1
100
2
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53135/BCU_Factums_G1107.pdf
bf6992301e816a7506ce5f55499679eb
PDF Text
Text
M É M O I R E
A CONSULTER,
ET C O N S UL TA T I O N ,
POUR
le citoyen
diction
lant
F
a y e t
,
curateur à l ’inter
d ’Antoine F a y et son père , appe
d’un jugement
du
tribunal civil
du
département du C a n t a l , du 25 Messidor ,
an I V
C O N T R E
naud ,
J e a n S a v ig n a t
,
Jean R ey -
A n to in e B o y e r , J ea n B ru g e
-
rolesIn timés.
U
n hom m e dont la folie fut un fujet d’étonnement &
d ’effroi pour la ville d’Allanche ; un homme qui , après
avoir adminiftré fes biens pendant trente a n s, fe dépouille
tout-à-coup de cette adminiftration , pour en revêtir un jeune
m ilitaire fans expérience ; un hom m e dont toutes les actio n s
portent l’empreinte de la démence la plus caractérifée , a-t-il
pu tranfmettre à fon fils, non-feulement le droit de régir fes
biens prefens & à venir , mais encore le pouvoir de les
vendre , en s 'interdifa n t la faculté de révoquer fo n procureur
conf t itué pour quelque caufe & m otif que ce pût être ? U ne
procuration auff i extraordinaire dans fes m o tifs, qu’illim itée
dans fes pouvoirs, a-t elle été l’ouvrage d’une volonté libre
& réfléch ie, ou plutôt ne préfente-t-elle pas les caractères
d’une interdiction extrajudiciaire ? L cs ventes faites deux
A
�ans nprès cette procuration font - elles revêtues de la pre
mière condition néccllàire à leur va lid ité, du confentement
du vendeur fans lequel il ne fauroit exifter de con
vention ?
T elles font les importantes queftions fur lefquelles le récit
des faits va jeter un nouveau jour.
F A I T S .
A ntoine F a y e t, marié en i j 56 , fe mit à la tête de fes
affaires, & fe livra à un commerce aiïèz confidérable ; foit
que la fortune ne répondit pas à fes efpérances, foit que la
raifon s’éteignit par degrés , il ne fit que de faufles fpéculations \ fon comm erce , au lieu de profpérer , eiTuya des
revers irréparables ; il fe vit bientôt en butte aux pourfuites de fes créanciers , & menacé de l’expropriation de fes
biens par une faiiie-réelle.
Q uelqu’aftligeant que fut le dérangement de fa fortune, il
avoit à craindre un malheur bien plus fenfible dans la perte
abfolue de fa raifon. Vainem ent la fam ille prit toutes les
précautions que pouvoir fuggérer la prudence, pour cacher
au public le déplorable état d’Antoine Fayet ; fes foins furent
infru&ueux ; fa démence fe m anifefta, tantôt par des traits
de violence Si d’em portem ent, tantôt par des fcènes d’ex
travagance ; les places publiques, les é g life s, les maifons
particulières devinrent le thcatlre d’incidens répétés chaque
jo u r, i k ce malheureux père de famille fut pour fes conci
toyens un objet d’épouvante 8c de pitié.
O n n’auroit pas dû balancer fur le feul remède convenable
dans ces trilles circonftances ; mais la fam ille fe flatta que
cet orage produit par le dérangement de fes affaires ferait
p aflager, que le calm e fuccederoit à cette efpècc de frénéfie,
& qu’ il ne falloir avoir recours à l ’interdittion que lorfque
tout efpoir feroit perdu.
Des petfonnes intérefTées à ce qu’Antoine Fayet ne fût
pas interdit, imaginèrent de lui faire figner une procuration
�3
q u i , en le dépouillant de l’adminiftration de fes biens,
équivaudrait à une véritable interdi& ion, & faciliteroit la
vente de Tes propriétés.
Cette p ro cu ra tio n elt du 5 novembre 178 5. Il y avoir
alors près de deux ans qu’Antoine Fayet étoit dans un état
de démence habituel, & qu’étranger à toute efpèce d’affaires,
il n’avoit pas donné une se u l e iïgnature ( 1). A ud i les termes
de la procuration en décèlent-ils facilem ent le m o tif A n
toine Fayet donne pouvoir à fon fils a in e , jeune militaire
fans expérience, non-feulement de régir 6c adminiftrer fes
biens , recevoir fes revenus, payer fes créanciers, pourfuivre
toutes inftances, traiter , tranfiger , mais encore de vendre
tous fe s biens-fonds , excepté la maifon qu’il h a b ite , fubftituer un ou pluiieurs procureurs en tout ou partie , de fes
pouvoirs, avec claufe expreffe que le conflituant ne pourroit
révoquer le procureur conjlitué, pour quelque caufe & m ^tif
que ce -pût être j icelui Je démettant dès-à-prêtent defdits
pouvoirs j & fans que ces préfentes fufjent fujettes à furannatïon.
Antoine Fayet fils, muni de pouvoirs auifi illim ités, ne
jugea pas à propos d’en faire ufage ; il partit quelques mois
après pour Ion régim ent, & lailTâ. fa famille dans la plus
cruelle détrefTe. oi le père eût joui de la pénitude de fa
raifon , auroit-il confenti à fe lier les m a in s, non-feulem ent
iour le préfent, mais encore pour l’avenir ? Se feroit-il mis
bus la tutèle de fon fils ? N e fe feroii-il pas réfervé le droit
de révoquer cette procuration ? D e quelque nom que l’on
veuille la colorer , ne trouve-t-on pas, foit dans les motifs
qui l'ont di£tée , foit dans les termes & l’étendue des pouvoirs
qu’elle contient, foitdans les effets qu’elle a produits, la preuve
évidente de la démence du père , & de l’inexpérience du fils ?
C e ne fut que deux ans après, & à fon retour du régim ent,
Î
( 1 ) O n doit obferver que la fignature mife au bas de la proen»
rationeft ii pênie , fi inform e, qu elle ne rcflemble point aux anciennes
fignaturej d’ Antoine F ayet.
A 2
�4
qu’ Antoine Fayet fils, trompé par les craintes qu’on cherche
à lui infpirer, vendit en 178 7 & 1788 la preCque totalité des
biens de fon père , moyennant une Comme modique de
34,000 üv. - Les acquéreurs 11e manquèrent pas de circon
venir ce jeune militaire , de profiter de Ca loyauté & de Con
inexpérience pour lui faire faire tout ce qu’ ils crurent con
venable à leurs intérêts -, ne pouvant Ce diilïm uler que l’état
de démence de leur vendeur étoit public ; inftruits même que
quelques perfonnes d’Allanche qui auroient voulu pouvoir
acheter, en avoient été empêchées par les Cages conCeils d ’un
jurifconfulte de R ioni , ces acquéreurs exigèrent que les
ventes fuiîent Cecrètes , & plufieurs Ce paiTèrent très-myCtérieufement dans un lieu peu éloigné d’Allanche : ils prirent
des précautions qui décéloient leurs mauvaife foi & leur
crainte Cur la validité de ces- ventes ; au lieu de payer les
créanciers d élégu és, ils dépofèrent leurs contrats au bureau
des hypothèques , feignirent une confignation , & ne de
meurèrent pas moins nantis de la chofe & du prix.
Ces ventes dont l’objet devoit être d ’allurer la libération
d’Antoine F a y e t, n’ont fait qu’accroître la 111a (Te de Ces dettes
par lesfraisqu’a entraînéscetteprétendueconfignation. Q u’elle
foit ou non réelle, cela devient indifférent pour la caufe.
E n effet, fi le prix des ventes a été réellement coniïgné , il a
demeuré iutadl dans les mains du receveur des confignations ; perfonne n’en a retiré un (fou. Si au contraire la
confignation n’a éré que fi& iv e , les acquéreurs Ce trouvent
faifis de ce prix. A i n i i , dans tous les cas, ils n ’ont rien à
craindre pour leurs deniers.
Q u ’importe d ’après ce réfultat, que des a&es auifi déCaftreux aient été partes par le notaire Saintherand, beau-frère
d ’Antoine Fayet ; que Con frère Guillaume Fayet ait donné
Con conlentement à la vente du domaine de Pradier ; qu ’il
Ce foit départi au profit de Savignac, acquéreur, de tous
droits Sc prétentions Cur le domaine vendu ? ' Ces circonCtances neCauroient couvrir l’incapacité du vendeur, nifuppléer
fon défaut de conCentemait.
�5
Depuis cetce époque, le dérangement des affaires, les
malheurs de la famille , le déplorable état d’Antoine Fayec
ont été fans remède j il ne reftoit plus aucun efpoir aux
créanciers pour être p ayés, ni aux enfàns pour fauver les
débris de leur fortune : trois des enfans , fur h u it, étoienc
au ft-rvice de la République ; un quatrième é to it, par fon
état, condamné à l ’exil ; un cin quièm e.setoit établi à la
R och elle; la mère & fes filles prôdiguoient à leur m alheu
reux père leurs foins impuiiïàns.
Jean Fayet , inftruit des malheurs de fa fam ille, vole
à fon fecours ; il voit avec douleur que l'état de fon p è re,
aggravé par le dérangement de fes affaires, eft fans remède ;
il reconnoît que des confeils perfides, de concert avec des,
acquéreurs avides, ont abufé de l’inexpérience & d e la facilité
de fon frère pour lui extorquer un confentement illufoire
a des ventes ruineufes. Il eut recours au feul moyen propre
a remédier aux malheurs de fa famille ; il fe détermine ,
quoiqu’avec la plus grande amertume , d provoquer l’interdi&ion de fon père. L'interrogatoire, l’avis des Pparens,
les certificats des médecins mettent" dans le plus grand
jour fon état habituel de démence ; tous attellent que cec
état remonte à une époque beaucoup plus ancienne ; ils
s’accordent tous à en fixer les premiers fymptômes àdix ou douze
ans : ils ajoutent que la démence d'A ntoine F a y e t, caractérifée par des accès de frénéiie, avoit publiquement éclate
avant 17 8 5 ; qu’elle setoit accrue chaque année davantage,
& qu’elle étoit parvenue à fon dernier période. L ’unanimité
de ces témoignages ne permet pas au tribunal de M urât de
fufpendre l’interdiftion : elle fut prononcée le premier therm i
dor an 3 \ 6c Jean Fayet fut nommé curateur à la perfonne
& aux biens de fon père.
L e premier ufage qu’il fit des fondions de curateur, fut
de demander la nullité de la procuration du 5 novembre
1 7 8 5 , & le défiftement des objets vendus avec reftitution
des jouiilances. Com m ent regarder cette procuration comm e
l’ouvrage d’une volonté libre Sc réfléchie ? Si Antoine Fayac
a a
t
�6
eût joui de la plénitude de fa raifo n , auroit-il foufcrit à fa
propre interdidion ? fe feroit-il mis volontairement en tutèle ?
auroit-il ratifié d’avance & aveuglément tous les ades de
fon procureur conftitué ?
U n e telle dépendance, une abnégation auffi formelle de
fes droits , fuppofe la privation totale de la raifon. Jamais
un père de fa m ille , accoutumé à gérer fes affaires, &
jaloux de fon autorité, n’auroit porté l’oubli de fes devoirs
jufques à fe condamner à la plus abfolue n u llité, & jufqu’à
devenir étranger dans fa propre maifon.
.Ainfi , cette procuration eu une preuve irrécufable de la
démence de fon auteur, ou au moins formoit une pré
e m p tio n fuffifante pour faire admettre la preuve teftimoniale.
Jean Fayet a demandé à faire preuve de la démence habituelle
de fon père depuis 1 7 8 3 , & notamment à l’époque de la pro
curation de 17 8 5 , & des ventes qui l’ont fuiviel Cette preuve
a été ordonnée par jugement interlocutoire du tribunal du
d iflrid de M u râ t, du 9 frudidor an 3 . Une enquête compofée de 5 5 témoins préfente la démonftration la plus
complète de l’état d’ Antoine F a ye t, foit à l’époque de la
procuration , foit à l’époque des ventes de 17 8 7 ic 1788.
Sa conduite n’a été depuis 1 7 8 3 , qu’un long enchaînement
de faits bien propres à prouver fa démence. Tantôt il m al
traite ceux qui lui refufent du tabac, tantôt il fe livre à des
accès de fureur & attaque les pailàns ; quelquefois il eiliie de
faire des miracles , & de changer l’eau en v in , ou il ne fep réiente à l’églife que pour troubler le fervice divin par des fcênes
aufli ridicules que fcandaleufes ; plus fouvent encore il court
les rues comme un furieux, & effraie, par fes vociférations ou
fes tuenaces , ceux qu’il trouve fur fon paflage. Ses difeours
répondent à fes adions; ils n’ont aucune fuite; & s’il tient
quelques propos raifonnables , cette lueur de raifon difparoît
nuflitôt, & jamais il ne fort de fon état de démence.
C e concours unanime de témoins fur le fait habituel de fx
dém ence, les circonihnces qui la caradérifent, la continuité
�7
de cet état, fans aucun intervalle lucide, forment la preuve la
plus concluante qu’Antoine F a yet ne jouiflbit plus de fa raifon
depuis i 783 .
Le vœu du jugement interlocutoire étoit donc rem pli, Sc
Ia démence de F a y e t , une fois confiante, il en réfultoit la
conféquence néceifaire de la nullité des ailes non-revêtus de
fon confentement. Q ue l’interdiftion judiciaire n’ait été pro
noncée que le premier thermidor an 3 , étoit-il moins cer
tain que Fayet étoit privé de fa raifon , foit à l’époque de la
procuration , foit à l’époque des ventes j que dans cet état
il étoit incapable de volonté , & que par conféquent ces
aétes ne pouvoient être confidérés comme fon ouvrage ?
C ’eft néanm oins, au mépris de ce principe fondamental des
conventions, & contre le témoignage concordant de cinquantecinq tém oins, que le tribunal civil du département du C a n ta l,
q u i , par la fuppreffion des tribunaux de diítriófc, remplaçait
le tribunal du ci-devant diftritt de M urât , & fe trouvoit par
conféquent lié par l’admi ilion de la preuve , a déclaré Jean
Fayet , curateur à l’interdi&ion de fon p è re , purement &
Jimplement non-recevable dans fe s demandes.
L e curateur à l’intcrdiâion s’eft empreiTc d’interjeter
appel de ce jugement , auflî extraordinaire dans íes m o tifs,
qu’injufte dans fes difpofitions : il demande au Confeil
quels font les moyens qu ’il doit faire valoir pour en faire
prononcer l’infirmation ?
F
a y e t
, fils.
C O N S U L T A T I O N .
L« C o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lefture de la procura
tion du 5 novembre 1 7 8 5 , des ventes qui l’ont fuivie le 14
novembre 17 8 7 , i 5 & 23 juillet 1788 , 29 août 1788 ; du
jugement d’interdiftion du premier thermidor an 3-, de l’avis
de parens du 4 therm idor, pour la nomination d’un curateur
à Antoine F a y e t} des pourfuites dirigées par ce curateur
contre les acquéreurs dudit Antoine F ayet j du jugement in-
�8
terlocutoirc du tribunal du diftri<5t de M u r â t, du 9 fruûidoc
an 3 y des enquêtes & contre-enquêtes faites en exécution de
ce jugement ; du jugement en premier reilort du tribunal
civil du département du C an tal, du 2.5 meffidor an 4 j en*
fem ble du mémoire à confulter :
E s t i m e , que les lois o n t diftingué deux caufes d ’in te rd iflio n , la p rodigalité & la d é m e n c e , d o n t les effets ne
d oiven t pas être confondus.
U n prodigue ne peut être privé de l’admimftration de fes
biens, qu’après avoir donné des preuves multipliées de fes
diiîîpations ; tant qu’il n’eft point dans les liens d ’une inter
diction légale , il jouit du droit de difpofer par quelque afte
que ce foit j fon incapacité eft fubordonnée au jugement
qui prononce fon interdiftion , & ce n’eft qu’après un exa
m en approfondi de fa conduite , que la juftice fe détermine
à la proclamer.
U n infenfé eft incapable de difpofer auflîtôt que la d é
mence fe manifefte par des aitions éclatantes j la nature
prévient l ’office du ju g e , en lui raviifant la plus précieufe
de toutes les facultés, la raifon qui diftingué l’homme de
tous les animaux. Dans cet état d ’anéantiiïement 3 comment
pourroit-il juger du mérite d’un a f t e , en pefer les avan
tages ou les inconvéniens , ne confulter que fon intérêt en
le fignant ? Com m ent pourrait - il le revêtir du confentement néceiîàire à fa validité ? N e deviendrait - il pas
l ’inftrument aveugle de fa ruine ? N e tomberoit-il pas dans
tous les pièges que lui tendraient à Penvi la cupidité & la
mauvaife foi ? L a loi exige , pour une convention , le con
cours du confentement de deux ou plufieurs perfonnes ; fi
l ’un des contradtans eft privé des lumières de la raifon , il eft
incapable de vo lo n té , & par conféquent la con ven tion ,
qui devrait être fondée fur le confentement réciproque des
parties , n’eft plus l’ouvrage que d’un feul con traâan t, & #
peche dans fon principe conftitutif! Furïoji vcl ejus eux bonis
interdiclum fie , nullci voluntas eft.
�itf
9
D e ce principe naît une différence dans tes effets de ces
deux forces d’interdi&ions ; l’une n’enchaîne l'interdit qu’au
moment même où elle eft prononcée ; l’autre , purement
déclarative , remonte au temps où la démence eft prouvée:
ficLtim aivmïente furore j furiofo interdiclum ejt. Les aûes
du p rod igu e, avant fon interdid'1011 , font confirmés par la
loi ; ceux de l’infenfé , quoiqu’antérieurs à l’interdidlion ,
peuvent être attaqués j lorfque la démence précède l’époque
de ces aétes.
L a démence eft un fait dont la preuve dépend , com m e
celle des autres faits, d e là dépofition des témoins. O n ne
peut fe procurer une preuve écrite des actions qui la caractérifen t, ni faire conftater par un officier public les accès
de frenéfie , les adtes d ’em portem ent, les traits d ’extrava
gance qui en nuancent ou diverfifient le caractère. C o m
ment faiiir tant de circonftances auffi bizarres que fugitives ,
& les configner dans un infinim ent authentique ? Les té
moins feuls peuvent expliquer la variété infinie d’attions
dont ils font les fpe&ateurs habituels ; ils font libres de les
choifir & de les propofer com m e une preuve irrécufable
de la vérité du tait principal : qu’ils différent dans les dé
tails , peu importe , pourvu qu’ils s’accordent fur les motifs
de leur jugement , 3c qu’ils dépofent unanimement de la
démence de celui dont l ’état eft conftaté.
Les dépofitions des témoins acquièrent encore un nouveau
degré de force 3 quand l’aéte dont la validité elt mife en
doute , porte l’empreinte du dérèglem ent d ’elprit de fon
auteur. Q u ’un père de fam ille , habitué à gérer les affaires ,
fe dépouille tout-à-coup de l’adminiflration de fes biens ;
qu’il en confie le foin à un jeune militaire ; qu’il l’autorife
non-feulement à régir, mais encore à vendre tous fes fonds j
qu’il s’interdife le pouvoir de révoquer fa procuration ; que
le procureur conftitué , au lieu d’ufer de fes pouvoirs , aban
donne fa famille aux pourfuites des créanciers ; que deux ans
après, & au retour de fou régim ent, il vende la prefque
totalité de fes biens , fous les yeux de fon p è re , &. fans fa
Mémoire à Confultcr3 & c .
A 5
�IO
participation, pour un prix fort au-defTous de leur valeur; on
chercherait en vain les motifs d’une conduite aulii extraor
dinaire on n’en peut trouver d’autres qu’une précaution
commandée par l’état de ce père de famille ; on doute de
la fageile d’un afte que réprouvent les règles ordinaires
de la raifon humaine -, & en approfondiiTant les circonftances
& les termes de cette procuration , on ne balance plus à la
regarder comm e l’ouvrage d ’un infenfé.
C es deux fortes de preuves concourent donc légalement
à démontrer la démence. D ’un côté, les difpofitions que ren
ferme un a f t e , accufent quelquefois la fageifè du fignataire ÿ
de l ’autre, la préfomption de la démence fe convertit en
certitude , fi les témoins depofent qu’à l’époque de cet afte
l ’aureur ne jouiiToit plus de fa raifon.
Vainem ent voudroit-on équivoquer fur la nature des
aftes , & établir une diftinftion entre les aftes à titre oné
reux, & les aftes à titre lucratif; vainement prétendrait- on
ét3y cr cette diftinftion de la jurifprudence des arrêts , &
foutenir qu’ils n’ont admis la preuve de la démence contre
des aftes o n éreu x, qu’avec une extrême difficulté.
Les principes ne peuvent varier au gré de ceux qui les
in voq u en t; & fans fe jeter dans le labyrinthe inexplicable
d e l’efpèce de chaque a rrê t, il faut s’attacher à cette maxime
de d r o it, que les contrats comme les teftamens Si les d o
nations ne font fondés que fur la volonté libre des parties.
U n infenfé eft incapable de difpofer , foit par donations
entre-vifs , foit par ccftam ent, parce qu’il eft privé de toute
cfpèce de volonté. Pourquoi le même m o tif ne s’appliqueroit-il pas aux difpoütions onéreufes ? Faut-il une moindre
liberté d ’efprit pour défendre fes intérêts contre un acqué
reur avide , que pour exercer des aûes de libéralité ? L e
confentement des parties n eft-il pas la condition ellèntielle
des conventions ? £ ft-on moins expofé aux fupnfes de la
mauvaife foi dans le cas d’une vente , qu’aux fuggeftions
de la famille dans les cas d’une donation ? & fur quel
fondement accorderoit-on à un infenfé la faculté de vendre,
�TI
tandis qu’on lui interdirent le pouvoir de donner ? L a raifon
»’admet pas un pareil fophifm e , & la loi le proferit. In
negotiis contrahendis alia catija habita ejl. Furioforum, alia
eorum qui fari pojfunt j quamvis actïum rei non intelligerent ;
nam furiojus nullum negotium contraherc potejl. Pupillus
onrnia tutore autore agere potejl. L . 5 . de reg. jur.
L a loi ailimile le furieux au pupille; l’un & l’autre font
hors d ’état de régler leurs affaires, & de contraéter : mais
la volonté du tuteur fupplée celle de fon pupille ; tandis que le
furieux, dépourvu d ’un curateur, eft dans l’impuilTance abfolue de contraéter. L a loi ne diftingue pas les aétes onéreux
des adtes à titre gratuit ; elle incerdit à l’infenfé , au furieux ,
le pouvoir de difpofer par quelque a£le que ce foit. Nullum
negotium contrahere potejl.
L ’autorité des jorifconfultes vient à l’appui d’une décifion
auiïï précile. D ’A rgen rré, fur l’article 2.66 de la Coutume
de Bretagne examine la queftion de lavoir fi un contrat
qui eft l'ouvrage d’un infenfé peut fervir d i fondem ent à la
prefeription. Il ne balance pas à décider qu’un pareil con
trat eft abfolument n u l, & 11e doit produire aucun effet. Il
en donne pour m o tif, que les inlenfés font incapables de
s’obliger en contrariant ; leur confentement ne fauroit les
lie r , puifqu’ils n’ont aucune efpèce de volonté, & qu’ainiï
le premier cara& ère, ou plutôt le principe fondamental de
la convention n’exifte pas. Proptcrea quoi furiojï & taies
confenfum non habent idontum ad obligandum, in quo ejl
fubflantiale fubjeclum contrahendi & fine quo contraclus non
confifiunt ■neque enim vel \elle3 vel nollç pojfunt.
Ricard rend hommage au même principe. « Il y a toutefois
»> cette différence à faire entre l’infenfé 8c le prodigue _, que
” le premier, dès le moment que fon efprit commence à
» être troublé, eft rendu de plein-droit incapable de dif—
» pofer, fans aucune interdiction p r é c ife ,n i prononciation
” du juge ^ parce que fon inhabilité eft rendue notoire &
” publique par les premières attions de dérèglement qu’il
» fa it, Sc 411e d’ailleurs il manque au poijit eiïcntiel *
I
�v
iî
»
»
»
»
n Jétant point 'capable de faire un afte d’une volonté
lib re , ni même de prêter ion ■
confencem cnt, puifqu’il
manque de raifon , qui eft le principe de l’un & de
l’aun e ;
quoique, les parens ne f e [oient pas mis en devoir
de faire créer un curateur à l'imb¿cille 3 ils fo n t reçus à
vérifier le défaut de jugement. »
■
Loin que la jurifprudence aie contrarié ces principes,
plufieurs arrêts ont accueilli la preuve teftimoniale du fait
d e démence contre des a£tes onéreux : parmi ceux que l’on
pourroit invoquer , il fuffic Je citer avec d ’AgueiIeau les
arrêts de P a y e t, du 2.5 février 1 6 8 1 ; d e B o iïii, du 21 juin
i6 75-, de Joyeufe, du 5 mars 1681 : un plus récent encore
rapporté par l'éditeur du répertoire de jurifprudence, du 21
juillet 1 7 7 9 , a déclaré nulle la vente d’une maifon faite
par Bertin avant fon interdi& ion, pour caufe de démence.
Quelle que foit d’ailleurs la .diverfité des arrêts fur ce point
de jurifprurience , la l o i , les auteurs , la raifon s’accordentils moins à proferire , fans diftinftion, tous les a & e s , de
quelque nature qu’ils fo ie n t, s’ils ne font pas l’ouvrage d’une
volonté libre & réfléchie ? le défaut de confentement ne
fuffir-il pas pour en faire prononcer la nullité ? & comme
l’obferve le judicieux R icard , quoique les parens ne fe foient
pas mis en devoir de faire créer 1111 curateur à l’inienfé, la
preuve de la clémence n’eu eft pas moins admife.
L e fort de ces aftes eft donc fubordonné au réfultat de la
reuve teftimoniale. Si les témoins s’accordent à dépofer que
auteur d’une procuration leur a paru dans 1111 état abfolu
de démence à l’époque où il l’a fign ée, s’ils appuient leurs
dépolirions fur des circonftances qui en garantirent la vérité,
alors les doutes difparoillent, & les préfomptions fe convertiilent en certitude} on ne balance plus à regarder com m e
infenlé celui que la notoriété publique accufe de folie j l’évi
dence des preuves fert de guide à la juftice, & fon premier
devoir eft de proferire des a£tes furpris à la trop facile im
prudence d’un homme privé de fa raifon.
E n appliquant ces principes à i’efpèee, il fera facile de
f
�i3
prouver qu Antoine Fayet cil devenu l’inftrument avêugle
rie la raine fie fa fam ille , par cela feul qu’il étoic tom bé
dans la clémence la plus cara&érifée depuis 178 3 j & que
depuis cette époque il n’a plus recouvré l’ufage de fa raifon.
Sa procuration de 17 8 5 n’en fournit-elle pas, finon une
démonftration complète , au moins une violente préfomption? C oncevra-t-on en effet qu’un père de fam ille jouiflant
de la plénitude de fa raifon, & jaloux de fon autorité, fe
défaifill'e, le dépouille de toute adminiftration , même du
pouvoir de vendre fes b:ens, en faveur d’un jeune homme
fans expérience & prêt à rejoindre fon régiment ? A qui perfuadera-r-on que cette abdication de fes droits n’eût d ’autre
m otif que la facilité de traiter avec fes créanciers ? Ses créan
ciers fe feroient-ils montrés plus inexorables envers le père
qu ’envers le fils? Antoine Fayet n’auroit-il pas pu vendre
lui-même line partie de fes biens? qu’avoit-il befoin de char
ger un procureur du foin de fes affaires ? Le notaire Saintherand auroit-il eu le front de le condamner à une véritable
m ort c iv ile , s’il n’eût compté fur l’apathie naturelle de fon
beau-frère, & s’il n’eût voulu éviter l’éclat d ’une inrerdidtion ?
A-t-011 jamais vu un homme raifonnable fe mettre volon
tairement en tutèle, & devenir étranger à toutes les affaires
com m e à l’adminiftration de fes biens ? L a néceflité feule a pu
fuggérer un a&e de cette nature à Saintherand , & la claufe
de non-révocation des pouvoirs qu’il contient, révèle les motifs
de ce nouveau genre d ’interdi&ion. I le il prouvé, i.° qu’an
térieurement à cette procuration , Antoine Fayet avoir cefle
de faire le com m erce, de vaquer à fes affaires, & de donner
même fa fignature pour la plus petite chofe ; 2.0 que fon état
de dém ence étoit fi public , que nul individu n’auroic
voulu abufer de fa fituation , ni lui furprendre un confentement illufoire j 3 .° que depuis cetce procuration il a vécu
dans l’indifférence la plus profonde fur les malheurs de fa
fam ille j qu’il n’a pris aucun intérêt foit à l’éducation de fes
enfans, foit a la confervation de fes biens; qu’en un mot fa
vie n’a plus été qu’un long fommeil troublé tour-à-tour pat
des accès de fureur ou d’cxtravagance.
�. 1/f
L ’objet de cette procuration é to it , d it-o n , de traiter avec
les créanciers à des conditions plus avantageiifes, & d’aiTurer la libération d’Antoine F ayet; & cependant le procureur
conftitué part deux mois après pour fon régim e n t, fans s’oc
cuper ni de l’intérêt de fes créanciers, ni du fort de fon père !
C e n’eft qu’à fon retour & deux ans après , que l’on parvient
à lui arracher un confenrement illufoire à des ventes évidem
ment ruineufes pour fa famille. O n multiplie les précautions
pour en couvrir la nullité \ on en parte une fous les yeux
d ’Antoine F ayet, &c dans la ville d’A llan che; on craint que
Fayet ne forte de fon apachie naturelle , ou qu’il ne s’élève
un cri ge'néral d’improbation contre ces aâes ! Les acquéreurs
exigent non-feulement que les autres ventes ne foient point
palîées à A llan ch e, mais encore que Guillaum e F a y e t, frère
du vendeur, renonce à tous droits & prétentions fur le d o
maine de Pradier. L es acquéreurs n’ ignoroient pas l’état
habituel de démence d’Antoine Fayet \ ils ne pouvoient fe
diflimuler que le fils n’avoit plus, par ce feul f a it, aucun
pouvoir pour vendre les biens d ’un homme notoirement
connu pour infenfé; ils favoient même que par ce m otif le
citoyen Lapeyre de R iom avoit confeillé au citoyen Bonnet
aîné , d’A lla n ch e , de ne point acheter d’un pareil frondé de
pouvoir : de là les précautions infpirées par la crainte, l e loignement d ’Allanche , l’intervention de G uillaum e F a y e t,
le dépôt des contrats au bureau des hypothèques , le nonpaiement des créanciers, la confignation feinte ou réelle du
prix ! Vain efpoir qui ne fauroit les raiTurer! L a démence
d ’Anto'ne Fayet étoit trop publique à A llan ch e, pour faire
illufion à la bonne-foi d ’un acquéreur \ pas un individu n’auroit ofé traiter avec Antoine F ayet, les créanciers eux-mêmeS
avoient fufp.-ndu leurs pourfuites \ tous les habitans d’A lla iu lu le regardoient .comme un objet d ’épouvante & de
pitié ,
qu >iqu il ne fut point encore dans les liens d ’une
'interdiction légale , on défie de rapporter , foit avant foit
après ces ventes, un adte quelconque émané de lui & revêtu
de fon confentement.
�15
Com m ent en effet pourroit-on donner un démenti à
cette maiTe impofante de tém oins, qui attellent unanimement
que la démence d’Antoine Fayet remonte à une époque
antérieure à la procuration de i y S 5 ? Com m ent contefterks
faits q u i la caraâérifent ? Com m ent oppofer des p ré e m p
tions incertaines à des preuves irrécufables ? Parm i ces faits ,
il en eft qui ont pre'cédé la procuration , d’autres qui l’ont
fuivie ; on peut donc les divifer en deux clalfes qui fe rap•ortent aux deux époques marquées par le jugement interocmoire.
L a folie d’ Antoine Fayet s’eft m anifeftée nu comm en
cement de 1 7 8 3 ; les q u in ze, feize & dix-feptième témoins
dépofent que depuis environ douze ans ils ont reconnu
F ayet en dém ence, qu’ils ont été appelés par fon frère &
par fon fils pour l’enfermer dans une petite chambre à côté
du cim etière , & pour l’attacher dans fon lit ; que depuis
cette époque , ils ont vu Fayet courir les rues, crier, parler
& rire fans fujet.
L es mêmes fcènes fe font répétées avec plus de violence
encore en 1785. L a fureur d’Antoine Fayet étoit devenue
un fujet d’effroi pour la ville entière d’AHanche; les fuites
ne lui furent pas moins funeftes : dans le courant de mai
1 7 8 5 , Fayet échappe à la furveillance de fa fam ille ; il court
dans.les rues comme un furieux, entrechez le nommé Com bes,
ferru rier, s’arme d’un gros marteau, & menace de frapper
ceux qu’il trouve fur fon partage. Com bes Sc fes deux fils
ertaient en vain de le défarmer ; leurs efforts font inutiles ;
ils appellent aufecours. D ezieux , onzième tém oin, accourt ;
mais à fon approche , Fayet lui préfente un couteau , Sc
menace de l’éventrer s’il avance. D ezieux oppofe alors l’a drerte à la fo rce, &c l’ayant fai fi par une jam b e, il le renverfe fur l’efcalier ; mais la chute fut fi violente que Fayet
en eut la cuille cartee , & n’a pu marcher depuis qu’avec des
potences ; les témoins craignant encore les effets de fa fu
re u r, l’emportent chez lui 5c l’attachent fur fon lit.
L es circonftances de ce fait font à recueillir ; l’attion de
{
�16
Fayet marque le dernier degré de la fureur, & les craintes
qu ’il inlpiroit à fes concitoyens ; le marteau pouvoir deve
nir dans fes mains une arme meurtrière ; ©n ellaie de le
lui arracher } íes emportemens & fes menaces intimident les
témoins accourus au bruit du ferrurier Com bes ; ils font
réduits à ufer du moyen le plus violent pour le défarm er;
ils n’ofent l’approcher, & c’eft par la chute la plus funefte
que Dezieux parvient à lui arracher le marteau.
L ’époque de ce fait n’eft pas moins digne d’attention : c’eil
quelques mois avant de foufcrire la procuration de 1 7 8 5 ,
en faveur de fon fils , qu’il donne à fes concitoyens le fpectad e de la fureur la plus caradbérifée. Pourra-t-on douter
de l’aliénation de fon efprit, quand toutes les circonftances
concourent à l’attefter ? i° . Les témoins entrent dans le dé
tail le plus circonftancié de ce f a i t , & ne diffèrent point *
dans leurs dépofuions. 20. Il en eft une preuve encore plus
convaincante dans les fuites qu’a produites cette chute :
voudroit-on nier un fait auffi p o fitif, quand il en porte
des marques auifi frappantes ? 3 °. Le certificat du chirur
gien qui l’a foigné , en fixe l’époque au mois de mai 17 8 5 ,
& declare qu’à caufe de fa grande folie il lui a été im poffible de le guérir ( 1 ) ; & c’eft un homme fujet à une dé
mence de cette nature, que l’on fuppofe capable d’adminiftrer
fes b iens, ou d’en confier le foin à fon fils, en l’autorifant
à vendre la totalité , &: en s’interdifant le droit de révoquer
( 1 ) Je foufligné Jean S c lig n ia c , officier de fanté de la commune &
canton d’A lk n c h e , départemenr du Cantal , certifie, à qui de d r o it,
avoir été appelé par la femme du citoyen F a y e t, pour panier Antoine
F ayet fon m ari, aaiTi domicilié d’ A Hanche, d'une luxation à la partie fu périeure du fémur de la cuilTe d ro ite , & qu'il m’a été impoifible de la
lu i remettre à caufe de fa grande fo lie ; malgré que j ’aie fait mon pofiible de m’en approcher pour la Ihí remettre j ’ai été obligé de l’aban
donner a Ton malheureux fo r t , G1 cela dans le courant de tuai 1785*
E n fo i de quoi j ai deiivre le préfent certificat pour valoir ce que de
r a ifo n , & que j ’affirme fincère & véritable. A A llanche , ce premier
v e n to fe , 1an 5 de la République frsnçaife, Signé Soli^niac , ofliciic
Je fanté.
�17
fa procuration. C e n’eft pas le feul trait de ce genre que les
témoins rapportent avec des circonftances auffi précifes que
l ’on ouvre l’enquête compofée de cinquante-cinq témoins ;
que l’on analyfe leurs dépofitions ; que l’on rapproche tes
faits les plus m arquant} on verra Antoine Fayet palier tourà-tour de la plus fombre apathie à des accès de fureur, ôc
de la fureur retomber dans l’apathie ! Courir dans les rues,
crier ou rire fans fu je t, maltraiter les palTans fur les plus lé
gers prétextes , n’entrer dans l’églife que pour y caufer du
fcandale , outrager les objets du culte , fe permettre des ac
tions indécentes , effrayer enfin par fes vociférations ou par
fes menaces ; tels font les traits principaux de fa conduite
depuis 1 7 8 5 , jufqu’à l’époque de fon interdidUon ; le même
défordre règne également dans íes difeours & dans toute
fa conduite.
•Auilî les témoins ne balancent-ils pas fur le jugement
qu ’ils doivent porter de l’état habituel de démence d’Antoine
f a y e t ; ils s’accordent unanimement à le préfenter comm e
un homme entièrement privé de fa raifon, fans aucun in
tervalle lucide, & fans aucun efpoir de rétablifTement. Leur
tém oignage, fondé fur des faits pofitifs, ne fauroit être con
tredit par le filence des témoins de la contre-enquête. C o m
ment oppofer quelques dépofitions vagues ou infignifiantes à
cette mailè de faits qui démontrent la démence d’Antoine
F a y e t, en 1 7 8 5 , 17 8 7 8 c 17 8 8 ? Com m ent placer, dans la
même balance, cette fétie non-interrom pue de faits pofi
tifs , & des préem ptions prétendues de fagefTe évidemment
démenties? Com m ent fe refufer à cet enfemble de preuves,
qui forme le premier caradfère de la vérité ? Soit que l’on
calcule le nombre des témoins , foit que l’on s’arrête aux faits
dépofés , il en réfulte la démonftration la plus complète ,
qu’Antoine Fayet 11e jouiiToit plus de fa raifon en 1 7 8 6 ,
époque de la procuration, & qu’il ne l’avoit pas recouvrée,
ni en 1 7 0 7 , ni en 1 7 8 8 , époque des ventes. L e vœu du
jugement interlocutoire a donc été parfaitement rempli ; la
démence ne peut' plus être douteufe ; & la conféquence qui
en réfulte , n’cft-elle pas la nullité des adles qui furent l’ou
�i8
vrage d’un infenfé ? N ec dubium, dit d’Argentré j contractus
qui cum talibus fiunt j ex toto nullos tjfe.
Par quelle fatalité le tribunal civil du Cantal a-t-il rejeté
cette preuve, 8c fur quels prétextes a-t-il fondé un jugement
auffi contraire aux règles les plus communes de l’ordre judi
ciaire ? Com m ent a -t-il pu , fur-tout , déclarer le curateur
non-recevable dans f a demande? Pouvoit-il ignorer qu’il étoit
lié par un premier jugement interlocutoire , puifqu’il rem plaçoit le tribunal du ci-devant diftrift de M u râ t, qui lavoir
ren du , mais qui n’avoit pu prononcer fur le fond de la conteftation avant la fuppreffion des tribunaux de d iftrid ? Les
juges du Cantal devoient donc ftatuer, com m e l’auroient
fait ceux de M u râ t, fur le mérite des enquêtes refpedtives.
L à fe bornoient leurs pouvoirs : ils n’ont donc pu réformer
le jugement inattàqué du tribunal de M u râ t, fans com
mettre une violation d’ordre , judiciaire qui vicie radicale
m ent leur jugement.
E n vain ont-ils cherché à s’appefantir fur les dangers de
la preuve teftimoniale en cette partie, & fu rlefilen ce de là
fam ille.
C e n’eft jamais qu’avec une extrême répugnance, que des
enfanj fe déterminent à provoquer l’interdi&ion de leur
père ; ils fe flatent que fon état fera p ailàger, & ne veulent
avoir recours au remède néceflaire , mais affligeant, de l’interdidtion , que dans le cas où il ne reftc plus aucun efpoir.
P eut-on conclure de ces ménagemens fi naturels, qu A n
toine Fayet n étoit pas tombé en démence avant fon inter
diction? A vec cette maniéré de raifonner, la preuve de la
démence feroit inadm iilible, & les faits les plus avérés ne
paroîtroient pas fuffifans pour la faire admettre. Q ui peut
douter néanmoins que la preuve teftimoniale ne foit U voie
h plus ordinaire pour arriver à la découverte de la vérité? Il
faut d iftin gu er, avec l ’immortel d’AgueiTeau , les difpofitions d’ un aCte, de la capacité ou de l’incapacité de fon au
teur : les unes fe prouvent par l’afte m ê m e, & c'eft en ce
ftn s que les loix ont interdit la preuve teftimoniale , contre
& outre le contenu aux aûes j l’autre au contraire eft un fait
�19
qui dép en d, comme les autres faits , des dépofitions des
témoins. L a folie , continue d’A guefleau, eft un délit inno
cent , un dérèglement im puni, un défordre purement phyiique; & comme dans les crimes véritables qui bleflent les
loix de la m orale, & troublent l’ordre de la fociété c iv ile , on
ne cherche point d’autre preuve que le témoignage des autres
h om m es, il femble aulÏÏ que dans ce renverfement de l’e fp rit, qui viole les droits de la nature & déshonore la raifon ,
on ne puiiTe defirer de preuve plus naturelle & plus convain
cante, que celle qui réiulte du iuffrage unanime des témoins ,
premiers juges de ces fortes de concertations.
2 0. L a nature d ecesa& e sn e peut être d’une grande confidération, puifque un infenfé n’eft pas moins incapable des a&es
onéreux quedesa& esàtitregratuit; les u n s& les autres exigent
la capacité de celui qui les pafle 3 & cette capacité dérive
d ’une volonté libre & réfléchie. La diftin&ion fophiftique
des premiers ju g e s , entre ces deux fortes d ’a & e s, eft réprou
vée par la loi qui déclare un infenfé dans Pimpuiilance
abfolue de contrafter. Nullum negotium contrahcrt potejl.
3 °. Si le dérangement des affaires d’Antoine F ayet néceflitoit la vente d ’une partie de fes b ien s, il falloit qu ’elle
fût précédée d’une interdi£tion 5c des formalités ufitées en
pareil c a s ; il auroit au moins fa llu , par cette opération,
afTurer la libération du débiteur, & ne pas confommer le
prix de ces ventes en frais inutiles j il auroit fallu vendre
ces fonds à leur véritable valeur , & ne pas donner pour
une modique fom m e de 34 ,o o o livres, des héritages d ’un
prix bien fupérieur ; il auroit fallu fur-tout ne pas confom
mer la ruine d ’une famille entière , en feignant de la libérer.
4 *. La procuration ne peut être confidérée comm e un
a&e de fageiTè : il eft fans exemple qu’un père de fam ille
fe dépouille de l’adminiftration de fes biens j en faveur d’un
jeune homme fans expérience ; qu’il l’autorife à les vendre;
qu’il s’ interdife le droit de révoquer fon procureur conftitué ;
en un m o t, qu’il fe mette volontairement en tutèle, fi fon
état ne commandoit pas cette abdication entière des droits
t a plus- précieux.
�20
5 °. L a qualité du notaire & le filence de la famille ne
forment pas des induâions plus concluantes. L a loi n’ad
m et pas dans un adle un confentement par équipollent ;
l ’incapacité d’Antoine Fayet étant dém ontrée, foit à l’époque
de la procuration , foit à l’époque des ventes ; la préfence
d ’un notaire, beau-frère du ven deu r, ni l’intervention de
quelques parens n’ont pu fuppléer ce défaut de confen
tement.
6°. Les termes de la procuration en décèlent facilement
le m otif. S ’eft-on jamais interdit le droit de révoquer un
procureur conftitué ? des pouvoirs illim ités irrévocables, mettoient le conftituant dans une véritable interdi&ion , fans
avoir l’inconvénient de la provoquer en juftice.
7°. Les pourfuites faites , foit par la femme F a y e t, foie
par les créanciers, prouvent bien qu’Antoine Fayet n’étoit
pas encore interdit en 1 7 8 5 , 17 8 7 & 1 7 8 8 ; mais non
q u ’il jouiiToir de fa raifon aux mêmes époques. O r , la
démence d ’Antoine Fayet étoit l’objet des recherches de la
ju ftic e , & la démonftration de ce fait en a été le réfultat.
8°. Les précautions prifes par les acquéreurs, d ’exiger
le confentement de G uillaum e F a y e t, & de s’éloigner
d ’ AUanche pour la paflTation des contrats, indiquent aiTez
leurs craintes fur la validité de£ aftes: auroient-ils traité avec
le fils d'A ntoine F a yet, Ci le p ère, préfent, & fain d’efp rit,
eût été capable de vendre ? fe fcroient-ils éloignés d’AHanche»
s’ils n’euiTent craint un cti général d’improbation contre ces
actes ?
Les motifs du jugement du 2.5 m eilidor, an 4 , ne
>ê.hent donc pas moins dans le fait que dans le droit. Dans
e d r o it, la preuve teftimoniale de la démence doit être
adm ife , puifqu’il s’agit moins d’attaquer les difpofitions de
l'acte , que la capacité de fon auteur. Dans le fait , un
concours irréfiftible de circonftances & de fuffrages unanimes
des té noins prouvent que la démence d’ Antoine Fayet a
commencé en 1788 , qu’elle avoit fait les plus grands pro
grès en 1 7 8 5 , & q u ’elle étoit parvenue à fon dernier
période en x 787 & 1788.
Î
�1üf1
I
21
Lespremiers juges n’ont pas pu , fans m anquera la juftice
& à la vérité , préfumer qu’Antoine Fayet jouiiToit de fa
raifon aux époques de la procuration & des ventes , &
fur cette prélom ption, démentie par les fa its , déclarer le
curateur à l’interdi& ion, non-recevable dans fa derm nde.
L e s principes, les auteurs , la jurifprudence , la raifon
s’élèvent contre une décifion aulli arbitraire ; & en revenant
au jugement interlocutoire dont le tribunal civ il du Cantal
s’eft écarté fans aucun prétexte , il reftera pour démontré ,
1 °. que la preuve teftimoniale de la démence eft admillible
contre des a&es palfés avant l’interdi£tion ; 2°. que la dé
mence une fois prouvée , la profcription des aétes qui furent
l ’ouvrage d ’un in fe n fé , en eft la conféquence néceiTaire.
A in li la reftitution des objets aliénés peut d’autant moins
fouffrir de difficulté, que le prix des ventes eft intact, ou
dans les mains des acquéreurs, ou dans celles du receveur
des confignations. Par conféquent les intérêts de ces acqué
reurs feront pleinement confervés.
Délibéré à Clerm ont-Ferrand, ce z o v e n tô fe, an
la République françaife.
Signé j
M
a u g u e
5 de
.
L e s s o u s s i g n é s font pleinement de l ’avis ci-deiTus , &c
par les mêmes raifons, ils ne font pas la confultaticn par
ticulière qu’on leur a dem andée, parce qu’après avoir bien
m édité les q ueftion s, ils fe font convaincus de l’inutilité
d’un travail qui n’o ffriro it, fur le fo n d , d’autres raifons de
d écid er, que celles qui font iumineufement développées tant
dans la confultation du citoyen M augue , que dans celle
qui avoit précédé l’interlocutoire.
Paris , le 18 germinal 3 an 5.
Signé
B
i t o u z Îî
db L
ignieres
, C
ournol.
V u u n m é m o i r e pour le citoyen Fayet , curateur à
l’interdiftion d’ Antoine Fayet fo n p è re , enfemble les confultations qui y font jointes ;
L ’ a v i s d e s î o u s s i g n És e ft , que Jean Fayet ayant été reçu
¿/¡I
�t
22
à faire preuve de la démence habituelle de fon p è r e , il
n’étoit pas permis au tribunal civil du département du
C a n ta l, de le déclarer non-recevable en fa demande.
C ’eft une règle certaine, que les juges font liés par les
interlocutoires qu’ils prononcent.
L e feul cas d’exception eft celui dans lequel les fins de
non-recevoir & les droits des parties ont été cxpreflement
réfervés.
T e lle étoit fur ce point la j u r i (prudence du ci-devanc
parlement de Paris.
Quelques autres tribunaux l’avoient adoptée.
Plufieurs la rejetoient.
L a légiilation nouvelle ne la confacre point.
O n pourroit donc élever des doutes fur la régularité de
ce genre de prononciation , s’il n’étoit pas établi que cette
réferve n’a point eu lieu dans le jugement interlocutoire
du 9 fruilidor de l’an 3 .
Les juges ayant reconnu que les faits étoient concluans, il ne reftoit plus qu’à décider fi la preuve en étoit
faite.
En fuivant une autre route , le tribunal du Cantal a
évidemm ent enfreint les règles de l’ordre judiciaire.
Il a , dans fon fyftêm e, multiplié fans nécefiîté les aftes
du procès, & a expofé ainfi les parties à des frais inutiles;
fon jugement doit donc être réformé.
L e moyen d ’appel fera p ris , de ce que le tribunal qui
remplace celui de M u râ t, a été contraire à lui-m êm e, en
n’ayant pis d’égard à une preuve qu’il avoit précédemment
ordonnée.
A u fo n d , comment faut-il confidérer l’a&ion intentée
par Antoine Fayet ?
Quel fera le fort de la procuration d o n n é e , le 5 no
vembre 1 7 8 5 , par Fayet p ère, & celui des ventes confenties en vertu de cette procuration?
L a folution de ces queftions dépend de la jtifte applica
tion des principes de la m atière, aux faits de la caufe.
Les principes ont été parfaitement développés dans la con-
�fo f)
7.3
fultacion du citoyen M augue. Les fouflignés les adoptent;
ils reconnoiiïenc , avec ce jurifconfulte Sc avec tous les
hommes éclairés, que l’interdi&ion de l’infenfé doit avoir
fon effet du jour où la folie s’eft manifeftée.
L a démence , difoit l’avocat général Scguier dans un
plaidoyer rapporté au tome 6 e. de la nouvelle colleétion
de jurifprudence verbo dém ence, § 3 ; « la démence ne
» fe form ant, pour l’ordinaire 3 que par des déclins plus
»* ou moins fenfibles , il eft certain qu’elle a exifté avant
» la fentence d’interdi& ion, & dès-lors il feroic dangereux
» de confirmer tous les aétes qui ont précédé ce juge» ment. »
L ’infenfé eft donc interdit par la nature avant de l’être
>ar le juge : fon incapacité réelle précède fon incapacité
égale. L a loi doit lui prêter fecours depuis le moment où
fa raifon a été obfcurcie ou égarée.
S ’il étoit befoin de citer des autorités à l’appui de cette
dodtrine , on diroit : O uvrez Bourjon , livre premier ,
tom . 6 , chap. 4 >
prem ière, diftinftion 2 , § 70 -,
voy. A ugeard , confulcez ce répertoire, & vous y trouverez
une foule d ’arrêts qui ont établi que la fentence d’interdi& ion d’un infenfé n’étoit que déclarative des erreurs ou
des injures de la nature.
Plusieurs de ces arrêts ont été rendus fur ce réfultat d’une
preuve teftimoniale ; preuve qu’il ne faut pas facilement
admettre quand il s’agit d’une convention, mais qu’il feroit
dangereux de rejeter dans tout ce qui tient à l’état des
perfonnes.
Les préjugés que l’on c ite , ont d’ailleurs banni la diTtinftion que le tribunal a voulu admettre entre les afies
onéreux & ceux à titre gratuit ; ils ont anéanti tout ce
qui avoit été fait par l’infenfé depuis le moment que fon
efprit avoit commencé à être troublé.
Les principes font donc bien connus.
Conviennent-ils aux circonftances du fait?
Sont-ils applicables à l’efpèce ?
D e cette application } de cette concordance entre le droit
Î
,
'
�& le f a it , dépend le fuccès de toutes les conteftations qui
divifent les hommes. E x facto jus oritur.
D écider une affaire par les règles qui lui font propres ,
voilà le grand art du ju g e , le premier de fes devoirs , &
la plus importante de fes fonctions.
Les fouff ignés n’ayant fous les yeu x, ni l’enquête, ni la
contraire - enquête, ne fauroient émettre leur opinion fur
le mérite des preuves.
IL leur eft fur-tout impoff ible de juger s’il eft fuffifamment établi que Fayet père étoit en état de démence avant
la procuration, & à des époques approximatives du temps
où cette procuration fut donnée ; s’il en a entendu la force
& la conféquence , ou fi cet acte eft l’ouvrage de la fuggeftion.
O n ne doit pas fe diffimuler que ces diverfes circonftances
peuvent jeter une grande lumière dans la caufe ; car s’il
eft reconnu q ue Fayet n’avoit plus l’ufage de fa raifon au
m om ent où la procuration & les actes furent confentis, on
ne fauroit tirer aucun avantage de la conduite perfonnelle
de fa famille. L e m ém oire, l’avis du jurifconfulte qui a vu
les pièces, les renfeignemens donnés aux fouffignés , tendent
à établir l’affirmative. Si la preuve ordonnée eft telle qu’on
l ’annonce , la nullité de la procuration & des actes qui
l’ont fuivie , eft une conféquence néceffaire des principes qui
viennent d’être rappelés.
C elui quia perdu en entier l’ufage de fa raifon , n’eft plus
rien dans le monde -, & , félon l’expreff ion d’un ancien ju
rifconfulte , il eft réduit à vivre, pour ainfi dire avec les
hommes dans un tombeau animé.
D élibéré à P aris, le 24 germinal de l’an
S ig n é T
ro n ch et
5.
, P o r t a l is & C a m b a c é r é s .
A P aris, chez B a u d o u in , Imprimeur du C orps légiflatif,
place du Carroufel , n°. 662.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Fayet. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Maugue
Bitouzé de Lignières
Cournol
Tronchet
Portalis
Cambacérès
Subject
The topic of the resource
démence
abus de faiblesse
nullité
procuration
interdiction judiciaire
témoins
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour le citoyen Fayet, curateur à l'interdiction d'Antoine Fayet son père, appelant d'un jugement du tribunal civil du département du Cantal, du 25 messidor, an IV ; Contre Jean Savignat, Jean Reynaud, Antoine Boyer, Jean Brugeroles, intimés.
Annotations manuscrites siégé le 8 Messidor an 5, « jugement confirmé, les motifs sont très développés».
Table Godemel : Démence – voir testament : 1. la procuration d’un homme en démence donnant les pouvoirs les plus étendus et les plus extraordinaires, s’interdisant la faculté de révoquer ces pouvoirs, est-elle valable ? les ventes faites en vertu de ce mandat, trois ans après la date, doivent-elles être exécutées, surtout si elles creusent une lésion énorme ? le curateur à l’interdiction qui en a demandé la nullité, est-il recevable à établir, par témoins, que la démence existait avant la procuration ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
chez Baudouin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1785-Circa An 5
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1107
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53135/BCU_Factums_G1107.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Allanche (15001)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
Créances
démence
interdiction judiciaire
nullité
procuration
témoins
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53136/BCU_Factums_G1108.pdf
7db542c6d8870b4cc5e26dd3ff16861d
PDF Text
Text
M E M O I R E
A CONSULTER
E T
’
c o n s u l t a t i o n
,
P O U R le cito y en F A Y E T 3 curateur a a l' in ter
d ic tio n d ' A n t o i n e
F A Y E T , son p è r e ,
dem andeur;
C
o n t r e
Jean S A V I G N A T
et autres,
.
demandeurs
L
a
a
procuration d’un
surpris des
hom m e
pouvoirs si
q u ’il en résulto it pour
en dém ence à
qui on
étendus , s i extraordinaires >
lui une
véritable interdiction ,
e st-elle valable ? d es ventes faites en vertu d’une pareille
procuration ,
et
trois ans après sa d a t e , doivent-elles
ê t re e x é c u t é e s , s u r - t o u t , si
énorm e ?
elles
causent
une
lésion
M o n pere avoit reçu de la nature un cœ ur excellent »
mais il joignoit à une sensibilité e xtrêm e la plus ardente
imagination. Bouillant et e m p o r t é ,
les moindres objets
faisoient sur lui la plus violente impression ; égalem ent
A
�incapable de maîtriser ses sentimens , ou d e tes modéreu,- **
il fut
toujours dans les e x t r ê m e s , et
n’éprouva jamais
que les accès de la joie , ou les angoisses de la tnstesse :
il entreprit beaucoup ; il réussit rarement ; et soit q u ’il
e u t ‘ m al co n çu ses projets , ou qu’il fut m alheureux dans
leur exécu tion , il vit bientôt une partie de sa fortune
disparoître et échaper de ses mains.
L a douleur et le désespoir produisirent en lui le
plus
terrible effet , et l'inflammation du sang , ou l ’irritation
des. nerfs , le conduisirent à
la démence.
C ’est sur la fin de 1783 q u ’il acheva de perdre l’ usage des
facultés in te lle c tu e lle s , et que son état fut connu de tous ses
concitoyens. D è s ce m o m e n t , il abandonna ses affaires ;
laissa ses biens à la merci de ses créanciers , tous trop
honêtes pour le poursuivre dans la position malheureuse
où il se trouvoit. M ais de
vils praticiens habiles à s’ en
richir par les malheurs d ’a u t r u i , calculèrent b ien tôt leur
fortune sur la ruine d e m on père. V o y a n t q u e ses créan~Ciers vouloient dem eurer tra n q u ille s, ils insinueront q u ’il
faudroit vendre à l’amiable pour les payer. C e conseil qui
paroîc d’abord
s a g e , s’il
avoit pu s’e x é c u t e r , é toit un
raffinement de perfidie d o n t on c o n n o ît r a , par la s u it e ,
to ute la noirceur.
M ais co m m ent faire faire des ventes
par un h om m e d o n t'l’aliénation d’esprit étoit si p u b liq u e ,
et avec lequ el personne ne pouvoit traiter ? on imagine
de lui faire signer une procuration que l ’on p e u t appeler
à juste t it r e , un acte d’interdiction.
E lle fut passee le
f n©vembre 1785. Il y
*j>lus de dix-huic mois q u e m o n
avoit alors
père n ’avoit pas pris la
�3
p lu m e , et qu’il étoit dans un état de d é m e n c e , qui n e
lu i perm ettoit pas de contracter
le moindre engagem ent.
O n lui fait cependant dire q u ’il » donne pouvoir à A n to in e
» Fayet
son fi’s , aîné , alors cavalier an régiment de la,
« R ein e , de régir et adnvnistrer ses affaires , biens présens
»3 et a venir ; recevoir tous ses revenus ; payer ses créan33 ciers ; affermer ses
b ie n s;
m traiter et transiger; V
poursuivre toutes instances;
endre
tous
B
ses
ien s
fo n d s
,
« excep té sa maison oii i l habite ; substituer un ou plu33 sieurs procureurs en to u t ou en partie de ses pouvoirs.
» L a présente procuration , est-il ajouté , demeurera
« valable , et sans pouvoir
être révoquée jusqu’à défi-
” nition de la régie et extinction de tout
paiement de
« ses créanciers , sans que le constituant puisse révoquer
” led it procureur constitué pour quelque cause ei m o tif
” que cela pu isse être 3 iceluy s'en démettant dès-h-présent
» desdits pouvoirs , et
sans
que
ces
présentes soient
” sujettes à surannation.
T e lle s sont les expressions littérales de cet
a c t e ; les
adversaires n ’o n t pas craint de les tronquer dans leur m é
moire , parce q u ’ils ont senti q u ’ elles étoient foudroyantes
contre eux. N e v o it-o n pas en effet que
cet
acte n ’a
r'en de personnel ; rien qui porte le caractère de la v o
lonté et d e la capacité de F a ye t père ?
Q u o iq u ’il en soit , je conviendrai avec les adversaires
que le cito yen Sintheran , m o n - o n c le , fut le notaire rédac
teur de ce tte procuration , et
le
citoyen B er t ra nd ne
l ’a signée q u ’en second ; je dira; m êm e q u ’il tacha de ne
rien oublie? pour lier les mains à m o n père , parce qu’il
'*•
A z
�'- 'A
cro yoit que
4
l'état de son beau f r è r e , exigeant qu’ il fut
'in te r d it, il
suffisoit ,
Jui-mênwi—
to u t b o n n e m e n t, qu’il prononçât
i n t e r d i c t i o n , tandis q u e lle ne d evo it
et
ne pouvoit i’être qu’ en justice.
Q u e p eu t-il résulter de cela ? r i e n , si
ce n’ est que
le citoven Sintlieran v o u l o i t , avec raison, interdire m o n
père , et lui donner un curateur ; mais qu’il s’est trompé
en pensant q u ’une
iuterdiction officieuse pouvoit
opérer
le m êm e effet qu’ une interdiction judiciaire. Je suis per
suadé que son erreur partoit d ’un bon m o t i f , et que
s’il
àvoit prévu tous les m aux qui sont résultés de cette fatale
procuration , il auroit é té le premier à s’y opposer ; mais
la pureté de sa conduite ne sauroit couvrir le vice radical
de cet a c t e , consenti par m on père , dans un terns où
il étoit absolum ent
incapable de contracter. M o n frère
to u t j e u n e , to u t militaire q u ’il é t o i t , fut si effrayé des
pouvoirs qu’on lui d o n n o it, q u ’il refusa d ’en user , et q u ’il
partit pour son régiment.
Trois ans ap rès, il revint passer q uelqu e tems au sein
de sa famille ; dans cet in t e r v a lle , l ’état de m on père ne
fit q u ’empirer ; il ne se m êlo it de
rien ; on
étoic m ê m e
ob ligé de le surveiller ; ses fermiers refusoient de p a y e r ,
parce q u ’ils v o y o ien t qu’il n ’é toit
pas
capable de leur
donner quittance ; en un m ot , tout étoit
déplorable. Q u e firent alors
dans un état
les hommes intéressés à ce
q u e mon frère fit usage de sa procuration ? ils lui inspi
rèrent tant de crainte sur les prétendues poursuites que
vou lo ien t exercer les créanciers de
mon père , quMs le
4é>erminerçnt à yçndre la presque totalité de
ses biens.
�5
O n profira, pour le tr o m p e r , de sa bonne foi , de
in e x p é r ie n c e , de sa franchise , et sur-tout, du
son
désir qu’i l .
avoit de rétablir les affaires qui lui étoient confiées. T o u t
fut si bien dirigé , qu’on lui fit donner pour 34000 l i v . ,
des -objets qui valoient alors plus de 80000 liv. (a).
O n ne sera pas surpris de la vilité du prix des
ventes
quand on saura que plusieurs personnes honêtes d’A lla n c h e
n e voulurent point a c h e t e r , parce qu’elles savoient bien
q u e l le s ne pou voien t le faire solidement {b) : on eut donc
recours aux adversaires, que l’on
trouva
très-disposés à
seconder les manœuvres des d eux hom m es qui on t ruiné
m on père ; l’ u n , notaire à A l l a n c h e , recevoir les ventes ,
cautionnoit les a cq u é re u rs , et faisoit ce q u ’on appeloit
a u tre fo is, en term e de palais , la broutille des procédures,
tandisque son frère , procureur à R i o m , dxrigeoic en
grand les opérations judiciaires, et disposoit toutes les
(a)
du
Il
est n o t o i r e , à A l l a n c h e , q u e ,
d o m ain e de
o ffe rt
5 5 ,0 0 0
P ra d ier,
liv .,
la
m ère
cependant
il
m a l g r é q u e sa v a l e u r e u t p r e s q u e
d ix
ans
d es
c i to y e n s
n ’a é té
vendu
d ou b lée
avant
la
vente
B e n o ît en
a vo it
que
2 0 ,0 0 0 l i v J
d a ns l ’i n t e r v a ll e
de
d ix
a n s , par la p r o g r e s s i o n d es fo n d s .
{F}
il
Du
nom bre de
f u t c o n s u lt e r
le
ces
citoyen
personnes
L apeyre,
est
le c i t o y e n
hom m e
de
B o n n e t , aîné 5
loi à R i o m . Sur
1 e x p o s é sin ce re q u il fie J e l ’éta t d e m o n p è re , et d e la p r o c u r a ti o n
d o n n é e a so n f i l s ,
le
citoyen
L apeyre
lui
c o n s e illa d e
ne p o in t
faire u n e a c q u i s i ti o n q u i d e v i e n d r o i t illu s o ire . Si c e t e st im a b le j u r i s
c o n s u lt e
a signé
l ’o n t tr o m p é
sur
la c o n s u lt a t i o n
les faits ;
d es a d v e r sa ir e s , c ’est
il est f a c ile d e
s ’en
parce
q u ’ils
c o n v a i n c r e p a r la
le c tu r e m e m e de leu r m é m o i r e .
A
j
�batteries. Il parvint à faire consigner le
sition s, quoique
prix des acqui-.,
les acquéreurs se fussent obligés de le
payer directem ent à chaque créancier. C ’é to it afin de pou
voir établir e n tr'e u x une bonne instance d’ordre , q u ’il a
eu soin de n o u r r ir , par des
requêtes signifiées de tems
en rems à 33 créanciers opposans. V o i là le bût où ces
d eux frères
vouloient arriver ,
lorsqu’ils ont
conseillé ,
p r o v o q u é , et forcé m êm e les ventes dont il s’agit.
Il est résulté , de cette infâme coalition entre les acquércirs ,
et ceux qui ont fait
vendre , que , depuis huit
ans , un seul créancier n’a pas encore été payé ; que
mr.sse des dettes de
mon
la
père a presque d ou blé , tant
par les intérêts échus que par les frais énormes
é té faits pour la consignation et
sur l’ordre ;
qui
ont
qu’ enfin ,
les 34000 l i v , prix des différentes v e n t e s , n’ont pas rap
porté' un sou d ’intérêt , et que cette
som m e qui croit
plus que suffisante pour acquitter les d ette s, n’en payerait
aujourd’hui q u e la moitié. T e l est l’avantage que m on
père a retiré de ces ventes q u e les adversaires ont osé
présenter com m e lui ayant é té très-profitables.
*Si ces actes odieux n’ont pas été attaqués p l u t ô t , c’ est
parce que mon père n ’avoit auprès de lui aucun
enfant
qui put le faire : su1* huit que nous som m es, trois étoient
„ au service de la Ilépublique ; un quatrième prêtre vivoit
hors de ch ez lui i et j’habitois L arocheü e ou Bordeaux :
il ne restoit d on c que
ma mère et ses trois filles , o c cu
pées à prodiguer leurs soins à mon malheureux père.
A rriv é dans ma fa m ille , j’ai été sen sib le , com m e je
devois l’être , à la position
affligeante dans laquelle je
�X oï
Fai trouvé ; j’ai cherché les
m oyens de pouvoir réparer
une partie de ses malheurs ; j’avois besoin pour cela
faire interdire m on
de
père ; il l’a été avec toutes les for
malités re'quises.
L ’avis de parent , et l’interrogatoire qui
ont précédé son
interdiction , n’établissent que trop sa
d ém ence et son a n c ie n n e té , qui étoit déjà prouvée par
la procuration de 1785.
Nom m é
pour curateur à l ’interdiction ,
je m e suis
empressé d’em ployer les fruits de d ou ze années de tra
v a u x à payer
les créanciers
de
m on
père ; et j’aime
à dire que jusqu’ici je n’ai eu q u ’à m e louer de leurs
procédés. J’ai demandé la nullité des
ventes faites en
vertu de la procuration de 1 7 8 5 , et le désistement des
objets vendus. D e u x motifs puissans ont déterm iné cette
d é m a rch e ; le p rem ier, pour achever de faire honneur aux
dettes de mon p è r e , avec les biens dont on l’a indig
nem ent d é p o u illé ;
le secon d , pour procurer le s u r p l u s
de ces biens à une famille nom breuse
q u i,
depuis six
ans , a éprouvé toute sorte de b e s o in s , et qui auroit pu
vivre
dans
une
h on ête
aisance
sans
la
friponerie de
ceux qui l’ont cruellem ent trompée.
Les adverjaires ont qualifi 4 ma dem ande d'extravagante;
ils l ’ont attribuée à la progression survenue dans la valeur
des
biens
enfans
q u i,
Fayet.
reproche
selon
M ais
téméraire
eux,
n’ est-il
est
a excité
pas facile
la cupidité
des
de voir que
ce
une veritable e x t r a v a g a n c e
que
la cupidité seule a laissé échaper ? les adversaires auraient
dû faire
attention
que
les
enfans
F a yet ne vien n en t
pas offrir des assignats pour de l ’argent payé au prétendu
A 4
�fon dé
de
pouvoir de
n ’a rien reçu
leur père. Il esc
sur le prix des ventes
constant qu’il
oui doir erre ou
dans les mains des acq uéreurs, ou clans celles du rece
veu r des consignations : dans le premier c a s , k s adver
saires n’ ayant rien p a y é , n’auront rien à re cev o ir: dans
le s e c o n d , ils retireront ce
qui aura été consigné. L a
m ultiplicité des assignats ne peut dès lors leur faire aucun
t o r t , si le désistement est ordonné.
Il
faut donc écarter ce
m o y en de considération j et
exam iner l’aiFaire sous son véritable po:nt de vue.
L a procuration du 5 novem bre 1785 contient-elle une
preuve suffisante de la d ém en ce du citoyen Fayet père
pour la faire déclarer n u lle , et faire prononcer la nullité
des ventes qui l ’ont suivie?
C e t te procuration
c o m m e un
peut-elle
au
moins être
regardée
co m m en cem en t de preuve par é c r it , suffisant
pour faire adm ettre la preuve
offerte
que F a ye t père
avoit l’esprit aliéné à l’epoque de la procuration de 1785 ?
T e lle s sont les d eu x questions
sur lesquelles le con
seil est prié de donner son avis.
F A Y E T
T
,
k
C
o n s e i l
s o u s s i g n é
fils.
qui a pris lecture
de la
procuration donnée à A n to in e F ayet par son père , d s
ventes faites
en
vertu
de
cette
procuration ,
de
la
dem ande form ée devant le tribunal de M u r â t , des consul
tations
imprimées
des
14 et
15
th e r m id o r ,
du m ém oire à consulter des enfans F a / e t ;
ensemble
�—^
cu ra te u r, à l ’interdiction
9
E s t i m e que la dem ande du
dé
F a y e t p è r e , est fondée
sur
les l o is ,
sur l’opinion
des meilleurs auteurs , et sur la jurisprudence constante
des
tribunaux ,
q u ’ainsi le succès de ce tte dem ande n e
sauroit être douteux.
On
est
a souvenr posé pour
en
principe
qu’ un citoyen qui
d é m e n c e , est interdit par le fait m êm e de sa
d ém en ce : ce principe a
m êm e. P o u r pouvoir
son fon dem en t dans la nature
disposer , il faut
un acte
de
la
volo n té ; et pour ém ettre cet acte , il faut le concours
des facultés extérieures du
corps
rieures
jugem ent. L ’absence
de
l’esprit et
du
et
des
facultés
de
inté
ces
'f a c u l t é s d oit donc produire l ’incapacité de disposer ; mais
la sentence
d ’interdiction ne
prouve
que la
dém ence
actuelle , au m om en t où elle est prononcée , et ne m arque
pas l ’époque où elle a co m m en cé ; conséqu em m ent elle
n e suffit pas seule pour anéantir les actes qui l ’ont
C ep en d an t la dém ence , sur-tout celle
qui n ’ est pas
fu rie u s e , ne se fo r m a n t , pour l’ordinaire , q u e par des
déclins plus ou moins
sensibles, et
ne
se
manifestant
q u e par une suite , une continuité d’actions qui conduisent
à l’interdiction > il est certain qu’ elle a nécessairement
existé avant l’interdiction , qui ne fait que la déclarer ;
e t dès lors , il seroit d’une injustice évid ente de confirmer
indistinctement tous les actes qui ont précédé le ju gem ent
d ’interdiction.
Il faut
donc
une
règle
q u ’il faudra admette« de
sûre
ceu x
pour distinguer ce u x
q u ’il faudra rejecter ; et
�ÏO
cette r è g l e , nous disoit
M . l ’avocat
général
S e g ire r
portant la parole dans l’affaire de la succession de M a d c.
L aforie ,
jugée par arrêt de
1759 ; « cette
règ’ e est
« d ’exam iner les actes en e u x-m êm e s; s’ils portent dans
« leur
o b jet
ou
dans leurs
dispositions, q u e lq u e em -
« preinte de dém ence ou d’aliénation d ’esprit ; c’est le
« cas de donner un effet rétroactif à l’interdiction , et de
>5 prononcer la nullité de ces actes.
A i n s i , la justice doit présumer la sagesse et la présence
d ’esprit
dans celui
tous les citoyens
qui
use de la
faculté com m une à
de contracter pendant q u ’aucun
juge
m en t ne lui en a retiré le pouvoir ; et lorsque la sagesse
de l’engagem ent q u ’il a contracté confirme cette présomp
tion , il n’y a point de
preuve
contraire à admettre.
A u co n tra ire, lorsque l’acte suppose le
de
la
raison dans
d érangem ent
celui qui le c o n tra c te , il fait déjà
preuve par lu i- m ê m e , et preuve écrite que la d é m e n c e ,
déclarée depuis par le j u g e m e n t , existoit déjà lors de
l’acte ; tout au moins , il autorise à admettre la preuve
testimoniale du f a i t , que la dém ence
avoit
com m encé
a van t,
et
fait un devoir aux magistrats de l ’a d m e ttr e ,
si leur
religion n’est pas suffisament éclairée par l ’acre
m êm e ; tels sont les principes
re m s, par les avocats
p rofessés, dans
tous les
g é n é r a u x , organes de la l o i ,
et
sur-tout par l’im m ortel d ’Aguesseau qui ne laisse rien à
désirer sur cette matière dans ses divers plaidoyers
O r , si nous appliquons m aintenant ces principes à la
,
cause présente ; si nous jugeons l’état des facultés intel
lectuelles de F a y e t , lorsqu’il passa la
procuration géné-
�raie de 1785 , à son fils ; par cette pièce , pourrons-nous
ne pas y appercevoir la
preuve la plus évidente de la
p erte totale de sa raison et de son ju gem ent dès-avant
cet acte ? il fut en
effet une
vraie
interdiction perpé
tuelle qu’ il s’imposa à lui-même , ou pour
m ieux d i r e ,
q u ’il signa sans en connoître l’objet.
Il donne pouvoir
à
son
ses affaires, ainsi q u e ses
fils de
biens
régir et administrer
pressas et a v en ir , de
recevoir toutes ses créances actives , de plaider, de traiter ,
de transiger , payer ses créanciers , de passer des baux ,
les renouveller , vendre et aliéner à tel prix qu’il aviseroit ;
d e substituer un ou plusieurs procureurs en tout ou en
partie ; et ce qui est bien plus fort , i l s ’ interdit la fa cu lté
de pouvoir révoquer cette procuration pour quelque cause
et occasion que ce p u t être 3 et sans que sa procuration
f u t sujette a surannation.
Q u ’un citoyen qui entreprend un vo y a g e de lo n g c o u r s ,
d onne une semblable procuration illim itée pour le repré
senter dans son absence ; il n ’v a rien là d ’extraordi*
naire ; mais qu’un citoyen qui n e q uitte pas sa d e m e u r e ,
d onne pouvoir
de
g çu vern er sa
pendant qu’il sera p r é s e n t,
de
reprendre
à
volon té
maison e t ses b i e n s ,
et qu’il s’interdise la faculté
l’administration générale
d élè g u e ; c’est ce qui ne peut se
concevoir
qu’il
que de la
part d’un hom m e à qui la dém ence interdit d’administrer
lui-m êm e ses afîaires. C elu i-ià est décidém ent dans 1 im
b écillité où
la folie , qui
l ’ entourent ou
se rend , . ou
que ceux qui
le maîtrisent , rendent dépendant do son
fils , en le rangeant irrévocablem ent sous sa tutelle.
�W
»V
I2
l’acte de procuration dont il s’agît ,
C oncluons que
prouve
la
dém ence
actuelle de
Fayet
p è r e , lorsqu’il
le consentit , car la transmission de la part d’un cito yen
toujours présera , de la régie générale de ses affaires , k
un procureur constitué qui , par é ta t,
d ’être absent , et
souvent
se trouve
obligé
éloigné , ( le fils , procureur
constitué , servoit dans la cava'erie ) , est une mesure qui
ne peut s’expliquer q u e par l ’incapacité notoire du co m
m ettant d ’administrer lui-mêm e. Il n’en faudrait donc pas
d ’avantage pour faire prononcer la nullité
ration de 1785 , et
des différentes ventes
de la
procu
qui
en o n t
é té la s u i t e , sur-tout d ’après ce qui résulte de l’avis de
p a r e n t , et de l ’interrogatoire qui ont précédé l’interdiction
du père Fayet.
M a is , s’il restoit encore quelque d ou te sur sa d é m e n c e ,
à
l ’époqu e
de
la procuration de
pourroit-on pds nier q u e si cet
1785 , au
moins n&
acte ne form e pas une
preuve irrésistible et co m p lette de l’aliénation d ’e s p r it,
il en fournit une présomption bien pressante , et doit
suffire
pour
f a i t , que la
faire admettre
dém ence
la preuve
testimoniale du
s’étoit manifestée antérieurement
par les actions , les discours et les
affections de F a y e t
père.
Q u e l’on consulte les six arrêts rapportés dans le m ém oire
imprimé dus adversaires de Fayet ; on verra que trois o n t
admis la preuve testim oniale de la d ém ence , parce q u ’il
en e x ’stoit un com m encem en t de p r e u v e , par écrit ; et
q u e les ttois autres on t rejette la preuve
o ff e r t e ,
parce
qu’il n ’ existoit pas de co m m en ce m en t de preuve , par écrit,
*
� li
*3
î l résulte doncd e cous ces arrêts que si le tribunal de M u râ t
n e trouve pas sa religion suffisamment instruite par la procu
ration de
178 5
et par les autres pièces , il ne pourra se dis
penser d’ordonner la preuve des faits , qui seront articulés
par les enfans F a y e t, pour prouver qu’à l’époque de sa procu
ration
, leur
père avoit
l’ esprit aliéné ; cette preuve a
toujours été ordonnée en pareil cas , e t pour ju ger de sa
sagesse , il suffit d ’entendre Daguesseau dans une cause
pour le ci-devant prince de C o n ty .
sem bla ble
m
L a d é m e n c e , d it-il, est un fait, mais un fait habituel,une
« disposition , une affection permanente d e l’ame ; et co m m e
» les habitudes ne s’acquierent que par les actes réitérés ,
« elles ne se prouvent presque jamais que par une longue
■
» s u ite , une c o n tin u ité , une
multiplicité d’actions dont
« il est impossible d ’avoir la preuve par une autre voie
■
>> q u e p a r le seu l témoignage de ceu x qui ont été specta•sj teurs assidus de ces actions.
■
» A jou tons m êm e que ce tte preuve est
■
» forte q u e celle qui se tire des a c t e s ',
>5 témoins
souvent plus
parce
que
peuvent expliquer des actions plus considc-
rabies par leur
longu eur , plus
im portante
par leur
*> nature , plus décisive par leurs circonstances , q u e
signature d ’un acte {a).
(¿0
Une
les
la
.
s e n te n c e a rb itra le r e n d u e e n tr è s - g r a n d e
con n oissan ce de
c a u s e , le 7 m e s s id o r d e r n i e r , a j u g é c o n f o r m é m e n t à ces prin cipe s. I l
c ’a gisso it
fru its,
d e la n u ll i t é d ’ u n e d o n a t i o n e n tr e v i f s , a v e c reserve d u su
fa ite par d e f u n t e F r a n ç o i s e T i x i e r ,
Arnaud ,
son
fils
aîné ,
i
la c h a r g e d e
a u p ro fit d ’a m a b l e - A n d r é
payer
une
l é g i t i m e d«
0,0.00 l i v . à M a r i e A r n a u d «a s œ u r : c e l l e - c i a d e m a n d é l a nullitQ
*>+
�d e la d o n a t i o n , a tte n d u q u e l 'é t a t d e d é m e n c e d e sa m è r e
pas p u
lu i laisser
1 7 8 6 , e lle
la fa c u lté
de
d isp o se r
de
a v o i r t o t a l e m e n t p e r d u l ’u sa ge
c o n s é q u e n t la d o n a t i o n par e lle fa ite e n
» Sur q u o i,
ses
de
b ie n s j q u e d e p u i s
sa r a i s o n , et q u e p a r
1788
étoit n u lle.
c o n s id é r a n t q u e p o u r d is p o s e r v a l a b l e m e n t ,
33 u n e v o l o n t é réfléch ie \ q u ’ il
n ’y a pas
n ’a v o ic
de v o lo n té
il fa u c
réfléch ie d a n s
» c elui q u i est p r i v é d e sa r aison , d e s o n j u g e m e n t e t d e ses fa c u lté s
» i n t e lle c tu e lle s 5 q u ’e n c o n s é q u e n c e , la p erte d e la raison e n tr a în e a v e c
s» s o i , d ès l ’in s ta n t q u ’e lle est p a r v e n u e a u dtm i<.r p é r i o d e , la d é c h é a n c e
« d e la cap acité d e
» la r aison est
d isp o se r ; q u e
la d é m e n c e
ou
la p r i v a t i o n d e
u n fa it , m a is u n fa it h a b i t u e l , u n e d i s p o s i t i o n , u n e
a ffe c tio n p e r m a n e n t e d e l ’a m e j q u e t o u t fa it est su sc e p tib le d ’ê t r e
33 ét a b li par la p r e u v e t e s t i m o n ia l e ; m a is q u e la d é m e n c e p e r m a n e n t e
3> 11e p o u v a n t se m a n i f e s t e r q u e par d es
actes réitérés ,
une lon gu e
33 su ite , u n e c o n t i n u i t é , u n e m u l t i p l i c i t é d 'a c t i o n s , la p r e u v e n ’e n
3> est a d m i s s ib l e q u e l o r s q u e les fa its s o n t p r é c i s , caracté ristiq u es d e
33 d é r a n g e m e n t
de
la r a iso n j
m u ltipliés
33 actes d ’ u n d é li r e a c c id e n te l e t
» F r a n ç o i s e T i x i e r est m o r t e
33 fa c u l té s in t e l l e c t u e l l e s
en
et
p a ssa g e r ; q u ’il
est
d a n s u n éta t d ’a b s e n c e
et mon de»
constan r q u e
to t a le
d e se s
1 7 9 1 ; m a is q u ’il n e l ’est p a s ,
q u 'e lle
33 f u t d é j à en d é m e n c e a v a n t le m a r ia g e d e
33 a rtic u lés par M û r i e
souten us,
A rnaud , pour
éta b lir
>3 d é m e n c e h a b i t u e l l e , a v a n t l e m a r i a g e
et
s o n fils ÿ q u e
les fa its
l ’e x is te n c e d e l ’état
lors d u
m a ria ge,
de
sont
» précisés et c a r a c t é r i s é s p a r . c o n s é q u e n t a d m iss ib le s.
33 L e t r ib u n a l p e r m e t à M a r i e A r n a u d et M o n t e l é o n s o n m a r i , d e
33 faire p r e u v e
des faits
de dém ence de
F r a n ç o i s e T i x i e r , par e u x
33 a r t i c u l é s , s a u f à J e a i m e - V i c t o i r e B o y e r , v e u v e A r n a u d ,
» .c o n tra ire ,
etc.
L e s a rb itres q u i
o n t r e n d u ce j u g e m e n t s o n t les
et B la n c de C l e r m o n t , p o ur
<t H u g u e t de B i l l o m , p o u r
.ti
ont
une
la p r e u v e
la d é fe n d e r e s s e j
les d e m a n d e u r s .
c o n s u lt a t i o n j e n l e u r f a v e u r ,
D atcis-M arcillat.
citoyen s
B ergier
les c i t o y e n s L a v i g n e
O11 o b s e r v e
que
ceux-
d es c i t o y e n s L a p e y r e e ï
�2 t>
D ’après c e la , la preuve subsidiairement offerte par les
enfans Fayet , de la d ém en ce de leur père
avant 1 785 ,
peut-elle souffrir la m oindre difficulté ? s’ils ont des preuves
publiques et non équivoques d’ une dém ence certaine , il
en résultera la nullité de la procuration , parce qu’il est
certain q u e celui qui n’a pas le pouvoir
n e peut pas le
de c o n tr a c te r ,
transmettre ; nemo dat quod non
L e procureur constitué est
l’organe du
ministre de sa volonté. Si
celui-ci est dans
habet.
c o n s titu a n t, la
l’incapacité
de contracter , son procureur constitué ne peut pas l’obliger
non plus ; par-là tom beront , avec la p rocuration, toutes
les aliénations qui l’on t suivie.
L e s enfans F a y e t d o iv en t d o n c attendre avec confiance
le désistement
qu’ils réclam ent : les
créanciers de leur
père sont intéressés à ce q u ’il soit o r d o n n é , puisqu’il
leur assurera le paiem ent de leurs créances d ont la m a
jeure partie ne seroit pas
payée , si
les
ventes dont il
s’agit avoient leur exécution.
D é lib é ré à C le rm o n t 3 le vingt-quatre th erm id o r, l’an
3 de la R ép u bliqu e Française ,• une et indivisible.
BERGIER.,
I l est ess en tiel
de
rem arquer
B IA U Z A T .
i.° q u e ,
dans
d o n t 011 p r o d u i t u n e e x p é d i t i o n e n f o r m e , il
dans
l ’affaire d u c i t o y e n
F a y e t, un
é c r i t , p u i s q u e la c i t o y e n n e T i x i e r
l ’e s p è c e d u j u g e m e n t
n ’ e x is to it pas ,
com m e
co m m en ce m en t de preuve
n ’a v o it
fa i t
q u ’un e
par
d is p o s itio n
très-ordinaire dans notre D épartem ent ; z .° que la citoyenne T ix ie r
est
m orte
en
d e la p r e u v e
po ssess io n
o ff e r te
est
d e s o n étar ; par c o n s é q u e n t l ’a d m i s s io n
in fin im en t
a c t u e l le o ù il s'ag it d ’ un acte
u n e In t e r d i c t i o n
b ie n s
que
v o lo n t a i r e , o u
d e la part d ’ u n
hom m e
l ’o n
p lu s
peut
com m e une
in terdit
fa vo rab le
c o n s id é re r
v é r i ta b le
de son
enc£ est p ro u v é e par l ’acte m êm e d o n t o n
, ^
ê 9 *
SV/
dans
ou
l 'e s p è c e
com m e
d ém ission d e
v iv a n t,
et
d o n t la
d em an d e la nullité*
�16
L e C o n s e i l s o u s s i g n é qui a pris lecture
des diffé
rentes pièces visées dans le m ém oire à consulter , et de
la consultation , est absolument du m êm e avis sur les
questions proposées , et par les mêmes motifs.
D é lib é ré à R io m , le premier fr u c t id o r , l’an 3 d e la
R ép u b liq u e Française , une et indivisible.
T O U T É E ,
GR EN IER, PAR A D E S,
D E V AL.
L e s SOUSSIGNÉS qui ont pris lecture du mémoire à
con su lter, de la co n su lta tio n , et
des pièces ci-dessu s
visées , sont du même avis , et par les mêmes raisons.
D é lib é ré à Issoire , le quatre fructidor, l’an 3 de la R é p u
b liq u e F r a n ç a is e , une et indivisible.
B A Y E T père
_4
D e l'imprimerie G
DESRIBES, BERGIER, BAYET.
< ;• - /
S
S
O
R AN IER
I
R
E ,
et F R O I N ,
ïmprimeur
du district, an 3 de la République, une et indivisible.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Fayet. An 3]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Biauzat
Toutée
Grenier
Parades
Deval
Bayet, père
Desribes
Bergier
Bayet
Subject
The topic of the resource
démence
abus de faiblesse
nullité
procuration
interdiction judiciaire
témoins
curateur
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour le citoyen Fayet, curateur, à l'interdiction d'Antoine Fayet, son père, demandeur ; Contre Jean Savignat et autres, demandeurs.
Table Godemel : Démence – voir testament : 1. la procuration d’un homme en démence donnant les pouvoirs les plus étendus et les plus extraordinaires, s’interdisant la faculté de révoquer ces pouvoirs, est-elle valable ? les ventes faites en vertu de ce mandat, trois ans après la date, doivent-elles être exécutées, surtout si elles creusent une lésion énorme ? le curateur à l’interdiction qui en a demandé la nullité, est-il recevable à établir, par témoins, que la démence existait avant la procuration ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Issoire)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 3
1785-An 3
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1108
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1107
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53136/BCU_Factums_G1108.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Allanche (15001)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
curateur
démence
interdiction judiciaire
nullité
procuration
témoins