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CONSULTATION
P O U R
L a dame C H A P A V E Y R E , habitante de la
v il le
de M urât, departement du C a n t a l , ap pe-
lante d’un jugement rendu au tribunal civil de
l’arrondissement de R i o m , le 9 thermidor an 10;
C O N T R E
Le citoyen A n t o i n e T E I L H A R D D U C H A M B O N propriétaire, habitant de
ladite ville de Riom } intimé.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire
à consulter de la dame C hapaveyre, ensemble copie d’un
ju gem ent rendu au tribunal civil de R io m , le 9 ther
midor an 1 0 ,
�( 2 }
que ce jugement renferme une évidente
erreur, en ce qu’il déclare valable une donation mutuelle
faite par contrat de mariage entre futurs conjoints, quoi
que cette donation n’ait pas été revêtue de l’insinuation ,
dans les quatre mois du décès de l’un des donateurs; q u e ,
par conséquent, l’appel interjeté par la dame Chapaveyre
est parfaitement bien fondé , et que le succès le plus com
plet doit couronner sa juste réclamation.
Il résulte du mémoire à consulter, et de l’exposé des
faits insérés au jugement dont il s’agit, que-; par le'contrat
de mariage de Marie-Jeanne Chapaveyre du Saillant avec
Antoine Teilhard-du-Chambon , la future s’est constitué
E
s t i m e
en trousseau, meubles, effets, linge et hardes à son usagç,fi>
même ses meubles m eublans, etc. jusqu’à cotfeufrence
de 2,000 fr. à quoi ces divers effets ont été amiablement
estimés entre les parties.
D e plus, et en d o t , elle s’est constitué, i ° . les biens
meubles et immeubles à elle éclius par le décès de son
père ; 2°. la somme de 60,000 fr. faisant partie des biens
par elle recueillis de la succession testamentaire de Jacques
.
Phi lippe du Saillant, son oncle.
Par le même contrat, le futur est spécialement autorisé
à poursuivre la rentrée et le remboursement de tout ce
qui peut être du à la future, h demander partage, aliéner
les immeubles réels et fictifs , toucher le remboursement,
comme les intérêts ou revenus échus ou à éch oir, à la
charge néanm oins de f a ir e emploi des fon d s ¿i f u r et
mesure q u 'il en touchera le m o n ta n t, soit en acquisitions d’immeubles réels ou fictifs, soit en acquittement
de dettes hypothécaires de 1 uu ou de l’autre des futurs.
/
�( 35
Il est d’ailleurs stipulé, que tous les autres biens, de
quelque nature qu’ ils soient, non compris dans les cons
titutions précédentes, sont réservés à la future, comme
extradotaüx et paraphernaux.
Enfin, et A la suite de quelques autres clauses particu
lières , dont il est inutile de rendre co m p te, parce qu’elles
n’ont aucun rapport A la question ci-dessus proposée ,
il est dit : « Que pour se témoigner leur amitié récipro« q u e , les futurs se sont mutuellement donné et donnent
« l’usufruit de tous et chacun les meubles et droits qui
« seront délaissés par le premier mourant ; laquelle dona« tio n , est-il ajouté, qui est mutuellement acceptée, aura
« lieu , y ait enfans ou non du mariage. »
Quelques années après ce m ariage, la dame Teilharddu-Chambon n’ayant point d'enfans institua pour son
héritière universelle Marguerite Chapaveyre, sa sœur.
L ’institution fut faite par le contrat de mariage de celle-ci
avec le citoyen Pardoux - Fayolle, sous la réserve par
l'instituante de pouvoir disposer d’une somme de 18,000 f.
q u i, en cas de non disposition de sa part, devoit f’a irj
partie de l'institution : l’instituée ne fut d’ailleurs soumise
à aucune autre condition que celle de ne pouvoir attaquer
les ventes partielles qui a voient été faites par TeilhardCliambon , mari de l’instituante, de quelques portions
détachées du domaine de Saint-Bonnet-Lachamp.
La dame Teilliard-du-Chambon étant morte dans le
mois d’août 1790 , Marguerite Chapaveyre, sa sœur et
son héritière instituée, forma contre le mari survirant une
demande tendante A ce q u e , faute par lui d’avoir fait
emploi des sommes reçues de son épouse, pour avoir ,
A a
�C 4 )
au contraire, alién é, depuis le décès de celle-ci, la tota
lité de son domaine de Saint-Bonnet-Lachamp, et faute
d’avoir fait inventaire, au décès de sa femme, des biens
par elle délaissés, qu’elle s’étoit réservés en paraphernal,
il fat déclaré déchu de l’ usufruit stipulé en son contrat
de m ariage, condamné à restituer les biens dotaux , et
la somme de 5o,ooo fr. pour les biens para plier naux,
si mieux il n’aimoit suivant leur valeur,
donner par
renseignement, ou à constater par voie de commune re
nommée.
Cette première demande a été suivie d’une a u tre,
formée dans le cours de l’an 10 parla dame Chapaveyre,
qui a conclu par celle-ci, à ce que le don m utuel, porté
au contrat de mariage de sa sœur avec le cit. Teilbarddu-Cliambon , fût déclaré nul et de nul effet , fa u te
(Vavoir, été insinué dans les quatre m ois du décès de
la .dame son épouse ,* en conséquence, que le citoyen
Tcilhard-Cham bon fût condamné à restituer, avec inté
rêts, à compter du jour du décès, savoir, les biens dotaux,
ainsi qu’i’.s étoient énoncés et fixés au contrat de mariage,
et les bieus parapliernaux , suivant leur consistance ,
d’après la preuve par commune renommée, ou la somme
de 5o,ooo fr. etc. etc.
Ces deux demandes ayant été jointes; par un jugement
du i i prairial an 1 0 , le tribunal ordonna, avant faire
d r o it, que le citoyen Teilhard-du-Chainbon seroit tenu
de justifier d’ une manière légale, que , soit en quittances
de ilettcs pour le compte de Marie - Jeanne Chapaveyre ,
sa femme, soiten acquisitions d’immeubles réels ou fictifs,
il avoitsullisammcnt satisfait l’emploi des deniers dotaux
dont ii éloit expressément chargé.
�( 5)
Ainsi la contestation présentoit deux quest:nns à jurer.
L ’ une de savoir, si, faute d’insinuation dons les cju.iire
mois du décès de la dameTeilhard-du-Chainbon , ht dona
tion mutuelle, portée en son contrat de mariage, devoit
être déclarée nulle.
L ’autre, si, en tous cas, le citoyen Teilhard-du-Chambon
ne devoit pas être déclaré déchu de son usufruit, faute
par lui d’avoir satisfait aux obligations que la lo i, sou
contrat de mariage et le jugement interlocutoire du n .
prairial lui imposoient. Car il est bon d’observer qu’ il
n’a aucunement justifié des payemens par lui articulés
des dettes de sa femme; et qu’au lieu d’être propriétaire,
comme il Favançoit, d’un domaine de 112,000 f r . , il étoit
de notoriété publique, qu’à peine il en possédoit la moitié.
Mais , quoique les principes du droit civil et les cir
constances du fait se réunissent en faveur de la dame
Cbapaveyre pour assurer le succès de l’ une ou de l’autre
de ses demandes , les deux questions ont été décidées
contr’elle par le jugement du 9 thermidor an 1 0 , q u i,
sans s’arrêtera sa demande en nullité, dont il Fa déboutée,
a repoussé pareillement sa demande subsidiaire en priva
tion d’usufruit, de même que celle en provision d’une
somme de 6,000 fr ., qu’elle avoit incidemment formée.
L e tribunal civil de Riorn a donc ju g é, en principe,
que les donations mutuelles, faites par contrat de mariage,
n’avoient pas besoin, pour être valables, d’être revêtues
d e là formalité de l’insinuation , et que la loi qui les y
assujétissoit ne présentoit, à cet égard, qu’une disposition
purement bui’sale, dont l’infraction n’entraînoit point la
A 3
�( » 4
C6 )
i U ’ ité de l’acte , mais seulement une peine pécuniaire.
L e soussigné estime, au contraire, que le défaut d’in
sinuation dans les quatre mois du décès de l’un des dona
teurs , emporte la nullité radicale de la donation faite
par contx*at de mariage ; que la distinction qui sert de
base au jugement du 9 thermidor an 10, contredit éga
lement la lettre et l’esprit de la loi.
P o u r se bien convaincre de cette v é r ité , il n’est pas
besoin de rappeler ici nos anciennes ordonnances, notam
ment celle de M oulins, qui soumettent indistinctement
à la formalité de l’insinuation toutes les donations entre
v ifs , de quelque nature qu’elles puissent être. On se
bornera simplement à rapporter les dispositions de l’or
donnance de 1 7 3 1 , et celles des lettres patentes de 1769,
qui ont modifié le principe g é n é r a l, relativement aux
donations de survie d’entre mari et femme.
L ’article X I X de l’ordonnance de 1731 porte « que
« les donations faites dans les contrats de mariage en ligne
« directe ne seront pas sujettes à la formalité de l’insi« nuation. »
E t l’article X X » que toutes les autres donations,
« même les donations rénumératoires ou m u tu elles,
ce quand même elles seroient entièrem ent égales, ou celles
« qui seroient faites à la cliarge de services ou de fonda« tions , seront insinuées conformément aux anciennes
« ordonnances, à peine de nullité. »
Ainsi , à l’exception des donations en ligne directe,
faites par contrat de mariage, toutes les autres donations,
indistinctement, sont assujéties à l’observation rigoureuse
�C 7 )
de cette formalité ; et comme la nature des donations
mutuelles, qui ne sont, au fait, que des contrats eornmutatifs, intéressés de part et d’autre, pouvoit laisser
quelque doute sur la nécessité de les comprendre dans
]a classe des.actes de pure libéralité, le législateur,'pour
dissiper toute espèce d’incertitude à cet ég a rd , les y a
spécifiquement comprises, même dans le cas ou elles seroient parfaitement égales.
1
A u x termes de l’ordonnance de 1731, il n’est donc pas
douteux que les donations mutuelles d’entre mari- et
fem m e, étoientj’eomme toutes les autres, aisujétics à la
formalité de l’insinuation dans les cjuatre mois de-leur
date; les articles X I X et X X sont si formels, si clairs et
si précis, qu’i l •faudroit'volontairement fermer les y e u x
à l’évidence pour méconnoître la règle qu’ils établissent.
Cependant l ë ’ caractère particulier de ces espèces de
donations pouvoit et deVoit même les placer dans une
classe particulière, non pour les dispenser de l’insinuation,
mais du moins pour1reporter au décès de l’un des dona
taires l'obligation de remplir cette'formalité.
Dans la donation mutuelle , effectivement, ni l’un ni
Vautre-des donataires ne se dépouille de la propriété des
choses qu’ il donne; il en conserve, pendant toute sa vie,
la libre disposition ; et s’il ne peut plus les aliéner à titre
purement gratuit, au préjudice de son codonataire , du
moins peut-il les vendre , les échanger, ou les hypothé
quer au payement de ses dettes.
O r , c o m m e l’insinuation, qui n’est que le moyen de
donner la plus grande publicité possible aux actes de libéra
lité, nu pour unique but que de prévenir oti d’empôchûr la :
A 4
/
�f-S)
fraude qu’ un donateur déjà dessaisi de la propriété de
choses par lui données , pourroit commettre envers des
tiers qui ne connoîtroient pas la donation, il est clair que
ce m otif cesse nécessairement pour les donations mutuelles,
q u i, ne dépouillant pas les donateurs de la propriété,
leur laissent conséquemment la disponibilité entière et par
faite de tous les objets qui composent leur donation.
D ’un autre c ô t é , si cette forme extrinsèque devenoit
complètement inutile pour ces sortes de conventions, il
pouvoit être dangereux de les y assujétir, en ce qu’elle
gênoit la libre disposition que conservoientles deux époux,
par les inquiétudes qu’elle donnoit aux tiers avec lesquels
ils avoient à contracter. . . ,
P q u r concilier ces différentes vues, il falloit donc néces
sairement faire deux choses.
j
. c ; . • >i ■
'
L ’u n e, reculer le terme de l’iqsinuationijusqu’après le
décès de l’un des deux donateurs;
l/ a u tr e , obliger le donataire survivant à faire insinuer
dans les quatre mois de la mort du prédécédé, afin de
prévenir, par ce moyen, les dispositions frauduleuses que
riiéj’ilier pourroit faire des choses données; car la dona
tion mutuelle saisit le survivant à l’instant même du décès
de son codonateur. Elle dépouille, conséquemment,l’héri
tier de celui-ci; et, si elle n’étoit pas rendue publique par
l ’ insinuation, le même inconvénient qui résulte du défaut
de publicité des donations ordinaires, se rencontreroit dans
«elle-ci, puisque l’héritier, ainsi investi de tous les biens
de la succession, par la règle le m ort sa isit le vij\ pour
rait également tromper des tiers qui ne connoîtroient
pas la donation.
�c 9 )
Ce double but a été rempli par les lettres patentes du 3
juillet 176 9 , qui ont ordonné « q u e tous les dons de
« survie faits dans les contrats de mariage, par un mari à
te sa fem me, ou par la femme à son m ari, tous les dons
« mutuels, réciproques, rénumératoires, faits par l’un et
« l’a u tre, dans lesdits contrats , seroient exempts, ju s
te qu au jo u r du décès du donateur, de la form a lité e
« /’in sinu ation , soit au domicile des contraelans, soit aux
« bureaux des lieux de la situation des biens donnés ; à lu
« charge, n éa n m oin s, que lesdites donations seroient
« insinuées au dom icile du d o n a teu r, dans les quatre
« m o is , à compter du jo u r de son décès. »
Remarquons, avant d’aller plus lo in , que l’exception
faite par cette loi en faveur des donations mutuelles, ou
de survie, par contrat de mariage, n ’a lieu que pour le
temps de l'insinuation : sont dispensées ju s q u a u jo u r du
décès du donateur ; que, par conséquent, la règle reprend
tout sou em pire, lorsque le terme de cette suspension est
arrivé. E t, par une conséquence ultérieure, que l’obli
gation de faire insinuer, dans les quatre mois du décès,
est imposée à peine de nullité , puisque l’ordonnance
de 173 1, à laquelle il n’est dérogé que pour Je tem ps,
punit de la même peine l’inobservation de cette formalité.
Il y auroit donc une absurdité com plète, à ne v o ir,
dans les lettres patentes du 3 juillet 1769 , qu’une dispo
sition purement bursale, puisque les mêmes motifs, qui
fondent la nécessité de l’insinuation des donations ord i
naires, dans les quatre mois de leur date, provoquent
également celle des donations réciproques, dans les quatre
niois du décès de l’uu des donateurs} et que, d’un autre
A S
�454
( 10 )
côté, ces mêmes lettres patentes n’ont dérogé l’ordon
nance dé 1 7 3 1 , que pour le temps où la formalitéidevroit
être remplie, sans anéantir la peine de nullité, qui en
punit l’inobservation.
Ces principes posés, rien de plus facile que d’écarter
les prétendus motifs qui servent de base au jugement du 9
thermidor an 10.
L e premier consiste à dire : « que, d’après l’ordonnance
« de 1 7 3 1 , les lois antérieures et celles qui ont suivi, Tin 1
« sinuation n’est ordonnée à peine de nullité, que pour les
« donations entre-vifs, pour les seules libéralités présentes
« et absolues. »
, ,
Nous venons de v o ir , au contraire, que les donations
mutuelles, même celles qui seroient parfaitement égales,
et généralement toutes les espèces de donations, sans autre
exception que celles en ligne directe, sont soumises parles
articles X I X et X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , à la for
malité de l’in sin u a tio n , sous peine de nullité : que celles
d ’entre mari et femme en ont été dispensées, il est vra i,
pour le temps de la vie des donateurs ; mais qu’en
laissant à la disposition de l’ordonnance de 1731 tout
son empire et son eiFet, relativement à. l’obligation
d’insinuer dans les quatre mois du décès, les lettres pa
tentes de 1769 n’ont établi qu’une exception temporaire,
sans déroger au surplus des autres dispositions de l’ordon
nance.
.
,
L e second motif du jugement est fondé, « sur ce qu’une
«c donation mutuelle de biens qui s e trouveront après le
« décès, ne peut être réputée ni une libéralité purement
« gratuite, ni une donation présente et absolue, puisqu’il
\
�4.V f
( 11 )
* n’y a de véritables donations entre-vifs, que celles qui
« dépouillent, dès le moment, le donateur an profit du
« donataire; et qu’ainsi la donation dontil s’agit n’est qu’une
« véritable donation à cause de mort. »
Ce second motif renferme autant d’erreurs que de mots.
D ’abord il est faux qu’il n’y ait de véritables donations
entre-vifs, que celles qui dépouillent le donateur dès l’ins
tant même de la donation ; car les institutions contrac
tuelles sont, par exemple, de vraies donations entre-vifs ,
et réputées comme titres irrévocables de leur nature ,
quoiqu’elles laissent à l’instituant la faculté de disposer à
titre onéreux de tous ses biens, et ne le dépouillent d’au
cun de ceux qui composent l’institution ( i ).
Les donations faites par contrat de m ariage, h la
charge de payer les dettes que laissera le donateur, et
qui sont formellement autorisées par l’article X V I I I de
l’ordonnance de 1 7 3 1 , sont encore des donations entrevifs , et parfaitement irrévocables, quoique le donateur
conserve la faculté d’aliéner ses biens en les hypothé
quant à ses créanciers.
Les donations de survie , autorisées également par
la même lo i, sont encore des donations entre-vifs; et
jamais personne n’a imaginé jusqu’à présent qu’on pût
les ranger dans la classe des donations à cause de m o rt,
( i j Voyez L eb ru n , des successions, livre 3 , chap, a , numéro 7.
Potlùer , introduction au titre des successions de la coutume d ’Oxléanj,
numéros 17 et 18.
L oi du x8 pluviôse an 5 , article premier.
* *
�f 12 )
qui en diffèrent essentiellement p a rle caractère de révo
cabilité qui leur est propre.
La donation à cause de mort est essentiellement révo
cable jusqu’à la mort du donateur, non-seulement par
le fait, c’est-à-dire, par l’aliénation qu’il peut faire à
litre onéreux , mais par le d roit; en ce qu’il n’a besoin
que d’un simple acte de sa volon té, pour les anéantir,
les révo q u er, les m odifier, ou disposer en faveur de
tout autre que le donataire.
L es donations de su rv ie , au contraire, les donations
mutuelles et réciproques, celles à la charge de payer les
dettes du donateur, les institutions contractuelles, les
promesses de conserver, et autres de même nature , sont
bien révocables en ce sens, que le donateur ou l’insti
tuant conservent la liberté d’aliéner à titre onéreux ?
même la totalité des objets donnés.
Mais elles sont irrévocables en cet autre sens, que le do
nateur ou l’instituant ne peuvent disposer à titre gratuit en
faveur d’un autre que le donataire, et qu’il n’est plus en
son pouvoir de les anéantir ou de les modifier de quel
que manière que ce soit. L ’ordonnance des substitutions,
article X I [ , le décide formellement pour les institutions
contractuelles d’héritier, et sa disposition s’applique à
f o r t io r i aux autres conventions de même nature , c’està-dire , à celles qui ne dépouillent pas le donateur de la
propriété des choses données, quoiqu’elles lui ôtent la
liberté de disposer à titre gratuit.
D e cela seul que les donations mutuelles , et en général
1rs donations de survie, sont irrévocables de leur nature,
il s'ensuit donc nécessairement qu’elles ne sont point
�4&
( *3 )
donations à cause de mort ; e t , par une consequence ulté
rieure, qu’on doit le;s ranger dans la classe des donations
entre-vifs; ce qu’il 'falloit démontrer.
A u surplus, si les donations mutuelles n’étoient pas de
véritables donations entre-vifs, soumises comme telles à
Tinsinuation , on demanderoit pourquoi l’article X X de
l ’ordonnance les a rangées dans la môme classe pour les y
assujétir, et pourquoi les lettres patentes de 1769 ne les
ont exceptées de cette disposition générale que pour reculer
le terme de l’insinuation, en le plaçant au décès de l’un
des donateurs, sans anéantir d’ailleurs la peine de nullité
que l’inobservation de cette foi’me doit nécessairement
leur faire encourir.
L e troisième m otif du jugement est fondé sur ce que
« la déclaration de 1729 n’a soumis à l’insinuation les
« dispositions testamentaires et autres à cause de m o rt,
« que pour les assujétir à un droit bursal, et les a expres« sèment exceptées de la peine de n u llité, en cas de
« non insinuation. » ■
Si les donations mutuelles, par contrat de mariage,
pouvoient être regardées comme dispositions testamen
taires ou à cause de m o rt, rien ne seroit plus juste que
ce raisonnement qui ne laisseroit aucun lieu à la répliqué :
mais on vient de faire voir qu'elles étoient essentiel
lement donations entre-vifs; qu’elles en avoient le prin
cipal caractère, celui de la parfaite irrévocabilité; et la
conséquence directe qui résulte de là , c’est qu’on ne peut
leur appliquer les lois relatives aux testainens.
Les juges du tribunal de Riom donnent pour quatrième
motif, que les lettres patentes de 1769 n ont point déroge
�( 14 )
a u x lois antérieures, relativement à la. -peine de nullité
j'a u te dûinsinuation, et il semble que l’on pourroit tirer
pour conséquence directe de cette' assertion incontesta
ble, que si l’exception qu’elles introduisent n’est que pour
le terme de l'insinuation, la peine de nullité subsiste faute
d’insinuation dans celui qu'elles établissent, c’est-à-dire,
dans les quatre mois du décès du donateur.
O n ajoute, dans le jugement, a que cette loi (les lettres
* patentes de 1769 ) a seulement pour objet, en déter« minant le temps et l’époque de l’insinuation, de.fixer
« le temps précis auquel les peines du double et triple
« droit seroient encourues. a
Mais les lettres patentes de 1769 ne parlent ni du
double ni du triple d roit; elles disent seulement que les
donations de survie, comme les donations mutuelles, sont
dispensées pendant la vie du donateur de la formalité
de l’insinuation . . . . pour y demeurer assujéties seule
m ent dans les 4 m ois du jo u r de s o j i décès.
E t comme les raisons de l’exception sont puisées dans
la nature môme des donations de survie, qui, laissant au
donateur la faculté de disposer à titre onéreux , n’exposent
point à être trompés les tiers qui coiitracteroient avec lui;
C om m e, d’un autre coté, la nécessité de l’insinuation
doit commencer au moment où cette faculté s’anéantit,
c’est-à-dire, au moment où l’héritier du-donateur est
pleinement dépouillé, entièrement dessaisi de la propriété
et de la libre disposition des choses données, c’est-à-dire,
ou moment du décès de l’un des donateurs;
Comme cette nécessité se trouve fondée alors sur les
mêmes motifs que celle qui rend indispensable finsinuar
�( *5 )
tîon des donations présentes et absolues, c’est-à-dire, sur
la crainte que des tiers de bonne foi ne contractent avec
un propriétaire dessaisi par la donation;
Comme enfin les lettres patentes de 1769 n’ont point
dérogé aux lois antérieures, quant à la peine de nullité;
Il s’ensuit, par la plus directe et la plus évidente de
toutes les conséquences, que le défaut d’insinuation dans
les quatre mois du décès , emporte la nullité radicale de
la donation.
Si d’ailleurs les lettres patentes de 1769 ne prononcent
pas cette peine de n ullité, c’est qu’il étoit parfaitement
inutile de la rappeler dans une lo i, q u i, n’ayant pour
objet que d’établir une dispense de temps, laissoit d’ail
leurs subsister toutes les dispositions de l’ordonnance
de 1731 , auxquelles le législateur n’entendoit aucune
ment déroger.
E t s i , en parlant des donations entre-vifs et absolues
de la femme au mari ou du mari à la fem m e , la même
loi veut qu’elles continuent d’être assujéties à l’insinuation,
sous peine de nullité, c’est uniquement pour mieux indi
quer la différence des unes et des autres, en ce que les
unes doivent être insinuées dans les quatre mois de leur
date, sous la peine voulue par l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
tandis que les autres sont dispensées de cette peine
pendant toute la vie du donateur.
C’est donc une grande erreur que celle des premiers
juges, qui ont cru voir une différence réelle entre ces
deux dispositions des lettres patentes de 176 9 , et qui en
ont conclu qu’elles abrogeoient, au moins tacitement, la
peine de nullité pour le défaut d’insinuation des dona-
�c ,i 6 )
tions mutuelles, tandis qu’elles la prononçoient textuel
lement par rapport aux donations présentes et absolues
du mari à la femme ou de la femme au mari. En matière
de formes extrinsèques , on ne eonnoît point d’abrogation
tacite : elle doit être formelle ou elle n’existe pas. O r ,
non - seulement les lettres patentes n’ont point abrogé
tacitement la peine de nullité prononcée contre les dona
tions mutuelles nom insinuées; mais il est de toute évi
dence que le législateur ne pouvoit pas mêtne en avoir
l’intention , sans tomber dans la plus absurde contradiction
avec lu i- m ê m e , puisqu’encore une fois les motifs qui
rendent l’insinuation nécessaire, dans les quatre mois du
décès, sont identiquement les ■mômes que ceux qui l’ont
fait introduire pour les donations présentes et absolues.
*• Quant au dernier, motif du jugem ent,, qui est .encore
fondé sur ce faux principe, que les donations mutuelles
sont de véritables donations à cause de mort , 011 se
croit dispensé d’y répondre, parce que ce seroit tomber
clans des redites aussi fastidieuses qu’inutiles ; seulement
on observera que les premiers juges ont perpétuelle
ment confondu les donations entre-vifs qui n’ont d’effet
qu’après la mort du donateur , avec les donations à
cause de m o r t , lorsqu’ils devoient s’attacher au carac
tère essentiel qui les distingue, savoir, l’irrévocabilité
parfaite des premières , et la faculté conservée par le
donateur jusqu’à son dernier soupir, de ré v o q u e r, anéan
tir , ou modifier les autres. A vec cette distinction, ils
auroient évité l’erreur dans laquelle ils sont tombés, et
11e süroient pas contrevenu« , comme ils l’ont fait, aux
dispositions textuelles de l ’ordonnance de 1731.
�4 à%
( 17 )
L e soussigné ne doute donc pas un seul instant que
l’appel de madame Chapaveyre ne soit couronné du
succès le plus com plet, et que le tribunal devant lequel
se trouve portée sa réclamation ne rende aux vrais prin
cipes l’hommage que le premier leur a refusé.
Délibéré par le soussigné, ancien jurisconsulte, à P a ris,
ce 5 frimaire an 11.
POIRIER.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu la présente
consultation, est également d’avis de la nullité de la
donation mutuelle dont il s’a g i t , par le défaut d’insi
nuation dans les quatre mois du décès de la donatrice.
L ’auteur de la consultation a très-bien développé les
principes de la m atière, et parfaitement accordé la dispo
sition de l’article X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , et celle
des lettres patentes du 3 juillet 1769, en ce qui concerne
les dons mutuels faits entre mari et femme. L ’ordon
nance de 1731 prononce textuellement la nullité de ces
sortes de donations, faute d’insinuation; celles-ci, comme
toutes les autres, devoient être insinuées dans les 4 mois
de leur dale , o u , tout au moins pendant la vie du dona
teur : c’étoit ainsi que l’avoit prescrit l’article L X V I I I de
l'ordonnance de ÏVloulins ; et celle de 1 7 3 1 , dans l’ar
ticle X X V I , s’est référée aux délais de l'insinuation por
tés par les anciennes ordonnances.
Les lettres patentes du 3 juillet 1769 n’ont rien changé
ù la nécessité de l’insinuation des dons mutuels, ni à la
i 'j ,
�( 18 )
nullité qui devoit résulter du défaut d’insinuation ; elles
n’ont opéré d’autre changement que sur le temps où
cette insinuation devoit se faire, et elles ont déterminé
-ce temps, dans les quatre mois du décès du donateur;
mais elles n’ont pas moins laissé subsister la nécessité
, de l’insinuation du don mutuel , et sa nullité lorsque
l ’insinuation n’a pas été faite dans le délai.
L ’auteur de la consultation donne d’ailleui’S des raisons
sensibles de la nécessité de l’insinuation, même dans ce
cas; il est inutile de les répéter.
On ne peut donc qu’applaudir aux principes de la
consultation, et adhérer aux résolutions qui en sont la
conséquence. O n ajoutera seulement, pour démontrer
de plus en plus que les lettres patentes de 1769 ont laissé
subsister la nullité des dons m utuels, faute d’insinuation,
la décision de l’article X X J de l’ordonnance de 1731 3 à
l’égard des dons mobiles, augment, contre-augmënt, etc.
O n avoit douté long-temps si les donations faites par
forme de dons mobiles, augm ent, etc. étoient sujettes à
l'insinuation , lorsqu’une déclai’ation du 20 mars 1708
les y assujétit positivement; ce qui paroissoit aussi les y
soumettre, à peine de nullité. Mais cette rigueur fut tem
pérée , à leur éga rd , par une seconde décluration de 172 9,
qui les affranchit de la peine de n u llité, et n’imposa à
l’inobservation de l’insinuation de ces sortes de donations
que les autres peines portées par les édits et déclarations,
c’est-à-dire , des peines purement bursales.
S’il eût été dans l’intention du législateur d en user de
même à l’égard des dons mutuels, dont le défaut d'in
sinuation, dans le délai prescrit, emportoit, dans les termes
i
�f; "
( 19 )
précis de l’ordonnance de 1731 la peine de nullité; si,
dit - on , le législateur eût voulu retrancher cette peine
dans les lettres patentes de 1769 , il n’auroit pas manqué
de le dire , comme il l’avoit fait pour les dons m obiles,
augm ent, etc. dans la déclaration du 30 mars 1729.
Ce seroit donc aller contre le texte précis de la l o i ,
et c’en seroit une violation, que de valider le don mutuel
dont il s’agit.
Délibéré à R i o m , le 19 pluviôse an 11.
A N D R A U D .
A R I O M , de l ’im prim erie de
L a n d r i o t , seul im prim eur du
T rib u n a l d ’appel. — A n 1 1.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poirier
Andraud
Subject
The topic of the resource
donations entre époux
contrats de mariage
donations
nullité
enregistrement
sécurité des tiers
douaire
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour la dame Chapaveyre, habitante de la ville de Murat, département du Cantal, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Riom, le 9 thermidor an 10 ; Contre le citoyen Antoine Teilhard-Duchambon, propriétaire, habitant de ladite ville de Riom, intimé.
Annotations manuscrites: « voir l'arrêt confirmatif de la Cour 1ére section du 20 ventôse an 11, au recueil manuscrit page 674 » .
Table Godemel : Insinuation : le mari donataire de l’usufruit des biens, par contrat de mariage, a-t-il dû, sous peine de nullité, faire insinuer la donation dans les 4 mois du décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1782-Circa 1803
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0925
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0926
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53086/BCU_Factums_G0925.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Saint-Bonnet-près-Riom (63327)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations
donations entre époux
douaire
droit intermédiaire
enregistrement
nullité
sécurité des tiers
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fe71fafb43bb0b1f9679e14c4641e9dc
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
La dame C H A P A V E Y R E - , appelante;
CONTRE
Le cit. TEILHARD DU CHAMBON , intimé.
Q u o i q u e la contestation qui divise les parties soit
d’un grand intérêt pour l’une et pour l’autre, elle
n’exige pourtant pas un long détail de faits : les questions
qu’elle présente demandent une plus longue discussion.
La question principale est de savoir s i, dans une
donation mutuelle d’usufruit, faite dans un contrat de
m ariage, des biens dont l’époux prédécédé mourra
saisi et vêtu , en faveur du survivant, le,défaut d’insiA 2
�(4 )
nuation , clans les quatre mois de la mort du prédécédé,
emporte la nullité de la donation.
La seconde question ue peut être que subsidiaire, et
seroit inutile à juger, si la première étoit décidée pour
la nullité : c’est de savoir si le donataire de l’usufruit
n’a pas été obligé de faire inventaire, et de donner
caution, e t , ne l’ayant pas fa it, quelle peine il doit
encourir ?
L e jugement dont est appel a débouté de lu demande
en nu llité, ainsi que de celle qui avoit pour objet
l’inventaire et la caution ; et c’est sur l’un et l’autre
chef de ce jugement qu’il s’agit d’établir les griefs de
l’appelante.
M arie-Jeanne Chapaveyre, sœur de l’appelante, con
tracta mariage le 21 octobre 1782 avec le cit. Teilhard
du Chambon, intimé.
Elle se constitua un trousseau de nippes et liardes à
son usage ; de p lu s, des meubles meublans, ustensiles
de maison, et argenterie; le tout évalué ù. 2,000 francs,
dont le contrat de mariage porte quittance.
Ensuite elle se constitua en dot les biens qui lui étaient
échus par le décès de son père, et la somme de 60,000 fr.
faisant partie des biens à elle échus comme héritière
testamentah’e de Jacques-Philippe du Saillant, son oncle,
consistans en différentes obligations, promesses ou effets à
elle dûs, provenans de ladite succession ; lesquels , est-il
dit, seront présumés reçus par la célébration du mariage.
L e citoyen Teilhard du Chambon fut chargé de faire
la recherche de tous ces effets actifs, à la charge néan
moins de faire emploi desdits biens, à fur et A mesure
�4& t
C
qu’il en t'ouclieroit le montant ; lequel emploi pourroit
être valablement fait en acquisitions d’immeubles fictifs
ou réels, ou en acquittement de dettes hypothécaires de
l’un et de l’autre des futurs époux , même en payement
du supplément de finance de la charge dont le futur
époux étoit revêtu, s’il y avoit lieu. p‘
La future épouse se réserva ses autres biens comme
paraphernaux, et spécialement une maison à Clerm ont,
place des Cercles.
Il fut stipulé un gain de survie réciproque de 6,000 f.
et les époux se donnèrent mutucllèment au dernier vivant
la jouissance de tous leurs biens.
Dans le cours du m ariage, la maison de Clermont
fut vendue 38,720 fr. principal ou. épingles. Il en fut
payé 20,000 francs à l’appelante, sœur dp l’épouse, pour
.-le legs à elle fait par le testament de Jacques-Philippe
du Saillant, son oncle. Les'autres 18,720 francs, qui
‘ étoient paraphernaux ù la fdmme ,1 furent ; touchés par
le mari.
.i,
,i,
L a sœur de l’appelante, en la m ariant, J ’avûit instituée
son héritière.; elle l’auroitu&té tigajQmpiat, quarte! -ü'nty
auroit pas eu d e s titu tio n , dès, que sa'sœur' est morte
en 1790 sans postérité.
f
;
. •
rr
i.* A près sa m o rt, le;(çitoyen TeilliArd du Cliam bon,
comme usufruitier, é(;oit certainement, tenu de .fnir.c
.inventaire et de "donner, c a u t i o n ¡ i l r*négligeaul ’un et
• l’autre.
'
.
C’est ce qui -avoit déterminé une première action
.exercée contre lui ppr l’appelante,,liériljère de sa sœur,
cc qu’il fût lenu de rapporter l’ÿivçnüûrç qu’il (qygit
A 3
�( 6 )
tlu faire après la mort de sa fem m e, et à justifier de
l’emploi qu’il avoit fait de ses biens dotaux et paraphernaux ; faute de ce faire, qu’il fût déclaré privé de
l’usufruit, condamné à la restitution des biens et des
jouissances.
Lorsque cette demande fut form ée, l’appelante n’avoit
garde de croire que l’intimé avoit négligé les formalités
nécessaires pour rendra valable la donation d’usufruit ;
elle ne se fût pas bornée à cette demande, si elle eût pu
penser que la donation n’avoit pas été insinuée dans le
délai prescrit par les lois. Mais ayant eu depuis recours
au registre des insinuations, et n’y ayant pas trouvé la
donation dont il s’a g it, c’est alors qu’elle s’est crue fondée
à exercer une nouvelle action, et à demander la nullité
de la donation.
C’est sur ces deux demandes portées au tribunal d’ar
rondissement de cette v ille , et après qu’elles ont été
jointes , qu’est intervenu le jugement dont est appel, qui
a débouté l’appelante également de l’une et de l’autre.
On parlera, dans la suite, des motifs que le premier
tribunal a énoncés dans son jugem ent, et q u i, de la
manière dont ils sont exprimés , auroient dû peut-être
produire une décision absolument contraire. Mais on va
commencer par présenter les moyens qui établissent la
demande en nullité : il y aura peu de chose à dire sur
la première derfiande en privation d’usufruit, qui n’est
devenue que subsidiaire. On se croira d ’autant plus dis
pensé d’une longue discussion sur cette demande en pri
vation d’usufruit, qu’on a plus de confiance dans l<i
demande en nullité«
�(7 )
Il s’agit d’abord d’établir la nature de la donation mu
tuelle d’usufruit, faite au profit du survivant par le contrat
de mariage de 1782. Est-ce une donation entre-vifs, ou
à cause de mort ?
- Quel est le principal caractère d’une donation entre
vifs ? c’est d’être irrévocable. A u contraire, la donation
à cause de mort est toujours révocable par le donateur.
Un autre caractère de la donation faite en contrat de
mariage , est de saisir le contractant en faveur de qui
elle est faite ; au lieu que la donation à cause de mort ne
saisit p as, mais qu’elle est sujette à la demande en déli
vrance.
S’il y a eu quelque controverse , entre les auteurs, sur
la nature des donations mutuelles , ce n’a pu être que pour
celles qui étoient faites entre mari et femme pendant le
m ariage, dans celles des coutumes qui autorisent les dona
tions mutuelles, et non pour les donations mutuelles qui
étoient faites par le contrat de mariage même. Mais encore
pour celles-ci, s’il y avoit eu quelque doute, il auroit dispai'u au moment de l’ordonnance des donations de 1731 ;
car, comme l’observe le jurisconsulte Bcrgier, dans la nou
velle édition qu’il nous a donnée des œuvres de Ricard,
dans sa note à la fin de la page 12 du deuxième tom e,
il n est plus possible de soutenir Vopinion de R ic a r d ,
depuis les nouvelles ordonnances, qui ont mis les dona-i
tions mutuelles au rang des véritables donations entreVvfs , et les ont assujéties aux mêmes règles que les
donations simples. Mais voyons ce que porte, à cet égard,
l’ordonnance de 1731.
‘ L ’article X IX dispense de l’insinuation les. donations en
A 4
�to®
( J JI'
C« )
contrat de mariage, lorsqu’elles sont faites en ligné directe.
M ais, tout de suite , l’article X X veut que toutes les
autres donations faites en contrat de mariage , même les
remunératoires ou mutuelles, quand elles seroient entiè
rement égales,' soient insinuées conformément aux an
ciennes ordonnances, à peine de nullité.
Plaçons-nous à l’époque la plus prochaine après l’or
donnance de 1731 ; il n’est pas douteux que la donation
dont il s’agit eut été absolument nulle par le défaut d’in
sinuation.
:
E t même alors il auroit fallu que l’insinuation eût été
faite dans les quatre mois de la donation, pour avoir son
effet du jour meme de sa date, ou bien qu’elle eût été insi
nuée avant la mort de la donatrice, auquel cas elle n’auroit
eu effet que du jour de la date de l’insinuation : mais
toujours le défaut d’insinuation en eût opéré la nullité.
C’est en effet ce qui étoit prescrit par l’ordonnance
de Moulins , à laquelle se réfère l’oi*donnance de 173!»
en disant que les donations dont elle parle seront in
sinuées conformément aux anciennes ordonnances, à
peine de nullité.
, Il faut avou er, cependant, qu’à l’égard de la femme
qui avoit survécu au m a ri, les héritiers du mari ne
pouvoiént pas lui opposer le défaut d’insinuation, parce
que cette insinuation étoit à la charge du m ari, et qu’il
en étoit garant envers sa femme..Il en-,étoit autrement
h l’égard du m ari, quand c’étoit lui q u i avoit survécu,
parce qu’il avoit tout, pouvoir et toute liberté de faire
insinuer la donation mutuelle ; et, ne l’ayant pas fait dans
les délais prescrits par les ordonnances ; c’e s t-à -d ire , dans
�4
m
(9 )
les quatre mois de la donation , ou pendant la vie de
sa fem m e, la peine de nullité étoit encourue contre luimême, en faveur des héritiers de sa femme.
Mais la disposition de l’ordonnance de 1731 a souffert
quelque changement par l’apport aux donations mutuelles
faites en contrat de mariage; non pas cependant, ni,
sur la nécessité de l’insinuation en elle-m êm e, ni sur la
nullité par le défaut d’observation de cette formalité;
mais seulement sur le temps et le délai de l’insinuation
de ces sortes de donations.
Cechangement s’opéra par les lettres patentes du 3 juillet
176 9 , qui intervinrent pour faire cesser la diversité de
jurisprudence qui s’étoit introduite , non-seulement dans
différentes cours de parlem ent, mais même entre les
diverses chambres du parlement de P aris, où l’on jugeoit
tantôt que les donations mutuelles faites en contrat de
mariage devoient être insinuées , non-seulement dans le
bureau du domicile des époux, mais encore dans celui
de la situation des biens; tantôt qu’il suffisoit de l’insi
nuation dans le bureau du domicile : où l’on jugeoit aussi,
tantôt que l’insinuation étoit nécessaire, à peine de nul
lité ; et tantôt qu’elle étoit inutile pour la validité d’une
donation mutuelle en contrat de m ariage, parce q u e , dans
cette espèce de donation, il n’y avoit ni tradition, ni
transmission de propriété au préjudice des créanciers du
donateur, ni des héritiers, qui devoient connoître l’état
de la succession , avant de se porter héritiers. C’est pour
■faire cesser cette diversité de jurisprudence, dans ces deux
cas, que le législateur veut qu’à l’avenir l’insinuation
tie soit nécessaire qu’au domicile du donateur , et n’en
A 5
*
�prescrit néanmoins la nécessité que clans les quatre mois
du décès du donateur, dérogeant à tous édits et déclara
tions à ce conti'aires. La dérogation ne porte donc évidem
ment que sur les deux cas prévus par les lettres patentes ,
c’est-à-dire , sur le lieu où doit être faite l’insinuation ,
et sur le délai dans lequel elle doit être faite; mais ne
frappe nullement sur la nécessité de l’insinuation en
elle-même, ni sur la nullité faute d’une insinuation
quelconque.
Il est vrai qu’à la suite de ces dispositions il est ajouté ,
qu’à l’égard des autres donations absolues du mari à la
fem m e, et de la femme au m ari, il n’est point dérogé
à l’ordonnance de 1 7 3 1 , et qu’elles continueront d’être
assujéties à la formalité de l’insinuation , suivant la dis
position des ordonnances, à peine de nullité ; mais cette
dernière disposition des letti’es patentes n’a pour objet
que d ’ i n d iq u e r la différence des donations mutuelles et
de celles qui sont absolues, par i*apport au temps où les
unes et les autres doivent être insinuées : et si les dona
tions absolues doivent continuer d’être assujéties à l’insi
nuation , à peine de n u llité, les donations mutuelles ne
sont pas affranchies de cette peine; il auroit fallu pour
cela qu’elles en eussent été nommément dispensées par
la pi’emière disposition des lettres patentes qui s’appli
quent uniquement à cette espèce de donation, surtout
dès que l’ordonnance de 1731 , et toutes les anciennes
ordonnances imposoient la peine de nullité , au défaut
d’insinuation , aux donations mutuelles en contrat de
nu ri age.
Mais dira-t-on, p e u t- ê tr e , cu i bono la nécessité de
�4 ^
( 11 )
l’insinuation, puisque la donation de l’usufruit des biens
qui se trouveront à la mort du prédécédé , ne l’empêche
pas, jusqu’à sa mort, d’aliéner et d’hypothéquer?M ais au
moins l'empêchc-t-elle de disposer à titre gratuit.
E t , d’abord , peut-on faire cette objection, lorsque la
loi prononce formellement une peine de nullité? peut-on
sonder le motif de la loi? ne suffit-il pas qu’elle soit écrite :
Jex scripta ? que nous disent sur cela tous nos anciens
auteurs , et après eux les habiles jurisconsultes auxquels
le gouvernement a confié la rédaction du nouveau projet
de code civil ? C’est dans l’article V du titre de l’appli
cation des lois et de leur interprétation , qu’ils s’expliquent
ainsi : Quand une loi est cla ire, il ne fa u t point en
éluder la lettre, sous prétexte d'en pénétrer Vesprit. ^
M ais, d’ailleurs, le cui bono de l’insinuation s’aper
çoit aisément, soit à l’égard des tiers, soit même à l’égard
des héiùtiers du donateur.
D ’abord pour les tiers, qui ne peuvent connoître la
donation que par l’insinuation , s’ils contractent avec
l’héritier du donateur, dans la confiance d’une hypothè
que sur les biens compris dans une donation qu’ils igno
rent ; si même ils achètent quelques-uns de ces biens, de
l’héritier du donateur, qui ensuite leur seront évincés
par le donataire, qui n’aura pas fait insinuer; alors ils
auront été trompés dans la juste confiance que devoit leur
inspirer l’ignorance d’une donation qui n’avoit pas été
rendue publique par l’insinuation.
En second lie u , à l’égard même de l’héritier du do
nateur, il aura également ignoré la donation ; il aura été
vérifier le registre des insinuations; il ne l’y aura pas
�trouvée, et il se croira fondé à vendre ; il l’aura fait
de bonne foi , et néanmoins, son acquéreur étant évincé
malgré le défaut dinsinuation, il se trouvera exposé à des
dommages-intérêts envers son acquéreur.
V oilà donc bien évidemment le cu i bono de l’insi
nuation , et de la nullité dont elle a frappé le défaut de
l ’insinuation; mais, on le répété, le cuibono est une ques
tion indiscrète ; lorsque le législateur a parlé et que la loi
est claire, il n’est pas permis d’en pénétrer les motifs ,
il faut s’en tenir à la lettre.
Veut-on, sur la question, une autorité qui nous soit fami
lière? c’es t celle du dernier commentateur de notre coutume,
sur l’art .X L I du titre X I V , tom. 2, p. 439, où, après avoir
dit que les donations absolues, faites par le mari à la
fem m e, doivent être insinuées dans les délais ordinaires,
mais que le mari est garant envers sa femme du défaut
d’insinuation, il ajoute, qu’il en est autrement de celles
mentionnées dans les lettres patentes de 1769 , c’est-àdire , des dons mutuels en contrat de m ariage, parce
qu’alox*s la femme qui survit, aya nt quatre mois après la mort
du mari, pour faire insinuer le don mutuel, la succession
de son mari n’est pas garante, puisque le temps de l’in
sinuation n’a commencé à courir qu’à son décès: si donc,
ajoute-t-il encore, la veuve n’a pas fait insinuer, en
laissant accomplir le délai dans un temps lib re , et où
elle n’étoit plus dans les liens du mariage ; c’est elle qui
a été vraiment négligente.
Il d o it, d’ailleurs, paroître bien évident que le com
mentateur a pensé que la donation, en ce cas, étoitnulle
par le défaut d’insinuation ; car il ne pouvoit pas en-
�4*/
0' 13 J)
tendre parler de la garantie du mari pour les peines
bursales, parce que les droits bursaux sont à la charge
de la f e m m e donataire, et que si le mari les eût payés
avant sa m o rt, ses héritiers les auroient répétés contre
la femme.
S’il en est ain si, dans le cas où la femme a survécü
au m ari, à plus forte raison doit-il en être de même à
l’égard du m ari, lorsque la femme est morte avant lui.
Pour démontrer de plus en plus que les lettres patentes
de 1769 ont laissé subsister la nullité des donations mu
tuelles en contrat de mariage , faute d’insinuation, on
peut rappeler l’art. X X I de l’ordonnance de 1731 ; cet
article répète et confirme la disposition d’une déclara
tion de 1729 : et en voici l’explication.
On avoit douté long-temps si les donations faites en
forme de dons mobiles , augmens, contre-augmens, etc.
étoient sujettes à l’insinuation , lorsqu’une déclaration
du 20 mars 1708 les y assujétit positivement ; ce qui
paroissoit aussi les y soumettre, à peine de nullité. Mais
une autre déclaration de 1729 les affranchit de la peine
de n u llité, et n’imposa ù l’inobservation de l’insinuation
de ces sortes de donations que les autres peines portées
par les édits et déclarations, c’est-à -d ire , les peines
purement bursales.
S’il eût été dans l’intention du législateur d’en user
de même i\ l’égard des dons mutuels faits en contrat de
mariage, dont le défaut d’insinuation emportoit la peine
de nullité dans les termes de l’art. X X I de l’ordonnance
de 1731 ; si j dit-on, le législateur eût voulu retrancher
cette peine dans les lettres patentes de 17 6 9 , il n’auroit
�4t(?
Cm ) t
pas manqué de le dire , comme il l’avoit fait pour les
dons m obiles, augmens, etc. dans la déclaration du 30
mars 1729, et comme il l’avoit répété dans l’art. X X I
de l’ordonnance de 1731.
E n fin , s’il pouvoit encore rester le moindre doute
sur la question , il seroit bien entièrement levé par
nos nouvelles lois, qui ne laissent pas la plus légère obscu
rité sur la nullité des donations dont il s’agit, faute
d’insinuation.
Une loi du 24 germinal an 3 , ayant sans doute égard
aux obstacles qu’avoient pu apporter à l’insinuation des
donations les temps de la terreur, permit à toutes les
parties intéressées dans des actes d’une date certaine, con
tenant des dispositions à titre gratuit, telles que dona
tions entre-vifs, dons mutuels sujets à la formalité de
l ’insinuation, et ayans-cause desdites parties qui auroient
omis de remplir cette form alité, à dater du 1er. avril
1 7 9 3 , leur pei’met de satisfaii’e k cette formalité dans
les trois mois de la publication de cette l o i , sans être
tenus de payer de plus forts droits, et sans q iio n puisse
leur opposer le défaut di insinuation, pour la validité
desdits actes et dispositions.
Cette loi a donc décidé deux choses : la p rem ière, que
la prorogation de délai q u i est accordé p o u r l ’insinua
t io n , n’aura lieu que p o u r les actes q u ’on auroit négligé
de faire in sinuer, à dater du i cr. avril 1 7 9 3 ; P nr con
séq u en t, elle n’embrasse pas les d o n atio n s qu i auroient
dû etre insinuées avant le i er. a vril 1 7 9 3 ; et la dona
tion dont il s’agit
auroit d û être insinuée avant le i cr.
avril 1793 j puisque la m ort de la donatrice remonte
à
1790.
�4»
( i 5 _)
La loi a décidé, en second lieu, en permettant de faire
insinuer dans les trois mois de la publication, que lus
actes qui ne l’auroient pas été auparavant, non-seule
ment ne seroient pas sujets à de plus forts droits, niais
même qu’on ne pourroit pas leur opposer le défaut d’in
sinuation pour leur validité.
La loi pouvoit-elle dire plus clairement, que les dons
mutuels dont elle parle, qui devoient être insinués avant
le I er. avril 1793, ainsi que ceux qui ne devoient l’être
qu’après cette époque, et qui 11e le seroient pas dans le
délai qu’elle venoit de leur accorder, seroient sujets nonseulement aux plus forts droits, mais qu’encore le défaut
d’insinuation pourroit leur être opposé pour leur validité?
A près les principes qu’on vient d’établir, après les
preuves qu’on vient d’en donner , on ose dire que ce
seroit s’aveugler volontairement et résister à l’évidence,
que de combattre la nullité de la donation qui n’a pas
été insinuée dans les délais prescrits. Ce ne sont pas
seulement les forts droits bursaux qui peuvent être exigés
pour l’inobservation de cette formalité, ou peut encore
opposer le défaut d’insinuation pour la validité desdits
actes et dispositions, comme le. dit la loi du 4 germi
nal an 3.
On trouvera encore d’autres moyens et d’autres raisonnemens autant ou plus décisifs en laveur de l’appe
lante, que ceux qui ont été employés par ce mémoire,
dans la consultation donnée sur la question sur cette
affaire, par un jurisconsulte de Paris, d’une imputation
connue : on ne croit pas devoir les répéter , parce que
la consultation est imprimée , et qu’elle sera distribuée
avec le mémoire-
�(
l 6
)
On croit également devoir se référer à la consultation,
sur la réfutation des motifs du jugement dont est appel,
sur le premier chef de sa disposition. Cette réfutation
est par e lle -m ê m e si pleine et si énergique, qu’on craindroit
de l ’affoiblir en y changeant ou y ajoutant. Ce ne seroit
qu’une répétition inutile.
Mais on n’a pas soumis à l’auteur de la considtation
le second chef du jugem ent, sans doute parce qu’on l’a
cru assez inutile , par la confiance que l’on avoit de la
nullité de la donation. Néanmoins , et par surabondance,
011 ne veut pas négliger la réfutation des motifs de ce
second ch ef, par lequel l’appelante a été déboutée de
sa première demande , relative au défaut d’inventaire et
de bail de caution; ne fût-ce que pour faire voir le peu
d’attention qu’on a mis dans toutes les dispositions du
* jugement.
C’est à mesure de l’exposition de' ces m otifs, qu’on
rappellera les faits et les principes par lesquels ils se ré
futent.
P rem ier motif. — Attendu que le citoyen Teilhard
du Chambon a justifié légalement d’un emploi en acqui
sition d’immeubles, en valeur de sommes excédantes celles
portées en son contrat de mariage; que les immeubles
consistent en une maison dans cette ville, en un domaine,
"moulin et bâtimens situés dans le canton le plus pro
d u c t if , plus q u e: sufïisans pour le r e c o u v r e m e n t de la
dot et 'autres biens parnphernaux de sa femme.
'Réponse. ■
— Les lois exigent impéricuseriicnt un bail
de caution de la1part de l’usufruitier. On peut voir sur
cela le titre du digeite de usufruçtu et quemadmodhm ;
.
..
t
�('*7 )
et l’art. C C L X X X V clé la coutume'de Paris veut que
le donataire mutuel ne gagne les fruits que du jour qu’il
a présenté caution. Les lois ni les auteurs ne distinguent
point si l’usufruitier a par lui-même de quoi répondre.
La caution est une double sûreté pour le propriétaire.
Second rnotif. — A ttendu, en outre, qu’il a été.arti
culé et mis en fait que le .citoyen Teilhard avoit payé,
du chef de sa femme, des dettes considérables, et que
ces payemens étoient connus de sa partie; ce qui n’a
pas été contesté.
Réponse. — L ’appelante n’étoit point présente à l’au
dience où les faits ont été proposés par l’intimé ; elle
ignore absolument s’il a payé des dettes de sa femme :
son défenseur ne pouvoit les avouer ni les désavouer en
l’absence de sa cliente, qui étoit à vingt lieues de là. Mais,
ces payemens, s’ils existent, devroient être justifiés par
des titres, et ces titres auroient dû être rappelés dans
l’inventaire auquel l’intimé étoit obligé.
Troisième motif. — Attendu que l’inventaire n’a pour
objet que de constater l’existence, la nature ou la valeur
des objets sujets à l’usufruit, et que, dans l’espèce, tous
les biens dotaux et paraphernaux connus ont été déter
minés et évalués à une somme fixe par le contrat de
mariage ; que rien n’établit q u e , par événement posté
rie u r, il soit échu ou advenu à la femme d’autres biens
que ceux qu’elle avoit lors de son mariage ; et q u ’ainsi
l’inventaire des choses sujettes à l’usufruit d e v e n ô it saiis
objet et sans nécessité.
Réponse. — L ’usufruitier n’est pas seulement obligé à
donner caution, il est encore tenu de faire inventaire,
�( I8 )
surtout quand les choses sujettes à l’usufruit consistent en
mobilier. C’est ce que nous enseigne Domat dans le titre
des obligations de l’usufruitier, d’après la disposition de
la loi première , íf. usufructuarais quo modo caveat.
Mais il n’est pas v ra i, d’ailleurs , que le contrat de
mariage établit l’existence, la nature et la valeur de toutes
les choses sujettes à l’usufruit.
O n voit en effet, dans le contrat de mariage, d’abord,
que l’épouse se constitue son trousseau, liardes et nippes à
son usage ; e t , de plu s, des meubles meublans, ustensiles
de maison , et de l’argenterie.
A la v é r ité , le mari devoit avoir le gain coutumier
du trousseau ; mais il ne gagnoit pas les meubles meu
blans , les ustensiles de m aison, et l’argenterie : il falloit
donc faire inventaire de ces objets.
D ’un auti’e côté , par le contrat de mariage, la femme
s’étoit constitué une dot de 60,000 liv. à prendre sur les
effets , obligations et promesses qu’elle avoit recueillis
dans la succession de son oncle : mais elle s’étoit réservé,
comme bien paraphernal, tout ce qu’il y auroit, dans ces
effets , au delà de la somme de 60,000 liv. ; et tous les
effets généralement avoient été remis au pouvoir du m ari,
qui en avoit donné décharge. La réserve en bien parapher
nal, de ce qu’il y auroit dans les effets au delà de la d ot,
montre la nécessité qu’il y avoit de faire un inventaire.
Enfin , il y avoit encore de réservé, comme bien para
phernal , la maison de C lerm on t, q u i lut vendue après
le mariage, moyennant 38,720 liv. dont le mari avoit dû
Loucher 18,720 livres : l’objet étoit assez conséquent pour
le comprendre dans un inventaire.
�( 19 )
A in s i, dès qu'il y avoit, d’un côté , obligation légale
de faire inventaire, et de l’autre, dans le fa it, nécessité
de le faire, pour constater ce qui devoit être rendu par
l’usufruitier,à la cessation de l’usufruit; ce qui composoit,
outre la dot les. paraphernaux de la femme, tels que les
meubles meublans , ustensiles de m aison, argenterie,
excédant des effets de la succession de Saillant au delà de
la dot; et enfin , ce que le mari avoit reçu du prix de
la vente de la maison de Clermont ; comment a-t-on pu
donner, pour m otif du jugem ent, que l’inventaire étoit
sans objet et sans nécessité ?
A insi paroissent s’écarter invinciblement les motifs du
jugem ent, pour dispenser l’intimé du bail de caution et
de la confection d’inventaire ; deux obligations que lui
imposoient les lois, et qu’on doit regarder -comme des
conditions de l’usufruit qui lui avoit été donné ; condi
tions dont, le défaut d’accomplissement d o it,l’en. faire
priver.
.M ais il y a lieu de croire que le tribunal d’appel n’aura
point à prononcer sur le second chef du jugem ent, qui
ne frappe que sur une demande subsidiaire , laquelle
deviendra sans objet si le premier chef est infirmé , e t
si la donation d’usufruit est déclarée nulle par. le défaut
d’inventaire.
' A N D R A U D , avocat,
D E M A Y , avoué.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul im prim eur,du
T r ib u n a l d ’appel. — A n 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Demay
Subject
The topic of the resource
donations entre époux
donations mutuelles d'usufruit
contrats de mariage
nullité
insinuation
sécurité des tiers
douaire
usufruit
enregistrement
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour la dame Chapaveyre, appelante ; Contre le citoyen Teilhard du Chambon, intimé.
Table Godemel : Insinuation : le mari donataire de l’usufruit des biens, par contrat de mariage, a-t-il dû, sous peine de nullité, faire insinuer la donation dans les 4 mois du décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1782-Circa 1803
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0926
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0925
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53087/BCU_Factums_G0926.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Saint-Bonnet-près-Riom (63327)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations entre époux
donations mutuelles d'usufruit
douaire
enregistrement
insinuation
nullité
sécurité des tiers
usufruit
-
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3ebc8a0833dccb1cd70b944daccd7a18
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Text
MÉMOIRE
POUR
L e sieur B O U T A R E L , inspecteur des contri
butions directes, habitant à Pontgibaud, de
mandeur en opposition;
CONTRE
L 'A d m in is t r a t io n
et
des
de
D o m ain es
l
E
' n registrem en t
défenderesse.
QUESTIONS.
L a Régie a -t-e lle la fa c u lté de réclamer les droits
d'enregistrement d’un acte sous seing privé , ou de celui
q u i le soumet à l'enregistrement pour s’en servir après
avoir même commencé à en fa ir e usage , ou de celui
qu’elle s’imagine devoir les supporter ?
L e triple droit est-il dû pour l'enregistrement d’ une
contre-lettre du 22 brumaire an 7 , dont la date est
certaine ?
L es droits d’enregistrement d’ un acte sous seing privé
au pouvoir d’un inspecteur de l’enregistrement, comme
héritier de son père, présenté par lui à l’enregistrement,
1
�_ ( o
après avoir commencé à en faire usage, sous prétexte
de réclamer, douze ans après la mort de son p è re , une
somme que le sieur Boutarel s’étoit obligé de payer dans
l ’année de la date de cet a cte , q u i , à la connoissance
de cet inspecteur , le fut a v a n t, donnent lieu à cette
instance.
L e receveur du bureau où cet acte a été présenté,
a cru pou voir dispenser cet inspecteur d’acquitter ces
d ro its, en dressant un procès verbal et décernant une
contrainte contre le sieur Boutarel , q u i , voyant dans
la loi et dans la jurisprudence de la Cour de cassation
que l’administration de l’enregistrement ne pouvoit exige.r
ce payement de l u i , s’y est refusé; et celle-ci insistant,
le sieur Boutarel se trouve dans la pénible nécessité,
p o u r combattre cette prétention, de faire connoître les
hom m es, les faits et les motifs de cette cause.
F A I T S .
L e sieur A ntoine C h ir o l, paren t, ami et voisin du
sieur Boutarel, lui ven d it, le 22 brumaire an 7 , deux
héritages moyennant 9,600 francs. O n ne mentionna que
4,000 francs dans l’acte notarié; mais dans une contrelettre faite double le môme jo u r , rentier prix fut relaté;
le sieur Boutarel s’y reconnut débiteur du sieur Chirol
d’une somme de 2,800 francs, et celui-ci s’obligea ï\ dé
poser cette contre-lettre ès-mains de notaire? à la pre
m ière réquisition du sieur ’B outarel (1).
-■
■
’
11
—-
,
(1) Uu des fils du sieur Chirol, receveur de l'enregistrement,.
�(3)
L e sieur An toin e Chirol est décédé en 1800, aprèsavoir reçu et quittancé les 2,800 francs.
L e sieur Pierre C h iro l, dit Labessade, un de ses fils,
inspecteur de l’enregistrement et des domaines au dé
partement des Plautes-Alpes, qu’il avoit chargé de sa
procuration pour l’administration de ses biens pendant
les deux dernières années de sa v ie , le f u t , après son
décès, par ses cohéritiers, de la liquidation de sa suc
cession (1). Cette circonstance lui donna encore une occa
sion particulière et forcée de voir les preuves de la libé
ration du sieur B o u ta rel, avec lequel il eut beaucoup de
comptes et d’affaires ù régler.
D ep uis, une source servant à l’irrigation de l’ un des
héritages vendus en l’an 7 , un chemin qui en longeoit
un autre, quelques autres points de contact, excitèrent
l’humeur processive de l’inspecteur Chirol , qui suscita
Successivement plusieurs procès au sieur Boutarel, et dont
l’issue acheva de l’aigrir. L e 9 septembre 18 1 0 , il lui
écrivit de G uéret, où il étoit alors vérificateur, une lettre
remplie de fiel, d’injures et d’impostures, par laquelle
il réclamoit le payement des 2,800 francs mentionnés dans
la contre-lettre du 22 brumaire an 7 , et qu’il terminoit
avoit un déficit de 5, 5oo francs dans sa caisse; en bon père, il
voulut venir à son secours, et il désiroit que ses autres enfans
n’en fussent pas jaloux. Telle fut la cause de la contre-lettre que
le sieur Boutarel ne souscrivit que par complaisance. M. ChirolLnbessade , qui le sait parfaitement , voudroit qu’il en fût la
victime.
(0 Le sieur Chirol l’a déclaré au procès verbal de non-conci
liation , du p.5 mai.
2
�'
W -.
(4?
ainsi : S i dans la quinzaine je ne recevois pas la son • mission positive de l'effectuer , pour vous poursuivre,
je remettrai au receveur de Penregistrement de Guérct,
la contre-lettre qui en f a i t C objet , afin de jïétre pas
tenu d’avancer Penregistrement, qui', y compris le triple
droit et le décim e, doit s'élever à 726 f r . , et d'en fa ir e
'poursuivre le payement directement contre vous.
L e sieur Boutarel qui avoit appris à connoître le sieur
Ch i ro i, espérant qu’ une réponse claire, positive et cer
ta in e, ou l ’arreteroit dans ses projets, ou le forceroit à
ne pas mépriser toutes convenances pour se procurer la
pitoyable satisfaction de lui nuire, lui répondit, le 19 du
merne m ois, par la poste et par le ministère d’un huis
sier (1), qu’ il avoit, à sa connoissance, payé l’entier prix
... - .... .
_^T
■
(1) L a n 1810, et le 19 septembre............ me suis transporté
au domicile du sieur Chirol-Labessade, vérificateur de l’enre
gistrement , habitant de la ville de Cham bon, département de
la C reuse, en parlant à sa servante-domestique ; auquel ainsi
parlant j’ai représenté que ce n’avoit pas été sans surprise, sous
tous les rapports, que le sieur instant avoit reçu une lettre écrite
et signée dudit com pris, sous la date du 9 du présent, dans la
q u elle, entr’autres choses, il dit que ledit instant est débiteur
de la succession du père de lui compris d’une somme de 2,800 liv.
en principal, sur le prix d’une vente que lui a faite son défunt
p è r e , devant Im b ert, notaire, le 22 brumaire an 7 , dûment
enregistrée , d’un pré appelé la Brousse , situé à la Brousse,
mairie de Bromont. Comme ledit instant s’est entièrement libéré,
aux termes convenus, de toutes les sommes par lui promises;
qu’il est porteur de toutes les quittances des payemens par lui
faits, qui établissent son entière libération, laquelle d’ailleurs
est connue particulièrement dudit comprisj qu’ainsi c ’est plus
«
�(
5
3
)
t f
de son acquisition; qu’au reste il oOfroit de communiquer
à lui ou à son conseil ses quittances, etc.
Une telle manière de répondre, qui auroit dû, sur une
personne qui se seroit cru des droits, provoquer de suite
les plus vives, les plus pressantes poursuites, ne produisit
qu’un profond silence et la plus compiette inaction, jus
qu’au 20 mai 1812.
A cette époque, le sieur Chirol venoit de succomber
dans un procès qu’ il avoit encore intenté au sieur Boutarel; ne sachant contre qui exhaler son hum eur, il avoit
formé une action en désaveu contre son huissier. Cette
affaire étoit vivement poursuivie; elle prenoit un caraqu’à tort que ledit compris dit que ledit instant est débiteur de
ladite somme de 2,800 liv. Comme ledit instant n’ignore pas le
m otif secret de la le ttre dudit co m p r is , et qu’il importe à son
h o n n e u r et à ses in térê ts d e ré po ndre au m o t i f a p p a r e n t , j ’ai
audit compris déclaré que ledit instant est porteur de toutes les
quittances du prix par lui promis par ladite vente ; qu’il offre
de les lui communiquer ou à son conseil ; que dans le cas où
il soutiendroit qu’il pourroit devoir quelque chose à cet égard ,
directement ou indirectem ent, sous quelque rapport possible 'f
ledit instant offre de s’en rapporter au compte qui sera fait par
le conseil même du sieur com pris, au cas qu’il en fasse choix
parmi des jurisconsultes attachés aux tribunaux de Clermont ou
de Riom ; lui déclarant que ledit instant verroit même avec
plaisir que ledit compris fit choix de M. V is s a c, son avocat à
R iom , et de MM. Mayet et G ou rb eyre, ses avoués aux tribu
naux de première instance et d’appel, promettant de payer surje champ ce qu’il seroit ainsi déclaré devoir. Et afin q u ’il n’en
ignore, e tc ., etc.
3
&
�( 6 )
ière de gravité inquiétant. Il se rend à R io m , sollicite un
arrangement : le sieur Boutarel souscrit à tout ce qu’il
désire, et l'affaire s’éteint.
r L e lendemain 20 mai 1 8 1 2 , en s’en retournant à
G u é r e t, il s’arrête à P o n tgib au d , et fait signifier au
sieur Boutarel une citation écrite de sa m ain , pour se
concilier sur la demande en payement de ladite somme
de 2,800 francs, en disant que quoique dans Vacte de
vente du 22 brumaire an 7 , le p rix n'ait été porté qu’à
la somme de 4,000 f r - , la vérité est qu'il souscrivit
le même jo u r une contre-lettre au sieur jln to in e C hirol,
explicative que ce p rix étoit réellement de g, 5oo fran cs ;
que cette contre-lettre , qui valoit pour un supplément de
■prix de 5, 5oo fran cs , portait quittance de la somme
de ,2,700 fr a n c s ; de sorte q u il restoit débiteur de
s , 800 fr a n c s , etc.
t
> Cette citation fut sans difficulté (1) enregistrée le même
joui* nu bureau de Pontgibaud , par le sieur Claude
B o u jro n , receveur, également proche parent des sieurs
Boutarel et C h ir o l , et le fondé ordinaire de procuration
de ce dernier.
XiC ¿ 5 . mai 1 8 1 2 , jour fixé pour la comparution au
(1) Un surnuméraire 'de huit jo u rs, .au mot de contre-lettpe
dont l’enregistrement n’étoit pas mentionné, auroit, aux termes
de l’article 41 de la loi du 22 frimaire an 7 , dressé procès verbal
.contre l’huissier, et décerné irae contrainte contre lui pour
l ’am ende, et contre le sieur Chirol pour l’enregistrement. Mais
cette citation étoit à la requête de l’inspecteur Chirol.
�<3/ y
C 7)
bureau de p aix, le sieiir Chirol s’y rendit avec une suite
nombreuse : le sieur Boutarel y fît comparoître un fondé
de p ou vo irs, qui s’expliqua de manière à ne pas donner
de prise contre lui au génie fiscal qui avoit imaginé cette
audience.
L e sieur C h iro l, déconcerté par la réponse du sieur
Boutarel, en sortant de l’audience retourna chez son ami
le receveur B o u y o n , qui dressa un procès verbal ( i) de
f
(x) L ’an 18 12 , et le 2.5 m a i......... . . Nous soussigné Claudq
Bouyon, receveur de l’enregistrement au bureau de Pontgibaud,
ayant serment en Justice, certifions qu’il a été présenté ce jour
à notre bureau, par le sieur Pierre C h irol, un acte sous signa
ture privée, du 22 brumaire an 7 , passé entre le sieur Antoine
C h iro l, propriétaire, habitant de la commune de Clerpiont, et
le sieur Benoit B outarel, géom ètre, habitant de Pontgibaud ,
contenant déclaration q u e q u o iq u ’il soit stip u lé dans la vente
consentie le même jour devant Im bert, notaire à Pontgibaud,
par le sieur Antoine Chirol, en faveur dudit Boutarel, que le
prix est de 4,000 francs, la vérité est qu’il est de 9,600 fr.
Q u’ayant reconnu par la vérification faite aux registres de
re cette , que ladite vente du 22 brumaire an 7 , enregistrée le
12 frimaire suivant, avoit pour objet un pdcher et un pré situés
aux appartenances de la Brousse, commune de Bromont; que
la perception des droits avoit eu lieu sur la somme de 4,000 fr.
seulem ent, prix énoncé audit a c t e , et que par conséquent la
contre-lettre dont il s'agit présentait uneaugmentation de 5 , 5oofr. ;
avons demandé (avant de lui donner la formalité) au porteur de
ladite contre-lettre, la somme de 660 fr. en principal, et celle
de 66 fr. pour le montant du décime pour franc , le tout à titre
d amende prononcée par l’article 40 do la loi du 22 frimaire an
7 , pour triple d ro it, à raison de 4 fr. pour 100 f r . , suivant la
4
�. (8
la remise que lui lit le sieur Cliirol de cette contre-lettre.
L e lendemain 2 6 , le sieur. Bouyon fit passer un avis
au sieur Boutarel, pour qu’il eût à se présenter dans la
huitaine à son b u re au , afin d’y acquitter la somme de
7 2 6 francs, montant des droits d’enregistrement de cette
contre-lettre. L e 20 juillet suivant, il décerna contre
lui une contrainte, q u ’il lui fit notifier le 6 a o û t, et
à laquelle le sieur Boutarel a formé opposition le 26 du
même mois.
L a Régie a défendu à cette opposition par un mémoire
où elle soutient q u e , d’après les articles 29 et 31 de la
lo i du 22 frimaire an 7 , et un arrêt de la Cour de cas
sation , du 30 juin 1806, le sieur Boutarel doit payer,
fixation portée par l’art. 69, paragraphe 7 , n°. i er. de la loi de
frim aire, et conformément à l’art. i er. de celle du 27 ventôse
an 9 ; et que s’étant refusé au payement de ladite som m e, nous
lui avons déclaré que nous réservions ladite contre-lettre, à l’effet
d’ user de la faculté accordée par l’art. 56 de ladite loi de frimaire.
A quoi il a obtem péré, avec protestation qu’il n’en requéroit
point l’enregistrement, et n’entendoit nullement acquitter aucun
des droits ou amendes par nous exigés ; sauf à nous pourvoir
comme nous aviserions contre le sieur Boutarel, acquéreur et
débiteur d irect, indiqué par l’art. 3 i de la loi du 22 frimaire
an 7.
Pour quoi nous rapportons le présent procès verbal, à l’effet
d’agir contre ledit Benoit Boutarel, pour le payement de ladite
s o m m e de 660 fr. en principal, et de celle de 66 fr. pour le
décime pour franc, à titre d’amende, conformément à l’art. /to
de la loi du 22 frimaire an 7 , ainsi qu’il est expliqué des autres
parts. Fait à Pontgibaud, en notre bureau, lesdits jour et an".
Signé Bouyon.
�9)
et que le triple droit est d û , d’après l’article i er. de la
loi du 27 ventôse an 9.
MOYENS.
f
'*
L e sieur Boutarel dira sans détour que si le déposi
taire de la contre-lettre n’avoit pas été un inspecteur de
l ’enregistrement, et de connivence avec le receveur de
Pontgibaud, ce procès n’existeroit poin t, parce que ce
receveur qui connoît particulièrement sa partie n’auroit
pas eu la complaisance d’enregistrer la citation du 20 mai
sans remplir ses d ev o irs, de dresser le procès verbal
du 25 , et de réclamer du sieur Boutarel des droits que
la loi lui imposoit l’obligation personnelle et ne lui donnoit le droit d’exiger que du sieur Chirol.
L e titre 5 de la loi du 22 frimaire an 7 détermine par
qui les droits d’enregistrement doivent être acquittés et
supportés.
L ’article 29 indique ceux qui doivent les acquitter ,
et l’article 31 ceux qui doivent les supporter.
C ’est en confondant ces deux dispositions que la R égie
soutient son receveur, au lieu de le forcer en recette. .
Les art. 28 et 29 tracent les devoirs des receveurs, et les
obligations de ceux qui soumettent un acte à l’enregistre
ment. La Régie ne peut invoquer l’art. 31 ; il est étranger
à la perception des droits ; il n’a rapport qu’à l’intérêt
privé des parties ; il f ix e , dans leur intérêt se u l, leurs
droits et leurs obligations. La R égie n’a que la facu lté
de p e rcev o ir, et non de
réclamer
de qui bon lui semble un payement.
�C 10 )
D ’après l’article 2 9 , les receveurs doivent exiger les
droits de toutes espèces d’actes de ceux q u i les présentent
à l’enregistrement, sans considérer s’ils doivent les sup
porter; et ceux-ci ne peuvent se dispenser de les ac
quitter , d’après l’article 28, pour quelque m o tif que ce
soit. Ainsi les notaires, les greffiers, les huissiers, les
secrétaires, etc., doivent acquitter tous les droits aux
quels leurs actes sont s o u m i s ; c’est d’e u x , et ce n’est que
d’e u x , que les receveurs peuvent les exiger; et cependant
il est bien incontestable, d’après la nature de leurs fonc
tions, et l’article 3 1 , qu’ils ne doivent pas les supporter;
mais ils doivent les acquitter , par cela seul qu’ ils les
déposent au bureau de l’enregistrement. Et il en est de
même pour les actes sous seing p r iv é , de la part de ceux
qui en font le dépôt.
L e s droits seront acquittés , dit ce même article, par
les partiesy pour les actes sous signature privée quelles
auront à f o ir e enregistrer. Ainsi celle qui présente uu
acte à l’enregistrement doit en acquitter les droits, et le
receveur ne peut les exiger que d’elle seule.
D'après l’ordre clairement et expressément établi par
la l o i , les droits d’enregistrement des actes sous signature
privée doivent être acquittés par ceux qui les présentent
à l’enregistrement, et ils doivent être supportés par ceux
qui seront reconnus en définitif débiteurs, qui devront
les rembourser à ceux qui les auront acquittés. Les re
ceveurs ne doivent et ne peuvent exiger les droits d’en
registrement que de ceux que la loi leur indique, de
ceux qui leur-présentent un acte; autrement ils s'érigeroient en juge, et règleroient arbitrairement les qualités,
�( 11 )
les droits et les obligations des parties; et la perception i
au lieu d’être faite rapidement e t, pour ainsi d ir e , m é
caniquement, donneroit lieu à des examens, à des lon
gueurs interminables, et à des discussions et des procès
continuels.
Tels sont les principes en matière de perception des
droits d’enregistrement, que la Régie ne pourra pas con
tester , et qui d’ailleurs sont littéralement extraits d’un
arrêt de la Cour de cassation, du i 5 nivôse an n ( D e nevers, tome i«r. , page 5 j ô ) } rendu'dans une espèce
absolument semblable.
. L e sieur Boutarel ne répondra pas à la citation que
l ’Administration a faite d’un arrêt du 30 juin ï8o<5, parcc
qu’il n’a aucune analogie avec l’espèce, et qu’il n’y a que
les noms à changer de celui du i 5 nivôse an ï i .
Maintenant rapprochons les faits, pour que l ’appli
cation soit évidente.
. .
L e 20 mai 1 8 1 2 , le sieur Chirol-Labessade fait citer
en conciliation le sieur B o u ta re l, sous prétexte d’en
obtenir le payement d’une :somme de .2,800 f r . , portée
en une contre-lettre du 22 brumaire an 7 (1) : l’o rig in a l,
écrit de sa m a in , .a été enregistré le même jour ou bu
reau de P on tgib au d , par un receveur parent des deux
parties. L e 2 5 , il présente cette 'contre-lettre au m êm e
bureau, au même receveur, qui dresse un :prooès verbal
soigné, ten dénaturant le sens des articles 2 8 ,'2 9 ., 3 1 ,
40 <ct 56 de la loi du 22' frimaire an 7. Quand la loi a
(1)
Le sieur Cliirol s’est bien gardé de donner suite h sa
citation.
�( 12 )
p a rlé, il ne pouvoit dépendre de ce receveur de forcer
en payement le sieur Boutarel plutôt que le sieur Chirol.
Celui-ci, en qualité d’héritier de son père, avoit form é, x
par sa citation, la demande au payement de cette contrelettre. Cet acte étoit connu de ce receveur ; le sieur
C h i r o l , en le présentant à Penregisti'ement, ne faisoit
que continuer de s’en servir. I l avoit à le fa ir e enre
gistrer; il en devoit par conséquent acquitter les droits;
il ne pouvoit s’en dispenser par quelque m o tif que ce
f û t ( art. 28 de la loi du 22 frimaire ); et le receveur
devoit les exiger de l u i , et ne pouvoit décerner de con
trainte que contre lu i, et non contre le sieur Boutarel.
Pourquoi le sieur Chirol a-t-il présenté cette contrelettre à l’enregistrement? Est-ce comme employé dans
cette partie? mais il n’ose prendre sa qualité d’inspecteur
dans le procès verbal; et elle étoit un dépôt sacré dans
ses mains......... Est-ce par zèle pour le fisc ? mais n'est-il
pas personnellement en défaut? E h ! quel beau r ô l e ! ....
Est-ce pour effectuer ses menaces, et avoir le doux plaisir
de faire sans fruit contribuer le sieur Boutarel? L ’A d
ministration seconderoit-elle son animosité? serviroit-elle
d’instrument à ses petites p a ssio n s?.... Est-ce pour ré
cla m e r le payement de 2,800 francs ? sa lettre du 9 sep
tembre 18 10 , sa citation du 20 mai 1 81 2, le procès
verbal de non-conciliation, du 25 mai , le prouvent. La
loi a parlé; il doit acquitter les droits d’enregistrement.
Comme la première règle de l’Administration, et qu’elle
prescrit avec soin à ses em ployés, est de n’agir qu’avec
la délicatesse qui caractérise l’homme d’honneur, et qu’il
leur est interdit d’user de moyens insidieux ou réprouvés
�C 13 )
par les lois et la probité pour découvrir des droits ; dans
le cas même où le sieur Boutarel d e v r o i t à la rigueur
acquitter les droits d’enregistrement de cette contreleltre , dès que l’existence n’en est parvenue à la connoissance de l’Administration que par la violation d’un
dépôt de la part d’ un de ses employés, la connivence et
l ’oubli de tous devoirs de société et de famille de- la part
d’un autre, ou par l’effet de leur esprit d’en vie, de haine
et de vengeance, elle ne peut et ne doit pas profiter de
voies aussi impures pour les exiger (1).
L e receveur Bouyon , après avoir eu la complaisance,
pour l’inspecteur C h ir o l, de décerner une contrainte
contre le sieur B o u ta re l, pour en exiger le payement
de droits que devoit acquitter cet inspecteur, s’e st-il
imaginé complaire au fis c , en réclamant un triple droit,
au lieu d’un droit s im p le , seul d û ?
1
D ’après les dispositions des articles 62 et 73 de la loi
du 22 frimaire an 7 , les actes sous signature privée dont
la date est certaine, ne doivent que les droits ù titre d'en
registrement ou d’amende, existant à cette,époque, et
les juges ont la faculté de fixer cette date (2). O r , dès
qu’il est reconnu que l’acte notarié est du 22 brumaire
an 7 , on ne peut disconvenir que la contre-lettre ne soit
nécessairement du même jour. D évelopper la foule de
motifs qui le démontrent, ce seroit vouloir prouver l’évi-
(1) La Cour de cassation a consacré ces principes dans un
arrêt du i Pt. juillet 1 81 j , rapporté dans le Journal de D enevers,
de 1 8 1 1 , page 346
.
(2) Article 62. Par décès de l’une des parties, ou autrement^
�(1 4 )
dence. Ainsi les droits auxquels cette contre-lettre peut
être assujétie, doivent être réglés par la loi du 9 ven
démiaire an 6 , dont l’article 32 porte qu 'il n’y a lieu
d’exiger qu’un droit simple à titre d’am ende, sur les
contre-lettres dont la connoissance sera acquise. L ’A d
ministration prétend le contraire, en invoquant l’art. I er.
de la loi du 27 ventôse an 9. Erreur étrange et évidente
de sa part.
Les dispositions de cet article ne concernent que la
fixation et la perception des droits d’enregistrement, et
n ’ont aucun rapport avec ceux à exiger à titre d’amende;
entr’autres les art. 32 de la loi du 9 vendémiaire an 6 ,
40 et 62 de celle du 22 frimaire an 7 , et 7 et 16 de
celle du 27 ventôse an 9 , distinguent l'enregistrem ent
de l’amende. L ’article I er. de la loi du 27 ventôse an 9,
ne s’occupant que des droits d’enregistrement, n’a point
changé la quotité des peines ou amendes. L ’application
d’une peine ne pouvant avoir lieu qu’en vertu d’une loi
positive, l’Administration ne peut invoquer une loi muette
à cet égard , et dont le silence dit le contraire; ainsi elle
ne pou rroit exiger qu’un droit sim ple, à titre d’amende.
Signé B O U T A R E L .
Me. R O U H E R , avoué.
A R IO M , de l’imp. de T H IB AU D , Imprim. de la Cour royale, et libraire.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boutarel. 1812?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Rouher
Subject
The topic of the resource
enregistrement
contre-lettre
successions
fraudes
fisc
faute professionnelle
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Boutarel, inspecteur des contributions directes, habitant à Pontgibaud, demandeur en opposition ; contre l'Administration de l'Enregistrement et des Domaines, défenderesse. Questions. La Régie a-t-elle la faculté de réclamer les droits d'enregistrement d'un acte sous seing privé, ou de celui qui le soumet à l'enregistrement pour s'en servir après avoir même commencé à en faire usage, ou de celui qu'elle s'imagine devoir les supporter ? Le triple droit est-il dû pour l'enregistrement d'une contre-lettre du 22 brumaire an 7, dont la date est certaine ?
Table Godemel : Enregistrement v. mutation (droit de) : 1. la régie a-t-elle la faculté de réclamer les droits d’enregistrement d’un acte sous seing privé, ou de celui qui le soumet à l’enregistrement, pour s’en servir, après avoir même commencé à en faire usage, ou de celui qu’elle suppose devoir les supporter ? le triple droit est-il dû pour l’enregistrement d’une contre-lettre du 22 brumaire an 7, dont la date est certaine ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1812
An 7-1812
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2116
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontgibaud (63285)
Chambon-sur-Voueize (23045)
Bromont-Lamothe
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Contre-lettre
enregistrement
faute professionnelle
fisc
fraudes
Successions
-
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faefff63efe95fe13554161f1f73e19c
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Text
M
E
M
O
I
R
E
POUR
D am e M a r ie - C a r o l in e L A C O S T E , ve u ve de M . J e a n -J a c q u e s.
R I X A I N , Doct eur en m éd ecine , T u tric e de ses E n fans
m ineurs , Appelante ;
CONTRE
M .A
n t o in e
BERARD
de
C H A Z E L L E S - L A B U S S I È R E , Iniimé;
E N C OR E CONTRE
M M . J a c q u e s - A m a b l e S O U B R A N Y DE B E N IS T A N T , et 'Pierre
F A R A D E S C H E S d e s R O N Z I È R E S , appelés en garantie;
E T CONTRE
M adam e de C H A M P E T I È R E , veuve de M . de P E N A U T I E R
épouse, en secondes noces , de M . de R A M O N D , Tuteurs
des mineurs de P E N A U T I E R , Intervenants.
- L A principale question que presente à juger cette c a u s e , est
d e savoir quel e s t , de d eu x a cquéreurs d u m ê m e o b je t , celui
q u i d o it avoir la p ré fé ren ce ; de M . R ixain , qui a acquis le
p re m ier, loyalem en t et su r la foi p u b liq u e , et qui a pris possession
d e l ’objet a c q u is,
O u de M. Berard , qui., postérieurem ent à la p re m ière vente qui
lui était parfaitem ent c o n n u e , s’est fait consentir u n e seconde
vente par un fondé d e p o u v o ir , qui ignorait la p r e m i è r e , et q u i
a outrepassé ses pouvoirs.
,< t% \
�*
9t
( O
L e T rib u n a l de p re m ière instance d e R io m a rejeté la p rem ière ;
X' n II a ord on n é l’exécution de la seconde.
;-,
M m0 v e u v e l\ixain a interjeté appel de ce Jugem en t dans
. ; l’intérét de ses mineurs.
'I
L e succès d e c e l appel ne p e u t pas c ire douteux.
FAITSt
M mc R o l l e t , épo u se de M . de C h a z e r a t , est décéd ée au m o is
d ’octob re r 8o 5 .
E lle a laissé de grands biens , et un grand n o m b re d ’h éritiers
ou de légataircs*universels.
C es héritiers form aient différentes b r a n d ie s , d ont tous les
m e m b re s avaient un intérêt c o m m u n .
T e lle était la b r a n d ie S o u b ra n y de B én is t a n t , com posée des
maisons
de
B cn ista n l ,
de
G ro u io n t,
Lausanne
et A rc lio n -
D e s p c r o u s e s , habitons de la ville de R i o m , et des m aisons
P cnautier de V o i s i n , cl M a lla rc t, qui habitaient le ci-devant
Languedoc.
L e T esta m en t de M rac d e Chazerat a d o n n é lie u ?» beau co up d e
discussions sur sa validité c l sur son exécution.
M M . de B é n is t a n t 'c l de G ro m o n t ont agi constam m ent dans
toutes ces d is c u ss io n s , lanl p o u r eux q u e p o u r leurs co h éritiers,
et spécialem ent p o u r ce u x du L a n g u e d o c , dont ils possédaient la
confiance au plus haut d e g r é , et dont ils avaient les pouvoirs.
Les discussions te rm in ée s, il a été p ro c é d é par. des experts au
partage de tous les biens de la succession.
Il a été form é autant d e lots q u ’il y avait de branches d ’héritiers
appelés au p a rta g e; ces lots ont été tirés au s o rt, et la terre de
SainUAgouIin esl échue au lot de M M . de Soubrany, d e ‘G ro m o n t,
c l de tous les coh érilers dont leur branche était com posée.
C e lle terre, n e convenait ;i aucun d ’entre e u x , et bien m o in s
encore à ce u x qui habitaient le L an gued oc.
-
�' (
3
)
Il fut donc arrêté par Ions les intéresses q u ’elle resterait dans
l ’indivision ; q u ’elle serait v en d u e en co m n u m ; et M M . de
B énislanl et de G r o m o n t, qui réunissaient la confiance de ions
les intéressés , lurent choisis p o u r recevoir- les enchères et
p ro céd er aux ventes.
O n voit dans leurs défenses q u ’ il leur fut en vo yé, par leurs
‘cohéritiers du m i d i , en janvier, février et mars 1816, de nouvelles
procurations qui contenaient les p ouvoirs les plus étendus, 7nnne
de vendre: ce sont les expressions de leurs .défenses.
K l on voit dans ces m êm es défenses qu e rien depuis n ’a altéré
cette confiance , et q u ’au contraire M M . de B én isla n l el de
G ro m o n t, qui ont entretenu avec eux une correspond an ce active,
n ’ont cessé d ’en recevo ir de n o uveaux lémoignages.
O n leur dit dans une des lettres n om breuses q u i com posent
c e lle c o rresp o n d an ce: « J ’ai e n v o y é .d a n s le tem ps 1111e p ro cu » ra tio n , el je vous p rie de croire que je tiendrai p o u r bon
» tout ce que vous ferez. »
O11 leur d il dans une autre : « Nos intérêts, sont co m m u n s ;
j> en faisant p o u r “v o u s , vous faites p o u r nous. »
E l dans toutes 011 retrouve le m ê m e style el le m ê m e abandon.
M M . de B én islan l cl de G ro m o n t, pleins de confiance dans la
pureté de leur conscience el dans leur bonne f o i , n ’ont pas
cru q u ’il lut nécessaire de représenter ces procurations el ces
lettres en cause principale ; mais ils doivent réparer ce lle omission
en cause d 'a p p e l, el m eltre toutes ces pièces sous les yeux de
la Cour* la justice l’c'xigç ; l’ho n n eur le u r en fait un d evoir ;
l'intérêt des m ineurs l\ixain le com m ande.
Q u o iq u ’il en s o it, au m o y e n de ce lle convention unanime des
cohéritiers , de laisser la terre de Sain l-A yo u lin dans I indivision
el de la m ettre e n v e n t e , il a été «apposé des affiches dans le
d épartem ent du P u y - d e - D ô m e cl dans celui d ’A llie r;
L e s annonces en o n t été insérées dans les feuilles périodiques
de C le r m o n l, I\iom et M o u lin s , du m ois de mars i S i G , el dans
V
�( 4 )'
io u lc s , M M . de B énislant et de G ro m o n t ont été désignés c o m m e
devant d o n n er les ren seign em en s nécessaires , et donner, p o u r les
p a iem en s, toutes les facilités que l'o n pourrait désirer; ce qui
supposait é v id e m m e n t que c ’était en eux seuls qu e résidait la pleine
puissance de traiter et de v e n d re tant p o u r eux que p o u r tous
leu rs cohéritiers.
Prè s d ’un an entier s’est écoulé sans qu e celte vente se soit
effectuée.
D ans ce lo n g in te r v a lle , p lu sieu rs personnes se sonl présentées
p o u r l ’a cq u isitio n du dom aine d e N e u fo n t, qui faisait partie de
cette terre d e S a in t-A g o u lin , et entre autres, M. B erard e tM . Rixaiu.'
M . B era rd n ’en n'offrait pas le p rix q u ’en dem andaient les
vendeurs ;
M . R i x a i n porl a plus l oin
les
e n c hè re s ;
il offrit
d ’aj oul or à
l ’acquisition d u d o ma i n e d e N e u f o n t , ccll c des boi s qui d é p e n
daient de celte te rre ; cè qui convenait beau co up aux vend eurs.
Ses offres furent acceptées cl la ve n te lui fut consentie sous se in g privé, le 16 fé v rie r 1818, à raison de 60,000 f. de prix prin cip al, et de
i,4 4 ° fr- p o u r épingles, le tout payable dans les term es convenus.
C e lle ven te lui fut consentie par M M . de So u bran y et d e
G ro m o n t, in d iq u é s dans les affiches, stip u lan s, « tant en le u r no m
» p ro p re et p r i v é , qu e se faisant c l se portant forts p o u r to u s
leu rs co h é ritie rs, dans la succession de feue dam e G ilb e rlc
» R o lle t , épouse de M . de Chazerat, a uxquels ils p rom ettent d e
» faire agréer et ratifier ces présentes à la p re m ière réq u isitio n
« de l ’a c q u é re u r» .
■.
Jj’indicalion de M M . d e B é n isla n t cl de G ro m o n t , dans les
affiches, co m m e ven d eu rs ; l e u r l oyaut é co n n u e , la considération
dont ils jouissent, leur grande fortune et le u r garantie personnelle,
n e perm ettaient pas à M. llix a in de p re n d re, sans incon venan ce,
d ’autres rtn s e ig u e m e n s sur les p o u vo irs q u ’ils avaient de traiter'
p o u r la famille P en a u lier et p o u r leurs cohéritiers qui habitaient
le L en gu e d o c ; toutefois, il apprit, sans s’en e n q u é r ir , qu e la p lu s '
parfaite intelligence régnait entre tous les c o h é r itie r s , cl qu e
/
�O jk t> '
( s )
M M . île B én islant et de G ro m o n t avaient la m ission la plus
étendue de lous ces cohéritiers p o u r gérer et ad m in istrer la terre
de SainL-Agoulin, la ven d re en tout o u en partie , et faire p o u r
eux tout ce q u ’ils feraient p o u r eux-m êm es.
C e lle r e n ie fut.à peine s ig n é e , qu e M. B era rd en fui instruit;
il sc transporta aussitôt chez M. Hc'brard , n o ta ir e , qui ayait
dans ses mains le sous-seing ; M . Ile b ra rd le lui m o ntre et lui en
donne lecture.
.11 prie alors M. Ilé b ra rd d ’être son m éd iateur auprès de
INI. R i x a i n , p o u r l ’engager à lui céder son m a r c h é , c l .l e charge
m êm e de lui offrir ju s q u ’à 6,000 fr. de bénéfice.
Non content de celte p re m ière d é m a r c h e , il se re n d de suite
à C lc r r n o n t, où était M . R ixain ; il fait a g i r , soit auprès de
M. R a y m o n d , curé de la C a th éd ra le , son o n c le , soit auprès de
ses autres parens et de scs a m is, les p ersonnes de la ville les
plus influentes, dans l ’esperance q u ’elles ob t i e nd ront de M. Rixain
le sacrifice q u ’il exige.
«
M. R ix a in , qui n ’avait pas acheté par sp éc u la tio n , niais par
c o n v e n a n c e , -croit d evoir conserver son acquisition.
M. B c r a r d , après avoir fait ces différentes dém arches sans
succès ,, p re n d un autre parli.
Il savait que M.",e de C h a in p é liè re , épouse de M . de Iiam ond ,
avait des biens personnels dans les environs de C o u rp iè rcs ; que
son h o m m e de c o n fia n c e , p o u r l'adm inistration de ces b i e n s ,
était le sieur P in a lc lle , qui avait e u , d i l - o n , des relations du m êm e
g e n re avec sa famille. 11 va le t r o u v e r ; il sc présente c o m m e
étant dans l’intention d ’a cquérir la m oitié du dom aine de N eufont,
faisant partie de la terre de. S a in t - A g o u lin , dans laquelle les
enfans de M .rac de C h a m p é tiè r e , de son p re m ie r mariage avec
M . <lt* B en ag u et de P en a u lier, avaient un intérêt q uelcon que.
Il*a soin de laisser ign orer au sieur P inalclle qu e ce dom aine
était déjà ve n d u en entier à M. R ixain par M M . de Bénistant
et de G r o m o n t , cl il se fait c o n se n tir, devant n o ta ire , le 22f é v r ie r , six jours après la v c n le consentie à M . Rixain , une vente
de la m oitié de ce
dom aine , en v e rtu d ’ une procurai ion de
-
�( 6 )
M .mc de Cli.nmpcl.icrc et de M . R am o n d , son mari , tuteurs
des m ineurs P e n a u lic r, en dalc du 5 du m ê m e m ois de fé vrier,
par laquelle M. c l M .1"0 de R a m o n d donnent p o u v o ir au .sieur
P in a leü e : « de p o u r e u x , c l en leurs nom s cl q u a lités, se réunir
» a u x copropriétaires des mineurs de Iîénngucl de •Penaulicr, rela- '
» tiv e m c n l aux biens com posant la succession d e M . mc de Cl taxerai ;
» lesdils biens consisl.mil, entre an 1res c h o se s , dans la lerre de
» S a in t- A g o u lin , à Irois lieues de R i o m , d é p a rlem eu l du P uy~
» d e - D ô m e ; ven d re à telles p e r s o n n e s , et aux p rix , clauses
» c l conditions les plus avantageux, les portions revenant auxdits
•» m ineurs de R énaguet de P e n a u lic r , dans la terre de Saint« A g o u lin et scs d é p en d a n ce s, etc. ».
L e p rix de ce lle v c n lc est fixé à 2:1,000” fr. et 5oo fr. d ’é p in g les,
p rix pro p o i’lionnellcnieiil inf érieur à ‘ celui que M . Ilixain avait
acheté la totalité du domaine.
O n verra bientôt ce q u ’il faut p en ser de cette p ro c u ra tio n ,
de la iialure des p o u vo irs q u ’elle co ntient, et de l ’abus q u ’ en
a fait le sieur Pinalelle.
C e lle seconde v c n lc consentie à M . R crard 11e larda pas à être
connue de M . R i x a i n , qui fil alors enregistrer sa v c n lc sous
seing-privé:
Cet en registrem ent fut fait le 4 mars ;
L ’acte fut transcrit au bureau des h y p o th èq u es de R io m le 5 ;
. . M. liixa in prit possession p u b liq u e de sou a cq u is itio n , et la
fil notifier aii ferm ier, par aclc notarié du 20 du m ê m e m o is;
E t , de su ite , il fil «les réparations urgentes aux balim cn s du
d o m a in e , des p la n lalio n s’et des améliorations de tout gen re dans
les fonds qui en étaient susceptibles.
L es choses étaient en cet étal lo r s q u e , le p re m ie r avril 18 1 4 ,
M . lierai(l fit notifier au fe rm ie r sa vente passée à C o u rp iè rc s
lè 22 février, avec défenses d e payer à d ’anlres q u ’à lui la moitié
du prix du bail du dom aine de Ncufont.
JLe i'G mai suivant , il fil citer M . R ixa in d evan l le Juge
�(lc poix d ’À i g u c p c r s e , p o u r v o ir (lire: « Q u ’ il serait gardé et
» maintenu dans la possession de son d o m a in e , o u , du m o in s ,
» de la m oitié dudit dom aine de N c u f o n t , avec défenses de l’y
» troubler à l’a v e n i r , et d e s’im m iscer dans la possession d u d it
» d o m a in e , à peine de tous d épen s, d o m m a g es-in lérèls ».
M . Rixain a pris cette action de M . B era rd p o u r trouble à sa
possession.
M. Berard a alors changé la dem ande q u ’il se proposait de
fo rm er en maintenue dans sa p o s s e s s io n , en dem ande en partage
du domaine de N e u fo n d , p o u r lui en être délaissé la m oitié.
La conciliation n ’ayant-pas eu li e u , M . B era rd a fait a ssig n e r,
par exploit du 3o mai, M . Hixain au T rib u n a l de p re m iè re instance
de R i o i n , p o u r v o ir ord on n er le partage de ce domaine.
M. R ixain a fait assigner en garantie, sur cette a c tio n , M M . de
Bénistant c l d e G r o m o n t , scs v e n d e u rs;
.M . B erard a aussi fait citer en garantie M. cl M .m‘ de Jlairiond,
q u i sont intervenus et ont pris son fait eL cause.
T outes les actions p rin c ip a le s , récursoires et in terv en tio n s,
ont été jointes.
La cause portée à l'aud ience des 8 et i o juin d e r n ie r , il
est interven u Jugem ent qui « ord on ne qu e la vente consentie
» au profit du sieur de C h azelles, par le sieur P i n a le l le , m an» (lataire des sieur c l dame de R a m o n d , devant G o n d r e , notaire
» à C o u rp iè res , le 22 février 18x8, sera exécutée selon sa forme
» et teneur.
». E n c o n s é q u e n c e , sans s’arrêter ni avoir égard à la v e n le
» faite par les sieurs de Bénistant et Faradesclies des R o n z iè re s,
» au profit du sieur R i x a i n , par acte sous se in g -p riv é , enregistrée
» le 4 m ars su iv a n t, laquelle est déclarée nulle et de m il effet,
■'» en ce q u ’elle co m p ren d la totalité; du dom aine de N eufond ,
» et ne d o i t ’ p ro d u ire effet que p o u r la m oitié dudit d o m a in e ;
» O rd o n n e qu e dans la q u in z a in e , à c o m p ter de la signification
» du Jugem en t à personne ou d o m ic ile , la dame v e u v e R ixa in ,
�1 »
, ( 8)
» aux qualités q u ’elle p ro cè d e , sera Icnuc de ven ir à division
» et partage, avec le sieu r de Cliazeiles , du dom aine de N e u fo n t,
»
»
»
«
»
»
»
»
»
«
»
»
auquel partage la daine ve u ve R ixaiu fera rapport des jouissauces par elle p erçu es ou son défunt inari; depuis et com pris
la reco lle de l’année r 8 i 8 , d epuis l’entrée en jouissance dudit
sieur R i x a i u , ainsi que des dégradations qui p o u rro n t y avoir
été c o m m is e s , avec intérêt du tout depuis qu e de d r o it , cl
sa u f la com pensation du m ontant des réparations et am éliorations qui y auront été fa ite s, p o u r m o ilié du tout être
attribué audit sieur de Cliazeiles.
» C o n d a m n e les sieurs Rénistant e l F aradesclies des R o n zières
à garantir la dam e v e u ve R ixaiu de toutes les condam nations
contre elle p ro n o n cées ci-dessus i au profit du sieur de C lia zeile s,
ainsi q u ’aux d o m m a g e s , intérêts résultant de l’éviction du
dom aine de N eu fo n t ».
L e Jugem en t n o m m e ensuite des experts p o u r p ro c é d e r , au
partage et à l'estim ation des jo u issan ces, d égrad atio ns, am élio
rations et d o m in agcs-intérèls adjugés.
C o n d am n e les sieurs de Rénistant c l Farradesclies des R onzières
aux dépens envers toutes les parties.
A u s u r p l u s , le T rib u n a l 'd o n n e acte au sieur de Cliazeiles de
ce q u ’il consent que les experts fassent tom ber au lot de la dame
Rixaiu la totalité ou partie des bâliinens du d om aine de N e u fo n t,
s’ ils l’estim ent nécessaire p o u r l ’exploitation de la partie du
d o m a in e , qui sera attribuée à la dam e R ixa iu ;
E l d onne acte à la dam e R ixa iu de sa ré se rv e d e fa ir e .p r o
n o n ce r la résiliation de la v e n te du 16 février 1 8 1 8 , p o u r cause
d ’e v i d i o n d u n e portion du d o m a in e , c l de se p o u r v o i r , ' à cet
e f f e t , ainsi q u ’elle avisera.
T e l est le J u ge m e n t d o n t est appel.
E a dame R ixaiu le d én o n ce à la C o u r co m m e contraire à Ions
les p rin c ip e s , dans la partie qui annulle la ven te consentie à
ÎVI. R ixaiu le 16 fé v rie r, el lui préfère celle consentie* à M. lin raid
le 22 du m ê m e mois.
�° lk /
(9)
'MOYENS.
D ’après les considérans du J u g e m e n t, le p re m ie r m oyen qui
a déterm iné le T rib u n a l de p re m ière instance à annuller la vente
d u 16 fé v rie r, et à accord er la préférence à celle du 22, résulte
de ce que , « suivant l'article i328 du C o d e c i v i l , l ’acte sous
» s e i n g - p r i v é , contenant ven te de la totalité du dom aine de
« N e u fo n t, au profit du sieur R ix a in , par les sieurs de Bénistanl
>> et F a ra d e s c h e s , n e peut avoir de date c e r t a i n e , à l’égard du
» sieur de Chazclles et des sieur et dam e R a m o n d qu e du jo ur
» de son enregistrem ent, le 4 mars 18 18 , c ’e s t - à - d i r e , douze
» jours après la ven te n o t a r ié e , au profit d u sieur de Chazclles
» du 22 février p ré céd e n t ».
O r , ce considérant est fondé sur u n e e rre u r palpable en fait
et en droit.
L ’erreur csl pal pabl e en p o i n t d e fait.
O n ne p e u t pas préten d re en eiTet qu e la vente consentie à
M . Rixain n ’eût pas de date certaine, resp ectivem en t à M. Berard,
lo rsq u ’il est constant q u ’il en a pris connaissance chez M. Ilébrard ,
n o taire, et q u ’il lui en a été d onné lecture ;
L o r s q u e , d ’après cette l e c t u r e , il a fait agir auprès d e M. R ixain,
à R i o m , M . H ébrard ; et à C l e r m o n t , toutes les personnes q u ’il
a cru avoir quoiqu'influence sur lu i p o u r l ’engager à lui céder
son m a rc h é , m ê m e en lu i faisant p ro p o ser un bénéfice de 6,000 fr.
F aits qui sont de n o to rié té , q u ’011 croit ne pas avoir été déniés
dans la cause par M. B e r a r d , et d o n t , au surp lus, M rac R ixain offre
la preuve.
L o r s q u ’un acte q u e lco n q u e est connu d ’un tie rs , cette c o n
naissance p ro d u it à l’égard de ce tiers le m em e eiïel que s’il
était a u th e n liq u e ; il a p o u r lui claie c e rta in e , et lorsque ce liers
s’est fait consentir une seconde v e n t e , celle q u ’il a co n n u e csl
nécessairem ent la prem ière à son ég ard , et l’art. i 328 d u Code
c iv il cesse de lui être applicable.
L ’erreu r du considérant est encore palpable en point de droit,
,
�(
10
)
en cc q u e , d ’après les princip es u n iversellem en t reconnus dans
celte m a liè re , c ’ est le p re m ie r des d e u x acquéreurs qui est cn;
possession d e l’objet v e n d u q ui doit c ire p r é fé r é , quel qu e soit
la dale de sa vente.
Quotiens du obus in solidum prœdium ju re disïrahkur : manifesti
ju ris est cum , cui priori traditum est, in detinendo domino esse
potiorem. Loi quotiens, au C o d e , l i v . 3 , litre 3 2 , de rci vindicatione.
C e texte de la L o i est si f o r m e l , tous les auteurs tellem ent
unanim es et la J u risp ru d en c e si invariable sur ce p o i n t s , q u ’on
croirait abuser des m o m e n s de la C o u r , qu e d e m u ltip lie r les
cilalions p o u r l’établir.
O r i c i , M. R ixain a pris possession solennelle du dom aine
de N eu fo n t c l des bois co m p ris dans sa v e n te , par aclc n o la r ié ,
d u 3 i mars 18 18 , avant qu e M . B era rd eut fail aucune démarche'
p o u r inc lire sa seco nd e v e n te à exécution ; il s’est m aintenu
dans c e lle possession tant q u ’il a v é c u , et elle s’eçl p e r p é t u é e ,
ju sq u ’à cc jour, dans la p e rso n n e d e sa v e u v e et de ses enfans.
11 n ’en faudrait pas davantage p o u r assurer aux m in eurs R ixain
la p référen ce de la v e n le faile à le u r p è r e , su r celle consentie
à M . B erard .
Mais cc n ’est pas se u lem en t sous cc p o in t de v u e q u e . cette
p ré fé re n c e le u r est assurée.
Q u a n d la L o i m e t en question la p ré fé ren c e e n lre d eu x
a c q u é re u rs, elle les sup po se tous d eu x d e b o n n e foi.
C ’est ce qui résulte de c e lle expression ju r e qui se trouve.
dans la L o i quotiens qu e nous ven o n s de citer.
J u r e , disent les glossalcurs sur cette L o i , id est non dolo.
J u r e , id est bond fu ie , vel sine dolo,
O r , on n e p e u t pas d ire q u e le second a c q u é r e u r , qui connaît
la p re m ière v e n t e , achète de bo n n e loi cl sans fraude , bon âfide,
vel sine dolo.
A u ssi , lous les
auteurs et la J u ris p ru d e n c e s’a cco rd enl-ils
dans cc cas , à rep o u sser l ’action en p ré fé ren c e de ce seco nd
a c q u é re u r sur le premier..
�C 11 )
M e y n à r d , Président du P arlem en t de T o u l o u s e , dans scs
notables et singulières questions , Yiv. 2 , chap. /f i , après avoir
décidé que la préférence entre d eu x acquéreurs du m ê m e objet,
est d uc h celui qui le p re m ie r en a été en possession , ajoute
ce qui suit :
« N ous ne voudrions toutefois ou blier ici ce que B a l d k et
» J a s o n auraient ailleurs an n o té, savoir : Q u ’en celle question
» de p ré fé re n c e , entre d eu x a cheteurs, appartenant au second
» par ladite co n slitu tio n , curn jà m res tradila f u i s s e l, il est besoin,
» et la faul ainsi tellement tem pérer, que si le se c o n d , quand il
» achetait les biens qui lui étaient vend us, savait; et avait éLédùm ent
» averti, iceux m êm es biens avoir été auparavant et p re m ière m e n t
« vend us au susdit autre p re m ier a ch e teu r; q u e c’ est alors et.
» p our la témérité et mauvaise f o i d ’icelui second , d ’avoir
» entendu nonobstant c e , à tel a c h a t, (pie le p re m ie r viendrait
» à p r é fé r e r , et être re çu à v e n d i q u e r lesdiis b i e n s contre ledit
» sec ond , quel l e tradition et p re m ière , réelle et effectuelle
« possession q u ’il y peut p rétend re ».
Il est im portant de re m a rq u e r qu e cet a u te u r, dans le cas
p ré v u , où la p re m ière vente était connue par le second acquéreur,
ve u t que ce p re m ier acquéreur soit re çu à v e n d iq u er lesdiis
biens contre ledit se c o n d , quelle tradition et première réelle et
effectuelle possession q u 'il y peut, prétendre ; et q u ’i c i , c’est le
p re m ie r acquéreur qui a la tradition et prem ière, réelle cl
effectuelle possession, n o n - s e u le m e n t de fa it, mais par acte
authentique.
Nous lisons également dans D esp eisses , tom e 1 " , titre 1." ,
de T A c h a t, page 5 8 , que « si le second acheteur a s ç u , lors de
« son c o n t r a t, la vente jà faite, bien qu’il eût le prem ier la
» possession de la chose vend ue, il est oblige de la rem ettre.
« T e l le m e n t , dit-il, que ladite L o i quoties n ’a lieu q u ’entre
j> deux acquéreurs de bonne f o i ».
11 ajoute encore plus bas que « le Jurisconsulte, en la question,
» quel des deux acheteurs doit être préféré? re q u ie rt en tous
�»
»
»
»
( , 2 ) )
deux bonne fo i; celui-là p e rd ra sans doute sa cause, p u isq u e
m ê m e il y a du doute à sçavoir qui sera p r é fé r é , lo rsq u e lo u s'
d e u x ont bonne f o i, et d ’abondant, à cause de celte mauvaise
fo i, le p re m ie r acheteur p o urrait faire casser la seconde vente,
» co m m e faite en sa fraude ».
D e s p e is s e s c ite , à l'appui de cette décision, l’autorité de
B aldes , de P accius , de R anohin , de G omes ;
U n A r r ê t du P arlem en t de D i j o n , du 26 juillet 15 6 4 » rappo rté
p a r B o u v o t , to m e 2 , sur le m o t Trente, question 68';
U n A r r ê t du Parlem ent de B o r d e a u x , cité par A n t o m n e , de
l ’année i582;
E t un troisièm e A r r ê t d u P arlem en t de P a r is , de l ’année iiig 5 ,
ra p p o rle par le m êm e auteur.
A u t o r i t é s a u x q u e l l e s o u p e u l a j o u t e r c e l l e de l \ ou ss EAT J- DEL a c o m iîe , dans son R e c u e il de J u ris p ru d e n c e , au m o l Trente,
section 5 , n.° 16.
D e sorte q u ’on p e u t co n sid érer ce p o in t c o m m e à l ’abri d e
toute contradiction ; q u e , dans aucun-cas, le second a c q u é r e u r ,
qui a connu la p re m ière v e n t e , n e p e u t être p référé au p r e m i e r ,
lors m ê m e q u e ce second a c q u é re u r aurait été le p re m ie r en
possession des biens v e n d u s , parce q u ’il n ’a pas acheté honâ.
f u i e , vel sine tlolo.
A plus forte r a is o n , l o r s q u e , co m m e dans l ’e s p c c e , c ’est le
pre m ier acheteur qui a la tradition et la prem ière, réelle et effectuclle
p ossession , de fait et par acte authentique ; possession dans laquelle
il s’est m aintenu lui et scs représentons ju s q u ’à ce jour.
\
A p r è s le p re m ie r considérant q u ’on v i e n t d e d i s c u t e r , on lit
dans ce J u g e m e n t, q u ’in d ép en d a m m e n t que la ven te consentie
à M . llix a in n ’avait une date authentique qu e du 4 m a r s , j o u r
de l’en registrem ent du sous s e i n g - p r i v é , tandis que la ven te
consentie à M . B e r a r d , par acte n o ta rié , est du 22 fé vrier: « L e s
» sieurs de B énislant c l Faradesches des R o n z i è r c s , q u o iq u e
» cohéritiers dans la succession de la dame de C h azerat, n'avaient
» alors aucun droit et qualité p ou r consentir la vente audit llix a in
�( .3
)
»
»
»
»
»
»
«
»
p u i s q u e , de le u r p ro p re a v e u , ils avaient v e n d u antérieurem ent
des im m eubles de ce lle succession p o u r bien au-delà de le u r
am endement ; et q u e , d ’un aulrc c ô té , ils ne justifient d ’aucun
p o u vo ir de v e n d r e , qui leur ait été donné par lesdils sie u r
et dame Ratnond ; et q u ’au co ntraire, il résulte de le u r défense
q u ’ils étaient instruits qu e le sieur Pinatelle a toujours été
leur seul mandataire p o u r v e n d r e , le seul qui eût une p ro c u ration de leur part a cet effet ».
O n ajoute : « q u ’en considérant la vente sous sein g-privé faite
« par les sieurs de B énislant et F a ra d e sc h c s , co m m e existant
» sous la date d u iG février 18 18 , cl en admettant que le sieur
» de Chazelîes en avait connaissancs lors de la vente n o ta r ié e ,
» qui lui fut consentie le
22
d u m ê m e m o i s , par
le
sieur
» P in a te lle , mandataire des sieur et dame R a m o n d , il en résul» terail seulem ent qu e le sieur de Chazelîes avait acheté du
» véritable p ro p riéta ire , qui seul avait droit de v e nd r e , la m oitié
» du dom aine dont il s ’a g it, q u ’il savait avoir été vendu précé» dem m enl p a r des personnes q u i n ’avaient n i droit n i (jualité
» p our vendre; qu e cela 11e changerait la nature ni de l ’une ni
» de l ’autre des deux ve n te s; celle faite par les sieur et darne
» de R.ainond ou leur mandataire , dont il a été touché la m ajeure
3> partie du p r i x , serait toujours v a lid é e , tandis que celle qu e
» les sieurs de Bénislant et Faradesches ont c o n s e n tie , serait au
» contraire n u ll e , parce qu'ils n ’avaient n i droit n i pouvoir de
» vendre ».
Il est bon d e re m a rq u e r q u ’on répète ju s q u ’à trois fo is, dans
ces c o ïisid é ra n s, que M M . de B én islan t et d e G r o m o n l n'avaient
n i droit n i qualité p our vendre à M . R ix a in ;
Q u e M . de Chazelîes savait que le d o m a i n e
d e N e u f o n t avait
été ven du précédem m en t p a r des person n es q u i n avaient n i droit
n i q u a lité p o u r vendre;
Q u e M . de Chazelîes savait que la vente que M M . de Bénistant
et Faradesches ont consentie à M. R ix a in , serait n u lle, parce
q u ils n ’avaient n i droit ni. pouvoir de vendre.
Q u o i! M . B era rd savait qu e M M . de B én islan t et de G rom ont
�( *4 )
n'avaient n i droit, n i q u a lité, n i p ouvoir, p ou r vendre le domaine
de N e u f ont; cl il s’csl adressé à eux , pendant une année entière ,
p o u r leur faire des o ffres, les r e t ir e r , en faire de n o u v e lle s,
traiter avec eux de ce lle v e n t e , et les presser de la lui consentir.
I l savait qu'ils n ’avaient n i d ro it, n i qualité, n i pouvoir p our
vendre, el que la veille q u ’ils avaient consentie à M. Rixain , était
nulle; et aussitôl qu e cette vente lui a clé c o m m u n iq u é e par
M. I lé b r a rd , qui en élait d ép o sitaire, il le p r i e , avec les plus
vives instances, d ’o btenir de M. Rixain q u ’il lu i cède son acquisi
tion , en lui offrant m ê m e 6,000 fr, de bénéfices.
I l savait que cette vente était n u lle; et non content de ces
p rem ières d é m a r c h e s , il se ren d d e suite à C lerin o n t où élait
M. Rixain ; il fait réitérer ses instances auprès de lui ; il em ploie
scs parens les plus p r oc he s et les personnages les plus influens ;
cl c e la , p o u r le déterm in er ù lui céd er c e lle v e n te , q u ’il savait
être nulle et sans conséquence.
C e p e n d a n t, ce lle vente était si p e u n u lle ; elle élait tellem ent
solide à scs y e u x , q u ’il o ffra it, p o u r en obtenir la c e s s io n , des
sacrifices tels, q u ’ils auraient p u tenter tout aulre qu e M. R ix a in ,
qui n ’avait acheté qu e par c o n v e n a n c e , et qui tenait à son
acquisition par affection.
A u s u rp lu s , 011 p e u t faire ici à M . B era rd un d ilcm n c :"
O u M. B erard savait que M M . de B é n isla n t e l G ro m o n d
n ’avaient n i droit, n i qualité, n i pouvoir p our vendre, el que
le u r v c n le élait n u lle; ou il ne le savait pas.
S ’il le sa v a it, quo p en ser de l ’in co n sé q u en ce de sa c o n d u ite ?
S ’il ne le savait p a s , q u e penser du J u g e m e n t qui lui suppose
ce lle connaissance, p o u r le justifier du re p ro ch e de s’être fait
consentir une seconde v c n l e , connaissant la p rem ière?
O n 11e voit pas quelle ré p o n se M. B erard p e u t faire à ce
d i'c a m e .
Il ne lui sera pas plus facile de ré p o n d re à un second d ilcm n c
q u ’on va lui proposer.
O n lit dans ce J u gem en t qu e la vente cons.cnlie à M . R ixain
�C *5 )
par M M . de Bénistanl c l de G r o m o n t, peut d ’aulant m oins êfr'c
m a in ten u e, q u e , « de leur propre aveu, ils m a i eta vendu anté->> ricurcment des immeubles de celle succession p our bien au-delà
» de leur amendement ».
S ’il est vrai q u ’il y ait eu des v e n le s antérieures dont M M . de
B énistanl et de G rom ont aient louché le p r i x , sans en taire p a ri
à leurs cohéritiers, que faul-il penser de M M . de Bénistanl et
de G ro m o n l?
S ’ils o n l louché ce p r i x , et q u ’ils en aient fait pari à leurs
cohéritiers, que faut-il penser de ce J u ge m e n t?
Car il est évident que si le p rix de ces venles antérieures a
clé distribué entre tous les c o h c rilic rs, M M . d e B énistant cl de
G ro m o n t n'ont p a s vendu, des immeubles de la succession a u-delà
de leur amendem ent, et qu e tous les cohéritiers s o n t, à cet égard,
sur la m ê m e ligne.
E t à qui fait-on de pareilles inculpations ? A u x hom m es les
plus reconnrïandables, dont la probité sé v è re , la loyaulé el la
délicatesse passent en p r o v e r b e , com m e a utrefois, chez les
A th é n ie n s, la justice d ’Aristide.
A la vérité , ces inculpations ne p e u ve n t atteindre MINI, de
Bénistant. et G ro m o n t ; ils sont invulnérables sous ce point de
v u e , mais ils ne sont pas seuls dans la cause.
O n les accuse d ’avoir trom pé la foi p u b liq u e , de s’etre désignés
dans des affiches, dans les feuilles p ério d iq u es , com m e vendeurs
du d om aine de N e u fo n t, sans droit, sans qualité, sans pom oir;
d ’avoir abusé de la confiance q u ’à eue en eux M . B ix a in pour
lu i consentir u n e v c n lc nu lle, illusoire ; scs en fans sont exposés,
pa r le u r f a it , à u n e éviction in év ita b le ; ils d o iv en t, d è s-lo rs,
p r e lc r le u r appui à ces orphelins q u ’on se p r o p os e de dépouiller,
el les d éf end re avec loule l ’énergie d ont ils sont capables.
M M . de lîénislant el G ro m o n t doivent d o n c s’em presser de
p r o d u ir e , sous les yeux de la C o u r , tous les p o u vo irs q u ’ils
o n l reçus de leurs cohéritiers du M i d i , d epuis la m o rt de M mc de
Chazerat, p o u r les re p résen ter dans les différons procès auxquels
�( >6 )
sa succession a donne lieu , et dans les partages qui en ont été
le résultat;
T o u s les po uvo irs q u ’ils en ont re çu depuis les p artages, et
spécialem ent , les procurations q u i le u r o nt été envoyées en
ja n v ie r , février et mars 1 8 1 6 , q u ’ils rappellent dans leurs
défenses c o m m e contenant pouvoir de vendre ;
E t e n fin , toute le u r correspond an ce qui contient une suite
lion in te rro m p u e de tém oignages d ’une confiance sans »bornes,
avec des expressions qui seules seraient autant de p o u vo irs
illim ité s , p ro p re s à justifier n o n -s e u le m e n t la ven te q u ’ils ont
consentie à M . R i x a i n , mais
auraient p u consentir.
toutes les autres ventes
q u ’ils
C ’est alors q u ’on repoussera avec indignation cette idée affli
g e a n te , que M M . de B é n i s l a nt c l G r o m o n t aient p u tro m p e r le
p u b lic cl les particuliers q u i se sont présentés p o u r acqu érir
le dom aine de Neufont. et les bois de S a in t- A g o u lin , et qu e les
actes qu'ils ont passés avec e u x ne soient q u e des feuilles de chêne.
S ’il y a dans cette aifaire u n e vente tout à-la-fois désavouée par
la loyauté et la bo nne f o i , c l vicie u se dans tous les s e n s , ce n ’est
pas celle consentie par M M . de B én isla n t et d e G r o m o n t à
M . R ix a in , mais bien celle consentie à M . B e ra rd pa r le sieur
Pinatelle.
O n a vu ci-devant q u e M. B e ra rd ayant u n e parfaite connais
sance d e la p re m ière ven te consentie à M. R i x a i n , il n ’a p u
s ’en faire consentir u n e s e c o n d e , de b o n n e foi et sans fraude,
bond fu ie et sine dolo.
Mais ce n ’esl pas se u lem en t en cela q u e celte seco nd e vente
est vicie u se et nulle.
E lle a é lé consentie pa r le sie u r P i n a t e ll e , seul et is o lé m e n t,
tandis q u e sa pro curatio n portait q u ’il serait tenu de sc réunir
a u x autres cohéritiers p ou r consentir ces ventes.
Le sieur Pinatelle a v e n d u à M . B erard la m oitié du dom aine
de N e u f o n t , c l les m in eu rs Bénaguel n ’avaient q u ’un sixièm e
de ce d o m a in e , c o m m e de loulos les autres p ro p riétés de la lerrc
«le S aint-A goulin.
�Cn )
L e sieur Pinatelle a m o r c e l é , par celte v e n l c , des biens
in d iv is, et peut-être in d iv is ib le s, c l sa procuration ne lu i donnait
pas le po uvo ir de faire ainsi des ventes p a rtie lle s , qui non-seule
m en t étaient contraires à l ’essence de la société existante entre
les c o h é ritie rs , . cl à leur convention p rim itiv e de laisser tout
dans l’ind ivision, mais qui entraîneraient p o u r "tous les consé
quences les plus funestes; d ’a b o r d , en nécessitant autant de
partages entre les acquéreurs et les cohéritiers, q u ’il y aurait eu
d ’objets vend us;
E n second l i e u , parce que la branche S o u b r a n y , étant co m p o sé e
de plus de vingt c o h é r itie rs , si chacun de ces vin g t cohéritiers
se donnait la licence de v e n d r e , à son grc et is o lé m e n t, des
p ortion s d ’héritages o u de dom aines à tout v e n a n t, chaque objet
p o u rra it, co m m e dans l ’e s p è c e , être v e n d u à plusieurs acquéreurs
à-la-fois , et il en résulter:»! un itesordre , une confusion et des
pro cès, d o n l l ’idée seule est effrayante, e l dont il est im possible
de calculer les résultats.
L e sieur Pinatelle a d onc fait un abus étrange de sa pro curatio n,
quand il s’est prêté aux sollicitations de M. B e r a r d , e l q u ’il lui
a ve n d u la m oitié du dom aine de Neufont.
L ’article 1989 du C o d e civil p o r t e , en term es fo r m e ls , que
;« le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est po rté
?i dans son m andat ». T o u t ce qui excèd e scs p ouvoirs est frappé
de n u llité , et doit d e m eu re r sans effet.
A la v é rité , M . et M .me R a m o n d , tuteurs des m in eu rs Bénaguet,
ont p orté la com plaisance, p o u r M . B era rd , ju s q u ’à intervenir dans
la c a u s e , p o u r ap p ro u ve r la cond uite de leur agent d ’a lïa ire s,
et c e la , contre l ’intérêt de leurs
mineurs;
C o n t r e toutes les c onvenance s s o c i a l e s ,
E t sans égard aux dangers auxquels ils exposent MM. de
Bénistanl e l de G ro m o n t, ( p ii, d epuis le décès de M"1' de Chazerat,
n ’ont cessé de s’o c c u p e r , avec zèle, de leurs intérêts , et d ’acquérir
jo urnellem ent des litres à leur reconnaissance.
Mais celle intervention ne change rien à l’étal des choses ; elle
3
�( 18 )
I
n e change pas la nature de la vente qu e s’ est fait consentir
M . B era rd par le sieu r Pinatelle ; elle n ’en est ni plu s fra n c h e ,
n i plus lo y a le , ni plu s co n fo rm e au m a n d a t, ni plus p ro p re à
co n cilier à M . B era rd la faveur d e la C o ur.
BOIROT ancien Jurisconsulte
MARIE, Avoué.,
A CLERMONT-FERR AN D , de l ’Imprimerie de Pellisson père et fils, au coin des rues
Saint-Gcnès et Saint-Esprit, ancienne maison'Giron.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lacoste, Marie-Caroline. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Marie
Subject
The topic of the resource
ventes
doubles ventes
successions
Chazerat (Madame de)
experts
actes sous seing privé
possession
jurisprudence
bonne foi
procuration
partage d'un domaine
équité
enregistrement
domaines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Marie-Caroline Lacoste, veuve de monsieur Jean-Jacques Rixain, docteur en médecine, tutrice de ses enfans mineurs, appelante ; contre M. Antoine Berard de Chazelles-Labussière, intimé ; encore contre messieurs Jacques-Amable Soubrany de Benistant, et Pierre Faradesches des Ronzières, appelés en garantie ; et contre madame de Champetière, veuve de M. Penautier, épouse, en secondes noces, de M. de Ramond, tuteurs des mineurs de Penautier, intervenants.
annotation manuscrite : « 9 octobre 1822, 1ére chambre, arrêt infirmatif. »
Table Godemel : concurrence : 3. le principe introduit par l’article 1328 du code civil pour prévenir les fraudes et non pour les favoriser, ne peut être appliqué qu’entre deux acquéreurs de bonne foi, et lorsque celui qui a acquis par acte authentique a ignoré la vente qui précédemment avait été faite, en faveur d’un autre, par acte sous signature privée. Spécialement la préférence peut être accordée à la vente faite sous seing privé, quoique son enregistrement soit postérieur à la date de la seconde vente, consentie devant notaire, lorsque cette dernière vente avait été faite par un mandataire, contrairement aux termes de la procuration, et lorsqu’il est établi que le second acquéreur avait une connaissance personnelle de la vente antérieure à celle qu’il a obtenue par acte authentique.
4. quelle doit être l’étendue de la garantie accordée au second acquéreur dont la vente reste sans effet par suite de la connaissance personnelle qu’il avait sur l’existence de la première vente, et de son silence à cet égard envers le mandataire ?
n’est-ce pas suffisamment pourvoir à ce qu’il peut prétendre, que de lui allouer le remboursement des sommes qu’il a payé sur le prix de la vente, ainsi que de ses déboursés pour frais et loyaux coûts, avec les intérêts à compter des époques de paiement ou de déboursés ; et, de plus, les dépens auxquels il est condamné ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Pellisson père et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1818-1822
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2526
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2527
BCU_Factums_G2528
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53512/BCU_Factums_G2526.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Neufonds (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bonne foi
Chazerat (Madame de)
domaines
doubles ventes
enregistrement
équité
experts
jurisprudence
partage d'un domaine
possession
procuration
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53513/BCU_Factums_G2527.pdf
31692a8d5b139f8102c61f67c106f8d7
PDF Text
Text
r it- w t iê jn u r iïp *
aimjBmwniaiJN
MEMOIRE
COUR ROYALF,
DE RIOM.
P O U R MM. J a c q u e s S O U B R A N Y D E B É N IS T A N T
et P i e r r e F A R R A D E S C H E D E S R O N Z IÈ R E S ,
Appelans et Défendeurs en garantie ,
I ro CH A M B R E .
C O N TR E
M onsieur
A
B E R A R D D E CH A Z E L L E S L A B U S S I È R E S ; intimé ;
n t o in e
C o n t r e Madame d e CH A M P È T I È R E S , veuve
de M . P e n a u t i e r épouse en secondes noces }
d e M . R AMOND tuteur des mineurs de P e n a u t i e r ,
,
intimés;
E t c o n t r e Dame M a r i e - C a r o l i n e L A C O S T E
veuve de M . Jean-Jacques R i x a i n , docteur en
médecine tutrice de ses enfans mineurs , aussi
intimée et appelante.
,
,
M u l t i l i t i g a n t in f o r o n o n ta m u t a l i q i u d
c o n s e q u a n t u r , q u a m u t a l io s v e x e n t a t q u e m o le s te n tt
S i les contestations judiciaires sont, pour la plupart
des hommes, une source de déplaisirs, il en est qui pa
raissent y trouver de secrètes jouissances. On serait au
^
�(■ )
moins tenté (le le croire, à leur empressement à re
chercher des procès.
Telle est l ’idée morale que présente cette cause.
Ses questions sont nombreuses et compliquées.
L a principale roule sur la préférence à accorder à
l ’ un des deux acquéreurs du même immeuble. Sera-ce
au premier, dont l ’acte était seulement sous seing
p r iv é , mais a été exécuté par une possession réelle ?
Sera-ce au second, qur, connaissant la vente déjà faite,
ù obtenu d ’un fondé de pouvoirs, duquel elle était
ignorée, une seconde vente par-devant notaire?
D ’autres q u e s t i o n s n a i s s e n t J e l ' i n s u f f i s a n c e des
pouvoirs du mandataire, de la circonstance que l’objet
vendu était indivis entre plusieurs personnes, et de la
confiance absolue, autant que m éritée, que tous les
co-propriétaires
s’étaient empressés
souvent de té
moigner à ceux d ’entr’eux qui ont été les premiers
vendeurs.
A ujourd ’hui cependant , abandonnés par ceux-là
même qui leur firent de nombreuses protestations ?
ces premiers vendeurs sont traduits devant les tribu
naux-, a t t a q u é s , d ’ un côté, d a n s leur ouvrage; som
més, de l ’autre, de le s o u t e n i r ex po sé s à une garantie
onéreuse; contraints de se livrer aux longs désagrémens d ’une lutte judiciaire entre deux adversaires
ennemis l’un de l ’autre, et qui paraissent également
décidés à ne se faire aucune concession.
Si la décision des premiers juges pouvait être con
firmée, MM. de Bénistant et des Ronzières seraient
�(3)
les seules victimes cl’une contestation q u ’ils n’ont ni
pu prévoir ni pu empêcher.
Mais les règles du d roit, les circonstances, les con
sidérations, enfin les moyens les plus puissans pa
raissent s’unir pour faire réformer cette décision.
F A IT S .
L a succession de la dame de Chazcrat avait donné
lieu à un long procès. De nombreux héritiers testa
mentaires s’étaient réunis pour défendre les dernières
volontés de leur bienfaitrice. Parm i eux, on remar
quait la famille de Bénistant et la f a m i l l e d e B c y u a guet. L eu r origine otuit la uieuie, et leurs di’oits à la
succession étaient égaux.
Mais la famille de Beynaguet, fixée depuis long-tems
dans le Languedoc, ne pouvait pas, à cette distance,
donner à des difficultés extrêmement sérieuses toutç
l ’attention q u ’elles méritaient. Dès les premiers instans, ils engagèrent leurs parens de R io m , et sur-tout
MM. de Gromond et de B énistant, à accepter toute
leur confiance.
L a famille de Beynaguet se divisait en trois branches ;
l ’une était représentée par la dame M a d e l e i n e B e y n a
g u et, veuve Des V o i s i n s ; l ’autre, par la dame Rose
Françoise Beynaguet, veuve de Mallaret; et la troi
sième, par M. Beynaguet-Saint-Pardoux de Penautier.
Leurs procurations furent envoyées k M. de Bénis
tant en février et mars 1806. Ces procurations étaient
�( 4 )
■
des plus étendues; elles autorisaient à demander par
tage, à compromettre, traiter, transiger, vendre ou,
donner tous consentemens au x ventes qui auraient
été ou qui seraient faites par les autres cohéritiers.
Cependant le procès principal se termine.
Les cohéritiers connaissaient tous les soins q u ’y
avaient apportés MM. de Bénistant et de Gromond.
Plusieurs lettres de remerciement leur furent adres
sées. M. de Penautier, dans des lettres du i er mars
1812
et du 12 août i 8 i 3 , en exprimant à M. de
Gromond sa reconnaissance pour ce q u ’il avait déjà
l a i t , en le priant, e n son n o m e t e n celui de ses pa
rens , de veiller à leurs intérêts com m uns, lui rappelle
les procurations q u ’a reçues M. de B én istan t, où il
cro it, d it-il, que tout est spécifié
.
Bientôt après, M. de Penautier décède. Sa veuve,
aujourd’hui madame de Ramond, fait écrire à M. de
Gromond pour lui annoncer la perte q u ’elle vient
d ’éprouver ; le prier de lui faire connaître l ’état dans
lequel se trouvent leurs affaires ; lui demander ce
q u ’elle doit faire, et l ’inviter à lui envoyer un mo
dèle île procuration.
Sur sa réponse, M.
de G r o m o n d
reçut,
le 10 mai
1 8 1 4 ? une procuration en blanc de madame de Pe
nautier.
L a veuve Mallaret était aussi décédée; et ses trois
cnfans adressèrent aussi 'des procurations à M. de
Gromond.
�'( 5 )
Enfin , madame veuve Des Voisins lui en envoya
une nouvelle.
A chaque le ttre , nouveaux remerciemens, nouvelles
protestations de confiance absolue.
L e partage de l ’hérédité se termina en i 8 i 6 . U n s e u l
lot fut fait pour les deux familles de Beynaguet et de
Bénistant. La terre de Saint-Agoulin leur fut attribuée
en commun. Cette terre se composait de plusieurs
domaines, dont le plus considérable est le domaine
de Neufonds, objet du procès actuel.
Instruits de ce résultat, les divers membres de la
famille de Beynaguet manifestèrent, dans plusieurs
lettres à M. de Gromond, l e ur s désirs f f u o Ja t c n ' C do
S a i n t - A g o u l i n f û t vendue.
Dans une lettre du 12 avril 1 8 1 6 , la dame veuve
Des Voisins- s’exprimait ainsi :
« Nous nous en rapportons entièrement à l ’opinion
« de M. de Bénistant.
« Nous nous bornons seulement
« naître que
h
vous faire con-
nos intérêts sont qu ’il fût
possible
« d’obtenir la vente de la portion qui revient bi notre
« maison , soit séparément, soit conjoijilement avec
« la maison Bénistant.
« J ’ose me flattei’ , M onsieur, que vous voudrez
' « bien ajouter à votre obligeance la continuation des
« soins que vous avez bien voulu vous donner jusqu’ici. »
Dans une autre lettre du 3 o septembre suivant,
madame Des Voisins ajoutait ;
�« J’ai envoyé dans le tems ma procuration. Je vous
« prie de croire que j e trouverai bon tout ce que
« vous fe r e z . »
A la même époque, madame de Ramond tenait un
langage semblable. E lle écrivait, le 14 avril 1816 :
« J’ai l ’honneur de vous remercier de tous les soins
« que vous voulez bien vous donner. Je vous prie de
« vouloir bien les continuer, et de faire pour le mieux.
« Je m'en réfère d ’avance à tout ce que vous fe r e z .
« J’ai fait passer à M. Pinatelle une procuration, et
« lui ai dit de se concerter avec vous, pour tirer tout
« 1 avantage p o s s i b l e de ce q u i c o n c e r n e r a notre famille.
« Madame Pes Voisins aura sans doute r é p o n d u à
« votre lettre. Je suis persuadée que nous ne divisons
« pas d ’opinion ; q u ’elle est d ’avis que la vente de la
« terre qui est échue dans notre lot s’eiTectue, dès
« que cela doit nous être plus avantageux. »
M. de Mallaret écrivait dans le même sens, le 5 mai
18 17 .
Alors M . de G rom ond, M. de Bénistant et M, Pina
telle, fondé de pouvoir de la dame de Ram ond, so
concertèrent pour vendre la terre de Saint-Agoulin.
On nç mancj^ie pas cle p r e u v e s de cet a c c o r d , si sin
gulièrement rompu depuis.
L e 4 décembre
1816,
M. P in a te lle,
écrivant à
M , de G rom ond, et lui annonçant son prochain voyage
à Riom , lui disait : « Nous prendrons ensemble le
« parti que vous croirez
« tous. >t
le plus avantageux pour
�I
Une autre lettre du i 5
<i suis bien d ’aviâ de faire
« si l ’on en trouve un prix
7
janvier 1817 portait : « Je
afficher Suint-Agoulin, e t ,
raisonnable, de le vendre. »
Des affiches furent, en effet, apposées en divers
lieux , et notamment à Gannat et à R io m , villes
dans l ’arrondissement desquelles étaient situés les
biens. Elles étaient faites au nom de tous les copro
priétaires ; elles indiquaient MM. de Bénistant et de
Gromônd père, comme plus particulièrement chargés
de négocier et de faire les ventes.
Les affiches 11e produisirent pas d ’abord tout l ’effet
q u ’on en attendait.
M. de Bonnevic se présenta cependant pour acquérir
une partie de la terre de S ain t-A gou lin , c’est-à-dire
le château et plusieurs domaines; mais ses offres étaient
au-dessous du prix de l'estimation, et les négociations
furent traînantes.
Prévenu des offres de M. B on n evie, M. Pinatelle
écrivit à M. de G rom ond, le 9 aoiit 1817 :
« L e ia du courant je me rendrai à R iom , et nous
« arrêterons ensemble le dernier prix auquel 011 peut
« abandonner Saint-Agoulin -, mais soyez bien per« suadé d ’avan ce, que ni moi ni M. de R a i n o n d
« 11’avons envie de contrarier , et que nous nous rçtn« gérons toujours du sentiment des autres cohéritiers. »
M. Pinatelle vint à Riom, comme il l ’avait annoncé,
Le dernier prix fut arrêté avec lui. M. de Bonnevie
en fut prevenu : il y acquiesça; et un jour fut fixé
�pour consommer la vente en présence de M. Pinatelle et
de tous les autres intéressés, ou de leurs fondés de pouvoir.
Au jour indiqué , la vente est rédigée. U ne partie
du prix est comptée par M. Pinatelle lui-même. Mais,
au moment où tous allaient signer, on s’aperçoit q u ’il
y a quelque légère omission dans les procurations des
membres de la famille de Beynaguet, dans celle même
dont était porteur M. Pinatelle. On convient de sur
seoir à l ’acte a u th en tiq u e, de demander d ’autres pro
curations, et de faire, en attendant leur arrivée, unq
vente sous seing privé, signée seulement par ceux des
héritiers qui habitaient Riom.
■
%
Cependant la procuration de madame de Ramond
arriva la première. E lle est datée de Paris, du 5 février
1818. E lle avait été demandée pour consommer, avec
les autres cohéritiers, la vente déjà arrêtée avec M. de
Bonnevie. L a lettre que dut écrire alors M. Pinatelle
à M. de Ramond en ferait fo i, si elle était produite.
C ette procuration est donnée par la dame et le sieur
de Ram ond, comme cotuteurs des mineurs Pen au tier,
« p ou r se réunir a u x copropriétaires des mineurs do
de P e n a u tie r, relativement aux biens
« composant la succession de madame de C h azerat;
« Beyn ag uet
« lesdits biens consistant, entr’autres choses, dans la
« terre de S a in t-A g o u lin .............. Vendre à telles per« sonnes, et aux p rix , charges, clauses, et aux condi« tions les plus avantageuses, les portions revenantes
« auxdits mineurs de P e n a u tier, dans la terre de
« S ain t-A g oulin 3 et les dépendances. «
�T
On verra bientôt que l ’on a fait du mandat un
usage contraire à ses termes et à sa destination.
M. de Bonnevie n ’avait pas acquis le domaine de
Neufonds et des bois voisins.
Les cohéritiers reconnurent q u ’il serait avantageux
de vendre les bois et le domaine en masse, et ils en
fixèrent le prix à 60,000 francs et à Go louis d ’épingles.
Plusieurs concurrens se présentèrent, et parmi eux
M. de Chazelles-Labussière, qui d ’abord s’était pro
posé de n’acheter que le domaine. L e prix lui parut
trop élevé : c’est au moins ce q u ’il répondit à M. Ilébrard
père, un des négociateurs de la vente.
Sur ces entrefaites,' le sieur
Rixain se ren<l c h e z
4>
M- Ilébrard, notaire* il oflre le prix demandé, mais
il vqut q u ’un acte soit fait sur-le-champ. M. de Bénistant et M. de Gromond des Ronzières sont prévenus
(M. de Gromond père était absent.) : que devaientils faire? Le prix convenait; les intentions de tousles
cohéritiers étaient connues; leur harmonie n ’avait
jamais été troublée. M. de Bénistant était porteur
des anciennes procurations de 1806; il avait reçu aussi
de fréquentes protestations de confiance et de consen
tement à ce qui serait fait. Il crut devoir, avec M. de
G r o m on d fils, consentir à un acte de vente sous seing
privé, en se portant f or t pour tous les cohéritiers.
L ’acte resta en dépôt chez M. Hébrard, en atten
dant l ’arrivée des procurations qui avaient été de
mandées. Cependant M. de Ghazelles , prévenu de la vente
2
�'ÏP
qui avait été faite,
se rend à Riom ; il en parle à
M. de Gromond des Ronzières, qui lui confirme son
existence, en lui indiquant le dépositaire. Il se rend
chez M. Iïébrard , qui lui montre l ’acte sous seing
privé, et qui lui parle des procurations que l ’on at
tend pour passer l ’acte authentique.
M. de Chazelles se retira, mais après avoir invité
M. Hébrard à offrir 6000 francs à M. Rixain pour
l ’engager à se départir de la vente.
L e 20 février,-à C lerm o n t, il fait faire la même
proposition par l ’intermédiaire des personnes les plus
respectables.
Tous ces faits sont constans.
Mais le sieur de Chazelles et le sieur R ix a in , voisins
de campagne, étaient depuis long-tems peu d ’accord.
Les offres furent refusées; et ce moyen honnête de
satisfaire son désir n ’ayant pas réussi au sieur de
Chazelles, quelle fut sa ressource?
Il nous la fait connaître lui-même dans ses écrits.
Considérant q u ’i l ne lu i convenait p lu s de revenir
auprès de M M . de Grom ond (car jusqu’alors, dans ses
négociations,’ il ne s’était adressé q u ’à eux); et désespévant de les faire revenir de la préférence qu ils don
naient à M . R ixain j il entra en marché avec le sieur
P in a te lle , fo n d é de pouvoirs des sieur et dame de
Jlamond.
E n effet, le sieur Pinatelle avait reçu la procuration
demandée pour la vente convenue avec M. Bonnevie.
Instruit de cette circonstance, M. de Chazelles se trans-
�( ■> )
porte auprès de lu i, à Courpières; et, lui laissant tout
ignorer, il obtien t, de son erreur sans dou te, la
vente de la moitié du domaine de Neu fonds, de la
moitié seulement, quoiqu’il se fût toujours présenté
pour tout acquérir. L a vente fut passée le 22 février,
devant Gondres, notaire à Courpières.
Ce trait est facile à juger.
Il parut révoltant à
M. Rixain. Personne n’ignore les scènes de violence
auxquelles il donna lieu.
M. de Chazelles se jugeait moins sévèrement. A ce
q u ’il avait déjà fa it, il crut pouvoir ajouter une dé
marche au moins étrange : il vint proposer à M. de
Gromond père, qui avait reçu les procurations n o u
v e l l e s , cio les l u i c o n f i e r , poui qu il achctat le surplus,
du domaine, afin de détruire ainsi l ’acte du sieur
Rixain. On devine aisément quelle fut la réponse.
Cependant M. Rixain fait enregistrer sa vente le
4 mars. Il était en possession* Il attendit l ’attaque
judiciaire.
E lle ne tarda pas.
Par cédule en conciliation, du 19 mai 18 18 , M. do
Chazelles demande, contre M. R ixain, à être main
tenu daus la possession de la moitié du domaine qui
lui a été vendue.
A u b u r e a u de p a i x , le si eu r R i x a i n rappela tous les
faits,
la connaissance q u ’av ai t le sieur de
Chazelles
de la première v e n t e , les propositions q u ’il l u i av ai t
faites, et l ’ignorance dans l aque ll e
il a v a i t
‘sieur Pinatelle pour obtenir la seconde vente.
laissé
le
�17
( ■* )
Que pouvait répondre le sieur de Chazelles? Il se
borna à dire q u ’il se réservait d ’expliquer ou de recti
fier les faits devant qui de d r o it, et demanda le par
tage du domaine.
L ’affaire est portée devant les tribunaux.
MM. de
Bénistant et de Gromond y sont appelés par leurs
vendeurs; madame e tM . Ramond par le sieur Chazelles.
Cependant les autres cohéritiers, prévenus de cet
incident, en témoignent leurs regrets à M. de Bénisnistant, auquel ils déclarent s’en rapporter absolument.
Dans une lettre de madame Des V oisins, on re
marque ces e x pr e ss ions : « Je m e b o r n e r a i donc , mon
« cher cousin, à vous dire que je tiendrai pour fait
« tout ce que vous ferez. »
E n 1820 , M.
de Mallaret écrivit ainsi : « Mes
« sœurs et moi nous nous en rapportons parfaitement
« à ce que vous croirez devoir faire dans cette cir« constance. Notre confiance en vous est entière. »
Long-tems a van t, et dès le commencement de l ’an
née 18 18 , M. de Mallaret et ses sœurs avaient, ainsi
que la dame Des V oisin s, envoyé à M. de Gromond
de nouveaux pouvoirs des plus étendus. Ils s e r v i r e n t
à passer d e v a n t n o t a i r e l a v e n t e f a i t e ¿1 M. de
Bonnevie.
L ’acte authentique eut lieu le 22 mai 18 18 ; il est
signé par tous les copropriétaires, ou par leurs procu
reurs fondés, à l’exception de M. Pinatelle, qui ne
voulut plus y prendre part.
D epuis, madame et M. de Ramond ont hésité, ont
�écrit des lettres vagues, et ont fini j:>ar se réunir à
M. de Chazelles.
Devant le tribunal et dans des écrits respectifs, les
faits ont été développés. La plupart ont été reconnus
par M. de Chazelles lui-même.
A l ’audience, ils ont été répétés en sa présence;' il
n ’a pu en désavouer aucun; et le tribunal a du consi
dérer comme certain q u ’il connaissait la première vente
lorsqu’il a obtenu la seconde.
Cependant celle-ci a été m aintenue, par jugement
du 10 mai 1820.
L e tribunal a pensé,
Que tout héritier, avant une demande en partage,
pouvait von dre clos iiiimeu/jles jusqu u. concurrence de
la valeur de son lot ;
Que la vente faite par le sieur Pinatelle avait été
approuvée et ratifiée par les sieur et dame de Ramond,
qui s’étaient , dans la cau se, réunis au sieur de
Chazelles ;
Que la vente sous seing privé n’avait de date cer
taine, à l ’égard du sieur de Chazelles, que du jour
de l ’enregistrement, c'est-à-dire douze jours après la
Vente authentique faite à celui-ci;
Que les sieurs de Bénistant et de Gromond n ’avaient
pas le droit de v e n d r e au s i e u r Jtixain, puisque, de
leur propre aveu , ils avaient vendu antérieurement
des immeubles de la succession , au-delà de leur
amendement ;
Q u ’en considérant la vente faite au sieur Rixain
�(
>4 )
comme existante et comme connue du sieur de Chazelles, il en résulterait seulement que le sieur de
Chazelles avait acheté du 'véritable propriétaire , qui
seul avait le droit de vendre la moitié du domaine,
qu’il savait avoir été vendu précédemment par deux
personnes qui navaient ni droit ni qualité pour vendre ;
Q u ’il n ’était pas vraisemblable que le domaine no
pût être divisé en deux portions ;
Enfin q u ’il n ’y avait pas lieu à admettre la subro
gation demandée par les sieurs de Bénistant et de
G rom ond, parce q u ’il ne s’agissait pas de vente de
droits sviccessifs.
E n conséquence , le tribunal a déclaré valable la
vente faite au sieur de Chazelles ; a annullé celle
faite au sieur R ixain , en ce q u ’elle comprenait la
totalité du domaine, et a ordonné le partage de ce
(lomaine, en donnant acte au sieur de Chazelles de
son consentement à ce q u ’on fit échoir tout ou partie
des bàtimens au lot du sieur Rixain.
Il a ensuite condamné MM. de Bénistant et de
G ro m o n d , envers la veuve R ix a in , aux dommages et
intérêts, résultant de l ’éviction q u ’elle souffrait, et
lui a réservé le droit de faire prononcer, sur ce motif,
la résiliation de la vente entière.
C e jugem ent, q u i ,
loin de terminer le procès,
serait un germe fécond de discussions nouvelles, a été
dénoncé à la C o u r , soit par la dame Rixain, soit par
MM. de Bénistant et de Gromond.
L a dame Rixain yeut conserver le domaine entier*
�C >5 )
MM. de Bénistant et de Gromond doivent la soutenir
dans sa juste réclamation.
Mais ne sera-t-on pas surpris que des dommagesintérêts lui aient été accordés.
Les principes et les circonstances signalent le mal
jugé du jugement.
A ne consulter que les principes, l ’action du sieur
de Chazelles était non recevable; au moins devait-il
être sursis à y faire droit, jusqu’après un partage.
A considérer les circonstances, la vente faite au
sieur Rixain devait obtenir la préféreuce.
Au reste, la subrogation demandée pour mettre fin
au procès devait être accueillie.
O n prouvera ces trois proposilions.
On dira ensuite quelques mots sur la garantie.
§ Ier.
1j action est non recevable.
Les premiers juges ont rappelé, comme principe
fondamental de leur décision , une règle que l ’é q u ité ,
plutôt que la lo i, prescrit dans les cas ordinaires,
mais q u ’elle repoussait dans le cas particulier.
« Tant q u ’il n ’a pas élé for me de demande en par
ie tage, ont-ils d it, tout héritier a le droit de vendre
« des immeubles de la succession, jusqu’à concurrence
« de ce q u ’il amende dans les biens de mime nature. »
Nous verrons dans la.suite combien peu était appli-
�( 16 )
calilc à la cause cette maxime introduite seulement
par la jurisprudence.
M ais, eu supposant q u ’on eût dû l ’appliquer, en
conclure que l ’acquéreur avait pu agir en désistement,
et prononcer ce désistement avant le partage de la
succession , c’est une erreur dont la jurisprudence
même n ’offre pas un seul exemple.
Toute la théorie des droits des cohéritiers., sur les
immeubles
d ’une
succession ,
est
renfermée
clans
l ’article 8 8 3 du Code civil. E n voici les termes :
« C h a q u e cohéritier est censé avoir succédé seul, et
« im m édiatem ent, à tous les effets compris dans son
« l o t , ou à lui échus par licitation, et n ’avoir jamais
« eu la propriété des autres effets de la succession. i>
Ainsi la fixation des lo ts , le résultat de la licitation
peuvent seuls faire connaître quel est celui des héri
tiers à qui la propriété de tel ou tel immeuble appai>
tient j et est censée avoir toujours appartenu.
A in si, tant q u ’il n ’y a pas eu partage ou licitation,
la propriété reste in con n ue, incertaine, et même en
quelque sorte suspendue.
De là. deux conLsctjuences :
L ’une, que le cohéritier, q u i , sans le consentement
des autres héritiers, vend un immeuble in d iv is , est
considéré comme vendeur de la chose d ’a u tru i, et
fait une vente nulle.
Cette première conséquence est rigoureuse, mais
elle est vraie -, elle est consacrée par un arrêt dq
�C r7 )
cassation, du 16 janvier 18 10 , dans les termes les
plus forts (1).
L ’autre conséquence est que l ’acquéreur ne peut, au
moins, se présenter et agir comme propriétaire de la
chose acquise, tant q u ’un partage ne l ’a pas placé
dans le lot de son vendeur.
Cette seconde conséquence est plus douce; elle a été
admise par l ’équité, q u i, plus flexible que la lettre
de la loi
se prête davantage à tout ce qui peut
concilier les intérêts divers.
S i , s appuyant sur cette doctrine et secondé par
ses vendeurs, le sieur de Chazelles eût formé une
demande en partage c o n t r e t ou S Jos-coiicVitxcrs j UL^Cllt
e o n c l u à ce q u ’on fit échoir au lot de ses vendeurs la
moitié du domaine des Neufonds, son action eût été
régulière; il n’y aurait eu q u ’à en examiner la légiti
m ité , c’est-à-dire à considérer quels pouvaient être les
intérêts opposés des autres cohéritiers, et à faire véri
fier la facilité de la division par moitié du domaine
de Neufonds.
Il n ’en a pas été ainsi.
L e sieur de Chazelles, armé de son titre , a agi en
propriétaire. Il a assigné, non en partage d ’une succes
sion indivise, qui se composait de p l u s i e u r s objets
mobiliers et i m m o b i l i e r s , m a i s en désistement de la
moitié d ’un domaine isolé; il a formé sa demande, non
contre les cohéritiers de son vendeur, mais contre le
(1) Voir l'arrêt dans le Journal dé Denevers^ yol, de 18 10 , p. i 5a.
3
�( 18 )
sieur R ixalu , qui était en possession du domaine
entier, en vertu d ’une vente que lui avaient faite
d ’autres cohéritiers.
Mais de quel droit a agi le sieur de Chazelles?
Il répondra sans doute que c’est du droit que lu i
ont transmis ses vendeurs.
Mais quel droit avaient ses vendeurs eux-mêmes ?
L e droit de demander le partage général. Ils n’avaient
que ce seul droit j ils n ’ont pu en transmettre un
autre.
L e sieur Rixain était en possession du domaine.
Cette possession , cju’ il t e n a i t de c e r t a i n s des coheri^
tiers, ne pouvait lui être enlevée que par le vrai pro
priétaire. O r ,
ce vrai propriétaire ne pouvait être
connu que par un partage qui aurait placé le domaine
dans le lot d ’un autre que de ceux de qui émanait
le délaissement de la possession.
Personne n ’ignore q u ’entre cohéritiers, il n ’y a que
l ’action en partage. Cette maxime élémentaire a été
appliquée par un arrêt de la première chambre de la
C our de R io m , ren du, le 8 octobre 1811 , contre un
héritier in stitué, qui demandait le désistement d ’ un
objet p a r t i c u l i e r , v e n d u par un l é g i l i m a i r e (i).
A plus forte raison peut-on invoquer la maxime
contre l ’acquéreur qui a acheté ce qui n ’était pas en
la possession de son vendeur, ce que celui-ci n’a pu
lui livrer.
( t)
Voir cct orrôt dans le Journal de la Cour ; h sa date.
�( *9 )
Comment pourrait-il obtenir lo désistement, tant
q u ’un partage n ’aura pas fait connaître s’il est réelle
ment propriétaire de l ’objet réclamé?
L e sieur de Chazelles opposera peut-être q u ’un,
partage est inutile, le surplus des immeubles communs,
ayant été vendu par les autres cohéritiers.
On lui répondra que cette circonstance ne doit pas*
.faire déroger aux principes, par plusieurs raisons.
Il existe, indépendamment des immeubles, d ’autres
objets com muns, tels que les bois d ’Àubusson ; des
rentes et des effets publics; des créances considérables;
en un m o t, pour deux cent mille francs au moins do
Valeurs indivises, qui doivent e n t r e r , avec lac immeu
bles, da n s la masse à diviser; et cette masse entière
doit servir, d ’après la lo i, à fixer les.lots.
D ’ailleurs, comme on le prouvera bientôt,. les autres
ventes ont été%faites du consentement des sieur et
dame de Ramond, avec le concours même de leur fondé
de pouvoir : elles ne peuvent donc, fournir d ’argument
au sieur de Chazelles.
Rien ne prohve, au reste, que ces ventes égalent
en valeur les lots de ceux qui^ les ont signées; rien
ne prouve aussi que l ’acquisition, du sieur de Chazelles
n ’excède pas les droits de ceux q u ’il prétend repré
senter. U n partage seul peut lever les doutes.
C e partage est d ’autant plus nécessaire, que le sieur
de Chazelles se présente avec un titre vicieux, émané
non des vrais cohéritiers, mais de leurs tuteurs ;. car
ce sont les six enfans Penautier, tous mineurs lors de
�( 20 )
la ven te, dont un seul est majeur aujourd’h u i, qui
ont droit aux biens indivis; et la vente a été consentie
seulement par le fondé de pouvoir des tuteurs. O r ,
des tuteurs n ’avaient pas le droit de vendre; et les
cohéritiers ne peuvent être contraints de reconnaître
la validité d ’une vente illégale. Q u ’ils eussent ou non
été disposés à se contenter de la garantie des sieur et
dame de Ramond, si tout eût été fait de concert, on,
ne p e u t, en tenant contre eux une conduite hostile,
exiger q u ’ils courent les chances futures des tracas
series possibles des enfans Penautier. Placés aujour
d ’h u i, par l e u r s a d v e r s a i r e s , d a n s la position fâcheuse
d ’avoir un procès, ils veulent au moins n ’y être plus
exposés à l ’avenir.
U n partage est indispensable aussi pour connaître
si la division du domaine de Neufonds ne nuirait pas
aux intérêts de tous ; si ce domaine «he perdrait pas
de sa valeur; s’il serait facile d ’aliéner l ’autre moitié
du domaine, et Tes bois que la'dame Rixain a annoncé
vouloir abandonner, dans le cas où son acquisition ne
serait pas maintenue en totalité.
L ’intérêt môme de MM. de Gromond et de Bonistant commande ce partage ; car ils prouveront que la
vente faite au sieur Rixain doit avoir la préférence ,
et que l ’objet vendu doit être placé dans leur lot;
et
s’il arrivait que d ’autres immeubles aliénés soient attri
bués au lot des enfans Penautier; si ceux-ci refusaient
de ratifier les ventes, il serait sans doute beaucoup plus
�( 21 )
facile de traiter avec les tiers-détenteurs q u ’avec le
sieur de Qhazelles.
Enfin la loi ordonne le partage; et ce seul mot
répond à tout.
Jusqu’au partage, le sieur de Chazelles est sans
droit, sans action, et le procès imprudent q u ’il a
intenté, ce procès q u ’il a désiré, q u ’il a acheté, doit
tourner contre lui-même. La demande doit être rejetée
quant à présent; et une condamnation aux dépens
doit le punir d ’être venu porter le trouble au m ilieu
d ’une famille q u ’aucune discorde jusqu’alors n ’avait
affligée.
Tel e s t, il sem ble, l ’arrêt cru « las
exacte de la Cour.
■pa r fi os
ont
h.
espérer de la j u s t i c e
Mais, en usant envers le sieur de Chazelles d ’une
indulgence que les circonstances ne sembleraient guère
lui mériter, au #moins la Cour devrait-elle surseoir à
faire droit sur sa demande jusqu’à ce q u ’un partage
eût été fait. Telles ont é té , dans des conjonctures
semblables, les décisions de la C o u r, qui avait à pro
noncer sur un# question de préférence entre deux
acquéreurs du même immeuble vendu par deux co
héritiers différens. L ’un des arrêts est du 23 messidor
an i i ; l ’autre du 9 floréal an i 3 . Ces arrêts se sont
principalement f ond és s ur ce que le partage, comme
déclaratif de p r o p r i é t é , pourrait seul apprendre la
quelle de deux ventes obtiendrait son effet en tout
ou en partie (1).
(1) Voir ccs arrêts dans le Journal de l’an i 3 , pages 335 et 338.
�( 32 )
S II.
D ’après les circonstances, la vente fa ite au sieur R ixa in
devait obtenir la p référen ce.
L a vente faite au sieur Rixain devait être préférée,
Comme la première en date, et en date connue du
sieur de Chazelles.
Comme la première aussi dont l ’existence ait été
légale ;
Comme
suivie de tradition réelle et de la mise en
possession d e l ’ a c q u é r e u r *
Comme faite par des vendeurs légitimes.
Sur la priorité de la date de la vente faite au sieur
R ix a in , il n ’y a q u ’un mot à dire : cette vente est
du 16 février 18185 celle du sieur de Chazelles n ’est
que du 22 du même mois.
Mais on oppose que la seconde vente est authen
tique , et que l ’enregistrement de la première est seu
lement du 4 mars. De là des raisonnemens puisés dans
l ’article 1828 du Code c iv il, relatif^ aux actes sous
privé.
Proposés p a r le
seing
s i eu r
de Chazelles, ces raisonnement
sont-ils bien sérieux?
E n établissant des règles sur la date des actes sous
seing privé, à l ’égard des tiers, le but du législateur
a été de prendre une sage précaution contre les anti
dates. Il a voulu prévenir les fraudes. Mais 011 ne
peut lui supposer l ’intention dç les favoriser.
�(.=3)
Que la date d ’ un acte sous seing prive soit réputée
incertaine à l ’égard des personnes qui l ’ont ignorée,
cela est juste.
Mais que ceux qui ont connu des conventions sous
seing privé, ceux à qui elles ont été communiquées,
qui se sont rendus certains de leur existence, puissent
abuser du défaut d ’authenticité de leur date, pour
surprendre ou obtenir des conventions authentiques
et détruire les premières ; c ’est ce que la morale
blâme hautement, c’est ce que l ’équité condamne ,
c’est ce que la loi ne saurait tolérer. Alienus clolus
nocere cilteri non clebet ( L .
met
.).
i l , if. de doli mal. es
. --- ----
O r , quelle a été la conduite du sieur de Chazelles?
Prévenu, par une lettre de M. D ebard, de la vente
faite au sieur Rixain, il se rend à Riom.
Il y rencontre le sieur de Gxomond des Ronzières,
un des signataires de l ’acte, qui lui confirme l'exis
tence de la vente.
Il se transporte chez le sieur H ébrard , notaire 7 qui
lui fait voir l ’acte sous seing privé, et lui dit que l ’on
attenddesprocurations pour passer un acte authentique.
Il invite alors le sieur Hébrard à offrir au
Oooo francs de bénéfice.
si eur
Rixain
Il emploie plusieurs personnes de Clermçnt pour
faire les mêmes offres.
Tous ces faits sont certains ; ils sont prouvés par les
propres écrits du sieur de Chazelles; ils ont été plaides
�'( » 4 )
et reconnus devant les premiers juges, et le jugement
les considère comme constans.
C ’est après une connaissance aussi parfaite d’une
vente antérieure, après des tentatives réitérées pour y
être subrogé, que le sieur de Chazelles va trouver
clandestinement, à Courpières, loin de R iom , loin de
son propre dom icile, un fondé de pouvoirs étranger,
à l ’ignorance duquel il surprend une seconde vente.
Quel procédé ! Que le sieur de Chazelles Je. qualifia
lui-même.
Nous sommes, il est vrai :
« L y n x e n v e r s no s p a ie ils } et taupes envers nous,
'« Nous nous pardonnons tout. »
M ais, quelle que soit pour lui-même l ’indulgence
du sieur de Chazelles, il est impossible que ses propres
réflexions ne le condamnent,
S ’il se pardonne, au reste, la morale et la justice
seront plus sévères \ elles ne consacreront pas une telle
manœuvre ; elles ne considéreront pas comme la seconde
en-date, à l ’égard du sieur de Chazelles, une vente
q u ’il connaissait aussi bien avant d'acquérir.
Mais l ’acquisition du sieur de Chazelles n ’a eu
meme d ’ e x i s t e n c e , que long-tems après l ’enregistre
ment de celle du sieur Rixain.
E n effet, de qui avait acheté le sieur de Chazelles,
le 22 février i B18 ?
D ’un procureur fondé, dont les pouvoirs restreints
pe l'autorisaient pas à vendre seul aucune partie des
fonds indivis entre les cohéritiers,
�C»s J
On l ’a déjà dit : l ’intention de tous les coproprié
taires du même lot avait été, dès l ’origine du partage,
de se réunir pour vendre les objets communs.
Cette intention, manifestée par une foule de lettres,
n’avait jamais changé; et M. Pinatelle, en recevant
la première procuration des sieur et dame de Ramond,
en avait été prévenu. Aussi madame de Ramond,, en
écrivant à M. de Gromond père, le 14 avril 18 16 ,
s’exprimait-elle ainsi :
« J’ai fait passer ma procuration à M. P in atelle,
.« et lui ai dit de se concerter avec vous. »
Aussi M. Pinatelle a-t-il lui-même souvent annoncé
que tout se ferait de concert. On a déjà rapporté les
expressions de ses lettres, des 4 décembre 1 8 iG ,
5 mai et 9 août 1 8 1 7 ; elles démontrent jusqu’à l ’évi
dence qu ’il ne devait pas, q u ’il ne pouvait pas vendre
isolément.
L a dernière procuration q u ’il r e ç u t , le 5 février
1818 , n ’était pas plus étendue; elle donnait seulement
pouvoir de se réunir a u x copropriétaires des mineurs
fieynaguet, pour vendre les objets indivis.
Ainsi, en vendant seul, le sieur Pinatelle excédait
son mandat. La vente était donc n u lle , comme faite
par une personne sans qualité.
Q u ’importe q u ’elle ait été ratifiée depuis par une
quittance du 3 septembre 18 18 , ou par un acte du
19 juin 1819? L ’existence légale de la vente n ’aurait
lieu que du jour de la l’atiiication expresse ou tacite,
£Jest-à-dire, plusieurs mois après l ’enregistrement de
4
�( 2(5 )
l ’acquisition du sieur Rixain. Celle-ci, sous ce rapport
même, est donc la première en d ate, puisqu’elle est
la première qui émane réellement d ’un des coproprié
taires de lïobjet vendu.
A ux
divers motifs de préférence que l ’on vient
d ’indiquer, le sieur Rixain en joignait un puissant,
tiré de sa prossession.
Tous les jurisconsultes ■connaissent le principe écrit
dans la loi Quotiès cluobus, au Code D e rei ven d icatione.
Quotiès duobüs in solidum prœdium ju r e distrahilur, manifesti ju r is est eum c u i priori traditum
est, in detinendo dominio esse potiorem.
'
Cette règle équitable
était fondée sur l ’intérêt
p u b lic , qui ne permet pas q u ’on puisse troubler des
possesseurs par des ventes secrètes quoiqu’antérieures y
et sur la bonne foi de celui qui avait acquis, dans
l ’ignorance d ’une autre vente dont aucune exécution
n ’avait fait connaître Inexistence.
A u ssi, pour que le.possesseur fût préféré, il fallait
q u ’il eût ignoré la première vente : inscius p r ia is
venditionis.
du droit romain étaient admis dans
le Droit français. On peut consulter Domat ( r ) ?
Ces principes
•Pot.liier (2), et les auteurs les plus recommandables.
Il serait superflu de rappeler ici avec détail leur doc•trine, et la jurisprudence qui l’a consacrée. E lle a déjà
(r) Lois civiles, «lu Contrat «le venie, section 2 , article i3.
(î>.) Potliicr, Trait«; du, Contrat clc ycnlc, n° 3 iy.
�( 27 )
été développée lumineusement dans le mémoire de la
dame Rixain. ■
•
Mais il est nécessaire de prévoir et de réfuter une
objection q u ’on puisera peut-être dans l ’article i 5 8 3
du Code civil.
Suivant cet article, la vente « est parfaite entre les
«
(f
«
«
p a r ties, et la propriété est acquise de droit à
l ’acheteur, à Végard du ven deur} dès q u ’on est
convenu de la chose et du prix, quoique la chose
n ’a it pas été livrée ni le prix payé. »
Quelques personnes croient trouver dans cette dis
position de la l o i , un argument décisif en laveur du
premier acquéreur. L e ven deur, diseut-ils, n ’a pu
vendre une cJios©
uc lui aj^pai tenait plus.
L ’objection-ne s’applique pas à la cause, puisque;
'le sieur Rixain et le sieur de Chazelles ont acheté de
vendeurs différens.
Mais, s’y appliquât-elle, elle serait écartée par
quelques réflexions.
Dans la législation romaine aussi, le simple consen
tement sur la chose et le prix rendait la vente parfaite
entre les parties. E m pdo consensu peragitur} dit la
loi i , in fu i.J f. D e contrah. empt. Em ptio et venditio
conirahitur sim ul atque depretio conveneritj, quant vis
nondum pretium numeratum sit. ('Instit. de em pt. et
vendit. J .
Le défaut de délivrance n’empêchait pas que la
vente ne fût parfaite dès le moment de la convention,
et que la propriété ne fût. acquise de droit à l ’acho-
�teur à l ’égard du vendeur. C ’est pourquoi, par appli
cation de la maxime res périt dom inoj dès l ’instant
du
contrat , la chose était au péril de l ’acheteur,
quoiqu’elle ne lui eut pas été livrée.
P ericu lu m rei venditœ statim ad emptorem pertinet,
tametsi adhuc ea res emptori non tradita est. (Instiu
de empt. et v en d it, § 3 .).
Tous ces principes étaient reçus dans le Droit fran
çais comme dans le Droit romain ( i ) ; et les dispositions,
de l'article 1 58 3 du Code civil n ’en' sont que la
répétition.
Il n ’y a donc pas de m o t i f , aujourd’hui plus
q u ’autrefois, de refuser la préférence à l ’acquéreur
q u i est le premier en possession, lorsque sa bonne foi
le protège.
Remarquons aussi que l ’article 1 5 8 3 du Code dit
seulement que la vente est parfaite entre les parties—
de Vacheteur au ven deur; mais q u ’il ne règle rien
par rapport aux tiers. O r , dans le silence de la loi
nouvelle, c’est aux lois anciennes, d ’où elle émane,
au Droit romain su r-to u t, que l ’on doit recourir ,
comme à une mine abondante des plus sages décisions.
Alors on a p p l i q u e c e t t e m a x i m e si c o n n u e , s ur l ’inter
préta tiou des lois : Leges priores ad posteriores trahuntur, et è contra.
Opposerait-on l ’article 2 18 2 , selon lequel le ven(1) Voyez Domat, Lois civiles, contrai de vente, section 7 , art. 2 ;
Potliier, Traité de la vente, n° 3 o}.
�r
5
déur ne transmet à l ’acquéreur que la propriété et le£
droits qu ’il avait lui-même sur la chose vendue ?
Mais cet article renouvelle seulement l ’axiome an
cien : Nem o p lu s ju r is in alium transferre potest
quam ipse habet. C ependant, malgré cette vérité ,
que personne ne contestait, on reconnaissait q u ’entre
deux acquéreurs qui tenaient leurs droits du même
vendeur, le second, s’il s’était mis en possession,
devait être préféré.
A in si, la législation nouvelle sur les ventes est la
même que la législation ancienne.
Les mêmes raisons, dans le même cas, doivent donc
aujourd’hui faire ¿1¿cUla- l question comme on la
décidait autrefois.
M. Malleville, un de nos législateurs, examine cette
question sur l ’article 2182 du Code civil; et il la
décide en faveur du second acquéreur, qui est le pre
mier en possession, en ajoutant que l ’article 1 583 n’a
rien de contraire à la loi Quotiès.
Si la préférence devait être accordée au sieur Rixain,
comme possesseur de la chose vendue, même en sup
posant qu’il l ’eût acquise après une première vente ,
et du même vendeur, a plus forte raison d o i t - i l l ’ob
tenir lorsque l ’on r e m a r q u e q u e le sieur Rixain a en
sa faveur la p r i o r i t é de la date, l ’avantage de la bonne
foi dans l ’acquisition, et celui d ’avoir acquis d ’un des
copropriétaires de la chose vendue, tandis que l ’acte
du sieur de Chazelles est seulement l ’ouvrage impar*
�(So)
Tait d ’un homme sans pouvoirs, qui a été le jouet de
Terreur et de la surprise.
Mais on a prétendu que les vendeurs du sieur Rixain
n’avaient pas eu le droit de vendre,
L ’assertion est facile à détruire.
Les sieurs de Bénistant et de Gromond avaient un
droit de copropriété à divers objets indivis, et notam-.
ment à la terre de Saint-Agoulin, dont faisait partie
le domaine vendu au sieur Rixain. C e droit de co
propriété suffisait seul pour les autoriser à vendre, et
pour faire maintenir l ’acquéreur en possession, tant
q u ’un p a r t a g e c o n s o m m é n ’ a u r a i t pas attribué à
d ’autres q u ’à ces vendeurs la propriété de l ’objet
vendu.
Il y a plus. Les sieurs de Bénistant et de Gromond
père avaient été autorisés, invités même plusieurs fois
par tous les copropriétaires, à négocier, à arrêter, à
faire les ventes de la totalité du lot commun.
Cela est prouvé par les procurations q u i, dès 1806,
avaient été envoyées à M. de Bénistant; par celles que
reçut, en 18 18 , M. de Gromond pèrej par les fré
quentes lettres q u ’ont écrites, avant et depuis 1818,
les sieur e t d a m e d e Mallare t , la dame v e u v e Des
Voisins^ la dame de Ramond elle-même; lettres dans
lesquelles les remerciemens des soins passés, les solli
citations pour q u ’on les continue à l ’avenir, les invi
tations à vendre les biens com m uns, dans l ’intérêt de
tous, les protestations de confiance absolue sont réilev
térées presque à chaque page,
�( 3i )
Cela est démontré par les lettres mémo du sieur
Pinatelle, fondé de pouvoirs de la dame de Ramond
qui écrivait, peu de tems avant la ven te, q u ’il était
d ’avis de faire afficher Saint-Agoulin ; e t , si l ’on en
trouvait un prix raisonnable, de le vendre; qui assu
rait que ni lu i ni M . de Ramond n ’avaient envie de
co n tra r ier .et q u ils se rangeraient toujours de l ’avis
des autres cohéritiers.
Cela est indiqué par les affiches qui ont précédé
les ventes, affiches qui désignaient MM. de Gromond
et de Bénistant comme seuls chargés de donner les
renseignemens, et de fixer les prix et les termes des
paiemens.
C e l a a e t c r e c o n n u par. le sieur de Chazelles luimême, qui jamais ne s’était adressé à d ’autres q u ’h
MM. de Gromond et de Bénistant, et qui aussi, dans
les qualités du jugement dont est appel, rappelle les
négociations dont avait bien voulu se charger M. de
Gromond père, du consentement de toutes les parties/
et parle de leur confiance absolue en lui.
Enfin cette vérité s’est manifestée encore depuis la
vente faite au sieur R ixain , par les lettres approbatives de tous les cohéritiers, si l ’on en excepte cepen
dant M. de Ramond. Les regrets même que celui-ci
exprima dans les lettres q u ’il écrivit alors, font assez
connaître que s’il n ’approuva pas la vente, c’est q u ’il
se laissa entraîner par la condescendance q u ’il crut
devoir à son procureur fondé.
Com m ent,
d ’après de telles circonstances, n-t-on
�(30
pu hasarder de dire que MM. de Bénistant et de
Gromond n ’avaient pas le droit de vendre?
Comment a-t-on hésité à consacrer une vente, que
les vœux de tous les copropriétaires avaient préparée,
et dont l ’intérêt de tous commandait l ’exécution ?
Supposer que les cohéritiers de la dame de Ramond
avaient épuisé leur capacité, par l ’aliénation faite en
faveur de M. d e B o n n evie, du surplus de la terre de
Sain t-A goulin , c’est commettre une erreur de fait et
une erreur de droit.
XJne erreur de fait : car cette aliénation avait été
arretée en pr é se nc e du s i e u r Pinatelle. Il avait concouru
à la rédaction de l ’acte sous seing privé; il a v a i t luimême compté l ’argent qui fut alors reçu ; il était lié
pour ses mandans, par son consentement et par l ’hon
n e u r, autant que tous les autres cohéritiers. Ces faits
ne seront pas niés; il serait, au reste, facile de les
prouver.
A in s i, la vente sous seing p riv é , faite au sieur de
B on n evie, était l ’ouvrage de tous les cohéritiers ; et
tous auraient du concourir à l ’acte authentique. C ’est
même dans ce b u t , que le sieur Pinatelle demanda
aux sieur et dame de Ramond une nouvelle procurar
tion, plus explicative. C ’est dans ce but., que celte
procuration lui fut envoyée, comme le prouveraient
les lettres de demande et d ’en voi, si elles étaient pro
duites;
comme le démontrent même les termes de
la procuration , qui parle précisément de la terre de
Çiaint-AgouUn, k vendre.
^
�C 33 )
S i , depuis, le sieur Pinatelle et ses mandans ont
refusé seuls, entre tous les cohéritiers, de signer l ’acte
authentique, il n ’en est pas moins vrai que cette vente
doit être considérée comme leur propre ouvrage, et
comme leur étant commune; il n’en est pas moins
vrai que c’est dans la confiance que personne ne man
querait à la foi promise, que MM. de Bénistant et de
Gromond ont souscrit une autre vente en faveur du
sieur Rixain, et q u e , par conséquent, ils ont pu faire
cette autre vente.
Mais il y a erreur de droit dans l ’objection.
L a vente faite au sieur Rixain est la première qui
ait reçu une date certaine. E lle a été enregistrée le
4 mars 1818. L ’existonco a u t h e n t i q u e de la vente du
sieur Bonnevie est postérieure de plusieurs mois; car
l ’acte notarié est seulement du 22 mai suivant.
Les conventions antérieures et sous seing privé ne
peuvent être opposées au sieur R ixain , qui a le droit
de se considérer comme premier acquéreur, et d ’exiger
que sa vente soit exécutée plutôt que toute autre.
Ces conventions ne peuvent même être opposées à
MM. de Bénistant et de Gromond; car elles ne sont
prouvées que par leur aveu; et ils ont déclaré en
même tems qu’elles avaient cté faites avec le concours
du fonde de pouvoirs des sieur et dame de Ramond.
O r , leur déclaration est indivisible.
D on c, à consulter rigoureusement les règles de la
loi, ils ont pu vendre au sieur Rixain, en février 1818;
Ht, suivant le raisoiîiifiment des premiers juges, comme
?
�( 34 )
l ’objet vendu n ’excédait pas leur portion héréditaire 7
celte vente doit être respectée.
Ainsi s’évanouissent les argumens que l ’on avait
accumulés pour détruire un acte dicté par la loyauté
et par l ’intérêt de tous les copropriétaires, et pour
faire triompher un procédé que l ’opinion, la morale:
et la loi condamnent également.
§ III.
L a subrogation légale devait être admise.
Les moyens développés
d a n s les p a r a g r a p h e s p r é c c -
dens font connaître les nombreuses difficultés qui ont
été déjà et qui seront encore la suite de l ’acquisition
du sieur de Chazelles.
U n partage général à faire ? des questions compli
quées à résoudre, la nullité de l ’une des deux ventes
à prononcer, la préférence entre les deux acquéreurs
à déterminer, des actions en garantie à juger.
U n moyen simple et légal était présenté au tribunal
de première instance pour échapper à tant de difficul
tés. C e moyen consistait dans la subrogation légale
demandée par MM. d e B é n i s t a n t et d e Gromond contre
M. de Chazelles. Pourquoi n ’a-t-il pas été saisi?
Cette demande est renouvelée devant la Cour : elle'
pourra dispenser de tout
autre examen -, car si les
autres questions ont été discutées les premières , le
b ut unique a été de convaincre de l ’u tilité , de la
�C 35 )
ùÿ
nécessité même de la subrogation que l ’on propose
MM. de Bénistant et de Gromoud offrent d ’ailleurs
de renoncer à tous leurs autres moyens, si le sieur de
Chazelles consent, ou si la Cour ordonne q u ’ils soient
subrogés aux droits de celui-ci; ils offrent, dans ce
cas, de lui restituer le prix et les intérêts q u ’il u
payés, les frais de l’acte, ceux même du procès, jus
q u ’au jour où ils ont demandé cette subrogation, en
première instance, ou jusqu’il tel autre jour qui sera
déterminé par la Cour.
Cette demande a été écartée, sous le prétexte que
le contrat de vente portait sur un objet isolé et dé
terminé. L ’article 8 4 1 du Code civil, ont dit les pre
mi e r s juges, n ’est pas a p p l i c a b l e à u n tel cas.
Il y a une double erreur dans ce motif.
L a subrogation doit être admise,
i° parce que la
vente ne comprenait q u ’une portion d ’objets indivis
entre cohéritiers; 20 parce que les droits cédés étaient
évidemment litigieux.
L e sieur de Chazelles n ’avait pas acheté un objet
certain, déterminé et particulier; il s’était fait vendre
la moitié d ’un domaine indivis entre un grand nombre
de cohéritiers.
Pour qu’il puisse indiquer lui-même les héritages
q u ’il a a c q u i s , un 2iartaSc csC nécessaire ; aussi les
premiers juges ont-ils ordonné la division du domaine
en deux lots.
Mais ce n’était pas assez. L e partage de la totalité
des objets indivis entre les cohéritiers doit se faire,
�( 36 3
comme 011 l ’a déjà prouvé, parce que ce partage gé
néral peut seul apprendre quel sera, parmi les cohé
ritiers, le vrai propriétaire du domaine.
O r, la vente faite au sieur de Chazelles lui donne
le droit d’assister à ce partage, de le provoquer même,
de porter un œil curieux dans tous les secrets de la
fam ille, de paralyser les moyens conciliatoires, si fréquens entre cohéritiers, si difficiles lorsque des étran
gers viennent apporter au milieu des parens leur roideur et leurs prétentions. L ’article 8 4 1 du Code civil
doit être appliqué au sieur de Chazelles; car chaque
cohéritier a intérêt à l ’éloigner du partage.
L a Subrogation a é té o r d o n n é e , d a n s u n cas sem
blable, par un arrêt de la C ou r de T u rin , du 18 mars
1808 ( i) . U n arrêt plus récent, rendu par la Cour
de Lim oges, le 3 août 1 8 1 8 , l ’a aussi admise contre
le cédataire de la moitié indivise d ’un domaine dé
pendant d ’une succession ; et c’est vainement que
l ’arrêt a été attaqué devant la Cour de cassation. Le
pourvoi a été rejeté le i4 juin 1820 (2).
Mais le moyen de subrogation devait aussi être
accueilli sous un autre rapport.
Les objets cédés étaient litigieux : rien de plus
évident. S ’il fallait u n e p r e u v e de c e t t e v é r i t é , on la
puiserait dans la
nécessité même où s’est trouvé le
(1) Voir l’arrêt dans le Journal de Dencvers, vol. de 1809, suppl.,
page 9.
(2) Voir l’arrêt de cassation dans le Journal de Sirey, tome 21 f
page 92 , première partie»
�( ^7 )'
sieur de Chazelles de commencer par une action
ciaire l ’exercice du droit q u ’il avait acquis.
Le vice de l ’acquisition était connu du sieur de
Chazelles : il savait qu'il achetait un procès. S ’il n ’en
a pas été effrayé, q u ’il soit au moins permis k des
personnes moins aguerries de ne "pas consentir à en
éprouver les chances et les lenteurs. L ’article 1699 du
Code civil les autorise à s’en affranchir par le rem
boursement du prix et des frais de la vente : ils veulent
user de ce bénéfice. L a loi, l ’équité, toutes les consi
dérations se réunissent, il semble, pour le leur assurer,
en faisant cesser un procès qui déjà fut d’une trop
longue durée, et qui serait encore suivi d ’une fatigante
involution de procédure et île ju gemens, si le remede
efficace de la subrogation n ’en arrêtait le cours.
S IV .
Observations sur la garantie réclam ée par la
dame R ixain.
Tant et de si puissans moyens repoussent l ’agression,
du sieur de Chazelles contre la dame Rixain, que la
Cour n’aura pas à s’occuper, sans doute, de la ga
rantie si sévèrement
M M . de Bénistant et
obtenue des premiers
L e jugement doit
demandée par celle-ci contre
de G r o m o n d , et si largement
juges.
étonner aussi dans cette partie
de ses dispositions.
Que l ’on inflige des dommages et intérêts à des
�7
( 38 )
vendeurs de mauvaise foi, q u i, surprenant l ’ignorance
d ’ un acquéreur, lui vendent ce q u ’ils savaient n ’avoir
pas le droit d’aliéner.
Mais prononcer une in d em n ité, suivant une estima
tion p ar exp ei'ts, contre des vendeurs confians, dont
les qualités et les droits étaient connus de l ’acquéreur
lui-même; leur faire porter tout le poids d ’une faute
qui leur est étrangère ; les punir de l ’imprudence de
cet acquéreur, qui a négligé de faire enregistrer sa
ve n te, et qui a préparé ainsi le plus fort des moyens
q u ’on lui oppose, c’est, il semble, pousser la rigueur
jusqu’à la d u r e t é ^ e t , si l ’on appelait cela de la j u s t i c e ,
il faudrait se hâter de renvoyer à cette maxime ;
Sum m um j u s , summa in juria,
Ces courtes observations suffisent sur une question
qui n ’est q u ’accessoire. Ce sont les questions princi
pales , ce sont les moyens qui repoussent l ’agression
dn sieur de Ghazelles, qui saisiront sans doute l ’atten
tion de la C o u r, et qui fixeront sa justice. Convaincue
de l ’irrégularité de l ’action intentée par le sieur de
Ghazelles, de la nécessité d ’un partage qui eut du la
précéder, et sans lequel elle ne pourrait être accueillie ;
étonnée des étranges circonstances qui ont accompagné
une acquisition que l'aveuglement des passions pouvait
seul conseiller, et que la réflexion et la morale devaient
interdire ; frappée des difficultés nombreuses et des
frais considérables que traîne à sa suite le procès q u ’a
�( 39 )
cherché et q u ’a acquis le sieur de C h azelles, la Cour
mettra un terme à ces vexations; elle ordonnera la
subrogation q u i, dans la cause, est autorisée sous un
double rapport; cette subrogation équitable, invention
bienfaisante du droit romain, et que le droit français
s’est empressé d ’accueillir; cette subrogation protec
trice, qui éloigne des partages de famille l ’ oeil indis
cret de l ’étranger; cette subrogation salutaire, destinée
aussi a faire cesser les discordes, en mettant un frein
aux tracasseries ou à la cupidité des acquéreurs de
droits litigieux.
M. D E
BÉN ISTAN T.
M. D E GROM OND D E S RO N ZIÈ R E S.
Me A L L E M A N D
A vocat.
Me D E V E Z E , L icen cié-A voué.
R I O M ) I M P R I M E R I E DE S A L L E S , PRÈS L E P A LA I S DE J U S T I C E .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Soubrany de Bénistant, Jacques. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Devèze
Subject
The topic of the resource
ventes
doubles ventes
successions
Chazerat (Madame de)
experts
actes sous seing privé
possession
jurisprudence
bonne foi
procuration
partage d'un domaine
équité
enregistrement
domaines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour messieurs Jacques Soubrany de Bénistant, et Pierre Farradesche des Ronzières, appelans et défendeurs en garantie, contre monsieur Antoine Berard de Chazelles-Labussières, intimé ; contre madame de Champétières, veuve de M. Penautier, épouse, en secondes noces, de M. de Ramond, tuteur des mineurs de Penautier, intimés ; et contre madame Marie-Caroline Lacoste, veuve de M. Jean-Jacques Rixain, docteur en médecine, tutrice de ses enfans mineurs, aussi intimée et appelante.
Table Godemel : concurrence : 3. le principe introduit par l’article 1328 du code civil pour prévenir les fraudes et non pour les favoriser, ne peut être appliqué qu’entre deux acquéreurs de bonne foi, et lorsque celui qui a acquis par acte authentique a ignoré la vente qui précédemment avait été faite, en faveur d’un autre, par acte sous signature privée. Spécialement la préférence peut être accordée à la vente faite sous seing privé, quoique son enregistrement soit postérieur à la date de la seconde vente, consentie devant notaire, lorsque cette dernière vente avait été faite par un mandataire, contrairement aux termes de la procuration, et lorsqu’il est établi que le second acquéreur avait une connaissance personnelle de la vente antérieure à celle qu’il a obtenue par acte authentique.
4. quelle doit être l’étendue de la garantie accordée au second acquéreur dont la vente reste sans effet par suite de la connaissance personnelle qu’il avait sur l’existence de la première vente, et de son silence à cet égard envers le mandataire ?
n’est-ce pas suffisamment pourvoir à ce qu’il peut prétendre, que de lui allouer le remboursement des sommes qu’il a payé sur le prix de la vente, ainsi que de ses déboursés pour frais et loyaux coûts, avec les intérêts à compter des époques de paiement ou de déboursés ; et, de plus, les dépens auxquels il est condamné ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1818-1822
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2527
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2526
BCU_Factums_G2528
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53513/BCU_Factums_G2527.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Neufonds (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bonne foi
Chazerat (Madame de)
domaines
doubles ventes
enregistrement
équité
experts
jurisprudence
partage d'un domaine
possession
procuration
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53514/BCU_Factums_G2528.pdf
7fcde7791d4a5b9a9d0626af5aa3198d
PDF Text
Text
■a
iu
Y
i
«J « m -m m u m m
MÉMOIRE
EN
P O U R M. Antoine
«■
REPONSE,
BERARD D E
C HAZELLESCOUR ROYALE
L A B U S S I È R E , intim e;
DE IUO1M.
CONTRE
i ro c h a m b r e .
M M . J acques S O U B R A N Y D E B É N IS T A N T
et P i e r r e F A R R A D E S C I I E D E S R O N Z I È R E S ,
appelans et défendeurs en garantie;
E
C O N T R E D am e M a r i e -CarolineLACOSTE
^
veuve de M Jean-Jacques R i x a i n , D octeur en
t
m édecine, tutrice d e ses enfans m in eurs
aussi
intimée et appelante
E T EN PRÉSENCE
D e M adame de C H A M P È T I È R E 3 veuve de
M . P e n a u t ie r ; épouse, en deuxièm es noces, de
M . Ramond, tuteur des mineurs P e n a u t i e r , ayant
pris le f a i t et ca u se, et garans de M . B e r a r d de
C ha z e l l e s , intim é
préférence
a
L
respectivement demandée par deux
acquéreurs du même immeuble, faisait d ’abord la seule
difficulté de cette cause, et en est encore aujourd’hui
l ’unique objet.
�Une vente authentique, consentie par madame dèf
Ramond ou son fondé de pouvoirs, a transmis à
M. Berard de Chazelles la propriété de la moitié du
domaine de Ncufond. L e sieur Rixain a voulu se
mettre en concurrence avec ce premier acquéreur, et
a produit une vente, sous seing privé, de la totalité
du même domaine , vente q u ’il aurait reçue de
MM. Soubrany-Bénistant et Farradesche des Ronzières.
L ’enregistrement de cette seconde vente est
postérieur à la date de celle de M. de Chazelles ;
mais comme l ’acle sotis seing privé a d’ailleurs une
date a n t é r i e u r e à c e l l e de l ’ a c t e authentique, le sieur
Rixain soutenait que son acte devait a v o i r l a p r é f é
rence sur celui de M. de Chazelles, soit parce q u ’il
était le premier en possession du domaine de Neufond,
soit parce que M. de Chazelles, connaissant la pre
mière vente à l ’époque de son acquisition, ne pouvait,
sans d o l ou mauvaise f o i , acheter un immeuble q u ’il
savait déjà vendu à un autre; d ’où il tirait la consé
quence que la date de la vente devait être considérée
comme certaine à l ’égard de M. de Chazelles , qui
n ’était cependantqu’ un tiers, tout comme elle le s e r a i t
vis-à-vis de MM. Soubrany-Bénistant et Farradesche,
scs vendeurs.
L ’imagination fertile du sieur Rixain lui fournit
bientôt les moyens propres à soutenir son système ;
quelques faits supposés ou dénaturés lui servirent de
prétexte pour invoquer des maximes anciennes, abro
gées ou changées par notre nouveau Droit; et bientôt,
aveuglé par son intérêt, il en vint jusqu’à méconnaître
�( 3 )
ce q u ’il devait aux autres et à lui-même, en se livrant
à des imputations et à des déclamations que M. de
Cliazelles dut dédaigner.
L a vente consentie à M. de Cliazelles par le fondé
de pouvoirs de madame de Ramond, avait été approu
vée par cette dernière et celui de ses enfàns qui avait
atteint sa m a j o r i t é . M. de Cliazelles ayant l a i t con
naître sa positionna cette dame, elle s’empressa de
prendre son fait et cause. Le sieur Rixain appela à
son tour ses vendeurs, en garantie ; et dès-lors de
nouvelles parties durent prendre part à une contesta
tion qui leur devenait personnelle, et dont elles de
vaient supporter tout le poids.
L a q u e s t i o n de propriété de l ’immeuble vendu fut
alors agitée entre madame de Ramond, représentée
par M. de Cliazelles, et MM. de Bénistant et de
G r o m o u t , qui avaient vendu au sieur Rixain.
Madame de Ramond, ou M. de Cliazelles, son ac
quéreur, soutenaient que le domaine deNeufond étant
un immeuble indivis entre différons copropriétaires ,
chacun avait eu le droit de vendre sa portion , mais
q u ’aucun d ’eux ne pouvait avoir la faculté d’excéder
son amendement, et de vendre ce qui ne lui appar
tenait pas. Elle ajoutait q u ’il était p r o u v é e t reconnu,
même par MM. de B é n i s t a n t ct.Farradesclie, qu e, par
des ventes antérieures à celle de M. de Chazelies et
celle de Rixain, qui lui est postérieure, ils avaient
déjà disposé de leur portion dans l'immeuble
com m un
et indivis, tandis q u ’elle-même, en vendant à M. de
Cliazelles ,
s’était
restreinte
à sou amendement ,
�(4 )
q u ’elle n’avait pas même épuisé. Madame de Ramond
tirait de-là la conséquence q u e , dans tous les cas, la
vente de M. de Chazelles devait être respectée comme
ém a n a n t d u 'véritable p r o p r ié ta ir e , et obtenir la pré
férence sur celle consentie au sieur Rixain par d es non
p rop riéta ires.
Pour répondre à ce moyen, MM. de Bénistant et
Farracïesche recherchaient l ’origine«de la propriété de
ÜNeufond. Suivant eux , cet immeuble n ’ éta it p o in t
simple p r o p r ié té in d iv ise entre particuliers, mais bien
un objet dépendant d ’ une su cce ssio n à p a rta g er entre
cohéritiers.
De là ils inféraient :
i° Que la demande, formée par M. de Chazelles
contre le sieur Rixain , était mal "intentée ; q u e ,
comme représentant madame de Ramond, il ne pou
vait avoir d ’autre action que celle en partage ; que
cette action devait être dirigée contre tous les héri
tiers, et comprendre tout ce qui composait la suc
cession à partager; q u ’ainsi, sous ce premier rapport,
la question de préférence à accorder à l ’un des deux
acquéreurs devait être renvoyée à l ’événement du
partage;
2° Que l ’immeuble ne pouvait être partagé sans
éprouver une perte notable; q u ’ainsi il y avait lieu
à licitation d ’ un objet q u i , dans aucun cas, ne devait
être démembré par un partage ou des ventes partielles;
' 3° Q u e , comme cohéritiers de madame de Ramond,
ils avaient la faculté d ’écarter M. de Chazelles du
partage,
par l ’excicice de l ’action en subrogation,
�( * )
J
action qui ¿lait tVailleurs d’autant plus favorable
que M. de Cliazelles était acquéreur de droits litigieux*
MM. de Bénistant et Farradesche soutenaient ensuite
qu ’ils avaient vendu au sieur Rixain, comme fondés
de pouvoirs de madame de Ramond; que celui qui
au nom do cette daine, avait transmis à M. de Clia
zelles la propriété de la moitié du domaine de Neuibnd
ou n ’avait point de mandat à cet effet, ou en avait
excédé les termes; q u ’eniin ce prétendu fondé de pou
voirs de madame de Ramond aurait été trompé par
M. de Cliazelles, qui^ pour obtenir une vente, lui
aurait laissé ignorer celle préexistante du même objet,
consentie par
de benisiaiit et luimiJoscho nu sieur
R i x a i n , m a l g r é t ou te foi s la connaissancepersonnelle q u ’il
en avait. Sous ce dernier rapport, les trois adversaires
de M. de Cliazelles et de madame de Ramond réunis
saient leurs efforts p o ü r faire accorder la préférence à la
vente consentie au sieur Rixain.
MM. de Iiénistant et Farradesche s’étaient mépris
sur les faits de la cause; ils les avaient présentés
d ’ une manière si erronnée et si incomplète, q u ’il était
facile, en les rétablissant et leur donnant la seule et
véritable interprétation q u ’ils puissent recevoir, de
prouver q u ’ils conduisent à des r é s u l i a t s tout opposés
à ceux que ces M e s s i e u r s e n ont voulu tirer : aussi
l ’invention des moyens répond-elle à l ’exposé des faits.
Les appelans ont examiné une foule de questions qui
ne se présentent pas, et se sont encore mépris sur les
principes qui doivent servir à résoudre celles qui
naissent réellement des faits de la cause.
�M . de C h a z e ll e s a réussi en première instance. P o u r
répondre a u x d e u x Mémoires distribués sur appel par
la dame v e u v e Iiixain et
les sieurs de B é n i s t a n t et
F a r r a d e s c h e , il se contentera d ’ int erroger, avec la plus
gran de
a t t e n t i o n , les faits d u
procès,
et d ’é ta bl ir
ensuite trois propositions , a u t o u r desquelles v i e n d r o n t
se ranger les n o mb reu ses objections ( b i e n
faciles à
d é t r u i r e ) de ses adversaires.
L a p r e m i è r e . — Q u e , le do m a in e de N e u f o n d é t a n t
line propriété indivise entre p a r t i c u l i e r s , et non u n
objet dépendant d ’ une succession à p a rtag er entre
c o h é r i t i e r s , u n cles copropriétaires de cet i m m e u b le a
p u ve ndr e sa p o r t i o n , sans q u e
son a c q u é r e u r
fût
soumis à exercer u n e action en p a r t a g e , à souffrir u ne
l i c i t a t i o n , et f u t exposé à F a ct io n en subrog ati on.
L a seconde . — Q u e , sous le C o d e c i v i l , la propriété
d ’ un
immeuble
ét an t
transmise à
l ’a cq u é re u r par
l ’effet seul d u c o n tr a t de v e n t e , et sans q u ’il soit
besoin d u concours de la t rad it ion ou de la t ra n sc ri p
t i o n , u ne ve n te sous seing privé ne p e u t être opposée
a u x tie rs , q u ’a u t a n t q u e sa da te serait assurée par les
moyens ind iqu és par la l o i ; q u e ce lu i q u i a négligé de
p re n d r e ces p r é c a u t i o n s , ou n ’a pas s o n g é à assurer lai
dat e de son t i t r e , n ’est p oi nt p r o p r i é t a i r e , et ne p eu t
accuser de fr aude le tiers q u i , prof ita nt d ’ u n avantage
q u i l u i était offert par la l o i , a u r ai t acquis l ’i m m e u b l e
par u n acte a u t h e n t i q u e ,
régulier et t ra ns la tif de
propriété.
La.
tro isièm e
.
— Q u e , sous les anciens p r in c i p e s , la
tradition , pe nda nt le droit inte rm éd ia ire la transcrip -
�( 7 )
î.
lio n , e t , sous le Code civil, le titre s e u l, ne transfé
rant la propriété, qu'autant que la vente aurait été
consentie par le véritable propriétaire j et , dans
l ’espèce, le seul propriétaire de l ’immeuble vendu
étant madame de Ram om l, M. de Chazelles, son
acquéreur, doit obtenir la préférence sur le sieur
Rixain , qui , sous aucuns rapports, ne peut se
plaindre ou argumenter de la connaissance que M. dû
Chazelles aurait eue d ’une vente antérieure à la sienne,
émanant d ’un vendeur qui n’était pas propriétaire.
Les développemens et les détails dans lesquels on
sera obligé d ’entrer détruiront, an reste, les alléga
tions, les insinuations et les ré Licences r/ne l ’an a cru
pouvoir s e jjerme u r e c o n t r e JYT. de Chazelles, et aux
quelles il a dit être sensible. Cependant, en y répon
dan t, il n’oubliera point que l ’honneur même lui
impose la loi de respecter les adversaires q u ’il
obligé de combattre.
est
FAITS.
Le domaine de Neufond faisait partie de la terre de
Saint - Agoulin , dépendant de la succession de ma
dame de Chazerat, ouverte en i 8o5 . C o m m e c’est en
q u a l i t é d ’ h é r i t i e r s d e cette c l a m e , et par suite du
partage de sa succession, que les vendeurs respectifs
de Mi\l. de Chazelles et Rixain ont obtenu la propriété
indivise de cette terre, quelques détails sont indispen
sables pour apprécier la nature du titre et reconnaître}
lus droits d^chacun de ces vendeurs.
�(8)
Madame de Chazerat avait disposé de son immense
fortune par cinq lestamens et codicilles, oil, après
avoir fuit différons legs, soit à litre particulier, soit
à titre universel, elle donne à M. de Chazerat , son
époux, outre l’ usufruit de tous ses biens, lu propriété
de son mobilier et .créances; e t , q u a n t ¿1 la p ro p n é lé
d e ses im m e u b le s , voulant q u ’ils retournent à ceux
de ses parens qui descendent des estocs desquels ils
lui sont parvenus, elle les donn e ii chacun de ses pa
rens de la b ran ch e de ses a j e u l et a y e u le p a ter n els et
<le celle de son a y e u le m a te r n e lle , qui seraient en
ordre de l u i s u c c é d e r s u i v a n t les règ les de la j'cprcscntation à V in Jin ij telle q u ’elle avait l i e u d a n s la
c i-d e va n t C o u tu m e d ’A u v e r g n e > pour lesdits biens
être partagés entre les trois branches, au m arc la
liv re de ce qui lui était parvenu, et être ensuite sub
divisés suivant les mêmes règles.
Cette disposition testamentaire appelait au partage
de la succession de madame de Ch azerat, i° les des
cendant de Jean Rollet, ayeul paternel, dont la tes
tatrice avait reçu les domaines de Mirabelle ; 20 les
descendans de la dame V ig o t , ayeule maternelle, qui
avait a p p o r t é u n e c o n s t i t u t i o n dotale de i5,ooo ir. ;
3° les descendans de G il b e n c G r o s , ayeule mater
nelle, qui avait transmis à la dame de Chazerat les
domaines d ’Entraigue et de Jpse; mais la même dis
position excluait un quatrième estoc, celui de JeanMarcelin, q u i , n’ayant possédé aucuns biens
et n ’ayant rien transmis à. la testatrice, ne pouvait
prendre part à sa succession,
,
Philibert
\
�( 9 )
T
Les biens propres à la testatrice, ou à elle provenus
de son père, et qui devaient faire, entre les trois
estocs favorisés, l ’objet d ’un partage au marc la livre
étaient la terre de Saint-Agoulin, les domaines et pro
priétés de Ménétrol, les bois d ’Aubusson, les meubles
et créances.
Ce testament devait donner lieu à des difficultés
sérieuses, et faire naître de longs procès; aussi le par
tage de la succession ne put-il avoir lieu q u ’en 181G,
c’est-à-dire onze ans après son ouverture.
Pendant ce tems, les trois estocs favorisés par le
testament de madame de Chazerat eurent 'a répondre
à une demande en n u l l i t é f o v n i a c p a r l ’astoc e x c l u ,
cle Marcellin, qui soutenait que la disposition testa
mentaire était en contravention formelle avec le Code
civil, qui défend de s’en référer, en termes généraux,
aux dispositions d ’une Coutume abrogée, et de les
prendre pour règle de la dévolution de ses biens.
Ce premier procès terminé , les trois estocs appelés
se divisèrent, et plaidèrent entr’eux.
D ’abord l ’estoc Rollet voulut faire appliquer aux
descendans de Gilberte Gros la forclusion, avec toutes
les règles de la Coutume d’Auvergne, ce qui donna
lieu à des débats t r è s - l o n g s e t t r è s - s é r i e u x .
Plus tard, chaque estoc éleva des difficultés sur le
mode de partage au marc le franc ; chacun interpré
tait cette disposition du testament suivant ses intérêts,
présentait un mode de partage différent de celui qui
était proposé par les autres estocs; et ces points ne
3
�furent ni les moins longs ni les moins difficiles à
résoudre.
Enfin il fallait se régler avec M. de C hazerat, rela
tivement à l ’usufruit des immeubles, au don du mo
bilier et des créances, qui lui avaient été légués par
madame son épouse, et aux avances q u ’il avait faites
pour la succession, dont il avait payé tous les droits.
Il paraît q u ’à cet égard il y eut, entre les héritiers
et M. de Chazerat, des conventions particulières, par
suite desquelles les bois d ’A u b u ss o n , le s rentes} e jje ts
p u b li c s j et autres c r é a n c e s , n ’ont p o in t é té com p ris
d a n s le p a r ta g e q u i a eu lieu entre toits le s héritiers
testam entaires d e m ad a m e de C h a zc r a t.
On sent que les affaires d ’une succession qui pré
sentait tant de prétentions diverses de la part des
héritiers, dont les bases du partage étaient méconnues
et contestées, qui enfin offrait de si nombreuses diffi
cultés dans sa liquidation, ne pouvaient être surveillées
et suivies par chacun des nombreux héritiers composant
les trois estocs appelés par le testament de madame de
Chazerat : aussi voit-on que, dès l’origine, chacun de
ces estocs se choisit un procureur fondé, spécialement
chargé tle d i r i g e r et surveiller, dans son intérêt, les
affaires de la succession.
L ’estoc R o llet se divisait en deux branches, ayant
chacune un droit égal à la portion que l ’estoc pouvait
amender dans la succession de madame de Chazerat;
i° la branche d ’Àmable Rollet, représentée au partage
par les familles Davaux et Cadier-Devauce ; 2° la
branche de Gilbcrie R o llet, qui avait épousé M. Amable
�( 11 )
Soubrany, se divisant elle-même en deux branches
l ’une, celle d ’Amable Soubrany, second du nom,
époux d ’une demoiselle de B én o g u ct, d ’où descendent
les familles V oisin sj M a lle i'c t et P e n a u lie r , ce der
nier représenté par M. de Chazelles; celle d ’Amable
Soubrany, troisième du nom, d ’où proviennent les
maisons Archon-Despérouses 3 de B én istan t, de Lauzanne et de Gromont 3 représentées, au procès, par
M. Rixain.
Ces deux dernières branches avaient des intérêts abso
lument communs; et comme les descendans Bénaguet
habitaient le Languedoc , et que les représentans Farradesche étaient tous établis à R lo m , lien do l ’ouver
ture de la s u c c e s s i o n de madame de Chazerat, il était
naturel que des cohéritiers dont les droits et les pré
tentions étaient semblables, fissent cause commune et
agissent de concert et dans le même sens, en donnant
leurs pouvoirs à ceux d ’entr’eux qui étaient le plus
à portée de surveiller les affaires de la succession.
Ces préliminaires étaient indispensables pour péné
trer le véritable sens et assigner l ’étendue des lettres
et procurations produites par MM. de Bénistant et
Farradesche, et dont ils ont voulu faire un si singulier
usage.
E n lisant ces pièces, on remarque d ’abord que
M. de Bénaguet-Penautier était celui des héritiers de
la branche Bénaguet, qui s’occupait le plus activement
des affaires de la succession de madame de Chazerat,
et qu ’il avait même la confiance' de madame Voisins
et de M. Malleret, ses cohéritiers. La raison de cela
�( 12 )
se trouve dans le mariage que M. Bénaguet de Penautier avait contracté avec mademoiselle de Champétière,
alliance qui devait rendre plus fréquentes et faciliter
ses relations avec la ville de Riom , lieu du domicile
et siège des affaires de la maison de Champétière.
Aussi voit-on par les pièces produites, que M. Bé~
naguet de P en a u tîer, faisant tant pour lui que pour
madame V oisins et M. M a lle r e t, donna, le 10 jan
vier 1806, une procuration sous seing privé, à M. de
Bénistant, portant simplement pouvoir de fa ire toutes
les démarches nécessaires pour la succession, de payer
les d r o i t s p r o p o r t i o n n e l s , de retirer quittances.
Mais les difficultés commençant h n a î t r e , e t l e s p r é t e n
tions du représentant de l ’estoc exclu étant connues,
M. de Bénistant sentit la nécessité d ’obtenir des pouvoirs
nouveaux et plus étendus : ils furent demandés ; et
bientôt deux procurations, l ’une du 23 février 1806,
adressée par madame V oisin s, habitant à Carcassonne,
l ’autre, du 26 du même mois, envoyée par M. M a l
leret , domicilié à T o u lo u se} arrivent à M. de Bénis
tant. Ces deux procurations, qui ne sont autre chose
que la copie d ’un protocole de notaire, et q u i , malgré
la d i s t a n c e d e s domiciles des constituans, s o n t l ’image
fidelle et 1’ expédition t e x t u e l l e l ’ u n e d e l ’autre, con
tiennent, comme 011 le pense bien, les pouvoirs les
plus absolus et les plus illimités. Ainsi le procureur
fondé doit prendre connaissance des biens composant
la succession, faire les actes conservatoires , requérir
Y apposition et la rémotion des sce llé s, assister à Y in
ventaire 3 faire procéder au partage, se mettre en
�possession d es lo ts, e t c ., traiter sur Y u s u fr u it, p la id e r ,
transiger............. ; et c’est au milieu de tout cela que
l ’on lit que le procureur fondé pourra v e n d r e , soit
a v a n t , soit après p a r t a g e , la p o r t i o n du c o n s t i t u a n t ,
et c o n s e n t i r , s ’ i l est besoin , a u x v e n t e s q u i a u ra ien t
é t é d é jà f a i t e s , ou q u i le s e r a i e n t p a r d ’a u t r e s
HÉRITIERS.
Dans le même tems, et le i 3 mars 18 1 2 , M. Bénaguet de Penautier envoyait aussi à M. de Bénistant
une nouvelle procuration sous seing privé, contenant
à peu près les mêmes pouvoirs,
et permettant d e
v e n d r e , ou d on n er to u t con sen tem en t à d es v e n te s q u i
a u ra ien t é té ou q u i seraient f a i t e s p a r le s autres
co h éritiers ou
d roit (lcl11S Icichtc SUCCCSSIOll•
On sent assez que ces procurations n ’avaient d ’autre
objet que celui de donner au mandataire tous les pou
voirs qui lui étaient nécessaires pour repousser les
prétentions contraires aux droits de l ’estoc Rollet,
hâter ou faciliter les opérations du partage, en ven
dant même, s’il en était besoin, le s d ro its s u c c e s s ifs
des constituans, ou en consentant aux ventes qui
au r ai en t déjà été ou seraient faites de leurs droits par
d ’autres héritiers ; mais q u e , sous aucun rapport, ces
pouvoirs ne pouvaient s’étendre au cas où le partage
étant terminé, c h a q u e h é r i t i e r a u r a i t reçu sa portion
de la succession , portion q u i , lui devenant alors p r o
p r ié té p a r tic u liè r e , et n ’ayant plus rien d e com m u n
avec la s u c c e s s io n , ne pouvait être aliénée que de son
exprès consentement, et en vertu d ’une procuration
spéciale.
�( «4 )
Sous ce rapport, il est difficile de concevoir com
ment les appelans ont pu argumenter de ces procura
tions de 1806, pour légitimer les ventes q u ’ils ont
consenties en 1 8 1 8 , sans pouvoir et sans le consente
ment des propriétaires. Mais ce moyen parait bien
plus extraordinaire encore, lorsque, p a r l a lecture de
la correspondance produite par MM. de Bénistant et
Farradesche, 011 s’assure crue, dans ces premiers tems,
la famille Bénaguet , 11011 seulement 11 avait point
l ’intention de vendre sa portion > mais q u ’au contraire
elle désirait obtenir des lots distincts et séparés.
E11 e f f e t , une latti-e du i cr mars 1 8 1 2 , écrite par
M. Bénaguet de Penautier à M. de Groinont père ,
lui annonce que M. de Bénistant a des procurations
de ses sœurs et la sienne, oit il croit que tout est
spécifié POUR LES LOTS ET CONVENANCES. P.lllS bas , il
ajoute : « Quant aux objets de convenance, je ne puis
« que vous prier, et mes parens, de veiller à nos
« intérêts. J’imagine que le lot de la branche Saint« Pardoux sera un seul lot; j e désirerais cependant
« que les trois portions fussen t indiquées ; mais nous
« n'en sommes pas à la j o u i s s a n c e ». Il faut en
convenir, rien n’est plus exclusif, que cetle lettre, de
toute intention de vendre, et de pouvoirs donnés à cet
effet par la famille Bénaguet. Les spécifications des
procurations portent sur les lots et convenances ;
M. de Gromont est prié de veiller aux intérêts de ses
mandataires, pour les objets de convenances y les
héritiers désirent que les trois portions qui doivent
leur revenir soient indiquées p ar le partage : tel est
�C 15)
le véritable sens du mandat donné par la famille
Bénaguet, et le mode d’exécution q u ’il devait recevoir.
Comment donc les appelans se sont-ils mépris ju s q u ’au
point de citer cette- lettre dans leur Mémoire , en y
faisant des omissions si importantes, q u ’en s’abusant
eux-mêmes, ils s'exposaient à tromper la justice sur
les véritables intentions des mandans et les devoirs
des mandataires?
M. Bénaguet de Penautier est décédé à l a 'f i n de
i 8 i 3 . Le 9 février 18 14 > Sil veuve (a u jo urd ’hui
madame de Ramond) fit écrire ù M. de Gromont
père, « que son intention, et celle des familles Voisins
« et Malleret, ll’était pas de c o n t r a r i e r les a u t r e s
« li cri tiers , ni y « ’i l se fa sse des fr a is de ju stic e dans
« la su c ce ssio n ............ Ils désirent au contraire que
« tout se p asse au m ie u x d es in térêts de toutes les
« p a rties ». Mais comme M. de Penautier s 'é ta it s e u l
m ê lé de cette a ffa ir e , et qu e person n e n ’en a a u cu n e
c o n n a issa n ce , elle demande ce q u ’elle doit faire, et
prie de lui adresser un modèle de procuration. Cette
l e t t r e , qui bien évidemment ne se réfère q u ’aux
a ffa ires de la su ccession et aux op ératio ns d u p a r ta g e3
est cependant invoquée comme un p o u v o ir de v en d re
par les appelans, q u i , pour en tirer cette induction,
la cotent dans leur Mémoire, sans toutefois en faire
connaître une seule expression...........
Quoi q u ’il en s o i t , les p ro cu ra t io n s de la famille
B én agu et f u rç n t
adressées à MM.
de
Gromont et
B é n i s t a n t , par l ’int erm édiaire de mad a m e de Pe nau -
ticr, dans le co u ran t des mois de mai; j u i n et ju il l e t
�( 16 )
18 14• A cette époque , les trois branches appelées par
ïe testament de madame de Chazerat plaidaient encore
sur le mode du partage de cette succession ; et ce n’est
q u ’en 18 16 , que les opérations purent en être ter
minées.
Il est important de se fixer, i° sur la composition
de la masse de cette succession; 20 sur le lot qui a été
attribué à la branche Soubrany, représentant pour
moitié l ’estoc Rollet; 3° sur le droit que chacune des
familles
Bénaguet
et
Farradesche avaient
sur les
immeubles composant ce lot. L a connaissance de ces '
faits et leur s a i n e i n t e r p r é t a t i o n seront suffisantes pour
détruire la plupart des moyens invoqués par les
appelans.
La masse de la succession de madame de Chazerat
fut composée d ’abord de tous les biens que chaque
estoc avait apporté ; ensuite des biens propres à la
testatrice, ou qui lui étaient provenus de son père,
tels que les domaines composant la terre de SaintA g o u li n , et ceux de Menétrol; mais Von n y co m p rit
p o in t j n i le s bois d ’A u b u s s o n , n i le s rentes et effets
p u b l i c s n i d ’autres cré a n ces qui avaient fait la ma
tière d ’ u n e c o n v e n t i o n entre les héritiers e t M. de
C h a z e r a t, légataire du mobilier, de l ’usufruit des
immeubles, et en outre créancier des héritiers; con
vention au moyen de laquelle ces derniers objets
ne devaient rentrer dans la succession q u ’au décès de
M. de Chazerat, et faire à cette époque l ’objet d’uu
partage particulier entre les trois estocs.
Cette massq fut divisée entre les trois estocs, au
�( r7 )
marc le franc de leurs apports. L ’amendement de
l ’estoc Ilollet fut fixé à 622,960 fr. 56 c. 5 et comme
la branche d ’Amable Rollet représentait l ’estoc pour
moitié, elle devait recevoir 3 i 1,480 fr. 28 c. Cette
dernière somme devait encore se diviser en deux por
tions égales de 1 55,740 fr. \l\. c. chacune, l ’ une à.
attribuer à la branche d ’Amable Rollet, second du
nom, d ’où descendent les familles Davaux et CadierDevauce; l ’autre à la branche de Gilberle Rollet,
épouse
d ’Amable
Soubrany ,
d ’où
descendent
les
familles Bénaguet et Farradeschc. D ’après cela, l'amen
dement de ces deux dernières familles était de 77,870 fr.
7 c. pour chacune d ’elles ; et., commo la /hmillo Bonsi
g n e t se c o m p o s e de trois tètes, M. Bénaguet de
Penautier, la veuve Voisins et M. Malleret, chacun
d ’eux avait droit au tiers de la somme attribuée à leur
branche, et leur lot devait en conséquence se composer
d ’immeubles en valeur de 25,q56 fr. 61 c.
Mais les intérêts des familles Bénaguet et Farradesche
étant communs, les experts ne s’occupèrent point de
la subdivision de leur lot; ils firent l ’attribution des
immeubles qui devaient leur revenir, comme si Gilberte Rollet existait encore*, e t , après avoir distrait
de la terre de Saint-Agoulin le d o m a i n e d e s Bardons,
qui fut mis au lot d e M. Dcvauce, ils délaissèrent aux
descendans de Gilbertc Gros le surplus de cette terre,
qui se composait, i° d ’une réserve évaluée, avec les
bestiaux, à 40,700 fr. 5 20 du domaine de N eu fo n d ,
estimé, aussi avec les bestiaux, 4°,233 jfr.; 3° du
domaine de Bussière, en valeur de 21,628 fr. , les
3
�( >8 )
.bestiaux compris; 4°
domaine des Girauds, porté,
avec les bestiaux, à 20,217 fr.; 5° du domaine de
Machal, évalué, avec les bestiaux, à 18,856 francs ;
6° enfin, des bois dépendans de cette terre, estimés à
20,527 fr. Le total de ces estimations partielles, faites
va leur partage , se monte à 162,201 ir.; et comme
M. Penautier avait droit au sixième de cette somme,
il était donc copropriétaire de la terre indivise de
Saint-Agoulin, avec la branche Farradesche, la veuve
Voisins et M. Malleret, et pouvait en disposer jusqu’à
concurrence de 27,380 fr. 36 c.
L ’exposé de ces i\iits p r é s e nt e des idées si claires et
conduit à des résultats si évidens, que l ’ on peut être
étonné q u ’ils aient échappé à l ’attention de MM. de
Bénistant et de Gromont, q u i , d ’ailleurs mieux que
personne, devaient connaître les détails, les affaires,
et l ’événement du partage de la succession de ma
dame de Chazerat.
Ils savaient, en effet, que les bois d ’Aubusson, les
rentes, effets publics, et autres créances, n ’avaient
point été compris dans le partage des immeubles; que
ces objets omis devaient donner lieu à un nouveau
partage e n t r e les trois estocs R o lle t 3 J^igot e t Gros,
mais que , sous aucun rapport, cette opération ne
pouvait changer ce qui avait été arrêté pour l ’attri
bution des immeubles, ni intéresser les branches Bénaguet et Farradesche à autre titre que celui de re
présentant de l ’estoc llollet. — Pourquoi donc les
appelans ont-ils voulu se servir de faits aussi inexac
tement présentés, pour en tirer la conséquence q u ’ils
�( r9 )
devaient avoir la faculté d ’exercer l ’action en subroga
tion contre M. de Chazelles, et que ce dernier devait
être tenu de former une demande en partage, do
l ’événement de laquelle dépendait la préférence à
ac co rde r à sa veuve ou à celle du sieur Rixaiu?
Ils ne pouvaient également ignorer que les domaines
dépendans de la terre de Sainl-Agoulin avaient été
attribués aux familles Bénaguet et Farradesche, par
suite du partage des immeubles de la succession de
Chazerat; que ce partage avait fait cesser l ’indivision
entre toutes les parties intéressées comme héritières, et
que la terre de Saint-Agoulin n était p lu s, pour les
familles Bénaguet et Farradesche, u n o b j e t d é p e n d a n t
d e s u c c e s s i o n 3 mais bien une propriété isolée et in
divise entre particuliers. — Comment MM. de Bénistant et Farradesche on t-il s pu penser à opposer à
M. de Chazelles, que sa demande contre le sieur
Rixain était mal fondée; q u ’il devait être renvoyé
à former la demande eu partage d ’une succession qui
n ’existe pas, et soumis à une action en subrogation ,
comme acquéreur de droits successifs et litigieux?
Enfin, le partage ne permettait pas à MM. de Bénistant et de Gromont d’ignorer un fait qui était
d ’ailleurs de leur connaissance p e r s o n n e l l e , c’est que
la terre de S a in t - A g o u l i n s e composait de cinq do
maines ayant des bàtimens et des moyens d ’exploita
tion qui leur étaient particuliers; q u ’il y avait, en
outre, des bois détachés de ces domaines; q u ’enfin ,
chacun de ces immeubles était d ’une étendue assez
considérable, et situé assez avantageusement pour que
�leur division, bien loin d ’être
nuisible,
f u t , au
contraire, un moyen d ’en augmenter sensiblement la
• valeur. — Cependant les appelans ont cru pouvoir sou
tenir q u ’il y avait lieu à licitation............
Il ressort encore de ces faits un résultat bien essen
tiel. La terre de Saint-Agoulin était propriété indivise
entre les familles Bénaguet et Farradesche ; chacune
de ces maisons était propriétaire de moitié des im
meubles qui la composaient; et M. Penautior était
saisi du tiers de la portion revenant à sa branche ,
c'est-à-dire du sixième de la totalité. Ainsi la terre
de S a i n i - A g o u l i n . d e v a i t , en cas de partage, former
d ’abord deux lots; celui qui a u r a i t é té a t t r i b u é à la
famille Bénaguet devait ensuite être subdivisé en trois
portions égales ; mais, en cas de vente, chacun des
copropriétaires ne pouvait aliéner que sa portion dans
propriété indivise , et ne pouvait transférer les
droits d ’autrui sans un consentement exprès et une
procuration spéciale.
la
11
a déjà été prouvé q u ’avant le partage de
1816 ,
MM. de Bénistant et de Gromont n ’avaient aucun
pouvoir pour vendre la portion qiîi pouvait revenir à
la b r a n c h e B é n a g u e t dans la succession de m a d a m e de
Chazerat. On a même vu c o m b i e n les appelans avaient
été peu heureux dans la production des pièces dont ils
voulaient induire cette procuration, et dans les consé
quences q u ’ils en tiraient; il convient, actuellement
d ’examiner, ce qui s’est passé depuis le partage de 18 i G ,
et île rechercher si, depuis cette époque, MM. de
Gromont et de Bénistant ont reçu pouvoir de vendre
�(- )
/ 0 i 3 èm
la portion revenant 'a la veuve Voisins et au sieur
M aller et , et notamment celle du sieur Peu au tier ,
dans la propriété indivise de Saint-Agoulin.
Si l ’on consulte la correspondance produite parMM. de Bénistant et de Gromont, on s’assure q u ’il
n ’y avait rien d’arrêté entre les copropriétaires de
Saint-Agoulin, relativement à la vente de cette terre,
et que l ’on était bien loin d ’être convenu q u e } n 'éta n t
gu ère su scep tib le de d ivision
i l f a l l a i t la v en d re en
com m un.
E n effet,
L e 12 avril 181G, madame de Voisins écrivait h
M- de G r o m o n t , q u ’e l l e a v a i t appris « qu il avait été
« procédé au partage des lots entre la maison Devance,
« d’une part, et la maison Bénistant et Penautier,
« de l ’autre ». Elle ajoutait : « S i v o u s j u g e z né« cessaire q u ’i l soit p r o c é d é à un n ouveau p a r ta g e ,
« nous y donnons notre consentem ent ». Elle disait
ensuite : « N o u s nous ,en rapportons parfaitement à
« l ’opinion de M. de Bénistant, à c e t égard. Nous
« nous bornons seulement à vous faire connaître que
« nos intérêts sont q u ’il fût possible d’obtenir la vente
« de la p ortion qui revient à notre m a ison , soit
v. s é p a r é m e n t j
soit c o n j o i n t e m e n t avec la maison
« Bénistant. »
A i n s i , madame dp Voisins n ’avait aucune opinion
formée su r la v en te ou le p artage de la terre de S a i n t Agoulin. Elle ne pouvait, en effet, apprécier les avan
tages et les iuconvéniens de l ’une ou de l ’autre de ces
W
�pw >\
( 22 )
opérations, puisqu’elle ignorait absolument la compo
sition et la situation de cctte terre; aussi ne manifestet-elle aucune volonté ; elle désire seu lem en t v en d re sa
p o r tio n ; mais elle s’en rapporte à l ’opinion de M. de
Bénistant, sur une vente séparée ou c o n jo in te . Il
parait que plus tard MM. de Bénistant et de Gromont
ayant écrit à madame de Voisins q u ’ils trouvaient à
vendre, cette dame leur répondit, le 3o septembre
1816 , q u ’elle avait envoyé sa procuration, et ajoutait:
« Je vous prie de croire que je tiendrai pour bon tout
« ce que vous ferez ». Expressions de politesse qui 11e
signifiaient a u t r e c h o s e c l a n s leur généralité, si ce
n ’est que madame de Voisins approuvait la v e n t e de
sa portion dans la p r o p r ié té in d iv ise de la terre de
Saint-Agoulin, de quelque manière q u ’elle fût faite,
soit co n jo in tem en t s soit sépa rém en t avec la maison
de Bénistant.
MM. de Bénistant et de Gromont produisent une
lettre de M. M alleret, sous la date du 5 mai 1 8 1 7 ,
c’est-à-dire, d ’un an après le partage de la succession
de madame de Chazerat. On y lit que M. Malleret
avait appris q u ’il s ’é ta it é le v é q u e lq u e s d iffic u lté s su r
le p a rtage y m a i s que la p o rtio n B é n a g u è t d e v a i t ctre
d ivisée en trois ; et il ajoutait : « S i on nous donne
« des terres, il faudra les vendre : j ’aurai recours à
« votre obligeance ». M. Malleret ne pensait donc pas
que la terre de Saint-Agoulin fût indivisible. Au con
traire, pour faire c'esser les difficultés qui pouvaient
s'opposer au partage , il indiquait les amendemens des
représentais B é n agu e t, et annonçait q u ’il voulait
�( 23 )
vendre les terres qui lui échéraient par la division de
cette propriété commune.
Il faut actuellement fixer son attention sur les rela
tions q u ’a eues madame de Ramond, veuve, en premières
noces, de M. Bénaguet de Penauticr, tutrice de ses
enfans mineurs, avec. MM. de Bénistant et de Grom o n t , relativement à *la terre indivise de SaintAgoulin.
Il paraît que M. de Gromont, qui (comme il est
dit dans les écrits du procès), s’occupait plus particu
lièrement que M. de Bénistant, et presque exclusive
ment à l u i , des affaires de la succession de madame de
Chazerat, avait prévenu madame; tic l l a m o m i d u p a r
ta g e f j u i v e n a i t cl’ètre eiFcctue , et lui avait apjiris que
la terre de Saint-Agoulin, qui était échue au lot des
familles Bénaguet et Farradesche, était indivise entre
elles. En donnant cet avis à madame de Ramond ,
M. de Gromont lui disait-il également q u ’il serait plus
avantageux de vendre Saint-Agoulin en masse, que de
le morceler par un partage ou des ventes partielles?....
C ’est ce que la correspondance n’apprend pas; mais
on y voit que madame de Ramond , qui avait des
biens considérables en Auvergne, un homme d ’affaires
spécialement chargé de leur gestion, et qui était conséquemment plus à m ê m e q u e madame Voisins et
M. Malleret de c o n n a î t r e la valeur réelle de SaintAgoulin, et de savoir si les ventes partielles étaient
plus convenables q u ’une vente en masse, avait spécia
lement chargé le sieur Pinatelle, de Courpière, son
homme d ’affaires, du soin de ses intérêts.
�*
( 24 )
Une lettre du 1 4 avril 181G donne avis à M. de
Gromont du choix que venait de faire madame de Ramond d ’un fondé de pouvoirs. Après .quelques expres
sions de politesse et de remcrcîmens, elle continue :
« J’ai fait passer à M. Pinatelle ma procuration, et
« lui dis de se co n certer avec vous pour tirer tout
«
Vavantage p o ssib le
de
ce
qui
concerne
kotke
r a-
« m i l l e ». E t s’expliquant ensuite sur les intentions
q u ’elle suppose à madame de Voisins, elle ajoute :
«i Je suis persuadée q u ’elle est d ’avis que la v e n te de
« la terre qui est échue dans notre lot s ’e ffe c tu e >
« dès q u e c e la - d o it n o u s ¿tre p lu s a v a n ta g eu x ».—
Ainsi c’est le sieur Pinatelle qui est le f o n d é d o pou
voirs de madame de Ramond; il ne doit se co n certer
avec M. de Gro mont, que pour l ’avantage commun,
et. dans le cas seulement oh la v e n te d e la terre
( e n t o t a l i t é ) serait plus avantageuse q u ’un morcelle
ment effectué par un partage ou des ventes partielles.
Mais cette lettre même imposait à M. de Gromont
l ’obligation corelative de ne rien faire dans les intérêts
de madame de Ramond, sans se co n certer avec le sieur
Pinatelle, et sans obtenir le consentement de celui
qui seul a v a i t p o u v o i r de la représenter et de contracter
pour elle.
M. de Gromont ouvre alors une correspondance avec
le sieur Pinatelle, q u i , le 4 décembre 1 8 1 6 , lui écrit
q u ’il viendra à la fin du mois à Riom, et ajoute :
« Nous prendrons ensemble le p a r ti que vous croirez
« le p lu s a v a n ta g eu x p o u r tous ». — Rien n ’était
donc encore arrêté; les avantages ou les désavantages
�0 5 )
Jj
du parti à prendre n ’avaient point été balancés, et
ne devaient l'être q u ’au voyage du sieur Pinatello,
q u i , au reste, paraissait dispose à avoir la plus grande
déférence pour l ’avis de M. de Gromont.
Il parait que M. de Gromont insistait sur la vente
de Saint-Agoulin , en b l o c , afin d ’éviter le morcelle
ment qu i, suivant lui, devait diminuer considérable
ment la valeur de cette terre. On pouvait sans incon
vénient essayer cette opération5 aussi le sieur Pinatello
répond-il, le i 3 janvier 18 17 , à M. de Gromont, qui
lui avait fait cette proposition : « Je suis bien d ’avis,
« comme vous, de faire afficher S a in t-A zo u lin , e t ,
« SI l ’on en trouve un p r i x r a i s o n n a b l e
do v e n d re » .
— Expressions remarquables qui prouvent que, dans
l ’intention du sieur Pinatellc, Saint-Agoulin devait
être vendu en totalité', p a r une seu le v e n t e et au.
m êm e a cq u ér e u r , et que l ’aliénation ne devait en être
faite q u ’autant q u ’on en trouverait un p r i x con ve
n a b le , c’est-à-dire au moins égal à celui de l ’estimation
faite valeur partage.
On peut ici se faire une idée de la position et de
la volonté de tous les copropriétaires de la terre de
Saint-Agoulin. MM. de Bénistant et de Gromont pen
saient qu e cette
p a rtage ,
il
Voisins et M.
terre n ’ étant g u ère s u s c e p t i b l e
c o n v e n a it
Malleret
de
; madame de
n’avaient sur cela aucune opi
de
la
vendre
nion ni aucune volonté : ils ne manifestaient q u ’ un
désir, celui que le u r p ortion f u t v e n d u e de la manière
la plus avantageuse et la plus conforme à leurs in
térêts. Madame de Ramond v o u la it
e x a m in e r
; elle
�connaissait l ’opinion (le M. (le Gromont; mais elle ne
croyait devoir définitivement s’en rapporter q u ’à l ’avis
du sieur Pinalelle, son liomme d ’aiïaires, à qui elle
avait spécialement donné ses pouvoirs. Cet homme
d ’affaires devait se co n cer te r avec M. de Gromont clans
l ’avantage de toute la f a m i l l e / mais ce concert ne de
vait avoir lieu q u ’autant q u ’une v en te g én éra le de la
terre de Saint-Agoulin se ferait au nom de tous les
copropriétaires, et à un prix p lu s co n v en a b le ou plus
élevé que.celui que pourrait produire le morcellement.
Dans cette position, comment agit M. de Gromont?
Les faits sont encore'ici bien essentiels à recueillir.
D ’abord il fait poser des affiches dans les départemens
du Puy-de-Dôme et de l’A lli er, annonçant la vente de
la terre de Saint-Agoulin, et 'où il s’indique comme
devant donner des renseignemens sur cette propriété,
et sur les conditions.de la vente. C ’est lui qui nous
apprend ce fait.
Il entre ensuite en négociation avec M. Debonneviej
non pour la to ta lité de la terre, mais sur les quatre
objets les plus précieux qui entraient dans sa compo
sition; de manière q u ’il la morcelle et la divise, c o n t r e
la c o n v e n t i o n q u i ( s u i v a n t l u i) avait été f a i t e entre
tous les copropriétaires. E n effet, cette vente devait
comprendre d’abord la réserve, e stim é e , v a le u r p a r
tage , 40,700 fr. ; ensuite le domaine de Bussière, en
valeur, suivant la même estimation, de 21,628 fr. ;
troisièmement, le domaine des G i r a u d , estimé à
20,217 fr.; enfin celui de Machal, évalué à 18,896 fr.
Total de l ’estimation de ces biens, v a le u r p a rta g e ,
�i o i , 4 4 r fr. Alors le domaine de Neufond et les bois
restaient invendus, et ces immeubles, suivant toujours
les idées de M. de Gromont, pouvaient, par cet isole
ment, devenir d ’une aliénation plus difficile, et perdre
considérablement de leur valeur.
7
Mais ce n ’est pas tout. Outre que M. de Gromont
ue devait vendre la terre de Saint-Agoulin q u ’en
totalité, il ne dcVait encore faire cette vente qu'à un
p r ix c o n v e n a b le , qui conséquemment ne pouvait être
moindre que le prix de l ’estimation. O r , que fait-il?
Il délaisse à M. Dcbonnevie la réserve et les trois
domaines qui étaient le plus à la convenance de, cet
acquéreur, dans la terre Je Saint-Agxmifuj.nioyennanc
8 9 , 7 Go fr. ; et comme l ’estimation v a le u r p a rta ge do
ces immeubles était de 101,44!
ü fait «ne perte
de 11,681 fr. sur cette estimation, qui est toujours
bien au-dessous de la v a le u r r é e lle et v é n a le . Ainsi,
M. de Gromont, par la vente consentie à M. Debonnevie, tombait dans les deux inconvéniens q u ’il con
seillait lui-même d ’éviter, le m o rcellem en t de la terre 3
et la v i l i t é du p r i x des ven tes.
Cette vente est la première; M. de Gromont en
convient; mais il soutient également qu ’elle a été faite
de concert avec le sieur Pinatelle, cjui y a donné son
consentement. U n e lettre du 2 août 1817 est même
produite pour justifier cette dernière assertion.
Ce dernier fait est absolument étranger
à
M. de'
Chazelles. Sa réalité ou sa fausseté ne saurait Tintél’e s s e r
, puisqu’il ne pourrait donner lieu
q u ’à
une
demande cil dommages-iiitérêts de la part de MM. de
^
�?*«Y
,
f 28 )
Bénistant et de Gromont, contre madame de Ramond;
ainsi M. de Chazelles pourrait se dispenser de l/exa
miner, si les raisons les plus fortes ne se présentaient
d ’ailleurs en f o u l e , et ne se pressaient pour le com
battre et le détruire.
Il est, en effet, difficile de croire que le sieur
Pinatelle, q u i , aux termes de sa procuration, ne
devait se concerter avec M. de G ro mont, que dans
l ’intérêt commun des copropriétaires de Saint-Agoulin,
et pour vendre-cette terre en masse et en totalité;
qui , d ’ailleurs , dans sa correspondance , annonçait
a M. de G r o m o n t i j u ’ il f a l l a i t v e n d r e S a i n t - A g o u l i n ,
si l ’on cil trouvait un prix raisonnable, ait ensuite
légèrement consenti à excéder les termes de sa procu
ration, et à compromettre les intérêts de son mandant,
en consentant tout à-la-fois au morcellement de cette
terre, et à ce que les immeubles qui en étaient ainsi
détachés fussent vendus à un prix bien au-dessous de
celui de l ’estimation valeur partage. La lettre écrite
par le sieur Pinatelle, le 2 août 18 18 , bien loin de
détruire ces doutes, les fortifie au contraire beaucoup.
y voit que le sieur Pinatelle, après avoir annoncé
l ’arrivée de m a d a m e de Ramond pour le 1 2 , ajoute :
« Je me rendrai à R i o m , et nous arrêterons ensemble
On
« le dernier p r ix auquel on peut abandonner Saint« A goulin ». A i n s i , aux termes de cette lettre, le
sieur Pinatelle croyait q u ’il était question de la vente
de la totalité de la terre; que le prix n ’eu était point
encore arrêté , et que M. de Gromont attendait son
arrivée et son concours pour le fixer définitivement.
�( 29 )
*
Le sieur Pinatelle s’est-il rendu à Riom pour, couférer avec M. de Gromont? Ce fait est inconnu du
sieur de Chazelles. Mais si l ’on suppose ce voyage, ou
jieut également croire que le procureur fondé de ma
dame de Ramond s'est retiré sans rien terminer, lors
q u ’il a vu que le mode et le p rix de la vente étaient
si contraires aux intérêts de sa commettante. Ces ¡nésomptions se changent en certitude, quand on se fixe
sur des faits plus positifs et reconnus dans la cause,
savoir : que le sieur Pinatelle n ’a coopéré en rien à la
vente sous seing privé consentie au sieur Debonnevie ♦
,
q u ’elle a été souscrite par MM. de Bénistant et de
Gro mont, seuls agissant <t a n t , enj Jühpv nom que se
portant'forts pour leurs autres copropriétaires, et que
le prix en a étè , en entier, touché par ces Messieurs.
L a circonstance du défaut de procuration ne détruit
point l ’évidence de ces résultats. Si les pouvoirs donnés
par madame de Voisins et M. Malleret étaient insuffisans, i l parait certain que le sieur Pinatelle en avait
reçu de très-étendus de la part de madame de Ramond;
et M. de Gromont n’aurait pas manqué d ’exiger de
M. Pinatelle q u ’il souscrivit la vente de M. Debon
nevie , si ce procureur fondé, loin d’y donner son
consentement, n’avait au c o n t r a i r e , par les raisons
qui ont déjà etc e x pl i q u é e s ^ cru qu il était de son
devoir de s’y opposer, ou du moins de n*y participer
en aucune manière.
Quoi q u ’il en soit, MM. de Bénistant et de Gro
mont, au moyen des affiches q u ’ils avaient fait poser,
étaient toujours propriétaires
de
ce qui restait à
�( 3o )
4
vendre de la terre de Sainj>AgouIin, h. l ’égard des
tiers qui voudraient devenir acquéreurs.
L e domaine de Neufond et les bois n ’étaient point
compris dans la vente consentie à M. Debonnevie.
Neufond était, par sa position, un objet de conve
nance d ’autant plus précieux pour M. de Chazelles,
que les propriétés de ce dernier se confinaient et se
confondaient avec les terres composant ce domaine.
M. de Chazelles avait, depuis long-tems, manifesté
l ’intention d ’acquérirNeufond; son projet n’était point
un secret : il l ’avait même communiqué au sieur Rixain,
Son voisin d e c a m p a g n e , opii, appréciant les avantages
que M. de Chazelles devait trouver à cette acquisition,
et la regardant même comme chose, nécessaire, lui
conseillait de presser ses démarches et de terminer
promptement.
M. de Chazelles vit alors M. Debart, gendre de
M. de Gromont; il lui montra tout le désir q u ’il avait
de devenir propriétaire de Neufond; et pour q u ’il n ’y
eut point de difficultés sur la fixation du prix, il se
soumit à couvrir de la somme de 2000 fr. la dernière
enchère qui serait mise. Au moyen de cette offre, la
préférence f u t p r o m i s e à M . dc-Chazclles.
Bientôt après, M. de Chazelles vit M. de Gromont.
Dans cette entrevue, la vente du domaine de Neufond
fut négociée. M.
Debart écrivit ensuite à M.
de
Chazelles que le prix était réglé à /pjooo francs ;
que s’il lui convenait, il pouvait arriver pour terminer.
Mais M. de Gromont, ne regardant point cette con
vention comme définitive, crut pouvoir manifester
I
�(30
J«
l'intention de mettre cet immeuble aux enchères :
toutefois il prévint M. de Chazelles de ce nouveau
projet, en lui promettant de l ’avertir assez à tems
pour q u ’il pût figurer parmi les enchérisseurs.
Les choses étaient en cet état, lorsque , peu de
jours après, M. de Chazelles apprend, par une nou
velle lettre de M. Debart, que MM. de Bénistant et
de Gromont ont promis au sieur Rixain de lui vendre
le restant de la terre de Saint-Agoulin.
M. de Chazelles ne pouvait ni ne devait croire à
l ’avis qui lui était donné; la parole et les promesses
qu il avait reçues de M. de G ro mont, la connaissance
que le sieur Rixain avait de ses. projets d ’ucquisiiion,
par l a c o m m u n i c a t i o n que M. de Chazelles lui en avait
faite lui-même, tout devait lui faire supposer que
M. Debart était mal informé.
M. de Chazelles f i t un voyage à Riom pour fixer
ses idées et faire cesser ses incertitudes; il y vit M. Farrad'esche des Ronzières, fils cadet de M. de G ro m o nt,
qui lui dit qu’il avait vendu au sieur Rixain , et que
Me Ilébrard, notaire, avait reçu la vente. Ce dernier,
interrogé à son tour par M. de Chazelles, assurd. qu ’il
n ’y avait point eu de vente passée 3 parce que l ’on
n ’avait pas les procurations des p a r t i e s intéressées, et
que celle d e m a d a m e d e J i a m o n d avait été donnée au
sieur P in a le lle , son homme d'affaires.
L a déclaration de Me Ilébrard apprenait à M. de
Chazelles deux faits bien essentiels; le premier, q u ’il
n ’y avait q u ’une préférence promise au sieur R i x a i n ,
et non une vente terminée; le second, que M M . de
�m \
( 3, )
B én i s tant et de Gromont n’avaient pas le droit de
ven dre, fait qui devint alors d ’autant plus certain
pour M. de Chazelles, que la conversation q u ’il avait
avec Mc Ilébrard lui rappela les craintes que INI. de
Gromont avait souvent exprimées devant l u i , sur les
difficultés q u ’il pourrait éprouver à faire ratifier la
vente q u ’il avait consentie à M. Bonnevie.
M. de Chazellçs ne pouvait s’empêcher de remar
quer combien la conduite du sieur Rixain et les pro-,
cédés de M. de Gromont étaient peu conformes aux
égards réciproques que l ’on se doit entre gens hon
nêtes; il avait m C m c l e d r o i t ¡d’être offensé de cet oubli
de toutes convenances : il jugea t o u t e f o i s q u ’ i l é t a i t
indigne de lui de se plaindre, de faire aucune nou
velle démarche auprès de M. de Gromont pour obtenir
une préférence qui lui avait été déjà vainement pro
mise, et aima mieux s’imposer un sacrifice d’argent
pou r s’assurer la propriété du domaine de Neufond ,
en se faisant subroger 3 ou au moins associer à la
promesse de préférence, de vente qui avait été faite
au sieur Rixain.
Mc Ilébrard reçut de M. de Chazellçs l’invita lion
de proposer a u s i e u r Rixain une somme de G oo o francs
pour prix de cette subrogation ou association; mais
ce notaire lui ayant fait observer que cette négociation
pouvait se faire plus facilement à Clermonl, M. de
Chazelles fit faire sa proposition au sieur Rixain par
M. Raymond, curé de la cathédrale, oncle de ce der
nier, et auquel on devait supposer une grande influence
sur l ’esprit et les déterminations de son neveu.
�( 33 )
M. Raymond eut la complaisance d être rintermé
diaire du sieur Rixain et de M. de Chazelles; mais
l ’interposition de ses bons offices fut inutile pour
obtenir la subrogation ou l ’association h la p r é fé r e n c e
que M. de Gromont avait promise au sieur Rixain.
U n billet écrit par M. Raymond à son neveu, et que
l ’on trouve cependant au dossier de M. de Gromont,
prouve même que plus M. de Chazelles se montrait
désireux d ’obtenir cette subrogation ou association
plus le sieur Rixain devenait difficile et exigeant.
Quoi qu ’il en soit, le refus du sieur Rixain étant
positif, q u ’avait à faire M. de Chazelles?
L u i convenait-il de s ' a d r e s s e r d e n o u v e a u à M. de
G r o m o n t ? — Mais ce dernier avait manqué à la pro
messe q u ’il avait faite; d ’ailleurs M. de Chazelles
était informé, par le notaire Ilébrard, qu ’il n ’avait
d roit d e v e n d r e , n i comme p rop riéta ire 3 n i comme
f o n d é de p ou voirs.
Devait-il abandonner son projet d ’acquisition?— ■
Mais le sieur Rixain avait agi d ’une manière au moins
inconvenante, en cherchant à devenir propriétaire
d ’un immeuble dont
il avait lu i- m ê m e
l ’acquisition à M. de Chazelles. Ce dernier
conseillé
croyait
d ’ailleurs q u ’il n’existait point de v e n t e ; 011 n e lui en
avait communiqué a u c u n e ; il avait ou croyait avoir
la certitude q u ’entre le sieur Rixain e t le sieur de
Gromont tout était demeuré dans les termes d ’une
simple prom esse de p r é fé r e n ce en cas de vente; pro
messe qui ne pouvait avoir aucun effet, étant donnée
par autre personne que le propriétaire de l ’objet à
'
!
5
�( 34 )
vendre,
et n’imposait, aucune obligation civile ni
morale à celui qui -voudrait .acquérir ,du véritable
propriétaire.
,
.
. ,
M. de Cliazelles fit donc ce q u ’il devait et pouvait
faire, en s’adressant au sieur Pinatelle, fondé de pou
voirs de madame de Ramond. Cette démarche était
même plus que toute autre propre à l'éclairer sur
l ’existence réelle ou feinte de la vente Rixain , puisque
si cette vente avait eu ¿lieu le 18 février 18 18 , le sieur
de Gromont devait se hâter, d ’en donner avis au sieur
Pinatelle, q u i , dès-lors.,,aurait été instruit de ce (ait,
lorsque, le 22 d a .n iim c mois, c’est-à-dire neuf jours
après cette prétendue vente, M. de Cliazelles se pré
senta pour acquérir le domaine de Neufond.
L e sieur Pinatelle entra en négociation avec M. de
Cliazelles; la procuration de madame de Ramond fut
examinée; elle est du 5 février 1818; voici ses expres
sions : « Sans entendre aucunement déroger à tous
« pouvoirs et procurations q u ’ils pourraient avoir
« donnés antérieurement à ce jour......... ; et ajoutant
« auxdits pouvoirs et procurations............ .. donnent
« p ou vo ir de se réunir a u x copropriétaires des
« mineurs--- .. , r e l a t i v e m e n t a u x b i e n s c o m p o s a n t la
« succession de m a d a m e de C h a z e r a t , lesdits biens
« consistant entre a ut re chose
« A
g o u l i n __ ;
dans l a t e r r e de
S aint-
v e n d r e à t e ll e p e r s o n n e e t a u x p r i x . . . .
« les portions revenantes au xdits mineurs........; fixer
« toutes époques d ’entrée en jouissance et mode de
» .paiement; obliger les comparans à toutes garanties,
v et à faire ratifier la vente. »
�( 35 j
*
Les termes de cette procuration sont clairs et positifs.
Ils apprennent que, bien avant le mois de févr ier 18 i8j
le sieur Pinatelle était le fondé de pouvoirs de madame
de Ramond; que ces premières procurations ne pou
vaient d ’abord avoir d ’autre objet que celui d ’obtenir
l ’attribution du lot qui devait revenir aux mineurs
de cette dame, dans la propriété indivise de SaintAgoulin; mais que les idées ayant changé, et les copro
priétaires ayant paru se réunir sur l ’invitation de
M. de Gromont, pour essayer de vendre cet immeuble
en totalité, madame de Ramond avait, p o u r c e ca s
s e u le m e n t, donné au sieur Pinatelle pouvoir de so
réu n ir aux autres coproi>iict:iircs,,'poiiï‘ vendre la por
tion revenant à ses mineurs; condition qui toutefois
devait cesser, si la vente n’élait point faite en b lo c ;
s i la terre é ta it m o rcelée y si sur-tout les coproprié
taires des mineurs Ramond disposaient de leur portion
sans se réu n ir ou se co n certer avec le sieur Pinatelle.
Il est en eifet évident que , dans ccs diiFérens cas, le
sieur Pinatelle ne pouvait ni ne devait se concerter
avec des copropriétaires qui avaient sép a ré et is o lé leurs
in térêts de ceux de ses mandans; q u ’alors la procuration
du 5 février 18 18 lui imposait le devoir de vendre
seul, et a u x meilleures conditions p o s s i b l e s , la porlion
r e v e n a n t aux m i n e u r s de madame de Ramond, dans
la terre de Saint-Agoulin.
Les pouvoirs contenus en cette procuration étant
connus, il faut se rappeler que MM. de Bénistant et
de Gromont avaient morcelé la terre de Saint-Agoulin
par la vente consentie à M. Debonnevie, et que ce
�(36)
morcellement était si- peu avantageux aux coproprié
taires, que la réserve et les meilleurs domaines avaient
été vendus à un prix moindi’e de 11,691 francs que
celui de l ’estimation valexir partage. Il est aussi essen
tiel de ne pas oublier que tout cela avait été fait
sans le concert clu sieur Pinatelle, qui n’était informé
de rien par M. de Gromonty pas même d’aucune vente
consentie ou à‘ consentir au sieür Rixairi.
Le sieur Pinatelle avait donc seul le droit de vendre!
la portion revenant autf mineurs Penautier dans la
de Saint-Agoulin. Ce fondé de pouvoirs, voulant
d ’ailleurs f i d è l e m e n t ï e m p l i r s o n m a n d a t , prit les
précautions convenables pour ne f>as l ’excéder, et tirer
terre
le parti le plus avantageux de la chose confiée a ses
soins, et q u ’il devait aliéner.
Il commença par s’assurer de la quotité de l ’amen
dement des mineurs Penautier dans les immeubles,
dont la propriété était indivise. L ’examen de la gé
néalogie de la famille et du partage de la succession
de madame de Chazerat le convainquit bientôt que
ses mandans étaient propriétaires, d ’un sixième de la
de Saint-Agoulin, et que la valeur de ce sixième
était de 25,950 f r . 6 1 c . , s i l’on c o n s u l t a i t les bases
adoptées par le partage, et de 27,330 fr. 38 c . , si
terre
l ’on s’arrêtait au délaissement d'imineubles qui avait
eu lieu en vertu de cet acte. Le domaine de Neufond,
dont M. de Chazelles voulait faire l ’acquisition, avait
en outre été estimé, valeur partage, à la somme de
/[o,a33 francs; et comme M. de Chazelles en offrait
5o,ooo fr. et 1000 fr. d ’épingles, le sieur Pinatelle,
�(3ï )
tn lui-vendant la moitié(de ce;domaine, était certain,
d ’une part, q u ’il ne-faisait q u ’user du droit que ses
mandans avaient à cette; propriété, e t , de l ’autre s
que la vente était avantageuse, puisqu’elle excédait de
11,000 fr. l ’estimation 'valeur' partage.
E n conséquence, le 23 février 18 18 , vente, du
sieur Pinatelle à M. Bprard d e , Chazelles, par acte
public et authentique, de la m oitié du.domaine de
N eufoncl, dépendant de la terre de Saint-Agoulin ,
tel qu’il a été attribué aux héritiers Bénaguet et Bénistaut, ledit domaine contenant en totalité deux cent
quatre-vingt-quinze mille toises. La vente porte que
« l ’acquéreur sera teuu d)antrat<inir ¿a ¿>ail dudit do« maine jusqu’à son expiration, sauf a lui à s’arranger
« avec les autres propriétaires: de la terre de Saint« A g o u l i n , pour la 'ventilation du produit dudit
« domaine ». Le vendeur s’oblige d’ailleurs à faire
ratifier les mineurs Bénaguet, et à prendre des arrangemens avec M. de Chazerat, relativement à son usu?
fruit.
Le prix de cette vente est de 2Î>,ooo francs, et de
5oo fr. d ’épingles; sur cette somme, 85oo francs sont
payés comptant, et le restant stipulé payable, savoir,
9000 fr. en un a n , et 8000 fr. en deux
ans,
à dater
de la vente.
M. de Chazelles se hâta de donner à son acquisition
toute la publicité possible; il prit possession réelle du
domaine de Neufond en faisant notifier son contrat
aux fermiers de ce domaine, et en leur déclarant q u ’ils
n ’eussent à payer q u ’entre ses m ains la moitié du prix
�(38)
de leur ferme. Cet acquéreur comptait même alors si
peu être en concurrence avec qui que ce fut, relative
ment à la propriété du domaine de Neufond, et igno
rait si bien la vente
Rixain, qu e , suivant
M. de Chazelles ayant
curations Voisins et
prétendue consentie au sieur
M. de Gromont l u i - m ê m e ,
appris, plus tard, que les pro
Malleret étaient arrivées, et
q u ’enfin >M. de Gromont avait des pouvoirs pour
vendre, lui proposa de devenir acquéreur des portions
revenant à ses deux copropriétaires dans le domaine
de N e u f o n d .
Cependant la c o nn a is s a nc e q u ’ a v a i t M. de Gromont
de la vente consentie par le sieur Pinatelle à M. de
Chazelles, devait lui donner quelques inquiétudes.
II lui était difficile, en effet, de justifier son opéra
tion , qui avait eu le double inconvénient de morceler
la terre de Saint-Agoulin, et de diminuer sa valeur
réelle et vénale, tandis que la vente consentie par le
jüieur [Pinatelle présentait l ’avantage incontestable
d ’augmenter d’un cinquième, au moins, la valeur de
l ’immeuble qui en était l ’objet. Aussi M. de Gromont
sentit-il tout l ’embarras de sa situation; et, v o u l a n t
faire obtenir la p r é f ér en c e a u s i e u r Rixain, envers le
quel il était aii moins lié par une promesse , il eut
recours à M. de Bénistant, qui ne s é t a it , à ce q u ’il
paraît, occupé d’aucune de ces négociations, et voulut
6e servir de l'influence de cet homme respectable pour
parvenir au but q u ’il se proposait.
Il
paraît effectivement que M. de Bénistant écrivit
dans le même tems à madame de Voisins, M. Malleret
�(
)
et madame de Ramond, pour leur demander la rati
fication des ventes consenties à M. Debonnevie* et ail
sieur Rixain.
,
Les réponses à ces différentes lettres sont produites.;
et l ’on voit dans celle de M. Ramond, sous la date du
12 mai 18 18 , que, connaissant la vente consentie par
le sieur Pinatelle h. M. de Chazelles, il déclare posititivement que, ne voulant pas s’exposer h excéder son
sixième, il né peut entier dans la vente Bonnevie ni
l'autoriser. Il ajoute que M. de Gromont devait p ré
venir le sieur P in a lelle de ses engage mens avec
R ixain y que d'ailleurs M. de Gromont a donné sa
parole d'honneur, devant M. A l a r y „ de rati/iei' la
venic conseil lie ¿1 JVT. cle Clidzelles. Enfin, il termine
par dire que madame de Voisins lui a écrit q u e lle
veut tenir pour bien fa ite la vente consentie à M. de
Chazelles. Dans une autre lettre du i er juin suivant,
M. de Ramond consigne que M . M alleret tient pour
seule valable la vente de M . de Chazelles.
Ces faits sont importans; ils montrent l ’intention
bien positive de madame de Ramond, la volonté bien
expresse de madame de Voisins et de M. Malleret, et
prouvent en même que le sieur de Gromont, qui avait
agi seul et sans se concerter avec le sieur Pinatelle,
q u ’il 11’avait pas m ê m e i n f o r m é de scs opérations, ne
se croyait pas lié ni engagé envers le sieur Rixain,
puisqu’il avait promis de ratifier la vente consentie
à M. de Chazelles.
M. de Bénistant fît de nouvelles démarches auprès
de madame de Voisins et de M. Malleret, et réussit
enfin à en obtenir deux
lettres approbalives
dés
�opérations de M. de Gromont. Celle de madame de
Voisins est du 28 mai 18 18 ; elle s’y exprime ainsi :
« J e tien d ra i p o u r fait to u t ce que v o u s f e r e z ; vos
« intérêts sont les mêmes que les miens. Je pense que
« vous chercherez votre avantage en terminant ».
M. Malleret écrit aussi, le i er juillet, q u ’i l no sa it
q u e lle est la prem ière v e n te . Il dit ensuite : « Mes
« sœurs et moi nous en rapportons parfaitement à ce
« que vous croirez devoir faire. Nous avons en vous
« une co n fia n ce entière ; nous fe r o n s c e qu e v o u s
« cro irez
d ev o ir f a i r e
».
Ainsi
ces deux
lettres
annoncent s u f f i s a m m e n t que madame de Voisins et
M. Malleret cédaient moins, en a p p r o u v a n t l e s o p é r a
tions qui avaient été faites, à leur conviction person
nelle, q u ’à la condescendance et à la confiance absolue
q u ’ils croyaient devoir à M. de Bénistant.
Mais M. de Ramond insistait. M. de Gromont crut
alors, pour vaincre sa résistance, devoir réunir ses
efforts à ceux de M. de Bénistant. Pour toute réponse,
M. de Ramond écrivit, le i crjuin, q u ’ i l allait, v e n ir
¿1 R io m 3 et q u ’ i l
tâ ch era it d e tout arranger.
Ce
voyage eut effectivement l i e u , et les explications qui
furent données ne produisirent autre chose qu ’une
double ratification de la v e n t e c o n s e n t i e p a r Pinatelle,
résultant, i° d ’une quittance donnée à R i o m , le 3
septembre 1 8 18 , par madame et M. de Ramond à
M. de Chazelles, de la somme de 9000 f r . , montant
de la première annuité, avec intérêts échus et à échoir
jusqu’au mois de mars 1 8 1 9 , époque oit cette somme
çtait exigible; a° d ’une ratification expresse de la vente
de M.
dç Chazelles ; faite, le ip juin 1 8 1 9 ,
par
�(
40-
M. Amable-Rodolphe Bénaguet, qui avait alors atteint
sa majorité.
Il était essentiel de réunir ces faits et de'les expli
quer, avant de s’occuper de la procédurq dont l'exposé
peut actuellement se faire en peu de mots.
On a vu que M. de Cliazelles avait pris la précau
tion de s’assurer du prix de la ferme du domaine de
Pieu fond. La notification q u ’il avait faite au fermier
était même, aux termes de sa vente, le seul acte de
possession qui lui fût permis. Mais le sieur llixain
imagina q u ’il se créerait un droit{(en se permettant
une voie de fait, q u ’il voulait faire regarder commo
’lin acte de p o s s e s s i o n r c d l c . I l fit en conséquence des
plantations et des défrichemens, qui forcèrent M. de
Cliazelles à former contre lui une demande en com
plainte possessoire. Mais le sieur Rixain ayant produit
une vente sous seing privé, en vertu de laquelle il se
prétendait propriétaire de la totalité du domaine de
Neufond, M. de Cliazelles crut devoir convertir sa
demande possessoire en demande en partage, qui fut
portée au tribunal civil de R io m , par exploit du 3o
mai 18 18.
L e sieur Rixain appela alors en garantie MM. de
B é n i s t a n t et de G r o m o n t , et s o u t i n t , d ’ailleurs, que
sa vente devait a v o i r la préférence sur celle consentie
à M. de Cliazelles, soit parce q u ’il y avait eu tradition
en sa faveur, et prise de possession r é e lle , de sa pari,
de l ’objet vendu, soit parce que sa vente, q u o i q u e
sous seing privé , avait , respectivement à M.
Cliazelles,
une date certaine,
de
puisque ce dernier
�( 4» )
la connaissait avant d ’acquérir du sieur Pinatelle«
MM. de Bénistant et de Gromont ajoutaient à ces
moyens que la vente consentie à M. de Chazelles était
nu lle , parce que le sieur Pinatelle ne s’était pas con
formé à sa procuration, et avait négligé de se concerter’
avec MM. de Bcnistant et de Gromont; que d’ailleurs
la terre de Saint-Agoulin n ’étant point susceptible de
division, elle devait être licitée; q u ’enfin, s’il y avait
lieu à partage, comme il devrait être général et q u ’il
porterait, non seulement sur des immeubles, mais
encore sur des choses mobilières et des percières con
testées , ils devaient être admis à. l ’exercice de l ’action '
en subrogation.
M. de Chazelles, de sa part, fit connaître l ’état
des choses à madame de Ramond, qui intervint pour
prendre son fait et cause; e t , après avoir répondu en
fait et en droit aux moyens qui lui étaient opposés,
M. de Chazelles soutenait q u ’ayant acquis du véritable
propriétaire ou de son fondé de pouvoirs , sa vente
devait avoir la préférence sur celle du sieur Rixa in ,
qui ne représentait que des vendeurs sans droits et
s a n s qualités pour lui transmettre la propriété du
domaine de Neufond.
Le jugement qui statue sur ces prétentions respec
tives est du 10 mai 1820. Il faut en analiser les
motifs.
Les premiers juges établissent d ’abord, comme prin
cipe de jurisprudence ,
q u ’ avant
la
demande
en
p arta ge, tout cohéritier a le droit de vendre des
immeubles de la succession , jusqu’à concurrence de
�( 43 )
son amendement dans les Liens de même nature et
que les ventes ainsi consenties ne peuvent être atta
quées, que si le vendeur a excédé son dro it, et pour
cet excédant seulement.
Faisant ensuite l ’application de ces principes à la
vente de M. de Chazelles, le tribunal reconnaît
comme faits certains, i° que cette vente ri e x c è d e
p o in t l ’am endem ent des mineurs. Bénaguet dans la
terre de Saint-Agoulin ; 20 que ces mineurs ou leurs
tuteurs n ont p i i s a u cu n e pcivt dans le p v ix des autres
immeubles vendus.
Quant à l ’usage que le sieur Pinatelle a fait de la
procuration de madame et de M. llamonti, en vendant
à M. de Chazelles, le tribunal considère que la vente
de Chazelles a été constamment approuvée par les
mandans, et que cette approbation résulte, i° de la
quittance donnée par la dame de Ramond à M. de
Chazelles; 2° de la ratification de la vente faite par
M. Bénaguet fils aîné; 3° de la réunion et de la jonc
tion de M. et madame de Ramond à M. de Chazelles,
et de leur adhésion à ses conclusions.
L e tribunal examine ensuite la vente sous sein"o
privé produite par le sieur Rixain.
A ce sujet, le tribunal remarque, i° qu'aux termes
de l ’article 1328 du Code civil, cette vente ne pouvait
avoir de date certaine, à l ’égard de M. de Chazelles
et de madame de Ramond, q u ’à dater de son enregis
trement; 20 que MM. de Gromont et de
Bénistant,
quoique cohéritiers de madame de Ramond, n ’avaient
ni qualité ni droit pour vendre à Rixain, puisque,
'
�(Tune p a r t , ils avaient antérieurement vendu au-delà,
de leur amendement, et q ue , de l ’autre, loin de
justifier d ’aucun pouvoir de madame de Ramond, ils
convenaient dans leurs défenses q u ’ils savaient que le
sieur Pinatelle avait toujours été seul mandataire pour
ven d re, et le seul qui eût procuration de madame de
Ramond, à cet effet.
Q u e , dans ces circonstances, s’il était prouvé que
la vente Rixain était connue du sieur de Chazelles, il
n ’en résulterait autre chose, si ce n ’est que ce dernier
aurait acquis du véritable propriétaire une chose qu ’il
savait' p r é c é d e m m e n t a v o i r é t é vendue par des per
sonnes qui n ’avaient ni droit ni qualité p o u r l a v e n d r e ,
ce qui ne changerait rien à la nature ni de l ’une ni de
l ’autre vente.
1 '
Quant aux demandes subsidiairesj et d ’abord sur
la licita tio n }
Le tribunal considère que le domaine de Neufond
ayant une étendue de deux cent quatre-vingt-quinze
mille toises de superficie, étant situé dans la commune
de Saint-Agoulin, devait, loin de rien perdre de sa
valeur, gagner par la division.
Sur la s u b r o g a t i o n , le tribunal donne p o u r motifs
q u ’elle n ’est maintenue par l ’art. 841 du Code civil,
que pour le cas où il y a cession de droits successifs,
et non pour celui où il y a vente de portion d’un
domaine ou autres immeubles particuliers indivis.
E n conséquence, le tribunal déboute MM. de Bénistant et de Groinont de leurs demandes contre
.jVL de Chazelles ; ordonne l ’cxéculion de la vente de
�( 45 )
ce dernier; déclare nulle celle du sieur Rixain, comme
contenant la totalité du domaine de Neufond; réduit
son effet à la moitié, et ordonne le partage de cet
immeuble. Le même jugement donne acte h M. de
Chazelles de ce qu ’il consent à ce que les experts fassent
échoir au lot de M. Rixain la totalité ou partie des
Mtimens, s’ils les jugent nécessaires pour l ’exploitation
de son lot.
Les principes consacrés par ce jugement étaient
d ’une exactitude telle, q u ’il semblait difficile q u ’ils
donnassent lieu à une critique fondée; cependant le
tribunal avait fait une méprise en considérant MM. de
G ro m o n t, de Bénistant , et inaJamo do Ramond ,
c o m m e cohéritiers, tandis q u ’ils n ’étaient que c o
p ro p rié ta ire s y et en regardant la terre de Saint-Agoulin
ou le domaine de Neufond comme immeuble dépen
dant d ’ une succession indivise 3 tandis que ces objets
n ’étaient autre chose q u ’une propriété p a r tic u liè r e et
in d iv ise entre les ayan t d roit.
La veuve Rixain et ses garans ont cherché à utiliser
cette erreur de fait. Après avoir interjeté appel du
jugement, ils ont, dans deux Mémoires successivement
publiés, reproduit leurs moyens; ils ont même essayé
d ’en développer de nouveaux. On r é p o n d r a a u x uns et
aux autres en s u i v a n t la d i v i s i o n que l'on s’est tracée,
et en établissant les trois propositions qui doivent faire
la matière de la discussion.
�DISCUSSION.
§ i*r
L e d om aine de N e u fo n d est une p r o p r i é t é i n d i v i s e
ENTRE PARTICULIERS j
DANT
D'UNE
cohéritiers
et UOll U N O B J E T DÉPEN-*
SUCCESSION
A
PARTAGER
ENTRE
; a in si un d es co p rop riéta ires d e c e t
im m eu b le a p u v en d re sa p o rtio n sans qu e son
acquéreur
f û t sou m is à une
ci so u ffrir une
en
C
licita tio n
subrogation
ette
a ctio n
en
partage
,
> et f u t e x p o s é à l ’a ctio n
.
proposition, dont la vérité est établie en
fait, serait également vraie dans toutes ses consé
quences, lors même que la terre de Saint-Agoulin
serait un objet de succession indivise entre cohéritiers;
e t , pour ne rien laisser à désirer sur ce point de la
cause, il est important d ’examiner les difficultés qui
se présentent sous les deux rapports , c’est-à-dire ,
i° dans la supposition où MM. de G ro m o n t, de Bénistant et les mineurs Bénaguet seraient cohéritiers,
et que la succession serait encore îi partager entr’eux ;
2° dans la position réelle où se trouvent les parties,
et en les considérant comme simjdes copropriétaires
d ’un immeuble indivis.
Dans' notre Droit : lorsqu’un défunt a laissé plu
sieurs héritiers, ch a cu n d ’e u x eàt, sa isi d e la p ortion
de biens qui lui est déférée par la loi; mais , cette
�( l\l )
portion se trouvant confondue avec celle des a n tr e s
héritiers, tant q u ’il y a indivision de la masse de
l ’hérédité, il est juste q u ’il ait le d ro it d e la f a i r e
sortir de la masse c o m m u n e } parce q u ’il peut lui être
plus utile d e j o u i r divisent eut d e sa p a r t et d ’en
disposer à son gré ; d e là n a ît V a ctio n en p artage ,
q u i appartient à ch a q u e héritier.
Nos principes actuels 3 conformes à notre ancien
Droit français, n ’ont point adopté la définition du
partage portée par la loi G, $ 8 , J f . co m m u n , d iv id u n d o j qui le qualifie un a cte p a r le q u e l le co h éritier
a cq u éra it d e ses c o h é iitic r s leu rs p o rtio n s indivises
dans le s e jfe ts q u i l u i é t a i e n t a t t r i b u é s p a r le p a r ta g e; tandis que, dans nos usages, le partage n 'est
p a s tr a n s la tif , mais bien seulement d é c la r a t if de
p r o p r ié té ,
parce que chacun des héritiers, n ’étant hé
ritier q u ’en partie, n’a pu succéder réellement à tous
les biens, mais seulement à ceux que lui assignerait
le partage; et comme, en vertu de la maxime le m ort
sa isit le v i f , chaque héritier est r ép u té a vo ir é té sa isi
d ès le m om ent d e V ouverture de la su ccession > de
tous les biens qui lui sont particulièrement échus par
le partage, il en résulte que cet acte a un e ffet ré
t r o a c t i f qui r e m o n t e à 1 ’ o u v e j 't u r c ô.c la succession ;
q u ’ainsi chaque c o h é r i t i e r est c e n s é a vo ir s u c c é d é s e u l
et im m éd ia tem en t à tous les biens a ttrib u és par le
partage, et n a vo ir ja m a is eu la p r o p r ié té d es autres
biens.
De ces idées élémentaires découle la faculté de
vendre avant partage, accordée à chaque cohéritier. Il
�( 48 )
était en effet naturel que celui qui était saisi, dès
l ’ouverture de la succession^ de la portion de biens
que lui déférait la loi, qui 11e tenait d ’ailleurs rien de
ses cohéritiers, pût disposer de sa propriété, pourvu
q u ’il n ’excédât point son amendement. Cette faculté
ne saurait d ’ailleurs être nuisible aux tiers, puisque,
pendant l ’indivision, aucun des cohéritiers ne peut
grever ou hypothéquer le lot q u i , par l ’événement du
partage, doit échoir à son cohéritier.
La faculté de vendre avant partage a donc sa source
d a n s l e s dispositions de la loi, dont la jurisprudence a
fait une saine a p p l i c a t i o n , e t non d a n s les seuls prin
cipes de l ’équité. Comment donc pourrait-on soutenir,
comme conséquence des principes , que le cohéritier
qui vend, sans le consentement de ses cohéritie?\s.,
l ’iinmeuble indivis, vend la chose d ’autru i, et que la
vente est nulle, s i, d ’ailleurs, il n ’a point excédé sa
portion ou son droit dans la succession indivise, et si,
comme dans l ’espèce, le cohéritier qui se plaint a
lui-même vendu antérieurement au-delà de son amen
dement, de manière que la nullité q u ’il invoquerait
viendrait frapper et détruire ses propres ventes P—
MM. de B c n i s t a n t e t de G r o m o n t v e u l e n t bien
abandonner cette première conséquence, comme trop
rigoureuse; mais ils s’appuient sur une seconde, en
vertu de laquelle l ’acquéreur ne peut agir comme
propriétaire, tant que le partage n ’a pas placé au lot
du vendeur l ’objet acquis ; d ’où ils infèrent que
M. de Chazelles, comme représentant son vendeur,
ne pouvait demander que le partage général contre
�( 49 )
tous les cohéritiers, et non le désistement d ’un domaine
isolé contre le sieur Rixain.
De quelle importance peut être ce moyen employé
par MM. de Bénistant et de Gromont ? S ’il est fondé
jiourquoi M. Debonnevie jouit-il de la réserve et des
trois domaines qui lui ont élé vendus? Pourquoi le
sieur Rixain s’est-il mis en possession du restant de la
terre de Saint-Agoulin ? Quel est le titre de ces acqué
reurs vis-à-vis madame de Ramond? Dans les principes
des appelans, cette dame ou seç mineurs ne sont-ils
pas leurs cohéritiers? ne pouvaient-ils conséquemment
vendre et jouir comme eux? et MM. de Bénistant et
de Gromont d e v a i e n t - i l s stmis a v o i r l e - privilège de
disposer de la totalité de la succession? M. de Chazelles,
de son côté, ayant acquis de madame de Ramond,
pouvait-il avoir d ’autres actions à exercer, que celles
qui étaient indispensables pour faire cesser les obstacles
.que l ’on apportait à sa jouissance? E t qui • faisait
naître .ces difiîcultées, si ce n ’est le sieur Rixain,
prétendu acquéreur d ’héritiers qui n ’avaient plus
aucun droit à la succession, ayant excédé leur amen
dement par des ventes antérieures à la sienne?
Mais M. de Chazelles n’a point acquis de droits
Successifs; il est acquéreur d ’un objet particulier.
Comment donc a u r a i t - i l demandé un partage général ,
lorsque, en adoptant le système de succession, inventé
par MM. de Bénistant et de Gromont, on voit que
cette succession ne se serait composée que de la. terre
de Saint-Agoulin, étant démontré que les
bois.
d’Au-
busson, les rentes et effets publics ne pouvaient entrer
7
�clans cc partage particulier, et ne devaient être divisés
entre les trois estocs favorisés par le testament de
madame de Chazerat , q u ’à l ’époque du décès de
M. son époux?
Dans ce système , est-ce parce que la terre de SaintAgoulin était indivisible, et q u ’il devait y avoir lien
à sa licitation , q u ’une demande en partage, de la part
de M. de Chazelles contre les cohéritiers de son
vendeur, était indipensable?
D ’abord les principes répondent :
Que n ’ y ayant plus, comme autrefois, d ’héritiers
qui aient des droits p á r t i c u í i e v s h. des biens d ’une
certaine nature ou d ’une certaine origine, tous sont
également appelés à succéder à toutes les espèces de
biens qui se trouvent dans la succession (Code c i v i l ,
article 7 3 2 ) ; q u ’ainsi chaque héritier peut réclamer
en nature j soit sur les meubles', soit sur les immeu
bles, la portion pour laquelle il est appelé à succéder,
et ne peut être contraint'a prendre moins sur une
espèce de biens, et p lu s sur une autre ;
Que si, pour éviter la division des exploitations et
le morcellement des héritages, l ’article 83 a du Gode
civil permet de m e t t r e plus «l’ i m m c u b l c s dans un lot
que dans les autres, c’est seulement dans le cas oit
Y intérêt commun de tous les héritiers est bien cons
taté; mais que jamais l ’intérêt ou la convenance de
quelques-uns d ’entr’eux n ’a pu servir de motifs pour
contraindre les autres à renoncer au droit q u ’ils ont
de prendre en nature leur portion entière, soit sur lesmeubles, soit sur les immeubles;
�( 5 0
Que le partage doit être constamment préféré à la
Jicitation, parce q u ’il conserve à chaque héritier ]a
portion que lui donne la loi, et que d ’ailleurs nul ne
peut être contraint à aliéner ce qui lui appartient
dans une niasse commune, et qui peut en être sépare'
sans aucun préjudice pour ses associés; q u ’ainsi la
vente par licitation ne peut avoir lieu que lorsque le
partage ne peut se faire sine cujusquam injuria 3
C o m m e décidé la’ loi au Code communi dividundo ,
c’est-à-dire lorsque la division est tellement incom
mode, q u ’elle opérerait la dépréciation de chacune des
parties ou de plusieurs des parties divisées, ou ne
laisserait la perspective quo J ’ uuu j ou lusancc onéreuse
et difficile.
E n fait : la division de la terre de Saint-Agoulin ,
loin d’être nuisible, était avantageuse; la terre était
composée d ’une réserve, de quatre domaines et d ’un
bois, outre le domaine qui en avait été distrait par
les experts, pour être porté au lot de la famille Devauce. Gette réserve et chacun de ces domaines avaient
J
t •
des bâtimens d ’exploitation et,des bestiaux particu
liers; ils étaient en outre d ’une étendue, en superficie,
très-considérable,
de manière qu'ils pouvaient être
divisés sans retour de lot ni é t a b l i s s e m e n t d aucune
servitude,• et si à ces circonstances 1 on ajoute 1 heu
reuse situation de ces immeubles, on se convaincra de
tout l ’avantage qui devait résulter de leur partage.
Mais MM. de Bénistant et de Gromont
ont eux-
mêmes reconnu cette vérité, en faisant à M. Debonnevic la vente de la réserve et de trois de ces domaines;
�m
\
ils ont ainsi fait leur lot
dans la terre de Saint-
Agoulin ; ils en ont disposé. Madame de Ramond ne
critique pas leur opération; elle respecte leur vente.
De quel droit ces Messieurs viendraient-ils donc se
plaindre de ce que leurs cohéritiers ont ensuite usé
. ^ de leurs droits pour disposer de leur portion dans la
î
propriété indivise ?
Ces principes conduisent à une autre conséquence î
c’est que M. de Chazelles ayant acquis de madame
de Ramond sa portion dans des immeubles susceptibles
de partage, et déjà divisés par le fait de ses cohéri
tiers, n ’avait à intenter d ’autre action que la d e m a n d e
q u ’il a formée.
E n effet, dans quelle position étaient les choses?
M. Debonnevie était propriétaire de trois domaines et
de la réserve, comme représentant MM. de Gromont
et de Bénistant; M. de Chazelles était acquéreur de
la moitié du domaine de Neufond, et représentait les
mineurs Bénaguet; enfin le sieur Rixain se prétendait
propriétaire de la totalité du domaine de Neufond et
des
Ct
bois, comme les ayant acquis de MM. de Gromont
de Bcilistant , v e n d a n t l a n t e n l e u r n o m que se
portant fo r ts pour ceux des héritiers Bénagnet dont
ils étaient mandataires. Il ne s’élevait point de diffi
cultés sur ramendement de madame de Ramoncl ou
de ses mineurs ; il n’était point dès-lors question
de réduire la vente consentie h M. de Chazelles,
comme excédant le droit q u ’avait sa venderesse dans
l'immeuble aliéné, mais bien de l'annuler dans Fin-
�( «3 .)
térêt du sieur Rixain, comme étant postérieure en date.
à la sienne.
E n cet état, que devait donc faire M. de Chazelles?
Former une demande en partage de la terre de SaintAgoulin? Mais cet immeuble était partagé; chaque
cohéritier avait pris sa portion de cette nature de
biens; de manière q u e , lors même q u ’il y aurait eu
d ’autres objets à partager, cette opération aurait dù se
faire sans aucun rapport de cette terre, dans laquelle
chaque cohéritier reconnaissait avoir pris son amende
ment. Mais encore contre qui cette demande devaitelle être dirigée? Etait-ce contre tous les h é r i t i e r s do
madame <lo Ciiasserat? M a i s un partage général de
toute la succession avait eu lieu entre eux; ce partage
judiciaire avait attribué Saint-Agoulin à la sous-divi
sion d ’une des branches de l ’estoc Rollet ; les héritiers
de Chazerat n’avaient donc aucun intérêt à la contes
tation, ni aucune qualité pour défendre à une demande.
— Etait-ce enfin contre les représentans Farradesche
et Bénaguet? Mais chacun d ’eux avait pris sa portion;
il l ’avait aliénée; chacun des différons acquéreurs était
en possession ; le sieur Rixain lui-même se présentait
comme possesseur et propriétaire du d o m a i n e de
Neufond. : c ’é t a i t donc c o n t r e c e dernier seul, que
madame de Ramond ou M. de Chazelles, son acqué
reur, devait intenter leur action, et c’est ce qui a été
fait.
MM. de Bénistant et de Gromont persistant tou
jours à se regarder comme cohéritiers de madame de
Ramond ou de ses mineurs, et à considérer la terre de
x
�m
( «4 )
Saint-Agoulin comme objet dépendant d ’ une succes
sio n , insistent sur la demande en subrogation q u ’ils
ont formée contre M. de Chazelles, et présentent cette
demande sous deux rapports, en considérant leur
adversaire comme acquéreur de droits successifs eç
litig ieu x.
Quelle est leur espérance?
Sous le premier point de vu e , on sait que celui qui
a acquis le droit de s’iminiscer dans les affaires de la
succession , de prendre connaissance des titres et
papiers, de pénétrer dans les secrets de la famille,
peut etre écaité du partage. C ’est pour faire cesser ces
inconvéniens, que l'ancienne jurisprudence appliquait
aux cessions de droits successifs les dispositions des
lois per cliversas et ab A n astasio, qui permettaient
d ’écarter les cessionnaires de droits litigieux ; disposi
tions que l ’article 8/| i du Code civil a érigées en loi.
Mais l ’on sait aussi que, lorsque la cession ne comprend
que la part indivise qui appartient à l ’héritier dans
des objets certains et déterm inés> l ’article S/ji ne
peut être appliqué, puisqu’on ce cas le cessionnaire
ri a pas le droit de s ’im m iscer dans le partage de
toute Ici s u c c e s s i o n j mais q u ’il suffit de l'appeler au,
partage des objets certains et déterminés dont i l a
acquis une portion; et ce dernier principe est si cer
tain , q u ’un arrêt de la Cour d ’appel de D ijo n, du
20 thermidor an 1 2 , a jugé que, si pour fix e r la
v a l e u r de cette portion d ’objets certains et déterm inés,
soit à raison des prélèvemens qui pourraient être dus
à d ’autre^ héritiers, à des donataires ou légataires.
�soit à raison du règlement des dettes 3 il devenait
nécessaire de donner connaissance au cessionriaire de
toutes les affaires de la succession y et s'il exigeait
lui-même cette communication, dans ce cas il était
convenable que la liquidation de la succession f u t
fa ite d ’abord avec l ’héritier céd a n t, et que le cessioitnaire ne fut appelé.qu’après cette première opération j
pour procéder au partage des objets certains et déter
minés auxquels seuls il a des droits.
Si l ’on se fixe sur ces principes, et q u ’on les ap
plique aux faits de la cause, il est évident qu ’il n ’y a
aucuns motifs pour admettre la subrogation proposée
par MM. de Groraont et de lîenistanl.
D ’abord M. de Chazelles n ’a acquis q u ’un objet
certain et déterminé : c’est la moitié du domaine de
Neufond. Son titre ne lui donnait pas le droit de
s’immiscer dans les affaires de la succession, quelles
q u ’elles fussent; il ne pouvait former d ’autre demande
que celle en partage du domaine de Neufond : ainsi
toute autre affaire de la succession lui était étrangère,
et toute demande en partage général interdite.
D ’un autre côté,
il
n’y avait aucunjprélèvement à
faire, aucune dette à régler pour fixer la quotité ou
la v a l e u r d e l a p o r t i o n v e n d u e <la domaine d e Neu
f o n d ; madame d e l î a m o u d s’était même chargée de
régler a v e c M. de Chazerat ce qui lui était du pour
l ’ u s u f r u i t ; enfin, ce qui est déterminant, la ferre de
S a i n t - A g o u l i n était le seul objet qui composât cette
prétendue succession : les bois cl’Aubusson , rentes ,
�( se )
effets publics et créances, devant faire l ’objet d’ un
)
partage particulier entre les trois estocs appelés à
la succession de madame de Chazerat , étaient en
tièrement étrangers à cette terre, ne pouvaient servir
h déterminer l ’amendement de chacun des ayant droit;
et comme M. de Chazelles n ’a rien acquis de ces
objets, q u ’il n’y prétend rien, on recherche vainement
les raisons oü les prétextes qui pourraient légitimer
cette demande.
Cette action en subrogation , considérée comme
exercée contre un acquéreur de droits litigieux, est
encore plus
singulièi-e.
Sotis
ce
point
de
vue,
o n se
demande
si MM. de Bénistant et de G rom ont ont
».
voulu se créer un moyen, ou faire une injure à M. de.
Chazelles.
Pouvait-il y avoir litige sur le fond du droit ? La
propriété cédée par madame de Ramond était-elle
d ’une nature litigieùse ? Peut-on ,
mênie par des
conjectures, établir la probabilité d ’un litige?
D ’un autre côté, la résistance apportée par le sieur
Rixain à l ’exécution de
la vente consentie à M. de
t
Chazelles, peut-elle rendre litigieux les droits cédés
par madame de Ramontl? D a n s t o u s l e s c a s , ne faudraitil pas que le litige eut précédé l ’acquisition, et q u ’il
y eût procès au moment de la vente, pour que les
droits q u ’elle comprend fussent litigieux dans le sens
de l ’article 1897 **
Autant cle questions que l ’on soumet à l ’examen de
�MM. (le Bénistant et de Gromont, eu les priant de
consulter les arrêts (i).
Jusqu’ici on a examiné cette partie de la cause sous
le rapport q u ’elle a été présentée par MM. de Bénistant et de Gromont, c’est-à-dire en considérant les
ayant droit à la terre de Saint-Agouliu comme co
héritiers, et le domaine de Neufond comme dépendant
d ’une succession indivise, et l ’on croit avoir pleine
ment détruit les moyens que les adversaires étaient
parvenus à se créer à l ’aide cette erreur de fait.
Mais quelle est la vraie position des parties, et leur
qualité relativement à Saijit-7\gou]jn ?
E n principe, quand le partage d ’une succession est
terminé, toutes les affaires de la succession sont ré
glées, et il n ’y a plus même de succession; ce n ’est
plus entre héritiers proprement dits, mais entre co
propriétaires, que restent indivis les biens qui n ’ont
pas été partagés; l ’acquéreur ou le cessionnaire n ’est,
en ce cas, qu ’un copropriétaire à titre singulier, d’où
résulte que l ’action en subrogation n’étant pas admise
entre copropriétaires, mais ayant été restreinte par
l ’article 841 > en faveur des successibles et aux cessions
de droits successifs, ne pourrait être admise contre
celui qui, après le partage de la succession, aurait
acquis la portion d ’un héritier, même dans des im
meubles restés indivis.
(1) Voyez
1, p. 53.
8
Sirey,
t. 7 , 1 , p.
7^.— Idem ,
t.
9 , 2.— Idem ,
t.
20,
�( 58 )
Si l ’on consulte le droit romain sur la copropriété
des choses indivises ,
On y apprend :
— Que d e u x personnes ne
peuvent posséder la même chose pour l e t o u t (leg . 19,
Q
uant a
la
possession.
J f. D e precario y leg. 3 , § 5 , J f. D e acquirend. v e l
amitt. posses.") ; que la possession ne peut appartenir
à d eu x pour le tout ( leg . 5 , p . i 5 ,J f . Com m odati),
mais que plusieurs peuvent posséder le tout p a r
indivis (ibid. ).
Qu-vnt a. l a t r a d i t i o n . — Celui qui livre un fonds
qui ne lui appartient que par indivis avec un autre ,
ne transfère la propriété que de la moitié indivise qui
lui appartient ( leg . G4 , in f i n e J f . D e evictionibus),
à moins q u ’il ne l ’ait livrée aussi au nom et du con
sentement de son copropriétaire ( In st.} p . (\ i,J f. D e
rerum divisione, leg. 9 , p . 45 à- *•)•
Enfin q u a n t A l a v e n t e . — Quand un copropriétaire
vend sa p a rt, l ’acheteur ne peut prétendre que ce qui
sera tombé dans cette p a r t , par le partage fait avec le
vendeur avant la tradition (Leg. i 3 , p . i ' j i j f - D e
action, empti et venditi.').
E n fait : le p a r t a g e d e l a s u c c e s s i o n de madame de
Chazerat était terminé; il avait été fait judiciairement
entre les trois estocs favorisés, et avait réglé toutes
les affaires de cette succession ; de manière que la terre
de Saint-Agoulin, provenue aux familles Bénistant et
Bénaguet par l ’effet du partage, n’était entr’eux q u ’un
immeuble indivis 3 vis -à-vis duquel ils figuraient
comme copropriétaires} et non comme cohéritiers.
�C 59 )
•
W
D ’ u n autre coté, M. de Chazelles, ayant acquis la portion
d ’un copropriétaire dans une chose indivise, et non
pas la portion d'un successihle dans une succession 3
n ’était lui-même q u ’un copropriétaire ¿1 titre singulier.
De là se déduisent plusieurs conséquences :
L a première. — Que chaque copropriétaire étant
censé ne posséder que sa portion dans le tout indivis,
et ne pouvant transférer que la propriété de ce qui lui
appartient, son acquéreur, en exerçant ses droits, a
la faculté d’évincer celui qui s’est mis en possession
de la portion appartenant à son vendeur, et q u ’il n’a
pour cela q u ’à exercer contre le délenteur une action
en désistement, si la p o r t i o n du vendeur était c o n n u e
par un partage antérieur à la vente, ou une demande
en partage, si les portions étaient encore confondues;
mais qu e , dans l’un ou l ’autre cas, l ’acquéreur 11e
peut et ne doit agir que contre celui qui met obstacle
à la jouissance et à l’exécution de sa vente.
L a seconde.— Que chacun étant propriétaire de sa •
portion dans le fonds indivis, 11e peut être obligé à
l ’aliéner; q u ’il a le droit de la prendre en nature ou
de la vendre, sans que, dans aucun cas, lui ou sou
acquéreur puisse être contraint, à moins d’un consen
exprès à consentir à une v e n t e par licitation.
L a troisième. — ( C o m m e on l a déjà dit). Que la
s u b r o g a t i o n n ’étant admise qu ’en faveur des succestem ent
sibles et pour cession de droits successifs, ne peut l ’être
entre copropriétaires, et contre un cessionnaire qui
n ’est, en ce cas, lui-même, q u ’un
titre singulier.
copropriétaire
à
?
�M \.
■ ( 6a )
Ainsi, la proposition examinée dans ce paragraphe
est pleinement justifiée, et les moyens déjà développés
servent encore à écarter deux difficultés élevées par
MM. de Bénistant et de Gromont.
»
Ils soutiennent, en premier lieu , que rien ne
prouve que les ventes q u ’ils ont consenties égalent
leur lot, et q u ’il n ’est pas établi que celle de madame
de Rainond, à M. de Chazelles, n’excède pas l ’amen
dement de cette dame‘dans la terre de Saint-Agoulin,
L a réponse est facile ; elle ressort des faits. Le par
tage fait connaître l ’amendement de chaque coproprié
taire; c e l u i d e - m a d a m e de Ramond est de 25,956 fr»
61 centimes, si l ’on consulte les b a s e s du p a r t a g e , e t
de 2 7,33o fr. 36 centimes, si l ’on considère la valeur
estimative des immeubles délaissés. Cependant madame
de Ramond n’a vendu que pour 25, 5oo fr. d ’immeubles,
et a obtenu, par cette vente, un bénéfice de 11,000 fr.
sur l'estimation , valeur partage, du domaine de Neufond. MM. de Bénistant et de Gromont ont v e n d u ,
de leur part, tout le reste de la terre de Saint-Agoulin,
et ont fait une perte de 11,691 fr. sur la même valeur
partage; ainsi, bien évidemment, madame de Ramond
n ’a p o i n t excédé ses droits ni son amendement 5 et ce
reproche ne pourrait encore a t t e i n d r e que MM. de
Gromont et de Bénistant.
Les adversaires disent ensuite que la vente de M. de
Chazelles est vicieuse; q u ’elle a été consentie par des
tuteurs, et que les mineurs pourront, dans l ’avenir,
l ’attaquer, et même former la demande en partage.
On voit assez q u ’en présentant ce moyen, MM. de
�( 6. )
Bénistant et de Gromont se considéraient comme co
héritiers des mineurs Bénaguet , et q u ’ils avaient
voulu oublier q u ’un partage judiciaire avait en libre
ment séparé leurs intérêts de ceux de ces mineurs.
Mais aujourd’hui il leur sera facile de sentir que ,
n ’étant que copropriétaires^ d ’un immeuble indivis ,
ils n ’ont aucun intérêt à la validité des ventes de la
portion de ces mineurs; q u ’ils n ’ont aucune demande
en partage à redouter, puisque cette opération a été
déjà faite régulièrement, et d ’une manière définitive;
q u ’ainsi, dès q u ’ils ne peuvent établir que madame de
Ramônd leur a causé un préjudice en excédant, par
sa vente, son amendement dans la propriété indivise,
il ne saurait désormais leur rester aucune objection
raisonnable à présenter.
�S II.
Sous le Code c iv il, la'propriété d ’un immeuble étant
transmise à Vacquéreur par l ’effet seul du contrat
de vente , et sans q u ’il soit besoin du concours de
la tradition ou de la transcription, une vente sous
seing privé ne peut être opposée a u x tiers q u ’autant
que sa date est assurée par les moyens indiqués
p ar la loi. C elu i qui a négligé de prendre ses pré
cautions
ou n ’a pas songé ci assurer la date de
•son titre, n’est point propriétaire, et ne peut accuser
de fra u d e le t i e r s r j n i j p r o f i t a n t d ’un avantage qui
lu i était offert p ar la lo i, aurait acquis l ’immeuble
p a r un acte authentique 3 régulier } et translatif de
propriété.
L ’examen de cette proposition , qui doit prouver
que la vente de M. de Chazelles d o i t a v o i r la pré
férence sur celle du sieur Rixain, lors même que l ’une
et l ’autre de ces ventes émaneraient d ’un seul et véri
table propriétaire, et montrer q u e , dans aucun cas,
la preuve tendant à établir que M. de Chazelles c o n
naissait, a v a n t s o n a c q u i s i t i o n , la v e n t e R i x a i n , ne
saurait être admise, nécessite un exposé et une analise
raisonnée des principes.
On sait que , dans le Droit romain, la tradition
était un moyen d ’acquérir par le droit des gens ( L e g . 9,
§ 3 , ff- de acquir. rerum dominio.
Sous ce Droit, la tradition était chose si essentielle,
que les obligations q u i , suivant la définition de la loi
�(Ci)
3 , au J f. de obligationib. et action ib.s tendent à nous
astreindre à faire ou ne pas faire, ou à donner quelque
chose, n ’avaient pas l ’effet de transférer la propriété
d'un corps ou d ’une servitude : Obligationum substantia non in eo cousis lit, ut aliquod corpus nostrum_,
aut servitutem nostram f a c i a l y de manière que l ’ac
quéreur à qui la chose n ’avait pas été livrée ne pou- *>
Vait exercer l ’action in rem, parce q u ’il n’était point
propriétaire ( L .
. de rei vcndicatione). E t quant
aux servitudes, la tradition en était censée faite par
leur exercice de la part de celui à qui elles étaient
dues : E go p ulo usum ejus jitris pro traditione possessioilis CSSe ( Leg. ao^ do servie, prœd. rus t . ) , ou
par la souffrance de celui qui la devait ( L eg . i , J 2 ,
j f . de servit, prœd. rusl.— Leg. 3 , in princip. , Jf. de
usufruct. et quemadmodum.').
Si l ’on consulte les principes adoptés par les lois,
romaines sur la vente en particulier, on voit q u ’entre
deux acheteurs -celui à qui la chose a été livrée est
préférée {Leg. 3 i , $ i 3 J f. de actionib. empti et
ven diti); et cette loi suppose que chacun des deux
acquéreurs a acheté de bonne foi, sine dolo m alo,
d ’un non propriétaire, à non dom ino, qui a livré la
chose j et elle décide que, soit que les deux acheteurs
aient acquis d ’un même vendeur, ou l ’un d ’un ven
deur et l ’autre d’un autre, sive ab alio et a lio , il
faut maintenir en possession celui auquel la chose a
été livrée d ’abord : Is e x nobis tuendus est qui prior
I
j
ju s apprehendit.
Ces dispositions du droit romain étaient admises
�k
)
dans notre ancienne législation; mais la loi du 1 1 bru
maire an 7 changea toutes les idées, à cet égard, en
introduisant la transcription à la place de la tradition,
et en attachant le transfert de la propriété à l’accom
plissement de cette nouvelle formalité.
L ’article 26 de cette loi porte : « Les actes translatifs
« de biens et droits susceptibles d ’hypothèques doivent
« être transcrits... Jusque-là ils ne peuvent être opposés
« a u x tiers qui auraient contracté avec le vendeur,
« et qui se seraient conformés a u x dispositions de la
« présen te. »
Ce texte était précis : a u s s i , s o u s Fempire de la loi
du 1 1 brumaire, non seulement la préférence entre
deux acquéreurs, dont chacun avait fait transcrire,
se réglait p ar la date de la transcription, et non pai'
la date de la mise en possession (1), mais encore l ’acqué
reur transcriptionnaire était préféré'a. l’acquéreur non
transcriptionnaire, quoique celui-ci fut antérieur en
titre, et que lors de son contrat le second acquéreur
eût connu la v e n te .— L a vente n ’étant pas simulée,
la transcription perfectionnait le titre de l ’acquéreur
au préjudice du tiers} encore que cet acquéreur eût
COnntl Une première v e n t e l i o n t r a n s c r i t e ( 2 ) .
L ’espèce d’un de ces arrêts peut donner une idée
juste des principes en cette matière.
(1) Voyez S ire y , tome 4 , p- 2 i p. 585.
(2) Voyez Sirey, tome 3 , p. 1 , p. "ii.— Id em , lome 6 , p. 1 , p. Go.
— Dcuevers, lomo 3 , p. 1 , p. 564.
�.
( <55 >
Le 8 floréal an 9 , Pierre Girard vendit par acte
public un immeuble à Michel, son frère. '
Le 9 , seconde vente du même objet à Guillaume,
son autre frère.
Le second acquéreur transcrit le jour même de son
acquisition, tandis que le premier ne remplit cette
formalité que plusieurs mois après.
Dans cette position, débats entre les deux acqué
reurs.
Le premier, admis à une preuve, établit que le
second avait, lors de son acquisition, connaissance de
la première vente. E n conséquence, il soutient que le
second aefjudreur s’était rendu coupable d ’une fraude
qui devait lui faire refuser la préférence.
Ce système fut accueilli par le tribunal d ’Issoire;
mais sur appel, le jugement fut réformé par arrêt de
la première chambre de la Cour royale de R iom , du
5 prairial an 1 1 , qui accorda la préférence à la seconde
v e n t e parce que, i° le second acquéreur avait trans
crit le premier, et que la loi attache l’irrévocabilité de
la propriété, vis-à-vis des tiers, à cette formalité ;
29 que, dans les termes absolus de cette loi, la con
naissance d ’ une vente précédente est indijférente ;
q u ’il est a s s e z q u e l e s e c o n d acquéreur ait su que
la première vente r i avait pas été soumise à la f o r
m alité de la transcription.
Cet arrêt ayant été déféré à l ’examen de la Cour de
cassation, fut confirmé, le 3 thermidor an i 3 , par
les motifs,
Q u ’on ne peut accuser de fraude celui qui achète
9
�«0C \
(66)
un immeuble q u ’il avait pu déjà savoir être vendu À
un autre, tant que cette première 'vente ri est pas
transcrite , et conséquemment q u i l riy a pas eu trans
lation de propriété'y car il n ’y a pas de fra u d e à pro
fite r d'un avantage offert par la l o i , et que c e s t au
prem ier acquéreur à s'im puter à lui-même s'il n’a pas
usé d ’une égale diligence pour fa ir e transcrire son
acte.
Le nouveau droit introduit par la loi du \ i brumaire'
an 7 , exigeait que l ’on reconnut quels étaient les actes
qui pouvaient être transcrits, et conséquemment, par
l'accomplissement de cette ioi-maln<$, conférer irrévo
cablement la propriété. .
Il n ’y avait point de difficultés pour les actes
authentiques.
Quant aux actes sous seing privé translatifs de
propriétés d ’immeubles , une décision du ministre
de la justice, du 25 nivôse an 8 ,
porta q u ’ils ne
doivent pas être transcrits........s"ils ne sont préala
blement reconnus et déclarés tels par jugem ent. Cette
décision parut trop rigoureuse aux tribunaux; et la
jurisprudence établit, au contraire, que les a c t e s .sous
seing privé peuvent ê t r e t r a n s c r i t s , e n c o r e q u ’ils ne
soient pas reconnus (i).
Aussi
uu avis du conseil
d ’E t a t , du 3 floréal an i 3 , décide expressément q u ’un
acte de vente sous seing privé peut être transcrit,
quand i l est enregistré. Il fallait donc, sous la loi de
brumaire, que la date de l ’acte sous seing privé f u t
(i) Voyez Sircy, tome 4 > part. 2 , p. 29G.
�assurée, à l ’égard des tiers, pour pouvoir être soumise
à la formalité de la transcription, qui seule transférait
la propriété d ’une manière irrévocable.
Tel était 1 état de cette législation transitoire ,
lorsque le Code civil fut promulgué. Si on l ’étudie
avec attention, si on combine sur-tout scs dispositions,
on se convaincra bientôt que, peur les.cas ordinaires,
ce code n ’a eu égard ni à la tradition ni à la. trans
cription, et q u ’il a attaché au titre seul le transfert
de la propriété; de manière q u ’aujourd’h u i, dans le
cas de deux ventes, Y antériorité de la date de l ’ une
doit nécessairement lui faire accorder la j>ix{/crence
s u r l ’a ii ti c.
E n effet, sous le Code civil, àr la différence du
Droit romain, la tradition n’est plus un moyen d ’ac
quérir, en ce sens, du moins, q u ’elle n ’est plus né
cessaire pour conférer la propriété des immeubles, le
contrat suffisant pleinement à cet égard.
A in s i, quant aux obligations de toute nature 3 le
-Code civil a introduit à cet égard une modification
bien importante, et dont les conséquences, en Droit,
sont très-étendues, en statuant que Veffet des contrais
et obligations, en général, est de t r a n s f é r e r i m m é d i a
te m e n t
et sans q u ’il soit b e s o i n de tradition , l a pi'opriété pleine et entière de la chose qui en est l ’objet;
c ’est ce qui résulte nettement des articles j 13 8 , 1 583
et 1703 du Code, qui ont abrogé l’ancienne maxime:
Tradilionibus non nudis pactis dominia rerum transferuntur.
Le Code civil n’admet, au reste, que deux excep
�tions aux règles absolues et positives q u ’il établit : —
la première est relative au m obilier, espèce de biens
pour lequel le possesseur est préféré, quoique son titre
soit postérieur, si l ’acquéreur est de bonne foi (Voyez
Code civil, articles 1 1 4 1 et 2279)*— L a seconde re
garde les donations et les testamens, qui ne transfèrent
pas seuls la propriété des immeubles, ce qui ne peut
avoir lieu que par le concours de la transcription, que
le Code civil, comme la loi du n
brumaire an 7 , a
mis à la place de la tradition. (Voyez Code civil, ar
t i c l e s 9 3 9 et s u i v a n s , 1069 et suivans). M a i s , hors
ces cas, tout rentre dans la r è g l e g é n é r a l e , l e c o n t r a i
suffit pour conférer pleinem ent la propriété des im
meubles qu i en sont l'objet.
Les résultats de ce principe sont q u e , dans notre
nouveau Droit :
i° L ’acheteur à qui la chose n’a pas été livrée peut
exercer l ’action en revendication, même à l ’égard du
second acquéreur, qui aurait fait transcrire; car le
vendeur n ’a pu transmettre à ce dernier que la propriété et les droits q u ’il avait lui-même sur la chose
'v e n d u e . (Voyez Code civil, article 2 1 8 2 , deuxième
alinéa);
20 Q u ’entre deux acquéreurs, s’il s’agit d ’immeu
bles, on doit maintenir celui qui a pour lui l ’anlériorité du titre, abstraction faite de la tradition ou
transcription, qui ne sont plus nécessaires pour saisir
l ’acquéreur ou pour faire courir la prescription en sa
faveur.
j 583. ).
(Voyez Gode c i v i l ,
articles i i 3 8 , i i / j î ,
�( «9 )
'
Ces conséquences, qui ressortent si nettement des
dispositions de la loi, sont encore consacrées par la
jurisprudence.
Ainsi, sous l ’empire du Code civil, la transcription
n'est pas nécessaire p our préserver l ’acquéreur de
l ’effet d'une seconde vente que pourrait consentir sou
vendeur (Arrêt de Nîmes, du 11 juin 1807. Voyez
Sirey, tome 9, partie 2 , page 3 i.). La préférence
entre d eu x acquéreurs successifs du même immeuble
se règle, non par la tr a n s c r ip tio n mais uniquement
p ar la date des titres (Arrêt de Trêves, du 9 février
1810. Voyez Sirey, tome 12, partie a , page 177.).
.— E t c e t t e j u r i s p r u d e n c e est si positive et si constante,
que l ’on voit q u ’un contrat de vente passé sous la loi
du 11 brumaire an 7, quoique non transcrit, est
devenu translatif de propriété du moment de la pro
mulgation du Code civil (Arrêt de Paris , 9 février
1814. Sirey, tome 12 , partie 2, page 74.).
U n changement aussi notable dans les principes
devait faire sentir la nécessité d ’assurer la date des
actes, transférant par eux-m êm es, et dès l ’instant,
îa propriété des immeubles, sans le concours de la
tradition ou de la transcription. Cette n é c e s s i t é était
même plus forte s o u s l e C o d e civil que sous la loi du
II brumaire an 7 , puisque, sous cette dernière loi,
la transcription conférant la propriété, et l ’acte sous
seing privé ne pouvant être transcrit ju s q u ’à son enre
gistrement , il en résultait q u e , sans enregistrement,
le porteur d’un acte sous seing prive n ’avait pas de
titre contre les tiers.
�( 7° )
Il
existe d ’ailleurs, entre l ’acte authentique et l ’acte
sous seing prive, des différences si notables dans les
effets q u ’ils produisent, même entre les parties con
tractantes , q u ’il était
indispensable. d ’assigner des
moyens certains de reconnaître leur date, et de l ’assurer
à l ’égard des tiers.
E u effet, l ’acte authentique fait foi jusqu’à inscripr
lion de faux; c’est à celui qui l ’attaque à tout prouver,
tandis que l ’acte sous seing privé ne fait foi q u ’autant
q u ’il a été reconnu expressément ou tacitement par
ceux qui o n t i n t é r ê t de ne pas le reconnaître; de ma
nière q u ’une simple d é n é g a t i o n p e u t e n a r r ê t e r l ’exé
cution , et c’est au demandeur à prouver la vérité de
son acte.
E n un m o t , l ’acte authentique est présum é vrai ,
tant qu g le f a u x n ’est pas prouvé , tandis que Vacte
sous seing p riv é, quand il y a dénégation , est présum é
f a u x , jusqu’à preuve contraire ( Argum ent tiré des
articles i 3 a3 et 13 24 ^ll Code civil.).
U n titre q u i , par sa nature, a une existence aussi
incertaine, même à l ’égard des parties contractantes,
pouvait-il être facilement opposé à des tiers? E t rela
tivement à eux, aux i n t é r ê t s d e s q u e l s il est si facile
de préjudiciel' par des antidates, l ’acte sous seing
privé pouvait-il avoir d ’autre date que celle du jour
où il était représenté, ou au moins celle que la loi lui
donne, comme suite de l ’accomplissement des forma
lités q u ’elle prescrit?
Aussi l ’article i 328 du Code civil no fut défini
tivement rédigé,
q u ’après un examen très-sérieux.
�( 7 0
L ’arlicle 219 du premier projet, et l ’art. 217 de celui
de la section , 11e parlaient pas de rénonciation de la
substance d ’un acte sous seing privé dans un acte
public, pour en constater la date; et l ’analisc des
observations dès tribunaux, pages 609 et 6 1 2 , établit,
que c’est sur la demande des Cours de cassation et de
Grenoble, que cette addilion, déjà consacrée par les
lois des i 3 messidor et 6 fructidor an 3 , fut adoptée au
conseil d ’E t a t , sur la réclamation de M. Defermont.
L'article 1828 porte : « Les actes sous seing privé*
« n ’ont de date contre les tiers, q u e nu j o u k où ils
«
«
«
«
«
ont été enregistrés, du jo u i' de la mort do celui ou
l ’un (le ceux q u i les ont souscrits, ou du jo u r OÙ
leur substance est constatée dans des actes dressés
par des officiers publics, tels que procès-verbaux
de scellés ou d ’inventaire. »
Si l ’on se fixe sur les antécédens de cet article,
l ’incertitude des actes sous seing privé entre les parties
contractantes, la facilité des antidates, les discussions
au conseil d ’E t a t , pour ajouter aux circonstances
qui doivent donner à l ’acte sous seing privé une
date certaine contre les tiers, tout ne se réunit-il pas
pour établir que les dispositions de cet article sont
absolument r e s t r i c t i v e s ? J)e u t-on sur-tout méconnaître
cette vérité, quand, en se fixant sur la rédaction de
la loi elle-même, ou se convainc qu ’elle est conçue en
termes p ro h ib itifs, absolus et restrictifs pour toutes
les conditions q u ’elle exige, afin de donner à l'acte
sous Seing privé une date contre les tiers, et q u ’au
contraire elle s’exprime en termes énonciatifs, lors-
�q u ’elle veut faire sentir de quelle nature peuvent être,
sans en exclure aucun, les actes authentiques qui
peuvent
privé ?
constater
l ’existence
des actes sous seing
Mais ce n ’est pas tou t; l ’exposé des motifs, le rap-r
port fait au tribunat, et le discours au corps législatif,
lèveraient au besoin toute espèce de doute sur le sens
et le véritable esprit de cette loi.
M. Bigot de Préameneu, dans son exposé des motifs,
du 7 pluviôse an 1 2 , disait : — « Il est souvent du
« plus grand intérêt, soit pour les parties, soit pour
« des tierces p e r s o n n e s r p c e l a d a t e clcs actes sous
« seing p rivé soit prouvée. Ceux qui les ont écrits ont
« la facilité de les écrire une seconde fois sous une
« autre date. L a date portée dans un écrit sous seing
« privé ne fait donc foi q u ’à l ’égard de ceux qui ont
« signé; i l fa u t q u ’à l ’égard des autres la date soit
(i d ’ailleurs assurée ; ainsi les écrits sous seing privé
« n ’o n t ,
a l ’é g a r d
des t i e r c e s
personnes,
de d a t e
« CERTAINE.,........ »
M. Jaubcrt, dans son rapport au Tr ib unat, du
i 4 pluviôse an 12 , ajoute « que déclarer en principe
« que les actes sous s e i n g p r i v é f a i s a i e n t f o i de leur
« date contre des tiers, c ’ e u t é t é o u v r i r l a p o r t e a
« t o u t e s l e s f r a u d e s . — Déclarer en principe que ces
« actes n’ont point de date contre les tiers, n?est-ce
«
«
y
«
pas compromettre, en certains cas, les intérêts des
hommes de bonne foi qui n ’ont pas exigé un acte
public, ou parce q u ’ils n ’y ont pas songé, ou parce
.qu’ils n ’ont pas voulu en faire les frais. — Cependant
�( 7^ )
« cc dernier inconvénient est moindre que celui qui
« résulterait du système contraire.............. Au reste
« le s
c o n tr a c ta is son t a v e r t i s ;
c ’est à
eux
à
« PRENDRE leu rs PRÉCAUTIONS. »
Ainsi, deux choses sont actuellement évidentes : la
première, que, sous le Code civil, le titre transfert
seul la propriété de l ’immeuble vendu; la seconde,
que l ’acte sous seing privé n’a de date certaine , à
l ’égard des tiers, q u ’autant que l ’acquéreur s’est con
formé aux dispositions restrictives de l'article i3a8
du Code civil;
autrement, cet acquéreur n ’est pas
plus propiictaire que celui qui, sous le Droit romain,
n ’ a u rait p a s eu da t r a d i t i o n ou que celui q u i , sous
la loi du i i brumaire au 7 , n ’a u ra it p a s eu de
transcription.
Sous ce rapport, il est évident q u ’aucune preuve
ne saurait être admise pour fixer et établir à l ’acte
sous seing privé, contre les tiers, une autre date que
celle que la loi lui assigne. En effet, comme l ’a dit
M. Jaubert, les con tra cta n s sont avertis ; c ’est à e u x
à p ren d re leu rs p réca u tio n s ; ils sont donc, relative
ment à la date de leur a c t e , dans la même position
que celui qui voudrait faire admettre une p r e u v e p o u r
une s o m m e e x c é d a n t i 5 o l'r• , c o n t r e l es dispositions
formelles de l ’article i 3 4 r du Code civil, et qui ce
pendant ne pourrait se placer dans aucune des excep
tions prévues par les articles 13/f7 et x3/j8 du même
Code. Or, 011 peut, à son tour, faire ici un dilemme
à la dame veuve Rixain, et lui dire : « Votre mari
« p o u v a it 011 ue p o u v a it p a s assurer la date de soji
*9
�( 74 )
«
«
«
«
«
«
acte vis-à-vis les tie r s.— S ’il le pouvait, pourquoi
ne l ’a-t-il pas fait? I l était averti par la loi; il tlevait prendre ses précautions : il doit donc seul supporter la peine de sa négligence.— Si, au contraire,
il ne le pouvait pas, quelle était la raison de cette
impossibilité? On ne peut en supposer que deux ;
« la première, que l ’acte n ’existait point encore ; la
« seconde, q u ’en supposant son existence, la vente
« qui en était l ’objet avait été consentie par des ven« deurs n ’ayant ni qualité ni pouvoir; dans l ’un et
« l ’autre cas, comment cet acte pouvait-il être opposé
« au tiers? c o m m e n t a u r a i t - i l été pour lui l ’origine
« de la plus légère obligation, lors même q u ’il lui
« aurait été connu ? »
Cependant la dame veuve Rixain persiste à articuler
q u ’il y a fraude de la part de M. de Chazelles, qu i,
à l ’époque de son acquisition, connaissait la première
vente; et, se fondant sur les dispositions de la lo i 9,
au J f. de p ublician â in rem ac liane 3 sur celles de la
lo i 3 1 , § 2j J f. de aclionibus em pli et v e n d iti, ainsi
que sur tous les auteurs de l ’ancienne jurisprudence
qui ont appliqué ces principes, elle soutient que la
préférence doit être accordée à sa vente.
Avant d ’employer ces moyens, la dame Rixain au
rait dû réfléchir q u ’elle était obligée d'invoquer une
législation et une jurisprudence qui n ’existent pins ;
que dès long-tems la tradition avait été remplacée par
la transcription y que la transcription elle-même n ’était
point aujourd’hui nécessaire pour transférer la pro
priété, qui se transmettait par le titre seu l, lorsqu’il
�( 7« )
^
¿tait authentique; mais que, dans l ’un comme dans
l ’autre de ces deux derniers cas, on ne pouvait ac
cuser de fraude celui qui achetait un immeuble q u ’il
savait vendu, lorsque, sous la loi du' n brum aire,
la première vente n’était pas transcrite 3 ou que, sous
le Code civil, elle n ’avait point de date certaine à
l ’égard des tiers; q u ’alors, n ’y ayant pas eu de trans
lation de propriété, le second acquéreur avait pu sans
fraude profiter d ’un avantage ouvert par la loi, tandis
que le premier acquéreur aurait à s’imputer de n ’avoir
pas usé de diligence, et de n ’avoir pas pris ses pré
cautions, quoiqu’il fut suffisamment averii. S i l ’o n
v o u l a i t c o n s u l t e r l e D r o i t romain dans cette cause, ce
n ’était pas des principes de législation positive et sujets
à changement q u ’il fallait exhumer, mais bien ces
principes immuables qui sont .consignés dans le vaste
recueil du Droit romain, et journellement invoqués
comme raison écrite. Alors la dame veuve Rixaiu au
rait appris que celui qui use de son droit n ’est point
censé en dol. N u llu s videtur dolo fa esre qui ju r e
suo utitur {Leg. 5 $, ff- de reg. ju r is .); que nul n ’est
présumé ignorer son droit. Plurim hm interest utruni
quis de alterihs causa et fa c to 3 non sciret, an de
ju r e suo ignoret (^Leg- 3 ,
de ju r e et fa e ti ignorantin. ).
La dame veuve Rixain persiste à soutenir que les
dispositions de l ’article i 3 a8 du Code civil n’ont rien
de restrictif ; que les cas qui y sont prévus ne sont
q u ’ énonciatifs, et que l ’on peut démontrer, contre les
tiers, l ’existence d’ un acte sous seing privé, pard autres
�< w
^
( 76 )
circonstances que celles énumérées dans cet article.
L ’erreur de ce système a été démontrée; mais si l ’on
accordait à la dame Rixain ce dernier p o i n t , quel
avantage retirerait-elle de cette concession ?
Dans quel sens, en. effet, l ’article i 328 pourrait-il
être considéré comme énonciatif? C ’est dans le cas où
la dame Rixain articulerait des faits pareils ou d ’une
égale force à ceux qui sont indiqués par la loi, mais
q u i , par leur singularité ou leur rareté, n’auraient
pu. être l ’objet de la prévoyance du législateur.
Voyons encore les principes : Les législateurs, dit
Theopliraste, n e s’occupent pas de cc qui arrive une
ou deux fois. Q uod enim sem el aut bis eæ istit, ut
ait Theopliraste s, prœtereunt legislatores ( Leg. G,
tit. 3 , au JJ\ de legib. seu que{ consul. et long*
consuetud. ) . — Les lois ne peuvent prévoir tous les cas
( L . 10, 12, e o d Aussi leur décision doit s’appliquer
aux cas semblables : A d sim ilia procederc, atque.
ila f u s dicere debet ( L . 1 2 , i 3 , a 4 ? eodem.'). De-là
le principe ubi eadem ratio idem j u s .— Les cas sem
blables sont
censés écrits dans la loi : Q uasi hoc
legibus inesse credi oportet {I). le g . , 27.). Aussi les
auteurs qui o n t cru devoir regarder l ’article i 328 du
Code civil comme énonciatif, proposent-ils des cas
d ’une force au moins égale à ceux qui ont été prévus
par la loi, et qui n ’ont pu venir à la pensée du légis
lateur. Le docteur Toullier donne pour exemple uu
militaire qu i, la veille d'une bataille, consent un acte
sous seing privé, et q u i , le lendemain, a les deux
bras emportés;
il se demande ensuite si un pareil
�(77.)'
i 1
accident assure la dale de l ’acte relativement aux
tiers. Il est évident1 que ce cas est tout semblable'et
tout aussi fort que ceux prévus par l ’article; que sa
rareté ne permettait pas que le législateur s’en oc
cupât; qu ’ainsi il doit être censé écrit dans la loi.
Q u ’ont de commun de pareils exemples, fondés sur
des faits publics, permanens et incontestables, avec
l ’espèce à juger? La daine Rixain veut une preuve :
de quel fait? La connaissance que M. de Chazelles
aurait eue, avant son acquisition, de la vente consentie
au sieur Rixain par MM. de Bénislànt et de Gromont.
Mais cette connaissance a-t-éllê un caractère d ’é v i d e n c e
a u s s i f o r t <jne / ’e n r e g i s t r e m e n t j la mort d ’une des
parties contractantes, ou Vénonciation des actes soiis
seing privé dans les actes p u b lics? Cette circonstance
est-elle sur-tout tellement rare, q u ’il fût impossible
de la prévoir? E t si la loi, décidant, en ce point,
d ’une manière toute contraire aux principes q u ’elle a
consacrés, eut voulu laisser la propriété flottante et
incertaine, et la faire dépendre de la déposition de
quelques témoins, ne s’en serait-elle pas clairement
expliquée ?...........
Mais M. de Chazelles a fait connaître les faits, et il
a au m o i n s l ’a v a n t a g e d e n ’a v o i r jamais varié. M. de
Gromont des Ronzières lui a dit que la vente était
c o n s o m m é e ; M* llébrard, notaire, lui a assuré qu'il n ’y
avait point de vente, parce que MM. de Gromont et
de Bénislànt n ’avaient pas de pouvoirs pour la con
sentir. M. de Chazelles, supposant que le sieur Rixain
avait au moins obtenu une promesse de p référen ce, a
�1
l*V
voulu faire un sacrifice pour être subrogé ou associé à
d
cette promesse : il n’a pu réussir. Il s’est alors adressé
au sieur Pinatelle, que Mc llébrard lui avait indiqué
eomme fondé de pouvoir de madame de Ramond, et a
acquis de lui la moitié de Neufond , sans connaître
toutefois la vente que le sieur Rixain aurait tenue de
MM. de Gromont et de Bénistant.
Telles sont les explications que M, de Chazelles a
constamment données et q u ’il réitère encore. Il savait
q u ’il pouvait se taire; mais sa conscience exigeait de
lui l ’aveu de la vérité tout entière : il l’a fait. Mais,
comme cet aveu est indivisible il ne peut redouter
que la Cour admette une preuve qui, dans les circons
tances, serait tout à-la-fois illégale, inutile et inju
rieuse»
!
�( 79 )
j O
f
S III.
Sous les anciens principes la
(
t r a d it io n
> pendant
le droit intermédiaire la t r a n s c r i p t i o n } et sous
le Code civil le t i t r e s e u l , ne transférant la
propriété qu autant que la vente aurait été consentie
par le véritable propriétaire ; et s dans l ’espèce, le
seul propriétaire de Vimmeuble vendu étant ma
dame de Ramond ou ses mineurs, M . de Chazclles,
son acquéreur, doit obtenir la préférence sur le
sieur R ix a in , q u i } sous aucun rapport 3 ne p eu t
se plaindre ou
connaissance sup
posée que BI. de Chazclles aurait eue d ’une vente
antérieure à la sienne„ mais émanant d'un vendeur
qui n’était pas propriétaire.
Si cette proposition est vraie, elle est déterminante
dans la cause, et tellement décisive, qu ’elle pourrait
rendre inutile l ’examen des autres moyens. O r , com
ment cette proposition s’établit-elle?
Sous le droit romain, la tradition ne transférait la
propriété, q u ’autant que celui qui livrait la chose en
était propriétaire ( l . 20 , Jf- D e acquirendo rerum
d o m i n i o car s’il ne l ’était pas, la tradition n ’avait
d ’autre effet que de fournir un titre pour prescrire
(jL. 46 j j f . eod. L . ^4 j 111 f uiej J f ‘ & e contrahendd
emptione
L a tradition ne transfert le domaine , qu’autant
q u ’elle est faite par le maître ( leg . 20 } Jf- D e acqui-
f f
�flO \
( a. )
rendo rerum d o mi n i o ) , ayant capacité à cet effet
( In st. in princ. et p .
i , quibus alienare licet v e l
non), ou par son mandataire {leg. 9 p . l \ , j j • h. tit.)^
et généralement par quiconque a reçu du maître, ou
de la l o i , ou du ju ge, pouvoir, à cet effet, par son
mandataire, son tuteur, ses créanciers envoyés en
possession de ses biens, etc..... (I b id . et leg. 1 p . 2 1 ,
f f . D e admin. tutorum, leg. 9 j au f f . D e acquirendd
v e l amittendd hereditate y Inst. in princip. de succès-,
sio n ibu s s u b la tis j e t c ............, le g . 6 , § 1 , et le g . 7 ,
P•
6^ et sequ en tes q u ib u s e x
n e m , e t c .........
ca u sis p ossessio-
' 4L a tradition faite par le v e n d e u r transfert la pro
p r i é t é , si la chose l u i appartien t { L e g .
11 , p .
i 3
f f . D e a ction e e m p ti et v e n d it i .). Dans ce sens, on
applique aux ventes le même principe q u ’aux dona
tions : D o n a r i non p o tes t., n isi q u o d e j u s J it c u i d on a tu r.
‘P ar suite de ce principe, si la bonne f o i et p r io r ité
d e p o ssessio n , pour les immeubles , étaient requises
quand les deux acquisitions émanaient du véritable
propriétaire ou de deux non propriétaires, cela 11’em¡péchait pas q u e , si l ’un d ’eux avait acheté d u v r a i
p r o p r ié ta ir e , o n n e c o n s u l t a i t plus, à son égard, la
bonne f o i ou la p r io r ité d e p o sse ssio n ; il devait être
maintenu c o n sta m m e n t } d é fin itiv e m e n t , c’est-à-dire,
tant au possessoire q u ’au pétitoire, sur le fond : S i
a lle r e x nobis a domino em i ss e t , is omnimodo Lv.endus
est. Cela était si vrai., que, dans le cas où quelqu’un
aurait acheté d ’une personne q u ’i l croyait, n è lr e pas
propriétaire, et qui cependant l ’était réellement, la
�( 8i )
• JK
propriété cle la chose vendue lui était transférée, si
elle lui avait été livrée : Q u i igno ravit dotninum esse
rci venditorem , p lu s in re est rjuàm in existimationc
mentis; et ideb tametsi existim et se à non domino emere,
tamen si cï domino, c i tradatur 3 dominas ejficitur
( L e g. 9 , § l\, Jf- D e ju r e et f a c t i ignorrintid.).
Sous le Code civil, les principes sont les mêmes ;
et, en France comme chez les Romains , celui qui
aurait acquis du véritable propriétaire serait main
tenu, et cela, quand même son acquisition serait pos
térieure à la vente faite par un non propriétaire, à
un premier acquéreur qui a u r a i t été m i s e n p o s s e s s i o n
eiïeciive p a r son vendeur. Les raisons de cette décision
sont, i° que la tradition n’est plus aujourd’hui né
cessaire pour tranférer la propriété; 2° que le vendeur
ne peut transférer à l ’acquéreur d ’autres droits sur la
chose vendue, que ceux q u ’il y a lui-même ( V o y e z
(Code civil, article 2182.).
Ces règles positives et invariables s’appliquent ,
comme 011 l ’a v u , aux propriétés indivises, desquelles
le vendeur ne peut transférer la propriété que de la
moitié qui lui appartient, à moins qu ’il ne l ’ait livrée
aussi au nom et du consentement de sou copro
priétaire.
Cela posé, on s’assure, en revenant sur les faits de
la cause ,
i° Que la terre de Saint-Agoulin était
propriété
indivise entre la famille d ’Amable Soubrany, époux
de Marie-AnneFarradesche, qui avait droit à la moitié
de cette terre, et celle d ’autre Amable Soubrany ,
11
�* :'
*
•
( 8.)
époux d ’ une demoiselle B én aguet, qui était proprié
taire de l ’autre moitié; que la famille Bénaguet se
composant de trois tètes , chacune d ’elle était pro
priétaire du sixième de Saint-Agoulin, évalué, par le
partage, à 25,956 fr. 61 c . , ou, par le délaissement
de la terre, à 27,33o fr. 36 c. ;
a° Que MM. de Bénistant et Farradesche ont les
premiers vendu à M. Debonnevie la portion qui re
venait à leur famille dans cette propriété indivise ;
q u ’ils ont figuré seuls dans ces ventes; q u ’ils en ont
t o u c h é le. prix, de manière que-, leur portion étant
épuisée , ils ne p o u v a i e n t p lu s d i s p o s e r d e la moindre
partie de la terre de Sain t-A goulin à titre de pro
priétaires;
3° Que ces Messieurs ayant ensuite vendu au sieur
Rixain le domaine de Neufond et les bois dépendans
de la terre de Saint-Agoulin, ont 'vendu la chose
d ’autrui, puisqu’il l ’époque de cette vente ils n’agis
saient ni comme propriétaires ni comme mandataires ;
que si, dans la suite, cette vente a pu profiter au
sieur Rixain, pour les portions revenant à la dame
veuve Voisins et au sieur M alleret, au moyen des
ratifications q u ’ i l s e n ont faites, elle n ’ a pu lui
transmettre aucun droit du c h e f des mineurs B éna
guet ou de leur tutrice, qui n ’ont jamais donné de
pouvoirs à MM. de Bénistant et de Gromont, et qui
avaient au contraire un fondé de procuration parti
culier, chargé de vendre dans leurs intérêts ;
4° Que la vente de madame de Ramond à M. de
Chazelles, de la moitié du domaine de Neufond, est
�( 83 )
'
faite par le véritable propriétaire ; que la venderesse
n ’a point excédé sa portion dans la propriété indivise;
que cette vente, consentie par le sieur Pinatelle, fondé
de pouvoirs de madame de Ramond, a été reconnue
et ratifiée par les véritables propriétaires, qui se réu
nissent encore aujourd’hui à M. de Ghazelles pour
repousser les prétentions de la dame veuve llixain et
de MM. de Bénistant et de Gromont.
Ainsi, la vente du sieur Iiiæain est nulle pour la
moitié du domaine de Neufond , comme ayant été
consentie par des vendeurs qui n’avaient , comme
propriétaires ou comme mandataires, ***<<?mie capa
cité p o u r aliduer. C e l l e d e M. de Ghazelles doit, au
contraire, être exécutée, puisque son titre émane du
fondé de pouvoirs du véritable p r o p r ié t a ir e qui non
seulement l ’a ratifiée, mais vient encore la soutenir
devant la Justice.
L ’exposé du fait et l ’examen des propositions qui
en découlent ayant prouvé q u ’il n’y a point de cause;
q u ’il n ’en a jamais- existé; que, pour en créer une ,
MM. de Bénistant et de Gromont, réunis au sieur
Rixain, ont été obligés de s’abuser sur les points' de
faits q u ’ils d e v a i e n t le m i e u x connaître, et sur les
principes les plus élémentaires, M. de Chazelles doit
s’arrêter.............. Que lui resterait-il en effet à com
battre ? quelques assertions fausses , des réticences
plus ou moins injurieuses, des déclamations puériles
ou inconvenantes. M. de Chazelles sait que trop sou
vent, dans les discussions judiciaires, l ’injure attire
�( 8 4 ,)
l ’injure, et qu ' il lui serait permis d ’adresser au moins
à ses adversaires des reproches faciles à justifier, et
justement mérités, mais il ne veut point d ’une com
pensation aussi opposée à ses principes; et, fort de sa
conscience et de son droit, il aime mieux, s’abstenant
d ’aucune autre réflexion, s’en remettre à la sagesse
et à l ’impartialité de la C o u r, *
*
.
BERARD D E C HAZE LLE S-LA B U SSIÈ R E ,
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B A Y L E aîn é, ancien A v o c a t.
P ierre B A Y L E a in é , A vou é-licen cié,
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Berard, Antoine. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle, Jean-Ch.
Bayle, Pierre
Subject
The topic of the resource
ventes
doubles ventes
successions
Chazerat (Madame de)
experts
actes sous seing privé
possession
jurisprudence
bonne foi
procuration
partage d'un domaine
équité
enregistrement
indivision
testaments
coutume d'Auvergne
estoc
experts
affichage
droit intermédiaire
domaines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour M. Antoine Bérard de Chazelles-Labussière, intimé ; contre MM. Jacques Soubrany de Bénistant et Pierre Farradesche des Ronzières, appelans et défendeurs en garantie ; et contre dame Marie-Caroline Lacoste, veuve de M. Jean-Jacques Rixain, docteur en médecine, tutrice de ses enfans mineurs, aussi intimée et appelante ; et en présence de madame de Champétière, veuve de M. Penautier ; épouse, en deuxièmes noces, de M. Ramond, tuteur des mineurs Penautier, ayant pris le fait et cause, et garans de M. Berard de Chazelles, intimé.
annotations manuscrites : texte complet de l'arrêt du 9 octobre 1822, 1ére chambre.
Table Godemel : concurrence : 3. le principe introduit par l’article 1328 du code civil pour prévenir les fraudes et non pour les favoriser, ne peut être appliqué qu’entre deux acquéreurs de bonne foi, et lorsque celui qui a acquis par acte authentique a ignoré la vente qui précédemment avait été faite, en faveur d’un autre, par acte sous signature privée. Spécialement la préférence peut être accordée à la vente faite sous seing privé, quoique son enregistrement soit postérieur à la date de la seconde vente, consentie devant notaire, lorsque cette dernière vente avait été faite par un mandataire, contrairement aux termes de la procuration, et lorsqu’il est établi que le second acquéreur avait une connaissance personnelle de la vente antérieure à celle qu’il a obtenue par acte authentique.
4. quelle doit être l’étendue de la garantie accordée au second acquéreur dont la vente reste sans effet par suite de la connaissance personnelle qu’il avait sur l’existence de la première vente, et de son silence à cet égard envers le mandataire ?
n’est-ce pas suffisamment pourvoir à ce qu’il peut prétendre, que de lui allouer le remboursement des sommes qu’il a payé sur le prix de la vente, ainsi que de ses déboursés pour frais et loyaux coûts, avec les intérêts à compter des époques de paiement ou de déboursés ; et, de plus, les dépens auxquels il est condamné ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1818-1822
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
84 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2528
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2526
BCU_Factums_G2527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53514/BCU_Factums_G2528.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Jozerand (63181)
Entraigues (63149)
Neufonds (domaine de)
Girauds (domaine des)
Machal (domaine de)
Bussière (domaine de)
Aubusson-d'Auvergne (63015)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
affichage
bonne foi
Chazerat (Madame de)
coutume d'Auvergne
domaines
doubles ventes
droit intermédiaire
enregistrement
équité
estoc
experts
indivision
jurisprudence
partage d'un domaine
possession
procuration
Successions
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53720/BCU_Factums_M0221.pdf
65b545069d60f9da5d0c0616666d7d9e
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CONSULTATION
P O U R
L a dame C H A P A V E Y R E , habitante de la
ville de M u r at, département du C a n t a l , appe
lante d’un jugement rendu au tribunal civil de
l'arrondissement de R i o m , le 9 thermidor an 10;
C O N T R E
I e citoyen A n t o i n e T E I L H ARD
D U C H A M B O N , propriétaire, habitant de
ladite ville de Ricm, intimé.
LE C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire
à consulter de la dame C hapaveyre, ensemble copie d’un
jugement rendu au tribunal civil du R io m , le 9 thermidor an 10 ,
�( 2 )
^
E s t i m e que ce jugement renferme une évidente
erreur, en ce qu’il déclare valable une donation mutuelle
faite par contrat de mariage entre futurs conjoints, quoi
que cette donation n’ait pas été revêtue de l’insinuation,
dans les quatre mois du décès de l’un des donateurs; q u e ,
par conséquent, l’appel interjeté par la dame Chapaveyre
est parfaitement bien fondé , et que le succès le plus com
plet doit couronner sa juste réclamation.
Il résulte du mémoire à consulter, et de l’exposé des
faits insérés au jugement dont il s’agit, que, par le contrat
cle mariage de Marie-Jeanne Chapaveyre du Saillant avec
Antoine Teilhard-du-Chambon , la future s’est constitué
en trousseau, meubles, effets, linge et liardes à son usage,
même ses meubles meublans, etc. jusqu’à concurrence
de 2,000 fr. à quoi ces divers effets ont été amiablement
- estimés entré les parties.
%
D e plu s, et en d o t , elle s’est constitué, i ° . les biens
meubles et immeubles à elle éclius par le décès de son
père ; 20. la somme de 60,000 fr. faisant partie des biens
par elle recueillis de la succession testamentaire de Jacques
Philippe du Saillant, son oncle.
Par le même contrat, le futur est spécialement autorisé
à poursuivre la rentrée et le remboursement de tout ce
qui peut être dû à la future, à demander partage, aliéner
les immeubles réels et fictifs , toucher le remboursement,
comme les interets ou revenus échus ou à écl\oir, à la
charge néanm oins de f a i r e emploi des fo n d s à f u r et
mesure q u i l en touchera le m o n ta n t, soit en acquisi
tions d’ immeubles réels ou fictifs, soit en acquittement
de dettes hypothécaires de l’un ou de l’autre des futurs.
�C
3
)
Il est d’ailleurs stipulé, que tous .les autres biens, de
quelque nature qu’ils soient, non compris dans les cons
titutions précédentes, sont réservés à la future, comme
extradotaux et parapliernaux.
Enfin, et à la suite de quelques autres clauses particu
l e res , dont il est inutile de rendre co m p te, parce qu’elles
n’ont aucun rapport à la question ci-dessus proposée ,
il est dit : « Que pour se témoigner leur amitié récipro« que, les futurs se sont mutuellement donné et donnent
« l’usufruit de tous et chacun les meubles et droits qui
« seront délaissés par le premier mouraut ; laquelle dona
« tion , est-il ajouté, qui est mutuellement acceptée, aura
« lieu , y ait enfans ou non du mariage. »
Quelques années après ce mariage, la dame Teilhardtlu-Gharnbon n’ayant point d'enfans institua pour son
héritière universelle Marguerite Chapaveyre, sa sœur.
L'institution fut faite par le contrat de mariage de celle-ci
avec le citoyen Pardoux - Fayolle, sous la réserve par
l’ instituante de pouvoir disposer d’une somme de 18,000 f.
q u i, en cas de non disposition de sa part, devoit fairj
partie de l’institution : l’instituée ne fut d’ailleurs soumise
ù aucune autre condition que celle de ne pouvoir attaquer
les ventes partielles qui avoieut été faites par TeilhardChambou , mari de l’instituante, de quelques portions
détachées du domaine de Saint-Bonnet-Laehamp.
La dame Teilhard-du-Chambon étant morte dans le
mois d’août 179 0 , Marguerite C hapaveyre, sa sœur et
son héritière instituée, forma contre le mari survivant une
demande tendante à ce q u e , faute par lui d avoir fait
emploi des sommes reçues de son épouse, pour avoir ,
A 2
�.
.
( .4:)
,
.
au contraire, aliéné, depuis le décès de celle-ci, la tota
lité de son domaine de Saint-Bonnet-Lachamp, et faute
d’avoir fait inventaire, au décès de sa fem m e, des biens
par elle délaissés, qu’elle s’étoit réservés en paraphernal,
il fût déclaré déchu de l’usufruit stipulé en son contrat
de m ariage, condamné à restituer les biens dotaux , et
la somme de o,ooo fr. pour les biens paraphernaux,
si mieux il n’aimoit suivant leur valeu r, à donner par
renseignement, ou à constater par voie de commune re
nommée.
5
Cette première demande a été suivie d’une a u tre,
formée dans le cours de l’an 10 par la dame Chapaveyre,
qui a conclu par celle-ci, à ce que le don m utu el, porté
au contrat de mariage de sa sœur avec le cit. Teilbarddu-Chambon , fût déclaré nul et de nul effet , f a u te
d'avoir été insinué dans les quatre m ois du décès de
la dame son épouse ,• en conséquence, que le citoyen
Teilhard-Cham bon fût condamné à restituer, avec inté
rêts, à compter du jour du décès, savoir, les biens dotaux,
ainsi quV.s étoient énoncés et fixés au contrat de mariage,
et les biens paraphernaux , suivant leur consistance ,
d après la preuve par commune renommée, ou la somme
de 5o,ooo fr. etc. etc.
Ces deux demandes ayant été jointes; par un jugement
du i l prairial an 1 0 , le tribunal ordonna, avant faire
droit , que le citoyen reilhard-du-Chambon scroit tenu
de justifie]’ d’ une manière legale, q u e , soit en quittances
de dettes pour le compte de Marie - Jeanne Chapaveyre ,
sa femme, soit en acquisitions d'immeubles réels ou fictifs,
il avoit suffisamment satisfait ù 1 emploi des deniers dotaux
dont ¡1 éloit expressément chargé.
�5
(
)
( _
A in si la contestation présentoit deux questions à jm-ei\
L ’ une de savoir, si, faute d’insinuation dans les quatre
mois du décès de la dam eTeilhard-du-Cham bon, la dona
tion mutuelle, portée en son contrat de mariage, devoit
être déclarée nulle.
L ’autre, si, en tous cas, le citoyen Teilhard-du-Ghambon
ne devoit pas être déclaré déchu de son usufruit, faute
par *lui d’avoir satisfait aux obligations que la l o i, son
. contrat de mariage et le jugement interlocutoire du n
prairial lui imposoient. Car il est bon d’observer qu’il
n ’a aucunement justifié des payemens par lui articulés
des dettes de sa fem me; et qu’au lieu d’être propriétaire,
comme il l’avançoit, d’un domaine de 1 12,000 fr.j il étoit
de notoriété publique , qu’à peine il en possédoit la moitié,
Mais , quoique les principes du droit civil et les cir
constances du fait se réunissent en faveur de la dame
Cbapaveyre pour assurer le succès de Tune ou de l’autre
de ses demandes , les deux questions ont été décidées
contrelle par le jugement du 9 thermidor an 1 0 , q u i,
sans s arrêter à sa demande en nullité, dont il l’a déboutée,
a repoussé pareillement sa demande subsidiaire en priva
tion d’usufruit, de même que celle en provision d’une
somme de 6,000 f r . , qu’elle avoit incidemment formée.
L e tribunal civil de Riom a donc ju g é, en principe,
que les donations mutuelles, faites par contrat de mariage,
n’avoient pas besoin, pour être valables, dêtre revetues
d e là formalité de l’insinuation , et que la loi qui les y
assujétissoit ne présentoit, à cet égard, qu une disposition
purement bursale, d o n t l’infraction n’entraînoit point la
A 3
�. ,
.
{ 6 )
.
nullité de l’acte , mais seulement une peine pécuniaire.
L e soussigné estime, au contraire, que le défaut d’in
sinuation dans les quatre mois du décès de l’un des dona
teurs , emporte la nullité radicale de ]a donation faite
par contrat de mariage ; que la distinction qui sert de
base au jugement du 9 thermidor an 10, contredit éga
lement la lettre et l’esprit de la loi.
P o u r se bien convaincre de cette v é r ité , il n’e s t ‘pas
besoin de rappeler ici nos anciennes ordonnances , notam
ment celle de M ou lin s, qui soumettent indistinctement
et la formalité de 1 insinuation toutes les donations entre—
v i f s , de quelque nature qu’elles puissent être. On se
bornera simplement à rapporter les dispositions de l’or
donnance de 1 7 3 1 , et celles des lettres patentes de 1769,
qui ont modifié le principe g é n é r a l, relativement aux
donations de survie d’entre mari et femme.
L ’article X I X de l’ordonnance de 1731 porte « que
« les donations faites dans les contrats de mariage en ligne
« directe ne seront pas sujettes à la formalité de l’insi« nnation. *
E t l’article X X » que toutes les autres donations ,
« même les donations rénumératoires ou m u tu elles,
« quand même elles seraient entièrem ent égales, ou celles
« qui seroient faites à la charge de services ou de l'onda« tions , seront insinuées conformément aux anciennes
« ordonnances, à peina de nullité. »
Ainsi , à l’exception des donations en ligne directe,
faites par contrat de mariage, toutes les autres donations,
indistinctement, sont assujéties à l’observation rigoureuse
�C 7 )
de cette fo rm alité ; et comme la nature des donations
mutuelles, qui ne sout, au fait, que des contrats c*ornm 11ta tifs, intéressés de part et d’autre, pouvoit laisser
quelque doute sur la nécessité de les comprendre dans
la classe des actes de pure libéralité, le législateur, pour
dissiper toute espèce d’incertitude à cet égard , les y a
spécifiquement comprises, même dans le cas où elles sel’oient parfaitement égales.
' A u x termes de l’ordonnance de 1731, il n’est donc pas
douteux que les donations mutuelles d’entre mari et
fem m e, étoient, comme toutes les autres, assujéties à la
formalité de l’insinuation dans les quatre mois de leur
date; les articles X I X et X X sont si formels, si clairs et
si précis, qu’il faudroit volontairement fermer les yeu x
à l’évidence pour méconnoître la règle qu’ils établissent.
' Cependant le caractère particulier de ces espèces de
donations pouvoit et devoit même les placer dans une
classe particulière, non pour les dispenser de l’insinuation,
mais du moins pour reporter au décès de l’un des dona
taires 1 obligation de remplir cette formalité.
Dans la donation mutuelle , effectivement, ni l’un ni
l’autre des donataires ne se dépouille de la propriété des
choses qu’il donne 5 il en conserve, pendant toute sa vie,
la libre disposition ; et s'il ne peut plus les aliéner à titre
purement gratuit, nu préjudice de son codonataire , du
moins.peut-il les v e n d r e , les échanger, ou les hypothé
quer au payement de ses dettes.
- O r , comme l’insinuation, qui n’est que le moyen de
donner la plus grande publicité possible aux actes de libéra
lité, n’a pour unique but que de prévenir ou d’empêcher la
a
4
�,
(8 )
..
fraude qu'un donateur déjà dessaisi de la propriété de
choses par lui données , pourroit commettre envers des
tiers qui ne connoîtroient pas la donation, il est clair que
ce motif cesse nécessairement pour les donations mutuelles,
q u i, ne dépouillant pas les donateurs de la p ropriété,
leur laissent conséquemrnent la disponibilité en tière et par
faite de tous les objets qui composent leur donation.
D ’un autre c ô t é , si cette forme extrinsèque devenoit
complètement inutile pour ces sortes de conventions, il
pouvoit etre dangereux de les y assujétir, en ce qu’elle
gênoit la libre disposition que conservoientles deux époux,
par les inquiétudes qu’elle donnoit aux tiers avec lesquels
ils avoient à contracter.
P o u r concilier ces différentes vues, il falloit donc néces
sairement faire deux choses.
I/ u n e , reculer le terme de l’insinuation jusqu’après le
décès de l’un des deux donateurs.
•
1/autre, obliger le donataire survivant à faire insinuer
dans les quatre mois de la mort du prédécédé, afin de
prévenir, par ce m oyen, les dispositions frauduleuses que
l’héritier pourroit faire des choses données; car la dona
tion mutuelle saisit le survivant à l’instant même du décès
de son codonuteur. Elle dépouille, conséquemrnent,l’héri
tier de celui-ci ; et, si elle n’étoit pas rendue publique par
rinsinualion, le même inconvénient qui résulte du défaut
de publicité des donations ordinaires, se rencontreroit dans
celle-ci, puisque l’héritier, ainsi investi de tous les biens
de la succession, par la règle le rnort saisit le vif\ pour
roit également tromper des tiers qui ne connoîtroient
pas la donation.
�,
C9)
Ce double but a été rempli par les lettres patentes cln 3
juillet 176 9 , qui ont ordonné « que tous les dons de
« survie faits dans les contrats de m ariage, par un mari à
<r sa fem m e, ou par la femme à son m a r i, tous les dons
« mutuels, réciproques, rénumératoires, faits par l’un et
« l ’autre, dans lesdits contrats, seroient exempts, ju s
« qu'au, jo u r du décès du d on a teur, de la fo r ni alité e
« üin sin ua tion , soit au domicile des contraetans, soit aux
« bureaux des lieux de la situation des biens donnés \ à la
« ch a rg e, n éa n m o in s, que lesdites donations seroient
« insinuées au dom icile du d o n a teu r, dans les quatre
« m o is , à com pter du jo u r de so?i décès. »
Remarquons, avant d’aller plus lo in , que l’exception
faite par cette loi en faveur des donations mutuelles, ou
de survie, par contrat de mariage, n’a lieu que pour le
temps de l’insinuation : sont dispensées ju sq u 'a u jo u r du
décès du dona teur,* q u e , par conséquent, la règle reprend
tout son em piré, lorsque le terme de cette suspension est
arrivé. E t, par une conséquence ultérieure, que l’obli
gation de faire insinuer, dans les quatre mois du décès,
est H»pTJsée à peine de nullité , puisque l’ordonnance
de 1 7 3 1 , à laquelle il n’ est dérogé que pour le tem ps,
punit de la môme peine l’ inobservation de cette formalité.
Il y auroit donc une absurdité com plète, à ne v o ir ,
dans les lettres patentes du 3 juillet 176 9 , qu’une dispo
sition purement bursale, puisque les mêmes motifs, qui
fondent la nécessité de l’insinuation des donations ordi
naires , dans les quatre mois de leur d ate, provoquent
également celle des donations réciproques, dans les quatre
mois du décès de l’un des donateursj et q u e, d’un autre
A
5
�(
IO )
^
côté, ces mêmes lettres patentes n’ont dérogé a l’ordon
nance de 1 7 3 1 , que pour le temps ou la formalité devroit
être rem plie, sans anéantir la peine de nullité, qui en
punit l’inobservation.
Ces principes posés, rien de plus facile que d’ écarter
les prétendus motifs qui servent de base au jugement du 9
thermidor an 10.
L e pi’emier consiste à dire : « que, d’après l’ordonnance
« de 1 7 3 1 j les lois antérieures et celles qui ont su iv i, l’in •
a sinuation n’est ordonnée à peine de nullité, que pour les
« donations entre-viis, pour les seules libéralités présentes
« et absolues. »
Nous venons de v o i r , au contraire, que les donations
mutuelles, même celles qui seroient parfaitement égales,
et généralement toutes les espèces de donations, sans autre
exception que celles en ligne directe, sont soumises parles
articles X I X et X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , à la for
malité de l’insinuation, sous peine de nullité : que celles
d’entre mari et femme en ont été dispensées, il est v ra i,
pour le temps de la vie des donateurs ; mais qu’en
laissant à la disposition de l’ordonnance de 1731 tout
son empire et son effet, relativement à l'obligation
d’insinuer dans les quatre mois du décès, les lettres pa
tentes de 1769 n’ont établi qu’une exception temporaire,
sans déroger au surplus des autres dispositions de l’ordon
nance.
L e second m otif du jugement est fondé, « sur ce qu’une
« donation mutuelle de biens qui se trouveront après le
« décès, ne peut être réputée ni une libéralité purement
« gratuite, ni une donation présente et absolue, puisqu’il
�( ri )
r n’y a de véritables donations entre-vifs, que celles qui
« dépouillent, dès le m oment, le donateur au profit du
« donataire; et q u ’ainsi la donation dontils’agit n’est qu’une
■
■véritable donation à cause de mort, a
Ce second m otif renferme autant d’erreurs que de mots.
D ’abord il est faux qu’il n’y ait de véritables donations
entre-vifs, que celles qui dépouillent le donateur dès l’ins
tant même de la donation ; car les institutions contrac
tuelles sont, par exem ple, de vraies donations entre-vifs ,
et réputées comme titres irrévocables de leur n a tu re ,
quoiqu’elles laissent à l’instituant la faculté de disposer à
titre onéreux de tous ses biens, et ne le dépouillent d’au-»
cun de ceux qui composent l’institution ( i ).
Les donations faites par contrat de m ariage, à la
charge de payer les dettes q u e laissera le donateur, et
qui sont formellement autorisées par l’article X V I I I de
l’ordonnance de 1 7 3 1 , sont encore des donations entre
vifs , et parfaitement irrévocables, quoique le donateur
conserve la faculté d’aliéner ses biens en les hypothé
quant à ses créanciers.
Les donations de survie , autorisées également par
la même l o i , sont encore des donations entre-vifs ; et
jamais personne n’a imaginé jusqu’il présent qu’on pût
les ranger dans la classe des donations à cause de m o rt,
( 1 ) Voyez L e b r u n , des successions, livre 3 , chap, z , numéro 7,
Pothier , introduction au titre des successions de la coutume d Orléans f
numéros 17 et 18.
L o i du 18 pluviôse an 5 , article premier.
�.
.
. ( 12}
qui en diffèrent essentiellement p a rle caractère de révo
cabilité qui leur est propre.
.
L a donation à cause de mort est essentiellement révo
cable jusqu’à la mort du donateur, non-seulement par
le fait, c’est-à-dire, par l’aliénation qu’il peut faire à
titre onéreux , mais par le d ro it, en ce qu’il n’a besoin
que d’ un simple acte de sa volon té, pour les anéantir,
les rév o q u er, les m odifier, ou disposer en faveur de
tout autre que le donataire.
^ Les donations de survie , au contraire, les donations
mutuelles et réciproques, celles à la charge de p-yer les
dettes du donateur, les institutions contractuelles, les
promesses de conserver, et autres de même nature, sont
bien révocables en ce sens, que le donateur ou l’insti
tuant conservent la liberté d’aliéner à titre o n é re u x ,
même la totalité des objets donnés.
Mais elles sont irrévocables en cet autre sens, que le do
nateur ou l’instituant ne peuvent disposer à titre gratuit en
faveur d’un autre que le donataire, et qu'il n’est plus en
son pouvoir de les anéantir ou de les modifier de quel
que manière que ce soit. L ’ordonnance des substitutions,
article X I I , le décide formellement pour les institutions
contractuelles d’héritier, et sa disposition s’applique à
J'ortio ri aux autres conventions de même nature , c’està-dire , à celles qui ne dépouillent pas le donateur de la
propriété des choses données, quoiqu’elles lui ôtent la
liberté de disposer à titre gratuit.
D e cela seul que les donations mutuelles , et en général
les donations de survie, sont irrévocables de leur nature,
il s'ensuit donc nécessairement qu’elles ne sont point
�13
(
)
donations à cause dè mort ; e t , par une conséquence ulté
rieure , qu’on doit les ranger dans la classe des donations
entre-vifs ; ce qu’il falloit démontrer.
A u surplus, si les donations mutuelles n’étoient pas de
véritables donations entre-vifs, soumises comme telles à
l’insinuation , on demanderoit pourquoi l’article X X de
l’ordonnance les a rangées dans la même classe pour les y
assujétir, et pourquoi les lettres patentes de 1769 ne les
ont exceptées de cette disposition générale que pour reculer
le terme de l’insinuation, en le plaçant au décès de l’un
des donateurs, sans anéantir d’ailleurs la peine de nullité
que l’inobservation de cette forme doit nécessairement
leur faire encourir.
.
L e troisième m otif du jugement est fondé sur ce que
« la déclaration d e ’ 1729 n ’a soumis à l’insinuation les
« dispositions testamentaires et autres à cause de m o rt,
.« que pour les assujétir à un droit bursal, et les a expres« sèment exceptées de la peine de n ullité, en cas de
« non insinuation. »
Si les donations mutuelles, par contrat de m ariage,
pouvoient être regardées comme dispositions
taires ou h cause de m o rt, rien ne seroit plus
ce raisonnement qui ne laisseroit aucun lieu à la
.mais on vient de faire vo ir qu’elles étoient
testamen
juste que.
répliqué :
essentiel
lement donations entre-vifs; qu’elles en avoient le prin
cipal caractère, celui de la parfaite ir r é v o c a b ilit é ; et la
conséquence directe qui résulte de li , c’est qu on ne peut
leur appliquer les lois relatives aux testamens.
Les jugés du tribunal de Hiom donnent pour quatrième
•motif, que les lettres patentes de 1769 n ont p o in t dérogé
\
�4
( i )
a u x lois a ntérieu res, relativem ent à la-peine de nullité
f a u t e d 'in sin ua tion , et il semble que l'on pourroit tirer
pour conséquence dii’ecte de cette assertion incontesta
b le, que si l’exception qu’elles introduisent n’est que pour
le terme de l’insinuation, la peine de nullité subsiste faute
d’ insinuation dans celui qu'elles établissent, c’est-à-dire,
dans les quatre mois du décès du donateur.
O n ajoute, dans le jugem ent, « que cette loi ( les lettres
« patentes de 1769 ) a seulement pour objet, en déterc< minant le temps et l’époque de l’insinuation, de fixer
« le temps précis auquel les peines du double et triple
« droit seroient encourues. »
Mais les lettres patentes de 1769 ne parlent ni du
double ni du triple droit ; elles disent seulement que les
donations de survie, comme les donations mutuelles, sont
dispensées pendant la vie du donateur de la formalité
de l’insinuation . . . . pour y dem eurer assujéties seulem ent dans les 4 m ois du jo u i' de son décès.
E t comme les raisons de l’exception sont puisées dans
Ja nature même des donations de survie, q ui, laissant au
donateur la iaculté de disposer à titre onéreux , n’exposent
point à être trompés les tiers qui conlracteroient avec lui j
C o m m e, d’ un autre côté, la nécessité de l’insinuation
doit commencer au moment où cette faculté s’anéantit,
c’est-a-dire, au moment ou 1 héritier du donateur est
pleinement dépouillé, entièrement dessaisi de la propriété
et de la libre disposition des choses données, c’est-à-dire,
au moment du décès de lu n des donateurs;
Comme cette nécessité se trouve fondée alors sur les
ïpêmes motifs que celle qui rend indispensable l’insinua-
�5
( ï )
^
tïon des donations présentes et absolues, c est-a-dire, sur
la crainte que des tiers de bonne foi ne contractent avec
un propriétaire dessaisi par la donation;
Comme enfin les lettres patentes de 1769 n’ont point
dérogé aux lois antérieures, quant à la peine de nullité;
Il s’ensuit, par la plus directe et la plus évidente de
toutes les conséquences, que le défaut d’insinuation dans
les quatre mois du décès , emporte la nullité radicale de
la donation.
•
Si d’ailleurs les lettres patentes de 1769 ne prononcent
pas cette peine de n u llité, c’est qu'il étoit parfaitement
inutile de la rappeler dans une lo i, q u i, n’ayant pour
objet que d’établir une dispense de temps, laissoit d’ail
leurs subsister toutes les dispositions de l’ordonnance
de 1731 , auxquelles le législateur n’entendoit aucune
ment déroger.
E t s i , en parlant des donations entre-vifs et absolues
de la femme au mari ou du mari à la fem m e, la même
loi veut qu’elles continuent d’être assujéties à l’insinuation,
sous peine de nullité, c’est uniquement pour mieux indi
quer la différence des unes et des autres, en ce que les
unes doivent être insinuées dans les quatre mois de leur
date, sous la peine voulue par l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
tandis que les autres sont dispensées de cette peine
pendant toute la vie du donateur.
C ’est donc une grande e rre u r que celle des premiers
juges, q u i ont cru voir une différence réelle entre ces
deux dispositions des lettres patentes de 1 7 6 9 , et qui en
ont conclu qu’elles a b r o g e o ie n t, au moins tacitement, la
peine de nullité pour le défaut d’insinuation des dona-
�.
.
( ,i 6 )
.
tîons mutuelles, tandis qu’elles la prononçoient textuel
lement par rapport aux donations présentes et absolues
du mari à la femme ou de la femme au mari. En matière
de formes extrinsèques , on ne connoît point d’abrogation
tacite : elle doit être formelle ou elle n’existe pas. O r ,
non - seulement les lettres patentes n’ont point abrogé
tacitement la peine de nullité prononcée contre les dona
tions mutuelles non insinuées; mais il est de toute évi
dence que le législateur ne pouvoit pas même en avoir
l’intention, sans tomber dans la plus absurde contradiction
avec l u i- m ê m e , puisqu’encore une fois les motifs qui
rendent l’insinuation nécessaire, dans les quatre mois du
décès, sont identiquement les mêmes que ceux qui l’ont
fait introduire pour les donations présentes et absolues.
Quant au dernier motif du jugem ent, qui est encore
fondé sur ce faux principe, que les donations mutuelles
sont de véritables donations à cause de mort , on se
croit dispensé d’y répondre, parce que ce seroit tomber
dans des redites aussi fastidieuses qu’ inutiles ; seulement
on observera que les premiers juges ont perpétuelle
ment confondu les donations entre-vifs qui n’ont d'effet
qu’après la mort du donateur , avec les donations à
cause de m o r t , lorsqu’ils devoient s’attacher au c.iractère essentiel qui les distingue, savoir, l’irrévocabilité
parfaite des premières , et la laeulté conservée par le
donateur jusquVi son dernier soupir, de rév o q u er, anéan
ti r , ou modifier les autres. A v e c cette distinction , ils
auroient évité l’erreur dans laquelle ils sont tom bés, ef
ne seroient pas contrevenu« , comme ils l’ont fa it, aux
dispositions textuelles de l ’ordonnance de 1731.
�' ( *7 )
.
L é soussigné ne doute donc pas un seul instant que
l'appel de madame Chapaveyre ne soit couronné du
succès le plus com plet, et que le tribunal devant lequel
se trouve portée sa réclamation ne rende aux vrais prin
cipes l’hommage que le premier leur a refusé.
D élibéré par le soussigné, ancien jurisconsulte, à P a ris,
ce
5 frimaire
an n .
'
^
PO IR IER .
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu la présente
consultation, est également d’avis de la nullité de la
donation mutuelle dont il s’a g i t , par le défaut d’insi
nuation dans les quatre mois du décès de la donatrice.
L ’auteur de la consultation a très-bien développé les
principes de la m atière, et parfaitement accordé la dispo
sition de l’article X X de l’ordonnance de 1731 , et celle
des lettres patentes du 3 juillet 1769, en ce qui concerne
les dons mutuels faits entre mari et femme. L ’ordon
nance de 1731 prononce textuellement la nullité de ces
sortes de donations, faute d’insinuation; celles-ci, comme
tontes les autres, devoient être insinuées dans les 4 mois
de leur date , on , tout au moins pendant la vie du dona
teur : c’étoit ainsi que l’avoit prescrit l’article L X V I I de
ordonnance de M ou lin s; et celle de 1 7 3 1 > dans l’ar
ticle X X V I , s’est référée aux délais de l’insinuation por
tés par les anciennes ordonnances.
Les lettres patentes du 3 juillet 1769 n ont rien changé
y la nécessité de l'insinuation des dons mutuels, ni à la
1
1
�.................................
(
18 ) ..............................
nullité qui devoit résulter du défaut d'insinuation ; elles
n’ont opéré d’autre changement que sur le temps où
cette insinuation devoit se faire, et elles ont déterminé
ce temps, dans les quatre mois du décès du donateur;
mais elles n’ont pas moins laissé subsister la nécessité
de l’insinuation du don mutuel , et sa nullité lorsque
l’insinuation n’a pas été faite dans le délai.
L ’auteur de la consultation donne d’ailleurs des raisons
sensibles de la nécessité de l’insinuation, même dans ce
cas; il est inutile de les répéter.
On ne peut donc qu’applaudir aux principes de la
consultation , et adhérer aux résolutions qui en sont la
conséquence. O n ajoutera seulement , pour démontrer
de plus en plus que les lettres patentes de 1769 ont laissé
subsister la nullité des dons mutuels, faute d’insinuation,
la décision de l’article X X I de l’ordonnance de 1731 , à
l’égard des dons mobiles, augment, contre^augment, etc.
On avoit douté long-temps si les donations faites par
forme de dons mobiles, augm ent, etc. étoient sujettes à
l’ insinuation , lorsqu’ une déclaration du 20 mars 1708
les y assujétit positivement; ce qui paroissoit aussi les y
soumeltre, peine de nullité. iVlais cetle rigueur fut tem
pérée , à leur égard , par une seconde déclaration de 1729 ,
qui les affranchit de la peine de nullilé, et n’ imposa à
l’inobservation de l’insinuation de ces sortes de donations
que les autres peines port ces par les edits et déclarations,
c’est-à-dire , des peines purement bursales.
S ’il eut été dans l’ intention du législateur d'en user de
même à l’égard des dons mutuels, dont le défaut d'in
sinuation, dans le délai prescrit, empurtoit, dans les termes
�( 19 )
précis de l’ordonnance de 1 7 3 1 , la peine de nullité; si,
dit - o n , le législateur eût voulu retrancher cette peine
dans les lettres patentes de 1769 , il n’auroit pas manqué
de le d ir e , comme il l’avoit fait pour les dons m obiles,
augm ent, etc. dans la déclaration du 30 mars 1729.
Ce seroit donc aller contre le texte précis de la l o i ,
et c’en seroit une violation, que de valider le don mutuel
dont il s’agit.
D élibéré à R i o m , le 19 pluviôse an 1 1
;
A N D R A U D .
A. RI O M , de l’imprimerie de L
an drio t
,
Tribunal d ’appel, — An 1 1
seul imprimeur du
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. An 2?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poirier
Andraud
Subject
The topic of the resource
insinuation
enregistrement
donations entre époux
donations
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation pour la dame Chapaveyre, habitante de la ville de Murat, département du Cantal, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Riom, le 9 thermidor an 10 ; contre le citoyen Antoine Teilhard-Duchambon, propriétaire, habitant de ladite ville de Riom, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 2
1790-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0221
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
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