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Text
MEMOIRE
P O U R
D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
J u l ie n
CONTRE
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son mari yjuge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de Brioude ;
D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E ,fille majeure,
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit P i e r r e D A L B IN E et de ladite
D E J A X , son épouse ,
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit
Montbrizet-Gizaguet ;
' Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la lo i, pour éluder la
prohibition de la loi, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lois, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? Telle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�(2)
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame Dalbine, tous l’effet d’un plan cons
tamment suivi, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfans ; savoir, Julien, V ita l,
Antoine premier, Antoine second du nom , et AnneMarie Dejax, première du nom.
Julien, V ital, et Antoine premier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
Anne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
Tartel; elle a survécu à son mari, et vient elle-même
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
A n toin e D e ja x , second du nom , s’est marié avec M arieTh érèse D elchier.
De ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
Julien Dejax, appelant;
Anne-Marie Dejax, seconde du nom, veuve Peyronnet j
E t Agnès D ejax, épouse du citoyen Dalbine, juge.
Celle-ci a eu , de son mariage avec ledit Dalbine, trois
enfans; A n n e-M arie, qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et Marie Dalbine*
Telle est la généalogie des parties»
�Anne-Marie Dejax, première du nom, veuve Tartel,
n’avoit point eu d’enfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien, V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom, l’avoient prédécédée. Antoine, second du
nom, laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les lieritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’Antoine, second du nom, il n’en
restoit que trois , par le décès de Vital-François.
A nne-M arie D ejax, seconde du nom , s’est mariée
en 1770, avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
mariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien Dejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de sa part, même de ses fa its et pro
messes , et entièrement aux risques, périls et fortune
du donataire.
Lu s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
1
Il n’en a pas-clé de même pour la dame D albinc.
Par son contrat de mai'iage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit •, elle lui a donné, en outre, une
somme de 2,000 fv., payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
Le 19 novembre 1778 , elle dispose en faveur de
A 2
�C4 )
Anne-Marie Dalbine , sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. La donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géi’a et administra à son gré ; elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
On va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit»
Les actes vont se succéder.
i i novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
que, si les quittances en avoient été fournies par la dame
D albine, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-même, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vue*, de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novembre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame Dalbine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée do
Tusage delà vue; se réservant, est-il ajouté, la consti
tuante , de toucher et recevoir elle-même les sommes qui
seront payées par ses débiteurs} de manière que lu datne
�(5)
Dalbine sera censée rüavoir absolument rien reçu en
vertu des présentes ; et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 \ la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixième,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
Le 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. La donation fut évaluée à
une somme de 11,600 fr ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la minute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
Le 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lui avaient été adjugées moyennant
�( 6)
la somme de 2,95o f r . , mais auxquelles elle avoit fa it
des réparations considérables, pour, par la dame D albine, jou ir d'icelles dans Vétat où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,221 j\
par elle déjà payée ¿1 la nation, et à la charge âe payer eï
la nation le restant de Vadjudication. I<e contrat 11e man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r .,
qui devoit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220 fr.
Ce n’étoit point assez. 21 vendémaire an cinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, mari d’AiméMarie Dalbine.
Par cet acte, il est dit que la dameDejax, veuve Tartet,
a fait vente à Montbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-devant religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé parla nation; 30. de
tous les m eubles, outils aratoires, et généralement de tous
les meubles étant au pouvoir du métayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître dudomaine de Vazeliettes , sous la réserve de Tusufruit
de tous les objets vendus. La vente est faite moyennant la
somme de 25,000 francs, dont le contrat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et les capitaux des reinboursemcns qui étoient
faits par les débiteurs.
�6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la niece, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c'est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so?nmes , tant en principaux,
intérêts que fra is , ainsi, est-il ajouté , que le montant
du prix de la vente de Vazeliettes par elle consentie au
profit de défunt Gizaguet, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé à son gré, soit ¿1 payer partie de ses
dettes contractées, ou à ïentretien de sa maison ou
autrement, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insiiffisans pour fo u rn ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
Enfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8, par
lequel, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame Dalbine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
E lle est décédée le 4 vendém iaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-dire , dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. Elle a
fait citer à ces fins le cit. Dejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
Le cit. Dejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
�(S )
19 messidor de la même année, la dame Dalbineet son
m ari, les enfans Dalbine, c’est-à-dire, Marie Dalbine,
Pierre Dalbine et Anne-M arie D albine, veuve Montbrizet-Gizaguet ;
Savoir : la dame Dalbine et son mari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, Pierre, et Anne-Marie Dalbine, veuve Gizaguet, enfans dudit Dalbine, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
Et encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germ inal an 5 , du domaine et métairie de Vazeliettes
et du Poux, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été «tatué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D ejax, et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Yazeliettes et le P o u x, et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en être délaissé à
la dame Dalbine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D ejax, veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, revenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : Dans la
moitié pour Xinstitution de la dame D albine, sont com
prises toutes lesfacultés de disposer de la défunte,faites
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2; en con
séquence la disposition du sixièm e, enfaveur des enfans
D albine, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( IO )
consentemenths avons m is, sur ce chef> hors d*instance,
sa u f à sc pourvoir contre leur mère> ainsi qu’ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’un mois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du mobilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux; n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. Le jugement oixlonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante delà succession de la défunte,et de rendre comptey
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belmont, notaire.,
. Condamne le citoyen D ejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
Le citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes :
i° . La donation faite, en faveur des enfans Dalbine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation ^du iy floréal an 2 , à l’acqui
sition des deux maisons nationales;
3°. La vente du 21 vendémiaire an 5 , consentie au
citoyen Montbrizet-Gizaguet ;
�Et enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
- La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte dé démontrer la négative.
i Donation du 17 germinal an 2.
Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d'état. Les enfans Dalbine l’ont reconnu eux-memes ;
ils ont déclaré ' qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an 2 y qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
On a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine; mais
on s’est abusé;
L ’art. X V I porte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l’avenir à la faculté de
disposer j au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage dés successions; savoir , du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux ; et du dixième ;
si l’on a dés héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendi*e la lo i, què de penser
qu’ellé a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu’après avoir défendu d’avantager directement les successibles j elle a permis de les avantager indirectement.
Ce seroit preter une absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que ië successible v i t , ses en
fans ne sont point en ordre de succéder \ il leur fait
B 2
�( 12 )
obstacle. Mais il est certain aussi, que le père'et le fils
ne sont censés, en droit’, faire qu’une seule et même per
sonne. Pa ter et filin s un a eaàemque persona.
La loi, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. Or , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
l’enfermer un avantage indirect ?
La coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens paraphernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres à qui le m ari puisse ou doive
succéder ,*parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donnèr indirectement ce qu’on ne
peut directement.
Et, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit commun , et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rap
porter il la succession ce qui «voit été donné au petitfils; et, respectivement, le petit-fds ce qui avoit été donné
au père?
La loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
autorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite à retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixième, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�(i3)
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
' L ’article X X I porte que si le donataii’e ou héritier
institué est- en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
"Et l’article X X IIporte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
- Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r, auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaire?
L ’article X X V I defend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif ; et
il est ajouté, ou à ses descendons. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
D ira-t-on que la loi ayant parlé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant n’a pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( i4 )
siorii E n fin , la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre ses puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 17 nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’an des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition -f
comme faite indirectement au profit die l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée nulle, d’abord en
première instance, au tribunal d’arrondissement de cette
commune) et ensuite sur l’appel en ce tribunal.
«
Subrogation du 17 jlo rca l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na~
tionales, n’est évidem m ent qu’une donation déguisée sOus
le nom de vente.
Ce n’est pas sans doute par la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger de la natiire de l’acte, mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, et consacré par les lois.
Parmi les différons textes de lois, on peut citer la loi
SuJpitius, au digeste, D e donationibus inter virum et
uxoram, et la loi Niidâp au cod. D e contrahenda emp~
tionex
�( i5 )
Papon , sur la loi Suïpitius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à chose que la loi ne permet, 1 on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et juge
« qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’un de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner , fait, par testament ou conti'at entre-vifs,
« confession que l’autre lui a prêté, ou employé à ses
« affaires, ou délivré, ou remis en ses mains certaine
« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
« fait tel p rêt, ou remis, employé, ou délivré la somme.,
« La simulation, dit le mémo auteur dans. un auti'e
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat, chose dont
« néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap*
« parence pour le contrat passé entre les parties. Un
« homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r ix , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
« si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera nulle, comme le dit Ulpien. »
Et Papon cite ladite loi ISudâ.
« Quoique les parties, dit Ricard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 16 )
« un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
eu provoquent la nullité.
• A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer : Dans un acte
devant notaires il faut, dit-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
public, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport à l’officier public.
Et de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, Plu s valere quod agitur, quàrn quod sirnulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’efl
détermine pas toujours la nature; si,malgré la dénomina
tion
�C r7 )
tion que les parties lui ont d o n n ée, on peut l ’arguer de
simulation et de fraude , comment s’établit maintenant
cette simulation et cotte fraude ?
Par les circonstances. .
t raus ex circonstantiis probarî potest, dit D um oulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F raus, dit énergiquement d’Argentré, sur l’article
CGXCVI de la coutume de Bretagne , probatur conjecturis antecedentibus , consequentibus et adjunctis.
Falsissim im i, a jo u te-t-il , quod quidam putaverunt non
nisi instrumentis probarî posse; facta enim extrinsecus
fraudent potiùs probant, quia nemo tarn supinus e s t ,
ut scribi patiatur quœ fraudulenterfacit.
La fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. De la vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
Citerons-nous encore Denizard. lies donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 17 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile: aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect-, au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mômes auteurs, les principales
circonstances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La première, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas personasfacilè prœsumitur.
C
�( 18 )
La seconde , la non-nécessité de vendre, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
La troisième, si les actes sont géminés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
certitude.
En un m ot, comme dit d’A rgentré, dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les circonstances antécédentes et
subséquentes.
La parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r ix , tout se rencontre ici. Le notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
n a n te s , on ajoute les circonstances antécédentes et subsé
quentes ; si l’on juge, pour rappeler les expressions de
d’Argentré, ex adjunctis, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
La dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et de l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
et interdit toutes donations, à charge 4e rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou ù ses descen-
�( 19 )
dans; et de ce que cet article ne parle que des ventes a fonds
perdu, la dame Dalbine et son mnri n’ont pas manque
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire , autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la maxime, Inchtsio unius est exclusif) chenus.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’anmille pas; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55e. question :
« A ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion, et
« sans aucun des vices qui pourraient annuller le
« contrat. »
Fixons-nous sur ces dernières expressions.
On voit qu’on n’a pas môme osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes simu
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. Le doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
des ventes faites de bonne fo i, et non en fraude; des.
ventes sincères, et non des ventes simulées. On voit
même, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
« Sur la cinquante-cinquième question, ¿jjue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
G a
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commerv ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion, ni
« défaut de payement. »
Qu’induire de là ? La question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
à un héritier présomptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée ?
Cette question est sans doute bien diiféi’ente.
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeîiettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de 25,000 francs,
numéraire métallique, laquelle somme, e st-il dit, la
venderesse reconnaît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 25,000 francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? Et si cette somme avoit été
payée comptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves,tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son armoire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
• Mêm<^circonstances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix; point d’attestation tic
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
Mais, de plus, réserve de la part de la venderesse de 1 usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, tresordinaire au contraire dans les donations ; réserve qui
seule suffiroitpour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l’article X X V I de la loi du 17 nivôse.
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds perdu, prohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement dfes
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame Dalbine, du domaine de Fontanes , domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-Marie Dalbine,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2, procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
La loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? Elle inter
pose ses enfans.
; Donation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�(
22
)
alors disponible, envers les non successiblcs, c’est-à-dire,
du sixième.
La q u o t i t é disponible, o u , pour mieux dire, qu’elle
croyoit disponible, étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveugle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été payée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seroient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C ’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendém iaire an 5.
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame Dalbine ait fo u r n i quittance aux
débiteurs, c’est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes sommes, tant en principaux, in
térêts que fr a is.
Et il est ajouté, ainsi que le montant du prix de la
Vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x.
Pourquoi cette dernière mention ? Q u ’ e t o i t - i l besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la vente? N’étoit-ce pas elle-même
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre comptable , des sommes par elle reçues et quit~
tancées ; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’achève-t-il pas de décéler
la fraude ?
Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa maison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa vie, même du
domaine vendu ; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
Enfin, testament du 9 messidor an 8, qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
On a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
La lo i, a-t-on d it, ne défend que les ventes h fonds
perdu, faites à des successibles. O r, ic i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu ; e t, d’un autre côté, n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger h la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa
succession.
La donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme?Ne profite-t-elle pas aux enfans communs? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner à la femme et aux enfans ? La
�( H' )
loi ne défend-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement , et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la circonstance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au mari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
Autre jugement du tribunal d’appel séant à Rouen,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
Voici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« Deux questions ont été posées :
« La première consistoit à savoir quelles sont les con« ditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
« fait par un père, à l’un de ses enfans ou de ses gendres.
« La seconde avoit pour objet de reconnoitre si Le« monnier, acquéreur, avoit rempli les conditions néces« saires pour la validité de son acquisition.
« Le tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la pre« mière de ces questions , que les principes et la juris« prudence, fondés sur l’art. CCC CX X X 1V de la cou« tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( *5 )
« ticle IX de la loi du iy nivôse an 2, se réunissent pour
« établir qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
ft père l’un do ses enfans, 11’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le jusle prix de
« la chose acquise, et qu’il justifioit de l’emploi des de« niers de la vente, au profit du vendeur.
« Et sur la seconde question, il lui a paru que L e« monnier n’avoit point rempli les conditions requises
« pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
cc sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point unepreuve
« de l’emploi des deniers , en faveur du vendeur, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par Dumoulin, en ces termes :
« Conclusum quod in venditionefactâjilio velgenero,
« confessio patris non valet de recepto, etiamsi nota
is. rius dicat pretium receptum coram se.
• « D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’Eure, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réform é ; et le contrat de vente, passé par le défunt
« H erm ier à L em onnier, son gen dre , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testament du 9 messidor an 8.
Un premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour quel département il étoit
établi. Titre Ier. scct. II , art, X II de la loi de ly y i.
Une seconde nullité, de ce qu’il n’a pas désigné le n°.
de la patente. Loi sur les patentes*
D
t
�( 26 )
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse, c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surnom , et non par son vrai nom.
L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r,
celui qui ne signe pas son vrai nom ne signe véritable
ment pas.
Le nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement siuver/zat ; il
devoit signer Ci'oze.
Un décret de l’assemblée constituante, du 19 juin 1790,
art. 11, porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille.
Autre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X \ III y
porte, qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera que leur nom patronimique, c’està-dire , de baptême, et celui de la famille, et leurs fonc
tions ou professions.
6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter de nom ni de prénom, que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécutif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�( 27 )
On citera l’ordonnance de Henri II, de i 555 , qui a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citera l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article GGXI, qui porte les mômes dispositions.
Et, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
même, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de famille, après avoir déclaré son prénom : Ego
Joannes...................testarnentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. Singulos testes, dit cette loi, qui testamento adhibenturproprio chirographo annotare convenit, quis, et cujus testamentum signaverti. Il faut que, par l'acte même, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le témoin, quel
est ce témoin. Un surnom peut être commun à plusieurs.
Le nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne signe pas par son nom , est comme s’il ne
signoit pas.
Le testament est donc nul ; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
. Dans tous les cas, le testament ne pourrait avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( .2 8 }
seulement qu’elle n’en auroitpas disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D ans la moitié, est-il dit,
pour Cinstitution de la dame D albine, sont comprises
toutes les facultés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ites depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. On ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2,
ou, pour mieux dire, à celle du 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible-, et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi il faudroit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible, et la donatiap>du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son'contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à A n n e -M a r ie D albine-, en tant du m oins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyi'onnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
Le jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
On voit combien cette cause est importante. Elle n’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt le
succès qu’elle attend , il n’y auroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. L e s fraudes, déjà trop
communes, se multiplieroient ; la loi seroit sans objet ; la
�(2 9 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a-t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreroient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G E S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d R i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d’appel. — A n 11.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
successions collatérales
donations
coutume d'Auvergne
droit intermédiaire
doctrine
nullité du testament
surnoms
défaut de nom patronymique
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
testaments
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
Description
An account of the resource
Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Jospeh Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1771-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0932
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Fontanes (domaine de)
Brioude (43040)
Rights
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Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
défaut de nom patronymique
doctrine
donations
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
successions collatérales
surnoms
testaments
ventes
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b8dec1dffd266e36187183d1139588b7
PDF Text
Text
IJ b t)
---- ------
�u r.
*» * , o ' '•
!J4
GENEALOGIE
DES PARTIES.
Pierre D ejar,
marié à
Jacqueline Chassaing.
Julien,
décédé sans
postérité.
s.
V ital,
décédé sans
postérité.
Antoine Ier.
décédé sans
postérité.
ont donné tous leurs biens
à Julien Dejax.
4
Antoine II,
marié â
Marie-Thérèse
Delchier.
Anne-Marie,
mariée au cit.
T artel,
de cujus.
I
S
3
4
Vital.
Julien,
AnneA gnès,
François, appelant. Marie , mariée à
Pierre
mariée à
décédé
Peyronnet. Dalbine ,
sans poster.
intimés.
i
2
Joseph,
AnneMarie ,
intimé.
mariée à
Robert
Gizaguct >
intimée.
3t
3
M arie,
intimée.
�MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame A g n è s D E JA X , et le citoyen P i e r r e
D A L B IN E , son mari, juge au tribunal d’ar
rondissement de Brioude;
J o s e p h D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E , et
A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert
C r o z e - M o n t b r i z e t - G i z a g u e t , tant en
son nom que comme tutrice de ses enfans,
tous intimés :
CONTRE
J
D E J A X , homme de loi, habitant de la,
ville de Brioude, appelant d’un jugement rendu
au tribunal de cette même ville, le 6 messidor
an 10.
u l ie n
S o u s l’empire des lois prohibitives, les transactions
les plus ordinaires étoient toujours suspectées de fraude
l’injustice, la cupidité, l’ambition, avoient u n champ
vaste pour leurs spéculations ou leurs calculs. Quelle jouis
sance pour le cit. D e ja x , connu pour avoir la passion
A a
�<1« procès! Il doit sans doute regretter le temps où la
loi du 17 nivôse étoit en vigueur. II paroît que la loi du
4 germinal an 8 lui a singulièrement déplu; il sera bien
plus irrité contre le code civil, qui permet des dispositions
universelles en ligne collatérale; et son moment n’est pas
bien choisi pour attaquer des règlemens de famille dictés
par la reconnoissance, ou des ventes aussi sincères que
légitimes.
Ce n’est pas assez pour le cit. Dejax d’avoir obtenu,
par importunité ou par lassitude, la majeure partie de
la succession de l’un de ses oncles, d’avoir été donataire
universel de deux autres, il est jaloux de la plus légère
préférence de la tante qui lui restoit. Il l’a négligée dans
sa vieillesse; l’auroit abandonnée à des soins mercenaires,
sans la généreuse bienfaisance de la dame Dalbine : mais
aujourd’hui il en veut à sa succession; et tous les actes
qu’a faits la dame Tartel sont à ses yeux des libéralités
frauduleuses et déguisées, que la loi proscrit et lui réservoit exclusivement.
Ses prétentions sont défavorables et odieuses, sa récla
mation impolitique et injuste, attentatoire au droit sacré
de propriété : en l’adoptant, ce seroit récompenser l’in
gratitude, blesser la reconnoissance, et proscrire les con
ventions les plus légitimes.
( 4 )
F A I T S .
La dame D ejax, veuve Tartel, de la succession de la
quelle il s’agit, a été la bienfaitrice de toute sa famille.
Elle donna une somme de 3,000 fr. à Anne-Marie Dejax,
femme Peyronnet, lors de son contrat de mariage.
�( 5 )
¿ tff
Elle fit également un don de 6,000 fr. à Julien D ejax,
son neveu, appelant, lors de son mariage avec la demoi
selle Croze, du 20 novembre 1771. Ce sacrifice fut absolu
de sa part, et sans aucune réserve d’usufruit.
Le 9 décembre 1 7 7 1 , Agnes Dejax épousa le citoyen
Dalbine, et la dame Tartel lui fit donation de quelques
immeubles situés àFontanes, évalués à 5 ,000 francs, et
non d’un domaine, comme le prétend Dejax,- plus, d’une
somme de 2,000 fr. ; mais elle se réserva, pendant sa vie,
l’usufruit des objets donnés.
L e 19 juin 1778, la dame veuve Tartel fit donation à
Anne-Marie D albin e, sa petite-nièce, de six parties de
rente au principal de 4,000 fr.
L e 17 germinal an 2, elle fit donation du sixième de
ses biens à A n n e -M a rie , Joseph et Marie Dalbine, ses
petits neveu et nièces.
Le 6 messidor an 8, elle a fait un testament par lequel
elle a institué pour son héritière de la moitié de tous ses
biens, par préciput et avantage à ses autres héritiers de
droit, Agnès D ejax, femme Dalbine.
Telles sont les libéralités qu’a exercées cette femme
bienfaisante. Mais le citoyen Dejax conviendra lui-mème
qu’Agnès, sa sœur, méritoit quelque préférence, et devoit
obtenir la première place dans l'affection de sa tante.
Depuis longues années la dame Dalbine lui a rendu les
services les plus empressés et les plus généreux. La dame
Tartel, indépendamment des infirmités qui accompagnent
la vieillesse, étoit atteinte d’une cécité complète; sa nièce
ne l’a pas quittée, lui a prodigué ces tendres soins qui con
solent les malheureux et les dédommagent des privations.
Julien Dejax , au contraire, s’occupoit peu de sa tante
�(6)
pendant qu’elle a vécu ; il n y pense que depuis qu'elle
est morte ? parce qu’il est très-habile à succéder. Il lui
sera sans doute difficile d’attaquer des libéralités que les
lois autorisent : mais il fait l’énumération des ventes que
la dame Tartel a consenties 5 il est donc essentiel de les
rappeler.
L e 31 août 1791, le cit. Dalbine se rendit adjudicataire,
au ci-devant district de Brioude, de deux maisons natio
nales, moyennant la somme de 2,960 fr.; et l’adjudication
lui fut faite au nom de Marie Dejax, veuve Tartel.
L e 26 floréal an 2 , cette dernière subrogea Agnès
D e ja x , autorisée de son m a ri, à l'effet de ces deux adju
dications, à la charge par elle de payer 1,950 francs qui
étoient encore dûs à la nation ; de payer le montant d’un
devis qui avoit été donné pour quelques réparations; et
moyennant le remboursement qui fut fait de deux sommes
qui avoient déjà été payées par la dame Tartel; savoir,
celle de 1,221 fr. d’une part, versée à compte du prin
cipal ou intérêts dans la caisse du receveur, et celle de
1,200 fr. pour les réparations déjà faites.
L e 24 v e n d é m i a i r e an 5 , la dame veuve Tartel a vendu
à Robert Croze-Gizaguet, époux d’Anne-Marie Dalbine,
sa pciitc-nièee, un domaine appelé de Vazeliettes, l’a su
brogé à une vente nationale de partie d’un domaine appelé
le Poux, et lui a également cédé les meubles qui garnissoient ce domaine de Vazeliettes, dont l’inventaire est
annexé au contrat.
Cette vente est faite sous la réserve de l ’u sufruit de tous
les objets vendus et des bestiaux du domaine, moyennant
la somme de 25,000 fr. qu’elle reconnoît avoir reçue
comptant lors de lu vente,
�La dame veuve Tartel est décédée le i^r. vendémiaire
an 9 , c’est-à-dire, qu’elle a survécu quatre ans à la vente
par elle consentie au profit de Robert Crozc de Gizaguet.
Après son décès, les intimés espérèrent, pendant quel
que temps, que le cit. Dejax n’éleveroit aucune contesta
tion ; il sembloit se rendre justice : il nomma son arbitre,
fit estimer les fonds, et on procéda à l’inventaire du mobi
lier; cet inventaire fut écrit par son fils en sa présence.
Mais bientôt il changea d’opinion. Il éludoit toujours
les propositions qui lui étoient faites : la dame Dalbine
se vit contrainte de le faire citer pour procéder au par
tage des biens délaissés par la dame veuve Tartel.
C ’est alors que le cit. Dejax manifesta ses intentions
hostiles. Il demanda d’abord la nullité de la donation faite
par la tante commune, le 17 germinal an 2, du sixième
de tous ses biens au profit des enfans de la dame Dalbine,
sa nièce ; 20. il attaqua l’acte de subrogation de floréal
an 2 , au profit de la dame Dalbine ; 30. il conclut à la
nullité de la vente faite au profit du cit. Robert CrozeGizaguet, le 24 vendémiaire an 5 ; 40. il soutint la nul
lité du testament du 9 messidor an 8 , qui attribuoit â la
dame Dalbine la moitié des biens de sa tante, en prdeiput;
5 °. il prétendit que la dame Dalbine, épouse M ontbrizet,
devoit lui faire raison des arrérages d’une rente d’un setier
seigle, faisant moitié d’une rente de deux setiers par elle
perçue d’un nommé Poughon de Reillac, tant avant
qu’après le décès de la dame Tartel; 6°. il conclut h ce que
la dame Dalbine fût tenue de déposer, entre les mains de
tel notaire qui seroit commis, tous les titres, papiers et
docuinens de la succession, pour que chacune des parties
pût en prendre communication, ainsi qu’elle aviseroit.
�m
Il prétendit que la dame Dalbine devoit demeurer cau
tion de toute prescription qui auroit pu s’opérer depuis
le décès de la tante commune jusqu’au dépôt des titres
de créance ; il demanda qu'elle fût tenue de faire raison
de tous les arrérages de rente , baux à ferme, et géné
ralement de tout ce qu’elle peut avoir perçu des créances
dépendantes de la succession ; que tous les biens meubles
et immeubles , effets , créances , composant cette succes
sion , même ceux dont la dame Tartel avoit disposé
entre-vifs, en faveur de ses héritiers de d ro it, fussent
rapportés à la masse commune par les détenteurs, avec
restitution de jouissances et intérêts, depuis le décès de
la dame T a r te l, jusqu’au partage effectif.
Enfin il conclut subsidiairementdans le cas où tout
ou partie des actes attaqués ne seroit pas annullé, et que,
par l’effet de ceux conservés, ou de tout autre disposi
tion non contestée, plus de la moitié des biens de la
dame Tartel se trouveroit absorbée , il fût ordonné que
les dernières dispositions de la dame Tartel seroient re
tranchées jusqu’à due concurrence , de m a n iè re qu’il
restât toujours à diviser la moitié des biens meubles et
ijnmeubles composant cette succession.
Le eit, D e ja x , en expliquant ses prétentions, se fond o it , pour la nullité de la donation de germinal an 2 ,
du sixième des biens, i°. quant aux meubles, sur ce
que cette donation n’en contenoit pas l’é la t, quoiqu’il
11 y eût qu’une tradition feinte. Par rapport aux im
meubles , il prétendoit que la loi du 17 nivôse ne permeltoit pas la forme des donations entre-vils; et que la
dame Tartel ne pouvoit disposer du sixième de ses biens,
que
�(9)
que par donation pour cause de m ort, ou par testament.
La subrogation de floréal an 2, étoit suivant lui une
libéralité déguisée , faite au profit d’une successible. La
dame Tartel avoit éprouvé une lésion énorme, en ce qu’elle
avoit acquis dans un temps où les assignats perdoient peu
de leur valeur 5 tandis qu’ils étoient discrédités à l’époque
de la subrogation, en supposant même qu’elle en eût
reçu le remboursement, ainsi que cela a été dit dans l’acte.
Il prétendoit encore que cette maison avoit acquis une
grande valeur dans l’intervalle, par la démolition de plu
sieurs biltimeùs nationaux , qui auparavant embarrassoient ou obscurcissoient les avenues de la maison.
La vente du domaine de Vazeliettes étoit aussi une
donation déguisée, faite à vil prix au gendre d’une successible, à un homme dont la fortune ne lui permettoit
pas de payer 25 ,ooo fr. comptant. A l’entendre, cette
vente étoit faite sans nécessité, sans cause, sans emploi
du p rix , qui auroit dû se trouver dans sa succession ,
quatre ans après son décès.
Le testament du 6 messidor an 8 étoit encore n u l ,
parce que le notaire n’avoit pas indiqué pour quel dé
partement il étoit établi ; l’un des témoins n’avoit pas
signé son vrai nom ; ce même témoin étoit parent avec le
gendre de celle au profit de laquelle les dispositions étoient
faites ; enfin , on n’avoit pas suffisamment désigné le
huitième témoin , qui avoit été appelé à raison de la
cécité de la testatrice.
Le cit. Dejax, dans toutes ses demandes, a eu le désa
grément de ne pas trouver de son avis des cohéritiers qui
avoient le même intérêt. La dame veuve Pcyronnet a
B
�demandé acte de ce qu’elle consentoit au partage de ïa
succession de la dame veuve T arte!, conformément à son
testament ; 2°. de ce qu’elle n’entendoit point contester
la vente du domaine de Vazeliettes et dépendances, faite
au profit de Robert Croze-Gizaguet, ni aucune des do
nations partielles faites par la dame veuve Tartel.
Les petits-neveux, donataires du sixième, ont consenti
que la donation demeurât sans effet quant au mobilier ;
mais ont demandé son exécution, par rapport aux im
meubles.
L a dame Dalbine, de sa p a r t , a soutenu que la subro
gation faite à son p ro fit, le 27 floréal an 2 , n’étoit pas
du nombre des actes prohibés par la loi ; que toutes les
circonstances en prouvoient la sincérité ; que la loi ne
défendoit pas de ve n d re , et qu’elle validoit ce qu’elle
n’annulloit pas.
A l’égard du testament, le notaire avoit désigné le lieu
de sa résidence, qui est la ville de Brioude, et cette dé
signation étoit suffisante. 20. Les noms et prénoms de
Montbrizet-d’A uvernat, un des témoins, étoient expli
qués dans le testament. Dans tous les actes publics et
p riv é s, jamais ce témoin n’avoit signé d’autre nom que
celui de d’Auvernat. Ce témoin n’est pas parent de l’hé
ritière instituée. La parenté n’est pas une cause de prohi
bition. Et l’ordonnance de 1735 ne dit pas qu’on désignera
nominativement le huitième témoin, qui doit être appelé
pour cause de cécité.
La dame veuve Montbrizet , comme tutrice de ses
enfans, a observé, relativement à la vente du domaine
de Vazeliettes, qu’elle étoit consentie en faveur du mari
�d’une personne non successible. Elle a prouvé que la
prohibition rigoureuse de la loi ne s’étendo-it qu'à ceux
qui étoient appelés au partage de la succession. Son mari,
acquéreur , étoit d’ailleurs étranger à la dame Tartel :
les biens, quelle lui transmettoit, à titre de vente, passoient à tout autre famille que la sienne. Il est invrai
sem blable qu’elle l’eût préféré, si elle avoit eu des in
tentions libérales. Croze-Gizaguet trouvoit, dans sa for
tune , et dans son emploi de capitaine de gendarmerie,
des ressources suffisantes pour payer le montant de cette
acquisition: la dame Tartel avoit survécu quatre ans à
cette vente , et devoit naturellement en avoir employé
le prix à ses affaires ou à ses besoins, dans un age sur
tout où ils se font plus impérieusement sentir, et où les
infirmités augmentent nécessairement les dépenses.
Ces défenses si simples devoient faire présager à Julien
D ejax, quelle seroit l'issue des prétentions de ce collatéral
avide. L e jugement dont est appel « l’a débouté de
» sa demande en nullité, tant contre la subrogation à la
vente des deux maisons nationales, consentie par la
» dame Dejax, veuve Tartel, au profit de la dameDalbine,
» par acte du 26 iloréal an 2 , que de la demande en
» nullité de la vente du domaine de Vazeliettes, au profit
» de Robert Croze-Montbrizet, du 21 vendémiaire an 5 ,
i, et encore de celle intentée contre le testament de la
» dame Tartel, en date du 6 messidor an 8.
» Il est ordonné que les vente, subrogation et testa•» rnent sortiront leur plein et entier effet; il est donné
» acte aux parties de ce qu’elles s’en réfèrent A leur
» qualité d'héritiers, et offrent de rapporter tout ce qu’elles
B 2
�%j
( 12 )
,» tiennent à titre de libéralité particulière, et ce, de la
» môme manière qu’elles l’ont pris ou dû le recevoir. En
» conséquence il est dit que , par experts nommés par les
« parties ou pris et nommés d’office, il sera procédé au
» partage des biens meubles et immeubles provenans
» de la succession de la dame Tartel , pour en être
» délaissé à la dame Dalbine, héritière testamentaire,
» une moitié en cette qualité, et un tiers dans l’autre
» moitié comme successible ; le second tiers au cit. Dejax ;
>? et le dernier i\ la dame Dejax , veuve Pcyronnet ;
>) auquel partage chaque partie rapportera les jouissances
» perçues dans les immeubles, suivant l’estimation qui
» en sera faite par les experts, et les intérêts, revenus
» et autres objets dépendans de la succession, sauf tous
» les prélèveinens de droit que chacune d’elles aura droit
» de faire.
3) Il est ajouté que dans la moitié pour l’institution
» de la dame Dalbine, sont comprises toutes les facultés
» de disposer de la dame Tartel, faites depuis la publi» cation de la loi du 17 nivôse an 2 : en conséquence
« la disposition du sixième en faveur des enfans Dalbine
» demeure sans effet quant à présent; ils sont mis de
» leur consentement hors d’instance pour ce chef, sauf
» i\ se pourvoir contre leur mère ainsi qu’ils aviseront.
3) Il est ordonné q u e , dans le délai d’un mois à compter
» de la signification du jugement, le cit. Dejax sera tenu
» de faire faire inventaire du mobilier, papiers et titres
3) de créances laissés par la dame Tartel à l’époque de
t> son décès, si mieux il n’airue s’en rapporter h l’élat
3) qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera
3) censée faite le délai passé.
�éii&
( 13 )
» Il est encore ordonné que la dame Gizaguet sera
» tenue de rapporter le contrat de rente annuelle d’un
» septier seigle, qui fait partie intégrante de la succession
» de la dame T a rte l, et à en rendre compte suivant le
» prix des pancartes des années par elle perçues depuis
» l’ouverture de la succession , sauf au cit. Dejax de
» faire raison de ce qu’il a touché de la même rente.
» Sur le surplus des demandes respectives, les parties
» sont mises hors de jugement; e t, en cas d’appel, il est
» ordonné que tous les papiers et titres de créances
» dépendans de la succession de la dame Tartel, seront
» déposés ès mains du cit. Bellemont, notaire public de
» B rioude, désigné par les parties, et commis par le
» tribunal ; et le cit. Dejax est condamné aux dépens
» envers toutes les parties. »
Il est bon de connoître les motifs qui ont déterminé
ce jugement ; on verra qu’ils sont tous marqués au coin
de la sagesse, de l’équité et de la raison.
Eu ce qui touche la subrogation faite au profit de la
dame Dalbine , « il est dit que cette forme d’acte n’a
» point été interdite par la loi du 17 nivôse an 2 ; que
» le législateur , en interprétant dans ses décisions sur
» diverses questions relatives à ses efFets, a décidé que
j) ce qui n’étoit pas annullé par la loi étoit validé par
» elle.
» Qu’en anéantissant les ventes à fonds perdu entre
» successibles, la loi n’y a pas compris les autres transac» tions commerciales, contre lesquelles on n’invoque ni
» lésion ni défaut de payement ; que l’acte prouve que
» le prix dont il porte quittance a été compté, et que
�r' * ,
(
1 4 ) ......................................
» le surplus Ta également été, ainsi qu’il résulte des quit» tances rapportées. »
En ce qui concerne la vente du domaine de Vazeliettes,
faite au profit de Robert Groze de Gizaguet, on remarque
« que Robert Gizaguet n’étoit point dans la ligne de
» ceux sur qui frappe la prohibition des nouvelles lois,
» qu’il n’étoit ni successible ni me me époux de succcssible.
» On observe que la jurisprudence constante du tri» bunal de cassation, est de ne point ajouter à la rigueur
» des prohibitions des lois, mais au contraire de se ren» fermer dans le texte précis de ces prohibitions, sans
» les étendre.
» Les ventes pures et simples et a prix fixe ne sont
» pas interdites en faveur des successibles ; et quand
» bien même Robert Croze-Gizaguet eût été successible
» de la dame Tartel, la vente n’en seroit pas moins valide
» et inattaquable, tant qu’aux termes précis des lois on
» ne l’argueroit pas de fraude ou de lésion. Enfin il
» est d it, dans cet acte, que le prix en a été compté
» présentement i\ la dame Tartel ; et dès-lors on ne peut
élever aucun doute sur ce point de fait. »
Eu ce qui touche les nullités résultantes contre le tes
tament, « Attendu que la loi, sur l’organisation du nota» ria t, astreignant les notaires à indiquer le lieu de
» leur résidence et du département, n’a eu en vue que
» d’empêcher les fraudes qui pourroient être commises
» par des hommes qui usurperoient faussement la qua» lité de notaire, ou par des notaires même, recevant
» des actes hors de l’arrondissement pour lequel ils sont
» institués ; mais qu’un notaire, en indiquant le Heu de
�C 15 )
» sa résidence, fait connoître assez qu’il ne sort point
» des limites qui lui sont fixées, et satisfait suffisamment
» à ce que la loi lui impose; que s’il falloit annuller les
y> actes dans lesquels la désignation du département est
33 omise, ce seroit porter le trouble et la confusion dans
» la société.
» Attendu que d’Auvernat , l ’un des témoins, a été
» désigné par le notaire sous les noms et prénoms portés
>3 en son acte de naissance, de Jean-Baptiste Croze-Mont>3 brizet-d’A uvcrnat, et que par sa signature d’Auvernat
>3 il a suffisamment attesté sa présence audit acte.
33 Attendu que dans tous les actes généralement quel33 conques il ne signe que d’A u vern at, et qu’il n’est connu
33 dans le public que sous ce nom.
33 Attendu que sa pai-enté avec la fille et les petits33 enfans de l’héritière testamentaire ne dérive que du
33 lien d’affinité , ne suffit point pour annuller un acte
33 auquel il n’est appelé que comme témoin.
33 Attendu que la loi n’impose point aux notaires l’obli33 gation de désigner nominativement lequel des témoins
33 a été appelé en huitième par le motif de la cécité de la
33 testatrice, et qu’il suffit, aux termes de l’ordonnance
33 sur les testamens , que le nombre des témoins requis
3î soit constaté.
33 Attendu que le cit. Dejax ne demande point à être
33 admis à prouver le dol et la fraude dans les actes qu’il
33 attaque, ni que ces actes aient été l’effet de la sng» gestion ou de la violence.
» Attendu que les successibles ne peuvent cumuler
» les qualités de donataire et d’héritier.
�(
1
6
3
» Attendu que la faculté de disposer étant bornée à
» la moitié, par la loi de germinal an 8 , toutes les dis—
» positions qui excéderoient cette quotité doivent y être
» restreintes. »
Tels sont les motifs qui ont déterminé la décision des
premiers juges j ils sont certainement très-judicieux. Il
s’agit d’examiner si les objections du cit. Dejax, qui a eu
le courage d’interjeter appel de ce jugem ent, peuvent
balancer ces motifs , et faii’e annuller des conventions
légitimes.
1
D onation du 17 germinal an 2.
Le cit. Dejax d’abord pouvoit s’épargner une discus
sion oiseuse sur la validité ou la nullité de cette dona
tion du sixième, faite au profit des petits-neveux de la
dame Tartel. Le jugement dont est appel ordonne que
cette disposition demeurera sans effet, et la réunit à la
disposition de moitié, faite au profit de la dame Dalbine.
Mais s i , en thèse générale, on devoit examiner le
mérite de cette donation , il seroit aisé d’établir qu’elle
doit avoir son exécution, puisque les donataires ne sont
point successibles de la donatrice.
En effet, l’article X V I de la loi du 17 nivôse permet
de disposer du dixième de son bien en ligne directe, ou
du sixième en ligne collatérale, au profit d’autres que
des personnes appelées par la loi au partage des successio?is : donc, on ne peut tirer''cl’autre conséquence de
cet article, sinon que tous ceux qui ne sont point appelés
au partage sont susceptibles de recevoir la disposition de
cette quotité. Les argumens les plus simples sont les
meilleurs;
�*
é& r
C 17 )
meilleurs ; toutes les subtilités , tous' les raisonnemens
captieux disparoissent devant les termes de la l o i , qui n’a
exclu que ceux qui sont appelés directement au partage,
et ou ne doit point étendre les prohibitions.
On trouveroit encore la preuve, que le descendant du
successible, loin d’être exclu par la loi, est au contraire
capable de l’ecevoir. L ’article X X II lui permet de profiter
de la retenue, quoique son ascendant prenne part à la
même succession.
Loin de nous ces discussions inutiles sur l’incapacité
des enfans! Pourquoi rappeler cette maxime ancienne:
P a te r et filiu s un a eademque p eisona ? V o u d ro it-o n
faire concourir l’ancienne législation avec la nouvelle?
lorsque la loi veut qu’elles n’aient plus rien de commun
par la suite, ainsi que cela est dit textuellement par la
réponse à la question 47 de la loi du 22 ventôse an 2.
Si l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse a compris les
descendans du successible dans la prohibition des ventes
à fonds perdu , le motif en est assez expliqué dans la loi
du 22 ventôse. Ces ventes à fonds perdu , dit-on, sont
une source trop fréquente de libéralités indirectes. C’est
une exception qui confirme la règle. Ces sortes de vente
même ne sont annullées q u ’autant q u ’elles seroient sus
pectes ; elles peuvent être validées par le concours ou
le consentement des autres successibles. Mais précisément,
parce que la loi a compris dans cet article les descendans
du successible , qu’elle ne les a point nommés dans les précédens, on ne doit pas raisonner d’un cas ¡\ un autre ,
ni exclure d'oflice ceux que la loi n’a pas déclarés inca*
pables.
C
�.
c
i
8
)
Il
faut au surplus laisser au cit. Dejax le plaisir de
dire que cette donation est nulle pour le mobilier. L ’ar
ticle X V de l’ordonnance de 1731 le veut ainsi; les intimés
y ont consenti ; enfin cette donation n’a aucun effet par
rapport au cit. Dejax: pourquoi donc a-t-il pris tant de
peine, pour discuter un point qui n’est pas contesté,
et pour lequel il n’éprouve aucune perle ?
Subrogation du 17 Jloréal an 2.
Par cet acte, la dame veuve Tartel a subrogé la dame Dalbine sa nièce à une acquisition nationale. Le prix étoit
encore dû en majeure partie ; cette subrogation n’est faite
qu’à la cliarge de verser dans la caisse du district tout
ce qui n’a pas été payé; elle est faite sans aucune garantie ;
les sommes que la dame veuve Tartel avoit payées sont
infiniment modiques; et il faut avoir une grande manie
du procès pour attaquer une subrogation qui présente
aussi peu d’importance. Cependant, le cit. Dejax épuise
les autorités , se livre à une intempérie de citations pour
prouver la simulation de cet acte; il met à contribution
les lois et les auteurs , dans une matière où il y a peu
de décisions certaines, et où tout dépend des circons
tances ou des présomptions.
L e savant Ricard , dans son traité des donations, pre
mière partie, cliap. III, sect. X V I , nomb. 767, dit bien
qu’une vente étant passée entre personnes qui sont prohi
bées de se d onner, peut être prise pour un avantage
indirect, et que des présomptions violentes pourroient
quelquefois suffire : comme si le donateur venoit à décéder
�C *9 )
bienfôt après une semblable vente simulée , et que le
prix fût considérable , sans qu’il se trouvât dans sa mai
son aucune somme proportionnée aux deniers qu’il dé
tro it avoir reçus, et que d’ailleurs il ne parût pas qu’il
en eût fait aucun emploi dans ses affaires; avec quoi
qu’autre conjecture résultante du fait particulier. Ricard,
comme on le voit, ne se décide pas légèrement à prononcer
la nullité d’un contrat de vente. La présomption la plus
forte suivant lu i, c’est lorsque le vendeur décède bien
tôt après : on peut alors supposer aisément que ce ven
deur , mortellement atteint, cherche à transmettre ses
propriétés , à titre gratuit, à celui qu’il préfère ou qu’il
affectionne le plus. Tel est le malheureux effet des lois
prohibitives, qu’on cherche toujours à les éluder, surtout
dans ces derniers momens. M ais, il n’est pas dans la na
ture qu’on cherche à se dépouiller , lorsqu’on a l’es
poir de jouir encore : on préfère souvent un héritier à
tout autre, rarement on le préfère à soi-même; et, parmi
nous, les donations entre-vifs deviennent infiniment rares.
Et peut-on ici argumenter de présomptions, de fraude
ou de simulation , lorsqu’on voit que la dame veuve
Tartel a subrogé en l’an a , et n’est décédée qu’en l’an 95
lorsqu’il est établi, que le prix, ou au moins la majeure
partie de la subrogation, étoit encore dû par l’adjudica
taire; qu’il a été payé à la caisse nationale par la subro
gée? Alors, sans doute, doivent disparoître toutes ces
conjectures , tous ces moyens banaux de simulation ,
qu’on voudroit faire résulter de la loi N u d a , ou de l’au
torité de Papon , q u i , même sur la loi Sulpicius , nç
passe pas pour avoir toujours dit la vérité.
G a
�L e célèbre Gochin plaidoit sans doute pour un homme
qui comme Dejax ne revoit que simulations; et le plai
doyer d’un orateur fameux peut donner de grandes leçons,
et apprendi’e à bien discuter; mais on ne doit pas le citer
comme un ouvrage doctrinal.
D ’ailleurs si la loi du 17 nivôse a défendu de donner,
elle n’a point défendu de vendre; et le législateur veut
bien nous apprendre lui-même que la loi valide ce qu’elle
n'annulle pas.
Vente du 24 vendémiaire an
5 , au profit du cit. Gizoguet.
Cette vente est faite en l’an 5 au profit d’un étranger
à la venderesse ; mais cet acquéreur étoit le gendre de
la dame Dalbine \ et comme il est dans le système de
Dejax d’étendre les prohibitions, il veut les porter à
l’infini : quoique l’objet vendu passât à une famille étran
gère à la dame Tartel, qu’il appartînt aux héritiers Montbrizet plutôt qu’aux héritiers Dalbine, cependant Dejax
veut encore que cette vente soit simulée.
L e tribunal de cassation n’a pas pensé comme le cit.
D ejax, lors d’un jugement du 6 prairial an 10, qui a
confirmé une vente à fonds perdu , faite à l’ascendant
d’un successible. Samuel Dalau avoit vendu tous ses biens
à Marie Bonnau, veuve Dalau, sa belle-sœur, moyennant
une rente viagère. Samuel Dalau n’avoit point d’enfant,
et les cnfans de Marie Bonnau, ses neveux, étoient du
nombre de ses successibles. Les autres héritiers attaquoient
cette vente de nullité; ils se fondoient sur la disposition
de l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse; ils rappeloient
�¿ iï/
( 2ï )
toutes les autorités qu’invoque le cit. Dejax, et ne inanquoient pas de dire que les arrêts avoient toujours confondu
le père avec le fils, d’après la maxime : P a ter et filiu s
una eademque persona. Le tribunal d’appel de Poitiers,
sans égard pour cette maxime , avoit validé la vente :
pourvoi en cassation; et, comme le tribunal de cassation
apprend qu’on doit restreindre les lois prohibitives, il
est à propos de rappeler les motifs qui l’ont déterminé
à l’ejeter le pourvoi.
« Considérant que l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse
» an 2 , est prohibitif, et ne peut par conséquent s’éten» dre d’un cas à un autre.
» Considérant qu’il ne comprend que les successibles
» et leurs descendans, et que s’il y a quelques inconvé.» niens de ne l’avoir pas étendu, soit aux descendans,
» soit à l’époux en communauté avec le successible, ou
» avec les descendans du successible, il y en auroit encore
» davantage, à créer, sous le prétexte d’analogie, des
» prohibitions que la loi n’a pas établies.
» Considérant que créer ces nouvelles prohibitions, ce
» seroit ( quelque justes qu’elles puissent être ) entre» prendre sur l’autorité législative ; ce qui, dans l’espèce,
.» seroit d’autant moins pardonnable, qu’il n y avoit pas
» de question plus controversée avant la loi du 17 nivôse,
» que celle de l’étendue des prohibitions : d’où il suit que
» c’est en connoissance de cause que les législateurs l’ont
» restreinte expressément aux successibles et à leurs des-•» ccndans.
*■ » Considérant enfin qu’il ne peut pas y avoir ouverture
■
x> à cassation d’un jugement auquel on ne peut faire d’autre
�( 22 )
» reproche que d’être conforme à la lettre de la lo i, etc.
Tels sont les véritables principes en matière de prohi
bition. Cette décision de l’autorité normale doit servir
de règle invariable en cette matière. Il en résulte que
Robert Croze- Gizaguet n'étoit pas personne prohibée,
quoiqu'il fût l’époux de la descendante du successible;
qu’il pouvoit traiter, acquérir delà dame veuve Tartel:
e t , en écartant aussi victorieusement la prohibition , on
fait disparoître toute idée de simulation ou de déguise
ment du contrat.
Les conventions doivent être généralement exécutées:
tous les efforts des tribunaux doivent tendre à valider
les actes plutôt qu’à les annuller, Ut potiùs actus valeat,
quàm ut pereat. Nulle présomption de fraude dans la
vente dont il s’agit: celle qui a si fortement touché Ricard,
la mort prochaine du vendeur, ne se rencontre pas dans
l’espèce particulière , puisque la dame Tartel a survécu
quatre ans à cette vente. Et s’il falloit annuller tous les
contrats qui portent quittance, il faut convenir qu’il n y
auroit plus rien de solide ni de certain parmi les hommes.
Dans les mutations actuelles, presque toujours les con
trats portent quittance, quand bien même le prix ne
seroit pas entièrement payé. On y supplée par des effets
ou des reconnoissauces particulières, pour éviter de plus
grands droits.
Ici le prix principal n’est pas exorbitant, et ne choque
en aucune manière la vraisemblance. D e quel droit le
cit. D ij ax voudroit-il scruter la solvabilité ou les res
sources du cit. Gizaguet ? JN'est-il pas notoire cp.i'il apparterioit à une famille riche, qu'il avoit uti patrimoine con-
�e*s)
sidérable, un emploi dont les appointemens étaient de
3,000 francs par année? ne sont-ce pas là des ressources
suffisantes pour payer une somme de 2Ô,ooo francs? pourroit-on , sur des prétextes aussi légers, dépouiller une
famille , des orphelins, d’un bien légitimement acquis ?
quiconque oseroit le penser , n’auroit aucune idée des
principes du droit et de l’équité.
L e cit. Dejax , dans son aveuglement, va jusqu’à cri
tiquer les intentions libérales et bienfaisantes de la dame
Tartel; il rappelle avec affectation ses dispositions anté
rieures et subséquentes : pourquoi a - t - i l oublié celles
dont il a été l’objet, et dont il étoit si peu d ig n e, puis
qu’il attaque la mémoire de sa bienfaitrice ? N ’a-t-il pas
reçu d’e lle , en se mariant, une somme de 6,000 francs,
avec tradition réelle ? tandis que les libéralités faites aux
autres ont toujours été grevées de l’usufruit envers la
donatrice.
Pourquoi n’a-t-il pas dit qu’il étoit donataire universel
de deux de ses oncles, qu’il a profité exclusivement de
leui’s dépouilles, et que la dame Dalbine , sa sœ ur, en
a été privée ; que par ces donations il a trouvé le moyen
de réunir, en majeure partie , les biens de Julien, son
oncle, premier du nom? Il a craint sans doute de justes
reproches d’avidité, lorsqu’il se montre aussi jaloux de
ce que sa sœur a reçu la récompense des soins les plus
tendres et les pins assidus. Dans son humeur inquiète,
il va jusqu’à reprocher les quittances et la décharge que
la dame veuve Tartel a données à sa nièce pour la gestion
de ses biens ou la perception de ses revenus. Mais la darne
Tartel devoit-elle quelque chose sur ses revenus au cit.
�(*4 )
Dejax ? n’étoit-elle pas au moins la maîtresse d’en dis-’
poser à son gré? Si la dame Dalbine a pris la précau
tion de se faire donner une décharge, c’est qu’elle avoit
la procuration de sa tante, et qu’elle devoit craindre ,
avec raison, que son frère lui demandât compte de son!
mandat ; mais on ne voit rien là que de très-ordinaire.
La dame Tarte! a pu dissiper ses revenus comme ses capi
taux , sans que personne eût le droit de critiquer sa con
duite; elle en a fait tel emploi que bon lui a semblé; et*
ce n’est pas la première fois que des collatéraux avides
ont été trompés dans l’espoir qu’ils avoient de trouver
des capitaux ou des deniers à la mort de celui dont ils
convoitoient la succession.
La coutume de Normandie ne les leur a pas fait rendre;
et l’article C C C C X X X IV , qui a servi de base à un jugement
du tribunal d’appel de R o u e n , rapporté au mémoire
du cit. Dejax , ne reçoit aucune application à une suc
cession ouverte en droit écrit.
Testament du
6
messidor an 8.
Le notaire qui a reçu ce testament , en désignant la.
ville de Brioude, a-t-il dû désigner le département dans
lequel il étoit domicilié? A-t-il dû faire mention du nu
méro de sa patente? Ou défie le cit. Dejax de citer
aucune loi qui oblige, à peine de nullité, les notaires
d j désigner leur département ou le numéro de la pa
tente: ils n'ont même jamais pratiqué cet usage, lorsqu’ils
reçoivent dans les villes de leur résidence, et pour des
personnes qui y sont domiciliées. La désignation du dé
partement
�c »5 r
partement ne seroit utile qu’autant qu’on recevroit un
acte pour un tiers étranger au département .dans lequel
il transige ou fait un te s ta m e n t, parce qu’il peut y .avoir
des formes ou des règles différentes de tester d’un dé
partement à l’autre : mais, dans ¡l’espèce, cette mention
n ’avoit aucun but; et, comme l’ont observé les premiers
juges, la désignation de la résidence á Brioude étoit sans
contredit suffisante. Les huissiers seuls saut astreints par
les lois à rappeler le numéro de leur patente : les no
taires auro'ent dû être dispensés d’en prendre ; et la
nouvelle loi qui organise Je notariat, les en dispense
expressément
L e témoin jMontbrizet d’A uvernat, en signant sim
plement siuvem aty ne i ’a iait que d*après l’usage cons
tant où il est de signer ainsi ; c’est .ainsi iqu’il a signé le
contrat de mariage de son frère; c’est ainsi qu'il a signétous les actes publics ou iprivés, depuis iqu’il a ^exercice
de ses droits ; et îles 'intimés rapportent un acte de no
toriété qui le constate,»etiqui apprend même qu’il n’est
pas connu ni ¡désigné sous d’autre nom.
O n a satisfait à tout ce qu’exige la loi qui veut qu’on
prenne le nom de sa famille, en rappelant dans les qua
lités 'des témoins le prénom »et 'le noni de la famille du
témoin d'Auvernat.
La parenté de ce témoin avec Robert Groze-Gizaguet,
époux de la petite-nièce délia testatrice, n’ast point une
incapacité:'Fur-gtile, des=testamens, chapitre III, section;
I I, nombre <10,' nous'donne^en/pvincipe jque les parons
collatéraux'peuvent être-témoins aux teslamens'de leurs
parens,*et qu'on'doit dirç la même>chose d(;s parens de
D
�( 2 6 )
l’héritier ; car le paragraphe X , aux instituts, de tcstam.
ordin. n’exclut du témoignage le père et les frères de l’hé
ritier, qu’autant qu’il est en la puissance de son père,
et que ses frères sont aussi en la puissance de leur père
commun; à plus forte raison le parent du parent de l’hé
ritière peut-il être témoin dans un testament.
L e cit. Dejax n’insiste pas fortement sur ces singuliers
moyens de nullité ; mais il se plaint de ce qu’en sup
posant ce testament valable, les premiers juges n’ont pas
compris dans la disposition de moitié toutes les dispo
sitions faites antérieurement à la loi du 17 nivôse. C’est
une erreur de sa part; et les premiers juges ont sage
ment restreint cette confusion aux dispositions faites de
puis la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
Point de doute d’abord pour les objets vendus, qui
sont hors de la succession du testateur; et il doit en être
de même pour les donations entre-vifs faites dans un
temps utile , parce qu’une donation a le même effet
qu’une vente ; elle dépouille le donateur, dès l’instant
même : les objets anciennement donnés ne peuvent faire
partie d’une succession ouverte sous l’empire des lois
nouvelles.
L e cit. Dejax a la prétention d’intéresser le public dans
la décision de cette cause. On ne voit pas trop comment
l’ordre public seroit troublé, parce que le cit. Dejax
n’auroit pas une portion égale dans la succession de sa
tante. Mais la société seroit bouleversée, si les 'conven
tions des hommes pouvoient être anéanties sous des
prétextes futiles; si des ventes ou des mutations qu’il im
porte de faciliter et d’assurer, pouvoient être annullées
�6r S
(2 7 )
par des chimères ou des allégations de fraude. Ce seroit
porter atteinte au droit de propriété, au droit le plus cher
à l’homme, de dispenser ses bienfaits, de récompenser le
mérite ou de protéger la foiblesse, si on s’écartoit jamais
du respect qu’on doit avoir pour les volontés du défunt.
L e code civil nous rappelle sagement à des idées plus
saines, à des principes plus sages, en rendant aux testa
mens toute leur ancienne faveur. Aujourd’hui nous pou
vons répéter cette maxime des Romains : Quidquid legass i t ita lex esto !
P A G E S ( de Riom ) anc. jurisc.
V A Z E I L L E , avoué,
Ç & ÏU ,U. &
J i
^
V
^
A*
n
‘------- ~ * '
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A RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — An 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Agnès. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès (de Riom)
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Dame Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal d'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, tant en son nom que comme tutrice de ses enfans tous intimés : Contre Julien Dejax, homme de loi, habitant de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au tribunal de cette même ville, le 6 messidor an 10.
Annotations manuscrites : « 8 prairial an 11, jugement du tribunal d'appel, déclare la vente du 24 vendémiaire an 5, nulle, en l'assimilant aux ventes à fond perdus, prohibés par l'article 26 de la loi du 17 nivôse an 2. recueil manuscrit, page 738. »
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1771-An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0932
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0716
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53093/BCU_Factums_G0932.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53092/BCU_Factums_G0931.pdf
07705c8bb6750aa819b06d59728dd19e
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Text
MÉMOIRE
P O U R
J u l ie n D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
C O N T R E
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son m a ri, juge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de B riou d e;
D A L B IN E , M a r i e D A L B I N E , fille majeure
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-G izaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit PlERRE D A L B IN E , et de ladite
D E J A X , son épouse ;
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans m ineurs, et dudit
Montbrizet-Gi zaguet ;
Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la l o i , pour éluder la
prohibition de la lo i, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lo is, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? T elle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�C2 )
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame D albine, tous l’effet d’un plan cons
tamment su iv i, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfuns; savoir, Ju lien , V ita lt
Antoine prem ier, Antoine second du n om , et A n n eM aric D ejax, première du nom.
Julien , V ita l, et Antoine prem ier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
A nne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
T a rtel; elle a survécu à son m ari, et vient elle-m êm e
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
Antoine D ejax, second du nom , s’est marié avec M arieThérèse Delchier.
D e ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
^
Julien D ejax, appelant;
Anne-Marie D ejax, seconde du nom , veuve Peyronnet ;
E t Agnès D e ja x , épouse du citoyen D albine, juge.
Celle-ci a e u , de son mariage avec ledit D albine, trois
enfans; A n n e -M a rie , qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et M arie Dalbine.,
Telle est la généalogie des parties.
�(3)
Anne-M arie D ejax, première du nom , veuve T artel,
n’avoit point eu d’cnfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien , V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom , l’avoient prédécédéc. Antoine, second du
nom , laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les hé
ritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’A ntoine, second du nom, il n’en
restoit que tro is, par le décès de Vital-François.
Anne - Marie Dejax , seconde du n o m , s’est mariée
en 1770 , avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
m ariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien D ejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de 'sa p a rt, même de ses f a i t s et pro
m esses, et entièrement aux risques, périls et fo rtu n e
du donataire.
Là s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
Il n’en a pas été de même pour la dame Dalbine.
Par son contrat de mariage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit -, elle lui a donné, en o u tre , une
somme de 2,000 f r . , payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
L e 19 novembre 1 7 7 8 , elle dispose en faveur de
A 2
�(
4
)
Anne-M arie D alb in e, sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. L a donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à. portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géra et administra à son gré -, elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
O n va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit.
Les actes vont se succéder.
i r novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
q u e , si les quittances en avoient été fournies par la dame
D a lb in e, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-m êm e, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vu e; de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novem bre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame D albine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée de
Yusage de la vue ; se réservant, est-il ajouté, la constituante, de toucher et recevoir elle-même les sommes qu i
seront payées par ses débiteurs, de manière que la darne
�ékf
(
5 )
D albine sera censée rî’avoir absolument rien reçu on
vertu des présentes j et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 ; la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixièm e,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
L e 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. L a donation fut évaluée à
une somme de 11,600 f r ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la m inute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
L e 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lu i aboient été. adjugées moyennant
�(
6
)
la somme de 2,950 J r . , mais auxquelles elle avait fa it
des réparations considérables, pour, par la dame JDalb in e, jo u ir d'¿celles dajis l’état où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,22 i f .
par elle déjà payée à la nation, et à la charge de payer à
la nation le restant de Vadjudication. L e contrat ne man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r . ,
qui de voit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220f r .
Ce 11’étoit point assez. 21 vendém aireancinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-M ontbrizet-G izaguet, mari d’AnneMarie Dalbino.
Par cet acte, il est dit que la dam eD ejax, veuve Tartet,
a fait vente à M ontbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-d evan t religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé par la nation; 30. de
tous les meubles, outils aratoires, et généralement de tous'
les meubles étant au pouvoir du m étayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître du
domaine de Vazeliettes , sous la réserve de Iusufruit
de tous les objets vendus. L a vente est faite moyennant la
somme de 25 ,000 francs , dont le con trat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et lus capitaux des remboursernens qui étoient
faits par les débiteurs.
�ÙJ.Y
(7)
6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la nièce, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c ’est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so m m es, tant en p rin cip a u x,
intérêts que f r a i s , ain si, e st-il ajouté , que le montant
du p rix de la vente de azehettes par elle consentie au
profit de défunt G iza g u et, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé ¿1 son gré, soit à payer partie de ses
dettes contractées, ou à Ventretien de sa maison ou
autrem ent, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insujfisans pour fo u r n ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
E nfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8 , par
lequ el, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame D albine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
»
Elle est décédée le 4 vendémiaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-diie, dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. E lle a
fait citer à ces fins le cit. D ejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
L e cit. D ejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
+»t)
�( 8 ) '
i g messidor de la même année, la dame Dalbine et son
m ari, les enfans D albine, c’est-à-dire, Marie D alb in e,
Pierre Dalbine et A n n e-M arie D alb in e, veuve M ontbrizet-Gizaguet;
Savoir : la dame Dalbine et son m ari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
'lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, P ie rre , et Anne-M arie D albine, veuve Gizagu e t, enfans dudit D albin e, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
E t encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germinal an 5, du domaine et métairie de Vazeliettes
et du P o u x, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été statué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�( 9 )
Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D e ja x , et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Vazeliettes et le P o u x , et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en Être délaissé à
la dame D albine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D e ja x , veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, x’evenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : D a n s la
m o i t i é your Îinstitution de la dame D a lb in e , sont com
prises toutes les facultés de disposer de la défunte,fa ite s
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2 ; en con
séquence la disposition du sixièm e, en fa v eu r des enfans
D a lb in e, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( 10 )
consentement les avons m is, sur ce c h e f , hors d'instance,
s a u f ii se pourvoir contre leur m ère, ainsi q u ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’ un m ois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du m obilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. L e jugement ordonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante de la succession de la défunte, et de rendre compte,
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belm ont, notaire.
Condamne le citoyen Dejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
L e citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes r
i° . L a donation faite, en faveur des enfans D albine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation, du 17 floréal an 2, à l’acqui
sition des deux maisons nationales ;
30. L a vente du 21 vendémiaii*c an 5 , consentie aij
citoyen Montbrizct-Gizaguet ;
�C ^ }
E t enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte de démontrer la négative.
D onation du 17 germinal an 2.
- Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d’état. Les enfans D albinel’ont reconnu eux-mêmes;
ils ont déclaré qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an -2, qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
O n a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine ; mais
on s’est abusé.
- L ’art. X V I p orte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l ’avenir à la faculté de
disposer, au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage des successions; savoir, du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux; et du d ixièm e,
-si l’on a des 'héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendre la lo i, que de penser
qu’elle a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu?après avoir défendu d’avantager directement les suctessibles, elle a permis de îles avantager indirectement.
Ce seroit prêter u n e ‘absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que le successible v it , ses en
fans ne sont point en ordre ide >succéder ; il leur fait
B a
�(12) t
obstacle. Mais il est-certain aussi, que le père et le fils
ne sont censés, en droit, faire qu’une seule et même per
sonne. P a te r et filius una eademque persona.
L a lo i, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. O r , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
renfermer un avantage indirect?
L a coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens parapliernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres et q u i le m ari puisse ou doiçe
succéder ; parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donner indirectement ce qu’on ne
peut directement.
E t, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit com mun, et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rappoi’ter à la succession ce qui avoit été donné au petitfils-, et, respectivement, le petit-fils ce qui avoit été donné
au père?
L a loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
aulorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite h retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixièm e, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�( i3 )
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
L ’article X X I porte que si le donataire ou héritier
institué est en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
E t l’article X X II porte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r , auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaii’e?
L ’article X X V I défend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif; et
il est ajouté, ou à ses descendans. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
Dira-t-on que la loi ayant pai*lé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant riz pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( 14 )
sion. Enfin, la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre scs puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 1 7 'nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’un des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition,
comme faite indirectement au profit de l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée n u lle , d’abord ren
première instance, au tribunal d’arrondissement'de cette
com mune, et ensuite sur l’appel'en ce tribunal.
Subrogation <du i j jîo r c a l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na
tionales, n’est évidemment qu’une donation déguisée sous
le nom de vente.
Ce^n’est pas sans doute jpar la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger'de la nature de l’acte., mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être'contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, 'et consacré par les lois.
Parmi les diilerens textes de lois, on'peut citer'la-loi
Sufpitius , au digeste, D e dohationibus inter virum et
ujcorem, et'la loi Nudâ>, au cod. <De mntrahenda emptione.
�¿i/
( i5 )
P a p ó n , sur la loi S ulp itius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à cliose que la loi ne perm et, l’on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et jugé
a qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’uñ de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner, fa it, par testament ou contrat entre-vifs,
« confession que l’autre lui a p rê té , ou employé à ses
« affaires, ou d é liv ré , ou remis en ses mains certaine
.« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
k fait tel p rê t, ou remis, employé, ou délivré la somme.
« L a simulation, dit le même auteur dans un autre
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat , chose dont
«x. néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap« parence pour le contrat passé entre les parties. U n
v homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r i x , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
«f si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera n u lle , comme le dit Ulpien. »
E t Papon cite ladite loi Nudâ.
« ’ Quoique les parties, dit R icard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 1 5 }
cc un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
ea provoquent la nullité.
A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer :Dans un acte
devant notaires il faut, d it-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
p u b lic, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport ;'i l’officier public.
E t de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, P lu s valcre quod agitur, quiim quod simulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’en
détermine pas toujours la nature; si, malgré la dénomina
tion
�6o ï
C 17 ) f
tion que les parties lui ont donnée, on peut l’arguer de
simulation et de fraud e, comment s’établit maintenant
cette simulation et cette fraude ?
Par les circonstances.
Fraus ex circonstantiis probari potest, dit Dumoulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F r a u s , dit énergiquement d’A rgentré, sur l’article
C C X G V I de la coutume de Bretagne , probatur conjectu ris antecedentibus , consequentibus et adjimctis.
F a lsissim u m , ajoute-t-il ,q u o d quidam putaverunt non
n isi instrumentis probari posse ’ fa c ta enim extrinsecùs
fra u d em potiüs probant, quia nemo tam supinus e s t ,
ut scT'ibi patiatur quœ fra u d u len terfa cit.
L a fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. D e là vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
. Citerons-nous encore Denizard. Les donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 1 7 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile : aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect; au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mêmes auteurs, les principales
cii’constances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La prem ière, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas persoîiasfacile prœsumitur.
C
�(
18)
■La seconde , la non-nécessité de ven d re, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
L a troisième, si les actes sont gém inés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
cei'titude.
En un m ot, comme dit d’A rg en tré , dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les cii'constances antécédentes et
subséquentes.
L a parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r i x , tout se rencontre ici. L e notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
nantes , on ajoute les circonstances cmtécédentes et subsé
quentes ; si l’on ju g e , pour rappeler les expressions de
d’A rgen tré, ex adjim ctù, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
L a dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et dè l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
pt interdit toutes donations, à charge de rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou à ses descen-
�( *9 )
dans; et de ce que cet article neparle que des ventes à fonds
perdu , la dame Dalbine et son mari n’ont pas manqué
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire, autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la m axim e, Inclusio unius est exclusio alterius.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55 e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’annulle pas ; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55 e. question :
« À ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion , et
« sans aucun des vices q u i pourroient amiullcr le
« contrat. »
Fixons-nous,sur,ces dernières expressions.
O n voit qu’on n’a pas même osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes sim u
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. L e doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
.des ventes faites de bonne f o i, et non en fraude ; des
•ventes sincères, et non des ventes simulées. O n voit
m êm e, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
a Sur la cinquante-cinquième question, ÎJue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
C 2
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commer
ce ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion , ni
« défaut de payement. »
Q u’induire de là ? L a question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
a un héritier présom ptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom ,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée?
Cette question est sans doute bien différente.
,
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeliettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de a 5 ,ooo francs,
numéraire m étallique, laquelle som m e, e s t- il dit, la
vendercsse reconnoît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 2Ô,ooo francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? E t si cette somme avoit été
payée com ptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves
tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son arm oire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
Memqfcirconslances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix ; point d’attestation de
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
M ais, de plus, réserve de la part delà venderesse de l’usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, trèsordinaire'au contraii’e dans les donations; réserve qui
seule s u f f i r o i t pour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l ’article X X V I de la loi du 17 nivôse. .
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds p erd u , pi’ohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement des
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame D albine, du domaine de Fontanes, domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-M arie D alb in e,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2 , procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
L a loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? E lle inter
pose ses enfans.
D onation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�alors disponible, envers les non successibles, c’est-à-dire,
du sixième.
L a quotité disponible, o u , pour mieux d ire, qu’elle
croyoit disponible , étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveu gle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été p ayée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seraient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendémiaire an 5 .
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame D albine ait fo u r n i quittance au x
débiteurs, c'est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes som m es, tant en p rincipaux, in
térêts que fr a is .
E t il est ajouté, ainsi que le montant du p rix de la
vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x .
Pourquoi cette dernière mention ? Q u’étoit-il besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la ven te? N ’étoit-ce pas elle-m êm e
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�C 23 )
Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre com ptable, des sommes par elle reçues et quit
tancées; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’a ch è v e-t-il pas de décéler
la fraude ?
.. Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa m aison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa v ie , même du
domaine vendu; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
E n fin , testament du 9 messidor an 8 , qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
. O n a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
L a l o i , a-t-on d it , ne défend que les ventes à fonds
perdu, faites à des successibles. O r, i c i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu; e t, d’un autre c ô té , n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger à la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa,
succession.
L a donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme ? Ne profite-t-elle pas aux enfans communs ? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner1ù la femme et aux enfans ? L a
�(H )
loi ne défen d-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement, et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la cii'constance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au m ari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
A utre jugement du tribunal d’appel séant à R ouen ,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
V oici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« D eux questions ont été posées :
«
«
«
«
te
te
te
« La première consistoit à savoir quelles sont les conditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
fait par un père, à l’un de scs enfans ou de ses gendres.
« L a seconde avoit pour objet de reconnoitre si L e inonnier, acquéreur, avoit rempli les conditions nécessaires pour la validité de son acquisition.
« L e tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la prê
mière de ces questions , que les principes et la juris
prudence, fondés sur l’art. C C C G X X X IV de la coû
tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( 25 3
r ticle IX de la loi du 17 nivôse an 2, se réunissent pour
« établix* qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
« père à l’un de ses 'enfans, n’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le juste prix de
« la chose acquise, et qu’il justiiioit de l’emploi des dea niers de la vente, au profit du vendeur.
« E t sur la seconde question, il lui a paru que L e « monnier n’avoit point rempli les conditions requises
c< pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
« sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point une preuve
« de l’emploi des deniers, en faveur du ven d eu r, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par D um oulin , en ces tex-mes :
ce Conclusum quod in venditionefactâ filio velgenero,
« conjessio patris non valet de recepto , etiam si nota« rius dicat pretium receptum coram se*
cc D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’E u re, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réformé ; et le contrat de v en te , passé par le défunt
« Hermier à Lem onnier, son gendx’e , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testam ent du 9 messidor an 8.
U n premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour que^ département il étoit
établi! Titre I er. sect. I I , art. X II de la loi de 1771.
U,ne seconde nullité, de,ce qu’il n’a pas désigné le ü °.
dç la patente. L o i sur les patentes.
D
�(26)
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse , c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surn om , et non par son vrai nom.
“ L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r ,
celui qui ne signe pas son vi’ai nom ne signe véritable
ment pas!
j
L e nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement A uvernat ■il
devoit signer Croze.
^ Un décret de l’assômblée constituante, du 19 juin 1790,
art. I l , porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille,
t A utre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X V I I I ,
p o rte , qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera quedeur nom patronimique, c’està-d ire, ' de baptêm e, et celui de la fam ille, et leui's fonc
tions ou professions.
-* 6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter dç nom ni de prénom , que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécu tif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�C 27 )
'
On citera l’ordonnancé de Henri I I , de 1 5 5 5 , q u i a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à -peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citei’a l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article C G X I, qui porte les mêmes dispositions.
E t, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
m êm e, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de fam ille, après avoir déclaré son prénom '.Ego
J o a n n es.................... testamentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. S in gulos testes, dit cette lo i, q u i testarnento adhibenturproprio chirographo annotare con çen it, quis, et cujus testamentum signaçerit. Il faut que, par Vacte m êm e, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le tém oin, quel
est ce témoin. U n surnom peut être commun h plusieurs.
L e nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne. signe pas par son n o m , est comme s’il ne
signoit pas.
L e testament est donc nul; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
Dans tous les cas, le testament ne. pourroit ' avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( 2 8 ) .................................
seulement qu’elle n’en auroit pas "disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D a n s la m oitié, est-il d it,
pour Vinstitution de la dame D a lb in e , sont comprises
toutes les fa cu ltés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ite s depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. O n ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2 ,
ou, pour mieux dire, à celle dü 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible; et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi ilfau d roit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible , et la donation du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à Anne-M arie Dalbine; en tant du moins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyronnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
L e jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
O n voit combien cette cause est importante. Elle n ’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt Îe
succès qu’elle attend ,'il n’y aüroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. Les fraudes, déjà trop
communes, se multi£lieroient; la loi seroit sans objet; la
�. ( 29 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a -t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreraient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G È S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L A N D R I O T , seul imprimeur du
T ribun al d’appel. — A n 11.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; Contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; Et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1770-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0931
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0716
BCU_Factums_G0932
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53092/BCU_Factums_G0931.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes