1
100
29
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53633/BCU_Factums_G3016.pdf
271905b214561b57e6b22888acc78857
PDF Text
Text
TESTAMENT
DE
M. A N T O I N E L A V E RGNE ,
A n c i e n C u r é de M a i n t e n o n .
-------- ■ ^ g Q O f f i
----
10 A o û t 1 8 4 5.
J e , soussigné, Antoine L a v er g n e , ancien curé de Maintenon ,
département d’Eur e-et -Loir ( Chartres), considérant q u e , malgré
la bonne santé dont je jouis, mon grand âge m’avertit que ma mort
ne peut être é lo ignée, ai résolu de mettre par écrit mes dernières
volontés , comme il suit :
Et d’abord je recommande mon Ame à Dieu , me jette avec c o n
fiance dans les bras de sa miséricorde, et le supplie, par les mérites
infinis de notre divin Sauveur et r édempteur, de m’accorder une
�J a o i» .
-
a -
lionne morl ; ¡’implore pour l’obtenir l’intercession de la sainte
V i e r g e , de tous les Saints , et particulièrement de saint Antoine
mon patron.
i° Je donne et laisse après ma morl à Jean R o u c h y , cordonnierbottier à Rouen en Normandie , fils d’ Antoine R o u c h y , mon neveu
et filleul par ma sœur aînée Jeanne L a v e r g n e , propriétaire à L a bastide , commune d’Anglards , le domaine de L on g e v e r g n e , la
montagne de V ey r i è r e s et tout le bien que j’ai acheté de la ve uv e
Bresson ma voisine, ainsi que le moulin avec toutes ses dépendances,
mai son, p r é s , terres et jardin, le tout situé à L o n g e v e r g n e , c o m
munes d’Anglards cl de Sainl-Vincent, tel que je l’ai acheté de M.
J u g e , chevalier de la L é g i o n - d ’l l o n n e u r , avec les fonds que j’ai
gagnés si honorablement en An gl eter re, par mon travail et mes
faibles talents, pendant vingt-huit ans d ’émigration et de séjour que
j ’ai fait dans ce r oy aume pour me soustraire à la hache révolution
naire qui inondait de sang tout Paris et les environs à la fin do
l’année 1 7 9 1 . Je lui en fais don p our être entièrement à lui , pour
en jouir et ses descendants après ma m o r t , à l’exclusion de mes
autres parents el héritiers ; car telle est ma v o l o nt é , qu’il en soit seul
et unique héritier , lui et scs enfants après lui , de génération en
génération , sous la condition et l’obligation néanmoins la plus
étroite , que tout héritier, possesseur el propriétaire de ce bien, de
ce domaine présent et à venir , quel qu’il soit , renoncera à sou
nom de famille qu’il portait auparavant , pour prendre et porter
celui de L av er gne , cl en faire usage dans tous les actes et les écrits
qu’il passera cl signera pendant sa v i e , el le transmettra à sa posté
rité , use s descendants, garçons et filles, qui renonceront au nom
de Rouchy pour prendre et signer L av erg ne .
2° L e domaine de L on g e v e r g n e ne sera jamais vendu , échangé ,
m o r c e l é , ni g re vé de dettes, sous quelque prétexte que ce soit ;
mais il passera à chaque héri tier, à chaque famille tel que je l’ai
laissé à ma mort; les propriétaires, les possesseurs de ce domaine
seront obligés à leur mort de répondre des réparations qu’ il y aura
�—
à ' f a i r e en le laissant, cl
trant en possession du
3
—
chaque
successeur
p o u rr a ,
d o m a i n e , demander , par une
en en
visite
d’e xper t, un dédommagement pour les réparations qu'il y aura à
faire pour l'entretenir, le cultiver et l’exploiter.
5°
Je donne par ce testament expression de ma volonté aux
D i e r n a t , de Mauriac , mes neveux par ma sœur cadette , Françoise
L a v c r g n e , la somme de huit mille francs à prendre sur le revenu
du domaine de L on ge v e r g n e . Jean R o u c h y , mon héri tier, paiera
un an après ma mort à Joseph Diernat, fils aîné, deux mille francs,
la seconde année après ma m o r t , deux mille Irancsà Jeanne Diernat,
ma nièce ; la troisième année après ma m o r t , deux mille francs à
Michel Di er nat, leur f rère, et la quatrième année après ma mort,
deux mille francs à Antoine Di ernat, pâtissier, et en cas de m o n ,
les frères vivants hériteront de la portion de leur frère décédé ,
qu'ils partageront entr’eux.
Je leur aurais donné le domaine s’ils se fussent ma ri és , mais leur
grand âge a détruit tout espoir de mariage.
4° Je donne et laisse par ce testament écrit de ma m a i n , mon
bien paternel et ma te rn el , fonds et revenus qui auraient pu courir
depuis la mort de mon père jusqu’à la mienne, dont je n’ai jamais
touché un sou ; car j’ai été obligé de pourvoir à toutes les dépenses
de mon éducation; je donne ce bien aux enfants de Marie Alsac ,
femme Juliard , de Saivettes , p our être entièrement à eux , mais
sous la condition et l’obligation la plus étroite, qu’eux el leurs h é r i
tiers présents et à venir feront faire tous les ans , par les prêtres de
l’église d’An g la rd s , un service pour le repos de l a m e de mon père
André L a v c r g n e , et de celle de ma mère Jeanne A u r ia c, e t, après
le s e r v i c e , on fera à la porte de l’église une aumône aux pauvres
do Labastide, de Pradellcs cl de Bo u le y ra c , en pain et en a r g e n t ,
pour la somme de dix francs; ce service sera annoncé en chaire le
dimanche d ’auparnvanl. L e pré de Noudairc ne pourra jamais se
vendre sans le consentement de l’église d’ Anglards qui en décidera.
Ce service est à perpétuité ;
�5 n Je
donne à Antoine R o u c h y , mon filleul et mon neveu , la
portion de mon bien paternel qu’ il a prise dans le partage qu’il a fait
avec sa sœur aînée Marie R o u c h y , afin qu’il ne soit pas inquiété et
tourmenté dans la jouissance de ce bien par ses autres parents;
G° Je donne à Rose Chavaroc , femme V a l t n i e r , le bien de L a bastide que j’ai acheté de Jean Pagis , pour en jouir toute sa vie , et,
après sa mo r t , je le donne à Virginie Valmier, femme Juliard , sa
fille, pour être à elle et à scs enfants après sa mort. Si elle meurt
' sans enfants, j î donne ce bien à Amable Juliard son m a r i , pour 011
jouir toute sa vie ; mais, après sa m o r t , je le donne à la fille aînée
de R o u c l i y , mon neveu cl filleul. Madame V al mi er, et tout pos
sesseur de ce bien après e ll e, feront faire un s e rvi ce , tous les ans,
dans l’église d’Angl ards, pour le repos d’Antoine R o u c l i y , mon
b c a u - f r c r c , de Jeanne L av e r g n e , ma sœur a î n é e , de Françoise
L a v e r g n c , ma sœur cadette , femme Diernat. Apres la messe , on
fera , à la porte de l’église, une aumône aux pauvres , en pain ou
en a r ge nt , p our la somme de quatorze francs. Ce service sera
annoncé au prône de la messe paroissiale, le dimanche d’aupara
vant. Il est à perpétuité et pour toujours. Cette aumône ne sera
distribuée qu’aux pauvres d e L a b a s l i d e , de Bouleirac et de P radelles. On fera ce service et cette aumône le vingt-neuf n o v e m b r e ,
jour de saint André , patron de mon père André La ve rg ne .
70 Je donne aux enfants de Françoise Ro uch y , veuve Arnal , du
C h ez - Vi g ca n , la somme de six mille francs à prendre sur le revenu
du domaine de L o ng c v e r g n e , cinq ans après ma mort. Jean Roucliy,
mon héritier, sera tenu de pay er à chacun de ces six enfants , en
commençant par le fils aîné, la somme de mille francs par an, jus
qu’à fin de paiement , car telle est ma volonté qu’ils aient chacun
mille francs.
8* Jean R o u c h y , mon donaiairc, renoncera à son bien paternel
et maternel , pour le donner à sa sœur aînée, mère de plusieurs
�enfants , à laquelle je donne mille francs à prendre sur le revenu du
domaine de L o n g e v c r g n e , huit ans après ma mort.
9° En entrant en jouissance du domaine de L ou g o v c r g n c , Jean
Iiouchy prendra son père avec l u i , le l o g e r a , le nourrira et le r e
tirera ; il aura les mêmes égards et les mêmes attentions pour scs
deux sœurs cadettes ; il les prendra chez l u i , les logera cl les
nourrira. Dans le cas où ils ne pourraient pas s’accorder ensemble,
Jean Rouchy leur d onne ra , en sortant de chez l u i , la somme de
deux mille francs à partager entr’elles , mille francs pour chacune,
car telle est ma volonté q u ’elles aient mille francs chacune.
ioo A pareil jour de ma m o r t , le propriétaire du domaine de
L o n g e v c r g n e , et tous les possesseurs de ce bien après lui, feront
faire un service , tous les ans et à perpétuité , pour le repos de l'âme
d’Antoine L a v e r g n e , né à Labastide , paroisse d ’ Anglards, ancien
curé de Maintenon ( E u r e - e t - L o i r ) Chartres.
11 sera annoncé
au
prône de la messe paroissiale, le dimanche d’auparavant ; outre la
messe du service, on dira deux autres messes basses aux deux autels
collatéraux , une à l'autel saint Antoine, mon patron. En l'absence
du maître, du propriétaire du domaine , le fermier et sa famille
seront obligés d’y assister et d ’aller à l’oiTrande. On fera sonner, la
veille du se r vi c e, la cloche A ntoinette que j’ai donnée à l’églis«
pour les pauvr es, et , le matin du s e r v i c e , on sonnera tontes les .
cloches. Après le s e r v i c e , on fera, à la porte de l’église, une a u
mône en pain ou en argent, pour le montant de trente f rancs, aux
pauvres de la paroisse. Ce service et l’aumône sont (ondés pour
toujours sur le domaine , sur le bien de L o n g e v c r g n e , quelle que
soit sa destinée.
i i " Voulant récompenser les s e r v i c e s , la fidélité, l’attention,
les soins de ma domestique T hè c le Mardelay , qui m’a servi un si
g r nul nombre d ’anné es, cl dont la conduite a toujours été i rrépro
chable; adorant Dieu et le servant du fond du c œu r, je lui d o n n e
cl lui lègue , par ce testament expression de ma volonté , une rente
�.
“
.
de six cents francs par an jusqu’à sa mo r t , à prendre sur le bien et
le revenu du domaine de L on ge v e r g n e . Faute de paiement de cent
écus tous les six m o i s , elle pourra faire arrêter et saisir, entre les
mains du fermier ou du propriétaire, le revenu de la f e rme , car
(elle est ma volonté qu’elle soit exactement payée tous les sjx mois,
à raison de cent écus.
1 20 Je lui donne de plus un lit de p l u m e , un traversin de plume,
un oreiller de p l u m e , deux paires de draps, l’un de toile fine et
l ’autre de toile commune , deux matelas, deux couvertures do
laine, quatre serviettes, le Crucifix qui se trouve à la tête de mou
l i t , au pied duquel je faisais mes prières , la timbale d’argent que je
lui ai donnée depuis l o n g - t e m p s , un c o u v e r t , cuiller et fourchette
en argent rayé, une petite cuiller à café aussi en argent, le NouveauTestament en français, l’imitation de Jésus-Christ, de la Sainte
V i e r g e , la ¡Méditation sur les Evangiles de toute l’a nné e, par
Médailles.
3
i ° Si ma domestique T h è cl e Mardelay veut se fixer et finir ses
jours dans ce p a y s - c i , à L on g e v e r g n e , je charge Jean Ro uch y de
lui donner un appartement dans le château ou dans la maison de la
voisine ; en lui payant régulièrement les six cents francs que je lui
donne après ma m o r t , cent écus tous les six mois, je le prie de ne
rien oublier pour lui rendre service tant qu’elle vivra, car je lui dois
beaucoup de reconnaissance pour m’avoir servi avec tant de soin
ol de fidélité. Je la prie de ne jamais m’oublier dans ses prières , et
de faire dire quatre messes par a n, une pour mon père André
Lav cr gne , une pour ma mère Jeanne A u r i a c , une pour ma sœur
Jeanne L a v c r g n e , cl une pour Antoine L a v c r g n e , ancien curé de
.Alainienon.
i,i"
d'Anglards
une somme de huit cents
1 Je donne à l’L<>lisc
O
O
francs pour acheter cl mettre au bas de l’église , sur le d e v a n t , dans
une place convenable, une h o r l o g e ;
on placera au-devant de
l'église , sur la porte , une grande plaque de cuivre sur laquelle on
gravera les mots suivants en grosses lettres :
�PASSANT,
U n c e r t a i n j o u r v ie n d r a q u ’à f o r c e de p a s s e r ,
S a n s m ém o t ’e n d o u t e r tu te v e r r a s p a s s e r .
A u pied de l ’E t c r n e l va d o n c te p r o s t e r n e r ,
D e m a n d e - l u i p a r d o n , n e cesse de p r i e r .
S eg n es, rum pe m o ra s, in me mora non erit a lla .
T h u s s p o k i the c l o k e a l n o o n B e fo r e the c h u r c h
O f A n g l a r d n e a r M a u r i a c in the y c a r d o n e
T ’ h o u r a n d ligtli h u n d r e d A n d fifly.
1850.
Je laissera celte somme de huit cents francs dans une malle de
mon cabinel qui ne pourra être ouverte que par ma domestique
T h c c l c M a r d e l a y, mon héritier, mon exécuteur testamentaire et
deux autres témoins.
5
i <> Je donne à la paroisse d’Anglards une somme de six mille
francs pour fonder et établir une école pour les enfants de la
commune. Celte somme sera piise sur les fonds que j'ai dans le
gouv er ne me nt , dans les cinq pour cent. M. Fer ri èr e-Laf îi lc , ban
quier à Paris, rue d’ Arlois , n° 16 , escomptera ces six mille francs
à la paroisse, en lui prouvant, par écrit et par des certificats du
maire de la paroisse, que j’ai donné ces six mille francs pour fonder
une école; il a les inscriptions entre scs mains et je les ai aussi dans
ma malle de mon cabincl , à L o n g e v e r g n e . L ’ instituteur de cette
école, avanl d’èire reçu, sera examiné par le maire , par M. le curé
cl par un habitant de la commune le plus Capable sur les différentes
branches de l’éducation qu’ il doit ensei gner, sur le latin surtout, à
cause du la proximité du collège de Mauriac , qui a donné tant de
bons sujets à l’Eglise , à l’Etat. On admettra dans cette école doux
�enfants tic Labastide, de Marsac et du P c i l , sans p a y e r , gratis. On
distribuera des prix à la fin de l’année; on dira toujours deux
messes, l’une au commencement et l’autre à la (in, pour Antoine
La ve rg ne .
16" Je donne à la paroisse d’Anglards la somme de cinq mille
francs pour établir ci fonder une école des jeunes petites filles de
la paroisse. Cette somme sera prise sur les fonds que j’ai dans les
cinq pour cent du gouvernement dont les inscriptions sont entre les
mains de M. Ferrièi e -Laf ii tt e, banquier à Pari s, rue d’Ar toi s,
a" »6 , qui paiera cette somme à la paroisse , en lui p r o u v a n t , par
des écrits et des certificats du maire et de la paroisse, que j’ai donné
à la c ommu ne , à ma m o r t , ces cinq mille francs pour fonder une
école de jeunes filles. Cette école prendra et portera le nom de
YE co le Lavergne. L'institutrice sera choisie par un comité c o m
pose de ¡NI. le curé , de M. le maire , de M. Salsac , de madame
v e u v e L cs cu r i c r - D c s p e r i è r c s , de madame Salsac et de madame
T h o u r y , qui l’examineront sur toutes les branches de l’éducation
qui peuvent rendre les femmes heureuses , bien élevées et utiles à
leur famille et à la société , savoir bien lire, bien é c r i r e , bien c a l
culer, bien travailler en linge, faire les robes, les chemises, les bas,
les mo uchoi rs, les coiffes, tricoter, filer, etc.
A mérite égal , on fera bien de préférer une religieuse, bien plus
propr e à inspirer la religion , la piété, la vertu, p a r l e u r modestie,
leur maintien , que les femmes du monde. P ou r encourager l’é m u
lation , on fera bien de donner des pi ix , de distribuer des livres ,
«l’exposer aux y e u x du public les ouvrages qui auront été travaillés
dans le courant de l’année par ces jeunes petites filles. Les parents
s empresseront d’aller admirer, encourager leurs enfants , leurs
s a ’ iirs. Le dimanche nie paraît un jour bien favorable pour celle
distribution. On admettra gratis et sans pay er quatre petites filles
île Labastide ; le choix en sera fait par madame L cscu ri cr -L at our ,
femme du maire. La rentrée de.cette école sera toujours précédée
d ’une messe p our m a n i è r e , Jeanne Auriac.
�—
9
—
 ff
i 7e Je donne à la paroisse d'Anglards la somme de quinze cents
francs pour acheter un cimetière dans un endroit bien situé et co m
m o d e , non loin de l’église , pour ions les habitants de la paroisse.
Si je n’ai pas p ay é à la paroisc ces quinze cents francs avant ma mort,
je charge Jean Ro uch y , mon héritier, de les pay er aussitôt que la
paroisse l’exigera , et il fera porter dans ce nouveau cimetière mes
dépouilles mortelles, dans un cercueil fait de planches de chêne ,
bien confectionné. O11 placera sur la lombe une pierre lumulaire
de six pieds et demi de l ong ue ur , sur quatre cl demi de largeur.
On gravera sur cette pierre lumulaire l’inscription sui vante, en
grosses lettres
:
« Ici repose Antoine L a v e r g n e , né à Labastide , celte paroisse ,
» ancien curé de Maintenon (département d’Eure-et -Loir) , Char» 1res en B e a u ce , émigré en 1791 en Angleterre pendant vingt-six
» ans, pour avoir refusé de prêter serment aux Cannibales de la
n l’évolution qui inondaient de sang tout Paris et ses environs , en
* 1 7 9 1. »
Priez Dieu pour lui.
Dom ine , m iserere m ei et ressuscita me.
Mors ullirna line a rcrum.
Ornnia sub iclu mois hubet.
iQ" Je supplie M. le Cur é d’Anglards de présider à toutes les
prières et cérémonies de mon enterrement, et d’ inviter quelques
('cclésiastiques du voisinage à m’accompagner "jusqu’à ma dernière
demeure. Le* propriétaire de L o n g c v er g ne est particulièrement
�----
I/*
10
yr
chargé et obligé de pay er toutes les dépenses de r eui errcment et
les honoraires de messieurs les ecclésiastiques qui assisteront a la
cérémonie. Je le charge particulièrement de les remercier et de
lui payer les dépenses qu’ ils feront pour le dîner.
20" Je laisserai, dans la malle de mon c abi ne t, la somme de cent
écus pour être distribués à tous les pauvres qui se présenteront à
mon enterrement.
21° Je donne à l'église d’Anglards la somme de cinquante francs
pour faire dire une annuelle de quarante messes par an pour le
repos de l’âme d’Antoine L a v e r g n e , ancien curé de Muintenon,
cette annuelle est fondée pour toujours et à perpétuité sur le bien
de L o n g e v e r g n e ; je désire que cette annuelle soit acquittée par un
prêtre natif de la paroisse, qui se trouverait sans place et sans oc cu
pation.
22« Ne voulant pas que mes meubles passent en des mains étran
gères pour être vendus ou brisés dans le t ransport , je les donne et
les laisse à Jean Ro uch y, pour meubler sa maison, mais sous la con
dition et l’obligation la plus stricte qu’ il payera pour leur p ar t, aux
Diernat, de Mauriac, mes ne ve ux , la somme de deux cents francs.
Aux enfants de Marie Ro u ch y veuve Alsac, deSarrettes
200
Aux enfants d’Antoine Ro uch y, de la Bastide
5oo
Aux enfants de Françoise Ro uch y, veuve Arnal, du V i gean , à partager entr’eux six
A Rose V al m i c r
3 oo
^00
A Jeanne Diernat, ma nièce, de Mauriac, ma soucoupe d’argnnt.
A Diernat l’aîné, mon n e ve u , ma montre d’Angleterre.
A Amable JuillardI, de Lampr e , l'histoire ancienne.
A Virginie Juillard, de L a m p r e , l'histoire de France.
�—
h
£ i< y
—
A M. le cure de Moussages , la Bible en fi ançais en quatre vol.
et la Bible en latin en un gros cl beau volume.
A Monsieur le curé de Saint-Simon L av e rg ne , l’Histoire Ecc lé
siastique en vingt-cinq beaux volumes.
35°
Je donne à l’Eglise
tous les
d’Anglards , tous
les
ornements ,
vases qui servent à décorer ma chapelle de L o n g e -
v e r g n e , comme calice , patenne , crucifix , pierre sacrée , devant
d’autel, dentelles, lavabos, purificatoires, co r po ra l, carions, vases
¿1 fleurs, missel, chasuble, étole , manipule, co rdon, aube et tous
les tableaux , excepté le sa cr é-cœu r de Jésus-Clirist portant sa
croix , le sacré c œu r de Marie qui appartiennent à T h è c l c Mardelay , ma domestique , en un mot je donne toute la chapelle ii l’é
glise d ’Anglards pour orner la chapelle de Saint-Antoinc mon
patron. Dans le cas où Ro uch y, mon légataire , voudrait conserver
la chapelle du château , je lui laisse cl lui donne tous les vases et
tous les ornements ci-dessus mentionnés , au lieu de les donner à
i ’église d’Anglards.
a4° Rien convaincu et tu’étant assuré m o i - m ê m e , par le séjour
de douze ans que j’ai fait dans le vallon à L ong eve rg ne , que les
habitants de la rivière , depuis Monibrun jusqu’aux O l d i è r e s , sont
plusieurs fois exposés à perdre la vie pendant les hivers qui sont
très-longs et très-r igour eux, pour aller assister aux ollices de l’é
glise d ’Anglards, qui est mortelle à cause de son aspect vers l’occi
dent , obligés de franchir les précipices les plus d a n g e r e u x , de
traverser des rivières souvent débordées et sans ponts, et les glaces
et les neiges amoncelées pendant plus de six mois de l’année.
5
a 0 Je donne aux habitants de la vallée, el surtout aux habitants
du village de Malepradc, village pauvre et sans ressource aucune ,
In somme de quinze mille francs pour fonder et établir une église ,
une succursale dans leur village , dans leur endroit. Celte s o m m e
sûrement bien placée ou même laissée dans les fonds du g ou v e r -
i
l
�L n e m e n t , dans les
~
~
1
2
~
cinq pour cenl , cette somme de quinze mille fr.
donnera tous les ans sept à huit cents francs, somme assez forte
pour commencer à bâtir l’é g l i s e , la maison du c u r é ; ou ne l o u
chera pas à la somme de quinze mille francs , on la conservera
pour payer les honoraires du desservant, chaque année , et dans
tous les cas, M e Ferrièrc-Laflillc , banquier à Paris , rue d ’Artois,
n°
j
6
, payera cette somme aux habitants de la Rivière en vendant
une partie des fonds que j’ai dans les (bnds du gouvernement, dans
les çinq pour cent, en lui pro uva nt , par des certificats du maire et
des habitants de la vallée, que je leur donne celte somme pour
bâtir une église et fonder une paroisse. Je recommande cette bonne
œ u v r e aux habitants les plus zélés pour la religion , les plus ha
biles , les plus distingués de l’endroit , cl surtout aux habitants du
village de Mnleprade. Je leur conseille de s’assembler, d’en déli
bér er el d’en écrire aussitôt après ma mort à Monseigneur l’eveque
et au ministre des culi es, pour obtenir leur consentement. Une
paroisse est de toute nécessité dans une vallée si profonde el si
périlleuse; elle fera le bonheur des familles, de leurs enfants qui
pourront être instruits, enseignés par leur propre curé au lieu de
les e nv o y e r dans des paroisses éloignées , perdre leur temps , leur
vie à travers les r ivi ères, les r oc he rs, les bois, les montagnes; les
vieillards, les malades, les femmes enceintes devront leur vie et
leur salut à une si belle fondation.
26® On donnera à celle église le nom de la paroisse de Lorigev er gne ; on fera tous les ans , le jour de Saint-André , patron de
mon père André L a v e r g n e , 1111 service pour le repos de son â me,
cl je désire que celte église ail pour patron saint Antoine.
27° Après avoir payé six mille francs pour l’école des garçons
cl cinq mille francs pour l’école des petites (illcs, et quinze mille
francs pour fonder une église dans le vallon à Maleprade, je donne
encore à l’église, à Ja paroisse d’Anglards , une somme de six mille
francs à prendre sur une somme de quarante mille francs et plus
que j’ai dans les cinq pour cent du g o u v e rn em en t , afin de fonder
�-
.3
-
X //
une aumône annuelle pour les pauvres de la p ar oisse, qui sera dis
tribuée le 17 janvier, jour de saint Antoine , chaque année. Cette
somme bien placée donnera cent écus par an. Les inscriptions de
cette somme de quarante mille francs sont entre les mains de M.
Ferrièrc-Lafliic , qui escomptera cette somme en vendant mes
fonds. Je recommande cette amnone particulièrement aux âmes
charitables qui aiment les pauvres.
11 sera
facile de p ro uve r à M.
Ferrière-Lafiite que j'ai fait toutes ces donations en lui faisant part
et lui communiquant mon testament olographe qui sera entre les
mains de mon héritier ou de mon exécuteur testamentaire; on fera
bien d’écrire à M. F e r r i è r c - L a n i t e , banquier à Paris, le plus tôt
possible après ma mort.
28° Je donne aux D i e r na t , de Ma ur iac , deux couverts d’ argent
rayés et une cuiller à café rayée. Je donne à Rose V a l m i e r , deux
couverts d’argent, l’un rayé et l’autre uni, avec une cuiller à café
unie.
Je donne à Virginie Juillard, de L a m p r e , deux couverts d’a r
gent , l’un rayé et l’autre uni, avec une cuiller à café unie.
Je donne à Marie Alsac , de Sar rett es, femme Juillard , deux
couverts d’argent unis.
Je donne à M. le curé.de Moussages , un couvert d’argent rayé
et une cuiller à café, aussi d’argent rayé.
Je donne à M. le curé de Saint-Sirnon-Lavergne , un couvert
d ’argent rayé et une petite cuiller d’argent , aussi ray ce.
2f)° Je donne et l è g u e , par ce testament, aux enfants d ’Antoine
Bergeron , natif de ttouleirac cette commune , mon filleul , jadis
fermier de Madame l’ uyraimon de C h am ei ra c , la somme de cent
écus une fois payée, ('elle somme leur sera payée uti an après ma
m o r t , par Jean Uouc hy , héritier du domaine de Longe ve rgne .
5 o“ Si à ma
mort, le fermier de L o ng e vergue et celui de Labas-
tide n’ont pas entièrement payé la ferme des années précédentes et
�— »4 s’ils sont en r e s t e , je donne ce reste au (ils aîné de J u i l l a r d , de
Sarrctlcs, pour continuer son éducation et faire scs classes à Mauriac.
5 i # Les
deux malles qui se trouvent dans le cabinet de ma cham
bre ne pourront être ouvertes que par T hé c le Mardelay , ma d o
mestique , cl par deux témoins à son choix.
32 * Je
prie les personnes auxquelles je pourrais confier mon
testament olographe , d’écrire aussitôt aprcs ma m o r t , à Jean Ro u
ch y , cordonnier à Rouen, en Normandie, mon héritier , de se p r é
senter sans délai pour prendre connaissance et copie du testamenf,
afin de p ouvoi r régler scs affaires et remplir les obligations a ux
quelles il aura à répondre ; il sera e n c o re , de toute nécessité,
d’avertir par un mot do lettre les autres donataires qui auront
quelque chose à réclamer dans ce testament.
55 °
Je prie M. le Maire d’A n gl a r d s , d ’e nv o ye r aussitôt api es
ma m o r t , une personne sûre ou un garde pour veiller et empêcher
que personne »’entre dans la maison , dans le château, avant l’a r
rivée de Jean Ro u ch y ou de quelqu’ un e nvo yé de sa part et autorisé
par lui.
54 ’ Je
donne à Jean Rouchy , la somme de deux mille francs à
prendre sur les fonds du g o u v e r n e m e n t , dans les cinq pour cent,
pour payer les honoraires de mon enterrement et les droits de mort.
Ne sachant pas ce qui me restera , ce qui me sera encore dù de ces
fonds à ma mort, j’en donne la moitié de ce restant aux deux petites
filles d'Antoine Ro u ch y , de Lab asi ide , cl l’autre moitié aux deux
premiers enfants de Juillard, de Sar rct lcs, pour leur donner de
l'éducation.
Je nomme pour exécuteur de mor. testament olographe , M.
l ’ éricr, notaire à M e al lc t , canton de Mauriac ; je ne doute pas q u ’il
ne fasse bien et fidèlement exécuter mes dernières volontés expri-
�— i5 —
niées dans ce testament ol ographe; j’ai la plus grande confiance en
sa probité et son honneur; je charge J e a n R o u c h y , mon héritier, de
lui ofi'rir, de lui donner la somme de quatre cents francs , pour h:
remercier de ses peines cl de scs bons conseils cl de lui prouver sa
rcconnoissance dans lous les temps el dans toutes les occasions.
Apres avoir pris de la somme de quarante mille (runes et plus,
que j’ai dans les fonds du gouvenement , dans les cinq pour cent,
dont les inscriptions sout entre les mains de M. F cr ri èr e-L af ne ,
banquier à Paris, rue d’ Artois, n° i G , el cnire les miennes dans une
malle de mon cabinet, savoir : six mille francs pour une école de
garç ons, cinq mille francs pour une école de petiles filles d ’Anglards , six mille francs pour fonder une aumône annuelle pour les
pauvres , deux mille francs pour payer les droits d’enterrement et
de mort, quinze mille francs pour fonder une paroisse dans le vallon
à Muleprade ; total : trenic-quaire mille francs.
Je donne encore aux habitants de Malepradc du Vallon , quatre
mille francs de plus , à prendre sur le restant de la somme de q u a
rante mille francs de mes fonds, soit pour continuer à bâtir l’église,
soit pour fonder deux; écoles ; j’engage les habitants de la vallée à
établir le plus promptement possible la paroisse; afin de s’assurer
les fonds que je leur donne , je leur conseille de s’assembler , d’en
délibérer et de confier celte bonne œuvr e aux habitants les plus
remarquables , les plus habiles et les plus zélés pour la religion ; je
la recommande surtout aux habitants de Maleprade , bien certain
qu’elle fera leur bonheur , surtout si la route venait à passer dans
leur e n d r o i t , je le désire de toute mon âme pour leur intérêt.
Apres avoir pris trente-huit mille francs de la somme de quarante
mille francs que j’ai dans les fonds du gouvernement pour remplir
plusieurs legs mentionnés dans ce testament ; je donne la moitié de
«•c restant au fils aîné de Juillard, de Saretle, pour continuer scs
études , et l’autre moitié de ce restant aux deux filles aînées du
Jean Arnal , du Vigean , telles sont mes volontés.
�—
i6
—
Fait, écrit et signe de ma main, le dix août mil huit cent quarante
cinq— Signé Antoine L a v e r g u e , ancien curé de Mainte non ,
canton Chartres , à L o n g e ve r gn e , commune d’Anglards , canton
de Salers, le dix août mil huit cent quarante cinq.
R I O M. — A . J O U V E T , l m p r i n e u r - l i b r a i r e p r è s l e P a lais.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Testament. Lavergne, Antoine.1845?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
A. Lavergne
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
legs
prêtres
Description
An account of the resource
Titre complet : Testament de monsieur Antoine Lavergne, ancien curé de Maintenon. 10 août 1845.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3016
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3017
BCU_Factums_G3018
BCU_Factums_G3019
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53633/BCU_Factums_G3016.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
legs
prêtres
prêtres réfractaires
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53505/BCU_Factums_G2519.pdf
d745023ace7cb673eff5d2456984529d
PDF Text
Text
MEMOIRE
COUR R OY AL E
DE RIOM.
POUR
Ire CHAMBRE.
L e Sieur Jean-M artin R O C H E R , Négociant, habitant
de la V ille de Tence, arrondissement d ’Issingeaux,
en qualité de subrogé-tuteur de J e a n - P i e r r e
P eyrachon, fils mineur, habitant de la même Ville,
A ppelant
CONTRE
D am e M a r i e - G e n e v i è v e P E Y R A C I I O N
et M onsieur J e a n - A n t o i n e
O L L I N , Juge
M
au Tribunal civil d 'Issingeaux , son m ari, de lu i
autorisée, habitansde la F ille d T s s in g e a u x , intimés;
E t C O N T R E Sieur J e a n - P i err e P E Y R A C H O N
Rentier, habitant en l a ville de T ence, aussi intimé.
,
D a n s tous les tems et chez presque tous les peuples
policés, les lois ont accordé aux pères la faculté de
disposer d’ une partie de leurs biens.
�Cette faculté,
trop étendue peut-être parmi les
Romains, et que des idées bizarres avaient réduite à
rien parmi nous, à une époque où les exagérations
dictaient les lo is , cette faculté précieuse a été sage
ment réglée par notre législation nouvelle.
Le Code civil présente, il semble, la combinaison
la plus juste du droit de disposer, qui est une éma
nation du droit de propriété, avec les devoirs que la
nature impose aux pères envers leurs enfans.
E n fixant
tiers, ou au
enfans, nos
passions, ou
la quotité disponible à la m o itié , au
quart des biens, selon le nombre des
législateurs ont prévenu les écarts des
les erreurs de la faiblesse, en même tems
q u ’ils ont laissé une carrière assez grande à la recon
naissance, aux affections et aux sentimens généreux.
Les tribunaux ne sauraient trop respecter ces règles
bienfaisantes q u ’ont préparées de profondes médita
tions; et s’ils doivent être attentifs à empêcher que
les réserves destinées aux enfans ne reçoivent quelque
atteinte, ils ne doivent pas être moins empressés à
consacrer les dispositions des pères qui ont employé
d abord une partie de l e u r p a t r i m o i n e à payer la dette
de la nature.
Ainsi l ’enfant qui a reçu de son père un don con
sidérable pour sa portion héréditaire, 11e saurait être
admis à critiquer des libéralités postérieures, ou doit
au moins imputer, sur la réserve q u ’il r é c l a m e , l'avan
cement d ’hoirie qui lui a été fait.
Cette vérité, élémentaire en droit, a cependant été
�. ( 3 )
méconnue par le tribunal d ’Issingeaux. Confondant
les principes des rapports avec ceux de l ’im putation,
et sous le prétexte que le rapport n Jétait pas dû au
légataire, ce tribunal a pensé que l ’héritier, donataire
d ’un avancement d’hoirie, avait le double droit et de
conserver le don, et de réclamer en outre la réserve
par la voie du retranchement , contre un légataire
universel.
Une telle erreur, qui tendrait à détruire la faculté
de disposer, est trop contraire à la doctrine ancienne,
à la doctrine nouvelle, à l’esprit, et même à la lettre
de la loi considérée dans son ensemble, pour soutenir
long-tems les regards éclairés des magistrats d ’une Cour
supérieure.
F A IT S.
L a contestation est née sur une demande en partage
de la succession du sieur Jean-Pierre Peyrachon.
L e sieur Peyrachon a laissé, à son décès, deux enfans, Marie-Geneviève Peyrachon, épouse d eM .M ollin ,
et Jean-Pierre Peyrachon, deuxième du nom.
L e contrat de mariage de Marie-Geneviève Peyrachon
et de M. Mollin est en date du 12 floréal an i 3 .
Pa i' ce contrat, passé sous l ’empire du Code civil,
le père de la future lui constitua une dot considérable,
q u i, d’après l ’intention des parties, devait lui tenir
lieu de scs droits dans la succession de sa mère, dans
celle d ’un frère nommé Augustin, et dans les biens
paternels.
�( 4 )
Voici les termes de la constitution :
« Ledit sieur Jean-Pierre Peyrachon donne et cons
titue à la demoiselle Marie-Geneviève Peyrachon ,
sa fille, en dot, la somme de cinquante mille francs,
dont deux mille francs du chef de ladite Rocher (la
mère, alors décédée); le surplus, du chef paternel,
dont v in g t-cin q
mille francs seront payables en
dettes ou obligations, à réquisition, et d ’après l ’état
à faire entre les parties; et les autres vingt-cinq
mille francs seront payables en fo n d s ou argent ,
p ar q u i cle d roit, après le décès dudit donateur ,
et sans intérêt, et même p a r a n t i c i p a t i o n , en tout
ou en partie. »
Plus bas est ajoutée la clause suivante :
« Déclarant ladite future q u e , dans ladite consti« tution maternelle, qui est mobilière, sont fixés et
« compris les droits qui peuvent lui revenir du chef
« d ’Augustin Peyrachon, son frère, qui se portent à
« 5oo fr. pour le tiers
et ( j uel le renonce à ses droits
« légitimaires paternels et maternels. »
Ces dernières expressions sont claires; Marie-Geneviève Peyrachon renonçait, moyennant la dot promise,
à scs droits le'gitimaires paternels. O r , depuis la
publication
du Code civil ,
les droits légitirnaires
n ’étaient autre chose que les droits à la réserve légale
établie par l’article c) 1 3 , réserve qui remplaçait la
légitime ancienne.
A insi, que la renonciation fût ou non valable, il est
évident q u e , renoncer à de tels d ro its, c’était rocou-
�(
5
)
naître que la dot avait été donnée et reçue à compte
seulement de la réserve, et à imputer sur la portion
qui reviendrait à l ’épouse dans cette réserve, si elle la
réclamait un jour.
Cependant Marie-Genevière Peyraehon a soutenu
dans la suite q u ’elle pouvait, et retenir sa d o t, et
réclamer, en outre, le tiers des biens que son père
avait laissés au moment de son décès ; et cette pré
tention j repoussée par la volonté du père comme par
les dispositions de la lo i, a cependant été accueillie
par le tribunal d’ïssingeaux.
Il parait que la dot entière avait été payée par le
père; que même il avait délaissé, pour 12,000 francs
seulement, un domaine appelé de Naute , dont la
valeur réelle est de 24?000 francs.
Convaincu d’avoir donné à sa fille plus même que
la loi ne lui attribuait dans son patrimoine, le sieur
Peyraehon père crut pouvoir exercer des libéralités
envers celui de ses petits-fils qui s’était montré le plus
digne de son aflection.
Il consigna ses volontés dans un testament olographe
du 3 o mars 1819.
x
Le testateur fait d ’abord quelques legs pieux;
Il lègue* ensuite à Jean-Pierre Peyraehon , son fils
aine, un domaine, un pré et un bois, p ou r lu i tenir
lieu , d it-il, du tiers de mes biens r/iic la lo i lu i accorde ;
Enfin il lait nu legs universel en faveur de JeanPierre-Auguslin Peyraehon, son petit-fils. Voici les
termes de la disposition :
�(
6
)
« E t au surplus de tous mes autres biens meubles
« et immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les donne en préciput et avantage, et hors part
« et portion, et sans rapport, à Jean-Pierre-Augustin
« Peyrachon, mon petit-fils, l’ainé de mondit fils et
« de la défunte demoiselle D e ig n a t, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes biens que je lui
« donne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu au
« présent testament, et de payer mes dettes. »
L e sieur Peyrachon déclare, dans son testam ent,
que son intention a été de prévenir les procès entre
ses enfans.
On verra combien peu ont été respectées les der
nières volontés d ’un père.
L e sieur Peyrachon décède. Bientôt après, M. Mollin
et son épouse forment contre leur frère une demande
en partage ; e t , comme le légataire était un mineur
non émancipé, et q u ’il avait des intérêts contraires à
ceux de son tuteur légal, ils l ’assignent dans la personne
de son subrogé-tuteur, en réduction du legs universel
qui lui avait été fuit.
Ils appellent aussi dans la cause le vicaire de Tence,
q u ’ils accusent de spoliation, et multiplient les procé
dures par de nombreuses saisies-arrêts, destinées, si
on les en croit, à faire connaître les vraies forces de la
succession du père.
Sans entier dans le détail de ces diverses procédures,
il suffira de dire que la cause fut jugée contradictoire
ment ti l ’audience du 7 juin 189.0.
�(
7
)
L à , M. Mollin et son épouse conclurent au partage
des biens dont le sieur Peyrachon père était en posses
sion au moment de son décès ; ils demandèrent que le
tiers de ces biens leur fût a ttrib u é , et q u ’en consé
quence le legs universel fut réduit. Ils soutinrent q u e ,
dans le tiers auquel ils avaient droit, ne devaient être
compris ni les 48,000 fr. de dot que le père leur avait
donnés, ni le domaine de N au te, qui leur avait été
délaissé h vil prix.
Le sieur Jean-Pierre Peyrachon fils conclut aussi au
partage 5 mais il réclama seulement le tiers du patri
moine de son p ère, patrimoine sur lequel il n’avait
rien reçu.
Le subrogé-tuteur du légataire soutint que la réduc
tion du legs universel ne pouvait être demandée par la
dame et le sieur M o llin , qu'autant que ce qui leur
avait été donné serait insuffisant pour leurs droits
dans la réserve légale, et q u e , pour vérifier ce fa it,
il fallait réunir fictivement aux biens existans au décès
du testateu r, ceux que ses héritiers avaient reçus
pendant sa vie.
Il fut pris de part et d ’autre divers autres chefs de
conclusions qui sont étrangers à la discussion actuelle.
L e tribunal adopta le système que lui présentait la
daine M o l l i n ? refusa, pour déterminer la réduction
du legs universel, de réunir fictivement les biens
donnés à la masse des biens existans au décès du tes
tateur, et ordonna que ce legs serait réduit au tiers
seulement des biens existans.
�f k
l
( g }
Cependant la dame Mollin fut soumise, envers son
frère, au rapport des 48>ooo francs qui lui avaient
été constitués ; mais on ne l ’obligea pas à rapporter
le domaine de Naute. L ’estimation de ce domaine fut
néanmoins ordonnée, mais dans le but unique de
diminuer encore le legs fait au petit-iils Peyrachon^
de toute la plus-value q u ’aurait le domaine au-dessus
de 12,000 francs ( i) .
( i ) Voici lo texte du jugement sur la question :
E n c e q u i t o u c h e la d e m a n d e e n p a r t a g e f o r m é e p a r les é p o u x M o l l i n ,
A ttend u que nul ne peut ôtre contraint de demeurer dans l ’indivi
sion ; que dès-lors un cohéritier a droit de forcer son cohéritier, ou
tout autre détenteur des biens de la succession , à quelque titre que ce
çoit, de venir à partage de ces mêmes Liens;
Attendu que Jean-Pierre Pcyrachon père n’a fait aucun acte duquel
011 puisse tirer la conséquence, qu ’ il a abandonne la succession pater
n e lle , pour s’en tenir an legs qui lui avait été fait par son père; qu ’ une
semblable option ne peut résulter que d’ un acte fôrmel fait au greffe
ilu tribunal ; qu ’on n’en produit aucun de cette’ espèce ;
A ttendu que les cohéritiers du sieur Jcan-Picrre P cyra ch on , voulant
procéder à la division des biens délaissés par c e lu i - c i , ont dû y appeler
Jean-Picrrc-Augustin Pcyrachon , son légataire; qu'il est impossible de
procéder au partage d ’ u n e B u c c e s s io n hors la p r é s e n c e d ’ une personno
intéressée à cc partage.
E n cc qui touche le rapport, à la masse de la somme des q u arantehuit mille francs donnés à la daine M o llin , réclame par le mineur
Pcyrachon ,
Attendu que des dispositipns du Code c i v i l , il îésnlle que le rapport
¡est nue obligation imposée par la loi à l’héritier, du remettre dans Ifi
succession les choses q u ’ il a reçues entre-vifs directement ou indirocjuent, de la part du défun t, pour ¿tic partagées entre tons les héritiers;
A t t e n d u q ue cette o b l i g a t i o n
,
fondée sur
1«
présomption q u e le don
�(
9
)
L e principal motif de la décision est puisé dans une
fausse application des règles sur les rapports, notam
ment de celle qui déclare que le rapport n’est dû q u ’au
n ’avait été fait à l ’héritier, qu’à titre d ’avance sur ce qu’ il devait re
cueillir dans la succession, a pour principal objet de rétablir entre tous
les héritiers l ’égalité qui est dans le vœu de la loi ;
Attendu que cette vérité résulte de l ’article
843 , qui déclare que
tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rap
porter à ses cohéritiers tout ce qu’ il a reçu du défunt par donation
en tre-v ifs, directement ou indirectem ent, à moins qu ’ il lia it été e x
pressément dispensé du rapport;
Attendu que de ce principe constant et bien reco nnu , il suit qu ’ il
n’y a que le cohéritier qui puisse demander à son cohéritier le rapport
du don entre-vifs qu ’ il avait reçu du d é fu n t, puisque lui s e u l a droit à
la faveur de la loi et au maintien de l ’égalité; que cette conclusion est
encore corroborée par les dispositions claires, précises et formelles de
l ’article
85^ du Code c iv il, ainsi conçu ; « L e rapport n’est dii que
ic par le cohéritier ci son cohéritier ; il n'est pas du ni a u x légataires
« ni a u x créanciers de la succession ». E t la Cour suprême a consacré
ce principe par son arrêt du
3o décembre 1 8 1 6 , dans la cause entre les
frères Davier et les sieurs Villeniorc et L e c l c r c , rapporté par S ire y ,
tome 17 , pages i 53 et suivantes.
Attendu , en f a i t , que le mineur Peyrachon n’est pas le cohéritier de
la dame Mollin ; qu ’il est étranger à la succession , dans laquelle il ne
recueille que ce qui lui a été transmis par la libéralité de son grandpère ; q u ’ il ne peut dès-lors invoquer le bienfait d ’ une loi qui n’a
d ’a u tre
objet que de rétablir l’égalité parmi les cohéritiers du sang.|
Q u a n t à la d e m a n d e e u r ap p o r t d e c e t t e s o m m e ,
f or mée p a r le sieur
P e y r a c h o n pè r o ,
A ttendu qu ’ il est le cohéritier de la dame M o llin , et qu ’en celle
qualité il peut exiger le rapport du don entre-vifs qui lui a été tait
par l’uutcur commun ; que tel est le vœu des articles 843 et
Code civil.
857 du
�(
10
)
*
cohéritier, et qu ’il n ’est pas (lu aux légataires ni aux
créanciers de la succession.
Le tribunal n’a pjis réfléchi q u ’il ne s’agissait pas
En ce qui touche la réclamation de Jean-Pierre P eyra ch o n , tendant
au rapport à la masse du domaine de la Naute,
Attendu q u e , lors du contrat de mariage de la dame Mollin , le père
de celle-ci ne lui constitua qu ’ une dot de la somme de cinquante mille
francs; qu ’à la vérité, il se réserva, ou à scs héritiers, la faculté de
payer la moitié de celte dot en fonds ou en argent ;
Attendu que de la réserve de cette faculté, 011 ne peut induire
que les biens qui seraient donnés en paiement seraient dotaux, parce
qu il résulterait de cette induction , que la nature de la dot de la daine
M ollin n’aurait pas été certaine, et qu'elle aurait pu varier au gré de
son père ou des héritiers de c e lu i- c i, ce qui répugne au caractère de la
dot , qui d )it être déterminée par le contrat de maiiage ;
Attendu que toute interprétation doit disparaître devant les termes
môme de l ’acle dans lequel on lit que ledit Jean-Pierre Peyrachon
donne et constitue en dot à sa fille la.som me de cinquante mille fra n cs ;
q u e , par ces expressions, la nature et le caractère île la dot sont fixés
d ’ une manière absolue; q u ’on ne peut y apercevoir qu’ une dot mobi
lière; que si h: constituant s’est réservé le droit (le payer une partie de
cette dot eu immeubles, c ’est une condition qu ’ il a imposée à son
g e n l t e , et a laquelle celui-ci a acquiescé; q u ’ il serait difficile de con
cevoir l’exécution de cette clause entre le sieur Peyrachon père et sa
fille, puisque, dès 1 instant où le inanpge était accom p li, elle nVtait
plus habile à recevoir do ses mains les fonds qu’il aurait voulu lui
donner en paiement ;
A t t e n d u q u ’on 11e p e u t v o i r d a n s c c l t o c la u s e q u e la f n cul l é d e p a y e r
a ve c des i m m e u b l e s u n e d ot m o b i l i è r e ; q u e si tel est le v é r i t a b l e p o i n t
d e v u e sous l eq u e l on d o i t la c o n s i d é r e r ,
il s ' ens u i t q u« l ’ i m m e u b l e q u i
a ét é d o n n é en p a i e m e n t d e la s o m m e d e d o u z e m i l l e francs n ’est pas
d o t a l , d ’après
1rs
di s posi t i ons d u p a r a g r a p h e 2 d e l ’a r t i c l e
1 553 d u
C o d e c i vi l ;
A tleu du que la vérité de cette proposition acquiert un nouveau degré
�de juger une question de rapport, mais une question
de réduction; que le légataire n ’était pas demandeur
en rapport, mais défendeur en réduction; et q u ’il
d'évidence, par le mode d ’exécution de cette clause, entre les paities
qui l ’avaient consentie. Il n’est pas contesté que le sieur Peyraclion
père ait remis et cédé à son gendre la propriété du domaine de la
N a ute, en paiement de la somme de 12,000 francs qu’ il lui devait pour
payer la totalité de la dot qu’ il avait constituée à sa fille ; le père
Peyraclion avait donc entendu que la dot de sa fille était constituée en
a rg en t, mais qu ’il avait la faculté d’en payer une partie en immeubles ;
le mari l ’avait entendu de m êm e; ils ont exécuté l’ un et l ’autre cette
c onvention, dans le sens qu’elle présente naturellem ent, et de la ma
nière qu ’ils l ’avaient composée l'un et l’autre; et peut-il y avoir une
règle plus contractante dans le inoilo de sou exécution?
A ttendu néanmoins qu ’il est soutenu que la valeur du domaine de la
Piaule s’élève à la somme de 24,000 fr. , tandis que cet immeuble a été
cédé à M. Molli» , pour acquitter une somme de 12,000 fr. ;
Attendu q u e , s’il était vrai que cet immeuble fût réellement de la
valeur de s j ' 000 fr. , ou de toute autre supérieure valeur de celle de
12,000 f r . , il s’en suivrait que le père Peyraclion aurait exercé envers
M . Mollin une libéralité qui excéderait le montant du paiement qu ’ il
a voulu faire, libéralité qui aurait réduit d’ autant la faculté que lui
accordait la loi de disposer d’ une partie de ses biens;
Attendu que , pour déterminer si le sieur Peyraclion , de la succession
duquel il s’agit, n ’a pas dépassé les limites que la loi lui avait assignées,
il est important de connaître la valeur du domaine de la Mutile........
I->e t r i b u n a l .............................. o r d o n n e q u e , jinrJVIiW. P a n e l i e r , d u l i e u
d e P a n e l i e r , c o m m u n e d e S a i n t - V o y ; M a t h i e u a î n é , d e la v i l l e d e l i a s ,
e t Jîreiias, île lu v i l l e d ' I> s i ng e a u x , e x p e r t s - gé o n i èl r e s ......... , il sera p r o
c é d é à la visite e t e s t i ma t i on des i m m e u b l e s délaissés p a r d é f u n t J e a n P i e r r e P e y r a c l i o n , en c e non c o m p r i s le d o m a i n e d e l a f t a u t e , céilé
p a r ce d e r n i e r à M. Mollin , en p a i e m e n t d e l a somme d e 12,000 f r an c s ,
pour savoir si lesdits immeubles , dont ils ser ont t e nu s d e r a p po r t e r
�( 13 ;
n ’exigeait pas un rapport réel pour prendre une partie
de la chose donnée, mais seulement une réunion fictiv e
pour juger si l’héritier à réserve avait déjà reçu tout
ce que la loi lui assurait.
L e subrogé-tuteur du légataire a interjeté appel
d ’un jugement par lequel les droits de son pupille
étaient sacrifiés.
L ’appel a été dirigé contre les deux héritiers à réserve.
L a Cour aura à examiner si ces héritiers, auxquels
il n’a pas été fait de don en précip ut, ont le droit
de faire réduire un legs, pour obtenir plus des deux
tiers du patrimoine de leur père, quoique cette quotité
seule leur soit attribuée par la loi.
l ’é t a t , consistance et v a l e u r , peuvent sc partager commodément en
portions égales, sinon avec soulte ; e t, dans le cas où la division puisse
avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux , pour en être a ttr ib u é , par
la voie du sort, et par-devant le juge-commissaire, un à chacun des
copartageans , M arie -G cn evièv e , Jean-Pierre et Jean-Pierre-Augustin
Peyrnclion , légataire. Lcsdits experts seront tenus de présenter les l>nses
de 1 estimation, et d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits
biens , depuis le décès du père Peyraolion ;
Déclaré n y avoir lieu d’accorder a n l é g a t a i r e le rapport à la masse de
la somme de .(8,000 fr. , payée par ledit défunt Peyrachon à la dame
Mollin , sa fille ; ordonne que cette somme sera rapportée à l’égard de
Jean-Pierre Peyraclion, cohéritier;
Déclare ce dernier non recevablc dans sa demande en rapport à la
masse du domaine de la K a u l c , cédé par le défunt à M. Mollin , pour
compléter la dot qu’ il avait constituée h sa fille ; ordonne nussi q u e , par
les mêmes experts, ¡1 sera procédé à l'estimation de lu valeur de ce do
maine, a dater du jour de la remise qui en a été faite à M. M ollin, p ou r,
sur leur rap p ort, élrc statué co qu ’ il appartiendra........
�( ,3 )
A consulter seulement les principes, la négative de
cette proposition ne paraîtra pas douteuse.
Si l ’on considère aussi les termes de la constitution
dotale faite à la dame M o llin , on sera de plus en plus
étonné de son succès en première instance.
Les principes anciens et nouveaux sont en harmonie
parfaite sur la question.
On sait que la réserve légale est aujourd’hui ce
q u ’était la légitime autrefois. L ’une et l ’autre ont les
mêmes caractères, sont fondées sur les mêmes m otifs,
ont reçu de la loi la même destination.
L a réserve légale, comme la légitime, est une portion
du patrimoine du père, que la loi attribue aux enfans,
et dont il ne lui est pas permis de les dépouiller.
La réserve légale, comme la légitime, est une dette
du père, destinée à fournir des alimens aux enfans.
L a réserve légale, comme la légitime, n’admot ni
mode, ni terme, ni conditions.
Elles ne diffèrent entr’elles que par le nom et par
la quotité.
Aussi vo it-o n , dans les discours des législateurs,
que la réserve légale a été établie à l ’image des légi
times fixées soit par le droit romain, soit par la
coutume de Paris; que les discussions ont roulé seule
ment sur sa q u o tité ; et que le Code civil a adopté,
sauf quelques modifications, la quote légilimaire réglée
par la coutume de Paris, qui avait mis une balance
�( 4 )
plus égale entre le droit de propriété et les devoirs de
famille (i).
Aussi remarque-t-on , dans les procès-verbaux du
conseil d ’E t a t , relatifs à la rédaction du Code civil.,
que la réserve légale est appelée légitime (2).
S ’il y a identité de cause et de nature entre la
légitime d ’autrefois et la réserve légale actuelle, ce qui
a été reconnu vrai dans la législation ancienne, relati
vement à la légitime, doit être appliqué, sous la
législation nouvelle,
C Jest en effet un
les cas semblables, il
In casibus omissis 3
à la réserve légale.
aphorisme de d ro it, q u e , dans
doit y avoir semblable décision.
deducenda est norma legis à
sim ilibus. (B a co n , aph. 115 D u p in , Principia ju r is
civilis prolegomena.')
O r , si nous examinrvis les principes anciens, on
reconnaîtra que l ’eufant légitimaire, quoique dispensé
du rapport envers 1111 étranger, était cependant tenu,
même à l’égard de celui-ci, d ’imputer sur sa légitime
ce q u ’il avait reçu précédemment de la libéralité de
son père.
La décision devait être différente dans les deux cas,
parce que les règles sur les rapports, et celles sur
( 1 ) V o y e z l’arliclo
do c c l l o coultunc.
(a) N ota. O u lit notam m ent, dans le procès-verbal do la séance du
rj pluviôse an 1 1 , ces oxpressions :
« JjO conseil d l'-tal adopte en p r in c ip e , cpie l(i Icgitimc ne pourra
(t être iïappéo ilo substitution. *
�l ’im putation, appartenaient à deux ordres distincts
d ’idées et de principes.
Les règles sur les rapports avaient leur fondement
sur l ’égalité naturelle des enfans dans la succession de
leurs ascendans (i).
Ut liberis tum m asculini quam fe m in i seæûs...........
cequd la n ce, p a n que modo prospici possit : hoc
etiam œquitatis studio, pressenti legi credidim us inserendum , ut in dividendis rebus ab
functoriun parentum ,
intestato de-
tcim dos r/ucim antè nuptias
donatio confcraiur. L . 1 7 , C . de C ollât.
Si le m otif d’équité qui avait dicté la règle ne se
rencontrait pas, le rapport n ’avait pas lieu.
Ainsi le rapport n’était dû q u ’entre enfans cohéri
tiers, et h ceux-là seulement qui avaient ces deux
qualités (?.).
Tous les auteurs anciens s’accordent à professer cette
doctrine, et à reconnaître que le rapport n’est dû ni
aux légataires ni aux créanciers de la succession.
Les règles sur l ’imputation n ’étaient pas les mêmes.
L ’imputation pouvait être exigée par un donataire
ou légataire étranger, toutes les fois q u ’un légitimaire,
qui avait déjà reçu du défunt une libéralité, deman
dait, pour obtenir sa légitime, le retranchement du
don ou du legs fait à l’étranger.
(1) Voyez D om at, Lois civiles , titre (lit rapport, scct. 1 " , art. i tr!.
(a) Voyez D o m a t , Lois civiles, i l i d } scct. 1 , ait, 1 , 3. -
�Cette règle était la conséquence d ’un autre principe
qui n’autorisait l ’enfant à quereller les dispositions
faites par son père, q u ’autant que la dette de la nature
ne lui avait pas été p a yé e, et q u ’il était privé de tout
ou de partie de sa légitime.
In quartam parlent a d excludendam inojficiosi
(juœrelanij tant dotem quàm antè nuptias donationem
prœfato modo volum us im putari, siexsub sta n tid ejus
p rofecta sit de cu ju s hœreditate agitur ( L . 29, C . de
inojf. testant.
Tous les auteurs s’accordent aussi à décider que
l ’enfant doit imputer sur sa légitime ce q u ’il a reçu
du père, à moins q u ’il n’en ait été expressément dis
pensé par celui-ci.
U n grand nombre, et des plus recommandables ,
examinent la question même qui a été jugée dans la
cause; et leur décision est absolument contraire à celle
du tribunal d ’Issingeaux.
Dumoulin la résout dans une courte note sur les
articles 10 et 11 du chapitre 27 de la Coutum e du
Nivernais.
L article 10 pose le principe du rapport des dons à
la succession.
L ’article 11 établit deux exceptions : l ’une quand
l’enfant donataire renonce à la succession ; l ’autre
quand le don lui est fait en préciput.
Sur cette dernière exception , Dumoulin fait observer
que, dans le cas prévu, l’enfant même, en se portant
héritier, n’est pas tenu de rapporter : i)uia tune
�(
'7 )
succedenclo non lenetur conferre. Mais il ajoute
aussitôt que l ’exception disparaît, c’est-k-dire, que le
rapport est d û , si la légitime des autres enfans est
atteinte, et si l ’enfant donataire réclame lui-méme sa
légitim e, par la voie du retranchement sur une dona
tion ou sur un legs. F a lh t , quatenhs ahorum liberorum légitima lœderctur. Item f a l h t , u t se m p e u
TENE 4TUR IMPÜTARE IN LEG1 TIMAM3 SI OPÜS SIT (i).
« Il est impossible, dit un auteur- m odern e, de
« mieux marquer la différence q u ’il'!*y a' entre le
« ' rapport simple à une succession à laquelle on vient
« comme héritier, et le cas d ’une attaque dirigée
« contre un don ou un legs, pour faire ordonner une
«’ déduction pour la légitime (2). »
Ricard, dans son Traité des D onations, après avoir
démontré que l ’incompatibilité des qualités de dona
taire et d ’ héritier, et l ’obligation du rapport ont lieu
seulement entre les enfans, et non pas à l ’égard des
étrangers (3) , examine si le légataire étranger peut
exiger que le don fait à l’enfant s’impute sur la légitime
q u ’il réclame (4).
i
Il indique les raisons contre cette imputation ,
raisons q u ’il puise dans les règles du rapport.
(1) Voir lcsn o tcstlc Dumotilin *ur Icsarticlescit<5s, dans le C oatum ier
tonic 3 , p o ^ o 1 x S s .
*
g e n t 1r a l ,
(•*) Truitc des Donations, par M. G re n ie r , edition iu- 4 ° , tome a ,
page 337.
,
;
,
( 3) l’ artle x1* , chap.
{\) Garlic
3
3 , sect. i 5.
3 ‘ chap. 8 , scct."i 1 , n « 1 1 54 et suivang.
!
�( 18 )
Mais il se décide eu faveur du légataire. Y o ic i eu
quels termes
« Mais encore que cette doctrine (de la dispense du
rapport à l ’égard d ’un étranger) pût être véritable
dans un raisonnement exact, et q u ’il semble q u ’il
. y ait d’autant plus de lieu de la réduire à cet effet,
que nous sommes dans une matière extrêmement
favorable, néanmoins il faut considérer d ’un autre
côté q u ’il s’agit d ’une grâce extraordinaire , que
la loi n ’a introduite que sous des conditions qui
sont entr’autres d ’imputer et de tenir compte par les
enfans des libéralités q u ’ils ont reçues de leur père;
et , en effet , si nous considérons quels ont été
l ’origine et le m otif de la querelle d ’inofficiosité,
nous trouverons q u ’elle n’a été inventée que pour
réprimer les libéralités immenses des pères, dans
les
rencontres
auxquelles ,
ayant
méprisé
leurs
iferifans,' ils s’étaient épuisés en laveur des étrangers;
si bien-que, lorsque cet oubli ne se rencontre pas,
et que le père a employé une partie de ses libéralités
envers scs enfans, il est bien raisonnable que l ’action
que la loi leur a mise en main diminue à proportion
q u ’ils ont été reconnus par leur père. E t si notre
première proposition avait lieu, il s’ensuivrait q u ’un
fils, comblé de bienfaits par son père, ne laisserait
pas de pouvoir contester les moindres et les plus
légères donations q u ’il aurait faites, et d ’en de
mander le retranchement; si bien que cette obliga
tion d ’imputer les avantages reçuç à la légitim e,
�(
r9
7^
)
« étant si fort de la substance à l ’égard de qui que
« 'ce so it, il n’y a pas d ’apparence de prétendre que
«r nous en ayons tiré l'usage du droit romain, sans
« cette circonstance qui lui est si essentielle : aussi la
« pratiquons-nous de la sorte sans contredit. » •
M. Lebrun traite aussi la question5 e t, après avoir
développé, comme Ricard, les motifs que les principes
sur les rapports peuvent fournir contre l ’imputation ,
il ajoute (1) :
« Il faut dire néanmoins que des héritiers étrangers
a ont droit, comme des enfans qui sont institués
a héritiers, de faire faire l ’imputation sur la légitim e,
«
«
«
«
parce que la querelle d’inofficiosité, et la demande
delà légitime sont un droit extraordinaire, qui 11e doit
avoir lieu que lorsque le père, ou n ’a point du tout,
ou n ’a pas assez considéré son san g, et quand il faut
« que la loi vienne au secours de la n a tu r e , et q u ’elle
« supplée au défaut de l ’affection paternelle : Q uia
« ju d ic iu m patris le x su pp let, dit Godefroy
« loi S i totas C) j
C . D e in of.
donat .
sur la
Ainsi cette
« action n ’a point lie u , quand le père a rempli les
« devoirs naturels; et il serait fort injuste q u ’un fils,
«
«
«
«
comblé des bienfaits de son père, vint accuser son
t e s ta ie n t , et donner atteinte à do légères libéralités,
dont le père aurait voulu reconnaître l ’amilié de
quelqu’un. »
(1) Voir L ebrun , îles Successions, tome i " , li Y. a , cliap.
n°‘ 4 et
5.
3 , sect. 9 ,
�(. 2 0 )
Espiai’d-D usaux, dans ses Observations sur L e b ru n ,
enseigne la même doctrine.
Argou, dans ses Institutions au droit français, après
avoir dit que le père peut disposer des deux tiers ou
de la moitié de ses bien s, selon le nombre de ses enfans,
soit en faveur de l ’un d ’eu x, soit en fa v e u r d ’ un
étranger, fa it, en parlant de la légitim e, la remarque
suivante :
i
j
.
« Sur quoi les enfans doivent, parmi nous, imputer
« tout ce q u ’ils ont reçu de la libéralité du père ou
« de la mère ( i) . »
Fçrrières, sur la coutume de Paris; Furgole, dans
son Traité des testamens; Pothier, dans son Traité
dfcs Donations entre-vifs, expriment la même opinion;
L apeyrère, pour le parlement de Bordeaux; Duperrier, pour celui de Provence; d ’O live, pour celui de
Toulouse, attestent l ’ usage admis dans ces parlemens, de
faire imputer sur la légitime ce que les enfans ont reçu
de leur père par donation entre-vifs, « soit q u ’il l ’ait
« ainsi expressément ordonné, ou q u ’il n ’en ait point
« parlé du t o u t , remarque d ’O live; car bien que la
« donation ne soit point conçue en termes qui puissent
« induire l’im putation, la Cour, toutefois, à l ’exemple
« de ce grand Papinien , estime que la pensée du
«< donateur est étendue plus avant que l’écriture :
« P lu s diettim minus scriptum . »
INI. M erlin ,
q u i,
dans son Répertoire, rappelle
(i)Iustitutions au droit français, liv. a , chap.
de la dixième ¿dition.
> tome i ' r , page
3/P
�plusieurs de ces opinions, et qui atteste la jurispru
dence uniforme des tribunaux français, sur ce poin t,
s’exprime ainsi :
« 11 faut considérer la chose donnée au légitimaire^
« comme existant dans la succession , et supposer
« ensuite q u ’il l ’en tire en vertu de la volonté du
« défunt; ce qui amène nécessairement cette consé« quence, que Vimputation ne peut en être éludée
« p ar quelque prétexte que ce soit ( i). »
Telle était, à l ’instant où le Code civil a p a r u , la
doctrine généralement adoptée par les auteurs et par
les trib un au x, doctrine qui distinguait le rapport de
l ’im putation; doctrine qui ne permettait pas au léga
taire de demander à l ’enfant donataire le rapport de
la chose donnée, pour en prendre une partie, mais
qui l ’autorisait à soutenir que la valeur du don fait
à l’enfant devait s’imputer sur sa légitim e, et q u ’il
fallait q u ’il y eût insuffisance pour que le legs fût
réduit.
Cette doctrine, aussi équitable que constante , at-elle été renversée par le Code civil?
Pour le supposer, il faudrait rencontrer dans la loi
nouvelle les dispositions les plus claires et les plus
fo rnielles.
O r, q u ’y trouve-t-on, et quels articles ont invoqués
les premiers juges?
On y trouve des règles sur les rapports; et les ar( i ) Voir au mot L ég itim e} section 8 , paragraphe 3 ,-art. a , u°
4*
�(
22
)
ticle s' 843 , 8^7 sont les seuls q ü ’on ait invoques k
l ’appui d ’un nouveau système,
;
!» n ¡ ' il
■'J'xr
Mais ces articles ne disent rien de plus que ce^tjue
disaient les lois anciennes. r
'
•
L ’un déclare que tout héritier, venant h. partage,
doit rapporter k la succession le don q u ’il a reçu, s’il
ne lui a été fait e n p ré cip u t.
L ’autre ajoute q u e le rapport n ’est pas dû au créan
cier ni au légataire.'
'•
’
aw.»
Tout cela était vrai autrefois comme aujourd’hui :
la loi nouvelle n ’est q u ’une copie fidèle du droit
antérieur.
Ces articles ne disent pas que l ’ héritier naturel peut
faire réduire le legs fait h ¿un étranger, sans imputer
sur la portion héréditaire q u ’il réclame, les donations
q u ’il a reçues.
La question même ne peut être résolue dans des
articles qui ne traitent que des rapports, parce q u ’elle
a moins trait à un rapport q u ’à une réduction.
- C ’est dans les articles qui fixent la quotité dispo
n ib le, qui établissent une légitime ou une réserve
légale, qui autorisent les cnfatis q u ’un père injuste a
dépouillés de cette réserve ii la réclamer; c’est dans
les articles qui accordent aux enfans l ’action en re
tranchement, et qui en règlent le mode et les condi
tions, que doit être cherchée la solution de la difficulté.
O r , si nous considérons cette partie de la loi, nous
verrons q u ’elle autorise la disposition de la moitié, du
tiers, ou du quart des biens du disposant, selon q u ’il
�laisse à son tîécès un seul enfant légitim e, cru deux,
ou un-plus grand nombre ( Y . Code civil, art. 9 13 .)
L a réserve est donc restreinte, suivant les cas, k la
moitié, aux deux tiers ou aux trois quarts des biens.
C ’est de cette réserve seulement q u ’il n ’est pas
permis de disposer au préjudice des enfans.
C ’est cette réserve q u ’ils ont le droit de réclamer
par la voie du retranchement, s’ils en sont privés par
des libéralités excessives.
Mais si les libéralités n’excèdent pas la quotité dis
ponible , si les portions que conservent ou que re
cueillent les enians suffisent à la réserve légale, l ’action
en retranchement ne saurait être admise.
E t quelle opération ordonne la' loi pour vérifier si
le père, par une aveugle générosité, a excédé les bornes
q u ’elle lui prescrivait? L ’article 922 nous l ’apprend.
« La réduction se détermine en formant une masse
« de tous les biens existant au décès du donateur ou
« testateur. On y réunit fictivement ceux dont il a
« été disposé par donations entre-vifs,
d ’après leur
« état à l’époque des donations, et leur valeur au
« tems du décès du donateur. On calcule sur tous
« ces biens, après en avoir déduit les dettes, quelle
« est, eu égard à la qualité des héritiers q u ’il laisse,
« la quotité dont il a pu disposer. >»
La règle est positive; elle veut que tous les biens
du d éfu n t, ceux même dont il a disposé à titre gratuit
pendant le cours de sa v ie , soient, sinon rapportés,
au moins réunis fictivement à ceux q u ’il laisse à son
�l
(= 4 )
décès', pour ne former q u ’une seule masse de patrie
moine, sur laquelle on calcule la quotité dont il a pu
disposer.
Alors s i , dans les libéralités entre-vifs ou testamen
taires, il y a eu excès de la quotité disponible, la
réduction est faite ; s’il n’y a pas eu excès, les libé
ralités sont maintenues.
Telle était l ’opération que devait ordonner le tri
bunal d ’Issingeaux; telle est celle q u ’on lui deman
dait; telle est celle q u ’il a refusée, quoique la loi la
prescrivit impérieusement. Il l ’a refusée sous le plus
vain prétexte. Les règles sur les rapports ne s’appli
quaient pas à la question. Il ne s’agissait pas d ’un
rapport réel, mais d ’une réunion fictive; et qu o iqu ’il
paraisse y avoir quelque analogie dans les deux cas,
on y reconnaît une différence sensible, pour peu q u ’on
réfléchisse. Lorsqu’il y a rapport réel, celui qui l ’a
exigé et qui l ’a o b te n u , prend part dans la chose
rapportée -, il en prive le donataire. Mais par une
réunion fictive, le donataire n’est-privé de rien; il
conserve la chose donnée; elle n’est réunie que par un
simple calcul, pour faire connaître le patrimoine entier
du donateur, en déterminer la valeu r, et vérifier ainsi
ce dont il a pu disposer au préjudice de ses en fans.
E t remarquons que celte réunion purement fictive
est ordonnée par la lo i, dans tous les cas possibles.
Quels que soient les donataires, étrangers ou successibles ? les libéralités q u ’ils ont reçues doivent servir à
�(
»5
)
former la masse destinée à calculer la quotité dis
ponible.
A in si, pour savoir si le sieur Peyrachon père avait
excédé cette quotité, l ’on devait former une masse
générale, soit des objets légués au sieur Peyrachon fils,
soit de ceux compris dans le legs universel, soit enfin
des biens donnés précédemment, et par conséquent de
la dot constituée à la dame Mollin.
La valeur de cette masse étant déterminée, on en
aurait distrait,
i° les sommes ou les valeurs données
à la dame Mollin ; 20 celles léguées au fils P eyrach o n ,
pour le tiers que la loi lui réservait.
On aurait examiné ensuite si le surplus du patri
moine excédait le tiers dont la loi permettait la dis
position .
E n cas d ’excès, le legs eût été réduit.
S ’il n ’y avait pas excès, le legs eût du être exécuté
sans modification.
Cette opération simple , la seule juste , la seule
légale, ne pouvait convenir à la dame M ollin, parce
q u ’il en serait résulté la preuve q u ’elle était en
possession du tiers du patrimoine du père, de ce tiers
que personne ne lui d isp u ta it, de ce tiers, seule
quotité que lui réservait la lo i, puisque le défunt n’a
laisse ([iic deux enlans.
L lle a voulu conserver la dot q u ’elle avait reçue,
et obtenir encore le tiers du surplus; elle a soutenu
et a eu le bonheur de faire penser aux premiers juges
que sa dot ne devait pas-s’imputer sur le tiers qui
4
�( 26 )
lui était réservé par le C od e; c’est-à-dire q u ’après
avoir reçu de son père sa portion de la réserve > elle
a prétendu q u ’elle lui était due une seconde fois en
vertu de la loi.
Cette prétention est contraire à notre législation, à
la doctrine de tous les auteurs nouveaux, aux clauses
même du contrat de mariage de la dame Peyrachon.
A ce que nous avons déjà dit sur les termes et le
sens de la loi, il suffira d ’ajouter quelques réilexions.
Si les législateurs ont établi une réserve légale, c’est,
comme nous l ’avons déjà remarqué, dans le but de
prévenir l ’erreur ou la passion d ’un père q u i , mécon
naissant ses devoirs envers ses enfans, les priverait de
son patrimoine entier, pour verser scs bienfaits sur un
héritier de son choix. Guidée par le vœu de la nature,
la loi a créé la légitime ou la réserve, comme une
créance des enfans sur les biens de leurs auteurs. Elle
a d ’ailleurs autorisé ceux-ci à disposer à leur gré du
surplus de leur fortune. O r , un père qui constitue
une dot à sa fille, doit être , ainsi que tout autre
débiteur, présumé avoir voulu acquitter la dette dont
il ne lui était pas permis de s'affranchir, plutôt que
faire une libéralité purement gratuite : Nem o liberalis
nisi liberatus. Cette présomption ne cesse que lors
q u ’une volonté contraire a été exprimée, c’est-à-dire,
lorsque le don a été fait en préciput.
Comment d ’ailleurs supposer q u ’un père, qui a
versé ses bienfaits sur l ’un de ses enfans, ait voulu
le dispenser de lui en* tenir com pte, lui permettre de
�(
27 )
l'accuser de ne pas avoir rempli ses devoirs, et lui
laisser le droit de faire réduire ses autres dispositions,
et de demander une légitime entière comme s’il n ’avait
rien reçu?
9
L ’action en réduction n ’est accordée à l ’enfant, que
comme un secours contre l ’injustice ou l ’aveuglement
du père, et comme un moyen de réparer les torts
de celui-ci. Si le père a été juste et éclairé, si l ’on ne
peut lui reprocher aucun tort, il n’y a pas de répara
tion à ordonner, et l ’action en réduction disparait.
Enfin le droit des enfans à la réserve est un droit
sacré, sans doute; mais celui des pères sur le surplus
de leurs biens est également respectable; et ne seraitce jias l ’anéantir, que d ’autoriser l ’enfant, déjà comblé
des bienfaits de son père^ à disputer encore à un tiers
une faible partie de la quotité disponible?
C ar quel serait l ’efFet d’un tel système?
L e père de deux enfans, après avoir leur donné
entre-vifs les neuf dixièmes d ’une grande fortune ,
ne pourrait cependant disposer à son gré du dixième
qui lui resterait. Il serait tenu d’en réserver les deux
tiers aux deux enfans déjà si riches de ses libéralités.
Une telle conséquence, résultat nécessaire de l ’opi
nion de M. Mollin , en rend l ’erreur palpable.
Aussi les auteurs nouveaux ont-ils reconnu le prin
cipe de l ’im putation, en l ’appliquant à la réserve
comme les auteurs anciens l’appliquaient à la légitime.
M. Malleville , dans sou Analise du Code civil >
�( ^8 )
enseigne celle doctrine, précisément sur cet art. 857,
q ui a fourni à M. Mollin son principal argument.
Voici comment s’exprime ce magistrat, q u i, comme
011 le sait, a concouru à la rédaction du Code :
« Si un enfant prétendait faire retrancher une do« nation ou un legs , comme ne trouvant pas sa légitime
« ou sa réserve dans les biens libres, sans doute les
« légataires ou donataires seraient en droit d ’obliger
« cet enfant à tenir compte de ce q u ’il a reçu; mais
« ce n’est pas Iti ce q u ’on entend par rapport. »
Les auteurs des Pandectes françaises énoncent la
même opinion sur le même article 8^7 :
« Il y a cependant un cas où il se fait une sorte de
« rapport par l’hérilier donataire à d ’autres qu a des
« cohéritiers : c’est celui où il demande le retranche« ment des legs ou des donations, pour compléter sa
« légitime. Comme il doit alors imputer sur sa légi« lime les choses q u ’il a reçues lui-même, et que les
« legs ou donations ne souillent de retranchement
« que pour ce qui manque sur sa légitime après cette
« imputation , l’enfant donataire fait une espèce de
« rapport de ce qui lui a été donné, aux légataires
« et donataires étrangers, quoiqu’ils ne soient passes
« cohéritiers. »
lie savant auteur du dernier Traité des Donations
et Testainens, distingue aussi les principes qui con
cernent l’action en réduction d ’un legs universel, pour
le parfournissement de la légitim e, de ceux qui ont
�( . » ,
r t f :
traitl simplement au rapport. On remarque clans sa
dissertation les expressions qui suivent :
« Dans le cas de la demande tendant à faire distraire
« d ’un legs universel la portion nécessaire pour com« poser la légitime, il n ’est pas un au teu r, au moins
« de ma co n n a issa n ceq u i n’ait enseigné, en s’expli« quant d ’après les principes mêmes dans lesquels le
« Code civil est con çu, que tout ce qui était donné
« par le défunt à celui qui réclame une légitime par
« voie de réduction , devait être imputé sur cette
« légitime, même quand la demande en réduction ou
«
«
«
«
«
retranchement pour la légitime (ce qui doit avoir
lieu aujourd’ hui pour la réserve) serait dirigée
contre un étranger qui serait légataire universel. Ce
q u i, dans ce cas particulier, exclut l'application .des
principes concernant les rapports, c’est la nécessité
« de concilier le droit de disposer, accordé par la lo i,
« avec le devoir q u ’elle impose de laisser une partie
« de ses biens à quelques-uns des héritiers. Si ce
« devoir est rempli en entier, la disposition ne doit ’
« être réduite que proportionnellement à ce qui peut
« manquer pour compléter la réserve (i). »
Cette uniformité d ’opinions démontre la vérité de
la règle de l’imputation; elle est en harmonie d ’ailleurs
avec les lois,’ les autorités et la jurisprudence, qui ,
( i ) Voir le Traite des Donations, par M . G re n ie r , édition i u - 4 ° >
tome 2 , page
334 -
�1 ^
( 3o )
dans l ’ancien droit, obligeaient le légitimaire a déduh'e
sur sa légitime les dons q u ’il avait reçus. O r, l ’on sait
que les lois anciennes et nouvelles se prêtent un mu.tuel secours pour la décision des cas non expressément
prévus par l ’une des législations. Leges priores ad
posteriores trahuntur et è contra. On se rappelle aussi
la maxime que nous avons déjà citée : In casibus
omissis deducenda est norma legis à sim ilibus.
Mais dans la cause, on pourrait se dispenser d ’avoir
recours aux règles générales, qui ne sont nécessaires
que dans le silence des actes de libéralité.
E n effet, la question est décidée par le contrat
même qui contient la constitution de dot.
On se rappelle les termes de cette constitution.
D ’un côté, le sieur Peyrachon père avait stipulé
q u ’une partie de la dot ne serait payable q u ’après
son décès, ce qui indiquait assez q u ’il ne la donnait
que pour tenir lieu à sa fille des droits q u ’elle aurait
un jour dans sa succession,
D ’un autre côté, il exigea d ’elle une renonciation «
tous scs droits le'gitiniaires paternels et maternels.
N ’était-ce pas interdire formellement à la daine Mollin
le droit de réclamer une portion de la réserve légale?
N ’était-ce pas lui annoncer clairement que son père
entendait disposer du surplus de ses biens, sans q u ’il
lui fut permis d ’attaquer les dispositions?
La dot fut le prix de la renonciation. Comment la
dame Mollin pourrait-elle conserver la dot, et rétracter
la renonciation? Si elle refuse d’exécuter la convention,
�n ’est-il pas juste q u ’elle en restitue le prix ; q u ’elle le
rende au patrimoine du père, dont il avait été tiré,
ou q u ’elle l ’impute au moins sur les droits légitimaires
q u ’elle avait promis de ne jamais réclamer?
Ainsi la loi du conti’at de mariage suffirait pour
décider la cause, et pour faire rejeter les prétentions
exagérées de la dame Mollin.
Combien ne doit-on pas être surpris de la double
erreur des premiers juges? Ils ont méconnu tout à-lafoiset les règles ordinaires de l’imputation, qui devaient
dicter leur jugem ent, et la convention écrite, qui ne
permettait pas a la dame Mollin de retenir sa dot en
réclamant ses droits légitimaires! Cette erreur est trop
grave pour ne pas être réparée par la Cour.
Les motifs que nous avons développés peuvent s’ap
pliquer à l ’imputation de la valeur réelle du domaine
de Naute, comme a celle de la partie de la dot qui a
été payée en argent.
S ’il est v r a i, comme on l ’assure, et comme cela
paraît avoir été reconnu par toutes les parties, que ce
domaine fut d ’un prix beaucoup au-dessus des 12,000 fr.
pour lesquels il a été délaissé, la plus-value doit aussi
être imputée sur les droits légitimaires de la dame
Mollin.
E n valu dirait-on que le domaine a été délaissé h
M. Mollin, non à son épouse, et q u ’il n ’appartient
pas à celle-ci.
Plusieurs réponses écarteraient l ’objection.
i° Elle n’est pas justifiée; car l ’acte de délaissement
�n ’est pas rapporté. Il ne paraît pas même q u ’il ait été
produit en première instance; et cependant il serait
important à connaître ;
20 L e délaissement f u t - il fait au m ari, s’il y a
vilité dans le p r ix , et si l ’on doit considérer la plusvalue comme une vraie libéralité, au moins doit-on
reconnaître aussi que c’est envers sa fille, et non en
vers M. M ollin, que le sieur Peyrachon aurait entendu
se montrer généreux; q u ’ainsi la libéralité devait être
attribuée à celle-ci, et par conséquent être imputée
sur les droits q u ’elle réclame ;
3 ° C e t t e i m p u t a t i o n s e r a i t d ’ a u t a n t p l u s équitable,
que si le père, par un délaissement d ’immeubles , a
réellement augmenté la dot promise, il n ’a fait à sa
fille et à son gendre cette seconde libéralité, que parce
q u ’il a pensé qu e, fidèles à remplir la condition à
laquelle ils s’étaient soumis, ils ne réclameraient pas
leurs droits légitimaires.
A ujourd’hui q u ’ils se jouent de cette condition ,
pourquoi conserveraient-ils l’avanlage de la plus-value
du domaine que leur a cédé le sieur Peyrachon père?
Ce domaine, comme la dot payée en a r g e n t , doit être
réuni à la masse du patrimoine pour déterminer la
quotité disponible, sauf, après la fixation de celte
q u o tité, à ]\I. Mollin et à son gendre, à retenir l’ar
gent cl le domaine, en les imputant sur le tiers qui leur
revient dans le patrimoine entier.
Mais n’ordonner l ’estimation du domaine de N aule,
comme le porte le jugement dont est appel, (pie pour
�diminuer le don fait au légataire, c ’est blesser à-lafois et les règles du juste, et l ’intention* évidente du
sieur Peyrachon père.
Quoique principalement dirigée contre la dame
M ollin, la discussion à laquelle nous nous sommes
livrés s’applique aussi au sieur Peyrachon son frère.
Si la dame Mollin doit imputer sa dot sur sa portion
dans la réserve légale, c’est-à-dire sur le tiers du pa
trimoine du père, son frère ne doit pas lui-m êm e
obtenir la moitié de cette dot et le tiers du surplus
des biens; car il aurait plus que la loi ne lui attribue,
et le légataire serait privé d ’une partie de la quotité
disjionible.
L e jugement doit donc aussi être réformé à l ’égard
du sieur Peyrachon fils.
Au reste, celui-ci avait approuvé le testament, et
l ’avait même exécuté , en 1 se mettant en possession
du legs qui lui avait été fait pour sa portion dans la
réserve légale. Cette circonstance présente un moyen
de plus contre la décision du tribunal d ’Issingeaux.
Il serait superflu de réfuter l ’application d ’un
arrêt de cassation, du 3 o décembre i8 i( î, cité dans
les motifs du jugement. L ’arrêt est étranger à la
cause. Il d é c i d e que le légataire d ’une quote déter
minée , c’est-à-dire du quart des biens de la suc- *
cession j
ne peut exiger le rapport des dots ou des
avancemens d’hoirie, pour prendre le quart, même
des objets rapportés.
5
�( 34 )
La difficulté n ’était pas celle qui nous occupe. Il
s’agissait d ’un rapport r é e l, qui tendait à priver les
donataires antérieurs d ’une partie de la chose donnée,
et non d ’une réunion fictive, destinée seulement à
faire connaître la quotité disponible. L e légataire
n ’était pas attaqué en réduction;
au contraire, il
voulait augmenter le legs, du quart de tous les dons
précédemment faits. Ce n’est donc que par confusion
de principes, que l'on a pu assimiler les deux questions.
Egarés par les règles sur les rapports , les premiers
juges n ’ont pas remarqué q u ’ils se jetaient dans une
fausse route, et q u ’ils avaient à juger seulement une
question de réduction.
Ils ont oublié q u ’un legs,
quelque considérable q u ’il f û t , ne devait pas être
r é d u it, s’il n’exçédait point la quotité disponible. Ils
se sont mis en opposition directe avec le texte même
du droit français, qui ordonne la réunion des biens
donnés aux biens existans lors du décès du testateur,
pour calculer la valeur de la quotité dont il lui était
permis de disposer. Ils ont ignoré aussi ce grand
principe d ’équité et de justice, qui ne permet pas aux
enfans d ’attaquer les dernières volontés d ’un père,
lorsque celui-ci n ’a pas négligé lui-même scs devoirs,
et lorsqu’il leur a payé la dette de la nature et de la
loi. E n fin , méconnaissant le vœu de la législation
n ou velle, qui
protège également , et le droit des
enfans à la réserve q u ’elle a é ta b lie , et la faculté
de disposer accordée aux pères, mais restreinte dans
de justes bornes, ils ont créé un système qui rendrait
�(3 5 )
■ ■w
cette faculté illusoire, et qui autoriserait les enfans,
quoique enrichis, par les bienfaits du père, de la plus
grande partie de son patrimoine, à faire réduire à
son décès les libéralités même les plus modiques,
dictées par l'affection ou commandées par la recon
naissance.
Me ALLEMAND, Avocat.
M* GAYTE-LARIGAUDIE, Licencié-Avoué.
R I O M , I M P R I M E R I E D E S A L L E S , P R È S L E P A L A I S DE J U S T I C E .
-
,
■r
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rocher, Jean-Martin. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Gayte-Larigaudie
Subject
The topic of the resource
legs
partage
légitime
quotité disponible
réduction
experts
réserve héréditaire
gain de survie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, arrondissement d'Yssingeaux, en qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre Peyrachon, fils mineur, habitant de la même ville, appelant ; contre dame marie-Geneviève Peyrachon et monsieur Jean-Antoine Mollin, juge au tribunal civil d'Issingeaux, son mari, de lui autorisée, habitans de la Ville d'Issingeaux, intimés ; et contre sieur Jean-Pierre Peyrachon, rentier, habitant en la ville de Tence, aussi intimé.
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53505/BCU_Factums_G2519.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
gain de survie
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53634/BCU_Factums_G3017.pdf
c3836967b3b262ae0490d998b082550f
PDF Text
Text
POUR
J E A N
R O U C H I ,
Appelant,
CONTRE
MICHEL DIERNAT,
Et autres Intimés.
Un prêtre français , q u i , en 1 7 9 3 , s’était réfugié en Angleterre,
pour éviter les poursuites auxquelles l'exposaient sa qualité et son
refus de prêter serment à lu Constitution civile du clergé, a acquis,
loin de son pays , par ses travaux et par son industrie, une fortune
assez considérable.
Rentré en F ran ce, il s’est livré long-temps aux pieuses fonctions de
son ministère s a c r é , et lorsque l’âge et les infirmités lui ont com
mandé le repos, il s’est retiré dans le lieu qui l’avait vu naître , et à
destiné sa fortune entière, moins quelques legs particuliers, au
descendant de l’une de ses sœurs, à Jean R o u c h i, son neveu. Il
�l’a , en conséquence, déclaré son h é ritie r , dans plusieurs parlies
de son acte de dernière volonté.
Mais ce titre d'héritier ou de légataire universel lui a été con
testé par des parents collatéraux, et quoiqu’il eut été reconnu, par
le Président du tribunal, qui l’avait en voyé, à ce titre, en posses
sion de tous les biens de son bienfaiteur, il lui a été contesté devant
le tribunal entier, afin de parvenir à la nullité d’une des disposi
tions principales du testament, que l’on a supposée contenir une
substitution prohibée par la loi.
L e tribunal de première instance de Mauriac a admis ces préten
tions. li a refusé à Jean Rouchi le titre d’héritier de son grand-oncle;
il a considéré et annulé comme viciée de substitution, la disposition
principale faite en faveur de Jean R ou chi, et il en a attribué tous
les avantages
aux nombreux héritiers collatéraux du testateur.
u
Ce jugement blessait trop ouvertement les intentions que le testa
teur avait manifestées dans plusieurs testaments; il interprétait aussi
les lois sur les substitutions d’une manière trop rigoureuse, pour
pouvoir être respecté.
Jean Rouchi en a déféré l’examen aux hautes lumières de la
Cour de R io m ; il espère, il doit espérer une décision plus fa v o
rable, plus conforme à la l o i , plus en harmonie avec la volonté
évidente du testateur.
FAITS.
L e sieur Antoine Lavergne , ancien curé de ¡Mainteiion , dépar
tement d’Eu r-el-Lo ire , était né dans l'arrondissement de Mauriac,
département du Cantal.
Prêtre en 1 7 9 5 , persécuté pour ses opinions religieuses, il (ut
obligé de fuir et de se réfugier en Angleterre. L à , pendant un long
séjour, il acquit, parses soins, par scs travaux , parses économies,
une fortune assez importante.
Rentré en France dans 1111 temps plus prospère, il acquit des pro-
�priétés foncières dans l’arrondissement de ¡Mauriac, et notamment
le domaine de L o n D
" c - V e r"On c et divers autres immeubles.
Averti par son grand â g e , il voulut disposer de sa fortune ; il avait
deux sœurs seulement, ou leurs descendants. 11 fit choix , pour son
h é ritie r, de Jean Rouchi , qui était son petit n e v e u , et que
ce dernier titre recommandait plus particulièrement à sa bien
faisance.
Jean Rouchi n’élail pas marié et ne l’a jamais été :
il exerçait la profession de marchand bottier, en ¡Normandie, où il
avait un établissement, que les bienfaits de son oncle lui ont fait
perdre; en sorte que ces bienfaits, loin de lui être utiles, lui se
raient devenus désastreux, s’il en était privé aujourd’hui.
»
Quatre testaments successifs furent faits, dans la forme olographe,
par le sieur Lavergne ; le prem ier, le 12 octobre 18 5 7 ; le second,
le 20 septembre 18 5 9 ; le troisième, le 9 octobre 1 8 4 2 ; le qua
trième, le 10 août i 8 4 5 ; et dans toutes ses dispositions testa
mentaires, persistant dans ses intentions en faveur de son neveu ,
Jean Piouchi, il le nomme son donataire et son h éritier ,
L e dernier testament doit seul nous occuper.
P ar ce testament , le sieur Lavergne s’exprime ainsi :
« i° J e donne et laisse après ma mort à Jean R ou chi, cor» donnier-bottier à R o u e n , en Normandie , fils d’Antoine R o u c h i,
»
»
»
»
»
»
»
»
mon neveu et filleul, par ma sœur aînée , Jeanne Lavergne, propriétaire à Labastide, commune d’Anglards , le domaine de.
L o n g c - V c ïg n e , la montagne de V c r r ie r r c , et tout le bien que
j’ai acheté de la veuve Brcsson , ma voisine , ainsi que le moulin
avec toutes scs dépendances, maison, prés, terres cl jardin, le tout
situé à Lo n ge -V e rgu e , communes d’Anglards cl de Sl-Vincent,
tel que je l’ai acheté de M. J u g e , Chevalier de la Légiond’IIonncur, avec les fonds que j’ai gagnés si honorablement en
» Angleterre , par mon travail et mes faibles talents , pendant
>> vingt-huit ans d’émigration el de séjour que j’ai fait dans ce ro-
» yamne , pour me soustraire à la hache révolutionnaire qui inon• dait de sang tout Paris et les environs, à la fin de l’année mil sept
» cent quatre-vingt-onze; je lui en fais don pour être entièrement
�A **
-
4 -
» à lui, pour en jouir lui et ses descendants après ma mort, à l’e x -
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
a
»
»
»
»
»
■»
»
clusion de mes autres parents et héritiers. Car telle est ma v o lonlé qu’il en soit le seul et unique héritier, lui , et ses enfants
après lu i , de génération en génération, sous la condition et
l’obligation néanmoins la plus étroite, que tout héritier , possesseur et propriétaire de ce bien , de ce domaine, présent et à
venir, quel qu’ il soit, renoncera à son nom de famille, qu’il
portait auparavant, pour prendre et porter celui de Lavergnc. Il
en fera usage dans tous les actes et les écrits qu’ il passera et
signera pendant sa vie , et le transmettra à sa postérité , a scs
descendants, garçons et filles, qui renonceront au nom de
Ilouchi pour prendre et signer L a v e rg u e j
» a» L e domaine de Lo n ge -V e rgn c ue sera jamais vendu,
échangé, ni morcelé ni grevé de dettes sous quelque prétexte
que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque famille,
lel que je l’ai laissé à ma mort; les propriétaires, les possesseurs
de ce domaine seront obligés, à leur m o r t , de répondre des réparafions qu’il y aura à y faire, en le laissant. Chaque successeur
po u rra, en entrant en possession du domaine, demander, par
une visite d’e x p e rls , un dédommagement pour les réparations
» qu’il y aura à faire, pour l'entretenir, et le cultiver et l’exploiter.
Telle est la disposition principale de ce testament.
L e testament contient aussi diverses autres dispositions secon
daires.
I’ ar l’article 5 , le testateur donne aux D iernat, scs neveux par
sa sœur cadette, Françoise L a v e rg n c , la somme de huit mille
francs à prendre sur le revenu du domaine de L o n g e -V e rg u e , et
payable, dit-il, par Jean Rouclii, mon h é r itie r , en plusieurs
termes, à ceux des enfants Diernat qu’il désigne par leurs noms.
Par l’article 4 , il donne son bien paternel et maternel aux enfants
de Marie Alsac, femme Julliard , à la charge par eux de faire faire
tous les ans un service pour le repos des Aines île scs père et mère.
Par l’article 5 , il donne à Antoine Uouchi, son neveu, la p or
tion des biens paternels du testateur que cet Antoine Rouchi a prise
�.
5
.
.
dans le partage que celui-ci avait fait avec sa sœur aînée.
Par l’article 6 , il dispose de son bien dejLabastidc en faveur de
Virginie Valm ier, femme J u l lia r d , pour elle et ses enfants; et si
elle mourait sans enfants, il le donne, après la mort de celle-ci, à la
fille aînée de Jean llouchi, son neveu. Cette disposition renfermerait
peut être une substitution.
Par l’article 7 , il charge Je u n R o u ch i, son héritier j, est-il
d it, de payer en six ans, 6,000 francs aux enfants de Françoise
lunichy , veuve Arnal.
Par l’article 8, il veut qu c-Jeati R o u c h i , son donataire, renonce
en faveur de sa sœur aînée à son bien paternel et maternel.
Par l’article 9 , il veut que Jean llou elii, en entrant en jouissance
du domaine de L o n g e -V e rg n e , relire auprès de lui , loge et nour
risse son père et scs deux sœurs.
mi,
:
Par l’article 10 , il ordonne que le propriétaire de Longe-Vergne
fasse faire tous les ans, pour le repos-de son àme, 1111 service com
posé d’une grand’messe et de deux messes basses.
Par l’article 1 1 , il lègue à sa domestique une renie viagère de
six cents francs , à prendre sur le domaine de Lon ge-V ergne.
P ar les articles 1 2 et i 3 , il donne aussi à cctie domestique quel
ques objets mobiliers , en chargeant Jean Rouchi de lui payer les
six cents francs, et de lui rendre service tant qu’elle vivra.
Par l’article ¡ 4 , il lègue à l’église d’ Anglards, une somme de huit
cents francs qu’il laissera , dit-il, dans nue. malle qui ne sera ou
verte que par sa domestique, son h éritier, son exécuteur testa
mentaire et deux témoins.
Par l’article i 5 il destine, sur les fonds qu’il a à Paris , (‘>,000 (r.
pour fonder une école de garçons dans la paroisse d’ Anglard.
Par l’article if), il donne à la même paroisse 5 ,000 francs pour
fonder une école de jeunes (¡lies.
Par l’article 1 7 , il donne à la môme paroisse, i , 5oo francs pour
acheter un cimetière, en chargeant Jean R ou chi, son héritier,
d it - il, de payer cette somme à la paroisse dès qu’elle l’exigera.
�jx<)J*
— G —
Par l'article 18 , il s’occupe de ses luncraillcs.
P a r l'article 19 il déclare que le propriétaire de L o n g e - V e r g n e ,
Je a n R ouchi est particulièrem ent chargé et obligé de payer
toutes les dépenses de l’enterrement cl les honoraires des ecclésias
tiques, et de les remercier et de leur payer les dépenses qu’il feront
pour le dîner.
Par l’article 20 il laisse cent écus pour distribuer aux pauvres
qui se présenteront à son enterrement.
Par l’article 21 il fonde, dans l’église d’Anglard , un annuel de
quarante messes pour le repos de son âme.
Par l’article 22 il donne et laisse tons ses meubles à Je a n R ouchi ,
sous la condition qu’il payera aux D ie rn at, scs ne v e u x ,
des
sommes détaillées s’élevant à 1,2 0 0 fr.
Par l'article 2") il donne à l’église d’Anglard , les ornements
d’ une chapelle.
Par les articles 24 , 25 et 26 il donne aux habitants de la vallée
de Lon ge-V ergne cl surtout aux habitants du village de Malaprade,
une somme de i , 5o o f r . pour fonder cl établir une succursale
dans leur village , voulant qu’on donne à cette église le nom de
la paroisse de L o n ge-V ergn e.
P ar l’article 27 il veut que les 1 1 ,0 0 0 fr. destinés à la fondation
des deux écoles de garçons et de filles , les 1 , 5oo fr. donnés pour
l’établissement d’une église , et G,000 fr. qu’il consacre à la distri
bution de 5oo fr. par an au x pauvres d’A n g lard, soient pris sur
une somme de /¡o,ooo fr. qu’il a déposée chez M. Ferrière-Lafitte,
banquier à Paris , et qu’à cet effet, on communique à celui-ci son
testament olographe qui se ra , dit-il, entre les mains de mon
h éritier ou démon exécuteur testamentaire.
Par l’arlicle 28 il donne quelques couverts d’argent à quelquesuns de ses héritiers naturels et à deux curés.
Par l’arlicle 29 il charge Je a n Ilo u c h i} héritier du domaine de
L o n g e -V e rg u e , de payer cent écus aux enfants d’un filleul.
�P ar l'article ,5o il donne au fils aine de Julliard , ce qui lui
resterait dù sur son prix de ferme.
Par l’article 5 i il recommande d’o u v rir, en présence de sa
domestique et.de deux témoins, doux malles qui se trouvent, dans
le cabinet de sa chambre.
Par l’article 32 il prie les personnes auxquelles il pourrait
confier son testament olographe, d’écrire , aussitôt après sa mort,
à Je a n Rouchi, cordonnier à Rouen, en Normandie, mon héritier,
dit-il , de se présenter sans délai pour prendre communication et
copie du testament, afin de pouvoir rég ler ses affaires , et remplir
les obligations auxquelles il aura à répondre ; il sera encore tenu
d ’avertir par un mol de lettre les autres donataires qui auront
quelque chose à réclamer dans ce testament.
Par l’article 35 il prie le curé d’Anglard d’empêcher que per
sonne n’entre dans la maison, dans le château , avant l’arrivée de
Je a n Rouchi ou de quelqu’ un envoyé de sa part et autorisé par
lui.
Par l’article 54 il donne à Jean R o u c h i, deux mille francs à
prendre sur les fonds du gouvernement, pour payer les honoraires
de son enterrement et les droits de mort.
Par l’article 55 il nomme, pour exécuteur testamentaire, INT.
P e rrie r, notaire à Mealct, et charge Je a n Rouchi , mon h éritier,
dit-il , de lui offrir /(oo f’r. pour le remercier de ses peines et de
scs bons conseils, et de lui prouver sa reconnaissance.
E t après avoir pris 5 8 ,ooo ir. sur les fonds du gouvernement
pour remplir les legs mentionnés dans le testament, il donna moitié,
du restant au fils aîné de Julliard et l’autre moitié aux deux filles
aînées de Jean Arnal.
Le testament est ccrit et signé par le sieur Antoine L a v c r g n e , à
L o n g e - V e r g n c , le lo a o û t 1 8 4 5 .
T el est ce testament dont nous avons cru devoir rappeler en détail
les diverses dispositions, pour prouver que le testateur avait disposé
de tous ses biens, qu’il a considéré et déclaré Jean Rouchi son
h éritie r, et qu’il l’a chargé en cette qualité de prendre immédia-
�lomcnt communication du testament , voulant qu’on l’avertisse
¡'t ce titr e . aussitôt après sa mort, pour qu’il puisse régler ses
affaires et.remplir les obligations auxquelles il aura à répondre.
L e sieur Lavergne décéda le 12 août 1 7
•
Une ordonnance de M. Mailhe , juge
à Mauriac et faisant
fonctions de président du tribunal , envoya sur requête , Jean
Rouchi en possession des
biens du défunt, comme étant sou
légataire universel.
Les Diernat et d’autres personnes , notamment les Alsac , se
disant habiles à se porter héritiers du,défunt, formèrent opposition
à celte ordonnance d’envoi en possession.
Mais elle fut maintenue d’abord par un jugement du tribunal de
première instance de Mauriac du 12 janvier 1 8 4 8 , qui ordonna de
plaider au fond, ensuite par un arrêt confirmatif du 5 avril 1849.
Revenus devant le tribunal de Mauriac, les Diernat et les
Alsac ont attaqué le fond du testament.
Par jugement du 2?, août 1 8 4 8 , ce tribunal a décidé 1 8 que le
testament 11e renfermait ni 1111 legs u niversel, ni une institution
d'héritier, qu’en considérant le sieur Rouchi comme légataire
universel du sieur Lavergne et en l’envoyant en possession des
biens, le président du tribunal avait mal interprété ce testament et
que son ordonnance devait être réformée;
2° Que ce testament contenait, par scs art. i*r cl 2e , une substi
tution qui s’étendait au-delà du deuxième degré des descendants
du légataire.
Lu conséquence, il a reçu les Dit ruât, Alsac et consorts,
opposants à l’ordonnance d’envoi en possession du 5 septembre
précédent; au fond, il a déclaré ladite ordonnance nulle‘et de nul
e ffe t , et statuant sur les dispositions des art. » " et a* du testament
dudit sieur Lavergne, il a déclaré les legs qui y étuient contenus
nuls cl de nul effet comme renfermant une substitution prohibée,
a débouté, en conséquence, Jean Rouchi de sa demande cl l’a con
damné aux dépens.
�L e sieur Rouclii a interjeté appel de ce jugement par exploit du
G décembre 1848.
:i,
,,
Cet appel saisira la Cour de Rioin de l'examen de plusieurs
questions d’une grande importance.
Ces questions consistent à décider :
j® Si le sieur Rouclii est ou non l’héritier 011 le légataire universe
du sieur Antoine Lavergnc ;
20 S ’il y a réellement substitution ou si l’ensemble du testament
ne prouve pas que le testateur a voulu moins substituer qu’ interdire
généralement l’aliénation du domaine compris dans sa disposition
principale ;
t/
5° S i , en supposant qu’il y eût substitution , elle ne devrait pas
être considérée comme restreinte aux enfants et pelils-enfanls du
donataire , et par conséquent reconnue valable ;
4° E t subsidiairement, si en la supposant même étendue au
troisième d e g r é , c’est-à-dire aux pelils-enfanls du donataire, elle
r.e devrait pas aussi être maintenue jusqu’au second degré , et
annulée seulement pour le degré ou les degrés postérieurs.
Examinons successivement ces diverses questions.
PREM IÈRE
La
loi déclare valable
Q UE STI ON.
toute disposition tcstamenta.re , ou
universelle , ou à litre universel, ou à lilre particulier , soit qu’elle
ail été fai le sous la dénomination dinstitution d 'h é ritie r , soit
qu’ellc ait été faite sous la dénomination de legs (Code civil, art.
J00 2 ); cet article assimile l’héritier au légataire universel.
O11 sait qu’ un héritier, qu’ un légataire universel succède à ions
les droits comme à toutes les charges du défunt, hercs ju ris
successor e st... et in omne ju s viortui ( L. g , § 12 de h ercd ib ’ts
m stitucndis , L,
de acquit, v e lo n iit hcrcd. )
�O r , l'institution d'héritier a toujours pu se faire de plusieurs
manières : elle se fait en déclarant un tel . ... maitre de toute son
hérédité Totius h œ redilalis m cœ dominus e s to , rectè insti-
tutiofit ( L . 4 8 , M arcian, Lib. 4 insiit. )
Elle se fait aussi quoique plusieurs de ces mots manquent dans
l’expression. Omissio alicitjus vo ca b u li iti heredis institutione
eam non vitiat, dit Pothier , dans son bel ouvrage des Pandectes
(L ib . 28, tit. 5 , de heredibus instituendis , n° 3 2 ) , et l'auteur cite
divers textes du droit romain :
V . G . S i ciiiteni sic scribat,
e s t o
;
licet non adjecerit,
creditnus solus nuncupaturn , minus scriptum.
E t s i ita ,
l u c i u s
e s t o
;
l u c iu s
h e r e s
;
tcintiimdem dicim us.
Ces observations sont fondées sur celle maxime si juste, si
ancienne et si connue même dans le droit nouveau : potms
voluntatem quani verba specturi plaçait.
O r , en parcourant le testament du sieur Antoine L a v e r g n c , il
est impossible de ne pas reconnaître que le testateur a toujours
voulu que le sieur Rouchi fût son seul héritier, c’est-à-dire sou
légataire universel.
Il Tavait voulu par scs trois premiers testaments de 1 8 0 7 , ‘^c
j S S q , de 1 8 4 2 ; il a .persisté dans celle ferme volonté et l’a con
sacrée dans son dernier testament du 10 août 1845.
Ou'on le p arcou re, en effet, et l'on y verra que Jean Rouchi
est le seul de scs parents que le testateur honore du titre de son
héritier.
11 le lui confère par l’article 5 de son testament.
11 le réitère par l’article 7.
11 le renouvelle par l'articlc 14 1 en prescrivant qu’une malle ne
soil ouverte que par sa domestique et son héritier.
11 le répète dans l’article 1 7 , en chargeant Je a n llo u ch i , son
héritier, de payer 1 ,5oo francs à la paroissed’Au"lard pour acheter
1111 Cimetière.
�Il déclare par l’arliclc 19 que Je a n R ou chiest particulièrem ent
chargé et obligé de payer toutes les dépenses dq l'enterrement et
les honoraires des ecclésiastiques ainsi que les dépenses qu’ils feront
pour leur diner.
Il veut, par l’article 27 , que les fonds qu’ il a chez le sieur F c r riè re , banquier à Paris, soient employés pour payer divers legs
particuliers, ol qu’à cet effet, 011 communique à ce banquier son
testament olographe qui sera, dit-il, entre, les | mains de mon
h éritier.
_.<nr,
Il charge par l’article 29 Jean R o u c h i, son h éritier Au domaine
de L o n g e -V e rg n e , de payer cent écus à un filleul.
<!''
Il prie par l’article 52 les personnes auxquelles il pourrait confier
son testament olographe , d’écrire aussitôt après sa mort à Jean
R ou chi, à R o u e n , en Normandie, mon h éritie r , dit-il, de se
présenter sans délai pour prendre communication ou copie du
testament, afin de pouvoir régler ses affaires.
Il prie aussi par l’article 55 le cure d’Anglard , de prendre des
mesures pour empêcher que personne n’entre dans la maison et
dans le château avant l’arrivce de Je a n R ouchi ou de quelqu’ un
envoyé de sa part.
Et pourquoi ces précautions? parce que, par l’article 2 2 , il •
donne tousses meubles, à Je a n R ouchi sous quelques charges.
E n fin , par l’article 3 5 , il charge Jean Rouchi, son h é r itie r ,
d’offrir 400 fr. au sieur P errier, son exécuteur testamentaire , pour
le remercier de ses soins et lui prouver sa reconnaissance.
Ainsi, en parcourant le testament entier du sieur Antoine L av e rgne, on voit qu’il a disposé de tous ses biens meubles et immeubles;
on y voit aussi qu’il a donné à Jean Rouchi scs biens meubles et la
plus grande partie de scs biens immeubles, sauf quelques legs
particuliers en faveur de ses antres parents.
On y voit surtout, qu’il a considéré Jean nonchi comme son
héritier ; que c’est à lui seul, à l’exclusion de tous scs autres parents,
qu’il attribue la qualité de son héritier, et par conséquent le ju s
�univers uni de son hérédité; c’est lui seul qu’il a investi de ce titre;
c’est lui seul qu’il a chargé de payer les charges de sa succession,
les legs dont il la grevait , les frais funéraires de cette succession ;
c’est lui seul qui devait surveiller, conjointement avec l’exécuteur
testamentaire, l’accomplissement des dons qu’il faisait, le paiement
des dettes dont elle serait chargée; c’est lui seul enfin qu il déclarait
son unique héritier.
Aussi le président du tribunal, M. Mailhe , magistral très ancien
et très éclairé, n’a-t-il pas hésité , sur la présentation du testament
olographe, à envoyer Jean Rouchi en possession de tous les biens
de l’hérédité, comme légataire universel ; cl si des ju g e s, plus
jeunes, moins instruits, ont réformé celle décision , on ne peut que
déplorer leur erreur, et reconnaître qu’ils n’ont pas refléchi sur la
vraie pensée du testateur, et qu’ils ont violé l’esprit du testament.
En vain se fondent-ils sur le don qui y en est fait , à d’autres
personnes , d’objets particuliers et notamment du petit domaine de
la Bastide.
Mais ce domaine était peu considérable.
Mais les legs particuliers étaient peu importants, comparés à la
fortune entière du testateur.
Mais ces legs particuliers ne détruisent pas la généralité du don
de l’hérédité, et ne dérogent pas à l’universalité de cette succession
qui est attribuée à Jean Rouchi. Car le titre d ’h é iit ic i , qui lui est
souvent donné dans le testament, lui conférait cette universalité et
des droits cl des charges attachés à l’hérédité.
C a r , d’ailleurs, c’est surtout l'intention du testateur, sa volonté
évidente, manifestée par l'ensemble du testament, que l’on doit
considérer, afin de s’assurer que le testateur avait réellement voulu
le gratifier du titre de son héritier u niversel, eu le nommant seul
son héritier. C'est, en effet, cette intention que l’on doit consulter;
potins voluntatcm quant v e rb a spcctari plucuil.
C ’est aussi dans ce sens que les auteurs de jurisprudence Ont
appliqué l'article 1002 du code civil.
�—
i3
—
A u ssi, M. G r e n i e r , clans un excellent ouvrage sur les donations
et les Testaments (tome i " de la seconde édition, page 5 i 5 ),»
d é c la re -t-il, que , » en droit, le mol univetsalitè a toujours été
» entendu dans le sens d’une prépondérance évidente, attachée au
» titre d’un légataire par rapport à celui des autres.
Ainsi , on peut donner la qualité de légataire ou héritier
» universel, i° à celui qui est appelé à recueillir là totalité de
» cette succession; 20 à celui qui ne recueillerait que les biens
» de cette succession , moins les réserves affectées à certains
» héritiers.
»
»
»
»
» 5° A celui qui se trouve en concours avec un légataire , non
d'u ne portion ou de quotité de biens d e la succession p rise
en masse , niais seulement d’objets qui doivent bien entrer en
contribution pour le payement des dettes et des charges de la
succession, tels que les imm eubles ou le m o b ilier , ou une quo-
» tilé fixe des immeubles ou du mobilier, mais auxquels le légis» laleur n’a pas attaché le titre d’universalité d’ une manière aussi
» évidente que celui qui est appelé à recueillir en misse le restant
» de l’hérédité. »
On remarquera q u e , dans l’espèce, aucun des legs particuliers
ne pourrait être soumis au payement des dettes et charges de
l’hérédilé.
Le sieur Rouchi devrait seul les acquitter toutes. O r , comment
le pourrait-il s’il était privé de la qualité d’héritier et de tous les
avantages attachés à ce titre.
Un arrêt de la cour de Limoges du 8 décembre 1 8 0 7 , a con
sidéré comme legs universel une disposition testamentaire , bien
que le testateur eut omis de disposer de quelques objets peu im
portants de sa succession, et qu’au lieu d’appeler les héritiers insl !tués à recueillir conjointement, il ¡»il, au contraire, attribué à
chacun d’eux un lot composé d ’objets déterminés ( V . cet arrêt
dans le journal de Sirey , 5 ç) , 2. 27).
/
�De moine , un legs qualifié d’universel par le testateur, ne cesse
pas d'avoir cc caractère, par cela seul que le testateur aurait dis
posé de la nue propriété de quelques-uns de ses biens au profit
d’autres légataires , en réservant seulement l’usufruit au profit du
légataire universel. (Arrêt de la cour de cassation du 20 novembre
)8 /j5 . Srrey, 4 3 , t.. i 8 5 ()). Il existe d’autres arrêts analogues.
.1
!. . .
.r.
Aussi, Vazcillesij dans sou traité des successions, sur l’article
i o o 5 , dit-il que loilegs ne cesse pas d’être universel, quoiqu’il
soit grevé de legs particuliers et même du legs à litre universel
défini par l’ article 1 0 1 0 , et il donne un exemple ainsi conçu :
« P au l, dit-il, est légataire universel , soit qu’il ait été institué
»
»
»
x
»
»
»
.héritier, ou que tous les biens lui aient été légués, à la charge
de payer une somme fixe ou de donner un objet déterminé à
P ie rr e , soit que le testament porte, en première ligne, le legs
de Pierre et ensuite le legs universel. Dans ces divers cas, Paul
est également h éritier an légataire universel, puisqu’il recueille
tous les biens sans partager avec personne , sous Ici distinction
seulem ent des objets déterminés qu’il doit remettre aux autres
» légataires. Aucun de ces légataires n’a de droits successifs. Paul
j> seul représente le défunt, universo ju r e , avec scs droits et ses
» obligations. »
Les autorités cl les arrêts que nous avons invoqués sont fondés
sur l'interprétation du testament, et ont pour base la m axim e,
vo/nntatern potins quant v e tb a specta rip la ça it.
Jean R o u c h i, auquel le testateur a attribué la plus grande partie
des biens de sa succession , auquel il a donné des valeurs d’une
prépondérance évidente sur les legs particuliers qu'il a déférés
aux autres légataires , qu’ il a qualifié même seul du titre de son
h éritier, et qu’il a chargé de payer à d’autres diverses sommes,
auquel ¡1 a tic plus confié le soin de scs funérailles et l’obligation
d’en faire les dépenses, cc Jean Rouchi a reçu évidemment du tes
tateur l’ universalité des droits de l’hérédité, et seul il doit profiter
de ses avantages, comme seul aussi il est grevé de ses charges.
V
�Et remarquons que le plus grand nombre des legs particuliers
sont faits à des parents , à des héritiers naturels du défunt, à des
personnes qui auraient à partager avec lui la succession qu’ils lui
disputent, et q u e , leurs legs n’ayant pas été faits par préciput ou
avec dispense de rapport, ils les perdraient si leurs prétentions
étaient accueillies.
Mais ces prétentions viendraient se briser contre le testament,
contre le titre d 'h é ritie r , o u , ce qui est la même chose, de léga
taire universel, qui a été attribué à Jean Rouchi, soit par les e x
pressions littérales et géminées de ce testament, soit par l’ensemble
«le cet acte de dernière volonté.
L ’examen de la question que nous venons de discuter rendrait
surabondante celle de toutes les autres questions proposées dans le
mémoire. Si Jean lîouchi était considéré et reconnu comme héri
tie r, c’est-à-dire comme légataire universel du sieur Antoine L a
v e rg n e , lui seul aurait le droit d’examiner la question de substitu
tion. Car celle substitution, fût-elle prononcée pour une partie de
l ’hérédité , lui seul devrait prolitor de la nullité qui en résulterait.
T ous les autres héritiers naturels, tous les intimés, par cria seul
qu’ils ne sont pas héritiers réservataires , seraient non rccevables
à soulever celte difficulté cl à soutenir que cette prétendue substi
tution était prohibée, puisqu’ils ne devraient pas profiter de celte,
prohibition et d’une nullité dont les conséquences et les avantages
ne devraient appartenir qu’au légataire universel. C ’est ce qu’a
décidé en thèse la cour de cassation, par un arrêt du 24 mai 1807 ,
rapporté dans le journal de S i i e y , t. 6 7 , 1, 5 1 7 . C ’est aussi ce
qu’avaii jugé antérieurement la cour cle Montpellier, parm i arrêt
du 10 février i 8 5 G, rapporté dans le même journal, t. 5G, 2 , 54g.
Car la nullité ou la caducité des legs particuliers profite à l’héritier
testamentaire seul ou au légataire universel, ainsi que l’ont décidé
de nombreux arrêts, ainsi que le déclarent aussi tous les auteurs et.
notamment Merlin , Grenier pour le nouveau droit , Hourjon et
J'othier pour l’ancien.
�DEUXIÈME
QUESTION.
L e testament du sieu r L avergne contient une prohibition
(Valiéner plutôt qu ’une substitution.
La loi prohibe les substitutions par l’article 89Ü du code civil ,
mais elle les définit expressément pur le même article , ainsi conçu :
« Les substitut ions sont prohibées.
» Toulc disposition par laquelle le donataire, l’héritier institué,
» ou le légataire sera chargé de conserver et de rendre ¿1 un
» tiers , sera nulle , même à l’égard du donataire , de l’héritier
» institué ou du légataire. » Des termes formels de l’article , il r é
sulte que, si le testateur 011 le donateur n’a imposé au donataire, à
l’héritier ou au légataire, ni la charge de conserver, ni la charge
de rendre ¿1 un tie rs , il n’y a pas de substitution.
Cependant, quoique ces charges expresses ne fussent pas écrites
dans la disposition , quelques personnes ont voulu trouver une
substitution dans l’ensemble des expressions qui constituaient cette
disposition.
Mais ce système inexact a été repoussé par les auteurs et par
les arrêts.
Parmi les auteurs, on peut citer T ou llier, tome 5 , n° 24 ;
Rolland de Villargues, n° ¡ 7.5 et suivants; Duranton , t. 8, 11*4 2 ;
Coin-D clille, n° 4 * •
Parmi les arrêts, 011 peut invoquer un premier arrêt de la cour
de cassation du 24 mars 1 8 2 9 , cl un second arrêt de la même
c o u r, du 5 juillet i 8 5 :i; un troisième arrêt de cette cou r, du 25
juillet 1854. Ces trois arrêts ont décidé en thèse que, s i Vobliga
tion de co n serva et de rendre n ’est p as littéralem ent e x p rim é e ,
le doute doit s'interpréter en fa v e u r de la disposition. C ’est
l'application de la maxime si connue : j>otius ut va len t actus
�—
I?
—
quani ut p erea t ( V . les arrêts cités dans le journal de S ire y ,
tome 2 9 , 1 , 2 9 3 ; tome 3 2 , 1 , 4 3 o ; tome 34 > i> $77- Les voir
aussi dans le journal de Dcnevers.)
Dans le testament du sieur L a v e rg n e , il n’existe pas de charge
de conserver; il n’existe pas aussi de charge de rendre à un tiers.
On 11c devrait donc pas y voir de substitution.
Mais, dit-on, il y a des expressions qui en tiennent lieu.
i° Jean Rouchi et ses descendants, ses enfants sont rappelés dans
la disposition principale ;
20 11 y a prohibition d’aliéner le domaine de Longe-Vergne; or,
ces termes , rapprochés entr’e u x , constituent une substitution per
pétuelle et prohibée.
Ainsi , contre les décisions des arrêts que nous avons rappelés ,
c ’est par une interprétation qu’on a cru découvrir une substitution
prohibée, c’est-à-dire que le doute qu’on se faisait a été interprêté
contre la disposition.
Mais cette interprétation rigoureuse était contraire aux principes
qui veulent que le doute soit interprété en faveur de l’acte.
Mais, d’ailleurs , rénonciation des descendants , des enfants, ni
même la prohibition d’aliéner’, n’autorisaient pas une telle inter
prétation.
i° Le don principal est fait à Jean Rouchi uniquement, sans
aucune charge de conserver et de rendre. Il y est dit, en effet :
« J e laisse à Jean Rouchi, cordonnier-bottier, à Rouen, en Nor-
» rnandie, le domaine de Lon ge-V ergne , etc.
11 est vrai que le testateur ajoute plus bas-:
« J e lu i en fa is don p o u r dire entièrem ent ¿1 lu i et p o u r en
» jo u ir lu i et ses descendants après ma m o rt , à l’exclusion de
» mes autres parents et héritiers; car telle est ma volonté, qu’il en
» soit le seu l et unique h éritier, lui et ses enfants après l u i , de
» génération en génération.
�—
b
i8
—
Là s’arrête la disposition.
L ’on voit que c’est Jean Rouchi seul qui est appelé à recueillir
le domaine.
Que c’est lui seul qui est déclaré par le testateur son unique
héritier.
S ’il y est parlé des descendants de celui-ci, le testateur y dit :
P o u r en jo u irt lu i et ses descendants , après ma mort; s’ il veut
qu’il en soit son seul et unique héritier, lui et ses enfants après l u i ,
de génération en génération , c’est parce qu’il sait q u e , suivant les
lois de la nature, et conformément aux règles ordinaires des suc
cessions, les enfants, les descendants jouissent après leur père , ot
lui succèdent de génération en génération.
L e testateur n'exprime ici qu’une pensée générale et commune à
tous les hommes , qui considèrent les enfants, les descendants
comme devant jouir après leur p è r e , comme destinés à lui su ccé d er.
D ’ailleurs, il n'institue pas les enfants, les descendants de Jean
Rouchi, ses héritiers, comme leur père qu’il déclare , au contraire,
son seul et unique héritier.
D ’ailleurs aussi, il ne charge pas Jean Rouchi de conserver et
de rendre à scs enfants , à scs descendants, le bien qu'il donne à
lui seul.
E t comment aurait-il pu choisir pour ses héritiers les enfants de
Jean Rouchi, puisqu’il n’en existait ni au moment du testament, ni
à celui du décès du testateur ?
Comment celui-ci aurait-il pu penser à substituer à Jean Rouchi,
son unique donataire du bien de Lon gc-V crgnc, les enfants que ce
Jean Rouchi laissait ou laisserait, puisque Jean Rouchi n’était pas
m arié, et même ne l’avait jamais été, au moment du décès de son
oncle ?
Que deviendrait enfin celte prétendue substitution , si Jean
Rouchi ne se mariait jamais ou ne laissait aucun enfant, aucun
descendant ?
�— 19 —
E l remarquez que le tcstaicur n’impose pas même à Jean Rouchi
l’obligation d e sc marier, cl que, par conséquent, le sieur Lavergne
ne peut avoir même l’cspcrance fondée que son donataire aura un
jour des enfants, des descendants qui pourraient recueillir les biens
donnés.
Nouvelle preuve, que rénonciation dans le testament, d’enfants ,
de descendants , ne sont que des expressions vagues, sans portée ,
sans consistance, échappées à un prêtre peu éclairé sur les lois
françaises, et qui, n’élant pas , au reste, contenues avec précision
dans les dispositions principales, ne peuvent ni en détruire, ni
même en faire suspendre l’exécution, sous prétexte de substitution.
Mais trouvera-t-on une substitution dans la prohibition d’aliéner
contenue dans le testament du sieur Lavergne?
« L e domaine de Longe-Vergne , y est-il dit, ne sera ni vendu ,
» échangé, ni m orcelé, ni grevé de dettes sous quelque prétexte
» que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque famille,
» tel que je l'ai laissé à ma m o rt, etc. »
Remarquons d’abord que cette prohibition n’est pas perpétuelle ,
comme on le suppose dans le jugement où l’on déclare la substitu
tion perpétuelle; en rapprochant la première partie de la disposition
avec l’intcrdiction de vendre.
Ce rapprochement est, d’ailleurs, vicieux sous plusieurs rapports.
i° La prohibition de vendre n’est pas déclarée faite au profil des
enfants et des descendants de Jean R o u c h i, donataire;
a0 Ne fût-elle fuite qu’à Jean R o u c h i, elle serait nulle comme
étant absolue , quoique temporaire seulement; comme restreinte
à la vie de ce Jean Rouchi , parce qu’elle établirait à son égard une
espèce de droit de main-morte , interdit par la législation nouvelle,
et notamment par l’article i*r du titre 2 de la loi du i 5 mais 179 0 ,
qui abolit « lout droil prohibitif des aliénations et dispositions, à
» litre de vente, de donation entre vifs ou testamentaire, et tous
» autres eil’cts de main-morte réelle, personnelle ou mixte, qui
» s’étendraient sur les personnes ou les biens ; »
�3° Celle prohibition serait nulle surtout si on l’appliquait à lous
les descendants de Jean R o u c h i, et si l’on considérait le testament
comme renfermant une prohibition p erp étu elle, parce qu’elle serait
contraire, non-seulement à la loi citée, mais encore aux bonnes
m œ u rs, à l’ordre public , qui veulent q u e le commerce des biens
soit libre ; elle serait nulle par suite comme impossible et proscrite
par l’art. 900 du Code civil, qui veut que les conditions impossibles,
et celles qui sont contraires aux lois et aux mœurs soient réputées
non écrites , et que , malgré leur abolition , la disposition entre vifs
ou testamentaire n’en reçoive pas moins sa pleine exécution.
C ’ est aussi ce qu’ a jugé en thèse un arrêl de la Cour de Paris,
du 1 1 mars 1 8 5 6 ; et telle est l’opinion de T o u llicr, dans son droit
civil français , tome 6 , n° 688.
E t remarquons que , s’il s’est présenté quelques décisions con
traires, ce n’est que dans les cas oii la prohibition de vendre n’était
que momentanée, et que surtout elle n’élail pas absolue.
O r , comment une obligation , une condition nulle, pourrait-elle
valoir pour faire reconnaître et déclarer l’existence d’unesubsliiution
prohibée? E t ne sait-on pas que ce qui est nul ne peut produire
aucun effet, suivant la maxime consacrée par la législation de tous
les temps : quod nnllum est, milium producit effectuai.
C ’est cependant cette maxime qu’a violée le tribunal de Mauriac,
en se servant de la prohibition d’aliéner, et en la rattachant à la
disposition principale du testament, pour en conclure que ce testa
ment renfermait dans son ensemble une substitution prohibée.
Si ce tribunal eùl réfléchi sérieusement sur le testament, il eût
reconnu que cette prohibition de v e n d re , d'échanger, de m orceler,
de g rever d’aucune dette, élail l’objet principal, l’objet même
unique de la pensée du testateur; que , dans son ignorance des lois
françaises, ou, dans leur oubli, il voulait surtout que son domaine
fût conservé dans la même situation, avec la même valeur qu’il
avait au moment où il le laissait; qu’il s’occupait peu d’une p ré
tendue substitution à laquelle il 11c songeait même pas, cl donl les
avantages n’auraient tourné qu’au proiit d’enfants qui n’ existaient
�pas au moment de son décès, et qui, peut-élre • »’existeraient
jamais; mais que so» seul désir, son désir évident était que son
domaine restât intact, et fût conservé dans toute la splendeur dont
il l’avait orné ; il voulait la conservation complète, intégrale de
son domaine; il rattachait en quelque sorte son existence morale,
sa renommée future , à la conservation de ce domaine
qu’ il
avait créé ou au moins embelli à l’aide de ses soins et de ses re s
sources, et dont il voulait prolonger la durée au-delà de sa vie
physique, en exprimant en quelque sorte le vœu d’immortalitc qui
germe dans le cœur de tous les hommes.
C ’est donc une prohibition d’aliéner, et non une substitution, qu’il
a établie par son testament; et puisque, d’aprcs l’art. 900 du C od e,
d’après toute la législation française, cette prohibition est nulle, elle
doit être annulée sans porter atteinte au don principal fait en faveur
de Jean R o u chi, en respectant ce don même , en ordonnant l’exé
cution , sans y porter atteinte à l’aide d’une prohibition illégale,
dont la nullité ne permet ni de s’en servir à établir une substitution
qui n’est pas expressément écrite dans l’acte , ni même de con
courir à l’idée de cette substitution.
Ainsi doit se décider la seconde question proposée.
TROISIÈME
Q UE S TI O N.
*
Y a u ra it-il même dans le testament une substitution, elle ne
serait p as prohibée.
Ici se présente une question d’interprétation qui, d’après les prin
cipes , doit toujours être résolue en faveur de l’acte testamentaire.
L ’art. S96 du Code civil prohibe les substitutions, c’est-à-dire les
donations ou les legs, faits à la charge par le donataire ou le légataire
de rendre à un tiers les objets donnés ou légués. Mais la loi posté
rieure du 1 7 mai 18 2 6 a modifié cette prohibition , en déclarant que
les biens dont il est permis de disposer « pourront être donnés avec
�charge de les rendre à un ou plusieurs des enfants du donataire,
ries ou à naître , ju squ'au d eu x ièm e degré inclusivem ent. »
*
Le testament du sieur Lavergnc donne, après sa mort, « à Jean
»
»
»
»
»
llouclii, son neveu , son domaine de ! .onge-V ergne ; il lu i en
fait don p o u r être entièrem ent ¿1 fu i, et pour en jo u ir, lui et ses
descendants, après sa m o r t ; ...... sa volonté est qu’il en soit le
seul et unique héritier, lui et ses enfants après lui , de génération
on génération. »
C ’est donc à Jean Rouchi seul que le domaine est donné ; c est
lui qui en doit être le seul et unique héritier.
Riais 011 supposant qu’on pût trouver une substitution dans l'addi.
lion de ces mots : p o u r en jo u ir lu i et ses descendants , ou dans
ceux-ci : q u 'il en sera le seu l et unique héritier, lui et ses enfants
après l u i , ces expressions ne constitueraient qu’ une substitution au
deuxième degré des enfants du donataire , telle qu’elle est autorisée
par la loi du 17 mai 1826.
C a r, d’un côté, l’expression pour en jo u ir lui et ses descen
dants après ma m o rt , 11e se trouve pas dans la clause principale,
constitutive du don fait à Jean Rouchi seul; elle n’est placée que
dans une addition indicative du mode de jouissance, c’est-à-dire
d’une jouissance qui doit naturellement passer aux descendants, si
le donataire 11’en dispose pas lui-tncme ; il n’y a , d’ailleurs , de la
part du testateur , aucune charge de conserver cl de rendre à ses
descendants.
I)’ un autre côté, les mots.fCJ descendants s’entendent naturelle
ment de ceux qui descendent en premier degré du donataire, lorsque
la clause elle-même ne dit pas (¡ne le testateur a entendu les appli
quer au second degré et à des degrés postérieurs, lorsque surtout
il 11'¡1 pas chargé expressément de conserver cl de rendre aux des
cendants du r>c et du 4* degrés.
Quant à la partie de la clause où il est dit que le testateur veut
que. Rouchi soit son seu l et unique h é ritie r , lu i et scs enfants:
a piès l u i , de génération en génération , ces expressions renfer-
�—
3 3
—
^
mcnl moins l'expression d’une volonté positive que l'indication de
ce qui se passe ordinairement; car les enfants sont ordinairement
les héritiers de leur auteur, cl c e de génération en génération. Les
mots enfants ne peuvent aussi s’entendre que des enfants au premier
d e g r é , aux termes de l’article 7 3 5 du Code civil, d’après lequel
chaque génération constitue un degré de parenté.
C ’est ainsi qu’ un arrêt de la Cour de Rouen , du 23 juin 1848 , a
décidé qu’ une substitution , faite conformément à l’a n . 10 48 du
Code c i v i l , c’est-à-dire à la cîiarge par les légataires de rendre les
biens à leurs enfants, ne comprenait pas même les petits-enfants,
et devait s’arrêter au i*r degré.
C ’est dans le même sens qu’ un arrêt de la Cour de cassation , du
5 février 18 5 5 , a jugé que la charge imposée par le testateur au
légataire, de conserver et de /(tisser les biens à ses enfants ou à
leurs héritiers, ne devait s’entendre que des descendants au premier
d e g ré , des enfants premiers appelés, le mot héritier n’étant souvent
employé que pour désigner les descendants au .premier degré. V .
ces arrêts rapportés dans le journal d e S i r e y , lomcs 49, 2, 1 8 1 , et
tome 55 , 1 , 87.
O11 devrait donc rigoureusement n’appliquer les mois descen
dants ou enfants , employés dans le testament , qu’aux enfants issus
au premier degré de Jean Rouchi. Car c’est le sens ordinaire attaché
à ces expressions.
Biais si, à cause des mots d e génération en génération, 011
veut entendre par l’expression les en fan ts , plusieurs degrés de
gén ération , au moins ne doit-on l’étendre qu’à deux d e g ré s, c’està-dire aux enfants et aux petits-enjants du donataire, cl cela soit
d ’après la lettre même du testament, soit d'après le sens naturel et
grammatical que présentent les mois d e génération en génération,En effet, i°le testament porle seulcmenu/e génèrationengénération
au singulier, cl non pas de générations en générations, au pluriel ;
il 11e s’applique donc littéralement qu’ aux d e u x g é n é r a t i o n s qui se
succèdent immédiatement.
�-
a4
-
?.■’ La volonté du testateur , contînt-elle , quelque vague qu'elfe
s o i t , une substitution , elle serait exactement remplie par la trans
mission des objets donnés aux pelrts-enfants du donateur. Car cette
transmission compléterait les deux*générations , sans compter le
donataire; l’une pour les enfants, l’autre pour les petits enfants.
Ainsi, sous ce rapport même, les dispositions de la loi du 17 mai
182G , seraient observées , lors même que le don du domaine de
Longe-Vergne renfermerait une substitution, puisque les enfants et
les petits-enfants du donataire seraient appelés à en recueillir les
avantages, et que la loi n'exige rieu de plus.
Pour étendre cette prétendue substitution an troisième, au qua
trième d e g ré , 011 à des degrés postérieurs, argumenterait-on de lu
clause relative
à la prohibition d’aliéner ,
d’é ch a n g e r, etc. ,
contenue dans une autre partie du testament.
I\Iais nous avons déjà fait remarquer que cette clause , étant
nulle, ne pouvait produire aucun effet; qu’elle ne devait être ratta
chée à aucune partie du testament; qu’elle ne pouvait, par consé
quent , pas plus servir à le faire annuler ou modifier , qu’elle 11e
pourrait être employée pour le faire valoir.
Au reste, les termes de cette clause sont absolument insignifiants
pour la question.
D ’une part , nous avons déjà fait observer qu’elle ne portait pas
une interdiction perpétu elle d’aliéner , en sorte que la prohibition
qu’elle contient doit se restreindre à Jean Rouchi lui-même et aux
degrés des enfants qui lui .seraient substitués , si substitution il y
avait.
D ’une autre part, la rédaction de la clause est en harmonie avec
cette idée restrictive. Car, s’il y est dit que chaque héritier, chaque
famille fera v érifie r, en entrant en possession du domaine , les r é
parations qu’il y aurait a faire pour l’entretenir , le cultiver et l’e x
ploiter , cette recommandation peut et doit s’entendre d’abord des
enfants au premier d e g r é , ensuite des enfants au second degré.
Ainsi les enfants au premier degré de Jean Rouchi , s’ils étaient
substitués , auraient à faire vérifier , à la mort de Jean Rouchi, do-
�nntairc, et conimc héritiers de celui-ci, les réparations dont le d o
maine de Lon ge-V ergne serait susceptible , pour le remettre dans
son premier état.
Et à leur tour, les enfants au deuxième degré de ce donataire,
ou ses petits enfants , auraient à provoquer une vérification sem
blable, comme héritiers des enfants du premier degré.
Ainsi se trouverait remplie la condition imposée à chaque héri
tie r, à chaque famille, à chaque possesseur de ce domaine , s’il y
avait réellement substitution, môme en faveur des descendants ou
des enfants du donataire, jusqu’au second degré.
On doit donc reconnaître qu’en supposant que le testament con
tienne une substitution, malgré l’absence de la charge de conserver
et de rendre , cette substitution doit se restreindre aux enfants et
aux petits-enfants de Jean R o u c lii, donataire.
Cette interprétation est recommandée par l’ensemble de la clause
constitutive de la donation.
E lle est exigée par ce principe conservateur qui veut que l’acte
soit interprété de manière à le faire valoir plutôt qu’à l’annuler.
E lle a été consacrée par les trois arrêts de la cour de cassation ,
des 24 août 1 8 2 9 , 5 juillet 186 2 , a 5 juillet 1 834 » ilue nous avons
ci-dessus cités.
E lle est en harmonie enfin avec les idées de justice , qui ne per
mettent pas que , pour annuler une disposition testamentaire , ou
suppose légèrement que le testateur a voulu violer textuellement
la l o i , dans ses règles fondamentales.
QUESTION
SUBSIDIAIRE.
Si, en s'écartant des principes que nous avons ci-dessus rappelés,
des arrêts que nous avons cités , des termes mêmes du testament,
sainem ent interprétés , 011 voulait y voir une substitution prolon\
�--- 26 --gce au-delà du second degré des enfants du donataire, cl s’étendant
au troisième degré ou à des degrés postérieurs, il serait légal et
juste , dans ce cas-là môm e, de prononcer comme on le faisait au
trefois , c’esi-à-dire de réduire la substitution aux deux premiers
degrés , en maintenant le don principal et la charge de conserver
et de rendre pour les enfants et les petits-enfants , en l’annulant
pour le surplus.
Une telle décison serait en harmonie avec la législation ancienne,
et elle ne blesserait pas la législation nouvelle.
E n effet, cela aurait pu paraître douteux sous les principes ri
goureux et absolus de l’article 896 du code c iv il, qui'prohibait
toute substitution, et qui annulait la disposition principale , même
à l’égard du donataire cl du légataire.
Mais ces principes extrêmes ont éié modifiés par la loi posté
rieure du 17 mai 1826.
Celle dernière loi n’a même rien de semblable à l'article i o 58
du code civil qui, en permettant à un père ou à une mère de donner
la quotité disponible à un ou plusieurs de leurs enfants , autorisait
ceux-ci à rendre les biens donnés aux cnfanls nés ou à naître au
p rem ier degré seulement ; en sorte que si la charge de rendre ne
devait pas profiler à 1011s les enfants du donataire, elle pouvait cire
considérée comme nulle.
Telle n’est pas la loi du 17 mai 182G.
Celle loi permet à toute personne , p è r e , mère ou étranger, de
disposer, aux termes des articles Q1 5 , 9 1 5 et 91G , de tousles biens
dont la disposition est permise par ces articles.
Elle autorise aussi à charger le donataire , quel qu’il s o i l , de
rendre les biens donnés , non seulement à tous ses enfants nés ou à
naître, mais à un ou à plusieurs d’entr’e u x , à son choix.
En 1111 m o l , celte loi du 17 mai 182G nous a ramenés aux dis
positions de l’ordonnance d’Orléans de
i 5 6 o , et de celle de
Louis X V , rendue en 1747 , sur les substitutions : La première
�~ 27 —
Jsb f
ordonnance déclarant, par l’article 5 9 , que les substitutions qui
seraient faites à l’avenir , 11e pourraient excéder d e u x degrés ,
sans y comprendre l'institution ou la première disposition; la se
conde ordonnance disant aussi, par l’article 5o , que toutes les
substitutions , en quelques termes qu ’elles soient conçues ,
POURRONT
S’É T E N D R E
AU-DELA
DE
DEUX
DEGRES
DE
n e
SUBSTITUES
,
outre le donataire, l’héritier institué ou le légataire.
La loi du 17 niai 1826 est absolument semblable aux ordon
nances de i 56o et de 1 7 4 7 ; elle ne s’exprime même pas en termes
aussi prohibitifs que ces anciennes ordonnances qui disaient que les
substitutions ne pourraient excéder deux d e g ré s, ne pourraient
s’ étendre a u -d elà de d e u x degrés , tandis que la loi de 18 2 6 se
borne à déclarer que les biens pourront être donnés à la charge de
rendre aux enfants jusqu’au deuxième degré.
On ne pourrait donc argumenter de cette loi de 1826 , comme
on l’aurait pu des expressions ne pourront, dont se servent les lois
anciennes, et in v o q u er, à l’égard de cette dernière l o i , cette
maxime ancienne : S y liaba
n o n
prœposita verb o p o te s t , tollit
potentiam ju ris et ja c li.
E t cependant, sous les anciennes ordonnances , une substitution
au troisième ou au quatrième degré 11c rendait pas nulle la dispo
sition principale, ni même la clause de substitution ; seulement il
en résultait que les substitutions étaient réduites aux deux degrés
autorisés par les ordonnances. C ’est ce que nous enseigne T hévenaut-Dessaules dans son traité complet sur l’ordonnance de
1 7 4 7 ; il le dit dans le chapitre 77 , au n° 1 1 1 2 , ou il déclare que
« le second substilué, qui a reçu les biens d’un premier substitué,
» possède,ces biens librement, sans charge de lideicommis , puis-
» qu’après les deux degrés , il né peut y avoir de substitution
» valable.
11 le répète au n° 1 1 i 5 , où il dit aussi que la substitution est
caduque au-deUi des d e u x degrés.
L a disposition était nulle au-delà de deux degrés , mais non
pour les deux degrés ni pour le don principal.
�—
28 —
Telle était la règle sous l’ordonnance de 1 7 4 7 ; telle elle doit
dire sous la loi du 17 mai 18 26, qui est conforme à cette ordonnance.
Mais appliquer cette nullité, soit au don principal, soit aux deux
degrés de substitution , c’est créer une nullité , c’est violer la
maxime : U tile p e r inutile non vitia lu r.
Argumenterait-ou de l’article 896 du code.
Mais l’argument ne serait pas exact. En défendant d’une manière
absolue de faire une substitution , l'article 896 devait imposer une
peine à celui qui violerait celte défense; de là la nullité qu’elle a
prononcée contre le don principal qui serait grevé de la charge
de conserver et de rendre.
Mais la loi de 1826 , en rétablissant l’ancien droit , a par cela
même aboli la clause pénale qui était infligée par le droit nouveau.
D ’ailleurs c’était dans l’intérêt des transactions commerciales,
c’était pour faciliter les ventes que l’article 896 avait prohibé les
substitutions.
Les législateurs de 1 8 2 6 , ayant apprécié différemment les in
térêts de ces transactions, ayant rétabli la faculté de substituer, telle
qu’elle était autorisée dans l’ancien droit, ayant aboli l’article 896
et la prohibition qu’il prononçait, la clause pénale portée par cct
article a dû disparaître avec la prohibition qui en était la cause,
cessante c a u sa , cessât effect us.
Pou r qu’elle eût été maintenue malgré la suppression de la loi
prohibitive, il aurait fallu que la loi de 1 8 2 6 , déclarât de nouveau
que cette peine aurait lieu pour tous les cas où il y aurait substitu
tion au-delà des premier et deuxième degrés autorisés par cette
loi. O r , elle 11c dit rien de semblable.
Aussi M. Toullier , dans son droit civil français, traitant une
question semblable, même avant la loi de i82t'>, sous l’empire seu
lement de l’article 1048 qui , par une exception particulière, p e r
mettait à un père de donner à son fils, à la charge de rendre à ses
enfants au premier degré seulement , décide-t-il v que la charge
�— '-»9 » de rendre aux petits - enin nls , serait nulle , mais que le surplus
» subsisterait , parce qu’en ce cas le code n’a pas prononcé la
» nullité de toute la disposition, et qu’on ne peut suppléer une
» nullité. » E l l’auteur rappelé la maxime utile p e r inutile non
'vitiulur (v. au lome 5 , n° 729. )
M. Toullier cile en note, à la même p a g e , l'opinion de M.
Daniels , magistral très-distingué de la cour de cassation , qui , lors
d’un arrêt du 5i mars 1807 , disait que la nullité de la clause de
restitution 1 1 opérait pas la nullité de l’institution. (V. l’arrêt dans
le journal de S irey, an 1807, r. p. 19 8, cl dans celui de Denevcrs,
lome 5 , an 1807 , pages 19 5 -19 8 .
Ainsi, même sur celte question subsidiaire , le jugement dont est
appel se serait trompé.
L ’on voit donc que le tribunal de Mauriac a mal jugé sous tous
les rapports.
.
Il a mal jugé en refusant de reconnaître dans le sieur Rouclii le
!
titre d’héritier, et par conséquent de légataire universel de sou
!
on cle, que celui ci lui attribuait, à l’exclusion de tousses autres
parents , dans de nombreux passages de son testament.
Il a mal jugé en croyant voir dans ce testament, une substitution,
tandis qu’il n’y avait réellement, et que le testateur n’avait voulu y
consigner qu’une prohibition d’aliéner , prohibition nulle de plein
d r o i t , mais qui laissait subsister le don principal et dont la nullité
11e permettait pas de s’en servir pour constituer une substitution.
Il aurait mal jugé lors même qu'il y aurait substitution , parce
que , par sa lettre , comme par son ensemble , le testament 11e
renfermerait qu’une substitution au 2* degré , qui était autorisée
par la loi du 17 mai 1826 ; parce qu’aussi la disposition devrait ,
au besoin, èlrc interprétée favorablement dans l’intérêt de la validité
de l'acte, potins ut valent quant ut perçut.
Il aurait mal ju gé, même subsidiaircmcnl, s’ il y avait eu une
substitution perpétuelle, en ne la restreignant pas aux deux pre-
i
5
I
iL y
�'
-
3o -
miers degrés, comme cela avait lieu sous l’ordonnance de 174 7 »
à laquelle nous a ramenés la loi du 17 mai 1 8 2 6 ; il aurait mal jugé
en créant une nullité que cette dernière loi n’établissait pas, et en
considérant une clause de restitution comme une clause de nullité.
M e A L L E M A N D , Avocat consultant.
Me R O U H E R ,
> Avocats plaidants.
Me DUMIRAL , )
M e L A M Y , Avoue.
RIO M . —- A. J O U V E T , Imprimeur-Libraire, près le Palais.
�« p i A v L t î^ .
^ L-W <\u *
^
M U K ‘t
/ Ci^j j ^mj ->«J( u j «% ¿
//¿jOkC»«*m <u ^ U j
Qi&JìtjICO»».
***
i* CLtdZ&t* füirfír
O u /« i\ M <
^*— ■"
Ck U t i à u i v t u . uC^CIWHCufcCO ^ f C4»*loi <M Ù ^ J 1
^ l/lu â tu iu
/O
*”
^ l U i j^ T Ory»u/ / a / ( l y u l t ú ) u . /t^ ftt« * a t>
fl ‘ * * - " ° 1
'em»*-»
c u u » » ^ i « » u o 7 u . « * “ *o«^
U f M j J ì k u . r /^«UUiCbcU
j gGtaU|>M*r tW A|
%t**4 " (I ^OcA ÿ
r*^uc (¿4
ffQjAjL U /budr O u UMIUOS
/
X. t l J V ~^^l >xt
«A~ U t u ilM C U a J r O U
CmA •
"2^;úvÍ
Çÿi. bH «U.
ovi **» í /
^
( w « u ' i »•» ^ to |iy iu > « « ^
^
U4
¿
/c<^ ojI mjuw
.<*- ^ u ! o«« Im J W
^
—
C V l^ u n u r
Í 9.
OVk-
r ~
u
< / if
| í **»»mT ^
,i:^
C Û vw M <uucy
>
/
“ *
»**, U
* L _ / < »a, o\ <«~ J
—
o » ^ * "** ^
^^x }^ ~
/< i ¿ t ____ »
k
^
f l « “ “ " “ “ * r - — *“ *
“ '“
T 5 * <l- J u ‘ - ~
dülu^u ^<u ¿L¿*Jfl
o"
^
' ~'"r
^
__
att . ^
^4
/<
4
***(f
<j| *“*- t t -
u M M A t ir c V A u u k ^ I U r ¿ t J
&—
~ b ( WAHt*. «-** '
^
.
/ U jkl^SO jO M r'
mU
A
Ÿ r * A /u í> ^
,n
*"
.
/»"^X ih T 'V ^ r t i h ^ p . . .
c it.
1
^HU tü««Xwfcíi fÿA.r**%
^
^ y tfíM K i
^
w
‘
'
(h. lu^> Cl1*1i*Úy
o í o i M ) W < « Y u> « * '* » ^ » '" " * « f > * ^ “ “ “ i / k i ~ í * ~
/ f 4MU«Vin/\ CaXv l« ^ Í% ¿ 4jU*jL>
C^Mm
ii>
/óu% ¿ía
A < U rh io
6
u *i ,*y j
—
¿X fU w ^ Y
<x ) c Y
/*
^
oC(JUVlM^«M
�U ÄoH
^
MM ¿ u m
/< (<M«ultl|i V * M »
ttftU *; i -‘ '
0 / -4. ü
ii
^
f
f'
^
^
^ú d í~ (M
tM kU xrut^^
2u ^ iti> l| J0tlX Û > U Ù
Òy | i \ u * U ^
PU\
*** lu fA iAA4J¿K*JVSiJi ^ ji> ü r~
j tjLßjJl*. ß\**r&^j i i i \ —
¿*otZtLJtl¿M C >
*
,
/*~**~~
rf%ênr / a fa» «tf<» V ^ t l AUMOnAfct^Î** ^-, K
~2^*itX £ u ï\ iL
*
et»
tjJjULj t
^ J ¿4
¿4 I
àjün m€^tàzX*jU*i
O fí^ L /Ô h
U- ^ -
Cj ' i|M
/t
^ * 44 .
Cj
ftxiiusy
U*\M<\uUÍí«> / d l « iV **-»X QX**
Ç0-<*<*—4X CO«A^U4, /o«M ^
^ u,u*
1 ¿fe«. &
. ' ■ (hüUjl(Àjyf f±A>++ A¿/*ÜLcXr- ^
»4JJW J '.
IW lU - f\ir%ÀΣ*ju " ic .
ilü u x iu ^ *
T t o ^ td ia v U J ' t i m ( x !< 'dwMiwVtO (/u*J±.
fa » o ¿L ß i? i» .* li1
^
......... 1hi>â' «.■'■•
___
<
Mül«—
4i
a
ij\
/li/lil<>-iift^.i
àk.
/
14
"
"
*
Tr
■
C » ^ ^ »Oiy4 x< /JKt*ÂT
^U *U m A nw . t¿u U » y< /U . A
" ' y 1" * ”
^ 4^ 7 ) t o ò r
c * ~ r>
<aa
O t J i U H it
&» / o u u M
(****- </i * ~
/*
c/><*»\y4 i> ¿Lm it t u J i t A * . >
0 3 ÔT
< u «_o•*/»**>
A-^
M U tW C ^ tí
¿ u J w * n % ^ r u í/
/t
i/ u M
¿m / Z U
¿ U U l^ M . " t e u ^ í
m
» -
m
i^ * * C V
« c -y ^ -y
t * -
« * »
t» *
^
444A#Ü*/, <
o0>«» ■* » K
*« « t <‘^
¿ 14 C t n u X t M U * « « * ) -»<
Û. /c*~^S i &aS*
t*jLr ft-K ^ Ú l l t i u i ^ ^ l / <l* * ^ / ^ U ’
(H 44< Ú » « a
^ ( r U
j 4V M y < « 4 k
^
(¡l*L*AxUy f
4^ 4^ -á ^ iU ^
Ax, /'«OÉI«. *6 ^ 6 y ^ .^ 0* ¿~ U
h^tL ^¿iru,'tzn^f p**, f<~ y^a*> A
v *-sU ±
•' t '
<U%t¡Cú
t*H ~ i u >
,
^
/
--------------- ~
.
�*{/***
/ u ív 6 á » * íiu » M ) rtuu>(¿Jb<jo%
•X . i t n l . __ _____________ _ . • - » ^
•
O M ^ ÍU A U W U )
A í* * ífc a r -
tA»
. «.
<u%
^ M -» O U *O D
Ä
3 *« *y’
¿ u .
íl6. í o t * < > W A i a r
tfc-*^«. \<»S>vt> ■ *)*. A o w y i t *
gjLttJkAr f(K ^UMOKMüL Cj\.*jÓ^ LU .
<LJ e * ta tm t —
tW
O k s ^
«- V«^I>WL»
^U)V>uuaul> y U k ta ^ iu .
“ *
O M 0 4 Ó
6 0 «
^ u t t b t t u f c - ^ í k V í A ' C L^te*.
a f c . cyjuu
£** « ¿ t iz L * ,
* « ***-
^íe»l3ít
1 *tr**-%
f 'a L U J< ^ < n f ~ u / ‘o ^
AJUL^UJtprÚ'JUJl,
V«AuÁ*4A>
ü * o > v ih « w « .
ftK‘ÍAAt^Ju^U^.
—>
A i.L t .il
a r t e * * - /5l É “ “
<U*«a¿ Cjj**. (t- ( u u j ú *
¿UÓtAoi*
Íí4 .
< w ^ “ 7í¿ lZ k
fA»****'***
**^ A *
«¿u JL u Jv r ¿
(¿sJfZjLU
Í uÚl t » r /<* cÁJdML^ Cl éj Ux . &**■
< jí^ ¿ r ¿ o ~ , ^
M U . fiT u T
t o M ^ a s i»
4'«.
(%*Á»í»JULr^
^ }f
jJxXÄJLT
^ i ) ü 4M < Ú « U
¿u u v tx lfi^ l u
iX
6.
/ u ljs í £L t*%u
(JUxtc.
" J t
tái ttt
^ ìiT ^ if e i
t V W t ^ y '*
cíitAijvsÁ*
J o —*.
^ u iv i t iz r ^yv»4-
^
^
& K^WUí^»X4X*íÜ A^^
LM^Jo*X~f
tfí**~ 'ft’ ^><*K
Ï-*.
° W ‘^ t
Lc^jo«iive ^ ** ixj^ ^ lZ fZ o ***-’
JLstKt^XKl*y * U 4||v < M ír-^ lu M <« <M
C*aÿjjÿtÿi'uLm "ì> i A ^ u u \ < t W
W«M
^ u m u t ^u X¿|ja)vhj»!t»> o
t* tuíícfcr*»»»^ (t_ Cultujuí-
/
,
iA t. J tf\.< K jtK » A ^ u l%
a.
I u * Í l fc¿*j*Ut+A '
<*»0)2><i
/*/**
f | ^ ^ çpx>\XtJx~ Ú* Y H '
c / o w < | lM W » y » * * >
ft*vuJr~tt(*lLtfC\ j * . /<■ ■«^ u*xivk(u t'lK
^
M p U U n tM r iA r~
t t u o o u . a . ju * + ui^M » w ^ fu * t* lU
^ U *IU / ^ v u lk b x « . O r
i| « a Ä S fc » *
c*r— ft t/\fAJí%X<¿r.
--i l y<uv><4. ù ^ u a c
�^ u . "Íím ao ( i\ ^ ^ | U u iú c ü t u i C k-4U>1( v u M v u u flT ^ iu t u u .
/n*J\i*ift> \ ,i ftíLt Cn*-iAnc% ijiA juxStl í^u¿ ¿-1 c*+fo\X /*.Jt^ X ck— 4a u » 4|uD/w>
((H¿rútCUrf UaX tJc-Jt*
O fjO x
(iik ¿ u k lu <-
OVWL^íltvUv% ¿V* ^OXxAZZtvUH^/y
(líHttUy^
¿ X w u lt X c »,
tm~ijdijt~ tp»í íA%-^«4<ctt c.^% |/oAJt**x<^'Xí_
lAjyit+iz ^ <-
ycM AVZtàr** ; <*c~(çjio** y ¿u>t4u < c+»*j¿.
tw o
/(o^kxt^txx*^j%
^tA*
fijMtjtíiy <4t ^ u t 4t ~ 4±fJfJ~UjL\ O. U U u iftu 1 4 ^ 1 C**
A l'» ín ^ 3^ u * » ií* 4«jc" ft<s%jj\ijl-\¿*jM
tu\tuÁ4M^-^ ^ a Í u ^ > u \
/7 **~ í
í^ m y ^
<4 |(u d r^ > <
ft/í . ^ lU . /í% ÚJLusuJLÍhc.
U iu u a .
Í+ajUL.
a »
¿44
Í ( a v i u ^ ^ 1|‘ ' » J » » - ^ y * /
U l O U 4 M *< U 4« > ü liü M
^
^ v u . 6 .
¿ i/ a Íím
U *». 4/ w t« . ^ t / U A % 4 ^
W to U
ídk~. (^uí a lo u U um aJL ^ l< - / u tZ<*A ytT ^ Ü
Íií.
fe 6 u > i4 M (A « jr ^VM . LM^rlu i l t<«< t .» T ~
^ u
V iC C fC ^ 1
m !( jL
C V uZbU ^
C ( i| t * M y a r '
^
ía x
> **~
¿ i w
(Ü H IttV yü r U - ) 1 U ^jb vO
a i« 4 4 ^ )\ U o ^ U M A / ^
^
OUr- Jíí^ iX ^ u ^ A T ' C/^X xmkÁ .
^ cu -
Á '
/ ío u íi* y C\*r-
{ Im É Í c
^ ^jj\£(US*
'l^ U I V lx lc lr ^ O W y u A U V ~
"ìk (¿bu ytV oiifM A i ( t k - / * í> ib u .^ < ¿ A u ú ^ i w U Í v
c í'íK jtU -'
/
f
7<a¿%V /a.
fiy ifc tu * ^ .
V/aaimJiUj-' ^ Cv. c k í+íyVLt~ |ÍiaÚ u D
6 if
a f t . <7^
>C
^ t r v v ^ lo
JoTblty(****■ "^ c
Um* Imjo
t u . ^W W .XtM r UUMt>Ú>
MCtW^ l ‘ ’t% ijpjí <** p tñ fo i-M-C
0 ¿ ffc z h úL /**. íxL íñ X r 'b £ lv \p > o tt 4s-'
ú i i , ( ^ u t y o í ^ r ^ u f ü u (/X£Mmam 1 í* » T id < ¿ í
covsX U ^ u . 'V o aaa 6 a A ^ C rfu
/ o i» r < p ¿
/ « -a ^
*A X X M > x £ ~ ^ b U É » ,« .. C l m jI z -
O * * tW -^ i “
2>< ¿ o
r , ^ 0 / maJnthx-
y ^ U a tá á r^
V
^ (/ * * '
* '
¿ t a - 7^
/^ a -> ^
lC«kO -*~J
(LÛT. ÚLk ' o»
; ¿ L ^ fe tc -u
V a i« t ¿ fe Jt ¡U *
C l/ o *
^ rf- < ^ U
'
/aW vm /‘
-to T tv ^ ^ a ^
¿ ^ £ ^ ^ * < - < 1^
/u¿**l~JTf V*- A U lru tb *
U ^ k - ^ U ^ ^ 0 « t / 'í W fu T b v ^ ttu *
r
^
c ^ íü ^ Íl
t<+ ÿ S v u b u + J T ',
'b ^ f t u « u l w G ;
C yX L ^ U M * / L
t» * W *
�^
f i . ¿L)\tcdt¿»JkXs
(^ ÌN \^ tw t^ jiO .
fa»» ^
<*- ^«! Cuiiu4
fo \j\tf »¿«i
I* io
/
C t-tjU a .
/(.
'À o i M t v U k C '^ - < -
ílt t u t íy ^ U iu tr (a\JC > 4mÌ(/ (L » i t ^ u l) ( / | u S b ( ù Jt
VoIo**A/
CJXfJlAAJ**.
* * ^ 4 u J^(U ^T
^
*j*At> i n f i d i
^/o»^y,4,**y*^C
-&Ú ^ ¿X <yo**tï ^ «. ^ u u /t< ju u w <*»
t u "b cn ttù x u -lAjJjt* ° i <
***
« f l i t “ (p L ¿ 4
A
o%Y<**«^ir^ c *»
v u « d **
/*»
¿ ¿ f ì C / \ 4» i * A i -
l> > « ^ » i a * y ^ k i r
0 *%
/ lju « à jii» y
( C *-U « J
A | tÒ ^ P
«
-
flw x ù o .
•
/
. !
Q&C. tytM. C«J* ^V>^U1¿1«Xl^O
t f
*^C 0 Kt><*SV\U*JL*ïf~ VtXl/OWI^O /<>■(- £/*jLA*JIkOC«
(ÿL*i(AJu\ tjuuuyvu* 7u> 4 *» U im W M u lu )«
/ * '
flyt*M ,
a it.
cu w < U h > ««».! ' ì^ amX
C te-'à«./* U a W d Jò ìh
■
J L a ¿«ÁmjO
/
/
.J «iCi f i t u t ù;M ^ u » |j< tu iß o /^A tnsw -*JL-
U x t u t t ^ u i r A CLkLulI Í
^jU*~/
Ç\<jJU CAA-
/
< À < jL ( s iX X * u l/ / ^ c u - r - t A » w v J ¿ M . o Ä w x u v u
AACU>Ùt /
- { U j-ÌO I* -^
áxtoúr- ¿ÍA ^ lík d ó s 'ío iUtiJfeUw ( Ú ¿ * + « X , k - }
/foa>uLxu~a.'V ‘~ ~ ^
C xo j/o *là^ 'à U ic M - / ¿ ¿ J lT o ^ c .u « « u u fc
u m I m . * P V o 4w i «W1* - ;
flcd b & t*Jr-/*u rù % t*>uJLxv\¿»^ J * J j r à \ u * r ^
to ¿ L » -2 L /¿V
C f c - < Ì L / ^ 4
^
c I ^ » « * muO
)f. jfit* * » U u ^ L y ^
* % c^ ,
Ö U U O
¿ í t e u M J r ^ 'a S tc w *
~ & ù iu ^
£ ù > lk ~ ty
c * * ¿ <*-& **
>
¿ u Jl ^ir«r- t o w « - ,
* > ,.......t o .* - W < u * ~ ¿ 3 r y
y u ix - jr * *JLÍ(U ~ **~ X—XÍ\IKM4» « ^ v /« -u ^ *»
^c3Slíawc**~ oa**ì«A **- ^ u w u > ¿ r ö c ^ l/u ir u . V aá^w a a , t **f^*'
f'oiJJuH+Lt.**
Om . >iULf*w»«4A **er" OA>u*o «Æ ^ * * 4^ * - »
CJVV^ÒOJU* •+*- OL°b<A%%4J>^
'
^ í|H a*X Í j f 4***0 4A+*jr fu . *i*T%A
7...
J*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rouchi, Jean. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Rouher
Dumiral
Lamy
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean Rouchi, appelant, contre Michel Diernat, et autres intimés.
Annotations manuscrites. 22 août 1848 : texte du jugement définitif.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3017
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3018
BCU_Factums_G3019
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53634/BCU_Factums_G3017.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53948/BCU_Factums_B0109.pdf
b1eced600405f635d60fc1b79f820968
PDF Text
Text
*)
*
“
' * 4 ................................................*
- -
„
'
.....................................................................................
^
^
MÉMOIRE
EN
R É P O NS E ,
P O U R M e. C h a r l e s J u g e , Procureur en la C o u r , Pere
& légitime Adminiftrateur de fes E n fan s, héritiers de
défunte Marie Bagès leur M e r e , ayant repris en fon lieu
& place ; Sieur F r a n ç o i s M a l b e t & D e m o ifelle E l i s a b e t h
B a g è s fa fe m m e, de lui autorifée, Habitans du lieu du
M o n te l Paroiffe d’A u to in g , Demandeurs & Défendeurs.
C O N T R E M e. J e a n - N a z a i r e B a g è s , A voca t en
Parlem ent, Habitant dudit lieu du Montel, même Paroif f e
d’ A u toin g ; & Mef f ire A n t o i n e d e P o n s , Seigneur,
Marquis de Belef t at, fo n Curateur, habitant en fo n Château
de Beleftat, Défendeurs & Demandeurs.
N
O a dit depuis lo n g - t e m p s , que le pour & le contre
vinrent au monde le même jo u r , & fe partagèrent le domaine
des pauvres têtes humaines. Il faut bien que cela foit , puifqu’il
A
�\
*
n’eft point de vérités, point de paradoxes, qui n’aient eu leurs
détracteurs & leurs apôtres; leurs triomphes & leurs revers.
I l eft pourtant rare de voir cette guerre d’opinions s’élever
fur des queftions auffi peu fufceptibles de co n tro v erfe , que
' ce lle qui divife M e. B agès & fes fœ u rs, ou leurs repréfentans.
I l s’agit de favoir fi M c. Bagès peut être admis au fingulier
p rivilege d’allier les deux contradictoires, à'invoquer & de com
battre tout-à-la-fois le teftament de fon p e r e , dJen accepter
T avantageux, & d’en rejeter Vonéreux. O n aura peine à croire
qu’il ait ofé préfenter férieufem ent dans les T ribunaux une pré
ten tion fi bizarre : toute TaiFaire eft cependant dans ces deux m oti.
JE1 « A
Le
fieur
X
ÜÛ
Bagès du M o n tel décédé en \~j6$ laiiîa fix
cnfans ; trois filles du premier l i t , m ariées, dotées & forclofes;
un mâle du fécond li t , ( c ’eft le D éfendeur. ) & deux filles non
m a rié e s, qui l’ont été depuis, l ’une au fieur M a lb e t, & l ’autre
à M e. Juge. I l fit un teftam ent, par lequel il légua le quart de
fes biens en préciput à M e. Jean-N azaire Bagès fon fils, & difpofa enfuite des trois autres quarts en ces termes : » E t à l ’égard
» des autres trois q u arts, ils s e r o n t partagés, par égales por»
»
»
»
tio n s, entre Ifabeau & ?viarie
fes trois enfansj qui font fes
qu’il a fuffifamment doté fes
m ariage. »
A s’en tenir à la lettre de ee
partage des biens du teftateur eft
& ledit Jean-N azaire Bagès
héritiers de droit., attendu
trois filles de fon premier
teftam ent, la proportion du
aifée à régler. Jean-N azaire
B agès doit prendre la m oitié de la maife e n tiere, la D am e
M alb et un q u art, & M e. Juge., au nom de fes enfans q u*
repréfentent leur m e re , un autre quart.
�3
M ais ce n'eft pas ainfi que M e. B agès 1 entend : le
teftament porte en ma faveur la difpofition du quart en précip u tj je l’a ccep te, nous d it-il; s’agit-il enfuite de partager
les autres trois quarts? je rejette le m êm e teftam ent, dont
je viens- d’accepter la difpofition avantageufe, ôc j’invoque
la loi : elle me donne le droit de repréfenter les trois filles
fo rclo fes; elle fait accroître leur portion à la m ien n e; j’ai
donc quatre parts à prendre dans les trois q u arts, ôc mes
fœurs du fécond lit^ ou leurs repréfentans, deux parts feu
lem ent. E n un m o t, le teftateur ne m 'a deftiné quJun tiers
dans les trois q u a r t s m a is la lo i m’en donne les deux tiers,
en rapportant les dots des filles fo rcloies; je me tiens à la loi.
T e l eft le fyftêm e du fieur B agès : il vou d roit adopter
le teftament de fon pere & le rejeter ; profiter de fes
difpofitions ôc les combattre; prendre le quart que la loi
ne lui donnoit p a s , qu’il ne peut tenir que de l’exécu
tion du tejlament, 6c refufer à fes fœurs Y exécution de ce
m ême teftament. Q uelle étrange alliance de Yacquiefcement
6c de la contradiBion ! E n vérité , elle fait honte à la M O Y E N S .
raifon. A u d i eft-elle condam née 6c par le droit com m un (a)
6c par le texte précis de la Coutum e q u i, dans l’art, j o du
tit. 1 2 , s’exprime ainfi : » L/héritier ab intejlat inftitué par
» teftament ou n o n , qui fciem m ent accepte aucun légat à lui
»
»
»
»
fait par le d éfu n t, ou autrem ent agrée en aucune partie ledit
teftam ent, il approuve toute la difpofition & ordonnance d’ icelui défunt 3 ÔC eft abfolum ent tenu la garder 6c accomplir. »
C ette lo i n’a pas befoin de com m entaire * elle eft auilï
( a)
Jurit ratio non iaducit divifionttn. volutitatu.
A 2
�4
impérieufe quJelle eft claire; & l'application en eft facile. M e.
B agès accepte le légat du quart à lui fait par le teftament
de fon pere ; il demande l ’exécution de ce légat y donc il
approuve toute la difpojîdon & ordonnance du défunt; donc
il eft tenu de la garder & accomplir en entier : o r , le défunt a
voulu que les trois quarts de fes biens fuffent partagés par
égalité entre le fieur B agès & fes deux focurs du fécond Ht;
donc il doit confentir à ce partage; il doit confentir à Taccom pliflem ent de cette difpofhion & ordonnance du défunt. Si
ce n’eft pas-là une vérité dém on trée, il faut renoncer à jamais
rien prouver aux hom m es; il faut effacer le texte de notre
C o u tu m e , ôc ne prendre déformais pour réglé d esju gem en s,
que l’arbitraire & le caprice.
PreiTé par l'évidence irréfiftible de ce raifonnem ent, & ne
fe flattant pas de parvenir à le ren verfer, s’il attaquoit en
fr o n t, M e. Bagès effaie de s'échapper par des faux-fuyans;
il louvoie & fe jette à côté de la queftion.
L a loi m ’aifure dans les réferves coutum ieres, nous d it-il,
Yaccroijjement des portions des filles forclo fes; c ’eft une illufion de croire que mon pere m’en ait privé par fon teftam ent;
il ne l ’a ni pu ni entendu, {a)
L ’obje& ion fe divife en deux branches, & fait naître deux
queftions. L e fleur Bagès pere avoit-il le pouvoir d’interdire
directement ou indirectement à fon fils i’exercice du droit
d’accroiffem en t? en a-t-il eu la vo lo n té?
L a premiere queftion ne roule que fur un jeu de mots. H
ne s’agit que de nous en ten d re, ôt nous fommes d’accord.
L e droit à.3accroijjement n'eft point à la difpoiltion d’un
( a ) Page zerc. du Mémoire du fieur Bagcs.
�teftateur! Q u e prétend-on dire par-là? Q u ’un pere n eft pas
le maître d’interdire à fes enfans m â les, par fon teftam en t,
l ’exercice du droit d’ accroijfement fur les réferves coutum ieres,
s'il ne les dédom m age pas d’ailleurs, en les gratifiant du quart
difponible ? R ie n de plus jufte.
M a is, en léguant le quart difponible aux m âles , ne peut-il
pas les réduire à l’alternative d’abdiquer, ou fa lib éra lité, ou
l ’accroiffement dans les trois quarts? M e. Bagès eft forcé de
convenir qu’il le peut (a)\ parce qu’enfin chacun eft maître de
modifier fa lib é ra lité , com m e il lui plaît. O r , le teftateur q u i,
com m e le fieur B a g è s, lègue le quart de fes biens aux m â les,
& prefcrit le partage des autres trois quarts par égalité, ne
fait rien autre chofe qu’ufer de ce pouvoir.
C ’eft moins alors la volonté du teftateur qui prive le m â le,
de l’accroiifem ent, que la volonté même du mâle qui l'ab d i
q u e , en acceptant un legs qui lui en im pofe tacitem ent la
néceifité. Il a l’option entre la difpofition de la loi & celle
de l’homme ; s’il préféré la difpofition de l’hom m e , peut-il
fe plaindre de l’obligation de s’y tenir qu’il s’eft im poiee par
choix ? Volenti non f i t injuria.
L es réferves coutumieres ne font pas moins facrées que Taccroiifem ent ; cependant l ’acceptation d'un legs déroge aux f££>> «
réferves coutum ieres: l’art. 50 du tit. 12 le décide textuellem ent.
L a prohibition de la fubftitution teftam entaire n'eft pas
moins exprefifément écrite dans la C o u tu m e , que la dévolution aux mâles de la part héréditaire des filles forclofes;
1?
9 ^ ?
;!
Pendant l’acceptation d'un le g s , de la part de l’héritier lé g i' ^ nr^ ÎU 1
tim e, éleve une fin de non recevoir contre cet h éritier, s’il o v y l
w,
. - ^
. tvi- . .
.
•—— ----------£Ljt~*1 ^ ^
Pag« 4,
9>
c, Ÿ
' ï ' r ^
r r fr
0
i r * T
�*
attaque enfuite la fubftitution (a). P ourquoi la m êm e accepta
tion n’élevero it-elle pas la m êm e fin de non recevoir contre
l ’héritier qui voudroit trav erfer, à la faveur du droit d’accro iflem en t, l ’exécution du teftam ent qu’il a approuvé?
T o u t cela feroit v ra i, continue M c. B a g è s, » fi le legs du
» quart étoit fait fous la condition que les filles mariées par» ticiperoient aux portions des filles forclofes; » sJil é to it dit
que le m â le, en prenant le q u a rt, ne pourroitpoint s’ aider de
l ’accroiJJem.ent des fille s fo r c lo fe s , pour fe fervir des expref-vZ*'"* fions de Bafm aifon.
» M ais le teftament du fieur B agès ne renferme point cette
» condition : on ne peut l ’en faire réfulter de quelque ma» niere qu’on l’interprete, foit qu’on s’arrête à la le ttr e , foit
» qu’on cherche à en pénétrer l’efprit; » Sc puis l ’on entre
dans la difcuflion des marques cara&ériftiques du legs condi
-
c
y.
n
v<rxt^j
tionnel j dont on cite deux exem ples entre dix m ille.
V o ilà un fa u x -fu ya n t, & rien de plus. N on ., il n’y a pas
d
e
condition expreife attachée au legs du quart fait à
X
M e. B agès par le teftament de fon p ere; mais il y en a une
t v-N
tac^t e i ou p lutôt il y en a une légale qui nJeft pas moins puiifante. » L a condition de droit que nous pouvons appeller
•* » condition lég a le, parce que c’eft la lo i qui la fu p p lée, nous
»
»
»
»
dit le favant F u rg o le dans fon traité des teftamens ( a)>
doit opérer le m êm e effet que la condition de fait qui eft
exprim ée par le teftateur, vu qu’elle eft de m êm e nature»
parce que la puiifance de la lo i eft encore plus forte ôc plus
( a ) V o y e z l’Arrêt des Hureaux rapporté par Prohet fur l’art, jo du tit.
Nous en parlerons plus particulièrement à la page 13.
(tf) Tom. a, ch. 7, feft. a , nom. 3J.
�7
» énergique que celle du teftateur ». O r , le legs du quart
fait à M e. Bagès par un teftament qui prefcrit Xégaliie entre
le légataire & fes deux foeucs dans le partage des trois quarts,
,
eft une difpofition nécefiairem ent accom pagnée de la condition légale, qu’en profitant du legs en p récip u t, M e. B agès •
fe foum ettra à l ’égalité prefcrite pour le partage des trois
.
quarts; elle eft écrite dans l ’art. 50 de la C outum e déjà rap6 *^ °
pellé plufieurs fois.
C e t article ne fouffre point de divifion dans l’exécution
d’un teftament ; il impofe à l’héritier ab intejlat qui accepte
aucun légat à lui f a it par le défunt j la néceiïité abfolue de
garder & accomplir toute la difpojîtion & ordonnance du dé
fu n t , fans lim itation & fans réferve ; il approuve toute la
difpojîtion & ordonnance du défunt, & efl abjolument tenu le
garder 6* accomplir. A b s o l u m e n t ! N e v o i l à - t - i l pas une
condition bien impérieufement prefcrite? & peut-on dire après
c e la , que la néceifité d’exécuter un teftament dans tout fon
contenu ne foit pas toujours une condition légale de toute
forte de legs fait à l ’héritier lég itim e; une condition qui naît
de la nature même de la chofe (a) ?
M e. B agès infiftera; ce n’eft rie n , nous d ira-t-il, que cette
condition tacite & légale : il fa u t, pour réduire les mâles à
l ’alternative du quart en préciput ou de T accroiffem en t, que
le teftateur leur en ait impofé la condition exprejfe. Bafrcm fo n , le favant Bafmaifon l ’a dit. O ferez-vous élever vo tre v o ix
( a ) Bafmaifon , qui eft l’Auteur de prédileftion du fieur Bagès , s’exprime
en ces termes fur cet article 50 : » B ref : En quelque façon & maniéré que
» le lignager venant ab intejiat, agrée tant foit peu le teftament, recevant ou
» baillant, ou autrement de fait ou paroles, il ne pourra plus contrevenir à
» la volonté du défont. »
'
�9
contre Tes oracles? T ém éraires ! avec votre ton a g ré a b le ....
C e grand hom m e auroit befoin pour defcendre à votre petit
niveau.... il auroit befoin..... d’un com m entaire ( a ).
D ’ un com m entaire ! bien trouvé , M e. B agès ; l'antidote
eft excellen t pour guérir du Jiyle agréable ! H é bien ! nous
voilà réfignés : Com m entons : foit : Q u e l eft notre texte? C es
fix lignes de Baim aifon (b ) : E t nonobjlant que le tejlateur ait
voulu rendre égaux les héritiers injlitués, ce qu3il f a it en tant
qu ils fo n t appellés en leurs noms propres au partage ; mais
n’ayant exprejfément déclaré f a volonté q u i l injlitue lefdits
mâles & fille s également, fans que les mâles puiffent s'aider
de l Jaccroijfement des portions des fille s mariées, lefdits mâles
pourront prendre ledit accroijfement.
V o u s avez raifon , M c. B a g è s , voilà un oracle : ja
mais on n’en failit m ieux le ftyle & l ’am biguité. E h ! que
voyez-vous dans cet oracle? que fi dans un teilam ent qui lègue
aux mâles le quart en préciput., il n 'y a pas ces m ots facram en tels, s a n s q u e l e s m â l e s p u i s s e n t s ’ a i d e r d e
, ils auront
le droit de prendre l ’accroijfement avec le quart? O h bien ! nous
L ACCROISSEMENT
r-y.
o
u
DES
FILLES
M ARIÉES
y voyons toute autre chofe nous : Bafm aifon eft bien moins
exigeant à nos yeux qu’aux vôtres. I l nons fem ble que c e t
A uteur ne demande rien de plus pour em pêcher les mâles
d ’accum uler le quart avec l’accroiiTem ent, iinon que le teftate u r , après leur avoir légué le q u art, ait exprejfément déclaréfa
t
volonté q u i l inftitue lefdits mâles ù f i l e s é g a l e m e n t dans
'y les trois quarts. A votre avis le point eflentiel eft que le bé-
», l
-------------------- Sur
(a)
Pag. 17 du Mémoire de M e. Bagès.
,
¿u tlt#
- Çf
, ia, Coutume.
_
9
----------
néfice
�néfice de raccroîffem en t fo it nommément prohibé. A u n ô tre ,
la feule ch ofe néceifaire eft que le partage des trois quarts
par égalité foit littéralem ent preferit.
Q u an d il vous plaira , nous entendrons les m otifs de
vo tre opinion : v o ici les raifons de la nôtre. I l eft u n '
fait certain & bien évident , par le rapprochem ent des
différentes parties du te x te dont il s’agit de pénétrer le fen s;
c ’eft que Bafm aifon parle d'un teftateur qui a voulu rendre
égaux les héritiers qu’il a in jlitués, fa n s avoir expreffément
déclaré f a volonté q u i l injlitue les mâles & les fille s également. D es héritiers rendus é g a u x , Îans exprim er Yégalité !
C ela paroît une énigm e au prem ier coup d’œ il ; l’A uteur
nous en donne la c le f; il explique com m ent il entend qu’un
teftateur a voulu rendre égaux fes héritiers in ftitu cs, fans
exprim er l'é g a lité. Ce qu'il f a i t > nous d i t - i l , en tant q u i l s
fo n t appelles en leurs noms propres au partage. G ’eft com m e
s’il diioit : le teftateu r, en appellant les mâles & les filles au
p a rta g e , en leurs noms propres, fans s'expliquer fur la p ro
portion du p artage, fans dire s'il fera égal ou in é g a l, fem ble
n’avoir com pté que les tê te s , & s'être référé à la lo i qui veu t
que lorfque le teftam ent n’a pas réglé les parts entre les
héritiers n o m m é s, la fucceifion fe divife par têtes ; ubi
partes adje✠non fu n t , cenfentur aquales : cependant il n’en
fera pas ainfi dans notre C ou tu m e ; les mâles feront com ptés
non-feulem ent pour leurs propres tê te s , mais encore pour
autant de têtes qu’ils repréfentent de filles mariées. E t pour
quoi? parce que la lo i particulière de la province réglé ainfi
' le partagej fie que le teftateur, en gardant le filen ce, eft cenfé
• en être rapporté à e l le , bien loin d’y déroger.
M ais fi le teftateur a déclaré expreffément fa v o lo n té à 'in f
B
^
j~
-n
^
—
7
^ «^*r
�tituer les mâles & les fille s é g a l e m e n t , alors tout ch an ge;
difpofitione hominis ceffat difpofitio le gis. L e teftateur a recom
mandé Yégalité entre les mâles & les filles dans le partage des
trois quarts ; il faut s’y tenir : les mâles ne repréfenteront
chacun qu’une feule tête au p a rta g e, parce que le teftateur
l ’a ainfi voulu. E n un m o t, Bafm aifon n’adm et les mâles à
repréfenter les filles fo rclo fe s, que dans le cas où le teftateur
n'a pas exprejjement déclaré f a volonté d ’injlituer les mâles &•
les fille s é g a L E m e n t ; donc il les exclu t de cette repréfentation
toutes les fois que le teftateur a exprefjément déclaré fa volonté
d'inflituer les mâles & lesfilles é g a l e m e n t , La. conféquence eft
fans réplique. C e qu'il ajout e , fa n s que les mâles puijfent s'a i
der de l ’accroisement des filles mariées, n’eft que pour un plus
grand développem ent de fon id é e , pour m ieux la faire fentir;
mais le point uniquem ent eifentiel eft l ’expreffion de Y égalité >
qui em porte néceifairem ent avec foi l’exclufion de l’accroiifem ent avec lequel elle eft inconciliable.
T e l eft l ’e fp rit, le feu l véritable fens du paifage que nous
expliquons : lui en prêter un au tre, fuppofer que Bafm aifon
exige que le com m andem ent de Yégalité foit accom pagné de
la prohibition littérale de l ’accroiiTem ent, ce feroit fuppofer
que ce com m entateur donnoit plus d’im portance aux m o ts ,
qu’aux ch ofes; il é to it trop judicieux pour donner dans de
pareils écarts de raifon (a).
O r , fi le paifage tant cité de Bafm aifon fe réduit à c e la ,
(< j) D ’un autre côté, ce feroit le faire tomber en contradiilion trop formelle
avec ce qu’il dit ailleurs que de quelque maniéré , & pour peu que l'héritier
»grée le teflam ent, recevant , ou baillant, ou autrement, il ne pourra plu*
tantriv(tiir à la volçnU du défini.
�quel avantage en tirera M c. B a g è s? N e fera-ce pas nous, au
co n traire, q u i, en,nous rangeant fous la banniere de ce co m
mentateur j aurons droit de com battre M e. B ag ès avec fes pro
pres armes? nous lui dirons : Bafm aifon ne demandé rien autre
ch ofe pour exclurre les mâles du bénéfice de l ’accroifiem en r,
lorfqu’ils font prélégataires du quart, fi ce n’eft que le teilateur
ait preferit l'égalité du partage des trois quarts. V o u s êtes précifém ent dans ce cas. L e teftament de votre p ere, en vous avan
tageant du q u art, a preferit Y égalité entre vos fœ urs & v o u 9
dans le partage des trois quarts; refpe& ez fa v o lo n té , ou abdi
quez le q uart; voilà ce que vous dit l ’arc, j o de la C ou tu m e;
voilà ce que vous répété Bafm aifon que vous avez choifi pour
votre prote&eur (a).
M ais, la Jurifprudence, quJy répondrez-vous, nous dira M e.
B agès? e lle fe déclare pour m oi. O n a trouvé dans un ancien
manuferit de M e. M a rie , Jurifconfulteavantageufem ent connu
dans le dernier fie c le , la note de deux anciennes fen ten ces;
l ’une fans d a te , la plus récente fous la date du mois de feptem bre 1662* qui ont décidé la queftion qui nous d iv ife , &
qui l ’ont décidée en faveur des mâles.
N ou s répondrons que l’exiftence légale de ces fentence*
n’eft point p ro u vée; qu’il feroit facile de les trouver au g re ffe ,
fi elles n’étoient pas ch im ériq ues, & que cependant elles ne
font pas produites; que les efpeces particulières en font encore
(
) Au furplus , s’il ¿toit poifible de donner au partage de Bafmaifon don*
nous venons de faire l’analyfe, l’interprétation forcée & captieufe que lui donne
M e. Bagès, cette opinion augmenterait la lifte aflez nombreufe des erreurs de ce
Jurifconfulte q u i} quoique juftement célébré, n’étoit pas infaillible ; 6c une erreur
Bafmaifon n’effacerait pas U loi.
B 2
�moins connues ; que fi elles fon t ré e lle s , elles fon t interve
nues fans doute fur des teftam ens, où le prélegs du quart en
faveur des mâles avoit é té fuivi d’une fimple inftitution tant
des mâles que des filles dans les trois quarts, fans expreiïion
form elle de
ég a lité, com m e dans l ’efpece propofée par
Bafm aifon.
Q u ’à la v é r ité , la note m anufcrite parle de la prem iere de
ce s fentences
com m e ayant ju gé la queftion dans une
efp ece où les m âles & les filles à marier étoien t inftitués
par portions ¿gales dans les trois quarts ; mais que le J u rifconfulte qui la rapporte n’en donnant pas la d a t e , in
dique aiTez par-là qu’il n’en connoifloit pas perfonnellem ent
l ’e fp e c e , & n’en parloit que fur des o u i-d ire ; que d’ailleurs
il s’éleve avec force contre fa d écifio n , com m e contraire à
la grande réglé de l "mdivifibilité des teftamens. » M ais le tefta»• ment étant un aâe individu, j e dirois le contraire, & que ïa c » croisement lia lieu : » ce fon t fes expreifions. N ous ajoute
rons que les A vo ca ts du P arlem ent appuyoient de leurs fuffrages la réclam ation de ce Jurifconfulte. E t f ie confultum à
Patronis Parlam entif in noftra Confuetudine, cum aliud fît fiatuendum in JucceJ/îonibus delatis ab inteflato, & in fucceffionibus delatis e x tejlamento.
N ou s dirons de plus que ce n'eft pas fur une note incertaine
de deux fentences plus incertaines e n c o re , tirées au bout de
plus d’un fie c le , de la pouffiere d’un m anuferit ig n o r é , &
de l ’oubli g é n é ra l, que s’aiTéoit la Jurifp ru d en ce; que ces
fen ten ces l ’avoient fi peu fixée dans le tem p s, que P r o h e t,
qui a fait fon Com m entaire d'après les notes du même Jurif
confulte M arie ¡ f o n beau-pere, d’après fes m anuferits, n’en a
pat dit un
m o t ; & qu’il établit au contraire Xindivifibitit*
�abfolue du teftam ent en m axim e fur l ’article j o j où il
rapporte l’arrêt des H u reau x qui l’a con facrée dans les term es
les plus forts , en ordonnant l ’exécu tion d’ une fubftitutioty^
teftam entaire , con tre la prohibition form elle 6c irritante de
la Coutume, par la feule raifon que le légataire ayant accepté
,
le legs à lui fa it, i l devait accomplir toute l'ordonnance du défunt. C^ * '
L ’indivifibilité du teftam ent n’eft pas auffi refpeftée de nos
jo u rs, continuera M e. B agès. » Suppofons qu’un p a rticu lier, » » o y
» dans la C ou tu m e de P a ris , ait donné par teftam ent une
» m aifon qui faifoit tous fes propres, il eft certain q u e , q uoi» qu'il ait des m eubles & des acquêts confidérables, qui dans
&
» cette C outum e font entièrem ent difponibles fans affectation
»
»
»
»
»
»
»
à aucune lig n e , fon légataire particulier ne peut avoir que~^5?"
le quint de la m aifon lé g u é e ; les autres quatre quints
m eureront à l ’héritier du te fta teu r, fans que le légataire
univerfel des m eubles & acquêts fo it tenu de faire récom penfe au légataire particulier de ces quatre" quints fur les
meubles & acquêts, fi le teftateur ne l ’a expreifém ent ainfi
ordonné par fon teftament. »
L a comparaifon n’eft pas heureufe. M e. B agès ne v o it - il
pas que cette efpece n’a aucun rapport à l’indivifibilité du
teftam ent f que l’héritier des propres qui obtien t la rédu& ion
du le g s, n’ eft pour rien dans le teftam ent; que ce n’eft pas
lu i qui profite des biens d ifp o n ib les, mais bien le légataire
univerfel ? s’il étoic légataire u n iv erfel, s’il accep toit ce tte
q u alité, on ne l ’écou teroit pas dans fa réclam ation des quatre
quints des propres t à titre d’h éritier légitim e. A Paris on lu i
diroit : vous êtes légataire univerfel ; vou s ne pouvez pas vou s
préfenter com m e h éritier lé g itim e , ces deux qualités fo n t in
compatible E t par-tout : vous Êtes légataire univerfel j le
^y U
, -
v
’
‘
�I*
' : s •» n teftam ent eft indîvifible; vous ne pouvez pas en accepter unç
* -»»des difpofitions & com battre les autres.
.. F o rc é pied-à-pied dans tous Tes retranchem ens, M e. B agès
.
'•
.
,
’
-
fe retourne : p aflon s, fem ble-t-il nous d ire , que je n’aie pas
le droit de divifer le teftam ent de m on pere ; je n’en ai pas
’/befoin. Pour être en droit de conclurre de l ’indivifibilité du
teftam en t, » qu’en acceptant le legs du quart, j ’ai approuvé
<
» la difpoiition que mon pere a faite à fes fille s, mes
V » faires auroicnt dû prouver que cette difpoiition qu’ils comparent à un lé g a t, exijle. »
P ou r le coup voilà du neuf. O n veu t que nous prouvions
qu’un teftament q u i, à la fuite d’un legs du quart en p récip u t,
C J ltt iû f* '' /y&efasiporte en toutes lettres : » & à l’égard des autres trois q u arts, ils
feron t partagés par égales portions entre Ifabeau & M arie & ledit
Na^aire Bagès ( légataire du quart ) ; on veut que nous prouv ^ons cl ue ce teftam ent con tien t une difpofition des trois
* '¿ 0 — quarts ! nous d iron s, prene\ l ’aâe & life\.
Je lis , nous répondra M e. B a g è s , & je vois que le teftateur
^
ne sJeft pas arrêté à ces premieres expreffions ; à l ’égard des trois
*)
quarts, ils feron t partagés par égales portions entre Ifabeau, M arie & led. Naraire Bagès /fes trois enfans & de la dame Faucher :
jL vfi*
^
1
la difpofition feroit p arfaite, s’il s’en é to it tenu là ; mais ce
qui fuit la fait difparoître.. Il ajoute qu ils fo n t f e s héritiers de
droit; il explique pourquoi il le cro it ainfi ; attendu qu’il afuffîfam m ent doté f e s trois fille s de fo n premier mariage ; lefquelles
i l prétend quel le s ne puiffent rien prétendre dans fa ficceffion» P lus on approfondit ces m o ts, qui font f e s héritiers de
» droit, plus on eft convaincu que le teftateur a entendu aban*
» donner les trois quarts au vœ u de la C ou tu m e.
>■£*
» E t ce qui acheve de perfuader que le teftateur n’a pa*
�1?
» entendu déroger à la difpofition que la loi faifoit en faveur
» de fon fila, ce font les term es qui fuivent im m édiatem ent;
» attendu qu il a fuffifamment doté f e s trois fille s du premier
» mariage, & c . »
» C e m o t, attendu, renferm e fans doute le m o tif de la
» difpofition qui le précédé ; il prouve que dans cette difpo» fitio n , le teftateur s’eft uniquement occupé à aifurer par
» furabondance les trois quarts de fa fucceffion à fes enfans
» du fécond lit , excluiivem ent à ceu x du p rem ier, 6c abftrac» tion faite du plus ou du moins que ceux du fécond lit aman» doient dans les trois quarts . . . . . il importe fort peu
» quJil ait dit que la divifion s’en feroit par égales p ortions,
» dès que tout prouve que ces mots contiennent Am plem ent
» une énonciation erronée fans difpofitions. »
C Jeft donc ainfi q u e , jouant fur les m o ts, & gliifant de fubtilité en fubtilité , M e. B agès arrive à une conféquence ridicule,
Il veut perfuader que lorfque le fieur B agès fon pere a dit
que les trois quarts de fa fucceffion feroient partagés par por
tions égales entre íes trois enfans du fécond l i t , ces expreflions
ne fignifioient p a s q u e les" trois" enfans" appelle s prendront
chacun un tiers! qu’elles lignifient au contraire que l ’un des / -.*
trois prendra quatre parts a lui feul! allons; il faudra réform er
f r t .^ r , I
^ j
nos dictionnaires. D éform ais un partage par portions ég a les,
j*
fera celui du ly o n ; to u t d’un cô té . V o ilà bien la logique de
!
l’intérêt perfonnel qu‘rrâ*pporte to u t à fó iT m a is eft-ce c
e
de la raifon ? O n rou git de difcuter férieufem ent de pareille^
rêveries.
l
l
e
^
_
——
^ O u i j le teftateur auroit adopté un partage in é g a l, s’il avoitj *
.
^ftitué tout uniment fe s héritiers de droit, fans exprim er la
Portion qu’il deftinoit à chacun. E n s'en rem ettant ainfi au
***
i
\
.
i
3- *
Ji
^*
j
�frf
d ro it, il auroit confacré l’inégalité que la loi mettoit entre
fes trois enfans. Mais il ne s’eil pas exprimé ainfi ; il a réglé
la proportion du partage de la maniéré la plus précife & la plus
impérieufe. L es trois quarts s e r o n t partages par p o r t i o n s
é g a l e s Peut-on méconnoître une volonté fi nettement
développée ?
S i, en défignant les trois héritiers entre lefquels il vouloic
établir une égalité parfaite, quant au partage des trois quarts
de fa fucceifion, il a dit qu’ils étoient f e s héritiers de droit ;
il a dit vrai, puifque la loi les appelloit tous trois à fa fuccefc
fion ; il a manifefté en même temps la caufe impulfive de fa
difpofition ; il a envifagé fes enfans du premier 6c du fécond
lit. A l’égard de ceux du premier l i t , il a dit : je ne leur
dois rien; j’ai fuffifamment pourvu à leur fort; ils n’ont plus
rien à prétendre à ma fucceifion, & je les en exclus. Ceux
du fécond lit fixent enfuite fes regards paternels. Il dit : ils
n'ont rien reçu de m oi, la loi les appelle à recueillir ma fuc
ceifion ; mon affection les y appelle encore plus particulière
ment ; fie comme ils partaient également cette affedion, je
veux qu'ils partagent auifi é g a le m e n t les trois quarts de mon
'j>atrimoine que je leur deftine : ainfi leur qualité d'héritiers de
droit a déterminé la préférence que le teftateur leur a donnée
fur fes filles du premier lit, dont il confacre l’exclufion légale»
mais iljia pas voulu s’y référer pour la proportion du partage#
& , bien loin de dire qu’ils partageroient félon l’ordre àc
droit, il a dérogé à cet ordre, en ordonnant un partage p*r
portions égales. Lorfqu'un teftateur a exprimé fa volonté avec
cette n e tte té , il ne s’agit pas d’interpréter, il faut obéir#
» Quand une volonté eft exprimée par des paroles claires »
» & qui n’ont aucune am biguité, nous dit le favant F ur-
.
�17
» go le ( a ) , il n*eft plus permis de chercher une autre vcio n té
» différente ou co n tra ire , parce que ce feroit étouffer la v é » rité par la fi& io n , ôc abandonner le certain pour l’incertain. »
I l faut s’obftiner à ne pas vou lo ir lir e , pour foutenir que le
fieur B agès pere n'a confidéré fes enfans du fécond l i t , qu’en
les oppofant à ceu x du prem ier, abftra&ion faite du plus
ou du moins qu’ils am andoient dans fa fu cceiïïon & fans rien
régler à cet é ga rd ; lu i, dans le teftam ent duquel il eft te x
tuellem ent écrit que les trois quarts feront partagés par por
tions égales en treu x.
'
C ertainem ent le fieur B ag ès a envifagé fes enfans du fécond
l i t , e n le s oppofant avec ceu x du p rem ier, pour gratifier les
uns & ratifier l ’exclufion légale des au tres; mais il ne s'eft
pas arrêté là. I l a évidem m ent confidéré fes enfans du
fécond lit fous un autre r a p p o r t 6 c pour fixer leur fort en
tre u x ., puifqu’il a prefcrit le partage égal ent r eu x des trois
• quarts de fes biens. S i M e. B agès ne vo it pas c e la , c ’eft qu’il
ne veu t rien voir de ce qui bleffe fes intérêts.
I l n’eft pas moins inconcevable , lorfqu ’il dit qu’il v o it
bien dans le teftam ent de fon pere une énonciation de la
proportion
dans laquelle il fuppofoit que le partage de®
trois quarts de fes biens devoit être fait ; mais nullem ent une
àifpojîtion qui prefcrive cette proportion de partage. L o rfq u e
le célébré a b b é, qui a rendu aux m uets un équivalent de l ’or
gane dont la nature les avoit p riv é s , aura découvert un fecret
plus m erveilleux e n c o re , le fecret d éfaire v o ir ceu x qui ferm ent
les yeux à la lu m iere, nous ferons voir à M e. B agès dans le teftament defon pere la difpofition qu'il n 'y trouve pss. Jufques-là
-------------------------------- --------- -------- ---------------- ----- /. )
( a ) Des Teilam ens, tome i , ch, 7,*fe& . 4 , pag. ftij» 1
»
-1
)
�18
nous nous confolerons de fon obftin ation , bien convaincus que
les M agiilrats qui doivent nous juger t verront ce qu’il ne veu t
pas voir. N ou s nous bornerons à dire que M e. B agès fera le
feu l à ne pas trouver une difpofition bien p ré c ife , un legs
bien cara&érifé dans ces expreiïions du teftateur, qui fuivent
le prélegs du q u a rt, & à l'égard des autres trois quarts, ils
s e r o n t partagés par égales portions entre f e s trois enfans
& de la dame Faucher.
II n’y a point de term es façram entels pour les legs : de
quelque m aniéré quJun teftateur ait exprim é fa v o lo n té , elle
£
ij/
eft toujours efficace; il füffit qu’elle foit exprim ée. Otnne verhum fignificans tejlatoris legitimum fenfum 3 l e g a r e v c I
^ J ^ ^ ^ fid e ic o m m it t e r e v o len tis, u t i l e a t q u e v a l i d u m e s t (a).
O r , la v o lo n té du iïeur B agès pere fur le partage des trois
<
quarts de fa fucceflîon., n’eft-elle pas bien énergiquem ent e x
•
prim ée? les trois quarts s e r o n t partagés par portions égales.
C e tte expreifion feron t eft ce lle du com m andem ent : pourroiton donc ne pas reconnoître dans ce t ordre de partage im pé-
i
rieufem ent difté par le teftateu r, la lo i qu’il a faite entre fes
enfans ? & que fau t-il de plus pour cara& érifer une difpofition
teftam entaire, un legs?
M e. B agès infiftera encore : » Q uand le teftateur auroit
»
»
»
»
d ifp o fé, par une claufe plus expreilfe, des trois quarts de
fa fucceiïion par égalité entre les trois enfans du fécond
l i t , il ne l ’auroit fait que parce qu’il cro y o it que la lo i le
v o u lo it ainfi; cette difpofition ferôit l’effet de l'ignorance*
» dès-lors e lle ne pourroit fubfifter ( b) . »
( a ) L tg. 3 , communia de légat. & fideùom.
( i ) Page 7 du Mi®./de Me.
�*9
A in ii donc la v o lo n té la plus expreffe des teftateurs fera éter
nellem ent le jouet des vifions intérefTées de tout h é ritie r, dont
l ’avidité fans m efure ne fe croira pas aflfez bien partagée ! Si
le teftateur eût é té m ieux inftruit de l ’efprit du D r o it coutu m ie r, il n’eût pas voulu ce qu’il a voulu ! V o i là , il faut
l ’a v o u e r, une m éthode bien com m ode pour rayer dans un
teftament une claufe qui déplaît. M ais la ra ifo n , mais la loi
s’accom m odent-elles de ces fubterfuges?
L a raifon nous crie que c'eft folie d’abandonner le certain
pour faifir des peut-être. O r., qu’y a -t-il ici de ce rta in ? Q u e
ir
le teftateur a voulu le partage éga l des trois quarts de fee
biens entre fes trois enfans du fécond lit. A -t-il fu , ou n o n ,
que cette proportion de partage n’é to it pas celle de la lo i?
E n fuppofant qu’il Tait ig n o ré , qq’auroit-il fa it, s’il l ’eût fu?
A u roit-il difpofé différem m ent qu’il ne l ’a fait? V oilà., fi T on
v e u t, m atiere à des peut-être, mais c ’eft tout. O r , des co n
jectures incertaines, des p eu t-être, ne prévaudront jamais au
tribunal de la ra ifo n , fur une volon té certaine & littéralem en t
écrite.
C e que la raifon nous d it, la loi le confacre. U n teftateur
n’a pas, à perfuader; il com m ande : dès-lors il eft difpenfé de
//
rendre com pte des m otifs qui déterm inent fa libéralité. L a
validité du legs n’a befoin d’aucune autre bafe que la volon té
1
-JLJOd
.
qui le produit., f i t pro rationt voluntas. D e -là eft née ce tte
règle de d r o it, que la caufe purem ent impulfive exprim ée par
69 7^ -*^
le teftateur, pour faire con noîtte ce qui l’a engagé à d ifp o fer,
^
com m e il l’a fa it, n’eft pas attachée au le g s ; ratio legandi le- r
8 a*o non cohœret (a ). D ’où réfulte que la faufleté de ce tte
(*)
I
Tr*'1
cùm talc y * , §. falfam cmtfam, Jf, de {audition. & dtmonjkat.
*
s
CV
/ )
�20
caufe n’annulle pas la d ifp ofition , parce quJelle laiiTe fubfifter
la v o lo n té ; legato fa lfa caufa adjecla non nocet (a ).
Il eft donc aifé de voir qu’en fuppofant avec M °. B a g è s ,
que lorfque fon pere prefcrivit le partage égal des trois quarts
de fes biens entre fes trois enfans du dernier l i t , il étoit dans
la fauife perfuaiion que la C ou tu m e lui en faifoit la l o i ; en
fuppofant q u 'il n’eût été pouffé à difpofer a in fi, que par
l ’ignorance du droit j fa volo n té écrite n’en feroit ni moins
refpectable ni moins efficace; & pourquoi? parce que la fauffeté de la caufe impulfive ne vicie pas le legs (b).
(a)
Hitic & Ç. 5. fequent. injl. de legatis. Ricard, traité des donations,
troifieme partie, nom. 3 1 7 ; F urgole, des teftamens, tome a , chap. 7 , feit. 3 ,
nom. 8 & fuivans.
¥
( b ) Q u’on ne nous oppofe pas l’Arrêt de Bonnecarrere, rendu au Parlement
de Touloufe en 1630, & dont parle D olive, liv. j , ch. 17. i ° . Cet Arrêt a été
rendu dans un temps o ù , o*mme i’obferve Furgole, tome a , pag. 110 , n. 1 9 , le
Parlement de Touloufe donnoit beaucoup trop au preftige des conje&ures. a 0. De
quel poids peut paroître un A rrê t, lors duquel les opinions fe trouvèrent fi in
certaines, que Dolive remarque en finiflant, qu’il y eut fuccefiivement deux
partages aux deux Chambres des Enquêtes.
30. Enfin, il ne faut que lire l’efpece de cet A rrê t, pour fe convaincre qu’il
eft ici hors de toute application. La claufe du teftainent de Bonnecarrere qui
donnoit lieu au procès étoit conçue en ces termes : Item , a dit avoir marié feue
Mengine Bonnecarrere fa fille avec Bernard Dariés , à laquelle fu t promife la Jomme
de cent cinquante éeus petits ; de laquelle fomme en a payé une bonne partie, ainfi
qu appert de la reconnoijjance à laquelle il Je remet, & la fomme refonte veut en
tièrement être payée audit Dariés comme fuccejfetir à une Jienne unique fille , fille de
fille y 6' avec icelle fomme , l ’injiitue Jbn héritier particulier , & qu’ il ne puijfie rien
plus demander fur fes biens. » Il étoit évident d’un côté , que cetie cljule ne
contenoit aucune difpofition quelconque en faveur de Dariés, de la fomme qu’il
avoit déjà reçue fur la dot de fa femme, & qui devoit revenir au teftateur par
droit de retour, comme robfervoit M . D olive; il ne le doit pas moins que le tefta
teur , en difant qu’il vouloit que la fomme qu’il croyoit devoir encore fût payée ,
n’avoit pas voulu être libéral, mais fe libérer, ignorant que la loi le libéroit. Il ne
t ’agifloit donc pas d’un le g s, dont l’erreur de droit eût été la fimple caule impulfive ;
�21
M ais d’ailleurs M e. B agès s’abufe étrangem ent fur le point
de fait. Q u e lle vifion d’im aginer que fon pere nJa difpofé des
trois quarts de fes biens par égalité entre fes trois enfans du
fécond lit , que dans la faufle idée qu'ils étoien t f e s héritiers
de droit dans cette proportion ? I l les qualifie bien f e s héri
tiers de droit, & ils l’étoien t en e ffe t; mais il ne dit pas
qu'il les crût fes héritiers par égalité ; donc il n’eft pas vrai
de dire qu’il a fuppofé cette égalité ôc difpofé en co n féq u en ce;
il eft é v id e n t, au co n tra ire , qu’il l’a p re fcrite , parce qu’il
la defiroit. Il ne devoir pas com pte des m otifs qui l’ont dé
cid é ; fit pro ratione voluntas : cependant il a mis fes héritiers
dans fa confidence. A p rès avoir ordonné le partage égal des
trois quarts de fes biens entre fes trois enfans du fécond l i t ,
il déclare qu il difpofé ain fi, attendu qu il a fuffifamment doté
f e s trois fille s de fo n premier mariage , lesquelles il entend
q u elles ne puifjent rien prétendre dans f a fucceffion ; le m ot
attendu renferme le m o tif de la difpofition qui le p r é c é d é ,
nous dit M e. B a g è s: d’a cco rd ; mais ce m o tif bien faifi ne
renverfe-t-il pas la prétention de M e. B a g è s , au lieu de l’ap
puyer ? L e teflateur prefcrit l'é g a lité entre fes trois enfans
du dernier l i t , attendu que f e s fille s du premier Ut ont été
fuffifaniment dotées: donc il les regardoit com m e rem plies de
leurs portions héréditaires : il ne fe trom poit pas. A l'ép oq u e
de fon teftament , la valeur de fa fucceflion é to it inliniment au-deifous de celle qu’une révolu tion im prévue lui a
donnée depuis; & il n’y auroit eu pour e lle s , ou pour M e.
l*À'kfrat'-°n
te^ateur en étoit la caufe finale. E ft-il bien étrange après cela, que
rr t ait jugé que Dariés non-feulement ne pouvoir pas exiger le reliant à
dot^ ’•f 'a ^ot
k femme ) rnais qu’il devoit encore reftituer la partie de cette
avoit reçue? 11 n’y avoit point de legs en fa faveur,
/
�B a g è s , leur rep réfen tan t, aucun profit à prendre leur* parts
h éréd itaires, en rapportant leurs dots.
a 0. I l entend que f e s fille s du premier lit ne puiffent rien
prétendre dans f a fucceffion. C e tte exclu iion qui accom pagne
l ’ordonnance de l ’é ga lité entre les trois enfans du fécond
lit ne renferm e-t-elle pas éminemment T exclufion du repréfentant que la lo i m ettoit à la place des filles du prem ier
lit ? L e teftateur n*a-t-il pas marqué la v o lo n té la plus déci
dée que fes filles du prem ier lit ne fuifent com ptées pour
rien ni directement ni indireâement dans le partage des trois
quarts de fa fcceilio n ? que leur exiftence n’altérat point l ’é
galité de ce partage ?
/
V ain em en t M c. Bagès fe pare de fa qualité de fils unique;
vainem ent il nous d it q u e , pouvant ieu l perpétuer le .n o m
du teftateu r, il é to it feul l ’ob jet de fou affe& ion. Ils fo n t
paffés ces fiecles de b arb arie, où la fo lie de perpétuer fon
n o m , rendant l ’hom m e traître à la n a tu re , rempliiToit les
clo ître & la fo c ié té , de triftes vi&im es im m olées à l’établiifem ent d’un aîné. Si l ’on paie encore un tribut à l ’idole du
p r é ju g é , au m oins o u b lie-t-o n rarem ent que l ’on eit le pere
de tous fes enfans.
L e fieur Bagès s'en efî rappellé. Il m et d'abord fon offrande
aux pieds de l ’idole : le quart de la fucceifion lui eft deftiné
en p récip u t; mais le cri du fentim ent le ramene au ili-tô t à
fes autres enfans. S a follicitude paternelle balance leurs deitinées ; & , m efurant fes libéralités par leurs b efo in s, il or
donne entre fes filles & fon fils le partage é g a l des trois
quârts de fon patrim oine. Par cette fage diftribution il Satis
fait à la n a tu re, après avoir acquitté la dette,du préjugé. E t
M c. B agès vou d rait qire“Cet arrangem ent judicieux ne fû t que
�*3
le fruit de la m éprife ! C om m e l'in té rêt perfonnel aveugle !
- Mai6 enfin fur ce pied., Je teftateur aura fait u n teftam ent
rid içu lç, con tin u e-t-on j au lieu de gratifier fon fils a în é , il
lui aura m oins laifTé que la lo i ne lui donnoit.
L e fieur B a g è s ne m et pas plus de jufteife dans fes calculs
que dans fes raifonnem ens : quelle é to it donc la portion
des biens de fon pere que la loi lui r é fe r v o it, fo it de fon
c h e f, fo it du c h e f des filles fo r ç lo fe s , fit dont il ne pouv o it pas être privé ? L a m o itié , pas davantage ; & ce n’éto it qu'à la charge de rapporter les dots des filles forçlofes.
C e rapport de trois dots qui réunies s’é le v e n t à plus de
10000 liv. n 'é to it pas peu de ch ofe ; le teftam ent l’en difpenfe ; il lui attribue la m oitié de la fucceifion en l ’état où
elle fe trouvoit au décès du teftateu r, fans aucune ch arge de
rapport. N e vo ilà -t-il pas un avantage bien réel & bien confidérable? N ou s fommes en droit d'en con clu re que le teftam ent du fieur B agès pere donne beaucoup plus au fils que la
loi. R ie n ne peut donc juftifier fa réfiftance à s’y co n
form er.
C O N C L U S I O N .
A in fi difparoiifent toutes les illufions dont M e. B ag ès s'eft
bercé. D e u x chofes fon t égalem ent dém ontrées : la p rem iere,
que fon pere a pu preferire le partage é g a l des trois quarts de
fa fu cceifio n , en gratifiant fon fils du quart en p ré cip u t, pour
le dédom m ager de raccroiifem en t des p arts des filles fo rcio
n s ; la fé co n d é , q u 'il l’a voulu. P o tu it quod voluit. M e. B agès
ne fera que des efforts impuiifans pour obfcurcir l ’évid en ce de
ce* dçux aiTertions, & pour être admis à divifer un teftamenç
flue 1^ Coutum e & le d roit com m un d éclaren t indivijîble. Q u ’i l
'f
�24
op te e n c o r e , s’il le v e u t, entre la fucceff i on légitim e & la fucceff io n teftam entaire ; mais qu’il ne fon ge pas à profiter des
avantages du teftam en t, s’il ne veut pas fe foum ettre à fes difpofitions fans réferve.
M onfieur le L I E U T E N A N T - G É N É R A L , Rapporteur.
M e. B E R G I E R ,
A v o c a t.
JUGE,
P rocureur.
A R I O M , chez Ma r t i n D É G O U T T E , Imprim eur Libraire
près la-Fontaine des Lignes
1782.
•
'
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Charles. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Juge
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de ses enfans, héritiers de défunte Marie Bagès leur mère, ayant repris en son lieu et place ; sieur François Malbet et demoiselle Elisabeth Bagès sa femme, de lui autorisée, habitans du lieu du Montel, paroisse d'Autoing, demandeurs et défendeurs. Contre maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, habitant du dit lieu du Montel, même paroisse d'Autoing ; et messire Antoine De Pons, seigneur, marquis de Belestat, son curateur, habitant en son château de Belestat, défendeurs et demandeurs.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
BCU_Factums_B0109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0110
BCU_Factums_B0111
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53948/BCU_Factums_B0109.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vodable (63466)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53950/BCU_Factums_B0111.pdf
ac551de54d646534dda41ad10ef7f35c
PDF Text
Text
a g w t e g a ' ......
-
I/
........
&!L
ÿ t& s *
R E P O N S E
S OMM A I R E
,
M e C h a r l e s J U G E , Procureur
en la Cour , pere & légitime Adminiftrateur
de fon enfant , héritier de défunte M A R I E '
B A G É S , fa mere; Sieur F r a n ç o i s M A L B E T ,
& Demoifelle É l i s a b e t h BA G E S , fa femme ,
de l ui autorifée , Demandeurs & Défendeurs.
P o u r
,
,,
C o n t r e M ‘. J e a n - N a z a i r e B A G É S ,
A voca en Parlement & M effire A N T O I N E
D E P O N S Chevalier , Seigneur de Bélef t a t,
f on Curateur Défendeurs & Demandeurs.
L
esDemandeurs
ne fe feroient jamais
douté qu’ils puffent s’attirer le reproche
1
d’abandonner les principes dans cette
affaire , pour fe livrer à leur imagination,
ont dit que le fieur B a g é s, après avoir lè
gue par une premiere difpofuion de fon teftament
�le quart de fes biens en préciput à Ton fils aîné ,
avoit prefcrit le partage par portions égales des
autres trois quarts, entre ce même fils & Tes deux
fœurs à marier. Eil-ce-là un rêve creu x, enfanté
par une imagination prévenue ? Nous répéterons à
M e. Bagés: prenez le teftament de votre pere , &
liie z , vous verrez qu’il a dit que les trois quarts de
Je s biens feront partagés par égales portions entre
Tes trois enfants du fécond lit. Faut-il mettre l’ima
gination en travail , pour lire dans un a&e ce
qui y eft Îi littéralement écrit ? C ’eft pour obfcurcir
l ’évidence de ces deux lignes , qui parlent auiTi
clair aux yeux qu’à l'eip rit, qu’il falloit de grands
efforts d’imagination ; auiïi M c. Bagés en a-t-il fait
d’incroyables, mais de bien inutiles. Nous nous garde
rons bien de le fui vre dans les écarts où il s’eft jetté pour
nous y attirer. Le moyen le plus fur de porter la
conviàion dans tous les efprits, fur une vérité évi
dente, eft de la préfenter toute nue ; & quand on
fait des tentatives pour la voiler , & y fubilituef
l’illuiion, de la préfenter encore. A u lieu de nous
enfoncer avec M e. Bagés dans le puits où il aeÎTaye
de 1 enfévelir, nous la ramènerons au grand jour»
& pour toute réponfe aux commentaires interné'
rtables auxquels il s’eft livré , afin de faire céder
l’intention nettement exprimée du fieur Bages ,
f o n p e r e ,à une intention imaginaire & fa n tas
q u e, nous lui répéterons : „ il n’cft pas per'
�» mis d’étouffer la vérité par la fi&ion , & d a» bandonner le certain pour l’incertain. Le teilateur
a dit littéralement que les trois quarts de Tes biens
» (eroient partagés par portions égales entre fes trois
» enfants du dernier lit , cela eft très-clair affurément,
» tenons-nous y donc. ( a,)
La volonté du teilateur ainii affurée, refte à
examiner ii M e. Bagés eft recevable à la com( û ) Si M e. B 'g é s e u t voulu recueillir tous les paradoxes que la fubti.
licé a imaginés dans les fiécles où t l L ÎÜ BÜ BLregnoit dans l’ÉcoIe ic au
B a rreau , pout donner plus de crédit aux préfom ptions & aux co n je& u < rcs qu’ à la tealité , il auroit pu allonger fon M ém oire d ’une bien plus am
ple collection de citations captieufes, mais le regne de la raifon eft reve*
nu. C e n’ell p is feulem eit Furgules qui nous die que l’on ne laifTe plus à
l ’écart la vérité & la réalité pour courir après des om bres & des im ag i
nations , ( i ) Cujas avoit judicieufem ent rem arqué long-tem ps avant lui
( i) T o m . »«•
que tout ce que les intei prêtes ont dit fur les conjectures n’eft à peu près Pa8e 40
que v ifio n & m enlonge ; mendacijftma Junt omnia quee in hanc legem adnatarunt. ( i j E t M . D ;;m at s’exprim eainiî dansfes loix c iv ile s , i<?. partie , L iv .
^
. . I-°*
3e. Tic 1er. Se£tion 6e. “ Il faut diftinguer trois fortes d ’expreiïîons dans ^Uc ' PaSinvmh
» les Teftamentb ; la premiere de celles qui font parfaitement c la ire s , la
» féconde de celles qui font fi oblcures '¡u’ile ll im poflîble de leur donner
» un feus , & la troifieme de celles où il fe trouve q uelqu 'obfcurité, queU
» que am biguité , ou qtaelqu’autre défaut qui peut en rendre le fens in*
»> certain.
» Les expreffions parfaitement claires, co tv in u e -t-il, nefouflfrent point •
t» d interprétation pour en fixer & connoitre le fen s, puiique leur clarté les
» rend évidentes.
» Ec li la dilpofition du T eilateu r s’ y trouve expliquée bien nette» ment , & p récifem ent, i l faut s‘en tenir au fens qui paroit par î’exprejjion.
” Cum in va 6/j nulla ambiguitas efi , non debet admitu voluntatis quee/ho. Leg.
*î*^§. 1. fF. de légat. 3.
Cum euim manififliffimus ejl fenfus tejlatoris , verborum intcrpre:atio nujquàm
ie>
» ut melior fenfus exijîat. Leg. 3. in fin. cod. de liber, praei. vel ex hœred.
va anf ^ c^Pece ^es expreffions font très-claires. Les trois quarts feront
«Jq.* •{ par *galtjPortioni*\\ eft im poffible de trouver là de 1 équivoque ;
1C w futtt s'y tcnij littéralem ent> non debet admitti voluntatis ifacejho.
�^
4
battre. Il demande à prendre fur les trois quarts de
la fucceiîion de Ton pere , l’accroiflement des parts
héréditaires des filles forclofes, en rapportant lerrs
dots ; & en demandant cela , c’eft-à-dire , en com
battant le partage égal prefcrit par le teilateur, il
veut encore profiter du legs du quart en préciput.
Nous lui oppofons la réglé générale , qui ne per
met pas à celui qui veut profiter d’un teftamenr,
d’en divifer les difpofitions; qui lui impofe la 'nécefîité , ou de le rejeter en entier, ou de l’exé
cuter en entier. Nous lui oppofons en particulier
l’article 50 du titre iz de notre coutum e, qui
confacre fpécialement cette indivifibilité des difpofitions teftamentaires. Q ue nous répond M e. Bagés?
il commente à ion gré le commentaire de Bafmaiion fur notre coutume. Il fe tourmente , il s’a
gite , pour traveftir ce judicieux auteur en ridicule.
Il fe repofe fièrement fur deux anciennes fentences
qu’il a tirées de l’oubli du greffe , & dont il ra
conte les efpeces à fa maniéré. Foible reiTource
pour faire taire la voie impérieufe de la loi.
Bafmaifon étoit trop raifonnable , & la Sénécbauffée d’Auvergne fut dans tous les temps trop
attachée aux vrais principes, pour choquer de front
la difpofition textuelle de la coutume.
Si Bafmaifon a dit que le prélegs du quart en
faveur des mâles, n em p êih o t pas qu’ils ne priflent
laccroifTemcnt des parts des filles forclofes dans les
�trois quarts -, il n’a parlé ainfi, que pour les cas où
le teflrateur n’a pas ordonné le partage égal des
trois quarts , entre les mâles & les filles à m arier,
ou il n’a difpofé expreflément que du quart, & s en
eft rapporté à la loi pour le partage d3S trois
quarts *, cet auteur décide tout le contraire dans le cas
où le teftateur a prefcrit littéralement le partage des
trois quarts par égalité entre les mâles & les filles non
mariées ; il veut alors que la difpofition de la loi
difparoiiTe devant h difpofirion de l’homme. ProviJiQiie hornirus cejjat provijio kgis.
C ’eft ce qui a été démontré avec tant d’évidence
dans le premier Mémoire des Demandeurs , que
les efforts qu’a fait M c. Bagés , pour prêter à cet
auteur une opinion plus favorable à fon fyftêm e,
n’ont prouvé rien autre chofe que fon embarras.
Il ne trouvera pas plus de reffource dans les
deux fentences de 1 6 3 0 & 1 66z , qu’il invoque
comme ayant confacré fa prétention.
La le&ure attentive des expéditions de ces
fentences qui viennent d être produites , prouve
démonftrativement quelles font hors de toute ap
plication à l’efpece préfente.
Quelle eft en effet la queftion jugée par celle du
M juillet 1 6 3 0 ? U n iieur Titaflon avoit
laiifé quatre enfants m âles, trois filles mariées &
forcloses, & d’autres filles non mariées de fon vivant.
Il avoit fait un teftam ent, par lequel il avoit légué
purement & Amplement le quart de fes biens en
�6
préciput à trois de íes enfants m âles, fans qu’il paroiiTe qu’il eût difpofé des trois quarts, encore moins
qu’il eût prefcrit l'égalité dans le partage de ces trois
quarts entre les mâles & les filles non forclofes.
Il s’éleve une conteilation fur l ’accroifTement des
parts héréditaires des filles forclofes. Les mâles fe le
diiputoienc entr’eux : il y avoit plufieurs filles non
forclofes; une feule étoit intervenue, les autres n’étoient point en caufe. La fentence ordonna que le
droit d’accroiflement des parts & portions hérédi
taires des trois filles forclofes feroit commun entre
les quatre mâles ; & qu’en procédant au partage,
le quart & quatrième portion defdites parts hérédi
taires feroit délivré au Demandeur ( le fieur T itaifon , Chanoine ) & les autres trois quarts aux
Défendeurs ( fes trois freres ) outre & par deifus ,
le quart h eux légué en préciput , & ce privaùvejnent & a l'exception des autres jilles non mariées par
le pere, en rapportant néanmoins les dots des filles
forclofes.
Q ue juge cette fentence ? que le fimple prélegs
du quart en faveur des mâles ou de quelques-uns
d’eux , n’empêche pas les légataires de participer à
l’accroiiTement des parts héréditaires des filles for
clofes-, lorfque le teftateur n’a fait aucune dilpofition des trois quarts, & s’en eft rapporté à la lo i,
ou lorfqu’il n’a pas prefcrit l’égalité entre les mâles
6 1 les filles Jion m ariées, dans le partage des trois
�quarts. Rien de plus jufte : alors l ’ a c c r o i (Tement peut
être cumulé avec le legs du q u art, (ans divifer le
teftament, fans le combattre ; pourquoi donc ne pas
accorder aux légataires tout le bénéfice de la vo
lonté de l’homme & delà difpofition de la loi qui con
courent enfemble ? mais il ne s’agit pas ici de cet
te queftion. Dans l’efpece , leteftateur, en léguant le
quart à M e. B a g é s, a ordonné le partage des autres
trois quarts par portions égales entre Tes fœurs &
lui. D ’après une pareille difpoiition , on ne pourroit
cumuler le quart avec le bénéfice de raccroiffem ent,
fans divifer le teftament, fans combattre la volonté
exprefle du teftateur , & c’eft à quoi la loi réiifte.
Ainfi point de reifemblance entre la queftion jugée
par la fentence de 1 6 3 0 , &: celle fur laquelle la
Cour a à prononcer dans ce moment.
L a fentence de i 6 6 x e f t encore bien plus éloig
née de la queftion. On prétend en avoir trouvé
l ’efpece dans une note manufcrite de M e. M arie ; mais
cette note dont la fource & 1Auteur font également
ignorés, fe trouve ouvertement démentie par l’ex
pédition qui vient d’être produite On y voit clai
rement en effet que , dans l’efpece de cette fentence,
il n’y avoit ni prélegs du q u a rt, ni teftament. Il s’agiifoit de la fucceiîion collatérale du fieur U r io n ,
Chanoine, ouverte ab intejlat. Pierre & Adrien
^rion pourfuivoient le partage de cette fucceifion
contre les defcendants d’une fceur non forclofe. Les
�8
concluions qu’ils avoient pnfes font rapportées en
entier dans la fentence. Ils demandoient qu’il leur
fût délaifle cinq portions fur iix de la fucceiîion du
(leur Urion , Chanoine ; fa voir , deux de leur c h e f/
& les trois autres de droit d ’accroijfement par la ré
nonciation de Jeanne , Antoinette <§' M arie Urion ,
& la fixieme à tous les Défendeurs , repréfentants une quatrième fille non forclofe. (<?) La fentence
adopta ces conclufions : que jugea-t-elle donc ? une
queftion fur laquelle tous les fuffrages font réu
nis depuis long-temps ; fa v o ir, que les mâles -pro
fitent en pur gain de l’accroiflement de la
part héréditaire des filles forclofes, d^ns les iucceiïions collatérales. Mais qu’a de commun cette
queftion , avec celle qui divife M e. Bagés & les
Demandeurs ? ici il eft queftion de déterminer
l’effet d’un teftament, de lavoir s’il eft permis d’en
divifer les difpofitions, d’accepter [avantageux , de
rejeter l'onéreux ; là il n’étoit queftion ni de tefta
ment ni de prélegs II s’agiffoit d'une fucceiîion ouverte
ab imejlat. Et n’eft ce pas un temps bien perdu >
que celui qui a été employé à déterrer dans ntt
greffe une fentence auiîi étrangère à la conteftation •
Q u ’on nous dife tant qu’on voudra qu’une note
(a ) V o il\ une preuve bien claire que la fucceffion étoit o u v e rte -^ ,rt"
icjlat y p u if ue le partage croit dem andé fan«, prélèvement , fans
en vertu d ’aucune difpofition quelconque , & fuivant l'ordre de fuccei.
établi p arla coutume. Auifi ne trouve-t-on aucun teftament de vile dans
fenccnce.
i
- • _
manufcrite
�manufcrite de M e. M arie , avocat contemporain ;
qui avoit écrit au procès, préfente l’efpece de cette
fentence d'une maniéré abfolument conforme à celle
fur laquelle la Cour a à prononcer aujourd h u i, La
fentence paroit pour donner un démenti à la note,
& nous apprendre quel fonds on peut faire fur des
manufcrits obfcurs.
Concluons donc que M e. Bagés s’eft fait illufion,
lorfqu'il a cru fonder fon fyftême fur la jurifprudence. E t puifqu’il eft combattu par la raifon ,
p ar la loi générale de l ’indivifibilité des teftaments,
& par la difpofition particulière de notre coutume ,
la Cour pourroit-elle balancer à le profcrire?
Monficur LE L I E U T E N A N T -G É N É R A L ,
Rapporteur.
M e. B E R G I E R ,
A vocat.
J u g e , Procureur.
A
CLE RM O N T - F E R R A N D y
De l'imprimerie
d 'A n t o in e
D E L C R O S , Imprimeur du Roi. 1782;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Charles. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Juge
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Réponse sommaire, pour maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de son enfant, héritier de défunte Marie Bagès, sa mère ; sieur François Malbet, et demoiselle Elisabeth Bagès, sa femme, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs. Contre maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine Depons, chevalier, seigneur de Bélestat, son curateur, défendeurs et demandeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie d'Antoine Delcros (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
9 p.
BCU_Factums_B0111
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0110
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53950/BCU_Factums_B0111.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vodable (63466)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52927/BCU_Factums_G0319.pdf
fb00705306a44456b11b56d6ba409d6c
PDF Text
Text
P
R
É
C
I
S
P O U R dame M a r i e - M a g d e l a i n e A R N A U D
& fieur J e a n - B a p t i s t e T R E IL E S ,fo n mari,
Notaire royal à A rton n e, & M effire V
ict o r
A R N A U D , Prêtre, habitant de cette Ville de
Clerm ont ; lefdits dame & V i ctor A rnaud,
héritiers du fieur Gilbert-Paterne Arnaud , leur
pere, Intimés.
C O N T R E dame A n t o i n e t t e B O M P A R D ,
veuve du f ieur J ean Chabrol, héritière univerfelle
du fieur Perrin , Directeur des Dom aines,
Appellante.
A dame Chabrol vient de faire un der
nier effort par un Mémoire imprimé,
fignifié au moment où le procès étoit fur
le pointd'etre juge, pour etre dechargee
du paiement d’un legs de 2400 livres, fait par le
fieur Perrin, Directeur des Domaines, à un Com A
�mis indigent, qui l’a fervi pendant près de
ans
dans fon Bureau, fur un modique appointement
de <)00 livres par an.
La dame Chabrol & le fieur A rnau d, tous deux
étrangers au fieur P errin , n’ont dû s’attendre à
des libéralités de fa part, a fa m ort, qu’en propor
tion de l’affeâion qu’il pouvoit avoir pour l’un &
pour l’autre.
Il eft facile de voir que celle qu’il a eu pour la
dame Chabrol étoit fans borne ; l’inftitution univerfelle qu’il a faite en fa faveur en eft feule la preu
ve ; mais cette difpofition étoit libre. Etoit-elle jufte ? ce n’eft point la queftion à décider.
Les héritiers légitimes du fieur Perrin , on veut
dire fes parents en droit de lui fuccéder, perdoient
par cette inftitution plus de 1 20000 livres , qui fc
trouvoient verfées dans les mains de la dame C ha
brol ; c’étoit un coup d’œil délagréable, qui auroit
pu exciter de juftes clameurs de leur part & des
pourfuites en juftice, pour anéantir des diipofitions
fi outrées ; ces pourfuites, bien ou mal fondées, auroient toujours foulage un chagrin naturel,
don
né bien de l’embarras ôt de l’inquiétude à l’héi iticrc
étrangère ; mais ils ont refpe&é la volonté du fieur
Perrin , dès qu’ils ont cru l’appcrcevoir dans des
motifs de reconnoiilance.
Par quelle fatalité la dame C h ab ro l, qui a eu le
talent de fe procurer leur place dans la lucceilion
du fieur Perrin, n’a-t-clle pas fait h. l’égard du petit
legs, dont a .été gratifié un ancien Commis, ce qu’ont
�3
fait à l’égard de l ’inilitution d’héritier les parents
dans l’ordre de iuccéder au fieur Ferrin ? ils n’ont
ni traverfe les projets de la dame C h ab ro l, en eiiàyant de détourner le fieur Perrin de faire pour:
elle des difpofitions univerfelles, ni après fa mort
tenté de les détruire.
• Le fieur Arnaud, dont les utiles & longs fervices avoient été fi foiblement récompenfés, ne s’eil
occupé de fon côté qu’à venter la générofité de fon
bienfaiteur, fans murmurer contre l’ample fucceffion laiilee à la dame Chabrol , ni jetter aucun
regard d’envie ‘fur fon' fort ; il fe le feroit repro^
ché. Pourquoi donc la dame C h ab ro l, animée d’uri
autre eiprit, a-t-elle entrepris d’abord de faire char
ger, par le codicille quelle a fait faire dans un temps*
très-prochain de la mort du fieur Perrin, le legs de
2.400 livres, de plufieurs' conditions abfurdes ou
impoifibles \ tandis que ce legs fe trouve pur <Sç fimple & fous une charge facile a remplir dans le
teftament ? c’eft une énigme inexplicable pour ceux
qui connoifiènt le cœur & le défintéreiîement de
la dame C h a b ro l, & qui favent que c’elt le fieur
Arnaud qui a introduit le fieur Perrin chez elle
qui par la a contribué à ía'fortune.
Ces réflexions, qui ont parunéceiîaires afin d’a
mener à la connoiilance du véritable état du procès,
décident déjà en faveur du fieur Arnaud ou de
fes héritiers. Celles qui reftent encore a faire,'join
tes au récit1du teftament & du codicille, 6c a cer
tains faits ôc moyens , achèveront de convaincre
A a
�que fi la réfiitance que la dame Chabrol oppoie
peut être jufte au tribunal de ion cœur , elle ne
îàuroit trouver de partifan ailleurs.
En 1763 le fieur Perrin fut attaqué d’une ma
ladie de langueur, qui le mina peu à peu, 6c le conduifit enfin au tombeau.
La dame Chabrol fut, on ne peut pas plus, affe&ée de cette trifte fituation ; mais ia douleur fut
prudente,
elle n épargna rien pour parvenir à
ion but; on devine ce b u t, c’étoit en perdant le
fieur Perrin, qui étoit ion locataire & fon penfionnaire depuis 25 ans, de iè procurer en
fon bien. •
Le fieur Perrin fit donc fon teftament le 12
Septembre 1763 , temps auquel il vaquoit encore
à la Dire&ion & veilloit a ion Bureau, temps où
la mémoire étoit iàine &c l’efprit en ctat de diriger
des difpofitions teilamentaires &c toutes autres, avec
liberté, fans l’empire qu’exerçoient iur lui depuis
long-temps des affe&ions, qui, quelques pures quelles
foient, ne vieillirent jamais, &: auxquelles a tous
âges
dans l’état de la plus grande infirmité , on
ne rcfifte guere, quand l’objet eft toujours préfent ÔC
qu’il follicitc en perfonne.,
Extrait du teflamcnt du Jicur Perrin.
» Je donne & lègue a la Sœur iaint Denis Bom» pard (a) , RcligieufcÜrfulinc, une penfion de 7 2 1.
(a) C ’eil la fœur de la dame veuve Chabrol,
�5
On ne fait mention de ce legs que pour montrer
que toute la famille de la dame Chabrol s’eft re t
ienne des libéralités du Dirc&eur.
Legs fa it au Jîcur Arnaud.
» Je donne & lègue a Gilbert-Paterne Arnaud,
» mon premier Com m is, la, fomme de 24.00 liv.
» qui lui fera payée par mon héritiere ci-après
« nommée, auiîi-tôtque mes comptes, qu’il dref» fera fur l’infpe&ion de mon exécuteur tefbimen*> taire, feront arrêtés & appurés,en inllituant ledit
» Arnaud mon héritier particulier audit legs. »
Nulles autres charges impofées a ce legs, par ce
premier a&e, fruit de la réflexion la plus mure
d’un homme inftruit, que celle de dreilèr les
comptes du fieur Perrin , ce qu’il étoit aifé au fieur
Arnaud de faire, & ce qu’il a exécuté. Le fieùr
Perrin n’avoit preicrit cette rédaâion (Z>) que pour
faciliter la dame C h abrol, fon héritiere univerfelle,
dans le compte qu’elle devoit rendre en cette qua
lité aux Fermiers Généraux.
Le fieur Perrin n’oublioit rien , comme l’on»
voit, dans ce teftament de ce qui pouvoit contribuer
à l’avantage de la dame Chabrol ; elle le tenoit
de fi près, qu’il lui eut été impoflible de perdre
de vue les moindres choies qui pouvoient l’intéreiTer.
Le fieur Perrin lègue enluité cinquante écus
(,b) Pour cette rédaâion il lui en auroit coûté au moins 2.«
lo u is,d o n t cette claufe lui a évité la dépenfe. ' i
�a fon domeiHque ; & enfin il lègue a fa fœur,
fa niece <Sc ion neveu les rentes qui lui étoient
dues fur l’Hôtel de Ville de Paris.
Tels font les legs portés au teilament, après
lefqueis il inilitue la dame Chabrol ion héritière
univerfelie du iurplus de iès biens.
Il nomme pour ion exécuteur teftamen taire le
iieur Lantilfier, Contrôleur Générai des Domai
nes.
La dame Chabrol auroit du être très-contente
d’une inllitution pareille, chargée de fi peu de legs.
Celui de cinquante écus à un domeiHque ne la
chagrinoit guere, non plus que le don des rentes
fur l ’Hôtel de V ille de Paris aux parents du tes
tateur , a caufe des difficultés qu’il y a à les per
cevoir , &C des diminutions quelles éprouvent ;
mais pour les cent louis légués au fieur Arnaud,
elle ne pouvoir s’accoutumer a l ’idée de diminuer
d’autant les fommes confidérables qu’elle favoic
devoir lui revenir en vertu de l’inftitution.
LefieurPerrin,déperiifant journellement, fut infcnfiblemcnt réduit a la triile néceifité de ne plus
quitter fon lit. Dès ce moment la dame Chabrol & le fieur
Lantifiier s’emparerent de la Direftion & de tous
les papiers. Les moindres notes ou écrits qui purent
Faire foupçonner a la dame Chabrol quelque
comptabilité l’efïrayercnt, ou lui firent naître l’i
dée de faire charger le fieur Arnaud du compte de
certains objets,dont il n etoit nullement comptable.
�7
.
Pour l’exécution de ce projet elle choifitles derniers
moments de la vie du fieur Perrin.
Le iieur Perrin, qui n’exiiloit prefque plus, qui
n’avoit qu’un iouvenir obicur des choies 6c des
idées confufes, mais qui cependant, par le long
ufage d’écrire , n’avoit pas perdu cette faculté ,
écrivit un codicille le 30 Janvier 1764. conforme
aux vues de la dame Chabrol.
«
Extrait du codicille du fieur Perrin.
Il a écrit, ou on lui a fait écrire, qu’il avoit
» omis dans ion teilament deux chofes eilèntielles,
» ay fait, eil-il dit, mon codicille lur le teilament
» ainfi qu’il s’enfuit. «
Le ftyle de ce dernier a&e ne reiïèmble nulle
ment à celui de l’autre ; cela eil vifible, fur-tout
quand on voit qu’après avoir d it, ay fa it mon co
dicille fu r ledit tejlament ainfi q u il s'enfuit ; il
continue par ces mots « i°. que le legs de 2400
» liv. que j’ai fait au fieur Arnaud , mon premier
» Com m is, n’aura lieu qu’autant qu’il aura rendu
» compte il M . LantiJJier, mon exécuteur nomn me par le fufdit teilament, des recettes & dé» penics par lui faites pour le timbre extraordi» naire, & ce a compter de l’année où il me refla
» redevable d’une fotnme de 900 liv. dont M .
»» Lantiificr trouvera dans mes papiers la note
» arrêtée du fieur Arnaud, &c. »
Il veut enfuite que fi par l’événement de ce
�«<>-
g
compte le débet excède les 2400 liv. le fieur A r
naud foit tenu de rendre le furplus.
20. Le legs n’aura lieu qu’autant que le fieur
Arnaud aura mis en réglé le compte dû aux héritiers
V itr y , dont M . Lantiffier lui remettra les pieces
(elles étoientdonc entre les mains du fieur Perrin. )
Auifi eft-il obfervé dans cet aâe que le fieur
Arnaud n’a reçu fur cette iucceiïion que la fomme de trois cents 6c quelques livres du fieur
Bouyon d’Herment ; j abandonne le furplus, dit
le fieur Perrin , J i furplus y a , à fo n ame &
confcience.
30. » Q u’il rendra encore un compte à M . Lan» tiftier de la fucceiïion R ottier, dont il s e jl
» fcu l immifcé ( ce qui eft faux comme cela eft
» prouvé au procès. )
40. Enfin » qu’il dreiîèra tous les comptes a ren»> dre pour la première année de Jean-Jacques Pré» vôt. ( Cela eft fait. )
« Et faute par ledit fieur Arnaud , eft-il ajou» té , de fatisfaire a tout ce que deflus , il de» meurera déchu • du legs de 2400 livres.
» Lequel ayant lieu ( ceci mérite attention ) lui
»> fera payé en quatre années confécutives à celle
n de mon décès. »
On doit avoir obfervé qu’au commencement
du codicille on lit que le fieur Perrin avoit omis
deux chofcs dans fon teftament a l’égard du fieur
Arnaud , & que cependant il a fait dans le codi
cille quatre changements notables.
Il
�<^é
Il charge le fieur A rnaud, iV d u compte du
timbre extraordinaire, qu’il ne devoit, pas Ôc qui
eil impoifible.
..
-* .
2°. D u compte de la fucçeiïiori V itry;, dont il
n’avoit pas les pieces, & pour laquelle il n’avoit
reçu que 300 livres, le iieur Perrin étant hors
vd’étàt.de recevoir cette fomme. (c)->
30. D u compte de la fucceifion Rottier, dont
le iieur Perrin avoit tout reçu avant fa maladie,
&.• dont il avoit également les pieces,
r
40. Le legs de 2400 livres , au lieu d’être payé
au décès j.àinfi que cela eil dit au teilament, ne
devoit l’être que dans quatre termes &: dans quatre
ans.
"s r;Ces quatre chofes ajoutées, au lieu de deux que
le fieur Perrin avoit feulement annoncées, démon
trent combien peu il étoit. préfent a lui-mcrnc,
lorfqu’il écrivoit fous la di&ée ou le s 4nfpirations
de la dame Chabrol un codicille où’ elle faifùit
inférer a fon gré des claufes nouvelles., dans la
. vue d’éteindre en entier un legs de 2400 givres.
- Tout autre que la dame Chabrol auroit regardé
ce legs tel qu’il étoit dans le teilament, avec refpe& , au moins l’auroit-elle regardé d’un œil indif
férent , considérant qu’il devoit fe trouver dans la
iuccefiion du fleur Perrin plus de cent-vingt mille
livres en argent comptant ou en effets „exigibles,
ians parler des profits journaliers que la dame
(c) Elle fut payée peu de temps avant fa mort.
B
�Chabrol avoit retirés du fieur Perrin pendant fa
v ie , qu’elle n’avoit pas diiïipé , &: dont elle n’étoit
comptable envers perfonne.
A u milieu de l’opulence où la dame Chabrol
fe voyoit déjà, au temps du codicille, le fieur Perrin
étant mourant pour lors , quatre termes & quatre
années, pour fe libérer de ce legs immenfe à ies
yeux , étoient-ils néceiTaires ?
Elle prit la même précaution pour un legs de
dix louis, fait au Domeftique du fieur Perrin; ce
legs étoit payable , fuivant le teftament, au décès ;
elle fit mettre dans le codicille que ce Domeftique
ne pourroit l’exiger que dans deux ans &; en deux
termes.
Quiconque lira ce codicille, le comparera au
teftament, réfléchira iiir l’étàt de la fucceifion,
rappellera les notions qu’il a -reu: des chofes, fera
attention aux différentes époques du teftament &
du codicille , ôc à l’afFâiilement total où étoit le
fieur Perrin à ce dernier a£te, ne doutera nulle
ment qu’il ne foit l’ouvrage de la dame Chabrol.
Qui croira que fi au temps du codicille le fieur
P e r r in eut été auiïi -iain d’efprit & de "mémoire,
011 lib re, qu’il l’étoit au temps du teftament , il
eut donné quatre an's-& quatre termes h fon héri
tière pour payer cerit louis , • & deux-ans pour en
payer d ix , & qu’il eut longé h. inipoicr au Idgs
fait au fieur Arnaud les conditions contenues 'au
codicille ? tout indigne dans cette affaire , & l’on
cft étonné qiic la dame Chabrol ait oie Jla faire
�II
connoître au public par un Mémoire imprimé.
Une autre remarque a faire dans le codicille ,
c’eil qu’après la confirmation du legs de dix louis
au Domeitique du fieur Perrin, elle y a fait ajou
ter, à condition qu’il ne pourra rien prétendre des
hardes, nippes, & c. & que f i mon héritière juge
à propos de lui en donner, il ne le tiendra que de
fa libéralité. La dame Chabrol vouloir gagner de
tout côté & être defpote fur tout. Le' fieur Perrin
auroit-il penfé a cette claufe fans les reiTorts étran
gers qui dirigeoient fa plume & fes penfées?
Le fieur Perrin étant décédé le 6 Février 17 6 4 ,
fix jours après le codicille, & cinq mois environ
après fon teftament, le fieur Arnaud rédigea les
comptes qu’il étoit chargé de faire par le. teilam en t, & il les rédigea Tous l’inipe&ion du fieur
Lantiflier ; mais quand il demanda le paiement
des 2400 liv. on lui oppofa le codicille.
Il eut beau dire,quant au timbre extraordinaire,
qu’il n’avoit jamais été Garde-Magafin, ôt par conféquent chargé perfonnellement d’aucun compte’,
qu’il avoit été feulement Scribe des Gardcs-a-Ma-*
gafins & du fieur Perrin pour les états & comptes
relatifs a cette partie , que ces comptes étoient an
nuellement apurés. 11 eut beau repréfenter ces
comptes, rendus au nom des Gardes-Magafins,
repréfenter encore qu’il n’avoit en fes mains au
cunes pieces des fucceifions V itry & Rôttier, que
tout ce qui étoit provenu de ces fucceifions ne confiftoit qu’en quelques meubles, dont le prix avoit
13 2
�in
été remis au fieur Perrin, qui l’avoit, fms doute,
rendu aux héritiers de ces deux Contrôleurs, morts
dans cette Province. Il eut beau dire enfin qu’il
ne devoit rien fur aucuns de ces articles ni fur
aucuns autres, excepté laiomme de 300 (i/)liv.qu’il
avoit touché pour la iucceifion V itry , du conièntemient du fieur Perrin , lorfqu’il étoit alité & hors
xTétat de toucher lui-même.
Il eut beau repréfenter, qu’outre le legs , il lui
étoit dû une fomme de 13 livres 8 fols 6 deniers
pour frais de Bureau par lui avancés ; celle de 7 5
livres pour appointement des fix premières femain esd u quartier de Janvier pour l’année 1764., le
tout faifant la fomme de 88 livres 8 fols 6 den.
& expoier qu’il étoit dans le befoin, toutes ces obfervations furent vaines. La dame C h abrol, du fein
de la vafte fortune que lui avoit tranfmis la mort
du iieur Perrin, lui répondoit toujours avec mé
pris , en lui oppofant chaque fois le codicille &
l’obligation où il étoit en vertu deccta&e de rendre
des comptes, (e) qui dans le vrai ne font ni à faire ni
faifablcs , encore moins néccilâires , & que le fieur
Arnaud étoit dans l’impoffibilité de rendre.
Le fieur Arnaud lui propofa de s’en remettre a
l’avis de Jurifconfultes éclairés, elle ne voulut ja
mais écouter, d autre jurifprudcnce que celle du
(d) C ’eft la fomme dont il cil parlé au codicille.
( î ) Pcrfonnc ne lui dit rien, ni pour la form ule, ni pour le*
fuccellions llottior
�, . T3
fieur Lantiffier, qui décidoit do&ement en faveur du
codicille auquel il avoit coopéré.
* Six ans s’écoulèrent en pourparler d’arrange
ments infru&ueux ; le fieur Arnaud, ennuyé de tant
de longueur & d’une réfiftance fi opiniâtre , après
s’être bien confulté, furmonta la crainte qu’il avoit
d’entrer en litige avec une perfonne dont il - re
doutait le crédit auprès de ceux dont il dépendoit ( f ) ; il fit aifigner la dame C habrol, le 31
M ai 17 7 0 , pour être condamnée au paiement du
legs & des autres fommes dont on a parlé. La
dame Chabrol n’avoit jamais fait aucunes offres de
les payer, ni iommé le fieur Arnaud de remplir
les conditions du codicille, ce qui marque bien
qu’elle n’avoit eu intention par ce codicille que de
le dégager du legs de 0,4.00 liv. qui étoit le feul qui
l’importunoit. Quelle avidité ! on n’en connut ja
mais de femblable, qu’elle ne foit point fâchée de
ce qu’on d it, elle y force. Il n’elt perionne qui à
ia place l’eut imité dans ion procédé contre le pau
vre Arnaud, qui n’a preique laiflé dans fa fucceffion que le legs du fieur Perrin ÔC les frais qu’il a
fait pour s’en faire payer, auxquels il 11’a pu four
nir qu’aux dépens de fa propre fiibiiftance 6c de
celle de fa famille.
La dame Chabrol ie voyant affignée, fe pro
mena chez tous les Jurifconiultcs. Ceux qui avoient
été a portée d’être inftruits par eux-mêmes, lui fi
rent fentir le ridicule qu’elle alloit fie donner & le
( / ) Il ¿toit commis chez le iieur D elivry.
�IV
I4<
mauvais fuccès auquel elle devoit s’attendre ; mais
elle aimoit mieux paiîer pour ridicule que de tirer
de fa poche cent louis. Elle eut recours a des Jurifconfultes étrangers , très-habiles , 6c leur demanda
le fecours de la lo i, on le lui accorda, 6c 011 dé
cida que, fuivant elle , le fieur Perrin avoit été le
maître d’impoler au legs qu’il avoit fait au fieur
Arnaud les conditions qu’il avoit voulu ; mais elle
ne faifoit pas attention à l’autorité des circonilanc cs,q u i impofent iouvent filcncc à la loi. D ’ail
leurs , comme elle ne vouloit que la lo i, on ne
lui fit pas ailez fentir que celle qu’elle réclamoit
ne s’appliquoit pas 6c ne pouvoir s’appliquer à des
conditions, ou impoiïiblcs, ou qui etoient évidem
ment l’effet de l’eireur, ou fur lefquels il ctoit faci
le au licur Arnaud de fe purger.
Inltance confidérable en conféquence en la SénéchauiTée. La poflibilité ou l’impoflibilité des con
ditions appofées au legs dans le codicille, 6c la
fiifpicion de cet a&e y furent traités amplement, 6c
livres en mains. La dame Chabrol a depcnlé plus
de 50 louis qui ne lui coùroicnt guère, 6c en auroit fait depenfer autant au fieur A rn au d , qui lui
auroient coûté beaucoup, s’il n’avoit etc loulagé par
les généreux Défenfeurs.
Après une multitude d’écrits de part 6c d’autre
6c les plus vives ibllicitarions de la dame C h a
brol, il a été rendu Sentence fur productions
rcfpecVivcs le 9 JuilLc 177?. au profit du licur
Arnaud.
�4,PI
Extrait de la Sentence de la SènéchauJJec.
Il eft ordonné » que fur le montant des con#> damnations prononcées en faveur du iieur A r»> naud, déduction fera faite a la dame Bompard,
•#> veuve Chabrol, du confentement du fieur A r» naud, de la fomme de 300 liv. par lui re uc du
#> nommé Bouyon d’Herm ent, pour la fucceilion
» V it r y , d’une part, &c de celle de 2,88 liv. d’au» tre , duc h la fuccelfion Pcrrin par défunt fieur
» A rn au d, frere du légataire, par billet du 1
» Janvier 17 $6, enfemble des intérêts. » (g )
La dame Chabrol cil condamnée a remettre au
fieur Arnaud le billet ÔC les pieces concernant
ce qui étoit dû par Bouyon h. la fucccflion Vitry.
O n doit obferver que le fieur Arnaud , en rece
vant pour le fieur Pcrrin, qui étoit alité, les 300
liv. ducs à la fucceflion V itr y , s’étoit obligé en
vers Bouyon, débiteur, de lui remettre toutes pieces
relatives à cet o b jet, dont il ne pouvoit faire la
rernife , ces pieces étant au pouvoir du licur
Pcrrin.
Cette obfcrvation manifefle bien que le fieur
Arnaud n’a jamais été le maître ni de la iuccclfion V itry ni de celle de Rottier ; les pieces de l'une
& de l ’autre font actuellement entre les mains de
la dame Chabrol, où elles ont palle de celles du
licur Pcrrin.
( jt ) L e l i c u r À r i u u J , Ulg a u i r c , ¿ v o i t C o u l e n t le b i l l e t .
�i. ^
^
!5
Par la même Sentence la dame Chabrol eft dé
clarée non reccvable dans le iùrplus de fes de
mandes, en affirmant par le iieur Arnaud , com
me il l’avoit offert, i°. qu’il ne devoir rien a la
fucceiîïon Perrin pour le timbre extraordinaire ni
pour la fomme de 934. liv. mentionnée en la note
du fieur Perrin de l’année, 17 <54. ; a°. qu’il ne retenoit rien de la fucceflion V itry & Rottier directe
ment ou indirectement, & à la charge parle fieur
Arnaud, fuivantfesoffres,de rédiger pour la veuve
Chabrol les comptes des fucceiïions Rottier &
V itry.
Et pour faciliter cette rédaction il eft ordonné
que la veuve Chabrol remettroit dans le mois au
fieur Arnaud les pieces néceiîaires ; faute de ce
faire dans ce délai, il eft dit que la veuve C h a* brol demeurera déchue de toute a£tionj 6c que le
fieur Arnaud fera déchargé de la réda&ion des
comptes.
La dame Chabrol cil condamnée en tous les
• dépens.
Cette Sentence étoit le jufte prix des mauvaifes
conteftations de la dame Chabrol & de la bonne
foi du fieur Arnaud.
Le fieur Arnaud ne dcvoit nullement rédiger
les comptes des fucceifions V itry & Rottier, cette
rédaction n’étant pas preicritc par le codicille, ÔC
ayant établi qu’il ne dcvoit compter lui-même
d’aucuns de ces objets ; mais il avoit offert cette
rédaction, penfant que cctoit a cette rédaction
feule
�•
1 7
4°3^
feule que devoient fe réduire les conditions du co
dicille.
C e qui le détermina a le penfer ainfi, c’eft
la difpoiition du teftament répétée dans le codicille,
par laquelle il eft tenu de faire ou dreiTer les
comptes que le fieur Perrin devoir aux Fermiers
Généraux, mais faire ou dreiTer des comptes,.&
compter préfentent deux fens 6c deux? devoirs
différents.
'
DreiTer des comptes, c’eit mettre un compte en
réglé pour autrui ; compter, c’eft faire la,fon&ion
d ’un redevable, & le fieur Arnaud n’eft pasi.plus
comptable aux Fermiers Généraux qu’à la iùcceiïion du fieur Perrin ; il n’a été que fon Com
mis ôc jamais fon Receveur. O n auroit cependant
pu le faire charger par le codicille de compter aux
Fermiers Généraux: comment cette idée n’eft-elle
pas venue a l’efprit de la dame Chabrol ? il auroit
été facile en effet de faire ajouter cette comptabi
lité , parce que le fieur Perrin, dans la foiblelle où
il étoit, n’ayant plus la force de diftinguer les
chofes cjui s’expriment par des termes approchants,
auroit fait a l’égard de cet article comme à l’égard
des autres, confondu la comptabilité avec la rcda&ion d’un compte.
11 cil bien fcnfible que quand il écrivit le codi
cille , il n’entendit 6c ne put entendre, malgré la
confuiion de fes idées, que la reda&ion du compte
du timbre extraordinaire 6c des fucceflions V itry
ÔC Rottier , 6c que. s’il paroît en quelque forte s’etre
c
�i8
exprimé différemment, c’eit l’effet de l’importunité
& d’une irréflexion naturelle à fa fituation. .
Le fieur Arnaud crut donc remplir le vœu du
Teftateur dans ion codicille, en offrant ion miniftere pour la réda&ion des comptes dont il s’agit.
La dame Chabrol ne fut pas contente du ju
gement de la SénéchauiTée. Elle en a interjetté ap
pel en la C o u r , où elle efpére qu’on l’enrichira, de
cent louis au deiîùs des 120000 liv. dont le fieur
Perrin l’a gratifiée; elle les veut au préjudice d’une
honnête, mais pauvre famille,.qui attend ce.legs
depuis dix ans, & s epuife en frais pour l’obtenir.
Extrait des moyens propres à faire confirmer h
jugement de la Sénéchaujfée.
O n ne fortira point des bornes d’un précis, <Sc
l’on fera court dans l’expofé des moyens qui doi
vent opérer la confirmation de la Sentence de la
Sénéchauffée dont la dame Chabrol s’eft rendue
appellante , d’autant mieux que iùr les f^its &: les
obîervations dont on a fait précéder ces moyens,
il doit être irrévocablement décidé dans l’efprit de
tout leéleur, même dans celui de la dame C h a
brol , que la Sentence attaquée eft juile dans tous
fes chefs.
1
i°. Elle ne peut pas fe plaindre de.ee que, du
confentcment du iieur Arnaud, il a été ordonné qu’il
feroit fait dédu&ion des 300 liv. qu’il a toujours ac
culé avoir reçu, pour la fucceifion V it r y , du fieur
�19
•
B ouyon, d’H erm ent, cette dédu&ion diminuant
d’autant le legs qui la fatigue tant.
O n fe rappelle que dans le codicille il eft recon
nu que fur la luçceffion V itry le fieur Arnaud
n’avoit touché que cette iom m e, & qu’il y eft
exprelfément dit, que pour le furplus , J i Jurplus
y avoit, le fieur Perrin l'abandonnait à Lame &
çonfcience du fieur Arnaud.
L e ‘fieur Arnaud àvoit offert d’affirmer n’avoir,
concernant la iiicceflion V itry , que cette ibmme,
l’affirmation a été ordonnée de cette maniéré. O n
a donc jugé conformément au codicille. L ’appel
• de la dame C habrol, pour ce premier c h e f, 11e
fauroït donc avoir le moindre prétexte, & le fieur
Arnaud doit paroître bien bon dans les offres qu’il
a faites à la dame Chabrol de l’aider pour la ré
faction du compte de cette fucceifion, dès qu’il devoit être quitte de tout a cet égard itiivant le codi
cille même, par l'on affirmation , fans la charge de
rédiger ce compte.
2°. L ’appeldeladameChabrol né peut pas être recevable en ce qui concerne la déduction prononcée
par la même Sentence* d’unefortime de 188 liv.
à laquelle le fieur Arnaud avoit coniènti, quoi
que n’étant obligé par billet du 2. Janvier 17^6
'qiie comme caution xl’e ion frei'e, a qui le fieur Pcrjrin l’avoit prêtée.. Il/efl clair que’ la -dame C h a
brol , foit en la Cour , foit en la Séncchaufléç, n’a
combattu le fieur Arnaud que par humeur ou par
¿des. motifs d’intérêt qui ne fauroient l’honorcr. J
�3°. Elle n’eit pas non plus fondée à fe plaindre
de cette Sentence, en ce qu’elle eft condamnée à
remettre le billet du frere du fieur A rnaud, parce
que le montant de ce billet étant déduit, ce billet
ne doit pas refter en fes mains.
4.0. Elle a été auifi juftement condamnée à la
remife des pieces, titres ou procédures contre Bouyon d’H erm ent, le fieur Arnaud ayant promis,
s’étant même obligé de les- lui rendre avec le bil
let, & la dame Chabrol n’ayant aucun motif lé
gitime de les garder, dès qu’on lui fait raifon de
tout ce que de voit Bouyon.
50. La Sentence a encore bien jugé en décla- rant la dame Chabrol non recevable dans le iurplus de fes demandes, en affirmant par le fieur
Arnaud, comme il l’avoit offert, qu’il ne devoit
rien pour le timbre extraordinaire, ni pour la fomme de 934. liv. mentionnée en la note du fieur
Perrin de l’année 1754. Le fieur Perrin lui-meme
auroit été obligé de s’en rapporter à l’affirmation
ordonnée par la Sentence fur les objets dont il
s’agit.
La dame Chabrol femble , dans fon Mémoire
imprimé, infifter fortement fur fon appel de ce
chef de la Sentence, mais c’cfi: le comble de l’er
reur ou de l’aveuglement, <Sc cette partie de ion
appel, difons-le fans ménagement, ne préfente
que du pitoyable.
Comment concevoir que la dame Chabrol ait
pu fe livrer a l’abfurde idée de faire impofer I4
�loi d’un compte de cette nature , ' & à l’idée plus
abiurde encore de prétendre au paiement d’une
fomme de 934 liv. calculée en chiffre fur un vil
chifton fans iignature, traîné dans la pouffiere d’un
Bureau depuis 17 54 ju% u,£n T7^4 ? n V a-t-il pas
a gémir en voyant un procès fi diipendieux pour
des chimeres-, qu’une avidité , qu’on peut dire infa
mable, .cherche à réalifer ;aux yeux des MagijP(rats éclairés? qui voudroit être Commis de quel
que Bureau que ce (oit, fi fur de femblables titres,
onpouvoit le forcer en recette & le rendre comptable.
O n pourrait s’en, 4tenir à ce qui a été écrit en
la Sénéchauilëe 6c en la Cour pour 'cet article im
portant, ,tauquel la dartie Chabrol réduit aujour
d'hui toutes íes prétentions.
r
:
Cependant, comme on eft jaloux d’cdifier le
public fur la conduite du fieur A rn au d , on croit
devoir entrer en difcuffion fur cet objet, & don
ner une idée de ce qui s’eft pratiqué pour ce tim
bre extraordinaire pendant que le ficur Arftaud
a été Commis du fieur Perrin.
C ’eft le Garde-Magafin qui *eft comptable de
ce timbre extraordinaire, il a une commiifion exprcilè des Fermiers Généraux, <
5c il eft compta
ble vis-a-vis le Dirc&eur. Le fieur Arnaud n ’a
jamais été Garde-Magafin , il n’etoit que-le feribe
de ceux qui ont exercé cette fondión -pour les états
a tenir , & la réda&ion des cdmptes. La recette
& la dépenfe concernant cet objet fc faiioient à
la Dire&ion, comme les autres qui regardent le«
�D om aines, & le fieur Arnaud n’avoit, pour les
foins particuliers qu’il fe donnoit dans cette par
tie , qu’une fomme de 40 livres en fus de fes
appointements de 500 livres.
Les comptes des Gardes-Magafins fe rendent
annuellement.
Le fieur Arnaud a produit un grand nombre
de ces comptes depuis 17^^ , ils font tôus adreiTés
au fieur Perrin &c apurés par lui. Il en a produit
auiîi un qui n’a été apuré qu’après la mort du
fieur Perrin par fon héritiere. V oici comment ils
font tous intitulés ,'■&* la forme dans laquelle ils
■font1'arrêtés; & rapürés; - h
•..
» Compté que rend N . Garde-Magafin de la
» Formule au fieur Jean-Baptifte Perrin , Direc» teur des Formules de la Généralité de Riom ,
« des recettes & dépenies par lui faites pour le
timbre extraordinaire, pendant la première anriéè dii bail de Jean-Jacques Prévoit.»
' 'A ' la faite font les chapitres de recette , de dédenfe & de reprife.
Q n remarque que dans tous les comptes le
moHtant dii chapitre de reprife eft toujours rccon"nu avoir été-reçu:pdr le Receveur Général ou le
Diredeur. L ’arrcté qui vient après eft en ces
termes :
<1 f
» •’ fe-tant ' la recbttc eft égale h la depenfe, Sc
» aif méyeiï de là remife 'faite par le comptable
» :des r&giftrcs & pieces de décharge, énoncés au
*n préfent compte, le comptable demeure bien &:
�fo(n
» valablement déchargé des recettes ôtdépenfesv
» Fait. 6c arrêté triple entre nous, 6cc. ni
A u deilbus fondes fignaturcs/du Garde-M a-‘
gafin 6c du Dire&eur ou Receveur Général.-r Il eft d it , fait 6c arrêté ktriple , parce qu’un dei
ces arrêtés, joint au compte,'eft envoyé aux Fer-^
miers Généraux , l’autre, refte entre les-mains du,
Receveur Général, 6c le Giirde-Magafin'. en re
tient un auifi pour fa décharge.
Les différentes perionnes qui ont exercé cette
place de Garde-M agafin,, pendant la vie du fieur
Perrin, font, la veuve du fieur Ecuyer, François
Reynaud, lé fieur Chabrol mari de l’Appellante ,
6c Gilbert Fournier.
Le dernier compte de la formule,ou du timbre
extraordinaire, dû, au fieur Perrin eft rendu par
le fieur Fournier j 6c a été^ arrêté dans la forme
des autres en 1765 pour 1763 ; l’arrêté eftfigné
du fieur Fournier , Garde-Magafin j. de la dame.
Bqmpard, : veuve Chabrol, (héritière de fe u \fieur
Perrin, enièmble du fieiu* Lantiiîier ,wen qualité
d’Exécuteur teft^mentâire. r 0 %; doit fe rappeller
que le fieur Perrin étoit décédé le 6 Février
1764 , 6c obferver que le compte de 1763 devoit être rendu à fon héritière 6c au fieur Laritiiïicr , comme fon Exécuteur teftamentaire.
La dame Chabrol 6c le fieürrLantifiier ont
figné l’arrêté du compte pour 1 7 6 3 , fans réferves 6c proteftations qu’ils auroient pu faire , au
moins dans le triple refté a leur pouvoir , 6c dans
�»1%
24
celui du Garde-Magafin , s’ils ne vouloient point,
par des raifons particulières, les écrire dans celui
envoyé a M'a Compagnie. La dame Chabrol & le
fieur Landiîier avoient cependant connoiiîànce de
la note de 1 7 5 4 , quand ils ont iigné ce dernier
compte delà formule , & qu’il avoit été dreiTé &c
écrit par lè fieur‘ Arnaud.
" Sur le récit de* ces comptes de formule, & furtout fur celui qu’on a fait du compte pour 1763 ,
naîtra-tril dans l’efprit de quelqu’un l’idée d’un
debet de la part du fteur Arnaud pç>ur les années
antérieures a 1 7 6 3 " quand on voit querla dame
Chabrol ne produit aucun billet ou reconnoiifance
de debet de la part du fieur Arnaud fait an fieur
Perriri ou a elle ; quand on voit quil: n’a été dans
aucuns temps Garde-Magafin en titre, & qu’il
n’a fervi que de fcribe aux Gardes-Magafins pour
les états qu’ils devoient tenir , & la réda&ion des
comptes qu’ils avoient a rendre ; quand on voit
que, le fieiir Arnaud , s’il faifoit quelque recette
■
dans , cette partie / ou dans les autres , laiiîbit tout
a lai Dire&ion roù il 11e réfidoit pas, & dont i l !ne
pouvoit rien emporter chez lui; quand on voit
• encore que la dame Chabrol n’a point a&ionné
le iieùr Arnaud; pour la reddition de compte qu’elle
prétond par rlui due r & que ce n’eft que »pour fe
"d'éfendre de la demande en paiement du legs contr’elle formée, fix ans environ après la mort du
! fieur Perriri qu’elle-a oppoié juridiquement cette
?comptabilité •impoifible 6c illicitement exigée.
On
�O n dit impoifible, parce qu’il eft fait mention
dans tous les arrêtés de compte que les regiftres
& pieces de la formule ou du timbre extraordinaire
ont été remis chaque fois au fieur Perrin.
O n dit illicite, étant contre toutes les loix de
demander un compte à quelqu’un qui n’en doit
aucuns, & contre qui on n’a aucuns titres pour
l’y faire condamner (/z). Il n’y a en effet que les
fieurs Chabrol &c Fournier , fuccefïivement Gardes-Magafins, après la note de 17 >54-, à qui l’on
pût s’adreffer , encore fe (eroient-ils vi£torieufement
défendus fur les comptes par eux rendus, & apu
rés par le fieur P errin, ou fon héritiere. Ces
comptes font preuve que tout eft fini entre quel
que comptable que ce foit &: le Receveur, quand,
par des myfteres qu’on ne comprend pas , & que
la dame Chabrol explique mal , il devroit 1 s’en
trouver plufieurs.
■ <*
Les différents états relatifs a la formule & au
timbre extraordinaire que la dame Chabrol s’eft
procurés parle moyen des plus exaftes recher
ches', & dont elle efpére tirer avantage , ne font
ibrtis que d’un tas de papiers poudreux dont de
voir être naturellement furchargée la Dire&ion ,
le fieur Perrin l’ayant exercée pendant a 5 ans ;
•ils ne peuvent iervir qu’a faire voir que rien n’é(/i) D om as, tir. 1 , f. 9 , art. 1 4 , rapporte plufieurs l o i x , &
décide lui môme que les conditions injuftes ou impoifibles ne
détruifent point le legs , & que le légataire venant à mourir
avant de l’avoir reçu, tranfmettroit fon drait à fon héritier. V o y e z
le même A u te u r, des Teflaments , tit. 1 , feétion 8.
D
�cîiappe a la vigilance d’une femme aifHve &: au (H
fcrupuleufement attentive à fes intérêts , que la
dame Chabrol.
Ces états ne font iîgnés de perfonne , & ils
ne préfentent que des mémoires journaliers & in
formes pour aider à la rédaction des comptes des
Gardes-Magafms & du iieur Perrin. La princi
pale fonction du fieur Arnaud , en ia qualité de
Commis, étoit de calculer fur des morceaux de
papier , & d’écrire iiir des regiilres.
Dès que la dame Chabrol vouloit ériger en ti
tres de femblables états , écrits fur des feuilles ou
demi-feuilles volantes &c terminées par des calculs,
tels qu’on les faits pour fe compter à foi-même,
pourquoi n’en produit-elle que onze depuis 1754.
juiqu’en 1761 ? elle auroit pu en produire de tous
les mois , de toutes les femaines &c même de tous
les jours ; que de titres n’auroit-elle pas eu ? elle
auroit par là , fuivant fon code, non feulement
anéanti le legs de 14.00 livres, mais encore abforbé la fortune du fieur Arnaud, quand elle auroit été
trois ou quatre fois plus confidérable que la fucceftion du fieur Perrin.
Pourquoi encore n’en produit-elle point des an
nées fubféquentes a 17 6 1? le fieur Arnaud en a fait
nécessairement en 1762 & 1 7 6 ^ qui font les deux
clernieres années de l’exercice du fieur Perrin.
Parmi les états produits & les autres, il en eil
quelques-uns qui ne font pas feulement pour la for
mule , ils font encore pour le Bureau. La dame Cha-
�a7
brol auroit été auili fondée, on Ta dit déjà, à de
mander contre le fieur Arnaud le compte de la
Dire£Hon entiere, que celui’du Garde-M agafin, il
des états de cette nature étoient ou pouvoient être
des titres.
La dame Chabrol afFe&e de ne produire les quittancesdufieur Arnaud,pour iès appointements, que
depuis 1746 juiqu’en 17 51 , parce qu’elle craint
la fin de non recevoir qui réfulteroit des autres con
tre le compte du timbre extraordinaire ou de la for
mule ; mais parce qu’elle dit n’en avoir pas d’autres,
doit-elle être crue? La préfomption eit contr’elle.
La preuve même que le fieur Arnaud a donné
d’autres quittances que celles qu’elle produit, c’eñ
que le fieur Arnaud n’a réclamé que fix femaines
d’appointements , & quelques légeres iommes pour
gratifications ou pour avances par lui faites, que la
dame Chabrol ne contefte pas. '
La produ&ion qu’elle fait dés quittances du fieur
Arnaud établit l’uiage du fieur Perrin de s’en faire
• donner chaque année depuis 1746 juiqu’en 17 51.
O n ne fauroit croire qu’ayant été exad pendant fi
long-temps à en retirer annuellement, il ait né
gligé après 17 51 les mêmes précautions, lui qu’on
a connu pour un homme réglé dans iès affaires ,
! affidu au travail, peu diííipé& entendu dans toutes
: les parties dont il étoit chargé, & qui n’avoit prêté
a8o livres aiiifrcre du fieur Arnaud, fon Com m is,
que fous le cautionnement par écrit de ce dernier.
Un homme tel, qu’on peint le fieurPerrin 4 jiç
D z
�I<4&
l»r
peut être iùppofé s’être comporté avec fon Commis
..depuis 17 5 i juiqu’en 1764-, qu’il eft décédé, avec
la négligence qu’on lui prête , quelque confiance
qu’il eut. O n peut d’autanc moins le foupçonner,
qu’en léguant par Ton teftament les 2400 livres qu’il
répugne fi fort à la dame Chabrol de payer, il ne
parle ni du. défaut de quittance d’appointement, ni
des comptes pour le timbre, extraordinaire ou la
formule , ni de la fucceifion Rottier & Vitry.
Auroit-il oublié, dans un temps où il étoit en. tiérement à lui, 6c. où il avoit celui de fe rappeller
. tout y de réfléchirfur tout, ÔC où il fentoit parfai
tem en t combien cela étoit néceifàire , des objets il
eilèntiels ? n’auroit-il pas, avant.de faire la difpofition de ce legs, arrêté compte avec le fieur Arnaud,
fi cela n’eut. pas yété fait ? mais tout entr’eux étoit
dans l’ordre; le plus parfait / & il ne s’occupa qu’a
récompenfer un fidele ôc zélé Commis ; c’eft doiic
par le teilament ( les circonftances l’exigent ) que
tout doit être expliqué, tant le codicille que le relie.
La dame Chabrol n’y penfe pas, quand elle pré
tend que depuis'17 51. le fieur Arnaud n’a donné
aucunes quittances, de fes appointements, <k que
cependant il eft demeuré reliqùataire pour le tim
bre extraordinaire ou pour la formule ; fi ces faits
étoient vrais, en ;fuppofant le fieur Arnaud d’auifi
mauvaifc foiï que la dame Chabrol le prétend , il lui
eut été libre de demander le paiement de fes appoin
tements depuis 17 $1 :: &-on n’auroit pas pu , on
- l’a prouvé , lui ojbpoièr en compenfation. les.préten-
�< 1*
a9
dus comptes du timbre qui étoient rendus & apu
rés , & dont, fur fa iimple qualité de Com m is, faifeur d’état & de calculs, on ne peut le charger.
Il n’a néanmoins demandé le paiement quë de
fix femaines , quoiqu’il fut bien qu’on devoit lui
demander fans raifon un compte du timbre extraor
dinaire.
• La note de 17 ^4, qui fonde, la dame Chabrol
dans ia demande en reddition de compte du tim
bre extraordinaire ou de la formule, eft, on ne peut
pas plus, méprifable.
Elle eft conçue en ces termes :
« D u 13 Mars 1 7 5 4 .]^ payé à’ M . Arnaud
» fes appointements, 6c il m’eft demeuré devoir
» 934. livres. »
' Cette note , au bas d’un 'état des frais de GardeMagafin, eft fur une demi-feuille de papier fale &
chiffonné, qui montre par elle-nïême fon peu de.va
leur, & le cas qu’en avoic fait le fieur Perrin.”
Elle n’eft fignée ni de lui ni du fieur Arnaud.
D e quel poids pouvoit-elle donc être devenue au
30 Janvier 1 7 6 4 , date du codicille?
J
On peut obje&er1à cette note , produite pàrf-la
dame Chabrol, qu’elleh’éft point celle dôntiil eft*'
parlé au codicille, étant dit dans cet a<5tc que* le
lieur Arnaud compterait du timbre extraordinaire,
h compter de l’année 1 7 5 4 , où il me refta redeva
ble d’une fomme de 900 livrés, dont M . LantiiTier
trouvera dans mes papiers la note arrêtée de la ■
main du Jieur Arnaud.
d
3
�<»*
5 3°
La note’de 17 $4
point arrêtée par le fieur
Arnaud , elle n’eft terminée que par une efpece
deTP , qyi peut ne pas^être celui que figurent le
(leur 'Perrin dans ià'fignature. Tout annonce que
cette notCj étqit deilirtée,; comme tant d;autres /
à. périr dans la pouiliere du Bureau, 6t quelle
n’a été reiiùfcitée 6c' n’a reçu quelque vigueur
que par'la .main püiiîante de la dame: Chabrol.
Encartant de^ termes,;,du ^cbdicille^/la dame
ÇhabroÎ n’avoit pas mêipe d jfdion, pour le compte;
du timbre extraordinaire ou de la formule, contre
le iieur Arnaud , .étant dit dans cet a&e qu’il rendroit çompre aufieur Lantiflier, Exécuteur teftamentaire. Ileft dit la rnême chofe pour le compte des.*
fucceifions Rottier 6c V itr y , 6c le fieur Lantifv
fier , Exécuteur teitamentaire, n’a jamais demandé
contre le fieur Arnaud, le compte du timbre ex
traordinaire, ni celui, des fucceflions ; V itry 6c
Rottier. . 1 ’
:;
O n ne peut donc douter que la dame Chabrol,
jaloufe de conferver cent louis de plus dans la
fucceiïion du fieur Perrin, ne fait tant de frais ÔC
de procédures que pour furprendre Ja Juftice ;
mais elle n’aura pas le même empire fur elle qu’elle
avoit fur le fieur Perrin.
6°. Quant a la iùcceiïion Rottier , dont on a
ioutenu que le fieur Arnaud n’étoit pas non plus
comptable, ce qui a été jugé de même par les
premiers Juges; la dame Chabrol a été. ii con
vaincue de cette vérité , qu’elle n’en parle pas dans
�3i
.fon Mémoire imprimé ; elle afFe&e feulement de
dire qu’elle fe référé à ce qui a été dit à ce fujet
.dans fes'écritures: r;A-,
..
C e n’efl: pas fans'raifon qu elle garde le filence
fur fa demande en reddition de compte de *cette
fucceiïion, le fieur Arnaud rapportant un état’de
ce qui étoit dû au fieur Rottier ,-ôc.de çc.'.jcppe
le fieur Rottier devoit., au deiîous. ducjviçl U ejft
é crit, de la main du fieur^.Pçrrin qu’il a 'reçu
3x1 livres 2 fols une fois , & 2,4. livrés*/mie
autre. Ces deux reçus font fignés de la lettre ini
tia le de ion nom , ôc il avoit recuxes^iomm^s des
■
■
perionnes qu’il avoit chargées de vendre, lés'rr^u", 1
1
f~\
Àl
•" 1
‘ ■--Ü J ^Jii'V
bles ;de ce Contrôleur. . i ,:r . ... j..
C et état acheve de confirmer que le, fieur
A rnaud ne faifoit qu’écrire, &: quei c étoit le fieur
- Perrin qui recevoit.
- v- ■
dame Chabrol fait ime^efpecç de rixç ,au
..fiqur Arnaud,*'pour (a.voir: retenu en ies mains ces
états , ces notes & ces comptes du timbre extraor„ dinaire. qu la formule^ doni on:a tant, parlé,,, mais
. il ne les a pris que-dans J.a^ D jrçiao a, &: fous fes
yeux , pour ie défendre des .’prétentions -,dont e|e
le menaçait (7) ; il ne iàuroit çtre blâmé -quand' il
s’en ièroit iàiii autrement , la loi naturelle autoO— •*-------r—rr.------------------- :-----:------- — "— 1
(/) ‘Le fieur Arnaud les a repréfcntë’à la dame Chabrol &
au lieur LantiÜier , toutes les fois qu’il a été queftion de ter
miner amiablemeut fur ion legs
foit avant la ,d em an d e
foit après , & il n’a pas craint de les : produire. \ i l , l ’a cru
même néceflaire.
\
'<’¡1 .
'
'
i
...........
*
w
"
‘A vi
jj'IO J
�<'f>* r
'
'
; 31
rifant a iè prémunir contre un adverfaire injuile.
O n a donc fait inférer fauiîement, dans le co
dicille du fieur Perrin , que le fieur Arnaud s’étoit feul immiicé dans la1 fucceiîion du fieur
Rottier , étant prouvé par écrit que le fieur
Perrin recevoit feul , &; que le fieur Arnaud
n’écrivoit que les états concernants la dépenfe 6c
la recette. C ’eft de cette même, façon qu’il a fait
pour le timbre extraordinaire, dont le produit ie
p ercevait chez le fieur Perrin.
r * •' Qüànd on "’regarderoit les conditions du codi"cMc tomme ierieuies 6c devant avoir lieu , elles
font accomplies par les obfer varions que l’on a
faites, qui forment un compte , & par l’affir
mation que le fieur Arnaud a offerte de ne rien
devoir au fieur Perrin. Encore,un coup, le fieur
' Perrin vivant nauroit pu exiger autre choie.
Cette affirmation a été même faite de la ma
niéré la plus folemnelle , 6c dans une circonf' tance, qui1rie doit laiffer aucun doute fur ia fin"cérité ,'il récoit .au moment le plus prochain de
la m ort1, & .de rejoindre ce Directeur à qui on
veut qu’il foit comptable.
^Einrnrr'dir-Txfiament - dii—
Jieur Arnaud du 9
îoi.’piio arr-/
¡Novembre. dernier.
-1 0 1 'ita
!:'.J
•; i l ’ l-j. .
. .
• u ;Le- fieur Arnaud, fait .vente, a la femme de
tout fon mobilier 6c de fes effets, à l’exception
�de ce qui proviendroit du procès pendant au Conièil
Supérieur entre lui 6c la dame veuve Chabrol ,
héritière teftamentaire. du fieur Perrin.
Il avoit raiion d’exclure -de'la vente niobiliaire
faite à ia femme ce procès 6c ce qui dcvoit eti
provenir; ce procès & ce qui devoit en provenir
formant la majeure partie de fa iucccifiqn,
fc eft
àufTi de l’Arrêt a intervenir-que dépend princi
palement le fort des héritiers'"durfieur ArnaucTj
les enfants.
Par le même teftament il eft d i t , 6c c’eil ce
qui auroit du défarmer.. la darne Chabrol ,'fl
l’avarice ou la cupidité étoient capables ¿ ’être fenfiblés « que comme par la' Scntence rehdue en
r> la Sénéchauflee de cette V i ll e , entre le Tcfta» teur ÔC la dame C h abrol, il a été ordonné des
n affirmations à faire par ledit' fieur T eftateu r,
« il déclare & affirme préfentement que les ob]ets
» fur lefquels l’affirmation lui a été déférée par
» ladite Sentence, lui font bien 6c légitimement
» d u s , 6c qu’il n’a rien reçu à déduire fur fes
» créances , donnant pouvoir à fes héritiers de
» réitérer ladite affirmation & déclaration, & au» très qui pourroient être ordonnées par le
n Confeil. »
O n fait de quel poids font dans les Tribu
naux 6c dans toutes les Nations policées les fer
ments faits par un mourant qui a joui de quelque
réputation : quoi ! celui-ci ne touchera point la
dame Chabrol ? quel cœur ! elle pourluit tou-
�IU1
r
34 jours ! il faudra donc , fur fon feul témoignage,
croire que le fieur Ar na ud, qui a été regardé
comme un honnête citoyen , & qui avoit donné
les fignes les moins équivoques de religion avant
fon ferm ent, a été un prévaricateur pendant fa
vie , & un parjure à fa mort. (k) (l)
(k) Le fieur Arnaud après le décès du fieur Perrin a été
Commis du fieur D e liv r y , il e ft mort Commis du D irecteur
actuel.
( l ) La Note de Ricard , rapportée au Mémoire imprimé de
la dame C h a b ro l, ne peut fignifier rien ici ; il n’eft point
queftion d ’ordonner de preuve teft imoniale de la fu g g e ftion
d u codicille , elle :eft évidente
d ’un autre côté , les condi-t ions de c e .c o d ic ille font accomplies de la maniére poffible ,
& en les confidérant en elles-mêmes & en rigueur, elles font
l ’effet de l’erreur ou de l’oubli.
Monf i eur l'A b b ê B E R N A R D , Rapporteur,
î
« • :i
'
i:
t ' :l
M e. B O H E T , Avocar.
i
■
|
..........I
fi
:
.. ■
.
- î.
,
!
C h a u v a s s a i g n e s , Procureur.
r- r
f.
'f'
î ; ■':•'[ i . T.- .
.-I
■: ■•
.
'tu r;:; ‘
K.
A CLE R M O N T - F E R R A N D ,
D e l ’ imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des D o m a in e s
du R o i , R u e S . G e n ès , près l ’ancien M a rch é au B le d . 17 7 4 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Arnaud, Marie-Magdelaine. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernard
Bohet
Chauvassaignes
Subject
The topic of the resource
legs
héritier universel
abus de faiblesse
codicille
successions
intention du testateur
ferme générale
gardes-magasins
faute professionnelle
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour dame Marie-Magdelaine Arnaud et sieur Jean-Baptiste Treiles, son mari, Notaire royal à Artonne, et Messire Victor Arnaud, Prêtre, habitant de cette Ville de Clermont ; lesdits dame et Victor Arnaud héritiers du sieur Gilbert-Paterne Arnaud, leur père, Intimés. Contre dame Antoinette Bompard, veuve du sieur Jean Chabrol, héritier universelle du sieur Perrin, Directeur des Domaines, Appellante.
Table Godemel : Legs. - difficulté sur son paiement.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1763-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0319
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Artonne (63012)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52927/BCU_Factums_G0319.jpg
abus de faiblesse
codicille
faute professionnelle
ferme générale
gardes-magasins
héritier universel
intention du testateur
legs
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53506/BCU_Factums_G2520.pdf
f2bdb61e87702c60506dae495bb99ac7
PDF Text
Text
ff
■ÿr m
memoire
EN REPONSE,
P O U R M. J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat,
au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs l
habitant de la ville d ’Yssingeaux; intim é.
�MEMOIRE
COUR ROYALE
DE RIOM.
EN R E P O N S E ,
Ir
P O U R M . J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat, .
au nom et comme tuteu r de ses enfans mineurs ,
habitant de la ville d ’Y ssingeaux, in tim é
*r
{ 9 X%
CONTRE
L e S ieu r J e a n - M a r t i n
R O C H E R , N é g o c ia n t , ^ ~
habitant de la ville de T e n c e , en q u a lité de subrogétuteur de J e a n - P i e r r e - À u g u s t i n P e y r a c ho n , appelant;
EN PRÉSENCE
«
D u S ie u r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n Propriétaire t
habitant la v ille de T e n c e , aussi intimé.
S
i la loi a mis des bo rne s à
la
faculté
q u ’elle
a c c o r d e a u x pères de disposer de le ur s b i e n s , à titre
g r a t u i t , c ’ est p r i n c i p a l e m e n t d a n s l ’ i n t é r ê t des enfans.
/
�, r
( 2 )
C ’est, cl’un autre c ô t é , pour maintenir l ’égalité
V
entre les héritiers, et sur-tout entre les enfans, appelés
à la même succession, que la loi a ordonné le rapport
des dons q u i leur ont été faits , s’ ils n ’ont pas été
expressément dispensés de ce rapport.
Ma is , d ’après les principes même qui l ’ont fait in
troduire, le rapport ne peut être exigé par le donataire
ou légataire, étranger à la succession.
C e point n ’est pas contesté.
O n ne veut pas moins en éluder l ’application 5 et ,
pour y parven ir, on veut faire distinguer l ’action en
r a p p o r t , de l ’aclion en im p u t a t io n .
C e n ’est pas, d il -o n , le r a p p o r t de la dot par elle
reçue, et du domaine qui lui a été abandonné en
jjiienient d ’ une partie de cette d o t , q u ’on a demandé
ïîtcjp- madame Mo llin.
L a loi faisait en sa faveur une
l*. * réserve dont elle ne pouvait être privée par les dispo^
* ^
"
*\
sitions gratuites du sieur Peyrachon , son père. L e
legs fait en faveur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon
doit recevoir son exécution ju s q u ’à concurrence de
cette réserve et de celle du sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
autre enfant; mais, pour compjti/fcr la ré se rv e de ma
dame M o l l in , il faut d ’abortl im p u t e r le montant de
sa dot et l ’excédant de valeur du domaine qui a été
délaissé à son mari.
On arriverait ainsi, pour Jean-Pierre-Augustin P e y
rachon , légataire, au même résultat que s’il pouvait
obtenir le rapport do la dot constituée à jMm'! Mollin.
L e legs iait eu faveur de Jean-Pierre Peyrachon 11c
�(3 )
peut comprendre, aux termes mêmes du testament du
sieur Peyrachon p è r e , que le tiers des biens existans
dans les mains de celui-ci à l ’ époque de son décès.
Il
ne peut être question , dans aucun cas ,
de
Y im putation de cette dot; et madame Mollin ou ses
enfans doivent obtenir leur droit de réserve sur les
biens dont le sieur Peyrachon est mort saisi, tout en
conservant la dot que le sieur Peyrachon lui avait
constituée.
A u moins ,
madame Mollin et
ses enfans
de
vraient toujours retenir l ’excédant de la valeur du
domaine de la Nau te , si cet excédant ex i s te , et est
réputé lib é r a l i té , à valoir sur la quotité disponible des
biens du sieur P e y ra ch o n , le d é l a i s s e m e n t d e ce d o
m a i n e , en p a i e m e n t de la d o t , devant etre considéré,
q u a n t à l ’excédant, comme un don .en pr éc ip ut ; cequi restreindrait d ’autant le legs fait à Jean-PierreAugustin Peyrachon.
C ’est ce que nous espérons étab l ir , avec le secours
d ’ une législation qui a eu principalement en vue les
héritiers à réserve, saisis de plein droit de la succession,
quelles que soient les dispositions fai tes pour les en
écarter; avec le concours d ’ une jurisprudence qui tend,
avec raison , lorsque la loi n ’a pas de prohibition for
m e l l e , à préférer, à des l é g a t a i r e s étrangers, ceux pour
lesquels les l i e n s du sang et les droits de la nature
semblaient être une recommandation suffisante, dans
l ’exercice de la faculté donnée h l ’ homme de substituer
aux héritiers que la loi appelait, des héritiers de son
choix.
�(4)
\ »
B u reste,
l ’avantage q u ’on veut obtenir pour le
mineur Peyraehon tient à la décision d ’un point de
' . ,.
droit 5 et l ’on doit s’en rapporter aux lumières des
magistrats q ui doivent prononcer.
Mais le mineur Peyraehon a cherche en ou tre , ou
l ’on a cherché dans son in térêt, à détourner toute la
fortune mobilière du sieur Peyraehon.
C ’est l ’objet d ’un autre procès pendant én la C o u r ,
et dans lequel figure un sieur abbé Merle, qui aurait
participé aux soustractions et enlèvemens dont les
h é r i t i e r s légitimes se sont plaints.
N ’é t a i t - c e p o i n t a s s e z , p o u r le m i n e u r Peyraehon ,
de recueillir, au préjudice de son père et de sa tante,
»
le tiers des biens de la succession de son aye ul?
FAITS.
L e sieur Jean-Pi erre P e y r a e h o n , ancien juge de
paix du canton de T e n c e , a e u , de son mariage avec
Marguerite Rocher ,
trois
enfans , savoir : Marie-
Geneviève , Jean-Pierre et Augustin.
M a r g u e r i t e H o c h e r est d é c é d é e ' l a p r e m i è r e .
A u g u s t i n P e y r a e h o n est m o r t q u e l q u e t e m s a p r è s .
M a r ie -
Geneviève Peyraehon a contracté
mariage
avec M. Jean-Antoine M o l l i n , juge au tribunal civil
d ’Yssingeaux.
L ’acte réglant les conditions civiles de ce mariage
est en date du 12 iloréal an i 3 .
L e régime dotal est d ’abord stipulé.
�(5 )
L e sieur Jean-Pierre Peyra ch on, pére de la futu re,
lui donne et'constitue en dot la somme de 5 o,ooo f r . ,
dont 2000 fr. du chef de Marguerite R oc h er, alors
décédée, et le surplus du chef paternel.
L a somme de 25 ,ooo fr. doit être payée en dettes
ou obligations à réquisition, et d après 1 clat à faire
entre les parties. « Les autres 2^,000 f r . , est-il d i t ,
« seront payables en fonds ou a r g e n t , par qui de
« dro it, après le décès du donateur, et sans inté rêt,
« et même par anticipation, en tout ou en partie »
L a future se constitue de son ch ef, et du consente
ment de son père, la somme de 1000 francs pour son
trousseau.
Il est stipulé un gain de survie en faveur de la
future.
Suit immédiatement la clôture de l ’acte, avec la
mention des signatures des parties et des témoins.
« Déclarant ladite f u tu r e , est-il ajouté après cette
« clôtu re , que dans ladite constitution maternelle,
« qui est mobilière, sont fixés et compris les droits
« qui peuvent lui revenir du chef d ’Au gu stin Pe yra « chonson
frère, dont le tiers se porte à 5oo f r . ,
« et q u ’elle renonce à tous ses droits légitimantes
« paternels et maternels. »
C e c o n t r a t est passé sous le C o d e c i v i l .
L a déclarai ion qui le termine est insignifiante; elle
devrait d ’ailleurs, en la forme, être considérée comme
non écrite.
E n paiement du premier terme de la dot de son
�(0)
épouse, M. Mollin a reçu du sieur Peyraclion , son
b eau-p ère , le ro mai i 8 o 5 , des effets* et créances,
ainsi que quelques héritages, céd és et rem is pour la
somme de 5 ooo f r . , ju s t e v a le u r desdits fo n d s .
L e second terme a été anticipé. L e 20 juin
i
8i 3
,
le sieur Peyraclion a remis à M. Mollin des titres de
créances, pour la somme de i3 ,o o o fr. ; « et pour les
« 12,000 f r . , restant de ladite d o t , lit-on dans l ’acte,
« je,
Peyrachon , ai remis et cédé,
en propriété,
« l ’entier domaine de la N a u te audit sieur M ollin,
i< a cc epta nt, pour le m onta nt desdits 12,000 francs,
« d u q u e l domaine il n ’entrera en j o u i s s a n c e cju après
« le décès d u sieur P e y r a c l i o n , qui s’en réserve les
« fruits pendant sa v i e ; et, au moyen de tout ce que
« dessus, et sau f le paiement desdites créances, ledit
« Peyrachon sera libéré de rentière dot de sa fille. »
L e sieur Peyrachon avait un attachement particulier
pour madame Mollin , q u ’il honorait d ’une entière
confiance.
Il
est inutile , pour la
cause a c t u e l l e ,
d ’entrer dans des explications à cet égard. Il suffira de
dire q u e , par un premier testament olograph e, en
date du i3 juin i8i3 , le sieur Peyrachon av;rit légué,
sur la portion disponible de ses liions, à Jean-PierreCiiarles M o llin , son petit-fils et filleul, son domaine
du P e ic h e r , et avait donné le surplus de cette portion
disponible à Jean-Pierre-Martin-Alphonse P e y ra c h o n ,
un des enfans de Jean-Pierre Peyrachon , son fils.
Ce
n ’ont
pas
été les
dernières dispositions du
sieur Peyrachon : inutile encore de dire comment et
�( 7 )
par les suggestions de q u i elles ont ¿té changées. L e
sieur abbé Merle joue ici un
rôle peu h o n o rab le ,
comme dans toutes les circonstances q ui ont précédé,
accompagné et suivi la mort du sieur Peyraehon.
'
Qu oi q u ’il en soit, le sieur Peyraehon a fait u n
second testament olographe, sous la date du 3 o mars
1819.
i° L e testateur révoque et anmille toutes les dispo
sitions q u ’il pourrait avoir faites antérieurement ;
20 II fait quelques legs p i e u x , à. acquitter p a r c e lu i
q u i aura la partie disponible de ses bien s3 q u i d e
meure aussi chargé de ses honneurs fu n èb res ;
3°
Il donne à Jean-Pierre P ey ra eh o n , son fîls aîné,
le domaine de F o u r n e t, un pré et un bois, et c e y
p o u r lu i tenir lieu du tiers de ses biens que la lo i lu i
accor de y
4 ° « Je déclare reconnaître, porte le testament,
« pour mes p e ti t s-en fan s, M a r i e - G e r m a i n e , Jean« P ierre-A u g u stin et J e a n - P i e r r e - M a r t i n - A l p h o n s e
« Peyraehon ,
ces trois e n f a u s issus du mariage do
« mondit fils avec feue Maric-Germaine Deiguas ; e t ,
« au surplus de tous mes autres biens meubles et
« immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les d o n n e e n p r é c i p u l e t a v a n t a g e ,
hors p a r t e t
« p o r t i o n , e t sans r a p p o r t , à Jean-Pierre-Augustin
« P e y r a e h o n , m o n p e t i t - f i l s , l ’a î n é de mond it lils et
« de la défunte d e m o i s e l l e Deiguas, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes bie ns, que je
�(8 )
« lui don ne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu
« au présent testament, et de payer mes dettes. »
L e testament se termine par la déclaration, de la
part du testateur, que ses meubles et effets ne sont
de v a le u r que de cent cinquante fr a n c s .
C ett e déclaration était-elle un moyen q u ’on cher
chait à se ménager, pour écarter tous reproches d ’enlèvemens et spoliations?
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon est décédé le 9 mai
1819.
U n a c t i f considérable en deniers et en c r é a n c e s avait
été dét ou rn é, d a n s l ’ i n t é r ê t , san s d o u t e , de JeanPierre-Augustin Peyrachon : on veut bien croire que
le sieur abbé Merle n ’y avait aucun intérêt personnel.
L e 18 mai 1819, M. e t M meMoIlin présentent requête
au tribunal d ’Yssingeaux, et ils obtiennent une ordon
nance portant permission de faire des saisies-arrêts,
jusques à concurrence de la somme de 3 o,ooo f r . , entre
les mains de diiférens débiteurs désignés, et de tous
autres qui
pourraient
être
découverts.
La
même
o r d o n n a n c e , a t t e n d u ‘que les intérêts de .Tcan-Pierre-
A u g u slin
Peyrachon ,
encore
m ineur ,
peuvent se
trouver en opposition avec ceux d u sieur Jean-Pierro
P e y r a c h o n , son père,
autorise M. et M me Mollin à
provoquer la nomination d ’un subrogé-tuteur.
Suivant procès-verbal du 4 j n ‘ n !8i9> le sieur JeanMartin llocher a été nommé subrogé-tuteur du mineur
P e y r a c h o n , par le conseil de fumillo.
�Des saisies-arrêts ont eu l i e u , et elles ont été suivies
de demande en validité.
Peu de jours après., et le 11 juin
1 8 1 9 , M. et
M me Mollin ont saisi le tribunal d ’Yssingeaux d ’ une
demande en p a r t a g e de la succession du sieur JeaiiPierre Peyraclion.
C ett e demande est formée contre le sieur JeanPierre Peyraclion fils, et contre le sieur R o c h e r , en
sa qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre-Àugustin.
Peyraclion.
Il est annoncé que les biens de la succession, indé
pendamment des immeubles légués au sieur Peyraclion
pour son tiers, consistent dans plusieurs m aiso ns,
domaines, rentes, e l dans le s titr e s e t p a p ie r s que
Jea n -P ieire- A u g u s t i n Peyraclion remit en dépôt à
M e Cham pagnac j notaire à T e n c e , avec le testament
de son a y e u l, et dans les promesses et sommes ré
clam ées contre les siciu's a b b é M erle et R o c h e r , en
sa dite q u a lité > et que le m ineur P e y r a c lio n , d ’in
telligence avec le sieur M erle , pretre, ont transfoi'mées en b illets p a y a b les au p o rteu r, dont ils sont
restés saisis.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle sont égale
ment assignés pour rapporter à la masse tout ce q u i
a clé détourné avant la mort du sieur Peyraclion et
pendant sa maladie, même de son consentement} pour
rendre toutes les sommes remises en leurs mains, ainsi
que tous les billets et promesses souscrits, par suite
des changemciis opérés, au 110111 du sieur Merle ou de
�Jean-Pierre-Augustin P eyra ch on, ou stipulés 'payables
au porteur , desquels billets et promesses ils ont été
n a n tis , et qui étaient primitivement au nom du sieur
Peyrachon père.
M. et madame Mollin concluent enfin à ce que le
sieur Peyrachon , en qualité de tu teur légal de JeanPi erre-A ugustin, et le sieur Ro ch er, en qualité
de
subrogé-tuteur, ne puissent être envoyés en possession
des biens com pris en
l ’ institution f a it e p a r Jean-
P ierre P eyrachon j prem ier du n o m , en fa v e u r de
J e a n -P ierre-A u g u stin j son p etit f i l s , que de con for
m ité à la loi.
L ’affaire étant engagée devant le tribunal d ’Yssingeaux, des faits de soustractions et spoliations ont été
précisés d ’une manière plus particulière, par M. et
madame M ollin, et ils en ont offert la preuve. Préala
b l e m e n t , l ’abbé Merle et le subrogé-tuteur ont subi
interrogatoire sur faits et articles, en vertu de jugeincns des 12 juillet et 9 novembre 1819.
M. et madame Mollin ont soutenu que le legs fait
en f a v e u r d e J e a n - P i e r r e - A u g u s t i n
testament du
3o mars 1 8 1 9 , 11c
P e y r a c h o n , p a r le
p o u v a i t lui donner
droit q u ’au tiers des biens dont le sieur Peyrachon
père était mort en possession \ et que pour déterminer
la quotité disponible à l ’égard de ce légataire , qui
était étranger à la
succession, 011 ne devait point
comprendre dans la masse la somme de 48,000 francs,
montant de la constitution de dot laite à la dame
�( 11 )
'/
M o l l i n , dont le rapport ne pouvait être du q u ’au sieur
Jean-Pierre P e y r a c h o n , cohéritier.
L e subrogé-tuteur du mineur Peyrachon a demandé,
par application des articles 920 et 922 du Code civil,
que la f i x a t i o n de la quotité dont le sieur Peyrachon
père avait pu disposer, fut faite sur une masse c o m
posée to u t à-la-fois des biens existans à son décès, et
des immeubles et sommes d ’argent dont il avait dis
posé de son vi va n t; et , par suite , que Ton comprit
dans la masse, soit la somme de 48,000 f r . , montant
de la constitution de dot faite à la dame M o llin , soit,
q uan t à l’excédant de v a le u r , le domaine de la N au te ,
donné en paiement, sur le montant de la d o t , pour
la somme de 12,000 f r a n c s , et a y a n t u n e v a l e u r beau
coup plus considérable, d ’après le subrogé-tuteur et
le sieur Jean-Pierre Pey ra chon , q u i , de son c o t é ,
demandait le rapport du domaine même de la Naute.
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon a adhéré, d ’ailleurs,
aux conclusions de M. et madame Mollin , et à celles
du subrogé-tuteur, en tant q u ’elles avaient pour objet
d ’augmenter la masse de la succession, h laquelle il
était appelé pour un tiers. L e subrogé-tuteur lui op
posait q u ’ il était censé avoir renoncé à cette succession,
en acceptant le legs à lui fait par le testament, eu
jouissant et prenant la possession des objets q u i lui
avaient été légués.
L e sieur abbé Merle s’est réuni au subrogé-tuteur
pour coutester les enlèvemens et spoliations articulés
�par M. et madame Mollin; il a particulièrement conclu
à la suppression des écrits signifiés par M. et madame
M o llin , comme lui étant injurieux.
E n cet état , le tribunal civil d ’Yssingeaux a rendu,
le 7 juin 1820, un jugement contradictoire dont voici
le dispositif (1) :
« L e tr ib unal, après avoir entendu M. le substitut
du
procureur du Roi,
et
en avoir délibéré en la
chambre du conseil ,
« Ordonne que par les sieursPannelier, Mathieu aîné,
et B renas, experts-géomètres, que le tribunal a nommés
d ’o f f i c e . . . . , il sera p r o c é d é à la v i s i t e e t e s t i m a t i o n des
immeubles délaissés par défunt Jean-Pierre Peyrachon,
en ce non compris le domaine de la N a u t e , cédé par
ce dernier à M. M o l l in , en paiement de la somme de
,12,000 francs, pour savoir si lesdits immeubles dont
ils seront tenus de rapporter l ’état , consistance et
v a l e u r , peuvent se partager commodément en portions
égales, sinon avec soultc; et, dans le cas où la division
puisse avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux ,
pour en être att ri b ué, par la voie du sort, et
par-
devant le juge-commissaire, un à chacun des eo-partageailS, Marie-Gencvièvo, J e a n - P i e r r e et Jean-PierreAu gust in P e y r a c h o n , légataires; lesquels experts se
ront tenus de présenter les bases de re s t i m a l io n , et
( 1) I-cs motifs de ce jugeaient sont transcrits dans le M ém oire p u b lié
au nom du sieur Jean-M artiu R o c h e r , su brogé-tuteur , pages 8 c l
suivantes »
�( -3 )
d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits biens,
depuis le décès du père Peyrachon ;
« Déclare n ’y avoir lieu d ’accorder au légataire le
rapport à la niasse de la somme de 48,000 f r . , payée
par ledit défunt Peyrachon à la dame M o l l i n , sa fille;
ordonne que cette somme sera rapportée à l ’égard de
Jean-Pierre Peyrachon , cohéritier ;
« Déclare ce dernier non-recevable dans sa demande
en rapport, à la masse, du domaine de la N a u t e , cédé
par le défnnt à M. Mollin , pour completter la dot
q u ’il avait constituée à sa fille; ordonne aussi que ,
par les mêmes experts, il sera procédé à l ’estimation
de la valeur de ce d o m a i n e , à dater du jour de la re
mise q ui eu a été faite à M. M o l l i n , p o u r , s u r leur
r a p p o r t , ê t r e statué ce q u ’il appartiendra ;
« E t , avant dire droit sur la demande en partage
des meubles dépendans de la même succession, le tri
b u n a l reçoit M. Mollin à prouver, tant par titres que
par témoins, dans le délai de h u i t a i n e , par-devant
M. Massard, jugeîi cet effet commis, les faits suivans :
« Qu e le défunt Peyrachon était reconnu dans le
public pour un grand capitaliste, ayant à sa disposi
ti on, et placée chez différons particuliers, une somme
de 5o,ooo francs, q u ’ il prêtait journellement avec on
sans b i l l e t s ;
« Q u ’il avait un livre-journal oii il énumérait scs
dettes actives, et indiquait sa position avec ses fermiers;
« Q u e , par aveux, et pendant sa maladie, et no
tamment depuis le carnaval dernier ( i B kj ) , le défunt
�avait reçu de ses fermiers, des cohéritiers Boy er, ou
du nommé P e y r o t , plus de 6000 francs en argent ;
« Q u ’ un grand nombre de promesses ou billets ,
souscrits en faveur du d é f u n t , et sous son nom, ont
été convertis en billets au porteur*, que les nouveaux
billets ont été écrits par Jean-Pierre-Augustin Peyrachon,
légataire, en présence de l ’abbé Merle; que
tantôt il était convenu q u ’ils seraient payés à JeanP i e r r e - A u g u s t i n , et tantôt à l'abbé Merle; que JeanPierre-Augustin s’est rendu plusieurs fois chez les dé
b i t e u r s pour leur recommander le secret, et les engager
à déclarer q u ’ ils n e d o i v e n t r i e n ,
et q u e ,
pour y
parvenir, il leur observait que l ’abbé Merle pensait
q u ’ils pouvaient dire avoir payé le d éfun t;
« Qu e depuis le dimanche gras, et pendant tout le.
tems qui a précédé de quinzaine la mort du père
P ey ra ch on , l ’abbé Merle était souvent pendant tout le
jo u r , et ju s q u ’à m i n u i t , dans le domicile du dé f u n t ;
« E t enfin q u e , pendant la maladie et après le décès
de Jean-Pierre P eyra ch on, Jean-Pierre-Augustin } son
petit-fils, a emporté de la maison du premier plusieurs
objets, tels que linge, bouteilles, argent, papiers et
autres effets;
« S a u f audit Jean-Pierre-Augustin Peyrachon et à
l ’abbé Merle leurs preuves contraires, dans le même
d él ai, et par-devant le même commissaire;
« Sursoit à prononcer sur la demande en suppression
de mémoire, déclaration d ’écrits calomnieu x, et eu
�( i5 )
dommages-intérêts, formée par l ’abbé Merle, jusqu a
ce q u ’il aura été procédé en exécution de l ’interlo
cutoire ci-dessus ordonné;
« C ondamne Jean-Pierre-Augustin P ey rach o n , dans
la personne de son subrogé-tuteur, en la moitié des
dépens faits j u s q u ’à ce j o u r , le surplus demeurant
réservé en définitif- »
L e 2 5 octobre 1820, le sieur Rocher, en sa qualité
de subrogé-tuteur, a interjeté appel de ce j u g e m e n t ,
tant contre le sieur Jean-Pierre Peyrachon , que contre
M. et M me Mollin ; mais avec déclaration que V appel
ne portait point sur la
disposition du ju g em en t j
relative à la preuve ordonnée p o u r de prétendues
sp oliation s.
Les parties ont dès-lors procédé en exécution de
cette disposition. Des enquêtes ont eu lieu; e t , par
de nouvelles conclusions, M. et M me Mollin ont de
mandé que le subrogé-tuteur et l ’ abbé Merle fussent
condamnés solidairement à payer et rapporter à la
succession de Je an -Pierre Peyrachon la somme de
5o,ooo fran cs ,. p o u r le numéraire q u ’avait le d é f u n t ,
et pour les sommes retirées par Jean-Pierre-Auguslin
P eyra ch on, ou mises en dépôt chez l ’abbé Merle, ou
enfin détournées par substi tut ion de promesses au
porte ur, h. laquelle somme le légataire serait privé de
prendre part , et ce , indépendamment des objets
énoncés aux t i t r e s confiés à M* C h am p a g n a c , à l ’égard
desquels il serait également déchu de tout droit.
L e subrogé-tuteur et l ’abbé Merle 11’ayant pas cru
�Î^î
( «6 )
.
devoir se présenter devant le tribunal d ’Y ss in geaux,
sur ces conclusions, un jugement par défaut, faute
de plaider, est intervenu le 25 mai 1 8 2 1 , par lequel
la condamnation au rapport de la somme de 5o,ooo fr.
a
été
prononcée solidairement
contre Jean-Pierre-
Àugustin Peyrachon et l ’abbé Merle. Il a été ordonné
que cette somme serait divisée par égale portion, entre
M. et M me Mollin et le sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
sans que le mineur Peyrachon pu t y prendre aucune
part. Il a été néanmoins déclaré par le jugement, que
cette privation ne s’étendrait point aux sommes prove
nant des l i t r e s déposés c h e z le n o t a i r e C h a m p a g n a c y
lesquelles seraient p a r t a g é e s e n trois portions, dont
l ’une serait attribuée au mineur.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle se sont
pareillement pourvus en la C o u r contre ce jug ement ;
et il s’agira de savoir,
lorsqu’on s’occupera de cet
app el , s’il est recevable, et très-subsidiairement s’il
est fondé.
Q u a n t à pr és en t, nous n ’avons à. examiner que les
dispositions du jugement du 7 j u i n . 1820, dans les
chefs attaqués; et c ’est à justifier ces dispositions, que
nous allons nous attacher.
�MOYENS.
L
a
principale q ues ti on, la question même unique
qui se présente en ce moment à la décision de la
Cour,
consiste à déterminer sur quels biens Jean-
Pierre-Augustin Peyrachon peut prendre le legs q ui
lui a élé fait par Jean-Pierre P e y ra c h o n , dans le testa
ment du 3 o mars 1819.
C e legs doit-il être borné au tiers des biens existant
lors du décès de Jean-Pierre P e y r a c h o n , c ’est-à-dire,
des biens dont il est mort en possession ?
O u bien ce legs peut-il comprendre le tiers des mêmes
biens, en y réunissant fictivement le m onta nt de la
constitution de dot faite à la dame Mollin par son
contrat de mariage du 12 floréal an 1 3 , et le prétendu
excédant de valeur du domaine de la Naute ; de telle
sorte que Jean-Pierre-Angustin ait le tiers en valeur
des biens existans lors du décès, du montant de la
C o n s ti tu t io n de d o t ,
et de l ’excédant de valeur d u
domaine ?
I l f a u t d ’a b o r d se f i x e r s u r les t e r m e s m ê m e de l a
d i s p o s i t i o n f a i t e p a r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n pè r e .
Après d!flférCng legs, et notamment le legs d ’ un
domaine fait au sieur Jean-Pierre Peyrachon fils, pour'
lui tenir lieu du tiers des biens que la loi lui accorde,
le testateur ajoute : « E t au surplus de mes biens
3
�« meubles et immeubles , je les donne en préciput
« et avantage à Jean-Pierre-Augustin Peyraclio n, mon
« p e t i t - f i l s , p o u r lu i tenir lieu de la portion dispo« niblc de mes biens que j e lu i donne. »
Q u ’entend donner,
sieur Peyraclion
et que donne
réellement le
par cette disposition ? L a
quotité
disponible; et il ne pouvait pas donner davantage :
quotité disponible, déterminée par l ’article
q i
3 du
C od e c i v i l , d ’après lequel les libéralités, par acte
entre-vifs ou par testament, ne peuvent excéder le
t i e r s des biens du disposant, s’il laisse h son décès deux
enfans légitimes*, cas d a n s l e q u e l sc t r o u v a i t le sieur
Jean-Pierre Peyraclion.
L e sieur P e y ra c l io n , testateur, gratifiait donc JeanPierre-Àugustin Peyraclion du tiers do ses biens.
Mais était-ce seulement du tiers des biens dont il
mourrait saisi et v êtu ?
L ’affirmative est sans difficulté.
Il est certain que des objets donnés entre-vifs, des
objets constitués en d o t , sortis de la main du dona
teur ou constituant, ne lui appartiennent plus. Si
postérieurement il dispose de tout ou de partie de ses
b ie ns, sur-tout par un testament qui ne reçoit d ’eiïet
que par sa m o r t , celte disposition ne peut atteindre
les biens dont il s’est déjà dépouillé par des donations
entre-vifs ou des constitutions de d o t , qui ne sont
autre chose que des donations.
A la vérité, les dons entre-vifs peuvent ne pas être
irrévocables, en ce sens q u ’il est des cas oit ils rentrent
�( *9 )
<
dans la succession du don at eu r, pour être soumis au
partage, ainsi que les biens dont le donateur est resté
nanti ju s q u ’à sa mort.
Mais c’est là ce qui constitue le rapport à succession.
A i n s i, c’est par l ’effet du rapport à la succession du
do nateur, que les objets donnés ou constitués en dot
viennent faire partie de la succession, viennent grossir
la masse des biens laissés par le donateur ou consti
t u a n t , afin que ceux q ui ont droit à la succession
puissent avoir leur p a r t , non-seulement dans les biens
existans lors du décès, mais encore dans les biens dont
le défunt avait cessé d ’être propriétaire à titre gratuit.
O r , quel est l ’objet du rapport?
C ’est d ’établir l ' é g a l i t é e n t r e c e u x q u i s o û l appelés
h la s u c c e s s i o n ; et cet engagement des en fans et autres
desceiulans, dit D o m a t , L o is c iv ile s , liv. 2 , l i t . 4 ,
sect.
i rc,
n°
I er,
à remettre dans la masse de l ’ hérédité
de leur père, ou autre ascendant à qui ils veulent
succéder, les choses-à eux données par cet ascendant,
pour être partagées entr’eux et leurs cohéritiers, de
même que les autres biens de l ’ hérédité,
est d ’une
équité toute évidente, qui a son fondement sur l'éga
lité naturelle entre les enfans dans la succession de
ascendans , et sur ce q u ’on présume d ’un lel
don,
n ’a v a i t été fa it <jue p o u r avancer au do
leurs
nataire u n e partie d e ce q u ’il pouvait espérer de l'hé
rédité.//«- titu lu s manifestant habet œ quilalem : loi 1,
il’, de collatione honorum. C e sont les mêmes p r i n c i p e s
qui out die te 1 article 8^3 du, Code c iv il, qui soumet
�Ctf
( 20 )
tout héritier venant à une succession, à rapporter tout
ce q u ’il a reçu du d é f u n t , directement ou indirecte
ment , à moins que les dons et legs ne lui aient été
faits expressément par préciput et hors pa rt, ou avec
dispense du rapport.
Dès que le rapport n ’a d ’autre b u t que l ’égalité
entre cohéritiers, il s’ensuit q u ’il ne devait être or
donné q u ’en leur fave ur, et q u ’il ne pou vait l ’être au
profit de ceux qui n ’étaient point appelés à la succes
sion,
et particulièrement
au profit des légataires,
envers lesquels le cohéritier donataire ne peut être
aucunement obligé.
».Telle a toujours été la règle, que l ’article 8D7 d u
Code civil n ’a fait que consacrer : « L e rapport n ’est
« du. que par le cohéritier à son cohéritier j il n ’est
« pas clù a u x légataires ,
ni aux
créanciers de la
« succession. »
U n e des conséquences
forcées de cette
règle est
q u ’ un légataire, quel q u ’il soit, e t su r- to u t le légataire
de la quotité disponible, ne peut demander le rapport
à l ’enfant ou autre cohéritier donataire, pour prendre
son legs tant sur les objets donnés que sur les biens
de la succession.
C ’est ce q u ’expliquent très-bien , pour l ’ancienne
législation, P o t h ie r , T r a ité des S u ccessio n s, chap. /j,
article a , § (>*, et pour la n o u v e ll e , M. C h a b o t
de
l ’A l l ie r , dans son ouvrage sur les Successions.
« L e rapport étant introduit pour établir l ’égalité
entre les enfuns qui Viennent à la succession de leur
�père 011 mère, ou autres ascendans, dit P o t h ie r ,
il
suit que l ’enfant ne doit le rapport q u ’aux autres
en fans ses cohéritiers : c’est pourquoi nous avons vu
q u ’il ne pouvait être prétendu par les créanciers de la
succession acceptée sous bénéfice d ’inventaire.
« Par la même raison , continue le même a u t e u r , si
un père qui a deux en fans, à l ’un desquels il a fait
une donation entre-vifs, fait un tiers-étranger léga
taire du tiers de ses biens, ce légataire ne pourra pré
tendre aucune part dans le rapport des biens donnés
entre-vifs à l ’un des enfans,-et n’ aura que le iiej's des
biens q u i se sont trouvés lors du d écès. C e u x donnés
entre-vifs à l ’un des enfans, se partageront entre les
deux enfans; car le rapport n ’est ilù q u ’aux enfans
cohéritiers. »
« M. C h ab ot de l ’Allier s’exprime en ces termes, sur
l ’article 857 du C o d e , n° 3 :
« Il est évident que la l o i , en cherchant à établir
l ’égalité, par le moyen du rapport, n ’a eu en vue que
les héritiers du sang, à qui la nature donne en effet
des droits égaux. Il ne peut y avoir aucun m o t if pour
établir l ’égalité à l ’égard des héritiers institués, dés
légataires, des donataires, qui ne tiennent leurs droits
ni de la n a t u r e , ni de la l o i , mais un iquem ent de la
volonté de l'homme. »
. ,.
H . C h ab o t pose ensuile cet exemple :
«Uri père, ayant cinq enfans, a fait à l ’ un d ’eux uil
don en avancement d ’ hoirie, et postviiun cinen t i l ' a
institué un étranger son héritier, ou légataire du quart
�de ses biens. Si l ’enfant donataire vient à la succession,
il fera le rapport de ce q u ’il a reçu ; mais ce rapport
ne profitera q u ’à ses frères et sœurs. L ’ héritier institué,
ou le légataire, n’aura rien à prétendre dans la chose
rapportée, et ne prendra son quart que dans le reste
de la su ccessio n / en sorte que si la succession vaut
4ooo francs,; et que le don fait à l ’un des cnfans soit
de 600 francs, l ’ héritier in sti tué, ou le lé g a ta ire ,
n ’aura le quart que de 34oo francs : les trois autres
quarts et les 600 fr. rapportés par le donataire seront
partagés également entre les cinq cnfans.
C e s p r i n c i p e s s’ a p p l i c f u e n t d i r e c t e m e n t a n o t r e espeCG.
L e sieur Peyrachon
père a légué à Jean-Pierre-
A u g u slin P ey ra chon , son petit-fils, la portion dispo
nible de ses biens, c’est-à-dire le tiers, dès q u ’il avait
deux enfans. L a dame Mollin avait reçu 48,000 francs
en d o t; elle en doit le'rapport, sans difficulté, à JeanPierre P e y r a c h o n , son cohéritier; mais elle ne le doit
point, à Jean-Pierre-Augustin , légataire étranger. C e
légataire ne doit donc avoir que le tiers des biens q u i
se sont trouvés lors du d é c è s , suivant les expressions
de Pot hier.
On cherche, pour le mineur P e y r a c h o n , à écarter
la conséquence qui vient d ’être tirée de la règle que lo
rap/torl n ’est pas dit a u x légataires ,
tinciion.
c'ntro les principes
sur
par une dis-
le rapport et les
principes sur Y im p uta tion .
Sous les anciennes lois, diL-011, l ’imputation pouvait
�( =3 )
être exigée par nn donataire on légataire étranger,
toutes les fois q u ’un légitimaire, qui avait déjà reçu
du défunt une libéralité, d e m a n d a it , pour obtenir sa
légitim e, le retranchement du don fait à l'étranger.
Il y a identité de cause et de nature entre la légitim e
d ’autrefois et la réserve actuelle. Sous les lois n o u
velles, il n’est pas permis de disposer, au préjudice
des enfans , d ’une quotité
d é t e r m in é e ,
qui est la
réserve faite en leur faveur-, et si une libéralité excé
dant cette quotité est faite au profit d ’un étranger,
les enfans ont le droit de la faire réduire; mais cette
réduction doit avoir lieu d ’ après la base déterminée par
l ’art. 922 du C o d e , et les enfans sont tenus d ’imputer
sur la portion ré se rv é e les sommes .et objets q u ’ils ont
précédemment reçus.
On cite , entre autres a u t e u r s ,
D o n a tio n s, partie 3 , cliap.
Ricard (T ra it é des
8., sect.
11,
n° 1 1 5 ) ,
L eb ru n (Traité des Successions, liv. 2, cliap. 3 , sect. 9,
nos 4 et 5 ) , M. Merlin (Répertoire de Jurisprudence,
au mot lég itim e, sect. 8 , § 3 , articles 2 , n° 4 ) , et
M.
Grenier
(T ra it é des D on a tion s
et
T esta m en s,
4e p a r t ., cliap. 2 , sect. 4 , § 2 , n° 5 9 7 . ) — Suivant ces
aut eurs, tout ce qui avait été donné par le défunt à
celui qui réclamait une légitime par voie de réduction,
devait ê t r e impute sur c e t t e légitim e, même quand la
demande e n réduction ou retranchement pour la légi
time aurait, été dirigée contre un étranger, légataire
universel.
Voila sans co nliedil des a u tonlc s bieu imposantes ■
�Wt
( H )
Voyons ju sq u’à quel point elles peuvent
servir au
système dtï‘ subrogé-tuteur du m ineu r Peyrachon.
'■ i° Il ne s'agit pas précisément, dans l ’espèce, d'une
action en réduction ou retranchement.
donation
ou un legs universl avait été
é t r a n g e r , celui
q u i réclamait
une
L o r s q u ’une
fait à un
légitime devait
imputer ce q u ’il avait reçu du défunt : c ’est ce qui
parait résulter assez
positivement
de l ’opinion des
auteurs.
Mais Jean-Pierre-Àugustin Peyrachon n ’a pas reçu
de Jea n -P ier re Pe yra ch on , son grand’père, un legs
Universel d o n t la r é d u c t i o n soit n é c e s s a i r e pour former
ôti completter la réserve de la dame Mollin dans les
biens du testateur. L e mineur Peyrachon n ’a reçu
d ’autre legs que celui de la quotité disponible ; c’est
•
un legs à titre universel. O r , quelle était la quotité
disponible? le tiers des biens existans au décès; car ,
à l ’égard du légataire, le montant de la constitution
dotale de la dame Mollin était irrévocablement sorti des
înains du testateur. C ’est à ce tiers des biens existans
lors du décès, que le mineur Peyrachon a seulement
d r o i t , d ’ a p r è s la d i s p o s i t i o n elle-même, sans q u e la dame
Mollin ait besoin d ’agir e n r é d u c t i o n o u retranchement.
Nous sommes absolument dans l'hyp othèse d ’une suc
cession où il y a tout à-la-fois des héritiers donataires
et un légataire d ’une quotité fixe. On a v u , suivant
Pothier- et M. C h a b o t , q u ’ il y a , dans ce cas, deux
masses distinctes; l ’ une à partager entre le légataire
et les héritiers, et qui ne comprend que les biens esis-
�(» 5 )
M
tans à l ’époque du décès de l ’auteur com m un ; l ’autre
à laquelle ne prennent part que les héritiers, et com
posée des biens existans au décès, distraction faite du
legs ; plus , des objets rapportés
par
les héritiers
donataires.
20 L e legs en faveur de Jean-Pierre-Auguslin Peyrachon fùt-il r é p u t é legs u n iv e r s e l fait sous l ’empire du
Code civil, il ne po urra it, ce semble, jouir des mêmes
S^jntages q u ’il aurait pu avoir sous l ’ancienne^ légisr
lation.
Sans entrer dans un examen approfondi du carac
tère de la légitime ancienne; sans chercher a marquer
tous les points de différence qui existent entre cette
légitime et la ré se rv e l é g a l e a c t u e l l e , d is o n s que la
q u e r e l l e d ’i n o f f i c i o s i t é , inventée pour les cas où ayant,
m éprisé .leu rs e n fa n s, les pères s ’étaient épuisés en
fa v e u r des étrangers} était considérée, en général ,
comme une grâce extraordinaire (ce sont les termes
dont se sert Ricard, à l ’endroit ci té ), que la loi n ’avait
introduite que sous des conditions qui étaient, entre
autres, d ’imputer et de tenir compte, par les enfans,
des libéralités q u ’ils avaient reçues de leur père. L e
brun disait aussi que la querelle d ’ inofficiosité «t la
demande de la légitime étaient un droit extra ord i
naire q u i n c d e v a i t a v o i r li eu q u e l o r s q u e le père, ou.
n ’avait p o i n t du to ut, ou n ’avait pas assez considéré
son sang, et q u a n d il fallait que la loi vint au secours
de la nature, et suppléât au défaut de l ’affection pa
ternelle : Q uia ju d ic iu m p a tris l e x supplet.
4
�'( 26 )
L a réserve, cette portion sacrée, que le Code a établie
en faveur des enfans et ascendans, se rattache à des
idées différentes : les enfans et ascendans ne peuvent
en être privés par quelque disposition que ce soit. C e
sont eux q ui ont la saisine des biens, que le légitimaire n ’avait jamais autrefois. A u x termes de l ’ar
ticle i o i r du Code civil, les héritiers auxquels une
quotité de biens est réservée par la l o i , sont saisis de
lein (]roit de tous les biens de la succession ; et leJ|i|r
universel est tenu de leur demander la déli
vrance des biens compris dans le testament.
C ett e sa is in e est -e lle s o u m i s e à q u e l q u e condition?
L e Code civil, unique lo i qui doive régler la réserve,
oblige-t-il l ’héritier réclamant sa réserve
contre
un
étranger, à imputer ce q u ’ il a reçu de son auteu r?
Les auteurs conviennent, au contraire, que la querelle
d ’ inofficiosité n ’avait été introduite que sous la co n d i
tion de l'imp utation. U n e pareille condition peut-elle
être suppléée, lorsque toute la faveur est du coté de
l ’ héritier h réserve?
E t n ’est-ce pas un principe constant, écrit (Jans la
loi 20, au code, de co lla tio n ib u s, q u ’on ne doit im
puter dans la légitime que ce qui est expressément
soumis par la loi à cette im putation? C e l t e loi établit
d ’abord que tout ce qui est sujet à l ’imputation dans
la légitime, l ’est aussi au rapport dans la succession ;
m ais, suivant l ’explication ajout ée, il ne faut pas en
conclure que réciproquement tout ce qui se rapporte »H
la succession doive s’impu ier sur la légitime. l)ü toutes
�( 27 )
/<
les choses soumises au rap port, on ne doit assujettir à
l ’imputation que celles qui sont exprimées par les lois.
H œ c autem rég u la , ut omma quœ p o itio n i quartes,
com putantur, etiam cib inteslalo conferantur : m inim e
è contrario tenebit3 ut possit quis diccre etiam ilia
quœ con feru n tu r, omnimodb in quartam partem his
c o m p u t a r i q u i ad inojficiosi querelam v oca n tu r. E a
enini tantummodb ecù his quœ co n feru n tu r3 m ém ora tœ portioni com putabuntur, pro quibus specia liter
leg ib u s} ut hoc f ie r e t , expressum est.
3 ° M. Merlin, dans l ’endroit in d iqu é, ne s’occupe
que de la question de savoir si les donations ordinaires
s’imputent sur la légitime, q u ’elles aient été faites ou
non sous c e l t e c o n d i t i o n 5 et ce p o i n t est d i s c u t é en
thèse g é n é r a l e . M . M e r l i n rapporte l'opinion de difi’érens auteurs, et l ’espèce de plusieurs arrêts. C e n ’est
que dans l ’article 3 du même § , q u ’il examine si un.
étranger, institué héritier ou légataire universel, peut
obliger le légilimaire à l ’ imputation de ce q u ’ il a reçu.
L a raison de douter, dit -i l,
est très-plausible. Les
choses exemptes du rapport à la succession le sont
aussi, en général, de l'imputat ion dans la légitime.
Après cette réllexion, INI. Merlin se borne à transe, ire
le sentiment de L e b r u n . O n voit dès-lors q u ’il ne
s ' e x p l i q u e p o i n t sur la réserve actuelle.
#
4" Q u a n t à l'auteur du dernier Traité des D o n a
tions, c’est à l ’occasion d ’un arrêt rendu par la Cour
d ’appel d ’ Agen, le 28 décembre 1808, q u ’ il (ait u n e
dissertation savante sur cette matière. Il indique aussi
�un grand nombre d ’autorités, et s’appuie principale
ment de la distinction faite par D u m o u l i n , sur l ’ar
ticle
ii
du chapitre 27 d e l à C o u tu m e de Nivernais,
entre le rapport simple à une succession à laquelle on
vient comme héritier, çt le cas d ’ une attaque dirigée
contre un don ou un legs, à l ’effet de faire ordonner
une déduction pour la légitime.
Dans l ’espèce de l ’arrêt de la C o u r d ’A ge n, rapporté
dans le Journal de D en ev ers3 i er v o lu m e de 1809,
page 49 du sup p l. , le sieur de Montalambert a v a it ,
par te sta m en t, légué à sa mère la moitié de ses m e u b l e s ,
son a r g e n t e r i e , e t u n e p e n s i o n de 800 f r a n c s ; 1il avait
institué po u r son héritier universel Louis de Montal e m b e r t , son cousin.
L a mère du testateur a tout à-la-fois réclamé le
quart qui lui était réservé par l ’arlicle 91 5 du C o d e ,
et le legs à elle fait.
L ’ héritier institué a soutenu que la mère ne pouvait
cumuler la réserve et le legs, qui ne lui avait pas été
fait à titre de préciput et hors part.
‘
O u voit la similitude q u ’offre cette espèce avec celle
de la cause : la m è r e v o u l a i t ne point r a p p o r t e r a u
mineur le legs à el le f a i t ; la fille v e u t o b t e n i r l a réserve,
indépendamment de la somme à elle constituée en dot.
Eli tyen! la C o u r d ’appel d ’Agen a accueilli la ré
clamation de la mère : «Considérant que les art. 843
et 85 7 du Code n ’assujettissent les héritiers venant à.
succession, à rapporter les donations entre-vifs q u ’ils
ont reçues du d é f u n t , 1 et ne leur interdisent de ré
�.( 29 )
'
clamer les dons h cause de m o r t , ou les legs q u ’il leur
a faits, q u ’a l ’égard de leurs cohéritiers; d ’où il suit
que l'incompatibilité des qualités d ’héritier et de lé
gataire en la même personne n ’est point absolue, mais
seulement
relative à l ’intérêt des cohéritiers;
que
l ’expression cohéritiers, employée dans les articles pré
cités, ne signifie que les héritiers légitimes, et non
les héritiers institués........... ; que l ’objet des rapports
étant de maintenir l ’égalité entre cohéritiers, l ’héritier
in s ti tué, non successible, est non recevable, envers
l ’héritier de la loi , à demander soit le rapport des
donations, soit la compensation des dons et legs avec
la réserve, parce que son titre établit l ’inégaliié, et
q u ’il i m p l i q u e r a i t q u ’il p û t l ’a i d e r , pour m a i n t e n i r ou
pour a u g m e n t e r cette inégalité, des mesures que le
législateur n ’a admises que pour la faire cesser........ ;
que l ’héritier in s ti tué, non successible, tenant tout
son droit du testament, doit prendre ce titre tel q u ’il
est dans son entier; q u ’il peut d ’autant moins inquié
ter l ’ héritier au sujet des legs q u i lui ont été faits ,
q u ’ils dérivent du même titre que l ’in s tit u t io n , dont
ils sont, en quelque sorte, une condition (les dons
entre-vifs sont encore plus favorables), et que le tes
tateur eût pu transmettre à cet héritier sa succession
tout entière, sans blesser en aucune manière les droits
de celui qui se trouve institué; par oii il est évident
que l ’appelant n ’est pas fondé en droit à forcer l ’hé
ritier à opter entre la réserve et le legs. »
M. Grenier, après avoir dit que cette décision n ’est
�( 3o )
.pas, àj beaucoup près, sans difficultés,, discute les
motifs d e - l ’arrêt de la C o u r d ’'Agen, q u ’il trouve en
opposition avec les anciennes règles sur l ’im pu tation ,
anciennes règles non contrariées, d i t - i l , par les dispo
sitions du Code c i v il , et à l ’appui desquelles viennent
les articles 920 et 922.
« A u surplus, ajoute cet a u t e u r, jusqu'à, ce q u ’il
y ait à ce sujet une jurisprudence formée, q u ’il est
impossible de faire résulter du seul arrêt de la C o u r
d ’appel (l’A g e n , la discussion aura l ’avantage de faire
sentir combien il est p r uden t, lorsqu’ on,veut instituer
un l é g a t a i r e u n i v e r s e l , e t q u ’ il y a u n a s c e n d a n t ou
un autre héritier à réserve, auquel on fait un d o n ,
de, s’expliquer de manière q u ’ il résulte de la volonti*
même du disposant, si le don est fait à l ’ héritier qui a
droit de réserve, indépendamment de cette même ré
serve, o u , au contraire, à imputer sur cette réserve,
en tout ou en partie. »
M . Grenier est donc bien loin d ’émettre l'opinion,
q u e , d ’après les dispositions du Code civ il, le donataire
ou légataire, en même tems héritier, doive absolument
imputer le don o u le legs sur la portion que la loi d é
clare indisponible en sa l a v e u r . Il indique seulement
des précautions ju s q u ’à ce r ju il y a it, à ce su je t }
une ju risp ru d en ce fo r m é e .
C et te
jurisprudence existe aujourd’ hui ; et nous
mettrons en première ligne un arrêt de la C o u r de
cassation , considéré comme étant de la p lu s hauts
im portance par les arrêtistes qui l ’ont rapporté.
�(
3i
)
C e t arrê t, qui est en date du 3 o décembre 1 8 1 6 ,
et q u ’on trouve dans le Journal de D e n e v e r s v o l . de
1 8 1 7 , page a 5 , et dans celui de S irey } tome 1 7 ,
page 1 53 de la i re partie ,
a été rendu contre un
héritier à qui la portion disponible avait été léguée
par préciput sur la totalité des biens, et q ui voulait
prendre c e . préciput sur l ’universalité de la succession,
y compris les objets soumis au rapport.
Il s’agissait
du
partage de la succession de Jean
Decour, q u i , en mariant ses trois filles, dans le cours
des années 1791 , 1792 et 1 7 9 4 , leur avait constitué
des dots, sous l ’obligation de rapporter à la succession
du constituant le capital et même les intérêts des
sommes dotales à elles constituées, dans le cas où elles
voudraient venir à partage.
L e 9 juin
1807 , testament de Jean D ec ou r, par
lequel il lègue à ses enfans mâles, avec dispense de
r a p p o r t, le qua rt de tous les biens qui composeraient
sa succession, sans en rien excepter.
S ’étant agi du partage
de la succession du père
commun , les filles y ont prétendu une part égale >.
nonobstant la clause portée en leur contrat de mariage.
Les frères ont demandé q u ’on fit entrer dans là masse
les dots reçues, pour, sur le to u t, être prélevé le
quart à 1<mu- profi t, et les irois quarts resians être
partagés entre tous. Les filles ont répondu (pie le pré
ciput ne pouvait se prendre que sur les seuls biens
qui étaient dans les mains du père au jo ur de son
�(32 )
décès, et non sur les sommes données en d o t , et qui
ne faisaient plus partie des bieris du testateur.
Les frères Decour disaient à leurs sœurs q u ’elles ne
pouvaient toucher au legs fait en leur fa veur , q u ’au
tant q u ’elles ne trouveraient point dans les dots reçues
et dans les biens libres de la succession, leur réserve
légale; et ils leur opposaient, comme le fait le subrogétu teur du mineur Peyrachon , l ’article 922 du Gode
civil , d ’après lequel la réduction des dons et legs se
détermine en formant une masse de tous les biens
existans au décès du donateur ou testateur ,
en
y
réunissant fictivement ceux dont il a été dispose par
donations entre-vifs, et, e n c a l c u l a n t sur tous ces biens,
après en avoir réduit les dettes, quelle est, eu égard
à la qualité des héritiers lé giti m es, la quotité dont le
donateur ou testateur a pu disposer.
L e tribunal d ’A r g e n l an , et la C o u r royale de C a e n ,
par arrêt du 20 avril 1814? ont proscrit la prétention
des sieurs Decour frères; et la C o u r de cassation ,
section civile , a rejeté le pourvoi formé contre cet
arrêt.
Les motifs de l ’arrêt de la C o u r de cassation
\
sont « q u ’en décidant q u ’ un héritier qui est en même
tems légataire, par p r é c ip u t , d u q u a rt
des b i e n s d u
d é f u n t , peut réclamer sa portion v i r i l e , comme héri
tier, sur les sommes qui sont rapportées à la masse de
la succession par les cohéritiers donataires en avance
ment d ’ h o ir i e ; mais q u ’il 11c peut être adm is , cil
qualité de légataire, à prendre une part quelconque
$ur les sommes rapportées, et q u ’en conséquence il
�n ’a droit, en ladite qualité de légataire, q u ’au quart,
par préciput, des biens qui appartenaient au testateur
lors de son décès, l ’arrêt dénonce a fait une juste ap
plication de l ’art. 857 du Code c i v il , et que d ’ailleurs
il n ’a contrevenu à aucun des articles invoqués par les
demandeurs, et qui étaient tous sans application à
l ’espèce. »
U n arrêt de la C o u r de cassation, du 27 mars 1822,
rapporté
dans le n° 3 du B u lle tin des A rrêts de la
C ou r de cassation } p o u r 1 8 2 2 , a été rendu absolu
ment dans les mêmes pr incipe s, en cassant un arrêt
de la C o u r royale de Montpellier, du 8 avril 1818.
E n 1792 , 1.793, et en l ’an 7 , le sieur Balsan avait fait
des dons, en a v a n c e m e n t d ’hoirie, à ses deux filles et
à l ’ un de ses fils. L e i 3 mai 1802, il fit un testament,
par lequel il donna, par préciput et hors p a r t , à JeanBaptiste B alsan , son fils a i n é , le quart de tous les
biens q u i l laisserait à son d é c è s , de q u elq u e nature
q u ’ils fu sse n t.
ainé
L e quart légué par préciput au fils
d e v a i t - i l être
prélevé
sur tous les biens dé
laissés par le père c o m m u n , y
compris les rapports
des dons en avancement d ’ hoirie, ou seulement sur
les biens dont
le père
était saisi au
moment
de
mort ? L e tribunal de Lodè vc et la C o u r de
M o n t p e l l i e r avaient décid£ que le préciput du q u a rt
devait ê tre p ris sur tous les biens, en y comprenant
sa
les dons en avancemens d ’hoirie. L a C o u r
sation
nant
a ,
au
contraire ,
les demandeurs
à
jugé
« q u ’en
rapporter
de cas
condam
à la succession
�(34)
de leur p è r e , et au profit d ’un légataire du quart en
p r écip u t , les biens q u i leur avaient
été donnés en
avancement d ’ hoirie, la C o u r royale de Montpellier
avait violé l ’article 857 du Code c i v il ,
et fait une
fausse application de l ’article 922 du même Code. »
C o m m e n t un légataire, non successible, pourrait-il
avoir plus de droit q u ’un légataire par préciput, ve
nant au partage comme héritier?
L a C o u r de cassation, par son arrêt d u 3 odécembre
1816,
a , au surplus, regardé comme non avenue et
sans effet la renonciation qui aurait été faite par les
sœurs D e c o n r , clans leurs contrais de mariage; ce qui
nous conduit à faire remarquer que la renonciation
de la dame Mollin à tous ses droits légitimaires pa
ternels, moyennant la somme à elle constituée en d o t,
ne peut influer en rien sur le droit de réserve qui lui
était assuré par la l o i , sur-tout à l ’égard d ’ un légataire
4
q ui n ’avait en l u i - m ê m e aucune vocation pour être
admis au partage des biens.
C e t t e renonciation
ne
parait point avoir été exigée par le père : pourrait-elle
être opposée sous une législation qui prohibe d ’une
m a n i è r e si e x pr e ss e les s t i p u l a t i o n s sur les s u c c e s s io n s
non o u v e rte s ? ( Code c i v i l , a r t i c l e s 7 9 1 , i i 3 o , i38f),
1G00, 18 3 7.).
A u besoin, M. Mollin rappellera les dispositions des
articles il\> i 5 , 16 et G8 de la loi du
ventôse
an 1 1 , sur le notariat, qui veulent que la mention de
la signature des parties, des témoins et des notaires
soit laite il la fui de l ’aôte; que les renvois et apostilles
�C 35 )
soient écrits en marge ou à la fin (le l ’acte , avec signa
t u r e , paraphe, et même
approbation des parties ,
lorsque la longueur du renvoi a exige q u ’il fût mis à
la fin de l ’acte; et q u ’ il n ’y ait dans le corps de l ’acte
ni surcharge, ni interligne, ni addition.
Sans nous occuper davantage de cette clause de re
nonciation, disons donc , ainsi que l ’ont décidé les
arrêts de la C o u r de la cassation, des 3 o décembre
18 1 6 et 27 mars 1 8 2 2 , que les légataires, lors même
q u ’ils ont une portion virile a réclamer comme héri
tiers , ne peuvent faire porter la disposition testamen
taire sur les dons en avancement d ’ hoirie ou autres,
que leurs cohéritiers ont r e ç u s .
E n vain on d i t , j)our le mineur P e y r a c h o n , que
l ’arrêt du 3 o décembre 1 8 1 6 , le seul que l ’on con
naissait, est étranger à la cause, et ne peut s’appliquer
q u ’au légataire d' une
quote déterminée , q u i
veut
augmenter le legs du q u a r t , de tous les dons précé
demment faits.
Nous avons déjà observé que Jean-Pierre-Augustin
Peyrachon était simplement légataire de la
d is p o n ib le ,
q u o tité
q u i se trouvait déterm inée au tiers, à
raison du nombre des enfans du testateur.
I j ’arrêt de la C o u r royale d ’A ge n, clti 28 décembre
1808, n ’a-t-il pas, d ’ailleurs, été rendu contre un
légataire universel qui refusait à la mère d u testateur
le legs particulier à elle fait et la réserve légale cu
mulés, c’est-à-dire, q u i voulait que le legs fut imputé
sur la réserve légale.
�( 36 )
L a C o u r royale de Limoges a décidé la munie chose
par un arrêt du i 4 juillet 1818 (D enevers, volume de
1 8 1 9 , page 7 d u suppl. ; S i r e y , tome 1 9 , page 1 44
de la 2e partie.). D ’après cet arr ê t, l ’ héritier à réserve
à qui il a été fait un legs, peut cumuler le legs et la
réserve, lorsqu’il vient en concours avec un étranger,
ou même un successible, agissant en qualité de léga
taire universel. L a C o u r de Limoges se fonde sur les
dispositions conférées des articles 843 et 8 5 7 du C o d e ,
et
répond aux objections tirées des articles 920
et
suivans.
« A t t e n d u , est-il d i t d a n s les m o t i f s de l ’arrêt, q u e
du système des rapports, voulùt-on passer à l ’examen
de la section du C ode q u i traite de la réduction des
donations et legs , la décision attaquée n ’en serait pas
plus légale; q u ’en effet, q u o iq u ’au premier aperçu l ’on
puisse peut-être s’arrêter à l ’idée de quelques auteurs
modernes, q u i ont dit q u i l ne s ’agit point proprem ent
d e rapport, tant que les legs n ’ont point été reçus, et
que la question doit être ju g é e p a r la règle des ré
d u ctio n s ; néanmoins 011 v o i t , i° q u e , dans la 2e partie,
l ’a r t i c l e 8 /j3 p r é v o i t le cas de legs à r e t e n i r o u à rap
p o r te r , et les embrasse dans sa g é n é r a l i t é ; 2° que le
système des réductions s’appliquant uni quement à la
quotité indisponible, il en résulte que les héritiers à
réserve ont seuls droit à former cette action en réduc
tion, pour faire rendre intacte à la masse c e t t e quotité
indisponible, si elle a été ébréchée; et q u e , dans l ’es
pèce, Lo uis C h e y l a r d , frère du déf un t, ne sc trouvant
�,
( 37 )
point dans la catégorie des héritiers à réserve, serait
encore non recevable dans sa demande, soit q u ’on la
jugeât par les règles des rapport s, soit par celles de la
réduction. »
A i n s i, il résulte bien positivement de cet arrê t,
comme de celui de la C o u r royale d ’A g e n , que le
légataire, même universel, doit souffrir tout à-la-fois
l ’exercice du droit de réserve accordé aux en fans et
ascendans, et le prélèvement des legs faits à ces der
niers, quoique non dispensés du rapport. A plus forte
r a i s o n , l ’héritier à réserve doit-il conserver les dons
irrévocables par lu i reçus, et obtenir sa réserve sur les
biens existans lors du décès.
✓
On ne se borne pas, pour le mineur P e y ra c h o n , à
demander la réunion de la dot de la dame Mollin à
la masse du patrimoine, pour déterminer la quotité
disponible; on veut aussi que la dame Mollin impute
sur ses droits légitim aires la plus-value du domaine
de la N a u te , délaissé à M. Mollin pour une somme
de 12,000 fr.
Nous avons à présenter des observations particulières
relativement
à cette plus-value
du domaine de la
N a u t e , si tant est q u ’elle existe.
C e ne serait pas, sans d o u t e , un excédant de valeur
peu considérable (j Uî pourrait faire regarder coin 111d
un avantage fait à la dame M ollin, le délaissement du
domaine de la Naute. Il a toujours été reconnu, en
matière de rapport ou à a' ré d u ctio n s q u e , pour l ’en-
�( 38 )
>tière exécution tle la vente faite à un successible, il ne
/fallait pas q u e l l e eut é té f a it e exa ctem en t au p r ix
'V énal, lors de cette v e n te } d ’après une estimation
d ’e x p e r ts , q u i p eu t elle-m êm e n ’être p a s sans in cer
titude ( L e b r u n , des S u ccessio n s} livre 3 , cliap. 6 ,
section 3 , n° 7 J 'M . G r e n ie r , T ra ité ¡des D on a tion s et
T estam ens} 4 e partie, chapitre i EV s e c t . 2 , n° 5 i 8 .).
M . Grenier pense que. si la valeur réelle n ’excédait
pas d ’un qua rt le prix de la v e n t e , la différencetqui
existerait serait sans conséquence.
Mais supposons que le domaine de la INaute-, donné
en paiement po u r 12,000 f r . , valait réellement plus
de iG,ooo I r . , 24,000
5 si 1 on veut.
Lorsque le sieur Peyrachon père a ainsi abandonné
h JVI. Mollin le domaine de la N a u t e , il n ’avait point
iencore disposé de la quotité de ses biens dont ses
•enfans pouvaient être privés.
Dès-lors, si on voit une libéralité dans la plus-value
•du domaine délaissé, le sieur Peyrachon aurait entamé
l a quotité disponible, par cette libéralité, qui serait
p r é s u m é e avoir été faite à
personne de son m a r i , à
la dame M ollin , dans la
titre de p r é c i p u t et hors
part.
E11 effet, non seulement, d ’après une jurisprudence
aujo u rd ’ hui iixéc, toute donation déguisée est valable,
.'lorsque le donateur est capable de donner et le dona
taire de recevoir; mais encore une semblable donation
f a it e à un successible est dispensée du ra ppo rt , et le
donataire peut la roieuir ju s q u ’à concurrence de la
�( 39 )
portion disponible, et prendre également sa portion
virile dans le surplus. Par cela que le donateur a em
prunté la forme d ’une vente ou de tout autre contrat
o n éreu x, il est censé avoir donné à titre de préciput
et hors part ( V o y e z , entre autres arrêts, celui de
la C o u r d ’appel de C o l m a r , du 10 décembre i 8 i 3 ,
rapporté dans le Journal de D ene vers , v o l. de i 8 i 5 ,
page i 4 du suppl. ■) et celui de la C o u r de cassation,
du i3 août 1 8 1 7 , rapporté dans le même jo u r n a l,
v olu m e de 1 81 8, page 98.).
Ainsi , M. Mollin ou ses enfans ne peuvent devoir,
dans aucun cas, le rapport ou l ’imputation de la plusvalue du domaine de la N a u t e , pas même envers le
sieur J e a n -P ie rre P e y r a c l i o n , q ui était le cohéritier
de la dame M o l l in , parce que l ’héritier venant à u n e
su c c e ss io n n ’est soumis au rapport de ce q u i lui a été
donné ou légué, que lorsque les dons-et legs ne,lui ont?
pas été faits par préciput.
A u contraire,
le legs fait ail mineur Peyraclion
doit être diminué de l ’excédant de valeur du domaine
de la N a u te ; de telle sorte que la portion disponible
des biens q u i devront former la succession du sieur
Peyraclion, soit d ’abord attribuée aux enfans Mollin,
jusques à concurrence du montant de l'estimation do
ce domaine, eu sus de la somme de 12,000 francs, et
que le mineur Peyraclion 11c puisse prendre que le
surplus.
C ’est de cette manière que doivent être entendues les
dispositions du jugement rendu .par le tribunal d ’Yssiu-
�( 4o )
geaux; et l ’on se demande comment se trouveraient
blessées les intentions d u sieui' P e y r a c h o n , et les
règles du ju s te ?
Les intentions d u sieur Peyrachon ! ...........
. Pe u t- on supposer que le sieur P e y ra c h o n , qui avait
constitué une dot à la dame M ollin , et q ui ensuite a
délaissé à M. M o l l i n , en paiement d ’une partie de
cette d o t , un domaine q u i aurait été d ’ une valeur
plus considérable, ait voulu restreindre et diminuer
les droits de la dame Mollin sur les biens dont il avait
resté saisi, pou r augmenter d ’autant le legs q u ’il fai
sait à Jean-Pierre-Àugustin Pey ra ch on ?
Mais le sieur Peyrachon avait donné des preuves à la
dame Mollin de l'affection q u ’il lui p o r t a i t , par les
dispositions contenues dans son premier testam ent,
d u i 3 ju in i 8 i 3 .
L e testament du 3 o mars 18 1 9 contenait-il la véri
table expression de scs dernières volontés? O11 pourrait
en d o u t e r , d ’après toutes les ’c irconstances qui ont
précédé sa mort.
Q u o i q u ’ il e n s o i t , ce testament doit recevoir son
exécution, mais de m a n i è r e à n e pas porter atteinte
aux droits que la dame Mollin tenait de la loi , ou
que lui assuraient des dispositions irrévocables en cllesmêinos, sur-tout respectivement ?i un légataire qui
n ’avait rien à prétendre, et qui ne recevra une portion
des biens de son a y e u l , que pour en p r i v e r sa tante et
son père, auxquels la loi les destinait entièrement,
�( 4 0
Les règles du juste ! ...............Mais
_ J
les raisons les plus puissantes, l ’équité la
mieux entendue ne se réunissent-elles pas en faveur
des enfans, dans la transmission des biens du père de
famille ?
Il a fallu laisser aux pères les moyens d ’exercer des
libéralités
qui , dans certains cas ,
pouvaient
être
d ictées p a r l ' affection ou com m andées p a r la recon
naissance.
Les enfans n ’en ont pas moins du exciter toute la
sollicitude de la loi ; et alors la nature et la loi se
trouvent d ’accord.
S ’écarterait-on des Règles du juste , par une obser
vation rigoureuse de ce qui est commandé par la nature
et par la loi ?
B E R N E T - R O L L A N D E , A v o ca t.
A L L E Z A R D , A voué.
RIOM
I M P R IM E R IE DE S A L L E S , PRÈS LE P A L A I S DE JU STIC E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mollin, Jean-Antoine. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernet-Rollande
Allezard
Subject
The topic of the resource
legs
partage
successions
légitime
quotité disponible
réduction
experts
réserve héréditaire
gain de survie
jurisprudence
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour M. Jean-Antoine Mollin, ancien magistrat, au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs, habitant de la ville dYyssingeaux, intimé ; contre le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, en qualité de subrogétuteur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon, appelant ; en présence du sieur Jean-Pierre Peyrachon, propriétaire, habitant la ville de Tence, aussi intimé.
note manuscrite : « 3 juillet 1822, arrêt confirmatif, Journal des audiences, p. 116. »
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2520
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2519
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53506/BCU_Factums_G2520.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine)
Pêché (domaine du)
Fournet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
experts
gain de survie
jurisprudence
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53507/BCU_Factums_G2521.pdf
bdf4f06907e7a36b6b828c57cba0661e
PDF Text
Text
POUR
V'cnxr' o m
du
Dame M a r i e D U B R E U I L , et le Sr G u i l l a u m e
C H O U S S Y , son m a r i, Expert - géomètre ,
Maire de la Com m une de Nebouzat; A n t o i n e
et autre A n t o i n e B O U C H E T , frères, culti
vateurs., et autres h abitans de la Com m une
de Vernines, défendeurs
CONTRE
M. G U I L L A U M A N C H E
du
BOSCAGE,
Lieutenant-général des Armées du Roi, Pro
priétaire de la terre de Vernines, demandeur.
M
d u B o s c a g e osl devenu propriétaire de la terre de
Vernines, située dans les montagnes de la Basse-A uvergne, par
le legs que lui en a fait M. de Lavigneix, qui n ’était, ni son
parent , ni son allié.
Au lieu d’user de cette propriété comme l’avait fait son bien
faiteur, et dans le sens et l’esprit de son Testament, il a signalé
sa mise en possession par des menaces d’asservir, à un droit de
Perrière, à la cinquième portion des fru its , deux à trois mille
�i
■\): * 3» iV.
! - # -V
f-.ii
$
1Í v *
-<
•
■
r-W•■*l£
■
¡¿.¡•¡■
tl
( - )
#
-
.
¿¿n
^
,
•
/.'s
ï,j|5
i;'1
Tfc-Î^'r :
M‘
m
•
■
■
il
, } \
"H
»
- •
formaient , jadis ,
v . -V
justice d e la ierre d e Yernines.
! r r - - 1'
;
:¡rpens de terre , q u i
il
*
1
l ’ enclave
de la haute
■'Bientôt ces menaces ont été réalisées ; déjà, dix. habitans sont
traduits en justice pour voir consacrer ce prétendu droit;
% ^Ç cnt autres se sont empressés de se réunir à eux pour repousser cette funeste prétention.
^Ûette cause n’est pas seulement celle des habitans de Yernines,
c’est celle de tous les habitans des montagnes d’Auvergne; c’est
la lutte de la liberté de l’agriculture contre le régime féodal qui
relève sa tête#altiere, et veut reprendre son sceptre de fer.
Les habitans de Yernines ont plusieurs sortes de moyens à
opposer en d é fe n se contre, la prétention de M. du Boscage.
1.cnt — M . du B o s c a g e esl sans droit et sans qu alité p o u r ré
clamer ce prétendu droit de Fercière';
’
2.ent — Ce droit a été contesté, dans tous les tem p s, par les
habitans de Yernines à leur ci-devant seigneur, et il l’était encore
au moment de la révolution.;
S.«“1 _ Q uaîl(l ce droit aurait été du , il a été supprimé par
les lois de 1791, 179a et 1793, qui ont aboli le régime féodal.
■ §. i " .
.
3 /. du Boscage est sans droit et sans qualité pour réclamer
le droit de Pcrcières.
M. Petit de Lavigneix nel ici a la terre de Vernines de la famille
Dufraisse, par acte du 8 juin 1792.
-M{' :]W
r' •
•u
Cette terre fut achetée moyennant 180,000 liv. de prix principal,
et 2,/joo liv. d’épingles.
Les assignats perdaient a I o n ^ 3 G po ur c e n t , suivant l’échelle
de dépréciation ,
ce
qui
portail ce prix , en numéraire , à
11 G,7 3 (> livres ou ii!»,2()^ fr. 81 centimes,
îjiii»
|ir
!U;
c.ette vente comprenait des hjttimcns, prés et terres;
�( 3 )
Différentes directes, montant h xiG setiers seigle inesurç:.de
Clermont ;
Go seticrs avoine ;
Et environ 170 liv. argent ;
Elle comprenait aussi quelques contrats de rentes foncières ;
« g.0 Un droit de Percière sur tonies les terres enclavées dons
j> ïeïendue de la ci-devant justice de V em in es, non tenues à cens,
» soit du propriétaire, soit d’autres ci-devant seigneurs.»
11 est dit plus bas que , « Attendu qu’il existe entre les sieurs
v Dufraisse et les liabitans de Ycrnines une contestation relative
» au droit de Percière , il est convenu que les sieurs et dames
» vendeurs seront obligés de rapporter , dans le courant de la
« présente année, un Jugement confirmatif de la Sentence arbi» traie rendue au profit desdits sieurs Dufraisse, et en cas de
» perte du procès , il sera diminué , sur le prix de la présente
» vente, la somme de 4o>ooo liv ., à quoi les Pcrcicres ont été
» évalu ées. »
Postérieurement, et en l’an 7, il s’éleva une contestation entre
AI. de Lavigneix et scs vendeurs pour raison de la remise des
litres,'soit des rercièrcs, soit des difl'ércns contrats de rente
compris dans la vente du 8 juin 1792.
Les choses restèrent dans cet étal jusqu'au mois frimaire an 11,
que trois des sieurs Dufraisse, qui étaient inscrits sur la liste des
émigrés, étant rentrés dans leurs foyers, il s’éleva une nouvelle
contestation entre eux et M. de Lavigneix, qui donna lieu à une
Iransaclion qui fut passée le i 5 messidor an 11 (/f juillet i 8u3.)
On \oit dans cette Iransaclion que les trois frères Dufraisse
demandaient à M. de Lavigneix le paiement des trois quarts du
prix «le la vente du 8 juin 1792, avec, interdis;
Que INI. (U> Lavigneix, leur opposait en défense q u e , « Loin
» d’être leur dccl>iU’ur , il avait surpayé le prix de son acquisition,
déduction faite des capitaux qui étaient restés dans ses mains;
. >. Q u ’en e ife t, il (allait commencer par déduire sur le prix de
son acquisition la somme de 40,000 liv., pour le montant du prix
�» des Pcrcières, attendu que l u i , Petit de Lavigneix, ne les avait
» achète que conditionnellement ; que ses vendeurs étant en
» procès avec les habitans d eV ern ines, pour ces Percières, il
» n’avait pas voulu prendre sur son compte les risques de ce
» procès ; qu’on s’était oblige de lui rapporter, dans l’année, une
» Sentence confirmalive de la Sentence arbitrale qui avait été
» rendue à leur profit ; qu’on devait aussi lui en remettre tous
» les titres ; qu’il ne lui avait été remis ni ces titres , ni la
« Sentence confirmalive de la Sentence arbitrale ; que cette
» Sentence n’avait pas même'été rendue; que, dès-lors, il éta/t
» libéré de cette somme de 4o,ooo liv. »
L e s frères Dufraisse répondaient, à l ’égard des Percières,
que , « P r e s q u e i m m é d i a t e m e n t a p r è s le co n tra t de v e n t e d u
» 8 juin 1792 , était i n t e r v e n u e ta loi du 25 août- q u i avait aboli
n toutes les redevances seigneuriales, dont on ne rapportait pas
» de titres primitifs de concession ;
» Que depuis , la loi du 17 juillet 1793 avait aboli toutes les
» rentes seigneuriales, sans exception, et que les Percières, dont
* était question, étaient comprises dans cette abolition;
» Que dès-lors, si le citoyen de Lavigneix était privé de ces
» Percières, ce n’était ni par le défaut de remises des titres, ni
» parce que. les citoyens Dufraisse ne lui avaient pas rapporté
» la Sentence confirmalive de la Sentence arbitrale, mais par
» l’eifet de la force majeure, dont ils n’étaient pas garants; qu’en
» conséquence, la perle de ces Percières était pour le compte
» d u ' c ito y e n d e L a v ig n e i x , cl qu’il ne d e v a it pas m o in s leur en
» payer le prix. »
D’après ces moyens proposés respectivement par les parties,
la discussion se termine sur cet objet en ces termes :
« Le citoyen Lavigneix demeure propriétaire incotnmulable
0 des Percières, telles qu'elles peuvent e/re dues, à scs risques,
» périls cl fortune, et sans aucune garantie, à cet égard, de la
» pari des vendeurs, qui lui ont présentement remis l’expédition
» de la Sentence arbitrale rendue cm» leur laveur contre les*
�w
(
5
)
» habitans d e V c r n i n c s , l e ......... août 1791 , dans l aquel le sont
» rappelés tous les titres sur lesquels le droit peut être fonde',
» et promettent de lui remettre, de bonne foi, tous les titres,
» soit sur lesdites P e r c i è r c s , soit tous les autres titres d e p r o -
Vcrnincs q u ’ils p ou r r o n t recouvr er. »
Il y a lieu de croire que M. de Lavigneix , en prenant ces
Percières sur son compte, a moins cherché son intérêt personnel
que celui des habitans de Vcrnincs , qu’il a voulu garantir des
vexations qu’ils n’auraient pas manqué d’éprouver de la part
de vils cessionnaires ou d’avides spéculateurs.
C e qui s e m b le r a it le prouver, c’est la conduite constante qu’il
a tenu depuis; il n’a fait aucun usage de ce droit de Perrière;
jamais aucun des habitans de la terre de Vcrnincs n’a été inquiété
pour ce d ro it, ni par l u i , ni par ses agens , et il s’est écoulé
seize à dix-sept ans depuis la transaction de i 8o 3 , sans qu’il lui
soit venu en idée d’élever la p lu s lé g è r e p r é t e n t io n à cet égard.
» p r i é té de ladite terre d e
C ’est dans cet état de choses que M. de Lavigneix a fait son
Testament par-devant notaire, à Besançon, le 14 janvier 1819,
dans lequel on lit le legs qui suit :
« Je donne et lègue à M. de Guillamnanchc du Boscage ,
» gentilhomme français, demeurant à Clerm ont-Fcrrand, en
>» Auvergne, lu somme de 4o,ooo fr ., ou, à son choix, m a terre
» de f 'cnilnes, à la charge, s’il accepte cette terre, de rendre à
» ma succession 3o,ooo fr. >»
11 est évident que, par ces expressions, m a terre de fa m in e s ,
M. de Lavigneix n’a entendu léguer sa terre que comme il
en jouissait, c’est-à-dire, avec le rural qui formait seul cette
terre à ses yeux , puisque c’était la seule chose dont il avait
jo u i, cl don t il avait entendu jouir depuis 28 ans.
Il était l>ien éloigné de vouloir y joindre le droit exhorbitant
de prélever la cinquième g erb e, sur toutes les propriétés des
habitans de celte terre, qu’il regardait comme aboli, et qu’il
ji’avnit jamais voulu réclamer.
�\V
.( G )
La prem ière, Tunique pensée de M. de Lavigneix, est de
'faire à M. du Boscage un don de 4°»00° fr- i s’il lui donne
l’option de prendre sa terre de Vernines au lieu de ces 4o,ooo fr.,
en payant 3o,ooo fr. à sa succession, c’est qu’il en estime la
valeur à 70,000 f r ., et le rural seul en valait plus de 80,000.
Il est contre toute raison de supposer que M. de Lavigneix,
qui entendait borner ses largesses à 40,000 fr ., et qui excédait
déjà celle somme en donnant le rural de sa terre de Vernintis,
en remplacement de ces 4o>00° fr- >
voulu gratifier encore
M. du Boscage du droit de la cinquième portion de tous les
fruits que les habitans de Vernines pourraient recueillir dans
deux ou trois mille arpens de terre, qui formaient jadis l’enclave
de la terre de V e r n i n e s ; droit, qu’à raison de l'a c c r o is s e m e n t
journalier de l'a g r ic u lt u r e et de l'iilat flo rissan t auquel elle est
Appelée par l’abolition de la féodalité et la suppression des dîmes,
on peut évaluer , sans exagération , à plus de 3oo,ooo f r ., surtout
si on y joint les 3o ans de jouissances dont M. du lioscage ne
craint pas de demander la restitution,
Ce serait vainement que , pour donner à ce legs une extension
conforme à ses vues, M. du Boscage voudrait exciper du Juge
ment qu’il a obtenu sur la demande en délivrance du legs qui
lui a été fait par M. de Lavigneix, par lequel il est envoyé en
possession de la terre de Vernines, « 'l’elle qu’elle se poursuit et
« comporte, avec scs circonstances cl dépendances, sans aucune
» réserve »
O n lui répondrait, i/"*, que ce J u g e m e n t n ’a eu pour objet
que les intérêts respect ifs de l'héritier et du légataire, et que
lotit ce qu’on a pu y insérer est étranger aux tiers auxquels il
n ’a pu ni profiler, ni nuire;
Que d’ailleurs, s’il était contraire à leurs intérêts, il ne
dépendrait que d ’eux d’en paralyser l'effet par la voie de la
lierre opposition.
a.««', O11 lui répondrait que a: Jugement ne fait pas mention
�(
7
)
des Percièrcs ; que l'héritier de INI. de Lavigneix s’est borné à
lui offrir la délivrance du legs dans le termes du Testam ent
que , dès-lors, tout sc réduit à l’interprétation de ce Testament,
et à expliquer quelle a été l’intention de M. de Lavigneix en lui
léguant 40,000 fr ., ou sa terre de Vernines, à la charge de rendre
à sa succession 3o,ooo fr.
Or, d’après tous les principes de la matière, pour interpréter
un legs, et lui donner plus ou moins d’extension, il faut
d’abord avoir égard au degré de parenté qui lie le testateur et le
légataire, et qui lui suppose plus ou moins d’affection pour le
légataire, d’après la marche ordinaire de la nature.
Or, ici, le testateur et le légataire n’étaient, ni parens, ni alliés.
Il faut ensuite, suivant U ic a e d , partie 2, chap. 4 , n.° 148,
avoir recours à toutes les circonstances qui peuvent servir à
découvrir la volonté du testateur, à toutes les conjectures qui
accompagnent l’espèce particulière qui est à décider, vestigia
volontafis set/uimur.
Or, ici, toutes les circonstances, toutes les conjectures s’op
posent à l’extension que M. du Boscage veut donner à son legs;
Le silence de M. de Lavigneix , sur ces Percièrcs , depuis 28 ans;
La valeur qu’il donne à sa terre, qui n’est pas même portée
au taux de la valeur réelle du rural;
La fixation de sa libéralité à 4°>00° fr- >
La manière dont il a joui de sa terre de Vernines, depuis
qu’il on est devenu propriétaire ;
La manière dont il en jouissait à son décès, au moment où
il dictait son Testament.
Ajoutons celte maxime si conforme à la raison et aux lois :
lu legatis f/uod m inim um est debetur.
Sempcr in obscuris tjuod m inim um est sequimur. Loi cj de
rcpilis juris.
E t nous aurons tant de guides assurés pour expliquer la
volonté de INI. de Lavigneix, qu’il ne restera pas le ¡»lus léger
doute cpie le legs qu’il a fait a M. du Loscage doit être réduit
�( 8 )
au iüral d e là lcrrc de Vernines, qui surpasse, en valeur, ce qu’il
a entendu lui donner.
D ’où il résulte , comme nous l’avons dit en commençant,
qu’il est Sans droit et sans qualité pour réclamer contre les
habitans de Vernines ce prétendu droit de Percière, qui excite
si vivement son ambition , cl sur lequel il fonde de si flatteuses
espérances.
g. i l .
Îjc prétendu droit de Percière , que réclame M . du Boscage; a
été, dans tous les tem ps, contesté p a r les habitans de J^errnnes ,
et il VëiaiffîèncQre quand M . de Ladgneicc a acheté la terre de
liera i tics.
M. du Boscage a fait imprimer et signifier, en tête de sa
demande, scs prétendus titres.
Le premier est l’extrait de ce qu’il appelle un procès-verbal,
signé Malingre, des i." septembre et 9 novembre 1489, dressé,
dit-il, en exécution d’un Arrêt du baillnge de Montferrand.
On ignore la forme de ce prétendu litre , s’il est en papier
ou en parchemin, si c e s l un original ou une simple copie
collationnéc ; cl , si c’est une copie collalionnée, quand cl par
qui elle a clé faite.
Ce qu’il y a de certain , c’est que les habitans de Vernines
ont plaidé avec leur Seigneur, pendant loul le cours du dernier
siècle, .sur ces Perc.ières ; que M. du Boscage a fait imprimer en
entier un Arrêt rendu au Parlement <lc Paris, sur celle affaire,
en 1765, et (pic ce préteikdn litre 11’y a pas élc produit.
Quoiqu’il en soit, on voit dans ce prétendu procès - verbal,
qu’au
siècle, la terre de Vernines était une châtellenie de
belle et grande étendue ;
Que d’après les limites qu’on lui donne , elle comprenait dans
Aon ■enclave, un espace immense;
Kl qü’eniin, on y fait mention q u e, « Ledit Seigneur élait
�(9)
» en possession d’avoir et percevoir la Percière des ¡èrres 'étant
» en sa seigneurie ».
Expressions qu’il ne faut pas perdre de v u e , et sur lesquelles
nous aurons occasion de revenir dans la suite.
M. Duboscage laisse ensuite une lacune de plusieurs siècles,
pendant lesquels on ne voit aucune trace de ces Percières.
Si on en croit les l'elalions insérées dans l’Arrêt de 1765,
il y eut une Sentence rendue à la chambre du Dom aine,
le 2 juillet 1717Que portait cette Sentence? On l’ignore. Tout ce qu’on voit
dans l’Arrêt, c’est qu’il y en eut une seconde le 7 avril 1752,
et une troisième le 6 avril 1756 ;
Qu’il y eut appel de ces différentes Sentences au Parlement
de Paris ;
Que l’appel de la Sentence du 6 février 1756, interjeté par
plusieurs individus qui sont dénommés dans cct A r r ê t , f u t
disjoint du procès pour être, ju g é séparément, et qu’il ne parait
pas qu’il ait été jugé depuis ;
Que sur l’appel des Sentences de 1717 et 1732, ces Sentences
ont été confirmées cl infirmées en partie;
Qu’enfin, tout ce qui résulte de plus clair de cet A r r ê t , c’est
que, pour ces Percières générales, étrangères à toute concession
particulière, et uniquement fondées sur le système de la propriété
universelle attribuée à la haute justice, il y a eu de tout temps
une résistance opiniâtre, de la part des habitans de Vcrnines,à se plier sous le joug qu’on voulait leur imposer;
Que ces Percières n’ont jamais été perçues depuis 1489
jusqu'en 1717 , que les Seigneurs de Vcrnines ont fait la tentative
d’y asservir ces habitans ;
Q u’elles n ’ on t pas été payées dep ui s 1717 j u s q u ’en 1 7 6 5 ,
époque
de l ’A r r ê t d u
t e mp s l à ,
Parlement,
puisque,
p en d an t
tout
ce
les parties étaient en p ro c è s ;
Que les Seigneurs de Vcrnines n’avaient qu’une bien faible
confiance dans leur prétention, puisqu’il n’ont suivi ce procès
a
�( 1° )
que de loin en loin ; que toute démarche a été suspendue de
leur pari, depuis 1717 jusqu’en 1752, cl qu’ils ont laissé passer
un demi-siècle sans en poursuivre la décision;
Que malgré l’Arrêt de 1765, la résistance des liahitans a
toujours été la même ; qu’il ne paraîl pas que le droit ait été
p erç u , et qu’il n’en a pas moins été en litige après comme avant ;
Q u’il a' fallu, en 1791, en revenir à un arbitrage; çt qu’enfin
tout était encore indécis sur ces Percièrcs, lorsque M. de
Lavigneix a acheté la terre de Vernines, le 8 juin 1792;
1 On lit , en effet, dans cet acte de vente , que , « Allendu
qu’il existe entre les sieurs Dufraisse et les habitans de
» Vernines une contestation relative au droit de Percière, il
» est convenu que les vendeurs seront obligés de rapporter,
» dans le courant de la présente année, u n ju g e m e n t con firm a tij
» de la Sentence arbitrale rendue au profit desdits sieurs
» Dufraisse; et au cas de perle du >procès , il sera diminué
» sur le prix de la présente vente la somme de 40j°°0 liv., à
» quoi les Percièrcs ont été évaluées. »
On prévoit dans cet acte de ve n te, le cas de la perle du
procès, et dans le cas prévu, il devait être déduit 4°>00°
sur le prix de la vente; il 11’y avait donc alors rien d’assuré sur
ce prétendjii droit ; tout dépendait du Jugem ent confirmait‘f de la
Sentence arbitrale, et ce Jugement n’a jamais été rendu.
C ’est donc avec raison que les habitans de V e r n in e s ont dit
que ce prétendu droit 'de Percière a été contesté dans tous
les temps; que la tentative de les y asservir, depuis plusieurs
siècles, n’a été renouvelée que de lo in en lo in , qu’elle a tou
jours été infructueuse , et que les choses étaient encore entières
au moment où ont paru les nouvelles Lois sur le régime
féodal.
�( “ )
§. III.
Q uand le droit de Percière aurait été dû, il a e'té aboli p a r les
nouvelles lois.
Il y a deux sorles de Percières ou de champarts, ou, si l’on
veut, de redevances à portions de fruits.
Les unes ont leur principe dans un acte de concession, fait
par un p r o p r i é t a i r e , d une quantité de terre determ m cc, a la
charge par ic colon de payer une quotité des fruits qui s’y
r e c u e i l l e n t , tel que le quart, le cinquième ou une moindre
portion qui se règle ordinairement sur le plus ou moins de
fertilité de l’héritage concédé.
Les autres sont des Percières générales, prétendues par les
ci-devant Seigneurs, sur toutes les terres situées dans l’étendue
de ce qui formait autrefois leur haute justice , sans autre exception
que de celles qui se trouvaient avoir été concédées à titre
de cens.
Les premières de ces Percières sont sacrées, et les habitans
de Vernines n’entendent pas les contester, s’il en existe de
pareilles dans leur commune.
Mais, il n’en est pas de même des Percières générales, et
indépendantes de toute concession particulière, telle que celle
que demande INI. du Boscage, sur toutes les terres situées dans
l’enclave de la ci-devant haute justice de Vernines.
C ’est sur celles-ci que porte notre proposition, qu’en sup
posant qu’elles eussent été dues aux Seigneurs de Vernines ,
elles seraient abolies par les nouvelles Lois.
Quand ou r e c h e r c h e l’origine du droit de Percière, auquel
les Seigneurs de V e r n in e s ont voulu asservir, dans tous les
temps, les habitans de celte commune, on n’en trouve pas d’autre
que celle maxime étrange (pie la force et la violence avaient
érigé en principe: que toutes les propriétés situées dans l’eaclave
de leur haute justice étaient de leur domaine.
�Il semblait que celte maxime devait cire étrangère à la Coutume
d’Auvergne, qui, de toutes les Coutumes, était la plus essentiel
lement allodiale ; cependant elle y était admise, comme dan»
la majeure partie des Coutumes de la France , où l’on ne
connaissait d’autre droit public que la maxime: Nulle terre sans
Seigneur :
Orrinia , dit M a z u e r , le plus ancien praticien d’Auvergne ,
qui écrivait avant la rédaction de la Coutum e, quœ sunt in
teiritono , seu districtu Dornirù, censenlur esse de suo fundo et
D ominio, et etiarn de suâ jurisdictione. M a z u e r , de judiciis, n.° 22.
B e s s i a n , qui est le premier commentateur qui ait écrit après
la rédaction de la Coutum e, confirme ce qu’avait dit M a z u e r ,
et s’exprime en ces termes sur l’article 5 du titre 2:
liegulariter et de ju re otnnia prœdia existentia in territorio aliciju s Dornini, censentur esse de suo fu n d o cl de suâ jurisdictione.
M. C h a b r o l , dans son commentaire sur cet art. 2, tom. 1 " ,
pages 40 et suivantes, rappelle, à cet égard, la noie de D u m o u l i n ,
sur l’art. 158 de la Coutume de T ro y c s , qui est allodiale comme
celle d’Auvergne, où il dit, que le Seigneur est fo n d é en la pro
priété dans sa haute justice.
Il rapporte une inulliludc d'autres autorités à l’appui de cette
prétendue propriété universelle des ci-devant Seigneurs dans
l’étendue de leur haute justice, qu’on se dispensera de rapporter,
et qu’on peut voir dans son ouvrage.
Or, c’est uniquement à ce titre que les ci-devant Seigneurs
«le la terre et de la haute justice de Yernines v, ont réclamé le
droit de Percièrc contre tous les habitait» de cette justice.
On lit dans le prétendu titre de 1489, que ledit Seigneur était
en possession d'avoir et percevoir la Percièrc des terres étant en
sa seigneurie.
On voit dans l’analyse de l’Arrel rendu en 1765, que dans
un aveu cl dénombrement donné au bureau des finances de
Kiorn, par la dame Arragounès, dame de Vcrnincs, elle comprend
�le droit de Percicres, à la cinquième gerbe, sur lous les héritages
situes dans l ’étendue de la justice de V ?m ines.
.A la vérité, clic consent que cet aveu et dénombrement soit
restraint aux terres non sujettes à cens, mais d’après la maxime:
cxceptio fu m â t reguhun , il n’en est que mieux établi que la
dame de Vcrnines entendait faire résulter, de sa haute justice ,
son droit de Percière sur tous les héritages situés dans son
enclave.
Ses c o n c lu s io n s tendent, en effet, à ce que, faisant droit au
principal, les habilans soient condamnés, « à payer et porter
» audit de Vcrnines, à son château de Vcrnines, le droit de
» P e r ciè r e , à la cinquième gerbe, sur les héritages non sujets à
» cens, et autres devoirs seigneuriaux dépendons de la justice de
» f rer/iines. »
Et on lit dans le dispositif de l’Arrèt, que la condamnation
est portée contre les h a b ila n s et co m m u n a u té d u d il T e r m in e s ,
N e u v ille , et autres dépendances de la h aute ju s tic e de l 'v n i n e s .
Lorsque depuis, M. Dufraisse , seigneur de Vcrnines, a voulu
mettre cet A rrèl à exécution , il a fait imprimer des Exploits
dans lesquels on lit que l’Arrêt de 1765, «adjuge audit seigneur
» la Percière, à raison de la cinquième gerbe , sur toutes les
» terres situées dans 1étendue de sadite justice de T^emines, et non
» . tenues à cens. »
Et dans l’acte de vente de 1792, on comprend « un droit de
» Percière sur toutes les teiTes enclavées dans iétendue de. la haute
» justice de T'ernines, non tenues à cens, soit du propriétaire,
» soit d'autres ci-devant seigneurs. »
Enfin , dans l’ Exploit de demande de M. du Boscagc , du
22 juillet dernier, on lit ce qui suit:
« Attendu (¡ue par diverses Sentences et ’A rrêts rendus dans
» les anciens Tribunaux , cl notamment par celui du i 5 juillet 17G!),
» les habilans de h paroisse de Vcrnines ont été condamnés à
» payer cl porter, audit sieur de V crnines, dans son château de
» Vcrnines, le droit de Percière, à la cinquième gerbe, sur les
�( >4 )
» héritages non sujets à cens et autres droits seigneuriaux,
» dépendons de ïa justice de Tremines. »
E l plus bas : « Attendu cpie le sieur du Boscage est bien
» fondé, d’après ces circonstances , à réclamer contre les habitans
» de Vernines, chacun en ce qui le concerne, le paiement des
» Percières dues sur chaque héritage. »
Il reste donc démontré que c’est uniquement à ce titre
de Seigneurs haut Justiciers que les seigneurs de Vernines ont
prétendu, jadis, un droit de Percièrc sur les terres enclavées
dans leur haute justice , et que c’est encore à ce même titre, et
comme se prétendant aux droits des anciens seigneurs haut
justiciers de cette terre, que M. du Boscage réclame aujourd’hui
ce même droit.
O r , il est facile d’établir jusques au plus haut degré d’évidence ,
que cc prétendu droit de Percière , uniquement fondé sur ce
titre de ci-devant seigneur haut justifier, ciït-il été du alors, ce
dont on est bien loin de convenir, aurait été supprime par les
nouvelles Lois qui ont «aboli la féodalité.
Une première L o i , du 20 avril 1791, avait aboli les droits
annexés à la justice seigneuriale.
Cette loi, sanctionnée par le Roi , est intitulée en ces termes:
« Loi concernant l’abolition de plusieurs droits seigneuriaux,
» et notam m ent de ceux (jui étaient ci-devant annexés à la justice
» seigneuriale »•
Une seconde Loi , du 25 août suivant, a développé les effets
de celle abolition.
L ’a rticle 1." d e ce tte L oi esl c o n çu en ces toxines :
« Tous les effets qui peuvent avoir été produits par la maxime:
» N ulle terre, sans Seigneur: Par celle de l’enclave, par les statuts,
» coutumes cl règles , soit générales , soit particulières, qui
»> tiennent h la féodalité , demeurent comme non avenus ».
O11 lit ce qui suit dans l’art. 5 , qui s'applique spécialement
à la cause.
« Tous les droits féodaux, x>u censucls utiles; toutes les rede-
�« vances seigneuriales annuelles, en argent, grains, volailles,
» V ire , denrées ou fruits de la terre, servis sous la dénomination
» de cens , censives, surcens , rentes seigneuriales et einphy» téotiques , champari , terrage, ugrier comptant .............. , sont
» abolis sans indemnité, à moins qu’ils ne soient justifiés avoir
» pour cause une concession primitive de f o n d s , laquelle cause
» ne pourra être établie qu’autant qu’elle se trouvera clairement
» énoncée dans l'acte prim ordial d'inféodation, d'accensement,
» ou de bail à cens, qui devra être rapporté. »
Et par l’article 12 de cette Loi: «‘Tous procès intentes et non
» décidés par Jugement en dernier ressort, relativement aux
» droits féodaux ou ccnsuels , fixes et casucls , abolis sans
» indemnité, soit par les Lois antérieures, soit par le présent
» D écret, demeurent éteints, et les dépens resteront compensés. >»
Cette Loi s’applique d’elle-même à l’espèce :
Le droit de Champart ou de Pcrcièrc, dont il s’agit, n’a pas
pour cause une concession primitive de fond , il n’a son origine
que dans la prétention qu’avaient les seigneurs de Vernincs de
la propriété universelle de toutes les terres situées dans l’enclave
de leur haute justice.
Ce prétendu droit de Percièrc est donc rigoureusement compris
dans la suppression prononcée par cette Loi.
11 peut y avoir d’autant moins de doute à cet é g a rd , que ,
d’une part, l’art. 17 de celle Loi n’excepte de la suppression
que, « Les rentes, cham parts et autres redevances qui ne
» tiennent point à la féodalité , et qui sont ducs par des parti» entiers à des particuliers non Seigneurs, ni possesseurs de fiefs.»
E l d’autre part, que M. du Boscagc n’est pas en état de justifier
d’un seul titre de concession des terres qui forment l’objet
de sa demande du 22 juillet dernier.
Mais ta Loi du 25 août 1792, n’est pas la seule que les
habitans de Vernincs soient en droit d’invoquer pour leur dé
fense; ta Loi du 10 juin 1793 vient encore à leur appui de
la manière la plus ciTicace.
�Nous lisons dans l’art. i.M de la section 4 de cette Loi, que,'
« Tous les biens communaux en général, connus dans toute la
» République, sous les divers noms de gastes , garrigues,
» landes, paccages , pâtis , ajoncs, bruyères , bois communs ,
» hernies, vacants, palus, marais , marécages , montagnes et
» sous toute autre dénomination quelconque, sont et appar» tiennent, de leur nature, à la généralité des habitans , ou
» membres des communes ou sections de com m une, dans le
» territoire desquelles ces communaux sont situés, et comme
» tels, ces communes ou sections de communes sont fondées
» cl autorisées à les revendiquer. »
Celte Loi s’applique encore d’elle-m êm e aux terres cultivées
par les habitans de Yernines, sur lesquelles M. du Boscage leur
demande le droit ,de P c r c ic r e , à la cinquième portion des fruits.
Cette commune est située entre le Puy-de-Dôme et le Montd’Or ; elle est couverte de neiges six mois de l’année ; la plupart
des terres dont elle est composée sont des terres vaines et
vagues, hernies et vacantes, qui ne sont pas succeptibles d’une
culture habituelle, mais que les habitans du pays défrichent de
temps à autre, et dont à force d ’engrais et de travaux, ils
parviennent à tirer quelques productions.
La possession de ce droit dans la personne des ci - devant
Seigneurs de V e r n i n e s , quand elle serait aussi réelle qu’elle
est démontrée fausse, ne serait d’aucune utilité, parce qu’on
voit dans l’art. 8 de la même section, que « La possession de 4o ans
» e x ig é e par la Loi du 28 août 1792, pour justifier la propriété
» du ci-devanl S e ig n e u r s u r tes terre s v a in c s et v a g u e s , gastes,
» garrigues, landes, marais, biens, hernies, vacants, 11e pourra
» en aucun cas suppléer le titre légitime, et ce titre légitime ne
» pourra être celui qui émanerait Je la puissance féodale; mais
>. seulement un acte qui constate qu’ils ont légitimement acheté
» lesdits biens, conformément à la loi du 28 aonfil >792.»
Et l’art. 9 qui su it, en expliquant le précédent, porte en
Inincs formels, que cette possession de 4o ans ne pourra être
�( 17 )
invoquée par les acquéreurs volontaires ou donataires , héritiers,
ou légataires du jief, à titre universel.
Enfin, la loi du 17 juillet 1793 a coupé la dernière tèle à
l’hydre féodale, en supprimant les redevances seigneuriales
et les droits féodaux de tous genres, même ceux qui avaient
pu avoir été conservés par les Décrets antérieurs.
On ne voit pas comment, d’après toutes ces Lois, M. du
Boscage a pu sc faire illusion au point de tenter la conquête
de ce droit dcPcrcièrc, qui, d’après lui-même, n’a d’autre origine
que la qualité de Seigneur haut justicier, qui est abolie, d’une
manière absolue, ainsi que tous les drois qui y étaient annexés ;
D ’un droit qui était en litige depuis des siècles entre les
habitans de Vcrnincs et leur Seigneur, et qui l’était encore au
moment de la révolution ;
D ’un droit enfin, qui ne lui a pas été légué par M. de Lavigneix,
qui n’a entendu le gratifier que d’une somme de 40,000 fr., ou,
d’un i m m e u b le de cette valeur; qui en est bien plus que rempli,
par le rural seul de la terre de Vernines que M. de Lavigneix
possédait à sasmort, et qu’il n’a entendu lui transmettre que
comme il la possédait.
On ferait d’ailleurs un présent bien illusoire à M. du Boscage
si on ne lui faisait pas un présent funeste, en lui accordant ces
Percièrcs.
M. du Boscage nous «lit lui-m êm e que le droit de Percière
q u ’il réclame 11e lui est pas du sur les terres qui étaient tenues
à cens des anciens Seigneurs de Vernines, ou des autres Sei
gneurs voisins.
O r , comment distinguer dans ces terres qui sont dans ce
moment en c u lt u r e ou qui le seront à l’avenir, les terres qui
étaient asservies à des cens, il y a 3o ans, de celles qui ne
l’étaient pas.
Par exemple, dans les 22 articles pour lesquels la dame
Choussy est traduite en justice, il peut y en avoir la moitié
3
�. ( 18)
ou les trois quarts, peut-être même le tout, qui étaient soumis a
des cens, soit envers le Seigneur de Vernines,
Soit envers le chapitre d’O rcival,
Soit envers le chapitre cathédral de Clermont,
Soit envers différons autres Seigneurs voisins, qui couvraient
de leur directe le territoire de Vernines.
Comment savoir celui ou ceux de ces vingt-deux articles que
les sieur et dame Choussy ont cultivés pour leur propre compte ,
comme étant anciennement asservis à des cens, ou ceux qu’ils
cultivent sous le bon plaisir et pour le compte de M. du Boscagc,
qui sc prétend le représentant de leur ancien Seigneur haut
justicier.
E l , s’il faut que l’asscrvisscmcnl ou l’affrancliissemenl de tel
ou tel article soit l’objet d’une preuve écrite ou testimoniale ,
cette preuve ne peut être à la charge du cultivateur, soit parce
qu’il n’a aucune ressource par-devers lui pour établir cette preuve
ou pour s’en garantir, soit parce qu e, d’après tous les principes
du droit naturel cl du droit civil, tout est en faveur de la liberté
contre la servitude, suivant la maxime: Quo/ies ilubia intcrprelatio
liberlatis. est, sccundùrn libcrtatcm respondendurn crit. llègle 20,
de regulis juris.
V4
%
M. Duboscage ne manquera pas d’invoquer en sa faveur
quelques préjugés des Tribunaux, tels que le succès de >1. de
Lasalle, qui a obtenu la confirmation de ses Pcrcières, contre
différons particuliers, liabilntis jde t>l;in/.nl ; el son succi’s per
sonnel contre plusieurs habilans d’Aurières.
Mais, à l’égard des Pcrcières de lîlanzat, 011 voit dans l’A rrêt,
que ces Pcrcières étaient ducs à M. de Lasalle, non pas comme
Seigneur haut justicier, et Sur l’universalité des terres situées
dans sa justice, mais sur des lénemens particuliers, el d’après
des titres primitifs de concession de fonds, tels que les exigeait
la Loi du 2!) août 1792, qui tous étaient rapportés au procès.
Et, ii l’égard de celles que M.*du Boscage s’est fait adjuger sur
�( T9 )
Certains mas et ténemens du village d’A urières, il paraît que
l’Arrét obtenu par M. du Boscage est fondé sur ce qu’il était
établi, par des reconnaissances de 1771, que ces liabitans ne
possédaient ces mas et ténemens r/u’à titre de colons congcables.
Au surplus, dans cette matière, encore plus que dans toute
autre, c’est par les Lois et non parles exemples que nous devons
nous régir. Legibus non exernplis regunnr.
Tout le monde connaît, d’ailleurs, ce brocard du palais, que
les Arrêts sont pour ceux qui les obtiennent, parce qu’ils sont
souvent l'effet d’un faux exposé des faits ou d’une défense négligée,
cX quelquefois d’un concert dont la justice ne peut pas pénétrer
le mystère.
. Ces préjugés dont M. du Boscagc ne manquera pas de tirer
avantage, sont donc sans conséquence et 11c peuvent avoir aucune
influence sur la décision de celle cause, qui se réduit à ces trois
points qu’on croit avoir également démontres jusques à l’évidence.
. Le premier, que M. du Boscage n’a ni droit ni qualité pour
rechercher ces Percièrcs.
Le second, qu’elles ont été contestées de tous tem ps, et
qu’elles étaient encore en litige au moment ou la terre de
Vernines a été vendue à M. de Lavigncix, au mois de juin 1792.
Le troisième, que si elles eussent été d u c s , elles auraient
été abolies par les lois des 20 avril 1791, a 5 août 1792, 10 juin
el 17 juillet 1793.
O11 sent, d’après tout ce qu’on vient de dire, qu’il est assez
inutile de s’occuper de la prétention de M. du Boscage, en
îvslilulion cle 3o années d’arrérages des Percièrcs qu’il réclame.
ie,,t. — S’il était dû dos arrérages de celle redevance, ce 11c
serait pas à lui que ces arrérages appartiendraient, mais à la
succession de M. d,. Lavigneix, dont l'héritier esl bien éloigné de
vouloir les réclamer ;
oent^ — S’il avail connu la disposition de l’arl. i 5 du litre 'S
de la Loi du 18 décembre 1790, qui porte en termes formels
�( 20 )
que ces sortes de redevances n’arrérageront pas à l’avenir, il
se serait épargné une demande aussi inconvenante, et qui ne
fait qu’ajouter à l’odieux que le droit en lui-même doit naturel
lement inspirer.
Il
ne nous reste, en terminant cette discussion, qu’à faire
une dernière réflexion dictée par le sentiment profond du bien
public et de l’intérêt de l'humanité.
Tout ce que nous Appelons dans ce département la montagne
de nuit, qui est d’une très-vaste étendue, consiste presqu’uni-quement en brandes, bruyères, landes, fraux et terres hernies
d une assez mauvaise nature.
Presque toutes ces terres re sta ie n t incultes par l’avidité des
Seigneurs , qui se prétendant propriétaires universels de tout ce
qui était situé dans l’enclave de leur haute justice, se prétendaient
en droit d’exiger de§ malheureux colons la portion la plus
précieuse des fruits qu’ils arrachaient, à force de travaux, de
ces terres ingrates.
Tout a changé de face dans ces contrées , l’abolition du régime
féodal a encouragé et annobli l’agriculture ; les cullivaleurs'ficrs
d’être possesseurs de propriétés indépendantes, et de ne travailler
désormais que pour eux et leur famille, ont rivalisé d’eiforts
pour féconder ces terres frappées jusques-là de stérilité; l’accrois
sement de la population a multiplié les bras; les défrîchcmens
ont été plus nombreux, les travaux mieux entendus, cl partout
les productions soûl d e v e n u e s doubles et peut-être triples de ce
qu’elles étaient autrefois.
I.e génie du mal, l’hydeusc féodalité a considéré, avec des
regards avides, ces.heureux changemcns , et tente aujourd’hui
de s'en approprier les avantages.
C ’est ïirn/n'iis Miles de Yihgikk qui veut faire sa proie des
moissons des habitans de Manloue, avec cette différence que
les spoliations des vétérans, dont parle le poêle, avaient du
moins pour prétexte des services rendus à la patrie, tandis
�( 21 )
qu’ici, c’est un heureux légataire, qui a reçu de M. de Lavigneix
le don le plus inattendu qui fut jamais, d’une somme de 4o,ooof.,
ou d’un immeuble de semblable valeur, qui veut décupler son
legs, et lui donner une extension sans mesure contre le texte
formel du Testament, qui borne la libéralité à 40 000 fr- et
contre l’intention manifeste du testateur qui a possédé 28 ans
la terre de Vernines, sans qu’il lui soit venu en idée de rechercher
un seul habitant pour le prétendu droit de Percière que réclame
aujourd’hui son légataire.
On a dit en commençant , et on ne saurait trop le répéter,
cette affaire n’est pas seulement celles des habitans de V ernines,
c’est celle de tous habitans des montagnes d’Auvergne.
Cent féodaux de ces montagnes, témoins de la lutte de M. du
Boscage , contre les habitans de V ernines, le suivent dans
l’arène, l’accompagnent de leurs vœux , et attendent avec
impatience l’événement, pour, s’il était favorable à la féodalité,
prendre part à la curée.
B O I R O T , ancien Jurisconsulte.
B O U C H E T , A voué.
A CLERMONT-FE R R A N D , de l'Im prim erie de P e l lisso n p ère e t f ils , au coin des ru es
Sain t-G enès et Sain t-Esp r it, ancienne m aison Giron.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dubreuil, Marie. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Bouchet
Subject
The topic of the resource
percière
experts-géomètres
experts
assignats
féodalité
émigrés
legs
coutume d'Auvergne
franc-alleu
doctrine
cinquième gerbe
communaux
climat
droits féodaux
physiocrates
agriculture
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Marie Dubreuil, et le sieur Guillaume Choussy, son mari, expert-géomètre, maire de la commune de Nebouzat ; Antoine et autre Antoine Bouchet, frères, cultivateurs, et autres habitans de la commune de Vernines, défendeurs ; contre M. Guillaumanche du Boscage, Lieutenant-général des Armées du Roi, propriétaire de la terre de Vernines, demandeur.
annotations manuscrites : « 19 janvier 1824, 1ére chambre, arrêt définitif. Voir au surplus au 26éme volume, p.81 et 103, les deux mémoires ».
Table Godemel : Percière : 3. la percière était-elle, en Auvergne, réputée féodale, lorsqu’elle était due au seigneur du tènement ? était-elle réputée mélangée de féodalité lorsque les titres qui la rappelaient, rappelaient en même temps les censives dues au même seigneur sur d’autres héritages ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Pellisson père et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2521
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53507/BCU_Factums_G2521.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Nébouzat (63248)
Vernines (63451)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agriculture
assignats
cinquième gerbe
climat
communaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droits féodaux
émigrés
experts
experts-géomètres
féodalité
franc-alleu
legs
Percière
physiocrates
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53519/BCU_Factums_G2604.pdf
483228fa604a875ac4ac705bc5299d15
PDF Text
Text
MEMOIRE
l'wcfTU* 'CàM
1%
POUR
Dame M
a r ie
y u^
D U B R E U I L , et le Sr G
CHOUSSY,
son m a r i ,
u il l a u m e
n t o in e
rV à«
E x p e r t - géomètre
M a ir e de la C o m m u n e de N e b o u z a t ; A
e t autre A
V
't'-»
^-*^ï /vP U
/Ok /■
CkAjuO
A»,
n t o in e
B O U C H E T , frères „ c u l ti
v a t e u r s et autres habitans d e la C o m m u n e
de Vernines., défendeurs ;
„ CONTRE
M.
GUILLAUMANCHE
du
BOSCAGE,
L ie u t e n a n t - g é n é r a l des A rm ées d u Roi, P r o
priétaire de la terre de V ernines., d e m a n d e u r .
M
• DU B o s c a g e est devenu propriétaire de la terre de
V ernin es , située dans les montagnes de la B a sse-A u verg n e, par
le legs que lu i en a fait M . de L avign eix, qui n'éta it , ni son
parent, ni son allié.
A u lie u d’user de cette propriété com m e l ’avait' fait son bien
faiteur, et dans le sens et l’esprit de son T estam ent, il a signalé
sa mise en possession par des menaces d ’asservir, à un droit de
P ercièr e , a la cinquièm e portion des fruits , deux à trois m ille
�itV
(2)
V
arpens de terre , qui form aient , jadis , l ’enclave de la haute
■'justice'de la terre de Yernines.
r .,i,. Bientôt ces menaces ont été réalisées ; déjà , dix liabitans sont
+
en justice pour voir consacrer ce prétendu droit;
**Ceiit autres se sont empressés de se réunir à eux pour re+**>
* poüssêr cette funeste prétention.
•t
-tv Cette cause n’est pas seulem ent celle des liabitans de Yernines,
c’est celle de tous les liabitans des montagnes d’A u vergn e; c’est
la lutte de la liberté de l ’agriculture contre le régim e féodal qui
relève sa tête a ltière, et veut reprendre son sceptre de fer.
L es liabitans de Yernines ont plusieurs sortes de moyens à
opposer en défense contre la prétention de M. du Boscage.
i.cnt — M. du Boscage est sans droit et sans qualité pour ré
clamer ce prétendu droit de Percière ;
—
ç c droit a été contesté, dans tous les tem p s, par les
liabitans de Yernines à leur ci-devant seigneur, et il l’était encore
au m om ent de la révolution ;
3 .ent — Quand ce droit aurait été dû , il a été supprim é par
les lois de 17 9 1, 1792 et 1793, qui ont, aboli le régim e féodal.
§. I er. .
M . du Boscage est sans droit et saris qualité pour réclamer
le droit de Percières.
M. Petit de Lavigneix acheta la terre de Yernines de la famille
D ufraisse, par acte du 8 juin 1792.
Cette terre fut achetée m oyennant 180,000 liv- de prix principal,
cl 2,400 liv. d ’epingles.
Les assignats perdaient alors 36 pour cen t, suivant l ’échelle
de. dépréciation , ce qui portait ce p rix , en numéraire , *1
116,736 livres ou 115,294 fr- 81 centimes.
Cette vente com prenait des b âlim en s, prés et terres ;
\
�y*
Différentes directes, montant à 116 sehers seigle , m esure de
Clerinont ;
* Go seliers avoine ;
E t environ 17!) liv. argent ;
E lle comprenait aussi quelques contrats de rentes foncières ;
« g.0 U n droit de P crcièrc sur foutes les terres enclavées dans
» l ’étendue de la ci-devantjustice de V'em ines, non tenues à cens,
« soit du p rop riétaire, soit d’autres ci-devant seigneurs. »
(Il est dit plus bas que , « A ttendu q u ’il existe entre les sieurs
» Dufraisse et les liabitans d eY crn in e s une contestation relative
» au droit de Percière , il est convenu que les sieurs et dames
» vendeurs seront obligés de rapporter , dans le courant de la
» présente année, un Jugem ent c o n f ir m a lif de la Sentence arbi» traie rendue au profit d e sc lils s ie u r s D u fraisse, e.t en cas de
» perte du procès , il sera dim inué , sur le p rix de la présente
« v e n te , la somme de 40,000 liv ., à quoi les Percières ont été
» évaluées. »
Postérieurem ent, et en l ’an 7, il s’éleva une contestation entre
M. de Lavigneix et scs vendeurs pour raison de la rem ise des
litre s, soit des P ercières, soit des différens contrats de rente
compris dans la vente du 8 juin 1792.
Les choses restèrent dans cet état jusqu’au m ois frim aire an 11,
que trois des sieurs D u fraisse, qui étaient inscrits sur la liste des
ém igrés, étant rentrés dans leurs fo yers, il s’éleva une nouvelle
contestation entre eux et M. de L a v ig n e ix , qui donna lieu à une
Iransaction qui fut passée le i m essidor an xx
ju illet i o .)
On voit dans celte transaction que les trois frères Dufraisse
demandaient à M. de Lavigneix le paiem ent des trois quarts du
prix <le la vente du 8 juin 1792, avec in térêts;
Q ue M. de Lavigneix , leur opposait en défense q u e , « L oin
» d’elre leur débiteur , il avait surpayé le p rix de son acquisition,
» déduction faite des capitaux qui étaient restés dans ses m ains;
» Q u’en effet, il fallait com m encer par déduire sur le p rix dé
*> sop acquisition la
de 40,000 liv,, pour le m ontant du prix
5
somme
(4
83
�» des Percières, attendu que l u i , Petit de Lavigneix, ne les avait
» acheté que conditionnellem ent ; que ses vendeurs étant en
» procès avec les habitans d e V e rn in e s , pour ces Percières, il
» n ’avait pas voulu prendre sur son com pte les risques de ce
» 'procès ; qu’on s’était obligé de lui rapporter, dans l’année, une
» Sentence coniirm ative de la Sentence arbitrale qui avait été
» rendue à leur profit ; q u ’on devait aussi lui en rem ettre tous
» les litres ; qu’il ne lui avait été rem is ni ces titres , ni la
» Sentence coniirm ative de la Sentence arbitrale ; que cette
» Sentence n ’avait pas m êm e été rendu e; q u e , d ès-lo rs, il éLa/t
» libéré de cette somme de 40,000 liv. ».
Les frères Dufraisse répondaient, à l ’égard des P e rcière s,
que , « Presque im m édiatem ent après le contrat de vente du
» 8 juin 1792 , était intervenue la loi du 25 août qui avait aboli
» toutes les redevances seign eu riales, dont on 11e rapportait pas
» de litres prim itifs de concession ;
» Que depuis , la loi du 17 juillet 179^ avait aboli toutes les
)> rentes seigneuriales, sans exception, et que les P ercières, dont
» était q u e stio n , étaient com prises dans cette abolition ;
» Que d ès-lo rs, si le citoyen de Lavigneix était privé de ces
» P e rciè re s, ce n’était ni par le défaut de rem ises des litr e s , ni
» parce que les citoyens Dufraisse ne lui avaient pas rapporté
» la Sentence coniirm ative de la Sentence arb itrale, mais par
» l ’eflet de la force m ajeu re, dont ils n’étaient pas garants ; qu’en
» con séqu en ce, la p erle de ces Percières était pour le com pte
» du c ito y e n de Lavigneix , et qu’il ne devait pas moins leur en
» payer le prix. »
D ’après ces m oyens proposés respectivem ent par les p a rties,
la discussion sc term ine sur cet objet en ces termes :
« L e citoyen Lavigneix dem eure propriétaire incom m utable
» des P ercières, telles qu’elles peuvent elre dues, a ses risqu es,
« périls et fo rtu n e , cl sans aucune garantie, à cel éga rd , de la
r> pari des vendeurs, qui lui ont présentem ent remis 1 expédition
» de la Sentence arbitrale rendue en leur faveur contre les
�(5)
»
»
»
»
»
habitans <lc V ern in es, le ......... août 17 9 1, dans laquelle sont
rappelés tous les litres sur lesquels le droit peut être fo n d e ,
et promettent de lui rem ettre, de bonne f o i , tous les titres ,
soit sur lesdites P ercières, soit tous les autres titres de propriété de ladite terre de Vernines qu’ils pourront recouvrer. »
Il y a lieu de croire que M. de Lavigneix , en prenant ces
Percières sur son compte , a moins cherché son intérêt personnel
que celui des habitans de Vernines , qu’il a voulu garantir des
vexations qu’ils n’auraient pas manqué d’éprouver de la part
de vils cessionnaires ou d’avides spéculateurs.
Ce qui semblerait le prouver, c’est la conduite constante qu’il
a tenu depuis -, il n ’a fait aucun usage de ce droit de Percière ;
jamais aucun des habitans de la terre de Vernines n ’a été inquiété
pour ce d r o it, ni par l u i , ni par scs agens , cl il s est écoulé
seize à dix-sept ans depuis la transaction de i 8o3 , sans qu’il lui
soit venu en idée d’élever la plus légère prétention à cet égard.
C ’est dans cet état de choses que M. de Lavigneix a fait son
Testament par-devant, n o taire, à B esançon, le 14 janvier 18 19,
dans lequel on lit le legs qui suit :
« Je donne et lègue à M. de Guillaum anchc du Boscage ,
» gentilhomme français, demeurant à C le rm o n t-F e rra n d , en
» A uvergne, la somme de 4o,ooo f r ., ou , à son ch o ix , ma terre
« de Vernines, à la charge, s’il accepte cette te rre , de rendre à
» ma succession 3o,ooo fr. »
Il est évident que, par ces expressions, ma terre de V ernines,
M. de Lavigneix n’a entendu léguer sa terre que comme il
en jouissait, c’est-à-dire, avec le rural qui formait seul cette
terre à ses yeux , puisque c’était la seule chose dont il avait
jo u i, cl dont il avait entendu jouir depuis 28 ans.
11 était bien éloigné de vouloir y joindre le droit exhorbitant
de prélever la cinquièm e g erb e, sur toutes les propriétés des
habitans de cette te r r e , qu il regardait co m m e a b o li, et qu’il
n ’avait jamais youlu réclamer.
�(G)
La p re m iè re , l ’unique pensée de M. de Lavigneix , est de
faire à M. du Boscage un don de °>ooo fr. ; s’il lui donne
l ’opfion de prendre sa terre de Vernines au lieu de ces o,ooo fr.,
en payant o,ooo fr. à sa succession, c’est q u ’il en estime la
valeur à 70,000 fr., et le rural seul en valait plus de 80,000.
Il est contre toute raison de supposer que M. de L a vig n eix ,
qui entendait borner scs largesses à 40,000 f r . , et qui excédait
déjà cette somme en donnant le rural de sa terre de V ernines,
en rem placem ent de ces 4°,000 f r . , ait voulu gratifier encore
M . du Boscage du droit de la cinquièm e portion de tous les
fruits que les habitans de Vernines pourraient recueillir dans
deux ou trois mille arpens de te r r e , qui formaient jadis l’enclave
de la terre de V ern in es; d ro it, qu’à raison de l'accroissem ent
journalier de l ’agriculture et de l’état florissant auquel elle est
appelée par l’abolition de la féodalité et la suppression des d îm es,
on peut évaluer , sans exagération , à plus de oo,ooo f r . , surtout
si on y joint les o ans de jouissances dont M. du Boscage ne
craint pas de dem ander la restitution.
4
4
3
3
3
Ce serait vainem ent que , pour donner ii ce legs une extension
conform e à ses v u e s , M. du Boscage voudrait exciper du Juge
m ent qu’il a obtenu sur la demande en délivrance du legs qui
lui a été fait par M. de L avign eix, par lequel il est envoyé en
possession de la te rre de Vernines , « T elle qu’elle se poursuit et
» com porte, avec scs circonstances et dépendances, sans aucune
» réserve. »
O n lui rép on drait, i.ent, que ce Jugem ent n ’a eu pour objet
que les intérêts respectifs de l’héritier et du légataire, et que
tout ce q u ’on a pu y insérer est étranger aux tiers auxquels il
n ’a pu ni p ro file r, ni nuire ;
Q ue d ’a ille u rs , s’il était contraire à leurs in té rê ts, il ne
dépendrait que d ’eux d ’en paralyser l ’eiîct par la voie de la
tierce opposition.
3 cnt,
On lui répondrait que ce Jugem ent ne fait pas mention
�(7 )
des Percièrcs ; que l’héritier de M. de L avigneix s’est borné à
lui offrir la délivrance du legs dans le termes du Testament;
q u e, d ès-lors, tout se réduit à l ’interprétation de ce T estam en t,
et à expliquer quelle a été l ’intention de M. de Lavigneix en lui
léguant 40,000 f r ., ou sa terre de Y e rn in e s , à la charge de rendre
à- sa succession 3o,ooo fr.
O r, d’après tous les principes de la m a tière, pour interpréter
un le g s , et lui donner plus ou m oins d’exten sio n , il faut
d’abord avoir égard au degrc de parenté qui lie le testateur et le
légataire, et qui lui suppose plus ou m oins d’affeclion pour le
légataire, d’après la marche ordinaire de la nature.
O r, ici, le testateur et le légataire n’étaient, ni parens, ni alliés.
Il faut ensuite, suivant R i c a r d , partie 2 , chap. 4 > n -° * 4 8 ,
avoir recours à toutes les circonstances qui peuvent servir à
découvrir la volonté du testateur, à toutes les conjectures qui
accompagnent l ’espèce particulière qui
est à décider,
vestigia
volonlalis sequirnur.
O r, ici, toutes les circonstances, loulcs les conjectures s’op
posent a 1 extension que 1V1. du Loscagc veut donner à son legs j
L e silence de M. de Lavigneix , sur ces P c rc iè re s , depuis 28 ans;
La valeur qu il donne a sa te rr e , qui n’est pas m êm e portée
au taux de la valeur réelle du rural;
La fixation de sa libéralité à 40,000 fr. ;
La m aniéré dont il a joui de sa terre de Y e rn in e s, depuis
qu’il en est devenu propriétaire ;
La manière dont il en jouissait à son d é cè s, au m om ent où
il dictait son Testament.
Ajoutons cette m axim e si conform e à la raison et aux lois :
I» legatis quod minimum est debetur.
Scnipcr in obscuris quod minimum est sequi/nur. L o i g de
regulis juris.
E l nous aurons tant de guides assures pour expliquer la
volonté de M. de L a v ig n e ix , qu’il ne restera pas le plus léger
doute que le legs qu’il a fait à M. du Boscagc doit être réduit
�au-rural de la terre de Y ern in es, qui surpasse, en valeur, ce q u ’il
a cnlendu lui donner.
D ’où il résulte , com m e noi^s l’avons dit en com m en çan t,
qu’il est sans droit et sans qualité pour réclam er contre les
habitans de Yernines ce prétendu droit de P crcière, qui excite
si vivem ent son am bition , et sur lequel il fonde de si flatteuses
espérances.
§. n.
Le prétendu droit de Pcrcière, que réclame M . du lioscage, a
été, dans tous les tem ps, contesté par les habitans de V«m ines ,
et il l'était encore quand M . de Lavigneix a acheté la terre de
7 'ernines.
M. du Boscage a fait im prim er et signifier, en tète de sa
demande , ses prétendus titres.
L e prem ier est l’extrSit de ce qu’il appelle un procès-verbal,
signé M a lin g re, des i." septem bre et 9 novem bre 1489 7 dressé,
d it-il, en exécution d ’un A rrêt du baillage de M onlferrand.
On ignore la form e de ce prétendu titre , s’il est en papier
qu en parchem in, si c’est un original ou une sim ple copie
collationnée ; e t , si c’est une copie co llalion n ée, quand et par
qui elle a été faite.
C e qu’il y a de certain , c’est que les habitans de Yernines
ont plaidé avec leur Seigneur, pendant tout le cours du dernier
siècle , sur ces'Percières-; que M. du Boscage a fait im prim er en
entier un A rrêt rendu au Parlem ent de P a ris , sur cette affaire,
en 1765^ et qtie ce prétendu titre n’y a pas été produit.
Q u oiqu ’il en so it, on voit dans ce prétendu p ro cès-v erb a l,
qu’au r5 ,tmc s iè c le , la te r r e de Yernines était une châtellenie de
belle et. grande étendue ;
Que d’après les lim ites q u ’on lui d o n n e , elle comprenait dans
son enclave un espace immense',
- E t qu’e n lin , on. y--fait mention- q u e , « L edit Seigneur était
�(9 )
» en possession d’avoir et percevoir la Perrière des terres étuul
» en sn seigneurie ».
Expressions qu’il ne faut pas perdre de vue*, et sur lesquelles
nous aurons occasion de revenir dans la suite.
M. Duboscage laisse ensuite une lacune de plusieurs s iè cle s,
pendant lesquels on ne voit aucune trace de ces- Percières.
Si on en croit les relations insérées dans l’A rrêt de 1765,
il y- eut une Sentence rendue à la cham bre du D om ain e,
le 2 juillet 1717.
Q ue portait cette Sentence? O n l ’ignore. T ou t ce q u ’on voit
dans l’A rrêt, c'est qu’il y en eut une seconde l e '7 avril 1752,
et une troisièm e le 6 avril 1756;
- Q u ’il y eut appel de ‘ces différentes Sentences au Parlem ent
de Paris ;
Q ue l’appel de la S e n t e n c e du 6 février 1756 , interjeté par
p lu s ie u r s individus qui sont dénommés dans cet A r r ê t , fut.
disjoint, du procès pour être ju g é séparément, et. qu’il ne paraît
pas qu’il ait été jugé depuis ;
Que sur l ’appel des Sentences de 1717 et 1752, ces Sentences
ont été confirmées et infirmées en partie ;
Q u’enfin, tout ce qui résulte de plus claiir de cet A r r ê t , c’est
que, pour ces Percières' générales , étrangères à toute concession
particulière, et uniquem ent fondées sur le systèm e de la propriété
universelle attribuée à la haute ju s tic e , il y a eu de tout temps
une résistance op in iâtre, de la part des habitans de V ern in cs,
a se plier sous le joug qu’on voulait leur im poser;
••
Q ue ces Percières n’ont jamais été perçues depuis i 48g
jusqu’en 1717 , que les Seigneurs de Vernincs on t fait la tentative
d y asservir ces habitans ;
Q u elles n’ont pas été payées depuis 1717 jusqu’en 17 6 5 ,
époque de l’A rrêt du Parlem ent, p u isq u e, pendant tout ce
temps là , les parties t'taient en procès;
Que les Seigneurs de Vernincs n’avaient qu’une bien faible
confiance dans leur p v cicn iio n , puisqu’il n’onl suivi ce procès
2
�( 10 )
que de loin en loin ; que toute démarche a c'té suspendue de
leur part, depuis 1717 jusqu’en 1752, et qu’ils ont laissé passer
un dem i-siècle sans en poursuivre la décision ;
Que m algré l’A rrêt de 1765, la résistance des habitans a
toujours été la m êm e ; qu’il ne paraît pas que le droit ail été
p e rçu , et qu’il n ’en a pas moins été en litige après-com m e avant ;
, Q u ’il a fallu, en 179 1, en revenir à un arbitrage; et qu’enfin
tout était encore indécis sur ces P e rciè re s, lorsque M. de
Lavigneix a acheté la terre de Y ern in es, le 8 juin 1792;
On l i t , en è fle t, dans cet acle de vente , que , « Attendu
» qu’il existe entre les sieurs Dufraisse et les habitans de
» V ernincs une contestation relative au droit de P ercière, il
» est convenu que les verideurs seront obliges de rap p orter,
» dans le courant de la présente année, un jugement confirmatif
» de la Sentence arbitrale rendue au profit desdits sieurs
» Dufraisse ; et au cas de perle du procès , il sera dim inué
» sur le p rix de la présente vente la somme de 4o,ooo liv., à
» quoi les Percières ont été évaluées. »
O n prévoit dans cet acte de v e n te , le cas de la perte du
procès , et dans le cas p r é v u , il devait être déduit 4^,000 liv.
sur le p rix de la vente ; il n ’y avait donc alors rien d’assuré sur
ce prétendu droit ; tout dépendait du Jugement conjirmatif de la
Sentence arbitrale, et ce Jugem ent n’a jamais été rendu.
C ’est donc avec raison que les habitans de Yernines ont dit
que ce prétendu droit de Percière a été contesté dans tous
les tem ps; que la tentative de les y asservir, depuis plusieurs
siècles , n’a été renouvelée que de loin en lo in , qu’elle a tou
jours été infructueuse , cl que les choses étaient encore entières
au m om ent où ont paru les nouvelles Lois sur le régim e
féodal.
�r
. ..
.
t
§.
n i.
Quan'd'Ie droit de Percière aurait été. dû, d a ete aboli par les
nouvelles lois.
11 y a deux sortes de P crcièrcs ou de chainparts, ou , si l ’on
v e u t, de redevances à portions de fruits.
Les u n es'o n t leur p rincip e dans un acte de concession, fait
par un p ro p riétaire, d’une quantité de terre d éterm in ée , à la
charge pâr le colon de payer une quotité des fruits qui s’y
recu eillen t, tel que le q u a rt, le cinquièm e ou une m oindre
'portion qui se règle ordinairem ent sur le plus ou moins de
fertilité de l ’héritage concédé.
L es autres sont des Pcrcicrcs gén érales, prétendues par les
ci-devant S eign eu rs, sur toutes les terres situées dans l’étendue
de ce qui formait autrefois leur haute ju stice, sans autre exception
que de celles qui se trouvaient avoir été concédées à titre
de cens.
Les prem ières de ces Percières sont sacrées., et les habitans
de ‘Ycrnines n entendent pas les contester, s’il en existe de
pareilles dans leur commune.
M aïs, il n’en est pas de m êm e des Percières générales, et
indépendantes de toute concession particulière*, telle que celle
que demande M. du B oscage, sur toutes les terres situées dans
’énclave "de la ci-devant haute justice de Ycrnines.
C ’est sur celles-ci que porte notre p rop osition , q u ’en sup
posant qu’elles evissent été dues aux Seigneurs de Ycrnines ,
elles • seraient abolies par les nouvelles Lois.
1
Quand on recherche l’origine du droit de P ercière, auquel
I c i /Seigneurs *de T érn irics ont voulu asservir, dans tous les
tem ps, les habitans de cette com m une, on n’en trouve pas d ’autre
que cette maxime étrange que la force eL la violence avaient
érigé en principe: que toutes les propriétés situées dans l ’euclavc
de leur haute justice étaient de leur domaine.
�*
( J2 )
II semblait que cette maxime devait être étrangère à la Coutum e
d’A uvergne, q u i, de toutes les C ou tu m es, était la plus essentiel
lem ent allodiale ; cependant elle y était admise , comme dans
la majeure partie des Coutum es de la France , où l ’on ne
connaissait d ’autre droit public que la maxime : N ulle terre sans
Seigneur :
Ornnia , dit M a z u e r , le plus ancien praticien d ’A uvergne ,
qui. écrivait avant la rédaction de la Coutum e , , quœ sunt in
territorio , seu dislriciu D om in i, censentur esse de suo fu n do et
Dom inio, et etiam de sua jurisdiclione. M a z u e r , de judiciis, n.° 22.
B e s s i a n , qui est le prem ier com m entateur qui ait écrit après
la rédaction de la C o u tu m e , confirm e ce qu’avait dit M a z u e r ,
et s’exprim e en ces termes sur l’arlicle 5 du titre 2 :
liegulariter et de ju r e omnia prœdia existentia in territorio alicujus D om ini, censentur esse de suo fu n d o et de sud jurisdictione.
M . C h a b r o l , dans son.com m entaire sur cet art. 2 , tom. 1 " ,
pages 40 et suivantes, rappelle, à cet éga rd , la note de D u m o u l i n ,
sur l ’art. i 58 de la Coutum e de Troyes , qui est allodiale comme
celle d’A u vergn e, où il dit, que le Seigneur est fo n d é en la pro
priété dans sa haute justice.
Il rapporte une m ultitude d ’autres autorités à l ’appui de celle
prétendue propriété universelle des , ci-devant Seigneurs dans
l ’étendue de leur haute ju stice, qu’on se dispensera de rapporter,
et qu’011 peut voir dans son ouvrage.
O r, c’est uniquem ent à ce titre que les ci-devant Seigneurs
de la terre et de la haute justice de V ern in e s, ont réclamé le
droit de Percière contre tous les habitans de cette justice.
On lit dans le prétendu titre de i 4fy)> (i uc
Seigneur était
en possession d'avoir et percevoir la Percière des terres étant en
sa seigneurie.
On voit dans l ’analyse de l’A rrêt rendu en 17G5, que dans
1111 aveu et dénom brem ent donné au bureau des finances de
l\ioin, par la dame Arragonnès, dame d c \ c r n in c s , elle com prend
�T
( >3 )
le droit de Percières, ci la cinquième gerbe, sur toùs les héritages
situés dans l étendue de la justice de
r/iities.
A la v é r ité , elle consent que cet aveu et dénom brement soit
restraint aux terres non sujettes à cens, mais d ’après la m axim e:
exceptio firrnat régulant, il n’en est que m ieux établi que la
dame de Yernines entendait faire résulter, de sa haute ju stice,
son droit de Pcrcière sur tous les héritages situés dans son
enclave.
Ses conclusions tend en t, en effet, à ce q u e , faisant droit au
p rin cip al, les habitans soient condam nés, « à payer et porter
« ajudit de Y e rn in e s , à son château de Vernines , le droit de
» Perrière, à la cinquième gerbe, sur les héritages non sujets à
» cen s, et autres devoirs seigneuriaux dépendons île la justice de
» Vernines. »
E t on lit dans le disposilif de l’A rrê t, que la condamnation
est portée contre les habitans et communauté dudit T o n tin e s,
Neuville, et autres dépendances de la haute justice de Tontines.
Lorsque depuis, M. D ufraisse, seigneur de Yernines , a voulu
rneLtre cct A rrêt a cxecution , il a lait im prim er des Exploits
dans lesquels 011 fit que 1 A rrêt de 1765, « adjuge audit seigneur
» la P e rciere , a raison de la cinquièm e gerbe , sur toutes les
» terres situées dans l ’étendue de sadite justice de Vernines, et non
» tenues à cens. »
'
E l dans l’acte de vente de 1792 , on com prend « un droit de
» Percière sur toutes les tares enclavées dans l'étendue de la haute
» justice de Vernines, non tenues à cens, soit du propriétaire,
» soit d'autres ci-devant seigneurs. »
Enfin , dans l ’E xploit de demande de M. du lioscage , du
22 juillet dernier, on lit ce qui su it:
« Attendu que par diverses Sentences et Arrêts rendus dans
» les anciens T rib u n au x, cl noLim m entpar celui du i 5 juillet 1763,
» les liabilans de la paroisse de Vernines onl été condam nés à
» payer et porter, audit sieur de Y e rn in e s, dans son château de
» Y e rn in e s, le droit de Percière, à la cinquièm e g e rb e , sur les
�c'u
'~
4
'( '
)
« héritages non sujets à cens et autres droits seig n eu riau x,
« dépendons de la justice de P rernincs. » .
• '
E t plus" bas : « Attendu que le sieur du Boscage est bien
>> fon dé, d ’après ces circonstances , à réclam er contre les habilans
« de V ern in e s, chacun en ce qui le co n cern e, le paiement des
» Percières dues sur chaque héritage. »
II reste donc dém ontré que c’est uniquem ent à ce titre
de Seigneurs haut Justiciers que les seigneurs de V ernines ont
prétendu , ja d is , un droit de Pcrcière sur les terres enclavées
dans leur haute justice , et que c’est encore à ce m êm e lit r e , et
comm e sc prétendant aux droits des anciens seigneurs haut
justiciers de cette te r r e , que M. du Boscage réclam e aujourd’hui
ce m êm e d rôi\.' '
O r , il est facile d ’établir jusques au plus haut degré d’évidence
que ce prétendu droit de Percière , uniquem ent fondé sur ce
titre, de ci-devant seigneur haut ju stifier, eût-il été dû a lo rs, ce
dont on est bien loin de con ven ir, aurait été supprim é par les
nouvelles Lois qui ont aboli la féodalité.
U ne prem ière L o i, du 20 avril 17 9 1, avpùt aboli les droits
annexés à la justice seigneuriale.
Cette lo i, sanctionnée par le R o i , est intitulée en ces term es:
« L oi concernant l’abolition de plusieurs droits seigneuriaux,
» et notamment de ceux qui étaient ci-devant annexés à la justice
» seigneuriale »•
U ne seconde L o i , du a5 août suivant, a développé les effets
de cette abolition.
L ’article 1 .cr de cette. Loi est conçu en ces termes :
« Tous les effets qui peuvent avoir été produits par la m axim e:
» Nulle, terre sans Seigneur: Par celle de l ’enclave, par les statuts,
» coutum es . et règles , soit générales , soit particulières , qui
» tienuent à 1? féod alité, dem eurent comme non àvenus ».
Ou lit ce q u i's u it dans l ’art. 5 , qui s’applique spécialement
à la cause.
. '
<' Tous les' droits féodaux, ou censuels u tiles; toutes les rede-
�V
( .5 )
« -vances seigneuriales ann uelles, en a rg en t, grains, vo lailles,
» c ir e , denrées ou fruits de la te r r e , servis sous la dénomination
» de cens , cen sives, surcens , rentes seigneuriales et em phy» téotiques , cham part, terrage, agrier comptant............... .. sont
» abolis sans indem nité , à moins qu’ils ne soient justifiés avoir
» pour cause une concession primitive île f o n d s , laquelle cause
» ne pourra être élablie qu’autant qu’elle se trouvera clairem ent
» énoncée dans l'acte primordied d'inféodation, d'accensement,
» ou de bail à cens, qui devra être rapporté. »
E t par l’article 12 de cette L o i: « T ous procès intentés cl non
» décidés par Jugem ent en dernier r e s s o r t, relativem ent aux
» droits féodaux ou censuels , fixes et casuels , abolis sans
» in d em n ité, soit par les L ois an térieu res, soit par le présent
» D é cre t, dem eurent étein ts, cl les dépens resteront com pensés. »
Celte L oi s’applique d’elte-mêinc a l’espece :
L e droil de Champarl ou de P e r c iè r c , dont il s’a g it, n’a pas
pour cause une concession prim itive de fo n d , il 11’a son origine
que dans la prétention qu avaient les seigneurs de Yernines de
la propriété universelle de toutes les terres situées dans l’enclave
de leur îiautc justice.
Ce prétendu droit de P ercièrc est donc rigoureusem ent com pris
dans la suppression prononcée par cette Loi.
Il peut y avoir d’autant moins de doute à cet é g a rd , que ,
d’une p a rt, l’art. 17 de cette L o i n ’excepte de la suppression
q u e , « Les re n te s , champarts et autres redevances qui ne
» tiennent point à la féodalité , et qui sont dues par des parti» culiers à des particuliers non Seigneurs, ni possesseurs de fiefs.»
E t d’autre part, que M.' du Boscage n’ est pas en élat de justifier
d un seul litre de concession des terres qui form ent l’objet
de sa demande du 22 juillet dernier.
25
Mais la L oi du
août 1792, n’est pas la seule que les
liabitans de Yernines soient en droit d’invoquer pour leur dé
fense ; la Loi du 10 juin i
vient encore à leur appui de
la manière la plus efficace.
793
�Nous lisons dans l ’art, i." de la section 4 de cette L o i, q u e ,
« Tous les biens com m unaux en gén éral, connus dans toute la
» R é p u b liq u e , sous les divers noms de gastes , garrigues ,
» lan d es, paccages , pâtis , ajon cs, bruyères , bois communs ,
>» h e rin e s, vacan ts, p a lu s, marais , marécages , montagnes et
» sous toute autre dénomination q u elco n q u e, sont et appar» tiennent, de leur n atu re, à la généralité des habitans, ou
» mem bres des com m unes ou sections de co m m u n e, dans le
« territoire desquelles ces com m unaux sont situés, et com m e
>> tels, ces com m unes ou sections de com m unes sont fondées
« et autorisées à les revendiquer. »
Cette L oi s’applique encore d’e lle -m ê m e aux terres cultivées
par les habitans de V ern in cs, sur lesquelles INI. du Boscage leur
demande le droit de P e rc ie re , à la cinquièm e portion des fruits.
Cette com m une est située entre le Puy-de-Dôm e et le Montd ’O r ; elle est couverte de neiges six mois de l’année ; la plupart
des terres dont elle est.com p osée sont d es terres vaines et
va g u es, hernies et vacantes, qui ne sont pas succeptibles d ’une
culture h ab itu elle, mais que les habitans du pays défrichent de
temps à a u tre , et dont à force d’engrais et de travaux , ils
parviennent à tirer quelques productions.
La possession de ce droit dans la personne des ci - devant
Seigneurs de V ern in e s, quand ellô serait aussi réelle qu’elle
est dém ontrée fausse, ne serait d’aucune u tilité, parce qu’on
voit dans l ’art. 8 de la m êm e section, que «La possession de 4o ans
» exigée par la Loi du 28 août 1792, pour justifier la propriété
>> du ci-devant. Seigneur sur les terres vaincs et vagues, gastes,
» garrigu es, lan d es, m arais, b ien s, hern ies, vacants, ne pourra
» en aucun cas suppléer le titre légitime*, et ce litre légitime ne
>> pourra cire celui qui émanerait de la puissance féo d a le; mais
» seulement un acte qui constate qu’ils ont légitim em ent acheté
» lesdits biens, conform ém ent à la loi du 28 août 1792.»
K l l ’art. 9 qui s u it, en expliquant le précéden t, porte en
termes form els, que cette possession de 4o ans ne pourra être
�y
'7
(
)
invoquée par les acquéreurs volontaires ou donataires, héritiers,
ou légataires du fief, ù titre universel.
E n fin , la loi du 17 juillet 1790 a coupé la dernière tôle à
l’hydre féod ale, en supprim ant les redevances seigneuriales
et les droits féodaux de tous genres, m êm e ceux qui avaient
pu avoir été conservés par les Décrets antérieurs.
On ne voit pas co m m en t, d ’après toutes ces L o is , M. du
Boscage a pu se faire illusion au point de tenter la conquête
de ce droit d eP crcière, qui, d’après lui-m êm e, n’a d’autre origine
que la qualité de Seigneur haut justicier, qui est abolie, d’une
manière absolue, ainsi que tous les drois qui y étaient annexés ;
D ’un droit qui était en litige depuis des siècles entre les
habilans de Vernincs et leur. Seigneur, et qui l’élait encore au
moment de la révolution ;
. '
D ’un droit enfin, qui ne lui a pas été légué p arM . de Lavigneix,
qui n’a entendu le gratifier que d’une somme de 40,000 fr., ou
d un immeuble de cette valeur; qui en est bien plus que rem pli
par le rural seul de la terre de Y crnincs que M, de Lavigneix
possédait a sa m o r t, et qu’il n’a entendu hii transmettre que
comme il la possédait.
On ferait d’ailleurs un présent bien illusoire à M. du Boscage,
si on ne lui faisait pas un présent funeste, en lui accordant ces
Percières.
M. du Boscage nous dit lu i-m ê m e que le droit de Percière
q u ’il réclame ne lui est pas du sur les terres qui étaient tenues
a cens des anciens Seigneurs de Y e rn in c s, ou des autres Sei
gneurs voisins.
, comment distinguer dans ces terres qui sont dans ce
moment en culture ou qui le seront à l’avenir, les terres qui
étaient asservies à des cous, il y a 3o ans, de celles qui ne
l’élaient pas.
Par e x em p le , dans les 22. articles pour lesquels la dame
Choussy est traduite eji ju stice, il peut y en avoir la moitié
O
�ou les trois quarts, peut-être m êm e le tout, qui étaient soumis à
des cens, soit envers le Seigneur de Y e rn in e s,
Soit envers le chapitre d ’O rc iv a l,
Soit envers le chapitre calhédral de C lerm ont,
Soit envers différons autres Seigneurs voisin s, qui couvraient
de leur directe le territoire de Yernines.
Com m ent savoir celui ou ceux de ces vingt-deux articles que
les sieur et dame Ghoussy ont cultivés pour leur propre com pte ,
comm e étant anciennem ent asservis à des ce n s, ou ceux qu’ils
cultivent sous le bon plaisir et pour le com pte de M. du B o sca g e ,
qui se prétend le représentant de leur ancien Seigneur haut
justicier.
E t , s’il faut que l’asservissem ent ou l'affranchissement de tel
ou tel article soit l ’objet d ’une preuve écrite ou testim oniale ,
cette preuve ne peut être à la charge du cu ltivateu r, soit parce
qu’il n’a aucune ressource par-devers lui pour établir cette preuve
ou pour s’en garantir, soit parce q u e , d’après tous les principes
du droit naturel et du droit civil, tout est en faveur de la liberté
contre la servitude/suivant la m axim e: Quoties dubia in/erpretafio
liber/a/is est, sccundiini libcrlalem respoudendum crit. Ilègle 20,
de rcgulis ju n s .
M. Duboscage 11e manquera pas d ’invoquer en sa faveur
quelques préjugés des T rib u n au x, tels que le succès de M. de
L a sa llc, qui a obtenu la confirmation de ses P e rciè rcs, contre
dilierons particuliers, habilans [de Blanzal ; cl son succès p er
sonnel contre plusieurs habilans d’Aurières.
Mais , à l’égard des Percièrcs de B la n za l, 011 voit dans l’A r r ê t ,
que ccs Pcrcièrcs étaient ducs à M. de L a sa lle , non pas com me
Seigneur haut ju sticier, cl sur l’universalité des terres situées
dans sa ju stice, mais sur des ténemens particuliers, et d’après
des litres prim itifs de concession de fo n d s , tels que les exigeait
la Loi du i>5 août 1792 , qui tous étaient rapportés au procès.
E l , à l’égard de colles que M. du B osca ge s’esl lait adjuger sur
�( *9 )
■cei'lains mas et tenem ens du village d’A urières , il paraît que
l’A rrêt obtenu par M. du Boscage esl fondé sur ce qu’ il était
établi, par des reconnaissances de 1 7 7 1 , que ces habitans 11c.
possédaient ces mas cl ténemens q u ’à tilre de colons congcables.
A u su rp lu s, dans cette m atière, encore plus que dans toule
autre, c’est par les Lois cl non p a rles exem ples que nous devons
nous régir. Legibus non cxemplis regirnur.
Tout le m onde con n aît, d’ailleurs, ce.brocard du palais, que
les Arrêts sont pour ceux qui les ob tien n en t, parce qu’ils sont
souvent l'effet d’un faux exposé des faits ou d’une défense négligée,
et quelquefois d’un concert dont la justice ne peut pa$ pénétrer
le inyslèrc.
Ces préjugés dont M. du Boscage ne m anquera pas de tirer
avantage, sont donc sans conséquence cl 11e peuvent avoir aucune,
influence sur la décision de cette ca u se , qui se réduit à ces trois
points qu’on croit avoir égalem cnl dém ontrés jusques à l’évidence.
L e pi c in ie i, que M. du Boscage n’a ni droit ni qualité pour
rechercher ces Pcrcières.
L e second, qu elles ont été contestées de tous te m p s , et
qu elles étaient encore en litige au m om ent ou la terre de
Yernines a clé vendue à M. de L avign eix, au mois de juin 1792.
L e troisièm e, que si elles eussent été d u e s , elles auraient
été abolies par les lois des 20 avril 1791, 25 août 1792, 10 juin
et 17 juillet 1793.
On sent, d’après tout ce qu’on vient de d ire , qu’il est assez
inutile de s’occuper de la prétention de M. du Boscage, en
restitution de 3o années d’arrérages des Percières q u ’il réclame.
ie“1. — S ’il étail du des arrérages de celte redevance , ce ne
sérail pas à lu; q UC ccs arrérages appartiendraient , mais à la
succession de M. de Lavigneix, dont l’héritier est bien éloigné de
vouloir les réclam er ;
°
2eut. — S’il avait connu la disposition de l’arl. i 5 du litre 3
de la Loi du 18 detem bre 17i)° » q u' porte en termes formels
�(0°
( 20 )
que ces sortes de redevances n ’arrérageront pas à l’aven ir, il
sc serait épargné une demande aussi inconvenante, et qui ne
fait qu’ajouter à l’odieux que le droit en lui-m êm e doit naturel
leinent inspirer.
Il ne nous reste, en term inant celle . discussion , qu’à faire
une dernière réflexion dictée par le sentiment profond du bien
public et de l’intérêt de l ’humanité.
Tout ce que nous appelons dans ce départem ent la montagne
de n u it, qui est d’une très-vaste étendue, consiste presqu’uniquem ent en brandes, bruyères, landes, fraux et terres liermes
d ’une assez mauvaise nature.
Presque toutes ces terres restaient incultes par l ’avidité des
S eig n eu rs, qui sc prétendant propriétaires universels de tout ce
qui était situé dans l’enclave de leur haute justice, se prétendaient
Cn droit d’exiger des m alheureux colons la portion la plus
précieuse des fruits qu’ils arrachaient, à force d e'tra va u x , de
ces terres ingrates.
Tout a changé de face dans ces contrées , l ’abolition du régim e
féodal a encouragé et annobli l’agriculture ; les cultivateurs fiers
d ’être possesseurs de propriétés indépendantes, et de ne travailler
désormais que pour eux et leur fa m ille, ont rivalisé d’efforts
pour féconder ces lerres frappées jusques-là de stérilité; l’accrois
sement de la population a m ultiplié les bras; les détrîchemens
uni été plus nom breux, les travaux m ieux entendus, et partout
les productions sont devenues doubles el peut-être triples de ce
q u ’elles étaient autrefois.
Le génie du m al, l’hydcuse féodalité a considéré, avec des
regards a v i d e s , ces heureux ch an gcm ens, et tente aujourd’hui
de s'ei: approprier les avantages.
C'est l'impius Miles de VliM’.tTÆ qui veut faire sa proie des
moissons des habiians de JNIantoue, avec cette différence que
¡es spoliations des vétérans, dont parle le p oêle, avaient du
moins pour' prétexte des sér-; ices rendus à la p atrie, tandis
�( 21 )
qu’ici, c’est un heureux légataire, qui a reçu de M. de Lavigneix
le don le plus inattendu qui fut jamais, d’une somme de 4o,ooof.,
ou d’un im m euble de semblable valeu r, qui veut décupler son
le g s , et lui donner une extension sans m esure contre le texte
form el du Testament t qui borne la libéralité à 40 ,ooo fr. ; et
contre l ’intention manifeste du testateur qui a possédé 28 ans
la terre de V ernines, sans qu’il lui soit venu en idée de rechercher
un seul habitant pour le prétendu droit de P ercière que réclam e
aujourd’hui son légataire.
On a dit en commençant , et on ne saurait trop le répéter,
cette affaire n’est pas seulem ent celles des habitans de V ern in es,
c’est celle de tous habitans des montagnes d’Auvergne.
Cent féodaux de ces m ontagnes, tém oins de la lutte de M. du
Boscage , contre les habitans de V ernines, le suivent dans
l ’a rèn e , l’accompagnent de leurs vœ ux , et attendent avec
impatience l’événem ent, pour, s’il était favorable à la féo d alité,
prendre part à la curée.
B O I R O T , ancien Jurisconsulte.
BOUCHET,
A vou é.
A CLERMONT-FERRAND,a de ul ’imprimerie
P e l l ids s oen sp è r re eut f iel s s
c o de
i n
Saint Genès et Saint-Esprit, ancienne maison Giron.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dubreuil, Marie. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Bouchet
Subject
The topic of the resource
percière
experts-géomètres
experts
assignats
féodalité
émigrés
legs
coutume d'Auvergne
franc-alleu
doctrine
cinquième gerbe
communaux
climat
droits féodaux
physiocrates
agriculture
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Marie Dubreuil, et le Sr Guillaume Choussy, son mari, expert-géomètre, Maire de la Commune de Nebouzat ; Antoine et autre Antoine Bouchet, frères, cultivateurs, et autres habitants de la Commune de Vernines, défendeurs ; contre M. Guillaumanche du Boscage, Lieutenant-général des armées du Roi, Propriétaire de la terre de Vernines, demandeur.
Annotations manuscrites : « jugement au tribunal de Clermont-Ferrand[?], 18 mai 1822, arrêt 1ére chambre, 19 janvier 1824, voir journal des audiences, p. 48 ».
Table Godemel : Percière : 3. la percière était-elle, en Auvergne, réputée féodale, lorsqu’elle était due au seigneur du tènement ? était-elle réputée mélangée de féodalité lorsque les titres qui la rappelaient, rappelaient en même temps les censives dues au même seigneur sur d’autres héritages ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Pellisson père et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2604
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2521
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53519/BCU_Factums_G2604.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Nébouzat (63248)
Vernines (63451)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agriculture
assignats
cinquième gerbe
climat
communaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droits féodaux
émigrés
experts
experts-géomètres
féodalité
franc-alleu
legs
Percière
physiocrates
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/17/53988/BCU_Factums_V0113.pdf
0b2e543791142ab10c926ad124b503fb
PDF Text
Text
M
É
M
O
I R
E
P O U R Dame G abrielle d 'O livier , V eu ve de M re JeanBaptiste de Tournem ire ,
donataire
et héritière de
demoiselle R odd e sa mère , laquelle étoit légataire de
M re Léonard de C h a zelle , Appellante de Sentence
rendue par d éfau t, en la Sénéchaussée de R io m , le 28
mars 1787.
CO N T R E
M essire A ntoine-J oseph
ett demoiselle M arguerite
de
de
l a
V
aissiere
C h a z e l l e son épouse
,
;
se
disant héritière du sieur Léonard de Chazelle son p è r e }
Intim és .
La
survenance d’enfants annul l e-t-elle un testament ?
Si l’on eût proposé cette question à R o m e , la loi auroit
prononcé l'affirmative , et on n’auroit pas écouté celui qui
se seroit élevé - contré cette décision. C h e z les Romains ,
l'institution d’héritier étoit un honneur. T o u s les enfan s y
A
�a
avaient un droit ¿gai ; un père ne potivoit en priver aucun
sans des justes motifs , dont la loi ne lui laissoit que 1 apjlicatio n .
Parmi nous, qui n’avons pas adopté 1institution d’héritier,
qui ne devons ce bienfait-.qu’au s?.ng et à la l o i , nous ne
connoissons point le v ice de prétérition.
Si. quelques Auteurs , imbus des principes de là Jurisprud^nse Romaine ,
ont pensé que la survenance d’enfants
annulîoit un testam ent, c'est une erreur qu’on n’ose plus
soutenir aujourd’hui. L es Ordonnances de 17?» et 173>
**
ont tracé la ligne de démarcation qui sépare à jamais les
principes des donations et ceux des testaments.
Q uand un h o m m e, sans enfants
se dépouille d’une
partie de ses biens par une donation entre vifs', il s’est
lié irrévocablem ent, et ne pouvant briser un lien dont là
t,mdr esse pour ses enfants le fait repentir , la loi vient
consoler la sollicitude paternelle.
Dans un testam ent, au contraire, l’homme restant touj3urs libre de sa volonté , n’a pas besoin du secours de la
lo i pour manifester ses regrets ; il n’a qu’à vouloir un mo
ment , et sa volonté rend à ses enfants ce qu’il avoit d o n n é
à des étrangers , qui lui sont moins chers.
L a différence du pouvoir que ces deux sortes d’actes
laissent au p è r e , a déterminé la différence des prin cip es
relatifs aux uns et aux autres. L ’aveugle intérêt peut seul
oser entreprendre de les confondre.
F A I T S .
L a demoiselle Françoise R o d d e , étoit née sâns fortune *
�niais elle étoit douée d’un caractère qui la rendoit chcrô
à tous ceux qui la connoissoient. L e sieur Chazelle, son
oncle , se trouva heureux de lui tenir lieu de p ère, et prit
à elle l’intérêt le pins tendre ; il l’appclla auprès de lui ,
veilla à son éducation, et ia soigna autant que l’exigeoit
sa naissance, et que sa fortune le lui permettoit.
T ous ces bienfaits auroient cependant été funestes à la
demoiselle R o d d es, si son oncle eut borné là sa générosité :
il le sentit ; e t , décidé par les règles de la justice autant
que par les mouvements de son cœur , il ne voulut pas
être généreux à demi. L a coutume lui permettoit la libre
disposition du quart de ses biens; il le légua à sa j 211:13
p îpille par testament du 30 avril 1743 , et laissa le reste à
S:s héritiers ab intestat y par égale portion.
L e sieur de Chazelle étoit alors garçon. B ientôt il
épousa demoiselle M arie-M arguerite de Vilîem nnié ; mais
sa tendresse pour sa femme ne le rendit point injuste envers
sa nièce. Il laissa subsister son testament ; e t , réglant avec
la dame son ép o u se, le sort des enfants à naître de ce
mariage , il Stipula que , pour conserver leur m a lso n , ils
donnoient , par donation entre-vifs
,
pure et irrévocable , m oitié
de leurs biens présents et à v e n ir } à un de ses znfants rna.e ou
f i lit } qui naîtroient de leur mariage , te l q u i l serait par eu x
n om m é , ou par Cun d 'eu x
,
ou à leur d éfa u t , en cas de décès ,
par quatre parents. C e sont le propres expressions de cette
clause.
Peu de temps après son mariage , le sieur de Chazelle
^trouva l’occasion d’établir la demoiselle Roddes sa nièce.
L'éducation qu’il lui avait fait d o n n er, jointe au legs d’une
poraou de ses biens, lui iit trouver un parti trec-sortabie.
A ij
�4
Pour ne pas le laisser échapper , et pour indemniser ça
nièce de la réduction de son le g s , qu i, au moyen d i la
donation contractuelle , étoit bornée à un huitième , au lieu
d ’un quart , il lui fi* un cadeau de noces de 1,000 liv. et de
quelques m eubles, qu’on qualifia de dot dans son contrat
de mariage avec le sieur d’O livier.
Q u o i qu’il en soit de cette qualification , le sieur C h az .lle ne changea rien aux dispositions écrites dans son
testam ent, lesquelles se trouvoient seulement réduites à un
huitième , comme nous venons de le dire.
L e sieur de C hazelleeut plusieurs enfants de son mariage.
I l vit croître , il aima ces fruits d’une union très-heureuse ,
sans qu’il songeât à révoquer le legs qu’il avoit fait à sa
nièce.
Il mourut , et laissa son testament dans les formes qu’il
l’avoit écrit. L a dame son épouse mourut aussi.
Ils navoient point c h o is i, entre les deux enfants qui
alloient leur survivra , le donataire qu’ils avoient fait par
leur contrat de mariage ; de sorte que ce choix difficile à
faire par un père et une mère qui ont une égale tendresse
pour leurs enfants, fut dévolu aux p aren ts, qui se décidè
rent en faveur de la dame Baronne D escorailles. Cette der
nière recueillit la moitié de la succession, à titre de dona
taire, et la dame delà Vaissière sa soeur, reçut l’autre comme
héritière.
C e partage ne devoit frapper que sur les biens qui
étoient libres ; et dcs-lors, le legs fait à la demoiselle
Roddes devoit en être distrait. Cependant les parents firent
une masse de t-mte la fortune des père et mère , et la
divisèrent en deux parties é g a le s, sans son songer à payer
�à-la légataire , la juste libéralité que le sieur de Chazeîle
lui avoit faite.
Cette conduite étrange n’étoit pas conséquente avec
l ’opération que les parents venoient de faire ; c a r , à quoi
bon ) dans une succession dévolue à deux sœurs , nommer
une d’elles donataire de la moitié des b ien s,
et l’autre
héritière de la seconde partie ? L ’intention des père et
mère u’avoit-elle pas été que l’une de leurs filles fù: avan
tagée ? C ep en d an t, par ce partage, elles sont également
favorisées. Q uelle devoitdonc être l’opération des parents ,
en faisant le choix qui leur é:oit référé ? Ils devoient dis
traire de la portion de l’héritière, le legs fait à la dame
d’O livier : par ce m oyen, l’héritière auroit eu moins que
sa soeur, et l ’intention de leurs auteurs eut été remplie.
Q u o iq u ’il en so it, la dame de T o u rn em ire, qui repré
sente la dame d’O livier sa m ère, comme cessionnaire et
comme hérière contractuelle , a demandé à la dame de la
Y a is s ic re , héritière du sieur de Chazelle son p c re , la déli
vrance de son legs.
Une demande aussi [juste a éprouvé un refus , et donné
lieu à la contestation qui divise aujourd’hui les parties. E lle
a déjà été jugée par défau t, au Présidiil de R ioin } contre
la dame de Tournem ire. Mais cette sentence, fruit d’une
erreu r, qui n’a pas été combattue devant les premiers Juges,
ne sauroit tenir contre les principes que nous allons déve
lopper.
M
O
Y
E
N
S
.
L e sieur de Chazelle avoit le droit de disposer du quart
de ses biens : on ne le lui a jamais contesté.
�6
L a demoiselle R odd e , sa légataire, étoit capable de
recevoir cette libéralité ; on convient encore de ce point.
L e testament qui contient le legs qu’elle réclame , est
revêtu de toutes ses formes. O n n’élève aucun douce à cet
égard.
Il ne devroit donc plus subsister de contestation entre
les parties. L e
testateur a pu léguer ; la légataire a pu
recevoir; et nul vice de forme ne s’élève contre le testa
ment. O ù donc est la difficulté ?
Si ce testament est valable aux yeux de la l o i , il contra
rie l’ambition des adversaires ; et voilà le m otif de leurs
efioris pour le faire anéantir. M ais, comme c’est l’intérêt
seul qui les guide , ils ne présentent pour défendre leur
système ,
que les erreurs inséparables de la cause de
l ’avidité.
Il ont vu dans nos lo ix , que la survenance d'un enfant
annulloit une donation ; et ils appliquent aux testam ents,
ce qui n’est vrai que pour les donations. Ils n’ont pu se
dissimuler la différence qu’il y a entre une libéralité irré
vocable et une libéralité qui pourroit être révoquée par le
testateur ; mais ils ont confondu toutes nos idées sur ces
m atières, et ils se sont flattés de faire illusion.
D elà passant à des erreurs d’un autre genre , ils ont
invoqué le D roit Rom ain , quand l’acte dont il s’agit n’est
soumis qu’à nos loix cotumières , à notre D roit François.
Iis ont assimilé le testament des Rom ains à nos dispostions
de dernière volonté , malgré la disparate immense qui les
rend étrangers. Enfin , citant ces loi.t romaines sans exac
titude ou sans attention, ils ont tout em brouillé, et ils ont
fini par nous fournir des armes contr’eux-mêmes.
�7
Ramenons tout âux vrais prencipes , et forçons
nos
adversaires à retracter les sophismes que leur imagination
a enfantés pour défendre le système le plus étrange.
i ° . Etablissons q u e , si la survenai.ce d’un enfant détruit
Une donation , elle ne produit pas le même eiïet sur un
testament.
2°. L a différence qu’il y a entre
nos dispositions de
derniers volontéet le testament des Romains.
5°. Q u ’aucune loi rornaine applicable à notre espèce n’est
contraire au testament du sieur de C h a zelle, puisqu’il a
pérséveré dans sa volonté , après la naissance de ses enfans.
4°. Q i e la Jurisprudence et les Auteurs qui ont écrit
après l’Ordonnance de 1731 et celle de 1 7 5 5 , se reu
nissent pour en prouver la validité.
Et nous pourrons conclure qu’il est digne de la sanction
des tribunaux, puisqu’il est conform e au vœ u de nos loix,
S-
! er
l a survenance etun Enfant ne. détruit pas un Testament,
N ou s reconnoissons trois vices destructifs des testa
ments. Ils sont n u ls, s’ils pèchent par les formes : ils ne
peuvent subsister, s’il y a défaut de capacité de la part <fti
testateur ou de la part du légataire : enfin, les tribunaux les
reprouvent, s’ils blessent nos mœurs p arleu r dispositions.
N o s loix ont marqué tous ces vices ; et quand elles s’arrêr
ient sur ce d é tail, elles disent que les testamens qui en
sont exempts sont valab les, et doivent être consacrés par
la justice.
�8
Ici toutes les formes ont été observées : point d’incâpacité
ni de la part du testateur ni de la part de la lé g a t a ir e e t
nos mœurs approuvent qu’un oncle marque, par des dispo
sitions de dernière volon ré, qu’il a aimé sa nièce , et qu’il
voulu lui servir de père.
Si donc on veut que la survenance d’un enfant annuité
parmi nous l’acte qui contient un le g s , il faut qu’on noiis
cite une loi françoise qui prononce cette nullité. En existe
t-il ? la coutume d’Auvergne sous l’empire de laquelle se
trouveut les biens du testateur contient-elle quelque disposi
tion à cet égard ? non :
Mais ce n’est pas a ssez. N ous avons une Ordonnance
sur les testaments ; contient-elle un article qui prononce
eette nullité ? N on .
E n fin , dans le nombre de nos loix , qui est immense ,
trouve-t-on quelque trace qui annonce que jamais nous
ayoas admis cet étrange système ? N on encore. T o u t notre
C o d e est muet sur çe point ; et ce seroit une erreur nou
velle pour n o u s, si quelques parents aussi avides que les
adversaires ne l’avoient fait inscrire dans les registres de nos
Tribunaux , qui l’ont proscrite aussi souvent que l’ambition
a osé la présenter. ( i )
E t certes t si l’on eût regardé la survenance d’un enfant
comme une cause de révocation de testam ent, nos lo ix
<•
---- -
■
---------- 3
( 1 ) N eus parlerons de cette Jurisprudence en réfutant les dernières objections
des intimés ; et nous ferons vo ir que les arrêts rendus dans notre espèce ont consacré
les testaments, malgré la survenance d’enfants ; que ceux qui semblent avoir jugé
jl’une manière différente , sont dans des circonstances étrangères à la dame de
Toumemire.
l’auroient
�*
l ’auroient déclaré , comme elles ont déclaré que Cette cir
constance annulle les donations.
Q u e prouvent donc leurs dispositions à l’égard de cellesci , et leur silence sur ceux-là ?
Q u e ces deux sortes d’actes sont séparées par une diffé
rence totale.
L es premiers sont irrévocables. L e donateur et le dona»
taire forment ensemble un contrat qui ne peut être rompu
sans le consentement du donataire.
L es seconds sont révocables ad nutum. L e testateur ne
contracte point avec le légataire ; il peut rompre son
testament quand il le veut.
Dans les prem iers, le donateur est lié : là loi seule peut
briser l’acte qui contient des libéralités dont il se rep en t, et
qu’on présume qu’il n’auroit pas faites , s’il avoit e u , ou s’il
aro it cru avoir des enfants. L a loi se place alors entre lui
et le donataire pour plaider la cause de la nature.
Dans les seconds, le testateur, toujours maître de réparer
les erreurs de la bienfaisance, n’a pas besoin que la loi
lüi prête un secours qui lui est inutile. S ’il a des enfants
à l’époque du testament, il a été généreux en connoissancs
de cause : s’il lui en survient après qu’il est f a i t , et que
la nature parle à son cœur , il p eu t, de son propre m ouve
ment , l’écouter et lui obéir.
L a différence est - elle assez grande ? Cependant elle n’a
pas arrêté les adversaires. Ils confondent ces actes. L e m otif
de l’ordonnance qui révoque les donations par la survenance
d’un en fan t, d o it , suivant e u x , faire annuller les testataments dans la même circonstance. L e testateur ne fait un
le g s qu’en considération de ce qu’il n’a point d’enfants,
B
�¡0
qu’à condition qu’il n’en aura pâs : quand il lui en survient,
son testament est anéanti, la nature rentre dans ses droits,
et les enfants ne sont pas plus privés d’une partie de la
fortune de leur père , par un
testament que par une
donation.
Si telle est la disposition du testateur, quand il n’a pas
d’enfants, cette disposition doit changer quand il devient
père ; et comme il a le droit de rompre son testam ent,
on doit croire qu’il persiste dans ses résolutions , quand iL
laisse subsister l’acte qui les contient.
M a is , plaçons , pour un m om ent, sur la même lig n e ,
les testaments et les donations ; et supposons qu’un parti
culier , avant d’avoir des enfants , eût fait une donation. Il
lui en naît un. Si ce père , après la naissance de cet en fan t,
ratifie sa donation par un acte nouveau, cet enfant pourra-t-il
en demander la révocation ? Q ui seroit assez étranger à ne s
loix pour oser prononcer l'affirmative ? personne sans
doute. E t bien un testateur qui lègue une partie de sa for
tune , avant d’avoir des enfants, et qui , quand il e n a ,
ne révoque pas son testam ent, que fait-il ? ne confirme-t-il
p as, ne ratifie t-il pas son testament ? et dès-lors, peut on
alléguer la survenance d’un enfant pour le faire révoquer ?
Dans le premier cas , la donation renouvellée après la nais
sance d’un en fan t, est une donation faite après la surve
nance de l’enfant. O n ne peut donc pas dire que le dona
teur ne l’auroit pas fa ite , s’il avoit é t é , ou s’il avoit cru
qu’il seroit père.
Dans le second, le testament qui n’est pas déchiré après
que le testateur a vu naître un enfant , n’est-ii pas censé
fait après la naissance de cet enfant ? Comment donc pour-
�îï
roit-on âlléguer la naissance de cet enfant pour faire
annuller l’acte qui contient les justes libéralités de son
père ?
Disons plus : qu’est un testament ? quelle est sa date ?
Un testament n’e st-il pas l’expression de la volonté du
testateer ? Tant qu’il v i t , n’est-il pas maître de la changer ?
O u i sans dnute. T elles sont nos maximes ; et n’en résuste^-t-il
pas la conséquence qu’un testam ent, quelqu’antérieur qu’il
soit à la mort du testateur , est. l ’expressions de sa dernière
vo lon té; n’en résulte-t-il pas cette autre conséquence q u e ,
si les enfants sont nés avant sa mort , le testament est
postérieur à leur naissance !
Dans l’espèce , le testateur âvoit vu naître ses enfants ; il'
les avoit vu croître ; il les avoit aimés ; il meurt : jusques«là
ayant pu changer son testament , il Ta confirmé chaque
jour en ne le révoquant pas. Il est donc postérieur à la
naissance de ses filles : on ne peut d o n c , encore une fo is ,
l ’attaquer sous pretexte de la survenance d’enfants.
L a thèse ne seroit pas la m êm e, si la libéralité envers
sa nièce ,
étoit écrite dans une donation.
Il n’auroit
pas été libre de la révoquer : sa date seroit celle du jour
de la passation du contrat ; et la naissance d’un enfant
po :térieurement à l’acte , rendroit la donation nulle.
N e perdons par conséquent jamais de vue cette diffé
rence. Dans ies donations , l’homme a besoin du secours
de la loi pour rompre un lien qu’il a eu l’imprudence de
form er, et qu’il n’auroit pas formé , s’il avoit cru avoir des
enfants.
Dans les testaments au contraire, il est toujours maîtte
B ij
�12
de sfr v o lo n té , parce qu’il ne l’a point engagée irrévoca
blement.
N e perdons pas de vue que, lorsque le donateur a vu
naître un enfant, et que loin de se repentir de sa libéralité ,
il la fait de nouveau : cette seconde donation ne peut plus
être révo q u ée, fous prétexte qu’un enfant est né posté
rieurement à la première.
D e même un testament s fait avant la naissance d’un
enfant, est ratifié , si le père ne le détruit pas après la nais
sance de cet enfant. C e n’est plus le prem ier, c’en est un
second dont la date est celle de la mort du testateur.
V o ilà toute la cause ; elle est dans ce peu de mots : et
nous y sommes revenus par ce résumé , pour la fixer irrévo
cablement. Maintenant, si nous nous livrons à d’autres discustio n s, nous nous écarterons du point de la décision : mais
dans ces écarts, où nous serons entraînés par nos adversaires,
nous aurons toujours à la main le flambeau de la vérité ;
et nous prouverons que la vérité qui poursuit l’erreu r,
a c q u ie r t
de nouvelles forces dans sa m arche, et se prépare
un triomphe plus complet.
L a conservation de ce testament n en est pas une] ratifica
tion , disent les adversaires : s’il éxiste , c’est que le fisur
de Chazelle a oublié de le déchirer. L a tendresse paternelle
doit faire présumer que son intention n’a pas été de laisser
subsister un legs qui depouilloit ses enfans d’une partie de
sa fortune.
L e sieur de Chazelle a oublié de déchirer son testament!
l’invention est heureuse. E l c’est sa tendresse pour ses en
fants , qui doit le
faire présumer f N ous rendrons un
hommage plus juste à la tendresse paternelle, en disant que,
�13
lorsqu’un père se repent d’un bienfait qui dépouille un fris qui
lui vient de naître, son premier mouvement est de courir
à l’acte qui le renferm e, et de le déchirer ; que, quand il ne
le ddehire pas , il manifeste que sa libéralité a été le fruit
d?une volonté constante que rien n’a pu ébranler, puisqu’elle
a résisté à la voix de la nature.
Mais , sur quoi est fondée cette objection ? sur un fait
supposé : et pour la repousser , que faut-il de plus , que
de présenter un fait vrai ? l’existence du testament
S ’il étoit permis d’écouter le langage des adversaires,
quel testament seroit à l’abri de la censure des tribunaux ?
quel est le fils qui ne trouveroit pas ce moyen pour le faire
anéantir ? quel est celui qui ne pourroit pas dire que le
testament qui le prive d’une partie des biens de son père >
n’existe que parce que son père a oublié de le chan ger, de
le rétracter?
Mais non. Il étoit réservé aux adversaires de bazarder
cet étrange discours. L e sieur de Chazelle n’a rien oublié
de ce qu’il a voulu faire. Son testament existe, parce qu’il
a voulu le laisser subsister, malgré la survenance de ses
enfants. Sa tendresse, pour eux n’a rien changé aux justes sen
timents qu’il avoit pour sa nièce. Il n’a pas cessé de l’aimer,
quoique des enfants soient venu prendre la première place
dans son cœur. L es soins qu’il avoit eus de sa jeunesse,
ses premiers bienfaits lui avoient fait un devoir des se
conds. Sans le legs qu’il lui a fait , ses premiers présents lui
seroient devenus funestes. E t remarquez combien >le sieur
de Chazelle ctok loin de vouloir rétracter son testament.
Quand il le f it , à la vérité, il n’étoit pas marié. Mais queique
temps après son m ariage, il trouve un établissement pour
�*4
sa nièce. Il saisit âvec empressement cette occasion de
l’indemniser ds ce que le legs du quart avoit été réduit à
un huitième par la donation contractuelle portée dans son
contrat de mariage. Il lui fait un présent de n o c e s , de
1000 liv ., et de quelques meubles.
|
E t sans doute il doit paroître nouveau d’entendre les
adversaires dire à ce sujet, que le sieur de Chazelle avoit
anéanti son testament, et par le contrat de mariage qui
contient une donation ds moitié de ses biens à l’un des
enfants qui naîtroient, et par le contrat de mariage de la
demoiselles R odde qui reçoit une dot.
Prem ièrem ent, le contrat de mariage du sieur de C h a
zelle ne prouve qu’une chose , c’est qu’il a voulu avan
tager un de ses enfants, comme il le dit lui-m êm e, p our
soutenir sa maison. Il lui donne en conséquence , la moitié
de ses b ie n s, et les lui donne francs et libres de toutes
charges. Q uant à l’autre moitié , il veut qu’elle soit parta
gée entre tous ses enfants par égale portion.
Mais quentend-on par les biens d’une succession ? ce
qui re s te , toutes les dettes de la succession payées : deducto
xre alieno. O r , les legs sont compris dans les dettes.
A in s i, la deuxième partie des biens du sieur de Chazelle
étoit affectée aux charges , et par conséquent au legs de la
demoiselle Rodde. C e l e g s , q u i, dans le principe, étoit
du quart, s’est trouvé par le contrat de mariage., réduit
à un huitièm e, parce que la donation contractuelle dé
pouille le père de la moitié des biens qu’il avoit lors de
t ’stament , et que le legs d’un quart ne se prend que
sur les biens que le testateur laisse à sa mort. Il est du quart
�'5
de la moirî'i niais respectivement au m it , il n’est que
d un huitième.
20' L e contrat de mariage de la demoisseîle Rodde ne
contient rien qui annonce la destruction du testament du
sieur de Chazelle. C e dernier y ajoute une nouvelle preuve
de son attachement pour sa nièce : il le fait , parce qu’il
veut l’indemniser de la réduction que son legs avoit éprouvée ;
en vain y chercheroit-on autre chose. O n n’y trouve que
cela ; et pourquoi y chercher la preuve de l’anéantissement
du testament ? L e testateur avoit-il besoin de déguiser son
intention ? E toit-il forcé de la configner dans des actes
étrangers ? ne lui suflisoit-il pas de déchirer le testament ? E t
s’il ne l’a pas f a it , que faut-il en conclure, sinon qu’il a
voulu le laisser subsister ?
C ette conséquence est détruite, suivant les adversaires,
par une dernière quittance, que la demoiselle R odd e et
SDn mari ont donné du dernier paiement de la dot que le
sieur de Chazelle lui avoit constituée. Par cette quittance,
disen t-il, le sieur de Chamelle, s ’ est fa it tenir quitte et déchargé
lu i et les siens ; et elle est donnée sans aucune réserve généra
lement quelconque. D onc il ne devoit plus rien à la demoiselle
R odd e ; donc ses héritiers ne lui devoient plus rien ; donc
le legs étoit déîruir.
N otre réponse pourroit être fort courte. L e testament
subsiste ; donc il n’a pas été détruit. E t certes , cette
manière de raisonner est plus juste que celle des adversaires.
L e principe de la conséquence est tiré d’un fait constant;
et la conféquence en découle d’?/ie-r»iême. Les adversaires,
au contraire, tirent une conséquence étrangère à leur prem’tce. Ils disent : le sieur de Chazelle a payé la dot qu’il
�16
avoit constituée à là demoiselle R odd e ; donc son testament
est détruit. Q uelle étrange logique !
Reprenons l ’objection. « L a quittance décharge le sieur
» de Chazelle et les siens ». Mais de quoi ? de toute la d o t,
parce que la demoiselle R odde en recevoit le dernier paie
ment. E lle est donnée sans aucune réserve généralement
quelconque. Mais sur quoi
frappe cette renonciation à
toute réserve ? sur ce qui faisoit l’objet de la quittance,
sur la dot.
Ecartons donc ces subtilités , qui n’auroient jamais dû
être proposées. N i le contrat de mariage du sieur C h a z e lle ,
ni le contrat de mariage de la demoiselle R o d e , ni la
quittance finale de la d o t, rien de tout cela ne peut faire
présumer l’anéantissement du testament. Ces actes prouvent
au contraire, que le sieur de Chazelle a voulu le laisser
subsister. Ils le p rou ven t, parce qu’ils n’en contiennent
pas la révocation ; ils le prouvent sur-tout , puisque le
second atteste que si , par le prem ier, le legs du quart
avoit été réduit à un huitième , le sieur de Chazelle à voulu
indemniser sa nièce de cette réduction ; et que le troisième
établit qu’il a été fidèle aux engagements qu’il avoit pris par
le second.
Après tant de preuves que le sieur de Chazelle a persisté
jusqu'à sa m o rt, dans sa volonté , nous arrêterons-nous à la
dernière objection des adversaires ? Ils la tirent de l’opéra
tion des quatre parents qui ont fait le choix que le sieur de
Cbâzelle et sa femme n avoient pas osé faire d’un de leuijs
enfants , pour recueillir la donation contractuelle de la
moitié de leurs biens.
Si ces quatre parents , disent-ils
,
eussent
cru
à l’existence
du
�17
du testament de 1 7 3 4 , ils auroient pu ne pâs Faire de choix ;
car ils n’avoient aucune raison d’avantager- l’aînée des filles
au préjudice de la cadette qui auroit pu se trouver ru inée,
61 la succession avoit été chargée de dettes.
i° . Q u ’importe l’opinion de ces quatre parens ? est - ce
leur opinion qui doit décider si le testateur a persisté dans
sa volonté ? le testament qui existe ne suffit il pas pour le
demoritrer ?
20. N e pourrions nous pas tirer de cette opération la
plus grand avantage, si nous en avions besoin ? L a suc- 1
cession du sieur de Chazelle , dirions nous, étoit sans
charges. La seule étoit le legs fait à la demoiselle Roddes.
Si ce legs n’eut pas existé , si les parens l’avoient ignoré »
ils n’auroient eu aucun intérêt de faite île éhobii'que les
père et mère des adversaires leur ¿voient déféré. Et en
e ffe t, les sieur et dame de Chazelle n’avoient laissé que
deux enfants. Leur succession étoit1 de droit partagée paf
moitié. D ès-lors n’auroit-il pas été indifférent que 'l’urt
d^s enfants reçût sa moitié à titre de donataire, bu à titre 1
d’héritière ? puisqu’il n’y àuroit pas eu déchargés, leur con*
dition eût été la même, et le choix devenoit inutile entre
eux d’eux.
Plaçons nous maintenant dans la véritable thèse fcc nous
Verrons la nécessité de faire un choix. L ’intention des père
^ mère étoit qu’un de leurs enfants fût avantagé pour soutenir la maison. Il existoit un legs. C e legs devoit être
u la charge de l’héritière, et la donataire devoit en. être
fra n c h ie .
Pour remplir l ’intention des père et m ère, les
Quatre parents instruits de ce legs
ortt donc été fôrèés de
taire un choix. Cette opération est donc une preuve que
C
�i
18
k s quatre parents avaient coanoissânçe du testament. Elte
nous offre donc, un Nouveau, moyen contre le système des
adversaires mais nous leur en faisons grâce. L e testament
subsiste ; il n'a point été révoqué.
secours étrangers pour se soutenir.
Il n ’a pas besoin de
L a loi le consacre ,
puisqu’elle n’en prononce pas la nullité par la survenance
d’enfantSi.
C e silence de. l’ordonnance de
1 7 3 J ,. gêne bien les
adversaires.. O n peut en juger par les efforts qu’ils tentent
pour eçhapper- aux conséquences qui en résultent..
C ette ordonnance se ta ît, disent-ils „ sur la question qui
nous, divise.;, mais elle n’a pas dérogé aux.loix ,auX:usages,
ni à la jurisprudence , concernant la révocation tacite des
testaments. A i n s i p a r exemple., l’inimitié qui* est survenue
entre le.testateur e tle légataire après un testament „ l e fait
révoquer de plein;d ro it, si. cette haine est telle qu’elle
füsse. croire: que si elle eut; existé lors ou« avant le. testa?m entj il n’auroit pas été fa it; et q u o ia jo u t e n t - ils , un
testament sera rompu par une inimitié ultérieure , et la
naissance d’un,enfant ne produira pas le même effet! L 3
tendresse paternelle sera donc moins puissante que 1*'
haine. Un homme sera donc plus sensible-à une injure*,
qu’un père ne sera attaché à ses enfants»
C e t argument a droit d’étonner. D ’abord.notre ordoi*nm ce.de. 17-3
et nos coutumes sont muettes sur la ré
vocation, des
testaments pour cause d’inim itié, corn«16
elles le sont sur la révocation de. ces actes par la surve*
nance d’enfants,, et; elles offrent les mêmes. motifs p °ur
ne pas admettre la première.; aussi ne-l’admettons nous*
R43*'-
�N ous présumons, avec raison :J que si le testateur o f
fensé par son légataire n’a pas révoqué sa libéralité, c e st
ou parce qu’il a pardonné, -ou parce qu’il a eu des motifs
puissant« pour ne pas lui enlever un don qu’il avoit cru
devoir lui faire.
Ensuite 3 quand nous admettrions cette cause de révoca
tion ta c ite , seroit-ce une nécessité pour admettre celle de
la survenance des enfants ? N ’y a -tjil pas une différence
telle qu’il soit impossible de confondre ces deux espèces ?
L es Magistrats peuvent penser qu’un testateur, grièvement
outragé , n’a jamais eu l’intention de pardonner l'offense :
que s’il n’a pas révoqué son testament , c’est qu’il a
été
surpris par la m ort; et que son désir a toujours été de
l ’anéantir.
Ils peuvent penser que la haine et
la bienfai
sance sont incompatibles. Opposés l’un à l'au tre, si ces
deux sentiments entrent un instant dans un cœ ur, la haine
l ’emporte ordinairement sur la générosité. Une foule de
circonstances peut appuyer ces présom ptions, et en faire
un corps de preuve que l’intention du testateur a été de
priver son légataire du don qu’il lui avoit fait avant d’avoir
eu à s’en plaindre.
Mais dans l ’espèce d’un testament suivi de la naissance
d’un enfant, les présomptions ne peuvent pas être les mêmes.
L a tendresse paternelle n’exclut pas l’amitié, la bienfaisance
envers ses parens. T ou s les sentiments doux se prêtent
un mutuel secours; ils ne sont point étrangers l’ un à l’autre ;
ils sont, si nous osons le d ire , de la même faniills , et qui
en admet u n , peut et doit les admettre tous.
O n voit donc une grande différence entre les deux es
pèces. Dans la prem ière, le testateur offensé a dû avoir
C ij
�'SO
1 intention de retirer ses bienfaits.
sensissç testaiorem.
Manifestum est aliuà
D ans la seconde, en faisant un don à son parent, le
testateur prouve qu’il l’a aimé et quand il laisse subsister
son testament, il prouve que le sentiment qui l a dicté a
toujours été le même.
Dans la première il peut y avoir des raisons d’anéantir
le testament.
Dans. la seconde il ne peut point y en avoir. T o u t
se réunit au contraire pour le faire confirmer , parce que
rien ne fiiit douter de la persévérance du testateur dans sa
bienfaisance.
Il en seroit autrement si le père avoit ignoré l’existence
<le ses ¡enfants, parce q u e , dans ce ca s, on pourroit pré
sumer que s’il avoit connu cette circonstance il n’auroit
pas. .persévéré ;; tet c’est dans ce sens qu’il faut entendre
toutes les loix romaines qui nous sont opposées par les
adversaires, et que nous examinerons dans tin moment.
Mais, disent-ils i, la connoissance ou rignorànce de la
paternité ne doivent être considérées qu'à la date du tes-r
tament. O r , quand le sieur de Chazelle a fait son tes.r
tafn en t, ïl' n’avoit point d’en fan ts, et il ignoroit s’il en
auroit : donc , etc.
-
C e que les adversaires appliquent ici -aux testaments,
n’est vrai que pour les donations. Et pourquoi ? c’est que
1e donateur est lié par le contrat et l’acceptation du do
nataire ; au lieu que par un -testament le testateur ne l’est
pas. Il a la liberté ds le révoquer , et quand il ne le fait
p o in t, il atteste qu’il a toujours voulu ce <5 j’il avoit voulu
dans le principe.
^
? .
�2 1.
Us citent plusieurs fragments de loix : mais c’est la loi
entière qu’il faut citer. L a voici :
« Si filius-familias m iles, fecisset testamentum more rni» litiæ , deinde post mortem patris posthumus ei nasceretur :
» utique rumpitur testamentum ejus : verum si perseverasset
» in eâ voluntate ut vellet adliuc illud testamentum valere :
3> valiturum illud quasi rursum aliud factum ». 1. 33 ff. tit. de
testtamento m ilitis.,
Cette loi est très-positive, et les adversaires, en la ci• ta n t, n’avoient pas osé en transcrire la dernière partie :
verum si perseverasset, etc.
E lle est conforme à nos principes ; elle est d’accord
avec ce que nous dit la raison à cet égard.
Il est si vrai en principe qu’un testament n’acquiert une
existence légale , et qu’il n’a de date que celle que lui donne
la mort du testateur, qu’entre deux légataires nommés par
deux testaments différents, faits par la même personne , à
des époques éloign ées, on ne conn oît, on n’admet ni prio
rité, ni postériorité; et que l’héritier naturel, par exem ple,
reprend sa légitime sur tous les le g s , sans avoir é^ard à
la date des testaments. Dans l’espèce de plusieurs donations
au contraire, l’héritier est obligé de remonter des dernières
aux premières pour se remplir de la portion que la loi ne
laisse pas à la disposition de l’homme...
C e principe se confirme par une foule d’autres exemples.
A in s i, le legs d’une partie déterminée de la fortune du tes
tateur, ne ¡>e prend que sur les biens qu’il laisse libres à
«a mort. Il peut donc le diminuer, l’augm enter, le détruire
Par des dispositions particulières. Son testament n’est donc
\
�22
consommé qu’à sa mort. Sa mort seule lui donne donc
sa date.
A in s i, un testament est annuité si le testateur meurt
incapable de tester « irritum fit testamentum quoties ipsî
» testatori aliquid contigit, puta, si civitatera amittat » 1. 6,
§. j , d e inj. rupt. cir. j . testam.
Il est c la ir, d’après cette loi qu’on ne juge pas le tes
tament à l’époque où il a été fait; mais à l’époque de la
mort du testateur.
E t la raison ne nous dit elle pas qu’un père qui laisse
subsister sou testament, après la naissance d’ un enfant ,
persévère , dans sa v o lo n té , qu’une volonté continuée est
une volonté n o u velle, et que dès-lors sa persévérance est
comme un testament n ouveau,
fait pendant qu’il avoit
des enfants?
Concluons donc de cette discussion que le testament du
sieur de C h a zelle, fait dans un temps où il n’étoit pas père,
confirmé par sa persévérance quand il a eu des enfants, est
à l’abri de toute atteinte.
L es adversaires qui ne peuvent pas échapper à cette
conséquence par les coutum es, ni les principes de notre
droit françois ont recours à deux autres armes , aux loix
romaines et à la jurisprudence.
A l’égard des loix romaines, nous pourrions nous abs
tenir de les diccuter. N ous avons sur les testaments une
ordonnance positive q u i, comparée avec celle relative aux
donations , décide par son silence que la survenance d’en
fants ne ré v o q u e pas les dispositions de dernière v o lo n té .
L e testament a d’ailleurs été fait en pays de coutum e, et
c’est un écart impardonnable que de le citer devant les loi*
romaines.
�23
Quant à la jurisprudence, nous convenons qu’elle fixe de»
points sur lesquels nos coutumes ou nos ordonnances n’ont
pas statué ; mais si les arrêts sont conformes aux principes,
ils sont en faveur de la dame de Tournemire. Si quelques
circonstances étrangères à l’espèce ont décidé les tribunaux
à contrarier, les principes généraux, ces arrêts ne peuvent
pas lui être opposés.
D ’après cela nous pourrions nous^ dispenser de suivre nos
adversaires dans la. discussion où ils. vont nous entraîner..
Cependant, comme les loix romaines et la jurisprudence
consacrent les maximes que nous avons in vo q u ées, nous
ne refusons pas ce nouveau combat.
M ais avant de nous livrer à l’examen dès objections
qui sont tirées des loix romaines , nous croyons devoir
fixer la nature des -testaments chez les Romains et leur
différence avec nos dispositions de dernière volonté.
I I.
D e s teflaments cke ^ les Rom ains
,
& des difpofitions
de
dernière volonté parm i nous.
L e testament chez les Romains étoit une institution d’hé
ritier faite dans les formes prescrites par les loix.
T ous
les enfants devoient y être nommés.. D elà cette maxime
que l'institution des enfants est le premier devoir des parens
dans- leur testament. D elà cette loi qui n’affranchissoit même
pas de rinofficiosité le testament de celui qui aurcit cons^
titué l'empereur pour son héritier >[i imperator f u hares in(li -
lutus
,
poffe inofficiofum d ici teflamentum fepe. referiptum efi.
L . 8 t%6 ff. de. inoff. testarn..
Parmi.nous l’institution d’héritier n’a pas lieu; aussi nou&;
�24
ne connoissons point la prétérition. C e dont l’homme peut
disposer est fixé par la loi. C e dont la loi ne lui laisse pas
la disposition appartient aux héritiers. D ès-lors peu im
porte aux héritiers d’êtrenommés dans les testaments de leurs
parents. L ’institution n’ayant pas lieu , nous ne devons pas
avoir les préjugés des Romains à cet égard. Si nos testa
ments ont quelques rapports avec quelques unes des disposi
tions de dernière volonté des Rom ains, c’est avec les actes
qu’ils nommoient codicilles. L e codicille,suivant la définition
de la lo i , est un acte qui contient des dispositions à cause
de mort sans institution d’héritier. Côdicillis hceredltàs } neque. d a rï , neque adimi p o te st , ne confondatur ju s testamento rum
et codicillotum .
'
'
V o ilà bien ríos testaments. Une disposition à cause de mort
sans institution d'héritier.
L à querelle d’inofficiosité n’étoit pas admise contre un codicile; et cela par une raison bien simple. Les Romains
étoient sensibles à l’honneur de l’institution et un codicille ne
contenoit pas d’institution.
C ’est par la même raison que nous n'avons pas admis la
plainte d’inofficiosité. N ous tenons de la loi seule la qualité
d’héritier. L ’homme ne peut ni nous la donner, ni nous l’ôter.
D ’après la différence qu’il y a entre les testaments des R o
mains et nos dispositions de dernière v o lo n té , les loix ro
maines sur les testaments ne peuvent pas être appliquées à
notre espèce.
Il n’en est pas de même des loix relatives à leurs codicilles^
en ce qui ne contrarie pas nos mœurs et notre droit françoisi.
O n peut y trouver plusieurs maximes qui peuvent nous
éclairer.
,
$. III.
�2*
« I I I .
Examen des L oix Romaines opposées pxr les sieur et dame da
la Viissière.
L a première est tirée du C ode , T . 2 p , de Posthum'U
hxred. instit. , vel exhœred. vel prxterit. V o ic i quels en sont
les termes.
» Si post testamenti)m factum quo posthumorum suorum
» nullam mentionem testator f e c i t , filium , filiamve susci» c ip it, intestato vita functus est : cum agnatione poçthyml
j*
vel poshtumæ cujus non m em init, testamentum ruptum
» sit. E x rupto autem testamento nihil deb eri, neque je : i
» posse , explorati Juris est ».
L a seconde est tirée du D ig e s t , L . t o , de Lib. et Postk.
hcered. instit, vel. exhçered. E lle est conçue en ces termes.
a Commodissimè is qui nundum natus est ità hseres
p instituitur, sive vivo me , sive mortuo natus fuerit hæres
» esto : aut etiam purè neutrius temporis habita rationç.
» Si alter uter casus omissus fuerit eo casu qui omissus fit,
» natus rumpit testamentum, quia hic filius nec sub condi*> tione quidem scriptus hæres intelligitur qui in hune
» casum nascitur qui non est testamento apprehensus ».
Q u e résulte-t-il de ces deux L o ix ? qu’un enfant qui n’est
pas encore n é , peut être institué héritier * et q u e, s’il est
passé sous silence dans le testament de son père , sa unissance postérieure rompt le testament dans lequel il e.sjt
omis.
M a is , au'ont-elles de relatif à notre espèce et même à
notre Législation?
D
�2Î
S ’agit-il ici de la naissance d’un posthume? E t nos dis
positions de dernière volonté suivent - elles les L o ix
des Rom ains pour les testaments ?
Quant à l’espèce , nous demandons l’exécution
d’un
acte contenant un lçgs. L e legs avo;t été fait avant la
naissance des enfants du testateur; mais le père avoit connu
ses enf.'nts avant de mourir ; et nous verrons dans un m o
ment , en discutant le D roit Romain sur les codicilles , et
notre Jurisprudence sur nos testam ents, combien celte
d'iTcrence est décisive.
A l’égard des L o ix Romaines sur les testam ents, nous
avons déjà dit qu’elles.étoie.it étrangères à nos opinions , à
n tre dreit sur les dispositions de dernière volonté.
. C hez hs. R om ains, l’homme avoit le droit de se pouvoir
donner un héritier.
Parmi nous, l’héritier est nommé par la L o i. L ’homme
n î peut faire que des légataires.
Chez les Romains, tous les enfants devoientôtre nomméâ
ctans leurs testaments , tous institués héritiers, ou exhérédés
avec dénonciation des causes de l’exhérédation.
Parmi n o u s, rien de tout cela. N os testaments ne sont
que d ;s codicilles. N o js ne connoissons pas la délicatesse
des préjugés romains. L ’institution d’héritier étoit un hon
neur pour eux. C hez n o u s, l’institution est un bienfait de
la L o i.
Cette différence d’opinions et de mœurs a dû dicter aux
Rom.iins d is L o ix qui déclarassent qu’ un testament seroitr
rompu , par l’onrs;ion d’un enfant. Testamentum rumpitur
av;i3.t.o:itsiu tueredis, ]lt à n ous, des coutumes et des ordon-
�27
nance muettes sur un point qu’il droit inutile de fixer, parce
que institution d'héritier n’a lieu.
Ainsi , d’un coté , les Loix citées concernent les testa
m ents, et d ès-lo rs, elles ne sont pas apj licables à l'espèce,
où il n’est question que d’un codicille , puisque le testa
ment ne contient qu’un legs. D ’un autre c ô t é , il s’agit dans
ces L o ix , de la naissance d’un posthum e, dont la préte
ntion annulle le testament du père ; et dans notre esp èce,
les enfants du testateur sont nés pendant sa vie : il les a
vus pendant douze ans.
Les adversaires font ici un tableau touchant du tendre
intérêt que devoit inspirer un être qui n’étoit pas encore
né. En annullant le testament paternel
par
survenance
d’enfants, les loix , disent-ils, ont pensé qu’un père ne se
serait pas déterminé à donner ses biens à un étranger , s’il
eût su qu’il pourroic lui naître un enfant.
Ils.tiennent beaucoup à cette idée ; car elle se trouve
répétée à chaque objection qu’ils font. N ous avons déjà fait
voir que cette
présomption de la tendresse paternelle
devoit s’évanouir devant un testament , fa it, à la vérité ,
par un testateur qui n avoit pas d’enfants , mais consacré par
une persévérance de douze an s, pendant- lequel temps le
testateur avoit eu deux filles qu’il avoit tendrement aim ées,
èt avec assez d’cgalité , pour n’oser pas choisir entr’eiles
celle qui recueilleroit la donation contractuelle , portée par
son contrat de mariage.
M a is , ce tableau de la piété parternelle que les adver-«
su'ires mettent dans un si beau ca d re , est-il bien fidèle? Us
n’ontt vu , dans le D roit Romain , que les L o ix qu’ils ont
citées : ils n’ont pas réfléchi que dans l’espèce de ces mêmes
D ij
�*8
JLoix , 1institution pour la Somme la plus m odique, faite
en faveur d’un posthume , suffit pour valider le testament
où ii est nommé.
S i donc un posthume , institué seulement pour une
■somme de f o liv» ne rompt pas le testament de son père ;
« il nç lui reste dans ce c a s q u e le droit de demander sa
légitim e , il est évident que ce n’est pas l’unique intérêt
des posthumes qm a dicté les L o ix dont il s agit ici ; que ces
L o i* ne soiit qu’une suite de l’obligation étroite où est le
père de nommer , dans san testam ent, ses enfants nés ou
à naître.
C ette nécessité est inconnue parmi nous ; et dès-lors
nous ne devons pas admettre les. L c ix qu'elle a données*
aux Romains'.
Remarquons enfin q u e , s i , dans îe D roit R o m a in , làprdtérition rompoit le testament dans toutes ses parties,
ainsi qu’il résulte de ce fragment tiré d’une des L o ix citées
x x rupto autem testamento n ih il deberi
n equepetiposse tx p lo -
rati ju r is est. C e droit a été changé parla novelle i i j , qui
easse le testam ent, quant à l’institution ,. et le laisse sub
sister pour les le g s , sauf à les falcidier pour compléter la
légitim e du prétérit.
« Si vero contigerit ( ce sont les termes de cette L o i du,
D roit Romain ) in quibusdam talibus testamentis quœdam
» legeta
v tl Jtdeicommissa , a ut libertates y aut tutorunî
» drttiones reli-nqui,. vel quælibet alia capitula concessa
» legibus noîTiinari. : ta omnia jubem us adimpleri et àaTf
9 M is quitus f u t ri nt dtrelicta et tatiquam in. hoc non rescissurn>
y obtincat testamentum. E t hæ.c quidon de. parentunx ordi-
# uavimus testam ents
�A in s i, après ¿voir prouvé que les:'adversaires ne poud
roient pas tirer avantage des deux L o ix qu’ils ont invo
quées avec plus de hardiesse que de prudence , parce
quelles ne déclarent un testament n u l, qu’à cause du. vice
de prétérition , que nos coutumes et nos ordonnances
n’ont pâs adm is, nous venons de leur démontrer par la
novelle i i j , que , quand même nous serions placés dans
l ’espèce des L o ix c ité e s , le testament du sieur de Chazelle
devroit avoir son exécution, puisque la dame de T ourne.mire ne réclame qu’un legs. Legata , v el fidcicom m issa....
ta
omnia jubem us adimpleri et'd a ri illis quibus fu erin t dere-
Jicta i et tanquam in hoc non rescissum obtineat testamentum.
L es sieur et dame Vaissière seront-ils plus heureux dan»
leurs autres citations? Ils disent ; le vice de prétérition qui
annulloit les testaments des Romains , n’avoit pas lieu pour
les testaments militaires : les testaments militaires se rappro
chent donc beaucoup de nos dispositions de dernière v o
lonté ; par conséquent, les L o ix qui ty sont r£?ôtives
recevront une application d irecte à celui du sieur de
Chazelle.
Fondés sur ce raisonnement, ils invoquent deux L o ix
tirées du d igeste, titre de testameuto m ilitis.
Arrêtons - nous un moment. Ils les invoquent , parce
q u ’ils pensent que la prétérition n’annulle pas un testament
.m ilitaire, et que ce testament ressemble à nos dispositions
'de dernière volonté.
C e sont deux erreurs qu’il faut redresser r et nous en tire
rons la conséquence que' ces loix se réfutent par les mêmes
raisons que nous avons développées sur les deux autres.
D ’abord , c ’est une première erreur de dire que le vicc
�3
de
°
prétérition n’annulle pas un testament militaire. L à
L o i qui établit la querelle d’inofficiosité est très-générale.
E lle porte : omnibus tam parentibus quàm lib en s de inofficioso l i â t disputais. Les fils , les pères- des militaires , tous
sont compris dans les termes omnibus tàm parentibus quàm
liberis.
E t pourquoi en seroient-ils exempts ? L es testaments
militaires ont été regardés par les R om ain s, et sont traités
* Editsde1570 parmi nous , avec beaucoup de faveur*. O n les affranchit
IS7Î’
des formes gênantes que les militaires ne peuvent pas rem
plir ; mais ils sont sujets d ailleurs , aux mêmes L o ix :
prohibita per legem m iles facere non potesr. Ainsi , ce dont
un citadin n’a qas le droit de disposer , n’est pas laissé à la
disposition du soldat. Rem issa hæredibus p er legem , m iles
testamento suo imperare non potest. Ses droits ne sont pas plus
étendus que ceux de ses concitoyens. E t pour s’en convain
cre , il ne faut que consulter les L o ix Romaines sur leurs
principes relativement aux successions. R a tio n a tu ra lis,
quasi le x qucedzm tacita
,
liberis parentium hccreditattm a'idicit
velut ad debitam successiontm eos vocando. Propter quod et
in ju r e civ ili suorum kxre'ium nomzn eis inductum est. A c
ne ju d icio quidem parentis , n isi e x meritis de causis sumn\ovt,ri
ab eâ successione possunt. L . 7, ff*. Bon. damn.
Toutes leurs L o ix respirent ces sentiments : c’est lâ
raison naturelle qui défère la succession des pères aux
enfants ; qui les y appelle. L e D roit civil ne fait que les
indiquer ; et il n’est pas permis aux parents de la leur enle
v e r , sans de justes causes.
C es vérités, puisées dans la nature, ne sont-elles que
des erreurs pour les militaires? peut-on dire qu’ils les igno-
�31
rem ? Et quelles que soient les difficultés qu'ils trouvent à
remplir a la r m é e , les formes prescrites pour les amres
testam ents, où s^roit la raison pour les affranchir du devoir
de disposer en faveur de leurs véritables h éritiers, ' de
Tobligation d’accordor à tous leurs enfants, l’honneur de
.l'institution ?
L es L o ix mêmes que les adversaires nôus ont citées ,
ne prouvent-elles pas que le vice de la prétention annulloit
les testaments des Militaires? O n y voit qu’un posthume omis
par son père m ilitaire, rompoit son testament. « S i filins
» fvmilias miles testamentum fecerit et omiserit posthumum. . *
» oninmo modo rumpit testamentum », Omiserit; ce terme ne
peint-il pas la prétention? Omnino rumpit testamentum ; ces
termes n’ar.noncent-ils pas que ce vice rompoit le testamant militaire ?
Q u elle est la première conséquence de tout ceci ? qu$
les testaments militaires devoient contenir l’institution de
tous les héritiers du testateur; que par con séq u en t, ils ne
ressemblent pas plus à nos dispositions de dernière vo lo n té,
que tout ce qui portoit le nom de testament chez les
Romains.
Q u ’en résule t-il en second lieu? que les nouvelles L o ix
qui vont nous être o p p o sées, sont déjà repoussées par les
raisons que nous avons expliquées sv<r les deux première»
L o ix que nos adversaires avoient invoquées.
.Cependant, ne craignons pas de les examiner de plus
près. Elles sont si favorables à ia demande de la veuve de
Tournemire , qu’on est.tenté de.croire que c’est pour elle
que ses adversaires ont écrit jusqu’à présent.
L a première est la L o i 33, N ous allons la rappporrer
�s*
telle que le s Intimés la citen t: nous la rapporterons ensuite
telle qu'elle existe.
« Si filiusfamilias miles fecisset testamentum more mili» tiæ , deinde post mortem patris pothumus ei nasceretur ,
» utique rum pitur ejus testamentum. . . . Secundùmque
» si filius familias miles testamentum fecerit et omiserit pos» thumum per errorem , non quod volebat exhæredatum,
» deinde posthumus post m ortem avi, vivo adhuc filio , id
» est patri suo t natus fuerit, omnimodo rumpit illius testa» mentum »,
L a seconde eft la 3 6e , *. Ier, E lle est conçue en ces
termes :
11 M iles in supremis ordinandis ignarus uxorem
esse
» prægnantem ventris non habuit mentionem ; post mortem
» patris nata filia ruptufli çssç testamentum apparuit, neque
» legata deberi ».
» S i qua vçro medio tempore scriptus hæres , legata sol9 visset utilihus actionibus filiæ datis ob improrisum casum
» esse revocanda; nec institutum cum bonae fidei posses» so refu erit, quod indè servari non potuisset, præstari».
C es L o ix sont très-sages. Dans la prem ière, d’après ia
version des adversaires, un soldat fait
un testament ; il
ne parle pas d’un posthume qui lui naît après «a m o rt, et
son testament est rompu. R ien n’e s t’plus conform e aux
principes des Romains sur les testaments ; c’est une consé
quence , un corollaire de cet axiome : agnatione sui hœredis
¡rumpitur testamentum
Dans la seco n d e, fidèlement citée , un soldat ne parle
pas dans son testam ent, d’un posthum e, parce qu’il ignoroit
que sa femme fut enceinte; ignarus uxorem esse prægnantem}
et
�33
et son testament est également cassé.
Ces dispositions
n’offrent encore rien que de conséquent aux principes des
L o ix Rom aines.
Mais , posons une autre espèce. Si le soldat , après
avoir testé en faveur d’un étanger , revient dans sa patrie ;
s’il trouve que sa femme l’a rendu père , et que cependant
il persévère
dans sa volonté , qu’il ne la révoque pas
expressém ent, quel sera le sort de son testament ? L a ré
ponse est écrite dans la première L o i citée par les adver
saires. E t c’est ici la lacune dont nous nous sommes plaints.
Ecoutons - la-cette réponse.
a Si filius familias miles fecisset testamentum more mili» .tiæ , deinde postm ortem patris posthumus ei nasceretur M
» utiquerumpitur testamentum ».
•V oilà pour la première espèce.
^ •
$
V o içip o u r là seconde.
« Verum si perseverâsset în eâ voluntâte , ut vellet
« adhùc illud testamentum -valere : valiturum illud quasi
» rursum aliud factum ».
C ette réponse de la L o i est-elle assez claire ? tranche-telle assez fortement la difficulté ? Il est inutile sans doute
de nous occuper à prouver que les adversaires avbieiit
intérêt de ne pas la transcrire.
Avant d’abandonnsr les testaments militaires , ils citent
encore deux L oix qui y sont relatives. C e sont le s p c et io®,
C od. de test milit.
Mais ces deux L o i x , comme celles que nous venons
d’analyser, sont fondées sur l’ignorance présumée du père....
ignorons se filium habere......... si cum , vel in utero filia
nesdo pâtre milite t etc. E t dès-lors , ces L o ix , outre
E
�qu’elles sont étrângères à notre D roit François, ne reçoivent
aucune application à notre espèce , ou le père n'a pas vécu
dans l’ignorance qu’il avoit des enfants.
Hâtons - nous donc d’arriver à la discussion des L o ix
touchant les codicilles ; elles ont plus de rapport à nos
dispositions de dernière volonté ; mais n’oublions pas que
nous examinons les L o ix d’un peuple où l’institution d’hérilier étant un honneur pour les enfants , un devoir pour les '
pères , la Jurisprudence devoit être très - sévère contre
les codicilles , qui pourroient tendre à la rendre illusoire.
L a première est tirée du D igeste 2 , de Jure Codicillorumt
1. 18
« Q ui gravi utero uxorem esse ignorabat codicillis ad
» filium scriptis libertates d éd it, natâ post mortem patris
» filiâ, cum de eâ nihil patrem sensisse constituisset, pla» cuit libertates à solo filio præstari posse ».
L a deuxième est la ip e du même titre. E lle s’explique
ainsi :
« Is qui filium unum habebât cum codicillos ad eum
» scripsisset ; decessit intestatus hærede et eo , et quem
» postea procreavit : agnatione sui hærdis nenio dixerit
» codicillos evanuisse : igitur si nihil tam de posthumis
» esperavit et codicilli non evanescat ; et quae relicta s u n t ,
» pro parte dimidia filius ad quem
codicillus
factus est
» solvere compellitur , non etiam posthumus. Sed et si
x» codicillos reliquisset duobus superstitibus filiis decedens ,
» cum putaret alterum ex his prius decessisse , simili modo
» dici p o te st, omnia per inde debere filium ad quem scripti
» sunt codicilli , atque si solus hæres extitisset patri. Im o
g, duntaxat partem debet.
Eorum tamen quae pro parte
�» præstari non possunt, nih’il eorum prastandum, quoniam
» illi non fuerit fîlioabiaturus nisisolum putaret successorem
» sibi futurum. »
Ces deux nouvelles L o ix sont dans la même espèce que
celles que nous avons examinées touchant les testamens
militaires : c’est le même esprit qui a dicté les unes et les
autres , l’ignorauce ou étoit le père qu’il avoit un enfant de
plus.
Dans la première de ces nouvelles L o ix le père avoit
ignoré la grossesse de sa femme ; qui g ra vi utero uxorem
esse ignorabat. Il n’avoit pas connu son en fan t, cum e x eâ
( filia ) nihiL patrem sensisse constitlsset
L a seconde embrasse deux espèces. Dans l’une , le père
n’avoit qu’un fils. Il meurt ab intestat , et il lui naît un
posthume.
Dans l’autre, il en naît deux ; mais en mourant , il pense!
que l’un de ses fils est mort âvânt. lui.
Dans ces deux cas, l’ignorance où étoit le père , a décidé
la L o i à dire qu’il n’y auroit que celui à qui le père avoit
écrit les codicilles , qui dût les payer.
L a L o i a pu se déterminer par la présomption que , si
le père avoit eu connoissance qu’il avoit deux enfants, il
n’auroit pas chargé sa succession de tant de codicilles : et
cette présomption est très - raisonnable. M a is , si le père
avoit connu tous ses enfants , et qu’il eût persévéré dans sa
libéralité, alors la L o i n’auroit pas touché à ses disposi
tions. Verum si perseverasset in eâ voluntate ut vellet âd/iàc
illu d testcimentum valere : vciliturum illu d quasi rursum aliiid
factum .
E t qu’on ne dise pâs que ce fragment est tiré d’une L o i
E ij
�3*
qui concerne les testaments militaire?. Il est pris d’un L o i
rendue dans la même espèce ; et dès-lors il est applicable.
M a is, veut-on voir ce que décident les L o ix Romaines
sur les co d icilles, quand l’ignorance du père ne les a pas
dictés ?
L a L d i 1 6 , fF. de Jure Codicil. , est conçue en ces termes:
« A b intestato factis codicillis , relicta
etiam posteà
» natus intestati successor debebit ».
Ainsi , aux termes de cette L o i , l’enfant né après un
codicille fait , est obligé de payer les legs. E lle renverse
donc tout le système des adversaires ; et leurs efforts pour
lui donner un sens détourné , attestent assez qu’elle les
gêne. Mais toutes leurs recherches , toutes leurs subtilités
sont inutiles.
Cette L o i ne contrarie pâs celles citées. E lle fait lç droit
commun ; et les autres sont des exceptions. '
Ecoutons encore la L o i 8 , §. i er, de Jure Codicil.
1
« Ideo fideicommissa dari possunt ab intestate* succeden» tibus , quoniam creditur paterfamilias sponte suâ his
» relinquere legitimam hæreditatenî ».
Encore une fo is , voilà le droit commun. L es codicilles
frappent sur tous les héritiers , sur ceux qui sont institués,
comme sur ceux qui succèdent ab intestat. Aucun n’en est
exempt , à moins que le père ait ignoré sa naissance; m ais,
quand il a su qu’il laissoit sa femme grosse ; qu’il lui naîtroit
un posthum e, ses codicilles ne sont pas fondés sur une
erreur de fait ; et d è s-lo s, ils obligent tous ses enfants.
E t c’est une erreur que l’avidité seule peut oser hazarder,
que de prétendre que lorsqu’un père, après avoir fait un
co d icille, persévère dans sa volon té, malgré la naissance de
�37
nouveaux enfants, ne confirme pas son testament ; c’est
une dérision de vouloir appliquer à cette e s p è c e , les L o ix
qui décident des cas absolument opposés.
Résumons cette discussion.
Les L o ix Romaines sont étrangères
dans une contestation
kJ
où il s’agit d’un testament fait en pays coutumier. C e mot
?eul écartoit toutes celles qui nous ont été opposées.
C epen dan t, nous les avons exam inées, analysées, dis
cutées , et elles nous ont fourni de nouvelles armes.
i° . Celles qui déclarent les testaments révoqués par’’ la
survenance d’un posthume , quand le posthume a été passé
sous sile n ce, sont sages et parfaitement d’accord avec
l’esprit du. D roit Romain , qui admet la querelle d’inofficiosité fondée sur le vice de prétéricion.
M a is , dans notre e sp è c e , le testament du sieur de
Chazelle n’est soumis qu’à nos L o ix coutum ières, qui
n’admettent pas l’institution d’h éritier, et qui ont rejetté
par conséquent, toutes les ressources que le D roit Rom ain
ouvrok aux enfants passés sous silence dans le testament de
leur père.
D ’ailleurs , la prétérition ne rompoit le testam ent, chez
les Romains , que relativement à l’institution. T e l étoit le
droit nouveau , attesté par la novelle 11 <;. Les legs con te
nus dans le testament étoient valables, Ea omnia (legata vel
fideicommissa , aut libertates ) « Jubemus adimpleri et dari
» illis quibus fuerint d erelicta, et tânquàm in hoc non
» rescissum testamentum ». O r , nous ne demandons qu’un
legs. D on c , même d’après le D roit Rom ain nouveau , ls
testament du sieur de Chazelle doit être consacré.
fio. L es
L o ix relatives aux testements militaires des
�* 8,
R o m ain s, décident que lorsqu’un père , soldat, est mort
sans savoir qu’il lui étoit survenu un enfant , le testament ,
fruit de cette ignorance , étoit rompu; mais q u e, si le père
connoissant la naissance de son fiis , persiste dans sa v o
lonté
,
le testament doit avoir son
exécution. Verum si
pcrscverasset in eâ voluntate ut vdlct adhàc illu d testamentum
valere
,
valiturum illud quasi rursutn ahud factum .
:
Cette seconde partie de la L o i prononce la validité du
testament du sieur de Ghazelle. Quand il le f it , il n’avoit
point d’enfant ; il ignoroit s’il seroit père. M a is, après la
naissance de ses enfants , il a persévéré pendant douze
a n n é e s entières , dans ses dispositions. Elles sont donc
consacrées par la L o i même qu’on oppose pour les faire
anéantir.
3°. Celles qui règlent les codicilles , rendues dans les
mêmes circonstances, offrent la même décision, la même
conséquence. Si le père a ignoré la naissance d’un second
enfant ; si l’ayant connu , il pense qu’un de ses fils est m ort,
les codicilles ne frappent que sur celui à qui il avoit écrit
les codicilles. O n peut présumer , faire des conjectures,
lorsqu’on ignore ce qu’auroit fait une personne dans telle
ou telle circonstance. C ’est alors une question de v o lo n té ,
et la L o i la décide en faveur des héritiers, parce que ratio
naturalis
,
quasi L e x qucedam tacita liberis parentium hcerc-
ditatem addicit y élut ad debitam successionem eos vocando.
Mais , lorsque la volonté du testateur est certain e, il
est impossible d’admettre des présomptions contre cette
volonté connue ;
et c’est alors que les L o ix disent : ab
intestato fa ctis codicillis ,
successor d&bebiu
relicta etiam posteà, natus intestati
�r3p
Enfin , un testament est l’expression de la dernière v o
lonté : il n’a d’effet qu’au jour de la mort du testateur. O n
ne consulte pas sa d a te, mais celle du décès de celui qui
l ’a dicté. Jusques-là , ce n’est qu’un papier domestique ; ce
n’est qu’un projet d’intention que la mort vient consacrer.
Tant qu’on ne le change p a s, on le confirme. Chaque instant
de la vie en est une ratification nouvelle.
Ainsi y c’est au dernier moment de la vie du sieur de
C h a z e lle , qu’il faut saisir ses dispositions, ec les laisser
avec re sp e ct, telles qu’il les a écrites. Il a persévéré pen
dant douze ans , après la naissance de ses enfants. Ses en
fants sont venus occuper dans son cœur la première place ;
mais ils n’ont pas détruit l'amitié qu’il avoit pour sa nièce.
L a tendresse paternelle , l’attachem entpour safamille ,to u s
Ces sentiments doux habitent sans rivalité dans le même
fcœur ; et ce qu’ils dictent l’un et l’autre , est consacré, si la
L o i et les mœurs ne sont pas blessées par leurs disposi
tions renfermées dans des actes revêtus de toutes les formes.
Passons donc à l’examen de la Jurisprudence et de l’opi
nion des Auteurs.
s.
IV .
D e la Jurisprudence et des Jurisconsultes.
Après avoir établi les véritables principes de la m atière,
fait une sage âpplicatiou des L o ix Romaines , q u i, loin
de combattre notre demande , achèvent d’en démontrer la
justice , devrions-nous nous occuper de discuter quelques
arrêts qui nous sont opposés ? Si ces arrêts consacrent nos
m axim es, ils sont de nouvelle s arises pour nous. S ’ils pa-
�40
roissent les contrarier, qu’en ré s u lte ra -t-il, sinon qu’ils
ont été rendus dans des circonstances étrangères à notre
espèce ?
L es adversaires nous citent sept arrêts :
L e premier , du 1 o janvier i î i i .
L e second , du 6 août 1 641.
L e troisième , du 3 juillet 1663.
L e quatrièm e, du 2 mars i 56 y.
L e cinquième , du 17 août 1 j 17.
L e sixième , du 7 janvier 172 7.
L e septième enfin, est de 1783.
L es six premiers s’écartent d’un seul m o t, ils sont anté
rieurs à l’ordonnance de 173 j , concernant les testaments,
et celle de 173 1 , concernant les donations. L es Juriscon
sultes qui ont écrit avant ces deux L o i x , confondoient
les principes des donations et ceux des testaments. M .
d’A guesseau, alors A vocat
G é n é ra l, et qui depuis fut
C h a n celier, s’expliquoit en ces rermes :
I j> Quelques A uteu rs, ( disoit-il dans son plaidoyer sur la
» cause des héritiers V illayer ) ont prétendu qu’on pouvoit
» étendre ce qui a été introduit pour les donations entre» vifs aux dispositions testamentaires ; et que la survenance
» cfcs enfants révoquoit également les uns et les autres ;
» cette opinion n’est fondée que sur la confusion qu’on
» a faite des principes qui règlent la n itu re des donations
.» entre-vifs , et de ceux qui déterminent le caractère des
» donations à cause de mort ».
Ainsi s’exprimoit ce Magistrat : et quand il fut Chance
lier , il s’occupa de séparer ces deux branches de notre
Législation. I l ne les traita pas dans la même O r d o n n a n c e -
�Il en fit deux. Dans l’u n e , il posâ les prîncipês qui règlent
la nature des donations'; et dans l’autre , ceux qui détermi
nent le caractère des testaments. Il n’y eut plus la confusion
dont il se plaignoit. L es donations furent révoquées par là
survenance d'enfants, les testaments ne les furent pas.
M ais ,
avant cette époque , quelques Auteurs soute-
noienc , comme il le dit , que la survenance d ’enfants
annulloit les testaments ; et la Jurisprudence a pu consacrer
ces erreurs du temps. Il appartient aux L o ix de fixer nos
véritab e ; ma mes.
C ela sufFiroit pour écarter les six premiers arrêts qui
nous sont opposés.
Cependant ,
q u on nous suive dans
l ’examen de leurs espèces , et Ton verra qu’ils ne sont pas
applicables à la nôtre.
Dans le prem ier, un homme avoit fait cinq legs mo
diques. L ’acte étoit d’un temps où étant gârço n , il n’âvoît
pas pu porter sa volonté sur des enfants. Devenu père-, il
avoit acquitté, de son vivant , les seuls legs qu’il avoit
voulu ; l’un , en mettant son domestique en apprentissage;
l’auire’, en mariant sa nièce ; et ces deux légataires ne formoient aucune demande, etc.
L e posthume offroit aussi d’acquitter un troisième legs1,
de 40 écu s, fait aux pauvres de la R eligion PrétendueRéform ée. Il n’en restoit que deux autres , de yo écus
chacun , qui avoient été négligés. M . S e rv in , A v o ca tGénéral , dit que a pour les circonstances particulières, le
» testament devoit être cassé entièrem ent, combien qu’en
» la thèse générale, il ne dût l’être q u epro legiti/nâ ». L e
Parlement mit hors de Cour. A in s i, cet arrêt re ju g e rien.
M . l’Avocat-G énéral prouve que dans la thèse générale^,
F
�les legs ne sont que réductibles par la survenance denfanti,
jusqu’à concurrence de la légitime.
V o ic i l’espèce du second.
Un testateur fait un legs à sa femme , qui n’^toit pas
gro sse, et à deux de ses nièces. Il devient père , et il meurt.
L e s deux nièces, convaincues des inte'ntions de leur oncle ,
ne
demandent rien. C ’étoit la mère du posthum e, q u i,
remariée en secondes n o c e s , réclamoit son legs contre sa
propre fille. O n sent dès-lors, combien elle se présentoit
défavorablement. Il y avoit deux autres circonstances. E lle
avoit déclaré dans l’inventaire fait après le décès de son
m ari, que les biens appartenoient moitié à elle et moitié à
sa fille. E lle avoit fait la même déclaration dans son second
contrat de m ariage, en présence de son second mari. Ces
deux déclartions étoient une reconnoissance de la révoca
tion du legs. L a demande de cette marâtre parut odieuse à
M . l’A vocat-G énéral T a lo n , qui ne voyoit dans la cause ,
qu un second mari qui tâchoit de dépouiller les enfants au
premier mariage : et la Cour en la proscrivant, fit un acte
de justice qui n’a aucune application à notre espèce.
Le
arrêt annulle le testament d’un homme marié qui
n'avoit pas encore d’enfant. Il lui en naît un. Le'père assiste
au B aptêm e, et ne survit que quinze jours. C et arrêt estil applicable à l’espèce on le sieur Cnazelte survit douze
ans à la naissance de ses deux filles ? N on sans doute.
Il' E t remarquez que Soeve , qui le rapporte, dit « qu’il y
» avoit preuve âu procès s que depuis la naissance de l’en» fant , le père avoit retiré son testament d’entre les mains
» de celui a qui il l’avoit confié pour en être le dépositaire;
j» et qu’incontinent après lavo ir retiré, il avoit été atteint
�J* d’apoplexie. I l est certain, ajoute l’A rrêtiste, que cette
» présomption violente se rencontrant au fait particulier
» dont il s’agissoic, on pourroit dire que le testateur avoit
» la volonté de révoquer son testament , mais qu’il navoit
» pu le mettre à exécution , ayant été prévenu de là
» mort ».
_Q u 'on juge combien cet arrêt s’éloigne de notre espèce;
combien il nous est étranger ; combien , en raisonnant
d’après les circonstances dans lesquelles il a été rendu i
nous pourrions ajouter des réflexions qui viendroient grossir
les moyens qui militent déjà en notre faveur. N ous n’en
ferons qu’u n e, c’est que c’est l’intention du testateur qu’il
faut consulter. O r , tout prouve dans notre thèse , que le
sieur de Chazelle a persisté. Aucune action de sa vie ne
nous l’offre décidé à changer ses dispositions ; rien ne nous,
le présente avec le moindre repentir , avec la plus légère
irrésolution. ]1 aime ses enfants, il vit au milieu d’eux pen
dant 12 a n s, et tous les moments de sa vie sont autant
d’actes d’approbation de son testament en faveur d’une
nièce qu’il a toujours également chérie.
L ’espèce du quatrième arrêt se rapporte à ces Ioix ro
maines qui décident qu’un posthume inconnu au père ,
annulle le testament; il est m tm e des circonstances qui
ne permettoient pas de douter de l ’intention du testateur.
Il suffira de les rapporter pour faire sentir combien les
adversaires ont mis peu de choix dans les armes dont ils
se servent.
M . de Bordeaux revient de son ambassade d’A ngleterre;
*1 tombe m alade, fait son tessament, et meurt. L a dame
son épouse étoit enceinte depuis 15 ou 20 jours , et n’erç
F ij
�44 .
. . ..
fut instruite que Quelque temps après la mort de son mari.
L e mari l’ignoroit égalem ent, et son testament en contenoit la preuve; car en léguant 20,000 liv. à la dam©
Sanguin sa sœur , il la dispensoit de rapporter cette somme
à sa succession, en venant, d iso it-il, à partage avec ses
co-héritiers. Il ne cornptoit donc laisser que des héritiers
collatéraux, et non pas un fils qui n’auroit eu rien à parta
ger avec sa tante. A u ssi, cette sœur du testateur ne denîandoit-elle pas son legs. D ’autres légataires de 80,000 1.
qui composoient à-peu-près la totalité de la succession ne
demandoient rien non plus.
O n attend avec impatience qu’on nomme les adversaires
du posthume. C ’étoit une concubine an gloise, une fille
naturelle légataire de 1200 liv. de rente viagère, et un
valet-de-cham bre légataire de 1000 liv.
L'arrêt débouta la concubine, réduisit la pension ali
mentaire de la fille naturelle à 300 liv. ; il fut ju ste, et s’il
poussa la sévérité jusqu’à annuller le legs du valet-de*
cham bre, c’est d’après la présomption , que si le testa
teur avoit su qu’il seroit père , il auroit été moins libéral.
■L ’arrêtiste constate les i j ou 20 jours de grossesse seu
lem en t, le silence de la sœur convaincue des intentions de
son frère, le silence des autres légataires , la défaveur de la
concu bine, et sur-tout la clause où le testateur dispensoi
sa sœur de rapporter son legs au partage de ses co-héri
tiers.
L e cinquième a été rendu dans un 3 espèce qui présentoit la même défaveur que le second. Deux époux font
un testament mutuel avant d’avoir des enfants. Un fils leur
naît un an et quatre jours après. L a mère meurt au bout
�4Î
de 18 ans sans l’avoir révoqué ; mais le père qui regardoit
la révocation comme constante entre lui et sa femme»
n’avoir pas fait inventorier le testament, et il avoit déclaré
dans son inventaire , que les effets de sa Communauté
étoient à partager entre son fils et lu i, sans prendre la
qualité de donataire de sa femme. C ’est après cette recon
naissance formelle qui équivaut à une renonciation , qu’il
demandoit contre son propre fils
l’exécution du
don
mutuel.
L e sixième arrêt est rendu pour la coutume de N oyon .
I l s’agissoit dans l'affaire dun legs universel , fait à un
mari par sa femme ; ils avoient eu quatre enfants qui tous
étoient décédés. Q uelque temps après il leur en naquit uà
cinquième. L a mère avoit survécu trois ans à la naissancç
de cet enfant, et étoit morte sans avoir révoqué son tes
tament. L e mari en demanda l’exécution , et il fut débouté.
C et arrêt prononça avec justice la nullité du testament.
Si la Cour se détermina d’après les principes de M . l’avocat*
général G ilbert de V o isin s, il paroît qu’elle eut égard aux
dispositions de la coutume de N o y o n , qui perniet au$
conjoints de s’avantager différemment, suivant qu’ils ont*
ou qu’ils n’ont pas d’enfanis. L e testament dont il s’agissoit,
fait pendant que les époux n’avoient pas d’enfants, étoit
Valable ; mais la naissance d’un fils ne les laissant plus libres
de se faire un legs universel, le testament de la femme à
s.on mari se trouvoit contraire au vœ u de la coutume.
Ç ’en étoit assez sans doute ; mais le Parlement dut êtrerévolté de l’action d’un père qui tendoit à dépouiller son.
fils de toute la succession de sa mère. Si rien n’annonçoit
^ue la testatrice
eut voulu révoquer son testament 9 au
�46
moins il y avoit la juste p réem p tion qu’elle avoit compté
que son mari aimeroit assez son fils pour ne pas lui ravir
son bien : il y avoit aussi la présomption qu’elle
avoit
dû penser que la loi révoqueroit elle-même une libéralité
qu’elle avoit faite dans un temps où elle n’avoit pas d’en
fants , et que la naissance d’un enfant rendoit illégale.
C et arrêt est aussi loin que les autres de notre espèce*
E nfin, nous le rép éton s, tous ceux que nous avons exa
minés jusqu’ici sont antérieurs à l’ordonnance des donations
et à celle des testaments, époque à laquelle les Juriscon
sultes confondoient les principes des uns et des autres-.
E t nous faisons ici une réflexion satisfaisante, c’est que le
Parlem ent, dans toutes ses décisions, fut toujours conforme
aux vraies maximes. S’il annulla quelques testaments faits
avant la naissance' d’un enfant; il ne le fit jamais que
lorsqu’il vit que telle avoit été l’intention des testateurs.
E n fin , si le dernier est postérieur à ces deux ordon
nances , il est rendu dans les mêmes principes. L a dame
Matharel avoit institué sa mère sa légataire pour un quart
de ses bien s, et avoit fait deux autres legs. E lle étoit ma
lade lors de son testament; elle revint en santé y et trois
ans après elle accoucha d’une fille qui lui coûta la vie , car
trois heures après elle mourut. Sur la contestation élevée
entre l’héritier du fils de la testatrice et les deux légataire«
particuliers, les deux legs furent déclarés révoqués.
La
C o u rse déterm ina, par la circonstance que la mère étoit
morte trois heures apiès ses couches , et qu’elle n’avoit
pas eu le temps de marquer sa volonté.
Dans ce cas on
présume avec raison, que la tendresse m iternelle auroit
orté la testatrice à rompre son testament.
�47
- .
M ais dans notre espèce il n’y a pâs de présomption sem»
blable à fa ire , p^rce que le testateur a si bien manifesté
sa volonté par une persévérance de 12 ans, qu’il est im
possible de conjecturer.
L es Cours ont rendu quelques autres arrêts, et nous
les opposons aux adversaires ; ils forment le dernier état
de la jurisprudence.
L ’un est rendu au Parlement de Rouen. Augeard qui le
rapporte en donne l’espèce. L e testateur donne à sa sœur
tout ce dont la coutume lui laissoit la liberté de disposer ;
il avoit alors un fi’s „naturel ; il en épousa la mère et. lé
gitima son fils ; il mourut long-tempe après, sans avoir
d’autres enfaitts et sans révoquer ses dispositions dû der
nière volonté. Elles furent attaquées ; mais le Parlement
les consacra par arrêt du 20. décembre 172 7. C et arrêt
fut porté au Conseil par la voie de la cassation ; mais la
requête fut rejîttée.
’'
L e second est rendu par la Cour , qui doit juger le
testament du steur de Chazelle. C ’e?t l’arrêt qui a confirmé
14 testament du sieur le R iche de la Poupeliniere. T o u t
lè m onde'en connoît les circonstances; il s’étoir. marié
en 1759 , et avoit disposé le 29 novembre 1762 de L’u
niversalité de ses biens. A cette époque la dame son épouse
étoit enceinte de près dé trois mois. Il ne parla point de
cet erífant'dáns son testament', et il mourut le y déceinbfe
suivant, sans avoir* rien changé à ses dispositions ; il étôlt
probable que le testateur avoit ignoré la grossesse de sa
femme à l’époque du ’testament; mais il étoit probable qu’il
1avc/it connue avant de mcHirir ; et la Cour
consacra ses
dispositions de dernière v o lo n té , par arrêt
du 12 mar*
�4^
1 7 ^ « O n l’âttaquâ par toutes les voies ; mais on ne put
parvenir à le faire réformer.
A in s i, ce cortège d’arrêts effrayants par le nom b re, dont
les adversaires avoient entouré leur systèm e, s’est dissipé.
L e dernier état de la jurisprudence , attesté par ceux que
nous avons rapportés, ajoute de nouvelles preuves de la
validité du testament du sîeur de Chazelle. Q ue reste-t il
à nos adversaires? une dernière ressource que ne négligent
jamais ceux qui défendent une mauvaise cause, celle d’aller
fouiller dans les auteurs, et d’y recueillir les erreurs qui leur
sont échappées.
T o u s ceux dont ils invoquent le suffrage, ont écrit avânt
l’ordonnance de 1731 et celle de 173 j .
C ’est à eux que
M . d’Aguesseau , alors A vocat-gén éral, àdressoit le repro, che de confondre les principes des donations et ceux des
testaments. C e sont eux peut-être qui ont fait concevoir à
ce grand Magistrat le projet qu’il a exécuté depuis, d e ,
nous donner des loix positives sur ces deux matières im
portantes de la législation de tout peuple civilisé.
R icard â été redressé par son annotateur. Me* Bergier,
fondé sur l’esprit et le rexte de nos ordonnances, pense que
la survenance d’enfants nannulle point un testament.
P o m at parle de ce qui se pratiquoit à R o m e, et d’ailleurs
il finit par rapporter la novelle 11 j , qui décide que la
survenance d’enfants ne rompoitpas letestam entpourleslegs.
S i Auzanet , sur la coutume de P aris, paroît penser que
la naissance d’un posthume annulle le testam ent, il ne le
croit que dans le cas oh le testateur n’auroit pas parlé des
posthume?. I l se détermine donc par la considération du vice
de prétérition.
�4P
L a Thotnassîere se fonde sur la même erreur.
Coquille sur l’ignorance où le testateur auroit été de Tétât
'de sa maison.
C ochin dit que c’est une question de volonté , à en juger
d ’après les arrêts.
'
Si nous appliquons toutes ces autorités à la contestation
qui nous divise , nous les verrons sc réunir en notre faveur.
Il ne s’agit ici que d’un le g s, et D om at citant la novelle
11 y , est d’avis que le legs est valable.
Auzanet et la Thomassiere fondent leur avis sur la prétérition. O r , ce vice est inconnu dans. notre législation, qui
n’admet pas l’institution d’héritier; et encore une fois il ne
s agit que d’un legs dans notre espèce.
,
L e sieur de Chazelle n’a pas ignoré l’état de sa m aison;
il a vécu 12 ans avec ses enfants. Cette circonstance rap
pelle Coquille à notre avis.
Il
n’y a pas liéu à chercher la volonté du testateur. Sa v o
lonté est claire, elle s’est manifestée par une persévérance
de 12 ans. U b i est evidens voluntas , non relinquitur prœsumptioni locus.
Concluons donc que le testament du sieur de Chazelle est
valable. S i, aux dispositions de nos lo ix , à la jurisprudence
des arrêts, aux preuves même que nous a fournies le raison
nem ent, nous voulions ajouter l’autorité des A uteurs, nous
pourrions citer tous ceux qui ont écrit après l’ordonnance
de 1731 et celles de 173 f , F u rg o l, l’Annotateur de R icard ;
mais ces citations inutiles nous entraîneroient dans une dis
cussion , que le désir et la facilité de répondre à to u t, n’ont
déjà rendu que trop longue pour une question qui se réduît^à
ce peu de mots.
•
�**0
,
. L e .testateur étoit libre de disposeï du quart de ses biens.
L e testament est revêtu dé toutes les formalités requises.
L a survenance d’enfants annulle une donâtion, moins en
faveur des posthumes peut-être que pour favoriser les mariages.
. E lle ne produit pas le même effet sur les testaments.
Dans les donations l’homme est lié par un contrat ; il ne
peut le rompre sans le secours de la loi.
”')
Dans les testaments au contraire, l’homme toujours libre,
n’a besoin que de v o u lo ir, pour obéir au penchant de son
cœ ur pour ses enfants.
O r , le sieur de Chazelle a connu l’existence de ses enfants;
il les a aim és, il a vécu 1 2. ans avec eux. Sa persévérance
est marquée par autant d’approbations, qu’il s’est écoulé de
'minutes pendant cet intervalle, et ce seroit une impiété que
d'élever des doute sur ses intentions.
- ■
*
.i
Monsieur C L E M E N T D E B L A V E T , Rapporteur*
M c. V ig ie r , Procureur.
A Paris , chez K N A P E N & F ils , Lib.-lm pr. de la C our
des A id e s , au bas du Pont Saint M ichel. 1789.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Vernet
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_V0102_0001.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Olivier, Gabrielle d'. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Clément De Blavet
Vigier
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
legs
dot
donations
doctrine
droit romain
posthume
jurisprudence
droit coutumier
Description
An account of the resource
Mémoire pour dame Gabrielle d'Olivier, veuve de monsieur Jean-Baptiste de Tournemire, donataire et héritière de demoiselle Rodde sa mère, laquelle était légataire de monsieur Léonard De Chazelle, appellante de sentence rendue par défaut, en la sénéchaussée de Riom, le 28 mars 1787. Contre messire Antoine-Joseph De La Vaissiere ; et demoiselle Marguerite de Chazelle son épouse, se disant héritière du sieur Léonard de Chazelle son père, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Knapen et Fils (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1743-1789
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0113
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Vincent-de-Salers (15218)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/17/53988/BCU_Factums_V0113.jpg
doctrine
donations
dot
Droit coutumier
droit Romain
jurisprudence
legs
Posthume
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53386/BCU_Factums_G2016.pdf
16814b381089fdc3e24602b9592653ce
PDF Text
Text
MÉMOIRE
EN R É P O N S E .
�COUR
MÉMOIRE
EN
IM PÉ R IA LE
D E RIOM .
Ire. CHAMnnE.
RÉPONSE,
A u d ien ce
P O U R
du
2 ju illet 1810..
Dame J e a n n e - M a r i e D E C H A M P F L O U R ,
veuve du sieur P a u l - François d e M o n t r o z i e r sieur J e a n - B a p t i s t e D E C H A M PF L O U R ; dame M a r i e - A n n e - F é l i c i t é D E
F R E D E F O N T , et sieur J e a n - J a c q u e s D E
R O C H E T T E , son mari ; demoiselle G a b r i e l l e D U R A N D D E P E R IG N A T , et dame
M a r ie D U R A N D , relig ie u se ; tous habitans.
de la ville de Clermont-Ferrand, intimés;
C O N T R E
r
\
Dame A n n e - E m i l i e D E F E L I X , veuve de
sieur Claude-François-Léon d e S i m i a n e 5
propriétaire à Collongues, arrondissement d'Aix,
département des Bouches-du-Rhône, appelante;
en
p r é s e n ce
D e dame M a r g u e r i t e D E C H A R D O N , veuve
du sieur J a c q u e s -F r a n ç o is de M o n ta n ie r
C l a u d e - A ntoine - J oseph D E
DON
demoiselle A n n e D E
CHAR~
CHARDON/
A <&
�C4 )
dame B e r r e t t e D E C H A R D O N , veuve du
sieur V a l l e t t e d e R o c h e v e r t ; tous proprié
taires, habitans de la ville de Riom, intimés;
ET
EN
PRÉSENCE
D e J a c q u e s - M a r i e L A V I G N E s et J e a n
P I R E L , habitans de la ville d’Ambert, aussi
intimés.
QUESTIONS.
i°. Les religieux q u i, -par Veffet rétroactif de la loi
du 5 brumaire an 2 , ont obtenu un droit successif de
la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis à
rendre cette succession après le rapport de cet effet
rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés
représentés par la république, comme émigrés?
2°. L a nation, dans ce cas particulier, n'est-elle pas
censée avoir renoncé à toute recherche, et n'avoir point
voulu user du bénéfice des lois des gfructidor an 3 , et
3 vendémiaire an 4 ?
3°. L e sénatus-consulte du 6 floréal an 10 n’a - t - ï i
Teiuiu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, que
les biens qui se trouvoient dans les mains de la nation,
p a rla voie du séquestre, au moment de Vamnistie?
C e s questions sont exactement les mêmes que celles
présentées par la dame de Simiane. Il fauf y ajouter
�(5 )
qu’elle se dit créancière du sieur Hector de Sim iane,
mort émigré , et que c’est en cette qualité qu’exerçant
les droits de la république, elle veut la ire aujourd’hui
ce qu’elle prétend que la république auroit dû fa ire après
le g fructidor an 3 , c’est-à-dire, ôter aux héritiers d’une
religieuse ce qui lui a été abandonné nationalement, dont
elle a joui dix ans et jusqu’à sa mort. Cette prétention
est si bizarre, qu’il faut être surpris de la voir élever
sérieusement, après tant de lois faites pour rassurer les
possesseurs des biens transmis, à quelque titre que ce
soit, par la république.
F A I T S .
L a dame A n n e D elà i r e , épouse de JVT. de C la r y , est
décédée le 27 octobre 1 7 9 1.
Elle avoit institué pour héritiers, par un testament de
17 8 7 , M . Hector de Simlane, son cousin paternel, et
M . de Chardon, son cousin m aternel, à la charge d’ac
quitter pour 240000 francs de legs.
Hector de Siiniane, domicilié à A vign o n , étoit sorti
de France à l’époque des troubles du Comtat. Mais n’y
ayant encore aucunes lois contre les ém igrés, il paroît
que M . de Simiane se présenta pour recueillir la suc
cession de Clary ; mais en 1792 il fut inscrit sur la liste tles
émigrés, et le séquestre fut mis sur ses biens.
Jusqu’au 28 mars 179 3 , ce séquestre n’étoit qu une
occupation des biens. Mais la loi du 28 juillet ^793 Jjannit
à perpétuité les ém igrés, et les déclai’a morts civilement.
Madame de Clary avoit une sœur religieuse (Jeanne
�(6 )
D elaire) : la loi du 5 brumaire an 2 l’appela h succéder,
puisque madame de Clary étoit morte après le 14 juillet
1789. Eu conséquence, Jeanne de Clary obtint à son profit
la mainlevée du séquestre, fut déclarée héritière de sa
soeur, et envoyée en possession de tous les biens, par un
arrêté du 8 nivôse aii 2.
L a loi du 9 fructidor an 3 abolit l’effet rétroactif de
la loi du 17 nivôse. En vertu de ce changement de légis
lation, on dit que M . de Chardon reprit les biens maternels
de madame de C la ry , qui lui étoient légués par le tes
tament de 1787.
Si le sieur de Sim iane eût été régnicole ù cette é p o q u e ,
il n’est pas d o uteux q u ’il n’eût eu aussi le droit de re
prendre les biens paternels dans les mains de Jeanne
Delaire.
Mais il étoit toujours sur la liste des émigrés -,
Il étoit mort sans -postérité avant la loi du 9 fructidor,
à A sti, et en état d’émigration;
Par conséquent il ne laissoit à ses héritiers que les
biens dont il étoit propriétaire à l’époque de son décès,
c’est-à-dire, le 1 % prairial an 3.
C’est ainsi que la famille elle-même l’entendit à cetle
époque ; et une circonstance assez singulière va le prouver.
M . de Simiane mouroit sans enfans : il laissoit deux
héritiers ab intestat ; l’un étoit le sieur Vidaud de la
T o u r , et l’autre étoit Jeanne D ela ire elle-même.
L e sieur Vidaud de la T o u r avoit seul qualité pour
disputer à la religieuse Delaire la propriété des biens
C lary, et pour prétendre qu’ils étoient dans la masse de
la succession de Simiane.
�C/ 7 )
Bien loin d’en agir ainsi, M . Vidaud de la T o u r se
réunit à Jeanne Delaire pour demander au direçtoire
exécutif la radiation de M . de Simiane , et l’envoi en
possession de ses biens propres situés a A vignon.
En effet, ils obtinrent une radiation le 28 nivôse an 5.
A lors ils prirent la qualité d’héritiers bénéficiaires de
M . de Simiane; et en vertu d’un jugement du tribunal
de Vaucluse, du 24 thermidor an 5 , ils firent commettre
le sieur Chambaud, notaire à A vign on , pour faire l’in
ventaire du mobilier de la succession.
Il ne vint pas môme à la pensée du sieur Vidaud de
la T o u r (seul intéressé, on le rép ète,) de faire com
prendre dans ce mobilier de la succession Simiane
aucune portion de la succession de madame de Clary.
L ’arrete de radiation n’avoit été qu’une indulgence
éphémère due aux circonstances. T.es lois de l ’an 3 sur
les émigrés avoient fait des exceptions pour les émigrés
d’A v ig n o n , et la journée du 18 fructidor an 5 ramena
les mesures générales de 1793* Eli conséquence, une loi
du 22 nivôse an 6 ordonna que les émigrés avignonnais
qui auroient obtenu des radiations par suite de la loi
du 9 fructidor an 3 , seroient réintégrés sur la liste.
L e séquestre fut dono remis sur les biens du sieur de
Simiane, mais seulement h Vaucluse, et il ne fut levé
qu’après l’amnistie générale, du 6 floréal an 10.
A lors Jeanne Delaire se réunit encore au sieur Vidaud
de la T our, son cohéritier; ils obtinrent la radiation du
défunt, le 26 frimaire an 11.
Ils sollicitèrent l’envoi en possession tics biens; et c’est
ici le cas de remarquer encore que M* Vidaud de la T o u t
�(8 )
•n’eut pas plus qu’en l’an n la pensée de se mettre en
possession des biens d’A u vergn e, qu’il ne fit de diligences
qu’à V aucluse, et laissa la religieuse Delaire en pleine
possession des biens de sa sœur.
. Il y a plus : car la religieuse Delaire vendit seule
'tous les biens de sa sœur en l’an 10 , après le sénatusconsulte, et le sieur Vidaud de la T o u r ne s’y opposa
pas.
Dans le même temps on clierchoit à empêcher la des
tination que M . le Préfet de Vaucluse vouloit faire d’un
domaine du sieur de Simiane pour une pépinière : le
sieur Vidaud de la T o u r réclam oit contre cette occupa
tion, conjointem ent avec Jeanne Delaire; et même après
la mort de Jeanne Delaire il ne crut pas pouvoir vendre
ce domaine sans y appeler ses héritiers.
La dame Delaire, religieuse, est décédée l e n messidor
an n . Les familles de Chardon et Champilour se sont
partagé la succession comme héritières des deux lignes :
elles ont eu à défendre celte qualité dans deux procès;
mais elles ont fait juger qu’elles étoient héritières, et
elles sont toujours restées en possession.
La dame F élix de Simiane s’est elle-même adressée à
elles en cette qualité, le 8 février 1808, non pas pour
leur disputer les biens, ni former des demandes hypo
thécaires, mais seulement pour faire liquider à Avignon
ses reprises contre elles, comme héritières du sieur de
Sim iane, par représentation de la religieuse Delaire.
Ce seroit peut-être une tâche fort difficile pour la dame
de Simiane de justifier ces reprises, lorsqu’ayant vécu à
A sti jusqu’à la mort de son parent, elle s’est emparée de
tout
�( 9 )
tout son m obilier, de toutes les ressources qui les faisoient
exister l’un et l’autre hors de France. Et elle vient aujour
d’hui , comme héritière de sa fille par les lois actuelles,
réclamer la succession de son fils et l’effet d’un testament
qui a rendu ce dernier créancier, du chef de son père,
du sieur de Simiane, mort à Asti.
Quoi qu'il en soit de ce circuit de qualités, madame
de Simiane procédant comme héritière de sa fille, qui
l ’étoit de son frè re , s’est fait adjuger 296000 fr. pour des
terres vendues de l’estoc de la dame de Seveyrac, aïeule,
pour des pensions et des fermages , sans expliquer le
moins du monde comment tout cela lui est rigoureuse
ment dû.
Les héritiers Champflour, par acte du 18 février 1809,
répudièrent au greffe d’A vignon la succession du sieur
de Simiane.
Jusque-là on prévoit difficilement comment la dame
veuve de Simiane pourra enfin renverser tout cet ordre
de choses , et s’en prendre aux biens de la religieuse
Delà ire. Il paroît qu’elle-même n’auroit pas commencé
cette attaque; mais elle y fut menée par circonstance, et
elle a cru peut-être de bon augure d’être appelée à un
procès par des débiteurs de 92000 fr ., qui ne vouloieni
se libérer qu’en sa présence. V oici comment la dame de
Simiane a été appelée à ce procès, et quelle est l ’origine
de sa réclamation actuelle.
Il paroît qu’en prairial an 10, la dame de Sim iane,
il peine rayée elle-même de la liste des émigres, s’occupa
B
�C 10 )
d’actes conservatoires pour la sûreté de ses prétendues
reprises : scs agens firent en son nom des inscriptions à
A vign on , à Clermont et à A m bert, et même une saisiearrêt entre les mains des sieurs Lavigne et P ire l, qui
avoient acheté des immeubles de la religieuse Delaire.
Ces mesures n’avoient rien que de naturel, puisque
Jeanne Delaire étoit héritière du sieur de Simiane , et
par conséquent débitrice personnelle de l’adversaire tant
qu’elle ne répudieroit pas. Ainsi il ne faut pas regarder
ces actes de l’an 10 comme une prétention semblable à
celle que manifeste aujourd’hui la dame de Sim iane,
après une répudiation.
E n 1809 , les héritiers D elaire assignèrent les sieurs
L a v ig n e et P ir e l en payement de la somme de 92160 f r .,
prix de la vente à eux consentie par Jeanne D elaire,
en l’an 10 , et des intérêts depuis cette vente.
Les sieurs Lavigne et Pirel ayant en mains une saisie-*
arrêt, en excipèrent, et demandèrent la mise en cause
de la dame de Simiane : elle fut ordonnée; et la dame
de Simiane fut assignée en mainlevée de sa saisie et de
ses inscriptions.
Scs droits n’étoient pas encore liquidés, et elle se hâta
drobtenir à A vign on un jugement par défaut , le 16
mars 1809.
A lo rs m adame de Simiane se disant créancière , se
présenta au tribunal de Clermont pour demander la con
firmation de sa saisie-arrêt ; et alors elle éleva, pour la
première fo is , la prétention que les biens de madame
de Clary appartenoient à Hector de Simiane pour moitié,
et qu’ainsi ces biens étoient le gage de ses reprises.
�( 11 )
L e tribunal de Clermont n’a point accueilli cette de
mande ; il a annullé la saisie-arrêt et les inscriptions de
la dame de Simiane : son jugement du 9 août 1809 est
fondé sur des motifs très-solides et très-lumineux.
Ils se réduisent à dire que M. de Simiane ayant perdu
les biens Clary par son émigration, et étant mort émi
g r é , ses héritiers n’auroient pu les réclamer que si ces
biens s’étoient trouvés dans les mains de la nation lors
de l’amnistie •, mais que la nation ayant été désistée de
ces biens par la religieuse D elaire, et n’ayant pas eu le
droit de les lui redemander, les héritiers de l’amnistié
n’ont dû prendre ses biens dans les mains du gouverne
ment qu’en l’état où la révolution les avoit laissés (1).
L a dame de Simiane prétend n’avoir pas perdu l’es
pérance de faire réformer cette décision qu’elle trouve
cependant légale dans ses bases , m a is t r o p sévère, et
fausse dans ses conséquences.
Il semble cependant diiïicile que la Cour pût être
plus indulgente, sans blesser les droits des héritiers de
la dame D elaire, et sans porter atteinte aux lois qui Jes
ont investis de cette succession.
M O Y E N S .
Les lois qui vont être citées rappelleront des souvenirs
pénibles, et ramèneront peut-être à des idées àe pros
cription et d’injustice. Mais sans s’occuper d’une justifljugement est transcrit
de madame de Simiane.
(1) L e
litté ra le m e n t
dans le mémoire
B 2
�( Ï2 )
cation qui seroit aussi déplacée qu’une critique, il sera
bien permis du moins de demander ù la dame de Simiane
si elle croit avoir eu un titre plus sacré que Jeanne D elaire, pour lui disputer la succession de sa sœ ur, et si
les lois de 1793 ont été véritablement une spoliation
dans cette circonstance.
Madame de Clary n’avoit qu’une sœur; elle n’avoit
pas pu en mourant lui laisser sa fortune , puisque les
religieuses étoient incapables de succéder. Elle pensa alors
à des parens éloignés , et sa mort précéda l’époque de
l ’abolition absolue de la vie monastique.
E q août 1792 les religieuses furent expulsées de leurs
asiles , et les biens q u ’elles possédoient en échange de
c eu x qu’elles avoient abandonnés en renonçant au siècle,
leur furent enlevés avant qu’il fût question de dépouiller
les émigrés de leurs fortunes.
Peu de temps ap rès, les lois qui avoient rendu les
religieuses au monde leur permirent d’être successibles ;
et alors, il ne faut pas en douter, si madame de Clary
eût vécu , ses intentions eussent été d’accord avec la na
ture et la loi ; sa sœur eût été son héritière.
Eh bien! ce que madame de Clary au tombeau ne pouvoit pas r é p a r e r , l’a été par le hasard d’une révolution;
le bannissement de M . de Simiane lui a ôté ce que les
jnânes de sa bienfaitrice lui regrettoient indubitablement *
et cette sœur jadis bannie clle-môme et morte au monde,
a retrouvé tme fortune à laquelle d’autres événemens
l ’avoient rendue étrangère.
Qui donc osera dire que Jeanne Delaire m urpoit ,
lorsqu’une loi lui a donné la fortune de sa sœur ? Madame
�( 13 )
de Simiane le d it, sinon à elle, au moins à ses héritiers.
Elle va plus loin dans son injustice, car c’est contre eux
qu’elle veut rejeter tout l’effet de l’émigration , tandis
qu’elle veut, elle-même émigrée, avoir été invulnérable.
Elle vient dire aux héritiers de Clary : « Je vous sais
« bon gré de la peine que vous avez pi'ise d’obtenir des
« radiations ; mais sic vos non vobis, je m’en adjugerai
« tout le profit, si vous le trouvez bon. Jeanne Delaire
« a em pêché la nation de vendre les biens C lary, vous
cc avez empêché la vente des biens Simiane *, tout cela
« sera mon bénéfice. Je reviens de l’émigration noti
ce seulement avec la dépouille du défunt, mais encore
« avec des titres qui absorbent tout le reste, et je pour« suis des reprises que la nation française a eu la bonté
« de me réserver intactes. T out ce qui a été vendu est
« perdu pour les héritiers ré p u b lic o lc s , et tout ce qui
« reste est conservé pour moi. »
Mais ce n’est pas par des réflexions morales qu’il faut
repousser l’attaque de la dame de Simiane ; ce sont les
lois elles-mêmes qui sauront y répondre victorieusement.
La loi du 28 mars 1793 a déclaré morts civilement
tous ceux q u i , alors inscrits sur des listes d’ém igrés,
n’étoient point rentrés en France dans les délais accordés
par les lois précédentes.
Il ne s’agit pas de vérifier quelle étoit l ’ é p o q u e de l’ins
cription du sieur de Simiane, et si les émigrés d’A vignon
devoient être exceptés : car le Comtat fut r é u n i à la France
en 17 9 1, et par conséquent les lois de 1792 et 1793 ^es
atteignirent comme les autres Français.
�( m )
T out ce qu’il faut savoir, c’est que M . de Simiane
u’étoit pas rentré en France avant le 28 mars 1793 . A in s i,
aux yeux de la l o i , M . de Simiane est mort depuis cette
époque.
N ’est-ce pas assez de sa mort civile ? eh bien ! s’il
faut y ajouter l’époque de sa mort naturelle , M . de
Simiane est mort à Asti le 12 prairial an 3.
A lors il étoit encore sur la liste des émigrés : ainsi
ses biens n’ont pas pu être transmis par lui à ses héri
tiers naturels, puisque la loi les avoit déclarés acquis
irrévocablement à la nation.
Peut-être bien que si rien n’eut dérangé cet ordre, et
si la nation eût conservé jusqu’à l’an 11 les immeubles
du sieur de Simiane, ses héritiers en auroient obtenu la
remise lorsqu’ils sont parvenus à le faire rayer de la liste .
des émigrés après sa mort : cette mesure étoit une consé
quence d e l’amnistie. L e gouvernement n’a voulu retenir
que les bois, et les perceptions déjà faites : mais aussi 11c
voulant être généreux ou juste que dans son intérêt, il
a marqué fortement l’intention que nul possesseur tenant
sou titre de l’autorité publique, ne fût inquiété pour
aucune cause.
V oilà ce que la dame de Simiane paroît ne pas vouloir
comprendre ; les articles de la loi lui semblent équi
voques*, elle n’y a v u que l’ordre donné aux émigrés de
maintenir les partages faits avec la république ; et se
mettant ainsi à l’aise, elle a cru suffisant de dire que la
religieuse Delaire n’avoit fait aucun partage avec la répu
blique*, d’où elle a conclu que les héritiers de Simiane
ont très-bien eu le droit de disputer à cette religieuse
�( i 5 )
les biens qu’elle avoit obtenus par un arrêté authentique
du 8 nivôse an 2.
C’est là la seule prétention sur laquelle la dame de
Simiane insiste ; car elle reconnoit que M. Hector de
Simiane étant mort en état d’émigration et de mort
c iv ile , n’étoit pas alors propriétaire des biens qu’elle ré
clame : mais elle soutient que si ses héritiers n’étoient
pas successibles à l’heure de sa m ort, ils le sont devenus
huit ans après, c’est-à-dire, lors du certificat d’amnistie
délivré en l’an 11.
Ce point capital de la contestation reçoit deux réponses;
l’une, générale et relative aux effets de l’amnistie d’émi
gration ; l’autre, particulière, résultante de la qualité
de religieuse qu’a voit Jeanne de Clary.
r_
Pour être plus clair dans la première réponse, il faut
la faire précéder de la loi elle-même, dont il sera facile
ensuite de tirer des conséquences.
L e sénatus-consulte, du 6 floréal an 10 , porte, ar
ticle 16 : « Les individus amnistiés ne pourront, sous
« aucun prétexte, attaquer les partages de présuccession,
« succession, ou autres actes et arrangemens fa its entre
« la république et les p articuliers, avant la présente
« amnistie. »
A rt. 17. « Ceux de leurs biens qui sont e n c o r e devis
« les mains de la nation (autres que les bois et forets,....
« les créances qui pouvoient leur appartenir sur le trésor
« public, et dont l’extinction s’est opérée par confusion
« au moment où la république a été saisie de leurs
�( i6 )
« biens, droits et dettes a ctiv e s), leur seront rendus
« sans restitution de fruits. »
L ’arrêté des consuls, du 9 thermidor an 10, dit « qu’il
« est conforme à l’esprit du sénatus-consulte d’étendre
« la grâce aux héritiers, quand la mort a mis le prévenu
« lui-m êm e hors d’état d’en profiter. S’il eût vécu , il
« seroit rentré dans les biens dont l’art. 17 du sénatus« consulte fait remise aux amnistiés ; comment refuser
« la même grâce à ses enfans républicoles, et nés avant
« l’émigration ? »
?
Si ce que la loi accorde aux enfans de l’émigré doit
s’étendre aussi aux collatéraux, croira-t-on, d’après ce
qu’on vient de lire, que les héritiers de M . de Simiane
eussent pu demander ses biens à tout autre possesseur
qu’au gouvernement?
Les héritiers Simiane ne l’ont pas cru possible; ils ont
vu vendre par la religieuse Deiaire tous les biens qu’elle
tenoit de la république, et il n’est venu à la pensée de
personne qu’ils fussent fondés à attaquer son titre, en lui
objectant qu’après le 9 fructidor an 3 elle auroit dû rendre
à la république ce que la république lui avoit donné.
A supposer qu’on tienne pour réponse suffisante à ce
fa it, le droit qu’ils auroient eu de s’y opposer ( ce qui
lious ramène à la question), il faudra bien qu’on indique
com m ent et par quelle voie on auroit pu soi-m êm e
attaquer un actef a i t entre la république et la religieuse
JDelaire.
Sera-ce sous "prétexté du rapport de l’effet rétroactif
de la loi du 17 nivôse ? mais la loi dit que l’amnistié
ne pourra attaquer l’acte squs aucun prétexte.
Madame
�( 17 )
Madame deSimiane aura encore quelques efforts de plus
à faire pour prouver que les héritiers de l’amnistié pouvoient rechercher des biens qui rfétoient plus dajis les
mci'ns de la nation depuis l’an 2. Ce n’est pas qu’elle
n’ait bien prévu cette difficulté, dont elle fait une question
principale en tête de son mémoire ; mais elle l’a éludée,
et l’a laissée à peu près sans réponse.
Répétera-t-elle que la religieuse Delaire a dû rendre
à la nation les biens Clary aussitôt après la loi du 9 fruc
tidor an 3 ? Mais comment une aussi bonne pensée n’estelle venue qu’à madame de Simiane? et comment le fisc,
toujours si en éveil, ne s’en est-il point avisé? Quantum
mntatus ab illol faudroit-il s’écrier-, ou plutôt il faudroit
se croire fort convaincu par cette seule réflexion , que
le fisc n’etoit point autorisé à ôter à Jeanne Delaire les
biens dont elle étoit en possession, p uisqu ’il ne les de
manda pas.
Ce que la nation n’a pas fait en l’an 3 , la dame de
Simiane voudroit que les héritiers de son mari l’eussent
fait en vertu de l’amnistie, q u i, suivant elle, auroit un
effet rétroactif au temps de la mort et même de l’émigration.
Mais aucun effet rétroactif n’est donné à l’amnistie; et
c’est pour cela que le sénatus-consulte veut que l’émigré
vienne prendre dans les mains de la nation s e u l e m e n t
ce qui y reste.
On a vu à Besançon un sieur Masson, émigré* dont
les biens avoient été vendus à sa femme p e n d a n t même
qu il étoit en réclamation , venir après l’amnistie de
mander à sa femme, non pas l’évictioo du bien national,
,
e
�(
18
)
mais l’administration de la communauté. La Cour de
Besançon avoit jugé que l’amnistie avoit rétabli la puis
sance maritale, et'par conséquent la communauté comme
si elle n’eût jamais été interrompue : mais cet arrêt a été
cassé le 10 juin 1806, par le motif principal que le sieur
Masson avoit été en état de mort civile jusqu’à sa radia
tio n , et que Vamnistie riavoit pas eu d'effet rétroactif.
Sans doute il y a quelque répugnance à penser que
malgré la règle le mort saisit le v if , M . de Sim iane,
mort en l’an 3 , n’a eu d’héritiers qu’en l’an 11. Mais
on conçoit que pendant cette lacune c’est la république
q u i a été h éritière interm édiaire -, et rem arquons qu’elle
n’a pas voulu l’être à titre d’usufruit ou de fidéicommis;
elle n’a pas même voulu qu’on lui succédât par repré
sentation , de peur qu’on usât de ses droits ou de ses
omissions pour faire des procès ; elle a déclaré avoir
rempli le degré comme propriétaire, et avec le droit
utendi et àbutendi, elle n’a rappelé l’émigré que pour
reprendre rebus integris ce qui rcstoit dans ses mains ;
et sans lui donner le droit de porter ses regards en arrière
pour rechercher quel étoit le titre de possession de ceux
qui occupoient ses biens, la loi a placé pour lui un mur
d’airaiu entre le passé et l ’avenir.
V oilà., ce semble, l’idée la plus juste qu’on puisse se
former de cette législation, et c’en seroit assez peut-être
pour prouver qu’en thèse générale les héritiers Simiane
n’ont pas dû contester à Jeanne Delaire le droit de dis
poser des biens de sa sœur. Voyons cependant ce que la
circonstance que Jeanne Delaire étoit religieuse, ajoutera
de force à la précédente démonstration.
�C 19 )
Lorsque rassemblée constituante, voulant favoriser la
sortie des cloîtres, eut rendu la loi du 19 février 1790,
.qui permetto.it aux religieux des deux sexes de rentrer
dans le monde, il fut nécessaire d’expliquer s’ils deviendroient capables de successions : alors fut rendue une
seconde lo i, du 26 mars 179°? ainsi conçue :
; A rt. i er. « Les religieux qui sortiront de leurs maisons
« demeureront incapables de successions, et ne pourront
« recevoir par donations entrevifs et testameos que des
•« pensions ou rentes viagères. »
A rt. 2. « Néanmoins lorsqu’ils ne se trouveront en
« concours qu’avec le fisc, ils hériteront dans ce cas pré« Jerablem ent à lui. »
L a loi du 5 bru m aire an 2 , art. 4 , dit que « les re-« lig ie u x et religieuses sont appelés à. recu eillir les suc« cessions qui leur sont échues à com p ter du 14 juillet
a 1789. »
L ’art. 7 dit qu’audit cas de successions ils rapporteront
les dots constituées par leur profession monastique, et
que leurs rentes et pensions seront éteintes.
C ’est en vertu de cette loi que Jeanne Delaire a ré
clamé la succession de madame de C lary, sa sœur, dont
elle étoit seule héritière ab intestat. E lle en a obtenu
la propriété par arrêté du 8 nivôse an 2.
Lorsque la loi du 5 brum aire an 2 fut rapportée dans
•son effet ré tro a c tif, le 9 fructidor an 3 , J e a n n e D elaire
a u ro it pu être obligée par M. de Simiane de rendre la
m oitié des biens de sa s œ u r, si M. de Simiane eut été
viv a n t ; mais il étoit frapp é de m ort
c iv ile
: et de m em e
G s
�j/j*
( 20 )
que les émigrés ne peuvent pas recueillir les successions
ouvertes pendant leur mort civile, de même ils n’ont pas
d’action pour réclamer le bénéfice d’une lo i; cai’, suivant
la loi du 12 ventôse an 8, les émigrés ne peuvent invo~
quer le droit civil des Fronçais.
Jeanne Delaire n’avoit donc pas M . de Simiane. pour
concurrent, mais seulement le fisc en sa place pour la
moitié paternelle, et M . de Chardon pour les biens
maternels.
Celui-ci a pris sa portion, parce qu’il étoit républicole ; mais le fisc n’a pas pris la sienne, car il en étoit
empêché par l’art, a de la loi du 26 mars 1790, ci-dessus
citée.
Il est bien incontestable en effet que si M . de Simiane
ou le fisc étoient mis de côté, Jeanne Delaire se trouvoit héritière de sa sœur : ainsi elle étoit parfaitement
dans l’application de la loi qui Pappeloit à succéder.
A in s i, sans aller plus lo in , voilà déjà, la religieuse
Delaire avec un titre légal. Elle n’est pas seulement habile
à succéder, elle n’est pas détenteur provisoire et précaire ;
elle est héritière ; elle occupe les biens pro suo. Car il
n’y a pas encore d’amnistie , il n’y en aura que dans
huit ans; et le fisc lui a cédé sa place, non pas pour jouir,
Nmais pour succéder directement et personnellement.
L a loi du 9 fructidor an 3 n’a donc rien dérangé au
titre de propriété donné par la nation à Jeanne Delairo.
Cette loi a été expliquée par celle du 3 vendémiaire an 4;
et en même temps que le législateur rend à tous les héri
tiers déchus le droit d’ôter aux personnes rappelées ce
�( 2ï )
qu’elles ienoient de l’effet rétroactif, il déclare formel
lement que le fisc n’aura pas le même droit contre les
religieuses.
En effet, l’art. 5 s’exprime ainsi : « Les partages faits _
« entre la république et les personnes déchues , qui
« étoient ci-devant religieux ou religieuses ......... sont
« maintenus, sauf l’exécution de l’art. 7 de la loi du 17
« nivôse ( relatif à la confusion des pensions ). »
Rien n’étoit plus clair que cette intention de la loi (1).
Cependant madame de Simiane ne veut pas y voir ce
qui est évident : elle se contente de dire que la reli
gieuse Delaire n’a pas fait de partage avec la république,
d’où il suit que l’article ne la regarde pas.
Il suffiroit de répondre que la loi ne peut pas tout
dire, et exp rim e r tous les cas, et que scire leges non est
earum verba tencre, sed vim ac polesialem. Mais ce
n’est pas même le cas de chercher un sens , car il est
parfaitement rendu.
La loi qui doit être b riè v e , et qui doit prendre pour
exemple ce qui arrive le plus souvent, n’a pas pu sup
poser de prime abord qu’une religieuse se trouveroit
unique héritière. Il n’étoit que trop d’usage que ce
(0 Comme cet article prouve qu’en laissant les
su cce ssio n s
aux religieuses, et en retenant leurs pensions, la r é p u b l i q u e %
aussi songé à son intérêt, madame de Simiane se récrie, en
disant qu’on ne donne pas une grosse s u c c e s s i o n pour 5oo fr.
de rente. Elle oublie que dans les loteries on donne 10000 fr.
pour un écu ; ce qui 11e prouve pas pour cela une fausse spécur
lation, parce qu’ un gros lot n’est pas pour tout le monde.
�( 22 )
fussent les familles nombreuses qui peuplassent les mo
nastères, pour le plus grand avantage d’un héritier prin
cipal. Le plus souvent aussi c’est cet héritier que la
nation a représenté par confiscation , et alors elle a eu
un partage à faire avec les religieux rappelés par l’effet
rétroactif de la. loi du 5 brumaire.
Si dans le cas de ce partage la nation s’est interdit
le droit d’ôter au religieux la portion qu’il n’avoit eue
que temporairement, qu’en résulte-t-il autre chose, si
ce n’est que tous les droits de la nation ont été aban
donnés aux religieux, comme l’avoit déjà dit la loi du
2.6 mars 1790?
E t com m ent p e u t - o n demander à son imagination
qu’elle invente une différence entre le cas d’un abandon
par la voie d’un partage, ou d’un abandon par la voie
du délaissement total? N ’est-ce pas toujours la république
qui cède son droit tel quel? et qu’importe de recher
cher s’il étoit universel ou de quotité, lorsqu’il ne s’agit
ici que de savoir si on peut exciper du droit de la ré
publique ?
En un m ot, si M . de Simiane eût v écu , il est indu
bitable qu’il ne pouvoit troubler Jeanne D elaire, parce
qu’elle étoit héritière avant son amnistie , parce que le
sénatus-consulte ne lui donnoit droit de rechercher des
immeubles que dans les mains de la n a tion , parce que
la remise des biens Clary, faite à Jeanne Delaire en l’an 2,
étoit c o n s o l i d é e par l’art. 5 de la loi du 3 vendémiaire
an 4 , et enfin parce que les émigrés n’ont pas le droit
de rechercher si la république a eu tort de donner à
quelqu’un la propriété île ce qu.i etoit a eux.
�Ce que ne pouvoit pas faire M . de Sim iane, ses héri
tiers l’ont pu encore moins quand cette propriété a été
consolidée par une longue possession. Mais madame de
Simiane, qu’est-elle pour vouloir bouleverser tout ce qui
a été fait, et respecté même par le fisc? Elle est un simple
créancier réduit à exercer les droits de son débiteur.
Mais qu’elle explique comment elle veut exercer les droits
d’un émigré mort avant sa radiation, et par conséquent
exercer, du chef de cet ém igré, les droits de la répu
blique qui ne le lui permet pas.
Enfin , et pour comble d’incohérences, madame de
Simiane a débuté par une saisie-arrêt du prix des ventes
faites par Jeanne Delaire après l'amnistie ; ce qui est
une reconnoissance évidente du droit de propriété de la
venderesse, et par conséquent une p reu ve de plus que
toutes les parties intéressées croyoient également à cette
propriété, comme à la chose du monde la moins suscep
tible de contestation.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. D E V È Z E ,
A
licencié avoué.
RIOM, de l’imp. de THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT —•Juin 1810
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour, Jeanne-Marie. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
émigrés
séquestre
Comtat Venaissin
successions
amnistie
rétroactivité de la loi
estoc
vie monastique
rétroactivité des successions
mort civile
legs
hôpitaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Dame Jeanne-Marie de Champflour, veuve du sieur Paul-François de Montrozier ; sieur Jean-Baptiste de Champflour ; dame Marie-Anne-Félicité de Fredefont, et sieur Jean-Jacques de Rochette, son mari ; demoiselle Gabrielle Durant de Pérignat, et dame Marie Durand, religieuse ; tous habitans de la ville de Clermont-Ferrand, intimé ; contre Dame Anne-Emilie de Félix, veuve de Claude-François-Léon de Simiane, propriétaire à Collongues, arrondissement d'Aix, département des Bouches-du-Rhône, appelante ; en présente de dame Marguerite de Chardon, veuve du sieur Jacques-François de Montanier ; Claude-Antoine-Joseph de Chardon ; demoiselle Anne de Chardon, dame Perette de Chardon, veuve du sieur Vallette de Rochevert ; tous propriétaires, habitans de la ville de Riom, intimés ; et en présence de Jacques-Marie Lavigne, et Jean Pirel, habitans de la ville d'Ambert, aussi intimés. Questions . 1°. Les religieux qui, par effet rétroactif de la loi du 5 brumaire an 2, ont obtenu un droit successif de la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis à rendre cette succession après le rapport de cet effet rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés représentés par la république, comme émigrés ? 2°. La nation, dans ce cas particulier, n'est-elle pas censée avoir renoncé à toute recherche, et n'avoir point voulu user du bénéfice des lois des 9 fructidor an 3, et 3 vendémiaire an 4 ? 3°. Le sénatus-consulte du 6 floréal an 10 n'a-t-il rendu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, que les biens qui se trouvaient dans les mains de la nation par la voie du séquestre au moment de l'amnistie ?
Table Godemel : Succession : 1. les religieux qui, par effet rétroactif de la loi du cinq brumaire an 2, se mirent en possession des successions de leurs parents que des héritiers plus éloignés avaient appréhendées, ont-ils été soumis à la restitution après le rapport de cet effet rétroactif, quoique les héritiers rétablis se soient trouvés représentés par la nation, comme émigrés ? la nation, dans ce cas particulier, n’est-elle pas censée avoir renoncé à toute recherche et n’avoir point voulu user du bénéfice des lois des 9 fructidor an 3 et 3 vendémiaire an 4, pour se rédimer des pensions qu’elle s’était obligée de payer aux religieux ? Amnistie : le sénatus-consulte du 6 floréal an dix a-t-il rendu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, non seulement les biens qui se trouvaient dans les mains de la nation, par voie de séquestre, au moment de l’amnistie, mais encore tous les biens et droits qui leur appartenaient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1787-1811
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2016
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2015
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53386/BCU_Factums_G2016.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Ambert (63003)
Aix-en-Provence (13001)
Asti (Italie)
Avignon (84007)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
comtat vénaissin
Créances
émigrés
estoc
hôpitaux
legs
mort civile
rétroactivité de la loi
rétroactivité des successions
séquestre
Successions
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53635/BCU_Factums_G3018.pdf
096dec0a05f329d8fa02e067225ff7d0
PDF Text
Text
M
E M
O
I R E
POUR
MICHEL DIERNAT, ARNAL
E T A U TR ES IN T IM É S ,
C ON T R E
JEAN ROUCHY,
Ap pelant.
L e curé de Maintenon, forcé de fuir son presbytère et sa patrie
pour rester fidèle à scs devoirs ecclésiastiques , a passé de longues
années sur la terre étrangère.
Admis comme instituteur dans les familles les plus riches de l'aristocratie anglaise, il a p u , par son travail, adoucir l'amertume de
ce temps d’exil si malheureux pour un grand nombre de nos com-
�)>•
7 2 patriotes ; ¡1 «a même préparé sur le sol étran ger, pour ses vieux
jours , une fortune qu’ il u’mirait pas pu attendre et qu’on ne doit
pas économiser dans les fonctions du sacerdoce français.
M. l’ahbé Lavergne a porté sur la terre étrangère les vertus du
bon prêtre, et par dessus tout, la bonté, la bienfaisance qu’il
trouvait dans son cœur et qui puisaient une nouvelle force dans ses
sentiments religieux. L e prêtre fiançais est resté, à cet égard , tout
ce qu’il était ; il ne s’est jamais démenti, et rie n , au surplus , dans
ses rapports avec les familles catholiques - anglaises , n’eût été de
nature à modifier scs inclinations charitables.
Mais , à l’àge où l ’homme moral se complote , à l’àgc où s’arrê
tent les tendances , les opinions, qui doivent être celles du reste do
la v ie , on ne passe pas les virjgt-cinq années réellement puissantes
de son existence, au milieu d’une nation arrivée à un haut degré de*
civilisation, en conservani complètement intactes les premières
idées de son éducation , les mœurs et les habitudes de sa patrie.
M. l’abbé Lavcrgne avait subi la loi commune.
L ’amour de la France ne s’était jamais éteint dans son c œ ur; tou
jours il avait montré désir, espoir de retou r; mais les principes sur
lesquels reposent les institutions do notre p a y s, surtout ses institu
tions nouvelles lui étaient tout-à-fa it étrangers.
llesté Français de cœ ur, il était devenu Anglais même dans les
goûts, les habitudes de la vie ordinaire; h plus forte raison, l’était-il
par les pensées qu’il avait puisées sur l'étendue du droit de disposer
au sein des riches familles Anglaises, dans ce pays où les institutions
sont si libérales cl les lois si aristocratiques , et où cette puissante
aristocratie ne vit et ne sc conserve que par les lois attributives des
propriétés immobilières et la faculté de substituer.
Peut-être plusieurs de scs jeunes élèves tenaient-ils ainsi des
majorats considérables , des dispositions qui avaient été faites bien
des années avant leur naissance.
�-
3 -
A iO
M. l’abbé Lavergne ne pensait pas que ce qui sc pratiquait si fré
quemment en Angleterre put être interdit en France.
11 faut bien admettre que les tendances de son esprit le portaient
à faire des substitutions , c a r, dans le mémoire auquel nous répon
dons, on reconnaît en analysant l’article 6 du testament, que la dis
position qu’il contient est une substitution prohibée.
Il est vrai que le sieur R o u c h y , héritier, comme les sieurs
Diernat et A rn al, a intérêt à en signaler une dans cette partie du
testament; maison ne veut pas en trouver dans les articles premier
et deuxième, qui concernent le sieur Rouchy.
Bientôt nous démontrerons que la substitution des articles p re
mier et deuxième est bien plus manifeste , bien plus étendue, bien
plus en opposition avec l’esprit et le texte de notre législation que
celle de l’art. 6.
Mais disons, avant tout, que quand on apprécie ce testament
dans son ensemble , on reste frappé de cette pensée que le testateur
a la ferme conviction qu’il peut disposer, en législateur suprême, de
la transmission de scs biens., de leur em p loi, et des moyens de
perpétuer son nom jusqu’à la fin des siècles.
S ’agit-il de cette propriété de Longevergne , acquise aux dépens
de son tra v a il, embellie par scs soins, l'immeuble le plus important
de sa fortune , le manoir de cet homme à qui la famille a été inter
dite et qui voudrait se survivre à perpétuité sur cette ierre, la puis
sance du testateur réglera la transmission à perpétuité.
S ’agit-il de son nom , qui va mourir avec lui , il l’attache au ma
noir dont la transmission est réglée par son autorité sans limites
et sans pensée de contrôle.
S ’agit-il d’un domaine moins important, celui de Labastide, il
veut bien s’arrêter à la quatrième transmission dans l’exercice de
cette puissance de réglementer les siècles.
S ’agit-il de ses bienfaits, de ces pensées libérales et religieuses
en même temps, que nous louons et que nous voudrions détacher
�v
— 4 —
de quelques prescriptions où perce la vanité humaine , admet-il
qu’un contrôle , qu’une surveillance de la loi ou de l’autorité soient
possibles. Non, c ’est l’homme mort qui doit avoir tout prescrit,
tout réglementé, et tout doit se courber dans les générations qui
vont suivre de siècle en siècle, devant cette inflexible volonté ; et
celte voix qui s’éteint veut, dans mille ans, dans deux mille anS,
parler encore aux générations futures, et veut parler pour ordonner.
Non , prêtre , vous vous trompez : accoutumé à des pensées de
toute puissance , vous avez exagéré l’humaine puissance.
L ’homme , après lu i, ne laisse rien sur cette terre.
L a loi civile a voulu encourager scs efforts et lui ménager à
l’heure suprême des consolations. Mais en créant le droit de dis
poser, elle devait se montrer sagement économe de ce d r o it , car
dans votre sylême , une génération pourrait l’absorber entièrement
aux dépens des générations futures.
Pour votre nom , vous vous trompez encore : de voire seule
puissance vous ne pouvez pas l’ imposer ; l’autorité supérieure a ,
de par la l o i , son droit de permettre , son droit de défendre.
Pour vos bienfaits eux-inèmes vous êtes dans l’erreur.
V os ¡mentions protectrices de la vieillesse et de l’eufancc méri
tent les respects de tous. Mais ne croyez pas qu’elles puissent,
qu’elles doivent être exécutées comme vous le prescriviez , sur le
vu seulement de vos ordres écrits.
Non , ici la loi veille encore.
Elle ne veut pas que par des libéralités exagérées , les membres
des familles déshéritées puissent devenir de nouveaux pauvres
qui auront recours à la charité publique ;
E lle ne veut pas que par des dispositions trop étendues pour des
corporations, des établissements de charité ou des fondations, des
masses trop considérables de propriétés se trouvent frappées de
main-morte, sorties du commerce cl de la circulation.
�-
5
-
¿if
Elle ne le veut pas , par les mêmes raisons qui s’appliquent aux
substitutions; seulement, à la différence de cc qui a heu pour lt*s
substitutions, ne pouvant pas créer une règle absolue pour ces libé-r
râblés , elle les a soumises à une approbation de l'autorité supé
rieure , et si l'autorisation a lieu , pour le tout ou pour partie , elle
réglemente cl surveille encore l'exécution.
Uisons-le sans crainte d’èlre démenti : M. l’abbé Lavergne, dans
toutes les parties principales de son testament, s'est exagéré la
puissance qu’il tenait de la loi de disposer de ses biens.
Ces dispositions de la loi se lienl à des principes d’ordre public ,
à l’organisation loutc entière des sociétés , et ne sauraient fléchir
devant une volonté particulière , qu’ il faut entourer sans doule de
respect et de protection , mais alors seulement qu elle s’est e xp ri
mée dans les limites de cc qui est permis à l ’homme.
On a pensé avec raison , dans le mémoire publié pour le sieur
Roucby , qu’il ne suffisait pas pour apprécier cette cause de meure
sous les yeu x do la cour les articles du testament qui servent de
base principale à la discussion , qu'il fallait que l’œuvre entière fût
connue des magistrats , et cependant, après avoir cilé le lexie des
art. I er et 2% on s’est borné à donner l’analyse des 5 a articles qui
suivent. Nous ne pouvons admettre ni l’exactitude de l’analyse ui
le système en lui-môme.
Quant à (’exactitude de l’analyse, nous pourrions signaler plu
sieurs omissions importantes. Nous n’en indiquerons qu’ une comme
exemple : Sur l’ai ticle 5 , après avoir dit que le testateur donne
aux Dieruat une somme de 8,ooo fr. à prendre sur le revenu du
domaine de Longevergne , on passe complètement sous silence les
dispositions finales, expression si nette de ses pensées, et qui portent :
« J e leur aurais donné le domaine s’ils se fussent mariés , mais
» leur grand i\ge a fait perdre tout espoir de mariage. «
Quant au système , nous l’avons tous dit dans les plaidoiries ,
c’csi le testateur lui-inèinc qu’ il faut lire dans l’expression littérale
�de scs pensées , c’esl lui qu’il faut juger , c’est le lexlc complet du
testament que nous mettons ici sous les j e u x de chacun des ma
gistrats.
Il sera imprimé à la suite de ce mémoire«.
Ce testament , dit-on dans le mémoire , avait paru conférer au
sieur Rouchy le titre et les droits de légataire universel ; aussi l’o r
donnance qui l’envoyait en possession eu cette qualité , avait-elle
été maintenue par un premier jugement du 12 janvier 1848.
C ’est là une erreur.
Des qu’il eut été formé opposition à l’ordonnance , Rouchy r e
connut parfaitement lui-même qu’il 11e pouvait pas espérer de se
faire déclarer héritier universel, et, à ce litre, saisi de l’ universalité
de la succession et des biens dont il n’aurait pas été disposé d’une
manière spéciale. Aussi s’empressa-t-il de form er, par conclusions
du 1 1 novembre 18 4 7 , unc demande incidente, tendante à ce que,
dans le cas où il serait seulement légataire particulier, les héritiers
naturels fussent tenus de lui faire délivrance.
Sur ces conclusions subsidiaires , il s’élève des difficultés de
forme; les Diernat et Arnal soutiennent qu’une demande en déli
vrance de legs particulier, est principale et 11e peut pas être formée
incidemment par conclusions , et le tribunal , loin de juger ou
même de préjuger que Rouchy était légataire universel, ordonne
par le jugement qu’on invoque , qu’il sera plaidé au fonds sur la
demande incidente de Rouchy tendante à la délivrance de son legs
particulier , demande qui soulevait celle de la validité de ce legs
grevé de substitution.
Ainsi, ce jugem ent, s’il préjugeait quelque chose , c’est que le
sieur Rouchy serait légataire particulier et non légataire universel.
On plaide donc au fonds.
E t alors sont tranchées, par le tribunal, par des motifs aussi
simples que nets, mais frappants de vérité, les questions qu’on sou
lève de nouveau devant la cour , et qu’on soutient entourées de
grandes didicullés, sans doute parce qu’on se préoccupe de l’iu-
�— 7 —
lerét qui y est attaché , plutôt que ties tonnes, du sens des disposi
tions mises en présence du texte et de l’esprit de notre législation.
Nous allons les discuter à notre tour , dans l’ordre où les adver
saires les présentent dans leur mémoire.
PREMIÈRE
QUESTION.
f.c sieur Rouchy est- il légataire universel de l’abbé Lavergne.
L a lecture attentive du testament que nous avons mis sous les
yeu x des magistrats devrait contenir toute notre réponse ; e t, eu
effet, dans quel article, dans quel passage, trouve-t-on de la p a r td e M #
l’abbé Lavergne la manifestation de la volonté que le sieur llouchy
recueille tous les biens dont il n’aurait pas nominativement disposé,
ou ce qui restera après les legs payés? Dans quelle partie l’appellet-il à l’ universalité de sa succession et à toutes scs éventualités? On
lie peut pas citer un seul texte.
Et comment nos adversaires pourraient-ils en trouver, eux qui
se montraient, dans la plaidoirie , si exigeants pour que les termes
fussent dispositifs.
Comment organise-t-on donc cette qualité de légataire universel
qu’on veut faire reposer sur la tète du sieur llouchy , et à laquelle
on a vu qu’il ne cr oyait pas lui-mème dans le principe.
On invoque l’art. 1002 du Code civil ; 011 se garde bien d’ v
joindre le lexte de l’art. io o 5 .
O11 cite différents textes du droit Romain , desquels il r é s u l te
que l’héritier créé par le testateur, succède à tous les droits du
défunt; qu’en droit romain, l’institution d’héritier se faisait de
diverses manières, et que l ’omission de quelques mots dans la ma
nifestation de volonté qui désignait l’héritier n’eimièchnit nas de 1
*
jV
�en conférer les droits par l’application de celle maxitnc .* Politis
voluntatem quatn verba spectari plaçait.
Parlant de ces premières idées , 011 ajoute : les art. i«T et 2« du
testament contiennent 1111 legs Irès-imporlant en faveur du sieur
Roucliy ; cependant ce n’est pas là précisément qu’on signale le legs
de l’ universalité; 011 s’en garde bien ; on tomberait sous le coup de
l’art. 896 ; mais on dit : après avoir fait ce le g s, le testateur parle
encore de Roucliy dans plusieurs passages de ce long testament ,
cl il le désigne ainsi : Roucliy , mon héritier; Rouchy, l’héritier du
domaine de Longevergne ; or il faut appliquer là ces lois Romaines
qui voyaient une manifestation complète de la volonté dans ces
mots :
Totius hæreditatis meœ dominus esto ;
I aicîus hæres esto , ou Lucius hæres , ou Lucius esto.
Loin de nous, la pensée de proscrire les citations puisées dans le
dioit Romain ; mais on nous accordera sans doute que ces citations
portent souvent à faux, et que cela doit être nécessairement lorsqu’on
les applique à des matières sur lesquelles nos législateurs ont cru
devoir s’écarter complètement des règles admises en droit Romain.
C/est ce qui arrive ici :
On reconnaissait, en droit Romain , que le testateur ne pouvait
commander qu’à l’héritier qu’ il instituait et non à l’héritier du sang
qui ne tenait son droit que de la loi ; aussi ne pouvait-on pas faire
des legs sans nommer un héritier, et si l'institution manquait , si
elle était nulle, les legs tombaient avec elle. Polhier , des dona
tions et testaments. Chap. 2. Scct. 1. § 1.
Cet héritier ne pouvait pas en même temps être légataire. Jlœ r e d i
à scineti[>so legari non potest (même auteur, chap. 3 , art. /}.)
»
« On 11e pouvait pas non plus, dans le droit Romain, dit G renier
( d is c o u r s historique, p. 2 8 ), mourir comme ayant fait une dis-
j- position testamentaire d’une partie de scs biens, cl 11’cn aya*:-
�-
9 -
/
» pas fait pour le surplus , ce que les lois Romaines rendaient par
» ces termes : parlirn testât us partim intestatus,... ce qui pro» duisit celle conséquence que l'institution d'héritier pour une
» partie de la succession , quelque modique qu’elle fut avait l'effet
» d’attribuer le tout à l’héritier testamentaire. »
E t c’est à ce sujet que M. Grenier dil : ces trois mots , Lucius
îiæres eslo faisaient un testament.
Ces règles n'étaient pas celles de nos coutumes; elles avaient au
contraire pour maxime : Fintitution d'héritier n'a lieu ; elles ne
permettaient pas aux particuliers, dit Pothicr , de se donner à euxînémcs des héritiers.
Les rédacteurs de nos codes ont admis, ont le voit .assez, d’autres
principes , d’autres règles ; ils ont permis de se donner un héritier
sous le nom de légataire universel , mais ils n’en ont pas fait une
condition de la validité du testament cl n’ont pas subordonné l’exis
tence des legs particuliers à celle du legs universel ; mais ils ont
reconnu qu’en présence des anciennes habitudes , on ne pouvait
pas imposer aux pays de droit coulumier les formules ordinaires
du droit écrit, et réciproquement.
« Toutes ces dispositions , d i lM . Grenier (t. r r , 5e édition ,
» p. 4 ? 5 ) qui tenaient à d’anciens usages des Romains qui depuis
* bien longtemps devaient nous être étrangers, ont enfin disparu de
» notre législation , on a cru toujours devoir permettre des dispo» positions sous le nom d'institution d'héritier par égard pour les
» anciennes habitudes contre lesquelles on lie sescrait pas clevé sans
» inconvénient ; mais il est indifférent que l’on qualifie celui ci qui
» on fu it des dispositions, d ’héritier ou de légataire. E n matière
» de testament ces mois : donner , instituer héritier, léguer, de» viennent par eux-mêmes sans conséquence. L ’objet essentiel, est
* que la disposition soit claire et précise. T el est le résultat de
» l’art. 9G7 où il est dit : Toute personne pourra disposer p a r
« testam ent, soit sous le titre d'institution (Théritier, soit sous
* le titre de legs , soit sous toute antre dénomination propre à
�» manifester la volonté , disposition que l’on retrouve dans la
» seconde partie de l’art. 1002. »
A in s i, tout le monde reconnaîtra qu’en droit Romain où on ne
pouvait pas faire un testament sans faire un héritier, on 11e dût pas
facilement admettre qu’un acte présenté comme
testament ne
contînt pas de nomination d’héritier, pour peu que les expressions
employées par le testateur fussent de nature à faire supposer qu’il
s’étaii conformé à cette prescription fondamentale de la loi.
M a is, parmi nous, il 11’en est plus ainsi : faites un légataire
universel ou n’en faites pas ; grevez ou ne grevez pas ce legs uni
versel de legs particuliers ; faites des légataires à titre universel
ou n’en faites pas , ne faites que des légataires particuliers ; grevez ,
si vous voulez, ces legs particuliers de certaines charges ou du
payement de certains legs particuliers , lout cela est dans votre
droit. 11 n’y a plus de forme spéciale.
Les maximes du droit Romain, que le testateur ne peut prescrire
qu’à l’héritier de son choix el non à celui du sang , qu’il n’y a pas
de testament valable sans désignation d’ un héritier, qu’on ne peut
pas m ourir, partirn tes talus , partim ¿nies lattis;
La maxime du droit couluiuier, d’après laquelle la loi seule et
non les personnes désignaient l’héritier, institution d'héritier n'a
lieu;
Tout cela est proscrit.
L a loi ne considère plus que la manifestation de la volonté ;
Pour la faire exécuter dans toute son étendue , si elle ne dépasse
pas ce qui est permis ;
Pour la restreindre, si elle dépasse certaines bornes ;
Pou r l'annuler en entier, si ces bornes sont dépassées de telle
manière, que les restrictions nécessaires ne produiraient pins
qu’ une volonté tellement tronquée qu’ il fut incertain qu’en cet étal
celte volonté fût encore celle du testateur.
�- IX -
'
/*6l
Mais encore en cet état, la nullité à la différence du droit romain,
ne porlc-t-clle pns sur le testament entier, mais seulement sur les
dispositions qui sont frappées par les proscriptions légales, et toutes
les autres, quelle que soit leur forme, universelle, à titre universel
ou particulier, restent debout, parce qu’elles restent des volontés
non douteuses.
..a
A présent, nous pouvons adopter, sans restriction et invoquer
nous-mêmes la maxime de la loi 10 1 de ni conditionibus testunien-
torurn voluntatem potins quant vetba cotis idc rare oporlet.
Cherchons donc celte volonté de bonne f o i , cl le texte qui est
sous les yeu x des Magistrats leur fournit tous moyens de contrôle.
Une première question se présente , et sa solution est de la plus
grande importance pour lever tous les doutes.
M. l’abbé Lavergnc pouvait, sous une dénomination quelconque
(le s termes ne sont pas à considérer), disposer de l’universalité de
scs biens, au profil de telle ou telle personne, et charger celte p e r
sonne de payer ou délivrer tous les legs particuliers qu’il lui plairait
de faire ;
Ou bien il pouvait faire des legs particuliers et dire qu’ une fois
ces legs payés ou p rélev é s, le surplus de scs biens appartiendrait à
telle ou telle personne.
Il pouvait employer l’un ou l’autre do ces m od es, en quelques
termes que cela fût dit, faisant passer la disposition universelle
avant les dispositions particulières , ou faisant l’inverse , grevant la
disposition université d’ un petit nombre de charges , ou , au con
traire, lui en imposant d ’ une importance telle, que le legs universel
fût, d’après l’état de la succession à sou ouverture, réduit à rien.
Cela serait insignifiant ; nous ne nous arrêtons pas à la formule
du langage ; nous ne nous arrêtons pas à l ’importance matérielle
des dispositions ; nous ne considérons que leur caractère de géné
ralité ou de spécialité ; si, d’une manière quelconque , il a exprimé
celte volonté, d’une part, de généralité de sa succession, quelle que
�fût sa valeur et, d'autre part, de spécialité , il y a un légataire, uir
héritier universel, il y a des légataires particuliers.
Mais il pouvait aussi disposer taxativement, nominativement d’un
certain nombre d’objets de sa succession, ou de tous les objets de
sa succession ; s’il l’a fa it , il y aura des légataires particuliers, plus
ou moins nombreux; et que certains de ces legs soient minimes,
que d’autres soient très importants , cela n’a aucune influence sur
leur caractère réel, il n’y aura»toujours que des legs particuliers, et
il ne lui était pas prescrit , de par la loi et sous peine de nullité,
comme en droit rom ain, de faire un légataire, un héritier universel.
A présen t, qu’a-t-il fait? Y a-t-il une seule disposition d'univer
salité, ou de ce qui restera, les legs payés ; il faut lire, et évidem
ment 011 n’ en trouve pas trace ; n’y a-t-il pas, au contraire, minu
tieux détails des objets immobiliers et mobiliers de la succession,
recevant tous une destination spéciale; encore une fois, il n’y a
qu’à lire.
Disons même q u e, dans les intentions qui animaient évidemment
le testateur, cela ne devait pas être autrement.
Aristocrate de goût et d’éducation , beaucoup plus que de nais
sance , il s’était fait un fief, c’était Longevergne, fruit de ses travaux,
et de ce qu’ il veut bien appeler scs faibles talents ; il faut y attacher
le nom du fondateur, le transmettre de génération en génération,
et pour cela ce ne sont pas les affections qui sont à considérer ;
j’aurais donné ce domaine aux D ie rn at, dit le testateur, mais pour
remplir mes v u e s, ils sont trop vieux, alors ce sera R o u c h y , cor
donnier à Ilouen , petit-neveu , et, pour le but que je «ne propose,
le petit-neveu de trciHe ans doit avoir le pas sur les neveux de
soixante.
Ce n’est pas là de la préférence dans l’ordre des aflfectious du
testateur, c’est le moyen d’assurer l’exécution d’une volonté qui ne
tient en rien à la personne de Rouchy.
Scs affections , quelles sont-elles, après cette idée fixe de création
d ’un majorai?
�—
i3 —
Sa famille, et les pauvres d’une manière générale. 11 esl donc de
toute évidence que , lors même qu’il mirait eu des valeurs beaucoup
plus considérables que celles dont il a disposé, il les aurait réparties
dans cet ordre d’aflection : rien dans le testament n’annonce une
préférence, et s’il y en a une, elle est énoncée dans la parlie finale
de l’art. 3 du testament, et cette préférence n’est pas pour le sieur
llouchy.
Ainsi, pas de dispositions à faire un légataire universel ; cela était
même contraire à cette pensée de tout faire émaner directement de
lui et de tout réglem enter, et aussi rien, dans les termes , qui soit
attributif de l’universalité.
M ais, dans diverses parties de son testament, disent les adver
saires, il üppelie llouchy , son héritier , ou L’héritier du domaine
de Longcvergne, et c’est en citant un axiome duquel il résulte qu’il
faut considérer la volonté plutôt que les mots , que , cependant on
veut de ce mol qui n’est accompagné d’aucune attribution, d’aucune
expression de volonté, qui reste à l’état de désignation, faire résulter
que M. l’abbé L a v e rg n e , a donné à U o u cliy, tous les biens dont il
n*a pas spécialement disposé, qu’ il l’a institué son légataire uni
versel ; en sorte q u e , certaines valeurs qui ont été omises dans les
dispositions toutes spéciales du testateur devraient appartenir à
llouchy et non aux héritiers , et que, si une succession de 200,000
francs était échue à M. Lavergne, sans qu’ il en eut eu connaissance,
ce serait encore au sieur llouchy qu'elle appartiendrai^, et non aux
héritiers du sang.
A l’appui du système qui attache tant d’importance à une qualifi
cation qu’on sépare de la disposition, 011 invoque un arrêt de la
Cour de Lim o g es, du 8 décembre 18 37 ( S . 3 q -2. 27 ).
Que la Cour veuille bien se mettre sous les yeux l’espèce dans
laquelle cet arrêt a été ren du , et elle y verra qu’ il y a dans le tes
tament institution formelle de légataires universels, cl que la dilliculté naissait surtout de ce que ces légataires universels étaient au
nombre de trois, sans être bien expressément conjoints dans la
disposition ;
�/x^
— »4 —
E t que néanmoins 1’arrètiste dans une note a soin de mettre le
lecteur en garde contre les applications qu’on pourrait faire de cette
décision.
Mais s i , comme le disent les adversaires , il faut considérer l'in
tention et non les paroles, ne faut-il pas par l'ensemble des disposi
tions du testateur, e t , par ses habitudes , chercher le sens que lu i ,
dans sa pensée, donne aux mots dont il se sert.
Suivant v o u s, Ilouchy , mon héritier; Rouchy , héritier de
Longevergne , n'est pas le synonime de R o u c h y , légataire du d o
maine de Longevergne auquel mon nom est attaché, et cependant
comment s’exprime le testateur dans l’article i " , en disposant du
domaine de Longevergne : Telle est mon intention qu 'il en soit
seul et unique iie iu t ie r . Comment s’exprime-t-il encore dans le
même article en disposant de ce domaine, il le donne ci l'exclusion
de scs autres patents et iieiutieiîs.
Donc le testateur attache aux mots héritier d ’un domaine , 1 a
môme portée, le même sens qu’aux mots légataire d ’un domaine.
Donc encore ses parents, dans sa pensée, restaient bien ses héritiers.
Car en parlant de R o u c h y , fh éritier du dom aine , il parle de scs
autres parents et les appelle ses héritiers.
$
En sorte que si on voulait que Rouchy fût légataire universel par
cette expression sans attribution autre que celle de legs spéciaux ,
les parents qui n’ont pas besoin eux d’attribution , pourraient égale
ment revendiquer la dénomination sous laquelle ils ont été désignés :
il les appelle ses héritiers.
Il est à remarquer q u e, dans le mémoire où on relève avec tant
de soins toutes les dénominations d’héritier employées par le testa
teur, celle de l’art, i " , appliquée à Rouchy cl qui devait frapper
la première l'attention, est la seule qui ait échappé au rédacteur.
Elle est cependant l’origine , la clef de toutes les autres dénomi
nations semblables.
II a dit que Rouchy serait, à l’exclusion de tous les autres héri-
�—
15
—
{¿ers , le seul héritier du domaine de Lon goverg n c, cl qu’il devrait,
lui cl scs descendants, porter son nom à perpétuité. H appelle par
lu suite Rouchy son héritier ou l'héritier du domaine de Lon gcvcrgne.
Et il est si vrai que celte dénomination en rapport, au surplus,
avec la formule usuelle en Angleterre, n’a d’autre source, d’autre
cause que celle qui procède de la libéralité des articles 1 “ et a,
que le testament ne contient pas d’autre disposition qui puisse y
fournir le moindre prétexte, que toutes celles qu’on y trouve la
repousseraient .au contraire.
Que donne-t-il, en effet, à Rouchy de plus quece qui est contenu
aux articles i er cl 2e?
A l’article 2 8 , il exprime la crainte que ses meubles soient brisés
par le transport d’une localité dans une autre, ce quiserait arrivé si
les héritiers en avaient faii le partage. Alors il les donne à R o u c h y ,
mais il veut qu’il paye à ses parents, pùur leur p a rt, différentes
sommes désignées.
Ainsi, sans une disposition expresse, les parents auraient partagé
le mobilier; il n’y avait donc pas de legs universel.
Il veut toujours qu’ils le partagent; mais , dans le seul but d’éviler une détérioration, il fait la licitation , et fait payer à chacun leur
part en argent; donc, dans sa pensée, s’ il a fait un légataire, ce qu’il
appelle un héritier dù domaine de Longcvergne , ¡1 n’a pas un seul
héritier de tout l’actif de sa succession. 11 laisse, pour héritiers, les
héritiers du sang , e t , dans Je mobilier , il a la précaution de faire
leur part.
A-t-on une part sans cire héritier?
On fait remarquer dans le mémoire que, par l’article 1 9 , le pro
priétaire de Longcvcrgnc est spécialement chargé de payer tous les
frais d’enterrcmciit.
Cette disposition, dans le cas même où elle serait isolée, pourrait
être invoquée contre le sieur Rouchy beaucoup plus qu’en sa (à-
�—
16
—
veur, car, s’il était légataire universel, celle charge pesait de droit
sur lui , et il était inutile de la lui imposer; mais il ne faut pas la
séparer de l’art. 54 où on voit que le testateur donne au sieur Rouchy 2,000 fr. à prendre , d it - il, sur les fonds du gouvernement ,
pour payer celte dépense.
A insi, il sait si bien que Roucby n’a rieu à prétendre en dehors
de son legs particulier de l’art. i cr, que , lui imposant une charge
un peu considérable, qui ne pourra pas être prise sur scs revenus
qui ne seront pas encore échus , il lui fait remettre une somme
spéciale pour payer ces frais.
E t il est tellement vrai que le ¿estateur sait qu'il n’a personne
qui soit spécialement saisi de l'universalité, par son testament, que
lorsqu’il ne peut pas connaître le montant d’une somme dont il veut
disposer, il crée une disposition spéciale de ce qu’ il pourra y avoir ,
ou du surplus.
A in si, la disposition du domaine de Longevergne est tellement
faite dans le seul but de satisfaire cette idée fixe de création de m a
jorai et de transmission de nom , sans intention aiFcclucuse cl per
sonnelle à Jean Roucby., qu’il veut que si, au moment de son décès,
il y a des revenus de ce domaine, échus et non payés , ils appar
tiennent au fils aîné des Julliard.
Ainsi, il ne peut pas bien faire son compte du capital des renies
s u r l 'E t a t , puisque ce capital est variable. Alors il se demande ce
que de viendra le surplus, après payement des dispositions écrites,
si surplus il y a; et comme ce surplus ne serait pas assez important
pour le laisser partager enire lous les héritiers, il le donne moitié
aux enfants d’Anioinc Roucby, de Labaslide, moitié aux enfants
Julliard.
Comment ensuite peut on attacher tant d'importance à ce (pii
n'est qu'une qualification , lorsque dans le testament lui-même ces
qualifications varient dans leur application à la même personne?
S ’il a dit : R o u c b y , mon héritier, dans certains articles,
A l'art. 8 il dit : R o u c b y, mon donataire ;
�— '7 —
Aux articles io cl 1 9 , le propriétaii e du domaine de Longc-
vcrgne;
A l’article 2 3 , Rouchy, mon légataire;
A l’article 2 9 , Rouchy, héritier du domaine de Longevergnc.
Dirons-nous, adoplant le système du sieur Rouchy : vous 11’ètes
que légataire du domaine, par cette raison qu’il vous a appelé lé
gataire , propriétaire , donataire du domaine ?
Non , nous ne le dirons pas; il ne s’agit pas , en cflfet, des expres
sions plus ou moins justes, plus 011 moins conformes au langage du
droit dont le testateur se sera servi dans la désignation d’un individu.
Il s’agit uniquement d’apprécier le fond des dispositions et d’eu
lixer le caractère.
O r, que donne le testateur au sieur Rouchy? il lui donne spé
cialement le domaine de Longevergnc et scs dépendances, et la
réalité est qu’il ne !ui donne pas autre chose, c a r , s’il lui attribue
les meubles meublants , il lui impose l’obligation la plus stricte d’en
payer la valeur qu’ il fixe, et à chaque héritier pour sa part.
S ’ il lui donne (art. 54), mie somme de 2000 fi\, il lui est prescrit
(art. 1 9 ) , de l’employer au paiement de tous les frais funéraires.
iNIais, dit-on, il faut considérer la prépondérance du legs fait au
sieur R ou chy, et on invoque l’opinion de M. G ren ier, pour faire
admettre que l’importance des legs peut servir à en fixer le carac
tère.
On n’a qu’à se mettre sous les yeux ce que dit M. Grenier au
passage cité (t. 1 " , p G5 i , 5e édition), et on verra que cet auteur
traite là des dispositions dans lesquelles il y a concours entre le
légataire universel cl un légataire à titre universel; qu’il explique
parfaitement les caractères des différents le g s, et que nulle part il
11e dit qu’un legs d’un objet ou de plusieurs objets déterminés peut
être considéré comme legs u niversel, parce que ces objets auraient
une grande valeur relativement à l’importance do la succession.
3
�&
~
1 8
“
Conmient eùt-il tenu ce langage , lui qui d i t , t. i f , 5K édition ,
p. 67G, que le legs de tous les bois, de tous les prés, n’est qu’un
legs particulier; que , par la même raison, il ne faut voir qu’un legs
particulier dans celui de tous les meubles et immeubles qui sont
situés dans un département, et qui ajoute : « le legs d’une succession
» écliue au testateur n’est aussi qu’un legs particulier, quelque
» considérable qu’elle puisse élre , et quand même elle fo rm e» rait lu totalité de la succession du testateur au moment de son
» décès. Tel est le résultat des art. 1 0 0 2 , io o 3 , 1 0 1 0 du Code. »
M. G re n ier, en tenant ce langage, s’appuie sur l’autorité de
Chabot.
llic a r d , des donations (art. 5 , n° 1 6 2 6 ) , nous donne p ar
faitement la raison de cette opinion.
Cet auteur examine la question de savoir si on considérera
comme legs universel celui q u i, fait en termes particuliers, com prendait cependant réellement tout ce que le testateur possédait
d ’ une certaine classe de biens.
E t Ricard dit que ce n’est pas un legs universel, « parce que ,
» dans les successions, nous ne considérons pas seulement le pré» sent et ce qui nous paraît, mais nous y comprenons aussi la pos» sibilitè et F espérance ; d’ailleurs le legs étant d’un corps parti» culier, la disposition est certaine cl arrêtée.»
Ici il s’agit bien plus positivement que dans les exemples que
nous venons d’emprunter aux auteurs, (Fun corps certain et arrêté.
L e testateur a voulu donner ce qu’ il désigne, il n’a pas voulu
donner autre chose; il n’ a pas voulu donner les éventualités de sa
succession ; attribuer plus d’ étendue ou un autre sens à scs dispo
sitions cc serait créer un testament.
D e même qu’un legs particulier ne perd pas son caracterc de
legs particulcr parce qu’ il est considérable ; un legs universel ne
cesse pas d’être un legs universel parce que ses résultats sont m i
nimes , et que même , charges payées , le légataire universel sc
trouve en définitive ne rien avoir. 11 serait facile d'en citer des
�— i9 —
exemples, et de prouver que, soit par la volonté du testateur, soit
par des circonstances imprévues, des legs universels se sont trouves
beaucoup plus considérables qu'on
ne
pensait , ou tout à fait
minimes. L e legs particulier est le legs certain , positif; le legs uni
versel est celui des éventualités.
Personne, dit-on , n’est chargé du payement des dettes; ce sera
donc le sieur Rouchy qui les payera? donc il est légataire universel.
On conçoit très-bien par quelle raison le sieur Rouchy rédam e
le payement des dettes , obligation qui n'aurait que des avantages ,
puisque le testateur avait fhit, pour le passif comme peur l’actif de
s i succession, des dispositions toutes spéciales, et que sa succession
n’est grevée d’aucune charge non prévue.
Mais s’il s'en découvrait, dira-t-on?
S'il s’en découvrait, elles seront à la charge des héritiers naturels
qui recevront aussi l’actif dont ibu’a pas etc disposé, cl il en existe.
Enfin, qu’on suppose un testament q u i , absorbant tout l’actif par
des legs particuliers, aurait omis de régler le payement des dettes;
qu’on suppose dans ce cas la renonciation des héritiers naturels,
en résulterait-il qu’il faut créer un légataire universel là où il n’y en
a pas? ¡Non, il en résulterait que le passifserait payé par une réduc
tion proportionnelle des legs particuliers (art. io a 4 -)
Dans le mémoire comme dans la plaidoirie , en voulant soutenir
que le legs fait au sieur Rouchy est un legs u n iversel, ou a été
conduit, par la force des choses, à en revenir aux dispositions des
art. i rr et a1' du testament; c l, en effet, le testateur n’ayant pas eu
réalité donné autre chose au sieur R o u c h y , il fallait bien faire r e
poser les prétentions sur ces articles.
On y esl conduit par la pente irrésistible du terrain.
Lorsq u ’ on dit que le legs doit être considéré comme universel
à raison surtout de son importance, quel est ce legs important dont
on veut parler ?
�Incoiitcsti\blemcnt celui (le L o n ge v erg tie , manoir principal, lit
plus importante des propriétés ; nous devons être nécessairement
d’accord, puisque, sans doute, la pensée du rédacteur du mémoire,
comme celle de l’avocat plaidant, qui l’a d’ailleurs nettement ex
prim é, ne peut pas s’appliquer aux meubles meublants donnés à !a
charge de les p a y e r , et aux deux mille francs donnés pour les
employer.
Ici le magistrat a devancé de beaucoup la réponse que nous
avions à vous faire, et il vous a dit : Mais si la qualité de légataire
universel résulte de la disposition relative au domaine de Lon gevergne , c’est là qu'on vous signale la substitution, et tout legs
grevé de substitution est atteint, par l’art. 89G, quel que soit son
caractère universel; particulier, ou à titre universel.
Cette objection admet-elle une réplique possible, à moins qu’il
ne soit permis aux adversaires de laisser tuer le même legs comme
particulier par l’article 89G, et de le faire revivre ensuite comme
universel.
Voilà les conséquences ou sont conduits même les hommes les
plus éclairés lorsqu’ils partent d’un système qui repose sur une
base fausse.
L a vérité doit se faire jour , elle ressort même des paroles et des
écrits qui la combattent.
Celle v érité, quelle est-elle en définitive?
C ’est que les qualifications, et dénominations diverses données à
Rouchy par le testament, procèdent toutes des dispositions des a r
ticles 1 et a oii ou voit même que Rouchy est appelé héritier a
cause du don du domaine, et qu’alors, pour fixer la qualité réelle
du sieur Rouchy vis-à-vis la succession , il ne s’agit que de déter
miner le caractère du legs contenu aux art. 1 et 2 , et les adver
saires l’ont fait eux-mêmes : c’est un legs particulier.
*
Qu’on réunisse d’ailleurs, si on veut, toutes les dispositions q u i ,
dans le testament, concernent Rouchy.
�— ai —
Art i ' r cl 2. L oîts
o du domaine de Lon covcren
n
D e,7 avec obliiiailon
O
de porter le nom et de transmettre à l’infini ;
Art. 22 Don des immeubles meublants, à la charge d’en payer
le prix.
Art. i g et 2/|. Don de 2,000 fi’ ., pour les employer aux frais
funéraires.
Puis des charges imposées à R o u c h y , mais toutes avec spécialité
et détermination complète , cl en même temps calculées dans le
cas même oii cela n’est pas e xp rim é , de telle manière qu’elles
puissent cire payées sur les revenus du domaine.
Voilà donc trois legs bien déterminés grevés aussi de charges
positives, sans que Rouchy ait rien à recevoir en sus , rien à payer
de pl us que ce ce qui est ordonné par le testateur. Y eùl-il cent legs
de même nature et faits à la même personne, et cent charges fixes ,
le nombre n’en changerait pas le caractère, il y aurait ccnl legs
particuliers.
Deux de.ces legs sont insignifiants ; ils n’ ont même que la déno
mination de legs. L ’autre a, au contraire, de la vale u r; le testateur
y en attachait beaucoup , par suite de l’organisation qu’il faisait.
Mais en définitive, Rouchy n’est pas compris pour autre chose
dans les volontés exprimées ; qu’à présent, à raison de ce qu’il lui
donne , le testateur qui ne connaît pas les qualifications légales ,
l’appèle son donataire , comme il le fait, le testament perdra-t-il
sa nature de testament pour devenir une donation ; qu’ il l’appèle
sou héritier ou l’héritier de L o n g e v e rg n e , ce qui est la même
chose dans sa pensée , entend-il pour cela lui donner plus ou moins?
Cela fera-t-il le s i e u r Rouchy légataire universel? Cela fera-t-il
q u e si le testateur eût laissé dans sa succession 100,000 fr. dont il
n’eût pas disposé, il serait réputé avoir voulu les donner au sieur
Rouchy ?
Il l’a. bien appelé aussi légataire. Rencontrant, cette fois, l’cxpression juste en droit, cela a-t-il plus d’ importance? Mais, 11011.
�Appliquez donc la maxime que vous invoquez ,potius volunlcilcm
qnam verba spectariplacuit , et reconnaissez en même temps qu’il
n’y a , en définitive, dans le testament, qu’ une seule disposition
d’où procèdent les dénominations diverses que le testateur donne
au sieur Rouchy , puisque, dans les deux autres également parti
culières et insignifiantes, au surplus, il ne reçoit que pour payer ;
reconnaissez que vous avez déterminé comme nous le caractère de
cette disposition , et qu’en définitive, celte détermination est même
sans b u t, sans résultat au procès, puisque, si elle contient une subs
titution prohibée , la nullité prononcée par la loi l’atteint dans tons
les cas et quelle que soit sa classification légale.
D E U X I E M E QUESTION.
L e testament du sieur Lavcrgne contient-il une substitution ou
seulement une défense d'aliener ?
L e texte de la disposition qui est sous les yeu x des magistrats
est trop clair et trop formel pour qu’il soit nécessaire de se livrer
à ce sujet à une longue discussion.
II est vrai que le testateur ne se sert pas de ces expressions : le
sieur Boitchy sera chargé de rendre ¿1 ses enfants , les enfants
de Ronchj-, au.v leurs, les enfants des enfants de llonchy, etc ;
car
pour exprimer une à une
toutes
les transmissions
qui
riaient dans la volonté, il n’y aurait pas de limites, cl c’est précisé
ment pour cela que la pensée ne pouvait se rendre que par une
disposition g é » é raie.
Ou
voudrait
pouvoir
soutenir
que
les
mois
charge
de
conserver et de rendre sont sacramentels , ei que sans leur emploi
il n’y a pas de substitution; si on ne va pas toul à fait jusques-là
011 en approche , car après avoir souligné les mois : charge de
�— »3 —
conserver et de ren d re , on dit qu’il faudrait les trouver expressé
ment écrits dans le testament, et on invoque l’opinion des auteurs
cl quelques arrêts.
Nous avons vérifié la plupart de ces citations et il faut recon
naître qu’elles ne sont pas heureuses. P o u rq u o i, par exem ple,
invoquer dans l’ouvrage de M. Toullier le n° 24 du tome 5 , où il
dit, ce qui est hors de doute : « C ’est celle charge imposée au grevé
» de c o n s e r v e r ses biens pendant sa vie et de les rendre à sa mort
» qui constitue ce que les auteurs appèlenl l'ordre successif. » Au
lieu de citer le passage du même auteur, au n<> 5 o , même v o lu m e ,
qui s’applique réellement à la question, car il dit : « toutes les fois
» que l’acte esl conçu de telle manière, qu’il renferme nécessairement
» la charge de conserver et de rendre; quoique non littéralement
•5» exprim ée, sans qu’ il soit possible de lui attribuer un sens différent
» propre à maintenir la volonté du testateur aux yeu x de la loi , la
» disposition est nulle comme renfermant une substitution ; elle est
» nulle quant à la substitution , parce qu’elle est contraire à la loi
» que le testateur avait voulu éluder; elle esl nulle quant à l’ insti» lution du legs principal , parce qu’il est certain que le testateur
» n’a voulu donner qu’à charge de rendre, et qu'il est incertain
» s'il eut voulu donner sans cette charge. »
Ces paroles, et nous pourrions en citer de semblables empruntées
à M. G renier, à Duranton, à ¡Merlin, Coin-Delille , T h é v e n o l, et
à la Jurisprudence, diseut toui'ce qu’il faut dire , et reproduisent
au surplus le texte de l’art. 896 qui, en frappant de nullité toute dis
position p a r laquelle le légataire sera chargé de conserver et de
rendre ¿1 un tiers , exprime très-bien qu’ il n’y a pas à ce sujet
d’expression sacramentelle , cl que comme dans toutes les dispo
sitions testamentaires, il ne s’agit que de chercher cl do recon
naître les volontés quels que soient les formules du langage et les
termes employés par le testateur.
Si à présent ont veut soutenir que dans le cas où les expressions
employées
peuvent naturellement recevoir un sens aulre que
�Jjb
— 2.4 —
celui d'une substitution prohibée , 011 doit croire que le testateur a
voulu faire ce qui était permis plutôt que ce qui lui était défendu.
¡Nous serons de l’avis de nos conlradicteurs.
Que disions-nous , en e ffet, en plaidant? Nous disions, lorsque
sous l’empire d’une organisation sociale qui puisait de la force dans
les substitutions, elles étaient vues avec faveur, 011 en reconnaissait
là où on n’en reconnaîtrait pas aujourd'hui. Ainsi ces mots : J ’ins
titue un tel et ses enjants étaient alors réputés contenir une v o
lonté de transmission successive. Aujourd’hui, si rien autre chose
n’expliquait la pensée, on pourrait ne pas y voir un ordre successif,
mais seulement une disposition conjointe, en ce sens que le père et
les enfants dev raient recueillir directement du testateur ensemble et
par portions égales.
On pourrait encore avoir du doute aujourd’h u i, si on disait:
J ’institue Pierre et après lui ses enfants , car le testateur a pu
vouloir prévoir le cas de son déccs avant Pierre et stipuler que
dans ce cas , il donne à ses enfants , disposition qui reste directe,
qui est une substitution vulgaire, parfaitement perm ise, et non la
substitution, avec ordre successifprévue et prohibée d’une manière
si formelle par l’article 896.
Mais ce doute pourrait encore disparaître devant l’ensemble des
dispositions du testament.
Mais ici, 011 le dem ande, le doute, l’incertitude la plus légère
sont-ils un instant permis , en face d’une disposition qui crée la
substitution en ternies formels , qui en dit toutes les conséquences,
qui attache à sa perpétuité, la perpétuité du nom , et. qui indique
que le choix du grevé a été fait uniquement dans cette pensée de
transmission, on sorte que la stipulation, les conséquences, les mo
tifs, tout s’y trouve.
La stipulation. Y a-i-il rien de plus précis que ces expressions :
« J e lui en fu is donÇii Ilo u ch y ), pour être entièrement à lui et
* ses descendants, après mu m ort , à l’exclusion de mes autres
�-
35
_
» parents cl héritiers , car telle est ma volonté qu’il en soit seul et
» unique héritier, lui et ses enfants, après lu i , de génération
» en génération .
Ajoutez à cela que i ous les héritiers, possesseurs de ce domaine,
présents el à venir d e v ro n t, comme condition absolue, renoncer
au nom de R ouchy , pour prendre et porter le nom de Lavergne.
A insi, nom et domaine, tout se transmet de génération en g é
nération, dans la famille Ilo u c h y , qui prend a la fois, l e bien de
L o n g e v e rg n e , renonce au nom Ilouchy et prend le nom de L avergne , de génération en génération.
L es conséquences. « L e domaine de Longevergne ne sera jamais
» vendu, échangé, morcelé, ni grevé de dettes, sous quelque
» prétexte que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque
» famille, lel que je l’ai laissé à ma mort. » Ce qui est aussi une
répétition de la stipulation.
Puis, tant l’idée de conservation et de transmission complète
existe , obligation à chaque possesseur successif de maintenir les
lieux dans leur état complet d’entretien, réparation et culture.
L es motifs du choix. « J e leur aurais donné ce domaine (aux
» Diernat) , s’ils se fussent mariés , mais leur grand âge a détruit
» tout espoir de mariage.
Si dans le mémoire auquel nous répondons, on n’eût pas passé
sous silence celle partie de Parlicle 5 du testament, on n’aurait pas
demandé comment il sc ferait que le testateur, pour remplir cette
intention de tranmission, eût choisi un homme qui n’était pas marié.
On demande là au testateur ce qu’il a eu le soin d’expliquer.
Ses affections seraient pour les Diernat ; niais il s’agit de l’accom
plissement de la volonté de transmission de génération en généra
tion ; ils sont trop vieux : Rouchy est jeune, et il est choisi unique
ment en vue de la substitution, en vue de ce que la loi défend. Sans
cela il ne l’eut pas élé.
4
�¡¿ fi
-
,6 -
M ais, dit-on , la disposition contient une interdiction de vendre ,
clause réputée non écrite , aux termes de l’article 90 0 , cl on va jus
qu’à dire : le tribunal qui en fait une substitution , a violé la
maxime (juod nullum est nidlum producit effectum.
Etrange application de cette maxime qui ferait que ce qui est
nul ne produirait pas môme une nullité ! ¡Nous n’avons qu’à ré
pondre : Vous avez raison, ce qui est nul ne produit aucun eflet.
L a loi dit que la disposition entachée de substitution disparaît en
entier, dans le legs lui-même comme dans la charge de rendre.
Ainsi, le legs fait au sieur R o u chy , dans les art. i tr et 2« du testa
ment ne produit aucun effet.
O u i, sans doute, il y a interdiction de vendre; mais cette inter
diction résulte implicitement de toutes les substitutions ; ici, elle est
exprim ée; si elle l’était sans que ce fût pour créer une substitution,
ce serait l’article 900 qu’il faudrait appliquer, car l’intention de
gratifier le sieur Rouchy personnellement resterait encore certaine.
Mais lorsque l’interdiction de vendre n’est exprimée que comme
conséquence de la substitution , c’est l’article 896, la loi spéciale de
la m atière, qui doit recevoir son application. ( V o y e z G renier,
troisième édition, p. 1 15 , n° 7.)
D ’autant plus que la piésomption de la loi est ici vérifiée par le
fait, qu’ il est certain que le testateur n’a donné à Rouchy que
poursubstituer, et que la substitution disparaissant, il ne voulait pas
que sa propriété de Longevcrgnc fut à lui.
Nous le comprenons, le système du mémoire doit convenir par
faitement au sieur Rouchy , il lui donne le legs et met au néant les
obligations qui l’accompagnent.
Mais ce système , sous prétexte de maintenir pour partie les in
tentions du testateur, n’en est-il pas la violation la plus manifeste?
N’a-t-il pas dit assez clairement : J e ne donne ce domaine au sieur
Rouchy que parce que je veux le maintenir dans l’état où je le laisse
à lout jamais; je veux le faire transmettre , par Rouchy qui n’est ici
�- *7 A ï)
qu’un m oyen, de génération en génération, sans cela je ne le lui
aurais pas donné, je l’aurais donné aux Diernat. E l on le donnerait,
ce domaine, à Roucliy , lorsqu’on reconnaît qu’on ne peut exécuter
sous aucun rapport la volonté réelle du testateur, celle pour l’ac
complissement seul de laquelle il l’a il passer le domaine par les mains
de Roucliy !
E t on appelle cela exécuter une volonté ! Mais si on voulait faire
accomplir la volonté seconde, alors que la première reste impuis
sante devant la l o i , ce serait aux Diernat qu'il faudrait attribuer la
propriété.
Cela ne se peut pas, parce que le testateur dit seulement ce qu’il
durait ja it s’il n’avait pas voulu fonder un m ajorai, et qu’on ne
peut faire exécuter qu’ une disposition précise.
Mais toujours est-il que lorsque la l o i , comme le disent tous les
auteurs , répute seulement qu’ il n’est pas certain que le testateur
eûl maintenu le legs dans le cas où il aurait su que la disposition do
transmission successive disparaîtrait, ici il est complètement dé
montré , prouvé que la substitution écartée, Roucliy ne serait pas
le légataire. Peut-on à présent, comme on le demande , écarter la
substitution et maintenir le legs , c’est proposer à la cour à la fois
]a violation de la loi cl la violation de la volonté du testateur.
L ’auteur du mémoire, l’avocat qui a plaidé pour le sieur Rouchy
sont d’accord avec nous , la volonté qui est en opposition avec les
principes fondamentaux de noire droit ne peut pas recevoir son
exécution; mais ne devraient-ils pas reconnaître en même temps
qu’alors que la voix qui aurait pu substituer une volonté licite à
celle qui ne l’est pas , ne peut plusT se faire entendre , c’est la loi
qui parle, et qu’elle appelle les héritiers du sang.
Les Diernat n’auront pas tout ce qu’ ils auraient eu si la volonté
du sieur Lavcrgnc pouvait encore ordonner. L e sieur Rouchy
recevra une portion beaucoup plus considérable q u e les Arnal. Mais
cette petite part les sortira de Pelai de domesticité dans lequel ils
�**" vivent. Faut-il, avec l’auteur du mémoire, tani gémir sur le sort de
l ’ouvrier cordonnier qui ne recevra pas un cliàteau , mais qui aura
des moyens d’existence assurés. Ne faut-il pas au contraire se féli
citer de ce que, dans la fortune d’un homme bienfaisant, la part de
tous se trouvera faite , la part des pauvres du village , la part des
pauvres de la famille.
TR O IS IÈM E QUESTION.
Y aurait-il même dans le testament une substitution, elle ne
serait pas prohibée.
Il faudrait, pour admettre celte proposition , que la substitution ,
une fois reconnue, put être renfermée dans les termes de la loi du
17 mai 1 8 2 6 , cl restreinte au second degré inclusivement. E st-ce
bien là ce qu’a voulu le testateur? Devons-nous, pour décider cette
question, nous liv r e r a des recherches nouvelles, afin de constater
de nouveau sa volonté? On comprend très-bien que l’appelant ait
pu diviser en deux questions ce qui a fait l’objet de la seconde et
de la troisième proposition de son mémoire. Dans l’une, il s’agissait
pour lui d’établir que les termes du testament renfermaient une
simple prohibition d’aliéner; il a pu se livrer sur ce point à une
discussion qui laissait en dehors le sujet qu’il traite dans la dernière.
Mais telles n’ont point été les conditions de la réponse qui lui a été
faite. P ou r établir qu’il existait dans le testament du sieur Lavergne
autre chose qu’une prohibition d’aliéner, nous avons été obligés de
prouver que ce testament renfermait une véritable substitution, et,
par suite, d’en démontrer les caractères cl l’étendue. Nous pourrions
donc nous en référer à cette partie de la défense présentée dans les
intérêts des héritiers du sang, et si nous passons à un examen spécial
de cette partie.de la discussion do nos adversaires, c ’est avec l’in
tention de choisir dans leurs arguments ceux qui appartiennent
d’une manière plus spéciale à celle nuance de la question.
�—29—
Jl
Leur argumentation sur cc point n’a qu’ un seul b u t , celui
d’établir que l'hypothèse des deux degrés suffit pour expliquer les
(ormes dans lesquels la substitution est conçue et assurer l’exécutiou
de cette partie du testament.
T
Nous avons déjà prouvé que les vues du testateur embrassaient
un avenir sans limites et l’esprit général de ses dispositions viendrait
ici protester , s’ il était nécessaire , contre le sens forcé que l’on
voudrait attacher à la lettre du testament. Mais la lettre et l’esprit
sont dans une harmonie parfaite à cet égard , comme il nous sera
facile de l’établir dans quelques rapides observations.
Les premières doivent porter sur la valeur des termes employés,
et ce qu’il y a de plus sûr, c’est de nous attacher à la définition
judiciaire qui a pu en être donnée. Nous sommes assez heureux
pour rapporter des autorités irrécusables sur ce genre de difficultés
qui présentent toujours un caractère assez grand d’indécision.
L a loi 220 au D . de vetbis significatione s’exprime en ces
termes : liberorum appcllationc nepotes et prœnepotes cœterique ,
qui e x his descendant continentur. Dumoulin applique «à notre
langue et à notre droit français celle signification du 11101 latin ;
c ’est ce qui résulte du passage suivant de son commentaire sur la
coutume de P aris, lit. i er, p. i 5 : « Verbum gallicum, enfant ,
» non est de se restrictum ad primurn vcl ad alium graduui ; sed
» iudiflerenter suppr.nit quovis dcscendenlcs , sicut verbum liberi
» in loge romanà. » E n fin , Ricard fait dans le même sens une
application plus directe de ce mot lorsqu’ il dit : L e mot enfant est
gênerai pour signifier tous les degrés de la ligne descendante ,
ce qui a lie u , soit qu'il s’agisse dem péc/ier Vouverture d ’un
Jidéïcommis , en conséquence de la condition , s ’il décède sans
enfants , ou de donner effet à une substitution au profit des
petits-enfants.
Cela ne veul pas dire que le mol enfants doive toujours s’enten
dre dans son acception la plus étendue, mais bien seulement que
celle acception csi susceptible de tous les degrés , suivant l'intention
�— 3o —
1
^
.
.
.
de celui qui en fait usage ci les circonstances dans lesquelles cet
usage a eu lieu.
Livrons-nous à celte double recherche pour le testament qui
nous occupe. Quel est le premier mot employé par son auleur en ce
qui touche la substitution, c’est celui de descendants : pour en
jouir, dit-il, cl ses descendants après ma mort; voila déjà une
première preuve que la pensée du testateur 11e s’arrête pas aux
premiers degrés. L e mot descendants 11e s’emploie jamais pour in
diquer uniquement les enfants et les petits-enfants ; ce serait lui
donner un sens impropre ; pour que l’expression soit juste, il est
nécessaire qu’elle désigne une longue lignée de personnes issues les
unes des autres , cl qu’elle p a rle , pour ainsi dire , d’un point fort
éloigné pour remonter jusqu’à l’auteur commun, embrassant alors
dans sa généralité , mais seulement dans ce cas , même les enfants
du premier degré ; c’est le mol de la ligne descendante qui corres
pond à celui d'ancêtres, dans la ligne ascendante. O r, nous défions
la vanité la plus ridicule d’oser appliquer celte qualification à l’uïeul
ou au bisaïeul. A in si, des le principe, nous voilà avertis par le
testateur lui-même; il veut étendre scs bienfaits sur une race tout
entière. C ’est donc dans le sens de cette première expression et
dans le sens conforme de la définition admise par les autorités citées
plus haut qiie l'auteur du testament continue en ces termes : lui et
ses enfants après lui, c’est-à-dire nepotes et prænepotes , cœ teri(jue qui e x eo descendebunt L ’explication qui suit immédiate
ment , de génération en génération , vient compléter la conviction
à cet égard. Celle locution est, en effet, des plus énergiques et ne
s’emploie jamais que pour indiquer une longue succession de per
sonnes ou de choses. Elle a passé dans le langage familier; chacun
de nous peut eu trouver cent exemples pris dans les habitudes de la
conversation et s’assurer , par lui-même, de l’étendue presque in
définie qui s'attache toujours à cette manière de s’exprimer. C ’esi
dans ce sens que les écriture? saintes entendent ces mots, de siècle
en siècle , qu’elles huit.suivre d’une si énergique explication. Il
n’existe qu’une différence, c’est que l’une de ces locutions s'applique •
�— 3 1 —-
«•tu cours du temps, l’outre à celui de l'humanité ; mais elles n’en ont
pas moins l’ une et l’autre un caractère biblique, qui doit conserver
à ces expressions toute leur force, lorsqu’elles se retrouvei.t sous
la plume d’ un prêtre.
L e mémoire du sieur Ronchy ne peut opposer sur ce point
qu’ une objection grammaticale que nous sommes obligés de repous
ser , d’abord au nom de la grammaire elle-m êm e, et pour le main
tien de scs règles. De ce que le mot génération est pris au singulier,
on v e u t conclure qu’il ne s’agit réellemçnt que de deux générations,
dont l’une serait indiquée par le premier emploi du mol génération,
et l’autre par le second emploi qui en esl fait; pour aller au-delà,
le mémoire eût exigé le pluriel. L e pluriel! lorsqu’ il s’agit d’indi
quer un ordre successif, le passage d’une chose à l’aulrc ! Mais
c ’eût été une faute gro ssiè re , en contradiction manifeste avec les
faits que l’on veut exprimer. Plusieurs générations ne succèdent
pas immédiatement à plusieurs générations, elles se suivent une à
une , dans l’ordre des temps, et pour aller de la première jusqu’à la
plus reculée, c’est toujours l’ une après l’autre qu’il faut les prendre;
c ’est donc au singulier que doivent se faire toutes les énonciations
de celle nature et jamais peut-être un plus long avenir n’a été prévu
ou annoncé que par ces mots : de génération en génération.
L a cour exigerait-elle une preuve de plus; qu’on veuille bien se
rappeler qu’une des conditions imposées par le testateur au léga
taire du domaine de Longevergne était d’abandonner sou nom pour
prendre le nom de son bienfaiteur. L e domaine cl le nom étaient
deux choses attachées l’ une à l’autre cl dont les destinées se con
fondaient dans la pensée de M. l’abbé Lavcrgne. Esl-cc à Ronchy
seul qu’il impose l’obligation de prendre et porter le nom de L a vergne? Est-ce uniquement à ses (ils ou à scs petits-fils? Non , c’cst
à sa postérité, à scs descendants garçons et Jilles. Comme la pos
session du domaine doit suivre celle du nom , c’est donc à sa pos
térité qu’il transmet l’un cl l’autre. Il est impossible que celte charge
de conserver cl de rendre soit censée ne plus exister après le second
�degré; c’est une prétention contraire au texte du testament , cl la
cour sait déjà qu’elle est encore plus contraire à son esprit.
QUESTI ON
SUBSIDIAIRE.
L e titre même de cette partie de mémoire détermine nettement
la position acceptée par les auteurs pour la dernière question dans
laquelle ils se réfugient. Ce titre suppose en cflet que les questions
principales ont déjà été décidées dans le sens contraire aux préten
tions de Rouchy. l.a qualité de légataire universel ne lui a pas
été attribuée p a r le testament, ou bien dans tous les cas, le legs
universel se trouvant entaché du mente vice que le legs particuliçr, la substitution fid éi commissaire n'en existe pas moins avec
tous scs caractères juridiques ; elle embrasse la descendance
entière du sieur Rouchy sans limitation ci un degré spécifié , et
ne peut être retenue dans les limites de la substitution légale ;
mais dans ce cas même, à en croire nos adversaires, la nullité ne
commence qu'avec la prohibition , et les tribunaux doivent dis
tinguer : annuler la disposition dans sa partie qui concerne les
personnes appelées ¿1 un degré prohibé , la maintenir à l'égard
de celles qui se trouvent ci un degré où la substitution est p e r
mise. Cette prétention , que l'on cherche à appuyer de l’exemple
des lois anciennes , suppose nécessairement l'impuissance d’appli
quer l’art. 89G aux dispositions qui rentrent dans le cas prévu par
la loi du 17 mai 18 2 G , lors même que ces dispositions excéde
raient les limites fixées par cette loi elle-même. C ’est prononcer en
un mot l'abrogation au moins partielle de cet article si important
île noire droit civil. Celle décision csi-clle admissible? ¡Nous
sommes loin de le penser cl nous espérons pouvoir porter jusqu'à
l'évidence la démonstration qui nous reste à faire sur ce point.
La question ne se présente pas seulement à propos de la loi du
1 7 mai 182G , (îl longtemps avant la publication de ce dernier acte
législatif, ou s’était déjà demandé si la clause ¡m iaule de l’art. 89G
�-
33 -
qui annule toute disposition portant substitution fidéi-commissaire,
pouvait être appliquée au cas ou une substitution faite suivant l’es
prit des an. 1048 et 1049 du code civil lui-mcnie, aurait dépassé
toutefois les bornes fixées par ces articles. Le mémoire publié pour
Iîoucfiy indique suffisamment que ses signataires avaient souvenir
de cette circonstance, mais ils regardaient la solution de la ques
tion agitée p a r eu x comme <Jouteuse sons les principes rigoureux
de l’article 8gf> du code civil, qui prohibait toute substitution et
qui annulait la disposition principale même à l'égard de dona
taire et de légataire, (p . 2G.)
C ’est là sans doute le motif qui les a empêchés d’examiner à ce
point de vue la question qu’ils ont mieux aimé porter sur le terrain
de la loi du 17 mai 18 26. Nous ne pouvons cependant restreindre
notre discussion à cette dernière partie, parce que l’ un de nos con
tradicteurs a repris dans la plaidoirie la thèse abandonnée dans le
mémoire , qu’au fond la loi du 17 mai 182G se confond pour nous
avec l’art. 8 g Sd u code civil,et que la décision pour la difficulté qui
nous occupe doit rester la même sous l’empire de deux législations
émanant des mêmes principes.
Nous allons donc examiner d’abord la question avec les termes
du Code civil, et par rapport aux articles
1048
et 1049 de ce Code.
Une’ premicre observation se présente à cet é g a r d , c’est qu’il ne peut
être dans ce cas nullement question de l’abrogation do l’art. 89G
comme dans le cas où il s’agit de la loi du 1 7 mai 1S26. Ces dispo
sitions du Code civil appartiennent au même titre, elles ont été
publiées en même temps . et pourraient tout au plus présenter
entre elles quelque opposition ou quelque antinomie. Il sera fa
cile de démontrer plus tard comment elles s’accordent et peuvent
trouver une exécution facile et simultanée; il convient d’examiner
avant tout le système qui nous est opposé.
Nos adversaires invoquent la maxime utile p er inutile non
vitiutur; mais il faudrait préalablement prouver que la substitution
faite au-delà du premier degré n’est qu’ une clause inutile, à laquelle
5
�¡¿tlai*loi n'attache aucun caractère réprouvé
34 par elle ; c’est là précisément
en quoi consiste la question , et l’invocation de la maxime rappelée
plus haut n’est qu’une véritable pétition de principes.
E lle ne peut donc dispenser nos adversaires d’examiner avec
nous les motifs de l’exception en vertu de laquelle une substitution,
que la loi déclare nulle au-delà du degré fixé par elle, ne devait
pas entraîner la nullité de la disposition principale dont elle fait
partie. L e C o d e , disent-ils, n’a point, en ce c a s , prononcé la
nullité de toute la disposition. C ’est encore là décider la question par
la question. Si l’on s’arrête aux termes isolés des art. 1048 et
io /j Q,
nos adversaires pourraient donner peut-être une apparence spé
cieuse à leur aflirmalion sur ce point; mais est-ce ainsi qu’il faut
procéder?
Une erreur de fait en quelque sorte sert de base à leur raisonne
ment. Ils semblent croire que la nullité de la substitution faite audelà du premier degré est prononcée par les articles que nous
examinons; il n’en est point ainsi. Que l’on pèse les termes dans
lesquels ces articles sont conçus, et il sera facile de se convaincre
qu’ils ne prononcent directement aucune nullité ; ils valident dans
les cas pour lesquels ils interviennent les donations par actes entre
vifs 011 testamentaires faites avec la charge de rendre aux
enfants du donataire , cm prem ier degré seulement ; ces dernières
expressions supposent une nullité préexistante en ce qui touche les
degrés inférieurs, niais elles ne la prononcent pas. Où donc est
écrite cette prohibition? Dans l’art. 8 9 6 , qui relié ainsi étroitement
aux art. 1048 et 1049 , proclame le principe, tandis que ces derniers
articles introduisent l’exception.
E n cilet, rappelons-nous les circonstances dans lesquelles sont
intervenues les dispositions qu'il s’agit d’ interpréter. Tout ce qui
avait trait aux substitutions avait été effacé de nos codes sous le ni
veau de l’égalité révolutionnaire ; la loi du
octobre 1 7 9 2 s’était
contentée de déclarer toutes substitutions abolies, sans autre com
mentaire que celui des événements au milieu desquels cette abolition
était prononcée.
�— 35 —
C ’est en l’an 1 1 qu’eut lieu la révision de cclte matière au sein
du conseil d’état ,
destiné à être
bientôt une des principales
institutions de l’empire qui se préparait. A cette époque transitoire,
il y a , sur cette matière, plus que sur toute autre transaction entre
les idées qui dominaient encore et celles dont on voulait assurer le
triomphe prochain. Cette double tendance, on pourrait dire cette
double nécessité, sc retrouve évidente dans l’ensemble des discus
sions remarquables qui ont eu lieu sur cclte grave question. C ’est
ainsi que les dispositions prohibitives de la loi de 17 9 2 ont été
proclamées de nouveau comme principe général, en tète de l’art.
8 9 6 , tandis que les dispositions contraires doivent être considérées
comme purement exceptionnelles et restreintes rigoureusement aux
cas qu’ elles ont prévus. Tout ce qui est en dehors tombe nécessai
rement sous l’empire de la règle commune. Tel est le sens du mot
seulement, employé par les art. io/{8 et 1049. Ils ne prononcent
eux-mêmes aucune nullité pour les autres cas de transmission avec
la charge de rendre, parce que le législateur savait très bien que
cette nullité avait été prononcée par lui de la manière la plus abso
lue dans l’art. 896.
Cette vérité ressort toute puissante du rapprochement des textes;
elle devient irrésistible par l’examen des discussions où se sont éla
borés les principes admis dans notre code civil. L à une discussion
unique a eu lieu , et elle a porté en même temps sur l'article 896 et
les art. 1048 et suivants. Ils forment la mémo pensée législative
chargée de donner satisfaction à tous les besoins du moment sur la
matière; c’est un tout indivisible qui n’a pas élé divise dans la dis
cussion prépatoire par le législateur cl ne peut être divisé dans scs
résultats par le pouvoir chargé de faire l’application d e là loi.
L ’art. 89G n’admet aucune exception, pas plus dans la disposi
tion principale ainsi conçue, les substitutions sont prohibées , que
dans sa disposition secondaire , ayant pour but d’annuler, à l’égard
de toutes les parties, toute disposition faite à la charge de conserver
et de rendre à un tiers. Si cet article était resté la règle unique de
la matière, aucunes dillicüllés ne pourraient évidemment s’élever
�Is 6
_
3« -
dans son application; non seulement les substitutions du second et
du troisième degrc seraient nulles, mais elles devraient aussi entraî
ner la nullité d elà disposition toute entière. Quel changement peut
donc résultera cetég crd d es termes des art. 1048 et >049? un seul :
celui qui consiste à excepter de la prohibition générale les dona
tions faites à la charge de rendre aux enfants du donataire, au
premier degré seulem ent ; mais cette exception doit cire restreinte
aux cas qu’elle spécifie, c’est ce qu’ indique l’expression seulement ,
employée dans l’article. C ’est, au reste, ce qui résullc de la na
ture des dispositions elles-mêmes et des principes qui règlent le
domaine du droit général cl celui du droit exceptionnel.'
Quelles sont les autorités citées à l’appui de l’opinion con
traire? Elles sont fort peu nombreuses; identiques dans leurs
moyens elles doivent également tomber devant la même réfutation.
M . Toullier a écrit sur la question une opinion qui paraît ne pas
avoir clé de sa part l’objet des méditations approfondies que le sujet
comporte. 11 l’exprime en quelques mots, comme en passant, et
l’appuie seulement sur les deux motiis que nous avons déjà réfutés;
le i ' r consistant à dire que le code n’a point prononcé la nullité de
toute la disposition lorsqu’il s’agit d’ une substitution fidcï-commissaire prolongée au-delà du degré légal; le deuxième tiré de la
maxime utile par inutile itou vitiatur. INous croyons avoir
démontré sufiisamment ce que de semblables arguments présentent
de futile et d’irréfléchi ; nous n’y reviendrons pas. Q u’il nous soit
seulement permis d’opposer à l’opinion de M. Toullier sur les art.
1048 et 1049 l’opinion de M. Toullier lui-même sur l’art. i o 5o du
même code.
On sait que ce dernier article avait pour but d’empêcher que la
charge de rendre put avoir lieu au profit d’un seul des enfants du
grevé ; il déclare donc que les dispositions permises p a r le s deux
articles précédents, ne seront valables qu’autant que la charge de
restitution sera au profit de tous les enfants nés ou à Huître. M.
Toullier pense qu’ une disposition faite à 1111 seul des enfants serait
nulle en totalité , c'est- à-dire que la charge de rendre 1i un ou
�1
^7
plusieurs enfants ne serait pas seulement invalide , mais encore
la donation directe fa ite au donataire ou au légataire grevé
( Toullier t. 5 , n° 7 2 8 ).
Après avoir professé de tels principes , c’est cependant dans 1«
il" qui suit immédiatement que M. Toullier change de langage et
de décision lorsqu’ il s’agit d’apprécier les résultats de la nullité qui
aurait pour cause l’obligation de conserver et de rendre au-delà
du premier degré.
Pourquoi cette distinction? Les articles io/J8, 1049 et i o 5o ne
sont-ils pas dans le même chapitre? Ne font-ils pas les uns et les
autres partie d’ un ensemble de dispositions intervenues sur la môme
matière, et soumises aux mêmes règles. Si les premiers échappent à
l’application de l’art. 89G, il doit en être de môme pour le dernier.
Nous irons même plus loin à cet égard et nous dirons q u e, si c e 1
argument de l’auteur, consistant à dire que le code ne prononce
point dans ce cas la nullité de toute la disposition , pouvait avoir ja
mais quelque chose de spécieux, ce serait dans l’cspcce de l’article
i o 5o ; car cet article prononce lui-mème la nullité à apprécier , et
il 11c s’explique point sur les conséquences qui peuvent atteindre la
disposition faite en faveur du donataire ; tandis q u e la nullité qui
frappe les substitutions du second degré et des degrés subséquents
a son origine ailleurs, dans les prohibitions générales de l’art. 89G
lui-même , et qu’ elle doit participer nécessairement à toutes les ri
gueurs qui lui servent de sanction.
Il est vrai que RI. Toullier donne un autre motif à la sévérité
qu’il déploie en ce qui touche la nullité prononcée par l’art. i o 5 o ,
dans le cas où la substitution ne serait pas recueillie par tous les en
fants du g re v é ; une pareille distinction , dit-il, ne pourrait être
fa ite que dans d is vues d'orgueil que la loi réprouve. Est-ce qu’il
Ii’y a pas un orgueil aussi grand à vouloir perpétuer une fortune
immobilière dans sa famille , de génération en génération? Est-ce
tpie l’on ne retrouve pas dans ce mode de substitution, et au plus
haut c h e f, toutes les raisons d’ordre public qui doivent la faire
prohiber comme la plus désastreuse de toutes? L ’aflinnative ne
�¡¿b*
-
38
-
pcul être douteuse. Cette contradiction d'avis prouve évidemmeni
que l’auteur s'est laissé entraîner à exprimer sur la question dont il
s’agit une opinion superficielle, cl la manière dont il a décidé celle
dont il s’est occupé en premier lieu, doit faire penser qu’un examen
plus approfondi l’ eùl ramené sur toutes les questions de même na
ture aux véritables principes de la matière.
L a cour connaît du reste les motifs qui ont fait introduire dans le
cod e, à la diflerence de ce qui existait dans les lois anciennes, une
prohibition qui frappe de nullité la disposition entière à raison de la
nullité dont se trouve frappée dans certains cas la clause de substi
tution. L e législateur s’est proposé un double but; il a voulu don
ner une sanction pénale à des défenses toujours éludées jusqu’à lui;
il a pensé que la donation faite sous la charge de rendre formait un
tout indivisible, en-dehors duquel on courrait le danger de ne plus
retrouver la volonté du donateur ou du testateur, et qu’il était im
possible de maintenir un acte semblable dans cet état d’altération
présumée. (M erlin, dict. de jurisprudence verb. substitution,
t. j*r, v. 1 4 . — pages 52 et 522 .) Ces deux motifs de la loi s'appli
quent aux substitutions du second et du troisième de g ré, avec plus
d’évidence et de justice qu’à toute autre disposition iïdci-commissaire.
Que la Cour veuille bien faire elle-même l’expérience de cette
application, cl elle restera convaincue qu’il n’existe pas sur ce point
de la cause une seule considération de nature à justifier un système
qui aurait pour résultat de soustraire à la sanelion pénale de l’art.
896 les substitutions les mieux caractérisées et les plus dangereuses,
celles en un mot que la loi a voulu atteindre par-dessus toutes.
Les mêmes raisons de décider peuvent-elles s’appliquer à la loi
du 17 mai 1826? Sans nul doute en ce qui concerne le plus grand
nombre d’entre elles , et pour arriver sous ce rapport a une dé
monstration complète , nous n’avons qu'une chose a faire , c’est
d'établir que la loi de 182G, fondée sur le même principe que les
art. 1 0 .'|8 cl 1049 i>’a fait autre chose qu’en étendre les dispositions
à un plus grand nombre de cas sans en changer le caractère.
�^9
Pour accepter celte v é rité , il suffit de lire attentivement les dispo
sitions de nos deux lois. L ’ intention du législateur est évidente, il
n’a entendu que modifier les articles du Code sur certains points ,
en les maintenant sur d’autres, et en laissant les dispositions nouvelles
comme les anciennes sous l’empire du droit commun de la matière.
L e projet de la loi du 17 mai 1826 renfermait, outre la disposition
relative aux substitutions, une disposition trcs-gravc qui fut rejetée
par les chambres, et qui tendait à créer un prcciput légal et obliga
toire en faveur de l’aîné miile de chaque famille placée dans de
certaines conditions de fortune. L ’ esprit qui avait inspiré celte
double mesure législative ne peut être douteux ; elle avait pour
but de reconstituer et de conserver en France des fortunes territo
riales propres à constituer une aristocratie nouvelle. Ce fut un des
actes les plus expressifs de la pensée qui dominait le gouvernement
, à cette époque , et l’on peut se rappeler encore combien furent
v ives les oppositions soulevées contre cette tentative. L e g ou ver
nement fut donc obligé d’agir comme celui de l’an II , et par des
motifs tout-à-fait analogues, il fit des concessions pour en obtenir.
L ’article relatif au droit d’aînesse disparut de la l o i , et l’on prit tous
les moyens d’amoindrir autant que possible fes autres modifications
introduites dans la partie si importante de notre Code civil sur les
substitutions.
C ’est ce qu’explique ires-bien le premier exposé des motifs de la
loi présentée d ’abord à la chambre des pairs, et qui est conçue en
ces termes :
« Ainsi, Messieurs, modifier les art. 10 4 8 , 1 0 4 9 0 1 i o 5o du
» Code c i v i l , et quant aux personnes seulement, étendre, mais
» seulement d’un degré, l’exercice de la faculté qu’ils accordent;
» permettre l’excrcice de cette faculté à toute personne ayant la
* capacité légale de disposer de ses biens; permettre aussi.qu’on
* en fasse usage au profit d’un ou de plusieurs enfants du donataire,
» au lieu d’exiger que la donation comprenne tous ces enfants ;
» mais en même temps ne rien changer à ce qui est déjà fixé pour
�» les biens; maintenir les bornes données à la quotité disponible, et
» renfermer dans ces bornes la liberté accordée aux donateurs et
» aux testateurs : lel est évidemment l’un des moyens les plus efTi» caces de favoriser la conservation des biens , sans choquer les
». mœurs et sans changer les bases de notre législation. »
T el est aussi le sens de cet antre passage pris dans l’exposé des
îuotils présenté à la chambre des députés :
« C ’est encore pour cela qu’on a jugé qu’il su disait de modifier,
» en mi petit nombre de points, les articles 1048 et «049 du Code
» civil, et qu’on devait se borner, i ° à rendre la faculté de substi* tu e r , à toutes les personnes qui ont la capacité légale de disposer
» de leurs biens ; 2# à ajouter un second degré au premier déjà
» établi p a r l e C o d e ; enfin à permettre d'appeler indifféremment
» un ou plusieurs enfants du g r e v é , selon la volonté de l’auteur de
> l’institution.
k T e l est, en effet, le projet de loi que nous soumettons à votre
» examen; telles sont les modifications qu’il a paru nécessaire de
» faire subir à cette partie du Code civil. *
L ’identité apparente de ces diverses dispositions législatives avait
semblé telle à tous les esprits, qu’ un magistrat qui faisait partie de la
chambre des députés , crut devoir proposer l’abrogation des art.
io/jS cl io.jg du C o d e , pour y substituer la loi nouvelle, et que M.
le garde-des-sceaux vint réclamer le maintien simultané des deux
lois, parce qu’elles n’étaient ni complètement différentes, ni com
plètement identiques entre elles. On lit dans sa réponse cette
phrase remarquable oii se trouve résumée en peu de mots toute la
vérité sur la question spéciale qui nous occupe : C elte disposition
est si loin d ’abroger les d eu x articles, qu’elle s ’appuie sur eu x ,
qu ’elle part de cette base pour s ’étendre plus loin qu'ils ne le
Jnnt eux-mernes.
La première conséquence à tirer de tout ce qui précède, cYst
que la loi du 17 mai 182G a été ramenée aux principes du Code
i
�—
4I
—
-Á ty
civil, qu’elle n’a entendu faire autre chose qu’étendre les disposilions
exceptionnelles que le premier législateur y avail déjà déposées et
que j devenue ainsi en quelque sorte partie intégrante du Code luim e m e , clic doil être soumise aux règles générales qui dominent
scs disposilions. O r n o u s savons déjà, qu’en matière de substitu
tions , le principe adopté csl celui qui est écrit dans l’art. 896, au
quel on doit conserver louic sa force.
L a seconde conséquence c’est que la loi de 18 2 6 n’a prononcé
contre cet article ni abrogation expresse ni abrogation tacite. E lle
soustrait à son empire les exceptions qu’ elle crée dans le sens et
l’esprit des art. 10 48 et 1049, mais tout ce qui csl en dehors de ces
exceptions nouvelles tombe sous le coup de la prohibition de l’art.
896 du code c i v i l , comme y tombaient, avant les modifications
qu’il a reçues en cette partie , tous les cas qui n’étaient pas compris
an nombre de ceux plus restreints formant les exceptions du code.
L e rnémoir.e publié dans l’intérêt du sieur Rouchy nous semble
contenir des raisons bien faibles en opposition de celles qui viennent
d’être développées. 11 donne pour tout motif à l’art. 89G , sur le
quel s’ est livrée une lutte si grave entre des régimes que les é v é
nements mettaient de nouveau en présence , Vintérêt des 'transac
tions commerciales et la plus grande fa cilité des 'ventes. Soit T
nous voulons bien raisonner dans cette hypothèse; mais que con
clure de ce fuit? L es législateurs de 18 2 6 avaient apprécié au
trement les intérêts de ces transactions ; ils ont aboli l’art. 8f)G
et la prohibition qu’il prononçait; la clause pénale de cet article
a dû disparaître avec la prohibition qui en était la cause. C es
sante causa, cessât ejjectus.
11 est superflu de signaler à Fatteiuion de la cour la forme de cc
raisonnement, réprouvée par l’école elle-même. 11 repose tout en
tier sur des inductions tirées d’une des propositions qui le consti
tuent à celle qui suit cl qui sont toutes contestables. Ainsi, il n’est
pas exact de dire dans le sens absolu du mémoire que les d eu x
législateurs ont apprécié différemment les intérêts des üansac0
�- ^ “
lions ; cela est vrai en cc qui touche le deuxième degré défendit
¿»y*
par le prem ier, autorisé par le second. Tous les deux retombent
d’accord sur le troisième degré, et comme la prohibition commence
à cc point pour l’un et l’autre , elle doit entraîner également sous
l’empire des deux lois toutes les conséquences pénales qui lui ser
vent de sanction. On pourrait prendre ainsi chacune des supposi
tions que nous venons de rappeler, et constater successivement la
fausseté de chacune d’elles et le défaut de rapports qui vicie leur
ensemble; mais il suflit d’avoir fait l’épreuve sur une seule pour les
avoir infirmées toutes.
Il
reste encore un argument contre lequel nous avons réservé
nos derniers efforts parccqu’il présente une apparence plus spécieuse
que les autres. L a loi du 27 mai 1 8 2 6 , disent nos adversaires ,
nous a ramenés complètement aux dispositions des ordonnances de
1 56 o et de 1 747 * Or, le plus savant commentateur de celte dernière
l o i , Thévenot Dessaules nous apprend que la nullité d’une'substi
tution au 5 e degré n'avait d’autre effet que de laisser les biens
substitués libres dans les mains de celui qui avait été appelé au
second degré. Pourquoi en serait-il autrement aujourd’hui sous une
législation analogue
D ?
Deux réponses sc présentent et qui sont toutes deux également
décisives : la première c’est qu’aucune des lois antérieures n'avait
attaché la nullité de toute la disposition à celle de la clause fidéïcommissaire, et que cette différence capitale entre les deux légis
lations explique les motifs qui devaient faire valider cette disposition
dans le premier cas, tandis qu’elle doit être annulée dans le dernier.
Nous répondrons en second lieu que les termes des deux légis
lations peuvent bien être les mêmes en cc qui touche les résultats ,
mais qu'elles ont l’une et l’autre un point de départ bien opposé et
procèdent de principes tout différents.
Quel était en effet le droit commun en cette matière sous l’empire
de l'ancienne législation ? C’était celui de la liberté la plus complète
en fait de substitutions. Les ordonnances de i 56’o et 1 «7.-f7 avait eu
�-
43 -
Â
pour but de les restreindre, comme il est facile de s’en convaincre
en lisant leur préambule; l’exception à cette époque consistait dan»
la prohibition, et Thévenot Dessaules, s'expliquant à cet égard
dans l’ouvrage invoqué contre nous , dit en termes formels , chnp.
4 , p. i r" , que les jidùï-commis sont optirni ju iis , en sot ie que
tout s ’y interprète et tout s’y juge de la manière la plus fa v o
rable.
Nous avons déjà établi que, depuis 1792 , c’est le principe con
traire qui a prévalu. 11 est écrit comme règle absolue et générale
au titre de l’art. 89G du code civil. La faculté de substituer forme
l’exception ; elle est stricti juris et doit être renfermée dans ses
termes les plus rigoureux.
L a conclusion de ces prémisses se déduit d’ elle-mème ; tout ce
qui était douteux ou obscur sur l’ancienne législation devait s’ inter
préter suivant l’esprit des ordonnances dans le sens favorable au
maintien de la substitution , tandis que sous l’empire de la loi nou
v elle, il faut interpréter contre elle tout ce qui peut donner lieu à
interprétation.
L a loi ne s’explique-t-elle pas d ’une manière formelle sur le
sort d’une substitution permise qui se trouve mêlée à une substi
tution faite pour un degré défendu ! C ’est le droit commun de la
matière qui doit être appliqué à défaut d’une disposition spéciale,
et nous savons que le droit commun des deux époques nous conduit
à des résultats tout à fait contraires : le maintien de la substitution
pour la première et sa nullité pour la seconde.
T els sont précisément les termes de l’cspccc créée par le testa
ment soumis à l'appréciation de la Cour. L ’abbé Lavergne pouvait
donner à son neveu en lui imposant la charge de rendre à scs enfants
jusqu’au second degré ; enfermée dans ces limites, l’institution eût
été valable , puisqu’elle se fût trouvée conforme aux dispositions
exceptionnelles de la loi du 17 mai 1 8 2 6 ; mais le testateur a tait
p lu s, il u imposé à tous ses successeurs de génération en génération
�•
~ 44 —
l'obligation de conserver et de rendre l'immeuble qui 11e devait
jamais sortir de la famille; c’est là une disposition inadmissible, une
clause que toutes les parties s’accordent à considérer comme nulle.
L a seule difficulté est d’apprécier la conséquence juridique de cette
nullité.
Sous l’empire des ordonnances de 15 7 0 et 17 4 7 la disposition
principale eût été valable , la substitution eût également produit scs
effets jusqu’au second degré inclusivement. Nul doute à cet égard ;
nous en avons dit les motifs. D ’une part ces ordonnances ne p ro
nonçaient en aucun cas la nullité de la disposition entière; d’autre
part elles avaient admis pour droit commun de la matière la validité
des substitutions. O r , les deux principes contraires sont écrits dans
la loi nouvelle, et un raisonnement analogue doit nous conduire à
une décision complètement opposée, la nullité de la disposition
principale elle-m êm e. Loin d’èlre défavorable à notre cau se,
l’exemple tiré de la législation ancienne vient donc lui prêter un
appui nouveau et inattendu.
INous ne connaissons aucun arrêt qui ail décidé formellement la
question soulevée; mais un grand nombre sonl intervenus depuis la
loi de 1 8 2 6 , étions ont appliqué l’article 89G du Code civil sans
exprimer un seul doute sur le maintien de ses dispositions. On petit
consulter le plus récent rendu par la Cour d’appel de Pau , le 2
septembre 1 8 4 7 , et qui est rapporté dans le recueil de Syeis, tome
4 9 , page i q 3 ; 011 y verra que la Cour y vise plusieurs fois la loi
de 182G , qu’elle puise dans les motifs de celle loi un moyen de
nullité pour le cas dont elle s’occupe , et que cependant elle n’hésite
pas à prononcer en même temps la nullité de la clause de substitu
tion et celle de la disposition principale.
Parmi les auteurs qui se sont occupés de la question, M. Tonllier
seul a exprimé une opinion-contraire et que nous avons déjà réfutée.
Une noie qui se trouve au 5e volume de la dernière édition du
Traité des Donations, de M. G re n ier, rappelle cette opinion et s’y
range; mais elle est évidemment écrilc sous l'influence exercée par
le nom du premier jurisconsulte sur l'esprit de l’auteur, M. Ancdot,
�— 45 —
tyf
jeune magistral de grande espérance , que les événements politiques
om rendu au barreau.
Les autres auteurs sont unanimes dans le sens de l’opinion déve- '
loppée par nous. On peut consulter avec utilité Rolland de Villargues, Vazeille, Dalloz, Coin de l’Isle et surtout Duranton, tom. 8,
n° 5 i. L ’espril et le texte de la nouvelle législation , la doctrine et
la jurisprudence, tout s’élève donc contre l’étrange prétention de
nos adversaires. La loi du 17 mai 1826 était en opposition avec les
mœurs de notre époque et de notre pays ; il n’a été fait aucun usage
de la faculié nouvelle qu’elle avait introduite; elle était en quelque
sorte frappée de désuétude, lorsqu’ une mesure récente est venue
prononcer contre elle une abrogation formelle ; comment pourraiton reconnaître à une loi aussi éphémèrp la puissance d'avoir effacé
de nos codes le principe en vertu duquel les substitutions avaient
été abolies? La cour 11e saurait accorder la sanction de scs arrêts à
une semblable doctrine.
Nous venons de parcourir dans. toute son étendue le 'ce rc le où
110s contradicteurs avaient eux-mêmes renfermé la discussion , et
nous pensons n’avoir laissé sans réponse aucune des objections sé
rieuses élevées contre le système adopte par les premiers juge.«.
Dans une cause de cette nature, les principes ont une importance
telle qu’on hésite à placer à côté du grand intérêt public de leur
conservation des motifs puisés dans des considérations d ’intérêt
personnel et de justice privée.
Mais s’il est des cas où l’on puisse se montrer moins scrupuleux
à cet égard , c’est surtout à propos des affaires où , comme dans
celle-ci , l’intérêt de la famille vient se confondre avec celui de la
société. Nous avons démontré en fait que l’abbé Lavergnc n’avait
été déterminé dans son choix pour Rouchy , qu’à raison des motifs
que la nullité des clauses de substitution doit anéantir. Ses affections
l’eussent dirigé d’un autre côté , et l’exécution de son t e s t a m e n t ,
réduite à la disposition principale, n’est plus conforme à sa volonté
réelle, on pourrait même dire à sa volonté exprimée. Celle exécu
tion serait-elle au moins plus conforme aux principes d ’un régie-
�.
m ent sage et équitable pour la distribution de la fortune de l’abbé
L a v ergne entre tous ceux que la loi et la nature appelaient à la
recueillir? On doit avouer que non ; si le testament s’exécute, quel
spectacle va nous offrir la famille de l’abbé L avergne? Un de ses
membres, appelé subitement d’une humble position à une grande ri
chesse, deviendra seul opulent au milieu de ses parents les plus
proches, réduits à l’état de besoin et de domesticité que de mauvais
sentiments une position semblable peut faire naître dans le cœur de
tous! Si au contraire une répartition plus égale pouvait faire parvenir
à chacun d’eux une partie de ce patrimoine trop riche pour un s e u l,
de meilleures dispositions pénétreraient dans chaque famille avec une
aisance plus grande. L e sieur Rouchy serait encore un des mieux
traités dans le p artag e, et son retour aux habitudes de sa vie toute
entière avec des conditions de fortune meilleures , pourrait lui pré
senter plus d'une compensation à un r ève non réalisé d’une richesse
qui ne fait pas toujours le bonheur.
Cette affaire peut du reste se résumer en peu de mots : Le testa
ment de M. l’abbé L a v ergne présente deux parties bien distinctes ;
l’une sacrée et pieu se, elle sera exécutée par les héritiers naturels
avec tous les scrupules de la piété qui l’inspira; l’autre en opposi
tion flagrante avec les mœurs et les lois de notre p ays, nous ne
l’aurons pas en vain dénoncée à la justice de la cour : nous sommes
surs de rencontrer en elle la fermeté de principes contre laquelle
une disposition semblable doit venir se briser.
DUCLOZEL,
SALVETO N,
T A ILH A N D ,
M IR A ND E ,
]
l Avocats.
J
ï
i A vouès-Licenciés
I
R I OM. — A. J O U V E T , I m p r i m e u r - L i b r a i r e , près le Palais.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Diernat, Michel. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duclozel
Salveton
Tailhand
Mirande
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Michel Diernat, Arnal et autres intimés, contre Jean Rouchy, appelant. Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3018
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3017
BCU_Factums_G3019
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53635/BCU_Factums_G3018.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53636/BCU_Factums_G3019.pdf
488c6cc58eb18f95ca189f9a344325f5
PDF Text
Text
À at).
NOTE EN RÉPONSE
PO U R
JEAN R O U CH Y
CO NTRE
MICHEL DIERNAT, ARNAL
E T AUTRES.
On se propose d’etablir d’une manière succincte les six proposi
tions suivantes :
1 ° Jean Rouchy est légataire universel d'Antoine L a v e rg n e , son
oncle ;
2° La validité de ce legs universel est indépendante du sort de
la disposition particulière au domaine de Lon gevergne qu’on p ré
tend entachée de substitution j
�5 ° L e testament d’Antoiné; Layergne ne renferme pas de substi
tution;
4 “ Si ce testament renferme une substitution , elle n’est que no
minale, et doit être réputée non écrite par application des art. 8 i 5 ,
900 et 906 du code civil ;
5 ° Cette substitution ne, fût-elle.pas réputée non écrite , n’excé
derait pus les dispositions permises par la loi du 17 mai 1826.
6° Si cette substitution dépasse la limite de la loi de 18 2 6 , elle
doit être maintenue pour deux degrés et ne peut être annulée que
pour les degrés postérieurs.
§ I-,
Je a n Rouchy est légataire universel.
Nous disons qu’ il est le légataire universel de son oncle , parce
que, dans son testament, celui-ci lui a imprimé celle qualité presqu’à chaque ligne.
Parce qu’ il lui a conféré les prérogatives cl les charges de l’hé
rédité.
Parce qu’il a été investi du n o m , de la presque totalité de la for
tune du testateur.
Parce que l’intention de l’abbé Lavcrgn c de lui transmettre Funi-
veisurn jus de sa succession n'est pas douteuse.
Nos adversaires reconnaissent que l'institution d’héritier ou de
légataire universel n’ est assujettie à aucune forme particulière ,
qu’il faut avant tout rechercher et faire prévaloir la volonté du
testateur ; mais ils soutiennent qu’Antoine Lavcrgn c n'a ni fait, ni voulu
faire de Jean Rouchy son légataire universel ; que les qualifications
qu’il lui a données dans son testament se contredisent j que d’ailleurs
certaines dispositions de c e testament sonl exclusives do la qualité
'nie llouchy voudrait s arroger.
�Les raisons par lesquelles on lente d’ établir que l'abbé Larergne
n’a pas voulu nous faire son légataire universel ne nous semblent
guère convaincantes.
-
Qu'importe qu’il fut dominé par l’idée d’ériger en majorai son
domaine de L o n g e v e rg n e , par le désir de réglementer l’avenir?
Cotte idée se conciliait parfaitement avec *l'institution d’ un léga
taire universel. 11 a voulu certainement transmettre à l ’uu de ses
parents sou nom et la partie la plus précieuse de sa fortune, n’etaitcc pas vouloir l’appeler à continuer sa personne, à recueillir les
droits qui constituent une hérédité. C ’est vainement qu’on objecte
que le testateur n’avait pas pour Ilouchy d’aflection particulière ,
qu’il a même manifesté pour les Diernat une préférence d ’attache
ment, que 1age de Rouchy lui a seul valu fattribution du domaine
de Longevergne. Si les espérances que l’abbé Lavergne attachait
à l ’àge de Rouchy étaient de nalure à lui faire léguer le domaine de
Longevergne, ù lui faire transmettre le nom du testateur, comment
se seraient-elles opposées à ce qu’ il reçût de son oncle une institu
tion d’héritier qui éiail la consécration la plus, naturelle de ses
espérances. Mais il n’est pas vrai que l’abbé Lavergne n’eut pas
pour Jean Rouchy une prédilection manifeste; dans ses testaments
successifs de 1 855 , 1 8 5 7 , i S 3ç), 1 8 4 2 , 1 8 4 5 , il réitère avec une
rare persévérance les témoignages les moins équivoques de cette
prédilection. En est-il de même pour les Diernat? jNon certaine
ment , car la testament de. 1842 renferme in jln e une précaution
qui prouve qu’il n’avait pas même confiance dans Jeur probité.
O11 ne? prouve donc pas que l’abbé Lavergne n’ait pas voulu
faire de Rouchy son légataire universel; loin de là, c’est la p ré
somption contraire qu’il faut admettre.
V oyons maintenant ce quM a fait en réalité. Depuis le commen
cement jusqu’ù la (in du testament, presque dans chaque clause, il
l’a appelé son héritier, il l’a désigné comme sou héritier, il l ’a
traité comme son héritier.
�Cela équivaut-il à une institution? Nos adversaires soutiennent
que non, se fondant sur ce que nulle part on ne trouve en notre
faveur une disposition générale.
Il est vrai que celtQidisposition universelle manque dans le tes
tament; qu’imporle:si l'institution s’y trouve.
C’est l’erreur de nos adversaires de croire qu’un legs uuiversel
ne peut résulter que d’une disposition; ils oublient l'art. 1002 qui
porte expressément qu’il peut également résulter d'une institution
d’héritier.
.
La différence entre la disposition cl l'institution est facile à saisir.
P ar la première on donne l’hérédité elle-même , par la seconde on
confère une qualité dont les conséquences sont déterminées par la
loi. L e résultat au fond est le même; la forme seule est différente.
Ce qu'il fallait démontrer contre nous , c’est que nous ne pou
vons pas invoquer une institution; on ne l’a pas fait. Cette institulion résulte suivant nous d'une manière indubitable de ce que le tes
tateur, à plus de dix reprises, a nommé Jeau Rouchy son héritier.
Dire de quelqu’un, il est mon héritier, n’est-ce pas dire je v eu x
qu’il le soit. L ’aflirmation n'a-l-elle pas ici la valeur d’une injonction.
Pourrait-on craindre que le testateur eût mal exprimé sa peusée;
cette pensée serait-elle équivoque parce que le curé L averg n e.u ’a
pas toujours appelé Jean Rouchy purement et simplement son hé
ritier, parce qu'il T a parfois désigné ain si': mon donataire, mou
légataire, l’héritier du domaine de Longcvcrgne?
’ Jean Rouchy est le seul des parents de l'abbé Lavcrgne auquel
il ait donné cette qualité de donataire, de légataire, il iliisait donc
entr’eux une différence; tous les autres parents avaient cependant
des legs particuliers. Ces expressions, donataire, légataire, étaient
donc identiques u celle d’héritier , et ne pouvaient s'appliquer qu’à
un don, à un legs universel
Si le testateur , par exception, a appelé Rouchy héritier du do-
�-
5
-
maine de L o n g e v e rg n e , c’est à l'occasion d’ une disposition qui sc
référait à la possession de ce domaine.
Mais ce qui donne la mesure exacte de^l’expréssion d'héritier,
employée par lu i, ce qui en détermine invinciblement la portée,
c’est que l’abbé Lavergne a vérilahlementiraité Jean Rouchy comme
son héritier ; c’est qu’il l’a doté des prérogatives, c’est qu'il lui a
imposé les charges de cette qualité.
Iles prérogatives. Il aura le nom, il aura la fortune, le manoir;
il veillera aux honneurs funèbres ; lui seul, après le décès, pourra
s’introduire le premier dans le domaine de Longevergne; on devra
l’avertir immédiatement, tout devra se faire en sa préseuce.
¡.es charges. C ’est lui qui doit les acquitter toutes : celles qui sont
étrangères a la propriété du domaine de Longevergne , aussi bien
que celles qui sont assises sur les produits de cet immeuble princi
pal. Qu’ont de commun , par exem ple, avec l’attribution particulière
du domaine, le paiement à la commune d’une somme de i , 5 oo fr.
pour un cimetière ; le paiement de 4oo fr. au notaire, exécuteur tes
tamentaire, de 3 oo fr. à un filleul du testateur. En quelle qualité
Rouchy devra-t-il payer ces sommes? Esi-ce une charge de l’hérédilé , est-ce une charge du domaine; l’abbé Lavergne a pris
soin de l’ expliquer, car c’csl à R o u c h y , son héritier , qu’ il a im
posé ces diverses obligations.
‘ *y
1
f
Sans doute , il aurait été plus simple, plus conforme aux habi
tudes juridiques que l’ancien curé de Maintenon se bornât dans son
testament à instituer R o u c h y , sou légataire universel, et à indiquer
ensuite quels legs particuliers , quelles charges poseraient sur lui
en cette qualité.
Une tendance réglementaire fort apparente (favorisée peut-être
par l'habitude de la discipline sacerdotale ) a probablement contri
bué à lui faire adopter le détail minutieux de prescriptoins dans
lequel il semble se complaire. On conçoit aussi qu’un motif plus
sérieux , plus louable, l’ait déterminé à quelques-unes des précau-
fo c r
�Il
...
lions que son testament révcle. L e neveu qu’il choisissait pour son
légataire universel était enlevé par l u i , à une profession modeste,
pour devenir subitement un propriétaire important; n’y avait-il pas
à craindre que cette faveur de lu fortune ne le trouvât pas d’abord
complètement préparé à (ç n user avec discernement; qu’il ne man
quât d’expérience pour liquider sa position ; que scs autres parents ,
mécontents de la situation inférieure qui leur était faite, ne vinssent
lui susciter des difficultés , lui créer des entraves. C ’est, n’en dou
tons pas , pour éviter ce danger que le curé L av crg n c indique sur
<juels revenus , avec quels fonds, dans quel délai les legs particu
liers devront être payés ; qu’il distribue le capital des rentes qu'il a
sur l’iltüt; qu’il se garde , autant que possible, de constituer Jean
R o u c h y , débiteur personnel.
Si le curé Lavcrgnc n’a pas dit d’une manière générale que son
héritier serait tenu de toutes les charges de la succession, c’est qu’il
savait qu’il n’en laissait pas d’autres que celles exprimées au testa
ment. Supposons/cependant, qu’une dette inconnue eût été décou
v e rte , n’ eùt-ce pas été à Jean Ilouchy à l’acquitter, et les Diernat
ne lui auraient-ils pas renvoyé ceux qui se seraient adressés à eux?
Il y avait donc une véritable institution d’héritier.
L a circonstance , qu’eu outre de cette institution, le curé Lavergne aurait disposé taxativement envers son. héritier institué de
quelques-uns des objets compris dans l’hérédité est complètement
•indifférente. Quod ubiuidat, non vitiat. Le testateur posait à la fois
le principe cl les conséquences, voilà tout. La double disposition
se concilie facilement, au lieu de se contrarier.
Faut-il maintenant répondre à l’objection tirée de. l’art, aa du
testament relatif au mobilier? iNos adversaires y voient un partage,
une licitation qui prouve jusqu’à l’évidence que les héritiers d’An
toine Lavcrgnc n’étaient autres dans sa pensée que les héritiers du
sang. C ’est la une prétention vraiment chimérique; car le mobilier
est laissé en blitier à Jean Ilouchy et les sommes qu’ il est chargé
de délivrer soit à dés parents dans les proportions les plus inégales
�— 7 —
cl les moins,,confirmes à leurs prétendus amendements , soit a
des étrangers ne représentent pas la dixième partie de la valeur de
ce mobilier, tandis que Jean R ou chyi;qni ^.suivant la l o i , n’aurait
eu qurun 24m* a plus des t)| 10 pour luî seul
Nos adversaires ont repoussé l’application que nous avons faite à
la question des quelques règles d’interprétations empruntées à la
législation romaine ; ces règles sont cependant aussi celles de notre
droit; elles sont écrites dans les art. 1 i 56 et suivans du code civil,
et la loi romaine n’a fait que nous fournir un exemple. 11 ne faut
pas confondre ce qui tient à l'interprétation des actes avec ce qui
irént au fonds du droit.
Celle première thèse se réduit à des termes bien simples. Si M.
Antoine Lavergnc avait écrit dans son testament, j’institue Jean
Rouchy mon héritier, mon légataire universel; ou je veux- et j’en
tends que Jean Rouchy soit mon h é ritie r, personne , nous le
supposons, n’ bicrail aujourd’hui contester là légitimité de cette
institution."
S ’il avait dit . Jean Rouchy est mon héritier, ne rcconiiaitrait-on
pas encore que cette phrase est équivalente à celle-ci : Jean Rouchy
sera mon héritier , ou à celte auire : J e veux que Jean Rouchy
soit mon héritier. Car comment pourrait-on nier que celui de
la volonté duquel'il dépendait que la chose fut n’a pas manifesté
également sa Volonté en disant d’ une manière plus concise : celle
chose existe.
t
‘
'
Il s’est borné à appeler Jean Rouchy son héritier : cela, suivant
nous, suivant le bou sens, revient au même que s’il avait dit : Jean
Rouchy est mon héritier.
Ou trouverait-on la différence? Si Jean Rouchy n’étail pas son
hérilier, s'il ne voulait pas qu’ il le fut, comment, pourquoi rap
pellerait-il son héritier ?
Il dépendait évidemment de la volonté du
te sta te u r
de faire un
héritier ; — cette volonté pour se réaliser n’ était soumise à aucune
�!
»0É .
........................ ......... - S ; - rormc^partîcuïicrc'/'clie pôtitVàiÎ'sfe ‘formuler en quelques mois. L e s '
expressions' employées né pèrrticltent pas de doute sur la volonté.'i
La sagesse des Romains a décidé la question : Lucius fier es ne
--»fi - ■ • . )lunn'; noüiaoi^jb V ■
.
vaut pas moins que I aicius eslo. La première expression doit avoir
, •;.»
r . .. • njOi^.0D3a 2 i l . 'ïBi .
»
„
i l a merne force et doit..produire .les memes conséquences que l a
secon de, tantumdcmjJicimus.
S II.
L a validité de'ce legs universel est indépendante du sort de la ’
disposition particulière au domaine de Longevergne qu'on
prétend,entachée de substitution .
L es Diernatont prétendu , dans leur M ém oire, que si la qualité
de légataire universel existait au proih du sieur Rouchy., elle ne
pouvait résulter pour lui que de la disposition relative au domaine
de L o n gev erg n e; que si cette disposition est entachée de substitu
tio n , le legs universel doit l’êlrc également ; que l’on ne peut pas
tuer Ici legs comme particulier, cl le faire revivre comme universel.
Cette prétention ne repose que sur une confusion. Non ; il n’est
p ts vrai que la qualité de légataire universel nç résulte pour R o u
chy que de la disposition particulière au domaine ¡de Lon gevergne;
ce n’est pas là qu’il la puise, car elle n’y est pas meme mentionnée.
f,*est sur les articles 3 , 7 , 1 6 , 1 7 , 1 9 , 2 7 , 2 9 , 3 a , 5 2 , 55 , 55
qu’il la fonde , et ces articles sont complètement distincts de articles
1 et 2 qui s’odcnpént’sjiécialcmcnt et'exclusivement de la'propriété
de Longevergne.
Noire proposition , cil fait, demeure donc inattaquable; pour
rait-il , en droit, en être autrement ?
L ’article 896 prononce , il est v r a i , même à l’égard de l'héritier
institué, la nullité de la disposition par laquelle cet héritier est
chargé de conserver et de rendre. La conséquence de cette nullité
�est de ûiire annjuler pour tous 1m disposition yicieuse , de telle sorte
‘
• • 1 • •' ** • U VLlJ . 1
#
qu’elle soit considérée comme non écrite ^ o m m e n’ayant jamais
existé.
L e sort de l'objet compris dans la disposition annulée n’étant plus
réglé par elle, cet objet rentre dans la succession légale ou testa
mentaire du disposant, sans qu’ il y ait à s’inquiéter le moins du
‘inonde de la substitution par laquelle ou a voulu le frapper.
II peut arriver qu’un légataire universel profite en entier de
l’anuullation d’ une substitution et recueille ainsi une partie de l'hé
rédité q u i, sans cette annulation lui aurait complètement échappé.
Il peui arriver,'tout aussi bien , qu’il soit simplement exonéré de
la charge de conserver et de rendre, pourvu que son titre ne lui
eût pas été conféré par la disposition vicieuse, et que la substitution
ne frappât point sur la.totalité de l’hcrédite.
On ne faii pas alors revivre la disposition vicieuse; mais on main
tient la disposition valable, et on n’étend pas jusqu’à elle le vice qui
lui est étranger.
E xem p le. Pierre commence par instituer Paul son héritier uni
versel; il fuit ensuite divers legs particuliers; l’un.de ces legs est fait
à Jac q u e s, mais pour en jouir seulement après le décès de Paul.
Ce dernier legs renferme une substitution; Paul en fait prononcer la
tjnllilé et profite de l’annulation , comme il profiterait de celle de
touUiutrclcgs particulier, comme si au lieu d’êirc héritier testamen
taire, il était héritier du sang.
On ne peut pas lui opposer qu’il se met en opposition avec l’a r
ticle 8 qG; cet article est exécuté. Ce n’est pas en vertu de la dispo
sition qui renferme la substitution qu’il recueille l’objet substitué,
c’est en vertu d’une qualité étrangère à cette disposition.
Si on le décidait autrement on arriverait, sans raison , sans motif,
à restreindre l’étendue du legs universel. Ou diviserait une succes
sion en deux parts diÜ'érciücs, l’ une testamentaire, l’autre légale.
�On créerait des difficultés incalculables; on violerait gratuitement
la volonté du testateur.
La jurisprudence e s t , du reste, positive sur ce poin t, et nos ad
versaires , dans leur M ém oire, n’ont pas osé soutenir la thèse con
traire.
§ 111.
L e testament de l’abbé Lavergne ne renferme pas de
substitution.
Il y a pour toute substitution un caractère essentiel, fondamental ;
l’existence d'une double libéralité. 11 faut que les difïércnts appelés
soient saisis par la même volonté, que leurs droits procèdent de la
même origine ; il faut qu'il y ait une double disposition.
Rencontre-t-on ce caractère dans la clause relative au domaine
de L o n geverg n e; nous croyons pouvoir affirmer le contraire.
Aucune disposition n’est directement faite aux enfants , aux des
cendants du sieur R o u chy ; pour suppléer à cette absence de dispo
sition expresse, on est obligé de fa ire de l’ interprétation, de combiner
ensemble des clauses distinctes pour en tirer des inductions. O r ,
cette manière de procéder est proscrite par la loi (art 1 1 5 7 ) , par
une jurisprudence constante de la cour suprême (arrêts des 24 mars
1 8 2 9 , 5 juillet i 8 5 a , i 3 juillet i 8 3 4 -)
Toullier que nos adversaires nous opposent, dit nettement qu’on
ne doit reconnaître l'existence d’une substitution qu'autant que
l’acte litigieux renferme nécessairement la charge de conserver
et de rendre, et qu'il est impossible d'attribuer à l’acte un sens
différent capable de le valider.
Est-il v r a i , comme on l’a dit dans le mémoire auquel nous r é
pondons, que la volonté de l’abbé Lavergno de faire une substitution
î;c soit manifestée par les termes de la stipulation , par rénonciation
�de scs conséquences , par l'induction de ses motifs? C ’est ce qu’il
faut voir.
La stipulation ne contient de don qu’en faveur de Jean Rouchy ;
on lui fait don du domaine pour être entièrement à lui. Il doit en
être le seul et unique héritier. Si l’on parle de scs enfants , de scs
descendants , ce n’est que par voie dénonciation à l’occasion de la
libéralité faite à Rouchy lui-même; le doute subsiste tout au moins
sur le sens, sur la portée de cette énonciation , cl dans le doute , il
est plus naturel de penser que le testateur a voulu exprimer un fait
conforme aux lois de la nature , que de supposer qu'il a eu l’inten
tion de se mettre en opposition contre les lois de son pays.
Si la stipulation laisse du doute, est-il au moins levé par rénon
ciation de scs conséquences; énonciation qu’on prétend trouver
dans la clause 2 " , par laquelle le testateur défend de vendre , d’é
changer , de grever de dettes le domaine de Longevcrgne, sous
quelque prétexte que ce soit. On fait une pétition de principes en
supposant que l’interdiction de vendre est une conséquence de la
substitution. 11 aurait fallu d’abord démontrer l’existence de la subs
titution contestée avant de lui attribuer telle ou telle conséquence.
La clause relative à (’interdiction d’aliéner , loin de prouver
l’existence de la substitution , permet au contraire de penser qu’on
n’a pas voulu la créer.
Cette clause se présente en eflct plutôt comme la condition de
legs fait à Rouchy , que comme la suite de la disposition probléma
tique en faveur de ses enfants. Si la substitution existait, celle clause,
devenait inutile; les droits des appelés étaient garantis par l’inves
titure qu’ils recevaient; l’obligation imposée au grevé était alors
sans objet.
Quant aux motifs par lesquels le mémoire auquel nous répon
dons explique la substitution et le choix de Iloucliy pour-premier
appelé, ils nous paraissent bien peu décisifs.
�. L ’abbé Lavergne a dit quelque part dans son testament, qu’il ne
donnait pas son domaine aux D icrn at, parce qu’ ils n’étaient pas
mariés et jnlctaient -plus en âge de le devenir; il a paru penser
ailleurs quer Rouchy, plus jeune que les Dicrnat, pourrait avoir des
enfants et mèmq,des descendants.
On en tire la conclusion que Rouchy n’a été choisi que pour
organiser une substitution ; que le choix fait de sa personne prouve
l’existence de cette substitution.
Ce raisonnement n’est que spécieux. L a jeunesse de Rouchy,
l’ espérance probable qu’ il se marierait , qu’il aurait des en
fants, ont pu dans une certaine mesure déterminer l’abbé Lavergne
à en faire son héritier universel ou principal; mais celte pensée
ne conduisait pas nécessairement à une substitution. Les' donalions
faites par contrat de mariage , sont évidemment déterminées par
en sentiment de la famille; cela suflit-il pour les-déclarer entachées
de substitution prohibée ?
Toute l'argumentation qu’on nous oppose sur ce point tombe
devant un seul fait. Roucby n’était point marié lors du testament,
il ne l’est pas encore. Pourquoi l’abbé Lavergne , s'il ne voyait en
lui que l’instrument d’une substitution , ne lui a-t-il pas imposé ,
comme condition du legs de L o n g e v e r g n e , l’obligation de se ma
rie r; alors qu’il lui en imposait d’autres: celles de porter son nom
et’ d c n e pas aliéner le domaine. La substitution n’a donc pas été la
cause déterminante du legs.
.-,1
Mais ce n’est pas seulement parce que le testament ne renferme
pas de disposition caractérisée en faveur des seconds appelés que
lions soutenons qu’il ne contient pas de substitution ; nous disons de
plus i° que les seconds appelés ne sont pas désignés d’une manière
suffisante ; a" que le grevé aurait conservé le droit de disposer ;
5* que la réunion de ces deux circonstances rend impossible
l'existence d’ une double libéralité et d’un ordre successif qui sont
les caractères nécessaires de toute substitution.
�L'insuffisance de la désignation des seconds appelés n’est guère
contestable. Il semble bien d’abord si la 'substitution existe qu’elle
soit faite en faveur de ions les enfants el^descendants de Jean
l lo u c h y , quoique l’expression io«,r ne?IS’y l)*ôuve point. Mais
lorsqu’on lit avec attention l’ensemble des deux clauses n* i el n* a,
lorsqu’on y voit que les possesseurs du domaine seront obligés de
le laisser dans un certain étal d’entretien , que leurs successeurs
pourront demander des visites d’experts ; on est forcé de recon
naître que le testateur a prévu que les générations entières ne se
raient pas appelées, 'qu'une préférence pourrait être accordée à
tel,ou tel membre d’ une lignée. C ’était du reste le seul moyen
d'éviter le morcellement qu’il prescrivait.
Ajoutons à cela que l’ interdiction de disposer n’ayant pas été
imposée au g r e v é , cette faculté semble au contraire lui avoir été
réservée et qu’il résulte de la combinaison de ces divers éléments
que llouchy aurait eu le droit de choisir ou de ne pas choisir celui
ou ceux de scs enfants auxquels devrait passer l’immeuble substitué.
S ’il eri est ainsi, il est évident qu’ il y a incertitude absolue , quant
à la désignation des seconds appelés, et il ne l’est pas moins
qu’il n’y a pas d’ordre successif créé par le testateur-; ce n’est plus
en effet le testateur qui dispose , c’est le grevé qui dispose ou no
dispose pas, à son gré, comme il lui plaît et quand il lui plaît. Que
serait ce d'ailleurs qu’ un ordre successifqui n’aurait ni détermination ,
ni r è g l e , qui demeurerait soumis à toutes Icsoüvciüunlilés de la
fantaisie et du caprice ?
Il n’y a donc an lieu d'une substitution qu’une iiinliénabilité pro
hibée pat* la loi du 1 5 mars 1790 , et qui , aux termes de l’art, goo
du codc civil doit être considérée comme non écrite.
�S i le testament renferme une, substitution , elle n'est que nomi
nale et doit être réputée non écrite p a r application des art.
8 1 5 , (joo et (joü du codà ‘cii'il.
Celte proposition est. s’ il est possible, plus certaine encore que les
précédentes.
(
. Posons d’abord comme chose incontestée^ i* que la substitution,
si elle existe , a été faite au profil d’enfants à naître cl non encore
conçus au moment du décos du testateur; 2° qu’elle a été faite à
tous les enfauls de chaque génération avec interdiction dç vendre
ou de morceler.
Quelle en est la conséquence juridique?
L ’art, goô porte expressément que pour être capable'de recevoir
par testament, il faut être conçu au moment du décès du testateur.
Les enfants à naître du mariage de Jean Rouchy n’étant pas conçus,
cl n’étant pas capables de r e c e v o ir , la disposition qui les concerne
est donc nulle. O r , si celle disposition est nulle , nous ne trouvons
plus dans la cause l'existence d’une double libéralité; les appelés
n’ont plus de droit pour exiger la restitution du domaine; le grevé
n’a plus le devoir de le conserver ni de le rendre; la.substitution
s’évanouit.
:
L e législateur, dans l’art. 89G, 11’a voulu, n’a pu vouloir qu’an
nuler les substitutions q u i, sans la prohibition de cet article, au
raient été valables et susceptibles de produire des ciTets. Ricn «’ au
torise à en étendre la portée; les principes recommandent au
contraire de rcnicriner les nullités dans le cercle le plus étroit.
On nous objecterait vainement que les art.
10.^8, 1049» 1082
du Code civil et la loi du 17 mai 1 8 2 6 , permettent de disposer au
profit d’enfants à naître. Ces divers articles constituent une excep-
�-
.5 -
f (0
lion au droit commun ; ils ne dérogent pas seulement a l’art. 896,
ils dérogent aussi à l’art. 906. Mais celle dérogation se renferme
rigoureusement dans lu limite même de ces articles. E lle avait pour
but de diminuer, de restreindre la portée de l'art. 8 9 6 ; il serait
absurde de lui reconnaître un résultat directement contraire. O11
conçoit qu’on invoque ces articles dans l’ intcrèl du maintien d’une
disposition testamentaire ; on ne conçoit pas qu’011 les invoque dans
le sens de sa nullité.
II est vrai que Furgole , que Thévcnot-Dessaules , que tous les
anciens auteurs s’accordaient à considérer comme une substitution
fidéï-couimissaire la disposition en faveur d’un individu détermine
cl de ses enfants à naître. Cela é tait, en e ffet, conforme aux prin
cipes de l’ancien droit, l’ordonnance de 1 7 5 1 , permettant par scs
articles 1 1 et 12 , les libéralités en faveur de personnes non encore
conçues.
Mais la
faculté accordée par
cette ordonnance
a
été refusée par le Code civil. La disposition valable autrefois n(\
l’est plus aujourd’h u i; c'est celte différence dans la validité de la
disposition qui fait que la substitution existe sous une législation et
n’existe plus sous l’autre.
Cette vérité a été successivement mise en lumière d’une maniera
irrésistible par Rolland de Villargues ( numéro; 187 et suivants de
sou traité des substitutions), par Merlin (nouvelle édition des ques
tions de d ro it, tome dernier, p. 17 ) . Toullier (lome 5 , numéro
8 2 0 ) ; Duranton ( tome 8 , numéro 5 5 ) ; Dalloz , ( dernier volume
du Répertoire , page 1 7 7 ) , et plusicurs^autres auteurs se sont ap
proprié leur opinion. La jurisprudence l’a consacrée d’une manière
qui, aujourd’hui, peut sembler définitive. Nous pouvons citer no
tamment deux arrêts de la Cour suprême, rapportés dans IJalIoz,
18 2 7 . i. 85 cl i 8 5 5 . 1. 598.
Tous les deux ont décidé que l’exception faite à l’art. 90G, par
lé s a it. 1 0 4 8 , 10 ^ 9 0 1 1082 du Code c i v i l , devait se renfermer
dans les cas prévus par ces art., que dans tous les
autres
cas , eu
vertu de lu règle générale, les dispositions fuites eu faveur d’enfants
�non encore conçus, devaient être regardées comme nulles; qu’il
n'y avait pas lieu d’ induire, d’une pareille disposition, l'existence
d 'u n e ,
substitution, mais de la répnter non écrite, conformément à
l ’art. 900.
Comment nos adversaires pourraient-ils résistera cet accord si
complet des principes, de la jurisprudence, de la doctrine?
Il est encore un autre motif qui s’oppose à ce que la disposition
faite aux enfants à naître de Jean Rouchy puisse être considérée
comme écrite , et engendrer une substitution
Cette disposition n’est faite que sous la condition absolue de ne
pas morceler j c’est-à-dire de 11e pas partager. Elle est donc en
opposition formelle avec l’art. 8 i 5 du code civil; elle est de plus
matériellement inexécutable et physiquement impossible. Quel se
rait à la 4e > à la 5e génération le nombre des descendants de Routh y ? Personne ne saurait le dire avec certitude , mais le calcul des
vraisemblances donne des chiffres qu’il peut être utile de consulter.
IMus de mille personnes seraient, suivant les probabilités, dans un
avenir prochain co-propriétaires du domaine de Longevergne ; ne
serait-ce pas là une situation impossible?
Tout se réunit donc pour faire décider qu’ il n’y a point de substi
tution ou qu’ il n’y a qu'une substitution nominale dans le legs fait à
.lean Rouchy.
1 Lorsqu’il s’agissait d’apprécier des questions de cctlo naluro sous
l'empire d’une législation qui autorisait les substitutions , le magis
trat devait penser que le testateur n’avait rien écrit d’inutile ; il suffi
sait alors que l’interprétation qui créait la substitution fut possible.
Ou appliquait ainsi la maxime qui depuis a été écrite dans l’article
1 i 5 ~ : ¡ }otins ut valcat quant utpcrcat.
L e même principe doit produire aujourd’hui des conséquences
contraires. La substitution qu’ on admettait facilement lorsqu’elle
était valable , ne doit plus l'être , maintenant qu'elle est prohibée,
que lorsqu’elle est manifeste, inévitable.
�SV -,
C elle substitution ne fit-elle elle pas réputée non écrite, n excé
derait pas les dispositions permises par la loi de 1S26.
Nous pourrons cire très-brefs sur celtc proposition.
Nos adversaires invoquent la loi 220 du digeste d’après laquelle
Liberorum appellalione nepotes etprænepotes cœterique qui e x
his descctidunt continentur; ils soutienent que l’expression des
cendants correspond à celle d’ancêtres dans la ligne ascendante, et
que ces mots : de génération en génération en déterminent le sens
de telle sorte qu’il n’est pas possible de limiter à deux degrés la
substitution.
Nous renvoyons à Ricard, à ïh é v e n o t, à tous les anciens auteurs,
unanimes à enseigner que l’expression enfants n’ implique pas une
substitution graduelle ; à tous les dictionnaires qui établissent que ce
mot de descendants est susceptible d’une acception plus ou moins
étendue; à un arrêt de la cour de cassation du 5 février 1 8 5 5
(D. 1 — * 58 ), duquel il résulte qu'une clause p a r laquelle un
testateur déclarait que les institués ne pourraient vendre ni
aliéner ses biens sous quelque prétexte que ce fû t et qu’ils
seraientforcés de les laisser ci leurs enfants ou à leurs héritiers,
a pu être considérée comme 1 1 excédant pas les limites de la loi
du 17 m ai 182G.
• 1
Quant à ces mots de génération en génération (en admettant
qu’ity soi«*t sans importance , qu’on les ait mis au singulier plutôt
qu’au pluriel), ils n’indiquent pas la perpétuité qu’on veut en faire
découler, et expriment seulement un ordre successif. C ’est comme
si l’on avait mis de degré en degré. Or, les mêmes auteur.s ne trou
vaient pas cette dernière locution suffisante pour caractériser la
substitution graduelle, ils voulaient de plus y trouver un indice
d’une pensée de perpétuité : le mot à toujours ,• par exemple.
3
�L ’objeciion tirée de l’obligation imposée à Roucliy de trans
mettre à sa pospérité le nom de R o u c h y , n’a pas non plus une por
tée décisive, car la transmission du nom une fois opérée, se conti
nuait naturellement ct> n’élnit plus soumise à la possession du d o
maine.
S V I.
S i cette substitution dépasse la limite de la loi de 1 8 2 6 , elle
doit être maintenue pour deu x degrés et ne peut être annulée
que pour les degrés postérieurs.
Celte proposition peut être examinée à deux points de vue diffé
rents : celui du Code civil, celui de la loi du 17 mai 1826.
Celte dernière face de la question a été iraitce avec assez de soin
dans le mémoire précédemment publié pour le sieur Rouchy,
pour que nous puissions nous dispenser d ’y revenir. Il n’en est pas
de même de la première ; c’est d’elle que nous allons plus spécia
lement nous occuper.
Pour démontrer que la substitution doil être annulée pour le tout,
les Diernat présentent le système suivant :
,.{
L ’art. 8 9 6 , disent-ils , est le principe général. Sa rigueur a un
double motif : la nécessité d ’une clause pénale, l’indivisibilité de la
substitution.
Les art. 1048 et 1049 110 f ° nl fIuc constater une exception qui
doit être restreinte aux cas spécifiés.
Les inolifs qui ont dicté l’art. 896 s’appliquent aux substitutions
du 2* et du 5 e de g ré, avec plus d’évidence et de justice qu’à toute
mitre disposition iîdéï-connnissaire.
�L e lexie et l’csprîi ¿es art. 89G, 1048 et J049, s'accordent donc
pour repousser la prétention de Rouchy , qui voudrait que la subs
titution 11e fût annulée qu’au delà des deux degrés. iZ(
¡Vous ne dissimulons pas la force apparente de ce raisonnement.
Il ne résiste pas cependant à un examen attentif.
Est-il d’abord exact que l’art. 896 soit général et domine sans
exception toute la matière des substitutions?
L ’art. 8 9 7 , que nos adversaires semblent ne pas avoir aperçu ,
répond le contraire , car il porte expressément que les dispositions
permises aux pères et aux m ères, aux frères et aux sœurs , au
chap. 6 du titre 2* , sont exceptées des deux premiers paragraphes
de l’art. 89G, c’est-à-dire de celui qui prohibe les substitutions,
comme de celui qui les annule.
Commençons donc par tenir pour certain que les dispositions
permises par les art. 1048 et 1049 c. c. , ne sont ni prohibées , ni
annulées par l’art. 89G.
Voyons maintenant les termes de ces art. 1048 et 1049 combir
nés avec l'article i o 5 o.
k Les p è re s, les mères , les frères et les sœurs pourront donner
a à leurs enfants ou à leurs frères ou sœurs , les biens dont ils ont
» la faculté de disposer , à la charge de les rendre à tous leurs en» fanls nés et à naître , sans exception ni préférence d’àge ou de
» sexe, et au premier degré seulement.
•1 ‘ !
Une substitution faite conformément à ces règles , «à CCS diverses
conditions n’ est ni prohibée , ni annulée j elle est permise , elle est
légitime.
Aucun des nrt. 1048 , 1049 cl * ° 5o ne se réfère au moins no
minalement à l’art. 89G; il n’est dit dans aucun que leurs disposi
tions soient créées par exception à celles de l’art. 89G.
�11 est facile de comprendre pourquoi le législateur permettait la
substitution des art. 1048 et 1049 , pourquoi par l’a n. 897 il avait
excepte celte substitution particulière de la prohibition de l’art. 896.
L ’esprit d’inégalité , de privilège avait été sous l’ancienne mo
narchie la cause des abus inhérents aux substitutions ; on leur
reprochait avant tout d’amener la concentration des fortunes , de
changer l’ordre légal des successions. L ’art. 896 a été un hommage
rendu à l’esprit d’égalité. O r, la substitution des art. 1048 et 1049
avait le double mérite d’être rigoureusement conforme à l’ordre
légal des successions et au principe de l’égalité des partages. Ces
articles ne dérogeaient donc pas clans la réalité à l’arl. 8 9 6 ; -ils
dérogeaient bien davantage au principe de l’art. 9 0 6 , en validant
une libéralité faite à un incapable de re c e v o ir; mais l’intérêt des
familles qui devait faire admettre plus tard les stipulations contrac
tuelles de l’art. »082 justifiait complètement cette exception.
Voyons maintenant ce qui aurait du arriver sans le code c i v i l ,
antérieurement à la loi de 1 8 2 G , si une des personnes auxquelles
les art. 1048 et 1049 accordaient le droit de substituer au premier
degré seulement, avait substitué à deux degrés.
Celle substitution devait-elle être maintenue au premier d e g r é ,
ou devait elle périr pour le tout? Nous n’hésitons pas à dire qu’elle
aurait dû être maintenue dans la limite des art. 1048 cl 1049^
■■ ■
Ce ne serait certainement pas dans cos derniers articles qu’on
trouverait les moyens d’une annulation absolue et générale ; il n’en
résulte qu’une chose, c’est que la substitution permise à tel dcjgré
ne l’csi plus à tel autre; leur application naturelle, raisonnable, de
vrait donc être de valider pour ce qui est permis, d’annulerpour ce
qui ne l’est pas.
On ne les trouverait pas davantage dans l’art. 89G. Car cel arti
cle applicable à la partie de la substitution qui excède le premier
�degré, ne l’esl pas à celle qui se renferme dans les limites des art.
1048 et 1049.
L ’art. 896 n’ annule que ce qui est prohibé, il n’annule pas ce
qui est permis.
11 ne faut pas oublier que l’art. 897 porte expressément que
l ’art. 896 ne prohibe ni n’annule les substitutions des nrt. 1048 et
1049
C ’est donc ailleurs qu’il faudrait chercher les causes de la nullité
absolue.
Ce 11c seront p a s, quoi qu’en disent nos contradicteurs, des motifs
d’ intérêt public qui pourront jamais les fournir. Comment cet imércf
pourrait-il pousser à proscrire , à détruire ce qu’ il a fait établir dans
les art. 1068 et 10G9.
Serait-ce la crainte que le maintien partiel de la disposition 11e
favorisât des infractions fâcheuses.
Celte crainie serait chimérique, car l’intérêt des g r e v é s , de leurs
créanciers, s’ils en avaient , serait une garantie suffisante. E t puis
quel grand mal y aurail-il à ce que l’ordre des successions et le
principe d'égalité étant respectés , les propriétés demeurassent un
peu plus long-temps dans les familles.
II
n'y a donc pas à imaginer une clause pénale inutile ; il n’y a
surtout pas à l’appliquer lorsqu’elle n’existe point.
L a raison qui a déterminé , contradictoirement aux anciens prin
cipes , la nullité absolue prononcée dans l’art.
8 9 6 , c ’e st
l’inccrtiiude
sur la volonté du testateur qui aurait pu ne gratifier le grevé qu’en
�’ ' considération de l'appelé. Cette raison est évidemment inapplicable.
Peut-on penser qu’un p è re , qu’un frère n’ait donné à son enfant, à
son neveu , qu’en considération de son arrière-petit fils, de son arricre-ncvcu. IVaurait-il pas donné égalementsans celle considération?
Scs affections pouvaient-elles s’égarer ailleurs? Pouvaient-elles ctrc
aussi fortes pour celui qui n’était qu’ une lointaine espérance d’a v e
n ir , que pour cciix qui étaient le prem ier, le direct objet de leur
tendresse.
Il
faut aller plus loin; il faut créer une indivisibilité absolue de la
disposition. O r , comment justifier cette indivisibilité? les degrés
des générations ne sont-ils pas distincts; les dispositions qui s’appli
quent à chacun de ces degrés 11e peuvent-elles pas également être
distinguées? L ’indivisibilité ne se rencontre pas en fait; elle, ne sç
rencontre pas non plus dans l'intention du testateur. Comment la
concilier d’ailleurs avec l’ordre successif qui est l’élément essentiel
de touie substitution? Ce moyen croule comme les autres; il n’a ,
du reste, jamais été considéré comme sérieux même par ceux qui
ont soutenu l’opinion contraire à la nôtre, et pas un seul auteur ne
s’en est appuyé.
Riais si, môme sous l’empire du Code civil, la disposition exces
sive devait seulement être réduite , cela n’esl-il pas bien plus clair
encore depuis la loi du 1G mai i 82G, qui nous a ramenés purement
et simplement aux anciens principes.
Nous terminerons ce qui est relatif à l’examen de cette dernière
proposition, par une réponse aux critiques dont un illustre auteur,
]NJ. Toullier, a été l’objet de la part de 110s contradicteurs.
On reproche au savant jurisconsulte sous le patronage duquel
nous aimons à placer la démonstration qui précèd e, d’avoir émis
sur la question une opinion superficielle et de s’étre placé presqu’à
�la même page dans une contradiction manifeste. II est viai que son
.
. , , , -'i ,
", u iti't . , i j f , m'ï»!, '»:>?«;•
>
opinion est peu développée; cela ne prouve qu une cliose, c est
.
. îiciu î"*Qiîir rr .pv \
que la question ne lui paraissait point faire de dillicnlle. Quant
au reproche de contradiction, il est facile de l’en Justifier. RI.
,
„
1 3 .- 3 - t 2,'.!Î 9 - l ! l * . | ü V I J o r .
.
.
lo u liie r a raison dans 1 une et dans J autre de scs deux opinions,
pour l’art. i o 5 o comme pour l’art. io 4 8 . Pourquoi cela?
C ’est que lorsque la condition de l’art. i o 5 o n’est pas rem plie,
la faculté créée dans les art. 1048 et 1049 disparaît. On ne se trouve
plns alors dans le cas d’exception prévu pai’ l’art. 897 ; on retombe
purement et simplement sous le coup de l’art. 896. Tandis qu’ il
n’en- cst'pas ainsi, comme nous l’avons déjà prouvé , lorsqu'on res
pectant les prohibitions de cet art. i o 5 o , on dépasse la latitude
permise 'dans les articles précédents. M. Toullier n’a eu d’autre tort
que de ne pus joindre, dans les développements de son opinion, aux
motifs vrais qu’ il a tirés de l’intention du législateur, les arguments
plus positifs qu’il pouvait emprunter aux textes.
Nous avons rempli jusqu’au bout le devoir que nous nous étions
imposés; nous déposons la plume avec l’énergique conviction que
le testament du curé Lavergne doit être maintenu dans son intégrité,
avec la(ferme espérance qu’il le sera.
Non la justice 11e consentira pas à mutiler celle œuvre de vertu
et de sagesse; non elle ne supposera pas que le ministre de
Dieu , q u i , dans l’expression de sa volonté dernière , a montré le
patriotisme le plus élevé cl le plus pur, ait voulu se révolter contre
les lois de son pays. En présence des testaments successifs de l’an
cien curé de Maintenon , de sa persévérance à choisir pour son
héritier celui de scs neveux qui seul pouvait continuer sa famille,
la cour ne doutera pas qu’il n’ait é té , quoi que puissent dire les
sieurs D iernat, l’objet de son invariable prédilection ; elle ne vou-
�— 24 —
d ra pas que les bienfaits réfléchis de cet oncle respecté et c h é r i,
n’aient été pour lui qu’une cause d’embarras , de douleur et de
ruine.
Me DUMI R A L , Avocat-plaidant.
M e A L L E M A N D , Avocat-consultant.
M e L A M Y , Avoué.
R I O M . — A . J O U V E T , I m p r im e u r , l.i b r a ir e et lith ograp h e.
�à c . " ô u ï \ 7T~
fß o \A iu C ö
Ÿ X *.
*
/ Á ^ m ^ o ííA u iu
/ o ttr t—
'w
w
u
tv
O u v u u
u f
( M / ò v ^ u j r / A c u t r ín q v u J f t -
CJT
i /
I t (l*J U U
!
O
^
u i U u u< |H
h ««.
.
'
/ O
ui
. t t - <
1 >UA
,
i/
V
(X.
**“
tAAn / - A l ü u w i r
t
A
fC **
V
_
{A U
'
4
t i-
!i‘
Ö OM M M wO
■>
'
b u ! U
«A «% lUbuúv
c u .Y
d
«UUUmm D
**/» / o ú j F y < ¿ U ^ ( u A
^
« ^ ^cJ/oXA^OwMJr^«*-» /CjW ttXiíí'
^
* i... .
■\
i , » ; Él*¿
*
^ ,t* -
/ •
O U U U aO )
f (> U \ \ * -
^ U M
(V C m X x m / i C
^
*
CK. ^ O w T b u M
C^iaJ t í
/¿ y y
«L A u u o ó u Í ^ « J*
. U
1 *N
^ Í O O “» ^
0*% fccU /U t*M « K i x jU u J
1
/ V
&Î u K L
uX
uuU » « )4
(| U (^
m m l
ou
CJLC^uÂ.
•<* •
CtA C Ú
l
n o io j.
Cj
i í t u r
.
^ 'í/ * ^
-'**■
tfiu
J
^
^ » m C ¡*
tu. ¿U ( ¿ b A y u j U M ^ iO f l^ ^ ^ u r
0 > ' Í w
m l
í « f c * \ t u . JT ü v i» a ./ t * v .
C4r lA A iT k ^ Ú t.^ ^ c i M ^ .y a M l J t u u
fí( íít
MU.
i(,M <A*X.fc«jfÚÚu WbuÁ t ü i « á * u ¡ i M
/ 'V t - .
1
u i«
U U ^ ) U t \ iO
■*-—
_ 'A>0;
<4»W iT n » >,>\ u L (
. ¿L "iäCvL «\O Â (u jdiu U r
li
/ u ^I«A ^ o»(Xuím cú>«>i
U< 4 « i r
m*mf
ÍA ¿ { t U * * * * » W . > c J U C
' i IA
(K l/i t
fc/feA **4*^
‘
/ CV
> . 7 / « ». » '
|//
• >.
«—
. fc . ‘
0 > ^ lA * tïU r ^U vC
VU
, Ú .,^ ^ t V U X w J f CC flÚ<bfcw ' yU(<<»wu«4**~T‘.•-1J •>»^II
f  ^ M È**iÎtOU (AtXvi /«. Cují
Ä.
^
^ a i t ^ t x u l u t / C*%- JuÁ¿* i*w^ i utj[ft«»u. ^uaj /e* (j u m /vom ^
/ /.A»U«JL/
y¿
#«*
*^oO |
c CGL
«.X,/
, T7
f.M r
(í «m .y u A i u K t A w u ^ M K n t w u ,
OUUMJMÍAt
Co
wp.-
ouu
J
f0t4
cm um
^
^ } , , ;.
*
' íf't^ W te
> \ ^ u ^ M fa lu > M
/w i(t«X u ^U lM M A * < í< X u ^CfcwUj í»
J t i M . f* J *
C U V k ^ tÚ n ^ :
/?
AOMrM/VuIlkU C^<M«uÚ> u i t i r V » i C^fù^to«*^- y ^U4ÜVVlCtW«
f
._.
f
i?
✓
At
/■-v -#y ■—
( U . /iA<% /
V Í^ W H
CX n<M % o4.
t u
U A O U M l
U \ O U Í » l O f O«****
I
' ri
< f-w ; * 'MM Jf
' r
/4
(UCWA
¿ U Á t U ^ i ly ^C/lÂTuA^ ^
______
ttiu.
1
^ j( Jh w i>
( (Cs. toúJ%«. CKJtx |«ui»r^CU »a’
*
'
’ I' '
*tty*ík
f» •
«1
*
�hl
fix j^ o ^ x r l » /* <**O K¿. o *
u X c y t c J ^ ;M ~ *r
¿ fe r - A ;^ ^ « . </<*JD¿^ ' j —*.
<Ai>u*«( «lu»
r --u » y/<t u uu^Aiu
u>.
j
/*' .
-N * ■•' I
( u « á J t ¿ u * o r'iw |U « ñ A ‘ <»»i»J >
(M to*Awu.
/ l i » UXuJtuiM ^AtuÚXju! ( Í Í lo 'a t t* ^ <¿ ******^' (T*htSk
c ’ xA*-
« T fc tu
V (l^ (JÛ iw /^ 'M U M V ttÎL i^ ,<^
(U J \ U A u o ^ c Utlv\<AMUr CX—^
U Û M -^
^4* fcA*-
,ftf f JtÎi/
U
| ^ MA<
k. {«{*>'
*boM> u J r * t í i t uiuÁk^óuiU
A
/i
—A. f r .
_______.' . : t
a>vv\uM ^*x>v» * i¿ G ^
t t
^
. '. .
«
-- --- (J^------ ---- /
íftj^ ~ v » » — »
(^m! a IbM ftH
A* V U M biibu
*°^ M/’
z ? i c a / " i t / « /MXflSXiiÂiÀt*» ik » y tJ> it ^ * * ^ '* iw* '/ 4A*‘^w ,'v ^ b*ir '
y *u ^
i« u i^ ^ / u ú tu iia >
Ì U c*.
u ^ ip u i¿ ü
/oÂV
^ («a
" ÛUU<|
R e lA u«* c í *a « ^r 6\ <—
.*
u
u i
m a
u
^
Cl c ittr ^ i / w í t í
.
A **âT ï*J«
______
ff t«^V*«
U
to w -M
OVAXA
^ $ <‘xj’. p ° * rVuVii
* <
^C n fOu#!
.saaaawmoi
|U >
¿ A .y u l|L ^ A v < ia i ~&OUA aàfÎM M M U )M ^tÜ«4>rW u V M M U l txA..^ M | u o | J Ú i « a t ù fU u A i* v iu >
< x r <uiXÛt< 5< ( J ^
CJt" IIW»i«J w ^
jsr v u y --- -------->------ -- — 7 -------. £ V y \ i v
(C«/\ HMH«»» Ut\ /*TV(I |jO>Ju><» U faJu (WA ^ ^ -- i I—
/u litslu ih tm /AMAtiluÛt, t f i i / « f a ir v t J J ^ C/M<~«or
/CJlT ^l^toMJT ft-^ r /t*w|UA¡ü^ü#w**
L • A ^ If * ^ ->
1 / U
. »yi *V>WUi
•
yU
4- -y
ÔC^il
�(xajCjí ¿btfrjuQ
/ -
-V
/
__ ^ “ ^ a T u / V »
.
à c
«- «*
a
jtjMM.
°"
^
$ O A »o t-0 -
« /
J
/c v ^ 4 ^ I O O -\ jx x > \ »
i
(A « \
/ < Jx A
* fe c
fit ü û ü ^
(M U.Ul'Oli
*
t o w i.Q y ’ o jjv « *
^
C L i\ * Ü Â A «a
/ & A » o i^ v ^
C*»-Vv\tit**x>
(LijlA^Ky^
/ /a i t t U
t
«a«- /<r^io^)0)U Û i«<
/ û ü 5
>a
coÀ <
a î /î\ a »a c >^w
c a m îA
>i* . ^ 'cur
/< X j L \ h ^ OlAMt Cv <VML Om ^»/»»AUaVMJ
y t u ilt .
^ c \ Îu * tA i (|u! U /fa^llA í» ft. |OW^>HiA ;’
^ /,Í4M' ^ * * A ft* n d « . / o t o
Ú u -(rtMAAXA^tí
/ l a * * (mm. <ÿi*xjTr ^ « r W
,
^°|' ^
«^ *»*rt~Ó C ,ii¿>^lÜ ftA r 'fU L y ú mmju
Üt^ Í5 * U y<A
XAJ 01A -fcax J o»% —
U* U j? ^ 0 i^ i
('U O tííi. <M%
(A M ltU ta ^ ,
y ^ c M v » ,
/ cua ¿
U t û iït Jn ^ ,
A l
AaJ U
/0 ^ 1
i
IAX.
^ ItA w J k .
I^U.' i l u J P ^ ^ J U U f J
m iM
p A a JlÍu A u u •
Cv.
c C Íic O ^
Ç/cilTc ßXUjL, ft «A*aX r/cooovy«*^
/a
6 u * ^ w w ,| f ‘ ^ ^ t
( l* j\ * x i\ y ^
^
U a^ V
im
Í
j U u
^ c ù jT ì
É ^ ft w M
^ r ^ v » ^ 1^ 0
/ t v ' X j ^ u n j u j v T í l «a
íí
t****iu‘
/k' 4 l ^ ^(/(ut«
t û i ï (^<tXr Ï
<* í t u
( Íiit
L lllM
^ IM U
u. u
U l^ u
(jdÁtS^bl
Q \C *A r
i C
^L)A<M»JU>
OlAujur*
/
4
/<. /i*A^
/ 'C M Ía fi /Cl((»_ ^u*6juv\« < iZ tr^ V > ^ 0 1 ¿tvUM <M ÿJL**X~
o«*f ia
C^u!
iA*\
*\ / tl u
y íi à&. A
Z3íK*
u ^H
/yibM
â Tu
u<J(tju>
* J i U <^•
t / a a »€ a ^ *»< ^
V
"
^
< tM ~
iM O U r
<v JA C »m
/ «L w u i u l f t ÿ m
^
/* *
V
^ « T ^ ^ o v T w h
^
um*
u ! (tm
u ÁÁftJr
^<_
jo w v
e f c A Ä ^ w jü j^ C » —
Ji>\\ pjdkax dJUi<M <XÁ«AA\. C tn U aJL .^ y^ O tvxu ». <*-
CAA«
9M.
î «
¿ l(H u iíy
y «A A A «A _v
V c*\ A I<
/< ^ (l
7&VV*
U lt<4 V » W Í W * * <
V t\ y ««X <
t u
¿Ú
C lM V > \
/5 » Jm
V fóúx~^ J * W V
'f J ^ V ú a c x ^ J T
m w
^ «U
^
w i
^
í
»
(U n titi*
/< - V « M > « J l v (
*>A»-<4*
( ^ Y o Á 'v m U
c/civn^* Vwfci^«^ U x m w w v w x '
' i t i
/ t
et
(fv U L
JtiXM ¿UiucÍÍaj ui. AiaaaÁaj<aAuÍ j f t ^CA 6¿U*JL> C^u/IA VeJ^IMC« A. ^
fO\Cb*Aa* f uX. U « i «JUw¿tT
CM. ¿<I«AMIa y ¿ i4
«J »***»*; t ^ T L v w . UlA
fu *
�#•
U»M»
ii
•
< ^ U n CuJ(/ c o ^C l*^<ÂuJI«JL^ ^
OOMXJ / OU ’
-CW.\KKl*Jrt*.O <j^U
(U ^O VU M u^-^M /(\
a ^ ^ t tJ t Ù A M jK T '
À.
A (jü U C | U (. " ^ t y « * '
t * c - / w V t y ° ''
"iu jM ^ ¿c/\ OuaIu^ i«>ivW üi»H w ttutJUjvOSr^***^
/(oí ^>oáXu«J>u*c AX> (^<a «lu *. t u ^ J i i u O l
'à « y«**
^«. ^OU ¿Ú m
u r
|
**
Aft*í«*íc y*v 3 H
<ke*rye
(«tuiiú. »V)<ur y«**»W A y ttjCkùÀÏ* • ctl»**. «>wC*M*
ow» l'tuXÙl^ / • ^ - / e w * ÿ a ~ « * -u r V VAcj«~^*. / l i Î ^ ï f c X / o ~ l6 « * »
'fccL
^ H.( (kM M t
/*
a . J t.O > ~ *
/t ljt
« m .^ > m » > * >
cJOTuA'*.* /oor, < ß r f o i ° ^ iv ^ O r
'^V\|U0tUu*M ù
fe û W »C w «r ~ (M w tt
^
CuA^OUij^Jrb* Í!a i*u Í^
( f '° JJ
( a n b f v û i u
£ c * ~ < rà o __ lx
C.
.
^«u. /fcs~b Iripju . x i* ;«
U ttru ^ M
/ c
¿ A u ^ m A u a jJIiv d
« ^ ’ .—
^
«Ar-“/ « »
& **ȟ c^ 2 U M
a x * y ,o ^ o < v c it c ^ ^ r ^ s i K * ,^
-faU* C(~< k *
¿ 7D%ïiJZ^MX/
?»*¿ / o « > r *A *^o»cl*
koÙJiJuu ■>t*nk«vus^a*^"Âc
V«/»y«M, *»-
CjtxaXJtT ^b 'kl^ X Ù j, ^ o u ^
ca£V
A 't W ^ 1 ¿ » y L U J Í ¿ K , S ^ '¿ ¿ ú ¿ i****~iv»«A
/OWH
O M .Í
t ü
C W -io ^ 4
**“
^ £ jT
t« a tïu J U
/K
A U (tá u | u i> ^
A.
U aH O H ^M
cx/i<«*?>\^ ^ ’tuÜanA»»
ce- ¿
OLA
Ô
a
i
u
(
^
^
( m £ u ; ^ iu jj
^«<m/Iiû J ( uju ^U JW M tojr Cuuouu yAjv«.
>C*uU_ ft^ (ufs Om ^ A o y i j —
/bM üùi
^ y » Ù n ," b < A iAt)*t7 «XJV^rdj^,
¿lx,l*Xí(!y
fctí* €AßC~ f**~» Ú*XÍ*~X~~
n icyC"ftO«A ' tC ù (Uamju K i
U iu t tu v a c f «mm. ^ u l|tü X u A u ju ^ W iiA iiiu ^
t
i
J
Cftify<i **-
H»Úmw»«A^ COVWHMA4. fC u ir U <^%*I u n v t û u
C**\
|
m
< ^ m u lti^ u v C M iîX u u M
¿L*f>OÍXfe**<dl A1H U- {'(M M «,;
¿(
cl
^
ôi^>ot Ju m ^ c i\ iu jt (M vuuoytJi 6 m
<«
x ,
i \ 'o w j r ^ 2 \ X > « y u / t**%>ity>
AMbUMM*«
*
â
r<,
iv i** / ^ {A*»ÎU^C
N
* v
ci tv Cv Û m
•
^ ic à A u w t
*
tfc * i
/{*Q ll\fJO »ifc««
)t,**»««»c. ù . /(\ ^ u ¿|tiK ú A ü ú u ^ a » » m tyjiL \f( lA*\t\(j£
Ju i'll'- ^ t u T ’
/ / # I »I
> fCi
«j
«•».
fc lf e »»»«>- l^
*
*\
C ^ ù > u lAAc>j ( - ^ U
MUV>Kt*A^Uii»
ÙM liti, l/i4%- UaumcM J L o
:
v
•
1
I«
�$ U
tr
(jfU ^ T u m
f u
à < . 5 c iA » b a r
/«
j\ .
our 4c ÉÎIAJ. / a v t ^ « C “V
^ a ¿ r J k .y £ ft M
OH*<uW
)i
/ M / t u ^ C i J r ^ Ù 1 b '( Ü i w X v / V A f
rf i l u i. r j b t*\ >♦
*
I
^
iî 1 w * J I u m J T ;
^ / u li^ tù iu iM jpJluhitiUL.^*"
V
j..
/
/
^
£
5
«A/vul.«— >.
^
^
/
C lü U jJ L *
¿
î
»
■ °i
A o îb u . /'c^ccyiiU . c'tAX- a h l w A ■M ü ü Ju iH
/
*5?^
-6«\ » .« .¿ ït « * • 'Zu (M U M .
/ -\
-r' :
*
. ‘ ‘ 1 M , X.
,/ s »
,
i
. .
'A
•
<V««Ju/w
cl
.
O
lu
tv
iiu
'
/¡UAAütuuiJ
iflt« f
^ * V * fc^u,t* <*- d m tv jt o ArtAotM im i ac iiiu
a ï u<iiu
l i a« &
&. U
m »«x»«
/
t u
x
*
y
»
«
Â
j ^
“
j>
Ä W - jA * .
< ) K / c V
f
WJjxijXiyJ MJL U jsZ K i^^ 0 " ^ '
Cclv
JtK f J f c à ï t t Z y : ctT ;‘ ~ ~
ca^ fciirX vU o
Î^ M rA -
M M u u t r
« L m ; //«.-is
0
r
7 1 IL
V
'm
¿
ttA<AAV
C io U ^ ..-
V SK W «*-
u Ac tu ( x z t ^ x ^ ^U». f ÆJjxVZ LAç - j f,%“*x>
//
fa ju iu
,,
I
A
m
a
H U »ar
¿
(<
m lU M O W «
a***. UttZ
>
K
I
i7 ¡X m
4C u X
iAJL C lU « % A c ^ |
^ u * «Ä »
^& <. < *“ »■
^
^
u *r t* ^
A+-*tj f- .1
.
*
U A V v v tM .
CAA
y
^
H
#*
4*
*> * j ~* ~
t£\oJ%ujd
jtiu. /(«((|to«u)
i l t jH
v »TV’ x r '^ c U * * k u < v A/ '
/ ,<«ryt<AV
•t* 7 i ’• .
\ '/
y
* 'J ''
- _ >~v. .
' .
( u O c^
íaI í Cu
c^ u m ^
#
,
,
p . J**
C**Gí**%ik> cL K ta lu .
i*
/
.
.
'
.
^¿u
ft *mî» v M f t u i t
# » " * • _
rv
ilo u lA y .y <**
«X
< A ¿ t¿ a J-
Ctr j c u ^ Á r ^ p W v / f r u * .* } * / ^ w w i ; i ' c W
«^m. ¿ a o ^ a « A > y c v u u r '( ^ i^ J m
M U t^ U u i)^
uJtï'
U>v X u a <u JT («U£jtttAtu'uO tC Jtj|< Jtt* iu .JÚMÍÜW«lMAÍ
tyu? oxf^x^tA jr tA^ L ù v e i cu J^ o v ***
ft+~*~xx
^ * ^ î)
^
/
((/l<Hyc«t(j^vuL> » « •
-
^
r ÿ ^ i r '"à o »A A u i^
tt» !«»<«» u yijn ut
M ~ b M u )u
*
/<*
4AW4
/
O 'm ^ íIh L u J xjUaa | lx n u A y ^ ^ f A Í <u/M Su "Íom w m »»».
¿ y ¡u jL à .
"i
(j^U
(/y ty iU lM
cm j o < r
ù .^ u u 2b<ar a.
^VLI jtuU* VkXX"\- / / 'i < t U
/ ~ ^ * ^
«r-iAM k^tuL) ’fstniXïur,
, .
�f%v.
UC~}tK
c
ftjüVU. íuit V
(| (MMteAuiM M y«AUlAbluiH ^0»»k/lL-
/¡ í r ( r l\ îîT iaju
o
m t> » « o u m o
tc^jjAma tÂ**J<A t>
ftTvJT AlrÙXàjU SAvjtd-ttjHur C*~ ß**tf»\K*Xuß*M- 0< O.
cJ^ O u u sc^ Ja A
/ ^ u Á c ~ * * ~ CAT tv
V O V *^
C y y y X ¿ y ^ . 'sX j y
*X^
¿ I Ui± v u u J^ ^ Y U~ M '> n r A 0 * ^
, '/
(u .to « x ~ c » u . /«
u
*»j Ó
u <m
/e».
“*¿W,¿U‘K
^
tX/
Ù*U J
a »ua *U JU . a
«á* ¿ ^ « .
y V " ^ * . «aì
*fc* /«» fOMir %« ( I vÙjJ L * f f <JA »y
Y
a»w »*^»<^
U ¿ W Ce j<±
f (tJtiXi v J^ t M«v
O ova«««m .
d/o«\ytV^%6U|
u»* Ivwaf^tAjL/W^J Cü'w
^
U*y<*M4
,
4 .t‘ ,u .
/ it it i (u lfftu u t« r OMfcw*
* * 4 ^ * * * ^ '’ y * ~<t**V>>
6lf)|UUTÙUii« du. U <û ilvu y~ ' (jfyU*<
<OA.tixÂî<U\ ^ • /«a fs*i>\
Cwu^ /<. ) CUMub A h a (lt\ (lu ^ o ^ * *
•--- l y
/
 'i« \ a ô r 7 i i ^iAD|L>u^r u r / / « « y iV ^ * * w h **’
<w \ V M M jU K X -
(M M ( / ü « v b i J u > u "•
tw «»wiu ^ > < l f ¿ ^ (v w û /u
ut
Jî
^
(A
ù
u jw
U
/ b tù / lb M u A .
U A fc w W O V &
^
^
k
llr | > > W >
^ ^ ìj
/V
u ^ 'O
6 a cw ïu jr^ v iiT b '*« » «
•■' '• *- ' “ H. y
U H ^ JT
J
U i U m m ju
^ Í Ú
.,
0-
, /
#
L p
r_
JW w
/
. • £ . * - *—*
^ U^ k--------- ^
v i,, '^ tr,''»>/
“ ■ (f^ Y
Q U y A u tu iM ^ M
vît
***■*%.
|A / /u(
t * > ¿ R * » * M » **■
* / •
fa » . O i w i i * « »
/
> '
'■ ‘ ■ ' ■ w w yi
^ U~b OM UMJUI ~ i4. A O w y Vt^
^
kM*4 J C s v v p W
c
C%~
■
�^
^ u t.,C u UjCÙKvlû>va< UA»^O^tX^4Ai CK—
tb k r
¿
OS b <
J
tu .
i f e
/(ti ^U uiuÀ X
( O U A i^ t A A M
A v s t i t jc ^ t*xx ^ M Ú
e u ^ .lijw ù u i'V /»aÄTcd*
( ( M u u u . IW )M U À D T û
/u
f u j i I tli* » A tl)M
^
t
OU.
{)(^Q ^ w t i i b t - ( M l ^
/<- / < W
u r
ÿui
-v uxuJ uk.
(u u iin u u r
<j*
/
^ ' <4Ar
tA4fl*
yr ¿ iM Â Îty a
<**
^ *"
f t
u \ ^ Â A f c Ü v O »**•»*
t t u o ^ u J « »»
/ 'f t ^ u c l c
^
y
/u | J U O > l A UIM
^ t a i u f /n iu )u iM (U « k t 4*
aftwui^tuu à . /t<u\
c u v O ta a x c Ji-
\
¿ U JI
-
U ÂL^Xm f i o t t o
/(fiM »»»d i j m w
CA^ ^
i/A w tA yM u^ilair'cIû. lutuuJTiAAM t
.j
(taJÜ CÎ iAc
cjo o ~ W -
U
J
-
r
oî ài l »**
/•
c u u i u f i t u t t » iu n ^ fc ü jf'ir ^ * ' / li* v \ iu tü j . c l\t*J\(j*
Aa > h
»T)i>« .
M V" ^
<^t u
**
c m v o x ^ c ^eSKÌi./ fvuxr
^ lU
/o%yk*.f«~
& K i|/uluiw Q iO k Ul^O cú liJi ^Uiuu<MCuwAuM 3 c. /ï <y
f' '
/ « ^>a>ll(%yu ^ u iu ir A faj6(4vJtàîu Cb (« ^w U i«X *yc
^<a**ÌA cJcfc""
^ u jtitC ü Ä U )*u j
Í^X^M^cLy¿U3t~
l)« 'iil|U U (a r;
maY
“ * '“ 4*'
Cfcp
^ W r «*«-*- /o*»^*«^»
a . M*ob«-
(^«»t U JH u T O v CÚW ííioífcí«»»«
f*. (*jf¿%Í^XZZa.\<t^k. c ^ jo tp *
'
íjf***. C m T ^Jm m vw H
yutiGL
£AAM*^fyï-
t u U t í^ < ^ r U ta y /u í» ¿ JL j|u 7^ ^ A o C í^ x 'y ^ * * ! ^
IAUIW4
(aa*.(jUT< Va m ^ v«
U *»'
^
« • •>
(O u ^ cu am t /& Ciyí* (kbiHMC ^-< /ou» ¿ u / c * * Y ^ o k U i v í J u m . <-»
"i
^ h A lu u r
Or- C % / f < a T i J Í (
^ <
u »a
Yo
%
J
t
U
O
>
C j(T o ^ ^
í aa A
i
c u u b U u iw o
O u f»
V ^
^
¿ (ih u jm
^
ja % * X T
i
Om
fo% JT a ,u l» < - * » *
ú jjv J * «
u t ,‘‘
° ‘ **
U M ^W
,
<j^ 4. ít^ ^VX^ill^XvOtUj' C/lw(UaJILk *^4 /«4*/Li ^Ol^l^UT"
^ U - ^ lW u r y ( * ¿ Í I v a ««J"0 > U m< ¿ a CCkV^MU
omX—
i* iÿ i~ j& f V M/ A , u cía cfa^ o » * x * « K O < » m . /u t ^ 6 y c L ú tb lo ;
f tcu fíd\ *ó<J)6 tu ^ t/u m u u u /<» « w JU it i c (( t* v \ ü ^ it)h
^
y u ’ ¿L x u L \ o ~ s 'i> * . /<s
^ u ttC C tJIu ik »
,
AiV^c^mx /<. / (y » |/ b tfa ^
^ <M«r^«jfÍ4jj|uÍM ^ lû tu -U ^ jJO ltîx ' ci
Ä*. w T u ii. / ú X S Ot J uaaííu^ ° k « (u 2 m^ coi*^ i/ ( ^ f c a AWTCL Ü P u
1 ^ «ííkvt.'b*
m i
çXw»«a
¿\'ivt|U «)lJ»<luL> ^
AoxÚ L
tu_
�P'SlA < u ^r"S '
/'a n K Ù lo %<j ? * 'rtfi,vJr
//r^UL*AÄAAv«x* ^ iM att< u r/viL > ”i c
"
"ÌUa ? « v y
^
flU U ttü û ir'
CT 1 M « t
Y 'M^ - «W «****"
..X
• r
A i f c w f í » « ‘ - ^ aitt'
J
a- '
« iw » « « , /»«or
<wJ“ ^«»
t *^^**'',fc,^ á Ä d e y< w T " i uy^lA JllU ljU w u m¿tvM>M.O ( i /fc
f ltí*í. (j «**->
y\rr^
V 7 ^ ./ ...
U V X ò«*ßVx\AjA ^ r tzte^ • *■
C iii«
/ U ^«AmÍIÚ'^CuUj
/ u ¿ i't^ 4 u > tu >
y b w r^ v n « M M U j ^ ov' /<-
oV
^
tUAJ
>
^ 1 - b o v .a ^ .
C O v Ja U W « . U. A»
, CAr
îtlû u « « X cXfeî (U w À lM M
Ui>«\ t K v j t* J /***** lT*
/fA *Jti*iar'
vumu^
/•</!■«. (^«ú. jíi»«y
^ü t;
(yüJk. (l\tvt VbwUtÚr
'btacuiko Ow
■
-'/■* <
í
**T*.
-
fts á z u x io u
• -’ ■
« » » f Ol't^oU) ilvAlM /n
a
«
M
a
.:o ö v O > j A . . , \
.
'
&. A j u s t e r lu**<p**f j» a a I o iJ
f u . . . |- ft (i — i-in—
Mt <ft 1<M C u
( /«* fÿWUÍCJt tÁ<*>**> Ô< A ^ /^ >
b
¿ A ju <| Ó
‘»A*
cL O .
'^ '« 0
y < < iiC C 4 u » u > Q icM o (mTwmuw
U Ô i ^
V
i k p ü ï s X va>«
' ¿ f e j ç ~ - b ' cv u jT ï u ^ ^ J t * ^
y
< M Y |^ ú h ¿ ( t o
¿ A ttjV tC u \ T l
C¡*UL i c
, y 4*5
|(I« a m JL
'^ ^ f 'i /^**l^‘‘
/ u v v < ¡s t~
/ u X > t ¿ 3 Z* r
i a Í í ^ i ^ l
« *» * *y í> v > f> « »vI
^ Ü U A A lW **j ^ |< i A ílJ f 2 f t ^ » » ,^ <
CjíMjik*
|4 U r
/V i o « '
a jU j
¿ T> > »a
A tu lu íí
'b c r k 'b v ^ J o V v k í v A * * * »
^ 9 / *
y «ú
.
'•0 %CUL> . ( fómí^jjtt. / o Á ^ Í ^
^
A Lb U V
A íV » fc J,
¿ A
f
/ u íiÜ iit o » * *
V il A¿ yC ^O < J» JS * t Jt <.
( W
Cf « *-*-> ç y n s * " ' . { ' U a X Í * * * -
>,*
___Î.-VC'cMr
2k"V*V*. CjUA u C- ^ V' tfJU >^ ^ UtaA
^
'O
^
J 0 0
f
----------- ^ --------'n T ^ , ,
KUíaUAaAi!) ^ Ur ^>iA V tU tJtu iw OMWIt to'»* Ä* y * * ^ »{UçÂiu' * /
¿otj^íiiV A ia a » » y /<MAJCiJ(ui«M>r i< /to V*v ^ " it o w c « * “ tXyL> *
�(Ï6 %6^
(y
<jfW- ^
ujC ÍK (X u ^ tl,
ti&Hx. mtttrtu^ «AnXÙiuu
tlu J E if-.
ftKQJUikiÜÔtcOM
i * ’ J * * n J i t i 53T
^
/'tyfiApTutM
y i O ^1 '< j | ( t 4 ~ M ^
**-
A (^ 6
UC- 3 u
O lku/ur /rf ^MÎÜl
U|w .
|(iUX< A c u x p U U
A c t ü t » * ' " ' 4***“
I 7Í+T;
<m
^ / o l'i lu i> » ^ « 1 /V 9 iß ^ t yA^ ^i tlfU
i C Lù JAr iuui«* p//U»4u J I r J'âZ
vàxjL
,j'vu *< f~ .'*~ / c « ^ 5> ^ * y w ttíxw r/ ^tiow
iu L*L * Ï.u £ m
d
i
y
tA*A.j**vÂ. C U M M U . V
^
t ù ( « ( c u l r ^ t ^ ù u w w t x u ö T ö j^ <
( U jU
iv ^ u
J ^ th ir
u ÎU
/ü i
U r u lf* .^ * .
^
/ > Cv?> fa U < A <*■»» t , l ^
UA ^ XiXj^tl\aa\uaaCA ^UAa>mî ’M
c*
*<j|>)|k)<^Xây ^ fL**“ "
****
^ v T ìO(A(^A<mA4. <■..\ / . A (u V Û u *
/. . • -M -- '
A<<«mC£u^
(*6 %Ç t M liU « ¿ r u ít r r/ouuuXti u*w)<j
(^ ia ^ c u w
-'
/<•
l-S.
O it« u « x ^ < « « \ /iv}f*x*X~’
c U L T ^ t y t\»M U
/^ V M iT u tt^ U lU ^ ^ Ju¿t^t£ú A u > 'U U
(ju 'iM U fu » p c il¿ ^ 0
IW^OV^CUAU
MÍ*M<|«*C,
^ u í l C C J « 1«»»)
^ C u av A u ^ iÚ JT ^ w /cyvi ( tJttZkJf «£*>if>«M / i m J ü J u » « y t M M f c l o
^ u T b iO ^ Jb iiu Ji— ut«k /o tyiitu u i Íca» ^ ú » a /
d i ^ u u ^ c ^ U [^ ¿ L ^ u * ,
k n ^ ^ r
^c
^ ttid U ü t^ O k cÄuiM ^»m
Mt\ ¿ u m y u íit X Á ii c u \
/ riw \(»£u i ' (u.\/i«X O<» w» a Xu>»a t/jitiplw i*« .
'
y
e r ftu 2 fc M
y
T
^
r
f ^ lu iT
h *
/«AM»Ul)a> U >^U hM 4,
V
IJ
< a a c * í.
A» / « i V o
/?<)!*>
»»í
l i U f'iif
/o ^
ft«j<»», i ^
r“ " ' ' * 11 T *»\ ^ tlh ir
^
to ^ ju ^ T i»
/
ocv. c T i
'-- *
<j[uc
U iu | iili^
O r
^ M iK H V jU í ^ < , ^ ó l J J < i | t * r •
\ 6
(ItM ^ íü U
a X o ^ ¿ t¿ u < _ ^ < A y u flit íu í« .* » ^
c t f t jp
C y
/ s
à U M iy (fuX
/l^ |A M u t|j< ,^ 4 / Ca / i IUi H lusVu i » *
íb ú tit«
Cv-
Vj j
{y l u y «1
1
<U
IV ! M M .
y
(< 1\ A J ±
^
tt í« » A < » W V 4 .
<
A.
c A fb u u u J I
/ 1 1 * » » ^ ^ I M i »•
^
tM U í\ T W .
(j(io {\ ^
tfVMUAMir Ck /
b ^ i^ A A A ^ u ^ u ^ iU ju
¿ ^ t y i ^ /u í u i U
C ^ V UM^
O
tb u ^ M A u r C u y / o Jy w > >^ K T
4*
^f«».
�^
/ y * A A .c J i
/fc
CW uU aJT ( m . ^ v l m x r
^ * « jc —
V 6 * u X iA d u ««-*«. tu, CU.CÜWI **y*JU COU^I^kA. iAAM^/bi ^ o (lÍa (^ «aJL>
\ /u. UbTtoST^M JO ltV tA A . ».--- - V~
^f,
^r»»
V v« u ( ^ ¿ uU ciim Qju^owtb^**\
^ M c » à -/t ^u a^ c^m y'au M ^ ieu *^/(M C jkiu (t
« -/fa .« A C * —
V
g\<L >K K ^
V ^Ùj|UUM «u, ÿ
^
iu i> ^ í^ « e titi H
tiJ ic v > ^ 7 £ u X T '
tk^üntlr- oi)fOC~
UM /«Uw« &. A*-.
/t4 ^UUtjOVU^i p o u û jù u .
/i
V «|
'i *
l* ^ V t U iw >t^uur-
ftù w ii ¿ 4
/«* /«(UiAc,^ o r
(r^
t(
U A ir u x U
/fa
U «x v A -^ b u
/f "&*» jJrtfcÉwkiMUMOa.
(M ,^ u » Jlo u y C (~ ü ~ A»
// /ft )< « J( c A b lO ^
g^tJy« o ftM iù j
If " i<.
m w tO iW fa A M » * »
/ • * .7 ^ ? ,
***»»«*»
t. /*»•
**
, />
ClM u ^ M
jy ■»^ ^
Al»*Mr /«V
p - ‘ . u ttt AA
^tljU O W tJ^O
u|h¿4< X ~ ¿« / u i
U. A jU ^ t
^
< « îu u chd~ IpAl. }U<M /f<jXjb OUM UM UL ^ v> O A ? , /í^ V ílU A í'
**—
'
•
^
bM ,U >ab«M < y « ! t l u )O Í» ir^ » V « A « » . «*- tX*J ‘ ” ' ' V
fUUA ft
Ujít CU^M
Kui^x CXi í U M jL
w u
, CbW lty»^»*!^
6-
CU»
^ ' < ' ‘ M Í T f c « u * * .’ l « *
í
J< } « ó r
W ( 4 M U k M jr
w
T
o
« w
v
<m
\
U
*
^
o ^ > u > Jtu iH
c i * <9>t*J\CjX *J
u u it
f*
u
J
o im
T
fc k *M « IC i
<
« I» ** ^ *-
^ ***
y u t l B ^ t v í lW v
Gl+~
'* T ^ « m . -‘ ¿ l ^ U V tO U M O «
' —3
fiU>SKfO'JuL*^*J^Çf*jXïr <M f«.
O ^ ju o r O u iH *
c
%
c^**i>vcuU^
C u u tu M k M T
|u ii\ C ítu Jr ú i« u O
/ovytpJdU»
-
(ju x ^ v ü u ^
Í
u
'^
u ím
J
iu
tb * ^ w ^ ^ ,LÁ,%*K
/* . foC O u
¿%J u í itX lJtvÜ (JU b N M u u jT c t r u ^ / C u m * ^ ^ f •*«./* ^
cu. ú n jk ty i
< m ( | « u i A '^ < 4 j i / o % í í
y u ío íit f c t o « » !
A m i Uu«\fc»«H ^ t >
fz tti*
ty h ?
" i IV (U jU ui ß\ »Afa (jX
tp k jí
J
^ fa » r
«Km á fa u x s l—
CtJ*iOj*X~ CAíÍimÍm
/•
¿ y si
***“ *
»
í “6^£ /
s^ O > * K *
<jlt%jj\u\»a*ár f* ^ . yílA U fviít
"i* . A oaJ a l l *6 <ß6 J (^Wk M1 M<- < J - *
*«
�Af " '(M ^ v v w iiju o /•»^ yvu A jjtctï
J Ô«A/c^«^nt-VoükJUùk»*-^jU^
u í f r /cV. I-<^»«jl. /(^ iAjuJLtxKz 7 l< . /t iMnCJj¡j£**J*+
ia ^ u fit C t Ju i« * »
'^ l^ *
^ J u A . t í C á i ó i w i ^ / * , fy ú u u á X ix A o c i e ,
A
ù . A iiju û i r ^ t /a fc».
( ittw À iu <^ut
a u ft
U ja *^ °
/ ^tíxh o wmÍ í u a u ^ -*'
^U )ius«]^< 4s r /m
01/ÌJ*\*J& V JU U L
t fe ic u h
<pt*'a¿*/*V.
_
A * Ju iw U * iû » “ * ^ Ifc iiu j
(M ÿo ^lW^tA*j¿ÍÍW«ÍA>
fo ^ X Z U ;
^
/ < « £ ' ’ /ôV K j«*.
^ C j L i i y i a ú u j r A fu ib iD ) ^ t y x * -
(\ A l i t i t i
i/M'A.~*J
jc u ¡u ¡r i n y ^
CO M Avli. / a /©* ‘'à *
tZbc^JU
/ô T *«/y» o irfo »M
’ t_~
£ u w -fc* ^ ^
,
X
/
Û * K u r^ t|J< ^ K /c S a ü u i) ~¿><.(J\JL *h<* tKj3fi*Jj¿->
c iiu ^ ib U i
‘ »«jfcvc-
Ä-
/a. Z ìi y.
Û M * - » t o ' * * * - (-* & * -*
,u<y <Wo<‘
*ÿ'UA M l t t i f c «
(< w ú ¿xá > *
vMOjMJMMUJU /« o ^ u t t . 6 m
jt x t o u i
^ u ! i ( <\* v \» j\tr
(M U w iu tc M A c a ry
^
^0^V>
/ a ^ov^*-> 4*6 %&
«u j +Z u ja ^
^ > a ~ t. A c A ^ o x ir ^
Cfvt A
CO^fcT— V-
a t f e y « .;
Ä ^ J^ o iitÖ T M Ä »
c ü t v t u \ ( u u r ^ M y u  r © * * ! « .^
o r f t c S b « ^ è » f t ^ C L 6u.
^
çr\CUr t< C**A*
/iTiv>|Ü Ü )\A uiw
tAA*-
)OM (UA<4*\ ^ lo tu ilV
</ov^«A >V»y^/
/
cUiiUiA
yV d L
/ * J * í 3 U * ¿ m p a i r ’tX ï****. r
coU JT o^ ¿d t
ïc A c ju l ,
ft*,, y <¿*~
**- ^ M (u ^ t c u » y ^ t X ^ Q u A t o H ô
O u t^ iw x ó J^ A ^ '^ c .y ix .
OjulIuavoca<m%**ì*^T **“ ¿P*“** J *A*^J
(U U ^oC (ï~ ^ Ù
M r C w « ( j " io v w T S if
omoJ T
( tA x i- ^ O ^ U ^ A
cA
Ç>“ *
d - CX»»*xAw>**»»»X>
wa
V cbouvX *~ / l p O J t X t K ^
A cV *jC bC c^»«JU ^ IA V
{ f c 'i c j w u *
ù
/
s
t j ^
°-
^inAAAAXtS f '*~->
�XH
c ú f^ J T . { * & %
fí\ t * A r
M>
'l A i . ^ o o o c ^
^ C U A O »*r
Y *S~
/ í\ ~ b C U A C u À à c, ~Ä«-A
/*
Cí * a j¿
O
\
Ce
C u a ^ U » y ’ü T ' i * . J * ' tM ^ '
C m w «C <| «a A 2W
^ u Y ^ "yto » «
¿ » *
<~ c¿Y
^ '
CAA.
¿ ^ £ ia j< a ^ « » j
U
<A
J O V»
c iu x li
CU«U|j Ú u
/t
w aw w 5 j ,
ffijfjitjlito * *
¿ « a < iU
/ L ju x íy *^t\
^\M r
y i j'ijp
(tM X
O
(/fc V W y .t u T ^ ft * ^
\ü u - '
tí*l<xA~+<~x ~^t>KA^ yíy, o X w r V # 4 / / “^ ¿ r <*’ y
Ü lio u A U X r / te. \AhGXju3 Ú iu '^ m |^U *dí ^it*A A (w *^lí y * W’‘
U iw tb d r " ^ Ú
m a
O
-
t v
6 (A
a\
J|
(^ -¿K .
* ^
^ M ir tc ía io ,
-V
jko
I - ,
>■ ?■
.Mi}
' Itw .-i--. l- JM v /t -U • Ï
v .„
w '~ , a P'-'í
.-..Ä
-Wl^X
-o \
'■
^
.* . - - ’
5-.« ;..: .•
' ^ *\
.»
.<
>‘ — ,
.
V
f . ,.
• .¿,
^
•
...... .ti,,
N
'U
-7i>.« *Ij.a#
.«••
,^ ü '
-5 ,*U
- , •,•.
JU o;
•■«
.O
T~J ’’
* *"'-•J
'*
.
.
*
*^ -
L-í í >.-..--^,." » i
*■'
■'""WA
>*•->*•
•“
,v
• '''
.**■•1
.Ik
,
,
•
.
*_
*,..,
r
*-«*A»v»^íÍr
A .« .« ..o
^
J»
/■
■-'>*■•#(»>..,) ,..* , L-A
V
«
, /— rj., ., I í t ... * -. >
“v u *
.uí
.i , . ,
w ; . . .« e / ,*
.1
.'
1
• ' /h-, * » • « . .
<*'
Wr.,.
*
,_••
.1
-•>>
V
'*••.
'UW '
J ; ‘ \.o
t
' "’
^
t»»a^|c'Í>«^"^Y'<*w l> t * . ---
íj»»’ íl ^W «i
«
<***-
<> A
Mj) -ÍJ
•
^
#Vj o r / i j
. . í « o ' ^ i~ **
^>a) A ,
*r
-
»*6*
\
. 4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rouchy, Jean. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dumiral
Allemand
Lamy
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Note en réponse pour Jean Rouchy contre Michel Diernat, Arnal et autres.
Annotations manuscrites. « Point de droit »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3019
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3017
BCU_Factums_G3018
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53636/BCU_Factums_G3019.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53520/BCU_Factums_G2605.pdf
91b0e145176edecedd92094dcec0b1b8
PDF Text
Text
/O'*
CONSULTATION.
C O U R ROYAL
DE RIOM.
I re
L e C O N S E IL SO U SSIG N É , v u les pièces d’un procès pendant au tri
bunal c iv il séant à Clerm ont, entre M . le lieutenant-général du Boscage
et quelques habitans de la commune de V ernines;
V u aussi un Mémoire im prim é, contenant les moyens de défense des
habitans de V ernines;
V u enfin une Note de questions proposées, au nom du général du Boscage,
par M . le comte de Cosnac , son gendre,
E
s t d ’a v i s ,
1 °. Que M . du Boscage, en qualité de légataire de M . de Lavigneix,
est saisi de tous les droits qu’avoit celui-ci à la percière reclamée ;
2°. Que cette percière n’est pas féodale}
3°. Que c’est à ceux des habitans qui contestent la percière, à prouver
qu’ils sont dans l ’exception qu’établit l’arrêt de 1765.
On doit être surpris de l’insistance qu’ont mise les habitans dans la
proposition du premier moyen; car ils ne sont ni recevables, ni fondés a
le proposer.
M . de L a vigneix avoit acquis la terre de V ernines par acte du 8 juin 17 9 2 ;
l'acte de vente indique en détail les objets dont se composoit cette terre,
et y comprend notamment « un droit de percière sur toutes les terres
» enclavées dans l’étendue de la ci-devant justice de V ernines, non tenues
» a cens, soit du propriétaire, soit d’autres ci-devant seigneurs. »
Par un testament du 14 janvier 1 8 1 9 , M . de Lavigneix a légué cette
terre à M . du Boscage, sans en indiquer les détails, mais sans aucune
reserve. Il n’a employé, pour la désigner, qu’une seule expression; il a
dit : J e donne et lègue...... ma terre de Vernines.
Cette expression générale comprend évidemment tout ce qui composoit
la terre de Vernines , tous les droits qu’il avoit acquis lui-même en 179 2 ,
et qui n avoient pas été atteints par les lois sur la féodalité; en un mot,
tout ce dont il étoit propriétaire dans les dépendances de V ernines, au
moment où le legs fut fait.
Aussi, des difficultés s étant elevées sur l'etendue du legs entre l’héritier
du testateur et le légataire, elles ont été résolues en faveur de celui-ci;
1
C HAM BRF.
�( a )
et le tribunal de Clerm ont, par un jugem ent, la C ou r, par un arrêt
confirmatif, ont attribué à M . du Boscage la terre de Vernines, dans l'état
où elle se trouvoit au moment du décès du testateur, avec ses- accessoires,
circonstances et dépendances généralement quelconques.
Il est donc jugé que M . du Boscage représente M . de Lavigneix pour
tout ce qui composoit la terre de Vernines : cela est jugé avec l ’héritier
universel du défunt. Comment la question pourroit-elle être agitée encore?
Ceux qui l ’agitent dans la cause, sont eux-mêmes sans qualité pour la
proposer; car ils ne représentent pas eux-mêmes le défunt. Ils étoient '
ses débiteurs d’un droit de percière ; il doit leur importer peu à qui, d’un
légataire ou d’un héritier universel, ce droit appartienne aujourd’hui : il
doit leur suffire d’être certains qu’ils ont, dans la personne de M . du Boscage,
un légitime contradicteur. O r, ce point n’est pas douteux, puisqu’il a été
décidé, entre les vraies parties, par un jugement et par un arrêt.
L ’examen de la nature de la rente, objet de la seconde question, ne
peut laisser de doutes sérieux dans un esprit non prévenu.
L e terrain sur lequel la percière est réclamée, est situé en Auvergne ,
c’est-à-dire, dans une province où la puissance féodale ne se présumoit
pas; où ses droits ne pouvoient s’exercer qu’avec des titres positifs, et où
l’on ne reconnoissoit pas cette m axim e, si rigoureuse pour les habitans :
N ulle terre sans seigneur. L ’Auvergne étoit un pays de franc-aleu, dans
lequel il n etoit admis de présomption qu’en faveur de la liberté des hé
ritages, et d’autre règle que celle-ci : N u l seigneur sans titres.
Cette règle fondamentale du droit de notre province; cette règle, qui
fut toujours religieusement observée parmi nous, formoit autrefois un
obstacle invincible, contre lequel venoient se briser toutes les prétentions
de la féodalité.
Pourquoi la méconnoîtroit-on aujourd’hui ! et pourquoi ne serviroit-elle
pas aussi, quoiqu'en sens contraire, à vaincre la résistance des débiteurs
des percières, qui cherchent à se soustraire à une dette légitime par des
déclamations contre les abus de la puissance féodale.
Ces déclamations très-puissantes, si on les faisoit entendre dans un lieu
où la puissance féodale étoit de droit, ne sont que de vains mots, en les
appliquant à une contrée où la puissance fcodale n’exisloit pas sans titres.
Si l’acte constitutif de la créance n’a aucun des signes de la féodalité; s’il
n ’attribue au créancier aucun de ces droits nombreux et si caractéristiques ,
qui ne pouvoient appartenir qu’à un seigneur féodal, et seulement en sa
�(3 \
qualité de seigneur ; si l’acte enfin établit un droit qui n’est pas essen tielle
ment féodal, et qui auroit pu appartenir à tout autre qu'à un seigneur,
dans tous ces cas, le droit existe encore; les lois sur la féodalité ne 1 ont
pas atteint, car elles ont respecté les propriétés ordinaires.
O r , personne n’ignore qu’en Auvergne, le droit de percière n étoit pas
féodal de sa nature; personne n’ignore aussi que l ’on ne reconnoissoit
aucune différence entre les percières dues à des seigneurs , et celles qui
appartenoient à de simples particuliers ; personne enfin ne soutient sérieu
sement aujourd’hui que les possesseurs d’héritages grevés de percières,
peuvent se dispenser de les acquitter, s’ils ne prouvent pas clairement qu’elles
étoient entachées de féodalité, et, comme telles, abolies par les lois nouvelles.
Tous les doutes sur ces diverses propositions ont été fixés par de nom-,
breux arrêts, depuis celui rendu entre M. de la Salle et les habitans de
Blanzat, jusqu’à ceux qu’a récemment obtenus le sieur Crcuzet, comme
étant aux droits de M . de L aq ucu lhe, ancien seigneur, contre un grand
nombre d’habitans de C c b a z a l.
De tous ces arrêts, il résulte que celui qui réclame la percière n’est
astreint à autre chose, si ce n’est à prouver que la percière lui étoit due
autrefois; et que c est a celui qui la refuse, en argumentant des lois sur la
féodalité, à démontrer q u elle étoit réellement féodale.
O r, le droit invoqué par M . du Boscage est établi sur une foule de titres
qu il seroit trop long de détailler, et parmi lesquels on remarque surtout
un procès verbal du 9 novembre 1489, et un arrêt du i5 juillet 1765 : le
procès verbal, qui contient la délimitation du territoire de Y ernin es,
énonce le droit qu’avoit le propriétaire de la terre, de labourer et faire
lalourcr
lesdites terres et prendre et percevoir la gerbe et percière
desdites terres qui ont été labourées dedans lesdits territoires.
Plusieurs autres parties de ce procès verbal rappellent aussi, parmi les
droits du seigneur, celui de bailler à percières tous les héritages situés
dans les dépendances de Vernines, et d’appliquer à son seul et singulier
projit les fru its revenus et émolumens desdits héritages et d'en jouir et
u ser, comme tout vrai seigneur et p r o p r ié t a ir e pou voit et devoit faire
de sa chose propre.
.. ,
,
,
,
,
On voit que , dans ces temps reculés, la percière étoit due au seigneur
de Vernines, pour tous les héritages situés dans l’étendue de ceUe pa
roisse; et que cetoit comme vrai propriétaire des terres, non comme
seigneur féodal, qu’il exigeoit la percière, en accordant la permission de
�(4 )
faire des défrichemens. A insi, non-seulement la propriété directe, mais
même la propriété utile du sol, appartenoient au seigneur de V ernines;
en sorte que ce n'étoit que comme colons, et moyennant une portion des
fruits, que les habitans défrichoient ou cultivoient.
Pour tout le terrain défriché ain si, avec la permission du seigneur
propriétaire, les habitans, auteurs des défrichemens annuels, n’avoient
ni ne pouvoient avoir de titres, par cela même qu’ils n’étoient que de
simples çolons , et qu’aucune concession ne leur avoit été faite.
11 paroît que , dans la suite, les défrichemens étant plus nombreux, et
la culture des diverses parties du territoire de Vernines étant plus suivie,
elle fut tolérée par le propriétaire , moyennant la délivrance d une portion
des fruits de la part de chaque colon, et que cet état de choses se prolongea
pendant un très-grand nombre d’années, sans titre pour les colons, et
sans contestation de part ni d’autre.
Mais il paroît aussi que, si la plus grande partie du territoire de Vernines
appartenoit au seigneur, et ne pouvoit être cultivée sans sa permission au
moins tacite, une autre partie du même territoire étoit la propriété par
ticulière de certains individus, en vertu de concessions faites moyennant’
un cens, soit par le seigneur de Vernines, soit par des seigneurs voisins,
ou par le chapitre de la cathédrale : ces concessions sont même indiquées
dans le procès verbal de 1489 (0 *
.... 1' ' %
Cette circonstance fit naître, entre les habitans de Vernines et le sei
gneur, un long procès , sur lequel prononça l’arrêt du i 5 juillet 17 6 5 ; et
elle explique les dispositions de cet arrêt, qui confirme une sentence du
6 février 1766 : cet arrêt condamne les habitans de Vernines à payer et
porter le droit de percière pour tous les héritages qui ne seroient pas
assu jettis à des cen s, soit envers le seigneur de V ernines, soit envers '
d’autres seigneurs.
Cette disposition est en harmonie parfaite avec tous les titres rappelés
dans l’arrêt, et avec l’idée que nous avons ci-dessus énoncée. On conçoit,
en effet, que les anciens titres attribuant au propriétaire de la terre dé
V ernines, la propriété de tout Je territoire situé dans les enclaves de cette
terre, les anciens titres indiquant que les défrichemens et les cultures •
ne dévoient avoir lieu q u ’avec sa permission et à la charge d’une percière,
( 1 ) L e s habitans de V e rn in e s p o s s é d o ie n ta u s s i, en o u tr e , trois cents sep teréesenviron
de c om m u n a u x , pour le pacage de leurs bestiaux; il n ’ en est pas question dans la cause.
�s*»'
/0/
(
5
)
chaque habitant, pour s’affranchir de cette charge, devoit prouver, par
le rapport d’un titre particulier de concession, qu’il étoit propriétaire
lui-même do la partie de terrain qu’il possédoit; et comme les conces
sions avoient été grevées de cens , il étoit naturel de ne considérer comme
affranchi de la percière qui caractérisoit un simple colonage, que celui
qui ju stifieroit qu’il payoit des cens, parce qu’à la différence de la percière,
la redevance censuelle étoit caractéristique d’une concession prim itive,
qui avoit transféré au possesseur la propriété utile.
La distinction établie par l ’arrêt de iy 6 5 , entre le cens et la percière,
prouve donc, tout à la fois, et que le seigneur étoit resté propriétaire
des fonds sujets à la percière, et que cette percière n’étoit pas féodale;
qu’elle étoit seulement la valeur du droit de propriété, comme cela a lieu
dans toute espèce de colonage, tandis que le cens ctoit une redevance
annuelle, prix de l ’abandon de ce même droit de propriété, pour tous
les héritages auxquels il s’appliquoit.
Toutes ces réflexions sont fortifiées par une autre circonstance bien
remarquable; savoir, que les habitans de Vernines ne produisent abso
lument aucun titre de concession quant aux héritages soumis à la perciere, ce qui démontré de plus en plus que s’ils ont joui jusqu’en 17 9 0 ,
c est seulement au meine titre de colons, comme dans l ’origine des défiichemens.
Aussi remarque-t-on, dans le procès verbal du 27 juin 1780, la dé
claration d un grand nombre d’habitans qui reconnoissent ne cultiver
qu a titre de colonage, les terres qu'ils détiennent dudit seigneur.
S ils ne sont que de simples colons, s’ils ne sont réputés avoir toujours
cultivé qu’avec la permission tacite du propriétaire de Vernines, il est
évident que la percière ne peut être considérée comme féodale, car ce
caractère ne pourroit convenir qu’à une redevance fondée sur un titre,
mélangée de droits seigneuriaux.
A insi, non-seulement la preuve de la féodalité devroit être à la charge
des débiteurs de la percière : et dans le doute , d’après les principes
admis en Auvergne, ce vice ne se présumeroit pas; mais encore il est
démontré par les actes produits, comme par les circonstances, que cette
percière n’est pas féodale, et n’a pu par conséquent être atteinte par les
lois abolitives des droits féodaux.
Les observations que nous avons déjà faites, peuvent aussi servir de
réponse à la troisième question.
�( 6 ) ..
L ’arrêt de 1765 renferme deux dispositions, l’une générale, l’autre éta
blissant une exception.
Par la disposition générale, la percière est déclarée due pour tous les
héritages situés dans l ’étendue du territoire de Vernines.
Par l’exception, l ’arrêt affranchit les héritages grevés de cens envers
d’autres seigneurs, et même envers le seigneur de Vernines.
L a disposition générale a formé le droit du sieur du Boscage.
L ’exception forme celui des habitans.
De là il suit que c’est aux habitans qui veulent se placer dans l’ex
ception, à en prouver l ’application.
Ils le doivent, soit d’après la combinaison de la maxime Reus J l t actor
cxcipiendo, avec celte autre maxime A ctori incumbit probatio ; soit parce
que la preuve négative seroit impossible au sieur du Boscage; car quels
moyens auroit-il pour prouver que tel ou tel héritage ne payoit pas de
cens ? Au contraire, le fait positif pourra être prouvé par les habitans :
il leur suffira de rapporter des titres récognitifs de cens pour les héritages
qu’ils voudront affranchir de la percière. C ’est, au reste, une règle élé
mentaire en droit, que c’est à celui en faveur duquel est le fait positif
à le prouver, et que la preuve négative du fait ne peut être exigée.
Enfin, les termes, comme l’esprit de l’arrêt de 1765, mettent à la charge
des habitans la preuve de l’exception dans laquelle ils voudront se placer.
Mais on oppose que l’arrêt de 1765 n’a été rendu qu’avec la communauté
des habitans, et non avec les individus ; et qu’il ne peut être invoqué contre
ceux-ci.
L ’objection se repousse de plusieurs manières.
x°. L a contestation intéressoit tous les habitans, soit comme corps com
mun, soit comme individus, puisqu’il s’agissoit d’un droit de percière réclamé
sur tout le territoire de Vernines, c’est-à-dire, sur tout le terrain occupé, et
journellement défriché ou cultivé par les divers habitans de ce territoire.
11 étoit donc naturel qu’ils regardassent le procès comme une affaire com
mune, et qu’ils le soutinssent au nom de la communauté.
20. L ’arrêt est r e n d u , non-seulement contre la communauté, niais encore
contre les habitans considérés individuellement, et représentés par des
syndics qu’ils avoient choisis. On rappelle, en effet, dans l'arrêt, et le nom
des syndics anciens qui avoient représenté les habitans dans l e commencf[ncnt du procès, et le nom des syndics actuels, est-il dit, c est-à-dirc, de
ceux qui avoient été nommés pour soutenir l’nppel. O r, cette nomination
�C7 )
de syndics n’avoit pu être faite que par une assemblée des individus posses
seurs des héritages sur lesquels étoit réclamée la percière ; ces possesseurs
étoient donc valablement représentes dans le procès; et par conséquent,
l’arrêt a contre eux, soit comme indi\idus, soit comme liabitans, la force
de»-la chose jugée.
5°. Enfin, indépendamment de ce que plusieurs des habitans sont indi
viduellement nommés dans l'arrêt; indépendamment aussi de ce qu en exé
cution de cet arrêt, plusieurs autres habitans ont été individuellement
poursuivis et condamnés par des sentences que l’on rapporte, c’est que le
procès verbal de 1780 prouve aussi que l’arrêt s’appliquoit aux individus
possesseurs, puisque ce sont ces individus même qui font, avec le proprié
taire, des conventions pour parvenir à une plus facile exécution de l’arrêt.
Nous avons répondu aux diverses questions proposées ; nous avons dé
truit, il semble, les principales objections opposées à M . du Boscage.
Invoqueroit-on aussi contre lui la prescription, en soutenant que la percîère n’a pas été servie depuis longues années?
Cette dernière difficulté seroil écartée tant par les faits que par les titres.
On feroit d’abord observer, abstraction faite même de tout autre moyen,
qu’il faudroit trente-cinq ans au moins de prescription entre majeurs, avant
la demande, pour détruire le droit de percière (voir l’art. 2 du titre 5 de la
loi du 20 août 1792). Or, il paroit qu il seroit facile au sieur du Boscage de
prouver, meme par témoins, que la percière a été servie jusqu’en 17 9 0 ; et
il est de principe que la preuve faite pour une seule année pendant le temps
de la prescription, suffiroit pour la conservation d’un droit fondé sur titres,
comme l’est celui de M . du Boscage.
Celui-ci seroit également autorisé à soutenir que les détenteurs n’ayant
possédé que comme colons, ainsi que cela est prouvé par les titres, ainsi
que cela même a été reconnu par eux en 178 0 , leur possession, viciée dans
«on origine, n’a pas eu les caractères exigés par la loi pour opérer la pres
cription (voyez le Code civil, art. 2229 ).
Au reste, le sieur du Boscage est porteur de plusieurs pièces qui lui serviroicnt à prouver la perception de la percière, et par conséquent à inter
rompre la prescriptioâ.
Tels sont, par exemple, les divers carnets écrits de la main des fermiers
ou sous-fermiers, et où sont notés les payemens. Ces carnets, ouvrages
d hommes aujourd’hui décédés, et non intéressés d’ailleurs ;\ la cause, ces
carnets seroient considérés, d’après les principes et la jurisprudence, comme
�(8 )
suffisans pour fournir la preuve des payemens reçus par les fermiers. L es
tribunaux ajouteroient surtout la plus grande confiance à l’espèce de registre
ou de relevé intitulé É ta t du compte des gerbes reçues 'par L a ssalas et
Iléb ra rd , ferm ier et sous-fermier de la terre de V ernines, d’autant plus
que cet état paroît avoir servi de base au traité passé le 7 avril 17 9 0 entre
H ébrard et Lassalas. L e traité, qui est authentique, prouve la vérité de
l ’état qui l’a préparé, en fixe aussi la date, et démontre par conséquent que
la percière étoit payée en 1790. D eux arrêts de la Cour de Riom , rendus
les 12 janvier et 7 août 18 2 1, ont admis des registres privés d’anciens fer
m iers, comme preuve de payemens interruptifs de la prescription.
Enfin, la sentence arbitrale de 179 1 pourroit aussi être invoquée contre
cette prétendue prescription.
D é l i b é r é par les anciens Avocats soussignés, à Riom , le 2 1 avril 1 8 2 2 .
G O D E M E L , A L L E M A N D , D E V ISSA C .
t
A C lerm on t , de l'Imp. d e THIBAUD -L A N D RIOT, L ib r a ir e , Imprimeur du
- .
Roi et d e la Préfecture.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lavigneix De. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Allemand
De Vissac
Subject
The topic of the resource
percière
experts-géomètres
experts
assignats
féodalité
émigrés
legs
coutume d'Auvergne
franc-alleu
doctrine
cinquième gerbe
communaux
climat
droits féodaux
physiocrates
agriculture
colonat
longues procédures
communaux
défrichements
livres de comptes
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Percière : 3. la percière était-elle, en Auvergne, réputée féodale, lorsqu’elle était due au seigneur du tènement ? était-elle réputée mélangée de féodalité lorsque les titres qui la rappelaient, rappelaient en même temps les censives dues au même seigneur sur d’autres héritages ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1765-1822
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2605
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53520/BCU_Factums_G2605.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Nébouzat (63248)
Vernines (63451)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agriculture
assignats
cinquième gerbe
climat
colonat
communaux
coutume d'Auvergne
défrichements
doctrine
droits féodaux
émigrés
experts
experts-géomètres
féodalité
franc-alleu
legs
livres de comptes
longues procédures
Percière
physiocrates
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53947/BCU_Factums_B0108.pdf
d5b606a27bae5c5db7c64bb2fa5dff88
PDF Text
Text
MÉMOIRE
PQ U R
Me J
e a n
N a za ir e
Parlem ent, & Meff i re A
n t o in e
B A G È S , A vocat
en
D E P O N S ., C h evalier,
S eign eu r, Marquis de B elleftat, fon curateur
à l ’effet
de l'autorifer, Défendeurs & Demandeurs.
C O N T R E M e C h a r l e s J U G E , Procureur en la Cour
Demoifelle M a r i e B A G E S , fo n époufe de lui autorifée Demandeurs & Défendeurs ;
E t encore contre Sieur F r a n ç o i s M A L B E T , Bourgeois
Demoifelle E l i s a b e t h B A G È S , f o n épouf e , auffi
de lui autorifée y Intervenans & Demandeurs.
ù
Voluntatis defuncti quæftio in æftimatione Judicis ef t
L . 7 Cod. de Fidéic,
M
E. Bagès réclame , dans la fucceffion de fon p ere,
le quart quJil lui a légué par fon teftam ent & encore les
Portions des filles forclofes en vertu du droit d'accroiffeA
�m ent., dont Ton pere n’a ni entendu ni pu le priver. Les
Demandeurs foutiennent que d’après cet a¿te , M e Bagès
n’a que le droit de prendre ou le quart ou l ’accroiffem ent,
mais qu’il ne peut pas demander l ’un ‘Ôc l ’autre. O n fe propofe d’établir que les principes ôc la jurifprudence s’élevent
à l’appui de la prétention de M e Bagès.
J f
X
Æ
A
fieur Jean B agès, bourgeois, a été marié deux
fo is , & a laiiTé fix enfans. Il a eu trois ‘filles de Ton pre
mier mariage avec la. demoifelle D aureilhe, & .de Ton fécond
mariage avec la demoifelle F a u c h e r f o n t 'iiîu s M e Bagès
& autres d'eux filles qui font les dames Juge & M albet.
D é fu n t
L e s'tro is filles du premier lit ont été mariéès du vivant
de leur pere,* fans réferve d ’eipoir fucceiïif : favoir; l’une
avec le.fieur G la d e l, N otaire, à Saint-Ylaire ; l’autre avec
le fieur P a g è s , bourgeois a L avou tte ; & la troifieme avec
le fieur Pradier, marchand à Brioude. Ces trois filles font
par conféquent forclofes de la'fucceilîon de leur perej d’après
la Hifpofition de notre Coutume.
• L e 20 avril 1765 , le fieur Bagès fit fon teftam ent, dont
on croit devoir tranfcrire ici les ternies.
. ,
D onne & lègue ledit fieur tefiateur a Jean-Nai^aire Bagès ,
f o n fils & de dame Marguerite Faucher, le quart
'quatrième
■partie de tous & un chacun fe s biens , meubles & immeubles,
en quoi quils puiffent confifter : la jouijfance duquel quart
çi-dejfus dànrre, ledit fieur tefiateur veut & entend • quelle
'■appartienne à .ladite dame Faucher , fo iv époufe, fiifqües à
4a majorité dudit Jean-Na^aire Bagès ,'leù r f i l s , dont il lui
�en fa it legs; & à Fégard des autres trois quarts, ils feront^
partagés par égales portions entre Ifabeau & M arie , & ledit
Jean-Naraire Bagès, fe s trois enfa n s , & de ladite dame Mar
guerite Faucher , qui fo n t fe s héritiers de droit, attendu qu il
a. fiffifa m m e n t doté fe s trois filles de fon premier mariage
avec demoifelle Catherine Daureilhe ; lefquelles il entend quelles
ne puiffent rien prétendre dans fa fucceffion.
Long-tem ps après le décès du iieur Jean B agès, la dame
Juge a fait aiîigner M e B agès, pour venir à divifion 6c par
tage de la fucceffion paternelle. L a dame M albet eft inter
venue dans l’inftance j pour adhérer aux conclufions prifes
par fa foeur.
M e Bagès a déclaré qu’il confentoit au partage ; mais il a
ioutenu qu’il devoit prélever d’abord fur la m afle.de la fuc
ceffion, le quart qui lui a été légué., ôc qu’il devoit enfuite
prendre" dans les trois quarts reftans fa portion , ainfi que
celles des trois filles forclofes, en rapportant les dots qui
leur ont été conftituées ; que la fucceffion devoit être divifée
en huit portions, dont fix appartenoient à M e Bagès rfavoir;
deux qui font le quart dont il eft ■
légataire ; trois comme
repréfentant les trois filles forclofes , & une qu’il amande
de fon ch ef, comme héritier; enforte que les dames Juge
& M albet étoient réduites chacune à un huitième.
E lle^ o n t combattu ce calcu l, en foutenant que le pere
par fon teftament avoit difpofé par égalité des trois quarts
de fa fucceffion entre les trois enfans de fon fécond ma
riage ; que ces m o ts , par égales portions, excluoient M e
Bagès du droit d’accroiflem ent.. Elles ont prétendu qu’il
réfultoit de cesr termes que le. legs n’avoit été fait au. fils
que fous la 'condition .q u il ne pouvait pas. demander; la c n
A z
�4
croiffement. Si vous contrevenez, ont-elles d it, à la condi
tion fous laquelle ce legs vous a été f a it , vous devez le
perdre ; ou , en l ’acceptant, vous devez renoncer à l ’accroiffement.
O n va démontrer que cette prétention eflr fondée fiir uneerreur..
■
&
nJignore que-dans notre Coutum e les por
tions des filles forclofes accroiflent aux mâles exclbfivem ent
aux filles non m ariées, & que le pere ne peut les en priver
direftement ni indire&ement. O n ne fuit point dans la ju rifprudence la Note- de M e Charles D um oulin , fur l ’art.
3 1 du tit. 12 j N ijî difpofitum fu erit in . . . . tejlamento parentis:
L e mâle tient Kaccroiflement de lavloi qui ne peut pas être
détruite par la volonté du pere.
Il faut cependant convenir que M e Bâgës ne pourroit pas
demander tout-à-la^-fois le quart des biens de fon pere ÔC
le droit d’accroiiTement, fi le legs de ce quart lui eût été
fait fous la condition qu elles filles^mariées participeroient
aux portions des filles forclofes. I l s’éleveroit alors con
tre lui ce principe fi connu, que-le teftateuf'peut'm ettre à
fa libéralité telle condition qu’il lui plaît.
Mais le teftament du fieur Bagès n ej renferme point cette
condition : on ne peut l’en faire réfulter de quelque maniéré
qu’on l ’interprete, foit qu’on s?arrête à 1la lettre, foit qu’on
cherche à en pénétrer l’efpriti
. U n legs eft conditionnel lorfque le teftateur déclare net
tement qu’il n’appartiendra au légataire-, qu’à condition qu’il
fera une certaine chofe> ou qu’un certain événement arriP ersonne
~h~ I V iT V U
i a o dir jë j y
�vera :on en trouve quelques formules dans les loix. Si Titius
in Capitolium, afcenderit, f i navis e x AJtâ venerit, fi cutrt
Titiâ- nupferit ei talem fundum do y lego. V o ilà une difpofition conditionnelle. T itius ne pouvoit pas demander fon
legs j s’il n’ ëtoit monté au Gapitole ^ fi le vaifieau n’étoit
revenu d’A fie , s’il n’avoir pas époufé' T itia.
Pour qu’une difpofition ait les cara&eres d’une condition,
il faut qu’elle paroiiTe avoir occupé le teftateur autant que
fa propre libéralité; qu’elle ait été même le premier objet
qui fe ioit préfenté à fon e fp rit, de maniéré que le legs:
lui foir. entièrement fubordonné, & qu’il s’évanouiifè, fi la
condition n’eft pas exécutée. Si Capitolium afcenderit, ei
talent fundum do.
Rapprochons ces idées fim ples, mais vraies du teftament
du fieur B agès, & examinons s’il renferme la condition fur
laquelle les Demandeurs fe fondent.
I l lègue lè quart de fon bien à fonr fils ; il eft' vrai qu’il
ajoute qu’à l'égard des autres trois quarts, ils feront parta
gés par égales portions entre l u i '& fes fœurs non mariées;
Mais cette derniere claufe ne préfente certainement pas une
condition-dont le legs du quart doive dépendre. L e ; teftateur
ne dit pas qu’il entend déroger au droit d’âccroiiTement dé
féré au mâlè par la C o u tu m e, en confidération du legs qu’il
lui fait; il ne dit & il n’infinue nulle p art, que la privation
de l’accroiflement ait été la caufe impulfive de fa libéralité;
O n ne peut donc pas fuppléer cette condition., dès qu’elle
ne réfulte en aucune maniéré du teftament.
I l eft d’ailleurs de toute impoiïibilité de fuppofer que le
teftateur ait été animé de cet efp rit, il l’on fait attention
^u itig n o ro it le- droit d’açcroiffement que la,Coutum e réfer-
�6
voit à’ fon fils: O n n’eft pas réduit ici à une fimple préfomp-,
tion de cette ignorance, qui cependant fuffiroit en matiere
d’interprétation ; la preuve en réfulte du teftament même :
en ■effet rappelions la fécondé claufe. E t à L'égard des
autres trois quarts , ils feront partagés par égales portions en
tre Ifabeau & Marie & ledit Jean-Naraire B agès , fe s trois
enfans & de ladite damé Marguerite Faucher , qui fo n t fe s hé
ritiers de droit. N e réfuite-t-il pas évidemment de ces exprefiiofis , qui fo n t fe s héritiers de droit, que le (leur Bagès a
cru que fa fuccelïion étoit déférée par égales portions à fon
fils & à fes deux filles non mariées? Il ne lègue à fon fils
que le qu art, parce que c Jeft la feule délibation que la loi
lui permette de faire à fon hérédité; & s’il dit que les autres
trois quarts appartiendront par égales portions à fes trois enfans du fécond lit , cJeft parce qu’il ignore que la loi en difpofe différemment; mais.il eit certain qu’il n’entend pas bleiTer
cette loi. & intervertir l’ordre qu’elle établit dans fa fucceffion entre fes enfans, puifqu’ii les confidere comme fe s hér
ritiers de droit. Il les fuppofe plutôt fes héritiers des trois
quarts, qu’il ne difpofe des trois quarts en leur faveur.
Plus on approfondit ces' mots ,. qui fo n t fe s héritiers de
droit , plus on eft convaincu que le teftateur a entendu abanr
donner ces tr,oi§:quarts au voeu de.la Coutum e. E n effe t, s’il
eût voulu qu’ils euilent été,divifibles pat^égaleç, portions
entre fes trois enfans du Tecond' lit , malgré la diipofitiorç
contraire dç la Coutum e, il n’auroit pas pu d ire^ u e quant
à cette partie de. fa fu cceifion , fes enfans étoienty^i héritiers
de droit,' parce que de droit ce partage np doit' point^ fe faire
par égalité. Si donc il dit que. ces trois quarts, fe,partageront
en tue eux par égalas portions, & que néanmoins .il les appelle
�7
fes' héritiers de droit, il en réfulte nécéÎTairetnent cette co’nféquence, qu’il a cru que d’après le droit, ce partage devoit
fe faire par égales portions.
C e qui achevé de perfuader que dans cette d a u fe , E t a
l’égard des autres trois quarts > ils feront partagés par égales
portions entre fe s trois enfans & de la dame Faucher , qui
fo n t fe s héritiers de droit , le teftateür n’a pas entendu déro
g e r a la difpofition' que la loi> faifoit en faveur de fon fils :
ce font les termes qui fuivent immédiatement. Attendu qu i l
afijjîfaniment doté fe s trois filles de fon premier mariage avec
demoifelle Catherine Daureilhe , lefquelles il entend quelles
ne puiffent rien prétendre dans fa fucceffion. C e m ot, attendu ,
renferme fans doute le m otif de la difpofition qui le précédé ;
il prouve que dans cette difpofition, le teftateür s’eft..unique
ment occupé à aiïurer par fürabondance les trois-quarts de
fa fucceffion à fes enfans du fécond Ht exclufivement à ceux
du prem ier, & abftra&ion faite du plus ou moins que ceux
du fécond lit amandoient- dans ces trois quarts. L e ’ teftateur
a mis en oppofition les enfans du premier lit avëc ceux du
fécond; mais il n’a ’pas entendu mettre en oppofition les en
fans du fécond lit entr’eux ; il a voulu qu’ils fuiTent, quant
aux trois quarts , f e s héritiers de droit; & il importe peu qu’il
ait dit que la divifion s’en feroit par égales portions , dès que
tout prouve que ces mots contiennent Amplement une énon
ciation erronée fans difpofition.
Si'donc le teftateür avoit difpofé par une claufe encore plus
expreife''des trois quarts de fa’TücceiIion par égalité entre les
trois enfans du fécond lit > il ne l ’aurôit fait qué parce qu’il
croyoit’ que la 'lo i1 le voulôit ainfi. Cette difpofition feroit
1effet de l’ignorante;-dès^lors elle ne pourroit fubfiiter. E li
�8
effet, il n 'y a point de volonté fans confentem ent; & comme
le confentement n’eft autre chofe que la détermination d’un
jugem ent libre & éclairé, on ne fauroit voir de confentement
là où l ’on n’apperçoit que les traces de l'erreu r; non videtur
confentire qui errât. C ’eft d'après ce principe qu’un arrêt du
Parlement de T o u lo u fe , du
août 1630, Rapporté par M .
D o liv e , queft. notab. liv. y , chap. 1 8 , a annullé un legs
fait par un teftament. O11 croit devoir en rapporter l'efpece.
Pierre Bonecarrere., en mariant M etigineBonecarrere,fa fille,
avec Bernard D aries, lui avoit conftitué en dot 1 jo écus., & en
dédu£tion,illuienavoit payé 80: de ce mariage naquit Margue
rite Daries. M engineBonecarrere vint à décéder, & M arguerite
D a rie s, fa fille , mourut aufli bientôt après, biffant Bernard
D ariesj fon pere, & Pierre Bonecarrere, fon aïeul maternel.
E n cet état., Pierre Bonecarrere fit fon teftam ent, par le
quel il déclara qu’il vouloit que la fomme reliante de la dot
par lui conilituée à fa fille ., fût payée à Bernard Daries >
fon gend re, comme fuccejfeurz fa fille , petite-fille du teftateur. Après le décès de Pierre Bonecarrere, fes enfans nonfeulement contefterenr à Bernard Daries le paiement du reftant de la dot qui lui avoit été lé g u é , mais encore ils lui
demandèrent la reftitution de £0 écus qui lui avoient été payés
à compte de cette même dot; ils attaquèrent le legs de nullité
fur le fondement que Pierre Bonecarrere avoit ignoré que
la dot qu’il avoit conftituée à fa fille devoit lui revenir par
droit de retour., & qu'il avoit penfé que cette dot appartenoit à fon gendre3 comme héritier de M arguerite D aries,
fa fille ; ce qui réfultoit de ces t e r m e s comme fuccejfeur à
une fienne unique fille . A v e c quelque force que Bernard Daries
argumentât
�9
argumentât du teftament., il fut débouté de Ta demande en
paiement du reftant de la d o t , qui lui avoit été lé g u é , & il
fut encore condamné à rendre la partie quJil en avoit reçue.
L'arrêt fut fondé, au rapport de M . D o liv e , fur ce que le
teftateur croyait erronément, 6* par une faufje préfuppofition,
qu’ il devait à fon gendre la fomme rejlante de la confïitution
dotale...................q u i l efi vraifemblable q u il ignoroit le droit,
& principalement celui du retour qui ejl un des plus fubtiles
& des moins connus en jurifprudence . . . . . que les légats
conçus fous faujje caufe fon t quelquefois anéantis par l'excep
tion du dol, lorfqu il appert que le défunt fans cette erreur
ne fe fû t pas porté à les faire. Suivant la loi y z , §. 6> ff. de
condit. & demonjl. fed plerunique. exceptià doli locunt habebit ,
f i probetur alias legaturus non fuiffe.
JVlais fi Ton pénétré encore l ’intention du fieur Bagès
p ere, on ne penfera jamais qu’il ait entendu priver fon fils
du droit d’accroiflement. C e fils unique qui pouvoit feul per
pétuer fon nom , étoit l’objet de fon affe£tion. Il veut donc
le gratifier de tout ce que la loi permettoit de lui donner ;
cependant il feroit allé contre fon b u t, s’il eût voulu ôter
à fon fils le droit d’accroiifem ent, puifque ce droit forme
un objet plus confidérable que le quart, d’après la m odicité
des dots qui ont été conftituées aux filles forclofes.
I l y a plus. Selon le fyftême des D em andeurs, le fieur
Bagès pere auroit voulu faire un teftament ridicule : en effet,
s’il eût connu le droit d’accroiffem ent, comme ils le prétendent,
il auroit en même temps prévu que, malgré fa difpofition ,
fon fils auroit eu le droit d’opter entre le legs & Taccroiffem en t, dont il ne pouvoit pas le priver ; mais il auroit bien
compris que fon fils auroit opté le droit d’accroiffem ent,
comme étant plus avantageux, & q u e, par conféquent, fon
B
�teftament devenoit inutile. Q uoi donc! le Heur Bagès auroit
propofé à fon fils, par fon teftament, ou de préférer un legs
bien moindre à raccroiflem ent qui lui appartenoit d éjà, ou
de s’en tenir à l’accroiiTement! O n ne peut pas fuppofer aufli
peu de réflexion dans un atte de derniere volonté.
A uifi Bafmaifon qui traite la queftion qui divife les Parties,
dans fa paraphrafe fur l’art. 31 du tit. 12 de notre Coutum e,
la décide en faveur du mâle : entrautres raifons qu’il donne,
de fon avis, il dit que toutes difpofitions teftamentaires doi
vent être réduites au quart; que s’il n'y avoit point de mâle.,
les filles mariées pourroient fe plaindre de ce que leur pere a
difpofé à leur préjudice, d’abord du qmrr (?n Firniurdirrr >lf ^
êt enfuite d’une partie des autres trois quarts en faveur de leurs
foeurs non mariées. Elles auroient inconteftablem entledroitde
demander la réduüiondes difpofitions du teftament au quart., &
de venir en partage des trois quarts reftans; que comme l’exiftence feule du mâle empêche les filles forclofes de demander
cette rédu£tion, le mâle qui les repréfente peut exercer ce
d ro it, & faire réduire les difpofitions teftamentaires au quart;
que la qualité de légataire ne fauroit former aucun obftacle à
l ’exercice de ce droit, de la part du mâle., parce que les deux
qualités de mâle & de légataire ne fe confondent point dans fa
perfonne, & que conféquemment il peut prendre tout-à-la-fois
le quart qui lui a été légué & encore les portions des filles for
clofes dans les trois quarts reftans. Il ajoute que le legs du quart
doit fe prendre fur toute la maife de la fucceifion, & l ’accroiflement fur les trois autres quarts, malgré l’approbation que le mâle
auroit faite du teftament, & nonobftant que le teftateur ait voulu,
rendre égaux les héritiers inftitués , ce qu’ilfa it en tant q u ils fo n t
appellés en leurs noms propres en partage y mais n a y a n t expreffément déclaré fa volonté q iîil inftitue lefdits mâles &filles égale
�m ent , fans que les mâlespuiffait s aider de Vaccroiffement des
portions des filles mariées 3 lefdits mâles pourront prendre ledit
accroiffement (a ).
O n ne fauroic rien voir de plus précis en faveur de M e
Bagès. N e réfulte-t-il pas de ces expreiïions, que pour qu’il
ne pût pas demander l ’accroiflem ent, il faudroit que fon pere
eût expreflfément déclaré qu’il nepourroit s’aider de ce droit,
au moyen du le g s ? Sans cette claufe conditionnelle, rien ne
prouve que le pere a voulu priver fon fils du droit d ’accroiiTement qu’il ne connoiffoit pas.
E n fin , la queftion n’eit pas nouvelle; elle a déjà été foumife plufieurs fois au jugement de la C our qui lJa toujours
décidée en faveur du mâle qui étoit dans la même pofition que
M e Bagès. C ’eft ce qui réfulte d’une note manufcrite de M e
G ilbert M arie, A vocat en ce S iè g e , qui vivoit dans le fiecle
dernier. O n va tranfcrire cette note. Sed quid in hâc fpecie? Le
pere donne le quart en préciput à fe s mâles} & au réfidu de fe s
biens les inflitue & fe s filles à marier héritiers par égales por
tions. On juge en ce Siège pour Vaccroiffement etiam in hâc
fpecie. M ais le teftament étant un acte individu , j e dirais le
contraire , & que Vaccroiffement ría lieu ,• & fie confultum à
Patronis Parlamenti in nofirâ Confuetudine , ciim aliud fit fia tuendum in fucceffionibus delatis ab intefiato, & in fuccejfionibus delatis ex teftamento. Contrà judicatum in nofirâ Curiâ ,
en la caufe des Titaffon ; 6* cela a pajfé en maxime pour le droit
d accroiffement ; car après le légat du quart, ïin jïitution aux
trois quarts refians ejl inutile, puifque les trois quarts fo n t acC a ) On tranferit ce paflage de Bafmaifon , d’après l’édition donnée par lui-inême, & non d’après celle qui a été donnée par Me. Confuí, où-il s’eil
gliiTé une faute qui donneroit lieu à un contre-fens ; & c’eft ce qui a fait dire
»pparemtnent aux Demandeurs que ce paflage eft obfcur, & qu’il n’y regne
pas une merveilleufe logique.
’
¿
B a
�12
quis aux héritiers ab intejlat, fans y pouvoir être contrevenu.
E t encore ainfi ju g é fu r le commencement de feptembre 1662., au
Rapport de M . B lic h , Lieutenant-Général> en la fuccejjiondu
Chanoine Urion, d’Aigues-perfe, contre les enfans de la fille
non mariée par Ces pere & mere ains Jeulement après leur dé
cès , au profit des Urion mâles, freres du défunt.
Dans cette efpece les filles non mariées étoient bien plus
favorables que les dames Juge & M albet : en effet leur pere
les avoit inftituées fes héritieres dans les trois quarts. D ’ail
leurs il n’y avoit pas une preuve certaine, comme dans notre
eip ece, qu’il ignoroit le droit d accroiflement réfervé au mâle
par la Coutume. Néanmoins parce que le legs n’étoit point
conditionnel, les filles fuccomberent ; &. un A vocat qui a
joui d'une grande réputation., attefte qu ila paj fée n maxime,
que dans ce cas le droit d’accroiifement a lieu en faveur
du mâle.
Il ne refte a&uellement qu’à réfuter les obje&ions des cohé
ritiers de M e Bagès.
l re O
r
ejec
+p j n s e
te^ament
un a^ e indivifible. Une de fes claufes
renferme une condition relativement aux autres : il faut l’ap
prouver ou le rejeter en entier.
Pr*nc>pe eft étranger à la queftion. Pour qu’on put
l ’oppofer à A le B ag ès, il faudroit que fon pere eût entendu
déroger à la loi qui lui réfervoit l ’accroifTement, & que cette
privation fût une condition du leg s; alors il eft certain que
M e Bagès ne pourroit pas divifer fon titre. Mais lorfqu’un
te fta te « fait un legs particulier d’un objet dont la loi ne lui
permet pas de difpofer, s’il n’a pas déclaré qu’il entendoit dé
roger à cette loi ^ & s'il n’a pas chargé expreiTément fon hé-
�13
ritier inftitué ou fou légataire univerfel, de faire valoir le
legs particulier, malgré la prohibition de la lo i; alors ce legs
sJévanouit, quoique les autres difpoiitions du teftament fu b fiftent. Un exemple rendra cette vérité fenfible. Suppofons
qu’un particulier, dans la Coutum e de P aris, ait donné par
teftament une maifon qui faifoit tous fes propres ; il eft cer
tain que quoiqu’il ait des meubles & des acquêts confidérab le s, qui dans cette Coutume font entièrement difponibles
fans affeftation à aucune lig n e , fon légataire particulier ne
peut avoir que le quint de la maifon léguée : les autres quatre
quints demeureront à l’héritier du teftateur, fans que le léga
taire univerfel des meubles & acquêts, foit tenu de faire récom penfe au légataire particulier de ces quatre quints fur les
meubles ôc acquêts, fi le teftateur ne l ’a expreifément ainfi.
ordonné par fon teftament. C ette jurifprudence eft enfeignée
par Bacquet dans fon T raité des D roits de Juftice, ch. 2 1 ,
n. 160 ; elle a été confirmée par un arrêt du 15 juin 1673
rapporté au Journal du Palais, & par d’autres arrêts bien
plus récens recueillis par D e n ifa rt, au m ot réferves coutum itres , n. 17 & fuivant. L e fondement de cette jurifpru
dence eft dans l’article 205 de la Coutum e de Poitou. C e t
article défend de donner par donation entre-vifs, ou tefta
m ent, plus du tiers des propres , & il ajoute que fi le tefta
teur donne ou lègue une plus grande partie de fes propres
d’une lig n e , le légataire ou donataire n'aura pour cet excé
dent aucun recours fur les autres héritages du donateur. L ’au
teur du Journal du Palais obferve que comme il n’y a aucune
Coutume qui en ce cas marque la com penfation, il faut fuivre celle de Poitou qui dit formellement quJil n’y en peut
avoir.
. 4
.
�14
L ors de ces arrêts les légataires particuliers ne man
quèrent pas de raifonner comme font les Demandeurs,
ÿ n teftament eft un atte indivifible. L e légataire univerfel doit nous dédommager de la réduction du legs parti
cu lier, ou il doit céder tous les objets diiponibles; mais ces
raifonnemens ne purent fe foutenir à côté des principes. Il
eût fallu que le teftateur eût irnpofé à fon légataire univerfel l ’obligation de fuppléer à la rédu&ion des legs parti
culiers.
I I O bjec .
L es Demandeurs oppofent que perfonne n'eft préfumé
ignorer le dro it; que par conféquent il n e ft pas permis de
fuppofer que le Heur Bagès pere ait ignoré le droit d’accroiffement que la Coutum e réfervoit à fon fils.
réponse
I I eft vrai qu’en général la loi ne préfume point qu’on
ignore le droit; mais ce n’eft là qu’une préfomption. O r ,
comme toute préfomption difparoît devant la v é r ité , il eft
certain qu’on ne peut pas raifonnablement fuppofer qu’un
teftateur ait connu un point de dro itj lorfqu'il eft prouvé
par fon teftament m êm e, qu’il l’a ignoré.
L e lég a ta ire, qui fut condamné par l ’arrêt cité par M .
D o liv e j & dont on a déjà rapporté l ’efp e c e , faifoit bien
valoir ce moyen ; mais on n’y eut aucun égard , par les raiions déduites par M , D o live. E t ne p e u t , d it-il ,fe r v ir de dire
que le tejlateur a erré en droit , & que l’erreur du droit n e ji
pas f i favorable comme l’ignorance du f a i t ; car à cela il y a
plufieurs réponfes, i°. Cette dijlinclion d'erreurs ejl bien confidérable en madère..de contrats; mais en f a it de tejlamens ,
comme quoique le teflateur errc3 il n importe} parce que nous .
�ne confidérons en ces difpojitions que la volante qui fa u t
aujfi bien , lofquelle fe trouve enveloppée dans l ignorance u
droit , comme dans l'ignorance du fa it. Errantis enitn nul us
efi confenfus.
L
es
Demandeurs oppofent à M e Bagès une fin de non I I I O
b JEC.
recevoir qu'ils font réfulter de la difpofition de l'art. jo du
tit. 12 de notre C outu m e, qui porte que l’héritier ab inteftat
ou teftamentaire qui accepte un legs à lui f a it , approuve
par-là le teftam ent, ôc ne peut plus enfuite demander la rédu&ion au quart. Cette l o i , difent les Dem andeurs, n’a pas
befoin de commentaire. M e Bagès accepte le legs du quart
à lui fait par le teftament de fon pere; il demande l’exécu
tion de ce legs; donc il approuve toute la difpofition & or
donnance du défunt ; donc il eft tenu de l’accomplir en en
tier : or le défunt a voulu que les trois quarts de fes biens
fuiTent partagés par égalité entre le fieur Bagès & fes deux
focurs du fécond lit ; donc il doit confentir au partage.
1
C e raifonnement renferme une pétition de principe. Pour r é p o n s e
que les Demandeurs euifent pu dire que M e B a g è s, en ac
ceptant le legs du quart, a approuvé la difpofition que fon
pere a faite à fes trois ertfans du fécond lit , des trois quarts
de fes biens, par égales portions, au préjudice du droit d’accroiiTement 3 ils auroient dû prouver que cette difpofition,
qu’ils comparent à tm légat exifte. O r , on a déjà établi que
la claufe du teftament relative à ces trois quarts ne contient
qu’une fimple énonciation fans difpofition, & que s’ il y avoit
une difpofition, elle feroit nulle parce quë le teftateur igno
rait le droit d’accroiffemônt que la Coutum e réfervoit à fon
�'l'tf
fils. C e ne feroit qu'autant que le teftateur auroît déclaré
qu’il entendoit déroger à cette loi en confidération du le g s,
qu’on pourroit oppofer à M e Bagès qu’il doit adopter ou
rejeter en entier le teftam ent, félon le droit commun du
R o ya u m e, auquel il n’eft fait aucune exception par cet ar
ticle de notre Coutume.
Auifi Bafm aifon, à l ’endroit déjà c ité , enfeigne que dans
notre efpece l ’approbation que les mâles auroient faite du
teftam ent, c ’eft-à-dire, la demande de leur legs ne les em
pêche pas de réclamer leur droit d’accroiiTement qu'ils tien
nent de la loi à laquelle le pere ne peut déroger que par une
condition impofée au legs.
Ainfi dès que M e Bagès n’a approuvé en aucune maniere
la prétendue difpofition des trois quarts, au préjudice de fon
droit d’accroiiTement j dès que d’entrée de cau feil a demandé
ce d ro it, & en même temps le legs du q u a r t o n ne peut
lui oppofer aucune fin de non recevoir.
I V O b je c .
L e s Dem andeurs, ou au moins les fieur & dame M a lb et,
ne pouvant pas contefter l'application du paflage de Bafmaifon
à notre efp ece, ont cru combattre cette autorité, en difant
que ce Commentateur auroit befoin lui-même d'un commen
taire à rendroit cité ; ...............q u il ejl tombé dans une grande
méprife ; .................. quex certes , s’il fa llo it relever tous les
rêves de fo n Commentaire , ceux qui le contioiffent, & qui fo n t
inflruits de la Jurifprudence , conviendront que la lijle n e n fe
roit pas courte.
REPONSH.
a été confidéré c o m m e un favant par tous
.
_
.
v
.
» i l
fes contem porains} dans un iiecle ou régnoit le gout de la
fcience
B
a s m a i s o n
.
�fcience du D roit. L e célébré M e Charles Dum oulin 1a h o
noré de fon eftime ; M es Conful & P ro h et, qui connoiffoient
fans doute notre C outum e, ont fait l ’éloge- de fa paraphrafe.
Jufqu’à préfent il a été , pour ainfi d ire, conventi q ü o n y
trouvoit le développement du fens de la Coutum e ; une connoiiTance parfaite des L o ix Rom aines ôc des traits d’érudition
dans l’Hiftoire Sainte & Profane; cependant les Demandeurs
n’y voient que des rêves ! cela prouve qu’il y a certains lec
teurs pour lefquels Bafmaifon auroit befoin d'un Commen
taire.
%
C ’ e s t avec la même folidité & le même agrément dans le y
fty le, que les Demandeurs ont réfuté la N o t e manufcrite de
M e Gilbert Marie. On a trouvé, difent-ilsj dans .une trèsvieille Coutume d'un très-vïeux Jurifconfulte la note de deux
très -vieilles fentences. Nous répondrons que la vieillejfe
Jiefl pas ici un titre au refpecl-, ( C ’eft fans doute la
jeune Aie ) que l’ exijlence légale de ces fentences n e jl point
prouvée > ni l ’efpece fu r laquelle on prétend quelles ont été
rendues.
I l neft pas exa£t de dire que la N o te manufcrite laifle
à defirer l’efpece fur laquelle les fentences dont elle fait men
tion ont été rendues : il fufïit de la lire pour fe convaincre
du contraire.
O bjec.
réponse
Il
n’eft pas plus raifonnable d’objefter que l’exiftence légale
de ces fentences n eft point prouvée. Il a été reçu jufqu’à
préfent qu on pouvoit préfenter comme des autorités, même
ans un traité do&rinal, des jugemens qui font recueillis par
es Jurifconfultes connus. Si la critique des Demandeurs étoit
a optée, quel crédit auroient la plupart des Commentaires 3
�iS
& fu r-to u t celui d e 'M . A uroux des Pommiers fur la C o u
tume de Bourbonnois ? O n pourroit peut-être dire avec v é rité,
que ce qui fait le principal mérite de ce Com m entaire, eftim é 'à jufte titre , c’eft la compilation que kl ’Auteur a faite
avec difcernement des notes manufcrites des anciens M agiftrats ou Jurifconfultes de la SénéchaufTée de M oulins, tels
que M M . D ecu llan t, Semin , M en u del, Herouis , V in c e n t,
B riro t, B a u g y , B erg ier, & c . M o rn ac, cet Auteur qui s’eft
autant piqué d’exa£titude que de p u reté, n’a pas craint de
rapporter des jugemens d’après des notes manufcrites de Ju
rifconfultes connus : quelquefois même il n’en cite pas les
Auteurs ; il dit fur la loi
ff. de ufufr. in fine. Ulti-
mum hoc Senatus- Confultum ex manufcripto ejl Patroni
v eteris/ O n fait journellement ufage au Palais de ces autorités,
& on ne les a jamais vu com battre, en difant que ce font
de très-vieilles fentences recueillies par de très-vieux Jurifcon
fu ltes dans de très-vieilles Coutumes.
Mais , difent les Dém andeurs, fi ces fentences eufient fixé
la Jurifprudence’,' quand elles ont été rendues, elles auroient
été recueillies par M e Prohet qui a dû profiter des lumieres
de M e G ilbert M arie, fon beau-pere.
O n ignore actuellement les circonftances qui ont pu déro
ber à M e Prohet la connoiiTance du manufcrit d’où cette note
a été tirée. C e qu’il y a de vra i, c ’eft que s’il étoit permis de
fortir des bornes de la difcuflïon du procès, pour faire l ’apo
logie de ce m anufcrit, on convaincroit que M e Prohet s’en
feroit fervi u tilem en t, s’il l’eut connu. O n a recueilli dans
le manufcrit plufieurs fentences & arrêts rendus fur des ma
tières intéreifantes qu'on ne trouve pas dans le Commentaite.
Certains jugemens , rapportés par M e P ro h et, font dans le
�19
m anufcrit, mais avec le récit de l’efpece omife par le C om
m entateur, qui cependant i n f l u e beaucoup fur l ’ idée qu il faut
fe former du préjugé. I l y a plus : M e Prohet y eft quelque
fois réformé ; par exem ple, fur l’art, 1 du tit. 2 3 , il cite un arrêt
rendu entre la dame N od iere, époufe du fieur de V illem o n t,
& le fieur F a y o lle t, fous la date de l’an 1 6 8 1 . L a copie de
cet arrêt, fignifiée à Procureur, eft dans le manufcrit;, mais
il eft daté du 27 mai 1682; & l’on y voit que la dame N od iere,
lors de la fentence & de l’arrêt, étoit veuve de M e C o n fu l,
A vo ca t, exerçant en la Cour. Ces obfervations ont été faites
par l’Auteur du manufcrit qui remarque l’erreur de M e Prohet.
E nfin, ce qui eft fans doute un titre de recommandation pour
cette note m anufcrite, c’eft qu’elle a été tranfcrite & recueil
lie avec foin par feu M e Brugiere de Barante.
M e Bagès peut donc invoquer en fa faveur les principes,
l ’autorité particulière de Bafmaifon & la Jurifprudence de la
C o u r , formée par plufieurs jugemens rendus après la difcuffion la plus opiniâtre : s’il échouoit avec de pareils garans,
y auroit-il une vérité en Jurifprudence qu’on n’effayât de
rendre problématique ?
Monfieur le L IE U T E N A N T - G É N É R A L > Rapporteur
.
Me G R E N I E R , Avocat.
H o m , Procureur.
A R I O M , ch ez M a r t i n
D E G O U T T E , Imprimeur - Libraire ,
près la Fontaine des L ignes, 1781.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bagès, Jean-Nazaire. 1781]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Hom
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire pour maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine de Pons, chevalier, seigneur, marquis de Bellestat, son curateur, à l'effet de l'autoriser, défendeurs et demandeurs. Contre maître Charles Juge, procureur en la Cour ; demoiselle Marie Bagès, son épouse, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs ; Et encore contre sieur François Malbet, bourgeois, et demoiselle Elisabeth Bagès, son épouse, aussi de lui autorisée, intervenans et demandeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1781
1765-1781
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
BCU_Factums_B0108
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0110
BCU_Factums_B0111
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53947/BCU_Factums_B0108.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lavoûte-Chilac (43118)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53949/BCU_Factums_B0110.pdf
016408d74087b43887969fe420af51be
PDF Text
Text
^1
II
iÿ
» •« ... ï , . < r ^ '^ 7 > _ «” 3 , •&>***% :
y f L l WHfÆTTO^
S E C O N D MÉMOIRE
POUR
M e. J
e a n
- N azaire
BAGÈS ,
A vocat
en
Parlement, & M e fï r e A n t o i n e de P O N S , Chevalier,
Seigneur de Beleftat., fon curateur, à l’effet de l’autorifer,
Défendeurs & Demandeurs.
,
C O N T R E M e. C h a r l e s J U G E Procureur en la
Cour Pere légitime adminiftrateur de fes Enfans, héritiers
de défunte M a r i e B A G E S leur M ere ayant repris
,
&
,
en fon lieu & place; Sieur F
& Demoifelle E l i s a b e t
lui autorifée Demandeurs
,
h
&
,
rançois
,
MALBET
,
,
B A G È S fa Femme de
Défendeurs,
L e s Demandeurs abandonnent les principes pour fe livrer
à leur imagination. Ils cherchent à fixer en leur faveur les
doutes quJils élevent fur l’interprétation du teftament du
fieur B agès, par la confidération de la tendreffe paternelle
qui porte à croire que le teftateur n’a pas voulu établir une
é g a l i t é confidérable dans le partage de fes biens t entre
A
�des enfans que la nature lui rendoit également chers. Mais
ils ont à combattre, un fils unique qui fonde fa réclamation
non - feulemént fur-le-texte de la loi municipale de la Pro
vince , mais encore fur l'intention manifefte du teftateur.
E t cette l o i , bien loin de n’autorifer qu’à regret une diftribution inégale de la fucceilion du fieur B agès, y applaudit
au contraire, pourvu que les avantages foitnt réunis fur
la tête du .mâle.
..
„
Aufli la Cour a interprété plufieurs fois des teftamens
conçus dans les mêmes termes que celui dont il s'agit, en
faveur du mâle qui étoit dans la poikion de M e. Bagès.
Quoique les filles , appuyées de l’avis des Avocats du
Parlem ent, aient à chaque fois combattu avec force l ’opi
nion de Bafmaifon qui s’élevoit contr’e lle s , néanmoins le
fentiment de ce Commentateur., o u p o u r mieux dire, les
principes particuliers de notre Coutume ont toujours triom
phé. C r o i r a - t - o n que la vérité ne foit point fortie de ce
choc d’opinions fi fouvent répété ? Croira - t - o n que la
Cour l’ait toujours abandonnée pour ne faifir toujours que
de fauiies lueurs? V oilà cependant ce que les Demandeurs
entreprennent de perfuader.
O n doit donc être bien étonné de leur ton affirmatif
qu’on fe feroit tout au plus permis, quand on auroit eu à
démontrer des vérités mathématiques. Toutes leurs propoiitions fo n t, félon eu x , autant de vérités auxquelles il faut
fe foumettre, ou renoncer à jamais à rien prouver aux hommes.
A u contraire, les raifonnemens de M e. Bagès font des erreurs
groifieres qui fo n t honte à la raifon ; des rêveries (juils rougiflent de ‘ difeuter férieufement. Ils ne fe confolent qu'avec
peine fur Je fort de M e, Bagès qui eft condamné à ne rien
�5
voir jufqu’à ce que le célébré A bb é (a) qui a rendu aux muets
un équivalent de l ’organe dont la nature les avoit prives, aura,
découvert un Jecret plus.merveilleux encore, le fecret de'fairet
voir ceux qui ferment les y e u x à la lumiere. C e ton ne doit;
pas même avoir le mérite d’éblouir. I l ne prouve que l’énthoufiafme^ & la prévention : la vérité i perfuade plus dou-i
cernent,
.
' :
• '
I
I
l eft inutile d’établir la faveur que la Coutume d’Auvergne
donne aux mâles, & les précautions que fes rédaSeurs ont'
prifes, foit pour leur affurer les portions des filles forclofes
exclufivement aux filles non m ariées, foit pour empêcher
leur pere de les priver de cette réferve. Les Demandeurs
en conviennent eux-mêmes (page j ). « Un pere, difent-iis,
« n’eft pas le maître d’interdire à fes enfans m âles, par fou
» teftament, l'exercice du droit d’accroiiTement fur les ré» ferves coutumieres, s’il ne les dédommage pas d’a ille u rs,>
» en les gratifiant du quart difponible. Mais en léguant le
» quart difponible aux m âles, il peut les réduire à l ’alter» native d’abdiquer ou fa libéralité ou raccroiiTement des
» trois quarts.
Il s’agit donc de favoir fi le fieur Bagès"pere a entendu
priver fon fils du droit d’accroifiement, en confidération du
legs q u il lui a fait du quart de fon bien ; s’il ne lui a fait
ce legs que pour le dédommager de la perte des réferves cou
tumieres; fi en un mot ce legs eft conditionnel.
Les Demandeurs 3 au lieu de difcuter Amplement cette'
s\1 *
v a ) Affurément l’Abbé de l’F.pée n’auroit jamais cru trouver place dans u’n
mo»e relatif à une queilipn d’accroiiTeinenc en Coutume d’Auvergne. -
A 2
J«
�*
queftion , invoquent, à toutes les pages de leur M ém oire,
l ’article f o du titre ia de notre C outu m e, comme une loi
particulière qui accable M e. Bagès, ôc à laquelle Bafmaifon
n’a point fongé lorfqu’il s’eft décidé contre les filles.
Mais l’ufage que les Demandeurs font de cet article, ne
peut que produire une confufion dans les idées 6c faire
perdre de vue l’état de la queftion. En e f f e t , comment
s’explique cet article? & héritier ab-inte(lat injiitué par tejiament ou non, qui fciemment accepte aucuns legs à lui faits
par le défunt, ou fatisfait à aucuns des légats fa its par ledit
défunt ou autrement, agrée en aucune partie ledit teflament\
il approuve toute la difpofition & ordonnance d'icelui défunt,
& ejî abfolument tenu de la garder & accomplir, fans q u il
puifje s’aider de la réduction au quart introduite par la Coutume.
O r , qu’y a - t - i l dans cet article qui ne foit abfolument
conforme au droit commun du Royaum e & que l ’on ne trouve
dans les L o ix R o m aines, & notamment dans la L o i Parent'ibus, §, qui autem, Cod.deinojf. teflam.l Q u ’en réfulte-t-il?
que l’on ne peut pas divifer la volonté d’un défunt; que l ’on
ne peut pas l’invoquer & la rejeter tout-à-la-/ois; que pour
peu que l’héritier ab-inteflat approuve le teftament^ il eft
obligé de l’exécuter en entier. S i , par exemple, il paie des
legs excédans le quart qui étoit feulement difponible, il ne
peut plus enfuite attaquer ces legs & demander qu’ils foient
réduits au quart.
Mais cette vérité, à laquelle M e. Bagès avoit rendu hom
mage dans fon premier M ém o ire, ne porte aucune lumiere
iur la difcution de la conteftation. Avant de dire que M e*
B a g è s, en demandant le quart & l ’accroiiTement, divife A*
volonté de fon p ere j il faut prouver que le teftateur a eu
�s
la volonté de ne dohner à fon fils que le quart feul y fana
l’accroiifement, ôc non l'un & l ’aütre. O n comprend aifément que la demande que M e. Bagès a formée du q u a rt,
ne peut être une approbation de la condition quJil feroit
privé de l’ accroilTement, fans prouver auparavant que cette
condition a été impofée au legs du quart.
V oilà donc la queition principale à laquelle l ’ a p p lic a tio n
de cet article de la Coutume eft néceflairement fu b o rd o n n é e ."
T o u t fe réduit donc à découvrir quelle a été la volonté du
fieur Bagès; c ’eft-à-dire, à l’interprétation de fon teftament :
& toute autorité qui n’apporte pas de lumieres fur cette
interprétation doit être écartée.
V e n o n s à ^interprétation, ôc rappelions les termes du
teftament qui en font l’objet. L e teftateur, après avoir légué
le quart de fes biens à fon fils, ajoute qu’à l'égard des autres
trois quarts, ils feront partagés , par égales portions, entre
Ifabeau & Marie & ledit J ea n -N a v ir e B a gès, fe s trois enfa n s & de ladite Dame Marguerite Faucher, qui font fe s héri
tiers de droit, attendu q u il a fuffif animent doté fe s fille s de
fon premier mariage.
Les Demandeurs s’appefantiffent finguliérement fur ces
m ots, par égales portions. L e teftateur, difent - ils, en or
donnant que les trois quarts de fes biens fe partageroient,
par égales portions, entre trois de fes enfans, n’a - t - i l pas
entendu que chacun dJeux prendroit un tiers dans ces trois
quarts ? Ces expreflions peuvent - elles fignifier que l’un des
trois prendra quatre parts à lui f e u l , ( page i $ ) ?
^ C e raifonnement féduiroit peut-être, en préfentant comme
tfolés ces m o ts, par égales portions. Mais il ne faut pa* le 6
�6
détacher de c e u x -c i, qui fo n t fe s héritiers de droit, & qui
fuivent les dénominations des trois enfans. O n a prouvé ,
dans le premier Mémoire de M e. Bagès ( page 6 & 7 ) , qu’il
réfultoit du rapprochement de toutes ces expreiTions, que le
teftateur n’avoit voulu voir dans fes trois enfans de fon fé
cond mariage, que des héritiers tels que la Coutume les lui
donnoit pour les trois quarts qui lui reftoient après le legs
qu’il avoit déjà fait; qu’il avoit entièrement abandonné ces
trois quarts au vœu de la Coutume.
Les Demandeurs répondent à cette obje&ion « que cette
» qualité d’héritiers de droit du fils & des filles non mariées,
» a bien déterminé la préférence que le teftateur leur a don» née fur fes filles du premier lit , dont il confacre l’exclu» fion légale j mais qu'il n’a pas voulu s’y référer pour la
» proportion du partage;
bien loin de dire qu’ils par» tageroient félon l ’ordre de d ro it, il a dérogé à cet or» dre , en ordonnant un partage par portions égales ,
» ( page 16 ).
C e t a veu , de la part des Demandeurs, que la qualité
d’héritiers de droit des enfans du fécond lit, a déterminé
l ’exclufion des filles du premier mariage, ne peut être que
très - avantageux à M e. Bagès. Cependant on eit forcé de
convenir que cettequalité n’a pointété la caufeprincipalement
déterminante de Texclufion de ces filles. L e teftateur nous
explique lui-même la raifon de cette exclufion, c ’ ejl q u il
les avoit fuffifamment dotées.
C e n eft pas que le teftateur ne fonge bien à la qualité
d'héritiers de droit des enfans du fécond l i t , mais c'eft uni
quement pour la leur c o n f e r v e r p o u r manifefter qu’il ne
vouloit y porter aucune atteinte. L e teflament préfente cette
�7
id ée, quoique le teftateur. ait dit que les-trois quarts feroient
partagés, par portions égales, entre fes enfans du fécond
lit; parce que tout de fuite il ajoute, qui fon t fe s héritiers
de droit; c’eft - à - d i r e q u e le teftateur veut qu’ils foient tels.
Ces derniers termes ont le même fens que fi le fieur Bagès
avoit dit nettement qu’il entendoit que le partage fe fit félon
l'ordre de droit.
' ■Si le teftateur a dit que le partage des trois quarts fe feroit,
par portions égales, c’eft ou parce que ignorant le droit d'accroiiTement, il a cru que fes héritiers, par l’effet du droit,
devoient rigoureufement partager les trois quarts félon le
nombre de têtes ( a) , ou parce qu’il a entendu parler d’une
( a ) Les Demandeurs ont d it, (p a g e 19 & 2.0 ) qu’en fuppofant que cett*
erreur de la part du fieur Bagès eût donné lieu à la difpofition des trois quarts,
par égalité, entre les enfàns du fécond l i t , cette difpofition n’en feroit ni moins
refpeftable ni moins efficace , parce que la fauffeté de la caufe impulfive ne vicie
pas le legs.
M a is 'les Demandeurs font dans l’erreur. Dans l’hypothefe , la caufe qui auroit
«lifté la difpofition du fieur Bagès feroit une caufe finale & non une caufe im
pulfive. La caufe eil fimplement im pulfive, lorfqu’elle ne regarde que l’intérêt
du légataire. Par exemple , fi le teftateur legue une fomme pour des frais de
prêtrife, ou d’ingrès en R eligion , ou pour acheter tel héritage, le légataire
obtiendra la dtlivrmce du legs', fans fe faire ni Prêtre ni Religieux, fans acquérir
l’héritage indiqué. La caufe finale eft celle fans laquelle il paroît que le teftateur
n’eût point légué ; & la faufleté de cette caufe vicie le leg s, quoiqu’il n’en foit pa*
de même de la caufe impulfive, à laquelle feule fe rapportent les autorités invoquées
par les Demandeurs. On trouve cette diftinrtion dans tous les livres relatifs à la ma>& même dans Fbrgole fi’fouvent.cité par les Demandeurs, TraitéJis Tejlamcns „
*kap-" s,
3} rt, s & fuiv. « La difpofition, d i t - i l , ert encore nulle, fi d ie
* pour fondement, ou pour caufe finale , un fait erroné, fans lequel le tefta-
�8
égalité relative à la lo i; ceft-à-dire, en comprenant, fous le
nom du m âle, les filles mariées, aux droits defquelles il étoic
fubrogé par le miniftere de la Coutume; mais toujours eft-il
certain que fa derniere intention a été que le partage des
trois quarts fe fit entre les enfans du fécond l i t , félon la
loi. L e teftateur ne leur fuppofe pas la qualité de fe s héritiers
de droit, comme l ’ayant eue feulement avant la difpofition.
des trois quart s , par égales portions ; il la leur fuppofe, il
la leur donne même après cette difpofition. Auroit-il nommé
fe s héritiers de droit des enfans dans lefquels il auroit déjà
eu l’intention d’effacer cette qualité ? Il a donc fournis au.
droit le partage des trois quarts de fa fucceilion.
Mais le guide le plus fûr qu’on puiiTe fuivre pour appn>
fondir la difpofition d'un teftateur, c ’eft d’examiner le m otif
qui l ’a di£tée. O r , quel eft le m otif du fieur B agès, lorfqu’il
laiiTe les trois quarts de fa fucceilion à fes enfans du fécond
lit? c e j l , dit-il, attendu q u il a Juffifammentdotéfes filles defort
premier mariage, lefquelles il entend quelles ne puiffetit rien pré
tendre dans fa fuccejfion. V o ilà donc tout l’efprit qui anime le
teftateur; il eft rempli d'une feule penfée; il n’a qu’un feul
b u t, c ’eft d’exclure fes filles de fon premier mariage. Mai*
fi en les excluant il eût eu en vue de déroger à la Coutume
relativement aux trois quarts entre les enfans du fécond lie*
n’auroit-il pas d'abord expliqué bien précifément cette vo
lonté ? n’en auroit-il pas die le motif? Q u o i donc! le tef» teur ne l’auroit point faite; il cite plufieurs loix, & il ajoute : « Cela a l‘eJ
» quand mime la difpofition ne feroit fondée que fur une erreur de droit con-
» fidérée comme la caufe finale. Cet Auteur fe fonde fur l’Arrit cité par
Oolive , dont on a rapporté l’cfpece dans le premier Mémoire de Me. Bagi*.
tateur*
�9
tateur, en excluant de fa fuccefïîon fes filles du premier
l i t , le faifoit furabondamment, la loi avoit déjà prononcé
cette exclufion; cependant comme il eft rempli de cette in
tention , il la développe bien, clairement ; il fait plus , il
en explique les motifs , ôc l ’on voudroic perfuader que ce
teftateur aufli foigneux eût eu le deflein de déroger à la loi
la plus impérative., fans expliquer ni ce deflein ni fes’ mo
tifs , fans dire qu’il privoit fon fils de raccroiiTement,
parce qu’il l ’en dédommageoit par le legs du quart ( a) !
En un m ot, fuivant les Demandeurs, il y auroit deux
différentes difpofitions d'ans cette phrafe : E t à l'égard des
autres trois quarts , ils feront partagés, par égales portions,
entre Jfabeau & Marie & ledit Jean-Na^aire B agès, fe s trois
cnfans & de ladite Dame Marguerite Faucher, qui fon t fe s
héritiers de droit. Une premiere d ifp o fit io n p a r laquelle le
teftateur auroit voulu q u e , malgré le vœu contraire de la
Coutum e, les enfans du fécond lit euiTent partagé les trois
quarts, par égalité, fans que le fils pût exercer le droit
d'accroiflement ; & une fécondé difpofition, par laquelle il
auroit voulu exclure de fa fucceilion fes filles de fon premier
mariage. Mais le teftateur ne donne qu’un feul m otif qui
fe référé à tout ce qui précédé, attendu, dit-il, q u il a fu fJifamment doté fe s trois filles de fon premier mariage : o r, s’il
eût eu en vue deux difpofitions, il n’auroit pas expliqué le
m otif de l’u n e, fans rendre compte du motif de l’autre. Il
n’ y a qu’un fe u l m otif, parce qu’il n’y a eu qu’une feule dif(<*) Les foins que prend le teftateur pour exclure les filles mariées, prouvent
^u’il ignoroit la fordufion légale & l’accroiirement, on ne peut donc lui fuppofer
lnt«ntion de priver fon fils de ce dernier droit.
B
�lo
pojîtioti. S’il y avoit en deux d'ifpofitions, il y auroit eu deux
motifs.
Voyons comment les Demandeurs répondent à ce moyen.
« L e m ot, attendu, d ife n t-ils, renferme le motif de la dif» pofition qui le précédé , d ’accord ; mais ce motif bien
» faifi ne re n v e rfe -t-il pas la prétention de M c. Bagès, au
» lieu de l ’appuyer ? le teftateur preferit l ’égalité entre
» fes trois enfans du dernier lie, attendu que fes filles du
» premier lit ont été fufiifamment dotées, ' page 21 ).
Ainfi donc., fuivant les Demandeurs, l’unique motif qui
fe trouve dans le teftament s’adapteroit également aux deux
difpofitions qu’ils y fuppofent. Selon eux le teftateur a ratifié
Vexclufion légale de fe s fille s du premier Ut, attendu qu elles
ont été fujjifamment dotées ; félon eu x , le teftateur a de plus
preferit l'égalité entre fe s trois enfans du dernier lit , toujours
par le même m otif; attendu que fe s fille s du premier Ut ont
été fujjifamment dotées.
Mais il n’y a aucune analogie entre ce m otif & l’ordon
nance de l’ég a lité, c ’e ft-à -d ir e , la privation du droit d’accroiiTement qu’on fuppofe que le teftateur a voulu prononcer
contre fon fils. Si le fieur Bagès eût voulu configner dans
fon teftament cette privation, il en auroit donné pour motif,
attendu que j'a i dédommagé mon fils par le legs du quart ;
s’il dit feulement, attendu que j'a i fujjifamment doté mes trois
fille s de mon premier mariage, c’eft parce que dans la difpofition qui précédé, il n’eft occupé que de la feule idée
de laiifer les trois quarts de fes biens à fes enfans du fécond
l it , à l ’exclufion des filles du premier mariage, fans vouloir
altérer la difpofition que la loi faifoic de ces trois quarts
entre ces trois enfans du fécond lie.
�Les Demandeurs font une autre réponfe qui n’eit guère
plus raifonnable que la premiere. « L e teftateur., difen t-ils,
» entend que fes filles du premier lit ne puiifent rien pré» tendre dans fa fucceilion. Cette exclu fion, qui accom» pagne l’ordonnance de l’égalité entre les trois enfans du
» fécond lit , ne ren ferm e -t-elle pas éminemment l’exclu» fion du repréfentant'que la loi mettoit à la place des filles
» du premier lit ?
Mais cette obje&ion fuppofe toujours que le pere a entendu
priver le fils de i’accroiiïement, par conféqueut elle fe réfute
par les mêmes moyens qu’on a déjà déduits. L e teftateur a
bien exclus de fa fucceilion les filles du premier lit ; mais
il n’en réfulte autre c h o fe , fi ce n’eft qu’ il s’eft réuni à la
loi pour confirmer, en faveur de fon fils., le droit de les
repréfenter. Pour que le fils eût perdu ce d r o it , il faudroit
que le pere l’en eût bien expreffément privé. Or., c ’eft ce
qu’ il n’a ni fait ni voulu faire.
*
L e s Demandeurs ont été également dans l ’impoiTibilité
de répondre aux moyens qui s’élevent en faveur de M c.
B a g è s , pour prouver qu’ il peut invoquer avec autant de
fuccès l’ efprit du teftateur, que la lettre du teftament.
C ’eft à l’efpritj dont le teftateur paroît avoir été anim é,
qu’il faut principalement s’ attacher pour s’ aifurer de fon in
tention. Les loix publiques ont été rédigées par les plumes
les plus habiles ; cependant elles font fouvent obfcures, parce
qu’ il y a dans le langage beaucoup d’imperfection, comme
dans tout le refte de ce qui tient à l’humanité. Auifi les Légiflateurs nous difent qu’ il faut fouvent négliger les termes de
a loi pour en pénétrer le fens ôc confidérer quelle a été
�fon intention. Sclre verba legis non ejl fcire legem. A com
bien plus forte raifon doit-il en être de même des teftamens
qui font rédigés avec moins de foin que les loix , & par
des perfonnes bien moins exercées dans les affaires. Il n’eil
donc pas étonnant que la loi 1 0 1 3ff. de condit & demotijirat.
s’explique ainfi in conditionibus tejlamentorum voluntatem po~
tiùs quant verba confiderari oportet. C ’eft par cette raifon
que les Juges font autorifés à interpréter largement les dernieres difpofitions des défunts. In tejlamentis pleniàs voluntates
tejlantium ihterpretantur nous dit la loi \2 , ff. de regul.
Juris.
O r , en premier lieu, M e. Bagès étant le feul enfant qui
pût perpétuer le nom du teftateur, croira-t-on que c e lu i-c i
a voulu le priver des avantages que la Coutume lui aifuroit ? peut-on même le préfumer, lorfqu’on voit que ce pere
n’a pris la peine de faire un teftament, que pour ajouter aux
faveurs de la loi celles qui dépendoient de fa volonté ? C e
fils eft fon héritier teftamentaira, & dès-lors dans le doute
tout doit s’interpréter en fa faveur. C ’eft ce que nous enfeigne
le favant Ricard, Traité des Donations, fécondé partie, ch. 4 ,
71. 12.6. La réglé la plus générale, d i t - i l , qui puiffe f e propofe r à ce fu je t , 6* qui contient éminemment en fo i toutes les
autres, ejl que p&ur iexplication des donations & des tejlamens, il fa u t3 avant tout & fu r -to u t confidérer la perfonne
de celui qui difpofe > & avoir égard à fa volontéy enfuite la
faveur de l héritier tient le fécond lieu ; & enfin la perfonne
du légataire ou du donataire ejl la moins confidérable.
Q u e répondent les Demandeurs ? « Ils font paifés ces
» fiecles de barbarie, où la folie de perpétuer fon nom >
» rendant l ’homme traître à la nature5 rempliiToit les cloî-
�13
» très & la fociété de triftes vi&imes immolées à 1 établifle» ment d’un aîné. Si l’on paie encore un tribut a 1 idole
» du préjugé, au moins o u b lie -t-o n rarement que I o n eil
» le pere de tous fes enfans.
- V oilà peut - être de belles phrafes, mais rien de plus.
i° . L a loi municipale de la Province , à laquelle fes
moeurs 6c fes ufages font conformes, permet une inégalité
entre les enfans dans le partage des fucceflîons. E lle fait
p lus, elle invite à avantager les mâles, puifque en certains
cas elle les favorife elle-même fans le fecours de la volonté
de leur p e r e , pour la conservation des maifons du pays. Par
combien de raifons prifes dans la politique ne pourroit-on
pas juftifier les vues de cette loi? Mais ceferoit lui faire injure
que de l ’entreprendre; on doit s’y foumettre avec confiance,
parce qu’elle a pour elle au moins le préjugé de la fageife.
A h ! fi dans des fiecles reculés, qu’on appelle aiTez légère
ment des fiecles de barbarie,'une augmentation de fortune
en faveur des enfans qui perpétuent les noms des familles,
a paru aux Légiflateurs un moyen propre à leur confervation; peut - on penfer différemment dans des temps où la
c o r ru p tio n des moeurs a rendu la fortune encore plus néceffaire à l’illuftration (a ) 1
a0. 11 y a une très-petite différence entre ce que les
filles du fécond lit auront dans la fucceffion de leur p e re ,
diftra&ion faite du quart fie de l’accroifTement dans les trois
quarts reftans, ôc^ce qu’elles auroient e u , fi elles euffent
fuccédé ab-inteftat. E n e i f e t , le fieur Bagès pere ayant
laiffé fix enfans, les portions des Dames Juge & Malbet
( a ) Dans tous les Etats policés , on a permis des teilaroens >& dans pluiieurs
ex«lufion ^es fiMcs en a été l’objet.
�T4r
n’auroient été qu’ un fixieme : o r, malgré les prélevemens de
M c. B a g è s , il leur reviendra ou à leur repréfentans un hui
tième : leurs portions ab-intèjîat ne reçoivent donc d’autre
diminution que celle qu’y apporte l ’avantage du quart qui a
été fait à leur frere unique; avantage qui eft fans doute m o
dique relativement à l’ufage de la Province, dans laquelle
les inftitutions contractuelles font fréquentes. Du fixieme au
huitième y a - t - i l une il grande difproportion? E ft - c e - là le
partage du lion, tout d'un côté?
A la vérité M e. Bagès aura un autre bénéfice outre le
quart; mais comment? C ’eft parce qu’il prendra les portions
des filles fo rclo fe s, qui font aufii d’un huitième, en rappor
tant leurs dots. Mais ce bénéfice ne nuit en aucune maniéré
à la Dame Alalbet ôc aux repréfentans de la Dame Juge.
Il fe prendra feulement fur les filles mariées, du vivant du
pere. C e font elles feules qui y perdent ; & fi la Coutume
ne donnoit pas ce bénéfice à M e. B agès, les Demandeurs
n Jy gagneroient rien, parce que les filles mariées viendroienc
fans doute prendre au partage leurs portions afférentes dont
l ’exiftence feule du mâle les prive. O ù eft donc l ’injuftice
fur laquelle les Demandeurs fe font récriés avec auifi peu
de réflexion ?
D ’ailleurs p enfera-t-on que le teftateur ait eu quelque
peine à réduire fes filles non mariées à un huitième de fa
fucceifion, lorfqu’on apprendra qu’il n’avoit donné à chacune
de fes filles de fon premier mariage , qu’environ la vingtième
partie de fes biens. En 1 7 J 1 , il maria Anne Bagès avec ls
fieur P a g e s , & il lui conftitua une dot de 2,400 liv. feu
lem ent, fans efpoir fucceflif. En 1 7 ; 7 , M arie-Thérefe B a gèi
fut mariée avecleiieiif G ladelj ôcforclofe moyennant
�E n 176 0 , Marguerite Bagès époufa le fieur Pradier, & Ton
pere lui. donna pour toute dot 2,^00 liv. C e qui rend ces
dots encore plussmodiques, c’eft que près de la moitié n a été
Jftipulée payable qu’après le décès du fieur Bagès. Ces trois filles
fe font mariées félon leur état :1e teftateur devoit préfumer qu’il
en feroit de même des deux filles de fon fécond lit, puis
qu'elles avoient une fortune bien fupérieure., malgré le pré
lèvement du quart & de l’accroifiement, & ces v u e s ont été
'juftifiées par l’événement. Comment donc fe pérfuader que le
fieur Bagès pere a voulu donner à chacune de fes filles non *.
mariées la quatrième partie de fa fucceifvon? T e lle eft cepen
dant la prétention des Demandeurs.
En fécond lieu., on a prouvé dans le premier Mémoire
de M e. Bagès ( pag. p & 10 ), qu e, félon le fyftême des D e
mandeurs, fon pere auroit voulu faire un teftament ridicule.
E n effet , l’accroiifement étant plus confidérable que le
q u a rt, il n’auroit pu raifonnablement propofer à fon fils
de renoncer à cet accroiffement, pour s’en tenir au legs
du quart.
Les demandeurs répondent que le droit d ’accroiffement,
confiftant dans la moitié de la fucceilion, étoit prefque en
tièrement abforbé par le rapport des dots des trois filles
forclofes, qui réunies montent à plus de 10,000 liv.
Mais ils.ne font pas plus exa&s dans leurs calculs que dans
•leurs, raifonnemens. Il a été fait entre les parties, en 178 0 , un
•partage provifionnel, dans lequel M e. Bagès s’eft réfervé tous
fes droits. Lors de ce partage tous les biens-fonds dépendans
de la fucceifion ont été eftimés amiablement à la fomme de
4 *>ooo liv. Dans cette fomme on n’a pas compris les beftiaux
**** domaines, le mobilier, les papiers & autres effets montanç
�i6
au moins à 8,000 livres ce qui fait en tout £0,000 livres.
C ’eft fans raifon qu’on prétend que lors du teftament les
immeubles du fieur Bagés n’étoient pas d'une fi grande va
leur; qu’ils ont augmenté de p rix, comme tous les autres
fonds, par l'effet d’une révolution imprévue; qu’ainfi lors
du teftament le quart excédoit le droit d’accroiifement.
Il eft aifé de répondre à cette obje&ion. Depuis le décès
du pere, les héritages de fa fucceifion ont été confidérablement dégradés; enforteque, malgré l ’augmentation furvenue
en général, ils valoient moins lors du partage, que lors du
teftament. D ’ailleurs les héritages, même lors du partage,
valoient bien plus de 42,000 liv. Il eft d’ufage de faire dans
les actes ces fixations le plus bas qu’on p e u t , fie perfonne
n ’en ignore le motif. O n peut donc porter la fucceiïïon pa
ternelle à 5*0,000 liv.
M e. Bagès devoit donc avoir 2 0 0 0 liv. pour fon droit
d’accroiiTement; c Jeft-à-dire, la moitié de la fucceiïïon. Sur
q u o i, diftrattion faite, non pas de 10,000 liv. comme les
Demandeurs le prétendent, mais feulement de 7,poo liv.
pour les dots conftituées aux trois filles forclofes, refte la
fomme de 17,100 liv. revenante à M e. Bagès. O r , le quart
de la fucceifion ne montant qu’à 12,^00 liv. ce quart a-t-il
pu être légué à M e. B a g ès, pour le dédommager de 17,100 liv.
dont fon pere ne pouvoir pas le priver ? Encore ne faut-il
pas omettre une circonftance qui diminue finguliérement le
l e g s , c eft que le fieur Bagès a entendu que la Dame Fau
c h e r, fon époufe, auroit la jouifiance du quart jufqu’à 1*
majorité de fon fils; c'eft-à-dire, pendant dix-huit ans.
M a is , quand on compenferoit les beftiaux , meubles SC
papiers avec la prétendue plus value des fonds, on ne pour
ront
�roit jamais dire que le teftateur a eu l’intention de pri
ver fon fils de raccroiflem ent, en le dédommageant par
*
•
le quart; parce qu’il n’y auroit également aucune proportion
entre l’un & l’autre. L a fucceilion, fous ce point de vu e ,
montant à 42,000 liv. la moitié pour l’accroiifement, diftraction faite de 7,5500 liv. formeroic un objet de 13,100 liv. &
le quart ne fe porteroit qu’à io ,? o o liv. O r , un pere ne
prendroit pas la peine de tefter, pour propofer à fon fils
de prendre, ou 13,100 liv. qui lui appartenoient d é jà , ou
i o , j o o liv. feulement, à n'en jouir qu’après dix-huit ans.
E n f i n , s’ il reftoit encore quelque doute fur la queftion de favoir fi le fieur Bagès a é té , ou non, dans l'inten
tion de priver fon fils de l’accroiflement dans les trois quarts,
dans ce doute même il faudroit fe décider pour la négative,
par la raifon que M e. Bagès tient raccroiflement de la C o u
tume, & que fon pere eft préfumé avoir voulu conformer fon
intention au vœu de cette loi. T e lle eft la do&rine de
F aber, de error, pragmatic. decad. 5 $ , err. 1 ; fe d quia in
dubio, dit-il, f i non aliud de tefiatoris volúntate appareat, credendus f u prudens quilibet tefiator, eum voluntad fuœ ordinetn
prefcripjijfe, quem fuccefiioni intefiati le x preferibit. N ec enim
aut prudentius aut certius ullum potefi ejje confilium quàm
legis.
C ’eft ce que nous enfeigne encore M e. G u iñ é , Auteur
auili judicieux que favant,dans fa neuvieme regle du droit
de repréfentation. Le principe, d i t - i l , des pays régis par le
droit civ il, efi de mettre la difpofition de l'homme au-deffus
de celle de la lo i, Utique quiifque legaifit ita jus efto . . . .
mais le principe de notre pays coutumier efi au contraire. Nous
C
�18
ejîuncns la loi plus f ig e que /’homme, & nous faifons prévaloir
fa difpofition au-dej}us de celle de l’ homme , autant de fois que
cela Je peut faire ,fa n s contrevenir direclement à la difpofition du
teflateur. I l ne/l permis dans notre ufage de difpofer que de
certaine nature de biens, & ju fq iià certaine quantité, & même
fou s des conditions & des formalités fatales ; de forte que quand
dans la difpofition du tejlateur, ilfe trouve quelque choje d obfcur,
ou fu jet à interprétation, il le fa u t interpréter & le rapprocher
autant qu il ejl pojfible ( fans détruire la volonté du tejlateur ),
à la difpofition de la Coutume. M. H en rys, tom. 2, liv. 4 ,
queft. 1 2 4 , n. 2 & 3, fait la même diftin&ion ôc expofe les
mêmes principes.
G u in é , en en faifant l’application, décide une queftion qui.
a beaucoup d’analogie à celle qui nous divife. Il fuppofe que
le teftateur ait dit qu’il laiiToit fes biens à fes plus proches
parens, & que ce teftateur laiife des freres & des neveux
qui , en général, & fu r-to u t à Paris, feroient habiles à lui
fuccéder par fouches. Il demande enfuite fi les neveux font
exclus on non par le teftament. Quoiqu’il paroiife que le
teftateur a voulu inftituer fes freres qui font fe s plus proches,
cependant Guiné d é c id e , en réfutant l ’opinion de A leLegrand fur la Coutume de T r o y e s , que les neveux & les
freres doivent recueillir conjointement la fuccellion; parce
que la loi met les freres & les neveux du déj'unt en même
degré ( en ce qui concerne l'habilité de fuccéder ) ; & il fa u t
préfunier que le tejlateur les a confidérés de même maniéré que
la Coutume les confidere. T e l eft encore l’avis de Someren
qui a écrit dans cette matiere avant G u in é , & dont ce der
nier Auteur rapporte les termes.
O r ; fi dans ce cas on a penfé que la proxim ité* dont parr
�loit le teftateur devoit être celle de la lo i, quoique le tefîateur n’annonçât en aucune maniéré cette intention; quoique
à prendre les termes du teftament, il eût feulement defigné
fes plus proches en degré & non fés plus’ proches relative
ment à l ’habilité que donnait la Coutum e, par l’effet de la
repréfentation; à plus forte raifon doit-on croire que le fieur
B a g è s , en difant que les trois quarts de fes biens feroien:
partagés entre fes enfans du fécond l i t , par égales portions,
a eu en vue l’égalité de la l o i , fans faire abftradion dans la
perfonne du m Ue, de fa prérogative de repréfenter les filles
mariées, fur-tout dès que le fieur Bagès a témoigné ènfuite
par ces mots, qui font fe s héritiers de droit, qu’il n’a point
voulu déroger à cet égard à la difpofition de la loi.
P a s s o n s a£tuellement aux autorités qui s’appliquent plus
dire&ement à notre efpece. O n veut parler des Sentences
de la C o u r , qui ont jugé la queftion en thefe en faveur
du m âle, & du fentiment de Bafmaifon qui y eft con
forme.
*
A Tégard de ce Commentateur les Demandeurs n'ont,
pas tout - à - fait ofé perfifter à foutenir qu’il n'avoit écrit
que des rêveries ; mais ils ont fait tous leurs efforts pour
obfcurcir le paifage où il traite la queftion. C e f t avec rai
fo n , difent-ilsj qu 011 a cité ce paifage comme un oracle:
c en eft un dans toute la force du term e, parce qu’il en a
toute l’ambiguité.
Mais rapportons le paifage de Bafmaifon. C e t Auteur
obferve d’abord que Yaccroïjjement de la portion de la fille
viariee compatit avec les légats & libéralités tcjlamentains
f ails aux mâles ; fit après en avoir donné plufieurs raifons,
C 2
�20
éc entr’autres celle qu'il ne fe fait point de compenfation.
de deux gains, quand l ’un & l ’autre ne viennent point de la
même perfonne & de la même maint c ’e ft -à -d ir e , que l ’un
dérive de la l o i , & l ’autre de la volonté du pere j il
ajoute.
O r 3 le légat fe prend fu r toute la fucceffion , par la
dlfpofition & provifion de l’ homme, au contraire, laccroijjement f e prend par le bénéfice de la Coutume & par la fubrogation des perfonnes, en ce que le mâle repréfente la fille
mariée, pour prendre fa portion ; ce qui fa it que fi le p ere,
la mere ou autres lignagers infiituent c o n j o i n t e m e n t
héritiers, par leur tefiament, les mâles & les fille s à marier,
& q u il y ait fille s mariées, du vivant du pere, quand bien
tous les héritiers injïitués accepteront le tefiament, p o u r t a n t
L E S M A L E S N E SE R O N T P O IN T E X C L U S D E LA PO RTIO N
> d’autant que l ’approbation que les
mâles ont fa ite du tefiament, ne nuit point en leur nom pro
pre , en tant qu’ils fo n t héritiers infiitués au droit difiind &
féparé qui appartient aux mâles, & qui ne prend point fon ori
gine ni du tefiament ni de la volonté tacite du tefiateur, &
procédé de ce que le mâle repréfente la fille mariée qui pourroit demander réduction du tefiament au quart, & venir en par
tage des trois quarts de la fucceffion, ce que les mâles peuvent faire au nom de la f i l l e } & prendre fu r les trois quarts
la portion des fille s mariées, 6* ce f a i t , partager le furplus
de la fuccejfion in viriles, avec tous les héritiers infiitués 3
d e s
f i l l e s
SANS
PAR
d
'a
QUE
LES
m a r i é e s
LAPPROBATION
M ALES,
c c r o i s s e m e n t
INDUISE
DU
TESTAMENT
CONFUSION
DU
FAITE
DROIT
qui appartient aux mâles ex perfonâ
de leurs fccurs mariées, & par le bénéfice de la Coutume.
�21
E t c*ejl ce qui a lieu nonobjlant que le tejlateur ait voulu
rendre égaux les héritiers injlitués ; ce q u il fa it en tant qu ils
fo n t appelles en leurs noms propres en partage ( a ) .• M A I S
n
'a
y a n t
e x p r e s s é m e n t
QU*IL I N S T I T U E
M ENT, SANS
LESDITS
d é c l a r é
MALES
QUE LES M A L E S
L'ACCRO ISSEM EN T
RIÉES , LESDITS
DES
s a
v o l o n t é
ET FILLES
ÉGALE
PU ISSE N T S*AIDER
PORTIONS
M ALES POURRONT
DES
FILLES
PRENDRE
DE
M A-
LEDIT
ACCROISSEMENT.
Il y a tant de clarté dans le développement de l ’opinion
de Bafmaifon , &. tant de folidité dans fes motifs
qu’ il
n’eft befoin de faire aucune réflexion pour démontrer l’ une
& l’autre.
A quoi fe réduit l’ interprétation des Demandeurs? Baf
maifon, difen t-ils, fuppofe que le teftateur a fimplement
appellé au partage des trois quarts le mâle & les filles à
m arier, fans s’expliquer fur la proportion du partage, fans
dire s’il fera égal ou inégal. A lo r s , quoiqu’ il femblât que
ces trois quarts duifent fe divifer par têtes , fuivant cette
réglé, ubi partes adjeclce non fu n t, cenfentur œquales ; néan
moins les mâles feront comptés pour autant de têtes qu’ ils
repréfentent de filles mariées, parce que la loi le voulant
ainfi, le teftateur, en gardant le filence, eft cenfé s’en être
rapporté a elle, bien loin d y déroger. Mais ce fera différent
fi le teftateur a inftitué les mâles & les filles également. C e
'm o t , également, renferme une volonté énixe de déroger à
la loi; il a la même énergie, la même efficacité, que fi le
teftateur eût d it, fans que les mâles puijfent s’aider de l ’ac-
r» ( a ) Voyez la premiere Edition de Bafraaifon«
�croisement. O r , le fieur Bagès pere ayant ordonné le partage
des trois quarts de fes biens entre fes trois enfans du fécond
lit , par égales portions, & ces termes, équivalant à celui d'é
galement , ils emportent auifi l ’idée de la prohibition de
l ’accroiffement.
Mais ce fens ne fe préfentera jamais à Tefprit de tout
.lecteur impartial. 11 importe peu dans l’idée de Bafmaifon, que
le teftateur ait dit que les trois quarts feroient partagés entre
Je-mâle & les filles à marier, ou par égalité, ou égale
ment, ou par égales portions, ou même qu’il en ait Am
plement. ordonné le partage entr'eux. Il n'entend faire
aucune différence entre toutes ces manieres de difpofer,
qui effectivement doivent toutes avoir le même effet ,
fuivant cette reg le , ubi partes non fu n t adjeâœ, cenfentur
œquales.
Cet auteur fuppofe qu’il paroît réfulter des termes du tef
tament l ’idée d’établir une parfaite égalité quant aux trois
quarts entre le fils & les filles; & c e jl ce qui a lieu, dit-il,
nonobjlant que le tejîateur ait voulu rendre égaux les héritiers
injUtués en ce qu ils font tous appellés en leurs noms propres
en partage, c’e ft-à -d ir e , en femblant faire abftra&ion dans
la perfonne du mâle, du droit de repréfenter les filles forclofes. Néanmoins Bafmaifon décide que fi le teftateur n’a
pas dérogé par une volonté bien exprefie à la loi qui s’oppofe
à cette égalité, le mâle, outre le quart qui lui a été lé g u é ,
prendra raccroiffement dans les trois quarts reflans. Pour
qu’on puiffe dire que le teftateur ait voulu déroger à une
loi amTi impérative que celle de l ’accroiflement, pour qu’il
paroiffe qu’il n’a légué le quart que conditionnellement, &
en confidération de la privation de l'accroiftement qu’il a
�23
entendu prononcer contre le fils, il ne fuffit pas qu il ait dit
qu’il inftituoit le fils ôc les filles également quant aux trois
quarts, il faut qu’il ait encore ajouté fans que les mâles
puîffent s’aider de l’accroijjenient, ce n'eft qu’alors que le
legs efl conditionnel.
La négative, par laquelle la phrafe de Bafmaifon com
mence* en gouverne tous les membres. O n pourroit, fans
rien changer au fens, la rendre de cette maniéré. Mais Jî
le tefîateur na point exprejfément déclaré fa volonté q u il itiftitue les mâles & les filles également y s \ l na pas dit encore,
fans que les mâles puîffent s'aider de l'accroiffement des por
tions des f i le s mariées, les mâles pourront prendre l'accroiffenient.
Si ce n’eft pas l'a le fens de ces termes , fans que les
mâles puîffent s'aider de l'accroiffement, ils n’en auront
aucun , parce qu’ il eft impoflible de leur en donner d’au
tre. Il faudra donc les regarder comme des pléonafmes
ridicules.
Les Demandeurs croient prévenir cette obje&ion 3 en difant que Bafmaifon n a employé ces termes que pour un plus
grand développement de fon idée , pour mieux la faire fentir.
E h l vraiment fans doute, ces termes font le figne d’une
idée. Mais quelle ef t-el l e? C'eft que fi le teftateur ne les
a pas employés, il ne peut jamais être confidéré comme
ayant voulu déroger à la loi de l’accroiffement, au préju
dice de fon fils, quelqu’idée d’égalité que préfente d’ailleurs
le teftament quant aux trois quarts. Quand ces expreifions
-conditionnelles manquent, il faut croire que le teftateur n’a
entendu parler que d’une égalité relative à la divifion éta
blie par la Coutume.
�24
A udi ce n’eft qu’en défigurant entièrement le paflage de
Bafm aifon, que les Demandeurs ont entrepris de prouver
q u e , fuivant ce Commentateur, le mot également équivaut ÔC
a la même force que c e u x - c i, fans que les mâles puijjent
s'aider de ïaccroiffement, & qu’il ne faut que l’expreiïion ou
du premier ou des derniers. Il n’y a abfolument rien dans le
pairage de l’Auteur qui indique qu’il ait eu cette idée ;
fie tous fes termes n'ont été employés que pour exprimer
bien difertement l ’idée contraire.
P a r rapport aux deux Sentences de la C o u r , rappor
tées dans la note manuferite de M e. Gilbert Marie , les
Demandeurs perfiftent toujours à dire « que l ’exiftence
» légale de ces Sentences n’eft point prouvée; qu’il fe» roit facile de les trouver au G reife, fi elles n’étoient
» pas chimériques, & que cependant elles ne font pas pro~
» duites.
Mais les Demandeurs ne pourront plus faire ce reproche :
on a trouvé ces Sentences au Greffe & elles feront jointes
à la produ&ion de M e. Bagès. Celle qui a été rendue dans la
famille des TitaiTon., eft en date du iy juillet lô^o ; & celle
d’entre les héritiers du Chanoine U rio n , d’Aigues-Perfe*
eft du 9 feptembre 1662.
L a premiere de ces Sentences n’étant point datée dans
la note de M e. M arie, on auroit été dans rimpoifibilité de
la trouver au Greffe. Mais on a fait cette découverte, avec
le fecours d’une autre note manuferite de M e. Conful 3 annota
teur de Bafmaifon, dans laquelle cette Sentence s’eft trouvée
datée; & M e.C onful annonce qu’il a tiré fa note des manuferits
de M e. d’A n jo ly , A v o c a t, dont le nom eft encore c o n n u au
Palais.
�Palais. O n va tranfcrire la note de M e. Conful qui forme
une nouvelle autorité en faveur de M c. Bagès. Quoi quen
tiennent les Avocats de la Cour, quand le pere legue le quart
aux mâles > ù les itijlitue pour le furplus avec les f ille s , on a.
toujours jugé en ce Siège que la portion des filles accroît aux
mâles tant feulem ent, bien quon die que le teflament cfi un
acte. indivis, fie judicatum pour les Titajfon, en ce Siège ,
le i 5 ju illet zô^o.
Ce que le P araphrajle rapporte a été obfervc au partage, de'
la fuccejjion de Meffire Antoine de M urât, Criflopke de Murât
J'on frere, Secrétaire du Roi , ayant pris le droit d’ accroijje- •
ment avec le légat du, quart. E x d’A n joli (a).
Mais, ajoutent les Demandeurs, les efpeces particulière»
de ces Sentences ne font point connues.
( a ) Me. Andraud eft dépofitaire du manuferit d’où cette note a été tirée. Il s’eft
rendu certain que Me. Conful en eft l’Auteur. Ce Jurifconfulte a occafion de d ire,
fans fe nommer, qu’en une certaine année il étoit échevin de Riom & que M.
Dubois étoit ion collègue. Et M e. Andraud a vérifié fur les Regiftres de la V ille
qu’en l’année indiquée, Me. Conful étoit effectivement échevin avec M . Dubois.
D ’ailleurs il y eft parlé des notes faites fur la paraphrafe de Bafmaifon, comme
étant l’ouvrage de l’Auteur même du manuferit. On a tout Heu de préfumer que
ce manuferit précieux dans lequel on trouve rapporté un nombre prodigieux de
Sentences de la C o u r, a fervi de matériaux à un ouvrage entrepris par M e. Conful
fur notre Coutum e, dont Mes. Berroyer & de Lauriere parlent dans la Bibliothèque
des Coutume»y ou que peut-être il eft une partie de cet ouvrage. « On prétend,
" difent ces Jurifconfultes, au mot Auvergne , page 84, que; Me. Conful, qui a .
M fait des notes fur Bafmaifon, avoit auifi laiffé un Commentaire entier, dont une
>J partie s’eft perdue chez feu M . de Joncoux, Avocat au Parlement, qui étoit
^ du pays. Si le Compatriote qui a ce fragment, a autant,de zelç pour le public
” Hu en avoit M , de Joncoux, il fera bientôt réuni & ' confacré à leur commune
* Patrî«.
.
.j
s.i
ii Xivii
D
�z6
11 eft aifé de réfuter cette obje&ion.
Quoiqu'on ne trouve pas dans ces deux Sentences les
termes des teftamens qui faifoient la difficulté, parce que les
pieces y font Amplement défignées ôc datées, fans qu’on
faife aucune mention de leur teneur., on ne peut douter que
ces Sentences n'aient jugé en thefe la queftion qui nous
divife.
i° . Leurs difpofitifs le prouvent. Ils portent que les mâles
prendront au partage, en vertu du droit d’accroifTement, les
portions des filles forclofes, outre & par-deffus le quart fi
eux légué en préciput, & ce privatïvement & à /’exception des
autres fille s non mariées par le pere.
2°. D ’après le récit de l'efpece de la Sentence de 1 662 y
rapportée par M e. M a rie, on voit qu’elle étoit abfolument
femblable à la nôtre. Sed quid in hac fp e cie ? dit-il, le pere
donne le quart en préciput à fe s mâles , & au réfidu de f i s
biens > les inflitue 6* fe s filles à marier , héritiers p ar
égales portions. On juge en ce Siège pour Vdccroifjement
etiam in hac fpecie. O r , il faut, fans doute, s’en rappof"
ter à ce que nous attefte M e. M a r ie , puifqu’il avoit écrit
pour les filles qui demandoient le partage des trois quarts
dans la fucceiïion du Chanoine Urion. Cela eft prouvé p3^
le vu de pieces de cette Sentence. Avertijfement, y
d it , des Défendeurs, figne M arie, Avocat en ce Siège. M *Marie dit que les Avocats du Parlement s’étoient d é c id é
en faveur des filles; & efFe&ivement le même vu de pieces
fait mention d'un avis de Confeil, figné Chambeu & Cantoh
Avocats à P aris, employé pour plus amples avertiffemenst
de la part des fille s . Mais ce Jurifconfulte foumet fon o p i
nion à la Jurifprudence de la Cour. Contra judicatum, dit-il*
�27
in nojîra Curia, & cela a pajfé en maxime pour le droit d ac~
croisement. Il fait prévaloir les raifons qui. ont donné lieu a
cette Jurifprudence aux moyens qu’il avoit déduits pour les
filles, & qu’il expofe en fubftance.
3°. L ’efpece de la Sentence de 1630, rendue entre les
TitafTon, eft bien conftatée par la note de M e. Con ful, en
ces termes, quand le pere legue le quart aux mâles & les
infiitue pour le furplus avec les f ille s , on a toujours ju g é , &c.
6c encore par c e u x - c i, ce que le Paraphrajle rapporte a été
obfervé au partage de la fuccejfion de Mejfire Antoine de
Murât. O r , il n’y a pas d’équivoque fur l ’efpece propofée
dans la paraphrafe de Bafmaifon. E t ce qui ;pt*ouve l’exaclitude de la note de M®. C o n fu l, c ’eft qu’il d it, quoi qu}en
tiennent les Avocats de'la Cour, c’eft-à-dire, du Parlement;
& , en effet, la Sentence de 1630 énonce encore leur
confultation en faveur des filles. Mais les mâles en rapportoient une autre ou des Avocats du Parlem ent, ou de ceux
exerçans en ce Siège.
E nfin, les Demandeurs fe retranchent fur une obje&ion
qui eft ridicule. Ils difent que « fi les Sentences de la
» Cour font réelles; ellfes font intervenues, fans doute j
» fur des teftamens, où le prélegs du quart en faveur des
» mâles avoit été fuivi d’une fimple inftitution, tant des
» mâles que des filles dans les trois quarts, fans exprefllon
» formelle de L’ égalité, comme dans l’efpece propofée par
» Bafmaifon.
O n a déjà remarqué que la différence que les Deman
deurs mettoient dans la maniéré d’exprimer j de la part du
d a t e u r , l’égalité dans les trois quarts entre lé mâle &
D a
�as
les -filîes à marier, étoit chimérique. L Jinftitutio.n pure &
fimple qui feroit faite à leur profit quant aux trois quarts,
emporteroit la même idée d’égalité qui pourroit être atta-J
chée à ces m o ts , également, par égales portions. Il s’agit
feulement de favoir il dans les efpeces des Sentences j il
réfultoit de la lettre du teftament, c^ue le pere avoit paru
vouloir rendre égaux le fils & les filles non mariées, quant
aux trois quarts, fans s’expliquer fur le droit du fils de
repréfenter les filles forclofes. O r , on ne fauroit douter
que les efpeces de ces Sentences ne fuifent telles n on-feu
lement d’après les termes dans lefquels s’expliquent M ts.
Marie & C o n fu lj en les rapportant, mais encore d'après les
moyens que les filles employoient & ceux qu'on leur oppofoit. L e tejlametit ejl un aâe individu, difoient les filles,
les mâles ne peuvent pas approuver la difpofition à eux faite
du quart en préciput, qu’ils n’approuvent en même temps la
difpofition faite en faveur de leurs fœurs non mariées des
portions des filles forclo fes, fans égard pour raccroiifement. Les mâles répondoient : Après le légat du quart,
linflitution aux trois quarts rejlans eft inutile, puifque les
trois quarts fon t acquis aux héritiers ab - inteftat s fans y
pouvoir être contrevenu. N ’eft-il pas évident que le teftament préfentoit l’idée d’égalité quant aux trois quart* entre
le fils & les filles? Mais cela ne fuffifoit pas relativement
aux principes particuliers de notre C o u tu m e , parce quâ
le pere nJavoit pas dérogé expreifément à la loi de l ’accroiifement ; il n’avoit pas déclaré qu’il n’avoit fait le
legs du quart à fon fils, que fous la condition qu’il ne prendroit pas raccroiifement dans les trois quarts reftans. E t
voilà pourquoi les filles fuccomberent. O r , cette condi-
�39
tion manque également dans le teftament du fieur Bagès.
Il
y a plus, la qualité d‘héritiers de droit que le fieur Bages
pere a donnée à fon fils & à fes filles non m ariées, le m otif
de fa difpofition, qu’il a expliqué, font des circonftances du
plus grand poids pour M e. B agès. Elles prouvent que fon
pere n’a entendu parler que d’une égalité relative à la lo i,
& non d’une égalité abfolue. Ces circonftances ne fe rencontroient point dans les efpeces des Sentences de la C our;
cependant elles ont jugé en faveur des m âles, & elles ont
été recueillies par les Jurifconfultes , comme devant faire
ceffer toutes les incertitudes qui s’étoient préfentées fur la
queftion qui nous divife. Les demandeurs peu ven t-ils fe
flatter férieufement de les faire renaître?
«
Monfieur le L I E U T E N A N T - G É N É R A L , Rapporteur.
M e.
G R E N IE R ,
A vocat.
H o
m j
Procureur.
*> k '2/
, *
A R lO M ,chez
S'
M artin
-----®
. 0 -/ 1
, v------ » , ______
D É G O U T T E , Imprim eur-Libraire,
près la Fontaine des L ig n es, 1782.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bagès, Jean-Nazaire. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Hom
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Second mémoire pour maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine De Pons, chevalier, seigneur de Belestat, son curateur, à l'effet de l'autoriser, défendeurs et demandeurs. Contre maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de ses enfans, héritiers de défunte Marie Bagès, leur mère, ayant repris en son lieu et place ; sieur François Malbet, et demoiselle Elisabeth Bagès, sa femme, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs. Note manuscrite : « par sentence du 19 août 1782 au rapport de M. de Sampigny, lieutenant général jugé en faveur du sieur bagès unanimement. Les juges étaient au nombre de seize. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
BCU_Factums_B0110
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0111
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53949/BCU_Factums_B0110.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vodable (63466)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54013/BCU_Factums_DVV19.pdf
a385c8270ae94bb9efb0d1b00ff878f5
PDF Text
Text
MEMOIRE
PO U R
Les sieurs NICOLAS BATHOL et DESSALES,
CONTRE
Le sieur MESTRE et autres cohéritiers.
��IRE-
*•
POUR
L e sieur N ico las B ath ol-C h ou ssy, agissant tant en son nom
q u ’en qualité d ’héritier de défuntes dem oiselles Sophie et
C h ristine B a th ol ses sœurs , et sieur F ran çois-V incentSatu rn in D essales , officier de santé , agissant tant en son
nom personnel q u ’en qu alité de père et légitim e ad m i
nistrateur de la personne et des bien s de son fds m in eu r
d ’avec défunte dam e M arie B atliol , lesdits sieurs B ath ol
et D essalles , liabitans de la v ille de B illo m , pris en
q u alité d ’héritiers de défunt sieur A n toin e B a th o l-E sp in a sse , leu r père et b e a u -p è re , appelans d ’un jugem ent
rendu au trib u n al c iv il de C lerm on t , le 26 m ai 1 8 3 1 5
CONTR E :
i° L e sieur M estre , officier de santé , h ab itan t au lieu
de M o n tm o y , com m une de M an glieu ; C la u d e-M arie
M e s tre , expert 'géom ètre} habitan t du B ourg de StB o n n e t-le -C h a ste l, P a u l et T h éodore D u p u y , en qua
lité d ’h éritier de défunte M arie M e s lre ,
leu r
m è re ,
propriétaires liabitans au lieu de C h a n le u g e , départe
m ent de la H aute-L oire ; sieur P ierre S ib a u d , n o ta ire ,
habitant le c h e f-lie u
de la
com m une de S t - A ly re 7
canton d ’A r ia n e , tant en son n 0m personnel q u ’en
qu alité de père et légitim e adm in istrateur de la per
sonne et des bien s d ’A n d ré J e a n - Baptiste et M arie
S ib a u d , ses enfans m in e u rs , d ’avec C lau d in e-T ou ssain t
�Itflstre sa *£61111116 , sieur P ierre -Irén ée Sibaud prêtre ;
M ich e l-A im e S ib au d , Y icto r-M a rtia l S íb a ü d , M agdeleine
A d éla ïd e
S ib au d et C la u d e
B arrière son m ari ,
ces
quatres derniers agissant en qualité d ’en fans et héritiers
de ladite dam e C lau d in e-T o u ssa in t M estre , et lesdits
sieur
et
dam e
M estre
agissant
com m e
héritiers de défunte Jean n e B a tlio l,
enfans
et
d écédée, fem m e
de Jean M estre leu r père;
2° M arie M oissat, veuve de N icolas L a y a t , propriétaire,
habitante de la v ille de B illom , Jacques-Josepli P u ra y
iils a în é , sieur
J ea n -B a p tiste-A m a b le P u ray , dam e
M a rie -A n n e P u ra y et le sieur François Pages son m ari ,
dam e Françoise P u ra y et le sieur Jean P in et son m ari,
tous in tim é s, com parans par M e D riv o n leu r a v o u é j
D am e Jeanne L aclien al et le sieur Espinasse son
m ari, propriétaire, h abitan t au lieu de V in d io le t, intim és
com parant par M e llo u g ie r leu r avoué.
lîn présence de dam e M arie Justin e C iquard et du
sieur A lexan d re F arglieon son m ari , propriétaires liabitans de la v ille de E illo m , dam e M arie C iquard et le
sieur B alth azard
V im a l-Y ia lis
son m a r i,
n égo cian t,
habitant de la v ille d ’A m b e r t , et défendeurs en assistance
de cause et en déclaration d ’arrèt com m un ,‘ défaillans.
Le sieur Antoine Batliol, auteur de toutes les parties , était
né a v e c une fortune fort m o d iq u e , aussi voit-on qu’en 1755
il avait dû borner ses prétentions à épouser une femme qui
lui avait porté une dot de deux mille livres en capital.
�Aubergiste à Billom, il trouva dans son industrie le moyen
d ’accroître la fortune qu’il devait laisser à ses enfhns, et qui
fait aujourd’hui l’objet du procès pendant devant la C o u r ,
maigre le soin qu’il avait pris d’éviter autant que possible de
pareilles sujets de contestations par les dispositions qu’il avait
faites, en instituant deux de ses enfans pour héritiers, en
fixant d’ une manière positive la légitime des autres , soit par
leurs contrats de mariage , soit par son testament.
Ces dispositions ne furent pas d’abord attaquées par les
adversaires actuelsdu sieur Louis-Nicolas Bathol Choussy; des
paiemens furent effectués aux légitimaires par les deux ins
titués, après le décès de l’auteur commun, et à compte sur les
légitimes sans réclamation aucune. 11 est même à remarquer
que l’un des deux i n s t i t u é s étant décédé sans postérité, et
intestat, il a été procédé un partage de sa succession entre
tous les frères et sœurs, quoique la composition de cette
même succession dût être entièrement changée dans le cas où
conformément aux prétentions que les parties adverses ont
soulevées et fait a c c u e i l l i r plus tard , e l l e s ne seraient pa s
tenues de borner leurs prétentions aux constitutions qui leur
avaient été faites.
Si les renonciations aux successions directes n’ont pas paru
à la justice résulter en termes assez formels des contrats de
mariage des parties adverses, le long espace de temps qui s’est
écoulé entre le décès de l’auteur commun cl la demande de la
légitime de rigueur, lesactes d’acquiescement assez positifs que
l’ exposédes faits placera dans cet espacedetemps intermédiaire,
demontrent assez que celte contestation, dénuée d ’intérêt dans
le principe, n’en a trouvé que dans les augmentations de valeur
dues au temps, et plus encore aux évèneinens p o l i t i q u e s de
l’époque qui ont donné lieu à l’abolition des cens et rede
vances fort considérables dont les héritages de l ’auteur com
mun étaient grévés. Aussi, si la fortune immobilière d Antoine
I.
�(4 )
Bailiol a clé estimée plus de cent cinquante mille francs, estil essentiel de remorquer que cette évaluation a été faite valeur
de 1808 , et sans aucune déduction des cens et rentes seigneuriaîes ou foncières dont les héritages étaient grevés , d’où on
doit conclure qu’en 1780 la fortune immobilière de Tauleur
commun ne s’élevait peut être pas au tiers de la somme à
laquelle elle a été fixée en 1808.
On a déjà dit que les premières difficultés, nées entre les
parties, étaient relatives au partage des successions collatérales
qui s’étaient ouvertes, et à l’égard desquelles aucun contrat de
mariage n’énonçait de forclusion.
On conçoit que les adversaires en demandant à la justice de
déclarer de nul effet les forclusions qui résultent de leurs
contrats de mariage à l’égard des successions directes, qu’après
avoir procédé au partage de la succession de l ’un de leurs
frères i n s t i t u é , s u c c e s s i o n qui ne se composait que de
l’amendement de ce frère dans les biens de l’auteur commun,
ont introduit eux mêmes une grande complication dans la li
quidation de leurs droits, puisque ce partage fait, ils le défont
eux-mêmes , en changeant la masse, et q u ’il y a des rapports
à la charge de chaque partie.
Cette complication s’est augmentée par rapport à la succes
sion de l’auteur commun, par la circonstance qu ’une partie des
b i e n s étaient situés en droit écrit, l ’autre en coutume et par la
nécessité d’appliquer deux législations à la même succession.
En outre les termes des contrats de mariage, quant à la for
clusion, n’ont pas été trouvés identiques : l’une des sœurs est
forclose , tant pour les biens de droit écrit que pour ceux de
c o u t u m e , les autres ne le sont que pour ceux de coutume
seulement.
De nouvelles successions collatérales sont venues à échoir
avec des droits distincts d ’après les dispositions entrevifs ou
testamentaires.
�Les deux institués et la mère commune usufruitière, ont
joui, tantôt en commun, tantôt séparément, et dans des p r o
portions inégales, et à des époques qu’ il faut distinguer, des
biens composant la succession de l’auteurcommun.— Les légitimairesont joui d'une partie de ces mêmes biens prise dans
la part provenant de la succession de l’ un des institués. 11 y a
donc lieu à rechercher, suivant les époques, les rapports de
jouissances qui sont dus par chacune des parties.
Il en est de même pour le mobilier qui avait été divisé entre
les deux institués dans des proportions inégales, et dont cha
cune des parties en cause avait pris une portion dans le partage
de la succession de l'un des frères.
Enfin les deux institués ont liquidé la succession de l’au
teur c o m m un , payé des dettes nombreuses, rembourse des
contrats de rentes, ce qui doit donner lieu à des prélèvemens
en leur faveur.
Ces difficultés sont nombreuses, et, certes, si le sieur Louis*
Nicolas Batliol fils d’Antoine , l’un des institués, s’est montré
négligent de ses propres intérêts, en l a i s s a n t rendre contre
lui des jugeinens par défaut qui sont devenus définitifs, et
qui lèsent gravement ses intérêts, il faudra reconnaître d ’un
autre côté que lorsque les parties ont été renvoyées devant
notaire pour fournir des explications sur les difficultés qui les
divisent, lui seul s’est empressé de donner des renseignemens
de compulser dans les études de notaires, et de produire les
documens qui étaient propres à éclairer la religion de la jus
tice, et qui devaient même mettre fin à toute contestation sur
certains points, si les parties adverses avaient voulu seule
ment jeter les yeux sur les actes et pièces qui leur étaient pré
sentés.
L e sieur Nicolas Batliol, et lesieur Dessalles son b e a u frère ;
après avoir ainsi satisfait en tout ce qui dépendait d’eux , au
jugement préparatoire qui prescrivait de fournir les explica-
�(6)
#
tions demandées , ont mis trop de confiance dans ce qu’ils
avaient déjà fait et dit, et ont laissé prendre contre eux un
nouveau jugement par défaut, qui, on ne craint pas de le dire,
est un véritable plaidoyer en faveur des parties adverses. C ’est
de ce jugement dont ils sont appelans, et ils espèrent démon
trer que sous plusieurs rapports,, il est en opposition formelle
avec les règles du droit et les faits les mieux établis an procès.
Il faut, avant d ’aborder la discussion , faire connaître la gé
néalogie de la famille Batliol, les actes qui établissent les droits
des parties et la procédure qui a été suivie jusqu’à ce jour.
On voit par la généalogie, join te au présent mémoire, que du
mariage d’Antoine Batliol avec Marie Batliol étaient nés huit
enfans. Sous le rapport des droits héréditaires il ne sera
question que de sept , parce q u e l ’un des enfans, Françoise
était religieuse Bénédictine à Billom.
Louis-Nicolas est décédé sans postérité le 20 décembre 1796,
il avail été institué par l’auteur commun. Il s’agit de sa succes
sion au procès.
Antoine ( dit Espinasse), aussi institué par l’auteur com
mu n, conjointement avec Louis-Nicolas, a eu quatre enfans;
Sophie el Christine, deux de ses filles sont décédées sans pos
térité , et ont institué Louis-Nicolas leur frère pour leur
héritier. Marie a épousé le sieur François-Salurnin Dessale
qui est en cause au procès, tant en son nom que pour son fils
mineur, et qui est appelant conjointementavec Louis-Nicolas.
ce dernier tant de son chef que pour les droits q u ’il lient de
ses deux sœurs, Sophie el Christine. Le sieur Dessalle el LouisNicolas , sont représentés par M° Savarin.
Jacques, curé de Châlons, avait reçu un titre clérical pa rle
testament de l’auteur commun, il est décédé en 1785. Sa suc
cession est un des objets en contestation au procès.
M a r i e , quatrième enfant de l’auteur commun'avait épousé
�François Roussel Ciquart ; ses héritiers, au nombre de deux,
sont défaillans. Us ont moins d ’inléret dans le [m)cès que
les autres parties, parce que leur mère a été déclarée forclose
dans les successions directes, tant en bien de droit écrit que
de coutume.
Marie-Anne cinquième enfant , avait épousé Jean Moissat.
Jeanne, sixième enfant, avait épousé Jean Mestre.
Les positions de ces deux sœurs sont identiques ; elles figu
rent dans la cause comme intimées, et sont représentées par
M* D ri von,
Il est toutefois à remarquer que Anne, quatrième enfant de
Marie-Anne femme Moissat, avait épousé Jean-Baptiste Lachenal qui, d’un premier mariage, avait une fille nommée
Jeanne, mariée au sieur Espinassc : elle a é t é appelée en cause
comme héritière de son père, à raison de l’usufruit que celuici avait eu des biens d ’Anne Moissat; elle est représentée
pa rM 0Rougier, cl a dans la contestation un intérêt identique
à celui d e s h é r i t i e r s de M a r i e - A n n e femme Mo iss at, et de
Jeanne femme M e s t r e .
Le septième enfant de l’auteur commun élait Françoise, la
religieuse à Billom. 11 ne sera question d’elle que pour les repri
ses des sommes et pensions qui ont été payées à son couvent.
Le huitième enfant était Marie, décédée sans postérité en
1792. 11 s’agit aussf du partnge de sa succession.
Ainsi la contestation actuelle porte à la fois sur quatre suc
cessions, qui, dans l’ordre dédale des décès, se présentent ainsi :
i 4 Celle d’Antoine Bathol, auteur commun, décédé en 1780;
20 Celle de Jacques, curé de Châlons, décédé en 1785 ;
3° Celle de Marie, décédé en 1792 ;
4 ° Celle de Louis-Nicolas, institué, décédé en 1796.
Les parties entre lesquelles la consteslation s’élève sont d’une
part les représentons d ’Antoine Espinassc a p p e l a n s ; d autre
part les representans de Marie., de M a r i e - A n n e et de Jeanne.
�f8 )
La généalogie de lafamille Bathol étant bien connue, arrivons
à l ’analyse des actes.
Ce fut le 3 février 1755 , qu’eut lieu le mariage d ’Antoine
Batliol et de Marie Bathol, auteurs communs. La mère de la
future lui constitua un trousseau de 5oo livres, il lui fut en outre
constitué 2,000 livres dont 1,800 livres de biens paternels , et
200 livres de biens juaternels.
Les époux se firent un don mutuel de 60 livres au survivant,
et la veuve , en cas de survie , devait en outre recevoir l^o li
vres de pension.
Ces stipulations annoncent assez par elles-mcmes que le
futur époux n’avait qu’ une fortune fort m od iq u e , et qui était
en rapport avec sa position d’aubergiste à Billoin , forlune
q u ’il parvint cependant à accroître successivement par son
t r a v a i l et s o n é c o n o m i e , A u s s i , lorsque le 16 octobre 17 5 8 , il
maria son qualrième enfant Marie Bathol, il lui constitua de
son chef un trousseau de 5 oo livres, plus un lit garni et ar
moire ; pour dot palernelle cl maternelle 2,000 livres, plus
un contrat de rente de 4o livres au capital de 800 livres.
Ce contrat de mariage porte expressément, qu’au moyen de
toutes ces constitutions, la future épouse, autorisée du futur
époux, renonce aux successions de ses père et mère, les suc
cessions collatérales lui demeurant réservées.
Le 19 juin 1767 eut lieu le contrat de mariage du cinquième
enfant, Maric-Anne Bathol, avec Jean Moissat. Cet acte n ’est
pas produit par les adversaires, mais les écritures en énoncent
les dispositions dans les termes suivans: Les père et mère de
la future lui constituent un trousseau, et des meubles estimés
5oo livres; et en outre, du ch ef paternel, 1,800 livres, cl du
chef maternel 200 livres.
Il paraîtrait que la clause de forclusion ne serait pas aussi
explicite dans cet acte , que dans lé premier, en ce qu’on n’y
trouverait pas la mention formelle de l'assentiment de la fu
�ture et de son époux, et qu’il serait dit seulement qu’au moyen
du paiement de cetle somme , la future sera forclose à tou
jours des successions directes, lus collatérales lui demeurant
réservées.
Les termes du contrat de mariage de Jeanne avec Jean
M e s t r e , que les écritures du procès nous rapportent sous la
date du 7 février 1769, différeraient fort peu du précédent; lîl
constitution serait aussi de 5,000 livres; mais on n’aurait pas
eu le soin d’ énoncer quelle portion de cetle somme serait
prise sur les biens paternels, quelle portion sur les biens ma
ternels. Cependant on conçoit facilement qu’il n’a pas pu entrer
dans l’intention des parties de faire supporter la moitié de cette
do t, c’est-à-dire i , 5oo livres pour un seul enfant, sur huit, par
la succession maternelle , lorsque la mère avait eu une dot
de 2,000 livres seulement, et que la fortune du père avait été
seule augmentée par les acquisitions faites depuis le mariage.
A11 surplus, ce contrat déclare aussi la future forclose des
successions directes à peu près dans les mêmes termes que
le précédent.
Antoine, Bathol auteur commun, décéda le 20 novembre
1780 laissant un testament en date de la veille de son décès.
Par cet acte il donna l’usufruit de tous ses biens, meubles et
immeubles à Marie Bathol sa femme.
Il donna à Jacques Bathol, curé de châlons, à titre d’ins
titution particulière, 3 ,000 livres, payables après le décès de
l’ usufruitière.
Il donna encore à Marie Bathol huitième enfant, non mariée,
à titre d ’institution, 3 ,000 livres, et un trousseau qui doit être
réglé par la mère, l e tout payable au décès de l’ usufruitière o u au
mariage de la légataire ou lorsqu’elle quittera la c o m p a g n i e de
sa mère.
Louis-Nicolas et Antoine, scs deu xfd s, s o n t nommes ses hé
ritiers universels par égalité à la charge des legs-
�(
J
Les deux institués s’occupèrent immédiatement de liquider
la succession de l’auteur commun , et entre autre chose de
payer les sommes qu’ils devaient à leurs frères et sœurs.
On mentionnera particulièrement la quittance du 18 oc
tobre 1782, par laquelle Jean Moissat déclaré avoir reçu des
deux institués lasormnede 1,002 livres, quittance portant décla
ration qu’au moyen de ladite somm e, Jean Moissat reconnaît
que sa femme est bien dotée et appariée ; et promet de ne pas
inquiéter les deux héritiers Nicolas et Antoine.
On doit parler encored’une autrequitlance du 29 mai 1783,
par laquelle Jacques Bathol, curé de Chalons, reconnaît avoir
reçu des deux inslilués une somme de i , 5 go livres.
11 paraîtrait que ce paiement aurait été précédé d ’une sen
tence que les adversaires placent sous la date du 8 mai 1780,
et par laquelle Jacques Bathol aurait, suivant eux, fait ordon
ner le p a r t a g e des biens d’Antoine, auteur commun. Au sur
plus, cetlesenlence n’a jamais reçu d’exécution,et il est évident
que le paiement qui fut effectué quelques jours après eut
lieu à compte sur l’institution de Jacques , dont il entendait
désormais se contenter.
3^a quittance du 18 octobre 1782 démontre également de
la manière la plus positive que la femme Moissat n’entendait
pas revenir contre la forclusion qui résultait de son contrat de
mariage.
Ce fut la succession de Jacques, curé de Chalons, qui donna
lieu aux premières contestations qui sont nées dans la famille.
Le 5 Juin 1786 il fit donation à Marie Bathol femme Moissat
d une somme de 4,000 livres à la charge de payer 1,000livres,
pour Messes, 5oo livres à l ’église de St-Genest, et 4 o livres de
pension à Françoise Bathol sa sœur, religieuse à Billorn.
11 paraît qu’après son décès, qui eut lieu en 1785, scs meubles
furent vendus, et que le prix en fut employé à payer les dettes
de sa succession.
�( Il )
Depuis le décès de l’auteur commun jusqu'en 1786, la mère,
commune usufruitière, cl les deux enfans institués Louis-Nicolas et Antoine Bathol avaient continué à habiter ensemble la
maison paternelle, la petite auberge de Billom, sans faire aucun
partage.
En 1786, Antoine Bathol voulut se séparer de sa mère et
de son frère, et il fut alors procédé entre eux au partage de
la fortune paternelle. On conçoit cependant que la mère, ayant
sur tous les biens un droit d’usufruit qui n’avait d’autre limite
que celle que la loi y portait, et le frère aîné qui restait avec
elle, étant héritier pour moitié, il était de toute impossibilité
q u ’Antoine Bathol pour lui seul pût recevoir en jouissance
immédiate, tant dans les meubles que dans les immeubles, une
portion égale à celle que sa mère et son frère garderaient
ensemble; aussi trouverons-nous au procès la preuve la plus
positive ,.qu’il fut loin de retirer moitié de la succession mobi
lière et immobilière.
Louis-Nicolas et la mère commune continuèrent à tenir en
semble l’auberge de Billom, et se livrèrent en outre au c o m
merce de bois.
Parmi tous les enfans d’Antoine B a t h o l , premier du nom.
Il n ’y avait alors que Jacques qui fut décédé. On a vu q u ’il
avait fait desdispositions au profit de la femme Moissat, dispo
sitions fort peu avantageuses à raison des charges qui lui étaient
imposées.
Ce fut par assignation du 12 décembre 1789, qu’elle de
manda contre tousses cohéritiers le payement des 4,000 livres
à elle données. Dans cet exploit, elle expose que la succession
de Jacques a été partagée en sept portions, une pour la mère
commune, et les autres pour les six frères et sœurs, non com
pris la religieuse, et qu’elle n’a pas prélevé les 4,000 livres aux
quelles elle a droit ; et ce qui est plus extraordinaire, c’est qu’a
près avoir annoncé elle-même q u ’elle avait participée au par-
�tage de la succession de Jacques, elle demande de recomposer
la masse de celte succession, par l ’exécution de la sentence du
8mai 1783, par laquelle Jacques avait fait ordonner le portage
de la succession de l’auteur commun, pour lui en cire attribué
sa part afférente.
Remarquons bien au surplus, que jusqu’alors cette demande,
comme celle de 1783, si elle a existé, n’est faite que du chef
de Jacques, pour qui la forclusion n’était prononcée que dans
le testament de l’auteur com mu n, où on ne pouvait pas
trouver d ’assentiment de sa part , tandis que pour les
femmes Moissat, Mestre et C i q u a r t , la forclusion résultait
de leurs contrats de mariage, où elles étaient certainement
bien parties.
On ne voit pas que cette première demande de la femme
Moissat ait eu de swile.
En 1792 , le déccs de Marie Bathol, célibataire, et huitième
enfant de l ’auteur commun, en ouvrant une nouvelle succes
sion, fit naîire de nouvelles difficultés.
P a r son testament du 25 mars de la même année elle avait
l é g u é 2!>o francs à c h a c u n e de s e s s œ u r s , les f e m m e s M e s l r e
et M o i s s a t , pareille somme a A n t o i n e C i q u a r t son neveu,
i 5 livres de pension à F r a n ç a i s e , son autre sœur religieuse ;
elle avait institué sa mère et ses deux frères Louis-Nicolas et
A n t o i n e pour lui succéder en tousses biens, qui sont, disaitelle, une légitime de 3 ,000 livres ou tous autres.
Ces dispositions, toutes positives qu’elles étaient, n’empêcitèrent pas la femme Moissat d ’élever de nouvelles difficultés
au sujet de celte succession.
Le 19 novembre 1794, elle assigna tous les cohéritiers en
partage.
Elle dit dans cet exploit que Marie Bathol avait été instituée
héritière par Antoine Bathol, l’auteur commun, conjointement
avec scs deux frères.
�Les termes du iesiament de Marie Bathol prouvent qu’elle
était loin d’élever une pareille prétention. Et comment auraitelle pu le laire? Les dispositions de l’auteur commun sont
positives, et lui assignent seulement une légitime de 3 ,ooo
livres.
La veuve Moissat ajoute dans cet exploit, que Marie étant
décédée après le i4 juillet 1789, les dispositions testamentaires
qu’elle a faites sont nulles, que la succession doit dès-lors être
divisée par égalité entre la mère commune et tous ses frères
et sœurs. Elle nomme deux arbitres, et somme les défendeurs
d’ en nommer deux autres.
Les exploits des 8 janvier et 23 mars 1795 , annonçent les
incmes prétentions sur la succession de Marie. Dans ce dernier
la veuve Moissat conclut, en outre, à ce que les défendeurs s o i e n t
tenus de justifier de l’inventaire quia dû être fait après le.décès
de l’auteur commun , sinon à ce qu’ils soient condamnés
à rapporter, suivant estimation par expert, la valeur de la por
t i o n de ce mobilier revenant à la succession de Marie Bathol.
En sorte que celte demande relative à la succession du père ,
n ’est encore formée que du chef de Marie B a t h o l, q u ’on sou
tenait héritière conjointement avec scs frères.
Tels étaient les sujets de contestation déjà soulevés entre
les pnrtiçs , lorsque de nouveaux droits vinrent à échoir par
les décès de la mère commune el du frère aîné, l’un des insti
tués, qui curent lieu dans'la même a nné e, la mère de toutes les
parties étant décédée le i 3 novembre, el Louis-Nicolas le
10 décembre 1796.
On ne voit pas q u ’il ail jamais élé formé de demande rela
tivement à la succession de la mère commune; il serait même
d i f f i c i l e de préciser les droits des parlies dans celte s u c c e s s i o n ,
car on ne trouve pas au dossier les actes qui doivent les éta
blir, et les énonciations des jugemens qui ont élé rendus sont
conlradicloires à cet égard. Il conviendra donc de former îa
�masse de celte succession qui se compose de reprises sur les
biens de l’auteur commun, mais sans s’occuper de la division
entre les enfans.
Relativement à la succession de Louis-Nicolas , qui était dé
cédé sans postérité, ce fut aussi la veuve Moissat qui fil les pre
miers actes de procédure.
Les scellés avaient été apposés, elle en demanda la rémolion,
et assigna le 4 janvier 1797 les cohériliers pour venir assister
à celte rémolion.
Les parlies parvinrent néanmoins à s’entendre au moins en
ce qui concerne la succession immobilière de Louis-Nicolas.
Par un compromis du 21 nivose an Y , où figurent Antoine
Bathol, Jeanne Bafhol femme Mestre, Marie-Anne B a t h o l ,
veuve Moissat et Antoine Ciquart, fils et hériter de Marie
Bathol, les sieurs Galtier et Croizier furent nommés arbitres,
pour procéder au partage des biens de Louis-Nicolas , et statuer
sur toutes les difficultés qui pourraient s’élever au dit partage.
Dès le 22 janvier 1797, les arbitres procèdent à l’opération
qui leur avait été confiée, ils visitent les immeubles, forment
la masse en 58 articles , mais sans faire connaître le montant
d e l e u r e s t i m a l i o n , f o n t le p a r t a g e e n q u a t r e lots, et il est en
suite procédé au tirage au sort par suite duquel chacun des
coparlageans est enlré en possession.
Les coparlageans à la fin de cet acte se réservent leurs droits,
dans les autres successions; mais il est de toute évidence que
cette réserve dans leur pensée ne pouvait s’appliquer qu’aux
deux successions collatérales de Jacques, curé de Clialons, et
de Marie, célibataire, pour lesquelles des difficultés elaient
déjà nées , et non à celle de l’auteur commun , sur laquelle il
n’avait jusqu’alors été élevé aucune prétention autre que
celle du paiement des légitimes fixées. S ’il e n e û t été autre
ment, comment concevoir qu’on eût fait le partage de la suc
cession de Louis-Nicolas, l’un des institués, dont la masse
�( j5)
(■prouverait nécessairement des rotranchemens, si les for
clusions stipulées contre.les légitirnaires ne devaient pas pro
duire tout leur effet.
#
Le 22 pluviôse an V, il fut procédé à l’inventaire du mobi
lier qui se trouvait dans la maison où Louis-Nicolas Bathol
était décédé. 11 faut remarquer que la mère commune habi
tant avec son fils Louis-Nicolas, cet inventaire comprit aussi
les effets mobiliers à son usage , ou qui étaient en sa pos
session.
Malheureusement cet inventaire ne fut pas fait d ’une manière
complète parce que les Mestre, C iq u a r t , et Antoine Bathol
firent remarquer que d’après les conventions arrêtées , et
contenues au procès-verbal de rémotion des scellés, du i 5 ni
vôse an V ( i ) , il suffisait d’inventorier;
i° Les meubles et effets réclamés par Antoine Bathol, ou au
moins ceux qu’il retirerait.
2° Tous les journaux , contrats de rentes, billets, obligations
et autres titres.
3“ Tous meubles, papiers et autres effets qui se trouveraient
dans l’armoire de la grand’mère commune, cl ceux qui doivent
se trouver dans ladite succession, comme provenant de Marie
Bathol sœur et tante commune , sauf à se partager de suite les
autres effets mobiliers.
D ’après cette proposition qui fut formellement acceptée
par la veuve Moissat, il n’y avait à inventorier que ce qui
n'était pas de la succession de Louis-Nicolas, car ce qui en
dépendait devait être partagé immédiatement.
Il faut r e m a r q u e r qu’Antoine Bathol ne réclamait le prélève
ment de certains objets mobiliers , que par la raison que lors
du partage de 1786 entre son frère et sa mère d ’une part , et
(1) Il n est pas aux pièces.
�(.§ )
lui d’autre p a r t , il n’avait eu sa moitié ni dans les meubles ni
dans les immeubles.
.
La fixationdelav^eur du mobilier d e l ’auteur commun, étant
l ’un des objets en discussion , nous reviendrons sur cet inven
taire pour faire connaître le peu d’importance des objets retirés
par Antoine Bathol et qu’on lui donnait comme complétant sa
moitié.
Comme on parle dans les écritures et dans le jugement
par défaut dontestappel des richesses mobilières de la maison
Bathol, tenant de 1735 à 1780 une auberge dans Billom, nous
verrons aussi par cet inventaire de quoi se composait la garde
ro b e , et les bijoux de la maîtresse de la maison.
Ce fut en cette même année 1797 , que deux des parties
adverses élevèrent pour la première fois la prétention de se
faire relever de la forclusion stipulée dans leurs contrats de
mariage, et de se faire attribuer une légitime de rigueur, dans
les biens de l’auteur commun.
Le 7 mars de cette année 1797 la veuve Moissat, Jeanne
Bathol, et Jean Mestre son m a r i , présentèrent à l’assesseur du
juge d e paix de Billom, une requête qui s’applique à la lois
à la succession de l’auteur commun, à c e l l e de J a c q u e s Bathol,
cu ré de C hâ lon s, à celle de Marie Bathol, célibataire, et même
à celle de Nicolas, mais pour quelques réclamations mobilières
seulement.
Les deux sœurs exposent dans celte requête :
i° Que leur père ayant une fortune considérable, on ne les a
légitimés qu’à 3 , 5oo livres, mais que n’ayant pas renoncé
expressément, elles peuvent réclamer une légitime de rigueur;
20 Que Jacques Bathol, curé , est mort sans avoir fait pro
céder au partage des biens d ’Antoine son père qu’il a v a i t
fait ordonner par sentence du 8 mai 1783 ; que par son
testament il a légué 4,000 livres à la veuve Moissat ; q u ’elles
réclament en conséquence la formation de la légitime de
�Jacques dans les biens de l ’auteur commun, avec restitution
de j o u i s s a n c e s depuis l e de'cès , pour être partagés après prélè
v e m e n t des 4 ,ooc l i v r e s dues à la v e u v e Moissat ;
3 ° Que défunte Marie Bathol avait droit à une légitime dans
les biens d’Antoine , père commun , et à une part égale dans
ceux de Jacques,
Q u ’elles demandent que sa succession soit composée sur ces
bases, et divisée par égalité, sans égard pour son testament
•«jui est frappé de nullité par suite de l’état de démence de la
testatrice.
(Il est à remarquer que dans la demande formée par la veuve
Moissat, le 19 novembre 1794»e* qui a uniquement pourobjet la
succession de Marie, cet état prétendu de démence n’élait nul
lement allégué.)
4° Enfin les deux sœurs ajoutent qu’après Je décès de LouisNicolas , la presque universalité de ses biens a été partagée,
mais que dans ce partage, elles se sont fait toutes réserves, et
qu’Antoine s’est retenu certains objets mobiliers, comme
n ’ayant pas reçu toute sa portion de mobilier lors du partage
fait entre les deux frères et la mère; que celle prétention n’est
pas justifiée par titre, et que par conséquent il y a lieu au par
tage de ce mobilier, ainsi que de l’armoire principale qui se
trouye dans le salon d elà dame Mestre.
Tels sont les chefs de demande sur lesquels la veuve Moissat
et ladite Mestre appellent leurs frère et sœur et neveu en con
ciliation devant le juge de paix.
Antoine Bathol répond que ses sœurs ne peuvent revenir
contre la renonciation stipulée dans leurs contrats de m a r i a g e .
Que Jacques avait été rempli de sa légitime par les sommes
qu’il avait reçues avant sa mort , et par celles qui o n t été
payées après son décès, du consentement des deux sœurs, que
s il était encore dû quelque chose , il offre d ’en payer la
moitié;
�( ’ «)
Qu'en ce qui concerne la succession de Marie Bathol, son
testament règle les droits de chacun des héritiers , q u ’il est de
toute fausseté qu’elle lut en état de démence ;
Q u ’à l’égard du mobilier par lui prélevé, lors du partage de
la succession de Louis-Nicolas, au lieu de devoir le rappor
ter, il doit reprendre celui qu’il n’a pas reçu et dont il donne
le détail.
Enfin il présente lui-mèinc différens chefs de réclamation
sur lesquels il somme les parties adverses de s’expliquer devant
le juge de paix.
Les parties n’ayant pu se c o n ci lie r, les femmes Moissat et
Mestre firent assigner Antoine Bathol leur frère* et Antoine
Ciquart leur neveu , par exploit du 5 août 1797, dans lequel
elles reproduisent les mêmes prétentions.
Il est à remarquer q u e , dans cette assignation, elles disent
p o s i t i v e m e n t , en ce qui concerne la succession de Jacques Ba
thol, curé,qu’elledoit se composer du quart dans les trois quarts,
mais seulement des biens de coutume de l’auteur commun ,
ce qui ne les empêche pas aujourd’hui d*élcver des préten
tions plus étendues , et de prétendre que le jugement rendu
sur celte demande, leur a accordé plus qu’elles ne demandaient.
Lors du partage de la succession de Louis-Nicolas les con
trats de rentes, obligations et billets étaient restés i n d i v i s a i r e
les parties; le sieur Ciquart,. notaire, et l ’un des coparlageans,
avait été chargé du recouvrement des obligations et billets, le
sieur Flaget, notaire, avait été constitué dépositaire desconlrats
de rente.
Le 17 juillet i 8o 3 l e s e n f a n s M es tr e , se disant donataires de
leur mère, firent citer leurs cohéritiers en conciliation sur la
demande en partage q u ’ils entendaient former contre eux
tous, pour les contrats de rente de la succession de Louis-Ni
colas, et contre le sieur Ciquart sur la demande en compte
des obligations et billets dépendant de la même succession.
�Ainsi, pendant que les parties étaient en instance sur une
demande générale de liquidation de tous leurs droits dans
toutes les sucessions ouvertes, un nouveau procès était entamé
par l’une d ’elles, relativement à une portion distincte de l’une
de ces successions.
Il y eut conciliation sur cette dernière demande ; par le
procès-verbal du 4 thermidor an XI le sieur F l a g e t , notaire,
fut nommé pour procéder au partage , et Ciquart offrit de
rendre le compte demandé.
Cependant la demande introduite par l’exploit du 5 août 1798
avait été suivie d’un jugement par défaut; Antoine Bathol y
ayant formé opposition , ce ne fut que le 20 pluviôse an XIII
( 9 février i 8o 5 ) , q u ’il fut statué contradictoirement: il est
essentiel de faire connaître ce jugement:
Les fins de non-recevoir proposées contre l ’opposition sont
rejetées.
Il est donné défaut contre Ciquart, le jugement est déclaré
commun avec lui.
En ce qui c o n c e r n e la d e m a n d e de l é g i t i m e de r i g u e u r des
femmes Moissat et Mcstre, il est d i t , qu’à la différence de la
femme Ciquart, elles n’ont fait aucune renonciation aux suc
cessions directes ou collatérales; que l e u r s c o n t r a t s d e m a r i a g e
font bien connaître les intentions de leur père et mère, mais
n o n les leurs ; qu’ il f a u t que les r e n o n c i a t i o n s soient expresses ;
que les actes postérieurs qui sont invoqués sont également insufïîsans ; mais que la succession de l’auteur commun, se com
posant à la fois de biens de coutume , et de biens de droit
écrit, l a forclusion résulte de la coutume à l’égard des pre
miers.
Relativement à la succession de Jacques, le j u g e m e n t dé
clare q u ’ ïl n’a pas accepté la forclusion contenue dans le tes
tament de l’auteur commun.
A l’égard de la succession de Marie, le jugement rejette la
3.
�preuve de démence offerte , et dit que son testament doit être
exécuté.
Enfin , pour le mobilier de Louis-Nicolas , il est dit que
lieu ne constate le partage de ce mobilier , quoiqu’on ait vu
que ce fait était reconnu dans l ’exploit même de demande.
Telles furent les bases de décision admises par le tribunal :
elles seraient assurément de nature à être fortement critiquées;
mais il y a plus , c’est que par suite d ’une inadvertance et de
l’omission de quelques mots, le dispositif n’en aurait même pas
fait une exacte application , si ces mots omis ne pouvaient pas
être suppléas ainsi que que le prétendent les parties adverses.
Ce dispositif ordonne partage des biens > meubles et im
meubles de l’auteur commun , pour en être délaissé un qua
torzième à chacune des femmes Moissat et Mestre, dans les
biens de droit écrit seulement, auquel partage toutes les
parties feront les rapports de droits.
Ordonne partage de la succession de Jacques, qui se com
posera, est-il dit, de sa légitime de droit dans les biens de droit
écrit de l’auteur commun , de six ving-huitièmes , ou trois
quatorzièmes des biens de coutume provenant de la même
succession, tant de son chef que par suite de la forclusion
coutumière prononcée contre les femmes Mestre , Moissat et
Ciquart ; dit cependant que sur la masse ainsi compose'e, il
sera fait déduction du tiers de la portion de dot constituée
aux femmes Moissat, Mestre et Ciquart, et imputable sur les
biens de coutume ensemble des intérêts de ce tiers.
O r d o n n e , qu’avant partage de la succession de Jacques ;
la veuve Moissat prélèvera les 4>ooo francs à elle donnés, et
dit que le surplus sera partagé en six portions, dont quatre
pour les quatre parties en cause , et deux pour chacune des
successions de Marie décédée en 1792, et de Louis-Nicolas
mort en l ’an V.
Ordonne sur le sixième revenant à la succession de Marie
�Bathol*, q u ’ A n t o i n e Bathol en prendra les deux tiers” " soit
comme héritier testamentaire de ladite M a r i e , soit cérame
héritier de Marie Bathol, laquelle était liérilicre pour un tiers
de ladite Marie sa mère ( il faut sans doute lire sa filld, car
la mère commune , n’est décédée qu’après Marie sa fille ) ;
que l’autre tiers sera attribué à la succession de Louis-Ni
colas , pour être partagé en quatre portions avec le sixième de
son chef.
Dit que le mobilier, effets, billets, contrats de rente, de la suc-*
cession de Louis-Nicolas Bat hol , 'seront partagés par quart
entre les parties ; à cet effet ordonne rapport par Antoine
Bathol Espinasse et Ciquart du mobilier, effets, contrats etc.,
suivant leurs déclarations, sauf tous légitimes contredits.
Ordonne exécution du testament de Marie Bathol'; à cet
effet condamne Antoine Bathol, à payer aux femmes Moissat
et Mestre les deux tiers des legs à elles faits.
Dit que les parties conviendront d ’experts, que sinon il en
sera nommé.
Antoine Bathol s’empressa d’interjeter appel de cè: juge
ment ; dans ses conclusions il démontrait que la renonciation
de ses sœurs résultait bien formellement de leurs signatures
apposées sur leurs contrats de mariage qui en contenaient la
clause ; il démontrait que les adversaires avaient fixe la com
position delà succession de Jacques pat leür demande, mais
qu ’il n’y avait sans doute dansle disposilifdu jugement qVo ubli
ou omission de quelques mots , qu’ il fallait lire deux tiers de
trois quatorzièmes dans les biens de coutume, tant de son
chef que par droit d ’accroissement du chef dès filles forcloses;
qu ’en effet, puisqu’il y avait trois filles forcloses en biens de
coutume, que les trois miles, aux termes de la coutume, pro
fitaient également de la forclusion , Jacques ne pouvait avoir
qu un quatorzième du chef de scs sœurs , et un de son chef ;
ce qui faisait deux , et non pas trois.
�Il lui était facile de prouver, pour le mobilier de Jacques,
qu’il avait été partagé, et pour celui de l’auteur commun, que
les adversaires en avaient pris plus de la moitié dans la succes
sion de Louis-Nicolas ; que c ’était ainsi à tort , et contraire
ment aux termes de la demande, q u ’on l ’avait assujetti à en
faire le ra p p or t, qu’il en était de même pour les contrats de
rentes, obligations et billets qui avaient été remis soit au sieur
Flaget, notaire, soit à Ciquart l’un des héritiers.
Malheureusement l ’acte d ’appel était irrégulier, faute de
signification au véritable domicile des intimés, et l’arrêt qui
est du 5 mai 1806, en déclarant l’appel d’Antoine-non recevab le , s e b o r n e à lui donner acte de la déclaration des adversaires,
portant reconnaissance que la moitié du mobilier de l’auleur
commun avait été partagée dans la succession de Louis-Nicolas,
et que celui de Jacques, curé de Châlons, avait été vendu
pour p a y e r les dettes, aveux bien peu méritoires de la part des
adversaires puisqu’il existait des preuves positives de ces faits.
C ’est en exécution de ce jugement devenu ainsi définitif, par
une fin de non-recevoir d ’appel que les experts nommés p ro
cédèrent aux opérations ordonnées , par un rapport du
16 août 1808, qui e s t loin d’être complet, à raison de difficultés
qui se sont présentées.
Ils estiment les immeubles composant la succession d An
toine Bothol, auteur commun. Savoir:
Droit écrit:
Commune de Biltom.
.
Coutume :
j
.
.
. * 3 i articles.
GG,a3o f r . ci.
1,8,935 \
Com m une de Monlmorin el Glaive 21 articles.
Com mune de C M . ....................... 28 art.
Compjune du L aroux.......................i 3 art.
66 ,a 3o fr.
4 û . i 5o j
32,285 j
93, 37o
—
To ta l .
.
i5(),6oofr.
�Ils déclarent qu’ ils ont fait cette estimation en tenant compte
seulement des impositions, et comme si les héritages étaient
dégagés de toutes redevances censuelles ou foncières ; qu’il
paraît cependant résulter de l’état remis par Antoine Bathol ,
qu ’à l’époque du décès de l’auteur commun, il existait des re
devances censuelles et foncières considérables , dont ils n ’ont
pu fixer le montant, parce que le chargé de procuration des
demandeurs n’a voulu faireaucune réponse relativement à cette
réclamation quelqu’inslances qu’on ait pu lui faire.
/
Ils disent que la succession de l ’auteur commun doit se
composer aussi de la moitié du mobilier à rapporter par A n
toine qui n’a pu produire aucun inventaire ;
Q u ’elle se compose encore des contrats de rentes ; mais que
comme les représentons des femmes Moissat et Mestre n’ont
droit qu’à un quatorzième dans les biens de droit écrit seu
lement , il faudrait avoir tous les contrats de r e n t e , pour dis
tinguer celles qui sont assises sur des héritages de droit écrit,
celles qui portent sur des héritages de coutume, et celles enfin,
qui étant seulement constituées suivent la loi du domicile,
qui est Billom; qu’on n’a pas fourni tous les contrais de rente;
q u ’Antoine a seulement présenté le registre de l’auteur com
mun ; qui ne contient pas des indications insuffisantes.
Il faut remarquer qu’Antoine Bathol ne pouvait rien pro
duire de plus , puisque comme on le sait, tous les titres des
contrais de rente avaient été confiés, soit à Ci qu ar t, soit au no
taire Flaget.
Us ajoutent que les mêmes raisons les ont empêché de
pouvoir composer la succession de Jacques; qu’outre ces pre
mières difficultés, ils s’en élève encore d ’autres relaliyement à
cette succession.
Que le jugement dit que celte succession se c o m p o s e r a
entre autres choses des jouissances dues depuis le décès d A n
to in e , auteur co mm un, mais qu’il ne condamne pas exprès«
�sèment Antoine au rapport de ces jouissances ; que celui-ci
prétend d’abord, que ce« jouissances ne sont dues que depuis
le décès de la mère commune qui avait l’usufruit; et qu’ensuite
Louis-Nicolas, son frère, ayant perçu partie de ces jouissances,
il ne peut être tenu de faire, le rapport de ce dont il n’a nul
lement profité ; q u ’il ajoute enfin que les propriétés étaient
grévéesde beaucoup de redevances censuelles et rentes consi
dérables qui diminuaient beaucoup ces jouissances surtout
jusqu’à la date de la suppression des cens.
Les experts déclarent qu’il faut que toutes ces questions
soient décidées, pour qu’ils puissent terminer l’opération à
eux confiée, et ils renvoient en conséquence les parties devant
le tr ibunal, pour faire statuer sur les difficultés qui se sont
élevées.
E n cet état, et trois ans seulement après, les Mestre et
Moissat, par une requête du 9 novembre 1811 demandèrent
l’homologation du rapport, en ce qui concerne l’évaluation
des immeubles, et l’annulation pour le surplus.
Ils conclurent à ce qu’il fût nommé un notaire , pour pro
céder aux comptes des jouissances dues par Antoine, au par
tage des contrais de rentes et arrérages, et à toute la liqui
dation.
Après la signification de cet acte, plus de trois années s’écou
lèrent encore sans poursuites , et elles ne furent reprises que
par une requête du 6 décembre 181 4 » dans laquelle les Mois
sat et Mestre réfractent les conclusions par eux prises le 9 no
vembre 1811 tendantes à l’homologation du rapport, en ce qui
concerne l’évaluation des immeubles; disent que ce rapport
est nul , pour ne pas comprendre toutes les opérations or
données ; demandent nomination de nouveaux experts , et
d ’un notaire pour procéder au partage et liquidation , et con
cluent en outre à ce qu'il leur Soit accordé une provision
«le 6,000 francs.
i \
r *> *
�C ’est sur ces conclusions qu’intervint, le 2 juin i 8 i 5 , un
jugement du tribunal civil de Clermont-Ferrand, qui, attendu
l'insuffisance de l'instruction, ordonne que les parties se reti
reront devant M* Laroche, notaire à Billom, pour s’expliquer
sur tous les points des difficultés élevées devant les experts ,
et sur lesquels ils ont manqué de renseignemens pour terminer
leurs opérations ; dit que le procès-verbal sera remis entre les
mains des experts pour terminer le partage, ou q u ’en cas de
contestation sur ledit procès-verbal, les parties en reviendront
à l’audience pour être statué ce que de droit.
L ’exécution de ce jugement fut suspendue par une tenta
tive d’arangement qui, malheureusement pour toutes les parties,
n ’eut aucun résultat; mais les faits que nous aurons à faire
connaître en parlant du procès-verbal rédigé par le notaire
commis, démontreront assez, qu’au milieu de ce dédale de dif
ficultés, ce n’était pas Antoine Bathol ou ses représentans
qui reculaient devant la manifestation complète de la vérité.
Ce ne f u t que le 16 février 1821 que les parties se présen
t è r e n t d e v a n t le n o t a i r e L a r o c h e ; mais c e n ’ctait plus c e l l e s e n t r e
lesquelles l’instance avait été liée ; car des procès de cette na
ture, sont du nombre de ceux qui se lèguent trop souvent de
génération en génération.
Les parties qui comparurent devant le notaire sont donc les
représentans d’Anne Bathol femme Moissat, les représentans
de Jeanne Bathol femme Mestre, Antoine Ciquart, repré
sentant de Marie Bathol, et enfin les représentans d ’ Antoine
Bathol, deuxième du nom, et parmi ces derniers le sieur LouisNicolas Bathol, qui était le principal intéressé dans la contes
tation, qui était défendeur, et qui cependant fit seul des e f f o r t s
p o u r fournir à la justice les renseignemens demandés. Il est
nécessaire d ’analyser ce procès-verbal, en distinguant, pour
é v i t e r t o u t e c o n f u s i o n , c h a c u n des chefs sur l e s q u e l s des
explications devaient être fournies:
�.Mobilier de la
succession d’An
toine ,
auteur
commun.
Louis-Nicolas Bathol et les autres cohéritiers d’Antoine, deu
xième du nom, déclarent q u ’au commencement de 1786, leur
père fut obligé de quitter la maison paternelle qui resta au
pouvoir de Louis-Nicolas et de Marie, mère commune, usu
fruitière.
Ils donnent le détail en trente-huit articles des objets mobi
liers q u ’il emporta, offrent de les rapporter en nature pour
ceux qui existent, en argent pour les autres.'
Ils déclarent qu’ils sont prêts à affirmer, ainsi qu’ils le
peuvent d’après les notes de leur p è r e , que ce dernier n ’a
pas reçu autre chose, que le surplus est resté entre les mains
de la mère commune et de Louis-Nicolas Batliol , et a été
partagé après le décès dudit Louis-Nicolas.
Louis-Nicolas Batliol ajoute que, lors du partage qui f u t fait
entre son père et son oncle, par l’entremise du s i e u r Meslre,
père de l’un des demandeurs, Antoine voulait avoir une dé
claration de certains effets mobiliers, qui n’avaient pas figuré
au partage , ce qui est établi par un mémoire trouvé dans les
papiers de Louis-Nicolas, et qui était une réponse à la demande
de son frère.
11 dit enfin , que des titres de créance o n t été rémis, il est
vrai, à son père lors de la séparation'de 1786, mais qu’à raison
de l’insolyabilité des débiteurs il n’a pu en faire le recouvre
ment ; il représente ces titres à scs cohéritiers.
Les représentans Moissat et Mestre , au lieu de fournir par
eux-mêmes et de bonne foi tous les renseignemens qui étaient
à leur connaissance, avaient donné pouvoir à un sieur Vauris,
de parler en leur nom.
Le sieur Vauris répond donc que la déclaration du sieur Bathol
ne comprend qu’une faible partie du mobilier de l’auteur
c o m m u n ; que la maison Bathol était fort ancienne, la meil
leure auberge de Billorn; que l’auteur commun faisait le com
merce de bois, q u ’il était fermier de plusieurs directes, q u ’il
�(*;)
a v a i t u n e f o r t u n e c o n s i d é r a b l e , et q u ’i l p o r t e m o d e s l e m c n t
à 200, 000 f r a n c s .
Le
s i e u r B a l l i o l r é p l i q u é q u ’ o n sait b i e n q u e la m è r e c o m
m u n e , u s u f r u i t i è r e g é n é r a l e , n e l u i a d o n n é q u e c e q u ’ elle a
v o u l u d u m o b i l i e r , e t q u ’ il e s t p l u s q u ’ e x t r a o r d i n a i r e d e l u i
d e m a n d e r r a p p o r t d e la t o t a l i t é l o r s q u ’ il y a e n p a r t a g e ;
Que dans lesdeux mois d ’intervalle enlreledécès delà mère
et de Louis-Nicolas il n’y a pas eu de partage, à raison de
l’agonie de Louis-Nicolas, mort phthisique, mais qu’après tous
les héritiers ont partage.
Pour connaîlre la valeur du mobilier de l ’auteur commun ,
il fait à ses adversaires une proposition d ’une exécution facile, et
qui répandrait la plus grande lumière sur celte partie des dif
ficultés qui les divisent : donnez, leur dit-il, u n état du mobilier
que vous avez reçu dans le partage qui a eu lieu après le décès
de Louis-Nicolas, j’en ferai autant, et de ces états réunis à
celui que je viens de fournir, résultera la consistance du mo
bilier de l ’a u f e u r c o m m u n .
11 d i t , q u a n t a u x b e s t i a u x e t i n s t r u m e n s a r a t o i r e s , q u ’ il n ’a
t r o u v é a u c u n e n o t e d e s o n p è r e ; q u ’ il p e n s e n é a n m o i n s q u ’ i ls
é t a i e n t c o m p r i s d a n s le d é l a i s s e m e n t fait
à s o n o n c l e et à s o n
p è r e p a r la m è r e c o m m u n e ; q u e l e s a n c i e n s c h e p t e l s p o u r r o n t
s a n s d o u t e e n f a i r e c o n n a î t r e la v a l e u r .
Il ajoute qu’on a fait erreur lorsqu’on a dit que l’auteur
commun laisait le commerce de bois ; que ce commerce n’a
été entrepris que par Louis-Nicolas, et par la mère commune;
qu ’enfin, lorsqu’on parle du mobilier d’une auberge, il ne faut
pas perdre de vue qu’il s’agit d’une auberge d eB i ll o m e te n 1780;
que le mobilier d ’une semblable maison peut ctre de q u e l q u e
volume, mais q u ’il est aussi de peu de valeur.
L e s i e u r V a u r i s p e r s i s t e d a n s ses d i r e s , et p o u r é l u d e r la
p r o p o s i t i o n d e f o u r n i r d e s états g é n é r a u x d e t o u t ce m o b i l i e r ,
il r é p o n d q u e ses c o m m e t t a n s n ’o n t p a s d e c o m p t e a r e n d r e ;
�que les comptes sont à la charge de ceux-là seuls qui ont eu une
gestion, tel que le sieur Ciquart qui a été chargé de recouvremens considérables.
Autant valait répondre, que quoiqu’on eût été renvoyé de
vant notaire, pour fournir les renseignemens qui manquaient
à la justice, on n ’en voulait donner aucun.
Louis-Nicolas donne ensuite le détail des créances actives
Créances acti
ves.
remises à son père, et qui n’ont pu être recouvrées.
Il y en a qu;.ranlc-!rois.
Il en présente les titres, il met aussi sous leS yeux des par
ties adverses les livres journaux tenus par l’auteur commun,
et d es pièces de procédure contre différons débiteurs; maison
déclare ne pas juger utile de s’en occuper.
11 dit, quant aux rentes actives, q u ’elles ont été perçues par la
Renies actives.
mère commune et par Louis-Nicolas son o n c l e jusqu’à son
décès. — Q u ’ i m m é d i a t e m e n t après les titres ont été déposés
par les parties adverses entre les mains de F l a g e t , notaire ,
pour en faire le recouvrement.
11 se réserve de faire déclarer que les renies sont toutes mo
bilières, et dès-lors soumises à la loi du domicile de l’auteur
commun.
Mais, pour faciliter le travail des experts, il donne le détail de
toutes ces rentes qu’il s’est procuré en l’étude de Flaget, notaire.
11 y en a quatre-vingt-six.
11 indique pour chacune les titres, la situation, la quotité,
les rembourseuiens, leurdate, le inodede paiement, argent ou
assignats.
Louis-Nicolas ïï ath ol, fait aussi remarquer que les rede
Redevances pas
vances censuclles et autres, dont les biens de l ’auteur commun
sives.
étaient grevés, doivent être prélevées, ainsi que les dettes de
toute nature, avec les intérêts au profit de ceux qui les avaient
acquittés.
I
donne le détail en seize articles de toutes ces redevances
dont plusieurs étaient considérables,
�( a9 )
Ici le sieur Vauris ne peut cependant faire autrement que de
donnerunconsentement.il reconnaît que sur les jouissances il
doit être fait déduction des redevances. Il eut été difficile de le
nier; mais remarquons en passant que ces redevances censue Iles ou autres, à l’époque 011 elles existaient, et spécialement
au moment du décès d e l ’auteurcommun, avaient encore pour
effet de diminuer la valeur de ses biens, et que cependant
les experts n’en ont tenu aucun compte, et qu’ils ont en outre
estimé valeur de 1808 , et non valeur de 1780.
Le sieur Louis-Nicolas fournit ensuite l’état des dettes de
la succession qui ont été payées par son père et par son oncle.
Cet état est de tren te-u n articles, s’élevant ensemble à
10,488 fr. 5o centimes.
Rentes passives
A r r i v e à la s u ite l ’ état d e s r e n t e s p a s s i v e s r e m b o u r s é e s ,
remboursées.
„
.
. . .
t 1
o-> ^
formant un total en capital seulement de 10,90.} tr. 27 cent.
Omission
de
Le sieur Louis-Nicolas Batliol croit aussi ( quoique ses adneux mots dans
.
,, .
. .
. r .
. .
le jugement de v e r s a i r e s l a i e n t r e c o n n u ) d e v o i r t a i r e i c i m e n t i o n a u n e o m i s l an XIII.
s i o n q u i s ’ e s t g l i s s é e d a n s l e j u g e m e n t d e l ’ a n XIII.
D a n s le j u g e m e n t d u 20 p l u v i ô s e a n X I I I , q u ’ il s ’a g it d ’ e x é
c u t e r , il e x i s t e , d i t - i l , u n e o m i s s i o n d e d e u x m o t s q u i r e n d la
d i s p o s i t i o n t o u t à fai t i n c o h é r e n t e ,
les a d v e r s a ir e s
l ’ont r e
c o n n u ; m a i s il a c r u d e v o i r la s i g n a l e r e n c o r e d a n s l e p r o c c s v e r b a l , p o u r q u ’a u c u n e difficu lté n ’a rrêtât les e x p e r t s .
L ’auteur commun laissa sept en fans , trois mâles et quatre
filles ; trois des filles furent déclarées forcloses, la quatrième
est morte célibataire.
La légitime des filles forcloses était d ’un quatorzième, la for
clusion profitant également aux trois maies , 1 a m e n d e m e n t
de Jacques doit être réglé ainsi qu’il suit :
^ n quatorzième de son c h e f dans les biens de c o u t u m e , un
tiers de trois quatorzièmes des mêmes biens du chef des filles
forcloses.
Mais les mots un tiers d ’un quatorzième, ayant clé omis , on
�lui attribue trois quatorzièmes tant de son chef, que du chef
des filles forcloses, tandis qu’il faut dire pour le tout deux tiers
de trois quatorzièmes ou deux quatorzièmes, il y a ne'cessilé
de réparer cette erreur, qui causerait aux successions des deux
frères un préjudice énorme en capital et en jouissances;
mais le tribunal a bien fait connaître son intention, en ne fai
sant rapporter par la succession de Jacques que le tiers des
dots des trois sœurs , tandis qu’il les lui eût évidemment fait
rapporter en entier, si seul il eût profité du bénéfice de la for
clusion.
Il ne s’agit pas, dit-il encore , de changer le jugement, mais
seulement de signaler une omission qui ne doit provenir que
du greffe.
Erreur des expertsdansle clîis
sement do deux
héritages.
Héritages dont
ri ne un des deux
frères a joui.
Le sieur Yauris se borne à répondre, qu’il déclare protester
contre toute rectification de jugement et arrêt, et s’en rapporter
au s u r p l u s à la justice, sur les articles du compte présenté.
L e sieur Louis-Nicolas Bathol, reprenant ses dires, déclare
que , les experts ont fait erreur , en classant deux immeubles
qu’il indique parmi les héritages situés en pays de coutume ,
qu’ils s o n t l ’ u n e t l’autre d e d r o i t écrit.
On voit que jusqu’à présentles dires de Louis-Nicoles Bathol
n’avaient été suivis que de réponses vagues et évasives. Ce
pendant le procès-verbal du notaire , constate que sur un
fait, au moins , les parties parvinrent 5 s’accorder; il y e s t
énonce que les parties ont reconnu que chacun des deux
freres a joui des héritages dépendans de la succession de
1 auteur commun , dont l e p r o c è s - v e r b a l donne l e détail e n fai
sant figurer à coté le montant de l’estimation des experts de 1808.
De ce tableau il résulte que les héritages dont Louis-ISicolas, premier du nom, a joui par suite du partage de 1786,
seraient, d ’après le rapport des experts d ’une valeur, savoir:
•
Biens de droil écrit..............................4 2 , 1 1 0 )
>
Biens de coutume.................................. 49>305
i
r<
�Que les héritages, dont Antoine, deuxième du n o m ,
a joui par suite du môme partage , seraient d’ uno
v a l e u r , savoir:
Droit écrit......................................... 28,020 ) ro
n
.
rr
- \ 68,120«
C o u t u m e ........................................ 39,20a ;
D’ où il résulte, que lors de la séparation qui a eu
lieu en 1786, les héritages, gardés par Louis Nicolas
et sa m ère, avaient sur ceux délaissés à Antoine un
excédant de valeur de...........................................................23, 5ao
■
Observation de
^iquartsurlaréparation d omission de deux
La séparation des deux frcres étant de 1 7 8 6 , et l'estimation
des experts de 1 8 0 8 , le chiffre de l’excédant de valeur reçue
serait, il est vrai, moins considérable, si on remontait aux va
leurs de la date du partage. Mais la proportion serait la même,
puisque la diiférence s’établirait sur la masse des immeubles
de la succession, et, dès lors, sur la portion de Louis-Nicolas,
comme sur celle d ’Antoine.
On a vu que le sieur Yauris , représentant des Moissat et
Mestre, n’avait en aucune manière voulu convenir q u ’il y avait
.
,
1
J
simple erreur de rédaction ou de copie au greffe dans la
mots dans lo j u- d i s p o s i t i o n d u j u g e m e n t d e l ’a n X I I I , q u i p a r a î t a c c o r d e r à l a
pement de 1 an
•
i T
1
.. , ;
Xlll et sur le succession de Jacque s, la presque totalité du bénéfice de for
estTema ¡¡dé ^
clusion
c^ie^ ^cs trois ^llles 5 lc sieur C iq u a r t, qui ne parlait
pas par un mandataire, mais qui fournissait lui-même les
explications demandées, s’empressa au contraire dereconnaître
celte erreur ; il dit qu’ il est surpris que ses cohériters soient
encore divisés sur une rectification qui ne lient qu’à une omis
sion de quelques mots ; que l’intention des juges est évidente,
et que quoiqu’il ait. un intérêt semblable à celui des M o i s s a t
et des Mestre, puisqu’il amende un sixième dans la succession
de Jacques,il n’entend nullement contester sur ce point.
il ajoute, qu’en ce qui concerne le compte des c r é a n c e s pres
que toutes irrécouvrables, qui lui ont été confiées, il est prêt
a le rendre ; mais qu’il espère prouver, q u ’indépcndeminentde
sa part dans la succession de Jacques qu’il n ’a pas reçue, sa
�portion des contrats de rentes confiés à Flaget, notaire, excé
dera le rapport des créances dont il est tenu.
Il dit, enfin, que ses cohéritiers ont confié, sans sa participa
tion , à l ’huissier Farge un rôle de contributions foncières sur
lequel il restait dû i , 5oo francs à Louis-Nicolas, ex-percepteur,
et qu’il en réclame sa part.
Tel est ce procès-verbal qui aurait pu avoir les plus heu
reux résultats pour toutes les parties, en abrégeant beaucoup
un procès long et dispendieux, si toutes s’étaient présentées
devant le notaire , comme les héritiers d ’Antoine, avec un vé
ritable désir de s’éclairer mutuellement, et d’arriver à une
manifestation complète de la vérité. Il n’en a pas été ains i, et
d ’après le système des parties adverses , tout serait à r e c o m
mencer aujourd’hui, puisqu’elles viennent encore dire à LouisNicolas Bathol : «Justifiez des paiemens faits par votre auteur,
m o n t r e z - n o u s les titres des rentes, etc.»
Nous aurons souvent dès lors à leur demander : mais qu’êtesvous donc venu faire devant le notaire Laroche ; ces pièces de
compte dont vous parlez, mais nous les avons mises une à une
sous vos yeux en l’étude du notaire; pourquoi n’avez-vous pas
voulu les voir; voulez-vous que ce soit devant la justice que ce
travail se fasse. Mais la justice a déjà décidé que nos comptes
devaient être débattus devant notaire; et si elle nous y ren
voyait encore, quel résultat pouvons-nous espérer si vous ne
voulez rien discuter, rien examiner.
Ce procès-verbal sera cependant d ’une grande utilité au
procès ; lesdires de Louis-Nicolas, appuyés sur des pièces pro
duites devant le notaire, trouveront créance dans l’esprit des
magistrats; car ils ne sont contredits que par desdénégations qui
ne sont appuyées sur rien , ou par les réponses vagues du man
dataire des parties adverses , qui paraîtrait avoir compris que
sa mission, au lieu d ’avoirpour but de simplifier les difficultés
qui divisaient les cohéritiers, consistait à les compliquer ou à
en imaginer de nouvelles.
�Il fallait donc en revenir à l’audience ; mais les demandeurs,
comprenant enfin, qu’après avoir aussi mal exécuté les dispo
tions du jugement du 2 juin 181 5 , ils se présenteraient peu favoblement devant la justice, ne se pressèrent pas.
E n 1824, ils demandèrent par une sommation la co mm uni
cation de plusieurs pièces qui n ’étaient pas au po uv o ir de
Louis-Nicolas Batliol.
Cet acte n ’eut aucune suite, et en i 83 i le 26 mai, à une
époque où Louis-Nicolas Batliol ne s ’occupait plus d ’une af
faire depuis si long temps co mm enc ée , et au sujet de laquelle il
avait donné tous les éclaircissemens demandés, il fut pris
contre lui un jugement par défaut, qui fut rédigé avec le plus
grand soin, et qui accueillit, comme on peut bien le penser,
presque toutes les prétentions des parties adverses, et con
damna en outre les représentans d’Antoine au paiement d ’une
provision de 10,000 francs.
Nous n’entreprendrons pas d ’analyser ici ce jugement ,
dont la lecture a occupé une audience cnlière, lorsque l’affaire
a été portée une première fois devant la Cour.
Ilsera plus convenable de n’en (aire connaître les dispositions
que sur chacun des chefs que nous aurons à examiner , et seu
lement à mesure qu’ils se présenteront dans l ’ o r d r e de la dis
cussion.
Dès que ce jugement fut connu des représentans d’Antoine
Bat lio l, deuxième du nom , ils s’empressèrent d’y former
opposition; mais un premier défaut q u ’ils ignoraient rendait
leur opposition non-recevable ; ils s’en désistèrent pour
interjeter l ’appel sur lequel la Cour est appelée aujourd’hui à
statuer.
Cependant
des
p o u rs u ite s actives
étaient e x e r c é e s , p o u r
p a r v e n i r a u p a i e m e n t d e l à m o d e s t e p r o v i s i o n d e 10, 000 f r a n c s ;
q u e les p a rties a d v e r s e s s ’éta ie n t fait a c c o r d e r ;
en
d é le n s e s fu i p r é s e n t é e , et
le
une
requête
17 j u i n 18^2, il i n t e r v i n t u n
5
�arrêt qui, en ordonnant q u ’au fonds on procéderait en la ma
nière ordinaire , réduisit la provision à 2,000 francs.
Le s i e u r Louis-Nicolas Bathol, et le sieur Dessale , au nom
qu’ il agit, ont par acte du 3 juillet 18 3 3 , dénoncé leur appel
aux représentais Ciquart, en les appelant e u assistance de
cause. Le 4 juillet pareille dénonciation a été faite à Jeanne
Lachenal, et au sieur Espinasse, son mari, en leur qualité d'hé
ritiers du sieur Jean Baptiste Lachenal , usufruitier des biens
d ’Anne Moissat, l’une des filles de Mârie-Anne Bathol.
Les représentons Ciquàrt n’ayant pas constitué d’avoué, il a
été pris contre eux un arrêt de jonction le 28 août 1853 . Ainsi
la procédure se trouve en état entre toutes les parties.
v
DISCUSSION :
Pour mettre de l’ordre dans la discussion que nous devons
abordera présent, il nous paraît indispensable de développer
successivement chacun des griefs de 1 appel interjeté par nos
parties dans l’ordre établi par les conclusions, et en plaçant en
li'te de chaque question l'analyse des motifs et du disposiiifdu
jugement par défaut dont est appel.
PREMIEH CHEF D ’ APPEL.
Questi on.
7)oit-i(é/rc attribué à la succession de Jacques B athol\ dans les
biens de coutume, 3 / f 4 > tant de son chef, que du chef d e s filles for*
closes?
Quels sont les nrnendemens des copfirtageans héritiers , ins~
litnes ou légitimaires dans l e s bien» de droit écrit, et dans les biens
de coutume ?
Jugem ent-
C n l à lort que 1 « héritier» d Antoine B a l b o l , d eu x ièm e du n o n . préten
dent que 1 «m cn druifu t d e Jacquc», dan* le* bien* de l'auteur com m un ,
�no doit pas Aire de six-vingt huitièmes ou trois quatorzièmes , tant do son
ch e f que par suite do son droit d’accroissement.
Antoine Rathol, autour c o m m u n , décédé en 1780 a eu sept enfans habiles
a lui succéder; Louis-Nicolas et Antoine ont été institués héritiers, et Jos
autres réduits à la légitim e do rigueur.
Los biens étaient partie de droit é c r i t , partie de coutum e; relativement A
ceux do la première cla sse, l ’institution , d ’après la novello 18 comprenait
moitié; l ’autre moitié étant a partager entre sept, un quatorzième do la to
talité formo la légitime.
Sur ceux de la deuxième classe l ’avajitago ne pouvait comprendre qu'un
q u a rt, les autres trois quarts étaient à diviser entro tous los cohéritiers.
( Art.
et 49 du titre t a .)
A i n s i , sur les biens do c o u tu m e , l ’ institution conférait aux doux institués
le quart, ou sept vingt-huitièm es; los autres trois quarts ou vingt-un vingthuitièmes i\ partager entro les sept enfans, donnaient trois vingt-huitièmes
pour chacun.
Trois des sept enfans , les femmes Ciquart, Moissat et Mestre, mariées,
père mère vivans , étaient forcloses , d’après l'art. a<» du titro ta do la cou
tu m e. et d'après l’art 3 i du mémo titre, leur portion accroissait aux trois
maies, Louis-Nicolas, Antoine et Jacquc».
Ainsi Jacques amendait dans les bien.« do coutuiuo :
i° De «on chef. ..........................................................
3/a8
«° Par droit d'acroissement du chef des filles for
closes , le tiers de 9/28 o u .............................
3/aS
— 3/i 1
En t o u t ...................................
Mais le jugement du ao pltiviAsean X I I I , no déterm inant q u e vir tu elle
m ent et par in duction, la portion de chacun des enfans d A ntoine Ilathol, il
c o n v i e n t , pour éviter toute difficulté,d e faire, d après les principes c i-d e ss u s
énoncés, une (n ation in dividu elle tant en biens de droit écrit qu’en biens de
coutum e.
i * B iens de d ro it écrit.
Louis-N icolas et Antoine.
• ' U q n n t it é d ii p o ii b l« ......................... « . . .
• • Leur portion héréditaire chacun t / t 4. . . .
3» l.a portion de Marie Rjthol femme Ciquart.
puisque, par 1« jugem ent de pluvièM* «n X III, il a
A R*p>rtrr, . . . .
7P *
•/il
9f(4
�Report.
. . . .
.
9 J*4
été reconnu qu’ elle n’avait droit qu’aux successions
c o l l a t é r a l e s ......................................................................
V «4
Jacques B ath o l, légitime de d r o i t .......................
Marie , décédée sans postérité...................................
io;i4
1/14.
1/14
Femme M o i s s a t .........................................« . .
Femme M e s t r c ..........................................................
1/14
1; 14-
Total é g a l ...................................
i-j?H
♦
2° Biens de coutume.
Louis-Nicolas et Antoine.
i° Le préciput................................................................
7728
20 Chacun 8/28 pour leur portion héréditaire
6/28
.
T o t a l .........................................
Jacques.............................................................................
Femmmc Ciquart..........................................................
Femme M e s t r e .........................................................
13/28
3y28
3;-28
3/28
Femme M o i s s a t ..........................................................
3/28
M arie, décédée sans p o s t é r i t é .............................
3/28
Total é g a l .............................
28/28
MUW
]
»Ul:»]
Les amendemens sont ainsi définitivement fixés.
Discussion.
»
j jGS héritiers d ’ Antoine Batliol, l’un des institués , n’enten
dent nullement revenir ici sur ce que le jugement de l’an XIII
a jugé et voulu juger. Ils savent qu’une irrégularité de leur
acte d’appel n’a pas permis à la Cour d’examiner une question
qui était fort importante pour eux, et qui consistait à savoir si
les femmes Moissat et. Mestre, en s i g n a n t leur contrat de ma
riage , où la clause de forclusion était formellement ex
primée, n’avaient pas, tout ausssi bien que la femme Ciquart,
donné un assentiment positif a celte stipulation comme ;'i
toutes les autres conventions de leurs contrats. Certes, si cette
question n’avait pas été enlevée à la connaissance des magis-
�•trats supérieurs par une fin de non-recevoir, ils espéreraient
qu’il ne leur serait pas difficile de démontrer que les contrais
de mariage seuls, indépendamment des actes d’acquiescement
nombreux qui ont suivi, 'démontrent de la manière la plus
formelle l ’intention de renoncer , intention qui d’ailleurs n’a
rien de suprenant de leur part, si on remonte par la pensée à
l ’époque de leurs contrats de mariage , et si on se fixe en outre
sur la valeur que les biens de l’auteur commun pouvaient avoir
alors. Mais il y a eu chose jugée, il faut bien qu’ils en accep
tent les conséquences, quelque fâcheuses qu’elles soient
pour eux.
Il
n’y a donc rien à mettre en queslion, sur les amendemens
fixés par le jugement dont est appel, e n ce qui concerne les
b i e n s de droit écrit, puisqu’une fois q u ’il est admis que les
femmes Moiss.it ctMestre, ne sont pas renonçantes, il a été fait
une juste application du droit. Le sieur Louis-Nicolas et aulres
héritiers d’ Antoine n’ont jamais au surplus élevé la moindre
difficulté à cet égard , depuis que leur appel du jugement de
l ’an XIII a été repoussé par une fin de non-recevoir.
Mais ils ont toujours souleriu que l’ameridemenè des légilimaires, dans les biens de coutume, était le m ê m e q u e d a n s les
biens de droit é c r i t , et que dès lors Jacques n’amendait dans
ces biens que deux quatorzièmes, et non trois, tant de son chef
que par son droit d’accroissement dans les forclusions , ce qui
n ’était pas nié autrefois par les parties adverses, et ce (pi’Antoine
Ciquart a encore formellement reconnu dans le procès-verbal
Laroche.
Le rédacteur du. jugement par défaut dont est appel a fait
beaucoup dvef(orts pour établir qu’ il revenait trois q u a t o r z i è m e s
a J a c q u e s lîaihol, et, pour ¿¿la, il a voulu prouver que la légi
time dans les biens de c o u t u m e était des trois q ua r ts . S ’il e n
ctàit ainsi, Jacques Bathol devrait en effet r e c e v o i r 3/ 1 4 mais
si elle n’est que de m o i t i é , il ^amendera que 2/ i/f ; onscracertai-
�nement d’acord sur ce point. II faut donc examiner s’il revenait;
comme on le prétend les trois quarts aux légitimaires.
Les premiers juges ont fait une différence, pour la quotité
de la légitime, entre les biens de droit écrit, et ceux de cou
tume. Pour les uns, ils l’ont fixée à moitié, pour les autres, aux
trois quarts. Nous soutenons, nous, que la légitime est la même
sur les biens de coutume que sur ceux de droit écrit; la même
»
*
d a n s n o t r e c o u t u m e d ’ A u v e r g n e q u ’e n d r o i t r o m a i n , l e s a u -
torités’ ne nous manqueront pas.
M. Chabrol, sur l’article 32 du litre 12 (t. 1" p. 482), s’ex
prime ainsi :
« Le droit romain règle la légitime des enfans, différem» ment suivant leur nombre ; s’il y en a quatre et au-dessous,
» ils ont le tiers à partager entre tous , y compris l’héritier
» ou le donataire universel; s’ils sont cinq et au-dessus, la
» légitime est une portion égale dans la m oi ti é, telle est la
» disposition de la novelle 18, de Triente et Sentisse, cha» pitre 3, de l’authentique novissima, Cod. de inoffic., Test.
« Ainsi, lorsqu'il n’y a que deux enfans, le légitimaire a un
» sixième; s’il y en a trois, chacun a un neuvième; entre quatre,
» c’est le douzième ; s’ils sont cinq, la légitime est un dixième
» par têle, et par conséquent la moitié de ce que le légitimaire
» aurait dû avoir ab intestat : au-dessus de ce nombre ; la légitime est toujours la inoilié d’une portion égale.
» La coutume de Paris a réglé la légitime d ’une manière
uniforme; c’est dans tous les cas la moitié de ce que l’enfant
» aurait dû avoir ab intestat. Cette fixation est indépendante
» du nombre des légitimaires ; ainsi , s’il n’y en a qu’un, le
» légitimaire a le quart ; entre trois le sixième; entre quatre
» le huitième et au-dessus de q u a t r e , la légitime se trouve
» conforme au droit romain.
» Malgré toute la déférence qui est due au droit Romain ;
» l’on ne peut se dispenser de reconnaître que la coutume de
�»
»
»
»
»
»
»
»
»
Paris est plus sage : la fixation du droit écrit a quelquefois
l'effet que les légitimâmes ont d’autant plus qu’ils sont en plus
grand nombre, et d’autant moins que leur nombre est moindre ; parexemple, s’il y a cinq enfans, chacun a un dixième et
s’il n’y en a que quatre, ils n’ont plus qu’un douzième, ce
qui est absurde; d’ailleurs la coutume de Paris est plus
équitable, en réglant la légitime à la moitié de ce q u ’on aurait dû avoir ab intestat, et en ne permettant aux pères et
mères de priver leurs enfans que de celte moitié.
» Mais quelque raison qu'il puisse y avoir de préférer la
» fixation de la coutume de Paris à celle du droit c i v i l , nous
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
«
»
»
»
»
»
»
sommes obliges de reconnaître que la règle, et Vusage fix e n t
parm i nous la légitimé comme dans le droit Romain. C'est la
règle parce quele droit romain est notre droit commun. Suivant
l’art. i cr du litre i 3 , notre coutume n’est qu’une exception
à ce droit, et la province est mêlée de droit écrit et de coutume ; nous le suivons pour l’âge auquel on peut tester et
dans plusieurs autres cas omis par la coutume, c’est l’usage
dans tous les partages des successions directes ; les legitimaires ri ont jam ais eu ni prétendu que la quotité’ fixée par
/’authentique, et cet usage n ’a pas de commencement. Masuer
dit : S i quœratur quee est ilia légitima respondeo tjïiod est ilia
quee datur de jure scripto ju x la autht. , novissima , code de
irioff. Test. Basmaison l’a observé de même sur l’article
14 de ce titre, alinéa dernier, et même sur le présent
article alinéa trois; il en est de même de Prohct sur cet
article et sur l’article trente-trois du titre quatorze ; Bessian
le suppose aussi. La coutume de Bourbonnais a fait la même
omission que celle d ’Auvergne; mais Dumoulin, en sa note
sur l’article trois cent dix, explique que la légitime est celle
du droit Romain.
|
On lit dans le discours préliminaire du Traité des donations
de M. Grenier, page i c i et 10 2 ;
�» Les coutumes variaient sur la fixation de la légitime des
» enfans. Les unes avaient une disposition conforme au droit
» romain ; les coutumes de Rlieims et de Melun étaient de ce
» nombre ; d’autres, telle quela coutume de Paris et celle d’Or» léans, l’avaient fixée à la moitié de ce que chacun des enfans
» aurait eu , s’il n’y avait pas eu de disposition, sans avoir
» égard à leur nombre.
» Il y en avait plusieurs qui étaient muettes à ce s u j e t , et
» la jurisprudence s’y était fixée différemment. Dans quelques
» unes, comme celles d'Auvergne, Bourbonnais et Berry, la
» légitime, était fixée suivant la disposition du droit romain ;
» dans d’autres, telles que les coutumes de Tourraine, Anjou ,
» la Rochelle et Troyes, elle l’était conformément à la coutume
» de Paris. »
On peut aussi sur ce point consulter Rousille, de la légitime,
pages 8 et 9.
Ainsi M. Chabrol, tous les auteurs qu’il cite dans le passage
ci-dessus transcrit, M. Grenier, Rousille sont unanimes sur ce
point, qu’en coutume d’Auvergne, on suivait le droit romain,
pour la fixation de la légitime, qui était de moitié lorsqu’il y
a va it c i n q e n f a n s ou p l u s.
Ou est donc la difficulté?
Elle résulte des dispositions de l’article quarante-un du litre
douze de la coutume, reproduites dans l'article quarante-six
du même titre.
L ’article quaranle-un est ainsi conçu :
Et. ne peut aucun, pur testament codicille ni autre disposition
de dernière volonté, disposer de ses Liens ¿1 pies causes, ou autre
ment au préjudice de ihéritier ah intestat, ipie d un quart, chargé
de tous les légats, et de la quarte partie des dettes, et de la quarte
partie des funérailles.
Ainsi, disent les premiers juges, laréserveestdes trois quarts,
donc la légitime est des trois quarts dans les biens de coutume ,
à la différence des biens de droit écrit.
�Oui, la reserve est des trois quarts ; nous ne la contesterons
pas aux parties adverses, mais, pour cela , il y a une option à
faire; caria réserve ne peut cire confondue avec la légitime; on
ne peut à la fois demander la réserve dans les biens de cou
tume, et la légitime dans les biens de droit é cr it, cl c’est pour
cela queM. Chabrol a dit, avec beaucoup d’autres auteurs, dans
le passage ci-dessus transcrit, que la légitime était de moitié
en coutume d’Auvergne comme en droit écrit , parce que,
lorsqu’on demande la légitime de droit, on la prend sur tous les
biens tant de coutume que de droit écrit, tandisque, lorsqu’on
invoque la réserve coulumière qui est des trois quarts, il faut
renoncer complètement aux biens de droit écrit.
Mais écoulons e n c o r e M. Chabrol, qui, sur l’article quaranteun du litre douze, celui qui est invoque par les premiers juges,
pose nettement cette question ( t. 2, p. 28):
TjCs enfa n s qui demandent la réduction au quart} peuvent-ils
prétendrey outre les trois quarts, leur légitime dans les biens de
droit écrit. , ou rCont-ils <jtie l option du retranchement des trois
quarts des biens de coutume, ou de la légitimé tant dans les biens
de coutume que dans ceux de droit écrit. . . . et qui répond :
» La légitime de droit n’a lieu dans les pays coutumicrs/que
» par forme de supplément, en cas d'insuffisance du rétran» cheinent que la loi du pays réserve aux héritiers du san^ ,
» et dont elle ne permet point de disposer à leur préjudice
» par testament. Si donc les enfans se trouvent remplis par les
» réserves coutumières de la légitime que la loi leur assure, ils
» n’ont plus rien à prétendre. Cette légitime ne'leur est due
» qu’à concurrence de ce qui leur manque pour la‘remplir.
” Ils doivent don c, en la demandant, rapporter ce qu’ils ont
» déjà reçu du patrimoine et de la substance du père. Ainsi ils
» rie peuvent avoir à leur choix q u ’une portion égale dans les
» trois quarts des biens de coutume d'Auvergne, ou une légitime
» sur tous les biens, tant de droit écrit que de coutume; ils ne peu-
6
�(40 '
/y
» cent profiler à la fo is du bénéfice de la coutume el de la légitime
» de droit. La coutume n’a pas donné la légitime outre et
» par-dessus le retranchement des troisquarts; c’est ce qui a élé
» jugédanscette couIurne par un arrêt récent du 10 avril 17^7,
» el rendu en la quatrième chambre des enquêtes; il est rap» porté par M. Lépine de Granville , qui en cite un précé» dent de 172J. La même question avait déjà élé jugée confor» m o m e n t, pour celle province, entre madame la présidente
» Amelot el le marquis de Brion son frère, par un arrêt du
» parlement de Grenoble du 16 août 1719, et dans la maison
» de .c ennetaire, par autre arrêt du parlement de Paris du 7 sep» tembre 1724 ; ils sont rapportés par Denisart, et cet auteur
» y ajoute un arrêt du 12 mars 171$, contre le prince de Cari» gnan. On en cite encore un en faveur de M. le prince de
>» Condé; et ilavail élédejà dêcidépar un arrêt du 18 août 1666,
» rapporté au journal des audiences, hors de son rang, que
71 dans la coutume de Sl-Séver, qui donne la légitime aux ascen» dans, ils ne peuvent l’obtenir, qu’à la charge de rapporter les
» meubles et acquêts, que d'autres coutumes leur donnaient;
» c’est aussi le sentiment de Ricard et celui de Lebrun. »
Voilà encore l’autorité de M. Chabrol, el celle d’arrêts nom
breu x, qui nous apprennent que les parties adverses n’au
raient pu prétendre pour Jacques, comme pour elles-mcmes,
à une portion dans les trois quartsdeis biens de coutume, qu’en
renonçant aux biens de droit écrit : elles n’ont eu garde de le
faire pour cllcs-mcmcs ; car, dans les biens de coutume, elles
sonl forclose^, tandis qu’elles ne le sont pas dans les biens de
droit écrjt.
Cependant nous avons vu que les premiers juges ont attri
bué aux parties adverses, personnellement, et à la succession
de Jacques, portion dans la moitié des biens de droit écrit , et
dans les trois quarts de biens de coutume, tandis q u ’il esta
présent évident qu’il ne leur revenait que portion dans moitié
�de tous les biens , indistinctement, ou portion dans les trois
quarts des biens de coutume seulement.
Il
nous reste à démontrer, que de la rectification de cette
erreur de droit évidente, il résulte qu’il ne revient à la succes
sion de Jacques que deux quatorzièmes et non trois quator
z i è m e s , des biens de coutume, différence qui , dans la cause,
acquiert une importance notable, à raison des restitutions de
jouissances.
Nous présentons ici le tableau des amendemens de tous
les cohéritiers dans les biens de coutume, suivant les règles
admises par les premiers juges, et suivant la rectification qui
résulte de ce qui précède.
Amendemens des cohériters dans les biens de coutume.
i° Suivant les premiers juges.
2° Suivant ce qui précède.
i° Louis-Xicolas et Antoine
7/28 .
P r é c i p u t .......................
6/28 .
Portion légitimaire.
3/28 .
2° Jacques........................
3° Femme Ciquart .
3/a8 .
40 Femme Mestre . .
3/28 .
3/28
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
7/ U
7/ 14.
1/14.
1/14.
iji4
»
1/1.4
. 3/28 . . . .
Ainsi les deux institués ont de leur c h e f .
suivant ce qui est établi ci-dessus . . •
Par suite de la forclusion contre les femmes
1/1Æ
5° M arie, célibataire .
.
.
.
0° Femme Moissat .
Moissat, Mestre'et Ciquart chacun 1/14
Jacques de son chef .
.
.
M a r i e , ftllo non mariée
Total égal.......................
971* \
u/14
2/ 1-4 )
i/ni \
1/14 j
2/14
i/ii
1/14
14/14
»
C ’est donc seulement deux quatorzièmes et non trois qui
reviennent à la succession d e Jacques, et un q u a t o r z i è m e au lieu
de trois vingt-huitièmes qui doit être attribué à celle de Marie.
6.
�Ces calculs sonl fondés sur des principes incontestables, et
jusqu’alors incontesJés ; car, comme le dit M. Chabrol , dans
le premier passage que nous venons de citer, les légit'unoires
11'ont'jamais en ni prétendu (¡ne la quotitéfixée par l authentique,
et cet usage n d pas de commencement. Cela est si vrai, que les
parties adverses ont rendu elles-mêmes hommage à ces règles
par leur demande. Q u ’on lise en elfet l’exploit introductif
d ’instance, du 22 thermidor an V, et on y verra que leurs pré
tentions sont d ’avoir part égale dans la succession de Jacques,
q u i se composera, disent-ils, du quart dans les trois quarts des
biens de coutume laissés par l'auteur commun.
Voilà qui était fondé en droit : en ne prétendant rien dans
les biens de droit écrit, la portion de Jacques devait bien en
effet se composer du quart dans les trois quarts des biens de cou
tume , tandis qu’on ne pouvait élever celte prétention, si on
d e m a n d a i t la légitime de rigueur, tant sur les biens de droit
écrit que sur ceux de coutume:-cela est une juste conséquence
des principes énoncés dans le second passage, que nous avons
emprunté au savant commentateur de la coutume.
Mais ici on cherche encore à se couvrir de la protection
d ’ une fin denon-recevoir, c’t'sl le moyen favori des adversaires.
Sur ce point, dil-on, il y a chose définitivement jugée par le
jugement du 20 pluviôse an XIII, par l’arrêt confirmatif du
5 mai 180G, et on a soin d ’ajouter que, quoique cet arrêt ait
repoussé par une fin de non-recevoir l’appel interjeté contre
les femmes Moissat et Mestre, il n’en a pas été ainsi de l’appel
dirigé contre Ciquart, à raison duquel il a été nécessaire d ’exa
miner le fond du droit.
r é pon do ns d’abord à cette dernière observation : On a bien
vu par l’exposé des faits, que l’intérêt principal de l’appel
était de faire réformer le jugement de l’an XIII, à l’égard des
femmes Moissat et Mestre ; car la femme C iq u a r t, à la diffé
rence descssœurs.avaitélé déclarée forclose, tantdans les biens
«
�* N
>
de droit écrit que dans ceux de coutume. Si, relativement à la
succession de Jacques, les représentansCiquarl avaient le même
i n t é r ê t que les Moissat et Mestre, il faut reconnaître que l ’ i r
r é g u l a r i t é de l’appel, relativement aux deux soeurs, faisait aussi
tomber cet appel à l’égard de C iq u a r t , car il s’agissait toujours
uniquement de la composition de la succession de Jacques,
et on ne pouvait pas composer cette succession de deux
manières différentes. Il faut ajouter enfin, que comme l’in
tention des premiers juges , résulte assez évidemment de leur
jugement, l’erreur de rédaction ou de copie, dont on cherche
aujourd’hui à profiter, ne dut pas alors attirer d’une manière
spéciale l’attention des parties. Examinons donc si réelle
ment les premiers juges ont voulu décider la question qui nous
occupe, ainsi que l'entendent les parties adverses.
Et, d’abord, il serait assez difficile de croire qu’on ait voulu
leur accorder Ultra petitai ce qu’on aurait fait évidemment, si,
tandis quelles ne demandaient, comme on vient de le vo ir ,
la portion légilimaire de Jacques que dans les trois quarts des
biens de coutume seulement, et cela conformément aux règles
de droit, on la leur eût accordée, contrairement aux mêmes
règles, à la fois dans les trois quarts des biens de coutume, et
dans la moitié des biens de droit écrit.
On peut donc déjà dire, que par cela seul qu’ il n’y a pas eu
de demande à ce sujet , il n’est pas possible qu ’on puisse avoir
la prétention de se l’être fait accorder.
Si les juges ne peuvent accorder que ce qui est demandé,
ils ne jugent aussi réellement que ce qui est agité ce qui est
mis en question, tantumjudica lu m, quantum litigatum. Et on
voit dans le jugement, que relativement à la succession de Jac
ques, le tribunal se demande seulement, si cette s u c c e s s i o n
doit se composer d'une légitime, de. droit, ou du l egs fait par le
testament d u p o r e , et ne s e donne n u l l e m e n t à examiner la
question relative à la quotité de cette légitime, dans l’une et
l’autre nature de biens.
�Aussi, lorsqu’on lit dans le jugement ces expressions dont
on s’empare : Ordonne partage de la succession de Ja cq u es,
qui se composera i i° etc... i a de six vingt-huitièmes , ou trois
quatorzième des biens de coutume, tant de son c h e f que par
droit d'accroissement, voit-on qu’elles ne s’y trouvent que
d ’une manière énonciative, sans question posée sur ce point,
sans motifs qui s’y appliquent, et qui fassent connaître les bases
sur lesquelles repose cetle répartition. Ce ne sont certaine
ment pas celles que le rédacteur du jugement par défaut
dont est appel a imaginées, car elles consacreraient une erreur
grave de droit.
Que faut-il donc croire ? c’est que les juges n’ont pas mé
connu les principes, mais qu’il ont pu commettre une erreur
de compte dans ces calculs, par quatorzièmes ou par \ ingt-huitièmes, e r r e u r q u i est du nombre de celtes qui peuvent tou
jours etre réparées; ou q u ’il y a eu, comme on le dit dans le
procès-verbal Laroche, omission , oubli de deux mots dans la
rédaction ou dans la copie au greffe.
Les intimés s’opposent à celte rectification , et cependant
Celle e r r e u r , ils l’o n t reconnue eux-niemes aune aulreépoque.
Ce que les représenlans d’ Antoine Balhol o n t dit à cet égard,
dans le procès-verbal Laroche, n ’a pas été contredit ; et 011 voit
même d a n s ce procès-verbal, que Ciquart, l’un d ’eux, persévère
«le bonne foi à déclarer qu’il n’y a eu qu’erreur de calcul ou de
copie; qui doit èlre réparée sans difficulté, d’où la conséquence
que le jugement par défaut, après avoir supposé q u e les juges
de l’an X l l l avaient voulu accorder aux parties adverses plus
qu’elles ne demandaient, et plus qu’il ne leur revenait, per
sévère à vouloir donner à Ciquart spécialement ce dont il ne
veut pas, ainsi qu’il l’avait déclaré d’une manière positive à
une époque recenle.
Ce n’est pas tout, on ne veut pas laisser rectifier dans le ju
gement de l ’an X l l l ce qui n’est q u ’ une erreur de copie,ou de
�calcul, et ce même jugement, lorsqu’on y a intérêt, on necraint
pas de le changer pour son propre compte.
Q u ’on lise en effet le jugement de l’an XIII , et on verra
qu’il attribue aux représentons d ’Antoine, les deux tiers de la
succession de Marie, décédée célibataire; qu’on se mette en
suite sous les yeux le jugement pnr défaut dont est appel
( dix-huitième chef d’appel), et on y trouvera que ce n’est
plus que la moitié de la succession de Marie qui est accordée .
aux représentons d Antoine.
Il faudrait cependant être conséquent avec soirmême, et dire
que, si les erreurs même de calcul du jugement de l’an XIII,
ne pouvaient pas être réparées par le jugement dont est appel,
elles ne pouvaient pas l’être davantage pour la répartition de
la succession de Marie, que pour la composition de la succes
sion de Jacques.
11 y a cela de plus , encore , c ’est que la rectification qu’on
fait dans l’intérêt des parties adverses, pour la succession de
Marie , ne peut pas être une erreur de c a lc u l, puisque la dé
cision de l’an XIII est motivée sur ce qu’on considère Antoine
comme seul hériter de la mère commune, el que, dans ce cas, il
lui reviendrait en effet les deux lii rs de la succession de Marie;
En résumé, sur ce chef, les juges n’ont pas pu v o u l o i r ac
corder plus qu’il n’était demandé, la q u e s t i o n n ’a pas été
agitée; et lorsqu’on ne trouve que la simple énonciation du
résultat d’un calcul, on d o i t croire de la part des juges, que
l’erreur est dans le calcul, et non dans le droit. 11 esl prouvé
que le droit n’accorde à la succession de Jacques que deux
quatorzièmes et non trois. Le jugement dont est appel , doit
donc être rectifié sur ce point.
2"*° C IIEF.
Q a e itio n .
Quelle est Vétendue du legs en usufruit que r auteur commun
�a fa it a Marie B a ih o l, sa fem m c, par son testament da 24 no
vembre 1780.
Jugement.
Antoine B a th o l, auteur commun , ayant par son teslameut épuisé la quo
tité disponible en faveur de ses deux lils et de sa fem m e, a, par là même, ré
duit ses autres cinq enfans à la légitime de rigueur.
Celte légitime que la loi même accorde malgré la "volonté de l ’homme
ne peut être grévée d’aucune charge d’usufruit ou autre.
La conséquence est que l ’ usufruit de Marie B a th o l, sur les biens de son
mari , doit être restreint à la moitié de ceux de droit écrit, et au quart do
ceux de coutume.
Discussion.
Cette seconde décision repose sur la même erreur que la
première, et ici aussi les adversaires cherchent à invoquer
l'autorité delà chose jugée, mais ce sera plus vainement encore;
car, qu’on lise attentivement le jugement de l’an X I I I , et on
n ’y trouvera pas un mot qui s’applique à la quolilé du droit
d ’usufruit delà mère commune.
On y verra bien que la succession de Jacques, par exemple,
se composera, entre autres choses, des jouissances dues de
puis l’ouverture de la succession de l’auteur commun*, mais la
question de savoir quelle portion de ces jouissances sera attri
buée à la mère commune, pour son droit d ’usufruit, ju squ’à la
date de son décès, quelle portion amenderont les légitimaires,
jusqu’à cette époque, n’est nullement agitée, nullement jugée
ni même énoncée. La fin de non-recevoir ici invoquée, n'est
donc que le reste d ’une vieille habitude, il ne faut pas s’en
occuper.
Quant au fond du droit, comme nous avons établi ci-dessus
que la légitime était la même en coutume qu’en droit écrit ;
que les légitimaires ne pouvaient prétendre à la réserve des
trois quarts, qu’en renonçant aux biens de droit écrit, il est évi
dent que l’usufruit de la mère commune comprenait moitié
des biens de coutume comme de ceux de droit écrit. .
�3 ma
Question.
Jugement.
CHEF D ’APPEL.
Comment la masse immobilière de ïauteur commun doit-elle
être formée ? Dans quelle proportion le rapport des immeubles
doit-il cire fa it ?
La masse a été fixée par les experts de 1808 à 159,600 francs. Savoir :
Droit écrit........................» . . .
Coutume...................................................
Les héritiers d’ Antoine prétendent
que Louis-Nicolas a joui :
En droit é c r it, d’immeubles pour
une valeur d e .........................................
En pays de c o u tu m e , pour . . .
Antoine Tîalhol,
42,110
49,305
159,600
En droit écrit, p o u r .......................
28,920
En co u tu m e, p o u r..............................
39,205
4*
•
Différence
.
.
.
91,475
68,125
,
2 3 35 o
Le rapport devrait être fait dans celte proportion, si ce fait était exact ;
mais c’est chose à vérifier par les opérations ultérieures.
Ordonne le rapport dans celte proportion, si les experts reconnaissent que
Louis-Nicolas ou sa succession, et A ntoine, ont reçu dans cette proportion.
Discussion.
ft
■ Nous avions dit que sur ce point, les parties étaient tom
bées d ’accord devant le notaire Laroche ; mais les adversaires
n’ont pas, à ce qu’il paraît, tardé à se repentird’avoirreconnu la
vérité d’un fait,puisque, par le jugement qu’elles ont fait rendre,’
ce qui était avoué est remis en question <?t que la solution en
est renvoyée aux experts. Cependant c ’était là précisément une
des difficultés qui les avaient forcés à suspendre leur travail.
Nous le demandons aux parties adverses ; quand y aura-t-il
donc quelque chose de fini? N ’est-il pas ridicule, lorsque l'ins
truction de cette cause n’a fait en vingt ans que quelques pas
se u le m en t, de vouloir encore rétrograder.
Pour vouloir ainsi mettre de nouveau en question le fait
*
�( bo )
dont nous nous occupons, il fallait bien dire qu’il n’avait pas
etc avoué et reconnu; aussi est-ce ce qu’on soutient aujour
d ’hui.
Ce q u ’il y a de mieux , lorsqu’il s’élève une semblable dis
cussion , c’ est de citer le texte.
Voici lilte'ralleinent comment le procès-verbal Laroche
s’exprime à cet égard.
Les p a r t i e s d é c l a r e n t , tpie depuis et compris 1786, époque
(i laquelleLouis-Nicolas et' A n toi/ie Hatho! frères, qui ju sq u a lo rs
avaient vécu ensemble, se séparèrent, ledit Louis-Nicolas Iîathol
a jo u i exclusivement des immeubles ci-après, qui après son
décès, Jurent subdivisas par quart entre toutes les parties, ou celles
qn 'elles représentent.
Suit l’élal des immeubles.
Voilà qui est bien positif, 1er notaire l’a constate , il en a fait
lecture, les parties t’ont signé.
•
Mais, dit-on, ce n’est l;\ qu’une erreur de rédaction de la part
du notaire, qui a écrit, les parties déclarent, quoique la décla
ration en réalité n ’ait été faite que par l’ une d ’elles, Louis Ni
c o l a s , héritier d ’Antoine; ce qui le p r o u v e , a joute-t-on. c ’est que,
l o r s q u ’ o n donne à ta suite l’état d o s i m m e u b l e s d o n t Antoine a
joui, il est seulement exprimé que la déclaration a été faite par
Louis-Nicolas.
L ’inadvertance , ici reprochée au notaire, serait un peu
forte.
Voilà un houmuf dont l’honorable mission est de constater
les conventions qui interviennent entre ses concitoyens; qui
exerce depuis de. longues ornées , qui ici est spécialment
chargé pnr lu justice d ’entendre les parties , de constater sur
quelspoiiils elles sont d ’accord, sur quels points elles sont d i
visée* jeel homme ne commet q u ’une toute petitç erreur, c'est
d écrire qu’on est d ’accord, précisément qnandon ne s’entend
pas tlu tout; on donne lecture de l’acte qui constate ce fait.
�un n u i r e notaire est présent comme mandataire des adver
saires; toutes les parties, et les notaires signent sans récla
mation aucune.
Nous sommes loin de prétendre qu'une inadvertance ne
puisse pas échapper meine à l'homme le plus attentif: ce serait
par exemple une erreur de co m p te , de calcul, telle que colle
que nous relevons dans le jugement «le l’an X l l l f trois qua
torzièmes au lieu de deux quatorzièmes, ce que les adversaires
croient cependant impossible ; mais ce ne sera jamais une
erreur sur le fait principal, sur l’objet même de la mission
donnée, ce ne sera pas la constatation d’ une convention, la re
connaissance d ’un fait important, 15 où il n’y a ni convention
ni lait reconnu. S ’il en était autrement, que deviendrait la fol
duc aux actes reçus par les officiers publics.
Voyons cependant la prétendue preuve qu’on donne de cette
erreur ;on la trouve dans celle circonstance, que la suite de la
déclaration n’est l'aile que par Louis-N ¡colas.
Cela est Idu I à fait i n s i g n i f i a n t , du moment que la première
partie de la déclaration démontre que sur ce point on était,
d'accord; aussi ne trouve-t-on à cet égard aucune espèce de
contredit de la pari du sieur Vauris, ou du sieur Ciquorh
Mais, dit-on , rapportez l’acte de partage qui a été fait en
1786,01 alors il sera facile «le reconnaître quels sont les héri
tages dont Louis-Nicolas 0*1 entré en possession* quels sont
ceux dont Antoine a eu la jouissance : certes les représentait*
d ’Antoine 11e demanderaient pas mieux «pie de rapporter celle
pièce et plusieurs autres. Ils n’ont pas reculé devant 1rs
justifications qui étaient en leur pouvoir ; ils ont même, comme
I«* démontre le procès-verbal l*aroc!»e, compulsé beaucoup
de titres qui étaient dans des étmles de notaires, et q»»* 1rs
ad> cruire.% 11 ont
même voulu regarder lorsq» >1 t.»liait
fournir le* explication* demandées. Ma»» ce partage il» ne l'ont
pas, quoique ceaoil un titre qui devait appartenir à leur père;
�el ils sont assez heureux pour pouvoir prouver que leur père
n ’avait pas son double en tnains: qu’on lise en effet l’inven
taire fait au domicile de Louis-Nieolas , et on y verra parmi les
pièces inventoriées à la séance du 26 pluviôse an V, trois dou
bles du parta go. sous signature privée, f a i t entre le déjunt JSicolas
Eathol, et Antoine JJathol, les \ojanvier, 12 avril et 12 août 1786,
le tout attaché ensemble.
Le partage avait dû en effet être fait en trois exemplaires pour
la m è r e , et pour les deux frères; et on voit que la négligence
et laconftance d ’Anloine étaienllelles, qu’ il n’avait pas pris son
double.
A présent, ces tilres ont-ils élé retirés par Louis-Nieolas, représentant d ’Antoine ? L ’inventaire dit seulement que les titres
el les clefs ont été remis aux héritiers, sans autre explication.
C e t i n v e n t a i r e n o u s apprend également que les obligations
furent confiées à Ciquart, les contrats de rente à un notaire , et
nous ne voyons pas que la moindre pièce ait étéremiseà A n
toine, avec qui on était déjà en discussion.
On objectera, qu’ilavait inconteslablementle droit de prendre
au moins u n des doubles, cela est vrai ; mais les adversaires
pouvaient en prendre aussi un, comme héritiers de Louis-Nicolas, qu’ils le produisent. La question consiste d’ailleurs à
savoir ce qui a été fa it , et non ce qu’on aurait pu fait e. S’il y
y a quelque chose de probable, c’est que les Irois exemplaires
attachés ensemble sonl restés dans les mêmes mains; et certes,
il n ’est pas possible qu’on les ait confiés à celui des cohéritiers
qui était en discussion avec tous les autres.
Les représentais d’Antoine ne demanderaient pas mieux
que ce titre fut produit; mais il serait, il faut en convenir, de peu
d'utilité pour la question dont on s’occupe en ce moment ,
puisque, sur c e point, on a etc d accord en fait.
On ne voit pas, au surplus, quelle peut être l’utilité de cette
discussion soulevée par les conclusions des adversaires.
�/■; r p
) -. _
* -
; •>r*
: », ; m'\ ' ; ^ jL Ô Î ü i j ; l ? 6
*
» " o .»>.>
: Que demanue-t-on ? le renvoi devant les experts, pour faire
reconnaître quels sont les héritages de la masse, dont chacun
des deux frères était en possession. Mais devant ces experts,
se présentera-t-on avec d ’ailtres élémens que la première
fois j non sans doute. Puisqu’on n’a été renvoyé à déclaration
devant le notaire, que parce que les experts n’avaient pu r é
soudre celte difficulté, il faut bien accepter le résultat du tra
vail fait devant ce notaire, adopté par toutes les parties.
On ne conçoit pas en vérité quel avantage les parties ad
verses peuvent trouver à éterniser ce procès, et à imaginer
chaque jour quelque nouveau moyen pour multiplier les
frais.
4 mc C HEF.
Q uestion.
Jugement.
discussion.
Y a-t-il lieu de distraire les articles 7 et 19 de lam asse des
biens de coutume, pour les faire figurer dans la masse des biens
de droit écrit ?
D’après les renseignemens qui ont été pris ces immeubles sont situés en
pays (le coutume. Ils resteront en conséquence classés comme dans le rapport.
Les appclans s’empressent de r e c o n n a î t r e qu’il ya eu erreur
de leur part dans la critique q u ’ils ont faite du rapport, en ce
qui concerne l’article dix-neuf, mais les nouvelles recher
ches qu’ils ont faites, ont au contraire, confirmé leur opinion,
relativement à l’article six, qui & t situé au terroir des Charpendes.
Ils produisent un certificat de M. le maire de Billom, cons
tatant que le terroir des Charpendes dépend de Billom, qui est
payé de droit écrit.
Il n’y a donc aucun inconvénient à charger les experts, qui
devront compléter l’opération des partages, de vérifier ce fait
�qui sera constaté avec la plus grande facilité, et c’est ce qu’ils
demandent?
5m# C»H E F .
Q uestion.
Jugement.
Discussion.
L'article vingt-sept de la masse de droit écrit doit-il continuer
d'être compris dans les biens de Fauteur commun ?
Cet article fait partie des biens de l ’auteur commun.
Ce chef n ’est pas un grief d’appel, les appelons n ’en ont
parlé dans leurs conclusions que pour reconnaître le bien
jugé sur ce point, et faire remarquer que cette difficultén’avait
pas été élevée par eux.
6m® c h e f .
Question.
Quel est le rapport du mobilier qui doit être fait par les repré
sentons d Antoine, deuxième du nom ?
Jugement.
Le jugement de pluviôse an X III condamnait Antoine Rathol à faire le
rapport des meubles, suivant déclaration, sauf légitimes contredits.
L ’état en trente-huit articles, fourni devant le notaire comme étant tout ce
que les héritiers d’Antoine Rathol avaient reçu de la succession de leur
a ï e u l , est dérisoire.
En vain on a dit pour le justifier que la mère commune et Lonig-Nicolas
en avaient gardé la plus grande partie, et que cela avait donné lieu à ui.e
réclamation par mémoire.
Ce mémoire n’est pas prod u it, malgré la réquisition qui en a été faite; ce
qui fait supposer qu’il détruirait Ueffet qu’on en attend.
Lors de, l ’inventaire de 1797 Antoine lia th o l, ayant soutenu n’avoir pas en
178G retiré toute sa part du mobilier , il fut dressé un état du mobilier qu’ il
préleva sur celui trouvé au décès de son fr è r e , et ce ne fut q u ’après ce prélè
vement qu'il fut procédé au partage entre tous.
11 est constate, soit par 1 inventait e , soit par le procès-vorbnl au bureau
de paix du i> mars s u iv a n t , qu Antoine, prétendant malgré ce prélèvement
n’ayoir pas t>i portion/ faisait beaucoup d autres réclamations.
�En admettant la déclaration des représentans d ’Antoine devant le notaire
Laroche, il n’aurait pas satisfait an vœu du jugement de l’an X I I I ; car il
faudrait qu’il eût offert le mobilier compris dans l ’état de 1797 , et qui fut
retiré.
M a is , même avec cette a d d itio n , l'offre serait insuffisante ; car il faudrait
trouver la moitié du mobilier de l ’auteurcomm un dans les trois états suivans
Savoir :
i° La déclaration devant le notaire;
a» L’état d ’objets reçus en 1797 ;
3° L ’éial des objets réclamés devant le juge de paix le 11 mars 1797.
Cela est impossible.
La maison Batbol était ancien ne, l’ une des plus riches de Billom , c’était
l ’auberge la plus importante.
Ces états ne comprennent pas de v i n , de provisions ; pas de bois dont l ’au
teur commun faisait le commerce.
II est nécessaire , puisque les états sont insuffisans, de fixer d’office la va
leu r du mobilier.
Entre l ’année i 8 i 5 , époque où fut rendu le jugement qui commet le notaire
Laroche, et l ’année 1821, date de son procès-verbal, les parties avaient fait
choix d’arbitres pour statuer entre eux.
Les arbilres , après avoir pris tous les renseignemens, avaient porté la con
sistance de ce mobilier à 14,000 fr : les représentans des femmes Moissat et
Mesire consentent à cette fixation.
Quant au mode de rapport de cette somme, il est à remarquer que parmi
les immeubles se trouvait Je domaine de Laroux, estimé par les experts do
I808, 82,000 francs.
Les représentans d ’Antoine Batbol ont reconnu qu’ il leur avait été attribué
par le partage de 17SG, avec le mobilier et les bestiaux , en ajoutant que les
a n c i e n s cheptels en établiraient la consistance. Mais , malgré la sommation
qui a été fa ite , ces cheptels n’ont pas été produits. D’après la valeur du do
maine, il n’y a pas d’exagéralion à fixer ce cheptel à quatre m ille francs rapportables aux biens de coutume.
Quant au surplus, qui est de io ,000 francs, ils devront être rapportés à la
masse de droit écr it, moitié par les représentans d’ A n to in e, et moitié par la
succession de Louis-Sicolas.
Ainsi la valeur du mobilier est fixée à H .ooo francs, dont les représentans
d ’Antoine sont condamnés ù rapporter 9,000, savoir, 4,000 à la masse do
coutume; .»,000û la masse de droit écrit. La succession de Louis-Nicolas doit
en rapporter 5 ,000 seulement à la rnasso do droit écrit.
�On voit q u ’on a eu raison de dire que le jugement par défaut
dont est appel était un véritable plaidoyer en faveur des par
ties adverses: rien n’y est négligé, pour donner une couleur
de vérité à la décision qui est rendue, on peut même ajouter,
que quand les élémens manqueiît on en imagine. Ainsi, comme
on ne savait sur quoi faire reposer ce chiffre de 14,000 francs ,
on invoque le témoignage d’arbitres, qui avaient été nommés
par les parties , et on annonce, q u ’après avoir pris beaucoup
de renseignemens, ils avaient dans leur travail estimé la va
leur du mobilier de l’auteur commun à 14,000 francs.
Ce travail, nous aurions été curieux de le voir, on aurait dû
pouvoir nous le communiquer, puisque le rédacteur du j u g e
ment par défaut l’invoque , et cependant nous l’avons vaine
ment demandé.
Les appelans déclarent ici, qu’ ils n’ont pas la moindre con
naissance d ’une pareille évaluation par experts ou par ar
bitres, et ils ne craignent pas d ’ajouter q u ’elle serait tellement
exagérée que son existence est impossible ; il nous sera facile
de le démontrer. Et d ’abord, qu’ordonnaient le jugement de
l ’an XIII, et l’arrêt de 1806, le rapport du mobilier suivant dé
claration, s a u f ions légitimes contredits.
Les représentais d ’Antoine Balhol se sont exactement co n
formés à cette disposition ; il ont fait leur déclaration détaillée ,
q u i n’a été contredite en rien, puisqu’on n’a pas pu i n d i q u e r
un seul objet mobilier qui ne f ut pas compris dans leur dire.
Pilais, dit-on , la déclaration ne comprend pas l étal des objets
mobiliers prélevés en 1797, lors du partage de la s u c c e s
sion d’Antoine. Ce reproche C o n s ig n é au jugement est v r a i
ment puérile. Les représentans d ’ A n t o i n e Bathol n ’ont jamais
nié q u ’ ils ne dussent le rapport de ce mobilier, et s’ils n’en ont
pas fourni élat dans le procès-verbal du notaire Laroche, c’ est
uniquement parce q u ’il y en avait déjà un fort détaillé dans l’in
ventaire du ‘22 pluviôse an Y, qui est au dossier des parties ad-
�W
verses. Puisqu’on n’a su répondre à la déclaration positive des
représentans d’Antoine que par de longs discours sur le luxe,
et les richesses mobilières de l ’auteur commun, tenant en 1780
une auberge dansune rue détournée de Billom, il n’est pas inu
tile de faire connaître ce q ue , lors de l’inventaire de l’an V ,
on abandonne à Antoine Bathol, pour compléter la moitié
de ce beau mobilier.
L ’acte constate qu’Antoine Bathol retira :
i° Un lit bleu , étoffe de laine, composé etc.... (O n peut lire
ces détails dans l’inventaire, et on verra que ce lit avait un seule
matelas et des rideauxen sergette. Il est vrai quela courtepointe
était en cotonade Jlarnbce; cela pouvait être très-beau , mais
alors que d ’avantages réunis ; car rien n’est moins cher.)
20Six plats et six assiettes d’étain ;
3° Un pot d’étain ;
4° Une petite marmite en cuivre ;
5° Une chaîne de fer ;
6° Une somme de dix-huit francs pour la moitié d’un cou
vert d’agent ;
7° Dix-huit draps de lit.
8' Six nappes;
90 Douze francs pour la mo it iéd ’ une nappede vingt couverts.
On se demande, si, dans une riche succession mobilière, des
objets semblables à ceux-ci, à l ’exception des dix-liuit draps
de lit, auraient seulement valu la peine d ’être réclamés.
Est-ce une riche succession mobilière que celle où on par
tage un couvert d’argent de la valeur de trente-six francs, où
on voit que la vaisselle est toute en étain ; où la grande nappe
de la maison est d’ une valeur de vingt-quatre fr.
Cet état, indépendamment des autres docuinens de la cause,
suffirait seul pour prouver quelle pouvait être la nature de ce
mobilier et sa valeur.
•
Ce mobilier était celui qu’on pouvait s’attendre à trouver, en
8
�( 58)
•
1780, dans un auberge logeant ordinairement des yoiluncrs à
Billom, mobilier, comme on l’a dit, d’un gros volume, mais de
peu de valeur: de grands lits bien élevés par un épais coussin de
paille recouvert d ’un matelas, bien larges, pour tenir deux , et
au besoin trois voiluriers, des drapsde résistance qui blanchis
sent en vieillissant; Le tout surmonté d ’un ciel en planches
de sapin, soutenu par quatre piliers du même bois , et en
touré de beaux rideaux en sergette bleue.
Pour vaisselle, des plats, des assiettes d’étain ; cela résiste
aux mouvemens un peu brusques des hôtes ordinaires de la
maison.
Mais il faut avoir un couvert d’argent pour un voyageur de
distinction , s’il en passe un ; on fait celte empiète avec l’éco
nomie, qui est dans les habitudes de la maison : le couvert vaut
56 francs.
La toilette de la maîtresse de la maison doit être en rapport
avecle mobilierde l’hôtel.MarieBathol n’est morte qu’en 1797,
à une époque où le luxe avait déjà fait des progrès, 011 elle
avait beaucoup plus d ’aisance qu’en 1780, puisque tous ses
e n f a n s é t a i c n l é ta bl is , et que les biensà elle laissés en usufruit par
l’auteur commun, produisaient beaucoup plus à raison de l’af
franchissement des cens. Q u ’on lisecependanl l’invenlairede sa
garde-robe, et on verra quelle était fort peu considérable, el que
pour joyaux, la mère commune n ’avait que le bijou de rigueur,
la croix d’or.
La maison Balhol était, dit-on, en 1780 la principale auberge
de Billom ; il ne faudrait pas en féliciter les voyageurs qui
étaient alors forcés de s’y arrêter. Mais ce ne sont là que de va
gues allégations. 11 faut examiner ce que pouvait être en 1780
une aubergç à Billom, pays où le luxe moderne n ’a même pas
encore pénétré.
11 faut à la Cour des documens positifs ; nous venons d ’en
indiquer, nous en trouvons encore dans le rapport d ’experts
�de 1808. La maison où se tenait l’auberge y est décrite; on y
voit qu’elle se composait au rez-de-chaussée, d'une cuisine, et
d une espèce de salon sur le derrière ; au-dessus de trois cham
bres dont une seule ¿1 cheminée, le tout estimé2,000 francs, valeur
de 1808.
C ’est dans cette maison, qui certes, était loin de valoir les
2.000 fr., à la date du décès de l’auteur commun, que les adver
saires ne craignent pas d é p l a ce r en 1780 un mobilier de
10.000 francs , sans compter les bestiaux.
Ce rapprochement suffit à lui seul pour démontrer que ce
sont les allégations des parties adverses qui méritent d ’être ap
pelés dérisoires, et non l’état fourni par les représentais
d ’Antoine, état qui porte avec lui la preuve de la sincérité des
déclarans.
On a eu tort de dire qu’il ne comprenait pas de denrées : On
y voit figurer quinze septiers de bleds ; on y a encore porté
une somme de 4°° fr- or ou argent, dont assurément on aurait
bien pu ne pas parler, si on n’avait pas eu l’intention de dire la
vérité toute entière.
Les adversaires ont cependant trouvé un nouveau moyen à
ajouter à ceux imaginés par le rédacteur du jugement par dé
faut dont est appel ; ils disent que souvent en l’absence de
documens on estime le mobilerau dixième des valeurs im mo
bilières; que la fortune de l’auteur commun s’ élevant à près
de 160,000 francs, le mobilier, si on prenait le dixième, serait
de 16,000. que cependant on ne l’a porté qu’à 14,000 francs, en
sorte qu’ils ont même l’ambition de faire preuve de modé
ration.
Q u ’on ait pu prendre une pareille base en l’absence de docu
mens , et pour certaines positions, Cfela est possible; mais
ici d’abord, les documens ne manquent pas, ensuite ce mode
d ’évaluer serait entièrement erroné pour un homme pris
dans la position de l’auteur c o m m u n , et enfin la base serait
fausse.
8.
\
�(Go)
Los docuinens ne manquent pas, puisque nous venons d’en
pro du ire, el qu’on pourrait en trouver d’autres encore dans
les pièces du procès.
Ce mode d’évaluation peut convenir jusqu’à un certain point,
lorsqu’il s’agit d’ un homme né avec des habitudes de luxe ,
qui a reçu de ses auteurs une fortune toute faite, mais non
lorsqu’il est question de la succession d’un homme qui a été
le seul artisan de sa fortune, qui en sait le pri x, ne l’emploie
pas en superfluités , et qui précisément dans les années
qui ont précédé son décès a eu à établir un grand nombre
d ’enfansà qui il a donné du mobilier.
Ce chiffre de 160,000 francs, qu’on pose ainsi sans la moindre
hésitation est la valeur de 1808 , et non de dé 1780; c’est en
outre celui de l’évaluation des biens dans la supposition oùils
n ’auraient pas été grévés de cens et de redevances foncières ,
et les experts disent eux-mêmes , qu’il en existait de fort consi
dérables, en sorte que s’il était nécessaire de faire l’évaluation
d e l à fortune de l’auteur co m m u n , prise telle qu’il la possé
dait, ils faudrait probablement ôter les deux tiers de l’éva
luation.
A i n s i , malgré cette nouvelle objection , il est de toute évi
dence que la somme de 14,000 fr., portée pour le mobilier de
l’auteur commun, est d’une exagération ridicule.
Sur ces 14,000 francs, on a trouvé le moyen d ’en faire rap
porter neuf par la succession d’Antoine, et cinq seulement
par la succession de Louis-Nicolas.
La succession d’Antoine doit, dit-on, la moitié du mobilier
mort. Cela serait très-bien s’ il en avait reçu la moitié.
Mais les adversaires ont bien reconnu qu’il n’en avait pas eu
la moitié en 1786, puisqu’en 1797 on lui a laissé faire un pré
lèvement, et qu’il n y a eu de discussion que sur le nombre des
objets à prélever.
Antoine, en faisant ce prélèvement, se réserva expressément
�île réclamer ce qui lui manquait ; cette réclamation il l’a
p r é s e n t é e dans le procès-verbal de non conciliation du 2 iv e ntôse an V, et d e v a n t le notaire Laroche: jamais il n ’y a é t é fait
droit.
11 est facile de comprendre qu’en 1786 Antoine ne pouvait
pas recevoir la moitié du mobilier pas plus que des immeubles,
et que la différence devait même être plus considérable pour
le mobilier que pour les immeubles.
11 se séparait en effet non-seulement de son frère, mais aussi
de sa mère qui avait un droit d ’usufruit général. Son frère
et sa mcre continuaient en outre à tenir l’auberge de Bill o m , le mobilier garnissant cette auberge leur était indis
pensable.
Supposons que toutes les parties aient exercé rigoureuse
ment leurs droits, c’est ce qui est probabledela partdelamère,
surtout pour le mobilier, en admettant encore, que faisant des
abandons sur les immeubles, elle n’ait pas gardé plus de mobi
lier qu’il n e lui en revenait : mais, enfin, supposons q u ’il n’en
ait pas été ainsi. Le droit général d’usufruit de la mère seréduit
à moitié; les deux frères n’ayant à partager que la moitié, les
trois quarts seraient restés dans la maison paternelle, et l’autre
quart aurait été emporté par Antoine ; ainsi la déclaration faite
devant le notaire Laroche n’aurait pu comprendre qu’un quart,
l’autre quart serait porté dans l’état des objets prélevés en 1797,
et dans la réclamation faite au bureau de paix en la même
année.
Il est dès-lors évident qu’on ne peut astreindre les représen
tai s d ’Antoine à rapporter la moitié du mobilier mort, à
moins qu’on 11e leur rende ce qu’ils réclamaient en 1797Mais, il y a plus, on leur fait rapporter tout le mobilier
vif,on le porte a 4,000 francs pourun domaine évalué 3a,000 fr.,
valeur de 1808, et on s’empare ici delà déclaration des repré
s e n t a i d Antoine devant le notaire Laroche , déclaration p or
�tant offre de rapporter le mobilier y i f , suivant les anciens
cheptels qu’on lui reproche de ne pas produire.
Cette déclaration est une preuve déplus de la bonne foi des
représentans d’Antoine. S ’ils avaient eu ces anciens cheptels ,
ils auraient de suite fait connaître leur valeur estimative, et il
n ’est pas extraordinaire, que si jamais il en a été fait, Antoine
ne les eût pas, puisqu’on a vu q u ’il avait laissé entre les mains
de son frère, même le double de son acte de partage. Que v o u
laient donc dire les représentans d’Antoine par cette déclara
tion, c’est que la succession de son frère comme celle de son
père rapporteraientlemobilier vif, suivant lesanciens cheptels,
dans la pensée où ils étaient que les anciens cheptels pourraient
être trouvés; et c’est de là q u ’on part dans le jugement dont est
appel pourrnettre un cheptel de 4>ooo fr. à raison d ’un domaine
de 32 ,ooo francs à la charge de la succession d ’A n to in e , et pour
n ’en faire rapporter aucun par la succession de Louis-Nicolas.
Quant à l’évaluation de 4 ?ooo fr, elle est dans son exagération
tout à fait en proportion avec celle de 10,000 francs pour
le mobilier mort; mais ce qui est inconcevable c’est q u ’on ait
espéré faire croire que, tandis que Louis-Nicolas a pris des
91,475 fr.
tçrrcs pour une valeur d e ..........................
Et qu’Antoine n ’en a eu que pour . .
68,125
Ce dernier ait reçu par le partage absolument tous les be s
tiaux, et que le premier n ’en ait pas du tout gardé pour cultiver
ses te rre s, tandis qu’au contraire le lot de Louis-Nicolas ,
ayant plus de terre a du avoir plus de bestiaux. Aussi voit-on
dans le procès-verbal du notaire Laroche, que les représentans
d ’Antoine reconnaissent avoir reçu une somme de 100 francs
pour leur portion d ’une paire de bœufs quiélaif restée à LouisNicolas.
Que doit-on donc faire dans cette circonstance en l’absence
de cheptels de part et d’autres ? On doit évidemment évaluer
les valeurs de bestiaux que chacun des deux frères a dû re-
�■'(6 3 )
1’*•*
J
■ï'-ïlf
>*• j» »1rt * ’ï
ccvoir en proportion des terrains compris dans leurs lots ,
ou c h a r g e r les experts de procédera cette opération.
A i n s i il est démontré, que relativement au mobilier, la dis
position du jugement dont est appel qui causerait un préju
dice énorme aux représentans d ’Antoine, repose sur des bases
complètement erronées q u ’elle doit être réformée ; que, quant
au mobilier mort , la déclaration des représentans d’Antoine,
qui n’a été contredite par rien de positif, mérite entière con
fiance ; et que pour le mobilier vif il y a lieu de le faire évaluer
pourcliacune des deux successions, en proportion des héritages
compris au partage de 1806.
Certes , si particulièrement pour ce chef des contestations
pendantes, les adversaires avaient v o u l u de bonne foi fournir
à la justice des documens propres à l’éclairer , ils auraient
accepté la proposition des représentans d’Antoine, qui con
sistait à produire tous les états de ce qu’ils avaient reçu en
mobilier dans le partage de la succession de Louis-Nicolas
de 1 7 9 7 , étals q u i auraient parfaitement fait connaître la con
sistance de la masse immobilière , puisque personne ne con
teste que Louis-Nicolas en eut pour le moins la moitié. Mais
celte proposition on s’est bien gardé de l’accepter, car elle eîit
coupé court à toutes les exagérations à l’aide desquelles on
espérait faire payer aux représentans d’Anloine en capital et
intérêts, depuis longues années, ce qui n’a jamais été reçu, ce
qui n’a jamais existé.
7 mo C H E F .
Question.
L'état des créances actives en quarante-trois articles, fourni par
les représentans d'Antoine comme ayant été seules reçues par
leur père, doiL-il être reconnu sincère.
^Bernent
nB SCra ^UG ^or8^ue ^es ^*rC8 seront communiqués qu ’on pourra savoir
si cet étal est sincère.
�Donne acte aux demandeurs de la réserve q u ’ils se font de critiquer cette
déclaration en temps et lieu.
Discussion.
C ’est bien ici surtout qu’il y a lieu de demander aux parties
adverses ce qu’elles sont venues faire en l’étude du notaire La
roche ?
On ne s’expliquera sur cet état que lorsque les titres auront
élé communiqués et examinés; mais pour cette communica
tion , pour cet examen, nous avons été renvoyés devant le no
taire Laroche. Là le sieur Louis-Nicolas Balhol-Choussi a
donné le détail de tous ces titres de créances en quarante-trois
articles, état qui se termine ainsi :
44 ° Finalement a représente et offert de remettre sous récépissé,
un vieux
livrejo u rn a l tenu par le d'Antoine B a th ol de C u ju s, commencé
etc ; plus un autre livre jou rn a l commencé etc ; plus encore quan
tité de vieux dossiers de procédure, t o u t q u o i toutes les parties,
d ’un consentement unanime, ont ju g é inutile de compulser et dé
tailler au x présentes, soit à raison du peu ou point d importance
qu'offrent lesdits livres et procédures, à raison de leur ancienneté,
qui a fa it perdre la trace des débiteurs y désignés , soit à cause de
l insolvabilité reconnue de ceux qu ’on pourrait retrouver.
Rien n’est plus p o s i t i f , les titres de créances ont été mis
sous les yeux des adversaires, on leur en a offert communi
cation sous récépissé, ils l’ont jugée entièrement inutile , et à
présent ils veulent sans doute être renvoyés de nouveau par
devant notaire, pour recommencer le détail consigné au procèsverbal Laroche: et si elles font semblable réponse, viendrontelles encore demander de leur réserver de faire cet examen en
temps et lieu. Quand le moment opportun sera-t-il donc
AINSI QUE LES T IT R E S DE CREANCES C I-D ESSU S V IS É S
arrivé ?
On objecte que la réponse consignée au procès-verbal, por
tant qui’il est inutile de prendre communication, ne s'applique
qu'aux livres et vieilles procédures ; mais il faudrait encore
�supposer là une nouvelle erreur du notaire , qui aurait écrit
le contraire de ce qu’on a dit; car rien n’est plus pf>sitif que
ce qui est transcrit littéralement ci dessus.
La déclaration se compose d’une série de quarante-quatre
articles; les quarante - trois premiers ont pour objet les
titres de créances, le quarante-quatrième comprend les livres
et procédures.
C ’est lorsqu’on arrive au dernier article qu’on offre la
communication : cela suffirait pour démontrer que l ’offre
porte sur le tout; mais on a encore le soin d ’ajouter pour
ne laisser aucun doule : ainsi que des titres de créances cidessus visés.
A-t-on ensuite en répondant fait une distinction entre les
titres de créances et les vieux dossiers? aucunement. Le pro
cès-verbal porte : tout quoi les parties d ’un consentement una
nime ont ju g é inutile de compulser.
Ainsi, à l’offre qui porte sur le tout, on fait une réponse qui
porte e'galement sur le tout.
fl est donc de la dernière évidence que les parties adverses
ont accepté la déclaration du sieur Louis - Nicolas Balhol
comme sincère, et qu’elles ne peuvent à présent revenir sur
leur acceptation, uniquement pour se donner le plaisir delui
faire recommencer un travail déjà fait en l’étude où on avait été
envoyé dans ce but. La justice ne cède pas à de pareils ca
prices.
*
8n,e c n E F .
Question.
Jugement.
Ducussion.
L'état des contrats de rentes fourni par les représentons d A n
toine B a lh o l doit-il être déclaré sincère ?
Mémo décision que pour les titres de créances.
Cette décision est peut être encore plus extraordinaire dans
�son application aux conlrals de renies, que relalivement aux
' tilres de créances.
Les conlrals de renies, en effet, n ’avaient jamais clé entre les
mains d ’Antoine Bathol, deuxième du nom, aulenr des appe
lons, ils avaient été tous trouvés au domicile de Louis-Nieolas
après son décès : preuve de plus que le partagé n’avait pas été
égal. L ’inventaire constate que les litres de tons ces conlrals
furent remis par tous les héritiers au notaire Flaget. Les
experls ne les ayant pas sous les yeux ne purent en constater le
montant et en fixer l’assiette. Celle difficulté était une de celles
qui devaient êlre levées aux termes du jugement par les
explications , que les parties fourniraient devant le notaire La
roche.
Certes , c ’était aux adversaires demandeurs à consulter
ces tilreS, «à en faire le relevé , et à le présenter au notaire
Laroche. Ils n’en ont nullement pris la p e i n e , et ce sont les
rcpréscnlans d ’Antoine, quoique défendeurs , qui, dans leur
désir extrême, déterminer une instance pendante déjà depuis
tant d ’années , ont fait en l’étude de Flaget le relevé de ces
contrats de rente, q u ’ ifs ne pouvaient pas déplacer sans le
concours de leurs cohéritiers, et en ont donné le détail en
quatre vingt-cinq articles dans le procès-verbal Laroche, où cet
état, contenant toutes les indications possibles, occupe vingtcinq rôles.
/ -i
*
* *JL ' \
^
Que pouvaient-ils faire de plus? rien assurément ; mais les
adversaires pouvaient au moins examiner ce long, étal, le com
parer aux litres: l’étude de F l a g e t n’était pas plus fermée pour
eux (¡uc pour leurs cohéritiers. L ’onl-ils fait , nous l’igno
rons.
Mais ce q u ’il y a de certain, c’est que, devant le nolaire La
roche , il n’ont fait aucune c r i ti q u e , aucune observation, et
qu’ ils ont gardé un silence complet.
’
‘ 1 .
Les appelans o n t donc à leur ré po nd re , sous ce rapport,
�comme sous tous les autres, nous avons fait, nous, tout ce que
nous devions, nous avons même fait plu s, à présent, puisque
vous n’avez rien eu à opposer à notre déclaration, ell^doit être
réputee exacte, et nous ne pouvons être tenus de retourner
devant le notaire, sur ce p o i n t , nous, pour répéter ce que
nous avons dit, et vous apparemment pour garder même si
lence.
M Ê M E * C IIE F.
Question.
Par qui doit-cire supportée la perte survenue dans les créances
et renies, depuis l'ouverture de la succession de l'auteur commun ?
P a r q u i s'effectuera le rap port?
Pour les créances remboursées en assignats , le rapport aurat-il lieu en assignats ?
•
Jugement.
é
J;
Depuis 1780 jusque« et compris 1797 les filres de créances et rentes ont
été rnlrc les m a i n s , soit de la môre commune, soit do L o u is-N ico las , soit
d ’A n to in e, par conséquent la perte résultant de défaut de poursuites et des
prescriptions est à leur charge.
E11 1797 les litres de créances ont été remis à Ciq ia r t , et les contrats de
rente au notaire F l a g e t , ils en sont responsables.
L'héritier étant forcé de recevoir les rcinboursemens en assignats ne doit
que ce qu’ il a reçu.
Condamne les successionsde MarieBathol, Louis-Nicolas et Antoine flathol
à garantir et indemniser celle d’A ntoine, prem ier du nom, de to utes pertes
survenues depuis 1780 jusques et compris 1797 dans Jes créances et r e n te s,
à défaut d’actes conservatoires et de poursuites dirigées en temps utile.
Pour les créances ordonne le rapport par les représentais Ciquart.
Pour les renies réserve toute action en garantie contre le notaire Flaget.
Pour les créances remboursées en assignats, dit que le ra p p o r t en sera lait
suivant l'échelle de dépréciation.
Discussion.
Il est à remarquer que le dispositif du jugement n’assujetlit
Ciquart à aucune garantie, quoique, pour les pertes survenues
�depuis 1797, il y ail, pour le condamner à celle garantie, même
motif que pour les autres parties. Ce n’est là sans doute
cju’ une omission ; car les motifs annonçent assez quelle était
l’inlenflon du rédacteur du jugement.
Il faut dire cependant que la garantie est ici prononcée en
termes trop irritans. On sait assez combien les recouvremens
de petites renies et créances de cette nature p r é s e n t e n t
de difficultés. La garantie n’est due que dans le cas où il y a eu
négligence.
»
Mais ce dont les appelans ont particulièrement à se plaindre,
c’est de la condamnation de garantie prononcée contre A n
toine, conjointement avec son frère et sa mère , relativement
aux contrats de rente, pour toutes les perles qui ont pu sur
venir entre 1780 et 1797.
On ne peut être garant que de ce qui est de son fait. Si
parce que de 1780 à 1786, Antoine habitait avec sa mère et son
frère la maison paternelle, où étaient tous les titres, on veut
lui faire partager avec eux la garantie de ce qui a pu arriver
pendant cet espace de temps , il faut au moins reconnaître que
celte décision serait souverainement injuste dans son appli
cation à l’espace de temps qui s’est écoulé entre l ’année 178G
et l’année 1797 , puisque l ’inventaire de celte époque constate
que tous les contrats de rente furent trouvés au domicile de
Louis-Nicolas et de la mère commune, et passèrent de là entre
les mains du notaire Flaget, d ’où il résulte, qu’Anloine ou sa
succession ne peuvent êlrcassujeltisà aucune garantie pour les
pertes qui ont pu être éprouvées sur les contrats de rente, par
défaut de poursuites ou mesures conservatoires entre 1786 et
1 7 97 *
Au sujet de ce chef d’appel, les adversaires disent dans leurs
conclusions que les représenlans d ’ Antoine se prétendent hé
ritiers de la mère commune. Ils répondront qu’ils n’ont ja
mais fait acte d ’héritier, que dans les motifs du jugement de
�l’an XIII, et dans ceux du jugement dont est appel , on les
considère tantôt comme héritiers institués, tantôt comme ne
l’étant pas; mais q u ’aucune demande n’ayant été faite jusqu’à
ce jour, pour le partage de la succession de la mère, ils n’ont,
à cet égard, aucune qualité à prendre ni à répudier, et que la
succession delà mère commune devra être composée sans s'oc
cuper de son partage entre les parties.
Enfin, sur cet article, les appelans feront remarquer, dans
l’intérêt de tous les cohéritiers que lors de l’inventaire de 1797,
on trouva au domicile de Louis-Nicolas, ex-perccpleur un rôle
de contributions, sur lequel il restait i , 5oo francs à recouvrer,
par suite des avances qui avaient été faites; que ce rôle fut confié
à l’huissier Farge, et qu’il y a lieu de faire contre lui, pour ces
perceptions, les mêmes réserves que contre le sieur Flaget
pour les renies.
9 me
CHEF.
Il est inutile de s’occuper de ce chef d’appel , qui a pour
objet le rapport des contrats de renie, en partie à la masse des
biens de droit écrit, en partie à la masse des biens de coutume,
suivant leur nature , 011 suivant la situation des héritages pour
celles qui sont foncières.
Après examen, nous avons reconnu par nos conclusions que
sur ce point il avait été bien jugé.
I O m* C H E F .
Question.
Jugement.
Les dois des fem m es M oissat , Mestre et Ciquarl seront- elles
en partie à la charge de la succession maternelle, et dans quelle
proportion.
En ce qui concerne la dot do la femme M oissat, la moitié de la valeur du
sera & la charge de la succession m aternelle , par la raison q u c la d o t
tro u sseau
�étant toute mobilière , il ne peut y avoir lieu à l ’application de l ’article 6 du
titre 14 de la coutume c i .........................................
25o francs a.
Sur le ca p ita l, d'après la stipulation , la suc
cession maternelle s u p p o r t e r a ..............................
200
A la charge de la succession ma fem elle . .
Quant à la femme M e str c , dont la dot est de
4.50
3 ,ooo francs, les père et mère ayant doté conjoin
tement, il sera fourni par la succession maternelle
Relativement à la femme C iq u a rt, le père ayant
doté se u l, il n’y aura aucune partie de cette dot à
i , 5oo
la charge de la succession maternelle.
JJiscussion.
On voit que la conséquence de cette décision est de mettre
à la charge de la fortune de la mère, qui se composait u niq ue
ment de sa dot de 2,000 f r . , i , 5oo fr. pour doler un seul enfant,
i ,95 o fr., pour en doter deux sur huit.
El, alors , on se demande sur quoi se prendra la légitime que
la loi réserve aux autres enfans.
Outre que cela n’est pas possible en droit , peut-on réelle
ment. supposer q u e , lorsque les père et mère ont conjointe
ment doté leur fille Jeanne en 1769, ils eussent réellement
rinlenlion de contribuer à cette dot par moitié ; on ne le peut
pas croire, lorsqu’on compare la fortune du père à celle de la
mère ; et s’ils ne se sont pas positivement expliqués à cet égard,
leur volonté ne résulte-t-elle pas assez clairement des contrats
de mariages des deux autres fdles qui avaient été mariées
avant.
La décision ne saurait au surplus se justifier en droit ; car ,
en droit écrit , a u s s i bien qu’en coutume , doter les tilles , est
line charge paternelle.
La loi sip u ler a continué à être observée dans le plus grand
nombre des pays de droit écrit, malgré la novelle 21 de ¡’e m
pereur Léon, qui ne faisait pas partie du corps de droit écrit.
C eslce qui est attesté par beaucoup d’auteurs, et particulière
�ment par Chabrol, sur l’article 3 i du chap. 12 , t. i e*, p. 474
et 475.
Cntelan exprime, il est vrai, une opinion contraire, mais il
dit néanmoins que l’obligation de la mère ne pourrait dé
passer les légitimes des filles.
Ainsi l’auteur, que les parties adverses pourraient invoquer,
repousserait encore le système adopté par les premiers juges ,
ptiisqu on fait supporter à la succession d’une mère de huit
en fan s', n’ayant que 2,000 livres, une dot de i,5oo livres pour
un seul de ces enfans..
I l me CI1EF.
' Que s t i o n .
J u g e me n t .
P a r qui doit être f a it le rapport des jouissances ?
Relativement aux jouissances sur le m obilier , les capitaux , les rentes et
créances, la décision doit être, pour les accessoires, la même que celle qui
est intervenue pour le principal: les jouissances sur les immeubles seront
rapportées :
De 1780 à 17SG par la mère commune ;
De 178G à 1797 par les deux héritiers Louis-Nicolas et Antoine;
De 1797 jusqu’au partage, quant à la portion de L o u is-N ico las, par les
quatre héritiers qui ont partagé à cette époque»
discussion.
Cette décision est juste en principe, mais il y aura une rec
tification nécessaire à faire, el qui sera la conséquencede ce qui
a été établi ci-dessus, lorsqu’on a démontré qu’Antoine était
loin d’avoir reçu en 1786, dans le mobilier cl dans les im
meubles , une portion égalé a celle de son frère ; il en est de
même pour les renies, puisque l’inventaire démontre qu ’elles
étaient toutes au pouvoir de Louis-Nicolas.
1 2 me C11EF.
Gestion.
piment.
A partir de quelle époque les intérêts des jouissances sontils dus ?
P o u r les jouissances antérieures à la d em an de, les intérêts sont dus depuis
�la demande; pour celles postérieures les intérêts sont dus de la date dechaqu«
perception.
L a demande a été formée le 5 avril 1783 par Jacques Balhol, qui avait con
clu aux restitutions de jouissances et intérêts.
L ’assignation du a ’» thermidor an XII par la veuve Moissat cl les époux
Mcstre porte les mêmes conclusions.
Cette assignation n’eut d’autre objet que de reprendre l ’instance introduite
en 1783.
C ’est dés lors de 1783 que sont dus les intérêts des jouissances antérieures,
et pour celles postérieures ils doivent courir de la date de chaque perception.
Que les intérêts des jouissances soient dus depuis la de
mande pour celles qui étaient alors perçues , c’est ce qui nous
paraît incontestable en prin cipe , sous l’ancien droit, comme
sous le droit nouveau ; car, s’ il n'était pas permis de stipuler
que des fruits ou des intérêts produiront eux-mêmes intérêt
à chaque échéance annuelle , il était assurément licite de capi
taliser les fruits 011 les intérêts échus d ’un certain nombre
d ’années, pour en percevoir de nouveaux fruits, de nouveaux
intérêts; et l’effet q u ’aurait produit à cette égard une conven
tion pouvait également résulter d ’une demande judiciaire.
Mais de même aussi (pie sous l’ancien droit , une convention
ne pouvait pas faire produire intérêts à des fruits, à mesure de
leur échéance , de même nue demande ne pouvait pas avoir
cet effet pour les fruits à échoir. Aussi nous serait-il impos
sible d ’admettre la décision , qui porte «pie, pour les jouis
sances postérieures à la demande, les i n t é r ê t s seront «lus a par
tir de chaque perception , lorsque celte demande a laquelle on
veut faire produire un pareil effet est antérieure au Code civil,
dont les art. 1154 et n 5 5 *ont une évidente dérogation aux
principes de 1 ancien droit.
Mais, îcl, nous pensons qu il sera superflu de discuter sur les
principes admis par les premiers juges, comme base de leur
décision ; car l'application qu ils ont faite, et de celui que nous
�ne saurions critiquer, et de celui qui nous paraît inadmissible,
tombent également devant la rectification de quelques faits.
C ’est au 5 avril 178^ q u ’on fixe la date de cette demande,
qui doit capitaliser tous les fruits échus, pour leur faire pro
duire intérêts, et (pii, pour les années subséquentes, capitalise
ces mêmes fruits année par a n n é e , pour leur faire produire
intérêt de chaque perception, ce qui doit produire un résultat
assurément très-salislaisanl pour les intimés, et effrayant pour
les appelans.
Mais, on se le demande , à supposer que Jacques Bathol ait
formé une demande le 5 avril 178Ü, à supposer encore , que
dans cette demande il eût conclu à la restitution, non-seule
ment des jouissances, mais aussi des intérêts des jouissances,
comment serait - il possible , que ce qui était le fait «le
Jacques seul , eût fait courir les ifttérêls des jouissances au
profit des femmes Moissat et Mestre , qui n’étaient seulement
pas parties dans celte instaure, qui étaient forcloses, qui
alors 11e réclamaient nullement contre cette forclusion, (pie
l’on voit au contraire dans tons les actes qu'elles faisaient à
cette époque, se considérer comme étant entièrement étran
gères;! la succession de l'auteur com m un, et n'ayant a prétendre
que la légitime (pii leur avait été fixée avec clause de forclusion.
On a fait remarquer (1,1ns l'exposé des faits combien la
position de Jacques était différente de celle de scs deux
soeurs.
Contre lui , la forclusion n’était prononcée que par le tes
tament de l’auteur c o m m u n , il n'avait donc pas pu donner
son assentiment.
Contre ses sceurs, la forclusion était stipulée dans leurs con
trats de mariage ; et, certes , leur concours dans ces actes, leur
acceptation des clauses générales qu'ils contenaient, emportait
bien l’acceptation de la clause particulière de forclusion.
Il est très-vrai que le jugement de l'an X III en a décidé au
to
�froment, mais cela n’empêche pas que la différence, très-sail
lante des positions , nous explique fort bien comment il a pu
arriver qu’en 1783 Jacques s’élait cru autorisé à former une
demande tendante à faire déclarer nulle la forclusion pro
noncée contre lui personnellement, et à venir en conséquence
à partage, et que ses sœurs ne se soient pas alors crues fondées
à en faire autant.
Mais le seul point im portant, c’est qu’elles ne l’ont pas fait.
Supposons donc que le jugement de 1783 ait existé, q u ’il eut
attribué des restitutions de jouissances avec intérêts, ce juge
ment portait-il profil pour les femmes Moissat et Mestre , non
assurément, pas plus pour les intérêts que pour le principal ;
elles sont forcloses et restent forcloses , pu isq u ’elles n’ont pas
demandé l’annulation de la clause de forclusion , qu’elles n’ont
pas même été parties dans cette instance, et que c’est par le
jugement de l’an XIII seul qu’elles sont relevées de la for
clusion.
Aussi est-ce une erreur matérielle, que le fait consigné
dans les motifs du jugement dont est a p p e l , et qui déclare
que par l ’assignation du 25 thermidor an XII , la veuve Mois
sat et les mariés Mestre 11 ont fait que reprendre l’instance
introduite en 1783. Q u ’on lise cette assignation, qui n’est pas
de l’an XII mais de l’an V , et on Verra q u ’elle n’est pas une
reprise d ’instance, mais une demande première et princi
pale , et cela ne pouvait pas être autrement ; c a r , s’il y avait eu
instance en 1783, et qu’elles y eussent été parties, la validité
de la clause de forclusion eut été jugée à leur égard, comme
en ce qui concerne Jacques, et il n’y aurait pas eu lieu à la
faire juger encore en l’an XIII.
Q u ’on examine aussi, et surabondamment les actes qui ont
eu lieu dans la famille entre l’année 1783 et la tin de l’an Y , et
et on pourra se convaincre que, pendant cet espace de temps,
les femmes Moissat et Mestre ne songaient nullement à se
�faire relever de la forclusion, ou ne pensaient pas le pouvoir,
puisqu’ellespartageaient les successions collatérales, et particu
lièrement, au commencement de l’an V , celle deLouis-Nicolas
dont la composition devait être entièrement changée, si elles
n ’étaient pas forcloses dans la succession directe de l ’auteur
commun.
Ainsi, s’il est justifié que Jacques ait formé en 1783 une
demande contre ses deux frères, en annulation de la clause de
forclusion, et en délivrance de la légitime de rigueur avecrestitution, non-seulement des jouissances, mais même desintérêts
des jouissances, il y aura lieu d ’allouer à sa succession , mais
à cette succession seule, les intérêts des jouissances perçues en
1783.
Disons ici q u ’il paraît bien résulter des énonciations de di
verses pièces de procédure qu’en effet a cette époque une
demande a été formée par Jacques , mais la production de
l’exploit ou du jugement qui en a été la suite , pourrait
seule faire connaître si réellement il avait été conclu aux in
térêts des jouissances. Les adversaires ne produisent pas
cette pièce, nous ne l’avons jamais eue. Si cette justification n ’est
pas faite, les intérêts des jouissances ne pourront évidemment
cou rir, même au profit de la succession de Jacques, qu à partir
de l’époque où il sera justifié que la demande en a été faite
par les héritiers.
En ce qui concerne les intérêts des jouissances attribués
aux femmes Moissat et Mestre du chei de l’auteur commun ,
comme du chei de Louis-Nicolas, ils faut également recher
cher à quelle époque la demande en a été formée.
Ce n’est pas, bien certainement, en 1783, puisqu’on vient de
démontrer que ce n’est qu’en l ’an V , q u ’elles ont demandé
l'annullation de la clause de forclusion, à l’égard de la sucession paternelle, et que Louis-Nicolas n ’est décédé qu’en *796.
Ont-elles formé cette demande par l’exploit introductif d’ins10.
�lance du 22 thermidor an V? nullement. On y voit bièn qu’elles
concluent à la restitution des intérêts des sommes qu’elles pré
tendent leur être dues ; mais il n’y est nullement question
d ’intérêts d ’intérêts, ou d ’intérêts de jouissances.
O r , pour se faire allouer des intérêts de jouissances, il faut
une demande bien précise; car, comme le dit M. Toullier, ( t. 6,
p. 283 ), conclure au paiement des intérêts de ses créances en
général, ce ne serait nullement conclure au paiement des in
térêts des jouissances.
Nous avons démontré, que les intérêts des jouissances ne
pouvaient être accordés ni de 1783, ni à partir de l’an V. Ce
sera aux parties adverses à prouver que ces intérêts ont été
demandés, et à faire connaître l’acte contenant celle demande,
dont la date pourra seule fixer celle de cette restitution.
Mais il est en, même temps essentiel de dire ici q u ’il y
aura lieu d’imputer à leur date, ou, ce qui revient au même,
d ’allouer avec intérêts et intérêts des intérêts , si, par suite de
justification de demande, il en était alloué aux parties adverses,
les paiemens qui ont été fails successivement aux légitimaires,
e t particulièrement la somme de i , 5 g o francs, payée à J a c q u e s
Batliol par les deux institués le 29 mai 1783.
| 3 ®* CHEF.
Question.
Jugement.
Les intérêts des dots et intérêts d'intérêts de ces mêmes dots ,
seront-ils rapportés par les fem m es Moissat et M estre?
Les intérêts des dots ne sont dus qu’à partir de l'ouverture do la succession
de l ’auteur commun.
Les intérêts d’intérêts étaient prohibés par les lois anciennes; ainsi les
femmes Moissat et Mestre rapporteront les intérêts de leur dot, mais aucun
intérêt d’intérôls.
Discussion.
Qfet article de contestation rentre dans celui que nous avons
prévu à§la fin de la discussion du chef précédent ; car le rédac
�teur du jugement par d é f a u t , pour préparer la décision qui
entrait dans ses vues , a entièrement déplacé la question à ré
soudre.
De quoi s’agit-il ici ? de liquidation évidemment. Or sur
le chet précédent , il vient d ’être décidé que les femmes
Moissat et Mestre avaient droit aux intérêts des jouissances de
tout ce qui leur revient dans la succession de l’auteur com
mun, à partir de la demande de ces intérêts de jouissances,
c’est très-bien ; mais aux intérêts d ’intérêts de ce qu’elles n ’ont
pas reçu sans doute ; car, pour ce qu’elles ont reçu , elles ne
peuvent pas plus avoir de prétentions sur les intérêts et inté
rêts d’intérêts, que sur le capital.
Si, par exemple, il leur revenait 10,000 francs; qu’avanll’ouverture de la succession elles eussent reçu 3 ,000 fr., à titre de
dots , ou autrement, elles n’auraient évidemment 5 toucher que
7,000 fr. , et les jouissances et intérêts de jouissances de ces
7,c 00 f. seulement ; car ellesnepeuventsefairepayerlesintérêts
de ce qu’elles ont en mains ; et cependant ce serait le résultat
de la décision du jugement dont est a p p e l , puisqu’on leur fait
rapporter par les institués les intérêts des jouissances de tout
ce qui leur revient, ce qui n’ est autre chose que des intérêts
d'intérêts, et qu’elles ne rapportent pas, elles, les intérêts d ’in
térêts de ce qu’elles ont reçu à compte.
Il faut de deux choses l’une, ou imputer à la date du décès de
l’auteur commun les dots reçues sur la légitimedes deuxfemmes
Moissat et Mestre, pour,apartir'de cette époque,ne leurallouer
les jouissances que déduction faite de ce qu’elles ont en mains,
et à partir de l’époque de la demande d ’intérêts des jouissances,
t postérieure au code c i v i l , ne leur allouer aussi les intérêts que
sous la même déduction ; ou allouer réciproquement les jouis
sances et intérêts des dots de la même date , ce qui simplifie
l’opération et conduit au même résultat.
Si le rédacteur du jugement par défaut s’était dispensé de
�s’expliquer à cet égard, il n’y a pas le moindre doute que, dans,
la liquidation , on eût procédé ainsi que nous l’indiquons; car
il ne serait venu à la pensée de personne de faire payer aux
femmes Moissat et Mestre , les intérêts des jouissances sans
déduction de ce q u ’elles ont reçu ; mais puisque le contraire
résultait formellement des termes du ju g e m en t, il était bien
nécessaire d ’en demander la réformation.
•*
•
' - *
«i
' • •*
• •
) 4 me C H E F .
Q uestion.
Jugement;
Sur les jouissances qui sont dues , faut-il faire déduction des
redevances censuelles et autres, dont les héritages étaient grèvés?
comment f existence de ces redevances devait-elle cire établie ?
Au procès-verbal Laroche le m and ataire des h éritiers Moissat et M eslre a
consenti à cetto d éd uction . E ll e d oit être faite , m ais à la ch arge de justifier :
i<> Des titres p r im o r d ia u x établissant lesdites r e d e v a n c e s , ou au moins
d’actes fo rm els de reconn aissan ce ;
20 Des quittances en forme, et non sujettes à suspicion, établissant les
paiemens.
Discussion.
L e jugement par d éfa ut, œuvre des adversaires, est, il faut
en convenir, rédigé avec beaucoup d ’art.
Il était de toute impossibilité de refuser de retrancher sur
les jouissances le montant des redevances payées; aussi s’empresse-t-on, avec la meilleure grâce possible, de reconnaît!»
q u ’il y a lieu à ce retranchement, mais on a bien soin d’}
mettre immédiatement deux petites conditions qui empê
cheront la disposition principale de produire le moindre
effet.
Il fraudra des quittances en forme, comme si on en prenait
pour des petites r en te s, ce qui donnerait lieu à des frais qui
excéderaient la rente, comme si on en recevait même d ’aucune
• espèce pour les dîmes, par exemple, et pour d’autres prestations
en nature; comme si également un cohéritier qui ne l’était pas
�‘alors, à qui on ne pouvait pas s’attendre îi rendre des comptes,
pouvait exiger la production de toutes les quittances, même
pour un espace de temps tel qu’on n’ eut pas été tenu d’en faire
la justification au créancier lui-même. Mais si on représentait
les quittances de cens et autres redevances pour chaque année,
ce ne serait pas assez ; il serait possible , en effet qu’on se fût
donné le plaisir de payer sans devoir. Pour que la justification
soit complète, il faudra , à côté des quittances, rapporter les
titres prim ord ia ux, ou au moins formellement récognitifs;
c ’était la condition essentielle , car les quittances , comme elles
sont données aux débiteurs,ce débiteur, à la rigueur, pourrait en
avoir un certain nombre, on savait même qu’il en avait produit.
Mais quant à des titres primordiaux, à des reconnaissances de
cens, on sait très-bien que c’est le créancier qui les a en mains,
et que , par conséquent , on ne pourra jamais satisfaire à
cette condition ; c’est précisément ce qu’on veut.
Ici, il faut encore rappeler aux parties adverses qui l’ou
blient constamment, que l e s ‘experts n ’avaient pas pu fixer le
montant des redevances qui étaient dues, parce que, quoique le
sieur Antoine Bathol qui vivait encore à celte époque, et qui
en avait une connaissance parfaite, en eût présenté l’état, elles
n e voulurent pas, dit le rapport, donner la moindre explication
malgré les instances qui leur fu ren t faites. Il faut leur rappeler
q u ’un jugement nous ayant envoyé devant notaire sur cette
difficulté et sur plusieurs autres, le fils du sieur A n t o i n e
Bathol a représenté cet état indicatif du montant de chaque
redevance, de sa nature, du nom des créanciers, et deshéritages
qui étaient grévés, ( procès-verbal, folio 4^et suivans ) en pro
duisant pour chacune des quittances justificatives, que le
sieur Vauris, mandataire des adversaires , n’imagina pas de
prétendre alors, q u ’il fallait les titres primordiaux que sur
sommation de s’expliquer, il répondit, (folio 5 i verso ), qu'il
n'entendait aucunement contester ce qui était équitable, et que
�ses commettans consentaient à ce qu'il f û t fait sur le compte des
jouissances, déduction du montant de toutes redevances censuellcs, dont le paiement était justifié par quittances.
Voilà encore qui est positif : car on ne pre'tendra pas sans
doute que le sieur Vauris entendit q u ’il fallait que le paiement
de chaque année fût établi par quittances, et soutint que si
on en rapportait un certain nombre pour chaque redevance ,
011 ne les rapportait pas pour toutes les années. Si telle eût été
la prétention un débat se serait élevé sur ce point devant le no
taire , tandis que la réponse ferme la discusssion relative à ces
redevances ; tant il est vrai, qu’ainsi que ses termes l’indiquent,
elle était une approbation complète de l’état produit ; et que
les adversaires n ’en aient pas de regret, il est bien temps que,
sur quelques points au moins, la discussion s’arrête. Comment
espéreraient-ils d ’ailleurs faire décider , eux qui n’ont de
mandé à être relevés de la forclusion qu’en l’an V , à qui nous
ne devions jusqu’au jugement de l ’an XIII aucune espèce
de compte ; comment espéreraient-ils faire décider que pour
justifier de l’existence d ’une redevance , nous serions tenus
d ’en rapporter toutes les quittances une à une depuis 1780 ;
mais un petit nombre de quittances ne sont elles pas comme
vingt, comme trente, la preuve de l’existence de la redevance ;
Et son existence établie, n ’y a-t-il pas présomption de droit que
le paiement a été exigé des détenteurs des héritages? Dans une
pareille position la justice se contenterait de preuves e n c o r e
moins certaines.
Ce chef de difficulté à donc été définitivement réglé sur la
représentation de preuves positives, il n ’y a plus lieu de le
mettre en discussion.
i 5 rac CHEF.
Q u a tio n .
£ e prélèvement des dettes payées en l'acquit d elà succession de
�l'auteur commun par les deux frères et la mère commune, estil ju stifié
Jugement.
?
Le sieur Bathol a fourni devant le notaire Laroche un état en trente-un
articles des dettes payées. Gomme cet état n’est pas appuyé de pièces justifi
catives, on ne peut s’expliquer d’une manière particulière que sur les art.
4 , 7 , 9 et 10.
Art. 4. Il y a lieu de rejeter cet article qui a pour objet la légitime do
4,000 francs de Marie B a th o l, dont les deux institués sont héritiers. Prenant
171 ï des biens de droit é c r i t , et 3/ i4 des biens de coutum e, la succession de
Marie doit rapport de ce qu’elle avait reçu.
L ’article 7 , qui a pour objet une somme de 2,390 pour la dot et gains nup
tiaux de la mère c o m m u n e , doit être rejeté, parce qu ’il faut imputer d’abord
sur cette d o t :
1* La valeur des bardes et effets de la mèro commune ;
2° Les dots des femmes Moissat et Mestre, s’élevant sur la succession de la
mère A 1.950;
3° La somme pour laquelle il sera jugé que la mère commune doit contri
buer dans la dot de la femme.Ciquart.
Vi f. 9. 2G francs pour les Trais d’en terrem en t de F ra n ço ise B a t h o l , r e l i
gieuse , rejeté par le m o t i f q u ’ une re lig ie u s e est réputée m orte.
Art. 10. 1,002 francs de principal payé pour supplément de dot à MarieAnne B a th o l, femme Moissat, le 12 octobre 1782, réduit à 752 fr a n c s , parce
que la quittance constate que sur les 1,002 fr a n cs, les deux frères n’ avaient
fourni que 752 francs,
u v '
Tous les autres articles, au nombre de 27, sont rejetés comme n’étant pas
appuyés de pièces justificatives.
Discussion.
Il paraîtbien que le rédacteur du jugement par défaut avait vu
les quittances, puisqu’il dit avec raison que la quittance du
12 octobre 1 7 8 2 quoique de 1,002 ne doit, d ’après ses termes,
être comptée aux deux institués que pour 7 5 2 francs. Apres
nouvel examen nous nous empressons de le reconnaître.
Mais comment peut-on dire que l ’état produit devant le
notaire Laroche ( folio 52 et suivans ), n’est pas appuyé de
quittances. A l’exception de deux ou trois créances, telle que
celle des irais de dernière maladie de l’auteur commun , figu
rant pour 160 francs seulement, sur tous les acticles , les
�quittances sont mentionnées par leur date et les noms des
signataires.
Les quittances étaient devant le notaire mises sous les yeux
du mandataire des parties adverses ; c’était à lui à les critiquer
s’il y avait lieu. Faut-il à présent que ce débat se fasse article
par article devant la Cour j mais la justice a déjà décidé que ce
n ’était pas là l’objet d’une discussion d’audience.
On a très-bien compris que le motif du jugement dont est
appel, qui repose sur un fait erroné, ne saurait ici justifier la
décision; aussi, sur ce point, dans les conclusions prises par
les adversaires, veut-on faire entendre que le sieur Batliol, re
présentant d’Antoine, n ’a pas voulu devant le notaire Laroche
laisser examiner les quittances qu’il produisait; et pour cela,
on cite une partie de la réponse du sieur Yauris ; transcrivons-là
toute entière et littéralement:
L e sieur Vauris a répondu, et requis a u x présentes Tinsertion de
sa réponse, que sans approuver ici, n i improuver tous les dires
des sieur et dame B athol ; il déclarait pour ses commettans
auxquels il n'entend nullement préjudicier, s'en rapportera
justice pour tout ce qui serait établi avoir été payé légalem ent et
par qudtances bonnes et valables, par les a uteurs desdits Batliol,
suivant la vérification qui en sera faite par les experts chargés de
procéder à Vestimation des jouissances, ou encore mieux p a r le
notaire ou commissaire chargé des comptes.
On le demande, cette réponse entortillée de réserves et de
précautions, veut-elle dire, déposez vos quittances, nous allons
les examiner pour rejeter ou allouer, suivant que cela nous
paraîtra équitable? Quand 011 parle d’examen par les experts
ou par le notaire, ou commissaire chargé des c o m p te s , cela
veut-il dire le notaire Laroche? II n’avait nullement cette
mission, il était seulement charge «le rédiger procès-verbal
des explications des parties sur les difficultés qui avaient arrêté
)ps experts pour être les opérations continuées après ces ex
plications.
�Cette réponse, évasive comme beaucoup d'autres consignées
au même procès-verbal , ne veut-elle pas dire au contraire :
nous sommes là pour nous expliquer sur foutes les difficultés
qui suspendent le partage définitif et les comptes? J’entends
vos explications je n’ai rien à objecter , et cependant je n’en
conviens pas , nous finirions trop vile; à une autre fois. Voilà
une belle raison pour rejeter, lorsqu’on en vient à j u g e m e n t,
vingt-sept articles en masse; ces vingt-sept articles doivent au
contraire être tous alloués, parce q ue, lorsque les quittances
ont été présentées elles n ’ont pas été contestées.
Nous ne redouterions nullement, quant au résultat définitif,
de recommencer la justification que nous avons faite, nous
retrouverons encore, à peu de choses près, les quittances qui
furent alors produites; mais toutes choses doivent avoir une
fin: cela est désirable surtout pour les procès.Et lorsqu’en ce
qui nous concerne , nous avons exécuté aussi complètement
que posssible les d i s p o s i t i o n s du j u g e m e n t du 2 juin i 8 i 5 ,
nous d e m a n d o n s s’il peut être permis aux parties adverses de
nous faire recommencer, uniquement parce qu’elles n’ont pas
voulu voir ce que nous avons mis sous leurs yeux.
S ’il y a quelque chose d’é v id e n t, c’est que le jugement par
défaut a rejeté en masse, sous un prétexte de défaut de justifi
cation , les vingt-sept articles qui ont paru à l’abri de toute
espèce de critique, pour s’expliquer seulement sur les quatre
articles qui pouvaient fournir matière à quelque contestation.
Les représentons du sieur Antoine Bathol q u i se sont mon
trés toujours animés de désir d’écarter autant que possible
toutes les difficultés dece lle contestation, reconnaissent avec
empressement que le rejet de l’article quatre et la réduction
de l’article dix leur paraissent fondés; mais ils ne sauraient
adopter le rejet des articles sept et neuf.
C ’est à tort qu’on a décidé, sous l’article sept, que la reprise
de la dot de la mère commune souffrirait retranchement de
�1,950 francs, pour les dots des femmes Moissat et Mestre.On
a démontré ci-dessus ( io m0 c h e f) , qu’il ne devait pas en être
ainsi; on se bornera à renvoyer à ce qui a été dit à ce sujet.
L e mal jugé, en ce qui concerne la déduction à faire pour une
portion de la dot de la femme C i q u a r t , est encore plus évi
dent, puisque le jugement dont est appel déclare lui-même ,
( voir iome che f d’appel ) , que la succession maternelle,
ne doit contribuer en rien au paiement de la dot de la femme
Ciquart.
?oj .
Quant à l’article neuf, il faut avouer que c ’est un motif au
moins singulier, que celui qui déclare q u e , quoique la q u i t
tance des frais d’enterrement de Marie Bathol soit rapportée ,
cet article de dépense ne peut être alloué , parce q u ’avant sa
inort naturelle ccttereligieuse élait réputée morte. C ’est pousser
un peu loin les conséquences d’une fiction : ces frais sont une
dépense de famille qui doivent être supporlés par tous , dans la
proportion des droits héréditaires. Il faut bien avoir envie de
tout contester pour se livrer à des critiques de cette nature.
I 6 1"' c h e f .
11
est inutile de s’occuper de la question soulevée par le ju
gement dont est appel, relativement à une prétendue pré
tention de rapport des dots des femmes Moissat et Mestre à
la succession de Jacques Bathol. Il a été interjeté appel de
ce chef, uniquement pour démontrer que le rédacteur du
jugement par défaut supposait très-gratuitement aux représentans d ’Antoine une prétention q u ’ i l s n ’ont jamais eue, et
c’est ce qui est démontré dans les conclusions.
17™” ,
l
8me,
lir
I 9mo , c h e f s
¡í
"'l 1
d ’a p p e l,
S ' i l ' f i 1 ■'«i&ii l ’ i r j - i V
•" m
f
>
Les 17m(5,
19“°, chefs d ’appel ont pour objet les disposi
tions par lesquelles le jugement fixe , d ’après les bases précé
�demment adoptés, les amendemens des parties dans les trois
successions de Jacques, de Marie et de Louis-Nicolas, de telle
sorte q ue ces trois chefs du jugement dont est appel, ne sont
que le résumé des décisions que nous avons déjà fait con
naître , résumé dans lequel on a omis la succession de fauteur
commun , qui sert cependant à composer toutes les autres.
Nous avons signalé les erreurs qui devaient être réparées;
et dans les conclusions jointes au présent mémoire, nous pré
sentons, d’après ces rectifications, le tableau de lacomposilion
et de la répartition de chacune des quatre successions, qui
font l’objet du procès, en commençant par celle de l’auteur
commun ; y revenir ce serait nous répéter. Il est temps, d’ail
leurs de clore une discussion , que la volumineuse procédure
de celle affaire , la complication que les parties adverses y ont
introduite, leur obstination à refuser les explications qui de
vaient faciliter la solution des difficultés , leur refusplus fâcheux
encore d’examiner les pièces et documens m i s sousleurs y e u x ,
ont dû nécessairement rendre longue et laborieuse.
Ce procès présente en effet cela d’extraordinaire, qu’ici c’est
l ’institué qui, en fournissant tous les documens qu’il peut se
procurer en presse la solution , et que ce sont les légilimaires
qui refusent de reconnaître ce qu’ils savent être vrai, mécon
naissent ce qu’ils ont reconnu, et imaginent difficulté sur
difficulté pour retarder la solution de ces longs débats de
famille. Ils esperent apparemment les léguer, avec quelque
complication de plus, à une autre génération.
R iom ,1 5 janvier 183G.
BATHOL.
M° H D U C L O S E L , Avocat,
M e S A V A R I N , Avoué.
R io m . — I m p r i m e r i e d e t h i b a u d .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_DVV06_0001.jpg
Description
An account of the resource
<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bathol, Nicolas. 1836]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
H. Duclosel
Savarin
Subject
The topic of the resource
successions
forclusion
coutume d'Auvergne
auberges
droits féodaux
cens
généalogie
dot
contrats de mariage
forclusion
testaments
quittances
arbitrages
inventaires
droit écrit
experts
mobilier
procédures
doctrine
légitime
legs
draps
assignats
Description
An account of the resource
Mémoire pour les sieurs Nicolas Bathol et Dessales contre Le sieur Mestre et autres cohéritiers,
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1836
1780-1836
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
87 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV19
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Manglieu (63205)
Chanteuges (43056)
Saint-Alyre-d’Arlanc (63312)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/28/54013/BCU_Factums_DVV19.jpg
arbitrages
assignats
auberges
cens
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
doctrine
dot
draps
droit écrit
droits féodaux
experts
forclusion
généalogie
inventaires
légitime
legs
mobilier
procédures
quittances
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53199/BCU_Factums_G1310.pdf
46a8239a4e78d916e12824947929d365
PDF Text
Text
M É M O I R E
P O U R
DE
LA
L E S
V ILLE
L É G A T A IR E S
SOMME
DE
8 OOOO t1~.
RIOM,
L’ i m p r i m e r i e
IM P R IM E U R
D ’A U R I L L A C ,
D’U N E
A
D E
P A U V R E S
L A N D R I O T ,
d e
DE
LA
Juin
COUR
1804.
D ’A P P E L .
SEUL
�MEMOIRE
POUR
Les Pauvres d’Aurillac, représentés par le Bureau
de bienfaisance de cette v ille , appelant;
C O N T R E
,
L e sieur C A P E L L E héritier de madame
G A L I E U.
de
I L existe un corps q u i , né avec la société, est destiné à
durer autant qu’elle. Objet de la prévoyance du législa
teur , de la bienfaisance des particuliers, des sollicitudes
de la religion, les lois veillent pour le protéger, des mains
généreuses le nourrissent, la piété se charge de le con
soler, et tous les hommes le respectent, car le respect est
D û au malheur.
A 2
�(4)
L es ■pauvres
composent ce corps
\
les pauvres, c’ est-
à-dire, cette portion des citoyens de chaque état, à qui
le ciel a donné la v ie , et refusé les moyens de la soutenir :
membres souffrans de la société, en les recevant dans son
sein elle contracte l’engagement sacré de les secourir.
L ’arbre fertile ne prive aucun de ses rameaux de la sève
qui les féconde.
L ’homme a donc ménagé des ressources à l’homme
contre les disgrâces de la nature ou de la fortune. Il est
des biens mis en réserve pour ceux qui n’en ont point :
la société encourage et protège les dons faits à la pau
vreté par l’opulence. Ces b ien s, ces d o n s , fruits de la
munificence des princes ou de la générosité des parti
culiers, se nomment également
fondations :
ce sont des
dépôts inviolables consacrés par la charité publique -, ce
sont des eaux salutaires dont l’humamté, la bienfaisance,
la religion gardent la source.
Des pauvres se présentent aujourd’hui pour réclamer
une de ces fondations : c’est l’unique débris échappé au
naufrage qui a englouti tous leurs biens ; c’est un legs de
80000
, dernier gage du souvenir d’une femme ver
tueuse dont ils pleurent encore la perte. L ’héritier le
refuse *, des premiers juges l’ont annullé : mais le gouver
nement l’approuve , mais toutes les lois l’autorisent___
les magistrats supérieurs le confirmeront. Il est digne de
la justice de protéger les monumens de la bienfaisance ;
et l ’autorité publique doit consacrer les dernières volontés
d ’ une femme assez généreuse pour vouloir faire le bien
au delà même du to m b eau , et assez heureuse pour Je
pouvoir-
�1
b{ 4
( 5 )
C ’est à des femmes que madame de Galieu avoit confié F A I T S .
la distribution de ses bienfaits. Les femmes semblent des
tinées par la nature à soulager les infortunés; leur pitié
est plus douce, leur compassion plus affectueuse, leurs
soins plus délicats que ceux des hommes : elles sont des
gardes avancées, placées sur la route du malheur pour le
découvrir; elles apparoissent dans ces obscurs asiles où
il se dérobe aux regards, telles qu’un D ieu bienfaisant
qui ramène avec lui l’espérance. Quels pleurs ne se sèchent
point à leur approche ! quels maux ne sont pas adoucis
par leurs soins! que de consolations sorties de leur bouche!
que de dons échappés à leurs mainsi
Sans parler iei des Sœurs de la charité , des Hospitaliè
res et des autres femmes qui se consacroient par des vœ ux
au service des pauyres, plusieurs villes comptoient avant
la révolution des associations de dames pieuses, réunies
par le seul intérêt de la religion et de l’humanité : on
les nommoit indifféremment Dames de la charité, Dames
<le la miséricorde, Trésorières des pauvres. R i o m , Clermont avoient les leurs, et parmi elles comptoient leurs
noms les plus illustres. O n en trouvoit dans toutes les
paroisses de Paris
on en trouvoit aussi dans la ville
d ’Aurillac.
Les Dames de la charité
étoient ordinairement les
dames les plus respectables et les plus distinguées de
-chaque v ille : c’ étoienL des femmes du m onde, les unes
m ariées, d’autres v e u v e s , d’autres célibataires. Elles ne
faisoient aucun vœu ; libres d’abandonner à leur gré
un joug qu’elles s’imposoient librement.
Elles ne for-
moient point de corps; dégagées de tous liens piiblics,
�( 6 )
ne retirant d’ autres fruits de leurs travaux que le plaisir de
faire le bien, distinguées non par des signes particuliers
mais parleurs vertus, connues de l’autorité seulement par
leurs bienfaits, comme la fleur modeste par ses parfums.
Solliciter la piété dans les temples, et la bienfaisance
dans les maisons ; obtenir de l’avare pitié des dons qu’elle
refuse à un hom m e, et qu’elle accorde
a
une femme;
secourir l’infortuné qui se cache, en lui dérobant la main
q u i le nourrit ; assister l’artisan m alade, trop pauvre
pour soutenir sa famille privée de ses travaux, trop fier
pour mendier un lit à l’hôpital ; porter aux douleurs
des remèdes, et des consolations aux chagrins : voilà les
fonctions et les plaisirs des Dames de la charité. Dirai-je
des maux plus secrets qu’elles soulageoient ? parlerai-je
des nourrices récompensées , des orphelins recueillis,
des filles dotées, et de tant d’autres bienfaits oubliés
avec les bienfaitrices ?
J ’ai dit que la ville d’Aurillac avoit ses
charité :
Da?jies de la
on les nommoit dans cette v i l l e , comme dans
la plupart des provinces méridionales,
de. la miséricorde ;
Dam es de l'œuvre
ce q u i veut dire , dames chargées
-du travail de la charité. T e l étoit leur titre à G re n o b le,
à M ontpellier, etc. A Figeac, on en trouve la preuve
dans le testament de madame de G a lie u , qui lègue le
revenu de l’une de ses terres aux pauvres
la miséricorde
de £œuvre de
de Figeac. Croira-t-on que ce titre par
ticulier soit le seul fondement du procès que l’héritier de
madame de Galieu intente aux pauvira ? C r o i r a - t - o n
que ce procès n’auroit jamais ex isté , si quelques dames
pieuses d ’Aurillac
n’avoient
été connues que sous le
nom de Dames de la miséricorde
?
�( 7 )
Leurs aumônes , leurs quêtes, leurs soins, étoient le
seul Lien des pauvres de cette v i l l e , dont la population
s’élève à plus de dix mille âmes. Il n’y avoit alors qu’une
seule paroisse, et cette paroisse etoit sans fabrique et
sans marguilliers. Toutes les oblations, les fondations,
et les autres objets affectés aux fabriques dans la plupart
des paroisses du royau m e, se trou voient à A u r illac entre
les mains des prêtres connus sous le nom de Communalistes , érigés en titre de collégiale par des lettres pa
tentes, et q u i , après avoir prélevé les frais du service
de l’é g lis e , se partageoient ce qu’il y avoit de reste ,
sans en faire aucune part aux pauvres.
L a ville av o it, à la v é rité, un Hôpital ; mais cet éta
blissement ne juuissoit que d’ un revenu médiocre. L a
classe indigente et laborieuse du peuple attaclioit d’ailleurs
une espèce de lionte aux secours qu’elle auroit pu trouver
dans l’hôpital. O n ne comptait de fonds destinés au sou
lagement des pauvres, qu’ une rente de 432
payable
sur la quittance des éclievins et du curé ; ils en confiè
rent la distribution aux Dames de la miséricorde.
Le
zèle de ces dames sembla s’accroître lorsque la
marquise de Fontanges se joignit à elles : le trésor des
pauvres s’enrichit de ses libéralités. L ’évêque de T r o y e s ,
son oncle, y ajouta les siennes. Plusieurs femmes riches,
jalouses d ’imiter de si nobles exem ples, r i v a l i s è r e n t de
charité avec madame de Fontanges. O11 fit aux pauvres,
dont les Dames de la miséricorde prenoient soin , divers
legs dont plusieurs sentences du bailliage de V ie ordon
nèrent la délivrance. Les quêtes devinrent plus nom
breuses •, les assemblées de charité plus régulières ; le
�(8)
curé d’Aurillac les p résid oit, en son absence madame
de Fontanges prenoit sa place : cet honneu r, dû à son
n o m , l’étoit plus encore à son zèle. C ’est sans doute ce
qui fait dire à madame de Galieu, dans son testament,
que la marquise de Fontanges étoit la supérieure des
Dames de l’œuvre de la miséricorde. Jamais elle ne reçut
ce titre de supérieure; il n’étoit donné , comme on sait,
qu’aux femmes qui étoient à la tête d’un couvent, d’une
communauté. Comment des dames qui avoient des époux,
des enfans, des engagemens avec le m o n d e, auroientelles formé une communauté ? Comment madame de
Fontanges, épouse et m è r e , en auroit-elle été la supé
rieure? ce titre est incompatible avec ceux qu’elle avoit
reçus des lois et de la nature.
A cette ép o q u e, vivoit à Aurillac une veuve extrême
ment riche et sans enfans : on la nommoit FrançoiseDorothée de Cabridens. E lle avoit été mariée au sieur
de Galieu de F ig e a c , qui lui avoit laissé tous ses biens,
sous la condition de rendre la terre de G rialou , située
dans le Q u e r c i , à l’un de scs parens. Pour remplir la
substitution, madame de Galieu fit une donation de cette
terre ù l’abbé C a b r i d e n s de C l a v i è r c s , son f r è r e , parent
d ’ailleurs du sieur de Galieu. L a donation fut passée
à Paris en 1 7 7 4 , et l’abbé de Cabridçns a joui de la
terre jusqu’il sa mort.
C ’étoit un homme aussi recommandable par sa piété
que par sa bicnfaisance.il fut question, en 1 7 7 7 , d’éta
blir à Aurillac une école de Frères de la doctrine chré
tienne, pour l’instruction des enfans des pauvres. L ’abbé
de Cabridens donna, pour cet établissement, une rente
de
�( 9 )
de
65o ^ ,
et un capital de ioooo
ff',
Il voulut que ces
sommes demeurassent à jamais consacrées à l’instruc
tion de la jeunesse, môme en cas de retraite des Frères
de la doctrine chrétienne. L ’acte authentique fut passé
avec les officiers municipaux d’Aurillac, le 29 septembre
1777.
L ’abbé de Cabridens destinoit encore/d’autres bienfaits
aux pauvres de sa ville natale. Il jouissoit d ’une grande
fortune. L a succession de madame de G a lie u , sa sœ u r,
est composée de biens situés en A u ve rgn e et en Querci.
T ous ceux d’Auvergne appartenoient à l’abbé de CabriT
dens ; savoir, les domaines de Faillitou et de la Bartassière, qui viennent d’être vendus plus de 80000
, et
le fief de Clavières, qui vaut à peu près cette somme.
Je ne pai'le pas de plusieurs maisons et de
quelques
autres immeubles de médiocre valeur. L a fortune de
l ’abbé de Cabridens s’étoit encore accrue par le don de
la terre de Grialou, dont il pou voit disposer à son gré.
Madame de Galieu, sa/ sœur, n’avoit point d’enfans. U
crut devoir à son é t a t , à son caractère , d’adopter les
pauvres pourries siens; mais, pressé par l’âge, et assiégé
par les infirmités qü’il traîne à sa suite, il confia
h
sa
sœur l’exécution des pieux desseins qu’il avoit conçus.
Il la chargea de vendre les biens qu’il possédoit en A u
vergne, au profit des pauvres. Il lui indiqua ceux qu’assistoient les Dames de la miséricorde pour l’objet de
ses secours, et il la chargea de payer la rente qu’il avoit
destinée
l’éducation de la jeunesse. Ces dispositions,
il ne les consigna point dans un testament. Sa sœur pos
sédoit toute sa confiance. Il ne vouloit pas, lui d it -il,
B
�tjuc le public pût en douter. Il lui laissa donc
sa succession tout entière.
Mais madame
ab intestat
de Galieu a
pris soin de nous apprendre à quelles conditions : en
fh aux pauvres, pour rem plir, dit-elle,
les pieux desseins qui lui ont été communiqués par
son,frère avant sa m o r t , et en ordonnant de vendre,
léguant 80000
p our acquitter ce le g s , tous ses biens d’A u v e r g n e , c’està-dire, tous ceux qui lüi venoient de l’abbé de Cabridens.
Cependant la maison de madame de Galieu étoit assiégée.
Q u e d’amis, que de parens ne se trouve pas une testatrice
opulente ! Q ui pourroit dire toutes les manœuvres, pein
dre toutes les intrigues qu’on employa pour obtenir la
première place, ou du moins une place dans son tes
tament ?
'
L e jour si long-temps attendu arriva enfin : ce fut le
4 octobre 1785. M adame de Galieu a v o i t , à ce qu’il
p a r o ît, plusieurs parens au même degré : c’étoient des
enfans de ses cousines germaines, c’est-à-dire, ses neveux
bretons. D e u x liabitoient Aurillac. L e troisième vivo it
à Saint-Constant, village à q u e l q u e s l ie u e s de cette ville :
on le nommait le sieur C a p e l l e , et il avoit quatre enfans,
deux filles et deux fils. Madame de Galieu choisit l ’aîné,
alors âgé de cinq ans, pour son héritier; elle lui substitua
5011 frère, sans faire aucune mention des filles. L a substi
tution ne s’est pas ou verte, et Pierre-Antoinc-Urbain
Capelle, cousin au quatrième degré de madame de Galieu,
jouit seul a u jo u rd ’h u i d’ une fortune dont i l ne p o u vo it
espérer tju’un douzième, suivant l’ordre de lu nature,
puisqu’il auroit été obligé de partager avec son frère
�(
II )
et ses deux sœurs le tiers qui revenoit à son père.
Ces détails feront juger si ¡’extrême faveur que croit
mériter l’héritier de madame de Galieu, si cetle prédi
lection spéciale que lui p o r to it, dit-il, sa bienfaitrice,
si ces droits respectables du sang et de la nature qu’il
invoque, sont des prétentions fondées ou de vaines chi-inères. Quelle faveur extrême ne mérite pas un héritier
préféré à des parens plus rapprochés! préféré à son propre
père , à son frère ,
à
ses sœurs ! Quelle prédilection spé
ciale n’a pas témoignée madame de Galieu à un enfant
de cinq ans, qu’elle n’avoit jamais v u , qu’elle n’a choisi,
on le sait, que parce que la foiblesse de son âge sembloit ne pas. lui permettre de cqntrarier les volontés de
sa bienfaitrice! Combien sont respectables les droits du
sang et de la nature, lorsqu’ils sont invoqués par un
héritier que ni le sang ni la nature n’appeloient person^
nellement à la succession*
Madame de Galieu laissoit environ
5qqooq ^
de biens^r
çn meubles, en créances > ou en terrçs,,E lle(poçsédoit
le iief de Grialou, celui de C lavières, les domaines de
F e ic e lle , de Lacoinbe, de F a illito u , d e l à Bartassière*.
etc. ; des maisons à A r p a j o n , à A u rilla c,
Figeac; un
mobilier considérable. E lle a fait, il est v r q i, des legs
en très-grand n o m b re : ils s’élèven t, dit l’héritier, à.
270000
tf~.
O n veut l’en croire ; mais enfin la moitié
de celte somme est consacrée à acquitter les detles de la
nature ou de l’amitié ; il n’y a que l’autre moitié qui
soit destinée à des œuvres de charité ou de religion. Ces
legs ne paroîtront pas exorbitans relativement aux forces
de la suçcession, et quand ou songera aux conditions
B 2
�' 1•‘J.
( 12 )
imposées par l’abbé de Gabridens à madame de G alieu ,
sa sœur et son héritière.
Entre les legs pieux , on remarque celui du revenu
de la terre de G r ia lo u , laissé pendant un an
vres de Tœuvre de la miséricorde
aux pau
de la ville de Figeac.
Ce legs a été fidèlement payé ; il devoit l’être avant la
rév o lu tio n ; il n’étoit pas considérable. L ’on n’a point
demandé si les Dames de la miséricorde de Figeac avoient
des lettres patentes.
-
Il est une autre disposition qui excite de vives récla
mations, qui ( s’il en faut croire l’héritier ) est nulle
faute de lettres patentes', qui du moins a fait retour à
la succession , qui enfin doit être réd u ite, t o u j o u r s sui
vant rh ë i’itièr. E lle est faite en faveur des pauvres de
rdcuvre de la miséricorde d ’Àurillac : elle est l’objet de
ce mémoire.
O n sait que l’abbé de Cabridens avoit laissé tous ses
biens à sa sœur, à de Certaines conditions. V o ic i de quelle
manière madame de Galieu les a remplies.
■
E t pour rém plir , d it-elle, les pieux desseins qui
vr ïn’ont été communiqués par Jeu monsieur Cabri« dens , mon frè re } avant son décès , je lègue aux
pauvres de l ’œuvre d e là m i s é r i c o r d e d e la v i l l e d ’A u « rillac laquelle oeuvre est administrée par de pieuses
«
(.(.'
« damés, et dont madame la marquise de Fontanges est
« la supérieure, la somme de 80000
; à la charge
« néanmoins que les administrateurs de l’œuvre seront
« tenus de payer annuellement, et à perpétuité,
aux
« Frères de l’école de la doctrine chrétienne établis à
« A u rilla c, la pension et rente annuelle que monsieur
�« l’abbé
( 13 )
clé Cabrîdens, mon. frère, s’étoit obligé
de-
« leur payer par les actes passés avec eu x, et avec les
« consuls
et communautés
d’Aurillac , sans laquelle
« condition je n’aurois légué à ladite
« somme de 60000
tt‘.
Je veux
œuvre que la
qu’il soit employé le
messieurs les "prêtres
de la ville et communauté d’A u rilla c, qu i seront
dans le besoin , et encore les autres prêtres des en-
« revenu de 20000 ^ pour assister
«
«
« virons de ladite v i l l e , si le revenu de ladite somme
« de 20000
peut le comporter ; et que le revenu des
à soulager et assister
le surplus des pauvres que ladite œuvre a coutume
tïassister. Je veux en conséquence que la somme de
« 40000 *** restantes soit employé
«
«
« 80000
, ci-dessus léguée aux conditions mentionnées,
« soit payée auxdites dames administrant ladite œuvre ,
« sur la quittance qui en sera foux*nie par ladite dame
« marquise de Fontanges, leur supérieure, et aux termes
« ci-dessous fixés. »
:
Madame de Galieu ne fixa aucun terme précis pour
le payement de ce legs : mais elle chargea son exécuteur
testamentaire de recueillir, jusqu’à ce que son héritier
eût atteint l’age de vingt-cinq ans, tous les revenus de sa
succession , et d ’employer ces revenus à acquitter nonseulement le legs fait à. l’œuvre de la miséricorde, mais
tous ceux qu’elle laissoit. Elle destina au même usage le
prix de tous ses biens d’A u v e r g n e , ‘dont elle ordonna la
vente conformément aux intentions de l’abbé de Cabri
dens. Elle nomma le fils de son exécuteur testamentaire
pour remplacer son père, s’il v e n o i t à mourir, avant que
le sieur Capelle eût atteint vingt-cinq ans. Enfin elle prit
�î
( 14} ■
.
toutes les précautions que pouvoit suggérer la prudence
à
une bienfaisance éclairée. Vaines précautions!
soins-
inutiles ! T a n t de mesures, si sagement concertées, n’ont
servi qu’à faire voir que personnenepeut se flatter aujour
d’hui d’étendre son pouvoir au delà de son existence; que
les héritiers testamentaires , aussi avides et plus ingrats
que ceux du sang, ne trouvent jamais assez considérable
la succession qu’ils n’osoient espérer; et qu’ils regardent
presque comme un vo l personnel les legs que leur bien
faiteur s’est permis de faire, et ceux de ces legs surtout
que la religion a dictés, la religion qui seule plaide au lit
de la mort la cause des malheureux.
Madame de Galieu survécut quatre ans à son testament»
Ses résolutions ne se démentirent point : elle mourut sans
y avoir rien changé, au mois de janvier 1789; heureuse
de quitter, pour le séjour de l’éternel repos, une terre où
fermentoient déjà tant de semences de discorde! Elle
mourut : les pauvres la pleurèrent, et ils la pleureront
long-temps.
Surveillante fidèle des intérêts des pauvres, la marquisede Fontanges, qui se trouvoit à Paris à cette époque
s’occupa de leur faire délivrer le legs de 80000
ti~,
T
que
madame de Galieu leur avoit laissé. L ’article 3 d’un édit
de 1749 veut que toutes les fondations faites en faveur
des pauvres soient approuvées par le parlement, qui
nommera des administrateurs au legs ( sans doute si le
testateur n’en a pas nommé ). L a marquise de Fontanges
se rendit chez M . le procureur général, pour le prier de
demander en son nom l’iiomologation nécessaire. M . le
procureur général y conseutit. i l traça la marche qu’on
�Q*cy?)
t i5 )
Revoit suivre. Il îa llo it, d i t - i l , remettre une copie du
testament au procureur du roi près le bailliage d’Aurillac,
qui la lui adresseroit, en l’invitant à requérir que le legs
fût approuvé par le parlement. M . le procureur général
promit de le demander. Ce fait est certain : madame de
Fontanges, qui vit encore, madame de Fontanges, qui
habite A u r i l l a c , l’attesteroit ; et un tel témoignage ne
sera pas récusé.
L e testament fut envoyé à Paris, vers la fin de
ï
79 .
Les troubles survenus alors, les alarmes de la magistrature
sur son état, firent négliger cette affaire, comme beaucoup
d’autres, par le procureur général. Il étoit peu question
de fondations, lorsqu’on ne s’occupoit qu’à détruire. Bien
tôt le parlement fut supprimé, et sans lui l’homologation
devenoit impossible.
Cependant l’exécuteur testamentaire de madame de
Galieu s’étoit mis en possession de tous ses biens, con
formément ù ses volontés ; il devoit les garder jusqu’à ce
que l’héritier eût atteint vingt-cinq ans. Il fit l’inventaire
des meubles, et les vendit pour acquitter une partie des
legs. Il voulut ensuite faire p rocéder, suivant les ordres
de la testatrice, à la vente des biens d’Auvergne. L e sieur
C ap elle, père de l’héritier qui n’avoit alors que neuf ans,
s’opposa à cette vente : il représenta que le moment n’étoit
pas favorable à la vente des immeubles ; et il avoit raison,
l ’année 1789 aclievoit son cours.
Mais les troubles qui commencoient, et les désordres
plus grands encore dont ils étoient avant-coureurs, inquiét oient p eu le père du sieur Capelle : ce qui l ’alarmoit ,
�400
V
( i6 )
c’étoit la nécessité de payer des legs qu’il regardent comme
son bien propre; et sa conduite l’a assez montré.
Ce ne fut qu’en 17 9 2 , et après avoir laissé écouler les
années moins orageuses de 1790 et 1 7 9 1 , que l’exécuteur
testamentaire fit rendre un jugement qui l’autorisoit à
vendre les biens désignés par madame de Galieu : ce juge
ment est du-27 janvier 1792. D ès que le sieur Capelle père
le connut, il fit solliciter une suspension de vente; l’exé
cuteur testamentaire y consentit. Mais enfin, pressé sans
doute par les légataires, et après un délai de six m ois,
il fit poser des affiches qui indiquoient au i 5 juillet les
premières enchères, et l’adjudication définitive au 30 du
même mois.
L e 30 juillet 179 2 , l’assemblée déjà formée, les enché
risseurs réunis, le sieur Capelle père, manifestant alors
le projet qu’il avoit formé depuis long-temps de ne point
acquitter les legs faits par madame de Galieu, projet suivi
depuis par son fils ; le sieur C ap elle, d is-je, fit signifier
à l’exécuteur testamentaire, et au notaire chargé de rece
voir les enchèi'cs , un acte d’appel du jugement qui 01donnoit la vente. Cet incident surprit et troubla rassem
blée; et on vendit seulement quelques petits biens épars,
à l ’aliénation desquels consentoit le père de l’héritier.
L ’exécuteur testamentaire auroit fait sans doute statuer
sur l ’appel du jugement du 27 janvier; mais il n’y sur
vécut pas long-temps : son fils prit alors l’administration
et la jouissance des biens de la succession. Ainsi l’avoit
ox-donné la testatrice, jusqu’à ce que son héritier eût
iitleiiit l’âge de vingt-cinq ans : mais ce qu’elle ne vouloit
pas,
�4 o !
( 17 )
pas, mais ce qu’elledcfendoit, il abandonna bientôt après
les rênes de l’administration qui lui étoit confiée, et toute
la succession, au sieur Capelle père, qui mourut avec la
joie de la transmettre entière à son fils, mais avec le remords
peut-être d’avoir payé d’ingratitude la bienfaitrice de sa
famille, qui s’étoit défiée de lui avec raison, et qui avoit
nommé â son héritier d’autres administrateurs que son
père.
Ainsi l’héritier de madame de Galieu possède depuis
douze ans une fortune qui ne lui appartiendroit même pas
encore, car il n’aura vingt-cinq ans que l’année prochaine!
Ainsi n’ont pas été acquittées les dettes de la charité et
de la religio n , que les revenus dont il jouit de voient
éteindre ! Ainsi s’accomplissent les volontés suprêmes de
ces hommes que la justice place sur leur lit de mort comme
des législateurs dont toutes les paroles deviennent des
oracles! Les exécuteurs testamentaires exécutent ainsi les
vœ ux les plus chers de leurs amis qui ne sont plus !
Si quelque chose peut excuser la foiblesse de ceux qu’avoit choisis madame de Galieu, c’est le sinistre état de la
France au moment où ils remirent ou plutôt laissèrent
échapper le pouvoir confié à leurs mains. L e soleil de 1793
nvoit lui : tout se bouleversoit, tout périssoit, et les talens
et la vertu, et la religion et la patrie.
Alors parurent ces lois à jamais mémorables, qui dé
clarèrent qu’il n’y avoit plus de pauvres, que la bienfai
sance nationale n’en souffriroit plus. Puisqu’il n’y avoit
plus de pauvres, les biens que les siècles avoient accu
mulés pour leur soulagement devenoient inutiles : la
Jaisance nationale
bien-
s’en empara. U n décret rendu eu 1794
C
GO*.
�( 1 8 )
réunit au domaine’ de Tétat toutes les propriétés des hos
pices, toutes les fondations particulières faites en faveur
de l’indigence; en un m o t, l’actif et le passif de tous les
établissemens de charité. Les hôpitaux devinrent des ca
sernes , les maisons de secours des maisons de force, les
églises, le dirai-je! des écuries. . .
Q ui auroit alors osé
réclamer la fondation faite par madame de Galieu? Les
Dames de la miséricorde étoient dispei-sées plutôt que
supprimées; les unes avoient fui aux approches de l ’oi-age,
d’autres habitoient les prisons, le reste gémissoit en silence.
Ces jours affreux semblent déjà loin de nous. U n héros
a paru, suivi de la victoire, et de la sagesse plus utile que
la v i c t o i r e : ses premiers soins ont été de rendre leur
cours à ces sources salutaires et pures qu’ alimente la cha
rité publique. Il a rétabli les hôpitaux dans leurs biens;
il a relevé ces autels à l’ombre desquels les infortunés
trouvoient toujours un refuge ; il a rem placé, s’il est pos
sible , les Dames de la miséricorde, les Dames de la cha
rité , et tant d’autres anciens et dignes tuteurs des pauvres,
en créant, dans la plupart des villes de l’empire, des bu
reaux de bienfaisance.
Les administrations de ces nouveaux établissemens sont
distinctes de celles des hôp itau x , aussi-bien que leurs attri
butions. L e gouvernement a ordonné que les hôpitaux
auroient des administrateurs particuliers, chargés de régir
les biens qui leur étoient rendus, et ceux que des personnes
bienfaisantes consacreroient à fonder de nouvelles places,
ou à conserver les anciennes, dans ces tristes asiles des dis
grâces de la nature et de la fortune.
;
L e s bureaux de bienfaisance sont une reuuion d’ hommes
�( T9 )
charitables, q u i, nommés par le gouvernement, recueillent
sous ses auspices les dons que la pitié offre à l’infortune,
et surtout à l’infortune qui se cache’, ils sont chargés de dis
tribuer ces secours qu’on appelle à domicile. U n arrêté du
gouvernement leur attribue tous les biens affectés à l’entre
tien des Hospitalières et Filles de charité, toutes les fon
dations relatives à des services de bienfaisance, à quel titre
et sous quelque dénomination que ce soit. C ’est pour les
bureaux de bienfaisance que le comte de Rumford a ima
giné ses soupes économiques. Ce sont eux qui sont chargés
de les distx’ibuer.
.
.
(
-,
U n de ces établissemens a été formé à Aurillac i l y a trois
ans : d’anciens magistrats le composent; et les pauvres n’ont
qu’ un reproche à leur faire, c’est de ne leur offrir que du
zèle, et de ne leur donner que des promesses.
O n a dit quelle étoit la misère des pauvres d*Aurillac
avant que les Dames de la miséricorde s’occupassent de les
soulager. Ces dames, dont plusieurs vivent encore, n’ont
pas repris leurs fonctions, devenues sans objet, depuis que
le gouvernement a chargé de l’administration des biens des
pauvres les bureaux de bienfaisance : celui d’Aurillac se
propose d’engager quelques-unes de ces femmes respectables
à se joindre à lui pour la distribution des secours à domicile.
Ces secours ont été nuls jusqu’à ce jour; la seule espérance
des pauvres, c’est le legs qui leur a été fait par madame de
Galieu.
O n a dit que ce legs n’avoit été payé ni par l ’exécuteur
testamentaire, ni par l’héritier de madame de Galieu. L e
bureau de bienfaisance, chargé par les lois de veiller aux
intérêts des pauvres, ne tarda point à le demander au sieur
C i
�fc
( 20 )
Capelle, qui fut cité en conciliation, et ensuite devant ics
juges de première instance d’Aurillac, pour être condamné
à le payer. L e sieur Capelle commença par récuser tous ses
juges, sur de futiles prétextes; et bientôt il obtint de la cour
de cassation un arrêt qui renvoya la connoissance de l’af
faire aux juges de première instance de la ville de SaintFlour.
Les pauvres auroient pu se plaindre de cet arrêt, et
peut-être le faire réformer. Il avoit été obtenu sur un e!
requête qui ne leur avoit pas été communiquée : il étoit
rendu sur un faux exposé des faits. M a is, certains de la
justice de leur cause; ils crurent qu’aucun tribunal ne
d e v o itle u r paroîire suspect, et ils citèrent à Saint-Flour
l ’héritier de madame de Galieu.
Cependant, suivant les dispositions de l’article 3 de
l’édit de 17 4 9 , toutes les fondations devoient être homo
loguées par le pai'lement, q u i, par attribution spéciale,
remplaçoit le prince dans cette fonction. Cette formalité
n’avoitpas été remplie à l’égard du legs fait par madame
de Galieu ; la suppression des parlemens ne l’avoit pas
permis. Les pauvres crurent d e v o i r d e m a n d e r au gou
vernement un arrêté q u i , tenant lieu d’homologation ,
approuvât le leg s, autorisât le bureau de bienfaisauce
à l’accepter en leur n o m , et fît connoître à l’héritier de
madame de Galieu que le bureau exerçoit tous les droits
des Dames de la miséricorde.
Toutes les pièces, tous les l’cnseigrfemcns nécessaires
furent envoyés à Paris. L e ministre de l’intérieur se fit
rendre compte de l’a lia ire, et, sur son rapport, fut donné,
le 7 juillet 1802, l’aiTÔlé du gouvernement qu’on va lire.
�4 oJ
( 21 )
Copie de TArrêté des Consuls.
Les consuls de la république , sur le rapport du mi
nistre de l’intérieur,
L e conseil d’état entendu,
Arrêtent ce qui suit :
A r t ic l e i er.— L e legs de 80000 tf",fait à l’Œ u v re delà
miséricorde de la ville d’A u rilla c, par madame FrançoiseDorothée de Gabridens, veuve G a lie u , suivant son tes
tament du 4 octobre 1785 , reçu par M arm ontel, notaire
à Aurillac , enregistré, sera accepté
de ladite ville
au nom des pauvres
par le bureau de bienfaisance, rempla
çant aujourd’hui l’Œ u v re d elà miséricorde, pour la dis
tribution des secours à domicile.
A r t . 2.— L e montant de ce legs sera rcuni aux autresbiens et revenus des pauvres de la ville d’A u r illa c , pour
être administré et régi par les membres du bureau de
bienfaisance, à l’instar des autres biens des établissemens
de charité.
A
rt.
3. — L e legs étant fait en argent, il sera employé
en acquisition de rentes sur l’état.
A
r t . 4 . — Les administrateurs du bureau de bienfai
sance feront, sur les biens de la succession de la tes
tatrice , tous les actes conservatoires qu’exigera la garantie
des droits des pauvres d’Aurillac.
A r t . 5. — E n cas de contestation ou de refus de la
part des héritiers, les administrateurs du bureau
de
bienfaisance poursuivront la délivrance du legs devant
�V*.
(
22
)
les tribunaux, en s’y faisant préalablement autoriser, clans
les formes voulues par les précédens arrêtés.
A
rt.
6: —
Une somme annuelle de
65 o if~
sera pré
levée sur le revenu du le g s , pour être employée par
le maire à l ’instruction de la jeunesse, sous la direction
et la surveillance du préfet du département.
A
rt.
7. — Pour remplir les autres intentions de la
testatrice, il sera pareillement p rélevé, sur le montant
des rentes, une somme annuelle de 1000
, représen
tant au denier vingt un capital de 20000 ^ , pour être
employée chaque année à secourir les prêtres de la ville
et des environs, qui se t r o u v e r o n t dans le besoin.
A r t . 8. — En cas qu’il n’y ait pas de prêtres indigens,
ou en assez grand nom bre, la somme ou le restant de la
somme sera distribué aux pauvres par le bureau de bien
faisance.
A r t . 9. — L e ministre de l’intérieur est chargé de
l’exécution du présent arrêté , qui sera inséré au Bulletin
des lois.
L e premier consul, signé B o n a p a r t e .
T e l est l’arrêté du gouvernement, en faveur de9 pauvres
d’Aurillae. L e bureau de bienfaisance, autorisé par le pré
fet, a poursuivi le jugement de l’affaire, qui lui paroissoit
décidée a l’avantage des pauvres par cet arrêté. Les pre
miers juges n’en ont pas ou cette idée; le procureur im
périal seul a conclu au payement (|u legs. Quant aux juges
de St.-F lou r, ils ont pensé que madame de Galieu n’avoit
pi\s fait un legs aux pauvresd’A urillu c, mais fyien à l’Œ uvro
�4 oy
'
°-
( 23 )
de la miséricorde \ qu’ils ont considérée comme un corps;
ils ont jugé que ce prétendu corps étoit une communauté
illicite, non approuvée, qui n’a voit pas été fondée pa r des
,
lettres patentes; que par conséquent elle étoit nulle el inca
pable de recevoir des libéralités. Par ces motifs, les premiers
juges ont déclaré le bureau de bienfaisance non-recevable
.
dans sa demande.
Analyser les erreurs qui servent de base à leur décision,
et réfuter successivement les fausses conséquences déduites
de ces deux faits supposés constans et qu’il falloit prouver,
s a v o ir, que les Dames de la miséricorde formoient une
com munauté,.et que madame de Galieu a légué à cette
communauté, et non aux pauvres, la somme que son frère
avoit destinée à des œuvres de charité , ce seroit v o u lo ir ,
,
sans être utile à la cause , affoiblir l’intérêt qu’elle doit
inspirer. Etablissons la justice de la demande , el laissons
l’éclat de la vérité dissiper les ténèbres de l'erreur.
lia cause, en cet état, présente des questions également MOYENS,
im portantes aux yeux du barreau et des hommes du monde.
O n n’agite plus ici des discussions purement civiles. Ce
n’est point la fortune d’un particulier; c’est l’ordre, c’est lé
droit public qui est en suspens.
Sera-t-il permis à un tribunal inférieur de s’ériger en
réformateur des arrêtés du ©
iiouvernement,7 et de déclarer
les pauvres d’une ville considérable incapables de recevoir
un legs, lorsque le gouvernement les a reconnus capables
d ’en profiter ?
Ces mêmes juges, s’ ils n’ont pas excédé leur compétence,
u.’ ont-ils pas porté atteinte au droit public, eu déclarant les
�K-
»
( 24 )
pauvres d’Aurillac non-recevables à demander un legs
qui leur a été fait en 1 7 8 5 , et que l’arrêlé du gouver
nement, tenant lieu d ’homologation, a rendu valable?
V o ilà les deux questions de droit public que fait mûtre
cette affaire; leur examen est l’objet principal de ce mé
moire. O n y ajoutera une seconde partie, dans laquelle on
réfutera rapidement les moyens subsidiaires opposés par
l ’héritier de madame de Galieu devant les premiers juges ;
savoir, que le legs a fait retour à la succession, et que du
moins les magistrats doivent le réduire.
P R E M I È R E
P A R T I E .
O n a dit que les deux propositions qu’il s’agit de prou
ver dans la première partie de ce mémoire, l’incompétence
des premiers juges, l’erreur dans laquelle ils sont tom bés,
sont des questions de droit public. C ’est que les fondations
et tout ce qui les concerne font partie du droit public. Pour
le faire v o i r , et pour établir en même temps la capacité
des pauvi’es en général à recevoir des liJjcrali tés, il est
nécessaire
de rappeler des principes qui s’appliquent
également aux deux propositions à démontrer.
Les pauvres , en nom co lle c tif, dit J. M ,
Ricard ,
forment un corps irrégulier que les lois n’ont point créé,
et qui subsiste par soi-m êm e , toujours renouvelé , tou
jours existant. Les législateurs de R o m e , aussi-bien que les
nôtres, o n t toujours autorisé les dispositions faites à leur
profit. Elles sont même de toutes les libéralités les plus
favorables.
Il est inutile d’en doimer la raison. Chacun voit que lu
nécessaire
�( 25 )
nécessaire du pauvre fait le superflu-du riche, et que c’est
à la bienfaisance éclairée à réparer les injustices de l’aveuglé
fortune;
• >i .1 r ■
_
.i
Les dons faits aux pauvres, considères comme iïn corps y
se nomment en général fondations. Les fondMi'oriS'Sont
de droit public, parce que le gouv,ei‘nem'ënÎlsëhl‘(créé<
^
établit les corps, èt prononce sur' tout ce qui lfe3 rëgàrdéi
C’est par cette raison que d iverséd itso n t pourvu 8'1<1
manière dont les* fondations pourroieiit être fàiteÿ} à lëüè
'•
1
acceptation et à leur administration au nom des pauvrës;
La déclaration de 1749 formoit le^dërniei* drôit sur cetW
inatière avant la revolutio'n/TSii'vdici lefe dtépc>sÎtil>hsrifèM'
latives à la cause :
'
.¡¡ioc^h ;jo î oUiiî
•
2H ij-ioc; K- <Î,:jdDOD j'J ain^i
D éclaration de ï ‘7 40.'' *•? '40i'
>>•'''! " ■
•
I • •
" { r i-n !
*!il ':!iB
,
:;r
ÀTVrrCLii t er.— Voulons^qu’il n^püis'së’ eti-lî f^ t^ W u ii
nouvel établissement 'dè1 chapitres,!I'dollé^és, séiWiïàire^^
maisons ou communautés religieuses',1tttôineloité prétexte
d’hospices-, congrégations, confréries;, hôpitauk du dutroi
corps, et communautés, soit ecdësiastiqü esséculière^
ôu régulières, soit laïquës, de quelque Qualité'qu’elles
soient ; ni pareillement aucÜrfe rioùVelle ci*éatiônJdé fchaJ
pelles, si ce n’est 'en vertu' de notre' pèrmtesioncSiiires^e^
portée par nos lettres1pâttinltfes*,^À&gistr^es- en nos jjar‘4
lemens ou conseils supérieurs.
A
rt.
■
’
2. — Défendons de faire à l’avenir aucune dispo
sition par •aCfé dë'dfekricfrc vo lü M é ^ 'Ô ifi’ fôiidér'i’m nou
vel étitblïsséiliënt dè' la ‘qtia li té ' ’de11cfctlx‘ ^in«'sont '1îhéiiï
tioriné^ daris^l’urticle'précéclenty^peiii'ti'dè hullfte^cjüiûid'
D ’
�. .( 2 6 )
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir nos
lettres patentes.
i '
.
A r t . 3. — N ’entendons comprendre dans les deux ar
ticles, précédons les fondations particulières , qui ne tendroient à l ’établissement d’aucun nouveau corps, collège
ou communauté,, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et quL.n’auroient pour objet que la célébration
de messes ou obi^s yla
subsistance d'étudians pu de pauvres
ecclésiastiques oji séculiers, etc., ou autres œuvres pieuses
de même.nqturç, et également utiles au public; à l’égard
desquelles; £qnda|ion^;ljie ^era p o in t nécessaire d’obtenir
nos ¿lettres. pateaies;^
sni tir a de. laire homologuer les
actes ou dispositions qui les contiendront^ en n o sp arle mens et conseils supérieurs ^ sur les conclusions ou réqui
sitions de nos procureurs, généraux. Voulons qu’il soit en
même temps pourvu par nosdits parlemens à Padministrftt^n des.hijwi^.dç^tiu^s «d’exécution. desditjssibndatipns,,
et, jijUX comptes.qui qn seront l’cndus*.
0, A
r t ^ 9-
;
.
,
:— Annulions, tous les actes ou dispositions qui
pourraient avo^r ét^ faits directement o u indirectement
en faveur des. établissemens mentionnés en l’article xcr.
A r t . 29..— ,Toiitesl^s ^ci^andes ibrruçesenexécution du
preseiit édit.seront portqps directement en la grand’cliam 1ire ¡du pqrlçmcnt, çjt ce pçjy^i.vement
poijr
y
à tous autres jugesr
t*tpc.statu^jsux* lc^ cotypiijsjoiis.de notre px-ocureur
■V . ’i1 :
■or . 1
(
au un •iifiyvi 'l v - i 1ni * !» ¿hnï ' I'
(]pc^ ra ^ o n ,, A * : » wfTi jusqu’^ nos
pftiir.faire^vfil^ir.Je^fondations.'dwtinC’es,ù l^.s.ubfiistance
(Je? p^uvï9a,;içl’^btq^i^ l^iojxxalcigatjon du parlexnent, q u i
�( *1 )
ïcmplaçoît le prince dans cette fonction, et qui étoifc
Chargé' de nommer des administrateurs aux legs qu’il
approuveroit.
Depuis que l’empereur a pris les rênes de l’é ta t, lô
droit public a changé relativement aux fondations. Ce
ne sont plus les cours d’appel qui les autorisent. L e gou
vernement s'est réservé ce soin ; et 11 a nommé à jamais,
pour les administrer, les bureaux de bienfaisance et les
administrateurs des hôpitaux. Cette prérogative du chef
de l’état lui demeure attribuée pour toujours par l’article
910 du Code c iv il, portant : « Que les dispositions au
« profit des hospices, des pauvres d’ une commune, ou
« des
établissemens d’utilité publique , n’auront leur
« effet qu’autant qu’elles seront autorisées par un arrêté
^
du gouvernement.
, re
p r o p o s itio n
E n cet état de choses, il s’agit d’examiner s’ il a été
.
,
.
In c o m p e -
permis à un tribunal inférieur de s’ériger en réformateur
tence despre-
d ’un arrêté du gouvernement, et de déclarer les pauvres
pLurpronon-
d’Aurillac incapables
de recevoir un don dont le D
gouver- cer
?"r ,la
1
c a p a r i i e des
nement les avoit jugés capables de profiter.
pauvres.
Jamais le tribunal de Saint-Flour n’a pu s’arroger
ce droit. Ce n’est point à ceux qui tiennent la balance
de la justice,
h
diriger le gouvernail de l’état. L e chef
de l’empire prononce seul sur l’existence et la capacité
des corps qui font partie de son empire. Ses actes su
prêmes 11e sauroient être ni suspendus, ni réformés, ni
a un 11liés par les autorités secondaires. L e droit public
est aujourd’hui l’arche sacrée que les cours elles-mêmes
ne peuvent toucher ; et des magistrats inférieurs ont bien
D a
�(
)
osé y porter atteinte, en déclarant nul un legs ap p ro u v é ,
autorisé p arle gouvernement, sous prétexte que le gou
vernement n’a pas autorisé, approuvé le corps auquel
il a été laissé, et par conséquent le legs lui-même !
E h quoi! le gouvernement aura reconnu la capacité
des pauvres d’Aurillac pour accepter des libéralités en
1 7 8 5 , par l’entremise des Dames d e là miséi’icorde; et
un tribunal de première instance déclarera les pauvres
non - recevables dans leur dem ande, précisément par
défaut de capacité! Cependant le gouvernement est l ’uni
que juge de cette capacité : le gouvei’nement seul peut
donner ou r e fu s e r aux p a u v r e s les qualités nécessaires
pour recevoir comme pour demander. Ainsi c’est en vain
que le ministre de l’intérieur, que le conseil d’état, que
l’empereur lui-m êm e, ont jugé que les pauvres avoient
été l’objet, et les Dames de la miséricorde les ministres
de la bienfaisance de madame de Galieu
\
c’est en vain
que l’empereur, voyant que de pieuses dames avoient
été remplacées par des hommes charitables, leur a or
donné d’accepter et de recueillir les dons de madame de
Galieu au nom des pauvres ! en vain il a réglé l’emploi
du bienfait, conformément aux v œ u x de la bienfaitrice!
inutilement il a voulu qu’une partie du legs fût appliquée
à l’instruction de la jeunesse; une*autre consacrée au
s o u l a g e m e n t des ecclésiastiques indigens ; une autre des
tinée à s e c o u r i r , dans leurs humbles demeures, les pau
vres de toutes les classes! Ce règlement d’administration
publique a été pesé dans la balance des juges de,SaintFlou r ; e t, trouvé trop léger, il s’évanouira comme un
songe, devant l'intérêt personnel de l’héritier de madame
�44&
(
29
)
de G alieu. N ou s avons d ro it de m ieu x augurer de la
sagesse des magistrats suprêm es : c’est à eux qu’ il est
réservé de ven ger l ’ordre p u b lic d’un tel scandale.
I l seroit superflu de p réten d re que l’arrêté du g o u
vernem ent est contraire au x deux prem iers articles de
l’édit de 1 7 4 9 , puisqu’il autorise le bureau de bienfai
sance à a ccep ter, au nom des p a u vre s, un legs qui n’a
pas été laissé aux p a u v re s, mais à l’Œ u v re de la m iséri
c o r d e , com m unauté non a p p ro u v é e , nulle p ar consé
quent , et au nom de laquelle le bureau ne peu t rien
dem ander. Il est certain d’abord que l ’arrêté n’est p oin t
contraire à l’article 1 e1' . , mais bien conform e à l’article 3
de l’édit de 1749. Cet article autorise les legs laissés au x
p auvres, à condition q u ’ils seront hom ologués. L e g o u v e r
nem ent approuve et h om ologue le legs fait par m adam e
.de G a lie u , parce qu’il le considère com m e fait au x pau-r
vres seu ls, par l’entremise des D am es de la m iséricorde.
11 ne faut que relire le texte de l’a rrêté , p ou r se con
vain cre de cette vé rité. M ais en fin , et quand on suppose
ra it que le gouvernem ent a d éro g é à l’ édit de 1 7 4 9 , il
n’appartient p a s , encore une f o is , aux autorités judi
ciaires d’annuller les actes ém anés du p o u v o ir suprêm e.
S i l’arrêté a été su rpris, que l’h éritier de M cle. de G alieu
se p o u rvo ie au conseil d’état p o u r le faire réform er.
U n e objection plus so lid e , en a p p a re n ce, sera de sou
tenir qu en vain le g o u v e rn e m e n t, par l’article 5 de son
arrêté , auroit ren voyé aux tribunaux la connoissance
des contestations qui p ou rroien t s’ élever au sujet de la
délivrance du legs fait par madame de G alieu , s’ il n’étoit
pas perm is aux juges de s’ écarter de l’avrêté. Il est vrai
�C 3o )
que l’ un des articles porte : « Q u ’en cas de contestation,
« ou de refus de la part de l’héritier, le bureau de bien« faisance poursuivra la délivrance du legs devant les
« tribunaux. » O n convient que l’autorité judiciaire est
chargée d’ordonner le payement du legs, en cas que l’hé
ritier s’y refuse, ou qu’il élève des difficultés mal fon
dées. C ’est une formule répétée dans tous les arrêtés sem
blables , dont sont remplies les archives des lois. Mais
l ’héritier ne peut contester, les juges ne peuvent exa
miner,
que ce qui a rapport au droit c iv il;
savoir,
la validité du testament, la capacité de disposer de la
testatrice , la quotité du legs , p a r e x e m p l e . T o u t ce qui
est de droit public est au-dessus de leur atteinte. L a capa
cité des pauvres, pour recevoir comme pour demander ,
fait partie de ce même droit p u b lic; et le gouvernement
seul s’est réservé d’en décider. Cependant c’est précisé
ment par défaut de capacité que les premiers juges ont
déclaré les pauvres d’Aui'illac non-recevables dans leur
demande. C ’est trop abuser sans doute de l’ambiguité
apparente des clauses de Farrêté. Comment supposer le
gouvernement assez contraire ù lui-même dans les arrêtés
qu’ il Vend chaque jour au p r o f i t d es pauvres, pour per
mettre aux tribunaux de prononcer sur la capacité des
demandeurs, lorsqu’il a reconnu cette capacité par Pacte
même qui saisit les juges? Comment concevoir le sens
de l’article 910 du Code civil, qui veut que les disposi
tions en faveur des pauvres n’aient d’eflet qu’autant qu’ils
fuiront été autorisés à recevoir et
h demander
par le gou
vernement, si les juges peuvent, après l'arrêté rendu,
déclarer que les légataires n’ont pas de qualité pour
demander.
�4
i*
( 31 )
Il est inutile d’employer d’autres raisons à réfuter une
objection qui n’est que spécieuse; et l’on croit avoir suf
fisamment prouvé que les premiers juges ont excédé leur
compétence
7
en déclarant les pauvres d’Aurillac non-
recevables dans leur demande , par défaut de capacité. Si
cependant on pouvoit penser encore que le tribunal de
Saint-Flour a eu le d r o it , malgré l ’arrêté du gouverne
m ent, de prononcer sur la capacité des demandeurs, il
sera facile d’établir que ce tribunal a ,, dans tous les cas,
porté atteinte au droit p u b lic , en déclarant les pauvres
d’Aurillac non-recevables à demander un legs qui leur
avoit été fait en i y 8 5 , et que l’arrêté du gouvernement,
tenant lieu d’homologation, a rendu valable.
O n l’a déjà prouvé : les legs faits aux pauvres sont les
plus favorables de tous. L ’article 3 de l’édit de 1749 ren-fe rm e
a
p r o p o s itio n
Le
leg s
.
a
à ce sujet des dispositions précises, que voici : « Les
fondations faites pour la subsistance de pauvres étn- riiiac, et l’arf •
r
•
« tliansr ecclésiastiques ou séculiers y seront valables ,
à
la
rèté du gouvemement ,
« charge de faire homologuer par le parlement les actes d-homologa^
« qui les contiendront. » L e parlement est chargé, par
le môme article,, de n-ommer des administrateurs aux.fon
dations qu’ il approuvera.
L e legs fait par madame de Galieu, s’il a été laissé aux
pauvres,, et non à l’œuvre de la miséricorde, comme le
prétendent les premiers juges, devoit d o n c , pour devenir
valable, être homologué par le parlement.
La révolution n’a point permis aux tuteurs des pauvres
de remplir cette formalité : mais le gouvernement actuel
y
a suppléé
\
et on a fait voir que son arrêté tenoit e n -
renJi
�( 32 )
tièrement lieu d’homologation. L ’évidence de cette vérité
inippe d’ailleurs tous les yeux. Il ne s’agit que de prouver
que le legs fait par madame de Galieu a été laissé nom
mément non moins qu’uuiquementaux pauvres d’Aurillac.
Mais cela meme devient évident par les circonstances
qui ont précédé le legs, par les termes du legfe lui-même'.
L ’abbé de Cabridens, homme d’une bienfaisance éclairée
par la religio n , se voit riche au delà de ses espérances,
et par son patrimoine, et par le don de la terre de Grialou
que lui a fait sa sœur : il n’a que des parens éloignés ; il
veut faire d’utiles aumônes; il jette les yeux autour de
lui, et voit les pauvres d’Aùrillac dénués de tout secoursJ
et même du bienfait inestimable de la première instruc
tion. Il commence par donner, en 1 7 7 7 , une rente de
6 5o
et une somme de 10000
pour l’instruction de la
jeunesse. E t qui n o m m e - t - i l pour diriger cette bonne
œ uvre? les Frères de la doctrine chrétienne.
Résolu de verser d’autres bienfaits encore sur les pauvres
de la ville qui l’a vu naître, il ne veut pas charger ses
derniers jours des pénibles soins de vendre ses propriétés;
il ne veut pas dépouiller une sœur qui lui est chère : c’est
h
elle qu’il confie, a v a n t de m o u r i r , l’exécution de ses
pieux desseins. Etoit-ce en effet les Dames de l’œuvre de
la miséricorde qu’un homme aussi bienfaisant avoit en
v u e , ou les indigens qu’elles soulageoient? Cet ecclésias-*
tique éclairé, q u i, dans l’acte de 1 7 7 7 , prévoit que les
Frères de l’école chrétienne pourroient être supprimés,
et donne en ce cas la rente de
65 o 1t~ à
la ville, pour
l ’instruclion de la jeunesse, 11e fondoit-il que sur le pré
tendu corps appelé l’Œ u vvc de la miséricorde, et non
pas
�4 ‘f r ,
( 33' )
p ns sur les pauvres, objet des secours depl’jCEuvrc-?' N e
l'entend-on pas parler par la bouche de sa sœur,, partager,
distinguer les indigens en ti*ois classes, pauvres à instruire,
pauvres ecclésiastiques, pauvres honteux? Ecclésiastique,
il témoigne une prédilection spéciale aux ecclésiastiques
indigens; bienfaiteur éclairé, ilseeourt, par préférencè,
. l ’iniortune qui rougit de solliciter des secours.
1! ;
N o n , jamais les magistrats ne croiront que l’abbé de
Cabridens ait eu de pieux desseins en faveur des Dames
delà miséricorde, et non en faveur dé ces pauvres qu’elles
.avoient choisis pour l’objet de leurs soins : cependant
madame de G ’alieu ne fait , ditrelle,
desseins de sonfrère.
qvi èxécilier les pieux
Si donc l’abbé de Cabridens n’avoit
en vue que les pauvres, si madame de Galieu n’a fait
qu’exécuter ses charitables volontés, ce n’est qu’aux pau
vres qu’elle a pu , qu’elle a dû léguer, qu’elle a lé g u é , et
à trois classés de pauvres distinctes et clairement désignées :
• aussi dit-elle qu’elle lègue
aux pauvres^ V o ic i
les expres
sions dont elle s’est servie : a E t pour exécuter les pieux
a desseins qui m’ont été communiqués par l’abbé de
« Cabridens , mon f r è r e , avant sa m o r t , je lègue
«
pauvres de TŒuvre de la miséricorde
a ux
d’ Aurilluc, la-
« quelle Œ u v re est administrée, etc........ la somme de
«
80 0 0 0 tf*, dont une partie sera employée
h l ’ in s t r u c t i o n
« de la jeunesse, une autre au soulagement des pauvres
« ecclésiastiques, le reste enfin à s e c o u r i r les autres pau« vres que l’Œ u v re a coutume d’assistcf. » :
^
Vj
Les circonstances qui ont précédé le;legs s’accordent
donc avec les termes dans lesquels /il
jconçu , . pjoyr
montrer qu’il a clé fait aux pauvres, pf. k.lypisrcksses de
�(. 34, )
' pauvres, et que par conséquent les Dames ¿6 l’œuvre
<
. n’étôient-chargées que d’en toucherde capital, de le placer
en contrats de rente, et d’en distribuer le revenu ; le tout
, de l ’agrément du parlement.
•
»Tous les esprits ne sont pas également frappés de la
. justesse d’une preuve qui n’est formée que par une réunion
de circonstances et d’inductions tirées de ces circonstances.
- Appelons ;le raisonnement au secours des faits , et que
toutes les armes de la parole fassent triompher la vérité.
Si le legs étoit laissé aux pauvres d’A u r illa c , sans autre
explication ,; personne'ne douteroit qu’il ne fût valable.
’ T o u te la difficulté vient donc de ce qü’il est laissé aux
j pauvres de l’Œ n vre de la miséricorde, d’où l’on prétend
3 induire qu’il est fait à l’Œ u vre elle-même. E h b ien , qu’on
-•admette l’hypothèse où il seroit fait simplement aux pau!'vres d’Aurillac i que seroit-il arrivé?.
>
Il étoit nécessaire que le parlement homologuât le tes‘ tament. Q ui aurait demandé l’homologation? L ’exécuteur
testamentaii’e, dira-t-on, l’auroit d em an d ée.. . Soit; mais
qui nuroit reçu les fonds, qui les auroit administrés? Les
administrateurs choisis par le parlement; car l’édit de 1749
~ le charge d’en nommer. E h bien ! s’il eût plu au parlef'ment de choisir les Dames de la miséricorde, pour dis
t r i b u e r léil fonds, et leur supérieure pour les recevoir,
; n ’étoit-il pas le maître? E t quel choix plus sage auroit pu
*''‘faire Tn 11tort lé'publique? C ’étoit doubler le prix du bien
fait q u e d’en corificr la distribution à de si pures mains ;
3 ¿’étoit cofnmetti’é la vertu modeste, la piété éclairée, la
1 élviritô vigilante; à l’exécution des derniers vœux de la
' VCrtii, d<} îtf *piété; de la charité.
�C 3* )
Objectcra-t-on que le parlement nVuroit pas nommé
les Dames de la miséricorde? P ou rqu oi? parce qu’elles,
formoient un corps illicite. Il faudroit d’abord prouver
qu'elles formoient un corps. Mais ensuite, et toujours en,
supposant que le legs eut été fait simplement aux pauvres
d’Aurillac, l’autorité publique ne reconnoît pour corps,
dans l’état, que ceux que sa volonté a créés. L e parlement ,
n’auroit donc point jugé illicite un corps qu’il n’auroit
pas même reconnu pour corps. Informé par le substitut
du procureur général, auprès du bailliage d’Aurillac, des
bienfaits et du zèle des Dames de la miséricorde, le par
lement les auroit sans doute, commises à la distribution du
don de madame de Galieu. Peut-être même il auroit or
donné que les fonds seroient versés entre les mains de ces
dames; peut-être aussi il auroit exigé alors que les éclievins veillassent à l’emploi des sommes en contrats de rente,
suivant l’intention de la testatrice , et que les contrats
fussent passés en leur nom : précaution sa g e , parce que
les Dames de la miséricorde n’étoient qu’une association
passagère, et parce que la ville et son corps municipal
devoient toujours durer.
Ici triomphe la justice de la cause des pauvres; la vérité
paroit ici dans tout son jour. Ce que le pai’leinent auroit
fait, auroit pu faire, la testatrice l’a pu faire : elle l’a fait.
L e parlement auroit pu choisir , pour administrer les
fonds laissés par madame de Galieu, les Dames de la mi
séricorde; madame de Galieu les a choisies, elle a pré
venu le choix de l’autorité : elle l’a-indiqué,du moi^s,
car les fondations, on le répète, sont de droit publip, ^
l’autorité publique peut changer- les administr,aleurs nomE
2
�( 3* >
niés par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix.' Il falloit bien que le legs fût reçu au nom des
pauvres, fût placé au profit des pauvres, fût distribué à'
ces mêmes pauvres. I,a testatrice a chargé les Dames de
la miséricorde de tous ces soins, toujours sous la conditioh que l’autorité publique ratificroit ses volontés par
ticulières.
Q ue les premiers juges viennent dire maintenant que
l’Œ u v re de la miséricorde étoitun corps, et un corps non
approuvé ; qu’ils tirent des termes mêmes dans lesquels est
Conçu le legs, la preuve que la testatrice rogardoit l’Œ u v re
de la miséricorde comme une com munauté, comme un
Corps existant dans l’état, et qui devoit toujours exister.
Cela n’est pas constant : mais enfin qu’importe l’opinion
qu’avoit la bienfaitrice de ceux qu’elle chargeoitde la dis
tribution de son bienfait, si elle ne les regardoit en effet
que comme des administrateurs, comme on vient de le
prouver ?
L ’Œ u v re môme, fût-elle un corps ( c e qu’on n i e ) , ce
corps ne f û t- il pas approuvé, quelle loi empêchoit la
testatrice de préposer un tel corps
h
la distribution de
son bienfait, toujours sous la condition que le parlement
npprouveroit ce c h o ix ?
• L ’édit de 1749 v e u t - i l que les dispositions faites aux
pauvres soient annullées, lorsque la distribution en a été
confiée à des personnes incapables, ou
à
des corps non
approuvés? N on : l’article 3 de l’édit confirme toutes les
f o n d a t i o n s en faveur des pauvres, à la charge de les faire
homologuer : mais i l ‘ ne dit pas que si l'administration a
e t c ‘laissée à des inains incapables, les fondations seront
�4A-
(3 7 )
annullées; il ordonne, seulement au parlement 'de nom-»
mer des administrateurs à la fondation.. N ’est-ce pas dans
le cas où ceux qui auront été nommés seront indignes ou
incapables de cette honorable fonction ? Peut-on expli
quer autrement cette dernière disposition de l’éd it, et
seroit-elle applicable, si les administrateurs choisis étoient
des personnes dignes de toutè la confiance publique, ou
des corps légalement établis ,f tels1que des1 hôpitaux ou1
des fabriques?
: •' i
• *>-
< C ’est en vain que l ’on s’aveugle sur la justesse(dc cette
conséquence, et que l’on soutient q u e , s’il en étoit ainsi *
rien ne seroit plus facile que d’éluder la prohibition de
l’éditj ejn>léguant indirectement à desiCorps illicites, qu’on
nommeroit simples administrateurs en apparence/Erreur
évidente! L e corps, ou la personne à qui le legs seroit
laissé, ne's’opposeroit-il pas à l’avidité du corps chargé
de l’administration.? L e parlement ne d om in erait-il pas
d’autresiadministîâfeuts? E h quoi! madame Gàlieu choisit)
trois classes depativres pour ses ¡légataires ; elle: rend son
testament public, notoire dans la ville entière d’Aurillacy
par l’ordre de vendre tous ses biens d’A u v e r g n e ; elle or
donne de placer le capital de son legs \ pour n’en distribuer*
que les revenus; et l’on osera dire(que l’Œ u v re de la misé
ricorde, que ce corps chimérique tjùi n’existe que dans
l’imagination du sietir Capelle et des premîers juges, auroit
pu s’enrichir des dépouilles des pauvres, et détourner &'
son profit la source dest charités: d ’uné. femme vertueuse!
C c s t trop abuser db L’obscurité qu’oû. ¡voudrait répandre'
sur la cause la plus claire, .-.. ir ...
•; :V;
1 ;
, N e laissons pas môme à l’erreur le dernier retranche-^
�( 38 )
ment qii’elle élève contre la vérité. L ’Œ u vre de la misé
ricorde , ce corps illicite! fcette communauté illégale! qui
avoit une supérieure! une assistante! un receveur! un
titre particulier (disent les premiers juges)! n’étoit point
un corps, n’étoit point une communauté; c’étoient quel
ques daines vortueuses rassemblées pour faire le bien. Les
communautés'ne meurent jamais. Ce sont des personnes
dans l ’état. Elles ont leurs biens, leurs statuts, leurs'ehefs.
Les dames de la miséricorde étoient des femmes du monde^
mariées, veu ves,' célibataires, qui ne faisoient pas de
v œ u x , q u i n ’avxnentpas de biens. Elles s’étoient chargées
Seulem ent der distribuer ceux qu’on donucroit aux pauvres.
Q u i a apprit aux.premiers juges qu’elles avoiçnt un titre
p,i rticulier^inine assistante, tiné supérieureiu n receveur ?
Les Dames 'de la miséricorde n’avoient pas de titre par
D am es de Vœuvre
d?autres villes Uamc's
ticulier. O n les nommoit & Aurillac
de, là. miséricor.lc / comme dans
de là charité. C e mot d 'œuvre ne
désigné point tin corps
nouveau) : i l signifie itraVail, et indique les modestes fonc-i
^ions des femmes pierïses qui s’étoient dévoilées au service
des pauvres. Les Dames de la miséricorde n’avoient pa^
d7«ssistîinte. I;eu r prétendu r ec e v eu r, c?étoit l’une d’ellesy
choisio;:entre les autres pour recueillir les dons des poiv
üpnnés généreuses.* lElles n’avoient pas de chefs. Madame
die Foutanges; il est v r a i , est appelée par m.-idame de
(Jalieu leur supérieure; mais c’est un titre imaginé par
la; testatrice-y.Qujubiqueiment inVenté' pour désigner celle
que
égaïeïià voiciil) cluirgée de présider leurs assemblées'
en l'absence du curé d’Aurillac. Ltiiduré Id’AuriUuc, qui
CtoH.leui’) y m l a b l c chefp dcvoit assister/ cçmrne oii vient
�C 39 )
de le dire, à toutes leurs réunions,'et on en rapporteroît
la p r e u v e , s’il le falloit. Ces dames s’étoient réunies naguère:
leur société se seroit rompue à la mort des plus zélées,
comme toutes les sociétés. E lle est rompue en effet aujour
d’hui , quoique plusieurs des associées vivent encore, et
entr’autres la plus illustre.
!
i
M ais, à quoi bon tant de détails pour apprendre ce qu’à
S a in t-F lo u r seulement ,on ignore , ,ce que chacun sait à.
Aurillac comme ù Clermont, comme dans la ville où on
écrit ce mémoire. Cette ville aussi avoit ses Dames de la
charité. Furent-elles'jamais considérées, co m m cu n e com
munauté ?
•-
«: i , i
•,( a v }
, • v»
C ’en est assez sans doute pour montrer qiie le legs fait
par madame de Galieu n’a été laissé qu’aux pauvres, et
non pointa un corps imaginaii*c. Il est donc valable, puis
que l’an’êté du gouvernement supplée à. l’homologation ;
et les premiers juges ont porté, atteinte a,u.di'oit public,
en déclarant les pauvres d’Aur,illac non recevables à de
mander un legs qui leur a été laissé nommément non
moins que directement, un legs que le gouvernement a
autorisé. D ’ailleurs^ lp gouvernement avoit déjà ¡reconnu
lu capacité des pauvres'pour recevoir et pour^emnrtdeV):
il n’appartenait plus au tribijnal; de. ¡Saint^-.Flaur d’en
décider. Ce tribunal a donc î\ la fois excédé sa compétence
et mal jugé nu fond. Son .jugement doit donc être infirmé
sous ces deux rapports.
., I(
•
f:
d e u x i è m e ' P a r ï i e. - 1
i
*f
i
'l
• .1 ' .
c;. :
y /•: >r
S
Moyens
L ’héritier de madame de G a lie u , plus instruit qvje siiliairi's
poses par
personne de la foiblesse de sa cause, après que la validité ritier.
�C40)
du legs .qû’ il prétend nul a été démontrée, soutiendra',
:comme il l’a fait devant les premiers juges, que du moiiis
de legs a fait retour , si l’on peut ainsi s’exprimer, à la
v
succession dont il étoit séparé, et il se fera une dernière
-ressource de la condition de retour écrite dans le testa
ment de sa bienfaitrice,
J' : ) • •
r
’ ■• !
i°.Pr^(pn(îu-
•
r
! |
1;
,
L a voici : « E t dans le cas, d i t - e l l e , où l’Œ u v r e de
¿''la""succès- c< la miséricorde viendroit, par la suite des temps, à être
¿ion
« réunie à l’hôpital général d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital, je veux et entends qu’en ce cas le legs de
« 80000 tf", que je fais ù ladite Œ u v r e , fasse retour à mon
ce héritier. »
Que peut-on espérer d’une clause aussi extraordinaire,
qui est contraire au droit du pouvoir suprêm e, et qui
'fait dépendre le retour du legs d’un événement qui 11’est
-pas encore arrivé, et n’arrivera vraisemblablement ja
mais? Cependant le sieur Capelle a fait de ce moyen un
‘des principaux motifs de ses refus. Foible , impuissant
'auxiliaire, qui ne défendra point une cause privée de
scs appuis les plus solides depuis que la validité du legs
est démontrée! Inutile et dernière ressource, qui ne
résistera point à la force du droit public et de la vérité!
f‘
Dans les jnatières qui appartiennent au droit p u b l i c ,
il faut se garder de cette o p iu io u , trop générale, que
l’intention du testateur est la suprême loi; qu’ il peut
resserrer les siècles dans le cercle de sa v o lo n té , et donner
des chaînes aux générations qui n’ont pas encore reçu
-1; > *-r. iliîi
o.
■1 * H)’jour. Il faut'mettre de sages restrictions à ce raisonne..¿jî
frient dosâmes généreuses, que le bienfaiteur est libre d’imposer
�( 4* )
'
poser des conditions à des bienfaits librement accordés.
Ce raisonnement peut être fo n d é , lorsqu’il s’agit, dans
le droit civ il, de savoir si un légataire a droit à un legs
qui ne lui a été fait qu’à de certaines conditions : c’est
alors la volonté du testateur qu’il faut considérer. Mais
les fondations sont de droit p u b l i ç , comme l’héritier
dé madame de Galieu en convient sans doute ; et les
vrais principes du droit public sont que le bienfaiteur
peut ne point d on n er, mais qu’il n’est pas toujours libre
de reprendre. Il est le maître de ses biens ; mais ils appartenoient avant lui à la société, et ses dons ne sont en
effet qu’une dette. L e
bien public est son b u t ; mais
c’est à l’autorité publique à le remplir de la manière la
plus utile à l’é ta t, la plus convenable aux circonstances.
O n trouve le développement de ces principes dans les
préliminaires de l’ouvrage nommé par l’illustre Grotius
le D roit de la guerre et de la p a i x , et dans la première
partie du D roit p u b lic, de M . Domat.
C ’est ainsi que des sommes, destinées par le fondateur
à élever une église, ont été employées par le prince à
doter un hôpital ; c’est ainsi que divers arrêts ont changé
les administrateurs nommés par un testateur à la fonda
tion , et que le gouvernement actuel a chargé le bureau
de bienfaisance d’ Aurillac de distribuer aux pauvres les
dons de madame de Galieu, qui avoit confié ce soin aux.
Dames de la miséricorde.
Toutes les clauses par lesquelles un fondateur met des .
entraves aux droits de l’autorité publique sur sa fondation,
sont donc regardéescomme non-écrites ; c’est une maxime
de la jurisprudence romaine, comme de la nôtre. T elle est
F
�( 4* )
la condition mise par madame de Galieu à son bienfait.
O n diroit qu’elle-m êm e en a reconnu le vice ; elle l’a
placée ou plutôt cachée à la fin de son testament, comme
une idée étrangère à son cœur, et qui ne lui avoit pas été
inspirée au moment où elle commençoit son testament
par laisser 80000
aux pauvres.
M adame de Galieu vouloit bien soulager les pauvres : mais
elle vouloit que les Dames de la miséricorde fassent les
seuls ministres de sa bienfaisance; elle leur attribuoit ex
clusivement le droit de distribuer ses dons. C ’est, dirat-on , parce qu’elle les destinoit uniquement aux pauvres
que l’Œ u v re soulageoit, c’est-à-dire, aux pauvres honteux,
aux pauvres qui n’alloient point à l’hôpital. Si cependant
le parlement avoit jugé qu’il seroit plus utile à la ville
d ’augmenter les fonds de l’hôpital général que d’employer
les dons de madame de Galieu en secours à domicile, s’il
n’eût voulu homologuer le legs qu’à cette condition, peuton douter que la ville tout entière n’eût réclamé contre
la clause de retour stipulée par la testatrice? L e parlement
sans doute n’y auroit eu aucun égard : il eût usé du droit
que lui attribuoit l’édit de 1749, de nommer des admi
nistrateurs aux fondations soumises à l’homologation, et
il auroit attribué aux administrateurs de l’hôpital celle de
madame de G a lieu , s’il avoit jugé plus utile d’en faire
cet usage.
E n fin , un moyen victorieux contre la prétendue clause
de retour invoquée par l ’héritier, c’est l’arrêté du gouver
nement qui prononce tacitement qu’elle est comme nonécrite. Quand on supposeroit même que l’événement
prévu par la
testatrice est arrivé, ce qui est fa u x , le chef
�4^/
( 43)
de l’état, usant de son autorité suprême, a déclaré que
la réunion du legs à la succession ne s’est point opérée ;
il a reconnu la capacité des légataires; il a nommé de
nouveaux administrateurs aux dons de madame de Galieu.
L ’autorité judiciaire n’a point le droit de réformer cet
acte, émané de la première des autorités.
Mais la clause de retour, non-seulement est contraire
au droit public, non-seulement est annullée par l ’arrêté
du gouvernement, elle est encore illusoire autant qu’inu
tile. L ’événement qu’elle prévoit n’arrivera jamais, sui
vant toute apparence; du moins il n’est point encore
ari’i v é , comme il est facile de le démontrer.
Est-ce le prétendu corps appelé l ’Œ u v re de la miséri
corde qui a été réuni à un hôpital? cela est impossible.
O n a prouvé que ce corps n’existoit point. L a testatrice,
d i r a - t - o n , pensoit qu’il existoit, car elle suppose que
l ’Œ u vre de la miséricorde pourroit être réunie à un hô
pital. Cette objection rentre dans la proposition déjà
réfutée, que les Dames de la miséricorde formoient une
communauté. Ce n’est pas la le ttr e , c’est l’esprit de la
clause qu’il faut chercher. L a testatrice a voulu prévoir
le cas où les biens destinés à être distribués aux pauvres
par les Dames de la miséricorde seroient réunis à ceux
de l’hôpital général d’Aurillac ou de tout autre hôpital;
elle ne vouloit pas que ses bienfaits, consacrés à soulager
l ’indigence laborieuse, servissent à nourrir l’oisiveté et la
paresse dans un hôpital, comme il ai’rive quelquefois. Ses
cx-aintes ne se sont pas réalisées, ses desseins n’ont pas été
trompés; aucune loi de la révolution n’a confondu les
biens destinés aux secours à dom icile, avec ceux que la
F a
�( 44 )
générosité publique offre à tous les pauvres indistincte
ment dans les hôpitaux : ces biens ont toujours été dis
tincts, comme lies administrateui’s qui les régissoient. Je
le prouve.
L a première loi rendue au sujet des établissemens de
bienfaisance, c’est celle du 18 août 1792 , qui supprime
toutes les associations, confréries et congi'égations de piété
ou de ch a rité , et qui ordonne que leurs biens seront
administrés et vendus comme les autres domaines natio
naux. D ès ce jour plus de secours à dom icile, mais point
de réunion des biens des pauvres qui les recevoient aux
biens des hôpitaux.
L a loi du 19 mars 1793 rétablit les secours à domicile:
elle ordonna qu’il seroit form é, dans chaque canton, une
agence chargée de la distribution du travail et des secours
aux pauvres; que ces secours seroient divisés en secours
pour les pauvres valides., et secours à domicile pour les
pauvres infirmes.
Enfin parut le fameux décret qui déclara propriété
nationale l’actif et le passif: des hôpitaux et des autres
établissemens de bienfaisance. L ’article 4 o r d o n n e à la
commission des secours publics de faire parvenir ( aux
administrateurs des hôpitaux ) les fonds nécessaires aux
besoin^, dq. ces établissqn^çps, pour leur dépense courante,
jusqu’à ce que la distribution des secours soit définitive
ment arrêtée;
Ainsi furent conservés, et les administrateurs des hô
pitaux , et les secours que tous les pauvres indistinctement
recevoient dans,ces établissemens, comme les secours à
domicile revoient été par, la loi du 19 mars 1793? cIui
�4*9
( 45 )
charge de leur, distribution les agences des cantons ; ainsi
n’ont jamais été confondus x ni les bjeijs.cles diverses classes
de pauvres, ni les administrateurs de ces biens.
Les choses sont demeurées en cet état jusqu’à la loi qui
maintient les hôpitaux dans ceux* de leurs biens qui n’ont
pas été vendus. Peu de temps après, et en 1 7 9 6 , fut
rendu.le décret qui crée des bureaux de bienfaisance,,
chargés spécialement dé la distribution des secours à do
micile. Ces bureaux remplacèrent les agences établies par
la loi du 19 mars 1793 ; et bientôt un décret leur rendit
les biens, des pauvres qui ftvoi,ent ^échappé à la vente
ordonnée par le décret du 18 août 1792. L e legs fait par
madame de Galieu est de ce nombre.
Ces détails o n t.p a ru nécessaii’es pour montrer que,
jamais les biens destinés aux secours à domicile n’ont, é,tér
réunis à ceux des h ô p ita u x , comme le prétend le sieur,
Capelle : il faut fermer les ye u x à l’évidence, pour sou
tenir une pareille opinion. Il est vi*ai que pendant quel
que temps les biens destinés au soulagement de toutes les
classes de pauvres ont été réunis, au domaine national,,
et confondus, si l’on v e u t , dans le même trésor, dans,
le trésor public : mais cette source commune se divisoit,,
pour ainsi d ir e , en de,ux ruisseaux dont le cours étoit
séparé. Bientôt les sources sont devenues distinctes comme
les ruisseaux; mais jamais celui quo devoit alimenter la,
bienfaisance de madame de Galieu n’a été tari.
C ’est donc inutilement que l ’héritier de madame de
Galieu prétendroit que le legs réclamé par les pauvres
afait retour à la succession. Ses raisons sont aussi foibles
�úfio
i'**!*
i
( 4« )
à cet égard que les prétextes qu’il allègue pour obtenir
la réduction de ce même legs.
U ne somme de 80000 ^
est exorbitante, s’éc rie -t-il,
relativement aux forces d’une succession que la révolu
tion a presque anéantie. L a suppression des cens lui a causé
des pertes immenses} incalculables. Il
est vrai: des rentes,
et en assez grand n o m b re, sont perdues pour lui ; mais
enfin l’héritier de madame Galieu ignore-t-il que la réduc
tion d’un legs ne peut plus être demandée quinze ans
après l’ouverture de la succession , et lorsqu’en acceptant
l ’hérédité sans condition , il s’est exposé aux disgrâces
comme aux faveurs- de la fortune ? Mais encore quelles
preuves, autres que ses plaintes, a-t-il donné jusqu’ici
de l’insuffisance de la succession ? O ù est l ’inventaire des
meubles ? O n sait qu’il existe : pourquoi ne pas le pro
duire ? O ù est celui des créances ? L ’état des immeubles,
les baux à ferm e, où sont-ils ? Quels contrats de rentes
établissent les
détrimens énormes
que la suppression des
cens lui a causés ? Il sera un moins riche héritier, il est
vrai; mais il sera riche encore: devoit-il l’étre, s’il n’a voit
été héritier? on en a p p e l l e à l u l - m ô m e . Il sera un moins
riche héritier : mais il vient de vendre les domaines de
Faillitou et de la Bartassière, plus de 80000
mais il
lui reste la terre de Clavières, qui vaut cette somme; mais
la terre de Grialou lui appartient; mais il possède des
vignes dans le Querci ; mais il ne compte que vingt-quatre
a n s , et depuis dix années la succession de madame de G a
lieu lui produit 10000
de revenus; Grâce à ces événe-
jncus qu'il accuse, il les reçoit, ces revenus, qui, suivant lo
�C 47 )
testament de sa bienfaitrice, nedevoient lui appartenir qu’à
sa majorité ; ces revenus qui jusqu’alors devoient être
employés à acquitter les dettes de l’amitié et de la religion;
ces revenus que grossit encore l ’intérêt produit par le ca
pital du legs que les pauvres attendent depuis quinze ans.
Que l’héritier de madame de Galieu se garde donc d’in
voquer des motifs de considération à l’appui de ses £oibles
droits ! Des motifs de considération en favètlirtîe^ ca*se l
il auroit mieux fait de garder le silggfife ; çe fl’est paVà^hri
de les réclamer. Ils se présentent en foule pour combattre
ses prétentions. L a morale, la religion, la pitié, l’intérêt
public, viennent au secours des pauvres. L a morale, invo
quant le respect dû aux derniers vœ ux d’une femme ver
tueuse , s’écrie que le legs qu’ils réclament est une dette
plutôt qu’un bienfait. L a religion, offrant à nos regards
le lit de mort de l’abbé de Cabridens, le montre dépo
sant dans le sein d’une sœur chérie ses volontés expia
toires ou bienfaisantes, et précédé dans le séjour céleste
par les prières reconnoissantes des pauvres , comme par
un doux encens. L a pitié attendrit les cœurs sur les souf
frances des indigens d’une ville entière, gémissans sans
secours depuis quinze années, n’espérant plus qu’en ce
le g s , dernière ressource qu’on veut leur ravir. L ’intérêt
public peint les malheurs des temps ; la misère, fille de
la guerre extérieure et des discordes intestines; les hô
pitaux dévastes, les établissemens de charité détruits : il
représente que ces jours ne sont plus, où il sembloit néces
saire de refroidir la bienfaisance : il repousse ces pré
jugés trop funestes et trop répandus, que c’est un abus
de
faire Faumône;
que semer les dons, c’est faire naître
�l
'
.
_
( 48 )
les pauvres, q u i, malgré ces idées
libérales
, sont plus
nombreux que jamais. E nfin, toutes les affections nobles
et généreuses appellent à protéger cette cause les hommes
vertueux, les hommes religieux, les hommes du monde,
les hommes d’état: leurs efforts, réunis à la force du droit
public et des lois, entraîneront la balance de la justice.
.J U L E S *
L
^A æa
A ux
J.
I
j
B.
M A L L E T ,
avoué.
E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a lu le m ém oire ci-d essu s,
Estime que les m oyens qui s’y trouvent développés sont con
form es aux principes du droit public , auquel appartient la cause.
Il est certain , d ’ abord, que l ’ârrété du gouvernem ent est une reconnoissance form elle de la capacité des pauvres d ’A u r illa c , et que
les juges de S ain t-F lo u r ont excédé leur com pétence en les décla
rant n o n -receva b les dans leur dem ande, précisém ent par défaut
de capacité. A u fo n d , les droits des dem andeurs ne sont pas m oins
évidens que l’erreur des premiers juges. L es circonstances et les
term es du legs dém ontrent assez q u 'il a été laissé aux pauvres, et
à trois classes de pauvres ; et que les D am es de la miséricorde
étoient seulem ent chargées d ’en faire la distribution. O n ne parle
pas des m otifs de religion et d ’intérêt public que les pauvres in
voquent à l’appui de leur demande. L a justice n’ a pas besoin dans
cette cause du secours de l ’équité ; et l’esprit n ’est pas m oins satis
fait que le cœ ur.
D é lib é ré à C le rm o n t, l e , 10 juin 1804.
B O I R O T , B E R G I E R , B E I L L E -B E R G I E R .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bureau de bienfaisance de la ville d'Aurillac. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jules
Mallet
Boirot
Bergier
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les pauvres de la ville d'Aurillac, légataires d'une somme de 80000 francs. Mémoire pour les Pauvres d'Aurillac, représentés par le Bureau de bienfaisance de cette ville, appelant ; contre le Sieur Capelle, héritier de madame de Galieu.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1785-1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1310
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53199/BCU_Factums_G1310.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53718/BCU_Factums_M0219.pdf
dbc5bcedd6fac9a6256e5e2f9eab764e
PDF Text
Text
MÉMOIRE
PO UR
DE
LES
LA V I L L E
PAU VRES
D’A U R I L L A C ,
LÉGATAIRES d’ u n e
SOM M E
DE
4
80000
'
4
¿ktyiA/ty,
n
/'y^V
<kitÂxP\i/\x
Sm ^l/o^^tuX bijflcS
6 4 t.
A RI OM,
ee
l’im prim erie
IMPRIMEUR
de
DE L A
LANDRIOT,
COUR D ’ A P P E L »
Ju in 1804.
se u l
/
�M
É M
O
I R E
PO U R
'
L e s Pauvres d’A u rillac, représentés par le Bureau
de bienfaisance de cette v ille , ap p elan t;
r
t
V
C ONT R E
.
t .
#•.
•
-
*
Le sieur C A P E L L E , héritier de madame
G
a l i e u
de,
.
I l existe un corps q u i, né avec la société, est destiné à
durer autant qu’elle. Objet de la prévoyance du législa
teur, de la bienfaisance des particuliers, des sollicitudes
de la religion, les lois veillent pour le protéger, des mains
généreuses le nourrissent, la piété se charge’ de le consoler, et tous les hommes le resp ecten t car le respect est
du au malheur.
A 2
�_
.
u ?
L es pauvres composent ce corps; ïes pauvres, c’està-dire, cette portion des citoyens de chaque état, h qui
le ciel a donné la vie, et refusé les moyens de la soutenir :
membres souffrans de la société, en les recevant dans son
sein elle contracte l’engagement sacré de les secourir,
X/’arbre fertile ne prive aucun de ses rameaux de la sève
qui les féconde.
L ’homme a donc ménagé des ressources à l’homme
¡contre les disgrâces de la nature ou de la fortune. Il est
des biens mis en réserve pour ceux qui n’en ont point :
la société encourage et protège les dons faits à la pau
vreté par l’opulence. Ces biens, ces dons, fruits de la
munificence des princes ou de la générosité des parti
culiers,-se-nomment également fondations : ce sont des
dépôts inviolables consacrés par la charité publique; ce
.sont des eaux salutaires dont rhumanîtë, la bienfaisance,
la religion gardent la source.
Des pauvres se présentent aujourd’hui pour réclamer
une de ces fondations : c’est l’unique débris échappé au
naufrage qui a englouti tous leurs biens; c’est un legs de
80000 1i~, dei'nier gage du souvenir d’une femme ver
tueuse dont ils pleurent encore la pei’te. Ii’héritier le
refuse ; des premiers juges Îont annullé : mais le gouver
nement l’approuve, mais toutes les lois l’autorisent___
les magistrats supérieurs le coniiinieront» Il est -digne de
la justice de protéger les monumens de la bienfaisance ;
<et l’autorité publique doit consacrer, les dernières volontés
d’ujiç ferpmq assez généreuse pour vouloir faire le bien
a,u delà, même
-■* * ■du
* .tombeau,
- * • * et assez heureuse pour le
pouvoir*
�(5)
’
^
C’est à des femmes que madame de Galieu ayoit confié FA IT S,
la distribution de ses bienfaits. Les femmes semblent des
tinées par la nature à soulager les infortunés; leur pitié
est plus douce, leur compassion plus affectueuse, leurs
soins plus délicats que ceux des hommes : elles sont des
gardes avancées, placées sur la route du malheur pour le
•découvrir ; elles apparoissent dans ces obscurs asiles où
il se dérobe'aux regards, telles qu’un Dieu bienfaisant
qui ramène avec lui l’espérance. Quels pleurs ne se sèchent
point à leur approche ! quels maux ne sont pas adoucis
par leurs soins! que de consolations sorties de leur bouché!
que de dons échappés à leurs mains !
iSans parler ici des Sœurs de la charité , des Hospitaliè
res et des autres femmes <jui se consaeroient par des vœux
au service des pauvres, plusieurs villes comptoient avant
àa révolution des associations de dames pieuses, réunies
par le seul intérêt de la religion et de l’humanité : on
les -nommoit indifféremment Dames de la :c harité, Dames
de la miséricorde, Trésorières des pauvres. Rio'm, Cler
mont avoient les leurs, et parmi «lies comptoient leurs
noms les plus illustres. On en trouvoit dans toutes les
paroisses de Paris : -on en trouvoit aussi dans la ville
d’Aurillac.
Les Dames de la charité étoient ordinairement les
dames les plus respectables et les plus distinguées de
•chaque ville: c’ étoient des femmes du monde, les unes
mariées, d’autres veuves, d’autres célibataires. Elles ne
knsoient aueun vœu ; libres ^abandonner à leur gré
un joug qu’elles s’imposoient librement. Elles ne for—
«noient point de corps; dégagées de tous liens publics s
�(6 )
ne retirant d’autres fruits de leurs travaux que le plaisir de
faire le bien, distinguées non par des signes particuliers
•mais parleurs vertus', connues de l’autorité seulement par
.leurs bienfaits, comme la ‘fleur modeste par ses parfums.
. Solliciter la piété dans les temples, et la bienfaisance
rdans les maisons ; obtenir dé l’avare pitié des dons qu’elle
refuse a un homme, et qu’elle accorde à une’ femme ;
secourir l’infortuné qui se cache, en lui dérobant la main
■qui le nourrit; assister l’artisan malade, trop pauvre
pour soutenir sa famille privée de ses travaux, trop fier
pour mendier vin lit à l’hôpital ; porter aux douleurs
des remèdes, et des consolations aux chagrins : voilà les
fonctions et les plaisirs des Dames de la charité. Dirai-je
des maux plus secrets qu’elles soulageoient? parlerai-je
des nourrices récompensées , des orphelins recueillis ,
des filles dotées, et de tant d’autres bienfaits oubliés
avec les bienfaitrices ?
J ’ai dit que la ville d’Aurillac avoit Ses Dam es de la
charité : on les nommoit dans cette ville, comme dans
la plupart des provinces méridionales, Dames de Vœuvre
de la miséricorde,' ce qui veut d ire, dames chargées
du travail de la charité. Tel étoit leur titre à Grenoble,
à Montpellier, etc. A Figeac, on en trouve la preuve
dans le testament de madame' de Galieu, qui lègue le
revenu cle l’une de ses terres aux pauvres de Cœuvre de
la miséricorde de 1(igeac. Croira-1-011 que ce titre par
ticulier soit le seul fondement du procès que l’héritier de
madame de Galieu intente aux pauvres? C roira-t-on
que ce procès n’auroit jamais existé , si quelques dames
pieuses .d’Aurillac n’avoient été connues que sous le
nom de Dames de la miséricorde ?
•
�c 7 y
. "
'
' Leurs aumônes / leurs quêtes, leurs soins, étoient le
seul Lien des pauvres de cette v ille , dont la population
s’élève à plus de dix mille âmes. Il n’y avoit alors qu’une
seule paroisse, et cette paroisse étoit sans fabrique et
sans marguilliers. Toutes les oblations, les fondations,
et les autres objets affectés aux fabriques dans la plupart
des paroisses du royaume, se trouvoient à Aurillac entre
les mains des prêtres connus sous le nom de Communalistes , érigés en titre de collégiale par des lettres pa
tentes , et q u i, après avoir prélevé les frais du service
de l’église ,. se partageôieïit' ce: qu’il y avoit de reste ,
sans en faire aucune part aux pauvres. ‘ La ville avoit, à la vérité, un hôpital; mais cet éta
blissement ne jouissoit que d’un revenu médiocre. La
classe indigente et laborieuse du peuple-attaclxoit d’ailleurs
une espèce de honte aux secours qu’elle auroit pu trouver
dans l’hôpital. On ne comptoit de fonds destinés au sou
lagement des pauvres, qu’une rente de 4 3 2 ^ , payable
sur la quittance des échevins et du curé ; ils en confiè
rent la distribution aux Dames de la miséricorde.
• Le zele de ces dames: sembla s?accroître lorsque la
marquise de Fontanges se joignit à elles : le trésor des
pauvres s’enrichit de ses libéralités. L ’évêque de Troyes,
son oncle, y ajouta les siennes. Plusieurs femmes riches,
jalouses d’imiter de si nobles exemples, rivalisèrent dë
charité avec madame de Fontanges. On fit aux pauvres,
dont les Dames de la miséricord'e prenoient soin , divers
legs dont plusieurs sentences du bailliage de Vie ordon
nèrent la délivrance. X>es quêtes devinrent plus nom
breuses ; les assemblées de charité plus régulières ; le
)
�( 8>
çuré d’Aurillae les présidoit, en son absence madame
de Fontanges prenoit sa place : cet honneur, dû à son
nom, l’étoit plus encore à son zèle. C’est sans doute ce
qui fait dire à madame de Galieu, dans son testament,
que la marquise de Fontanges étoit Ja supérieure des
Dames de l’œuvre de la miséricorde. Jamais elle ne reçut
çe titre de supérieure ; il n’étoit donné, comme on sait,
qu’aux femmes qui étoient à la tète d’un couvent, d’une
communauté. Comment des dames qui avoient des époux,
des enfans, des engagement avec le monde, auroient-*elles formé une communauté ? Comment madame d©
Fontanges, épouse et mère, en auroit-elle été la supé»
rieure ? ce titre est incompatible aveç çeux qu’elle avoit
yeçus des lois et de la nature.
- A cette époque, vivoit à Aurillae une veuve extrême-*
ment riçhe et sans enfans : on la nommoit Françoise^
Dorothée de Cabridens. Elle avoit été mariée au sieur
de Galieu de Eigeac, qui lui avoit laissé tous ses biens,
sous la condition de rendre la terre de Grialou, située
dans le Querci, à l’un de ses parens. Pour remplir la
substitution, madame de Galieu fit une donation de cette
terre à l’abhé Cabridens de Clavières, son frère, parent
d’ailleurs du sieur de Galieu. L a donation fut passée
à Paris en 1774? et l’abbé de Cabridens a joui de la
terre jusqu’il sa mort,
C’étoit un homme aussi recommandable par sa piété
que par sa bienfaisance. Il fut question, en 17 7 7 , d’éta
blir à Aurillae une école de Frères de la doctrine chré
tienne, pour l’instruction des enfans des pauvres. L ’abbé
de Cabridens donna, pour cet établissement, une rente
de
�( 9 )•
de 65o , et un capital de 10000 ft. Il-voulut que ces
sommes demeurassent à jamais consacrées à ■l’instruc
tion de la jeunesse, même en cas de retraite des Frères
de la doctrine chrétienne. L ’acte authentique fut passé
avec les officiers municipaux d’Aurillac, le 29 septembre
I777'
.
. .
*
. ' . '
L ’abbé deCabridens destinoit encore d’autres bienfaits
aux pauvres de sa ville natale. Il jouissoit d’une grande
fortune. La succession de madame de Galieu, sa sœur,
est composée de biens situés en Auvergne et en Querci.
Tous ceux d’Auvergne appartenoient à l’abbé de Cabridens ; savoir, les domaines de Faillitou et de la Bartassière , qui viennent d’être vendus plus de 80000 ^ , et
le fief de Clavièrcs, qui vaut à peu près cette somme.
Je ne parle pas de plusieurs maisons et de quelques
autres immeubles de médiocre valeur. La fortune de
l’abbé de Cabridens s’étoit encore accrue par le don de
la terre de Grialou, dont il pouvoit disposer à son gré.
Madame de Galieu, sa sœur, n’avoit point d’enfans. Il
crut devoir a son état, à son caractère , d’adopter les
pauvres pour les siens; mais, pressé par l’âge,.et assiégé
par les iniirmités qu’il traîne à sa suite, il confia à sa
sœur L’exécution des pieux desseins qu’il avoit conçus.
Il la chargea de vendre les biens qu’il possédoit en A u
vergne, au profit des pauvres. Il lui indiqua ceux qu’assistoient -les Dames de la miséricorde pour l’objet de
scs secours , et il la chargea de payer jla=rente qu’il avoit
destinée à l’éducation de la jeunesse.': Ces' dispositions,
il ne les consigna point dans un testament. Sa sœur pos
sédoit toute sa confiance. Il ne vouloit pas, lui dit-il,
B
�X
)
'que le public pût en douter. H lui laissa donc àb iritéstdt
sa succession tout entière. Mais madame de Galieu a
pris soin dé nous apprendre à quelles conditions : en
léguant ^oooo7*" aux pauvres, pour remplir, dit-elle.,
les pieux desseins qui lui ont été communiqués p ar
'son fr è r e avant sa m ort, et «n ordonnant de vendre,
pour acquitter ce legs, tous ses biens d’Auvergne, c’està-dire tous ceux qui ,lui venoient de -l’abbé de'Gabridéns.
■Cependcntla maison de madame de Gaiieu étoit assiégée.
"Que d?amis, que dei parens ne se trouve pas une testatrice
opulente'! 'Qui poürroit dire-toutesles manœuvres*, pein>dre toutes les intrigues qu’on employa pour obtenir la
;prëmière .place, ou du moins une place dans son testraient'?
- X e .jour si'long-temps attendu arriva enfin :'ee fut le
- 4 'octobre 1785. Madame de Galieu avoit-, à "ce qu’il
rparoît, plusieurs.parens au même degré-: ¿’étaient des
'enfans de ses cousines germaines, -c’est-à-dire, ses neveux
bretons. Deux habitoient Aurillac. L e troisième vivoit
à-Saint-Constant, yillagie à.quelques lieuesde cette -ville-:
eon te nommdit le sieur Capelle, et il avoit quatre enfana,
-¿Leux ifilles et detix> fils. Madame de Galieu •choisit l’aîné,
alors âgé de cinq ans, ' pour son héritier ;;elle lui substitua
*s©n f r è r e , sans faire aucune mention des-îillcs. La substi
tution ne 1s’est rpas ouverte-, et -:Pierrc-Anloine-Urbain
’ Gapelle,cousin auquatrième degré de madame deGalieu, •
jouit seul aujourd’hui d’une fortune dont il'ne pouvoit
^espérer qu’un .douzième, 'suivant l’ordre de la nature.,
¿puisqu’il aüroit‘ été'obligé de _parl/iiger avec son irètfe
�c ï't y
.
Qt ses deux sœurs le tiers, qui revenoit à- soa père..
Ces détails feront juger si l’extreme faveur que croit
mériter l’iiéritier de-madame de Galieu-,, si çetle pi:édi—
lection spéciale que lui- portoit, dit-il, sa. bienfaitrice r
si. ces droits respectables du sang et de la nature qu’il
invoque, sont des prétentions fondées ou de vaines çlii-<
mères. Quelle faveui: extrême ne inéiiite- pas un héritics?préféré à des païens pki? rapprochés! préféré à son propre*
-père, à son frère , à ses sœurs ! Quelle prédilection spé~.
eiale n’a pas témoignée madame d.e Galieu à un enfant
de cinq ans, qu’elle n’avoit jamais vu 5l qu’elle n’a choision le sait, que parce que la- foiblesse- de son âge semi
bloit ne pas. lui permettre de contrariée les volontés de
sa bienfaitrice ! Combien sont respectables les droits du
sang et de la nature lorsqu’ils sont invoqués par un
héritier que ni le sang ni La nature n’appeloient person~>
Bellement à la succession ?
Madame de Galieu laissoit environ 5ooooo de biens y
■ en meubles, en créances., ou; en terres.. E lle possédoit.
le fief de Grialou, celui de. Claviçres, les domaijaes.de
Feicelle,, de Lacombe, de Faillitou , de la Bartassière,
etc.; des, maisons, à Arpajon.,, à,Aurillac, k Figeac; ua
mobilier considérable. E lle a fait, il- est vrai, des legs,
en très-grand nombre ils s’élèvent, dit l’héritier, à
270000 tir. On veut l’en croire : mais, enfin la moitié
de cette somme est consacrée à acquitter les dettes, de la
nature ou de l’amitié ; il n’y a que* l’autre, moitié qui *■
soit destinée à des œuvres de charité ou de religion. Ces
liegs ne paroîtront pas exorbitans relativement aux forces
4 e la succession , et quand ou songera aux conditions
B 2
�1 12 )
'
imposées par l’abbé de Cabridens à madame de G alleu,
sa sœur et son héritière.
Entre les legs pieux, on remarque celui du revenu
de la terre de Grialou, laissé pendant,un ¿ra aux pau~
vres de Tœuvre de Ici miséricorde de la ville de Figeac.
Ce legs a été fidèlement payé ; il devoit l’être avant la
révolution ; il n’étoit pas considérable. L ’on n’a point
demandé si les Dames de la miséricorde de Figeac avoient
des lettres patentes. ' ■ :
■
t
Il est une autre disposition qui excite de vives récla
mations , qui ( s’il eu faut croire l’héritier ) est nulle
faute de lettres patentes , qui du moins a fait retour à
la succession , qui enfin doit être réduite, toujours sui
vant l’héritier. Elle est faite en faveur des pauvres de
l’œuvre de la miséricorde d’Aurillac : elle est l’objet de
ee mémoire.
.
On sait que l’abbé de Cabridens avoit laissé tous ses
biens à sa sœur, à de certaines conditions. Voici de quelle
manière madame de Galieu les a remplies.
' « E t -pour rem plir, dit-elle, les pieux desseins qui
¥ ni ont été communiqués par J 'a i monsieur Cabri« dens , mon f r è r e , avant son décès , je lègue aux
« pauvres de l’œuvre de la miséricorde de la ville d’Auc rillac, laquelle •oeuvre est administrée par de pieuses
« dames, et dont madame’'la marquise de Fontanges est
« la supérieure, la somme de 80000 ; à la charge
« néanmoins que les administrateurs de l’œuvre seront
« tenus de payer annuellement, et à perpétuité, aux
« Frères de l’école de la doctrine chrétienne établis à
* Aurillac, la pension et rente annuelle que monsieur
�( i3 )
« i’abbq de Cabridcns, mon frère ,• s’étoit obligé de
« leur payer par les actes passes avec eux, et avec les
« consuls et communautés, d’Au villa c , .sans ’laquelle
« condition je n’aurois légué-jù li\dite œuvre que lq
« somme de 60000
Je veux qu’il soit employé le
« revenu de 20000 pour, assistermessieurs les prêtres
« de la ville et çom?nunauté d’^Aurillac^ qui seront
« ,dans le besoin , .et encqre les autres•prêtres des çeh
« virons de ladite v ille ,r si le retenu de ladite,somme
« de 20000
peut le comporter ; et que le revenu des
« 40000 restantes soit employé à soylager et assister
« le surplus des pauvres- que. Iqdiie, .çsupvexa. cputumG
« d'assister. Je ?,*reux en conséquence' que la .^pnime de
« 80000 , ci-dessus léguée aux conditions mentionnées}
« .soit payée auxdjtes dames administrant ladLte opuvrp ,
« sur la quittance qui en sera fournie par-ladite dame
« marquise de Fonümges, leur supérieure , et aux termes
« ci-dessous .fixés. » ,
;
• ; . , ..
Madame de Galieu 11e fixa aucun terme précis pour
le payement de ce legs : mais elle chargea,son exécuteur
testamentaire de recueillir, jusqu’à ce que son héritier
eut atteint l’âge de vingt-cinq ans, fous les revenus de sa
succession , et d’employer ces revenus à acquitter nonseulement le legs fait à l’oeuvre dp la miséricorde, mais
tous ceux qu’elle laissoit. Elle destina au môme usage le
prix d.e tous ses biens d’Auvergne, dont elle ordonna la
vente conformément aux intentions de l’abbe de Cabridens. Elle nomma le fils de son exécuteur testamentaire
pour remplacer son père, s’il venoità mourir avant que
le sieur Gapclle eût atteint vingt-cinq ans. Enfin elle prit
�( i -4 y
toutes lès- précautions que pouvoit suggérer la prudence*
<V une bienfaisance éclairée; Vaines précautions! soins*
inutiles ! Tant de mesures, si sagement concertées, n’ont
servi qu’à faire voir que personne nepeut se flatteraujour—
d’hui d’étendre son pouvoir au delà de son existenee; que^
les héritiers testamentaires , aussi avides et plus ingrats,
que ceux du sang, -ne trouvent jamais assez considérablela-succession qu’ils nrosoient espérer; et qu’ils regardent
presque comme un vol' personnel les legs que leur bien
faiteur's’est permis de faire, et ceux dé ces legs surtout
que la religion a dictés, la religion qui seule plaide au lit
de la mort la cause des malheureux.
Madame de (ïaliëu survécut quatreans à son testament.
Ses résolutions ne- se démentirent point relie mourut sans,
y avoir rien changé-, au mois de janvier 1785:; heureuse
de quitter, pour le séjour deTéternel repos, une terre où
fërmentoient déjà tant de semences de discorde! Elle
mourut : les pauvres la pleurèrent, et ils.la; pleureront
l:ong-temps_
Surveillante fidèle des intérêts des pauvres,.la marquise
de Fontanges , qui se trouvoit à Paris à cette époque
s’occupa de leur faire délivrer le legs de 8toooo ti") que1
madame de Galièu- leur avoit laissé. L ’article 3 d’un édit
de 1749 veut que toutes les fondations; faites en- faveur
des pauvres soient approuvées par le- parlement, qui
nommera- des administrateurs au legs ( sans doute si le
testateur n’en a pas nommé ). La marquise de Fontanges
se rendit chez M. le procureur général, pouir le prier de
demander en son nom l’homologation nécessaire. M1. le
procureur général y. consentit.. Il traça la- marche qu-’oii.
�( i'5 )
''âevoit srîivre. Il falloit, dit-il-, remettre une rcopie du.
•'testament au procureur du roiprès le*bailli âge d’Aurillac,
qui la lui advesseroit, en l’invitant à requérir.quelle lçgs
fût approuvé >par le parlement.- M. le procureur général
promit de -le demander. Ce fait est certain ^madame de
ï ’ontanges, qui v it1encore., madame^de Fontanges, -.qui
-liabite Aurillac -, l’attesteroit -, et un ;tel témoignage ne
-sera pas-récusé,
,, ' . .1 • ' ■
'
'Le testament fut ènvoyé à Paris, vers la Æn de 179-..
Les troubles survenus alors, les alarmes de la magistrature
sur son état,'firent négliger cetteaffaixej comme beaucoup
d’autres, par le procureur général, Il.étoit peu question
•de fondations, lorsqu’on ne s’oceupoit qu’à détruire. Bien
tôt le parlement fut supprimé /.et Sans lui;l’homologation
-devenoit impossible.
'
-Cependant l’exécuteur testamentaire de madame de
IGalieu s’étoit -mis en possession .de tous ses biens,, con
formément à ses volontés; il devoit les,garder jusqu’à ce
■quë<l’héritier eût "atteint vingt-cinq ans. Il fit l’inventaire
des-meubles,-et les'vendit pour acquitter une partie des
legs.-Il voulut ensuite «faire procéder,, suivant les ordres
de la testatrice, à la-vente des:biens d’Auvergne. Le sieur
■Capelle ,'père de l’héritier qurn’avoit alors que neuf ans,
•s’ opposa à cette vente : il représenta.que le-moment n’étoit
¿pas favorable à'ia ventesdes immeubles; et il-avoit-raison,
-l’année 1789 achevoit son; cours. *
,
-Mais les troubles qubcommençorent, et les-désordres
‘•plus grands Encore dont ils éfoient avant-coureurs, inquié^oient.peu le.père du sieur Capelle : ce . qui l’alarmoit ?
�(
16 X
c’ctoit la nécessite de payer des legs qu’il regardent comme
son b i e n ' et'sa conduite, l’a assez montre.
: (Je* ne fut’1tfù’eja 1792 ,.et api'ès ayoir laissé »¡écouler les
aimées moins orageuses àe.l<jgo et 17 9 1, que l’exécuteur
testamentaire fit rendre un. jugement qui l’^iutorisoit à
vendre les biens désignés pan madame dé Galieu ; ce juge
ment est du 27 janvier 1792. Dès que le sieur Gapelle père
le connut, il lit solliciter une suspension de vente; ^exé
cuteur testamentaire y consentit..Mais enfin, press,é sans
doute par les légataires, et après !un délai de six mois,
il fit poser des affiches qui indiquaient au i 5 juillet les
premières enchères^ e t l’adjudication définitive au 30 du
même mois.- >an >
•
•
•
1 lié '30 juillet 1 yg2, l’assemblée déjà formée, les enché
risseurs réunis, le sieur Capelle père, manifestant alors;
le projet qu’il avoit formé depuis long-temps de ne point
acquitter les legs-faite par madame de Galieu, projet suivi
depuis par son fils; le sieur Capelle, dis-je, fit signifier
à l’exécuteur testamentaire, et au notaire chargé de rece
voir les enchères, un acte d’appel du jugement qui ordonnoit la vente. Cet incident surprit et troubla l’assem
blée; et ori vendit seulement quelques petits biens épars,
à l’aliénation desquels consentoit le père de l’héritier.- ■
L ’cîüécuteur testamentaire auroit fait sans doute statuer
sur l’appel du jugement du 27 janvier; mais il n’y suxvécut pas long-temps : son. fils prit alors l’administration
et la jouissance dés biens de la succession. Ainsi Tavoit
ordonné lu testatrices jusqu’à ce que son héritier eut
atteint l’âge de vingt-cinq arts : mais ce qu’elle ne vo.ulqit
pas,
�'
C *7 )
p
pas, mais ce qu’elle défendoit, il abandonna bientôt après
les rênes de l’administration qui lui ëtoit confiée, et toute
■la succession 7 au sieur Capelle’ (père, qui mourut avec la
joie de la transmettre entière à son'fils, mais avec leremords
peut-être d’avoir payé dUngratitudè la bienfaitrice de sa
famille, qui s’étoit défiée de lui avec raison, et qui avoit
■nommé à son ^héritier d’autres ’ administrateurs >que son
père.
: Ainsi l ’héritier de madame 'de Galieu possède depuis
douze ans une fortuné qui ne lui appai'tiendroit même pas
encore, car il n’aura vingt-cinq ans que Tannée prochaine!
Ainsi n’ont pas été'acquittées les dettes dè ¡la charité-et
de la religion, -que les revenus -dont il jouit devoient
éteindre ! Ainsi s’accomplissent les volontés suprêmes de
ces hommes que la justice place sur leur lit'domort comme
des législateurs dont toutes les paroles deviennent des
oracles! Les exécuteurs testamentaires exécutentiainsi les
vœux les plus chers de leurs amis qui ne sont plus! - i .
Si quelque chose peut excuser lafoiblesse derceux q u V
voit choisis madame de'Galieiij c’est (le sinistre, étatde’la
. France au moment où ils remirent ou plutôt laissèrent
échapper le pouvoir confié à leurs mains. Le'soleil de 1793
avoit lui : tout se bouleversoit, toutpérissbit, et les talens
*et la vertu, et la religion et la ‘patrie.
•
Alors parurent ces lois à ja m a i s inémorable's, qui dé
clarèrent qu’il 11’y avoit plus.de pauvres-, que la bienfai
sance nationale 11’en souffriroit plus. Puisqu’il n’y avoit
plus de pauvres, les biens que les siècles avoient accu
mulés pour leur soulagement devenoieut inutiles : /a bicnJaisance nationale s’en empara. Un décret rendu cil 17.94
G
�(i8)
réunit au domaine de l’état toutes les propriétés des hos
pices, toutes les fondations particulières faites en faveur
de l’indigence ; en un mot, l’actif et le passif de tous les
établissemens de charité. Les hôpitaux devinrent des ca
sernes, les maisons de secours des maisons de force , les
églises, le dirai-je! des écuries.........Qùi auroit alors ose
réclamer la fondation faite par madame de Galieu? Les
Dames de la miséricorde étoient dispersées plutôt que
supprimées ; les unés avoient fui aux approches de l’orage,
d’autres habitoient les prisons, le reste gémissoit en silence.
Ges jours affreùx semblent déjà loin de nous. Un héros
a paru, suivi de la victoire, et de la sagesse plus utile que
la ^victoire : sesi premiers soins ont- été de rendre leur
cours-à rces soùrces salutaires, et pures qu’alimente la cha
rité publique*. Il à-rétabli les hôpitaux dans leurs biens;
il a relevéi ces autels à l’ômbre desquels les infortunés
trouvôient toujours un refuge ; il a remplacé, s’il est pos
sible \ les Dames de la miséricorde, les Dames de la cha
rité , et tant d’auti’és anciens et dignes tuteurs des pauvres,
en créant; dans'la,plupart'des villes de l’empire, des bu
reaux de bienfaisance, i
.Les administrations de ces nouveaux établissemens sont
distinctes descelles des hôpitaux, aussi-bien que leurs attri
butions. Le gouvernement a ordonijé que les hôpitaux
aüroient des administrateurs particuliers, chargés de-régir
les biens qui leur étoient rendus, et ceux que des personnes
bienfaisantes consàcreroient a fonder de nouvelles places,
ou h conserver les anciennes, dans ces tristes asiles des dis
grâces de la nature et de la fortune.
,
Les bureaux de bienfaisance sont une réunion d’hommes
�( 19 )
charitables, qui,nommés par le gouvernement, recueillent
sous ses auspices les dons que la pitié oiï’re à l’infortune,
et surtout à l’infortune qui se cache; ils sont chargés de dis
tribuer ces secours qu’on appelle à domicile. Un arrêté du
gouvernement leur attribue tous les biens affectés à l’entre
tien des Hospitalières et Filles de charité, toutes les fon
dations relatives à des services de bienfaisance, à quel titre
et sous quelque dénomination que ce soit. C’est pour les
bureaux de bienfaisance que le comte de Rumford a ima
giné ses soupes économiques. Ce sont eux qui sont chargés
- de les distribuer.
Un de ces établissemens a été formé à Aurillac ily a trois
ans : d’anciens magistrats le composent; et les pauvres n’ont
qu’un l’eproche à. leur faire, c’est de ne leur offrir que du
zèle, et de ne leur donner que des promesses.
- On a dit quelle étoit la misère des pauvres d’Aurillac
avant que les Dames de la miséricorde s’occupassent de les
soulager. Ces dames, dont plusieurs vivent encore, n’ont
pas repris leurs fonctions, devenues sans objet, depuis que
le gouvernement a chargé de l’administration des biens des
pauvres les bureaux de bienfaisance : celui d’Aurillac se
propose d’engager quelques-unes de ces femmes respectables
à se joindre à lui pour la distribution des secours à domicile.
Ces secours ont été nuls jusqu’à ce jour; la seule esperance
des pauvres, c’est le legs qui leur a été fait par madame de
Galieu.
On a dit que ce legs n’avoit été paye ni par l’exécuteur
testamentaire, ni par l’héritier de madame de Galieu. Le
bureau de bienfaisance, chargé par les lois de veiller aux
intérêts des pauvres, ne tarda point à le demander au siçur
G 4
.
.
�(
20
)
Capelle, qui fut cité en conciliation , et ensuite devant les
juges de première-instance d’Aurillac, pour être condamné
à le payer. Le sieur Capelle commença par récuser tous ses
juges, sur de futiles prétextes ; et bientôt il obtint de la cour
de cassation un arrêt qui renvoya la connoissance de l’af
faire aux juges de première instance de la ville de Saintl'Iour.
Xes pauvres auroient- pu1 se plaindre de cet arrêt, et
peut-être le faire réformer. Il- avoit .été obtenu sur une
requete qui ne leur avoit pas-été communiquée : il étoit
rendu sur un faux exposé des faits. Mais., certains de la
justice de leur cause, ils crurent qu’aucun tribunal ne
devoit leur paroître suspect, et ils citèrent à Saint-Ftour
l’héritier de madame de Galieu.
Cependant-, suivant les dispositions de l’article 3 de
l’édit de 1749, toutes les fondations devoient être homo
loguées par le parlement, qui, par attribution spéciale,
remplaçoit le prince dans cette fonction. Cette formalitén’avoit pas été remplie à l’égard du legs fait par madame
de Galieu ; la suppression des parlemens ne l’avoit pas
permis. Les pauvres crurent devoir demander au gou
vernement un arrêté q u i, tenant lieu d’homologation,
approuvât le legs, autorisât le bureau de bienfaisance
à l’accepter en leur nom, et fit connoitre à l’héritier de
madame de Galieu que le bureau exerçoit tous les droitsdes Dames de la miséricorde.
Toutes les pièces, tous les renseignemens nécessaires
furent envoyés h Paris. Le ministre de l’intérieur se fit
rendre compte de l’aflaire, et, sur son rapport, fut donné,
le 7 juillet 1802, l’arrêté du gouvernement qu’on va lire.
�( 21 )
Copie de VArrêté des Consuls.
Les consuls de la république, sur le rapport du mi
nistre de l’intérieur ,
- ’
Le conseil d’état entendu,
'
•
Arrêtent ce qui suit :
A r t i c l e i er.—Le legs de 80000
fait à l’Œuvve delàmiséricorde de la ville d’Aurillac, par madame Françoise-;
Dorothée de Cabridens, veuve Galieu, suivant son tes
tament du 4 octobre 1785., reçu par Marmontel, notaire'
à Aurillac, enregistré, sera accepté au- nom des pauvres ■
de ladite ville par le bureau de bienfaisance , rempla
çant aujourd’hui l’Œ u vre de;la m iséricorde, pour la dis-)
tribution des seco.ui’s à domicile.
A r t , 2 .— Le montant de ce legs sera réuni aux autres
biens et revenus des pauvres de. la ville d’A urillac, pour
être administré et régi par les membres du bureau de
bienfaisance, a l’instar des autres biens des établissemens
de charité.
A r t . 3. — L e legs étant fait en argent, il sera employé
en acquisition de rentes sur l’état.
A r t . 4 . — Les administrateurs du bureau de bienfai
sance fero n t, sur les biens de la succession de la tes
tatrice, tous les actes conservatoires qu’exigera la garantie1
des droits des pauvres d’Aurillac.
A r t . 5 . — En cas de contestation ou de refus de la
part des héritiers, les administrateurs du bureau de
bienfaisance poursuivront la délivrance du legs devant
�( 22 )
les tribunaux, en s’y faisant préalablement autoriser, dans
'
les formes voulues par les précédens arrêtés.
A r t . 6. — U ne somme annuelle de 65 o ^ sera pré
levée sur le revenu du legs, pour être employée par
le maire à l’instruction de la jeunesse, sous la direction
et la surveillance du préfet du département.
A r t . 7. — Pour remplir les autres intentions de la
testa’trice, il sera pareillement prélevé, sur le montant
des rentes, une somme annuelle de 100 0^ , représen
tant au denier vingt un capital de 20000
, pour êti'e
employée chaque année à secourir les prêtres de la ville
et des environs, qui se trouveront dans le besoin.
- A r t . 8. — E n cas’ qu’il n’y ait pas de prêtres indigens,
ou en assez grand n o m b re, la somme ou le restant de la
somme sera distribué aux pauvres par le bureau de bien
faisance.
■ A r t . 9. — Le ministre de l’intérieur est chargé de
l’exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin
des lois.
L e premier consul; signé B o n a p a r t e ,
Tel est l’arrêté du gouvernement, en faveur des pauvres
d’Aurillac. Le bureau de bienfaisance, autorisé par le pré
fet, a poursuivi le jugement de 1 aiïaire, qui lui paroissoit
décidée à l’avantage des pauvres par cet arrêté, l/es pre
miers juges n’en ont pas eu cette idée ; le procureur im
périal seul a conclu au payement du legs. Quant aux juges
de St.-rFlour, ils ont pensé que madame de Galieu n’avoit
pas fuit un legs aux pauvres d’Aurillac, mais bien à l’Œuvre
�C 23 )
de la miséricorde, qu’ils ont considérée comme un corps ;
ils ont jugé que ce prétendu corps étoit une communauté
illicite, non approuvée, qui n’avoit pas été fondée par des
lettres patentes; que par conséquent elle étoit nulle et inca
pable de recevoir des libéralités. Par ces motifs, les premiers
juges ont déclaré le bureau de bienfaisance non-recevable
dans sa demande. '
Analyser les erreurs qui servent de base à leur décision,
et réfuter successivement les fausses conséquences déduites
de ces deux faits supposés constans et qu’il falloit prouver,
savoir, que les Dames de la miséricorde formoient une
communautéet que madame de Galieu a légué à cette
communauté, et non aux pauvres, la somme que son frère
avoit destinée h des œuvres de charité , ce seroit vouloir,
sans être utile à la cause , aifoiblir l’intérêt qu’elle doit
inspirer. Etablissons la justice de la demande , et laissons
l’éclat de la vérité dissiper les ténèbres de l’erreur.
.
La cause, en cet état,présente des questions également MOYENS,
importantes aux yeux du barreau et des hommes du monde.
On n’agite plus ici des discussions purement civiles. Ce
n est point la fortune d’un particulier • c’est l’ordre, c’est le
droit public qui est en suspens.
Sera-t-il permis à un tribunal inférieur de s’ériger en
reformateur des arrêtés du gouvernement, et de déclarer
les pauvres d’une ville considérable incapables de recevoir
un legs, lorsque le gouvernement les a reconnus capables
d’en profiter ?
Ces mêmes juges, s’ils n’ont pas excédé leur compétence,
n’out-ils pas porté atteinte au droit public, en déclarant les
�( 24 )
,
pauvres d’Aurillac non -recevables à demander un legs
qui leur a été fait en 17 8 5 , et que l’arrêté du gouver
nement, tenant lieu d’homologation, a rendu valable?
Voilà les deux questions de droit public que fait naître
cette affaire; leur examen est l’objet principal de ce méïnoire. On y ajoutex’a une seconde partie, dans laquelle on
réfutera rapidement les moyens subsidiaires opposés par
l’héritier de madame de Galieu devant les premiers juges ;
savoir, que le legs a fait retour à la succession, et que du
moins les magistrats doivent le réduire.
P R E M I È R E
PARTIE,
On a dit que les deux propositions qu’il s’agit de prou
ver dans la première partie de ce mémoire, l’incompétence
des premiers juges, l’erreur dans laquelle ils sont tombés,
sont des questions de droit public. C’est que les fondations
et tout ce qui les concerne font partie du droit public. Pour
le faire v o ir , et pour établir en même temps la capacité
des .pauvres en général à recevoir des libéralités, il est
nécessaire de rappeler des principes qui s’appliquent
également aux deux propositions à démontrer.
Les pauvres, en nom collectif, dit J . M. Ricard,
forment un corps irrégulier que les lois n’ont point créé,
et qui subsiste par soi-meme, toujours renouvelé, tou
jours existant, Les législateurs de Rome, aussi-bien que les
nôtres, ont toujours autorisé les dispositions faites à leur
profit. Elles sont même de toutes les libéralités les plus
favorables.
XI est inutile d’en donnor la raison, Chacun voit que lo
nécessaire
�( *5 )
^
nécessaire du pauvre fait le superflu du rich e, et que c’est
à la bienfaisance éclairée à réparer les injustices de l’aveugle
'fortune.'
,■
‘ Les dons faits aux pauvres, considérés comme un corps f
se nomment en général fondations. Les fondations sont
de droit public, parce que le gouvernement seul crée t
établit les corps, et'prononce sur tout ce qui les regarde.
C’est par cette' raison que divers édits ont pourvu à la
manière dont les’ fondations pourvoient être faites, à leur
acceptation et à leur administration au nom des pauvres.
La déclaration de 1749 formoit le dernier droit sur cette
matière avant la révolution. En voici les dispositions r o
latives à la cause :
.
'
<
Déclaration de 17 4 9 .
A r t i c l e ïe r.— Voulons qu’il ne puisse être fait aucun
nouvel établissement de chapitres, collèges, séminaires,
maisons ou’ communautés religieuses, même sous prétexte
d’hospices; congrégations, confréries, hôpitaux ou autres
corps, et communautés, soit ecclésiastiques, séculières
ou régulières, soit laïques, de quelque qualité-qu’elles
soient; ni pareillement aucune nouvelle création de chai
pelles, si ce n’est en vertu de notre pei'mission expresse,
portée par nos lettres patentes , enregistrées en nos p arlemens ou conseils supérieurs.
A r t . 2 . — Défendons de faire à l’avenir aucune dispo
sition par acte de dernière volonté, pour fonder un nou
vel établissement de la qualité de ceux qui sont menv
tionnés'dans l’article précédent, à peine de nullité, quand
D
�»
.
..
( 26 \
.
même la disposition seroit faite à la charge cPobtenir nos
lettres patentes. ,
'
A r t . 3. — N ’entendons comprendre dans les deux ar
ticles préeédens les fondations particulières qui ne tendroient à l’établissement d’aucun nouveau corps, collège
ou communauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice, et qui n’auroient pour objet que la célébration
subsistance d?étudions ou de pauvres
ecclesiastiques nu séculiersyetc*, ou autres oeuvres pieuses
de messes ou o b i t s
de même nature et également utiles au public j à. l’égard
desquelles fondations il ne sera point nécessaire^’obtenir
nos., lettres patentes, et il, suffira, de faire h&mologuer les
actes ou dispositions qui les contiendront,, eh nos parle*mens et conseils supérieurs, sur les conclusions ou réqui
sitions de'nos procureurs généraux. Voulons qu’il soit en
même temps pourvu par nosdits parlemens à l’adminis
tration des biens destinés àTexécirtion' desdites
fondations /*
•
et aux comptes- qui en seront rendus-..
A r t . 9* — Annulions tous les actes ou: dispositions qui
pourroient avoir été faits directement ou indirectement
en. faveur des- établissement mentionnés en l’article I er..
A r t . 29-— Toutesles demandes formées en exécution du
présent edit seront portées.directement en la grand’ehambue du parlement, et ce privativement à tous autres juges,
pour y être statue sui’ lfîS conclusions de notre procureur
général.
-
,
*
^
*
.
D ’après cette déclaration , il a sufii jusqu’il nos jours
pour faire valoir ,les fondations destinées à la subsistance'
des pauvres, d’obtenir l’homologation du.parlement, qui
�( *7 )
^
rcmplacoit le prince dans cette fonction, et qui étoit
clj«rgé de nommer des administrateurs aux legs qu’il
approuveroit.
Depuis que l’ompereur a pris les rênes de l’état, le
droit public a changé relativement aux fondations. Ce
ne sont plus les cours d’appel qui les autorisent. Le gou
vernement s'est réservé ce soin*, et il a nommé à jamais,
pour les administrer, les/bureaux de bienfaisance et les
administrateurs des hôpitaux. Cette prérogative du chef
de l’état lui demeure attribuée pour toujoui’s par l’article
910 du Code civil, portant : a Que les dispositions au
« profit des hospices, des pauvres d’une commune, ou
« des établissemens d’utilité publique , n’auront leur
« effet qurtautant qu’elles seront autorisées par un arrêté
.« du gouvernement.
^
iT®
.
En cet état de choses, il s’agit d’examiner s’il a été
T
,
• \
»i
. r .
~
.
Incompepermis a un tribunal inférieur de s’ériger en réformateur tence des pred’un arrêté du gouvernement, et de déclarer les pauvres ¡¡¡^ipJnond’Aurillac incapables
cer
?".r des
,la
, # de recevoir un don dont le gouverO
capacité
îiement les avoit jugés capables de profiter.
pauvres.
Jamais le tribunal de Saint-Flour n’a pu s’arroger
ce droit. Ce n’est point à ceux qui tiennent la balance
de la justice, à diriger le gouvei'uail de l’état. Le chef
de l’empire prononce seul sur l’existence et la capacité
des corps qui font partie de son empire. Ses actes su
prêmes ne sauroient être ni suspendus, ni, réformés, ni
annuités par les autorités secondaires. Le droit public
est aujourd’hui l’arche sacrée que les cours elles-mêmes
ne peuvent toucher ; et des magistrats inférieurs ont bien
D a
p r o p o s itio n
Jj
j’
*
’
�( 28 )
osé y porter atteinte, en déclarant nul un legs approuvé,
autorisé parle gouvernement, sous prétexte que le gou
vernement n’a pas autorisé, approuvé le corps auquel
il a été laissé, et par conséquent le legs lui-même !
Eh quoi! le gouvernement aura reconnu la capacité
des pauvres d’Aurillac pour accepter des libéralités en
i y 8 5 , par l’entremise des-Dames delà miséricorde; et
un tribunal de première instance déclarera les pauvres
non - recevables dans leur demande, précisément par
défaut de capacité! Cependant le gouvernement-est l’uni
que juge, de cette capacité : le gouvernement seul peut
donner ou refuser aux( pauvres les qualités nécessaires
pour recevoir comme pour demander. Ainsi c’ est en vain
que le ministre de l’intérieur, que le conseil d’état, que
l’empereur lui-même, ont jugé que les pauvres avoient
été l’objet, et les Dames de la miséricorde les ministres
de la bienfaisance de madame de Galieu ! c’est en vain
, que l’empereur, voyant que de pieuses dames avoient
été remplacées ,par des hommes charitables, leur a or
donné d’accepter et de recueillir les dons de madame de
' Galieu au nom des pauvres ! en vain il a réglé remploi
du bienfait,• ( #conformément
aux
vœux de ■la
bienfaitrice!
•
'
i
t.- :/ . 1
.
inutilement il a voulu qu’une partie du legs fût appliquée
ü i’inslruction de la jeunesse
y une. autre consacrée au
soulagement des ecclésiastiques indigens ; une autre des
tinée à secourir,- dans leurs( humbles demeures, les pau■vres de toutes les classes! Ce règlement d’administration
publique a été
pesé-dans
la balance des juges de Saint-
jFlour; e t, trouvé trop léger, il s’évanouira comme un
songea devant l’intérêt personnel de l’héritier de madame
�C 29 )
de Galieu. Nous avons droit de mieux augurer de la
sagesse des magistrats suprêmes : c’est à eux qu’il est
réservé de venger l’ordre public d’un tel scandale.
}
Il seroit superflu de prétendre que l’arrêté du gou
vernement est contraire aux deux premiers articles de
rédit de 174 9 , puisqu’il autorise le bureau de bienfai
sance à accepter, au nom des pauvres, un legs qui n’a
pas été laissé aux pauvres, mais à l’Œuvre de la miséri
corde, communauté non approuvée, nulle par consé
quent , et au nom de laquelle le bureau ne peut rien
demander. Il est certain d’abord que l’arrêté n’est point
Contraire à l’article 1 e1'*, mais bien conforme à l’article 3
de l’édit de 1749- Cet article autorise les legs laissés aux
pauvres, à condition qu’ils seront homologués. Lie gouver
nement approuve et homologue le legs fait par madame
de Galieu, parce qu’il le considère comme fait aux pau
vres seuls, par l’entremise des Dames de la miséricorde.
Il ne faut que relire le texte de l’arrêté, pour se convainci’e de cette vérité. Mais enfin, et quand on supposerroit que le gouvernement a dérogé à l’édit de 174 9 , il
n’appartient pas, cncore une fois, aux autorités judi
ciaires d’annuller les actes émanés du pouvoir suprême.
Si l’arrêté a été surpris, que l’héritier de M cle. de Galieu
se pourvoie au conseil d’état pour le faire réformer.
Une objection plus solide, en apparence, sera de sou
tenir qu’en vain le gouvernement, par l’article 5 de son
arrêté, auroit renvoyé aux tribunaux la connoissance
des contestations qui pourroient s’élever au sujet de la
délivrance du legs fait par madame de Galieu , s’il ri’étoit
pas permis aux juges de s’écarter de l’tUTÔté.. Il est vrai
�C
3°
)
que l’ un des articles porte : « Qu’en cas de contestation^
« ou de refus de la part de l’héritier, le bureau de bien
« faisance poursuivra la délivrance du legs devant les
tr tribunaux. » On convient que l’autorité judiciaire est
chargée d’ordonner le payement du legs, en cas que Fhér
ritier s’y refuse, ou qu’il élève des difficultés mal fon
dées. C’est une formule répétée dans tous les arrêtés semr
blables, dont sont remplies les archives des lois. Mais
i’héritier ne peut contester, les juges ne peuvent exa
miner, que ce qui a rapport au droit civil; savoir,
la validité du testament, la capacité de disposer de la
testatrice , la quotité du legs , par exemple. Tout ce qui
est de droit public est au-dessus de leur atteinte. La capa
cité des pauvres, pour recevoir comme pour demander,
fait partie de ce même droit public ; et le gouvernement
seul s’est réservé d’en décider. Cependant c’est précisée
ment par défaut de capacité que les premiers juges ont
déclaré les pauvres d’Aurillac non-recevables dans leur
demande. C’est trop abuser sans doute de l’ambiguité
appax*ente des clauses de l’arrêté. Comment supposer le
gouvernement assez contraire à lui-même dans les arrêtés
qu’il rend chaque jour au profit des pauvres, pour per
mettre aux tribunaux de prononcer sur la capacité des
demandeurs , lorsqu il a reconnu cette capacité par l’acte
même qui saisit les juges? Comment concevoir le sens
de l’article 910 du Code civil, qui yeut que les disposi
tions en faveur des pauvres n’aient d’eiïét qu’autant qu’ils
auront été autorisés à recevoir et à demander par le gou
vernement, si les juges peuvent, après l’arrêté rendu,
déclarer que les légataires n’ont pas de qualité pouy
demander.
�( 31
3
^
Il est inutile d’employer d’autres raisons à réfuter une
objection qui n’est que spécieuse; et l’on croit avoir suf
fisamment prouvé que les premiers juges ont excédé leur
compétence , en déclarant les pauvres d’Aurillac nonrecevables dans leur demande, par défaut de capacité. Si
cependant on pouvoit penser encore que le tribunal de
Saint-Flour a eu le droit, malgré l’arrêté du gouverne
ment, de prononcer sur la capacité des demandeurs, il
sera facile d’établir que ce tribunal a y dans tous les cas,
porté atteinte au droit public, en déclarant les pauvres
d’Aurillac non-recevables à demander un legs qui leur
avoit été fait en 178 5, et que l’arrêté du gouvernement,
tenant lieu d’homologation,, a rendu valable..
On l’a déjà prouvé : les legs farts aux pauvres sont les p r o p o s i t i o n .
plus favorables de tous. L ’article 3 de l’édit de 1 7 4 9 ren- Le legs a
ferme à ce sujet des dispositions précises, que voici : « Les été fait aux
1
pauvres d’ Au« jondations laites pour la subsistance de pauvres étu- riiiac, et rar
« dians, ecclésiastiques ou séculiers, seront valables , à la veme^nent"1",
« charge de faire homologuer par le parlement les actes d’homoioga-'
« qui les contiendront. » Le parlement est chargé, par tion >le rcntl;
le raeme article, de nommer des administrateurs aux iondations qu’il approuvera*
Le legs fait par madame de Galieu, s’il a été laissé aux
pauvres, et non à l’œuvre de la miséricorde,, comme le
prétendent les premiers juges, devoit donc, pour devenir
Valable, être homologué par le parlement.
La révolution n’a point permis aux tuteurs des pauvres
de remplir cette' formalité : mais le gouvernement actuel
y a suppléé; et ou a fait voir que son arrêté tenoit en-
�C-3 * )
'fièrement lieu d’homologation. L ’évidence de cette vérité
frappe d’ailleurs tous les yeux. Il ne s’agit que de prouver
1 que le legs fait par madame de G-alieu a été.laissé nom
mément non moins qu’uniquement aux pauvres d’Aurillac.
Mais cela même devient évident par les circonstances
qui ont précédé le legs, par les termes du legs lui-même.
L ’abbé de Cabridens, homme d’une bienfaisance éclairée
-par la religion, se voit riche au delà de ses espérances >
•et par son patrimoine, et par le don de la terre de Grialou
que lui a fait sa sœur : il n’a que des parens éloignés ; il
veut faire d’utiles aumônes ; il jette les yeux autour de
lui, et voit les pauvres d’Aurillac dénués de tout secoursr
et même du bienfait inestimable de la première instruc
tion. Il commence par donner, en 17 7 7 , une rente de
6 5o
et une somme,de 10000 ^ pour l’instruction de la
jeunesse. Et qui nom m e-t-il pour diriger cette bonne
œuvre? les Frères de la doctrine chrétienne.
Résolu de verser d’autres bienfaits encore sur.les pauvres
de la ville qui l’a vu naître, il ne veut pas charger ses
derniers jours des pénibles soins de vendre ses propriétés;
, i l ne veut pas dépouiller une sœur qui lui est chère : c’est
à elle qu’il confie, avant de mourir, l’exécution de ses
pieux desseins. Etoit-ce en effet les Dames de l’œuvre de
la miséricorde qu’un homme aussi bienfaisant avoit en
vue, ou les indigens qu’elles soulageoient? Cet ecclésias
tique éclairé, qui, dans l’acte de 17 7 7, prévoit que les
Frères de l ’ é c o l e chrétienne pourroient être supprimés,
■et donne en ce cas la rente de 65o
à la ville, pour
l’instruction de la jeunesse, ne fondoit-il que sur le pré'tendu corps appelé l’Œuvre de la miséricorde^ et non
pas
�( 33 )
pas sur les pauvres, objet des secours de l’ GEuvre ? N e
l’en tend-on pas parler par la bouche de sa sœur, partager,
distinguer les indigens en trois classes, pauvres à instruire,
pauvres ecclésiastiques, pauvres honteux? Ecclésiastique,
il témoigne une prédilection spéciale aux ecclésiastiques
indigens; bienfaiteur éclairé, il secourt, par préférence,
l’infortune qui rougit de solliciter des secours.
Non, jamais les magistrats ne croiront que l’abbé de
Cabridens ait eu de pieux desseins en faveur des Dames
delà miséricorde, et non en faveur de ces pauvres qu’elles
avoient choisis pour l’objet de leurs soins : cependant
madame de Galieu ne fait, dit-elle, qu'exécuter les pieux
desseins de sonfrère. Si donc l’abbé de Cabridens n’avoit
en vue que les pauvres, si madame de Galieu 11’a fait
qu’exécuter ses charitables volontés, ce n’est qu’aux pau
vres qu’elle a pu , qu’elle a dû léguer, qu’elle a légué, et
à trois classes de pauvres distinctes et clairement désignées :
aussi dit-elle qu’elle lègue aux pauvres. Voici les expres
sions dont elle! s’est servie : « Et pour exécuter les pieux
te desseins qui m’ont été communiqués par l’abbé de
« Cabridens , mon frère, avant sa m ort, je lègue aux
« pauvres de TŒuvre de la miséricorde d’Aurillac, la
« quelle Œuvre est administrée, etc........ la somme de
*' 80000
dont une partie sera employée à l’instruction
« de la jeunesse, une autre au soulagement des pauvres
« ecclésiastiques, le reste enfin à secourir les autres peu« vres que l’Œuvre a coutume d’assister. »
Les circonstances qui ont précédé le legs s’accordent
donc avec les termes dans lesquels il est conçu , pour
montrer qu’il a été fuit aux pauvres, et à trois,classes de
E
�( 34 ) '
*
pauvres, et que par conséquent les Dames de l’œuvre
n’étoient chargées que d’en toucher le capital, de le placer
en contrats de r e n te e t d’en distribuer le revenu -, le tout
de l’agrément du parlement.
>
.
•Tous les esprits ne sont pas également frappés de la
justesse d’une preuve qui n’est formée que par une réunion
de circonstances et d’inductions tirées de ces circonstances.'Appelons le raisonnement au secours des faits , et que
toutes les armes de la parole fassent triompher la vérité.
• Si le legs étoit laissé aux pauvres d’Aurillac, sans autre
explication-, personne ne douteroit qu’il ne fût valable.
Toute la difficulté vient donc de ce qu’il est laissé aux
pauvres de l’Œuvre de la miséricorde, d’où l’on prétend
induire qu’il est fait à l’Œuvre elle-même. Eh bien, qu’on,
admette l’hypothèse où il seroit fait simplement aux pau-,
vres d’Aurillac : que seroit-il arrivé? .
•
•
Il
étoit nécessaire que le parlement homologuât le tes
tament. Qui auroit demandé l’homologation ? L ’exécuteur
testamentaire, dira-t-on, l’auroit demandée. . . Soit; mais
qui auroit reçu les fonds, qui les auroit administrés? Les
administrateurs choisis par le parlement; car l’édit de 1749
le charge d’en nommer. Eh bien ! s’il eût plu au parle
ment de choisir les Dames de la miséricorde, pour dis
tribuer les fonds, et leur supérieure pour les recevoir,
n’étoit-il pas le maître? Et quel choix plus sage auroit pu
faire l’autorité publique? C’étoit doubler le prix du bien
fait que d’en confier la distribution à de si pures mains ;
c’étoit commettre la vertu'modeste, la piété éclairée, la
charité vigilante, à l’exécution des derniers vœux de la
vertu, de la piété, de la charité.
'
■-
�'•
C 35 )
;
'
- Objectera-t-on que le parlement n’auroit pas nommé
les Dames de la miséricorde? Pourquoi? parce qu’elles
formoient un corps illicite. 11 faudroit d’abord prouver
qu’elles formoient un corps. Mais ensuite, et toujours en
supposant que le legs eût été fait simplement aux pauvres
cl’Aurillac, l’autorité publique ne reconnoît pour corps J
dans l’état, que ceux que sa volonté a créés. Le parlement
n’auroit donc point jugé illicite un corps qu’il n’auroit
pas même reconnu pour corps. Informé par le substitut
du procureur général, auprès du bailliage d’Aurillac, des
bienfaits et du zèle des Dames de la miséricorde, lepar->
lement les auroit sans doute commises à la distribution du
don de madame de Galieu. Peut-être même il auroit or-
donné que les fonds seroient versés entre les mains de ces
dames; peut-êti-e aussi il auroit exigé alors que les échevins veillassent à l’emploi des sommes en contrats de rente,
suivant l’intention de la testatrice , et que les contrats
fussent passés en leur nom : précaution sage, parce que
les Dames de la miséricorde n’étoient qu’une associationpassagère , et parce que la ville et son corps municipal
devoient toujours durer. ,
Ici triomphe la justice de la cause des pauvres; la vérité
paroît ici dans tout son jour. Ce que le pax-lement auroit
fait', auroit pu faire, la testatrice l’a pu faire : elle l’a fait.
XiC parlement auroit pu choisir , pour administrer les*,
fonds laissés par madame de Galieu, les Dames de la mi
séricorde; madame de Galieu les a choisies, elle a pré-.,
venu le choix de l’autorité : elle l’a indiqué du moins
car les fondations, on le répète, sont de droit public, et
l’autorité publique peut changer les administrateurs nom
E 2
�(3 0
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix. Il falloit bien que le legs fût reçu au nom des
pauvres, fût placé au profit des pauvres, fût distribué à
ces mêmes pauvres. La testatrice a chargé les Dames de
la miséricorde de tous ces soins, toujours sous la condi
tion que l’autorité publique ratifieroit ses volontés particulièi*es.
i
Que les premiers juges viennent dire maintenant que
l’Œuvre de la miséricorde étoitun corps, et un corps non
approuvé ; qu’ils tirent des termes mêmes dans lesquels est
conçu le legs, la preuve que la testatrice regardoit l’CEuvre
de la miséricorde comme une communauté, comme un
corps existant dans l’état, et qui devoit toujours exister.
Cela n’est pas constant : mais enfin qu’importe l’opinion
qu’avoit la bienfaitrice de ceux qu’elle chargeoit de la dis
tribution de son bienfait, si elle ne les regardoit en effet
que comme des administrateurs, comme on vient de le
prouver ?
.
•
i L ’Œuvre même, fût-elle un corps (ce qu’on nie), ce
corps ne-fût-il pas approuvé, quelle loi empêehoit la
testatrice de préposer un tel corps i\ la distribution de
son bienfait, toujours sous la’ condition que le parlement
approuveroit ce choix?
.
,
L ’édit de 1749 v e u t-il que les dispositions faites aux
pauvres soient annullees, lorsque la distribution en a été
confiée à des personnes incapables, ou à des corps non
approuvés? Non.: l’article 3 de 1édit- confirme toutes les
fondations en faveur des pauvres, à la charge de les faire
homologuer: mais il ne dit pas que si l'administration a
été- laissée à des mains incapables, les fondations seront
�(
37
)
aimullécs; il'ordonne seulement au parlement de nom
mer des administrateurs à la fondation. N’est-ce pas dans
le cas où ceux qui auront été nommés seront indignes ou
incapables de cette honorable fonction? Peut-on eXpli*
quer autrement cette dernière disposition de l’édit, et
seroit-elle applicable, si-les administrateurs choisis étoient
des personnes dignes de toute la confiance publique, oii
des corps légalement établis, tels que des hôpitaux ou
des fabriques ?
• *
L
C’est en vain que l’on s’aveugle sur la justesse de cetté
conséquence, et que l’on soutient que, s’il en étoit ainsi,
rien ne seroit plus facile que d’éluder la prohibition de
l’édit, en léguant indirectement à des corps illicites, qu’on
nommeroit simples administrateurs en apparence. Erreur
évidente ! Le corps, ou la personne à qui le legs seroit
laissé, ne s’opposeroit-il pas à l’avidité du corps chargé
de l’administration? Le parlement ne nommeroit-il pas
d’autres administrateurs? Eh quoi! madame Galieu choisit
trois classes de pauvres pour ses légataires ; elle rend son
testament public, notoire dans la ville entière d’Aurillac,
par l’ordre de vendre tous ses biens d’Auvergne ; elle or
donne de placer le capital de son legs, pour n’en distribuer
que les revenus; et l’on osera dire que l’Œuvre de la misé
ricorde , que ce corps chimérique qui n’existe que dans
l’imagination du sieur Capelle et des premiers juges, auroit
pu s’enrichir des dépouilles des pauvres, et détourner à
son profit la source des charités d’une femme vertueuse!
C’est trop abuser de l’obscurité qu’on voudroit répandre
sur la cause la plus claire.
Ne laissons pas môme à l’erreur le dernier retranche-
�...
-
C 38 )
•
ment qu’elle rélève contre la vérité. L ’Œuvre delà misé
ricorde, ce corps illicite! cette communauté illégale! qui
avoit une supérieure! une assistante! un receveur! un
titre particulier ( disent les premiers juges)! n’étoit point
un corps, n’étoit point une communauté; c’étoient quel
ques dames vertueuses rassemblées pour foire le bien. Les
communautés-ne meurent-jamais. Ce sont des personnes
dans l’état. Elles ont leurs biens, leurs statuts, leurs chefs:
Les dames de la miséricorde étoient des femmes du monde,
jnariées, veuves , célibataires, qui ne faisoient pas de
vœux, qui n’avoient pas de biens. Elles s’étoient chargées
seulement de distribuer ceux qu’on donneroit aux pauvres.
Qui a appris aux premiers juges qu’elles avoient un titre
particulier, une assistante, une supérieure, un receveur?
Les Dames de la miséricorde n’avoient pas de titre par
ticulier. On les nommoit à Aurillac D am es de l’œuvre
de la m iséricorde, comme dans d’autres villes Dam es
de la charité. Ce mot d'œuvre ne désigne point un corps
nouveau : il signifie travail, et indique les modestes fonc
tions des femmes pieuses qui s’étoient dévouées au service
des pauvres. X<es Dames de la miséricorde n’avoient pas
d’assistante. Iæur prétendu receveur, c’étoit l’une d’elles,
çhoisie entre les autres pour recueillir les dons des per
sonnes généreuses. Elles n’avoient pas de chefs. Madame
de Fontanges, il est v ra i, est appelée par madame de
Galieu leur supérieure ; mais c’est un titre imaginé par
la testatrice, ou uniquement inventé pour désigner celle
que scs égales a voient cliargee de présider leurs assemblées
en l’absence du curé d’Aurillac. Le curé d’Aurillac, qui
étoitleur véritable chef; ejevoit assister, comme 011 vient
�. ( 39 )
cle le dire, à toutes leurs réunions, et on en rapporteroit
la preuve, s’il le falloit. Ces dames s’étoient réunies naguère :
leur société se seroit rompue à la mort des plus zélées,
comme toutes les sociétés. Elle est rompue en effet aujour
d’hui , quoique plusieurs des associées vivent encore, et
entr’autres la plus illustre.
.•
Mais, à quoi bon tant de détails pour apprendre ce qu’à.
Saint-Flour seulement on ignore, ce que chacun sait à
Aurillac comme à Clermont, comme dans la ville où on
écrit ce mémoire. Cette ville aussi avoit ses Dames de la
charité. Furent-elles jamais considérées comme une cornmunauté ?
■ •
' • C’en est assez sans doute pour montrer que le legs fait
par madame de Galieu n’a été laissé qu’aux pauvres, et
non point à un corps imaginaire. Il est donc valable, puis
que l’arrêté du gouvernement supplée à l’homologation;
et les premiei’s juges ont porté atteinte au droit public j
en déclarant les pauvres d’Aurillac non recevables à de
mander un legs qui leur a été laissé nommément non
moins que directem entun legs que le gouvernement, a
autorisé. D’ailleurs, le gouvernement avoit déjà reconnu
la capacité des pauvres pour recevoir et pour demander :
il n’appartenoit plus au tribunal de Saint -Flour d’en
décider. Ce tribunal a donc à la fois excédé sa compétence
et mal jugé au fond. Son jugement doit donc être infirme
sous ces deux rapports.
1
D E U X I È M E
'
PARTIE.
Moyens sub
. L ’héritier de madame de Galieu, plus instruit que s,dlfIr,:5,0P
,
x
posésparl he
personne de la foiblesse de sa cause, après que la validité riii«.
�' ( 4° )
du legs qu’il prétend nul a été démontrée, soutiendra,
Comme il l’a fait devant les premiers juges, que du moins
le legs a fait retour, si l’on peut ainsi s’exprimer, à la
succession dont il étoit séparé, et il se fera une dernière
ressource de la condition de retour écrite dans le testa
ment de sa bienfaitrice.
1°. Prétendu
retourdu legs
à la succes
sion.
La voici : « Et dans le cas, d it-elle, où l’Œuvre de
« la miséricorde viendroit, par la suite des temps, à être
« réunie à l’hôpital général d’Aurillac, ou à tout autre
« hôpital, je veux et entends qu’en ce cas le legs de
« 80000
que je fais a ladite (Euvre, fasse retour à mou
« héritier. »
Que peut-on espérer d’une clause aussi extraordinaire,
qui est contraire au droit du pouvoir suprême, et qui
fait dépendre le retour du legs d’un événement qui n’est
pas encore arrivé, et n’arrivera vraisemblablement ja
mais? Cependant le sieur Capelle a fait de ce moyen un
des principaux motifs de ses refus. Foible , impuissant
auxiliaire, qui ne défendra point une cause privée de
ses appuis les plus solides depuis que la validité du legs
est démontrée! Inutile et dernièi'e ressource, qui ne
résistera point à la force du droit public et de la v é rité!
Dans les matières qui appartiennent au droit public,
il faut se garder de cette opinion, trop générale, que
l'intention du testateur est la supreme loi; qu’il peut
resserrer les siècles dans le cercle de sa volonté ; et donner
des chaînes aux générations qui n’ont pas encore reçu
le jour. Il faut mettre de sages restrictions à ce raisonnejnent des âmes généreuses, que le bienfaiteur est libre d’im
poser
�'
^ 41 ^
.
.
,
poser des conditions à des bienfaits librement accordes.;
Ce raisonnement peut être-fonde, lorsqu il s agit, dans
le droit civil, de savoir si un légataire a droit à un legsqui ne lui a été fait qu’à de certaines conditions ; c’est
alors la volonté du testateur qu’il faut considérer. Mais'
les fondations sont de droit public ÿ comme l’héritier
dé madame de Galieu en convient sans doute*, et les
vrais principes du droit public sont que le bienfaiteur
peut ne point donner, mais qu’il n’est pas toujours libre
de reprendre. Il est le maître de ses biens ; mais ils appartenoient avant lui à la société, et ses dons ne sont en
effet qu’une dette. Le bien public est son but ; mais
c’est à l’autorité publique à le remplir de la manière la
plus utile à l’état, la plus convenable aux circonstances.
On trouve le développement de ces principes dans les
préliminaires de l’ouvrage nommé par l’illustre Grotius
le Droit de la guerre et de la p aix, et dans la première :
partie du Droit public, de M. Domat.
. •
• ,
C’est ainsi que des sommes, destinées par le fondateur
à élever une église, ont été employées par le prince à.
doter un hôpital ; c’est ainsi que divers arrêts ont changé,
les administrateurs nommés par un testateur à la fonda
tion , et que le gouvernement actuel a chargé le bureau
de bienfaisance d’Aurillac de distribuer aux pauvres les
dons de madame de Galieu, qui avoit confié ce soin aux
Dames de la miséricorde.
Toutes les clauses par lesquelles un fondateur met des
entraves aux droits de l’autorité publique sur sa fondation,
sont donc regardées comme non-écrites ; c’est une maxime
de la jurisprudence romaine, comme de la nôtre. Telle est
'
F
�..
.r
c 42 ) ■
t
la condition mise par madame de Galieu à son bienfait.
On diroit qu’elle-m êm e en a reconnu le vice ; elle l’a
placée ou plutôt cachée à la fin de son testament, comme
une idée étrangère à son cœur, et qui ne lui avoit pas été
inspirée aù moment où elle commençoit son testament
par laisser 80000
aux pauvres.
! Madame de Galieu vouloit bien soulager les pauvres : mais
elle vouloit que les Dames de la miséricorde fussent les
seuls ministres de sa bienfaisance; elle leur attribuoit ex
clusivement le droit de distribuer ses dons.- C’est, dira
t-on , parce qu’elle les destinoit uniquement aux pauvres
que l’Œuvre soulageoit, c’est-à-dire ¿ aux pauvres honteux,
aux pauvres qui n’alloient point à l’hôpital. Si cependant
le parlement avoit jugé qu’il seroit plus utile à la ville
d’augmenter les fonds de l’hôpital général que d’employer
lés dons de madame de Galieu en secours à domicile, s’il
n’eut voulu homologuer le legs qu’à cette condition, peuton douter que la ville tout entière n’eût réclamé contre
la clause de retour stipulée par la testatrice ? Le parlement
sans doute n’y auroit eu aucun égard : il eût usé du droit
que lui attribuoit l’édit de 1749, de nommer des admi
nistrateurs aux fondations soumises à l’homologation, et
il auroit attribué aux administrateurs de l’hôpital celle de
madame de Galieu, s’il avoit jugé plus utile d’en faire
cet usage.
E n iin , un moyen victorieux contre la-pré tendue clause
de retour invoquée par l’héritier, c’est l’arrêté du gouver
nement qui prononce tacitement qu’elle est comme nonécrile. Quand on supposeroit même que l’événement
prévu par la testatrice est arrivé, ce qui est fa u x , le chef
�(
43
)
r
de l’état, usant de son autorité suprême, a déclare que
la réunion du legs à la succession ne s’est point opérée ;
il a reconnu la capacité des légataires; il a nommé de
nouveaux administrateurs aux dons de madame de Galieu.
L ’autorité judiciaire n’a point le droit de réformer cet
acte, émané de la première des autorités.
’
Mais la clause de retour, non-seulement est contraire
au droit public, non-seulemetft est annullée par l’arrêté
du gouvernement, elle est encore illusoire autant qu’inu
tile. L ’événement qu’elle prévoit n’arrivera jamais, sui
vant toute apparence; du moins il n’est point encore
arrivé, comme il est facile de le démontrer.
Est-ce le prétendu corps appelé l’Œuvre de la miséri
corde qui a été réuni à un hôpital? cela est impossible.
On a prouvé que ce corps n’existoit point. La testatrice,
d ir a -t-o n , pensoit qu’il existoit, car elle suppose que
l’Œuvre de la miséricorde pourroit être réunie à un hô
pital. Cette objection rentre dans la proposition déjà
réfutée, que les Dames de la miséricorde formoient une
communauté. Ce n’est pas la lettre, c’est l’esprit de la
clause qu’il faut chercher. La testatrice a voulu prévoir
le cas ou les biens destinés à être distribués aux pauvres
par les Dames de la miséricorde seroient réunis à ceux
de l’hôpital général d’Aurillac ou de tout autre hôpital ;
elle ne vouloit pas que ses bienfaits, consacrés à soulager
l’indigence laborieuse, servissent à nourrir l’oisiveté et la
paresse dans un hôpital, comme il arrive quelquefois. Ses
craintes ne se sont pas réalisées, ses desseins n’ont pas été
trompés; aucune loi^de la révolution n’a confondu les
biens desïiinês aux secours à domicile} avec ceux que la
F 2
�( l44 -/)
générosité publique offre à tous les pauvres indistincte
ment dans les hôpitaux : ces biens ont toujours été dis
tincts, comme les administrateurs qui les régissoient. Je
le prouve.
La première loi rendue au sujet des étnblissemens de
bienfaisance, c’est celle du 18 août 17 9 2 , qui supprime
toutes les associations, confréries et congrégations de piété
ou de charité, et qui ordonne que leurs biens seront
administrés et vendus comme les autres domaines natio
naux. Dès ce jour plus de secours à domicile, mais point
de réunion des biens des pauvres qui les recevoient aux
biens des hôpitaux.
.
La loi du 19 mars 1793 rétablit les secours à domicile:
elle ordonna qu’il seroit formé, dans chaque canton, une
agence chargée de la distribution du travail et des. secours
aux pauvres; que ces secours seraient divisés en_secours
pour les pauvres valides „ et secours à domicile pour les
pauvres infirmes.
,
,
Enfin parut le fameux décret qui déclara propriété
nationale l’actif et le.passif des hôpitaux et des autres
établissemens de bienfaisance. L ’article 4 ordonne à la
commission des secours publics de faire parvenir ( aux
administrateurs des hôpitaux ) les fonds nécessaires aux
besoins de ces établissemens, pour leur dépense courante,
jusqu’à ce que la distribution des secours soit déimitivement arrêtée. •
'
• • .
• -,
Ainsi furent conservés, et les administrateurs des hô
pitaux, et les secours que tous les pauvres indistinctement
recevoient „dans ces établissemens ?/ comme 1 ^ sexH^r^ iV
domicile l’avoient été par la loi du 19 mars ,1:793,,.,£jui
�(
4$
)
charge de leur distribution les agences cles cantons; ainsi
n’ont jamais été confondus,. ni les biens des diverses classes,
de pauvres, ni, les administrateurs de' ces biens.
L e s . choses sont demeurées en cet état jusqu’à la loi qui
maintient les hôpitaux dans ceux de leurs biens qui n’ont
pas été vendus. Çeu de temps après, et en 17 9 6 y fut
rendu le décret qui crée des bureaux de bienfaisance,
chargés spécialement de la distribution des secours à do
micile. Ges bureaux remplacèrent les agences établies par
la. loi du 19 mars 1793 ; et bientôt un décret leur rendit
les biens des pauvres qui avoient échappé à la vente
ordonnée par le décret du 18 août 1792. Le legs fait par
madame de Galieu est de ce nombre»
Ces détails ont paru nécessaires pour montrer que
jamais les biens destinés aux secours à domicile n’ont été
réunis à ceux des hôpitaux, comme le prétend le sieur
Capelle : il faut fermer les yeux à l’évidence, pour sou
tenir une pareille opinion. Il est vrai que pendant quel
que temps les biens destinés au soulagement de toutes les
classes de pauvres ont été réunis au domaine national,
et confondus, si l’on veut, dans le même trésor, dans
le trésor public : mais cette source commune se divisoit,
pour ainsi dire, en deux ruisseaux dont le cours éloit
séparé. Bientôt les sources sont devenues distinctes comme
les ruisseaux; mais jamais celui que devoit alimenter la
bienfaisance de madame de Galieu n’a été tari.
C’est donc inutilement que l’héritier de madame de
Galieu prétendroit que le legs réclamé par les pauvres
¿ifait retour à la succession., Ses raisons sont aussi foibles
�•
c "
4
6
3
.
.
à cet égard que les prétextes qu’il allègue pour obtenir
la réduction de ce même legs.
Une somme de 80000
est exorbitante, s’écrie-t-il,
relativement aux forces d’une succession que la révolu
tion a presque anéantie. La suppression des cens lui a causé
d e s pertes immenses, incalculables. Il est vrai: des rentes,
et en assez grand nombre, sont perdues pour lui; mais
enfin l’héritier de madame Galieu ignore-t-il que la réduc
tion d’un legs ne peut plus être demandée quinze ansaprès l’ouverture de la succession, et lorsqu’en acceptant
l’hérédité sans condition , il s’est exposé aux disgrâces
comme aux faveurs de la fortune ? Mais encore quelles
preuves, autres que ses plaintes, a-t-il'donné jusqu’ici
de l’insuffisance de la succession ?' Où est l’inventaire des
meubles ? On sait qu’il existe : pourquoi ne pas le pro
duire ? Où est celui des créances? L ’état des immeubles,
les baux à ferme, où sont-ils ? Quels contrats de rentes
établissent les dêtrimens énormes que la suppression des
cens lui a causés ? Il sera un moins riche héritier, il est
vrai; mais il sera riche encore': devoit-il l’être, s’il n’avoit
été héritier? on en appelle à lui-même. Il sera un moins
riche héritier : mais il vient de vendre les domaines de
Faillitou et de la Bartassière, plus de 8 0 0 0 0 ^ ; mais il
lui reste la terre de Clavières, qui vaut cette somme; mais
la terre de Grialou lui appartient ; mais il possède des
vignes dans le Querci ; mais il ne compte que vingt-quatre
ans, et depuis dix années la succession de madame de Ga
lieu lui produit 10000
de revenus. Grâce à ces événejnens qu’il accuso, il les reçoit, ces revenus, qui, suivant le
�_
.
( 47 )
.
..
'
testament de sa bienfaitrice, ne devoient lui appartenir qu’à
sa majorité ; ces revenus qui jusqu’alors devoient être
employés à acquitter les dettes del’aniitie et de la religion;
ces revenus que grossit encore l’intérêt produit par le ca
pital du legs que les pauvres attendent depuis quinze ans.
Que l’héritier de madame de Galieu se garde donc d’in
voquer des motifs de considération à l’appui de ses foibles
droits ! Des motifs de considération en faveur de sa cause !
il auroit mieux fait de garder le silence ; ce n’est pas à lui
de les réclamer. Ils se présentent en foule pour combattre
ses prétentions. La morale, la religion, la pitié, l’intérêt
public, viennent au secours des pauvres. La morale, invo
quant le respect dû aux derniers vœux d’une femme ver
tueuse , s’écrie que le legs qu’ils réclament est une dette
plutôt qu’un bienfait. La religion, offrant à nos regards
le lit de mort de l’abbé de Cabridens, le montre dépo
sant dans le sein d’une sœur chérie ses volontés expia
toires ou bienfaisantes, et précédé dans le séjour céleste
par les prières reconnoissantes des pauvres , comme par
un doux encens. La pitié attendrit les cœurs sur les souf
frances des indigens d’une ville entière, gémissans sans
secours depuis quinze années, n’espérant plus qu’en ce
legs, dernière ressource qu’on veut leur ravir. L ’intérêt
public peint »les malheurs des temps ; la misère, fille de
la guerre extérieure et des discordes intestines; les hô
pitaux dévastés, les établissemens de charité détruits: il
représente que ces jours ne sont plus, où il sembloit néces
saire de refroidir la bienfaisance : il repousse ces pré
jugés trop funestes et trop répandus, que c’est un abus
de fuira l’aumône $ que semer les dons, c’est faire naître
�48
les pauvres, qui, malgré ces idées libérales , sont plus
nombreux que jamais. Enfin, toutes les affections nobles
et généreuses appellent à protéger cette cause les hommes
vertueux, les hommes religieux, les hommes du monde,
les hommes d’état:leurs efforts, réunis à la force du droit
public et des lois, entraîneront la balance de la justice.
L.
j.
L
e
JULES,
b. M A L L E T , avoué.
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a lu le mémoire ci-dessus,
E stim e
que les moyens qui s’y trouvent développés sont con
form es aux principes du droit public, auquel appartient la cause.
II est certain, d ’abord, que l’arrêté du gouvernement est une reconnoissance form elle de la capacité des pauvres d’A u rilla c , et que
les juges de Saint-Flour ont excédé leur compétence en les décla
r a n t n on-recevables dans leur dem ande, précisément1 par défaut
dé capacité. A u fo n d , les droits des demandeurs ne sont pas moins
evidens que l'erreur des premiers juges. Les circonstances et les
termes du legs démontrent assez qu'il a été laissé aux pauvres, et
à trois classes de pauvres j et que les Dam es de la miséricorde
étoient seulement chargées d ’en faire la dis tribulion. On ne parle
pas des m otifs de religion et d’ intérêt public que les pauvres in
voquent à l’appui de leur demande. L a justice n ’a pas besoin dans
cette cause du secours de l ’équité] et l'esprit n’est pas moins satis
fait que le cœur.
D é lib é ré à
C lerm o n t, le 10 juin 1804,
BO IR O T , B E R G IE R , B E IL L E -B E R G IE R .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bureau de bienfaisance de la ville d'Aurillac. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jules
Mallet
Boirot
Bergier
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire pour les pauvres de la ville d'Aurillac, légataires d'une somme de 80000 francs. Mémoire pour les Pauvres d'Aurillac, représentés par le Bureau de bienfaisance de cette ville, appelant ; contre le Sieur Capelle, héritier de madame de Galieu.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53718/BCU_Factums_M0219.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53198/BCU_Factums_G1309.pdf
5f9d3559cb8a63063e77c3dd40ae6c5f
PDF Text
Text
P
'
R
É
P O U R le Sieur C
C O N T R E
le B
C
I
S
apelle
u r e a u
d e
, défendeur,
B i e n f a i s a n c e
de
la V ille d 'A u rilla c, demandeur.
L a Dame G ALIEU décédée en 178 9 , avait, par
son testament du 5 octobre 1785, institué pour son
héritier le sieur C ap e lle , son neveu , à la charge
d’une quantité considérable de legs divisés en trois
classes.
A la tête de ceux de la seconde est un legs de 80,000
fait à l'OEuvre de la miséricorde de la V ille d’Aurillac,
Congrégation non approuvée.
C e legs est ainsi conçu :
Pour exécuter les pieux desseins qui m’ont été
communiqués par feu M. Cabred en s, mon frère,
je lègue aux pauvres de l’OEuvre de la miséricorde
« de la V ille d’Aurillac , laquelle Oeuvre est administrée
par de pieuses dames, et dont M e. Fontanges est la.
Supérieure, la somme de 80,000, à la charge néan-
moins que les Administrateurs de ladite œuvre
seront tenus de payer annuellement et à perpétuité
�( 2 )
» aux Frères macédons de l’école chrétienne établis
j) à Aurillac, la rente et pension annuelle que feu M,
Cabredens s’était obligé de leur payer par acte e tc .,
» sans laquelle condition je n’aurais légué à ladite
jî œuvre que Go,ooo ; qu’il sera employé 20,000 pour
?> assister MM. les Pretres de la V ille et Communauté
» d’Aurillac qui seront dans le besoin, et même ceux
» des environs si le revenu de ladite somme le permet;
» que le revenu des 4°>000 restans sera employé à
assister et soulager les pauvres que ladite (Euvre a
3) coutume d’assister , etc. etc.
<ç Je veux et entends qu’au cas que l’œuvre de la
» miséricorde vînt à être réunie dans le temps à
» l’hôpital général , ou à tout autre hôp ita l , le legs de
» 80,000 que je fais à ladite œuvre , fasse retour à
» mon héritier. » ,
L e testament porte en outre que cette somme sera
payée aux termes ensuite fixés aux Dames administrant
ladite œ u vre, sur les quittances u fournir par Me. de
Fontanges leur Supérieure.
Et attendu l’impossibilité de payer des legs si con
sidérables , ( ils se portent à près de 000,000 ) avec
le prix du m obilier, il est dit qu’après le décès de la
testatrice il sera procédé à la vente du mobilier et de
divers immeubles désignés, parmi lesquels se trouvent
des fiefs , à l’effet de quoi elle nomme le sieur Cayla
�_ C5 )
exécuteur testamentaire , ou plutôt fiduciaire , pour
que celui-ci acquitte lesdits legs avec le prix desdites
ventes, ou des revenus de la succession qu’il percevra
jusqu’à ce que l’héritier ait atteint sa 25 me année ,
(prairial an i 3 ) , terme jusqu’auquel doit durer l’exé
cution testamentaire ou plutôt la fiducie, bien que
par le décès du sieur Capelle il arrivât un autre héritier
qui ne fût pas m ineur, voulant que cet exécuteur
testamentaire ne puisse être recherché ni pressé par
personne , mais que pour vendre il puisse choisir et
attendre le moment qui lui paraîtra convenable ; de
sorte qu’il n’y pouvait être fo rc é , et que par suite il
pouvait retarder le payement du legs jusqu’au dernier
moment de l’exécution , jusqu’en prairial an i5.
L e payement des legs de la première classe devait
être fait dans l’an du décès. Ces legs absorbaient plus
que le prix du m obilier, de sorte que les legs suivans
ne pouvaient être acquittés qu’avec le revenu des
biens restans, et le produit de ceux vendus. Cette
circonstance est précieuse à recueillir.
Quant aux legs de la seconde classe, ils devaient
être payés à fur et mesure que les ventes des biens
ou les revenus de l’hérédiLé auraient produit des
fonds suffisons.
La révolution survint j au milieu d’uri désordre
¿pouvantable, toutes les corporations furent dissouLes,
�C4 )
Gt les biens de toutes les Institutions aumônières
allèrent se fondre et se perdre dans la main de la Nation.
D epuis, un Gouvernement sage , travaillant de
toute manière à réparer tant de m aux, a rétabli ou
créé des Bureaux de bienfaisance.
Celui de la V ille d’A urillac, autorisé par un arrêté
du Gouvernem ent, demande la délivrance du legs
fait à l’œuvre de la miséricorde.
Pour commencer , supposant le legs valide au
fonds , nous nous bornerons d’abord à proposer les
exceptions qui tendent à reculer l’époque du payement
ou à restreindre la quantité.
Il devrait être accordé terme à l’héritier jusqu’en
prairial an i3.
L ’exécutcur testamentaire ou plutôt le fiduciaire,
car le sieur Cayla doit être regardé comme t e l , puis
que selon le testament, il devait rester en possession
de toute l’hérédité, à la charge seulement de rendre
tout ce qui se trouverait entre ses mains , à la fin de
l’exccution ; le sieur C ayla, disons-nous, avait terme
pour acquitter ce legs , jusqu’en prairial an i3 ; c’està-dire , jusqu’à ce que ledit Capelle eût atteint l’àge
de 25 ans, soit qu’il restât héritier , ou qu’un autre
môme majeur fût appelle à son défaut. Cela résulte
�341
( 5 )
du testament, car d’un coté on ne peut supposer que
les revenus accumulés pussent remplir le legs avant
cette époque ; de l’autre, l’exécuteur qui ne pouvait
être recherché et pressé par personne, pouvait re
tarder et renvoyer les ventes à ce temps.
Or , quoique l’exécution et la fiducie ayent cessé
avant l’époque prévue par la testatrice, et qu’avant
ce temps l’héritier ait été mis en possession , il ne
doit pas pour cela être privé du terme : car il avait
été accordé , non en faveur de l’exécuteur et du fi
duciaire qui devait tout rendre, mais seulement en
faveur de l’héritier ; et cela est si v ra i, qu’il n’avait
pour objet q u e de faciliter l’acquit des legs , et de
dégrever la succession d’autant, en permettant d’ac
cumuler les revenus, ou en donnant le temps de vendre
avantageusement, au moyen de quoi jusqu’à celle
époque il ne pouvait être dû aucun intérêt. T e l est
d’ailleurs le sens de la L. 36 de cond. et demonst.
Dans ces 80,000 , une somme de 20,000 est léguée
à condition que l’œuvre de la miséricorde payera
aux Frères macédons de l’école chrétienne, la rente
et pension à laquelle feu M. Cabredens s’était obligé
envers eux par acte du
etc. ; condition sans la
quelle il n’eût légué que Go,OOO.
Cette partie du legs est donc subordonnée à l’acte
dont s’agit : cette disposition n ’a pour objet que de
�fixer le mode suivant lequel il devra être executé ,
de décharger l’héritier de cette obligation, et de la
remettre à un tiers. T elle est la cause et la condition
du le g s , sans cela il ri eût été légué que 60,000.
Mais le Bureau de bienfaisance qui en deman
dant les 80,000, demande aussi cette partie du legs ,
aurait dû d’abord prouver que les Frères macédons
ont obtenu des lettres patentes sur cet^ a cte, ou tout
au moins qu’il est dans la classe des exceptions por
tées par l’art. 3 de l’édit de 1749; ce que nous nions,
et sans quoi il est nul : que l’acte est postérieur à la
Déclaration de 1762 , et qu’en ce cas les Frères macédons étaient proprement une école de charité , sans
quoi l’acte serait nul encore , parce qu’il donnait une
rente constituée , tandis qu’aux termes de l’édit de
1749 il ne pouvait être donné que des rentes sur
l’Etat ou autres de cette espèce.
Ainsi tombe et l’acte par lequel feu M. Cabredens
s’était obligé envers les Frères macédons, et la dis
position testamentaire qui lui correspond.
L e legs est d’ailleurs caduc , car son o b je t, ainsi
que l’obligation de M. Cabredens ont péri avec les
Frères macédons ; de sorte que la condition pour la
quelle on a expressément légué, sans laquelle on n'eût
légué que (jo,000 , n existe plus.
Ajoutez à cela qu’une partie du capital de la rente
�c 7 )
; , _ .
pour le service de laquelie ie legs avait été fa it, s«
trouve remboursée , ainsi qu’il résulte'des quittances
produites par le sieur Capelle.
Sur les Go,ooo restans , 20,000 sont légués pour
que le revenu soit employé à soulager MM. les Prêtres
pauvres de la ville d’Aurillac.
Il n’est malheureusement que trop sûr que cette
classe , horriblement décimée par la révolution , est
en proie à la plus affreuse m isère; mais le Gou
vernement va faire cesser ce scandale ; les anciens
titulaires auront un traitement ; les Evêques , sans
doute , se feront un devoir de placer ceux qui n’en
auront pas ; de sorte que sous peu tous les prêtres
existans se trouveront à l’abri du besoin ; les prêtres
à venir n’auront pas plus à craindre ; car les titres
cléricaux seront désormais de 5 oo de rentes.
Ainsi donc , si le revenu des 20,000 ne suffit pas
pour les besoins actuels des prêtres , à l’avenir il sera
plus que suffisant, et il serait juste que l’excédent
revienne à l’héritier. Il demande en conséquence à
être autorisé à retenir ces 20,000, tant qu’il le vou
dra, à la charge d’en payer l’entier revenu, ou partie
suivant qu’il en sera besoin, par ce moyen le retour
sera exact et parfaitement d’accord avec les volontés
de la testatrice; il ne sera ni moindre, ni excessif.
�L ’héritier demande à prélever la quarte falcidie
sur le legs entier ou réduit.
On a répondu que pour prélever la quarte , il fallait
être héritier bénéficiaire. Si cela était, le sieur Capelle
n’étant pas encore parvenu à sa 55 me- année pourrait
se faire relever d’une acceptation faite en minorité ;
mais nous ne ferons pas valoir ce m oyen, parce que
le principe avancé par le Bureau de bienfaisance est
absolument faux. Il est vrai que pour prélever la fal
cidie, il faut avoir fait inventaire , pour constater la
binasse de la succession. £ ici il a été fait ) Mais il
ne l’est pas, qu’il faille être héritier bénéficiaire. Làdessus nous renverrons aux auteurs qui ont traité la
matière.
On a ensuite supputé , accumulé des zéros. Ces
brillantes exagérations doivent être réduites de plus
de moitié ; et quand cela ne serait pas, la testatrice
chargée envers l’héritier d’un riche fideicommis, a du
le lui remettre franc et quitte ; et ce iideicommis pré
levé , on verra que ce qu’elle laisse de son chef ne
remplit pas les legs qu’elle a faits.
Enfin, comme il sera établi dans le cours de la
discussion qui suit , l’héritier a le d roit, aux termes
de la Déclaration de 17Ç2 ou 1774 > d’offrir le paye
ment de ce legs en rentes sur l’E tat, et le Tribunal
ne pourrait le lui refuser.
M OYENS
�M i
C 9)
MOYENS
AU
FONDS.
L ’affaire présentée sous ce premier rapport, nous
l’examinerons au fonds, et nous discuterons la validité
du legs.
L e legs dont il s’agit est-une fondation. Les fonda
tions sont définies ; « une dotation faite à un Etablis
sement pour l’acquit d’une ou de plusieurs charges. «
Pour déterminer la validité d’une fondation, il faut
considérer quàtre choses : i °. quel est le Corps auqueion donne ; 20. quelles sont les formalités nécessaires
pour saisir ce Corps ; 5 °. quels biens on peut lui don
ner , 4°. quels4sont les termes dans lesquels on a
donné.
1 C ’est, je pense, traiter la question sous tous ses
rapports possibles, et sous tous ces rapports il sera
.constant que le legs est nul.
ï °.
Quel est le Corps auquel on a légué ?
C ’est un principe de droit public qu’il ne peut exister
de corporations, et qu’elles ne peuvent obtenir d’exis
tence légale que par l’approbation du Gouvernement.
C e principe consacré par les lois romaines, a traversé
les siècles , et a été reçu par tous les empires raison»
uablement constitués.
a
�Il a cto régularisé en France par divers édits ,
notam m ent par ceux de 1666, de l'jhQ , et par la
déclaration de 1762 qui n’a été enrégistrée au Parle
ment de Paris qu’en 1774
Ils se réunissent tous pour déclarer illégaux les
Corps non approuvés , et pour prononcer la nullité
de tous actes faits à leur profit.
Qu’on lise l’édit de 1749. Cela se trouve â chaque
article ; nous nous contenterons de rapporter l’art. 9
ainsi conçu r
»
»
»
»
»
»
«
<c Désirant assurer pleinement l’exécution du présent
édit, concernant les Etablissemens mentionnés dans
l’art. 1. ( qui sont tous Chapitres, Séminaires,
C ollèges, Maisons ou Communautés religieuses,
même sous prétexte d’hospice , Congrégations , Confrairies, Hôpitaux, ou autres C orp s, Communautés
ecclésiastiqu es , sécu lières , religieuses ou laïques ,
de quelque qualité qu’elles soient etc. etc. ) déclarons
» nuls tous ceux qui seront fa its sans avoir obtenu nos
» lettres patentes , et les avoir f a i t enregistrer dans les
» form es ci-après prescrites , voulons que tous les actes
» et dispositions qui pourraient avoir été fa its en leur faveur
» directement ou indirectement, ou par lesquels ils pour» raient avoir obtenu des biens de quelque nature
» que ce soit, à titre gratuit ou onéreux, soient dé-
�M y
C a )
»
»
«
»
»
»
»
claris nuls t sans qu il soit besoin d'obtenir des lettres de
récision contre lesdits actes , et que ceux qui se
seraient ainsi établis , ou qui auraient été chargés
de former lesdits Etablissemens , soient déclarés déchus de tous droits résultans desdits actes , nonobstant
tous consentemens exprès ou tacites qui pourraient
avoir été donnés à l’exécution desdits actes ou
» dispositions. »
L ’article 2 prononce la n u llité, quand même ces
dispositions seraient fa ite s à la charge d'obtenir des lettres
patentes.
Ces articles sont formels , et tombent d’aplomb sur
l’espèce, ils prononcent également la nullité des
Corps non approuvés, et des dispositions faites à
leur profit.
Ici l’Etablissement , la Corporation , PHôpital, la
Congrégation ,sous prétexted!hospice , dite l’œuvre delà
miséricorde n’est point approuvée, donc elle est nulle,
donc aussi les actes faits à son profit directement ou
indirectement, à elle-même, ou à ceux qui l’adminis
trent , sont n u ls, d’une nullité absolue , car il n’est
pas besoin de lettres de récision ; d’une nullité irré
parable , et dont ils ne pourraient être relevés dans
le cas où ils seraient approuvés par la suite ; car l’art. 2
prononce }a nullité quand même les dispositions s q -
*
�( 12 )
raient faites à la charge d’obtenir les lettres patentes'
c’est-à-dire , quand môme le bienfaiteur voudrait,
a u tan t qu’il est en lu i, se conformer à la loi de l’E ta t,
voudrait, autant qu’il est en lu i, couvrir et réparer
l ’incapacité du Corps auquel il donne ; enfin ces actes
sont nuls , d’une nullité que le ministère public doit
poursuivre, « nonobstant tous consentemens exprès ou
tacites des parties intéressées » , et ainsi qu’il est plus
expressément dit dans divers autres articles de cet édit.
L e Bureau de bienfaisance écrasé par cet article r
tâche de se re le v e r, et dit : c’est «aux pauvres de
l’œuvre de la charité, et non à l’œuvre que l’on a
donné.
Faible et misérable argument, que pulvérise la rai
son d’accord avec les lois , et la lettre du testament.
« Civibus civitatis legatuin , vel iidei commissum
» datum civitati relictvrm videtur. » L. 2. de reb.
dub. L e legs fait aux pauvres de l’œuvre est fait à
l’œuvre.
L a lettre du testament n’est pas moins expresse ,
c’est au corps qu’il a été légué ; 'car ce n’est que les
revenus des 80,000 (pii doivent être employés à sou
lager les pauvres , que Pauvre a coutume d'assister ; et
par qui doivent-ils être employés ? par l’œuvre qui
a coutume de les assister : ce n’est point aux pauvres
�*
c '« 3 - y
mais au corps que l’on a lé g u é , puisqu’on le charge
d ’une rente annuelle envers les Frères m accdons, -*
d’une fondation perpétuelle envers MM. les prêtres
pauvres de la V ille d’Aurillac, C e n’est point aux
pauvres qu’on a légué , puisque ce n’est point eux
qui peuvent demander , recevoir , et quittancer. Il
n’y a pas même fideicommis , car ils n’auront jamais
de droit et d’action pour posséder. C ’est pour leur
soulagement ; mais ce n ’est pas sur eux que l’on
a fondé : ils sont l’o b je t, et non les dépositaires
de la fondation i ce n’est point eux qui forment le
corps et la congrégation de l’œuvre de la miséri
corde , mais bien les pieuses dames qui administrent
cette œuvre ", car les pauvres n’auront jamais de puis
sance et de drôit ni dans l’administration, ni contre
les administrateurs.
(
L ’on a ensuite prétendu que par un acte ordinaire
on pouvait léguer à un être étranger , non existant,
que le legs vaudrait, si le légataire venait à exister ,
et le Bureau de bienfaisance appliquant ce principe ,
a dit : nous représentons l’œuvre ¡dp la miséricorde ,
nous existons légalement, donc le legs vaut ; et il
a cil é en preuve deux arrêts qui déclarent ■
valables
des legs faits à des posthumes-iiés m <5t ’i3 mois
après le décès de leur Père testateur.
Autant d’erreurs que de mots:1'lie ' legs fait à un
�étranger non existant ne vaut p o in t, car il n’aurait
pas de m olif raisonnable : ces dispositions permises
dans les contrats de mariage par une exception au
droit , ne le sont qu’en faveur des descendans , et
ont un m otif, car on les affectionne d’avance.
Il n’est pas possible que le Bureau de bienfaisance
représente civilement Tœuvrp de la miséricorde , car
on ne peut pas représenter civilement ce qui n’a point
existé civilement : Nous reviendrons ailleurs sur cet
argument.
Quant aux arrêts cités , s’il n’y avait pas erreur ,
il y aurait mauvaise foi. En e ffe t, ils n’ont pas juge
que des legs faits par le Père à ses en fans posthumesnés i i ou i3 mois après son décès, étaient faits
à des enfans qui n’existaient p o in t, car ils auraient
jugé que des enfans posthumés étaient bâtards , et il
y aurait eu contradiction entre- le mot et la chose ;
mais ils ont jugé que des enfans liés 11 et i3 mois
après le décès étaient légitimes , et par conséquent
étaient conçus au temps du décès.
On a ajouté que le legs fait à des incapables pour
rendre à des capables était bon; ce qui est vrai des
incapacités relatives, et non des absolues, comme celle
du Corps dont n,ous parlons.
�( i 5 )
Mais à quoi boil ces argumens. L ’article est formel,
les dispositions en faveur des Corps non approuvés
sont nulles, d’une nullité radicale , absolue , irrépa
rable , quand même ils seraient faits à la charge d’ob
tenir des lettres patentes ; et on ne peut concevoir un
événement qui ressuscite une pareille disposition.
On oppose aussi mal à propos l’article 5 de l’édit
de 1749 , que l’on a embrouillé avec art pour en faire
le nœud de l’affaire : pour le résoudre, il suffira
d’expliquer cet article conçu comme il suit :
^ N ’entendons comprendre dans les deux articles
p r é c é d o n s l e s fondations particulières , qui ne ten-
»
»
«
«
»
»
«
»
»
liraient a Vétablissement d’aucun nouveau corps , collège,
011 com m unauté , ou à l ’ére ctio n d’un nouveau titre
de b én éfice , et qui n ’auraien t pour o b je t que la
célé b ra tio n de messes obits, la subsistance d’étudians, ou de pauvres ecclésiastiques ou séculiers etc.,
ou autres œuvres pieuses de même nature et également utiles ; à l'égard desquelles fondations il ne
sera pas besoin d'obtenir nos lettres patentes , et il suffira
de faire homologuer lesdits actes ou dispositions en
nos parlemens etc. etc., q u i, est-il ajouté, pourvoiront à l’administration desdites fondations.«
Cet article ne dispense de la formalité des lettres
patentes auxquelles il substitue l’homolagation , que
�( '6 )
les fondations particulières et les actes qui les con-*
tiennent, et non les Corps à qui elles sont confiées.
En effet , il n’y est question que de fondations parti
culières qui ne tendraient point à établir un nouveau corps ,
à Végard desquelles il ne sera point nécessaire d’obtenir
des lettres patentes , mais il suffira de Vhomologation
dans les cours supérieures f* cela est clair,
Or , des fondations confiées à un Corps non ap
prouvé , tendent nécessairement à établir \m nouveau
Corps , soit qu’il les emploie à obtenir des lettres pa
tentes pour se faire approuver , soit qu’il les emploie
à exercer le but de son institution , et par-là à s’éta
blir plus fortement quoique d’une manière illégale.
L ’article 3 de la déclaration de 17G2 ou 1774 con
firme cette explication : « déclarons R avoir voulu
» com p ren d re au nombre des fondation^ mention>5 n ées en l'a rtic le 3 d e l’é d it d e 1 7 49 ? les fonda
it tions des vicairies , ou secondaires amovibles , des
9> chapelains qui ne sont point en titre de b é n é fic e ,
» des services , prières , lits , places dans les hôpitaux
)y et autres établissemens duement autorisés , des bouillons,
« tables des pauvres des paroisses ; ( les fabriques
» sont des corps duement autorisés ) des distributions à des pauvres ou autres établissemens qui ,
» ayant pour objet des œuvres de religion et de
» charité
�»
y)
»
»
C 17 )
charité , ne 'tendraient point à e'tablir des nouveaux
Corps , collèges, etc, : voulons,quà l'égard desdites fo n dations , il en soit usé comme il est dit par l’article
3 de l’édit de 1749- »
C ’est ici qu’il faut remarquer la prudence et l’éco
nomie de la loi : elle a voulu d’un côté empêcher
que les corporations ne devinssent trop riches , et de
l’autre, asssurer l’exécution des fondations.
L e Gouvernement est de droit le protecteur et le
conservateur né de toutes les fondations, et le lé
gislateur a voulu que les Corps approuvés l’avertissent
à chaque fois qu’ils en recevraient ; mais pour les
fondations particulières , c’est-à-dire qui n’auraient pour
objet que quelques individus , et q u i par conséquent
seraient peu considérables , il a voulu que quand elles
seraient faites à des hôpitaux et fabriques ; car c’est k
eux seuls que peuvent se rapporter ces espèces con
tenues dans les articles précités. L e législateur f
disons-nous, a voulu que ces Corps ne fussent point
tenus d’avertir le Gouvernem ent, et les a dispensés
de la formalité gênante et dispendieuse des lettres
patentes, sauf l’homologation , faite dans une cours
supérieure, de l’acte qui établit la fondation : ( ce
gui n’a point été fait ici. )
JEt cela était raisonnable , car les hôpitaux étant
5
�.
C >8 )
.
.
alors administres par les premiers magistrats de l’endroit , et les fabriques par les Curés qui avaient uneexistance légale, et un ofiiee c iv il, le Gouvernement
avait des agens auprès de ces Corps , pour surveiller
l’exécution et' l’emploi de la fondation ; mais cela
n’est plus applicable aux Corps non approuvés. Telle;
est leur position, que d’un côté , le Gouvernement;
n’a point auprès' d’eux des agens qui les surveillent r
et l’avertissent des dispositions faites à leur profit, et
que de l’autre , ils ne peuvent eux-mèmes l’en avertir,,
car le premier regard de sa toute puissance les ferait
rentrer dans la poussière et le néant dont.ils n’auraient
pas du sortir.
Si donc le Gouvernement nTa pas des surveillans
auprès des Corps non approuvés s’ils ne peuvent
demander sa surveillance faute de moyen de
correspondre avec lui , qu’est - ce qui garantira
leur fidélité ? qu’est - ce qui garantira l’exécution
des fondations qui leur auront été confiées ? qu’est-ce
qui empêchera qu’un Corps établi t sous prétexte
d’hospice et de charité , n’abuse de la confiance du
fondateur, pour détourner la fondation à son profit ?'
- Ici le Bureau de bienfaisance n’osera pas présenter
l’arrété du Gouvernement qui l’autorise à accepter
le legs, comme des lettres patentes portant appro
bation de la congrégation de l’œuvre de la miséri-
�C ■!£) 5
¿corde. T ou t ce qu’il peut faire, c’est de le présenter
«comme lettres patentes confirmant le legs : ce que
nous discuterons dans le paragraphe suivant.
Donc la congrégation de l’œuvre de la miséricorde
n’est pas approuvée, donc le legs qui lui a été fait
e s t absolument nul.
D es form alités prescrites pour saisir le Corps sur lequel
on fon d e.
L a nullité résultant de l’illégalité du Corps sur le
qu el on fonde , est une nullité principale , et qui em
porte toutes les nullités secondaires ; de sorte que
pour traiter de celles-ci , il faut pour un moment
oublier la première.
II suit des ¿dits rendus sur la matière , et de ce
que nous avons d it , qu’en principe général les fon
dations doivent être confirmées par lettres patentes.
Cette formalité à - 1 - elle été observée ?
L e Bureau de bienfaisance présente l’arrêté qui
l ’autorise à accepter le leg s, comme des lettres pa
tentes.
Nous lui répondrons q u e , si ce sont des lettres
patentes , elles sont obreptices , et que le Gouverne
ment a été trompé sur l’état du corps légatairç.
�( 20 )
Il est en effet de principe , que les lettres patentesne sont accordées que conditionnellement, et sous
cette clause expresse ou tacite , s a u f notre droit sa u f
le droit d’autrui. Sauf notre d ro it, c’est-à-dire, sauf le
droit public et les lois politiques ; sauf le droit d’au
trui , c’est-à-dire , sauf les lois civilesO r , l’arrêté qu’on nous oppose, s’il était autre'
chose qu’une simple autorisation, et un. règlement
éventuel du mode d’administration, répugnerait aux
lois politiques, car il serait en contravention avec
l’édit de 1749» il répugne<auxÎois civiles, car, comme
il sera prouvé ailleurs, le legs est caduc à cause de
l’événement prévu par la testatrice.
Ces principes sont de droit public et social, ils
appartiennent, à ce droit que Justinien , au commen
cement de ses institutes, appelle le droit immuable des
nations; sans eux il n’y aurait plus que despotisme, d’où
il faut conclure qu’ils sont non seulement respectés,
mais encore recommandés par notre gouvernement.
Ils ont été de tout temps admis en F ran ce , ils
appartiennent au droit ancien comme au droit nou
veau ; car la monarchie aussi avait sa liberté et son
respect pour les propriétés : ils sont consacrés par le
concours unanime et imposant des auteurs de la juris
prudence et des ticlits.
�3J 7
< 21 ?
• Ët sans aller plus loin, voilà pourquoi l’édit de 174g
introduit un grand, procès sur la vérification des lettres
patentes, pourquoi l?artiele 7 veut ,sous peine de nullité,
qu’il soit fait une enquête de commodo et incommodo,
qu’elles soient communiquées aux procureurs-généîaux des Cours souveraines , pour être par eux requis
ce qu’ils aviseront, aux supérieurs médiats et immé
diats du Corps sur lequel on fonde, aux seigneurs
des biens donnés , et enfin aux autres personnes dont
l ’avis et le consentement seront jugés nécessaires, qui
so n t, comme on peut voir par l’article X , les enfans
et les héritiers même présomptifs dut bienfaiteur.
V oilà pourquoi l’articlé 8 parle des appositions faites
soit avant soit après l’enrégistrement desdites lettres,
sur lesquelles oppositions il devra être statué ainsi
qu’il appartiendra \ de sorte que tantôt il pourra arriver
que la lettre patente (_ comme aujourd’hui l’arrêté dii
Gouvernem ent, s’il pouvait être regardé comme te l,
ce qui n’est pas : ) de sorte , disons-nous , que tantôt
il pourra arriver que la lettre patente soit écartée par
les cours souveraines, et tantôt que cette lettre p a
tente , revêtue de la sanction judiciaire, vérifiée, homo
loguée , de\Tenflè' loi , soit annullée par les mêmes
cours qui l’ont enrégistrée.
L ’autoTité royale et celle des parlemens n’ont pas
honte de se rétracter et de reculer devant la simple
o t£
�opposition d’un particulier, que dis-je, elles procla
m en t ce droit donné contr’elles au dernier des indi'vid u s, et s’en font un titre de gloire.
E t si cela était ainsi sous la monarchie, à plus forte
raison , cela doit être sous notre Gouvernement plus
. libre et plus populaire.
r
Ainsi donc, si cet arrêté était une lettre patente, il
devrait être écarté comnie obreptice et contraire au
droit politique et civil.
Il devrait encore être annullé conformément aux
articles 5 , 6 et 7 de l’édit de 1749, qui prononcent
la nullité en cas d’inobservation des formalités qu’ils
prescrivent.
Mais le Tribunal n’aura point cette p ein e, car cet
arrêté n’est point dans l’espèce, ce que devraient être
des lettres patentes ; et cela résulte de ce qu’il ne
peut recevoir les formalités nécessaires pour leur vali
dité , de ce qu’il ne peut devenir la base d’un grand
procès, magni processus , de ce qu’il n’est point destiné
à devenir une loi , comme des lettres patentes enre
gistrées , de ce qu’il n’est qu’un acte de simple admi
nistration , un acte qui autorise à recevoir, et régie
l’emploi, en cas que l’on reçoive.
Que le Tribunal se rassure , il n’aura point à com
battre cet arrêté , car il ne raisonne que condition-
�C 23 )
tièllem ent, et dans la supposition- de* la-validité du
legs ; car il ne touche point au fond de la question,
qui de droit est remise à la décision des Tribunaux f
et sur laquelle le Gouvernement n’a point empiété.
i
L e Bureau de bienfaisance oppose ensuite l’article 5
de l’édit de 1749 et de la déclaration de 1774» qui
dispense certaines fondations de la formalité des lettres
patentes,
>
. Il est v ra i, mais cet article ne parle que des fon
dations particulières , fa ite s à des Corps duement autorisés :
o r , d’un coté s l’œuvre de la miséricorde n’était pas
autorisée , de l’autre , la fondation n’était point parti
culière , c’est-à-dire individuelle , ou relative seulement
à quelques individus,
De plus, cet article impose-la formalité de l’homo
logation , et ici il n’y en a pas : la demande en déli
vrance du legs ne peut en tenir lieu , car on ne procède,
pas devant une cour supérieure, on ne procède pasu
dans les formes nécessaires pour homologuer.
Ainsi le Bureau de bienfaisance ne rapporte' pas de
lettres patentes qui ratiiient la fondation ; cette fon-,
dation et le Corps sur lequel 011 a fondé ne sont point
dans les exceptions portées par l’arlii le 5 ; et quand
on le supposerait, il n’y- pas eu homologation comme
�C 24 )
il est prescrit, à peine de n u llité, ainsi qu’on pourrait
le prouver.
«
D ’ailleurs la disposition fût-elle revêtue des formar
lités requsies , le Corps n’étant pas approuvé , elle
est absolument nulle.
L e legs est-il fait en biens dont il soit permis de
disposer en faveur des gens de main-morte ?
L ’article i 4 de Inédit de 1749 défend aux gens de
main-morte d’acquérir, posséder, recevoir à l’avenir
aucuns immeubles , rentes foncières, droits réels ,
rentes constituées sur les particuliers , sans avoir au
paravant obtenu des lettres patentes pour l’amortis
sement.
Les articles i 5 et 16 étendent la disposition aux
fonds droits réels, et rentes réputés meubles par les
coutmues et statuts , aux acquisitions , échanges ,
ventes, e tc ., donnations simples ou à charge de fonda
tion , etc. e tc., à titre gratuit ou onéreux.
L ’article 17 défend à l’avenir toutes dispositions de
dernière volonté pour donner aux gens de main-morte
des biens de la qualité marquée par l’article 14, quand
môme elles seraient faites à la charge d’obtenir-des
lettres patentes , ou qu’au lieu de donner directement
dçs
�des biens fonds aux gens de main-morte , celui qui les
aurait donnés, aurait ordonné qu ils- seraient vendus ou
régis par d’autres , pour leur en remettre le prix ou les
f
—»
revenus.
•
•'[ »
'
*
C et article comme on v o it, contient deux parties ,
l’une prononce la nullité des dispositions de der
nière volonté qui donneraient aux gens de main-morte
des immeubles, et autres biens désignés par l’art. i4L ’autre 'assimile aux dispositions prohibées d’im
meubles etc. , celles par lesquelles le testateur aurait
ordonné que les biens seraient vendus ou régis par-,
un tiers , chargé de remettre au Corps institué , ou
légataire , le prix desdits biens vendus ou des revenus
perçus.
Les arrêts appliquent rigoureusement la seconde
partie de cet article. 'Les Parlemens ont pensé en fait,
qu’il était de leur devoir de rejeter et de prévenir tous
les moyens détournés , toutes les fraudes par les
quelles on chercherait à éluder les dispositions de
l ’édit 1749 ; ils ontpensé en droit, que dans ces cas, le
J)rix représentant la chose vendue , devait être sujet
à la rigueur.de l’article.
Ainsi un arrêt de 1755 déclare nulles , qu an t aux
immeubles, les dispositions d’un huissier de Yitri ,
par lesquelles il avait légué tousses biens à l’hôpital
4
�vi.'* \
0 6 )
üe'cette ville. L e testateur avait a jo u té ,'si la dis-,
position est contraire à l ’édit de 1749 >je charge mon
exécuteur testamentaire de vendre tous mes biens^
fonds et contrats, pour le prix en être employé e a
rentes , dont il soit permis de disposer en. faveur des
gens de main-morte.
L e Curé de Berneuil lègue à sa fabrique 12,000 à
prendre chez des tiers où ils sont déposés* Ceux-ci
avaient aliéné les sommes , et en avaient donné deux
reconnaissances, portant promesse de passer contrat r
au bas de chacune de ces reconnaissances, le Curé
dresse un codicile par lequel il les lègue à sa fabrique.
La cause était favorable , la promesse de- passer con
trat avait été ignorée du m aître, elle n’avait point
eu d’effet \ la fabrique arguait encore des dispositions
de la déclaration de 1762 enregistrée et exécutée
dans les autres parlemens, mais non encore dans celui
de Paris ; cependant arrêt de 17G4 qui casse les
codicilles.
La dame Coquetariat lègue à la fabrique cTAillant
3,4oo , pour faire un fond destiné à l’entretien dun
vicaire : de cette somme 1,000 doivent être pris sur
ses, meubles , et 2,400 sur ses immeubles . . . . con
testation . . . La fabrique disait qu’on ne lui avait légué
qu’une somme pécuniaire, qu’on n’avait pas rappellé
�C 37 )
les immeubles , pour ordonner qu’ils seraient vendus,
mais seu lem en t pour fixer la part contributoire des
divers héritiers , car la testatrice avait des héritiers
de meubles, et des héritiers d’immeubles. Arrêt des
1764 qui casse le legs pour la partie qui doit être
prise sur les immeubles.
iVoyons si le» legs dont s’agit est dans l’espèce, et
s’il, est aussi favorable,
.
.'i ,
L a dame Galieu à fait trois classes de legs. Ceux
de la première classe doivent être acquittés dans l’an
du décès , pour ceux de la seconde , l’exécuteur tes
tamentaire .chargé de les payer, ne pourra être pressé ,
de sorte qu’il pouvait retarder la délivrance du legs
jusqu’au dernier moment de l’exécution.
Pour le payement de ces legs, elle .ordonne qu’après
son décès on vende ses meubles*'-Mais le prix qui
pouvait en provenir ne devait-pas suffire, il était visible
qu’il serait.absorbé par ces legs exigibles dans l’an du
décès de la testatrice. Elle a donc voulu qu’ils fussent
payés avec c e prix qu’ils devaient absorber ; quant
aux legs de la seconde classe non exigibles , elle a
donc su qu’ils ne pouvaient être payés àvec le prix
d’un mobilier déjà absorbé ; elle a donc voulu qu’ils
fussent payés avec le prix des immeubles vendus, et
iles revenus perçus.
;i
‘
�Cela est manifeste, quant on se rappelle qu’elle veutr
d’un côté, que l’exécuteur testamentaire ne puisse être
pressé pour l’acquit de ces legs, et de l’autre qu’il ne
puisse être pressé pour Vendre. Elle* v e u t. qu’il ne
puisse être pressé d’acquitter les legs , parce qu’il ne’
peut être pressé de vendre et réciproquement de*
sorte q u e , comme nous l’avons' déjà d i t ,. ili peut re
tarder jusqu’aux derniers momens de l’exécution, et
la vente des immeubles , et l’açquit des legs. Ces
deux volontés se correspondentv (
Donc la dame Galîeu à sou cpl.ê1soriJlegs ne pourrait être acquitté qu’avec le prix’ des‘'immeubles et
des revenus , donc elle a voulu qu’il Je fût'",’ .donc
elle a légué le prix d’immeubles à vendre et de re-venus à percevoir, donp 1la- disposition est idans le
das prévu parirl’art, i ÿirde Fédit tle 'tïy / ^ , donc aux1
tenines de -cet, article elUiiést riulle. Cola est aussi évi^-f
dent qu’une proposition de-m athém atiques.^^ H’1 :
:
-î *
- V ' » r " : *I
. l » t i . » . O J Î ' . I;
. , [ u.> -
»
■}•L ’article '9 de la /déclaration) dèi •t 17G2.) ou 17.74;
youlaiitJavicins'er.lesi'Hôpitaux ot; .mitres- ètablissomens.
dé .charité, leur* permèt de, recevoir dQ^iii^mcublcs ;)
dérogeant à cet égard, à 1 art. i ydd réclit i74fj>, r(],1i l 1,r’0~
noiiicç la nullité des ..actes de dernière volon té, par i
lesquels il leur en serait légué, .v, ¿ry. - v ; 1 ¿-jf.
�2>¿í
C 29 )
On observera d’abord, qu’il n’est dérogé à l’art. 17
de l’édit 17 49 que Pour Ia partie qui prononce la
nullité , mais non pour la partie qui assimile aux dis
positions de biens fonds, celles qui ordonneraient que
des immeubles seront vendus , ou le revenu perçu par
des tiers , pour le prix en être rendu aux Corps lé
gataires. Ainsi cette partie de Part, étant maintenue ,
les héritiers de ceux qui auront ainsi lé g u é , devront
être traités comme íes héritiers de ceux qui auraient pu
rement légué des immeubles. Ainsi aux termes des art.
suivans et notamment du r5 , ( déclaration de 1762
ou 177 4 y le sieur Capelle aurait le droit d’offrir en
rentes sur l’Etat y le payement des 80,000 qui devaient
être acquittés avec le produit des immeubles à ven
dre , et des revenus à percevoir.
Il est v r a i que ,1’arÊ^ X I oblige; íes héritiers qui
profiteront de cette fa c u lté ,^ retirer lçs- immeubles
dans Jjaruiée de l’cruver^ure. de,la suççes^Îon! Mais le
sieur Capelle ne pouvait être tenu de retirer ie prix
considéré ici comme d’immeuble légué , puisqu’il ne
l’a. pas. fourni-^ il a fait plus tjue le retirer , puisqu’il
la retenu. n
.
,
' '
. ;
.
.
■*
*» •
',
, :i:n n o j
> v u ir
Í
. Maintenant, cçsartkl^ n ejs.ont point applicables à
un Corps non approuvé , et nous ne.sommes/entrés,
daus ces'.détail^ ,qi^:,pou^ pjrpuxer^e plus{ eji pju$ la
«Wllité
¡ ¡ j x l ; '- ' jju
-i in;
3
�____________ (
5 0 )
Quels sont enfin les termes dans lesquels on a légué ?
Outre la clause de retour exprimée dans l’acte ,
expressis ver bis , il est une condition résolutoire, qui
résulta des termes dans lesquels on a légué.
L e legs est fait aux pauvres que Vqeuvre a coutume
d'assister, c’est-à-dire aux pauvres que l’œuvre choisit,
dont le choix est laissé à soi* arbitre ; car rien ne
pouvait la gêner.
O r il est de principe général que quand un arbi
trage , un droit d’élection sont laissés à un tiers , lui
seul peut arbitrer et choisir; que s’il ne le peut , ou
ne le v e u t , la stipulation tombe.
L a L. 45 de verb. ob. , après l’avoir expressément
décidé , dit : c< magis probandum est à personâ ,
non esse' recedendum cui arbitrium confertum est. »
L.a L- 44 ajoute ; « si non arbitretur stipulatio non
v a le t , adeo ut si pœna àdjecta sit, ne ipsa quidem
pœna commitatur. »
1
’
C e. principe ainsi exposé au titre général des obli
gations , est répété au titre de chaque obligation par-t
ticulière ^ voir ceux de contrah. empt. au code pro
s’ocib >' dé locat!' etc., et'è'.', de hæred. inst. de légat,
etc. , etc. , etc. ;
•'
La loi ‘ m u ltk J de cônd. et déinQnst. pose , le cas
où un héritier ou légataire a été chargé d’élever-un
�$ 6ï
C 3 0
.
tombeau sur les plans d’un tie rs, et elle dit : « si
cujus arbitrium est, non vivat, vel adesse rei nonpossit,
vel arbitrari nolit, multanon commititur ab hærede. «
L a peine , la déchéance portée par le testament n’est
pas encourue , pourquoi ? parce que l’obligation est
tombée.
Ici l’héritier était chargé de donner 80,000 pour
être employés suivant l’arbitrage des pieuses dames
composant l’OEuvre de la miséricorde, en d’autres
termes pour être employés à l’assistance des pauvres
qu’elle a coutume d'assister. La congrégation n’existe
p lu s, on ne peut savoir quels sont ceux qu’elle aurait
choisis , car ce n’est pas la généralité des pauvres
qu’elle assistait, puisqu’elle n’était point hospice gé
néral, c’étaient des pauvres choisis dans la généralité :
ce n’est pas à la généralité des pauvres que la dame
Galieu avait lég u é , mais seulement à ceux choisis
dans cette généralité.
Eh b ien , la Congrégation chargée d’arbitrer, de
choisir, la Congrégation qui devait fournir le plan sui
vant lequel le monument aumônier devait être élevé ,
n’existe plus. « Non adest, non v iv it, non potest
arbitrari « donc « stipulatio ( legatum ) non valet. »
L e Bureau d e bienfaisance oppose à cela q u ’il repré
sente l’œuvre. Nous avons prouvé qu e cela n’était pas
�( 3a )
possible, et dans un moment nous ajouterons à la
previve donnée ; mais en attendant, supposons-le
puisqu’il le veut.
« Non recedendum est à personâ cui arbitrium
confertum est. » Le droit d’é}ection, d’arbitrage étant
fondé sur la confiance, est personnel, comme elle :
ce droit donné à l’œuvre ne peut passer au Corps
qui la représente, non plus que celui donné à un in
dividu ne peut passer à son héritier \ aussi les lois ne
distinguent p o in t, elles prononcent absolument : celle
de obligat. dit « stipulatio non valet « , et la loi m u lta ,
avant de prononcer , « multa non committetur » n’exa
mine pas si l’architecte a. laissé des héritiers , pu plutôt
(des élèyjes qui aient pris son genre, son faire, son style:
Donc de droit l’arbitrage, l’élection sont person
nels, et cela est juste : car qui sait si Me. G alieu ,
liée avec Me. de Fontanges, n’était pas dans le secret
de ses coutumes , de ses choix; qui sait môme si elle
ne lui avait pas fait des recommandations particulières
et verbales.
E t cela est d’un grand poids dans la cause; car en
matière d’aumône, et de legs pie, les recommandations
verbales sont admises et exécutées contre la lettre du
testament, sur la déclaration de Fexécuteur testa
mentaire ou du fiduciairc.Témoin
�\
( 53 )
Tém oin un arrêt du parlement de Paris, du 2 aôut
ï 7 5 4 , dont voici l’espèce : M. D evau x, chanoine à
Chartres fait son testament, après quelques disposi
tions pieuses, il ordonne que-le restant de ses bien?
sera employé aii soulagement des pauvres.'Il nomme
ensuite un exécuteur testamentaire. L e Bureau de
l’hôpital de Chartres réclame le legs , comme fait à
l’hôpital ; l’exécuteur testamentaire conteste , et pré
tend avoir des recommandations particulières et ver
bales en faveur des jeunes étudians : arrêt au profit
de l’exécuteur testamentaire.
Mais la disposition de la testatrice a corroboré celle
du droit; en e ffe t, elle a ordonné que le legs ferait
retour à l’héritier aussi-tôt qu’il ne serait plus admi
nistré par l’OEuvre, aussi-tôt qu’elle serait réunie à
l'h ô p ita l, ou à tout autre hôpital. Nous reviendrons
bientôt sur le sens de cette clause, qui dans la cause
est profond et décisif.
Mais le Bureau de
Corps que l’OEuvre ?
bienfaisance est-il le même.
Qu’est-ce qui établit l’indentité d’un Corps ?
C ’est i°. sa continuation par des membres indi
viduellement aggrégés , et non par un nouveau Corps
qui le remplacerait brusquement , ce qui cxd u d
toute idée de continuation.
•
-
' •
5
.
�c 34 )
1 C ’est 2°. Tidentité de principes de réglés , enfin de
tout ce qui forme l’esprit d'un Corps.
Or , y a-t-il identité à cet égard entre l’OEuvre'et
le Bureau de bienfaisance. Rendant également justice,
et applaudissant également aux principes des hommes
bienfaisans qui le composent, et des pieuses dames
qui administraient l’œ u vre, j’oserai cependant dire
qu’il n’y a pas identité, et là-dessus j’en appellerai
à la conscience de tout homme qui ne seTa ni entêté
ni prévenu. J’ajouterai en preuve , que Me. de Fontange exerce et continue de son côté les œuvres de
la miséricorde. Si ses principes étaient les mêmes que
ceux du Bureau, ne viendrait-elle pas se placer à leur
tête ou parmi e u x, et joindre des efforts, qui réunis ,
seraient plus heureux.
Elle ne le fait p as, et si elle voulait le faire elle ne
serait pas reçue : de sorte que ce C orps, qui se prétend
le même que celui de l’œ uvre, rejetterait la Supé
rieure de l’œuvre.
Il y a plus, le Gouvernement n’a pas voulu q u e los
Corps qu’il créait eussent les mêmes règles , les mêmes
principes, le même esprit que ceux qui étaient dé
truits. S’il l’avait vo u lu , il les aurait rétablis, comme
il a rétablîmes hermites du Mont St. Bernard , ou tout
au moins il aurait composé les nouveaux Corps des
débris des anciens ; s’il ne voulait pas de femmes , il
ne manquait pas d’hommes élevés dans ces institutions.
�Ç 35 )
Or il ne l’a pas fa it, et dans tous les Bureaux" de
bienfaisance de la République , il n’y a peut-être pas
un seul individu ayant appartenu à ces Corps ; du
moins il y en a très-peu. Donc , etc.
L e Bureau de bienfaisance oppose qu’il a été appelle
à représenter l’œuvre. Pour, l’établir, il allègue qu’il
est institué pour le même objet ; savoir, pour l’assis
tance des pauvres, et la distribution des secours à
domicileMais de droit un corps ne représente pas tous les
corps institués pour le même objet; de d ro it, il n’est
pas le même , sans quoi il faudrait dire que l’œuvre
représentait les F ille s et les Pères de la charité, etc. etc.
De d ro it, un corps ne représente pas et n’est pas
l’héritier de tous les corps, q u i, institués pour le même
o b jet, viennent à p érir, à plus forte raison de ceux
qui ont péri avant qu’ilj# existaisant»
Si le Bureau de bienfaisance était aujourd’hui dé
claré l’héritier de l’œ uvre, demain, par la force des
mêmes principes, il pourrait demander à être déclaré
l’héritier des Templiers ou de toute autre institution
du même genre, qui aurait péri mille ans avant lui.
E n fm , il est des corps comme des individus, on
n’a jamais prétendu que ceux-ci fussent de la même
famille et fussent appellés à se représenter et à sc suc-»
céder , parce qu’ils exerçaient la même profession.
�(SC)
Ainsi donc le legs doit faire retour à l’héritier par
l’effet et l’événement de la condition résolutoire ta
citement exprimée par ces mots : les pauvres que l'œuvre,
a coutume d’assister.
Examinons maintenant quel doit être l’effet de la
condition résolutoire expressément énoncée dans la
clause qui suit.
« Et au cas que l’oeuvre de la miséricorde vint à
être réunie à lTIôpital gén éral, ou à tout autre hôpital ,
je veux que le legs fasse retour à mon héritier. »
La condition a eu lieu , puisqu’il y a eu confusion
des Corps et des biens.
Il y a eu confusion des Corps, car toutes les insti
tutions aumônières de France ont été réduites à une
seule espèce, qui les a toutes remplacées, savoir les
hospices généraux.
Il y a eu confusion de biens , elle s’est opérée
dans la main de la Nation , qui s’en est emparée ;
témoin entre autres lois celle du 19 mars 1793 , qui
ordonne que les biens des hôpitaux ; c e u x des do
tations et donations en faveur des pauvres, seront
vendus Comme nationaux : la Nation par ces loisét autres , a délaré /’assistance des pauvres , dette na
tionale , et s’en est chargée : ainsi d o n c, comme on
l’a d it , elle est devenue le véritable hôpital, l’hôpital
universel d e l’empiro \ et les hôpitaux'qui sont restés,
�t
( 37)
n’étant plus propriétaires et indépendans , n’ont été
que l’a gen t, et l’intermédiaire par lequel cet hôpital
universel exerçait l’hospitalité.
Mais dit-on, il n’y a plus confusion, et de nouveaux
Corps ont été établis ; c’est parce que de nouveaux
Corps ont été établis , que la confusion des anciens
n’a pas cessé, et qu’elle dure encore ; quand il n’y aurait
plus confusion , qu’importe ? le droit du légataire
n’en a pas moins été résolu , le legs n’en a pas moins
dès l’instant fait retour à l’héritier, tout n’en est pas
moins consommé.
A u reste, je vais plus loin, je soutiens que les rapport?
que le Bureau de bienfaisance nous dit exister entre
l’œuvre et lui , sont une preuve que la condition
prévue est arrivée, et que l’événement dont il s’a g it,
savoir la réunion , a eu lieu cil sa faveur : je le prouve.
En cas de réunion de deux Corps , qu’est le
Corps auquel on réu n it, par rapport à celui qui
est réuni ? il hérite de ses droits , il lui est substitué ,
il le remplace , il le représente.
O r , le Bureau de bienfaisance ne cesse de répéter
qu’il hérite des droits de l’œuvre , qu’il lui est subs
titu é , qu’il la remplace , qu’il la représente ; c’est en
vertu de. ce prétendu titre qu’il a g it, qu’il demande.
Donc , etc.
�. X 38>
Quand la tentatrice a écrit, au cas que l’œuvre
vint à être réunie à l’hôpital gén éral, ou à tout autre
' h ô p ita l , c’est comme si elle avait é crit, au cas que
l’hôpital général, ou tout autre hôpital vienne à rem
placer et à représenter l’œuvre.
IVIais pourquoi a-t-elle dit l’hôpital gén éral, ou tout
autre h ô p ita l , parce qu’elLe a voulu s’énoncer d’une
manière générale , qui put embrasser jtoutes les insti
tutions de ce genre ; et -cela était conséquent à la
clause dont nous avons parlé plus h au t, par laquelle
elle léguait exclusivement à l’œuvre de la miséricorde,
»et rejetait tout autre Corps ^de ce genre , tout autre
institution aumôriière, charitable , pitoyable , pour nous
servir des termes des anciennes chartes.
O r , on ne peut douter que le Bureau de bienfaisance^foit une institution aumônière , pitoyable ,
charitable , donc il est compris dans l’expression :
Vhôpital générai ou tout autre hôpital.
Donc les rapports qui le lient à l’œuvre de la mi
séricorde , et dont il prétend tirer son droit, sont une
preuve qu’il n’en a pas : donc le titre auquel il de
mande , prouve qu’il n’a point de titre pour demander.
Mais enfin qui lui aurait donné les droits qu’il
vient exercer ici ? de qui tient-il sa mission ? ce n’est
que du Gouvernement ; or le Gouvernement n’avait
point de droit au legs dont s’agit ; donc il n’a pu
lui en donner,
�w
C 39 ) _
Comme cette partie de l’affaire est non pas la plus
contraire aux adversaires, car les autres ne le sont
pas moins , mais celle où l’injustice de leur demande
.frappe le plus ceux qui n’ont aucune connaissance du
d roit; c’est sur ce point, que pour en imposer au
public , ils ont entassé les sophismes.
C ’est là leur dernier refuge, c’est là que nous
allons les forcer.
On a d’abord opposé que toute clause résolutoire
apposée à un legs pie était immorale, et partant nulle.
L ’argument est neuf : c’est la première fois qu’on
l’avance , faisons en sorte que ce soit la dernière.
Cette proposition est à contre sens de la raison et
des lois.
En effet, une condition résolutoire ou négative ne
peut être immorale, qu’autant que l’obligation qu’elle
résout, est commandée par les mœurs ou par les
lois : telle serait la condition résolutoire de l’obli
gation de payer les impôts, ou de nourrir son père
pauvre.
Mais quand l’obligation n’est pas recommandée par
les mœurs ou par les lo is, la condition qui la résout
ne peut pécher contr’elles.
Celui qui a la puissance et le droit de ne pas faire,
a bien la puissance et le droit de ne faire qu’à m oitié,
en tel ca s, en tel temps, en un m o t, de ne faire que
�:
>76
'■<•
c *>
y
conditionnellement. Et la Dame G alieu, qui avait
incontestablement, le droit de ne pas donner, avait
bien aussi celui de ne donner que sous les conditions
implicites et explicites dont nous avons parlé.
Les lois ne sont pas moins formelles ; nous en ci
terons une dans l’espèce , d’une fondation de jeux
funèbres.
On sait que ces jeux étaient dans l’antiquité ce que
sont de nos jours les oraisons funèbres, les prières,
les messes; la différence est que les anciens appelaient
Autour du tombeau, l’ambition avec ses jeux , ses tu
multes , ses disputes, ses combats , scs haines et ses
vengeances ; tandis qu’aujourd’hui nous y appelions
l’indulgence et les bénédictions du C ie l, des réflexions
morales sur la double nécessité de mourir et de bien
faire, des souvenirs honorables pour celui qui n’est
plus, et des idées consolantes pour ceux qui sont restés,,
Hé b ien , la L. T itïis Lucius de anuuis légat . , pose
l’espèce qui suit : Titius Lucius lègue à la République
une certaine somme, à condition q u e les reven u s en
seront employés à des jeux funèbres en son honneur.
Elle décide que si la condition n’est pas rem plie,
les héritiers répéteront ce qui aura été p a y é , et retien
dront ce qui sera du.
La glose fait plus , elle renvoie à la loi n de cond.
indeb. « Si hœres arbitratu lib e rti, monumcntuin
facere
�j ,r r
.
<
41 5
facere jussus, ( tcstamento ) pecuniam iiberto dederit,
et is accepta pecunia monumentum non faciat, conditione tenetur. » La glose décide donc que la Répu
blique est tenue des conditions qui lui sont imposées,
' aussi rigoureusement que le dernier affranchi.
Il n’y a d’exception à ces principes que quand les
conditions «ont illicites , comme celles de célébrer
ces jeux dans un emplacement prohibé par les lois ,
ou quant la condition étant purement m odale, ne
peut être exercée : alors le testateur est censé avoir
principalement voulu donner, et n’avoir fixé le mode ~
que secondairement.
On trouve des exemples dans le droit romain.
On a ensuite opposé une loi de 1790 , q u i, à l’égard
<les fondations dont la Nation s’est emparée, veut que
les héritiers du fondateur ne puissent profiter des
clauses de retour, apposées dans les actes constitutifs.
L ’argument tout misérable qu’il e s t, ne prouve
point en faveur de la conséquence des adversaires
qui citent cette loi’ , après avoir prétendu que les
clauses de retour apposées dans ces actes étaient im
morales, et par conséquent nulles.
Si ces clauses étaient immorales et nulles , pour
quoi le Législateur a -t-il eu besoin d’en prévenir
l’effet par une l o i , peut-être odieuse ?
Examinons maintenant la loi qu’on nous oppose. .
6
�( 42 )
Une loi qui déroge au droit commun ne peut être
étendue. Dans celle-ci, il ne s’agit que de fondations
déjà validées, déjà exécutées , dont les biens se trou
vaient entre les mains des Corporations supprimées ,
et dont la Nation s’était emparée ; mais il n’y est au
cunement question de celles dont les biens ne sont ni
saisis ni rem is, qui ne sont point exécutées ni vali
dées , dont le droit est contesté.
T e l est donc le système des moyens avancés par le
sieur Capelle.
L e Corps n’était point approuvé , de là une nullité
absolue, irréparable.
L e Corps étant approuvé, l’acte de fondation au
rait du être ratifié par des lettres patentes , tout au
moins par l’homologation dans une cour supérieure.
I
Les biens donnés ne sont point de la nature de
ceux dont il est permis de disposer, aux termes de
l ’article i4 d e l’édit de 1749. Les Corps non approuvés
ne peuvent être compris dans les exceptions portées
par les déclarations suivantes.*
E nfin, le legs est nul par l’événement des condi
tions résolutoires V' explicitement ou implicitement
portées dans le-testament.
�c 43 >
11 nous reste maintenant à répondre à quelques ob
jections détachées.
,
*
L ’adversaire a prétendu que le legs pie réd u it, ne
faisait point retour à l’héritier, mais deyait être em
ployé à des usages pieux.
Nous nous contenterons de lui répondre qu’apparamment il n’a pas lu les articles 10 , î i et 12 de
l ’édit de 1 749 On a blâmé la demande et la réclamation de l’hé
ritier , elles ont été représentées comme l’acte d’une
avidité condamnable, que les Tribunaux devaient
s’empresser de flétrir.
Certes , telles ne furent point les opinions, tels ne
furent point les exemples de ces hommes illustres ,
dont le nom sera toujours cher à la magistrature,. des
ÎDaguesseau , des Gilbert de V oisin s, des Joli de
F le u ry , des Seguier, etc., etc. Ils savaient et ils pu
bliaient que ces demandes et ces réclamations, loin
d’être répréhensibles, sont au contraire encouragée»
et recommandées par le législateur.
En effet, les articles 10, n et 12, donnent le droit
de réclamer les biens ainsi donnés, non seulement
�Ho
C 44 >
'
aux héritiers, mais encore aux enfans et autres héri
tiers présomptifs q u i, vivant même le donateur , seront
envoyés en possession y que s’ils ne veulent ou n’osent
exercer ce droit, la loi de suite et sans attendre, le
remet au Seigneur dont les biens dépendent ; et si
celui-ci se ta it, alors les procureurs-généraux doivent
en poursuivre la confiscation..
L ’article ajoute : il vrai que ces biens ainsi con
fisqués au profit du r o i s e r o n t par lui employés en
faveur d'un autre hôpital, au soulagement des paur
vres , ou à quelque usage public.
Mais ce n’est là qu’une mesure particulière, qui est
étrangère aux principes constitutifs de l’édit ; le prince
écartant toute idée de fiscalité, n’a pas voulu se gorger
de la dépouille des citoyens.
Il
a été opposé que l’intérêt public exigeait que la
fondation fût acquittée, que tout devait se taire de
vant cette considération d’un ordre supérieur, et on
s’est complaisamment arrêté sur cet argument.
Mettons içi de côté la sensibilité , affection toujours
honnête et généreuse , mais qui doit aussi céder à la
' raison ; et voyons si l’intérêt public exige que toutes
les lois politiques et civiles d’un Etat soient immolées
aux prétentions dusimple Bureau de bienfaisance.
L ’intérêt de l’E ta t, l’intérêt public , c’est le respect
pour les lois politiques et civiles, et par suite pour
les propriétés.
�Ml
C 45 )
Ce n’est point l’intérêt d’un jo u r , d'une heure ,
d’un m om ent, celui d’un ou de quelques individus;
La société qui reste , ne considère ni l’instant qui
s’écoule, ni l’homme qui passe, et l’un et l’autre ne sont
pour elle qu’un point fugitif, que le temps absorbe et
dévore : ses jours à elle sont des siècles , ses enfans
sont des masses entières , c’est eux seuls qu’elle
considère quand il s’agit de stipuler ses intérêts, e t
non quelques individus , qui tour-à-tour se présentant
sur son théâtre, n’y' sont que des usufruitiers d’un
instant , pour lesquels fout est viager , tout est mo
mentané dans l’ordre social.
Mais quel serait enfin le produit de cette grande
mesure , de cette considération d’un ordre supérieur,
à laquelle on veut , sans hésiter, faire le sacrifice de
tout ce que les Nations doivent respecter sous peine
de vie , des lois de l’Etat et de la propriété. •
'' >
C et intérêt public, nous le dirons, n’est autre chose
d’un côté, que la facilité donnée au Gouvernement
d’économiser quelques écus , en le dispensant de
payer ce qu’il donne, et ce qu’il doit pour l’assistance
des pauvres ; de l’autre, celle de recevoir quelque
argent, parce que le fonds du legs doit être placé
en rentes sur l’Etat.
�Eli bien ! ce n’est point là l'intérêt public : nous
irons plus loin; ce n’est pas la volonté du Gouverne
m ent; en douter serait ne pas lui rendre justice.
Malheur donc à cette opinion vaine et dangereuse,
,qui renversant les id ées, place l’intérêt public dans
une économie momentanée , à laquelle ' il fait céder
toutes, les lois, et appelle des conséquences funestes.
Anathême à ces principes q u i, s’ils étaient connus »se
raient également réprouvés, et par le Gouvernement,
fier de commander à un peuple généreux et libre , et
par la Nation qui s’applaudit d’avoir trouvé un C hef
qui se fait honneur de respecter ses droits.
Enfin , 1’on a prétendu que le legs est favorable.
Mais sur quoi donc serait fondée cette faveur,
éerait-ce sur les articles 2 , 3 , 9 , 10 , n , 12 , i 4 ,
i 5 , 16 , 1 7 , 1 9 , 20 , 21 , 2 2 , de l’édit de 1749» et
sur les déclarations qui l’expliquent ? serait-ce sur les
clauses du testament ?
Si la faveur n’est qu’une couleur honnête donnée
à l’injustice, ah ! sans doute le Bureau de bienfaisance
a droit de la réclamer. Et encore sera-t-il difficile,
sera-t-il impossible de trouver un vernis qui puisse
effacer et couvrir taut de nullités : mais si au con
traire ce mot exprime le respect dû à une réclamation
(jui réunit pour elle la force du droit et de l’équité,
�C 47 5
alors c’est à l’héritier qu’elle est d u e, car il à pour lui la
loi de l’E ta t, qui défend de donner aux Corps non
approuvés, et la loi de l’équité qui ne permet point que
les familles soient dépouillées pour enrichir des Cor
porations , même des hôpitaux , parce que la spolia
tion d’une famille produit plus de misérables, que
n’en peut soulager l’opulence d’un hôpital. 11 a pour
lui la lettre du testament. Et si la' dame Galieu ( i )
imprudemment évoquée par l’adversaire , pouvait un
moment soulever la pierre du sépulchre , et franchir
les barrières de la mort , son ombre pâle et indignée,
ne crierait-elle pas à l’adversaire.
l8,
« Pourquoi êtes-vous venu troubler le silence et la
ap’ » paix du tombeau, pourquoi m’avez-vous appellé ?
» quare inquietasti me ut suscitarer. »
« Ma volonté n’est-elle pas claire, n’est-il pas evident
que j’ai voulu vous exclure , que vous n’avez pas
« plus de droits que l’autorité qui vous envoie : pour» quoi donc m’avez-vous appellé ? quare inquietasti me
» ut suscitarer. Eli bien , je vous répondrai, je vous
» dirai que vous-même ne croyez point à la validité
» du le g s, je vous dirai que vous confiant en des
s) circonstances étrangères , vous avez osé mentir à
» votre conscience ; que vous avez espéré séduire les
^ J M. Juliic avilit dans so plaidoirie «voquc l’ombre de 1* Jame Gai*00,
�( 48 )
» Juges en leur proposant de s’associer à la bienfaisance
» d’un testateur, mais vous vous serez trompé : vos
» Juges savent que le legs est r évoqué , ils savent
« que leur devoir est de dire rigoureusement droit à
» t o u s , et que là où la justice finit, l’injustice com
» mence. »
P. S. L e sr. Capelle n’a pu se procurer le testament du sr. Gérauld
G alieu ; mais il n’en est pas moins vrai qu’il y a eu une substitution.
A u reste , cela est étranger à la question , et c’est par les principes
qu’il faut décider.
L e sr. Capelle a découvert que la quittance dont nous avons parlé
au com m encem ent, est relative à un autre acte que celui rapporté
dans le testament ; il doit à sa loyauté d’en avertir les Juges.
L e citoyen L am ourou x, P résiden t,
Rapporteur du délibéré.
B E R T R A N D , fils.
SE V E R A C ,
Avoué.
A Saint-FJou r, de l'imprimerie de V e. S A R D I N E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lamouroux
Bertrand fils
Séverac
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour le Sieur Capelle, défendeur, contre le Bureau de Bienfaisance de la Ville d'Aurillac, demandeur.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Veuve Sardine (Saint-Flour)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1309
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53198/BCU_Factums_G1309.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53716/BCU_Factums_M0217.pdf
6e3d15ba0ca9269529430c1f958cbd19
PDF Text
Text
POUR
C O N T R E
le Sieur C
le B
a p e l l e
u r e a u
de
B
,
d é fe n d e u r,
i e n f a i s a n c e
de
la v ille d'A u rilla c, demandeur.
L
a
D am e G a
l i e u
d écéd ée en
17 8 9 , a v a it, par
son testam ent du 5 octobre 1 7 8 5 , institué pour son
h éritier le sieur C a p e lle , son n eveu , à la charge
d ’une quantité considérable de legs divisés en trois
classes.
,
A la tête de ceux de la seconde est un legs de 80,000
fait à l ’O Euvre de la -m iséricorde de la V ille d ’A u rilla c,
C o n grégatio n non approuvée.
C e legs est ainsi conçu :
« Pour exécu ter les pieux desseins qui m ’ont été
com m uniqués par feu M. C abredens , m on f r è r e ,
» je lègu e aux pauvres de l ' o e uvre de la m iséricorde
» de la V ille d’A u rillac , laquelle oeuvre est administrée
» par de pieuses dames, et dont M e. Fontanges est la
« S upérieure, la somme de 80,000, à la charge néan» moins que les Adm inistrateurs
de ladite
œ u vre
» seront tenus de p a ye r annuellem ent et à perpétuité
�( 2 )
,
» aux F rères m acédons de l’école ch rétien n e établis
» à A u r illa c , la rente et pension annuelle que feu M,
» C abreden s s’était obligé de leur payer par acte e t c .,
» sans laqu elle condition je n ’aurais légu é à ladite
^ œ u v r e que 60,000 ; qu’il sera em p loyé 20,000 pour
assister M M . les Prêtres de la V ille et Com m unauté
d’A u rillac qui seront dans le b e s o in , et m êm e ceu x
yy des environs si le reven u de ladite somme le p erm et;
» que le reven u des 40,000 restans sera
em p loyé à
» assister et soulager les pauvres q ue ladite Œuvre a
?? coutume d'assister , etc. etc.
« Je veu x et entends qu’au cas que l’œ u vre de la
» rniséricorde vînt à être réunie dans le temps à
» l ’hôpital gén éral , ou à tout autre hôpital, le legs de
» 80,000 que je fais à ladite œ uvre , fasse retou r à
» mon héritier. «
^
L e testam ent porte en outre que cette somme sera
p ayée aux termes ensuite fixés aux Dam es adm inistrant
ladite œ uvre , sur les quittances à fournir par M e. de
F on tan ges leur Supérieure.
E t attendu l’im possibilité de payer des legs si con
sidérables , ( ils se portent à près de 3 oo,ooo ) avec
le p rix du m o b ilie r , il est dit qu’après le décès de la
testatrice il sera p ro céd é à la vente du m obilier et de
divers im m eubles d é s ig n é s , parmi lesquels se trouvent
¿ es
t à l ’effet de quoi elle nom m e le sieur C a y la
�'
exécu teu r testam entaire ,
,
.. •
ou plutôt fiduciaire , pour
3 5
que celui-ci acquitte lesdits legs avec le prix desdites
ventes , ou des revenus de la succession qu’il percevra
jusqu’à ce que l ’h éritier ait atteint sa
25 me
année ,
(p rairial an i 3 ) , term e jusqu’ auquel doit durer l ’exé
cution testam entaire ou plutôt la fid u c ie , bien que
par le décès du sieur C ap elle il arrivât un autre h éritier
qui ne fût pas m in e u r, voulan t que cet exécuteur
testam entaire ne puisse être rech erch é ni pressé par
personne , mais que pour ven d re il puisse choisir et
attendre le m om ent qui lui paraîtra con ven able ; de
sorte q u ’il n’y pou vait être forcé , et que par suite il
pouvait retard er le payem ent du legs jusqu’au dernier
m om ent de l’exécu tio n , jusqu’en prairial an i3L e payem en t des legs de la prem ière classe devait
être fait dans Fan du décès. C es legs absorbaient plus
que le prix du m o b ilie r, de sorte que les legs suivans
ne pouvaien t être acquittés qu’avec le reven u
des
biens resta n s, et le produit de ceux vendus. C e tte
i circonstance est précieuse à recueillir.
Q uan t aux legs de la seconde cla sse, ils devaien t
être payés à fur et m esure que les ventes des l iens '
ou les reven us de l ’h éréd ité auraient produit des
fonds sufiisans.
L a révo lu tio n survint ; au m ilieu d’un désordre
■épouvantable, toutes les corporations furent dissoutes,
�et les
biens de
toutes
les Institutions aum ônières
allèrent se fondre et se perdre dans la m ain de la Nation.
D e p u is , un G ouvern em ent sage , travaillant de
toute m anière à réparer tant de m a u x , a rétabli ou
créé des B ureaux de bienfaisance.
'
\
C e lu i de la V ille d ’A u rilla c , autorisé par un arrêté
du G o u v e rn e m e n t, dem ande la délivrance du legs
fait à l’œ uvre de la miséricorde,.
Pour
com m encer , supposant
le legs valid e
au
fonds , nous nous bornerons d’abord à proposer les
exception s qui tendent à reculer l’époque du payem ent
ou à restreindre la quantité.
Il devrait être accordé term e à l’h éritier jusqu’en
prairial an i5 .
L ’exécuteur testam entaire ou plutôt le fid u c ia ire ,
car le sieur C a y la d o it être regardé com m e t e l , puis
que selon le testam en t, il d evait rester en possession
de toute l’h é r é d ité , à la charge seulem ent de rendre
tout ce qui se trouverait entre ses mains , à la iin de
l’exécu tion ; le sieur C a y la , disons-nous, avait term e
pour acquitter ce legs , jusqu’en prairial an i5 ; c’està-dire , jusqu’à ce que led it C ap elle eût atteint l ’àge
de 25 a n s, soit q u’il restât h é ritie r, ou qu’ un autre
m êm e m ajeur fût appelle a son défaut. C e la résulte
�( ' ) •
I
du testam en t, car d’un coté on ne peut supposer que
les revenus accum ulés pussent rem plir le legs avant
cette époque ; de l’autre , l ’exécuteur qui ne pouvait
être recherché et pressé par p erson n e, pouvait re
tarder et ren v o yer les ventes à ce temps.
O r , quoique l’exécution et la fiducie ayen t cessé
avant l ’époque p révu e par la te sta tric e , et qu’avant
ce temps l’h éritier ait été mis en possession , il ne
doit pas pour cela être p rivé du term e : car il avait
été accordé , non en faveur de l’exécuteur et du fi
duciaire qui d evait to u t r e n d r e , mais seulem ent en
faveur de l ’h é ritie r; et cela est si v r a i, qu’il n ’avait
pour objet que de faciliter l ’acquit des legs , e t de
d égrever la succession d ’a u ta n t, en perm ettant d ’ac.cum uler les reven us, ou en donnant le temps de vendre
avan tageusem en t, au m oyen de quoi jusqu’à cette
ép oqu e il ne pouvait être dû aucun intérêt. T e l est
d ’ailleurs le sens de la L .
36
de cond. et demonst.
D ans ces 80,000, une somme de 20,000 est légu ée
a condition que l’œ u vre
de la m iséricorde payera
aux F rères m acédons de l’ école ch rétie n n e , la rente
et pension à laquelle feu M. C abredens s’était o b ligé
envers eux par acte du
etc. ; con d ition sans la
quelle il n’ eut légué que 60,000.
C ette partie du legs est donc subordonnée à l’acte
dont s’agit : cette disposition n ’a pour ob jet que de
�'
(
6
} .
.
■
.
.
lixer le m ode suivant leq u el il devra être exécu té ,
de d éch arger l’h éritier de cette o b lig a tio n , et de la
rem ettre à un tiers. T e lle est la cause et la condition
du le g s , sans cela. J lI n'eût été léguée que 60,000.
M ais le Bureau de bienfaisance qui en dem an
dant les 80,000, dem ande aussi cette partie du legs ,
aurait du d ’abord prouver que les F rères m acédons
ont obtenu des lettres patentes sur cet a c t e , ou tout
au moins qu’il est dans la classe des exceptions por
tées par l’art. 3 de l’édit de 17 4 9 ; ce que nous n io n s ,
et sans quoi il est nul : que l’acte est postérieur à la
D éclaration de 1762 , et qu’en ce cas les F rères m acé
dons étaient proprem ent une école
de charité , sans
quoi l’acte serait nul encore , parce q u ’il donnait une
ren te constituée , tandis qu’aux term es de l’éd it de
1740 il ne pou vait être
donné que des rentes sur
l ’E tat ou autres de cette espèce.
Ainsi tom be et l’acte par lequel feu M . C abredens
s’ était obligé envers les F rères m a céd o n s, et la dis
position testam entaire qui lui correspond.
L e legs est d’ailleurs caduc , car son o b j e t , ainsi
que l ’obligation de M. C abreden s ont péri avec les
F rères m acédons ; dq sorte que la condition pour la
q u elle on a expressém ent lé g u é , sans laquelle on n’eut
légué que 60,000 , n existe plus.
A joute/ à cela q u ’une partie du capital de la rente
�C 7 )
.................
pour le service de laquelle le legs avait été l a i t , se
trouve rem boursée , ainsi qu’il résulte des quittances
produites par le sieur G apelle.
Sur les
Gûjooo restans
,
20,000 sont légués pour
que le reven u soit em ployé à soulager M M . les Prêtres
pauvres de la v ille d ’A u rillac.
11 n’est m alheureusem ent que trop sûr que cette
classe , h orriblem ent d écim ée par la révolu tio n , est
en
proie à la plus
affreuse m isère ; mais le G o u
vernem ent va faire cesser ce scandale ; les
titulaires
auront un
anciens
traitem ent ; les E vêq u es , sans
doute , se feront un d evo ir de placer ceux qui n ’en
auront pas ; de sorte que sous peu tous les prêtres
existans se trouveront à l ’abri du besoin ; les prêtres
à ven ir n’auront pas plus à craindre ; car les titres
cléricaux seront désormais de 5 oo de rentes.
A in si d o n c , si le reven u des 20,000 ne suffit pas
pou r les besoins actuels des prêtres , à l’avenir il sera
plus que su fiisa n t, et il serait juste que l’excéd en t
revien n e à l’h éritier. Il
dem ande en conséquence à
être autorisé à retenir ces 20,000, tant qu’il le vo u
d ra , à la charge d ’en payer l ’ entier reven u , ou partie
suivant qu’il en sera b e s o in , par ce m oyen le retour
sera exact et parfaitem ent d ’accord avec les volontés
de la testatrice j il ne sera ni m o in d re , ni excessif.
�(
8
)
_
L ’h éritier dem ande à p rélever la quarte falcidie
sur le legs entier ou réduit.
O n a répondu que pour p rélever la quarte , il fallait
être h éritier bénéficiaire. Si cela é ta it, le sieur C ap elle
n ’étant pas encore parvenu à sa 3 5 me- année pourrait
se faire relever d ’une acceptation faite en m inorité ,
mais nous ne ferons pas valoir ce m o y e n , parce que
le principe avancé par le B u reau de bienfaisance est
absolum ent faux. Il est vrai que pour p rélever la fal
c id ie , il faut avoir fait inventaire , pour constater la
masse de la succession. ( ici il a été fait )
M ais il
ne l’est p a s , qu’il faille être h éritier bénéficiaire. L à dessus nous renverrons aux auteurs qui ont traité la
m atière.
O n a ensuite s u p p u té , accum ulé des zéros. C es
brillantes exagérations d oiven t être réduites de plus
de m o itié ; et quand cela ne -serait-pas, la testatrice
chargée envers l ’h éritier d ’un riche iid eicom m is, a du
le lui rem ettre franc et quitte'; et ce fideicom mis p ré
le v é , on verra que ce q u ’elle laisse de son c h e f ne
rem plit pas lés legs qu’elle a faits.
Enfin , com m e il sera établi dans le cours de la
discussion qui suit
1 h éritier a le d r o it, aux termes
de la D éclaration de 1762 ou 1774 > d ’offrir le p aye
m ent de ce legs en rentes sur l ’E ta t, et le T rib u n a l
ne pourrait le lui refuser.
'
.
M OYENS
�(- ° ' )
MOYENS
AU
.
FONDS.
..
“
L ’affaire présentée sous ce prem ier r a p p o r t, nous
l ’exam inerons au fo n d s, et nous discuterons la validité
du legs.
L e legs dont il s’agit est une fondation. L e s fonda
tions sont .définies ; « une dotation faite à un E tablis
sem ent pour l’acquit d ’une o u de plusieurs charges. »
P ou r déterm iner la valid ité d ’une fo n d a tio n , il faut
con sid érer quatre choses : i °. q uel est le C orps auquel
on donne ; 2°. quelles sont les form alités nécessaires
pour saisir ce C orps ; 3 °. quels biens, on peut lui don
n e r ; 4°. quels sont les termes dans lesquels on a
donné.
C ’e s t, je pens,e, traiter la question sous tous ses
rapports p o ssib les, et sous tous ces rapports il sera
constant que le legs est nul.
i° . Q u e l est le C orps auquel on a légu é ?
C ’est un principe de droit public qu’il ne peut exister
de co rp o ratio n s, et qu’ elles ne p eu ven t obtenir d ’exis
tence légale que par l’approbation du G ouvernem ent.
C e principe consacré par les lois rom aines, a traversé
les siècles , et a été reçu par tous les em pires raison*
r.ablem ent constitués.
2
�(■ 1 ° )
Il a été régularisé en F ran ce par divers édits y
notam m ent par ceu x de 16 6 6 , de 1 7 4 g , et par 'la
déclaration de 1762 qui n ’a été enrégistrée au Parle
m ent de Paris q u ê n i 774Ils se réunissent tous pour déclarer illégau x
les
C o rp s non approuvés , et pour prononcer la nullité
de tous actes faits à leur profit."
Q u ’on lise l’édit de 1749- G ela se trouve à chaque
a rtic le ; nous nous contenterons de rapporter L’art. 9
ainsi conçu :
ce D ésirant assurer pleinem ent l ’exécution du présent
» é d it, concernant les Etablissem ens m entionnés dans
» l ’art. 1.
( qui sont tous C hapitres r Sém inaires ,
» C o llèg es , M aisons ou Com m unautés , re lig ie u se s,
}•> même sous prétexte d'hospice , Congrégations, C onfrai-
. » ries , H ô p ita u x , ou autres C orps , Com m unautés
» ecclésiastiques , séculières , religieuses ou laïques ,
« de quelque qualité qu’elles soient etc. etc. ) déclarons
« nuls tous ceux qui seront fa its sans avoir obtenu nos
lettres patentes , et les avoir f a i t enregistrer dans les
yy form es ci-après prescrites, voulons que tous les actes
» et dispositions qui pourraient avoir été fa its en leur faveur
» directement ou indirectement, ou par lesquels ils pourjy raient avo ir obtenu des biens de quelque nature
n que ce s o it, u titre g iatu it ou o n c r c u x , soient dé~
�'
^ 11 ) .
...
» 'cla rés nuls , sans qu il soit besoin d’ obtenir des lettres de
m récision contre lesdits actes , et que ceux; qui se
>> seraient ainsi établis , ou qui auraient été chargés
» de form er lesdits Etablissem ens , soientr déclares de
» chus de tous droits résultans desdits actes , nonobstant
» tous consentem ens exprès ou tacites qui pourraient
« avoir été
donnés à l’exécution d e sd its, actes ou j
» dispositions. »
. ■'
"
' L ’article 2 prononce la n u llit é , quand même ces
dispositions seraient fa ite s à la charge d’ obtenir des lettfes
patentes .
,
- ,
: ' >
» t t - -‘t | ’ .
;f
1 >? ‘
C es articles sont formels , et-tom bent d ’aplom b sur
l ’e s p è c e , ils prononcent égalem en t la n u l l i t é des
C orps non a p p ro u v é s, et des dispositions faites à
leu r profit.
1 1 ......
.
:
Ici ^Etablissem ent , la 'C orporation , l’t t o p it a l, la
C o n gréga tio n , sous prétexte d’hospice y dite l’œ u vre d e là
m iséricorde n ’est poin t approuvée ; donc elle est n u lle,
donc aussi les actes faits à son profit directem ent ou
in d irectem en t, à, e lle - m ê m e o u à ceu x qui l’adm inis
tr e n t, sont n u ls , d ’une n u llité a b s o lu e , car il n ’est
1
.
1
'
'
1
.
.
1
pas besoin de lettres de récisÎQ n; (d ’i^ne nullité irré
parable , et dont ils ne pourraient être relevés dans
Ip cas où ils seraient approuvés par la suite-; car l’art. 2
prononce, la n ullité quand; m êm e les dispositions se-
�C 12 ) >
raient faites à la charge d ’obtenir les lettres p aten tes;c ’est-à-dire , quand
m ême le bienfaiteur v o u d ra it,
autant qu’il est en l u i s e conform er à la loi de T E t a t ,
v o u d r a it, autant q u ’il est en l u i , cou vrir et réparer
l ’incapacité du C orps auquel il donne ; enfin ces actes
sont n u ls , d’une nullité que le m inistère public doit
p ou rsu ivre, « nonobstant tous conseritemens exprès ou
tacites des parties intéressées » , et ainsi qu’il est plus
expressém ent dit dans divers autres articles de cet édit.
L e B ureau de bienfaisance écrasé p ar cet article
tâche de se r e le v e r , et dit : c’est aux pauvres de
Fceuvre de la c h a r ité , et non à l’œ uvre que l’on a
donné. '
;
■' •
L
.
•
i
.
F aib le et m isérable argu m en t, que pulvérise la rai
son d ’accord avec les lois , et la lettre du .testam ent.
« C ivibu S ciyitfitis legatum , v e l iidei commissum
datum • civitati re lic tu m , videtur. » L . 2. de reb.
f.
,
w
I
.
dub. L e legs fait aux pauvres de -l’œ u vre est fait à
l ’œ uvre.
,
•
. ...
L a lettte du testam ent n’es-t' pas' moins - exp resse1,
c’est au coi'ps qu’il a!:été lég u é ; rar ce^n’èst que les
reven us d e s 80,000 q u ivd o iven t être em ployés à sou-,
lager les paiiVres , que f a t ivre à coutume d'assister ; et
par qui d o iven t-ils -être em ployés ? par Poeuvre qui
à coutum e do lès a s s is té
c^ n’-est' poin t aux pauvres
�'
( >3 )
mais au corps que l ’on a l é g u é , puisqu’on le charge
d ’une rente
annuelle envers les F rères m acéd o n s,
d ’une fondation p erpétuelle envers M M . les prêtres
pauvres de la V ille
d ’A u rillac. C e
n’est p oin t aux
pauvres qu’on a lég u é , puisque ce n’est 'p o in t eux
qui peuven t dem ander , recevo ir , et quittancer. 11
n ’y a pas m êm e fideicom m is , car ils n’auront jamais
de droit et d’action pour posséder. C ’est pour leur
so u lag em en t; mais ce
a fon d é : ils
sont
n ’est pas sur eux que
l’o b je t , et non
l’on
les dépositaires
de la fondation : ce n ’est point eux qui form ent l e ’
corps et la con grégation de l’œ u vre de la m iséri
corde , mais -bien les pieuses dames qui adm inistrent
cette œ uvre ; car les pauvres n ’auront jamais de puis
sance et de droit ni dans l ’adm inistration , ni contre
les adm inistrateurs.
. .
• L ’on a ensuite préten du que par un acte ordinaire
on pouvait légu er à un être étranger , non existant ;
que le le g s v a u d r a it, si le légataire ven ait à exister ,
et le Bureau de bienfaisance appliquant ce prijiçipç ,
a dit : nous représentons l ’œ uvre d e là m iséricorde ,
nous existons lég a lem en t, donc le legs vaut ; et il
a cité en preuve deu x arrêts qui déclarenjt valables
«les legs
faits à des posthum es^nés 11 et i 5 m ois
après le décès de leur P ère testateur.
'
A u tan t d ’erreurs quo d e mpts. L e J legs fqit à uii
�J
. 1
,
.
C
)
.étranger non existant ne vaut p o in t , car il n ’aurait
-
pas de m o tif raisonnable : ces dispositions permises
dans les contrats de mariage .par une exception au
droit , n e le sont qu’en faveur des descendans , et
on t un m o tif, car on les affectionne d ’avance.
Il n ’est pas possible que le B ureau de bienfaisance
représente civilem ent l’œ uvre de la m isé ric o rd e , car
on ne peut pas représenter civilem en t ce qui n’a point
existé civilem ent ; N ous reviendrons ailleurs sur cet
argument.
'
•Quant aux arrêts cités , s’il n’y avait pas e r r e u r ,
il y aurait m auvaise foi. E n e f f e t , ils n’ont, pas jugé
que des legs faits par le P ère à ses enfans pdsthumesnés i i
ou i5
mois après son
d é c è s , étaient faits
à des enfans qui n ’existaient p o in t, car ils auraient
ju g é que des enfans posthumes étaient bâtards , et il
y aurait eu contradiction entre le m ot et la chose ;
mais ils ont jugé que des enfans nés 11 et i 3 mois
après le décès étaient légitim es , et par conséquent
étaien t conçus au temps du décès.
O n a ajouté que le legs fait à des incapables pour
r e n d r e .à des capables était b o n ; ce qui est vrai des
incapacités re la tiv e s, et non des absolues, comme celle
du C orps dont n o u s1 parlons,
�■ ( -5 )
_
M ais à quoi bon ces argumeris. L ’article est fo rm e l,
les dispositions en faveur des C orps non approuvés
sont nulles , d’une n u llité radicale , absolue , irrépa
rable , quand m êm e ils seraient faits à la charge d’ob
tenir des lettres patentes ; et on ne peut con cevoir un
événem en t qui ressuscite une pareille disposition.
O n oppose aussi mal à propos l ’article
3
de l’édit
de 1749 , que l’on a em brouillé avec art pour en faire
le n œ ud de l’affaire : pour le résoudre,, il suffira
d ’expliquer ce t article conçu
com m e il suit :
« N ’entendons com prendre dans les deux articles
« précéd en s , les fondations. particulières , qui ne ten
draient a Rétablissement d’aucun nouveau corps , c o llè g e ,
» ou com m u n au té , ou à l ’é re c tio n d ’u n n o u v e a u titre
» de bénéfice , et qui n ’auraient pour ob jet que la
y? célébration de messes o b it s , la subsistance d ’étu-
» dians, ou de pauvres ecclésiastiques ou séculiers etc.,
» ou
autres œ uvres pieuses de m êm e nature et éga-
» lem en t utiles ; à l’ égard desquelles fondations il ne
» sera pas besoin d’obtenir nos lettres patentes , et il suffira
de faire hom ologuer lesdits actes ou dispositions en
» nos parlemens etc. e tc ., q u i , est-il ajo u té, p o u rvoi
» r o n t à l ’adininislration desdites fondations.^
C e t article ne dispense de la form alité des lettres
patentes auxquelles il substitue l’hom olagation , que
>
V.
�,
c «> )
;
..
les fondations particulières et les actes qui les co n
tiennent , et non les Corps à qui elles sont confiées.
E n effet , il n’y est question que de fondations parti
culières qu i ne tendraient point à établir un nouveau corps,
à Végard
desquelles il ne sera point nécessaire d'obtenir
des lettres patentes , mais il suffira de Vhomologation
dans les cours supérieures ; cela est clair.
O r , des fondations confiées à. un C orp s non apr
p r o u v é , tendent nécessairem ent à établir iin nouveau
C orps , soit qu’il les em ploie à obtenir des lettres p a
tentes pour se faire approuver , soit qu’il les em ploie
à exercer le but de son institution , et par-là à s’éta
b lir plus fortem ent quoi jue d ’une m anière illégale.
L ’article 3 de la d éclaration de 1762 ou 1774 con
firm e cette exp lication : « déclarons R a v o ir voulu
» com prendre au nom bre des fondations
m en tion
» nées en l’article 3 de l’édit de 1749 > les fonda-?
y> tions 'des vicairies , ou secondaires am ovibles , des
)} chapelains qui ne sont point en titre de b é n é fic e ,
des services , p rières , lits , p laces dans les hôpitaux f
)3 et autres établissemens duement autorisés, des b o u illo n s,
» tables des pauvres des paroisses ; ( les fabriques '
?> sont des
»corps duem ent autorisés ) des distribu
ai tions à des pauvres ou autres établissem ens q u i ,
» ayan t
pou r obje|t des peuvres de religion
et de
» ch arité
�.
. c ' p . ,
.
'
» charité , ne tendraient point à établir des
nouveaux
yy Corps , collèges , etc, : voulons ,(]u à l’ égard desdites fo n
» dations , il en soit usé com m e il est dit par
»
3
1 article
de l ’éd it de 1749- »
C ’ est ic i qu’il faut rem arquer la prudence et l ’éco
nom ie de la loi : elle a vo u lu d’un côté em pêcher
que les corporations ne devinssent trop riches , et de
l ’a u tr e , asssurer l’exécu tio n des fondations.
L e G o u vern em en t est de d roit le protecteu r et le
conservateur n é de toutes les fo n d a tio n s, et le lé
gislateur a vo u lu que les C o rp s approuvés l ’avertissent
à chaque fois qu’ils en recevraien t ; mais pour les
fondations p a rticu lière s , c ’est-à-dire qui n’auraient pour
o b jet que q u elq u es in d iv id u s , et q u i par conséquent
seraient p eu considérables , il a vo u lu que quand elles
seraient faites à des hôpitaux et fabriques ; car c ’est à
jeux seuls que pevjv.ent se rapporter ces espèces con
tenues
dans
les
articles
précités.
L e lé g is la te u r ,
disons-nous, a vo u lu que ces C orp s ne fussent point
tenus d’avertir le G o u v e r n e m e n t, et les a dispensés
de la form alité
gênante e t dispendieuse des lettres
p a te n te s, sau f l’h om ologation , faite dans une cours
su p é rie u re , de l’acte qui étab lit la fondation : ( ce
qui n’a point été fait ici. )
E t cela était
ra iso n n a b le, car les hôpitaux étan t
5
�Ç ' 8 )
_
alors adm inistres par les prem iers m agistrats de l’errd r o i t , et les fabriques par les C u rés qui avaient u n e
existance lé g a le , et un office c i v i l , le G o u v e rn e m e n t
avait des agens auprès de ces C orps , pour surveiller
l’exécu tio n et l ’em ploi
de la fondation ; mais cela'
n ’est plus applicable aux C orps non approuvés. T e l l e
est leu r p o s itio n , que d'un côté , le G ou vern em en t
n’a point auprès d ’eux des agens qui les su rv e ille n t,
e t l ’avertissent des dispositions faites à leur p r o fit, et
que de l ’autre , ils ne p euven t eux-mêmes l’en avertir,
car le prem ier regard de sa tou te puissance les ferait
ren trer dans la poussière et le néant dont ils n ’auraient
pas du sortir.
Si donc le G ou vern em ent nra pas des surveillans;
auprès des C o rp s
dem ander
sa
correspondre
leu r
fidélité ?
non approuvés , s’ils ne p eu ven t
surveillance
avec
faute
lu i , q u’est - ce
de
m oyen
qui
de
garantira
q u ’est - ce qui garantira ^ exécution '
des fondations qui leur auront été confiées ? q u ’est-ce
qui em pêchera qu’un C orps é t a b li, sous' p rétexte'
d ’hospice et de charité , n’abuse de la confiance du
fo n d a te u r, pour détourner la fondation à son profit ?'
Ici le B ureau de bienfaisance n’osera pas présenter
l ’arrêté du G ou vern em en t
qui- üautorise à accep ter
le le g s , com m e ,des lettres patentes portant appro
bation de la con grégation de l ’œ uvre de la m iscri-
�< ¿9 )
corde. T o u t 'c è qu’il p e u t fa ire , c'est de le présenter
com m e lettres patentes confirm ant le legs : ce
que
nous discuterons dans le paragraphe suivant.
D o n c la con grégation de l ’œ uvre de la m iséricorde
n’est pas a p p ro u v é e , donc le legs qui lui a été fait
est absolum ent nul.
'
iDes formalités prescrites pour saisir le Corps sur lequel
' on fon de.
' L a n ullité résultan t de l’illégalité du C orp s sur le»
¿fuel on fonde , est une n u llité principale , e t qui em
porte toutes les n ullités secondaires ; de sorte , que
pour traiter de celles-ci , il faut pou r un m om ent
o u b lier la prem ière.
•
II suit des édits
rendus sur la m atière , et de ce
q ue nous avons d i t , qu’en p rin cip e gén éral les fon
dations d oiven t être confirm ées par lettres patentes»
C e tte form alité à - 1 - elle été observée ?
L e B ureau d e bienfaisance, présen te l ’arrêté .qui
l ’autorise à accepter Je le g s , com m e des lettres pa
tentes.
N ous lui répondrons que , si ce sont des lettres
p a te n te s, elles sont obreptices , e t que le Gouverne-*
nient a été trom pé sur l’état du corps légataire.
�'
.
( 20 )
•
Ï 1 est en effet de principe , que les lettres paténtes
ne sont accordées que
co n d itio n n ellem en t, et sous
cette clause expresse ou tacite , s a u f notre d ro it, sa u f
le droit d’autrui.
S a u f notre d r o it , c’est-à-dire, sauf le
d ro it pu blic et les lois politiques ; sau f le droit d ’au
trui , c ’e s t- à - d ir e , sauf les lois civiles.
O r , l’arrêté qu’on nous, o p p o s e , s’il était au tre
chose qu’une simple au torisation , et un règlem ent
éven tu el du m ode d’ad m in istration , répugnerait aux
lois politiques , car . il serai£_en contraven tion a v e c
l ’é d itd e 174 9 ; il répugne aux lois c iv ile s , car, com m e
il sera -prouvé ailleurs , le legs est caduc à cause d é
l ’évén em en t p révu par la testatrice.
C e s principes sont de droit public et s o c ia l, Ws
appartiennent à ce droit que J u s tin ie n , au com m en
cem en t de ses institutes, appelle le droit im m uable des
nations; sans eux il n’y aurait plus que despotism e, d ’où
il faut conclure qu’ils sont non seulem ent re s p e c té s,
mais encore recom m andés par notre gouvernem ent.
Ils ont été de tout temps admis en F r a n c e , ils
appartiennent au droit ancien com m e au droit n ou
v e a u ; car la m onarchie aussi avait sa liberté et son
respect pour les propriétés : ils sont consacrés par le
concours unanim e et im posant des auteurs de la juris-,
pruden ce et des édits.
�E t sans aller plus lo in , v o ilà pourquoi l’éd it de 1749
in trod u it u n -grand procès sur la vérification des lettres
paten tes, pourquoi l’article 7 v e u t , sous peine de nullité,
q u ’il soit fait une en quête de com m odo et incom m odo,
q u ’elles soient com m uniquées aux procu reu rs-gén éraux des cours souveraines , pour être par eux requis
ce qu’ils a v is e ro n t, aux supérieurs m édiats et im m é
diats du C orps sür leq u e l on fo n d e , aux seigneurs
des biens donnés , e t enfin aux autres personnes dont
l'avis et le consentement seront jugés n écessa ires, qui
s o n t , comme on peut vo ir par l’article X , les enfans
et les héritiers m êm e
présom ptifs d u bienfaiteur.
V o ilà pourquoi l’article 8 parle des oppositions faites
soit avant soit après l’enrégistrem ent desdites le ttr e s ,
sur lesquelles oppositions il devra être statué ainsi
qu’il appartiendra ; de sorte que tantôt il pourra arriver
que la lettre patente ( com m e aujourd’hui l ’arrêté du
G o u v e rn e m e n t, s’il pou vait être regardé com m e t e l,
ce qui n’est pas : ) de sorte , disons-nous , que tantôt
il pourra arriver que la lettre patente soit écartée par
•les cours so u vera in e s, et tantôt que cette lettre p a
ten te ,•revêtu e d e la sanction ju d ic ia ire , v é r ifié e , h om o
lo gu ée , dev/enWe' loi , soit annullée par les m êmes
cours qui
1ont
enregistree.
■
L ’autorité ro yale et .celle des parlem ens n’ont pas
hon te de se rétra cte r'e t de reculer devant la simple
�'
(a a -)
_
'
apposition d’un particulier , que dis-je, elles procla
m ent ce droit donné contr’elles au dernier des indi
vidus , et s’en font un titre de gloire.
E t si cela était ainsi sous la m o n arch ie, à plus forte
ra iso n , cela doit être sous notre G ouvernem ent plus
lib re et plus populaire.
A in si d o n c, si cet arrêté était une lettre p a ten te, il
d evrait etre écarté comme obreptice et conti'aire au
d roit politique et civil.
Il d evrait encore être annullé conform ém ent aux
articles 5 , 6 et 7 de l’édit de 17 4 9 , qui prononcent
la n ullité en cas d’inobservation des form alités qu’ils
prescrivent.
M ais le T ribun al n ’aura point cette p e in e , car cet
arrêté n ’est point dans l’e s p è c e , ce que devraient être
des lettres patentes ; et cela ' résulte de ce q u ’il n e
p e u t recevo ir les form alités nécessaires pour leur vali
d ité , de ce qu’il ne peut d even ir la base d ’un grand
p r o c è s , magni processûs , de ce qu’il n’est point destin é
à d even ir une l o i , com m e des lettres patentes enrér
gistrées , de ce qu ’il n’est q u ’ un acte de simple admir
n is tra tio n , un acte qui autorise à re c e v o ir , et régie
l ’e m p lo i, en cas que l’on reçoive.
Q u e le T rib u n a l se rassure , il n’aura point à com
battre cet arrêté , car il ne raisonne que condition-?
�C 25 )
nellem ent / et dans là supposition d e la valid ité dti
legs ; car il ne tou ch e p oin t au fond de la q u estio n ,
qui de droit est rem ise à la décision des T r ib u n a u x ,
e t sur laquelle le G o u vern em en t n’a poin t em piété.
L e Bureau de bienfaisance oppose ensuite l ’article
3
de l ’ édit de 1749 et de la déclaration de 1 7 7 4 , qui
dispense certaines fondations de la form alité des lettres
patentes^
Il est v r a i, mais cet article ne parle que des fon
dations particulières >fa ite s à des Corps duement autorisés :
o r , d ’un côté * l’œ u vre de la m iséricorde n’était pas
a u to ris é e , de l ’a u t r e , la fondation n’était point parti
culière , c’est-à-dire in dividu elle , ou relative seulem ent
à quelques individus*
D e p lu s , cet' article im pose la form alité de l’hornolo g a tio n , et ici il n’y en a pas rla .d e m a n d e en d éli -5
vrance du legs ne p e u t e n tenir lie u y c a r on ne procède^
pas devant urfe cour s u p é r i e u r e o n ne .procède pasdans les form es nécessaires pour hom ologuer. -
.•
A in si le Bureau de bien faisance né rapporte pas de
lettres patentes qui ratifien t la fondation ; cette fon
dation et le C orps sur leq u el on a fondé ne s o n t point
dans les exceptions portées par l’article
3
;
quand'
on le su pposerait , il n ’y pas eu hom ologation com m e
�.
• ..................................................C ' ¿4 )
.
_
il est prescrit, à peine de n u llité ; ainsi q u ’on pou rrait
le prouver.
'
D ’ailleurs la disposition fût-elle revêtue des form a
lités req u sies , le Corps n’étant pas approuvé , e lle
est absolum ent nulle,
■ ' •
'
L e legs est-il fait en biens dont il soit permis d e
disposer en faveur des gens de main-morte ?
L ’article 14 de l’édit de 1749 défend aux gens d e
m ain-morte d’a c q u é rir, p o sséd er, recevoir à l ’avenir
aucuns immeubles , rentes
fo n ciè re s, droits réels ,
rentes constituées sur les p a rticu liers, sans avoir au
paravant obtenu des lettres patentes pour l’amortis
* isement.
L e s articles i 5 e t
’
16 éten den t la disposition aux
fonds , droits r é e ls , e t rentes réputés m eubles par les
coutm ues et statuts , aux acquisitions , échanges ,
v e n te s , e t c ., donnations simples ou à charge de fonda
tion , etc. e t c ., à titre gratuit ou onéreux.
L ?article 17 défend à l’avenir toutes dispositions de
d ern ière vo lo n té pour donner au*: gens de main-morte
des biens de la qualité m arquée par l’article 14 , quand
m êm e elles seraient faites à la charge d’obtenir des
lettres patentes , QP
lieu d,e donner directem ent
des
�( 25)
des biens fonds aux gens de m ain-m orte , celui qui lés
aurait donnés, aurait ordonné quils seraient yendiis ou
régis par d’autres , pour leur en remettre le prix ou les
revenus.
C e t article com m e on v o i t , contient deu x parties ,
l ’une prononce la n ullité des dispositions de der
nière volon té qui donneraient aux gens de main-morte
•des im m eu b les, et autres biens désignés par l’art. 14L ’autre assim ile aux dispositions prohibées d’im
m eubles e t c ., celles par lesquelles le testateur aurait
ordonné que les biens seraient vendus ou régis par
un tiers , ch argé de rem ettre au C orp s institué , ou
légataire , le prix desdits biens vendus ou des revenus
perçus.
,
L e s arrêts appliquent rigoureusem ent la seconde
partie de cet article. L e s Parlem ens ont pensé en fait,
q u ’il était de leur d evo ir de rejeter et de p réven ir tous
les m oyens -détournés , toutes les fraudes par les
quelles on ch erch erait à éluder
les dispositions d e
l ’édit i y49 y ds ont pensé en d ro it, que dans ces c a s , le
p rix représentant la chose vendu e , devait être sujet
à la rigueu r de l’article.
•
" A in si un arrêt de i 755 déclare nulles , quant aux
im m eu b les, les dispositions d ’un h u issier.d e Y itr i ,
par lesquelles il avait lég u é tous ses biens à l’hôpital
4
�f c a G ) ..................................................
de cette- ville. L e testateur avait a jo u té , si la dis
position est contraire à l ’éd it de 1749 , je charge m on
exécu teu r testam entaire de vendre tous mes biens
fonds et c o n tra ts, pour le prix en être em ployé en.,
rentes , dont il soit permis de disposer en faveur des>
gens de m ain-m orte.
,
L e C u ré de B ern euil lègue à sa fabrique 12,000 'a
prendre chez des tiers où ils sont d ép osée C eu x -ci
avaien t aliéné les sommes , et en avaient donné deu x
reconnaissances, portant prom esse de passer contrat :
au bas de chacune de ces recon n aissances, le C u r é
dresse un co d icile par lequel il les lègu e à- sa fabrique.
L a cause était favorable , la promesse de* passer con‘ trat avait été
ignorée du m aître , elle n ’avait point
eu d ’effet ; la fabrique arguait encore des dispositions
de la déclaration
de 1762
enregistrée et exécu tée
d an s. les autres p arlem en s, mais non. encore dans celui
d e Paris ; cependant arrêt de
codicilles.
.
i 764 qui casse les
L a /dame C oqu etariat lègu e à la fab riqu e d’ A illan t
3,40° , pour faire un fond destiné à l ’entretien d ’un
vicaire : de cette somme 1,000 doivent être pris sur
ses m eubles , et
2 ,4 ° °
sur ses inimeubles . . . . co n
testation'. . . L a fabrique disait qu’on ne lui avait légu é
qu’une somme p é cu n ia ire , qu’on n’avait pas rappelle
�.
C 27 5
,
.
les im m eu b les, pour ordonner q u ’ ils seraient ven d u s,
maïs seulem ent pour fixer la part contributoire des
divers h éritiers , car la testatrice avait des héritiers
de m e u b le s, e t des héritiers d ’immeubles. A rrê t des
1764 qui casse le legs pour la partie qui doit être
prise sur les im m eubles.
- V o y o n s si le legs dont s’agit est dans l ’e s p è c e , et
s’il est aussi favorable.
„
L a dame G a lieu a fait trois classes de legs. C e u x
de la prem ière classe d oiven t être acquittés dans l’an
du décès , pour ceu x de la seconde , l ’exécuteur tes
tam entaire chargé de les p a y e r , ne pourra être pressé ,
de sorte qu’il pouvait retarder la délivrance du legs
jusqu’au dernier m om ent de l’exécution.
. P ou r le payem ent de ces l e g s , elle ordonne qu’aprèsson décès on ven d e ses m eubles. M ais le prix qui
pouvait en p roven ir ne d evait pas suffire, il était visible
q u ’il serait absorbé par ces legs exigibles dans l’an du
décès de la testatrice. E lle a donc voulu qu’ils fussent
payés avec c e prix q u’ils d evaien t a b so rb er; quant
aux legs de la seconde classe non
exigibles , elle a
donc su q u ’ils ne p o u vaien t être payés avec le prix
d ’un m obilier déjà absorbé ; elle a donc voulu q u’ils
fussent payés avec le prix des im m eubles v en d u s, et
des revenus perçus.
.
*
�\
( 28 )
C e la est m an ifeste, quant on se rappelle qu’elle veuf;
d ’un c ô t é , que l’exécu teu r testam entaire ne puisse être
pressé pour l’acquit de ces legs, et de l’autre , qu’il n e
puisse être pressé pour vendre.
E lle
v eu t qu’il n e
puisse être pressé d’acquitter les l e g s , parce qu’il nep eut être pressé de vendre et réciproquem ent ; d e
sorte q u e , comme nous l ’avons d éjà d it , il peut re
tarder jusqu’aux derniers m om ens d e l’e x é c u tio n , e t
la ven te des im m eubles, et l’acquit des legs. C e s
d eu x volontés se correspondent.
D o n c la dame G alieu a sçu que son legs ne pour
rait être acquitté qu’avec le prix des- im m eubles et
des revenus , donc elle a vou lu qu’il le f u t , donc
elle a légu é le prix d’im m eubles à ven dre et de re
venus à p e r c e v o ir , donc la disposition est dans le
cas prévu par l’art. 17 de l’édit d e 17 4 9 , donc au x .
termes de cet article elle est nulle. C e la est aussi évi
d e n t qu’une proposition dé m athém atiques, v
L ’article 9 de la, déclaration d e 1762 ou 1774
vo u lan t favoriser les H ôpitaux et autres établissemens
de c h a r ité , leu r perm et de recevo ir des im m eubles,
dérogean t à.cet égard à 1 art. 17 de
1édit
1 749> qui p ro
nonce la n ullité des actes de dernière v o lo n té , par
lesquels il leur en serait légué.
\
�0 * 0
O n observera d ’ab ord , q u ’il n ’est d érogé à l’art. 17
d e l ’édit
1749 que pour la partie qui prononce la
nullité r mais non pour la partie qui assimile aux dis
positions de biens fo n d s, celles qui ordonneraient que
-
des im m eubles seront ven dus , ou le reven u perçu par
des tiers , pour le prix en être rendu aux C orps lé
gataires. Ainsi- cette partie de l’art, étant m aintenue ,
les héritiers d e ceux qui auront ainsi lé g u é , devront
être traités com m e les héritiers de ceux qui auraient pu
rem ent légu é des im m eubles. A in si aux term es des art.
suivans et notam m ent du i 3 / ( déclaration de 1762
o u i 774 ) le sieur C a p elle aurait le droit d’offrir en
rentes sur FEtat f le payem ent des 80,000 qui devaient
être acquittés avec le produit des im m eubles à v e n
dre , et des revenus à percevoir.
Il est vrai que l’art, X I o b lig e les h éritiers qui
profiteront de cette faculté , à retirer les im m eubles
dans l’année de l’o u vertu re de la succession. M ais le
sieur C a p elle ne p ou vait être ten u de retirer le prix
considéré ici com m e d ’im m euble légu é , puisqu’il ne
,
i
l’a pas fourni ; il a fait plus que le r e t ir e r , puisqu’il
la retenu.
>
1
■
M ainten an t, ces articles ne sont poin t applicables à
un C orps non approuvé , et nous n e sommes entrés
;
dans ces détails q ue pour prouver de plus en plus la
'i
m ilit é du legs,
•
(
•
�/
■
.
.
Ç
5o
) _________
.
'
Q uels sont enfin les term es dans lesquels on a ’légu é?
O utre la clause de retour exprim ée dans l’acte ,
e x pressis verbis , il est une condition réso lu to ire, qui
résulte des ternies darçs lesquels on a légué.
L e legs est fait aux pauvres que l’ æuyre a coutumç
d ’assister, c ’est-à-dire aux pauvres que l ’œ uvre c h o isit,
d on t le choix est laissé 3 son
pouvait la gêner.
arbitre j car rien ne
O r il est de principe général que quand un arbi
trage , un droit d ’élection sont laissés à un tiers , lui,
seul peut arbitrer et choisir ; que s’il ne le peut , ou
ne le v e u t , la stipulation tom be.
L a L.
43
de verb. ob. , après l’avoir expressém ent
d écid é , dit : «
magis
probandum
est à personâ ,
non esse recedendum cui arbitriurn confertum est. »
L a L . 44 ajoute : « si non arbitretur stipulatio non
v a le t , adeo ut si pœ na adjecta s i t , ne ipsa quidem
pœ na commitatur. »
C e principe ainsi exposé au titre général des o b li
gations , est répété au titre de chaque obligation par
ticu lière , v o ir ceux de contrah. empt, au c o d e , pro
socio : de locat. e tc ., etc., de hæred. inst. de légat,
etc. , etc. , etc. ,
L a loi multa de cond. et démonst. pose , le cas
où un h éritier ou légataire a été chargé d’é le v e r un
�(
3.
)
_
_tom beau sur les plans d ’un tiers , e t elle dit : « si
cujus arbitrium est, non v iv a t, v e l adesse rei non possit,
v e l arbitrari n o lit, m u lta n o n com m ititur ab hæ rede. »
L a peine , la d éch éan ce portée par le testam ent n ’est
pas encourue , pourquoi ? parce que l’obligation est
tom bée.
Ici l ’h éritier était chargé de donner 80,000 pour
.être em ployés suivant l ’arbitrage des pieuses dames
com posant- l’O E u vre de la m iséricorde , en d’autres
term es pour être em ployés à l'assistance des pauvres
q u’elle a coutume d’assister. L a
congrégation n ’existe
p lu s , on ne peut savoir quels sont ceux qu’elle aurait
choisis , car ce n’est pas la gén éralité des pauvres
qu’elle a ssista it, puisqu’elle n ’était point hospice g é
n éral, c ’étaient des pauvres choisis dans la gén éralité :
ce n’est pas à la gén éralité des pauvres que la dam e
G a lieu avait lé g u é , mais
seulem ent à ceu x choisis
dans cette généralité.
, .
•
t
E h b ie n , la C o n g rég a tio n chargéé d’a r b itr e r , de
choisir, la C o n grégatio n qui d evait fournir le plan sui
van t leq u el le monument aumônier devait être é le v é ,
n ’existe plus. « N o n a d e s t, non v i v i t , non potest
arbitrari » donc « stipulatio ( legatum ) non valet. «
.
L e Bureau de bienfaisance oppose à cela qu’il repré
sente l’œ uvre. N ous avons prouvé que cela n’était pas
�■
.
(3 0
^
'
.
p o ssib le , et dans un m om ent nous ajouterons à la
preuve donnée ;
mais
en a tte n d a n t, supposons-le
puisqu’il le veut.
« N o n recedendum est à personâ cui arbitrium
con fertu m est. » L e droit d’é le c tio n , d’arbitrage étant,
fondé sur la con fian ce, est p e rso n n e l, coinm e elle :
c e d roit donné à l’œ uvre ne peut passer au C orps
qui la rep résen te, non plus que celui donné à un in
d ivid u ne peut passer à son h éritier ; aussi les lois ne
distinguent p o in t , elles prononcent absolum ent : celle
d e obligat. dit « stipulatio non valet » , et la loi m u lta ,
avan t de prononcer , « m ulta non com m ittetur » n’exa
m ine pas si l ’architecte a laissé des héritiers , pu plutôt
îles élèves qui aient pris son g e n re , son faire, son style.
D o n c de d ro it l’a rb itra g e, l ’élection sont person
n e ls , >et cel^i est juste : car cjui^sait si M e. G a lie u ,
lié e avec M e. de Fontanges , n ’était pas dans le secret
de ses coutumes ,, de ses choix ; qui sait m êm e si elle
ne lui avait pas fait des recom m andations particulières
e t verbales.
E t cela est d’un grand poids dans la cause ; car en
m atière d ’aum ône, et de legs p ie , les recom m andations
verbales sont adjnises et exécutées contre la lettre du
te sta m en t, sur la déclaration de l'exécu teu r testa
m entaire ou du fiduciaire.T ém o in
�.
.
c 53 )
,
: T é m o in u n arrêt du parlem ent de P aris, du 2 août:
1 7 3 4 , dont voiei l’espèce : 1\ 1. D e v a u x , chanoine à
Chartres fait son testam en t, après quelques disposi
tions pieuses , il ordonne que le restant de ses biens
sera em ployé au soulagem ent des pauvres. 11 nomm e
ensuite un exécuteur testam entaire. L e Bureau de
l’hôpital de C hartres réclam e le legs j com m e fait à
l’hôpital ; l?exécuteur testam entaire conteste , et pré
tend avoir des recom m andations particulières et v e r
bales en faveur des jeunes étudians : arrêt au profit
de l’exécuteur testam entaire.
■
. Mais la disposition de la testatrice a corroboré celle
du d roit; en e f f e t , elle a ordonné que le legs ferait
retour à l’h éritier aussi-tôt qu’il ne serait plus adm i
nistré par l’O E u v re , aussi-tôt qu’elle serait réunie à
l’ h ôp ita l, ou à tout autre hôpital ; N ous ' reviendrons
bientôt sur le sens de cette c la u s e , qui dans la cause
est profond et décisif. *
M ais le B ureau de
C o rp s que l’O Euvre ?
"
bienfaisance est-il le m êm è
Q u ’est-ce qui établit l’m dentité d ’un C orps ?
C ’est i°. sa continuation par des m embres indi
viduellem ent aggrégés , et non par un nouveau C orps
.qui le rem placerait brusquem ent , ce qui exclud
tou te id é e de continuation.
5
�\
C 54 p
,
C ’est 2°, l’id en tité de principes de régies , enfin d e
tout ce qui forme l’esprit d’un C orps.
O r , y a -t-il id en tité à cet égard entre l’O E uvre e t '
le B ureau de bienfaisance. Rendant égalem ent ju s tic e ,
e t applaudissant égalem ent aux principes des hom m es
bienfaisans qui le co m p o sen t, et des pieuses dames
qui adm inistraient l’œ u v r e , j’oserai cependant dire
q u ’il n ’y a pas id e n tité , et là-dessus j’en appellerai
à la conscience de tout homme qui ne sera ni en têté
ni prévenu. J ’ajouterai en preuve , que M e. de Foritange exerce et continue de son côté les œ uvres de
la m iséricorde. Si ses principes étaient les m êmes que
ceu x du Bureau , ne viendrait-elle pas se placer à leur
.
tête ou parmi e u x , e t joindre des e ffo rts, qui réunis ,
•
seraient plus heureux.
•
E lle ne le fait pas , et si elle voulait le faire elle ne
serait pas reçue : de sorte que 'ce C o r p s , qui se prétend
le même que celui de l’œ u v r e , rejetterait la S u p é^ rieure de l’œ uvre.
'
Il y a p lu s , le G ouvern em ent n’a pas voulu que les
C orps qu’il créait eussent les mêmes règles , les mêmes
p rin cip e s, le même esprit q u e ceu x qu i étaient dé
/
/
truits. S ’il l ’avait v o u lu , il les aurait ré ta b lis, comme
■. «
il a rétabli les herm ites du M ont St. Bernard , ou tout
au m oins il aurait com posé les nouveaux C orps des
débris des anciens ; s’il ne voulait pas de femmes , il
ne m anquait pas d ’hommes élevés dans ces institutions.
�(
35)
O r il rie Fa pas f a it , et dans tous les B u reau* de
bienfaisance de la R épublique , il n 'y a peut-être pas
un seul in divid u ayant appartenu à ces C orps ; du
moins il y en a très-peu. D o n c , etc.
L e Bureau de bienfaisance oppose qu’ il a été appelle
à représenter l’œ uvre. Pour l ’é tab lir, il allègue qu’il
est institué pour le m ême ob jet ; s a v o ir, pour l’assis
tance des p a u v re s, et la distribution des secours à
dom icile.
•
Mais de droit un corps ne représente pas tous les
corps institués pour le m êm e o b je t; de d r o it , il n’est
pas le m êm e , sans quoi il faudrait dire que l’œ u vre
représentait les F illes et les P ères de la ch a rité, etc. etc.
D e d r o it , un corps ne représente pas et n ’est pas
l ’h éritier de tous les c o rp s, q u i, institués pour le m êm e
o b je t, viennent à p é r ir , à plu$ forte raison de ceux'
qui ont, péri avant qu’il/ existasse«!?-»
S i’ le Bureau de bienfaisance était aujourd’hui d é
claré l’h éritier de l ’œ u v r e , d em ain , par la force des
m em es p rin cip es, il pourrait dem ander à être d éclaré
l’héritier des T em pliers ou de toute autre institution
du même g e n re , qui aurait péri m ille ans avan t lui.
E n fin , il est des corps com m e des in d iv id u s, on
n’a jamais prétendu que ceux-ci fussent de la m êm e
famille et fussent appellés à se représenter et à se suc
céd er , parce qu’ils exerçaient la m êm e profession.
�C 36)
.
A in si donc le legs doit faire retour à l’h érilier par
l ’effet et l’événem ent de la condition résolutoire ta
citem ent exprim ée par ces mots : les pauvres que Vœuvre
a coutume d’assister.
Exam inons m aintenant quel d o it être l’effet de la
condition résolutoire expressém ent énoncée dans la
clause qui suit. '
'
« E t au cas que l’œ uvre d e l à m iséricorde vin t à,
être réunie à l’H ôpital général , ou à tout autre hôpital,
je veu x que le legs fasse retour à mon héritier. »
L a condition a eu lieu , puisqu’il y a eu confusion
des C orps e t des biens.
-
11 y
a eu confusion des C o r p s , car toutes les insti
tutions aumônières de F ran ce ont été réduites à une
seule e s p è c e , qui les a toutes rem p lacées, savoir le s
hospices généraux.
Il y a eu confusion de biens , elle s’est op érée
dans la main de la N ation , qui s’en est em parée ;
tém oin entre autres lois celle du 19 mars 1 7 9 3 , qui
ordonne q u e les biens des hôpitaux , ceux des d o tâtions e t donations en faveur des p a u v re s, seront
vendus com m e nationaux : la N ation par ces 'lois'
et autres , a délaré l ’assistance des pauvres , dette na
tionale , et s’en est chargée : ainsi d o n c , comme 011
l ’a d i t , elle est devenue le véritable h ôp ital, l ’hôpital
universel d e l’em pire ; et les hôpitaux qui son t restés,
»
�..
.
.
.
.
.
n’ étant plus propnétaire's èt iridépéndans , n’ont été
que l’a g e n t, et l’interm édiaire par leq u el cet hôpital
universel exerçait l ’hospitalité.
M ais dit-on , il n’y à plus co n fu sio n , et de nouveaux
C orps ont été établis ; c’est parce
que de nouveaux
C orps ont été établis , que la confusion des anciens
n ’a pas c e ssé , et qu’elle dure encore ; quand il n’y aurait
plus confusion , qu’ im porte ? le droit du légataire
n ’en a pas moins été résolu , le legs n’en a pas moins
_ dès l ’instant fait retour à l ’h é ritie r, tout n’en est pas
moins consom m é.
A u re ste , je vais plus lo in , je soutiens que les rapports,
que le B ureau de bienfaisance nous dit exister entré
l’œ uvre e t l u i , sont une preuve que la condition
prévue est a rriv ée , et que l’événem ent dont i l s’a g i t ,
sa v o ir la réunion , a eu lieu en sa faveur : je le prouve.
t )
E n cas de réunion de deux C o r p s , qu’est le.
C orps auquel on r é u n it ,
par rapport à celui qui
est réuni ? il h érite de ses droits , il lui est substitué ,
il le rem place , il le représente.
O r , le Bureau de bienfaisance ne cessé de répéter
qu’il hérite des droits de l’oeüvre , qu’il lui ést subs
titué , qu’il la rem place , qu’il la représente ; c’est ëri
vertu de ce prétendu titré qu’il ftg it, qu’il deiiiandé»
D o n c , etc.
�. c 38}
' Q uand la tentatrice a é c r it, au cas que l’oeuvre
vin t à être réunie à l ’hôpital général , ou à tout autre
h ô p ita l , c’est com m e si elle avait é c r it , au cas que
l ’hôpital g é n é r a l, ou tout autre hôpital vienne à rem
placer et à représenter l’œ uvre.
M ais pourquoi a -t-elle dit l ’hôpital g é n é r a l, ou touf,
autre h ô p ita l, parce qu’elle a vo u lu s’énoncer d’une
m anière g é n é r a le , qui put em brasser toutes les insti
tutions de ce genre -, et cela était conséquent à la
clause dont nous avons parlé plus h a u t, par laquelle
elle léguait exclusivem ent à l’œ uvre de la m iséricorde ,
e t rejetait tout autre C orps çle ce genre , tou t autre
institution aumônière, charitable , pitoyable , pour nous
servir des term es des anciennes chartes.
^
O r , .on ne peut douter que le Bureau de bien^faisance^sôit
une institution aum ônière , pitoyable ,
charitable , donc il est compris dans
l’expression :
thôpital général ou tout autre hôpital.
' D o n c les rapports qui le lient à l’œ u vre de la mi
séricorde , et dont il prétend tirer son d r o it, sont une
preuve qu’ il n’en a pas : donc le titre auquel il d e
m ande , prouve qu’ il n’a point de titre pour „demander.
M ais enfin qui lui aurait donné les droits qu’il
vien t exercer ici ? de qui tient-il sa mission ? ce n’est
que du G ouvern em en t ; or le G ouvernem ent n’avait
point de d roit au legs dont s’agit ; donc il n’a pu
^Jui en donner.
�J
( 3<)'5
Com m e cette partie de l ’affaire est non pas la plus
contraire aux ad versaires, car les autres ne le sont
pas moins , mais celle où l’injustice de leu r dem ande
frappe le plus ceux qui n 'on t aucune connaissance du
d r o it; c’est sur ee p o in t, que pour en imposer au
public , ils ont entassé les sophismes.
C ’est là leu r dernier r e fu g e , c’est là
que nous^
allons les forcer:
O n a d ’abord opposé que toute'clause résolutoire
apposée à un legs pie était im m orale, et partant nulle.
L ’argum ent est n e u f : c ’est la prem ière fois qu’on
l’avance , faisons en sorte' que ce soit la dernière.
C e tte proposition est à contre sens de la raison et
des lois.
E n e ffe t, une condition réso lu to ire ou n égative n e
peut être im m orale, q u’autant que l’obligation qu’elle
r é s o u t, est com m andée par les m œurs
lois : telle serait la condition
ou par les
résolutoire de l’ob li
gation de payer les im pôts, ou de nourrir son. père
pauvre.
.
Mais quand l’obligation n’est pas recom m andée par
les mœurs ou par les l o is , la condition qui la résout
ne peut pécher con tr’clles.
C elui qui a la puissance et le droit de ne pas fa ire,
a bien la puissance et le droit de ne faire qu’à m o itié ,
en tel cas , en tel te m p s, en un m o t , de ne faire que--
l
�C
conditionnellem ent. E t
4o
> ‘
la D am é
.
G alieu,, qui avait
incontestablem ent le droit de ne pas: d o n n e r, avait
bien aussi celui de ne donner que souis les conditions
im plicites et explicites dont nous avons parlé. •
L e s lois n e sont pas moins! formelles- ; nous en ' ci
terons une dans- l’espèce , d ’une fondation 'de- jeux
funèbres.
O n sait que ces jeux étaient dans l’im tiquité ce que
sont dé nos jours les oraisons- fu n è b re s, les prières ,
les m esses; la différence est que les anciens appelaient
autour du tom beau, l’am bition avec ses jeux , ses tu^
mult.es ., ses d ispu tes, ses combats , ses haines et ses
vengeances ; tandis qu’aujourd’hui nous y appelions
l ’indulgence et les bénédictions du C ie l, des réflexions
m orales sur la double nécessité de m ourir et de bien
fa ire , des souvenirs honorables pour celui qui n’est
plus, et des idées consolantes pour ceu x qui sont restés.
H é b ie n , la L . Titius Lucius de anuuis lég a t., pose
l ’espèce qui suit : T itiu s L ucius lègue à la R épublique
une certaine so m m e, à condition que les revenus en
seront em ployés à des jeu x funèbres en son honneur.
E lle d écid e que si la condition n’est pas re m p lie ,
les h éritiers rép éteron t ce qui aura été payé , et retien
d ront ce qui sera du.
L a glose fait plus , elle renvoie à la, loi n de cond.
indeb.
« Si hceres. arbitratu
lib e r t i, m onumentum
,
facere
�.
-
C4 0
.
.
facere jussus, (^testam ento) pecuniali! liberto dederii,
e t is accepta pecunia m onumentmn non faciatt, con
dì tione tenetur. « L a glose décide donc que la R épu
blique est tenue des conditions qui lui sont im posées,
aussi rigoureusem ent que le dernier affranchi.
Il n’y a d ’exception à ces principes que quand les
conditions sont illicites , com m e celles de célébrer
ces jeux dans un em placem ent prohibé par les lois ,
ou quant la condition étant purem ent m o d a le , n e
peut être exercée : alors le testateur est censé avoir
principalem ent v o y lu d o n n e r, et n’avoir fixé le m ode
que secondairem ent.
.
O n trouve des exem ples da.ns le droit romain.
O n a ensuite opposé une loi de 17 9 0 , q u i, à l’égard
des fondations dont la N ation s’est e m p a rée, veu t que
les héritiers du fondateur n e puissent profiter des
clauses de reto u r, apposées dans les actes constitutifs.
L ’argum ent tout m isérable q u ’il e s t , ne prouve
point en faveur de la conséquence des adversaires
qui citent cette l o i , après avoir prétendu que les
clauses de retour apposées dans ces actes étaient im
m orales, et par conséquent nulles.
Si ces clauses étaien t im m orales et nulles , pour
quoi le L égislateu r a - t - i) eu besoin d ’en préven ir
1 effet par une l o i , peut-être odieuse ?
Exam inons m aintenant la loi qu’on nous oppose.
6
�■
(4 0
U n e lo i qui d éroge au droit com m un n e peut être
étendue. Dans c e lle -c i, il ne s’agit que de fondations
d éjà v a lid é e s, d éjà exécutées , dont les biens se trou
vaie n t entre les mains des C orporations supprim ées ,
e t dont la N ation s’était em parée ; mais il n’y est au
cun em ent question de celles dont les biens n e sont ni
saisis ni re m is, qui ne sont poin t exécu tées ni vali
dées , dont le droit est contesté.
T e l est donc le systèm e des m oyens avancés par le
sie u r C apelle.
L e C o rp s n’était point a p p ro u v é , de là une n ullité
a b s o lu e , irréparable.
•
L e C orps étant a p p ro u vé, l’acte de fondation au
rait du être ratifié par des lettres p a te n te s, tou t au
moins par l’hom ologation dans une cour supérieure.
L e s biens donnés n e sont point de la nature de
ceu x dont il est permis de d isp o ser, aux termes de
l’article i 4 d e l ’é d itd e 1749. L e s C orps non approuvés
ne p eu ven t être compris dans les exceptions portées
par les déclarations suivantes.
E n fin , le legs est nul par l ’ événem ent des condi
tions
r é s o lu to ire s , explicitem ent ou im plicitem ent
portées dans le testam ent.
�(43)
Il nous reste m aintenant à répondre à quelques ob
jections détachées.
L ’adversaire a prétendu que le legs pie r é d u it , ne
faisait point retour à l ’h é ritie r, mais devait être em
p lo yé à des usages pieux. '
•
N ous nous contenterons de lui répondre qu’apparamment il n’a pas lu les articles 1 0 , n et 12 de
l ’édit de 1749Q n a blâm é la dem ande et la réclam ation de l ’h é n t i e r , elles ont été représentées com m e l’acte d ’une
avid ité co n d a m n a b le, que les T rib u n au x devaient
s’empresser de flétrir.
.
•
C ertes , telles ne furent point les o p in ion s, tels ne
furent poin t les exem ples de ces homm es illustres
7
.dont le nom sera toujours ch er à la m agistrature , des
D aguesseau , des G ilb e rt de
V o is in s , des Joli de
F le u ry , des S e g u ie r, e t c . , etc. Ils savaient et ils pu
b liaien t que ces dem andes et ces réclam ation s, loin
d ’être répréh en sib les, sont au contraire encouragées
e t recom m andées par le législateur.
•
E n e ffe t, les articles 1 0 , 11 et 1 1 , donnent lé droit
d e réclam er les biens ainsi d o n n és, non seulem ent
�(-4 4 )
aux h éritiers , mais encore aux enfans e t autres h éri
tiers présom ptifs q u i, vivant même le donateur , seront
envoyés en possession ; que s’ils ne veu lent ou n’osent
exercer ce d r o it , la loi de suite et sans a tte n d re , le
rem et au Seign eur dont les biens dépendent ; et si
celui-ci se t a i t , alors les procureurs-généraux. doiven t
en poursuivre la confiscation.
.
L ’article ajoute : il vrai que ces biens ainsi con
fisqués au profit du r o i , seront par lui em ployés en
faveur d’un autre h ô p ita l, au soulagem ent des pau
vres , ou à quelque usage publie.
M ais ce n’est là qu’une mesure p a rticu lière, qui est
étrangère aux principes constitutifs de l’édit ; le prince
écartant toute idée de fiscalité, n’a pas voulu se gorger
de la dépouille des citoyens.
.
Il
a été opposé que l ’intérêt public exigeait que la .
fondation fût acquittée , que tou t devait se taire d e
van t cette considération d ’un ordre su p é rie u r, et on
s’est com plaisam m ent arrêté sur ce t argument.
M ettons ici de côté la se n sib ilité , affection toujours
hon n ête et g é n é re u se , mais qui doit aussi céder à la
raison ; et voyons si l’in térêt public exige que toutes
les lois politiques et civiles d’un E tat soient im m olées
aux prétentions du simple Bureau de bienfaisance.
L ’in térét de l’E t a t , l ’intérêt public , c’est le respect
pour les lois politiques et c iv ile s , et par suite pour
les propriétés.
.
�■
(
45
y
.
C e n’est poin t l ’in térêt d ’un jour , d ’u n e h e u r e ,
d ’un m o m e n t, celui d’un ou de quelques individus.
L a société qui reste , ne considère
ni l’instant qui
s’é c o u le , ni l’hom m e qui passe, et l’un et l’autre ne sont
pour elle qu’un point fu g itif, que le temps absorbe et
d évore : ses jours â elle sont des siècles , ses enfans
sont
des masses entières ,
c’est eux seuls qu’elle
considère quand il s’agit de stipuler ses in té rê ts , et
non quelques individus , qui tour-à-tou'r se présentant
sur son théâtre , n ’y sont que des usufruitiers d’un
instant , pour lesquels tout est viager , tout est m o
m entané dans l ’ordre social.
Mais quel serait enfin le produit de cette grande
mesure , de cette considération d’uu ordre su p érieu r,
à laquelle on veu t , sans h é site r, faire lé sacrifice d ç
tout ce que les N ations d o iven t respecter sous pein e
de vie , des lois de l’E tat et de la propriété.
.
C e t intérêt p u b lic, nous le diron s, n’est autre chose •
d ’un c ô té , que la facilité donnée au G ouvern em ent
d ’économiser' quelques écus , en le
dispensant dé
payer ce qu’il d o n n e , et ce qu’il d oit pour l’assistance
des pauvres ; de l’a u tr e , celle de recevo ir quelque
a rg e n t, parce que le fonds du legs doit être placé
en. rentes sur ¡’Etat.
;
�'
■
c . 46 ?
. , ,
.
E h 'bien ! ce' n’est poin t là l’intérêt public : nous
irons plus lo in ; ce n ’est pas la volonté du G o u v e rn e
m ent ; en douter serait ne pas lui rendre justice.
M alheur donc à cette opinion vaine et dangereuse,
qui renversant les id é e s , place l’intérêt public dans
une économ ie m o m en tan ée, à laquelle il fait céder
toutes les lo is , et appelle des conséquences funestes.
A n ath êm e à ces principes q u i, s’ils étaient connus »se
raien t égalem ent ré p ro u v é s, et par le G o u v ern em e n t,
fier de com m ander à un peuple gén éreu x et lib re , et
par la N ation qui s’applaudit d ’avoir trou vé un C h e f
qui se fait honneur de respecter ses droits.
E n fin , Y on a prétendu que le legs est favorable.
M ais sur quoi donc serait fondée cette fa v e u r ,
serait-ce sur les articles 2 , 3 , 9 ,
10 , 11 , 12 , i 4 ,
i 5 , 16 , 17 , 1 9 , 2 0 , 21 , 1 1 , de l’éd it de 1749»
sur les déclarations qui l’expliquent ? serait-ce sur les
clauses du testam ent ?
S i la faveur n’est qu’une couleur hon nête donnée
à l ’ in ju stice , ah ! sans doute le B ureau de bienfaisance
a d ro it de la réclam er. E t encore sera-t-il difficile ,
se ra -t-il im possible de tro u ver un vernis qui puisse
effacer et cou vrir ia u t de nullités : mais si au con
traire ce m ot exprim e le respect dû à une réclam ation
qui réunit pour elle la force du droit et de l’é q u ité ,
v
�( 4 7
)
.
alors c’est à l’h éritier qu’elle est d u e , car il a pou r lui la
lo i de l’E t a t , qui défend de donner aux C orps non
ap p ro u vés, e t la loi de l’éq u ité qui ne perm et point que
les familles soient dépouillées pour .enrichir des C o r
porations , m êm e des h ôpitaux , parce que la spolia
tion d’une fam ille produit plus de m isé ra b les, que
n ’ en peut soulager l’opu len ce d ’un hôpital. Il a pour
lui la lettre du testam ent. E t si la dam e G alieu ( i )
im prudem m ent évo q u ée par l’adversaire , pou vait un
m om ent sou lever la pierre du sépulchre , et franchir
les barrières de la m ort , son om bre pâle et in d ig n é e ,
ne crierait-elle pas à l’adversaire.
« Pourquoi êtes-vous venu troubler le silence et la
yy paix du to m b ea u , pourquoi m ’avez-vou s appellé ?
55 quare inquietasti me u t suscitarer.'
« M a vo lo n té n’est-elle pas claire, n’est-il pas eviden t
5> que j’ai voulu vous exclure , que vous n’avez pas
55 plus de droits que l’autorité qui vous envoie : pour
quoi donc m ’avez-vous appellé ? quare inquietasti me
55 ut suscitarer. E h bien , je vous ré p o n d ra i, je vous
« dirai que vous-m ême ne cro yez point à la valid ité
« du l e g s , je vous dirai que vous confiant en des
3? circonstances étrangères , vous avez osé mentir à
^ votre co n scien ce; que vous avez espéré séduire les
( ’ ) M. Jullic Avait dans sa plaidoirie '¿vcqnc l’ombre de Udamc 'Galieu.
�.
C 4 8 )
.
.
Juges en leu r proposant de s’associer à la bienfaisance
« d ’un te sta te u r, mais vous vous serez trom pé : vos
Juges savent que le legs est révoqu é , ils savent,
» que leu r d evo ir est de dire rigoureusem ent droit à
» t o u s , et que là où la justice fin it, l ’injustice co m» m ence. »
.
P. S. Le st. Cape|le n’a pu se procurer le testament du sr. Gérauld
Galieu 5 mais il n’en est pas moins vrai qu’il y a eu une substitution.
Au reste , cela est étranger à la question, et c’est par les principes
qu’il faut décider.
Le sr. Capelle a découvert que la quittance dont nous avons parlé
au commencement, est relative à un autre acte que celui rapporté
dans le testament ; il doit à sa loyauté d’en avertir les Juges.
Le citoyen Lamouroux, Président,
Rapporteur du délibéré.
B E R T R A N D , fils.
S E V E R A C , Avoué.
A Saint-Flour, de l'imprimerie de V e. S A R D I N E ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum Capelle. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lamouroux
Bertrand fils
Séverac
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour le Sieur Capelle, défendeur, contre le Bureau de Bienfaisance de la Ville d'Aurillac, demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Veuve Sardine (Saint-Flour)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1749-1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0217
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311_0CR
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53716/BCU_Factums_M0217.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53124/BCU_Factums_G1026.pdf
23c8e4cfa05147d19757f9c7a436c448
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR C l a u d e HUGON DE GIVRY ,
pour un e sixième
portion de
défunt
GUILLOUET D’ORVILLIERS,
tenant-général des armées
°
héritier
* ..........
Louis
ancien lieu
n a v a le s , intimé et
'
appelant;
C O N T R E S i m o n B É L A N G E R , ancien
cuisinier de feu L o u i s G U I L L O U E T
D ’ O R V I L L I E R S , habitant de la ville de
Paris 7 appelant d'un jugement rendu. au cidevant tribunal civil de l'Allier.* le 6 O
germinal
an 8; et intimé.
^
kxr»<_>
^
c lu
~ it-K
QUESTI ON.
Peut-on exiger le payement d'un legs conditionnel, lors
que la condition imposée au légataire n’a pas été
remplie p ar le fa it du légataire ?
I l e s t difficile d’expliquer comment la question la plus
simple a pu faire naître une contestation sérieuse; par
quels motifs on a donné à cette cause une aussi grande
publicité pourquoi Simon. Bélanger s’est permis de disA
trib u n a l
? î!
DAPPEL
ITj:
,;,»tàiuo».
|S
•
jl
/o ^
�( o
tribucr des libelles diffamatoires, s’est répandu en injures
grossières contre le citoyen de G iv ry , ses défenseurs et
ses conseils ? Étoit-ce pour donner plus de poids aux
présomptions,' aux allégations, aux chimères, qui for
ment la base de sa défense ?
Un légataire conditionnel peut-il espérer la délivrance
de son legs, quand il n'a pas rempli la condition? On
sait que la condition affecte tellement la substance du legs,
qu’il ne peut pas avoir son effet sans elle ;
Qu’il suffit que la condition ne soit pas impossible, pour ‘
qu’elle doive être exigée;
Qu’il faut se soumettre, avec une obéissance aveugle ,
à la vo lo n té du testateur, et satisfaire ponctuellement à
la condition.
Simon Bélanger pouvoit discuter ces principes, sans
se permettre aucune diffamation.
Mais ses injures et ses menaces ne sauroient atteindre
le citoyen Ilugon de Givry. Il ne les rappelle , qu’à raison
de ce que le jugement dont est appel, a ordonné la sup
pression d’un alinéa du mémoire de Bélanger, et que
ce dernier est appelant en ce chef; il ne s’en occupera
qu’autant que cela est nécessaire pour sa défense, et il
ne se permettra aucune représaille.
F A I T S .
Simon Bélanger est entré au service de M. d’ Orvilliers,
en 1779. M* d’ürvilliers habitoit alors la ville de Rochefort, après avoir quitté Brest, où il avoit commandé la
marine et les armées combinées de France et d’Iispagne.
�JtA
(3)
M. tl’ Oryilliers eut le malheur de perdre son épow e, en
17 8 0 ; il avoit quitté le service. Isolé, livré à lui-même,
il prit la résolution de passer le reste de sa vie dans
retraite. Il choisit la maison de St. M agloire, h Pari^,
et s y fixa dans le cours de l'année. 1 7 8 1 , aupi’ès de
S.\
M . Laube, ancien officier de marine, son ami, son ancien
compagnon d’armes; il habita avec lui jusqu’à la fin de
*; i9' 3*"
1790. C’est là qu’il comptoit terminer sa carrière glo-5»«*v:'l‘v^ *"
rieuse ( 1) ; mais une attaque d’apoplexie qu’il éprouva,
dans la même année 17 9 0 , afïbiblit ses facultés intellec
tuelles, et le mit dans la dépendance de Bélanger, son
domestique. Ce dernier loua, sous le nom de son m aître,
une maison écartée de celle de St. M agloire, et le fit trans
férer dans cette nouvelle habitation, malgré les repré
sentations de M. Laube, et de tous ceux qui prenoient
intérêt à ce brave et ancien général, dont la mémoire
inspire la vénération.
Les amis de M. d’Orvilliers instruisirent sa famille de
ce changement.Tous les païens de M. d’Orvilliers, vive
ment affectés de son état, donnèrent au citoyen Hugon
de G ivry, les pouvoirs les plus étendus, pour se rendre
auprès de leur on cle,y prendre tous les arrangemens et
mesures convenables, donner les ordres que sa prudence
lui suggérerait, pour que M. d’Orvilliers fût servi et
soigné ainsi que l’exigeoit son âge et son état ; l’autori
sèrent même à transférer leur oncle ;\ portée de quel
qu’un de sa famille, pour qu’il puisse veiller à ce qu’aucun
(1). P ar son testam ent, il avoit manifesté l’intention d’étre enterré
dans la maison de St. M agloire,
A a
�( 4 )
soin ne lai manque, si son médecin juge que cela
puisse se faire sans risque pour sa santé et sa conser
v a tio n .
L e citoyen Iiugon de Givry est ('•gaiement autorisé à
envoyer ou à changer les domestiques, et à prendre toutes
les mesures que sa sagesse lui dictera, pour que les af
faires d’intérêts soient administrées de manière que les
revenus de son oncle suffisent à ses besoins et à ses dépenses.
Ces différentes procurations qu’il est inutile de trans
crire littéralement, sont des 12 avril et 9 août 17 9 1 , et
enregistrées le même jour 9 août.
L e citoyen Hugon de G ivry se rendit auprès de son
oncle, en vertu des pouvoirs qui lui avoient été donnés.
M. d’ Orvilliers étoit peu favorisé de la fortune ; sa plus
grande ressource étoit une pension de 18,000 f r ., payée
par l’état, et qui fut supprimée dans la suite. L e citoyen de
G ivry ne pouvoit confier son oncle h des mains merce
naires ; il prit la résolution de l’amener chez lui au mi
lieu de sa famille; il consulta le médecin Phlips sur cette
détermination ■, il fut décidé que le voyage ne pouvoit
entraîner aucun inconvénient. lie citoyen de Givry fit
vendre, en présence de M. Laube et de Bélanger, le
mobilier qui restoit h son oncle; le produit de la vente
fut de 403 fr. en assignats.
Bélanger accompagna son maître dans ce voyage ; il
demeura huit jours à M oulins, auprès de lui, et l'aban
donna ensuite, pour retourner h Paris.
j\l. d’ Orvilliers a vécu dans la maison de son neveu,
juiqu’au 13 avril 1792. Ses neveux et nièces après sa mort
partagèrent sa succession ; il revint il chacun la somme de
�to )
(5)
1,8 3 1 f. 85 cent., ainsi qu’il résulte des quittances produites.
M. Laube, ami de M. d’ Orvilliers, étoit dépositaire
du testament de ce dernier, qui l’avoit nommé son exé
cuteur testamentaire. Comme M. Laube n’étoit pas Fran
çais, et qu’il étoit sur le point de retourner dans son
pays, il envoya ce testament au citoyen de Givry. Ce
testament olographe est sous la date du 4 mai 17875 il
contient difïerens legs ; il suffit de transcrire celui qui
concerne Bélanger.
« J e donne 6,000 fr. à Bélanger, en reconnoissance
« des services qu’il m’a rendus, par estime de ses vertus
et par amitié pour lui j je lui donne aussi le lit d’in« dienne, et tout le petit ameublement de la chambre
« située au prem ier, où je m a n g e ; tous mes habits et les
,«• deux tiers du linge servant à ma personne; enfin je lui
<r donne tous mes livres qui se trouveront , après que
« M. Laube aura fait le choix de ceux qui lui conviennent.
» J e donne à Calliste, mon laquais, un tiers du linge sér
ie vant à ma personne, et une somme de 1,200 fr.
« L es articles concernant les deux domestiques n a u « ront effet, quautant qu’ ils seront à mon service à
« Vheure de ma mort. »
Bélanger, informé du décès de son ancien maître, écrivit
au citoyen de G i v r y , lui parla du testament dont il connoissoit l’existence, du legs qui lui avoit été fa it, et de
manda copie du testament.
Le citoyen de G ivry copia littéralement l’article qui concernoit Bélanger, et s’empressa de le lui envoyer.
Sans doute que Bélanger ne crut pas alors qu’il pou voit
exiger le payement du legs, lorsqu’il en connut la condi
�t
(6)
tion ; du moins il a gardé le silence jusqu’au 2 vendé
miaire an 7 , qu’il fit signifier un acte extrajudiciaire au
domicile du citoyen Hugon de Givry. Il se permet, dans
le préambule de cet acte , des inculpations malhonnêtes
contre le citoyen de G ivry, et le somme de déclarer, i°. si
M. d’Orvilliers est décédé dans sa maison de Moulins;
2°. s’il a fait son testament olographe , le 14 mai 1787 ;
3 0. si par ce testament il a fait un legs quelconque en fa
veur de Bélanger, qui étoit sou premier salarié; 40. si
M . d’ Orvilliers lui a confié, à titre de dépôt, son testa
ment, pour le déposer chez un notaire après sa m ort;
5 °. s’il est encore dépositaire aujourd'hui du même testa
ment. Dans ce dernier cas , il somme le citoyen liugon
d’en faire le dépôt chez un notaire, ou en justice , dans
vingt-quatre heures , et de lui indiquer ensuite le lieu 011
il aura fait le dépôt. Dans le cas où le citoyen Hugon
auroit, à l’instant du décès de M. d’ Orvilliers, fait le dépôt
de ce testament au greffe, ou en l’étude d’un notaire, il le
somme de lui indiquer à l’instant le notaire qui a reçu ce
dépôt; sinon et faute par le citoyen Hugon de donner à
Bélanger les renseignem ens nécessaires pour avoir une
copie légale de ce testament, et de s’expliquer sur les faits
ci-dessus, celui-ci se pourvoira contre lui pour l’y con
traindre, faisant à cet effet toutes réserves de fait et de
droit.
L e citoyen Hugon de G ivry répondit, i ° . que M. d’Or
villiers étoit mort chez lui en 17 9 2 ; 2^. qu'il a fait un
testament olographe, mais qu’ il en ignore positivement la
d ate, qu’il croit cependant que c’est en 1787 ; 3 0 qu’il croit
qu'il a fait un don conditionnel en faveur dudit Bélanger ;
�C7 )
40. que M. d’ Orvilliers a confié son testament entre les
mains de M. Laube, ancien officier de marine, son a m i,
qui le lui a montré , et qui en est nommé exécuteur testa
mentaire ; 5°. que lui H ugon-Givry n’est point dépositaire
de ce testament, et qu’il ignore ou il e st, et s’il existe;
6°. enfin qu’après la mort dudit d’O rvilliers,lui G iv ry ,
a partagé avec ses autres cohéritiers les meubles et effets
du défunt, dont partie a été distribuée aux pauvres, particulièremet ses habits et linges de corps ; qu’au surplus,
s’il étoit prouvé qu’il fût dû légitimement à Bélanger, la
succession d’ Orvilliers le payerait.
Cet acte extra judiciaire fut suivi d’une cédule, en date
du 5 nivôse an 7 , par laquelle Bélanger demanda que le
citoyen Hugon fût tenu de déposer le testament chez un
n o ta ir e , ou au greffe du tribunal civil, dans vingt-quatre
heures, si mieux le citoyen G ivry n’aimoit payer , à lui
Bélanger, la somme de 1 5,000 f r ., valeur du legs à lui fait
par le testament du 14 mai 1787. Il y eut un procès verbal
de non conciliation , suivi d’une citation du 6 pluviôse, et
le 28 floréal an 7 , il intervint un premier jugement con
tradictoire, qui ordonna que le citoyen Hugon de Givry
seroit tenu de déposer au greffe du tribunal civil d’Allier
le testament olographe de défunt d’ Orvilliers, dans la hui
taine , à c o m p te r de la signification du jugement.
L e 3 frimaire an 8 , nouvelle citation de la part de Bé
langer, contre le citoyen Hugon de G ivry, tendante ¿\ faire
déclarer exécutoire contre lui le testament olographe de
feu d’Orvilliers, du 14 mai 17 8 7 ,et le faire condamner,
en qualité de seul et unique héritier de son oncle, à lui
faire la délivrante des legs exprimés à son profit, et à lui
�( 8 )
payer pour iceux, i ° . la somme de 6,000 fr. fixée par le
testateur ; 2°. celle de 8,ooo fr. pour les deux tiers des habits
et la valeur du linge servant alors au défunt ; 3 0. celle de
3,000 fr. pour la valeur des livres que le citoyen Hugon a
trouvés à la mort de son oncle ; 40. celle de 10,000 fr. pour
d o m m age s-in té rêts, dûs à raison de ce que le citoyen de
G iv r y , comme dépositaire infidèle du testament, l’a tenu
secret jusqu’au 28 floréal an 7 , qu’il a été condamné à en
faire le dépôt, et que par là il a mis Bélanger dans l'impossibilité de former plutôt son action.
L e 8 frimaire il y a eu un procès verbal de non concilia
tion , et le 26 du même mois Bélanger a fait assigner le
citoyen de Givry au ci-devant tribunal civil d’Allier , où il
a repris les mêmes conclusions qu’au bureau de paix.
Il est bon d’observer, que lors du procès verbal fait au
bureau de paix, le citoyen G ivry avoit exposé que Bélanger
réclamoit mal à propos l’exécution d’un testament dont il
n’avoit pas rempli la condition ; que le legs 11’avoit été fait
au profit de Bélanger, qu’à condition qu’il se trouveroit
au service du testateur au moment de son décès, et que
Bélanger avoit quitté le service de M. d'Orvilliers long
temps avant sa mort. Au surplus, le citoyen de G ivry
remarqua qu’il n’étoit héritier de son oncle que pour un
sixième; qu’il ne savoit à quel titre et pour quel motif
Bélanger lui accordoit une préférence exclusive; il crut
devoir lui indiquer le nom, la qualité et la demeure de ses
autres cohéritiers.
Bientôt il s’est élevé entre les parties, une discussion plus
sérieuse. Bélanger opposoit comme fin de non recevoir un
écrit de M. d’Orvilliers du i6_av ril 1788 , qui, suivanL lu i,
le
�( 9 ).
le dispensent d’exécuter la condition apposée au testament.
Ilargumentoit contre le citoyen de G iviy de quelques lettres
particulières de l’envoi que lui avoit fait ce dernier, de
l’extrait du testament en ce qui concernoit Bélanger. II
voulut faire résulter de là, une approbation du testament.
Des mémoires imprimés ontété répandus de partet d’autre.
Bélanger s’est livré aux plus atroces déclamations ; des per
sonnalités ont été substituées aux moyens, et chaque écrit
qui émanoit de lui, étoit une nouvelle diatribe. Dans un de
ses mémoires , pag. 4 , verso, après avoir dit que le citoyen
Ilugon de G ivry étoit venu à Paris, le i 5 mai 17 9 1 ,
auprès de son oncle , il s’exprime ainsi :
« Quel étoit le but de ce voyage ? Etoit-ce pour veiller
a plus particulièrement sur la santé de son oncle , et pro
ie longer ses jours en lui prodiguant tous les secours de
« l’art des médecins ? Non. Il ne s’est rendu en si grande
«■ hâte dans la capitale, que pour s’em parer, ainsi que
«■ toutes les circonstances le prouvent, de la succession de
« son vieil oncle, avant sa m ort, et pour en accélérer le
« terme autant qu'il dépendoit de lu i , sans se coin pro
ie mettre aux yeux de la justice. »
On doit sans doute mépriser les injures, mais une accu
sation aussi grave ne pouvoit être tolérée. Le citoyen de
G ivry en demanda justice; il conclut i\ la suppression de
ce libelle, et à l’affiche du jugement à intervenir.
Il s’appliqua ensuite à démontrer, en point de droit, que
Bélanger étoit non recevable à demander la délivrance de
sou legs conditionnel, et qu’enfm il auroit dû former sa
demande contre tous les héritiers du testateur.
L a cause portée à l’audience du tribunal civil d’A llier,
B
�V
'Cío)
du 6 germinal an 8 , il est intervenu» un jugement contra
dictoire , dont on va transcrire les motifs et les dispositions.
« Considérant, i ° . qu’aucune des trois fins de non rece
te voir proposées par Bélanger n’est fondé , attendu d’une
« part, que l’écrit en date du 16 avril 1788, dont argü
ir mentoit Bélanger, non seulement ne relève pas formel« lement le légataire de la condition portée au testament,
« mais encore qu’il en résulte au contraire que le légateur
« ne supposoit sa séparation du légataire, que dans le seul
« cas du prédécès de ce dernier; de l’autre, qu’il ne résulte
« aucun acquiescement formel à l’exécution du legs, ni de
« l’extrait du testament délivré au légataire, sans réserve
« de la part de l’héritier, cette réserve étant de droit, et la
te correspondance de l’héritier établissant qu’il regardoit le
* legs comme n u l, ni de la délivrance qui a pu être faite au
* légataire de quelque partie du legs, puisque non seule« ment il n’est pas justifié que cette délivrance soit du fait
« de l’héritier, mais encore qu’elle a été faite avant la mort
« du testateur, de l’aveu même du demandeur.
« Considérant secondement, que d’une part le citoyen
« Hugou de G ivry, par les inculpations graves qu’il a
« faites à Bélanger, tant dans son mémoire imprimé, que
« lors des plaidoiries de la cause, et sur-tout par le rapport
« de la procuration des autres cohéritiers, dans laquelle il
« s’est fait particulièrement autoriser à renvoyer les domes« tiques, a fourni lui-même au moins de violentes yré« sotuptîoiis , que c'étoit lui qui avoit renvoyé Bélanger
* du service de défunt Guillouct d’ Orvilliers ; que d’une
a autre part, soit que l’on considère l’intention manifestée
« par le testateur, dans sou testament, do finir scs jours
�ce à Paris, puisqu’il vouloit y être enterre, soit que l’on
« considère qu’il étoit de sa connoissance que Bélanger
« étoit établi à Paris, et y avoit sa famille; soit que l’on
« considère enfin que ce n’est pas le,testatcur qui a quitté
a Paris volontairement, pour venir à Moulins, mais que
« c’est plulôt la volonté du citoyen de Givry , qui a opéré
cc seule cette translation, qui a eu lieu dans la maison dudit
« G iv ry ; que dès-lors le défaut d’accomplissement de la
« condition imposée à Bélanger , ne peut pas lui être rc« proche, parce que non seulement la condition n’est pas
« restée la même par le fa it, non du testateur, mais bien
ce de l’héritier, mais encore qu’il n’a plus été au pouvoir
« du légataire de l’accomplir, puisque le testateur, transce féré dans une maison au tre que la sienne propre,
« n’a plus eu dès-lors de domestiques particuliers pour
« le servir, mais bien ceux seulement du maître de cette
« maison; que les domestiques du testateur y eussent-ils
cc même resté avec lu i , ils y seroient alors devenus ceux
« de la maison, et non du testateur ; ce qui n’étoit ni dans
cc l’esprit, ni dans la lettre du testament.
« Considérant en troisième lieu, que les faits d’indignité
a proposés par le citoyen de G iv ry , sont non seulement
c< vagues et nullement précisés, mais encore que Bélanger
cc les a suffisamment-écartés, tant par le rapport de ses
« états journaliers de recette et dépense, arrêtés scrupucc leusemcnt et dans le plus grand ordre par le testateur,
« depuis 178 1 , jusqu’à sa translation à Moulins, que par
ce la correspondance amicale, tenue par le citoyen llugon
ce lui-même, avec le citoyen Bélanger, depuis la sortie de
« cc dernier du service du testateur à Moulins, chez le
B 2
�f
i
-m
( 12 )
« citoyen Hugon de G iv ry , ladite correspondance due« ment timbrée et enregistrée.
«r Considérant en quatrième lieu, que soit le dépôt fait
« entre les mains du cit. Hugon de G ivry, du testament
« de feu d’O rvilliers, soit la qualité de seul et unique
« héritier de ce dernier, à lui donnée, dans les premiers
« jugemens rendus dans la contestation, ceux postérieurs '
« portant cette réserve form elle, sans que les qualités
* puissent nuire ni préjudicier aux parties, ne peuvent
« changer sa qualité ni lui attribuer celle d’exécuteur
« testamentaire, ni lui donner de plus grands droits
« dans la succession, que ceux qu’il y a réellement ; qu’en
« principe le cohéritier n’est tenu, vis-à-vis le légataire,
« quel que soit le legs qui lui a été fait, qu’en propor« tion de la portion qu’il amende dans la succession ,
« en qualité de cohéritier ».
« Considérant cinquièmement, que pour déterminer
« la partie du legs relative aux livres, liardes et linges
« du testateur, Bélanger ayant reconnu avoir retiré avant
« la mort du testateur, le lit et l’am eublem ent faisant aussi
« partie dudit legs, il est indispensable que 1 état des« dites hardcs, linges et livres soit donné, et que cette
« obligation est de droit imposée à l’héritier, tenu de
« la délivrance du legs et nanti de la succession , sauf
« tous contredits de la part du légataire.
« Considérant s ix iè m e m e n t , que quoique en principe
« général les intérêts d’un legs portés dans un testament
« olographe, ainsi que dans l’espèce, courent du jour
« du décès du testateur, lorsque l’ héritier nanti du testa
it m ent, néglige d’en faire le dépôt aussitôt après la
�Jü ) 5
( n )
te mort du testateur ; néanmoins la circonstance résul
te tante de ce que Bélanger, légataire, connoissoit non
« seulement le testament, mais encore celui qui en étoit
« dépositaire, par l’extrait qui lui avoit été adressé par
« le citoyen H ugon-Givry, doit faire éprouver des mo« difications à ce principe ; mais que s’il est juste dans
cc cette hypothèse, que les intérêts du legs ne soient point
k alloués du jour du décès du testateur, il ne l’est pas
« moins, d’après la conduite tenue par le cit. Hugon.
« de G iv ry , dans l’instance en rapport et dépôt du tes« tament, d’allouer les intérêts à compter du jour de
« la première sommation faite aux fins du rapport et
« dépôt dudit testament, du 2 vendémiaire an 7 , la de« mande en d élivran ce du legs, n’ayant été retardée que
« par le refus obstiné du citoyen Hugon de G iv ry , de
« représenter le testament, et son seul fait 33.
« Considérant septièmement, que dans l’espèce, les
« intérêts qui seront alloués, tiennent lieu de tous domr inages-intérêts , qui ne sont jamais dûs qu'à raison
« du tort qu’on éprouve; le préjudice souffert par Bé~
« langer n’étant autre dans l’hypothèse , que le retard
« apporté à l’acquittement ou à la délivrance de son legs,
« et les intérêts alloués étant la compensation naturelle
« et de droit de ce retard.
a Considérant huitièmement, que la défense légitime
«■ se borne aux seuls moyens de la cause, et non à des faits
«■ étrangers, et encore moins lorsque ces faits contiennent
« des inculpations graves, et tels que la réputation et l’hon« neur peuvent en être altérés ; qu’au nombre de ces genres
« d’inculpations et faits, le citoyen G ivry est fondé à
�*«
C *4 )
« mettre le second alinéa du v°. de la quatrième page du
« mémoire imprimé du citoyen Bélanger, commençant
« par ces mots : quel étoit le but de ce voyage ? et finis« sant par ceux-ci: sans se compromettre aux y e u x de
« la ju stice, et qu’il y a lieu dès lors d’ordonner la radia« tion dudit alinéa', et que procès verbal en soit dressé
« par le greffier aux frais de Bélanger.
« L e tribunal jugeant en premier ressort, déclare so-»
« lennel et exécutoire contre le citoyen Hugon de G ivry
« le testament olographe de défunt Louis Guillouet d’Or« villiers, du 4 mai 17 8 7 , dûment enregistré ; donne acte
« aux parties de la déclaration faite par Bélaliger, qu’il a
« en son pouvoir le lit et l’ameublement faisant partie'du
« legs à lui fait dans ledit testament ; condamne ledit
« Hugon de G iv ry , en sa qualité d’héritier de défunt
« Louis Guillouet d’ ü rvilliers, à payer et délivrer, ou
« autrement acquitter, en pareille proportion seulement
« que celle qu’il amende dans ladite succession, audit Bé« langer, avec intérêts, à compter de la sommation signi« fiée le 2. vendémiaire an 7 , tant la somme de 6,000 fr.
« portée au même legs , que les bardes et deux tiers de
« linge à l'usage du défunt, et sa bibliothèque , faisant
« partie dudit legs; et pour être statué sur la consistance
« ou valeur desdites hardes, linges et bibliothèque; or« donne que dans la quinzaine, à compter de ce jou r, le
a citoyen llugon de G ivry sera tenu de signifier à Bélanger
« un état certifié desdites liliales , linges et livres , saul con« {redits de la part dudit Bélanger, pour lesdits états et
a contredits rapportés au tribunal, ou à délaut d’iceux ,
« être par lui statué ce qu’il appartiendra, en l’audience
�( i5 )
« du 6 floréal prochain , en laquelle la cause- demeure
« continuée; condamne néanmoins ledit Hugon de Givry
«• aux dépens faits jusqu’à ce jour par le citoyen Bélanger,
« ensemble au coût, levée et signification dudit jugem ent,
« qui sera exécuté par provision, nonobstant l’appel, aux
« charges de droit, comme s’agissant d’exécution d’acte
« de dernière volonté reconnue en justice. E t faisant droit
« sur les conclusions en radiation et suppression d’injures,
* prises par le citoyen Hugon de G iv r y , le tribunal or<r donne que Yalinéa du v.° de la quatrième page du mé« moire imprimé de Bélanger, commençant par ces mots:
« quelétoit le but de ce voyage ? et finissant par ceux-ci:
« sajis se compromettre aux y e u x de la justice , sera
« rayé dudit mémoire comme injurieux et diffamant, et
«• que procès verbal de ladite radiation sera dressé par le
« greffier du tribunal aux frais dudit Bélanger. »
Bélanger a fait signifier ce jugement par exploit du 28
thermidor an 8 , avec déclaration que ce jugement le g re
voit dans quatre de ses dispositions; qu’en conséquence il
s’en rendoit appelant, i ° . en ce qu’il prononçoit la sup
pression d’une partie de son mémoire de défenses; 20. en
ce qu’il 11e prononce point en faveur de Bélanger une con
damnation en dommages-intérêts ; 30. en ce que, sans
aucune distinction , il ne condamne le citoyen Hugon de
G ivry qu’au payement de sa portion du legs; 40. en ce que
le payement 11e prononce pas quelle est la quotité des con
damnations que doit supporter le citoyen de G iv ry , ce
qui, suivant lu i, est un déni de justice.
De son côté, le citoyen Hugon de G ivry a interjeté pu
rement et simplement appel du même jugement par acte
�C 16 )
du 23 brumaire an 9 ; et c’est sur ces appels respectifs que
le ¡ribunal a à prononcer.
L ’ordre de la discussion exige qu’on commence par
examiner la question de droit relative à la condition im
posée au testament.
On analisera ensuite les moyens particuliers et subsidiai res du citoyen Ilugon de Givry.
Et on terminera par la discussion des griefs que Bélanger
a proposés contre le jugement dont est appel.
• L a première règle que l’on doit observer touchant l’ac
complissement des conditions e st, que l’on doit se con
former exactement à la disposition conditionnelle. Telle
est la doctrine de Furgolesur les testamens, tom. 2 , ch. 7 ,
sect. 5 , nomb. 3 : « C’est la lo i, dit-il, que les parties con« tractantes se sont prescrite ; c’est la loi qu’un testateur
« qui dispose a imposée : il faut donc consulter le contrat
« ou la volonté du testateur, et suivre exactement et litté« ralement cc qui est prescrit : in conditionibusprimurn
« ïoeum voluntas defuncti obtinet ca quœ régit condi« tioncs , loi 1 9 , ff. de condit. et demonstrat. L e temps,
« la forme , la manière , les circonstances, tout cela dépend
« de la disposition conditionnelle, de laquelle on ne doit
« s’écarter en aucune façon ; c’cst elle qui doit régler l’évé« nementet la conduite de celui qui doit accomplir la con« dition , pour profiter de la libéralité conditionnelle; et
« comme on ne doit rien ajouter ¿1 la disposition pour
« rendre la condition plus difficile, ni pour l’étendre d’un
« cas ù l’autre, ni d'une personne à une autre, on ne doit
« 11011 plus rien omettre ni retrancher de ce qui se trouve
v. exprimé dans la disposition; cl par conséquent l’accom
plissement
�^ ( 17 )
« plissement ou l’infraction de la condition, doivent arriver
« précisément de la manière et en la forme prescrite par
« le testateur. »
R icard, dans son traité des dispositions conditionnelles,
cliap. 5 , sect. 3 , nornb. 3 14 , enseigne <r que les conditions
« doivent être pleinementet exactement accomplies, aupa« ravant que la disposition qui en dépend pu:sse avoir
« son effet. Lorsque le testateur a attaché sa libéralité à
« une condition, la condition en est la base et le foude<$ ment; de sorte, que l’une ne peut subsister qu’avec
« l’autre. Il est absolument nécessaire, pour faire sub« sister la disposition , que la condition, qui seule est ca« pable de lui donner l’être, précède dans les mêmes
« termes que le défunt a prévus , tellement que s’il y
« manque quelques circonstances , la volonté du testateur,
« qui s’est liée à la condition , demeure imparfaite ; elle
ce ne peut produire pareillement qu’une disposition impar« « faite, laquelle conséquemment demeure sans effet et
« sans exécution. »
Plus bas, Ricard ajoute, « que ces maximes ont lieu à
« l’égard des conditions en général, mais qu’elles doivent
« plus particulièrement recevoir leur application, lorsqu’il
« s agit de conditions potestatives, qu’il est au p o u v o ir du
« légataire d ’a c c o m p l ir , précisém ent dans les termes que
a lui a prescrits le testateur. Il doit, avec une obéissance
a aveugle, se soumettre absolument à la volonté du dé« lunt, et satisfaire ponctuellement à la condition, sans
« qu’il lui soit permis d'examiner s’il seroit plus expédient
« de l'exécuter d’utie autre façon que celle que le testateur
a a prévue. »
G
�* (r\
( 18 )
Les considérations les plus puissantes ne peuvent empê
cher que les conditions ne soient accomplies, si on veut
profiter des libéralités : il n y a point de condition qui ne
gêne en quelque manière la volonté, la liberté, puisque
la plupart roulent sur des choses que l’on ne feroit pas
volontiers , si elles n’étoient ordonnées. A ussi, ce n’est pas
ce qu’il faut examiner ; le légataire est obligé de captiver sa
volonté ou ses goûts, pour suivre exactement les termes de
la condition qui lui est imposée, et qu’il peut exécuter. La
loi n’excepte que tout ce qui seroit déshonorant par rap
port à l’état et à la condition de la personne à laquelle la
condition a été imposée; mais toutes celles qui n’ont rien
de contraire aux lois ni aux bonnes mœurs , ni m ê m e à
la liberté, dans le sens des lois, doivent être strictement
exécutées.
Et pourquoi s’appesantir sur une chose aussi simple ? Ne
dépend-il pas de celui qui donne, d’imposer à ses libéra
lités les conditions qu’il lui plaît ?
O r, le généra] d’ Orvilliersavoit subordonné le legs qu’il
faisoit, tant à Bélanger qu’à Calliste , à la condition qu’ils
seroicnt à son service à 'Cheure de sa niort.
Bélanger convient qu’il n’étoit pas au service du général
d’ Orvillicrs à l’heure de son décès; il est même reconnu
qu’il avoit cessé d’être auprès de son m aître, plus d’un
an avant sa mort. Il n’a donc pas rempli la condition sous
laquelle le legs lui avoit été fait ; il est donc non recevablc
dans sa demande en délivrance de ce legs.
Tout ce qui a été dit, écrit et imprimé de la part de
Bélanger, dans le cours de l'instruction, se réduit à pré-
�( 19 )
tendre que le citoyen de G ivry l’avoit renvoyé, lorsqu’il
conduisit son oncle à Moulins.
Une preuve que le citoyen de G ivry ne l’a pas renvoyé,
c’est qu’il a accompagné lui-même son maître à Moulins,
qu’il a resté huit jours auprès de lu i, et a voulu ensuite
s’en séparer pour aller rejoindre ses enfans qui étoient à
Paris.
Si son départ n’avoit pas été volontaire, si le citoyen
de G ivry lui avoit fait violence ou l'eût renvoyé de sa
maison } comment n’auroit-il pas réclamé? Comment ex
cuser son abandon d'un ancien m aître, d’un homme si
respectable, lorsqu’il n’existe de sa part ni plainte, ni ré
clamation, non seulement à lépoque où il a quitté le service
du général, mais encore lorsqu'on voit qu’il a gardé le
silence pendant sept années entières, après la mort de
M. d’Orvilliers?
De quel droit, d’ailleurs, le citoyen de G ivry auroit-il
renvoyé un ancien domestique qui ne dépendoit pas de
lu i, et qui étoit attaché au service de son oncle ?
Lors du départ du citoyen de Givry pour Paris, les
lettres que la famille avoîent reçues, faisoient supposer que
M. d’Orvilliers étoit dans un état d'affaiblissement absolu;
il n’avoit que des infirmités qui sont la suite d’ un grand
âge, et qui s’ étoient accrues par une attaque récente : mais
il avoit encore ses facultés intellectuelles, et il se trouvoit
dans un état tel qu’il put supporter sans danger le voyage
de Moulins; qu’ il a survécu plus d’un an; qu’il a toujours
joui du libre exercice de ses droits, et que sa famille n’a
fait aucune démarche pour provoquer son interdiction.
Il est mort en possession de sou état, au milieu de sa
c; 2
�famille; et en supposant que Bélanger eût été renvoyé,
il ne pourroit pas l’imputer au citoyen de G ivry , mais à
M. d’Orvilliers lui-même., qui n’auroit plus voulu de ses
services.
Ainsi, ou le citoyen Bélanger s’est retiré volontairement
d’auprès du général cVOrvilliers, et, dans ce cas, il n’a
rien à prétendre; ou il a été renvoyé, et alors il l’a été par
son maître : il n’a donc point rempli la condition sous la
quelle le legs lui avoit été fait.
L e seul motif du jugement que le citoyen de G ivry ait
intérêt de discuter, est celui qui paroît avoir déterminé
les premiers juges à ordonner l’exécution du legs. On y
d it, « que le citoyen Hugon de G ivry a fait des incul« pations graves à Bélanger; que p arla procuration des
« autres cohéritiers, il s’est fait autoriser particulièrement
« à renvoyer les domestiques; on en conclut qu’il a fourni
« au moins de violentes -présomptions que c’étoit lui qui
u avoit renvoyé Bélanger du service de M. d’Orvilliers.
On ajoute, « que si l’on considère l’intention manifestée
« par M. d’Orvilliers, de finir ses jours à St. M agloire, où
« il vouloit être enterré,* qu’il étoit de la connoissance de
« M. d’ Orvilliers que Bélanger étoit établi à Paris, et y
« avoit sa famille; que ce n’est pas M. d’Orvilliers qu ia
« quitté volontairement Paris pour venir à Moulins, mais
« que c’est plutôt la volonté seule du citoyen de G ivry qui
« a opéré cette translation dans sa maison; que dès-lors le
« défaut d’accomplissement de la condition imposée ¿\
« Bélanger, ne peut lui être reproché. Non seulement,
« disent les premiers juges, la condition n’est pas restée la
« même par le fait, non du testateur , mais de l’héritier,
�- O 'J
( 21 )
« mais encore il n5a pas été au pouvoir du légataire de
« l’accomplir, puisque le testateur , transféré dans une
« maison autre que la sienne, n’a plus eu dès-lors de domes« tiques particuliers pour le servir, mais bien ceux seule^
« ment du maître de cette maison. Les domestiques du
« testateur y eussent-ils môme resté, ils y seroient alors
« devenus ceux de la maison et non du testateur, ce qui
« n’étoit ni dans l’esprit ni dans la lettre du testament. »
E t sur ce fondement, la délivrance du legs est faite à
Bélanger !
Est-il donc au pouvoir des juges de changer ou modifier
les conditions apposées par un testateur au legs qu’il lui
' plaît de faire ? lestamentum estjusla voluntatis sententia
de eo quodpost mortem sucim jieri velit. Les juges ne
peuvent y porter la plus légère atteinte, par des inter
prétations capables d'altérer la volonté, l’expression lit
térale du vœu du testateur; point de considération qui
puisse dispenser le légataire de s’y soumettre.
S’il étoit permis de s’arrêter à des considérations, elles
seroient toutes, dans la thèse, agitées contre le domes
tique. Il est clair que le testateur ne l’a gratifié que dans
la vue des services qui lui seroient rendus dans les derniers temps; c’est-à-d ire, dans les plus pénibles de sa
vie : la volonté du testateur est d’autant plus formélle
ic i, qu’il a employé cette expression, à Theure de ma
mort.
Ces principes, qui puisent leur source dans la saine
raison , comme dans les lois, ne sauraient présenter aucun
doute, ni être atténués par les efforts d'aucun interprète;
autrement les conditions seroient toujours éludées, et
�It.iJ
( 22 )
jamais domestique n'auroit encouru la perte de son legs ;
il ne inanqueroit jamais de subterfuge et de faux-fuyant
pour s’afiranchir de toutes celles attachées aux libéralités
qui lui étoient destinées. Il y a plus, le maître dont le
but auroit été de s’attacher un domestique jusqu’à la
fin de ses jours, seroit abusé dans le motif de sa sensi
bilité.
Aucuns exemples dans la jurisprudence, n’autorisent
l’infraction aux lois dont se plaint le citoyen Hugon de
G ivry ; et le danger de cette espèce d’arbitraire ne peut
manquer d’être proscrit.
L e résultat de tout ce que les juges ont v u , est une
violente présomption.
E t quoi! les présomptions des juges; c’e s t-à -d ire ,
l’ouvrage de leur imagination, l’opinion imparfaite ( car
des présomptions ne sont rien autre chose ), qu’ils auront
pris sur un point de fait, seront substitués à la volonté
écrite d’un testateur, convertiront un legs conditionnel
en un legs pur et simple? N on, ce seroit la première
fois qu’un tel système seroit consacré.
Mais y a-t-il même quelques raisons de présumer dans
les motifs que contient le jugement ?
Des inculpations dans un mémoire et dans des plaidoi
ries! En bonne logique, on ne voit point le rapport qu’il
peut y avoir entre l’aigreur plus ou moins fondée, qui a
pu s’introduire dans un procès en l’an 8 , et la sortie d’un
domestique en 179 1 , d’auprès de son maître mort en 1792.
M aison ne dit pas en quoi consistent ces inculpations!
Mais le jugement lui-même a prononcé la suppression
d’un alinéa tout entier d’un mémoire de Bélanger, comme
�( 23 )
injurieux et diffamant; et le citoyen Hugon de G iv ry ,
traité ainsi par l’ancien domestique de son oncle, n'aura
pu repousser les injures, sans qu’on trouve dans sa juste
défense, un titre contre lui !
Quant à la procuration , elle ne prouve rien , et les
juges en font complètement l’aveu, puisqu’ils n’y trouvent
encore que des présomptions y mais elle doit démontrer
à la justice la circonspection et la prudence du citoyen
plugon de G iv ry , qu i, en se rendant auprès de son oncle,
âgé et malade , craignoit de le trouver dans un état qui ne
lui permettroit plus de s’occuper de sa maison, de ses
affaires, et l’obligeroit, lui parent, à faire usage de cette
autorité qui naturellement devoit appartenir à lui comme
à ses cohéritiers.
Il n’en fut point ainsi: le général d’ Orvilliers n'étoit pas
aussi malade qu’on l’avoit craint, puisqu’il entreprit et
soutint parfaitement le voyage de Paris î\ Moulins; il se
détermina librement et volontairement à se rendre dans
sa famille; et n’étoit-ce pas là qu’il étoit sûr de trouver
ces soins attentifs qui sont une nécessité dans la vieillesse,
ces prévenances qui soulagent les m aux, ce concours d’amis
tendres qui préservent des dangers de la solitude?
A rrivé à Moulins, il a continué à jouir de la
de sa raison et de son état.
Le citoyen llugon de Givry n’eut donc à se permettre
aucun usage de la procuration ; et en parlant le langage
du d ro it, quelle pouvoit être la valeur d’une telle procu
ration pendant la vie du général d’Orvilliers ? Ses parens
qui n’avoientaucun pouvoir, en pouvoient-ils conférer?
Celui qui avoit reçu ces pouvoirs, avoit-il un moyeu légal
�( 24 )
d’en faire usage ? Cette procuration n’étoit qu’un acte de
prévoyance , destiné à rester sans exécution, si l’événe
ment ne le l’endoit nécessaire, et un scrupule du citoyen
de G ivry sur sa mission.
Les présomptions du tribunal dont est appel, sont une
injure à la m é m o ir e du général d’Orvilliers, et au respect
que ses parens ne cessèrent de lui porter. Elles supposent,
ou que ses facultés intellectuelles l’avoient abandonné, ou
que ses parens usoient de contrainte envers lu i, et contrarioieut ses volontés.
E t quand ce seroit le citoyen Hugon de Givry qui auroit
renvoyé Bélanger, seroit-ce sans l’aveu, ou contre la vo
lonté de son oncle ? voilà encore ce qu’il au ro it fallu
établir. Bélanger en a bien senti la nécessité, puisqu’il a
prétendu qu’il s’étoit transporté chez le juge de p aix, lors
de son départ de Moulins, mais que ce juge étoit absent,
et que tous ceux qui auroient pu le remplacer, lui avoient
refusé leur ministère.
A p rès huit années de silence, une allégation de cette
espèce n’est que ridicule.
Et ce juge de paix absent! Bélanger étoit donc bien
pressé de quitter M oulins, s’il n’a pii attendre son retour.
Sa démarche au rcsle prouveroit-elle ce que le juge de
paix n’a pas constaté ?
Croira-t-on que c’est au moment où la famille du gé
néral d’Orvilliers remplit vis-à-vis de ce respectable parent
ce quelle regarde comme son premier devoir, Je recueillir
dans son sein, quelle va répandre l’allliction dans son
ûme , par l'expulsion d’un domestique auquel il étoit
attaché ?
Le
�¿o /
( 25 y
Les faits, au reste, démentent toutes les assertions qui
servent de base au jugement.
Bélanger est p rti volontairement ; il n’a plus voulu
rester auprès de son m aître, quand il a v,u qu'il falloit'le
servir et vivre loin de Paris; il a préféré retourner dans
la capitale, où sa famille et scs habitudes Tattachoient. Si
on ne lui en fait pas un reproche, au moins ne doit-il
pas soutenir que la condition du legs se soit trouvée
accomplie ?
Les premiers juges sont tombés dans une contradiction
assez remarquable.
L a présomption que Bélanger a été renvoyé par le cit.
Hugon de G iv ry , les conduit à la conséquence, que Bé
langer n’est sorti que malgré lut et malgré son m aître, et
qu’alors c’est comme s’il n’avoit jamais quitté le sei'vice du
testateur. Puis oubliant cette conséquence, ils disent qu’ il
étoit à la connoissance du testateur, que Bélanger étoit
établi à Paris , et y avoit sa famille ; ce qui signifie appa
remment que l’intention étoit dele gratifier, quand même
il auroit cessé de demeurer avec le testateur.
A insi, nécessité avouée de l’accomplissement de la con
dition , puisqu’ils admettent pour équivalent la prétendue
expulsion de Bélanger , qui lui a ôté le pouvoir de s’y con
form er, et dispense absolue de la condition, par la vo
lonté présumée du testaleur, de ne lui avoir pas imposé
cette obligation : c’est ainsi qu’on raisonne , quand on
présume.
XiCS premiers juges disent encore, «soit que l’on consi« dère l’intention manifestée par le testateur , dans son
« testament, de finir scs jours à Paris , puisqu'il vouloit
D
�>
•\I
‘
( 2 6 }
« y être enterré, soit que l’on considère qu’il étoit à sa
« connoissance que Bélanger y étoit établi 3 et y avoit sa
« famille. »
Rien de plus curieux que ces considérations; elles veu
lent d ire, sans doute, qüe pour l’accomplissement de la
condition , le général d’ Orvilliers s étoit obligé de mourir
à P aris, et de rester attaché aux volontés de son domes
tique sur son domicile.
On doit abandonner à sa propre valeur un système qui
tendroit à faire d’un testament un titre contre le testateur.
Un testament ne date que de la mort ; ce n’est qu’à ce
moment qu’il prend son existence. Il n’est pas permis aux
juges d’examiner ce qu’il a plu au testateur de faire pen
dant sa vie : sa liberté étoit entière; et si son intention eût
été de dispenser son domestique de la condition, à raison
de son changement de domicile, il n’auroit pas manqué
de s’exprimer sur ce point.
Une erreur monstrueuse forme la base de toute cette
discussion , en ce que Bélanger et les juges considèrent les
dispositions qu’il s’agit d’exécuter, comme étant de 1787 ,
tandis qu’elles n’ont d’existence que du jour du décès.
L ’instrument seul est de cette époque; et sa date, qui n’a
de propriété que pour valider l’acte en sa forme , est abso
lument nulle et sans cflct au fond.
Et si M. d'Orvilliers eût vécu quinze ans encore, Bé
langer seroit donc venu, s'appuyant sur la date de 17 8 7 ,
prétendre également au legs, après cette longue cessation
de serv ices ?
il étoit, d it-o n , à la connoissance du testateur, que
Bélanger étoit établi à Paris, et y ayoitsa famille,
�( *7 )■
Mais connoît-on, ou conçoit-on, pour un domestique,
une autre existence que son service auprès de son maître?
et ce service n’est-il pas négatif de tous établissemens ?
Ensuite, la connoissance du testateur que Bélanger avoit
sa famille à P aris, n’oifre-t-elle pas une conséquence toute
contraire à celle que le tribunal en a tirée? C’est préci
sément parce qu’une famille est un juste titre d'attachement
et de prédilection, parce que M. d’Ürvilliers a pu craindre
qiie Bélanger préférât ses parens à son m aître, qu’il lui
a imposé la condition d’être à son service à L'heure de sa
mort j et quand M . d’ Orvilliers vouloit se rendre auprès
de ses parens, c’étoit sans contredit à Bélanger à faire le
sacrifice de ses affections : et parce que le testateur avoit
connoissance de cette particularité, la condition n’en est
que plus forte.
Les premiers juges disent encore que ce n’est pas M. d’Or
villiers, testateur, qui a quitté Paris volontairement, mais
que c’est plutôt la volonté du citoyen de Givry qui a opéré
seule cette translation.
Les premiers juges ajoutent ici présomption sur pré
somption , et ne se sont pas aperçus qu’ils lançoient des
traits injurieux à la famille et à la mémoire du général
;d’ Orvilliers : ce dernier est mort jouissant de la plénitude
de son état civil; tout ce qu’il a fait, il a voulu le faire;
et le livre de sa conduite personnelle et privée n’est ouvert
pour personne. Quant à ses parens, loin de contrarier les
volontés d’un onde qu’ils n’ont cessé de respecter, loin de
le contraindre dans aucune démarche, loin de l’outrager
par des privations, le moindre de ses désirs fut toujours
une loi pour eux.
D 2
�*
(28)
E n fin , porte encore le jugement, « par son séjour dans
« la maison d’autrui, le général d’Orvilliers est présumé
a n’avoir plus eu de domestiques à son service. »
* Es t-il présumable que dans cet état de vieillesse et de
maladie, qui rend encore les soins particuliers plus né
cessaires, et lorsque la fortune lui en laissoit le pouvoir,
le général d’ Orvilliers ait été privé de domestiques? Mais
ce qui dissipe encore les présomptions du tribunal de l’Allier, c’est la vérité constante et à la connoissance de tout
le m onde, à Moulins, qu’indépendamment de six domes
tiques qui avoient toujours composé la maison du citoyen
Hugon de G ivry, le général d’ Orvilliers a été se rv i, jus
qu’à sa m ort, par deux domestiques à ses gages et de son
choix, qui ne le quittoient ni le jour ni la nuit, dans le
même appartement qu’occupe aujourd’ hui et depuis plus
de six ans, la belle-mère du citoyen de G ivry, et que rien
n’a été négligé pour rendre digne de lui la retraite où il
a terminé sa vie gloi’ieuse.
Le citoyen Hugon de G ivry se bornera à ces réflexions
sur la disposition du jugement qui le concerne. On ne v o it,
dans scs motifs, que des efforts maladroits pour justifier
line disposition que la loi réprouve; et ce n’est point avec
des précomptions, des allégations ou des chimères, qu’on
peut effacer , combattre ou altérer un titre authentique.
il reste à examiner les grieis proposés par Bélanger,
contre ce même jugement.
On se rappelle que Bélanger s’en est rendu appelant,
premièrement eu ce qu’ il prononçoit la suppression d’ un
alinéa de son mémoire, comme injurieux et diffamant.
Le citoyen llugon de Givry a transcrit plus haut cet
�C 29 )
alinéa ; Bélanger a eu l’audace d’accuser le neveu, le
disciple du général d’Orvilliers, d’avoir cherché à abréger
les jours de ce vieillard vénérable, sa 7?s se compromettre aux y eu x de la justice.
Cette horrible diffamation , qui méritoit une peine
plus sévère, et qu’il est cruel de relever, est d’autant
plus maladroite qu’on ne commet pas de crime sans
intérêt. E t quel intérêt avoit donc le citoyen Hugon
de G iv iy , de chercher à abréger les jours d’un oncle
dont toute la fortune consistoit en une rente viagère
de 18,000 francs?
Mais ce seroit s’avilir que de descendre à une justifi
cation ; le citoyen de G ivry doit se contenter de livrer
l'auteur de cette monstrueuse accusation, à la justice et
à la sévérité du tribunal.
Bélanger se plaint encore de ce que le jugement dont
est appel, ne lui a point adjugé de dornmages-intérêts.
Quel tort a-t-il donc souffert ? n’éloit-il pas assez heu
reux d’avoir obtenu la délivrance d’un legs conditionnel,
sans avoir rempli la condition? N ’étoit-il pas suffisam
ment dédommagé parles intérêts de ce même legs, qui
lui sont alloués depuis la sommation par lui faite de re
présenter le testament ?
Bélanger se récrie encore de ce que le citoyen Hugon
de G iviy n’a été condamné qu’au payement de sa por
tion du legs; mais ignore-l-il qu’un héritier n’est jamais
tenu au payement des legs, que dans la proportion de
son amendement? Le citoyen de Givry lui avoit désigné
la portion qu’ il nmendoit dans la succession de son oncle;
il lui avoit indiqué Je nombre, la qualité et demeure de
�( 30 )
ses autres cohéritiers. Bélanger n’avoit point d’action hy
pothécaire sur la succession de M. d’ Orvilliers; chacun des
héritiers ne pouvoit donc être tenu que personnellement
pour sa portion, en supposant que la demande fût fondée.
E n fin , Bélanger regarde comme déni de justice, le
défaut d’indication précise de la quotité des condam
nations que devoit supporter le citoyen de Givry.
Ce dernier grief est inexplicable. On n’indique ordi
nairement cette quotité qu’en termes généraux, et pour
la part et portion qu’amende le cohéritier contre lequel
on dirige les poursuites. Bélanger connoissoit en quoi
consistoit l'amendement du citoyen de G ivry, qui étoit
un sixième; il n’étoit donc nullement besoin d’une plus
ample explication.
Par conseil, P A G E S , jurisconsulte .
B R U N , avoué.
A Riom , de l’imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. An 9.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Hugon de Givry, Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
legs
legs conditionnels
domestiques
diffamation
diffusion du factum
censure
volonté du testateur
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude Hugon de Givry, héritier pour une sixieme portion de défunt Louis Guillouet d'Orvilliers, ancien lieutenant-général des armées navales, intimé et appelant ; Contre Simon Bélanger, ancien cuisinier de feu Louis Guillouet d'Orvilliers, habitant de la ville de Paris, appelant d'un jugement rendu au ci-devant tribunal civil de l'Allier, le 6 germinal an 8 ; et intimé.
Table Godemel : Legs : 2. le légataire peut-il exiger le paiement d’un legs conditionnel, lorsque la condition imposée n’a pas été remplie par lui ? en d’autres termes, un ancien domestique du testateur peut-il réclamer le legs que lui a fait son maître, autant qu’il sera à son service à l’heure de sa mort, s’il avait quitté ce service avant cette époque ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1790-An 9
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1026
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53124/BCU_Factums_G1026.jpg
Censure
diffamation
diffusion du factum
domestiques
legs
legs conditionnels
volonté du testateur
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53200/BCU_Factums_G1311.pdf
1b40ecb078869d8abdfa6ec5c1addfa6
PDF Text
Text
MEMOIRE
D’APPEL
SEANTE
EN R É P O N S E ,
A RIOM.
POUR
P
- An t o i n e - U r b a i n C A P E L L E ,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
Saint - C o n s ta n t , intim é;
i e r r e
CONTRE
Les
A
d m i n i s t r a t e u r s
d u
B
u r e a u
de
de la ville d’Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de Saint-Flour , le 20 floréal an I I .
b i e n f a i s a n c e
L es administrateurs du bureau de bienfaisance de là
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
�( 2 )
80000 francs , fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricorde de cette ville. Ils seront lus avec intérêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
Mais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordi’cs qui l’accompagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en dém ontrer
les inconvéniens, comme l ’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout entière, c’est au gouvernem ent,
qu’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’etre u tile,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
Être permanentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais linissent presque toujours par dégé
nérer.
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’ il rend
hommage aux vertus et h. la piété de ces dames respec
tables qui trou voient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoieut la chaumière du p a u v r e , soulageoient ses
�(3)
besoins, et lui donnoiént cet marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre respect, qui fut créé pour notre bonheur!
femmes vertueuses et tendres, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion? par qui avez-vous été remplacées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour eu obtenir
la délivrance?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orotliée Cabridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rillac dans le
courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de conuoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-Urbain C a p clle , fils aîné du sieur C apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent à la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent à une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 fr ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en usufruit, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�■ U ii
(4)
plusieurs immeubles en toute p ro p rié té , dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seu l, de la seconde classe,
et le plus considérable de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
«c P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« communiqués par feu M . Cabridens, mon fr è r e , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uvre de la miséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ uvre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funtanges est
« la su p érieu re, la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétienne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’A u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ uvre que 60000 fr. ; qu’il
« sei’a em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le revenu de ladite somme
« de 20000 fr. peut le com porter ; et que le revenu de
«
«
«
«
«
«
la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r .,
soit em ployé à assister et soulager le surplus des pauvres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
léguée, aux conditions mentionnées, soit payée auxdites dames administrant ladite Œ uvi’e, sur la quittance
�¿1> i
(5)
« qui en sera fournie par ladite dame de F ontanges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veu x et entends qu’au cas où ladite Œ uvre de la
« miséricorde v în t , dans le tem ps, à être réunie ù l’hô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je veux-, d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u vi'e, Ja sse
« retout à mon héritier. »
Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ uvre de la misé
ricorde ,• qui étoit administrée par des dames pieuses,
mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cétte même ville
qu’en 1777.
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l ’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C a y la , qui étoit chargé
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
de la succession, jusqu’à ce que l ’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e prix des ventes et des revenus de la succession devoit
•être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquitte
ment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Los legs de première classe, autres que celui qui fait
l’objet de la dem ande, devoient être payés dans l’année
du décès. L e prix du m obilier fut insuffisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�,r
.
<■6 )
' I l est probable qu’en 1789, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. 11 est au moins certain que cette Œ uvre n’a jamais
réclamé ni formé aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur G ayla, exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y lit môme
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u rillac, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque lé sieur A ntoine Capelle, père et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu , se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pou voit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sceurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit caduc, et beau
coup d’autres étoicut également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieur Gayla père vint à décé
der. Son iils, en vertu du môme testament, prit la jouis
sance des biens, qu’il a gardée jusqu’en 1796. Il n’est pas
exact de dire qu’il remit l’hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en clu rg e r; et ce n’est
(*) C ’est une erreur qui s’est glissée dans le» copies : il n’est point question
lie Sœuri-grises dans le testament,
�4 ^
i l )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, Voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit la succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Il est d it, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
(c et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse Être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant pou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« pour Tintérêt de son h éritier, et encore sans qu’il soit
« tenu de payer aux légataires aucun intérêt de leurs
« legs. »
lies employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait à une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alicu , pour le payement de cette somme
de 80000 ii'. L e 8 thermidor même année, ils firent un
nouveau commandement*, e t, sur l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Capelle avoit encore à discuter contre
)
�( 8 )
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulut faire de cette somme l’em ploi auquel elle étoit
destinée,
Bientôt après, l’hospice d’A urillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle.
Cette prétention ne tendoit qu’à faille exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice 11’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brum aire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres furent nom^
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer lo
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
miséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateursy disent que cette Œ uvre n’a jamais été supprimée x
qu’elle n’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749»
l’CEuvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespatentes.
L e cas p ré v u par la testatrice, p o u r le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r ., n’étoit pas a rriv é ; le
Ico-s devoit donc être versé dans leurs mains,
T els sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
citation devant le tribunal d’A u rillac. Le sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. E t comme on a paru
im prouver la récusation , il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D clorlz-L abarth e, l’un des juges, est membre
�( 9 )
«lu bureau de bienfaisance ; les sieurs L a val et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même v ille ; ils a voient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur Destaing , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julheset V e rn io ls, l’un étoit le défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u ïilla c , qui ne pouvoient remplacer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l’intérêt de tous
les liabitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : en
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
Ce jugement fut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse suivan t, les administrateurs citèrent euxmêmes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
6?étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou-;
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u rilla c, le legs dont il s’agit, et à en pour
suivre la délivrance devant les tribunaux; 20. d’un arrêté
B
�l-..
( 1 0 }
du conseil de préfecture, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les trib un aux, les poursuites com
mencées contre le sieur Gapelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S ain t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i° . Suivant eux , les legs faits pour cause pie devoient
recevoir leur exécu tio n , et être jugés favorablement.
Xi’incnpacité du légataire ne rend pas même nul le legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner
l’emO
ploi et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des legs , et
l’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
• 5°. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u vre de la m iséricorde, comme corps et communauté;
mais il fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de ¿'Œ uvre de la miséricorde >
�44&
( 11 )
cela n’a été que pour désigner l’espèce et la qualité- des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit eu
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n’a jamais été réunie i l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile, n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde; mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été conservées.
8°. L a condition du retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’avoit p révu e; et, en matièi’e favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. O n ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les p révo ir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’une grande révolution ,
surtout lorsque tout est rentré dans la ligue prescrite par
le fondateur.
io °. La réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges, et court tous les risques :
B a
�V ,H
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
Mes périt dom iho.
pertes considérables.
i i °. L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quarte falcidie. Elle n’a lieu qu’au profit
de l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n’a p;:s lieu pour les
legs pies. 11 im pliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuffisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son cô té, le sieur Capelle soutint, i° . que le legs fuit
u l’Œ uvre de la m iséricorde étoit cadu c, soit lors de sa
confection, soit au moment de fou vertu re de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation, aucune dotation, aucun établisse-:
ment avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée'
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établisseinens,*
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations
associations et hospices: d’où il résultoit que le legs auroit
cessé d’être e x igib le, du m oment que l'intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le coniioit exclusi
vem ent; et alors la réversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. L e patrimoine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g en re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée héri-
�4 4 /
( 13 )
Jtièrc par son m a ri, de qui elle tenoit la plu s'grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Ca pelle , son petit-neveu et
son liéritier présom ptif; et la dame Galieu dcvoit moins
se considérer comme p ro p rié ta ire, que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
etoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères m acédons, ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Gapelle
ne pou voit être tenu que d’en payer annuellement l’in
térêt.
6°. E n pays de droit é c r it, l'héritier institué ou
ab intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 174 9 , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à. acheter des rentes
sur l’état ; et le sieur C apelle, en ce cas, pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du leg s, en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
La cause portée en cet état au tribunal de Saint-Flour ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement con
tradictoire , qui déclare le legs fait par Françoise-D oro
thée de Cabridens, veuve de Geraud Galieu , à l’Œ uvrc
de la miséricorde de la ville d’ /Yurillae, par son testa
ment du 4 octobre i j 85 , nul et de nul eilèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette même ville non - recevables dans la
�* VU w
■ ■
t 14 ^
demande par eux form ée contre le sieur C ap elle, héri
tier de la dame G a lie u , en délivrance de ce môme
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
« i° . D ’après la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
P ar une exception néanmoins établie par la
jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
pie , les legs pieux faits au profit des communautés
illicites étaient appliqués aux pauvres ou autres
œuvres p ie s, et la disposition, même imparfaite ,
n’empêclioit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. M ais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1 7 3 5 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’édit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p ie , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
cc 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui ren ou cc 2 ° .
«
«
«
cc
cc
cc
cc
cc
a
cc
cc
«
cc
«
a
te
ce
«
velle les défenses de form er aucun établissement
de corps ou communauté quelconque , sans l’obtention préalable de lettres-patentes, sont nommément
compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u
nautés sous prétexte d’hospiçes. Par une disposition
rigoureuse et nouvelle , qui ajoute à celle des précédenies lo is , il est défendu de fonder de tels établis-
�/
44Ÿ'
( x5 )
« semens par disposition de dernière Volonté , quand
K même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
« des lettres-patentes.
« 4 0. L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
« dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
K que l’homologation du parlement pour fondation de
« messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pau« vres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
« d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut i*aiK sonnablement recevoir sou application lorsque la
« disposition est faite à un corps ou communauté non« approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
« contradiction avec l’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
« pleine exécution de l’article 1 e1' . , non - seulement
« déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
« mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
« sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
k faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
« sans qu’il soit besoin de lettres de rescision, nonobs« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné- à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
« 5°. Adm ettre l’exception portée en l’article 3, au
« profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
« moyen indirect de fonder l’éellem ent, contre le vœu
« de la lo i, des établissemens qui , quoique déjà exis« tans, n’auroient eu jusque-là qu’une existence éphé« m è re , faute de moyens suflisans.
« 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition infî—
« niment rigoureuse, veut que les enfaus ou héritiers
�( i6 )'
présomptifs , du vivan t même de ceux qui ont fait
les' dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
envoyer en possession , même avec restitution de fruit*?,
du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
de l’édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis
sement non-approuvé , en appliquoit le bénéfice aux
hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
'cause pie.
« 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774
1780 ,
qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela
tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger sui
vant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
fait à une corporation ou communauté non légale
ment établie , à l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
d’A u rilla c, qui n’avoit point obtenu de lettrcs-pntcntes.
S’il est dit que le legs a été lait aux pauvres de l’Œ uvre
de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-i
tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
des pauvres h laqitelle la testatrice entendoit faire du
bien. L ’Œ uvre de la miséricorde ayoit tous les carac
tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�44°)
C *7 )
« communauté , puisqu’elle uvoit une supérieure, une
« assistante , un receveur-, elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, ïŒ u v r e de la miséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister ; c’est l’Œ uvre
« que la testa.trice avoit envisagée, plus encore que les
■
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau* vres, eeelésia&tiques et séculiers, qu’elle avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l ’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à perpétuité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ uvre à l’hôpital
v g é n é ra l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses
v ne sont applicables ni aux pauvres in dividu els, tels
« "que les pauvres honteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l’Œ u vre de la m isé« ricord e, considérées comme individus.
« 90. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
« pour cette interprétation av«c l’arrêté des consuls,
« q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it , l’a qualifié de legs f a it à tQ iu v re
« de la m iséricorde , quoique le gouvernem ent ait eu
<c sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de TŒ uvre de la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
« ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres-patentes, l’a considéré comme légalement
C
�c
1
8
}
« représenté, par suite des lois des 16 vendémiaire et 7
« frim aii’e an cinq,
« Cet arrête d’ailleurs ne préjuge rien sur l’ invalidité
« ou la validité du legs, puisqu’en cas de contestation
« il renvoie les parties devant les tribunaux,
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana« lisees, le legs fait a l’Œ uvre de la miséricorde d’A u —
« rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;.
a e t, d’après l ’article 10 de l’édit de 174g , l’héritier seul'
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs, »
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
interjeté appel de ce jugement , et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Càpelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs ; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à'
propos de relëver quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
1
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpitaî
d’A u rillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, comme
l’ont prétendu lfcs appelans , on doit d ir e , d’après la
notox-iété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richement d oté, proportionnellem ent
à la population de la ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde. L e bailliage de V ie
n’auroit pas été compétent pour connoître de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas. •
L ’Œ uvre de la miséricorde n’étoit pas même une cor
poration. O n se souvient avec rcconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées daûs les villes p rin ci-
�( 19 )
pales. Les dames charitables qui en faisoient partie for«
moient une société particulière , et parfaitement lib r e ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le, n’ étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ieu x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m ê m e , faire respecter sa mémoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne peut l’espérer qu’autant
q u ’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernement.
' L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune de la tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelie
son neveu, père de l’intim é, et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelie p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelie
iils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœ ur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
i
-A- vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou, de la Bartassière, et du fief de Clavièx*es.
Ces deux premiers domaines ne s’élèvent point à une
C a
\
�1^ 5Z
!
I
¡
1
f.
( 20 )
somme de 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im píoprement de fief, puisqu’il ne l’a jamais été* ne vaut pas^
la même somme. Il n’a fait aucune disposition , et tout
ce qu’ont dit les appelans page 9 de leur m ém oire, ne
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
Pourquoi dire encore que la dame Galieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proches : elle n’en avoit
aucun dans la ville d’A u r illa c , qui fût au même degré*.
L e sieur Capelle p è r e , neveu du sieur Galieu , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la n atu re, pour se ser
v ir des expressions des appelans, appeloient personnellement le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G rialou , qui faisoitr partie de sefr
propriétés, et qui ydans l’état actuel , ne produit pas 800 fïv
de rente.
• A la page 12 du m ém oire, on prétend que l’Œ uvrede la miséricorde de la ville de Figeac avoit été payée d ti
legs porté par le testament , et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac avoient des lettres-*
patentes. Mais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que lrŒ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de filles d e l’éta»
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d*un siècle, jouissoit d’une existence légale, et envoyoifc
des sœurs de son ordre dans une foule de villes.
■ L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14» que-madame de Fontanges^se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, avoit fait des dé-»
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�(
21
)
absolument faux et controuvé : on peut m ême-assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G alieu , la
société des Dames de la miséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fait aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n’ont été remis au fils qu’après la mort du
p è re, et il n’en jouit que depuis 1795. Si le sieur Capelle
père s’opposa r en 179.2, à la vente de quelques immeu
bles , c’est que déjà le sieur Cayla en avoit vendu pour
58ooo assignats, dont il n’a fait aucun usage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papier-monnoie.
Les membres du bureau de bienfaisance préten dent,
page 19 , qu’ils ne peuvent offrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienfaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
charité ,.de leur piété : les quêtes , les aumônes , les dons
m anuels, doivent com poserprincipalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
Punique but de leur établissement.
_ Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le poin t de vue de l’intérêt p u b lic ;
car s’il faut en croire les adm inistrateurs, qui paroissent
•»voir des vu es,élevées, lewr cause est une question do
droit public.
�4M
' * «'
( 22 )
M a is com m ent Tordre et le droit public seroient-ils
en suspens ( pour se servir des ternies des appelans ) ,
parce que le legs de 80000 fr. fait à l’CEuvre de la misé
ricorde seroit contesté ?
Q u’étoit l’Œ uvre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établisseinens étoient bornés à certains lieux et à
certains temps-, ils n’entroient point dans le système de
l’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliers, lorsqu’il s’agissoit de remédier aux maux
d’une disette , d’une épidém ie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations momentanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portant, parce
qu’elles avoient des vues vraiment utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrement volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s, des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible q u e , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés ? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; c’est toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cessé, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’écrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�4 X*
C 23 )
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution ; et le'
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment,, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu l’empêcher pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se voir1
cc privées de leur fortune , par les dispositions que les
« hommes ont à form er des établissemens nouveaux qui
K leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos« térité avec le titre de fondateurs. L e m eilleur usage
w que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
a im portante, est de concilier autant qu’il est possible
cc l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
O u aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit •, mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit in com pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur m ém oire l’arrêté des consuls, en date
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. L ’article 5 de
cet arrêté p o rte , « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des-héritiers, les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablem ent
« autoriser dans les formes voulues par les précédens
« arrêtés. »
�( H 3
Il est bien é v id e n t, d’après cet article , que l ’arrêté ,
comme l’ont dit les premiers ju ges, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
<le renvoyer devant les .tribunaux, pour prononcer sur
\cs contestations qui pouvoient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvernem ent, comme on vent le prétendre,
eût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’emploi en cas que
l ’on reçoive.
I l en est de cet a rrê té ,* comme il en étoit
»
autrefois des lettres de bénéfice d’inventaire ou des let
tres de restitution.. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition-;
ncllem ent une succession, soit pour se pourvoir contre
y 11 engagement indiscrètement contracté. M ais pour
q u ’elles eussent leur exécu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les trib u n a u x , qui n’en prononcoient l'enté
rinement qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs,. A u roit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non communiquée , un arrêté qui les autorise
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en conuoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les tribunaux , en cas
de contestation , si le legs doit être ou non acquitté. T e lle
est
�¿ fit
C *5 )
est la seule idée raisonnable, le seul point dè vue s'oua
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoiei.it une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugnerait à tous les prin
cipes de liberté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le mérite de la;
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit?
de réform er les actes du gouvernem en t, que fce n’est
point à lu i à diriger le gouvernail de Tétùt. Ces expres-1
sions im propres sont absolument vides de sens. 11 faudrait1
au moins rayer l ’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vaitile gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
le droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il1
s-agit, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter!
Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce q u i1
a rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice», la quotité du legs
par exem ple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour i*ecevôir comme pour demander fait partie'1
de ce même droit publie.
Il est assez difficile de com prendre ce qùé les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. Ori ne conteste*
pas la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seixVîehf^
confiés depuis leur création. O u sait que le gou vern em en t1
D
-K |
1
�C 26 )
seul s’est réservi le droit de les y autoriser , et ce n’est pas
ce que les juges de Saint-Flour ont examiné. Ils ont seule
ment décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avoit été fa it, puisque ce bureau n’existoit.
pas lors du décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des dames pieuses à laquelle le legs avoit été
fait , étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelans eux-m êm es, les premiers juges avoient droit de
çonnoîtrie de la'valid ité du testament, d e là capacité do
disposer et de la quotité du le g s, on ne voit pns comment
ils n’auuoient pas eu le droit de prononcer sur la validité
de ce même le g s c o m m e n t il auroit été interdit à Thé—
ritier de discuter devant les tribunaux la capacité de la.
testatrice ou du légataire.
O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé-tence, pour s’occuper de la validité du legs ou fondation!
de la dame Galieu ; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en revenir à l’édit de 1749, qui fait la loi dans celte
matière..
D ’après l’article 1". de cet é d it, il ne peut être form e
aucun établissement qu’en vertu de lettres-patentes enre
gistrées dans les cours. Sous ce mot général d’établisse-ment , on y comprend nominativement les hospices ,
congrégations , confréries , h ô p ita u x , etc.
L ’art. 2 défend de faire ù l’avenir aucunes dispositions
par acte de dernière volonté pour fonder un nouvel éta
blissem ent, o ira u proiil des personnes qui scroicnt char-gées de le form er , le tout à peine de nullité , ce qui sera
observé quand même la disposition seroit faite à la charge
d’obtenir des lettres-patentes.
’
�•
( 27 )
L ’article 9 déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pourroient avoir été faits en faveur des établissemens non
autorisés., directement ou indirectem ent; et tous ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant toute prescription , tous consenteinens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnes à l'exécution de
ces actes ou dispositions.
Par l’article 1 0 , les en fans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions , à réclamer les biens par eux
donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,avec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’étoit qu’ une association libre non
approuvée , une congrégation sous prétexte d’ / u sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de lettres-patentes : donc
les dispositions faites à son p rofit, directement ou indi
rectem en t, à elle-même ou à ceux qui l’adm inistrent,
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pourroit en réclamer la restitution, si le legs a voit été payé*,
nonobstant tou te prescription, toute approbation expresse
ou tacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des
termes irritons des articles 9 et 10 de l’édit de 1749.
L es administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable, Ce n’est point à l'Œ uvre de la miséricorde quu
D a
�I .»'.
c
2
8
3
le legs a ét<? fa it, mais bien a u x pavores de’ l’Œ uvre. Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l ’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait à l’Œ uvre. Civibus
« cw itatis legatum, vel jîd e i cotnm issum , datum civitath
« relictum videtur, loi 2 , D e rebus dubiis. L a lettre
v. du testam ent, co n tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lé g u é , car ce n’est que les re cc venusdes 80000 ^ qui doivent être employés à soulager
a lés pauvres que l’GEuvre a- coutume d’assister ; et pai*
a qui doivent-ils être employés ? p a r l ’Œ u v re ,q u i a cou—
« turne- de les assister. Ce n’est point aux pau vres, mais>
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’une
vu rente annuelle'envers les Frères m acédons, d’une fon~
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la ville*
a d’A u rillac. Ce n’est] point aux pauvres qu’on a légué ,
a• puisque ce n’est point eux qui peuvent diemander /
« recevoir et1 quittancer: Il n’y a pas même fidéicom m is,
« car ils- n’auront jamais de droit et d’action pour possé«• der;-c’est> pour leur-soulagem ent, mais ce n’est pas su c
«- eux que l’on a fondé. Ils sont l’ôbjet et non lfe9 dépo—
«■sitaires de la fondation : ce n’est point eux qui forment’
<r le corps et là congrégation de l’Œ uvre de la- m iséri«< corde , mais bien les pieuses dames qui administroient
et’ cette Œ u v re ; car les pauvres n’auront jamais de puis—
sance et de droit?, ni' dansi l?adminislration , ni contre*
« les- administrateurs. »
Les, administrateurs invoquent1 l’article 3’ de l’édit de
*749 ? qui*excepte les fondations particulières, qui ne ten»
�46
i
c z9 y
droient à l’établissement cl’aucun nouveau co rp s, collège
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d’étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou séculiers, etc. A l’égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sur les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans
ces exception s, les appelans ajoutent : L a révolution n a
point permis aux tuteurs des puuvres de rem plir la for
malité de l’homologation-, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette homologation.
Cette o b je c tio n s o u v e n t ren o u velée, et toujours dé-truite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l’exception portée par l’article 3 étoit
étrangère a la cause, puisque la disposition est faite au
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas., disent-ils., l’exception seroit en contradiction avec
l’article 9 de. Fédit;. ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœu de la l o i, des établissemqns q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de.moyens suflisans.
L ’article 3 11e dispense de la formalité des lettres-paten
tes , auxquelles il substitue l’hom ologation, que les fon
dations! particulières et les-actes, qui les contiennent, et
non les corps à qui elles- sont confiées. Dos fondations
confiées à un corps non approuvé tendent nécessairement
à établi n un nouveau corps-, coutru la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�( 30 )
On pourroit citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’héritier. M . de Séguiran,
évêque de N evers, fit son testament le 3 avril 178 9 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient employés
à l’execution des établissemens de charité qu’il avoit com
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’instruction et charité chrétienne, et des fonds nécessaires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif; ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible à ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans- le rapport qui fut
fait au conseil des Cmq-cents, le 21 germinal an 6 , par
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise i l’héritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
pouvoit être demandé, et le nouvel ordre de choses en ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie ; pf>r conséquent le legs doit être réversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu’ il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�4 6 2
( 3* )
mais le sieur Cnpelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande affinité entre cette espèce et celle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évéque de N evers, la testatrice n’est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivi’an ce, elles n’en
ont jamais été saisies ; le nouvel ordre de choses a changé
la destination d u'legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprimés; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legrs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pourroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontanges , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués h une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. 11 ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
D
7
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que lesappelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée eu acquisition
de rentes sur l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éral, comme les bureaux de bienfaisance,;
11e peuvent aujourd’hui recevoir îles capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’iutérêl à quatre pour cent; ou.
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il
n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u’importe que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la misé
ricorde assistaient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré q u’elle vouloit exé
cuter les pieux desseins de son frèx*e, elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les uxies ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
L es appelans, qui veulent faire triompher la vérité par
toutes les armes de la p a role, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’A u r illa c , sans autre explica
tion , personne ne doutei'oit qu’il ne fût valable. Mais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
L es pnxivx*es forment un cox*ps irrégulier, qxii n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoii-. Il faut un interm édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de l’état. Si le corps ou l’hos
pice n’est pas fondé en vertu de lettres-paferites, le legs
est caduc, et revient à l’ héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749* Bientôt les appelans s'égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué uu legs fuit aux pauvres , ilau ro it au
torisé
�4&
( 33 )
torisé les Dames de la miséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droit
p u b lic; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix.
'
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignox’e
où les appelans ont pu les puiser. La règle la plus cer
taine en matière de testamens, c’est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l’exé
cution , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a scs lim ites: comme elle doit respecter les p ropi’iétés , elle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit public , ce n’est qu’en ce sens , que la
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon-:
dation faite par la dame G a lie u , le legs ne pouvoit
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le recevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespa tentes.
'
L ’iE u vre de la m iséricorde n’avoit aucune existence
légale. Voudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs ; ils conviennent qu’il falloit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an d ix ; et vouloir qu’un arrêté, postérieur,
E
�(
'
3
4
)
de treize années à l’ouverture du legs, puisse fa're re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fortunes , supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner u n effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du
le g s , ou a présumé le consentement de l’héritier à en
verser le montant.
Il
est contre toutes les rè g le s, contre toutes les idées
reçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvert
en 1789 , puisse être réglé par les lois actuelles; qu’un
legs essentiellement nul dans l’ancien ordre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’une libéralité
faite à l’Œ uvre de la miséricorde depuis 1785 , puis, e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur C ip elle ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se trouve dans une position si dif
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? L a fortune
de sa bienfaitrice n épi’ouvë une diminution si considé
rable depuis la révolution , qu’elle sufiiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice ? eut-elle été aussi libéi’a le ,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son héritier; elle ne suppose aucune di
minution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
A l’acquittement des legs, pendant la m inorité de son lié r
�('35 y
ri lier. Si elle perm et de; ¡.vendre, quelques-im m eubles,
elle dés'gne les moins précieux ; encore a-t-elle.excédé
ses pouvoirs en ce poin t, parce que c’est éluder la dispo.sit'on des articles 1 4 , i 5 et 16 de l’édit de 1749.
- E t cependant, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’i.rquitler le ; legs de 80000 f r . , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
qu’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’ institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
; '
.
D ’après ce3 considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’afloiblissent pas les moyens principaux , le sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance , établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères maçédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours h dom icile *, dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
20. 11 y a encore à prendre: sur le legs pareille somme
de 20000 f r ., dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
�{ >Ù
v ''
( 3* )
3°. E t toujours dans l ’hypothèse que le surplus du '
legs pourroit être e x ig é , le sieur Capelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être em ployée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir qu’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes
ce n’est pas là ce qu’a entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l ’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoient dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose1que des réntes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l’article 13
de la déclaration du 20 juillet 1762, enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiex-s et représentant des|
donateurs ou testateurs à donner, en pavem ent, desrernboursemens des rentes de la nature de celles dont il est
perm is a u x gens de jnain-m orte de f a i r e T a cq u isition ,
p a r Varticle 18 de Tédit de 1749. Ce subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être i*efusé à l’in tim é; il a pour lui'
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vigueu r, et qui ont du r é g i r l e l e g s dont i l s’ a g i t .
40. L e sieur Capelle est encore le maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de .l’hérédité ; qu’elle se prend eu égard
h la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.
L o i 30, lo i 73, ad J'a ie.
4 , au Cod.
T o u t héritier testamentaire ou ab intestat a lç droit
�ét(û ü )
( 37 )
^
(le la distraire, lorsqu’ il a été fait inventaire ; et, dans
l ’espèce , cette formalité a été remplie. E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6, adfaie. §. i, au Cad. Et le sieur GtpeLle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
5°. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament; il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; 011
ne peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en première instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le i-emboursement ; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
Mais c’est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considéi'ation peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
sur une vaste m er, et dont l’utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les affections nobles et généreuses
s’opposent à ce q u ’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’ intérêt public. L 'hom m e d'état ne
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
E
3
�fondations particulières, qui absorberaient à la longue
toutes les propriétés. L 'h om m e religieux vient au secours
de ses semblables, et garde le silence sur ses bienfaits.
L 'h o m m e du monde pense que les fondations sont pres
que toujours des monumens de vanité et d’o rg u eil, et
les apprécié à leur juste valeur. L e m agistrat, impassible
comme la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
vention sur les questions qui lui sont soum ises, et ne
fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les h ommes sont véritablement égaux
-en droits.
r
s
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
f
M e. M A R I E , avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1311
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53200/BCU_Factums_G1311.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53307/BCU_Factums_G1704.pdf
e5bf57299cbdeb3f55775dcb7de8fb8f
PDF Text
Text
PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame
F
r an çoise
R U P H Y , et le sieur
C
laude
B O U T A R E L , son m ari, intim és, et défen
deurs en opposition ;
C O N T R E
L e sieur L a u r e n t - L o u i s - A m a b l e
DELORT
appelant d'un jugement rendu au tribunal d ’A u rillac le 9 mai 1806, et demandeur en oppo
sition.
Auri sacra famés. Hor.
L
A dame Boutarel est héritière testamentaire du sieur
L o uis-Isaac D e lo r t, frère de l’appelant.
Elle a reçu cette dernière preuve de tendresse d’un
A
�oncle qui lui avoit tenu lieu de père, et qui l’a com
blée de ses bienfaits.
L e sieur Laurent-Louis-A m able Delort n’approuve
point le testament, et auroit bien voulu ajouter à son
opulence, la fortune de'son frère.
Q u’a-t-il fait pour la mériter ? Ennemi implacable du
défunt, il n’a cessé de l’outrager pendant sa vie. On ne
doit pas s’étonner qu’il attaque encore ses dernières vo
lontés.
L e testament est olographe ; il n’est assujéti à aucunes
formes. L ’appelant est obligé de convenir qu’il est écrit
en entier, signé et daté de la main du testateur; il n’étoit
donc pas possible de le faire annuler.
L ’appelant a imaginé d’attaquer sa nièce d?indignité.
Il l’accuse d’une indiscrétion qui n’est pas de son fait, et
croit avoir trouvé un moyen infaillible de s’approprier
les biens de son frère.
Les jurisconsultes auxquels il s’est adressé n’ont pas
été de son avis; les magistrats, le public, n’ont pas pensé
comme lui. Il en a été réduit à plaider lui-même sa cause
devant les premiers juges; il a,succombé dans sa pré
tention.
Il veut essayer s’il sera plus heureux en la cour; et
les intimés s’attendent bien que ce ne sera pas encore le
dernier degré qu’ils auront h parcourir.
F A I T S .
L e sieur Louis-Isaac D elo rt, ancien officier de cava
lerie , s’étoit fixé à Aurillac , auprès d’un sieur Isaac
D e lo r t s o n gjraad-oncle et son bienfaiteur.
�t
. ( 3 ) .
Il épousa dame Gabrielle Serieys; il n’en a pas eu d’enfans. L a 24 juin 178 7, il fit un testament au profit de
la dame son épouse. Ce testament contient un legs assez
considérable en faveur de la dame R u p h y , sa nièce ,
femme Boutarel, et fille de dame Louise D elo rt, sa sœur.
On remarque dans ce premier testament, que le sieur
D elort désire être enterré sans pom pe, dans le cime
tière de sa paroisse, à côté du tombeau où son grandoncle a été enterré ; il veut que son testament soit ou
vert Tinstant après son décès, pour prévenir et éviter
toute apposition de scellés, et toutes formalités de jus
tice.
L e testateur fait encore un legs à la dame Louise D e
lo rt, sa sœur, épouse du sieur de R uphy, mais il ne fait
aucune mention de son frère.
L e 27 pluviôse an 3 , il marie la demoiselle de R up hy,
sa nièce, avec le sieur Boutarel. Il est dit dans ce contrat,
que la demoiselle de Ruphy est originaire de T h o n o n ,
département du M ont-Blanc; mais qu’elle demeure de
puis plusieurs années auprès de son oncle. Il repré
sente les père et mère de la demoiselle de R u p h y , et
lui constitue de son chef une dot de 12000 fr.
L e 10 germinal an 7, la dame Serieys , épouse du sieur
D elort, a fait aussi son testament olographe-, elle a dis
posé de tous ses biens au profit de son mari : mais elle
n’oublie pas une nièce qui lui étoit chère; elle fait à la
dame Boutarel un legs de 2000 fr, et de six couverts
d’argent.
Après la mort de la dame Serieys, les sieur et dame
Boutarel ont habité avec leur oncle; il possédoit à BouA 2
�la i
v>
(
4
)
dieu, commune d’Y olet, une maison de campagne qu’il
se plaisoit à embellir.
Il y faisoit des réparations coûteuses, et souvent il avoit
recours à la bourse du sieur Boutarel, qui se faisoit un
devoir d’obliger son oncle, et de xie pas contrarier ses
goûts.
L e sieur D elort, d’ailleurs, ne cessoit de donner à sa
nièce et à son époux des preuves de tendresse et.d’affec
tion, et disoit à . ses amis que tout ce qu’il faisoit étoit
pour sa nièce.
.............
Il a effectué ses promesses. Un testament olographe,
fait à Boudieu, daté des I er. messidor et i er. thermidor
an
contient, après plusieurs.legs, une disposition
universelle au profit de la dame Boutarel.
Ce testament est surtout honorable,pour la dame Bou
tarel : son oncle, en lui donnant, contente les affections
de son cœur. Il répète ce qu’il avoit déjà dit dans son
premier testament pour ses funérailles; il ordonne qu’on
le fasse enterrer près de feu Isaac D d o r t , . son grandoncle et son bieiifaiteur, etc.
O n observe que ce testament est écrit sur une feuille
entière : le sieur Boutarel en produit une copie figurée.
Les dispositions ne contiennent que trois rôles, et quel
ques lignes sur le verso .de la seconde page.: il restoit
encore beaucoup de place, si le.testateur avoit eu l ’in
tention de faire d’autres legs.
Un mois après, le sieur D elort est attaqué d’une ma
ladie à laquelle il a succombé; il est décédé le samedi
28 fructidor, à cinq heures du matin.
D u premier moment qu’il -s’étoit alité, il avoit remis
y
�12?
C 5 }
toutes ses clefs à son neveu Boutarel. L a dame Boutarel
ne quittoit pas le chevet de son oncle; elle avoit pour
lui ces attentions touchantes, ces tendres soins qui con
solent des maux de la vie.
E lle fut témoin des derniers momens de son oncle ;
elle ne put résister à ce choc cruel; elle perdoit un père,
un bienfaiteur, un am i; elle fut atteinte d’une attaque
qui a fait long-temps craindre pour ses jours; elle étoit
Lien loin de s’occuper de ses intérêts.
L e m ari, alarmé de l’état de son épouse, ne songeoit
à autre chose ; mais sur les trois heures après m id i, une
ancienne domestique du défunt apprit au sieur Boutarel
que le sieur Delort avoit sans cesse manifesté le désir
d’être enterré auprès de son gran d-oncle; qu’il seroit
peut-être nécessaire de donner des ordres à ce sujet, et
de les donner promptement; qu’en cherchant dans les
papiers du défunt, on pourroit trouver quelqu’écrit re
latif à ce point.
L e sieur Boutarel fit alors des recherches, de l’avis et
en présence du .sieur abbé Usse, confesseur du défunt :
on trouva dans son secrétaire un paquet cacheté , avec
ces mots sur l’enveloppe : P o u r remettre à madame
Boutarel.
•Le mari en fait l’ouverture, sans y voir d’autre con
séquence : c’étoit le testament du défunt, contenant une
disposition universelle au profit de la dame Boutarel ;
mais en même temps l’ordre de le faire enterrer à A u rillac, près de son grand-oncle.
Pour exécuter cet ordre, il falloit bien connoître le
testament. L ’intention du testateur étoit donc qu’il fût
�( 6 )
ouvert aussitôt après son décès *, et on n’en peut plus
douter, lorsqu’on voit la même volonté dans le premier
testament de 1787.
L e sieur Boutarel remit le tout au sieur Boudier, juge
de paix du canton, en le priant de s’occuper des for
malités nécessaires pour la présentation du testament.
Ce testament, en effet, a été présenté au président du
tribunal, qui en a dressé procès verbal, et ordonné le
dépôt chez un notaire, conformément à l’article 1007 du
Code civil.
Ce procès verbal est du 30 fructidor-, il ne pouvoit
avoir lieu plutôt, quoi qu’en dise l’appelant, puisque le
testateur n’est décédé que le 28 : le 29 étoit un dimanche.
Lors de la présentation, on ne joignit pas l’enveloppe,
à laquelle on n’attachoit aucune importance.
Les sieur et dame Boutarel ont également présenté
requête pour se faire envoyer en possession des biens ;
ce qui a été ordonné, conformément aux articles 1008
et suivans du Code civil.
Survient, dix-sept mois après, le sieur D elort, frère
du défunt, qui prend une cédule du juge de paix d’Aurillac, dans laquelle il expose que les sieur et dame Bou
tarel se sont emparés de toute la succession de LouisIsaac Delort ; qu’il est habile à lui succéder pour moitié,
et qu’il entend demander à la dame Boutarel la restitu
tion du m obilier, les intérêts et les fruits : il n’entre dans
qucune autre explication.
A u bureau de paix, les sieur et dame Boutarel justi
fient du testament de leur oncle ; ils en déposent une
expédition sur le bureau. L e sieur Delort répond qu’il
�(
7
)
ne reconnoît pas le testament, et qu’il persiste dans sa
demande.
Dans son exploit du 22, février 1806, le sieur Delort
expose enfin que les dispositions faites par son frère étoient
caclietées ; que sur l’enveloppe étoient des caractères écrits
et signés par le testateur; que le prétendu testament que
lui ont opposé les sieur et dame Boutarel au bureau de
p a ix , ne fut pas présenté en cet état devant le président
du tribunal; qu’il lui fut porté sans enveloppe et sans
cachet : d’où il suit qu’il n’y a eu de la part de l’auto
rité légale r ni ouverture du testament, ni description de
son véritable état : conditions sans lesquelles il n’a pu
être mis à exécution.
Il en conclut que ce testament étant altéré, doit être
déclaré nul et comme non avenu ; que la succession de
Louis-Isaac Delort est ouverte ab intestat ; qu’ainsi il
doit avoir la moitié des biensSur cette demande, et le 9 mai 1806, jugement con
tradictoire du tribunal d’A urillac, dont suivent les motifs
et le dispositif ;
« V u les articles 970, 1 0 0 1 et 1 0 0 7 du Code civil r
« Considérant qu’en fait il est reconnu et avoué par
« les parties que le testament de Louis-Isaac Delort est
« écrit en entier, daté et signé de sa main ;
« Considérant que d’après l’article 970 du Code c iv il,
« le testament olographe n’est assujéti à aucune autre
« formalité ; que les dispositions de l’art. 1007, i re» par
ti tie , sont uniquement relatives aux précautions ordon« nées pour rendre public le testament olographe, et.
« que leur oubli ou leux défaut ne peut produire une-
�i
( 8 }
« nullité non prononcée par la lo i, et formellement
« rejetée par l’article 970 ;
« Considérant que la preuve offerte par le sieur Delort
« ne tend pas à établir, dans le testament dont il s’agit,
« le défaut de l’une des trois formalités exigées par l’ar« ticle 970, ni la suppression d’un testament postérieur,
et révocatoire de l’autre, mais seulement à prouver qu’il
« y avoit une enveloppe cachetée, avec des caractères
¿c écrits, qui a été ouverte avant la présentation au ma« gistrat; ce qui est absolument insignifiant, soit d’après
cr les faits avoués par le sieur Boiltarel et sa femme, soit
« paçce qu’il n’en résulterait pas la nullité du testament;
« d’où il suit que cette preuve est inutile et non recetr vab le, et que, par suite, le testament étant valable,
« la demande du sîfeur Delort est mal fondée ;
« L e tribunal, sans s’arrêter ni avoir égard à la preuve
« offerte par le sieur D elort, le déboute de ses demandes,
« et cependant lui donne acte de la déclaration faite par
« les sieur et dame Boutarel, qu'après le décès du sieur
« L o u is-Isa a c D e lo r t, le sieur B o u ta r e l, assisté du
et sieur li s s e , prêtre, cherchant dans les papiers du
« défunt une recommandation relative à son enterre« m ent, a trouvé un papier ca ch eté, sur lequel étaient
« écrits ces mots : Pour remettre à madame Boutarel ;
« que l’ayant ou vert, il a trouvé le testament dont il
« s’agit ; que le testament et l’enveloppe ont été confiés
« à M . B oudier, juge de p a ix , q u i, le jour de la pré« sentation du testament, n’a remis que celui-ci, regar« dant l’enveloppe comme inutile. »
Cette dernière disposition du jugement indiquoit asse£
au
�'( 9 )
au sieur D elort ce qu’il avoit à faire. En effet, s’il persistoit à prétendre que cette enveloppe renfermoit quelqu’autre chose que le testament produit ; qu’il y avoit
un testament révocatoire ou un codicille; prenant acte
de la déclaration des intim és, il pouvoit se pourvoir en
suppression de testament ou de codicille ; mais il n’avoit
pas pour cela une action en nullité contre un testament
régulier.
E t comme il étoit vraisemblable, sans doute, que le
sieur D elort auroit mis dans la même enveloppe deux
testamens contraires^ dont l’un auroit révoqué l’autre,
le sieur D elort, appelant, eût peut-être été admis à faire
cette preuve.
Système bizarre qui n’a pu sortir que d’un cerveau
mal organisé, ou d’un homme aveuglé par la colère et
la cupidité.
Quoi qu’il en soit, vivre sans -plaider rCest pas con
tentement : le sieur D elort a cette passion. Il a interjeté
appel du jugement d’Aurillac ; et à la veille de l’audience,
il a cru devoir donner au public une nouvelle preuve
de sa bizarrerie et de son ambition.
Ce qu’il y a de plus difficile, c’est de trouver dans
sa défense quelque chose de raisonnable ou de plausible,
un moyen qui mérite d’être réfuté.
Il cherche dans les lois romaines des argumens ou des
moyens d’indignité : et le moment est bien choisi.
L e testament est postérieur à la promulgation du Code.
L a loi du 30 ventôse an 12 , qui réunit les lois civiles en
un seul corps, sous le titre de Code civil des Français,
s’exprime en ces term es, article 7 :
3
[
�«
«
«
«
( 10 )
« A compter du jour où ces lois sont exécutoires,
les lois romaines, les ordonnances, les coutumes généraies ou locales, les statuts, les règlemens, cessent d’avoir
force de loi générale ou particulière, dans les matières
qui sont l’objet des lois composant le présent Gode. »
Indignités prévues p a rle Code c iv il, article 727.
« Sont indignes de succéder, et comme tels exclus
« des successions,
« ci°. Celui qui seroit condamné pour avoir donné ou
« tenté de donner la mort au défunt ;
« 20. Celui qui a porté contre le défunt une accusa« tion capitale, jugée calomnieuse;
« 30. L ’héritier majeur, qui, instruit du meurtre du
« défunt, ne l’aura pas dénoncé à la justice.»
Les orateurs du gouvernem ent, en présentant ce titre
du Code au eorps législatif, M . Treilhard portant la
p aro le, ont dit :
« Nous n’avons pas cru convenable d’étendre davan« tage les causes d’indignité; il ne faut pas, sous le pré« texte spécieux de remplir la volonté présumée du dék fu n t, autoriser des inquisitions qui pourroient être
« également funestes et odieuses. C ’est par ce m otif que
« nous n’avons pas cru devoir admettre quelques causes,
« reçues cependant dans le droit rom ain, com m e, par
« exem ple, celles qui seroient fondées sur des habitudes
« criminelles entre le défunt et l’héritier, ou sur la dis« position qu’on prétendroit avoir été fuite d’un bien
« du défunt avant son décès, ou sur l’allégation que l’héc< ritier auroit empêché lé défunt de faire son testament,
« ou de le changer. »
�1^3
( n
)
L e sieur Delort nous apprendra sans doute à l’audience
comment il peut y avoir dans l’espèce indignité de suc
céder , parce que le sieur Boutarel a ouvert un testament
olographe, contenant des dispositions au profit de sa
femme.
Maintenant y a-t-il nullité du testament, à raison de ce
que l’enveloppe n’a pas été produite devant le juge ?
A rticle 970 du Gode.
« L e testament olographe ne sera point valable , s’il
« n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testa« teur ; il n’est assujéti à aucune autre forme. »
A rticle 1007.
« Tout testament olographe sera , avant d’être mis à
« exécution, présenté au président du tribunal civil de
« l’arrondissement dans lequel la succession est ouverte.
« Ce testament sera ouvert, s'il est cacheté ; le prési« dent dressera procès verbal de la présentation, de l’ou« verture et de l’état du testament, dont il ordonnera
« le dépôt entre les mains du notaire par lui commis. »
Il n’en est pas du testament olographe comme du tes
tament mystique, qui de sa nature est secret. D ’après
le même article, l’ouverture ne peut en être faite qu’en
présence des notaires et témoins qui ont signé l’acte de
suscription.
M . M aleville, sur la première partie de cet article,
dit que la loi suppose qu’on peut cacheter et tenir secret
son testament olographe ; mais qu’ il ne faut pas pour
cela lè confondre avec le testament m ystique, dont parle
la seconde partie.
Bernardi, ex-législateur, aujourd’hui chef de la division
civile du ministère du grand - ju ge, dans son commen-
�1
( 12 )
taire sur la loi du 13 floréal an 1 1 , des donations et
testamens, prévoit la question qui nous occupe, et s’ex
prime ainsi, page 187, sur l’article 1007:
On peut demander si un testament clos et cacheté
avoit été ouvert avant d’être présenté au président du
tribunal, cette circonstance le rendroit nul.
Il faut distinguer d’abord le testament olographe et le
testament mystique, et ensuite si c’est le testateur luimême ou un autre dépositaire qui en a fait l’ouverture.
L e premier n’est pas secret de sa nature ; ainsi, qu’il
soit ouvert ou fermé , il doit être exécuté, à moinsqu’on
ne prouve que le testateur l’a révoqué.
Annales du notariat, i 5e, question.
En parlant de l’ouverture du testament olographe avant
sa présentation au magistrat :
L e notaire qui feroit l’ouve rture .d’un testament olo
graphe, avant sa présentation , en opéreroit-il la nullité,
sous le prétexte qu’il n’avoit pas caractère pour cette
opération ?
Rép. Il n’y a pas de nullité là où la loi ne l’a pas
prononcée; ainsi, quand un notaire, ou tout autre dé
positaire d’un testament olographe cacheté, auroit l’im
prudence de l’ouvrir avant de le présenter au président
du tribunal, cela n’en opéreroit pas la nullité. Cette question ne peut former de doute à l’égard du
testament olographe, qui de sa nature peut rester ouvert,
et que la loi n’exige pas être secret. Si le testateur le
renferme sous une enveloppe cachetée, ce n’est de sa part
qu’une précaution qui ne tient pas à l’essence de l’acte
qui auroit pu exister sans elle : ainsi, quand on viendroit
h le décacheter avant de le présenter au président du
�,
C T3
.
/■>/
tribunal, ses dispositions ne seroient pas altérées par là ,
puisqu’il n’étoit pas de sa nature destiné à être secret, et que
même le dépositaire pourroit prétendre avoir été chargé
de l’ouvrir aussitôt après la mort du testateur, ou nier
qu’il eût été cacheté, etc.
En effet, comment le cachet seroit-il de quelque im
portance pour un testament olographe? Par cela seul que
le défunt a lesté en cette form e, il n’a pas voulu que
ses dispositions fussent secrètes. Lorsqu’il veut les laisser
ign o rer, la loi lui indique la forme du testament mys
tiqu e, dont la validité dépend des formalités attachées
à l’enveloppe et à la suscription qu’elle contient.
Aussi l’article cité du Gode, fait-il une grande différence
entre ces deux testamens. Celui qui est olographe, ca
cheté ou n on , doit etre présenté au président, qui en
dresse procès verb al, dans l’état où il est, sans avoir
besoin d’appeler personne-, au contraire, si c’est un tes
tament m ystique, il ne peut en faire l’ouverture sans
appeler les notaires ou les témoins qui ont signé la sus
cription de l’enveloppe.
Preuve certaine que le testament ologra p h e , cacheté
ou non , peut etre ouvert sans conséquence ; et pourvu
qu’il soit écrit, signé et daté du testateur, il ri est assujé ti à aucune autre fo rm e.
O n ne peut ajouter à la loi, ni suppléer des nullités
qu’elle ne prononce pas.
L ’indignité est restreinte aux cas prévus ; et la loi n’a
pas voulu l’étendre au-delà.
D ’ailleurs, l’indignité est personnelle. Ici ce n’est pas
même la dame Boutarel qui a été téméraire ou indis-
�( H )
crête •, et on ne peut qualifier ainsi l’acte le plus simple et
le plus naturel, dans la position où se trouvoient les
parties.
L e mari pourroit-il nuire aux droits de sa femme ?
Ce système seroit dangereux et inconvenant. Un époux
qui rie vivroit pas avec sa femme dans l’union que sup
pose le m ariage, pourroit donc la priver d’une succes
sion , parce qu'il auroit la témérité d’ouvrir un testament
qui la concerne?
Ce n’est pas raisonner sagement que de prétendre que
la femme devient responsable de la faute du m ari, quand
elle s’est présentée pour recueillir l’effet des dispositions
faites à son profit.
L a femme ne pouvoit-elle pas ignorer que le testament
avoit été ouvert, et ne pas savoir qu’il étoit cacheté?
L e mari étoit bien maître de son. secret : la femme nd
s’occupe que des dispositions faites à son profil.
L e sieur D elort n’est pas plus conséquent, lorsqu’il
dit que le testament n’a pas de véritable date : il est en
effet daté au commencement, du ier. messidor, et à la
fin, du I er. thermidor.
Mais de deux choses l’une : ou le testateur a employé
un mois pour rédiger son testament, ou la dernière date
est une erreur.
S’il a employé un m ois, ce qui est probable, parce
qu’on peut réfléchir sur ces dispositions, les deux dates
prouvent son exactitude.
Si au contraire ce n’est qu’une erreur, elle ne peut être
d’aucune importance. En effet, pourquoi la loi a-t-elle
voulu que le testateur datât son testament ? ce n’est que
�m
( 15 )
pour, s'assurer plus positivement de son intention et de
sa volonté.
Qu’importe que ce soit tel jour ou tel autre, si on ne
rapporte pas un autre testament fait dans l’intervalle.
Aussi le sieur D elort semble - t - il vouloir faire grâce
de ce m oyen, et ne le proposer que légèrem ent, pour
ne rien négliger.
Que le sieur Delort cesse donc d’y insister. E t pour
quoi vien t-il ambitionner la fortune de son frère, lu i,
héritier contractuel de ses père et m ère, et qui a fait
plaider si long-temps ses frère et sœur, pour obtenir leur
légitime ;
L u i qui depuis long-tem ps est séparé de sa fem m e,
qui n’a pas d’enfans, et jouit de plus de 12000 francs
de rente ;
L u i, enfin, qui n’a vu ou écrit à son frère que pour
l’outrager ou lui proposer des cartels ?
C’est à lui seul qu’on proposeroit des moyens d’indi
gnité , s’il étoit appelé à succéder au défunt ; et qu’il
sache qu’on peut p rouver, par ses écrits, tout ce qu’on
vient d’avancer.
Signé B O U T A R E L .
Me. P A G E S ( de Riom ) , ancien avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A. RIOM , de l’imprimerie de Landriot, seul imprimeur de la
Cour d'appel. — Mars 1807.
eül
-
�9^ J y
ty fUOAl> (160y^ awudh
/ a ^ iiu w t ,
í/ft¿rr e
c ^ w t
/
i
r
a » *v|^ u u > ^ «*A
Ç & * io \ * ^ y i o M * y * * >
^
a
<
w
*
t ~ A r // u f Y ,ù ' <^ r '
» /c. tA~Jl>*ï ^'*-'
fpjtrr.— -~X »/bjrlYÍÚ> 3 «
^ »*1
æjuiiù. 6t-Mo /rt««^ u/tfc*^> ^»' «• f « y V r y ,w * » ' ^ m,‘
€X*Jbu
/¿■—
-Iil^
ou a i i u i i o ^ ra « M i« v io H i J «*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Ruphy, Françoise. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
testament olographe
legs
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour dame Françoise Ruphy, et le sieur Claude Boutarel, son mari, intimés, et défenseurs en opposition ; Contre le sieur Laurent-Louis-Amable Delort, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'Aurillac, le 9 mai 1806, et demandeur en opposition.
Particularités : notation manuscrite : 17 mars 1807, arrêt 2nde section. Confirme en rejetant la preuve offerte par Delort, parce qu'en la supposant faite, elle serait insignifiante quant à la nullité du testament olographe de Louis Delort, fait objet du procès, et ne serait relative qu'à la suppression d'un autre testament ou codicille postérieur, dont il ne s'agit pas.
Table Godemel : Testament : 7. le fait, par le mari de la légataire universelle, d’avoir ouvert l’enveloppe cachetée qui renfermait le testament olographe, écrit, daté et signé par le défunt, et de l’avoir présenté sans cette enveloppe considérée comme insignifiante, au président du tribunal qui en ordonna le dépôt chez un notaire, après constatation de l’état de la pièce, doit-il avoir pour effet d’admettre qu’il y a eu infidélité, violation du sceau et du secret du testateur, suppression d’un autre testament ou codicille révocatoire , et par suite nécessité d’annuler le testament comme ne présentant pas les caractères propres à assurer sa sincérité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1787-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1704
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1705
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53307/BCU_Factums_G1704.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Yolet (15266)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
legs
nullité du testament
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53645/BCU_Factums_M0104.pdf
b32f1be835663f4581a6365f5390f62e
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
POUR C l a u d e HUGON D E G IV R Y , héritier
pour une sixième portion de défunt L o u i s
G U 1LL0U ET D ’ORV 1LLIERS, ancien lieu
t r ib u n a l
tenant-général des armées navales, intime et D'appel
appelant ;
•
séant à Riora
C O N T R E S i m o n B E L A N G E R , ancien
cuisinier de feu L o u i s G U I L L O U E T
D ' O R V I L L I E R S , habitant de la ville de
Paris , appelant d'un jugement rendu au cidevant tribunal civil de VAllier 3 le 6 germinal
an 8 , et intimé.
Q U E S T I O N .
Peut-on exiger le payement d'un legs conditionnel, lorsque la condition imposée au légataire n’ a pas été
remplie par le f a i t du légataire ?
,
.
I L est difficile d’expliquer comment la question la plus
simple a pu faire naître une contestation sérieuse ; par
quels motifs on a donné à cette cause une aussi grande
publicité ; pourquoi Simon, Bélanger s’est permis de dis
A
,
�C a )
_
tribucr des libelles diffamatoires, s’est répandu en injures
grossières contre le citoyen de G iv r y , ses défenseurs et
ses conseils? Etoit-ce pour donner plus de poids aux
présomptions, aux allégations, aux chimères, qui for
ment la base de sa défense ?
Un légataire conditionnel peut-il espérer la délivrance
de son legs, quand il n’a pas rempli la condition? On
sait que la condition affecte tellement la substance du legs,
qu’il ne peut pas avoir son effet sans elle;
Q u il suffit que la condition ne soit pas impossible, pour
quelle doive etre exigée;
Q u il faut se soumettre, avec une obéissance aveugle ,
à la volonté du testateur, et satisfaire ponctuellement à
la condition.
Simon Bélanger pouvoit discuter ces principes, sans
se permettre aucune diffamation.
Mais ses injures et ses menaces ne sauroient atteindre
le citoyen Hugon de Givry. Il ne les rappelle , qu’à raison
de ce que le jugement dont est appel, a ordonné la sup
pression d’un alinéa du mémoire de Bélanger, et que
ce dernier est appelant en ce chef; il ne s’en occupera
qu’autant que cela est nécessaire pour sa défense, et il
ne se permettra aucune représaille.
F A I T S .
Simon Bélanger est entré au service de M. d’OrviïliprsT
en 1779- M* d’ Orvill'crs habitoit alors la ville de Rochcf j r t , après avoir quitté Brest, où il «voit commandé la
marine et les armées combinées de France et d’Espagne.
�M. d’Orvilliers eut le malheur de perdre son époure , en
1780; il avo':t quitté le service. Isolé, livré à lui-même,
il prit la résolution de passer le î-este de sa vie dans la
retraite. Il choisit la maison de St. Magloire , à lJaris,
et s y fixa dans le cours de l’année 17 8 c, auprès de
M. Laube, ancien officier de m a r i n e , son ami, son ancien
compagnon d’armes; il habita avec lui jusquà la fin de
179°. C’est la-qu’il comptoit terminer sa carrière glo
rieuse (1); mais une attaque d’apoplexie qu’il éprouva,
dans la même année 1790, affoiblit ses facultés intellec
tuelles, et le mit dans la dépendance de Bélanger, son
domestique. Ce dernier loua , sous le nom de son maître,
une maison écartée de celle de St. M agloire, et le fit trans
férer dans cette nouvelle habitation , malgré les repré
sentations de M. Laube, et de tous ceux qui prenoient
intérêt à ce brave et ancien gén éral, dont la mémoire
inspire la vénération.
Les amis de M. d’Orvilliers instruisirent sa famille de
ce changement.Tous les parens de M. d’Orvilliers, vive
ment affectés de son état, donnèrent au citoyen Hugon
de G ivry, les pouvoirs les plus étendus, pour se rendre
auprès de leur o n c le ,y prendre tous les arrangemens et
mesures convenables, donner les ordres que sa prudence
lui suggéreroit, pour que M. d’Orvilliers fût servi et
soigné ainsi que l’exigeoit son âge et son état \ l’autoriserent même à transférer leur oncle à portée de quel
qu’un de sa famille, pour qu’il puisse veiller à ce qu’aucun
(1). P a r son testa m e n t, il a v o it m an ife sté l’ in ten tio n d 'être en terré
d ans la m aiso n de St. M a g lo ire .
A 2
�( 4 )
r
soin ne lui manque, si son médecin juge que cela
puisse se faire sans risque pour sa santé et sa conser
vation.
‘
L e citoyen ïïugon de Givry est également autorisé à
envoyer ou à changer les domestiques, et à prendre toutes
les mesures que sa sagesse lui dictera , pour que les af
faires d’intérêts soient administrées de manière que les
r e v e n u s de son oncle suffisent à ses besoins et à ses dépenses.
Ces différentes procurations qu’il est inutile de trans
crire littéralement, sont des 12 avril et 9 août 1791 , et
enregistrées le même jour 9 août.
Le citoyen Hugon de Givry se rendit auprès de son
oncle, en vertu des pouvoirs qui lui avoient été donnés.
M. d’ Orvilliers étoit peu favorisé de la fortune; sa plus
grande ressource étoit une pension de 18,000 f r . , payée
par l'état, et qui fut supprimée dansla suite. L e citoyen de
Givry ne pouvoit confier son oncle à des mains merce
naires; il prit la résolution de l’amener chez lui au mi
lieu de sa famille; il consulta le médecin Phlips sur cette
détermination; il fut décidé que le voyage ne pouvoit
entraîner aucun inconvénient. L e citoyen de Givry fit
vendre, en présence de M. Laube et de Bélanger, le
mobilier qui restoit à son oncle; le produit de la vente
fut de 403 ir. eu assignats. '
Bélanger accompagna son maître dans ce voyage; il
demeura huit jours à Moulins, auprès de lui, et l’aban
donna ensuite, pour retourner à Paris.
M. d’Orvilliers a vécu dans la maison de son neveu ,
jusqu’au 13 avril 1792. Ses neveux et nièces après sa mort
parla gèrent sa succession ; il revint à chacuu lu somme de
�( 5 )
.
.
1,831 f. 85 cent., ainsi qu’il résulte des quittances produites. M. Laube, ami de M. d’Orvilliers, étoit dépositaire
du testament de ce dernier, qui l’avoit nommé son exé
cuteur testamentaire. Comme M. Laube n etoit pas Fran
çais, et qu’il étoit sur le point de retourner dans son
pays, il envoya ce testament au citoyen de Givry. Ce
testament olographe est sous la date du 4
i 7 ^7 j ^
contient différens legs j il suffit de transcrire celui qui
concerne Bélanger.
« Je donne 6,000 fr. à Bélanger, en reconnoissance
* des services qu’il m’a rendus, par estime de ses vertus
« et par amitié pour lui ; je lui donne aussi le lit d in
« dienne, et tout le petit ameublement de la chambre
« située au premier, où je mange ; tous mes habits et les
«r deux tiers du linge servant à ma personne j enfin je lui
« donne tous mes livres qui se trouveront , après que
« M. Laube aura fait le choix de ceux qui lui conviennent.
« Je donne à C a lliste , mon laquais, un tiers du linge sér
ie vant ù ma personne, et une somme de 1,200 fr.
« L e s articles concernant les deux domestiques n au
« ront e ffe t, qu autant qu'ils seront à mon service à
« Pheure de ma mort. »
Bélanger , informé du décès de son ancien maître, écrivit
au citoyen de G iv r y , lui parla du testament dont il connoissoit l’existence, du legs qui lui avoit été fa it, et de
manda copie du testament.
Le citoyen de Givry copia littéralement l’article qui concernoit Belanger, et s’empressa de le lui envoyer.
Sans doute que Bélanger ne crut pas alors qu’il pou v o it
exiger le payement du legs, lorsqu’il en connut la condi-
�.
.
6 ) .
.
,
tion ", du moins il a gardé le silence jusqu’au 2 vendé
miaire an 7 , qu’il fit signifier un acte extrajudiciaire au
donjicile du citoyen Hugon de Givry. Il se permet, dans
le préambule de cet acte , des inculpations malhonnêtes
contre le citoyen de G ivry, et le somme de déclarer, i°. si
M. d’Orvilliers est décédé dans sa maison de Moulins;
2°. s’il a fait son testament olographe , le 14 mai 1787 ;
30. si par ce testament il a fait un legs quelconque en fa
veur de Bélanger, qui étoit son premier salarié5 40. si
M . d'Orvilliers lui a confié, à titre de dépôt ; son testa
ment, pour le déposer cliez un notaire après sa mort;
5°. s’il est encore dépositaire aujourd’hui du même testa
ment. Dans ce dernier cas , il somme le citoyen Hugon
d’en faire le dépôt chez un notaire, ou en justice, dans
vingt-quatre heures, et de lui indiquer ensuite le lieu ou
il aura fait le dépôt. Dans le cas où le citoyen Hugon
auroit, à l’instant du décès de M. d’ Orvilliers, fait le dépôt
de ce testament au greffe, ou en l’étude d’un notaire, il le
somme de lui indiquer à l’instant le notaire qui a reçu ce
dépôt; sinon et faute par le citoyen Hugon de donner à
Bélanger les renseignemens nécessaires pour avoir une
copie légale de ce testament, et de s’expliquer sur les faits
ci-dessus, celui-ci se pourvoira contre lui pour l’y con
traindre, faisant à cet effet toutes réserves do fait et de
droit.
L e citoyen Hugon de Givry répondit, i° . que M. d’O r
villiers étoit mort chez lui eu 1792; 2°. qu’il a fait 1111
testament olographe, mais qu il en ignore positivement la
date, qu’il croit cependant que c’est eu 1787 ; 30 qu’il croit
cju’il a fait un don conditionnel en faveur dudit Bélanger 3
�. .
( 7 )
4°. que M. d’Orvilliers a confié son testament entre les
-mains de M. Laube , ancien officier de marine, son a m i,
qui le lui a montré , et qui en est nommé exécuteur testa
mentaire ; 5°. q u e lui H ugon -G iviy n’est point dépositaire
de ce testament, et qu’il ignore où il e s t , et s’il existe;
6°. enfin qu’après la mort dudit d’ Orvilliers, lui G iv r y ,
a partagé avec ses autres cohéritiers les meubles et effets
du défunt, dont partie a été distribuée aux pauvres, particulièremet ses habits et linges de corps; qu’au surplus,
s’il étoit prouvé qu’il fût dû légitimement à Bélanger, la
succession d’ Orvilliers le payeroit.
.
Cet acte extrajudiciaire fut suivi d’une céclule, en date
du 5 nivôse an 7 , par laquelle Bélanger demanda que le
citoyen Hugon fût tenu de déposer le testament chez un
notaire, ou au greffe du tribunal civil, dans vingt-quatre
heures, si mieux le citoyen Givry n’aimoit payer , à lui
Béla nger , la somme de i 5 ,ooo f r . , valeur du legs à lui fait
par le testament du 14 mai 1787. Il y eut un procès verbal
de non conciliation , suivi d’une citation du 6 pluviôse, et
le 28 floréal an 7 , il intervint un premier jugement con
tradictoire, qui ordonna que le citoyen Hugon de Givry
seroit tenu de déposer au greffe du tribunal civil d’Allier
le testament olographe de défunt d’Orvilliers, dans la hui
taine , à compter de la signification du jugement.
L e 3 trimaire an 8 , nouvelle citation de la part de Bé
langer, contre le citoyen Hugon de G ivry, tendante à faire
déclarer exécutoire contre lui le testament olographe de
ieu d Orvilliers, du 14 mai 1787,6! à le faire condamner,
en qualité de seul et unique héritier de son oncle, à lui
faire la délivrance des legs exprimés ù son profit, et à lui
�C 8)
payer pnur ¡ceux, i° . la somme de 6,000 fr. fixée par le
testateur; 20. celle de 8,000 fr. pour les deux tiers des habits
et la valeur du linge servant alors au défunt ; 30. celle de
3,000 fr. pour la valeur des livres que le citoyen Hugon a
trouvés à la mort de son oncle ; 40. celle de 10,000 fr. pour
dommages-intérêts, dûs à raison de ce que le citoyen de
Givry . comme dépositaire infidèle du testament, l’a tenu
secret jusqu’au 28 floréal an 7 , qu’il a été condamné à en
faire le dépôt, et que par là il a mis Bélanger dans Fimpossibilité de former plutôt son action.
Le 8 frimaire il y a eu un procès verbal de non concilia
tion , et le 26 du même mois Bélanger a fait assigner le
citoyen de Givry au ci-devant tribunal civil d’Allier , où il
a repris les mêmes conclusions qu’au bureau de paix.
Ii est bon d’observer, que lors du procès verbal fait au
bureau de paix, le citoyen G ivry avoit exposé que Bélanger
réclamoit mal à propos l’exécution d’un testament dont il
n’avoit pas rempli la condition ; que le legs n’avoit été fait
au profit de Bélanger, qu’à condition qu’il se trouveroit
au service du testateur au moment de son décès, et que
Bélanger avoit quitté le service de M. d'Orvilliers long
temps avant sa mort. A u surplus, le citoyen de G iv iy
remarqua qu’il n’étoit héritier de son oncle que pour un
sixième; qu’il ne savoit à quel titre et pour quel motif
Bélanger lui accordoit une préférence exclusive ; il crut
devoir lui indiquer le nom, la qualité et la demeure de ses
autres cohéritiers.
Bientôt il s’est élevé entre les parties, une discussion plus
sérieuse. Bélanger opposoit comme fin de non recevoir un
écrit de M. d’Orvilliers du iô^avril 1788, qui, suivant lu i,
le
�.
.
( 9)
le dispensent d’exécuter la condition apposée au testament.
Il argumentait contre le citoyen de Givry de quelques lettres
particulières de l’envoi que lui avoit fait ce dernier, de
l’extrait du testament en ce qui concernoit Bélanger. Il
voulut faire résulter de là, une approbation du testament.
Des mémoires imprimés ont été répandus de partet d’autre.
.Bélanger s’est livré aux plus atroces déclamations ; des per
sonnalités ont été substituées aux moyens , et chaque écrit
qui émanoit de lui, étoit une nouvelle diatribe. Dans un de
¡ses mémoires , pag. 4 , verso, après avoir dit que le citoyen
•Hugon de G ivry étoit venu à Paris, le i 5 mai 1791 ,
auprès de son oncle, il s’exprime ainsi :
; « .Quel étoit le but de ce voyage ? Etoit-ce pour veiller
« plus particulièrement sur la'santé de son oncle, et pro
'« longer ses joùrs en lui prodiguant tous les secours de
« l’art des médecins ? Non. Il ne s’est rendu en si grande
« hâte dans la capitale, que pour s’emparer, ainsi que
• toutes les circonstances le prouvent, de la succession de
« son vieil oncle, avant Sa m o rt, et pour en accélérer le
« terme'autant qu’il dépendoit de lu i, sans se compro« mettre aux yeux de la justice. »
• • On doit sans doute mépriser les injures, mais une accu
sation aussi grave ne pouvoit être tolérée. L e citoyen de
Givry en demanda justice; il conclut à la suppression de
-ce libelle, et à l’affiche du jugement à intervenir.
• Il s appliqua ensuite à démontrer, en point de droit, que
Bélanger étoit non recevable à demander la délivrance de
son legs conditionnel, et qu’enfin il auroit dû former sa
demande contre tous les héritiers du testateur.
- La cause portée a l’audience du tribunal civil d’A llier,
£
�( 10 )
du 6 germinal an 8 , il est intervenu un jugement contra
dictoire , dont on va transcrire les motifs et les dispositions.
« Considérant, i °. qu’aucune des trois fins de non rece« voir proposées par Bélanger n’est fondé , attendu d’une
« part, que l’écrit en date du 16 avril 1788, dont argu<r mentoit Bélanger, non seulement ne relève pas formel
« lement le légataire de la condition portée au testament,
« mais encore qu’il en l’ésulte au contraire que le légateur
« ne supposoit sa séparation du légataire, que dans le seul
« cas du prédécès de ce dernier; de l’autre, qu’il ne résulte
« aucun acquiescement formel h l’exécution du legs, ni de
« l’extrait du testament délivré au légataire, sans réserve
« de la part de l’héritier, cette réserve étant de d roit, et la
« correspondance de l’héritier établissant qu’il regardoit le
« legs comme n u l, ni de la délivrance qui a pu être faite au
«• légataire de quelque partie du legs, puisque non seule« ment il n’est pas justifié que cette délivrance soit du fait
« de l’héritier, mais encore qu’eile a été faite avant la mort
« du testateur, de l’aveu même du demandeur.
« Considérant secondcrhent, que d'une part le citoyen
tt Hugon de Givry, par les inculpations graves qu’il a
« faites à Bélanger, tant dans son mémoire imprimé, que
« lors des plaidoiries de la cause, et sur-tout par le rapport
« de la procuration des autres cohéritiers, dans laquelle il
« s’est fait particulièrement autoriser à renvoyer les domes
a tiques, a fourni lui-même au moins de violentes prê
te sorn\itioiis , que c’étoit lui qui avoit renvoyé Bélanger
« du service de défunt Guillouet d’ Orvilliers ; que d’une
a autre part, soit que l’on considère l’intention manifestée
« par le testateur, dans sou testament, de Unir scs jours
�.
.
^.rI )
« à Paris, puisqu’il vouloit y être enterré, soit que l’on.
« considère qu’il étoit de sa eonnoissance que Bélanger
« etoit établi à Paris, et y avoit sa famille} soit que l’on
« considère enfin que ce n’est pas le testateur qui a quitté
« Paris volontairement, pour venir à Moulins, mais que
« c’est plutôt la volonté du citoyen de Givry , qui a opéré
« seule cette translation , qui a eu lieu dans la maison dudit
«’ G ivry; que dès-lors le défaut d’accomplissement de la
« condition imposée à B élanger, ne peut pas lui être re
« proche/ parce que non seulement la condition n’est pas
« restée la même par le fa it, non du testateur, mais bien
« de l’héritier, mais encore qu'il n’a plus été au pouvoir
« du légataire de l’aeçomplir, puisque le testateur, trans0
dans une maison autre que la sienne propre,
° lia plus eu dès-lors de domestiques particuliers pour
« le servir, mais bien ceux seulement du maître de cette
« maison ; que les domestiques du testateur v eussent-ils
« même resté avec lu i, ils y seroient alors devenus ceux
« de la maison, et non du testateur; ce qui n’étoît ni dans
« l’esprit, ni dans la lettre du testament.
« Considérant en troisième lieu , que les faits d’indignité
« proposes par le citoyen de G iv r y , sont non seulement
« vagues et nullement précisés, mais encore que Bélanger
« les a suffisamment écartés, tant par le rapport de ses
« états journaliers de recette et dépense, arrêtés scrupu« leusement et dans le plus grand ordre par le testateur,
R depuis 1781 , jusqu’à sa translation à Moulins, que par
(< Kl correspondance amicale, tenue par le citoyen Ilugoa
tt lui-même, avec le citoyen Bélanger, depuis la sortie de
ce dernier du service du testateur à M oulins, chez le
B 2
�( 12 )
« citoyen Hugon de G iv ry, ladite correspondance due« ment timbrée et enregistrée.
<r Considérant en quatrième lieu, que soit le dépôt fait
« entre les mains du cit. Hugon de G ivry, du testament
« de feu d’Orvilliers, soit la qualité de seul et unique
« héritier de ce dernier, à lui donnée, dans les premiers
« jugemens rendus dans la contestation, ceux postérieurs
« portant cette réserve formelle , sans que les qualités
«r puissent nuire ni préjudicier aux parties, ne peuvent
« changer sa qualité ni lui attribuer celle d’exécuteur
« testamentaire, ni lui donner de plus grands droits
« dans la succession, que ceux qu’il y a réellement ; qu’en
« principe le cohéritier n’est tenu, vis-à-vis le légataire,
« quel que soit le legs qui lui a été fait, qu’en propor« tion de la portion qu’il amende dans la succession ,
« en qualité de cohéritier ».
«
«
k
«
«
«
«
ce
«
«
«
te Considérant cinquièmement, que pour déterminer
la partie du legs relative aux livres , hardes et linges
du testateur, Bélanger ayant reconnu avoir retiré avant
la mort du testateur, le lit et l'ameublement faisant aussi
partie dudit legs, il est indispensable que l’état des
dites hardes, linges et livres soit donné, et que cette
obligation est de droit imposée à l’ héritier, tenu de
la délivrance du legs et nanti de la succession , sauf
tons contredits de la part du légataire.
« Considérant sixièmement, que quoique en principe
général l e s intérêts d’un legs portés dans un testament
olographe, ainsi que dans l’espèce, courent du jour
du décès du testateur, lorsque l’héritier nanti du testa
it m eut, néglige d’en faire le dépôt aussitôt après la
�C 13 )
« mort du testateur ; néanmoins la circonstance résul« tante de ce que Bélanger, légataire, connoissoit noti
« seulement le testament, mais encore celui qui en étoit
« dépositaire, par l’extrait qui lui avoit été adressé par
« le citoyen Hugon-Givry, doit faire éprouver des mo
« difications à ce principe ; mais que s’il est juste dans
« cette hypothèse, que les intérêts du legs ne soient point
« alloués du jour du décès du testateur, il ne l’est pas
fc moins, d’après la conduite tenue par le cit. Hugon
« de G ivry, dans l’instance en rapport et dépôt du tes
te tament, d’allouer les intérêts à compter du jour de
« la première sommation faite aux fins du rapport et
« dépôt dudit testament, du 2 vendémiaire an y , la de
« mande en délivrance du legs, n’ayant été retardée que
« par le refus obstiné du citoyen Hugon de G iv ry , de
« représenter le testament, et son seul fait ».
« Considérant septièmement, que dans l’espèce, les
« intérêts qui seront alloués, tiennent lieu de tous doin,* mages-intérêts , qui ne sont jamais dûs q u à raison
« du tort qu’on éprouve; le préjudice souffert par Bé« langer n’étant autre dans l’hypothèse, que le retard
« apporté à l’acquittement ou à la délivrance de son legs,
« et les intérêts alloués étant la compensation naturelle
« et de droit de ce retard.
« Considérant huitièmement, que la défense légitime
«■se borne aux seuls moyens de la cause, et non à des faits
« étrangers, et encore moins lorsque ces faits contiennent
« des inculpations graves, et tels que la réputation et l’iion« neur peuvent en être altérés ; qu’au nombre de ces genres
* d inculpations et faits} le citoyen Givry est fondé u
�( 14 )
m
mettre le second alinéa du v°. de la quatrième page du
mémoire imprimé du citoyen Bélanger, commençant
par ces mots : quel étoit le but de ce voyage ? et finis
sant par ceux-ci: sans se comyramettre aux y e u x de
la justice , et qu’il y a lieu des lors d ordonner la radia
tion dudit a lin éa, et que procès verbal en soit dressé
par le greffier aux frais de Bélanger.
« Le tribunal jugeant en premier ressort, déclare so
lennel et exécutoire contre le citoyen Hugon de Givry
le testament olographe de défunt Louis Guillouet d’O r
villiers , du 4 mai 1 7 8 7 ,dûment enregistré ; donne acte
aux parties de la déclaration faite par Bélanger, qu’il a
en son pouvoir le lit et 1 ameublement faisant partie du
legs à lui fait dans ledit testament ; condamne ledit
Hugon de G iv ry , en sa qualité d’héritier de défunt
Louis Guillouet d’Orvilliers, à payer et délivrer, ou
autrement acquitter, en pareille proportion seulement
que celle qu’il amende dans ladite succession, audit Bé
langer , avec intérêts, à compter de la sommation signi
fiée le 2 vendémiaire an 7 , tant la somme de 6,000 fr.
portée au même legs , que les hardes et deux tiers de
linge à l'usage du défunt, et sa bibliothèque , faisant
partie dudit legs; et pour être statué sur la consistance
« ou valeur desdites hardes, linges et bibliothèque; or« donne que dans la quinzaine, à compter de ce jour, le
« citoyen Hugon de Givry sera tenu de signifier à Bélanger
« un état certifié desdites hardes, linges et livres , sauf con« tiedils delà part dudit Bélanger, pour lesdits états et
« contredits rapportés au tribunal, ou à défaut d’iceux ,
« cire par lui statué ce qu’il appartiendra, en l’audience
�( r 5 -)
« du 6 floréal prochain , en laquelle la cause demeure
« continuée; condamne néanmoins ledit Hugon de Givry
« aux dépens laits jusqu’il ce jour par le citoyen Bélaugei ,
« ensemble au c o û t , levée et signification dudit jugem ent,
« qui sei’a exécuté par provision, nonobstant 1 appel, aux
« charges de droit, comme s agissant d execution d acte
« de dernière volonté reconnue en justice. Et faisant droit
« sur les conclusions en radiation et suppression dinjures,
«• prises par le citoyen Hugon de Givry , le tribunal 01 ■«■donne que Yalinéa du v.° de la quatrième page du me
« moire imprimé de Bélanger, commençant par ces mots.
« quel étoit le but de ce voyage ? et finissant par ceux-ci.
« sans se compromettre au x y e u x de la justice , sera
« rayé dudit mémoire comme injurieux et diiïainant, et
* que procès verbal de ladite radiation sera dresse par le
« grellier du tribunal aux frais dudit Bélanger. »
Bélanger a fait signifier ce jugement par exploit du 28
thermidor an 8 , a v e c déclaration que ce jugement le gre-voit dans quatre de ses dispositions ; qu’on conséquence il
s’en rendoit appelant, i° . en ce qu’il prononçoit la sup
pression d’une partie de son mémoire de défenses; 20. en
ce qu’il ne prononce point en faveur de Bélanger une con
damnation en dommages-intérêts ; 30. en ce que, sans
aucune distinction , il ne condamne le citoyen llu gon de
Givry qu’au payement de sa portion du legs; 40. en ce que
le payement ne prononce pas quelle est la quotité des con
damnations que doit supporter le citoyen de G iv r y , ce
qui, suivant lu i, est un déni de justice.
De son cô té, le citoyen Hugon de Givry a interjeté pu
rement et simplement appçl du même jugement par acte
�( i6 )
^
du 23 brumaire an 9 ; et c’est sur ces appels respectifs que
le tribunal a à prononcer.
L ’ordre de la discussion exige qu’on commence par
examiner la question de droit relative à la condition im
posée au testament.
On analisera ensuite les moyens particuliers et subsi
diaires du citoyen Hugon de Givry.
Et on terminera par la discussion des griefs que Bélanger
a proposés contre le jugement dont est appel.
La première règle que l’on doit observer touchant l’ac
complissement des conditions e s t, que l’on doit se con
former exactement à la disposition conditionnelle. Telle
est la doctrine de Furgole sur les testamens, tom. 2, ch. 7 ,
sect. 5 , nomb. 3 : « C’est la lo i, dit-il} que les parties con« tractantes se sont prescrite ; c’est la loi qu’un testateur
« qui dispose a imposée : il faut donc consulter le contrat
a ou la volonté du testateur, et suivre exactement et litté« ralement ce qui est prescrit : in conditionibus primum
« locum voluntas defuncti obtinet ca quœ régit condi« tiones , loi 19 , ff. de condit. et demonstral. L e temps,
« la form e, la manière, les circonstances, tout cela dépend
« d elà disposition conditionnelle.de laquelle on ne doit
« s’écarter en aucune façon ; c’est elle qui doit régler l’évé« nement et la conduite de celui qui doit accomplir la con« dition, pour profiter de la libéralité conditionnelle; et
« comme on ne doit rien ajouter à la disposition pour
« rendre la condition plus diflicile, ni pour l’éteudre d’un
« cas à l’autre , ni d’uue personne à une autre , on ne doit
« non plus rien omettre ni retrancher de ce qui se trouve
v exprime dans la disposition, et par conséquent l’accom
plissement
�.
.
. ( x7 )
.
« plissement ou l’infraction de la condition , doivent arriver
« précisément de la manière et en la forme prescrite par
<* le testateur. »
'
Ricard, dans son traité des1dispositions conditionnelles,
cliap. 5 , sect. 3 , nomb. 314 , enseigne <r que les conditions
« doivent être pleinement et exactement accomplies, aupa« ravant que la disposition qui en dépend puisse avoir
« son effet. Lorsque le testateur a attaché sa libéralité à
« une condition, la condition en est la base et le fondc« ment ; 'de sorte , que lu n e ne peut subsister qu’avec
« l’autre. Il est absolument nécessaire , pour faire sub« sister la disposition , que la condition , qui seule est ca
« pable de lui donner l’être, précède dans les mêmes
« termes que le défunt a prévus , tellement que s’il y
« manque quelques circonstances, la volonté du testateur,
« qui s’est liée h la condition ,• demeure imparfaite ; elle
« ne peut produire pareillement qu’une disposition impar
te faite, laquelle conséquemmenf demeure sans effet et
« sans exécution. »
Plus bas, Ricard ajoute, « que ces maximes ont lieu à
« l’égard des conditions en général, mais qu’elles doivent
« plus particulièrement recevoir leur application, lorsqu’il
« s agit de conditions potestatives, qu’il est au pouvoir du
« légataire d’accomplir, précisément dans les termes que
« lui a prescrits le testateur. 11 doit, avec une obéissance
« aveugle, se soumettre absolument à la volonté du dé« funt, et satisfaire ponctuellement à la condition, sans
« qu il lui soit permis d’examitier s’il seroit plus expédient
« de 1 exécuter d’ une autre façon que celle que le testateur
'« a prévue. » .
G
�( i8 )
Les considérations les plus puissantes ne peuvent empê
cher que les conditions ne soient accomplies, si on veut
profiter des libéralités : il n y a point de condition qui ne
gêne en quelque manière la volonté, la liberté , puisque
la plupart roulent sur des choses que l’on ne feroit pas
volontiers, si elles n’étoient ordonnées. Aussi, ce n’est pas
ce qu’il faut examiner ; le légataire est obligé de captiver sa
volonté ou ses goûts, pour suivre exactement les termes de
la condition qui lui est imposée , et qu’il peut exécuter. lia
loi n’excepte que tout ce qui seroit déshonorant par rap
port à l’état et à la condition de la personne à laquelle la
condition a été imposée; mais toutes celles qui n’ont rien
* de contraire aux lois ni aux bonnes mœurs , ni même à
la liberté, dans le sens des lois, doivent être strictement
exécutées.
Et pourquoi s’appesantir sur une chose aussi simple ? Ne
dépend-il pas de celui qui donne, d’imposer à ses libéra
lités les conditions qu’il lui plaît ?
O r, le général d Orvilliers avoit subordonné le legs qu’il
faisoit, tant a Belanger qu’à Calliste, à la condition qu’ils
scroient à son service à l'heure de sa mort.
Bélanger convient qu’il n’étoit pas au service du général
d’Orvilliers à l’heure de son décès; il est même reconnu
qu’il avoit cessé d’être auprès de son maître, plus d’un
an avant sa mort. Il n’a donc pas rempli la condition sous
laquelle le legs lui avoit été fait ; il est donc non recevuble
dans sa demande en délivrance de ce legs.
T out ce qui a été dit, écrit et imprimé de la part de
Bélanger, dans le cours de l’instruction, se réduit à pré-
�.
^ 19 )
.
,
..
tendre que le citoyen de Givry l’avoit renvoyé, lorsqu'il
conduisit son oncle à Moulins.
Une preuve que le citoyen de Givry ne l’a pas renvoyé,
c’est qu’il a accompagné lui-même son maître à Moulins,
qu’il a resté huit jours auprès de lui, et a voulu ensuile
s’en séparer pour aller rejoindre ses enfans qui étoient à
Paris.
Si son départ n’avoit pas été volontaire, si le citoyen
de Givry lui avoit fait violence ou l’eût renvoyé de sa
maison, comment n’auroit-il pas réclamé? Comment ex
cuser son abandon d’un ancien m aître, d’un homme si
respectable, lorsqu’il n’existe de sa part ni plainte, ni ré
clamation, non seulement à lépoque où il a quitté le service
du général, mais encore lorsqu’on voit qu’il a gardé le
silence pendant sept années entières, après la mort de
M. d’Orvilliers ?
D e quel droit, d’ailleurs, le citoyen de Givry auroit-il
renvoyé un ancien domestique qui ne dépendoit pas de
l u i , et qui étoit attaché au service de son oncle ?
Lors du départ du citoyen de Givry pour Paris, les
lettres que la famille avoient reçues, faisoient supposer que
M. d’Orvilliers étoit dans un état d’affoiblissement absolu;
il n avoit que des infirmités qui sont la suite d’un grand
ag e , et qui s etoient accrues par une attaque récente : mais
il avoit encore ses facultés intellectuelles, et il se trouvoit
dans un état tel qu’il put supporter sans danger le voyage
de Moulins; qu’il a survécu plus d’un an; qu’il a toujours
joui du libre exercice de ses droits, et que sa famille n’a
tait aucune démarche pour provoquer son interdiction.
Il est mort en possession de son état, au milieu de sa
c; 2
�( 2° )
^
^
famille; et en supposant que Bélanger eiA
U été renvoyé,
il ne pourroit pas l’imputer au citoyen de G i v r y , mais à
M. d’Orvilliers lui-même, qui u’auroit plus voulu de ses
services.
Ainsi, ou le citoyen Bélanger s’est retiré volontairement '
d’auprès du général d’Orvilliers, et, dans ce cas, il n’a
rien à prétendre; ou il a été renvoyé, et alors il l’a été par
son maître : il n’a donc point rempli la condition sous la
quelle le legs lui avoit été fait.
Le seul motif du jugement que le citoyen de Givry ait
i n t é r ê t de discuter, est celui qui paroît avoir déterminé
les premiers juges à ordonner l’exécution du legs. On y
d it, « que le citoyen Hugon de Givry a fait des incul« pations graves à Bélanger ; que par la procuration des
« autres cohéritiers, il s’est fait autoriser particulièrement
« à renvoyer les domestiques; on en conclut qu’il a fourni
a au moins de viohntes.’çrésorirptions que c’ étoit lui qui
« avoit renvoyé Bélanger du service de M. d’ Orvilliers.
On ajoute, « que si l’on considère l’intention manifestée
« par M. d’ Orvilliers, de finir ses jours à St. M ag lo ire, où
« il vouloit être enterré,* qu’il étoit de la connoissance de
« M. d’ Orvilliers que Bélanger étoit établi à. Paris, et y
« avoit sa famille; que ce n’est pas M. d’Orvilliers quia
« quitté volontairement Paris pour venir à Moulins, mais
« que c’est plutôt la volonté seule du citoyen de Givry q u i
« a opéré cette translation dans sa maison; que dès-lors le
« défaut d’accomplissement de la condition imposée à
« Bélanger, ne peut lui être reproché. Non seulement,
« disent les premiers juges, la condition n’est pas restée la
« même par le fait, non du testateur , mais de l’héritier,
�C « O
^
« maïs encore il n’a pas été au pouvoir du légataire de
« l’accomplir, puisque le testateur, transféré dans une
« maison autre que la sienne, n’a plus eu dès-lors de domes
« tiques particuliers pour le servir, mais bien ceux seule« ment du maître de cette maison. Les domestiques du
« testateur y eussent-ils même resté, ils y seroient alors
« devenus ceux de la maison et non du testateur, ce qui
« n’étoit ni dans l’esprit ni dans la lettre clu testament. »
Et sur ce fondement, la délivrance du legs est faite à
Bélanger !
Est-il donc au pouvoir des juges de changer ou modifier
les conditions apposées par un testateur au legs qu’il lui
plaît de faire? testcimentum estjusta voluntatis sententia
de eo quodpost mortem su a m jie r i velit. Les juges ne
peuvent y porter la plus légère atteinte, par des inter
prétations capables d’altérer la volonté, l’expression lit
térale du vœu du testateur; point de considération qui
puisse dispenser le légataire de s’y soumettre.
S’il étoit permis de s’arrêter à des considérations, elles
seroient toutes, dans la thèse, agitées contre le domes
tique. Il est clair que le testateur ne l’a gratifié que dans
la vue des services qui lui seroient rendus dans les der
niers temps; c’est-à-d ire , dans les plus pénibles de sa
vie : la volonté clu testateur est d’autant plus formelle
ic i, qu il a employé cette expression, à ïheure de ma
mort.
Ces principes, qui puisent leur source dans la saine
raison , comme dans les lois, ne sauroient présenter aucun
doute, ni être atténués par les efforts d'aucun interprète;
autrement les conditions seroient toujours éludées, et
�1
( 22 )
jamais domestique n’auroit encouru la perte de son legs;
il ne manqueroit jamais de subterfuge et de faux-fuyant
pour s’affranchir de toutes celles attachées aux libéralités
qui lui étoicnt destinées. Il y a plus, le maître dont le
but auroit été de s’attacher un domestique jusqu’à la
fin de ses jours, seroit abusé dans le motif de sa sensi
bilité.
Aucuns exemples dans la jurisprudence, n’autorisent
l’infraction aux lois dont se plaint le citoyen Hugon de
G iv ry ; et le danger de cette espèce d’arbitraire ne peut
manquer d’être proscrit.
L e résultat de tout ce que les juges ont v u , est une
violente présomption.
Et quoi! les -présomptions des juges; c’e s t - à - d ir e ,
l ’ouvrage de leur imagination, l’opinion imparfaite ( car
des présomptions ne sont rien autre chose ), qu’ils auront
pris sur un point de fait, seront substitués à la volonté
écrite d’un testateur, convertiront un legs conditionnel
en un legs pur et simple? N on , ce seroit la première
fois qu’un tel système seroit consacré.
Màis y a-t-il même quelques raisons de ’p résumer dans
les motifs que contient le jugement ?
Des inculpations dans un mémoire et dans des plaidoi
ries! En bonne logique, on ne voit point le rapport qu’il
peut y avoir entre l’aigreur plus ou moins fondée, qui a
pu s’introduire dans un procès en l’an 8 , et la sortie d’un
domestique en 17 9 1, d’auprès de sou maître mort en 1792.
Mais on ne dit pas en quoi consistent ces inculpations !
Mais le jugement lui-même a prononcé la suppression
d’un alinéa tout entier d’un mémoire de Bélanger, connue
�,( 23 )
.
injurieux et diffamant; et le citoyen H u g o n de G iv r y ,
traité ainsi par l’ancien domestique de son oncle, n’auva
pu repousser les injures, sans qu on trouve dans sa juste
défense, un titre contre lui!
Quant à la procuration , elle ne prouve rie n , et les
juges en font complètementTaveu , puisqu’ils n y trouvent
encore que des présomptions i mais elle doit démontrer
à la justice la circonspection et la prudence du citoyen
Hugon de G iv r y , q u i, en se rendant auprès de son oncle,
âgé et malade, craignoit de le trouver dans un état qui ne
lui permettroit plus de s’occuper de sa maison, de ses
affaires, et l’obligeroit, lui paren t, à faire usage de cette
autorité qui naturellement devoit appartenir à lui comme
à ses cohéritiers.
Il n’en fut point ainsi: le général d’Orvilliers n’étoit pas
aussi malade qu’on l’avoit craint, puisqu’il entreprit et
soutint parfaitement le voyage de Paris à Moulins ; il se
détermina librement et volontairement à se rendre dans
sa famille; et n’étoit-ce pas là qu’il étoit sûr de trouver
ces soins attentifs qui sont une nécessité dans la vieillesse,
ces prévenances qui soulagent les m a u x , ce concours d’amis
tendres qui préservent des dangers de la solitude?
A r rivé à Moulins, il a continué à jouir de la plénitude
de sa raison et de son état.
Le citoyen Hugon de Givry n’eut donc à se permettre
aucun usage de la procuration; et en parlant le langage
d u 'd r o it , quelle pouvoit être la valeur d’une telle procu
ration pendant la vie du général d’Orvilliers ? Ses parens
qui n’avoient aucun pouvoir, en pouvoient-ils conférer?
Celui qui. ay oit reçu ces pouvoirs, avoit-il un moyen légal
�( H )
d’en faire usage ? Cette procuration n’étoit qu’un acte de
prévoyance , destiné à rester sans exécution, si l’événe
ment ne le rendoit nécessaire, et un scrupule du citoyen
de Givry sur sa mission.
Les présomptions du tribunal dont est appel, sont une
injure à la mémoire du général d’Orvilliers, et au respect
que ses parèns ne cessèrent de lui porter. Elles supposent,
ou que ses facultés intellectuelles l’avoient abandonné , ou
que ses parens usoient de contrainte envers l u i , et contrarioient ses volontés.
Et quand ce seroit le citoyen Hugon de Givry qui auroit
renvoyé Bélanger, seroit-ce sans l’aveu, ou contre la vo
lonté de son oncle? voilà encore ce qu’il auroit fallu
établir. Bélanger en a bien senti la nécessité, puisqu’il a
prétendu qu’il s’étoit transporté chez le juge de paix, lors
de son départ de Moulins, mais que ce juge étoit absent,
et que tous ceux qui auroient pu le remplacer, luiavoient
refusé leur ministère.
Après huit années de silence, une allégation de cette
espèce n’est que ridicule.
Et ce juge de paix absent! Bélanger étoit donc bien
pressé de quitter M oulins, s’il n’a pu attendre son retour.
Sa démarche au reste prouveroit-elle ce que le juge de
paix n’a pas constaté ?
Croira-t-on que c’est au moment où la famille du gé
néral d’ Orvilliers remplit vis-à-vis de ce respectable parent
ce qu’elle regarde comme son premier devoir, le recueillir
dans son sein, qu'elle va répandre l’aiïliction dans son
âme , par l’expulsion d’un domestique auquel il étoit
attache •
Le
�( 25 )
#
Les faits, au reste, démentent toutes les assertions qui
servent de base au jugement.
Bélanger est p.«rti volontairement ; il n’a plus voulu
rester auprès de son maître , quand il a vu qu il falloit le
servir et vivre loin de Paris; il a préféré retourner dans
la capitale,où sa famille et ses habitudes 1 attachoient. Si
on ne lui en fait pas un reproche, au moins ne doit-il
pas soutenir que la condition du legs se soit trouvée
accomplie ?
Les premiers juges sont tombés dans une contradiction
assez remarquable.
La présomption que Bélanger a été renvoyé par le cit.
Hugon de G iv ry, les conduit à la conséquence, que Bé
langer n’est sorti que malgré lui et malgré son maître , et
qu’alors c’est comme s’il n’avoit jamais quitté le service du
testateur. Puis oubliant cette conséquence, ils disent qu’il
étoit à la connoissance du testateur, que Bélanger étoit
établi à Paris , et y avoit sa famille ; ce qui signifie appa
remment que l’intention étoit de le gratifier, quand même
il auroit cessé de demeurer avec le testateur.
Ainsi, nécessité avouée de l’accomplissement de la con
dition , puisqu’ils admettent pour équivalent la prétendue
expulsion de Bélanger , qui lui a ôté le pouvoir de s y con
former , et dispense absolue de la condition, par la v o
lonté présumée du testateur, de ne lui avoir pas imposé
cette obligation : c’est ainsi qu'on raisonne , quand on
présume.
Les premiers ju^es disent encore, «soit que l’on consi« dère l'intention manifestée par le testateur , dans son
« testament, de .lion* ses jours à Paris , puisqu’ il vouloit
•
D
�« y être enterré, soit que l’on considère qu’il étoit à sa
« connoissance que Bélanger y étoit établi, et y avoit sa
« famille. ■
»
Rien de plus curieux que ces considérations; elles veu
lent dire, sans doute, que pour l’accomplissement de la
condition, le général d’Orvillierss’étoit obligé de mourir
à Paris, et de rester attaché aux volontés de son domes
tique sur son domicile.
On doit abandonner à sa propre valeur un système qui
tendroit à faire d’un testament un titre contre le testateur.
U n testament ne date que de la mort ; ce n’est qu’à ce
moment qu’il prend son existence. Il n’est pas permis aux
juges d’examiner ce qu’il a plu au testateur de faire pen
dant sa vie : sa liberté étoit entière ; et si son intention eut
été de dispenser son domestique de la condition , à raison
de son changement de domicile, il n’auroit pas manqué
de s’exprimer sur ce point.
Une erreur monstrueuse forme la base de toute cette
discussion, en ce que Bélanger et les juges considèrent les
dispositions qu’il s’agit d’exécuter, comme étant de 1787,
tandis qu’elles n’ont d’existence que du jour du décès.
L ’instrument seul est de cette époque; et sa date, qui n’a
de propriété que pour valider l’acte en sa form e, est abso
lument nulle et sans effet au fond.
Et si M. d'Orvilliers eût vécu quinze ans encore, Bé
langer seroit donc venu, s’appuyant sur la date de 1787,
prétendre également au legs, après cette longue cessation
de services ?
Il étoit, d i t - o n , à la connoissance du testateur, que
Bélanger étoit établi à Paris, et y ayoîtsa famille.
�'
( 27 )
.
Mais connoît-on, ou conçoit-on, pour un domestique,
une autre existence que son service auprès de son maître?
et ce service n’est-il pas négatif de tous établissemens ?
Ensuite, la connoissance du testateur que Bélanger avoit
sa famille à Paris, n’offre-t-elle pas une conséquence toute
contraire à celle que le tribunal en a tiree? C est préci
sément parce qu’une famille est un juste titre d attachement
et de prédilection, parce que M. d’Orvilliers a pu craindre
que Bélanger préférât ses parens à son m aître, qu il lui
a imposé la condition d’être à son service à ¿'heure de sa
mort - et quand M . d’ Orvilliers vouloit se rendre auprès
de ses parens, c’étoit sans contredit à Bélanger à faire le
sacrifice de ses affections : et parce que le testateur avoit
connoissance de cette particularité, la condition n’en est
que plus forte.
Les premiers juges disent encore que ce n’est pasM. d’O r
villiers, testateur, qui a quitté Paris volontairement, mais
que c’est plutôt la volonté du citoyen de Givry qui a opéré
seule cette translation.
Les premiers juges ajoutent ici présomption sur pré
somption, et ne se sont pas aperçus qu’ils lançoient des
traits injurieux à la famille et à la mémoire du général
d’ Orvilliers : ce dernier est mort jouissant de la plénitude
de son état civil; tout ce qu’il a fait, il a voulu le faire;
et le livre de sa conduite personnelle et privée n’est ouvert
pour personne. Quant à ses parens , loin de contrarier les
volontés d’un oncle qu’ils n’ont cessé de respecter , loin de
le contraindre dans aucune démarche, loin de l’outrager
par des privations, le moindre de ses désirs fut toujours
une loi pour eux,
D 2
�( *8 )
#
• E n fin , porte encore le jugement, « par son séjour dans
« la maison d’autrui, le général d’ Orvilliers est présumé
a n’avoir plus eu de domestiques à son service. »
Est-il présumable que dans cet état de vieillesse et de
maladie, qui rend encore les soins particuliers plus né
cessaires, et lorsque la fortune lui en laissoit le pouvoir,
le général d’Orvilliers ait été privé de domestiques? Mais
ce qui dissipe encore les présomptions du tribunal de l’A l
l i e r , c’est la vérité constante et à la connoissance de tout
le monde, à Moulins, qu’indépendamment de six domes
tiques qui avoient toujours composé la maison du citoyen
Hugon de Givry, le général d’ Orvilliers a été servi, jus
qu’à sa m ort, par deux domestiques à ses gages et de son
choix, qui ne le quittoient ni le jour ni la nuit, dans le
même appartement qu’occupe aujourd’hui et depuis plus
de six ans, la belle-mère du citoyen de G ivry, et que rien
n’a été négligé pour rendre digne de lui la retraite où il
a terminé sa vie glorieuse.
Le citoyen Hugon de Givry se bornera à ces réflexions
sur la disposition du jugement qui le concerne. On ne v o it,
dans ses motifs, que des efforts maladroits pour justifier
une disposition que la loi réprouve; et ce n’est point avec
des présomptions , des allégations ou des chimères, qu'on
peut effacer, combattre ou altérer un titre authentique.
Il reste à examiner les grieis proposés par Bélanger,
contre ce même jugement.
' On se rappelle que Bélanger s’en est rendu appelant,
p rem ièrem en t en ce qu’il prononçoit la suppression d’ un
alinéa de son mémoire, comme injurieux et diffamant.
L e citoyen Hugon de Givry a transcrit plus haut cet
�C 29 )
-
alinéa ,* Bélanger a eu l’audace d’accuser le neveu, le
disciple du général d’Orvilliers, d’avoir cherché à abréger
les jours de ce vieillard vénérable, sans se compro
mettre aux y e u x de la justice.
.
Cette horrible diffamation , qui méritoit une peine
plus sévère, et qu’il est cruel de relever, est d’autant
plus maladroite qu’on ne commet pas de crime sans
intérêt. Et quel intérêt avoit donc le citoyen Hugon.
de Givry , de chercher à abréger les jours d’un oncle
dont toute la fortune consistoit en une rente viagère
de 18^000 francs?
'
1 Mais ce seroit s’avilir que de descendre à une justifi
cation ; -le citoyen de G ivry doit se contenter de livrer
l'auteur de cette monstrueuse accusation, à la justice et
à la sévérité du tribunal.
•
Bélanger se plaint encore de ce que-le jugement dont
est appel, ne lui a point adjugé de dommages-intérêts.
Quel tort a-t-il donc souffert? n’éloit-il pas assez heu
reux d’avoir obtenu la délivrance d’un legs conditionnel,
sans avoir rempli la condition? N ’étoit-il pas suffisam
ment dédommagé par les intérêts de ce même legs, qui
lui sont alloués depuis la sommation par lui faite de re
présenter le testament ?
Bélanger se récrie encore de ce que le citoyen Hugon
de Givry n’a été condamné qu’au payement de sa por
tion du legs; mais ignore-t-il qu’un héritier n’est jamais
tenu au payement des legs, que dans la proportion de
son amendement? X^c citoyen de Givry lui avoit désigné
la portion qu’il amendoit dans la succession de son oncle;
il lui avoit indiqué le nom bre, la qualité et demeure de
�( 30 )
scs autres cohéritiers. Bélanger n’avoit point d’action hy
pothécaire sur la succession de M. d’ Orvilliers; chacun des
héritiers ne pouvoit. donc être tenu que personnellement
pour sa portion, en supposant que la demande fut fondee.
Enfin , Bélanger regarde comme deni de justice , le
défaut d’indication précise de la quotité des condam
nations que devoit supporter le citoyen de Givry.
• Ce dernier grief est inexplicable. On n’indique ordi
nairement cette quotité qu’en termes généraux, et pour
la part et portion qu’amende le cohéritier contre lequel
on dirige les poursuites. Bélanger connoissoit en quoi
consistoit l’amendement du citoyen de Givry, qui étoit
un sixième ; i l n’étoit donc nullement besoin d’une plus
ample explication.
Par conseil, P A G E S , jurisconsulte.
B R U N , avoué.
ma
A RlOM, de l'imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Hugon de Givry, Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
successions
legs
domestiques
Description
An account of the resource
Mémoire pour Claude Hugon de Givry, héritier pour une sixième portion de défunt Louis Guillouet d'Orvilliers, ancien lieutenant-général des armées navales, intimé et appelant; contre Simon Bélanger, ancien cuisinier de feu Louis Guillouet d'Orvilliers, habitant de la ville de Paris, appelant d'un jugement rendu au ci-devant tribunal civil de l'Allier, le 6 germinal an 8, et intimé. Question. Peut-on exiger le payement d'un legs conditionnel, lorsque la condition imposée au légataire n'a pas été remplie par le fait du légataire ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1779-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0104
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0103
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53645/BCU_Factums_M0104.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Paris (75056)
Moulins (03190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domestiques
legs
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53717/BCU_Factums_M0218.pdf
62acddb602fa7eba1dcf78cda40691d0
PDF Text
Text
wr
jU U su /
_
^MEM OIRE
SU R
LA N U L L I T É D’ U N L EGS
DE 8 0 0 0 0 * ,
•
'
F A I T A L ’Œ U V R E D E L A M IS É R IC O R D E
É T A B L I E EN L A V I L L E D ’A U R I L L A C .
%
W .
If,
*
vit
,
lù ^ fc js .
¿a
¿*- ¿¡¿ c4a îZ ^
& G ^utal CAL-¿itM -b ')^ /r$£aj& r
r
4 aM XcUiMA*'
A
DE
R I O M ,
L’ I M P R I M E R I E
IMPRIMEUR
DE
DE
LA
L A N D R IO T ,
COUR
Juillet 1804.
D’APPEL.
SEUL
�M E M O I R E
cour
D ’A P P E L
EN
RÉPON SE,
s£antk
A RI OM.
POUR
P
ierre
- A
ntoine
- U
rbain
CAPELLE,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
S a i n t - C o n s t a n t , intimé ;
C O N T R E
Les A d m i n i s t r a t e u r s
b i e n f a isance
du
B ureau
de
de la ville d ’A u rilla c , appe
lans d ’un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de S a in t-F lo u r , le 20 flo réa l an 11.
administrateurs du bureau de bienfaisance de l a
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
L
ES
►
�( O
t
80000 fran cs, fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricoi’de de cette ville. Ils seront lus avec in térêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
M ais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordres qui raccom pagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’ utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en démontrer
les inconvéniens, comme l’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout en tière, c’est au gouvernem ent,
q u ’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’être u tile ,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
être perm anentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais finissent presque toujours par dégé
nérer.
'
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’il rend
hommage aux vertus et à la piété de ces dames respec
tables qui trouvoient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoient la chaum ière du - p a u v r e , soulageoient ses
�( 3 )
t .
besoins, et lui donnoient ces marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre resp ect, qui fut créé pour notre bonheur !
femmes vertueuses et tend res, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société ! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion ? par qui avez-vous été rem placées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour en obtenir
la délivrance ?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orothée G abridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rilla c dans le
'courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de connoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-U rbain Gapelle , fils aîné du sieur G apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent a la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent a une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 f r ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en u su fru it, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�.
.
,{ 4 )
plusieurs immeubles en toute p ro p riété, dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seul, de la seconde classe,
et le plus considéi'able de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
« P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« com m uniqués par feu M . C abridens, mon frè re , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uçre de la m iséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ u vre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funta/iges est
« la supérieure , la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétien ne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’Â u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ u vre que 60000 fr. ; qu’il
« sera em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’ A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le r even u de ladite somme
« de 20000 lr. peut le com porter; et que le revenu de
« la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r . ,
« soit em ployé à assister et soulager le surplus des pau« vres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
« en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
« léguée, aux conditions m entionnées, soit payée auxa dites dames administrant ladite Œ u vre, sur la quittance
�.
.
c
5
« qui en sera fournie par ladite dame d e-F on tan ges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veux et entends qu’au cas où ladite Œ u vre de la
« miséricorde v în t, dans le tem ps, à être réunie à l’h ô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je v e u x , d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u v re , J'asso
« retour à mon héritier. »
- Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d ’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ u vre de la m isé■ricorde, qui étoit administrée par des dames pieuses,
•mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cette même ville
q u ’en 1777.
•
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C iiyla, qui étoit chargé
■
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés ,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
.de la succession, jusqu’à ce que l’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e p rix des ventes et des revenus de la succession devoit
être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquiLtcment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Les legs de prem ière classe, autres que celui qui lait
l’objet de la dem ande, dévoient être payés dans l’année
du deces. L e p rix du m obilier lut insuilisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�_
C6 )
II est probable qu’en 178 9, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. Il est au moins certain que cette'Œ uvre n’a jamais
réclamé ni form é aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur C a y la , exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y fit même
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u ril
la c, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque le sieur Antoine Capelle, pore et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu, se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l ’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pouvoit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sœurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit cadu c, et beau
coup d’autres étoient également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieuv Cayla père vint à décé
der. S011 fils, en vertu du même testament, prit la jouis
sance des biens, qu il a gardée jusqu’en 179^. Il n’est pas
exact de dire qu’il rem it 1 hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en charger; et ce n’est
(*ï C ’est une erreur qui s’est glissee dans les copies : il n’est point question
de Sœ urs-grises dans le testam ent.
�( 7 )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit La succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Ï1 est dit, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
« et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant p ou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« p o u r T in té rêt de so n h é r it ie r , et encore sans qu’ il soit
« tenu de payer aux légataii-es aucun intérêt de leurs
« legs. »
Les employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait ù une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alieu, pour le payement de cette somme
de 80000 fr. L e 8 thermidor même aim ée, ils firent un
nouveau com m andement; e t, s u r l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Cnpelle avoit encore à discuter contre
�.
•
,
•( 8 ) r
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulû t faire de cette somme l’emploi auquel elle étoit
destinée.
Bientôt api'ès, l’hospice d’Aurillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle,
Cette prétention ne tendoit qu’à faire exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice n’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brumaire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres fuirent nom
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer le
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
m iséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateurs
y disent que cette Œ uvre n’a jamais été. supprim ée,
qu’elle 11’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749 ,
l’Œ uvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespa tentes;
L e cas prévu par la testatrice, pour le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r . , n’étoit pas ax-rivé ; le
legs devoit donc être versé dans leux-s mains.
Tels sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
cilation devant le tribunal d’A urillac. L e sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. Et comme on a paru
im prouver la récusation, il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D e lo r tz - L a b a r th e , l ’un-des juges, est m em bre
du
�C9 )
du bureau de bienfaisance -, les sieurs L aval et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même ville ; ils avoient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur D esta in g , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julhes et V e rn io ls, l’un étoitle défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u rillac, qui ne pouvoient rem placer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d ’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l ’intérêt de tous
les habitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : eu
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
'
Ce jugement lut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse su ivan t, les administrateurs citèrent eux
) memes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
s’étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u r illa c , le legs dont il s’agit, et à en p ou r
suivre la délivrance devant les tribunaux j 20. d’un arrêté
B
�( 10 )
du conseil de p réfectu re, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les tribunaux, les poursuites com
mencées contre le sieur Capelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S a in t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i . Suivant e u x , les legs faits pour cause pie dévoient
recevoir leur exécution , et être jugés favorablement.
I/incapacite du légataire ne rend pas même n u lle legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner l’em
p lo i et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des le g s , et
l ’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
5 °. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u
vre de la m iséricorde, comme corps et com m unauté;
mais ¡1 fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de VŒ uvre de la m iséricorde,
�'
( II )
cela n’a été que pour désigner l ’espace et la qualité des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit en
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n ’a jamais été réunie à l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile , n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde •, mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été consei'vées.
8°. L a condition clu retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’a voit p révu e; et, en matière favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. On ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les prévoir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’ une grande révolution ,
surtout lorsque tout est l'entré dans la ligne presci’ite par
le fondateur.
io°. L a réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l ’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges ; et court tous les risques :
B «
‘
�R e s périt domino.
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
pertes considérables.
i i ° . L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quai'te falcidie. E lle n’a lieu qu’au profitde l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n ’a pas lieu pour les
legs pies. Il irapliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuilisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son c ô té , le sieur Capelle soutint, i°. que le legs fait
â l’Œ uvre de la miséricorde étoit caduc, soit lors de sa
con fection , soit au m oment de l’ouverture de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation , aucune dotation, aucun établisse-’
ïnent avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée.
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établissement,
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations,
associations et hospices : d’où il résultoit qxie le legs auroit
cessé d’être e x ig ib le , du moment que l’intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le con/ioit exclusi
vem en t; et alors la reversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. Le patrim oine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g e n re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée liéri-
�f 13 )
tière par son m a r i, de qui elle tenoit la plus grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Capelle , son petit-neveu et
son héritier p résom ptif’, et la dame Galieu devoit moins
se considérer comme propriétaire , que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
étoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères macédons , ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Capelle,
ne pouvoit être tenu que cl’en payer annuellement l’in
térêt.
.
6°. En pays de droit é c r it , l’héritier institué ou
ah intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 1 7 4 g , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à acheter des rentes
sur 1 état ; et le sieur C a p e lle, en ce c a s , pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du legs ; en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
L a cause portée en cet état au tribunal de Sain t-F lou r ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement contiddictoire , qui déclare le legs fait par F ran çoise-D o ro
thée d e C a b rid e n s , ve u ve de G eraud G alieu , à l’Œ u v r e
de la miséricorde de la ville d’AurillaC , par son testa
ment du 4 octobre 1785 , nul et de nul eiîèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette mêm e ville non - recevables dans la
�.
( r4 )
#
demande par eux form ée contre le sieur C a p elle, héri
tier de la dame G a l i e u , en délivrance de ce même
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
' « i° . D ’api*ès la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
« 2°. Par une exception néanmoins établie par la
« jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
« pie , les legs pieux faits au profit des communautés
« illicites étoient appliqués aux pauvres ou autres
« œuvres p ie s, et la disposition, même
imparfaite ,
«
«
«
«
«
«
«
n’empêchoit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. Mais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1735 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’cdit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p i e , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
« 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui renou« velle les défenses de form er aucun établissement
« de corps ou communauté quelconque , sans l’obtencc tion préalable de lettres-patentes, sont nommément
« compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u« nautés sous prétexte d’hospices. Par une disposition
k rigoureuse et nouvelle 5 qui ajoute a celle des precé-»
« dentes lo is, il est défendu de fonder de tels établis-
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( i 5 )
semens par disposition de dernière volonté , quand
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
des leí tres-patentes.
•
tc 4 °' L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
que l’homologation du parlement pour fondation de
messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pauvres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut rai
sonnablement recevoir son application lorsque la
disposition est faite à un corps ou communauté non
approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
contradiction avec l ’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
pleine exécution de l’article i er. , non - seulement
déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
sans qu’il soit besoin de lettres de rescision , nonobs-
« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
«
«
«
«
«
«
« 5°. Adm ettre l ’exception portée en l’article 3, au
profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
moyen indirect de fonder réellem ent, contre le vœu
de la l o i , des établissemens qui , quoique déjà existan s, n’auroient eu jusque-là qu’une existence épliém è r e , fa ute de moyens suilisans.
K 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition inftniment rigoureuse, veut que les enfans ou héritiers
�( 16 )
« présom ptifs, du vivan t môme de ceux qui ont fait
« les dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
« réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
« envoyer en possession , même avec restitution de fruits,
« du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
« de l’ édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
« de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis« sement non-aj>prouvé , en appliquoit le bénéfice aux
« hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
« cause pie.
‘
cc 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774 et 178 0 ,
« qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela« tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
« des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
« articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir«
«
«
«
‘ «
‘
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger suivant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
cc fait à une corporation ou com m unauté non légale-,
cc ment établie , h l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
cc d’A u rilla c,q u i n’avoit point obtenu de lel tres-patentes,
« S’il est dit que le legs a été fait aux pauvres de l’Œ uvre
cc de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-« tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
te des pauvres à laquelle la testatrice entendoit faire du
cc bien. L ’Œ uvre de la miséricorde avoit tous les carac->
ce tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�( 17 ) _
^
« communauté , puisqu’elle avoit une su périeure, une.
« assistante, un receveur; elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, l Œ uvre de la m iséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister -, c’est l’Œ uvre,
« que la testatrice avoit envisagée, plus encore que les
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau« vre s, ecclésiastiques et séculiers, -qu’elle .avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à p erp étu ité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ u vre à l’hôpital
«r g é n é r a l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses« ne sont applicables ni aux pauvres individuels , tels« que les pauvres lionteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l ’Œ uvre de la m isé« rico rd e, considérées comme individus.
« 9 0. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
cc pour cette interprétation avec l’arrêté des consuls,
c< q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it, l’a qualifié de legs f a i t à ï Œ uvre
« de la miséricorde quoique le gouvernem ent ait eu
a sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de Y Œ uvre d e la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres - patentes ; l’a considéré comme légalem ent
4
�.
c 1 8 -}
,
..
« représenté, par suite des lois des 16 vendém iaire et y
« frim aire an cinq.
« Cet arrêté d’ailleurs ne préjuge rien sur l'invalidité*
« ou la validité du le g s, puisqu’en cas de contestation:
« il renvoie les parties devant les tribunaux.
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana
« lisées, le legs fait à l ’Œ uvre de la m iséricorde d’A u « rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;
« 'e t, d’après l’article 10 de Fédit de 17 4 9 , l ’héritier seuî
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs. »■
Ees administrateurs du bureau de bienfaisance on t
interjeté appel de ce jugem ent, et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Capelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à
propos de relever quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpital
c^Aurillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, com m e
Font prétendu les appelans , on doit d ir e , d’après lanotoriété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richem ent d o té , proportionnellem ent
à la population de îa ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde.. L e bailliage de V i e
n’auroit pas été competent pour connoitre de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas.
L ’Œ u v re de la m iséricorde n’étoit pas même une cor-,
poration. O n se souvient avec reconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées dans les. villes princi*-
�( 19 ) .
_
.
pales. Les daines charitables qui en faisoient partie form oient une société particulière, et parfaitement lib re ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le , n’étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ie u x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m êm e, faire respecter sa m émoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne 'peut l ’espérer qu’autant
qu’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernem ent.
'
L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune delà tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelle
son n eveu, père de l ’in t i m é , et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelle p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelle
fils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
1774. A la vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou , de la Bartassière, et du fief de Clavières.
Ces deux premiers domaines ne s’élèyent point à une
C 4
�C 20 )
Sommede 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im pro
prement de fief, puisqu’il ne l’a jamais é té , ne vaut pas
la même somme. Il n’a fait aucune disposition, et tout
ce qu’ont dit les appelans, page 9 de leur m ém oire, 11e
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
P o u rqu oi dire encore que la dame G alieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proclies : elle n’en avo it
aucun dans la ville d’À u rilla c , qui fût au même degré.
L e sieur Capelle p è re , neveu du sieur G a lie u , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la nature, pour se ser
v ir des expressions des appelans , appeloient personnel
lem ent le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G ria lo u , qui faisoit partie de ses
propriétés, et q u i, dans l ’état actuel, ne produit pas 800 fr„
de rente*
A la page 12 du m ém oire, on prétend que l ’Œ u v re
de la m iséricorde de la ville de Figeac avoit été payée du
legs porté p a r le testament, et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac a voient des lettres**
patentes. M ais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que l’Œ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de iilles de l’éta
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d>un siè cle, jouissoit d’une existence légale, et en voyoit
¿es sceurs de son ordre dans un© foule de villes.
L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14? Q110 niadame deFontanges, se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, 'avoit fait des dé
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�( 21 )
absolument faux et controuvé : on peut môme assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G a lie u , la
société des Dames de la m iséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fuit aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n ’ont été remis- au fils qu’après la m ort du
p è re, et il n’en jouit que depuis iy g 5 . Si le sieur Capelle
père s’opposa , en 179 2 , à la vente de quelques immeu
bles, c’est que déjà le sieur Gayla en avoit vendu pour
58ooo
assignats, dont il n ’a fait aucun u sage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papiei'-monnoie.
L e s membres du bureau de bienfaisance p r é t e n d e n t ,
page 19 , qu’ils ne peuvent oifrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienlaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
ch arité, de leur piété : les q u êtes, les aum ônes, les dons
m anuels, doivent composer principalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
l ’unique but de leur établissement.'
r
Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le point de vue de l’intérêt public }
car s’il faut en croire les administrateurs , qui paroissent
avoir des v u es.é lev é e s, leur.cause ®st une question de
droit public.
�( 23 )
M a is com m ent Tordre et le droit -public seroievt-ïls
en suspens ( pour se servir des termes des app elon s),
parce que le legs de 80000 fï\ fait à l’Œ uvre de Ici misé
ricorde serait contesté?
■ Q u’étoit l ’Œ u vre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et'
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établissemens étoient bornés à certains lieux et à
certains tem ps; ils n’entroient point dans le système de
l ’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliei’s , lorsqu’il s’agissoit de rem édier aux m aux
d une disette, d une epidemie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations m om entanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portan t, parce
qu’elles avoient des vues vraim ent utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrem ent volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s , des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible que , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; cest toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cesse, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’ecrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�C 23 3
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution et le
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu Fempêclier pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se vo ir
« privées de leur fortune , par les dispositions que les
« liommes ont à former des établissemens nouveaux qui
« leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos
« térité avec le titre de fondateurs. L e meilleur usage
« que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
« importante, est de concilier autant qu’il est possible
« l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
On aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit; mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit incom pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
;
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur mémoire l’arrêté des consuls, en date'
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. I/article 5 de
cet arrêté porte, « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des héritiers , les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablement
« autoriser dans les formes voulues par les précédons
« arrêtés. »
’
�( 24 )
Il est bien évid en t, d’après cet article, que l ’a rrêté,
comme l’ont dit les premiers ju g es, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
de renvoyer devant les trib u n au x, pour prononcer sur
les contestations qui pou voient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvex-nement, comme ou veut le prétendre,
çût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’em ploi en cas que
l ’on reçoive. Il en est de cet a rrê té , comme il en étoit
autrefois des lettres de bénéiice d?inventaire ou des let
tres de restitution. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition
nellement une succession, soit pour se pou rvoir contre
un engagement indiscrètement contracté. Mais pour
qu’elles eussent leur ex écu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les tribunaux , qui n’en px’ononçoient l’enté
rinem ent qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs. A uroit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non com m uniquée , un arrêté qui les* autorise,
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en connoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les trib u n a u x , en cas
de contestation, si le legs doit etre ou non acquitté. T e lle
est
�c
*5 )
_
est la seule idée raisonnable, le seul point de vue sous
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoierit une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugneroit à tous les prin
cipes de lDoerté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le m érite de la
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit
de réform er les actes du go u vern em en t, que ce n’est
point à lu i ci diriger le gouvernail de f état. Ces expres
sions im propres sont absolument vides de sens. Il faudroit
•au moins rayer l’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vain
le gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
lë droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il
s'a git, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter.
; Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;
mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce qui
a'rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice , la quotité du legs,
par exemple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour recevoir com m e pour demander fait partie
de ce même droit public.
' Il est assez difficile de com prendre ce que les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. O n ne conteste
pàs la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seroient
confiés depuis leur création. O n sait que le gouvernem ent
D
�C
)
seul* s’est, réservé le droit de .les y autoriser, et ce n’est pas>
ce que les juges de Sain t-Flour, ont examiné. Ils ont seule
m ent décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avo it été fait, puisque ce bureau n’existoit
pas l o r s - d u décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des. dames pieuses à laquelle le legs avoit été,
fa it:, étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelons •eux-mêmes ,;les premiers juges avoient droit de
connpître de la validité du testament , de la capacité de
disposer et de la quotité ,du le g s, on ne voit pas comment,
ils n’auroient pas eu. le droit de prononcer sur la validité
de ce meme legs,, comment il auroit été interdit à l’iié-riticr de discuter devant les tribunaux la capacité de la'
testatriee ou. du légataire..
-, O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé—
tencej'pour s’occuper de la. validité du legs ou.fondation!
de la dam e-G alieu,; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en l’evenir, à i ’édit de 1749,, qui fait la loi dans cettematière.
■. ..
/
]D’a près l’article 1". de cet é d it, il ne peut être forméaucun établissement qu’en vertu- de lettres-patentes enre
gistrées .dans les cours. Sous ce mot gén éral,d’établisse
ment. , ■
on y: com.prend nominativement les Ziospices y,
congrégations ,, confréries hôpita ux ,. etc, .
.
L ’art. 2 défend de faire à l’avenir aucunes dispositions
par acte de derniere volonté pour, fonder un nouvel, éta
blissement,, ou au p,r°fit des personnes qui seroient ch ar-'
gées de le form er , le tout à peine de n u llité, ce qui sera,
observé quand même la disposition seroil faite à la ch arged’obtenir des lettres-patentes..
�( 27 )
. .
■ L ’article g déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pouiToicnt avoir été faits en faveur des établissemens uon
autorisés, directement ou indirectem ent; et tons ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant touté prescription , tous consentemens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnés à l’exécution de
ces actes ou dispositions,
' Par l’article 10 , les enfans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions, à réclamer les biens par eux
^donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,a vec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
r Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’éloit qu’ une association libre non
a p p ro u vée, une congrégation sous -prétexte d’ h o sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de leitres-patentes : donc
les dispositions faites ù son profit, directement ou indi
rectement , à elle-même ou à ceux qui l’administrent 7
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pour-roit en réclamer la restitution, si le legs avoit été p ayé,
nonobstant tou te prescription , toute approbation expresse
Q.Utacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des >
termes irritans des articles 9 et xo de l’édit dé 1749. ' .
' Les administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable. Ce n’est point à ¥ Œ uvre de la m iséricorde que x
‘
D a
*
�.
.
. c 28
}
le legs A 6tê fa it,’ mais bien a u x pauvres dé l’Œ uvre.' Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
r
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait â l’Œ uvre. Civibus
« civitatis legatum, velJldei com m issum , datum ciçita ti
« relictum videtur, loi 2 , D e rébus dubüs. L a lettre
« du testam ent, con tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lég u é , car ce n’est que les re-*
« venus'dés 80000’^" qui doivent être employés à soulager
« les pauvres que l’Œ uvre a coutume d’assister; et p ar
« qui doivent-ils être employés ? par l ’Œ u v re ,q u i a cou—
a tume de les assister. Ce n’est point aux p au vres, mai»
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’uner
« rente annuelle envers les Frères macédons , d’une fon
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la v ille
«
a
«
«
«
«
«
«
cc
d’A u rillac. Ce n’est point aux pauvres qu’on a légué ,
puisque ce n’est point eux qui peuvent dem ander,
recevoir et quittancer. Il n’y a pas même fidéicommis ,*
car ils n’auront jamais de droit et d’action pour posséder ; c’est pour leur soulagem ent, mais ce n’est pas sur'
eux que l’on a fondé. Ils sont l’objet et non les dépositaires de la fondation : ce n ’est point eux q u i forment
le corps et la congrégation de l’Œ u vre de la m iséri-:
c o r d e , mais bien les pieuses dames qui administroient
« cette Œ u vre ; £ar les pauvres n’auront jamais de puis« sance et de d ro it, ni dans ^administration , ni contre^
« les administrateurs. »
Xæs administrateurs invoquent l’article 3 de l’édit de
1749 ? cl u* excepte les fondations particulières, qüi ne ten.-* '
�( 29 )
droient à rétablissement d’aucun nouveau corp s, college
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou seculiers, etc. A 1 égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sui les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans.
ces exceptions , les appelans ajoutent : La révolution n a
point permis aux tuteurs des pauvres de rem plir la fo imalité de l’hom ologation, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette hom ologation.
Cette objection, souvent renouvelée , et toujours detruite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l ’exception portée par l ’article 3 étoit.
étrangère à la cause, puisque la disposition est faite au^
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas, disent-ils, l’exception seroit en contradiction avec
l ’article 9 de l’édit ; ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœ u de la l o i , des établissemens q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de moyens suffi sans.
L ’article 3 ne dispense de la formalité des lettres-pnten
tes , auxquelles il substitue l’h o m o lo g a tio n , que les ion
dations particulières et les actes qui les c o n tie n n e n t , et
non les corps à qui elles sont confiées. Dos font ations
confiées à un corps non approuvé tendent n< cessai] <m< nt
à établir un nouveau corps, contre la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�(
30
)
t
^
O n poiuToît citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’hériLier. M . de Séguiran,
évêque de N e v e r s , fit son testament le 3 avril 1789 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient em ployés
à l’exécution des établissemens de charité qu’il avoit coxn-r
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’ instruction et charité chrétienne, et des fonds néces^
saires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif1, ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible a ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans le rapport qui fut
fait au conseil des Cinq-cents, le 21 germinal an 6 , par.
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise à l’h éritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
p o u v o it ê t r e demandé, etle nouvel ordre de chosesen ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie
p ;n' conséquent le legs doit être-reversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�( 3T )
mais le sieur Capelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande aiïinité entre cette espèce etcelle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évêque de N evers, la testatrice n est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivran ce, elles n’en
ont jamais été saisies; le nouvel ordre de choses a changé
la destination du legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprim és; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pou rroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontangcs , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués à une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. I l ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que les appelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée en acquisition
de reu tessu r l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éra l, comme les bureaux de bienfaisance,
ne peuvent aujourd’hui recevoir des capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’intérêt à quatre pour cent; oui
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u ’im porte que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la miséx-icorde assistoient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré qu’ elle vouloît exé
cuter les pieux desseins de son fr è r e , elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les unes ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
'
Les appelans, qui veulent faire triom pher la vérité par
toutes les arm es de la p a ro le, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’ A u r illa c , sans autre explica~
tion , personne ne douteroit qu’il ne fût valable. M ais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
Les pnuvres forment un corps irrégu lier, qui n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoir. IL faut un inter
m édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de letat. Si le corps ou l’hos
pice 11’est pas fondé en vert,u de lettres-patentes, le legs
est caduc, et revient à l’héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749- Bientôt les appelans s’égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué un legs fait aux p a u vres, ilnuroit au
torisé
�( 53)
torisé les Dames de la m iséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droi(
public ; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer sou ..
choix.
•
.
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignore
où les appelans ont pu les puiser. L a règle la plus cer-,
taine en matière de testamens, c'est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions ; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l ’exé
cu tio n , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.,
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a ses limites : comme elle doit respecter les pro
priétés , efle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit p u b lic , ce n’est qu’en ce sens , que l a ,
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon
dation faite par la dame G-alieu, le legs ne pouvoifc
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le i-ecevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespatentes.
L ’G iuvre de la miséricorde n’avoit aucune existence
légale. V oudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs •, ils conviennent qu’il Fal—
loit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an dix j et vouloir qu’un arrêté, postérieur
'
E
'
*
�C 34 )
de treize années à l’ouverture du legs, puisse faire re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fo rtu n es, supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner un effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du»
le g s , ou a présumé le consentement de l’héi’itier à en
verser le montant.
«
/ Il est contre toutes les règles , contre toutes les idées
l’eçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvertr
en 1789? puisse être réglé par' les lois actuelles; qu’ un,
legs essentiellement nul dans l’ancien oi*dre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’ une libéralité
faite à l’Œ iivre de la miséricorde depuis 1785 , puis e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur Câpellë ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se •trouve dans une position si dif->
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? l^a fortune
de sa bienfaitrice a éprouvé une dim inution si considé
rable depuis la rév o lu tio n , qu’elle suffiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice'? eû t-elle'été aussi lib érale,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son h éritier; elle ne suppose aucune di
m inution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
à l’acquittement des legs, pendant la.m inorité de son hé-
�( 35 h
#
ritier. Si cile, permet, de vendre quelques • im m eubles,
elle désigne les moins -précieux -, .encore a-t-elle excédé
ses pouvoirs en ce p o in t, parce que c’est éluder la dis-,
position des r.rt:cles 1 4 i 5 et 16 de l’édit de 1749.
(
.-E t cependant-, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’acquitter l e ’ legs de 80000 f n , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
q u ’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
, .
D ’après ces considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’affoiblissent pas les moyens p rin cip au x, le .sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance, établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères macédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours à dom icile ; dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
2°. Il y a encore à prendre sur le legs .pareille somme
de 20000 f r . , dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
.
.
�( 35 3
.
3®. E t toujours dans l’hypothèse que le surplus du
legs pourroit être e x ig é , le sieur Gapelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être employée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir q u ’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes 1
ce n’est pas là ce quTa entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoiènt dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose que des rentes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l ’article 13
de la déclaration du 20 juillet 176 2 , enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiers et représentans des.
donateurs ou testateurs à donner, en payem ent, des rem
boursemens des rentes de la nature de celles dont if est
perm is a u x gens de m ain-m orte de f a i r e ta c q u is itio n ,
par Varticle 18 de Védit de 1749. C e subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être refusé à Pintimé ; il a pour lui
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vig u eu r, et qui ont dû régir le legs dont il s’agit.
40. L e sieur Capelle est encore lé maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. , O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de l’hérédité; qu’elle se prend eu'égard’
à la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.'
h o i 30 , lo i 7 3 , ad J'aie. §. 4 , a u .C o d .
’
T o u t héritier testamentaire ou ah intestat a le droit
�( 37
'
e
de la distraire, lorsqu’il a été fait inventaire; et, dans
l ’espèce, cette formalité a été rem p lie.'E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6 ,a d fa lc . §. i , au Cod. E t le sieur Capelle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
:
5 °. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l ’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; on
n e peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en prem ière instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le rem boursement; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
M ais c’ est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considération peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
fiur une vaste m er, et dont l’ utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les fféctiotrs nobles et généreuses
s’opposent à ce qu’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’intérêt public. L 'h om m e d ’état 11e
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
£3
�particulières, qui absorberoient à la longue
toutes les propriétés. L 'hom m e religieux vient au secours
de ses semblables ; et garde le silence sur ses bienfaits.
L ’ h o m m e d u m o n d e pense que les fondations sont presque toujours des-monumens de van ité et d’o rg u eil, et
les apprécie à le ur-juste valeur. L e m agistrat, impassible
com m e la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
te n tio n sur les questions qui lui sont soum ises et ne
-fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les hommes sont véritablem ent 'égaux
-en droits.
fondation
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
M e. - M A R i E , a v o ué,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité d'un legs de 80000 francs, fait à l’œuvre de la Miséricorde établie en la ville d'Aurillac. Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53717/BCU_Factums_M0218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53385/BCU_Factums_G2015.pdf
8aef37c30d916dc063ce723739530f8f
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
D ame A nne-É milie D E F É L IX , veuve de Claude-FrançoisLéon d e Simiane, demanderesse en maintenue de saisiearrêt ; appelante;
CONTRE
D
M a r g u e r i t e D E C H A R D O N , et autres, dem an
deurs en p arta ge et en nullité de saisie-a rrêt, in tim és;
ame
Et contre Sieur J e a N-BAPTISTE D E C H A M P F L O U R ,
et autres, défendeurs au partage intimés ;
,
Et encore contre J a CQUES-MARIE L A V I G N E et JEAN
,
P I R E L , habitans de la ville d’Am bert défendeurs et
intimés.
i
�C O U R D ’A P P E L
M
É
M
O
I
R
E
de
R I O M.
POUR
AN
D ame A nne - É m il ie D E F É L I X , veuve de Sieur Claude-François
L é on de S im ia n e,
l8 lO .
propriétaire à Collongues, arrondissement
d ’A ix , département des B o u c h e s -d u -R h ô n e , demanderesse en
maintenue de saisie a r r ê t , et appelante
y.
CONTRE
D
am e
M
a r g u e r it e
'
D E CH A R D 0 N , veuve d u S ie u r Jacques-F rançois
de M on ta g n ier , ancien m a g istra t ; C l a u d e - A
D O N ; D em oiselle A
nne
DE
n t o in e - J o s e p h
C H A R D O N , D am e P
D E CHAR
e r r ette
DE
CH A R D O N , veuve d u S ieur V a llette de R o c h e v e rt, tous propriétaires ,
h a b ita n s de la ville de R iom. , se q u a lifia n t héritiers sous bénéfice d ’inventaire
de d êfu n t e D a m e M a rie—Jea nne D e l a i r e . , ancienne relitgieuse , p o u r la ligne
m aternelle , dem andeurs en p a rta g e et en n u llité de saisie-arrêt , in tim és ;
E t contre Dame J e a n n e M a r i e D E CH A M P F L O U R , veuve du Sieur P aulFrançois de Montrozier ; Sieur J e a n - B a p t is t e D E CH A M P F L 0 U R ;
Dame M a r i e -A n n e -Fé l ic it e D E F R Ê D E F O N T , et Sieur Jean-Jacques
de Rochelle, son m ari; Demoiselle G a b r î e l l e D U R A N D - D E - P É R I G N A T , fille majeure; et Dame M a r i e D U R A N D , ancienne religieuse, tous
propriétaires , habitans de la ville de Clermont-Ferrand se qualifiant héritiers
bénéficiaires de ladite Dame religieuse D ELAIRE , pour la ligne paternelle ,
défendeurs au partage , et aussi demandeurs en nullité de saisie arrêt, intimés;
E t encore contre Sieur J acq u es -M a r i e L A V I G N E , notaire impérial, et
Sieur J e a n P I R E L , m archand, habitans de la ville d A m ber t , tiers
sa isis, appelés en cause défendeurs et intimés.
,
,
QUESTIONS.
L
e s
lois du
R eligieu x cl R elig ieuses qui par l'effet
5
é tr o a c tif d e s
r
brumaire et du 17 n ivôse un 2 , ont repris les succes-
v
�sions de leurs parcns , qui avaient déjà été appréhendées p a r
des héritiers p lu s éloig n és, ont-ils été soutnis à la restitution ,
après Vabolition de cet effet rétroactif , lorsque les héritiers réta
blis se sont trouvés représentés p a r la n a tio n , comme inscrits
sur la liste des émigrés ?
II. L a nation , dans ce cas p a rticu lier , n ’ est-elle, p a s censée
avoir renoncé à toute recherche , n’avoir point voulu user dubéné fic c des lois du y fru ctid or an 5 et du 5 vendémiaire an 4
enfin avoir consenti tacitement à une compensation dont le
résultat était de laisser aux religieux et religieuses les succes
sions dont on vient de p a r le r , en échange et pour se rédimer
des pensions que la nation s’ élait obligée de leur p a y er ?
III. L e sénatus-consulte du G flo r é a l un 10 , n 'a - t -il rendu
aux émigrés am nistiés ou ci leurs h éritiers , que les biens qui
se trouvaient dans les mains de la nation par la voie du séquestre >
au moment de V a m nistie , et non les biens q u ’ elle n'aurait p as
séquestrés , à cause de la compensation ci-dessus présumée ?
Ces questions se sont élevées à l’occasion d’une saisie-arrêt faite à
la requête de la Dame veuve de S im ia n e , crcaucièle considérable
d ’IIector de Simiane
son cousin , dons les mains des Sieurs Pirel et
L a v ig n e , acquéreurs de maisons et domaines situés à Ambert cl aux
environ s, lesquels Hector de Simiane , depuis mort en élat d’émi
gration, avait valablement recueillis dans la succession de Daine A n ne
Delaire , épouse du Sieur de Clary , décédée lo a8 octobre i y y i }
comme son héritier paternel.
L e Tribunal civil de Clermont-Ï’errand, par jugement c o n t r a d i c
toire du 9 août 180g , a décidé la négative do la première question
et l’atlirmative des deux a u t r e s , et n déclaré nulle lu s a is ie - a r r ê t
de la Dame veuve de S im iane, (pii, convaincue de» erieurs pal
pables que renferme ce ju g e m e n t, et dont ello est v ic t im e , n’a
point hesite û soumettre ces questions a 1 autorité de lu (Tour por
la voie d ’un appel régulier.
�( 5 )
F A I T S .
F ran çois*L ouis-IIector de Simiane , né à Clerm ont-Ferrand le
i . ' r décembre 1 7 1 7 , a quitté son domicile d’origine le 524 août 1787
pour aller demeurer à Avignon , d’où il est sorti le 1 2 janviei 1 7g 1 , à
l ’âge de plus de 75 ans > effrayé des mouvemens impétueux qui
ont agité le ci-devant Comtat avant sa réunion a la p ra n c e , pro
noncée le i 4 septembre de la même année.
C e vie illa rd , après avoir vainement cherché le repos d ’abord à
M enton , dans la ci-devant principauté de M o n aco, fut terminer sa
carrière le 12 prairial an 3 à A s t i , dans la ci-devant principauté
de Montferrat.
Dans l’intervale qui s’est écoulé depuis sa sortie d ’Avignon jus
qu’ à son d é cè s , il importe de remarquer ce qui s’est passé à son
sujet.
L e 28 o c to b re 1 7 9 1 , D a in e A n ne D e la ir e , épouse du Sieur
Charles de Clary , p résid en t en la cour des aides do C le r in o n t ,
décédée sans postérité, avait une s œ u r religieuse qui ne pouvait
dès-lors lui succéder , en sorte que ses héritiers naturels et légi
times étaient le Sieur H ector de Simiane, son co u sin , de l’estoc
paternel , et le Sieur de Chardon , son cousin , de l’estoc maternel,
qu’elle avait de plus institués ses héritiers universels , chacun dans
leur lig n e , par un testament olographe du 20 juin 1 7 8 7 , et un
codicile de la veille de sa m o r t , à la charge d’acquitter 24 o,ooo liv.
de legs, savoir; g 5 ,ooo
H y.
aux hôpitaux d e C le r m o n t e t d’Am bert,
20,000 liv. aux Sieurs de Féligonde et liellègue-Eujens, ses exé
cuteurs testamentaires., et le surplus à divers pareils , ù plusieurs
ecclésiastiques , à ses amis et à diverses c o m m u n a u t é s religieuses.
I.c Sieur Hector de Simiane ayant oppris le décès de la Dame
de C l a r y , appréhenda, lu portion paternelle de sa succession, et en
acquitter les droits , les 18 et ü5 aviil 17»)a , “ ux bureaux do
Clerniont et d’A m b e r t , lieux do la situation des Liens.
A la fin d(. cette même année, le S ieur H e c t o r de Simiane fut
inscrit sur la liste des émigrés duns le département de Vaucluse t
et le iéquebtre national fut apposé sur ses biens d ’Avignofi et sur
�( 6
)
ceux qu’il avait recueillis de la Dame de C lary et qui sont situés
dans le district d ’A m b e r t, département du P uy-de-D ôm e.
L e s choses étaient en cet é t a t , lorsque parut la loi du 5 brumaire
an 2 , dont l’art. 4 appelle les ci-devant religieux et religieuses à
recueillir les successions qui leur sont échues à compter du i 4
juillet 1789. De ce moment et par l’efFet rétroactif de cette l o i ,
la Dame religieuse Delaire se trouva investie de l ’universalité de
la succession de la Dame de Clary sa s œ u r , comme si elle lui eût
succédé immédiatement au 28 octobre 1791 , époque de son décès,
comme plus proche héritière excluant nécessairement ses cousins
de Simiane et de Chardon.
Il n ’y avait plus qu’à faire le ve r le séquestre apposé surles biens
paternels situés dans Je district d’A m b e r t , puisque la loi les avait
fait changer de maître, et c’est aussi ce qui eut lieu, sur la simple
pétition de la religieuse D e la ir e , et sans la moindre difficulté.
V oici l’arrêté de main-levée pure et simple de ce séquestre :
V u le mémoire et les pièces y annexées , le procureur-syndic
entendu, les administrateurs du district d’ Ambert réunis en surveil
lance permanente et tenant séance p ublique, « considérant que le
» séquestre n ’avait été mis sur les biens délaissés par le décès
v d ’Anne Delaire , femme
» S im ia n e , son c o u s in ,
C la r y , que parce que
qui s'en
disait h é r i t ie r ,
le
nommé
est suspecté
» d ’émigration ;
» Considérant que celte An ne Delaire n ’est morte que le 27
>* octobre
1791 , et que par l ’art.
4 du décret du 5 brumairo
» d e r n ie r , les ci-devan t religieux et religieuses sont appelés à
)) recueillir les sucocsMons qui leur sont échues à compter du i 4
» juillet 1789;
)j C o n sid é ran t qu’aux termes de celte l o i , Jeanne D elaire, ci-
)> devant ursuline do Montferrand , est habile à hériter d’Anno
» Delaire , sa
soeur ,
préférablement à Simiane , parent plus
}> éloigné ;
)> Considérant q u e , par les difFercns actes joints au m ém oire, il
» est
établi
que
Jeanne Delaire est
«(rur
germaine
d’Anno
» D elaire, femme C l a r y , et qu’elle a accepté sa succession, »
Accordent à Joanno Delaire la innin-levéc du séquestre mi# suc
�(7)
les biens délaissés par la m ort d’Anne D e laire , sa sœur , dont elle
est héritière , à la charge par elle de payer tous les frais auxquels
le séquestre a donné lie u , suivant le règlement qui en sera lait par
l ’administration. Fait le 8 nivôse , l’an 2 de la république une et
indivisible. Signé P e r r e t , Cisterne , D u rif, Rigodon , Crosmarie.
L a loi du 17 nivôse an 2 vint encoretco n firm er, par ses articles
1 et 5 , les dispositions de la loi du 5 brumaire précédent.
Il paraît q u e , p e n d a n t l’investiture donnee par ces lois à la reli
gieuse Delaire des biens de la Dame de C la r y , sa s œ u r , elle n’a
aliéné qu’une maison sise place du T errail a Clermont. Cette mai
son qui appartenait à l’eitoc paternel, fut vendue par elle-même le
a 5 pluviôse an 5 .
A celte é p o q u e , le Sieur de Shniane était occupé à adresser ses
réclam ations , tant au gouvernement qu’aux autorités locales , sur
l ’injustice qu’on lui avait faite en portant son nom sur la liste des
é m ig ré s, étant sorti d’Avignon avant sa réunion à la F r a n ce , et se
trouvant dans les cas d'exception énoncés aux articles 5 et 8 du litre
prem ier de la loi du a 5 brumaire an 5 , portant révision des lois
précédentes sur les émigrés. Il obtint en effet le 8 ventôse an 5 un
arrêté du comité de législation de la Convention
qui lui accordait
un sursis de six décades pour se pourvoir en radiation de son nom de
la liste des émigrés
Cependant
et se procurer les pièces nécessaires.
le séquestre
existait toujours sur ses
propriétés
d’Avignon , et il n’avait été levé sur ses propriétés d ’A m b e r t , comme
on l ’a vu , qu’à cause du changement de mains que ces propriétés
avaient éprouve par le rappel de la religieuse Delaire à la succes
sion de la Danio de C l a r y , sa s œ u r , rappel qui n ’était dû qu’à
l'effet rétroactif des lois de brumaire et nivôse. C et effet r é t r o a c t i f
avait excité des plaintes universelles, qui furent e n f i n e n t e n d u e s par
la Convention nationale.
Le 5 floréal an 3 , parut la loi qui suspendit toute action intentée
°u procédure commencée à l’occasion de reflet rétroactif de la loi de
nivose; cette loi fit préjuger facilement que cet effet rétroactif 110
tarderait pas à disparaître.
Néanmoins , tel fut le sort d’ H e c to r d e Simianc , qu’il mourut le
l u prairial an S a u r uno terre étrangère , comme il a été déjà d i t ,
�( 8 )
sans avoir pu connaître le résultat de ses réclamations touchant l ’ins
cription de son nom sur la liste des é m ig ré s , ni voir l’abolition
formelle de 1’eflet rétroactif des lois de brumaire et nivôse.
Ses héritiers naturels et légitimes étaient la religieuse D e laire , du
côté m a te rn el, et la famille de la Tour-\ idaud de G r e n o b 'e , du côté
paternel.
A près avoir fait remarquer ce qui s’est passé à l’égard d’IIector de
S im ia n e, depuis s a s o r t i e d’Avignon jusqu’à son d écès, il n’est pas
moins essentiel de remarquer tout ce qui s’est passé depuis sa mort ,
parce que tous ces faits ont un rapport direct à la décision do cette
cause.
Le
fructidor an 5 , la Convention décréta que les lois des 5 bru
maire et 17 nivôse an 2 , concernant les divers mode&de transmission
des biens dans les familles, n ’auraien t d ’eflet q u ’à c o m p te r des
époques de leur p rom u lgatio n .
Cette loi ne fit-elle pas évanouir à l ’instant mêm e le titre que la
loi du 5 brumaire an 2 , par son effet rétroactif
avait conféré à la
religieuse Delaire d ’héritière de la D a m ed e C lary } sa sœ u r, morte
le 28 octobre 17(1! ?
L e s héritiers légitimes delà Dame de Clary , au tems de sa m o r t ,
ne reprirent-ils pas à l’instant mémo leurs titres et leurs droits dont
ils avaient été déchus ? c ’est ce quo nous mirons bientôt à oxaminer.
Duus ce mémo mois de fru ctid o r, les administrations du district
d’Avignon et du département de Y a u clu so ,
reconnaissant que le
Sieur de Simiane était dans les cas d’oxeeptiou portes aux articles
3 et & du titre premier de la loi du a/> bçiimniro an 5 sur les ¿-migré«.,
ordonnèrent que son nom serait rayé' do la lis-ta des uniigrés. Ces
arrêtés de radiation des îa et *j5 fructidor furent sou mis. à la sanction
du gouvernement. Dans l’intervalo , parut la loi du .>veiuluminiro an
4
contenant le m o d e d’exécution de la loi du 9 fruclidor an 3 ,
ubolilive de lcffet rétroactif des lyis de brumaire et nivôse.
l/article premier maintient les ventes et los hypothèques acquises
de bonne foi sur les biens compris dan» Je* dispositions rapportées
par la loi du q fruclidor nn 5 , pourvu qu’elles aient uno date ceiïtuiiic poslénuurt» à lu promulgation.des lois, de beunmiro <?t< nivôso
un i , mujfc uiitérieurc ù lu publication'do la loi. dit 5 lloiiéaliaii .1 , sauf
�( 9 )
le recours des héritiers rétablis vers les personnes déchues ; mais
toutes aliénations , hypothèques et dispositions desdils biens à titre
onéreux ou g r a tu it, postérieures à la promulgation de ladite loi du
5 floréal dernier , sont nulles.
L ’article 2 ne permet pas aux héritiers rétablis de réclamer les
fruits et intérêts perçus avant In publication de la loi du 5 floréal.
L ’article 5 veut que les héritiers rétablis reçoivent les biens en
l ’état où ils se tro u ve n t, s a u f l’action pour abatis de bois futaie.
L ’article 4 ordonne à ceux qui sont obligés de re stitu er, de tenir
com pte du p rix qu’ils auront retiré de leurs aliénations ou de leur
va le u r, au teins où ils les ont recueillis , s’ils sont autrement sortis
de leurs m a in s, et autorise les personnes rétablies à exercer toutes
actions nécessaires qui appartenaient à ceux qui ont aliéné à titie
onéreux ou gratuit.
L ’article 5 maintient les partages entre la République et les per
sonnes déchues qui étaient ci-devant religieux ou religieuses.
A pres la publication de celte loi , la religieuse Delaire pouvait^
elle se dispenser de restituer tous les biens composant la succession
de la Dame de Clary , sa s œ u r , aux héritiers rétablis ?
A l ’égard du Sieur de Chardon , héritier m a t e r n e l, elle n’a fait
aucune difficulté de lui rendre tous les biens maternels; m ais, à
l ’égard des biens paternels , comme lallation garda le silence , elle
continua sa jouissance.
Cependant , comme le nom du Sieur H ector de Simiane était
toujours sur la liste des é m ig rés, et que le gouvernement n ’avait pas
encore statué sur les arrêtés des 12 e t a 5 fructidor an 5 des adminis
trations de Vnuclusc , qui ordonnaient sa radiation , 011 demunde m ,
d ’après cette loi du 5 vendémiaire an '» , la religieuse Delaire aurait
pu se re fu se ra la restitution d e s biens paternels , si la n o t i o n les eut
réclamés , et eût voulu y apposer le séquestre , com m e représentant
H ector de S im ia n e , encore réputé émigré
, e t q u i était évidemment
1 h é r i t i e r paternel rétabli «le la Dame do Clary.
C ’est oticoro ce qu’il faudra’ examiner.
L e qH nivôse an 5 , lu Directoire e x e cu tif) sur la réclamation du
Sieur I <nlour-Yidatid et de la religieuse Delaire , cohéritiers d’IIector
de S im ia n e, statuant sur les arrêtés du district d’Avignou et du
À
�( 10
)
département de Vniicluse des 12 et i 5 fructidor an 3 , relatifs â
a
radiation du nom d ’IIector de Simiane de la liste des émigrés ,
prit l'arrêté suivant :
« Considérant que Fran çois-L ou is-H eclor de Sim iane, ci-devant
domicilié à A v ig n o n , est parti de cette commune le 12 janvier
» 1791 , époque antérieure à la réunion du ci-devant Comtat à la
» F ran ce , pour aller voyager en pays étranger; que rien 11e cons» taie qu’il ait formé , a v a n t cette é p o q u e , un établissement en
» pays étranger , et qu’il est par conséquent dans l’ exception
v portée par les art. 5 et 8 du titre 1 . " de la loi du 25 brumaire
)> an 3 , après avoir entendu le rapport du ministre de la police
)) générale,
A r r ê t e : i.° que le nom de F ran ço is-L o u is-IIe c to r de Simiane
sera défin itivem en t r a y é de toutes listes des ém igrés où il aurait
p u être inscrit} 2.0 qu ’il sera sursis à toutes ventes de ses biens qui
resteraient sous la main de la nation ; que le séquestre établi sur
ses biens meubles et im m eubles, sera maintenu jusqu’à la paix ,
conformément aux art. 5 et 8 de la loi du 25 brumaire
an 3 ;
5 .® qu’il lui est défendu de rentrer en Franco tdnt que durera
la guerre , ù peine d’être détenu par mesure de sûreté générale
jusqu’à la p a i x , conformément à l’art. 5 de la loi du s 5 brumaire
an 3 .
C et arrêté n ’a - t - i l pas fait cesser la mort
civile d’IIcctor do
Simiane ?
L e séquestre de confiscation qui subsistait encore sur scs biens
d ’Avignon , n ’u-t-il pns été changé en fchnpio séquestre de sûreté
et de conservation ?
Si H ector do Simiano eût encore vécu à celle époque , la reli
gieuse Delaire qui détenait toujours les biens paternels do la Dame
de C la r y , sa s œ u r , dont il était l’héritier r é ta b li, aurait-elle pu
raisonnablement lui en refuser la restitution, sauf à la nation à y
poser le séqueslto do surete et de conservation?
La mort civile d ’Ilecto r do Simiane étant effacée par l’arrêté
du Directoiro o x é cu tif, et sa mort naturelle étant connue et cer
taine» « la date du iu prairial an 3 , ses héritiers personnels, ail
tenu do ta m ort, n ’étaient*!!» pfli censé» avoir recueilli scs bierrs
�(
I I )
d’Avignon et d ’A m b e r t , suivant le mode de succession de la loi
de n ivô se , c ’e s t - à - d i r e , moitié pour la religieuse Delaire , h éri
tière pour la ligne m atern elle, et moitié pour la maison Latour\ i d a u d , héritière pour la ligne paternelle ?
T o u t e s ces questions seront exam inées dans la discussion.
Reprenons le cours des faits.
E n e x é c u tio n de l ’arrêté du D ire c to ir e e x é c u t i f , et le
m id o r an
rent
24 t h e r
5 , la religieuse D elaire et le S ieu r L a l o u r - V i d a u d se f i -
7
O
admettre héritiers
bénéficiaires d’IIector de Simiane
jugement du tribunal civil de Vaucluse
par
séant à Carpentras , à la
charge par eux et suivant leurs offres de faire procéder à l’ inven
taire général des biens meubles et im m e u b le s, titres et papiers ,
et documens dépendans de la succession d’IIector de Simiane de
vant SI.* Chainbaud , notaire à A vign on, commis à cet effet; comme
aussi de faire procéder de suite à la vente des meubles et effets
mobiliers devant le même notaire pour être délivrés aux plus of
frants et derniers enchérisseurs , et le p rix en provenant être retiré
par lesdils h éritiers p o u r Faire fonds dans la masse.
A peine la religieuse Delaire et le Sieur L a to u r-V id a u d avaientils eu le tems de rechercher toutes les pièces relatives à la suc
cession d’Iïe cto r de Simiane , qu’ils furent arrêtés par la publica
tion d ’une loi rendue en haine des émigrés d’Avignon et parti
culière à ce pays.
Cette loi du 22 nivôse an G , porte , nrt. 5 , que les liabitans des
ci-devant comté Venaissin et comtat d ’A v ig n o n , dont la radiation
provisoire ou définitive a eu lieu par l’application de la loi du q
iructidor an 5 ( concernant les émigrés d’Avignon ) , ou des articles
<>.» 7 et 8 de la loi du 25 brumaire an 5 , seront réintégrés sur la
lÎ6te générale des émigrés.
l'iii vertu de cette loi , lo d ir e c te u r des dom aines nationaux do
\ üucluse continua le
séquestre
sur les
p ropriétés d ’ M cctor
de
Simiano à Avignon. A lo rs la religieuse D elaire et l e Sieur L a t o u r -
Viduud p rése n tè re n t à l'adm inistration c e n t r a l e une pétition ten
ant
à
ob tenir la levée do ce nouveau séquestre. Ils d o n n èren t
p o u r motifs q u ’ IIe c to r do Sim iane , étant sorti
Comtat avant leu r réunion à la l'r u n c c ,
d Avignon et du
11e p o u v ait
plus ¿tro
�( 12 )
considéré comme véritable émigré, et que d’ailleurs étant décédé même
avant sa radiation défin itive, la loi du 22 nivôse an 6 ne pouvait
lui être applicable.
Cette pétition resta sans réponse.
A cette même é p o q u e , les légataires d e là D am e de C l a r y , q u i ,
depuis le 28 octobre 1791 , avaient pris p atien ce , se déterminè
rent à demander la délivrance de leurs legs , et s’adressèrent à la
Dam e religieuse Delaire et au Sieur de Chardon , détenteurs des
biens de la Dame de Clary.
L e u r citation est du 29 ventôse an 6 , et elle a été suivie d’ un
procès-verbal de n o n - conciliation , où l’on voit que le Sieur de
C hardon et la religieuse Delaire répondent que , d’après l ’article
4 i du chapitre 12 de la coutume d’A u v e r g n e , la Dame de Clary
n ’avait p u disposer par testam en t que du q u a rt de ses biens de
coutume ; q u ’ e n co n sé q u e n ce ils offraient le quart desdits b ie n s ,
plus la totalité de ceux de droit é c r i t , sous la réserve de la quarte
falcidie. On convint d ’experts pour estimer tous les biens com po
sant la succession de la Dam e de Clary.
L e 1 . " germinal an 7 , les experts affirmèrent leur rapport. L e s
biens paternels de la Dame de C lary y sont estimés 280,000 liv. ,
et les biens maternels 108,700 liv.
L e 6 floréal an 1 0 , vint enfin le sénatus-consulte qui amnistie
les émigrés. L ’article 16 porte que les amnistiés ne p o u rro n t, en
aucun cas , et
sous aucun prétexte , attaquer les
portages de
présucccssions , successions , ou autres arrungemens et actes entre
la République et les particuliers , avant lu présente amnistie.
L ’a rticle 17 rend a u x ém igres leurs biens non vendus.
C e sénntus-consullo n’u point empêché la religieuse Delaire do
v e n d re , le 17 ‘lu même mois, une maison sise à A m b e r t , trois
domaines et un pré de réserve dans les environs do celte v ille ,
aux Sieurs l ’irel et Lavigne , moyennant 93,1(10 liv. , quoique ces
immeubles «lissent
été estimé» par les experts ivq, 100 liv. Sur
quoi il c»L « propos d ’observer que les conseils de la religieuse
Delaire , incertains sur scs droits , et ge
méfiant de l ’a v e n ir ,
�( i 3 )
eurent la prévoyance de reculer de dix ans l’époque du paiement.
L e Sieur L atour-Vidaud et la Dame religieuse Delaire , cohéritiers
bénéficiaires de feu H ector de Sim iane, v o ja n t qu’on n’avait fait
aucune réponse à leur pétition touchant la fausse application que
le directeur des domaines nationaux avait faite de la loi du 522
nivôse an 6 , s’empressèrent de présenter à M. le préfet de V au cluse une autre p é titio n , pour être admis aux déclarations p re s
crites par le sénatus-consulte , et par l’arrelé que ce mêm e préfet
avait pris le i 4 du même mois de floréal ; et ils ne doutaient pas
q u ’on ne l e u r rendît su r-le -ch a m p le petit domaine d e l a ^ r i a d e j
puisqu’il n ’avait pas été vendu.
Mais quel fut leur étonnement , lorsqu’ils apprirent que M . le
préfet se proposait de déclarer cet immeuble définitivement natio
nal , pour l ’afTecter à l’établissement
d ’une pépinière nationale ,
et que ce projet était porté à la décision du conseil général du
département !
Aussitôt le Sieur L alour-V idaud et la religieuse Delaire don
nèrent leurs pouvoirs à M*. l'e rra n d , avoué à G r e n o b l e , pour
réclamer auprès du conseil général ; et le 10 prairial an 1 0 , celuici distribua à chaque membre du conseil une nouvelle pétition
imprimée , tendant à faire rejeter le pio jet qui lui était soumis.
Il e x p o s a , au nom des cohéritiers bénéficiaires de feu H ector de
Simiane , qu’il avait été vendu pour plus de onze cent mille francs
de ses biens ; que c’était par une interprétation erronnée de la loi du
22 nivôse an 6 , que le séquestre avait été maintenu sur son domaine
de la T ria d e ; q u e , considérant même feu I lector de Simiane comme
a m n istié, le sénatus-consulte restituait aux amnistiés leurs biens
non vendus et non ufleclés au service p u b lic , qu’ainsi 011 ne pouvait
les priver de ce polit domaine»
Pendant qu’on attendait le résultat de cette n o u v e lle pétition, la
Dame de F é l i x , veuve du Sieur L éon «le Simiane , qui avait été aussi
inscrite su r in liste des é m ig ré s , m a i s q u i en avait rté éliminée pur
arretù «lu ministre «le la police générale du s messidor an y , prit le
25 prairial an 1 0 , tant au bureau des hypothèques d’A m b c rt qu ’au
�i f H -
'( H )
burenu de C le r m o n t , une inscription pour ¡220,000 liv. sur les biens
de feu H ector de Simiane , son cousin; et le 29 messidor su iva n t,
elle fit une saisie-arrêt entre les mains des Sieurs Lavigne et Pirel ,
débiteurs du p rix de leur acquisition.
L e 9 thermidor s u iv a n t , le conseil d'état donna un avis portant
que les prévenus d ’émigration , non rayés définitivement, dont le
décès avait précédé la publication de l’amnistie , pouvaient être
amnistiés; et qu e, comme l’amnistie avait été accordée principa
lement en faveur des familles des é m ig ré s,
il était conforme
a.
l'e sp rit du sénatus-consulte d ’étendre la grâce aux h é r itie r s, quand
la mort a mis le prévenu hors d ’état d ’en profiter. Cet avis fut
approuvé par le prem ier consul.
De ce m o m e n t r, la religieuse
Delaire et le Sieur L atour-V idaud
D
s ’o c c u p è r e n t d ’ob te n ir un b r e v e t d ’am nistie p o u r feu H e c t o r de
S im ian e , et ils l ’ob tin re n t en effet le 2G frim aire an 11 du G r a n d Juge , m in istre de la justice.
L e 4 germinal suivant, le conseiller d ’état ayant le département
des domaines nationaux , écrivit au Préfet de Vaucluse pour l’inviter
à donner les ordres nécessaires pour que les héritiers d ’IIector de
Simiane rentrent dans la jouissance de ses biens.
L e 29 germinal an 1 1 , M. le Préfet de Vaucluse prit un arrêté
en faveur desdits héritiers bénéficiaires, portant m a i n - le v é e du
séquestre.
L e 11 messidor s u iv a n t , la Dame religieuse Delaire est dccedee ,
laissant pour héritiers paternels la fumille de Champflour , et p our
héritiers maternels la famille de Chardon.
L lle avait alors fait disparaître tons les biens dont. H ector do
Simiane avait hérité d e là Dame d e C l a r y , so ilen vendant les uns ,
soit en cédant les autres aux hospices et aux autres légataires de sa
soeur.
L e 3 floréal nn 12 , le Sieur L a t o u r - V i d a u d , en sa qualité
d'héritier paternel sous bénéfice d ’inventaire d ’IIector de Simiane,
l it procéder à la vente du petit domaine de la Triade prés A v i
gnon , au plus offrant et dernier enchérisseur , d ’autorité de jus
tice et devant
lo
notaire c o m m i s
par le jugement du tribunal
civil do Vaucluse du 3* thermidor an 5 , «prés y avoir uppelô
�( i5 )
les créanciers, ainsi que la Dame religieuse Delaire ou ses repré
sentons / e t ce petit
domaine fut adjugé à la D am e veuve
de
S im iane, moyennant 40,000 liv. , quoiqu'il 11 eut été estimé par la
régie de l’enregistrement l’année précédente que 06,000 livL e 8 février 1808 , Jn Dame veuve de Simiane fit assigner devant
le
tribunal civil
d ’Avignon tous
les héritiers de la religieuse
Delaire , cohéritière bénéficiaire dTIector de Simiane , pour voir
liquider ses créances , et êtfe condamnés à les lui payer.
L e 27 décembre de la même annee , la famille de C h a r d o n ,
héritière maternelle de la religieuse Delaire fit assigner devant le
tribunal civil de Clermont la famille de C lia m p flo u r, héritière
p a te rn e lle , pour venir partager sa succession.
L e 18 janvier
1809 , la famille
de Chardon
fit assigner les
Sieurs Lavigne et Pirel d ’A m bert , devant le tribunal civil de
C le r m o n t , en rapport au partage de la succession de la religieuse
Delaire des sommes par eux dues en capital et intérêts du p rix
de la vente qu’elle leur nvait consentie le 17 floréal an 10.]
L e 8 février suivant, le tribunal de C le r m o n t , sur la déclara
tion des Sieurs Lavigne et Pirel qu’ils étaient prêts à se libérer,
en le faisant dire , avec la Dame veuve
de Simiane , ordonna
qu’elle serait mise en cause à la requête de la partie la plus diligente.
L e 18 du même mois , tous les héritiers de la religieuse Delaire ,
à l’exception du Sieur Gérard de Cliampflour o n c le , passèrent au
greffe d’ Avignon leur répudiation à la succession du Sieur de Sim iane, dont cette religieuse était héritière maternelle bénéficiaire,
mais ils se réservèrent la succession de celte religieuse.
L e 8 mars su iv a n t, le jugement de Clermont qui appelait en causo
la D am e veuve de Simiane , lui fut signifié , à la r e q u ê t e des h éri
tiers maternels de la religieuse Uelairo, avec a s s i g n a t i o n pour voir
«nnuller sa saisie-arrêt.
L e iQ du m ém o m o i s , la D a m e veuve do Simiane
tribunal civil d ’A v ig n o n un ju g em en t
obtint
au
contre le S ie u r ( jç r a r d du
ChumpHour oncle , la dame de S t.-D id ie r , mitre cohéi itie re , qui les
condam na à lui p a y e r
7 francs
55 c e n t i m e s , m on ta n t du ses
créances liquidées , au r a p p o r t de M . Don } j u g c - c o n u n i s s a i r e , c l
�-AW( i6 )
sur les conclusions du ministère public , et qui ordonna plus ample
justification des autres créances réclamées par la Dam e veuve do
Simiane.
Enfin , c ’est d ’après l’apperçu de tous ces faits et la jonction do
toutes les demandes , que le tribunal de C le rm o n t, par jugement du
9 août 1 8 0 9 , a statué sur le mérite de la saisie-arrêt de la Dame
veuve de Sim iane, qui était incidente au partage entre les h éri
tiers de la Dame religieuse Delaire.
V oici le texte du jugement dont est appel :
P o in t de droit. — L es biens situés à A m b e r t , dépendant de la
succession de la Dame de C l a r y , vendus aux Sieurs Lavigne et Pirel
p ar Marie-Jeanne Delaire, ont-ils fait partie, de
ceux remis aux
héritiers du Sieur de Simiane , en conséquence de l’arrêté d’amnistie
du 26 frimaire an 1 1 , ou b ie n avaient-ils appartenu définitivement
à ladite M a rie -J e a n n e D e laire ?
L a Dam e de Simiane peut-elle se prévaloir des lois des g fruc
tidor an 5 et 5 vendémiaire an 4 , relatives au rapport de l’efTet
rétroactif des lois des 5 brumaire et 17 nivôse an 2 , pour pré
tendre que lesdits biens étaient de droit restitués par la nation
à la succession dudit de S im ia n e, ou ré su lte -t-il de l’art. 5 de la
loi du 5 vendémiaire et du principe posé en l'art. 2 de celle du
20 mars 1 79 0 , que Jeaune-AÎarie Delaire n’avait jamais perdu la
propriété desdits biens qui lui avaient été délaissés par l ’arrêté
administratif du 8 nivôse an 2 ?
Résulte-t-il des exceptions portées par lesdits deux articles, et
de l’ensemble d’autres lois législatives , quo les ci-devant religieux
et religieuses étaient préférés au fisc ?
Ouïs
les avocats des parties et le procureur impériul en ses
conclusions;
a A t t e n d u , i*n qu H ector de S im ia n e, par son émigration en
y» 1792 et J7<j<ï> avait perdu la propriété des biens qu’il avait
)) recueillis de la succession do la Dame Delaire de Clary , décédée
» en octubro 1791 ;
» Attendu , 2.* qu'en conséquence, lorsque 1’efïct rétroactif delà
» loi du 5 brumaire an a , appela la religieuse Delaire à recueillir
» ces b ien s, qui lui furent remis par arrêté administratif du 8 nivôso
�( 17 ) . .
w an 2 , ce ne fut pas le Sieur de Simiane qui en fut dépouillé,
» puisqu’il l’était d é jà , mais seulement la république qui avait pris
» sa place ;
» A t t e n d u , 5 .“ que le Sieur de Simiane était mort en émigra» tion le 12 prairial an 5 , avant le rapport de 1 effet rétroactif
)) des lois des 5 brumaire et 17 nivose an 2 ; que sa succession
)> était encore celle d’ un émigre , lors de 1 effet rétroactif de ces
» lois par celle du 9 fructidor an 3 et celle du 3 vendémiaire an
)) 4 ; d’où il suit que tous les droits qui en dépendaient, app a rte» naient à la république par droit de confiscation ; que la nation
» ne voulut p a s user de l ’ eJJ'et rétroactif des lois de bruinait c
« et nivôse an 2 à son p r o fit , lorsqu’ il s’ agissait de dépouiller
)) les religieux et religieuses envers lesquels elle s*était redunee
» de la pension q u elle leur f a i s a it , p a r la compensation des
» pensions avec l e s revenus des successions p a r eux recueillies ;
» en conséquence, la nation renonça a la recherche p a r l art.
j
» de la lai du 5 vendémiaire an 4 ;
)) A tte n d u , 4 .° que l’e x -re lig ie u s e D éfaire a conservé en c o n s é )) quence pendant toute sa vie , la libre jouissance, administration
)) et disposition des biens dont il s’agit, et q u ’elle l ’avait spécialement
)) de f a it et de droit , soit lors du sénatus-consulte d ’amnistie du
)> G floréal an 10 , soit lorsque l ’amnistie fut appliquée audit Sieur
» de Sim ia n e en l’an 11 , huit ans après sa m o r t , au profit de ses
» héritiers ;
)> Attendu , 5.° et e n f i n , que dans cet état de c h o s e s , l ’article
» 17 du sénatus-consulte n’ayant rendu aux émigrés amnistiés que
« ceux de leurs biens qui étaient encore dans les mains de la nation ,
)) il est conséquent que les biens dont il s’agit 11e fussent pointrendu*
)> aux héritiers dudit Sieur Simiane , et qu’il résulte que la saisiel> arrêt, faite par ladite Dam e de Simiane entre
l e s
mains des acqué
» reurs des biens provenus «le la succession de fa Dame de C la r y ,
>’ »itués n A m bert , comme des bipns Sim iane, son débiteur , le 25
» messidor an 10 , est nulle et de nul effet, et q» ainsi les inscriptions
» par clic prises portent à faux ; »
I-c T r i b u n a l déclare l a s a i s i e - a r r e t , faite entre les mains dcsSieurs
P ire l et Lavigno le u5
m e ssid o r
an 10 , ù la requête de la veuve du
&
�( i8 )
S im ia n e , exerçant les droits de la succession d’H ector de Simiane ,
nulle et de nul effet , en fait pleine et entière main-levée aux h éri
tiers bénéficiaires de la religieuse Delaire ; ordonne q u e , sans s’y
a r r ê t e r , P irel et Lavigne videront leurs mains en
celles desdits
h é r itie r s , des sommes dont ils sont débiteurs en capitaux et intérêts j
à quoi f a i r e , ils seront contraints par les voies de contraintes, par
lesquelles ils sont obligés; ce faisant, ils en seront bien et vala
blem ent déchargés ; fait pareillement main-levée auxdits héritiers
des inscriptions prises par la veuve de Sim iane, soit en son n o m ,
soit en exerçant les droits de la succession du Sieur de Simiane au
bureau de la conservation d ’Am bert sur les biens provenus de la
succession de la Daine de C l a r y , qui ont été aliénés par l’ex-religieuse
D e l a i r e , ou qui pourraient exister encore , ordonne qu'elles seront
rayées de tous registres ; fait défenses à la veuve de Simiane d ’eu
requérir de pareilles s et la condamne aux dépens envers toutes le3
parties.
L a Dam e veuve de Simiane a interjete appel de ce jugement en la
C o u r , où elle espère en obtenir l ’entière réforraation.
M O Y E N S .
L ’œ uvre de la justice ne consiste qu’en deux ch oses, la rech er
che de la v é r ité , et la manifestation de la vérité.
L a Dame veuve de Simiane n ’a rien négligé pour faire connaître
à ses juges la vérité. Elle a rassemblé elle-même les faits et le»
pieces qui devaient les écluircr. Loin de se montrer avide du bien
d ’autrui , cllo a eu la générosité do ftiire voir aux magistrats
q u ’elle ne demandait pas , à beaucoup près , tout ce qu’elle avait
droit do demander ; q u ’elle voulait respecter tout ce qui avait
été donné par la religieuse Delaire aux hospices de Clermont et
d ’A m b e r t ,
quoique ces
d o n s - 1« fussent faits à
ses d é p e n s ;
qu’elle ne voulait pas même troubler les acquéreurs , quoique les
aliénations de la religieuse aient été fuites dans un tems où elle
n ’en uvait pas le droit , et quo le prix apparent des ventes soit
t rè s-m é d io c r e , qu’elle voulait bien tenir pour libérés les acqué
reur* qui avaient payé ; qu’enfin elle 110 réclamait , comme cr'¿an-
�( T9 )
cier considérable (PHector de Simiane , son cousin , que le p rix
encore dû des biens qui lui ont appartenu
p rix dont on ne
pouvait la priver , sans une double in ju stic e , puisque non-seule
ment c’est le gage de ses créances , mais encore qu’il faudrait
en déclarer propriétaires , et par suite en enrichir des familles
fort r i c h e s , qui n ’y ont aucun droit.
E n se présentant aussi favorablement, la D am e veuve de Simiane
devait-elle s’attendre que ses juges , au lieu de manifester par
leur jugement
la vérité qui se montrait à eux d ’une
manière
éclatante , chercheraient à l’obscurcir par des raisonnemens
n ’ont pas même le mérite d’être spécieux
qui
et par des systèmes
que les lois réprouvent évidemment ? n o n , sans doute. E t si sa
surprise a été grande , en
se vo yant condamnée en
première
instance , sa conGance en la justice de 6a cause l’accompagnera
toujours devant ses juges su p é rie u rs, car l ’erreur n ’a qu’un te m s ,
tandis que la vérité est immuable.
E x a m in o n s d ’ab ord scru p u le u sem en t les m otifs qui on t d é te r
m in é les p re m ie rs ju g e s à c o n d a m n e r les p réten tion s de la D a m e
ve u v e de Sim iane , et distinguons-y soign eusem en t ce qui y est vrai
d ’avec ce qu ’il y a d 'e r r e u r .
T ouch an t le prem ier m o tif , nous sommes d ’accord de cette
v é r ité , qu’IIector de Sim iane, après avoir recueilli en octobre 1791
les biens paternels de la succession de la Dam e de C l a r y , en perdit
la propriété , par la force de l’art. 1 . " de la loi du 38 mars 1795
qui frappe de mort civile les émigrés et déclare leurs biens con
fisqués ; o r , pour être réputé é m ig ré , il suffisait d ’être inscrit sur
la liste des ém igrés, comme l’a été en eiTet H ector de Simiane.
C e p e n d a n t, dans la ré a lité , quiconque était inscrit sur la liste des
émigrés n’était qu’un prévenu d ’émigration , puisque » il réclamait
en teins utile et parvenait à se fairo rayer , ses propiiélés n avaient
été perdues pour lui que tem p o rairem en t, puisqu il le» recouvrait
alors avec tous nee droit» civils.
T ouchant le second m o tif , nous sommes également d ’accord de
c ette v é r i t é , que lorsque la religieuse D elaire fut appelée û la succes
sion de lu Dame de C l a r y , sa soeur , morte lo 38 octobre 1 7 9 1 , p a r
�( 20 )
reflet rétroactif de la loi du
5 brumaire an a , et lo r s q u e , le 8
nivôse suivant , l’administration (lu district d ’Am bert accorda à
celte religieuse la levée du séquestre qui avait été mis sur les pro
priétés d ’A m b e r t , à cause d’Hector de Simiane qui les possédait
au moment de son inscription sur la liste des émigrés , ce ne fut
pas H ector de Simiane qui en fut dépouillé , mais bien la répu
blique qui avait pris sa place. Cependant on ne peut pas se dis
simuler q u e, tout en dépossédant la ré p u b liq u e , comme'représen*
tant alors H ector de S im ia n e , c ’était bien lui-m ême qui se serait
trouvé dépossédé par le rappel d’ une héritière q u i , quoique plus
proche successible de la défunte que l u i , n ’avait pourtant pas le
droit de succéder en 1 7 9 1.
Jusqu’i c i, nous ne sommes point en opposition d’ opinions ; mais
il n ’en est pas de m ê m e to u ch a n t le troisième m o tif du jugement
dont est a p p e l , qui renferme des principes qui nous paraissent
insoutenables.
O n y dit d ’abord q u ’H ector de Simiane étant mort le 12 prairial
an 5 , avant les lois du 9 fructidor an 3 et 5 vendémiaire an 4 , qui
détruisent l ’eflet rétroactif des lois des 5 brumaire et 17 nivôse
an 2 , sa succession était encore celle d ’un émigré , qu’ainsi tous
les droits qui en dépendaient , appartenaient à la république par
droit de confiscation.
Ce n ’est pas là-dessus que nous nous récrierons , car il est encore
vrai que , quoique le comité de législation de la Convention natio
nale eût accordé à Hector de S im ia n e , par son arrêté du 8 ven
tôse an 5 , un sursis de six décades pour se pourvoir en radiation
de son nom de la liste des
émigrés , et se procurer les pièces
nccessair39, il n ’en mourut pas moins le 12 prairial an 3 , sans
avoir pu encore faire accueillir ses réclamations , et q u ’ainsi la
république Ie représentait encore et pouvait exercer tous ses droits.
.Mais lorsque Ie9 premiers juges ajoutent que la nation ne voulut
p a s user <le l ’f j f ' t rétroactij des lois de brumaire eL nivô.ie an 3 a
son projit , l orsi/u 'il .l'ofjissait
dépouiller les religieux et r e li-
fiicuies envers h-si/uel* elle s'éta it redimée île la pétition <¡11’elle
leur Jais ait , par la compensation des pensions avec les rede
vance* j l c s successions p a r eux recueil lies , et q u ’en conséquence
�( 21 )
la nation renonça « la recherche p a r l ’ article 5 de la loi du o
vendémiaire an 4 ; voilà une doctrine que
nous
tenons pour
fausse.
E n e ffe t , où pourra-t-on trouver dans lés lois un seul mot qui
indique cette prétendue volonté de la Republique de ne point user
de l’effet ré tro actif des lois de brumaire et nivôse an 2 à son profit ,
lorsqu’il s’agissait de reprendre des mains des religieux et religieuses,
les biens qu’ils n ’ avaient recueillis qu’à la faveur de
cet effet
rétroactif?
Dans quelle loi encore trouvera-t-on que la nation ait pensé à faire
des compensations et à se rédimer des pensions qu'elle faisait aux
religieux et religieuses, en leur laissant les successions qu’ils auraient
recueillies par l ’effet rétroactif des lois de brumaire et nivôse ?
E n f i n , par quelle disposition législative la nation a-t-elle renoncé
à toute recherche ?
L ’article 2 de la loi du 20 m ars 1 7 9 0 , in voq u é p a r les p rem iers
. j u g e s , dit que « lorsque les re lig ie u x ne se tro u v ero n t en concours
» qu avec le fisc , ils h é r ile r o n t dans ce cas p ré fc rab le in e n t à lui. u
Quel rapport cet article a -t il avec notre cause ? J 1 ne s’agit pas
ici d’ une succession ouverte depuis le 20 mars 1790 en faveur de la
religieuse Delaire en concours avec le fisc, puisqu’au 28 octobre
1791 , jour du décès de la Dame de C l a r y , sa sœur , H ector de
Simiane et le Sieur de Chardon étaient tout-à-la-fois ses héritiers
naturels et testamentaires.
Il n’y a donc aucune induction ù tirer de celte loi pour appuyer
le système que nous combattons ; c a r , à l ’époque où l ’effet rétroactif
des lois de brumaire et nivôse a été abrogé par les lois des 9 fructidor
an 5 et 3 vendémiaire an 4 , la religieuse Delaire n’aurait pu se
refuser à restituer ù la nation les biens advenus à Hector de Simiane
cn 17 9 1 > sous le prétexte de la loi du 20 mars 1 790 , et *c regardant
alors en concours avec le fisc; car 011 lui aurait répondu avec avantage
‘ l»’il no n’ngi.iftuit pas d ’une succession ouverte à son profit au mo
ment do l'abolition de l'effet rétroactif et «ù 1®
aurait éle 6cul
en concours avec e l l e , mais qu’il s’agissait au contraire do resti
tuer au fu c un bien confisqué sur Ilc c to r de Sim iane qui l ’avait
recueilli sans difficulté lo 28 octobre 1 7 9 1 , à titre d ’héritier paternel
tout-à-la-fois légitime et testamentaire de la D am e de C l a r y , qu\iin»i
�( 22 )
la Dame religieuse Delaire ne s’étant point trouvée en concours
avec le fisc, l o r s de l’ouverture do la succession de sa s œ u r , ne
pouvait argumenter en aucune manière de l’art. 2 de la loi du 20
mars 179 0 , dont nos prem iers juges ont très - mal à-propos tiré
l ’induction que la religieuse Delaire était devenue propriétaire dos
biens paternels de la Dam e de C lary , sa sœur.
L ’art. 5 de la loi du 5 vendémiaire an 4 , ne contient aucune
renonciation de la part de la nation à la recherche des biens passés
dans les mains des religieux et religieuses à la faveur de l’eflbt
rétroactif des lois de brumaire et nivôse j et c ’est encore très-mal
à-propos que les premiers juges l ’ont ainsi prétendu : cet article
porte que « les partages entre la république
)) déchues qui étaient ci - devant
religieux
et les personnes
ou religieuses, sont
» maintenus. »
L ’esprit de cet article est le même que celui que l’ on retrouve
dans toutes les dispositions de cette loi du 3 vendémiaire an 4 , qu i,
en ordonnant les restitutions au profit des héritiers rétablis, veut
faire respecter tout ce qui a été fait de bonne foi pendant le cours
de l’efTet rétroactif des lois do brumaire et nivôse. Aussi nous ne
ferons point de difficulté de reconnaître et d ’avouer que si la répu
blique avait été en position de faire un partage aveo la religieuse
D e l a i r e , et que ce partage eût été consommé, il serait inattaquable.
Mais est-il vrai qu’il y ait eu partage entre la religieuse Delaire et
la république ? ......... no n ; car la république ni la religieuse Delaire
n ’ont jamais été dans la position de faire un partage.
Si l ’administration eut demandé à la religieuse Delaire la resti
tution des biens passés dans ses mains à la fuvour do l’effet rétroactif
des lois de brumaire et n iv ô s e , cette religieuse aurait été obligée
de los rendre tou s, à 1 exception de ceux aliénés par date certaine
et antérieure à la loi du 5 lloréal an 5 , comme le porte l’art. 1 do
la loi du 5 vendémiaire an 4 , desquels biens aliénés la religieuse
aurait encore c o m p t é le p r i x , aux tonnes de l’art. 4 do cette loi.
Il no pouvait donc y avoir lieu à aucun partage entre la r é p u
blique qui pouvait tout r e p r e n d r e , ot la religieuse Delaire qui no
pouvait rien retenir ; ot de f a it , il n y en a jamais eu aucun
ce qui
démontre quu l’article 5 de la loi du 3 vendémiaire an 4 est sans
application dans la cause.
�( 23 )
Q ue s’il faut dire le véritable m o tif qui a em pêché l ’adminis
tration de faire restituer à la religieuse Delaire les biens donl il
s’agit , en vertu des lois des 9 fructidor an 5 et 5 vendémiaire
an 4 ; c’est qu’ alors on craignait que ces biens , une fois rentrés
dans les mains de la nation, ne fussent ven d u s, au gr/md préju
dice des hospices de Clermont et d ’A m b e r t , auxquels la Daine
de C lary avait fait des legs considérables. L ’intérêt des pauvres fit
garder le silence aux administrations , qui laissèrent la religieuse
Delaire jouir paisiblement , malgré la révocation absolue de son
titre -d’héritière de sa s œ u r , opéree par l’abolition de l ’efTet rétro
a ctif des lois de brumaire et nivôse. M a i s , si le silence des admi
nistrations n ’a rien ôté à cette r e lig ie u se , il n e lui a non plus
rien donné , en sorte que sa jouissance , devenue précaire , ne
pouvait exister que jusqu’à ce qu’on retire de ses mains les biens
dont elle n ’était plus que dépositaire.
Quant aux compensations et rachat des pensions que les p re
miers juges supposent avoir élé consentis entre la nation et les
religieux y c est encore la une idcc cliiinericjuc. Jsnisis la nation
n ’a pensé à se rédimer des pensions qu’elle faisait aux religieux
en leur abandonnant , à titre de compensations , des propriétés
quelconques.
L a nation avait si peu pensé à ce singulier systèm e de com pen
sations , que par l’art. 4 de la loi du 17 nivôse an 2 , elle voulut
que les pensions attribuées aux religieux et religieuses, diminuent
en proportion des revenus qui leur
écherraient par succession ;
et l’art. 5 exige même qu’ils in scrive n t, dans leurs quittances de
pensions, la valeur des successions qu’ils auront recueillies.
Ces dispositions législatives nous font voir que n o n - s e u l e m e n t
la nation 11’a jamais entendu donner aux religieux et religieuses
des propriétés en compensation de leurs p e n s i o n s , m a i s qu elle
voulu même qu’à
proportion
qno les r e l i g i e u x e t religieuses
auraient des revenus par les successions qui leur écherraient posté
rieurement u u x lois des 5 b r u m a i r e e t >7 1,' vo9°
2 , leurs
pensions fussent diminuées d ’autant. Ainsi , jamais on ne nous
lera croire que la nation ait voulu donner cent mille écus de proprié
tés à la religieuse Delaire, en compensation d ’une pension de 700 lir.
�( H )
payable en l ’an 4 avec des assignais ou mandats presque sans valeur.
Il
est donc évident que le troisième m o tif du jugement dont est
a p p e l, repose sur des opinions insoutenables.
A l’égard du quatrième m o tif, comme il n'est que la conséquence
du p ré c é d e n t, il n ’est pas surprenant qu’un faux principe ait donné
lieu à un faux résultat. A u s s i , lorsque les premiers juges ont dit que
l'ex-religieuse D elaire avait conservé toute sa vie la libre dispo
sition des biens dont il s’agit, et qu'elle Vavait spécialement de
f a i t et de d ro it , soit lors du sénatus-consulte d'amnistie du 6 Horéal
an 10 , soit lorsque l’amnistie fut appliquée au Sieur de Simiane après
sa m o r t , au profit de ses h éritie rs, ils ont eux-mêmes déclaré que
c ’était la conséquence du principe posé auparavant, que la nation
n ’avait pas voulu user de l’effet rétroactif des lois de brumaire et
nivôse an 2 à son profit ; or nous croyons avoir d ém on tré suffisam
m ent combien cette idée était chim érique; et dès-lors s'est trouvée
démontrée d ’ avance l’illusion de la conséquence tirée en faveur de la
religieuse Delaire.
C elte conséquence est tellement f a u s s e , qu’en y substituant le
véritable principe puisé
naturellement dans la législation, et sui
vant à chaque pas ses effets, on sera forcé de reconnaître que la
religieuse Delaire n ’a conservé la libre disposition des biens d e là
Dam e de C l a r y , sa soeu r, que depuis son rappel à sa succession
en vertu de l’effet rétroactif des lois de brumaire et nivôsejusqu’à
la loi du 5 ilorédl an 5 , puisque l’art. i . ' r de la loi du 4 vendé
miaire an 4 , ne maintient que les ventes fuites avec date certaine
antérieurement ù cette loi du 5 tloréal an .1 , et encore sauf le
recours des héritiers rétablis vers les personnes déchues.
A i n s i , il faut convenir que dès le 5 floréal on 5 , la religieuse
Delaire fut privée du droit de disposer des biens de su sœur ; q u e lle
ne conserva plus que -défait et précairement la jouissance et l'ad
ministration des biens de la Dame de Clary , sa sœ u r; que le droit
do reprendre et do disposer de ces mêmes b ie n s , pour la portion
du Sieur de Sim iane, repasse dans les mains de la nation par l’effet
de la loi du <) fructidor an»), portant abolition de reflet rétroactif
des lois de brumaire et nivôse an a , tout de nicme que la portion
du Sieur de Chardon retourna en «ou pouvoir ; quo lors de l’urrêté
�( * 5 )
du Directoire e x é cu tif du 28 nivôse an 5 , qui ordonnait la radiation
du Sieur de Simiane de la liste des émigrés , faisait cesser sa mort
civile et se bornait à un séquestre de conservation, le cours ordi
naire et naturel des successions se trouva r é ta b li, de manière à
reconnaître les héritiers légitimes d ’IIector de Simiane , au tems
de sa m o r t , lesquels héritiers étaient la religieuse Delaire , pour
la ligne maternelle, et le Sieur L ato u r-V id a u d , pour la ligne pater
n e lle , qui se firent adm ettre au bénéfice d ’inventaire par ju ge
m ent du 25 therm idor an 5 j que la loi du 22 nivôse an 6 ayant
réintégré H ector de Simiane sur la liste des é m ig ré s, la nation a
encore repris les mêmes droits qu’elle avait avant l’arrêté du D irec
to ire , et que ces droits ont subsisté jusqu’à l’application du séna
tus-consulte d’amnistie en faveur d’IIector de Simiane ou de ses
h é r it ie r s , par arrêté du Grand-Juge du 26 frimaire an 1 1 , qui a
enfin rendu à la religieuse Delaire et au Sieur L a to u r -V id a u d les
droits attachés à leurs qualités d ’héritiers bénéficiaires.
V o ilà vé ritab lem en t les effets q u ’ont p r o d u its to u ch a n t les biens
q u ’I I e c t o r de S im iane avait recueillis de la D a m e de C la r y , soit
les lois con cern a n t
les successions , soit Jes lois
c o n c e r n a n t les
é m igrés , et nous tenons p o u r fa u x tout s y s tè m e co n tra ire.
Quant au 5 .* m otif du jugement dont est a p p e l, où l’on prétend
que l’art. 17 du sénatus-consulte n’ayant rendu aux émigrés am
nistiés que ceux de leurs biens qui étaient encore dans les mains
do la nation, il est conséquent que ceux dont s’agit ne furent point
rendus à ses h éritiers, et q u ’il en résulte que la saisie-arrêt de la
Daine veuve de Simiane est n u lle , et que ses inscriptions portent à
f a u x , il n'est encore que le résultat du faux principe posé dans le
n io t ii, où les premiers juges ont supposé gratuitement une com
pensation qu’aurait faite la république avec les religieux et reli
gieuses pour se rédim er do leurs pensions , en leur laissant les biens
qu ils auraient recueillis à la faveur do l'effet rétroactif des lois de
brumaire et nivôse an 2 : o r , c o m m o ce principe est insoutenable ,
la consé(ji|t»|,co actuelle tombe avec lui. Il faut ait co,itruire tenir
pour certain que jamais la république n ’a pensé ù faire do pareils
marché*» j qu’elle n ’a jamais renoncé à la recherche des biens que
les religieux et religieuses devaient restituer en vertu do la loi du
3 vendémiaire un <i j que l’art. 5 do ccttu loi qui maintient le*
�4 $ o.
( 2G )
partages entre la république et les religieux et religieuses d é ch u s,
est tout entier dans
l’intérêt de la n a tio n , et ne reçoit aucune
application dans l’espcce , puisqu’ il n ’y a jamais eu matière à partage
entre la république et la religieuse Delaire ; que la levée du séquestre
p ar arrêté de l’administration du district d’ Ambert en date du S nivôse
an 2 , a été nécessitée par le rap p e l de la religieuse Delaire à la succes
sion de la Dame de C la r y , s a sœur j par l’ellet rétroactif de la loi de
brum aire; que le silence des administrations après l’abolition de cet
effet rétroactif, ne peut en aucune manière être assimilé à une donation
oïl autre arrangem ent présumé fait entre la nation et cette reli
gieuse, qui a bien pu par ce moyen continuer sa jouissance de fa it,
mais non de d ro it , puisque son titre d ’héritière était révoqué ,
que les véritables héritiers étaient rétablis par la loi du 9 fruc
tidor an 3 , q u ' i l e c t o r de S im ia n e était re p ré s e n té par la nation
qui était saisie de tous ses droits , et qu’il en résulte que la Dame
veuve de Simiane a pu prendre inscription sur ses biens d’A m b e rt,
saisir valablement
les deniers provenans des aliénations de ces
b ien s, comme la prem ière et la plus considérable de ses créan
ciers , et que ce n’est que par un système contraire ù la vérité
qu’on lui a fait l ’injustice dont elle se plaint en la Cour.
Cette injustice est d ’autant plus pénible pour l ’appelante , qu’elle
s ’est présentée devant les premiers juges avec des sentimens hono
rables , et qu’ ils n ’ont pas daigné faire attention à plusieurs circons
tances et considérations qui militaient également en sa laveur.
Ne devait-on pas remarquer l’époque de la vente consentie par la
religion* e Delaire aux Sieurs Lavigneet l ’ i r e l , l’éloigncment iiu lermo
du paiement et le long silence des héritiers de cette religieuse ,
qui n ’ont pas même osé toucher les intérêts des acquéreurs ?
C ’est le 17 floréal an l o q u e c.-tte religieuse a fait cette v e n t e ,
c’e s t - à - d ir e , dix jours opiès la date du séiiutus-consulte d’umnistio
des émigrés.
lilla avait évidemment attendu jusqu’à ce m o m e n t, dans la crainte
q u ’en lo faisant plutôt , cela ne donnât l’éveil aux agens de la répu
bliques , et qu’ ils no rétablissent le séquestre et n ’exercent contre
elle les recherches qu’ils avaient le droit do faire depuis la loi du 9
fructidor an 3 , qui avait aboli l’cfTct rétroactif des lois de biun iaiie
et nivôse.
�( 27 )
L e sénatus-consulfe d ’amnistie lui parut d ’un présage favorable.
E lle se hasarda à vendre ; mais n ’étant pas encore bien fixée sur les
effets que ce sénatus-consulte pourrait produire à l’égard des émigrés
décédés , les acquéreurs pensèrent q u e , pour leur sûreté , il fallait
reculer de dix ans le p a ie m e n t, d’autant qu’ils savaient bien que si
l ’amnistie profitait aux héritiers des émigrés décédés , les créanciers
de ceux-ci pouvaient
dem ander
à ces héritiers le paiement de leurs
créances , et attaquer les a c q u é r e u r s qui auraient payé imprudem
m e n t , surtout
d a n s
la circonstance où la religieuse Delaire étant co
héritière bénéficiaire d’Ilecto r de Simiane avec le Sieur L a to u r—
,Vidaud , elle exposait sa vente à être querellée par son cohéritier
p our l’avoir seule consentie.
Cette précaution de la religieuse Delaire et de ses acquéreurs,
annonce qu’ils ont prévu non seulement ce qui arrive aujourd’hui ,
mais encore ce qui pouvait arriver de pluS fort.
Pourquoi d ’ailleurs les héritiers de la religieuse Delaire ont-ils
gardé un si long silence sur la saisie-arrct de la Dame veuve de
Simiane ?
Devait-on regarder indifféremment la circonstance singulière qui
se rencontre i c i , de voir aujourd’hui le Sieur de Chardon soutenir
que les biens d’H ector de Simiane situés à A m b e r t , ont formé le
patrimoine particulier de la religieuse Delaire depuis qu’elle a été
rappelée à la succession de la Dame de C l a r y , sa sœur , par l’effet
rétroactif de la loi de brumaire ; qu’elle en a toujours conservé do
f a i t et de d r o i t } la libre disposition ; qu’enfin , ils font partie do
sa propre succession et non de celle d ’IIector de Simiane , lui Sieur de
Chardon q u i , dans trois occasions solennelles, a prouvé qu ’il pensait
tout le contraire ?
D ’abord après l ’abolition de l’effet rétroactif des lois de brumairo
et nivôse, le Sieur de Chardon s’est fuit restituer par la religieuse
Delaire les biens de l’cstoc maternel de la Daine de Clary , sa s œ u r ,
dont il était héritier en 1791. O r pourquoi 11c veut-il pas reconnaître
que cette religieuse etuit de même soumise ù 1° restitution des biens
de l’estoc paternel, recueillis uussi en «7‘J 1 l>ar H ector de S im iane,
héritier de cette ligne ? c’est parce qu'il voudrait recueillir , c o m m e
héritier de cette religieuse , la portion paternelle des biens do la
jja m e de Clary ; mais comme les moyens qu’il a fait udopter p u ile *
�(
28
)
premiers juges sont illu soires, ses espérances à cet égard se dissi
p ero nt en la Cour.
Com ment encore v i e n t - i l actuellement soutenir que les biens
d ’ Am bert no font pas partie de la succession d H ector do Simiane ,
lorsqu’il a reconnu dans le Sieur L a to u r-V id u u d , héritier benéfi-»
ciairo dudit de Simiane , qualité pour défendre t conjointement avec
lu i, la totalité des biens délaissés par lu Daino de C lu r y , contre les
prétentions d ’une femme romanesque , qui a voulu tout-ù-la-fois
usurper le nom et la fortune du président do Clury et de son epouso ?
11 est ù propos de diro ici un mot do cette affaire , qui est aussi peu»
dante eu lu Cour.
L n l’nn 3 , la femme do Louis M a r l o t , coutelier ù C l c r m o n t ,
attaqua la religieuse Doluiro , alors rappuléo ù la succession de la
Duiuo do Clary , sa tic u r , pour lui dplivrer lo liers do cottc succès**
sion , en conformité do furticle >3 do lu loi du 12 brumaire au 2 , so
prétendant fille adultérine do la Dame de Clary.
Un jugement arbitral du 4 messidor suivant lui permit de prouver
sa possession d ’é t a t , conform ém ent à l’article 8 de la loi précitée.
J)es enquêtes respectives eurent lieu.
L a loi du a 5 nivôse an 3 renroya devant les tribunaux toutes les
questions d ’état.
L a femme Marlct garda lo silence pendant dix ans.
L es 6 et a i messidor an 1 2 , elle assigna en reprise d ’instance lo
Sieur do Chnrdon et le Sieur I«atour* Vidaud.
C c u x - ii n'eurent pas do peine à repousser sa demande.
Lll 18o(> , un jugement contradictoire «lu tribunal civil «le C lerjnont déclara vteiole ctabulic toute la procédure d e là femme M arlet,
com m e faite en exécution de r*-lTet rétroactif de U loi du ia
brumaire an a , touchant une aucc^Mon ouverte en 1 7 9 1 , et cela
d ’après l a i t i c l c
|3 d® 1* loi du .*> vendémiaire an », et la r li c l t
1 . " do U loi du i S l h c r m i d o r su iv a n t, n la condamna aux dt jKçn*.
l ’eu de teint apuft , b femme MarSet fit •**»gu?r U .Sieur de
Clary de Mural , frere de feu le p r o i'l c n t de î. î*»ty , Irt Sieurs
dr ( furdou et I-stour-V i d ¿ u d , lu-ritier* de U I'jimc de C l a r y ,
|*««u *uir «lira «(u'cilo n$îí rcv.mnu» filíe Irgiurac tic* hitar
et
lJ-tuiQ
Irui »
-c
C U r y , c l sn ;«u>ctjuëiuc ïb v o v cc eu
t»
�T
- ,
29 ^
i .e qo août 1808 j mitre jugement contradictoire, q u i , attendu
que la
femme
M arlet
n ’a
ni
titre
ni
possession d ’état
do
lille légitime des Sieur et Dam e de G a r y , décédés ; qu ’elle n ’a
non plus ni commencement de preuvo pnr é c r i t , ni présom ptions,
ni même d ’indices propres à déterminer lu preuve pur témoins
de sa prétenduo filiation, l ’a déclarée non rccevablo duns ses de
mandes , lui fait défense d ’usurper les noms des Sieur et Damo
do C lu r y , et l’u condumnéo aux dépens.
A p p el et assignation donnée en la Cour , n la requêto des mariés
Marlet , tunt au Sieur de Chardon qu’au Sieur L atour-Vidaud.
C e lu i-c i a depuis renoncé à la succession d’ Ilcctor do S im ia n o ;
et comme les héritiers de la religieuse Delnirc , sa
cohéritière
bénéficiaire , ont aussi renoncé', le tribunal civil d’Avignon a nommé
un curateur à cette succession vacante; et le Sieur Latour-Yidnud
lui a dénoncé sa copie d ’acto d ’appel , pour défendre à sa place ;
et n i effet , co curateur l’n substitué.
C e n est pas pour toucher le fouit do 1« cause «le la femme M a rlet,
que nous venons rappeler ce» faits , cnr cette uilàire n’est pas do
nature à donner de l’inqu iétude, et ne mérite pas qu’on s’en occupo
avant l’audience ; mais c ’est ufin de rappeler au Sieur de Chardon
qu'il a reconnu d a m tout le cours des procédures que le Sieur
L utour-V idaud avait été justement appelé par la femme M a r le t ,
pour défendre les bien» de l’estoc paternel de la Dame de C l a r y ,
comme lui Sieur de Chardon avait été aussi appelé pour défendra
les biens de l’estoc maternel.
Que
si le Sieur de C hardon eut p en sé d a m ce toms*lù, com m e
»1 • l ’air d e le faire aujourd'hui , il n ’eùt pas m anqué de repré
senter à la justice que le Sieur Latour* Yidaud n'étant qu héritier
bénéficiaire
d ’H rctor
de S im ia n e ,
n'avait aucune quahté pour
dcTendre le» bien» de la Dam e de Clary »iluc« •« An»b*rt ; qur ces
bien» étant devenu» propriétés de la relifieu *' Dc--*lirtl cr* vertu
•!*
loi du 5 brumaire an 3 , et du «¡Urne* ' l t ' administration»
• p r ç * l'a bolition
i ! c l ’e f f e t r é t r o a ' ù f d e
! c * • 1 * l a i t « u x »eul«
h c n l i f f i ¡II» c r i te r e l i g i c u t e à r e p o w * * * * I** ^ t t j - j u r * d i n ^ r r » c o n t r e
es» tr.ct?* p r o v e n a n t d e >4
■îi- C h a n l u n
ivatrmf®
, lo%n «le
trouvi
**c *a «n n r ;
teuir c»
t r é » * j u » ’. c e t
en
tfrt-tu lu id
»ÎM.
que !c
q u e «1 l r S » c u r
rt
»
I^itour-
�( 3o )
V idaud se réunisse à lui p our
fe m m e
combattre les prétentions de la
Mariet , qui voulait usurper tout-à la-fois le nom et la
fortune de la Dam e de C l a r y , n ’a -t-il pas bien reconnu lui-même
que cet héritier d ’H ector de Simiane avait qualité et intérêt de
conserver les biens qu’H ector de Simiane avait recueillis à A m b e r t ,
dans la succession de la Dam e de Clary ?
Com ment donc après une reconnaissance si solennelle faite devant
la justice en 1806 et 18 0 8 , le Sieur de Chardon a -t-il pu tenir un
langage si opposé en 1 8 0 9 ? .............. c’est que pour repousser la
femme M a r l e t , le Sieur Latour-Vidaud aide le Sieur de Chardon
à conserver la portion qui lui est advenue dans les biens de la
D am e de C l a r y , tandis que quand il s’agit de laisser au repré
sentant de son c o h é ritie r l’a u tr e p ortio n , il ch an ge vite de sys
tème pour tâcher de l’écarter et la prendre à sa place dans la
succession d e là religieuse Delaire dont il est encore héritier , en
sorte que , par cette subtilité , le Sieur de Chardon arrive à son but,
qui est d’avoir toute la succession de la Dame de Clary.
Cependant il est si vrai que les biens d 'A m b e rt ont toujours
été
considérés publiquement et notoirement
d’IIector de Simiane depuis les lois
comme propriétés
des 9 fructidor an S , et 5
vendémiaire an 4 , que la femme M arlet n’a pas hésité à faire
assigner le
S ieur
L atou r-V idaud et non les héritiers de la religieuse
Delaire , pour les lui contester.
Certainement , la femme M arlet ne demandait rien des biens
p r o p r e s d’JIector de Simiane. E lle ne s’adressait au Sieur L ato u rV id a u d
b i e n s
, héritier du Sieur de Simiane , que pour lui
enlever les
s i t u é s à A m b e r t , qu’IIector de Simiane avait recueillis comme
héritier paternel de la Dame de C la r y , comme elle s’adressait au
S ’ eur de Chardon pour lui abandonner les biens qu’il avait aussi
recueillis c o m m e son héritier maternel. Quoi de plus évident pour
convaincre la C our que le Sieur de Chardon change de principes
et de manière de voir au gré de son intérêt ?
L ’appelante
est
bien
éloignée de ne parler et de n■’agir que sui
vant son intérêt personnel.
E lle consulte avec scrupule les lois ,
pour ne demander à la justice que ce que les lois lui accordent ;
encore est-il fucile de démontrer combien ses demandes sont audessous de ses droits.
�<C
J*'
3i )
P rem ièrem ent , la Dam e veuve de Simianc exerçant les droits
d ’IIector de S im ia n e, son
débiteur, et voulant rigoureusement
ramasser les débri3 de la fortune de celu i-ci, pour se faire p a y e r
ensuite des 4oo,ooo liv. environ qu’il lui doit , pouvait dem a n d e r
aux Sieurs de Féligonde et Bellègue-Bujeas , exécuteurs testamen
taires de la Dame de G a r y , un compte de leur administration depuis
le 28 octobre 1791 jusqu’au mois de décembre 1795 que le séquestre
a été mis sur les biens d’Amberf.
Inutilement le testament de la Dame de C la ry les dispensait de
rendre compte. L a Coutume d’Auvergne ne lui laissait le droit do
disposer que du quart des biens de coutume : donc ils étaient au
moins comptables des trois quarts des biens de l’estoc paternel ; or
les trois quarts de 5280,000 liv. font 225,000 liv. , dont le produit
n ’est point à d é d a ig n e r, puisque dans le courant de plus de deux
ans de jouissance , ils ont dû recevoir environ 20,000 liv. ; cepen
dant la Dame veuve de Simiane n ’a point demandé ce compte.
2.
L a Dam e de Clary ayant légué 24 o,ooo liv. , il y avait lieu à
la réduction de ses legs qui ne pouvaient enlever que les maisons de
C le r m o n t , pays de droil é c r i t , et le quart des biens de coutume ,
ce qui n ’aurait point excédé i 5 o,ooo l i v . , c’e s t - à - d ir e , que la
réduction aurait produit 90,000 liv. en viron , dont 60,000 profite
raient à H ector de Simiane et par conséquent à sa créancière. Cepen
dant la Dame veuve de Simiane n’a point demandé cette réduction ,
et 11’entend jamais retirer des mains des pauvres et des infortunés les
largesses qu’il a plu à la Dame de C lary de leur fa ir e , et à la religieuse
Delaire d’acquitter. Heureuse de s’associer par ses sacrifices à ces
actes de bienfaisance , elle s'en félicite, au lieu de les regretter.
5 .° T ou te la portion des biens de l'estoc paternel de la D am e de
C la r y , advenus au Sieur H ector de Simiane , excédait de 40,000 liv.
tous ses legs. Com m ent la Daine religieuse Delaire les »-t-elle tous
distribués , moins les 9 2,160 liv. encore dues par les Sieurs l i i e l et
Lavigne d’Am bert ? Com ment le Sieur de Chardon qui devait sup
p orter le tiers «le ces legs , puisque sa portion «le 1 estoc maternel est
du tiers <Ie la succession, n ’a-t-il pas c o n t r i b u é en proportion ? Si
les biens d’Iie cto r de Simiane ont tout payé , la Dauie veuve de
Simiane peut donc réclamer de lui cette portion contributive ; cepen
dant elle ne l ’a pas fait. L u i conviçnt'il de vouloir encore souslrtiiro
*
�à la Dam e veuve de Simiane une somme aussi inférieure à ses créances,
que l’est celle due p a r les Sieurs L av ig n e et Pirel d’A m b e r t , pour se
l ’approprier à la faveur d’ un systèm e qui n ’a de fondement que dans
son imagination.
4 .° L a Dame religieuse Delaire ayant vendu le 2 5 pluviôse an 3 ,
une maison sise place du T e rra il à C le r mo n t , laquelle faisait partie
des biens paternels d e la Dame de Clary , sa s œ u r , échus à H e c t o r
de S im ia n e, cette religieuse en devait restituer le p rix , aux termes
de l ’art. 4 de la loi du 3 vendémiaire an 4 : cependant la Dam e de
S i m i a n e n ’a point inquiété les héritiers de cette religieuse à ce s u je t,
quoiqu’ils n ’aient point fait d’inventaire depuis son d é cè s, et qu’on
p û t les convaincre d’avoir fait des actes d ’héritiers purs et simples.
5 .° L a religieuse Delaire n ’ayant eu q u ’une jouissance précaire
des biens d ’H e c t o r de Sim iane depuis la loi du 5 floréal an 3 , elle
était comptable des jouissances, et ses aliénations postérieures étaient
nulles, suivant l’art. 1.er de la loi du 3 vendémiaire an 4. C e p e n
dant non seulement la D a me de Simiane n ’a point inquiété ses
h é r it ie r s , mais n ’a pas mêm e voulu évincer les acquéreurs ni les
donataires , quoiqu’il soit évident que les Sieurs Lavigne et P irel
aient acheté le 17 floréal an 1 0 , m oyenn an t 92,160 liv. des p ro
priétés estimées 129,100 liv.
C e r te s , lorsque la Dam e veuve de Simiane s’est montrée avec
des procédés si généreux et si d élicats, elle devait compter sur
une justice bienveillante, au moins sur une justice exacte. M a is,
puisque le sort en a décidé autrement en prem ière instance, elle
se flatte qu’en la Cour la vérité qu’elle a cherchée de bonne foi sera
manifestée avec assez d’éclat pour la consoler de l ’injustice passagère
qu’elle a éprouvée.
Signé à l ’original sur papier timbré ,
M .e C. L . R O U S S E A U , ancien avocat.
M .e G A R O N , avoué.
A
C L E R M O N T -F E R R A N D
,
Chez J. VEYSSET , Imprimeur-Libraire d u l y c é e , rue de la Treille.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Félix, Anne-Emilie de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Rousseau
Garron
Subject
The topic of the resource
créances
émigrés
séquestre
Comtat Venaissin
successions
amnistie
rétroactivité de la loi
estoc
vie monastique
rétroactivité des successions
mort civile
legs
hôpitaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Anne-Emilie de Félix, veuve de sieur Claude-François-Léon de Simiane, propriétaire à Collonges, arrondissement d'Aix, département des Bouches-du-Rhône, demanderesse en maintenue de saisie arrêt, et appelante ; contre Dame Marguerite de Chardon, veuve du sieur Jacques-François de Montagnier, ancien magistrat ; Claude-Antoine-Jospeh de Chardon ; demoiselle Anne de Chardon, dame Perrette de Chardon, veuve du sieur vallette de Rochevert, tous propriétaires, habitans de la ville de Riom, se qualifiant héritiers sous bénéfice d'inventaire de défunte dame Marie-Jeanne Delaire, ancienne religieuse, pour la ligne maternelle, demandeurs en partage et en nuliité de saisie-arrêt, intimés ; et contre dame Jeanne-Marie de Champflour, veuve du sieur Paul-François de Montrozier ; sieur Jean-baptiste de Champflour ; dame Marie-Anne-Félicité de Frédefont, et sieur Jean-Jacques de Rochette, son mari ; demoiselle Gabrielle Durand-de-Pérignat, fille majeure ; et dame Marie Durand, ancienne religieuse, tous propriétaires, habitans de la ville de Clermont-Ferrand, se qualifiant héritiers bénéficiaires de ladite dame religieuse Delaire, pour la ligne paternelle, défendeurs au partage, et aussi demandeurs en nullité de saisie arrêt, intimés ; et encore contre sieur Jacques-Marie Lavigne, notaire impérial, et sieur Jean Pirel, marchand, habitans de la ville d'Ambert, tiers saisis, appelés en cause, défendeurs et intimés.
note manuscrite : « Voir l'arrêt au journal des audiences, 1810, p. 300. »
Table Godemel : Succession : 1. les religieux qui, par effet rétroactif de la loi du cinq brumaire an 2, se mirent en possession des successions de leurs parents que des héritiers plus éloignés avaient appréhendées, ont-ils été soumis à la restitution après le rapport de cet effet rétroactif, quoique les héritiers rétablis se soient trouvés représentés par la nation, comme émigrés ? la nation, dans ce cas particulier, n’est-elle pas censée avoir renoncé à toute recherche et n’avoir point voulu user du bénéfice des lois des 9 fructidor an 3 et 3 vendémiaire an 4, pour se rédimer des pensions qu’elle s’était obligée de payer aux religieux ? Amnistie : le sénatus-consulte du 6 floréal an dix a-t-il rendu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, non seulement les biens qui se trouvaient dans les mains de la nation, par voie de séquestre, au moment de l’amnistie, mais encore tous les biens et droits qui leur appartenaient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1787-1811
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2015
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2016
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53385/BCU_Factums_G2015.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Ambert (63003)
Aix-en-Provence (13001)
Asti (Italie)
Avignon (84007)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
comtat vénaissin
Créances
émigrés
estoc
hôpitaux
legs
mort civile
rétroactivité de la loi
rétroactivité des successions
séquestre
Successions
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53644/BCU_Factums_M0103.pdf
0aefee4f12fcbac6d452ef8745c5a9eb
PDF Text
Text
r
M
.
E
M
O
I
R
E
D
épartem
entdel'aliertribunalcivil
P O U R le citoyen S i m o n B e l a n g e r , ci-devant cu isin ier , et
premier domestique de défunt L o u i s G a i l l o n e t d ’ O r v i l l i e r s , amiral de France , D em andeur ;
le citoyen H u g o n d e G i v r y ,
héritier dudit défunt son oncle , Défendeur.
CO N TRE
seul et unique
Q u e l l e idée d o it-o n se f o r m e r d ’un n e v e u , q u i n on con ten t de
s'e tre e m p a r é de la fo rtu n e de son v i e il o n c l e , m ê m e a v a n t sa m o r t ,
em p loie t o u r - à - t o u r l’a rtifice et le m en son g e p o u r d ép o u iller un p a u v r e
d om estique d’un legs m o d i q u e , q u e le d éfu n t lui a f a i t , en récom p en se
de ses longs et pénibles s e r v ic e s ?
N ’est-ce pas à l’ingratitude la m i e u x caractérisée joindre la plus sor
dide a va ri ce? N ’est-ce pas s’exposer d’ un côlé à la raillerie et au mé
pris du p u b l i c , et de l’autre à toute l’ani madver ti on de la justice?
T e l s sont cependant les tristes désagrémens , ou plutôt telles sont les
chances également honteuses que le citoyen H u g o n G i v r y ne craint
pas de courir. Héritier du ci-devant comte d’ Orvllliers q u ’ il a dépouillé
,de son v iva nt de sa riche s uc c es si on , il croit n’en a v o ir pas assez s’ il
ne parvient à frustrer le citoyen Bellanger du legs que le vieillard lui
a laissé p ar son testament.
Et sur quel m o y e n se fonde cet avide collatéral } pour b r a v e r a vec
tant de courage les loix de la reconnoissance , et affronter a ve c tant
d intrépidité la r ume ur publ ique ? « M o n o n cl e , dit-il , n’a entendu
« donner à Bellanger q u ’autant q u ’ il seroit à son service à l'heure
de sa m ort o r , long-tems avant cet événement Bellanger l’ avoit
» quitté ; donc son legs ne lui est pas du ».
Quel h o m m e seroit assez maître de soi pour r etenir son indig n a ti o n , lorsqu’ il saura que c ’est le citoyen H u g o n G i v r y lu i- mê me ,
qui a congédié Be ll anger , qui l’a e m p ê c h é par force et par artifice
de recueillir les derniers soupirs de son b i e n f a i t e u r , de son m a î t r
tombé en enfance ?
Entrons dans le détail de c ette singulière a f fa i re , plus digne de fig u rer dans un r o m a n , ou dans une intrigue de théâtre, que d'occuper
uneplace
dans les fastes de la justice.
A.
-
(
e
•
�(
2
)
F A I T .
V e r s la fin de 1 7 7 9 , Bellanger entra en qualité de c h e f de cuisine
au service du comte d’Orvilliers : il étoit alors à R o e h e f o r t , où sa place
de vi ce-ami ral de F r a n c e , le retenoit.
A y a n t perdu sa f e m m e a u co mme nce me nt de l’année 1 781 , il
quitta cette ville, envi ron une quinzaine de jours après. Il vint à P a r i s ,
et se retira dans le séminaire S ai nt -Magloi re , pour y v iv re dans toutes
les pratiques de la religion.
^
A v a n t s o n départ de R o e h e f o r t , il congédia ses domestiques qu i
étoient en grand nombre. Il ne garda que le seul B e l l a n g e r , q u ’il
me na a ve c lui à Paris , dans sa voiture. 11 fut redevable de celte p r é
f é re n ce , sur tousses camarades, a ux marques les plus expressives de
fidélité, d’attachement et d’exaclilude q u ’ il n’a cessé de lui donner en
remplissant ses devoirs auprès de sa personne.
__
Cet éloge n ’a rien d’exagéré , il n’est que la répétition des discours du
citoyen d ’O r v i l li e r s , et des tém oignages q u ’il a toujours r e n i u s de la
conduite de ce lidèle s e rv ite u r , p endant tout le tems q u ’il a été à son
service.
< _
Si l’on interroge le supérieur du séminaire de S a i n t -M a gl oi r e, il r é
pondra , ainsi q u ’il l’atteste dans son certificat du 4 frimaire de r ni e r,
a. que le citoyen L oui s Gaillonnet d’Orvilliers , ancien lieutenant-gé» néral des armées navales de F r a n c e , ayant résidé pendant l’espace
» de dix ans environ dans ledit sé mi na ire , j’ai souvent eu occasion de
» le voir et de m ’entretenir a v e c l u i , q u ’ il m ’a très-souvent parlé du
n citoyen Simon B e l l a n g er , son cuisi ni er, qui a été à son service pen
» dant ledit tems, et qui l’étoit déjà bien a u p a r a v a n t , q u ’il ma c o n s
» tamment témoigné être très-satisfait de son s er vi ce , persuadé que
■
» ledit Bellanger le s e r v o i t , no:i-seulement a ve c respect et lidélité ,
» mais a vec le plus grand a tt a ch em ent , et qu’ en conséquence il étoit
» disposé à lui faire beaucoup de bien pendant sa vie et après sa
» mort ».
Interrogez le directeur des études de. philosophie de cette ma ison ;
interrogez le citoyen Sai nt -Simon , aussi l’ un des chefs de cette m ê m e
mai son, tous les deux attesteront les mômes faits, les m ê m es t ém oi
gnages de satisfaction des services du iidèle Be ll ang er , le mê me désir
ciu comte d Or vdli ers de lui faire ou bien de son vivant el après sa mort.
Ces titres, que la voix publ ique consacre d u n e m i ni è re si h o n o
rable pour Bellanger , sont confirmés par les écrits el libéralités du ci-,
toyen d’Orvilliers.
_
‘D ’après ses ordres, Bellanger avoit apporté an séminaire de SaintMagloire une poilion de sou ménagé j c o m m e chaque jour la santé
du comte s’aiï'oiblissoit, il étoit possible que son héritier après sa mort.
�•
.
'
(3 )
.
.
lui contestât ce mobilier. P< ur délivrer ï iellanger de celte inquiétude ,
_ il lui d o n n a , le 16 avril 178O, l’ écrit suivant:
' « Je certifie et (onfesse que c’est par m o n avis et conseil que B e l
» langer a mis ses effets chez tnoi , el q u ’ils lui appartiennent en e n t i e r ,
» ainsi que tout ce qui est dans la c h amb re q u ’il oc cupe ».
Ce n’est pas t o u t , à cette déclaration de propriété, il ajoute en ces.
‘termes, dans l e m ê m e écrit : « Et j’y compi’ends le petit lit; et si connue
51 je l’e i p è r e , il me survit ; car s i f a v o is le malheur de le perdre ,
» il me seroit nécessaire pour coucher le domestique qui le re mp la » ceroit ».
' « D e fout c e c i , continue-t-il, il suit que le sage Bellanger-ne. i\oh
» point être inquiété après ma m o r t , sur ces meubles et l’article de
» mon testament ».
^ D ’après cet écrit , le don du petit lit que le citoyen Dorvilliers fait
a Be ll ang er , le chagrin q u ’ il éprouveroit s’ il avoit le malheur de le
perdre, l’espoir q u ’il le survivra , l’espèce d’ordre q u ’ il intime à son
héritier de 11e point inquiéter le sage ïiella n g er sur ses-meubles et
1 article de son testament ; enfin ce s u r n o m , cette épithète de sage q u ’il
lui d o n ne , toutes ces particularités prouvent que Bellanger avoit su
j u s q u a u dernier point mériter l'attachement de son m a î t r e , et q u ’ il
lui étoit devenu si nécessaire q u ’ il ne pouvoit plus s’en passer.
E n f i n , pour peu q u ’on réfléchisse sur sa situation, et q u ’on se r e
présente un vieillard de plus de 80 a n s , qui cha que j our voyoit e n
lever une de ses facultés, qu i senloit son corsps se détruire e n . d é t a i l ,
et s’ciFaisser sous le poids des infirmités ; n’est-il pas naturel de penser
que cet h o m m e se lut cru perdu l u i- m êm e, s’il avoit eu le malheur
de perdre le serviteur fidèle qui connoissoit depuis long tems ses goûts ,
ses habitudes, et qui possédoit si bien l’art de les flatter, de les e n
tretenir, cl adoucir res maux , el à foi ce de soins et de prévenances de
le faire s ur vi vr e, en quel que sorte, à lui-même.
U ne étude si continuelle de ‘services ne pouvoit être oubli ée; aussi
. ce vieux guerrier se fit il un devoir et un h onneur de les reconnoî ire;
il fit son testament olographe le 14 ma i 1787 , ainsi conçu à l’égarcl
ae Be ll ang er : o J e donne 6000 francs à S imon Bel l ang er , mon c u i
» smier el premier domesti que, en reconnoissance des services q u ’ il
a m a rendus , par estime de ses vertus et par amitié pour lui. Je
» lui donne aussi Is lit d’ indienne et tout le petit ameublement de ¡a
» cnombre située au premier où je mange , tous mes habits, et les
» deux tiers du linge servant
m a personne ; enfin je lui donne tous
» les livres qui se trouveront après qu e M . / aub (son exécuteur tesJ) lameiitaire_) aura fait le choix de ceux qui lui conviennent. -Je donne
n >-i C a li x le , mon Inquais...... l e s articles concernant les deux d o » nies tiques n'auront effet qu'autant qu'ils seront à mon servies;
M « l ’heuie de ma mort ».
A a
�( 4 )
_
_
Quelques années après ce testament, le citoyen d’ Orvilliers cessa
peu à peu de v i v i e , sa raison c é d i n a ; enün au mois de mars 1791 ,
Il tomba tout-à-fait dans l’enfance ; instruit de son état, le citoyen I I u gon de G l v r y , son neveu et son héritier, accourut à P a r i s , et y arriva
le i 5 mai de !a m êm e année.
_
_
_
Ouel étoit le but de ce v o y a g e? étoit-ce pour veiller plus p a r t i c u
lièrement sur la sa nié de son oncle , et p r o l o n g e r ses jours en lui pro
diguant tous les secours de l’art des médecins? N o n , il ne s’esl rendu
e n°si grande hâte dans la capitale , que pour s’emparer , ainsi que
toutes les circonstances le prouvent , de la succession de son vieil
oncle avant sa m o r t , et pour en accélérer le terme, autant q u ’il d é
pendent de l u i , sans se compromettre aux y e u x de la justice.
* Il est triste pour Bellanger de se voir réduit à révéler de pareils
faits • il est triste pour lui d’être forcé d’accuser le neveu , l'héritier de
son maître et de son bienfaiteur: que disons-nous accuser ? C ’est ce
n e v e u , c’est cet héritier qui s’accuse lui-même ; c’est sa propre c o n
duite qui le traduit devant le tribunal de l’opinion p u b l i q u e , et qui le
d é n o n c e , ainsi q u ’on va le voir dans un instant.
Un e f f e t , à peine est-il arrivé chez son o n c l e , q u ’ il s’empare do
t out , fait vendre son m o b i li e r, sa batterie de cuisine; sans aucune
f or ma lit é, se fait rendre compte de l’état de sa fortune et de ses r e
venus par le citoyen E t i e n n e , n o ta i r e, l’ homme d’affaires du citoyen
d’ Or vil li er s; il ordonne à Bellanger de mettre dans des mall es, l’a r
g e n te r i e , la garde-robe et tout le linge. P o u r se dispenser d ’acquitter
'le legs fait à Calixte ( l’un des domestiques du vieillard ) il le congédie,
' et lui donne pour i n d e mn i t é , un billet de 5 o francs en sus de ses
gages.
_
Il auroit bien v oulu renvoyer de m êm e Bellanger , et s’ acquitter p a
reillement de son legs; mais celui-ci lit p!u; de résistance, assuré pnr
l’écrit de son maître , du 16 avril 1788 , q u ’ il exigeoit q u ’ il ne 'c quittât
q u ’ à ia mort; soupçonnant que cette condition pouvoit être répétée
dans son testament, il persista à tester auprès de la personne du vi ei l
l a rd , et a lui continuer ses secours. Le vo ya nt si ferme dans cette
résol uti on, le citoyen de G i v r y n’insista pas (.'avantage pour le m o
ment.
„
. r
Quand tous c e s arrangemens lurent termines , ce neveu fit transporter
dans sa v oi tur e, son vieil o n c l e , qui avoit alors perdu l’ usage de la
parole; il le conduisit à M o u l i n s , a peu-près c o m m e un cadavre que,
l’on conduit à sa sépulture. Bellanger étoit à ses côtés pour lui fournir ,
pendant le v o va ^ e, tous les secours dont il avoil besoin. Enfin l’equi'«
L e e arriva à Mmilins le 2,3 u n i 1 79 1.
_
_
_
O n se demande pourquoi cette trans.alion si subite? L e citoyen
H i l t o n G i v r y e.royoit-il que le ci toyen Dorvilliers auroit plus de secours
à Mouli ns qu’ à Paris? Ma is ne sait-on pas que dans les plus graves,
�maladies, on v i e n t , d’une extrémité de la F r a n c e à l’a ut re , chercher
guérison dans cette grande capitale? Eloit-ce le m an q ue de fortune
ou d’aisance? Mais le citoyen d’ Orvilliers jouissoit à-peu-près de 30,000
irancs de r ent e; s a v o i r , de 18,000 francs de pension du g o u v er ne
ment , dont il lui éloit toujours dû une année en a r ri è re , du château
Cihenel, bien provenant de sa f e m m e , dont l’usufruit lui rendoit
annuellement environ 12,000 f r a n cs ; enfin il lui étoit d û , par une
citoyenne D u f r e s n e , b an q u i è re , un capital de 14,000 francs.
C.e n’étoit donc ni la pénurie des m o y e n s , ni le m a n q u e des
r emèdes, ni des secours de l’a r t , qui forçoient cet avide collatéral à
faire transporter, a ve c tant de précipitation, le.citoyen d’ Orvilliers de
-taris à M o u l i n s , dans l’état oii il étoit de souffrance et d’anéantis
sement. Pourquoi donc un v o y a g e si l ong , si p é n i b l e , pour u n
vieillard qui n’a voit plus q u ’un souille de vie ?
.................. Qulcl
non m o r ta l ia p e c to r a c o g i s ,
A u r i sacra f a m é s !
Jri r g tLn,
A u r este, quelques jours après l’ arrivée à Mo ul ins du citoyen
j-’orvilliers et de sa suite, le citoyen Hugon de G i v r y , m it auprès
de lui une garde et un domesti que, qui apprirent de Bellanger la
manière de gouverner le malade. Qu an d au bout de dix à douze jours
us furent au l a i t , le citoyen G i v r y déclara à Bellanger q u ’il n’avoit
plus besoin de l u i; q u ’il avoit payé sa place à la diligence de Paris,
pour partir 1s lendemain à quatre heures du matin ; q u ’ il eût à se
tenir p r ê t , et que son domestique le conduirai t à la voiture.
Il étoit six heures du soir, q uan d ce départ inattendu fut intimé à
Bellanger. Qu e d i r e , que faire dans la position où il étoit? Il eut beau
protester qu il ne quitterait son m a î t r e , conf or mément à ses i ntentions,
q u ’après avoir reçu son dernier soupir. Vainesproteslations;le malheureux
d ür vi lli er s 11’étoit plus q u ’ une masse i n a n i m é e ; Bellanger n’étoii plus
dans sa m a i s o n ; il éloit dans celle du citoyen G i v r y ; pouvoit-il y
l e s t t r , malgr é son congé et ses défenses d ’y rester?
Il fallut donc se disposer à partir; mais avant de céder à cette
atale nécessité, il crut devoir prendre ses précautions. Il alla chez le
ci-devant curé de Mouli ns , pour le prier de veni r a ve c lui chez le
juge de paix, afin de laire constater son départ forcé. Malheureusement
ce juge etoit a b se nt , el il étoit trop lard pour y retourner : il n’ eut
que le tenis de faire ses p a q u e t s , de co mp te r a v e c le citoyen G i v r y ,
clu i lui p ay a ses g a g e s , moitié en assignats, et moilié en a r g e n t , et
? « • VOUl' se (^!>'HTasser de lui plus f a c i l e m e n t , lui promit q u ’ après
e tet.es de son o n c l e , son testament seroit, à son é g a r d , ponctuelle
ment exécuté.
Bellanger p artit p o u r P a r i s , re mp li de ces brillantes promesses;
A 3
�.
.
( 6 }
■
.
mais bientôt il eut occasion d ’apprendre que promettre et tenir de la
part du citoyen Hugon G i v r y , sont deux choses toutes différentes.
I,e citoyen d’Orvilliers est décédé à M o u l i n s , le 14. avril 1792- lk;Llanger a réclamé ¡’exécution du testament du défunt.
.
I.Vabord il en a demandé la représentation au citoyen G i v r y ; celui-ci
lui en a donné une copie, écrite de sa 111 lin. C o m m e cet adversaire se
proposoit d’exciper de ¡’obligation imposée par le testateur, d’être a
son servi ce, à Plieure de sa m o r t , pour obtenir le legs, il a lallu
plaider pour s’assurer de l’existence de cette condition , si d i e étoit
bien l’ouvrage du testateur, ou plutôt celui de son héritier.
P o u r éloigner autant q u ’ il a été en son pouvoir le jugement de cet
incident , ie citoyen Hu g on de G i v r y a n i é , devant le juge de paix
et à l’audi ence, q u ’ il étoit dépositaire du testament, quoiqu' il eu eût
donné dr; sa m-iin une copie à Bellanger ; triais convai ncu par celle
copi e que toutes c;s dénégations étoient autant de mensonges , le
t r i b u n a l , par son jugement du 28 floréal, l’a condamné ¿1 le déposer
à son g iv l le dans la huitaine; sinon fait droit sur la demande en
délivrance de, legs , et en dommages et intérêts de Bellanger.
C e dépôt a été l'ait en exécution de ce j u g em e n t , et il n’est plus
question que de décider si le citoyen H ug on G i v r y ayant forcé 13ellanger de quitter son maître avant sa mo rt , celui-ci peut exciper de
celte retraite, dictée par la nécessité , pour se dispenser d’arquitter
le legs, et les' dommages et intérêts d û s , en raison du tort qu’ il a fait
éprouver à ce malheureux domestique. Entrons en matière.
M O Y E N S .
P a r son testament olographe du 14 mai 1 7 8 7 , le citoyen Dorvilliers
a lègue à Echanger, en récompense de scs longs services, une s omme
de 6,000 f r an cs, et d’autres objuls plus au long mentionnés dans ce
testament , et i! les lui a l ég ué s, à condition q u ’il sera à son service
ù )’ h m e de sa mort.
Quelle est la nature de ce legs? Quelle est celle de la condition
qui y est apposée?
S i , d’après les principes de la ma ti èr e, et d’après les faits de la
cause, 011 démontre:
E n premier lieu , que le legs est d u , indépendamment de la condition
qui lui est apposée ;
E n second lieu, q u ’il est du encore, parce que l’ inexécution de celte
m ê m e condition n’est point le lait de j 3ellanger, mais bien celui du
citoyen G i v r y .
Il résultera de la démonstration de ces deux propositions, quo dans
tous les cas possibles, il est tenu d acquitter le legs, et les d omma ge s
et intérêts d e ma n dé s , et que j'ien ne sauroil l’en dispenser.
�(
P R E M I E R E
7
)
P R O P O S I T I O N .
L e legs est dû , indépendamment de la condition qui lui est apposée.
Quelle est la nature de ce legs? C ’e s t , sans contredit, lin legs rémunératoire , une récompense donnée p o u r des services déjà reçus et à
recevoir par la suite.
'
,
O r , quelles que soient les conditions opposées à lin l e g s , à une
donation r énni né ra to it e, elles ne peuvent jamais eire d ’un a ccompli s
sement aussi strictement rigoureux , que les conditions apposées aux
donations purement gratuites.
L a raison de cette différence vient de ce que la donation r é m u n é
ra toire est plutôt une dette que le testateur acquitte, q u ’ une véritable
donati on; car si quelquefois il donne plus q u ’ il ne d o it , il n’est pas
en son p ouvoi r d’attacher à sa donation des conditions telles, qu’ il
puisse se dispenser d'acquitter ce qu’il doit réellement : la justice ne
permet pas pius q u ’on s'enrichisse des services d’aut ru i, que de sa
fortune.
Ces principes s’appliquent singulièrement a ux legs faits à des domesticjuRs par des vieillards infirmes. O n sait que les g^ges ordinaires
cju on leur d o n n e , ne suilisent pas , g beaucoup près, pour les r é c o m
penser des peines et des soins q u ’ ils prennent de ces êtres que la mort
Ivappe en détail , et q u ’elle accabl e, avant de terminer leur cari ¡ère,
de mille et milie inf irmités, aussi pénibles à soigner q u ’à supporter.
Al ors il n’est que l’espoir d’être indemnisés du surcroît de leurs
soins et de leurs veilles, qui soutient l’attachement des domestiques
auprès de leurs vieux maîtres , et les legs q u ’ils leur font après leur
m o r t , mê me a ve c la condition de recevoir leurs derniers soupirs, ne
sont jamais regardés que c o m m e un supplément de leurs gages.
I o u t e peine mérite salaire, et tout salaire doit être proportionné à
la peine.
C ’est ce qui a été décidé par plusieurs arrêts. D e n i s a r t , verbo legs ,
en rapporte un trèi-remarquable, N°. i 4 i dont voici les circonstances.
Nous les copions.
»
»
»
»
»
w
« L e n août 1 7 5 5 , M . le mar échal de T h o m o n d fit son testament
devant notaires, par lequel, entr’autres dispositions, il iit un legs
de 400 livies de pension viagère à Sevestre, son cuisinier, laquelle
pension devoit c o mme nc er du jour de son décès; plus, il lui léguoit
Mx :nois de ses ^ages, i ndépendamment de ce qui lui en seroit dû.
T n n s mois après ce testament , le mar échal de T h o m o n d ht ui»
co*-licilc en l av eu r de tiO;s domesti ques, ù qui il légua à chacun
�»
»
»
»
.
.
,
. (
8
)
.
une pension viagère de 150 l iv r e s ; bien entendu, portoit le codi
c i l e , que ces pensions et ces dispositions 11’ auront lieu qu’autant
que ces trois domestiques seront ¿1 mon service a l'heure de
ma mort.
» T ro is ans après la date de ces testomens et c o d i c i l e , et en 1 7 6 8 ,
» Sevestre sortit de chez M. Je maréc hal de T h o m o n d , o ù il étoit
» tombé malade. L e mar échal de T h o m o n d décéda le 9 sep
» tembre 1761.
» Quatre années après sa m o r t , Sevestre demanda en justice le
» paiement de sa rente v ia gèr e; il soutint, au Ch ât elet , q u ’ il n’étoit
» sorti de chez le maréchal de T h o m o n d q u ’à cause d’une ma la di e :
» il ajouta q u ’il n’ a voit pas perdu la protection de ce seigneur, qu i
» m êm e l’avoit placé chez le marquis de Sassenage; e n f in , que s’élant
écoulé trois ans depuis sa sortie chez M. le maréchal de T h o m o n d ,
» sans que le testateur eût r évoqué le legs à lui fait, c ’éloit une preuve
» q u e M . le maréchal de T h o m o n d avoit persisté dans sa volonté. ,
» L e tuteur des mineurs enfans de M . le maréchal de T h o m o n d ,
opposoit pour défenses, que Sevestre ne s’étant pas trouvé au service
de son maître lors de son d é c è s , il étoit non recevable dans sa
demande : il argiimentoit du codicile et des termes qui s’y trou
voient , relativement aux nouveaux legs faits aux trois autres
domestiques , bien entendu qu’ils seront à mon service à Vheure
>5 de ma mort ; enfin il excipoit de celle autre circonstance, que le
» testateur, outre les 400 l i v r e s , lui avoit en outre laissé six mois
55 de ses g a g e s , ainsi q u ’aux trois autres domesliques , pour leur
» donner moyen de se mettre en condition', ce qui s u p p o s o i t , par
5) c o n s é q u e n t , que Sevestre, ainsi que les autres domestiques, seraient
» encore à son service a son d é c è s , sans quoi les legs seraient
» caducs.
» P a r sentence conlradictoire du Châtelet, du 2.8 novembre 1 7f)6 ,
» Sevestre fut débouté de sa d e ma n de , a ve c dépens. Sevestre en
» appeila en la grand’ eha mbr e ; et par arrêt du lundi i 3 juillet 1 76 7,
.0 audience de sept heures , après une plaidoierie très-contradicloire
« la sentence fut i n f ir mé e, la délivrance du legs ordonnée à Seveslre
» seulement du jour de la de ma nde , a vec dépens.»
«
«
»
»
Si l’u s a g e , dans ce t ems, eût été de motiver les jusçemens c o m m e aujourd h u i , 011 verrait sans doute que 1g motif 1g plus dirimaut de cet
arrêt éloit la nalure rénumératoire du legs, et que la condition de se
trouver auprès du testateur, au mo me nt de sa m o r t , n’étoit point à la
ri gueur une condition sine qud non ; car dans cetle espèce, si le léga
taire n’a pas acquitté la lolalité du legs par ses services, il en a acquitté
nu moins une partie, et il seroit souverainement injuste de pri ver un
domestique de ce qui lui est légitimement d û , lorsque ce 11’ est pas sa
�faule s'il n’a pas tout Fait ce q u ’ il ch voit faire pour obtenir la totalité du
legs, et que d’ailleurs il n’existe contre lui a u cu n sujet de mécontente
ment qui puisse le lui faire perdre.
_ O r , telle seroit l’ injustice dont Bellanger r>eroit aujourd’ hui la vi ct ime ,
si supposé q u ’il eut quitté volontairement le cit. Dorvi lli ers, avant sa
“ oi’t, il étoit privé de son legs. Be ll ang er , après avoir passé les plus
belles années de sa vie au service du cit. D o r vi ll er s , a v e c les plus m o
diques g a g e s , perdroil le fruit de lant d’assiduités et de soins, de tant
de nuits q u ’il a passé auprès de l u i , à le p anser, à lenét oyer et à r e m
pli r, c o m m e une garde m a l a d e , toujours au chevet de son l i t , les plus
pénibles et les plus dégoûtantes {onctions!
Il
n’est point de tribunal q u i , dans ce c as, lui refusât un supplément
de gages pour l’ indemniser de ce supplément cle fatigues et de veilles,
et on voudroit le priver d’ un legs dont il a acquitté la plus grande
partie par ses services, parce q u ’il ne lui a pas été possible de l’acquitter
en totalité!
*
Non , un tel système de défense est trop injuste , trop déshonorant
de la part de celui qui le propose, trop opposé aux intentions si claire
ment énoncées du cit. Doryilliej s ; il dégèle de la part de son héritier
un si grand fond d’ingratitude et d’a var ice , q u ’on craint de se dé s ho
norer soi-tnéme et de s?, rendre son c o mp li ce , en écoutant a v e c quel que
attention une pareille défense.
_Détournons nos regards d’ un tableau si h i d e u x , et hâtons-nous cl’arriver à notre seconde proposition,
i
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
L e legS' estdâ , parce que Vin exécu tion de la condition n ’ est pas le
f a i t de B ella n g er, n u is bien celu i du cit. IJugon Givry.
r^t-ce Bellanger qui a quitté volontairement le cit. Dorvilliers ? Est
e citoyen de G i v r y qui l’a cong édi é?
*
? C o m m e 1 intérêt est la mesure de toutes les actions humaines, v o yo ns
« a .ueur de ce flambeau si c’est Bellanger q u i , de sa propre volonté,
es l et ne , ou si c ’est le citoyen de G i v r y qui l’ a forcé à cette retraite.
.a ^,0 u l ’ e!1 supposant ciue tous ces sentimens de zèle et d’ attacl«?^ an^ei' ^uso' f Parnde auprès du comte Do rvi ll ie rs, nVusl'n,,
G- -n6 Sa 'lain 1 cIi" ei * fei' •n,t! ^ .dissimulation,
Bellanger
savoit
que
le
IjOII
»
*
.. O
.
.
1
écriif» | ,C
• CUll)'le,'0,, p ^d a i r ? son testament ; il eu avoit la preuve
avnW t G Sn l,n,11' n cl;,ns l’acte du ifj avr il 1788, relatif aux effets q u ’ il
a pporles eu séminaire de Saint-Magloire.
nsuite Bell anger, c o ir aincu que le cit. Dorvilliers ne pouvant so.
�( io 5
passer de l u ! , avoit des raisons de soupçonner q u ’ il mettoit quelque
condition dans ce testament pour le lier auprès de sa personne ju squ’à
sa m o r t , et ses soupçons ne se sont que trop bien réalisés.
O r , est-il probable que Bellanger ait été assez ennemi de son propre
intérêt et de lui-même pour quitter le citoyen Dorvilliers au mo me nt
où il entrevoj'oit à chaque minute que ses espérances alloient se
réaliser par la mort de ce vieillard agonisant? Q u o i ! il a passé q u a
torze années, sans relâche, auprès de lui, dans le plus pénible s e r v i c e ,
et c’est lorsqu’il est sur le point de recevoir les récompenses q u ’ il lui
a tant de fois promises, q u i l le quitte!
N o n , ce fait n’est pas c r o ya bl e ; Bellanger n’est point un f o u , u n
i mbécilie ;les témoignages que le comte Dorvilliers, lorsqu’il jouissoit
de sa pleine raison , n’a cessé de rendre de sa sagesse et de ses vertus, ré
sistent absolument à cette idée; et si la sortie de Bellanger de chez le
•citoyen Hugon de G i v r y pou voit être volontaire de sa part, elle ne
pourrait lui être i mp u t a b l e , parce q u ’on ne pourrait la regarder que
•comme un acte de dé me nc e ; on le plaindrait, mais on ne seroit pas
fondé à le priver de son legs, parce que tout ce qui se fait dans la
f o l ie , n ’est point du domaine des loix.
Ma i s v o y e z encore c o m m e tout choque le bon sens dans l’ h y p o
thèse que nous traitons. Si Bellanger avoit eu.dessein de renoncer aux;
avantages portés en sa faveur dans le testament de son m a î t r e , par sa
retraite d’auprès de sa personne, pourquoi a-t-il attendu, pour l’effec
tuer, q u ’il fût à Mo ul ins ? N ’étoit-il pas plus s i m p le ,p l us naturel d’exé
cuter cette résolution à Paris, il s’ épargnoit la fatigue d’un voyage pour
aller et revenir?
C ’étoit , d i r a - t - o n , pour ne pas laisser le comte Dorvilliers
sans secours dans sa route; il l’ai moi t donc, il lui étoit donc att aché;
mai s s’il n’a pu se résoudre à l’abandonner pendant sa route, quelle
raison avoit il de l’abandonner après sa route terminée? L ’a imoi t- il
moins alors? lui étoit-il moins attaché?
O u i n’est co nv ai nc u maintenant que son départ de Mouli ns a été
f o rc é ,e t que l’ intérêt, l’a v j r i c e , la cupidité ont aveuglé le citoyen H u g o n
de G i v r y , au point de le congédier de chez lui, c o m m e il a congédié
Calixte à Paris, pour profiter des legs (ails à ces deux do me sti que s, et
pour se faire un moyen qui le dispensât de les acquitter.
Est-il possible d’en douter, lorsque sans é g i rd à la foiblesse, à l’ état
d’anéantissement d u c o m l e Dorvilliers, et au\ risques de le faire périr en
c h e m i n , il le fait enlever de Pans uo i m nj U i i cadavre q u ’on porte au
lieu de sa sépulture? Et pourquoi celte translation si s ui n t e , si p ré ci
pitée? afin q u ’étant maître absolu de sa personne, rien de sa succession
ne pût lui échapper.
'
S oi Cdoi ’or! voilà donc où l u p o u ^ s c eux que tu tourmentes!et l’on.
�.
C «« )
_
douieroit encore que celte mô me soif n’a pas excité le citoyen H u g o n
cie G iv ry à congédier Bellanger de ch ez lui pour s’ emparer de son legs,
comme elle l’a porté à s’e mparer, sans aucune f or mal it é, de toute la
fortune de son oncle avant q u ’ il fût inort.
A u surplus, s’il pouvoit rester encore quelques nuages sur la véritable
cause de la retraite de Bell anger, le tribunal, pour les dissiper, pourrait
sans doute ordonner la p r e u v e , tant par titres que par témoins des faits
énoncés au présent mé moi re .
•
' Ma is quoi! cette preuve n’est-elle pas toute acquise? N ’est-il pas d’une
évidence irrésistible que Bellanger ayant tout à perdre en quitant le
comte d ’Orvilliers avant sa mort', il ne l’a pas quitté de son propre
mo uve men t ? N’est-il pas d’une évidence non moins irrésistible que le
citoyen H u g o n de G i v r y ayant r envoyé C a l i x t e , l’ un des domestiques
du c o m t e , pour gagner le legs que ce vieillard avoit f a i t , il a de même
1 envoyé Bellanger dans la v u e aussi de profiter du legs fa it à Bellanger ?
O r , le citoyen H u g o n de G i v r y peut-i l argumenter de sa propre
turpitude? peut-il se faire u n moye n de sa convoitise pour se dispenser
*d acquitter un legs qu e l’ honneur et le respect, pour la m é m o i r e d’ un
oncle qui lui a laissé tant de f ortune, lui c omma nd ent si impérieuse
ment d’acquitter?
C)ue deviendraient donc les dernières volontés des mourans , si leurs
héritiers, à l’exemple du citoyen Plugon de G i v r y , pouvoient se per
mettre de les anéantir? Quels domestiques, sur la foi instable de leurs
maîtres caducs et i n f i r m e s , sacrifieroient leurs veilles pour les soulager ,
et exposeraient m ê m e leur santé, si les promesses de ces homme s lutlant sur la couche mortuaire entre le trépas et la vie , pouvoient être
iaussées et rendues illusoires par d avides et ingrats collatéraux ?
Magistrats, 1 epoque est enfin arrivée où après, tant de secousses v i o
lentes, il vous est permis d ’avoir tout le courage de la j usti ce, et de
raflermir , par l’autorité de vos jugemens-, les bases tant de fois ébranlees de la sociabilité. V o u s en ave z dans cette ca us e, l’occasion la plus
éclatante.
'
S il est de l’intérêt de la société d’assurer le service des domestiques
«iiveis leurs maî tres, il n’est pas moins intéressant pour elle d’assurer
es îéeompenses des maîtres envers leurs domestiques.
•Ainsi vous avez à puni r l’avidité d’ un collatéral qui croit n’ en a vo ir
point assez, si a l’opulente succession q u ’ il a recuei lli e, il ne joint
Un mo di que legs fai 1 a un pauvr e domesti que, après i/| années du ser
vice le plus assidu et le pins pénible. V o u s a ve z à venger ce malheui eux auquel un héritier barbare veut arracher It pain q u ’ il a gagné au
les** Ce *anl f'6 v e '^*!s et c^e sueurs. V o u s ave z à l’indemniser dp toutes
les chicanes multipliées de son r e d o u t a b l e adversaire lui
11 luit é pr o uv er , et qui l’ont réduit à la déplorable nécessité de
�. .
( .
12
)
vendre son mobilier pour f ou rnir a u x frais de c ette injuste contesta
tion.
Justice et h u m a n i t é telles s ont les deux vertus que vous ave z à sa
tisfaire. Dél ivrance du legs , dommages et intérêts proportionnés a u x
pertes de Bell anger ; tel est le jugement q u ’elles vous c o mma nd e nt , et
q u e le publ ic attend de vous.
SIMON
J.
Les
TH.
B E L A N G E R .
L A N G L O Y S , ancien avocat au parlement de Paris.
Jurisconsultes
soussignés
qu i ont lu le mémoi re
ci-dessus, et toutes les pièces sur lesquelles il est basé, après a voir
mûre me nt réfléchi sur les questions qui y sont traitées :
Sont d’avis que
S imon Belanger doit obtenir du
tribunal ci vi l
de l’Al l i e r l’admission des conclusions q u ’ il a prises , et qui tendent
à ce que le
citoyen
H u g o n G i v r y , héritier du
ci -devant comte
d ’O r v i l l i e r s , soit condamné d’exécuter à son égard le testament du
d e r n i e r , du 14 mai 1787.
L a demande de Belanger est fondée sur la morale et sur les loix;
et ses deux titres doivent par-tout être consacrés.
D élib éré à P a r is , le 1 3 p lu v iose an 8.
C 0 S T E.
.m a u s s a l l é ,
D e l’i m p r i m e r i e de L E N O R M A N T , rue des Prêtres SaintGe rm ai n l’A u x erro i s , No. 42.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Belanger, Simon. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Simon Belanger
Langloys
Coste
Maussallé
Subject
The topic of the resource
successions
legs
domestiques
Description
An account of the resource
Mémoire pour le citoyen Simon Belanger, ci-devant cuisinier, et premier domestique de défunt Louis Gaillonet d'Orvilliers, amiral de France, Demandeur; contre le citoyen Hugon de Givry, seul et unique héritier dudit défunt son oncle, Défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Lenormant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1779-An 8
1751-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0103
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0104
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53644/BCU_Factums_M0103.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Paris (75056)
Moulins (03190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domestiques
legs
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53308/BCU_Factums_G1705.pdf
c27003776d341e537ddde2ba77032af7
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
Sieur L aurent - L ouis - A mable D E L O R T ,
propriétaire, habitant de la ville de Thonon,
département du L ém an , appelant ;
C O N T R E
.
Sieur C l a u
d e
B O U T A R E L et dame F
r a n
R U P H Y , son épouse habitans de la
ville d’Aurillac intimés.
ço ise
E N perm ettant à l’ho m m e de disposer après lui de ses
biens , en lu i accordant le plus beau des privilèges , la
faculté de tester, la lo i a v o u lu sans doute que ses d e r
nières volontés fussent religieusement exécutées
aussi
vo it-o n que la seule mais r ig o u reuse condition à laquelle
est attachée la validité du testament f c’est la certitude de
A
�la vo lo n té du testateur, lorsque d’ailleurs sa capacité n’est
pas contestée.
T o u tes les précautions dont la loi s’e n to u r e , n’ont
d ’autre objet que d ’acquérir cette certitude.
A in s i, le testament public est assujéti à une multitude
de formes intrinsèques , q u i , toutes minutieuses qu’elles
peuvent p a ro ître , doivent être o b serv ées, î\ peine de
nullité , parce q u ’ayant toutes p o u r but d’im prim er à la
disposition le caractère d’ une vo lon té parfaitement lib re ,
elles ne sont plus de simples fo rm u le s , mais bien autant
de conditions attachées à la faculté de tester.
A in s i , le testament m ystique, qui laisse au testateur la
liberté de tenir scs dispositions secrètes, est rigoureusement
soumis à des formes e x té rie u re s , sans lesquelles la loi ne
l’autorise plus.
A in si enfin, le testament olographe étant dispensé de
toutes ces formes , parce qu ’il est l ’ouvrage immédiat du
testateur, la loi a dû prendre des précautions rigoureuses
p o u r s’assurer q u ’il contiendrait sa dernière vo lon té, p our
a vo ir la certitude que ce testam ent, laissé le plus souvent
parm i les papiers du d é fu n t, et à la merci des héritiers,
seroit l’apporté à la justice, intact et sans altération. P o u r
cela , elle a établi certaines fo rm e s , sans lesquelles elle ne
le reconnoît plus.
S i - p a r e x e m p le , le secret du testateur a été v io lé ; si
avant de rem p lir ces formes le testament a été d ’abord
soustrait, puis o u v e r t , lorsqu’ il étoit cacheté ; si on n’en
présente q u ’une partie, ou si on a pu même le supprimer
p ou r en substituer un a u tre ; si tous ces faits sont établis,
la loi refuse toute confiance à la disposition , et à celui
�m
(3 )
qu i la présente ; elle défend, aux magistrats d’en perm ettre
l ’exécution.
V o i là précisément l’espèce de la cause ; elle est digne
de fixer l’attention de la c o u r , soit parce que la question
est im p o rtan te, soit parce que l’intérêt en est m a je u r ,
puisqu’il s’agit d ’ une succession opulente ; soit enfin parce
qu ’elle tient à la m orale et à l’ordre public.
F A I T S .
Louis-Isaac D e lo rt est décédé à B o u d ie u , près A u rilla c ,
le 28 fructidor an 12 , à cinq heures du m a t in , laissant
p o u r héritiers naturels L a u re n t-L o u is-A m a b le D e l o r t ,
son f r è r e , et la dame R u p h y , sa sœur.
Sou frère étoit alors dans le département du L ém an ,
où il habite ; la dame R u p h y étoit ù A u r illa c : il n’y a voit
auprès de lui que la dame B o u ta re l, fille de la dame
R u p h y , et son mari.
A peine le sieur D e lo r t eut-il ferm é les yeu x , que le
sieur Boutarel prit sous son chevet les clefs de son b u r e a u ,
l’o u v r i t , fouilla les t ir o ir s , et y p rit un paquet sous en
v e lo p p e , cacheté de cinq cachets : l ’enveloppe portoit une
suscription annonçant qu ’elle contenoit les dernières dis
positions du défunt.
L e sieur B o u ta rel, com m e on peut le p en ser, ne s’assista de personne p o u r faire cette r e c h e r c h e , ou p ou r
m ieux d i r e , cet en lèvem ent; il déchira l ’en v e lo p p e , en
tira les papiers qu i y é to ie n t, et laissa passer deux jours
entiers sans prendre aucune mesure.
Ce ne fut que dans la journée du 30 fructidor q u ’il
parut avec la dame R u p h y , son é p o u s e , devant le présiA
2
o
�( 4
?
dent du tribunal civil d’A u r illa c , à qui ils présentèrent
ensemble un testament d’Isaac D e lo r t, écrit sur une feuille
v o la n te, sans cachet ni en veloppe , et qui portoit un legs
universel au profit de la dame Boutarel.
Ce papier é t o i t - i l celui que le sieur Boutarel avoit
trouvé sous l ’enveloppe dont il avoit v io lé le sceau ?
e t , à le supposer a in s i, étoit-il le seul qui fût sous cette
e n v e lo p p e ? contenoit-il enfin l ’unique , la dernière v o
lonté du testateur? C ’est une question que n’avoit pas à
décider le président du tribunal d’ A u rilla c -, il n’eut qu ’à
constater l’état de la p iè c e , et
en ordonner le d é p ô t ,
telle q u ’elle é to it, chez un notaire : c’est ce qu ’il fit par
son procès verbal du m êm e jour 30 fructidor an 12.
L e 2 vendém iaire su iv a n t, les sieur et dame Boutarel
obtinrent une ordonnance qui les envoya en possession
des biens , conform ém ent à l’art. 1008 du Code civil.
Pendant cet intervalle tout resta au p o u v o ir des sieur
et dame B o u ta rel; personne ne pensa à réclam er ou à
ordonner une apposition de scellés. L e sieur D elo rt éloit
absent ; et le magistrat spécialement chargé par la loi de
veiller à ses intérêts, et d’apposer les scellés d ’office, le juge
de paix , négligea ou ne vo u lu t pas prendre ceLte précau
tion , qu oiqu ’ il fût venu à B oudicu dans la matinée du 28.
L e sieur D e lo rt , frère et h éritier légitim e du défun t,
instruit de ce qui s’étoit passé , vin t ¿1 A u r illa c ; et le 13
fé v rie r 1806 il fit citer en conciliation les sieur et dame
B o u ta re l, sur sa demande en délaissement de la moitié
des biens de son frère.
A p r è s un procès verbal de non-conciliation , et la de
mande judiciaire qui en fut la suite, les parties se présen-
�142
( 5 ).
tarent à l ’audience du tribunal civ il d’ A u r i l l a c , où il s’en
gagea une discussion sérieuse.
L e sieur D e lo rt y mit en avant que le testament de
son frère n’avoit pas été présenté au juge in tégra lem en t, ni
com m e il devoit l ’être ; q u ’il y avoit de la part du sieur
Boutarel une double in fid élité, i° . en s’emparant sans
autorité ni q u a lité, et en l’absence de l’heritier naturel,
de la clef des tiroii’s du d é f u n t , et des papiers qu ’ il avoit
pu y tro u v e r; 2 °. en se permettant de ro m pre les cachets
du testam ent, et de vio ler tout à la fois le sceau et le
secret du testateur.
T o u t cela , disoit le sieur D eloivt, a été fait sciemment;
car le testament avoit sur l’enveloppe une suscription
signée du testateur; et tout cela ne peut a vo ir été fait
sans intérêts : rien ne le p ro u ve m ieux que la suppression
de l ’enveloppe.
D ’où il faut c o n c lu re , ajoutoit-il, que rien ne garantit
à la justice que le testament qu ’on rapporte soit réelle
ment celui qui a été tro u vé dans les papiers du testa
teur ; q u ’on n ’ait pas supprim é celui-là p o u r en substi
tuer un autre q u ’on a'ui'oit obtenu par obsession ; o r , le
légataire étant constitué en mauvaise f o i , la présom ption
est contre lui ; et que quand bien m êm e il n ’y auroit pas
de preuve précise de suppression du testament, dès que
la justice n’a plus de certitude sur la dernière vo lon té du
testateur, le légataire doit être puni par le x’ejet du tes
tament , de la violation qu ’il s’est permise.
Ces moyens étoient faits p o u r embarrasser les sieur et
dame Boutarel. S’ils avouoient les faits qui en étoient la
b ase, ils étoient constitués en mauvaise fo i; s’ils prenoient
4
�le parti de les n ie r, la p reu v e en étoit facile : et c’eût été
bien pis. Ils s’en tirèrent assez adroitement. J e conviens,
dit le sieur B o u ta re l, a vo ir ro m p u le cachet, et ouvert
l ’enveloppe; mais je l ’ai fait et j’ai dû le faire, parce que
l ’enveloppe portoit uniquem ent ces mots : P o u i' rem ettre
à m adam e B o u ta re l. Si je ne la rapporte pas aujourd’h u i,
c’est que le juge de paix q u i vint à B o u d ie u , dans la mati
née du d é c è s , et ù qui je iis la remise du p a q u e t , jugea
l ’en velop p e in u tile , et n’a x'emis que le testament le jour
de sa présentation : d ’ailleurs j’ai dû o u v rir les tiroirs et
chercher le testament, parce que j’étois instruit que m on
oncle avoit laissé des ordres de le faire inhum er à A u r i l lac ; ce qui ne p o u vo it pas se retarder.
T o u t e captieuse q u ’étoit cette défense , le sieur D e lo rt
la rétorqua vivem ent. V o u s croyez a vo ir b esoin , dit-il
au sieur B o u t a r e l, de prétendre p o u r votre justification
que le paquet vous étoit adressé. E h bien ! j’offre de
p ro u v e r q u ’au lieu de ces mots : P o u r rem ettre à m adam e
B o u ta r e l, il y avoit plusieurs lignes écrites, signées du
sièur D e lo r t , annonçant que le paquet contenoit ses der
nières dispositions : ce que devoit d ’ailleurs facilement
faire présum er l’apposition de cinq cachets ; ainsi je vous
constitue en mauvaise foi d e deu x manières :
1°. E n p r o u v a n t que r ie n sur l ’e n v e l o p p e , ni dans la
su scrip tion , n’a pu vous autoriser à o u vrir le paquet ;
q u ’au contraire tout vous com m andoit une respectueuse
discrétion ;
2 ° .,Parce q u e , dans ce ré c it, je démontre que vous en
imposez à la justice.
Q u a n ta la remise du testament au juge de p a ix , le sieur
�C 7 )
D e lo rt rép ondit que c’ étoit une fable d é m o n t r é e , soit
parce qu ’ il n’y avoit pas de procès v e rb a l, soit parce que
le testament avoit été présenté par les sieur et dame B o u tarel seuls , et non par le juge de paix.
T e l étoit L’état de la cause, lo r s q u e , le 9 mai 18 0 6, il
intervint au tribunal d’A u rilla c un jugement par leq u el,
sans a vo ir égai’d à la p reu ve offerte par le sieur D e l o r t ,
dans laquelle il fut déclaré non rece va b le, il fut débou lé
de sa d e m a n d e, et condam né aux dépens.
Ce jugement porte dans scs m otifs, q u ’il est avoué par
les parties que le testament p rod uit par le sieur B ou ta rel,
est en entier é c r it, daté et signé de la main du testateur,
et que la loi n’exige pas d’autres formalités ;
Q u e toutes celles voulues par l ’article 1007 du G o d e ,
ne sont relatives qu ’au m ode prescrit p o u r rendre public
le testament; mais que leur oubli ne peut en o p érer
n u l l i t é , puisqu’elle n’est pas pronon cée par loi ; que la
p reu ve est inadmissible, parce qu ’elle ne tend, ni à établir
l’absence de l’une des trois formalités voulues par l ’ar
ticle 970 , ni à p ro u ve r la suppression d ’un testament réVocatoire de l’autre, mais seulement la suppresion d’une
enveloppe absolument indifférente : qu ’ainsi on doit y ap
pliquer la m axim e frustrcL p r o b a tu r , etc.
E n f i n , le jugement « donne acte au sieur D e lo rt de la
« déclaration faite par les sieur et dame B outarel, q u ’après
« le décès de Louis-Isaac D e l o r t , le sieur B ou ta rel, as« sisté du sieur Usse, p rê tre , cherchant dans scs papiers
« une recommandation relative à son enterrem ent, tro uva
« un paquet cacheté ? sur lequel étoit écrit : P o u r r c -
�f { *'h
C8 )
« m ettre à m adam e B o u ta r e l j que l ’ayant o u v e r t , il a
« tro u v é le testament dont il s’agit ; que le testament et
cc l ’enveloppe ont été confiés à M . B o u d ie r, juge de p a ix ,
« q u i , le jour de la représentation du testament, n’a remis
« que celu i-ci, regardant l ’enveloppe com m e inutile. »
L e sieur D e lo rt a interjeté appel de ce ju gem en t; et
qu oique les circonstances et les faits articulés devant les
premiers ju ges, fussent suffisans p o u r le faire in firm e r,
au moins en ce q u ’il a déclaré la p reu ve non rece va b le,
le sieur D e lo rt n’en est pas m êm e réduit à ces termes.
Il a eu connoissance depuis l’appel de quelques faits plus
précis encore que ceux dont il a offert la p reu ve en pre
m ière instance, et au m oyen desquels il ne pourra y avoir
de doute sur la fausse application de la m axim e ¿fustrà
p r o b a tu r, e tc ., et sur le m al-jugé du jugement.
C ’est ce q u ’il s’agit de dém ontrer : la tâche ne pai’oît
pas difficile ; il suffit de com parer avec les principes et la
disposition des l o i s , la défense des sieur et dame B o u ta re l, et les motifs du jugem ent dont est appel.
L ’art. 1007 du Code civ il veut que tout testament olo’ g r a p h e , a va n t (îêtre m is à e x é c u tio n , soit présenté au
président du tribunal c i v i l , qui l ’o uvrira s’il est cacheté,
dressera procès verbal de la p résen tation, de Vouverture
et de Vétat du testament, etc.
E t les principes de tous les temps et de tous les lieux
veulent que celui qui est constitué en mauvaise f o i , qui a
com m is m ie in fidélité, en soit puni au moins par la perte
de tous les avantages qu i p ou vo ien t en l’ésulter p ou r lui.
Q ue l’on accorde la disposition de la loi avec les p rin
cipes ,
�14^
# (9 )
cip es, et on sera convaincu que les faits articulés par le
sieur D e l o r t , suffisent p ou r faire rejeter le testament.
P o u rq u o i la loi a-t-elle vo ulu une présentation du tes
tament olographe au président du trib u n a l? P o u rq u o i
a-t-elle exigé qu’ il fût dressé un procès verbal de r o u
verture et de Vétat du testament?
P o u r que personne ne puisse se rendre maître des dis
positions du défunt ; p o u r que le testament laissé le plus
souvent parm i les papiers de la succession, reçoive un
caractère authentique de v é ra cité ; p ou r que les héritiers
légitimes soient à m êm e de critiquer Vétat de ce testa
m en t, s’ils croyent p o u v o ir le faire avec avantage; p o u r
conserver enfin les droits de tous les intéressés, et assurer
autant que possible à la justice, que ce testam ent, exem pt
de toutes formalités intrinsèques, a été rapporté intact,
sans dol ni fraude, sans infidélité d’aucune espèce. A qu oi
serviroit autrement d ’en constater Vétat ?
E n veut-on une p reu ve plus positive en co re? O n la
trouvera dans les précautions dont s’entourent les arti
cles 9 1 6 , 9 17 et 918 du Gode de procédure.
L ’art. 916 veut que s’il se trouve un testam ent ou a u tres
papiers ca c h e té s, lors d’une apposition des scellés, le juge
de p aix en constate la f o r m e e x té r ie u r e , le scea u et la
s u s c r ip tio n , s’il y en a , paraphe Tenveloppe avec les
parties intéressées........... et fasse mention du tout sur son
procès verbal.
L ’article 9 1 7 , que le juge de p aix fasse, avant l ’appo
sition des s c e llé s , perquisition de tout testament dont
l ’existence seroit annoncée.
E t l’art. 9 1 8 , que les paquets trouvés ca ch etés, soient
B
�ito
( i° )
présentés p a r le juge de p a ix au p résid en t, le q u e l, estil d i t , en fera l ’o u v e rtu re , en constatera V éta t, etc.
P o u rq u o i ces excessives précautions de la l o i , si la
f o r m e e x té r ie u r e , le s c e a u , la s u sc r ip tio n , Venveloppe
du testament o lo g ra p h e, étoient si indifférens à ses y e u x ?
E t p o u r q u o i, si on est obligé de con venir que rien de
tout cela n’est indifférent, veut-on que la p reu ve de l ’in
fidélité, de la violation du sceau, de la suppression de
l’enveloppe et de la suscription, peut être du testament
lu i- m ê m e , soit une p reu ve indifférente et sans objet ?
O r , il étoit établi devant les premiers ju g e s,
Q ue le sieur Boutarel s’étoit permis de s’emparer des
clefs du d é fu n t , d ’o u v rir ses tiro irs, de fou iller dans ses
papiers ( et qu i sait où! ) , qu oiqu ’il ne fût pas héritier
n a t u r e l, et que l ’un de ses héritiers fût ù deux cents lieues
d’A u rilla c ;
Q u e s’étant emparé du testament du sieur D e l o r t , il
en a v o it rom pu les sceaux et soustrait l’en velop p e, quoique
chargée d’ une suscription ;
E nfin que le troisième jour seulement il avoit présenté
au président du tribunal civil un testament sur une feuille
de papier v o l a n t , sans enveloppe..
L e sieur Boutarel avoit donc contrevenu au x diverses
dispositions du Gode : il devoit donc être p u n i , en n ’ob
tenant pas îe x é c u tio n d’ un testament qui ne p ou voit pas
être reconnu p o u r être celui du sieur Delort..
Q u ’a-t-il répondu ?
E n prem ier lieu , q u ’ il avoit été obligé de faire p er
quisition p ou r trouver les ordres du sieur-Delort sur ses
obsèques..
�( II )
Mais ces ordres ne pou vo ien t se tro u v e r que dans son
testament; et l’article 9 17 du Gode de p rocédu re permettoit au juge de p aix seul de faire cette perquisition.
D ira-t-on que le Code de procédure 11’existoit pas alors?
M ais on sait que ce Code n’est que le com plém ent du
Code c i v i l , le développem ent de ses dispositions. O r ,
ces mesures conservatoires étoient suffisamment indiquées
par les articles 821 et 1007 du Code c i v i l , et par l’ar
ticle 8 1 9 , où l’on vo it que le juge de p aix doit apposer les
scellés, mêm e d’o flic e , partout où les héritiers sont absens
au moment du décès. Il falloit donc le faire ainsi ; et il
n’ étoit pas besoin alors du Code de p rocédure p o u r re
q u érir le juge de paix de faire perquisition préalable du
testament, ni p ou r savoir que le président du tribunal
p ou vo it seul faire V ouçerture du testament , ou autre
papier cacheté.
L e sieur Boutarel ne trouvera d’ailleurs dans aucune
loi qu ’ il soit permis à un h é r it ie r , lorsque tous n’y sont
p a s , encore moins à un étra n g e r, de s’ériger en m aître,
et de s’em parer et d’o u v rir les papiers de la succession :
ainsi, il est inexcusable sur ce prem ier fait.
E n second lieu , il prétend a vo ir ouvert le p a q u e t,
parce qu’il étoit à l’adresse de sa femme.
•Mais le sieur D e lo r t a offert la p reu ve du contraire ;
d’où il résultoit une n ouvelle p reu ve de mauvaise f o i ,
puisque les sieur et dame Boutarel ont v o u lu s’excuser
par un mensonge.
E n f i n , il prétendoit se justifier de ne pas rapporter
l’e n v e lo p p e , en disant qu ’il avoit présenté le tout au juge
de p a i x , qui avoit jugé l ’enveloppe inutile,
B 2
�t
$•>< ;
C Ï2 )
M ais où est le procès verbal du ju ge de paix ? Si le
fait étoit v ra i, y auroit-il une autre manière de le cons
tater ? E t com m ent présum er qu’un juge de paix se per
mette de retrancher une pai’tie essentielle d’ un testament,
de s’en charger mêm e , sans le constater, sans dresser un
procès v e r b a l? Com bien ne seroit-il pas rep réh en sib le,
s’il le faisoit ? Ce n’est donc chez les sieur et dame B o u
tarel qu’ une misérable défaite.
Ils sont donc convaincus d’infidélité , de mauvaise foi:
ils ont donc encouru la peine de celte in fid élité, parce
q u ’ ils l’ont commise sciemment et à mauvais dessein.
V o y o n s à présent ce q u ’ont dit les premiers juges dans
leurs motifs : on les a déjà rappelés eu substance.
Ils disent d’abord que le testament est é c r i t , daté et
signé par le testateur, et que la loi n’impose pas d ’autres
formalités.
M ais c’est s’écarter de la question. O n ne contesle pas
à ce testament les. formes auxquelles il est assujéti ; mais
on met en question ,, et il s’agit de savoir si le testament
qu ’on rapporte est celui qui a été laissé par le sieur
D e lo rt et enlevé par le sieur B o u ta re l, revêtu d ’une en
v e lo p p e , et scellé de cinq cachets.
Q u ’on dise, si L’on ve u t, q u ’il ne suffit pas de le mettre en
question, et qu’il faut des preuves;.le sieur D elo rt répondra,
avec avantage, q u ’ il lui suffit de p rou ver la mauvaise foi*,,
la soustraction, p o u r que par cela même la suppression,
du testament soit présumée jusqu’à preuve contraire.
lies premiers juges disent ensuite que les formalités
voulues par l’article 1007 du Code civil ne sont relatives
qu’au m ode prescrit p o u r rendre le testament public ;
�I}0
( 13 )
qu ’ainsi leur omission ne peut en opérer la n u llité, parce
qu ’elle n’est pas prononcée.
E n f i n , que la preuve est inadm issible, parce qu’elle
ne porte que sur la suppression d’une enveloppe indiffé
rente à la cause, mais non sur celle d’un testament révocatoire de l’autre.
L e prem ier argument est faux dans toutes ses parties.
Si l ’article 1007 du Gode civil n’a pas dit en termes
précis que le testament olographe qui 11e seroit pas p ré
senté dans les formes qu’il p re sc rit, seroit déclaré n u l ,
il l ’a plus que donné à entendre ; il l’a positivement
v o u l u , en ne permettant pas q ii’U so it m is ci e x é cu tio n
avant que ces formalités soient remplies.
N e l’eût-elle pas d it , elle a suffisamment appris qu’elle
exigeoit ces formes comme les seules qui pussent lui faire
rcconnoitre un testament olographe v a la b le , et q u e , hors
de l à , elle refuseroit sa confiance et sa sanction à tous
ceux qui lui seroient présentés.
Ces principes ne tiennent-ils pas d’ailleurs à.la m o ra le ,
à l’honnêteté publique ? Sera-t-il donc permis à u n étran
g e r , à un cohéritier m ê m e , d ’o u v r i r , de fouiller les
tiroirs et les papiers d’un défunt au m om ent où il vient
d’e x p i r e r , et en l’absence de la famille ; de s’em parer de
ce qui lui conviendra ; d’o u v r i r , de garder en son p ou
v o ir ce qu’il trouvera à son avantage , et de supprimer
ce qu’ il voudra soustraire? lia l o i , la justice , poui'rontelles rcconnoitre après cela un testament olographe qui
sort des mains de cet étranger, et à son profit bien entendu ,
par cela seul q u ’ il est écrit, signé et daté de la main du tes
tateur; et lorsqu’il est constant qu’il n ’en étoit.pas le dé-
ré
�(I4).
p o sita ire, q u ’il l ’a enlevé parm i les papiers du d é fu n t,
et qu’après l ’avoir retenu deux jours il ne le présente pas
dans l ’état où il l’a pris ?
E h ! où en serions-nous, si, dans de telles circonstan
ces, il n ’étoit pas perm is à l ’héritier légitim e de faire
entendre sa v o i x , d ’accuser ce prétendu légataire d’infi
d é lité , de soustraction, s’il falloit poser en principe que
la pi’euve de cette infidélité n ’est pas admissible, parce
que la loi n’a pas p rononcé la punition du cou p able, et
que bien loin de le punir elle veut qu ’on le récom pense?
Q uant au dernier raisonnement des premiers ju ges, il
n ’est pas plus exact.
L ’enveloppe ne peut être considérée com m e in u t ile ,
parce que la loi ne l’a pas jugée te lle , parce que sa suscription peut être im p ortante, parce q u ’enfin si on l ’avoit
rap p o rtée, on a u r o it p u la com parer avec le papier p ré
senté , et savoir s’ils étoient faits l’un p ou r l’autre.
E t p o u r q u o i, encore une f o i s , si elle eût pu être in
différente , le Code civil auroit-il exigé que l ’ouverture
eu fût faite par le président du tribunal ? P o u rq u o i l ’auroitil chargé d ’en constater l ’ouverture et l ’état ?
P o u r q u o i , en expliquant plus positivement cet article,
le Gode judiciaire exigero it-il que le juge de p aix chargé
de faire la perquisition du testament, si on le lui annonce
avant l’apposition des scellés, en constate la fo r m e e x té
r ie u r e , te s c e a u , la su scrip tion ; qu ’il le présente lui-,
m êm e au président du tribunal; que ce dernier en cons
tate encore l ’état? P o u rq u o i tout cela, on le répète , si ce
n’est pour p réve n ir les violations? P o u rq u o i tant de p ré
cautions contre l’infidélité, si elle doit rester im punie ?
�( i 5 )•
Ces formes ne sont ni puériles, ni plus minutieuses que
celles qui sont attachées au testament p u b lic ; elles ne
sont pas non plus moins im portantes, parce q u ’elles ne
sont pas des formes intrinsèques du testament: car elles
ont p ou r objet d’en conserver la substance; et plus le lé
gislateur a donné de latitude au p o u v o ir de l’hom m e en
dispensant les testamens olographes de toutes form alités,
plus elle doit se mettre en garde contre une infidélité
f a c ile , et s’arm er de précaution p o u r la p réven ir.
Les formalités relatives à la remise du testament olo
graphe n’ont donc fait que i*emplacer, dans l’esprit et
l ’intention de la lo i, les foi-mes exigées pour le testament
public ; et ne l’eût-elle pas d i t , en ne permettant de le
ynettre ci e x écu tio n q u ’après ces formalités rem plies, qui
auroit le droit de s’étonner qu ’après de semblables omis
sions, de si repréhensibles in fid é lité s, la justice pût reje
ter un testament olographe qu ’elle ne sauroit valider q u ’en
trem blant, lorsqu’elle est o bligée de déclarer n ul un tes
tament p u b lic , si le notaire qui l ’a écrit lui-m êm e a oublié
d en faire m en tio n , q u o i q u e le fait soit si facile à v é r i f i e r ?
Q ue l’on cesse donc de d ire , avec les juges d ’A u r i l l a c ,
que les faits articulés par le sieur D e lo rt sont indifférens,
et ne peuvent o pérer la nullité du testament; que l ’o n n e
fasse plus à la pudeur publique cette insulte de dire que
la plus grave infidélité dans cette matière ne puisse pas:
produire autant d’effet que le plus petit oubli d’ un no
taire dans la rédaction d’un testament public! T o u t ce que
la loi a placé sous sa sauve-garde, sous la protection im
médiate des'/magistrats, ne sauroit y être en vain. L a loi a
d it:S i vous voulez faille exécuter un testament olographe,
�C 16)
je vous impose ces formalités ; si vous y m anquez, s i , plus
encore , vous les violez ; si vous êtes en mauvaise f o i , je
ne reconnois ni v o u s , ni vo tre testament : je ne ve u x pas
q u ’on l’exécute.
L a p reu ve étoit donc admissible, puisque les faits arti
culés tendoient à faire rejeter le testament : les premiers
juges ont donc mal ju g é ; le sieur D e lo rt pou rro it donc
s’en tenir à ces termes , et soutenir avec fondement que la
p reu ve doit être ordonnée.
M ais v e u t - o n , avec les premiers ju g e s ,q u ’il faille p ro u
v e r la suppression d’ une manière plus positive ? L e sieur
D e lo rt peut satisfaire les plus difficiles.
Il offre de p r o u v e r ,
i ° . Q u ’au lieu des expressions P o u r rem ettre à m adam e
B o u t a r e l, il y avoit sur l ’en veloppe : T esta m en t de
T jo u is -Is a a c D e l o r t , et sa signature ;
2°. Q u ’il y avoit sous cette enveloppe deu x feuilles
de papier , et non pas une seule.
O ù est donc l’autre? Q u ’en a fait le sieur B ou tarel?
Si cette p reu ve est fa ite , il faudra dire q u ’il y a suppres
sion de testament ou de codicile ; il sera constant aloi’s ,
. Q u e le sieur Boutarel a commis une infidélité qui le rend
suspect, en s’emparant des clefs du d é f u n t , en ouvrant
son bureau , en y prenant des papiers , particulièrement
u n testament ;
Q u ’il l’a aggravée en ouvrant ce testam ent, qu oiqu ’il
fût scellé de cinq cachets , et qu ’il ne pût pas d o u t e r ,
d ’après la su scrip tio n , que ce fût un testament;
Q u ’il a s u p p r im é , et conséquemment eu intérêt de sup
prim er cette enveloppe qu i a disparu ;
Q u ’enfin
�1Ü
( *7 )
Q u ’enfin il a supprim é encore une partie des disposi
tions , puisqu’au lieu de deu x feuilles de papier qui
étoient sous l’enveloppe , il n’en a p roduit qu ’une. O r , tout
dém ontre q u ’ une seconde feuille de p a p ie r, sous la m êm e
e n v e lo p p e , n e p o u v o it etre qu ’un second testament, ou un
codicile : il ne p o u vo it a vo ir d’autre but que de modifier
les dispositions du p re m ie r, et d ’en faire de n ouvelles; et
le sieur Boutarel ne peut l’avoir supprimé que p o u r cela.
T o u t cela sera constant : la seule chose qui ne le sera
pas, c’est que le testament rapporté par le sieur Boutarel
soit un des deux papiers qui étoient sous enveloppe ; et
en effet, ne p ou voit-il pas l’avo ir obtenu du sieur D e lo i’t ,
par obsession ou autrem ent, et l ’a vo ir en sa possession?
N ’a-t-il pas été en son p o u v o ir de supprim er le v é r i
table testament, dont il auroit soupçonné l ’existence, p o u r
y substituer le s i e n , puisqu’ il a gardé le paquet pen
dant deux jours entiers? E t la présom ption n’est-elle pas
de d ro it, s’il est une fois établi qu ’il est coupable d ’une
soustraction ?
E t dans ces circonstances, la justice pourroit-elle sanc
tionner un testament qui ne peut être reconnu p o u r la
dernière vo lon té du testateur, lorsque.le légataire u n iver
sel est convaincu d’avoir soustrait une partie des disposi
tions?
N e faisons pas cette injure à la lo i; disons plutôt avec
elle que celui qu i supprime tout ou partie des disposi
tions , est indigne de conserver celles qui sont faites en sa
faveur. N o?i
a c c ip ie t
fr u c tu m suce cà llid ita tis q u i ro~
lu it hceredem hœ reditalc sua d efrau da re ,• sed Jiujusm odi legation illi relictum au f e r at u r , rnaneat a u tem
G
«
�4V
( 18 )
q u a s i non sc r ip tu m ,
y«* «/¿ï nocendum esse e x îs tim a v e r it,
suarn sen tiet ja c tu r a m . L o i 2 5 , D e
legalis.
Q u ’on ne dise pas que les faits de soustraction sont
imputés au m a r i, et ne peuvent nuire à la fe m m e , au
profit de qui la disposition est faite.
D ’une p a rt, la fem m e a participé à la présentation du
testament; conséquem ment à la fraude.
D ’un autre côte , la soustraction faite par le m ari ne
p ou rro it profiter à la fem m e ; et ce seroit m ieu x que
jamais le cas de dire : is fe c it c u i prodest.
Enfin il n ’en résulterait pas moins que la justice ne
peut rcconnoître ,. dans ce testament r a p p o rté , la d e r
nière vo lon té du testateur.
A in s i d o n c , d ’après les lois, soit anciennes, soit n ou
v e lle s , les sieur et dame Boutarel auraient encouru la
déchéance de tous les avantages qui p ou voient leur être
faits par le testam ent, à supposer môme qu ’il eût fait
partie du paquet décacheté; à plus forte raison si la justice
ne peut être certaine qu ’il y fût ren ferm é, parce q u e , dans
ce cas, elle ne reconnoît pas de testament.
C ’en est assez; tout ce q u ’on p ourroit ajouter ne seroit
-que fastidieux et superflu. L e sieur D e lo rt ne s’occupera
m êm e que légèrem ent d ’ un m o y e n de nnllité résultant
de ce que le testament rapporté par les intimés n’a point
de date réelle , et n’est pas conséquem ment dans les
termes de l’article 970 du Code civil. Ce m o y e n , quoi
q u ’il ne l’abandonne pas, bien au contraire , lui est inutile
dès qu ’ il n’y a pas de testament ; il n’en aurait besoin ,
et il ne pou rro it le faire v a lo ir ,.q u e dans le cas ou le tes-
�UÉ
( 19 )
tam ent seroit reconnu p o u r etre celui d’Isaac D e lo rt : mais
c’est ce qu ’on ne saurait craindre , ni m êm e p résu m er,
d’après la gravité des faits articulés contre les sieur et
dame B outare l, le peu de confiance que m érite leur testa
m en t, et qu ’ils méritent eu x-m êm es, et l ’indignité dont
ils se sont couverts par les plus rep réh ensibles et les plus
coupables infidélités.
D E L O R
M e. V I S S A C
T.
, a v o ca t.
M ° . D E V È Z E , avoué licen cié.
A. R I O M , de l’ im prim erie de L
andrio t ,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — M ars 1807.
*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delort, Laurent-Louis-Amable. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Devèze
Subject
The topic of the resource
testament olographe
legs
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Laurent-Louis-Amable Delort, propriétaire, habitant de la ville de Thonon, département du Léman, appelant ; Contre sieur Claude Boutarel, et dame Françoise Ruphy, son épouse, habitans de la ville d'Aurillac, intimés.
Table Godemel : Testament : 7. le fait, par le mari de la légataire universelle, d’avoir ouvert l’enveloppe cachetée qui renfermait le testament olographe, écrit, daté et signé par le défunt, et de l’avoir présenté sans cette enveloppe considérée comme insignifiante, au président du tribunal qui en ordonna le dépôt chez un notaire, après constatation de l’état de la pièce, doit-il avoir pour effet d’admettre qu’il y a eu infidélité, violation du sceau et du secret du testateur, suppression d’un autre testament ou codicille révocatoire , et par suite nécessité d’annuler le testament comme ne présentant pas les caractères propres à assurer sa sincérité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1787-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1705
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1704
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53308/BCU_Factums_G1705.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Yolet (15266)
Thonon-les-Bains (74281)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
legs
nullité du testament
Testament olographe
testaments