e r l 'a p p l i c a t i o n d e la c o n t r e - le t t r e q u i T à j in u lle .l
____________________________ <n • i'n
> U
(i)iL e s no.uvc 3u*jeffiM frifi:furent p ofn j,accep tés, parce q u elle
r it o y e n M u râ t exigeoif m on cndos.scincnt^t j’exige ois la signature )
du fils, vu l’état actu el du p ère ; inais le fils refusa de s’obliger persônnellem ent. L e c ito y e n M urât au ro it pu donner d’am ples éciairrisseitiens; mais il n’a point été ap p êlé'^ et'S à belle-Sûeur qui ne
p o u v o it en d o n n er, l’àéték1
{z) L e ju g em en t du
.viiim o'-
28 frim aire fait m ention
:
de ces moyo/is.’ »"1
1
�( & y,
Heureuse idée du premier ddfeiweur de. Lasteyras:
qu’elle a bien servi sa mauvaise f o i s o n impuissance (i.) et
ses vues dilatoires ! Elle fut accueillie aussitôt qu’indiquée,
cette manière nouvelle de puralyser la justice\ d’arrêter ,
sans les attaquer directement, l’exécution d’un ‘de ces titres
qui doivent en avoir une si prompte. L a lettre de change
est représentée ; elle est en mauvais état sans d o u te m a is
c’est le papier qui en a été altéré par un trop long séjour
qu’elle a fait enterrée avec mes autres papiers, sous le
régime de la terreur.
Mais elle n’est point altérée dans l’écriture ; elle n’est
viciée par aucune surcharge : cependant par jugement du
1 8 frim aire, il est ordonné qu’elle sera déposée au greffe ,
et qu’il en sera dressé procès verbal ; et le dépôt fut effectué
sur le champ.
L e citoyen M urât, dépouillé d’un titre bien reconnu
par Lasteyras, et qui sait qu’il n’a pu l’être que par une
inscription de faux, cite Lasteyras pour voir dire que faute
par lui d’avoir pris cette voie , il sera autorisé à retirer la
lettre de change du greffe. Sur cette dem ande, il est or
donné , par jugement du 23 frim aire, que dans la décade ,
Lasteyras sera tenu de déclarer s'il entend passer à l’inscriptioa de faux...... Sinon M urât est autorisé à retirer la lettre
de change du greffe.
>’C e second jugement ftit rendu après un nouvel examen
très-lo n g de la lettre de change.
(r) E lle est bien n o to ir e ; i^ n ’y a p oin t de décad e qu e l ’ on n e
ren d e au tribunal de c o m m e rce de C le r iu o u t des co n d a m n a tio n s
c o n tre lu i.
'
■
* :m 1 ¡:.
�Ce jugement est signifié le 28 frimaire; niais Lasteyras,
au lieu de prendre la voie de l’inscription de faux, emploie
deux jours entiers à cajoler le citoyen, M u rât, pour eri
obtenir le délai d’un mois.
Lasteyras et son défenseur avoient pris communication
alors de l’écrit de 1793, qui renverse tout le système de sa
défense. On convient d’un jugement confirmatif de celui
du tribunal de commerce, porta'nl condamnation des dépens
contre Lasteyras, et cependant une surséance d’un mois.
Ce jugement convenu est demandé et prononcé haute
ment à l’audience. Mais dans le même moment un de. ces
hommes qui sont méchamment officieux, fait remarquer
au défenseur de Lasteyras que ce jugement donneroit ou
verture à des dommages et intérêts envers m o i, et que
pour le neutraliser, au moinsfmomentanément, ilfalloit
y faire ajouter que la lettre-de change continuerait dp
demeurer au greffe. Il propose donc.au tribunal d ’admet
tre cet amendement. L e citoyen Murât ne veut pas y con
sentir. L e jugement est rapporté, et la cause remise. Cçs
faits sont notoires.
Le citoyen Lasteyras ne s’ o c c u p e plus que des moyens
de délayer. L e voyage de son premier défenseur en la ville
-de Paris servait de prétexte à s o n n o u v e a u défenseur poyr
obtenir plusieurs remises,, et. dçux mois et demi s’écoulent
Cil pure perte ppur le citoyen Murât.
Ce n’est qu!qprèscp terme qu’il obtient l’audience. Alors
. il avoit retiré la lettre de c h a n g e du greffe.
Lasteyras ne rapportoit point la contre-lettre qu il avoit
. annoncée: d’ailleurs elle eût été nulle vis-à-vis le citoyen
Murât. Il est donc sans mpy^ns : ily {suppléepardes exagé¡5 a
�T^*.
• * *1 (' ‘ a ) ** 4 J |
* f ''
rations mitfées, des fables ridicules, des criai lie tfesde induvaise foi. Ce galimathias Confus n'avoit poüi- objet que de
fatiguer, l’esprit, d’attirer l'attention sur des choses extraor
dinaires , pour l'empêcher de se concentrerait point unique
qui devdit Fomipër. n‘" ° •
*
' Cependant on ne'voÿoit reluire ;Vtravers ces nuages em
poisonnés dont on obscurci ssoit la cause,aucun moyen qui
pût retarder la condamnation de Lasteyras; mais après une
assez longue délibération, il est interpellé par le tribunal ( i)
'de déclarer s’il'entend passer ou non à l’inscription de faux.
* Cette interpellation est, comme on le conçoit aisément,
un trait lumineux qui l’éclaire promptement sur le sort qui
l’attend, et le parti qu’il doit prendre pour l’éviter. On le
sait, le danger présent est toujours celui dont on s’effraie,
et Lasteyras laisse échapper en tremblant lé mot fatal", qu’il
entend passer à [inscription' d e'fa u x (>2). Alors par son.
jugement d u .....................le tribunal lu i donne acte de
cette déclaration. I l est ordojuie que la lettre de change
>sera déposée au greffe y et qu’il en sera dressé procès ver*bal. L e citoyen Murât effectue sur le champ le dépôt. Il
lui en est àussi'donh,cacte pa’r le: jugemëntJ n
Ce jugement më paroît l’ouvrage de l’erreur et le comble
• de l’injustice, et je l’attaque par la voie de la tierce opposi-
(1) C ’ est du Gis Lastcyrjiij d o n t on parle : le*.père n’a p aru à
à a u c u n e a u d ien ce; le fils* Peu em p êch ô it bien. D epuis le dérange
m en t de sa tê te e t de ses affaires, il est en tièrem en t sous sa dom i
n atio n .
\
(2) 11 i ’ étoit p o u rvu d’une p ro cu ra tio n arrach ée à son p ère dans
un m o m en t où il é to il à l’extrém ité.
-
'
;
�tîon. Jé dem in rîr* qh’il soit an nul lé dans trnitos ,<rrs d'Wnijtions, et subsidiaireinent que, dans le cas où l’inscriptioti
de faux seroit admise, l’exécution du jugement du tribunal
de commerce de Clermont soit provisoirement ordonnée.
J ’appuie mes conclusions sur des moyens aussi nombreux
que puissans. Tout l’auditoire en étoit pénétré: mais, qui
lauroit cru ! les mêmes juges, le même président, qui,
lors du jugement du 18 frimaire, n’avoient vu dans la lettre
de change que des motifs de suspicion; qui, lors du juge
ment du 23 -, revenus de leur préjugé,. après un plus miir
examen , avoient autorisé, le citoyen Murât à retirer la
lettre de change du greffe; qui, lors du troisième jugement,
s'étoient contentés d’en ordonner purement le dépôt; les
mêmes juges, dis-je, lors du quatrième jugement, voient
une Jettre de.'charige fausse, surchargée, altérée, impré
gnée dei tous les vices ; je suis débouté de ma tierce opposi
tion , et un mandat d’amener est lancé contre moi.
Ce jugement est devenu le principe de la procédure sou
mise à l’examen des citoyens jurés.
.
f
• Quelles questions sont soumises à leur décision ? Celle de
savoir s i, après l’expiration du délai accordé à Lasteyras ,
pour passer <\ l’inscription de faux, il pouvoit être admis
par un second jugement à prendre cette voie.
20. Si les formes prescrites par la loi ont été observées ;
Si le dépôt ordonné par le troisième jugement, l’a été
valablement ;
. ,
. r ....
Si les faits de faux sont pertinens et admissibles, si l’on
peut soumettre à une épreuve expérimentale la question
de savoir si l’eifet a été altéré; tandis que les preuves écrites
qu’il 11e l’est pas, se trouvent cumulées.
!
�‘L ’or'donnancc de 1730 porte que celui qui prétend passer
à l’inscriplion de fa u x , doit lefa ire dans les trois jo u rs , à
compter de la notification du dépôt de la pièce arguée de
f a u x ; or ce délai avoit couru contre Lasteyras, à compter
du jugement du 18 frim aire, qui porte que le dépôt or
donné a été effectué. Il est donc certain que ce jugement
étant contradictoire avec Lasteyras présent à l’audience, le
dépôt ne pouvoit lui être mieux connu ; qu’ainsi, dès qu’il
avoit laissé passer ce délai de rigueur, M urât avoit été
fondé à se faire autoriser à retirer sa lettre de change; que
la décade accordée à Lasteyras ,-par le jugement du 231 fri-*
m aire, pour passer à Vinscription deJ a u x , avoit été un
délai de grâce; que n’en ayant pas profité , il étoit déchu de
toute faculté , et que le tribunal, après une telle fin de non
recevoir, n’avoit pu admettre son inscription tardive.
- Vainement diroit-on que la loi du 3 frim aire, an quatie,
ne prescrit 'poi nt de délai ; ce scroit une absurdité.
Les dispositions particulières que contient cette loi sur
le faux, n’annullent pas celles des anciennes ordonnances,
tfui Ti’y sont pas con trairesparce cjue la loi du 3 brumaire
.ne les abroge pas.
1>;
Il résulterait d’une opinion contraire, qu’il n’y auroit
jamais rien de fin i, et que des siècles entiers ne sufïiroient
pas pour éteindre des actions, lors même que ce laps de
temps seroit-le sceau des conventions des parties, ou des
jugemens rendus entre elles. Il en résulteroitque celui -Ji
«môme qui auroit été renvdyé d’une accusation par la jus
tice,pourroit encore ijn essuyer une nouvellepour le même
4ait. N ’admettons pas de pareilles erreurs.
Eu matières criminelles sur-lout, les fins-deoon recevoir
�( i5 )
ne peuvent, être, relçv^s. Celui qui la laisse acquérir, est
Censé s’être jugé.
La partie publique ne peut elle-même admettre la dé
nonciation de la part de celui qui n’est pas recevable à la
faire.
A ce premier m oyen, s’en joint un aussi puissîftit. Il est
de principe que l’on ne peut dans une affaire cumuler deux
jugeniens renfermant les mêmes dispositions.
Par celui du 18 frim aire, le dépôt de la lettre de change
avoit été ordonné ; il avoit été fait. Par celui du 23, Murât
qvoit été autorisé à la retirer. L ’un et l’autre jugement
avoient été exécutés. On ne pouvoit donc plus y revenir ;
l’exécution d’un jugement lui donne un caractère ineffa
çable d’irrévocabilité.
L e jugement d u .......... ventôse ^
, qui ordonne ,
pour la seconde fois y le dépôt de la p ièce, est donc une cu
mulation de celui du 18 frimaire, et contraire à ce principe:
TiQTi bis in idem•
Il est plus, il est une réformation clu jugement du 23 fri
ma ire.
Ce jugement du 23 frimaire porte qu eja u te p ar L q steyras de passer à l’ inscription def a u x dans la décade,
la pièce sera retirée du greffe 5 o r, la décade et autres dix
étant passée? depuis ce jugem ent, et la pièce ayant été reti
ré e , toutes dispositions çontraires sont une improbation,
un anéantissement absolu de celles qu’il renferme, et un
juge ne peut çe réformer lui-même, et revenir sur la chose
terminée.
Il résulte donc que le dépôt au greffe, est illégal, et n v
pu devenir Ja base d’une instruction criminelle.
�( 16 )
Un autre vice essentiel se remarque dans ce dépôt et le
jugement qui l’ordonne; en effet, la nouvelle loi sur le
faux incident, comme les anciennes, v e u t, article 623,
qu’avant de l'admettre, celui qui veut arguer une pièce de
fa u x , somme f autre de déclarer s il en tend se servir de la
pièce. O r, cette sommation ne fut pas faite au citoyenM urat,
porteur de la pièce, unique propriétaire de la pièce, et seul
en cause avec Lasteyras ; elle ne lui a même pas encore été
faite, La procédure pèche donc dans son principe.
Le dépôt de la pièce est également v ic ié , parce qu’il a
précédé la plainte en faux ; car la déclaration faite par Las
teyras , non de son propre m otif, mais sur l’interpellation
du tribunal, q u il entencloit passer à l’inscription de faux ,
n’étoit.que l’annonce d’une plainte, et non une plainte : or
l’article 526 du titre 14 de la loi du'3 brumaire , ne permet
le dépôt que lors d'une plainte ou d ’une dénonciation en
J( 1UX.
Après ce jugement et le dépôt vicieux de la pièce, Las-*
teyras s’en tint à sa déclaration, et ne rendit aucune plainte.
Il n’en subsistoit donc pas, lorsque le tribunal a rendu son
dernier jugem ent, qui porte un mandat d’amener contre
moi. De là des vices sans nombre contre ce jugement.
D ’abord le tribunal a fait d’office, lors de son jugement,'
ce que la loi veut être fait par la partie. L ’article cité de la’
loi du 3 brum aire, veut que ce soit la partie q u i arguë
une pièce de fa u x , q u i somme Vautre de déclarer s i elle
entend se servir de la pièce ; or ce n’est pas Lasteyras qui
nj’a fait cette sommation, c’est le tribunal qui l’a faite d’ollicej'
il ne s’est pas conformé à la loi : premier vice.
Ce n’est pas à moi que devoit ctre fait’la sommation
mais
�( *7 )
m a is au citoyen M urat, propriétaire de la pièce, et qui
«avoit la faculté de s’en départir.
Il ne s’agissoit que d’une tierce opposition au jugerpe.pt
du 26 ventôse, fondé principalement sur Je vice reconnu
de ce jugement qui ordonnoit le dépôt d’une pièce, sans
sommation préalable au citoyen Murât. Le tribunal ne
pouvoit donc juger autre chose que l’admission ou le rejet
de la tierce opposition. Il a donc outre-passé ses pouvoirs :
son jugement, qui n'est qu’une dénonciation, est donc
essentiellement vicié, et ce vice se répand sur toute, la..pro
cédure.
L e mandat d’amener, qu’il renferme , est encore ,plus
illégal j il émane d’une fausse interprétation de l’art.
de
la loi précitée ; cet article porte que s i un tribunal trouva
dans la visite d’un procès, même c iv il, des indices qui
conduisent à connoître Fauteur d’ un f a u x , le président
délivre le mandat d’amener (1).
L a loi a entendu , sans contredit, .parler du cas où l’ins
truction de lajprocédure a été faite, soit au civil, soit au
crim inel, et que par suite de cette instruction, la preuve
<3u faux est acquise , parce que la^preuve du délit indique
un coupable, au lieu que tant qu’il n’y a pas de délit cons
tant , on ne peut pas supposer de coupable.
Cette vérité résulte bien de l’art. 5^ 8 , rpuisque cet,art.
yègle ce qui peut être observé dans l’instruction de fauî&j
(1) A u x rermes de P a rt.‘53 6 , 'il d e v o ir être su rsira « jngom eat
d u p ro cès civil ,
jusqu’après l e . ju g ea ie n t de l’accusation en
. fa u x ; et ce p e n d a n t, en ré g la n ta u c riu iin e l l’accusation
ep fa u x , Je
tribunal a jugé Pailaire civile, e tlm ’o id é b u u téd e n io a ppp ositioyi
qu elle c.O ü tm d itliu a^
^
�. . . . . . . .
:< m
, . r- .
.
. .
et que ce n’est qu’après s’être expliqué à cet égard, que
vient l’art. 539, qui autof-ise le président d’un tribunal a
laÂCer un mandement d’amener.
’ ! 1
,:i'ïlfa llo iè ! donc, sur la plainte de'Lasteyras, fa ir e l’instruétiort du fau'*',retc’èst après l’instruction \ et lors du jugemèht
de Faffaire, soiŸau c iv il, soit au crim in el, si le faux eût
été constant, et que des indices se fussent élevés contre moi,
' qu’il auroit été autorise à lancer u n . maüdat d’amener ,
coriforniénient à la disposition de l’article 539. On a comfnencépar où l’on deVoit finir. '
'
Il s’agit ici d’un faux incident ; il falloit donc suivre le
vœu de la loi sur cette procédure. L e jury ne pourroit
donc baser une accusation sur une procédure aussi vicieuse.
Mais perdons de vue' cette diffoi-mité de la procédure.
Lasteyras peut-il arguer de iaucune'pièce qu’il a recon
nue authentiquement, et même en(jugem ent, pour être
sincère ? Ses moyens de Taux sont-ils pertinens ?
Pour trouver' u n e’rèionnoissaricé complète ,| de‘ là part
*de Lasteyras,nde Îa sincérité de la pièce, il ne faut que le
: suivre dans‘sa discussion _, lors dès divers jugémens.
La lettre de change ria jam ais été q u u n acte de com
plaisance, une pièce de crédit que f a ijb u r n ie au citoyen
B oisson .
Il reconnolt'donc que la lettre'de change est émanée de
lu i, souscrite p a r ’lui : il a donc une tonnoissance parfaite
de son existence ; il ne peut donc l'attaquer comme fausse j
car, ne iut-eUe qu’une pièce de crédit (1), anéantie par un
(1' C o tte assertion tom be dV lle-m ém o,, p a r ’la sim ple observa
tio n (¡lie je l’ aurois iiig o tié e ^ a u lièU’d e là ¿anlei* en p o ch e ; et que
t d ’ailli'urs cé langage est déplacé dan.s la b o u clie d’ iin h o m m e (jui u’a
jamais cesséd ’c ir c m o n débiteur de som m es coriwdérables.
�f *9 J '
nuire acte, elle ne pourroit, sous ce point cle vue r être re
poussée que par les voies et les moyens civils.
Il ajoute, il est v rai, que dans son principe la lettre de
change étoit payable au 30 septembre i j g i , e t q ù à 1791
on a substitué 1797? pour la ¿faire échapper à la contrelettre dont il est m uni (i).
Eh bien ! supposons d’abord que cela soit ainsi. Où apert
que je suis l’auteur du changement ? Cette date n’est point
écrite de ma main, c’est une chose reconnue.
F û t-e lle de ma main; le changement prétendu fût-il^
mon ouvrage, qui pourroit affirmer qu’il n’a pas été l’effet(
d’un consentement réciproque ?
; ,
Une seule chose pourroit le faire croire ,ce seroit une^
contre-lettre qui frapperoit sur une lettre de change de pa-,
reillesomme, de pareille date, qui seroit payable en 1791.
Cette contre-lettre feroit apparoître un intérêt de ma
part h donner à la lettre de change une date différente à
celle énoncée dans la contre-lettre. Mais le citoyen Lasteyras
ne produit aucune contre-lettre ; donc il ne peut pas même
s’élever de soupçon.
Ces faits de faux sont d’autant moins admissibles que
rinstruction de faux est absolument sans objet comme sans
cause, et qu’elle ne peut produire d’effet.
Lorsque le faux ne frappe comme dans l’espèce, que sur
l'altération prétendue d'une pièce, l'objet de l’inscription est
çle rétablir la pièce dans l’état primitif qu’on luisuppose\
son effet doit être de réduire l’acte à sa juste valeur.
( 1 ) C*est ainsi que Lasteyras s’est exprimé dans ses diverses
îidoicries.
C 3
�•V
*
*
*
(
V
2Û
p
/
*
^»T
Mais' si ïâ preuve dü fait dé faux ne peut produire d é J
changement à là nature'fton plus qu*à la valeur dç l'acte,^
ellé est vraiment sans but comme'sans effet, e t‘sans in
térêt : donc le fait dé faux n’èst pas pertinent.
1
"C ’est ici noire espèce: Supposons en effet que la lettre déchange fût payable en 1791 , etquesadàteait été converti«,
E e J"àù de fa u x frappant sur ce changement, Fobjet de
rinstruction du f a u x seroit de rétablir là date 1791. Sup-»’
posons donc m aintenait cettè date rétablie, quel sera l’effet'
de cefrétablissement ? Il sera absolument nul, parce que la
nature dié là -pièce-attaquée et sa valeur neseroient point"
changées. Ce seroit toujours une lettre de change, une lettre
db change dé la même som m e, contre laquelle on seroit r
après la preuve de fa u x , comme avant, c’est - à - dire T
saris moyens si l’on est sans quittance.
•
1
Que diroit-bn d’un homme qui conviendroit avoir signé
lin acte et l’àrguëroit néanmoins de faux , en disant que
T'àn a effacé sa signature, q u i étoit à droite, pour en
mettre une à gauche. Assurément on riroit ou l’on devroit
rire de ce fo u , et l’envoyer aux petites maisons , au lieu
d’admettre sa plainte. Eh bien! c’est exactement la même
chose, c’est le vrai langage de Lasteyras.
Il a souscrit la Itttre de change , il l’a souscrite pour sa
valeu r; mais elle étoit payable en 17 9 1, au lieu <£étr&
payable en 1797 : voilà le fdit de faux.
Mais, s’il en étoit ainsi, ce changement n’auroit été fait
que poüraméliorersa condition, en reculant son payement
avec perte d’intérêt pour moi. Pourquoi donc se plain
d ro n t-il?
Ces moyens sont sans réponse, mais de plus puissanseor
ore sV réùnisseuU
�•
y
Je déiiientre d’abord que l’état physique de*ïa lettre de
Change, dépose contre.son infâme supposition. J*établis
que le mot d ix - sept n’a pu être intercallé dans la place du
mot on se 5que IV dans lé mot onse , est liée sans distance ;\
1’>1 dè la première syllabe on, tandis que IV dans le mot sept,
est drstinctemont séparée du mot dix\ d’où il résulte que les,
deux mots dix-sept n’ont pu être composés du mot onse,
E t d*aill'eu?*s la preuve du fauxseroit impossible, il faur
d roit trouver des témoins.en étal de d é p o s e r que la lettre
de change étoit différente autrefois de ce qu’elle est aujourd-'liui. Toute autre preuve seroit nulle, pour établir l’al
tération , parce qu’il ne suffît pas qu'un délit pût être,
com m is, il fa u t que la preuve en soit acquise : voilà donc
ce premier système anéanti.
Mais il circule que Lasteyras, ne pouvant le soutenir, se
rejette à soutenir que tout le corps de*la lettre de change
est faux ; que la prem ière écriture a été enlevée avec des
ea u x corrosives, et qu on y a substitué une lettre de.
change , et c’est la couleur, la siccité du papier qui fournit
ce moyen.
Mais l’on a observé que la couleur rousse du papier, pro
vient , i°. de son état de pourriture : elle produit cet effet ;
20. de là colle dont je me suis servi, pour mettre une dou
blure à la pièce dans sa partie la plus altérée : on peut
éprouver cet effet de la colle, sur-d’autres papiers.
30. Lasteyras lui - même , qui connoissoit ou par lui ou
par son défenseur , ce daogercux secret, rélégué autrefois
dans les couvens des moines, de l’effet de leau forte, a
anuoncé lui-même que le papier que l’on a soumis à soû
�t 22 )
action, perd par elle sa colle et sa consistance, qu’alors l’oncre s’épate. M ais, i° . la pourriture et l'humidité du papier
produisent le même effet, En second lieu , toute l’écriture
de la lettre est d'une forme très-déliée, et qui ne ressemble
à rien moins qu’à ce qu’elle devroit être d’après Lasteyras,
ce qui prouve que l’avarie du papier a été postérieure A
l’écriture , au lieu d’être antérieure,
A l’égard de la siccité du papier et de sa facilité à casser,
elle dépose contre l’assertion de Lasteyras, par des consé-.
quences tirées de l'effet qu’il attribue à l’eau forte.
En effet, si l’effet de son action est de décoller le papier ;
au lieu de le rendre cassant, elle doit le rendre souple ; au
lieu de le dessécher, elle doit l'impregner d’humidité.
Que l’on prenne du papier sans colle, en vain on le pliera
en différens seps, non seulement il ne cassera pas, mais au
contraire les plis que l’on aura faits, ne conserveront
pas d’impression,
La colle, au contraire, rend cassant tout ce qui en est
im prégné; c’est ce qui donneaux étoffes, ce que l’on appelle
Vapprêt, et qui les fait couper.
La siccité du papier de la lettre de change, prouve donc
qu’il n’a pas subi l’action de l’eau forte.
Il seroit sans doute trop dangereux pour la société de
pousser plus loin des expériences sur cette liqueur, dans
lin écrit qui doit devenir public ; mais on en peut faire sans
danger sur du papier qui auroitsubi une longue humidité,
même celle de la cave ; qu’on le dessèche h la faveur d’un
feu actif; alors il deviendra ce qu’est le papier de la lettrç d^
phanie.
�. ^
C *3 )
r
'
Toutes'les expériences que l’on pourra faire, donneroht
Ce résultat, et ne pourront qu’être utiles, puisqu’elles ap
prendront les moyens dé'parer à un accident, sans tomber
1 dans un inconvénient contraire.
Mais.qu’esl-il besoin de recourir à des épreuves et des ex
p é rie n c e s physiques? la lettre de change ne dépose-t-elle pas
par elle-même, qu’elle n'a jamais été changée ni altérée, et
» ne donne-t-elle pas le droit incontestable de soutenir que le
“ fait articulé n’est pas pertinent ?
En efîet'le citoyen Lasteyras, ce qu’on ne doit pas perdre
' de v u e , rcconnoît que l’approbation et la signature de la
lettre de change sont sincères.
"
O r l’approbation n estpasuiiede cessimples approbations
banales, qui s’adaptent à toutes sortes de conventions.La
voilà : jBonpouYla somme de deux mille quatre-vingt-dix
livres dix-sept sous , montant de l a l e t t r e d e c h a n g e
c i - d e ssu s .
1
Il est donc vrai que le ci-dessus de cette approbatiûn est
une lettre de change, et une letttre de change de deux m ille
quatre-vingt livres dix-sept sous.
•
•1‘
Comment, après une telle approbation, peut-on sup- poser que l’écrit étoit dans le principe tout autre ch osa
■qu’une letlre de change. On veut donc que 'cette approba^ tion n’ait aucunèrvaleur ? N’est-ce pas le comble de l’absur
dité, de ‘vouloir supposer lé contraire de ce que Lasteyràs
atteste hii-mêrne.
Q uoi, l’on veut faire dire, par des Experts et par des ténioiris, le contraire de ce que dit cet écrit reconnu etaVoiié !
' on veut chercher dans la possibilité de c o r r o d e r ou d en
lever une écriture, la conviction que ce délit existe, tandis
�IHi)
que le papier sur lequel on suppose qu’il a ét&commfs,
atteste qu’il n’existe pas, et que cette atestation est celle de
•.•Lasteyras lui-m êm e, -et qu’il la;reconnoît pour telle ?
Quel est l’homme qui se sera,garanti de la prévention
dont on cherche^ circonscrire cette affaire, et qui peutêtre est alimentée par beaucoup de circonstances défavora
b le s , parce qu’elles ne sont pas épurées .par la discussion ;
’et qui voudra donner à des preuves acquises par la science,
souvent fautive et toujours incertaine des experts, la pré
fé r e n c e sur »une preuve toujours infaillible d’un écrit.
Il
n’en est pas d’une, preuve écrite comme d’une preuve
ou testimoniale ou expérimentale. L ’une est irréprocha-»
b le , autant qu’invariable ; -l’autrei au contraire, peut
présenter mille .motifs de suspicion et de contredit.
.Quel expert-même auroit assez-de hardiesse pour oser
• affirmer que la pièce dont il s’agit n’est qu’une pièce fausse
et fabriquée, et qu’elle n’étcit point auparavant une lettre
>~de change,, tandis q u ’elle atteste elle-même qu’elle en étoit
une. Bon pour
somme-de deux mille qmitre-vingUdix
livres, montant do ladite lettre de change ci-dessus. ,
*Ali !que l’oo mette cet écrit entre les mains d’un homme
reconnu , pour être lo plus, grand des; scélérats, et elle pro
duira tout» son effet. Dirart-on qu’elle pou voit être, con
sentie'au profit de tout autre que <le moi ? Mais-alors il
eût 6uffi de supprimer leprem ier nqm , et d ele remplacer
par le mien.
Mais décrit de 179 3, dont oti a vu la teneur, ne vient: il,pas à l’appui de la lettre de change; n’en icst-elle pps
le duplicata ? Il l’est "si bien , qu ’il nfauroit suffi sans-son
.fiucofirs, pour forcer-Lasteyras à m’pfi payer lji valeur.
Cet
�(25)
Cet écrit est universellement connu; Lasteyras ne l’atta*
quoit pas dans ses plaidoieries. Ne fait-il donc pas disparoître tous les doutes qui pourroient naître de l’état du pa
pier de la lettre de change.
Que diroit-on d’un homme qui argueroit de faux un
'écrit, même avec les meilléurs prétextes, s’il n’en attaquoitpas le double qui seroit rapporté?
1■
Eh ! qu’avois-je besoin de mé faire de's titres de créance
contre lui? Sans les lettres de change que j’ai adhiréës, j’en
ai pour dix mille livres,rqui n’ont souffert aueuîne altéra
tion (i). U me dpit plus'de 5ooo ^ pour'vacatibns pour lës’quelles j ’ai, ou ses pièces,'ou des recomioissahees. Et j?jri
fait deux voyages eii la ville de Paris', en vertu de prôcu^
rations notariées, appuyées de ses lettres (2}. Et pour ¡tôtit
•cela une insolvabilité notoire fait toute m!a ressource. ’ ! 1’
A ]«j vérité il désavoue ses procurations et ses arrêtés
cle compte : mais il ne peut désavouer les procédures dont
je suis porteur, et cependant il nepaye rien. L e beau débi
teur que j’ai là ; il vaut bien Ja peine qu’on se fasse contre lui
des titres de créance.
•*
'
A tous ces moyens que peut-on objecter1? L ’étal delà
lettre de change : mais fut-elle en lambeaux, accablée de
surcharges, l’approbation en toutes lettres, de la main de
( 1 ) Q u an d il en absorberoit la m oitié par des indem nités, il
ïn ’ en resteroit en core assez.
(2) Dans une de scs le ttre s , il m e prie de ne^pas qu itter Pari?,
Jusqu’à ce que j’aurois obtenu des arrêts. E!!e est du I er* août.
D t dans u n e autre du 10 o c to b re , il m e prie de continuer mes
coins , et de 11e rien épargner. Q u ’il in c produise maintenant ^ c i
q u ittan ces,
‘
■
1
11
�X 'M ')
Ln*ïtdyras, couvre tout; ¡parce-que toute .s«'valeur ¡s'etiran t Je
»on approbation, c’est elle qui fuit le titre.; ejjle doit servir
contra m nnia te la , et ¡cei-écrit,de 17,93 «’est 'qu’wn itüutf
surabondant.
. • . i> • . ■
- , 1 ■,
îi,.Si UKMS irapprochous;Mwinte®,ant -tau*. ces mayenside la
cand uite dé Lasteyras „ rde ses na^uveme.ns ,poqr ^bteair
du temps, inon refus-de proadre de iiouw.ayx effets m*i6ignés du fils, la cojivictiüii ne devienit—elfe pas Rurabjoudante?
>
)
Mais de nouveaux ennemis , dit-rom,, .paraissent ,sur ¡1?.
.scène.; d’autres titres viciés vieniientrà l^ppui .d.e L^^teyrag,
•Quels sont-ils donc ces .nouveaux .athlètes ? L e citoyea
Chànipetières/que .j’ai convaincu deimauvaisefoi ,>par
yrqpres .lettres .(1?), dans deux plaidoioriesiauthentiquesau
tribunal de ¡commerce de Clorrnont ;>que .j’ai fait condanirn e r, par. un jugem en t.contradictoire susceptible d'appel, et
^ u ’il s’empressa d’exécuter.
,
>
_ X#a citoyenne .Bidon qui a traité .avec moi après ■coru;testatiousen.cause.auriitres vus , de .main puivéc et .nota
riés ; qui suppose aujourd’hui l’existence dîun autre billut
ideidix uiiile;li.vres ¡pour avoir-le plaisir de ;leiCQinbattre,
«tandis que notre traité, embrasse Je hiU<ït de ,17.9o yut¡tous
>autms titres que je pourrais avoir.
,
( 1 ) ,Je p ro u va i par ses lettres, q u ’il m ’ avo it e n v o y é d e -P o m a is e
la le ttre de ch an ge qu’il c o n t e s t o it , et ra p p o r ta i.u n p r o t ê t
i j ( p qui étab lit la p réexisten ce d’ une a u tre lettre de ch a n g e à
celle de 1 7 9 1 . 'L e.m ênie! lio n u n e ne m ’a p a y é qu ’ en 179 7 un biljçt
d / ce n t s o ix a n te -s ix livres de l’an n ée 1774. Il m e fait p laid er
. »aujourd'hui p o u r "des v a ca tio n s qui rem o n te n t à la inOnje époque;
et il m ’ oppose un billet q u ’il disoit adhiré et d o n t j’ai la q u itta n c e .
�( 27 )
La citoyenne Arnoud qui désavoue comme faux un
billet qu’elle dit ne pas connoître.
L e citoyen Tailhand se plaint du payement d’un billet de
360# lui que j’ai tenu quitte, sur la fin de l'an deux,pour
1 5 0 # en assignats d’une somme de 300
qui m’étoit due
en numéraire.
Jusqu’à la citoyenne Gallet : cette femme si connue vient
faire masse contre moi ; elle qui s'est rendue coupable de
stellionat à mon égard, en me donnant en 1783 , en paye
ment d’une dette légitim e, une créance qu’elle avoit tou
chée dès l’année 1766 ; et qui, conseillée par des grugeurs,
répondit à ma réclamation par une plainte sur laquelle per
sonne n’a voulu plaider.
Mais s’ils sont dénonciateurs, aux termes de la loi ils ne
peuvent être témoins; et s’ils ne sont que témoins, que peu
vent avoir de commun leurs dépositions avec l’affaire de
Lasteyras.
Quelle ne doit donc pas être ma confiance, puisque, non
seulement la pièce arguée de faux, ne présente aucun indice
de ce crime, mais qu’encore elle dépose elle-même de sa sin
cérité, et qu’il est impossible qu’aucun autre genre de preuve
p u i s s e la combattre, et que cependant l’instruction qu’on
trouve à la suite de l’article 257 du titre 3 de la loi du 3
brumaire, an quatre, exige defo r te s présom ptions, des
preuves déterm inantes, pour provoquer la décision des
ju r é s , pour l'adm ission de l'acte d’ accusation.
À R IO M , DE
L’ I M P R I M E R IE D E
L A N D R IOT.
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Boisson, Louis. 1798?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
faux
lettres de change
subornation de témoins
prise de corps
offices
témoins
assignats
tribunal de commerce
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire justificatif, pour Louis Boisson, aîné, citoyen de la commune de Riom ; Sur une plainte en faux, rendue contre lui, par Lasteyras.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1798
1770-1798
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
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BCU_Factums_G1628
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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Faux
lettres de change
offices
prise de corps
subornation de témoins
témoins
tribunal de commerce
-
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6bab344525622622d6ab028929bd090d
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M E M O I R E
e n r é p o n s e
POUR
<
B O Y E R , Juge au Tribunal civil de
l'arrondissement de Clermont - Ferrand , chef - lieu du
département du Puy-de-Dôme , demandeur en cassation ;
P i e r r e
C o n tre
Jean - B a p tiste - C e z a r
CHAMPFLOUR-
D’ALAGNAT.
Q u o i q u e l ’ingratitude soit un vice monstrueux et détestable
et qu'il passe pour un crime qui porte en soi l ’opprobre de tous les
crimes } elle était néanmoins impunie parmi les anciens 3 qui estimaient
que la haine et la malédiction publique que les ingrats attiraient sur
eux
était une peine suffisante pour leurs punitions
et que ce crime
é tait de la condition de ceux dont la vengeance particulière devait être
réservée à Dieu.
Ainsi s’explique Dolive , le savant Dolive , chap. 5 , liv. 4
pag335
'
T “
de
’
�J ’ai dit et prouvé par
m on
premier mémoire que Cîiampflom
était dans la classe des plus insignes ingrats. M es preuves sont sou
tenues d’une multitude d’écrits qui ém anuit de lu i-m êm e, et qu’il
n’a pu démentir. Sa réponse n’efface aucun des traits marquans de
son ingratitude , de sa méchanceté , de sa mauvaise foi et de
sa.
perfide marche dans cette affaira y- elle n’est basée cette réponse que
sur ce qui peut sortir de labouche du vice , et du crime monstrueux
de l’ingratituue j m ensonges, im postures,
méchanceté ^ impudente
calomnie ; c’est tout ce que contient votre libelle.
Ç i n'a pas été assez a ’assouvîr votre rage contre ma réputation j
d’aborJ par votre plaidoirie , puis par
vos bravades , non seule
ment dans l’auditoire du tribunal de C le rm o n t, mais
encore dans
les tavernes et dans les cafés , bravades qui ont dû me faire un
devoir de publier m o n m é m o i r e , vous avez osé ajouter , par votre
réponse , les sarcasmes les plus
empoisonnés sur la confiance que
le Gouvernem ent actuel a bien voulu me continuer 3 par suite de
celle que je me flatte d’avoir méritée dans tous les
états que j ’ai
parcourus.
C ’e s t , personne n’en d o u te, afin de me
m o r t, que vous avez
porter le
employé cet amâ» d’outrages
des regrets à tous ceux qui ont attesté
l ’autorité suprême.
le
coup de la
pour
donner
vœu public auprès de
Tém éraire / vous n’avez pas pressenti les conséquences où va
tous
entraîner la lutte humiliante dans laquelle vous me forcez
de descendre
par votre
abnégation
de toute p u d u ir,
abandon inconsidéré à une plume prostituée
n’avez pas calculé
dans
votre
sotte fatuité
par votre
à la calomnie ; vous
sur
mon
origine ,
que la d iffir nce que vous me forcez d’écablir , ne pourrait qu’a
jouter au mépris et au discrédit donc vous êtes déjà trop couvert!
que votre vol reste à votre cupidité , peu m'importe ; c’esr moins
pour moi et pour ma famille que je reprends la plume , que pour
apprendre à ceux qni ne
yo us
Vmgrat qui me déchire.
r
connaissent pas t quel est l’ennemi,
�s n
i
Q u’ai-je été et
qui
suis-je ?
honoré de compter parmi mes
31'eux un Lieutenant général de la principauté dauphine d’A u v e rg n e ,
illustré par une Chartre donnée en 16 0 6 par l’oncle de H enry I V ,
à raison des actions d’éclat au-siège de Vodable , je n’ai cessé de
nie rendre digne d’une origine aussi flatteuse. Com m e procureur
dans les cour et tribunaux à C lcrm onr, une diantelie nombreuse
er d’élite , a plus marqué pour ma délicatesse que pour ma fortune.
D ans quarante années de travail, j’ai à peine
mille francs
à mon patrimoine. J'étais
ajouté
trente-quatre
sévère sur le choix des
plaideurs j je n’ai jamais occupé pour vbus ; j ’ai sur-tout
à
me
féliciter de n'avoir pas coopéré aux cent et une tracasseries que vous
avez suscitées aux pauvres gens de Eeaum ont , et à la faveur
quelles vous avez ajouté
beaucoup
de petits
des
héritages à votre
domaine ; trente familles au moins en gémissent depuis long-tem ps;
vous étiez un habitué du citoyen
dn tribunal d ’Issoire.
T riozon ,
aujourd’hui
greffier
A u x témoignages particuliers de confiance et de désintéressement
ont toujours été joints , et sans interruption , les
marques de la
considération de mes confrères et du public. J ’ai été successivement
syn d ic, procureur de communauté , membre de l’assemblée d’élec
tion d’Isso ire , administrateur de l’hôtel-dieu ,
B e rg ie r,
le
collègue du cit.
depuis plusieurs années législateur, comme
membre du
bureau de conciliation , officier municipal , procureur de la com
m une.
A la première révision du tribunal de district de C lerm o n t, le
vœ u de la municipalité et du conseil général me plaça pu m ier
juge.
X la secon de, le répsésentanr M usset se détermina par l'accla
m ation générale, à m e maintenir dans cette place.
E n l’an 4 , j ’étais à ma cam pagne,
lorsque l’assemblée
électo
rale me nomma juge au tribunal civil t
et je ne dois la place
<jue j ’occupe au tribunal
du Département qu’à la
du
chef-lieu
A i
�connaissance qui a étiS donnée au G ouvernem ent t et 1 mon însçn ;
par tous ses ri présent m s , du zèle et de la candeur avec
lesquels
j ’ai exercé mej fonctions.
Bien loin d î devoir aucun emploi à Couthon , il me destitua B’
à son retour du siè je de Lyon , de la place
C o m m u n e: il était mon em em i s s n s
de
procureur de
la
d o u te, parce que je ne me
servais ni pour moi ni pour mes cliens , de ses talens. L es registres
des audiences et la notoriété s'accordent sur cette vérité.
Généralem ent
pour un
reconnu . même par ceux
qui
ont été
réclu s,
bon, loyal et compacissant Citoyen \ ma femme
et mes
en fans n’ont qu’à se louer de ma conduite domestique , sur-tout j
je n'ai porté au c.n trouble dans aucune famille ;
m ;s enfans
et
mes gendres n’ont jamais eu à se plaindre de ma loyauté.
M a is} quel est donc ce personnage,
naissance ou par
sdiî
sinon aussi illustré par
mérite personael , au
moins
avili
par
sa
son
insolence, par son immoralité , par son audace à faire des dupes.
C ’est Jean-Biptistc-C ezar Caam pflour j le dernier des Cham pflour , ce voltigeur , tau ment sans péris.
Son b isaïeu l, marchand à C 'erm ont , acheki, en 1 7 1 0 ,
le do
maine d’Alagnat , à Beaumont , si vanté par son petit-fils pour »es
©rgies.
Son aïoul était juge ,
Lam oignon. C e
et de plus , homme d’affaire de
m agistrat, par son crédic ,
fie , de
cet
M . de
homme
¿ ’affaires un en n o b li, en 1 7 4 } .
I l n’y a pas long-temps qu’il
existait, à R io m ,
deux procu
re u rs , cousins de ce C e^ar, genrilhomme , qui se divertit à ravaler
l ’ctat de procureur ; comme si le petit-fils d'un marchand pouvait
ignorer qu’il est bien peu de procureurs qui ne ¡»\vonorent de cette
origine.
Com m ent cet homme û hautain s’était-il abaissé à devenir l ’ami
de Couthon ? à all«c se jewer à ses p ie d s, à P a r is , et à en ob-
�J
tenir une lettre pour la Municipalité de C lerm on r, le 7 juillet 17 5 5 ,
lettre qui préserva cet ingrat , et fournit à moi les moyens de lui
rendre les services détaillés dans mon précédent mémoire , et connus
4 e toute la V ille.
C ’est cependant ce
Totre
sau veu r,
même
Coutlion
qui fut
votre protecteur ,
dont l’oubli du bienfait vous a fait fabriquer cette
épigrame ingénieuse , moins pour moi que pour le G ouvernem ent,
et ceux qui l’ont éclairé sur le choix des juges............. Quod genu^
hoc hominum !
I l serait sans, doute merveilleux qu’ un tel Citoyen ne fut le fléau
de sa fam ille, de la société entière.
Sur le premier article 3 ne soulevons par ce voile qui cause encore
tant de désolations , et qui fait l’illusttation de votre femme.
Quant à l’autre, il m’est indispensable d’établir que si la fatalité
me rend victim e, j ’augmenterai la série de tant d ’autres. Semper
malus in eod:rn ginerc mali 3 par-tout astuce , im pudence, mépris
des règles des ob ijacions , comme de celles de l'honneur.
Mcrtons en premier ordre la violation des dépôts qu’avait faits entre
vos mains votre ancien
domestique. L e
fidèle Foureau entrant à
vou e service vous remit 25 louis. I l a l’imprudence de vous confier
q u i! a pour 15 0 0 francs de patrimoine dans le lieu de sa naissance j
vous le sollicitez de le vendre j il a la faiblesse de vous en remettre
le p rix , et ce fut lorsqu’il vous parut aisé de
vous libérer de ces
dépôts et des gages de nombreuses années , que vous prîtes un léger
prétexte pour le congédier, et par ce moyeu l e p a y e r en assignats
presque sans valeur : il est ruiné , et ses lamentations n’ont produit
sur votre cœur d’autres effets, que de le calomnier , sans réfléchir que
yous aviez abusé de l’empire de m aî:re pour violer la loi sacrée du
dépôt.
Appelez en témoignage M . Rechignat-D ém arant sur votre loyauré ,
relativement à votre billet d’honneur, et M . Rochefort , ne R ic m ,
ancien capitaine tl’ir.fauteiie, « m i s qui j ’eus la facilité c ’etre votre
�caution ? combien valaient
les 10 4 0 0 liv.
que vous
aviez promis
sur votre honneur, de rendre en espèces comme vous les aviez reçues ?
vous êtes-vous conduit autrement envers le citoyen B r u n e i, ancien
juge au présidial de C lerm on r, pour 12 6 0 0 francs ; envers le citoyen
G u y o t, de Vie sur-Allier , pour 6000 liv. j envers défunt Charbon
n ie r , bourgeois,
de Clerm ont ,
pour 424 0 liv. 5 envers la dame
veuve L a m o c h e jd e C lerm o n t, pour 4405 francs 12 s. 6 d .; envers
le citoyen Astier cadet, pour 24000 francs ; envers le citoyen Bonnec
officier de santé à C lerm o n t, pour
7
011 8000 francs. Il en sera
encore question.
Sont-ce là des traits d’honneur , de cet honneur qui distinguait les
preux chevaliers , comme ces respectables négocians que votre bisaïeul
eût sans doute imité ? ai-je calculé juste en vous plaçant ledernier
de votre race ?
Sans doute avec de pareilles ressources vous eussiez été ou plutôt
vous eussiez dû être au-dessus des besoins ; mais pourquoi , vous
sur-tout si grand en m unificence, avez-vous récemment ajouté à Pénormité de vos dettes un emprunt de
20000 francs à 18 pourcent
avec double doublure ? espereriez-vous au retour de moyens aussi
prom pts, aussi faciles pour votre libération ?
N e semblerait-il pas entendre le Cardinal de R ohan , à votre fa
tuité de rehausser la maniéré dont vous avez soutenu avec dignité
le rang où votre nom et votre condition vous ont placé ?
D ’après ce tableau fidèle connu de tous
nos concitoyens, qui ^
Cezar Champflour convaincra-t-il par son impudence sur le genre
de nos relations, par le ridicule de ses calomnies , par l’exagération
de sa prétendue générosité ? E t d’ab o rd , comment faire coïncider le
paiement dei vacations dues à un Procureur qui ne l’a jamais été pour
Champflour , ou les appointemens d’un homme d’affaire affidé tej
que Costes et L o u ïre tte , avec les marques d'une
reconnaissance
pour des services d’ami , de con seil, de guide j de cautionnement.
C est sous ces rapports que
yo uî
prépariez perfidemment vos leures »,
�i
en disant à
vos
SU
,
enfans arec transport apparent > avec jo i e , que
j'étais leur second père.
Quel «finem en t d'invention , de supposer d'avoir donné 25 louis i
ma domestique pour se donner le plaini: d’ajoucer que j’ai partagé ce
prétendu don ! Quelle corruption dans L s habitudes pour im aginer
un pareil moyen de calomnier ! ausii semble-t-il
qu’on ait
fouillé
tout son répertoire de sottises et de grossiéreté, pour me les appliquer !
Quod genus hoc hominum !
Une telle imposture qui n’est étayée
nécessairement enhardir à
saisir les
que
par l’audace, devait
lieux communs d’invectives.
L es larmes du pauvre arrosent les champs
que B o yer a acquis ou
usurpé pendant quarante années de vertus. Quel boursouflage ! qu’elle
attroce supposition ! Je n’ai rien acquis , encore moins usurpé de ce
qui a appartenu à des particuliers peu fortunés.
L ’acquisition que j ’ai faite à So lign at, au prix de î j o o o fr.
l ’a été de M . de Brion-de-Laizer.
I l ne s ’ agit, continue Cfaampflour , que de consulter les habitant
de la commune de Solignat 3 et le délibératoire du conseil, du 9 frim aire
an <) , qui autorise le M aire à poursuivre B o y e r en désistement des
Rutoirs et Communaux dont il s'étalt emparé j
pour
aggrandir son
p r é de Pragrand.
A qui Champflour a-t-il recouru pour un mensonge si mal conçu ?
L a commune de Solignat est composée d’environ mille habitan^
ou forains propriétaires j il leur a pris fantaisie , après l’an 4 , de
se diviser les communaux j je ne m’y o p p o s a i point. L es citoyens
Courbeyre , l’un ancitt» adm inistrateur, a u j o u r a ’ J iu i du conseil de
Préfecture , l’autre juge de p a i x , et le citoyen Duclauzel avaient
pris leur part : le citoyen Courbeyre avait fait extraire de son pré
environ mille chards de pierres qui furent déposées sur
la portion
¿ c com m unal, portion que j ’ai prise comme les autres , en suite de
la destination qui en avait été faite
pour moi.
C e n ’a jamais été
l ’emplacement des rutoirs. Il a plu à neuf particuliers sm m ille, de
■-*<
�s
me faire un procès ; il y a des Champilour et des brouillons par-tout:
Aussi ne voit-on figurer dans les n euf qu’un
M erle courroucé de
ce que j’ai réclam é, par la voie de la justice , l’abandon d’un chemin
qu’il a usurpé; le juge de p a ix , par ressentiment d'avoir succombé
à raison d’une prise d’eau donc il s’écaic emparé.
Les
sept -autres
ne
sont
que
des instrumens passifs
de la
méchanceté.
Quant aux dons : l’étalage mensonger que vous en faites, forme
un contraste bien frappant dans vos assertions ; les services que je
vous ai rendus , étrangers à ceux d’un procureur et
d’un homme
d*afïaire j les prêts immenses sans intérêts , les cautionnemens dan
gereux pour moi sous
divers rapports ; tels sont les motifs qui ont
eu , à vos yeux d’alo rs, un tel prix 3 . que
vous
avez cru en té
moigner une reconnaissance assez coûteuse. Répondez à ce dilemme ;
ou le présent a été alors proportionné aux
bienfaits j ou il a été
aussi peu réfléchi, que l'est aujourd’hui votre reproche ?
Dans le premier c a s , vous êtes un hardi et lâche menteur j dans
le secon d , ce serait de votre part l’aveu d’une dissipation aussi
irréfléchie que la vente de tous les biens de votre fem m e, et toutes
les espiègleries , à la
faveur desquelles
vous
ave^
soutenu
avec
dignité le rang ou votre nom et votre condition vous ont placé.
Dans le vrai , j ’ai reçu de vous deux boîtes d’o r , une plus petite
pour ma fem m e, une écuelle d’argent avec son couvercle et son
assiette, un porte-huilier à bâteau, douze couverts d’argent, dont
six à file ts, quatre cuillers à ragoûts , dont deux de moindre gran
deur , deux flam beaux, quatre douzaines de
planches , bois dur ,
et deux chards de bois à brûler. J ’ai évalué le tout à 3000 francs j
et j ’ai certainement porté chaque objet au-delà de sa vraie valeur.
Ju sq u 'ici , j ’ai établi que vous
étiez un inventeur eflronté :
je
pourrais vous appliquer cet ad ag e, semel m endax, semper mendax.
M ais , en s’écartant des
principes qui prescrivent l’indivisibilité
des a v e u x , il fauc au m o in s, à défaut de preuves, édifier par les
présomptions qui résultent de la moralité reconnue des parties,
�5»
Sur-tout par les preuves que
vous fournissez
vous-même de
votre
mauvaise for.
Vous n’avez jamais été dans le cas de prêter, mais toujours dans
celui des emprunts.
A l ’époque même où par l’effet d’un travail de plus de huit m o is ,
je vous fis toucher 3 10 0 0 francs par celui qui vous en demandait
60000 , vous articulez m’avoir remboursé les 7 7 5 0 francs que je vous
prêtai en 17 8 9 et 1 7 9 0 , vous n égligeâtes, d ites-vou s, de retirer
votre billet de 250 0 fr.
Que le citoyen Bourdier se plaint de n’avoir pas de quitance de
douze louis en or qu’il me remit pour votre beau-père Beraud.
Que vous étiez créancier au lieu detre débiteur de yotte frère
D esm oulin.
Que quoique je n’eusse pas compté les 12 0 0 0 fr. à Desm oulin ;
j ’avais spéculé de faire rapporter à ce principal n eu f et demi pour
cenc d’intérêt par an sur celui de 15 0 0 fr. qui étoit perçu sur le
capital de 16 0 0 0 fr. dû par les Viry.
Que j ’étais tenu de me faire donner une reconnaissance par celui
pour qui je faisais les emprunts.
Q u’il n’y avait aucune note probante de ces emprunts.
Que celle que je rapporte écrite devotre main , n’était pas en tière;
!
qu’elle avait été coupée avec des ciseaux.
t.
Que votre frère m 'avait remis des papiers de fa m ille , et parmi
ceux-ci la lettre de change de Lahousse.
v
Q u’il est tellement faux que j ’ai payé des créanciers en vertu de
l ’obligation de 12 0 0 0 f r . ; que sur mon refus de les p a y e r, vous ,
Champflour , les avez acquittés, notamment D ufraisse pour
18 0 ®
fr. afin d ’ honorer la m émoire de votre frère dont vous répétez sans
cesse que vous êtes le créancier.
Que ce n’est pas vo u s, mais bien moi qui ai sousttait, à l’audience
l ’écrit de votre frère dont je vous accuse d’avoir falsifié ou raturé
les dates.
B
i
�Que vous m’avez remboursé en mars 17 9 $ , au lieu de messîdot
an 5.
Que la detre envers Bugîion m ’était personelle.
Q ae je dénature les faics sur mon cautionnement envers Bonner.’
Reprenons chacun de ces treize articles.
i . ° D ’un côté , payer par Champflour
une somme de 15 0 0 fr.
sans retirer le titre de son engageaitnr ou une quittance j c'est
incroyable à quiconque l’appréciera par tous k s procédés , par les
contradictions , par les jongleries qu’il n’a cessé d ’entâsser dans cette
affaire , par le traité de l’an 7 , rédigé et écrit en deux doubles ,
par Champflour qui a laissé mon prénom en blanc. Champflour ne
s’est-il pas non seulement constitué mon débiteur de ces Z500 f r . , mais
encore ne m’a-t-il pas promis de m’indemniser à raison de l’époque
du remboursement ? or se fut-il rendu à cet acte de justice pour une
somme qu’il au ra it, selon l u i , payée deux fois j d’un autre c ô té ,
com parant, pages 7 , 25 , 24 , 5 1 de sa réponse avec cet acte du
ij
fructidor an 7 , on rétorque sans possibilité de reto u r, Cham -
flour ! mentiris iuipudentissime.
Page 7 , il prétend avoir payé 15 0 0 .
Pages 13 et 1 4 , il a p a y é deux fo is partie de ces sommes dans le
courant ds mars 17 9 5 . I l retira les effets qu’ il déchira comme inutilest
et il ne restait plus de trace de remboursement.
Page 3 1 , il s’ est entièrement acquitté en fonds et en numéraire j
soit envers le citoyen Bonnet j soit envers la demoiselle B om part} de
notre billet d’ honneur. I l en a les acquits des 2 1 messidor t 1 1 et 1 J
thermidor an 6 3 ainsi que le billet d’honneur.
P ar notre traité de l’an 7 , il se reconnoît mon débiteur de la
somme de 7 7 5 0 fr. et des 800 francs empruntés de M artine D e larbre , lequel emprunt il avait d ésavou é, page 8.
I l s’obligea par ce même traité de. rapporter Us effets et k s acquits,
des sommes dont il étoit débiteur.
�/ s /
11
Quelles sont donc , Champflour , les pièces que vous avez déchi
rées comme inutiles ? pourquoi vous êtes-vous obligé en l’an
7 de
rapporter des pièces que vous avez déchirées en 17 9 3 , tandis que
vous convenez d’être nanti des effets et quittances concernant Bonnet ?
pourquoi êtes-vous convenu , en l’an 7
que vous n’aviez remboursé
les 77 jo h . qu’au moment ou les assignats éprouvaient une perte con
sidérable ? assurément ce n’était pas en mars 17 9 3 .
Se joue-t-on aussi impunément des premières règles de la justice?
obligé par acte de rapporter des pièces dont vous convenez d’être
nanti , vous croyez être quitte de cette obligation en alléguant de
les avoir déchirées. Vous devez rapporter les pièces ou je dois être
cru. Vous êtes d’autanc plus indigne de confiance sur votre alléguation de paiement en mars 17 9 3
j
qu’encore une fois vous êtes ex*
pressément convenu dans notre traité de l’an 7 que vous n ave\ rem
boursé qu’au moment oà les assignats éprouvaient une perte consi
dérable.
E n ce qui touche 1s citoyen B o n n e t, vous abusez en vérité de
l ’art de mentir. Vous le forçâtes , malgré le billet d’honneur d’un
homme de votre nom et de votre rang } d’accepter les immeubles aux
prix que
voulûtes y m ettre, en le menaçant de le rembourser en
papier. Si vous avez donné du num éraire, c'est d’après l’échelle de
proportion. I l vous est si aisé d’obtenir des déclarations ! mais le
citoyen Bonnet et la demoiselle Bampart ne sont pas des Lahousse.
J e vous mets au défi de me contredire par le rapport de ces dé
clarations.
I
2-° C ’est à sa seule négligence que le citoyen Bourdier a dû
attribuer son défaut de quittance. L es douze louis n ’étaient qu’ un
à-compte. I l est
faux que les sieur et
dame
Beraud m ’eussenc
chargé de ce recouvrement ; je ne fus qu’ un commissionnaire offi
cieux. Bourdier encore débiteur, esperait, sans d o u te, de prendre
une quittance finale j le fait remonte à i i ou 15 ans. Il est notoire,
a C leim o n t, que ces époux ne laissaient pas séjourner leurs fonds
B x
s
�eu main-tierce : Champflour souille tout ce
reservé à lui
qu’ il touche j il est
seul de multiplier les in ju re s, mais
heureusement,'
il esc connu.
j . ° C ’est outrager la mémoire de D esm oulin
de soutenir qu’il
était débiteur de son frère, si celui-ci avait la bonnefoi de com m u
niquer tout ce qui peut
établir
la vérité , notament
l’écrit
m o n tr a i l’audiance, et q u 'il fit disparaîcre, la honte de ce
songe serait le seul résultat de cette vérification.
qu’il
men
4 .0 L a notre écrite de votre main , «elle de votre frère me. con
cernant j dont je suis porteur ; celle relative à v o u s , que vous avez
soustraite à l’audiance; le traité du
15 fructidor an 7 ,
l’acte de
dépôt entre les mains du notaire C h e v a lie r, de tout ce qui
a rap
port à la créance V iry donc je n’ai pas touché un sou j toutes ces
pièces combinées ensem ble, démasquent! votre imposture sur l’odieuse
invention que vous avez osé hasarder contre la preuve écrite, que
j ’eusse voulu recevoir des intérêts à 9 et demi pour cent , puisqu’il
est démontré par l’obligation même contenant procuration ,
que je
m’étais chargé d’en compter. C es intérêts sont encore Ju s. T o u t *
été gratuit.
5.0 Il éraic inutile,
il aurait
été
dangereux et mal-honête de
prendre des reconnaissances de celui pour qui les emprunts étaient
faits ; in u tile, parce que tout était de confiance ; cette confiance
m'établissait maître de ma cause , par la nature même de l'acte ;
dangereux et mal-honêce dans le cas de l'anéantissement de l’obli
gation de 110 0 0 fr. j obligation qui n’était en effet qu’en brevet
que je vous ai remise
dans
la même
fo rm e , depuis le jugement
que j ’attaque. Ces reconnaissances n’auraient-elles pas form é autant
de doubles emplois , autant de créances particulières, exigibles encore
si on eut déjruit l’obligation de iz o o ® fr. qui le* comprenait.
6 ° L a note des emprunts n ’était-elle pas suffisamenr établie pat
votre écrit et par le traité de l’an 7 ?
S 'il eut resté quelque douce, y aurait-il à hésiter dans la préfé-
�>3
fenee à d onn er, pour le serment, à l’obligeant officieux, sur l'ingrat,
sur le perfide jongleur,
7 .0
L a prétendue coupure de la note écrite par Champflour , n*a
i l é imaginé par lui que pour le seul besoin de son iniquité.
8.° Desmoulin ne m’a jamais remis aucun papier. C e fait
rrouvé a paru nécessaire pour donner
quelques
roman sur la lettre dechange de Lahousse. Si
con-
consistances au
cet
effet eut été
acquitté par Desmoulin ou par C ham pflour, le premier ne l’aurait-il pas
anéanti; en aurait-il fait mention dans ses écrits à moi et à son frère j
l'autre avair-il quelques raisons ou prétextes de me le[ remettre ? tout
ce que débite , à cet égard , Champflour , à l’aide de cet autre flibustier,
est absolument fa u x , et semble avoir un but plus criminel encore.
Cette lettre d ech an ge est du j i
mai
17 8 8 j
fixée au i . cr janvier 17 8 9 . Que penser de vos
son échéance étaic
extravagances,
en
supposant une prétendue maladie à Desm oulin , ses alarmes sur
un effet qui n’érait pas encore é c h u , ec qu’il a v a it, indiqué
dans ses n otes, devoir être p a y é , et l'avo ir été par moi ? de
quel
œ il,
sur-tout , envisager cette
rapportée sous la date du 8 juillet
quittance
que
vous
avez
17 8 8 , cinq mois avant l’c-
chéance y et que vous n’avez pas osé faire im prim er , comme étant
détruite par les notes et écrits des deux frères 3 par ceux de Louïrette
et C oste. C elui de ces écrits que vous eûtes l’adresse de soustraire
à la connaissancs de la ju stice, en prouvant que
vous
étiez son
débiteur de 6000 francs , faisait mention du paiement par n^oi, du
montant de cet effets j il rappelait en outre que l’objet principal
de la lettre de change n’était que de 18 0 0 francs ; l’intérêt était donc
de i j pour io o pour six mois. Quod genus hoc hominum !
9.
L 'écrit que vous avez soustrait à l’audience , vous constituait
'débiteur de votre frè re , de 6000 francs. J ’ai acquitté , selon
yo us-
m êm e par votre é c rit, et comme Coste l'atteste, d’après le traité de
l ’an 7 y les sommes dont il s’agit j si v o u s , C ham pflour, en avez
payé d'autres , sans doute vous ne pouviez vous en dispenser, s'il étaiç
�dans vos principes
d’honnorer
*4
la mémoire de votre frè re , von*-
cuss’rez rendu plus de justice d celui q u i, à sa considération , ec
sur sa fatale présentation, vous
avait tiré du
bourbier
où
vous
étiez plongé.
10 .° C ’est ajouter une rare impudence à une profonde déprava
tion , de m’imputer l’enlèvement de l’écrit de Desmoulin , "qui eut
opéré le gain de ma cause , en dévoilant vos infidélités sur l’état et
sur le contenu de cette pièce.
n . " Com m ent présumer que Cham pflour occupé, en mars 1 7 9 J ,
de préserver sa personne, eut imaginé de payer des créanciers dont
il eut encore emprunté pour se prémunir contre les malheureuses
conjonctures d’alors ?
L e traité de l’an 7 ne détruic-il pas ses mensonges et ses contra
dictions à cet égard ? ne vous êtes-vous pas obligé j C liam pflour,
par cet ac te, de rapporter les effets et les acquits des sommes dont
vous êtie% débiteur ?
1 1 . ° L a dette de Bughon est portée par votre é c r it, et dans
celui de C o ste , votre homme d’affaire, pour être personnelle à
Desm oulin. L e rapport d’une attestation de ce Citoyen honète , serait
trop humiliant pour lui et pour m o iy pour lui , de
se
mettre en
parallèle avec l’amendé Lahousse \ pour moi , d’imiter en rien un
ennemi aussi inimitable. M ais cette attestation a été rapportée à
l ’audience du tribunal d ’ a p p e l , par C h a m p f l o u r j son défenseur la
tenant "en
m a in ,
l’a n n o n ç a ,
sans la lire,
com m e
applicable â D es
m oulin. Plusieurs Citoyens de C le rm o n t, présens à l’audiance, er
ceux qui composaient le barreau, s’en rappellent. Quel voile a donc
pu dérober la vérité de ce fait à la justice ? pourquoi Cham pflour
a-t-il excepté de faire imprimer ce
m ém oire, avec les autres pièces ?
ctrtificat
à
la suite de son
.° Je crois en avoir dit assez sur le remboursement fait au
citoyen Bonnet j dans le premier article de cette discussion.
i j
O u i, sans doute , ma défense fut interceptée par vos
yocifé-
�"
.
.
rationsi par un débordement de calomnies grossières. M es m oyens;
dans le d ro it, furent étouffés 3 et le tribunal
fut surpris.
Quelle
méprise de qualifier une obligation dictée par une volonté déter
minée , ,ec par une confiance libre sur des objets secrets d’obliga
tion ) pour cause fausse ou sans cause pré-existante.
Quel autre sens peut-on , sous l’accepration naturelle ,
donner à
ces expressions, si ce n’est que le débiteur n’a pas reçu à la minute
m ôm e, m atériellem em ent, l’objet du prêt. M ais de qui est provenue
cette certitude ? de la seule loyauté de ce créancier qui pouvait pré
venir par un seul mot toute dénégation, toute supercherie.La cause
de cette obligation est-elle pour cela fausse ? exclut-elle la certitude
d’une cause préexistante ? non , sans doute.
Cham pflour-Desmoulin , dans une position fâcheuse , a besoin,
dans cet instant , d’autant de crédit que d’espèces. L a nature
nombre de ses dettes lui présentent des embarras dont
et le
il ne peut
sortir que par un acte de confiance , tel qu’il ne puisse recevoir
aucunes entraves. I l épanche sa douleur dans le sein de son ami j
il se fait un titre envers cet a m i, de cette habitude de bienfaisance
dont cet ami commun de la fam ille a donné
des preuves si écla
tantes à son frère.
N e sont-ce
pas là antant de causes m orales, pré-existantes, de
l'acte du 28 mai 17 8 9 ?
C et acte , dans son essence , et par ses expressions, n’est-il
autant un mandat qu’ une obligation? que d is-je, ne
pas
renferme-t-il
pas indivisiblement ce double carectère ?
M ais ces causes pré-existantes ne sont
elles sont encore matérielles.
pas seulement
morales i
Desmoulin avait , dans ce moment même , à acquitter des dettes
¿ ’honneur pour le jeu j il en avait d'autres par lettres de change
dont le terme était éch u , ou était sur le point d’échoir.
C ’est dans la journée m ê m e , après la confection de cet acte, du
>8 mai 1 7 8 ? , que je tire en votre faveur une
lettre de change;
�vous en passez l’ordre à Bughon et le m ontant, distraction faite
de l’in térêt, est touché par Desmoulins.
À-c-il pu échapper
à quiconque
counaissait votre
position
de
fortune et nos relations, que vous m’eussiez prêté vous-même ou
fait prêter par Bughon , et par l’entremise de votre sœur madame
B lo c , une somme pour mon compte ?
C ’est dans les premiers jours de juillet suivant que , presqu’à la
fois , je m’oblige envers Lescurier, de qui Desm oulin reçoit 5000 fr.
et que j ’acquitte pour lui les «ffers de Caze et de Blatin.
Sont-ce donc là des causes fausses, et s’il y a fausseté , n’y at-il pas contradiction dans le jugem ent?
M ais Champflour
aventure )> et on soutient pour lui que par
notre traité je me suis soumis de rapporter des resonnaissances de
D esm oulin sur ces deux objets , et que je n ’en rapporte aucune.
Ç ’a été le] prétexte de diviser mon aveu loyal , et d’an éan tir, à mon
é gard , l ’acte syllanagmatique du 18 mai 17 8 9 .
Diverses inconséquences. D ’abord erreurr de n’avoir pas reconnu
son indivisibilité , sa cohérence nécessaire avec les écrits de vous et
de votre frère , avec ceux de vos serviteurs Coste et Louïretre , que
j ’avais eu la bonne foi et le malheur de
vous laisser nommer nos
calculateurs.
Ces derniers écrits dont vous rapporrate* un bouble à Taudiance,
et dont je suis Hanti de l’autre, transcrit page 15 de mon m é
moire , ne sont-ils pas conformes aux notes de Desm oulin et à la
v o tre , n’ajoutent-ils pas à ce qui manque dans l’acte du
ij
fruc
tidor an 7.
M ais entraîné malgré moi
par une erreur que je dois respecter;
que dis-je , cet acte du 1 j fructidor an 7 , est le complément des autres.
I l fallait distinguer les sommes payées en numéraire d'avec celles
acquittées en papier. E h bien , dan»
cet a c te , il
ne
peut
être
question pour les paiemens en papiers suc lesquels je ne voulais pas
bénéficier
�> 7
-bénéficier que des objets Eughon
Coste et Louïrette
contient
t
et
y
Lescurier. L e Bordereau ¿ s
évaluation
de ces
sommes
d’après
-l'échelle de dépréciation j n’est-il pas l’exécution du traité
et
des
notes de vous et de votre frère ?
C e que vous avez imprimé sur celle de votre frère, pag. 1 2 , à
la n o te , 1 9 ,
que
j ’ai
10 et 2 1 de votre mémoire } comparé
rapportée ,
et
telle
qu’elle est
qui contient le bordereau de C oste , page
va mettre au plus grand jour
sur
avec
celle
la même feuille
14 de mon m ém o ire,
votre turpitude. M alheureux ! vous
vous êtes rendu coupable d’ un faux
matériel.
L ’écrit
que
vous
prêtez à votre frère, page 1 2 de votre mémoire , n ’est pas de lu i ,
et il ne peut être de la fabrication que de vous s e u l, oui de vous
s e u l, même sans l’aide de Coste et de Louïrette.
E n même temps , dites-vous } que mon frère souscrivit cette obli
gation ^ il avait donné à B o yer l'état de ses dettes.
C ’est donc d’après vous que cet état m e fut remis le
17 8 9 , jour de cette obligation.
x S mai
M ais l’état que vous décrivez est tout différent du m ie n , cepen
dant celui-ci a été la base du calcul et du bordereau de Coste et
de Louïrette.
Ces deux états , tous deux sans date , ne s’accordent point sur
la nomenclature des sommes j celui que j ’ai ,l* s exprime par louis ,
le vôtre les décrit par francs , quoi que , à cette époque ,
on
se
servit plus communément du mot livres.
Ils sont encore discordans sur le «om bre des articles } le mien
■en renferme onze , et celui que vous produisez n’en contient que dix.
Ils différent sur l’ordre dans lequel les créanciers sont inscrits.
M ais ces états sont absolument opposés sur les noms des créan
ciers et sur les sommes.
C elu i dont je suis po rteu r, qui
est encote Hne f o i s ,
saurais trop le rép éter, conforme aux écricsde
yos agens,
car je ne
est ainsi conçu :
C
M
, , i
�13
à Lahousst , io o louis j i * m’ envoyer au régiment pour le jeu 3 50
louis ; $.° par obligation cautionnée p a r M . B oyer , 1 1 1 louis ; 4.0 ¿
Lapierre , mon ancien domestique , 30
35
; 6 .“ , d
; 5.° <z Monestier , tailleur ,
j perruquier 1 3 / . ; 7 .0 ,
Flageac 2 5 /. j S .°, <è l ’abbé
Aubier 6 l. j 9 * , à mon tailleur 15 /. ; 1 o.° , ^ B latin 6 1 l. ; j 1 .° , pa r
contrat dora B lot est caution 3 6 1 l.
’
Celui que vous avez imaginé et fabriqué , destine i .° à M . L a ville j
M . B lot caution y 15 0 0 fr. \ 2.° à la Nanon 3 cuisinière de
men frère , 600 j j . ° à
Flageac ,
i i o 3 j 4.0 M .
Dufraisse-Lapierre , domestique de AI. de
B o yer ma caution 3 2 8 0 8 ;
S aubade 2900 j 6 ° à C a\: perruquier 3 15 ;
7 .0 'à
5.0 à A P .
Fabre
confiseur
1 2 1 8 j 8.p à l'abbé A ubier 12 0 0 ; 9 ,° à B latin 16 0 j io .u à Brochet ,
tailleur 360.
D e cette comparaison il résulte ,
i . ° Que dans les deux états
sont
compris
seulement
B l o t , ici
pour 15 0 0 fr. ,là pour 6 1 1. j Lapierre, ici pour 12 0 0 f r . , là pour 30 1. j
moi Boyer comme caution , ici pour 2800 f r ., là pour 1 2 1 lo u is ;
Caze , ici pour 3 15 fr. , là pour 13 louis ÿ un tailleu r, ici pour 3 i o f . ,
là pour i j louis ; l’abbé A u b ie r, ici pour 12 9 0 f r . , là pour 6 louis ;
et B la tin , ici pour
2 60 fr. , là pour 1 1 louis, O n apperçoit môme
qu’il y a assez d’uniformité ppur cinq de ces créanciers, mais qu’il
y a contrariété de 44 louis pour A u b ie r, et de 2 0 p o u r Lapierre ;
2 .0
Que Lahousse , Monestier , Flageac , et la destination de
1 2 0 ® fr. pour le je u , rappelés dans mon état 3 11e sont point cou
chés sur le vôtre. E n revanche, ce dernier comprend votre cuisi
nière , madams Saiizade et Fabre. Cette contradiction prouve que
la destination des 12 0 0 0 fr. était indé terminée j elle démontre sur
tout que devant varier selon les changemens éventuels du
d’autres causes, Cham pflour-D esm oulin
jeu , ou
se reposait sur l’acte
de
confiance q u 'il n’avait consenti que pour lui faciliter ces variations.
E n e ffe t, au lieu
de 50
louis pour le
jeu a v e n ir, au lieu de
payer la plupart des créanciers indiqués , il toucha les 800c fr. pro
venus de Bughon et de Lescurier pour faire face à la partie de jeu ,
qui l’avait fait recourir 4 cet expédient j conséquemment il me restait
�'*5>
à employer pour remplir les 12 0 0 0 fr. ; que 4000 francs qui l’ont
été en effet par m o i, et bien au-delà par les paiemens que j ’ai faits
de Z400 fr. à Lahousse j de 1 6 7 / r . à Blatin ; de 3 15 fr. à Caze , et
de 1 1 1 8 fr. à Fabre.
3 .° ( V o ic i, Champflour , le coup de massue qui va faire ressortir
ton
infâme
impossible
le
complot
que
avec Lahousse ) } qu’il est
Fabre
besoin de ta cause ,
compris
put
dans
êcre
ton
état
indiqué
le
phisiquement
fabriqué
18 mai
pour
17 8 9 ,
pour être acquitté, puisque F a b r e , alors , n’était point créancier de
Cham pflour-D esm oulin, et qu’il ne le devint qu’environ huit mois
ap rès, le 14 janvier 17 9 0 avec échéance au 1 4 avril suivant préfixe.
M ain tenan t, auquel des deux états faut-il ajouter foi ? à celui que
je rapporte l ’écrit de la main de ton frè re , confirmé par celui de
tes ag en s} rappelé dans l’écrit que vous
avez
eu la
subtilité de
soustraire à la ju stice, ou à celui dont je viens de prouver la faus
seté ? L e trait de lumière devient électrique pour porter la même
évidence , et mettre au plus grand jour le concert abominable avec
Lahousse.
L a lettre de change de cet estafier est du
ji
mai 17 8 8 ; l’échéance
était au premier janvier 17 8 9 ; Champflour a articulé l’avoir payée
le 8 juillet 17 8 8 , et la
déclaration
de ce
complice est du
19
nivôse an 9.
M a i s , le 8 juillet 17 8 8 3 l’écrit de Desnnoulin que je rapporte,
et dont vous placez la date au 28 mai
17 8 9 ,
n’était
même pas
fait le 8 juillet 17 8 8 , puisqu’il y rappelle la date de C a z e ,
qui n’a été cou tractée que le 2 juillet 1 7 8 8 , et n’était payable que
le 1 juillet 17 8 9 .
E h bîen ! C ham pflour, répliquez ; imaginez quelqu'autre moyen
pour consommer votre trame infâme avec votre digne ami Lahousse.
N o s concitoyens, la postérité et la ju stic e , je l’espère, jugeront la
question qui du gentilhomme
C
ham pflour
ou de l’ancien procureur
peut se promettre que l’honneur lui survive.
�» :■
10
Donc la cause de cet acte du
18
mai
17 8 9 }
fausse qu’est certaine au moral et au phisique ,
est aussi
peii
la cause pré-exis
tante.
C ela posé et démontré jusqu’à l’éviden ce, n’y a-t-il pas eu une
nouvelle erreur d’avoir prétendu que l’on devait diviser ma décla
ration émise de bonne f o i , et loyalement dans l’acte du 1 j fructidor
an 7 , transcrit page i j
et 16 de mon m ém oire?
Ces inconséquences en ont produit d’autres.
x ,° D ’avoir considéré mon aveu
2 ° D ’en avoir induit
comme contre-lettre.
la présomption d’une
autre
contre-lettre
pré-existante.
3.® D ’avoir confirmé mon aveu qui a été divisé quoiqu’indivi
sible , et de vous avoir déchargé du votre , sous prétexte d’une
prétendue révocation qui n’exista ja m a is, de l’acte du 15 fructidor
an 7.
En fin quelle a pu être l’opinion publique sur vos
fanfaronades
de vous être vanté de m’avoir fait perdre 12 0 0 0 fr. ;
n’est-il pas
notoire que vous m 'avez offert 14 0 0 0 fr. avant le litige que je ne
me déterminai à introduire
que
iTaprès les calomnies
que vous
vous étiez déjà permises ?
Term inons ce combat polémique , pat vous d e m a n d e r quel est
jusqu’ici le résultat d e tout.ee qui en est l’objet : l’entière créance
V i r y , qui était ma garantie, ne
vous reste-t-elle pas en
ne me volez-vous p a s , d'un côté , plus de 8000 fr. ,
entier ?
distraction
faite des assignats que vous m ’avez remis en l’an 5 , et que m échament
yous
me prêtez soutenir en l’an
4 ;
e t , d ’ un autre cô té,'
la valeur réelle des objets Bughon et Lescurier ? eh ! vous êtes assez
dissolu pour ajouter à ces vols la plus attroce diffamation / ô tempora ! ô mores !
Je
ne répéterai aucun moyen de mon pourvoi; je renvoie
X.
pion mémoire. Je ne prendrai pas la peine de refuter la réponse:
V
�quelque soit l’évènem e n t , ma conscience est pure j ma sécurité esc
parfaite.
I l me
reste encore le dégoût , mais la nécessité Impérieuse de
balayer les autres ordures
parsemées à chaque instant dans votre
libelle.
J e ne reviendrai pas sur vos caquets touchant
les
besoins dont
vous avez perdu le so u ven ir, lorsque j ’ai exposé ma fortune , mon
honneur et ma v i e , dans le temps où vous n’auriez pas
emprunter un lo u is, lorsque je
trouvé i
vous cautionnai pour plus de 1 1 0
niille francs 3 je courus tous les dangers , le plus pénible de tous ceux
que j’é p ro u ve, a été celui de l’ingratitude; j’ai agi en ami ch au d ,
sans un sou d’in té rê t, sans attacher aucun prix à mes veilles j à.
mes sollicitudes. Ingrat ! la présence
de
mes
enfans
semblait re
procher à ma m unificence, et vous les abreuvez du fiel le plus
amer que puisse éprouver un vieillard ! vous n ’avez répondu aux
faits que contient mon mémoire que par des sottises , des ironies !
injurier n’est pas répondre. L a notoriété vo u s, accable............. E h !
cependant ma fam ille et moi devons glaces à D ieu de votre noire
ingratitude. Si je vous eusse continué mes b o n tés, à quels ma
lheurs j’exposais ma fem m e, mes
enfans , m oi-m êm e. L e temps
n’est peut-être pas élo ign é, pensez-y bien , de vos regrets plus que
de vos remords.
V ous êtes insatiable sur le souvenir de Couthon ; vous ne vous
rappelez plus que vous n’obtîntes la lettre dont j’ai parlé j et que
je ferai imprimer à la suite de cette réponse, que parce que vous
Ütes abnégation de votre naissance et de votre rang j que vous rap
pelâtes à propos l’origine du marchand Champflour , sur-tout vos
acquisitions de biens nationaux à Beaum ont j aussi ce despote écrivit,
dit-il ,
AVEC rLAISIR
,
P A R C E QUE j ’ A I M E A
M E F R A P P E N T , E T QUE ,
m arq u é
que
d ’u n
CHAMPFLOUR
Champflour n>5t pas
AUTRE
fu t
seulement
D IR E
COTE , J E
l'e n n e m i
ami
du
LES V É R I t Î
n ’a i
s
QUI
JAMAIS
RE*
p e u p le .
du peuple,
mais
de la
�9
11
populace la plus effrénée , puisqu’il sait si bien la singer. Cepen
dant ,
toujours versatile , sa
naissance et son
rang lui font dé
daigner aujourd’hui d’être l’ami d’un ancien procureur, et il saisit
avidem nient ce mot pour s’égayer dans sa diffamation/
B o yer 'dit qu’il est mon ami 3 il m’a dénoncé comme émigré.
M isérable ! je n'ai
dénoncé personne ;
vous
eusse-je dénoncé ,
vous qui croyez me flatter en me nommant votre second père ; mais
vous seriez-vous conduit alors comme aujourd’hui ? d’abord je n’é
prouve pas le sentiment aussi fâcheux que pénible de la vengeance.
M ais me serais-je précipité dans tous les ab îm es,
suite funeste de
votre ém igration , moi qui étais à découvert pour vous , pour plus
que la valeur de ma fortune que vous exagerez des deux tiers.
D e votre aveu s page 7 de votre réponse , parti au commence
ment de juillec 1 7 9 } j vous fûtes inscrit sur la liste , le 14 pluviôse
suivant. V ous et vos agens affectés de confondre un simple acte
conservatoire qu’exigeait la l o i , avec
une dénonciation. J e différai
cet acte jusqu’au 5 décembre 1 7 9 1 ; je me suis bien gardé de vous
y présenter comme émigré. C et acte avait été précédé de huit autres;
31 a été suivi de
plus
de
quatre-vin gt-dix; ce sont d o n c, selon
v o u s, autant de dénonciateurs, et dam une colère digne de votre
rang et de votre naissance t
L ou ïrette 3 votre femme ,
vous
n’exceptez
vos gendres ,
pas
même le fidele
tous ceux qui vous ont
marqué intérêt. Quod genus hoc hominum !
B o yer se dit mon ami } et il m’a fa it rembourser en assignats tous
les anciens capitaux qui m’ étaient dus.
G rand D ie u ! quel affronteur/ quelle est donc une seule créance
dont j ’ai- coopéré au remboursement ? M ais avant to u t, vous toujours
o b éré, quelles créances autres que celles
provenant des ventes des
biens de votre femm e , dont la valeur équivaut au
vous été dans le cas de toucher ? je 11e suis entré
vôtre , avezpour rien dans
le s tripotages que vous avez faits à ce s u je t , et lorsque vous avez
eu la facilité de recevo ir, yous yqus êtes passé de tous bons offices
même de c m
de Louïrette.
I
�B o yer se dit mon ami 3 il fu t cause de ma. réclusion ; i l eut l'attrocitc d’insulter à mes malheurs.
Ir>tensé ! quel
l’autre
;
eh !
a c te ,
vols
quel m otif aventurez - vous ? ni l’un ni
affectez d’oublier tout
ce
que
je
fis pour
vous à cette triste époque ! n'est-il pas fâcheux que vous me for
ciez à vous savoir gré de cet impudent mensonge , la défiance
et l’indignation publiques à ce s u je t, s’étendront bienrôt sur votre
libelle comme sur votre personne.
Je ne fus pas chargé par Couthon de
la mission
douloureuse:
que me donna la Municipalité d’enrrer dans cet endroit de malheur
où vous étiez.
Lorsqu’il
s’agit de
faire exécuter la séparation
du s e x e , des
hom m es, j ’en appelle à tous les reclus et aux demoiselles de l’E ta n g j
leur position m’arracha des larmes , j’obtins à leurs désirs t qu'elles
restassent. Je vous n om m ai, il est v r a i, sœur Ce^ar, vous rites de
cette allusion sut l’opposé à cette vocation. Je n’eus aucune intention
de vous fâcher. C ’était dans cet instant fatalj une expression frater
nelle , par le plaisir que j ’avais que vous eussiez échappé à de plus
grands maux.
Quelle est donc la trempe de votre poignard pour ouvrir déjà ma
tombe ! il vous reste encore i empoisonner l'action dont je viens
de goûter les délices. Compatissant aux malheurs de la dame
Der
fargues comme je le fus aux v ô tres, je v ie n s , par acte p u b lic , de
lui remettre des biens que j’avais achetés plus de 80000 francs en
assignats. M on intention était connue depuis long-temps de M rs.
de Vcrniere > de Fougères , L e v é , Asticr , juge du tribunal <1’ar
rondissement à R iom . Chacun de nous a cherché à l’em porar suc
l’autre, en délicatesse dans les procédés.
J ’ai reconnu dans cette dame cette véritable illustration de nais~
sance et de rang. Vous êtes bien loin d’en approcher , Champflour !
;votre m alig nité était p eu t-être nécessaire p o u t
mous
faire connaître
�elle ne setvira qu’à faire plus honeur à ma mémoire. J e désire un
retour sur vous-même , mais vous, me rappelez ce que j’ai lu quel
que part
peut-être dans l’allmanach ou dans le praticien Lange , qu’il
est des h o m m es,
m enso nge.
tout glacés pour
la
v é r it é
to u t feu
,
p o u r le
L e Public va juger que nous différons encore
point.
sur ce
'
,
B O Y E R.
L E T T R E
DE
COUTHON.
Paris, le 7 Juillet 1 7 9 3 l’an 2
République française.
G E O R G E
de la
C O U T H O N ,
A u x Offic ie rs Municipaux de Clermont.
M
ES
CHERS .CO N CIT O Y E N S;
J ’ai vu chez moi avec.............. CHampflour-Beaumont ; il m’a communiqué
tous ses certificats et passe-ports ; il m'a apparu ainsi qu’à............. légalement
en règle. Il a désiré que je vous en écrivisse ; je le fais avec plaisir, parce '
que j’aime à dire les vérités qui me frappent , et que d’un autre côté, je
n’ai jamais remarqué que Champflour fut un ennemi 'du Peuple.
A CLERMONT-FERRAND
,
D E L’IM PRIMERIE DE GRANI ER E T F R OIN?
rue Balainvilliers.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
émigrés
Couthon
notables
faux
communaux
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Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Pui-De-Dôme, demandeur en cassation ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat.
suivi de « Lettre de Couthon ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0929
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0928
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53090/BCU_Factums_G0929.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Solignat (63422)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
communaux
Couthon
Créances
émigrés
Faux
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53089/BCU_Factums_G0928.pdf
55bd2cb0170fb20e9893ed4723d022e4
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Text
MEMOIRE
EN
RÉ P O N S E ,
POUR
J
CHAMPFLOURD ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
e a n
- B
a p t i s t e
Puy-de-D ôm e,
- Cesa r
défendeur j
CONTRE
\
P i e r r e B O Y E R , juge au tribunal civil de
l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Q u o d genus h oc hom inum !
V irg.
B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de C lerm ont, a été long-lemps mon procureur et mon
A
P IE R R E
t r ib u n a l
de
CASSATION.
�( s )
Iioinmc d’affaires ; il me scrvoit avec exactitude, je le
récompensois avec généi-osité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières ,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
Il devoit à l’une, de scs filles une dot de 20,000 francs ;
il ex p o se, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
dot.
U n jugement solennel du tribunal d’a p p e l, séant à
R io in , a réduit les prétentions de B o yer, i° . à une
somme de 1,800 francs 13 centim es,.qtii étoit due par
feu mon frè re , et que je ne contestois pas; 20. à une
somme de 2,400 fi’ancs que je paye deux fo is , parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
.Boyer m’a fait signifier le jugem ent, avec som m ation
de Vexécuter. J ’ai* payé ; il a reçu. A u jo u rd ’hui il se
pourvoit en cassation.
O n sent que-cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugcniènt du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homm e aussi peu délicat, Siégeai parmi
les magistrats du département.
Il a cru détruire cette prem ière impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore; je m ’éfois
contenté de faire valoir mes moyens ù l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intéi’êts. Je croyois devoir cette con
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que th o n n eu r lu i survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance ; il a soixantesept ans : il pourroit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. Il affecte de rappeler souvent qu’il est juge :
nn plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nom m é parce q u i l le co n n o isso it, et que le gouverne
m ent ïa v o it conservé parce q u i l ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon am i; il m ’a dénoncé comme
émigré ! Boyer se dit mon a m i, et il m ’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m ’étoient dûs!
(i) U n citoyen de Clermont réclame contre l’assertion de Boyer,
et lui fait au contraire de grands reproches : c’est le cil. Bourdier.
Il devoil à défunt Beraud , mon beau-père, une rente annuelle de
5o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années' d’airérages : le
citoyen Boyer éloit chargé d’en poursuivre le recouvrement. Bour
dier lui donna douze louis en or à compte ; mais il n’eut pas la
précaution de retirer de quittance, parce que Boyer prom eüoil de
la lui faire donner par la dame Beraud. Boyer a oublié celte cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la montre, a toujours dit le
délicalBoyer : etles douze louis seroient perdus pour le cil. Bourdier,
si je n’avois eu connoissance du fait. Je les alloue au ciloyen Bour
dier : c’esl encore une somme ii ajouter à toutes celles que j ’ai
données ù B o y e r, qui voudra bien la regarder comme une nou
velle marque (le reconnaissance.
A 2
�Boyer se dit mon ami ; il fut causes de ma réclusion f
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jo u r , en sa qualité de
com m issaire de Couthon , il se rendit ù la maison des
U rsulines, où on avoit entassé une foule c^e victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les fàm m es, et de
les conduire dans un autre cachot. N on seulement il se
perm it de les traiter avec une rigueur digne de «es temps
affreux, qui lui convenoient si L ien , mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœ ur César.
M o i Cham pflour, ami de Boyer! mais l’âge,'la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations , les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. Il convient lui-m êm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des m arques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B o y e r, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
E n fin , cette amitié ne remonte pas bien loin , puisque
au rapport de B o y e r, ce n’est qu’en 1783 ou en 17 8 4 ,
que je lu i a i été -présenté. Q uel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérém onie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et au mois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoîfre. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à Ilio m , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
?
�(
5
)
J}c> \
M a famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite; mes ancetres se sont illustrés dans la magis
trature, et l ’un d’eux fut annobli pour services rendus à
l ’état. C ’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
un citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. L a propriété principale
que je possède est située près de G lerm ont, dans un
des plus beaux cantons de la Lim agne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p la c é , dans un temps où il
existoit des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit fo rcé, dans la v i e , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m ’étoit ouverte de toute
p art, et q u o iq u ’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
B o y e r, qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un rom an, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m ’appliquer •, mais personne ne m ’a reconnu à ce portrait
louchant.
L a charge de receveur des décimes du clergé, appartenoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exercée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par B oyer, que j’avois chargé
de mes affaires ; le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer lit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai scs soins et son zèle; je lui iis
�•
f
(G )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleux, et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu , il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de là charge de receveur
des ta illes, qui venoit également de ma famille. Il est
connu de tout le départem ent, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l ’en ai jamais occupé.
•
E n 17 8 9 , j’eus besoin de quelques fonds; Boyer me
p r ê ta , le prem ier novem bre de cette même an n ée, une
(1)
Il n’est pas inutile de détailler ici les différons cadeaux que
j ’ai faits à B o yer; vingt couverts d’argent, dont huit à filets; huit
cueillers à ragoût, douze cueillers à c a fé , six salières d’argent,
une écuelle d’argent, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d’argen t, à h ateau , trèsbien ornés ; six flambeaux d’argent , deux cueillers à sucre , à
jour ; deux tabatières d’or pour le mari et la fem m e; une montre
d ’or à répétition, deux moutardiers et deux cafetières d’argent ; un
cab rio let, un fusil à deux coups, deux pistolets et une selle, cin
quante cordes de bois ù b rû ler, une feuillette de B ordeaux, tout
le bois nécessaire pour parqueter sa m aison, faire ses alcôves et
séparations, le tout en planches de noyer et poirier, et tant d’au
tres choses qui ne reviennent pas ù ma mémoire.
En argent , soixante-dix louis , qu’on lui fit accepter comme
bénéfice du je u , quoiqu’il n ’eût rien avancé.
l ’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis; jo
ne parle de cette largesse , que parce que je sais qu’ il monsieur
çlle en rendoit quelque chose.
�QU
(7 )
somme Je 5,ooo francs, avec intérêts à cinq pour cent,
sans retenue. L ’année suivante 1790, je renouvelai mon
Juillet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novem bre 179 0 , il me prêta encore une somme
de 2 , 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. J e voulus retirer m on billet ; il n’eut pas
le temps de le chercher au même m om ent; je négligeai
de le redem ander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792 ', je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois ém igré; il me dénonça comme
tel, le 27 octobi-e 179 2; sa déclaration (x)contient rén u
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son proiit les 1 * et 11
novem bre 179 0 , quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
....... ■
I
........ .
— ■!■■■■■— I
■■
. ■
(1) V oyez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o y e r, que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1793, il me faisoit
rembourser deux fois la somme de 2,5oo francs. Que vous ai-je
répondu, me d it-il? — Q u'il1falloit vous payer encore une fois!
A lors m ’adressant au juge de paix et ù scs assesseurs, je m'écriai :
Quelle opinion devez-vous avoir d'un homme qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà reçu ? L e juge de paix et ses asses
seurs soiït très-mémoratifs de ce f a i t , et peuvent l'attester.
�* -r
( 8 ) .....................
mars 179 3; Boycr ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. O11 sent que ce 11’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit;
je crus ne pouvoir m ieux faire que de le mettre hors
d’in térêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Couthon.
Mais Boyer s’étoit encore fait un autre titre de créance;
il me dit avoir emprunté d’une nommée M artine D elarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pou voit-il qu’il
eût fait cet em prunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dam es, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retiré d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune m ém oire : point de recon-»
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut paÿer ( 1 ).
(1) A propos de Martine D elarb re, Boyer lui avoit emprunté
cette somme de 800 fr. le i 5 avril 1790. C ’est le
25
du m êm e
m o is, huit jours après ce billet , qu’il fit le compte des dames
Beraud et Chajmpflour , et il ne fait nulle mention de cet em
prunt pour leur compte. Je me suis procuré ce billet des mains
des héritiers de Martine Delarbre. J’ai remarqué qu’il étoit de la
6ormne de 840 fr. payable dans un an ; la somme de /¡o fr. éloit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossernens en
m arge, de la somme de /(.o l’r. chaque; l'un , du ia septembre
1792 ; l’autre, du 27 mai
On y voit encore , que sur la date
çlu
avili 1790» Boyer a cflacé le ipot d ix de la fin de }a date,
Mes
r
�( 9 )
M es rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme juge , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendém iaire; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les regards ; il ne lut pas même
fort en crédit jusqu’au 18 fructidor' an 5 ; mais à celte
ép oqu e, il reparut avec audace: il étoit cependant hu
m ilié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
fit parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro
chement. L e prétexte fut un aiTangem ent par lui fait
avec feu Cliampflour-Desmoulins, mon fr è r e , en 1789.
Suivant B oyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement com ptée, et ce qui avoit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le mot onze ; ce qui donne au billet la date de
4791 au lieu de 1790. L ’encre qui a tracé le trait sur le mot d ix t
et écrit le mot on ze, l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infiniment plus noire que celle du corps du billet et
de la signature qui le termine. Ces cliangemons ne paroissent
avoir été faits que lors de l'endossement de la somme de 40 fr.
du 27 mai 1795 : cet endossement est postérieur au rembourse
ment que je lui ai fait. Il voulut alors rembourser Martine Del arbre
en assignats, sur le prétexte que je I’avois remboursé de même.
Cette fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et qu’elle ne lui avoit pas prêté pour mou compte;
alors il effaça le mot d ix pour y substituer le mot onse. 11 avoit
deux objels ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l’autre, de rendre plus probable l’emprunt qu’il
disoit avoir lait pour ces dam es, en lui donnant une date posté
rieure au compte qu’il avoit fait avec elles , et qui se Irouvoit
trop rapproché de la date du billet pour qu’on ne soupçonnât {»as
sa délicatesse.
B
�( ÎO )
.aucun bénéfice sur ces payemens; mais comme je lui avois
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790, il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte que je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un com prom is, pour nous en
rapporter définitivement à deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i , et que Boyer ne clierchoit
qu7un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m ’avoit prêtées en 179 0 ? Il crut s’être
fait un titre pour me forcer A lui donner une indemnité ;
et bientôt, révoquant le com prom is, il me traduisit au
tribunal civil du P u y-d e-D ô m e, où il étoit juge.
M ais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’éti'ange marché que B oyer
avoit fait avec mon frè re , le 2,8 mai 1789.
Cham pilour-Desm oulins, mon frère , étoit un jeune
m ilitaire, gén éreu x, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et m e devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les mains une quittance de mon frè re , de la tota
lité de sa légitim e, en date du 1 " avril 1784; un billet de lui ,
du 1" mars 17 8 9 , par lequel il se reconnolt mon débiteur de
4,600 francs; et un second, du 25 août 1791 , par lequel il reconnoit me devoir la somme de 16,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n'ai cessé de venir au secours de mon frère dans.
tous les temps ; j’ai une foule de lettres de lu i, par lesquelles il
m ’exprime sa reconnoissancc.
?
�Il lui restoit pour toute ressource une créance de
16.000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cen t,
sur le p rix de la charge de receveur des tailles de
l ’élection de Clerm ont, dont le tiers appartenoit à notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V i r y , notre
o n cle , titulaire de cette charge.
M on frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude ; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les m ojens de le tranquilliser. Il proposa à mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V i r y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se chargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Desmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
M ais un acte .de ce genre seroit bien coûteux-, entraîneroit des droits d’enregistrement considérables ; il faut
éviter cette dépense, et il y a un moyen tout simple.
D on n ez-m oi, d i t - i l à D esm ou lins, une procuration
notariée, pour m ’autoriser î\ recevoir les 16,000 francs
et les intéi'êts que vous doit votre oncle ; vous reconn o îtrez, par cette procuration, que f a i déjà payé les
12.000 fra n cs à vos créa n ciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne celte somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans, avoir donné un sou; et ce n’est point
B 2
�ici une assertion aventurée ; B oj’er l ’a reconnu clans lo
compromis du i 5 fVusador an 7 ; il a renouvelé cet aveu
devant le juge de p a ix , devant les premiers ju ges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
p o u r cause f a u s s e , ou sans cause préexistante ( 1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi im portante, sans bourse délier! et Boyer
veu t-il que l'honneur lu i survive, lorsqu’il est condamné
à remettre une obligation consentie pour cause fa u s s e !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) En même temps que mon frère souscrivoit cette obligation,
jl avoit donné à Boyer l’état de ses dettes. C et état étoit ainsi
conçu:
i°. A M . L aville, M . B lau d cau tio n ............................... i , 5oo fr.
A la Nanon , cuisinière de mon f r è r e ......................
Goo
A Dufraisse-Lapierre, domestique de M . de Flagheac,
1,200
c i ...................................................................... ... . :'V . . .
M . Boyer , ma c a u tio n ...................................................
2,800
A madame S a u z a d e .......................................................
2,900
A Caze , p e rru q u ie r........................................... ...
3i 5
A F a b r e , c o n fis e u r .......................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r ..............................................................
1,200
A B l a t i n ............................................................................
A B ra cb e t, t a i l l e u r ............................. ........................
260
5Go
T o t a l . . . ............................. ...
12,353 fi .
Voilà les dettes que devoil payer Boyer ; il n ’en a acquitté
d'autres que celles de C aze, Fabre et Blalin , que je lui ai allouées.
( E xtra it du livre journal de mon frl're, dans letjuel il avoit ins
crit les dettes dont B o y e r éto it chargé).
!
�an 8, Boyer obtient une cédule du juge de paix du
la section de l’Ouest de Clerm ont - F erra n d , où je
suis dom icilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m ’a rendu des services nota
bles ; q u i! a reçu d’abord de m oi des m arques de re
connaissance ,- il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 179 0 ; que l’époque des-remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’éclielle de
dépréciation, suivant les conventions des parties ; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et L o u yrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les a veu x; e t , comme les ni-bitres n’avoient autre
chose à faire qu’ un calcul qui seroit p én ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
„11 ine demande au prin cipal, i° . la somme de 8, 55o fr.
pour les causes énoncées au com prom is; 20. les intérêts .
de celte som m e, à com pter depuis l’échéance des effets;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen L e scu rie r, pour le compte do mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; p lu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l'obligation de 12,000 fr. 4 0 . la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen B u gh eon ,
le 28 niai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 179 2 , avec 136 fr. pour intérêts ou frais.
. Boyer demande encore une somme de 2^7 fr. 20. cent.
�( H )
payée à B la tin , négociant, le 8 juillet 178 9; celle de
3 1 5 fr. payée au nommé Caze, coiffeur, le 10 du m ême
m o is; celle de 1,218 fr. donnée à F a b r e , m archand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desm oulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclam oit aussi une somme de 2,400 fr,
qu’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un effet souscrit par mon frè re , et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B o y e r, par une suite de confiance ; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , B oyer. demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr- qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en fa v e u r de qui.
Telles étoient les demandes prin cipales, et comme
Boyer se trouvoit dans le b e so in , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
b ref d é la i, pour être condamné à lui p a y e r, par pro»
vision et à bon com pte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il donc dans le délire ? à qui persuadera-t-il
qu’il a em prunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
d’une p a rt, .et 3,180 fr. d’au tre, sans se faire donner
aucune reconnoissance par celui pour lequel il faisoit
les emprunts? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas môme
déclaré aux créanciers ? Pourquoi , quand Bughcon a
obtenu contre lui une sentence de condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi 11’a-t-il pas fait dénoncer les poursuites de
Uuglieoa ù mon frère ou à ses héritiers ?
I
�C 15 )
•Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l'obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’être créancier?
M ais cette obligation est contenue dans une procura
tion qui l’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo francs par annee ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il étoit
donc tenu de rendi’e compte de sa pi’ocuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescurier
et de Bughcon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient tourné à son profit. Reçues par mon
frère ! mais cela étoit im possible, Boyer ne devoit lui
rien com pter; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu , il n’a rien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets m inutieux de
B latin , Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs:
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de L escurier, Desmouliiis étoit
à son régim ent ; j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-m oi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m ’a fait assigner.
N o n , ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l ’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789 > ei1^ l’a(lresse de tirer sur
moi la lettre de change de B u gh eo n , et c’est avec ce
�(i6 )
même argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus délié , il reliroit deux fois son argen t,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai rem boursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frèi’e : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adroit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argum ens, qui
étaient sim ples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m o i, et que cet écrit étoit accablant.
M ais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoître
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et d em ’attérer par cette preuve que j’avois m oi-m ême donnée.
C e fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A v a n t d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît con
noître le montant des sommes qu’il disoit avoir em prun
tées pour mon frère.
Boyer me présente une feuille de papier, et rne prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Bo}rer a emprunté
« pour mon frère ,
« i°. A M . Buglicon 3,000 francs.
« 2°. A M . l'abbé A u b ie r 1,800 francs.
« 30. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres ; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je denuiXHÎois,
�c 17 )
^
^
J*
mnndois comment ces prétendues créances étoient étaLLies. Boyer prend de l’hum eur, et retire le p ap ier:
ce st cette inéme note qu’il a eu l’indignité de p ro d u ire,
et qu’il aimonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il ? 11 ne produisit qu’un papier
c o u p é , de la longueur de quatre lign es, dont il vouioit
se servir; il avoit supprimé le reste, et l’avoit coupé
avec des ciseaux ( i ).
P our le co u p , ce fut B oyer qui fut altéré, et publi
quement couvert de lionte. Malheureusement pour l u i ,
la créance de Yabbé A u b ie r se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de Yabbé A u b ier. S’il avoit supprimé les
'autres qu’il ne demandoit plus ; il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A u b ie r; cependant il convenoit qu’elle
DC lui étoit pas due. O r , il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Buglieon et L escu rier, quecelle
d’A u bier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou celte préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables ?
Q u'on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Buglieon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
m ’a voit prêtées en 1790! et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'audience, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des ciseaux , ils
firent éclater un mouvement d’indignation contre l'infidélité du
citoyen Boyer. Plusieurs citoyens de C lerm o n t, qui étoient éga
lement à l’audience, s’en aperçurent, et ont publié que les rieurs
n ’etoient pas du côté.du citoyen Boyer.
�Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m ’avoit fait
écrire sous sa dictée , et sur le même p a p ier, il avoit
porté entre autres , une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen Lenorm andFlaglieac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dire si mon frère avoit été son d éb iteu r,. et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
L e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
cîcvoit rien , et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
J e présentai cette lettre à l’audience, et iis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé diiïérens créanciers! Quand
on connoît B o y e r , il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B o y e r , procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l'audience sur l’interpellation du président!!!
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon frère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu'il me demande, et celles qu’il ne m’a pas
(1) TCoyrr a ajouté tf'» sa main son prénom , <jui avoit été laissé
rn blanc dans le double du compromis <jue j’ai en mon pouvoir.
�Jss
( *9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent à
178 9, et qu’il est établi que mon frère a resté à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 17 9 1, sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C ’est ici le cas de parler de la lettre de change de
.Lahousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 francs , au profit du
citoyen Lahousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788; il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de pai'ler principalement de la créance de Lahousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrais
à diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Lahousse; je n’avois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la detle; je priai le
citoyen Lahousse de vouloir bien inc remettre la lettre
de change de mon frère, et j’offris de souscrire à son
prolit un effet de pareille somme.
L e citoyen 1 -ahousse s’empressa d’accéder à ces arrangeinens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’effet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
fam ille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ign o roit les arrangeinens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dern ier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le m ontant, et l’engage
à mettre son acquit au Las de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’éloit des deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien con n u e, m algré la m alignité
de B o y e r , refusa de signer l’acquit , en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature; il a osé depuis form er
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payem ent, sur le fondement
que Boyer étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a entraîné les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme ju g e, sans le juger comme hom m e; mais
cet homme est im juge!!!
Mais je demanderai à B o y e r, comment et à quelle
époque il a payé ccltc somme à Lahousse ?
Boyer a d it , en plaidant, qu’il l’a voit acquittée à
l’échéance : on se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 178 9; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de celle obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
nanti avant d’etre créancier; il eu convient lui-incm e.
�Il ne l’a pas payée depuis, puisque la lettre de-change
étoit sortie d’entre les mains de Lahousse, lo n g-tem p s
avant son échéance. Tous les faits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Lahousse’; déclaration que j’ai produite à
l’audience (r) : aussi,loi’sque j’ai satisfait auxeondamnations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre celte lettre de change, afin d'en
poursuivre le recouvrement contx-e Lahousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à celte rem ise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel, de Riom .
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l'im
pudeur de xvclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C ’est ainsi que j’ai payé i,8oo francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 178 6, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C ’est ainsi que j’en ai payé bien d'autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en noie, à Per
ception de celles de F a b rc, Caze et Blatin.
Je pou vois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Lalioussc est imprimée à la suite du mé
moire.
�( 22 ^
J ’avois présenté un autre état qui m’avoit été donné
par mon frè re , et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cette
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M o n frère avoit fait la note des sommes que j’avois pré
cédemment payées pour lu i, et m’avoit remis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une dem i-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa main , et que
mon frère n’existoit p lu s , cet état étoit une pièce pro
bante qu’on ne pouvoit contester : je m ’en fis un grand
m oyen , lors de la p laid oirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. B oyer, qui ne connois^
soit pas cette p iè ce , en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de ‘
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoienL avec
intérêt la discussion de cette cause. L a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est m em bre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
I/O défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit à la m ain;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates,
lia cause est continuée à une autre audience ; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit il mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
ijous demandons tous deux avec confiance, soit à B oyer,
V
�i
c 23 )
soit à son défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouvé.
A lo rs Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou raturé
les dates. O n voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, u ’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la p a rtie , lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la'p ièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté cette créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en c o n v in t, et Boyer fut
jugé par le public. A u jourd ’h u i , Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son m ém oire,/ lui Boyer,7 le seul en
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blAmera-t-on maintenant de m’être refusé à payer
une indemnité à Boyer, à. raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
20. .T’ai rem boursé,danslecourant de mars i793,dan su n
temps où les papiers avoient encore une grande valeur ( j ).
(1) Boyer ne peut pas équivoquer sur lVporjuc de ce rembour-
�C m )
Il est vrai qu’en m ’acquittant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il ne restoit plus de traces
du remboursement.
Q u’a fait l ’ingénieux B o yer, pour me donner plus de
défaveur sur ce rem boursem ent? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
O n lui observe que cela est impossible ; qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation ; alors il
répond que c’est au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut m ériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et L ou yrelte,
par nous réciproquem ent choisis : Boyer a révoqué lo
compromis.
4°. E n fin , je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit réciproque, et que Boyer in’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payomens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé ; il n’y a donc pas de réciprocité.
sèment. J’en al fait un , dans le même tem ps, au cit. L o u y re lte ,
l’un des arbitres, que Boyer lui-même pressoit d’exiger son paye
ment et d ’imiter son exemple , sur-tout à raison de ma prétendue
émigration.
Depuis le com prom is, il eut la mauvaise foi de prétendre que
le remboursement avoit été fait beaucoup plus lard ( en messidor
cm 4. ) L ’arbitre Louyrettc le releva sur cette assertion. L e dé
licat Boyer se hâta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire comme m o i, puisque nous avons été remboursés dans le même
temps. On conçoit actuellement le m otif de la grande colère de
Boyer contre Louyrelte.
Tels
�(25)
T els furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
m on défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les propos de taverne
et de café , qui fui*ent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pas été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut co u vert, d it-il, par mes vociféra
tions , et le trib u n al, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un d élib éré, et n’a prononcé qu’après
le plus m ûr examen.
Enfin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9 , qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clerm ont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m o i, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 178 9 , et de celle de 3,180 francs d’au tre,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même a im ée, intérêts et frais qui leur sont acces
soires;
-2°. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement do la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obliga
t i o n de 2,804 francs, prétendue contractée par Cham pllour-Desmoulins , au profit d'une personne inconnue ;
30. En ce que les intérêts ont é.é adjugés à B o y e r,
à compter des époques des payemens ; 40. E n fin , en ce
que j’ai été condamné aux dépens; ém endant, Boyer est
D
�'♦
.
(* o
débouté de toutes ses demandes relatives à ces différens
chefs, sauf à lui à agir en garantie, le cas échéant; (c’estù-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de 1,800 fr. 13 cen.
montant des sommes payées à B latin, Fabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné àpayerles 2,400f.
montant de la lettre de change de Laliousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour h me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
f r è r e , comme faite pour cause fa u s s e ou sans cause
■préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugem ent auquel
je suis condamné.
Ce jugem ent, dont Boyer a pris la peine de faire im
prim er les motifs et les dispositifs , est principalement
m o tivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à B oyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champilour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de B oyer, dans le compromis
devant le juge de p a ix , devant le tribunal d’appel, qu’au
pioment de celle obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère;
L e tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
»
�C*7)
iicatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et documens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement dç
la somme de 8, 55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i que cette somme a été par moi payée à Boyer*
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquem ent Boyer se soumettoit à ne ré
péter les sommes q u ’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon fr è r e , que suivant la môme propor
tion , et d’après l’éclielle ;
4 0. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. L e tribunal d écid e, quant h l’indemnité du caution
n em ent, qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet prescrit, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne pas.
L a condamnation des sommes ducs à B latin , Caze et
la b r e , est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change deLahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
V 2
J
�(a 8 )
.
A l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depuis
l ’époque de ses prétendus payemens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
con ven tion , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
la demande.
B o y e r, présent à la prononciation de ce jugem ent,
croit avoir fait un assez grand p ro fit; il p art, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content , qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement a mon avou é,
le 5 iloréal an 9 , sans approbation préjudiciable , pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon dom icile,
sous les mêmes réserves; mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugem ent, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire urt acte d’oifre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal cl intérêts; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage an procès, notamment la lettre de
(1) Ces réserves et protestations de Boyer me rappellent I’anecdote d’un vieux praticien, qui voyageant dans les ténèbres, fut
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à se reconnoîlre dans l’obscurité. II s’écrioit üt chacun : J e t’ ac
cepte en tant que tu me sers, ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
Comme lu i, Boyer ne marche jamais sans protestations.
�/
(
29
A
)
change souscrite par feu mon frère au profit de Lahousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient insci’its les noms de L escurier, 1abhe yliibier
et B ugheon, comme créanciers de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendrait, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Lahousse.
Boyer ne laisse pas échapper l ’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. (c e lle fa ite pour' cause
fa u s s e ) \ mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, d it-il, la lettre de change et la n o te, sous le
vain prétexte qu’ il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’a p p e l, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
11 me parut d’autant plus extraordinaire , que B o y e r,
qui m’avoit fait, sommation d’exécuter le jugem ent, qui
rccevoit le montant des condamnations qu’il prononce en
sa laveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
J e pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d’une rébellion à justice; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugem ent, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je préseulai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
nie permet de l’assigner à jour fixe sur celle demande.
L e i 5 du même m ois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à cc jugement dans le
d é la i, et a fait paraître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité , également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m ’apprend, par
ce lib e lle , qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
T elle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-etre été
m inutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire ; je laisserai ensuite ;V
mon' conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la p lu m e, le fait bon et
com patissant ! R isu m teneatis. B o y er com patissant! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les habitans de la commune
de Solignac , que Boyer habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des rutoirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand. ’ ~
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu'il in’a rendu s, Boyer a mal ch o isi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Q u’on examine celte ven te, du 16 janvier 1786 (x); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avoia pas encore été présenté au citoyen Boyer £1 celte
¿poejue.
�(3 0
l'acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 fr. au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi form el.,.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de .mes filles. J ’en ai trois , toutes établies; elles ont porté
a leurs mai'is une fortune au moins égale, et j’estime assez
mes gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m ’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (i),,
(1) Boyer dénature les fa its, relativement au citoyen Bonnet.
C e n ’est pas lu i , comme il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointement et cumulativement
le 9 août 1790. J’ai heureusement conservé le b illet; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m ontant, partie en im
meubles , partie en numéraire. J’ai donné en im m eubles, au mois
de juillet 1792, douze journaux de terre, situés dans les appar
tenances de C lerm o n t, dans le meilleur canton, près les jardins
des Salles ; p lu s, une grange située à Clerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai compté en o u tre , en numéraire , la somme
de 8,400 fra n c s, intérêts com pris, à la demoiselle B om part, à
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. Ces payemens
«nt été faits les 21 messidor, 21 et a5 thermidor an G: j’en rap
porte les acquits de la demoiselle Bompart.
�w><.
( 32 )
et quelques autres créanciers dont il Fciit rém unération.
M ais B oyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Q u’il
le dise , s’il l’ose. M ais de ce que Boyer a été ma caution,
tous ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’aventuroit rien lorsqu’il se prêtoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
sur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre m o i, comme ém igré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il pcrsécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit à R io m , chez le citoyen
G ren ier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de R io m ; et m algré sa m oralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterm iner ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E s t-il bien étonnant, d’après ces services sign alés,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon ém igration? Il n’en falloit pas tant en 179 3 ; et
j’aurois eu moins d'inquiétude, si j’avois été daiis cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
O n sait qu’il falloit être propriétaire pour être inscrit
sur la liste fatale.
B oyer,
I
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sur
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût interpellée.
A ccoutum ée à vivre dans la retraite, loin du tumulte de
la société, elle fit avec effort le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti'; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la fis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus*
qu’à m o i, cette imposture m ’affeeteroit plus vivem ent.
Lorsque vous dites que j’ai connu f’obligatiôn consentie
par mon frère , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai en-
( i) Boyer prétendit en plaidant, que les sommes empruntées
de Buglieon avoient été versées dans le tablier de ma sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm oulins, mon frère : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressémeut mon défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-même pour lui
donner un dém enti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de ma sœ ur, étoit
celle de 3,900 fr. prêtée par la dame Sauzade, que j ’ai acquittée,
Boyer ne l’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-même de cette manière
au citoyen B o ye r, lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dame Sauzade répondit à Boyer , que la somme
prêtée par le citoyen Buglieon son frè re , n ’avoit pas été compte«
à Desmoulins : elle est toujours prête à attester ce que j ’avance.
E
�e 34 )
core par le m entiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur m oi la lettre de ch ange, que j’en passai l’ordre à
Bugheon; mais je ne le iis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
n eu r, qu’il ne fut point question de mon frère :.vou s
saviez trop bien que ¡dans.ee moment je ne me serois pas
engagé pour lui. ¡. .
Un des grands argumens de B o y e r, pour prouver que
l’emprunt fait à Lçscuriçr n’étoit pas pour son com pte,
est de dire qu’il a pris de B aptiste, n otaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être; mais celle
quittance est pour le droit de contrôle : o r, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs ; e t ,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en retirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution no devoit pas échapper
i\ Boyer.
M a is, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère , puisqu’elle est
comprise clans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez C h evalier, notaire, le prem ier com plé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur celle pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avec m oi, et. nous avons été divisés, lorsque je
I
�( 35 )
^
en ai ' demandé le compte. V ou s prétendiez en
avoir fourni le m ontant, à la vérité en assignats; vous
m ’oifriez de me faire raison du bénéfice, à condition que
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez; e t, lorsqu’après plusieurs années de discussion j
j’ai voulu éclaircir ce fait, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m ’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usnge à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent que j’avois toujours refuse d’allouer de
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation :
en changeant le lieu de la scène, il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion; c’est le billet sans date, où j’ai prostitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus aj-îprendre au pu blic, lorsqu’il en fit parade,
les motifs qui l’avoient dicté. C ’est après la journée du
18 fructidor. J ’appartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme émigré ; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoil fait des menaces; il
disoit à tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu'il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma fam ille, mes amis, étoicnl alarmés; on m’engagei
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
tous
�C 36 J
code. Boyer étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
Iréquens de cette ville à celle de Clerm ont ; il cherchoit
surtout à épargner les voitures; j’envoyois la mienne à
R io m , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta Lien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste •
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calom nies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? 11 me semble
entendre ce voleur qui crioit bien haut de peur qu’on
l ’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore rid icu le, lorsqu’il prétend que j’écarlois
l ’afllucnce des honnêtes gens qui accouroicnt chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la foule , et qui n’a jamais personne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
destituer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernem ent
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il o b tin t, par importu n ité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si sou vent manqué
de m émoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut plus
s’étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres, quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrclte. Mais tous
deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
l’estime p u b liqu e, et tous les deux connoissent trop bien
B o y er, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( 37
) _
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
tx-iomplie.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; fa i le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugem ent, je.donnai à d în er, à Beaum ont, à plusieurs
citoyens , pai’mi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœ ux pour le gouvernem ent, pour le premier
magistrat de la rép u b liq u e, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion p u b liqu e, à lui-m êm e , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C ’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent sou volum ineux et insignifiant mémoire.
S ig n é, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examine la
procédure et le jugement rendu contradictoirem ent,
entre les citoyens Champflour et B o y e r , le 27 germinal
an 9 ; le m émoire en cassation du citoyen B o y e r , et
celui en réponse du citoyen Cham pflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen B o yer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du p ro cès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les difïérens chefs de créances réclamées par le citoyen
B oyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaires, si foibles, qu’on scroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen C liam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un m émoire contre lui.
En effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen B o y er, une fin de non recevoir invincible. Il a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l'exé
cuter, en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
sans se fa ir e aucun préjudice.
1.1 est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête prs
�(
39
)
.
l'exécution d’ un jugement en dernier ressort. M a is, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles être
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
q u i a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement; alors, s’il croit avoir ép rouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p o u rv o ir, il ne doit payer
que comme contraint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention, sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescemen t préjudiciable.
M ais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; d;ins ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l ’acceptation.
O r , le citoyen B oyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Cham pflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Cham pflour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc term iné, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrem ent, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Cham pflour scroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condam né, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugem ent, et don
nerait à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudrait syncoper le jugem ent, le casser dans
�une p a rtie , et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugem ent, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chefs
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i , dans l’état où
en sont les parties : les choses ne sont plus entières, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
• Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
B o y e r, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus m ûr examen ?
Il oppose, i° , que la cause a été plaidée pendant deux
audiences; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ. Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7, sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui , suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , q u i, dans ce ca s, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
A v an t de proposer un pareil m oyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il allaq u c,
et qu’ il a lui-m êm e fait signifier. Il y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été prononcé. Boyer devroil surtout §e rappeler, puisqu’il
éLoit
�C41 )
¿toit présent à l’audience-; qu’il assistait son avoué pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut prononcé.
Ce fa it, au surplus, est constaté par le jugement q u i ,
sans d o u te, mérite plus de confiance que l’assertion de
Boyer. 11 porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant deux précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i , après en avoir d é lib é ré , etc ». V oilà
qui répond , sans d o u te , à l’objection d’une manière
pérem ptoii’e.
D ’ailleurs , un délibéré n’oblige point à un rapport.
Jôusse, sur l’article H t du titre V I de l’ordonnance de
1667 , explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu ,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des p ro« cureurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience ; auquel ca s, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur le registre,
« sans mémoires ni-écritures. L e greffier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : on en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« l ’audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
c< plus prochain , et le jugement sc prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sortes de délibérés sont autorisés par l’article 111
du titre V I , et par l’article X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rap port, écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugem ent, qu’il
a été ordonné un délibéré ès mains de l’un des juges,
F
�»fe
.
.
^42 )
ce seroit la stricte exécution de l ’ordonnance, loin d’être
nne infraction à la loi.
Il est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brumaire , d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l ’exécution de l ’oi’donnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure , et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute pi'océdure ; l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
abroge donc nécessairement la loi du 3 b ru m aire, si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’exp liq u er, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boy.er pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
pspèce de rapport à la cause ; il p o r te , « que si les parties
« com paroissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
a de demande et le jugement définitif ; si l’une d’elles ne
« comparoît poin t, il lui sera notifié de plus le jugement
« préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« ccdure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
O11 11e voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’arlicle X n’est pas plus déterminant:
« Les juges des tribun aux, porte cet article, p ou rron t,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet examen , ils rentreront à l’audience pour y déli
ée bérer en p u b lic, y opiner à haute v o i x , et prononcer
« Je jugement. Ils pourront en core, si l’objet paroît
« l’e x ig e r , nommer un rapporteur, qui fera son rapport
I
�( 43)
« le jour indiqué dans le jugement de nom ination, lequel
k rapport devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétendra pas que le
'jugem ent est n u l, parce que les juges n’ont pas opiné
à haute voix. Ce m ode, qui a entraîné tant de dénon
ciations, n’est plus usité. L ’objet de la caiise n’exigeoit
'pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de soin
les différons chefs de demandes, et le citoyen Boyer doit
'se féliciter de cette précaution; elle lui a valu lu con
damnation du billet de Lahousse, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
Ainsi , ce premier moyen de cassation est absurde et
inadm issible, d’après la teneur du jugem ent, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second l i eu, que le ju
gement viole la disposition de l’article 1 du titre III do
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le ciloyen Champflour
est condamné ; il se fonde sur ce que le citoyen Cham p
flour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il 11’avoit point fait d é lire s; d'où il lire la consé
quence que tous les dépens éloient à la charge du citoyen
■•Champflour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses applicaeations : il est vrai que lïarticle qu'il invoque veut que
toute partie q u i s u c c o m b e soit condamnée aux dépens
F a
�■
•
-
(44)
indéfinim ent, sans que pour quelque cause que ce soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Ghampflour a -t-il succombe? L e citoyen
B oyer a form é contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient à une som m ede23,3i7f.
i o cent. Il n’a réussi que sur deux ch efs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r , il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
g a g n e , surtout lorsque ces chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des dépens. C ’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyei'. V o ici com
ment il s’exp liq u e, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l ’assignation, et que le deman« deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les com penser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagn e, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
u sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Cham pflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le prem ier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoieut
contenus dans le même exp loit, et ont bien évidemment
occasionne autant de frais les uns que les autres. L e
�(45)
citoyen Cham pflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens; cependant ils ont été com pensés,
et le coût du jugem ent a été entièrement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en p lain d re, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-même dans
son troisième moyen. Sans doute on doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairem ent contractées.
M ais lorsque les conventions ou les obligations sont
purem ent conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accom plies, avant que la
convention soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention ; l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur uue vérité aussi certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être conlroverséi
O r , quelles sont donc les conventions des parties? E n
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Cham pflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qu’il lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fait
Un compte entre les parties, et que Boyer l’indeinniseroit
h son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’éloit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Cham pflour
n’éloit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-même. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties; Boyer n’a fuit aucun payement pour le compte
�( 4 <5 )
du citoyen C h am pflour-D esm oulins, o u , ce qui est la
même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il li’y à donc plus de consentement, dès
que Boycr révoque le Compromis •, il n’y a donc plus do
récip rocité, dès que Boycr n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir e n compensation aucune indem nité,
et cependant la compensation avoit été la cause prem ière
et essentielle du contrat ; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
co n d itio n , la convention est demeurée imparfaite. C ’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce q u ia été parfaitement
développé dans les m otifs; et si Boyer prétend que daus
un contrat synallagmatique et récip ro q u e, le citoyen
Cham pflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-m êm e;
qu’il pouvoit se jouer de scs engagem ens, tandis que le
citoyen Cham pflour étoit obligé d’exécuter les siens ,
cette prétention paraîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation , parce qu’il n’y a ni v io
lation de fo rm e , ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frim aire, 5 therm idor an 4, i 5 fruc
tidor an 5 , sont également mal appliquées.
1
P rem ièrem ent, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le discrédit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frim aire : Boyer avoit reçu volontaire
m ent, et ralenti n o n jit injuria.
Les lois des 9 therm idor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nç se sont occupées que des obligations pures et simples,
I
�et non des contrats conditionnels; il étoit donc inutile
de grossir un m ém oire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut exam iner le fond du
pi’ocès.
L e quatrièm e m oyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
g rief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Buglieon et Lescurier ; il va jusqu’il
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de i2 ,co o f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend quç cette n o te , qui émane
du citoyen Cham pflour., prouve que D ësm oulins, son
frère, a touclié les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l ’emploi
de 12,000 francs; mais il prétend avoir p r o u v é , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
C ham pflour, que D esm oulins, son fr è r e , avoit touché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rem pli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugem ent; la confession de celui qui est muni d’un
pai'«il titre , ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
T o u t est erreur et confusion dans ce g rie f, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
11 se plaint de ce que cette obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Q u’on lise son exploit introductif. de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; on verra que
�(48)
loin de conclure au maintien de celte obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
Cham pflour a.demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l?a ordonné en m otivan t, sur les aveux de B o yer,
qu& robligatipn étoit consentie p o u r cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
«
»
__
A l ’égard des lettres de change souscrites par B oyer,
au profit des citoyens Bugheon et L escu rier, rien n’établissoit que l’em prunt eût tourné au profit du citoyen
Cliam pflour-Desm oulins; il n’en a pas reçu le m ontant;
il ne devoit pas même le to u ch er, d’après les conven
tions , puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Cham pflour-Desm oulins;
et B oyer n’a payé aucune de ces dettes.
P o u r l’écrit prétendu émané du citoyen Cham pflour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. L a forme de cet é c r it, la
créance de îa b b é A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de B u gh eo n , et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payem ent, dénotent assez le cas qu’on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroit dû
précédemm ent supprim er; mais le jugement ne pouvoit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas form é la demande : le tri
bunal ne pouvoit condamner le citoyen Cham pflour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen B o y er; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celte p a rtie , ce scroit un grief d’ap p el, et non
un moyen de cassation.
Dans
?
�(
49)
Dans son cinquièm e et dernier m oyen , le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 1789, qui permet à Favenir
de prêter de l’argent à termes fixes, avec stipulation
d’in térêts, suivant le taux déterminé par la loi , sans
entendre rien innover aux usages du commerce.
L e citoyen Boyer argumente de cette lo i, pour prouver
que le jugement dont il se plaint auroit dû lui adjuger
les intérêts de la somme de 4,200 francs qui lui a été
al l ouée, à com pter du payement qu’il dit en avoir fait.
L e jugement ne lui adjuge cet intérêt qu’à com pter de
la dem ande; d on c, suivant le citoyen B o y e r, il y a in
fraction à la loi du 3 octobre 1789, par conséquent ou
verture à cassation.
Etrange conséquence ! Suivant les anciens principes,
l ’argent étoit stérile de sa nature, et ne pouvoit produire
d’in térêt, lorsqu’il s’agissoit de p rêt, qu’autant que le prin
cipal étoit aliéné entre les mains du d ébiteu r, ou qu’il
existoit une demande judiciaire en payement.
L a loi citée n’a pas dérogé à ce p rin cip e; elle a seu
lement laissé la faculté, pour l ’avenir, de stipuler l'intérêt
au taux o rd in aire , par l’obligation ou le b ille t; c’est-àdire , que lorsque cet intérêt est stipulé par l’écrit émané
du débiteur, les tribunaux doivent l'adjuger , conform é
ment à la convention ; mais s’il n’existe aucune stipula
tion , l’intérêt n’est d û , comme autrefois, que du jour
de la demande.
O r , il 11’y a aucune convention de cette nature entre
les parties, puisqu’aucontraire les sommes réclamées par
le citoyen Boyer étoient contestées ; que d’ailleurs le
prétendu prêt étoit antérieur à la lo i; il y a plus, c’est que
G
�<<•
( 5o )
dans les emprunts prétendus faits par B oyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l ’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payem ent, et que cet intérêt
■avoit été confondu avec le principal. C ’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier ei B u gh eo n , et pour les
soijimes adjugées à B oyer; tel est d ’ailleux’S l’usage abusif
et usuraire qui s’est introduit dans le commerce.
A in si les prétentions du citoyen Boyer ne tendroient
à rien moins qu’à se faire adjuger l ’intérêt des in térêts,
et à faire admettre l ’anatocisme dans les tribunaux.
XI invoque une clause du com prom is, où il est dit que
les citoyens L ouyrette et Costes, arbiti-es, feront aussi le
compte des in térêts, conform ém ent à la loi. M ais cette
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1 789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à com pter
les intérêtslégitim em ent d û s , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créance L ah ousse, auroient
au contraire x-ejeté le principal.
M ais le citoyen B oyer a révoqué le com promis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-m êm e détruit.
L e citoyen B oyer, en terminant son m ém oire, annonce
que ses moyens sont encore m ieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est com m uni
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cbam pflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R io m , par les anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendém iaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrarid, le 30 vendém iaire
an dix.
D A R T I S - M A R C 1L L A C .
qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. D élibéré à R io m , le 3 brum aire
an 10.
Xi
e
c o n s e i l
s o u s s i g n é
,
ANDRAUD.
�VJI,
PIECES
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C IA T IO N
DE
PIERRE
B O Y E R ,
Antérieure à l’inscription du cit. Champflour, sur la liste des émigrés.
E x tr a it des registres, contenant lés déclarations des créanciers
sur ém igrés, tenus au ci-devant district de Clerm ont, n°. 74.
A u j o u r d ’ iiu i
IS
!»
vingt-sept octobre mil sept cent quatre-vmgt«douze, a été déclaré par le procureur syndic du district, qu’il lui
avoit été signifié un a cte, en sadite qualité , par le ministère de
W e lla y , huissier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette com m une,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit Boyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisleCésar Champflour-d’Alagnat ; pour lequel il avoit fait des affaires
im portantes, et s’étoit prêté, à son égard, à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’avoit fait de la ma
nière la plus généreuse, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , ne
s’attendant â d’autre reconnoissance qu’à celle que se doivent des
ümis ; qu’il l’avoit principalement obligé , en souscrivant diffé
rons emprunts faits par ledit Cham pflour, notamment un billet de
la sommé de 17,000 francs au profit du sieur R och efo rt, et autres
quatre de 85o francs chacun, le 3 mars 1791 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d’indemnité : 20. d’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur Champilour par le citoyen B ru n e i, pour lequel il y
avoit également indemnité ; qu’il avoit en outre passé l’ordre de dif
férentes lettres de change tirées sur lui par ledit sieur Chamjtflour, dont il étoit dans l’impossibilité de donner le d é tail,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notamment celles
�jé r
(. 5 5 )
•
• ^
tics sieurs B o n n e t chirurgien, G uyot de Vic-le-Com le, et autres ; qu’il
lui étoit du à lui-même par billet 7,95o iîancs : p lu s , q u ’il lui
étoit dû par ledit Champjlour-Desmoulins la somme de 12,000
francs par acte devant notaire , lesquels l'ifo o o fr . (1) lui B oyer
avoit empruntés pour les compter audit Champjlour ou ci ses créan
ciers, et fou rn i de ses deniers ce qu i n’avoit pas été emprunte ;
mais que cette somme lu i avoit é té déléguée à prendre sur les
sieurs de V i r j père et f i l s , p a r le même acte du 28 mai 1789 ,
lesquels devoient audit Champjlour la somme de 16,000 francs
portant quinze cents francs d’ intérêts ; qu’il étoit même porteur
du titre obligatoire qui étoit commun avep le sieur Champjlour
a îné et la dame B l o t , auxquels il éloit dû pareille somme.
Q u’il avoil été instruit par bruit public que ledit sieur César
Champilour étoit ém igré; qu’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts, et de faire en conséquence la pré
sente déclaration , avec protesta Lion de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte étoit signé dudit sieur Boyer et de l'huissier.
Que M . le procureur-syndic croyoit 11e devoir être tenu ¿1 autre
chose sur cette signification, que de la déposer au secrétariat du
d istrict, pour valoir et servir audit Boyer ce que de raison ;
que les lois, soit du 8 avril, soit du 2 septembre dernier, ne le
rendoient en aucune manière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d’émigrés ; que l ’article V I de la loi du a
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce qu’ils avoient
à l’a ire, pour être conservés dans leurs d roits, privilèges et hypo
thèques , et être colloques utilement sur les deniers provenais de la
vente des biens des ém igrés; que par conséquent l ’acte du sieur
B oyer, qui, sans être un acte inutile, ne remplissoit pas néanmoins
(1) On voit que Boyer ne comptoit pas sur mon retour , lorsqu’il vouloit
s’approprier les 12,000 Francs énoncés en l’obligation de mon Irèie; quoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , pour ca u se fa u sse. , il ne la portoit pas moins comme une créance légitime qu ’il vouloit s’approprier, sans
doute pour V intérêt d e la nation. Yoilà_cet homme qui veut que l'honn eu r
lu i survive !
�( 54 ) _
le Lut de la loi sur ses intérêts ; et qu’il ne ponvoit sans autrement
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
(aire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
au secrétariat ; ce qui a été fa it, sauf audit B o y e r, s’il le juge à
propos, à parer aux inconveniens qui résulteraient de cette décla
ration imparfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé B e r n a r d ,
procureur-syndic. N°. 406.
Ledit jour 5 décembre 179 2 , est comparu au même directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r, avoué au tribunal du district
de C lerm ont, y h abitan t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment^ rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen B ern ard, procureur-syndic de ce district, le 27 octobre
d ern ier, a déclaré qu’ il croyait devoir la réitérer, et Vétendre
notamment sur des objets q u i d o i v e n t p r o f i t e r a l a r é p u b l i q u e ,
dans la supposition que Jean-Baptiste- César Champflour-Beaum ont, dom icilié en cette 'ville jusqu’ au 14 ou i 5 ju ille t dernier ,
so it ém igré, ce que le requérant ignore absolum ent, le sieur
Champjlour ne lu i ayant annoncé son voyage que pour la villa
de L y o n , n e s e t r o u v a n t p a s s u r l a l i s t e d e s é m i g r é s , dans la -*
quelle Joseph Champjlour son frère est inscrit. E n conséquence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d*affirmer s’ il en est
requis, ou s i cela peut être nécessaire ( 1 ) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Champflour , pour
lequel il a fait des affaires importantes et heureuses également
notoirement connues; que par suite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu’on peut faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’a
fait de la manière la*plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fam ille, ne s’attendant à d’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalement obligé en souscrivant
( i j Ma femme et l’ un de mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la démarche Je B o ye r; ils offrirent de le rassurer, par des engagemens soli
daires sur leur fortune personnelle, de lout ce q u ’il pourroit perdre : mais
Boyer oyoit d ’qutres vues; il comptoit se faire adjuger mon bien de Beaiw
»PQIltf
�( 55 )
différons emprunts faits par ledit sieur Cham pilour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient communs , notamment cinq billets à ordre.
L e Ier. de 17,000 francs en principal, au profil du sieur R o chefort de R io m , et les autres quatre de 85o lrancs chacun, le
3 mai 17 9 1, pour lesquels ledit sieur Champilour a fourni le
même jour une indemnité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
2°. Q u’il a souscrit avec ledit Champilour un autre billet de
la somme de 12,600 francs prêtée à ce dernier par le citoyen
B ru n ei, habitant de cette v ille , du 5 mars 1 7 9 1 , payable au
5 mars de la présente année, ignorant le requérant, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indemnité du même jour, et qu’il
a également déposé.
3°. Q u’il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur Cham pilour, el dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des prêteurs , desquels il est dans l'impos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n’en
ayant pas gardé des notes, comptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur Champilour ; mais qu’il en connolt plusieurs, notamment
celle du sieur B onnet, chirurgien de celte v ille, de 8,\ 00 francs ,
et qui étoit auparavant de 27,300 francs.
4*. Q u’il a souscrit et accepté deux lettres de change de
3,000
F.
chacune, en faveur du citoyen G u yo t, [de V ic -le -C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le x"* février 1795, pour
lesquels il y a indemnité du i or. février 1789, de la part du sieur
Cham pilour, en faveur dudit instant, laquelle le requérant a éga
lement déposée.
5*. Qu’il a passé l’ordre en faveur du citoyen Charbonnier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24° fra n cs, tirée par le
sieur Cham pilour, en faveur du requérant, le i 5 mars 1791 ;
6°. Q u’il est dû au requérant, i°. la somme de 5,260 fr. suivant
le billet consenti par le sieur Cham pilour, le 1". octobre 1790 ;
20. autre somme de 3,5oo f. portée par billet du 11 novembre 1790;
�(56)
S', enfin d’une somme de 4oo f. payée en son acquit au citoyen
Dessaignes, pour le montant d’un billet de pareille somme , du 23
août. 1790 , suivant sa q u ittan ce, au dos du 17 janvier 1791«
T o u s lesquels billets le requérant a déposé à l’in sta n t, en exé
cution de l’art. Y I de la loi du 2 septembre dernier, sauf à les
retirer, s’il est nécessaire, lesquels ainsi que les indemnités sont
timbrés et non contrôlés.
l i a déclaré d é p lu s , e t ce rouR l ’ i n t é k k t nE l a n a t i o n , sa u f
à réaliser sa déclaration a la m unicipalité de celte 'ville , con
form ém ent à la l o i , qu’ il a en ses mains les objets suivans , con
cernant le sieur Champjlour et son frère : i°. un double de
Im ité p a ssé sous seing privé entre les sieurs A rta u d -d e -V irj ,
père et fils, et les sieurs Jean-César Cbam pilour, Josepli Cham pilour, officier, et Claudine Champflour et Jean Gérard B lo t, son
m a ri, du 14 octobre 1782, par lequel les sieurs de V iry se sont
obligés à leur payer la somme de 48,000 fr. pour leur p o rtion ,
dans la charge que possedoit le sieur de V i r y , el l’intérêt de celte
som m e, sans pouvoir la rembourser de dix années , à compter de
l’époque du tra ité, sur le pied de 4>5oo francs par année, c’està-dire, i , 5oo francs chacun , en intérêts, et 16,000 en principal,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette ville,
du 29 janvier 17 8 4 , portant condamnation de ladite somme et
des intérêts, sur laquelle somme de iG,ooo fr. revenant au sieur
C h a m p f l o u r , officier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 mai 178 9 , en sorle qu’il n ’est plus dû au sieur
Champflour cadet que 4,000 fran cs, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ il a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Champflour et B lo t, au sujet de la comptabilité des béné
fices de la même charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V ir y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mémoires
et relevés pris sur les registres-journaux el sommiers pris par le cit.
Louyrette
I
�5 7 }
Louyrette qui y a , de sa p a r t, employé au moins trois m ois, sans
désemparer^, et qu'il sem ble, d’après le compte de clerc à m aître,
que le sieur de V ir y est débiteur d’environ 120,000 fr. envers les
sieurs Champflour et B lo t, le sieur Champflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, comme héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dame Espinasse, sa Jcmme, et les
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliampilour père, époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie rs, entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
(
sont com m unes, tant avec ledit. Blot et le déclarant qu’avec les
frères Cham pflour, et qu’il en est de même de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offrant cependant de communiquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , même avec déplacement.
5°. E n fin , qu’ il a en ses mains trois contrats de 'vente sons
seing privé , de deux parties de maison située en cette v ille ,
v i s - à - v i s les c i-d e v a n t A ugustins, et d’ un m oulin sur le
chemin de Clermonl , allant à Chaînaii<)vas ; les deux pre
miers , du a 5 septembre 1790 , l’un consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat aîné , et l’autre en faveur de Magdelaine
Charles , veuve de Claude D onces, sellier ; et le troisièm e, du 1 " .
avril 1791 , en faveur d ’Herm ent Jacob, traiteur, habitant de
cette ville, moyennant les prix y énoncés, desquels il a pareille
ment fuit le dépôt présentement, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B craud , épouse du sieur Cliampilour aîn é,
comme faisant partie de la succession du sieur Bcraud, son père.
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposés, sans préjudice à lui de tous scs droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
Copie certifiée conforme :
L À B R Y ,
secrétaire.
II
oyeu.
�DÉ C LARA T IO N DU CITOYEN LAROUSSE.
J e soussigné reconnois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Champflour - Desm oulins, la somme de
2,400 fra n c s, de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
payable au commencement du mois de janvier 1789; que long
temps avant l’échéance, le citoyen Champflour aîné me dit que
son frère Desmoulins étoit inquiet à raison du payement de cette
lettre de change, et me proposa, pour le tranquilliser, de me
faire lui-même un effet de pareille som m e, payable à ma volonté ;
ayant accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frère,
je lui remis ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
som m e, qu’il me paya ensuite.
D éclare et confesse, en outre, que long-tem ps après avoir été
payé du montant du billet représentant ladite lettre de change,
le citoyen Boyer me présenta la même lettre de change, en me
disant : V oilà un effet dont vous avez été payé; il faut y mettre
votre acquit; lequel il me dicta : et comme il m ’avoit fait écrire
que c ’étoit des deniers de lui B oyer, je refusai de le signer; dé
clarant en outre que le citoyen Boyer ne m ’a jamais rien p a y é ,
ni pour les citoyens Cham pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolument pourquoi cette lettre de change s’est trouvée entre les
mains de B o y e r, de laquelle je n’avois plus entendu p arler, que
depuis l’année dernière que le citoyen Champilour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et me dirent que le citoyen Boyer prétendoit s’en faire payer par le citoyen Champilour aîné.
Ce 29 n ivôse, an 9 de la république.
Déclaration de ce que dessus.
L AIIO U SSE.
Enregistré à R io m , le d ix - s e p t germinal an n e u f, fo lio
recto e t verso. R eçu un fr a n c , p lus d ix centim es.
r O U G I I O N.
48
�(59 )
Saint - Amand, le 7 frimaire an 8.
J 'a i reçu ta lettre, mon cher Cham pflour, par laquelle tu me
demandes un éclaircissement sur une créance de 600 francs que
le citoyen Boyer réclame de la succession de ton frè re , qu’ il d it
m’ avoir payée au nom de ton frère je ne puis te dire que ce que
j’ai répondu au citoyen B oyer, qui est venu me voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à me rap
p eler, et depuis j’ai encore tâché de me ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur cette affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’ il m ’a toujours parfaitement payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclamer : mais je ne me rappelle pas que
jamais il ne m’ ait rien été payé , au nom de D esm oulins, par
le citoyen B oyer; je le lui ai déclaré comme je te le mande ici,
parce que j e n ’en ai pas la moindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire tort, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B oyer, à qui j’ai fait la même déclaration que
je te fais là. M ille respects à madame de Cham pflour; et reçois,
mon cher a m i, l'assurance de mon bien sincère attachement.
LENORMAND.
À R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribun al d ’appel. — An 10,
J ï'ô
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour-D'Alagnat, Jean-Baptiste-César. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Champflour
Touttée
Pagès
Dartis-Marcillac
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
Couthon
notables
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-De-Dôme, défendeur ; Contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Annotations manuscrites : « 11 frimaire an 11 de la section civile de la cour de cassation qui rejette la fin de non recevoir. Sirey tome 3, page 101 »
pièces justificatives « déclaration des créanciers sur émigrés ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0928
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53089/BCU_Factums_G0928.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Couthon
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53088/BCU_Factums_G0927.pdf
ab1ccfd7925d3be5178e59090a162e4f
PDF Text
Text
T R IB U N A L D E C A SSA T IO N .
P O U R V O I R A U CIVIL.
m
é
m
o
i
r
.
e
P o u r P i e r r e BOYER, juge au Tribunal civil
de l 'arrondissement de Clermont-Ferrand , chef-lieu du
département du - P u y-de-Dôme , demandeur ;
Jean-Baptiste-César CHAMPFLOURD’ALAGNAT , propriétaire , habitant de Clermont 3
Contre
défendeur.
A
l'âge de 67 ans il me
que je dois employer à faire
reste encore un moment
disparaître les calomnies
d’existence
que m on
adversaire ne cesse de répandre contre moi. Je veux que l ’honneur
me survive , et que l’opprobre couvre à jamais le cruel ennemi qui
m e déchire
les lois viennent à mon secours, et me fournissent
l'occasion de dévoiler toute la noirceur de son procédé.
I l est inutile de débuter par le tableau toujours révoltant de
la plus insigne ingratitude, de la perfide calom n ie, de la surprise
et de la mauvaise foi
les faits présentés , soutenus de preuves
écrites , en feront bien mieux ressortir les différentes nuances, que
tout ce que je pourrai dire dans un prélude.
C 'est sur la fin de 17 8 3 ,
ou au commencement de 17 8 4 que
mon adversaire me fut présenté par son frère Champflour-Desmoulin ,
dont la mémoire me sera toujours chère , et avec lequel il avait
été pendant plusieurs années en délicatesse. L e premier me peignit
la situation de ses affaires j son discrédit qui était tel qu!il n'aurait
A
�par trouvé un L ouis à emprunter y ni à vendre la moindre partie
de son b ie n , par la crainte des prêteurs de p erd re, et par celle des
acquéreurs d’écre de suite évincés. Sa détresse
était
au point qu’il
était obligé de rester chez lui pendant le jo u r , et de ne sortir que
la nuit pour ses affaires , à raison d’un jugement consulaire qui avait
été rendu contre lui en
faveur
d’un particulier de R iom , qui le
condamnait par corps à. lui payer une modique somme de n o a f r .
pour le m ontant d’une lettre de change. Des huissiers avaient été
mis depuis plusieurs jours en surveillance, et il était sans argent
pour la faire cesser.
J e l’invitai à me déclarer franchement ses dettes , son avoir et
ses ressources. L ’énumération des dettes , à ce m o m en t, était
effrayante ; mais il me parut que son avoir était plus que suffisant
pour y faire face , et qu’il était possible de lui conserver au moins
une partie de son bien : au récit de ses malheurs , il joignit ainsi
que son frère des suplications et les invitations les plus pressantes,
pour m’engager à venir à son secours , soit par
mon argen t, soit
par mon c ré d it, et par mes talens dans les différentes affaifçs dont
il était alors assiégé.
D es larmes arrachées par l’infortune et l’état de sa position furent
la suite de cette première entrevue. J e suis né bon et compatissant;
je fus touché ; je mêlai mes larmes à celles des deux frères , et dès
ce moment , bien fatal pour la tranquillité dont je n’avais cessé de
jouir jusque l à , je lui livrai généreusement
tout ce
que j ’avais
d’argent ; je lui promis ma signature j il usa de l’un et de l’autre
sur-le-cham p, et dans l’heure il jouit de 5a liberté et d’un repos
qu’il avait perdu depuis long-tems.
M on procédé fut regardé par les deux frères comme un effet de
la providence. Ces fières qui ne s’étaient vus depuis long-sems ,
redevinrent frères ; mon adyersaire
ne
savait
comment remercier
celui qui lui avait procuré ma connaissance, et dans
sa première
expension ¡’étais l’homme unique.
Peu dç tems après je fus encore bien plus grand à
ses yeux :
�?
un particulier fui demandait plus de soixante mille fran cs, cette
demande indépendante de la première énumération des dettes , fut
allarmante pour m oi qui m’étais déjà livré } il m’apporta une multi
tude de registres, des com ptes, un tas de petits papiers particuliers,
et une infinité de chiffons qu’il avait retiré de ce particulier , à toutes
les époques •, je m’en occupe pendant plus de huit mois j je fais un
travail pénible mais tranchant, et tel que sur le vil et l’examen de
mon opération, et au moment où mon ouvrage était sous presse ,
l'individu fut forcé par vo ie amiable de renoncer aux soixante mille
fran cs, et de lui
compter lui-même
rrente-un
m ille
n eu f cents
francs.
J'avo u e j et je ne l’ai jamais dissim ulé, qu’à cette époque v o u s'
m 'àvez fait un cadeau d ’environ mille écus en bijoux et argenterie j
vous crûtes le devoir à mon désintéressement j j re ne vous prenais
aucun intérêt pour l’argent que je vous avais piété ; je n'avais rien
exigé pour les honoraires de mon travail qui avait duré plus de
huit mois j c’est tour ce que j ’ai reçu de vous ; mais mon ardeur
pour vous sortir du bourbier de vos affaires ne se borna point li.
I l existait un commencement de
procès
de comptabilité
entre
route la famille Champflour et les citoyens V iry , pète et f i ls , au
sujet de la charge de Receveur des tailles à
Clerm ont : j ’ai em
ployé encore pour cette affaire plus de six, mois. J ’ai fait de plus
un travail dans le mâïne genre du prem ier, quoique pour une
recette différente , à raison de laquelle on vous demandait quatorze
m ille francs que vous ne payerez jamais. Je me suis occupé d’une
multitude d’amres ; en un m o t, le fardeau de vos affaires a été écrasant
pour moi pendant nombre d’années ; je ne pouvais
pas
me flatec
d’avoir une heure de libre chaque jour , à moins que vous ne fussiez
en voyage.
L ’opération principale concernant les citoyens V iry
ment heureuse, mais elle ne procura pas de suite
parut égale
le montant de
son résultat; il y avait des lettres de change que j’avais endossées.
I l fut arrêté entre vous et moi de faire la yente de votre maisoni
A i
�<vy.
4
de C lerm o n t, comme l’objet le moins one'reux pour va» intérêts ;
elle est affichée ; des acquéreurs se présen ten t, niais pleins de la
même frayeur des prêteurs d ’arg e n t, sans aucune confiance pour
votre garantie , tous veulent une caution pour la sûreté de leurs
deniers.
II était naturel que cette caution fut prise dans la
famille , ec
il n’y avait que le citoyen B u ra u d , votre beau-père , qui avait con
servé son bien et celui de sa fe m m e , in tact,
qui pût s’y prêter j
niais il existait depuis plusieurs années une séparation de fait entre
vous et votre fem m e; vous ne voyez ni elle ni sa fam ille ; je me
chargeai de vaincre cet obstacle. Votre beau-père m’avait des obli
gations notables qui sont encore connues ; il adhéra à ma demande ,
et pouvait-il s’y refuser sachant tout ce que j ’avais fait pour v o u s ,
qui rejaillissait nécessairement sur ses petits enfans qu’il eût toujours
chez lui ! la ven te, par ce moyen , eût lieu le 1 6 janvier 1 7 8 6 ;
vous en touchâtes 15 ,6 0 0 francs qui étaient sa vraie v aleu r,
sans
néanmoins que j ’eusse pu opérer votre réunion.
L a maison ven d u e, vous répandîtes généralement dans la V ille
que je vous avais tiré d’affaire , que vous ne deviez plus
rien , et
qu’il vous restait votre bien de Beaumont , objet conséquent , que
vous avez augmenté encore par des acquisitions de biens nationaux.
Vous a v a l’abord séduisant; au premier aperçu il semble que vous
êtes incapable de trahir la vérité ; vous fûtes cru sur ce bruit que
vous aviez pris soin ■ d’accréilitcr. Des partis se présentent pour
l'établissement de vos
filles ; l’aînée et
la
cadette furent mariées
très-avantageusement.
M ais il s ’en fallait bien que la nouvelle du jour que vous aviez
répandue, celle d’avoir payé vos dettes , eut de la réalité ; il en
existait encore de très-pressantes , fondées sur des lettres de change
que j ’avais endossées.
Une découverte heureuse se présente ; un Officier de santé de la
commune de Clerm ont avait 17 ,3 0 0 francs à placer, vous allez à
Jui pour les obtenir, il vous répondit qu’il voulait une caution j
V
�j
vous m’ofFrez, H m’accepte : m a is, comme nous étions à l’époque
du 9 août 17 9 ° » 1 Officier de santé qui donnait cette somme en
num éraire,
voulait en
être remboursé de
m êm e,
et il
exigea
pour cela un billet d’honneur ; vous lui offrîtes le vôtre , il n'en
veut pas.; j'offre le mien , il l’accepte sans hésiter ; vous m’en donntz
un pour ma garanrie, où'votfe honneur ne fut pas inséré (i) ; vou s,
prites l’argent toujours pour éteindre des lettres de change.
D es emprunts et des paiemens se répètent encore ; le courant de
vos affaires était à-peu-près de cent mille francs par a n n ée; j’étais
le banquier et l’endosseur toujours généreusem ent, et sans aucune
sorte de bénéfice.
A l’époque de 1 7 9 1 , voici
quelle était ma situation avec vous.-
outre la lettre de change de 1 7 ,5 0 0 fr. de l’Officier de santé, assurée
par mon billet d’honneur , il existait de ma p a rt, solidairement avec
v o u s , nombre d’effets souscrits par nous d eu x, indépendament des
lettres de change que j ’avais endossées ; le tout était pour votre
compte ; j ’avais , et j ’ai encore vos indemnités pour ceux qui sont
contractés par sim p le billets ; en voici le détail :
i .° J e m 'étais obligé pour 20^400 francs
en
R ochefort de R iom , capitaine d’infanterie ; ce
faveur du
billec
citoyen
portait que
c’était de l’argent qu’on vous avait prêté ;
2 .0 Pour 11 ,6 0 0 francs au citoyen
Brunei , juge
au ci-devant
présidial de Clerm ont ;
3.0 Pour 6000 francs en faveur du citoyen G uyot 3 homme de
loi à Vic-sur-Allier ;
4 .0 Pour 4240
mont ;
francs à défunt Charbonnier , bourgeois à C ler-
( 1 ) Je reconnais que monsieur B oyer n’a consenti un
billet d’ honneur de
1 7 ,3 0 0 francs en faveur de monsieur B o n n e t, pour lui payer en argent pareille
somme , montant d’une lettre de c l:an g e , titie au profit dudit sieur Bonet par
moi , et endossée par ledit monsieur Boyer j je
leconnais , cîis-ji , qu'il n’a
fait le tout que pour me faire plaisir ; je promets
en
conséquence l'indem
niser dudit billet fait ce 5 août 1 7 * 0 . Signé CIiampflour-d’Alagnar.
�6
5 .® Pour 4 , 4 0 j francs 1 1 sous 6 den. à la dame veuve LamotKe.
de Clermonc ;
6 ° Pour 16 0 0 0 francs
au
citoyen A s tie r , cadet,
somme quo
vous avez touchée en numéraire j7 .0
E n fin vous me deviez personnellement pour argent prêté',',
suivant deux billets des i . er octobre et m novembre 17 9 0 , 7 7 5 0 6 :.,
outre un autre billet de 800 francs que j ’avais
consenti
en faveur
d’une nommée Martine D elarb re, et dont le montant avait été.,
touché, par votre femme et sa mère..
Champflour ! obliger pour vous mon honneur ! exposer ma personne
ft tous les instans à.la contrainte par corps / plus que \x valeur de mes pro
priétés! (i)vou s prêter mon argent sans intérêt ! ne rien prendre pour les
honoraires de mon travail qui vous a été si utile dans les différentes
affaires que j ’ai traitées pour vos intérêts ! qu’aurai-je pu faire dé
plus pour un p ère, pour un enfant, pour un vrai ami de tous les
rems ! et pour qui l’ai-je fait *
Il vous plaît de faire un voyage de long cou rs, à la même époque
de 1 7 9 1 . O h ! j ’avoue que ce départ qui ne m’affecta pas dans les
premiers mois de votre absence, me- tourmenta
cruellement après
une année révolue. L a disposition rigoureuse des lois sur- l’émigration présumée , votre
inscription comme
émigré
sur
la liste de.
l’administrâtion du district de C lerm on t, la crainte fondée d’être en
bute à tous vos créanciers porteurs de mes engagemens qui auraient
absorbé tour ce que je possédais, la triste perspective d’être obligé
de vendre généralement tout mon bien , et de manquer aux enga
gemens que j-’avais contractés en établissant mes enfans ; ce tableau,
était déchirant pour moi.
C ’est dans ces circonstances pressantes que , ne recevant aucune
nouvelle de votre p a rt, et votre famille n’en recevant pas non plus ,
je me conformai à la loi : .je fis enregistrer au
(0
Pendant quarante
ans d’un travail
opiniâtre ,
je
district
n'ai
J }OOQ fn a c s d’ac<jai';iùon , itidépenJuaent. de jnon fMiimoMKi.
vos enga?
fait «juc pour
�genacns et les miens. M a démarche a été précédée de celle de huit
autres de vos créanciers , et suivie d’un nombre qui s’élève à quatrevingt-onze parmi lesquels on y trouve votre femme et vos gendres
qui ont agi d ’après le conseil du citoyen
Grenier } jurisconsulte
■célèbre j actuellement Tribun.
Vous revenez enfin en 1 7 9 3 , j ’étais alors membre de la munici
palité de Clermonr. Votre retour au lieu de dissuader le public du
■fait de votre émigration
qui au vrai n’existait pas , opéra un effet
-contraire. A u moment de votre arrivée vous vîntes m ’accabler d’ami
tié , vous me fîtes voir vos papiers a je les trouvai bons. Vous
êtes appelé à la municipalité , vous n’osiez pas y paraître , je vous
rassurai. N ous y arrivons ensemble. Je m’abstiens de mes fonctions
municipales pour devenir votre défenseur, vos certificats sont pré
sentés , on élève des soupçons, vous m’aviez si fort convaincu de la
sincérité de vospièces que je les écartais avec fermeté,et vous-même pour
Faire disparaître tout d oute, offrîtes et demandâtes à la commune de
nommer deux commissaires pris dans le conseil général qui iraient
avec vous à Boulogne , où vous aviez resté , pour vérifier le faux
ou le vrai de vos papiers} ceci fut arrêté sur la fin de l’hiver 17 9 j .
J ’allai avec votre femme prier les commissaires d’avoir pour vous
les égards que se doivent de vrais citoyens j ils le promirent et au
total le voyage n'eut pas lieu.
D es lois sont émises pour l’incarcération des personnes dites sus
pectes en maison de réclusion. Vous vous cachiez tantôt à Pérignat»
outre-ailier , chez votre gendre , tantôt à B eaum on t, chez un cul
tivateur. Vous voulez absolument me voir A Pérignat pour vous
con soler, je ne pouvais pas y aller pendant le jo u r , crainte que
ma démarche vous
fit découvrir j je
pars accompagné du citoyen
C h a lie r, oncle de votre gendre , au milieu de la nuit. J e passe deux
jours avec vous ; je reparts ensuite la nuit toujours avec
la même
compagnie.
V ous me faites encore sa v o ir, et au citoyen Boirot , juriscon
sulte connu, votre retraite cachée à Beaumont j vous demandez abso-
�s
lument à nous voir et à, eonferer ensemble ; nous partîmes le même
s o ir , toujours la nuit} et après avoir passé trois heures avec v o u s,
nous ne nous retirâmes pas sans éprouver les plus grands dangers
avant de retrouver nos paisibles habitations.
H élas! pourquoi mon
dévouement pour vous ,
a-t-il
été sani
borne ? fallait-il après avoir engagé pour vous mon honneur, et
hazardé ma fortune, exposer encore ma vie? quel était donc le ban
deau fatal qui me couvrait les yeux.
Ici se présente un autre ordre de fait.
J ’ai agi envers votre frère D esm oulin comme
avec vous , et s’il
v iv a it , ce que je désirerais , je serais sans repentir à son égard} il
serait incapable de m’en donner.
E n 17 8 9 , votre frère eût le malheur de faire une partie de jeu
chez la dame F .......... ; partie
funeste ; il y perdit beaucoup : lé
fait est notoire. Il n'avait pas , dans le jeu , l’argent nécessaire pour
faire face à sa perte; il trouva du crédit. Ces sortes de dettes sonc
d’honneur, et votre fière n’en manqua jamais j on comptait sur lé
sien.
Il vint chez moi déposer sôn repentir et sa douleur. Il m ’annonce
q u ’il est sans ressource de votre cô té, quoique son débiteur. Il me
dir en même temps avoir trouvé 110 0 0 francs , mais à cette con
dition que l’individu qui les offrait , exigeait de sa part la cession
de 16 0 00 francs en principal qui lui étaient dûs par les citoyens
V iry , produisant par année 15 0 0 francs de revenu , revenu autorisé
par les lois d’a lo rs, s’agissant
de la vente d’une partie d’un office
de receveur des tailles.
Je fus révolté contre l’usurier bien connu de v o u s , et sans autre
examen j ’assurai à votre frère q u ’ il trouverait de l'argent sur ma
signature , et qu’elle était à sa disposition. Toujours plein d’honneur,,
il ne voulut en user qu’en me donnant des sûretés. Il me propose
daccepter une obligation de 110 0 0 francs à prendre sur celle de i t f
qui lui ¿tait due par les V iry , et en même temps une procuration
pour toucher les i j o o francs d’intérêts par année jusqu’au rembour
sement
�A °)S
■
r
9
seraient du principal dont le terme était Rx( par un traité, duquel intérêt
je devais lui faire raison sous la déduction de celui que je serais dans
le cas de payer moi-même pour lui aux prêteurs : car pour tout ce
que j ’ai fourni de mon c h e f, il ne fut jamais question entre nous
d’intérêt.
J ’acceptai cette obligation j 1 * délégation et la procuration, sa date
est du 28 mai 17 8 9 .
L e même jo u r , la dame Blaud , votre sœ ur, ayant des relations
avec la citoyenne Bughon , veuve Sauzade , celle-ci lui assura qu’elle lui
fera prêter mille écus par son frère Bughon , marchand , à six pour
cent. Votre frère vous en prévint ; vous vîntes chez moi tous les
deux , et comme l’obligation était déjà faite , et que pour en remplir
le montant il était naturel que je dusse m’obliger ; je souscrivis en
mon nom une lettre de change de 3 18 0 francs, en faveur de vous
Champflour aîné , q u i, à l’instant même en passâtes l’ordre à Bughon
qui en avait compté le montant. Cette lettre de change et l ’ordre sont
du même jour de l’obligation de votre frère ; tous ces faits voiis
sont connus , ainsi qu’à la dame Blaud votre soeur.
Cham pflour-D esm oulin, au moyen de cette so m m e, éteignit ses
dettes du jeu les plits pressées.
J ’avais déjà découvert 5000 francs du citoyen L escu rier, de Salers
pour lequel j ’étais chargé d’une affaire à
la cour des Aides ; j’en
instruisis les deux frères , le prêt fut fait le 3 juillet 17 8 9 un mois
et cinq jours après l’obligation de iz o o o francs. Desmoulin prit
l’argent en votre présence et en celle du notaire , du prêteur et de
moi-même. Lescurier exige six pour cent d’intérêt et donne quatre
années de terme. L ’obligation fut en conséquence portée à 6 10 0 francs ;
l’intérêt qui étoit de 300 francs fut stipulé payable chacune des quatre
an nées; il l’a été par m o i, ainsi que le principal précisément au
terme d’ab ord , à L escu rier, et après son décès à son frère comme
héritier.
C'est le citoyen B ap tiste, notaire à C le rm o n t, qui jouissait d’une
réputation méritée , qui reçut l’obligation que je consentis à Lescuritr.
B
�0
C ’e'tait lui-même qui avait i£çu celle que m'avait consînri Desmoulirt
un mois auparavant. C ’était lui qui était votre notaire affidé, il avait
reçu la vente de votre maison le 1 6 janvier 1 7 8 6 , il savait tout ce
que j ’avais fait pour les deux frètes C ham pflour, et que tout n’était
de ma part qu’office d’ami. M oins généreux
que moi envers les
Champflour , il se fit payer du coût de l’obligation ÿ ce qu’il n’aurait
pas exigé de moi dans aucun cas , et sur-tout existant alors un concor
dat entre les notaires et les ci-devant procureurs 3 à C lerm o n t, d’a
près lequel au:un ne devoir prendre d’argent pour les' affa'res qu’ils
pouvaient avoir les uns en
contractant, les autres en plaidant \
il me fournit sa quittance , (i) elle est de 7 1 fr ., et datée [du 10 ju il
let 17 8 9 , sept jours après l’époque de l’obligation. E lle est écrite de
sa main , et Baptiste est mort depuis plus de huit ans.
Ces trois premiers objets se montent à 9 4 5 1 francs> j ’ai payé de
plus d’après une note écrite, de la main de votre frère,
sa v o ir, i
1 3 !atin , m archand, le 8 juillet 1 7 8 9 , cinq jours après l’obligation ,
Î.6-; francs z s. 6 den. Dans le même temps à Case , perruquier ,
3 15
francs pour le montant d’ une lettre de change j à Lahousse ,
billardier-pautnier , ¿400 francs, montant d’ une autre lettre de change
qui était échue au premier janvier 1 7 8 9 ; il me remit la lettre de
change après avoir mis son acquit de mes mains et deniers ; il oublia
de le sign er, et moi-mème je n’y fis pas attention , la remise de la
lettre de change me suffisait. J e payai encore à F a b re , m archand,
m 8 fran cs, montant d’ une lettre de change souscrite par D esm oulin,
le 14 janvier 17 9 0 . Tous ces objets se portent à la somme de
francs i s. 6 den.
C ’est ainsi que j ’ai rempli l’obligation de iz o o o francj que m’avait
( 1 ) Je sous'iijné , notaire en cette ville , reconnais avoir reçu de M . Boyer ,
procureur en h cour des aides de cette V ille , la
somme de soixante-douze
livre» pour contrôle et réception d’ une obligation de
la somme de
six mille
¿eux cents livrer , consentie par ledit Boyer au profit du sieur Charles Lescufie r , le )
du p résen t, dont quitte. A Clerm ont-Ferrand , le 10 juillet 1 7 8 ? .
Quittance de 7 1
francs.
Baptiste,
�*
consentie votre frère, et vous voyez que j ’étais en avance de i < îji
francs z s. 6 den. 3 er ce n’est pas étonnant, outre le pouvoir que
j ’avais de toucher les 1 1 0 0 0 francs en principal , j ’avais celui de
to u ch er,
sauf
à
en faire
com pte,
les
ijoo
francs d'intérêt que
produisait chaque année le principal des 16 0 0 francs.
i Vous avez été présent à to u s, notamment aux emprunts d eB u gh o n
et Lescurier ; il vous a même p lu , sans que je l’eusse
m’en fournir de votre main la preuve écrite, (i)
ex ig é ,
de
C e billet n’a ni date ni signature , mais sa composition annonce
suffisamment son époque. J ’y suis qualifié de m on sieur, Bughon et
Lescurier le sont aussi, et ce mode était d'usage à la date des em prunts,
il n 'a cessé qu a l’explosion de la révolution. Vous m’avez écrit une
lettre en l’an 4 qui sera insérée en son lieu dans ce mémoire pour
prouver votre p erfid ie, où vous m ’avez donné la qualité de citoyen t
et sur-tout celle d ’ami.
. D e ces faits résulte cette réflexion qui porte la vérité à l'évidence,
vous qui me deviez ; moi q u i, notoirement n’empruntai jamais que
pour vous et votre frère, peut-il tomber sous les sens qu'ayant le
droit d’exiger de vous q u i, depuis que j ’ai eu la fatalité de vous
connaître , n’avez cessé de me
des effets de Buglion
devoir bien au-de-là du montant
et L escu rier; j ’ai emprunté pour moi sans
besoin personnel, sans prétexte pour aucune affaire ni pour moi ni
pour mes a m is, à un intérêt de six pour cent ; non , la raison
rejette à jamais une' pareille idée.
J ’ai f a i t , pour m’assurer le remboursement de cette obligation
toutes les poursuites auxquelles les lois m ’ont forcé. Diligence inu
tile contre les Viry qui alors avaient perdu, la charge
de receveur
des tailles ; tentatives infructueuses d’exécution mobiliaire ;
tion au bureau des hypothèques. J e
(0
inscrip
11’ai rien touché des V iry , ni
Monsieur Boyer a emprunté pour mon fr è r e ,
x .* A monsieur B u g h o n ..................................................... jo o o fr.
» •° A monsieur l’Abbé A u b i e r ....................................... 1* 0 0
A monsieur Lescurier........................................... jooo
B 1
�♦
'
Yl
principal ni intérêts ; v o u s v o t r e
frère et le citoyen Blaud n ’avea
rien touché non plus. L es poursuites contre les V iry nous ont été
communes. M ais j ’étais nanti du traité passé entre les V iry et vous
tous , et c’est ici le premier aperçu de votre conduite astucieuse i
mon égard. V o u s seul essayâtes inutilement que je vous en fisse la
remise , et je ne le tenais que du citoyen Blaud qui avait avancé
les frais d’enregistrement ; je m ’y refusai : cet acte m’était devenu
commun. Je vous en offris le dépôt. Il a eu lieu le premier jour
complémentaire de l’an 4 dans l’étude du citoyen Chevalier t notaire
i Clerm ont. (1)
( 1 ) Par-devant les notaires à Clerm ont-ferrand , soussign és, sont comparus
les citoyens Je m -B ip tiste -C e z a r Cham pflour , et Pierre B o y e r , juge au tribunal
civil du département du Pai-de-D 6m e ,
Lesquels ont remis et déposé en nos mains ,
pour être placé
au
rang de
nos minutes ,
1 .® U n traité sans signatures p rivées, passé entre
Jean
et André Artaud-
D evivy , Jean -C ezar C h am pflour, Josephe Champflour , M trie-C lau d ine Champ
flour , et Jean Giraud-Blaud , par lequel lesdjts V ir y , pire et fils ,
obligés à payer quatre mille cinq cents francs tous les ans , pour
se
la propriété des deux tiers du prir d« la charge de receveur des tailles
ci-devant élection de Clerm ont , avec convention que la
sont
raison de
de la
rente de quatre mille
cinq cents francs ne pourra être rachetée que dans dix ans , moyennant le
capital de quarar. te-hui: mille francs. Ledit acte fait quintuple , le 14 décembre
1 7 8 1 , et a éti enregistré à Clerm ont le 1 7 janvier , 1 7 8 4 par G iron qui a reçu
cent cinquante-une livre dix sous. Ledit acte étant sur une feuille grand papier
com m un; commençant par cet mots ;
nous soussigné
A n d ré
A rtaud-D eviry ,
et finissant par la date déjà énoncée en les signatures suivantes j D eviry . p i r e ,
C h aaipflou t-J’A la g n a t, C h am p flo u r, capitaine, D eviry , fils , B lau d , avec cette
note ; cet acte a été passé dans le cabinet de monsieur C hazerat , intendant
d'Auvergne , ensuite de laquelle est sa sign atu re, scellé le 30 ja n v ie r;
1°
L ’expédition d’ un jugement contradictoire, rendu entre les mêmes parties
en la sénéchaussée de C le rm o n t, le 19 janvier 1 7 8 4 , portant
condamnation
du paiement de ladite rente ;
3.0 Autre expédition de jugem ent rendu
entre
Iesdites
parties
devant électian de Clerm ont , le 3 avril de ladite année 17 8 4 ,
ladite rente , scellé* le 7 avril même mois 3
ju
en la tisujet de
�4#
: ; ............. .
, . . . . ■
.
: .r
“ C et acte authentique ajouté à votre écrit annonce bien certainement
la parfaite connaissance que vous aviez du composé de l’obligation
de iz o o o francs que m 'avait consenti votre frère, puisque vous en
reconnaissiez vous-même la sincérité.
Il existe encore d'autres preuves écrites , dont l’une est authentique
par la production que vous en avez faite vous-même à l’audience du
tribunal d’appel.
■ Vous aviez tenu note de tous les objets qui avaient rempli l’obli
gation de iio o o francs , vous les aviez fait transcrire par votre aflidé
Louirette , ainsi que vos moyens de résistance suggérés par votre dis
position ordinaire de non payer, et vous n'avez contredit dans cet
écrit, en aucune manière , les articles de Bughon et Lescurier.
L a finale de cet état , dont il est fait mention dans le jugenienc
du tribunal d'appel j porte à la troisième page recto une invitation que
vous m’adressez pour nommer des arbitres. C et écrit sans date est nécessairement antérieur au traité qui a
eu lieu dans la suite entre n o u s, et dès qu’il contient les emprunts
faits à Bughon et Lescurier que vous n’avez pas contesté, il prouve
de nouveau que vous aviez la
connaissance parfaite de ces deux
articles, et forment l'aveu le plus formel que vous me les deviez
d’après notre traité.
Coste , également votre aflidé , a fait par votre impulsion quelque
chose de p l u s , et qui se rapporte toujours à votre procédé d'alors.
4 • n Enfin
,
un commandement de p a y e r , avec signification desdits
deux jv g e -
tnens , ainsi que d'une cession fa ite au citoyen B o y e r ,
ain si que
ledit exploit en date du 6 mars
dudit 'm ois. Desquelles
1 79 f , enregistré le 7
du
traité ,
pièces qui ont été paraphées par nous notaire , le dépôt en a cté requis par les
comparans , comme commun entre eux , à l'effet d'en retirer des expeditions pour
la poursuite de leurs; droits.
D e quoi nous avons
dressé le présent acte en
l’ étude , le 1 . “ jour complémentaire de l’an 4 de la République , une et indi
visible. Les parties ont signé* la minute demeurée
à C h e v a lie r , n o ta ir e , a
¿té enregistrée audit C le rm o n t, le 3 complémentaire de
B iy le qui a reçu une livre en numéraire.
la
même
arrufe par
�%
< V v
*4
J V i un. état écrit de sa mnirç (i) qui contient n o n
seulement le
détail des objets qui remplissaient ec au-delà l’obligation de iz o o o fr»
mais encore la réduction en numéraire d’après l’échelle du rembourlem ent que j ’avais faite en assignats des effets de Bughon et Lesçuriert
car se ?ont les seuls qui ont
été remboursés en papiers, n’ est-ce
pas encore un, nouveau surcroîc de preuve ?
E n résumant cet article. Ecrits formels avoués de votre part. Acte
notarié où vous avez concouru , écrit de vos deux serviteurs Louirette
Sommes payées p a r
le
citoyen B o yer
en
l ’acquit du
citoyen Desmoulin.
_
Lettre de ch an ge, 18 mai 17 8 9 au citoyen Bughon ,
Remboursement 3^180 fra n c s, acquittée le 1 7 décembre 1 7 9 1 ,
en assignats. c i .......................... ............................................. 3 ,18 0 f r .
Plus pour intérêts et frais . . . .
ijj
de
E n tout.................................3 ,3 15
Réduction à l'échelle
de dépréciation.......................... 1 3 5 3 1 . u s
3 juillet 1 7 8 9 , obligation du cit. Boyer en faveur
du citoyen Lescurier , de 6 , 1 0 0 fran cs, p ayab le,
savoir 300 fr. au 18 mai 17 9 0 , pareille somme de
300 fr. au 3 juillet 1 7 9 1 , encore 300 fr . le 3 juillet
1 7 5 1 , et les 5,30 0 fr. restans au 1 juillet 17 9 3 .
Quittances des sommes ci-dessus.
4 Juillet 179 0 . . .
13
13
J ui l l et 1 7 9 1
Jui l l et I 7 ÿ i
. . .
. . .
300 fr. réduits à
300
3 00
300 f .'
réduits à
réduits à
170
107
3 Juillet 17 9 3 . . . Î 3 ° °
réduits à
Coût de l'o b li g a t io n ................................
1908
71
\
m
fixoo f r . réduits à 4 757 fr !
; 110
31 M ai 17 S 8 , à Lahouîse 1,4 0 0 fr. échéans au
Remboursement i / 'j a n v i e r 1 7 8 9 , « ............................................................ 14 0 0
en numéraiie.
8 Juillet 1789 , au cit. Blatin 16 7 liv. 1 s. , ci. . 16 7
10 Juillet 178 8 , au cit. C ase 3 1 J liv. payables
au 10 juillet 17 8 9 , ci.................................... ............... ... • 3 1 J
1 4 J a n v i î r 1 7 9 0 , au cit. F a b r e j n 8 liv. payables
le 1 4 avril > 7 ?o , ci,
• .............................. ....
9} » 0
1
ii
»
1
m
*4
�»s
et C oîte. II est donc démontré matériellement que les emprunts que
j'ai fait de Bughon et Ltscurier étaient pour votre frère. Cependant
je les ai payés , j ’en rapporte les quittances et les effets j c’est donc
encore une fois la dette de votre frère que j ’ai payée et non la m ienne.
E t vous vous êtes obligé de m’en faire raison ; vous savez encore
qu’avec des assignats qui valaient cent ¿eus vous m 'avez remboursé
85 5 0 francs prêtés en num éraire,
et vous savez aussi la promesse
verbale que vous m’aviez faite lors de ce remboursement de m’in
demniser. Vo.us étiez instruit comme moi que j’avais payé Bughon
et Lescurier en même espèce, après des poursuites du premier au tri
bunal de com m erce, c’est d’après cela que vous avez formé vousmême le traité qui contient nos obligations. L es deux doubles sont
écrits de votre m ain, mon prénom est laissé en blanc dans celui qui
m ’est destiné ; cet acte se présente sous l’aspect du sentiment et de
délicatesse. M ais on verra bientôc la vôtre disparaître. (1)
( 1 ) Nous soussignés Jean Baptiste et C ezar Chatnpflour , propriétaire , habi
tant de la ville de C lerm otu -ferran d , d'unt p a r t ;
Et
B o y e r , juge au tribunal civil du département du Pui-de-
D ôm e , d'autre part -,
Désirons terminer amiablement entre nous le compte que nous croyon <nou*
devoir respectivem ent, mettre à l'abri notre délicatesse de
l’ égard l’un de l’autre , et maintenir de cette manière les
toute suspicion à
sentimens
d’estime
et d’amitié réciproque qui ont régné depuis lang-tem s entre nous , avons fait
cjioix des citoyens Louirette et Cosre , nos amis com m uns, à l'effet de pro
céder audit compte , lequel est relatif aux objets dont le détail suit :
i . ° Suivant une procuration passée devant Baptiste , notaire , le 1 juillet 17 8 5 ,
Je citoyen Champflour-Desm oulin s'esr reconnu débiteur envers moi Boyer ,
d’une somme en principal de douze mille francs , et m’a autorisé à me retenir
cette somme sur la créance à lui due par les citoyens V iry .
Quoiqu’il paraisse par cet acte que moi B oyer étais alors créancier de cette
Jomme , la vérité est cependant que je devais en faire l’ emploi à l'acquitterrçent
«les différentes dettes du citoyen
D esm oulin, et
que ce n’était que par
ce
m oyen que j’ en devenais véritablement créancier. Cette condition de ma parc
n’était point écrite, elle était simplement Une suite de la confiance qu'avait ca
Rio! le citoyen Desmoulin , itère du citoyen Champflour.
�\ r
'i<S
D e ce que j'ai dit jusqu'à ce m o m en t, il résulte, i . ° que je vous ai
rendu de ^om breux et d’importans services , 2.0 que je vous ai prêté
en numéraire 8550 francs, en 1 7 9 0 , que vous m’avez remboursé en
assignats , moyennant cent écus , à la fin de messidor an j ; 30.
que
j ’ai emprunté et remboursé pour votre frère 9452 francs à Bughon
et à. L escu rier, indépendamment des autres objets que le jugement
du tribunal d'appel vous a condamné à me rembourser j des écrits
assurent la véracité de tous ces faits.
Il est inutile de parler de la reconnaissance que vous me deviez , et
qui aurait dû suivre votre existence. Plein d’indignation je passe au
i . ° Les 1 . "
octobre et n
novembre 1 7 9 0 , il fut
prêté
par
B oyer à moi Champflour , une somme de 7 7 5 0 francs. V ers
m oi Boyer
le
citoyen
le même tems ,
«mpruntii une somme de 800 francs pour le compte des citoyenne*
Buraud et Chîm pflour. L ’une et l’autre
de
ces
sommes ne m'ont été rem
boursées qu'au moment oa les assignats éprouvaient une perte considérable.
Dans ces circonstances , pour nous indemniser réciproquement de
la perte
q u ’ont éprouvé les assignats aux époques des paiemens que ftioi Boyer ai dû
faire sur le prix de la
cession Je
nooo
francs ci-dessus
énoncée ,
et moi
Champflowr , des remboursemens aussi ci-dessus énoncés.
Nous consentons à être réglés par les citoyens Coste et Louirette , et nous
leur donnons pouvoir de procéder et arrêter les comptes dont il s’agit • et ce
d’après et sut le taux de l'échelle de dépréciation du papier monnaie , aux diffé
rentes époques des paiemens et remboursemens par nous faits ; en conséquence
nous fournirons tous renseignemens nécessaires,
et
remettrons aux
C o ste et Louirette ; s a v o ir , moi Boyer les quittances justificatives
citoyens
de l'emploi
des 11.0 0 0 fra n c s , ain<i que les notes , titres et docuinens relatifs audit compte .
et moi Chamj.flour les effets et les acquits des sommes dont j ’étais débiteur ;
et de tout quoi il sera dressé un é t a t ,
au bas duquel
sera le récépissé des
citoyens Coste et Louirette» lesquels compteront aussi les intérêts conformé
ment à la loi.
Promettons souscrire audit compte , et de l’exécuter suivant s* teneur , sans
appel de notre part. A cet effet , celui de nous qui se t r o u v e r a
réliquataire ,
ptdmet de satisfaire l’autre du montant dudit réliquat.
Fait double sous r.os signatures p rivé e s, à Clermont-ferrand , le 15
fructidor
an 7 de la République française, Signé Cliam pflour et Boyer.
développement
r
�développement de votre perfide calomnie et de votre mauvaise foi ;
à laquelle j ’ajouterai la marche astucieuse dont vous avez usé dans
votre défense pour tromper la religion des juges du tribunal d’appel ,
et me surprendre moi-même.
Cro;rait-on que ce traité qui semble n’avoir été dicté que par des
intentions pures , amicales , par le sentiment et la délicatesse entre
un bienfaiteur et celui qui jouit de ses bienfaits ? croirait-on , d is-je3
que l'ingrat à qui j’ai affaire , aidé de Louirette , à qui il ouvre et
ferme la bouche à volonté, ait osé répandre dans le public qu’il
m 'avait trompé dans ce traité., et de s’en faire un trophée ? le fait
est cependant vrai. J ’en fus instruit pat une personne dont la véracité
n’est point suspecte , en présence de Coste qui alors étoit à lui-m êm e,
et je d ois, à la v érité, qu’en ce moment il me sembla n’être pour rien
dans le concert entre vous et Louirette.
Cette annonce à laquelle je ne crus que par la confiance que j ’a
vais dans celui qui m’en fie p art, m ’étourdit à tel p o in t, que je la
lui fis répéter plut d’une fois.
J ’examine , je réfléchis sur le piège j j ’y apperçois bien de l’astuce,
mais en me référant à la chose } je crois pouvoir me rassurer.
E ffectivem en t, quel est le résultat de ce traité, on y voit autre
chose si ce n’est, i . ° que vous vous obligez à me rembourser principal
et intérêt des 8550 francs prêtés en num éraire, sous la déduction â
l’échelle des assignats que vous m’aviez donnés , à la fin de messidor
an j , qui ne valaient pas cent écus. Vous ne pouvez contrarier cette
date qu’en rapportant les effets et les acquits, ainsi que vous vous
y êtes expressément obligé par le traité dont vous êtes l’auteur. E t
moi Champflour m ’oblige de rapporter les effets ' et les acquits dont
j ’étuis débiteur.
i.°
Q u e , de ma part , je ne devais vous compter qu’à l’échelle les
remboursemens que j’avais faits en assignats à Bughon et Lescurier;
vous les connaissiez, il existe des preuves écrites du fait , tux seuls
ont été payés en papier, tous les
autres l’ont
été
en numéraire,
le substantiel du traité 11e contient rien de p lu s, vous et moi étions
C
�$oo
r
/»h -
'is
V
obligés très-form ellem ent, il n’érait besoin que de calculateur pout
compter
et régler le compte qui était aisé. Vous fites choix do
Louirette et Coste pour faire ce compte , j ’y consentis. Pouvais-je
être en «iéfiance contre de simples calculateurs ? Il ne pouvait même
pas me venir à l’idée de les prendre pour juges arbitres, nous avions
tout jugé nous-mêmes. N o s opérations étaient absolument indépen
dantes des calculateurs. _
1
D ’après ce traité, je croyais que le compte serait fait le même
jour , vous aviez d’autre vue. C e traité ne contenait point de terme
pour l’opération des calculateurs , c'est ici le commencement de votre
m anœ uvre, vous deviez et il n'est pas dans votre goût de
paytr.
Vous ne remettez aucunes pièces aux calculateurs. Votre affidé Louirette
que je pressai pour vous les demander, ne me montra que des dis
positions semblables aux vôtres ; c’est vous qui le faisiez mouvoir ;
vous crûtes l’un et l’autre que ce calcul était à votre v o lo n té, et par
conséquent à jamais interminable.
C e procédé augmenta mon indignation. J e vous en témoignai mon
m écontentem ent, je fus berné plusieurs jours par vous et L o u irette,
et ce ne fut qu’à ce moment que
je fus convaincu de votre but
insidieux. Je vous écris une lettre très-explicative sur tous les objets
que vous me deviez ( vous l’avez produite à R iom ) je vous fixai
le ternie de votre réponse. V ous ne m’en fites aucune , en consé
quence je vous fis citer en conciliation devant le juge de paix.
L à , plusieurs interpellations vous furent faites , vous résistâtes à
toute explication, vous vous référâtes à notre traité que vous qua
lifiâtes di compromis. L a conciliation n’ayant pas eu lieu 3 je vous
citai au tribunal civil du département du Pui-de-Dôm e , je conclus
contre vo u s, conformément à
nos obligations, je vous demandai
les 8550 francs , sauf la déduction du montant des assignats, et tous
les objets qui avaient servi à
remplir l’obligation de votre frère.'
S o u s nies offres de ne vous compter qu’à l’échelle
de dépréciation
les remboursemens que j ’avais faits à Bughon et Lescurier. Je révoquai
Louirette et C o ste , la loi
m’en donnait le d ro itj mais
loin
de
�■*?
révoquer vos obligations et les m ien n es, j ’en demandons au con~
traire l’exécution ; je vous citai en justice , et enfin l'affaire fut portée
par suite de la nouvelle organisation judiciaire au tribunal de C lerm o n t, lieu de votre dom icile, où je remplis la place de premier
juge.
.
; D ès la première citation vous aviez annoncé très-publiquement
que votre défense allait paraître dans un mémoire imprimé que vous
supposâtes être déjà fait. Ce projet me faisait plaisir , mais la réfle
xion vous fie craindre ma réponse
elle
aurait démonté la trame
calomnieuse sur laquelle vous aviez fondé toutes vos espérances. Pour
avoir toute liberté de me calom nier, vous avez préféré de ne point
écrire , système affreux qui vous a réussi pour le moment. Vous vous
laissez condamner par défaut à .C lerm ont,
lieu de votre d om icile,
où vous étiez connu. Vous interjetez appel à Riorn , même silence
de votre part, et ce n’est qu’à l’audience
sans que je ptisse ni dusse m’y
attendre , que vous étalez tout le fiel de la calomnie et toute la noir
ceur de l’ingratitude , après avoir eu soin de faire circuler sourdement
par quelques émissaires les fausses impressions que vous vouliez semer.
Quelle différence de ce langage à celui que vous m’avez tenu ,
en l’an 4 , dans une lettre que vous m’avez écrite à R io m (1 ).
Il est aisé de répandre toutes sortes de calomnies qui ne vien
nent que trop naturellement à
une
imagination malfaisante. Vous
u ’aviez rien écrit. J ’étais nanti de titres et de bonne foi ; ma sécu(1)
C h er citoyen et ami ,
V ous êtes attendu chez vous aujourd'hui à ce que m’a dit votre voisin lie
boulanger. Comme j'ertvoie à Ilium pour conduire les acquéreurs de mon vin ,
il vous sera peut-être commode de vous servir de la voiture qui doit re v en ir
ce soir ; c’ est ce qui m’ engage à vous écrire deux mots. M on domestique vous
remettra ma lettre , et vous conduira si vous ctes
dans
l’intention
à Clermont.
Salut et fraternité ,
et sur-tout votre a m i,
C H A M P F L O U R .
de venir
�‘i *
fîrs er celle de mou défenseur étaient parfaites; lui et moi ne.poa**
vions nous attendre qu’à un succès complet ; cependant vos voci
férations j les menées qui les avaient précédées et le peu de prix
que mon défenseur et moi y mîmes } ont fait que je n’ai été qu’im
parfaitement défendu et que vous avez recueillis en partie le fruit de
votre surprise qu’on va bientôt voir suivie d'une scarfdaleuse mauvaise
foi.
“
J ’ai exposé
yos
r>
obligations et les miennes ; vous-même sembliez
les avoir basées sur la bonne foi et la délicatesse j pouvais-je m ’at
tendre que vous y manquassiez ? je n’avais d’autre préjugé
contra
vous sur l’honneur que celui qui paraissait naître de votre affaire
a v e ; l’officier de santé } et vraiment je n’étais pas encore convaincu.
L es moyens sourds dont vous aviez frapé l ’oreille de nos juges
et des personnes marquantes i R iom , furent que ¡’étais terroriste,
et cette expression annonce la férocité.
A l’audience, et d’après le caractère sous
lequel vous
m’aviez
peint j votre venin y ajouta celui de dénonciateur effréné.
M o i terroriste ? raportez-en le moindre trait ; je souscrirai à tout
ce vous voudrez. Il existe dans l’affaire , et envers v o u s, des preuves
d’humanité et de bienfaisance de ma
p a rt, qui
sont
absolument
éloignes de ce caractère , et je n'ai été remarqué 3 djns tout le courant
de la révolution que par les mêmes traits.
M oi dénonciateur !. je vous donne le m im e d é fi^
J e ne1 dois cependant pas oublier qtte votre noirceur m’a présenté
comme tel à l’audience, et comme vous ayant dénoncé vous-même j
votre supercherie , ou pour mieux dire votre cruelle méchanceté vous
porta à dire que moi seul avais fait une déclaration au district d’adminis
tration de Clerm ont , do différons engagemens qui existaient entré
nous. J e vais au départem ent, dépositaire de ces registres ; je ne me
trouve que le huitième sur la liste , et je vois le nombre de vos
dénonciateurs ( si c'est l’être que de conserver ses droits d après une
loi impérative ) s’élever à 91 j votre femme et vos gendres sont de
lu partit ) au n.° jit f .
�S o 'S
i r
Ces premières imputations ne frapaieric que sur l’opmion \ I*
mienne a été et sera toujours pour l’humanité , l’honn eur, la déli
catesse et la bonne foi.
M ais vous m ’aviez préparé quelque chose de bien plus amer , tou
jours puisé dans le même fonds.
J ’ai dit que j'avais remboursé
pour
D esm o u lin ,
votre frère ,
¿,4 0 0 francs à L ah o u sse, paumier-BilIardier à Clerm ont } étranger
d'abord à cette com m une; vous imaginez er suggerez à Lahousse
que c’était
vous qui aviez
fait ce
remboursement. O n connaîc
aujourd’hui assez généralement les moyens donc vous êtes
capable
d ’user. Lahousse n’est pas ignoré non plus.
Lors de ce remboursement, Lahousse reverse entre vos mains la
somme q t ’il avait reçue de m o i; vous
vous arrangez sur l'article
de l’intérêr. L a finale est que Lahousse a éprouvé même
perte. J e
lui avais donné du numéraire , ec il n’a reçu de vous que des
assignats dans le tems de leur baisse. J e tiens ce faic de Lahousse
lu i-m êm e, à la seconde entrevue que j ’ai eue avec lui depuis plus
de cinquante ans que j'habite Clerm onr.
C epen dant, à la veille de l’audience , vous obtîntes de lui une
déclaration contraire , vous la fîtes valoir méchament , autant dans
le public qu’à l’audience, toujours
dans
la
vue de
rendre nia
probité équivoque.
Pour donner l'air de la vérité à cette déclaration ,' vous im asinez
O
une nouvelle im posture, vous faites plaider que votre frère était
malade , er qu'il avait de l’inquiétude sur l’échéance de cette lettre
de change, et pour marquer votre disposition à l’obliger , vous
faites paraître une quittance de Lahousse 3 datée du 8 juillet 1 7 88.
Cette quittance toute fraiche quoique écrite sur
un vieux chiffen ,
ne pouvait d'aucune manière quadrer à vos vues'; ec d’abord , il
n’y •était pas dit que c’était pour votre frère que vous aviez p a yé;
elle vous est donnée pour
votre
d’usage de prendre une quittance
propre
dette ;
particulière
d’ailleurs
est-il
lorsqu’on acquitte
une lettre de change , la remise qui en est faite par le créancier no
6uffit-elle pas ? ■
�11
A u fa it, la lettre de change est datée du 3 1 mai 1 7 8 8 , et n’était
payable qu’au i . er janvier 1 7 8 9 ; quelles pouvaient être les inquié
tudes de votre frère au 8 juillet
1 7 88.
Il
n'y avait qu’un mois
et huit jours qu’il avait emprunté , et il avait terme jusqu’au i . er
janvier 17 S 9 . Finissez
par rougir de
votre concert odieux avec
Lahousse.
A ussi le tribunal d’appel ne s’est point arrêté à cette trame ; il
serait en eâF;t bien dangereux et bien inconséquent de faire dépendre
le sort de celui qui a payé , et auquel le titre de la créance a été
rem is,
d’ une
déclaration
quelconque
provoquée et
surprise par
l'homme qui cherche sans regarder au prix , à en perdre un autre y
quel fléau ne serait-ce pas pour la société ?
Vous allez plus loin. Oubliant avec délice la délicatesse et les
sentimens qui paraissaient vous avoir conduit lorsque vous conçûtes
notre traité , vous avez l’impudeur de retracter vos engagemens sur
l ’indemnité des 85 50 francs, pour lesquels, en me remboursant en
assignats 3 vous ne m ’avez pas donné cent écus..
Conduit pat le même sentim ent,, vous vous rejettes
gation de iio o o francs que m’avait consentie
voulez que ce soit pour moi
votre
que j ’aie emprunté
sur l’obli
frère; vous
de Bughon et
Lescurier.
Vous produisez à la première audience un état écrit de la main
de votre frère , vous en aviez déchiré ou couvert d ’encre les dates ,
vous le fires disparaître aussi-tôt , et
pour
toujours
sans doute:,
parce que votre conduite y était dévoilée.
A la première audience j ’avais articulé que c’était1 la dame B la u d ,
votre sœur , qui avait procuré à votre frère Desmoulin les milite
écus empruntés de Bughon , et j ’avais dit la v é rité ; vous la fires
paraître à la seconde audience ; mais au moment
me fit des questions, et où
où
le président
j’allais le requérir d’en faire a votre
sccur, vous avez soin de la faire disparaîrre ;
vous craignîtes que
sa candeur ne lui permit pas de déguiser la véritc.
�Vous ne pouvez pas contredire les faits que je viens de p o se r, le
tribunal d’appel et tout le bareau en sont témoins.
Enfin , par la ruse , la surprise , la calomnie et la mauvaise foi
vous êtes parvenu à me tromper et tromper la justice. L e jugement
que j ’attaque, rendu entre vous et moi le 27 germinal dernier au
tribunal d’appel séant
i
R iom sur délibéré , au rapport du citoyen
C a th o l, a rejeté vos obligations, soit sur l’indemnité relative aux
■8550 francs prêtés en num éraire, soit les emprunts que j'avais fait*
pour votre frère de Bughon et Lescurier. I l vous a condamné à me
rembourser l ’efFet de Lahousse et ceux de Blatin , Case et F a b r e , à
compenser les d épen s, excepté le coûc du jugement auquel vous êtes
condamné.
Vous allez célébrer à votre maison de cam pagn e, à Beaum ont,
avec toute la pompe possible, le triomphe de vos ruses j vous fûtes
généreux 3 parce que vous étiez persuadé que c’était moi qui payais.
Hélas ! parce que je vous avais démandé ce qui m ’était si légiîimem enr dû , fallait-il après ce jugement qui me l’avait refusé vous
mépriser assez vous-même pour donner une fête ?
-
L a fête ne vous satisfit pas, vous fûtes le seul qui y savourâtes
le fruit de vos intrigues. Vous imaginâtes d’autres moyens pour donner
de l’aliment à votre calomnie. M ais très-inconsidérément , vous pu
bliez et faites publier par Louirette que les chefs dans lesquels j ’avais
succom bé m’étaient bien dûs , mais que vous vouliez que je ne pro
fita pas du cadeau que vous m ’aviez fait. Ingrat / un présent n’est
jamais fo rc é , et si j ’eusse pu prévoir ton ingratirude, ma porte
aurait été fermée pour jamais à toi et à ton présent. T u ne m ’as
pas payé un centime par heure pour le temps que tu m’as fait perdre»
et dont j’ai privé la foule d’honnêtes gens qui affluaient chez moi.
Toujours furieux dans votre haine qui n’avait d’autre but que de
vous dispenser de me payer, goûtant le plaisir de m’avoir fait perdre
quinze ou seize mille francs que vous avez reconnu me devoir après
le jugement. Vous heurtez à toutes les portes pour me faire destituer
de ma place de prem itr juge au tribunal civil de l’arrondissement de
�*+
C le rm o a t, •chef-lieu-du département du Pui-de-D om e. Ÿ ou s répandes
impudemment que ce jugement me déshonore : comme s’il éta^t
possible d’être déshonoré en demandant son bien à celui qui , par sa
mauvaise foi , cherche à vous le faire perdre. Vous avez la bassesse
de chercher à en persuader les défenseurs au tribunal civil qui n’a
joutent aucune f j i à votre délation. Vous me forcez par-là de faire
imprimer et les motifs et lts dispositions de ce jugement. Vous
espérez par suite de votre calomnie de trouver les moyens de frapper
l’oreille du gouvernem ent, et vous n’avez rien négligé pour y par
venir ; mais quoique je sois demeuré calme et tranquille , il m’esc
revenu qu’il ne vous était resté de toutes ces démarches que le cruel
désir de me faire plus de mal encore.
Vous affectez d’oublier ce qui est connu de tout le département.
D ans aucun temps je n’ai demandé de places. J ’étais content de
m on premier état dont j ’ai toujours joui avec agrément. Celles dont
j ’ai
été honoré ne m ’ont pas été données par l’effet de l’intrigue,
mais de la confiance et de ma soumission aux lois. J ’appelle sur la
véracité de ce fait tous mes concitoyens , la députation passée et
présente du département du Puy-de-Dôm e et le gouvernement luimême. Je n’ai jamais dit ni écrit à aucune personne en place un
mot qui tint à la sollicitation.
J e ne m’abaisserai pas jusqu’à demander à mes collègues dans les
différentes fonctions que j ’ai remplies des attestations de ma conduite ;
mais ne me donnez pas un défi à cet égard , vous seriez couvert
de confusion par le démenti quelles vous donneraient de toutes vos
calomnies.
Il
est malheureux pour moi que je ne puisse pas m’occuper dans
ce moment des moyens accablans que j’ai à présenter, et qui n’on;
pas été plaidés au tribunal d’appel. L a loi me force à me restreindre aux
infractions qu’elle a soufferte par le jugement dont je poursuis 1*
cassation , et je passe aux moyens.
Premier moyen de cassation.
L a cause a été plaidée pendant deux audience* \ à la seconde et
le
�fc i j
germinal il fut ordonné tm délibéré au rapport jldu ciroyen
C ach o t, à qui les pièces furent remises sur-le-champ ; ce délibéré ne
fut prononcé que le 27 , et l’a été sans rapport préalable ni plai_
doirie de la part des défenseurs. J ’étais à l'audience , et je n’ eus
q u ’à entendre le jugement q"ue j ’ attaque , ce qui est une contraven
tion aux articles I I I et X de la loi du 3 brumaire an z , qui dans
ce cas exige un rapporc à l’audience , publiquement.
Second moyen.
C e ju gem ent, en vous condamnant à me payer 4200 francs dont
vous ne m’aviez pas fait des offres , compense les dépens, excepté
le coût du jugem ent auquel vous êtis condamné. Autre violation
des dispositions de l’article premier du titre X X X I de l’ordonnance
de 16 6 7 ainsi conçu:
« T oute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens
» indéfiniment j sans que , pour quelque cause que ce s o it, elle en
» puisse être déchargée. «
Troisième moyen.
L a première et la plus sacrée de toutes les lois pour la société
et pour les individus qui la com pose, est celle qui maintient les
conventions et les obligations contractées volontairement \ les liens
qui les soumettent à leur exécution 11e peuvent être brisés que dans le seul cas où leurs engagemens auraient pour base une cause illicite
et prohibée.
C ’est pour le maintien de cette loi précieuse que nos législa
teurs ont assujetti les juges de ne porter leurs décisions q u ’en les
motivant et en annonçant publiquement la loi qu’ils ont appliquée,
afin que les particuliers qui ont le malheur djavoir des procès , ne
puissent pas ignorer que c’est la loi qui les a jngés plutôt que les
juges qui doivent en être les esclaves. On va
voir à quel point la
première section du tribunal d’appel séant à R iom s’est écartée de
ce principe.
Une loi du î x frim aire an 4 s’exprime ainsi : « considérant que
D'
�pour arrêter les vols que font à leurs créanciers les débiteurs dô
» mauvaise foi en les remboursant en assignats au moment où ils
» n’ont aucune v a le u r, etc. etc. »
U ne autre loi du 5 thermidor an 4 a été rendue d'après les mêmes
principes à l’article premier : il est dit qu’à dater de la publication
de la présente loi , chaque citoyen sera, libre de contracter
comme
bon lui semblera ; les obligations qu’il aura souscrites , seront exe'cuy
te'es dans les termes et valeurs stipulés.
E n f in , l’article V de la loi du 15 fructidor an 5 s’exprime ainsi:
"
« Tout
traité ,
accords ou transaction faits depuis
le premier
» janvier 1 7 9 1 , contenant fixation en numéraire m étallique, réduc» tion ou arermoiment d’une créance résultante d’un autre titre, quel» qu’en fut la date ou la valeur exprimée dans ces nouveaux actes,
» auront leur pleine et entière exécution. »
J ’ai rapporté dans tout son contexte votre obligation., et vous
convenez dans cet acte me devoir 8550' francs que je vous avais
prêtés en numéraire. Vous rapportez même la date des effets. Vous
êtes
l’auteur, le rédacteur et l’écrivain des
deux doubles , vous
laissez en blanc mon prénom dans celui qui m ’est destiné. Vous
convenez aussi ne m’avoir remboursé cette somme lorsque les assignat»
éprouvaient une perte considérable^ousvous obligez de rapporter/« effets
q-is vous m’ ave-[ consentis et les acquits que j e vous ai fournis qui
fixaient l’époque certaine du remboursement que j ’assure être dans le
courant de messidor an 3 , presque sur la fin , moment auquel ce que
vous me donnâtes en assignats ne valait pas cent écus. Vous promettez
de m ’ indemniser d’après le taux de l’échelle du département du Pu ide-D.ôme , de la perte que vous m 'aviez faite éprouver. T elles so n t
vos obligations qui avaient pour cause , d’après la loi , la restitution
d ’ un vol bitn connu de nous deux. Vous faites intervenir à cet enga
gement la délicatesse 3 vous vouleç que je n’aie aucun reproche à vous
faire. Cette obligation était irréfragable ; ses causes étaient puisée*
dans la plus seine moralité et dans les lois précitées.
Cependant le jugtm eiic dont je demande la cassation, l’a annulé
�*7
dans cette partie, et a ordonné son exécution dans un autre. L ’at-il pu ? et ses dispositions ne sont-elles pas évidemment une infrac
tion i toutes les lois ?
L es motifs de ce jugement ne peuvent l'excuser dans cette p a rtie ,
ses motifs sont évidemment éronés ou au moins
inapplicables à
l’espèce.
,
L e premier est calqué sur la loi du 1 1 frimaire an 6 qui déclare
définitif les paiemens accepcéi en assignats , et qu’ayant reconnu moiinéme avoir écé remboursé en assignats, je n’avais pas le droit de
réclamer l’ effet de l’obligation que vous m’avez consentie.
M ais la loi de l’an 6 prohibe-t-elle les restitutions de la part de
celui qui veut les faire volontairem ent, et par délicatesse à celui qui
a été
victime de la crainte ou de la complaisance ? n’y aviez-vous
pas renoncé par notre traité ? d ’ailleurs , cette loi annulle-t-elle les
obligations ayant une cause aussi conforme aux dispositions de celles
que je viens de citer ? et n’est-ce pas une infraction absolue à ces
lois et à la raison que présente le premier et le principal m otif de
ce jugement ?
L e second , le troisième et dernier m o tif n’ont rien de commun
à la contravention à la loi j ils sont purement idéals et facultatifs.
Dans le second , on cherche à excuser la contravention à la loi ,
sous prétexté que ce jugement avait fait disparaître l’indemnité que
j ’avais promise à Champflour sur les remboursemens que j ’avais faits
en assignats A Lesci rier et à Bughon pour le compte de D esm oulin ,
deux articles que le jugement rejette , et dont je parlerai dans mon
quatrième moyen de cassation.
M ais faut-il de réciprocité pour rembourser à quelqu’ un ce qu’on
a reconnu véritablement lui devoir , et ce que la loi caractérise de
vol. Où en trouvera-t-on une qui dispense de payer une dette avouée
et reconnue? d’ailleurs il aurait fallu
une
condition irès-expresse
dans notre traité qui eût prévu et bien expliqué
et il n’en existe pas.
cette con dition ,
Quant au dernier il est détruit pat le fait même et par les piècea
D i
�■19
de' la procédure 5 il
compromis 3 les
parte 'q u ’ en tout cas
B o yer ayant révoqué h
engagement de Champflour ont cessé p a r son propre;
fait.
M ais il 11’exisre point de compromis
entre
les
parties, ce sont
des obligations très-formelles et irrévocables : en voici la preuve.
U n jugem ent contradictoire , du 19 brumaire an 8 , rendu entré
Champflour présent j et moi au ci-devànt tribunal civil séant à 'R io m .
est ainsi conçu :
» Attendu que le citoyen Champflour a déclaré , par l’organe de
« son défenseur, avoir signé l’acte dont il s'agir.
■ » L e tribunal ordonne qu’au principal les parties procéderont en
» la manière ordinaire, et cependant donne acte au demandeur de
j> ce que le citoyen Champflour reconnaît avoir signé l’acte du 15
» fructidor an 7 ; eh conséquence ordonne que ledit acte portera
» hypothèque sur les biens dudit C ham pflour, à compter de ce jo u r».
L a même expression a été répétée datis vos moyens rapportés pat
le jugement du tribunal d’ap p el, où il y est dit par vous-m êm e,.
p a r l ’acte du 15 fructidor an 7 : la même expression y est répétée
plusieurs fois ; ainsi d& votre aveu , notre traité est un acte et non
un compromis.
.
Q a’est-ce effectivement qu’un compromis ? . c'est une convention
faite entre deux particuliers qui ont des contestations, et sur les
quelles ils ne sont point d’accord, i Ils nomment
deux arbitres,
et
leur donnent pouvoir de juger leurs diffôréns ou en dernitr ressort
ou sauf l’appel.
Or le traité en question n’a aucun
de ces caractères 5 vous et
moi décidons tour. Chacun contracte les obligations qui lui sont rela
tives. Louirette et Coste ne sont choisis que pour être de simples,
calculateurs } la qualification de compromis donnée à cet acte n'est
donc que pure fantaisie. L oin par moi d'avoir révoqué les engagemens que nous avions contractés , j'en ai demandé expressément
l’exécution par mes citations, et ce n’est pas révoquer un acte que
4 ’eu réclamer l'cfLc. L a révocation qui existe esc restraiute au seul
�su
ï?
choix qu’ avait fait Champflour de LouVettS et Coste qui n’ont 'p„iî
quitté ses poches pendant qu’a duré notre discussion soit à Clerm ont
jo it à R iom . L e tribunal d’appel en a été témoin ; et pour mou
compte je me suis félicité de les avoir révoqués.
Quatrième moyen.
>
r J ’avois une obligation de 1 1 0 0 0 francs qui m’avait été consentie
pat Desmoulin ; le même acte portait délégation sur les Vi ry qui
lui en devaient 16000 3 et procuration pour coucher l’intérêt de
cette so m m e, portée à 1 5 00 fr. par année , s agissant de la vente
d’une partie de l ’office de receveur des tailles , où Desm oulin avait
part ; je devais faire
compte à
Desm oulin de
cet intérêt. Il
ne
dépendait que de moi de me faire payer du montant de cette obli
gation par les V iry
à l’échéance du terme qu’il avait pris par le
traité passé avec les Cham pflour et JBlaud 3 ce dernier en qualité de
m a ri, traité déposé en l ’étude de Chevalier , notaire à Clerm ont ,
par Champflour et m o i , plusieurs années après la date de l’obligation.
Si j ’ai fait l’aveu que lors de cette obligation, j ’en avais pas de suite
compté le m ontant, c’est parce que je l’ai v o u l u , c’est que la vérité
■fut toujours ma boussole , et que mon h onn eur, depuis mon exis
tence , n’a jamais reçu d ’atteinte. Champflour a été témoin r e tous
les actes d’après lesquels j ’ai rempli et au-de-là le montant de cette
.obligation. I l a lui-même passé l’ordre de la
lettre
de change
de
j , i 80 francs 3 empruntés à Bughon ; il 3, été également présent de
l ’emprunt de 6 1 0 0 francs de Lescurier qui sont les deux objets rejettés par le jugement. Sa connaissance sur ces deux objets est
assurée par un écrit de sa main , d ’autant plus avoué par lui 3 que
(omme je l ’ai observé dans les fa its , i l a osé m’en, dîmander la remise
p a r une demande judiciaire qu’ il a formée au tribunal d ’appel séant
à Riom j et qui y
est encore pendante.
L e s lois et les principes que j ’ai mis en avant mettent les écrits
^ous leur sauve-garde comme chose sacrée} cependant le jugement
que j ’attaque ne s’y est point arrêté 3 et son m otif à çtt
égard est
de dire que la dette de Bughon et de Lcscuriet m 'é lit pçrsçnnelle.
�Sans doute que c'est moi qui m’écais o b lig é , je devais le fairi
pour remplir l’obligation de 12 0 0 0
fr. qui
m’avait été consentie.
M.iis il est écabli par preuves écrites , émanant de vous-même , que
c’est D :sm oulin qui a tou-hé ces deux emprunts. N otre traité porte
obligation de ma part de rapporter les quittances justificatives de
l’emploi de 12 0 0 0 fr. , montant de l'obligation , ainsi que les notes ,
titres et riocumens relatifs audit compte. O r , ayant prouvé par vos
écrits que Desmoulin , votre frè re , avait touché les deux emprunts
rejetés par le ju gem ent, et ayant établi par quittance, et rapporté
les cff.-ts que j ’ai acquittés à Bughon et à Lescurier , n’était-ce pas
la dette de Desmoulin que j’avais payée? et ayant ainsi rempli les
obligations que j ’avais contractées dans notre traité , n’est-il pas contre
toutes les lois que l’obligation que Desmoulin m’avait consentie,
n’aie pas été maintenue ? la confession de celui qui est muni d’ un
pareil titre peut-elle être divisée en matière civile ?
Cinquième moyen.
Une loi du 3 octobre 1 7 8 9 3 sanctionnée te 1 2 } s ’ exprime ainsi ',
tout particulier, corps et communauté pourront à l ’avenir prêter l'argent
à terme fix e , avec stipulation d ’intérêt suivant le taux déterminé pa r
la l o i , sans entendre rien innover aux usages du commerce.
Par notre convention il est expressément dit que Louirette et
Costc compteront aussi les intérêts conformément à la lo i , et alors il
n ’y avait point de demande.
'
L e jugement vous condamne à me rembourser 4200 fr. que j ’ai
payés pour votre frère pour des dettes onéreuses > et où toujours
l'intérêt est au grand mo i n s , au taux du commerce. M es paiemens
remontent au tems du numéraire 3 et où il
n’était pas question
d’assignats.
L e ju gem ent, d’après la
lo i , pouvait-il me refuser cet
intérêt
conventionnel , autorisé et permis , lorsque , dans cette partie , il
consacre votre obligation , quoiqu’il la rejette dans l’autre. Cependant
les intérêts ne me sont adjugés que du jour de
la demande. Ce
jugem ent présente donc encore une nouvelle infraction à la loi.
�Avec cette m ultitude de m oyen s, tous tirés d e s lo is
moyens
qui sont encore plus dévélopés dans m a requête en cassation. Je
dois en attendre avec sécurité l’admission.
B O Y E R ,
A
c l e r m o n t
D E L ’IM P R IM E R I E
DE
-f
e r r a n d
GRANIER
ET
,
F R O IN ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1801?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Puy-De-Dôme, demandeur ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat, propriétaire, habitant de Clermont, défendeur.
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1801
Circa 1786-Circa 1801
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0927
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0928
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53088/BCU_Factums_G0927.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Beaumont (63032)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53068/BCU_Factums_G0907.pdf
5c63c8e5a4a2ca5442d34cf4a7ead064
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
P O U R
C
laude
B A U D IN O T - L A S A L L E ,
proprié-
taire,habitant de la commune de la Pacaudière,
départem ent de la L o ir e , in tim é;
> *
V ’
C O N T R E
Dame G a b r i e l l e - L o u i s e G U I L L E B O N ,
veuve de P i e r r e C H A U V I G N Y , habitante de
la ville de M oulins , appelante d'un jugement
rendu au tribunal de commerce de la même ville ,
le 2 7 vendémiaire an 10.
la dame de C hauvigny a-t-elle cherche à
donner à cette. cause un éclat qu’elle devoit éviter pour
e lle m ê m e s i les faits q u’elle m ’impute sont calom nieux,
A
, ,.
-P O U R Q U O I
�» •
c o
et qu’elle devoit éviter pour l’honneur de sa famille r
si je suis coupable?
E lle commence son mémoire par me rappeler que
je suis son gendre ; qu’elle est ma belle-mère : a-t-elle
craint que je l’aie oublié ?
E lle dit ensuite que c’est avec douleur qu’elle se voit
obligée de publier un mystère d’iniquité.
E t moi aussi, je le dévoilerai à regret, ce mystère d’ini
quité ! Mais puis-je garder le silence ?
F A I T S .
E n messidor an 6 , j’ai contracté mariage avec la de
moiselle de Chauvigny. L e contrat de mariage porte une
constitution de dot de 40,000 francs, qui devoit être
payée dans un a n , et au plus dans d eu x, à dater du
mariage.
L e père de mon épouse, Chauvigny de B lo t, avoit
été inscrit sur la liste des émigrés. La famille désiroit
obtenir sa radiation ; je ne la désirois pas moins. J ’offris
d’aller à Paris la solliciter.
O n sait combien de démarches et de sacrifices il falloit
faire. L a dame de Chauvigny me remit cinq lettres de
change tirées sur le citoyen L iè v r e , négociant à L y o n ,
montant ensemble à 9,700 francs. Ces lettres de change
ont été protestées.
J ’en fis part à la dame de Chauvigny; et pour qu’elle
ne pût révoquer en doute le refus de payement, je lui
envoyai les protêts. C ’est ainsi que ces protêts sont entre
les mains de la dame de Chauvigny. O u va voir le cruel
usage qu’elle cherche à. en faire.
�(3 )
En même temps je représentai à ma belle-mère l’em
barras de ma position ; elle me fit passer une somme de
800 francs.
Depuis j’ai reçu du citoyen Lièvre une somme de
4,044 francs.
J e suis parti de Paris vers l a j î n de ventôse', je suis
arrivé à Moulins ; et peu après ma b elle-m ère, ma
femme et m oi, sommes partis pour Annecy.
C ’est à Annecy qu’il a été procédé à un com pte, à
la suite duquel j’ai donné une quittance de 11,000 fr.
à imputer sur le capital de la constitution de dot ; p lu s,
de 1,020 francs pour six mois d’intérêts lors échus.
Je devois naturellement imputer cette somme d’abord
sur les lettres de change, et le surplus seulement sui* les
intérêts ou le capital de la dot ; mais la dame de Chauvigny désira que l’imputation fut faite préférablement
sur la dot. Elle m’observa que cela devoit m’être indif
férent, les cinq lettres de change qui restoient en mes
mains produisant également intérêt : je n’apercus pas le
piège ; je consentis la quittance comme la dame de Chauvigny voulut.
Celle quittance est du 12 germinal an 7 , datée d’Annecy.
Je ne dois pas dissimuler que le 4 nivôse an 8 , j’ai
fait encore une quittance de 8,000 francs , à imputer sur
les intérêts et le capital de la dot. J ’avois toujours entre
mes mains les lettres de change ; je regardois comme
indifférent d’imputer les sommes que je recevois, sur l’un
ou sur l’autre ; je préférois même de garder les lettres de
change, comme plus facilement négociables, en cas d’eveuemcnt.
A 2
�(4)
J ’ai voulu enfin en demander le payement. Quelle a été
ma surprise lorsque la dame de Chauvigny s’y est refusée !
A près avoir épuisé tous les procédés, j’ai été obligé de
la citer au tribunal de commerce de Moulins.' Sa défense
est consignée dans le jugement. Elle a conclu à ce q u e,
n’établissant paß que les cinq lettrés de change eussent été
protestées dans les délais^fixçs par l ’article I V dm titre Y
de l’ordonnance de *673 , je fusse déclaré purement et.
simplement non. - j’ecevable quant à présent daiis ma
demande. E lle s’est ;retranchée sur le défaut de repré
sentation des-protete;;-et elle les !avoit en ses mains!'
M a réponse, consignée aussi dans le jugement, a été:que les protêts étoient entrelies m ains de la dam® de
Cliauvigny à q u i je lesavois com m uniqués, et q u i, par
Tabus de confiance Je plus révoltant y refùsoit de me les
rem ettre, et de les représenter pour s"1en f a ir e une j i n
de non-payer j que la preuve de leur existence résultoit
d'une lettre écrite par le citoyen L ièvre à la dame de
Chauvigny te 18 nivôse an 7 , dont il a étéf a i t lecture.
Cette lettre n’étoit pas la seule.
A utre lettre du même du 26 nivôse an 7 , attestant
également l’existence des protêts.
Lettre de la dame de Chauvigny elle-même du 4 plu
viôse , à moi adressée, où elle s’exprime ainsi :
« Je viens d’en recevoir encore une de jérémiade do
» M . L ièvre à huit jours de date ; je vous prie d’envoyer
» encore à Lyon mes traites de 5,000 francs déjà, pro» testées; d’y ajouter une procuration, afin que l’on traite
» avec M . L ièvre pour ces mêmes traites ; qu’il en paye*
» mille écus d’ici au i 5 pluviôse, et 2,000 francs vers
�u /
(5 >
» le trente : cela vous donnera un peu de facilité; Je
» mande u M . L ièvre5de faire cetr arrangement âVec’
»nvous. Il dit qu’il èst malade',' que le protêt ’de mes'
» effets lui a ôlé son crédit. J e vous envoie sa 'lettre, 'et
» vous prie de ne pas'la perdre.
‘
’
Néanmoins le tribunal considérant, entr’autres motifs,
qué d’après l’article 'X du !mêirie titré de rordônnànctî y
le protêt ne peut être suppléé par riiicün autre- 'afctë'/
m’a déclaré purement et' simplement n o n - ’fécév,!iible
quant à présent.
" <
' ,,r
Heureusement les protêts avoient été faits par le mi-*,
nistère d’un notaire; et'l^usage est à Lyon que les1Notaires
gardent minute dé ces actes impôrtans dans 1C rornmerde.
Instruit de cet u sagé , j ’ai pris une seconde Expédition ,
et j’ai traduit de nouvea'u la dame de Chauvigiiy au même
tribunal de commerce.
" " 1
:'
A yan t d’aller plus loin , je'd ois rendrercbmpte d’uïie
autre procédure dont on se fait une arme c’o ntre mbi.;
Indépendamment des cinq lettres de change dont il
s’agit, la dame de Chauvigny m’avoit consenti, le n ven
démiaire an 9, trois lettres de change ; savoir :rdcüx de
2,000 francs chacune, et la troisième de i,oôo. L e 16 du
m em emois, j’en ai passé l’ordre «\la citoyenne Bourgeois;’
celle-ci a cité la dame de Chauvigny au tribunal de com-'
merce de Moulins. La dame de Chauvigny a désavoué
la signature. J ’ai été mis en cause; un jugement contra
dictoire a ordonné la vérification; des experts ont été
nommés de part et d’autre; les experts ont déchiré (llie
la signature mise au bas des trois lettres de change n’étoit
pas la signature de la dame de CI iau vigny.
Mais que ne disoit-on qu’il a été ordonné un amendement
�( 6)
de rapport ? E t jusqu’à ce que les nouveaux experts aient
donrjéj leur décision , jusqu’à ce que la justice elle-même
ait prononcé, peut-on faire pencher la balance qu’elle tient
encore en scs mains ?
Ce n’est pas cette cause .qui servira à la décision de celle
qui est aujourd’hui pendante devant les juges supérieurs;
c’est au contraire celle-ci qui :contribuera à jeter de la
lum
ière
sur l’autre.
.
,
i
Ç
•
• •
.. Je reviens à la nouvelle demande par moi formée au
tribunal de commerce de M oulins, d’après les secondes ex
péditions de protêts, en payement des cinq lettres de change.
L a dame de C h a u v ig n y s’est défendue encore par une
fin de non-recevoir, non plus à raison du défaut de re
présentation des protêts, mais à défaut de poursuites dans
la quinzaine du protêt, conformément aux articles X III,
X I V et X V du m ê m e titi-e ; mais cette fin de non-recevoir,
ainsi que la précédente, ne pouvoit avoix* lieu q u ’autant
qu’elle ¿tabliroit qu’il y avoit des fonds entre les mains du
citoyen Lièvre.
E lle soutint avoir fait les fonds; et le tribunal de com
merce en ordonna la preuve.
Mais bientôt elle prend une autre marche. Son génie se
développe à.mesure des circonstances, et lui inspire un
autre plan.
E lle imagine de rendre plainte en enlèvement et sous
traction des lettres de change dont je lui demande le
payement. Et comment expose-t-elle que je lui ai enlevé
ces lettres c}e change ?
Elle expose qu’après le compte fait enlr’elle et moi à
A nnecy le 12 germinal an 7 , je lui avois remis ces cinq
lettres de change, dont il m’avoit été fait raison dans le
�(7)
compte ; ensemble les deux bordereaux de recette et de
dépense qu’elle produit aujourd’h u i, montant l’un à 5,620
francs , et l’autre à 4,840 francs ; que de retour à M oulins,
elle a mis ces cinq lettres de change dans un tiroir de sa
commode avec la coiTespondance ; qu’elle est partie le
8 floréal an 8 pour Paris , où elle a demeuré jusqu’au 22
nivôse an 9 ; que j’ai profité de son absence pour ouvrir le
tiroir de l’armoire, et enlever les lettres de change et la
correspondance.
^ r «
Mais on pouvoit lui dire : Si j’ai ouvert le tiroir pour
enlever les lettres de change, comment n’ai-je pas enlevé
- en même temps ces actes de protêts? comment ces actes de
protêts sont-ils encore entre vos mains?
E lle p révoit l ’objection , et y x'épond d ’avance. E lle
les protêts ne'isont pas tombés entre mes
m ains, en ce q u e , sans intention , ils avoient été placés
"par elle dans lefon d d'une écritoire quelle avoit emportée
avec elle à P a r is : ce sont les termes de la plainte.
Dans le mémoire im prim é, le défenseur de la dame de
Chauvigny a relevé encore cette circonstance, en l’embel
lissant des grâces du style.
Il arriva , d it- il, par un de ces hasards heureux, qu’il
est impossible d’expliquer, que ladite de C h a u v ig n y qui
avoit eu la négligence de ne point bâtonner ces lettres de
change, et de les placer dans une commode, avoit mis dans
le double fond d’une écritoire plusieurs quittances don
nées par son gendre , ainsi que les actes de protêts de ces
mêmes lettres de change ; comme elle avoit emporté avec
elle son écritoire lors de son d épart, elle c o n s e r v a ^es
protêts et les quittances ; et les a toujours en son pouvoir.
observe que
�U*
-
Ui
C8 )
' « Elle demanda et se soumit à p ro u ver, i° . qu’à l’épos> que. du 19 germinal an 7 , jour auquel elle fit compte
fi avec le citoyen L ièvre des sommes qu’elle ou le citoyen
» Lasalle. avoient, reçues, les cinq lettres de change dont
». il s’agit étaient: en sa puissance; 2n. que pendant son
» séjour à P aris, à plusieurs reprises et notamment dans
!» les mois de prairial et de messidor de l’an 8 , ledit La» salle a fait des recherchesdans scs papiers, et que ce
» n’est que par l’effet de ces recherches qu’il en a sous!a trait lesdités cinq lettres de change, montant ensemble
» à 9,700 fr. dont il demande aujourd’hui le paiem ent,
Si quoiqu’il soit constant que la plaignante lui en a tenu
» com pte, lorsqu’il lui fit la remise des mêmes .lettres de
i» change. »
r A u bas de cette plainte.enr date du 7 thermidor an 9,
la dam e de C lia u v ig u y a aiïirmé la sincérité des faits
portés en icelle.
Sur G e t t e plainte j’ai subi interrogatoire. Les témoins
indiqués par la dame de CRauvigny ont été assignés; le
directeur du jury de l’arrondissement de M oulins a pris
leurs déclarations ecriles.
D u nombre de ces témoins éloient les citoyens JeanBaptiste et Claude L iè v r e , l’un fils , et l’autre frère de
fcelui sur qui les lettres de change avoient été tirées.
Pendant que la dame de Chauvigny poursuivoit cette
instruction criminelle, je poursiiivois de mon côté au tri
bunal de commerce la condamnation des lettres de change.
• .1,(1 dame de Ghauvigny a crû éluder la condamnation
ërt rapportant un certificat du greffier de la police cor
rectionnelle , attestant qu’il existait une instance au tri
bunal
�, ( 9 )
fcunal sur la plainte rendue par elle en enlèvement des
dites lettres de change qu’elle avoit, d it - e lle , retirées
i comme les ayant acquittées, ainsi q u il résultait du
compte J'ait entr’elle et-le citoyen Lièvre , et etautres
comptes J a its eut?elle et m oi j elle a demandé qu’il
fût sursis à faire droit sur la demande civile jusqu’à ce
qu’il auroit été statué sur l’instance criminelle.
L e tribunal de commerce n’a pas cru devoir s’arrêter
•à la demande en sursis.
•
‘ -r
Par jugement d u 21 vendémiaire an io-? « Considérant
• » que le tribunal ne peut et ne doit s’occuper que de la
» contestation qui est pendante pardèvant lu i, et non
J» de la plainte portée par’là défenderesse au tribunal de
» police correctionnelle de l ’arrondissement de jVIoulins. j
; i ». Considérant-qu’il’ seroit abusif et préjudiciable au
.» commerce de suspendre sous un pareil prétexte, qui
» souvent pourroit n’être ’ pas fo n d é, le payement des
^3 effets destinés 'par leur nature à le faciliter et à l’étendre ;
» Considérant enfin qu’il est de principe que lorsqu’un
» titre sous signature privée à été reconnu en justice, il
» mérite la même confiance que celui qui est authentique,
» et que de plusieurs de noè précédens jugemens il résulte
» que la défenderesse a reconnu que les cinq lettres de
.3) change dont il s’agit ont été par elle souscrites ; que
» dès-lors elles forment titre contr’elle , et <que l’exécu» tion provisoire est due au titre jusqu’a ce qu’il ait été
« déclaré faux ou annulé ;
»• Considérant enfin qu’aux termes des articles X lJ t,
» Xl
et ju£VI aleTordonnance de 1673 , les tireurs
» de lettres de change sont^aiTraucliis de toufes lacfcions,
B
�IGO
y
( 10 3
' » faute de poursuites dans le délai prescrit par les articles
» cités, lorsqu’ils prouvent qu’ù. l’époque à laquelle la
» lettre de change étoit payable, celui sur lequel elle a
» été tirée avoit provision de la part du tireur pour
53 l’acquitter; a '
‘
- •. a > '
’
*
» L e trib u n al, sans s’arrêter ni avoir égard à la de» mande en surséance, condamne la dame de Chauvigny,
5) consulairemeût seulement, à reprendre celles des cinq
» lettres de change par elle souscrites aui.profit du dé» mandeur,> payables* en nivôse an 7 , f'au nombre de
» trois; ce fa is a n t , la condamne à p a y e r 'a u demandeur
» la somme de 5 ,000 fr. montant des trois’ dites lettres
■
'» de change; et néanmoins lui accorde, pour le payement
» de la somme de 5,000. francs, le délai de quatre mois
» à compter du jour du jugement ; décharge la dame de
» C h a u v i g n y du: surplus des demandes f o r m é e s , sauf k
» Lasalle ù se pourvoir ainsi qu’il avisera.......»
‘ Cependant la dame d e’ Chauvigny n’abandonnoit pas
1
la plainte par elle rendue.
La cause, sur cette plain te, a été portée à l’audience
du tribunal de première instance de M oulin s, jugeant
correctionnellem ent, des 9 et 12 nivôse an 10.
11 n’est pas indifférent de rappeler les conclusions qui
ont été prises par la dame de Chauvigny.
Elle a conclu à ce que je fusse déclaré convaincu
d’avoir soustrait les cinq lettres de change ; je fusse con
damné A les remettre comme sohtes et acquittées.
Les mêmes témoins qui avoient été cités devant le
directeur du jury ont com paru, h l’exception des citoyens
Jean-Baptiste et Claude Lièvre,
�( ™
, L ’absence de ces derniers a donné lieu k deux ques
tions incidentes.
;
L a prem ière, si le tribunal devoit ordonner qu’ils
seroient réassignés, et différer la décision; la seconde,
si le tribunal s'arrêtèrent aux déclarations écrites de ces
deux témoins.
,
.
L e defenseur de la dame .de Chauvigny a affecté de
transcrire dans son mémoire les conclusions du citoyen
commissaire du gouvernement,:
mais
O
'*■
r ‘ il auroit dû transcrire aussi les motifs du jugem ent'
« Considérant, est-il d it, que l’article C L X X X I V d e
» la loi du 3 brumaire an 4 porte que le jugement sera
» prononcé de suite o u , au plus, tard, à l’audience sui» vante ; que l ’audience de ce jourd’liui est la seconde
» à laquelle l’affaire dont il s’agit a été portée \ que con» séquemment elle doit recevoir sa. décision ;
» Considérant, au fo n d , que quoique le cit. Baudinot
» soit convenu avoir
fait des
recherches
dans »le tiroir
de
*
t
•.
1
>
» la commode de la dame veuve Chauvigny, et quoique
» ce fait soit prouvé par les déclarations des témoins ,
» on 11’en peut néanmoins tirer aucune induction défa
it vorable audit citoyen Baudinot, attendu qu’il y a été
3) autorisé par une lettre écrite le 3 nivôse an 7 , aussi
» duement enregistrée ; qu’il avoit été autorisé par ladite
» dame veuve Chauvigny à traiter à raison de la mission
» qu’elle lui avoit donnée en la ville de Paris, jusqu’à
» concurrence de 10,000 fr. ce qui présente une uppa~
» ronce de légitimité de sa créance contre la d a m e veuve
» Chauvigny ;
» Considérant que des déclarations des témoins il ne
B a
�isp J;
» résulte pas la preuve quer les cinq lettres de change
»
»
»
»
»
»
»
ri
»
»
»
»
53
»
»
»
que la veuve Chauvigny a articulé lui avoir été soustraites, fussent dans le tiroir de sa commode lorsque
Baudinot-Lasalle y a cherché, et que même il en eût
retiré aucun papier ; considérant enfin qu’en supposant que les déclarations écrites du citoyen L ièvre
pussent être prises pour base du jugement à prononcer,
on n’y trouveroît -pàs même la preuve de cette pré
tfendue soustraction , pùisqu’il ne déclare que ce que
lui a dit feu son frè re , et que ni l’un ni l’atitre n’a
pu déclarer que les lettres de change qui étoiënt
sur la table du feu citoyen L ièvre lors du compte fait
avec la dame veuve Chauvigny p étoient'lès mêmes qué
celles que réclamoit rlà': veuve' 'Chauvigny , d’autant
qu e'L ièvre n eveu ,3qui étoit présent, n a p u dire nt les
d ates 7il le n om bre de celles q u il a, vu es s u r la table
de son père, n i de quelle somme elles étoient.
» P a r ces motifs le tribunal déclare la vèuve Chauvigny
» non-recevable dans-le'chef de conclusions , tendant à
» ce que les citoyens L ièvre fussent réassignés-, statuant au
» principal, décharge Baudinot-Lasalle de l’accusation. »
C ’est ainsi que j’ai été congédié de l’accusation.
A l’égard du commissaire, il a reconnu lu i-m ê m e
*
qu’abstraction faite desdépositions écritesdes L ièvre, frère
et fils , il n’existoit aucune preuve du prétendu délit ;
mais il paroît qu’il a pensé que ces deux déclarations
form oient une preuve complète.
La dame de Chauvigny a transcrit dans son mémoire
ces deux déclarations, je dois aussi les rappeler.
« Jean-Baptiste Lièvre fils, com mis -voyageur, dépose
�ifs
( 13 )
» que, le 19 germinal an 7 , la dame veuve de Chau» vigny régla un compte avec Philibert L iè v re , père
» de lui déclai-ant ; que ce fut lui déclarant qui écrivit
» le même compte; que lors d’icelu i,la dame de Chauvi» gny rapporta et fit voir , tant à son père qu’à lu i, des
» lettres de change tirées par elle sur Philibert L ièvre
» à l’ordre du citoyen Lasalle; que lui déclarant ne se
» rappelle pas de quelle somme étoient les lettres de
3> change, ni en quel nombre elles étoient; que la dame
» Ch au vigny lui fit v o ir , ainsi qu’à son p è re , les protêts
» qui avoient été faits des lettres de change à la re» quête de celui qui en étoit porteur , et qu’il est à
» sa connoissance qu’à l’époque du compte qui fut fait
» entre les dam e de C h a u v i g n y et P h ilib e r t L i è v r e , ce
» dernier paya quatre mille francs à la dame de Chau» v ig n y , et acquitta des traites tirées par le citoyen Lasalle f
» qui montaient à environ 3,000 francs; que la dame de
» Chauvigny , en l'ecevant de l’argent du père de lui dé» clarant, en donna sur le champ au citoyen L asalle,
» son gendx-e, en lui disant : V oilà nos affaires réglées;
s ajoute le déclarant, que dans le temps où la dame de
xi Chauvigny régla son compte avec son p ère, le citoyen
» Lasalle étoit présent, fit des reproches au citoyen L ièvre
» p è r e de ce qu’il n’avoit pas acquitté les lettres de
» change tirées sur lui ; que le citoyen L ièvre lui dit
» que ces lettres de change étoient trop conséquentes,.
» et qu’il n’avoit pas voulu les acquitter ; que le citoyen
» Lasalle qui avoit écrit au citoyeu L iè v r e , de Paris, dans
M des termes peu ménagés pour le presser d’arqiii|tcrces
» lettres de change, lui en fit alors des excuses.,, et a
�( *4 )
» ajouté que les faits dont il a rendu compte sont à. la
» connoissancc du citoyen L iè v r e , notaire à I/yon. »
Claude L iè v r e , notaire public à L y o n , a déclaré
« que dans le mois de germinal an 7 , n’étant pas préci» sèment mémoratif du jou r, il alla voir feu Philibert
33 L iè v r e , son frère, négociant, en son domicile rue de
» l’Arbre-Sec , il le trouva dans une pièce sur le devant,
» qui étoit avec la dame veuve C hauvigny, occupé à
» régler leurs comptes respectifs ; qu’il s’arrêta quelques
33 instans avec eux , et qu’à sa sortie son frère l’accom3) pagna ; qu’il lui demanda si la dame de C h auvign y,
3) pour régler leurs com ptes, avoit retiré du citoyen
33 Lasalle les lettres de change qu’elle lui avoit remises
33 sur lui ; à quoi son frère lui répondit qu’elle les avoit
» toutes, quelles êtoient sur sa table : ce dont il étoit
33 bien satisfait, parce qu’il n’auroit plus rien à faire avec
3) le citoyen L asalle, qui lui avoit écrit des grossièretés
» de ce qu’il avoit laissé protester ces effets. 33
Q u’on compare ces deux dépositions , et l’on verra
qu’elles se contredisent inanisfestement.
Suivant la déposition du premier , j’aurois été présent
au com pte, puisque d’après lui la dame de Chauvigny,
en recevant de l’argent du citoyen L iè v r e , m’en donna
sur le cham p, en me disant : V o ilà nos affaires réglées.
L e second témoin 11011 seulement ne dit pas que j’étois
présent au compte, mais il résulte encore de sa déposi
tion que j’étois absent.
L a dame de Chauvigny qui a relevé avec tant d’cxnc-»
titude dans son mémoire les diverses sommes qu’elle in’a
données, dit bleu qu’en allant à Annecy clic s’arrêta à
�»6/
( i5 )
L yon , prit de l’argent du citoyèn L iè v re , et me donna
2,400 francs ; mais elle ne dit pas qu’au retour d’Annecy,
et lorsqu’elle a réglé ses comptes avec le citoyen L ièvre
le 19 germ inal, elle m’ait donné de l’argent.
' Jean-Biptiste L ièvre dépose donc d’un fait que la dame
de Chauvigny elle-m êm e n’a pas osé mettre en avant.
Mais il suilit de la contradiction manifeste qui existe
entre la déposition de Jean-Baptiste et celle de Claude,
pour que la justice ne puisse s’arrêter ni à l’une ni-à
l ’autre.
A jou ton s, comme l’observe le jugem ent, que L ièvre
fils n’a pu dire ni les dates, ni le nombre de celles qu’il
a vues sur la table , ni de quelle somme elles étoient.
Par quels motifs le citoyen .Lièvi’e fils s’est-il prêté
à tout ce que la dame de Chauvigny a voulu ? Il faut
observer que le citoyen L ièvre fils d o it.30,000 francs à
la dame de Chauvigny, et c’est la crainte qu’elle ne retirât
ces fonds , qui a commandé sa dépositionMais s’il y avoit du doute, voici qui aclièveroit de por
ter la lumière. Depuis le jugement, L ièvre fils, et L ièvre
frère, nront pas craint, pour servir la dame de Chauvigny,.
de se rendre eux-mêmes parties, défaire une saisie-arrêt
en ses mains de tout ce qu’elle pouvoit me devoir ; ce
qui m’a obligé de les assigner en main-levée de leur oppo
sition , et en même temps en payement des deux lettres de
change, pour lesquelles le tribunal de commerce m ’ a réservé
à me pourvoir.
.T’ai dû entrer dans ces détails pour me justifier dans
l ’ opinion comme je l’ai été au tribu nal;
démontrer
que le jugement n’a pas été, comme on a voulu l’insinuer,
un jugement de-circonstance.
,
p
o
u
r
�i6k
(i6)
L a dame de Chauvigny ne l ’a point attaqué.
Elle s’est p o u r v u e uniquement contre le jugement du
tribunal de commerce qui l’a condamnée au payement des
trois lettres de change.
r
Les meilleures idées ne sont pas toujours celles qui se
. présentent les premières. Sur l’appel, la dame de Chauvigny
a revu et corrigé son plan.
c Jusqu’ici, j’avois suivant elle remis les lettres de change
comme acquittées, comme ni en ayant été f a i t raison.
C ’est le langage qu’elle a tenu dans tous les jugemens du
tribunal de com merce, dans la plainte, et lors du juge
ment du tribunal de police correctionnelle.
• A u jou rd ’h u i, elle s’attache uniquement h. prouver que
j e lie n a i point fo u r n i la valeur.
J ’ai à répondre au mémoire qu’elle a fait imprimer.
J ’ai à me justifier, et à justifier le jugement.
>
- Si j’établis que tout estfa u sse té >invraisemblance, con
tradiction dans ses d ires, l’opinion du public se fixerat-elle enfin entr’elle et moi ?
<
,
M O Y E N S .
L a dame de Chauvigny dans le mémoire qu’elle a fait
distribuer, dit que tout menteur doit avoir de la mémoire;
elle auroit dû ajouter que celui qui est reconnu menteur
sur un fait est présumé menteur sur les autres.
E lle dit page 4 de son m ém oire, qu’à mon départ pour
Paris, indépendamment des cinq lettres de change, elle
me remit la somme de 3,000 francs en numéraire; elle
«joute page 7 , qu’en allant à Annecy elle s’est arrêtée à
Lyon ;
�Ift
(»7 )
L yon ; qu’elle vit le citoyen Lièvre ; que celui-ci lui remit
des fonds, et, que sur ces fonds, elle m’a donné 2,400 fr.
Ces deux faits sont fa u x , et démentis par les pièces même
qu’elle a produites. Elle a produit un bordereau de recette,
et un bordereau de dépense, écrits de ma m ain, qu’elle
s’applaudit d’avoir conservés , le bordereau de dépense
montant à 5,620 francs , et celui de la recette à 4,840 fr.
Cette somme de 4,840 francs provient, i° . de 40,40 francs
qui m’ont été envoyés à Paris par le citoyen L iè v r e ,
quelque temps après les protêts ; 20. de la somme de 800
francs que la dame de Chauvigny m’a envoyée à Paris,
postérieurement aussi aux protêts. Si elle m’avoit remis ,
comme elle le prétend, à mon départ p o u r Paris, la somme
de 3,000 francs en n u m éraire , et à L y o n Celle de 2,400 f.
ne les aurois-je pas portées en recette, comme j’ai porté la
somme de 800 fr. ou si j’avois omis de les porter en recette,
la dame de Chauvigny ne se seroit-elle pas récriée ? n’auroit-elle pas rejeté bien loin le bordereau que je lui pré
sentais ? auroit-elle réglé définitivement le compte sans
que cette omission eût été réparée ?
Qu’elle prenne garde : il faut qu’elle convienne que ce
bordereau de recette n’a pas servi seul de base au compte;
ou qu’elle convienne qu’elle en impose sur la délivrance
de ces deux sommes.
A u premier cas, elle détruit elle-même toutes les induc
tions, et toutes les fins de non-recevoir, qu’elle a cherché
à tirer en sa'faveur du bordereau de dépense. Car si le
bordereau de recette ne consent pas toute,la recette, ai-je
moins de droit qu’elle de dire que le bordereau de dé
pense ne contient»pas,toute la clépqiisc?. 1 ' ’ ’ u:
�C*B)
A ti second cas, quelle foi la justice peut-elle ajouter à
scs autres assertions ?
(
.T’ai expliqué comment les protêts étoient en ses mains.
J ’ai dit que je les lui ai envoyés de Paris, bien éloigné de
p révoir les conséquences de cet envoi. E lle désavoue ce
fait; elle soutient que je les lui ai x-emis avec les lettres
de change, lors du compte général fait -le 12 germinal
an 7 : elle va plus loin ; elle soutient qu’il y a impossi
bilité que je les lui ai envoyés de Paris.
• En effet, dit-elle,.le citoyen Lasalle est parti le 14 ou
le i 5 brumaire an 7 pour Paris. Il n’y a resté que trois
mois qui ont fini le i 5 pluviôse; et le dernier de ces pro
têts n’a été fait à Lyon que le même jour i 5 pluviôse an 7.
. E t cependant elle produit elle-même une lettre écrite
par moi de Paris au citoyen L iè v re , à la date du 26 plu
viôse ; et audessous de cette d a t e , est écrit par le citoyen
L ièvre : Répondu le 4 ventôse. J ’étois donc encore à Paris
le 4 ventôse, et effectivement je n’en suis parti que vers
les derniers jours de ce même mois.
E lle dit que je lui ai remis les lettres de change lors
du compte général fait le 12 germinal an 7 ; que je les
lui ai ensuite enlevées avec la correspondance.
E t c’est vo u s, dame de Chauvigny, qui ne craignez
pas d’avancer une pareille imputation !
Avez-vous réfléchi?
J ’ai, dites-vous, profité de votre absence pour fouiller
dans votre commode. Oui ; j’y ai fouillé; mais comment?
?t votre invitation et par votre ordre.
D ésa vo u e rez-vo u s le' fait? 'vos lettres existent.
Première lettre dü „3 nivôse an 7 , rappelée dans
�( 19 )
le jugement du tribunal de police correctionnelle.
A ntre lettre du 28 floréal an 8, adressée à la dame
Lasalle.
« J ’ai reçu, ma clière am ie, la lettre de ton m ari, elle
» m’a fait grand plaisir, car j’étois fort inquiète; M . L ièvre
» m’ayant écrit le 19 , et m’ayant mandé qu’il n’avoit pas
» encore vu mes papiers; et depuis il ne m’a pas écrit.
» Mais la lettre de M . de Lasalle me prouve que mes pa» piers lui sont parvenus. J ’attends avec la plus grande
» impatience mes certificats pour agir; en m’envoyant
» par votre m ari les papiers de C liarm ier, envoyez-moi
» aussi l’échelle de dépréciation du département de l’A l» lie r , que vous trouverez aussi da?is mes tiroirs. »
J e sais ce que v o us allez m e répondre. V o u s m ’allez:
dire que ces lettres prouvent un délit de plus, un abus
de confiance.
:
A u tribunal de commerce de M oulins, pour suppléer
au défaut de représentation des protêts, j’ai produit une
lettre du cit. L iè vre , à vous adressée, du 18 nivôse an 7.'
Vous argumentez de la production de cette lettre, pour
prouver l’enlèvement de la correspondance.
Vous vous écriez page 18 du mémoire : Comment
cette lettre seroit-elle entre les mains du citoyen L a sa lle}
s 'i l tiavoit soustrait la correspondance ?
Mais rappelez-vous encore ce que vous m’avez écrit.
Lettre du 17 nivôse an 7. « Je vous envoie encore une
» lettre L ièvre; je vous prie d’y répondre vous - môme
» d’après les arrangemens que vous serez dans le cas de
» prendre. 33
G 2
�170
(2 0 )
Lettre du 4 pluviôse. « Je viens de recevoir une lettre
» de jérémiade du citoyen Lièvre. Il dit qu’il est malade ;
» que le protêt de mes effets lui a ôté son crédit : je vous
i> envoie sa lettre. »
Si vous m’avez envoyé les lettres du citoyen L ièvre , je
ne les ai donc pas enlevées ?
Si vous me les avez envoyées, elles n’étoient donc pas
dans votre tiroir ?
Il est donc bien prouvé par vos propres écrits que
je n’ai point enlevé la correspondance.
A i-je enlevé les lettres de change ?
A va n t d’examiner si je les ai enlevées, il faudroit qu’il
fût établi que je les avois remises. L a dame de Chauvigny
n’en sera sans doute pas crue sur sa déclaration ; ce n’est
pas par sa déclaration qu’elle détruira des titres.
L e fait est-il m êm e vraisemblable ?
Si je les avois remises , comment la dame de Chauvigny
ne les auroit-elle pas déchirées ? comment ne les auroitelle pas du moins bâtonnées ?
A quel titre les aurois-je remises ? comme acquittées.
Mais dans le mémoire im prim é, tous ses efforts tendent à
prouver que je n’en ai point fourni la valeur; que la va
leur ne m’en a jamais été due : si la valeur ne m’en a point
été due, je n’en ai point été p ayé; cela est évident. L a
dame de Chauvigny ne persuadera à personne qu’elle m’ait
payé 9,700 fr. sans les devoir ; je n’ai donc pas remis les
lettres de change comme acquittées, comme m en ayant
été f a it raison lors du compte.
J1 ne reste donc à la darne de Chauvigny que la ressource
de dire que je les ai remises comme ayant reconnu que
la valeur ne ni en ctoit point duc.
�m
( « )
Mais par là elle fournit contre elle-même l’argument
le plus terrible.
Si j’ai été assez probe pour les rem ettre, je ne l’ai pas
été assez peu pour les enlever.
A insi que la vertu le crim e a ses degrés.
L a fable de l’enlèvement des lettres de cliange n’est pas
mieux conçue que celle de la remise.
Déjà il est bien établi qu’elle en a imposé sur deux
points importans.
E lle a imprimé que j’avois enlevé avec les lettres de
change la coi'respondance, notamment la lettre de L iè vre
du 18 nivôse an 7 , par m oi produite au tx'ii)unal de police
correctionnelle ; et il est prouvé par ses écrits qu’ellemême me l ’a envoyée.
E lle a imprimé que j’avois profité de son absence pour
fouiller ci’iminellement dans son tiroir ; et il est prouvé
encore par des éci'its que c’est à son invitation et par sou
ordre.
Il n’en faudroit, sans doute, pas davantage.
Je 11e demanderai point comment les protêts n’étoient
point avec les lettres de change;, comment lui ayant remis,
suivant elle , le tout ensemble à Annecy , elle a fait un
triage des lettres de change et des protêts ; quels motifs
elle a pu avoir de mettre les protêts dans le double fond de
son écritoire.
Je n’examinerai pas même s’il est constant quelle«voit une écritoire à double fond.
Mais je lui demanderai ceci :
E lle est revenue de Paris en nivôse an 9 ; de retour a
�M oulins, elle a Lien ouvert son tiro ir, elle a bien dû s’ajîercevoir que les lettres de change et la correspondance
n’y étoient plus ; elle a dû être d’autant plus alarmée qu’elle
n’avoit pas eu la précaution de les batonner, ni de faire
mettre au dos l’acquit ; et elle garde le silence !
Je l’attaque au tribunal de commerce on payement de
ces mêmes lettres de change ; cette lois elle n’a pu ignorer
qu’elles n’étoient plus dans son tiro ir, et son premier mou
vement n’est pas de rendre la plainte qu’elle a rendue
depuis.
E lle se défend uniquement sur le défaut de représen
tation des protêts; autre preuve de sa bonne foi : ces pro
têts , elle les avoit en ses mains.
E lle dit que c’est par l’ellet du conseil qu’on lui donna;
que n’osant apprendre au public cette escroquerie coupable , elle consulta; qu’on lui dit que dès quelle voulait
-pallier mes torts et mes infidélités, elle avoit un moyen
simple d’écarter ma demande ; qu’elle n’avoit qu’à garder
les protêts pardevers e lle , et qu’alors le tireur étoit dé
chargé de plein droit faute de protêts.
>
E t elle croit par cette réponse éblouir les juges.
Non. Il n’est point de jurisconsulte qui ait donné ce
conseil. Il n’est point de jurisconsulte, il n’est point de
praticien|, qui ne sache que le défaut de protêt ne libère le
tireur, qu’autant qu’il peut prouver que celui sur qui la
letlre de change étoit tirée avoit fonds sufiisans : l’arti
cle X V I de l’ordonnance de 1673 en a une disposition
expresse.
E lle en impose donc sur ce fait comme sur les autres.
Mais je la cite de nouveau au tribunal de commerce
�\r&
( 23 )
après m’être procuré une seconde expédition des protêts ;
elle m’oppose le défaut de poursuites dans quinzaine.
Elle n’ignoroit pas, du moins cette fois, que le défaut de
poursuites ne pouvoit opérer de fin de non-recevoir,
qu’autant qu’elle prouveroit que le cit. Lièvre avoit des
fonds ; et elle se soumet à la preuve.
V oici ce qu’elle dit dans son m ém oire:
« L a dame de Chauvigny soutint avoir J'ait des
» j fonds , et le tribunal de commerce en ordonna la
» preuve. »
* - Mais en se soumettant à la preuve qu’elle avoit fait
des fonds, elle a donc reconnu que les lettres de change
ctoicnt dues , puisqu’elle en rcuvoyoit le payement au
citoyen Lièvre. Si elles étoient dues , je ne les ai donc
pas enlevées.
Dira-t-elle qu’elle n’a offert la preuve que pour les
deux lettres de change pour lesquelles le jugement dont
est appel m’a reserve a 111e pourvoir ? ]VIais ces deux
font bien partie des cinq prétendues enlevées ; et alors, ou
la dame de Chauvigny les doit toutes les cin q, ou elle
11’en doit aucune.
C ’est après ce jugem ent, c’est après avoir reconnu
1 existence de la dette, après avoir cherché uniquement
à en renvoyer le payement au citoyen L iè v r e , qu’elle
a imaginé le système qu’elle soutient aujourd’hui.
Je ne parle point du jugement du tribunal de police
correctionnelle qui m’a acquitté ; je m ets, pour un i»s_
ta n t, il l’écart ce jugement. Je eornparois au tribu»«! de
1 opinion. A i - j e assez démontré [’invraisemblance meme
des inculpations de lu dame,de Chauvigny?
�(24).
J ’ai d it , dans mon interrogatoire, que le compte avoit
été fait à M oulins ; que par le résultat je me trouvois
avoir reçu une somme de 11,000 francs, dont j’avois
donné quittance h compte sur la dot ; et la quittance est
datée d’Annecy.
A vec quelle complaisance la dame de^Chauvigny rap
pelle cette partie de mon interrogatoire! Com m ent, ditelle , le citoyen Lasalle veut-il que le compte et la quit
tance aient été faits à M ou lin s, tandis que la quittance
écrite de sa main est datée d’Annecy ?
E s t- il étonnant que je ne me sois pas rappelé si le
compte a été fait à M oulins ou à Annecy ? Q u’importe
après tout le lieu où le compte a été fait ? c’est le résultat
du compte , et non le lieu où il a été fait, qui importe.
A u surplus, qu’on compare cette erreur avec les con
tradictions et les impostures de la dame de Chauvign y.
Je crois m’être justifié ; j’ai maintenant à justifier le
jugement dont est appel, et à prouver que la dame de
Chauvigny ne peut se soustraire au payement des trois
lettres de change dont la condamnation a été prononcée.
Il
faut mettre de côté la fable de l’enlèvement de ces
lettres. La dame de Chauvigny en auroit aujourd’hui la
p reu v e, elle seroit non-recevable ù l’offrir. J ’ai été ac
quitté par un jugement non attaqué; elle ne peut revenir
sur la chose jugée. Quel espoir p e u t- il lui rester?
A M ou lin s, devant les juges de commerce ; dans la
plainte, au tribunal de policecorrectionnelle, elle n dit m’en
avoir fait raison lors du compte du 12 germinal an 7 ; elle
a reconnu elle-même la foiblesse de ce moyen; elle« prévu
qu’on ne inanqueroit pas de lui dire : Si vous prétendez
�( 2 5 )
en avoir fait raison, produisez donc ce compte. Ce n’est
pas par une vaine allégation qu’on détruit des actes.
Sur l’appel elle a changé de langage. Elle se réduit à
dire que la valeur n’en a pas été fournie ; elle excipe de
mes lettres au citoyen L iè v r e , des 30 brum aire, 20 fri
maire et 11 nivôse an 7 , de mon inteiTogatoire , du
bordereau de dépense écrit de ma main.
Que résulte-t-il de mes lettres ? que la valeur des let
tres de change étoit consacrée à la négociation dont je
m ’étois chargé. Cet aveu, je l’ai répété dans mon inter
rogatoire , et j’en conviens encore ; mais faute par le
citoyen L ièvre d’avoir voulu acquitter, même accepter,
j’ai fait des emprunts considéi’ables qui ont eu la même
destination que dévoient avoir les lettres de change ; et
dès ce moment les lettres de change qui jusque-là étoient
la propriété de la dame de Cliauvigny , sont devenues la
mienne. ..
Quant au bordereau, que c o n tie n t-il? ma dépense
personnelle, pour le voyage ou pour le séjour, et l ’argent
envoyé à ,M . de Cliauvigny personnellement ; mais
il ne contient aucun article relatif à la négociation dont
j’etois chargé. O r , dira-t-on que j’ai pu solliciter pendant
trois mois une radiation si difficile à obtenir, sansvfaire
aucuns sacrifices et sans bourse déliée.
' Vous argumentez d’une de mes lettres au cit. L iè v re ,
du 30 brumaire an 7. E t que d is -je au citoyen Lièvre
dans celle lettre? « Je n’ai pu me dispenser de vous faire
» présenter pour accepter Irois Irai tes moulant cnsexuMe
» à 5,c)oq fr. dont la destination est l'aile ; elfe est relative
D
�( *6 )
» à l’aiTaire' de mon beau-père. » Et plus bas : « Je crois
devoir vous remettre sous les yeux l’emploi sacré de cet
» argent. »
• Il y avoit donc, dès le 30 brumaire, 5,960.fr. employés
uniquement à l’affaire du beau-père.
Dans celle du 30 frim aire, je lui dis : V ôtre refus seroit
la cause de la non-réussite dans l’affaire qu i semble
vous-intéresser.
Dans ces 5,900 fr. rien, pour m oi, rien pour le traiteur,
rien pour ma dépense personnelle.
Vous-m êm e, dame de C h auvign y, le 3 nivôse an 7 ,
m’écrivez : « L ’arrêté du département est p ris, mais défa53 vorable......... Ils ne trouvent pas les certificats assez en
» règle*, il y en a un auquel ils Cherchent dispute , parce
3) qu’il y manque deux signatures, et qu’on omit de mettra
33 que ces deux témoins ont déclaré n e savo ir signer.
33 Comme cela partira dans cette semaine pour P aris, il
33 est important de parler à la personne qui vous a pro3) mis de faire le m ém oire, car leur arrêté n’est pas une
décision. II s'agit de savoir ce q u ilfa u d r a déposer,
et entre les mains de q u i, et arrêter p rix jiis q u ù la con
currence de 10,000 fr .
C ’est cette lettre qui a déterminé le jugement du tri
bunal de police correctionnelle.
Qui êtes-vous donc? Dans trois jngemens du tribunal
de commerce; dans la plainte, à raudicnce du tribunal de
police correctionnelle, vous soutenez que vous m’en avez
fait raison lors du compte du 12 germinal an 7; et parce
que vous 11c pouvez justifier celte assertion, parce que le
33
33
�IYŸ •
( 27 )
com pte, s’il étoit représenté, établiroit le contraire, vous
revenez sur vos pas , et vous dites que la valeur n’en
est point due.
Ce -n’est pas tout. Lors du second jugement du tribu
nal de commerce, vous vous défendez en soutenant avoir
fait des fonds entre les mains de L ièvre ; et par une con
séquence nécessaire, vous rejetez le payement sur L ièvre;
vous reconnoissezi par là la dette ; et aujourd’hui, en déses
poir de cause, vous la contestez.
Vous demandez que je donne un état particulier de
l’emploi du montant de ces lettres de change ; je ne puis
ni ne dois donner d’état, puisque, de votre propre aveu,
la destination de ces lettres de change étoit secrète. Vous
avez suivi ma fo i, et vous ne pouvez au plus exiger que
mon affirmation.
' Si je n’avois pas fourni la valeur des lettres de change,
auriez-vous tant tardé à me les demander? les auriezvous laissées entre mes mains ? Je dis laissées entre mes
mains, car il faut abandonner l’histoire, et de la pré
tendue remise et du prétendu enlèvement.
L a dame de Chnuvigny oppose un dernier moyen ;
le défaut de réserve dans la quittance de 11,000 fr. du
12 germinal an 7 , et dans celle du 4 nivôse an 8 , toutes
les deux à imputer sur la dot. M ais, i°. le défaut de
réserve n’opère point de quittance, toutes les f o i s que la
créance est fondée sur un titre : je me réserve assez la
créance, par cela même que je retiens le litre.
En second lieu , 'ce moyen est contradictoire avec le
précédent. L e défaut de réserve ne peut opc-rcr de ilu
r4\
�de non-recevoir que par la présomption de payement.
Mais comment concilier cette présomption de payement
avec le désaveu d’avoir été débiteur? la dame de Chauvigny auroit dû au moins dans sa dernière défense
se concilier avec elle-même.
P A G È S - M E I M A C , anc. jurisc.
''
MALLET,
*
!•
avoué.
•
•
A R io m d e l 'im p r im e r i e d e L A N D R I O T seul imprimeur du
T rib u n a l d ’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baudinot-Lasalle, Claude. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac, ancien jurisconsulte
Mallet
Subject
The topic of the resource
lettres de change
dot
Chauvigny de Blot (famille)
émigrés
faux
protêts
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude Baudinot-Lasalle, propriétaire, habitant de la commune de la Pacaudière, département de la Loire, intimé ; contre dame Gabrielle-Louise Guillebon, veuve de Pierre Chauvigny, habitante de la ville de Moulins, appelante d'un jugement rendu au tribunal de commerce de la même ville, le 27 vendémiaire an 10.
Table Godemel : Lettres de change, font foi contre le souscripteur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1798-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0907
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0906
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53068/BCU_Factums_G0907.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
La Pacaudière (42163)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Chauvigny de Blot (famille)
dot
émigrés
Faux
lettres de change
protêts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53067/BCU_Factums_G0906.pdf
e4cdd80d363c4ff37dc85660f8163ce1
PDF Text
Text
t>
MÉMOIRE
•
Dam e G
P, 0 U R
a b r ie l l e - L o u ise
G U I L L E B O N , veuve
de P i e r r e C H A U V I G N Y , habitante de la ville
de M oulins, appelante d’un jugement rendu au
tribunal de commerce de la même ville, le 2 7
vendémiaire an 10
C O N T R E
,
C l a u d e B A U D I N O T - L A S A L L E proprié
taire habitant de la commune de la Pacaudière,
département de la Loire, intime.
,
L A dame Chauvigny a été traduite au tribunal de com
merce de Moulins par le citoyen Lasalle , son gendre;
elle est condamnée au payement de la somme de 5,000 fr,
A
�( 2 )
montant'de trois lettres de change par elle souscrites à.
son profit ; letfres de change qu’elle avoit données par
simple précaution, dont il n’a été fait aucun emploi ;
qu’elle a retirées sans avoir l’attention de les bâtonner,
et qui lui ont été soustraites par son gendre, lorsqu’elle
éloit éloignée de son domicile.
II est difficile de se défendre d’un sentiment d’indigna
tion, lorsqu’on connoît l e s circonstances et les faits de
cette cause. La dame de Chauvigny n’oubliera cependant
pas qu’elle plaide contre le mari de sa fille : c’est avec
douleur qu’elle se voit obligée' de publier ce mystère
d’iniquité. Elle ne se permettra donc aucunes réflexions
amères; elle ne-dira que«^cè qui est nécessaire pour*sa
défense, et le citoyen Lasalle doit lui savoir gré de cette
modération,... .
•
,,
.
*- f
... "
F A I T S.
r ~
^
• j
j
:
Pierre Chauvigny de B lot, mari de l’appelante, a été
porté sur la liste fatale des émigrés ; fuyant loin de sa
patrie, son épouse a éprouvé les plus cruelles persécu
tions dans ces temps de troubles et d’orages qu’on voudrcrit effacer de sa mémoire.
< En l’an 5 , la dame de Chauvigny succéda en partie à.
un sieur Aurillon de Berville, décédé à Soleureÿ elle
reçut pour sa p a rt, tant en contrats de rente qu’en
billets et obligations, une valeur de 88,23.5 fr. elle
donna procuration, le 26 septembre 1795, i\ un sieur
Frédéric-A rnold Obreist, bourgeois de Soleurc, de
recevoir et poursuivre les rentrées de rentes, billets,
obligations, et tous remboursi'incus que feroient les
�{ 3
)
débiteurs. Elle en fournit un état à son mandataire qui
lui en donna reconnoissance.
A mesure de chaque perception, le fondé de pouvoir
adressoit les différentes sommes par lui reçues au cit.
Lièvre, négociant à Lyon, qui étoit en correspondance
avec la dame de Chauvigny. Le citoyen Lièvre recevoit les
fonds , les gardoit aux conditions convenues, ou les faisoit
passer, suivant les besoins de la dame de Chauvigny.
Cette succession répandit l’aisance dans la maison de
la dame de Chauvigny. Ce soulagement qu’elle recevoit
si à propos, et dans un temps ou elle ne jouissoit point
encore de sa fortune, lui fit tourner ses regards sur son
ép ou x, 'l’objet continuel de ses regrets, et dont elle gé-.
missoit d’ctre séparée j elle espëroit pouvoir pbtenil' sa
radiation.
Pour son malheur, le citoyen Baudinot-Lasalle étoit
alors à Moulins; il s’annonçoit comme un personnage
important, vantoit son crédit et ses relations avec les
personnes en place ^et faisoit entendre qu’il pourroit plus
qu’un autre contribuer à une radiation qui faisoit l’objet
de tous les vœ ux, de tous les désirs d’une épouse affligée.
Baudinot-Lasalle, intx-oduit chez la dame de Chauvigny,
employa toutes les ressources de l’art,; tous les manèges
de la séduction, et parvint à obtenir en mariage la fille
aînée de la dame de Chauvigny.
C’est le 7 messidor an 6 que fut rédigé le contrat de
mariage de Baudinot-Lasalle avec la demoiselle de Chau
vigny. La dame sa mère lui constitua une dot de 40,000 f.
remboursable après deux années expirées, à compter du
jour de la célébration du mariage.
A a
�(4 )
' L e citoyen Baudinot-Lasalle, qui affichoit le ton et le
luxe de l’opulence, avoit souscrit une lettre de change
de 3,000 francs, qui fut acquittée par le citoyen Lièvre,
correspondant de la dame de Chauvigny, le 9 thermidor,
trois jours après son mariage. Ce payement est établi par
le compte fait double entre feu Lièvre et la dame de
Chauvigny, ainsi que par la correspondance des citoyens
Baudin frères, qui étoient porteurs de cette lettre de
change.
Ce n’est pas le seul payement qui ait été fait pour son
compte ; mais on aura occasion de revenir ,sur ce point.
Enfin Baudinot ayant persuadé à sa belle-m ère qu’il
lui é toit facile d’obtenir la radiation de son m ari, la dame
de Chauvigny le presse d’aller faire des démarchesàBarisjelle lui compte 3,000 francs pour son voyage, et elle y
ajoute cinq lettres de change montant à 9,700 francs,
qu’elle tira au profit de son gendre sur L ièvre, négo
ciant à L yon , son débiteur. '
Ces lettres de change sont en date des 1 2 ,1 3 et 14 bru
maire an 7; savoir, deux du 12, dont l’une de 1,200 fr.
et l’autre de 2,350 fr. la première payable le 12 nivôse
suivant, et la seconde le 12 pluviôse aussi suivant; deux
autres en date du 13, montoient l’une à 1,400 fr. payable
le 13 nivôse lors prochain, et l’autre de 2,350 fr. payable
le 12 pluviôse aussi suivant; enfin celle -du 14 brumaire
étoit de 2,400 fr. payable le 14 nivôse de la même année.
Ces lettres de change avoient une destination sacrée :
c’étoit une précaution que prend t ladame.de Chauvigny,
en prévoyant le cas où son gendre seroit dans la nécessité
de faire des dépenses .'extraordinaires pour son mari.
�.( 5 )
Elle vouloit obvier à tous les obstacles, à tous les retards*
Bodinot-Lasalle l’a ainsi reconnu dans plusieurs lettres
qu’on aura bientôt occasion d’analyser , et qui prouvent
qu’il n’a jamais fourni la valeur de ces lettres de cliange.
La dame de Chauvigny elle-m êm e donna avis au
citoyen Lièvre des lettres de change qu’elle avoit tirées
sur lu i, et le citoyen Lièvre répondit qu’il n’avoit pas
sur le moment les fonds pour les acquitter ; qu’il falloit
les retirer jusqu’à nouvel ordre : mais ces letti’es ne
parvenoient pas à la dame de Chauvigny : sa corres
pondance étoit interceptée; et ce ne fut,qu’après le
départ de son gendre, qu’elle put recevoir des nouvelles
duicitoyen Lièvre. Ce sopt les lettres reçues postérieurement à ce départ , -qui c^pprqriïjent ¡que le citoyen Lièvre
en avoit écrit antérieurement plusieurs autres qui ayoient
été interceptées.
Enfin, le citoyen Lasalle part potfr Paris avec l’argent
et les lettres de change de sa [bolle-mère : son premier
soin, en arrivant,-est de chercher, à négocier les cinq
lettres de change : on ne veut les escompter qu’autant
qu’elles seront acceptées par le citoyen Lièvre qui refuse
son acceptation. Une lettre qp ,date du 30 brumaire .an,
sept, écrite par le citoyen Lasalle au citoyen làèvTC 3
apprend toutes ces circonstances : « Je n’ai pu me
» dispenser, d it-il, de vous faire présenter pour a c c e p t e r
» trois traites montant ensemble à 5,900 fr. dont la
» destination est Jaite et relative à Vajfaire de mon
» beau-père. Comme je suis peu connu ici où je n’ai
» ipas oie ii’ésidençe habituelle , V o u s sentez cju’i'l m’eût
» é t é impossible de négocier saus votre a c c e p t a t i o n , a
�( 6 )
Plus bas il ajoute : « Madame de Chauvigny m’informe
» que la démai’che qu’elle a faite de tirer sur voufe, vous
» a fait de la peine ; je crois devoir i c i , pour justifier
» cette action, vous rappeler, et la promesse que vous
» lui aviez faite d’une rentrée de fonds beaucoup plus
» conséquente que celle''dont elle dispose , et en même
» temps vous remettre sous les y eu x Vemploi sacré
» de cet argent. »
'
Il est bien évident , d’après les expressions-de cette
lettre, que Lasalle n’avoit point fourni la valeur des cinq
lettres de change; qu’elles étoient destinées aux dépenses
qu’il pouvoit faire pour obtenir la radiation de monsieur
dé' Chauvigny.'M ais le citoyen Lièvre refusai toujours
d’accepter, malgré que Lasalle eut'expédié de-Paris à
Lyon un certainBastine, son ami, qui présenta de nouveau
les effets chez le citoyen Lièvre.
'
:j
■ Lés échéances arrivent; lés lettres sdilt'protestées, faute
de payement Lasalle se plaint de cet événement à la ddme
de Chauvigny, sabellé-mèi'e,et lui écrit’que le défaut de
fonds lui fera manquer la réussite de ses afiaires.
La dame de Chauvigny s’empresse de lui adresser une
somme de 800 francs, en une lettre de ehange tirée par
Cordez, banquier ci Mouliné , sur Duc lied 6 et Petit à Paris.
Dans le même temps Lièvre lui fait passer 4,o44<irancs
de fonds. Lièvre en donne1avis ;V la dame de Chauvigny
par une lettre de L yo n , en'date du 6 pluviôse an sept;
et Lasalle en accuse la réception ait citoyen Lièvre par
line lettre du 26 du môme mois de pluviôse. •*; >
Baudinot-Lasalle revient à Moulins y après un séjour
de trois mois à Paris, sans -avoir fait aucune'démarche
�U
i
( 7 )
pour obtenir la radiation de son beau-père. Il se repose
quelques jours à M oulins, et se rend bientôt à Annecy,
lieu de son origine, avec son épouse. La dame de Chauvigny accompagne sa fille dans ce voyage ; elle s’arrête à
L yo n , où elle voit le citoyen L ièvre, reçoit de lui des
fonds, et donne à son gendre 2,400 francs.
Arrivée à Annecy, la dame de Cliauvigny fait im
compte général avec son gendre , d.es sommes qu’il a
reçues jusqu’alors. Il est à observer qu’à cette époque,
Je payement de la constitution de dot promise à la
demoiselle de Cliauvigny, n’etoit pas^ échue. La dame
de Cliauvigny produit le bordereau des sommes qu’elle
a payées, et Lasalle produit les bordei’eaux de ses dé
penses.
, La dame de Cliauvigny est assez heureuse pour con
server deux- états écrits en entier de la main du citoyen
Lasalle : l’un contient la recette, et prouve que Lasalle
a reçu pendant son séjour à Paris la somme de 4,840 fr.
le second, qui est l’état de dépense, porte une somme
de 5,620 francs.
Le citoyen Lasalle étoit à Paris avec son épouse et
sa belle-sœ ur; il porte pour le traiteur pendant trois
mois 2,620 fr. pour le vin et le logement 860 fr. ports
de lettres 70 fr. il dit avoir donné pour madame de
Cliauvigny 936 fr. frais de route 85 o fr. bois de chauffage
284 fr. ce qui établit bien évidemment qu’au moins
pendant son séjour il n’a souifert ni la faim, ni la soif,
ni le froid.
La dame de Cliauvigny est assez généreuse pour ne
faire aucune difficulté; elle alloue ce mémoire; et comme
J ti I
�t
"*
( 8 )
le citoyen Lasalle, d’après ce compte, avoit reçu jusque®
alors une somme de 17,740 fr. il fut déduit celle de
5,620 fr. pour dépenses, 1,020 fr. pour six mois d’intérêts
de la constitution de dot ; il en résulte que le citoyen
Lasalle étoit débiteur d’une somme dë 11,000 fr. dont
il donna quittance à sa belïe-mère sans aucune réserve,
et ci imputer sur la dot à écheoir de son épouse.
Cette quittance est en date du 12 germinal an 7 : il
est dit qu’elle est faite à Jlnnecy, et de suite Lasalle
remit à la dame de Chauvigny les cinq lettres de change
qu’elle lui avoit données avec les protêts, 16s bordereaux
de recette et de dépense dont 011 vient de parler.
L e 16 du même W ois dé germinal, après ce compte
fait et la quittance donnée, le citoyen Lièvre fit passer
au citoyen Lnsalle à A n n ecy trois effets de 1,000 fr.
chacun, dont il accusa la réception ; depuis le citoyen
Lièvre a payé pour lui une lettre de change de 3,000
fr. et lui a envoyé 600 fr. qu’il avoit demandés par une
lettre du 17 floréal an 7; enfin le citoyen Lièvre a payé
encore une somme de 3,000 fr. à un homme de Chamberi pour le compte du citoyen Lasalle , ainsi que le port
de ses effets.
Bientôt après la dame de Chauvigny quitte A n n ecy,
revient à Lyon, et le 19 germinal an 7 fait son compte
définitif avec le citoyen Lièvre.
Dans ce compte le citoyen Lièvre comprend toutes les
sommes qu’il a payées à Lasalle, ou pour lu i; elles se
portent à i 5, 8 o 8 lr. 19 s. 6 d.
Lasalle reste à peine six mois dans le lieu de sa nais
sance, manquant d’argent et de crédit et se voyant sans
ressource
�( 9 ).
ressource; il demande à revenir chez sa belle-mère qui
l’accueille avec obligeance.
La dame de Chauvigny ne perdoit pas de vue la ra
diation de son mari. Jusqu’alors ses démarches avoient
été infructueuses; pour le coup elle ne voulut s’en rap
porter qu’à ses propres soins et h sa tendresse; elle se
rendit à Paris pour solliciter elle-même. Elle se vit obli
gée de livrer sa maison de Moulins à son gendre. Elle
obtient à Paris une surveillance pour son époux ; et à
peine le reçoit-elle dans ses bras, qu’elle a le malheur
de le perdre. Elle quitte sur le champ un séjour qui lui
devenoit odieux, et ne trouve dans sa maison que trouble
et désordre : Lasalle agissoit en maître, malti'aitoit sa
belle-mère qu’il clcvoit respecter ; elle se vit forcée de 1q
chasser de chez elle.
- L e gendre, humilié ou irrité de cette expulsion, forma
trois demandes contre sa belle-mère. La première dont
il faut d’abord s’occuper , fut celle en payement d’une
somme de 9,700 fr. montant de cinq lettres de change
que sa belle-mère lui avoit confiées lors de son départ
pour Paris. Comment le citoyen Lasalle avoit-il dans ses
mains ces cinq lettres de change après les avoir remises il
sa belle-m ere le 12 germinal an 7 , jour du compte
an etc et de la quittance donnée ? La dame de Chauvigny
fut bientôt instruite que, pendant son absence, Lasalle
avoit fouillé dans tous les endroits où étoient les papiers
de la dame de Chauvigny; qu’il avoit trouvé dans le
tiroir d’une commode les cinq lettres de change non
batonnées , c l qu’il ne s’étoit fuit aucun s c r u p u l e de se
les approprier, ainsi que toute la c o r r e s p o n d a n c e qu il
B
�( ÏO )
avoit tenue avec sa belle-mère'pendant son séjour à Paris,
Mais il arriva, par un de ces hasards heureux qu’il est
impossible d’expliquer, que la dame de Chauvigny, qui
avoit eu la négligence de ne pointbâtonner ces lettres de
changé, et de les placer dans- une commode’, avoit mis
dans le double fond d’une écritoire plusieurs quittances
données par Lasalle, ainsi que les actes- de ?protêts de
des mêmes lettres de change. Gomme elle avoit emporté
avec elle son écritoire lors de son départ, elle conserva
les protêts et lès quittances, et;lës a toujours en son pouvoir.
Indignée de l’audace de sort’gendre', mais n’osant cepen
dant pas apprendre ait public cette escroquerie coupable,
elle consulte sur'les;moyens de défense qu’elle doit em
ployer. On lui dit que- dès;qu?elle vouloit pallier- lestorts et les infidélités du citoyen Lasalle, elle avoit uiï
m oyen simple d’écarter cette demande par une fin de n o n -
invincible. Elle n’avoit qu’à garder les protêtspardevers e lle , et-- alors le tireur des lettres de change
étoit déchargé dô plein-droit, faute-de protêts, d’après
la dispositioil de l’article IV du titre Y de l’ordonnance
de 1673.
La dame de Ghauvigny s’en tintà cet avis; elle demanda
a être déchargée du payement faute de protêts. Lasalle
eut beau soutenir que le citoyen Lièvre avoit refusé
d’acquitter ces lettres de change ; comme iln ’en rnpportoit
aucune preuve, le tribunal de commerce le déclara nonrecevable dans sa demande , et le-condamna aux dépens
par jugement en date du 21 floréal an 9.
Lasalle ne se tient pas pour battu par ce premier
jugement : il prend des informations i\ Lyon , et apprend
recevoir
�127
C 111
que dans cette, ville les notaires chargés de faire les
protêts sont en usage d’en garder minute ; il obtient
de Fromental, notaire, ministre de ces protêts, de secondes
expéditions, et fait assigner de nouveau sa belle - mère
en payement de ces lettres çle change,, en lui donnant
copie des actes de »protêts. j>
■ L a dame de Chauvigny est encore rassurée sur cette nou
velle tentative : on lui dit que d’après les articles X U I ,
X I V e tX V du même titre, son gendre est non-recevable
dans son action , faute par lui d’avoir poursuivi le
payement des lettres de change dans la quinzaine du
protêt. ‘E lle préfère encore ce moyen plutôt que de
dévoiler la turpitude de son gendre ; mais c e lu i-c i
argumente de la disposition de l ’article X V I du titre V.
de la même ordonnance , et prétend que la dame de
Chauvigny ne pouvoit opposer la fin de non - recevoir,
qu’en établissant qu’elle avoit fait des fonds suffisans et
en temps utile entre les mains de L ièvre, sur qui elle avoit
tire pour acquitter le montant de ces lettres de change.
La dame de Chauvigny soutint avoir fait les fonds,
et le tribunal de commerce en ordonna la preuve. Mais,
comme la dame de Chauvigny se disposoit ¿\faire procéder
à l’enquête, elle fut assaillie par une seconde demande
d’un genre encore plus extraordinaire.
Une dame Bourgeois, aubergiste h Moulins, fit assigner
la dame de Chauvigny au tribunal de commerce, en
payement d’une somme de 5,ooo francs, montant de trois
lettres de change souscrites au profit de Lasnlle, et signées
Chauvigny, que I/iisalle avoit passées à l’ordre de celle
dame Bourgeois, sa créancière.
B a
�La dame de Cliaiwigny étoit certaine de n’avoir pas
souscrit ces trois lettres de change ; elle nia les signatures
qui y étoient apposées; elle demanda que l’écriture fût
vérifiée par des experts sur pièces de comparaison.
Sur cette dénégation , jugement contradictoire qui or
donne la vérification. Des experts sont respectivement
nommés : vingt pièces de comparaison sont remises entre
les mains des experts, parmi lesquelles se trouvent les
cinq premières lettres de change, et les quinze autres sont
des pièces authentiques. Ces experts, après le plus mûr
examen, ont unanimement décidé que les signatures Gitillebon-Chauvigny apposées sur les trois lettres de change,
dont la dame Bourgeois réclamoit le payement, ri ont
jam ais dérivé de la même main qui a sigri« Chamngny
sur les cinq lettres de change qui ont été présentées comme
pièces de comparaison , et Guillebon-Chainngny apposé
sur les quinze autres pièces remises aussi aux experts
comme pièces de comparaison.
Cette seconde tentative de I.asalle effraya la dame de
Chauvigny. Elle fut même instruite qu’il existoit encore
plusieurs autres lettres de change sorties de la même fa
brique , et que Lasalle se proposoit de négocier. Sa pa
tience fut lassée; elle se détermina à rendre plainte contre
son gendre en soustraction des cinq lettres de change
m on tan t <
\ la somme de 9,700 francs , dont il demandoit
le payement d e v a n t le tribunal de commerce de l’arron
dissement de Moulins. Elle exposa dans sa requête dé
plainte que, le 12 germinal an sept, ces lettres de change
lui a v o i e n t été rendues par Lasalle ;
Que, le 19 du même mois, le citoyen Lièvre les avoit
�( i3 )
vues en sa possession; qu’elle les avoit présentées le même
jour qu’elle arrêta son compte avec le citoyen Lièvre père ;
Que, pendant son séjour à Paris, Lasalle s’étant pro
curé la clef de la commode dans laquelle elle avoit mis
ses papiers , avoit soustrait ces lettres de change, et qu’il
avoit été vu cherchant et feuilletant dans les papiers de
sa belle-mère.
Les déclarations des témoins furent conformes aux
. faits exposés en la plainte lors des premières informations
rédigées par écrit. Lasalle subit interrogatoire ; et cette
pièce est très-importante à connoître.
• Dans sa première réponse, il prétend qu’il a envoyé
à la dame de Chauvigny les protêts des cinq lettres de
change, pour l ’instruire q u ’elles n’avoient‘point été ac
quittées.
Bans sa seconde réponse, il désavoue avoir tiré aucun
effet sur le citoyen Lièvre pendant son séjour à Paris,
à raison des cinq lettres de change protestées. A la vérité
il convient avoir reçu de Lièvre des effets du montant
desquels il ne se rappelle pas; mais qui lui ont été acquittés
à Paris , et qu’il en a donné une quittance particulière à
la dame de Chauvigny.
Interrogé si les eifets qui lui ont été envoyés par le
citoyen L ièvre, n’étoient pas pour payer le montant des
lettres de change protestées,
Il répond qu’il peut être que le citoyen Lièvre ait
pensé acquitter les effets protestés , ruais que lui répon
dant a donné quittance à la dame de Chauvigny, à
imputai' sur la constitution dotale de la dame son
épouse.
�I ..I
t
;( u )
On lui demande si, le 12 germinal an 7 , la dame de
Chauvigny ne s’est pas pendue à A n n ecy, département
du M ont-Blanc, avec lui Lasalle et son épouse, s’ils n’ont
pas fait un compte avec ¡laidame deGliauvigny des diffé
rentes sommes qu’il avoit reçues du citoyen Lièvre; si,
parle résultat de ce compte, Lasalle ne reconnut-pas avoir
reçu de la dame de Chauvigny la somme de .17,691 francs,
et si, déduction desidépenses faites par lui Lasalle , il ne
donna pas quittance à la dame de;Chauvigny,de-la somme
de ij,o o o francs, à imputer sur la constitution dotale de
son épouse ;
Il répond que la dame de Chauvigny s’est effective
ment rendue à Annecy , mais qu’il ne se rappelle pas
l ’époque ; qu’il ne fut fait aucun compte entr’eux audit
lie u , mais bien en la ville de M ou lin s, par le résultat
d u q u el il se trouva effectivement qu’il avoit reçu 11 ,ooo f.
dont il donna quittance à compte sur la constitution dotale
de son épouse. Il observe que dans le même compte ne
sont point entrées les cinq lettres de change protestées,
m a i s seulement les effets par ;lui tirés sur le citoyen Lièvre,
ou à lui envoyés par ce dernier.
Il ajoute qu’il vouloit bien faire entrer les mômes
cinq lettres de change dans le com pte, mais que la dame
de Chauvigny ne voulut pas, en disant qu elle préféroit
se libérer de partie de la dot de sa f i l l e , et qu’il 11’avoit
aucun risque à co u rir, puisque les lettres de change avoient
été prolestées.
Interrogé , si pendant le séjour que la dame de Chau
vigny a fait h Paris , lui répondant n’a pas fait de recher
ches dans le tiroir d’une commode qui est placée dans la
�ù C t
C i5 )
chambre à coucher de la dame de Chauvigny, dans sa
maison sise rue des Carmelites ; s’il n’â pas trouve tous ses
papiers, parmi lesquels étoient les cinq lettres de change
tirées sur le citoyen Lièvre les 12 et 13 brumaire an 7 ,
et qui avoient1 été protestées ; s’il n’y a pas également
trouvé la correspondance que lui répondant avoit eue
avec la dame de Chauvigny, et s’il ne s’est pas emparé
desdites cinq lettres de change protestées, ainsi que de
sa correspondance;
A répondu, q u à la vérité', il a fa it quelques recher
ches dans le tiroir de la• commôde de la dame de Chauvigny; mais que s’il1 lés a faites, c’est que la dame' de
Chauvigny avoit écrit à soncépouse de lui envoyer quel
ques papiers dont elle avoit besoin î\ Paris ; qu’en faisant
cette recherche, i l n ’a vu aucune lettre de change, ni»
correspondance danslefmême tiroir; que conséquemment
il ne" s’en est point emparé.
On lui demande pourquoi lors de la demande par lui
formée au tribunal de commerce , en payement des cinq
lettres de change protestées sur le citoyen L iè v re , il ne
rapporta pas en même temps les protêts; et si dans le
temps les mêmes protêts étoient à sa possession.
Il répond que s’il n’a pas rapporté les protêts lors do'
cette première demande, c’est parce qu’il les avoit envoyés
de Paris à la dame de Chauvigny pour l’instruire que ces
lettres de change avoient été pro testées, et que dans ce
temps il regardoit ces lettres de change comme sa pro
priété , ayant'fait pour la dame de Chauvigny des dé
penses qui en excédoient le montant.
Il convient ensuite s’être fait délivrer des secondes
�(i6)
expéditions des protêts, parce que d’après le jugement qui
avoit été rendu par le tribunal de commerce, ils lui étoient
nécessaires pour former une nouvelle demande contre la
dame de Cliauvigny.
Sur la question qui lui est faite, si la dame de Cliauvigny a fait un compte avec le citoyen L ièvre, et si dans
ce même compte ne sont pas entrées les cinq lettres de
change protestées ,
>
Il répond que la damé de Chauvigny étant venue
accompagner sa fille dans le voyage qu’elle fit à A nnecy,
elle lui dit effectivement qu’elle alloit faire son compte
avec le citoyen Lièvre, mais il n’en a pas été témoin. 11
observe quY/ ne paroît pas probable que les cinq lettres
de change soient entrées dans le compte, en supposant
qu’il ait été fait, d’autant que ces cinq lettres de change
n’ayant point été acquittées par le citoyen Lièvre , en
tout ou en partie, la dame de Chauvigny ne pouvoit
lui en faire raison; qu’elle pouvoit d’autant moins les
faire entrer dans le compte, qu’elle n’avoit pas en sa
possession les cinq mêmes lettres de change, puisqu’elles
ont toujours resté dans ses mains.
On lui demande comment il a fourni le montant de
ces cinq lettres de change à la dame de Chauvigny, et
en quelle monnoie ;
11 répond qu’il a fourni le montant des mêmes lettres
de change à la dame de Chauvigny, par les différentes
avànces qu’il a jh ites pour elle dans la ville de P a ris,
pour remplir la mission dont elle tavoit chargé.
11 est nécessaire de s’arrêter sur cet interrogatoire pour
démontrer que le citoyen Lusalle en a imposé sur tous
les
�' ( 17 ï
les points, et pour prouver en même temps qu’il n’a
point fourni la valeur des* cinq lettres de change ; qu’ainsi
il ne peut en obtenir la condamnation.
Lasalle prétend dans sa première et sixième réponse,
qu’il a envoyé de Paris à la dame de Chauvigny,, sa bellem ère, les protêts des cinq lettres de change qu’elle lut
avoit consenties, pour l’instruire: que ces,lettres-de change
avoient été protestées, et que par,cette raison il ne pouvoit les présenter lors' de la première- demande-qu’ilforma contre là dame de Chauvigny.
Il paroissoit en effet assez singulier que-la dame de
Chauvigny eût les protêts en son pouvoir,.et qu’elle n’eût
pas les lettres de change.
On a vu plus haut pourquoi la dame de Chauvigny
avoit conservé lès protêts *, c’est qu’heureusement pour
elle , ils ne se trouvoient pas déposés au même lieu que
les lettres de change.
Mais s’il est vrai que le citoyen, Lasalle a envoyé de
Paris ces protêts à la dame de Chauvigny;,, pourquoi ne
l ’a-t-il pas ainsi déclaré lors du jugement qui a été rendu
sur cette première demande, le 21 floréal an 9 ? Il étoit
tout simple, lorsque la dame de Chauvigny lui opposoit
une fin de non-recevoir, faute par lui de rapporter les
protêts, qu’il déclarât qu’il les avoit envoyés à s a bellemère , de Paris, et qu’elle les avoit entre les mains.
Cependant on lit dans ce jugement que le citoyen La
salle explique en quoi consistent ces lettres de change;
qu’il déclare en avoir passé son ordre au profit d’un citoyen
Pax-aire, et celui-ci au citoyen Louis Flori; qu’elles avoient
été présentées au citoyen L ièvre, qui n’avoit voulu ni les
�(
1
8
5
accepter ni en payer le montant. Il n’est point question clé
protêt dans les dires de Lasalle ; la dame de Cliauvigny
excipe des termes de l’ordonnance de 1673, pour soutenir
que les porteurs de lettres de change qui n’ont pas été
acceptées, sont tenus de les faire protester dans les dix
jours, et que faute de protêt , ils sont non-recevables à
poursuivre les tireurs. Lasalle se contente de répondre que
les protêts étoient entre les mains de la dame sa bellemère ; qu’il les lui avoit communiqués, et que la preuve
de leur existence résultoit d’une lettre écrite par le citoyen
Lièvre à la dame de Chauvigny, le 18 nivôse an 7, dont
il fait lecture au tribunal.
Comment Lasalle avoit-il entre ses mains la lettre écrite
à sa belle-m ère, s’il n’avoit pas soustrait sa correspon
dance ? Pourquoi ne dit-il pas alors qu’il avoit envoyé de
Paris ces protêts k sa belle - mère ?
Aussi le tribunal, considérant qu’aux termes de l’or
donnance, tout porteur de lettres de change doit en faire
faire le protêt dans les dix jours de Téchéance ; que dans
la quinzaine suivante il doit en faire la dénonciation au
tireur ou endosseur ; passé lequel délai, il est non-recevable à exercer une action en garantie ;«
Considérant que le demandeur n’a justifié que ni lu i, ni
ceux entre les mains desquels ont passé les lettres de
changé, aient fait faire aucun protêt desdites lettres, ni
dénonciation d’iceux, déclare Lasalle non-recevable dans
sa demande.
Il est bien évident que si l’envoi des protêts eût été
vra i, le citoyen Lasalle n’auroit pas manqué de s’en faire
un moyen, de demander uu sursis pour obtenir une seconde
�•C r 9 .5
expédition des protêts ; ou, s’ilignoroit que les notaires en
gardassent minute, pour faire faire des recherches au
bureau de l’enregistrement.
Mais le silence du citoyen Lasalle, dans un moment
aussi intéressant pour lu i, est une preuve de son infidélité.
Et comment ose-t-il dire , dans son interrogatoire du 12
frimaire -an 10, qu’il avoit envoyé les protêts à sa bellemère? Cette idée lui est venue bien tard; et c’est au moins
une grande maladresse.
A u surplus, en considérant la date de ces protêts, il
y a impossibilité qu’il les ait envoyés de Paris à sa bellemère. En effet, les lettres de change sont tirées les 12, 13
et 14 brumaire an 7 ; leur échéance étoit pour les 12 , 13 ,
1 6 nivôse et 1 2, pluviôse fixe.
L e citoyen Lasalle est parti le 14 ou le i 5 brumaire an
6ept pour Paris. Il n’y a resté que trois mois, qui ont fini
le 1 5 pluviôse ; et le dernier de ces protêts n’a été fait à
Lyon que le i 5 pluviôse an 7. Ils n’ont dû être envoyés
au citoyen Lasalle que tous ensemble -, or, le 1 5 pluviôse
il y avoit trois mois que le citoyen Lasalle étoit à Paris ;
il n’a donc pas eu le temps de recevoir les protêts à Paris;
et de les faire passer de Paris à sa belle-mère : ainsi il en a
imposé évidemment dans son interrogatoire.
Cela est d’autant plus certain, qu’indépendamment de
ce que 1 envoi de Lyon a Paris a du tenir plusieurs jours,
c’est que les protêts n’ont pu parvenir dans ses mains que
long-temps après. En effet, il a fallu qu’ils passassent entre
les mains de Flori, pour le compte de change et rechange,
timbre de retour et frais de protêt ; de Flori ils ont dû
aller ù Paraire, pour le même compte, et ensuite au citoyen
G 2
�Lasalle. Tout'cela-a été fait; et même le citoyen Lasalle
a remis à sa belle-mère, en même temps qu’il lui rendoit
les lettres de change et les protêts, le compte de retour
revenant au citoyen Flori : la dame de Cliauvigny l’a en
son pouvoir.
Ce n’est donc qu’à A n n e cy , et lors du compte qui fut
fait entre Lasalle et la dame de Cliauvigny, que les lettres
de change, les protêts, le compte de retour, ont été remis
à la dame de Chauvigny, pour faire le compte avec son
gendre ; et l’infidélité du citoyen Lasalle est à découvert.
Dans sa quatrième réponse à l’interrogatoire, Lasalle,
tout en convenant quehrdame de Chauvigny s’est rendue
à Annecy, désavoue qu’il ait été fait un compte en ce lieu;
il soutient qu£ ce compte n?a été fait qu’en la ville de
~Moulins, que par -le résultat il se trouva avoir reçu une
somme de r i ,000 ïr. 'dont il donna quittance à compte
sur la constitution dotale de son épouse.
Mais un menteur ne devrùit pas manquer de mémoire.
Comment veut-il'que le compte ait été fait à M oulins?
Comment veut-il que ce soit à Moulins qu’il ait donné
quittance'de 11,000 francs ? lorsque cette quittance qui
est entre les mains de la'dam c'de Ghauvigny, écrite en
entier de la main du 'citoyen Lasalle, se trouve par lui
datée d’Annecy, du 12 germinal an 7 ; ’lorsque le 8 du
même mois de germinal, Lasalle écrit d’Annecy au citoyen
L ièvre, qu’il est sur'le point de faire un compte définitif
avec madame de Chauvigny. L e citoyen Lasalle en im
pose donesur tous les points; et quelle confiance peuvent
mériter ses assertions, lox-squ’elles sont démenties par des
actes q u i émanent de lui seul?
�d
( 21 3
On va voir actuellement qu’il prouve lui-même qu’il
n’a point fourni la valeur des cinq lettres de change dont
il réclame le payement.
Dans sa sixième réponse, il dit qu’il regardoit ces lettres
de change comme sa propriété, a y a n t f a i t pour la dame
de Chauvigny des dépenses qui en excédoient le montant.
Dans la dixième réponse, il répète q u il a fo u r n i le
montant de ces mêmes lettres de change à la dame de
Chauvigny par les différentes avances q u il afa ite s pour
elle en la ville de P a r is , pour remplir la mission dont
elle Taçoit chargé.
D ’après ces déclai’ations réitérées, le citoyen Lasalle
n’a donc fourni le montant de ces lettres de change, que
par les dépenses qu’il a faites pour la dame de Chauvigny,
et pour la mission dont elle l’avoit chargé. Il faut,donc
qu’il justifie de ces dépenses,.en quoi elles rconsistent ; il
iaut donc avant tout régler son compte, et établir que les
dépenses articulées forment la valeur deces cinq lettres de
change.
Eh bien, le citoyen Lasalle est encore confondu par
ses propres écrits ! Il a fourni lui-m êm e'à la dame de
Chauvigny ses états de recette et de dépense écrits en entier
de sa main. Par l’état de recette, il Teconnoît avoir reçu
de M . Lièvre pendant son séjour à Paris, la somme de
4,040 fr. et de la dame de Chauvigny, celle de 800 fr.
en tout 4,840 fr.
L ’état de sa dépense, toujours'écrit de sa main pendant
son séjour à Paris, se porte.à:1a somme de 5,620 f r a n c s ,
et dans cet état il n’a porté qu’une somme de 936 francs,
employée pour M . dç Chauvigny.
�(22)
i-' Il lui a-été fait compte1de cet excédant de dépense,
lorsqu’il s’est reconnu débiteur de la somme de i i,ooo fr.
c’est le seul état de dépense qu’il ait fourni, et encore on
voit que .c’est un mémoire-d’apothicaire : il n’a donc pas
fourni la'valeur des cinq lettres-de change ; il est donc
sans action contre sa belle-mère.'., v, ", j.
. iv.v.v .
a Mais ce ;n’est ^pas Ala Iseule i inconséquence qui ; soit
échappée au citoyen. Lasalle. '■
.
.
v.’Dans sa troisième réponse,'le citoyen Lasalle convient
qu’il peut etre que le citoyen Lièvre,, en lui faisant passer
des fonds, ait pensé à acquitter ces effets ■
protestés ; mais
que lui en a donné .quittance à la dame de Chauvigny,
à imputer sur la constitution dotale de son épouse.
Dans la quatrième réponse, il déclare qu’il vouloit bien
faire entrer les cinq lettres de change dans le compte qu’il
a fait avec sa belle-mère; mais que la dame de Chauvigny
s’y refusa, en disant qu’elle préféroit se libérer ¡de partie de
la dot de sa fille, et qu’il n’avoit aucun risque à courir,
puisque les lettres de change avoient été protestées.
Cette déclaration est aussi invraisemblable que ridicule.
L e protêt des lettres de change é t o i t une raison pour que
la dame de Chauvigny se pressâtd’en acquitter le montant,
dans la crainte d’être poursuivie par ceux au profit de qui
l’ordre en avoit été passé : et si elle en avoit été débitrice,
elle auroit sans contredit , imputé les payemens par elle
faits, sur le titre le plus onéreux , plutôt que sur une
c o n s t i t u t i o n dotale qui n’étoit exigible que 18 mois après.
On se rappelle,, en,effet, que Lasalle n’éloit marié que
depuis le mois de thermidor an six, et que la constitution
dotale u’étoit payable qu’après deux années expirées. O r,
�( 23 )
comment concevoir que le 12 germinal an 7 , la dame de
•Chauvigny eut voulu se libérer par préférence d’une dot
qui n’étoit payable qu’en thermidor an huit, plutôt que
d’acquitter des lettres de change par elle tirées, échues et
protestées.
• On n’oubliera pas d’ailleurs, que dans la cinquième
réponse de l’interrogatoire, le citoyen Lasalle convient
avoir fait des recherches dans le tiroir de la commode de
sa belle-mère ; et de là la preuve qu’il s’est rendu coupable
de soustraction.
Cependant l’instruction qui se faisoit à la police correc
tionnelle , n’empechoit pas le citoyen Lasalle de pour
suivie la seconde demande qu’il avoit formée contre sa
belle-m ère, depuis qu’il étoit muni d’une seconde expé
dition des protêts. La cause portée à l’audience du tribunal
de commerce de M oulins, le 21 vendémiaire an 10 , le
citoyen Lasalle conclut à ce que la dame de Chauvigny fût
condamnée consulaii-ement et par corps, à reprendre les
cinq lettres de change, et à lui payer la somme de 9,700 fr.
pour le montant d’icelles, avec intérêts à compter de la
date de chaque protêt.
La dame de Chauvigny se contenta de rapporter un
certificat du greffier du tribunal de police correctionnelle,
pour établir qu’il existoit en ce tribunal une plainte rendue
contre son gendre, en enlèvement et soustraction de ces
cinq lettres de change. Elle demanda qu’il fût sursis à pro
noncer sur la demande en payement, jusqu’à ce qu’il fût
statué définitivement sur sa plainte; et se réserva de faire
valoir parla suite tous moyens d’incompétence, de nullité,
et tous autres qu’elle aviseroit.
�tf\0
»1 »
(24)
Mais le tribunal considérant « qu’il ne pouvoit et ne
» devoit s’occuper que de la contestation pendante devant
» lu i, et non de la plainte portée au tribunal de police
■
fc correctionnelle,1 f
5) Considérant qu’il seroit abusif et préjudiciable, au
» commerce de suspendre, sous'un pareil prétexte, qui
» souvent pourrait 11’étre pas fondé, le payement des effets
» destinés par leur nature à le faciliter et iVl’étendre ;
» Considérant qu’irest de principe que | lorsqu’un titre
» sous signature privée a été reconnu en justice , il mé» rite la même confiance que celui qui est authentique,
i> et que de plusieurs précédens jugemens il'résulte que
» la dame de Chauvigny a reconnu que les cinq lettres
» de change dont il s’agit, ont été par elle souscrites ;
» que dès-lors elles forment titre contr’elle, et que l’exé» cution provisoii’c est duc au titre jtisqu’i cc qu’il ait
» été déclaré faux ou annullé ;
» Considérant enfin, qu’aux termes des articles X III,
» X I V , X V et X V I de l’ordonnance de 1673, les tireurs
» de lettres de change sont affranchis de toutes actions,
» faute de poursuites dans le délai prescrit par les articles
» cités, et lorsqu’ils prouvent qu’à l’époque à laquelle la
» lettre de change étoit payable, celui sur lequel elle a
» été tirée, avoit provision de la part du tireur pour
» l’acquitter ;
» Le tribunal , sans s’arrêter ni avoir égard à la
» demande en surséance, condamne la dame de Chau» vigny consulairemerit seulement, à reprendre celles des
» cinq lettres de change par elle souscrites au profit du
» demandeur, payables en nivôse an sept, au nombre de
trois
�»41
'( â 5 )
» trois ; ce faisant, la condamne à' payer au demandeur
» la somme de 5,ooo livres, montant de celle des trois
» dites lettres de change, aux intérêts d’icelles, à compter
» de la date des protêts, pour le montant de chacune des
» trois dites lettres de change; et néanmoins lui accorde,
» pour le payement de la somme de 5,ooo francs, le délai
» de quatre mois , à compter du jour du jugement;
» décharge la dame de Chauvigny du surplus des deîî mandes contr’elle formées, sauf à Lasalle à se pourvoir
» ainsi qu’il avisera. »
Après ce jugement, que le citoyen Lasalle n’a fait signi
fier à la dame de Chauvigny que le 18 germinal an 10,
les poursuites se continuèrent sur la plainte rendue en la
police correctionnelle. Les déclarations écrites dans la
première information, devoient pleinement rassurer la
dame de Chauvigny sur l’événement. Mais lorsque la cause
fut portée à l’audience, les héritiers Lièvre dont les dépo
sitions étoient surtout importantes , ne purent comparoître
dans une saison aussi rigoureuse ( nivôse an 10 ) : ils en
voyèrent leur exoine. La dame de Chauvigny demanda la
remise de l’audience, ou au moins la lecture des dépositions
des témoins absens; Lasalle s’y opposa, et les juges refusè
rent d’accorder la i*emise et de laisser lire les dépositions
des citoyens Lièvre.
Le citoyen Lasalle s’est vanté d’avoir obtenu le renvoi
de l’accusation : on va lui démontrer qu’il ne l’a pas obtenu
honorablement. Il suffit à cet égard de^eter les yeux sur
les conclusions du citoyen Pinot, commissaire du gouver
nement. 11 dit que dans le cas où le tribunal croiroit ne
pouvoir s’attacher aux dépositions écrites des citoyens
D
�^
i.i
( ^
' /. :
Lièvre, fils et oncte, à,raison de ce que ces* témoins n’ont
point paru sur la dernière assignation' qui leur a été
donnée, et n’ont point été entendus oralement à l’au
dience, il ne peut requérir l’application de la peine dont
la loi punit le délit de soustraction dont le cit. BaudinotLasalle est prévenu; 1 ' •
;
; *Attendu que le délit ne lui paroît pas alors suffisant'»
ïnent prouvé. ' r •
•- « Mais , si vu l’impossibilité où sont les témoins de
» comparaître à raison d’absence, éloignement ou autre
»' empêchement, le ti4bunal croit pouvoir faire usage
» de leurs dépositions écrites; comme ces dépositions
»1 réunies aux autres1faits acquis au procès , fournissent
»' une preuve complète de la soustraction dont le
» citoyen Baudinot est prévenu, il a conclu à ce que
» le citoyen Baudinot.en soit déclaré atteint et convaincu,
» et qu’en rconséquence, ' conformément à l’article II de
» la loi du 25 brumaire an 8 , il soit condamné en un
» an d’emprisonnement ; et aux frais de la procédure,
» conformément à la loi du 18 germinal. »
■
r Et ce n’étoit pas sans raison que le commissaire concliioit ainsi. iVoici'les déclai’atioiis dès citoyens L ièvre: ’
cc Jean-^Baptiste Lièvre fils, commisrvoyageur , dépose
» que , le 19 germinal an 7 , la dame veuve de Chau» vigny régla uu compte avec Philibert L ièvre, père
» do lui déclarant; que ce fut lui déclarant qui écrivit le
» même compte ; que lors d’icelui, la dame deChauvigny
» r a p p o r t a et fit voir, tant à’ son père qu’à lui , des
n lettres de change tirées par elle sur Philibert L ièvre,
a'à l’ordre du citoyen Lasallc; que lui déclarant 11c se
/
�( *7 )
» rappelle pas de quelle somme étoient les rlettres de
» change, ni en quel nombre elles étoient; que la dame
» Chauvigny lui fit v o ir, ainsi qu’à son père, les protêts
» qui a voient' été faits des lettres de change;à la re» quête de tellii qui en étoit porteur, et qu’il est à
» sa connoissance, qu’à l’époque du compte qui fut fait
» entre les dame de Chauvigny et Philibert Lièvre, ce
» dernier paya quatre mille' francs à la dame de Chau» vigny, et acquitta des traites tirées par le citoyen Lasa lie,
» qui montoient à environ 3,000 francs *, que la dame de
» Chauvigny, en recevant de l’argent du père de lui dé"
■
» clarant, en donna sur le -champ au citoyen Lasalle,
» son gendre, en lui disant: Voilà nos affaires réglées;
ajoute le d éclaran t, que dans le temj^s où la dame de
» C h au vign y régla son compte avec son père, le citoyen
» Lasalle étoit présent, fit des reproches au citoyen Lièvre
» père de ce qu’il n’avoit pas acquitté les lettres de
» change tirées sur lui ; que le citoyen Lièvre lui dit
» que ces lettres de change étoient trop conséquentes,
» et qu’il n’avoit pas voulu les acquitter; que le citoyen
» Lasalle qui avoit écrit au citoyen L ièvre, de Paris, dans
» des termes peu ménagés pour le presser d’acquitter ces
» lettres de change , lui en fit alors des excuses, et a
» ajouté que les faits dont il a rendu compte sont à la
» connoissance du citoyen L iè v re , notaire à Lyon. »
Claude Lièvre , notaire public à Lyon , a déclaré
« que, dans le mois de germinal an y , n’étant pas préci» sèment mémoratif du jo u r, il alla voir feu Philibert
» L iè v re , son frère, négociant, en son d o m i c i l e , rue de
*» l’Arbre-Soc, il le trouva dans une pièce sin- le devant,
D a
�( 28 )
» qui j ¿toit avec la dame veuve ' Chauvigny, occupé à
» régler leurs comptes respectifs ; qu’il s’arrêta quelques
jj : instans avec eux , et qu’à sa sortie, son frère l’accom» pagna; qu’il lui demanda si la dame de Chauvigny,
» pour régler leur compte, avoit retiré du citoyen
» Lasalle les lettres de change qu’elle lui avoit remises
» ; sur lui ; à quoi son frère lui répondit qu’elle les avoit
toutes ,• qu’elles étoient sur sa table', ce dont il étoit
» bien satisfait, parce qu’il n’auroit plus rien à faire avec
» le citoyen Lasalle, qui lui avoit écrit des grossièretés
» de ce qu’il avoit laissé protester ces effets. »
, L e citoyen Lasalle doit-il s’estimer heureux d’avoir
échappé à une condamnation humiliante par l’absence
des citoyens Lièvre? Certes, des déclarations aussi précises,
accompagnées de celles des autres témoins qui avoient vu
le citoyen Lasalle fouiller dans les papiers de sa.bellem ère , établissoient sans dotite le fait de soustraction ;
mais le tribunal ne crut pas devoir faire lire les dépo
sitions écrites ; en conséquence, par jugement des 9 et
12 nivôse an 10, lé citoyen Lasalle fut renvoyé de l’accu
sation.
T el est le titre honorable dont il ose argumenter. Fier
de ce succès, il fait signifier le jugement du tribunal de
commerce à la dame de Chauvigny, sa belle-mère, qui
en a interjeté appel en ce tribunal.
Il n’est pas inutile d’observer que les héritiers Lièvre
ont fait saisir entre les mains de la dame de Chauvigny
tout ce qu’elle pouvoit devoir à son gendre ; que
Lasalle a fait assigner les héritiers Lièvre en main-levée
de leur opposition, et en payement des deux lettres de
�C 29 )
change qui ne lui ont pas été allouées par le tribunal
dont est appel ; qu’il a ensuite dénoncé toutes ces pour
suites à la dame de Chauvigny.
C’est en cet état que se présente la cause.
La discussion est toute entière dans les faits, sans qu’il
soit besoin de recourir aux moyens de droit.
L e citoyen Lasalle n’a pas fourni la valeur des lettres
de change dont il réclame le payement ; ces lettres de
change ne lui avoient été données que comme supplément
et pour s’en servir en cas de besoin.
L ’emploi ne s’en faisant pas , les lettres de change
étoient la propriété de la dame de Chauvigny ; elle?
devoient rentrer en son pouvoir, puisqu’elles n’avoient
pas été acquittées.
Il y a impossibilité physique que Lasalle ait été en état
de fournir le montant de ces lettres de change; il étoit
obéré lors de son mariage; trois jours après, c’est-à-dire,
le 9 thermidor , Lièvre a acquitté pour Lasalle une
somme de 3,000 francs aux frères Baudin ; Lièvre a encore
payé pour le compte de Lasalle 5,400 francs, suivant sa
lettre du 20 fructidor an six.
Le 12 germinal an 7 , le citoyen Lasalle a donné une
quittance de 11,000 francs à sa belle-mère, à imputer sur
la constitution de dot promise par son contrat, et dixliuit mois avant que la dot fut exigible.
Cette quittance est donnée sans aucune réserve. Est-il
vraisemblable que le citoyen Lasalle eût fait cette impu
tation, s’il avoit été créancier de sa belle-mère d’une
somme de 9,700 francs, montant de ces cinq lettres de
change?
�( 3° ) '
J Le 8 nivôse an 8,"L asalle a encore fourni quittance
de là-somme de 7,000 francs, toujours imputable sur la
dot de sa fem m e , et sans- aucune réserve de sa part.
Ce n’est* que plus de deux ans api'ès que ces lettres de
change ont été tirées, que Lasalle a os'é en former la
demande; et il est notoire, dans la ville de M oulins, que
depuis son retour de Paris Lasalle fut toujours aux cxpédiens, dans un commerce continuel avec les faiseurs
d’affaires et les prêteurs à usure.
Comment auroit-il gardé le silence aussi long-temps
s’il avoit été créancier de ces lettres de change , surtout
lorsque sa belle-mèi’e pouvoit aisément y faire face pat
ses recouvremens sur la succession de Soleurc, qui nonseulement la mettoient à l’abri des besoins, mais encore
répandoient l’aisance dans sa maison.
L e citoyen Lasalle n’a point fourni la valeur des lettres
de ch an ge; il le reconnoît lu i-m êm e, d’abord par scs
lettres écrites au citoyen L ièvre, en date des 30 brumaire,
20 frimaire et 11 nivôse an sept.
Dans la première il écrit : « Je n’ai pu me dispenser
» de vous faire présenter pour accepter trois traites, mon» tant ensemble 5,900 francs, dont la destination est
» faite ; elle est relative à Vaffaire de mon beau-père. »
Il ajoute : « Madame de Chauvigny m’informe que la
» démarche qu’elle a faite de tirer sur vous, vous a fait
» de la peine; je crois devoir ici, pour justifier cette action,
» vous rappeler 'et la promesse que vous lui avez faite
» d’une rentrée de fonds beaucoup plus conséquente que
» celle dont elle dispose, et en même temps vous re» mettre sous les yeux Vemploi sacré de cct argent. »
�r
' ( 31 )
Dans la seconde lettre : « J’ai rèmis les lettres de change
» de madame de Chauvigny sur vous, pour qu’elles votis
» soient présentées de nouveau ; il est urgent d’avoir des
» fonds ic i, surtout dans cette occasion ; votre refus serait
» la cause de la non-réussite da?is Vaffaire qui semble
» vous intéresser. »
Dans la lettre du 11 nivôse, toujours adressée à Lièvre,
il écrit : « Je viens de négocier l’effet sur vous de
2,400 francs , payable le 12 du courant; je ne doute pas
33 que le tout ne soit exactement acquitté : vous en con33 noissez Vemploi. »
Il résulte bien clairement ; dè ces expressions réitérées,
que ces lettres de change n’étoient pas pour le citoyen
L asalle, mais qu’elles de voient ê tr e pour son beau-père
en cas de besoin ; qu’elles n’étoient point sa propriété,
-mais bien celle de sa belle-mère, puisqu’il nous apprend
que c’est elle qui en dispose.
Il est prouvé que le citoyen Lasalle n’a point fourni la
valeur de ces lettres de change par sa réponse h l’inter
rogatoire qu’il a subi. L à, il dit qu’il regardoit ces lettres
de change comme sa propriété , ayant fait pour la dame
de Chauvigny des dépenses qui en excédoient le montant;
ailleurs il répond qu’il a fourni lo montant de ces lettres
de change à la dame de Chauvigny, par les différentes
avances qu’il a faites pour elle dans la ville de Paris, pour
remplir la mission dont elle l’avoit chargé.
Il doit donc établir en quoi consistent ces dépensés.
O r , il n fourni l’état do sa recette et de én dépense,
écrit en entier de sa main : ces dépenses ne sé p01^011^
qu’ù la somme de 5,020 fr. encore s o n t - elles exagérées.
�C 32 )
: ,,Sa fecette se porte à 4,840 francs; il n’y a donc ’que
780 fr. d’excédant. Et comment seroit-il possible qu’il
ait ¡dissipé une somme aussi considérable pendant un
séjour de trois mois? Il convient lu i-m êm e n’avoir
. donné qu’une somme de 936 francs pour le compte
de son beau-père; il n’a donc p o in t. fourni la valeur
çdes cinq lettrés de change.
r Qu’on suive d’ailleurs le citoyen Lasalle dans toutes
les discussions qui ont eu lieu. Dans son interrogatoii’e ,
.il prétend avoir envoyé de Paris à sa belle-m ère les
actes de protêts, et il ne dit pas un mot de cette cir
constance lors du,premier, jugement du 21 floréal an
9 , lorsqu’on lui opposa la fin de non - recevoir à
défaut de protêt. N’étoit-ce pas le moment de s’expliquer
pour écarter sans retour cette fin de non - recevoir ?
Est - il probable qxi’ulors ' i l . eût dissimulé une circons
tance qu’il avoit tant d’intérêt à faire connoître.
Il y a impossibilité que le citoyen Lasalle ait remis
les protêts sans remettre les lettres de change ; il n’a
. pu envoyer les protêts de Paris, puisqu’il n’a pu les
recevoir qu’après son départ. Il est prouvé que tout a
été remis à la dame de Chauvigny, tant les lettres de
change que les protêts; qu’il a été fait un compte entre
les parties sur le tout; que le citoyen Lasalle en a imposé,
lorsqu’il a prétendu que ce compte avoit été fait à
.Moulins : sa lettre écrite au citoyen L iè v re , datée
d’Annecy du 8 germinal an 7 , la quittance fournie à
Annecy le 12 du même mois, donnent le démenti le
plus formel son assertion. ,
Comment le citoyen Lasalle au ro it-il donné une
quittance
�14
( 33 )
quittance de 11,000 fr. à compte de la dot de sa femme,
et sans aucune réserve, s’il avoit été créancier du mon
tant de ces cinq lettres de change*, il devenoit respon
sable de la somme qu’il reconnoissoit avoir reçue sur
la d o t, tandis qu’il eût été créancier personnel du
montant des lettres de change.
Est-il vraisemblable que la dame de Chauvigny eût
voulu se libérer d’une créance non exigible dix-huit
mois avant l’échéance, plutôt que d’acquitter des lettres
de change échues, c’e st-à -d ire , le genre de dettes le
plus onéreux?
L e citoyen Lasalle auroit - il donné postérieurement
et en ventôse an 8 , une quittance de 7,000 fr. toujours
à compte sur la dot de sa femme, s’il avoit été créancier
de ces lettres de change ? L a dame de Chauvigny auroitelle eu toujours la même fantaisie de se libérer d’une
créance non exigible? et le citoyen Lasalle l’auroit-il
toujours souffert?
Quel degré de confiance accorder à Lasalle, lorsqu’il
a eu la bassesse de négocier des lettres de change par
lui fabriquées, reconnues fausses par le rapport unanime
de deux experts ? n’est-ce pas le cas d’invoquer la
maxime : Sernel m alus, semper malus ?
La prétention du citoyen Lasalle est donc un tissu
d’horreurs , d’invraisemblances et de mensonges. Le ju
gement du tribunal de commerce dont est appel, est
donc injuste dans ses dispositions. Vouloir faire payer
îl 1« dame de Chauvigny le montant des sommes qui
ont été adjugées au citoyen Lasalle, ce seroit r é c o m p e n s e r
�( 34*)
le crime; et il ne doit rester au citoyen Lasalle que la
lionte d’avoir conçu l’idée d’une pareille tentative.
S ig n é, G U I L L E B O N , veuve C H A U V I G N Y .
Par conseil, P A G E S (d e R io m ) , ancien jurisconsulte.
D E V E Z E , avoué.
A R I O M ; de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — An 10.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gullebon, Gabrielle-Louise. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guillebon, veuve Chauvigny
Pagès
Devèze, avoué
Subject
The topic of the resource
lettres de change
dot
Chauvigny de Blot (famille)
émigrés
faux
protêts
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Gabrielle-Louise Gullebon, veuve de Pierre Chauvigny, habitante de la ville de Moulins, appelante d'un jugement rendu au tribunal de commerce de la même ville, le 27 vendémiaire an 10 ; Contre Claude Baudinot-Lasalle, propriétaire, habitant de la commune de la Pacaudière, département de la Loire, intimé.
Annotations manuscrites: comportant le jugement du 9 fructidor an 10.
Table Godemel : Lettres de change, font foi contre le souscripteur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1795-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0906
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0907
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53067/BCU_Factums_G0906.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
La Pacaudière (42163)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Chauvigny de Blot (famille)
dot
émigrés
Faux
lettres de change
protêts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53023/BCU_Factums_G0614.pdf
f2f46dbf64ae87d86e617efaf789e6c0
PDF Text
Text
SIGNIFIE
P O U R Me. P
i e r r e
B O Y E R , Procureur
en la Cour , Intime.
CONTRE
le fieu r S A I N T H O R E N T ,
Procureur au Préf idial de Clermont-Ferrand,
Appellant.
L
E fentiment le plus amer que l’homme puiffe éprouver, c’eft d’avoir a
fe repentir de fes propres bienfaits &
de s’en voir la victime.
M e. B oyer a rendu au fieur Sainthorent les fervices les plus fignales ; il a traité
avec un Mineur fans fortune, fans exiger ni fu
reté ni caution ; il lui a procuré, au prix le plus
�> %r.
2
modique, un état auquel fans lui il lui eût été diffi
cile de parvenir , il a foufcrit les engagements les
plus rigoureux du commerce pour lui fournir des
1 / fonds pour fes provifions 6c la réception , j/ü l’a
ieul, dans les premiers temps, ioutenu & guidé
dans fa nouvelle carriere , ôc aujourd’hui il le tra
duit dans les Tribunaux , &c lui illicite la con
certation la plus odieufe , & en même - temps la
plus abfurde que l’on ait encore préièntée à la
Juftice.
Le fieur Sainthorent a acheté 12 0 0 liv. la Pra
tique de M e. B o y e r, tandis que celles de .tous
ies Confreres le v.endoient trois , quatre , cinq ,
& .ju fq u ’à fept mille livres (a) ; il a déjà touché
cette fomme &c bien au delà par l’effet des recou
vrements que cette pratique lui a procurés , &: il
youdroit, en annullant une convention qui a été
la bafe du traité fait entre les Parties , fc ména
ger encore un recouvrement fur Me. Boyer luimême , qui monteroit peut-etre a huit 011 dix mille
liv. de forte que M e. B o y e r, au lieu de recevoir
une obole du prix de fa pratique , feroit encore
(a) Me. Margcridc a vendu Ton titre & la Pratique de fon
PrédécefTeur 14.00 livres , ci ,
.1400 1. "ï
.
Sa Pratique perfonnelle,
5000 j 74° ° •
Me. Gaultier,
-6600
Aie. Chauvaflaignes,
<¡000
Me. Fomaina- ,
4Soo
Me. Lecoq , fon titre & la P atique
de fon
Prëdécefleur , morr depuis 1 5 * n s t
14.00
Sa pratique perionnelle ,
-
�T
forcé de payer chèrement Ton Acquéreur pour Sa
voir acceptée.
Telle eil’ etu coté de l’interet l’idée que préfente
cette caufe, mais la maniéré fcandaleuîè-dont elle
a été plaidée à la derniere Audience prouve que
cet intérêt apparent n’étoit au fond que le pré
texte d’une diffamation réfléchie , ourdie
pré
parée par de iourdes manœuvres pendant un an
entier ,. & que l’on a ménagé pour une Audience
éclatante , où l’on put dénoncer M e. Boyer au
Public , à fes Confrères & à fes Supérieurs.
Tout a été fournis à l’inquificion la plus rigoureu fè, ia fortune a été grofïie jufqu’à l’hyperbo
le , & calculée avec outrage ; la baile malignité a
ferutté ia conduite, & Ta fuivi dans tous les
inilants de fou exiftencc.
Heureufement que M e. Boyer n*a pas même
dans tout le cours de fa vie un icul de ces traits
équivoques dont l’homme le plus juile n ’eit pas
toujours à couvert; heureufement encore que de
puis 1 6 années il a exercé fon état avec honneur
dans trois tribunaux iucceiTivement , aux yeux
même des Magiftrats qui (ont aujourd’hui les ar
bitres de ion fort.
Heureufement enfin que dans la caufe même
où l’on a raffemblé tout ce que la critique la plus
envénimée a cru trouver dans 1 6 années de pro
pre à l’inculper ; il n’y a pas un feul des faits
dont on l’accufe qui ne foit juftifié de cette ma
nière lumineufe qui fatisfait. également le Public
A2
�& le Ju g e, & qui couvre d’indignation
de mé
pris le vil calomniateur qui les a mis au jour.
M ais ce n’eft pas encore le moment de préiènter cette juitification, elle fera la matiere d’un
titre particulier a la fuite de ce Mémoire , il faut,
avant tout, rendre compte des faits de la ca’ufe ,
dégagés de tout ce qui y eit étranger, & établir
les moyens qui militent en faveur de M e. B oyer,
- & néceifitent la confirmation de la Sentence dont
eil appel.
F a i t s
d e
la
Ca u s e .
Le ficur Sainthorent vint travailler, en qualité
de C lerc au Confeil Supérieur , au mois dé Sep
tembre 1 7 7 1 ; il fut préfenté a M e. Boycr par
le iieur Lamothe , Banquier en cette Ville.
M e. Boycr n’avoit point de place vacante dans
fon Etude , cependant, pour obliger le Négocianc
qui le lui préîentoit, il voulut .bien le prendre
chez lui en qualité de Clerc , fans penfion, juiqu’li ce qu’il eut trouvé une place ailleurs.
Trois mois s’écoulèrent,
dans cet inter
valle les Procureurs reçurent un ordre d’oprer en
tre le Conleil Supérieur & ‘ le.s autres lu n id ifio n s
de cette V ille ; Me. Boycr opta le Confeil, & lon
gea à ic défaire de ion OiHce dans les autres
Sièges.
Le licur Sainthorent, qui avoit eu occafion de
s’appercevoir dans pliis d’ujic circoniïance que Me.
,
�tc>
«te*
Boyer lui vouloir du bien , profita de cet événe
ment pour le prier de lui faire un iort en lui cé
dant Ion O ffice, il lui avoua qu’il étoit fans ar
gent comme fans fortune, & qu’il n’avoit pas
même de quoi fournir à fes provifions & à ia
réception.
M e. Boyer fut touché de fa fituation , il lui
promit de lui céder ion Office aux conditions qui
lui conviendraient le mieux, &c quant aux fonds qui
lui manquoient pour fes provifions 6c fa récep
tion ; il lui offrit la fignature pour en trouver fur
lettres de change.
L a bienfaifance de M e. Boyer levoic tous les
obftacles. Il ne fut plus queftion que de rédiger
les conventions. Le iieur.Sainthorent étoit alors
peu verfé dans les affaires, au lieu d’une vente
pure & l'impie il deiira former une iociété .pour
avoir dans M e. Boyer .un guide ÔC 1117.maître
dont il put recevoir les leçons.
M e. B oyer accepta tout ce que lui propoia le
fieur Sainthorent? il lui dit, d’aller Jui^méme chez
M e Chabridon , À v o c a t, patriote du iiçur Sainthorcnt 6c ami commun des Parties, dé rédiger en
fer/, ble le traité dç iociété, qu’il le fôuicriroir. (¿7)
Cet traité lut lait &c ligné le. ji i •. Décembre
, 1,7,7j , :
' c<? conventions contenues dans cet
‘ ccifii;. la .fopi^té .dévoie durer trois.année**, M e.
Boyer devoit tracer la marche des affaires, aider
(.¿y La 'dernière daufe 'de ceYraltè porte qii'en cas dj contJtution les Parties s’en rapporteront à Me. ChaLridon.
�6
le fieur Sainthorent de fes confcils & fournir 50
livres de loyer.
L a pratique de M e. Boyer éroic confondue dans
la iociécé, il n’en retirait aucun prix, parce qu’il
devoir avoir la moitié des bénéfices.
A l’égard.dé l’Office le prix en fut fixé à 12 0 0
livres, iuivant l’évaluation qui en avoitété faite en
conféquence de l’Edit du centieme denier, 6c ce
prix ne devoit être payé qu’à l’expiration de la
iociété, néanmoins (ans intérêts, fans fureté, fans
caution, quoique le fieur Sainthorenc fut mineur.
&c fans fortune.
Parmi les autres claufes de ce traité , il n’en
eft qu’une feule qui doive fixer l’attention de la
C o u r, parce que c’eft cette claufe qui a fait naî
tre la conteftation fur laquelle il s’agit de ftatuer ;
elle eft: conçue en ces termes :
'h '6°. Si parmi les affaires commencées. moi
« Boyer ai reçu des fournies qui excédent les frais
» faits jufqu’à ce jo u r, je ferai obligé d’en faire
' » raifon a la communauté , &: fi les fommes que
» j’aurai touchées ne fe trouvoient pas portées fur
» mon reg iflre, je me réferve de compter avec
* les Parties & de m’en rapporter à leurs décla» rations , fans néanmoins qu’elles puifîent fe pré» valoir de la préfente convention, qui doit dc» meurcr fecrette entre nous : au furplus, pourra
♦> ledit fieur Sainthorent prendre communica» tion de mes regiftres quand bon lui fcmblera.
F<tplus bas cft écrit;» tout cc que deiTusôt dtsaiif
�i
i
»
«
»
«
7
très parts a été par nous reipe&ivement promis
& accepté, à peine de tous dépens, dommages
& intérêt«, pour avoir lieu de ce jo u r, 6c avons
le préiènt fait double, &c> »
Cette claufè étoit évidemment l’ouvrage de
la bonne foi la plus épurée de la patt de M e.
Boyer ; il commence par fe charger perfonnellement des fommes qu’il a pu recevoir de ies
clients en fus des frais faits jufqu’au jour de l’acte,
quoique dans tous les autres traités de ce genre
les fucceiièurs fe ioient chargés de faire raifonaux
Parties de ces fortes d’excédents, & que M e.
Boyer eut ainfi traité lui-même avec l'on prédécefièur.
Il avertit en fuite fon A iîocié qu’il s’efl: gliiT*
des omillions fur fon regiflre ( a ) , que cependant
il n’eft pas jufte que les clients en foient vi&inies,
en coniéquence on itipule que dans le cas où les
clients articuleroient des paiements qui ne fe trouveroient pas portés fur ce regiftre, M e. B o yer
compteroit avec eu x, comme ayant une connoiffance pcrionnelle des faits & des paiements qu’ils
pourroient articuler, & q u e l’on s’en rapporteroic
à leur déclaration.
Après ces conventions écrites & fignées refpec(a) Les omiifions qui fe trouvent dans le regiftre de Me
îïover , datent de l’année 1767 , où ayant ¿té nommé
Colleèk-ur dans^ des temps très -du rs , il a e mp loy é près
de trois années à faire la levée des Impôts , ce qui h,i a fait
négliger fes affaires pcrfonnelles, & particulièrement la tenue
ue Ion regiftre.
�*\’
*“
■
8
tivcment par les Parties, M e. Boyer end,oiTa unç
lettre de change de 600 liv. pour le. fieur Sainthore n t, qui fur fa iignature . fe procura cette iomme, obtint fes provifions <Sc fe fit recevoir.
Une année s’écoula fans que le fieur Sainthorent fe fut mis en devoir de compter un fol à M e.
Boyer ou produis: de la iociété; plus il étoit prefîé
pour cela, moins il étoit diipcfé a le fatisfaire ; il
crut enfin, & avec raiio n , avoir fatigué Me.
Boyer par íes refus de rendre compte , &c qu’il fe
preteroit volontiers -à rompre une fociété qui ne
lui étoit qu’onéreuie , en conlecjuence il lui fit
propofer de convertir cette fociété en .vente pure
6c fimple ; M e. Boyer accepta , ÔC le renvoya en
core a M e. Chabridon pour régler les conventions
de ce nouveau traité.
D éjà le prix du titre étoit fixé à 12 0 0 liv. fuivant l’évaluation du'cenricmc denier; le fieur Sainthorent porta lui-même la pratique à une pareille
iomme de 12 0 0 liv .'( a) régla, comme il le jugea
à propos, les tdfthes des paiements , & prit quatre
années , toujours fans fureté, fans caution, malgré
fon défaut de fortune & fa minorité.
Cet a£te fut pailc devant Me. l’E b ra ly , N o
taire, le 30 Décembre 1772.? & dans le même
(•O'xV.z. I.c fieur Sainthorcnt a fait plaider à la dernière A u
dience qu’il avoir donné 1 4 0 liv. de pot de vin , le fait cil
faux ; ces Z4.0 liv. étoient pour peniion é f logement , dont
]VIc. Bo ÿcr lui donna quittance par l’écrit fous feing prive,
qui fur fait entre les Parties le rndme jour du contrat.
inftant
�initanu le traité du ai..D écem bre,
*>
nulle' dans Itoutes, ies: ' parties -,
tvejV darf$ ¿feq
fixieme ckiiic jclput les"Parties.;ÿopfifmènent.hu ;,
contraire, l'exécution ■par-;unç/c^nyentipn.-.qui f^t vconçue en ces .termes :
—
i;,'
:
n»t Nous, l.ouffignés -, au n\oy£n J g j l’&Qe pafTé
» -entre inous*: cçjoivrd’.huv paj4eV?.nr 1 E b ràlyrJ,-c
» Notaire en cette V d le vçonfeftrçn^ qvfcfc&lpifej
j> :Îèntesi demeurent nüHes?oÇrnfepsr.^uÿu-n.¡eiFçt-jiy
” excepté pour la fixieme claufç^paf laqiieljc moi i
« :Boyer me fuis ^téferjVe.dç .çomptçr ayeÇi Jiics x
»•-clients qui. aura; XoV/Ti ib>)
” vrnr:,o \ o:r. j
: Cette, convention, qui avoir ç t i^ ip r i^ e lliy n ^ n
exécutée pendant que les-P-artiq^ afcqicnjc vécMJeiVi
lociété,le fut encore avec la memb exactitude de 1a .
part du Sr. Sainthorent. juiqvû laii13.de L’anoie^çt'na
niero, il s’en.rapportdit h la dkjafan.oi) deç-dlem.iij
fur les foinmcs qu’ils avaient payées
ilp y ç r^ j
ôc qui pou voient i être pmijos^ii>r| ¡lé «rregjftre
s’il le trouvoit quelques difficultés, il -les renvoyoit à .JV le .B o ÿ ê r po.uirfks.^lairiQUT^^jl Jtè-£Qn.-ci
tem oitrde toucherice qui. reil^içJégjtini.Qmcnrdilÿp
dédii&idn faite dor to u t j ce q û i -av o it; e t e p a y d ali ç '.
les .temps antérieurs,-’
*) î »p , *?ov
2rEt ¡il ne:fautfnas crpirc, qu’fiOrfiÛVAPt cettetniç 7 tboidè .,Jl «ni exécutant.à ' I*'îçttjtf ilc%fonv;qm:^
u
faitej.;critr# nksPj*ruefc, le,fieyrr^aiintljprçnt
trou vé,d an * k>iPratiquç,.d p]M e.;, B p y e r q l i e\dps *
recouvrements ; illufoires-; M e ^ B ^ c r a ; articulés
cn-çaulé principale y.v‘& \
\
d ’é t ^ l i r j q u ;
�ces recouvrements rftantoiem jufqu'à ce jour à
plus dfc Ï2*oo KVrès/'il- a’ fait plus , ’ il a; offert
de lu ífátré bon de tett?eifcmme , -en lui rendant
cdrrfpt^ ^dé-Oeté^à Maîcrô de ce qu’il avok tou
ché fur ces anciens recouvrements.
D e force que le fient Sainthorem , qui n?a
acheté qui ï i o o livres, qu’il doit encore ; la clientelle de M e, Boyer ; qui poür ces J io o livres , a •
été décharge du compte qù’il devoit d’un an de
fociété , dont la moitié revenant à M e. B o y e r,
formoit au moins un objet* de 800 liv^ q u i pour
cette fomme< de n o o liv. a^ acheté 'pne¡ pra
tique confidérable , qui' lui a procuré un état
& lui a fourni? beáucóup de travail dès; le
premier inftant* fe trouve dans ce moment, &
en mettant a récart tous les recouvrem-erus qui
lui rêftent à fair&yjouir* d’un état honnête, id’une •
clienteHe «âombr©üfè , ¿ ’’une-pratique très-lucrati
ve/fàn $ qu’il lïrie n coûte une obole.
Mais le fieur Sàirithorent n’a pas cru devoir fc
borner a ces píe mi ers av^nîage$ , il s’eft írhagmé .’
qu?ií ferôit'une pçtite fortunée s’il!parvenoit barrean-; «
tir*les? coriYêntiô^S'qü’i)' avoit faites ave¿
y e r , qui le forçoient de s’en rapporter à. la décla~
ratioil-des cllentsi pour ,les obj e$s qtfiJ méw ieiit >pas
i rífe o s’f e le
^i ’ifdé¿cfo étoit keiar-eafe^ ilme
pëtfÎft
tiSôriiëaS pëu? lâittiettfôà ç^écutiori;!
■'® fè *H4tà^ $£ Fairë iffign^f ¿A paiem em> -de; frai#t
des clients qu’il favoit-éttíe munis de quittances de
Boyer ¿ tnais-dbiit^ls^ pâie<ntettçsJ étbierttrpatf**
i.î
�11
irifcrits fur le régiftre , & il' les fit affi'gncr en trèsgrande connoiflànce de caufè v car , outre que les
quittances îùi avaient été repréfentees par les par
ties, il ¡eft très-probafcle que la cote-même du doP
fier cle ces particuliers lui7‘aVnonCOk qu Hs;avoient
payé le montant des frais qu’il réel amoit.
C es particuliers aifignés ne« manquèrent pa sde
dénonceria d^fïiânde dü fieur Sainthorint à M e.
Boÿer pour qtfil è u t^ ie s en gar&iÿiix
; -'JVIei •Boÿer y tté ^ciiquei&^hnejïiiridBVtoutis’afr
"faire peribn-nelle y fit dans»les premiers moments
les plus‘ grands^’ efforts pour; amener ^oru Advjariàirê a lâ côrïùiliation; Gomme c otite; afBiire jetait du
réifcut *fu- bén iètis' V' & *Jtie ' touth©mme bi en orgatiifé pouVoit en deciderj il lül fit propofer de
s’en ; rapporter à qui il jugeroit à ^propos ou dans
!a> tlaiîè des Jüriicon fuites * idu parmi îles .'autres
Citoyehs : ' M v Ducher i ;A yocat, fut vainement ’
porteur des paroles de paix , rlç fipur/Laniath^fcn
premier Patron en Cette viliéyle Ait.ïnfbh tobr ; M .
de Ribeyre , ancien Confeiller à la Cour des A i
des, tenta , pour 11 ttoifieme f6i!s ' de vaincre^fori
. obiriiiation ; tout- ftitinutile ,upa.rce (q£te.' JVI.& -Boyer
né prôpoibit qti’urib .décifiotr*oc 'tt’bfrçofc pas ià'-ran-'
çon<, & parce que des-lars fon Adverfai^e, ayo^t
peut-être moins pour objet de, réùffir dans ics prétentions, que de irpuye^ un.e;^çpafion-’âç' $ffàm ër
^‘ion ■bienfàâeur * cornm'el’ont^ prouvé lesvfeandaJ teufes d é c l à m à t i o n s ^ c î e * ^ l
Quoi qu7il en foit, M e. Boyer fut enfin forcé
B 2
�12
de ;iè défendre. par lés"voies juridiques •; il pritMe
parti.de dénoncer .au,fieur Sainthorent les deman
des. en? garantie formées çohtçe lui -pajrj’lesj particu
liers qu il.a v o ir - a iB g iié s r il conclura ce que.les
tonyenttons|faites-enir’ieuxi,cpar kiquellg§-il^’étpii
obligé de:s’en rapporter a la'déclaration des çliènts +
fuiTent exécutées félon leur .forme.Ôç g ê n e u r . 4
.»i-Les efford:qù’avoit :h i f ; J 3 o , y è r ÿoiir.terrfjiT
ner cette afFaireperfuadereht au fieur Sainthorejt^
qu’iL* avoir perdu fon double qui 'çontenoii: le /traité
de iociété 6c les conventions poftérieures, en cotfféquencé. ià première ÔC;mémfc ÎPA il nique ^éfenfe
en cauiè principale fut; d’abor.didiefjik r netrément
•ces conventionsdeifoutenir qu’il .n’en -avoir jamgi$
exilté entre les Parties, qu’il avoir acquis la Prati
que de M e. Boyer en vente pure &c (impie-,-par
a â e patte idevant.fEbraly, Notaire , le 30 D é
cembre 1 7 7 1 ., & qu’il p?y àvôit eu ,' ni alors,, ni
dans aucun temps , aucune autre cor\verition. faite
entre les Parties*, verbalement ni par écrit, (a)
(a) Requête du iicur Sainthorent en la SénéclHuifiie, du 4
'M ars 1 7 7 4 , page 7 de là '¿op i^
^ : , ■ >
» Le Suppliant, en répondant à;ceite.demahde.directement,'
. » v a . pro u ve i(que flepuis fon Contrat de .vente, il n c d o u t e n j r
» compte à tous les ‘parilciiiiéris qu’ il a fait ou fera^flîgner que
> du contenu au livré de recette à lui délivré , & déniera' fu re ■» mentièt fimplequnt' lesprétenduij/anvtqtions verbales articulées
» p a r Me. B o y e r .'
1 [
•.
J '-’ Et p j ils b a i , tnémfeVè'qùété'/ p^ £ £ 8 V " J e 'Suppliant denie jh - x> fttnahent 'les :cptwvtt\or]s\vtfil>aUs- ffrticulfef p ? r (e fin ir B o y e r,
r> il ne çonnoir a u Jri fk o ji queJan contrat-de vente * & défie au
d fie u r’ B o y (r V/<p o iiiÛ r titn If/i npftafib. * * '
,J
L t fieur Saihthoïcnt. à 'dénie avec la. m CW jnfrçpidité le faic
,
�Z 7J
13
M e. Boÿer rapporta le traité écrit de la main
du fieur Sainthorent & figné de lui ; alors il fut
forcé de changer .de langage, &. d’attaquer ces
conventions par la voie de la nullité <Sc de la léfi'on*
il prétendit au’clles éîoient contraires aux bonnes
m œ urs, qu’il etoit léie du tout, au tout, que ion
état dépendoic du caprice des tiers , qu’il avoit
acheté 12.00 .liv. une Pratique dont il pouvoit.rïe
pas retirer une obole ; 6c cç f u t W s 1 ce "dernier
point de vue .qvie l’affaire: futprefentee' li l’A iidience de la Sénéchàuilée le
Mars' dernier, ou
après une plaidoierie très-étendue, il fut fait droit
aux Parties ainfi qu il i i i i r . ‘
' -*
n Nous ordonnons que le contrat de .veht(?;rdc
» l ’Office & Pratique de Procureur , fait par
» la Partie de Boirot ( Me. Boyer ) a celle de
» Prévoit ( le fieur Sainthorent ) le 30 Décembre
contrôlé le 8 Janvier fuivant,' enfcmbjc
?> les conventions verbales fûtes en môme-tem^s
» entre les Parties, feront exécutées fuivant letir
» forme & teneur ; en conféquence condamnons
».. ia Partie de Prévoit à garantir celle de Boiroc
» des demandes contre elle formées •& à former,
« relativement aux elaufes dudit contrat de ven*
” te , comme aufli à garantir & indemnifer ladite
de la lettre de change, m.êihe'rtquête,.pa£e 6 \ Me. Royer ayant
demandé le mis en caufé ¡du. Négociant qui' av.oij f o u r n i e s
fo n d », il a<$té,forcé de (e r e t r a û ç r , .çoninie^fiir l’exÎftencè do
h convention, •
"
, ' 11 1
; , -i- . '
�» Partie Je Boirot de la demande en paiement
» .de la lettre de change du
», en affirmant- néanmoins par la Partie'de Boi'p jjSt devant nous 'dans la'huitàiné, Parties pré» 'ièntçs oji diiement appêllées, quelle n’a point
.» déchiré ladite lettre’ de change, condamnons
». la Partie de „Prévoit aux, dépens. »
. , Le fieur Sainthor^ntVeiV rendu Appéllant de cette
Sentence; -en J j ^ Ç o u r & Variant ’iàns“:cèfïè: iür.tet
Appel, tantôt'.îli’à; çonclu a 1’ïniirrnatiôh iridéfinié,
tantôt il a reftreint ion appel à de certains chefs,
tantôt enfin fuppoiant cjuil n’y avoit rien déjugé
.par cçtte, Sentence, il'a demandé, l’évocation du
principal
un jugement plus’ analogue a la/con,teftation.
Tout .ce verbiage décéle l’embarras du fieur
Sainthorent Ôc prouve cju’il .lui eft zrte - difficile
. de.s’entendre Jui-rmemç ; quant 'h nous ,f la cohtéfration . paroît devoir fe réduire à :dein£‘ objets ; le
.prem ier, de (avoir fi les premiers Juges ont jugé
ce qui étoit contcfté ; le fécond, de (avoir s’ils
ont bien jugé ; c’eit ce que nous allons établir.'
M O Y E N s.
La Sentence dont elt appel a jugé ce oui étoit
. -confell^ ;- il fuffit.po,urr l’établir.d’analyfcr les .pré
tentions refpe&ives des Parties.
Le fieur Sainthorent a fait affigner en paiement
de frais & (alaires plufieurs clients de M e. B o ycr,
�15
quit favüit être p o rte u r clé Tes quittances.
C es Particuliers aiïignés par le fieur Sainthorent exercent leur recours contre Me, Boyer.
Celui-ci dénonce cette a&ion à ion Acquéreur.,
& demande contre lui l’exécution des conven
tions faites entr’eux le 30 D écem bre, fuivant lefquelles la fixieme claufe du traité de iociété , qui
porte qu’il fera tenu de s’en rapporter aux décla
mations des clients, aura T o u t ion effet &> de
meurera dans toute fa force ôc vertu.
L e fieur Sainthorent nie ces conventions, elles
iont juftifiées, il changede batterie , il les iputient
nulles 6c contraires aux bonnes; mœurs.
Les Juges de la Sénéchaiiflee décident qu’elles
iont juftes, légitimes , & en cela ils jugent bien
évidemment ce qui étoit contefle,
: Ils ordonnent que le contrat de vente cle{ l’Office & Pratique, eniemble les conventions faites
le même jour entre les Parties feront, exécutées
félon leur forme èc teneur ;.ij$ décident que..le
contrat
les conventions iont indivifibles > &
que l’un & l’autre doivent avoir la nlêmç, exécu
tion ,
c’eit'ce qui etôit très-vivement côAteilé. .
Enfin ils condamnent le ficUr Sâinthorent à faire
ceiîèr ! les adions, que M d .. Boyer éprpMVc qu ;
éprouvera.jpar ¡la fuite,dd l a i d e s çlieqts ^fr
fignés ,a la déclaration defquels le fieur Saintliôrent refuÇe de s’en rapporter : cette garàntic étoit
exprefiement
B o y e r, $ i çtoit
�16
une conféquence néceifaire de l'exécution des
conventions.
D onc la Sentenôè dont eft appel a juge fur ce '
qui étoit demandé & fur ce qui étoic contefté.
- L a Sentence dont eft appel a bien■jugé.
;
. . . .
L
?
.
' ip
Îo u r établir cette propofition, -il eft inutile-de ^
mettre a contribution GrotiiiS , PufFendorf, W al-' ’
tel , W olff 6c B u rlàm aq u itou s ces Auteurs , en
traitait de la guerre 6c dé la-paitf, ne fongerent
jamâis !k «décider la queftion qui^nous diviie , laifc
fons donc la cé’ vain ’étalage feientifique, 6c re- ?
venons aux idées (impies que préiente cette' caufe.
M e. Bçyer étoit propriétaire d’un Office de
Procureur 6c d’une Pratique confidérable ; ces
deux objets étoient dans le commerce 6c les loix
dé-fil Patrie’ lui pfermettôient d’en difpoièr.
Il en a difpofé aü profit du fieur Sainthorent,
S i il en a difpoié a une condition jufte eni clic—
mehie indifpenfable > 6c fans laquelle la vente eut >
été1impraticable.'!
“ IA ifage des regiftres de recette étoit. autrefois
peu familier dans les Provinces, les Procureursles
nlitux famés de* la Sénéchauflée 6c de la Cour
dcîPAidfcs ii’en ont; jafriais’fcnu,' ou n’en ont jamais •
eu de réguliers: (tf) Ils fe contentoicnt dc donner .<
(.i) Mes. Aidât, V cr d ie r , Barricre , pere \ Lecoq , & tant <
d ’autres Procureurs :qui ont joui à fi jufte titre de l ’eftime &
d» U'confiance p u bH q u tfn 'e r» ! ont jamais eii.
des
�17
des quittances aux Parties, ou d’inférer les reçus
fur la cote des dofliers : fi par événement il fe
trouvoit des omiiïions , ils s’en rapportoient à la
déclaration"de leurs clients; & il eit iàns exemple
qu’il fe-foit jamais élevé la moindre difficulté a
cet égard entre les clients, les Procureurs ôc leurs
Succeiîeurs. ( a)
n M e . Boyér, plus exàâ que la majeure partie
de fès C onfreres, avoit tenu un regiftre de recette ;
cependant depuis 1 7 6 7 , qu’il avoit été occupé à
la levée des impôts, il s’y étoit gliifé beaucoup
d’omiiïions, &c ce regiftre n’étoit plus aufli régu
lier qu’il l’avoit été avant cette époque.
M e. Boyer, en traitant avec le fieur Sainthorent,
ne lui laiilà pas ignorer l’irrégularité de ce regiitre (¿>) , le iieur Sainthorent eut même foin de s’en
afiurer par lui-même en en prenant communica
tion , & ce fut en confequence de cette irrégula
rité qu’il fut convenu que loriqu’il fe trouveroit
des omiiïions fur ce regiftre, les Parties feroient
(il) La plupart des autres Procureurs de la Sénéchatiilée
ont bien vendu , comme Me. B o y e r , ou fans avoir des regiflres , ou fans en avoir de réguliers, & ont vendu à un
prix trois & quatre fois plus con'fidérable , cependant pas
un d’tmx n’a ¿prouvé la plus légère tracaflerie de la part de
fon Succeileur , pas un de ces Succelfeurs n’a prétendu que
fon Vendeur fût garant de tout ce qui ne fe trouveroit pas
infcrit fur un regiftrq ; & ce qu’il y a de fingtilier , c’cil
qu’aucun d’eux n’a même fongé h prévenir cette difficulté , & à
s’en mettre à couvert par une convention précife, & que Me.
B o y e r , qui a pris cette précaution , cft le feul qui l’éprouve.
■(b) N a. Ce fait eft conftaté par la Requête du fieur Sainthorent du 4 Mars, pages 4 & 8.
�tenues de s’en rapporter a la déclaration des clients.
E t comme M e. Boyer étoit plus à portée que
fon Succeiieur de juger fi ces déclarations étoient
iinceres ou ne l’étoient pas , il fut ftipulé , pour,
l’avantage du fieur Sainthorent lui-même , que
dans le cas prévu M e. Boyer feroit tenu décom p
ter avec les clients.
Cette condition étoit indifpenfable , puiiqu’en
vendant purement & fimplement Me. Boyer s ’ex-,
poioit a des garanties ruineufes , qui auroient pu
monter à des fommes énormes , 6c ablorber dix
ou vingt fois le prix d e l ’objet vendu.
Elle éroit évidemment conforme a l’intention
des Parties, puiiqu’il nd pouvoir pas entrer dans
l ’efprit de M e. Boyer de vendre pour 12 0 0 liv.
dix mille livres de recouvrements fur lui-m êm e,
£c que le iicur Sainthorent n’avoit jamais pu ionger à faire une acquifition de cette cfpece.
Elle étoit en outre de l’eiTcncc même de la ven
te, elle avoit finguliérement influé lur le prix ,
puilquc Me. Boyer délaifloit pour 12 0 0 liv. une
Pratique très-lucrative , 6c plus de Boo liv. de
profits de fociété, dont le fieur Sainthorent étoit
tenu de lui compter ; tandis que fes Confrères
vendoient leur Pratique quatre, cinq , iix , 6c juiqu’h iept mille livres.
Enfin cette condition étoit tellement de l’eilcncc de la vente , que fans cette claufc la vente eue
été évidemment impraticable, la Pratique de M e.
Boyer eut été inaliénable, 6c celles de tous les
�An
19
Procureurs qui n’ont pas de regiftres, ou qui n’en
ont pas de réguliers, le feroient également, puifqu’il n’en eft pas un feul qui ne préférât de per
dre fa Pratique & de l’abandonner plutôt que de
la vendre fans la condition exprimée ou fous-en•tendue de s’en rapporter à la déclaration des
clients, •& qui*voulut, pour une modique i'omme qu’il retireroit de cette Pratique , demeurer
garant de tout ce qui ne fe trouveroit pas inferit
iur un regiftre régulier.
Cependant cette claufe fi jufte, fi évidemment
indifpenfable, fi eiïèntielle & fi analogue aux cir;conftances eft amerement critiquée par le fieur
Sainthorent.
Il prétend en premier lieu qu’elle cfb contraire
aux bonnes mœurs.
En fécond lieu , qu’elle eft obfcure <Sc qu’elle
doit être interprétée contre le vendeur, quia p o tuit legem apenius cîicere.
Troifiem em ent, qu’elle oblige M e. Boyer feul,
& que lui iicur Sainthorent n’eft pas tenu de
l’exécuter.
Quatrièmement, que cette clauie n’a été con
firmée que dans une partie , lors du traité du mois
de Décembre 17 7 2 ., & qu’elle ne l’a pas été quant
à la néceiïité de s’en rapporter à la déclaration
des clients.
Cinquièmement, que M e. Boyer ne s’en cil pas
réfervé l’exécution en lui remettant copie de lui
certifiée de Ton livre de recette.
C i
�-vírV
20
Sixièmement enfin , qu’il eftléfé par cette claufc du tout au tout, 6c qu’elle doit être refcindée.
P R E M I E R E
O B JE C T IO N .
L a claufe de s’en rapporter a la déclaration des
clients eft contraire aux bonnes mœurs. .
R é p o n s e . Jamais les bonnes mœurs n’ont
empêché un propriétaire de difpofer de fa chofe
aux conditions qu’il croit convenables à (es inté
rêts; Me. Boyer pouvoir, en tranfmettant fa Pra
tique.au fieur Sainthorent, fe réferver, fans bleifer les bonnes mœurs , tous les recouvrements qui
étoient à faire, il pouvoir à plus forte raifon ne les
lui céder qu’a telle ou telle condition, & fur-tout
h une condition qui étoit d ’pne néceiîité abfoluc
par elle-même, 6c fans laquelle cette ceilion étoit
impoifible.
I l ne faut d’ailleurs qu’une réflexion bien fimple pour fentir combien cette obje&ion du fieur
Sainthorent eft abfurde : fi cette condition eft con
tre les bonnes mœurs, s’ il n’eft pas polfible à un
Procureur, qui vendía Pratique, de ilipulcr une
claufe qui le décharge de la garantie de tout ce
qui n’eft pas porté fur,íes.livres, il en i chiite,évi
demment qu’un .Procureur qui n’a.point dc.rcgiftre fera tenu de rendre à fon fucceifeur tout
ce qu’il aura reçu de íes clients dans tout le cours
de fa vie , depuis le jour même de la réception
juiqu’au jour du contrat île vente., puiiqu’cn ira-
�2 ï>2>
. 21
duifarit en jnftice tous, les clients de fon prédcceiîèur, ces clients exerceront une garantie , dont,
fuivant le iieur Sainthorent* riqn -ne peut le pa
rer qu’un regifbre régulier qui lui manque: ainii
cet acquéreur, qui, comme le fieur Sainthorent,
-aura a c h e t é , pour iio o liv..u n eP ratiq u e,u n eclien telle , un état, lucratif,.aura encore acquis le droit
de dépouiller, fon vendeur de toute fa fortune
préfente & fu tu re, quelque confidérable qu’elle
puiilè jamais être.
S E C O N D E E T T R O I S ™ : O B JE C T IO N *
L a ctaufe eft obfcure, elle doit être interpré
tée contre M e. B o y e r , elle n’oblige que M e.
•Boÿer.
, . : i c' t.: •»
. R é p o n s e . ’Il fufRdide.laqtranfcnre : » fi les
» fommes que . j’auraii.tquchées ne ie rrouvoienc
» pas portées fur mon regiilre , je me réferve
» de compter avec les Parties, &c de m’en rap» porter à leur déclaration, (ans, néanmoins qu’el” les puiilènt fe prévaloir de la préfente claufe,
» qui demeurera fccrette entre nous & c. »
E t : plus bas, tout ce que dciTus & des autrres
parts a été par nous relpeâiv.cment promis 6c
n accepté, .h peine de tous dépens, dom m ages, in* térers, pour .avoir lieu dès ce jour. »
Il cil iàns doute bien évident que. par cette
claufe les Parties ont;entendu prévoir le cas où
dçs.çlicnts, cbntrejefqucls le lieur Sainthorent ré-
�iz
-clameroit des frais, fe trouveroient avoir payé
tdcs fpmmes qui auroient été- omifes fur le regis
tre de recette , 'que dans:cecas les Parties feroient
tenues de s’en rapporter à la déclaration des clients,
&C M e. Boyer tenu de compter avec eux, parce
qu’il étoit plus en état que fon fucceffeur. d’appré
cier la iincérité de :ees déclarations..-.
iiù
C e f t une bien grande abfurditéi.de prétendre
que cette claufe oblige M e. Boyer feul à s’en rap
porter à la déclaration des clients, & que le fieur
Sainthorent n’a pas contra&é le même engage✓ * r»i»'
'
ment.
^ .
Quoi ! cette claufe n’oblige pas le fieur Saint
horent, 6c elle eft écrite de fa main &c fignée de
lui.
Elle n’oblige pas le fieur Sainthorent, & il l’a
cxpreflement acceptée ; il a promis- de l’exécuter ,
a peine de tous dépens, dommages ^intérêts.
Elle n’oblige pas le fleur Sainthorent, & il l’a
cxpreilement confirmée par le fous-ièing du 30
D écem bre, qui eit également écrit de ia main &
figné de lui comme la convention originaire.
Elle n’oblige pas le fieur Sainthorent, & il l’a
ponduellemcnt exécutée pendant l’année entière
qu’a duré la fociétc , & dans tout le cours de
l’année 1 7 7 3 ? comme Aie. Boyer cft a même
de l’établir par des preuves écrites.
A quoi bon M e. Boyer auroit-il donc ilipulé
cette ebufe pour lui feul ? qu’avoit-il beioin de
s’impofer la loi de s’en rapporter à la déclaration
�2*3
,
des clients, fi ion fucceiîèur pouvoit s’en jouer &c
exiger d’eux tout ce qui n’auroit pas été porté fur
les livres? pourquoi.ce compte deitiné a vérifier
ces déclarations, cette ftipulation du fecret pour
empêcher les Parties d ’en abuièr ? pourquoi prévoir
le cas des omifïions; fi Me. Boyer devoit en res
ter garant ? quel eut été enfin le fens , l’objet
d’une pareille convention?
' '
~.,:Ne iemble-t-ii pas qu’on : ait -pris a tache dans
cette affaire der lutter fans ceilè contre l’evidence,
de fronder ouvertement les premières notions &c
de livrer june guerre continuelle au iens commun.
Q V A T R I E ME
O B JE C T IO N .
: : Cette claufe n’a été confirmée que dans une par
tie y lors du contrat de vente du 30 Décembre
I 77 2 ;
■ ■■ ;
: /
B fufHt encore de tranferire ces
dernieres conventions qui font à la fuite Si au pied
du traité de iociété.
« Nous foufïignés , .au moyen de l’a&e pafléen» tre nous cejourd’hui, pardevant l’E b raly, N o » taire en cette V ille , consentons que ces préfen” tes ( le traité de fociété ) demeurent nulles &:
» fans aucun effet, excepté pour lafixiem e claufe y
» par laquelle moi Boyer mefu is réfèrvé de compter
” .avec mes clients, qui aura T o u t fou effet. ( a) »
R
é p o n s e
.
(«) Cette claufe a été tranfcrite avec des Guillemets dans la
troiiieniü Confultation imprimée ,p? g c 1 1 , & on acu foiu de
�.
*4
Rien eft moins équivoque que cette convention;
les Parties annullént le. traité.de fociété, excepté
pour la fixieme. claufe, & elles, ajoutent que cette
iixieme claufe, aura T o u t , ion' e ffe t.,..
?.. .
• En -rappellant. céttej.claufeeon ajouté , pour la
défignér de manière, 'à ne pouvoir pas s y mé
prendre, que c’eft celle par laquelle-,M e. Boyer fe
réferve de compter avefc fes-anciens clients ; -mais1
c eft une'Vràie dérifîon que de; prétendre que par
cette défignation l’on borne à. cet objet l’exécutiôn
de la elauie , puifqu’on itipule au contraire que
cette fixiem e claufe demeurera dans toute ia force
&: vertu, qu’elle aura T o u t fon eifet.
~EtiComment .en. effet auroït-il pü entrer dans
l’efprit des Parties contractantes de fyncoper cette
elauie , de divifer là faculté de compter , & la
néceilité de s’en rapporter, a la déclamation des
c lijn ts, tandis que ces deux conventions font ab
solument corélatives , quelles font une'dépendan
ce ncceflairc. l’une de l’autre , &c qu’elles font mê
me rédigées de maniéré h être-h jamais inféparab ie s, puiiqu’élles dépendent l’une- & l’autre du
même cas prévu , qui eft celui deromiflion fur lcîs'
liyres : Si les femmes que j aurai touchées ne Je
vouvoient pas portées fu r mon regifbe , je me
réferve de compter avec les Parties , & de m'en
rapporter à leur déclaration.
\ '
io u il r a i r c le m o t T o u t : 6n a fans c c if e a r g u m e n t é d an s cette
C o n f u l t a t i o n & à l ’ À u d i e n c t -, c o m m e fi l e m o t T o u t n*y c t ô i t
p a s : c ’c l l u ne m m i e r e t r è s - c o m m o d e d e r a i f o û n c r q u e d e r e
t r a n c h e r d ’ u/i a i l e les m o t s q u i n o u s g ê n e n t .
A quoi
�A quoi to n en effet ce c o m p te s’il dcvoit êrr;
ians objet,; fi le fieur Sainthorent pouvoit n’y
avoir aucun égard ',. rejetter* les-déclarations , na.
prendre que le livre de recette pour bouilole y-exi-.
ger tout Ge qui y feroit omis malgré -ces1: décldrations confirmées par le com pte, & . forcer enfin
M e. Boyer a la garantie de toutes ces omiiïions ?
Mais pourquoi s’appefantir fur une abfùrdité
de cette,elpece ^ dans le faiLle mot to u t leve toute
eipece d’équivoque, & .il y- a lieu de croire que ii
le fieur Sainthorent n’avoit pas. eu la précaution
de le fouitraire, il auroiç épargné, à fes. confeils
les vains raiionnement.s, qu’ils, iè {ont permis fur
le plus ou le moins d’étendue, qu’il folloit donner
à cette convention. _ ,
. .... .
C IN Q U IE M E
O BJEC TIO N ,
M e. Boyer ne s’eft pas réfèrvé l’exécution de
cette claufe en délivrant au fieur Sainthorent une
copie de lui certifiée de fon regiftrre de recette.
R é p o n s e . Dans le droit, ce défaut de rér
ierve dans la remifè du livre de recette /croit fans
doute très-indifférent ; ce n’eft pas par une omi£
fion de cette efpece que l ’on perd des droits.,ac
quis , & que l’une ou l ’autre des Parties peut être
libérée de fes engagements.
Mais dans le fait cette obje&ion ne. doit fon
exiftence qu’à une infidélité que le fieur Sainchorent s’elt permis, & que Me» Boyer fe trouve
D
�par le plus grand hazard en état de relever.
M e. Boyer ayoit eu la précaution de faire un
projet du certificat qu’il devoit mettre au bas de
cette copie qu’il étoit obligé de délivrer au fieur
Sainthorent, il a retrouvé ce projet, il le rapporte,
il eft conçu en ces termes :
« Je certifie la préfente copie comme ayant été
» tirée fur mes regiftres par le Clerc du iieur Sain» thorent, qui a été collationnée avec un des
» miens , fa u f néanmoins toutes erreurs , & fans
» préjudice des conventions faites entre nous re» lathement à cet objet. »
Que le iieur Sainthorent rapporte la copie de
ce regiftre qui lui a été délivré par M e. Boyer ,
fi ces expreifions font au pied de cette copie, l’obje£Uon difparoît & l’infidélité eft démontrée.
S I X I E M E
O B J E C T I O N .
Le fieur Sainthorent eft léfé du tout au tout par
cet e claufe , ’ ion fort dépend des tiers, il n’a
rien acheté, fes lettres de reicifion doivent être
accueillies.
''.■Ré p o n s e . Dans le droit il n’y a pas lieu à
refciiion en vente d’üifice.
'Secondem ent, le'bénéfice dé la reicifion a été
introduit, en faveur du vendeur & non. de l’achctciir, :
: ".
, '
Troifiemcment
il n’y a pas lieu à refcifion
en vente , ôc a plus*forte raiion ch achat1de choie
�i7
mobilière, &L tous les -Auteurs conviennent qu’une
Pratique de Procureur eft dans cette claiîè (a)
- Mais dans le fait de quel iront le fieur Saintborent oie-t-il dire qu’il eft-léfé du tout au tout,
lui qui pour 12 0 0 liv.comménce par s’acquitter d’un
compje d’une année de fociété, dont la moitié re
venant à M e. B o y e r, formoit au moins un objet
de 800 liv.
Lui qui pour ces 12 0 0 liv. s’eft procuré un
état, une clientelle, une fuite d’affaires confidérables , une Pratique très-lucrative , que fes Confreres ont acheté quatre/cinq, fix & jufqu’à iept
mille livres.
'
'
:
Le fieur Sainthorent eft léfe du tout au tout,
.& il eit déjà rempli par les anciens recouvrements
que cette Pratique lui a produit de cette fomme de
12 0 0 liv. qu’elle lui a coûté. ■
.
Il y a m ieux, il a touché ces 12 0 0 liv. cette
fomme eft dans fes mains , il en uie & M e.
Boyer a encore plufieurs années à attendre le prix
de fa Pratique, fans caution, fans la moindre fu
reté , &C avec toutes iortes de motifs de fufpe&cr
la folvabilité de fon acquéreur.
Que diroit-on d’un particulier qui achetc, mo
yennant 3000 liv. une terre avec fa récolte, qui
dgns le même inftanr touche 3 000 liv. de cette
récolte, & prend enfuitc des lettres de refcifion
¡.
( a ) Dumoulin fur la coutume de Par. f. i 1 /n-’ . 1,
Chopin , liv. ier.</e mor/Æ.P-AîtîS, titre ret. fco. 38.
firodeau fur Louçt, 1. p. foin.
D x
�!;y
■■■•
; .
£
!
i8
contre fon contrat d’acquifition, & fe prétend le'ie
. du tout au tout.
.
Râifonnements
Que diroit-on de cet acquéreur, fi pour mo’ I re-ijoanJ îo'de fe» yens de reicifion il di foira. Tes Juges , ce n’eft pas
\
iiT,p,imésun£ fomme de 3 000
que j ’ai acheté, moyenY*
nant 3000 liv. c’eft une terre . . . . . .
fauvons-lui Tidée, qui fe prélente fur ce plaiiànc
iophiime , ’ & . ’difons- lui tranquillement, vous avez
000 liv. & la terre, la choie 6c le ,prix.
M ais dit le fiéür Sâinthorent, l’JEdic de 1 6 9 1
prononce la fin de non-recevoir contre les Proj- ;
cureürs qui réclament le paiement de leurs frais
.'H
fans'wrèpréfenter un rcgiftre régulier, me voilà
donc.eiqpofé à fubir la fin de non-recevoir de la
] j;
part de tous vos clients, & à former dés deman
des dans lefquelles je puis iiiccombe’f ?
j
R é p o n s e . Que le fieur Sâinthorent borne
'
fon ambition qu’il fé contente des 12 0 0 livres
que lui a déjà procure cette Pratique, qui le
rcmpliiTcnt du prix de {brt*acquifirion,&: il fera à
l’abri des fins de non-recevoir. ~
Qu’il imite fon V en d eu r, q u i, dans l’cfpace
de 16 années n’a pas fait affigner un ièul client,
6c il fera' ai l’abri des fins de non-recevoir.
>-> Mais d’ailleu rs;’"s’il y a des fins de non-rece•voir» à craindre, clles fonr.pour. la pluparr acquifes par la. loi, qui^fixe lotemps pendant ldquel les
Procureurs peuvent réclamer leurs frai» , 6c ce
«n’eft pas^au défaut de ♦regiilrC' qu’il faut les ateri—
• buer. .
�■ 29 V
E n fécond lieu, il eft très-rare que les débi
teurs oppoient la fin de non-recevoir dans cette
matiere , on n’en voit prefque pas d’exemple , &
lin e paroît pas qu e, m aigre’ l’irrégularité des
regiftres cle M e. B o y e r, le fieur Sainthorent,
quoique très-arclent a pourfuivre en juilice fçs
anciens clients , en ait éprouvé une feule.
T r o ifie m e m e n t , on ne prononce jamais en ju'fc
tice la fin de non/recevoir pour honoraire, frais ■
9u falaire de gens dé tous les érats, qu’à la char
ge par le débiteur d’affirmer qu’il a paye la fomm e dem andée , de forte que la néceifité de fubir
cette fin de n o n -recevoir rentre dans la néceîïité
de s’en rapporter à la déclaration des clients, qui
a été ftipulée entre les Parties comme la fauvegarde des clients ÔC du vendeur.
Quatrièmement, cette fin de non^recevoir a "
été expreifémenc'prévue par les" Parties , a iervi
de bafe à leurs conventions’,-qui n’ëtoiént fondées
que fur l’irrégularité du regiitre de recette , & le(F
iieur Sainthorent s’y éfl: fournis' en; trbs-gran d o #
connoiilànce dé caüfey puifqû’il nous attelle lui-^1
même qü’il prit 'communication'de
rdgîltre ,
6c qu’il ajoute , avec fa douceur ordiiTairc , q u il
¿uppercut quune piice : de cette nature itùii faite
.................. —
pour craindre'le jour.
’
Cinquième nient1 enfin ; \cs plaintes 'dù‘ frétir
Sainthorent fur c£S fins d r non-recevoir poifiblcs
font d’autant plus indiferettes; “ que dam leH'ait
Me. Bover nVltipulé dans le e n t r â t 'd e vente
�*1”
3°
aucune. efpece (Je garantie, qu’il n’a pas entendu
lui aifiirtr un fol de recouvrement, que quand,
par événement, au lieu d ’avoir touché 12.00 1.
i l n ’auroit pas touché une obole , quand il auroit
eiTuyé des nns de non-recevoir lans nom bre, il
n’en ferait pas mieux fou dé à s’élevercontre les con
ventions faites entre les P arties, parce que cette
fomme de 12 0 0 liv. n’a pas été le prix d’un recou
vrement quelconque, ( a ) mais de la clientelle,
de la pratique) delà fuite des affaires , du trans
port de la confiance des anciens clients du Ven
deur, ôc enfin delà décharge d’un compte de fociétc qui, s’il eut été rendu par le fiçur Sainthorent, auroit au moins produit 800 liv. à Me.
Boyer.
Mais au furplus, fi le ficur Sainthorent perfifte encore à le plaindre de M e. B o y e r , s’il ofe
encore prétendre qu’il eit victime du d o l, de la
fraude , de la fupercherie, qu’il a été léfédu tout
au tour par les arrangements qu’il a fa it, tandis
bénéficie du tout au tour; voici quelles font
^ ►qu’il
<
RequctedeM ^cs °ffres que lui a faites Me. Boyer en cau^e prinB o y e r e n cat.fe cipale.dès le premier inilant de la contcftarion,
p rin c ip a le du a 6
I , .1 w
f i t
\ P A
J ■
0
•
1 •
Février,
qu il lui a réitérées a 1Audience, oc qui rencioient
à tous égards trcs-inutile le remede de la reicifion
auquel il a cru devoir recourir en caufe d’appel.
V ous prétendez que j’ai abuié dç votre inex-
\
V
â!
(■>) M"s. Lecoq & Marperide ont vendu 1 1 0 0 liv. la Pratique
de leurs Prédjccireurs.q ’i n’avoiont ni recouvrements, ni fuite
d’allaircs.
�31
■pé'ricnce en-vous'vendant ma Pratique 1 1 0 0 Iiv.
'le compte de laTociété, dont ma"portion étoit au
meins de-8oo liv. la clicntclîe, la iliite des affai
res, la fuceeTon d e 'la 'confiance valoient bien
tu 'delà decetre Tomme; mais prétendez-vous que
tout cela ne valoit pasune obole, eh bien, je vous
•en fais grâce, & ',j>offre de vous faire bon dé 12 0 0
!liv.rde3 recouvrementsfeuls, en me rendant comp
te du produit det ces recouvrements de clerc à
niaître.
Ce premier parti ne vous convient-il pas? en
Voici un fécond ; je confens que ma. Pratique foie
eftimée par Expéyts-Procureurs, gens à ce con- A
noiffants, dans l’etat où elle étoit lorfque je vous
l’ai livrée; je confens que cette eilimation foit fai
te relativement à nos conventions & en leur clonT
nantleur pleine exécution , 6c je m’oblige çle n’exi-^L
ger pour prix de cette Pratique que Te. montant ”
de l’eftimation.
_ C ’efl: ainfi que.M e. Boyer^s’ efl préfenfé dans
tous les temps;a Ton Adverlaire. à .Tamiablc,- 6c,
i #
*r />*• • ' •
* f
J *
avant d’etre traduit en Juicice ;par éçri'f^ôcà l’ Audicnce en caufe principale, 6c c’eit ainfi qu’il s’eft
toujours préfenté en la C our; mais jamais le fieur
Sainrhorent. n’a rien voulu ( a cc e p te r6 c ,p o u i;7
quoi ? parce que jamais fbn but fn’a ér$ de réparer
une Iciion atTurde & ¿imaginaire, jamais il n’a
longé férieufçment.à renverfer le traité le plus k l
avantageux qhe l’on ait fait dans ce genre : en \
incitant cette conteflation à M e. Boyer , fon pre-
�3>
mier-point de vue étoic. de le. rançonner, en !e
forçanr d’acheter chèrement-la paix, ou de le diiTàmer comrne j l Parfait à Ja derniere A udience,
s’il, rekifoic*.dc fè^i-yr.er à fa diferétion.
C^efl ici le.momentd’ecîtrer,dans,une nouvelle
carriGrej, où le fènsjfroid ferpiç. guiïi nécefïàire
qu’il e(t ifnpoiïible, où l’indignation conduit la
plume malgré les efïbrts_derla raiion p o u rl’arrêter.
. C H A P I T R E D ES. IN C U L P A T IO N S .
C e n’ptoit pas allez poyr le fieur Sainthorent
d’être ingrat dans les procédés, & /abfurde dans Tes
prétentions, détra&eur atrabilaire de fon Bienfai
teur ; il l’a préfenté dans l’Audience la plus nombreufe au public & à.fes Juges comme un hom
me fcandaleux dans ia fortune , qui croit trop im^«m enfe ¿¿trop précipitée pour avoir une fourcc
légitime.
Il l’a peint comme infidele dans ies traités, re
cevant de l’argent de les clients, après avoir ven
du là Pratique, retenant une partie de cette Pra
tique vendue pour en frtiftrer ion acquéreur.
Il l’a peint comme infidele ënvers fes clients
eux-memes^ recevant de l’argent fans l’envoyer h.
fa deflinatiori, des rftarchandifcs fans en compter:
il a appuyé cette diffamation de faits particuliers,
auxquels des certificats mendiés fembloient au
premier abord donner quelque poicj/, & abuiant
ainfi de la crédulité des auditeurs, il cft parvenu
à
�3 -*
33
il répandre les images les plus épais fur fa répu
tation , 6c à briier ion cœur par la douleur la plus
amere qu’un homme ait jamais reilèntie.
Si M e. Boyer eft coupable des infidélités quon
lui impute, s’il eft feulement fufpect, il confènt
d’être puni avec la derniere rigueur, il le de
mande même , "le bien public 6c l’honneur de fon
Corps l’exigent ; mais s’il eft démontré que tous
ces faits iont l ’ouvrage de la plus noire calomnie,
fi tous ces faits font autant de fauifetés manifeftes,
démontrées par des p r e u v e s authentiques, alors il
doit être ven gé, & il doit l ’être d’une maniéré
éclatante, proportionnée à 1 énormité de l’outrage ÔC
à la publicité de la diffamation, qui, préparée pour
1*Audience la plus nombreufe, oîi la foire 6c les aftiiès avoient conduit une multitude d’£trangers,s’eft
déjà répandue dans toutes les extrémités du Reilorc.
Quant h fa fortune, il ne peut s’empeher d’ob- Article premier
ferver qu’il eft bien étonnant que l’inquifition s’é
tende jufqu’à mefurer l’étendue des propriétés des
C ito yen s, & à en fonder la iourcc ; mais puiique fon Adverfaire le force de rendre compte
àu public de cette fortune immenie qu’on lui re
proche avec tant d’outrage, en voici le tableau,
qui eft d’autant plus exa&, qu’il eft tiré fur la groiïc
même des contrats :
M e. Boyer a acheté la maifon qu’il
habite,
4^00 1.
Une vigne à Chanturguc,
- 2.400
Une moitié de maifon à Saint-Genès, 1 <00
E )
1
�V^’
34
Il a acheté le bien de Riben de M . de r
1
B rio n ,
*.« ■ • ... 2^ 000 u
T o tal,
334° °
Sur quoi il doit fur le bien de Riben
3000 liv. à M . de B rio n , c i ,
3000
A t- le 4
'
f
Refte ,
*
3° 49 °
Ainfi donc dans 1 6 années , avec le travail le
plus opiniâtre , avec l’économie la plus ftricle,
avec des talents connus qui lui ont attiré la con
fiance publique , avec les récoltes les plus heureufes depuis fon acquifition du bien de Riben , M e,
Boyer a fait 304.00 liv. d’épargnes, & fa for
tune eil fcandaleufe, elle eit précipitée, la iource
n’en peut être légitime, (rf)
M e. Boyer eft un vendeur infidèle , il a vendu
au fleur Sainthoreut ia Pratique-,
depuis il a
touché de fes clients les frais qui lui étoient dûs,
la preuve en réfuke de ce que fur le doificr d’un
fieur G ic le s , qui a eu une affaire jugée en 17 6 8
contre le fieur Baudet & les Religieux M inim es,
on lit ces expreffions, tout mefî dû , que cepenr
dant lorfque le iieur Sainthorent s’eft pourvu con
tre ce fieur Cheles en paiement de fra is, il a rap
porté une déclaration de M e. Boyer qu’il ne devoit rien.
,
...
(a) Ces biens ont pli augmenter ch valeur par les rëvolutions furvcnuCT dans l’ tëtat , mi parce-que Me. Hoyer a f a i t
des acquifitions avantageufes en elles-mêmes , niais dans le
fait fes épargnes ne lui ont produit dans 1 6 années qu’un ca
pital de 30.JÆ0.
. .
«
�•
3Ÿ
.
......
■
Il fe préiènte contre cette inculpation uns pre
mière répon Je qui'ne pouvôit échapper a perionne,
^v qtii auroit du* frapper le.fieur Sainthorent, ceft'
qu’il arrive tous les jours que l’on riiet une note
iu i ' un dôiïier, qùi l’inilànt Après devient inutile ;
tout m cjl dû aujourd’hui, rien n’eft dû le lende
main , il eft'dorïc tïès-facile de concilier & cette note
du doiîier & la déclaration rapportée par Cheles , ’
d’autant mieux qu’il, s agit dune affaire jugée,
gagnee
terminée depuis 17 6 9 .
Mais Me. Boyer n’en eft pas réduit a; cette
Çeponic ; il rapporte la preuve écrire qu’il a réel
lement‘ touché les.: frais dé cette affaire du fieur
Baudet , Partie'condamnée , non pas depuis la
vente de fa Pratique, mais au mois de Février 17 6 9 ,
près de trois ans avant qu’il connut le fieur SaintHorcnt~~ ’
'
.........
Cette preuve réfulte de la quittance de ces frais,
qui eft ious cette date du mois de Février 17 6 9 ,
qui eft encore entre les mains de Me. Guillaume,
Procureur de Baudet, que lui-même a réglé les
fifàis & a-, compte les deniers , & cette quittance
eft d’ autant moins fufpc&e qu’elle ie trouve trani'crite à la fuite de celle donnée par les Religieux
Minimes au iieur Baudet pour les frais qui leur
jétoient dus dans la-mênie affaire»
• Cette preuve réfulte de l’atteftation de Me.
Guillaume,qui adonné fon certificat de tous ces
fu t s , & offre de juftifier de la quittance qui eft
dans fes mains.
E 2
�3,6
Elle réfulte enfin de l’atteilation de M e. Rochefort , qui eft aujourd’hui Confrere du fieur Sainthorent, & qui étoit alors Clerc de M e. B o yer,
qui certifie avoir lui-même écrit la quittance, &
vu compter <Sc toucher les deniers au mois de Fé
vrier 17 6 9 . (a)
C ’en eft aifez fans doute fur ce premier fait pour
confondre le fieur Sainthorent, pailons au fuivant.
Un Payfan d’Aulnat attefte avoir donné 6 liv.
à M e. Boyer au mois de M ai 1772, fur une affaire
de la SénéchauiTée, donc M e. Boyer eft un ven
deur infidele.
Plaignons le méchant, fon fupplice eft dans
fon cœur &: dans la peine qu’il prend pour faire
le mal. Q uoi! pour 6 liv. manœuvrer, follicitcr
un Payfan , le traîner chez un N otaire, luicxtor(d) Je fouifigné François Rochefort, Procureur en la Sénéchauffée de C l e r m o n t , certifie & attefte que Me! Boy er ayant
pourfuivi en 1768 une affaire pour le fieur G i c l e s / B o u r g e o i s
de cette Ville , demeurant rue des Carmes, contre le fieur Dau
det Cavalier de Maréchauffée & autres, dans laquelle affaire
jl y eut plufieurs Sentences, notamment une derniere du mois
d’ Août mil fept cent foixante - h u i t , qui condamnoit Baudet
a u x dépens; lefdits dépens,qui étoient dus à Me. Boyer, furent
r é g l é s par Me. Guillaume, Procureur de Baudet ; l’argent com
pté par ledit Baudet en préfence dudit Aie. Guillaume , & reçu
par ledit Me. Boyer le vingt-fept Février mil fept foixanteneuf dont le fieur Chelcs donna quittance audit Baudet, la
quelle j’écrivis moi-même , étant alors Me. Clerc chez ledit Me.
B o v e r , au bas d’ une autre quittance donnée par les Révérends
Pères Minimes audit Baudet concernant la même affaire. Fait
ce dix huit Août mil lept foixante-quatorze. R o c h e f o r t .
J'atteJIe les mêmes f a i t s & déclare que je f u is p o rteu r de /•*
quittance. G v 1 L L A V M E .
�quer un certificat, eiïuyer., pour 6 liv. la honte
qui eft attachée à la vile fon&ion du délateur.
. Ile.fieur Sainthorentreft aifez puni. '"D a n s le fait, tout ce que p'eut dire M e ‘B oyer]
fur c e t t e 1 'miférable inculpation , • c ’eft-- qu’il n’a
pas-la plus légere idée d’avoir touché cette fomme de 6 liv. de ce Payfan d’Aulnat.
* Que s’il Ta touchée, ce n a pu être qu’au mois
de;)M ai 1 7 7 1 & n’on"au mois de M ai 1-772 ,i
parce qu ’ il e(Vcertain que cette affaire n’a pas eu;
de fuite depuis le mois de M ai 1 7 7 1 .
Q u’au furplus, l’auroit-il touchée au mois de
M ai 1772- y l es Parties étant alors en fociété, le
fieur Sainthorent étant logé chez lui & vivant avec
lui il n’y auroit rien d’étonnant: 4 ue dans un
moment d’abfence du fieur Sainthorent, M e.
B oyer eut . touché ,pour lui ces & liv. ôc lui en
eut fait la remiiè à fon retour.
• - >
M ais dans le v ra i, M e. Boyer n’a aucune idée
de ces 6 liv. 6c aflurément l ’objet n’eft pas aiïez
important pour s’en occuper davantage.
Celui qui fuit l’efl: beaucoup plus, & mérite la
plus grande attention : le fieur Sainthoient re
proche à M e. Boyer de lui avoir vendu fa Pra~
tique, & d’en avoir gardé les papiers pour l’en
fruitrcr.
V oici lcrfait, M e. Boyer va le rendre fans ai
greu r, il louhaite qu’on puifle le lire fans- indig
nation.
'»
M e. Boyer 6c le fieur Sainthorent étoierrt en
�T£
siriorf si . v i U -ii-pr, < 3 : ? ^ . » S m » v w / p
loçjetç depuis le mois^de.JLJpcempre 177,1, , oc cet' ' }A f
r ........»! i
-• / I <
'•“'•VC
Ifcritiijs'ipnt- çpnveçri^çetçe -lqcijjte f^j^eiite. pupef
¿loviî'b
3T_; •'){ £!/[, » .f . ?r •
L e fieur Saintliorejit.avoiç a lp rs(quif,tç depuis
quelques ¡ours .la.pjaiijbn^cle JVle,.,BpyçrL ^ i i ^ rétpitro.cçup4 dan& JejCpurant.çlç Décembre: ^ '^ o ^
turejr<-jeà',papier qui :lp i;app.a«efioienf
nouveau domicile«
r/1
r. 1
./D.àjîir cet iritêrvallc,.&; le 9 Décembre , /avant
qu’ilsJûiïènt tranjjiçrfcs en enûer., M e. ^thay-pe,Peocurmvr vert la; JSenécJjauffëe ,. viut.rdërçîancrer
au/iven6Sait];hopünt Je? pieces d’un no m me, Jti il
lard , de L a n ti, qui dépendoient de la Pratique,
de Me. Bpyer.
. ,
Le fi cur Sainthorent- les chercha dans lps p af
piers qu’il avdit ,chez, lu i, &c ne. lesr ayant ^pas
trouvés, il renvoya/le Procureur ¿k la.jPar.tie las
chercher chez Me. Boycr.
r M e. Boyer pHa M e, Athaync de fairç lui-mcme cette, recherphe dans le cabipet où travailloit
précédemment J.c, iîetir' Sainthorent & où étoit
le refto des . papiers .qu'il n’avoit pas encore tranfportés dans fa nouvelle Etude.
. Me" Athaync , pprçs I3. .plus cxa$q recherche,
jTaryint à.'les..t'r(;tiv'çi;,, tombée aj/co. d’autres par
piers au bas du dernier rayon , &c lous uf) petit
lit qui: fe, troiiY.ofitr,dans ce cabinet. . ,
Cette affaire n’avoit pas été fuivie ; Me. B o io r
�39
^yoit ji'eçu deTargent des Parties, dont il de.ypitcompter j il pria M e.-^thayne de -faire fétat, des
fo is pour,conftater. Ton .débet, M e. Àtliayne-ayant),
refuie idc le faire? M e., B o y e rle Ht hii-même ,
s’ étaiu trouvé,débiteur de 2 5 liv. 5 fo ls , il remit
cette, iomme.à JVIe,\Athayne? inivant les conventionVjgu’il ayoit faites^avec le fieur Sainthorcnt,3
par lefquelles.f.il rétoit, .chargé de rendre aux:'
■■ .
; v tj p 1 • 1 j
<
■*.
. ■>.
'« .
i
rarties ce qjiu l. le trouveroit avoir reçu de trop
fur fes frais.
,1
f,M e. ^thayne iortit de.chez M e.B oyer,alla chez,
le fieur Sainthorent, lui annonça qu’il avoittrou-!
vé.les,pieces, lui en donna décharge, & lui fit partr
des 2.5 liv. «5.fols qu’il avoit reçu de M e. Boyer,
, D e retour c f e lu i, M e. Athayne fit ion a6le
d ’occiipen&'. un avenir ^ & porta- cette femme de
2.5 liv, ^ fois Tur/fon r<?giftre, le tout fous cette
mcnic, date d 11 g Decêmbrc S 77? > trois femaines
avant l’a&e de vente pure ¿k.fimple.
• Rien n’étoitiplus fimple-, plus naturel que tou
te eettc Q.pérÿio'n, '& elle s’étoit paiîee abfolument
ians myilere .de: la :part de toutes les Parties.
viÇependant lé.-fievir-Sarnthorent a pouiTé la ma-;
malignité, jufqu à/preienrer ce fait, dont routes les
circonilances lui, étoient fi parfaitement conn'iics1 comnie une iniidelité 'révoltante de. la part
de,'Mev' 'Bfrycr' comme nrie/ preuve. qu’aorès
. ni 3•' j"TWf /v; îS
\ ’ •!* *
• •
avoir, vp/ulu Îa^Pi^q.cjt^.,il en rctçnoit les papiers ‘
dans la,vue de. l’en iruilrcr. , ,.
, 7
'■ E.1 vp'î>r: ;d<în,rtcr qticlquc, vraifcmblaijçç h -ç ^ e ;
v ' ■-'¿-¿.'Ij x’/'VJ’i ..
�.4°
inculpation, il, a . furpris.de M e. Athayrie un cer
tificat , dont il ignôroit l’objet , qu’il lui a fait
fotiferire à la hâte , <Sc ians réfléxioiüj où lui faifarit cacher avec ibiii coûtes les çirconilatrcesr pro-preif 'a juilifier M e. B oyer, il lui a fait fauiîèment
déclarer, que c’étoit au mois d’A o û t 1 7 7 3 qu’il
âvoit trbiive ces piedes cn ez'M e, Bciÿ’er. (a) '
;M e ArÎVaÿne a en vain voûlu. depuis' retirer ce
certificat, ou'du moins l’expliquer, le rectifier, il
ne lui a pas etc polfible de fe le faire repréfenter ^ mais indigné de l’abus qa’on s’eft permis d’enr
faire à l’A udi en ce pour fleurir M e.'B o yer, il s’eft
liate: de rendre un' compte plus exaéfc & plus cir-r
¿¿nftancié. de tous ces faits dans, une nouvelle
déclaration qu’il e'I: eiTentiel de lire, parce qu’elle
contient les déta’.ls les plus fatisfaifants , de laquelle '
entre’ autres clïofes il rcfulte: ( b)
r
(a) N.i. I\Σ, Athayne a erré fur cette date, premièrement,
parce qu’on lui fit loufcrire ce certificat précipitamment, &
qu ’il n’eut pis le temps d e . f e rappeller les faits.
_ ...
Secondement, parce les pièces étant produites fur délibéré,
il ne les. avoir pas foiis' les ye ux , & ne pouvoit pas vérifier
l V u d’’ov;-npvr-& l’«iven‘ r
9 Décembre.
'Tr'oiiiemement , parce que ne fe rappeliant pa& des 2.«j liv.
5 fols, il n'eut pas la précaution de jetter les yeux fur fon.
rc»illrc-
•
. .. ;
Mais cette erreur cil aujourd’hui relevée par toutes ces pièces
6 par l’atteflation ci-aprè<.
;
(/>) Je fou'iigné Pierre .Athayne , Procureur en la Sénéchauffée de ClermoiU;Fcrrand , en expliquant & e n augmentant les
oublis que< j'ai fait dans le certificat que j’ai donné a l’irtiprévu
au lieur Deiainthorent & A fa follicitation , q*ie chargé par Jean
Juill.ird, de L a t y , de retirer fa procédure contre Michel Ikirin
¿¿ François G r é g o i r e d e la Paroilfe de B a g n o l , je fus avec le-
Premièrement,
�4Y
Premièrement, que c’eil le 9 Décembre 1 7 7 2 ,
----------------1— —
—
■
----------- dit Juülard l e n e u f Décembre 1 7 7 1 , ( ainfi que cela eft conf
i t e par la procédure que j’ai été retirer des mains de M. le
Lieutenant Général , attendu qu’il y avoir un délibéré de pronon
cé depuis un an) demanda cette procédure au fieur Defainthorent, acquéreur de l’Office dudit Me. B o y e r , que Me. DefaintW e n t chercha cette procédure, mais que ne l’ayant pas trou
v e , j e fus avec la Partie chez Me. Boyer pour lui demander où
pouvoit être cette Procéd ure, qu’il me répondit qu’elle devoit
être chez le fieur Defainthorerçt, que lui ayant répliqué qu’on
l’a voit cherchée & qu’on ne l’avoit pas trouvée, le fieur Boyer
me dit de chercher moi-même parmi tous fes papièrs , qu’ayant
cherché & fouillé par-tout, notamment dans des rayons au fond
d’un cabinet à côté de fon étude , & derriere un petit l i t, je
les trouvai à côté du dernier rayon qui va jufqu’à terre, & fous
Üt, parmi d’autres papiers que je n’examinai pas , & que je
crus néanmoins être de la SénéchauiTée,.qu’alors il fut queftion
de faire l’état des.frais , attendu que le fieur Bo ye r dit.que l’affaire n’ayant pas été conduite à fa fin , il croyoit avoir reçu
plus du montant des frais faits, & me pria de faire moi-même
l ’état defdits frais, que ne l’ayant pas v o u l u , le fieur Boyer me
pria de revenir après m i d i , qu’ y étant retourné , le fieur Boyer
fit l’état deidits frais, & fé trouva avoir reçu vingt-cinq livres
cinq fols en fus du montant des frais par lui fairs jufqu’alors ,
qu’il me remit cette fonune & 111c délivra les pieces , en me
priant d’ aller chez Me. Defainthorcnt lui en donner décharge,
& que je crois, autant que la mémoire peut me fournir , lui
avoir donné cette décharge ; que le tout fe pafl'a fans aucune
forte de myftere de la part dudit Aie. B o y e r , non plus que de
celle dudit Me. Defainthorcnt ; que fi je n’ai pas inis routes ces
circonftances dans le certificat que j’ai donné au fieur Defainrliorent , c’eft qu’il l’exigea fur le champ , fans me donner le
temps de me rappeller les faits, qu’un inilant après m’étant
r appellé la remife que m’avoit fait ledit Me. Boyer des 2^ liv.
S fols , je fus chez Me. Prévoit pour l’ajouter à mon certificat,
lequel me répondit qu’il n’en étoit pas nécelTaire, & que cela
ne faifoit rien à l’affaire , fur quoi je me repofai fur lui : que
depuis j’ai demandé au fieur Defainthorcnt de voir fon regiftre
pour favoir fi je l’avois déchargé , qu’il me l’a refufé malgré
mille inftances réitérées, en me difant que je n’avois pas don
né de décharge & que je n’étois pas partie capable pour le fai-
�V *'»•
4-2/
avant la diiïolùtion de la fociété & la vente pure
& fim p le , que M e. Athayne a demandé ces pieces
au iieur Sainthorent.
Secondement, que le fieur Sainthorent 6c M e.
Boyer ignoroient également où ces pieces pouvoient être, puiiqu’ils les cherchèrent ou firent
chercher l’un 6c l’autre de la meilleure foi, 6c qu’ils
ne les trouvèrent que par haiàrd, parce qu’elles
étoient tombées derriere le dernier rayon, 6c ious
un petit lit qui étoit dans le cabinet.
Troifiemement, que M e. Boyer n’avoit aucun
intérêt a iouftraire ces pieces a ion acquéreur,
puiiqu’il étoit furpayé de 2 5 liv. 5 lois, qu’il ren
dit a M e. Athayne & à fa Partie en exécution de
la fixieme claufe du traité de iociété.
Quatrièmement, que tous ces faits étoient par
faitement connus du fieur Sainthorent, puiiqu’il
reçut la décharge des pieces, puifqu’il apprit alors
6c a encore appris depuis par M e. Athaynes qu’il
ne lui étoit rien du , 6c que M e. Boyer avoit
rendu 2.5 liv. 5 f. a fou client.
Enfin , quand ces papiers auroient été trouvés
chez M e. Boyer dans des temps poftérieurs , le
fait n’en feroit pas plus conféquent , car le fieur
re , qu’ il me donna fa parole qu’il ne feroit aucun ufage de ce
certificat, & qu’il me le remeteroit, ce que l’ayant prié de fai
r e , nous fumes cnfcmblc chez Me. Prévoit, qui ne fc trouva
pas chez lui : Tout ce que deifus cil conforme à la vérité , &
pour la preuve , j’ai remis lefdites pieces à Me. Boyer , h la
charge par lui de me les remettre. Fait ce d ix -n e u f Août 1774*
Signé , A t h a y n e .
�Sâinthorent a laiiïe tres-long-temps des papiers dans
le petit cabinet où étoient ceux réclamés par Me.
Athaynes, & dans ce moment même il refte en
core beaueoup d’anciens papiers qui lui appartien
nent dans le grenier de Me. Boyer , & le fieur
Sâinthorent ne l’ignore pas , comme le confhte
cette note écrite de fa main, que Me. Boyer rapporte.
» Je prié Me. Boyer de vouloir laifler prendre
'** à la Porteufe les papiers qui dépendent de mon
” Etude, & qui font dans Jbn grenier , j’ai des
n papiers à y chercher. »
On ne manquera pas de faire à M e. Boyer le
reproche d’être diiïùs ; mais qu’on daigne fe rappeller qu’un mot iufEt pour accufer, & que pour
iê juftifier il faut des volumes.
Cependant Me. Boyer termine fur ce fait, en
obfervant que le fieur Sâinthorent ayant la plus
parfaite connoiifance de tous ces faits , ayant reçu
la décharge des pieces , étant inftruit de la remiiè des 0.5 liv. ■> f. fâchant mieux que peribnne combien tout étoit fim ple, naturel , innocent
de la part de Me. Boyer dans cette opération : le
trait d ’avoir préfente ce fait h l’Audience comme
une infidélité révoltante , qui a en effet foulevé
tous les Auditeurs contre Me. Boyer, annonce qu’il
a déjà pouffé bien loin fa carricre , pour un hom
me qui a a peine atteint fa majorité.
Il ne refte qu’un dernier fait fur lequel M e. Boyer
n’a pas une juftification moins fatisfaifante a préfenter.
F i
�44
#
r
■ Le fieur Sainthorent a fait; déclarer a la'nom
mée Gandebœ uf, Meunière .à .Chamaliere , que
Me. Boyer a reçu d’elle en 17 6 2 72 liv. en.arr
g e n t, que depuis elle lui a vendu une charrette
50 liv. & qu’enfin elle lui a donné 24. liv. pour
envoyer a un Procureur de R io m , & qu’il ne
l ’a point fa it, que par conféquent il 1 eft débiteur
&: retentionnaire infideje de cette fommé de 1 50 1.
ou environ , & qu’elle l’a: tout récemment traduit
en Juftice pour fe la faire reftituer.
Quel trait a ce fait a la caufe, c’eft ce qu’il
n?eft pas aifé d’appercevoir ? N ’importe, il faut
l’éclaircir, & pour cela, il-faut diftingiier les 24.
liv. ’du Procureur de Riom , & le fait des 7 2 liv.
&; de la charette.
Il eft vrai que M e. Boyer a reçu ;en 17 6 2 7 2 *
liv. de la Gandebœuf, ÔC qu’il a acheté d’elle une
charrette 50 liv. mais il eft. vrai aufîi que depuis
& avant cette époque de 1 7 6 2 , il a eu au moins
dix affaires pour cette femme ou fon mari, & que
les 7 2 liv. ainfi que les 50 liv. prix de la charrette,
cto'e;nt deftinées a remplir M e. Boyer des frais
de ces procédures ,ainfi a cet égard toutfe réduit
à un compte des frais faits jufqu’au jour du trai
té , qui doivent demeurer compenfés jufqu’à due
concurrence avec les 7 2 liv. ôc le prix de la char
rette; files frais excédent ces deux iom m cs, ;1 eft
évident que la réclamation que lui a fait fuicirer le
fieur Sainthorent eft ablôlument déplacée ; fi les
frais font moindres, ce qui cil impoffible, tf s’en-
�41)
fuivra que M e. Boyer aura trop reçu, 6c alors
.il exécutera les conventions qu’il^a faites avec le
■fieur Sainthorent de rendre l’excédant. J U. VC r1(,
rj -C’eit.à quoi fè réduiient ces certificats-,/cette
'demande de la Gandebceuf, qui font l’une 6c l’au
tre ion ouvrage.
Mais l’objet desj 0,4 liv. paroîrpliis férieux, on
remet à un Procureur 2,4 livres pour faire
pâffer à un tiers ; il les; envbie, rnais il n’en a au
cune preuve; il les gardeJ cc pourroit n’être qu’un
oubli ; cependant ce défaut de preuves, cet oubli
pourroient être fuipe&s, & M e. Boyer a promis
de nej.pas'laiiîèr Je. plus léger nuage iur fa con
duite , - ôcnd’écarter juiqua l’ombre même du
foupçon.
' n
C e Procureur de Riom auquel Me. Boyer deivoitt^rt i7 6 3 ifa ite paiïer ce$ 2 4 liv^étoitjM c.
B i’o rat, qui étoit chargé d’une affaire pour la'G andebœuf : ce Procureur eft mort depuis quelques
années, le cas devient plus embarrafïant, car s’il
étoic encore vivant, on fe feroit bien gardé de ie
livrer a:cette inculpation, —..l1'""
, •
r , , Cependant malgré cet obilacle , Me. Boyer fc
trouve, par le plus heureux hafard,en état d’établir
par des preuves écrites qu’il a dans le temps em
ployé cette fortune a fa deilination, 6c voici com
ment.
.
. Me. Biorat 6c fes cohéritiers avoient en Ia Sénéchauilée de cette Ville une affaire contre l’Hôpital Général 6c l’Hôtel-Dieu ; l’affaire fut perdue,
�4-6
M e. Boyer fnl’état de Tes frais, M e.Biorat, chargé
de la fuite de l’affaire pour toutes les Parties , com
pta avec lui dans le temps même où il étoit chargé
'd e ’.lui envoyer cette- lomme de 24. liv. pour la
Gahdebœuf; cette ibmme fut imputée fur le débet
de Me. Biorat envers Me. Boyer , & Me. Biorat
l’imputa à fon tour fur fes frais vis-a-vis la Gandebœuf
Ce fait eft prouvé par trois lettres de M e.
Biorat , dont M e. Boyer eft porteur, qui cons
tatent à la fois &i ce compte & cette imputa
tion des'i^ liv. &• juftifientpleinement M e. B oyer,
'non feulement de ce fait relatif à Tmiidélité pré
tendue de s’être approprié cette fom m e, mais
même quant h la lomme de 7 2 liv. & du prix
de la charrette ; car dans ces trois lettres- on voit
bien clairement que les Gandebœuf n’étoient pas
gens à iürpayer leur Procureur, (a')
Prem ière Lettre du prem ier A v ril 1 7 6 4 .
»
»
»
•»
»
» Monfieur & cher a m i , il y a apparence qu’il vous a pa/Té
de l’ idée de me faire payer par les Gandebocuf de la fomme
de 1 7 liv- 1 1 f ° l s <]u’ ils me doivent du reilant de mes vacations , fans quoi je fuis fur que j’aurois été déjà fatisfait
depuis le mois de Mai dernier quenous réglâmes enfemblc, &c.
Signé B i o r a t .
,
Seconde Lettre du t o Septembre *76 ^.
», Monfieur , je crois que M. Andraud , mon neveu , vous a
» prié plufieurs fois de ma part de me faire payer par lesGan» dichier des 1 3 livres 1 1 fols qu’ils me doivent encore , compenlation fa ite des fr a is que fa v o is fo u rn i pour eu x , d'avec
» ceux que vous avie^ fo u rn i pour moi & mes Conforts dans
» l e procis que fa v o is avec les deux H ôpitaux de notre V ille , il
�47
C ’en eft afTez fur tous ces faits,.6c il eft tenips
de terminer cette dégoûtante difçuiîion ; M e.
Boyer a rempli Ta tache, il a repoufle lesjraitsenvenimés^ de la calomnie & 'confondu {’impôtture ; il ofe le dire avec cette confiance que lui
infipire le témoignage de fon propre cœur ; fa con
duite eft fans,tache & ,1a. vie fans reproche, .elle
eft connue des M agiftrats; qui ,1’entendent, qui
depuis l é années l’ont v a fiûvre .Æonftàmment ià,
carriere avec la 'droiture',,'le zele 6c les talents
qu’exige fa profefïion , fans que jamais leurs oreil
les jayent été frappées de là] plainte la plus légere.
M ais fon état., fa. fortune ^ f ç p exifteneé mo
rale dépendent dp Popipipri ;p»frJiqyei J l : aV:oit'em'j
ployé 1 6 années à ;jiè la rendre favorable.6c un
inftant à tout détruit; les déclamations outragean
te^ , que, l’onis’ eft permis à la ;der niêrelAudience,
ont fait la plus vive impreftiw. fuKcoiJS leslA u
diteurs , 6c la multitude de ces Auditeurs raflèm>, cil honteux que depuis 1 6 mois je fois encore à demander
„ cette petite f o m m e , ie ferois fâché de les faire afligner, &c.
n Signé , B Î o R À t P O
ç
•* 'r ^
Troifieme Lettre du G F évrier i j G ç .
» C ’eft à votre confidération & à la prière que vous m’avez
» faite par votre lettre du iç du mois dernier que j’ai bien
3) voulu accorder aux Gandicher la quinzaine pour le paiement
n des 1 3 liv. 1 1 fols qu’ils me doivent depuis le mois de Mai
•»-‘iy^-de-frats-, pouruvoir occupé pour eux , compensation diit» m en tfailè Mec vous de ceux quc<voUs àvic^fo'urni pour moi &
» mes .Conforts dans lé procès que nous aviotis àvie les deux Hâ~
» p ita u x d t votre Ville ,je vous prie donc , & c. Signé, B i o k a t .
�W<w<--î
.48
blés des quatre Provinces par la Foire & les
A ffifes, a porté cette diffamation dans toutes les
parties du R e f f o
r t
;
M e. B oyer ne s’occupe pas à calculer les torts
que cette diffamation lui a caufé , ils font inappré
ciables , & fon A d verfaire n’eft pas en état de
les réparer mais il demande du moins, comme
une juftice à laquelle tout Citoyen a droit de prétendre d’être v engé d’ une maniére proportion
née a la multitude , à la gravité des inculpations
& a l’atrocité de la calomnie, & pour rendre
cette vengeance auffi .éclatante que l’a été la dif—
famation q u e l’A r r ê t qui doit le juftifier foit im
primé & affiché dans toute l’étendue du R effort j
& par-tout ou la calom nie a pu pénétrer.
■*
*
M onfieur D U F F R A I S S E D É V E R N I N E S ,
- , Avocat Général.
M e. B O I R O T ,
B oy e r
A
C
,
Avocat.
Procureur.
L E R M O N T - F E R R A N D,
D e l 'imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur dei Domaines
du R o i, R u e S G e n è s l’ancien Marché au Bled, 1774*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duffraisse de Vernines
Boirot
Boyer
Subject
The topic of the resource
offices
Conseil supérieur de Clermont-Ferrand
lettres de change
ventes
registres de recettes
lettres de rescision
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour Maître Pierre Boyer, procureur en la Cour, intimé. Contre le sieur Sainthorent, procureur au présidial de Clermont-Ferrand, appellant.
Table Godemel : Office. Contestation sur l’exécution de la vente d’un office de procureur
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1771-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0614
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Conseil supérieur de Clermont-Ferrand
lettres de change
lettres de rescision
offices
registres de recettes
ventes
-
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CONSEIL
SUPERIEUR.
M
E
M
O
I
R
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1 ere C H A M B R E .
POUR
M e. G
B A R T H E L E M Y , N otaire Caufecontînuée
eorge
R o y a l , & Procureur d'’ Office au Bailliage de Cham alieres, Appellant, Demandeur & Défendeur.
C O N T R E Sr. A
n d r
É
D E S O C H E S , Entrepofe ur
des Tabacs en cette V ille de Clermont- Ferrand ,
Intimé & Défendeur.
ET
contre P
ie r r e
B A R B E T H uiffler en la.
Cour . Intervenant & Demandeur.
¡jj^d^rjôizrçri
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fc^QoZTTOT-Tt^
L fieur Defoches femble avoir eu pour
E
but, dans fon. Mémoire i mprimé v d’en
impofer au public : & de' furprendre la
religion de la C o u r; il ne s’ eft pas dé
menti dans ce qu’il a fait plaider ; Barbet ,
qu’il a appelle pour avoir occafion de parler fous deux'
nom s, l 'a parfaitement imité. L ’objet de la caufe a été
entierement changé par l'un & l'autre des propofitions
contraires aux principes conftants ont été élevées; pour
les appuyer, ils ont excipé de décifions indifférentes à l’ef-
SaoSitJ?.'
�pece, §c fuppofé des avis diamétralement oppofés. à cc,
qu’on lit dans les Auteurs qu’ils citent. Il cil temps de
rétablir les faits & de venger les régies : c’eft ce que
j:e:, me propofe dans ce Memoire. . ■
j J ’ai été publiquement outragé par le'ficur Defoches;
en vàin', pour pallier fa conduite -, rappelle-t-il la qua
lité de (créancier qu’il n’a plus aujourd’hui, elle ne l’autorifoit.pas à m’enlever ma liberté d*üne maniere irrésIguliere
deshonorante, dans le temps même qu’il me
voyoityibus I çl iàuve-sarde dje la Juftice ; il a fervi mes
o
T...' • • ° 1
v v. ■
. ’•
•'ennemis, '1 ignominie dont il m a couvert, non moins
Certaine-, quoique icellée par un a£te fau x , a” terni ma
réputation & tari, mes reiïources.: Laperte de mon honneur & de ma fortune eft le fujet de mes plaintes.
Toup ’çc que j’avance eft connu ou démontré; tout ce
que. je demande eft évidemment jufte ; mes adveriàires
en font convaincus , & ne croient pouvoir s’y fo u t
traire qu’en préièntant à canonifer l’irrégularité la plus
pf.éqfçment prononcée , l’indécence la plus injurieuie
& la plus révoltante, le faj.ix même le mieux manqué
& le plus dangereux ; ils luttent opiniâtrement contre
les,r|pi^:.6c la, raifon ; efperent-ils quelque vivoire ?
n2 V
i i fis
E T.
‘P R 0 C E D U R E S .
J e rae.fuis procuré par moi-même un état honnête,
dc^ns- l’jexerciqe, duquel j’ai eu;,des concurrents & des
iiipcçs^■j’pi dpnç fait des j a l o u x , j e me fuis donc att i r ^ . ^ ci^^è'mis ; confcqupnce.s affligeantes pour l’huniçnite, mais trop bien démontrées par l’expérience F
tantôt on veut me punir de m’être attiré trop de con-t
lîance dan$; l’excrcice du N o ta ria t, & pour fermer à
�2*1
3
m es clients les avenues clé mon E tu d e , on ‘m e illicite unes
affaire d’éclat, c’étoit le bruit du tonnerre, il n’en.eut q u ex
la durée, je tiens 'mes.adverfaires dans, le fileja,ce_'de?cf
puis quatre années entieres. Tantôt on me-trouve trop
exa& , trop vigilant & trop impartial dans mes fonâipns de Procureur d’Office , &c par des menées fpurdes on •
me dénigre auprès d’un Prince , & à fo r c e ' d’imputa
tions atroces, on obtient ma destitution fi defirée; mais
deftitution révoquée à la honte du méchant , dès le
moment même que j’ai pu in’expljquer. & déchirer le
voile de la calomnie. L a haine, ne.fe lailè pas, on cher
che à prévenir les premiers.de l’E ta ty ;des Lettres
:
nymes, des Mémoires fecrets paiîent' jufques danfr lç
cabinet des Miniftres , on veut en obtenir, par furprife, un coup d’autorité qui perde le malheureux ; m ai$,
en vain , la probité reçonpite dans Fexamen le pliisfcrimuleux, obtient un glorieux triomphe.
,
Ce n’étoit^pas là les lèuls traits que j’aVois à crain- ,
dre. Que la haine eit induilrieuiè ! On imagina par
la fuite de me rendre coupable malgré moi-meme. * ;
on me fuppofoit plus d’averfion pour l’ignominie que
d’attachement & de fou million à la Juiliçe. On forma
le projet de me réduire publiquement à la révoltante
alternative de me voir deshonorer ou de me rendre
rcbellionnaire.
C ’cft au nom du fieur Deioches qu ont etç faites ces
indignités puniilables.' 11 eft necefîaire de- s’airrêter ! au
prétexte dont on s’eiî; fe r v i, aux circonflances dans ,
^qu elles on l’a em ployé, & à la maniçre • dpnt qn
s
conduit.
. . . . : • • u
•i - . .
Le voyage que je fus ^obligé de f^rie à,
en,,
I 7 7 ° > pour découvrir à M . le Duc de Bouillon lés
A 2.
M
�calomnies par le moyen desquelles on étoit parvenu à
fl*rprendret la religion de ce Prince, me eau là des dépe'nfcs confidérables relativement à ma fortune.
' I l n'étoit' pas moins néceiïàire que je fiilè de nou
veau ce voyage en 1 7 7 1 , pour me difculper des imiitations injurieiifes qui m’avoienc été faites dans des
Mémoires' adreiïesaiix premiers Miniftres de la Juftice;
moihs fortuné pour lors , je n avois d’autres reiîources
que l’emprunt, je m’adreiTai au fieur Defoches donc
je connoiiîois l’écàt, & qui mê prêta n c o livres à in
térêt ; il' voulût ma liberté pour gage du principal non
aliéné, & du révenu cumulé, & me fit ligner une lettre
de change de 1 x 3 0 livres à fix mois d’échéance, avec
convention qu’elle feroit renouvellée tous les fix mois,
& qu’en cas d’abfence de ma p a r t, le fieur Deloches
afîureroit fes intérêts en obtenant Sentence.
M e trouvant abfent à l’échéance de cette lettre de
change, le fieur Defoches fit prononcer contre m o i,
fiiivant nos conventions, des condamnations confulaires ; à mon retour de Paris je lui ai payé fes frais avec
tous les intérêts, même jufqu’à plufieurs mois après ce
payement : lalomme de 3 0 livres, cumulée avec le prin
cipal dans la lettre de change, demeurant toujours payée
d’avance en fus de l’intérêt échu , c’eft démontré par le
calcul fait par le fieur Defoches dans l’a âc inftrumentaire du 1% Juin dernier, qui porte quittance du prin
cipal , des intérêts cumulés avec le principal & des inté
rêts du tout.
M es ennemis ont vent de cette Sentence, & exci
tent le fieur Defoches à me pourfuivre ; ce dernier n’étoit lié que par parole d ’honneur que nous voyons
aujourd’hui fi fouvent méprifée, on ne put pas, il eft
E
�233
■>
v r a i, lui arracher Tes titres , mais on lui fit promettre
de donner ion approbation à tout.
Je fus ainfi livré à la merci de mes ennemis, il ne
leur reftoit qu’à me couvrir de honte par un emprifonnement ignominieux, à l’inftant même ils pouvoient
iàiiir leur proie ; ne craignant rien du fieur Defoches,
dtrnt j’avois la parole, lur laquelle je me fondois mal
à propos ; je me préfentois en cette V ille tousles jours,
& à pluiieurs reprifès par jour ; je m’en rapporte fur ce
fait à la notoriété publique. On pou voit donc m’etnprifonner à tout inftant & fans peine. Mais mes enncnemis ne pouvoient fe fatisfaire d’une ignominie or
dinaire , il leur falloit des circonftances qui en aug
mentaient l’éclat : les Aififes des jufticiables du Bail
liage de Chamalieres fe tiennent ordinairement le onze
Ju in , qui s’eft rencontré cette année un Je u d i, jour
fixé pour l’Audience ordinaire, on efpéroit de m’y
voir au milieu de tous les Vaiïàux dont j’ai la confian
ce en ma qualité de N o ta ire, c’eft: à cec inftant que le
coup fataldevoit m’être porté.
M o n exactitude à mes devoirs fondoit les cfpéranccs de mes ennemis ; appellé à Chamalieres pour l’exer
cice des fondions de Procureur d’O ffice, je m’y rends
avant midi; mes premiers moments font employés à des
fondions de ma C harge, & en particulier à 1émancipa
tion de Jean Ginion de Ceyrat.
L a tenue des Aiïifes & de l’Audience des caufes, à
laquelle j efpérois d’en faire juger deux qui m’etoient per
sonnelles, devoit remplir fuivant l’ufage la féance de l’a-'
prcs-dînéc. Trois H uiificrs, Martin P e t it , Tilignac &
Calias (ont portés liir l’avenue & dans l’Auberge la plus
voiiine delalàlle d’Audience; tout étant prépare pour
�*
'
< ^
6 ,.
l'exécution du projet, Palliée, Huifîier du Bailliage, qui avoir tenu compagnie aux trois autres jufqu’alors ,
les quitte pour aller prendre ordre du Bailli de venir
m’avertir de me rendre; la fçénne étoit prête,’ envi-'
ronné de tous les Habitants de Ç e y r a t, Boiiïèjoux,
Sauzet, Thedes, Champeaux, Manilon , &C; je me
difpofois a monter le degré qui conduit à là ialle d’A u dience, lorfque je me vis aiïàilli par les Huiiliers por
tés , ils agirent avec cette violence qu’on peut leur
fuppofçr pour obtenir les trois louis promis pQur prix
de l’expédition ; c.ette libéralité n’étoit pas du fait du
fieuy Defo.ches , mais ils n’étoient pas moins aiTurés .
d’obtenir leur réçompenfe..
L e peuple étonné, irrité même de cette indécence,
dont leur Homme de confiance étoit la vi&im e, s’émouvoit feniiblement, & fembloit demander fi je deiirois ma délivrance ; je.lavois depuis long-temps que je
leur devoisTexemple.de la. foumiifion à la juftice, qu’il
n’y avoit pas à balancer entre l’ignominie & la rebel
lion , même contre des procédés vexatoires; je leur ré
pondis donc par des témoignages contraires à leurs vues,
& iàns le favo ir, je fruftrai mes ennemis dans leur at
tente., je les privai du moyen qu’ils avoient juftemenc
cru infaillible pour me perdre dans l’un &: l’autre de
mes qualités de Notaire & de Procureur d’Office.
L ’indignité & l’ignominie avec lefquelles. je fus bru
talement traîné de Chamalieres dans les prifons de cette
V ille font au deiTus de toutes expreflions ; d’ailleurs le
public en a été inilruit par les yeux, double raifon qui
me difpcnfc de les rappcller.
Traduit dans l’obicurité des priions, peu remis en
core des douleurs que m’avoient caulé dans ce trajet ,
�\
•
7
les'poignets aufïi. meurtriers que vigoureux des trois
Huiffiers que j’ai nommés; intimement convaincu de
mon innocence, ne pouvant préfumer que la Juftice
eût adopté des accuiations calomnieufcs, je cherchai,
je mçditai beaucoup, & le iieur Defoches me parut
feul capable de ce trait , je lui adreilài uné lettre
dans le moment même, pour le porter à un effort ex
traordinaire ; j’y inférai pour cela des expreflions ho
norables que le iieur Defoches a démenti, & qu’il
a prouvé avoir été mal adaptées ; il s’en fait cependant
un' moyen , & pour fe rendre moins odieux,r•il la1 iyn^
cope , il en retranche même des propofirions qui dé
montrent combien il y a peu de fincérité dans ce qu’ilJ
dit , qu’il avoir offert de ie contenter dè fimples1
Îeuretés , ne craigne^ nullement de perdre
-M'.J
f a i des reJJources à faire honneur à ce" ifàe je^vous1
i ° ‘ s »/ vous vouleç bien ne pas me les ‘ôter \ éti nie1
fiifa n t tenir prifon , voulez-vous, M . /i„v o u s aVie^
quelque crainte de perte , accepter la vente de ihon^Of*
fice &. dd ma maifon à Beaum ont,jc fu is prêt a vous ld'
pajfer. ........telles étoient mesipropofitions ; or n’étoitce pas là plus que des offres de feuretés.
t
, J ’ai dit & je répété que cette ‘lettre •fut écrite •&'
envoyée au moment même , ou le momèiit' après cfiie
j’eus été cmpriionné , favoir, à quatre-heures 'du felir,*
date qui y cil écrite; ce fut même par cette'1''lettre’
que le iîeur Defoches reçût la premiere nouvelle de^
mon emprifonnement, cette lettr.e lui avoit -étéfti'mife1
avant l’arrivée "du particulier qui lui fut idÎ^éché-de
Chamalieres , pour le prévenir de'ce qai'fc’ëtoit^affë;
& l’avertir d’envoyer à la prifori un HuîiFicr qiii fu?
dreifér le procès verbal de -capxnrt^ôc'd’ccrbuéiJ 1 Li
�8
Il falloir pour cette fonction un homme plus avide
qu’habile, Barbet , qui avoit ignoré jufqu’alors que
j’eus jamais.rien du au fieur Defoches, fut rencontré
le premier ^ conduit chez le iieur Defoches, il apprend
le fait , reçoit les titres, fe procure deux témoins ,
& vient drefFer dansées prifons, à. fix heures du io ir ,
ainfi qu’il eft juftifié par écrit , le procès verbal de
capture, d ’emprifonnement 6t d’écroue dé nia perfonnc. ,
.
Cette conduite me furprit, je le témoignai par un
a&e inilrumentaire que je fis faire à B a r b e t, & aux
autres Huiifiers dans le temps qu’ils redigoient le pro
cès verbal ; je proteftai expreiTément de m’inferire en
faux. Mais ces Huiifiers devoient être graiTement foldés , toutes remontrances furent vaines, ôc la décla
ration de B arb et, qu’il ctoit porteur de pouvoir , fut
tout ce qu’on put obtenir d’eux.
Je me pourvus à la hâte en la SénéchauiTée de cette
V ille contre mon emprifonnement que je foutins
n u l, tortionnaire injurieux & déraifonnablc, j’y fus
déclaré non recevable par Sentence du 1 7 Juin ,
par laquelle, quoique ma caufe eût été plaidée avec
la plus grande modération , il m’efl: fait défenfes de me
lervir à l’avenir d’aucun terme injurieux contre le
fieur Defoches. Surqupi je le défie hautement, publi
quement & judiciairement d’indiquer aucune des expreifions de la Plaidoierie.qu’il puiilè préfenter comme
injurieufes.
M ’étant procuré le., montant des condamnations
Confulaircs qui Icrvoicnt de prétexte au fieur Defoches pour me tenir dans les prifons, je le lui ai offert,
fous la réferve de fuiyrc l’appel que j’avois déj a interjette,
il
�9
2**
il l’a accepté, 6c m’en a donné quittance notariée ,
que j’ai voulu en cette forme pour aifurer mes réferves.
Enfuite,parfurabondancede droit, j’ai obtenu A rrêt
en la Cour le fix Ju ille t, qui me permet de m’inicnre en faux contre le procès verbal d’emprifonnement
daté du onze Juin précédent. L e fieur Defoches a
d’abord dénçncé cette demande à Barbet , depuis il
a formé oppofition à l’Arrêt qui me permet de m’in£
cnre en f a u x , par requête du neuf; il a été imité
par Barbet qui eft intervenu par requête du dix pour
former oppofition au même A r r ê t , 6c par une autre
requête d u > i du même mois , ce dernier a conclu à
2-ooo liv. de dommages 6c intérêts.
T el eft Tétat a&uel de cette caufe, extraordinairement défigurée parle Mémoire imprimé du fieur Defo
ches , & encore plus par les fuppofitions indifférentes
que Barbet ôc lui ont fait plaider à la derniere Audien
ce. Ramenons-les aux points àdifeuter, ils font en grand
nombre. L ’oppoiition formée par le iieur Defoches,par
fa requête du 9 Juillet, à f Arrêt du 6 du même mois
qui me permet de m’inferire en faux contre le préten
du procès verbal de capture. La demande en dénoncia
tion 6c garantie formée par le fieur Defoches contre
B a rb e t, par exploit du même jour. L ’oppofition formée
à l’exécution du même A r rê t, par Barbet, par fa requê
te d ’intervention du lendemain. L a demande en dom
mages intérêts portée en la requête de ce dernier du
vingt-un du même mois. M a demande en rejet de
la pièce ii juftement maintenue faufle. M on appel de
la Sentence de la Sénéchauflée. du 17 Juin , 6c les de
mandes que j’avois formé devant le Juge dont eft
appel.
B
�Cette énumération ne doit pas effrayer, il eft facile
d’établir en peu de mots que l’oppolition formée par
le fieur Deioches & Barbet à l’Arret du 6 Juillet eft
non recevable , qu’il en eft de même de la demande
en dommages intérêts formée par Barbet, que faute par
le iieur Deioches d’avoir fait la déclaration exigée par
cet Arrêt &c l’Ordonnance de 1 7 3 7 , le prétendu pro
cès verbal d’emprifonnement doit être rejetté de la
caufe.
Mais euiïè-je dédaigné de me pourvoir en infeription de faux contre le prétendu procès verbal de mon
emprifonnement, mon appel ne feroit pas moins bien
fondé ; la Cour frappée des nullités multipliées de ce
procès verbal , jugera que je n’ai eu recours à
l’infcription en faux que par furabondance de droit,
& pour tirer les parties d’affaire, prononçant fans doute,
par fans au il fo it befoin de s'arrêter à Vinjeription de
fa u x , infirmant la Sentence, elle accueillira la deman
de en nullité & en dommages intérêts que j’avois formé
devant le premier J u g e , telles font mes conditions prin«
cipales & fubfidiaires, je les prends avec confiance ,
parce que je fuis en état de les fonder fur des dé'
monftrations.-
M O Y E N S .
» L a pourfuite du faux incident aura lie u , lorf» qu’une des Parties ayant lignifié, communiqué 011
» produit quelque pièce que ce puiiîe être dans le
*» cours de la Procédure ; l’autre Partie prétendra que
» ladite pièce eft fauiïè ou falfifiéc » ainii s’expli
que l’Ordonnance de 1 7 3 7 , titre du faux incident ,
�II
article premier. C ’eft fur cette loi qu’eft fondée ,
mon entreprife en infeription de faux contre le procès
verbal de mon emprifonnement, ce prétendu procès
verbal a été produ it , communiqué, Jignific , il a fervi de lien pour me retenir dans les prifons, il a été
la baie de la Sentence dont cft appel, il y a donc
lieu à la pourfuite du faux incident contre cette pièce.
Approchons de cette démonftration ôc des autres
difpofitions de l’Ordonnance, les allégations qu’on
m’a oppoiées comme fins de non recevoir,la lumiere
de ces flambeaux en fera appercevoir la futilité.
i°. On me reproche de iîavoir pas expliqué ce en
quoi coniifte le faux dont je me plains. Je réponds
qu’il efl: vrai que ma procédure ne contient pas la
déiignation expreflè de ce en quoi j’arguë l’afté de
fau x, mais étois-je tenu de faire cette indication ? le
iieur Defoches foutient l’affirmative fur la difpofition
de rOrdonnance, &c le fentiment de Rouilèau de Lacombe, de mon côté je ioutiens le contraire iiir les
termes & les diftin&ions de la même Ordonnance ,
& lur le fentiment du même A u te u r, &c de tous les
autres qui ont traité la matiere. Quelle fingularité ! elle
a pour fondement une bévue de la part du fieur Defoches.
Il y a une grande différence entre Vaccufation de
fa u x principal & l'injcription de fa u x incident. Le faux
principal s’introduit par requête de plainte qui doit
inltruire le Juge de premier abord des faits dont on veut
faire informer : c’efl: la feule inftru&ion légale qu’on
puiile lui donner , il faut donc indiquer & déiigner les
caulès que l’on prétend fauifes, & lur lefquelles il faut
faire informer ; l’Ordonnance ne le porte nas textuel-
�I l
lement, mais tel eft Ton efprit, 6c ainfi l’a décidé R o u £
ibau de Lacom be, cité par le iieiu* Defoches.
Il en eit ■autre'ment de i infeription en faux incident,
elle s’introduit par requete tendante à per;iiiiïion de s’inicrire, & cette permi hon ne doit dépendre que du plus
ou moins d’influence que la pièce arguée de faux peut
avoir lur là décilion de l’inJiance, à laquelle l’infcription eft incidente , il ne doit pas c>rc qucilion dès-lors
de ce en quoi confifte le faux ; cetre énonciation feroic
fruftratoirc , puiiqu’ori ie trouveroit obligé de la ré
péter dans les moyens de faux, que l’article 14. du même
titr e , veut que l’infcrivant dépofe au Greffe après la
déclaration du défendeur. Elle feroit dangereufe, par la
raifon que ^article 9 du même titre, exigeant qu’il fôit
donné copie a*i défendeur delà requête, cette requête,
fi elle contenoit les énonciations que mes adveriaires
préfentent comme néceflaires, inftruiroit le défendeur
6c le mettroit à même de prévenir 6c furprendre les
témoins 6c de difliper les preuves, c’efl: pourquoi l’art.
38 porte, qu’en aucun cas il ne fera donné copie ni
communication des moyens de faux au défendeur.
Aucun Auteur ne s ’eft écarté de ces maximes , 6c
Rouflèau de Lacombe , qu’on nous cite comme ayant
une opinion favorable au fyflême du fieur DefoGhes ,
s’explique d’une maniéré bien contraire, le Demandeur
donnera Ja requête , dit cet Auteur dans fon Commen
taire fur l’Ordonnancc de 1 7 3 7 , au titre du faux in
cident, page 2 7 9 .............par laquelle il expofera que
dans la cauje , injîance ou procès d’entre lui & J a Partie
adverje , elle lui a fa it fignijier , communiquer ou pro
duit une ou plu/icurs pièces dont il expliquera la na
ture & la date , & dira q u i l les maintient faujfes ouJ'ai*
�331
J3
f { f ié e s E N G É N É R A L , S J N S
q u 'i l
SO IT
n éc e ssa ir e
-d’ e x p l i q u e r e n q u o i c o n s i s t e p r é c i s é m e n t
L e f a u x o u l a f a l s i f i c a t i o n , c a r , ajoute-t-il,
i l n en efc p a s de m cm e de la d em a n d e en f a u x in c id e n t
que de la p la in t e en f a u x p r in c ip a l, où i l f a u t e x p liq u e r
en q u o i c o n fijle le f a u x . . . . . . p a r ce yu en f a u x in
cid en t , q u a n d on f o u r n i t f e s m o y en s d e f a u x , l'o n e x
p liq u e en q u o i le f a u x ou là f i l f f i c a t i o n c o n fifle. L e
dchmt de déiignation des énonciations faufiès ne peut
donc pas former une fin de non recevoir.
)
2-°. On prérend que je n’ai pas d’intérêt dans l’in s
cription de faux , par la raifon fuppofée que la pièce e jl
in différen te ou p e u in térejja n te p o u r la d é cifio n .
L e fieur Defoches fe fut-il expliqué a in fi, s’il eut
cru que l’objet &c l’état de cette cauie fuilènt connus
Quoi! je me luis pourvu contre mon emprifonnement,
& on ofe dire que je n’ai pas intérêt à faire rejetter par
la voie de l’infcription de faux le prétendu procès ver-j
bal , par lequel on a voulu conftater cette injure dont
je me plains ? Sans ce procès verbal je n’aurois pas été
cenfé emprifonné ; s’il n’exiftoit p a s, il n’y auroit pas
de conteitation fur ma demande, & je n’aurois pas le '
droit de fuivre l’inicription de faux qui produira le
tticnie effet ? Il n’eil queftion que de dépens, dit le fieur
•^eibehes: eh bien, la caufe fut-elle réduite à ce point,
nc ferois-je pas recevable à m’inferire en faux contre
k pièce introdu&ive de l’inftance ? Mais il en eft au
trement , l’outrage qui m’ii été fa it, l’ignominie par la
melle on n’a que trop réufli à ternir ma réputation &
tarir mes reiTources , font les objets à examiner &• ceux
° nc je nie plains.
I
�lâr
M a is , ajoutentencorcmes adverfaires , le procès ver
bal , cette pièce arguée de faux efl indifférente ou peu
intérejjante pour la décijlon ; s’ il en eii ainfi, il n’y a
qu’à la rejerter de la caufe , l’inicription de faux ne
tend qu’à cela ; fi au contraire cette pièce fert de ba.fe
aux prétentions du iieur Defoches, elle me nuit, & je
fuis fondé à l’attaquer par les voies de droit ; or l’infcription de faux eft de ce nom bre, donc, &.c.
3 0. On foutient que je ne fuis pas à temps de m’infc
crirecn faux , que j’ai couvert le vice de la pièce arguée
de faux, foit par la lettre que j’ai écrite au heur Defoches,
foit par le payement que je lui ai fait.
Commençons par répondre à cette derniere partie
de l’obje&ion ; fi elle étoit fondée, je r.futerois inu
tilement la premierc.
J ’ai payé au heur Defoches tout ce qui lui étoit du ,
môme 30 livres d’intérêt de plus que ce qui lui étoit
du. (
Les conventions font les Loix , & ce n’eft pas
( a ) Pour qu’ on ne puifTe pas critiquer ce que j’avance , je l'établis
par le compte que fit le fieur Defoches dans l’a&e inftrumentaire du
i l Juin d ern ier, dont voici les cxpreifions.
Il
déclare qu’il lui étoit du lu Jbmrnc de z z j o livres , montant de ladite
lettrede c/iu/ig-«, ( je n’avois reçu que n o o l . ) , c y , . IZ30 1.
Pour les intérêts de ladite fomme principale, dcduïïton faite des vingtièmes £t deux fols pour livre ,
celle de 5 7 livres i j fols , c y ,
.
.
.
.
57
1 7 f.
Pour fra is faits jufquà Femprifonncment, excluftvcmcnt
livres 1 7 Joîs g deniers, c y ,
.
.
34
17
9 à.
Toutes lefquelles Çommes revenant t) celle de t J
2-2,
—
*
.......... '—
"■■
■
-
¡ivres 14. fols çf deniers, cy ’,
.
.
.
• 1 3 1 1 1. 14. f. ç d.
Sur laquelle fomme le fieur Defoches déchire avoir reçu en deux dijférentes fo is , ( en Jan vier 1772.. ) par les mains du Jieur Arny $ 3 livres ,
partant il lui refie encore dû celle de tZ-Zÿ livres 1 4 Jols ,9 deniers, &
à r infant ladite Dcmoifelle Duijfon, {femme de Me. Barthelmy, ) ayant
�a moi qu’on peut faire le reproche , que celle par la- .
quelle le fieur Defoches s’eft autorifé à retenir les 30
livres , eft contre les bonnes mœurs ; mais en payant au
fieur Deioches ce qu’il avoit droit d’exiger de moi ,
ai-je renoncé à. ce que j’avois droit d’exiger de lui ,
ces objets n’étant pas dans le'çâs de la compensation ?
J ’ai payé une fomme que je devois, & j’ai fait des
referves expreiles & réitérées de ce qui m’étoit dû ;
je les ai expliquées; c’eft la réparation de l’injure'&
du tort qui m’a été fait par le fieur Defoches, ;'j’étois
en inftance en la Cour pour raifon de ce fait, je me
fuis réfervé la fuite de cette inftance ; l’a&e notarié du
2-2, Juin en contient la preuve à chaque page.
Dans cette inftance j’attaquois faite du 1 1 JuiiVcornnie nul & vexatoire , je m’étois réfervé
dans mes
requêtes en la Sénéchauifée, & dans.celles en l a d o ü r , 7
de me pourvoir en infcription de faux; mes droitsfont:
mta&es à cet égard , je dois être reçu à cette pourfuite.'
Je vais plus loin, &: joignant ici la lettre que ¡ ’écri
vis au fieur Defoches à la quittance qu’il m’a fo u rn i,4
je foutiens que ces deux pièces, fuilent-elles approba->'
tives de l’a£te en queftion , je ne ferois pas moins enx‘
droit de l’attaquer par infcription de faux ; j’en tiré la •
preuve de l’article a du titre 2. de la mêmcvOi*doh^\
nance de 1 7 3 7 , qui veut que la pourfuite! d ù rrfaüx •
incident foit reçue, encore que les pièces prétendues fa u fH.
confcnti que ledit fieur Defoches reçoive ladite fomme de
livres
f ° t s 9 deniers , auxdites conditions & fous toutes ces protefla tidns Çf refer- ■
vr cs » & en exprès de fes dommages intérêts à raifon £ emprifonnement dudit 1
peur Uarthelmy, frais & dépens ; ledit fieur^Defoches , jous les mîmes reJerves & protejlations contraires, a reçu préfentement ladite fomme de'
1
livres z/j. fols 9 deniers, dont quitte d'autant.
.
�***
1^
1 6-
Jès ayent été vérifiées , menu avec le demandeur en
fa u x , à dautres fin s que celles d'une pouifuite de fa u x
principal ou incident , & que même en conféquence il
ioit intervenu un jugement fur le fondement defdites
pièces comme véritables.
Quant à la lettre du n Ju in , je fuis fnrpris que le
fieur Defoches en ait fait ufage ; elle dément les quali
tés d’indulgence , de bonté & de bienveillance dont il
fe pare; j’y inférai des expreflions propres à toucher le
prêteur le moins humain , .le plus infenfible, elles frap
pèrent fur l’airain , je ne pus rien obtenir, pas même
le confentement du fieur Defoches à la vente que je
lui propofai de ma Maifon & de mon Office, pour en
emplpyer le prix à l’acquittement de fa créance.
Cette lettre enfin peut-elle être prife pour approba
tion du prétendu procès verbal ? j’ai articulé dans un
temps où elle n’avoit pas repafle fous mes yeux, lavoir
dans ma requête du n Juillet dernier quelle avoit été
écrite ' au moment même de mon entrée dans les prifons ,
& quelle fu t même remife au fieu r Defoches , une heu
re au moins avant que le procès verbal maintenu fa u x
eut été drejfé , à menie une heure avant que Barbet à
les deux Records , fe s ajjifiants , eujjent paru dans les
piifons. A ujourd’hui
après la communication que
j ’çn -ai prife , je prouve le fait par écrit. L a lettre
eil datée de quatre heures du foir, & le procès verbal
ne fut dreile qu’à iix heures , c’efl prouvé par l’aile
inilrumentaire fait aux Huiifiers dans le temps même
qii ils étoient occupés à écrire , porte l’aile. O r une let
tre écrite à quatre heures après midi peut-elle être prefentée comme approbation d’un a£lc écrit à fix heures
de la même foirée ?
¿J'o*
�x7
4°. Enfin on avance comme certain qu’il y a de Villufion dans les énonciations prétendues fauflès & pour
raifon defquelles je me luis pourvu.
L e développement qu’ont fait le fieur Defoches &
Barbet de cette objection iinguliere , annonce afïèz
combien leur caufe eft déplorable; ils ont avoué l ’un.
& l’ autre en plaidant, que dans le vrai Barbet n a aff if t i ni à la capture , ni à la conduite , ni à VempriJonnement , mais feulement à la rédaction du procès ver
bal qui ejl de f i n ja it ; ils m’ont cependant foutenu
non recevable à m’inicrire en faux , fous prétexte qu’il
eft indifférent par qui que ce foit que j’aye été faifi,
l’ayant réellement é té, & qu’il feroit impoifible - de
trouver que Barbet n’étoit pas à cette expédition miitaire.
Peu d’attention fufEt pour faire appercevoir que*
mes adverfaires cherchent ici à éluder la diipofition de
l’article 38 de l’ Ordonnance de 1 7 3 7 > & à fe faire
communiquer, contre la prohibition de cette l o i , les
moyens de faux quej’ai h oppofer au procès verbal ,
& dont j’ai déjà été forcé de découvrir.une partie. Mais
fans entrer dans le détail du lurplus de ces faits, qui
étonneroient le Public & irriteroient la Juftice, j’exa
mine &. je détruis le prétexte de mes adverfaires.
J ’ai la preuve que les HuifTiers qui m’ont faifi n’avoient pas de titres &: ignoroient ce qu ils faifoient ;
cette preuve eft écrite dans l’a&e inftrumentaire fait à
Barbet le 1 1 Juin , dan? lequel il déclara que c’étoic
lui qui avoit les pouvoirs, ce fait étoit v r a i, il les
avoit reçu un quart d’heure avant des mains du fieur
Deioches.
'
O r il eft de principe que les HuifTiers ne peuvent
Î
C
�i8
exploiter , & encore moins faire des a£tes de la dernîere rigueur fans être porteurs de pouvoirs ; ii je prou
v e , par la pouriuite de l’inlcription de faux, que mon
empnlonnement, fous quelque face qu’on veuille l’envifager , n’eft pas du fait de Barbet non plus que de
fes Affiliants , il réitéra qu’il eft feulement du fait des
trqis Huiffiers que j’ai nommés, d’où rélultent deux
nullités : la premiere fondée lur notre Coutume qui
ne permet pas que des Huiiliers fe prêtent ainfi les
mains : la leconde fondée fur la circonftance avouée que
le fieur Defoches n’avoit donné aucun pouvoir à ces
Huiiïiers. D ’où j’irai plus loin , me trouvant à même
dès-lors d’indiquer celui qui leur avoit donné l’ordre
de me deshonorer. Il n’eit donc pas indifférent de favoir par qui j’ai été faiiî, & ma pourfuite en faux in
cident devient intéreilànte.
C ’eft bien inutilement que Barbet veut exciper des
énonciations du procès verbal nous avons ; il eft vrai
qu’il applique le nombre pluriel dans fon procès ver
b a l, mais feulement en parlant de lui & des deux
R e c o rd s, fes témoins , qui n’étoient pas à l’expédition,
on ne voit pas qu’à l’endroit où fe trouvent ces exprcifions il foit aucunement queftion des trois Huiiliers.
E t dans tous les autres endroits du procès verbal Bar
bet parle en fon nom feul. J e l ’ai d'abondantJbmmêy
& c , de payer audit , . . . ou à moi H u iJJier , & c . J e
leur ai à chacund ,eux , . . & c. D ’ailleurs peut-on com
battre l’infeription de faux par la pièce même mainte
nue fauilè ?
Dire qu’il feroit impoifible de prouver que Barbet
n ’étoit pas à l’expédition, c’eft un moyen miférablc :
qui. le fait eft négatif, mais il peut être conftaté par
�2>2>7
Ï 9
des faits pofitifs, & principalement yar celui-ci, bien effentiel a remarquer que le fieur Defoches n’a vu Barber,
& ne lui a donné de pouvoir qu’après mon emprifonnement; que mon cmprifonnement en un mot n e ij
pas du fait de cet HuifUer.
Ce fait, que mon emprifonnement n’eil aucunement
du fait de B a rb e t, eit déjà prouvé par Barbet même,
il fe tire d’une contradiâion groiïiere qu’il a fait
plaider à la derniere Audience, preuve indubitable
de l’impofture ; pour colorer fa conduite, Barbet iourint à la derniere Audience, qu’il avoit pofte lui-mêfïïechezTouvain les Huiifiersquimefaiiirent, & qu’ il s’étoit placé à la porte de M ontjoly comme au guer.
Il paroît qu’il ne connoît pas le local; de la porte
de M ontjoly on voit iàns obftacle celle de l’auditoire
de Chamalieres, & celle du çabaretier T ouvain , d’oii
fortirent les Huiifiers qui me faifirent près de la Salle
¿ ’Audience, à dix à douze pas de la porce de M ontjo ly ; ma capture caiifa une rumeur qui raiïembla tout
le V i ll a g e ; Ôi Barbet, fous les yeux duquel le tout fe
feroit paifé, n’auroit rien apperçu , ou témoin de la
fcene il n’y ieroit pas accouru pour y jouer un des
premiers rôles, lui qui prétend avoir eu les pouvoirs;
il auroit vu que l’on me conduiioit h l’inllant , & il
ne fe ieroit rendu aux priions que deux heures après
ma capture.
Ce que je dis cil il fufceptible de réponfe ? & que dev >enncnt d’après ces raiionnements les obje&ions de
nies adverfaires? je luis recevablc à m’inferire en 'faux
c cil d’évidence. La feule fin de non recevoir qui s^clevc frappe contre leur oppoiition , elle s établit fur les
nicmes moyens par lcfqucls j’ay réfuté celles qu’ils
m oppoibient.
C i
�Cette fin de non recevoir frappe plus fenfiblemen&
encore contre la demande de Barbet ; ion crime i’ in
quiété , il hazarde de m’arrêter dans les démarches
que je fais pour le démafquer ; le faux qu’un foraide
intérêt lui â fait commettre, lui paroît facile à cons
tater, il redoute la démonftration que produiroit l’infcription de faux incident, c’eft par cette raifon qu’il
s’y oppofe, & il a le front de demander des dom
mages intérêts, fans doute on le fait parler à fon infçu , il n’eft pas concevable qu’il pût fe duper ainfi
lüi-même.
' A l’égard du fieur Defoches, la pièce dont eft
queftion, doit être rejettée de la caufe , c’eft l’ Ordonnance de 1 7 3 7 qui le prononce : le défendeur, por
te l’article 1 1 du titre z , fera tenu dans ledit délai
( de trois jours ) de faire j'a déclaration précife s’il en
tend ou 5’il n entend pas f e fe iy ir de la pièce mainte
nuefi-ujje ; le fieurDefbches, dans l’embarras où le mettoitlaconnoifTance qu’il a du faux du procès v e rb a l, ne
s’eft expliqué ni pour le foutenir ni pour l’abandonner.
M ais___faute par le défendeur , ajoute l’article 1 1 y
d yavoir jatisfait à tout ce qui ejl porté par Farticle
précédent, le demandeur en fa u x pourra fe pourvoir
ci VAudience pour ja ire ordonner que la pièce main
tenue faujfe fera rejettée du procès par rapport au
défendeur. Je fuis donc en droit de demander le rejet
de cette pièce , j’y ai expreiTément conclu , & ma
demande ne peut éprouver aucune difficulté.
rL c procès verbal de capture ôc d’emprifonnement
ainii écarû , il ne s’enfuit pas que je n’aye pas été
enfermé dans les priions; c’cft en joignant la déri-
�iîon à rinjuftice; que le fieur Defoches a glofé fur.
ce point a la derniere Audience ; j’ai été traduit dans
les priions, mais feulement par un coup de force , &
non par autorité de la l o i , c’eft une avanie & un
affront fanglant que mes ennemis m’ont fait faire fous'
le nom de mon créancier , c’eft ma perte que l’o n ,
méditoit & non le payement de ce que je devois au
iieur Defoches.
{
L a loi, en rejettant'cc procès veVbal.comme faux ,
Jappe par les fondements la Sentence dont eft appel, .
qui n’avoit d’autre baie que cet a&e illufoire dans
toute la force du terme.
C ’eft fur cette pièce que les premiers Juges ont fon- !
dé leur décifion, malgré les nullités évidentes qu i‘en ‘
annonçoient la fauflèté , ôtqui auroient du bleffer leurs ,
regards; nullités qui dévoient faire proferire comme
indécent, irrégulier & vexatoire l’a&e que la pourfuite
d’infeription anéantit comme faux.
t
Je ne m’arrête pas au défaut de conftitution de. Procureur devant le Juge ordinaire, fi récommandée par '
les Règlements , 6c cffe&ivement fi eflèntielle dans des
a£les de cette cfpece ; plus les pourfuites lont rigoureufes, plus elles doivent être exactes, plus on doit donner
au défendeur les facilités de fe pourvoir par les voies
de droit. L e demandeur doit toujours être prêt à fè
défendre , & conféquemment indiquer fon Procureur ,
dans le tribunal oii les conteftations peuvent être
élevées. C ’cft l’eiprit des Ordonnances , & même la
difpofition textuelle de tous les Règlements' qui ; ont
trait à cette matière ; c’eft par ce moyen que le fieur
Gallien, d’Iffoire, obtint des dommages intérêts confiderables, au mois de Mai dernier, contre uUde-fcscican'. '
�ciers. légitimes, à la requête duquel il avoit été tra
duit dans les priions de la Sénéchauiïee , d’ A u vergn e,
par B o yard , l’aîné , Huiiîier en cette V ille , qui s’étoit
contenté de conilituer'Procureur à la Coniulaire.
" Mais qu’efl-cè qirunc irrégularité de procédure aux
yeux de ceux qui ne craignent pas d’enfreindre la fauvegarde prononcée par la Coutume &: les Loix ? J ’ai été
faiii au moment où, j’allois exercer mes fondions com
me Procureur d’Office,' & défendre mes intérêts com
me particulier, ces faits ne font pas conteftés , & pouvoient-ils l’être ? 'D’un côté je rapporte les dofïiers des
affaires qui me font perfonnelles, ÔC dans lefquelles on
trouve dès form ations du commencement de Juin , à
verïir,plaider à,la première Audience; l’une étoit con
tre le norhme Girard , ,Meunier à Chamalieres , elle
a été terminée depuis; l’autre contre Jacques Chaput,
Meunier à R o y a t , elle cil indécife ; d’autre part les
régiilres dn Bailliage de Chamalieres, qui conduifcnt
dès temps les plus reculés jufqu’a nos jours, conflatent
que. les Aiîifcs. des Jüiliciables de ce Bailliage fe tien
nent le 1 1 Juin , fur les trois heures 6c demie ou en
viron ; c’eil à cette heure qu’elles dévoient être & ont
été tenues cette année , elles fe font rencontrées au jour
de l’Âudiencc; les Vaifcaux & les Plaidants avoient
été appcllés par la cloche ordinaire, torique le Bailli
me fit avertir par Palliet ; le cer ificat du Greffier l’an
nonce. C ’eil à la porte même de la falle que je me
vis aifailli ; le procès verbal d it , fur La place publique ,
près du Château, c’eil l’auditoire même ; ce 11 a cette
entrée que'les Huifliers parurent encouragés par quel
que génie courroucé, & d’autant plus hardi, &c déter
minant qu’il étoit inviiible ; étoit-il libre au iieur
�Defoches , étoit-il décent à mes ennemis de me faire
faiiir à cet inftant ? les Lo ix générales, la Coutume de
cette Province, íes voiíines, la Juriiprudence 6c les
Auteurs répondent pour moi ; j’y renvoie le fieur
Defoches , il me refte à peine ailez de temps pour les
citer, mais je me réferve d’en faire voir les fondements,
& d’en faire développer les conféquences par la plaidoierie.
Quique litigandi caufa necejje habet in jure vel certo
loco fijli. . . . . . in jus Jin e permijjii meo ne quis vo, l. 4 , ff. de in jus vacando.
C ’eft fur le fondement de cette L o i , & de la né^ ceiïité de faire reipe&er la juftice, que l’Ordonnance
de 1 5 7 1 défend , fous les peines les plus griévcs, d'ou
trager ou excéder les Officiers de Juilice.
» Les allants devenants 'es foires & marchés pu» blics,ou en Cour, pour expédition de leurs c au les ,
3> dont ils feront crus par leur ferment, lie doivent
» être pris ni arrêtés, ni détenus en corps 011 en biens
» pour aucunes dettes ou matière civile. » Article 62 du,
titre des exécutions , & c. Sur quoi le procès verbal,
dans le détail des articles de la Coutume admis en'droit
écrit, s’exprime ainii : tout Ledit titre des exécutions y
y entes &JiibhaJlations 5 memement le Cze. article d!icelui
titre.
.
L ’atticlc 1 3 3 de la- Coutume du Bourbonnois, <Sç.
larticle 400 de celle de la Marche , ont des difpoii-,
tions femblables à la nôtre.
Il fut rendu Arrêt au Parlement de Paris lç dernier.
Décembre 15 6 3 v par lequel un. Huiflicr .qui avoit
emprifonné avec fcandalc un Prêtre qui ..vcnoit de
chanter-, fut condamné en l’anlcnde envers le lloi', 6p
�>
/ K
^
à des dommages intérêts envers la partie. 11 eft ra p
porté par DesbroiTe & Brilion , & c.
•L/ôn trouve cité dans les ouvrages de ces Auteurs
un autre Arrêt du même parlement du 26 N o vem
bre 1 6 8 0 , qui prononce les mêmes condamnations
contre un HuiiTier qui avoit emprifonné un Curé
le lendemain de N oël ; &Boniface en rapporte un du 9
A oût 16 4 1. qui cailà l’emprifonnement qui avoit été
fait d’un Soldat pour dettes civiles.
Il eft rare de voir enfreindre les réglés par des coups
de vexation de cette nature ; nous ne voyons pas que
ce fait foit arrivé depuis long-temps, mais lee Auteurs
nous aiTurent que la même décifion feroit prononcée.
Prohet, fur l’art. 6 1 du titre 24. de notre Coutu
me , dit qu’il eft exécuté, même nonobftant tous les
privilèges que pourroit avoir le créancier, & qu’il a été
ainfi jugé , lui plaidant, pour un débiteur de fermages.
Auroux des Pomiers, iur l’art. 1 3 3 de la Coutume
de Bourbonnois , s’explique d’une maniéré à ne pas
permettre de douter que ces maximes ne doivent être
& ne foient en vigueur aujourd’hui.
» A u refte , dit i l , le même privilège qui eft accor5> dé à ceux qui fréquentent les foires cfi o&royé par
» notre Coutume au préfent article , & par celles d’A u» vergne & de la M arch e, aux articles cottés confor» mément à la loi q u iq u e l i t i g a n d i , à ceux qui vont
» en jugement ou en Cour pour l’expédition de leurs
» caufes , &c toutes veulent que ces allants & venants
» aux foires ou en jugements foient pour raiion de
» cette venue crus à leur ferment. »
Le ficur Defoches me difpcnfc de faire le ferment,
les faits que j’articule font prouvés par écrit. M e ren
dant
�^>4
^
•
dant à l’audience pour folliciter le jugement de mes
affaires perfonnelles , je ne pouvois pas ctre ia ifî, &
on croit bien moins en droit de me faifir, confidéré
comme me rendant à la continuation de mes fondions
de Procureur d’Office.
Comment les premiers Juges ont-ils donc pu fe
déterminer à rendre la Sentence dont eft appel ? je
ne penfe pas que l’obje£Hon faite par le fieur Defoches, que je ne fus pasfaifi en robe, leur ait fait impreffion, ils font initruits que jamais les Juges de Chamalieres n’ont exercé leurs fondions en robe , ÔC
d’ailleurs j’allois à l’Audience, & les règlements n’o
bligent pas d’aller ou de venir en robe. Les pre
miers Juges fe font décidés fans doute par l’alléga
tion indifférente d’un A rrêt qui a confirmé l’emprifonnement d’un Juge pris en robe ; il en auroitété
autrement, s’ils en euifent confidéré l’efpece , là il s’agifloit d’exécution d’Arrêt rendu à la Tournelle , 6c
il n’ étoit queiHon à mon égard que d’une dette civile.
Que le procès verbal d’emprifonnement foit cafie
comme nul & injurieux, ou qu’il foit anéanti comme
faux, alternative nécciïàire , je dois obtenir des dom
mages intérêts contre le iicur Defoches , & j’en fais
l’obfervation pour diiïiper l’eipérance qu’il s’étoit for
mé en mettant Barbet en caufe, de me faire pren
dre des conclufions contre ce dernier; ce n’cft point
Barbet qui m’a faiii & emprifonnc, il n’a trempe
dans cette affaire que pour commettre un faux ; ce faux
m autoriferoit à l’a&ionner lui-mcme , mais je puis me
borner au lieur Dcioch es, faclum judicis 7facïum partis ;
�à plus forte râiion le pourfuivant doit-il répondre du
fait de ion agent ; cette raifon 6c l’iniolvabilité des
A u teu rs, ou pour mieux dire des exécuteurs de ma
capture, m’ont empêché d’aifigner les trois Huiiïiers
qui ont agi par les ordres de mes ennemis.
A quelle iomme la Cour fixera-t-elle ces domma
ges intérêts , je m’en rapporte à ia juftice , à laprudence ; elle connoît la perte que j’ai eÎTuyé, l’injure que
j’ai fouffert 6c le motif de la vexation. On a porté
coup à ma liberté comme citoyen , lorfque fous la
fauve-garde de la Coutume 6c des Loix , j’allois follicitcr le jugement de mes caufesperfonnelles : lorfque
je faifois tout ce qui étoit en moi pour me procurer
les moyens de fatisfaire mon Créancier. Comme P ro
cureur d’Office j’ai été arrêté dans le moment où je
me rendois à mes fondions, à la porte du Tribunal
de la Ju ftic e, dont j’allois demander l’exécution des
décrets. O n a particulièrement choiii cette circonilance , on en a certainement tramé le projet ; tous les au
tres jours 6c à chaque inftant du jour on auroit pu
me faire faiiir d’une manière moins éclatante 6c moins
ignominieufe ; mais on chcrchoit à m’outrager, à m’humilier , à m’avilir aux yeux de tous ceux fur la con
fiance dcfquels cil fondé mon état ; on attend le mo
ment où tous les Vaifaux 6c tous les Jufticiables du
Bailliage de Chamalicres font aiîemblés ; on me laiflè
placer au milieu d’eux à la porte de l’auditoire, c’eft
alors qu’on s’oppofe à mon entrée , pour me faire pré
fumer indigne d ’entrer dans le ianétuaire de la Ju fticc;
on me tait enlever du milieu de mes clients, pour leur
fuggércr qu’ il ièroit dangereux de me laiiler vivre avec
gux ; tout le peuple à dû me croire criminel, c’eft ce
�2\^
dont on vouloit le perfuader ; & qui ne l’auroit ima
giné, me voyant brutalement traîné par trois H u iffiers
inhumains, dans lefquels les ordres de mes ennemis
avoient éteint la fenfibilité même la plus groffiere ?
on affecte de me faire traverfer les lieux les plus peu
p lés, & dans chaque carrefour, à chaque pas on me.
tient immobile pour donner le temps à la populace
de voir mon humiliation, & la frapper affez pour
lui faire rappeller de l’ignominie dont elle me voyoit
couvert. Hélas ! l’obfcurité des prifons fut un foulagement pour moi, jufqu’au temps où le fieur Defoches,
rejettant les proportions honnêtes que je lui fis, &
dédaignant les furetés que je lui préfenta i , fit fceller
la vexation par un faux. Le peuple ne pénétre pas le
fond des chofes, le bruit le frappe, les apparences le dé
cident; il me croit criminel depuis qu’il m’a vu traité en
fcélérat; la confiance qu’il avoir en moi formoit cepen
dant mon état. J ’ai donc perdu à la fois ma fortune &
mon honneur ? & c’eft le fieur D efoches, qui, pour obli
ger mes ennemis, m’a caufé cette perte irréparable ; tout
s’intéreffe à ma vengeance , je la demande à la C o u r ,
&
je l’attends de fa juftice.
Si gné, B A R T H E L M Y .
M. D U F F R A I S S E
Avocat Général.
J
A
C L E
D E
o u r d a n
R M
V E R N IN E S ,
, Procureur
O N T . F
E R R A N D ,
l'imprimerie de P i e r r e
V I A L L A N E S , Imprimeur
du Roi , près l ’an cien Marché au B le d . 17 7 2 .
des
Domaines
*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Barthélémy, George. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barthélémy
Duffraisse de Vernines
Jourdan
Subject
The topic of the resource
juridiction consulaire
notaires
destitution
lettres de change
prison
assises des justifiables du bailliage de Chamalières
fausse coutume
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
huissiers
dommages et intérêts
diffusion du factum
opinion publique
arrestation publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Maître George Barthelémy, notaire royal, et procureur d'office au bailliage de Chamalières, appellant, demandeur et défendeur. Contre sieur André Desoches, entreposeur des tabacs en cette ville de Clermont-Ferrand, intimé et défendeur. Et contre Pierre Barbet, huissier en la Cour, intervenant et demandeur.
Table Godemel : Emprisonnement. Si l’emprisonnement est nul, injurieux et vexatoire pour avoir été effectué en foire au moment où l’emprisonné, officier public, se rendait à l’audience, est-il dû des dommages intérêts ? une inscription de faux incident contre un procès-verbal d’emprisonnement, a-t-elle pû être faite sur simple requête ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
Circa 1770-1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0612
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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arrestation publique
assises des justifiables du Bailliage de Chamalières
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
destitution
diffusion du factum
dommages et intérêts
fausse coutume
huissiers
juridiction consulaire
lettres de change
notaires
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52881/BCU_Factums_G0204.pdf
2fc1b2c3c3391867419ef216a781a2c9
PDF Text
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P R É C I S :
SUR APPOINTEM ENT
A
METTRE
' P O U R les fieurs L E G U A Y & C H O C U A R D ,
Appellants, Demandeurs & Défendeurs.
C O N T R E lesfieurs V I L L A I N & G U E R 1N ,
Intimés, Défendeurs & Demandeurs,
g a o n o n c il
L s Intimés demandent dix mille liv.
E
D +++T++++T++++Y-H
+de dommages & intérêts pour récom+&+
L
+
A
++
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V
+
U
+#
V
+•*■«*•++*+++
penfe d’une faifie exécution qu’ils ont
§+
+
Y+V+V+
D
faite fans titre contre les Appellants,
^ o o o n Æ ll
qui font reconnus être eux-mêmes
créanciers de quatre mille livres : pour foutenir cette
failie execution , les Intimés ont pris des conclu
ion s en interprétation d’un A rrêt, qui prononce con*
tre-eux une main-levée pure & fimple d ’une ancien,A
g
a
�%
ne iaifie exécution qu’ils avoient faite , & qui les
condamne aux dépens : telles font les prétentions des
: fieurs Villain <Sc G u erin , & les défenfes qu’ils em
ploient pour les foutenir : il ne faudra certainement
pas faire de grands efforts pour renverfer un pareil
fyftême ; le ridicule cil t r o p .apparent pour qu il foit
befoin de prendre beaucoup de peine pour le faire
remarquer ; auffî les Appellants, fans fe livrer à de
longues difcuifions, qui feraient fuperflues, fe bor
neront-ils a préfenter a la C our le ieul récit des
faits 6c de la procédure qui a été tenue, qui font lès
moyens les plus péremptoires contre les prétentions
des Intimés, &c dont la connoiffance, en néceifitant
la condamnation de nos Adverfaires & la proicription de leur demande , aiTure aux Appellants l’ad
judication des dommages ôc intérêts auxquels ils ont
juiVement conclu. ' '
" ■
F A I
•
T S ET
MO Y E N S
»
•
.
^
Suivant un a&e du 1 1 Septembre 17 6 9 , ailèz
•obfcur a la vérité , mais qui a été expliqué par un
Arrêt du 3 1 Mars 1 7 7 2 , les Intimés ont vendu
aux Appellants les bois qu’ils avoient eux-mêmes
acquis du fieur Gafcoing 6c de la Marquife de Fou
gère ; fur chaque efpece de bois il eft des conven
tions particulières pour en fixer le p rix , il eft inu
tile de les rappeller : la feule claufe intéreilante dans
la caufe préfente, & q u i doit nous mener à ce qui
a donné lieu à conteftationla-voici : les Appellants
�doivent payer d’avance aux Intimés une iomme de
4.000 livres , & a chaque livraiibn de bois qui leur
fera faite jufqu’à la fin de l’exploitation en acquit
ter le montant en lettres de change, payables trois
mois après la livraiíon, de maniere que 4 000
ioient toujours payées d’avance.
Les mauvaifes conteftations qu’éleverent les In
timés fur l’exécution de cette vente, &: leur infolvabilité qui fut bien établie , donnèrent lieu a un A r
rêt du 3 1 M ars 1772«, qui ordonne que la íommé
de 4.000 livres dont on vient de parler ne fera
payée d’avance aux fieurs Villain &c Guerin qu’à
la charge par eux de donner bonne & iuffifante
caution.
Les Intimés iè font empreiles dTexécuter l’A rrêt
de la Cour ; le procès verbal du 1 3 Août 17 7 2 ,, fait
en l’hôtel du Lieutenant Général du Bailliage de S ,
Pierre-le-M outier, & joint aux autres pieces de la
procédure, établit que les Appellants ont payé cette
iomme de 4.000 livres aux Intimés : par quelle fa
talité les Appellants , créanciers de 4000 livres , le
trouvent-ils donc aujourd’hui faifis & exécutés dans
tous leurs meubles y dans la récolte de tous les hé
ritages ? mais comme ces réflexions paroîtroient
peut-ctre prématurées, pouriuivens le récit des faits,
que nous avons anoncés comme fuffiiants pour opé
rer la condamnation des Intimés.
Le deux M ars de l’année derniere íes Intimés;
firent faire une fommation aux Appellants de fe
trouver lur un des ports de la rivière, à l’effet d’y re A z
�„cevoir une certaine quantité de marchandiies qui
devoient y être voiturées ; mais ces marchandii'cs
n’étant point de l’échantillon convenu, étant d’ail
leurs infuffifantes pour charger un bateau, les A p
pellants les refuferent, 6c firent iignifier leur refus
par aâe extrajudiciaire du 1 1 du même mois.
Il fut enfuite procédé a la vifite de ces bois con
tradictoirement avec toutes les Parties ; mais à cette
époque, tandis que toutes les Parties procédoient
en la JuriiHi&ion Coniulaire de N evers, où C h o çuard & Leguay avoient appelle les Intimés au
iujet de la défe&uofité des marchandifes, tandis que
ces mêmes marchandiies, dans cette inrervalle ,
avoient été faifies à la requête du fieur Gaicoing ,
premier vendeur des bois en queition, & qui étoit
encore créancier du montant ; à cette époque, iavoir le 1 1 M a i, il plût aux Intimés de faire pro
céder par faifie exécution fur les meubles 6c effets
des Appellants pour raiion des bois, q u i, comme
on l’a déjà obfervé, avoient été refufés a caufe de
leur défeéhiofité.
Sur l’appel de ce procès verbal de faifie exécution,
& d’une Sentence qui fut rendue par les Coniuls
de Nevers au fujet de la défe&uofité des marchan
difes, il intervint en la C our le 10 Juillet dernier
un Arrêt fur appointement a mettre, qui fait main
levée provifoire à Chocuard & Leguay de la faifie
exécution fur eux faite le 1 1 M ai précédent, à la
charge par eux de recevoir &c de prendre les mar
chandifes mentionnées aux procès verbaux qui
�5
avoient été drefles , fauf a diitraire les marchandiiès qui ne feroient pas de Pefpece de l’échantillon
porté au marché du i l Septembre 17 6 9 , & à la
charge de payer le prix des marchandées , &: de
fournir a cet effet des lettres de change conformé
ment au m arché, leiquelles ièroient remifes entre
les mains de Bonnet, Commiilàire établi à la iaifie
des mêmes marchandifes de la partduiïeur Gaicoing.
L e 'irj du même mois il fut rendu un autre
Arrêt fur le fond des conteftations qui déclare dé
finitif celui du 1 0 , mais qui renferme en même
tems une autre difpofition trop intéreiTante pour
qu’on puiiTe la pailèr ious filence.
A l’Audience du 17 Juillet où fut rendu cet
A rrêt, les fleurs Villain & Guerin infiilerent forte
ment fur une demande en dommages & intérêts
qu’ils avoient cm être en droit de former par des
conclufions qu’ils firent fignifier a l’entrée de l’A u
dience , & qui tendoient a une condamnation de
6 000 liv. dé dommages & intérêts : ils préten
dirent que le refus qu’avoient fait les Appellants de
recevoir les marchandifes étoit préciiement ce
qui avoit donné lieu ^ la iaifie du iieur Gaicoing ,
que s’ils les eulTent reçu , Gaicoing n’auroit pu
faire faifir : des moyens fi pitoyables furent rejettés, ainfi que la demande , par l’Arrêt du 1 7
Juillet, qui à cet égard met les Parties hors de Cour.
Voila donc d’un côté une demande en dom
mages & intérêts formée pour raiion du refus de
recevoir les marchandifes , abfolument proicrite,
�6
de l’autre les Appellants autorifés à retirer leurs
effets faifis , à la charge par eux de payer le prix
du bois qui leur fera livré , en fourniiTant des
lettres de change entre les mains du Commiflàire
établi par Gafcoing.
Il ne reftoit plus qu a exécuter ces Arrêts ; mais
qu’eft-il arrivé ? les Marchandifes qui avoient été
faifies a la requête du fieur Gafcoing , étoient déjà
vendues, l’adjudication en étoit faite,cela eft cons
taté par deux procès verbaux des 26 Juillet & 16
Août dernier : lorfque les Appellants fe .préfenterent pour retirer les bois, un nommé Girard, Com
mis du fieur David , qui en étoit l’adjudicataire r
s’oppofa à ce qu’on les enlevât ; les Intimés déclarè
rent même qu’il n’étoit plus en leur pouvoir de les
livrer , attendu que le iieur D avid en avoit fait la
revente , fuite par eux de les avoir retirés avant le
30 Ju illet, qui étoit le terme que D avid leur avoit
accordé pour leur céder l’adjudication qui lui avoit
été faite, ils refuferent en conféquence de les repréfenter, ils refuicrent même de livrer aux Appel
lants quelques autres marchandifes qu’ils diioient
n’avoir pas été fàiiies, & que les Appellants offroient
de recevoir ; ils déclareront enfin qu’ils' n’avoient
rien a repréiènter & a livrer aux Appellants : voila
le précis des procès verbaux des 26 Juillet &: 16
A o û t, fur lefquels la Cour pourra jettcr les yeux r
mais dont l’examen eft fuperflu au moyen d’un A r
rêt qui fut rendu le premier Septembre, & dont
nous parlerons dans un moment-
�Voila donc, d’après ces procès verbaux, & l’impoifibilité de repréfenter les marchandifes iaifies ,
& le refus de repréfenter les marchandifes libres
bien conftatés : les Appellants étoient néanmoins
faifis, exécutés dans tous leurs meubles , faute de
paiement de ces mêmes marchandifes, &: la main
levée ne leur en étoit accordée qu’à la charge de re
tirer les bois qu’ils feroient tenus de payer.
Dans ces circonftances il falloit un nouvel A r
rêt q u i, d’après l’impoifibilité & le refus de la part
des Intimés de repréfenter les marchandifes en que£
tion , fit main-levée pure &: fimple aux Appellants
de la faifie fur eux faite : c’eft précifément ce que
ces derniers ont obtenu : en vertu d’un Arrêt du
Août ils firent affigner les Intimés pour l’A u dience du premier Septembre, qui étoit le jour in
diqué - ce fut à cette Audience qu’il fut fait le&ure
des procès verbaux refpe&ivement dreiïes par toutes
les Parties : l’impoifibilité & le refus dont on a dé
jà parlé furent conftatés : les Intimés oierent enco
re faire reparoître l’ancienne demande en domma
ges ôc intérêts qui avoit été proicrite par l ’Arrêt
du a 7 Juillet ; ils exciperent des frais confidérables
de faifie & de vente qu’ils diioient n’être occafionnés
que par le refus que firent les Appellants de rece
voir au mois de Mars les marchandifes qui leur
avoient été préfentées : mais cette demande fut
entièrement rejettee , ôc le même jour , pre
mier Septembre il intervint Arrêt contradi&oire,
qui, fans s’arrêter aux requêtes ÔC demandes des
�8
fieurs Guerin & Villain , ordonne que les Arrêts
des i o & 27 Juillet feront exécutés félon leur for
me & teneur, en conféquence fait main-levée pure
6c fimple à Chocuard & Leguay de la faifie exécu
tion fur eux faite de leurs meubles &c effets, 6c con
damne les Intimés aux dépens.
C et Arrêt ièmbloit devoir mettre fin a toutes
les conteftations qui s’étoient élevées jufqu’alors , &
conterioit des difpofitions qui n’étoient point équi
voques. L a main-levée pure &c fimple qui eft accor
dée , & la condamnation de dépens qui eft pronon
cée ne paroifïoient pas être fufceptibles de plufieurs
interprétations.
C ’eft néanmoins poftérieurement a cet Arrêt &c
à fon exécution que les Intimés , par procès verbaux'des premier & 7 O&obre dernier ont fait pro*
~céder par faifie exécution fur tous les meubles , fur
toute la récolte, foit des terres, foit des vignes des
Appellants : après que les Appellants ont obtenu
main-levée pure & fimple de l’ancienne faifie, après
qu’ils ont rait réintégrer leurs meubles dans leur
maifon , les Intimés, au mépris de l’Arrêt du pre
mier Septembre, viennent faire une fécondé faifie
des mêmes objets, ils ne fe contentent pas defaifir
les meubles, ils faififlènt toute la récolte, établirent
des Commiffaires fur toutes les granges & greniers
des Appellants, &c cela dans un temps où les Inti
més reconnoifTent être furpayés d’avance d’une
fomme de 4000 livres.
Les Appellants fe pourvurent auffi-tôten la Cour,
&
�V(
9
, & le r i Octobre , qui etoitlc jpur de 1*Audience
.indiquée-, il intervint Ajçrêt .pac,défaut.à.la vcr^tç;,
, mais exécutoire, i^ç$nç p^ur les^ p en s '.nonobilatyt
toute oppQÎition qui pourrojt être; formée^dans la.hui
taine , qui par proviiion fait.main-levée aux Appellants de toutes les choies iàifies par les procès ,ver
baux des premier & rj Qctpbre.(^,a .Cour, qui fe
- rappelloit encore de fes Arrêts dçs. i o & , nrj -Juil
let &c de celui du,premier Septcm&çe .qu’pïle(jav^it
rendu récemment,, vit avec indignation les‘ Inti
més .m épriièr. ainíi fes A rrê ts, auiTi; n’héfita-tjelle
point à en ordonner l’exeçution.: ^ ¡ -' oq ;>'j r i t
Il s’agit dans le momen^préfentjclu (fo ü d d e(l’ap*
pel de ces mêmes procès Verbaux fqui. fu t port&.à
l’Audience du a M a r s , préfentv mois , où il fiit
: prononcé un apppintement a mettre;,:' qui eft celui
. fur lequel les Appelants viennent de preienter a la
C o u r le récit fidele de, tous les faits
¿le toutes les
........................
procédures.
E n cet état, qui a lieu de prétendre a dtes
dommages 6c intérêts ijiforft-ce. les Intirrjes q u j,
au mépris de ,1’À rrêtj cpqtradi£Íoire xjlr premier
Septembre, rendu en cpnnpiiTance de caulè & fur
la lefture des procès verbaux.,des n 6 .. Juillet ÔC
1 6 A o û t, contenant refus & imposibilité de,1a
; p^rt des Intimés de repréfuter aucunes marphandifes , ont fait procéder fg.ps aucun, titr(e:par nou
velle faifie-exécution fur. tous les meubles, fur
toutes les récoltes des héritages des Appellants?
ou bien font-ce_ les Appellants qui , créanciers
B
�eux-mêmes dcsr Intimés 'de la fomme de 4 00.0
liv r e s , dnréÏÏuy'é' dq pareilles 'vexations-? Les faits
3de-tyà}cià\ïie úne; fois bién co’rinus & .établis, que
devient là' demande étx ‘ dóVnra'ágcs* & intérêts
'form ée pour la troifieme fois par les Appellants.,
qui a* étépj*oicrjte & parvl?A rrêt du ¿ 7 Juillet
•6¿-£ar ceUii^dVr^rertfieV Septembre^ les;, choies
7 0 rit cépêtîdaht’dans le • mcrtie état ou elles étbièijt
^áú'^premiér Septem bre, rien inx changé- depuis
cette époquer;. les Intimés /ne prétendent pas
-aV oir fait traniporter ide* nouvelles marchandiies
fur les. ports,; ib ne prétendent pas avoir fait la
‘rüiômdrè; fo rm atio n qui conftitue les Appellants
Jicri'r demeure de les aller retirer ; par quelle fatalité'les'Appellants, qui ont obtenu main-levée
-'•par A rrêtd ii premier Septembre , font:ils faifi^.Ôc
"exécutés“ '.à l’épbquç des premier ôt 7 .Octobre
dernier, du les choies font~àbfolument dans le
même état ? que devient enfin la demande en
interprétation ;de l’ Arrêt du premier Septembre
< qüi j d Vprcs TimpoiTibilité & les refus bien Conf- tatés^de la part 'des* Intimés de repréfenter aucu
nes m archandées, prononce contr eux une main- levée pure & (impie , & une condamnation de
dépens-?
“ rf Vailiement nos Adycrfairesviendroient-ils nous
’ d ire': mais c’efj: votre faute fi les marchandifes
ont été faiiies & vendues à la requête de G afcoin g,
il falloit les recevoir à l’époque du mois de M ars ;
■' d ’ailleurs vous les aviez vous - même acquifes de
�^Adjudicataire' a l’époque ^du procès .verbal ^d'a
•1.6 A o û t , &\v-ous avez-bie% erap§c}^£'parjvja r-<j.up
je pus lesr^tiriir ^ ^ous, l$s-:¿cpr^fç^teri n/ / {
.3*i A .ja : premièrecQ$jeéUjqnf oti, réptyrid jquq\t$4t
-ei| -tefmji,nér>& ,par l ’^ rcét' d
u
,
P
âK
.celui du pre.micr-: Septembre., ,Jf qui ont /profcrip
les demandes Qn dommages; & '; ip térets.j qu£j les
Appellants ‘avoiertt fo rm é ^ c ^ t egaçd. n;;-,; ¿ rn.
*:; iàur. la ;feconde ;obje&ipn- ilr^fè [pfiente, ¡égal^«
ment uné. réponfe bjçii décifiye en; admettant -,
•contre la vérité', que }qs Appellants enflent acquis
en, fécond les bois.-.q^Î fty&ie&t .etft ia'djug^s-j
D a v id , pourroit-pn leur_.^t3.faijieiyi} crinie:,-cel^ jlp
feroit 'que prpuyer. liç1beipi%jqu’ili;rjQ.yoient dô^-cjjs
‘mêmes marchandiies, & viendrait àr l’appui de
la demande en dommages, ô i intérêts0qu’ils-.jpi\c
formée ; les Intimés, conviennent de ¿plus queJ.er3jp
Juillet étoit le terme fatal d’après lequel il*f p’é.to'it plus d’efpéranc'e ■pour eux- de retirer leurs
• inarchandifes des mains du fieu^ D avid ; qii’im«
porte qu’après cette époque ce foitjes Appellants
ou d’autres Particuliers qui aient , acheté-ces mar,chandifes , cette obièrvation eft abfolunient étran
gère a la conteftation préfente : d’un autre co té,
ilfallo it donc qu’a l’époque du 16 Août les In
timés ne filïbnt point refus de-.liyrer les; marcha udites qu’ils difoient être .libres,
jipjv
dé
clarer qu’ils n’ayoient rien à^rçpréfenjer jÿj mais
pourquoi fc livrer à toutes ces dilcuflions ? elles
iont , on le répété, abiolument inutiles,;d’après
13 i
�l ’A rrê t1 du premîèr Septembre : a cette epoque
tous ces fàits'étoient connus, il a été fait le&ure
à l’Audtèncè dës: procès verbaux “des 26 Juillet 6c
-ï# A oût -J'VefV d'après*' rimpoiTibilité' & ' les re
fris confhtés'dcTepréfenter les - bois qu’a été ren
du cet A rrê t ; tout eft donc termine' à cet égard.
' G è.feroit àüifi bien inutilement que les Inti
m é s infiileroiëiit fur une miférâble obje&îon qu’ils
"fu ifcn rd aÀ s:;le difpôfnif de T A rrê t du premier
Septembre" : ! cet A .rret , difent-ils’, ordonne> què
les A rrêts des 10 & .27 Juillet feront exécutés ;
or ces Arrêts ne fônt “m^in-levée qu'a la charge
de payer, par conféquent l’AfreCdu premier Sep
tem bre7 ne nous- a pas: interdit la faculé de fàifir
6c exécuter pour le 'prix des marchandilès qui
-étôient encore furies ports , ôcque les Appellants
avoient la liberté de venir retirer ; par conféquent
notre faille eft bonne.
• ' Cette obje&ion ,‘ on peut le dire , eil: le comble
de l’abiurdité: YA rrêt du premier Septembre or
donne l’execution des précédents A rrê ts, & pour-quoi ? parce que les précédents Arrêts ordonnoient l'exécution de l’A rrêtd u 3 1 M ars 17 7 2 ',
qui confirme les diÎpolitions du marché de 1 7 6 9 ,
parce que les anciens Arrêts font défenfes aux
•Conflits de Nevers de plus connoître de cette
• tGnt€0aïk)h j'-niaîs* prérendre que rexécurion des
précédants*JA rîJ1êt-s/ordonnée pari?A rrêt du pre
mier Sêptem bnï, frappe fur la main-levée conditibpnelle portée par les Arrêts des
6c 16 A o û t,
�ceft vouloir conteiler l’évidence. Que demandoient en effet les Appellants à l’époque du pre
mier. Septembre ? Qu’attendu l’impoilibilicé & le
réfus de la part des Intimés de repréfenter les
marchandifes, la main-levée conditionnelle, portée
parles Arrêts des 16 Juillet & 16 A o û t, fut con
vertie en main-levée pure ôc iimple. Que porte
VArrêt du premier Septembre? main-levée pure
& iim ple, telle qu’elle étoit demandée, ôc con
damnation des dépens contre les Intimés. L ’ A r
rêt du premier Septembre n’ordonne donc point
l’exécution des précédents Arrêts en ce qui con
cerne la main-levée des iaifies. Les iàiiies des
premier & 7 O&obre font donc faites au mé* pris des A rrêts de la Cour , elles ne peuvent par
conféquent fe loutenir.
Les Appellants croient pouvoir fe difpenfer de ie
livrer a de plus longues difcuflions pour établir la
neceifité de déclarer nulles les faifies qu’on a faites
contr eux : à l’égard de la demande en interprétatation d A r r ê t, on a de la peine a concevoir com
ment on a pu s’aveugler ju{qu’au point de la former.
Pour les dommages & intérêts , il elt facile de dé
cider a préfent a qui il en eft dû raifonnablement.
Ces dommages & intérêts doivent être confidérables , <Sc fi les I ntimés, qui ont exercé contre
les Appellants toutes les vexations qui viennent
d être établies , n’ont pas craint de conclure a
10 0 0 0 livres de dommages ôc intérêts, les A p
pelants qui les ont éprouvés, peuvent-ils conclure
�*4
avec plus de modération en fe reflraignant à nrie
fomme de 6000 livres ? c’eft le plus léger dé
dommagement qu?on puiffe leur accorder. Cnéan?
ciers eux-mêmes de la iomme de 4.000 livres, ils
ont étéiaiiis, exécutés à la requête de leurs débiteurs;
dans moins de 6 mois ils ont eifuyé trois faifies exécu
tions ,foit dans leurs meubles, foit dans leur récolte;
la moindre parcelle d’héritage n ’a pas été éparg
née; unH uiilier eicortédeRecordsa toutparcouru;
leurs caves , leurs greniers , leurs maifons , tout
a été dévafté ; & ces vexations ont été exercées
contre des gens qui faiibient un commerce coniidérable, contre des marchands auxquels le plus
léger foupçon fur leur folvabilité peut faire le
plus grand tort : on peut le dire avec certitude,
les dommages &c intérêts que demandent les A p
pelants ne répareront jamais les pertes que leur
ont occafionné les Intimés.
Les Appellants finifîent leur défenfe par une
obfèrvation qui acheve d’établir la trille iïtuation
dans laquelle ils fe trouvent à l’égard des Intimés :
• depuis long-tems ils n’ont reçu aucun bois de la
part des Appellants, ils font cependant en avance
d’une fomme de 4000 liv. depuis deux années,
ils font obligés d’un autre coté de garder une
pareille fomme oiiivc entre les m ains, parce que
d’un mitant a un autre les Intimés peuvent faire
voiturer fur les ports de nouvelles m a rc h a n d a s,
que les Appellants feraient tenus de payer aux
termes de leur convention, après avoir été confli-
�tués en demeure de recevoir d’un inftant à un
autre; ils feroient expofés a être exécutés s’ils fe défaififfoient des fommes que le caprice des Intimés,
ou pour mieux dire le dérangement de leurs affaires
& l' impoff ibilité de remplir leurs engagements
rend oifives entre les mains des Appellants : tou
tes ces raifons, jointes aux vexations déjà établies,
feroient fuffifàntes fans doute pour fonder une
demande en réfiliation du marché que les A p
pellants auroient été en droit de former ; mais
les Appellants s’étant bornés à des dommages &
intérêts , c’eft fùr cet objet feul qu’il s’agit de pro*noncer , & fur lequel il ne peut y avoir qu’une
opinion unanime qui adjuge aux Appellants les
légers dédommagements auxquels ils ont conclu.
Monf i eur l' Abbé B E R N A R D , Rapporteur.
M e. T R O N E T ,
C
a l v i n h a c
Avocat.
, Procureur.
De l’imprimerie de P. V IA L L A N E S, près l’ancien Marché au Bled. 1774.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leguay, Jean-Baptiste. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernard
Tronet
Calvinhac
Subject
The topic of the resource
coupe de bois
eaux et forêts
jurisprudence
résiliations de marchés
ports
fret
stockage de marchandises
lettres de change
fraudes
marchandises
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis sur appointement à mettre pour les sieurs Leguay et Chocuard, Appellants, Demandeurs et Défendeurs. Contre les sieurs Villain et Guérin, Intimés, Défendeurs et Demandeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
Circa 1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0204
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0203
BCU_Factums_G0201
BCU_Factums_G0202
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52881/BCU_Factums_G0204.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Nièvre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Coupe de bois
eaux et forêts
fraudes
fret
jurisprudence
lettres de change
marchandises
ports
résiliations de marchés
stockage de marchandises
-
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b8ac507e3ba4e0e64affed770a2037bc
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
P O U R les fieurs G e r m a i n V I L L A I N
- & A n t o i n e G U E R I N , Marchands affocies,
demeurants en la V ille de là Charité-fur-Loire,
^ Intimés &
d’Arrêts.
CONTRE
Demandeurs'
en
interprétation.
les f ieurs J e a n - B a
p t is t e
L E G U A Y \ habitant de la V ille de P ou illi ,
& J
ean
-Ba
p t
iste
CHOCUARDy
habitant de la V ille de Cofn e , tous deux
Marchands de bois , af f ociés , Appellants &
Défendeurs.
Un Premier A rrêt rendu au mois de Mars
d
e
l ' année 1 7 7 2 condamne Leguay &
Chocuard a recevoir les M archandifes
qu’ils avoient achetés des fieurs Villain
& Guerin.
Les chicanes multipliées des fieurs Leguay &
A
�a
Chocuard ont retardé la reception de ces mar-chandifes;jufqu’apçès l a ,vente par adjudication fur
une faifie'faite par le fieur G aico in g , & concer
tée-avec Leguay &; Chocuard.
Deux autres Arrêts des 10 & -2,7 Juillet 1 7 7 3
ont condamné les fleurs Chocuard & Leguay à
payer le prix de ces mêmes marchandifes nonobi*
tant tÔUtes iàifies.
Enfin un dernier A rrêt du premier Septembre
fuivant, qui ordonne l’exécution des deux précé
dents, fert de prétexte aux fieurs Leguay ôc C ho
cuard pour renchérir fur leurs injuftices, & s’en
^utorifent pour, s’approprier les marchandifes contentieufes fans en payer le prix.
F A /«..r
ET
PROCEDURE.
Par ade fous fignatüre’ privée du- i 1 Septembre
17 6 9 les >fieurs Villaiii & Guerin vendirent aux
fieurs Leguay 6c Chocuard tous les bois qu’ils
retireroient de l’exploitation - des forêts, foit du
fieur G afcoin g'de Villecourt, foit de la dame
Marquife de Fougere.
‘
. *■
Les fieurs Leguay & Chocuard s’obligerent de
leur part a prendre tous les bois provenants de
ces mêmes exploitations.
!
Il fut en outre exprCÎÎément convenu, i°. que
le s‘fieurs Villàin & Guerin feraient tenus de faire
conduire toutes les marchandifes fur les ports les
plus commodes pour ’ les voitures ; 2 0. que les
�3
• J
marchandifes feroient conduites dans les mois de
M a r s , A v r il, Ju in , Juillet & Août de chaque
année ; 3 0. que dans.le cas où lefdites marchandiies feroient conduites avant le temps convenu,
lefdits fleurs Villain &t Guerin feroient tenus d’en
avertir les fieurs Leguay & C hocuard, qui leur
en donneraient décharge ; 4.0. les fieurs Chocuard
& Leguay s’obligerent de payer tous les ans une
fomme de 40 00 liv. en avance , favo ir, 20 0 0 liv.
à la St. Martin d’h iv e r, & les autres 200 0 liv.
aux Fêtes de N o ë l, le tout en lettres de change ,
6c après le compte à faire au mois d’Aout de
chaque année ; 50. enfin ces mêmes marchandifes
devoient être payées aux fieurs Villain & G uerin,
k fur & meiiire de la livraiion, pendant tout le
temps que dureroit l’exploitation defdites forêts.
C e traité , qui fait la loi des Parties, fembloit
n être iufceptible d’aucune forte de conteftation,
& les fieurs Villain ÔC Guerin fe ieroient empreffés de l’exécuter dans tous fes points, fi le fieur
Gaicoing n’eut cherché tous les moyens de faire
reulier la vente qu’il leur avoit faite de fes forêts.
Pour parvenir a Ion bur, il imagina de faire pour
voir les fieurs Leguay &c Chocuard pour deman
der la réiiliation du ious-feing dont eft queftion.
L execution de ce ious-feing étant fufpendue,
les fieurs Leguay & Chocuard refuiants de rece
voir les marchandifes exploitées, les fieurs V illain &: Guerin étoient dans l’impoifibilité de con
tinuer exploitation des forêts du fieur G aicoin^,
1
7
�leurs fonds demeurants dans la plus grande iouffrance.
Pour l’exécution de ce projet odieux concerté
entre le fieur Gaicoing & les iieurs Leguay &
C hocu ard, ces derniers fe pourvurent pardevant
les Juges-Confuls de N evers,où ils obtinrent une
Sentence le 4 Janvier 1 7 7 1 , qui ordonnoit la
réfiliation du fous-feing dont eft queftion. Sur
l’appel de cette Sentence, interjette en la C o u r, in
tervint Arrêt le 3 1 M ars 1 7 7 2 , par lequel il
fut ordonné que , conformément au Traité du mois
de Septembre 136 9 , les fieurs Leguay & Cho
cuard feroient tenus de payer -aux fieurs Villain.
& Guerin la fomme de 4000 livres avance, à
la charge par eux de donner bonne & fuffifante.
caution , pour cette fomme jeulement.
Munis de cet A rrêt , <Sc du fous-feing qu’il
confirmoit, les fieurs Villain & Guerin, qui avoient
beaucoup de marchandifes fur les ports, firent une
fommation aux fieurs Leguay 6c Chocuard , le a
M ars 17 7 2, à ce qu'ilsfiiffênt tenus defe rendre furies
ports des MottesfurA ltier , pour y faire ïenlevement
de la quantité de Z400 toifes de bois , ou plus ,
s 'il y avoit , qui y étoient emplacés depuis long
temps , & de payer lors dudit enle\ement le prix
comptant de tout ce qui pourroit s y trouver ^juivant & conformément à leurs conventions , leur
déclarant que faute par eux de s’y rendre, If'dites
marchandifes demeureraient à leurs rifques , périls
&fortunes ; protejlant néanmoins d'en pourfuivre
�le paiement contre lefdits Leguay & Chocuard en
la maniéré ordinaire, (¿z) Cette fommation n’a
yant produit aucun effet , les fieurs Villain
& Guerin fe difpofoient a pourfuivre le paie
ment de leurs marchandifes , ainfi que la ion: me
de 4000 liv. qui devoit leur être payée d’avan
ce, conformément à l’ A rrêt de la C o u r du 3 1
M ars 1 7 7 2 , lorfque les fieurs Leguay & Cho
cuard tenterent une fécondé fois la réfiliation
du fous - feing du 1 1 Septembre 17 6 9 ; en
conféquence ils firent fommer les fieurs V il
lain 6c Guerin , le n du même mois de
Mars , de fe trouver fur les ports le 1 6 , pour
être préfents au procès verbal qu’ils entendoient
faire dreifer des marchandifes en queftion. A u jour
indiqué les fieurs Leguay ÔC Chocuard fe trans
portèrent en eifet fur les ports , où il fut dreifé
un procès verbal conforme a leur vo lo n té, ÔC
très-favorable à l’exécution de leurs projets.
En vertu de cet acte inftrum entaire, les fieurs
Leguay & Chocuard firent aifigner pour la fé
condé fois les fieurs Villain &c Guerin pardevant
les Juges-Confuls de N evers , pour voir ordon
ner la réiiliation du fous-feing au i ‘ i Septembre
1 7 69 , pour les caufes, eft-il dit dans cet a£fce ,
que les bois, actuellement fu ries ports, nefontpoint
( a) L o r s d e cette f o m m a t i o n , les m a r c h a n d i f e s d e s fieurs
V i l l a i n & G ue r i n n’ a v o i e n t p a s e n c o r e été faifies à la requête
du fieur G a i c o i n g .
�6
de la quantité ni qualité portée au fous - feing
privé.
Comme toutes les démarches des fieurs Leguay
6c Chocuard étoient concertées avec le iieur
G aico in g, ce dernier, afin d’appuyer la demande
en réfiliaion, fit Faifir a Ta requête , par procès ver
bal du 30 du même mois de M a r s , les mar
chandées qui Te trouvoient fur les ports , 6c le
nommé Bonnet fut établi CommifTaire.
L e 6 du mois de M ai iu ivan t, les fieurs V illain & Guerin , craignant avec fondement quel
que furprife de la part des fieurs Leguay 6c
Chocuard , firent fommer ces derniers de f e trou
ver le Samedi fuivanr, 8 du même m ois, fu r les
ports des Mottes & autres , ou ils avoient fa it
conduire les marchandifes quils leur avoient ven
dus , à Veffet de recevoir toutes celles qui fe trou
veraient conformes , ce font les propres termes de
l’a ile, & dans Véchantillon relatif audit marché,
cî en payer le prix comptant, conformément à P A r
rêt du 3 1 Mars I J J 2 . , & ce entre les mains des
fieurs Léonard Bonnet, Commiffaire établi à la
Jaifie faite a la requête du Jieur Gafcoing , f i i f e
occajionnée , cffc-il ajouté, par le fait des fieurs
Chocuard & Leguay , pour n avoir pas fatisfait
aux premières fommations a eux ci-devant faites.
L e môme jo u r, fur la demande en réfiliation ,
intervint Sentence des Juges-Confuls de N evers ,
portant réiiliation du marché dont il s’agit. L e
1 1 du même mois les iicurs V illain 6c Guerin,
�voulant fe procurer le paiement de leurs marchandifes , firent procéder par iaifie ÔC execution
fur les meubles & effets des fieurs Leguay &
C hocuard.Ces derniers s’étant pourvus en la Cour
contre cette faifie , ôt les fieurs V illain & Guerin s’étant également pourvus contre la Sentence
portant réfiliation, intervint A rrêt fur appoin
tero n t à m ettre, le 1 0 Juillet fu ivan t, par le
quel la Cour fa it main-levée provif dire auxdits
Leguay & Chocuarà de ' la faifie - exécution fu r
eux faite le u M ai précédent , à la charge par
eux de recevoir & prendre les marchandifes tranf
portées fu r les ports , & mentionnées dans les
procès verbaux des 2 6 Mars & 8 M ai précé
dents j f i u f à en dijlraire les marchandifes qui ne
feroient pas de lefpece de /’échantillon porté au
fous -fein g du 11 Septembre i j f y , à la charge
aufjï de payer le prix defdites marchandifes , de
fournir à cet effet des lettres de change conformémentyaudit marché, à compter depuis leflits
jours 2,6 Mars & 8 M ai précédents, lefquelles
lettres de change feraient remifes entre les mains
de Léonard Bonnet , CommiJJaire établi à la faifie
de ces mêmes marchandifes, à la requête du Jieur
Gafcoing.
•D’après deux Arrêts confecutifs qui ordonnoicnt
1 exécution du fous - feing de 1 7 6 9 , qui condamnoient les iicurs Leguay & Chocuard a re
cevoir les marchandifes dépofees fur les ports & a
en payer le montant, les fieurs Villain & Gucrin
�8
furent encore forcés de fommer, quoiqu’infruâueufement, lefdits fieurs Leguay 6c Chocuard, par ade
du 2.3 dudit mois de Ju ille t, de fe trouver le lundi
fuivant 26 dudit mois fur les ports, pour par eux
recevoir définitivement toutes les marchandifes qui
s’y trouveroient, 6c enfuite en payer le prix au
defir defdits Arrêts entre les mains du fieur Bon
n e t, Commiilaire établi.
Il eit néceifaire d’obferver que les refus réitérés
’des fieurs Leguay 6c Chocuard de recevoir les
marchandifes que les fieurs Villain 6c Guerin leur
avoient offertes par différentes fommations, 6c
d’en payer le montant conformément au fous-feing
du 1 1 Septembre 1 7 6 9 , & 'a l’Arrêt du 3 1 Mars
1 7 7 1 , que tous ces refus avoient occafionné la
faifie faite à la requête du fieur Gafcoing de partie
des marchandifes qui étoient fur les différents ports,
6c que cette faifie fut fuivie d’une vente par ad
judication fur le fieur D a v id , que cependant ce
fieur D a v id , adjudicataire, conientoit à la livraifon de ces mêmes marchandifes, ainii qu’il fera
établi 6c prouvé par la fuite.
En conféquence de la fommation du 2 3 Juillet,
le fieur G u erin , faifant tant pour lui que jxmr le
fieur V illa in , fon aiïocié, s’etant tranfporté fu rie
port des Mottes, affifté d’un N otaire, 6c le fieur
L e g u a y , faifant pour fon aifocié, s’ étant auffi tranf
porté fur ledit port, affilié de même d’un N otaire,
il fut drefle un procès verbal qui contient plnfieurs
faits néceffaires à rappeller ; d’abord le fieur Leguay
prétendit
�prétendit ( b) que le fieur Guerin. n’étoit pas en état
de lui. livrer les marchandifes en queftion, pmiique partie d’icclles , con'fiftant en charnier, avoient
été vendues judiciairement au ficur D aV id /N eg o ciant a Nevers , & qu’une autre' partie, confiftant
en planches, avoient été auifi vendues au fieur C a cardier, qui les avoit enlevées. L e fieur, Çuerin
répondit alors ' qua l’égard des planches, il etoit vrai
qu’elles avoient été vendues à Cacardierf'," qui les
âvoit enlevées, mais qu’a l’exception de' cet objet,
qui étoit très-peu declwfe,\\ étoit en état de lui
livrer le furplus de toutes lesf autres' marchandifes
a eux appartenantes lur lcfdits ports'; & qu’il n y
âvoit qu’a en faire le compte ; le.iicur Leguay., pretfé par le fleur Guerin de procéder au compte des
marchandifes, demanda une ceifion de la part du
fieur D avid de ces mêmes marchandifes vendues
iairement. Mais lé fieur Guerin lui répondit (c)
qu’il n’avoit pas beioin de ceifiori ni d’ en juftifier
que les marchandifes exiftoient , & qu’il étoit prêt
de les lui livrer , s’il vouloit les recevoir & en
payer le prix conformément audit A rrêt, qu’a Re
gard du fieur D avid cela ne pouvoit faire aucune
difficulté , parce qu’il avoit fa parole d’hon
neur , qu’il la lui avoit même renouvelléc ce
matin , & ce , porte le procès verbal, en nopréfence
en certifiant que s’il n’avoit pas
( />)Pagc <; & 7 d u p r o c è s v e r b a l d u 1 6 J ui l le t 1 7 7 3 .
(c) P a g e 6.
(</) E n p r é f e n c e d u N o t a i r e q u i a reçu le di t p r o c è s verbal .
�.été malade il feroit venu fur lefdits ports pour rappeller audit iieur Leguay & à fon ailocié la promeiTe qu’il lui faifoit de remettre généralement
•toutes les m archandas qui, lui âvoient été adju
gées , à la charge par eux de lui rendre % remettre f
d'ici nu..30 du préfent mois, tous les frais avan
ces & débourfés q u î l 'avoitja ït a ce ju je t , quïfe
montaient % la fomme de x i8 6 hv. . ^
' .'J
Les objeciions du fieur Leguay étant détruites 'x
il irépondit ([e) que ion argent ne tenoit à rien ,
qu’il étoit dans feS gouilèts, mais qu’il vouloitiàvoir auparavant comment il le donneroit , à qui il
le.reme'ttroit, & f i les marchandifes étoient de re
cette & de Véchantillon porté -par le marché du n
Septembre ijG ÿ , D ’après'cela.le fieur Guerin étant rafluré, & fur
(a qualité'des marchandifes, •&: fur la iolidité du
paiement, il ne devoit plus y avoir dë difficulté ; or
le procès verbal conftate que le fieur Guerin mit le
fieur Leguay a l’abri de toute crainte en lui décla
rant que s i l ne vouloitpas lui remettre pcrfonnellement Je prix defhtes marchandifes, ni-entre les
mains -du fieur Bonnet qui avoit été établi Commif
fa ir e , ils confentoient q u il le remit entre les mains
du fieur D a v id , adjudicataire.
A l’égard des marchandifes, le fieur G u erin ,
après en avoir fait le compte en préfence du fieurLeguay ,’ ce dernier refuià de les recevoir <Sc d’en
payer le montant.
(<?) P a g e 8 & 9 .
�dcj
M l
C e refus de recevoir & de payer les.marchandiies conformément a l’Arrêt provifoire du io Juil
let, étant, bien conilaté, les fieurs Villain & Gue
rin pouriuivirent en-la C our l’Arrét définitif qu’ils .
obtinrent le 27' du même mois de Juillet-,.,par le- >
quel, fur l’appel interjette par les fieurs Chocuard' & . >
Leguay des pourfuites faites contr’eux par les fieursVillain &; Guerin , la Ç our a mis.l’appellation a u ’
néant, ordonne que l’A rrêt provifoire du to du
même mois demeureroit définitif, condamne les
Appellants en l’amende, en ce qui couche les appels
interjettés par les fieurs. Villaiti' & Guerin des Sen
tences de la Juriior&ion Coniulaire, de N tvers , teh- ^
dantes à furfeoir a j ’exjécution del’A rrêt du3 i. M ars
1 7 7 a ; la C our a mis les appellations fk Sentences
dont appel au néant, émendant, a.déchargé les fieurs
Villain 6c Guerin des condamnationsi.coatreux prononcées , ordonne que. l’Arrêt duditi jour 31.
Mars 1 7 7 2 fera exécuté fuivant fa forme & teneur.
Mais les fieurs Leguay &c Chocuard , bîbn loin
de fe conformer a cet Arrêt y formèrent le projet de
garder le plus profond filence juiqu’après le terme
fatal accorde aux fieurs Villain & Guerin par le r
fieur D a v id , ad judicataire,pour la délivrance defdites
marchandées qui lui avoient été adjugées , pourvu
toutefois que ce dernier fut payé dans le courant de
Juillet.
. ■
Pro)et ^cur rcuiTit très-bien : le. mois de Juil
let paTie, les fieiirs Leguay & Cliocuard firenr ache
ter du lieur D avid par le nommé Cacardier toutes
13 a
�les marchandifes en queftion, & s’en firent faire
une nouvelle vente par ce mcme Cacardier.
- C e fut alors que les fieurs Leguay & Chocuard,
ayant à leur difpojkion toutes ces marchandifes, bien'
affurés de plus que les Jieurs Villain & Guerin
ne pourroientplusJe faireforts de les délivrer, iommerent à leur tour, par acte du 1 4 Août iuivant les
fieurs Villain & Guerin pour repréfenter les marchan
difes mentionnées aux procès verbaux des 16 M ars
& 8 M ai précédents ; defquelles marchandifes, porte
cet afte, les fieurs Villain & Guerin auront la li
bre difpofidon , en rapportant par eu x , &jujlifiant
de la main-levée de lafaijie de partie des marchan
difesfaite à la requête du jieu r Gafcoing : la déchar
ge duJieur Bonnet , CommiJJaire, même la ccjjion
par écrit des Charniers vendus & adjugés au Jieur
D a v id , déclarant lefiitsfieurs Leguay & Chocuard
qu ils recevront cefdites marchandifes, fous les f u f
dites conditions de leur rapporter les mains-levées,
décharge & cejfion , & qu ils en payeront fu r le
champ le prix comptant.
Il eit malheureux fans doute pour les fieurs V il
lain & Guerin d ’ètre obligés de relater prefque tous
les a£tes paifés pendant leur contestation ; mais les
droits les plusinconteltables ont été embrouillés par
ime multitude de tournures &c de détours de niauvaife foi , qui ne peuvent être bien développés qu’en
rapportant'les aâes qui les confiaient.
E n jconfcqucncc d e l à fommarion du 14. .A o û t ,
Jcs iieurs Villain & G u erin s’ étant tranfportés
�w
fur les p o rts, firent obferver aux fieurs Leguay
6c Chocuard l’inconféquence de leur procédé ,
en dérifion de leurs offres , 6c l’indécence de leur
fommation ; de plus qu’ils avoientété, par le fait
feul defdits fieurs Leguay 6c C hocuard, dans l’impoffibilité de faire ufage du confentement donné
par le fieur D avid de délivrer les marchandifes
en queftion , que leurs obftinations à recevoir
lefdires marchandifes ayant laifle écouler le ter
me fixé , ils ne devoient plus s’attendre à ce
qu elles leurs fuifent délivrées , attendu qu’ils en
avoient eux-mêmes la pleine &: entiere difpofition.
A lors les fieurs Leguay 6c Chocuard préfenterent Requête en la C o u r , tendante à ce qu’il
fut ordonné que l’A rrêt du 10 Juillet précédent
feroit exécuté félon fa forme 6c teneur , 6c que
faute par les fieurs V illain &: Guerin d’avoir
livré les marchandifes énoncées audit A rrêt ,
main-levée pure 6c fnnple leur feroit faite de la
faifie exécution fur eux faite par proces-verbal
du 1 1 M ai précédent , qu’il leur fut permis de
faire aifigner leidits fieurs V illain & Guerin au
plus prochain jour , pour voir ordonner qu’ils
feroient tenus de faire leur compte conformément
a leur marché de la fomme de 4.000 liv. avancée
en exécution de l’A rret du 3 1 M ars 1 7 7 1 , en
conféquçnce être condamné à payer & rembourfer les fommes dont ils fe trouveroient reliquataires , aux offres faites par lcfdits fieurs Leguay 6c
�14
Chocuard de donner auxdits fieurs Villain 6c Gue*
rin la fomme de 4.000 liv. en deux lettres de chan- t
gé , dont l ’une à la Sr. Martin lors prochaine,
6c l’autre aux fêtes de N o ël fuivantes..
L e fieur Villain ( / ) ayant comparu fur cette'
aifignation , 6c ignorant, ce qui s’étoit pafle fur
les lieux , demanda que les fieurs Chocuard 6c
Leguay fuiTent déclarés non-recevables dans leurs
demandes, 6c condamnés en des dommages &
intérêts ; ces conclufions données fans corps de
requête , attendu que ledit fieur Villain n’étoit
pas inftruit des faits , furent contredites par une
requête donnée par lefdits fieurs Chocuard 6c
Leguay , & avant que ledit fieur Villain put être
inftruit de tout ce qui s’étoit paifé , intervint
A rrêt le premier Septembre fuivanc, dont il eft
d’autant plus indifpenfable de rapporter les véri
tables expreifions, qu’il s’agit d’en interpréter le
feus ; notre dite Cour, fans s'arrêter aux requêtes
& demandes desJieurs Villain & Guerin , ordonne
que les Arrêts des 10 & z y Juillet feront exécu
tés fuivant leur forme & teneur , en conféquence
fa it main-levée pure & jimpie aux fieurs Leguay
& Chocuard de la fiifie & exécution fu r eux
faites de leurs meubles & effets fa i fis par procès
verbal du 11 M ai dernier , condamne les Jieurs
Villain & Guerin aux dépens.
Les fieurs Villain 6c Guerin inftruits que les
fieurs Leguay & Chocuard étoient faifis de toutes
( / ) I l étoit a l o r s en cette* V i l l e .
�Je s marchandifes en queftion , les fommerent par
a&e du 2 4 dudit mois-de Septembre de payer
1le montant defdites
4 marchandifes,7 fous la dé,-duâion néanmoins de la fomme de 18 2 6 liy.
montant des débouries faits par le fieur David ,
fi toutefois cette fomme lui avoit été remife ,
les fieurs Leguay 6c Chocuard garderont le filenc e , nouyelle fommation du même jour 2 4 Sep
tembre qui ne produifit encore aucun effet, alors
les fieurs Villain & Guerin firent procéder par faifie exécution; mais les fieurs Leguay 6c Chocuard
refuferent d’ouvrir la porte.
Le lendemain , 25 du même mois , les fieurs
V illain 6c Guerin firent faifir les fruits pendants
par racine dans les .vignes des fieurs Leguay 6c
Chocuard , & ayant obtenu au Bailliage de St.
Pierre-le-Moutier une Ordonnance de bris 6c frac.ture de porte , ils firent procéder par faifie 6c
exécution fur certains objets appartenants aux
fieurs Leguay 6c Chocuard : fur l’appel en la
.Cour de la part de ces derniers, tant des fommations du 2 4 Septembre que .de l’Ordonnance
du Juge de St. Pierre le-Moutier , faifie de fruits
6c faifie exécution , ils furprirent de la religion
de la-C o u r un A rrêt par défaut qui leur adjuge
leurs conclufions provifoires.
M O Y E N S .
Qu’eft-ce que la Cour a entendu décider en
ordonnant que Us Arrêts des 10 & z y Juillet
�16
feront exécutés fuivant leur forme & teneur ? A ' t-elle voulu juger que les fieurs Leguay & Cho'cuard n’étoient pas en retard de recevoir’ les
marchandifes? Mais les fommations & les procès
.verbaux des 10 & 1 6 M a rs, 8 &c io M a i, 2,3
ô c ^ 6 Juillet fournifToient la preuve du contraire;
cela eft fi démonftrativement prouvé , que par
l’A rrêt provifoire du 1 0 Juillet les iieurs Le•guay & Chocuard n’ont obtenu la main levée
provifoire de la faifie ôc exécution fur eux faite
qu’à la charge & fous les conditions de prendre
& recevoir toutes les marchandifes tranfportées fu r
les ports , & mentionnées aux procès verbaux des
x G Mars & 8 M ai , & à la charge d’en payer
le montant en lettres de change, conformément au
fous-feing de IJ& 9 ; par l’ A rrêt du 27 du même
m ois, la C our a ordonné que celui ci-deiîiis rap
porté demeureroit définitif, & que l’Arrêt d u j r
M ars feroit exécuté félon ià forme & teneur ; or que
porte l’Arrêt du 3 1 M ars? il ordonne, que confor
mément au fous-feing du 11 Septembre ij6 () , les
fieurs Leguay & Chocuard feront tenus de payer
aux fieurs Villain & Guerin lafomme de 4000 liv.
C ’eftdonc par les Arrêts des 3 1 Mars 17 7 2 ,, 10
ÔC'i'j Juillet 1 7 7 3 que doit s’interpréter l’Arret du
premier Septembre fuivant ; 01* les trois Arrêts ne
ioiiffrent pas la moindre oblcurité ; le premier or
donne l’exécution du fous-feing de 17 6 9 ; le fécond
condamne les fieurs Leguay & Chocuard h recevoir
les marchandifes qui fe trouveroient fur les ports,
6c
�¿r
l7
6c d’ en payer le montant; le troifieme ordonne
que les deux précédents demeureront définitifs ,
6c feront exécutés félon leur forme 6c teneur.
Il faut donc conclure de ces trois A rrê ts, que
les fieurs Chocuard 6c Leguay ont conftamment
refufe de recevoir les marchandifes , que ce refus
a occafionné la faifie faite à la requête du fieur
Gafcoing , que fi lors de la fommation du io Mars
x
les fieurs Leguay 6c Chocuard euifent
reçu les mêmes marchandifes , 6c en euifent
payé le montant conformément au fous-feing de
17 6 9 , les fieurs Villain 6c Guerin auraient payé
le fieur G afco in g , 6c auroient empêché & la
773
faifie & la vente par adjudication de toutes les
marchandifes en queflion.
Vainement les fieurs Leguay 6c Chocuard ontils prétendu :j couvrir leur refus de recevoir les.
marchandifes; en queflion fous les prétextes ipécieux qu’elles n’étoient pas de l’échantillon porté
au fous-fèing de 17 6 9 , 6c qu’ils n ’avoient aucune
fureté pour le paiement , attendu qu’elles étoient
faifies a la.requête du fieur Gafcoing ; la ibmmation du 6 M ai ? 7 7 3 détruit entièrement cette
allégation, attendu 'qu’il y eft dit expreifément, à
-efFet par lefdits fieurs Leguay & Choçuard de
1
recevoir toutes celles ^qui je trouveroient conformes,
& dans £ échantillon rélatif audit marché , d ’en
payer le prix comptant conformément à l 1Arrêt
du 3 1 Mars i j j z , & ce entre les mains duJieur
c
�Î6
‘
1
8
Bonnet, CommiJJaire établi à lafaifiedufieur Gaß
coing.
. C ’eft ici la preuve la plus manifefte combien les
v
fieurs Villain & Guerin avoient à cœur de fe libé
rer , combien ils cherchoient à éviter toutes for
tes de conteftations , & leur deiir à mettre les
fieurs Leguay & Chocuard à l’abri de toute crain
te , foit fur la qualité des marchandifes, foit pour
la fureté du paiement ; mais les proportions les
plus juftes n étoient jamais accueillies, & les fieurs
Leguay ôc Chocuard ne cherchoient qu à répan
dre un nuage épais fur les droits les plus clairs
& les plus légitimes,
Faut-il encore des preuves plus authentiques du
refus formel des fieurs Leguay & Chocuard de
recevoir les marchandifes en queftion } L e procès
verbal du 2,6 Juillet en contient une in fin ité,dont les fieurs Villain ôc Guerin rapporteront
quelques exquifes, afin de convaincre de .plus en
plus les fieurs Leguay &: Chocuard de leurs injuftices. On lit donc dans ce procès v e rb a l, ( g ) que
les fieu r Villain & Guerin fefaifoientforts de livrer
les marchandifes qui étoient fu r lefdits ports , f i
les fieurs Leguay & Chocuard Vouloient 'les rece
voir , & que puijqu elles exifloient, ils nepouvoient
point fe refujer de les recevoir, & qu'en les recevant
( g ) R é d i g é en p r é f e n c e d u fieur L e g u a y & d ’un N o t a i r e ,
q i f i l a v oi t a m e n é a v e c lui f ür le p o r t .
�<ÎY
*9
ils navoient rien à leur oppofe'r, 'quedc-fuiplus ¿toit
leur affaire
Aquen: par.ledit jieur Leguay‘ recer
vaut & frayant Conformément ;à-leur, marché, & au
d e fr de l Arrêt .du io \Juillet ^ itoutei 'difficultés,
à cet égardJe trouveroient levées, Quant au paye
ment lur laifureté: duquel-les fieurs;- Leguay ât.
Chocuard'faifoient'des:diiîihikés, il eilconftàtéfuf
le même procès v.erbal quéi f i lefditsfieùrs Leguay.
à Chocuardiie vouloie'ntpasremettre auxfieurs VU -
lain & Guerin perfonnellement le montant du prix
defdites m archandifes , ni aufe u r Bonnet, Çojnmif
jaire , ils confentoientyolontiers qu ils lé remijfent
entre les ,mains d u fie ù r D avid', Adjudïcatai»
re. (Il)
•
i
D ’après tant de preuves qui ne peuvent être
conteftées, d’après toutes les précautions prifes par
les fieurs Villain
Guerin , pour aflu reria yalidiré du paièment defditts marchandifes, peut-ori
en induire qu’ils ont refufé de délivrer ces mêmes
marchandifes? Peut-on leur imputer le moindre
retard? N on fans doute ; maiSi le projet concerté
n’avoit pas encore reçu la perfection , & le fieur
Gafcoing , de concert avec les fieurs Leguay &
( A ) I l ne faut p a s p e r d r e d e v u e , q u e m a l g r é l’a d j u d i c a
tion faite au p r o f it d u fieur D a v i d d e par t ie d e s m a r c h a n d i f e s
en q u e f t i o n , il c o n f e n t o i t n é a n m o i n s q u e les fieurs V i l l a i n &:
G ue r i n , ( ainfi q u e le c on ft at c le p r o c è s ve rbal ) en fiflent la
d él i v r a n c e , p o u r v u t ou t e f o i s q u ’il fut p a y é d e fes frais & d é b o u r f é d a n s ie c o u r a n t d u m o i s d e Ju il l et .
C a
�C hocuard, vouloit, a quelque prix quecefut, faire
reiilier le Contrat de vente de fes bois* .
O n ne penfe pas que les: fieursoLeguay fit Ghoeuard veuillent tirer quelques indu&ions de la fommation faite aux fieurs Villain 6c Guerin le 14.
A o û t 1 7 7 3 de leur délivrer les raarchandifes
mentionnées aux procès verbaux des 16. M ars &
8 M ai précédents, & d’en recevoir le. montant ;
leurs prétentions feroient d’autant plus ridicules^
que lors de cette fommation les marchandifes
étoient à leur pouvoir , ils^en avoient la libre &c
entieredifpofition.‘Voici'com m ent. L e terme fatal
accordé parle fieurD avid, adjudicataire, aux fieurs
V illain & Guerin pour la livraifon des marchan
difes , étant expiré fans que ces derniers euilènc
pu remplir leurs1engagements envers ledit fieur
David , par le défaut de réception, &c par le dé
faut de paiement defdites marchandifes, le nom
mé C acardier, prête -nùm des fieurs Leguay &c
Chocuard, acheta ces mêmes marchandifes du fieur
David , adjudicataire, ils-les revendit enfuite auxd.
fieurs Leguay &■ Chocuard V & ce n’a été qu’a
près cette revente qu’â été faite.la iommation du
14. A oût 1 7 7 3 .
Il
faut donc regarder-cette fommation comme
un A£te abfolument dériloire, comme un A & c
qui démontre l’inconicquence abfoluc des fieurs
Leguay & Chocuard de recevoir le 14. Août ,
ce qu’ils ont conilamment refulé de faire , d’après
�toutes les fommations & les procès verbaux qui
les en ont requis, comme un A & e , en un mot
qui mérite les regards favorables d e’la Juftice.
M ais , difent les fieurs Leguay &c Chocuard ,
& cejl-là leur moyen décijif, par l’A rrêt du pre
mier Septembre 1 7 7 3 la Cour a fait main-levée
pure & iimple des faifies faites a la requête des
fieurs V illain & Guerin par procès verbal du 1 1
M ai dernier. Cela eft v ra i, mais la Cour ordonne
aufli que les Arrêts des 10 & 2,'7 Juillet feront
exécutés fuivant leur forme & teneur; c’efl: donc
ces deux Arrêts qu’il faut confulter , c’eit donc
h. ces deux Arrêts qu’il faut fe référer & exécuter
fervilemenc , pon&uellement ce qu’ils preferivent; o r, & on ne fauroit trop le répéter, ils. or
donnent l’exécution du fous-feing du 1 1 Septem
bre 17 6 9 , ils ordonnent que les fieurs Leguay
ôc Chocuard feront tenus de recevoir les marchandifes à eux offertes par les procès verbaux des
2,6 M ars & 8 M ai précédents, d’en payer le prix
,comptant: ces conditions eiientielles n’ont jamais
été exécutées, les fieurs Leguay & Chocuard ont
au contraire, au préjudice de ces Arrêts , conilamment refuié de recevoir, ils doivent donc iupporter la peine due au mépris qu’ils ont fait des
Arrêts de la Cour.
A l’égard des faifies de fruits faites par les fieurs
Villain ¿k Guerin , elles ont eu pour objet le paie
ment des bois provenus des forêts de la dame Mai;-
�7o
11
quifè de Fougiere, attendu que ces mêmes bois n’ont
jamais été compris dans les faifies faites a la requête
du fieur G afcoing, ni dans la vente par adjudica-,
tion faite fur le fieur D av id , que cependant lefdits
fieurs Leguay «Sc Chocuard ont conftamment refufé de les recevoir, ainfi que ceux provenus des fo
rêts du fieur Gafcoing. C es faifies ne peuvent donc
pas ‘être regardées comme vexatoires, puifqu’elles
ont pour motif le paiement d’une dette légitime.
Enfin il eft dû des dommages ôc intérêts aux
fieurs Villain & Guerin. Les faifies, foit du fieur
Gafcoing , foit de différents Particuliers avec lefbuels les fieurs Villain & Guerin avoient pris des
engagements, enfourniffent une preuve inconteftable , car il réfulte de toutes ces faifies la vente par
adjudication des marchandifès pour la fomme de
1 8 8 6 livres , tandis que les mêmes marchandifes,
fuivant les conventions portées au fous-feing privé
du mois de Septembre 17 6 9 , étoient en valeur de
livres , c’eft donc une perte réelle de 2.016 liv.
il enréfiilte de plus que les fieurs Villain 6t Gue
rin ont été forcés de fufpendre l’exploitation des
forêts, foit de la dame Marquife de Fougiere, foit
du fieur Gafcoing ; il en réfulte que les bois , qui
éroient prêts a être conduits fur les ports pour être
délivrés aux fieurs Leguay & Chocuard, font en
core dans les forêts, où ils perdent leur couleur na
turelle,& feront refufés lorfqu’ils feront préfentésaux
fiuirs Leguay 6c C hocuard, comme n’étant pas de
�3
a ..
la qualité portée au fous-feing ; il en réfuite enfin
un dérangement total dans la fortune des fleurs V illain & Gueri n, qui feront bientôt hors d’état de
continuer l’exploitation des forêts du fieur G a fco in g, fi la C our ne s’empreffe à mettre fin aux
vexations des fieurs Leguay & Chocuard.
Signé, V I L L A I N .
Monf i eur l'Abbé B E R N A R D , Rapporteur.
M e. D U R I F , Avocat.
L e c o q , Procureur.
D e l'imprimerie de P. V I A L L A N E S , près l’ancien Marché au Bled. 1774,'
�
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Factums Godemel
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Villain, Germain. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Villain
Bernard
Lecoq
Subject
The topic of the resource
coupe de bois
eaux et forêts
jurisprudence
résiliations de marchés
ports
fret
stockage de marchandises
lettres de change
fraudes
marchandises
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieurs Germain Villain et Antoine Guérin, Marchands associés, demeurants en la ville de la Charité-sur-Loire, Intimés et Demandeurs en interprétation d'Arrêts. Contre les sieurs Jean-Baptiste Leguay, habitant de la ville de Pouilli, et Jean-Baptiste Chocuard, habitant de la ville de Cosne, tous deux Marchands de bois, associés, Appellants et Défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
Circa 1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0203
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0204
BCU_Factums_G0201
BCU_Factums_G0202
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52880/BCU_Factums_G0203.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cosne-Cours-sur-Loire (58086)
Nièvre
Rights
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