1
100
10
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53531/BCU_Factums_G2616.pdf
220a1061d356e9b8159648977a06b17c
PDF Text
Text
RÉPONSE.
�RÉPONSE
PO U R
Jeanne
AUBIGNAT,VeVILLEVAUD, Appelante;
CONTRE
Le Sr CHAMBAUD, Adjudant Com m andant,
Officier de la Legion-d’Honneur, ci-devant
Maire de Chamalières et Royat, Intimé.
L e sieur Chambaud termine son Mémoire par d ire, pag. 8 3 ,
q u 'il doit être assez, généreux pour oublier et pardonner.
II est facile de pardonner aux autres le mal qu’on le u r a fait.
Il n’est pas toujours aussi facile d e
pardonner à soi-même,
si l’on descend dans son cœur et qu’on interroge sa conscience,
surtout quand on jette un coup-d'œil sur sa poitrine, pag. 8.
L e sieur Chambaud ne veut pas seulement être généreux envers
la veuve V illevaud, il veut encore l’être envers son défenseur,
en prenant la peine d’excuser son zèle, qu’il attribue à la bonté
et à la simplicité de son cœur, qu’il veut bien qualifier d ’honorables.
Sans chercher à analiser le sens de ces expressions, on se con
tentera de répondre qu’il ne suffisait pas de la bonté et de la
simpliste du cœur pour entreprendre une tache aussi pénible ,
que la defense de la veuve V illevaud, lorsqu’il s’agissait de lutter
avec tant de désavantage pour le faible contre le fort;
Pour l’opprimé contre l’oppresseur;
Pour une malheureuse paysanne, pauv r e , ru in ée, délaissée
�O )
par la nature entière; contre l’homme puissant, entoure de*
prestiges, des cordons, des grades et de la fortune.
Il fallait être animé d’un sentiment plus honorable; de l’atta
chement à ses devoirs, qui ne permet pas à l’homine public de
refuser son appui au malheur, et de capituler avec les considé
rations.
L e fait avéré dans la cause, est que la veuve Villevaud a été
'dépouillée d’une somme de 10,862 fr. 5o c . , qui formait à peu
près toute sa fortune.
On dit que ce fait est acéré : le sieur Cliambaud s’en explique1
ainsi dans son premier M ém oire, pag. 2 :
« Que la veuve Villevaud ait été victime de la fraude de deux
» ci-dêvant notaires, dont l’opinion publique a fait justice; c ’est,
» ce qui est malheureusement trop vrai pour elle : mais prétendre
» que le sieur Cliambaud a p u y contribuer dune manière quel» conque, c’est ce qui n’est ni vrai ni vraisemblable.»
O r, ce fait que le sieur Cliambaud dit n’être ni vrai ni vrai
semblable, qu’il ait contribué d'une manière quelconque dans l’acte
frauduleux dont la veuve Villevaud a été victim e, et qui a opéré
ga ruine, elle demande a éiii. orlmisc à en faire la preuve tant
par titres que par témoins.
E lle va bien plus loin : elle demande à faire la preuve que
c’est le sieur Cliambaud qui a m édité, préparé, dirigé et con
s o m m é cet acte frauduleux, de concert avec les deux ci-devant
notaires dont l opinion jniblique et J'ait justice•
C ’est en vaïn que le sieur Cliambaud a recours à de misérables
s ub t erf uges et à de vaincs subtilités de chicane pour échapper
5 la vérité qui le p resse, et qu’il qualifia les faits qu’on lui
oppose d’invraisemblables et d’insuüisan: pour établir sa culC ’cst encore vainement qu’il invoque avec jactance le jugement
du tribunal de première instance qui les a déclaré tels,
L ’alfaire alors 11’élait pas instruite;
^• f
Les faits n’claicnl ni suflisanuucnt développés, ni précises ;
�?3 )
Ceux même qui étaient connus ne l’ctaient qu’imparfaitement ;
E t beaucoup d’autres, d’une importance m ajeure, ne sont
parvenus qu’après le jugement à la connaissance de la veuve
Yillevaud.
Au surplus, le sieur Chambaud a - t - i l bien réfléchi sur les
conséquences de ce genre de défenses , et des efforts inouis
qu’il fait pour repousser, comme inadmissibles ou comme insuf
fisantes, toutes les preuves q u ’offre contre lui la veuve Yillevaud?
S’il est vrai que le sieur Chambaud n’ait pas contribué, d'une
manière quelconque, à l’acte frauduleux dont elle a été victime;
S’il est vrai, comme il le répète à toutes les pages de son second
M ém oire, qu’il ait absolument été étranger à cet acte; qu’il ait
été fait sans son concours, à son insçu et hors sa présence ,
pourquoi fuit-il, avec tant d’opiniâtreté, la lum ière, et s’opposet-il, avec tant d’efforts, à laisser sortir la lampe de dessous le
boisseau ?
'> P°g. 2.
Un homme comme le sieur Chambaud, officier supérieur}
montrant sur sa poitrine la glorieuse distinction, récompense de
ses services....; entouré de l'estime de ses camarades, de la confiance
et de lamitié de tous ceux qui le connaissent, doit ¿ lie comme
la femme de César, il ne doif pao £uc auupçonné.
On ne peut discuter cette affaire , et se faire entendre, sans
rappeler les faits qui l’ont fait naître.
Il ne faut pas les chercher dans les 83 pages du dernier
Mémoire du sieur Chambaud , ils se perdent dans la discussion,
et on ne peut suivre sa marche sans courir le risque de s’égarer
et d’égarer la justice.
Nous prendrons ces faits dans son premier M émoire, imprimé
et signifié le y août 1820, où il s’exprime en ces termes :
« Le sieur Girard , ancien notaire à Chamalières, avait acquis
» du sieur Dalbiat le pré du lïreüil , dépendances de Royat j
» le prix avait été stipulé payable dans 12 ans.
» Par acte du 21 juin 1808, passé devant C h evalier, notaire,4
» le sieur G irard vendit à Jeanne A u b ign at, veuve Y ille v a u d ,
�( 4 }
» et à Léger Bourgougnon, son gen dre, une partie considérable!
» du pré du Breiiil.
» La veuve Villevaud entrait pour neuf dixièmes dans l ’ac» quisition , et son gendre pour un dixième.
» Cette vente fut faite moyennant le prix de n , 3 i() livres
» tournois, dont 7,81g livres payées comptant, et les 3,75o livres
» restant, payables au i 5 novembre suivant.
» Il fut stipulé que le vendeur ne pourrait exiger le rem» boursement de cette somme qu’en fournissant une hypothèque
» pour la sûreté totale de la v e n te, ou en en donnant caution.
» Cette clause était importante pour la veuve Villevaud, puis
ai qu’elle avait à redouter deux actions hypothécaires ; d’une
» p a r t, Girard n’avait pas payé le prix de son acquisition au
» sieur D albiat, premier vendeur, qui dès lors avait un privilège
» sur l’objet vendu; de l’autre, le pré du Breiiil était grevé
» de l’hypothèque légale de la dame Dalbiat : nous allons voir
» coinmetit le sieur G irard , de concert avec le sieur Chevalier,
» a effectué l’emploi promis à la veuve Villevaud ».
C ’est toujours le sieur Chambaud qui rend compte des faits.
« Lie i 3 mai iRoq, le sieur Fonghasse, tant en son nom qu’en
» qualité de procureur fondé de la darne Fonghasse , sa mere ,
» souscrivit au sieur Girard , dcv«iiii ciic-miior 7 notaire, une
» obligation de 10,862 fr. 5o c., payable dans cinq ans, l’intérêt
» à cinq pour cent, avec l'affectation spéciale d’une maison sise
» rue de la Treille. Cet acte porte en outre la stipulation
y> suivante :
» Ledit sieur Girard déclare que ladite somme principale
» provient des deniers de Jeanne Aubignat, neuve J'illevaud, et
y, de Légeï Bourgougnon, son gendre, et fa it partie du prix de la
» vente que ledit Girard leur a consentie d'un pré situe à lloyaf,
» suivant l'acte passé devant nous Chevalier, notaire, le 21 ju in 1808,
» au moyen de. lafjuelle déclaration ledit sieur Fonghasse sera
« tenu, comme il’s'y oblige, de ne faire le remboursement de ladite
y> soiiiritc i]tien présente desdits Alibignat cl Bourgougnon, pour
v veiller ¿1 l'emploi'(Tiêelle, conformément audit contrut de vente.»
�fAi «4 .
( 5 )
» En vertu (le celte obligation, le sieur Girard prit une ins» criplion sur le sieur Fonghasse le 16 juin suivant.
» Au m oyen, continue le sieur Cliambaud, de cet emploi
» illusoire, la veuve Villevaud se libéra de la somme d e 3 ,5oo fr.
» qu’elle restait devoir à G irard , et celui-ci lui donna quittance
» finale le 12 mars 1812. Cet acte, passé comme les autres devant
» Chevalier, est pur et sim ple, et ne contient point, de la part
» de la veuve V illevaud, acceptation de la charge de remploi ;
» on y trouve seulement par simple énonciation ,
. .
» Que ladite somme présentement (juit/ance'e, ainsi que cçlle
» formant le surplus du prix de ladite vente, ont ¿te employées par
» Girard au désir du même acte de vente, par hypothèque spéciale,
» suivant obligation reçue par le même notaire le i 3 mai 1809,
» consentie au sieur Fonghasse. »
On a vu plus haut que le sieur Cliambaud. qualifie dillussoire
l’engagement contracté par le sieur Fonghasse, dans son obligation
du i3 mai 1809, de n’en faire le remboursement qu’en présence
de la veuve Villevaud et de son gendre, pour veiller à l’emploi
d’icelle, parce que cet engagement n’avait pas été accepté par la
veuve Villevaud.
M ais, outre que le sieur Fonghasse et sa mère ayant promis
de ne pas faire le remboursement des 10,862 fr. 5o c . , au sieur
Girard, qu’en présence et du consentement de la veuve Villevaud,
leur engagement était sacré; le sieur Cliambaud sait mieux que
personne quelle en était la valeur, lui qui a louché les 10,862 fr.
5o c. à la place cl au préjudice de la veuve Villevaud.
Voilà le moment critique de l ’affaire; et quoiqu’on ne puisse
plus suivre mot à mot la narration du sieur Cliambaud, comme
011 l’a fait jusqu’ici, on y trouve encore, au milieu d e ’l'obscurité
dont il cherche à s’environner, des sillons de lumière suifisans
pour nous diriger et nous conduire .nu bul.
11 nous dit qu’il élail créancier de la veuve V illevau d , d ’une
obligation de 6,000 fr;
Qu’après plusieurs avertissemens formels , mais infructueux,
une sommation lut faite au mois de décembre i8 i3 , c’cst-à-dirc,
�I* . :
'
( 6 )
environ un mois avant le fameux acte du 27 janvier 1814, que
le sieur Chambaud reconnaît lui-méme avoir clé l’ouvrage du
dol et de la fraude.
« A cette époque , dit-il, le mauvais état des affaires de Girard
» et de Chevalier était à son comble. »
Ce passage est précieux ; il prouve que le sieur Cliambaud
connaissait alors parfaitement le mauvais état des affaires de
Girard: et comment l’aurait-il ignoré? ils étaient amis insépa
rables ; il passait sa vie dans la maison Girard ; il était en tout
son conseil et son guide.
On lit a la suite de ce passage que « G irard, qui crut voir
» l’occasion de toucher de l’argent, chercha à appiloycr le sieur
» Cliambaud, par l'entremise de la veuve Villevaud, et fit un
» demi-aveu sur sa position de fortune. »
Ainsi, Girard se sert d’une personne interposée pour appitoyer
le sieur Chambaud sur son so rt, lui qui avait à sa disposition
tant d’autres moyens plus efficaces.
E t de qui se sert-il pour cela ? D ’une paysanne qui ne sait ni
lire ni écrire, et qui est, sans contredit, la femme la plus bornée
de sa commune.
Quoi qu’il en soit, lo sieur Girard fait au sieur Chambaud un
demi-aveu de la position de s<i fortune.
Il ajoutait qu’il « n’avait qu’un moyen de se tirer «l’embarras,
» c’était que le sieur Chambaud consentît à accorder le délai
» d’un an à la veuve V illevaud, pour le payement de ce qu’elle
» lui devait, et que celle-ci consentit de son côté à transférer sur
» le domaine de la Garandie, appartenant à lui Girard, l ’hypothèijite quelle avait sur la maison Fonghasse, pour une somme
y> d'environ 11,000 fr .»
Ici l’intrigue commence à se dérouler.
Le mauvais état des affaires de Girard et de Chevalier était à
son comble.
G irard n’avait qu’un m oyen de faire de l ’argent, et de se tirer
de l'em barras où il se trouyait ; il eu fait confidence au sieur
Chambaud.
�( 7 }
Ce m oyen, celait que la veuve T^dlevaud consentît de son côté
à transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant à lui
Girard, l'hypothèque quelle avait sur la maison Fongha sse, pour
une somme d ’envirop 1 1,000 fr .
« Alors, disait Ærirard, (on copie toujours le premier Mémoire
» du sieur Chambaud,), la somme que j e toucherai sur la maison
y> Fonghasse, et environ 7,000 lr. que je puis mettre en recou» vrement dans mon étu d e, me mettront à même de faire face
» à toutes mes affaires. »
Voilà donc le projet form é, et d’après le sieur Chambaud luimême , c’est lui qui en est le confident.
Déjà on peut s’apercevoir, s’il est vrai comme il le dit dans
son M ém oire, qu'il n ’a pu y coopérer d'une manière quelconque,
Mais allons plus loin. Que dira le sieur Chambaud, s’il est
prouvé que c’est lui qui s’est chargé de 1 exécution de ce projet,
et qui en a conduit le fil jusqu’au dénouement?
D ’abord il sollicite, avec les plus vives instances, la veuve
.Yillevaud, comme il en est convenu avec G irard, de donner
main-levée de son hypothèque sur la maison Fonghasse, et de
la transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant à Girard;
et il lui prom et, si elle veut s'y prêter, la plus grande indul
gence pour le payement de son obligation de 6,000 fr.
Pour lui inspirer plus de confiance, il lui remet un écrit de
sa inain, produit au procès et conçu en ces termes :
« Il existe une hypothèque de 11,000 fr. que la veuve Yillevaud
» a placé sur une maison de Clermont»
» On demande qu’elle en donne main-levée, pour la transférer
» sur un domaine de montagne, de la valeur de 3o,ooo fr. qui
» n’est grevé d’aucune hypothèque. »
Et le sieur Clmmbaud atteste à la justice, avec un front d ’ai
rain , (/it il n ’a pu coopérer, en manière quelconque, à ce transfert
frauduleux dont lu veuve. P^illevaud a été victime; que tout ce qui
s'est passé à cet égard a été fa it sans son concours, à son insçu
et hors sa présence, et lui est absolument étranger.
�( 8 )
Cependant on a vu que c’est lui qui a etc le premier confident
du projet ;
Que lorsqu’on lui en a fait la confidence, le marnais état de$
affaires de Girard était à son comble.
II d it , dans cet endroit de son ancien M ém oire, qu'il lui fit un
demi-aveu de sa position.
(
E t on voit dans la page 9 de ce premier M ém oire, qu’il en
était si parfaitement instruit, qu’il en fit part à son ami Bouchet*
qui était dans une trompeuse sécurité, et qu’il s’écrie : « Où
>1 n aurait-elle pas conduit le malheureux Bouchcl, si un ami
y> plus sincère n ’avait pas veillé sur lu i? »
^
Ainsi, c’était dans la pleine connaissance que le mauvais état
des affaires de Girard était à son comble, qu’il approuve son
projet de déterminer la veuve Villevaud à transférer, sur le do
maine de la Garandie, l’obligation de 11,000 fr. qu’elle avait sur
la maison Fonghasse, et qu’il dresse scs batteries pour emporter,
la place.
L e prem ier moyen qu’emploie le sieur Cham baud, est la per
suasion ; et pour mieux circonvenir la veuve V illevaud, il ne
craini pas d’assurer par son écrit qu’elle ne court aucun risque
a faire ce qu’on lui propose.
L e sieur Chambaud nous dit que l’écrit qu’il a donné à la
veuve Villevaud était une note à consulter.
Quoique cette qualification soit fort étrange dans la bouche
d’un colonel ou d’un adjudant-général, peu importe de quelle
manière cet écrit soit qualifié, il n’en prouve pas m oins,
Premièrement, que le sieur Chambaud était parfaitement au
courant du projet de faire transférer l’obligation de 1 1,000 fr.
qu’avait la veuve'Villevaud sur la maison Fonghasse, sur le
domaine de la Garandie, appartenant à G irard;
<
Secondement, qu’il était l’agent de Girard pour mener à fin
cette intrigue;
E t cela, malgré la pleine connaissance qu’il avait que le mauvais
état (1rs affaires de Girard était à son comble.
Quoi qu’il en soit, ni cet écrit, ni les sollicitations j o u r n a l i è r e s
�( 9 >
du sieur Chambaud, ne purent déterminer la veuve Villevaud à
se prêter à ce que lui et Girard exigeaient d’elle.
Le s i e u r Chambaud eut alors , recours à d’autres moyens.
On a vu qu’il était créancier de la veuve Villevaud d’une obli
gation de 6,000 f r ., qui était échue depuis long-temps ;
Qu’il était d’autant plus pressé de toucher le remboursement
de scs fonds, q u e , « dans la situation critique où étaient alors
» les affaires publiques, tout capitaliste , et particulièrement tout
» capitaliste militaire, sentait la nécessité de faire rentrer son
» argent ( premier M ém oire, pag. 4- ) » ;
Q u’il était convenu avec son ami Girard, qu’il « consentirait à
» accorder le délai d’un an a la veuve Villevaud, pour le payement
►
> de ce qu’elle lui devait, pourvu que celle-ci consentît de son
» côté à transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant
» à lui Girard, l’hypothèque qu’elle avait sur la maison Fonghasse,
» pour une somme d’environ n ,o o o fr. »
Il prit donc le parti de changer de ton avec la veuve Villevaud;
il la menaça des poursuites les plus rigoureuses, et joignant le
fait aux menaces , il lui envoie des huissiers le 22 janvier 1814,
cinq jours avant l’acte du 27 janvier, pour la contraindre au
payement de son obligation: ce commandement est joint aux
pièces.
Mais ce genre de menaces îiyant encore été insuffisant pour
déterminer la veuve Villevaud au sacrifice qu’il exigeait d’e lle ,
il eut recours à un autre moyen qui lui parut devoir être plus
efficace : il la menaça et la fit menacer de faire partir son fils
pour les armées dans les 24 heures.
La veuve Villevaud offre la preuve de ce fait, et elle produira,
pour l’attester, des témoins rccommandables.
Elle pourrait d’ailleurs invoquer sur ce fait, comme sur les
précédens, la notoriété des communes de Royat et de Chamalières.
Tous les habitans de ces communes ont été instruits, dans le
teins, de scs malheurs, des moyens employés pour obtenir d’elle
�C 10 )
les sacrifices qui ont opéré sa ruine, et ils en conservent encore
de profonds souvenirs.
C ’est en vain que le sieur Cliambaud, pour éluder la preuve
de ce fait relatif à la conscription, nous dit que le fils de la
;veuve Villevaud en était exempt comme fils de veuve ;
Q u’il était d’ailleurs peu propre au service militaire.
Comme si de pareils moyens suffisaient pour bannir la terreur
du cœur d’une mère qui aurait sacrifié toute sa fortune pour
empêcher le départ de son fils.
Q u’on se rappelle , comme le dit le sieur Cliambaud dans
son prem ier Mémoire , la situation critique où étaient alors les
affaires publiques.
Qu’on se rappelle toute la France orientale couverte des ar
mées de l’Europe coalisée.
Q u’on se rappelle la levée des gardes-d’honneur composée de
tous les jeunes gens des familles aisées dont un grand nombre
étaient fils, et même fils uniques de veuves, et qui tous avaient
payé leur tribut à la conscription, ou avaient des remplaçans
aux armées.
Alors le besoin était tel que tout conscrit était soldat, et que
celui qui nTétait pas bon pour être encadré dans la lign e, était
utilement employé dans les charrois.
Le sieur Chambaud invoque encore, sur ce fait, son défaut
d’influence dans la conscription militaire.
I c i , la veuve Villevauil est obligé de s’arrêter.
On a dit quelque part : Malheur à celui tpii soulèverait le voile
de la société: on peut dire avec bien plus de vérité !-Malheur à
celui qui soulèverait le voila de la conscription !
La veuve Villevaud croit être forcée de se restreindre à ce
qui lui est personnel; peulrctre lui ierait-on un reproche d’aller
- plus loin: c’est aux témoins qui ont plus de latitude, si la C our
daigne les interroger et les entendre, à nous apprendre si le
sieur Cham baud, officier supérieur et maire des c o m m u n e s de
Chamalières et R oyat, était sans influence, et quelle ¿tait sa
manière d’en user dans ces matières.
�'( II )’
Quoi qu’il en so it, la veuve Villevaud fut tellement effrayée
'de cette dernière m enace, qu elle n hésita plus a faire le sacrifice
q u ’on exigeait d’elle.
Elle était déjà décidée à se prêter à t o u t , lorsqu’il lui
p a r v in t un écrit qu’on lui dit être signé du sieur Chambaud ,
qui contenait la garantie du transfert de son hypothèque sur le
domaine de la Garandie.
Elle a appris depuis que ce dernier écrit était faux ; elle ne
se rappelle pas s’il lui a été remis directement par le sieur
Chambaud ou par un tiers; mais ne sachant ni lire ni écrire, elle
jnc pouvait avoir aucun doute sur sa sincérité.
Le rendez-vous fut donné chez Chevalier, notaire, dans la
matinée du 27 janvier.
La veuve Villevaud cro ît, sans toutefois en avoir la certitude,
qu’elle y fut conduite par le sieur Chambaud lui-meme.
Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elle s’y trouva avec les sieurs
Chambaud et Girard, et que là fut rédigé, en présence du sieur
Chambaud, l’acte tant sollicité et tant désiré par l’un et par l’autre.
On y expose que, par acte du 27 janvier 1808, le sieur Girard
vend it à la veuve Villevaud, et à Léger Bourgougnon, son gendre,ce dernier pour un dixième seulem ent, un pré situé dans les
«lependances de R o yat, moyennant 11,177 ^r>
c- > avec con
vention que le sieur Girard serait obligé de fournir une hypo-fhèque spéciale pour sûreté de ladite vente;
Que pour se conformer à cette clause, en présence et du
consentement de ladite Aubignat et dudit Bourgougnon, le sieur
Girard avait prêté au sieur Fonghasse, et à la dame D ésoches,
sa mère, la somme de 10,862 fr. So c., suivant obligation reçue par
ledit Chevalier, notaire, le i 3 mai 1809, avec déclaration, dans
ladite obligation, que les fonds prêtés provenaient du prix de
ladite vente, et que le remboursement ne pourrait en être
effectué qu’en présence desdils Aubignat et Bourgougnon, pour,
veiller à l'emploi de cette somme;
Q u ’aujourd’h u i, ladite Aubignat étant seule intéressée dans
cette affaire, « e t ne voulant aucunem ent gêner la libération
�'( 12 )
» dudif sieur Fonghasse, attendu que ledit sieur Girard offrait
» une garantie suffisante pour le prix de la vente ci-dessus
i» datée,, par hypothèque dont il sera ci-après parlé..
» Elle consentait, comme elle consent par ces présentes, que
» le sieur Fonghasse se libère, hors sa présence, de ladite somme
» de 10,862 fr. 5o c. envers ledit. Girard , ainsi qu’il avisera,
» et sans qu’il soit besoin de veiller à l’emploi d’icelle.»
E n conséquence, est-il ajouté, du consentement présentement
donné par ladite Aubignat , et pour lui donner une garantie pluj*
que suffisante du prix de la vente dudit jour 21 juin , le sieur
Girard a spécialement affecté et hypothèque un corps de domaine,,
situé au lieu de la Garandic, commune de Saint-Barthclemid’A ydat, consistant en bâtim ens, prés , terres et pacages , sur
lequel ladite Aubignat pourra prendre de suite inscription
conformément audit acte de vente précité.
- L e sacrifice consom m é, la veuve Viilevaud se relire.
Mais il n’en est pas de même des sieurs Girard et Cbambaud~>
• Us entrent, avec Chevalier dans une chambre qui était a côté
de son étude; e t, après une conférence secrète, Chevalier sort
et dit à son maître clerc : V ous ne ferez l'inscription de la veuve
.Vdlevaud que lors ijn on vous l onlom 1eru,
• E t en effet, cette inscription n’a clé faite par chevalier q u e
plus de trois mois après l’acte du 27 janvier.
' -Ce fait était accablant pour le sieur Chambaud, lui qui n’avaii
cessé de dire, d’écrire et d’imprimer, qu'il n'avait coopéré d'aucune
manière à tout ce qui s'était passé entre Gnard et la veuve T' dlevaud;
'!que tout s’était fa it à son insçu, sans son concours et hars sa
'présence.
Il a cherché quels pouvaient être les témoins qui s’élaieni
'trouvés chez Chevalier, notaire, le 27 janvier i 8 i 4 ; il a jeté les^
'ycux'sur M. Pineau, son maître clerc, et actuellement notaire,,
et il lui a fait écrire pour savoir s’il avait connaissance de ce
'qui s’était passé chez Chevalier, notaire, lors de la rédaction de
l*acte du 27 janvier 1814>-
�M. Pineau a répondu qu’il ne se rappelait pas les faits sur
■lesquels on lui demandait des eclaiicissemens.
Celle lettre est transcrite dans le Mémoire du sieur Chambaud,
pag. 78, et il croit pouvoir en conclure que ces faits sont faux
el controuvés.
M. Pineau a agi en homme sage, qui ne devait pas s’expliquer
s u r des faits aussi graves, sans nécessité; on doit louer sa prudence
et sa discrétion, mais il n’en faut pas conclure qu’il aura aussi
peu de mémoire s’il est interroge par la justice el sur la foi du
serinent.
Au surplus, qui a dit au sieur Chambaud qu’il ne peut pas y avoir
d’autres témoins de ces faits que M. Pineau, et qu’il ne peut
pas se trouver d’autres genres de preuves, tels que des aveux
des uns ou des autres des artisans de cette manœuvre?
Mais tout n’était pas fini par cet acte de transfert, si 1 obligation
Fonghasse restait dans les mains de Girard ; comme le mauvais
état de ses affaires était à son combla, elle devenait la proie de
ses créanciers ; et le sieur Chambaud n’avait pas entendu tra
vailler pour la masse, mais bien pour lu i, pour scs parens et
scs amis.
Il fallait donc promptement sortir des mains de Girard cette
obligation Fonghasse.
Le sieur Chambaud, parent de l’intim é, était créancier comme
lui de Girard; il fallait sauver sa créance, et le tirer de la faillite
ou de la déconfiture qui était parfaitement connue de l’intim é,
et qui à chaque instant pouvait devenir publique.
En conséquence, il se fait céder à lui et à son .parent Chambaud
l’obligation Fonghasse, débarrassée des entraves de la veuve
Villevaud. , ■
L ’acte de transfert était du 27 janvier i 8 i 4*
L ’acte de cession est daté du 5 février suivant.
Mais, quand on voit que ‘c’est un acte passé devant le même
Chevalier, notaire, si peu délicat dans scs fonctions, et qu’il
était de la plus grande urgence de transférer, dans le moment
même en mains tierces, cette obligation Fonghasse, pour éviter
�?
'p
( 14 )
que l’acte fait avec la veuve V illevaud, ne fût connu par les
autres créanciers G irard , et que cette obligation ne lut saisie
par eux, on peut dire, sans être taxé d’incrédulité, que ce second
acte fut fait le même jour et dans le même instant que celui fait
avec la veuve Villevaud, parce que le second acte était la con
séquence immédiate du premier, et qu’il n’était que le corrollaire et le complément de ^opération.
A u surplus, rien n’était plus facile que de faire faire celte
cession le même jour à lui et au sieur Chainbaud, son parent,
attendu que l’un et l’autre n’avaient rien à débourser pour celte
cession ; car on lit dans cet acte que « la présente cession e§t
» faite moyennant pareille somme de 10,862 fr. 5o c., que ledit
» sieur Girard déclare avoir ci-devant reçue desdits sieurs Chain» b au d , dont quittance. »
Comment Girard avait-il ci-devant reçu des sieurs Chambaud,
cessionnaires, les 10,862 fr. 5o cent., montant de l’obligation
Fonghasse, qu’il leur cède? ce ne peut-être que parce qu’ils
étaient l’un et l’autre ses créanciers de cette somme.
Ils faisaient, à la vérité, un acte prohibé par les lo is, ^en ce
que le sieur Chambaud sachant que le mauvais état des affaires
de Girard était, y, son co m b le , il ne lui était pas permis de se
payer ni de faire payer ses parens et ses amis an préjudice des
autres créanciers ; cc p’était qu’une peccadille aux yeux de l’in
térêt personnel.
Tandis que si l ’on veut expliquer autrement cette quittance,
si le sieur Chambaud veut prétendre, comme il n’a ccssé de le
dire dans ses M ém oires, qu’il ne lui était rien dû par Girard
avant cet acte de cession, il est impossible de concilier cette
assertion avec la quittance qui constate qu’il n’a pas donné une
obole à Girard pour le prix de cette cession, et qu’il en avait
payé le prix antérieurement.
O ï» convient que la mention de la quittance est sincère pour
le sieur Chambaud, cessionnaire de l’intimé : pourquoi cette
mention serait-elle fausse pour lui ?
�<
)
L e sieur Cliambaud fait sur cette cession une version , q u i,
prenant pour une vei î t e , ne fait qn ajouter a ses torts.
Si^on/cn croit, dès que Girard se vit débarrassé des entraves
que la veuve Villcvaud était en droit de mettre à la libération
du sieur Fonghasse, il colporta son obligation chez tous les
capitalistes de Clermont pour se faire des fonds, et il ne put y
réussir.
Le sieur Cliambaud voulut bien se prêter à en accepter la
cession, de concert avec le sieur Cliambaud, son parent, qui
ne l’est plus aujourd’hui qu’au huitième degré ( 2e M éin ., p. 24.)
Ce qu’il en fit, ce fut pour obliger son protégé Bouchct, dont
toute la fortune était compromise pour avoir cautionné Girard.
E t c’est à cette occasion qu’il s’écrie : « Trompeuse sécurité! où
» n'aurait-elle pas conduit le malheureux Bouchct, si un ami
» plus sincère n'avait pas veillé sur lui? »
Cet arni plus sincère, c’était le sieur Cliambaud, qui prétend
n’avoir agi dans tout cela que dans l’intérêt du sieur B ouchct,
dont il voulait éviter la ruine.
Adoptons cette version: le sieur Cliambaud en sera-t-il plus
innocent aux yeux de la loi et de l’équité?
É tait-il plus juste de sacrifier la veuve V illcvau d, et de lui
faire perdre 10,862 f. 5o c. qui lui étaient assurés sur la maison
Fonghasse, pour les faire gagner à son parent Cliambaud, et
à son protégé, son secretaire, Bouchct?
Son action serait bien moins odieuse et bien plus excusable, s’il
avouait franchement qu'il a fait tout cela pour lui-m êm e et
dans ses intérêts, parce que c’est un sentiment qui est dans
la nature, Proxirnus sum mihi.
Mais, abuser de la faiblesse et de l’ignorance d’une malheureuse
paysanne, sans défenses, pour la dépouiller de toute sa fortune,
saus autre intérêt que de la faire passer à des étrangers, c’est
aggraver ses torts, et rendre la fraude plus odieuse.
Au surplus, le sieur Chambaud n’a pas travaillé en vain en se
faisant céder par Girard l’obligation Fonghasse, débarrassée des
entraves de la veuve Yillevaud; il n’a pas perdu un moment pour
�( i6 )
en faire le recouvrement ; il a poursuivi le sieur Eonghasse à
toule outrance , il lui a refusé impitoyablement jusqu’au moindre
délai; il a de suite mis sa maison, rue de la Treille, îfen Expro
priation forcée; elle a été vendue: il en a poursuivi l ’ordre, il
a été .colloque en première ligne; les bordereaux ont été délivrés,'
et il a touché, ainsi que le sieur Chambaud, son parent et son
concessionnaire, le montant de l’obligation en principaux intérêts
et frais.
Tandis que la veuve Villevaud a été recherchée par madame
Dalbial pour son acquisition du pré du Jîrciiil, e t, elle a été
obligée de la payer une seconde lois.
E t qu’à l ’égard du transfert de son hypothèque sur le domaine
de la Garandie ; outre q u e , par une manœuvre crim inelle, son
inscription n ’a été formée au bureau des hypothèques que plus
de trois mois après l’acte du 27 janvier 1814; ce fameux do
maine que le siepr Chambaud assurait avec tant de confiance,
par son écrit rapporté au procès , valoir 3o,ooo fr.', et n'être
grevé d ’aucune hypothèque , n’a été vendu que g ,000 fr., et se
trouve grevé d’un grandnombrc d’hypothèques légales, judiciaires,
et conventionnelles.
C ’est dans cet état de choses que faiTairc 5C présente à la Cour.
La veuve Villevaud demande à faire preuve des faits qu’elle
a articulé tant par litres que par témoins.
Le sieur Chambaud dit n’avoir coopéré en manière quelconque
à*l’acte de transfert du 27 janvier 1814, qu’il prétend lui être
absolument étranger, et avoir été fait à son. in sçu , sans son con
cours et hors sa présence.
La veuve Villevaud rapporte un écrit du sieur Chambaud, qui
contient la preuve contraire.
E lle rapporte le premier Mémoire du sieur Chambaud, signifié
au mois d’août 1820, qui contient les aveux les plus précieux
sur toute sa conduite dans cette affaire, qui prouvent qu’il était
parfaitement instruit que le mauvais état des affaires de Girard
était il son comble , lorsqu’il lui a confié son projet de faire
�w*
*•
( 17 )
renoncer la veuve Villevaud à son hypothèque sur ]a maison
Fonghasse;
Qiii prouve que lui, sieur Cliambaud, premier confident de ce
projet, est devenu l’agent de toute cette intrigue, et que c’est
par son fait qu’ elle a été mise à fin, au préjudice de la veuve
.Villevaud dont elle a opéré la ruine.
Com m ent, dès lo rs , peut-on refuser à la veuve Villevaud la
preuve testimoniale qu’elle sollicite avec tant d’instances depuis
le commencement de cette contestation?
Si
on consulte le texte des lois, nous lisons dans l’art. i 348
du Code civil, que les règles, établies sur l’inadmissibilité de la
preuve testimoniale, reçoivent exception lorstjft’il s’agit d’olili-* '
gâtions qui haïssent Vie contrats, et* de*délits itt iptasi délits. ■ .
E f”dan$ Faïf. T S .^ -q u e ' Pj
^ ct'ptm m esl-adm isc lorsque.
l'acte ¿si attjfffué pouf- cMï£k d e'd o l'eï de'frandéï
O n retrouve les mêmciT’ prinerpes'•'datis-Hous J e s .auteurs
\^
ont traité ja.*nalieret ‘
/
v
JVlaÿs ne. s’agît-il que des’ faits Oitl;intrires,»éti-aftgers au dol et,à
la fraijde? Ù^sfifliV qù'xT existe des pr^uY.evécriteSjdc ces faits v
ÿu" Kesoiri*, pôhfrai-Cnt «opérer J3 .co ^ ic^ io ^ in iais qu’ôn ’ ,
V s
♦vpiii bieii ne* coniiaétCt^iCi qn U CiW} nie ^est com 1nci 1ce 111ens de *’ *'
__ v V .»y_*r '
__ r_*__
,iî____*i__ 1 __
1
7Îi*«4l.ai <,î*a
__ _ __ #
i^1
^
T------1- ' ---- L ’a^t“^ ^U-4Slrft ao.*le J ’ordonnançe^dc, 1 GG ^adin& w ln^cuve*
testimoniale dans lés cas ou elle est jffoTiibïTtr,* loislju d—
y
— r --- ,,
existe un commencement de preuve par
^
G’est donc uiu point de legislà\feîf*â t a b r i de to o te-céh traV £
diction*.* *
JJÎ
* 0 -w*»
x •*„«*
t.
' ' ’O n cr3i f dtîvbii* Faissoi» au* d4|jpjn5Cll?^Ç.U:t»ve,^Xc. -VillcYaucl-,
^
le soin de donner à l’audience tout le développement dont ces
principes sont susceptibles.
¿V
‘0
K‘ !’ A,,r •
V'*«.«0
• .A..
*<■*''i
A*
V il*
ÎWi»»/-.
.v
'•
...
lA . *
*v» Jt»'-. •"U .*
«.♦
«»v**» A
�( 18 )
La veuve Villevaud terminera sa discussion
qu’elle a faite en commençant.
Elle articule contre le sieur Chambaud des
de son intérêt que ces faits soient éclaircis:
rien à se reprocher, est fort de sa conscience
lumière.
par une réflexion
faits graves ; il est
l’homme qui n’a
et ne fuit pas la
Me BOIROT, ancien Jurisconsulte.
Me VEYSSET, Avoué
/*> x Cutt~. Ovxa. Cl*, j CvJk
/^ (£ /cv
*-
%
4 * c>yut4 a iovUr- LUAJAfML*
,Æ d L
¿ ¡Jtilifïilw ,
ÎA-.
/ v jii u ü a it - a A i t K » - A * * *
/ iu w /“ “ ■
^r:pS.Â
AVtoiir^v*vO^ (*y/pijfhy** y
fjjk . ù f Z /c*U~~a~ / '
I L
4 fe S k X
, u
• y * « ./. u * ^ t t w
oïd w - A O u * ’
w
f
. M
«. / '« y ii a
àt* o jjh ^ ÇaU Qju’tk^ c<jUA^A
-
^
•* «
e H -
^ ^ u ^ o v ifa H A A
C*a «U. VI y t**nuix- *aa
A. CLERMONT - FERRA N D , DE L’IMPRIMERIE DE PELLISSON, IMPRIMEUR.,
■ ^
.A U C O IN D E S R U E S
C4 mm<mAuiw <a»W*. ii» ^ iù 4 u».
(AMâ-Vtl(u M o iü ltiJ
^»cu^ </u»uyJ^
S A IN T -G E N E S E T S A IN T -E S P R IT
m ««jmiii Cmu^>
cj/|/vu/ /(X ^VWHWt» ^r\.«tAjr
apfXtp+JU- *+
Ac/VpX«*
«
.
^U|L ffuw tAX
^
~
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Aubignat, Jeanne. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Veysset
Subject
The topic of the resource
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
faux
experts
arbitrages
notables
domaines agricoles
opinion publique
chantage
infirmes
banqueroute
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse pour Jeanne Aubignat, Veuve Villevaud, Appelante ; contre Le Sieur Chambaud, Adjudant Commandant, Officier de la Légion-d'Honneur, ci-devant Maire de Chamalières et Royat, Intimé.
Annotations manuscrites. Arrêt de la 1ére chambre, 1822, arrêt complet.
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pellisson (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2616
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2615
BCU_Factums_G2614
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53531/BCU_Factums_G2616.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Lagarandie (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
arbitrages
banqueroute
biens nationaux
chantage
conscription
Créances
doctrine
dol
domaines agricoles
experts
Faux
fraudes
hypothèques
illettrisme
infirmes
magistrats municipaux
notables
notaires
opinion publique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53530/BCU_Factums_G2615.pdf
0543eba27d03b7a008122f3dd9b942ba
PDF Text
Text
MÉMOIRE
COUR ROYALE
DE RIOM.
E N
R E P O N S E ,
I Te C H A M B R E .
P O U R le sieur
CHAMBAUD ,
C h e v a l ie r ,
Colonel
d ’E t a t-M a jo r , en retraite, Officier de l ’Ordre ro ya l
de la Légion d ’H onneur,
C le rm o n t , intim é ;
A U B I G N A T veu ve de
P r o p r ié ta ir e R
Pierre
V i l l e v aud,
o y a t , appe lant e.
,
, ,
Q ucm sua culpa prem e t dcccptus omitte tucri.
A t penitas notum si tentent crimina
Tuterisquc tuo fidentem prœsidio.
serves
II o r a t . , ep ist. 18 .
n
U auteur célèbre a dit « q u 'il n ’y a pas de plate
« méchanceté, pas d ’ horreurs, pas de conte a b s u r d e ,
« qu 0n ne fasse adopter aux oisifs d ’ une grande ville
e n
$*+{% % %
habitant de la ville de /mluuum* oib*±
CO N TR E
Jeanne
^
s’ y prenant b ie n , et q u ’ il a vu les plus honnnêtes
�( * )
« gens près d ’être accablés sous le poids de la calomnie. »
C ett e cause est un exemple d ’une vérité aussi affli
geante pour la morale que pour la société.
L e sieur C h a m b a u d , officier' su péri eur, montrant
sur sa poitrine la glorieuse distinction, récompense de
ses services, devenu père de f am ille , voué à l ’éduca
tion de ses enfans, entouré de l ’estimede ses camarades,'
de la confiance et de l ’amitié de tous ceux qui le con
naissent , a vu troubler les douceurs de sa retraite par
l i n e accusation de d o l et de fr a u d e aussi, fausse que
hardie.
U n e bouchère, q ui fréquente depuis trente ans la
halle de C l e r m o n t ; une femme d ’un esprit souple et
défiant, a c c o u t u m é e \ u x procès et aux ruses qui peu
vent en assurer le succès, a eu l ’audace et l ’adresse
d ’ourdir contre le sieur C h a m b a u d la trame la plus
déliée et la plus odieuse.
L a veuve V i ll ev am l a v a i t é p r o u v é u n e perte c o n s i d é
rab le, q ui pouvait sensiblement d i m i n u e r sa f o r t u n e .
Son m a l h e u r , q u o iq u ’elle ne pu t l'imputer q u ’à ellemème ou à la prévarication d ’ un sieur C h e v a lie r, no
taire à C l e r m o n t , q u i avait toute sa confiance, la
rendait
intéressante.
C o m m e n t devait-elle détruire cet intérêt q u ’inspire
toujours celui q ui n ’a d ’autre reproche à se faire, que
de n ’avoir pas porté assez de vigilance à la conservation
de ses droits ? E l l e se choisit u n e victime : c ’esL le
sieur C h a m b a u d , absolument étranger aux actes q u ’ e l l e
a contvuetés, q u i doit l ’indemniser du tort q u e l l e a
�¿prouvé; il le d o i t , parce q u ’il a ¿ té l ’artisan d u dol
et de la fraude, et q u ’ il eu a p ro filé.
Si ou en croit la veuve V i l l e v a u d , le sieur C h a m b a u d
a a b u s é des choses les plus sacrées pour l ’induire en
erreur,
la tromper, et compromettre sa fortune.
E lle avait confiance au sieur C h a m b a u d . C ’est l u i
q u i l ’a sollicitée de consentir à l ’acte cj_ui devait lu i
être si funeste.
E lle était débitrice du sieur C h a m b a u d : ce dernier
la menace de poursuites rigoureuses pour contraindre
sa volonté.
E l l e était mère d ’ un fils soumis à la conscription ;
le sieur C h a m b a u d , ancien m ilitaire, et maire de sa
commune, lui fait craindre l ’effet de sa double in
fluence. L e fils de la veuve partira, si l ’engagement*
n ’est pas contracté.
L l l e îcsiste cncoie ; le sieur C h a m b a u d lu i remet
un b illet cle garantie ; alors elle cède, et se rend chez
le notaire.
L e sieur C h a m b a u d est présent à l 'a c te } c ’est lui
qui le dirige, qui empêche de prendre la seule pré
caution qui pourrait au moins sauver quelques débris
de lu fortune de la veuve Vi ll ev aud.
Pourquoi tant d ’artifice et de violence de la part du.
siem C h a m b a u d ? ........... Il était créancier de G i r a r d ,
a\eo lequel la veuve Vi ll ev aud contract ait; et connue
le mauvais état des affaires de G ir ard était co nnu du
sieur C h a m b a u d , ce dernier avait intérêt à priver la
v e u v e Villevaud de son gage, à le re p la c e r entre 1m
�mains tle son débiteur , pour pouvoir ensuite le prendre
en paiement de sa créance : c’est ce q u ’a effectivement
fait le sieur C h a m b a u d , q u i , le même j o u r , ' a acquis
de Girard l ’obligation qui servait de gage à la veuve
V i ll e v a u d , et que celle-ci venait d ’abandonner.
Ces plaintes graves, ces faits si habilement liés, qui
trouvaient leur explication dans le b illet de garantie
clonnd p a r le sieur C ham baud à la veu ve V ille v a u d
n ’étaient pas tous de l ’invention de cette dernière j
elle avait été p u i s s a m m e n t a i d é e p a r u n c o n s e i l intim e,
dont l ’opinion a ensuite fait justice, et qui a étc o b lig é
de quitter la ville de C le r m o n t p o u r aller porter ailleurs
sa fatale industrie.
Mais ces plaintes et ces faits furent soumis à l ’examen
‘ de jurisconsultes graves, trop amis de leur profession,
trop esclaves des devoirs q u ’elle impose, pour ne pas
employer t o u s leurs efforts à dévoiler le dol et la fraude.
L a VCUVe V i l l e v a u d p r o d u i s a i t l e bille t de garantie /
elle reçut et du t recevoir l e c o n s e i l d ’ e n f a i r e u s a g e ,
et de l ’entourer de tous les faits qui pouvaient donner
le plus de force et d ’effet à cette pièce importante.
Après dépôt préalable de la pièce chez un notaire,
le sieur C h a m b a u d fut cité en conciliation. Sa seule
réponse
récritu re
fut
du
do
soutenir fa u sses
la
signature
prétendu billet de garantie,
et
et d ’en
demander la représentation j mais son adversaire, qui
s’ attendait à cette dénégation, et qui avait sa réponse
prête, affecta-t-elle de regarder la fausseté de ce billet
comme un moyen de fraude de p l u s , employé par Ie
�( 5 )
sieur C h a m b a u d ; e t , dénaturant sa propre cit ation,
où elle avait
Chambaud 3
écrit
q u ’elle tenait ce b illet d u sieur
elle d i t , axi bure au de conciliation, que
ce dernier le lu i avait f a i t remettre.
Cette découverte était un grand pas vers la vérité :
aussi la veuve V ill ev a u d parut-elle reculer devant son
propre o u v r a g e ! ........ H u it mois s’étaient écoulés; un
remords salutaire la retenait encore, lorsque le sieur
C h am b a u d , qui avait intérêt à faire reconnaître la
fausseté de cette pièce et à la détru ire , traduisit luimême son adversaire devant les tribunaux.
L a veuve V i ll e v a u d retrouva alors sa hardiesse 5 le
conseil intime lui dit : « Vous ne savez ni lire ni
« écrire, que peut-on vous faire? Ne me nommez
« pas, moi qui suis l ’auteur du b i l l e t ,
« votre demande ». L a
et formez
veuve V i ll e v a u d suivit
ce
conseil.
Qu oi q u ’il en soit, le billet reconnu faux , la défense
du sieur C h a m b a u d était facile :
i° L a veuve Vi ll ev aud demandait une somme de
10,862 francs; mais où était son titre? E lle n ’avait
point été placée dans V im possibilité d ’en a voir; elle
a v a it , au contraire, senti la nécessité d ’en obtenir
un : elle l’avait elle-même produit........... Mais cette
pn:ce était j'econnue f a u s s e , et 11e pouvait rester au
procès, que pour attester la perversité de la veuve
Vi llevaud j cl faire rejeter la preuve des faits qu/elle
osait articuler;
2° L ’acte passé avec Girard n ’ avait rien fait perdre
�à la veuve V i l l e v a u d , q u i n ’était saisie, n i p a r une
acceptation fo r m e lle
n i p a r une inscription 3 du
gage q u ’elle soutient lui avoir été enlevé; de manière
q u ’elle devait se trouver heureuse d ’obtenir une ga
rantie q u ’elle n'avait pas;
3° Le
veuve
sieur
C h a m b a u d , loin de v o u lo ir nuire à l a
V i l l e v a u d , d e v a it, au contraire, 'v e ille r a la
conservation de ses intérêts. Il était créancier de cette
fe m m e , d ’une somme de 6000 fr; il n'avait d ’autre
hypothèque que les immeubles dont l a v e u v e V i l l e v a u d
pouvait craindre l ’éviction. Si sa garantie s’évanouis
sait, l ’éviction pouvait préjudiciel’ au sieur C h am b a u d ,
et lui faire perdre sa créance;
4 ° Po u r q u ’il y ait (loi et f r a u d e il f a u t , d’ un
côté
, q u ’il y ait eu des manœuvres p o u r induire en
erreur, ou détourner d ’ une chose u tile , e t , d e l ’ a u t r e ,
que l ’ o n a i t été dans l ’im p ossibilité de s ’en garantir.
•— Q l l a fait le s i e u r C h a m b a u d ? I l a donné note a
consulter, ou il in diquait la v a le u r du bien q u e la
veuve V ill ev au d devait recevoir en garantie, et disait
q u i l n ’y avait p a s d 'h y p o th è q u e s.— Qu e devait faire
la v e u v e Vill ev au d? Prendre des renseignemens, s’assurer
de la vérité de ces faits : c’est précisément le parti
q u ’on
a pris avant de contracter avec G i r a r d ........
Ces moyens, réunis à la fausseté du billet de ga
ranti e, détruisaient le système de la veuve V i l l e v a u d ,
et
démasquaient
complètement tout l ’odieux de sa
Conduite.
Mais pour ne rien laisser à désirer, le sieur Chain-
�baud,
répondant
aux faits
articulés par la veuve
V i l l e v a u d , en démontrait la fa uss etc ,
et prouvait
notamment,
i° Que le fils de la veuve V ill ev a u d avait été réformé
avant
l ’acte q u i fait l ’objet du procès ;
2° Q u ’il n ’était p oin t créa n cier de G i r a r d ; q u ’il
n ’avait connu l ’em b a n a s de ses affaires, que posté
rieurement à l ’acte dont il s’a git ; que s i, plus t a r d ,
il était devenu acquéreur de moitié de l ’obligation
abandonnée par la
veuve
V ill ev au d , c ’était
obliger un homme auquel il devait toute sa
pour
protection,
et empêcher q u ’il ne fût victime des cautionnemens
q u ’il avait prêtés à G ir a r d ;
3° Enfin le sieur C h a m b a u d démontrait que le
retard mis à l ’inscription de la veuve V i ll e v a u d ne.
pouvait pas lui être im p u t é ; que c’était à cette femme
à surveiller ses in t é rê t s,
ou au moins au notaire
C h ev al ier, q u i avait toute sa confiance.
Ces moyens furent accueillis , par jugement du
tr ibun al civil de C le r m o n t , qui rejette la demande do
la veuve Vi ll ev aud.
L e sieur C h a m b a u d jouissait d ’ un moment de repos,
lorsque les intrigues de son adversaire recommen
cèrent. E l l e interjette
appel du jugement.
Bientôt
elle publie q u ’elle a découvert de nouveaux laits; e l l o
en to u re , elle h a r c e l l e les amis du sieur C h a m b a u d ;
elle les fait t r e m b l e r pour sa réputation ; elle exigo
que ce dernier ach èi e, par un sacrifice, un Mémoire
dont
la publication
doit
le
couvrir
de* honte et
�'( 8 )
d ’opprobre........ L e sieur C h a m b a u d n ’ hésite pas : un
coup-d’œil jeté sur sa poitrine devait lui enseigner
son devoir ; il répond : L 'h on n eu r me d éfen d de
transiger.
En fin le Mémoire paraît. Dès les premières lignes,
le sieur C h am b a u d voit son nom uni à ceux de C h e
v a l ie r ,
notaire à C le rm o n t ;
de G i r a r d , notaire à
C ham alièr e, tous deux en banqueroute frauduleuse;
de Chevalier sur-lout dont le nom a été flétri par un
arrêt de la C o u r d ’assises de ce département. L e sieur
C h a m b a u d y est désigné comme l ’auteur tm l ’instru
ment d ’une fraude pratiquée entre lui et ses deux
complices, et le se u l que la ju s tic e puisse atteindre.
Il continue sa lecture; e t , si les faits et les moyens
peuve nt, par leur inexactitude et leur faiblesse, lui
inspirer de la sécurité sur l'événement du procès, il
n ’est pas moins indigné des outrages dont il est l ’objet.
Mais la v e u v e V i l l e v a u d n ’ é t a i t p o i n t e n c o r e satis
faite; le Mémoire pouvait n e pas a v o i r a s s e z d e pu bli
cité. Elle insère dans un journal un article ayant pour
objet de faire connaître scs plaintes, et de répandre
ses diffamations ( i ) .
C ’est ainsi que le sieur C h am b a u d a pu observer
les effets de la calomnie; craintive dans son origine,
elle n ’osait l ’attaquer q u ’avec précaution, et ne semait
q u ’en courant le trait empoisonné. Bientôt plus hardie,
elle veut porter des coups plus surs, marche à décou(i) Aiui
la Charte, 22 janvier 1822 , n° 7.
�v e r t , et réunit toutes ses ressources pour attirer sur
sa victime un cri général de haine et de proscription.
Les a r t i f i c e s de la veuve V ille vaud ont été tels ,
q u ’elle est parvenue à attacher à sa cause le nom d ’ un
juri sconsulte également recommandable par son hon
nêteté et son amour pour la justice : on ne se per
mettra point de blâmer sa conduite en cette occasion;
mais, quelque force q u ’il apporte dans cette cause ,
comme on craint beaucoup plus son autorité que ses
raisons, il sera le premier à désirer que l ’on en écarte
sou nom, pour n ’en interroger que
les faits et les
moyens.
FAITS.
L
e
sieur G ir a r d, ancien notaire à Chamalière, avait
acquis de M. D a l b ia t, ancien procureur du Roi
ù
C le r m o n t , un pré appelé le P r é clu B r e u ils situé à
Royat, moyennant la somme de 22,000 francs, stipulée
payable dans douze ans. '
L e 21 juillet 1808, par acte passé devant C hevalier,
notaire à C le rm o n t, le sieur G irard vendit à Jeanne
A u b i g n a t , veuve V i l l e v a u d , et à Léger Bourgoignon,
son gendre, partie du pré du Breuil. Jeanne Aubignat
entrait pour neuf dixièmes dans cette acquisition :
Bourgoignon n ’y figurait que pour l ’autre dixième.
Le
prix de c e t t e v e n t e
fut fixé à la somme de
U , 3 if) f r a n c s , sur laquelle 7819 francs furent payés
com pt ant, et les 3 , 5 <>o f r a n c s restant furent stipulés
payables au 11 novembre suivant; mais il fut convenu
?
�que le vendeur ne pourrait recevoir cette dernière
somme, q u ’en fournissant hypothèque pour la totalité,
ou en donnant caution.
Cet te clause était
importante;
et les acquéreurs
devaient rigoureusement exiger son exécution, puisque
de son accomplissement seul dépendait leur securité,
ayant tout à-la-fois à craindre la recherche hypo th é
caire et par privilège du sieur D a l b i a t , encore créan
cier du p r i x , et l ’exercice de l ’hypothèque légale de la
dame D a l b i a t , dont le prix du Breuil était encore
grevé.
,
Cependant la veuve V ill ev au d et son gendre ne sen
tirent pas assez le danger q ui les menaçait, ou au
moins ils ne px’irent aucune des précautions que leur
situation exigeait.
E n ef f e t,
i 3 mai 1809, par acte passé devant C h ev a lier,
notaire a C l e r m o n t , lu s i e u r F on g h ca sse, tant e n son
nom que comme fondé de pouvoirs d e sa m è r e , c o n
Le
sentit au sieur G irard une obligation de la somme de
10,86a fr. 5 o c . , payable dans cinq ans, avec intérêt
à 5 pour 100.
Il hypo th éq ua spécialement au paiement de cette
obligation une maison située à C le rm o n t , rue de la
Treille;
et l ’obligation termine par une stipulation
ainsi conçue :
« G ira rd déclare que la somme principale provient
« de Jeanne A u b ig n a t, veuve V ille v a u d , et de L ég er
« Bourgoiÿîion j son gendre, et fait partie du prix de
�( 11 )
« la vente de 1808. A u moyen de cette déclaration ,
« Fonzheasse sera tenu, comme il s’y oblige, de ne
« faire le remboursement de ladite somme ,
q u ’en
« présence de la veuve V ille v a u d et de B ourgoignon 3
« pour veiller à l'emploi d ’icelle, conformément au
« susdit contrat de vente. »
Ni
la veuve
Vill ev a ud ,
i*
ni
Léger Bourgoignon
n ’étaient parties, ni présens à cet acte; cependant il
faut convenir que Girard y avait fait une stipulation
q u i pouvait leur être u t il e , s’ils déclaraient vouloir
en profiter; mais, ju sq u’à cette déclaration, la stipu
lation pouvait être révoquée; Girard pouvait l ’anéantir,
et céder sa créance à tout autre, hors la présence et au
détriment de la veuve Villevaud,
L a veuve Villevaud n ’avait point accepté la stipula
tion faite à son profit; elle n ’avait point pris d ’inscrip
tion , mesure qui lu i était d ’ailleurs interdite avant la
signification du transport faite au -débiteur. L e sieur
Girard seul a v a it , le 16 ju in
1809, inscrit sur
la
maison donnée en hypothèque par Fongheasse, lorsque,
le 1-2 mars 1809, la veuve V i l l e v a u d donne quittance
à G irard de la somme de 3 5 oo lrancs, à elle restée
due sur la vente du 21 juillet 1808. C e l te quittance
ne contient pas d’acceptation de la stipulation insérée
en l ’obligation du
i3 mai
1809, mais on y trouve
une énonciation ainsi c o n c i l e : « (inc la somme (ju il« ta n cée, ainsi que c e lle formant le surplus du p r ix
« de la v e n t e , ont été em p lo y ée s, p a r G ira rd
« désir du
même acte de vente ,
au
par hypot hèque
�« spéciale , suivant obligation, du
i 3 mai 1809. »
Il est évident que cette énonciation ne contenait
point accoptation de la st ip ulat ion, équivalant à trans
p o r t , insérée dans l ’acte du i 3 inai 18095 cette sti
pulation ne liait donc point G ir ard; m ais, lors même
q u ’elle aurait produit un engagement propre à obliger
ce dernier, elle était encore inutile dans les intérêts
de la veuve V i l l e v a u d , q ui ne pouvait être saisie, îi
l ’égard du sieur Fongheasse, d é b i t e u r , que par la
notification du transport, et que jus que -là, ce tiers
avait le droit de payer le sieur G ir a r d , et était vala
blement libéré.
Ainsi la veuve V i l l e v a u d ,
n ’ayant ni accepté ni
notifié le transport contenu en l ’acte du i 3 mai 1809,
n ’ayant pris ni pu prendre aucune inscription sur la
maison Fongheasse,
n ’avait aucune garantie pour le
prix de la v e n t e du 21 juillet 1808.
Jusque-lîl
le sieur
Cihamluiud
était ahsolumen t
étranger aux affaires et aux intérêts de la veuve V i l l e
v a u d ; il 11e la connaissait même que par un procès
q u ’elle lui avait suscité en 1806, à l ’occasion du dé
frichement d ’ un ch em in ; contestation qui fut soumise
à l ’arbitrage de INI* Rispal, et terminée à l ’avantage
du sieur C h a m b a u d , par une transaction conforme îi
la décisioi\ de cet expert (1). Mais en 1 8 1 0 , le sieur
C h am b a u d eut avec la veuve Villevaud des relations
(1) La citation en conciliation et la transaction sont rapportées.
�(
,3
)
«
d ’intérêts , qui durent lui faire désirer vivement la
prospérité et la sûreté de la fortune de cette dernière.
L e 6 avril 1 8 1 0 , la veuve Vill ev aud empru nta au
sieur C h a m b a u d une somme de 6000 francs, et lu i fit
une obligation, reçue G i r a r d , notaire à Chamalière,
payable dans un a n , avec l ’intérêt à cinq pour cent.
E lle lui donna pour hypothèque spéciale deux prés.
L e plus considérable en contenance et en valeur était
précisément ce p r é du B r e u il} vendu par M. Dalbiat
à G i r a r d , et p a r ce dernier à la veu ve V i l l e v a u d .
O n sent assez que le sieur C h a m b a u d d e v a i t atta
cher le plus grand prix à la conservation d ’une hypo
thèque qui était la seule garantie du paiement de sa
créance,
les facultés mobilières d ’une bouchère ne
pouvant
lui présenter que des ressources bien insuffi
santes, sur-tout pour une somme aussi considérable.
L e sieur C h a m b a u d prit inscription, le 27 d u même
mois.
On arrive à la fin de 1 8 13. L a veuve Vi ll ev aud ne
s’était point libérée envers le sieur C h a m b a u d , quoique
son obligation fût échue et exigible depuis le mois
d ’avril 1 8 1 1 . C ette femme était encore en retard de
payer les intérêts j de manière que le sieur C h am b a u d
crut devoir la contraindre au
remboursement ,
et
chargea, h la fin du mois de décembre, le sieur G ir a r d ,
notaire, de lui lairc notifier un commandement de
payer. C et acte a été rédigé, mais n ’a pas été signifié.
Comme ces menaces de poursuites ont pu donner
au sieur Girard l ’idée de détruire la stipulation con-
�signée en l'obligation du i 3 mai 1809, en donnant
toutefois une garantie hypothécaire à la veuve Viilev a u d , et que cette dernière? en consentant à ce chan
gement , y
mettait
pour condition , que le sieur
C h a m b a u d lui accorderait un délai d ’un an pour le
paiement de l ’obligation de 1 8 1 0 , il est indispensable
d ’examiner les moyens q ui ont été employés par le
sieur Girard et la veuve V i l l e v a u d , pour atteindre
leur but.
Le
sieur
G irard
était notaire à C l i a m a l i è r e , e t
adjoint du sieur C h a m b a u d , alors maire de Chamalière et de Royat. L e sieur Girard était un homme
paraissant tout occupé de ses affaires, très - r é g u l i e r
dans'sa con du ite , vivant retiré, d ’ une grande réserve
dans la conversation, sur-tout quand i l s’agissait de
ses affaires. L e sieur C h a m b a u d ne vivait pas avec lui
mais il avait avec le sieur Girard les
relations que l e u r p o s i t i o n r e n d a i t i n d i s p e n s a b l e s ’, et il
était naturel q u ’habitant une maison de c a m p a g n e
dans l ’in tim ité ;
un peu éloignée de C lia m aliè re , le sieur C h am b a u d
vi n t descendre chez son a d jo in t , lorsque les affaires
de la mairie ou les siennes propres l ’y appelaient. A u
reste, il n ’avait avec l e sieur G ir a rd aucun intérêt qui
leur fut com m un ; il ne connaissait pas l’état de ses
affaires; il ne devait même pas chercher à les c o n
n aît re, puisqu’il est faux que le sieur Girard fut son
débit eu r; enfin le sieur Girard avait, comme notaire,
la ronfiance du sieur C h a m b a u d , et non celle de la
veuve Villevaud.
�■
•
.
( < n
Dans le même tems existait a Clermont un sieur
C h e v a lie r, notaire. C et homme avait su s’attirer une
confiance générale, et jouissait de l ’estime publi que.
Il était recherché et admis dans la bojme société; on
pouvait dire de lu i q u ’il était l ’ame de toutes les
affaires et de toutes les fêtes; et si ses nombreux amis,
, clupés p a r l u i , l ’ont
ensuite abandonné,
pourquoi
aujourd’h u i , pour nuire au sieur C h a m b a u d , voudraiton lui accorder les honneurs d ’une in tim ité , que l ’on
sait bien q u ’il n ’a jamais ob te n u e, m érit ée, ni même
désirée ?........
L e sieur Chevalier était lié d ’intérêt et d ’affaires
avec le sieur Girard. C e l t e circonstance, que les ban
queroutes simultanées de ces deux notaires ont rendue
p u blique, était entièrement inconnue au sieur C h a m
b a u d , et p o u v a it , au contraire, être a la connaissance
de la veuve V i l l e v a u d , qui était la protégée du sieur
C h ev alie r, son conseil ordinaire.
L a mère du gendre de la veuve V i ll e v a u d avait sevré
un des enfans de la dame C h eva lie r; c e l l e - c i était la
marraine d ’ un de ses petits-enfans; et il s était établi
entre elles une espèce d ’intimité, par suite de laquelle
la dame Chevalier allait fréq uem m en t, dans la belle
saison, passer des journées entières à R o y a t , et appor
tait à la veuve V illev aud de vieilles hardes dont elle
lui faisait cadeau , pour vêtir scs enfans.
Ces circonstances ne. sont pas sans intérêt dans le
procès; elles peuvent aider à découvrir les véritables
causes qui ont porlé la veuve V ill ev a u d à traiter avec
�le sieur Girard-, à apprécier les relations de cette veuve
avec Chevalier et G i r a r d , et à dévoiler les motifs q ui
l ’ont ensuite portée à in ten te r , contre le sieur C h a m
baud , la singulière action sur laquelle la C o u r a
à prononcer.
11 ne faut pas perdre de vue que le sieur C h am b a u d
avait chargé Girard d ’exercer les premières poursuites
q u ’il voulait diriger contre la veuve V ille vau d. G ira rd
avait dù prévenir cette veuve : il ne lui avait encore
rien fait s i g n i f i e r ; et l ’on p e n s e b i e n q u e la v e u v e
V ill ev aud n ’avait pas manqué de confier à. Chevalier
les craintes que les poursuites d u sieur C h am b a u d
pouvaient lui inspirer.
Il peut être que la position de la veuve V i ll ev a u d
inspira aux
associés Girard
et Chevalier l ’idée de
détruire la stipulation insérée en l ’acte du i 3 mai
1809, et de la remplacer par une hypothèque. C ett e
mesure d é t r u i s a i t l e s o b s t a c l e s q u e le sieur Fongheasse
pouvait apporter à sa libération, et r e n d a i t plus f a c i l e
la négociation de cette obligation. Mais tout cela ne
pouvait s’exécuter, sans que le sieur C h a m b a u d con
sentit à accorder un délai à la veuve Villevaud-, faveur
que cette dernière désirait vi vem en t, et que l’on osa
espérer de la complaisance du sieur C ham b a ud.
P o u r atteindre ce b u t , le sieur Girard fit une con
fidence au sieur C h a m b a u d ; il lui avoua devoir une
somme de 17,000 francs à différons créanciers;
lui
donna des explications sur l ’obligation F o n g h e a s s e ;
lui dit que la veuve Vi ll ev aud consentirait à iransfervr
�(
J7
)
Vhypothèque q u ’elle avait sur la maison Fongheasse,
sur le domaine de la G a ra n d ie , appartenant, à
G ir a r d ; et q u ’au moyen de ce transfert, sa libération
deviendrait facile, pu isq ue , outre les 11,000 fr. q u ’il
toucherait
de l ’obligation Fongheasse, il pouvait encore
compter sur 7000 fr. de recouvremens de son étude;
niais il ajoutait que cet arrangement ne pouvait s’eficct u e r, q u ’autant que le sieur C h a m b a u d consentirait
à accorder à la veuve Y il l e v a u d un délai d ’ un a n ,
pour le paiement de son obligation; délai que G i r a r d
et la veuve Y il levau d
sollicitaient
avec
beaucoup
d ’empressement.
L e sieur C h a m b a u d devait céder à ces instances; il
n ’était point l ’ami du sieur G ir a rd; mais sa position
pouvait l ’intéresser sous plus d ’un rapport : le sieur
C ham b aud et Girard remplissaient ensemble des fonc
tions administratives ; le sieur Girard exerçait une
profession qui inspire de la confiance; il était père de
famille : n ’était-il pas naturel de l ’aider à sortir de
1 embarras momentané dans lequel il se trouvait? D ’un
autre côté, dans la supposition même que la veuve
Vill ev au d aurait eu une hypothèque sur la maison
Fongheasse (ce qui n’était pas), le transfert q u ’ 011 lui
proposait ne pouvait que lui être avantageux. Le sieur
C h a m b a u d avait voulu acquérir le domaine de la
Garandie; il eri avait offert 22,000 fr. ; il savait que
cette propriété avait augmenté de valeur ; le sieur
Girard assurait q u ’elle n ’était grevée d ’aucune h yp o
théqué . ainsi aucun danger 11c paraissait menacer' les
3
�( >8 )
intérêts de la veuve V i l l e v a u d , auxquels ceux du sieur
C h am b a u d étaient d ’ailleurs si intimement liés.
Il convient de se faire ici une idée positive de la
v a le u r du domaine de la G a ra n d ie , et de Y état appa
rent des affaires du sieur Girard.
L e sieur Girard avait acquis le domaine de la G a
randie par parcelles, moyennant la somme.de 20, i 33 lr.
20 c. (1). Il avait animé cette propriété de bestiaux
d ’ une valeur considérable ; deux cents moutons et
vingt-deux bêtes à cornes avaient été achetés par lui 5
Girard avait en outre construit des batimens pour
rétablissement d ’ un m o u l in , faiL des réparations et
des plantations d ’une grande valeur*, de manière q u e ,
sans rien exagérer, on po u v a it , en 1814? porter la
valeur de ce bien à la somme de 3 o,ooo francs ; mais
sa situation et son produit viennent encore confirmer
cette i d é e . L e domaine de la Garandie est situé dans
"Un pays de m o n t a g n e .
D e s b a u x aut hentiques, des
a3 juillet 1810 et 21 février 1 8 1 2 , établissent q u ’ il
était affermé 1 4 19 francs*, et comme l ’on sait que la
valeur vénale des biens de montagne est bien supé
rieure à leur produit réel, comment se refuser à l ’idée
que ce domaine 11e va lût réellement 3 o,ooo fr. (2)?
L ’état apparent des affaires du sieur Girard n’avait
rien d ’inquiétant 5 il déclarait que le bien de la G a
randie 11’était grevé d ’aucune inscription : c’était un
(•) i.es expéditions de ces acquisitions partielles sont
(2) Les deux liaux à ferme sout rapportés.
rapportées.
�( * 9 .)
fait à. vérifier ; il ne restait donc que l ’hypolhèquo
légale de la femme, réglée depuis, par jugement du
3 août 1 8 1 6 , à la somme de 7 7 1 9 fr. 66 c. ( 1 ) ; h y
pothèque
légale q ui avait
d ’ailleurs pour
garantie
d ’autres propriétés du m a r i , et notamment une vigne
de vingt-six œuvres, située aux Roches; un pré situé à
T h è d e , ces deux objets vendus à la veuve G a r d y ,
moyennant la somme de 7600 francs; en fin , une cave
placée à Clermont.
C e t aperçu montre que le transfert d ’ hypothèque
que demandait G i r a r d , loin d ’être nuisible à la veuve
V i ll e v a u d , devait, au contraire, lui être avantageux :
un domaine présentait en effet une garantie plus sure
q u ’une maison de ville, sujette à des accidens difficiles
à prévoir; mais si l ’on ajoute que la veuve V i l l e v a u d
n ’avait pas d ’ hypothèque sur la maison; q u ’elle n ’était
pas même saisie vis-à-vis le sieur Fongheasse, par une
acceptation de la somme q u ’ il pouvait devoir au sieur
Girard (circonstances ignorées du sieur C h am b a u d ) ,
on demeurera encore plus fortement convaincu que
l'affectation d ’ Ilypothèque offerte par
Girard
était
u t il e , et même indispensable à la veuve Villevaud .
Quoi q u ’il en soit, ces conventions se méditaient
entre le sieur Girard et la veuve Ville vau d : eux seuls
pouvaient connaître leur position respective, l ’état de
leurs propres affaires; et le sieur C h am b a u d ne pou
(1) L a noie de ce jugement est rapportée.
�vait y être appelé que pour rendre le service auquel
il s’était engagé, en accordant un sursis à la veuve
Ville vaud .
Mais la veuve Ville vaud prenait des renseignemens j
elle savait ou avait pu savoir que lé sieur Clia mbaud
avait voulu acheter le domaine de la Garandie.
Cette
veu ve, comme débitrice du sieur C li a m b a u d , avait
avec lui des relations qui étaient devenues plus fré
quentes par la nécessité où elle se trouvait d ’en obtenir
un sursis pour pouvoir traiter avec Girard.
L e sieur C h a m b a u d fut donc interrogé par la veuve
Vi ll ev a ud; il lui fit franchement connaître ce q u ’il
savait de l ’état des choses; m ais, pour qu'elle put
s’éclairer davantage et vérifier par elle-même tout ce
q u ’il lui était important de savoir, le sieur Cliam b aud
remit à cette veuve une note à consulter, qui fait pièce
au procès, et qui est ainsi conçue :
« Il existe une h y p o t h è q u e d e i i ,000 francs, que la
« veuve V ill ev a u d a placée sur une m a i s o n à Gler« mont (1). On demande q u ’elle en donne main-levée,
(1) L e sieur Cliambaud ignorait donc que la veuve Villevaud nravait
point d'hypothèque sur la maison Fongheassp; il ignorait également
que cette femme n’était point saisie, vis-à-vis le sieur Fonghcasse, du
montant de l’obligation du i 3 mai 1809 : la veuve Villevaud avait
soigneusement caché ce fait au sieur Chambaud, qui avait cependant
le plus grand intérêt à le connaître, puisque l’hypothèque de la maison
Fonghcasse devait £tre la garantie de la vente du pré Dalbiat, et que cc
pie avait été donné pour hypothèque de l'obligation consciUic par la
veuve Villevaud au sieur Chambaud.
�( «
)
i< pour le transfert sur un bien de montagne, de la
« valeur de 3 o,ooo francs, q ui n ’est grevé d ’aucune
« hypothèque. »
Q u ’avait
à faire la veuve V ill ev au d ? Sa conduite
et ses démarches étaient réglées par la note qui lu i
avait
été remise, et rien n ’était plus facile à obtenir
que les renseignemens q u ’elle avait à prendre. Elle
devait s'enquérir de la valeur du domaine de la Garnndie : les gens du pays pouvaient lui donner, sur ce
f a i t , les détails les plus minutieux et les plus exacts;
la veuve Ville vaud devait les consulter. C ’est aussi ce
q u ’elle a fait ( i ) .
E l l e devait ensuite rechercher si le domaine de la
Garandie était ou non libre d ’inscriptions. U n certi
ficat du conservateur des hypothèques devait lui faire
connaître ce fait; et un homme d ’affaires pouvait l u i
apprendre que l ’hypothèque légale de la femme affecte
les biens du mari. L a veuve V i ll e v a u d prend encore
ces renseignemens : c’est le sieur Chevalier qui a été
consulté par elle, et qui lui a p r o d u it , avant l ’act e,
comme elle le reconnaît elle-même, un certificat né
gatif d ’inscription.
Après avoir obtenu tous ces renseignemens, la veuve
Villevaud arrête définitivement ses conventions avec
le sieur Girard. Chevalie r, notaire à C le rm ont, devait
recevoir leur acte et en être le rédacteur; il a v a i t ,
(i ) Ce fait est prouvé au proct's, par une déclaration de Charles
Constant.
�comme on a v u ,
toute la
confiance de la veuve
V i l l e v a u d , et avait été chargé par elle de vérifier si le
domaine de la Garandie n ’était grevé d ’aucune ins
cr iption.
L e 27 janvier 1 8 1 4 5 Girard et la veuve V illev aud
se rendirent d a n s ' l ’ étude du notaire Chevalier. L e
sieur C h am b a u d ne devait y paraître et n ’y parut
r ée ll em en t, que pour remettre à la veuve Ville vaud
la promesse de suspendre pendant un an l ’expropria
tion q u ’il voulait diriger contre elle. C e j o u r même
C hevalier produisit à la veuve V i ll e v a u d un certificat
négatif d ’inscription (elle convient de ce fait). Elle
consentit alors à ce que le sieur Fongheasse se libérât,
hors sa présence, envers le sieur G i r a r d , du montant
de l ’obligation du i 3 mai 1809, et r e ç u t , pour ga
rantie de la vente que lui avait consentie G i r a r d ,
le 21 juillet 1808, une affectation hypothécaire sur
le domaine de la G a r a n d i e , a v e c convention q u ’elle
pourrait prendre d e s u i t e inscription sur celle pro
priété.
L e sieur C h a m b a u d était entièrement étranger îi
cet acte. Il 11e pouvait être garant d ’aucune des suites,
soit q u ’elles fussent favorables ou nuisibles aux intérêts
de la veuve Villev au d. C ’était sur-tout à cette dernière
à surveiller son inscription, ou au moins au notaire
C h e v a l ie r , q ui avait été le directeur principal de cette
affaire, et q u i , par élat comme par devoir,
devait
"veiller à ce q u ’il ne fut porté aucune atteinte aux
droils d'une clie nl e, sur les volontés de laquelle il
�( 23 )
■avait acquis tant d ’empire. C est cependant le retard
mis à l ’inscription de la veuve V i ll e v a u d , qui a été la
véritable origine du procès actuel \ et on verra bientôt
comment cette femme a conçu le projet de rendre le
sieur Ch am baud garant du préjudice q u ’elle a éprouvé,
par suite de sa négligence ou de la prévarication d u
sieur Chevalier.
Quoi q u ’il en soit, les sieurs G ir a rd et C h e v a lie r,
ayant o b t e n u , par l ’effet de l ’acte du 27 janvier 1 8 14 ,
la libre disposition de l ’obligation Fongheasse, pen
sèrent, dès-l’instant m êm e, à l ’utiliser, et à se pro
curer de l ’argent en la négociant. Cet te obligation fut
immédiatement colportée dans toute la ville de C le r m o n t , et présentée à plusieurs riches capitalistes,
parmi lesquels on peut citer les sieurs Pejoux-Vialefont
et Bonne-Lavie.
L e sieur C h a m b a u d ne s’occupait point de ces né
gociations. Absolument étranger aux affaires des sieurs
G ira rd
et C h e v a l ie r ,
n ’ étant
le créancier d ’aucun
d ' e u x , il devait peu lui importer de savoir ce que
deviendrait l ’obligation du i 3 mai 1809, et en quelles
nxaius elle passerait.
Cependant les efforts du sieur Girard pour négocier
cette obligation , son empressement à obtenir de l ’ar
g e n t , le retard q u ’il mettait à faire honneur à scs
propres engagemens,
avaient
excité l'inquiétude do
quelques-uns de ses créanciers, et devaient bientôt
rendre public le mauvais état de scs affaires.
L a première notion q u ’eut le sieur Chambaud à ce
�sujet, lui fut donnée par un sieur C ham b aud-B la n ch a rd , son paient au huitième degré.
L e sieur Chai nb au d-Bla nch ard était créancier de
G i r a r d , d ’ une somme de 2444 francs, en vertu d ’un
titre. Il faisait des démarches actives pou r obtenir le
paiement de sa créance ; et le sieur Girard , pour
éviter des poursuites , lui proposa de le subroger à
l ’obligation du i3 mai 1809, mais sous la condition
expresse que ce q ui r e s t e r a i t d u sur le montant de
cette o b l i g a t i o n , la créance d u sieur C h a i n b a u d Blanchard dé du it e , serait payé comptant.
L e sieur C ham baud -B lancha rd lit alors connaître
à son parent sa position envers G ir a r d , et la proposi
tion qui lui était faite par ce dernier. L e sieur C h a m
b a u d lui conseillait d ’accepter; mais le sieur Cliamb a u d - B l a n c h a r d , craignant d ’être obligé d ’en venir u
une expropriation pour être payé du sieur Fongheasse,
montrait de la r é p u g n a n c e ;i s o u s c r i r e cet e n g a g e m e n t .
Il disait, d ’ailleurs, q u ’ il 11’avait pas les f o n d s n é c e s
saires pour payer le surplus du montant de l ’obligation.
Il engageait même le sieur C h a m b a u d à se réunir à
lui pour l ’acquérir; mais ce dernier, se trouvant dans
la même position de son parent , et 11’ayant point
d ’argent disponible , refusa d ’accéder à l ’invitation
du sieur Blanchard; et, pour le m om en t, ce projet
fut abandonné.
h Mais le sieur C h a m b a u d fut bientôt instruit d ’ un
tait qui devait lui donner de plus vives i n q u i é t u d e s .
Il rencontra M ' D e l a u u e , défenseur a g r é é a u tribunal
�■ ( »5 )
de commerce de Clermont , et tenant
un bureau
' d ’agence dans cette ville. Me Dclaune p o u v a i t , par Ja
nature de ses fonctions, connaître la position du sieur
Girard. Il ne craignait pas de dire que les affaires de ce
notaire étaient en très-mauvais é t a t , et se rendait à
Chamalière pour obtenir le paiement de deux effets,
montant ensemble à 3 o 5 o francs. M e Delaune montra
même ces deux lettres de change au sieur C h a m b a u d ,
qui vit avec douleur que l ’ une d ’elles était souscrite
par G i r a r d , et endossée par B o u c h e t, de R o y a t , et
Pautre souscrite par B o u ch et lui-même, avec l ’endos
sement de Girard.
C ette communication affligea profondément le sieur
C h am b a u d : le sieur Bouchet était secrétaire de la
mairie dont le sieur C h am b a u d était maire \ le sieur
Bouchet avait été et était encore le précepteur des
deux fils du sieur C h a m b a u d . L a fille de ce dernier
avait eu pour nourrice la femme du sieur Bouchet ;
de manière que tout semblait lui faire un devoir de
venir au secours d ’un malheureux qui pouvait être
victime de son obligeance et de sa trop grande confiance
au sieur Girard. D ’un autre côté, le sieur Bou ch et
était hors d ’état de supporter une perte considérable :
toute sa fortune se composait de 8000 fr. d ’immeubles;
ses travaux étaient d ’ailleurs peu lucratifs, et 3 ooo f r . ,
actuellement exigibles ,
traîner sa ruine.
devaient nécessairement e n
L e sieur Chambaud n’hésita point sur le parti q u ’il
avait à prendre : il voulait être utile au sieur Bouchet
4
�^fA
( 26 )
et employer toutes ses ressources pour le secourir ;
mais il lui était indispensable de connaître préalable
m e n t , et au ju ste , la position de celui q u ’il voulait
obliger; aussi, dans le premier mom ent, se borna-t-il
à prier M e Delaune de ne rien pr éc ip it er, et de lu i
accorder quelques jours de réflexions.
L e sieur C h a m b a u d eut un entretien avec Bouchet.
C e malheu re ux , séduit par G i r a r d , avait eu la fai
blesse de le cautionner pour une somme de 7700 f r . ,
et frémissait en mesurant la p r o f o n d e u r d e l ’abîme
q u ’il avait ouvert sous ses pas. L e sieur C h a m b a u d
avait bien quelques ressources; il était créancier d ’obli
gations assez considérables, et d ’une rentrée certaine;
mais il lui fallait de l ’argent pour acquitter les effets
dont M e Delaune était porteur.
L e sieur C h a m b a u d , en obligeant le sieur Boucliet,
un double o b j e t , celui de payer la créance D e
l a u n e , p o u r l a q u e l l e 11 é t a i t menacé de poursuites
rigoureuses, et de lui faire o b t e n i r u n n a n t i s s e m e n t
avait
pour les sommes q u ’ il avait déjà payées ou q u ’il devait
encore pou r le compte du sieur Girard.
C o m m en t le sieur C h a m b a u d s’y prit-il pour a t
teindre le b u t q u ’il se proposait ?
Il était créancier, d ’un nommé Charles C o n s ta n t ,
d ’ une somme de 3 ooo f r . , et son obligation avait une
montagne pour hypothèque.
Charles Constant avait
d ’autres créanciers, parmi lesquels figuraient les sieurs
Be rn ard,
marchands
ferrailleurs à Cle rmont , ‘l 11*
poursuivaient son expropriation; mais l ’ un d ’eux ayant
�t 27
ftccjuis la p r o p r i é t é de Charles C o n sta n t , moyennant
lu somme de 12,000 fr. , un 01 die oniiiiblc fut ouvert
devant Me Taché ,
notaire à C le r m o n t j et le sieur
C h am b a u d put bientôt s’assurer q u ’ il ne devait être
payé
de sa créance q u ’au g mai 1 8 1 5 . C e délai était
lon g, et ne s’accordait pas avec l ’emploi que le colonel
C h a m b a u d voulait faire de ces fondsj aussi, en exa
minant l ’ordre, le colonel s’étant aperçu que le sieur
( Moriu , banqu ie r,
également créancier de
Charles
C o n s t a n t , d ’une somme de 3 ooo francs, devait être
payé très-prochainement du montant de sa créance 5
sachant d ’ailleurs que
son beau-frère, le sieur B u
jadoux, orfèvre, était l u i - m ê m e créancier d u sieur
M o rin , fit des démarches pour obtenir un changement
de rang, et parvenir à être colloqué à la place du sieur
Morin. Cela fut effectivement exécuté : Morin donna son
mandat en paiement au sieur Bujadoux, q u i consen
tit à ce que le colonel C h a m b a u d en fit usage *, de
cette m an iè re ,
ce dernier accéléra la rentrée de sa
créance, et se trouva dans la position d ’être utile à
Bouchet (1).
Ces précautions étant prises, le colonel Chambaud
(0
Tout cela est prouve, i° par la quittance donnée par Morin à
Cliailcs Constant, de la somme de 3ooo francs payés par les sieurs Closel
et Joseph Bernard, acquéreurs de ses Liens; 20 par une procuration,
du
avril i 8 i 5 , donnée par le colonel Chambaud au sieur Bujadoux
pour sc faire payer, par les sieurs Closcl et Bernard, de la somme de
3 ooo francs cjui lui ¿luicul dus par Constant ; 3 ° par une déclaration
�( »8 )
revit le sieur C h am b a u d - B la n c h a r d , et ils convinrent
d ’accepter, chacun pour moitié,
la subrogation de
l ’obligation Fongheasse, que le notaire Girard devait
leur faire; mais comme le colonel n ’avait d ’autre b ut ,
dans celte affaire , que celui d ’exercer un acte de
bien faisance envers Bou ch et , et d ’empêcher q u ’il ne
fut victime de la confiance trop légère q u ’il avait eue
en G i r a r d , il fut convenu avec ce dernier que le
colonel arrêterait les poursuites de M e D e l a u n e , en
payant ses créances, et q u e , sur le r e s t a n t du prix
de la cession, Bouchet serait mis à couvert des sommes
q u 'il avait empruntées ou cautionnées dans l ’intérêt de
Girar d.
Les deux cédataires atteignaient ainsi leur b u t :
C h a m b a u d - B la n c h a r d , créancier de. G i r a r d , obte
nait le paiement de sa créance, et le colonel servait
ses affections, en rendant service à Bouchet. Aussi ,
tout étant ic gl e, le 5 fcvn cr 1 8 1 5 et i>ar
acte reçu
A
»
C h e v a l ie r , notaire, G ir ard transporta, avec subroga
tion , au colonel C h a m b a u d et ail sieur C h a m b a u d Bl anch ard , l ’eiFet de l ’obligation Fongheasse, du i 3
mai 1809, et de l ’inscription qui l ’avait suivie.
Ce
du sieur lîujadoux, du 22 janvier 1822, qui établit qu’ il y a eu
changement de rang entre Bujadoux et le colonel; que les fonds pro
venant de la créance Moriu ont été employés à payer le prix de la
cession Fongheasse, et ont été touchés par M 0 Delaune, qui les a
reçus comme créancier ou fondé-de pouvoir des créanciers de Girard
cl Bouchet.
�( 20 1
transport fut signifié à Fongheasse, le 22 du
même
mois.
Les sieurs C h am b a u d avaient, comme on l ’a v u ,
accepté, chacun pour moitié ,
l ’effet du
transport
du 5 février 1B 1 4 ? dont le prix n ’était autre que la
somme de 10,862 fr. 5 o c . , montant de l ’obligation
du i 3 mars 1809.
Il
est
inutile
de
rechercher
comment
le
sieur
Ch am baud-B la nchard s’est acquitté de sa moitié du
prix de cette cession, pu isque, plus heureux que le
colonel , il a pu échapper aux poursuites et aux diffa
mations de la veuve V i l l e v a u d , quoique seul il fût
créancier du sieur G ir a r d ; mais il est indispensable
de faire connaître les moyens employés par le colonel
pour opérer sa libération.
Ces moyens furent simples, et sont déjà suffisamment
indiqués par ce que l ’on connaît des faits de la cause.
M e Delaune était porteur de deux effets; le premier,
à éch éance le 20 mai 18 14 5
somme de 2000 f r . ,
souscrit par Girard et endossé par Bouchet; le second,
qui devait échoir le 22 du même m ois, de la somme
de i o 5 o fr. , était souscrit par Bouchot et endossé par
Girard. L e colonel C h am b au d paya ces deux créances
moins 5 o f r . , et en retira les litres. Ensuite le colonel
C h a m b a u d , pour s'acquitter dos ?.4 3 i b ‘*
centimes
restant pour parfaire la somme de 5 /|3 i fr. 2S c e n t . ,
prix de la subrogation de l’obligation de 10,862 fr.
5 o centimes, dont ¡1 avait acquis la m oit ié, fit remise
à Girard d ’obligations qui lui étaient ducs par dift’é-
�( 3o )
rens particuliers; et ce dernier, à son t o u r , suivant
la convention qui avait été arrêtée, en transporta à
Bouchet ce qui lui était nécessaire pour le nantir des
sommes q u ’il avait payées ou devait payer à sa dé
charg e, et le mettre à couvert des effets des cautiounemens q u ’ il lui avait prêtés (i ).
Si l’on s’arrête un instant sur ces faits, la réflexion
la plus sérieuse ne saurait permettre d ’y apercevoir,
ni l ’intention du c o l o n e l de trom per la veuve V illev aud ,
ni même la possibilité que cette veuve souffrit le plus
léger préjudice par l ’effet du transport fait aux sieurs
C h a m b a u d , si toutefois elle avait eu la précaution de
surveiller ses droits.
E n effet, s’il est vrai que l ’intérêt soit le mobile
le plus ordinaire des actions des h om m es , et q u ’il
faille rechercher, dans l ’am ou r de soi-même mal en
tendu , l a cause ou l ’origine des actes qui affligent
la morale ou t r o u b l e n t l a s o c i é t é , ou se demande
( i ) Ces faits sont prouvés , i° par le rapport de l ’effet de iooo francs,
acquitté des deniers du sieur Chambaud; 2° par un extrait du livrejournal de M® Delaunc , établissant que le colonel Chambaud a payé les
deux effets qui étaient dus par Girard et Bouchet ; 3° par la déclaration
de six débiteurs du colonel Chambaud, donnée devant Pclissière, notaire
à Chamaliérc, le
23 janvier
1822, prouvant qu’ils ont payé aux sicnrs
Girard et Bouchet ce qu’ ils pouvaient devoir au colonel Chambaud,
savoir : à Girard, la somme de 1700 f r . , cl à Bouchet, celle de 700 fr. ,
faisant ensemble les 2^00 fr. qui étaient encore dus par le sieur Clmmfoaiul, pour s’acquitter du prix du transport que lui
Girard.
avait
consenti
�( 3. )
vainement les motifs qui auraient pu porter le colonel
C h a m b a u d à nuire à la veuve Y illevau d . L e colonel
ne pouvait porter à cette femme ni haine n i a ffection
personnelle : leur position sociale les tenait à une trop
grande distance l ’un de l ’a u t r e , pour q u ’aucun de ces
pù t déterminer sa volonté ou influencer sa
sentim ens
conduite. Si l ’on consulte les intérêts pécun iaires q u i
seuls pouvaient établir quelques relations entre ces'x
deux ind iv idus, on s’assure que la veuve Y il l e v a u d
devait au colonel C h a m b a u d Gooo fr. , somme bien
considérable pour sa fortune. C e cap it al, si important
pour le colonel, avait pour hypothèque et garantie'
p rin cip ale
le p r é provenu du sieu r d ’A lb ia t : ainsi
le colonel C h a m b a u d , loin de chercher à nuire à la
veuve Y i l l e v a u d , devait au contraire, dans son in térêt'
p er so n n el, vivement d é sire ra i fa ir e tout ce q u i pou
vait coopérer à la prospérité des affaires de sa dé b i
tr ic e , et à assurer ainsi l ’effet de l ’ hypothèque q u ’il*
avait sur ses biens.
U n sentiment aussi naturel était-il combattu par
des a ffection s ou
un
intérêt c o n t ra ir e , assez
fort
pour porter le colonel à se nuire iï soi-m êm e , en
causant
un
préjudice à la veuve Y il l e v a u d ?
Mais
aucune intimité n ’existait entre le colonel et le notaire
G i r a r d ; toutes leurs relations se bornaient à celles
que faisaient naître leurs fonctions d ’administrateurs
de la même mairie. L e colonel ne connaissait point
l ’état des affaires <le G ir a r d ; la circonspection de ce
dernier les avait entourées du voile le plus épais, voile
�(
que le
colonel
n ’avait
)
aucun intérêt
à soulever,
puisque Girard ne lu i devait absolum ent rien y fait
important et dont la certitude est aujourd’ hui acquise
au procès, puisque tous les efforts de la veuve Villevaud ont été inutiles pour établir que le colonel f û t
créancier de G ir a r d , et q u ’elle en est ré du it e, sur ce
f a i t , à ses assertions personnelles, q u i , dans tous les
cas, seraient insignifiantes, mais dont le mensonge est
encore prouvé par la conduite odieuse et coupable çle
cette femme. O u sent assez q u e l ’ i n t é r ê t q u e Bouchet
inspirait au colonel ne pouvait être ni assez v i f , ni
assez a v e u g l e , pour le porter à pratiquer une fraude
dont il aurait été la première victime.
E n f i n , si le colonel C h a m b a u d eut désiré la cession
de l ’obligation du 1 3 mai 1809, et q u ’ il eût pensé
q u ’il était de son intérêt de l ’ob te nir, avait-il besoin
pour cela de la coopération de la veuve V i ll ev au d , et
de la porter à s o u s c r i r e l ’acte du 2 7 janvier 1 8 1 4 ? “
]\Iais la veuve V ill ev a u d était é t r a n g è r e îi l ’obligation
Fongheasse; elle n ’y était point partie; elle ne l ’avait
point acceptée; elle ne se l ’était appropriée par aucune
notification ,
ni même par aucune
inscription ; de
manière que cette obligation était toujours restée à la
disposition de G i r a r d , qui pouvait ou en recevoir le
m o n t a n t , ou en transmettre les effets à un tiers, hors
la présence de la veuve V i l l e v a u d , sans que le cédataire eut rien à craindre des oppositions ni des pour
suites de cette femme.
Cette démonstration
devient
encore
plus
évi
�(
33
)
d e n t e , si l ’on consulte la position de la veuve Villevau d.
Comme on l ’a d i t , l ’obligation Fonglieasse ne lui
transm ettait
aucun d r o i t , pu isq u’elle n ’y était point
pa rti e, et q u ’elle ne se l ’était appropriée par aucun
acte. L acquisition q u ’elle avait faite de Girard était
donc dépourvue de toute espèce de garantie, jusqu’à
l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ; mais, par cet acte, la veuve
Vi ll ev aud acquérait une hypothèque sur le domaine
de la G ara n die, qui n’était grevé d ’aucune inscription,
ainsi que cette femme le reconnaît elle-même, et que
l'établit d ’ailleurs le certificat qui est rapporté; donc
la veuve V i l l e v a u d , loin de faire aucune perte ou de
compromettre ses intérêts en souscrivant cet act e,
faisait au contraire une chose qui lui était avantageuse
sous tous les rapports , et portait ainsi remède aux
suites funestes de la négligence q u ’elle avait mise à
s’approprier l ’obligation Fonglieasse.
Mais pour que l ’acte produisit des effets avantageux,
il fallait q u ’il fût exécuté, et q u e , suivant ce qui y
est prescrit, l ’inscription à laquelle il donnait droit
fut prise de suite. L a veuve Vill ev a ud néglige une
formalité aussi essentielle, ou au moins elle ne la
remplit que le 11 mai 1814 5 quatre-vingt-treize jours
après l a c t é du 27 janvier; e t , pendant ce te m s, u u
sieur B o u ch o t, de C l e r m o n t , poursuit Girard pour le
contraindre au paiement d ’ une somme de 5 ooo francs.
Il obtient de son débiteur une hypothèque sur le
domaine de la G a ra n d ie , prend inscription le même
�34 )
jour que ïa veuve V i l l e v a u d , et se trouve ainsi en
(
concurrence avec elle.
L a veuve Vi ll ev aud ne devait imputer q u ’à ellemême les effets de sa propre négligence; mais au moins
si elle voulait adresser à q u e l q u ’un des reproches
fon d és, elle ne pouvait raisonnablement se plaindre
que du
notaire C h e v a l ie r , en qui
elle avait placé
toute sa confiance.
Il
faut en effet c o n v e n i r q u e cet homme paraît avoir
cruellement abusé du ci'édit q u ’ il avait a c q u i s dans la
ville de C l e r m o n t , et q u e , comme beaucoup d'autres,
la veuve V i ll e v a u d a été sa victime.
Les notaires Chevalier et Girard étaient liés d ’amitié
et d ’intérêt; leur chute devait être prochaine; et ils
sentirent la nécessité de réunir leurs efforts pour en
reculer l ’instant et cacher l ’ état de leurs affaires. Pour
c e la , il f a l l a i t , autant que possible, éviter ou retarder
tout CC q ui pouvait d o n n e r fies c r a i n t e s s u r leur solva
bilité , ou diminu er leur crédit; de là le retard mis
par Chevalier à l ’ inscription de la veuve V i ll ev a u d
contre Girard. Il est même à présumer que l ’inscrip
tion n ’aurait point été prise, si l ’audace de ces deux
notaires n’eù i éveillé la surveillance du colonel C h am b aud .
L ’obligation Tongheasse avait été reçue par C h e v a
lier. C e notaire et son associé Girard vouluren t abuser <1«
la m i n u t e , q u ’ils colportaient chez tous les c a p i t a l i s t e s
de C l e r m o n t , afin d ’en faire ressource et de la eeder
Une seconde f o i s , après le t r a n s p o r t q u ’ils en avaient
�(
35
'
)
consenti aux sieurs C h a m b a u d , le £> février i 8 i 4 * L e
colonel, informé de ces démarches, app rit 'b ie n tôt-,
par de nouvelles informations, que l ’ inscription de la
veuve V i l l e v a u d avait été négligée. Cette d o u b l e per
fidie devait exciter toute l ’indignation d’ un militaire :
aussi le
colonel
Chambaud ,
dont
l ’activité
était
doublée par un ressentiment bien légi tim e, m u lti
pliait-il les démarches pour découvrir C h e v a lie r, q ui
l ’évitait
avec le plus grand s o i n ,
et
parvint-il à
l ’o b l i g e r , tout à-la-fois, à prendre inscription pour la
veuve V i l l e v a u d , et à renoncer au projet d ’escroquerie
avait conçu.
Considérée sous ce point de vu e, la position de la
q u ’ il
veuve Vi llevaud était malheureuse. L e colonel C h a m
b a u d , il est v r a i , n ’avait rien à sc reproch er, même
dans le for i n t é r ie u r } sa conduite était conforme aux
règles prescrites par la délicatesse la plus susceptible ,
et devait être approuvée par tout homme d ’honneur.
C e p e n d a n t , d ’ un autre c o t é , on ne pouvait se défendre
d ’ un sentiment de pitié pour une foin nie de la classe
d e l à V i l l e v a u d , sans instruction, présumée 11 avoir
aucune connaissance en affaires, et dont l'hypothèque
avait péri, ou au moins était considérablement dimi
nuée par la prévarication du notaire, dont le devoir
était de 1’asSurcr et de la conserver; niais cet intérêt
cesse, et se change même bientôt en un sentiment
d ’ indignation bien v i f , si l’on examine de plus près la
conduite de la veuve Villevaud.
L e tort q u ’avait souffert cette femme pouvait aisé
�ment se réparer : le notaire Girard laissait des res
sources suffisantes pour l ’ indemniser, si toutefois elle
eût profité de ses avantages, et apporté à la conserva
tion de ses droits un peu de vigilance et d ’activité.
M a i s , loin de-là, la veuve Vill ev aud néglige toute
précaution , n’exerce aucune des actions que la loi lui
o u v r a it, laisse échapper son gage, v en d u te v i l p r ix ,
s’évanouir toutes les autres ressources de son débiteur;
dédaigne même de produire à l ’ordre; et l'o n ne saurait
comment expliquer une négligence'aussi s o u t e n u e et
aussi déplor able, si l ’événement ne venait apprendre
que cette étrange conduite était le fruit de la médi
ta tion, et combinée pour servir bientôt de prétexte
aux diffamations que cette veuve s’est permises, et à
l ’action odieuse
q u ’elle a dirigée contre le colonel
Chambaud.
Quelques détails sur ces faits sont indispensables.
1° A 1 époque d e l a d i s p a r i t i o n de G i r a r d , le do
maine de la Garandie fut abandonne, et les bestiaux
q u i l ’animaient furent vendus.
La veuve Y il levau d
pouvait veiller à la conservation des récoltes et du
prix de ces ventes; elle devait même faire tous ses
efforts pour s’en emparer et en profiter; cependant la
veuve Y il lev a u d ne fait aucune démarche, ne prend
aucune
précaution, et, cette première ressource lui
échappe.
2° Il est établi, par le rapport des actes, que G i r a r d
avait acquis les différons héritages composant 1« do
maine de la G a ra n d ie , moyennant 22,8/1 î ir. 20 c .;
�e t , par les baux à fe rm e, que cette propriété était
d ’un revenu de i 4 T9
ainsi,
bien é v i d e m m e n t ,
le domaine valait au moins 3 o,ooo f r . , sur-tout si on
ajoute l ’augmentation du prix q ui devait résulter de
l ’adjonction des best ia ux, des plantations et répara
tions faites par G ir a r d , et de la construction de bàti
mons pour l ’établissement d ’ un m o u l in , objet qui seul
va ut plus de 3 ooo fr. Cependant une propriété aussi
précieuse est vendue moyennant 9000 fr. L a vilité du
prix de la vente était évidente. L a veuve Y i l l e v a u d ,
comme créancière in scr ite , avait le droit de faire une
surenchère : elle n ’ use point de cette facu lté, et , par
sa négligence, elle laisse ainsi disparaître et s anéantir
les deux tiers de son gage. Mais la veuve Y i l l e v a u d
connaissait la valeur du domaine de la Garandie }
outre la note à consulter, q u ’elle avait obtenue d u
colonel C h a m b a u d , elle avait pris des renseignemens
avant Vacte du vingt-sept ja n v ie r 1B x4 ? postérieure
ment à la v e n te , elle renouvela ses démarches; et ,
ayant obtenu les mêmes résultats, elle manifesta 1 in
tention de faire
u n e
surenchère ; mais plus ta rd, ses
dispositions changèrent, et elle ne craignit pas de dé
clarer que si elle avait abandonné ses d ro its, c ’est
p arce q u e lle avait un b illet de garantie du co lo n el
Chant ban d (1).
3 ° Un ordre est o u ve rt, et la veuve Y il le v a u d ne
(1) Une déclaration de Châties Cuiütaut, du
commitc tous ces faits.
23
janvier 182a, fait
�( 38 )
fait aucune production. Cependant elle ne pouvait être
primée que par
l ’ hypothèque légale de la femme ,
hypothèque légale q u ’e lle con n a issa it, et qui avait
été fixée à la somme de 7 7 1 9 fr. Go c. , par jugement
du 3 août 1 8 1 6 , et q ui d ’ailleurs était éteinte,
ou
au moins pouvait l ’être par la valeur des autres pro
priétés appartenant à Girard. L a veuve V ill ev a ud était
ensuite en concurrence avec le sieur Bouchet, de C le r
m o n t , dont la c r é a n c e était de ^996 fr. ; mais cet
objet devait nécessairement souffrir une d i m i n u t i o n
considérable, s’il n ’était même totalement acquitté par
l ’effet de la saisie que Bouchet avait faite du cau
tionnement de G ira rd et de l ’usufruit de la moitié
des biens de sa femme, à laquelle il avait survécu ;
précautions que la veuve Y il l e v a u d avait entièrement
■négligées de prendre dans son intérêt (1).
Voila b i e n des négligences. U n abandon aussi com
plet, de la part de la v e u v e " V i l l u v a u d , d e s m o y e n s qui
pouvaient lui conserver ses droits, serait inconcevable,
si les faits ne venaient ensuite apprendre quelles étaient,
en agissant ains i, les véritables intentions de cette
fem me.
L e colonel C h a m b a u d avait été maire d eC ham aliè re
(1) Le certificat d’inscriptions, rapproché des titres qu’ il relate, et
qui sont rapportés, prouve que la veuve Villcvaiul n'était primée <[,|U
p:»r l'hypothèque légale de la femme, et venait en concurrence avec
Bouchet, les autres inscriptions étaiil prises sans droit, et les créances
ayant été acquittées.
�et de Royat jus qu’en juillet i 8 i 5 . L a veuve V ill e v a u d
avait un fils soumis à. la conscription , et x’eforme, le
3 décembre i 8 i 3 , comme estropié et infirme.
Cette
femme était encore débitrice du colonel d ’une somme
de 6000 f r., dont elle s’était libérée le 1 5 février i 8 i 5 :
elle réunit tous ces faits, les combine péniblement; et,
aidée des conseils d ’ un homme profondément immoral,
parvient à ourdir un plan de calomnies et, de diffama
tions, à l ’aide duquel elle espère donner quelque fa
veur à l ’action q u ’elle veut diriger contre le colonel.
Cependant la veuve V i ll e va u d n ’avait encore aucune
idée fixe, ni plan définitivement arrêté; la nombreuse
série de ses suppositions, contradictions et mensonges
ne devait être inventée ou produite q u ’en d é t a il , et
suivant les besoins de sa cause.
L a première idée q u i préoccupa la veuve V i ll e v a u d
et son conseil intime fut q u ’il lui fallait un titre pour
légitimer une demande contre le colonel C h am b a u d :
cela était embarrassant; le colonel ne l u i avait rieu
promis : il ne lui avait remis q u ’ une note à consulter,
propre à la diriger dans les démarches qu elle avait à
faire et dans les renscignemeps q u ’elle avait à recueillir;
mais ces difficultés devaient être bientôt surmontées
par les heureuses dispositions de la veuve V i l l e v a u d ,
aiclee du génie de son digne coopérateur. La note à
consulter, du colonel C h a m b a u d , devait servir deb a se
à l’écrit que l’on m éd it a it ; e t , au moyen d ’ un chan
gement et d ’une addition, ajoutés à la rédaction
la
veuve Vill ev aud se fait écrire et fa b r iq u e r un titre ,
�C 4o )
q u ’elle dépose, le 3 juin 1 8 1 8 , chez Me C â v y , notaire
à Clernicmt.
C e tt e pièce est ainsi conçue r
« Il existe une hypothèque de 11,000 francs, que la
« veuve V i l l e v a u d a placée sur une maison à C lerm on t,
« et
je
« sur
lu i
dem ande
main-levée pour la faire transférer
un domaine de m o nt a g n e , de la valeur
de
« 3 o,ooo f r . , qui n ’est grevé d ’aucune hyp ot hèq ue,
«
e t JE PROMET S LA. G A R A N T I R E T L A F A I R E T E N I R Q U I T T E .
« S ig n é A .
Si
CllAM BAUD.
»
l ’on rapproche cette pièce fausse de la note û
consulter, donnée par le colonel, et rapportée
à
la
page 20, on voit que l ’inventeur, pour faire un billet
de garantie d ’une pièce aussi simp le, n ’a eu besoin,
en la copiant et en la revêtant d ’une fausse signature,
que de faire demander la main-levée
et
p a r le c o l o n e l ,
d a n s son in té r ê t}
en substituant aux mots o n d e
m a n d e , ceux-ci : j e l u i d e m a n d e , e t d ’ a j o u t e r ensuite à
la rédaction de cette note à consulter, la p r o m e s s e d e
garantir et cle fa ir e tenir quitte > comme conséquence
nécessaire de la main-levée que le colonel avait de
mandée, et que la. veuve Vi llevaud devait lui accorder.
C e premier pas f a it, la veuve Ville vaud cite, le
3 août 1 8 1 9 , le colonel C h ain b au d eu conciliation.
Dans cette citation, ou elle demande contre le colonel
le paiement du montant de son obligation, et conclut
à l ’adjudication de dornmages-intérêts, elle expose, eu
termes généraux, q u ’ellq a été victime du dol
etde
la
fraude pratiqués par le colonel pour lui faire souscrire
�l ’acle du 27 janvier 18147 contenant abandon de son
hvpothèque; que cet acte était fait clans les intérêts
du colonel, créancier de G ira rd , q u i , par ce m o yen,
était parvenu à mettre sa créance à couvert; la veuve
Villevaud ajoute q u ’ott ne parlera point de toutes les
m anœ uvres, de tous les m oyens que mit en usage le
co lo n el C h a m b a u d y mais que lorsq u’elle a consenti à
l ’établissement de son hypothèque sur le domaine de
la G ara ndie , le colonel
lui
rem it
un écrit klans leq u el
il lu i prom it toute garantie. A u reste, la veuve V i ll e
vaud ne donne point copie de cet écrit, et n ’indique
pas le notaire chez lequel il est déposé.
Les parties comparurent au bureau
de paix.
La
réponse du colonel fut simple : il n ’est point partie
en l ’acte du 27 janvier 1814 ? cet acte était consenti
au profit de G ir a r d , qui pouvait disposer de l'o bli
gation en faveur de qui bon lui semblerait; ainsi le
colonel ne devait ni ne pouvait rien promettre à la veuve
V ill ev aud; mais le colonel déclarait en outre n ’avoir
ja m a is é c r i t , s i g n é , ni d é l i v r é aucun engagement
à cette veuve; il la sommait de représenter cette pièce,
protestant de
f a u x
} et se faisant, à cet égard, réserve
de toute action civile et criminelle.— L a veuve V i ll e
vaud exhiba alors d ’une expédition d ’ un acte de dépôt
de cette pièce chez C a v y , notaire, et ajouta que si
çet écrit 11 était p a s du c o lo n e l, ce serait une nou
v elle supercherie q u ’elle n’a f>u soupçonner.
Ainsi, en réunissant ce qui est contenu en 'la citar
lion et au procès-verbal, relativement à cette pièce,
6
�t f r i
( 4
0
on voit que la veuve était préparée à répondre aux
objections; que l ’écrit devait être présenté comme
a y a n t é t é r e m i s p a r le c o l o n e l ,
le n iait, la
fa u sseté
lu i
et que si ce dernier
de cet écrit devait être invoquée
comme moyen par la veuve V i l l e v a u d , et être pré
sentée comme l ’ouvrage du colonel, et
une su p erch erie
employée par lui pour tromper la v e u v e , en lui fai
sant
l u i
-
m êm e
rem ise
d ’une pièce aussi importante ,
comme vraile, q u o iq u ’elle fût fausse. L a suite appren
dra comment la veuve V i ll ev au d a été ensuite obligée
de reconnaître la fausseté de cette pi è c e , de l ’aban
d on ner, ainsi que de démentir l ’odieuse fable dont
elle avait accompa^jié cette production.
On
pourrait penser que la résistance du colonel
C h a m b a u d , et les moyens q u ’il employait pour la
justifier, inspirèrent à la veuve V ill ev a u d quelques
craintes, de salutaires réflexions; peut-être même ses
remords l ' e m p ê c h è r e n t en e f f e t , pendant plus de huit
m o i s , de former sa demande ; et il
est p r o b a b l e
que
cette femme n ’aurait point rompu le silence, si le
colonel, pressé par le désir de repousser la calomnie
dont il était l ’o b je t , et sentant d ’ailleurs la nécessité,
dans l ’ intérêt de ses enfans, de détruire et faire dé
clarer fausse la pièce q u ’elle avait osé produire contre
l u i , ne l ’avait lui-même prévenue.
L e 22 avril 1820, le colonel C h a m b a u d somma ,
par acte extra-judiciaire, la veuve V i ll ev au d de dé
cl ar er si elle entendait se servir de la pièce p:>r elle
déposée chez M r C a v y .
C e l l e f e m m e r é p o n d q u ’elle
�C 4 3 -)
F
n ’entend rien aux affaires; que tout ce q u ’ e lle sait ,
c ’est q u e l l e a donné au co lo n el onze m ille fr a n c s
dont elle n ’a rien to u ch é ; d ’ailleurs, la veuve Y i l l e
v a u d , sans s’expliquer sur la pièce qui faisait l'objet
de l ’acte auquel elle avait à répondre, finit par déclarer
q u ’elle
ofire de s’en rapporter à la décision de deux
jurisconsultes.
Cett e réponse est des plus singulières. C e n ’est plus,
en effet, un b ille t de garantie que lu i a remis le
co lo n el C ha m ba ud} pour lui tenir lieu de l ’ hypotbèque
q u ’elle aband onn ait, mais c’est actuellement nnc somme
de 11,000 fr. q u ’elle, veuve Y i l l e v a u d , a donnée au
colonel C h a m b a u d , et q u ’elle réclame. Il n ’est plus
question de pièce ou de titre qui puisse lui donner
action contre le colonel.
Quoi q u ’ il en s o i t , le colonel donna des suites à
cette première démarche. L e 22 mars 1820 , la veuve
Y il l e v a u d fut assignée devant le tribunal
civil de
C l e r m o n t , pour répondre-sur la demande qui était
formée contre elle, i° en d é s a v e u et lacération de la
pièce déposée chez M* C a v y ; 20 en réparation d ’ hon
n eu r , et suppression d ’écrits calomnieux; 3 ° en dommages-intérèts applicables aux pauvres, du consentement
du colonel C h am b a u d .
La veuve Y il l e v a u d était enfin obligée de s’expliquer j
il fallait répondre à la demande du colonel : tous dé
tours, tous subterfuges devenaient désormais impossibles
et inutiles; la vérité allait être connue : et la veuve
Y i l l e v a u d savait bien q u ’elle ne p ou v a it so u te ni r, par
�44 )
aucune ressource, le singulier titre q u ’elle avait eu
(
l ’audace (le se créer.
L a veuve V illev aud hésite encore : près d ’ un mois
s’est écoulé sans q u ’elle se soit arrêtée à aucun parti.
U n retour franc à la vérité pou vait désarmer son ad
versaire et la Justice, lui rendre des droits à l ’estime
q u ’elle avait cessé de mériter; mais le conseil intime
l ’obsède; il lui fait entendre que son ignorance doit la
mettre à l ’abri de t o u t e s poursuites relativement à la
pièce fausse; q u ’elle en sera quitte pour d é c l a r e r que
cet écrit lui a été remis, p a r personnes i n c o n n u e s de
la part du colonel; enfin , la v e u v e , ainsi rassurée,
travaille, de concert avec son digne coopérateur, au
plan de diffamation qui doit être substitué au billet
de garantie f a u x , que l ’on était forcé d ’abandonner.
C ’est alors que la qualité de maire du colonel et de
créa ncier de la veuve J^ illeva u d est destinée à donner
de la force et dé la v r a i s e m b l a n c e a u x moyens de d o l
et de fr a u d e q u ’elle veut employer; le colonel l ’aura
excédée de sollicita tion s verbales, il les aura renouvelées
plusieurs fois par écrit
la veuve "Villevaud s’arrête
là; c’est d ’abord tout'ce q u ’elle invente. Les menaces
du colonel de faire partir son f i l s ,
ses sollicitations
pou r obtenir les écrits q u ’il avait eu l ’imprudence de
lu i adresser, la scène de Chevalier, ne devaient point
figurer dans ce premier plan. L e génie même ne crée
pas tout du premier jet.
Knfin, six ans et sept mois s’étaient
l’acte de transfert
de . l ’ h y p o t h è q u e de
écoulés
depuis
la veuve Ville-
�(45 )
vau d ; la conscription avait ¿té abolie depuis le même
tems; il y avait cinq ans et demi que la veuve V i l l evaud s’était libérée envers le colonel C h a m b a u d ; de
puis juillet
i
8 i 5 , le colonel avait cessé ses fonctions
de maire, et le notaire G ir ard avait disparu dans le
moi s
de novembre de la même année, lorque la veuve
V ill ev a u d , dix mois après la citation en conciliation,
et deux mois après les poursuites que le colonel avait
exercées contre elle, se décide elle-même à former sa
demande, par exploit du 12 juin 1820.
Les conclusions de la veuve Villevaud ont pour objet
de contraindre le colonel k lui rembourser la somme
de 11,862 fr. 5 o c . , q u ’elle prétend que le colonel a
touchée à sa place, dans l ’ordre Fonghasse, et à l u i
payer 6000 francs pour dommages-intérêts.
Si l ’on en croit le libelle de cet exploit, l ’acte du
27 janvier 18 1 4 est n u l , parce q u ’il est le fruit du
dol et de la fraude pratiqués par le colonel C h a m b a u d ,
dans son intérêt, et pour s’approprier, comme créan
cier de G i r a r d , et au détriment de la veuve V i ll e v a u d ,
le montant de l ’obligation Fonghasse. C e dernier a
effectivement employé, pour l ’obtenir, les manœuvres
les plus coupables. Maire de sa co m m une, et créancier
de la veuve V ill ev aud, il a abusé de l'influence que
pouvait lui donner cette double qual ité ; d ’abord il a
employé des sollicitations verbales; les ayant vainement
réitérées, il les a renouvelées p a r é c r it, CE
qui
SERi
JU STIF IÉ y enfin la veuve Vill ev aud n’a été vaincue
que p a r un nouvel écrit (¡ni lu i est p a r v e n u , ( ¡u c llc
/
�a cru être de la main du c o lo n e l, et signe' p a r lu i.
A u re ste , la veuve Vill ev aud ne parle point encore
de la menace que lui aurait faite le colonel C h a m b a u d ,
de faire partir son fils comme conscrit.
Les expressions de la veuve V ill ev au d sont remar
quables : les sollicita tion s du co lo n el ont é té renou
velées p a r é c r it ! ........ Combien de fois? O ù sont *ces
écrits? pourquoi la veuve Vi ll ev aud ne les rapportet-elle pas? — E l le a é té 'vaincue p a r un nouvel écrit
q u i lu i est p a r v e n u , q u e lle a cru être de la main du.
c o lo n e l, et sig n é p a r l u i ! ....... Mais cet écrit est-il
autre que celui déposé chez M e C a v y ? Dans ce cas où
est-il? pourquoi ne le produit-elle pas? S i, au contraire,
c ’est le m êm e , cette pièce est fausse; la veuve V i l l e
vaud est obligée d ’en convenir; mais encore la veuve
V illev aud
se contredit elle-même sur le fait de la
remise de cet éc rit, p u is q u e , dans sa citat ion, elle
(lit que le co lo n el le lu i a r e m i s y q u ' a u bureau de
p a i x , elle soutient que la fa u s s e té serait une nouvelle
supercherie d u c o lo n e l; q u e , dans l ’acte extrajudi
ciaire , elle refuse de s’expliquer sur cet é c r i t , et
cherche
à dénaturer le f a i t , en substituant une somme
de onze m ille f r a n c s 3 p a r e lle prétendue donnée au,
c o lo n e l, au b illet de garantie q u e lle aurait reçu de
l u i , tandis q u e , dans l ’assignation du 12 j u i n , elle
détruit elle-même toutes ces premières déclarations, eu
disant que l ’écrit lu i est p a r v en u , expressions qui font
parfaitement comprendre que le colonel n ’aurait pas
remis lui-même U la v e u v e V i l l e v a u d la pièce dont il
�s ’a g it , mais q u ’il l ’aurait f a i t parvenir à celte femme
par un tiers. Ainsi la veuve V i l l e v a u d ; après avoir
commence par fa b r iq u e r un titre f a u x pour se créer
un droit contre le colonel, a ensuite recours au men
songe pour excuser une action aussi criminelle , et
donner quelque apparence à la calomnie qui devait
servir de fondement à l ’imputation de clol et de fra u d e
q u ’elle voulait substituer à la pièce fausse pour sou
tenir sa demande. Mais ce q u ’ il y a de certain sur ce
p o i n t , c’est que la veuve Vill ev aud ne rapporte aucun
écrit établissant des so llicita tio n s j ou constatant une
promesse de garantie de la part du colonel; que tou t
se réduit à la production de la note à co n su lte r, si
favorable au colonel, et si propre à dévoiler la con
duite artificieuse de la veuve Villevaud.
Dans ses conclusions signifiées, la veuve V i ll e v a u d
ajoute aux imputations contenues dans le libelle de
son e xp loit, que le colonel a employé la menace pour
la porter à souscrire l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ; q u ’il
a même contraint sa vo lo nté, en la m enaçant de fa ir e
p a rtir son f i l s com m e conscrit.
L e colonel C h am b a u d devait penser q u ’enfin la
veuve Vill ev a ud avait épuisé toutes ses ressources; il
crut en conséquence q u ’ il était de sou devoir de lui
répondre, et publia un premier Mémoire à cet effet.
Ses moyens étaient aussi simples que péreuiptoires.
D ’ab ord , partant du fait certain q u ’il n’avait con
tracté aucun engagement vis-à-vis la veuve V i l l e v a u d ,
et q u ’étant prouvé que cette femme avait fabrique
�une pièce fausse pour se faire un ti tr e , il soutenait que
toute action de dol et de fraude, relativement à l ’acte
du 27 janvier 1814 , ne pouvait être dirigée que contre
G i r a r d , partie en cet acte, et qui seul en aurait profité.
L e colonel disait ensuite q u ’il n ’avait jamais été
créancier de G ir a r d ;
q u ’ainsi il 11’avait jamais été
intéressé, même indirectement, à l ’acte dont la nullité
était demandée; mais q u e ,
lors même q u ’il serait
établi que G ira rd était le débiteur du colonel , la
veuve Ville vaud ne pouvait tirer de c e l l e c i r c o n s t a n c e
aucun parti avantageux, pu isque , par sa négligence
et à défaut d 'acceptation et de notification de la délé
gation faite en sa fa veur , par l ’acte du i 3 mai 1809,
cette obligation Fonghasse n ’avait jamais cessé d ’être
la propriété de G ir a r d , qui avait conservé la iacullé
de subroger à ses droits qui bon lui semblerait, sans
que la veuve V ill ev aud put s’en plaindre et critiquer
ce transport.
En fin le colonel C h am b a u d répondant aux im pu ta
tions qui lui étaient adressées, et notamment aux
menaces q u ’il aurait faites de faire partir le fils de la
V i ll ev a u d comme conscrit,
faisait observer que ce
jeune homme, disgracié de la n a tu r e, petit de taille,
estropié d ’ une main , avait des motifs de réforme telle
ment évidens, q u ’ il n ’avait aucune difficulté à craindre
ou à surmonter pour l ’obtenir; que d ’ailleurs, en fait,
cette réforme étant du 24 janvi er, 11’avait pu être la
cause impulsive ou influente de l’acte du 27 janvier^
qu'elle précédait de plusieurs jours,
�(
49 )
L a cause en cet état fut, portée au tribunal civil de
Cle rm ont j elle y fut l ’objet
d ’une discussion très-
solennelle, et il est important d ’analiser le jugement
q u i int ervint, le 11 août 1820, et qui se fait remar* quer par la solidité, la profondeur et la clarté de ses
motifs.
L a veuve V ill ev au d concluait à la nullité de l ’acte
du 11 janvier i 8 i 4 j et demandait contre le colonel
la restitution de la somme qu il avait reçue par suite
du transport de l ’obligation Fonghasse.
A l ’appui de ces conclusions, la veuve disait que
l ’acte du 11 janvier 1 81 4 était l ’œuvre du dol et de
la fraude du colonel, auquel elle avait profité, ainsi
q u ’elle offrait de le prouver. E lle ajoutait q u ’elle avait
été induite à consentir cet acte par les sollicitations
verbales et écrites du co lo nel, et par les menaces q u i
lui étaient faites de faire partir son fils comme conscrit,
faits dont elle offrait également la preuve. En fin e lle
a r tic u la it, com m e f a i t n ou vea u 3 q u ’elle se proposait
également d ’établir par témoins, q u e ,
postérieu rem en t
ïi l ’acte du 11 janvier 1814* le colonel l ’avait sollicitée,
de remettre les d e u x b illets q u i l lu i avait don n és 3
sous le p rétexte que ces d e u x p ièces étaient désorm ais
inutiles.
Sur ce premier point :
L e ju g e m e n t , s’arrêtant au principe qui exige que
to u t
demandeur
établisse
sa
demande ,
reconnaît
d ’abord en f a i t , que la veuve V i ll e v a u d ne prouve
rien ; que la fraude d o n t elle se plaint est invraisem7
�( 5o )
b la ble; que les faits q u ’elle articule sont inadmissibles
et sans gravité ; que la fausseté même de quelques-uns
est manifeste. E n droit : les premiers juges pensent
que
l ’admission de la preuve
offerte par la veuve
Y i l l e v a u d , outre q u ’elle serait une contravention for
melle à la règle qui défend l ’admission de la preuve
dans tout différend qui excède en valeur la somme de
i 5 o francs, et un exemple de la facilité avec laquelle
on peut renverser les conventions, doit dans l ’espèce
particulière être d ’autant plus f o r t e m e n t rejetée, que
l ’objet de la veuve Y il l e v a u d serait d ’o b t e n i r , sans
titre contre le colonel, une condamnation infamante
de la somme de 10,862 francs.
E x a m in a n t ensuite l ’article 1 1 1 6 du Code c i v i l ,
inv oq ué par la veuve Y i l l e v a u d , le jugement reconnait
q u 'il 11e peut s’appliquer q u ’aux parties contractantes5
q u e , dans ce cas seulement, on peut dire que Tune
a trompé l ’ a u t r e , m a i s q u e , dans l ’espèce, cet article
ne pouvait être i n v o q u é , p u i s q u e le c o l on e l était
étranger à l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 , et n ’en avait
retiré aucun bénéfice.
Les premiers juges croient devoir ensuite se fixer sur
chacun des faits articulés par la veuve V illev aud .
Ils s’occupent d'abord des sollicitations verbales et
écrites q u i lui auraient été adressées par le colonel.
Les premiers juges, après s’être convaincus du peu
d ’importance et de l ’insignifiance de ces sollicitations,
rejettent à cet égard la preuve offerte par la veuve
Yillevaud,
et se motivent sur ce que ceito femme
�n'avait point déclaré accepter l ’emploi fait en sa faveur
p ar
l ’obligation du i 3 mai 1809, et n ’avait même pas
pris d ’inscription en ver tu de ce titre ; sur ce que
l ’emprunt fait par Fonghasse n ’était autorisé par la
mère que jusqu’à concurrence de la somme de 10,000 fr.,
nu lieu de celle de 1 1 , 1 7 7 ^r * ? montant de l ’obliga.tion ; enfin sur la raison déterminante que C h am b aud
n ’étant pas créancier de G i r a r d , n'avait aucun intérêt
à l ’acte du 27 janvier 1814*
Q u a n t aux menaces faites par le colonel à la veuve
„Villevaud, et q ui auraient eu pour objet d ’inspirer
des craintes à cette femme sur le départ de son fils
comme conscrit,
L e tribunal rejette également la preuve de ce f a i t ,
parce que le colonel, comme maire, ne pouva it avoir
aucune influence au conseil de révision, où il n ’avait
pas même voix consultative; parce que le fils V i ll e v a u d
était atteint d ’infirmités q u i rendaient sa réforme im
m anq uab le; enfin parce que les opérations du conseil
de révision étaient terminées dès le 24 janvier 1 8 1 4 ,
conséquemment avant l ’acte du 27 , consenti par la
V ill e u a u d à G i r a r d , et hors la présence du colonel
Chambaud.
La justice devait enfin s’ occuper du fait art ic u lé ,
pour la première fois,
Villevaud,
à l ’audience,
par la veuve
et consistant à soutenir que le colonel
l ’avait sollicitée de lui remettre les deux billets q u ’il
lui avait adressés, comme désormais inutiles.
S u r ce p o i n t , le t r i b u n a l considère q u e ce fait n ’a
�été articulé q u ’en désespoir de cause. Il fixe ensuite
son attention sur le défaut d ’intérêt du colonel, q ui
n ’avait accepté la cession du 5 février 1 8 1 4 j» fIue pour
obliger le sieur Ch am b aud-B la nchar d et être utile à
Bouchet. E xa m in an t la pièce produite et avouée, le
tr ibunal reconnaît que cette note , qui ne contient
aucun conseil (ce q ui d ’ailleurs serait insignifiant)',
n'est autre chose q u ’ un Mémoire à consulter, propre
à éclairer la V ill e v a u d et à la d i r i g e r dans les renseignemens q u ’elle avait à prendre. Q u a n t au second écrit
déposé chez M e C a v y , et argué de faux par le colonel,
sa fausseté est reconnue; un m o tif relève même à cet
égard les variations de la veuve V i l l e v a u d , q u i , dans
sa c i t a t i o n , soutient que le co lo n el le lu i a j'em is,
tandis q u ’ensuite.elle déclare q u ’on le lu i avait f a i t
parvenir. Toutes ces circonstances, jointes au retard
de q u a t r e m oi s a p p o r t é à l ’inscription de la veuve
V i l l e v a u d , au fait c e r t a i n q u e l ’ i i yp oi l iù cj ue légale
avait pour garantie d ’autres biens que le domaine de
la G a ra n d ie , et réunies au silence gardé par la veuve
Vi ll ev aud pendant quatre ans et d e m i, et lorsque tous
les dangers q u ’elle signale étaient passés, et que conséquemment ses craintes devaient avoir cessé; tous ces
motifs réunis décident le tribunal à rejeter les preuves
offertes par la veuve Vi ll ev aud.
Il fallait ensuite examiner la demande du colonel
C h a m b a u d , consistant à obtenir la suppression <1« la
I’ièce fausse déposée chez M* C a v y , et des donnnagesintérêts.
�fÛ» ' *¡09
( 53 )
Su r le premier chef de cette demande, le tribunal
reconnaît la fausseté de la pîece, fausseté q ui était
d ’a i l l eu rs
prouvée par la sommation faite par le colonel
et par le silence gardé par la veuve V i l l e v a u d ; et sur
le
second,
le tribunal pense que l ’ignorance de la
veuve V i ll e v a u d peut l ’excuser; q u ’ il est possible que
quelques malveillans l ’aient trompée et induite en
erreur.
E n conséquence, le t r ib u n a l , statuant sur les deux
demandes, déboute la veuve V i ll ev au d de celle par
elle formée ;
déclare
fausse
la
pièce déposée chez
M° C a v y ; ordonne q u ’elle sera rayée et biffée de ses
minutes; et condamne la veuve Vill ev a ud aux dépens,
pou r tous dommages-intérêts.
C e jugement, en rendant au colonel C h a m b a u d une
justice rigoureuse et éclatante, ét ait, à l ’ égard de la
v e u v e ,V i l le v a u d , un acte d ’indulgence, dont toutefois
son adversaire se félicitait. L ’attention que le tribunal
avait portée à l ’examen de cette cause, les motifs pnissans q u ’il avait développés à l ’appui de son jugem ent,
l ’espèce de pitié q u ’il montrait pour les malheurs de
cette fe m m e, tout semblait se réunir pour l ’éclairer
et dissiper son erreur, si toutefois les passions pouvaient
se calmer à lu voix de la raison.
Mais la veuve V i ll e v a u d n’était pas vaincue; bientôt
elle interjette app el, prépare de nouveaux artifices, et
devient plus menaçante que jamais. L e colonel C h a m
baud devait faire la triste expérience q u ’ il est bien peu
d ’ hommes q ui sachent se garantir de l ’esprit de pré-
�vention, ennemi mortel de la justice et de la vérité.
Les déclamations, sans cesse répétées,
de la veuve
V i l l e v a u d , ses feintes douleurs, la perte q u ’elle éprou
v a i t , attachent à sa cause un jurisconsulte éclairé ,
mais dont l ’a me privilégiée
ne peut supposer tant
d ’astuce et de perfidie. Bientôt les apparences les plus
légères, les indices les plus équivoques sont réunis avec
art ; la haine de la cliente parait diriger la plume de
l ’avocat, q u i , sans a u t r e e x a m e n , d o n n e créance aux
faits les plus invraisemblables.
U n M é m o i r e parait
pour soutenir l ’appel; la chaleur et la rapidité du
s tile , les suppositions q u ’il co nt ient, des rapprochejnens injurieux pour le colonel, tout y semble réuni
pour amonceler des nuages funestes sur le fait à exa
m in er; et l ’adresse de la composition pourrait un ins
t a n t en imposer, si le défaut de critique q ui a inspiré
ce travail ne v e n a i t f r a p p e r les esprits ju d ic ieu x, et
leur montrer que le r é d a c t e u r , s e m b l a b l e à c e l u i q u i ,
à force de fixer une place v i d e , croit y voir un objet
q u i n ’existe pas, n’avait fini par regarder comme réels
les faits les plus invraisemblables et les plus absurdes.
Quoi q u ’ il en soit, la veuve Vill ev a ud annonce dans
son Mémoire que les faits de la cause n ’avaient pas
été suffisamment éclaircis en première instance; que des
circonstances graves avaient é té om ises; cependant la
lecture la plus attentive montre q u ’ il ne contient autre
chose que les faits déjà connus, et que la seule circons
tance nouvelle serait que « depuis le j u g e m e n t , la veuve
« Villevaud a appris q u ’après la co n lo c t io u de l ’acte t
�p
(55,)
« èt lorsqu’elle se fut retirée, C h a m b a u d , Girard et
« Chevalier entrèrent dans une ehambre à coté, d ’où
« ils sortirent après un entretien secret, et que le
« sieur Chevalier dit k son maitre-clerc, en présence
« de C h am b a ud et de G ira rd : Vous ne ferez l ’ins« cription de la veuve V i l l e v a u d , sur le domaine de
« la G aran d ie , que quand on vous le dira». On verra
bientôt ce que l ’on doit penser de ce dernier fait et de
la bonne foi de celle qui l ’a inventé.
C e Mémoire contient, au reste, deux aveux pré
ci eux; le premier est la reconnaissance formelle, faite
par la veuve V i ll e v a u d , de la fausseté de la pièce dé
posée chez M e C à v y ; elle avoue q u ’à cet égard il a été
bien jugé , et q u ’elle s’est
assurée que
cette pièce
n ’était ni écrite ni signée de la main du colonel.
Plus h au t, après avoir parlé de son désespoir et des
sacrifices q u ’elle était résignée à faire, elle ajoute
« Mais ce qui ne lu i permit plus d ’hésiter, ce fut u n
« écrit q u ’on lui fit parve nir, qui paraissait signé
« par C h a m b a u d , par lequel il lui
garantissait
for-
« mellement la validité du transfert». Ainsi , d après
la veuve Vill ev aud elle-même, la cause déterminante
de l ’acte q u ’elle a consenti était la pièce fausse, qui
lui serait parvenue p a r v oie indirecte
et p a r d ’autre
personne que le co lo n el. E n admettant cette explica
tion , comment ce dernier pourrait-il être responsable
de l ’erreur de la V i l l e v a u d ? ..........
Mais la veuve V i l l e v a u d n ’était poi nt satisfaite •
elle aspirait à la c él é b ri té , v o u la it faire d u b r u i t , et
j
�■
espérait
'
(
56
)
q u ’ une grande publicité
rendrait
sa cause
meilleure, en ajoutant à la gravité de ses diffamations.
C on tr e toutes les convenances et tous les usages reçus,
sur-tout en matière civile, un article est inséré dans
u n des journaux d u département', la veuve Ville vaud
y est peinte comme une victime du dol et de la fraude
pratiqués par le colonel.......... Ce-derni er pouvait ré
pondre -, mais il a d ù dédaigner de pareils moyens ,
laisser son adversaire goûter l ’affreux plaisir attaché à
la méchanceté satisfaite , et attendre avec calme et
respect sa justification de la justice de la Co ur.
D ISCU SSIO N .
L ’analise exacte et raisonnée des faits de la cause
faisant parfaitement
connaître
l ’esprit de passion ,
d ’injustice et de haine qui a animé la veuve V i ll e v a u d ,
. lors des poursuites q u ’elle a dirigées contre le colonel
C h a m b a u d , e t les s e n t i m e n s généreux q ui dirigeaient
ce dernier, lors des actes q u i l u i o n t été consentis,
ainsi que son défaut d ’intérêt à rien faire de nuisible
à la veuve V i l l e v a u d , il semble que toutes explications
ultérieures seraient inutiles pour faire repousser l ’appel
de cette femme.
Cependant,
po u r ne
rien laisser à dés irer,
examinera
les différentes questions
présenter;
et,
q ui
on
peuvent se
pour plus de c l a rt é , on divisera la
discussion en différons p a r a g r a p h e s q u i auront pour
objet de démontrer :
Que la demande de la veuve V i ll e v a u d excédant
�i 5 o francs, et cette femme n ’ayant jamais été. dans
l'impossibilité de se procurer un titre , ne peut y
suppléer par la preuve par témoins;
20 Que l ’intérêt de la veuve Vill ev a ud étant d ’avoir
une h yp oth èque , l ’acte du 27 janvier 181/j- lui était
avantageux ;
que
d ’ailleurs
le
colonel
C h am b aud
n ’ayant aucun intérêt à lui nuire, et étant au contraire
grandement intéressé à la conservation des ses droits,
ne peut être supposé avoir coopéré à aucune fraude;
3 ° Q u e , dans les circonstances de la cause et dans
la position ou se trouvaient les parties, les principes
repoussent toute idée de dol et de fraude;
4 ° E n f i n , et dans tous les cas, que les faits articulés
par la veuve V i l l e v a u d , soit ceux antérieurs à l ’acte
du 27 janvier, soit ceux qui ont accompagné cet acte,
soit enfin ceux q ui l ’ont s u iv i, ne sont q u ’un tissu de
contradictions et de mensonges.
§ IerL a dem ande de la veuve V d le v a u d ex cé d a n t 1 £>0f r . y
et cette fe m m e n ’a yan t jamais é t é dans l isipossi
b i l i t é de se procurer un TITRE, ne p eu t être admise
à y sup p léer p a r la preuve p a r tém oins.
Les principes qui servent à prouver cette proposition
,S0nt simples et laciles à établir.
L ’article i 3 / | i
d u C o d e civil v e u t q u ’ il soit passé
acte de va n t notaire ou sous signature p r iv é e , de toutes
8
�choses excédant la somme ou valeur de i 5 o francs.
L a loi n ’admet d ’autre
exception à cette règle,
que le cas oii il y a commencement de preuve par
écrit (Gode civ il, article 1.347), et cel u i où il y a eu
impossibilité de se procurer une preuve littérale.
( C o d e c i v i l , article i 3 /|8 ).
La
veuve Vi ll ev a ud ne peut point invoquer la pre
mière exception, puisque sa demande est de 10,862 fr.
20 centimes, et q u ’elle ne rapporte aucun commen
cement de preuve par écrit : il convient donc de se
fixer sur la seconde.
L ’ordonnance de Moulins gardait le silence sur ce
point -, la cause en était sans doute que personne
n ’étant tenu à l ’impossible, on ne peut reprocher de
n ’avoir point de preuve par écrit à celui qui n ’a pu
s’ en procurer : Im p ossibilium n u lla o b lig a tio , dit la
loi 1 8 j j f . D e rcgulis ju r is .
deux excep
tions fondées sur l ’impossibilité de se p r o c u r e r des
L ’o r d o n n a n c e d e
1 GG7,
en établissant
écrits dans une nécessité pressante, la première « pour
« dépôt nécessaire, ru in e , tu multe ou naufrage, ou
« en cas d ’accidens imprévus » (a rt . 3 , titre 2 0 ) , la
seconde « en cas de dépôt fait entre les mains de l ’hôte
« ou de l ’ hôtesse en logeant dans une hôtellerie » ,
11’énonçait point le principe général auquel ces excep
tions doivent se rattacher; mais il est évident que
c’étaient des cas restés dans les termes du droit commun,
où l’admission de la preuve testimoniale ne devait
avoir d ’autres bornes que la
prudence
des juges , la
�loi n ’ayant pu la défendre. C ett e doctrine, fondée sur
la raison, a été développée, il y a plus d ’uu siècle,
par un grand magistrat, M. l ’avocat général Joly de
F l e u r y , qui établit que les cas d ’ impossibilité ne sont
point des exceptions, mais bien des cas q ui n’ont ja m a is
é t é , qui n ’ont ja m a is pu être compris dans la prohi
bition (i ).
C e silence de notre ancienne législation devait être
remarqué par un esprit aussi judicieux que celui du
savant P o t h ie r; aussi cet a u t e u r ,
pour
faire cesser
cette omission, propose-t-il deux principes qui ont
en tr ’eux une corelation in t im e ,
et dont les consé
quences bien déduites peuvent suffire pour résoudre
toutes lés questions sur l ’admissibilité de la preuve
par témoins.
L e premier principe est « que celui q ui a pu se
« procurer une preuve par écrit n ’est pas admis à la
« preuve testimoniale , pour les choses excédant la
« valeur de 100 francs » ( a u j o u r d ’hui i 5 o fra n cs ). —
( T r a it é des Ob lig ation s, n° 7 5 i ) .
L e second principe est « que toutes les fois qu il n ’a
« pas été possible de se procurer une preuve é c r it e ,
« la preuve testimoniale est admise ». ( V o y e z id e m ,
n° 77 5 )L ’article i 348 du Code civil a recueilli ces règles,
et leur a donné force de loi. Il établit e n f effet une
(i)
Plaidoyer du a août 1 7 0 6 ,
des Audiences.
I
rapporte à sa dalc au Journal
�exception à la prohibition de la preu ve , « tontes les
« fois q u ’ il n ’a pas été possible au créancier de se pro« curer une preuve littérale de l ’obligalion qui a été
« contractée envers lui ». E t pour empêcher
tonie
méprise sur le genre d ’impossibilité que la loi désigne,
le législateur donne de suile des exemples propres à
développer le principe q u ’ il a posé, à faciliter sa jusle
application,
et à développer,
par les conséquences
q u ’on en peut tirer, ainsi que par les analogies, quelle
est la nature des impossibilités qui d i s p e n s e n t de sc
procurer un éc rit, et qui permettent de faire admettre
la preuve testimoniale.
Ainsi l ’article 1 3 48 nous apprend que l ’exception
, q u ’ il établit s’a p p l iq u e ,
i° A u x obligations q ui naissent cles quasi-contrais
et des d élits ou quasi-délits ;
■ 20 Aux dépôts n é c e s s a i r e s faits en cas d ’in cen d iey
ruine, tum ulte ou n a u fra g e, et à ceux faits par les
voyageurs en logeant dans une hôtellerie ;
3 ° A u x obligations contractées en cas iVaccidens
im prévus , ou l ’on ne pourrait pas avoir fait les actes
p a r écrit ;
4 ° A u cas oii le créancier a p erdu le titre qui lui
servait de preuve litté r a le , par suite d ’ un cas f o r t u it ,
im p rév u , et résultant d ’une f o r c e m ajeure.
O u pourrait examiner si les cas prévus dans cet
article sont restrictifs ou simplement én o n cia lifsy mais
nne pareille question serait oiseuse dans
l ’espf Ve
par
ticulière, pu isq ue , en considérant ces cas comme de ^
�sim p le s
exe m p les
3 il est impossible que la veuve
Vi llevaud puisse se placer dans une analogie q ui lui
soit
f av or a bl e .
E n effet :
L a veuve V i ll e v a u d et le notaire Girard figuraient
seuls dans l ’acte du 27 janvier 1814? cIa ^ avait pour
objet de faciliter la libération de Fonghasse, et de
donner à la veuve le domaine de la Garandie pour
hypothèque : le colonel C h a m b a u d n ’était point partie
en cet acte; quelles obligations ce titre pouvait-il donc
imposer à un étranger ;} rl o u t son effet 11e devait-il pas
se restreindre aux parties contractantes? et si la veuve
Vi llevaud avait reçu du colonel une promesse de ga
rantie,
ne devait-elle point se procurer une preuve
littérale constatant cet engagement, et fixant ses suites
et ses effets?
L a veuve Vi ll ev aud ne peut se placer dans aucune
exception; sa position n ’ava it , en effet, rien d ’extraor
dinaire; elle traitait avec un de ses concitoyens, avait
pris tous les renseignemens propres à l ’éclairer, passait
avec Girard un acte par-devant notaire; et si le colonel
devait y figurer comme garant, 11 etait-il pas naturel
que la veuve Ville vaud exigeât q u ’il y devînt partie,
ou q u ’au moins il souscrivit uu -engagement parti
culier ?
I l n ’y avait à cet égard aucune difficulté à vainc re,
puisque la veuve V i l l e v a u d (page 7 de son Mémoire)
nous apprend que le c o lo n el était chez C h e v a lie r, le
37 janvier 1 8 1
4 5 et
q u ’il est effectivement
certain
�( 62 )
q u ’il y parut pour remettre à cette femme le sursis
q u ’il lui avait promis; conséquemment, toutes les
parties étant en présence, les explications étaient fa
ciles, et rien n ’était plus simple que à 'e x ig e r un titre
d u co lo n el com m e g a ra n t, ou de ne p a s traiter avec
G irard.
Cela devient bien plus évident, quan d on considère
que la veuve Y il le v a u d reconnaît q u ’elle sentait ellemême la nécessité d ’avoir un titr e , et q u ’elle n ’aurait
point traité sans l ’écrit q u o n l u i fit. p a r v e n i r , et q u i
lu i paraissait sign é p a r C ham baud (Voy. le Mémoire,
page G).
Suivant elle, la promesse du colonel lui
serait donc parvenue avant le 27 janvier; mais, à
cette ép o q u e , se trouvant avec lui chez C h e v a lie r,
au moment décisif, lorsqu’elle allait contracter avec
G i r a r d , que ne s’expliquait-elle avec le colonel Cliamba ud sur un billet de garantie donné sans o b je t , et
q u ’elle tenait, n o n pas tlu c o l o n e l , mais q u i lui serait
parvenu p a r v o ie in d irecte?
Dans l ’ordre ordinaire des choses, tout cela serait
inconcevable; mais quan d on connaît les faits de cette
cause, les explications deviennent faciles. L a veuve
V ill e v a u d n ’a obtenu du colonel C h am b a u d que la
note à consulter, q ui lui a servi h prendre les renseignemens qui lui étaient nécessaires; elle n ’a reçu do
lui aucun conseil, et encore moins la promesse d ’au
cune garantie. L a fausseté de la pièce déposée chez
INI* C a v y est aujourd’ hui reconnue; les variations do
la veuve Ville vaud prouvent s u f f i s a m m e n t q u elle l ’c|.
�.
( 63 )
fait fabriquer , ou q u ’au moins elle en a usé sciem
ment. A quoi donc doivent servir cette p iè ce , ces
faits, aveux et variations, s’ils ne prouvent point que
le colonel n ’avait contracté aucun engagement envers
la
veuve
Y i l l e v a u d ; que s’ il avait promis une garantie,
elle serait établie par ti tr e,
puisque la veuve avait
senti la nécessité d ’en avoir u n , et q u ’il lui était f a
c ile de l ’obten ir; q u ’enfin c’est cette nécessité même
qui a porté la veuve V i ll e v a u d à commettre une action
criminelle, pour se donner les moyens de diriger une
action contre le colonel ?...........
S II.
V in té r ê t cle la veuve V ille v a u d étant d 'a v o ir une
hy p oth èq u ej l ’acte d u 27 ja n v ie r 1 8 1 4 lu i était
avantageux. — L e co lo n el n ’avait aucun intérêt h
nuire h cette fe m m e y il était s au contraire} inté
ressé à la conservation de ses droits.
L a preuve de cette double proposition est facile à
faire.
O n s’assure de l ’ intérêt de la veuve Vill ev a ud à
souscrire l ’acte du 27 janvier 1B 145 fIl,i
donnait
une hypo th èq ue , en se fixant sur sa position an té
rieure, qu il iaut apprécier avec les principes les plus
élémentaires.
L a vente consentie par Girard à la veuve V i l l e v a u d
est du 21 juillet 1808; il y est dit que le vendeur
�( <54 )
lie pourra recevoir le dernier paiement qu'en f o u r
nissant hypothèque p o u r la to ta lité, ou en donnant
caution. U n e condition si essentielle n ’a été consentie
par Girard que par l ’acte de i 8 i 4 L ’obligation du i 3 mai 1809 était consentie, par
le sieur F on g h a sse, en laveur de G irard. L a
V ille v a u d n ’y
veuve
était poin t partie. C e t acte lui était
absolument étranger, et les déclarations et stipulations
q u ’ il contient 11e pouvaient lui profiter
qu elle les aurait formellement acceptées.
q u ’autant
E n f i n , la quittance du 12 mars 1812 est donnée
par la veuve V ille v a u d à G ira rd : le sieur Fonghasse
11 y com paraît point ; de manière que les énonciations
q ui y sont contenues ne pouvaient produire a son
égard aucune obligation.
L a position de la veuve Vi ll ev a ud étant connu e, il
iaut consulter les principes.
« On peut s t i p u l e r a u p ro f it <l’ un tiers, lorsque
« telle est la condition d ’une stipulation que l ’on fait
« pour soi-mème.......... C e lu i q u i a f a i t cette stip u la
it lion ne p eu t p lu s la r é v o q u e r s i le tiers a d é cla r é
« v o u lo ir en profiter ( C o d e civil, article 1 1 2 1 ) .
« L e cessionnaire 11 est sa isi, à l’égard du tiers, que
<1 par la signification du transport, f a it e au débiteur,
<, — Néanmoins, le cessionnaire peut également être
« saisi p a r l'a ccep ta tion du transport, f a it e par le
« d é b ite u r ,
parm i
acte authentique (Code c i v i l ,
« art. 1G90).
« «57, avant que le cédant ou le cessionnaire en(
�( 65 )
« sign ifié le transport au déb it eur ,
c e lu i-c i avait
a p a y é le cé d a n t, il sera 'valablem ent libe/e » ^Codc
c i v il , article 1691).
Tels sont les principes. Ils exigent si rigoureusement
la signification du transport par le cé da nt, ou l'ac
ceptation du déb it eur , q u ’ il a été jugé q u ’on ne peut
prendre inscription sans acceptation préalable et for
melle, et q u e , dans aucun cas, l'inscription ne peut
être réputée acceptation et en tenir lieu (1).
Il faut actuellement revenir sur la position de la
veuve Villev aud . Girard devait lui fournir une hypo
thèque ou une caution : elle n ’avait obtenu ni l ’ une
ni l ’autre.
Girard avait stip u lé p o u r elle dans l ’obligation d u
i3 mai 1809; mais cette stipulation pouvait être ré
voquée, la veuve V ille v a u d n ’ayant p oin t d é c la r é
v o u lo ir en profiter.
L ’énonciation comprise dans la quittance du
12
mars 1812 , donnée par la veuve Vill ev aud à G i r a r d ,
était absolument étrangère à Fongliasse, qui pouvait
valablement se libérer entre les mains de Girard et de
tout
cessi onnaire
qui aurait pris la précaution
negligee
par la veuve V i l l e v a u d , de signifier le transport ou
de le fa ir e accep ter p a r le débiteur.
Ainsi la veuve V i ll ev a u d n ’avait ni hypothèque
ni c a u tio n , ni garantie; elle devait vivement désirer
(1) Voyez Sirey, tomo 10 , partie 1” , page 209.— D enevcrs, tome 8,
partie 1” , page 269.
9
�une de ces sûretés, et ne pouvait céder à aucune im
pulsion ou sollicitation étrangère, lorsqu’elle acceptait
l ’aftectalion hypothécaire
qui lui était
donnée par
l ’acte du 24 janvier 1 8 1 4 j acte q u i , dans tous les cas,
n ’é t a i t , de la part de G i r a r d , que
l ’exécution
de
l ’obligation q u ’il avait contractée , par la vente du
2.1 juillet 1808, de fournir une hypothèque à la veuve
Villevaud .
Mais était-il de l ’intérêt du colonel C h am b au d de
tromper cette veuve ?
D ’abord le colonel n'était point créancier de Gira rd ,
avec lequel d ’ailleurs il n ’avait rien de commun.
La
veuve Vill ev aud lui devait, au contraire, une somme
de Gooo francs, par obligation du G avril 181 0; celle
obligation avait pour principale hypothèque le pré ,
acquis par la V i l l e v a u d , de G i r a r d , le 21 juillet 1808;
et peut-on supposer que le colonel eût voulu pratiquer
une fraude pour se nuire ¿1 lui-ninnc et perdre sa
créance, si la daine Dalb ia t exerçait une action hypo
thécaire, et si les hypothèques légales absorbaient la
fortune de Girard ?
Ces réflexions, en prouvant les deux propositions
que
l ’on a voulu examiner
dans
ce
paragraphe ,
ajoutent une nouvelle force aux moyens déjà développés
dans le premier, et rendent plus pressante la nécessité
où se trouverait la veuve Vi ll ev a ud de prouver par
litre la promesse de garantie q u ’elle soutient lui avoir
<‘té iuiic par le colonel, garaulie que^
da ns
les cir-
�( g7 )
constances, celtc femme n a p u ni désirer ni demander,
et que le
col on el
n ’avait aucun intérêt à lui offrir.
S III.
D a n s les circonstances de la cause } et dans la position
où se trouvaient les parties 3 les principes repoussent
toute idée de d o l et de f r a u d e .
Les circonstances de la cause et la position des,
parties ne pouvaient faire supposer que le colonel
C h a m b a u d aurait à répondre à une action de dol et
de fraude. Etranger à l ’acte de 18 1 4 ? n ’y ayant aucun
in té rêt, comment serait-il garant de ses suites? L a
veuve
Vi lle vaud ne rapporte aucun titre; elle en est
réduite à la note à consulter qui lui a été donnée par
le colonel C h am b a u d : comment cette n o te, destinée
à éclairer cette femme sur ses véritables intérêts, et
qui , sous aucun rapport , ne pouvait l ’induire en
erreu r,
servirait-elle
de fondement à la singulière
demande q u ’elle a formée ?
Q u ’enseignent les principes?
L e dol an nul le la convention , parce q u ’il produit ou
entretient l ’erreur q ui détruit le consentement dans son
principe (Code c i v i l , art. i 109). Mais pour que l’erreur
détruise le consentement, i l f a u t q u e lle soit déterm i
n a n te, et que les artifices ou finesses aient pour objet
d'induire la personne contre
qui
elles sont pratiquées à
une convention p r é ju d ic ia b le ........ , ou à la détourner
d ’une chose utile ( L o i 1 , § 2 , j f . D e dolo m a lo .).
�f G8 )
Mais, pour q u ’ il y ait ouverture à une action pour
cause de d o l , il ne suffit pas q u ’il y ait eu des fin esses
et des artifices pratiqués pour induire q u elq u ’ un à une
convention préjudiciable, ou le détourner d ’une chose
u t i l e , il faut encore que celui q u i se plaint puisse
prouver q u ’i l n a p u se garantir des embûches q u i lui
étaient tendues; autrement il ne saurait soutenir q u ’il
y a eu d o l , puisque, d ’une p a r t , il peut arriver que
celui qui serait présumé l ’avoir pratiqué eût été trompé
comme l u i , et q u e , de
l ’a u t r e ,
il a u r a i t
à. s’imputer
la faute d ’avoir négligé de s’éclairer, quand il le pou
v a i t , sur ses véritables intérêts, et de n ’avoir point
examiné les faits sur lesquels reposaient les craintes ou
les espérances qui l ’ont in du it à une a c t i o n , ou l ’en
ont détourné.
L ’intention de tromper est le principal et même
l ’ unique caractère auquel on puisse distinguer le dol ;
aussi il n ’ y a p o i n t de d o l , si une partie a été trompée
sans que son erreur puisse être attribuée à personne :
c ’est ce qui le distingue de la faute : D o lu s , ciun adest
lœ d en d i animus, cu lp a , fa c tu m inconsultum quo a lteri
nocetur.
Les lois et les jurisconsultes font une distinction
entre le dol réel, d o lu s re ip sd , cas dans lequel on est
trompé par la chose plutôt que par la pe rs on ne, et
si n u llu s d o lu s intervenu s tip u la n ts, sed res ipsa in se
tlolum habet (loi 3 6 , J f. D e v . o
b
et le dol déter
minant ou in cid en t, le dol personnel, d o lu s m alus
q u i dcdit causant con tractui. ( l l n b c r u s auJ/< D e dolo
m a lo , n° /j ; Y o ë t , c o d ., u°» 3 et /j).
�h e d o l incident et personnel opère la nullité radi
cale de l ’a c t e , et donne ouverture à une a c t i o n , parce
que les manœuvres qui ont été pratiquées l’ont seules
déte rm iné, et en ont été l ’unique cause; mais le d o l
réel n ’est point une cause de n u l l i t é , parce que la
volonté de la partie contractante n ’a été déterminée
par aucun artifice q u ’elle ne p û t découvrir; q u ’elle
s’est elle-même trompée sur les accessoires de son enga
gement , sur la chose ou sur le p r i x , et q u ’elle a k
s’imputer de n ’avoir pas pris toutes les précautions qui
pou vaient faire cesser son ei’reur.
L a loi ne voit ni fraude ni d o l , là où celui q u i
se plaint a à se reprocher sa faute, son imprudence,
ou une confiance excessive. Elle' ne peut venir au
secours que de ceux qui ont été victimes d ’artifices ou
d ’embûches dont toute la prudence humaine n ’a pu les
garantir; autrement il y a lieu à l ’application de la
maxime V ig ila n tib u s ju r a subveniunt.
Ces principes sont ceux de la C o u r de cassation,
q u i , dans un de ses arrêts, pose comme maxime « que
« les prom esses fa lla c ie u s e s ne sont pa s d o l y que
« celui qui en est victime ne peut a ccu ser que sa
« confiance excessive y q u ’en conséquence il ne peut
« invoquer la preuve testim o n ia le, sous p rétexte de
« d o l et de fr a u d e . » ( i )
( 1 ) 2 avril 1 8 1 2 . — Cassation.— T u r i n . — S i r o y , to m e i 3 , partie 1” ,
page 1 4 6 .— D e n cY crs, Ionie 1 1 , p a itic 1” , page m .
�( 7° )
Voici l ’espèce de cet arrêt :
U n e propriété rapportant 3 £>oo fr. de revenu avait
été vendue 16,000 f r . , avec stipulation de la faculté
de rachat pendant deux ans. L ’acquéreur entretint le
vendeur dans l ’espérance de lui rétrocéder les objets
v e n d u s , même après l ’expiration du délai apposé à la
faculté de réméré; il empêcha même le vendeur d ’em
prunter la somme qui lui était nécessaire pour exécuter
ce rachat. U ne instance s’étant engagée, la C o u r de
T u r in crut voir dans ces faits un dol et une fra ud e, et
en ordonna la preuve.
Mais l ’acquéreur se pourvut en cassation, et soutint
que l ’arrêt avait violé les articles 1 3 4 1 ? i 346 et i 348
du Code civil, et avait admis une exception qui n ’était
point portée dans les article 1 347 et 1 3 48 du même
Code.
L e vendeur répondait à ces moyens par l ’exception
de dol.
Mais la C o u r de cassation
cassa
l ’arrêt de la C o u r
de T u ri n , par le double m oti f q u ’il y avait contraven~
tion à V article treize cent quarante-un du C o d e civil,
en ce que cette C o u r avait admis une preuve que la
loi rejetait, contre et outre le contenu en un acte, et
d ’ un fait allégué après l’acte; q u ’ il y avait également
fa u s s e application de l ’article
voilée sous
1111
i
3 /j 8 du C o d e civil,
vain prétexte de dol et de
fraude,
puisque le vendeur pou vait avoir la preuve . littérale
du fuit art iculé; q u ’il ne pouvait se plaindre ni de dol
�(
71
)
ni de frau d e, mais bien accuser sa faute et son im
prudence.
L ’application de ces principes est facile à faire.
L a veuve Yil lev aud prétend avoir été trompée sur
la valeuj du domaine de la G a r a n d ie , et sur l ’exis
tence des hypothèques grevant cette propr ié té.— Mais
d'abord la veuve Y il le v a u d se plaint d ’un d o l réel qui
ne pouvait donner ouverture à aucune action; ensuite
elle po u vait , pour la valeur du domaine, prendre des
renseignemens sur les l ie u x , s’assurer au bureau des
hypot hèques, qui est p u b li c , s’il existait ou non des
inscriptions sur la Garandie, et consulter des avocats
relativement aux hypothèques légales. Si elle n ’avait
point pris ces précautions, elle aurait commis une
faute et une imprudence, mais elle ne pouvait accuser
personne de dol ou de fraude.
L a note à consulter qui lui avait été remise par le
colonel devait lui servir de guide et la diriger dans les
renseignemens q u ’elle avait à prendre. Si elle s’cn fût
rapportée aux énonciations contenues dans cette note,
et q u ’elle eût été trompée, elle ne p o u v a it , d'après les
principes, accuser le colonel C h am b a u d de dol et de
frau d e,
puisque ce dernier pouvait s’abuser comme
elle sur la véritable valeur du domaine de la Garandie,
et sur 1 existence des inscriptions, et que les éclaircissemens a prendre sur ce point la regardaient exclusi
vement. Mais les indications données par le colonel
étaient exactes, et sont justifiées par le rapport des
acquisitions et des baux à ferme. L a veuve Y i l l e v a u d
�I 72 J
avait use de cette note pour prendre des renseignemens
ultérieurs sur la valeur du domaine,
ainsi que le
prouve la déclaration de Charles Constant. L e notaire
Chevalier avait retiré pour elle un certificat négatif du
bureau des hypothèques. L ’hypothèque légale avait
pour sûreté d ’autres biens plus que suffisans pour la
garantir. L a veuve était donc parfaitement éclairée;
et l ’on cherche v a in e m e n t , en droit comme en f a it ,
quels motifs ont pu la porter à accuser le colonel do
dol et de fraude.
S
IV.
L e s f a it s a rticu lés p a r la veuve V ille v a u d , soit c e u x
antérieurs à l'a cte d u 27 ja n v ie r , soit c e u x q u i ont
accom p agné cet a c te } soit enfin c e u x q u i l ’ont
s u iv i 3 n ’étant q u ’ un tissu de contradictions et de
m ensonges} la
p r e u v e no s a u r a i t
en être adm ise.
L ’exposé raisonné des faits de cette cause, et les
détails q u ’a nécessités la discussion à laquelle on s’est
déjà liv r é , doivent dispenser de rentrer dans l ’examen
de leur ensemble; e t , pour ne pas user de redites ou
de répétitions inutiles, on se bornera à examiner, dans
ce paragraphe, quelques-uns des faits qui n’ont pu
trouver place dans le plan que l ’on s’était proposé, et
à quelques réflexions relativement à ceux sur
la veuve Vi ll ev aud insiste le plus
servent de base à ses objections,
fortement,
l es qu el s
et
qui
�( ?3 )
Q uan d a u x fa its antérieurs à l ’acte du 27 janvier
1 814 ,
On sait que le colonel n ’avait avec Girard aucune
liaison d ’afï’ection ni d ’ailaires; q u ’ il n’avait aucune
relation avec C h e v a lie r, et que la veuve Y i l l e v a u d ,
au contraire, accordait toute sa confiance à ce dernier,
dont elle se faisait honneur d ’être la protégée. L a
communauté d ’intérêts qui existait entre Girard et
C hevalier est également c o n n u e •, et l ’on sait comment
le colonel, créancier de la veuve Y i l l e v a u d , q u ’il vou
lait contraindre au remboursement, fut induit à lu i
accorder un dél ai, et comment il lui donna une note
à consulter, propre à l ’éclairer sur la valeur réelle du
domaine de la G aran d ie , q u ’elle devait recevoir en
hypothèque de G ir a r d , et sur les inscriptions qui pou
vaient peser sur ce bien.
Rien n est plus simple que l'enchaînement de ces
faits, et plus propre à prouver la franchise du colonel
et la loyauté de sa conduite ; cependant la veuve insiste
et soutient q u ’en souscrivant l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ,
elle n ’a fait que céder aux sollicita tion s et aux menaces
du co lo n el.
Mais quelles sollicitations le colonel C h a m b n u d ,
absolument étranger aux affaires de G i r a r d , grande
ment intéressé au contraire à la
pr os pé ri té
de celles de
"Villevaud , a-t-il pu lui adresser, pour la porter à
un acte nuisible, et dont les funestes efi’ets devaient
rejaillir sur lui-même? U n e pareille supposition n ’estelle pas invraisemblable? peut-elle être accueillie par
10
�( 74 J
un esprit judicieux , lors même que la fausseté du
fait sur lequel elle repose 11e serait pas démontrée, et
q u ’il 11e serait pas p r ou vé, par le rapport de la note à
consulter, que le colonel, bien loin de faire aucunes
sollicitations à la veuve V i ll e v a u d , n ’ a f a i t que céd er
¿1 ses in sta n ces, en lui donnant les renseignemens per
sonnels q u ’il pouvait avoir, et en lui délivrant une
note propre à la diriger dans les éclaircissemens ulté
rieurs q u ’elle avait à se procurer ?
Quelles sont les menaces du colonel, qui ont pu
porter la veuve V ill ev aud à contracter avec Girard^
S ’en laissait-elle im poser p a r la q u a lité de maire ? .......
— Mais le colonel exerçait ces fonctions en 1806, et la
veuve Vi ll ev a ud ne craignit point de lui intenter un
procès pour le défrichement d ’un chemin !
L e craign ait-elle com m e d é b itr ic e ? ........... — ■Mais
précisément cet te q u a l i t é devait la mettre à l ’abri de
toute espèce d ’em b ûch e, si t o u t e f o is le colonel eut été
capable d ’en tendre, puisque sa créance avait pour
hypothèque principale le pré D a l b i a t , à la garantie
'duq ue l le domaine de la Garandie devait être affecté
par l ’acle de 1 8 1 4 ’•
A -t-e lle é té d écid ée p a r la m enace de fa ir e p a rtir
son f i l s ? — Mais , comme l ’ont observé les premiers
juges, le colonel C h a m b a u d n ’était point membre d u
conseil de révision ; comme m ai r e , il n’y avait pas
même voix consultative. D ’ un autre co té, les infir
mités du jeune Villevaud rendaient sa ré/orme indis
pensable; enfin les opérations du ce conseil étaient
�( 7* )
terminées dès le "i!\\ et l a c t é souscrit par la veuve
V i ll ev a u d est du 27 janvier 1 8 1 4 * Aucunes menaces
relatives à la conscription ne pouvaient donc influencer
sa détermination.
Mais encore tous ces faits seraient moins des ruses
et des artifices constituant le dol et la fraude , que
des actes de violence; et à quelle époque cette violence,
le pouvoir et l ’influence du colonel C h a m b a u d au
raie nt-ils cessé? L a conscription était abolie dès le
11 avril 18145 le colonel avait cessé d ’être maire en
juillet
i
8 i 5 ; la veuve V ill ev au d s’élait libérée le 1 6
février de la même année : elle n ’avait donc plus rien
à craindre; et ira-t-on supposer q u e l l e eut gardé le
silence ju sq u’au 12 juin 1 8 2 0 , et q u e l l e se fut laissé
prévenir par les poursuites du colonel relatives à la
pièce fausse q u ’elle osait produire, dans la circonstance
sur-tout ou la déconfiture de Girar d était connue et
publique par sa disparition, qui remonte au 11 no
vembre 1 8 1 5 .
E nfin la déclaration de la veuve Villevaud (V oyez
son Mémoire, page 6) fait cesser toutes difficultés re
latives à l’ influence de ces sollicitations et menaces.
Suivant e lle -m ê m e , elle n ’a cédé q u ’à Y écrit fju ’on
lu i J it parvenir : cet écrit serait donc la véritable
cause de son engagement; mais comme la fausseté de
cette pièce est au jo u rd ’ hui reconnue; que les variations
et les mensonges de la veuve Villevaud ne permettent
pas de se méprendre sur l’auteur de ce f a u x , lu
ïuiualilé de ce fait sert à lout expliquer; e t , se réunis-
�( 7g )
sant aux autres circonstances de la cause, elle doit
prouver à l ’esprit le plus prévenu, que la veuve Y il levaud n ’a pas du craindre,
pour nuire au colonel ,
d ’ajouter à une action coupable tout l ’odieux d ’une
calomnie.
Les circonstances qui se rattachent im m édiatem ent
à l ’acte du 27 janvier 1814 étaient des plus simples.
C e t acte fut reçu par Chevalier. C e notaire pro
dui si t, comme la veuve Y il l e v a u d le reconnaît ellem ê m e , un certificat négatif d ’ i n s c r i p t i o n s s ur les biens
de Girard. L e colonel avait promis à sa débitrice un
sursis d ’un an; il parut un moment chez Chevalier
pour faire la remise de cette pièce : la veuve Y il le v a u d
veut tirer parti de cette circonstance, et cote dans son
Mémoire (page 9 ) , comme fait nouve au , et qui n ’a
pas été soumis à l ’examen du tribunal de C le r m o n t ,
« q u ’après la confection de l ’acte, et lorsqu’elle se fut
« retirée, C h a m b a u d , G i r a r d e t Chevalier entrèrent
«
dans une cham bre
à
c ô té , d ’où ils sortirent
après
« un entretien s e c r e t et que le sieur C hevalier dit
« à son m a ître-clerc, en présence de C h a m b a u d et de
« Girard : V o u s ne fe r e z l'inscription
« Y il l e v a u d
de la veuve
sur le domaine de la Garandie , que
« quand on v ou s le dira. »
D ’abord ce (ait, tel q u ’il est présenté, est insigni
fia nt, et ne prouve rien contre le colonel; et comme le
dol et la fraude ne se présument pas, q u ’ils doivent
être clairement prouvés, la veuve Villevaml
ne
pour
rait les établir que par des faits tellement posiliis ,
�( 77 )
q u ’ils pussent résister à toute autre interprétation; et
q u ’a p p r e n d -
elle ? Que Cham baud entra dans
une
cham bre à c o t é , avec G irard et C heva lier; q u ’ ils en
sortirent après un entretien secret. — Us étaient donc
sans témoins? Quel était leur entretien? était-il secret?
avait-il pour objet les affaires de la V i ll e v a u d , ou des
choses indifférentes
et qui
lui fussent absolument
étrangères? A u ta n t de questions q u ’il est impossible
d ’éclaircir.— M ai s, à la s o r t ie , Chevalier dit à son
maitre-clerc : V o u s ne fe r e z rinsci'iptioTi que quand
on v o u s le d ir a .— -Que signifie encore cela ? N ’esl-il
pas naturel q u ’ un notaire se réserve la direction des
affaires de son cabinet, q u ’il les ordonne, qu il les sur
veille? et dans les expressions prêtées à Chevalier y at-il un seul mot qui puisse prouver, et même faire
supposer q u ’ il ne serait pas pris d ’inscription dans
l ’intérêt de la veuve V i ll e v a u d ?
Mais cette assertion est encore une invention et une
calomnie odieuse de la part de la veuve Villev au d. A u
27 janvier 1 8 1 4 ? Ie maître-clerc de Chevalier était
M e Pinea u, homme recommandable sous tous les rap
ports, et aujourd hui notano a Saint-Cieimain-Xjain—
brou.
L o r s q u e
le Mémoire d e l à veuve Vi ll ev aud parut,
le colonel, qui n’avait aucune preuve à redouter, sentit
cependant la nécessité d ’expliquer sa conduite en fait,
et de dévoiler l'abominable intrigue dont 011 voulait
le rendre victime. L ’avocat q u ’il avait honoré de sa
confiance exigeait d ’ailleurs des éclaircissemens ; des
questions furent en conséquence adressées à M e P i n e a u ,
�(78 )
q u i, le iG février 1 8 2 2 , répondît « q u ’il ne se rapu p ela it p a s la présence du colonel, et encore moins
« sa participation auæ prétendus f a i t s rapportés au
« Mémoire de la veuve Y i l l e v a u d , et qui ont suivi
« im m édiate men t, dit-on, la confection de l ’acte de
« transfert » (1). Cependant ce fait était assez no
ta b le, cette conversation assez singulière pour frapper
l ’attention j et il est probable que si elle eut existé,
celui qui recevait la recommandation q ui en était
l ’objet se la s er ai t rappelée.
Les circonstances postérieures à l ’acte du 27 janvier
ï 81 4 ? et colles qui se rattachent à l ’acte de transport
de l ’obligation, fournissent encore quelques objections
h la veuve V ille vaud .
On se rappelle les eflorts de Girard et de Chevalier
pour négocier l ’obligation Fonghasse, efforts renou
velés même après le transport qui avait été fait aux
sieurs C h a m b a u d $ on s a i t a u s s i les causes q ui ont
porté le colonel C h a m b a u d à accepter la cession de la
moitié de cette ob lig ati on , et comment il en a payé
le prix dàns les intérêts du sieur B o u c h o t, auquel il
voulait être ut il e ; il est donc inutile de revenir sur
des faits aussi clairement établis, et de s’arrêter aux
objections q u ’ ils détruisent.
Mais la veuve Y i l l e v a u d pose en fait que la cession
qui transfert la créance Fonghasse au sieur C h am b a u d
(1) Cette lettre Cit au dossier,
�( 79 )
est du même jour que l ’acte qui lui donne une hy
pothèque sur le domaine de la Gaiàndie.
dates détruisent cette assertion.
Mais les
L ’hypothèque
ac
cordée par Girard à la veuve V ill ev au d est du 27 jan
vier 1 8 1 4 j
cession de 1’obligation est du 5 février
( n e u f jours après) ; et comme un acte authentique
fait toujours, par l u i - m ê m e ,
foi de sa date , toute
autre explication serait in utile, si le colonel , pour
mettre de plus fort en évidence la mauvaise foi de
son adversaire, 11e rapportait un extrait du répertoire
de C h e v a lie r, oii l ’on trouve quatorze actes intercalés
entre ceux des 27 janvier et 5 février 18 j 4Il
ne
faut pas revenir sur le retard apporté à
l'inscription
de la veuve "Villevaud; il a ete suffisam
ment établi que cette omission était du fait de cette
veuve ou de Chevalier son conseil, et q u e , sous a u c u n
rapport, elle ne peut être imputée au colonel, qui ,
au contraire, en a exigé la réparation aussitôt q u ’il
a pu la connaître.
On pourrait même se dispenser
de nouvelles explications sur le fait articulé par la
veuve V i l l e v a u d , pour la première fois à l ’audience ,
( j u ’e l l e a é t é s o l l i c i t é e d e r e m e ttr e L E S D E U X b i l l e t s
<jxie l u i avait, d o n n é s le c o l o n e l ,
s’ il 11e se présentait
un rapprochement frappant, qui montre tout à-la-fois
que la veuve V ill ev a u d a en son pouvoir les deux
pièces dont elle parle , et que le colonel n’a pu eu
réclamer la remise, une d ’elle étant insignifiante 011
absolument favorable à ses intérêts ,
étant absolument inconnue.
et l ’autre lui
�'£$1
( 8o )
E n effet, il est prouvé q u ’il existe deux pièces au
procès : la première est la note à consulter, donnée
par le colonel à la veuve Villevaud : c ’est elle qui ly.
rapporte 5 le colonel la reconnaît et s’en empare. O n
a pu apprécier combien les conséquences qui s’en dé
duisent sont peu favorables à celle qui la produit.
L a seconde est la pièce déposée par la veuve V ill ev aud
chez M c C a v y ; et comme cet écrit est faux; que la
veuve reconnaît elle-même q u ’il n'est ni écrit ni signé
p a r le c o l on el , c o m m e n t cc d e r n i e r l ’ a u r a i t - il d e
mandée, ne pouvant la connaître? C om m en t même,
la connaissant, l ’aurait-il réclamée, puisque ,
sous
aucun r a p p o rt, elle ne pouvait lui être opposée ?
A u rés u m é,
L a demande de la veuve V i ll ev a u d est non recevable
et mal fondée.
NoN-RECEVA.ni,r..— P u i s q u e , é t a n t de 10,862 francs
5o centimes, sa demande deva it, aux termes de l ’ar
ticle 1 3 4 r du Code c i v i l , être fondée sur 1111 titre;
que la veuve V i ll e v a u d , 11e pouvant se placer dans
aucune des exceptions prévues par les articles 1.347 ° ’t
1 3 4 8 du même C o d e , n ’ayant jamais été dans Finir
possibilité d ’obtenir un litre du colonel, chose qui lui
était au contraire très-facile, si ce dernier eut contracté
des engageinens envers elle. L a veuye V i ll e v a u d , ayant
au contraire senti et reconnu la nécessité d ’avoir <:o
t i tr e , puisque,
à l ’appui de sa demande,
elle
en a
produit un q u ’elle a ensuite été obligée d ’abandonner
�( 8 0
comme faux , ne saurait avoir d ’action contre le colonel
Chambaud.
M al
f o n d é e
.
— Parce que la veuve Vill ev aud avait
intérêt à recevoir l ’ hypothèque qui lui était accordée
par l’acte d u . 27 janvier 1814? puisque antérieurement
elle n ’avait ni h y p o t h è q u e , ni caution , ni garantie de
la sûreté de la vente que lui avait consentie Girard des
prés provenant de la dame d ’A l b i a t ;
colonel C h a m b a u d ,
parce
que le
bien loin d ’avoir intérêt de lui
n u i r e , devait au contraire, comme son créancier, et
ayant
pour hypothèque le pré d ’A l b i a t , désirer la
prospérité de ses affaires, et tout ce qui pouvait con
solider la propriété de cet héritage entre les mains de
sa débitrice : double circonstance qui rend invraisem
blable et détruit toute allégation de dol et de fraude
contre le colonel ;
Parce que la loi et les principes ne permettent pas
de regarder comme des ruses ou des artifices consti
tu ant le dol et la fraude , l ’erreur dans laquelle la
veuve V illev aud serait tombée relativement à la valeur
du domaine de la Garandie et des hypothèques q u i
pouvaient grever cetie propriété , quand bien même
les éclaircissemens q u ’elle aurait pris n ’auraient eu
d ’autre fondement que la note à consulter qui lu i
avait été remise par le colonel;
Parce q u e , enfin, les faits articulés par cette femme
ne présentent rien de pertinent; que la veuve V i ll e
v a u d , sans cesse en contradiction avec elle-même,
dément ou détruit ses propres assertions; que ses men-
�(8 , )
songes répétés, la pièce fausse dont elle a sciemment
fait us age , les artifices dont elle a constamment u s é ,
entourent sa cause d ’une juste défaveur, qui ne permet
pas à la justice de s’éloigner des règles, pour permettre
à la veuve Y il l e v a u d de hasarder la preuve de ses diffa
mations et de ses imputations calomnieuses.
L e colonel C h a m b a u d a enfin rempli la tâche q u ’il
s’ était imposée. L a dignité de la Justice et le respect
q u ’il lui porte ont du modérer les élans d ’une trop
juste sensibilité.
Victim e
de
la m a c h i n a t i o n
la plus
perfide et la plus atroce, il a dù en développer toutes
les causes avec modération, en faire connaître tous les
ressorts, sans se livrer toutefois k aucun sentiment de
haine ou de vengeance. Les détails dans lesquels il est
entré peuvent présenter quelque lo ngu eu r; mais les
effets de la calomnie sont si difficiles k détruire! L e
empoisonné, lancé par une main cr iminelle, part
avec ra p id it é , a t i e i n t l a v i c t i m e , la frappe comme
l ’éclair qui précède la fo u d re ; et si l a b le ss ur e n ’est
trait
point morte lle, elle est au moins longue et difficile k
g u é r ir , et trop souvent la cicatrice reste.
L ’indignité de la conduite de la veuve V ill c va ud a
été telle, son insistance k nuire si prononcée, que le
colonel C h a m b a u d aurait pu désirer une satisfaction
plus complète, et l ’obtenir de la justice de la C o u r ,
en interjetant appel incident du ju g e m e n t , et en pre
nan t des conclusions propres k faire supprimer les
écrits q ui le diffament et le calomnient. Mais que
peuvent signifier les déclamations de celle femme? Sou
�( 83 )
délire , sa bassesse et sa méchanceté sauraient-ils
atteindre u n homme d ’honneur, q ui devait des expli
cations à ses amis et à ses concitoyens........ , mais qui
doit être assez généreux pour ou blier et pa rd o n n er?
C e Mémoire aura sur-tout produit tout son e f f e t ,
s’il désabuse le jurisconsulte honorable qui a été la
première v i c t im e d 'a r t if ic es auxquels la bon t é et la
simplicité de son coeur ne pouvaient résister. L e plus
beau triomphe d u colonel serait de forcer la conviction
r
et de commander l ’estime de cet homme respectable :
toutefois i l ne désire pas q u ’il se repente, q u ’aucuns
remords, aucun ch agrin ne viennent troubler le cours
d ’une si belle v i e ! ........ mais q u ’au moins il apprenne
à mieux placer ses bienf aits, et que cet exemple lui
r a p p e l l e , pour
ne l ’oublier jamais , cette maxime
morale de Térence :
B en efa cta m ale c o llo c a ta m a lefa cta existim o.
L e Chevalier C H A M B A U D .
M e Jn. - C h. B A Y L E ainé , ancien A v o ca t.
M e B R E S C H A R D , A v o u é -L ice n cié .
ERRATA.
P age 1 1 , ligne 2 1 , au lieu de 1809, lisez 1812.
l b i l. Au lieu de la veuve V illevaud donne quittance à G ira rd , lisez
Girard donne quittance à la veuve V illevaud.
Page 13 , ligne 2 5 , au lieu de décembre, lisez novembre.
R IOM; IMPRIMERIE DE S ALLES; PRÈS LE PALAIS DE
JUSTICE»
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chambaud.1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Breschard
Subject
The topic of the resource
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
faux
experts
arbitrages
notables
domaines agricoles
opinion publique
chantage
infirmes
banqueroute
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, Pour le sieur Chambaud, Chevalier, Colonel d’État-Major, en retraite, Officier de l'Ordre royal de la Légion d'honneur, habitant de la ville de Clermont, intimé ; contre Jeanne Aubignat, veuve de Pierre Villevaud, Propriétaire à Royat, appelante. Quem sua culpa premet, deceptus omitte tueri. At penitus notum si teutent crimina, serves, tuterisque tuo fidentem praesidio. Horat., epist. 18.
Annotations manuscrites. « 13 octobre 1822. preuve ordonnée ».
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
83 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2614
BCU_Factums_G2616
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53530/BCU_Factums_G2615.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Lagarandie (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
arbitrages
banqueroute
biens nationaux
chantage
conscription
Créances
doctrine
dol
domaines agricoles
experts
Faux
fraudes
hypothèques
illettrisme
infirmes
magistrats municipaux
notables
notaires
opinion publique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53529/BCU_Factums_G2614.pdf
451e21711534cff57cd88e109ef63056
PDF Text
Text
MÉMOIRE.
�COUR ROYALE.
MÉMOIRE
_
____
1 ere CHAMBRE.
POUR
;
A U B I G N A T . , V e uv e de
V ILLE V A U D
Propriétaire à
Appelante;
J e a n n e
P ie r r e
Royat„
CON
T R E
*
Le sieur P i e r r e C H A M B A U D . , AdjudantCommandant, Offer de la Légion-d’honneur,
, ancien Maire de C hamalières e t Royat ,
habitant de la ville de Clermont , Intimé
al'
•’i¡ J ‘illOiü
A
L veuve Villevaud a dénoncé à la justice une m anœ uvre dont,
'r
elle a été victi m e , et qui a entraîné sa ruine.
jr
C ette manoeuvre est l’ouvrage du sieur Chambaud , réuni avec
le sieur C h e v a lie r, notaire à C lermont , et G irard, notaire, à
Chamalières, ses deux amis.
Les deux derniers ont fait une banqueroute frauduleuse, et
sont en fuite,
Le sieur Chambaud est le seul que la justice puisse atteindre.
I l a été le principal instrument de la fraude; il en a conçu le
projet, il l’a dirigé avec art, il l’a mis à fin, il en a profité: en
résultat, il a touché 10,893 fr. 79 c., qui appartenaient à la veuve
Villeva u d , et qui lui étaient destinés..
�O ) •
Elle demande la restitution de cette somme ; si elle ne l ’a pas
obtenue en cause p rincip ale, c’est parce que les faits n’étaient pas
suffisamment éclaircis;
C ’est parce qu’elle avait omis d ’en articuler de graves, échappés
à sa mémoire affaiblie par ses m alheurs, ou qui ne lui étaient
pas alors suffisamment connus;
C ’est, enfin, parce qu’elle avait négligé de faire la recherche de
rènseignemens précieux qu’elle s’est procurés depuis.
A u jou rd ’hui, le dôl, Jà fraude, et les manœuvres pratiquées par
le sieur Chambaud, pour opérer la ruine de la veuve Y illc v a u d ,
et s’enrichir de ses dépouilles, sont dévoilés; et il n’échappera j)as,
devant la Cour, aux condamnations qu’elle a vainement sollicitées
contre lui devant le tribunal de première instance.
- ' n r F : ■!>
F A I T S :
M. Dalbiat, ancien procureur du Roi à Clerm ont, avait acquis,
par adjùdibatibn nationale0; lé i 3 juin 179 1, un pré situé à R o y a t,
appelé le ¿ré. du Breuil,' dépendant du prieuré de Royat.
M. Dalbiat revendit ce pré , le 3 frimaire an 11 , au sieur Girard,
notaire a Chamalières, moyennant 22,000 liv. tournois.
Cette somme ne fut stipulée payable que dans douze ans.
L e sieur Girard abusa de ce long intervalle, pour tromper les
habitans de Royat, auxquels il avait eu l ’art d’inspirer de la
confiance.
Il consentit, à plusieurs'habitans de cette commune, des ventes
pîfrticllcs' de ce pré du B r e u il, dont il toucha le prix.
La principale fut celle de dix jo urn au x, qu’il consentit, par
acte du 21 juin 1808, à la veuve Villevaud cl à Ligier Lourgoignon,
son gendre ; savoir , n e u f dixièmes pour elle, et un dixième pour
son gendre.1
L é ’prix de cette'vente fut fixé à 11,177 fr- 5° c ., ou 11,379 liv.
tournois.
Il fut payé sur ce prix 7,819 fr. comptant.
Les 3,io o fr. restans furent stipulés payables le 11 novembre
suivant.
�(3)
Mais il est dit que « le sieur Girard ne pourra exiger le re m '
» boursement de ladite somme restée d u e , qu’en fournissant une
>> hypothèque spéciale, pour la sûreté du prix total de la^prçsente
» ven te, avec faculté de prendre inscription ,.,;ott|en donnai^
» bonne et suffisante caution pour ta sûreté de laditehyp 0ti)èque. ^
Le sieur Girard parut se mettre en devoir de remplir cct en-^
gagement.
r> u
.oo. nn
L e i 3 mai i8 o g , il fit un prêt de roj862, fr; 5 o ç. au sieur
Fontghasse fils, et à la <lame veuve D é so ch e s, sa mèrp.
u, .
Ce prêt était destiné à former le cautionnement du sieur
Fontghasse, nommé receveur jpripcipalj.jdes.j Droits-réunis, à
Thiers ; il devait être remboursp aux prêteurs danç cin q ans r
c’est-à-dire, le i 3 mai i 8 i 4 *
•
,
,«r .
l"lu-uix
Cette somme fut hypothéquée spécialement .suc la maison ;de
•la dame Fontghasse, située rue de la T reille ; et on lit / dans
l ’obligation, la clause qui s u it:
ü{> j ’ • . .,
« Ledit sieur Girard déclare que ladite soipm e principale ci» dessus provient des deniers de Jeanne Aubignat, veuve Yille» v a u d , et de Ligier Bourgoignon, son gendre , et fait partie du
» prix de la vente que ledit sieur Girard lui a consentie d ’un p ré
» situé à R o ya t, suivant l’acte passé devant Chevalier et son
» collègue , le 21 juin 1808. A u moyen de laquellè déclaration,
» ledit sieur Fontghasse sera tenu , comme il s ’y oblige [ de ne
» faire le remboursement de ladite somme qu'en présence desdits
n Aubignat et Bourgoignon, pour veiller à l'emploi d'icelle, conjbr” nié ment audit contrat. »
A u moyen de cette précaution, les deniers de la veuve Villcvaud
étaient en sûreté; c’est-à-dire, qu’en supposant que le sieur Girard,
qui avait pris douze ans pour payer à M. Dalbiat le prix de
son acquisition du pré du B r e u il, ne satisfît pas àses engagcinens,’
et q u e lle , veuve Villevaud, fût recherchée par ce vendeur pri
m itif, elle retrouvait nécessairement son prix dans la maison
Fontghasse, attendu que l'hypothèque du sieur G irard, sur cette
maison, était la p rem ière, et que les sieurs et dame Fontghasse
ne pouvaient se libérer de cette somme sans la présence et le
�(4)
concours de la veuve Villevaud , et sans qu’il en fut fait emploi.
Cependant on verra bientôt qu’il en est arrive tout autrement:
Que l’obligation de 10,862 fr. 5o c . , consentie par les sieurs
et dame Fontghasse au sieur G ira rd , a passé depuis entre les
mains "du siéur Chambaud , son ami , son créancier et son
cessionnaire
Que cette somme a été touchée au préjudice de la veuve
Villevaud à qui elle était destinée ;
Que la veuve Villevaud a perdu sa 'sûreté sur la maison
Fontghasse;
Q u ’elle a été recherchée depuis par la dame Dalbiat pour son
acquisition du pré du B r e u il, qui n’avait pas été payée au sieur
Dalbiat par le sieur G irard, son acquéreur immédiat ;
Q u ’elle est obligée de payer cette acquisition une seconde fois;
Q u ’elle est ru in é e, et cela par le fait du sieur C ham baud,
qui s’est enrichi de ses dépouilles.
Com m ent tout cela s’e st-il opéré?
C ’est ce qu’il s’agit d’expliquer;
L e sieur ChainJjaud était maire de Chamalières et Royat.
Il a va it, a c e t i t r e , d a n s c e l t e c o m m u n e , c e t a s c e n d a n t que
donne sur le peuple l’habitude de commander et l’art de so
faire obéir.
11 était intimement lié avec le sieur Girard, notaire àChainalières,
et avec toutes les personnes de sa maison.
Com m e le sieur Chambaud était habituellémcnt dans la
maison G ira rd , il lui fut facile de s’apercevoir, sur la fin de
l ’année i 8 i 3 , du mauvais état de ses affaires, et qu’il était dès
lors en état de faillite, ou de déconfiture. On verra m êm e ,
dans la suite , qu il est p r o u v e , par scs propres a v e u x , qu’il en
avait une parfaile connaissance.
L e sieur Chambaud cfait créancier de Girard de sommes
considérables.
Le sieur Chambaud-lilanchard, son proche p a re n t, était dan»
la même position.
�/*<)
(5)
L e sieur C h a m b a u d chercha des l o r s , de concer t avec G irard,
à mett re à couv ert sa créance et celle de son parent.
Girard n ’ a v a i t d'effet disponible que l’obligation Fontghassey
mais cet e f l e t était la garantie de la v e u v e V illevau d , et l’emploi
des deniers qui formaient le prix de son acquisition du pré du
B rcu il-
11 fallait donc, avant tout, obtenir d’elle le sacrifice de ses
droits sur celte obligation.
L ’entreprise semblait difficile ; mais le sieur Chambaud avait
à faire à une paysanne illitérée, et qui n’avait pas m êm e l ’in
telligence ordinaire aux personnes de sa classe.
Il commença par employer auprès d’elle les moyens de
douceur et de persuasion ; il lui fit entendre qu’il avait besoin
du désistement de son hypothèque sur la maison Fontghasse ,
et qu’il lui ferait donner en rem placem ent, par le sieur Girard ,
une hypothèque sur son domaine de Lagarandic, situé com mune
de St-Barthélemy d’A y d a t , qui était en valeur de 3o,ooo fr, et
sur lequel il n’existait aucune hypothèque.
Ces premières tentatives verbales n’ayant pas r é u s s i , il ne
craignit pas de les consigner par écrit.
Il donna à la veuve Villevaud un écrit de sa m ain, qui est
rapporté au procès,
C e t^ c r it est conçu en ces termes:
« Il existe une hypothèque de 11,000 fr., que la veuve Villevaud
a placée sur une maison de Clermont.
« On demande qu’elle en donne main-levée pour la transférer
» sur un domaine de montagne de la valeur de 3o,ooo f r . , qui
n n’est grevé d’aucune hypothèque. »
1-ic sieur Chambaud cherchait, par cet écrit, à induire en
erreur la veuve Villevaud.
Ce domaine de Lagarandic, qu’il certifie valoir 3o,ooo fr., a été
vendu depuis 9,000 fr.
L l pendant qu’il attestait que ce domaine n’était grevé d’aucune
hypothèque, il était bien des fois couvert par l'hypothèque
légale de la femme G ira rd , ou par d ’autres hypothèques c o n
ventionnelles ou judiciaires.
�(6)
•
Q u o i q u ’il en soit, la veuve Villcvaud, qui ne savait ni lire,
ni é c r ir e , ayant communiqué ce papier à quelques personnes
de confiance, on lui en fit connaître l’insuffisance, et elle refusa
de se prêter à ce que le sieur Chambaud exigeait d’elle.
L e sieur Chambaud changea alors de ton avec la veuve Villevaud.
II lui avait prêté une somme de 6,000 fr,' par obligation passée
devant G ira rd , notaire, le 6 avril 1810.
Il n ’est peut-être pas inutile d’observer que l’intérêt ne fut
fixé dans cette obligation q u ’au taux légal de cinq pour cent ;
tuais q u e , dans la réalité, il fut convenu à dix, ce q u i .» été
religieusement exécute par la veuve V illevau d , qui a la preuve
écrite de la main du sieur C ham bau d , du taux auquel elle payait
cet intérêt.
L e sieur Chambaud trouvant la veuve Villevaud rebelle à scs
volo n té s, la menaça d’exercer contre elle des poursuites rigou
reuses pour la contraindre au remboursement de son capital,
dans un temps où l’état de ses affaires 11e lui permettait pas
d’eifectuer ce remboursement.
Mais Ces premières menaces n ’ayant produit aucun effet, il
en fit d’un autre genre.
La veuve \ illevaiid avait un fils aîné soumis à la conscription ;
cette loi n’avait jamais été si sévère que dans le passage de 1813 à
1814*
"
' L e fils Villcvaud avait, à la vérité, plus d ’un titre à l’e xem ption,
soit comme fils de veuve, soit comme peu propre d’ailleurs au
service m ilitaire.
Mais que pouvaient la raison et même la loi contre la puissance?
On menaçait de l’envoyer dans les charois de l’arm ée, où tout
conscrit pouvait être admis sans égard aux causes qui pouvaient
l'exem pter du service militaire.
Ce dernier coup porta le désespoir dans l’âme de la veuve
Villcvaud. Elle aurait tout sacrifié pour sauver son fils; mais ce
q»‘> ne lui permit plus d ’hésiter, ce fut un écrit qu’011 lui fit
parvenir, qui paraissait signé par le sieur Chambaud, par lequel
il lui garantissait, formellement la validité du transfert de sou
�(7)
hypothèque tic la maison Fontghasse sur le domaine de Lagarandie, qu’on lui assurait de rechef valoir 3o,ooo fr., e t-n ’être
grevé d’aucune hypothèque,
L a veuve Villevaud prit alors l e tparli’ de céder aux instances
du sieur Cham baud, et de faire ce qu’on exigeait d’elle.
L e sieur Chambaud redevint doux et caressant ; il luiindiqùa un jour pour se trouver chez Chevalier, notaire: elle
s’y rendit au jour indiqué ; elle y trouva le siéur Chambaud
Girard et Chevalier, qui l’y attendaient.
«
La veuve V illeva u d , qui ne savait ni l i r e , ni é c r ir e , n’eùfc;
besoin que de donner son consentement de se départir de son
hypothèque sur la maison Fontghasse, et de la transférer sur.
le domaine de Lagarandie.
On rédigea de suite un acte, dans lequel on expose que, par acte
du 27 janvier 1808, le sieur Girard vendit à la veuve Villevaud et
à Ligier Bourgoignon, son gendre, ce dernier pour un dixième
seu lem en t, un pré situé dans les dépendances de lloyat
moyennant 11,177 fr. 5o c., avec convention que le sieur Girard
serait obligé de fournir une hypothèque spéciale pour sûreté"de
ladite vente;
Que pour se conformer à celte clause, en présence et du
consentement de ladite Aubignat et dudit Bourgoignon,ilfe sieur
Girard avait prêté au sieur Fontgliasse et à la dame D é soch es,
sa m è re , la somme de 10,862 f r . , suivant obligation reçue par
ledit Chevalier, notaire, le i 3 mai 1809, avec déclaration, dans
ladite obligation, que les fonds prêtés provenaient du prix de la
vente dudit jour 21 ju in , et que le remboursement ne pourrait
en être effectué qu’en présence desdits Aubignat et B ourgoignon,
pour veiller à l’emploi de cette somme ;
Q u ’aujourd’hui, ladite Aubignat étant seule intéressée dans
cette atfaire, « et ne voulant aucunement gêner la libération
» dudit sieur Fontghasse , attendu que ledit sieur Girard offrait
» une garantie suffisante pour le prix de la vente ci-dessus datée
» par l’hypothèque dont il sera ci-après parlé,
» Elle consentait, comme elle consent par ces présentes, que
>> le sieur Fontghassc serlibère, hors sa présence, de ladite somme
�(8)
» de 10,862 fr. envers ledit sieur G ir a r d , ainsi qu’il avisera 7
» et sans qu’il soit tenu de veiller à l ’emploi d ’icelle.
» E n conséquence, est-il ajouté, du consentement présentement
» donné par ladite Aubignat, et pour lui donner une garantie
» plus que suffisante du prix de la vente dudit jour 21 ju in , le
» sieur Girard a spécialement affecté et hypothéqué un Corps
» de domaine situé au lieu de Lagarandie, commune de St» Barthélémy d’A y d a t , consistant en bâtim ens, p r é s , terres et
» pacages, sur lequel ladite Aubignat pourra prendre de suite
> inscription, conformément audit acte de vente précité. »
Il est bon de remarquer q u e , dans la contexlure de cet acte ,
on affecte de n ’exiger le transfert de la créance* de la veuve Villevaud, sur le domaine de Lagarandie, que dans l’intérét du
sieur Fontghasse, qui était étranger à cet acte, et qui l ’ignorait,
pour ne gêner aucunement, y est-il dit', la libération du sieur
Fontghasse, comme s’il avait iniporté au sieur Fontghasse de
payer les 10,862 fr. au sieur Girard, ou à la veuve Villevaud.
On peut encore remarquer qu’on affecte de dire qu’on offrait
à la veuve Villevaud une gar antie suffisante ; et de répéter plus
bas, une garantie plus que suffisante, quoique cette garantie fut
absolument i l l u s o i r e .
E n f in , on doit encore remarquer qu’il était convenu , par cet
a c te , q u ’on ferait de suite, au nom de la veuve Villevaud, une
inscription sur le domaine de Lagarandie; inscription qui devait
être faite par le sieur Chevalier, et aux frais de ceux qui avaient
exigé d ’elle un si grand sacrifice , tandis (¡ue cette inscription
n ’a été mise au bureau des hypothèques que le 11 niai 1814 »
trois mois dix-sept jours après la convention.
A la vérité, quand celle inscription eût été faite de suite,
comme l’exigeait l’a c t e , la veuve Villevaud 11’cn serait pas plus
heureuse , et sa créance n’en serait pas moins perdue : la valeur
réelle du domaine de Lagarandie étant bien des fois absorbée
par les hypothèques légales ou conventionnelles antérieures,
quoique le sieur Cliambaud eut attesté cent fois à la veuve Ville
vaud , verbalement et par é c r it , que ce domaine était en valeur
de 3o,ooo J r ., et n 'était grevé. d'aucune h ypothèque*
�y
y
(9 )
>
5- v j
Mais la veuve Villcvaucl a appris depuis, et postérieurement
au j u g e m e n t rendu au tribunal de Clcrmont , qu’après la con
fection de l’a i l e , ci lorsqu’elle se fut retirée de l’étude du notaire,
les sieurs Cliambaud, Girard et Chevalier entrèrent dans une
chambre à c ô t é , d’où ils sortirent après un entretien s e c re t,
et que le sieur Chevalier dit à son inaître-clcrc, en présence du
sieur Cliambaud et. de Girard : P^ous ne ferez l'inscription de la
veuve Vil/evaud, sur le domaine de JLcigarandie, tpie quand on
vous le dira.
I)e sorte que le retard de cette inscription n ’a pas été seule
ment 1’cffet d’une négligence impardonnable, mais l’efTet d'une
collusion reprehensible des trois personnages qui s’étaient réunis
pour tromper la veuve Villevaud , et la dépouiller de sa fortune.
L e sacrifice de la veuve Villevaud, de son hypothèque et de
son p rivilè g e , sur la maison Fontgliasse, a été à peine consommé,
que l’obligation Fontgliasse, débarrassée de toutes ses entraves/
est devenue la propriété du sieur Cliambaud; et cela, p ar'u n acte
de cession, qui a sans doute etc fait le même jour, mais qui
n’a ete date que de quelques jours après.
Cette cession, dans laquelle le sieur Cliambaud fait figurer avec
lui le sieur C liam baud, son p a ren t, se termine en ces termes :
« La •présente cession est faite moyennant pareille somme
» de 10,862 f r . , r,o c . , que ledit sieur Girard déclare avoir ct-de.» vaut. reçue desdits sieurs Cliambaud , dont quittance.
Expressions desquelles résulte la preuve mathématique , que
les cessionnaires étaient créanciers du sieur G ir a r d , puisqu’ils se
faisaient céder celle obligation en payement des sommes ci-devant
reçues d’eux par le sieur Girard.
L e sieur Chambaud , ainsi parvenu à ses lins , a cherché à
mettre a profil l’ Iu'ureuse position où il s’était [»lacé aux dépens
de la veuve Villevaud.
Il a poursuivi le payement de l’obligation dont Girard lui avait
làil le transport.
il a m is la maison Fontgliasse en expropriation forcée.
Ellp a été vendue juridiquement.
\
�( IO )
11 a poursuivi l ’ordre du prix.
Il a été colloque u tilem en t, cl il a touché seul, ou avec le sieur
Chambaud-Blanchard , son parent, 10,893 fr. , 79 c . , dans le
courant de l’année 1816.
Pendant que le sieur Chambaud touchait ainsi des deniers qui
avaient été destinés primitivement à assurer à la veuve Villevaud
le prix de son acquisition du pré du B reu il, q u ’elle avait compté
au sieur G irard, elle était recherchée en éviction par la dame
Dalbiat.
O11 a vu que le sieur Girard , en achetant du sieur Dalbiat
le pré du Breuil, avait obtenu douze ans de délai pour en payer
le prix.
L e sieur G ira rd , loin de se libérer du capital, n’avait pas
même été exact à payer les intérêts.
La dame Dalbiat, qui'était aux droits de son mari, se pourvut
alors contre les tiers - détenteurs de ce p r é , et spécialement
contre la veuve V ille v a u d , qui en possédait une portion consi
dérable.
La veuve Villevaud sc vit donc obligée de payer une seconde
fois le prix de son acquisition, ou du moins elle en paye
annuellement les intérêts, jusqu’à ce qu’il plaise à la dame
Dalbiat d ’exiger le remboursement de son capital, ou de l ’évincer
de sa propriété, ce dont elle est journellement menacée.
L e danger pressant que faisait courir à la veuve Yillfcvaud
la recherche de la d^me Dalbiat,. lui fit ourrir les yeux sur la
profondeur du précipice que le sieur Chambaud avait creusé
sous ses pas.
Elle prit des renseignemens sur le domaine de Lagarandie
que le sieur Chambaud lui avait fait substituer à l'hypothèque
qu'elle avait sur la maison Fonlghasse.
Elle apprit que ce domaine (pie le sieur Chambaud lui avait
assuré tant de fois, verbalement et par écrit, cire rf'u/ic valent4
de 3o,ooo j r . , était, bien loin d'en valoir la moitié;
E l qu'au lieu de 11’clre grevé d’aucune hypothèque, cumule il
�(n)
•1
r•
l'assurait par son é c r i t , il était grevé de l'h y p o th èq u e légale de
irard qui
la femme- G
Girard
qui en absorbait la valeur et au d e là , et q u ’ il
était en outre grevé d’une multitude d’hypothèques convention
nelles ou judiciaires, dont plusieurs étaient antérieures à l ’acte
du 27 janvier 1814 » cl nuiraient rendu son inscription insigni
fiante , quand elle aurait été faite de suite comme le portait cet
•acte.
Elle a alors porté ses plaintes au sieur Chambaud sur le funeste
résidtal de ses procédés à son égard ; mais elle n’y a trouvé que
durcie , et scs plaintes n’ont produit d’autre effet q u e . d e lui
attirer des injures.
Accablée par scs m alheurs, s e u le , sans a p p u i, et dépourvue
de ressources pécuniaires, elle a passé quelque temps a gémir
sur son sort, sans avoir ni les moyens de recourir aux tribunaux ,
ni le courage de dénoncer à l ’opinion publique un homme d ’un
état aussi imposant que l’était le sieur Chambaud.
Ce n ’a été qu’au mois d’août 1819, q u e , bien convaincue q u ’elle
n’avait rien à espérer, à l’amiable, du sieur Cham baud, elle est
parvenne à vaincre sa rép ugnance, et à dénoncer aux tribunaux
les manœuvres qu’il avait pratiquées pour opérer sa ruine et
s’approprier ses dépouilles.
La veuve Yillcvaud a comm encé par d époser’ chez M e Cavy ,
notaire, le billet de garantie qui était dans ses mains , qu’elle
croyait signé du sieur Cham baud, auquel elle attachait trop de
prix pour ne pas en assurer l’existence,
K l par exploit du 3 août 1819, après avoir exposé les fails r
cl spécialement l’écrit de garantie dont elle avait fait le d é p ô t ,
a fait citer le sieur Chambaud devant le juge de paix de
son dom icile, pour être concilié, si faire se pouvait, sur la
demandé qu’elle se proposait de former contre lui, « tendante
» a ce qu’il f,U condamné à lui payer et rembourser la somme
» de 10,862 fi-. f»o c.., montant de l’obligation souscrite par les
» sieur cl dame Font {»liasse, laquelle devait servir d’emploi pour
le prix de l’acquisition qu’elle avait faite, de G ira rd , du pré
« du Iircuil, ensemble au payement des intérêts deladile somme
�¡A
( 12 )
»
»
•»
«
à compter du moment q u ’elle a clé obligée de payer le même
prix de son acquisition à la dame Dalbial, ou d’en servir
l'intérêt, comme aussi à lui payer des dominages-inlérêls ,
à donner par déclaration, et aux dépens. »
L e sieur Charnbaud a paru devant le juge de paix; il a pré
tendu (pie « l’e x p o s é , fait par la veuve Villevaud dans sa
» citation, était faux et supposé, injurieux cl calomnieux, et
» qu’il entendait en demander la suppression avec dommages» intérêts. »
II ajoute qu’il est tres-étonné que la veuve Villevaud ose
annoncer q u ’ e l l e tient de lui un prétendu é crit, portant une
garantie quelconque de l'effet de son désistement de son hypo
thèque sur la maison Fontghasse; qu’il n’a jamais écrit, signé,
ni délivré un pareil écrit, contre lequel il proteste de faux-,
et il se réservç, en conséquence, toute action, soit civile., soii
criminelle.
La veuve Villevaud n’avait garde de s’attendre à une pareille
défense: ne sachant ni lire, ni écrire, il avait été facile d ’abuser
de son ignorance et de sa simplicité ; et 011 lui a assuré qu’en
effet l ’ é c r i t qu'elle a d ép o sé , n’est ni de l’écriture du sieur
Charnbaud , ni signé p a r lùi.
L e sieur Charnbaud, ayant appris q u e , malgré sa dénégation
d ’avoir signé cet écrit , la veuve Villevaud n’en persistait
pas moins dans ses plaintes , il a cru pouvoir l'effrayer par
un acte instrumentaire qu’il lui a fait faire par huissier, le
22 avril 1820, par l e q u e l , après avoir dit qu’il se proposait
de se pourvoir en justice , pour faire déclarer cet écrit
faux , .fabriqué, et faire condamner la veuve Villevaud en ses
d o m m a g e s -in té rê ts , dans le cas où elle persisterait à v o u lo ir ,
s’en serv ir, il l’a fait som mer de déclarer si elle entend faire
usage, soit envers lu i, soit envers ses ayans-cause, dudit écrit
déposé par elle chez M e. C avy, notaire, et si elle persiste dans
ses dires injurieux et calomnieux par elle laits au bureau de
conciliation , ou si (.|l(. conSt.nt à ce que ces dires soient suj»primes , et lcdil écrit retiré des mains du notaire pour être
�( i3 )
biffe et lacéré , üt rnieux elle n ’aime donner déclaration authen
tiq u e , d e v a n t notaire, qu’elle reconnaît ledit écrit faux , et non
émané dudit sieur .Chainbaud , et les dires insérés au procèsvcrbal de non conciliation, du i lÿ août 1B19, injurieux et
calomnieux.
La veuve Villevaud a répondu à cet acte instrumentaire , q u ’elle
ne connaissait rien aux affaires judiciaires ; que tout ce qu’elle
sait, c’est qu’elle a donné au requérant une somme de 11,000 fr.,
cl qu’elle n’a rien touché;
Q u ’au surplus, vu son ignorance, elle invite le requérant à'
choisir uu ou plusieurs jurisconsultes, pour régler, à l’amiable,
s’il est p ossib le, l’affaire dont il s’agit.
Cet acte instrumentaire fut suivi d’une assignation donnée, par
le sieur Chainbaud, à la veuve V ille v a u d , le 22 mai su ivan t,
tendante à ce qu’il lui fût donné acte du désaveu qu’il faisait
d’avoir écrit et signé l’acte déposé, par la veuve Villevaud, chez
M c. C a v y , notaire , lequel serait supprimé et lacéré , com m e
fabrique.
V oir pareillement ordonner q u e , sans s’arrêter , ni avoir égard
aux prétentions et demandes énoncées dans sa citation du 3 août
181 g, dans lesquelles elle sera déclarée non recevaîde et mal fondée,
les termes injurieux.cl calom nieux, insérés soil dans ladite cita
tion , soil dans le procès-verbal du juge de p a ix , seront sup
primés ; qu’elle sera condamnée en 2,000 fr. de dommagesin té rêls, applicables aux pauvres; que le jugement à intervenir
sera imprimé cl aiïiçhé au nombre de cent exemplaires aux frais de
Jadilc veuve V illeva u d , e t’ qu’elle çera, en ou tre, condamnée
aux dépens.
veuveV illevaud, de son coté, a fait assigner le sieur Chainbaud,
le 12 juin suivant, pour voir dire et ordonner q u e , sans s’arrêter
au département de sou hypothèque et p riv ilè g e , sur la maison
Fonlghasse, qu’elle a donné, par l’acte passé devant C hevalier,
notaire, le 27 janvier ,814, lequel sera déclaré m i l , frauduleux
cl comme non avenu , ledit sieur Chainbaud sera condamné
�f
( 4 )
à lui rendre cl restituer la somme de i o , 8 c)3 fr. -9 c . , qu’il a
touchée a son lieu et place, par sa collocation dans l’ordre de
la maison Fontghasse, aux intérêts de ladite som m e, d ep u is le
jour q u ’a eu lieu ladite collocation ; se v o i r , en o u tre, condam
ner en la somme de G,000 fr. de'dommages-intérêts envers elle,
et aux dépens.
D epuis, l’exposante, en persistant dans ses premières con
clusions , a signifié des conclusions m otivé e s, tendantes subsidiairement à ce qu’il lui fut permis de faire preuve, tant par
titres que par té m o in s , des faits de dol et de fraude qui
étaient alors à sa connaissance, cl des manœuvres pratiquées
par le sieur Chambaud pour la tr o m p e r, et obtenir d’elle le
département de son hypothèque et privilège sur la maison
Fontghasse, pour les remplacer par une inscription sur le do
maine deLagarandie dont il exagérait sciemment la valeur, pour
l ’induire en erreu r, et qu’il attestait n’être grevé d'aucune hypo
thèque, tandis que la valeur en était bien des fois absorbée par
des hypothèques légales ou conventionnelles, existantes lors de la
rédaction de cet acte.
L e sieur Chambaud a défendu à cette demande, en désavouant
tous les faits articulés par la veuve Villevaud;
E n présentant l’écrit de sa main , qu’il lui avait remis, comme
un m émoire à consulter dans scs intérêts ;
En prétendant q u ’il eut été sans intérêt dans toutes les ma
nœuvres ([non lui im pute, ne lui étant rien du par le sieur
Girard ;
Eu assurant que l’acte du 27 janvier lui était étranger, cet acte
n ’étant passé qu'entre la veuve Villevaud et Girard , et hors de
sa présence ;
Ou a l'égard des prétendues menaces faites à la veuve Villevaud
par lui ou par ses agens, q u ’elles étaient d ’autant moins vraisem
blables, (¡ne tout était terminé pour la conscription à l’époque
de crt acte; que d’ailleurs son (ils était exempt , par la loi, du
service militaire x et qu'il était personnellement sans a u c u n e
influence possible dans celle partie.
�( i5)
Enfin il a ajouté que si la veuve Yillevaucl avait perdu sa
créance , c’était par sa fa u te , "et pour n’avoir pas fait son ins
cription , sur le domaine de Lagarandie, immédiatement après
l’acte du 27 janvier.
C e genre de défense, et la hardiesse des dénégations du
s i e u r Chambaud , en a imposé au tribunal de première ins
tance; et la cause portée à l’audience du 18 août 1820, il est
intervenu jugement contradictoire q u i , sans s’a rrê te r, ni avoir
égard aux faits articulés pau la veuve Y illc v a u d , qui sont dé*
clarés inadmissibles, ordonne que l’écrit, attribué au sieur Qbantbaud , déposé parmi les minutes de M e. C avÿ, notaire, le 19 juin
181g, sera rayé et biffé ; que mention sera faite dudil jugement
en marge de l’acte de dépôt, et condamne la veuve Yillévaud
aux dépens pour tous doimnages-intérèts.
1c
La veuve Yillcvaud .est appelante de ce jugement.
Non pas dans la partie qui est relative à l’écrit qui est déposé
chez M e. Cavy , notaire, elle s’est assurée qu’il n’est ni écrit de la
main du sieur Chambaud, ni signé de lui : elle n’a donc rien
à opposer à celte parlie du jugement.
L e tribunal a ob servé, avec raison, que ne sachant ni lir e , ni
écrire, ce n’est pas a elle qu’on peut attribuer cet écrit ; il ne lui
reste donc qu’à gémir sur les funestes effets d’une supercherie
dont elle ne peul atteindre les auteurs.
Mais elle dénonce à la Cour ce ju gem ent, pour avoir repoussé
ses plaintes sur le dol , la fraude, et les manœuvres pratiquées
par le sieur Chambaud pour lui enlever sa fo rtu n e , et s’en em
parer pour son compte et pour celui du sieur •C ham bau d , son
parent.
Depuis ce jugem ent, elle a fait de précieuses découvertes , fjoit
en preuves écrites , soit en faits nouveaux , ou qui avaient échappé
a sa mémoire , ou q ui soui parvenus depuis à sa connaissance; el
elle se flatte que ces preuves de tout genre 11e seront plus
écartées par le reproche commode de rinadiuissibilile, comme
elles l’oul été en cause principale.
’
�( i6 )
Los principes sur le dol et la fraude sont écrits clans tons les
livres.
L e jurisconsulte Labeo en donne la définition en ces termes ;
D olu s malus est omnis calliditas , ftd la c ia , rnachiuatio, ad cir~
cum tenicndum , j'a llen d u m , decipiendmn alterum adhibita.
Expressions que Danty traduit en ses termes, dans scs additions
sur le traité de la preuve par témoins, de Boiceau, cliap. 7, n°. 10:
« Dol mauvais • on entend toutes sortes de finesse, de trom» perie, ou de fraude, concertée pour surprendre et pour tromper
» un aulre. »
Telle est encore la défmilirin que nous en donne Barb eyracx
sur Puffendorf, dans son Traité du droit de la nature et des gens,
Liv. 3 , cliap. 6 , aux notes:
» Par dol, dolus malus, on entend toutes sortes de surprise, de
» fra u d e, de finesse, de fein te, de dissimulation; en un m o l ,
» toute mauvaise v o ie , directe 011 indirecte, positive ou négative,
» par laquelle 011 trompe quelqu’un malicieusement ».
i- D u m o u lin , cl différons autres jurisconsultes, et après e u x ,
D an ty, a l'endroit cité, développent le vrai sens de chacune de
Ces Irois expressions, em p loyées, par te jurisconsulte romain,
dans la définition du dol , calliditas, fa lla c ia , inachiuntio , et par
lesquelles il a voulu marquer trois différons degrés de dol.
« Le p rem ier, appelé calliditas, est celle dextérité que les
» Latins appellent soh rtin n i, par laquelle un liommc a d ro it,
» cl qui a de l’expérience dans les affaires , engage une
» personne simple à faire ce qu’il veut, cl le m èn e, comme
>>■on d it, p a r l e nez, non pas ouvertem ent, mais par dos ma- •
» nières cachées, et avec une apparence «le sincérité dont il
» \n c sa défie pas: ce qui csl fort bien exprimé par le mol
» cirainu tinirc. »
. « Le second d e g r é , appelé f a lla c ia , est la fraude qui se
» «oinmcl manifestement par des paroles affectées ou équivoques ,
» et par des mensonges.
« Le troisième degré, niachi/iatio , est la surprise qui se fa il
�( T7 )
» par des voies indirectes et par de mauvais m o y e n s , qui pas« sent jusqu’il ce que. nous appelons fourberie.
» An reste, ajoute-t-il, n°. i 5 , le dol peut se définir, en
» général, tout dessein frauduleux de nuire à autrui, soit que
» cela se fasse avec déguisement et avec simulation, soit que
» cela se fasse ouvertement. »
Et. nous lisons dans l’article 1109 du Code civil, « qu’il n’y
» a point de consentement valable, si le consentement n’a été
» donné que par e rreu r, ou s’il a été extorqué par violence,
» ou sur/ms par dol. »
11 ne nous reste donc qu’à faire l’application de ces principes
à la cause.
La veuve Villcvaud achète de Girard un pré qu’il avait
acquis lui-même du sieur D alb iat, et dont il 11e lui avait pas
payé le prix , qui n’était payable que dans le ternie de douze
années, qui n’était pas expiré,
L e prix de l’acquisition de la veuve Villcvaud était de 11,379 liv.
tournois.
Elle ne paye qu’en prenant la précaution de l ’emploi de ses
deniers.
Girard fait un prêt aux sieur et dame Fontghasse, qui lui
en consentent obligation solidaire, payable dans cinq ans, et
l ’assurent par première hypothèque sur la maison de la dame
Fontghasse, située .à C lc rm o n t, rue de la Treille.
Ou stipule, dans cet acte, que les deniers prêtés proviennent
de la veuve Villcvaud , et sont le prix de la vente du pré du
ïïreuil. 11 est ajouté que les sieur et dame Fontghassc seront
tenus, comme ils s’y o b lig e n t, de ne faire le remboursement
de la somme prêtée qu’en présence de la veuve Villcvaud, et
de Son g e n d re , alors intéressé pour un dixième dans l'acquisition
du pre du U rcuil, pour veiller à l'emploi dicelle conformément
au conlral.
Le terme de cinq ans , lixé pour le remboursement du capital,
étant sur le point d’e x p ir e r , le sieur C ham bau d , qui connaissait
3
;
�(i8)
parfaitement le mauvais état des affaires du sieur Girard , et qui
ne voyait aucune ressource dans les moyens personnels de son
d é b ite u r , pour se faire payer de sa créan ce, et de celle du
sieur Charnbaud, son p arent, conçut alors le projet de sacrifier
la veuve Villevaud, et de prendre sa place.
C ’est ce qu’on a p p elle, en matière de fraude , concilium.
Ce projet a été suivi d’exécution; et on trouve ici concilium
et evenlus.
L e sieur Charnbaud emploie d’abord envers la veuve Ville
vaud des sollicitations amicales.
Ces sollicitations n’ayant pas réussi, il les consigne dans un
écrit q u ’il remet à la veuve Villevaud.
« Il existe, porte cet écrit, une hypothèque de 11,000 fr.
» que la veuve Villevaud a placée sur une maison de Clermont.
« On demande qu’elle en donne main-levée pour la transférer
» sur un domaine de montagne, de valeur de 3o,ooo fr, qui
» n ’est grevé d’aucune hypothèque. »
Si on veut commenter cet é c r it , on se demande d ’abord
comment le sieur Charnbaud était instruit qu’il existait une
inscription de 11,000 fr, faite par la veuve Villevaud sur une
maison de Clermont, si ce n’csl parce que le sieur G irard, son
ami in tim e, l’avait instruit de toutes ses affaires, et l’avait initié
dans le secret de sa position.
On demande qu’elle en donne main-levée.
Quel est celui qui demande que la veuve "Nillcvaud d onne
cette main-levée ? Ce n’est pas le sieur G ira rd , qui n’est pas
m ême dénommé dans cet é c r it , et qui n’a pas pris la peine de
l ’é c r i r e , c’est' celui dont il est l’ouvrage, et qui devait en
p ro fite r, ainsi que son p a r e n t, créancier comme lui du sieur
Girard.
Et quels moyens le sieur Charnbaud emploie-t-il pour par
venir à son but? La fraude cl le mensonge, callidiiatem ,fallacùun,
machinnlionem.
On demande la mn’m -lcvée de celle i n s c r i p t i o n p o u r la Iransf érer
sur 1111 domaine de montagne, appartenant au sieur Girard, de
valeur de 3o,ooo IV.
�(*9)
.
Et cclte valeur était tellement exagérée par le sieur Chambaud/
qu<5 ce domaine a été ven d u , d ep u is, 9,000 fr.
L e sieur Chambaud ajoute que ce domaine n'est grevé d'aucune
h y p o th è q u e , el i l est établi que non-seulement la valeur de ce
domaine était épuisée, et bien au delà, par l'hypothèque légale
d e là fem m e, mais que ce domaine était encore couvert d’autres
i n s c r i p t i o n s judiciaires ou conventionnelles, pour des sommes
énormes dont plusieurs existaient au moment o ù le sieur Chambaud traçait ces lignes.
Ainsi le sieur Chambaud usait de d o l , de fraude et de men
songes ; il employait tout à la fois, calliditatem, fallaciam et
machinationem: et contre qui usait-il de tous ces m oyens? contre
une malheureuse villageoise, illitéré e , sur laquelle il avait l ’as
cendant de la puissance, qu’ il aggravait encore par des menaces
<Tcxcrcer contre elle des poursuites rigoureu ses, pour la forcer
au remboursement d’un capital de 6,000 fr. qu’elle était hors
d ’état de faire , et des menaces plus effrayantes encore d ’accabler
son fds du poids de la conscription.
C ’est ici le cas de rappeler la défense du sieur Chambaud
devant les premiers juges, qui est développée avec complaisance
dans les nombreux considérans qui précèdent le dispositif du
jugement.
Il s’est présenté continuellement comm e étant sans intérêt
dans cette affaire;
Comme étant étranger à l’acte du 14 janvier i8 i/ f, <lans lequel
non-seulement il n’était pas en qualité, mais qui avait été fait
hors de sa présence.
O r , tout est faux et mensonger dans ces faits,
L a veuve Yillcvaud offre de prouver que le sieur Chambaud
ctait avec Girard chez Chevalier, notaire; qu’il a assisté h la
rédaction de 1acte ; (pie la veuve Yillcvaud s’étant retirée de
1 étude du notaire, les trois amis sont entrés dans une chambre
a c<'»té de l’étu de, d’où ils sont sortis après une conférence se
crète, à la suite de laquelle Chevalier a dit à son maître-clerc,
�•V
( 20 )
en présence du sieur Chambaud et de Girard: V m s ne ferez l'mscription île la vaine J^illeiaud, que lorsqu'on vous le dira.
Quant au prétendu défau! d’intérêt, tant de fois répété par le
sieur Chambaud, c’est encore un m ensonge, démontré par une
preuve é c rite , émanée de lui-même.
On a vu qu’aussitôt après avoir obtenu le. sacrifice qu’il exigeait
’d e la veuve Yillevaud, de son inscription sur la maison Fontghasse,
p ou r la transférer sur le domaine de Lagarandie, il a trouvé le
m oyen de s’approprier l’obligation de 10,862 fr. 5o c., qu’avait
le sieur Girard sur cette maison.
Il s’est fait c o n s e n t i r à lui et au sieur Chambaud , son parent,
la cession de cette obligation, qui a sans doute été faite le
m êm e jour et au m êm e instant, quoique le complaisant notaire
Tait datée du 5 février, huit jours après l ’acte du 27 janvier.
Mais cette date est assez indifférente; ce qui est bien plus
important dans cet acte, c’est la reconnaissance que fait le sieur
Girard , que « cette cession est faite moyennant pareille somme
:» de 10,862 fr. 5o c . , que le sieur Girard déclare avoir ci-devant
» reçue desdils sieurs C ham baud, dont quittance. »
Si le sieur Girard avait ci-devant reçu des sieurs Chambaud
la somme de 10,862 fr. 5o c., il était donc leur débiteur de
cette som m e, au moment qu’il leur transférait son obligation de
la même somme sur la maison Fontghassc; il leur transférait
donc cette obligation pour se libérer envers eux. L e sieur Cliainbaud n’élait donc pas sans intérêt pour lu i, et pour son p a re n t,
lorsqu’ il exigeait avec tant d ’instance, de la veuve Y illev a u d , la
main-levée de son inscription sur la maison Fontghassc, et son
transfert sur le domaine de Lagarandie.
L e sieur C ham bau d , qui a senti toute l'importance de ce fait,
a cherché à en prévenir les conséquences qui devaient naturclkv
ment en résulter contre lui. 11 s’est donc retourné de toutes les
manières pour y répandre une obscurité ténébreuse; mais tous
les efforts qu’il a faits pour cela se retournent contre lu i, et ne
le rendent que plus coupable.
�( 21 )
D ’a b o rd , q u a n t à la partie de la cession qui concerne le sieur
Chambaud-Blanchard, son parent, le sieur Clnunbaud s’exprime
en ces Lcrmcs, dans un Mémoire imprimé q u ’il a distribué en
cause principale , page t).
. .
« Les deux cessionnaircs entraient pour chacun moitié dans
» le prix de la cession : le sieur C ham baud-B lanchard a fait.
» tenir à compte sur sa portion ce <jid lui était du ; le surplus,
» il l’a payé en argent, c i ....................................... 5 , 43 i fr. 25 c. »
L e sieur Cliambaud ne dit pas ici ce qui était dù à son parent;
d’après l ’acte de cession, il est prouvé que c’était la totalité de.
sa moitié du prix de cette cession, puisque le sieur Girard
l ’avait reçue de lui ci-devant : et quand il y aurait eu quelque
léger appoint, à donner pour solde, une pareille minutie ne
tirerait pas à conséquence.
L e sieur Cliambaud est bien plus embarrassé pour sa moitié
du payement du prix de la cession.
D ’ab o rd , à l’en croire, ce qu’ il en a fait a été pour obliger
le sieur Boucliet.
« Le sieur Cliambaud, est-il dit dans ce M ém oire, a fait
» appeler le sieur B o u c h e t, (¡ni était bien loin de se douter du
» mauvais état des affaires de Girard.
»
»
«
»
»
»
« Il fait ensuite dire a Boucliet qu’il a cautionné Girard pour
7,700 fr, cl (pie, dans sa simplicité, il ajoute q u ’il 11c peut
pas croire avoir été trompé par son camarade d’enfance, par
celui qu’il regardait comme son meilleur ami. Trom peuse
sécurité! s’écrie le sieur Cliambaud; où n’aurait-clle pas conduii le malheureux Boucliet, ^i. un ami plus sincère n’avait
pas veillé sur lui,? »
Que d’aveux précieux dans ces lignes!
. ^ m a r q u o n s d’abord (pie le sieur Cliambaud fait appeler le
sicui B o u cliet, (¡ni était loin de se douter du mauvais état des
affaires de Girard.
Le sieur Cliambaud l’en instruit; et Bouchet, dans sa sim pli
cité, 11e veut pas y croire.
�*
»-
'l
( 22 )
Que faut-il conclure de tout cela ? Que le sieur Chambaud
était parfaitement instruit du marnais état des affaires de Girard,
p u isq u ’il en instruit les autres ;
Q u e , dès lors, tout ce qu’il faisait était de mauvaise foi;
Q u e c’était de mauvaise foi, et pour tromper la veuve Yillev a u d , qu’il la pressait par tarit de m oyens, soit verbalem ent,
soit par é c r i t , soit, par des menaces de tout g e n r e , de donner
la tnnin-lcvée de son inscription sur la maison Fontghasse, sa
chant bien q u ’en la transférait sur le dom.nine de Lagarandie,
elle perdrait nécessairement sa créance, attendu le mauvais état
des affaires de Grirard ;
Q u e c’était de mauvaise foi qu’il se faisait céder l’obligation
de Girard sur la maison Fontghasse, puisqu’il ne pouvait accepter
cette cession sans contrevenir aux lo is , et faire tort aux autres
créanciers ;
Q ue rien n ’est moins excusable que d ’avoir ruiné la veuve
Villevnud , et de lui avoir fait perdre sciemment sa créance ,
pour l'eillcr, comme il le d i t , sur le sieur B o u ch et, qui a trouvé
en lui un ami plus sincère que Girard , son camarade d’enfance,
p u is q u e , à l ’en c r o i r e , i l s e r a i t parvenu à sauver sa créance en
sacrifiant la veuve N i l l e v a u t l .
L e sieur Chambaud ajoute qu’il a payé au sieur Delaune 2,000 f,
sur le p'rix de la cession ;
Et qu'il a cédé à Bouchet des obligations pour le restant,
mrtiris 3 i fr. 25. c. q u ’il a payés au sieur G ira rd , en deniers,
pour appoint.
»tn. ii
11 faut convenir que le slctfr Chamband a une mémoire heu
reuse, puisqu'il se rappelle du nombre ‘des centimes qu’il a
payé au sieur G ira rd , le 27 ja m icr 1814.
M ais, d ’une part, cette version est inconciliable avec le texte
de la cèssion, qui atteste que le sieur Girard était débiteur de
la totalité du prix envers les deux cedataires.
D ' a u t r e - p a r t , si cette version était v r a i e , le sieur Cha i nb au d
serait bien ¡»lus c o u p a b l e , p uisqu' il ne lut resterait nicnie
pas
I excuse d e l'intérêt p e r s o n n e l , et q u ’ il aurait gra t ui t ement , et de
�( 23 )
gaîté de cœur, sacrifié une malheureuse veuve, sans défense, pour
enrichir (le ses dépouilles le sieur Chambaud-Blanchard, son
proche p a re n l, et le sieur Bouchet, son am i, dont il aurait
payé les créances, au moyen de l'obligation Fontghasse, nonseulement au préjudice de la veuve Villevaud à qui elle appar
tenait , mais au préjudice des autres créanciers Girard.
C ’est le cas de dire que le sieur Chambaud s’esl pris ici dans
ses propres filets.
Il
ne sera pas plus heureux dans le genre de défense^ qu’il
a employé devant les premiers ju g e s , sur le retard de l’ins
cription prise, au nom de la veuvp Yilleyaud , sur le domaine de
Lagarandie.
C ’est sa faute, a-t-il dit, si elle a perdu sa créance ; c’est parcç
q u’au lieu de faire son inscription au bureau (les h y p o th è q u e s ,
immédiatement à la suite de l’acte du 27 janvier 1814, çlle ne
la formée qu’au mois de mai suivant.
Mais comment concilier ce reproche que fait ici le sieur Chanibaud à la veuve Villevaud avec les laits dont elle offre la
p reuve; que lorsqu’elle se fut retirée de chez le notaire, les
trois amis , les sieurs Cham baud, Girard et Chevalier entrèrent
dans une chambre a coté de l ’etudc, d’où ils sortirent après un
entretien secret, et que Chevalier dit à son maître-clerc., en
presence du sieur Chambaud et de Girard : Jro\is ne ferez l'ins
cription de la veuve P'illevaud, que lorsqu'on vous en donnera
l ordre.
Comment concilier ce reproche avec le fait constant et consacré
par l’ usage, que c’était à C hevalier, notaire , ou à scs clercs, à
faire cette inscription , et non à une paysanne illilérée , qui devait
nécessairement s’en rapporter à eux , ne pouvant pas la faire
par elle-même ?
Comment concilier ce r e p r o c h e , avec la parfaite connaissance
qu’avait le sieur Chambaud du mauvais état des affaires du
sieur (iirard, dont il instruisait si bien Cham baud-Blanchard,
son parent, et B o u ch et, son a m i, tandis que non-seulement
il cachait ce mauvais état des affaires de Girard à la veuve
�( 24)
V illcv a u d , mais qu’il afTcctait de lui exagérer sa fo rtu n e , verba
lement et par écrit, pour mieux la trom per, et qu’il lui assurait
que cette fortune n’était grevée d ’aucune hypothèque. ( * )
Mais ce reproche n’est pas seulement fait de mauvaise foi
par le sieur Chambaud à la veuve Villcvaud ; il est encore dé
montré q u e , lors même que l ’inscription de la veuve Villcvaud ciit
été faite le jour même de l’acte du 27 janvier i8i/f, elle 11e lui
aurait pas été plus avantageuse que celle qui a été faite pour
elle au mois de mai suivant;
Soit parce que le sieur Chambaud l’avait trompée d ’une ma
nière étrange, sur la valeur du domaine de Lagaramlie, qui a
été vendu f),ooo f r . , tandis qu’il le portait à 3o,ooo fr ., par son
écrit qui est dans les mains de la veuve Villcvaud ;
Soit parce qu’il attestait que ce domaine n’étail grevé d’aucune
hypothèque, tandis que non-seulement la valeur en était bien
plus qu’absorbée par l’hypothèque légale de la dame G irard,
dont les droits lui étaient parfaitement connus;
Soit parce qu’il y avait trois autres inscriptions sur ce domaine,
ou généralement sur tous les biens du sieur Girard , antérieures
a l’acte du 27 janvier i B i /J, qui montaient à environ 28,000 fr.
Ainsi , le reproche que lait le sieur Cliamhnud à la veuve Vil
lcvaud d ’avoir perdu sa fortune par sa faille, el pour n ’a v o i r
pas fait son inscription immédiatement après l’acte du 2 7 'jan
v ie r, n’est pas plus heureusement imaginé que son prétendu
défaut d ’intérêt dans cette affaire ; que le fait (pic l’acte du
27 janvier a été fait en son absence, qu’ il lui était absolument
étranger, cl qu’il était lait-uniquem ent dans l’intérêt du sieur
Girard.
Le sieur Chambaud n'est pas plus heureux dans ses réponses
aux reproches que lui a laits la veuve Villcvaud , de lui avoir
(*; \.*'s d r ttr s *1»’ ('»irar<! * in setite* j u s q u ' a u
12 mai i S r r>, m o n te n t à 1 2 0 , 7 [ f i fr. *
jio n <011^11 ¡» l'i n s c r ip t io n h’ gale d e mi f e m m e , q u i m o n ta it a n m o i n s à
12 ,0 0 0 l r , ,
n o n compris, w» «lrttrs «ïiiroKia p liair e*.
l*,t l a
to talité
de
»es b i e n s a O l e \ r n d u e ,
par
actes
vo lo n taires,
m j/i o
** f r .
�Uts$
(¡>5)
fait et fait faire des m en aces, soit de la poursuivre rigoureuse
ment pour la forcer au remboursement des 6,000 fr. q u ’elle lui
d e v a it, soit de faire partir son fds, si elle sc refusait à ce qu’il
exigeai* d’elle.
A l’en c r o ir e , tout était terminé pour la co n scription , a
l’époque où l ’on suppose qu’il a fait ces menaces ; et il était
tellement étranger et sans pouvoir lui n u i r e , qu’il suifit de la
seule invraisemblance de ces faits, pour les faire rejeter.
Gomme si tout le monde ne savait pas que , sur la lin de 1813,
et. au commencement de 1814, il n’y avait point de bornes aux
abus du p o u v o ir , et aux vexations en matière de conscription ;
Comme si l’on ignorait que rien n’était im po ssib le, dans ce
genre, à un maire tel que le sieur Cliam baud, q u i réunissait a ce
titre un grade militaire qui lui donnail un ascendant, et un degré
de puissance auquel il était impossible à la veuve Yillevaud de
résister.
L e sieur Cliambaud croit encore pouvoir écarter ces faits, en
opposant que le fils de la veuve Yillevaud était n on -seu lem en t
exempt comme fils de v e u v e , mais comme im propre au service
militaire ; comme si on ignorait que tel conscrit qui ne pouvait
etre encadre dans un corps de troupe de ligne, était employé
utilement dans les charois de l’armée.
D ’ailleurs, la veuve Villevaud était-elle en état de juger du
plus ou moins d’effet que pouvaient avoir les menaces du
sieur Cliambaud ? c’est sur les inquiétudes si naturelles de la
tendresse maternelle ; c’est sur sa crédulité et son ignorance , qui
étaient bien connues du sieur Cliam baud, qu’il faut calculer la
vraisemblance de ces m enaces, et non sur le plus ou le moins
de possibilité qu’aurait eu le sieur Cliambaud de les mettre à
exécution.
A u surplus , il n’est pas à craindre qu’on ose élever des doutes
sur 1 admissibilité de la preuve testimoniale des faits articulés par
la veuve Yillevaud.
La plupart de ces faits sont déjà établis par des preuves
écrites irrécusables: et ne voudrait-on les considérer que comme
(commencement de preuves par é c r it , il nous suffirait d ’invoquer
�( 26 )
l ’articlc 1 347 du Code civil, qui porte que les règles établies sur
l ’inadmissibilité de la preuve testimoniale , reçoivent exception
lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit;
L ’article 1348, qui porte que ces règles reçoivent encore excep
tion , lorsqu’il s’agit d’obligations qui naissent de contrats, et de
délits ou quasi délits ;
E t l’article 1 353 , dans lequel on lit que « les présomptions qui
ne sont pas établies par la l o i , sont abandonnées aux lumières
et à la prudence du magistrat, qui ne doit admettre que des
présomptions g ra ve s, précises et concordantes, et dans les
cas seulement où la loi admet les preuves testimoniales, à
moins que l'acte ne soit attaqué pour cause de fraude ou de dol.
Il
ne faut, d ’ailleurs, jamais perdre de v u e , dans ces ma
tières , ce que nous dit le judicieux Coquille, dans son Commen
taire sur l’art. 4o du chap. 4 de la Coutume de Nivernois, que
« ceux qui veulent faire frau d e, travaillent de tout leur pouvoir
» à la couvrir; q u ’elle ne serait pas fraude, si elle n ’était occulte,
» et par regle générale, se dit qu’ez choses qui communément
» sont de difficile preuve ; on doit recevoir les preuves par con» jectures , et telles qu’on les peut recouvrir ; et peut-on joindre
différentes sortes de preuves imparfaites, pour en faire une
complète ? »
On ne peut donc refuser à la veuve Villevaud la faculté de réunir
tous les genres de preuves propres à constater le dol et la fraude
dont elle a été victime. L e jugement qui a déclaré inadmissible,
ou la preuve testimoniale, ou les faits articulés par la veuve Villev a u d , est un vrai déni de justice qu’elle dénonce à la C o u r ,
devant laquelle les opprimés sont assurés de trouver justice et
protection.
Me B O I R O T , ancien Jurisconsulte.
M e V E Y S S E T , Avoué
A CLERMONT, I)E L’IMPRIM ERIE DE PELLISSON, IM P.-LIBRAIRE,
AU C O lN DES R UES SAINT - GENES ET SAIN T E S P R I T,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Aubignat, Jeanne. 1821?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Veysset
Subject
The topic of the resource
banqueroute
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jeanne Aubignat, veuve de Pierre Villevaud, Propriétaire à Royat, appelante ; contre Le sieur Pierre Chambaud, Adjudant-Commandant, Offer de la Légion-d'honneur, ancien Maire de Chamalières et Royat, habitant de la ville de Clermont, Intimé.
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pellisson (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1821
1791-1821
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2614
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2615
BCU_Factums_G2616
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53529/BCU_Factums_G2614.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
banqueroute
biens nationaux
conscription
Créances
doctrine
dol
fraudes
hypothèques
illettrisme
magistrats municipaux
notaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53525/BCU_Factums_G2610.pdf
094a58f0221d70fbf3dfec89e46cbf00
PDF Text
Text
MEMOIRE
A CONSULTER
POUR
le
sie u r
V I N D R I N E T , P ro p rié ta ire
et Maire
de la Co m m u ne de V a li g n y - le - Monial , C a n t o n
de
Cer illy ,
Département
de
l ’A l l i e r ,
Prévenu
et Appelant
CONTRE
M o n s ie u r
l e
PROCUREUR D U RO I, Plaignant
et intimé.
A
'J i exercé les fonctions de maire pendant plusieurs années ; je suis
propriétaire d ’ u n e f o r t u n e assez considérable ; ma réputation d’homme
d'honneur est intacte : toutes les autorités civiles et religieuses, ainsi
que les notaires du canton où j ’habite se sont plu à attester ma mora
lité , ma fidélité et ma délicatesse dans tous les actes de ma vie civile et
politique ; et cependant une poursuite en escroquerie, dirigée et sou
tenue contre moi par l e ministère p u b l i c , poursuite dont toutefois j e
�ne conçois ni le m otif ni le b u t, est venue compromettre à-la-fois ma
fo rtu n e , ma tranquillité et mon honneur.
Ma position est singulière. U n acte de ven te, consenti par moi à
un tiers, vente dont je demandais l’exécution, et dont la validité no
m ’a point encore été contestée par celui avec lequel j ’ai contracté, a
servi de prétexte aux poursuites du ministère p u b lic ; et la convention
la plus ordinaire et la plus commune de la vie a été regardée comme
une escroquerie pratiquée de ma pari contre mon acquéreur. Je sais que
la bonne foi de l’ une des parties ne suffît pas pour garantir l ’exécution
d ’ un contrat; e t , quoique la vente dont il s’agit ait été acceptée libre
ment par mon acquéreur, et qu ’elle lui soit avantageuse, je n’aurais
rien trouvé d ’extraordinaire à ce qu ’ il eût essayé de la faire annuler
par les voies civiles. Mais ce que je ne conçois pas, c’est qu ’en respectant
1 acte qui le lie envers m o i, il ait trouvé le moyen de me le faire imputer
a délit, et que la vindicte p u b l i q u e m ’ a i t frappé comme escroc, quand
ma vente existe toujours, et que môme rien n’ a été fait pour parvenir
à l ’anéantir.
Il me serait impossible de concilier des choses et des idées aussi dis
parates : je crois avoir été plpcé hors des règles ordinaires, et mis dans
une exception créée exprès pour moi ; je crois également, en ne con
sultant que ma raison , que je suis victime d ’ u n e e r r e u r judiciaire qui
me serait Lien funeste , si elle ne pouvait ôtre réparée. Mais comme
mon ignorance des lois et mon intérêt personnel peuvent également
m ’éloigner de la vérité, je viens la demander à des jurisconsultes aux
quels je vais faire connaître les faits dans toute leur exactitude.
Comme je l’ai d i t , j’étais maire de la commune de V a lig n y , où
j ’habite. L e sieur Moingcard est percepteur de la môme commune , et
demeure à A in a y , petite ville peu éloignée du bourg de Valigny.
J’étais propriétaire de deux maisons situées dans le bourg de Valigny.
L ’ une d’e lles, remarquable, dans le canton, par sa beauté, son agré
ment et ses aisances , devait ôtre vendue pour me libérer d ’une somme
de 8000 fra n cs, que je devais au sieur P c titje a n , de C erilly , mon
unique créancier : il était important pour moi de faire ce rembourse
ment. En conséquence, à la fin de novembre, ou au commencement do
décembre 1821 , j’annonçai, par des afliches, la vente de cette maison
et de quelques autres propriétés.
Je connaissais ppu le sieur Moingcard ; mais les contribuables sc
plaignaient journellement de sa perception ; il* me remettaient chaque.
�jour des quittances qui paraissaient prouver qu’ ils avaient payé des
sommes en sus de leur cote. Je crus qu ’il ¿tait de mon devoir d’en
prévenir le sieur M oingeard, et de l’ inviter à faire cesser cet abus.
Mes remontrances ne produisirent aucun effet. De nouvelles plaintes
et de nouvelles remises de quittances fixèrent bientôt mon attention , et
je crus qu’ il était de mon devoir d’instruire l ’autorité.
M . T u r r a u l t , contrôleur des contributions, vint à cette époque à
V a lig n y ,
pour y faire l ’état des mutations. Je lui fis connaître les
plaintes que plus de soixante contribuables avaient portées contre le
percepteur; je lui remis les quittances qui m’ avaient été rapportées.
L e sieur Moingeard fut appelé ; sept quittances furent vérifiées en sa
présence, et prouvèrent que ce percepteur avait reçu 57 fr. 93 c. de
plus que ce q ui était exigé par son rôle.
M. le contrôleur des contributions ne voulut point continuer cette
vérification; il en donna pour raison qu ’ il devait préalablement instruire
M. le d irecteu r, et se r e tir a , en promettant q u ’ i l r e v i e n d r a i t trèsprochainement.
Ceux des contribuables dont les quittances avaient été vérifiées ne
manquèrent pas de faire connaître les résultats auxquels M . le contrôleur
était arrivé. Cette opération , devenue p u b l iq u e , dut causer une grande
rumeur dans tout le bourg de V aligny. Les exactions du percepteur
paraissaient demontrees ; on s expliquait sur son compte sans aucune
espece de ménagement ; m oi-mèm e, pressé par la foule des contribuables
de faire la vérification de leurs q uittances, comme me le prescrivait
la lo i, j ’ai pu faire connaître ma pensée sur la conduite du percepteur.
Je mis cependant la plus grande circonspection dans mes démarches.
J’étais obligé de céder à la volonté des.contribuables, q u i , en deman
dant à être vérifiés, ne faisaient qu ’ user de leurs droits; mais, d 'u n
autre côté, je craignais que mon peu d ’expérience de la comptabilité
ne nie fît commettre quelques erreurs. E n conséquence, pour concilier
les devoirs de mes fonctions et les ménagemens que je voulais avoir pour
le percepteur, j ’écrivis, le 4 mars 18 2 2 , à M. le receveur particulier;
je lui G» connaître les plaintes des contribuables , lui parlai des résultats
de la vérification commencée par M. T u r r a u l t , contrôleur , et lu i
demandai un commissaire ad h o c ,
opération.
pour faire ou continuer cette
Cependant, depuis quelque le m s , le sieur Moingeard paraissait so
dégoûter de sa perceptiou ; il avait môme trai ti de çct cm plo; aycc
�4 J
le sieur Fressanges fils , habitant à Teneuil ; il annonçait qu’ il voulait
vendre sa maison d’A in a y , et se retirera la campagne, où il pourrait
plus utilement et plus commodément reprendre le négoce du Lois qu’ il
avait q u itté, et dont il s’occupait avant sa nomination à la place de
percepteur. L e bourg de Valigny lui parut propre à ses spéculations;
il résolut d ’y fixer son dom icile, et désira devenir acquéreur de ma
m aison, dont la vente avait été annoncée par affiches des la fin de
l ’année 1821.
Les projets du sieur Moingeard étaient connus; déjà il avait visité
plusieurs fois ma maison; il savait que j ’en étais propriétaire à titre
d ’échange, et qu ’elle me revenait à plus de ■jGoo f r . , prix d’acquisition.
Je lui avais prouvé que j ’y avais fait des constructions et des réparations
qui en avaient considérablement augmenté la valeur; il savait que
le prix du loyer était insignifiant pour le prix de v e n te , parce que cette
maison avait appartenu à u n propriétaire que le mauvais état de scs
affaires avait porté à consentir des beaux simules, de la m o i t i é de la
valeur au moins des objets affermés; de manière qu ’en se présentant
p our acquérir, le sieur Moingeard traitait avec moi en grande connais
sance de cause ; et il sait bien qu ’à notre première et à notre seconde
e n tre v u e , nous fûmes loin d ’être d’accord sur le prix de cette maison,
et que je lui en demandais alors une somme bien plus considérable que
celle pour laquelle je la lui ai ensuite abandonnée.
Pendant ces négociations, quelques personnes demandaient à M. le
sous-préfet la place de percepteur du sieur Moingeard ; ce fonctionnaire
répondait que ce percepteur ne voulait pas vendre ; mais comme ceux
qui voulaient succéder ail sieur Moingeard disaient que les plaintes
nombreuses qui avaient été portées contre lu i, et les malversations qu ’ il
s’ était permises, le mettaient hors d ’état d’exercer désormais ses fonc
tions , M. le sous-préfet m ’ayant fait a p p e le r, je crus remplir un devoir
et rendre hommage à la vérité , en attestant ce que les plaintes des
contribuables, le rapport de leurs quittances, et la vérification de
M . le contrôleur des contributions m'avaient appris.
Il avait enfin été arrêté que la position du sieur Moingeard vis-àvis les contribuables serait examinée. L a vérification devait être faite
par M. le receveur particulier, et avoir lieu à la mairie de V a lig n y , où
se réuniraient les personnes qui avaient porté des plaintes conlrc le
percepteur. Mais bientôt I\l. le sous-préfet ayant dé>iré être présent à
cette opération, la fit renvoyer de huitaine , c ’cst-à-dirca u 21 mars ,
�époque a laquelle il devait s’ occuper du recru tem en t, et décida qu’elle
serait faite à C e r i l l y , chef-lieu de canton dont dépend la commune
de Valigny. J ’e x p l i q u e r a i bientôt l’ influence que ce retard et ce chan
gement de lieu ont pu avoir sur cette vérification.
Je ne pouvais apprécier ni connaître les motifs d’inquiétude et de
terreur qui agitaient le sieur M oingeard, et qui lui faisaient redouter
une v é r i f i c a t i o n que tout comptable exact et délicat doit plutôt désirer
que craindre. Quant à m oi, j ’avais des devoirs à remplir, et je croyais
y avoir satisfait en prévenant l ’autorité, et en la mettant à même d’ agir.
Sans intérêt personnel dans cette vérification , je n’avais aucune affection
ni aucune liaine ù satisfaire. Délivré de toute responsabilité, comme
maire, par l ’avis que j ’avais donné à M. le receveur, le sieur Moingeard
ne pouvait rien espérer ni rien craindre de moi ; et comment ma pro
tection lui aurait-elle servi ou mon inimitié lui aurait-elle n u i, si sa
perception était en r è g le , et s i, dans l ’exercice de ses fo n c tio n s , i l
s’était constamment conformé aux devoirs simples et i m m u a b l e s qui lui
étaient prescrits , soit envers le G o u v e r n e m e n t , soit envers les contribuab les? L e sieur Moingeard ne savait-il pas d’ ailleurs q u e , de mon
clief et personnellement, je n’avais jamais voulu faire aucune vérifi
cation, quoique mes fonctions, non seulement me le permissent, mais
m ’en imposassent même le devoir ?
Q uoi qu’ il en s o i t , le sieur Moingeard était parfaitement instruit de
tout ce qui pouvait l’interesser relativement à la perception ; je lui avais
fait connaître les plaintes des contribuables, et les démarches que j’avais
cru devoir faire auprès de l ’autorité ; il savait que sa place était de
mandée par plusieurs compétiteurs; que la vérification de sa position
avec les contribuables devait être faite, le 21 mars, par M M . le receveur
et le sous-préfet réunis; il était donc bien instruit q u ’il ne pouvait rien
attendre de moi ; et s’ il continuait les négociations relativement à l’acquisition qu ’ il voulait faire do ma maison , c ’était en vue des avantages
particuliers qu’ il y trouvait , et non dans l’espérance de se faire un
protecteur ou de désarmer uu ennemi exigeant.
De mon c ô té , je no voyais ni ne pouvais voir aucun empêchement
légal ou moral à ce que je fisse avec le sieur Moingeard un contrat
tel qu un acte de vente. J’avais rempli mes devoirs comme maire ;
comme particulier, il ne pouvait m’être défendu de vendre à celui
même que j ’aurais poursuivi avec le plus de ligueur. Aussi le sieur
Moingeard m’ayant fait de nouvelles instances , uous nous mîmes
�(
6
)
d ’accord sur le prix et les conditions; le 20 mars 1822 , la vente fut
arrêtée et rédigée sous seing privé.
L e prix fut fixé h une somme de 10,600 francs en principal , et
2'î.o francs d ’épingles. Cette somme devait être mise à ma disposition
par deux billets à o r d r e , au moyen desquels la vente porterait q uit
tance. Mais comme Moingeard promettait de payer les 84 o francs à un
terme très-rapproché, il fut convenu que l’acte de vente ne mentionne
rait que 10,000 fr.
Mes intérêts me parurent exiger une autre précaution. J’ai dit que
j ’étais débiteur d u sieur Petitjean , de Cerilly , d’ une
sommo de
8000 francs : j ’ avais l ’intention de lui faire compter une partie du prix
de la vente de ma maison , voulant finir de me libérer envers lui avec
d’autres ressources ; et comme le sieur R ic lie t, mon beau-frère , ha
bitant à C e r i l l y , était chargé de payer le sieur P e titjea n , je désirai
que 1 un des effets f i t p a s s é à son ordre : ce qui fut accepté par lo
sieur Moingeard.
E n conséquence, le 20 mars 1822, le sieür Moingeard rédigea et
écrivit lui-mêine tous les actes dont nous étions convenus ; et s’il a
donné aux billets à ordre la date du lendem ain, 21 , ou c ’est par suite
d’ une erreur dont je ne m’aperçus p a s , ou par d’autres motifs que je
ne pouvais alors connaître.
L a vente est d’une maison , cave au-dessous, hangard , grange ,
étable , cour, jardin à la suite, clos de mur. L e prix est de 10,000 f r . ,
dit reçus comptant. Il est convenu que le fermier jouira jusqu'au
11
novembre 1825 ; enfin il est dit que l ’acte sera passé par-devant notaire j
h la première réquisition de l’une des parties.
Les deux billets s o n t, l ’un de 584 o francs, valeur reçue co m p ta n t,
à l ’ordre du sieur R icliet, payable le 3 o courant. Plus tard, le sieur
Ricliet m’a passé l’ordre de cet effet; l’autre, qui fut directement fait
à mon o r d r e , par le sieur Moingeard , est de 5ooo francs, valeur pour
solde d ’ une maison, et à échéance le 11 novembre suivant.
J ’ai dit plus haut que la vérification de la position du percepteur
envers les contribuables devait d’abord avoir lieu à V alig n y , et être faite
par M. le receveur particulier; qu ’ il avait été ensuite arrêté que cette
opération serait retardée de h uita in e, et qu ’elle serait faite à C e r illy ,
en présence de M. le sous-préfet, qui devait se rendre au chef-lieu
pour le recrutement. N e m'attendant pas à ce c h a n g e m e n t , j ’avais
convoqué les con trib u a b le s U la mairie de V a li g n y , pour le jour qui
�(
7
)
avait été détermine par M. le receveur particulier. Ils s’y étaient rendus;
mais lorsque que je leur fis connaître le changement de volonté des
deux fonctionnaires dont la vérification
dépendait , ils montrèrent
beaucoup d'humeur et de mécontentement, et dirent qu’ ils aimaient
mieux supporter une perte que d’aller demander justice à deux lieues
de leur domicile. Tous refusèrent de se rendre à Cerilly , et la plupart
d’entr’eux retirèrent même leurs quittances.
I l était facile de prévoir que ce changement de volonté de la part
des contribuables serait avantageux au sieur Moingeard. Je me rendis
toutefois a C erilly ; je remis entre les mains de M . le receveur les
quittances dont j ’étais porteur, ayant le plus grand soin de les déposer
dans l ’ordre et telles qu’elles m ’avaient été données. Interpellé par
M. le sous-préfet, je répondis q u e , personnellement, je n’avais aucun
reproche à faire au sieur Moingeard , et que la vérification seule pouvait
apprendre si ce percepteur avait des torts envers les contribuables, ou
s i , au contraire , les plaintes de ces derniers é t a i e n t m a l fondées et
injurieuses. M . le receveur s’occupa immédiatement de cette opération1,
en présence du sieur Moingeard. Il reçut ses explications, reconnut
que ce comptable avait perçu plus que ce qui était dû ; mais en même
tems il crut devoir considérer ces excès de perceplion comme des erreurs
excusables. M. le receveur ordonna toutefois la restitution de différentes
sommes dont je devais être dépositaire ; et comme je croyais avoir
rempli mes devoirs envers mes administrés, et que d’ailleurs je devais
penser qu ’il avait été satisfait à tout ce que la justice pouvait exiger,
je signai le procès-verbal qui fut dressé de ces opérations, sans me
permettre aucune autre réflexion , et me retirai.
K ’ayant plus à m’occuper de celte affaire, je laissai aux autorités qui
m’étaient supérieures, et qui en avaient le p ouvoir, le soin de fixer le
sort du percepteur.
L e sieur M o ingeard, qui avait assisté à la vérification, qui en con
naissait les résultats, qui savait parfaitement que l ’opinion de M. le
receveur particulier ainsi que celle de M. le sous-préfet lui étaient
favorables, et qui conséquemment ne pouvait avoir aucune crainte,
me p a ya , le 28 mars, une somme de 7G0 fr. 75 c. , à cumple sur le
prix de ma maison, en ine disant que c’était tout l ’argent qu ’il avait
à sa disposition pour le moment ; et j’émargeai ce paiement sur le billet
qui m’avait été fait sous le nom de mon beau-frère.
Jo ne puis pénétrer reflet que put produire sur l’esprit du sicu c
�( 8)
Moingeard l'heureuse issue de son affaire. Ne voulait-il d'abord quitter
la perception que parce qu ’il craignait d ’être destitué? Cette crainte
ayant cessé, désirait-il la conserver, et ajouter les bénéfices certains
q u ’elle lui p ro cu rait, aux revenus de capitaux qui ne sont point entre
scs mains une matière inerte? Je ne sais rien de ses projets; mais tout
ce que je puis attester, c’est que le premier effet étant venu à échéance,
le sieur Moingeard me demanda des délais , et me fit pressentir qu ’il
désirait reculer l’époque de scs paiemens, chose que je ne pouvais ni ne
voulais lui accorder.
Les choses étaient dans cette position, et je pressais le sieur M oin
gcard pour obtenir le paiement du premier b ille t, échu le 3 o mars,
lorsque, le 12 avril 18 22 , je reçus une lettre de M. le receveur par
ticulier, qui m’annonçait que M. le préfet avait reconnu que les résultats
de la vérification étaient en faveur du sieur Moingeard ; que les erreurs
reconnues notaient qu’ involontaires, cl que rien n ’annonçait que ce
comptable eût voulu les faire tourner à son profit. M . le receveur
m ’ invitait en conséquence à remettre de suite aux divers contribuables
les quittances que j ’avais entre mains à l’époque des vérifications, en
leur comptant en même teins le montant des petites erreurs, que le
percepteur me r e m it, et provenant des frais faits , et que le percepteur
n’ avait point mentionnés sur ces quittances.
J'acquiesçai à cette invitation. Je remis aux contribuables leurs quit
tances. Mais comme le sieur Moingeard s’était retenu le montant des
petites erreurs, je le chargeai d ’en faire lui-même la distribution; e t, si
l ’opinion publique ne m ’a pas tro m p é , je dois dire que non seulement
il a été exact dans ces restitutions, mais encore qu ’ il en a fait bon
nombre d’autres plus considérables, qui devaient faire cesser d’anciennes
plaintes ou en éviter de nouvelles.
Cependant j ’ insistais pour obtenir du sieur Moingeard le paiement de
mon premier billet à ordre. Je 111e lassais d ’accorder des délais, et allais
le
poursuivre, lorsque je reçus u n e lettre de M. le procureur du Roi
près le tribunal de M ontluçon, qui me disait que j'avais dénoncé M oin
geard comme concussionnaire ; que la vérification des registres de ce
comptable avait prouvé que ma dénonciation était sans fondement, et
qu’elle était le fruit de la légèreté et de la haine. « Mais, c o n t i n u e
« M. le procureur du R o i, ce qui me parait un crime excessivement
«
répréhensible, c ’est t/il'on ni’ a dit (pie, p r o f i t a n t t i c la terreur que vos
« menaces ont inspirée au sieur M oingeard, vous lui avez fait souscrire
�( o )
« deux effets (le 5ooo francs chacun , dont le premier a pour cause la
«
vente d ’une maison , et le second , un prêt prétendu fa it par vous ou
« M . R ic h e t,
v o ir e
beau-frère. M. Richet déclare n ’avoir jamais rien
« prêté au sieur Moingeard : tout le monde sait que vous n’ êtes p a s à
« même de le faire. Ce second billet n’ est donc de votre p a rt, si les
« r a p p o r t s ;qui me sont faits sont vrais, qu'une honteuse et criminelle
k
e s c r o q u e r ie .............
Vous avez c h e rc h é , dit-on , a effrayer ce percep-
« teur par la perspective des peines auxquelles vous lui disiez qu ’ il allait
« être condamné; et vous avez profité d’ un moment de trouble pour lui
« faire souscrire un effet qui n’a d ’autre cause que votre effroyable
« cupidité. Je vous engage, Monsieur, à me faire connaître, le plus tôt
« possible , quelles raisons vous prétendez opposer à la dénonciation qui
« est faite contre vous; et si elle est fondée, comme je le crains, je
« vous invite à remettre sur-le-cliamp , au souscripteur, le billet dont il
« s’agit.
« Je serai à Montluçon jeudi prochain ; mais je n’y serai que ce jour« là de toute la semaine. »
Cette lettre, qui est du 3 mai, ne m ’est parvenue que le 16 du même
mois; de manière que je ne pus me rendre auprès de M. le procureur
du Roi au jour qu’il avait bien voulu m’ indiquer.
Il était évident que M. le procureur du Roi avait été trompé. Je
n ’ayais point dénoncé le sieur Moingeard. Comme maire, j ’avais dit faire
connaître a l ’autorité les plaintes des contribuables : je l ’avais fait sans
légèreté et sans haine. L a vérification du 2 février, et celle du 12 avril
1822 , prouvent que ces plaintes 11’ étaient pas sans fondem ent ; et il
n ’appartenait pas à un maire aussi peu exercé que je le suis en matière
de comptabilité, de décider que des sommes indûment payées par les
contribuables , à quelque titre que ce f û t , et encaissées par le percep
teur, qui ensuite a été obligé de les restituer, n ’étaient que de petites
erreurs involontaires, lorsque mes administrés persistaient à qualifier ce
fait à.'exaction.
Mais ce qu ’il y avait de plus odieux dans les on dit auxquels M . le
procureur du lloi avait cru devoir accorder confiance, c’était de pré
tendre que l’ un des effets n ’ a v a i t d ’autre cause que la terreur que j ’avais
inspirée à Moingeard ; que le premier seul représentait le prix de la
vente de ma maison. E t quel pouvait être l ’auteur de ces on d it, si ce
n’est le sieur Moingeard lu i-m ê m e , q u i , calculant sur la crainte que
peut faire n a ître , dans le cœur d’ un honnête horam o , la menace d ’une
�poursuite en escroquerie, me faisait inviter à lui remettre un de ses
b ille ts , ce qui le rendait propriétaire de ma maison pour la moitié du
prix convenu ?
J ’avais bien des clioses à répondre. D ’abord la plainte d’un comptable
de petite c o m m u n e, qui craint tellement une vérification, que , pour
l ’éviter ou se la rendre favorable, il s’impose de suite un sacrifice de
584 o francs envers un maire qui ne peut ni lui n u i r e , ni lui être utile,
était assez singulière. IN’est-il pas évident que M. le procureur du R oi
aurait pu sentir la nécessité d’ob tenir, par des moyens plus dou x,
e t , ce sem b le, plus convenables , envers un fonctionnaire bonoré ,
comme l u i , de la confiance du G o uvern em en t, des explications qui
auraient pu fixer ses idées et éclairer sa religion? D ’un autre c ô té , la
vente du 20 mars prouvait que le prix réel de ma maison était de
10,000 francs; et comme Moingeard 11e disait pas qu ’il me l ’eût p ayé,
il était évident que les effets consentis le jour m ôm e, ou le lendemain ,
ne faisant que représenter ce prix, ne pouvaient être attaqués, j u s q u ’a u
moment où la vente elle-même aurait été annulée. Je savais encore que
la demande en rescision pour cause de lésion ayant été introduite uni
quement dans les intérêts du ven deur, et ne pouvant être invoquée par
l'acheteur, le sieur Moingeard ne p o u v a it, sous aucun rapport, se faire
un moyen , contre sa convention , de la s o m m e à laquelle cette maison
aurait été portée , quelqu’exagéré que pût en être le prix ; mais comme
mon honneur était compromis, et que je prétendais à une justification
et à une réparation complettes, je répondis, le 17 m ai, à 31. le pro
cureur du R o i , et lui dis que je me rendrais auprès de lui le jour qu'il
voudrait bien indiquer; que je désirais que mon calomniateur assistât
à cette entrevue pour le confondre ; j ’ajoutais : « Q uant a la vente dont
« il est question dans votre le ttre , je vous prio de cesser de croire
n qu’elle soit un crime............. Il est absolument faux que j aie profité
« de la terreur où se trouvait Moingeard pour lui vendre ma maison....
(t Ces billets ne sont que le prix de l ’objet que je lui ai vendu ; e t ,
n pour vous prouver que je n’ ai point bénéficié sur cet o b j e t ,
«
S O UM ET S
A EN
FAIRE
FAIRE
^ E STIM ATIO N
je
me
PAR EXPERTS. »
Je dus alors m’arrêter à l ’idée de faire régulariser ma venie, et de ne
demander le paiement des deux billets , que comme représentant le p n x
de cette même vente; mais avant to u t, je désirais éclairer M. le pro
cureur du Roi. Depuis long-tcms j'attendais sa r é p o n s o avec la plus vive
impatience, lorsq u e, le 2S juin 18 2 a , M. le substitut du procureur
�( II )
du Roi m’ccrivit qu'à son retour d’ un voyage de six semaines, il a ^ i t
trouvé daus les papiers du païquet ma lettre du 17 mai ; qu il lui
paraissait que cette lettre ne me justifiait point des faits graves que l ’on
me reprochait ; qu’ il importait d’entendre les parties pour éclaircir cetlo
afiaire. E n conséquence, il m’ invitait à me rendre à M ontluçon,
le 8 juillet , et a me trouver chez lu i à onze heures du mptin ,
me prévenant qu’ un même avertissement avait été donné au sieur
Moingeard.
Je fus exact à un rendez-vous si vivement désiré. Je vins clioz M. le
substitut du procureur du R o i , qui me présenta chez M. le sous-préfet,
ou je trouvai M. le receveur particulier et le sieur Moingeard. L ’cxplicalion eut des détails, et mes reproches au sieur Moingeard furent
amers. M. le sous-préfet me proposait d’annuler la vente moyennant
indemnité ; en cas de re fu s, il me menaçait même de destitution ; mais
rien ne pouvait me faire accéder à un arrangement que je regardais
comme déshonorant pour m o i , et q u i a u r a i t été la preuve de la
manœuvre qu ’on m ’imputait. De son côté , M. le substitut du procureur
du Roi s’étant r e m i s sous l e s y e u x ma lettre du 17 m ai, me demanda
si je persistais dans mon offre de faire estimer la maison. Sur ma îéponse
affirmative, Moingeard dit qu ’il ne voulait pas de la m aison , parce
qu ’ il n’avait pas le moyen de la p ayer; et m o i, indigné de tant de
mauvaise f o i , d’audace et de p erfid ie , je m’écriai alors que s’ il était
question de prêter de l ’argent à intérêts usuraires, les fonds ne man
queraient pas au sieur M oingeard; qu ’au reste les choses demeureraient
en l’état où elles étaient. Les esprits ne pouvant plus que s’échauffer
et s’aigrir, je pensai que la prudence et le respect que je devais aux
personnes chez qui nous étions reçus et qui nous écou ta ie n t, in’ imposaient le devoir de terminer cette explication , et je me rôtirai de suite.
J’ai rapporté avec exactitude et fidélité ce qui s’est pasté dans cctlc
entrevue; elle est-la seule qui ait eu lieu devant les fonctionnaires que
je viens de nommer ; et je ne crains pas qu’ aucun d ’eux , et plus particu
lièrement M. le receveur particulier, puisse attester qu ’avant ou après
cette entrevue, je les aie e n t r e t e n u s de cette affaire.
Je donnai quelque tems de réflexion au sieur Moingeard
Enfin
lassé (le scs délais, je lui fis faire , le 9 octobre 1822 , une sommation à
se trouver lo 12 , chez un notaire , pour passer acte public de la vente
du ao mars.
Cet acte mettait le sieur Moingeard parfaitement à l ’aise. S ’il avait
�des moyens à faire valoir contre la verçte du 20 m ars, il pouvait les
employer; les tribunaux civils devaient les apprécier; mais le sieur
Moingeard se rendait justice à lui-même. U ne lutte corps à corps ne lui
convenait pas; et il préférait, en se mettant à l’ccart, se servir d’ une
main étrangère pour me frapper.
L e 11 octobre, deux jours après ma sommation , et la veille de celui
fixé pour comparaître devant le no taire, le sieur Moingeard porta
plainte au procureur du R.oi. Je parle ici de cette p ièce, pour 11e pas
intervertir l ’ordre des dates ; c a r , quelques efforts que j’aie pu faire , il
m ’a été impossible de connaître cette plainte, et d’en avoir communi
cation avant le jugement par défaut qui m’a condamné.
L e sieur M oingeard, sans se porter partie civile, prétend q u ’ayant
refusé de me prêter de l ’a rg e n t, il est devenu l’objet de mes calomnies,
de mes vexations et de mes menaces ; qu’à mon instigation , les contri
buables ont cessé leurs paiemeus , ce qui l’avait mis en arrière de 7.^00 fr.
sur l ’exercice 1821. Ce qui l ’avait spécialement efl'rayé, c’était, disait-il,
ma correspondance où je lui parlais du mécontentement des contri
buables, de leurs dénonciations, en le menaçant de le faire vérifier;
que celte mesure de vérification solennelle, ordonnée par M. le receveur
particulier, conjointement avec M. le sous-préfet, avait inspiré une
telle terreur à l u i , Moingeard, et à toute sa famille, que cédant aux
instances de sa femme , tjui séchait de dou leu r, il accéda à la proposition
souvent renouvelée par moi et rejetée par l u i , et devint acquéreur de
ma maison, moyennant io,84o fr. , quoique le prix du bail à loyer ne
fut que de 120 fr. ; mais q u ’au moyen de cette vente, je lui promis
d’éviter la vérification , et de le sauver du déshonneur et des fers. Il
reconnaît, au reste, que les deux billets, sur l’ un desquels est un reçu
de 7 6 1 f r . , ne sont autre chose que le prix de la ven te, et termine
en ajoutant que je pris peu de part à la vérification ; que j ’attestai
môme que Moingeard était un honnête hom m e, etc..........f ce qui jeta
M M . les vérificateurs dans le plus grand étonnement. •
E n conséquence, Moingeard porte plainte en escroquerie contre m o i ,
et indique à M. le procureur du Roi onze témoins. Je ne sais si tous
ont été entendus dans une instruction secrète, mais quatre d’entr’eux
seulement ont été présentés à l’audience ; et l’instruction fera voir avec
quelle peine Moingeard
autres.
est
parvenu à
y
en
adjoindre
quelques
Ignorant entièrement l ’existence de cette p la in te , le 12 Octobre,
�"O r
(
jo u r in d iq u é par m a so m m a tio n ,
*3
)
je m e présen tai ch ez le n o ta ir e ,
et
obtins un p rocès-verbal d e n on c o m p a ru tio n co n tre M o in g c a rd .
L e i 4 , je fis présenter requête à M. le président du tribunal civil de
Montlucon , et obtins une ordonnance conform e, permettant d’assigner
le sieur Moingcard à b ref délai, et au provisoire , pour être condamné
à passer acte public et authentique de la vente du 20 mars.
Cette assignation fut donnée le 19 ; et le même jour , le sieur M oin
gcard me fit notifier des conclusions où il dit que la vdntc du 20 mars
est un fantôm e, produit de la terreur et des fausses espérances que je lui
ai inspirées ; que j ’ai usé envers lui de violence et profité de son déses
poir , pour lui arraclier cette vente et commettre une escroquerie ; qu’ il
a remis au procureur du Roi une plainte où il a exposé tous ces faits ;
que ce magistrat est nanti de toutes les pièces nécessaires à sa défense ;
que déjà il a été donné suite à sa plainte ; que même une procédure
criminelle s’instruit, et que les témoins entendus la justifient complète
ment. E n conséquence, en vertu de l ’ a r t i c l c 3 du Code d instruction
criminelle, il demande qu ’ il soit sursis au jugement de l ’affaire c ivile,
jusqu’à ce qu’il ait été prononcé sur l ’action publique.
L e 23 janvier 18 23 , 011 en vient à l ’audience. L e sieur Moingeard
prend ses conclusions; le procureur du R oi demande d’office qu ’il soit
sursis à statuer sur ma demande , jusqu’à ce q u ’il ait été prononcé sur
l ’action publique, et le tribunal prononce le sursis.
Ces différentes conclusions, fondées sur une pièce que je ne connais
sais pas, devaient me faire supposer que le sieur Moingeard , en rendant
plainte, s’était porté partie c iv ile; q u ’il avait cru devoir a ttaqu er, par
les voies extraordinaires, la vente que je lui avais consentie. J’attendais
avec impatience son assignation, espérant bien l ’avoir pour adversaire,
ct ne pouvant imaginer qu’ il pût être question , tout en conservant à la
vente du 20 mars ses effets civils, de la faire considérer, dans l ’intérêt
de la vindicte publique , comme l ’ œuvre du critnc , et de m’appliquer
leS Pe*nes que la loi prononce contre l ’auteur d ’une escroquerie.
J attendais vainement. Rien des raisons me font penser que le sieur
Moingcard voulait lasser ma patience , et qu’ il espérait que , dégoûté et
harasse par un genre de guerre où je ne pouvais ni connaître ni compter
mes ennemis, et o ù , incertain sur les moyens d ’attaque, il m’ était
impossible de calculer mes moyens de défense, je finirais par Abandonner
mon droit, et consentirais à résilier la vente.
Mais le sieur M oingeard s’abusait. J ’ai assez de courage et de cons-
�( H
)
tance pour résister à ce que je crois injuste; et lorsque je vis qu«
plusieurs mois s’étaient écoulés sans que mon adversaire eût fait aucune
dém arche, les 16 et 17 a vril, je le sommai, ainsi que M. le procureur
du R o i , de donner suite à la p la in te , et de la faire juger dans q uin
zaine , leur déclarant que , ce délai e x p ir é , je prendrais jugement.
J’eus encore bien du tems à attendre : ce ne fut que le 11 juillet,,
que je reçus une assignation à la requête de M. le procureur du R o i ,
qui me citait à'cotnparaitre à l ’audience de police correctionnelle, du
1 9 , pour répondre à la plainte en escroquerie et en ca lo m n ie, portée
contre moi p a r l e sieur Moingeard , et de laquelle, est-il d i t , il me
serait donné plus ample connaissance à l’audience.
Je ils tous mes efforts pour connaître cette p la in te , ainsi que la
procédure, le réquisitoire du
ministère p u b lic , et l ’ordonnance de
règlement qui avait dû le suivre ; mais lien ne me fut communiqué.
Toutefois, pensant plus fortement que jamais que j ’aurais au m o in s,
comme partie c iv ile , le sieur Moingeard pour adversaire, j ’ obéis à la
citation , et me présentai à l’audience.
Quels témoins y trouvai-je? A l’exception de M. le sous-préfet, qui
expliqua très-au long tous les détails relatifs aux plaintes qui avaient
été provoquées par les malversations de Moingeard ; qui parla des
différentes vérifications qui ont eu lieu ; de ce qu’ il avait appris du
sieur Moingeard lui-môme relativement à la vente du 20 mars, et qui
finit par dire qu ’ il m’avait proposé de rendre les deux effets, et d ’an
nuler la vente, sous la condition que 3Ioingeard abandonnerait 8/j.o fr. ,
genre d ’accommodement que je ne voulus pas a gré e r, je ne vis parmi
ces témoins , que des hommes de jo u r n é e , des gens dont la conduite et
la moralité pouvaient être justement reprochées, ou des débiteurs de
M oin g eard , q u i , sous son influence, venaient débiter des propos de
cabaret, et avaient pour refreiu c o m m u n de leurs dépositions , que
j ’avais dit que le sieur Moingeard n ’avait qu ’ un moyeu d ’éviter les
condamnations qui l’attendaient,
celui d ’accepter la proposition que
je lui avais faite ou «levais lui faire , d ’acheter ma maison pour la somme
de 10,000 fr.
Je me retirai de l'audience le cœur navré de douleur. Je 11e pouvais
comprendre que l ’honneur des citoyens et le soit des transaction» les
plus respectables pussent dépendre du résultat do dépositions Ielles
que celles que je venais d ’entendre : encore si l’on m’avait présenté des
témoins irréprochubles, des propriétaires estimés dans lu contrée , des
�( i5 ;
hommes avec lesquels je pusse avoir des rapports de société; si même on
avait fait assigner les témoins qui avaient d’ abord été indiqués par
Moingeard lors de sa plainte , mais qu’ il a ensuite fallu mettre à l ’é c a r t,
j ’aurais pu a ss is te r avec sécurité à ces débats, et faire valoir mes moyens;
m ais q u e p o u va is-je
espérer ou attendre?............. Je résolus d e ne plus
paraître.
M. le procureur du Roi pensa toutefois que l ’instruction n’était pas
com p lette
: la cause fut renvoyée au 9 août. U n témoin avait été assigné
pour celle audience : c’était M . le receveur particulier. Ce témoin ex
plique les plaintes que j ’avais portées au nom des contribuables, les
vérifications qui avaient eu lieu , et leurs résultats ; il raconte ensuite ,
en ces termes, ce que lui disait le sieur Moingeard : « Q ue quelques
« instans avant la vérification, Vindrinet lui dit que l ’instant était arrivé
« où il pouvait le perdre ; qu ’il avait toutes les pièces pour cela..........;
« qu’alors épouvanté il souscrivit deux effots, l’ un , de 584 » fr. , pour
« p r ê t, à l’ordre de Ricbet ; et l’autre, «le 5ooo f r . , pour vente d ’ une
« maison». Ainsi Moingeard, dans scs conversations, faisait regarder
l ’un de ces effets comme arraché par la crainte, et l ’autre comme le
prix réel de ma maison; tandis que dans la réalité du fait, et comme
cela est prouvé par la vente sous seing p r iv é , du 20 m a rs , et par les
aveux même de M oingeard, consignés dans sa plainte , ces deux effets
n’étaient autre chose que la représentation du prix convenu de cet
immeuble. A u reste, M. le receveur atteste q u e , dans l ’entrevue qui
eut lieu chez M . le sous-préfet, ayant été pris au mot sur le consen
tement que je donnais à ce que la maison fût estimée, jo me retirai,
en disant que ce qui était fait resterait fait : c ’est une erreur. M. le
sous-préfet, qui était présent à cette entrevue, la seule que j ’aie eue
avec M. le receveur particulier, ne dépose pas comme lui : ce témoin
est unique sur ce p o in t; il s’est trompé; et je suis persuadé que s’il
devenait nécessaire de l ’entendre d<*. nouveau, mes observations lui
rappelant les faits dans toute leur exactitude , il se ferait un devoir de
rectifier sa déposition.
L e jugement ne fut pas prononcé , l ’audience ayant été renvoyée au
a 3 a o û t . Deux témoins furent assignés; l e premier, le sieur G u i l l e t e a u ,
propriétaire, parle d’ un marché que je lui dis avoir fait avec Moingeard :
ce qui était très-vrai; le second, ouvrier sabotier, et entièrement livré
à l'influence du percepteur, se réunit à ceux do ses camarades qui
avaient été entendus à la première audience.
^ 0*5
4 CU
�i'U.r
(
16 )
E n fin , le même jo u r , 23 août 1823, fut rendu le ju g e m e n t, q u i ,
considérant,
i° qu ’ il y avait eu de ma part diffamation et menaces
contre le sieur Moingeard; 20 que mes plaintes contre ce percepteur
avaient nécessité une vérification dont les résultats avaient prouve que
ce fonctionnaire était sans reproches ; 3° que cependant, avant que
ces résultats pussent être connus, mes diffamations et mes menaces
avaient produit leur effet ; que Moingeard , effrayé, avait accédé à la
proposition que je lui avais faite d’acheter ma maison 10,000 francs ,
q uoiqu’elle ne fût affermée que 120 francs; qu ’à cet effet il m’avait
souscrit deux billets représentant le prix de la vente; 4° qu’ayant été
sommé de faire estimer la maison, je m ’y étais refusé, après avoir paru
y consentir ,
Me déclare atteint et convaincu du délit d ’escroquerie, comme ayant
employé des manœuvres frauduleuses pour persuader l ’existence de
fausses entreprises et f a i r e n a î t r e la c r a i n t e d’ un événement chimérique,
et
OBLIGÉ,
BIEN
PAR
AU -D ESSUS
CES M O Y E N S , L E S I E U R M O I N G E A R D
D E SA V A L E U R
d’ A C H E T E R
U N E MAISON
REELLE ;
Me condamne en conséquence , conformément à l’article 4°7
Code p é n a l, combiné avec l ’article 194 du Code d’instruction crimi
n e lle , à un an d’emprisonnement, à une amende de 5o francs, et aux
dépens.
C e jugem ent, qui a été prononéé par défaut, m’a été signifié le i 5
septembre, et j ’en ai interjeté appel par acte mis au greffe, le 22 du
même mois.
Ce jugement explique nettement le fait dont je suis prévenu : c’est
d’avoir obligé Moingeard à acheter une maison bien au-dessus de sa
valeur réelle. Donc si la maison n’a été vendue qu’à sa v a le u r, il n’y a
plus de d élit; et c’est précisément ce fait que je voulais prouver par
une estimation.
L e jugement dit qu’ayant été sommé de faire estimer celte maison,
j ’ai refusé. O ù est cette sommation? Dans quel acte se trouve-t-elle?
Comment ai-je refusé? Ma lettre a M. le procureur du Roi ne prouvet-elle pas ail contraire q u e , dès le premier instant, j ’ai proposé cctto
mesure? E t , dans tous les cas, si le tribunal de Montluçon c r o y a i t
pouvoir me j u g e r , ne devait-il pas, avant de me condamner, s’assurer
au moins de l'existence du corps de d é lit, et ordonner d’oflîcc l'estima
tion de cette maison, lors même que j ’aurais résisté à cette mesure?
J ’ai seuti la nécessité d ’éçlairer mes conseils sur ce point important,
�(
17
)
J ’ai fait en c o n s é q u e n c e estimer la maison vendue, par trois experts
désintéressés, que je connais a p e in e , qui demeurent loin de mon
dom icile, et que leur capacité et leur moralité m ’ont seules décidé à
appeler. L e u r opération, qui est faite avec scrupule et avec les plus
grands détails, donne pour résultat la somme de 1 3 , 49 ^
4^ c . , qu ’ils
estiment être le prix réel de la maison que j ’ai vendue io,84o francs au
sieur Moingcard.
De p lu s , voulant avoir recours à des conseils qui ne peuvent me
connaître personnellement, et persuadé que dans ces sortes d’affaires
la moralité du client peut servir à l ’interprétation et à l ’appréciation
des faits, je me présente avec treize certificats, émanés et revêtus des
signatures de tous les fonctionnaires et de toutes les personnes influentes
de mon can ton, qui me recommandent comme un liomme dont la
probité et l ’lionnéteté ne sont ni suspectes ni douteuses.
C ’est avec ces différens élémens, que je prie mes conseils d ’examiner
ma position, et de tracer la marche cjue je dois suivre, et les moyens
que je dois employer.
VINDRINET.
3
�CERTIFICATS
DÉLIVRÉS
J e
AU
SIEUR
YINDRINET.
soussigné, Louis-Dominique M a z cra t, juge île paix du canton
de C e r i l ly , arrondissement de M o n tlu ç o n , département de l ’A llie r ,
certifie à tous qu ’ il appartiendra, que le sieur Vindrinct (Jacques),
propriétaire et maire, demeurant en la commune de Valigny-le-M onial,
s’est toujours comporté en homme d ’honneur et de p robité; q u e , par
sa conduite morale et politique ; par son attention soutenue à remplir
ses devoirs envers la société ; e n ü n , par la pratique des moyens qui
rendent un maire cher à ses administrés , il s’est concilié l’estiine géné
rale , et la nôtre en particulier. E n foi de quoi nous lui avons délivré
le présent certificat, que nous avons signé, a v e c n o t r e g r e f f i e r , e t auquel
a été apposé le sceau de cette justice de paix.
A C e r illy , ce d ix-h u it septembre mil huit cent vingt-trois.
L . - D . M A Z E R A T , ju g e de p a ix .
L H O T T E , greffier.
Nous , soussignés, Antoine B u ffa u lt, père ; Edme-Gaspard B u ffa u lt,
fils; Jean-Baptiste-Alexandre Mazerat, Vincent B ujon , Joseph Anîelm e,
T hibault-Beauregard, et François-Paul P etit-Jean, tous les six notaires
du canton de C e r i l l y , arrondissement de M o n tlu çon , département d e
l ’Allier ,
Certifions à tous q u ’il appartiendra, que M. Vindrinet (Jacques),
propriétaire et maire, demeurant en la commune de V a lig n y -le - M o n ia l,
Cst un homme probe et d’honneur , et qu il n toujours fait preuve de
délicatesse dans les différentes-affaires qu ’il a traitées devant nous; que
sa conduite d’homme privé et de fonctionnaire public lui a mérité
l ’estime et la confiance dont il jouit dans la société. E n conséquence ,
c ’est avec plaisir que nous lui avons délivré le présent certificat.
Fait à Ainay-le-Chûleau , le vingt-sept septembre mil huit cent vingttrois.
B U F F A U L T père, B U F F A U L T f i l s , M A Z E R A T ,
B U J O N , T H I B A U L T - B E A U U E G A U D , I’ E T I T - J E A N .
�( *9 )
N ou s, soussignés, maire et adjoint de l a ville d ’A inay-le-Cliâtrau ,
arrondissement de M o n t l u c o n , département de l ’A l l i e r , certifions à
tous qu ’il a p p a r t i e n d r a , que M . Jacques V in d rin e t, propriétaire, et
maire de la c o m m u n e de V a lig n y -le -M o n ial, canton de Cerilly , arron
dissement de M ontlucon, département de l ’Allier, a toujours t e n u une
co n d u ite
régulière et irréprochable, et qu ’il est hors de notie connais
sance q u ’ il
ait manqué à l ’honneur et à la prohité ; et qu ’il a , depuis
la r e n t r é e de Sa Majesté Louis X V I I I , toujours rempli scs fonctions
avec le plus grand zèle, et manifesté son attachement à la famille royale.
E n foi de quoi nous avons signé le présent.
E n mairie, à A in ay-le-C h âte au , le vingt-sept septembre mil huit
cent vingt-trois.
B U JO N , maire ; T U E U R A L T , adjoint.
N ous, soussignés, maire et adjoint de la
ville et commune de
Cerilly , arrondissement de Montlucon , département de l ’A ll i e v , cer
tifions à tous qu’il appartiendra,
pour homme
que nous avons toujours reconnu
d’honneur et de probité le sieur Jacques Vindrinet ,
propriétaire, domicilié à V a li g n y , et que dans les affaires que nous
avons eues à traiter avec l u i , il a mis la plus grande délicatesse;
attestons en outre que ledit sieur V in d r in e t, nommé maire de ladite
commune de V aligny depuis la rentrée de l ’illustre famille qui nous
gouverne, a rempli cette fonction avec le plus grand zèle. En foi de
quoi nous avons délivré le présent pour servir et valoir ce que-de droit.
E n muirie, à C e r illy , le vingt-cinq septembre m il huit cent vingttrois.
J. B O N N E T , m aire; T H I B A U L T - B E A U R E G A R D , adjoint.
N ous, soussigné, maire de la commune de Theneuille , ancien
capitaine de cavalerie , chevalier de l ’Ordre royal et militaire de SaintL o u is, certifions à tous ceux qu ’ il appartiendra, que depuis l’annce mil
huit cent treize, q Ue nous exerçons nos fonctions à Theneuille
canton
de C e rilly , arrondissement de M ontlucon, nous connaissons’le sieur
Jacques V in d r in e t, maire h V a lig n y ; c t pouvons affinncr qu’ il jouit
<lc lu considération duo à l ’homme p ro b e , h o n n ê te ,
c l voué à la
�légitimité. En foi de quoi nous avons délivré le présent pour servir
et valoir ce que de droit.
E n mairie, à ï h e n c u i l l e , le trente septembre mil huit cent vingt-trois.
L e chevalier
de
IîO D INAT , maire.
N ous, soussigné, adjoint, faisant provisoirement les fonctions de
maire de la commune de V a lig n y , arrondissement de Montluçon ,
département de l’A llie r, certifions, d ’après la notoriété publique, que
M. Jacques Vindrinet, maire de cette commune, e t , d’après notre
connaissance particulière, n’a cessé, depuis la restauration, de remplir
ses fonctions d ’ une manière loyale , probe, honnête et irréprochable;
qu ’ il n’a jamais cessé de mériter l ’approbation et la confiance de ses
concitoyens; qu’ il s’est acquitté de ses fonctions avec un zèle et un
desinteresseincnt peu ordinaires; qu’ il ne s’est, dans aucune circons
tance, attiré les reproches ni des administrés, ni des autorités supé
rieures; que son dévouement au Roi et à son gouvernement n’est point
équivoque; et que sa condu ite, dans tous les tems et en tout g enre, a
été à couvert du blâme et de la critique. E n témoignage de quoi nous
avons délivré le présent certificat pour servir ce que de droit.
Fait en mairie, à Valigny , le vingt-huit septembre inil huit cent
vingt-trois.
L I B A U L T , adjoint.
N ous, soussignés, maire et adjoint de la commune de V itray , canton
de C e r i l ly , arrondissement de M ontluçon , département de l'A llie r ,
certifions à tous ceux qu’ il appartiendra, que nous avons reconnu dans
la personne du sieur Jacques V in d rin e t, p r o p r i é t a i r e , et maire de la
commune de V a ligny-le-M o nial, un homme d ’ une conduite régulière
et irréprochable, et qu’ il est hors de notre connaissance qu’il ait manqué
à l ’honneur et à la probité ; et qu ’ il a , depuis la rentrée de Sa Majesté
Louis X V I I I , manifeste son attachement a la famille royale et au
Gouvernement. E u foi de quoi nous lui avons délivré le présent pour
lui servir et valoir en cas de besoin.
Vilray , le vingt-huit septembre mil huit cent vingt-trois.
B E R T J I O M I E I l - L A V I L L E T T E , m aire;
�(
21
)
N o u s, soussignés, maire et adjoint de la commune d’U r ç a y , canton
de Cerilly ( A l l i e r ) , attestons à tous ceux qu’ il appartiendra, que le
sieur Jacques V in d r in e t, propriétaire , demeurant en la commune de
V aligny-le-M onial, a toujours montré une délicatesse et une prohité
à toute épreuve ; qu’ il a constamment mérité l ’ estime de tous ceux qui
le c o n n a i s s e n t , et qu’ il n’est pas à notre connaissance qu’ il ait rien fait
jusqu’à ce jour qui ait pu lui faire perdre la moindre partie de celte
estime générale. Certifions en outre qu’ il est entièrement dévoué au
Gouvernement de Sa Majesté Louis X V I I I , et q u ’il s’est toujours
acquitté des fonctions de maire de ladite commune de Valigny , dont il
avait ete revêtu par Sa M a je s té , avec un z.èle et une activité dignes
d’éloges , et qui doivent lui mériter la reconnaissance de ses administrés.
E n m airie, à U rçay, ce vingt-neuf septembre m il liuit cent vingt-trois.
B U F F A U L T , m aire; V A L L A K C I I O N , adjoint.
J e , soussigné, Cliarles-François B e ra u d , maire de la commune de
Saint-Bénin , y demeurant,
certifie à tous qu’ il appartiendra, que
M . Vindrinet ( J a c q u e s ) , propriétaire-cultivateur, et maire de la com
mune de V a lig n y , s’est toujours comporté en homme d’honneur et de
probité; qu’il ne m’est jamais rien parvenu qui puisse atténuer l ’ opinion
q u ’on a generalement de sa délicatesse dans les affaires ; q u e , par son.
dévouement au Gouvernement paternel des B o u rb o n s, et par son atten
tion soutenue à remplir tous ses devoirs envers la socié té , il est envi
ronné de l ’estime publique. E n foi de quoi j ’ai signé le présent certificat,
auquel j ’ai apposé le sceau de cette c o m m u n e , ce \ingt-sc pt septembre
mil huit cent vingt-trois.
B E R A U D D E V O U G O N , maire.
i soussigné, maire des communes de Saint-Bonnet et de B rèze,
certifie qu’ il ne m ’est jamais revenu que le sieur Jacques V in d r in e t ,
habitant la commune de V a lig n y , avait exercé aucun acte contraire à
ceux imposés à un honnête citoyen , et que je n’ai aucune connaissance
qu’ il se soit conduit d’ une manière contraire aux lois rt arrêtés du
Gouvernement.
A Saint-Bonnet, en la maison commune , le Ircnlc septembre mil
huit cent vingt-trois.
HAMBOURG ,
maire.
�(
22
)
Nous, soussigné, maire de la commune de Bardais, canton de Cerilly,
arrondissement de M ontluçon, département de l ’A llicr, certifions à tous
ceux qu ’il appartiendra , que nous avons toujours reconnu pour liomme
d’honneur et de probité , le sienr Jacques Vindrinet-, maire de la com
m une de V aligny. Tant par sa conduite morale et politique, que par
son attention à remplir ses devoirs envers la société, il s’ est concilié
l ’estime générale, et en particulier la nôtre. E n foi de quoi nous lui
avons délivré le présent certificat que nous avons signé , et auquel a été
apposé le sceau de cette mairie.
F ait en m a ir ie , le vingt-sept septembre mil huit cent vingt-trois.
D U V E R N E T , maire.
N o u s , soussigné, maire de la commune de M e a u ln e , canton de
C e r i l l y , arrondissement communal d e M o n t l u ç o n , d é p a r t e m e n t de
l ’A llie r , certifions que M . Vindrinet (Jacq u es), propriétaire, e t maire
de la commune de Valigny-le-Monial, s’est toujours comporté en homme
d ’honneur et de probité. En foi de quoi j ’ai signé le présent certificat.
Meaulne , trente septembre mil huit cent vingt-trois.
L U Y L I E R , maire.
Mairie d ’Isles-sur-Marmande , canton de Cerilly , arrondissement de
Montluçon , département de l ’A llie r.— jNous, soussigné, Jean Guiltaux,
maire de la commune d’Lles-fur-Marmande, certifions que M. Jacques
V in d r in e t , maire de la commune de V a lig n y , dans tous les rapports que
j ’ai eus avec l u i , m ’a toujours donné des preuves de la plus sincère
probité;
q u e , dans toutes les circonstances,
il a toujours tenu la
conduite d’ un homme d’honneur. E n foi de cjuoi nous lni avons délivré
le p ré se n t, pour lui servir et valoir ce que de droit.
E u M a ir ie , à Isles, le trente septembre dix-huit cent vingt-trois.
G U ILTA U X ,
maire.
�CONSULTATION
T |F . C O N SEIL SO U SSIG N É,
V r le Mémoire à consulter du sieur V in d rin c t, et après lecture
attentive de ce Mémoire et des pièces qui y sont annexées ,
E st im e
q ue, s’agissant, entre le sieur Moingeard et le sieur Y in d rin e t,
de l'effet que doit avoir un acte de vente qui pouvait être attaqué par
l ’acquereur, sur le motif que son consentement aurait été extorqué
par la violence ou surpris par le dol et la fraude du vendeur, la validité
de cet acte ne pouvait être jugée que sur la demande de l’acquéreur,
et contradictoirement avec lui ;
Q ue cette ve n te , qui est synallagmatique, formant un lien civil
entre le sieur Moingeard et le sieur Vindrinet, n’élant point directement
attaquée par le sieur M oingeard, ne pouvait l ’être directement par le
ministère p u b lic , et que le tribunal de M ontluçon , en jugeant en
police correctionnelle que le sieur V indrinet, ven deur, était coupable
d ’escroquerie , a tout à-la-fois méconnu les règles de sa co m p é ten ce, et
annulé indirectement une vente qui n’était point soumise à son examen,
nullité dont Moingeard ne pouvait même profiter, puisqu’ il ne l ’avait
point demandee , et n’était point partie au jugement qui l ’ a prononcée;
Q u ’ainsi le sieur Vindrinet doit, sur son a p p e l, se borner à faire
valoir les moyens d’incompétence qui se présentent contre ce jugem en t,
et demander à être renvoyé à fins civiles.
Les développemens de celle opinion ressortent de la saine application
des principes aux faits.
Il existe une vente , sous la date du 20 mars 18 2 2 , consentie par le
sieur Vindrinet à Moingeard; il est reconnu que le prix de cette vente
a ete payé par la remise de deux billets à ordre.
L e vendeur a demandé l ’exécution de sa ven te, en exigeant qu ’elle
reçût une forme publique et authentique.
L acquéreur a soutenu , dans une plainte où il ne s’est point porté
partie civ ile , et dans des conclusions d’audience, ayant pour objet de
faire surseoir au jugement de l’action civile , introduite par le vendeur,
jusqu’à ce qu’ il eût été prononcé sur l ’action p ubliqu e , que cette
v vente lui avait etc arrachée par la violence et la terreur que lui avaient
�inspirées les calomnies, les vexations el les menaces du sieur V in d rin e t,
et par les fausses espérances qu'il lui donnait de le soustraire, par sou
c réd it, aux dangers el aux maux don t il le menaçait.
A in s i, suivant le sieur M oingeard, cette vente serait donc n u lle ,
parce que son consentement lui aurait été extorqu é par v io le n c e , ou
surpris par dol.
L a cause ainsi réduite à son vrai point de v u e , on se demande
par q u i , par quels m oyens, et par quelles voies cette vente pouvait
ôtre attaquée ?
L e Code civil (article i582 ) définit la vente une convention par
laquelle l ’ un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la payer. A insi,
la vente est un acte synallagm atique, ou un contrat par lequel les
parties s’obligent réciproquement l’une envers l ’autre; et comme, sui
vant l ’articlc n 3 4 , les conventions légalement formées tiennent lieu
de loi a ceux qui les ont faites, et qu’elles ne peuvent être révoquées
que de leur consentenient m u t u e l , ou pour les causes que la loi au
torise , il est évident que le lien civil qui résulte de toute espèce de
contrat doit être respectée jusqu’au moment où ceux qui ont intérêt
à le rompre viennent demander son anéantissement et développer les
causes qui justifient leurs prétentions.
C ’était donc au sieur Moingeard à se pourvoir directement et person
nellement contre la vente du 20 mars ; à lui seul appartenait d’en
demander la nullité ; elle ne pouvait être prononcée que sur ses conclu
sions; et toute attaque contre cet a cte , par autre personne que le sieur
Moingeard lui-même ; tout jugement qui aurait çu pour but de détruire
la force de cette vente , hors la présence des deux parties, qu’il pouvait
et devait uniquement intéresser, était vicieux, par cela même qu’il
devenait inutile; et que ne pouvant profitera celui dans l ’intérêt duquel
il aurait été re n d u , puisque ce seul intéressé n ’y était point partie, ce
jugement laissait respectivement à lui la convention dans toute sa force,
tout en paraissant l’anéantir.
L a plainte que Moingeard avait portée a M. le procureur du R o i ,
ne pouvait donner à ce magistrat le droit de citer le sieur Vindrinct
en police correctionnelle.
Il est vrai q u e , sous la loi du 3 brumaire a n 4 > tout délit donnait
nécessairement lieu à une action publique. L ’articlc 4 l*c cellc loi
exprimait ce principe en termes absolus, mais lo Code d’ instruction
criminelle u ’a point renouvelé cctto disposition si expresse ; il a youIij.
�Lorner et restreindre l ’aclion du ministère puLlic ; et l ’article i " dispose
seulement que
qu’aux
l ’a c t i o n ,
fonctionnaires
pour l ’application des peines, n’appartient
auxquels elle est confiée par la loi. Aussi tous les
criminalistes reconnaissent-ils que si autrefois la loi imposait au ministère
public le
et délits,
devoir
de poursuivre indistinctement toute espèce de crimes
a u j o u r d ’h u i
il peut y avoir deux espèces d’actions : celle du
ministère public , qui agit seul lorsque les faits présentent le caractère
du crim e, ou lorsque les délits ou contraventions blessent l ’ intérêt de
l ’E t a t , troublent la tranquillité ou la morale publique , et qu’ il est
question de réprimer ou contenir des habitudes dangereuses ; mais si
les délits sont légers, s’ ils ne présentent que des circonstances peu
importantes ou personnelles au délinquant ou lésé, alors il ne doit point
y avoir de poursuite d’office ; la partie qui se prétend lésée doit seule
agir t et le ministère public n’intervient que pour requérir l ’application
des peines.
Cette doctrine, qui peut être si f é c o n d e e n c o n s é q u e n c e s , reçoit ici
une application nécessaire et absolue. O n conçoit bien que le délit qui
résulte d’un fait peut donner lieu à la poursuite du ministère p u b lic ,
quoique la partie lésée garde le silence ; mais si le délit résulte d’ une
convention , il est évident qu ’il ne peut être jugé qu’ en même tems que
la convention elle-même, ou après qu ’elle aura été détruite par un
jugement antérieur; que cela est indispensable , sur-tout lorsque l’exis
tence de l’acte n’est point contestée, que les moyens que l ’on a à opposer
contre sa validité sont personnels aux deux parties, et qu’il ne peut
être anéanti que par voie de nullité.
Dans l ’espèce, une vente existe. Moingeard, acquéreur, dit qu’elle
est le fruit de la violence et du dol ; mais il devait se pourvoir contre
le consentement qu’ il a v a i t donné, et faire prononcer la nullité de son
cngagemcnt. Partie dans l ’acte, il fallait nécessairement qu ’ il l ’attaquât
pour le faire anéantir ; c’est lui qui devait agir personnellement; et en
supposant qu’ il pût se pourvoir par voie extraordinaire pour causo
d escroquerie, il est évident qu ’il devait assigner directement le sieur
Vindrinct en police correctionnelle, conclure à la nullité de la vente
pour cause d’escroquerie ; et le ministère public ne pouvait avoir d’autre
action que de requérir l ’application des peines ; ou si le sieur Moingeard
portait plainte à M. le procureur du R o i , il fallait au moins , pour que
ce magistrat eût le droit de poursuivre, que le plaignant se rendit partie
c iv i le , qu’ il conclût à la nullité de la v e n te , cl que le même jugement
4
�(26 )
pût prononcer d'abord sur la nullité de la convention, requise par l ’une
des parties, et appliquer par s u i l e , contre l ’autre, les peines du délit
qui aurait clé la cause de la convention.
E n agissant autrement,
la Justice
s’exposait à des inconvéniens
graves, et tombait dans des contradictions manifestes.
E n effet, contre qui le sieur Vindrinet avait-il à se défendre? Q uel
avantage pouvait-il retirer de sa défense ? Quelle était la capacité de
la partie qui l ’attaquait? E t quel que fût le résultat de l ’action à
laquelle il avait à répondre , que devait devenir l ’acle qui était l’objet
du procès ?
Il est évident que si le sieur Vindrinet parvenait à repousser la
poursuite du ministère p ub lic, il ne faisait rien pour la validité de sa
ven te; que le sieur Moingeard , n ’étant pas partie au procès, pouvait
encore 1 attaquer par lis voies civiles , et présenter comme moyens de
vio len ce, de fraude et de d o l , ceux <jue le ministère public avait qua
lifiés d’escroquerie, et dem a n dera les prouver ; que s i, au contraire,
le sieur Vindrinet succombait en police correctionnelle, la question de
la validité de la vente était encore intacte ; qu’ il pouvait la soutenir
civilement contre le sieur M oingeard, qui n ’avait point été partie dans
l ’instance criminelle ; et comme le moyen tranchant de ce procès ,
quelle que soit la juiidiction qui le ju g e , est l’c.slimation du prix réel
de la maison , offerte par le sieur V in d r in e t, offre d’estimation dans
laquelle il persiste, il est par trop certain qu ’ il ne pouvait consentir à
cette estimation envers M. le procureur du R o i , qui n’avait aucune
capacité pour stipuler les intérêts civils du sieur Moingeard ; et qu’en
supposant cette opération faite contradictoirement avec le ministère
p u b l ic , elle n ’aurait pas empêché que le sieur Moingeard,
seule et
véritable partie intéressée à la nullité de l ’acte du 20 mars, n'eu requît
ensuite une nouvelle.
Enfin, c’est un principe immuable en matière criminelle, que le
corps de délit doit être établi ; il 11c peut y avoir ni coupable ni appli
cation de peine sans cela. Dans l ’espèce, comment le corps de délit
pouvait-il être prouvé , si cc n’est par l’annulation de la convention ?
Pouvait-il y avoir des artifices punissables pendant l'existence de l’acte ?
E t peut-on concevoir que le
sieur
Vindrinet soit convaincu d’escroquerie
et puni comme tel, pour avoir obligé le sieur M oingeard à acheter
une maison bien au-dessus do sa valeur ré e lle , tandis que cette vente
existe toujours, et qu’elle doit avoir tout son effet jusqu’au moment où
�0 7
)
W f
le sieur Moingeard en aura fait prononcer la nullité par les tribunaux
civils, devant lesquels seulement il pourra être question de la valeur
réelle de cette maison.
Mais q u e l l e s s o n t les imputations adressées au sieur V in d r in e t, qui
ont servi à l ’ a c c u s e r d’escroquerie , et à l ’attirer à la police correction
nelle p o u r le fait de la vente du 20 mars ?
D ’a b o r d , on l’accuse de calomnie et de diffamation envers le sieur
Moingeard; o r , la loi du 17 mai 1819 d it, dans son article i 3 , que la
diffamation résulte de toute allégation ou imputation d’ un fait qui porte
atteinte à l'honneur ou à la considération ; et l’article i er de celle du
26 du même mois apprend que la poursuite du délit de diffamation
entre tout particulier
p a r t ie
ne
veut
a vo ir
lie u
que sur la
pla in t e
de la
qui se prétendra lésée.
L e ministère public n’avait donc aucune qualité pour poursuivre le
sieur Yindrinet comme auteur de diffamation ou de calomnie? C ’était
un moyen qu’ il lui était interdit d’employer jusqu’au moment ou le
sieur Moingeard viendrait le présenter et le soutenir lui-même ; la dif
famation n’étant point indiquée par la loi comme un des caractères de
l ’escroquerie , et formant un délit distinct et prévu par le législateur ,
ne pouvait être poursuivie principalement ou accessoirement qu ’à la re
quête de la partie qui se prétendait lésée.
Il est vrai que le ministère public n ’ a pris aucune conclusion sur ce
prétendu d é lit, et que le tribunal n ’ en a pas convaincu le sieur V i n drinct. Mais comme dans les motifs du réquisitoire de 51. le procureur
du R o i , ainsi que dans ceux du ju g em en t, on trouve la diffamation
invoquée comme circonstance servant à prouver l ’escroquerie, il est
évident quo ce motif doit être effacé, puisque, d ’une p a rt, il contient
l ’imputation d’ un délit qu’il n’appartenait pas au ministère public de
poursuivre ; et q ue, de l’autre, les circonstances qui constituent le délit
d ’escroquerie devant être clairement énoncées et spécifiées, il n’était
point permis d’en indiquer qui lui fussent aussi étrangères.
L e sieur Vindrinet était encore prévenu d’avoir employé des moyens
de terreur et épouvanté son acquéreur par scs menaces; de lui avoir fait
ensuite espérer qu’il lui éviterait le mal dont il le m enaçait, s’ il ache
tait sa maison moyennant 10,000 francs ; d’où il faut conclure que le
consentement du sieur Moingeard à la vento aurait, suivant l u i , étc
extorqué par la violence ou surpris par le dol du sieur Yindrinet.
L e Code civil <1 un titre tout espres pour apprendre quelles sont les
�conditions essentielles pour la validité des conventions. L a première est
que le consentement soit lib re; q u ’il ne soit pas donné par erreur,
surpris par d o l , ou extorqué par violence ( A rticle i iog.).
L a violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une
cause de nullité (Art. 1 1 1 1 . ) . Il y a violence , lorsqu’elle est de nature
à faire impression sur une personne raisonnable, et qu ’elle peut lui ins
pirer la crainte d ’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considé
rable et présent. On a égard, en cette matière, à l’ àge, au sexe, et à
la condition des personnes (A rt. 11 1 2 .) . U n contrat ne peut plus être
attaqué pour cause de violence , s i , depuis que la violence a cessé , ce
c o n tr a ts été approuvé, soit expressément, soit tacitement {A rt. 1 1 15.).
Enfin , la convention contractée par violence n’est point nulle de plein
droit ; elle donne seulement liev à une action en nullité ou en rescision.
L a reunion de ces principes fait jaillir des vérités bien importantes :
i° la violence est une cause de nullité ; m a i s l’acte n’est point nul de
plein droit : il y a seulement l i e u à u n e a c t i o n . E l i ! q u i p e u t la former,
cette action , si ce n’e s t , et exclusivement et à tous autres, la personne
qui a contracté, ou ses représentais? Devant quel tribunal doit-elle
être portée, si ce n’est devant les juges que la loi a établis pour connaître
de la validité des engagemens civils ?
20 To u te violence ne peut point entraîner la nullité d ’ un acte; il
faut qu ’elle ait les caractères prévus par l ’article 1 112. O r , par qui et
avec qui ces caractères seront-ils appréciés, si ce n’est encore par les
tribunaux auxquels la connaissance des affaires civiles est réservée, et
sur la demande et les moyens, justement appréciés, de l’ une des parties
contractantes ?
3 ° Enfin la violence a pu cesser, e t, depuis, le contrat être approuvé.
Q uel autre tribunal que le tribunal civil pourrait encore connaître de
cette fin de non recevoir; et comment pourrait-il la prononcer hors la
présence de celui auquel ello pourrait ¿tro upposic ?
L e dol est une cause de la nullité de la convention ( article 111G) ;
mais il faut que les manœuvres pratiquées par l ’une des parties soient
telles, q u ’ il soit évident que , sans ces manœuvres , l ’autre partie n ’au
rait pas contracté.— Il ne sc présume pas, et doit être prouvé ( ihid.).
L a convention contractée par dol n’est point nulle de plein droit : elle
donne seulement lieu à une action en nullité ou en rescision ( A r
t ic le
1 1 1 7 .) .
A in si, il faut donc encore une demande en nu llité; il faut que les
�29 )
■.
'
manœuvres soient a p p r é c i é e s , q u e le d o l soit prou vé , p o u r que la
n u llité de l ’ acte s o i t p r o n o n c é e . E t , encore u n e fois , q u i p e u t former
cette d e m a n d e , faire cette p r e u v e , si ce n'est la personne q u i a intérêt
à l ’ a n é a n t i s s e m e n t de l ’a cte? Q u i p e u t ju g e r de l ’ influence q u ’ ont eue
les m a n œ u v r e s sur l a volonté de la partie c o n t r a c t a n t e , si ce n ’ est le
tribunal a u q u e l la loi a remis le soin de faire respecter ou d ’ anéantir les
c o n v e n t i o n s des citoyens ?
S 'il est ‘des règles qui doivent être religieusement observées, ce sont
spécialement celles qui distinguent les lois et les pouvoirs. Appliquer à
un acte quelconque une législation qui lui est étrangère ; créer des
assimilations pour attirer un citoyen à une juridiction à laquelle il ne
peut être soumis, c’ est s’ exposer à faire violence à là J u s t ic e , en com
promettant les biens les plus précieux de l’homme , l ’honneur et la
liberté.
L o r sq u e naguère nous vivions sous u n e législation transitoire ; que
nos lois n ’ étaient pas recueillies en corps de d octrine , et que les idees
q u i unissent les principes en tr’ eu x étaient encore in ce rta in es, u n article
de loi parut confondre le dol et V e s cr o q u e ric , et d on na naissance à u ne
jurispru dence d on t on tro u ve les exem ples dans M .
M erlin ( V c r lo
DOL et ESCROQUERIE.).
L ’ article
35 d u titre 2 de la loi d u 22 ju ille t 1 7 g ! , qualifiait ainsi
l ’escroquerie : « C e u x q u i , par d o l , ou à l'a id e de faux n o m s , ou de
« fausses entreprises, ou d ’u n crédit im a g in a ire , ou d ’ espérances et de
« craintes c h i m é r iq u e s , auro nt abusé de la créd u lité de q u elq u e per« sonne , et escroqué la totalité ou partie de l e u r fo r tu n e ....... ». C e
n ’ était pas assez que cet article , en se servant du m o t de d o l , co m prît
dans sa généralité tous les artifices que les jurisconsultes romains dési
gnent par les expressions ovinern calliditatcm, Jallaciam , m achiuationcm ,
° d circum veniciidum , fa lle n d u m , decipicndum altetum adhibitam ;
pour augm enter la contu sion, la loi ne désignait ni la n a t u r e , ni l ’ espèce
acte que ces dispositions pouvaient embrasser; et son ailencc put faire
supposer q u ’elle s’appliquait également aux actes synallagmatiques et
unilatéraux, aux contrats commutatifs ou à titre onéreux, comme aux
contrats de bienfaisance.
Aussi les tribu n au x de police co rrectionnelle cu ren t bien tô t à jug er
u n grand no m bre d ’aflaires de d o l et de f r a u d e , q u e la partie m é c o n
tente attaquait pour cause d ’escroquerie. L ’ examen des conventions leu r
f u t alors soumis ; et pou r éviter qu e , sous le prétexte de faire réprim er
�^
•
( 3o )
un d é l i t , on introduisit un genre de preuve prohibé par l ’ordonnance
de 1GG7 , il fallut établir comme principe, i° qu ’ un acte ne pouvait
être jugé en police correctionnelle,
que dans le cas où il serait le
résultat de faits qui constitueraient un délit caractérisé par la l o i , faits
qui auraient été la cause productive de l ’acte que l ’on présenterait
comme l’ouvrage du dol môme ; 20 que ces faits devaient attaquer la
substance de l’a cte, et prouver qu ’ il n’était pas l ’ouvrage de la volonté
libre et entière de celui qui l’avait souscrit ; enfin 011 distinguait, avec
le plus grand soin , le dol simple de l ’escroquerie ; et alors naquit la
maxime qu’ il n’existait point d ’escroquerie sans d o l , mais que le dol ou
l ’abus de confiance peuvent exister sans escroquerie.
L a confusion et l’ incertitude des idées qui régnaient alors pouvaient
avoir de graves inconvéniens ; mais au moins on évita celui de faire
naître un délit d ’une convention existante et non attaquée ; le ministère
public se borna à requérir l’application des p e in es, lorsque l ’acte devait
être annulé , sur la plainte et la demande de la partie intéressée.
A u jo u rd ’hui les principes sont fixes. U n Code civil a établi les règles
des conventions, et fait connaître les vices qui peuvent les faire annuler.
L e Code de procédure nous indique la forme des actions et les tribunaux
qui doivent en connaître.
L e Code p é n a l , qui a pour objet exclusif la répression des crimes et
délits, n’a pu avoir en vue ce qui intéressait la bonne foi, <jui doit
présider aux conventions. Le législateur n’a dû prévoir dans en Code que
les faits et gestes q u i , en portant le trouble dans la société, compro
mettent la fortune des citoyens, et donnent naissance à des obligations
qui n’ont d ’autre origine et d’autre cause que le crime même qu ’ il a
voulu réprimer et punir ; mais jamais il n ’a pu entrer dans sa pensée
qu ’ une convention synallagmatique , un contrat coinmutatif ou à titre
onéreux ; qu ’ un acte de vente d ’objets déterminés et de choses qui sont
dans le commerce , pût il*»
« l'c»«™ «» <lca tribunaux correc
tionnels, lorsqun l ’existence de cet acte est réelle, qu ’elle n’est pas
contestée, et que cette convention 11c peut être attaquée que par des
moyens de nullité , prévus par la loi civile.
Aussi l’article 4 o 5 du Code pénal ne classe-t-il p o i n t , comme la loi
du 22 juillet 1 7 9 1 , le dol parmi les manœuvres pouvant donner liou à
une poursuite en escroquerie. Il définit avec^soin et en termes restrictifs
les faits punissables : u C ’est l’usage de faux noms et de fausses qualités 5
k c ’cst l’emploi de manœuvres frauduleuses t>our persuader l ’cxistçuçijf
�<t de fausses entreprises, d’un pouvoir ou d’ un crédit imaginaire, ou
« pour faire naître l ’espérance ou la crainte d’ un succès, d’un a cciden t,
« ou de tout autre événement chimériques ». Encore dans quel cas ces
manœuvres sont-elles punissables? C ’est lorsque, par un de ces moyens,
leur auteur a escroqué ou tenté d’escroqucr la totalité ou partie de la
fortune d’ a u t r u i , « en se faisant remettre ou délivrer des fonds, des
« m eubles, ou des obligations, dispositions, billets, promesses, quit« tances ou décharges. »
Ce texte est fort clair; il fait à-la-fois connaître , et les manœuvres qui
sont les moyens d’escroquerie , et l ’escroquerie elle-m ôm e, qui n’existe
que quand on enlève à autrui la totalité ou partie de sa fortune mobi
lière ou imm obilière, sans rien donner en échange , et sans contracter
envers lui aucune obligation. Mais une convention qui porte sur un
objet réel et déterminé, ne peut jamais donner lieu à une action en
escroquerie. L e contrat a alors une cause permise et certaine ; il est
toutefois possible que le dol ou la violence aient concouru à le former;
mais comme il est évident que ces moyens blâmables ne sont point la
seule cause du contrat, et qu’ il est certain qu’ il a eu pour cause
principale un objet réel qui doit le rendre respectable , c’est aux tribu
naux civils, seuls juges de la validité des conventions, à apprécier
l ’influence que l ’un de ces vices ou tous les deux réunis ont pu avoir sur
la liberté du consentement de l ’ une des parties contractantes, et si ces
manœuvres ont été ou non la cause déterminante du contrat.
L e Conseil ne croit pas devoir examiner les moyens du fond , mais
il doit dire que l ’offre faite par le sieur Vindrinet de faire estimer,
par experts, la valeur réelle de la maison vendue au sieur Moingeard,
et les élémens qu’ il rapporte à cc sujet, ne laissent rien à désirer sur la
preuve de sa bonne foi.
Il
est également vrai q u e , dans le cas où le tribunal croirait devoir
statuer sur le fo n d , il 11e le pourrait, qu’en ordonnant une nouvelle
audition de témoins , q u i , dans la circonstance , est de d r o i t , puisque
le sieur V in d r in e t, faisant défaut, n’a pu ni récuser, ni faire expliques
les témoins à charge, ni produire des témoins justificatifs. Dans ce cas,
le sieur Vindrinet aurait à faire valoir les moyens indiques dans sou
Mémoire à consulter , qui paraissent de la plus grande force , si l’exposé
des faits est exact.
Mais dans le m om ent a c tu e l, ou il ne saurait être question que de 1&
�p!
.
(3 2 )
competence du trib u n a l, et de l ’action qui pouvait être intentée contre
lu consultant, le Conseil, après la plus mûre réflexion, ne peut que
persister dans les résolutions qu’il a prises en commençant.
Délibéré par les anciens avocats, soussignés, à Riom, le 16 octobre
1823.
T
B
n
J AILHAND.
Jacques G O D E M E L .
BAYLE
e
C
n
J
aîné.
R IOM , I M P R I M E R I E D E S A L L E S , P R ÈS L E P A L A I S D E J U S T I C E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vindrinet. 1823?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tailhand
Godemel
Bayle
Subject
The topic of the resource
ventes
escroqueries
opinion publique
fisc
malversations
dénonciation
abus de pouvoir
diffamation
témoins
certificats de probité
dol
fonctionnaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter pour le sieur Vindrinet, propriétaire et Maire de la commune de Valigny-Le-Monial, Canton de Cérilly, département de l'Allier, prévenu et appelant ; contre Monsieur le procureur du Roi, plaignant et intimé. [suivi de] Consultation.
annotation manuscrites : « Le jugement a été confirmé à Moulins ».
Table Godemel : Escroquerie - pratiquée dans un acte de vente.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1823
1821-1823
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2610
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Valigny (03296)
Ainay-le-Château (03003)
Cérilly (03048)
Saint-Bonnet-de-Troncay (03221)
Meaulne (03168)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53525/BCU_Factums_G2610.jpg
abus de pouvoir
certificats de probité
dénonciation
diffamation
dol
escroqueries
fisc
fonctionnaires
malversations
opinion publique
témoins
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53449/BCU_Factums_G2220.pdf
c42babdcbbe68d5863a0b06a429a4295
PDF Text
Text
____
6a
J U G E M E N T
D u Tribunal civil de premiere instance de l'arrondis
sement de R iom, département du Puy-de-Dôme
,
Rendu le 20 mai 1812,
Entre sieur
t
J oseph
J O U B E R T , demandeur;
E t si eu r J o s e p h C O U R B Y - C O G N O R D , d é f e n d e u r .
P O I N T
D E
D R O I T .
Y a-t-il urgence ?
L e sieur Courby d oit-il être condam né comme stellionata ire , et par corps , à la restitution du p rix des actes de ventes
et cession dont il s'a g it, pour n'avoir pas déclaré les hypo
thèques légales et conventionnelles qui grévaient les objets
par lu i vendus ou hypothéqués ?
D o it- il être condam né à des dom m ages-intérêts?
E st-ce le cas d’ordonner l'exécu tion du jugem ent par pro
vision , sans préjudice de l'appel et sans caution ?
MOTIFS
S
ur
ET
DISPOSITIF.
quoi,
Apres que la cause a été plaidée solennellement aux audiences
des 3 o a v ri l, 6 , 7 et 14 m a i , et qu’à l ’audience dudit jour 14
m a i , le tribunal a continué sa délibération à cejourd’h u i , à
ladite audience, il a été rendu le jugement suivant:
E n ce qui touche la demande en renvoi de la c a u s e , pour
être fait droit à tour de rôle ;
Attendu , en fait, que le sieur Joubert a demandé que la
cause fût jugée à bref d é l a i , parce qu’il s’agissait d’objets trèspressans pour lui ; que la contestation présentait à décider une
1
!
�question de contrainte par corps, qui exige la plus grande
célérité; que la cause fixée d’abord pour l ’audience du dixhuit décembre mil huit cent onze , et par suite des délais
que les circonstances ont nécessités , et par les remises de
mandées par le sieur C o u r b y , n’ a pu être jugée jusqu’à ce
jour , ce qui fait un délai de plus de cinq mois ; qu ’ainsi le
sieur Courby ne peut se plaindre de n’avoir pas eu le lems
nécessaire de préparer ses moyens , et que dans la réalité il
a occupé deux audiences pour le développement de sa cause;
Attendu enfin que les articles cinquante-quatre et soixantesix du décret im pé rial, du trente mars mil huit cent h u i t ,
concernant la police des tr i b u n a u x , autorisent le président à
fixer , d’après l’exigence des cas , celles des causes qui doivent
être jugées à bref délai ; que par toutes ces raisons, la de
mande du sieur C o u r b y , en renvoi de la cause pour être
jugée à tour de rôle, ne paraît q u ’ un prétexte dilatoire qui
ne peut être accueilli ;
E n ce qui touche le stellionat reproché au sieur C o u r b y ,
dans les difTérens actes passés entre lui et le sieur Joubert ;
E t d’abord ce qui concerne les vices argués, dans la vente
du onze avril mil huit cent se p t, et le moyen »tiré d e ce
que l’immeuble vendu était lors du contrat grevé d’une mul
titude de créances au-dessus de sa valeur ;
Attendu q u ’il est constant par le jugement d’ordre , qui a eu
lieu à Thiers , pour la d i s t r ib u t i o n du prix de cet hé ri ta g e ,
qu’à l’époque
de
la v e n t e , cet immeuble était absorbé par
une foule de créances antérieures; que la plupart étaient exi
gibles , et du fait personnel du sieur Courby ; q u ’il ne p o u
vait les ignorer ; en sorte q u ’en vendant ce fonds au sieur
J o u b e r t , Co ur by était comme assuré de n’y avoir qu’une pro^
priété précaire et momentanée ; qu e néanmoins il l ’a vendu
comme une propriété solide et iucommutable ; que par là il
a sciemment trompé son acquéreur; que si, en principe, celui
qui vend l’immeuble, qu’il sait ne pas lui appartenir, c o m
met un stellionat, il doit en être de même de celui qui
�(3)
vend un héritage tellement grevé de ses propres dettes, q u ’il
est à la veille d ’en être exproprié ; il est évidemment de mau
vaise f o i , et doit être soumis à la même peine du stellionat ;
Attendu que plusieurs arrêts anciens n’ont pas hésité de
prononcer celte peine contre les débiteurs de mauvaise foi,
q u i , étant notoirement insolvables, contractaient des engamens q u ’ ils savaient bien ne pas pouvoir remplir ; que la
saine morale applaudit à la sagesse de ces décisions ; qu ’elle
est appuyée par l’autorité de docteurs recommandables; qu’auoune loi ne s’oppose à en faire l’application à des cas sem
blables ; et que la justice, animée du même esprit, dans tous
les t e m s , doit se complaire à confirmer ces principes ;
Attendu que l ’hypothèque spéciale , donnée pour sûreté à
celte vente r ne peut mettre le sieur Courby à l ’abri du stel
lionat , puisque le champ de la Ro uc he , qui forme cette h y
pothèque , et qui fait partie du bien de Bicon , était égale
ment à cette époque absorbé par des créances énormes, aux
quelles le sieur Courby avait affecté ce bien de 13icon en to
talité;
que ces créances qui lui étaient personnelles présen
taient une somme de plus de 210,000 francs, à laquelle se
joignaient encore les créances auxquelles le domaine avait été
assujetti par son vendeur immédiat; de sorte que ce bien de
Bicon était hypothéqué, au 11 avril 18 0 7,3 une masse énorme
de près de 3 oo,ooo francs; que par conséquent l ’hypothèque
donnée à cette première vente était aussi illusoire que la v e n te
m ê m e ; qu ’elle n’était qu’ une fraude ajoutée à une première
f i au d e , et provoquait aussi la peine du stellionat ;
Attendu que pour s’y s o u s t r a i r e , le sieur Courby allègue va i
nement qu ’il n’a déclaré ni l’héritage ve n d u , ni l ’objet donné
en hypothèque, libre de toutes charges, ni sujet à des hy p o
thèques moindres que celles qui y étaient assises; et que son
silence à cet égard le met ù l’abri des rigueurs de la l o i , q uj n’a
attaché le stellionat qu’a u ne déclaration expresse de franchise;
Une telle prétention doit être rejetée; car si, dans l’ancienne
jurisprudence, la déclaration de franc et quitte devait être expresse
�(4)
pour encourir le stellionat, c’est parce qu’à cette é po que , les
engagemens passés par actes publics grévaient de droit d’une
hypothèque tacite et générale tous les immeubles présens et à
venir du débiteur; de sorte qu’après une première hypo thè que ,
il pouvait encore en constituer de nouvelles, parce que, dans la
généralité de ses biens, dans l ’obscurité de ses affaires, on ne
pouvait reconnaître si les nouvelles hypothèques étaient bien ou
mal assises ; on ignorait si les biens à venir ne couvriraient pas
l ’insuffisance des biens actuels; par conséquent rien ne pouvait
asseoir un motif déterminé de stellionat, au moins d ’une décla
ration précise de franc et quitte; mais il n ’en est pas de même
dans le système hypothécaire a c tu el , car l ’hypothèque étant tou
jours conventionnelle, spéciale, et limitée aux seuls biens pré
sens , le débiteur connaît avec certitude les hypothèques et toutes
les autres charges dont il a grévé ses immeubles; si donc il les
vend comme propriété solide, ou s’il les donne pour hypothèque
sp éci ale, les connaissant absorbés par des créances antérieures,
il sait qu’il ne donne qu’une sûreté imaginaire, et q u ’ un gage
pe rf id e ; il sait q u ’il trompe, et la loi qui oblige le créancier à
prendre une hypothèque spéciale, se rendrait complice de la
fraude, si elle ne la punissait pas;
Attendu q u ’on invoque mal à propos l ’article 2059 du Code
Napoléon, comme ayant fixé les seuls cas du stellionat; c’est
une erreur ; il est évident que les termes de cet article ne font
q u ’annoncer en général quelques e sp è ce s de stellionat, sans
prétendre les désigner toutes; ils sont seulement indicatifs et
non limitatifs des cas du stellionat, c’est ce q u ’on apprend par
la discussion au Conseil d’Etat ; M . le Conseiller d’Etat R é a l
ayant observé que l’article ne spécifiait pas tous les cas du stel
lionat, M . le Sénateur Tronchet répondit que Varticle avait
é té rédigé en fo rm e gén érale , afin de ne rien préjuger sur le
régime hypothécaire ; or le système hypothécaire, en ordonnant
la spécialité des hypothèques, a v o u lu , sans doute, q u ’e lle pro
duisit un effet réel; un effet qui la tirât du vague de l’incertitude
générale et clandestine; il a voulu que la spécialité présentât un
�gage capable de rassurer, et qu’elle ne iût pas un pie'ge à la
bonne foi du créancier ;
.
Attendu q u ’on allègue, sans motifs, que le sieur Joubert a
connu ou dû connaître les charges du fonds vendu , et celles du
fonds qui lui a été hypothéqué; qu’il a pu consulter les registres
du conservateur, et qu’il doit s’imputer de n’avoir pas pris cette
précaution;
L e sieur Joubert a v a i t , sans contredit, celte faculté, mais
elle n’était pas une obligation pour lui pendant que la bonne foi
et le vœu de la loi obligeaient le sieur Cour by à. ne pas pré
senter une hypothèque frustratoire, une hypothèque spécieuse
plutôt que spéciale, car si la spécialité ne renferme pas la certi
tude d’ une garantie solide et d’un gage présenté d’une part, et
accepté de l’autre avec bonne fo i, elle manque son but ; la m a u
vaise foi continuera de profiter à son auteur, et le créancier
confiant, d’être victime de sa crédulité; q u ’il faut donc l'econnaître, dans la spécialité en elle-même, un supplétif de la décla
ration de franc et quitte; qu’elle en tient lieu pour les deux par
ties contractantes, et que le sieur C o u r b y , quoi qu’il n’ait pas
fait en termes exprès cette déclaration de franc et quitte, ne peut
se soustraire au stellionat; l’actiou a parlé aussi clairement que
les paroles;
En ce qui touche le vice résultant de ce que le sieur Courby
n’a pas déclaré expressément H y p o t h è q u e légale de sa femme,
soit dans la vente, soit en fixant l’hypothèque spéciale;
A t t e n d u , relativement au contrat de vente, que l'omission
du sieur C o ur by à cet égard le rendrait inévitablement coupable
de stellionat; néanmoins comme il a été établi, en l ’audience,
que le sieur Joubert avait dans la suite, et en 1808, purgé
l’hypothèque de la dame Courby sur le fonds vendu, en se con
formant aux formalités precriles pour cela ; que dès-lors le s.r
Jou b e rt, n’ayant plus en ce moment à craindre l’hypothèque
légale , est sans intérêt ; que l’intérêt est la règle des actions ;
le sieur Joubert cessant donc d’en avoir sur ce p o i n t , sa de
mande ne peut être accueillie ;
,
�Mais attendu q u ’il n’en est pas de même du cliamp de la
B o u c h e , donné en hypothèque; car cet héritage, ainsi que tout
le domaine de B ic o n , a été frappé de l’hypothèque légale de
la dame Courby ; et quoique le fonds vendu ait été purgé de
l’hypothèque de la fe m m e , le domaine de Bicon n’a pas pour
cela cessé d ’y être affecté; ce qui imposait au sieur Courby un
devoir absolu de la déclarer ; déclaration qui était de rigueur
étroite. L es art. 2 i 36 et 2194 du Gode ¡Napoléon en font une
nécessité indispensable aux maris. Les ternies de la loi ne per
mettent ni interprétation ni restitution, et la peine du stellionat,
prononcée conlre le mari qui ose y manque r, annonce l’impor
tance que le législateur a attachée à cètte déclaration;
Attendu q u ’il est inutile d ’alléguer que cette disposition de
la loi doit être entendue ci v il em e n t, et ne s’applique qu’au cas
où le créancier a pu ign orerle mariage, et par suite l’hypolhèque
légale, mais que le s.r Joubert n ’est pas dans cette position; oncle
et parrain du s.r Co u rb y , ayant même signé son contrat de m a
ri age , il connaissait parfaitement la qualité du sieur Courby, et
l’hypothèque légale de sa femme ;
R aisoqner ainsi, c’est se mettre en opposition avec les termes
et lresprit de la loi. E n eJFet, en pr&scrirant au mari de déclarer
l’hypothèque de sa fem me , les articles du Code ne se servent
pas d’expressions communes et vagues qui laissent entrevoir qu’il
peut y avoir lieu à des modifications. Ici tous les mots sont i m
périeux. Tje mari , dit la l o i , est tenu de prendre inscription sur
lui-m êm e ; s ’i l y d m anqué , il doit déclarer expressément l'h y
pothèque lég a le; sin o n , i l est rép u téstellio n a ta ire , e/, comme
t e l , contraignable par corps. Ainsi la loi ne pouvait employer
d ’expressions plus fortes et plus énergiques; l’obligation du mari
ne pouvait être gravée d’une manière plus profonde et plus
sensible ;
Cependant en prescrivant au mari ce devoir impérieux , le lé
gislateur avait à l ’esprit ces règles générales, que le mariage est
un fait public et 11c peut être ignoré de personne; que celui qui
contracte doit connaître la qualité de celui avec qui il traile; que
�C 7)
lestellionat étant un délit, il ne peut être attaché qu’à l ’inten
tion et au fait d’une tromperie caractérisée; malgré ces maximes
vulgaires, le législateur n’a pas laissé de prononcer en termes
formels la peine du stellionat contre le mari qui n’a pas déclaré
expressément l’hypothèque légale ;
L e motif s’en présente aisément; si la fe m m e , dispensée de
prendre inscription, n’en conserve pas moins son hypo thèq ue ,
c’est à condition que le mari y suppléera en requérant cette ins
cription sur lui-même; une grande faveur accordée à la femme
a du être compensée par une obligation rigoureuse imposée au
mari ; s’il a été juste de protéger la faiblesse de la fe mme, il a
été juste également que les tiers connussent, par le mari luim ê m e , l’hypothèque légale sur ses immeubles;
Attendu qu’il importe peu que les tiers aient pu par les re
lations sociales connaître l’existence du mariage, il est évident
que la loi n’a pas attaché sa volonté si impérative à la connais
sance d’un fait présumé bien connu de celui qui contracte; son
exécution commandée si inévitablement ne peut être soumise à
des présomptions plus ou moins fortes de la connaissance du
mariage; la loi est générale, expresse et' sans exceptions; la
modifier c’ est l’anéantir; mais si les tiers ont pu connaître le
m ar iag e, du moins ils ignorent et doivent ignorer si lors du
mariage l’hypothèque de la femme n’a pas été déterminée sur
quelques-uns des immeubles du m a r i , ils ignorent si pendant
le mariage l’hypothèque légale n’a pas été restreinte conformé
ment aux articles 2140 et 2144 du CodeNapoléon ; ces faits abso
lument inconnus aux tiers ont dû être expliqués par le mari; de
là cette nécessité d’une déclaration expresse de sa part; d e l à
enfin, faute d’y avoir satisfait, l’application de la peine du stel
lionat devient inévitable contre lui;
"En ce qui touche l’acte du 8 juillet 1808;
Attendu que par ce contrat il 11’a été cédé au sieur D um a y
qu’ une créance de 26,675 fr. comme étant due au sieur C o u r b y ,
par diiférens particuliers dénommés dans l ’acte; que de lelles
conventions ne présentent par leur nature q u ’une vente mobi-
�liairé de droits et actions; q u ’en principe les ventes de meubles
ne peuvent faire naître de stellionat, le stellionat n’étant at
taché qu ’aux seules ventes d’immeubles; q u ’ainsi la demande
du sieur Joubert en stellionat sous ce rapport n’est point re
cevais e ;
Mais attendu que pour hypothèque de celte venle mobiliaire
le sieur Cour by a spécialement affecté ce même bien de Bicon
déjà dévoré par ses dettes p e r s o n n e l l e s , en 1807, r:t qui depuis
avait encore été grévé par lui de nouvelles hypothèques pour
une somme de 22,000 fr. ; q u ’il est reconnu que dans cet acte de
cession le sieur Joubert n’a été que la caution du sieur Courby ;
que le sieur Joubert poursuivi et ayant paj’é est par la force.de
la loi expressément subrogé à tousles droits et privilèges du sieur
D u m a y ; qu’en les exerçant le sieur Joubert est fondé à relever
le vice radical attaché à l’hypolhèque donnée pour garantie à cette
cession ; que cette présentation d’ hypothèque étant entachée d’un
nouveau stellionat de la part du sieur C o u r b y , puisqu’elle ne
donne au sieur Joubert aucune sûreté quelconque sur cet immeu
ble déjà plusieurs fois consumé; qu’ainsi, le sieur Joubert est
fondé à réclamer contre le sieur Courby l’application du stellionat;
k la lo i ne protège que la bonne f o i ; elle punit le mensonge » ;
Attendu en outre que le sieur Co ur by , en constituant cette hy
pothèque spéciale a déguisé encore une fois l’hypothèque légale
de sa fem me; que p o u r couvrir cette résistance il ne peut allé
guer le vain prétexte que le s i e u r D i i m n y devait connaître son
maria ge , et par conséquent l ’hypothèque légale de sa femme
sur ce bien de Bicon ; q u ’une pareille allégation manifestement
repoussée par la loi en toutes circonstances deviendrait ridicule
à l’égard du sieur D u m a y représenté ici par le sieur Joubert ;
que par cette itérative violation de la lo i , le sieur Courby reste de
nouveau exposé à toute la rigueur des articles 2 i 3 6 et 2194 tlu
Code Nap o lé o n, sans que rien puisse l’en exempter;
E n ce q u i touche la vente du domaine de Sarliève;
Att en du que par ce contrat il fut convenu à la vérité que le
sieur Joubert supporterait quelques hypothèques inscrites sur ce
domaiue,
�C9 )
domaine, pour sûreté des ventes faites par le sieur Com-by et
qui sont spécifiées dans l’acte; que cette clause qui désigne
ainsi certaines hypothèques particulières fait entendre qu’il n’eu
existait pas d ’autres; qu’ une telle stipulation limitative renferme
une déclaration implicite de franc et quitte à l’égard des hypo
thèques non déclarées; que sans cette intention du sieur Cour by
la clause devenait surperilue; or en affirmant de la sorte posi
tivement pour les unes il a nié l’existence de toutes autres , sui
vent l’adage commun en droit, qui affîrmat de uno , negal de
ciltero\ que néanmoins outre les hypothèques que le sieur
Jouhert devait supporter, ce bien de Sarliève était encore hypo
théqué de vingt-cinq inscriptions du fait du sieur C o u r b y , les
quelles montent à plus de 120,000 f r . ; que le sieur Joubert,
exproprié du domaine de Sarliève, se trouve, par Peïïet de la
clause insidieuse ménagée par le sieur Co ur by , privé de la chose
par lui achetée, privé également du prix devenu la proie des
créanciers, et sans ressource sur le gage hypothéqué; o r , dans
une telle position , le sieur Joubert est bien fondé dans ses pour
*
suites en stellionat ;
Attendu que le stellionat se montre encore, faute par le sieur
Cour by d ’avoir déclaré expressément que l’hypothèque de sa
femme portait aussi sur ce domaine , objet de la vente; qu’ainsi
ce contrat appelle de nouveau l’application des articles 2 i 36 et
2194 du Code Napoléon ;
Attendu«que l’hypothèque légale de la dame Courby a été
également dissimulée, en constituant jjour la troisième fois le
domaine de Eicon pour l’hypothèque s p é c i a le de celte vente de
Sarliève; que le sieur Joubert est d ’autant plus fondé à relever
cette fraude du sieur C o u r b y , que déjà la dame Courby a exercé
sur ce domaine de Bicon les droits q u ’elle prétend lui a p p a r
t e n ir , portés par elle à 110,000 f r . , et qu’elle s’est fait attribuer
ce domaine par son ma ri; au moyen de quoi il ne reste au sieur
J o u b e r t , pour l’hypothèque qui devait garantir la vente, que
des recherches et des poursuites peut-être aussi infructueuses
q u ’elles seront multipliées;
3
�-i
( .0 )
Attendu q u e , pour échapper à ce dernier stellionat, on oppose
en vain que le sieur Joubert a déclaré, au c o n tr a t, avoir con
naissance de diverses hypothèques dont ce bien de Eicon était
grevé;
Cette clause doit être entendue raisonnablement et dans son
sens naturel ; le sieur Joubert, en disant qu’ il connaissait diverses
hypothèques sur le bien de B i c o n , a annoncé qu’à cette époque
il avait pris connaissance des inscriptions sur ce domaine; qu’il
avait consulté le registre du conservateur, car il ne pouvait les
connaître autrement; mais n’y ayant trouvé aucune inscription
de l’hypothèque légale, elle lui a été inconnue; il a dû croire
que ce domaine en était e x e m p t , faute par le sieur Cour by
d’avoir pris une inscription sur lui-même; et celui-ci y ayant
m a n q u é , il devait y suppléer par une déclaration expresse; celte
hypothèque de la femme est du nombre de ces charges qui
doivent ê t r e , d ’après la loi, nommément exprimées : indiget
sp ecia li nota y la connaissance ne peut s’en induire de termes
vagues et g é n é r a u x , tels que ceux par lesquels le sieur, Joubert
a dit connaître diverses hypothèques sur Bicon ; dès-lors, à dé
faut par le sieur Courby d’avoir énoncé l’hypothèque légale de
sa f e m m e , il s’est constitué de nouveau en stellionat, et ne peut
en éviter les conséquences;
(
E n ce qui touche les créances réclamées par le sieur J ou bert contre le sieur Courby ;
At tendu que le sie u r J o u b e r t r é c l a m e j u s t e m e n t l a s o m m e de
7,900 f r . , prix de la première vente , du 11 avril 1807; laquelle
a été affectée aux créanciers du sieur Cour by , utilement collo
ques, d’après le jugement d ’or d r e, qui a eu lieu au tribunal
civil de l ’arrondissement de Thiers ; les intérêts de cette somme
tels que de d r o i t , ainsi que les frais légitimes faits en consé
quence de cet objet ;
Q u ’il lui revient aussi la somme de 25,675 f r . , prix de la ces
sion portée en l’acte du 8 juillet. 1808, dont le sieur Joubert a
été caution envers le sieur D u m a y ; que le sieur C o u r b y , soit
dans un mémoire dis tribué, soit en l ’au die nce , a reconnu la
�légitimité de cette répétition , ensemble les intérêts tels que de
droit, ainsi que les frais faits par le sieur D u m a y contre le sieur
J ou be rt , pour contraindre ce dernier au paiement de la somme
par lui cautionnée;
Attendu q u e , relativement à la vente du domaine de Sa r
l i è v e , le sîeur Joubert a droit au remboursement de la diffé
rence qui existe entre le prix porté au contrat, qui est de la
somme de 74,074 f r . , et le montant de l’adjudication qui n’a été
porté q u ’à la somme de 5 6 ,000 Jr. , ce qui fait un déficit de
18,074 f r . , lesquels ne peuvent lui être refusés, d ’après l’art.
2191 du Code Napoléon , ensemble l ’intérêt tel que de droit,
et les frais autres que ceux dont l’adjudicataire peut être tenu ,
ce qui porte à la somme totale de 51,649 fr. les sommes li
quides, dues par le sieur Courby audit sieur Jou bert, non
compris les intérêts et frais , d’après le règlement ;
Que le sieur Joubert doit aussi être remboursé sur les 5 6 ,000 f.
de l’adjudication, des sommes qui seront attribuées aux créan
ciers , suivant l’ordre qui se poursuit actuellement au tribunal
de l’arrondissement de Clermont, sauf audit sieur Joubert à re
prendre en déduction dans l’ordre les collocations desdits créan
ciers , utilement colloqués, celles desdites créances qu’ il éta
blira avoir payées ; opération qui nécessite un compte à faire
entre les parties , après la confection de l’ordre ;
Attendu que pour se refuser au paiement de ces sommes at
tribuées au sieur J o u b e r t , et résultantes de la vente et adjudi
cation de Sarliève , le sieur Courby prétend, sans motifs, que le
sieur Joubert pouvait et même devait s’opposer à l’expropria
tion de ce bien , puisque , dit-il , le sieur D u m a y n’avait sur
ce domaine aucun droit personnel ni hy pothèque, et que ces
poursuites pouvaient aisément être écartées par le sieur Joubert.
L e sieur C o ur by est dans l’erreur; à la vérité , le sieur D u
may n’avait aucun droit , de son chef propre, sur le domaine
de Sarliève; mais comme représentant le sieur Destradat
ven
deur, comme subrogé à ses droits , le sieur D u m a y qui avait
payé-ledit sieur Destradat, était créancier pr ivi lé gié ; que c®
�titre était clairement énoncé dans la cession de juillet 1808;
que c ’est en cette qualité, que le sieur D u m a y a fait procéder
à la saisie immobiüaire de Sarliève; qu’il avait par conséquent
un liIre incontestable; que le sieur Joubert ne pouvait raisonnablgment élever de difficulté à cet égard ; que déplus, et en principe le
sieur Joubert, caution, n’é lait tenu d’intenter aucune contestation
sur le titre du créancier saisissant; q u ’il lui a suffi de dénoncer à
ter as, ainsi qu’il l’a fait, les poursuites du sieur D u m a y , pour
être à l’abri de toute critique; au moyen de quoi, sa réclama
tion soit du prix du domaine de Sarliève, soit des frais, qui
sont la suite de l ’expropriation ne peut lui être refusée ;
E n ce qui touche les dommages-intérêts demandés par le sieur
Joubert ;
At tendu q u ’o n ne peut se dissimuler les torts considérables
que le sieur Joubert a éprouvés à raison des trois actes dont il
s’a g i t , soit par les poursuites rigoureuses q u ’il a essuyées, soit par
les pertes qui ont été nécessairement la suite de ces rigueurs,
soit par le dérangement de ses affaires, résultantes des surprises
du fait du sieur Co ur by ;
A tte nd u que la contrainte par corps réclamée par le sieur
J o u b e r t , peut être ordonnée pour dommages au c iv il , lorsqu’ils
excèdent la somme de 3 oo f r . , suivant les dispositions de l’a r
ticle 126 du Code de procédure civile; que le sieur Joubert pré
sente ce m o y e n légal comme étant le seul qui puisse lui procurer
Une indemnité de ses p e rte s r u i n e u s e s ;
Attendu q u ’en évaluant d’office cette indemnité à la somme
de 8,000 f r . , et s a u f l’estimation par experts au choix des parties,
]e Tribun al croit entrer dans leurs vrais intérêts, et prévenir
par-là de nouveaux préjudices;
Attendu e n f l n . q u ’e n jetant un coup-d’œil sur le tableau gé
néral de la contestation , la justice ne peut voir sans improba
tion le s.r Courby se débarrasser, par des clauses frauduleuses,
de plus de 200,000 fr. de dettes, en charger le sieur Joubert ,
sous la forme de ventes trompeuses, épuisées par des c r é a n c e s
énormes , ou des hypothèques légales ; que néanmoins le sieur
�C
( ,3 )
C o u r b y , sons le nom et par le concert de sa f e m m e , a trouvé
le moyen de jouir tranquillement de son bien de Bicôn, c o m
posant presque toute sa fortune, pendant que le sieur Joubert,
son créancier légitime, a ébranlé la sienne considérablement ;
que la loi a voulu réprimer et punir de telles immoralités; que
c ’est pour cela q u ’a été établie la contrainte par corps, en m a
tière civile ; et que le sieur Cour by doit en ressentir les effets ;
P a r ces motifs ,
L E T R I B U N A L , par jugement en premier ressort, faisant
droit sur tous les objets de la contestation, et ayant égard à ce
qui résulle des trois actes des n avril 1 8 1 1 , g juillet 1809 , et
8 juillet 1808, déclare le sieur Courby stellionatpire , comme
a ya nt , dans lesdits trois actes, contracté envers le sieur Joubert
des
engagemens
pouvant se
q u ’il
savait ne pouvoir pas
rem pli r,
ne
dissimuler à lui - môme son insolvabilité , soit
pour avoir c a c h é , à dessein , les hypothèques dont étaient
grevés plusieurs des immeubles donnés en hypothèque spéciale,
soit principalement pour avoir dissimulé dans lesdils trois actes,
l ’hypothèque légale de sa femme , et avoir manqué d ’en faire
la déclaration expresse; en conséquence le condamne par corps
et prise de sa personne , en vertu des articles 2069, 2136 et 2 *94
du Code Napoléon , à payer au sieur Joubert dans la quinzaine
de la signification du présent jugement à personne ou à domi
cile , la somme de c in q u a n t o u n mille six cent quarante-neuf
francs, pour les créances liquides dues à ce dernier, e n s e m b le
les interels et frais tels que de droit ; à payer p a r e i l l e m e n t , dans
le meme dé lai, et aussi par corps, en e x é c u t i o n de l’article 126
du Code de procédure civile, la somme de 8,000 fr . à laquelle
somme le tribunal évalue d’office lesdommages-iiitérêis revenans
audit sieur Joubert, ensemble les intéiêts depuis la demande, si
mieux n ’aiment les parties faire estimer lesdils dommagesintérêts par les s.rs Creuzet, Tantillon et Ci onier , experts , ha
bitons à R i o m , lesquels resteront, aux termes de l’art. 3o5 du
Code de procédure civile , définitivement nommés , faute par les
parties,dans les trois jours de la signification du présent jugement
�C 14 )
à personne 011 à d omicile , de s’accorder sur le choix d’ un seul
ou de trois e x p e r t s , e t , conformément à l’article 3 10 du même
Code , d’en passer leur déclaration au greffe , dans le même
délai de trois jours; laquelle option lesdites parties seront tenues
de faire aussi dans la quinzaine de la signification du présent
jugement à personne ou à domicile, sinon et faute de ce faire
par l’une ou par l ’autre des parties, ladite fixation de dommngesintérêts à la somme de huit mille f r a n c s r e s te r a d é f i n i t i v e ; et
au cas d’option pour l’estimation par experts, le tribunal com
met M. le Président pour recevoir le serment desdits sieurs ex
perts.
E t avant faire droit sur le surplus des sommes qui pourron*
revenir au sieur J ou b e r t, pour raison de la vente du domaine
de Sarliève , surseoit jusqu’après la confection de l’ordre qui se
poursuit au tribunal d e C l e r m o n t , pour la distribution du prix
de ce domaine, po ur , ledit ordre achevé, les parties venir entre
elles à compte, relativement aux sommes que le sieur Joubert
pourra reprendre comme représentant ceux des créanciers uti
lement employés, et q u ’il a payés.
Sur le surplus des. d e m a n d e s, fins et conclusions, met les
parties hors de procès; condamne le sieur Courby aux dépens
et coût du présent jugement ; et ordonne , attendu ce dont il
s’agit, qu ’il sera exécuté nonobstant appel et sans donner caution.
Fait et prononcé, etc.
�C *5 )
C O P I E S
D E
L E T T R E S .
Clermont, le 10 avril 1809.
] V [ o N CHER J O U B E R T ,
J e viens de recevoir ta lettre avec celle de D u m a y . Il m’avait
écrit le même jou r, j’y avais passé : il n’a pas souffert de ses
intérêts, puisque je les avais réglés. J ’ai envoyé ta lettre à
M . L e b l a n c , qui est chargé de mes affaires et de la vente de
Sa rliève; il aura vu par*là combien on est injuste envers moi à
T h irrs. Il va écrire demain au Commissaire impérial à Thiei’S,
pour que mon alïaire envers les gens de Maison-Neuve n’éprouve
plus de retard. T u me mandes que tu veux m ’exproprier : la
marche que lu prendrais serait infiniment plus longue que celle
que je prends. Beaucoup de monde sont allés voir mon bien de
Sarliève : le tableau des revenus est de 5686 IV., et je le laisse à
2,000 f r . , ce qui n’est pas ch e r, à la porte de la v il le , et bien
â l i , comme il est.
J ’ai vu M . Du fo ur à Cl erm ont , je lui ai dit que je ne pouvais
payer qu’après avoir vendu. A v e c la meilleure volonté du monde»
je ne puis pas donner ce que je n’ai pas. T u me dis que je t'a i
m enti sur vies dettes ; M . L e b l a n c , qui a la note de tout ce que
je dois, peut édifier que je n’ai pas menti : à quoi que cela me
servirait, personne n’a pas jamais payé pour moi. Fais en sorte
que je n’éprouve pas de nouveaux frais, attendu que tu vois que
je suis en chemin de terminer mes affaires. Paries toi-mêine à
Soanen , ou si tu veux que je lui fasse écrire par M. L ebl anc : les
frais ne servent à rien q u ?à augmenter la somme.
J e te salue amicalement,
g
C O U R B Y - COGNORD.
? ’ ^e désire sortir plus ardemment que toij j’en prends bien 1®
Clermont, le 12 avril 1809.
M on
cher
J oubert,
Hier soir ôn me fit signifier à ta requête, une dénonciation
de prot êt , avec assignation à comparaître au Tribunal de c o m
merce de Thiers. L a personne qui me la donna , me fit voir une
lettre de Touraud, qui lui annonçait un effet de 10,000 l i v . , pro
testé faute d’acceptation, pour faire contre moi les poursuites;
je ne sais pas qui peut te porter à me faire manger de l ’argent; tu
sais bien que cet effet ne sera échu que dans dix-huit mois envi
�V'J
(
16
)
r o n , et que j e n’ai pas les fonds pour le payer. Si j ’avais de l’ar
g e n t , j’acquitterais celui de Soanen et de M. D u fo ur , qui sont
échus. J e n’ai jamais présumé que tu me voulus du mal; au
contraire, ne t’ayant jamais donné sujet à m ’en vouloir d’aucune
manière. T u as to uj o ur s paru tenir à mes intérêts ; tu sais que je
n ’ai pas mérité les désagrémens que j’ai éprouvé, d’après cela ,
je ne puis pas croire que tu veuilles me faire manger un couple
de mille livres en frais, qui n’entreront pas dans ta poche, et qui
sortiront de la mienne; ayant la certitude que je suis sur le point
de vendre mon bien pour terminer mes a ffaires. t u as du rece
voir une lettre de M. L e b l anc , qui est chargé de la vente; tu
peux voir chez lui l’état de ce que je dois, tu y verras que je ne
t ’ai point menti. Il fau t donc que lu arrêtes les frais de Soanen
et de M . Dufour : dès qu’ils ont attendu quelque tem s, qu’ ils
attendent un peu plus ; je ne puis pas prendre de mesures plus
vigoureuses pour sortir : personne ne m’a refusé du te n ,s ; i l n'y
aurait donc que toi.
J e t ’envoie le tableau des revenus de mon bien , pour te fa ir e
voir que je n’en demande pas même sa valeur, puisque je le
laisse à 92,000 liv., a u dernier prix. T u me renverras ce tableau
par l’exprès que je t’envoie, il me le faut ici. V a s tant chez
Soanen toi-même, s’il faut les intérêts échus, je ferai en sorte
de me les procurer pour te les les envoyer.
A d i e u je t’embrasse,
>
COURBY COGNORD.
P . S. Si tu persistes à vouloir me faire de la peine, je t’engagerai à
venir toi-même à Clermont, prendre connaissance de mes affaires chez la
personne qui en est chargée, d’après cela tu verras.
C l e r m o n t , le 27 avril 1809.
Monsieur Nicolo m ’a donné aujourd’hui d eux significations
de ju gem en t , l'un de Soanen , l'autre de M . Dufour-Riberolle.
A quoi cela te sers de m e faire des fr a is aussi considérables; si
tu vas de ce train pour les effets de Grangeon et celu i de d ix
m ille que t u as entre tes .mains, vous m’en taillerez du beau.
Pour éviter de me faire manger tout vif, je me rendrai à Thiers,
et consentirai une obligation qui ne me coûtera que onze francs
par mille,, au lieu que de cette manière, tu me ferais plus de
douze cents livres de frais. O n a dû te dire, l’autre j o u r , que
j’étais tombé de mon cheval, et que je ne pouvais pas marcher ;
mais avec certaine personne, il faudrait aller même si on était
mort. Je serai à Thiers dimanche ou lundi, sans faute.
J e te salue ,
1
,
Courby cognord. ;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Jugement. Courby-Cognord, Joseph. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Jugement du Tribunal civil de première instance de l'arrondissement de Riom, département du Puy-de-Dôme, rendu le 20 mai 1812, entre sieur Joseph Joubert, demandeur ; et sieur Joseph Courby-Cognord, défendeur.
copie de lettres.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1807-1812
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2220
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2219
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53449/BCU_Factums_G2220.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53448/BCU_Factums_G2219.pdf
64554d5741fd2bf8bbf1f7480bb9a950
PDF Text
Text
«
COUR
M
É
M
O
I
R
E
IMPÉRIALE
DE R IO M .
EN
R E P O N S E
i . re C h a m b r e .
POUR
L e Sieur
J e a n - J oseph
J O U B E R T , intimé;
C O N TR E
L e Sieur J
ean
-
Jo sep h
C O U R B Y -C O G N O R D ,
appelant.
l
e
sieur Courby-Co gnord a fait gémir deux fois la
presse pour défendre, suivant lui, son honneur et sa
libellé.
En appelant ainsi l’attention publique, il a du se
proposer d’établir que sa conduite était à l’abri de
toute censure, et qu’il était injustement l 'o bjet d’une
demande en stellionat.
Mais ce bu t, louable en lui-mêm e, s’il était inspiré
par un sentiment noble, a-t-il été rempli?
L e sieur Courby a-t-il dissipé les soupçons que font
naître ses propres dires? s’est-il lavé des inculpations
�( 2 )
qui'lui ont élé faites? a-t-il mérité, a-t-il obtenu les
suffrages flatteurs de l’opinion et l’approbalion hono
rable de la Cour ?
«
C ’est ce que l’avenir apprendra.
On reproche amèrement au sieur Joubert d’avoiu
méconnu les droils du sang et les devoirs d’une
affinité religieuse; de s’être montré en n e m i, tandis
qu’il devait être protecteur.
Mais ces titres qu’invoque le sieur Courby-Cognord,
ne les a-t-il pas violés cent fois lu i- m ê m e , en abusant
de l’affection de son oncle pour se procurer des res
sources et fournir à ses dissipations; en se débarras
sant, par des moyens frauduleux, de dettes énormes,
pour en charger celui qui le traitait en père ; en ob
tenant chaque jour de nouveaux sacrifices sous la foi
de ventes trompeuses ou de gages illusoires; en en
levant à ce créancier légitime , par des manœuvres
obliques, la possibilité de récupérer la moindre partie
des deniers quJil a su lui arracher; en empoisonnant
enfin, par la plus noire ingratitude, ses nombreux
bienfaits, du fiel de la calomnie.
Et il ose après c e l a , réclamer sa tendresse et sa
bienveillance !
Les motifs du sieur Joubert, qui n’avait pas cru
devoir répondre
au premier cartel de son n e v e u ,
n ’ont pas été appréciés par celui-ci : enhardi par cet
acte de modération, il n ’a pas craint d’avancer, contre
son oncle , des imputations odieuses et les plus h a
sardées.
Dans la nécessité de faire connaître à la Cour l’origine
�(3)
et les détails de la cause soumise à sa décision, l e —
sieur Joubert prouvera qu’il respecte encore les liens
qui rattachent à son adversaire, en se dispensant de
dérouler un tableau dont lui-même aurait à rougir,
et en se bornant à présenter les faits dans toute leur
pureté.
Père d’ une famille nombreuse, propriétaire d’une
fortune • assez considérable et liquide, éloigné des
affaires: auxquelles il est parfaitement étranger, et
n’ayant d’autre occupation que celle de faire valoir
ses propriétés rurales, le sieur Joubert vivait heureux
à la campagne qu’il habite, lorsque son repos a été
troublé,' ’sa1"fortune ébranlée par ses relations avec
le sieur Courby-Cognoi’d.-1
‘ :i
rf Celui-ci , qui était entré dans le monde sous des
auspices assez brillans relativement à la fortune, et
que quelques succès dans les affaires avaient aveuglé,
ne crut pas la ville d e Thiers un théâtre assez vaste
pour ses spéculations. Il transféra son domicile à Clermont, où beaucoup de causes, qu’il est mutile de rappe
ler , le jetèrent dans la gène et dans un discrédit absolu.
Pour couvrir ce que peuvent avoir de répréhen
sible ses dissipations, le sieur Courby en indique la
source dans la piété filiale; si on veut l’en croire,
les secours qu’il a prodigués à son père ont préparé
sa ru i rie.
. Serait-ce par oubli que le sieur Cou rby a
tu le
prix qu ’il mettait h ses bienfaits envers son père?
ils furent considérables sans doute, ces bienfaits, puis-
�que ce dernier, accablé de leurs poids, n’a pu les
reconnaître qu ’en se désaisissant bientôt de toutes ses
propriétés.
Faut-il également attribuer à la modestie du sieur
Couib y-Cognord le silence qu ’il a gardé sur le mode
de sa mise en possession du bien de Bicon, en usant des
mesures les plus coercilives, parce qu’il savait que
son père n’avait pas les fonds nécessaires pour faire
enregistrer une contre-lettre à la vente authentique.
Ce n’est donc point à son père que le sieur Courby
doit imputer le dérangement de sa fortune; la cause
en est moins belle, et il serait difficile de l’excuser.
L a première négociation qui eut lieu entre Joubert
et Cou rb y, eut pour objet la cession de cinq contrats
de rente appartenant h la dame Courby ; le sieur
Joubert ne se décida à faire cette acquisition que pour
procurer à son neveu le prix de ces contrats dont
il disait avoir le plus grand besoin. On peut même
noter sur ce point une particularité assez remar
quable. Postérieurement à cette cession le sieur Courby
n ’en a pas moins touché le revenu de la plus forte des
rentes, parce qu’au moment de l’échéance du terme,
le transport n’avait pas été notifié aux débiteurs. Sa
quittance le contasfe.
Peu de tems après, le
3 octobre 1806, Cou rby-
Cognord vendit à J o u b e r t , par acte sous seing-privé,
un jardin et un pré appelés de l’A b b a y e , qu ’il avait
acquis de son père. L e prix convenu fut de 8,000 fr.
qui furent payés en huit effets de 1,000 fr. souscrits
par l’acquéreur et livrés au vendeur.
�(5)
C ’est postérieurement, ainsi, ’ qu ’on le dira bien
tôt, que cet acte de vente a reçu une forme authen
tique.
L e sieur Courby, qui, depuis l’an n , s’était rendu
acquéreur du bien de Sarliève , avait eu recours à des
emprunts pour payer une partie du prix; pressé par le
banquier qui lui avait fourni des fonds, poursuivi d’ail
leurs pour d’autres dettes personnelles et exigibles, il
s’adresse au sieur Joubert pour le tirer de l’embarras
où il se trouve : il lui annonce qu’il est perdu, malgré
sa fortune brillante, s'il ne lui prête son appui; il ininvoque tous les titres qu’il peut avoir à ses bienfaits,
l ’intéresse à sa position, et obtient enfin de sa faiblesse
et de sa complaisance la promesse de venir à son secours.
L e crédit de Courby était é pu is é, sa signature re
butée; il avait besoin de ressources considérables. L e
sieur Joubert souscrivit, en conséquence, le 16 no
vembre 1806, pour
38 ,ooo fr. d’eifets à l’ordre du
sieur Courby qui les retira, et qui, de son côté, remit
des effets, pour pareille somme, à une échéance plus
rapprochée , pour tenir lieu de garantie. Dans le nom
bre se trouve
il est parlé à
Les places
circuler, des
la lettre de change de 10,000 fr. dont
l’art. 5 du mémoire de Courby.
,
de Thiers et de Clermont virent alors
mains de Courby seul, des lettres de
change du sieur J o u b e rt, pour une somme considé
rable. Quelle pouvait en être la cause?
Joubert n'avait rien acquis de C ou rby , que l’objet
modique dont on a parlé ; il lui avait encore moins
emprunté. Acquéreur depuis peu de lems du domaine
�(6)
des Baraques, où il avait fait des constructions impor
tantes Joubert n ’élait pas lui-même en situation de
placer des fonds. C'est donc sans fondement, que le
sieur C ou rby , familiarisé avec le mensonge, a avancé
dans son m é m o ire , et pour la première fois, que son
oncle avait été un des prêteurs auxquels il avait eu
recours, et que son taux n’avait pas été plus modéré
que celui des autres.
Cette assertion, aussi faussé1qu’indécent.e, serait dé
mentie hautement par tous les liabitans de Thiers ,
qui savent parfaitement que les effets distribués par
Courby, et revêtus de la signature de Joubert, lui ont
été donnés sans intérêt et à titre gratuit.
Cou rby ne fut pas dans cette circonstance, comme
dans beaucoup d’au tres, exact à. remplir ses engage^
mens; car le sieur Joubert fat obligé de solder à l’é
chéance plusieurs de ces effets.
L e s bienfaits du sieur Joubert ne se bornèrent pas
à' cette unique opération. D e
nouvelles demandes
furent faites : elles furent accueillies par de nouveaux
effets ou des cautionnemens.
Rien n’était négligé pour obtenir des ressources;
la dame C o u r b y e l l e - m ê m e secondait parfaitement
son mari dans ses projets, dans ses spéculations et dans
ses moyens. Des voyages fréquens et des séjours pro
longés au Brasset, habitation du s.r Joubert, avaient
toujours pour objet quelques sollicitations nouvelles. Ce
dcmicir s’abandonnait d'autant plus facilement à 1 im
pulsion de son cœur franc et généreux, que cl une part
ses bons offices profitaient îi l’amilié, et que de 1 autre
�(7)
la fortune apparente de C o u r b y , propriétaire de Bicon
et de Sarliève, ne lui laissait aucune crainte sur les suites
de sa complaisance.
Il était loin alors de suspecter sa loyauté, Seul il
était dans l’aveuglement.
'
<, '
. !• i.
Pour d o n n e r , en e ffe t, une idée de l’opinion que
l’on avait du sieur C o u rby-C o gn ord , dans sa ville na
t a l e , il suffira de rappeler le trait suivant : ,
,
!
A u commencement de 1807 , Courby arrive au
Brasset, où il avait été précédé par son: épouse, qui.,
munie de divers effets, avait tenté vainement depuis
plusieurs jours, de les faire endosser par le s.r Joubert,
atteint de la goutte à la main droite. On redouble
d ’efforts. La dame Joubert, séduite par des prières et
des larmes, sollicite èlle-même, et arrache à son mari
un consentement. C o u rb y , satisfait, s’élance sur son
cheval, et vole à Thiers présenter ses effets- L e ban
quier les refuse ; il méconnaîtra signature tremblante
de Joubert. Courby insiste vainement; son attestation
est méprisée; et il est forcé de revenir le même jour
au Brasset, auprès de son oncle qui lui reinet un billet
ainsi conçu.: i 5 février 1807. — J ’a i la goutte, j e n a i
pas pu nueux signer, J o u b e r t .
';
Ce billet fut joint à la lettre de change. ¡Le sieur
Joubert ayant été contraint de payer, comme endos
seur, et en vertu de jugement du tribunal de c o m
merce, qui condamne C o u r b y , tireur-, à l e ’garantir,
l’ un et l’autre lui furent remis: i l ’ en est porteur.
Ou profitera de celle circonstance, pour répondre,
une fois pour toutes, à une inculpation é!t ràngëf que
�(8)
le sieur Courby fait; à son oncle, dans une note h la
page 18 de son mémoire. *
En supposant que le sieur Joubert eut été excité
Jcontre son neveu, comme on veut le dire, p a r'u n e
colère a v e u g le , et qu ’il eût-voulu le contraindre par
corps, il n'aurait eu besoin de pratiquer aucune ma
nœuvre, pour se procurer contre lui une lettre de
cliange, afin de le poursuivre devant les tribunaux de
¡commerce. Pour son propre malheur, il n ’en a que
trop reçu. Forcé^de1payer pour son.neveu, il a obtenu
plus de dix jugemens emportant contrainte par corps,
sans en mettre un seul à exécution. Il peut les repré
senter encore.
•
i l :
Que le sieur Courby abandonne donc le vaste champ
du subterfuge et dé la calomnie!
r
.j
Cependant Joubert exige'que l’on donne une forme
authentique à la,vente du
3 octobre 1806. Cet acle
fut,reçu par Tourrau d, notaire, île! 11 avril 1807; il
eshun de ceux qui établissent les stellionats du sieur
Courby.
Il vend le jardin et le pré de l’A b b a y e , avec pleine
et çntièrç garantie, sans déclarer les hypollièques nom
breuses qui en absorbaient plusieurs fois la valeur, et
rendaient sa propriété incertaine et précaire.
Il reconnaît que le prix en a été payé avant l’acle.
..
Il oblige spécialement, à l’exéculion de la v e n l e ,
un ténement de terre, appelé le champ de la Honche,
faisaijtiparlie du domaine de Bicon ; et il 110 déclare
point les hypothèques qui grevaient cet liérilagc.
.Cependant} comnie dépendant du bien de 13icon , il
était
�(9)
était frappé de treize inscriptions de la part des créan
ciers du sieur Courby père , se portant, en totalité, à
72,348 f r., et de sept inscriptions prises par les cré a n
ciers personnels du sieur Courby-Cognord, toutes exi
gibles , pour une somme de 100,000 francs.
Ce même domaine était également frappé de l?h y pothèque légale de la dame Courby. L e vendeur la
dissimule également nonobstant l’obligation expresse
que lui imposait la loi d’en faire la déclaration.
Pour pallier sa conduite , le sieur Courby prétend
que la venle de ces jardin et pré n’a pas élé réelle ;
qu’il n’en a jamais reçu le prix ; et que l’abandon
qu ’il en a fait n’a eu d’autre objet qu’ une indemnité
exigée par Joubert , à raison de cautionnemens par
lui fournis.
• j
. . - r
, Il faut encore prouver le mensonge sur ce point.
A la vérité l ’acte énonce que le prix a élé reçu avant
ces présentes j mais la, raison, s’en trouve facilement.
L a vente de 1807 n’a fait que remplacer celle du
3 octobre 18 06, qui avait été payée au moyen d ’efï'els
souscrits par Jo u b e rt, et par lui soldés depuis. Lors de
la. vente authentique, le sous seing-privé, devenu inu
tile fut déchiré. L e notaire et les témoins pourraient
1 attester. Mais ce qui vaut mieux encore que toutes
lesi attestations possibles, c ’est l’existence des efiets
souscrits le 3 octobre , et qui , par un hasard heureux ,
se trouvent encore entre les mains du sieur Joubert.
Indépendamment de cette circonstance matérielle et
concluante, les clauses de l’acte ne repousseraienl-çlles
pas l’asserlion vaine du s.r Courby ? Si réellement il eut
3
�(
*)1â
10
)
4
fait un don gratuit du jardin h son oncle , se seraitil soumis aux chances d’ une garantie formelle , el à
loules les conséquences d’ une hypothèque spéciale?
Joubert lui-même recevant l’immeuble h titre de li
béralité, eût-il été si exigeant pour ses sûretés?
Mais s’il fallait encore des témoignages plus imposans sur la sincérité de la vente du 11 avril 18 0 7 ,
le sieur Joubert en invoquera qui ne seront point
récusés par son neveu.
L e sieur Courby-Cognord , pour qui la reconnais
sance est un fardeau dont il se débarrasse facilement,
s'était permis quelques propos sur le compte de son
oncle qui en est instruit. Une lettre portée par un
domestique à Courby lui reproche vivement l’indi
gnité de sa conduite : celui-ci s’empresse de démentir
les propos et les faits e u x - m ê m e s . Sa lettr e, datée
du 9 mai 1808, fait disparaître plus d’une des mille
imputations fausses auxquelles il s’est livré dans son
mémoire (1).
( 1 ) Y o i c i le contenu de la le ttre , telle qu’elle est éc rite :
Clermont, te 9 mai 1809.
M on cher o n c l e ,
.
J e suis bien surpris, qu’à T h ie r s , l’on me fasse parler quand
je d o r s , que je vous ai donné d ix m ille Hures pour me contre
signer des effets, ensuite le jardin et puis douze cents livres.
Je n’ai jamais parlé de cela à personne, et que cela n'est pas.
D ans le cas de dire cela. J e passerai au Brasset en allant à Thiers,
pour prendre jour pour te faire compter le montant du billet
que tu as endossé pour m oi et f a i t pour moi.
Je te salue am icalem ent,
C o u bby -C ognord.
�(
II
)
L e sieur J o u b e rt , qui avait payé un grand nombre
d’effets pour le compte de son n e v e u , et qui luimême , à raison de c e , avait eu recours aux emprunts ,
désire être remboursé; il le sollicite viv e m e n t, mais
sans succès; n'obtenant rien, il fait protester et m e
nace de poursuivre.
Dépourvu de fonds , Courby propose à son oncle
de lui abandonner en paiement l’effet d’un bail à ferme
de Bicon ; Jo ubert, pressé de Irouver des ressources,
acceplela proposition; et Courby lui fait cession de cinq
années du prix de la ferme du bien de B ic o n, qui
étant annuellement de 6 , 25 o francs, formait un total
de 3 1,260.francs.
L e transport ne porte, à la vé rité, le prix qu’à la
somme de 27,000 francs; mais il fallut nécessaire
ment calculer les intérêts des différens termes annuels
du bail, qui n’arrivaient qu’à des échéances successives
et éloignées. Celle différence du prix à la somme cédée,
démontre que le taux d’intérêts du sieur Joubert n’a
pas été excessif.
L e sieur Courby n’a pas manqué de renouveler,
sur cette cession, son assertion bannale, q u ’ une partie
du prix servit d’indemnité pour des cautionnemens
postérieurs.
Il avoue que , dans la réalité, il reçut i 5,ooo fr. en
effets de commerce; mais il ne prend point pour a r
gent comptant les effets dont le sieur Joubert lui fît
remise, et qu’il n ’avait pas payés. U ne de ses letIres,
du 6 mai 1808, établit cependant qu’avant le trans
p o r t , il se reconnaissait débiteur de son oncle, puii-
4
�qu'il lui demande comment il fa u t qiùil fa sse pour
le payer • il Lui apprend qu’il a des terres à vendre à
Sarlieve■q u i l ne se tient plus que pour 2,000 f r . , et
que d ’un moment à l'autre il peut terminer. Il se plaint
enfin des poursuiles exercées contre lui.
11 est très-vrai que le même jour, Joubert sous
crivit des cautionnemens sur cinq effets, s’élevant à
10,000 f r.; mais ils ne firent point partie du prix d e l à
cession, et si, dans la suite, il a exigé qu’on lui fît
compte de ces effets ( page 9 du m ém oire ), c ’est par la
raison bien simple qu'il les a soldés comme endosseur,
et qu’il devait en recouvrer le prix contre le tireur.
Il est porteur des billets portant acquit de ses deniers.
Un nouveau bienfait du sieur Joubert envers son
neveu résulte encore du cautionnement qu ’il lui prêta
le 8 juillet 1808; ce cautionnement est devenu la
source et l’occasion de tous les désastres qui pèsent
sur lui.
Par cet a c t e , passé h Clermont, Courby reçoit du
s.r D u m a y , banquier, une somme de 26,000 liv ., qu’il
emploie à payer une parlie du prix resté dû sur l’acquisition par lui faite des biens de Sarliève. L e sieur
Deslradut,
qui
touche les fonds, subroge le sieur
D um aij à,son privilège de vendeur.
D ’un autre côté, Courby et Joubert cèdent conjoin
tement et solidairement à D umay 26,000 liv. sur ce
qui peut être dû au dit sieur Courbij des prix en prin
cipaux et intérêts des ventes par lui consenties à plu
sieurs particuliers de diirérentes parties des biens qui
composent le domaine de Maison-JS^euve.
�( >3 )
p
Courby donne pour hypothèque le bien de Bicon
qu'il présente comme Libre, puisqu’il ne déclare au
cune des hypothèques inscrites qui, à cette épo qu e,
le grevaient de plus de 290,000 fr.
11 garde également le silence sur l’hypothèque lé
gale qui, dans la suite, a été évaluée par la femme
à 110,000 fr.
On a reconnu dans tous le cours de l’instance, que
le sieur Joubert n’avait paru dans cet acte que comme
simple caution; on le répète encore dans le mémoire,
et l’on entreprendrait en vain de le nier, puisque toutes
les expressions de l’acte tendent à manifester cette
vérité.
11 est bon d’observer que dans toutes les négocia
tions relatives au bien de M ais on -N e u ve , ainsi que
dans beaucoup d’autres, C o u rb y - C o g n o rd , que l’on
représente comme un jeune homme sans expérience
( page 48 du mémoire ), a trompé tous ceux qui ont
eu le malheur d’y prendre part.
Il a trompé les acquéreurs de ce b i e n , en le leur
vendant comme sa propre chose; et par ce m oye n, il
est parvenu ¿1 toucher la plus grande partie du prix.
Dans l ’acte du 8 juillet, il cède même à D u m a y
les 26,000 liv. comme une créance personnelle.
Enfin il a trompé tout à la fois et le sieur D u m a y ,
cédalaire, et Joubert, sa caution, en ne leur offrant
pour sûreté de ses engagemens qu ’une hypothèque
illusoire.
Comment ose-t-il, après c e l a , répéter que le cau
tionnement de son oncle ne lui a été accordé qu'à
ï
�( i4 )
des conditions onéreuses (pag. 8 du mémoire)! Peutil espérer d’en imposer par ses déclamations ? Quels
sont ses litres pour inspirer la confiance?
Sa mémoire ne lui rappellerail-elle pas, au contraire,
qu’après la clôture de la cession du 8 juillet, le sieur
D u m a y lui dit en termes énergiques, et en présence
de témoins , que jamais il ne pourrait ressentir et té
moigner assez de reconnaissance au sieur Joubert, pour
les services qu ’il en avait reçus.
Cette observation n ’a pas fructifié : le terrain était
ingrat.
Postérieurement J o u b e r t , contraint de payer de
nouvelles lettres de change, pour le compte de son
neveu , se /ait consentir par ce dernier une obliga
tion de 10,000 francs. Bientôt il solde au sieur Grangeon une autre somme do 10,000 francs, montant
des effets qu’il avait caulionnés lors de la cession du
bail de Bicon.
D ’un autre côté, D u m a y qui avait agi contre les
acquéreurs de M aison -N euve, en vertu de la cession,
éprouva de la résistance de leur part; ils avaient dé
couvert que ce bien était dotal. Ils refusèrent de payer.
Un jugement du tribunal de Thiers les autorisa à re
tenir en leurs mains le prix de leur acquisition. Alors
le sieur D u m a y , qni veut être p a y é , s’adresse à son
cédant.
Des obligations, des lettres de change n’étaient pas
de l'argent. Joubert, pressé, poursuit à son tour Courby;
il fait protester différons effets. Courby sollicite des dé
lais pour vendre le bien de Sarliève , cui’il avait a f -
�( .
5)
fiché dequis long-fems; il le lui offre à lu i- m ê m e ; une
correspondance active s’établit en treux. Trois lettres,
sous les dates des 10, 12 et 27 avril, justifient tout à
la fois et la nature des propositions du sieur Courby à
Joubert, et la réalité des créances de ce dernier. (Voir
ces lettres à la fin du mémoire.)
Beaucoup de personnes peuvent se rappeler qu'à
celte époque les acquéreurs qui se présentèrent furent
éloignés par les prétentions outrées du sieur Courby,
qui, en exagérant les revenus du bien, le portait à une
valeur excessive. Lassé d’attendre, le sieur Jo ubert,
conseillé de se rendre lui-même acquéreur, pour as
surer au moins ses créances personnelles, fit enfin l'ac
quisition de Sarliève, par acte du 9 juillet 1809.
L e sieur Courby lui vendit le corps de bien situé
à Sarliève, tel qu’il l’avait acquis du sieur Destradat,
par les ventes des 29 messidor an 10 et 9 nivôse an
11 , à l’exception des objets vendus au sieur Dumay.
H vendit également différons objets qu’il avait réunis
h sa propriété , et notamment une vigne et terre pro
venues du nommé C h o sso n , suivant les actes reçus
D o h j, notaire au lieu de Cournon.
Les prix de ferme de l’année courante et la récolte
qui pouvait alors être pendante, firent partie de la
vente. Cou rb y ne se réserva que la récolte de trois
septerées de luzerne.
L e prix de vente fut porté ¿1 74,074 fr., dont 4,074 fr.
pour les récoltes et le prix de ferme.
I,’acquéreur est chargé de supporter les inscriptions
conservatoires prises sur le bieïi vendu parles nommés
�(
16
)
Cornez, d’Auzolles, Lachenal et autres, ayant pour
objet la garantie des ventes consenties par le sieur
C o u rb y, des biens de son épouse. Il doit supporter de
mêm e quelques autres inscriptions conservatoires prises
par des acquéreurs nominativement désignés.
On lit encore que le vendeur a hypothéqué spéciale
ment , pour la garantie de la vente, son bien de Bico n,
lequel bien est déjà grévé de différentes hypothèques
dont l’acquéreur déclare avoir connaissance.
Enfin, F a d e est terminé par l’engagement que con
tracte le vendeur de faire la remise, dans le délai d’ un
mois, de son titre d’acquisition, de la quittance finale
de sa libération vis-à-vis le sieur d’Estradat, et des baux
à ferme de la propriété vendue.
Il n’est pas une seule clause, dans cet a cte , qui ne
constitue un stellionat, ou qui n’ait donné lieu à un
acte de mauvaise foi de la part du sieur Courby.
i.° L e sieur Jo ubert, qui a acheté le bien de Sarliève,
tel qu il avait été acquis du sieur cV E slradat, a néan
moins été actionné par ce dernier, en désistement de
six septerées de terre, faisant partie de l’un des objets
compris dans la vente du g nivôse nn 1 1 ; vainement
il a appelé en garantie le sieur C o u r b y , son vendeur;
celui-ci ne s’est pas mis en peine de faite valoir sa
v e n t e , et depuis p e u , un jugement du tribunal de
Clermont a ordonné le désistement.
2.0
D e tous les objets particuliers qui avaient été
réunis par le sieur Courby au bien principal de Sarliève, et qui faisaient partie delà vente, le sieur Joubert
n ’a joui quo de six quartelées de terre provenant d'un
nommé
�'nommé Beldon; il n’en a point connu 'd’autres, et
quelques recherches qu’il ait faites, il n’a jamais pu
parvenir à découvrir La vigne et la terre provenues du
nommé Chosson, et qui avaient été notamment com
prises dans la vente. Il y a plus, c’est que nonobstant
la déclaration formelle que les actes d ’acquisition ont été
reçus par D o ly , notaire à Cournon, le sieur Joubert
ne craint pas d’affirmer qu’il n’en existe point.
Ainsi le sieur Courby a évidemment commis un
stellionat, en vendant des immeubles dont il savait
n ’être pas propriétaire , puisque jamais il ne les a
acquis.
3.° Les prix des fermes faisaient partie de la vente;
le sieur Courby ne manqua pas d’en retenir les baux
bien au-delà du délai dans lequel il devait en faire
la remise, nonobstant une sommation de les délivrer:
il lit plus, il eut l’indélicatesse d’en toucher une grande
partie. Les fermiers ont ses quittances.
A u lieu de trois septerées de luzerne qu’il s’était
réservées, il en lit couper huit.
4.0
La iixation du prix de vente, porté pour les im
meubles à 70,000 fr. n’est pas la moindre des fraudes
de Courby. Elle est le produit de saJidêUtê dans 1 in
dication des revenus. Sa lettre du 10 avril 1809 apprend
qu’il les portait à 5,686 fr. Un tableau justiiicatif et
détaillé qu’il remit, avant l'acquisition, au sieur Jou
b e r t , qui en est porteur, fait mention de baux alors
expirés, d’autres dont les prix'étaient enilés, ou qui
même n’avaient jamais existé.
L e sieur Joubert croit au surplus inutile d’obseivcr
5
�que ce p r i x , tout énorme qu’il est, a été payé
intégralement, soit par l’abandon de ses créances per
sonnelles, soit par des délégations sur des créanciers
qu’il a soldés, dont il a les quittances. Cela est établi
par la contre-lettre dont on a donné copie : elle prouve
même par le calcul des sommes que le prix réellement
payé par Joubert monte à 76,625 fr., en ne comptant
même le prix de la cession du bail de B i c o n , que
pour
25 , 5 oo fr. ; aussi fut-il expliqué par Cou rby,
qu’il ne serait fait aucune répétition de part ni d’autre.
5.® L ’acquéreur a bien été chargé de supporter
quelques inscriptions conservatoires qui frappaient le
bien ven d u, mais il a dû naturellement trouver dans
cette obligation spéciale qui lui était imposée, l’as
surance qu’il n’en existait point d’autre, et la dispense
formelle d’en souffrir un plus grand nombre.
Ce p e n d a n t, indépendamment de ces inscriptions
conservatoires, il en existait, au moment de la ve n te ,
vingt-cinq autres, qui toutes avaient pour objet des
créances exigibles et personnelles à Courby, et dont
l ’évaluation se porte ¿1 la somme énorme de 2 1 5,000 fr.
On ne peut douter que le but de C o u r b y , en trom
pant son acquéreur sur les hypothèques qui grevaient
Sarliève, ne fût d’obtenir quittance des dettes dont
celui-ci était personnellement créancier, et de se dé
barrasser, par l’eilet des délégations de celles de ses
autres dettes qui lui parurent les plus pressantes. Joubert
se serait-il dépouillé, s’il eût été instruit ?
6.° L e sieur Courby a également dissimulé les hypo
thèques légales qui frappaient soit le bien vendu, soit
�( I9 )
l’objet qu’il présentent pour sûreté de ses engagemens ;
c’est une vaine subtilité de conclure de la déclaration
faite par J o u b e rt, qu’il avait connaissance des hypo
thèques qui grevaient Le domaine de B ico n , la consé
quence qu ’il connaissait aussi les hypothèques légales
non inscrites.
Comment donc, après tant de supercheries, de dol
et de fraude , le sieur Courby pourrait-il espérer d’é
chapper à la peine du stellionat ?
L e sieur Joubert connut bientôt la profondeur de
l’abîme dans lequel il s’était précipité, par ses rela
tions avec son neveu.
L e prix des jardin et pi*é de l’A bb aye , qu ’il avait
vendus au nommé Gaudissier, devint l’objet d’un
ordre ouvert entre les créanciers de Courby père et
ceux de Courby-Cognord. Ce qu’il y a de plus re
marquable , c’est que ce dernier y figure en qualité
de créancier poursuivant, du chef de sa m è r e , et il
se fait colloquer par privilège pour les frais d’ordre,
sur le prix de la revente d’un immeuble qu’il avait vendu
lui-même , tandis que son acquéreur perd tout à-Iafo i s , la chose, le prix et le gage qui lui avait été
promis.
L e sieur Joubert , déçu de l ’espoir de touc her le
prix du jardin , fut réduit à la fâcheuse nécessité de
so dépouiller lui-même, par l’aliénation de son do
maine des Baraques. La valeur de cette propriété,
qui s’éleva à 46,080 francs, fut employée ¿1 solder
lesxréanciers délégués par la vente de Sarliève , et
6
�(
20
) „
partie de la créance du sieur D u m a y , portée dans la
cession de 1808.
Ces sacrifices considérables n’en provoquèrent point
de semblables de la part du sieur Cou rby, qui depuis
long-teins s’inquiétait peu de ses engagemens. Les res
sources pécuniaires de Joubert, bientôt épuisées, furent
insuffisantes. Pressé vivement par D u m a y qui le pour
suivait comme caution solidaire, et l’avait fait e x é
c u te r, il sollicita son neveu de prendre des mesures
convenables pour terminer ses affaires.
Courby propose alors de céder à son épouse le bien
de B i c o n , pour remplacer le domaine de MaisonN e u ve par lui vendu, et pour acquitter ses autres re
prises. Celte aliénation, disait-il, en assurant tous les
droits de sa fe m m e , consoliderait la vente qu’il avait
faite de son bien dotal; les acquéreurs deviendraient
sans intérêt à maintenir les inscriptions conservatoires
prises sur Sarliève qui serait dégrèvé d’autant; ils s’em
presseraient de verser le prix de leur acquisition, qu’on
emploierait à éteindre la cession du 4 juillet 1808,
soit entre les mains du sieur D u m a y , pour ce qui lui
restait d û , soit dans celles du sieur Joubert, pour la
porlion qu’il avait payée lui-même.
Ce projet fut alors goûlé par Joubert qui concourut
à son
exécution , d’après l’assurance formelle que
Cou rby mettrait tout en œuvre pour arriver ¿1 ces
résultats. Mais celte convention qu ’on v e u t , pour
eu déduire un moyen de c a u s e , faire remonter ¿1
l ’époque de la venle de Sarliève, qui avait eu lieu
cinq mois auparavant, n'a été réellement arrêtée que
�(
21
)
^^3
long-lems après, et lorsque le sieur J o u b e rt , éclairé
sur les manœuvres dont il avait été v ic t i m e , et sur
sa véritable situation, se vit contraint d’adopter aveu
glément toutes les mesures qui paraissaient devoir le
préserver du naufrage.
Les pièces qu’on a publiées (pag. 16 du mémoire) dé
mentent même formellement l’assertion du s.r Courby,
puisque la première a pour date le 5 novembre 1809,
antérieure, de trois jours seulement , à la vente qui
est du 8, et que la seconde pièce lui est postérieure.
Celte vente du bien de Bicon à son épouse ne fu t,
de la part de Courby, qu’ une nouvelle fraude qui
mit le comble aux désastres de Joubert, en paralysant
tous les moyens d’exécution qu’il pouvait avoir contre
son neveu.
D ’une p a r t , l’acquisition de Sarliève ne lui offrait
aucune ressource, puisque les inscriptions considéra
bles qui grevaient ce bien, enlevaient au propriétaire
la possibilité de l’aliéner utilement.
D ’un autre c ô t é , C o u r b y , infidèle à sa promesse,
n ’agissait point pour faire cesser les motifs que les
acquéreurs de Maison-Neuve avaient eus pour retenir
en leurs mains le prix des ventes, cédé au sieur D u
may. 11 avait même laissé confirmer par arrêt le ju
gement qu ’avaient obtenu les acquéreurs au tribunal
de Tliiers.
Enfin, le bien de Bicon était devenu un gage pu
rement illusoire , soit par l’effet des inscriptions dont
il était frap pé, soit par l’aliénation qui en avait été
faite à la dame Courby.
�(
22
)
Telle élail la position critique de Joabert. Courby
cependant sembla prendre plaisir à l’aggraver, en lui
enlevant jusqu’aux plus iaibles ressources auxquelles
il aurait pu s’attacher.
Il fait d’abord requérir, par son épouse, deux ins
criptions sur le domaine de Sarliève, à raison de ses
droits, reprises et gains éventuels, le tout évalué à
1 10,000 francs. Ces inscriptions sont bientôt suivies de
sommations hypothécaires, notifiées les 24 juin et 19
août 1811 par la dame C o u r b y , alors séparée de biens ,
sous Cautorisation de son mari.
11 cherche à soustraire ses récolles de Bicon , par
une cession simulée, qu ’il en fait le i er. avril de la
même année à un nommé M a rtin et, tapissier à Clermont ; il y comprend même le mobilier qui garnissait
sa maison.
S’affranchissant de toute pudeur, Courby pousse
plus loin ses précautions. Il prévoit que le décès de sa
m ère, en lui attribuant une porlion de son hérédité,
pourrait offrir un gage à ses créa liciers ; rien ne l’e m
barrasse pour les en frustrer. 11 se rend auprès du lit
de sa mère agonisante, lui lait souscrire un acte sous
seing-privé, par lequel elle déroge à tous les réglemens
de famille qui avaient eu lieu entre ses enfans, et fait
une démission, au profit de tous, de l’universalité de
ses biens et droits. C e u x - c i consislaient en reprises
considérables contre son m ari, liquidées par jugement.
Muni de cet acte, Courby s’empresse d’en recueillir
reflet'; il en passe cession authentique, le 6 novembre
1810, en faveur de Joseph Martinet, son prête-nom
�(2
3)
ordinaire. Il est bon d’observer que sa mère existait
encore à cette époque. Quoique le vice d’un acte sem
blable soit é v i d e n t , il n’en démontre pas moins les
intentions coupables de "celui qui l’a souscrit.
Ce n’est pas tout : il craint d’avoir laissé quelque
chose en prise. Créancier de Philippe C o u r b y , son
f r è r e , d’une somme de 1 8,700 fr., que celui-ci lui avait
déléguée à prendre sur Pierre C o u rb y , leur père com
m u n , il veut encore c h erch era dénaturer sa créance,
et feint de s’en dépouiller par acte notarié du r 1 février
18 11. Pour cette fois, soit qu’il n’osât plus user de la
complaisance de son cédataire en litre, Martinet, soit
que celui-ci lui refusât son entremise, il alla découvrir
un sieur Gervy, charron à Clermont, qu’il constitua
son cédataire, moyennant une somme de 5 ,000 f r . ,
prétendue payée lors de l’acte.
Après de pareils faits, le sieur Courby voudrait-il
se présenter encore comme un jeune homme sans
expérience? Persuadera-t-il qu’il a été la victime d’un
oncle qui n’aurait pris la connaissance des a flair es que
dans le tumulte des camps, où il a figuré avec hon
neur, et à la campagne, qu’il a constamment habitée
depuis? Certes, ce
bien des coups de
Cependant lout
Jouberl. D u in n y ,
ne sont pas là de simples essais, mais
maître.
se réunissait pour accabler le sieur
qui n ’était point p a y é , exerce les
droits et privilèges du sieur d’Estradat, auxquels il avait
été subrogé par la cession du 8 juillet 1808, et pour
suit Joubert comme détenteur de Sarliève; après un
cômmandement du 27 mars 1 8 1 1 , il frappe ce domaine
�d’une saisie immobiliaire. L e procès-verbal est du 2 5
mai suivant.
Toutes ces poursuites sont dénoncées à C o u r b y , qui,
selon son usage, garda le silence. Jouberl était dans
l ’impuissance absolue de satisfaire D u m a y; l’expropria
tion fut consommée, et le 1 3 décembre 18 12 , le bien
de Sarliève passa sur la tête du sieur Rochefort, qui
s’en rendit adjudicataire.
Un ordre est ouvert au tribunal civil de Clermont
pour la distribution du prix, et l’on voit figurer, dam
le procès-verbal, la dame Cou rby, comme créancière
inscrite.
Quel était le résultat des relations d’affaires qui
avaient eu lieu entre Joubert et son n eveu ?
Dépouillé du domaine des Baraques,-chargé de dettes
à raison des emprunts qu’il avait été obligé de faire,
exproprié du bien de Sarliève, Joubert avait néanmoins
des créances considérables à répéter contre Courby. Ces
créances comprenaient, i.° la somme de 8,000 fr., prix
de la vente du jardin; 2 ° celle de 26,000 fr., portée
par la cession de 1808, qu’il avait payée comme cau
tion; 3.° la somme de 74,074 f r . , prix de Sarliève*
4.0 enfin , les intérêts de ces différentes sommes, et les
dommages - intérêts résultant des pertes qu ’il avait
éprouvées par le fait de son débiteur.
Quelles ressources lui offrait le s.r Courby ? aucune,
puisqu’au moyen des actes frauduleux qu’il a passés,
il s’est mis dans un état réel ou apparent d’insolva
bilité.
Rassuré par les mesures dont il s’est entouré , le
sieur
�C'a 5 ;)
siéur Courby se refuse à toute espèce d’arrangemens -,
ou ne les écoute que pour gagner du tems. Des sa
crifices sont offerts : il les rejetle avec obstination, ou
ne donne aucune garantie de ses engagemens.
Que pouvait faire alors le sieur Joubert ? placé dans
l’alternative cruelle!, de livrer à la censure de la justice
les actions d’ un neveu ingrat et coupable, ou de perdre
la fortune de ses enfans, il a dû céder aux devoirs
les'plus sacrésj Aucun esprit de vengeance n ’a pré
sidé au choix de son action; un sentiment si vil est
loin de son cœur ; il aurait volontiers épargné à Courby
la honte d’une condamnation rigoureuse, s’il n’eût
été certain que là contrainte par corps est le seul
moyen qui puisse assurerison paiement.
C ’èst par exploit du 20. décembre 1 8 11 , et après
un procès-verbal de non conciliation , que le sieur
Joubert saisit le tribunal civil dé sa demande, et con
clut à ce que Courby fût déclaré stellionataire, et
condamné par corpsau paiement detoutes sescréances.
Cinq mois de délais furent accordés au s.TCourby, qui
se plaint néanmoins de l’impatience de son adversaire.
Un jugement du 20 mai 1812 a condamné p a r corps
le sieur C o u rb y , déclaré stellionataire, à payer au
sieur Joubert la somme de 51,649 ifr., montant des
créances définitivement liquidées, el celle de 8,000 fr.
pour dommages-inlérôts.
Il est sursis à statuer sur le surplus des sommes
qui reviennent au sieur Joubert, pour raison de la
vente de Sarliève, jusqu’après la confection de l’ordre
ouvert au tribunal de Clerm ont, et la distribution
7
�( *6 )
du prix de ce domaine; en suile duquel les parties
viendront à c o m p te , relativement aux sommes que
le sieur Joubert pourra reprendre comme représentant
ceux des créanciers utilement colloqués , et qu’il a
payés.
)
L ’exécution du jugement est ordonnée nonobstant
appel et sans caution.
L e sieur Joubert est si étranger aux mouvemens
de la vengeance, quoiqu’on l’accuse de s’être laissé
guider par une colère aveugle, qu’il n’a pas mémo
usé de cette faculté.
L'appel du sieur C o m b y a investi la Cour du droit
de prononcer sur le mérite de ce ju ge m e n t, qui sera
mis en entier sous ses y e u x , à la suite du mémoire.
Cette décision porte avec elle sa recommandation
et les preuves de sa sagesse; tous les efforts du sieur
Cou rby n’ont pu l’atteindre. Les principes qui y sont
consacrés demeurent dans toute leur force, et l’ap
plication qui en est faite dans la cause, ne souffre pas
la moindre critique ni la plus légère objection.
Les motifs adoptés par les premiers juges ne lais
sant rien à désirer sous le rapport du droit, l’objet de
ce mémoire a dû naturellement se borner au déve
loppement des faits, étrangement dénaturés par le
sieur Courby-Cognord ; aussi le sieur Joubert se ferat-il un devoir de renfermer sa discussion dans un cadre
resserré.
En adoptant les divisions établies par le sieur C o u r b y ,
on examinera d’abord s’il y a , de.sa part, stellionat.
�C *7 )
^;"£n second lieu, si le jugement renferme des erreurs
sur la quotité des condamnations qu’il prononce.
J. v. . . IIP R ' E
j. s;
M I È R E
‘i
1 Q U E S T I O N .
Y a - t - il stellionat?
\
■
-
*
• •
• •
■ ■
r
Y
a - t - i l stelUonat, à défaut de déclaration des
créances inscrites? n • ' r .
L ’article 2069 du Code Napoléon détermine tout àla-fois la peine du stellionat et1 les principaux carac
tères auxquels on peut le reconnaître. Il est aS’nsi concu:
« L a c o n t ra in t e par corps a lieu, en matière civile,
pour.le stellionat.
- a II y a stellionat,
‘1
>'
« Lorsqu’on vend ou qu’on hypothèque Ün immeuble
dont on sait n’être pas propriétaire;'
1 -
« Lorsqu’on présente comme libres des» biens h y p o
théqués , ou que l’on déclare des hypothèques moindres
que celles dont ces biens sont chargés ».
L e sieur Courby voudrait se soustraire’1 l’application
de cet article, qui cependant offre, avec une exacti
tude frappante, le tableau de sa conduite envers son
oncle.
Il prétend que le premier cas prévu est étranger à
la cause; que les autres ne peuvent s’appliquer à lui,
parce qu’il n’a pas présenté ses biens comme libres, ni
déclaré des hypothèques moindres que les hypothèques
8
�(
28
)
réelles, et que la loi n’admet l’existence du stellionat,
que dans le cas d’une déclaration expresse contraire à
la vérité.
Les erreurs fourmillent dans ce système, en droit
et en fait.
B ie n n’autorise.; en d ro it ,'la distinction subtile et
immorale que l’on veut établir entre la déclaration
expresse du franc et quitte et le silence prémédité sur
les hypothèques existantes. L ’une et l'autre conduisent
au même but ;■ils produisent les mêmes effets , la
tromperie du créancier ; ils doivent donc être soumis
aux mêmes peines.
Cette conséquence incontestable résulte de la na
ture des choses. L ’acquéreur ou le créan cie r, qui
refusant de s’en remettre à la foi de l’individu avec
lequel il traite, exige une h y p oth è qu e , entend bien,
sans doute, recevoir une sûreté réelle et solide , puis
que sans cela, il n’eût pas contracté. L e vendeur ou
débiteur, qui, de son cô té, s’est soumis à la condition
imposée , doit la remplir dans toute son étendue. Si
donc il viole ses engagemeus, dans leur essence même
et dans leurs effets les plus immédiats, en ne livrant
qu’ un gage illusoire, il mérite également l ’animadversion de la justice, soit qu’il ait trompé par une
fausse déclaration, soit qu’il ait trompé par un silence
perfide dont on n ’a pas dû se défier.
A u surplus, l'esprit et les termes de la loi repous
sent formellement la distinction proposée.
L ’objet de la loi est de pourvoir à ce que des tiers ne
soient pas trompés, do prévenir toutes stipulations
�( 29 )
frauduleuses, d’assurer l ’exécution des contrats, et d’ef
frayer , en donnant une nouvelle force à l’obligation,
tous ceux qui pourraient concevoir la pensée de se sous
traire à leurs engagemens. L a sollicitude du législateur
a dû s’étendre sur toutes les espèces de fraude, les com'prendre dans ses dispositions, et les punir avec une
égale sévérité, sous quelque forme qu’elles se présen
tassent ; aussi, dans l’impossibilité de prévoir tous les cas
de dol, et de déterminer les manières infinies qui peu
vent être employées pour t r o m p e r , il nous apprend
lui-même dans la discussion élevée au conseil d’état,
qu’il s’est exprimé d’une manière générale, en aban
donnant à la prudence des tribunaux le soin de re
chercher, de reconnaître et de réprimer ce genre de délit.
Les termes de la loi sont également remarquables.
Elle ne dit pas qu ’il y a stellionat lorsqu’on déclare
libres des biens hypothéqués, mais lorsqu’on présente
comme libres des biens hypothéqués; ce qui est trèsdiflérent. Cette expression, qui fixe le sens d e là dispo
sition, est d’autant plus importante que l’art, 2,069
fournit lui-même la preuve que sa rédaction a été le
résultat des plus profondes méditations, puisque dans le
second membre de la phrase, il est ajouté : « ou lors
qu’on déclare des hypothèques moindres que celles
dont les biens sont chargés ».
Il ne faut donc pas, pour constituer un stellionat,
la déclaration expresse que les biens sont libres; il suffit
de les présenter comme tels. O r , n’est-ce pas présenter
des biens comme libres, que les vendre ou les hypo
théquer purement et simplement, sans déclarer qu’ils
�(
3o )
sont grevés de charges préexistantes? L e silencè, en
ce cas, n’est-il pas équipollent au mensonge? Ne pro
vo que-t-il pas l ’erreur du créancier? Ne trompe-t-il
pas également sa bonne foi? L e fait, dans ce cas, n’estil pas plus fort que la parole? El le législateur, en
employant ces mots , présenter comme libres , n’an
nonce-t-il pas clairement que ses dispositions con
courent avec le but qu’il s’était proposé?
N ’y aurait-il pas d ’ailleurs une absurdité révoltante
à c o n d a m n e r / c o m m e stellionataire, l ’individu q u i ,
en déclarant certaines hypothèques, en aurait passé
d’autres sous silence; et à excepter de l’application
de l’article précité celui q u i , affichant une désobéis
sance plus formelle à la lo i, aurait affecté ses biens
sans en déclarer aucune. Telles'seraient cependant les
conséquences immédiates du système proposé.
S’il était nécessaire d’invoquer des autorités pour
déterminer le véritable sens de la loi nouvelle , on
trouverait ais ément, dans tous les monumens de la
jurisprudence, les principes qu ’elle a consacrés.
L e savant Domat définit ainsi le stellionat, 1. i . er,
lit. 18 j secl. 3 , art. 5 :
« L e stellionat est cette espèce de dol don! use celui
qui c è d e , vend ou engage la même chose qu’il avait
déjà c é d é e , vendue ou engagée, et qui dissim ule cet
engagement ».
Il justifie sa définition par le texte de plusieurs lois
romaines dont les ternies sont précis. La même doc
trine est enseignée par les auteurs les plus recommandables ; et plusieurs arrêts ont déclaré stelliona-
�(
3i
)
iaires des débiteurs qui avaient assigné leurs biens,
en dissim ulant les hypothèques dont ils étaient grevés.
A in s i, le stellionat n’est donc pas essentiellement
attaché à la circonstance d’une fa u sse déclaration.
Il a lieu lorsqu’on assigne des biens en dissim ulant
les charges dont ils sont grevés ;
Lorsqu’on présente ces biens sans déclarer les h y
pothèques.
L a dissim ulation et le silence constituent le délit.
Cependant on insiste : on soutient qu’au moyen
de la publicité des hypothèques, le silence du v e n
deur ou du débiteur n’offre pas les mêmes dangers
qu’autrefois , où souvent il était impossible aux tiers
de reconnaître les hypothèques dont étaient grevés
les biens; et on en déduit la conséquence qu’il faut
puiser dans cette considération des motifs pour res
treindre les cas du stellionat.
Il est facile de pénétrer les vices de ce raisonne
ment. D ’abord le recours aux registres publics n’est
point une obligation pour le créancier ou l’acquéreur,
mais une simple fa c u lté dont il peut user ou se dis
penser a son g r é ; tandis que la bonne foi et la loi
exigent du débiteur ou du vendeur une déclaration
franche et expresse.
11 n’est pas vrai, en second lieu, q u e , dans notre
s37slème hypothécaire, le silence du vendeur ou du
débiteur soit moins dangereux qu’autrefois.
D ’une part, en ordonnant la spécialité des hypo
thèques, le législateur a voulu qu’elle produisît un
effet réel ^ et donnât la certitude d’ un gage assuré j
�(
32 )
ce qui n’arriverait pas, si le débiteur ou le vendeur qui
doit connaître les charges dont ses biens sont frappés,
pouvait les affecter , sans déclarer les hypolhèques
préexistantes.
D e l ’au tre, en dispensant d e l à formalité de l'ins
cription certaines espèces de créances, telles que les
privilèges énoncés en l’article 2 i o r , les hypothèques
légales et autres de cette nature, la loi aurait 1endu
un piège à l’acquéreur ou au'créancier, qui les ignore
nécessairement, si elle n’eût pas imposé l’obligation
de faire connaître ces créances et toutes autres qui
peuvent affecter les biens.
Enfin , la faculté qui est accordée aux créanciers
de requérir, pendant un certain délai, apiès la trans
cription des ventes, l’inscription de leurs hypolhèques
qui viennent néanmoins frapper le bien vendu', four
nirait encore des moyens de fraude, si, par une
mesure sage et expresse, le législateur n’eût constitué
en mauvaise foi le vendeur qui dissimule ses dettes et
les hypothèques dont ses biens sont grevés.
A i n s i , loin que le nouveau sysleme hypothécaire
com por te, sans danger, le silence du débiteur ou du
ve ndeur, et qu’il autorise quelques limitations aux cas
de stellionat, toutes ses dispositions
concourent à
réclamer la plus grande sévérité, soit dans l’appré
ciation des faits qui caractérisent ce délit, soit dans
l’application des peines encourues par celui qui s’en
rend coupable.
En fait, on ne peut se dissimuler que les trois actes
produits
�( 33 )
produits par le sieur Joubert ne renferment tous les
cas prévus par l ’article invoqué.
L e sieur Courby s’est rendu stellionataire envers le
sieur Joubert ;
i.° En vendant, par l’acte du 9 juillet 1809, les
terre el vigne qui sont dites provenir du nommé Chosson,
suivant les acles reçus D o l y , notaire, tandis qu’il n’a
point acquis ces héritages, et qu’il n’en a jamais été
propriétaire ;
2..0 En vendant, par l’acte du 11 avril 1807, les
jardin et pré de l’A b b a ye , absorbés plusieurs fois par
des créances qui ne lui laissaient qu’une propriété
incertaine et précaire, dissimulant , à dessein , les
hypothèques inscrites dont il était g r e v é , pour en
toucher le prix ;
3 .° En présentant comme libres, pour hypothèque
spéciale , savoir ;
Dans l’acte du 11 avril 1807, la terre de la Ronclie,
q u i , comme dépendant du domaine de Bicon , se
trouvait grevée de près de 200,000 fr.
Et dans celui du 8 juillet 1808, le même bien de
Bicon, sur lequel reposaient alors pour plus de 290,000 fr.
de créances inscrites.
4.0 Enfm, en déclarant, dans l’acte du 9 juillet 1809,
des hypothèques moindres que celles dont les biens
étaient grevés, puisqu’il n’avait chargé l’acquéreur que
de supporter nommément des inscriptions conseivatoires désignées, qui frappaient le bien de Sarliève,
objet
v e n d u , tandis qu’à cette
époque il existait
sur le môme bien, vingt-cinq autres inscriptions, ayant
9
�( 34 )
\
pour fondement des jugemens ou des obligations
personnelles au sieur C o u rb y , et qui donnaient un
total de 2 1 5,ooo fr. exigibles.
Ainsi le jugement attaqué se trouve complettement
justifié sous ce premier rapport.
§.
Y
I I.
a-t-il stellionai, faute de déclaration des hypo
théqués légales?
L'affirmative est évidente; elle résulte des art. 2 i 36
et 2194 du Code Napoléon.
L e premier de ces articles impose d’abord aux maris
et tuteurs Yobligaùon de faire sur eux-mêmes une
inscription ; pour assurer l’exéculion de cette mesur e,
dont l'objet est de pourvoir à ce que des tiers ne soient
pas trompés, il ajoute : « Que les maris et tuteurs qui,
ayant manqué de requérir et de faire faire les inscrip
tions ordonnées par le présent article, auraient consenti
ou laissé prendre des privilèges ou des hypothèques
sur leurs im meubles, sans déclarer expressément que
lesdits immeubles étaient affectés à Yhypothéqué légale
des femmes et des mineurs, seront réputés stellionataires, et comme tels, contraignables par corps ».
Il résulte de ces termes, aussi clairs que formels,
plusieurs conséquences :
i.° L a loi prescrit impérieusementVinscription) pour
faire connaître a u x tiers l’existence de l’hypothèque
légale ;
2.0 Elle considère déjà comme une faute Xomission
�(
35 )
du mari 011 du tuteur à faire cette inscriplion, parce
que celte omission est une désobéissance à ses injonc
tions;
3 .° Si l’inscription n ’ayant pas été requise, le mari
ou le luteur consent ou Laisse prendre des privilèges ou
hypothèques sur ses immeubles, sans déclarer les h y
pothèques légales de la femme ou du mineur, il est,
par son silence seul, réputé stellionataire, et puni
comme tel, parce qu ’alors la loi présume que la fraude
se joint à la désobéissance;
4,° E n f i n , la déclaration qu’est tenu de faire le
mari ou le tuteur, doit être expresse, et résulter de
l’acte l u i - m ê m e ,
suppléée.
sans pouvoir être présumée
ni
I/art. 2194 confirme encore ces principes; après
avoir établi le mode de purger les hypothèques légales
des femmes et des mineurs, il porte que les maris,
tuteurs, etc., pourront prendre l’inscription dont il
s’agit dans les deux mois de l’affiche cju’aura fait faire
le tiers-acquéreur, « sans préjudice, y est-il d it , des
poursuites qui pourraient avoir lieu contre les maris
et les tuteurs, ainsi qu 'il a été d it ci-dessus, pour
hypothèques par eu x consenties au profit des tierces
personnes, sans Leur avoir déclaré que les immeubles
étaient déjà grevés d’hypothèques, en raison du ma
riage ou de la tutelle ».
Les dispositions de ces deux articles peuvent être
rigoureuses, mais elles sont irritantes et positives : elles
doivent être respectées.
Dans la première partie de la discussion, le sieur
�Courby bornait ses préienlions à restreindre les termes
de la loi, et à en éluder l’application par une équi
voque spécieuse et subtile; mais devenu plus liardi,
il ne propose à la Cour rien moins que d’usurper la
puissance législative, et d’effacer du Code les deux
articles qui viennent d’être cités.
A Fentendre , l’exécution littérale de ces articles
constituerait stellionataires tous les maris, tous les tu
teurs de l’empire; et cette généralité révoltante doit
provoquer dans la loi une restriction que l’équité ré
clame. Il invoque m ê m e , pour colorer l’absurdité de
sa proposition , un passage d’un auteur à jamais cé
lèbre.
Mais ce raisonnement, spécieux au premier aperçu,
ne supporte pas le plus léger examen.
D ’une part, la loi existe; fût-elle vicieuse, il fau
drait l’exécuter.
Secondement, le grand nombre des coupables, loin
d'être un motif pour modifier la loi, et la restreindre
dans ses effets * prouverait, au contraire, la sagesse
de ses dispositions et la nécessité de maintenir avec
vigueur l ’exécution d’une mesure qui a pour objet
de prévenir la fra u d e , et de pourvoir à ce que des
tiers ne soient pas trompés.
Enfin le législateur n’a pas ignoré les inconvéniens
qui peuvent être attachés à l’exécution de ses décrets;
il a pensé sans doute qu ’ils n ’en balançaient
avantages , puisqu’il ne s’y est pas arrêté. Il
lui - même les motifs qui l’ont déterminé ;'i
de sévérité contre les maris ou tuteurs qui,
pas les
indique
s’armer
au m é -
�pris de ses injonctions, auraient consenti , ou laissé
prendre des privilèges ou hypothèques sur leurs im
meubles, sans faire la déclaration des hypothèques lé
gales. ( V o i r les motifs de la loi.)
E n se pénétrant de ces motifs, on reconnaît à la
fois la sagesse du législateur, l’utilité de la loi, el la
nécessité d’en maintenir l ’exécution.
L e passage c i t é , de D o m a t , est sans application.
L e sens des art. 2 1 36 et 2194 du Code ne conduit
ni à de fa u sses conséquences ni à des décisions injustesj
la loi est claire et positive : elle n’a pas besoin d etre
interprétée, puisqu’elle dit elle-même ce quelle veut.
Contraint de céder à la rigueur des principes, le
sieur Courby voudrait échapper à la condamnation
qui pèse sur sa tête, à la faveur de quelques ihifs par
ticuliers.
Il prétend que l’existence des hypothèques légales
a été connue; et pour l’établir, il invoque la qualité
du sieur Joubert, qui est son oncle et son parrain,
sa présence au contrat de mariage , l’acquisition des
rentes dotales et quelques autres circonstances aussi
peu importantes.
Sans examiner en ce moment la valeur relative do
chacune de ces circonstances, qui, d'ailleurs, ont été
réfutées par les motifs du jugement ,on repoussera, par
un moyen général, les conséquences qu’on veut en
induire, que le s.r Joubert a été instruit des hypothèques
léga les, el qu’une déclaration lui était alors inutile.
L a loi, dans les articles 2 1 36 et 2194 est générale,
expresse, absolue ; elle n admet aucunes circonstances
�U‘>0
( 38 )
particulières qui puissent modifier ses dispositions ; elle
s’est exprimée en termes formels, soit par rapport
aux obligations qu'elle a imposées aux maris et tuteurs,
soil relativement aux effets qu’emporterait contr’eux
l ’infraction à ses règlemens ; elle ne souffre, dans
son exécution, aucune exception, et n’a point atta
ché sa volonté à un fait connu , ou présumé connu
de la partie qui contracte.
A i n s i , fût-il établi, ce qui ne peut ê t r e , que le
sieur Joubert a connu l ’existence des hypothèques
légales; cette connaissance de sa part deviendrait in
différente pour la décision de la cause, puisque la loi
a attribué au défaut de déclaration des hypothèques
légales, le caractère et la peine du stellionat, indé
pendamment et abstraction faite de toutes considéra
tions particulières.
Si l’on examine actuellement les trois actes qui ont
été consentis p a r l e sieur C o u r b y , on y reconnaîtra,
sans beaucoup de recherches, tous les caractères qui
constituent le stellionat-aux termes des art, invoqués.
1°. I.e
ii
avril 18 0 7, il vend au sieur Joubert un
jardin et un pré.
II ne déclare pas les hypothèques légales qui frap
pent les objets vendus.
Il affecte spécialement à l'exécution de la vente,
le champ de la Ronche , sans déclarer l’existence de
ces mêmes hypothèques.
On oppose*que le sieur Joubert a purgé les biens
vendus de ces hypothèques légales, et qu’ainsi il les
connaissait, quoique non déclarées.
�( 39 )
Ce fait n’exclut pas le stellionat : d’une p a r t , il
ne prouve pas que la connaissance de l'hypothèque
légale ait précédé ou accompagné l’acte. D e l’autre,
cette connaissance n’ayant pas été donnée par le v e n
d e u r , ne peut le soustraire à l’application de la loi.
A u surplus, l’hypothèque légale de la dame Courby
frappe encore sur l'immeuble affecté à la garantie de
la vente.
2.0
Dans l’acte du 8 juillet 1808, Courby d o n n e ,
pour sûreté de ses engagemens, le bien de Bicon , et
il garde le silence sur l'hypothèque légale.
On voit enfin, dans le troisième acte, que le sieur
C o u r b y , vendant à Joubert le bien de Sarliève, le
charge de supporter quelques inscriptions conserva
toires , mais il garde le silence le plus absolu sur les
hypothèques légales.
Il en agit de même à l’égard du domaine de Bicon ,
qui a été spécialement affecté à la garantie de la vente.
Il est à remarquer que depuis la vente de Bicon à la
dame C o u r b y , qui remonte au 8 novembre 1809, et
qui parait avoir été homologuée par jugement du sa
mai
1 8 1 2 , Cou rby n’en a pas moins laissé subsister
1 hypothèque légale sur Sarliève 5 qu ’il n’a /ait aucune
diligence pour faire le ve r l’opposition des acquéreurs
de Maison - N e u ve ; et qu’il n ’a pas même lait con
naître la vente ni le jugement d'homologation.
Après des infractions si répétées, des fraudes si ma
nifestes , pourrait-il s'élever le moindre doute sur
l’exislence du stellionat ?
Cependant le sieur C ou rb y, accablé p a rla masse des
�'
(
40
)
preuves qui l’accusent, fait un dernier effort. Il ose
invoquer sa bonne foi ! Il rejette sur une erreur ou
sur l’oubli le défaut de déclaration des hypothèques
légales. Il affirme, pour justifier cette bonne foi, que,
lors des divers actes, il n’a touché aucune somme, et
que le sieur Joubert n’a pas été trompé.
Sa bonne foi ! ! !
Elle est établie
Par sa conduite ;
Par tous les actes qu ’il a passés ;
Par sa réputation ;
Par sa fidélité à remplir ses engagetnens ;
Par la vérité des faits qu’il atteste pour la justifier.
Il n’a louché aucune somme.
Le
3 octobre 1806 n’a-t il pas reçu 8,000 fr. pour
le prix du pré et du jardin ?
Les 26,000 liv., qui ont fait le prix de la cession
du 8 juillet 1808, n’ont-elle pas été versées, à sa dé
charge , dans les mains du sieur d’ Estradat.
N ’a-t-il pas reçu réellement, lors de l’acte du 9
juillet 1809 ;
1,800 fr. pour pot de vin ;
3,3oo fr. en un effet de com m e r ce ;
1 0,000
fr. portés par l’obligation reçue T o u r r a u d ,
dont il s’est libéré vis-à-vis de Joubert ;
25 , 5 q o f r . , pour la valeur du bail de Bicon, dont
Joubert se départit à son profit, et qu’il a touchés
depuis ?
N ’a-i-il pas aussi profilé de l’effet des délégations
qu ’il a faites par le même acte au profil de plusieurs
de
�(
4i )
de ses créanciers, et qui ont été payés par Jouberl?
L e montant de ces délégations donne un total de
35,442 fr.
Et il n’a rien touché!
l i e sieur Joubert n’a pas été trompé.
Serait-ce Courby qui aurait été trompé par Joubert?
Il ne réclame rien contre son oncle; et lui même
se reconnaît débiteur de sommes considérables.
Quelle garanlie offre-l-il à son créancier?
11 est donc prouvé que le sieur Courby n’a pas rempli
les obligations qui lui étaient imposées par la loi;
Q u ’il n’a pas déclaré les hypothèques légales;
Q u ’il a trompé Joubert avec lequel il contractait;
Q u ’il n’a point commis un stellionat imaginaire.
lie jugement doit donc être maintenu dans la dispo
sition qui déclare le sieur Cou rby slellionataire.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert ?
Cette partie de la cause n ’a qu ’un mot.
On critique' la liquidation des premiers juges, re
lativement aux objets acquis le 11 avril 1807, et on
vent la réduire à la somme de 6,913 fr. 60 c. , prix
de la vente consentie par le s.r Joubert à Gaudissier.
Cette observation pourrait paraître fo n d é e , si la
Cour ne pensait pas que Joubert , qui a acquis le
jardin moyennant 8,000 francs, et qui en est pri vé,
par le fait du vendeur, doit répéter tout ce q u ’il a
payé.
�(40
L a fixalion de la somme de 18,074 francs, que
les premiers juges ont allouée à Jo ubert, pour la dif
férence fixée entre le prix de la vente de 1809 et
celui de l’adjudication, est également contestée.
Il
paraît juste de rectifier Terreur qui s’esl glissée
dans le jugement, en confondant la valeur d e l à ré
colle pendante et du prix des baux de l’année courante,
évalués 4,074 f r . , avec le prix des immeubles.
Mais le sieur Joubert fera de son côté quelques
réclamai ions.
L e sieur Courby lui doit compte,
i.° Des sommes qu’il a touchées sur les baux à
ferme qui faisaient partie de la vente, et dont il a
fourni quit lance aux fermiers.
z.° D e la valeur des vigne et terre provenues du
'nomm é Chosson, et comprises dans la ve n te , dont
il n’a jamais été mis en possession, ainsi que des jouis
sances depuis la vente.
3.° L e jugement n’a pas adjugé au sieur Joubert
les frais et loyaux coûts de l ’acte du 9 juillet 1809.
Néanmoins ayant été exproprié par le fait de Courby,
vendeur, il a droit à cette répétition qui excède la
somme de 4>000 f rancs*
On soutient qu’il y a erreur de droit dans la dé
cision dont est appel,’ en ce qu’elle a accordé au s.r
Joubert la différence du prix des deux ventes. Pour
jusiifier celte e rr eur, on allègue que Joubert n’a pas
été évincé comme acquéreur, mais seulement comme
débiteur solidaire, ou comme caution solidaire, faute
de paiement ; et que conséquemment il ne peut exiger
�b o /
( 43 )
que le remboursement de ce qu’il a payé pour le
sieur Courby , débiteur direct , et les intérêts
de
celle somme.
L ’erreur est dans l’objection.
Joubert a été évincé, comme acquéreur ou tiersdétenteur, et non comme débiteur solidaire.
L e sieur D u m a y n’a fait exproprier Sailiève, que
comme subrogé de fait et de droit, au privilège du
sieur d’Estradat, premier vendeur qu ’il avait payé.
Comme créancier de J o u b e r t , en vertu de la cession
de 1808, D umay n’avait aucune hypothèque sur Sarliève, puisqu’alors Joubert n’en était pas propriétaire,
et qu ’il n’avait assuré d ’hypothèque que sur son do
maine des Brassets.
L ’éviction a donc eu lieu du ch ef de C o u rb y, v e n
deur, et sur Joubert, en qualité d'acquéreur. Courby
ne peut donc refuser une garantie complet le.
L e jugement a bien décidé en se conformant sur
ce point aux articles 2,178 et i , 63 o du Code N a
poléon.
On a
1 air de critiquer l’évaluation des dommages-
intérets; Joubert a seul le droit de s’en plaindre, si
1 on considère les pertes considérables qu ’il a essuyées
par le fait de C o u r b y , et l’état de délabrement de
ses affaires.
Les premiers juges ont pu condamner par corps au
paiement de ces dommages-intérêls ; et jamais, peutêtre, il n’a été fait un meilleur usage du pouvoir dis
crétionnaire accordé aux tribunaux, par l’article 126
du Code de procédure.
12
,
�( 44 )
En dernière analyse, des fraudes multipliées, des ma
nœuvres obliques, des actes odieux accusent le sieur
Courby.
Par des
stellionats
géminés , il
est
parvenu
à dépouiller le sieur Joubert d’ une grande partie de
sa fortune.
Il
se trouve dans tous les cas prévus par la loi, et
ne peut échapper à une condamnation qu’il a jus
tement méritée.
C ’est avec un sentiment pénible que le sieur Joubert
s’est vu fo r c é , par les imputations qui lui ont été faites,
îi prendre la plume pour éclairer la Cour et le public
sur la nature et les suites de ses relations avec le sieur
Courby.
S i, par la force des choses, il a été conduit à ma
nifester des vérités fâcheuses, que le sieur Courby
n ’impute qu’à lui-même la honte qu’il en éprouve!
C ’est dans les actes qu’il a passés, que l’on découvre
ses sentimens et sa conduite. Pourquoi a-t-il pro
voqué son oncle par une récidive insultante? Pour
quoi l’a-t-il placé dans la dure nécessité d’une dé
fense légitime?
L e sieur Joubert le répète : il ne réclame que jus
tice. Aucun sentiment de haine ni de vengeance ne
le domine. S’il insiste sur une condamnation par corps,
c’est parce que, dans l’état réel ou apparent d’insol
vabilité où le sieur Courby« s’est placé, par des ma
nœuvres obliques, il n’a pas d’ autre voie pour assurer
le paiement, de ses créances. '
■" '
Pour ne laisser aucun doute sur ses véritables in-
�.
. . .
(.45.) .
..
. .
t e n t i o n s le sieur. Jouberl r é i t è r e , e n présence de la
^ Cour les offres qu’il,a faites cent fois, avant et depuis'
.
l'instance. Que le sieur- C ourby se montre avec fran_
c h i s e et b onne loi;q u ' i l assure , par des moyens convenables, le paiement des sommes dont il est débiteur;
e t l e s i eur J oubert, renonçant aux droits qu’il tient
“
1
de la loi s’empressera de lui accorder tous les délais,
facilités et tempéramens raisonnables qu’il pourra
„désire r Que le.sieur C u
o r b y soit sincère dans ses offres;
.qu'il soit fidèle à ses nouveaux engagement. L e tems
.
qui calme tout, effacera quelques torts. L ’indulgence
p e r d o n n e r a l e reste et peut-être un jour retrouvera-t-il
a v e c satisfaction dans le coeur de son oncle, l’amitié
et la bienveillance qu’il e n avait aliénéés.
•Signé J O U B E R T .
‘
- M E G O D E M E L , avocat.
M e V E R N IE R E
A v o u é lic e n c ié ,
A- ^ov
‘
w-iîtusiv»
^^
^Af{.
'
^
Il
'“**- «(î— ~wjtr
fV)o> /
-- lV^^*
^*^É. ^kÜo va
[ T 3' ^
f. j
**'
lu .■
* I IIPLI.. IBMHIUH 'JHU I —
*.«- t_tLïnju Ç
•**-- «"-^«¿3—
^«|L l'olj*- -*JSLSrJ«£r
.* » _
£hr*-fcC.-«3t ^
,
ya
* * j~ ^ u- 1%otf ^
■
'i..
“
J.-C . S A L L E S lm p. de la Cour impériale et du Barreau.
üiou«
�^ u ----ü . f
*<U» * (^UAi
Cüv^aaoas^i—'^ / ÜVl <|j<m O,
/ lU
"h u
ii".
\ » c ^ tr
^mT^Owm^o
|^ U b
^ o u \ i^ |
S& H tJ f
à J * iv X u J r
U & Uj
•*t,î~~AjL jfc ' --- «_
«>-—«f*’»'
«a ^ o*a—VI iO^àc yM^v ^Am^jvotA«yv# ^U
i M > t M « A ( J <u < o-«-i*4—
/î a
«^v n c ^ k j ^ r t u ^
*“ — --i- >( '^p^f^i~Y- tr>
/
^ I*A T
c e » < n M « J « »a *^
7***"
to
^
**JaU
m
«m X
"'fcf*
^o
a
*
«XÄ»ij'vl- cütr"^
f
*
•
/ íín s f e r - t i s o i r > ' f c « i l \ 4 i
i
fcAwO
^ k J iA i ü U
o Am
ti—
C^juôvo Ò. /’m^Jm-«- ^-'il •*’<—
p - *
-' 4\jU
AAMf\(>^mJT^
/ u ^ iJ t ,
t f - ^ « M « U — J^1*0
.
i-.lf. -J-- ^UUI /«. Ji»«*-Jr>i "V U.1 •Jv^tu- ' M—
^
°
(/ r ; j
^<«vohiz3l¿¿x«-> «*- /îy««A» O«*»*—¿i *fcjr |\mm,
°*-
'V UA «V^*c,/
"^lA < A jJr * 1 " ~«-J
__ =* *
-ü**%j f
t~x«~u (.vuaK» •■ '>><l' J ÍV,«/ "ÎVUJ
i~**ir^cvv*^ ^«-»- <^d^'~^a'-*~ijc* 6«—^
(jpjin^t t «a—
4v\
<)'«''• M---íhJmÚc»«h
" * Âo?flj
(M j 1
cuîio vv^VÎ^uw
ôÆ.
*/^
ó
^í «
___ _y—'
r>>'*_ AoX»
^ W > m u u I C»>*-A«.
l*4l'*f
(
/ 'w u i r
MM
t> y ^ .
---
. ^Ulv<w.i4 f***t t*~.
r^t W
.
—1^
^v>w •/iv -'^*~Ôr‘«~Zjfô ^JUi. '(«Y'A ’ ^""*
f t Ia ¿
d tjtU Z
f —" ^
^
^ *-1
U*
^fë#,!.***'- **-*• e^cuww /*. CAiviftri^Dnr'
^ u *
"'«•
^Atouil Éi».
V. j < A W , /*/>, f
/xoj.
ÿ t u ir
1
ftM * f
®« t *
( ¿ ¡ “^
( ^t>*<
et—U«j^-J "Jt 'itJalfJw
^
^
A f
<£&s-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Joubert, Jean-Joseph. 1813?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Vernière
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
enfant prodigue
lettres de change
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé ; contre le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant.
note manuscrite : texte de l'arrêt du 5 mars 1813.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2220
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53448/BCU_Factums_G2219.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
enfant prodigue
fraudes
hypothèques
lettres de change
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53447/BCU_Factums_G2218.pdf
4a8a66f0916fa09e48d15ae8c866ee1f
PDF Text
Text
COUR
M
E
M
O
I
R
E
IMPERIALE
DE RIOM.
POUR
1er. CHAMBRE«;
Le sieur J e a n -J o s e p h COURBY-COGNORD,
appelant;
C ON T R E
Le sieur
J e a n -J o sep h
JO U B E R T intimé.
L E sieur Courby est obligé dé défendre son honneur
et sa liberté, contre un oncle, contre un parrain.
En considérant ces d eu x titre s , il devoit s’attendre à
tro u v e r un p ro tecteu r, d ans le sieur J o u b ert :
- I l n’a rencontré qu’un ennemi. ,
L e sieur Joubert prétend q u ’on lui a laissé ignorer,
dans divers contrats, des hypothèques conventionnelles
ou judiciaires, et des hypothèques légales.
L a réponse du sieur Courby est simple.
i
i
�r
- v
( O
Parmi ces hypothèques, les unes étoient inscrites, et
le sieur Courby, dans les contrats qu’il a consentis, n’a
pas déclaré que ses Liens étoient libres;
Les autres étoient connues du sieur Joubert.
Cela est prouvé par plusieurs actes : signataire du
contrat de mariage de son neveu ; acquéreur des con
trats de rente qui formoient une partie de la dot mo
bilière de la dame C ourby; averti de la vente des im
meubles dotaux de sa nièce par alliance, le sieur Joubert
n’ignoroit pas les hypothèques légales de celle-ci. L u ii même a indiqué les moyens de les faire disparoître, et
en a dirigé l’exécution.
f Cependant il crie au 'dol ; il accuse son neveu de l’a«v o ir ir o m p é ; il le poursuit Rêvant les tribunaux comme
stellipnataire; il demande que la liberté lui soit ravie.
Pour repousser unqragrçssiojpt.injuste, le sieur Courby
est dans la triste nécessité d’indiquer la source de ses
malheurs, et de parjeç des dangereux secours.qu’il reçut
du sieur Joubert.
Les faits démontreront combien l ’accusation fut irré
fléchie.
La discussion fera voir dans quelle erreur sont tombés
les premiers juges.
t
i
L e s i e u r : C o u rb y, né de parens dont la fortune paroissoit considérable, avoit contracté' un mariage avan
tageux,
•
Son contrat de mariage avec la demoiselle Cognord
est du 18 brumaire an 7 ( 8 novembre 1798 ).
On y voit .que la future épouse upportoit une riche
�( 3 )'
dot en Biens m eubles,et immeubles; elle ÿ y constitua le
domaine de la Maison-Nieuve, sitilé dans la'commune de
Celles, des meubles meubjans, de l’argent et des contrais
de rente : ces divers objets sont détaillés dans l’acte.
L e sieur Joubert,' oncle du futur,, et qui avoit été
un des négociateurs du m ariage, assista ^u Contrat et le
signa; et dès cet instant au moins il connut en quoi
consistoient les biens que la dame. Courby remettait à
son époux*
. i f
L e sieur Gourby reçut lui-même de son père 30,000 f»
en avancement d’hoirie^
, .
, •
Une carrière commencée sous de si brillans auspices
sembloit promettre un avenir heureux.
Les circonstances en ont décidé autrement.
o ^
L e sieur Gourby père se jeta dans dçs; affaires rui
neuses , et bientôt ses dettes s’àcçruiènt dans une pro
gression effrayante.
<
Il eut recours à son fils.
Celui-ci n’hésita pas à remplir un d evoir; il aida-son
p ère, et dejion argent, et de son crédit.
C essecours retardèrent la ruine absolue du p ère,
mais ils préparèrent celle du fils.
Dès 1806, le fils avoit payé ou emprunté pour le
père plus de 80,000 francs ; c’est ce que prouvent deux
actes de vente passés entr’eux , l’un le
xnars, l’autre
le 7 août 1806, et destinés à, acquitter lés dettbs d it
père envers le fils.
? Par l’acte du 13 mars, le père vend au fils le bien
de B icon, situé près d’A rtonne, à la charge de payer
en son acquit une rente viagère de 3,600 francs, et-en
�(
4
)
outre, moyennant 70,000 francs’ qu’il reconnaît avoir
reçus en différentes fois avant la vente.
!
»
Il déclare qu’ une partie du prix a été employée à
acquitter des effets sur place, souscrits par lu i, et que
l’autre partie recevra le meme'emploi ; il1s’engage même
à faire exprimer cet emploi dans les quittances.
L a vente n’indique aucune espèce d’hypothèque qui
grevât le bien vendu.
! ?
L ’acte du 7 août contient, i ° . un traité sur une con
testation qui s’élevoit entre ïe: père et le fils, touchant
la première vente; 20. une seconde Vente d’une maison,
d’un jardin et d’un pré.
r; '
L a contestation avoit pour cause la rente viagère de
3,600 francs, qui s’étoit éteinte dans les vingt jours qui
avoient suivi le 13 mars.
’ ' ’
-'L e vendeur >et l’acquéreur ! prétendoiënt chacun de
voir profiter du bénéfice de l’extinction de la rente; ils*
transigèrent moyennant 17,500 francs, que le fils s’o
bligea de payer à des créanciers du père, indiqués dans
l’acte.
.*
}
. ■1
'>
La seconde vente eut pour prix une somme de 23,000 f . ,
sur laquelle le fils se retint 12,000 f r ., qui furent reconnus
avoir été payés par lu i, Ü des créanciers du p è re , outre
les 70,000 f r . , prix de la vente de Bicon.
Les 11,000 francs qui restoient dûs, furent stipulés
payables à des créanciers désignés.
A in si, au mois d’août de l’année 1806, le fils avoit
payé ou s’étoit chargé de payer pour le père différentes
sommes q u i, réunies, formoient-un total de 110 , 5oo fr.
T o u t est acquitté depuis long-teuips.
�(5)
- On conçoit que le sieur Courby n’a pu trouver dans
ses propres ressources le moyen de fournir à une somme
aussi considérable.
Il a dû avoir recours à des emprunts.
; Tous ceux qui savent combien la voie des emprunts
a été désastreuse à cette époque, combien elle l’est en
core aujourd’h u i , doivent prévoir quel sort menaçoit
le sieur Courby fils.
"
Les emprunts étoient faits à un taux excessif.
L e sieur Joubert a été un des prêteurs , et son taux
ne fut pas plus modéré que celui des autres : c’étoit,
diso it-il, celui de la place.
‘ f
Souvent aussi il fut caution ; jamais son cautionne
ment n’a été gratuit (i).
■y
L e 16 n o vem b re 1806, le sieur C o u rb y so u scriv it, au
profit du sieur J o u b e r t, une lettre de chan ge de 10,000 f.
p ayable à la fin de m ai 1810 .
L ’intérêt étoit confondu avec le principal; et nous
verrons bientôt que le sieur Joubert trouva le secret,
avant l’échéance, d’exiger un supplément d’intérêt.
Quelque temps avant cette époque, le sieur Joubert
s’étoit fait céder par son neveu les rentes dotales de la
dame Cognord , épouse de c e lu i-c i, ces mômes rentes
portées par le contrat de mariage de l’an 7. L es actes
de ratification passés en faveur du sieur Cognoi’d père,
ne laissoient aucun doute sur leu r origine. .
■;
L e sieur Joubert perçoit encore ces rentes.
(x) Le premier cautionnement que le sieur Joubert fournit
à son neveu, fut pour une somme de 10,000 fr. : ce, service
lui fut payé 1,200 fr. •
•###*
�C6 J
En 180 7, il demanda à son neveu , et ârraclia à' sa
foiblesse ou à la nécessit é , une indemnité pour les cautionnemens qu’il lui avoit fournis ou qu’il devoit lui
fournir.
Cette indemnité fut l’abandon du jardin et du pré
que le sieur Gourby avoit achetés de son père, au mois,
d’août précédent.
L ’abandon fi*t fait par acte du 11 avril 1807, sous
la forme d’une ven te, dont le prix fictif fut porté à
8,000 livres ^tournois, que le sieür Gourby reconnut
avoir reçues avant ces présentes, est-il dît.
Il ne reçut r ie n / il n’a jamais rien reçii pour cela.
L ’a’cte contient promesse de garantir, fournir et faire
valoir de tous troublés, évictions, dettes et hypothèques,
clause d’usage; et il se termine par une clause hypo
thécaire ainsi conçue :
« Pour l’entière exécution des présentes, les parties,
« chacune en ce qui les concerne, ont obligé leurs biens
« présens et à venir, et spécialement ledit sieùr Courby
« un téuement de terre de la contenue d’entour cinq
« cent quarante-huit ares, ou douze septerées mesure
ec locale, appelé le champ de la Rousse, faisant partie
c du domaine de Bicon , situé dans la commune d’A r« tonne , arrondissement de R iom , tel qu’il se limite et
« comporte, les parties n’ayant pu en donner les confins. »
Cet acte est un de ceux qui sert de prétexte à Faction
en stellionat, et qui fait dire au sieur Joubert qu’on l’a
trom pé, en ne lui indiquant pas les hypothèques inscrites
et les hypothèques légales qui grevoicnt tant l’objet
vendu que l’objet hypothéqué.
'*
Les hypothèques inscrites : la loi n’en prescrivoit pas
�. < 7 )
la déclaration , et le sieur Joubert pouvoit facilement
les connoître.
Les hypothèques légales : il les "connoissoit si bien
qu’il les fit purger, en déposant une expédition de la
vente au greffe, en notifiant l’acte de dépôt à la dame
Courby et au procureur im périal, en un m ot, en em
ployant les formalités voulues par la loi.
O n rapporte l’exploit de notification.
L e second acte qu’invoque le sieur Joubert, est du 8
juillet 1808.
, Les circonstances qui ont précédé ou accompagné cet
acte sont utiles à connoître.
L e sieur Courby étoit débiteur envers le sieur Destradat du reste du prix de l’acquisition d’un bien situé
à Sarliève, acquisition qu’il avoit faite dans un temps
prospère, en messidor an 10 et en nivôse an 11.
L e sieuç Courby étoit,, d’un autre côté, créancier
d’une somme de 26,000 livres tournois, reste du prix
de diverses-ventes des .biens de son épouse, /qu’il avoit
Aliénés à cause de leur éloigrçement.
Pour payer le sieur. D estradat, le sieur Courby se
procura de l’argent chez le sieur D um ay, banquier à
Clerm ont, qui paya au sieur Destradat ce que celui-ci
cxigeoit (1 ), et à qui le sieur Courby çéda, pour s’ac
quitter, les a6,ocoo francs qui lui é t o i e n t dûs p a r les
acquéreurs des. biens de sa femme.
(1) Ce que reçut en cet instant le sieur Destraclat, n’étoit
pas-la totalité de sa créance ; mais le reste lui fut payé le i3
du même mois , par le sieur Courby» Celui-ri rapporte la quit
tance finale et authentique.
-------- — •-----
�( 8)
La cession fut faite devant un notaire de Clerm ont,
par le sieur Gourby et par le sieur Joubert, conjointe
ment et solidairement.
‘ L ’acte énonce que les biens vendus composent le do
mairie de M aison-N euve, sis commune de Celles; c’est‘à-dire, ce domaine que la dame Courby s’étoit constitué
sous la même désignation dans son contrat de mariage,
auquel avoit assisté le sieur Joubert.
c 'L e sieur Destradat subroge le sieur Dumay à son pri
vilège de vendeur, et l’autorise à subroger lui-même à
ce privilège les tiers indiqués de qui il recevra les 26,000 f.
E u fin , les deux cédans donnent pour hypothèque,
savoir : le sieur Joubert, son bien de Vinzelles, et le
‘sieur C ourby, son bien de Eicon.
L ’un* et l’autre gardèrént le silence sur les hypothè
ques légales qui grevoient ces deux biens.
Ce silence est aujourd’hui un sujet de reproche de la
part du sieur J o u b ert, qui ne veut pas s’apercevoir que
s’il y eût alors un oubli plutôt qu’une faute, il y participa
en ne déclarant pas lu i- même les hypothèques légales
gue sa propre épouse avoit sur son bien de Vinzelles.
A u reste,-le sieur Joubert, qui se plaint seul de ce
silence , ne fut pas trompé par cet oubli commun; car
il sa v o it, comme nous l’avons déjà remarqué, que la dame
Courby avoit des hypothèques légales; l’acte de cession
même lui en renouveloit le souvenir, en lui indiquant
quels étoient les objets vendus.
- On doit reconnoître que le Sr. Joubert n’avoit paru à cet
dcte’ que pour prêter au Sr. Courby son cautionnement.
'Mais il ne s’y étoit décidé qu’à des conditions fort
onéreuses au sieur Liouruy.~
�(9
)
Ì
Quatre jours auparavant, et devant un notaire de
L e z o u x , il avoit exigé que son neveu lui abandonnât
cinq années du prix de la ferme du bien de B ico n ,
prix de ferme qui étoit annuellement de 6 ,z 5o fr.
L e transport énonce pour prix une somme de 27,000 f.
payée comptant.
#
*
Dans la réalité, le sieur Joubert ne paya que i 5,ooo f.
en effets de commerce (1), et souscrivit des cautionnemens
sur cinq autres effets s’élevant à 10,000 francs, à un an
d’échéance, et datés des 12 et i 5 juillet 1808. ”
L e sieur Joubert a dans la suite exigé qu’on lui fit
compte de ces effets, ainsi qu’on le remarquera bientôt.
Les spéculations du sieur Joubert sur les embarras qu’éprouvoit le sieur Courby, se remarquent encore dans une
opération peu importante, sans doute, mais très-caracté
ristique , qu’il se permit en avril 1809., .
Son neveu lui avoit souscrit, le 16 novembre 1806,
un effet de 10,000 francs, payable à la fin de mai 1810;
L e sieur Joubert fait protester cet effet faute d’accep
tation, le 10 avril 1809.
I l donne sa procuration pour poursuivre par toutes
les voies de droit ; et le n eveu , pour éviter les pour
suites, est obligé de consentir une obligation payable à
la même époque, mais augmentée d ’un supplément d’in
térêt porté par un billet particulier.
______
On l’apporte le protêt et la procuration ; ils furent
(1) Un de ces effets étoit dû par le sieur M ailli, propriétaire
à Ris. Son échéance étoit au mois de décembre suivant. Le
tieur Courby le négocia chez le sieur D u m ay, banquier.
%
27
�( 10 )
remis au sieur C o u rb y , lorsqu’il fit l’obligation qui est
elle-m ôm e rappelée dans une contre-lettre dont il va
être parlé.
.
..
,
r
Le. dernier acte sur lequel se fonde le sieur Joubert,
dans son action en stellionat, est du 9 juillet 1809.
Par cet acte, le sieur Courby vendit a.u sieur Joubert,
i ° . le corps de bien situé à Sarlièv.e , tel qu’il l’avoit
acquis du sieur D estradat, à l’exception des parties qu’il
avoit précédemment vendues au sieur Dumay.
20. D ifférens héritages provenant d’autres acquisitions
particulières, qu’il avoit réunis au bien principal.
Les récoltes pendantes et le prix de ferme de l’année
courant e , furent compris dans l’aliénation.
_ -La vente fut faite moyennant 74,074 f.; savoir, 4,074 f.
pour les récoltes et le prix de ferm e, et le surplus pour
les immeubles»
, L ’acquéreur est chargé de supporter diverses inscrip
tions conservatoires, -prises sur les biens ci-dessus vendus,
est-il d it, par les nommés Cornet d’A u z o l, le sieur de
L a ch en a l , et autres , a y a n t p o u r o b j e t l a g a r a n
tie
DES VENTES CONSENTIES PAR LE SIEÜR C O U R B Y ,
DES BIENS DE L A DAME C OGNORD, SON EPOUSE.
. On énonce aussi quelques autres-inscriptions conser
vatoires que l’acquéreur doit souffrir*
On ne dit pas d’ailleurs que le bien vendu n’étoit
grevé d’aucune autre hypothèque.
IL en existoit réellement 'd’auFrës alors. L e sieur Jou-»
bert les connut; l’état lui en fut même remis par le
sieur Courby; et le sieur Joubert eut la précaution de
les vérifier au bureau de Clermon t, ce qui étoit facile :
�on étoit sur lès l i e u x c h e z le sieur Boutai, notaire à
Clermont.
A la fin de l’acte se trouve cette clause : « Le vendeur
« ............. a hypothéqué spécialement, pour la garantie
« de la présente ven te, son bien et domaine appelé
« Bicon , situé à . , ............lequel bien est déjà grevé de
« différentes hypothèques , dont l ’acquéreur déclare
avoir connoissance. »
T e l est l’acte que l’on présente encore comme ren-*
fermant un stellionat.
- •
La vente portoit quittance, quoique-le prix: ïi’dn eût
pas été payé. L ’emploi de ce prix fut fixé le même'jour
par une contre-lettre, (i)
(1) Voici cette contre:lettre : '
Nous soussignés, Jean-Joseph Joubert , propriétaire, ha
bitant au lieu du Brasset, commune de Vinzelles, et Joseph
Courby-Cognord, propriétaire , habitant de la commune de
Clerm ont, reconnoissons que la vente consentie cejourd’h u l,
par moi Courby, à moi Joubert, devant Boutai........ notaire,
du bien de Sarliève et dépendances, moyennant la somme de
soixante-quinze mille francs, dont l’acte porte quittance, a été
faite à la charge par moi Joubert, de payer en l’acquit de moi
Courby, i°. la somme de dix mille livres, montant de cinq lettres
de change souscrites par moi Courby, au p r o f i t de:moi Joubert,
et négociées par moi C ourby, au profit de différens individus,
par l’entremise de Grangeon fils , lesdites lettres de change
échéant le i 5 juillet présentmois; a°. la somme de a^Syliv. 12 s.,
due au sieur Souanen , en vertu de jugement rendu au tribunal
de commerce de Tliiers, 1q 18 avril dernier, et tant pour prin
cipal qu’intéréts et frais ;
'
3°. La somme de 2,325 francs, montant'd’une lettre de change
�(
1 2
)
> D e la lecture de cette contre-lettre naissent plusieurs
remarques.
i° . On s’aperçoit que les hypothèques inscrites sur
le bien de Sarliève étoient certainement connues du
sieur Joubert ; car celui-ci a la précaution de stipuler
qu’il conservera les titres des créances qu’il est chargé
de 2,000 francs, due au sieur Duffour, par moi Courby, sous le
cautionnement de moi Joubert;
4 °. io ,564 francs dûs par moi Courby, à la dame Forget-Lagrave, tant pour principal qu’intéréts et frais faits jusqu’à ce
jour;
5°. La somme de 10,216 francs , due par moi Courby, au sieur
Claude A lbert, de Riom , aussi pour principal, intérêts et frais,
jusqu’à ce jour; desquelles sommes, moi Joubert, promets et
m’engage à faire tenir quitte ledit Courby, et le garantir et indem
niser de toutes demandes ;
6°. A la charge aussi par moi Joubert, de tenir quitte ledit
Courby de la somme de 10,483 francs, montant du principal
d’une obligation de 10,000 francs, reçue Etournau, notaire,
consentie à mon profit par ledit Courby, échéant au mois de
mai de l’année prochaine, et le surplus pour frais ou différentes
autres avances faites par moi audit Courby;
70. Enfin, à la charge par moi Joubert, de me départir,
comme je me départs par ces présentes, en faveur dudit Courby,
de la cession qu’il m’a consentie devant Belligant, notaire à
L ezou x, le 9 juillet 1808, de la somme de 3 i , 25o francs, à pren
dre sur le fermage du bien de Bicon; laquelle cession, au moyen
des présentes , demeurera dès ce jour comme non avenue, ainsi
que la notification d’icelle faite à ma requête, au sieur Jouandon ,
fermier, autorisant ledit Courby à percevoir le prix dudit bail
à ferme, tout ainsi et de même qu’il avisera ; à l’effet de quoi je
lui en passerai à toute réquisition, acte de département, par-
�( i3 )
de payer, jusqu’à Veritière mainlevée de toutes les insc riptions sur le bien vendu.
2°. On y voit énoncé à l’art. 6 l’obligation de io,ooo f.
qui étoit le remplacement de la lettre de change du i 5
novembre 1806, et pour laquelle on retient 10,483 f . ,
devant notaire , ou lui fournirai procuration pour la percevoir et
toucher le prix chaque année sous mon nom , si bon lui semble,
le tout à ses frais.
Les titres desquelles créances, à l’exception néanmoins de
l’obligation consentie à mon profit, et l’acte de cession du prix
de la ferme de Bicon, resteront en mes mains jusqu'à l ’entière
mainlevée de toutes les inscriptions sur le bien vendu, à la
charge de rapporter les quittances desdits créanciers, dans les
deux années à compter.de ce jour.
En outre des sommes ci-dessus déléguées audit sieur Joubert,
ou quittancées par lu i, moi Courby reconnois aussi avoir reçu
du sieur Joubert, un billet de la somme de 3 , 3oo francs, payable
dans dix-huit mois, à compter de ce jour, sans intérêts, au sieur
Duffour-Riberolle, en acquit de moi Courby, et en diminution
de la créance à lui due en vertu des titres du 22 frimaire.an 1 4 ,
inscrite au bureau de Riom, le 3o frimaire an 14; le surplus de
laquelle créance restera à la charge de moi Courby.
J’ai aussi reçu, en addition du prix principal de ladite ven te,
la somme de 1,800 francs pour épingles, dont quitte.
Les présentes faites ëntrë'no'us, par forme de règlement définitif, et sans'qu’elles puissent donner lieu à aucuns nouveaux
comptes, reprises de part ni d’autre.
Car ainsi fait double entre nous et sous nos signatures, le g
juillet 180g.
Bon pour ce que dessus. Signé Joubert-Darrot.
Bon pour ce. que dessus. Signé Courby-Cognord.
!
p i
10 000
^
/ o Ç 6X
$%\ 6
^
Ç&*
^
°
/
0J lÇ
�( r4 )
é n 'y comprenant "de prétendus frais "ou avances; les
483 francs se composent des .frais du notaire* e t 'd ’un
supplément d’intérêt.
3°. On y retrouve à l’art. I er. les 10,000 francs de
lettres de change cautionnées par le sieur Joubert en
juillet 1808, payables en juillet 1809, et dont le cau
tionnement avoit été en partie le prix du transport des
termes à écheoir de la ferme de Bicon.
4°. Il y est parlé à l’art. 9 de ce transport ; ie siéur
Joubert s’en départ.
L e sieur Courby doit à la vérité de déclarer que le
sieur Joubert réduisit pour cet objet sa créance appa
rente à la somme de 2.5, 5oo francs ou environ.
Il lui restoit encore un bénéfice énorme.
Cette vente du bien de S arliève, et l’emploi du prix
indiqué dans la contre-lettre, payoit tout ce qui étoit
clû au sieur Joubert, et délivroit lè sieur Courby du
plus dangereux de ses créanciers.
Les autres créances inscrites sur le bien Sarliève, ou
étaient déjà acquittées, ou étoient sur le^point de l’être.
Aujourd’liüi les dettes personnelles au sieur Courby
fils , et pour lesquelles des inscriptions avoient été prises
sur ses difï’érens biens, sont pour la plupart acquittées;
il a en son pouvoir les titres des créanciers.
* A insi , au mois de-juillet 1809,
au moyen de la
cession qu’il avoit faite en 1808 au sieur Dumay-j -sur
les acquéreurs des biens de son épouse, le sieur Courby
dcvoit se croire sur le point d’être libéré de la plus
grande partie de ses dettes hypothécaires. Il d e v o it, il
�( i 5 )
est v r a i, des sommes considérables à la dame Cognord ,
son épouse; mais il lui restoit pour le payement de
celle-ci le bien de Bicon.
L e sieur Joubert n’ignoroit pas la situation des af
faires du sieur C ourby; il connoissoit toute l’étendue
des créances de l’épouse ; aussi, à l’instant môme où il
acquéroit le bien de Sarliève, il demanda et il fut con*
venu devant le sieur Boutai, notaire, et devant M e. Si«monnet et M e. Bayle, avoués des parties, que le sieur
Courby céderoit à son épouse le bien de Bicon , pour
s’acquitter de tout ce qu’il lui devoit, et pour faire par
là disparoître les hypothèques légales.
Cette convention arrêtée ne put cependant pas rece
voir son exécution sur-le-cham p, parce que le sieur
Courby n’avoit pas les fonds nécessaires à l’enregistrement
d’un acte très-coûteux» :
, ,
, Pour se les procurer, il prit bientôt après, avec le
sieur Joubert, des arrangemens au moyen desquels Fa?
voué qu’avoit à Riom le sieur Jou bert, souscrivit pour
celu i-ci, le 5 novembre 1809, un bon de 2,720 francs,
à valoir, est-il dit, sur le montant de Tenregistrement
de la vente de B ic o n , à consentir par le sieur Courby,
à la dame Cognord, son épouse.
L e sieur C ou rb y, à qui le mandat fut remis, le porta
au sieur Boutai, notaire, qui fît l’acte de vente ou d’é
change, le 8 novem bre, qui le soumit à l’enregisfrement
le 18 , et qui reçut le 23 novembre 2 5 i 6 iivres 13 sous
à compte.
. . . .
L ’avoué, signataire du mandat, refusa-de .payer le sur
p lu s, comme étant un objet d’erreur entra le sieur
,
�J o u b e r t, pour lequel il Vavait f a i t , et le sieur Courby.
On rapporte le m andat, et la quittance à compte et
m o tivée, signée B outai, et écrite derrière le billet (i).
- Gomment, d’après un pareil acte de vente, auquel le
sieur Joubert a si évidemment participé, et qu’il a même
e x ig é , concevoir qu’il ait pu faire plaider , quelques
années après , qu’on lui avoit caché les hypothèques
légales de la dame Courby ?
Mais cet acte avoit besoin de l’homologation de la jus
tice; il n’a été homologué que le 22 mai 1812; e t, avant
ce jo u r, de nouveaux malheurs sont venus frapper le
sieur Courby.
(1) Ce mandat esc écrit de la main de Me. Simonnet. La
quittance, et l’observation qui la su it, sont écrites de la main
de Me. Boutai.
V oici la copie de l’un et l’autre : •
•
«
cc
«
«
te
«
te
cc
« Bon pour la somme de deux mille x vingt livres que je
payerai en l’étude et à Me. Boutai, notaire à Glermont, à
sa réquisition, et à valoir sur le montant de l’enregistrement
de la vente de Bicon, à consentir par M. Courby à la dame
Cognord , son épouse.
« Riom , le cinq novembre mil huit cent neuf, x sept cent.
« J’ai dit deux mille sept cent vingt liv. Signé Simonnet. »
I
cc Reçu de M. Simonnet deux mille cinq cent seize livres
treize sous, à compte du billet d’autre part.
« Ce 23 novembre 1809. Signé Boutai.
cc M. Simonnet n’ayant pas voulu acquitter le surplus du
mandat, comme étant un objet d’erreur entre le sieur Joubert
pour lequel il l’avoit fa it, et le sieur Courby qui m’a remis
ce mandat pour l’enregistrement de sa vente.
* te Cette erjreur provient d’une négociation d’effet. »
D ’un
�( 17 )
D ’un côté, les Acquéreurs des biens de la dame Courby
résistèreut au commandement de payer que leur fit faire
le sieur D um ay, cédataire du p rix; ils formèrent opposition à. ce commandement, sur le motif qu’ils étoient
en danger d’éviction, parce que les biens vendus étoient
dotaux; et ils furent autorisés, par un jugement, à sus
pendre leurs payemens.
Leur opposition avoit été dénoncée au sieur Joubert,
le i i août 1808 ; le jugement'lui fut notifié à la requête
du sieur D u m ay, le 11 juin 1809, avant même qu’il
achetât le bien de Sarliève.
D epuis, le sieur Dumay l’a poursuivi, comme cau
tion solidaire, en restitution du prix de la cession du
18 juillet 1808, et il l’a fait exproprier de ce même bien
de Sarliève, q u i, par adjudication définitive, du 13 dé
cembre 1 8 1 1 , a été vendu 56 ,100 francs.
11 est bon de remarquer que dans les immeubles saisis
et vendus, ne sont compris que ceux qui provenoient
du sieur Destradat, et non ceux que le sieur C ou rbyy
par des acquisitions particulières, avoit réunis au bien
de Sarliève.
L e sieur Joubert est encore en possession de ces héritages particuliers.
D ’un autre côté , les affaires du sieur Courby père
avoient em piré; son épouse fit jDrononcer la séparation
de biens; elle évinça des acquéreurs de ses biens dotaux
vendus par le m ari, et ceux-ci exercèrent leur recours
sur le prix du jardin et du pré que le sieur Courby fils
avoit acquis de‘ s o h 'p è fe , qu’il avoit vèndü luir-mêifTe
au sieur Jo u b ert, et que celui-ci avoit .revendu, le 4
"3
�c
1 8
\
octobre 1811 , au nommé Eloi G audicier, moyennant
'la somme de 6,913 francs 60 centimes.
Un ordre s’ouvrit pour la distribution du prix de
cette dernière vente; des créanciers du père seuls y pro
duisirent leurs titres, et y furent colloqués : c’étoient des
acquéreurs des biens de la mère.
Enfin, dans le même tem ps,la dame Courby-Cognord
fut elle-même troublée dans la propriété de Bicon, par
des créanciers du père; c’est-à-dire, par des acquéreurs
des biens d’une dame R ollat, épouse du sieur Courby
jeune ; acquéreurs qui avoient acheté sous la garantie
solidaire du sieur Courby père , et qui étoient aussi
menacés d’éviction.
1 La dam e Courby-Cognord dénonça au sieur Joubert,
comme possesseur alors de Sarlièvc, les poursuites di
rigées contr’elle.
’
Cette dénonciation n’a cependant pas eu de suites ,
les tiers acquéreurs s’étant désistés de leur action contre
_ la dame Courby.___
■
Telles furent Jes funestes circonstances qui vinrent
tout à coup accabler le sieur C ourby, et q u i, en excitant
dans le sieur Joubert une colère aveugle (1) contre son
n eveu , ont préparé l’action iujurieuse qui est soumise
à la Cour.
, .
'
~~
T
(1) On jugera de la haine du sieur Joubert, par un procédé
assez étrange. Afin de pouvoir contraindre son neveu par corps,
il avoit acheté contre lui une lettre de change du sieur Dumay ,
‘ et poursuivoit sous le nom de celui-ci. L e; sieur Courby alla
; payer le sieur D u m ay, et découvrit alors ces manœuvres.^
�( 19 )
.
^
L e 30 août 1 8 1 1 , le sieur Joubert cite le sieur
Courby en conciliation, et fait les réclamations les plus
exagérées.
Il dem ande,
i°. A raison de la vente du bien de Sarliève , pour prix
principal, frais ou dommages et intérêts. 97,680 fr.
20. A raison de la vente du jardin et
7,070
du pré.....................................
1
.
/>?/ fr. /s 10,970
l Jour dommages-intérêts. 3,000
j
3°. A raison de la cession de 18 0 8 ,
p o u r p rix p r in c ip a l............ 2 5,675 fr.
7
. . .
Pour dommages-intérêts. 10,000
}
- r
'
Il conclut à ce que le sieur Courby soit déclaré stellionataire, et condamné par corps au payement de toutes
ces sommes.
La conciliation n’a pas lieu.
L ’affaire est portée devant le tribunal civil de R io m ,
par exploit du 20 décembre 1811.
L e sieur Joubert, im patient,'ne veut pas attendre le
tour du rôle; il demande que la cause soit jugée comme
.cause urgente. Il obtient cet avantage, sur le motif que
la contestation présentoit ¿1 décider une question de
contrainte par corps, qui exige la plus grande célérité.
Bientôt ses autres vœux sont remplis; et un jugement
du 20 mai 1812 , en décidant qu’il y a stellionat, con
damne par corps le sieur Courby h payer des sommes
beaucoup plus considérables que les avances légitimes
du sieur Joubert.
.
La longueur des motifs de cette décision ne permet
3*
�pas de les transcrire. On les rappellera sommairement
dans la discussion, pour les réfuter.
Ils sont, au reste, indiqués par le dispositif, ainsi
conçu :
■ « L e tribunal, par jugement en premier ressort, fai« sant droit sur tous les objets de la contestation, et
« ayant égard à ce qui résulte des trois actes des 11 avril
a 1807, 9 juillet 1809, et 8 juillet 1808, déclare le
« sieur Coui-by stellionataire, comme ayant, dans lesdits
« trois actes, contracté envers le sieur Joubcrt des en« gageinens qu’il sa voit ne pouvoir pas rem plir, ne
« pouvant se dissimuler à lui-m êm e son insolvabilité,
« soit pour avoir caché à dessein les hypothèques dont
.« étoient grevés plusieurs des immeubles donnés en hya pothèque spéciale, soit principalement pour avoir dis—
« sim ulé, dans lesdits trois actes, l’hypothèque légale
« de sa fem m e, et avoir manqué d’en faire la décla« ration expresse; en conséquence, le condamne par
« corps et prise de sa personne, en vertu des art. z o 5g ,
« 2136 et 2Ï94 du Code Napoléon , h payer au sieur
« Joubert, dans la quinzaine de la signification du p ré -'
« sent jugement à personne ou à dom icile, la somme
« de 51,649 francs ( i ) , pour les créances liquides dues
« à ce dernier, ensemble les intérêts et frais tels que de
« droit ; à payer pareillement dans le même délai ,
« et aussi par corps, en exécution de l’article 126 du
« Code de procédure civile, la somme de 8,000 francs,
(1) Les 5 i , 64<^rancs qu’adjuge le dispositif du jugem ent,
comme créances liquides, se composent, d’après les moti/s ,
�'
t 21 )
à laquelle somme le tribunal évalue d’office les domr
mages-intérêts revenant audit sieur Joubert, ensemble
les intérêts depuis la demande, si mieux n’aiment les
parties faire estimer lesdits dommages-intérêts par. les
«
«
«
«
« sieurs Creuzet, Tantillon et Croisier, experts, habitant
« à R io m , lesquels resteront, aux termes de l’art. 305
« du Code de procédure civile, définitivement nommés,
« faute par les parties, dans les trois jours de la signir
« fication du présent jugement ù personne ou à dotni•« cile, de s’accorder sur le choix d’un seuliQU de tvois
« experts, e t, conformément à. l’article 305 du même
« Code, d’en passer leur déclaration au greffe dans le
« même délai de trois jours , laquelle option lesdites
« parties seront tenues de faire, aussi dan^ la quipzaine
« de la signification du présent jugement h personr^e oji
« à domicile , sinon et faute de ce faire par l’une ou par
« l’autre des parties, ladite fixation de donimages-inté« rêts à la somme de 8,000 francs, restera définitive ; et
« en cas d’option pour l’estimation par experts, le tri« bunal commçt M . le président pour veccyo.ir le serment
« desdits sieurs experts; et avant faire droit $uv le surplus
« des sommes qui pourront revenir au sieur Joubert.,
i°. D u prix de la vente du 11 avril 1807 . . . 7*900 fr.
20. Du prix de la cession du 8 juillet. 1808 . . . . 35, 675
û°. de la différence entre le prix de la. vente du
9 juillet 1809, et celui qu’a produit l’adjudication
du i 3 décembre 1 8 x 1 ................................., ? . * • '
*8.074
m T o t a l ................................................. ."v . . .
On démontrera l’erreur de cette liquidation.
51,649 fr.
�1«
«
«
«
«
«
«
«
«
'«
«
«
pour raison de la vente du domaine de Sarliève, sursoit
jusqu’après la confection de l’ordre qui se poursuit au
tribunal de Clerm ont, pour la distribution du prix de
ce domaine, pour, ledit ordre achevé, les parties venir
entr’elles à com pte, relativement aux sommes que le
sieur Joubert pourra reprendre, comme représentant
ceux des créanciers utilement em ployés, et qu’il a
payés ;
« Sur le surplus des demandes, fins et conclusions ,
met les parties hors de procès ; condamne le sieur
Courby aux dépens et coût du présent jugement, et
ordonne, attendu ce dont il s’agit , q u 'il sera exéculé nonobstant appel , et sans donner caution. »
A in si, ce jugement autorise à priver provisoirement
un citoyen de sa liberté, et à ne lui laisser qu’au fond,
'des prisons la faculté de faire entendre ses plaintes à la
Cour suprême.
L e sieur J o u b ert, prévenu qu’on étoit sur le point
*de demander des défenses contre une disposition qui
n’étoit fondée sur aucune lo i, a eu la prudence de ne
*pas en user.
„
<
■
. T e l est le jugement contre lequel s’est pourvu le sieur
Coui'by.
zi XI se propose d’examiner d’abord s’il y a stellionat ;
Ensuite- quelles sommes sont dues au sieur Joubert,
�c 23 )
<
:
P
.
rem ière
question
M s
.
Y a-t-il stellionat?
Cette question se subdivise.
: II y a stellionat, ont dit les premiers juges, parce
qu’on n’a pas déclaré les hypothèques inscrites.
Il y a stellionat, parce qu’on n’a pas déclaré les hy
pothèques légales et non inscrites.
Examinons la question sous ses .deux i-apports.
§ . I e1'.
Y a-t-il stellionat y à défaut de déclaration des créances
r
,
inscrites ?
La décision rendue sous le premier rapport doit éton
ner; elle nous prouve que l’érudition n’est pas toujours
une garantie sûre contre l’erreur.
Pour démontrer qu’il y àvoit stellionat, les premiers
juges se sont égarés dans des dissertations qui leur ont
fait oublier et les termes et l’esprit de la loi.
L ’article 2o 5g du Code a défini le stellionat ; ët cette
définition est tellement claire, qu’il est difficile de con
cevoir comment le sens a pu en être méconnu.
V o ic i de quelle manière elle est conçue :
« Il y a slellionat, lorsqu’on vend ou qu’on hypo
t h è q u e un immeuble dont on sait n’être, pas pro*« priélaire;
,
�(
( 44)
« Lorsqu’on présente comme libres des biens hypo« théqués, ou*qüè l’on déclare des hypothèques moindres
« que celles dont ces biens sont chargés.
L e premier cas est étranger à la cause; les deux
autres pourroient-ils s’appliquer au sieur C ourby?
Peut-on dire qu’il ait -présenté ses biens comme libres?
Peut-on prétendre qu’il ait déclaré que ses biens
étoient -seulement grevés d’hypothèques moindres que
les hypotlièques réelles ?
Peut-on soutenir, en un m ot, qu’il ait fait une décla
ration ‘mensongère ?
Car c’est dans le mensonge qu’est le délit.
O r , le silence ne constitue pas le mensonge.
Il faut une déclaration expresse, une déclaration con
traire à la vérité,»une déclaration q u i, trompant celui
avec qui l’on contracte , l’em pêche, par la confiance
qu’il accorde à l’assertion , de recourir aux registres
publics pour vérifier le fait.
C ’est cette fausse déclaration qui produit le stellionat.
Les termes de l ’article ie prouvent suffisamment.
La discufcsiôn qui eut lieu au Conseil d’état le démontreroit en core, s’il étoit nécessaire.
Plusieurs des conseillers d’état trouvoient même qu’il
'étoit inutile d'attacher une peine aussi sévère que la
contrainte par corp s , a l a f a u s s e d é c l a r a t i o n du
vendeur .
Mais on répondoit qu’à raison des inscriptions qui
-pouvoient survenir entre la vente et la transcription,
-et qui seroient quelquefois j frauduleusement ménagées
par le vendeur m êm e, on avoit intérêt d’exiger de lui
UNE
�C *5 )
UNE D ÉC L A R A T I O N q u i , le soumettant à la contrainte,
jp ar corp s, l'obligeât iVétre vrai.
On observoit que quoique dans le nouveau système
hypothécaire l’acheteur puisse vérifier les incriptions,
cette circonstance ne rédime point le vendeur de Vobli
gation de fa ire une DÉC LA RAT IO N EXACTE , n ii de la
peine attachée A LA FAUSSE DÉCLARATION.
On ajoutoit que quand le vendeur a des ‘ doutes, il
peut refuser la DÉC LA RAT IO N que Tacquéreur exige
pour payer.
r •;
r
- Mais que si on lui accorde un à-com pte, sur la DÉ
C L AR AT IO N qu’ il f a i t que son bien n’est engagé que
pour une certaine somme , . . . . . et que Vimmeuble sc
„trouve chargé d’une hypothèque beaucoup p lusforte, . . . .
il y a , de la part du vendeur, dol et escroquerie ; et
alors il est juste qu’il devieTine sujet à la contrainte
par corps.
A in s i, il a été reconnu au Conseil d’état que c’étoit
la fausse déclaration seule qui renfermoit le d o l, et
qui rendoit applicable la peine attachée à ce genre de
dol ou au stellionat.
Ne doit-on pas être surpris, d’après cela, de.ee qu’on
ait invoqué dans les motifs du jugement quelques ex
pressions de M . le conseiller d’état R é a l, pour en con
clure que les termes de l’article zo 5g du Code Napo
léon sont seulement indicatifs et non limitatifs des cas
du stellionat.
M . Réal d it, il est v r a i, que: « l’article ne prévoit pas
« tous les cas du stellionat ; qu ’il ne. parle pas de celui
* ou le vendeur? par une obÜgqtioa nouvelle, créeront
4
�(z6 )
«• üne hypothèque dans l’intervalle de la signature de
« l’acte de vente à la transcription. »
L e cas prévu par M. R é a l, pouvoit être dangereux
sous l’empire'de- la loi du n brumaire an 7 , d’aprèS
laquelle la transcription seule transféroit la propriété.
Il ne peut pas avoir lieu sous le Gode, la pïppriété étant
transmise, même à l’égard des tiers, dès l’instant où la
vente est signée.
A u reste, que répond-on à M . Real ? « M. Tronchet
« répond que l’article a été rédigé d’une manière gé-« n érale, afin de ne rien préjuger sur le régime hypok thécaire qui n’est pas encore fixé ; mais comme dans
« tous les systèmes il y aura toujours un intervalle où.
«c.il Sera possible au vendeur d’engager frauduleusement
«. la chose vendue, on a pensé que le remède contre
■
k ces fra u d es , seroit d’autoriser ï acquéreur à e x i g e r
« du vendeur UNE DÉC LARA TI ON qu i soumette celui-ci
* â '¡a wontrdinté par corps. »
: > Ainsi y c’èst toujours d’après la déclaration seule du
vendeur que doit se juger la fraude.
C’est i\ cette déclaration que sont réduits tous les cas
possibles du stellionat.
S’il déclare que son bibn eâtjfranc et q u itte, et qu’il
en impose, il est stellionatairc.
- S’il déclare que son bien n’est engagé que pour une
certaine som m e, et qu’il se trouve chargé iVune hy
pothèque beaucoup plus fo r te yil est encore stellionataire.
Mais s’il ne déclare rien, il n’est pas coupable,
La loi avertit l’acqüércur j elle l’autorise à exiger que
le vendeur s’explique.
• •
�C
î
S i l ’ocquéreur n?useopas de son droit’,; i l ia’h* pas 3îf sb
plaindre,; ,il n’est pas présumé avoir été trompé ; .iljest
présumé, au contraire, avoir vériiiéiles inscriptions exis
tantes, et n^avoir pas eu_besoin ^ d e m a n d e r au Ven
deur une déclaration.
»
!'i '
.-l vEn un ‘m ot, la loi est écrite, et cette loi est pénale.
Ses termes sont clairs, et n’attachent la pëitae qü’frune
fausse déclaration.
• i! ~
< -Les lois pénales ne s’étendent pas ; au contraire, odia,
r e s t r i n g e n d a i
i •.
On ne doit donc pas puiiirjle silence, qtièiüd la loi né
prononce de peine quë'contre le langage et lb mensonge;
Seroit-il nécessaire, d’après ces principes, de suivre
les premiers juges dans leurs dissertation^*, de .répondre
à l’argument qu’ils tirént de la prélènduè insolvabilité
du sieur Courbÿj, à Pépotjue des divers actes qu’il a
passés avec le sieur Joübërt; de réfuter l’application
de quelques anciens arrêts, qui avoient considéré comme
Btellionataires, des débiteurs ou dés'vendeurs qui n’avoient pas fait des déclarations de franc et qliitte? 1
-, Ces vains raisonnemens viennent tous se briser con tre
les termes de la loi.
*■
••
• Jr'îT •*!.
La loi ne punit pas de la contrainte par* corps l’in
solvabilité du débiteur.
C’est une faute, sans dotite, que de contracter quoique
insolvable;
•->
Mais ce n’est point un sfelliôhaf.
'
A u reste, le motif est même utië ‘èrreur d'e fait.
L e sieur Courby n’étoit pas insolvablb à l’époque des
divers actes; et ce qui le prouve ? c’est qit^il àlpnÿé, soit
4 *
�C 28 )
alors, soit".depuis', la plus grande partie de ce quMl'devoit| ¡personnellement à ses créanciers hypothécaires et
inscrits, et il a retiré les. titres de créance.
_ Aussi, aucun de ses créanciers personnels n’a produit
à l’ordre de la distribution du prix du pré et du jardin
venç^u au sieur Joubert, et revendu par celui-ci.
Ce sont les créanciers du père seuls qui ont réclamé
ce prix.
Aujourd’hui m em e^ il restera au sieur Joubert des
moyens d’être payé, soit à l’aide des 26,000 francs qui
sont encore dûs par les acquéreurs des biens de 'la dâme
Courby, soit sur la portion héréditaire du sieur Courby
dans la succession de sa mère. Ce dernier objet a même
été saisi par le sieur Joubert. .
Quant aux anciens arr.êts ,que l’on invoque, ces arrêts
se réduisent, à ce qu’il paraît,:à un seul,' du i^r. février
i 556 , rapporté, par- Louet sur Brodeaii, sommaire 18 ,
Ji.°. 8..
...
' , ¡îî
‘ 1•
• »
, Majs ,cet arrêt isolé,, et rendu sans doute dans de9
cii’constances particulières ,<.ne fa(isoit pas jui'isprudence.
( V oyçz ,ce, que dit A 11roux sur l’article 81 de la cou
tume du Bourbonnais, n°. 5. )
.
,|
D ’a ille u rs, ce n’est pas d ’après les anciens p rin cip e s,
mais d ’après la législation n o u v e lle , qu ’ on doit ju ger une
cause née sous l ’e m p ir e ,de cette législation.
Les lois romaines étoient fort vagues sur le stellionat.
Elles appeloient ainsi toute espèce 'de dol qui n’avoit
pas reçu d’elles un nom particulier; elles s’appliquoient
î\ upe foulejc^e cas.
[ it
. La jijrisprudpnce française a voit; restreint celte appli-
�■C
29
)
cation, et ne considéroit en général comme stellionataire que celui q u i, en obligeant son bien , le déclaroit
franc et quitte.
Mais comme aucune loi précise ne définissoit en France
le stellionnat, il ne seroit pas étonnant que quelques
arrêts, en l’absence de principes positifs, eus'sent varié
sur le sens attaché à ce mot.
Aujourd’h u i, une définition exacte ne permet plus
de variations.
Ces observations, nous les puisons dans les discours
même des orateurs qui ont préparé la loi.
. M . Bigot-Préameneu, dans l’exposé des motifs, après
avoir remarqué que jusqu’à présent aucune règlejixe
n'a voit été à cet égard établie , ajoute :
1
... « La contrainte par corps étant considérée comme une
« sorte de peine, il étoit nécessaire d e spécifier Ja faute
« qui la faisoit encourii’. L e stellionat a été réduit au
« cas qui avoit été le plus généralement reconnu comme
« distinguant ce genre de fraude. »
Il rapporte ensuite les termes de la loi;
M . Gax’xù, tribun, s’exprime ainsi : i'
t..
« Comme il s’agit ici d’une sorte de d élit, et d’une
« voie de.rigueur établie pour la plus grande sûreté du
« créancier, on ne peut qu’applaudir à l’idée qu’ont eue
« les auteurs du projet, de définir lé stellionat ; et là
« définition qu’ils en donnent résout tous les doutes
« et j i x e toutes les idées. »
Comment donc concevoir qu’on puisse négliger cette
définition, pour se jeter dans le vague et dans l’arbi-
�C< 30 }J
traire, que les législateurs ont voulu tprécisdment'faire
disparoître ?
•
' .
Remarquons, au reste, que le silence du débiteur ou
du vendeur n’est pas dangereux aujourd’h u i, -comme il
l ’étoit autrefois.
Autrefois, il étoit impossible aux tiers de connoîtreles hypothèques dont étoient grevés les biens de ceux
avec qui ils conlractoient ; en sorte que .s’ils oublioient
d’exiger une déclaration de franc et quitte, ils pouvoient
être facilement trompés par un débiteur insolvable.
A ujourd’h u i, grâce à la publicité des hypothèques,
introduite par le nouveau système, chacun peut-conn oitre,, en consultant les registres, la situation de celui
avec qui il veut contracter; et rarement on néglige cette
précaution, lorsque l’objet que l’on se propose est im
portant.
Cette considération puissante seroit >uni m otif suffisant
de la limitation apportée par la loi aux cas du stellionat.
E nfin, la loi est telle; il faut la respecter; et ce seroit la blesser., ce seroit vouloir être plus sage qu’elle^
m êm e, ce seroit ‘se montrer plus rigou reu x, que de
l’étendre à des cas qu’elle n’a pas prévus.
L a question de ste llio n a t, sous son p rem ier r a p p o r t ,
se réd u it donc à exam in er si , dans les trois actes qu e
l ’on oppose au sieur C ou rby, il y a eu de sa part une
jfausse déclaration.
Cet examen ne sauroit être long.
Dans les deux prem iers, celui du n avril 1807, et
eèlui du 8 juillet 1808, il y a" silence absolu sur les hy-
�-
,
( âI )
pothèques ; ainsi, point de prétexte pour dire qu’il y
a eu fausse déclaration.
Dans le troisièm e, du 9 juillet 1809, les premiers
juges ont cru trouver une déclaration implicite defr a n c
et quitte.
D éclaration implicite : que veut-on dire par là ? L e mot im plicite, signifie par induction.
*
O r , un délit tel que le stellionat ne se présume pas';
il faut qu’il soit évident. La l o i , pour le reconnoître,
ne se borne pas à des inductions ; elle veut une décla
ration formelle.
1
Mais quelle est la déclaration que présente l’acte du
9 juillet 1809?
E lle est relative à l’objet vendu.
'
L e sieur Courby charge l’acquéreur de supporter
quelques inscriptions conservatoires seulement, et qu’il
indique.
C ’est, d it-on , comme s’il lui avoit dit expressément
qu’il n’y avoit aucune autre inscription sur le bien vendu;
et, à l’appui de cette assertion, on cite la m axim e, qu i
dicit de u n o , 7iegat de altero.
Quel raisonnement!
L e sieur ‘Courby parle , cela est v r k i, de quelques
inscriptions conservatoires, dans l’acte de vente du' bieà
de" Sarliève.
Mais s’ il en p a rle, ce n'est pas pour dire que toutes
les inscriptions se réduisent à celles-là;
C ’est pour dire seulement que l’acquéreur ne pourra
pas en demander la radiation, et qu’il sèra tenu de les
supporter.
�( 32 )
En sorte q u e , relativement à toutes celles pour les
quelles l’obligation de les supporter n’est pas imposée,
l ’acquéreur a eu le droit d’exiger la radiation, et d’agir
à cet effet contre le vendeur ; et c’est en ce sens que
seroit vraie la maxime, qui dicit de uno, negat de altero.
Mais soutenir que parce qu’on a parlé au vendeur
de certaines inscriptions, pour un cas particulier, on a
entendu lui faire une déclaration implicite de fr a n c et
qiiitte pour toutes les autres inscriptions, en v é rité ,
c’est déceler son embarras dans la recherche des moyens;
c’est laisser apercevoir le peu de justesse de l’opinioa
que l’on défend.
A u x'este, ce foible argument est encore détruit par
la contre-lettre, où l’on vo it, i°. qu’il est parlé de plu
sieurs créances exigibles et inscrites, du payement des
quelles le sieur Joubert est chargé ; 2°. que le sieur
Joubert se réserve le droit de retenir les titres des
créances même qu’il payera , ju sq u ’il Ventière main
levée de toutes les inscriptions sur le bien vendu.
L e sieur Joubert connut donc toutes ces inscriptions.
Il les connut d’autant plus facilem ent, que l’acte se
passoit à Glermont m êm e, siège du bureau des hypo
thèques pour le bien vendu: l’état lui en fut remis, et
il les vérifia au bureau avant que l’acte de vente fût passé.
Ainsi disparoît le premier moyen adopté par le tri
bunal dont est appel.
Point de déclaration de franc et quitte, dé la part du
sieur Courby.
Point de déclaration que les hypothèques fussent
Vioipdres qu’elles ne l’étoient réellement.
Sous
�( 33 )
Sous; ce premier rapport ,, il n’a donc: pas .commis, d«
stellionat.
§? I I ,
Yt a -t-il stellionatfa u te de déclarattpn-,de$ hypothèques
légales 2
O n invoque les termes de l’article 2136, d.unCodp^
Napoléon.
Les termes de ce t article paroissent rigoureux.
Transcrivons-^les ; nous examinerons .ensuite quelle,en,,
doit êtreil’application.
A rt. 2136. « Sont toutefois,les, maris et les tuteurs.,
«.tenus de rendre publiques les,hypothèques dont.leura
« biens sont grevés, etjjà^cet effet,;do. requérir eux« mêmes, sans aucun d élai, inscription, aux bureaux à
«.ce établis, sur les immeubles à eux, appar.tenaqti,, et
« sur ceux qui pourront leur appartenir par. la suite*,
« Les maris et les.tuteurs q u i, ayant manqué, de, re«• quérir et de faire faire les inscriptions;oi;données pasi
« le présent article ,,auroient consenti ouilaissé prendre^
« des privilèges ou>des hypothèques sur leurs immeubles,
«r sans-déclarer expressément que lesditsimmeubles étoient
« aiFectés>à l’hypothèquer légale des femmes, et» des mi
te neurs, seront réputés- stellionataires:,.eb.cpn}me tels.
« contraignables par, corps. »
A in s i, à s’en tenir minutieusement h l’expression lit
térale de l’article, tous les maris, tous les tuteurs, qui
ne feroient pas une déclaration.eiigressp; des. hypqtUèquçs
légales, seroient stellionataires.
5
�.C 34 ^
Aucune considération, aucun m o tif, ne pourraient
les garantir de cette tache flétrissante.
•
^
Que de stellionataires en France ! que d’honnêtes gens'
confondus dans les prisons avec de vils criminels!
C a r, si l’on consulte les actes nombreux faits depuis
l’émission du Code, par les maris, par les tuteurs de tous
les rangs, de toutes les fortunes, à peine én rencontrerat-on quelques-uns où soit contenue cette déclaration ex
presse que paroît exiger la loi.
Tous -ces-maris, tous ces tuteurs, seront-ils également
réputés stellionataires? l’erreur sera-t-elle assimilée à la
mauvaise fo i? le silence qui n’a pas trompé sera-t-il puni
comme la fraude qui a nui ?
Non sans doute; on ne peut supposer dans le légis
lateur une injustice aussi choquante.
Si la lo i, dans sa lettre, présente une généralité qui ’
révolte, cherchons dans son esprit la restriction que
l’équité réclame.
’
Appliquons à cette loi ces principes immuables que
les lois romaines nous ont transmis, et que nous enseigne '
leur illustre interprète, le savant Dom at . 1
« Lorsqu’il arrive, dit ce grand jurisconsulte (i), que le
« sens d’une lo i, tout évident qu’il paroît dans les termes,
« conduirait à de fausses conséquences et à des décisions
« qui seraient injustes, si elle étoit indistinctement ap
te pliquée à tout ce qui semble compris dans l’expression»
« Car alors l’évidence de l’injustice qui suivrait de ce sens
(1) Lois civiles, livre préliminaire, titre i er. , section a , au
préambule»,
�k apparent, oblige à découvrir, par une espèce d’inter« prétation, non ce que dit la loi, mais ce qu'elle veut;
« et à juger par son intention quelle est l’étendue et
« quelles sont les bornes que doit avoir son sens. »
. C ’est surtout dans l’interprétation des lois pénales qu’on
doit appliquer cette sage règle.
~
Cherchons donc ce que veut l’article 2136 du Codé*
Napoléon, pour éviter Y injustice évidente qui résulteroit
du sens apparent.
Nos idées seront bientôt fixées, si nous considérons
l ’exposé des motifs de la loi sur le stellionat, et la dis
cussion que cette loi et l’article 2136 firent naître au
Conseil d’état.
« E11 matières civiles, la règle générale interdit la
« contrainte par corps ( Exposé des motifs. ). »
Cette règle si importante dans l’ordre de la soctfcté-jne doit recevoir d’exception que contre les débiteurs q u i,
par leur im m oralité, par leurs j fraudes, se sont rendus
indignes de toute protection.
Mais la fraude ne peut exister sans le concours de
deux circonstances.
Il faut, i° . qu’il y ait eu intention de trom per;
20. Que cette intention ait été rem plie, c'est-à-dire,
qu’on ait trompé réellement.
Il faut qu’il y ait eu intention de tromper.
Car c’est l’intention qui caractérise le d élit, qui eu
détermine la moralité ; c’est la mauvaise intention, le
inalurn consilium qui rend coupable : sans l’intention
frauduleuse, il ne sauroit y avoir de fraude, ni par con
séquent de stellionat.
#
�* ' « 'Lé^stellionat, dit M .'Portalis ( i ) , suppose toujours
« de la fraude ; ainsi tquand'il n’y a qu’erreur et bonne
« f o i ,’ il n’y a pas rde âtèllionat. »
Dans la cause, on ne pourrait reprocher au sieur Courby
q ue'd e l’erreur; sa ‘ bonne1foi d?ailleürs est'évidente.
^7 § i , dans les actes qu’il a passés'avec le sieur Joubert,
il n’a'pas déclaré expressément les'hypothèques légales,
ce " fut par oubli plutôt* que'parH'raude ; ce fut parce
qu’aucuns notaires n’avoient l’usage d’insérer> dans leurs
actes 'de pareilles'^déclarations ; ce fut par une erreur
commune, et que partageable sieur Joubert lui-m êm e,
ainsi que'nous l’avons déjà remarqué.
L e sieur Courby fut d’ailleurs de bonne fo i, et ce
qui1le p ro u ve, c’est que¿;*lors de ces divers* actes , il ne
toucha aucune somme.
Dans l’acte d u '8 juillet- 1808,1’le prix^de la cession
qü’il faisoit fut payé 'en entier là^M.^Destradat.
Dané l’acte du 9 juillet* 1809, les 70,ooosfrancs, prix
de la vente, furent laissés en totalité au -sieur Joubertr
‘qui fut chargé °de p ayer des créanciers qui n’étoient
pas présens.
Si le si eut Courby eût été de ^mauvaise f o i, ‘n’eût-il
pas exigé au moins une partie de ces sommes considé
rables? eût-il consenti à vendre au sieur Joübert« une
propriété d’une graride valeur, sans rien recevoir, et
précisément pour commettre:un stellionat, et pour s’ex
poser aux dangers‘et à la honte que traîne à sa1 suite
u n pareil délit ?
(i)Proc. verb. du Conseil d’état, séance du 16 frimairaan 12.
�C 37 )
Toutési les .circonstances yjtoutes le%présomptipns mo
rales se réunissent donc pour-démontrer qu’il n’y u eu
qu'erreur et bonne f o i , , e t;par conséquent, qu’il u’y a
'■pas'-de'Stelliouat.
, ■■ .
Mais quelle qu’eût été m ê m e .l’iq.tention, du sieur
-G ou rb y, il faudroit, pour queJe-sieur Jouberfe fût fondé
.♦à -se plaindre ^ qu’il^eût : été réellement trom pé, .parole
-silence du.sieur Gourby;sur.lesaliypothèques^légples.'
■
„Q u’on- parcoure ,,ien jçffet }es>d'iççuçsioiîs rqu^putt,pré
paré au Conseil d’état l’adoption;de 1’r.^ticlç? aig6.
L a : loi n’a pas entendu exjger sous: des peines aussi
rigoureuses, une déclaration qui 6eroitCjinutile ; elle* a
ordonné cette déclaration afin,[de,pourvoir à ce que des
tiers ne fussent^pas,,trompés (i). r
Si donc le tiers avec qui >Ie^mari< a traitéf.conaojssoit
l’existence des hypothèques légales ,f le défqut-de décla
ration ne lui a pas nui ; il nerpeut;p asen argumenter,
i -parce qu'il n’a pas été trompé.
Cette vérité est. indiquéenparj la, simple bon ¡sens^et
osiül’onddésire !des- exemples de son application, on .peut
* en trouver dan^des ¡auteurs ^pecta})lesnqui l’ont invo
quée dans un cas bien plus grave que jle simple silence,
dans lencas même d’unQ ^ fa u ^ déclaration.
L a déclaration de; franc et quitte jijquapd-eJle.jéJpit
‘'-»contraire ùi la. vérité ,r.étqit ¡autrefois, généralement ,Tegardée comme caractérisant . le;,.stc>llÎ0Euit de 4 ar niapière
. 'lajtmoina équivoque.
»Cependant, ,si ,le. créancier à, qui ella ¡6toit- faite-¡ea
'
, ■
■....... ■
■
■
— •------- 1- , ■
(i)' Exposé des motifs.
—
�C 38 )
avoit'coniiü'le ménsorige'ien la recevant, il n’avoit pas
le*droit dé s’en plaindre'.'
Pourquoi1? Parce qu’il n’avoit pas été trompé : non
videtur enim deceptus qu i credidit assertioni quam
scitbat esse falsain.
>
’
^ ‘ Telles 'étoient lés- règles du droit français ; règles équi
tables ‘. que la raison accu eille, et que nous attestent
M . Louet s u r!Brodeau ( sommaire 18 , n°. 4 ) , M . A u t o u x et M . le président D u re t, sur l’article 81 de la
coutume du Bourbonnais.
' Ainsi le mensonge même n’étoit pas pun i, lorsque ce
mensonge* 71'avoit pas trompé.
A plus forte raison le silence doit-il être pardonné,
lorsque ce silence n’a causé aucune erreur.
^..jEjcammons si le sieür Joubert a connu Pexistcnce des
hypothèques légales.
*
Il assure les avoir ignorées*
! 1
i
i
Cependant, oncle et parrain du sieur Courby, il a été
un des négociateurs de son mariage;
li a assisté au contrat de mariage, où la dot mobilière
de la dame Courby est détaillée article par article, et il
a signé ce contrat ;
'■
"■
■
Il a acheté, dès 1806, les rentes dotales désignées dans
le contrat de mariage ; on lui a remis les actes de rati
fication, consentis en laveur du sieur Cognord père, et
il perçoit encore ces rentes.
A nous arrêter même h ces premières circonstances,
ne p ou rro lt-on pas dire qu’elles sont suffisantes pour
démontrer la connoissance des hypothèques légales de
la dame C ourby, de la part d’un parent aussi proche,
�( (39
)
qui a signé Tacté mêmé constitutif de ces hypothéqués,
et qui est devenu acquéreur d’une partie de la dotim obilière pour laquelle elles existènt. . j
!■
Mais poursuivons.
;
ot /i»
[ " ¡i'i-'
L e i i avril 18 0 9 ,jle sieur Joubert achète du.,sieur
Courby umjardin et un pré. 1 ) 1 >
br; n')?. xOn ne lui déclare pas les hypothèques légales ; et
cependant il dépose son contrat au greffe; il fait noti
fier l’acte de dépôt à la femme et au procureur impérial.
En un m o t, il purge ces hypothèques l égales. : t>
< Il les connoissoit donc, quoique non déclarées.
Et n’est-ce pas un jeu, que de dire que les hypothèques
légales ont été purgées seulement pour l’immeuble vendu,
et non pour l’immeuble donné en hypothèque, comme
garantie de la re n te ? , •
:> :
v fi
. Que signifie ce raisonnement , quant à la question?
D étruit-il le fait de la connoissance des hypothèques
légales, connoissance prouvée par les formalités même
qu’on a remplies? . :r - - -x
‘ ( ; :
L e sieur Joubert pouvoit-il ignorer,que l’hypothèque
légale s’étendoit sur tous les biens du m ari; qu’elle
grevoit l’objet qui lui étoit donné pour gage, comme
l’objet qui lui avoit été vendu?
<
;
Pouvoit-il croire à une réduction de cette hypothèque
générale, tandis qu’aucune déclaration, aucun indice
même ne lui faisoit présumer cette réduction. . - ;
L e sieur Joubert ne sauroit échapper à une preuve
aussi forte, émanée de son propre fait. ;
' ,
Il a connu l’existence des hypothèques légales.
�............. C(4or))
L o llb i lui apprenoitique1ces hypothèques'grevoient,
tous; les biens du mari;
•:
Cette connoissance positive qu’iba eue dès le premier^
acte qu’il a passé avec le sieur Courby, ne lui permet
pâs'd’allëgüèruson ignorance^lorsi des .actesi postérieurs.
L e second acte, celui du 8 rjuillet‘>i8ô8,/ne'Contient)
rien qui'-pût détruirela connoissanceiacquiseï précédem
ment par le sieur iJouberti
A u contraire; on y parle: deà ventes consenties'par
le sieur Courby ; des biens qui-composent* le domaine
de M aison-N euve, sis commune de)Celles<; c’est-à-dire,
qu^om appreùd auLsieur Jôubert la- vente de ce. même
bieii' qu’il1 avoit entendu la dame Courby se constituer!
sous là' même désignation, dans» lé contrat-de» mariage
auquel il avoit assisté; en sorte qu’ont lui donnoit-. par
là'uninoüVeV avisd è l’existence des hypothèques,légales.
(Cet a v is 'lui? fu t renouvelé»; soit par Facteidu r i août
i8 o 8 y queMüii-fit notifier1 le* sieur D u m a y ,.p o u r lui.
apprendre la résistance des acquéreurs et le* motif sur
lfequell ils se foüdoient; soit par 1le jugem ent qui autoïifcoit ces acquéreurs à ne pas payer, jugement qui lut
fut signifié’ le 20 juin 1809.
Cet avis fut encore répété-avec lestexpressions les plus
formelles dans l’acte de vente du biem de> Sarliève, du
9 juillet 1809, puisqu’on^ soumet formellement le sieur
Joubert à supporter les inscriptions prises pour la gatantie des rentes consenties par le sieur Courby, des
biens de la dame Cognord, son épouse.
Quoi de plus positif que ces-expressions !
Quoi
�( 4i )
Quoi de plus clair et de plus propre à apprendre l’exis
tence des hypothèques légales qui étoient acquises à la
fem m e, sur les biens du m ari, par. le fait de la vente
des immeubles dotaux !
:
. N ’a-t-on pas même le droit de dire que l’on trouve
dans cette phi’ase la déclaration expresse des hypothèques^
légales, exigée par la lo i? .
,
j On remarque aussi dans cet acte du 9 juillet 1809, une
déclaration importante faite par le sieur Joubert.
1
. En recevant pour hypothèque et comme garantie de
la vente, le bien cfe B ico n , il déclare qu’il cpnnoît les
différentes hypothèques dont ce bien rét oit déjà grevé.
. « Lequel bien est déjà g re v é vde différentes liypothè« ques dont l’acquéreur tdéclare avoir connoissance. »
Dira-t-il, avec lespremiers juges, que cette déclaration
ne doit s’appliquer qu’aux hypothèques inscrites; tandis
qu’il parle de différentes hypothèques ; tandis, que, par
ces expressions générales, il les comprend* toutes, de
quelque espèce qu’elles soient ; tandis qu’il est prouvé
surtout qu’il connoissoit alors les hypothèques légales. ;
'E n fin , aura-t-il recours à une vaine subtilité, et sou
tiendra-t-il que s’il ne peut, en son nom , agir en stellionat, il le peut au moins au nom du sieur Dum ay,
créancier, aux droits duquel il est subrogé comme
caution.
Miserable et dernière •ressource, qu’il est facile de
détruire.
t .
On pourroit répondre d’abord que la caution n’est
subrogée que lorsque le payement est effectué.
O r , le sieur Dumay n’est pas encore payé.
6
�( 42 )
- M ais, sans employer même ce moyen de droit, deux
puissans motifs feroient disparoître la distinction.
Prem ièrem ent, il est un principe certain en «morale
et en législation :
•
Celui qui a participé à une fraude, ne peut en ar
gumenter contre le coupable. S i duo dolo m a lo jècer in t ,
invicem de dolo non agent.
' Si une faute a été commise le 8 juillet 1808, à l’égard
du sieur D um ay, par-le silence gardé sur les hypothè
ques légales qui grevoient les biens du sieur C ou rb y,
le sieur Joubert, qui s’engageoit solidairem ent, a par
ticip é'à cette faute, puisque les hypothèques légales lui
étoient connues à lui-même, ainsi que nous l’avons prouvé.
Il
en a commis en outre une semblable, et qui lui
ést personnelle, en gardant aussi le silence sur les hy
pothèques légales dont étoit chargé son bien de V in zelles, qu’il donnoit pour hypothèque de son propre
engagement.
•
*
■ A in s i, le sieur Joubert n’a le droit de faire aucun
reproche au sieur Courby.
Secondement, il a toujours été de principe que les
actions pénales ne se transmettent pas. ' '
' Les lois romaines présentent beaucoup d?exemples
de cette vérité.
*
■. f .
L ’héritier même à qui la loi accorde le ju s universum ,
n’a cependant pas le droit de poursuivre l’application
d’une p ein e, lorsque l’action n’a pas été commencée
^par le défunt.
L a subrogation aux droits, que. la lo i «accorde à la
çaution y n’emporte que les droits ordinaires, les droits
�¿
43)
pécuniaires, et non le droit extraordinaire d’agir'en
stellionat.
Lorsque le créancier direct n’exerce pas lui-même
l ’action pénale, il est présum é, ou remettre la peine ,
ou n’avoir pas de motifs réels de se plaindre.
. Qui pourroit, en effet, nous apprendre, si ce n’est le
sieur Dumay en personne, qu’il n’a pas eu connoissance
des hypothèques légales, qu’il a cru qu’il n’en existoit
pas; en un m o t, qu’il a été trompé. *
Un tiers ne peut tenir ce langage en son nom , et priver
ainsi celui qu’il accuse des moyens de faire tomber l’ac
cusation par les questions qu’il feroit devant la justice
au sieur Dumay lui-même.
' Toutes ces raisons démontrent que le sieur Joubert
n’auroit le droit d’agir en stellionat que s’il avoit été
trompé personnellement.
O r , il est prouvé qu’il ne l’a pas été par le silence
dont il se plaint.
•
- Il est prouvé qu’il connoissoit l’existence des hypo
thèques légales, et qu’une déclaration lui étoit par con
séquent inutile.
,
.
Il
est prouvé même qu’il a provoqué la vente du bien
de B ico n , par le sieur Gourby à son épouse , pour ac
quitter celle-ci de ses reprises dotales.
Cela est prouvé par les deniers qu’il a fournis pour
l’enregistrement de cette vente.
Cela seroit prouvé par témoins, s’il étoit nécessaire,
et avec des circonstances qui démonti’eroient l’odieux du
prétexte d’ignorance et de fraude qu’emploie aujourd’hui
le sieur Joubert.
6 *
�( 44 )
Comment donc le sieur Joubert a-t-il pu s’aveugler
assez lui-même pour croire qu’il en imposeroit à la jus
tice, pour crier au d o l, signaler le sieur Courby comme
stellionataire, le dénoncer à l’opinion et aux magistrats,
demander vengeance contre lu i, et attenter à sa liberté?
E t quel est celui qu’il attaque avec cet acharnement?
Un neveu ! un filleul ! ! !
C ’est trop nous occuper d’un stellionat imaginaire.
Examinons les condamnations pécuniaires.
i
Seconde
question
T
'l
.
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert
L e tribunal dont est appel condamne le sieur Courby
à payer au sieur Joubert, i° . 51,649 francs en princi
paux liquidés par le jugement;
2°. 8,000 francs pour dommages et intérêts;
Et cela outre les sommes que le sieur Joubert pourra
avoir le droit de réclamer par Tévénement de la distri
bution du prix de l’adjudication du bien de Sarliève.
Les 51,649 francs liquidés se composent,
D u prix entier dé la vente du 11 avril 1809. 7,900 fr.
D u p r ix de la cession du 8 ju illet 1808. . . . 25,675
D e la différence entre le prix de la vente
du 9 juillet 1809, qui étoit de 74,074 f r . , et
le prix de l’adjudication du 13 décembre 1 8 11,
qui est de 56 ,100 fr. : cette différence est portée
à ............................................................................... 18,074
1 Ces divers principaux ont été alloués avec intérêts.
La liquidation renferme diverses erreurs.
�Première erreur.
Relativement aux objets acquis le n avril 1807, par
le sieur Joubert, et qu’il a revendus au nommé Gaud ic ie r, le 4 octobre 1811 , son acquéreur n’a pas été
dépossédé ; seulement il a été obligé de rapporter à un
ordre le prix de la seconde vente.
Ce p rix étoit de 6,913 francs 60 centimes.
' L e sieur Joubert a été privé de ce second prix , par
la distribution qui en a été faite aux créanciers du sieur
Courby père.
Mais il n’a été privé que de cela; il ne devoit donc
pas réclamer davantage; et le jugement a mal jugé en
lui accordant 7,900 fr.', au lieu de 6,913 fr. 60 centimes,
montant de sa perte réelle.
Quant aux 18,074 f r ., différence fixée entre le prix de
la vente de 1809, et celui de l’adjudication, il y a eu, de la
part des premiers juges, erreur de fait et erreur de droit.
Erreur de fait.
.
^ L a vente de 1809, faite au'm ois de juillet, comprenoit non-seulement les immeubles,‘ mais encore la récolte pendante, et le prix de fermé de l’année; et ces
derniers objets, dont a profité le sieur Joubert, étoient
portés dans le prix total pour 4,074 francs, ce qui réduisoit à 70,000 francs celui des immeuBles.
C’étoit donc cette dernière somme seulement que les
premiers juges, dans leur système inêm er devoient com
parer au prix de l’adjudication.
Encore devoient-ils déduire des 70,000 francs la valeur
de plusieurs héritages qui n’a voient pas été saisis, et
qui n’ont pas été vendus, comme nousTî>vons pré^XT
demment remarqué.
�Ces diverses déductions auroient réduit à beaucoup audessous de 18,000 francs, la différence des prix des deux
ventes.
Mais il y a erreur en droit dans la décision dont est
appel.
Cette décision est fondée sur l’art. 2 19 1, qui n’a pas la
moindre application à la question.
L e sieur Joubert n’a pas été évincé comme acquéreur;
il a été exproprié comme débiteur solidaire ou comme
caution, faute de payement.
,
Que peut-il donc exiger?
,
L e remboursement de ce qu’il aura payé pour le sieur
jCourby, débiteur,direct, et les intérêts de cette somme, à
titre de dommages et intérêts. (V o y . Code N apoléon,
art. i i 53 .)
Son bien vendu aux enchères est présumé avoir été
yendu à la vraie valeur qu’ il avoit à l’instant de la vente.
Dans tous les cas, s’il lui étoit dû des dommages et
intérêts, ce ne seroit que suivant la différence qui se
■trouveroit entre le prix de l’adjudication et la valeur
réelle du bien adjugé , considérée à l’époque de l’adju
dication ; o r , cette différence ne pourroit être appréciée
.que par des experts.
Une autre erreur du jugement est relative aux 8,000 fr.
de dommages et intérêts, qu’ils ont accordés au sieur
.Jou b ert, outre les 18,000 francs de supplément de prix.
C’est évidemment avoir accordé deux fois des dom
mages et intérêts pour le meme objet.
N i l’une ni l’autre somme n’étoient dues. L e sieur
Joubert n’a droit qu’à la restitution de ce qu’il aura payé,
et aux intérêts.
�'
^
(( A47 )ï
C’est par corps que le sieur Courby a été condamné
à payer les 8,000 f r ., et on s’est m otivé, pour prononcer
cette contrainte, sur le pouvoir discrétionnaire, accordé
aux juges par l’article 126 du Code de procédure.
Sans doute les magistrats ont ce pouvoir; mais la loi
ne leur a confié ce dangereux droit, qu’en leur recom
mandant la plus grande prudence, et la modération la pluà
scrupuleuse dans l’exercice d’une si puissante autorité.
: C ’est pour les cas d’un dol évident et d’un tort causó
par la fraude à l’homme confiant, qu’ils doivent réserveé
l’usage de l’arme que la loi a mise dans leurs mains.
- Nous avons démontré que le sieur Courby n’avoit
point trompé le sieur Jo u b ert, et qu’il étoit malheu
reux plutôt que coupable.
‘
A in si, quand il auroit dû des dommages et intérêts,
on ne devoit p^s l’y éondamner par corps.
Telles sont les erreurs nombreuses que renferme la
décision des-premiers juges.
' La plus grave est celle relative au stellionat. ‘
>•
* - Dépositaires de l’honneur et de la liberté de leurs
concitoyens, avec quel soin les magistrats ne doivent-1ils pas conserver ce précieux dépôt ?
Sans doute ils doivent punir les coupables ; mais ce
n’est qu’en apportant la plus sage circonspection à l’exa
men des preuves, avant de prononcer qu’il y a délit.
L e stellionat est un délit ; il ne peut donc y avoir
de stellionat sans intention criminelle , sans fraude.
^ L ’intention même ne sufliroit pas pour constituer le
d é lit, si cette intention perfide n’avoit pas été remplie
si le créancier n’avoit • pas été trom pé1 réellement.
�( 48 )
L e sieur Joubert se plaint de ce qu’on ne lui a pas dé
claré les hypothèques inscrites et les hypothèques légales.
Les hypothèques inscrites : il pouvoit les connoître.
Les registres publics lui étoient ouverts; il les a même,
vérifiés.
•
.
.. Les hypothèques légales.: il les a connues. Cette vérité
est démontrée, non par des présomptions vagues, mais
par des preuves écrites , consignées dans un grand
nombre d’actes où le sieur Joubert a été présent, ou qui
lui ont été notifiés.
A in s i, le sieur Joubert n’a pas été trompé.
'
,
E t comment l’auroit-il été par un jeune homme sans
expérience, lui d’un âge beaucoup plus avancé , lui
depuis long-temps exercé aux affaires? •
r .
Ses plaintes, ses allégations de fraude, son accusation,
ne sont donc que les cris d’une colère aveugle ;
Cris impuissans devant des magistrats impassibles;
Cris qui doivent indigner dans la bouchetd’un oncle,
d’ un parrain;- qui se déclare le persécuteur de celui-là
mêm e que la nature, la religion lui imposeroient le
devoir de protéger et de secourir.
j
•
Signé C O U R B Y .
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT,.— Mars 1813.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Courby-Cognord, Jean-Joseph. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant ; contre le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé.
note manuscrite : « jugement confirmé par arrêt du 5 mai 1813. Voyez les motifs à la suite du mémoire de l'intimé. Il y a pourvoi en cassation. »
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2219
BCU_Factums_G2220
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53447/BCU_Factums_G2218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53446/BCU_Factums_G2217.pdf
182fc95210992ac0f15bed221cb98486
PDF Text
Text
! ■:y
MEMOIRE SOMMAIRE
P
O
U
R
J oseph G O U R B Y -COG N O R D , défendeur et
incidemment demandeur
CO N TRE
,
J o seph J O U B E R T . son oncle maternel. demandeur et incidemment déjendeur
i •
QUESTION DE STELLIONAT.
J suis débiteur du sieur Joubert, mon oncle , non
E
pas de 157,648 francs , comme il ose le publier pour me
discréditer et me perdre, mais de 26,000 livres tournois,
en capital, de dette certaine, et de trois ou quatre années’
A
�( O
d’intdret de ce capital, qu’il a été contraint de payer
pour moi au sieur D em ay, banquier, envers lequel il
s’étoit obligé solidairement avec moi.
Il est possible q u e , par le résultat d’une instance d’ordre
"poursuivie au tribunal de T h ie r s , pour la distribution
du prix de revente d’un jardin dont je lui avois fait
"présent, en paroissant cependant le lui vendre7 je lui
doive le remboursement de 6 qn 7,000 ÿr.q u e Godissier,
dernier acquéreur, auroit été forcé de payer aux créan
ciers inscrits de mon père, ancien propriétaire, sauf mon
recours.
Peut-être le dénoûment d’un autre ordre à faire pour
la distribution du prix de la revente du-domaine du
Petit-Sarliève, acquis de moi par le sieur Joubert, en
1809, et revendu sur lui par expropriation forcée, au
mois de novembre d ern ier,'ajo u tera-t-il à ses reprises
contre moi.
En tou t, sa créance, qui n’est encore ni liquide, ni
liquidée, p ourra s’élever à ‘40,000 francs,\naisvnon au
delà.
Je laisse à mes défenseurs le soin de discuter mes in
térêts sur le plus ou le moins dans la liquidation de ma
dette', mais mon honneur, ma liberté, je les défendrai
moi-même! Ma vive sensibilité à l’injure qui m’est faite,
n provoquant contre moi la contrainte par corps, comme
stellionataire, me tiendra lieu de talens. Quelle que soit
somme dont la liquidation future de mes obligations
me constitue d ébiteur, elle ne sera jamais le fruit ni
d*une infidélité, ni d’un manque d’honneur, qui doivent
faire peser surm oi" la' peine de la contrainte par corps.
�(3)
C ’est ce que j’espère démontrer jusqu’à l ’évidence, même
à la prévention.
Sans doute, le fourbe doit être condamné par corps
à la restitution des sommes qu’il a escroquées par les
manœuvres criminelles du stellionat : les bonnes mœurs
l ’exigeoient, et l’article 2069 du Code Napoléon le veut
impérieusement. Mais en même temps que la loi s’est
armée de sévérité contre l’impudent stellionataire qui
trompe de dessein prém édité, par des illusions et des
déclarations mensongères, la crédulité de ceux auxquels
il vend, ou donne des immeubles pour gage de sûreté,
elle a pris soin de prévenir les fausses applications de
cette mesure rigoureuse, en définissant avec1 précision
ce genre d?escroquerie, en ces termes:
« Il y a stellionat, lorsqu’on vend ou qu’on hypo« thèque un immeuble dont on sait rfêtte pas pro« priétaire;
>
' ^
*'• « Lorsqu’on présente comme libres des biens hypo
to•théqués,
« Ou que l’on déclare des hypothèques moindres que
« celles dont ces biens sont chargés. »
' ‘
; Á ces trois cas de stellionat, l’article 2136 en ajoute
un quatrième : il répute aussi stellionataires les maris ou
les tuteurs qui auroient consenti ou laissé prendre frau
duleusement des hypothèques sur leurs immeubles déjà
grevés de celles de leurs femmes ou des m in e u r s , sans
les avoir précédemment rendues publiques, ou sans les
déclarer à ceux avec lesquels ils traitent,
r Les créances qu?a contre moi le sieur Joüberf tirentelles'leur origine d’escroqueries de ce genre , le tribunal
A 2
�C4 )
doit me frapper de la-contrainte par corps sollicitée pâli
mon propre oncle. Malgré l’extreme dureté de ce parent
pour m’obliger'à réparer ma faute , j’aurai mérité ce
châtiment rigoureux et Je m’y résigne. Mais si je n’airien fait qui donne à ma dette une source coupable, rien
qui blesse la bonne fpi ni l’hoinneur *, dans ce cas il n’y
aura rien de punissable dans ma conduite. Car, en toutes
~rnatières ( comme le disoit M . le conseiller d’état Berlier,
lors de la discussion de l’article), la bonne f o i prouvée,
f a it disparoître'.te'délit, ¡-j f (
A lo rs , par.conséquent, au .lieu de nie frapper d’anath èm e, et" de paralyser ma triste existence par la con
trainte par corp s, le tribunal devra me protéger, et me
venger de l’atteinte portée à mon honneur, à ma répu
tation, et à mon cré d it, par, l’éclat d’une diffamation
calomnieuse,, aussi acharnée qu’elle est injuste.
v
Remontons donc à la source des créances que réclame
le, sieur Joubert, pour voir si elles sont, de ma part le
résultat des négociations et des pratiques insidieuses de la
fourberie; là est toutejla question»n fo l) r
i ) »
Je vais suivre, dans l’an^li^e de ces’ créances , l’ordre
chronologique de leur origine,, à -l’exemple du sieur
Joubert.
, '
'
-il .il
,
'
.fi. •
[
Première créance dérivant )d?un acte de vente*du n
avril 1807, 'i '■> r i
•
f •
L e 11 avril 1807, je vends en apparence, et je donne
ra réalité un jardin et un pré attenans, situés à T h ie rs,
au sieUi Joubert, mou oncle, qui exigea cette gratifica.
■
'■
•
�m
ft'oz?, *pn sus des,intérêts
, cours .énprme;tle la place,
oiir"me]iïitsstr ¿Tes fonçis. qu’il 111,’avoît pi-etés ou procures,
e t TM ^t^hlïrisf^^rédTt 'de'sa signature. L e prix f i c t i f
de la vente fut de 8,000 francs, que^ je reconütrsr avoir
reçus;comptant. ^ ’hypothéquai., à,la garantie, un héritage
dépendant de moq domaine de Bicon, sans dire si cet im
meuble étoit libre , OU; grevé d’autres hypothèques.
_ L e jardin vendu provenoit de mon père, et se trouvoit
frqppé“, de son chef*, de différentes hypothèques.' "
~
:~ T e sieur JouberÇ le revend environ 7,000 francs ; l’acquëi’eur fait transcrire, et notifier aux créanciers inscrits;
il s’introduit un ordre,ret le sieur Joubert assure, sans
l’avoir justifié encore, que le prix entier delà revente a été
absorbé pâTr,les collocations et rês fi'àTs^prçlre ; il demande
“que je l’en indemnise- Je,ne,m’y rêfusç pas, pourvu qu’il
justifie ce qu’il avance, sauf mon recours^cqntrejmqn père.
Mais a-t-il la voie de la contrainte par corps contre moi
pour cette créance!?jll le. prétend , parce que je me suis
rendu stellionataire, dit-il,’
pppr, avoir vendu comme
libres, le jardin e tle pré,donf il s’agit, , . ; .y, ,y
n|/if
2°. Pour avoir hypothéqué k Lla; garantie unr héritage
de Bicon , déjà grevé d’autres hypothèques, sans les
déclarer.
v Y
. , I: ; ..f - Je réponds, en premier lieu;:.^is^z Te contrat de vent«;
du 11 avril 1807 ¿-et i;QUgisspz»>|yous psi-Ziasgiirefl que je
yous vendis lç jardin ,efi le prçj J désijgnéjsj.daiis .cejcoulfa-t,
comme libres;thé bien! vou$, mentez à ki justice et au
public; il n’en est rient .Je vendis cet immeuble pure
ment et simplement* sans déclarer.,¡ni qu’il^étoit. libre,
ni qu’il ne l’étoit; pas ; et Uj n’y a point steUionat dans
�( 6 )
tm pareil silence; car la loi ne commande pas d’explication à ce sujet; elle se borne à punir les fausses dé
clarations.
ü n second lie u , vous dites que j’hypothéquai à là
garantie du jardin et du pré un immeuble grevé d’hypotlièques, sans les déclarer : cela peut être ; mais où est
la loi qui répute stellionataire ceux qui hypothèquent
des immeubles déjà grevés d’autres .hypothèques judi
ciaires ou . conventionnelles * „saris*. les..déclarer.?, P o u r
qu’il y ait stellionat dans l’affectation d’un immeuble par
h ypothèque, sans déclarer qu’il est déjà grevé d’autres
hypothèques, il fa u t, suivant l’article 2o5g.,. qu’il ait
été hypothéqué comme libr e , parce qu’alors, et alors
seulem en t, il y a mensonge et dissimulation fraudu
leuse;* et c’est ce qu’on ne trouvera pas dans le contrat
de vente de 1807.
ii ;
Troisièmement. Diréz-vo'us que"si la loi n’exige pas,
sous peine de stellionat, la déclaration de toutes les
.hypothèques dont un immeuble est grevé', lorsqu?il- est
hypothéqué de noüveau', l’article 2136 du Code exige
au moins la déclaration des'v’hypothèques légales de la
femme?
Mi
Je répondrai q u e, sans examiner dans le moment le
mérite de ce moyen, que ¡je' discuterai bientôt en analisant le second chef de 'fcréance * il "suffit, pour en
écarter l’influeûce sur celle1 dont i l 1 s’agit maintenant,
de savoir qué le sieur Jbubert se tint-si bien pour
averti de l’hypothèque légale de la dame G ognord, mon
épç>.uae,'qu’il' remplit^'frdù-f'la >purger, les formalités pres
crites par les articles 2ip $ et ¿Î94 du- Gode Napoléon,
�C7 )
et qu’il atteignit le but. L ’hypothèque fut purgée; dèslors le sieur Joubert n’en ayant point souffert, et ne pou*
vant plus en souffrir, il ne sei'oit plus recevable à la
prendre pour base d’une plainte en stellionat, quand il
y auroit été fondé dans le principe.
D euxièm e c h e f de créance, résultant de la cession
de 26,000 livres tou rn ois, fa it e au sieur D e m a y ,
le 4 janvier 1808. _
^
Nous fîmes solidairement, le sieur Joubert et m o i,
cession - transport au sieur Dem ay, banquier à Clerm ont, par acte passé devant Chevalier , notaire, d’une
créance de 26,000 livres tournois, qui; m’étoit persono e lle , en qualité de mari de la dame Cognord-Courby.,
sur les acquéreurs du domaine de M aison-Neuve, com
mune de Celles, moyennant un prix égal de 26,000 liv.
tournois, qui tourna entièrement à.ma libéi’ation envers
M . de Stradat , de qui j’avois acquisi le /domaine du
Petit-Sarliève. '
n
,1 p
,\\\
La cession fut faite, de notre part, avec promesse de
garantir, fou rn ir et fa ir e va loir, et même de payer
après un simple commandement. La rentréede la créance
cédée, éprouva des obstacles Vie, sieur D em ay,; cessionnaire, en prit occasion de s’adresser au sieur J o u b e r t ,
pour rie contraindre, par la saisie immobilière de son
domaine du"Petit-Sarliève, à remplir fengngement de
payer lui-m êm e, à défaut par les débiteurs d’acquittér
leur dette après simple commandement.
.-.i
l
L e sieur Joubert faisant le sourd, lei domâinè saisi
�C8 )
sur lui a été vendu par ' expropriation, pour acquitter
une dette qui est véritablement la mienne ,< mais^qu’il
avoit volontairement fait sienne, en contractant l’obli
gation de la payer solidairement avec^ moi. Il a donc
un recours contre, m o i, qui'suis le principal débiteur;.
Je ne me refuse pas à l’indemniser de ce qu’il a payé
pour m o i, ainsi que des frais de l’expropriation qu’il a
subie pour,l’acquittement de ma dette ; mais dois-je y être
condamné par corps? O u i, encore -une fois, si cette in
demnité dérive d’un stellionat ; n on , si elle n’a pas cette
origine impure. Eclaircissons'donc le fait.^ii
Trois siellionats sont réunis dans le seul acte de ces
sion de 1808, s.’écrie le sieùr Joubert.*]
i *f
Stellionat} en1 ce que vous avez'veîidd^une créance
qui ne vous appartenoit -pas^ puisqu'elle étoit u n 'çrix
de vente des' biens;‘de'votre'fem m e.
Stellionat, en ce que voùs! avez hypothéqué à la ga
rantie de la 'icession, ••v o tre. bien. jdeJBi çq n , ;déjà grevé
de nombve ^a.xiives'hy'pothèqÎies'^ans en déclarer aucune.
Stellionat, enfin, en ce que vous n’avez pas déclaré
nommément les hypothèques légales de votre épouse.
V oilà trois visions, fruit de la mauvaise fo i, répon
drai-je, et non trois stellionats.
C’est une première vision,'en effet, de prétendre que
je vendis, par l’acte de cession de 1808 , une créance qui
ne m’appartenoit pas1; car les capitaux dûs a la fem m e,
-même lorsqu’elle est mariée sous le régime d otal, appar
tiennent au mari tant qu’il n’y a pas de séparation de
biens, suivant l’axiome maritus dorninus dotis,* qu’il a
seul droit d’en poursuivre le recouvrement, d’en per"
"■
■
■ ’
cevoir
�(9 )
cevoir les intérêts, d’en recevoir le remboursement (art.
1549 du Code Napoléon) ; par une conséquence néces
saire, qu’il a droit de les céder; et q u e, lorsqu’il en fait
cession, comme lorsqu’il les reçoit im m édiatem ent, il
devient débiteur du montant envers sa fe m m e .
D ’un autre côté , il est bien singulier d’entendre le
sieur Joubert me qualifier de stellionataire, pour avoir
vendu la créance de ma femme ( non séparée encore
alors ) , lui qui fit cette vente solidairement avec moi %
et qui , en la faisant, vendoit bien plus que moi ce
qu’ i l savait ne pas lu i appartenir.
En troisième lie u , comment le sieur Joubert ou ses
conseils aveugles, n’ont-ils pas fait attention que la vente
d’une créance n’est pas la vente d’un immeuble, et qu’il
n’y a stellionat , suivant l’article zo 5g du C o d e , que
« lorsqu’on vend ou qu’on hypothèque un immeuble
« dont on sait n’être pas propriétaire ? ( i ) »
E n fin , je demande au sieur Joubert : Qui êtes-vous
pour élever la plainte en stellionat au sujet de la cession
de 1808? Fûtes-vous l’acquéreur ? non : vous fûtes le
covendeur. S’il y avoit eu stellionat, vous en seriez le
complice : il vous sied bien , après cela, de vouloir vous
en faire un titre à la contrainte par corps contre moi !
C ’est une seconde vision de chercher un stellionat
dans l’aflectation de Eicon ù la garantie de la créance
(1) La question de savoir si l’on appliqueroit la peine du stel
lionat aux v e n te s des m eu b les d ’a u tr u i , fut discutée avec beau
coup de sagesse et de profondeur, au Conseil d’état, à la séance
du 16 frim aire an 12. L ’opinion qui en restreignoit l'application
a u x seules ventes d’im m eubles prévalut.
B
�( IO )
c é d é e , sans déclarer les autres hypothèques conven
tionnelles ou judiciaires dont cet immeuble étoit grevé.
Je la dissiperai, en répétant ce que j’ai déjà dit dans
la discussion du premier chef de créance : la loi ne déclare
stellionataire que celui q u i, par des déclarations expresses,
trom pe, en présentant comme libres des biens hypo
théqués : o r , l’on n’a pas un pareil reproche à me faire.
J ’ajouterai que ce n’est pas au sieur J o u b ert, mon
covendeur, que je donnai une hypothèque sur Bicon ;
niais au sieur D em ay, acquéreur; que Joubert lui en
donna u n e , comme m o i, sur son domaine des Brassets y
et qu’il ne fit pas plus que moi la déclaration des autres
hypothèques dont ce domaine étoit grevé ; que tout
ce qu’il m’oppose, retombe sur l u i , et ne prouve que
l’aveuglement et de la mauvaise foi et de la passion qui
l’égarent.
Si le troisième stellionat qu’on prétend trouver dans>
la cession de 1808 étoit réel, le sieur Joubert l’auroit
encore commis en complicité avec m oi; ce qui sufliroit
pour lui fermer la bouche : mais il n’est, comme les
deux autres, qu’une pure vision.
On le puise dans l’article 2136 du Code Napoléon,
qui exige des mai-is, ù peine d ’ê tr e réputés steliionata ires, ou qu’ils rendent publiques les hypothèques
légales de leurs fem m es, en prenant des inscriptions
sur eux-mêmes, pour avertir les tiers avec lesquels ils
contracteroient qu’elles existent, ou qu’ils ne consen
tent et laissent prendre aucune hypothèque ou privilège
sur leurs immeubles, sans déclarer expressément que
lesdits immeubles étoient affectés à Fhypothèque légale
des J e 1unies.
�( II )
Je l’avoue, je fis avec le sieur Joubert, et comme lu i,
dans l’acte de cession de 1808, la faute, m o i, d?hypo
théquer mon domaine de Bicon, le sieur Joubert, son
domaine des Brassets, sans songer à. déclarer que ces biens
étoient grevés des hypothèques légales de nos femmes,
quoiqu’elles n’eussent pas été rendues publiques par des
inscriptions ; et nous fîmes ces fautes avec tous les maris et
tous les tuteurs de l’E m pire, qui ont consenti par contrat
ou laissé prendre par jugement des hypothèques sur
leurs im m eubles, depuis la publication du Code en
l’an 12. Nous ne craignons pas de dire qu’il n’en est pas
un auquel il soit venu en idée de déclarer à son créancier,
avant le jugement de condamnation qui doit donner
hypothèque générale sur tous ses im m eubles, qu’ils
sont déjà frappés des hypothèques légales de leurs femmes
ou de leurs mineurs ; et nous osons ajouter qu’il n’en
est pas un sur cent qui ait pris la précaution de dé
clarer ces hypothèques légales dans les autres contrats
par lesquels il a consenti des hypothèques convention
nelles.
Quelle est la conséquence ? Que si nous sommes
stellionataires, le sieur Joubert et m oi, et comme tels
contraignables par co rp s, pour les suites de toutes
les hypothèques que nous avons consenties ou laissé
prendre sans déclaration des hypothèques légales de nos
femmes et de nos m ineurs, tous les h o m m e s m a rié s et
tous les tuteurs de l’E m pire. tous les pères, toutes les
inères qui exercent la tutelle légitime de leurs enfans,
soïïTstellionataires, et c o n tr a ig n a b le s par corps comme
nous; de sorte qu’il ne fa u d ra pas compter les stellionataires par centaines, ni par milliers seulement, dans
B 2
�C 12 ■
)
l’E m pire, il faudra les compter par millions, et cela sans
que personne s en doute. Quelle effroyable loi que celle
qui auroit des conséquences si terribles! N on, il n’est
pas possible de. donner à l’article 2136 du Gode une
interprétation si alarmante pour la société entière, si
flétrissante pour tous les chefs de famille. Ecoutons
l ’auteur des Lois civiles, sur la manière dont il faut expli
quer et entendre, dans l’exécution et la pratique, les
lois q u i, pfises à la lettre, conduiroient à des déci
sions d’un danger effrayant, ou d’une injustice révol
tante. « Lorsqu’il arrive, dit ce grand homme ( 1 ), que
« le sens d’une lo i, tout évident qu’il paroît dans les
« term es, conduiroit à de fausses conséquences, et à des
« décisions qui seroient injustes, si elle étoit indistinc
te tement appliquée à tout ce qui semble compris dans
« l’exception, alors l’évidence de l’injustice qui suivroit
« de ce sens apparent, oblige à découvrir, par une espèce
« d’interprétation , non ce que dit la lo i, mais ce qu elle
« veut dire , et à juger sur son intention quelle est
« l’étendue et quelles sont les bornes que doit avoir
« son sens. »
C’est i c i , ou jamais, le cas d’appliquer celte sage
règle-, cherchons donc ce que veut dire l’article 2136
du Code N apoléon, puisque ce que paroissent dire ses
expressions, prises à la lettre, est d’une injustice évi
dente. La discussion du Conseil d’état ne nous laissera
pas long-tem ps dans l’incertitude ; nous y puiserons
l’esprit de la lo i, et nous ÿ verrons, comme dans les
. (1) Lois civiles, livre préliminaire, titre 1 " ., sections, au
préambule.
�( 13 )
discours des orateurs du G ouvernem ent, ces grandes
maximes :
« En matières civiles, la règle générale interdit la
« contrainte par corps. »
« Dans les exceptions, la loi recherche si la cause
« de la dette n'est pas telle, que le débiteur soit indigne
« de toute protection, >et s i, lorsque son immoralité
a ne l’expose pas à des poursuites criminelles, l’ordre
« social n’exige pas qu’elle, soit réprimée par la pri« vation de sa liberté , jusqu’à ce qu’il ait réparé sa
« faute en payant sa dette ( i ). »
V oilà la vraie pierre de touche. L e stellionat qui
donne lieu à la contrainte par corps, ne se rencontre
que là où il y a de l'im m oralité, de la fr a u d e , de la
su rp rise, de la part du débiteur dans la cause de la
dette. Jamais on ne doit donc le placer, là où il n’y a
eu que de l’inadvertance, ou de l’ignorance et de la
simplicité, sans mauvais dessein, et point de surprise
ni de mauvaise foi.
O r , je vous le demande, sieur Joubert, avions-nous,
vous et m o i, le moindre dessein de tromper le sieur
D em ay, lorsque, dans l’acte de 1808, nous lui con
sentîmes hypothèque de garantie, sur nos biens de Bicon
et des Brassets, sans lui déclarer qu’ils étoient déjà grevés,
le m ien, des hypothèques légales de ma femme, et les
Brassets, des hypothèques légales de votre épouse ?
rîmes-nous autre chose, en cela, que suivre le torrent
de l’exem ple? stipuler comme tout le monde stipuloit
(1) D iscours de M . le C o n seiller d’état Bigot de Préam eneu,
présentant la loi relative à la contrainte par corps.
�^ ( *4 )
alors et stipule encore aujourd’hui ? Si nous ne parlâmes pas
des hypothèques de nos femm es, fut-ce par dissimula
tion et pour donner une fausse confiance au sieur D em ay,
o u , seulement, parce que nous n’y songeâmes pas plus
que le notaire, ni le notaire pas plus que nous?
L e sieur Demay n’ignoroit pas que nous étions mariés
l’un et l’autre ; et connoissant ce fa it, ne devoit-il pas
en conclui'e que nos épouses avoient des hypothèques
légales sur nos biens ? Donc il ne fut pas trompé ; donc
il n’y eut point de stellionat dans cette négociation.
A tout prendre, quand la subtilité auroit donné une
action en stellionat au sieur D em ay, contre nous d eu x,
vous appartiendroit-il, à vous , mon com plice, de l’exercer contre m o i, pour l’indemnité que je vous dois ?
à v o u s, mon on cle, qui aviez été un dès négociateurs
de mon mariage ; qui aviez assisté au contrat et à la cé
lébration ; qui connoissiez si bien les hypothèques légales
de ma femme , que vous aviez rempli les formalités
nécessaires pour les purger sur la vente de 1807 ? contre
m o i, qui ne vous ai donné aucunes hypothèques quelcon
ques pour l’indemnité que vous réclamez aujourd’hui ?
En voilà trop pour écarter toute action de stellionat
de la part du sieur Joubert contre m o i, pour raison de
la créance de 2.6,000 fr . r e m b o u r s é e au sieur D em ay,
ou qui est au moment de l’être par la distribution du
prix de la vente du Petit-Sarliève. Il n’y a eu de ma
p a rt, ni fourberie, ni mauvaise fo i, ni fraude, ni sur
prise, soit envers le sieur D em ay, qui ne s’en est jamais
plaint, soit envers vous. Il n’y a donc pas eu de stellionat
répréhensible; car le stellionat, je ne saurois trop le répé
te r, consiste essentiellement, iniquem ent dans le dessein
de tromper.
�( i 5 )
Venons à la troisième créance, par laquelle le sieur
Joubert prétend aussi me terrasser avec l’arme du stel
lionat. ,
!1 .
Troisièm e créance.
¡,
Je revendis au sieur Joubert, par contrat du 9 juillet
1809, la principale portion ,du petit domaine de Sarliève,
que j’avois précédemment acquis de M . de Stradat. L e
prix de cette revente fut de 74,000 francs : le contrat
en porte quittance ; mais il est reconnu et justifié par
écrit que je n’en reçus pas un centime. L ’acquéreur se
le retint en payement de différentes sommes que je lui
de vois, ou pour acquitter les dettes dont je le chargeai.
Il fut convenu, par une clause expresse, que le sieur
Joubert soufïïiroit les hypothèques conservatoires des
acquéreurs des biens de mon épouse ainsi que celles
des créanciers envers lesquels il étoit tenu de me libérer;
et j’hypothéquai encore à la garantie de la vente mon
domaine de B icon, que j’ai cédé depuis à mon épouse,
par voie d’échange et remploi de ses propres aliénés,
à l’instigation du sieur Joubert lui-même, et par con
ventions arrêtées entre nous , au même instant où la
vente de Sarliève fut passée, afin de faire cesser par ce
moyen le péril d’éviction dont se sont prévalus les acqué
reurs des biens de mon épouse, pour refuser de payer
les 26,000 livres tournois en capital, dont ils x’estent dé
biteurs sur les p rix , au sieur D em ay, à qui nous avions
cédé solidairement cette créance, par l’acte du 4 janvier
1808, et de rendre ce capital et les intérêts arriérés,
libres et disponibles.
{
"w
L e sieur Joubert ne peut désavouer les conventions
�.( i 6 )
faites entre nous, au sujet de la vente que je fis à mon
épouse du bien de Bicon. L e sieur Joubert exigea cet
échange; les sieurs Simonnet et B ayle, qui furent pré
sens à la vente de Sarliève , en déposeroient s’il le falloit.
Cela résulte d’un écrit du sieur Simonnet qui avoit la
confiance du sieur Joubert.
Aujourd’h u i, le sieur Joubert se présente à la justice
comme ayant été évincé et exproprié de ce domaine,
par l’effet des poursuites de mes créanciers inscrits, et
il en conclut que je suis tenu envers lui de la restitu
tion du prix d’acquisition de ce domaine, des loyaux
coûts, de 5o,ooo francs de dommages-intérôts; mais il
'n’en imposera pas à la justice par ce détour artificieux.
S’il a été exproprié, ce n’est pas qu?il ait éprouvé la
moindre poursuite, de la part de mes créanciers inscrits,
pour l’obliger, ni à leur rapporter le prix de son ac, quisition, pour être distribué, ni à les payer ou à dé
laisser le fonds h ypoth équé, en conformité des articles
2167 , 2168 et 2169 du Code. Il n’a pas reçu une
seule sommation hypothécaire. S’il a été exp ro p rié,
ce n’est pas comme détenteur d'un immeuble hypothé
qué aux créanciers de son vendeur, c’est seulement comme
personnellement obligé envers le sieur D em ay, et sur
la poursuite de ce créancier , faute de payement des
26,000 liv. tournois qui lui avoient été cédées par l’acte
— du 4 Janvier 1808, avec promesse de fo u r n ir et fa ire
yaloir^~rnéme de payer lui-même après commande
ment. Dans cet état de choses , il est évident que le
sieur Joubert, n’ayant été ni dépossédé, ni exproprié
par action hypothécaire, du c h e f de son vendeur, il n’a
point fa c tio n en garantie et indemnité à exercer, pour
"
*-------------------------------------------raison
�( 17 )
raison de l’inexécution du contrat. La seule indemnité
à laquelle il puisse prétendre, se réduit au rembour
sement de 26,000 francs, qu’il a été ou sera contraint
de payer pour moi au sieur D em ay, comme obligé soli
daire , par l’acte de 1808, des intérêts de ce capital,
et des frais de l’expropriation qu’il a soufferte à l’oc
casion de cette créance, de laquelle je me reconnois
son garant, et qui est la même que celle que je viens
d’analiser au paragraphe précédent. L ’indemnité que je
lui dois à ce sujet ne prend pas sa source dans le contrat
de vente de 1809 ; elle la prend dans la cession du 4
janvier 1808.
Il suit de là que quand il y auroit dans la vente de
1809, quelques germes d’une action en stellionat, ce
seroit sans conséquence pour la cause, dès que je ne suis
passible d’aucune condamnation motivée sur l’inexé
cution de ce contrat, j v
""TVÎais trouve-t-on même des germes de stellionat dans
les stipulations de ce dernier contrat ? Non certes ; car
il est bien plus exempt de toute imputation de fraude
et de surprise, qu’aucun des deux actes précédens dont
je viens de justifier la pureté.
i®. Le bien de Bicon, hypothéqué à la garantie de ce
dernier acte, comme à celle des prem iers, n’a pas plus
été déclaré libre d’autres hypothèques par c e l u i - c i q u e
par ceux-là; au contraire, il fut dit qu’il étoit déjà grevé
d’inscriptions dont l’acquéreur déclara avoir connoissance.
20. 11 n’a pas gardé , comme les autres, un silence
absolu sur les hypothèques dont il étoit déjà grevé.; au
contraire, il en déclare plusieurs, pour cliargprjexpvessèment le sieur Joubert de les supporter.
�( 18 )
3°. On me reproche de ne pas les avoir déclarées toutes;
et s’il en existoit d’autres, soit conventionnelles, ni ju
diciaires, que celles que mon acquéreur devoit supporter,
les causes en avoient cessé avant l’action en stellionat du
sieur Joubert, ainsi que je peux l’établir. Mais quand
il en auroit existé quelques antres, où est la loi qui me
frapperoit de la peine du stellionat, pour ne pas les avoir
déclarées?
Je lis bien dans l’article 2059 du Code, qu’il y a stel
lionat lorsqu’on présente comme libres des biens hypo
théqués, ou qu’on déclare des hypothèques moindres que
celles dont ces biens sont chargés; mais je ne vois là rien
autre chose, si ce n’est que celui qui déclare des biens
entièrement libres est stellioncitaire, si ces biens sont
hypothéqués, et que celui qui les déclare libres de toute
hypothèque, si ce n’est de telle et de telle qu’il désigne,
est stellionat aire aussi, dans le wcas où sa déclaration se
trouve infidèle ; et pourquoi ? parce que tous deux
ont trompé. Mais je n’y vois que cela; et tout homme
sensé et de bonne foi ne pourra rien y voir de plus.
O r , qu’est-ce que tout cela a de commun avec l’état
de la question ? Quand je déclarai certaines hypothèques
dans le contrat de vente de 1809, ce ne fut pas dans
Tintérêt de Pacquéreur, ni pour obéir à aucune injonc
tion de la lo i: je les déclarai seulement dans mon intérêt
personnel, et pour obliger l’acquéreur à les souffrir, sans
pouvoir exiger que je lui en rapportasse mainlevée. Une
déclaration faite dans ce sens et pour ce but, 11e devoit
pas être générale et de toutes hypothèques, parce que
je ne prétendois pas assujétir l’acquéreur à les supporter
toutes : elle devoit jm .contraire être limitée à celles que
�( i9 )
j’entendois qu’il supportât; et c’est prendre les choses à
rebours^que de vouloir faire sortir de là une dissimu
lation frauduleuse et caractéristique du stellionat. En
déclarant certaines hypothèques ^ je n’ajoutai pas que,
soit le bien vendu, soit le bien hypothéqué, étoient
libres de toute autre hypothèque. C’est tout ce qu’il faut
savoir, pour voir disparoître jusqu’à l’ombre du stellionat.
4°. La vente de 1809 est également plus à l’abri de
censure que celles de 1807 et de 1808, relativement au
défaut de déclaration des hypothèques légales de ma
¿femme , qui frappoit le domaine de Bicon , hypothé
qué à la garantie de cette dernière vente ; car elle n’a
pas gardé un silence absolu sur ces hypothèques légales,
comme les précédentes, puisqu’elle parle des hypothèques
de garanties des acquéreurs des biens de ma fem m e,
pour obliger le sieur Joubert à les supporter.
Comment p ôu rroit-il, après cela , rester des nuages
sur la pureté de ma conduite dans toutes les négocia
tions qui ont eu lieu entre le sieur Joubert mon oncle
et m oi?
E n fin , la vente de 1809 fut suivie, le même jo u r,
d’un acte sous seing p riv é , dans lequel on voit que le
sieur Joubert n’avoit pas payé le prix de la vente, quoi
que le contrat en contînt quittance. Dans l’acte sous seing
p r iv é , le sieur Joubert s’obligea à acquitter le prix en
différentes délégations; et il fut ajouté que les titres des
créances resteroient entre les mains du sieur Jo u b ert,
j u s q u ’à rentière mainleyée^de joutes les inscriptions eq
général qui existoient sur le bien vendu.
Il fut convenu,,, à cet effet,- que j’aurois deux années
pour me libérer envers tous mes créaücfeïs;
�( 20 )
Il ne peut donc pas y avoir de stellionat, puisque le
sieur Joubert fut chargé d’acquitter une partie des ins
criptions, et que je m’obligeai de payer les autres, et
d’en rapporter mainlevée dans le délai prescrit. Il est
im possible, dans cette position, de m’accuser de réti
cence et d’infidélité. Toutes les idées du sieur Joubert
sur le stellionat, sont contraires aux principes, ou aux
actes qui lui sont personnels. Si l’une des parties pouvoit
mériter des reproches pareils, il est évident que c’est le
sieur Jo u b ert, qui dissimule tout ce qui s’est passé entre
lui et m o i, ou qui voudroit, au mépris des lois les plus
claires, les plus positives, obtenir des condamnations
contre lesquelles s’élèvent sa propre conscience et les
raisons les plus évidentes.
Je m’arrête, et j’attends sans crainte pour mon hon
neur et ma lib erté, le jugement d’un tribunal qui ne
connoît que la loi et la justice.
L E jurisconsulte ancien soussigné, croit la justification
du sieur Joseph Courby, de toute tache de stellionat,
portée jusqu'à la démonstration, dans le mémoire q u i
précède.
.
D é lib é r é à Clermont-F errand} le 26 avril 1812.
Signé E.B E R
GIER.
f
A. RIOM de l’imp. d e THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison Landriot. — Avril 1812,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Courby-Cognord, Joseph. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire sommaire pour Joseph Courby-Cognord, défendeur et incidemment demandeur ; contre Joseph Joubert, son oncle maternel, demandeur et incidemment défendeur. Question de stellionat.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1807-1812
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2217
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2219
BCU_Factums_G2220
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53446/BCU_Factums_G2217.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53380/BCU_Factums_G2010.pdf
6b32cdaa7fa2fe735d9128571ea31baf
PDF Text
Text
P R É C I S
EN
RÉPONSE,
P O U R
t
E X P E R T O N , avoué licencié
au tribunal civil du P u y , intimé;
J e a n - B aptiste
C O N T R E
G ilb e r t
Q
G IB O N ,
a v o ca t,
a p p e la n t.
UAND on a soif de la fo r t u n e , q u a n d , p o u r cou rir
à cet unique b u t, on n églige ses proches jusqu’à la veille
de leur d écès, q u ’alors on ne se souvient d’eux que p ou r
ten ter, par obssession, de leur arracher des dispositions
gratuites, on o u b lie , l’instant d’a p rès, ceux de qui on a
obtenu quoique chose, et on ne se souvient de ceux dont
on a essuyé les refus que p o u r les m audire et insulter à
leur m ém oire.
Aussi G ilb ert G ib o n ne se r e t r a c e - t - i l aujourd’hui
M a rg u erite G i b o n , sœ u r de son p è r e , que com m e un
être disgracié de la n a tu r e , o n é re u x à sa f a m ille , et
a u q u e l, tout au p lu s , on devait q u e lq u e p itié.
A
�C M
C ’est assez naïvem ent exp rim e r les sentimens q u ’il avoit
p o u r elle , et le genre de ses affections. Il avoit q u elq u e
p itié p o u r sa ta n te , et beaucoup d’aiFection p o u r son
p atrim oine : d’où il est évident que s’il daigne encore
se souvenir q u ’il eut une tante appelée M a r g u e r ite , ou
suivant lui M a rg o u to n , ce n’est pas q u ’il ait la m oindre
envie de la regretter; c’est uniquem ent parce q u ’il a con
v o ité inutilem ent sa fortune.
Beau titr e , en effet, p o u r prétendre à la tendresse de
sa tante, exclusivem ent à tous autres, exclusivem ent sur
tout à E x p e rto n qui l’avoit recueillie dans sa maison depuis
plusieurs an n ées, qui lui p ro d igu o it les soins de l’affec
tion , et avec q u i elle a v é cu dans l’intim ité jusqu’au
dern ier instant de sa v ie !
E xcellen t mo)7en de persuader à la justice que le p r é
tendu testament resté im parfait fut un acte spontané de
M a rg u erite G ib o n ; qu e par reconnoissance p o u r la p itié
que G ib o n lui p ortoit de l o i n , il lui v in t en id é e , sur
son lit de m o r t , et dans la maison m êm e d ’E x p e r t o n ,
d’appeler un notaire^ p o u r lu i ôter le m oindre espoir
dans son h éréd ité , et la transmettre toute entière à
G ib o n !
M ais la v é rité se fait jo u r quelquefois i\ travers le
b o u rd on n em en t des passions ; et m algré sa résolution
bien prise de trom p er la justice sur le f a i t , le sieur
G ib o n n’a pu retenir cette expression de son âme dans
laquelle il s’est peint tout entier.
Il n’eut pas m anqué non p l u s , s’ il n ’eût cru p o u v o ir
prétendre à l’h érédité de M a r ie -M a r g u e r ite , de dire à
la justice q u ’elle étoit asth m atiqu e, et accablée d ’iuiir-
�( s ) ,
mités ; que bien loin de p o u v o ir administrer au-dedans
et a u -d e h o rs, elle étoit six mois de l’a n n é e , au m o in s ,
incapable de se servir e lle -m ê m e , et que le plus souvent
sa sœur la soign oit, q u oiq u e boiteuse, q u oiq u e son aînée.
E lle n’eût encore été à ses y e u x q u ’un être inutile et
insupportable : elle ne lui a paru tout d ’ un cou p robuste
et a c tiv e , que parce q u ’il a cru que cette idée p o u v o it
rendre vraisem blable la singulière préférence q u ’il sup
pose à J e a n - L o u i s G i b o n , dans la distribution de sa
fortune.
A ussi le sieur G ib o n a-t-il principalem ent em ployé
ses efforts à jeter sur E x p e rto n une défaveur q u ’ il redoutoit p o u r l u i - m ê m e , et q u i à ses y e u x produisoit
ce double effet, et d ’élo ig n er ce q u ’il vedoutoit le p lu s ,
et de déverser sur lui toute la bienveillance de la justice.
P o u r cela il a fallu arranger artistement des faits controuvés et étrangers à la cause, faire un tableau infidèle
de la vie d ’E x p e rto n ', l ’accuser hautem ent d ’a v o ir en levé
l ’argent com ptant de sa tante, crier le p rem ier au v o le u r ,
tout cela p o u r détruire,d’avance PeiTet de cette accusation
contre lu i-m êm e ,.ç t ne laisser à son adversaire que l’ap
parence de la récrim ination.
M ais la justice ne se laisse pas entraîner par des illu
sions; la C o u r q u oiq u e moins à portée que les juges du
P u y de connoître spécialement les parties et les circons
tances de la cause, sera bien tô t convaincue que le tri
bunal près duquel l’intimé exerce ses fonctions, et q u ’on
dit lui a vo ir accordé tant de f a v e u r , n e s’est mépris
ni sur la ca u se , ni sur les personnes, ni sur l’application
, des principes du droit.
A
2
�2>%Q
(4)
F A I T S .
J e a n -L o u is, M a rgu erite et M a rie -M a rg u erite G ib o n ,
tous les trois célibataires, avoieut constamment cohabité
et vécu ensemble dans la plus grande intim ité à L a n d o s ,
leur pays n a ta l, lorsqu'ils vin ren t en la ville du P u y ,
se réu n ir à M a rie G i b o n , fçm m e E x p e r t o n , leur sœ ur,
et au sieur E x p e r t o n , leu r neveu : ils ne se sont plus
quittés ; la m o rt seule les a séparés..
O n n ’a pas à rechercher ici ni l’o r ig in e , ni l’ état de
la fortune du sieur E x p e r t o n dans les prem ières années
d e sa v i e ; on snit assez que les parties sont enfans du
frère et de la s œ u r, que leurs parens étoient de la m êm e
condition ; et si G ib o n a osé parler d’E x p e rto n com m e
d*un être m isé ra b le , n é dans l’in d ig e n ce , et destiné à
y traîner sa v i e , ce n’est là q u ’ un ton de m épris trèsm éprisable assurém ent, surtout en tre proches.
S’ il faut en croire G ib o n , ce fut encore p a r p itié que
son père reçut E xp e rto n chez lu i; c a r , à l’entendre, ce
sentiment p ou r ses proches seroit chez lui une vertu
héréditaire. M ais p o u rq u o i ces détails m in u tie u x ; p o u r
quoi surtout ces récits inexacts, étrangers à cette cause,
si ce n ’est p o u r p ro u v e r à tout le m onde q u ’il a besoin
de s’entourer d ’ une foule de petits moyens p ou r donner
une c o u leu r de vraisemblance h des faits q u ’ il suppose
capables de disposer favorablem ent les esprits? Il faut
donc parler des faits.
G i b o n , faisant scs études au P u y , habitoit et v iv o it
chez E x p e rto n p è r e , son oncle. Ses études fin ies, son
�( 5)
p ère l’envoya à T o u l o u s e , et à la m êm e é p o q u e , E x perton fut en v o yé chez le sieur G i b o n , son o n c le , pra
ticien à P radelles, où il p rit quelque teinture de pratique.
L o rs q u e G ib o n fils revint de T o u lo u se , érigé en avocat,
son p è r e , alors juge des lie u x , lui laissa son étu de; mais
com m e il lui étoit interdit de p ostu ler, il profita d ’E x perton , sous le nom duquel il commença sa fortune
p e rso n n e lle , sans q u e jamais E x p e rto n ait reçu ni de
m andé , m algré sa m is è r e , la m oin dre gratification. Son
p ère l’entretenoit ; et lorsqu’ il avoit besoin de quelque
chose de p lu s , il le demandoit à ses tantes de Landos.
A p r è s un certain tem p s, E x p e rto n revin t au P u y ; il
entra clerc chez J o u v e , p ro c u re u r, où il a resté plusieurs
années. L a rév o lu tio n su rvin t;,le s sieurs G ib o n père et
fils furent persécutés : et puisque l’appelant a cru néces
saire ou utile à sa cause de rappeler quelques traits bien
défigurés de la v ie d ’E x p e rto n , p e u t-ê tre sa m ém oire
auroit pu lu i fo u rn ir et son cœur surtout lui rappeler
la conduite que tint E x p e rto n envers sa famille et lu im ê m e , dans ces temps d’orage et de persécution.
M ais ce n’est pas ce dont il s’agit. 11 faut arriver au
fait de la cause.
E x p e rto n fixé au P u y , y fut d ’abord défenseur offi
c ie u x , puis reçu a v o u é ; la dame sa m ère quitta la c o m
pagnie de son fr è r e et de ses sœurs p o u r ve n ir habiter
avec lui. Ils vivo ien t paisiblement ensem ble, lorsque son
oncle et ses d e u x tantes vin ren t partager avec eu x la
tranquillité de leur mén.ige.
L a dame E x p e rto n m ourut la p r e m i è r e ; son frerc et
�. ( 6 )
ses d e u x sœurs ne continuèrent pas m oins de cohabiter
et de v iv re avec E x p e t t o n , leur n e v e u ; ce q u i d é m o n treroit assez, san s'qu ’ il ait besoin de le 7rem arquer luî—
m êm e , q u ’ il ne leur donnoit que des p r e u v e è d e respect
et d’attachement.
E x p e rto n avoit acquis une maison au P u y. Il est faux
q u e jamais celle de la v e u v e B enoît ait été vendue à Jean-Louis G ib o n : ce n’est l à ' q u ’u n fait a r tic u lé , com m e
tant d ’autres, p o u r le besoin de la cause.
L e sieur G ib o n , dit-on , ne cessa de s’en plaindre ! Cela
est bientôt dit, m aiscela p erd to u tesa vraisem blance quand
on avoue que L o u is G ib o n et ses sœ u rs, bien loin de
retou rner h L an do s où ils a vo ient encore leur habitation
m e u b lé e , su iviren t E x p e rto n dans là maison de la ve u ve
E sbrayat, q u ’il venoit d ’acq u é rir; quand on saura surtout
q u e J e a n - L o u i s G ib o n ne tomba pas malade peu de
tem ps a p r è s , et qu ’il vécut vingt-six mois sans se p lain d re,
toujours à la com pagnie d ’E xperto n ;
C e seroit une lég ère présom ption , :pcu t-ô tre, du m é
contentement de L o u is G i b o n , s’ il «voit testé im m édia
tement après la ve n te ; mais il sùifit’de rapprocher les dates
p o u r se convaincre du co nt ra ir e : la vente est de vendcmiaii-e an 1 0 , le testament du 25 frim aire an 1 2 , et le
décès d u 'm ê m e jour.
C e n’est pas le m om ent de s’appesantir sur les circons
tances du testament de J e a n - L o u i s
G ib o n . L e sieur
E x p e rto n sait, et le sieur G ib o n sait com m e lu i, que le
frère et les deux sœurs avoient eu constamment la réso
lution de se laisser m utuellem ent leur fortune : tous trois
�( 7)
célibataires et d’un âge a v a n c é , leurs besoins et leurs
habitudes étoient les m ê m e s, leurs affections récip ro
ques égalem ent distribuées.
L e sieur G ib o n sait aussi que pleins de gratitudes p o u r
les attentions et les égards d ’E x p e rto n , leur intention
étoit aussi de lui laisser sinon to u t, au moins la majeure
partie de cette fo rtu n e; sans cela1 p o u rq u o i tant de p r é
cautions et d ’efforts p o u r les en d é to u rn er?
Q u o i q u ’il en s o it, ce testament est fait au profit de
M a rg u erite ; en quoi certainement il ne faut ni tro uver
ni ch ercher aucun m o tif d’exclusion p o u r E x p e r t o n , mais
l ’idée bien naturelle de laisser q u elq u ’aisance à sa sœur dans
un âge a v a n c é , ou p o u r m ie u x d ire, à ses: sœurs, puis
q u ’ une lon gue habitude de v iv r e ensemble les avoient
rendues nécessaires l ’ une à l’a u tre , et q u ’ il n’a voit pas de
raison de croire q u ’elles dussent jamais se séparer.
Ici le sieur G ib o n disserte beaucoup sur les intentions
d e son oncle ; car il établit toute sa cause sur la vertu
de certaines présom ptions q u ’il croit a vo ir rendues v ra i
semblables.
E t d ’abord il avance que son oncle s’en étoit ouvert
au curé de L a n d o s , en
quoi le sieur E xp erto n est
fondé à croire q u ’ il eût été plus réservé si le curé de
L an dos ne fut pas décédé dans l’ intervalle ; car p réci
sément le sieur G ib o n lui avoit dit plus d ’ une fois q u ’il
v o u lo it laisser ses biens :\ M a r g u e r it e , sa sœur aînée.
G ib o n ajoute q u ’ Experton lui-m êm e s’est vanté d’a vo ir
dirigé le testament au profit de M a rg u e rite ; ce qui
d ’abord est in e x a c t , et en second lieu ue seroit <l’au
cune conséquence.
�( 8 ) .
E n p rem ière instance, il étoit allé plus l o in ; il avoit
avancé q u ’E x p e rto n étoit présent au testam ent, et q u ’ il
l’avoit inilnencé directem en t; E x p e r t o n , sur le c h a m p ,
offrit de s’en rapporter à la déclai-ation du notaire, tout
d é v o u é q u ’ il étoit aux intérêts de G ib o n : on se tut.
G ib o n détaille ensuite une foule d’actes qui suivirent
le décès de son o n c le ; il.p réten d en tirer la conséquence
que M a rg u erite se considéra et fut reconnue com m e
seule héritière. M ais que prou veroit le fait en lui-m êm e?
tous les actes sont consentis par. M a rg u erite ; d’ailleurs,
on le r é p è t e , les deu x sœurs viva n t ensem ble, adm inistroient également ; quand l'une étdi.t m a l a d e , l ’autre
s’en occupoit p l u s spé c ia le m en t ; et tous les actes se
faisoient au nom de M a rg u erite , c’est-à -d ire, de celle
au profit de qui é to it.d irig é le-testament.
N ous arrivons a u x événem ens qu i se rapprochent le
plus de la m ort des deux sœurs. Ici le sieur G ib o n a
coulé fort rapidem ent : les actes de la cause vo n t ap
prendre q u ’il a été au moins im prudent en accusant
E xp e rto n de sp oliatio n , sans p re u v e s, sans indices, sans
le m oindre adm inicule qu i pût justifier cette gra ve in
culpation.
D ep uis près d ’ un an E x p e rto n , dont on exagère tant
la p r é v o y a n c e , avoit reçu dans sa maison 1 1 dame G ib o n ,
sœur de l’appelant : scs deu x taules étant l’une et l’autre
fort cassées, la dame G ib o n les soignoit; elle étoit à la
tête du m énage com m un. L e sieur G ib o n ne manqua
pas de mettre à profit cette circonstance.
M a r i é - M a r g u e r i t e G ib o n fut fr ap p ée d ’a p o p l e x i e , le
7 v e n d é m ia i r e an 14 > dit -on ; E x p e r t o n étoit a b s e n t, il
ne
�(9)
ne revin t que d ix jours après cet accident, sur l’avis que
lui en donna la dame G ib o n , en lui m andant qu ’elle
avoit tous les soins possibles de sa tante. Il trouva sa tante
assez m a lad e, entourée de diverses personnes : la dame
.Gibon ne la quittoit pas un instant.
- C ’est au m ilieu de tous ces surveillans, intéressés p o u r
la p lu p a r t, et m êm e pendant son absence, q u ’on l ’accuse
d’a vo ir enlevé l’argent de sa tante.
E x p e rto n ignore si sa tante avoit une somme d ’argent;
mais à le supposer ainsi, ce qui peut ê t r e , au moins estil bien certain q u ’on n’a pas à lui en dem ander com pte.
J u s q u e - là on avoit gardé des mesures p o u r amener
les deux tantes à disposer au profit de G ib o n ; cet é v é
nement donna plus de hardiesse; peut-être trouva-t-on
dans l’enlèvem en t de l’a rg e n t, et un bénéfice n e t, et le
m oyen de noircir E x p e rto n dans l ’esprit de sa tante.
Q u o i q u ’il en soit, un testam entfutdressé le 12 brum aire
an 1 4 , sous le nom de M a rguerite. F u t - i l consenti par
l ’aînée ou la plus jeune des deux sœurs? l’acte lui-m êm e
ne décide pas cette question ; mais il ne faut pas en omettre
les circonstances.
L a testatrice fut conduite chez E y r a u d , n o ta ire, le soir
très-tard; le testament fut dressé; et ce q u ’ il y a de plus
sûr au m o n d e , c’est q u ’elle ne le dicta pas, que m êm e
elle ne déclara pas spontanément les intentions q u ’on lui
p rê te ; cependant l’acte en fait foi.
C e q u ’ il y a de certain aussi, et le sieur E xp erto n en
prod uiroit la p reu ve s’ il ne vo u lo it pas garder certains
inénagemens , c’est q u ’il fut dressé avant la venue de
�OJ&x £r*b( 10 )
quelques tém oins; qu e l ’ un d’e u x , au m oins, fut appelé
tr è s -ta r d p o u r signer un te sta m e n t; q u ’il prom it d ’y
a lle r ; q u ’ il y alla en e ffe t; qu’ il ne co n n o isso it pa s la
te sta trice ,• que néanm oins on le fit signer com m e tém oin
du testament ; q u ’ il y répugn a d’abord ; que cependant il
le fit parce q u 'il Va voit p rom is. L e sieur E x p e rto n ne
sait pas s’ il eu fut de m êm e des autres, mais il a droit de
le soupçonner.
Cette tante q u i , suivant G ibo n , s’exhaloit en rep ro
ches et plaintes amères contre E x p e r t o n , sur l’eulèvem en t
de son a rg e n t, cette tan te, à qui on arrache une insti
tution au profit de G i b o n , ne lègu e pas moins io o o fr.
à E x p e r t o n , h u i t ’ou d ix jours après ce prétendu v o l :
quelle invraisem blance!
M arie-M argu erite G ib o n vécut jusqu’au n mars 1809;
et c’est ici q u ’il faut encore se fixer sur la conduite de
G ibo n .
Ce n’étoiè pas assez p o u r lui de p o u v o ir se dire héritier
de la plus jeune des sœurs; et q u o iq u e , suivant l u i , la
fortune de l’oncle lui appartînt déjà en e n tie r, il ne jeta
pas moins ses regards sur le m od iq u e patrim oine de
l ’aînée.
Q u e l fut son b u t ? c r a i g n i t - i l que la fortune de son
oncle ne lui fût pas bien assurée par le prem ier testa
m e n t ? v o u lu t-il, par un acte p u b lic , faire prendre une
fois eu la vie à M a rgu erite le nom de M a r g o u to n ? Ce
fut peut-être l’ un et l’autre ; mais c’est ce qu ’il im porte
peu de rechercher.
G ib o n étoit venu au P u y p ou r com m ander le testa-
�( ii )
ment du 12 b ru m a ire ; il y revint encore après le décès
de M a r ie - M argu erite : et p o u r ne pas faire un voyage
in fr u c tu e u x , il m it p o u r la seconde fois tous ses aflidés
en m ouvem ent.
L e 17 m a rs, de grand matin , M a rg u erite G i b o n , dans
la maison m êm e d ’E x p e r t o n , est tout d ’un coup assiégée
p a r un n o t a ir e , des t é m o in s , et toutes les personnes qui
l ’entouroient. O n com m ence un testament q u ’elle ne
v o u lo it ni dicter ni faire; déjà le p réam bule étoit r é d ig é ,
et bien entendu M a rgu erite appelée M a rg o u ton : le
notaire en étoit à l’institution d ’h éritie r, lorsque E x p e rto n
a rrive inopiném ent.
E to n n é de cette assemblée, il in terro ge; on lui ré p o n d ;
il somme alors le notaire d’ interpeler sa tante en sa p ré
sen ce, et devant les té m o in s, afin de savoir qui elle entendoit instituer ; elle répond : m on neveu d ’i c i ,* on veut
plus d ’explication , on lui demande si c’est G ib o n ou
E x p e r to u ; elle répon d : E x p e rto n . A lo r s le notaire
déclare qu ’ayant été en v o yé par G ib o n p o u r recevoir
un testament en sa fa v e u r , et croyant q u ’en effet ce seroit
l ’ intention de la testatrice, il seroit inconvenant q u ’il
rapportât au sieur G ib o n un testament fait au profit d’ un
autre. E x p e rto n lui perm it de se retirer.
V o i l à le fait dans toute son exactitude; et en ce sens
il est vrai q u ’ il empecha la confection du testament, si
toutefois on peut croire que le notaire l’eut achevé dans
le sens du sieur G ib o n . Mais poursuivons.
Il est prcsqu’ inutile de rappeler en passant q u e , le
19 mars au matin , M argu erite G ib o n fil son testament
et disposa de ses biens au profit d’E xperton. Il 11’y eut
B 2
�certainement d’affectation ni dans le nom qu ’elle y prit
puisque c’étoit bien le s ie n , ni m êm e dans le c h o ix du
no taire; car il e s t, à juste titre , dépositaire de la con
fiance publique.
D ep u is la maladie de M arie - M a rg u erite , Ta dame
G ib o n avoit introduit dans la maison A n n e M ia l h e , sa
p a re n te , qui lui aidoit à servir ses tantes, et qui étoit
tout aussi d é vo u ée q u ’elle aux intérêts du sieur G ibon .
E lles avoient tout à leur disp ositio n , m êm e les clefs des
armoires : E xp erto n n’en concevoit pas la m oindre d é
fiance; il semble q u ’il se plaisoit à s’aveu gler volontai
rement.
L e sieur G ib o n désespéroit d’arracher désormais .au
cunes dispositions de M argu erite ; par cela seul il doutoit
beaucoup de v o ir accom plir ses vues sur la succession
de ro n d e : il jugea prudent de s’em parer de ce qui étoit
sous la main.
L e 20 mars au m atin , E x p e r t o n , à peine l e v é , entre
dans la cham bre de sa tante; il y trouve G i b o n , A g u l h o n ,
son beau-frère, et A n n e M ialhe. Ils étoient entourés de
paquets de linge et d ’autres eiTets q u ’ils avoient retirés
des armoires : A n n e M ia lh e aclievoit de coudre le der
nier. Sous le prétexte d ’em porter les bardes personnelles
à M a r ie -M a r g u e r ite , déjà d é c é d é e , le linge des deux
tantes avoit été mis dans ces paquets, dans la chambre
m êm e où M a rg u erite étoit fort mal : E x p e rto n s’opposa
à l’e n lè v e m e n t .
M ais déjà les p apiers, les obligations et mitres pièces
importantes étoient entre les mains de G i b o n , com m e
on s’en convaincra facilem ent; ce m êm e jour il requit
�;
( 13 )
l’apposition des scellés : le procès verbal va p ro u v e r ce
q u ’on vient de dire.
Il faut rem arquer d’abord que G ib o n , nanti des titres
et o b lig a tio n s, G ib o n qui avoit voulu sans aucune p ré
caution préalable enlever le m obilier, G ibon qui prétend
a vo ir toujours cru q u ’il étoit seul héritier de son oncle,
annonce par ce procès verbal q u ’ il n’entend se porter
héritier de sa tante qu e sou s bénéfice d?inventaire.
L e juge de paix se p résen te; E x p e rto n lui déclare
q u ’ il consent à l’ap p o sition , mais q u ’il se réserve tous
ses dro its, notamment con tre les d isp osition s testam en
ta ires d ont e x cip e G ib on .
Il ajoute que le matin môme il a tro u v é dans la cham bre
A n n e M ia lh e ......... laquelle s’est permis d’o u v rir les ar
m o ires, d’en extraire le l in g e , d’en faire des tas; et il
invite le juge de paix à le constater.
M o n t é dans la c h a m b re , il trouve A n n e M ia lh e fort
p rép arée à sa réponse : Il faut faire connoître ici cette
partie du procès verbal.
« A v o n s tro u v é une fille qui nous a dit s’appeler
« A n n e M ia l h e , donnant des soins à d e m o iselle'M a rgouton , ne la co n n a issa n t sou s autre n o m ........qui
« nous a dit que ce matin elle a trou vé dans la p och e
« de ladite M argouton des clefs ,• qu'elle en a ouvert les
« a rm oires , et en a extrait le linge et autres effets q u ’elle
« savoit appartenir ¿\ la d éfu n te, p o u r les rem ettre à q u i
« de d ro it; qu'au m om ent où elle faisoit l’o u ve rt u re des
« a rm o ire s, et fermoit les p a q u e ts , M M . E x p e r t o n ,
« G i b o n et A g u l h o n sont a r r i v é s ; » mais elle é c h a p p e
ly ^ E x p cr to n n éto it arrivé que le dernier.
'
�C m )
Ln justice -sera-t-elle donc o bligée de s’en rapporter
à cet h é ritie r bén éficia ire ? est-il donc si in g é n u , si fa
v o ra b le , q u ’ il fa ille , sur ses assertions, croire à la m al
honnêteté de son adversaire, et lui faire perdre en m êm e
temps sa cause et sa rép u ta tio n? M ais poursuivons.
M a rg u erite G ib o n décéda le 27 m a rs; G ib o n ne ré-r
clam oit pas la levée des scellés; E x p e rto n fut obligé de
pren dre l’ initiative. Ils furent levés le 17 a v r i l , et le
m ê m e jour D u r a s t e l, notaire commis par le président
de p rem ière instance, procéda à l’inventaire. Il est encore
essentiel de rappeler ici quelques parties de ce procès
v e r b a l; il p rou vera co m b ien , dès le p rin c ip e , E xp erto n
s’est m o n tré avec franchise , et com bien au contraire
Gil>on a refusé de s’exp liquer.
E x p e rto n a vo it appelé ses tantes par leur n o m ; G ib o n
le tro uve mauvais : il dit q u ’il n’a p p ro u v e pas les dési
gnations données aux deux tantes, parce q u e lle s so n t
con tra ires au p rocès v erb a l d 'a p p osition de scellés ; et
en effet il avoit eu grand s o i n , lors de ce procès v e rb a l,
de don ner aux deux tantes les noms qui lui convenoient,
espérant s’en faire un titre d o n t ,a u reste, il recounoissoit
le besoin.
E x p e rto n lui rép liq u e avec raison que ce procès verbal
ne peut ré g le r ni les n o m s , ni les qualités de ses tantes.
A p r è s l’in v en ta ire , G ib o n répète avec une affectation
rid ic u le , et qui dém ontre son peu de fran ch ise, q u 'il
ne c o n n o is s o itp o in t M a r ie -M a r g u e r ite , mais bien M a r
guerite G ib o n , sa ta n te , p rem ière décédée ; il ajoute
que sa tanle lui a rép été plusieurs fois q u ’E xp crto n lui
avoit en levé son o r , son argent et ses papiers.
�( iS )
I l ne sauroit être fastidieux i c i , de rem arquer les
reproches que lui lit E xp erto n à la suite de l’in ven taire,
et la m anière dont il y répondit.
« E xp erto n n’est pas étonné que G ih on méconnoisse
« sa tante qu ’ il n’a g u ère f r é q u e n té e , si ce n’est lors
« de ses dernières maladies , p o u r lui surprendre une
« disposition nocturne.
« Il soutient que l’imputation de soustraction est fausse
« et calom nieuse; que c’est par cette invention et autres
« suggestions perfides que G ib o n , la dam e G ib o n , sa
« s œ u r , A n n e M ia lh e et autres personnes commises par
« G i b o n , que ce dernier a cherch é à détou rn er les dispo
se sitions amicales et favorables de ses tantes p o u r lui.
«
«
a
«
« Q u ’à cette ép o que M a r i e - R o s e G ib o n habitoit la
m aison, et «voit seule le soin de toutes les aifiiires du
m énage de ses tantes; que G ib o u lu i - m ê m e l’a vue
lib rem en t, a m angé et lo g é dans la maison tant que
cela lui a fait plaisir.
« R é p é ta n t que le jour du procès v e r b a l, à six heures
« du m a tin , il trouva dans la cham bre A n n e M ia lh e ,
« les sieu rs G ib o n t t A g u lh o n q u i avaient ouvert les
« a r m o ir e s , et les a voient f o u illé e s , c ro y a n t E x p e r to n
« encore au lit. »
V o ilà une accusation bien g r a v e , consignée dans un
acte p u b lic , faite à la luce de celui qui en étoit le mi
nistre; une accusation enfin q u ’ un h om m e d é lic a t, in
justement offensé ne supporte pas un seul instant. Q ue
répond G ibon ?
R ien sur le fait. Il trouve que ce sero it s'a m u ser qu e
tfjr r é p liq u e r ,* il se réserve d’agir ainsi q u ’il aviseru. E t
�( ,i 6 )
cri effet ce fait résultoit déjà du procès verbal d ’a p p o
sition de scellés; il étoit vrai en lu i-m ê m e ; il falloit des
réflexions p ou r y répondre.
Suivons l’ordre des faits, et ne faisons pas com m e le
sieur G ib o n , qui p o u r tirer une fin de non-recevoir ch i
m ériq u e d’ un jugement au possessoire, a jugé à propos de
les transposer, tellement q u ’après a vo ir traversé l’année
1809 on se tro u ve tout d ’un coup au 19 juin 1806.
D ès le 21 avril 1806, E x p e rto n fit notifier à certains
débiteurs de J e a n - L o u i s G ib o n un acte par lequel il
leu r déclare q u ’ il a été instruit de leurs dettes; q u ’ il a
été averti aussi que les titres ou billets qui constatent
la cfréance sont entre les mains de G ib o n : il leur fait
défenses de le payer.
L es procédures se continuent sans in te rru p tio n , jus
q u ’au m om ent o ù , forcé de. prendre un p a r t i, G ibo n
prend le fait et cause des d é b ite u rs , et intervient p our
faire cesser les poursuites; et en 1806 la cause.s’engage.
Il est inutile de détailler ici aucun des actes de possession
respectivem ent faits, p uis qu ’ ils ne peuvent être d ’aucune
con séqu en ce; il suffit de sa vo ir que sur une citation en
co n ciliatio n , donnée par E xp e rto n à divers détenteurs des
biens de L o u is G ibo n , les uns opposèrent des contrats de
vente , d’autres des baux à ferm e ; que dès-lors E x p e rto n
abandonna sa demande en désistement, et leur fit c o m
m a n d e m e n t de payer le p r ix des bau x de ferme. Ils y
f o r m è r e n t opposition ; G ib o n intervint p o u r prendre leur
fuit et cause; et c’est ainsi que la cause a été liée devant
le tribunal du Puy»
Pu isqu ’on a parlé de conclusions, il faut en parler aussi
pour
�C *7 )
p o u r redresser le fait. E xp e rto n , en présentant une requête
contre le sieur G ibo n , y conclut à être m a in ten u et ren
voyé dans la prop riété et jo u is s a n c e ........à ce q u ’ il soit
fait défenses’ à G ib o n de l’y troubler de n o u v ea u . Il n’y
-a donc pas de sa part une simple demande d 'en voi en
p ossession : mais le sieur G ib o n ne s’attache pas à une
g ran de exactitude dans les faits.
C ’est pendant l’instance, et en 180 8, que s’est élevée
la querelle possessoire dont on a parlé : c ’est en 180 9,
c’est-à-dire, au m om ent où la qualité des parties alloit
être jugée sur contestation r é c ip r o q u e , qu ’est rendu le
jugem ent possessoire dans lequel on donne fort adroi
tement au sieur G ib o n la qualité d ’héritier de M a rg u erite
G i b o n , qui l’étoit de J ean -L ouis.
E t aussitôt, fertile en petits m oyens dont il sent gran
dement le besoin , G i b o n s’écrie : E x p e rto n a reconnu
mes droits et la v é rité du f u i t , en ne form ant pas o p p o
sition aux qualités, dans une instance où il ne s’en ngissoit
p a s , q u o iq u ’ il me contestât form ellem ent cette qualité
dans le m êm e tem ps, et que ce fût l’ unique objet d’ un
procès au pétitoire. Q u elle p itié !
Q u o i q u ’ il en s o it, le tribunal du P u y a pron o n cé
sur le fo n d ; son jugem ent n’a d’autre base que les titres
et actes respectivement produits : il déclare q u ’une fille
qui est baptisée'sous le nom de M a r g u e r it e , qui dans
tous les actes a sans cesse été appelée M a rg u e rite , s’appelle
encore M a rg u erite ; et q u ’ un testament au profit do M a r
g u e rite , de la part d ’ un frère q u i v iv o it avec elle dans
l ’ in tim ité , ne peut profiter q u ’à M a r g u e r it e . C ’est là tout
�( i8 )
le secret des premiers juges'; il s’agit de savoir si en la
C o u r on trouvera m oyen de p ro u v e r le contraire.
L ’essayer avec des m oyens de droit isolém ent, la ten
tative seroit un peu hardie ; aussi on cherche principa
lem en t, non pas à. attirer directement la faveur sur soim ê m e , car on n’a aucun titre p ou r y p ré te n d re , mais à.
l ’obtenir indirectem ent, en s’efforçant de couvrir>son ad
versaire de d é fa v e u r, par une masse de faits tous inexacts,,
et p o u r la plupart étrangère- à la cause.
E xam in on s d o n c , i° . si, en d ro it, le testament dont
il s’agit peut appartenir à tout autre qu’à M a rg u erite
G ib o n qui y est d é n o m m é e ;
2°. E t à toutes fins, quelles conséquences p ou rraien t
résulter des faits articulés p a r l’apptilanf.
11 est de principe que les actes font foi de leur co n
tenu; et q u o iq u ’en g én é ra l dans les clauses douteuses ou
obscures, il faille moins s’attacher à la lettre q u ’à l’inten
tio n , potiùs vohintatem qu iim verba s p e c ta r i, cette e x
ception s’a p p liq u e seulement au cas où l’intention résulte
de 'l ’acte m ô m e , et où le sens^ ‘littéral des termes la con
trarie. La loi veut alors q u ’on ne s’arrête pas trop rigou
reusement à ^ expression, parce que bien loin d ’exécuter
l ’acte, ce seroit s’écarter de la vo lo n té des parties dont
il est le dépositaire.
M a is , par la m êm e raison, lorsque les actes ne sont
pas obscurs, elle ne perm et pas d ’en altérer la substance,
ni d ’en e x p liq u e r les dispositions par des circonstances
prises hors de l’acte lui-m êm e : C on tra scrip tu m 'testi
m on iu m non scriptu m testim o n iu m non J e r tiir .
�( 19 )
C ’est ce que nous dit spécialement D o m a t pour le cas
du testament. « Si la disposition du testament se trouve
« ex p liq u ée bien nettement et précisém ent, il faut s’en
« tenir au sens qui paroît p a r l’expression* »
Cette m axim e est de toute antiquité; elle tient à l’ordre
p u b l i c , qui ne veut pas q u ’on se permette de porter
atteinte à la foi qui est due aux actes, surtout aux actes
publics. Aussi le législateur s’est-il exp rim é dans les termes
les plus fo rts, et a - t - i l sem bla v o u lo ir ôter tout moyen
d ’élu d er la rigueur du principe par des interprétations
arbitraires, eu disant : « Il n’ est reçu aucune p reu ve par
« tém oins con tre et outre le contenu aux actes, n i su r
« ce q u i se ra it allégué a v o ir é té d it a v a n t , lors ou
« depuis les actes. » Q u o i de plus form el ?
C ’est encore un principe certain qu e le ministre d ’ un
acte public est toujours présum é de droit l’avo ir fait
con fo rm ém en t aux lo is; et que dans le cas m êm e d ’ une
lég è re infraction qu i ne touche pas à la validité de l’acte,
cette infraction doit être p ro u v é e par l’acte m ê m e , sans
q u o i il faut dire q u ’elle n’existe pas; car on ne présume
pas davantage l’erreur que 1q d o l, surtout lorsqu’elle scuoit
accom pagnée de désobéissance envers la loi.
C ’est donc le testament lu i-m ê m e , et le testament seul,
q u ’ il faut con sulter; c’est lui qui est aux yp u x de la loi
l’ unique dépositaire do la v o lo n té du testateur; c'est sur
lui que doit uniquem ent reposer la décision de la justice.
Q u ’y v o it-o n ? le testateur, sqns la m oindre ainbiguiiij,
institue p o u r son h éritière M a rg u erite G ib o n , sa sœ u r y
h a b ita n te de ta ville du P u y , fin sa com p agnie.
C 2
�(
20
)
Ilien de moins obscur , de moins éq u iv o q u e ; c’est
M argu erite G ib o n qui est instituée.
C ’est donc celle dont le nom est M arguerite ; celle, par
con séqu en t, à qui on l’a donné lors de son b ap têm e;
car c’est aux actes de baptêm e ou de naissance q u ’on
reconnoît les in d iv id u s; ce sont eux qui tém oignent de
leu r nom , de leur état, de leu r famille.
Il semble donc q u ’en prenant d ’ une main le testament,
et de l ’autre les actes de naissance, il seca facile de dém êler
la légataire ; car toutes les sœurs habitant avec le testa
t e u r , dont le nom ne sera pas M a rg u e rite , seront exclues
de sa succession, et celle-là feule à qu i ce nom appar
tiendra pourra se dire héritière.
Ce n’est pas cependant que le nom de l ’institué ou<
du légataire soit d’ une telle nécessité q u ’on ne puissepas y suppléer. S i , par e x e m p le , le testateur, voulan t
instituer uu de ses enfans, et n ’en disant p a s.le n o m , le
désigne de-telle m anière-qu’il soit impossible de le m éc o n n o îtr e , le testament ne lui profitera pas moins.
Si m ê m e , appelant celui q u ’ il institue d’ un nom qui
n’est pas le s ie n , il le désigne p ar des circonstances ou
des expressions qui tém oignent précisém ent celui q u ’il'
a vo u lu instituer, la connoissance certaine de sa volonté
suffit, q u o iq u ’ il y ait erreur de nom..
Ces exem ples sont ceux de la l o i; ce sont ceux m êm e
que citü le sieur G ib o n p ou r les ap pliquer très-im prop rem en t à sa cause : Si quidem in nominc...... légatarii
testator crravcrit, c u m
minùs valet'legatum.
de persona c o n s t a t
29,
Inst,.de Lcg.
, 7ii/iiIor
�( 21 )
C ’est encore le langage de la loi 4 , Cod. de Testatn .
S i in fw m in e........testator e r r a v e n t ,
nec
t a m e n
de
error h u ju sm o d i n iliil
o ffîcit v e r ita ti ; et sur cette loi la glose ajoute : C u m
QUO
SENSERIT
in cer tu m
SIT,
certu m sut de qu o sensit.
O n le v o it : ces exemples ne sont que la conséquence
des p rin c ip e s'q u ’on vient de d é d u ir e , de ces principes
élémentaires, que dans les doutes ou les obscurités d’un
acte il faut suivre l’ intention, lorsque d ’ailleurs elle est
évidente par l’acte m êm e, q u o iq u ’elle paroisse contrarier
le sens littéral des termes.
M ais q u ’on se garde bien de penser que-la lo f, pr.r ces
expressions, perm et de recherch er la v érité et l’intention
réelle du testateur hors du testament; ce seroit s 'é leve rouvertem ent contre les principes les plus certains du
droit. Si on lit quelques lignes de plus de la loi rom aine,,
on en sera encore m ieux convaincu.
A p r è s a vo ir parlé de l ’erreur de nom du lég a ta ire, et
décidé q u ’une désignation précise peut y su p p lée r, cu m
de persona c o n s ta t, l’em pereur Justinien p révo it le cas
où le nom sera bien celui de l’institué, mais la démons
tration fausse; et il dit au §. 30 des Institutes, de L ég a t. :
H u ic p r o x im a est ilia ju r is régula. F a lsâ detnonstration e legatum non p e ritn i • v clu ti s i quis ità legaverit :
S ty ch u m m eam ver nam d o , lego. L ic e t zmrn non v crn a , ■
sed ernptus s i t , u tile est legatum . Il ajoute immédiate
ment : E t con ven ien tcr s i itîi dem on straverit : S ty ch u m
m eum queni à S cïo e/ni , sitq u e ab a lio c/n ptus, u tile
est legatum Si D E SEI I VO C O N S T A T .
Cette r è g l e , com m e on le v o i t , est tirée du m êm e
�( 22 )
p rin cip e que la p réc éd en te; elle est fondée sur ce q u e ,
dans les deu x cas, l’esclave est suffisamment désigné par
sou nom de S ty ch u s, et parce q u ’ il est évident q u ’ il y a
erreur dans la démonstration. C ’est ensuite pur surabon
dance de p ré c a u tio n , que dans ce dernier cas la lo i ajoute:
S i de servo con stat.
L ’argum ent à tirer de cet exem ple de la loi s’aperçoit
avec facilité. L o rs q u ’en parlant de la fausse démonstra
tion elle dit qu ’ il ne faut.pas y a v o ir é g a r d , c’est parce
q u e le nom de l’esclav^e est disertement écrit dans le tes
ta m e n t, et q u ’alors la dém onstration n’est pas considé
r a b le ; encore a j o u t e - t - e l l e S i de serv o c o n s ta t, parce
q u ’ il est possible que le nom seul ne le désigne pas assez
disertem en t, com m e s i , p ar e x e m p le , il y a voit deux
esclaves du m êm e n o m ; 'e t ; c ’est ce q u i dém ontre encore
,m ieu x q u ’il ue faut pas cherch er hors du testamçnt les
preuves de la vo lon té du testateur.
C ’est le langage des auteurs. D o in a t , qui le disoit assez
d an s.le passage cité par r a p p e la n t , s’e xp rim e bien plus
form ellem ent dans le § . i 5 : « h n c o r e q u 'il so it v r a i
« q u e f in ten tion
«
c’e s t
«
MENT
doive cire préférée à P e x p r e s s io n ,
seu lem en t
FAIT
lorsque
CONNOITRE
la
CBTTE
suite
du
t e s t a
INTENTION,
-
m a is
« n on dans le ca s où rien ne f a i t d outer du sens de
« l'exp ressio n ; c a r alors la seule présom ption q u i peut
« être reçue est q u e le testa teu r a d it ce q u 'il voula it
a d ir e , et n 'a p a s vo u lu dire ce q u 'il n 'a pas dit. »
Sans nous épuiser ici en citations, remarquons seu
lement que l’art. 5 o de l’ordonnance de 1 7 3 5 , et le passape cité de R i c a r d , qui se rapporte au mêm e cas, n ’ont
�c*s)
pas le m oindre rapport à l ’espèce a c tu e lle , et décident
seulement qu ’en pays de droit é c r it, où la p ré te n tio n
étoit ad m ise, il n’étoit pas nécessaire d’appeler chacun
des enfans par son nom , et q u ’on pou vo it les désigner
m êm e p ar cette expression générale : C h a cu n de m e»
en fa n s.
Ces principes et ces exemples posés , quelle application
peut-on en faire à la cause? R ien de plus facile à décider.
Si en instituant M a r g u e r ite , le sieur G ib o n avoit
a jo u t é , m a sœ u r la plus je u n e , ou qu elqu ’autrc dési
gnation tellement spéciale q u ’il fût facile de la reco n D o itre , a lo r s , il faut en convenir., il y-auroit difficulté
d’a p p liq u e r le testament à M a rg u e rite ; et c’est ici le cas
de rép o n d re à l ’argum ent tiré de l’article 2148 , et à
l’exem ple de l’inscription hypothécaire.
O u i sans d o u te , tout est do rigu eu r dans une inscrip
t io n , et cependant une désignation spéciale et individuelle
suffit, mais à condition que la désignation spéciale soit
dans l’in scrip tio n ; car si elle n’y est p a s , l’ inscription
est nulle : y e û t - i l m ille et une circonstances hors du
b o rd e re a u , elles ne seroient d ’aucune utilité. Ici le p rin
cipe est le m êm e ; et si le sieur G ib o n veut souffrir l’ap
plication de l’exem ple q u ’ il a lui-même p o sé , on y adhère
sans p ein e , et la cause sera bientôt jugée.
M a is Jean-L ouis G ib o n ovoit deux sœurs également
célibataires, toutes deux Agées, toutes deux habitant avec
lu i; l’une s’a p p e lle ’M a rg u e rite , l’autre M a rie-M arguerite.
Il donne à M a r g u e r ite , sans autre indication plus spéciale :
qui osera se p e rm c tlre , sans d é c o u v rir dans le testament
ui d o u te , ni a m b ig u ité , ni o bscurité, de décider que le'
�C *4 )
testateur, en désignant M a r g u e r i t e a eu en vue M a rieM arg u erite ?
O n sera donc le maître désormais de m épriser les
volontés des m ourans, sous le prétexte de les interpréter!
O n dit m ép rise r; car ce seroit dire réellem ent q u ’il n’a
pas été perm is au testateur d ’ instituer sa sœur Margue-,
r it e , sous la simple dénom ination qui lui étoit p r o p r e ;
que p o u r instituer M a rgu erite il a dû ajouter quoiqu’autre
désignation plus spéciale ; et que par cela seul q u ’ il ne
l’aura pas f a it , le testament doit profiter à M a r ie - M a r guerite q u ’il ne désigne m ê m e pas. Singulier p riv ilè g e !
A ussi se cro it-o n obligé d’avancer q u ’ il préféroit l’ une à
l ’a u tre , 6ans que rien l’a n n o n c e ; de faire de l’une un
personnage actif et robuste, et de l’autre un etre m aladif,
insupportable aux autres et à s o i-m ê m e , et précisément
en tirer la conséquence que de ces deux sœurs avec
lesquelles il a toujours v é c u , il a donné dos secours à
celle qui en avôit le moins besoin , et ôté toute espèce
de ressources à celle qui étoit incapable de se prêter à
elle-m êm e aucun secours. S in gu lier m o tif de préférence!
E n un m o t, sans disserter plus lo n g-tem p s, toute la
prévo yan ce des lois citées par le sieur G ib o n 6e réduit
à cette explication diserte et expressive d'un savant
auteur : L o c o n o m in is est certa dém onstratif).
A in si , le testament contient-il le nom du légataire
ou h éritier ? adjugez-lui le legs ou l’ hérédité.
A défaut de n o m , c o n tien t-il, com m e l’inscrip tion, une
d ésignation sp écia le s u ffis a n te , telle qiCon puisse reconnoitre dans tous les ca s F individu appelé; y a-t-il certa
d ém on stra tio n ordonnez encore l’exécution du testament.
Eu lin
�Enfin y a-t-il quelque a m b ig u ïté , quelque contrariété
entre la dénom ination et la désignation ? suivez l’ inten
tion du testateur : S i apparet de quo cogt tatum j'itit.
V o i l à la substance des principes sur cette matière.
O r , dans quel cas se trouvent les parties? évidem m ent
dans aucun des deux derniers : il ne faut donc pas appli
q u er les règles qu i leur sont p rop res; ce n’est donc le
cas ni de parler de désignation spéciale, ni de rechercher
l ’intention du testateur. L ’héritière est n o m m é e , sans
aucune autre désignation; il ne s’agit donc que d’exa
m iner à qui s’applique le nom ; et c’est ici le cas d ’exa
m iner la bizarre difficulté q u ’on élè ve sur M argu erite
ou M a rg o u to n .
N ous avons dit en c o m m e n ç a n t, et c’est en effet un
p r in c ip e , que le ministre d ’ un acte p ublic est de droit
présum é l ’avo ir fait con form ém ent aux lois.
U n e loi du 6 fructidor an 2. porte : « 11 est expressécc m ent défendu à tous fonctionnaix-es publics de désigner
cc les citoyens, dans les actes, autrement que par le nom
« de famille et prénom s portés en la c té de îia issa n ce. »
L e sieur G ib o n va se fâcher, car c’est une loi de l ’an 2.
Il ne faut donc pas se borner à cette citation ; voyons
la loi du 11 germ inal an 11.
A r t . i cr. v A com pter de la présente l o i , les noms en
« usage dans les divers calendriers, et ceux des person« nages connus de l’histoire a n c ie n n e , pou rro n t seuls
« être reçus com m e prénom s sur les registres de l’état
« civil destinés à constater la naissance; et i l est in terd it
« a u x ojjflciers p u b lics d'en adm ettre a u cu n autre dans
« leurs actes. »
D
�C
26 )
I ,’officier public ne doit donc em p loyer que le prénom
donné à l’ individu par les registres de l ’état c iv il; il est
donc présum é de droit l’avo ir fait a in s i, jusqu’à p reu ve
contraire écrite.
Ce n’est pas q u ’on prétende en tirer la conséquence
#que s’ il eût reçu le testament sous le nom de M a r g o u to n ,
celle désignation n’eût pu être suffisante, mais seulement
q u ’ il s’est servi du p rén o m lu i-m êm e , plutôt que d’em
p lo y er une corruption patoise qui n’étoit pas le nom de
b a p tê m e ;’la conséquence enfin qu'ayant désigné M ars,uer it e , et le testateur ayant une sœur appelée M a r g u e r ite ,
c’est à son profit q u ’est dirigée la disposition.
Q u ’on veuille p o u r un instant se défaire de l ’idée que
lfc testament concerne la plus jeune des de^ix sœurs.;, q u ’on
suppose, s’ il faut em p lo y er ce tei-me, que le testateur a
vo u lu désigner l'aînée, com m ent a-t-il dû s’e x p r im e r ?
Q u ’on se mette à sa place. Il savoit que sa sœur s’appeloit M a rg u e rite ; n’a - t - i l pas ren d u entièrement son
i d é e , en disant : J ’institue M a r g u e r ite , ma sœ u r? Sa
disposition u’est-elle pas parfaite, son intention rem p lie ?
Q ui osern le n i e r ? ’
M ais si cela est ainsi, qui osera declarer que son inten
tion étoit a u tre ? qui osera toucher au sens littéral de sa
disposition , sans craindre d’y porter une main sacrilège,
et de m é p ris e r, contre le vœu do la l o i , la volonté la
m ieux e x p r im é e ?
A llo n s plus lo in ; supposons que le testateur ait dit ou
dû dire au notaire : J ’institue M a rg o u to n , le notaire aura
su ou lui aura dem andé si M argouton est une corruption
de M a rg u e rite , et p o u r se conform er à la loi il aura écrit
�(* 7 )
M arguerite : la personne en sera-t-elle moins certaine?
l’intention du testateur ne sera-t-elle pas encore rem plie?
E t on oseroit dire et décider qu ’il a entendu instituer
tout autre !
L e sieur G ib o n savoit, disons-nous, que sa sœur s’ap .peloit M argu erite : témoin le certificat de civism e contre
lequel on se récrie si singulièrement. C e r t e s , si on eût
cru q u ’elle dût être désignée autrement dans un acte
p u b l i c , il faut penser que le 26 floréal an 2 , le sieur
G ib o n n’eût pas mis d ’affectation à fouiller dans le calen
d rier g ré g o rien p ou r y ch ercher un nom patronimique!
E n vain d i t - o n que c’est un acte iso lé; on défie d’en
citer un seul où elle ait pris le nom de M argouton .
M ais p o u r dém o n trer que c’est ainsi q u ’elle a toujours
été dén om m ée dans les actes, et p o u r convaincre le sieur
G ib o n q u ’il s’écarte un peu de In v é rité sur le fa it, il suffît
de le re n v o y e r au testament du 12. brum aire an 1 4 ; il
est fait par M a r ie -M a r g u e r ite , qui y p r e n d , o u , p ou r
m ieu x d i r e , à q u i on donne seulement le nom de M a r
guerite.
E lle fait un legs à sa sœur de l’ usufruit de ses biens,
en ces termes :
« J e donne et lègu e à M a rg u erite G i b o n , ma sœ u r,
« célibataire, native de L a n d o s , habitant eu celle ville
a du P u y , la jouissance, etc. »
E h q u o i! M a rie -M a rg u e rite G ib o n lègue à sa sœur
sous le seul nom de M a rg u e rite , et elle auroit pu p rétendreà l’ instant m ê m e q u e l’institution faite parson frère,
sous le m ôm e n o m , ue peut p roduire aucun ellet en sa
D 2
�(
28 )
fa v e u r! C ’est par trop abuser de la permission de jouer
sur les mois.
Rappelons encore ici l ’argument de l’inscription h y p o
thécaire.
Si les deux sœurs étant également créancières de leur
f r è r e , une inscription avoit été prise à la requête de
M a rg u e rite , à qui profiterai t-elle ?
L a question, sans d o u t e , serait bientôt d é cid é e; pas
un tribunal au m onde ne s’aviserait de juger contre le
texte form el de la l o i , q u ’entre deux sœurs q u ’aucune
autre indication ne d é s ig n e , on doit reconnoitre celle
dont le nom n’est pas identiquement le même.
Ce seroit une question d e s a v o ir , dans le cas où il
n’en existerait pus sous le nom de M a r g u e r it e , 'si l’ins
cription p ou rrait appartenir à M a rie -M a rg u erite.
M ais ce n’en est pas u n e , dès que M a rg u erite existe;
et certes personne au m onde ne décidera jamais que l’ins
cription, p ou r être valable et profiter à M a rg u erite , aurait
dû être prise sous le nom de M a rgo u to u .
L ’esprit h u m a in , ce sem ble, ne peut con cevo ir q u ’ un
seul cas d ’e x c e p tio n , c’est celui où les deux sœurs s’ap
pelleraient également M a rg u e rite ; et ce cas sans doute
serait le plus favorable dans lequel p ou rrait se placer
le sieur G ib o n . Q u ’en r é s u lte ra it-il? 11 suilit, p ou r le
d é c id e r, de se référer aux principes, aux dispositions des
lois q u ’on a déjà citées.
P artout nous avons vu que la disposition n’est valable
q u ’autant que la personne du légataire est certaine: C u m
de person a co n sta t....... cu m certu m s it de q u o sens i t ;
�( 29 )
Q u e la certitude doit se t r o u v e r dans le testament
m ê m e , com m e nous le dit M . D o m a t , et com m e le déci
dent ces lois elles-mêmes.
Si donc la personne est incertaine; si le testateur ayant
deux sœurs portant le m êm e n o m , le testament ne d é
signe pas l’ une plus spécialement que l’a u t r e , la disp o
sition est nulle. V o ilà tout ce que pourroit espérer le
sieur G ib o n dans la disposition qu ’on vient de faire : o r ,
nous ne sommes pas dans ce cas.
N ’en déplaise donc à la loi B a r b a r iu s P h ilip p u s ,
il im porte fort peu que l’aînée des deux sœurs ait pu
être usuellement appelée M a rgo u to n ; que la plus jeune
ait q u elqu efo is, m êm e habituellem ent p orté le nom de
M a rg u erite : aucune d ’elle n’a perdu ni son véritable
n o m , ni l’habitude de la distinguer par ce nom. M a r
gouton signifie M a rg u e rite ; et si le frère et la sœur se
sont servis de cette dénom ination patoise dans le com
m erce de la v i e , il est constant au moins q u ’ ils ne l’ont
pas fait toutes les fois q u ’ ils ont parlé d’elle dans des actes
p u b lics;
C ar le sieur G ib o n , dans le certificat de civisme de l ’an 2 ,
l’a appelée M a r g u e r ite , qu oique m êm e a lo rs, com m e
ensuite, elle fût M a rg o u to n dans l’ usage;
C a r M a r ie - M a r g u e r i t e , par son testament de l’an 1 4 ,
l’a appelée fri argue ri te.
D ’où il résulte q u ’ il est impossible à un hom m e rai
sonnable de d é c id e r, m êm e de présumer que M argouton
n été l'unique expression prop re à désigner certainement
l ’aînée des deux sœ urs, et que toute disposition laite
�( 3° )
sous le nom de M a rg u erite ne peut la concerner ; car
les actes de la cause tém oignent tout le contraire.
A in si donc le fait et le droit concourent p o u r justifier
le jugem ent dont est appel.
Il ne reste plus q u ’à exam iner la ressource que peut
tro u ve r le sieur G ib o n dans la p reu ve testimoniale q u ’il
oiFre.
A cet égard tous les principes se réunissent. Si la p reu ve
n ’est pas faite par le testament, rien ne peut y suppléer:
c’est ce qui résulte des lois déjà c it é e s , et de la doctrine
enseignée par M . D om a t dans le passage q u ’on a transcrit;
c’est d ’ailleurs ce qui d érive du principe q u ’ un acte fait
foi de tout son c o n te n u , et q u ’aucune p reu ve étrangère
ne peut eu altérer la substance.
C ’est enfin ce qui est disertement é c r i t , soit dans les
anciennes ordonnances, soit dans l ’art. 1341 du Code.
« Il n’est reçu aucune p reu ve p ar tém oins contre et
« outre le contenu a u x actes , n i s u r ce q u i sera it
« allégué a v o ir été d it a v a n t, lors ou depuis les actes. »
Si m êm e on vo u lo it articuler que le juge peut toujours
s’entourer des lumières que lui ollreut les présom ptions,
l ’argum ent s’ écarteroit encore avec la r t . 1363 du m êm e
C o d e , qui ne permet de les considérer que lorsqu’elles
sont g r a v e s , p r é c is e s , con cord a n tes , et dans les cas
seulem en t où la preuve testim o n ia le est adm issible.
A ussi l’appelant sentant bien la force de ces m oyen s,
cherch e à se placer dans un cas d’exception. II ne s’agit
p a s , d i t - i l , de p ro u v e r une convention q u i excèd e le
ta u x des ord on n a n ces ou de
rart. 134! du C o d e ; mais
�(3 0
il s’agit de suspicion, de supposition de personnes; et il
cite D a n t y , ch. 7 , et la loi 2 1 , ff. de T e slib u s.
Il ne s’agit p a s , il est v r a i , de p ro u v e r une conven
tion qui excède i5 o fr. ; mais il s’a g it , par une p reu ve
testim oniale, d’ajouter ou de retrancher à un a c te , de
rechercher dans des dépositions la volon té du testateur,
de p ro u v e r p o u r cela ce qui peut avo ir été dit avant et
d ep u is; et la loi p ro h ib e également l’ un et l’autre.
C om m en t le sieur G ib o n fera-t-il entendre q u ’ il s’agit
de supposition de personne ? Su r qu i se dirigera cette
accusation ? sera-ce sur E v p e r t o n ? mais- alord c’tfst une
proposition in in telligible; car le testament n’est pas son
o u v r a g e ; et quand bien m êm e il l ’auroit in flu e n c é , il
seroit difficile de con ce vo ir une supposition de personne.
Sera-ce le testateur? mais on ne le com p rend roit guère
m i e u x , et peut-être encore moins.
•
Il y a supposition de personne, lorsque p o u r p rofiter,
par e x e m p le , d’une h éréd ité, et l ’héritier étant m ort ou
ab sen t, un tiers se présente com m e cet h é r it ie r , suppose
q u ’ il est la personne instituée.
A in si , p o u r ap pliquer l’exem ple à la cause, Jean L o u is institue M a r g u e r ite , sa sœ u r; M argu erite décède
avant lu i; une autre sœ u r, qui ne s’appelle pas M a rg u e
r ite , s’empare de son extrait de naissance, et se l’a p p ro
p ria n t, réclam e l’h é r é d it é , prétendant q u ’elle est M ar
guerite. 11 y a supposition de p erso n n e, pince q u ’on a
caché qui on é t o it , parce q u ’on s’est présenté p o u r un
a u tre , parce qu ’en prenant le nom de son voisin on a
cherch é à s’a p pro p rier ce qui lui étoit lègue certa in e
m ent, Mais ici quoi de s e m b l a b l e ? M a r g u e r i t e n’a pas
�ÏA«C 32 )
supposé q u ’elle fût une autre q u ’e lle -m ê m e ; elle ne s’est
pas ap prop rié l’extrait baptistaire de sa sœ ur, en cachant
le sien p ro p re ; elle s’est présentée à la justice ( ou
quoique ce soit le sieur E xp erto n ) , son extrait de nais
sance à la main ; elle a dit : J e m ’appelle M a rg u erite
par m on acte de b a p têm e; M a rg uerite dans le certificat
de la n 2 ; M a rg u erite dans le testament de ma sœur ;
ainsi q u oiq u e j’aie pu être usuellement désignée par
M a r g o u t o n , dans le langage fa m ilie r, je soutiens que ce
sont ces actes seuls q u ’il faut consulter p o u r connoître
la véritable héritière. A in s i elle n’a rien supposé, ni
p erso n n e, ni choses, pas m êm e une syllabe. E t en v é
rité il n’est q u ’ un besoin extrêm e qu i puisse inspirer de
semblables moyens.
Si 011 o u v re D a n t y , on trouve dans le chap. 7 , cité
par l’a p p e la n t, q u ’après a v o ir parlé de la sévérité des
ordonnances sur la foi due aux a c te s, il ajoute q u ’elle
n’a pas lieu dans les con tra ts s im u lé s , et autres actes
q u i son t fa it s en fr a u d e de la lo i ou p o u r trom per un
autre. E u cela il ne faut pas s’é to n n er; car on sait que
les cas de dol et de fraude sont toujours exceptés.
11 y a dol et fraude, s’écrie l’appelant; car 011 voud roit
s’em parer de ce qui n’appartient pas à M argouton G ibon.
11 y a dol et fraude com m e il y a supposition de per
sonne. Il y a dol et fraude com m e dans tous les cas
où on form e une demande que le défendeur conteste;
car c’est toujours un d o l, si on peut s’ex p rim er a in si,
que de réclam er ce qui ne vous appartient pas. S i , par
exem ple , je demandois le payement d ’ une obligation
q u ’on m ’auroit payée la veille , ce seroit certainement
un
�( 33 )
un dol , cependant on n’admettroit pas la p reu ve du
payement. E n un m o t , les faits de dol et de fraude ne
sont recevables à côté d’ un acte que “si l ’acte lui-m êm e
en est infecté : ainsi je puis être admis à p ro u v e r que
le consentement a été exto rq u é ou surpris-, q u ’ il a été
le fruit du dol et de la violence ; que m êm e il n ’a eu
d ’autre cause q u ’une erreur sur la substance m êm e de
la chose. M ais ici personne ne conteste que le testament
du sieur G ib o n ne soit v a l a b l e , car chacun veut se
l ’a p p r o p r ie r ; personne m êm e ne prétend qu ’ il soit le
fruit de l’e r r e u r , car on soutient q u ’ il a indiqué suffi
samment la p ersonne, et chacun veut être ou représenter
cette personne.
D o n c on ne peut pas admettre de p reu ve testimoniale
contre cet a cte; rien p ar conséquent qui tende à établir
qu elqu e chose contre ni outre cet acte.
D o n c on ne peut rien p ro u v e r de ce qu i s’est dit
l o r s , avant ou depuis.
D o n c , et d’après les principes déjà rappelés, si le testa
m ent est c la ir, il faut l ’exécuter te l q u 'il e s t; s’ il ne l’est
pas suffisamment p ar lu i-m ê m e , il faut le rejeter.
D o n c enfin la p reu ve testimoniale est inadmissible.
Si on exam ine ensuite la loi O b ca rm en J a m o s u m ,
on se demande de quelle utilité peut être cette citation.
E lle ne s’occupe pas eu effet des cas où la p reu ve testi
m oniale est admissible; mais seulement des témoins qui
doiven t être p r é f é r é s , de la foi q u ’on doit ajouter à
leurs dépositions. E lle dit que celui qui aura é p ro u v é
une condamnation infam ante, ne peut être té m o in , /«tc s ta b ilis J it‘ elle dit que le gladiateur ne sera pas c r u ,
E
�( 34 )
sin e tarm entis ; elle ajoute enfin que si tous les témoins
sont honnêtes et p rob es, et q u ’ils aient connoissance par
ticulière du fait en question , le juge doit y a v o ir la
plus grande confiance.
M ais nulle part il n’est question dans ce passage , ni
de testateur, ni de testament : la loi parle d’ une enquête
f a i t e , et non d ’une enquête à faire; elle dit au juge q u elle
doit être sa base p o u r la confiance q u ’il doit aux tém oins;
mais elle ne dit pas q u ’on recevra des preuves hors les
cas de d r o i t , puisque supposant une p reu ve déjà fa ite ,
elle doit supposer aussi q u ’elle a été admise con fo rm ém en t
aux lois.
Ecartons donc de la cause toutes ces autorités, et le#
in d ices résu ltan s de fa it s d è s -lo r s c o n s ta n s , puisque
tout cela n’y reçoit aucune application.
Com bien de présomptions-et d ’ind ices, s’écrie encore
le sieur G ib o n ! n ’est-il pas constant et a v o u é ..........
N on , il n’est ni constant ni a vo u é que M argu erite ,
la p lu s je u n e y s’est mise en possession de tous les biens;
qu ’elle y fait une mainmise absolue et ex clu siv e • q u ’elle
ait ex clu siv em en t g é r é , ad m in istre, vendu et afferm é;
car l’ intimé le nie fo rm el le m en t.
E t quand tout cela seroit v r a i , ce ne seroit q u ’un seul
fait répété trois fois avec a r t , en des termes difTérens;
et ce fait ne p ro u v e ro it rien.
E t quand bien m êm e encore il seroit vrai qu e M a riéM argu erite auroit joui seule et sans la participation de
sa s œ u r, q u o iq u ’elles vécussent en se m b le; quand bien
même M argu erite , ne con n a issa n t pa s le te s ta m e n t,
auroit pu en croire aux dires de sa sœur et du sieur
�(
3
5
}
G ib o n , et ne pas réclam er l’h é r é d i t é , s e r o it - c e une
p reu ve q u ’elle ne fût pas héritière ?
Si m êm e enfin on vo uloit descendre jusqu’à l’examen
de la p reu ve o ffe rte , il seroit aisé d ’en d é m o n trer la
futilité. Q u e v e u t - o n p r o u v e r ?
i° . Q u e la plus jeune des deux sœurs a toujours été con
nue et a toujours contracté sous le nom de M a r g u e r it e ,
et l’aînée sous celui de M argouton .
Il n’a jamais été contesté que dans l’ intérieur de la
fam ille elles aient l ’une et l’autre été désignées par ces
d énom inations; il n’y a donc pas besoin de p r e u v e , et
on vient de v o ir l’inutilité de cette circonstance. Mais
que jamais elles aient été ainsi dénom m ées dans des actes
p u b lic s, c’est ce q u ’on défie d ’établir : ce 11e seroit pas
d ’ailleurs le cas d’ une p reu ve testimoniale, mais bien de
rap p o rter les actes. C ’est du reste s’a v e n t u r e r beaucoup
que de présenter com m e un acte où l’aînée auroit contrac
t é , le prétendu testament resté imparfait : il ne fut jamais
ni son o u v ra g e , ni l’expression de sa vo lon té ; 011 ne s’est
jamais p o u rv u ni en nullité de son véritable testament,
ni p a r aucune autre action qui tendît à établir q u ’elle
avo it été em p êch ée de tester. G ib o n a pensé avec raison
q u ’ il lui seroit plus avantageux de se plaindre à son aise,
que de mettre au jour la vérité.
20. Q u e c’est cette sœur qu e le sie u r G ib o n a eue en
vue en instituant M arguerite.
A v e c des allégations aussi peu caractérisées et aussi
va g u es, on se donneroit la perm isiou de tenter la preuve
la plus indéfinie et la plus contraire aux lois! Est-ce donc
là un fait susceptible de p reu ve testimoniale? laissera-tE 2
�on de côté tout ce qui résulte de l ’ac te , p o u r é ta b lir,
par des dépositions orales, V in te n tio n , le fo n d de la
pensée du testateur?
3°. Q u e la plus jeune a joui exclu sivem en t.
O n a déjà répon du à ce fa it, et dém ontré q u ’il ne
seroit d’aucune conséquence.
4°. Q u e le sieur E x p e r to n , et M argu erite l’aînée, ont
déclaré que le testament concernoit la plus jeune.
C e fait n’est q u ’ une répétition des précédons. O n a
déjà rép ondu p ou r M argu erite ; q u ’im porte ce q u ?ellè
pou rro it a vo ir cru , sa?is a u cu n e co n n o issa n ce du tes
tam ent. P o u v o it-e lle l’a p p ro u v er sans le c o n n o ître ? E t
quant à E xp e rto n , qui d ’ailleurs désavoue form ellement
ce q u ’on lui im p u te , de quelle conséquence seroit ce fait,
à le supposer vrai ? en résulteroit-il que le testament est
autre q u ’il n ’est en effet? cela changeroit - il rien aux
preuves qui en résultent?
E n fin , n’est-ce pas asseoir ses preuves uniquem ent sur
ce qui a été dit depuis le testam ent ?
E t d’ailleurs quelle v r a i s e m b l a n c e ? E xp e rto n habitant
avec son oncle et scs tantes, vivan t avec eu x dans l’ io tim ité , auroit dirigé les libéralités de son oncle sur ses
sœ urs, plutôt que sur lui-m ôm e! ce seroit au moins de
sa part une grande p reu ve de désintéressemeut. M a i s ,
dit-on , il n 'a v o it p lu s iVin fluence. Ce f a i t iCa rien de
vraisem blable : et on offre de le p ro u v e r!
E t on appelle cet unique fait divisé en h u i t , des faits
précis et concluons!
M ais tout cela s’écarte par le fait constant q u e , soit
l’o u c le , soit la ta u le , les plus jeunes ont toujours appelé
�( 37 )
l ’aînée M arg u erite , dans tous les actes où il a été question
d ’e lle , et que jamais elle n’a été dén om m ée autrement
dans aucun acte.
N ’en doutons pas; le sieur G ib o n n’a offert cette p reu ve
avec tant d ’emphase et un ton d’assurance, sachant bien
q u ’on ne l’admettroit pas, que dans l’espoir q u ’il parvien droit à faire une impression défavorable à son ad ver
saire : aussi seroit-il fort aise que la C o u r pensât qu ’il
n ’en est pas besoin, et q u ’elle se contentât des présom p
tion s exista n tes.
L e sieur G ib o n e s t - il donc tellement éd ifian t, que
la justice d o i v e , les y e u x fe rm é s, lui donner pleine et
entière confiance ? E x p e rto n sera-t-il tellement circon
venu par des allégations qu i ne sont ni. v ra ie s, ni p résumables , que la C o u r d o ive le condam ner ou m al
présum er de l u i , parce que son adversaire c rie h a r o ?
Ce seroit un étrange m o y e n , si la justice ou ses ministres
p ou vo ien t se laisser étourdir par d’aussi vaines clameurs.
N ’a llèg u e-t-on pas encore qu ’E x p c r to n s’est fait con
sentir ù la fois une donation et un testam ent? C ’est un
autre fait semblable aux premiers. M argu erite G ib o n
vo u lo it donn er à son neveu ; la donation étoit com
mencée lorsqu’on s’aperçut q u ’elle exig ero it le détail du
m o b ilie r ; alors ou l’aban do n n a, et il ne fut fait q u ’ un
testament. lia do n a tio n , quoique com m encée, n’a jamais
été parfaite; ¡1 n’en existe pas d ’acte en forme.
Enfin , si la C o u r veut bien se p énétrer des faits et
des circonstances, elle sera convaincue de l'inexactitude
de G ib o n , et du peu de confiance (ju’elle lui doit.
E li quoi ! l’oncle et les tantes des parties sont venus
�3/4 .
( 38 }
habiter avec E x p e rto n . E t ils n’avoient p o u r lui que des
rebuts!
Il a vendu une maison achetée par son o n c le , et s’est
em paré du p rix p o u r en acheter une autre en son nom.
E t cet oncle qui en avoit une à lu i , qui d’ailleurs étoit
dans l’aisance , l’a suivi dans sa nouvelle habitation , et
a continué d’y v iv r e avec lui dans l’ in tim ité, jusqu’au
dernier instant de sa v ie !
Il a v o lé à sa tnnte une som m e d ’argen t; sa tante s’est
exh alée en r e p r o c h e s , en plaintes amères. E t dans le
m êm e temps elle lu i fait un legs de 1000 fr. par son
testament !
Il avoit accaparé son o n clc et ses tantes; il avoit une
funeste influence. E t bien loin de s’en servir p o u r lu im ê m e , il a d irigé les libéralités de son oncle au profit
d ’ un autrel
Il a reçu
i dans sa maison et à sa table ,' Rose sG ib o n ,
sœur de l’ in tim é; il y a admis A n n e M ia lh e , parente et
alTidée de G ib o n ; il y a affectueusement invité G ib o n
lui-m êm e. E t il étoit plein de précautions et de ruses
p o u r leur soufTlcr des dispositions!
E t c’est avec une semblable c o n d u ite , q u ’ E x p c rto n ,
avo u é au tribunal dont est a p p e l, et bien connu de ses
ju g e s, est parvenu à leur en im poser; q u ’il y a été tel
lement favorisé, que ses con frères, les avocats qui exe r
cent près de ce tribun al, et les juges eux-inêm es ont été
p réven u s p o u r l u i , et que G ib o n a été repoussé par tout
le m onde !
E n v é rité de semblables assertions offensent la justice,
et se réfutent elles-mêmes.
�( 39 )
E t G ib o n q u i , après la m ort d’ une des deux sœurs,
et dans les derniers instans de l’autre , a p én étré dans
sa cham bre p o u r fouiller dans ses poches, y prendre ses
c lefs, o u v rir ses a r m o ir e s , en sortir et s’a p pro p rier tout
le linge et les effets qui les garnissoient ; G ib o n , con vain cu
d ’une coupable soustraction, aura le droit d ’en imposer
à la justice, et d’accuser hautement son adversaire!
D isons au contraire que toutes ces circonstances con
courent p o u r repousser, et sa p ré te n tio n , et la faveur
dont il veut s’entourer.
Disons que si le tribunal du P u y s’est arrêté au tes
ta m e n t, c’est p o u r l’a v o ir sainement ju g é ;
Q u e s’ il a rejeté la p reu ve offerte , c’est parce que ,
d’ une p a r t , elle étoit contraire au x p rin cip es; que de
l ’a u tre , étant sur les lieux et connoissant tout à la fois
les faits et les personnes, il en a sagement a p p r é c ié l’inu
tilité.
D isons enfin que s’ il est vrai qu ’E x p e rto n ait joui
auprès des juges dont est appel d ’une certaine f a v e u r ,
ce n’est pas au moins sa cause; et que c’est le m eilleur
tém oignage q u ’il puisse donner à la C o u r de ce q u ’on
pense de lui dans le lieu de son d o m ic i le , et de ce qu ’en
pensent eux-mêmes les juges près desquels il exerce jo u r
nellement des fonctions publiques et honorables.
Signé E X P E R T O N .
M° . V I S S A C , avocat.
M° .
G A R R O N , avoue licencie.
A RIOM, de l’Imp. de THIBAUD, Imprim. de la Cour imperiale, et libraire,
rue des Taules, maison Landrio t . — Août 1810.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Experton, Jean-Baptiste. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Experton
Vissac
Garron
Subject
The topic of the resource
captation d'héritage
testament nuncupatif
dentelle
textile
infirmes
certificats de civisme
confusion d'héritier
patois
surnoms
diminutifs
nom d'usage
inventaires
dol
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Jean-Baptiste Experton, avoué licencié au tribunal civil du Puy, intimé ; contre Gilbert Gibon, avocat, appelant.
Table Godemel : Testament : 11. dans le doute que peut présenter la volonté d’un testateur, faut-il rechercher et faire exécuter sa volonté ? pour reconnaître le véritable héritier institué entre deux personnes qu’on prétend l’être, l’une exclusivement à l’autre, faut-il considérer l’exécution que le testament a reçue, et le jugement qui a été porté dans la famille, dans le public et par celui qui contracte ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1803-1810
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2010
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2009
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53380/BCU_Factums_G2010.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cros-de-Géorand (07075)
Le Puy-en-Velay (43157)
Landos (43111)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
captation d'héritage
certificats de civisme
confusion d'héritier
dentelle
diminutifs
dol
infirmes
inventaires
nom d'usage
nullité du testament
patois
surnoms
Testament nuncupatif
testaments
textile
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52995/BCU_Factums_G0517.pdf
da00d39e2c6dcb7ef4f5c204e6a27c19
PDF Text
Text
M
E
M
S E R V A N T
O
I
R
E
D ’A V E R T I S S E M E N T ,
P O U R Me. P i e r r e B o u r z e i s ancien A v o c a t en
la C o u r , Donataire univerfel de M argu e rite D e j a x
fa M e r e , Demandeur.
,
CO N T R E
Jullien Dejax
Avocat en parlement
Fils & H éritier de Pierre Défendeur.
,
,
A Juftice laiffera-t’elle fubfifter des partages qu’un
Pèrefit
entre les enfans, de biens dont il n ’avoit
plus la libre difpofition, ou de biens qui ne lui
avoient jamais appartenu ? & encore des partages
in fectez de faux , qui ne fuccederent qu’aux fuggeftions, qu’aux importunitez les plus marquées,
au dol & à la force les moins équ ivoqu es, où l’on
viola offectivement une égalité promife par différens Contrats de
mariage ?
S’en repofera-t’ellc fur un T ra ite qui ne fut que la fuite prémé
ditée de partages fi defectueux , l ’effet de nouvelles vio le n ce s, la
confom mation de la fraude t ramee , & qui emporteroit ( l’on ne
dira pas une lezion im inenfe ) mais une aleination gratuite & prefque totale de biens dotaux ?
A
�t
C e font les deux feules queilions que puillen t. offrir les Lettres
de refcifion fur lefquelles il s’agit de prononcer : L ’on n’annonce
rien que des Pièces autentiques où les faits du Procès n’ayent déjà
défini.
F A I T S .
Jean D e ja x &: Halips M a b i l l e , d e la V ille de Brioude, furenr
m ariez en 1 66.
Ils eurent des talens infinis pour accroître leur fortune à mefurc qu’ils virent augmenter leur famille ; petits & grands en par
lent encore.
Ils e'ieverent quatre enfans. M arguerite, P ierre, Antoine , &
A n n e -M a rie .
Marguerite fut accordée en mariage à Antoine Bourzeis, L ie u
tenant en la C hâtclcnie de Vieillc-Brioude : Leur C ontrat fut
palTé le i i . Janvier 1681.
O u tre ce q u e lle fe conftirua d’e lle -m ê m e en effets qui lui
avoient été léguez par fon aycule m aternelle, Jean D e ja x & H a
lips M abillc lui donnèrent en dot 800. liv. en deniers ou en
obligations e x ig ib le s , & un héritage de pareille valeur, fous
cette cla u fe , qu’où ils feroient plus grandes conftittttions à leurs autres
enfans , ils rendroieut égale celle de la future épouje , à laquelle il feroii
permis de venir a divifion dr partage de leurs biens avec l héritier qu’ils
inflitueroicnt, lequel ledit cas de partage arrivant, auroit pour préciput
Cr avantage la jonime de 2,000. liv. fur le total de leurs fuccejjions.
En 1 6 9 2 . Pierre Dejax fut aufli m a n é a v e c Jacqueline Chaffeirg .
Par fon C o n trat de mariage du 21. Janvier les pcrc & mcrc
communs lui donnèrent une fomme de 1000. liv. des meubles,
deux maifons & un jardin fanez à Brioude.
Ils deftincrent en même tems 5500. liv.
quelques meubles
à chacun d’A ntoine & d'Annc-M aric leurs *cnfans p u if n c z , pour
tous droits de légitim e, parts &c portions héréditaires dans leurs
fucceifions.
Enfin , M arguerite & Pierre furent inflituez. leurs he'ritiers pour
partager (gaiement les mêmes fuccejfwns, après que pierre auroit exercé
le préciput referve par le C o n trat de mariage de Marguerite.
A ntoine Bourzeis ne fouffric pas que Jean D ejax 6c Halips M a
billc euiient ainii fait des conftiturions plus fortes que celle qu’ils
avoient faite à Marguerite D ejax.
Il donna à lire la promcfTc qu’ils avoient faite à cet égard dans
�fa n C o n tra t de mariage î il demanda juilice» mais il ne fut pas
é co u té ; il fît afligner, mais une abfcncc de fa p a rt, un voyage
•à Paris fournirent aux Dejax l ’occafion de féduire fa femme ,
d’extorquer un blanc ligné qu’il lui avoit la ific, «5c d’en profiter
pour form er l’A fte dont on va rendre compte.
C e fut le 29. A v ril 1 6 9 3. ( dans le tenis même que Jean D e
jax écrivoit à fon gendre à Paris , ou que fon gendre affirmoit
un voyage au Greffe du Parlement ) qu’on le fît paroitre à Brioudc
devant Galambret N o ta ire , &: deux Tém oins.
Ainfi multiplié de préfence, Antoine Bourzeis autorifa fa fe m
m e , il re çu t, il s’obligea.
Jean D ejax & Halips M a b ille, » e x e cu ta n t, dirent-ils , les «
C ontrats de mariage de leurs enfans , dr pour les rendre égaux <°
Jutvant leurs inflitutions contraffaclle s , ccderent quelques créances «
à A ntoine Bourzeis & fa fem m e; à les en croire ils auroient <•
compté 300. liv. le tout enfcmble monta à 1150. liv. «
Il fut dit que cette fomme de 1250. liv. jointe à ce que «
M arguerite D ejax avoir déjà reçu par fon C on trat de mariage , «
•égaloit ce que Pierre avoit eu en deniers , m eubles, maifons & «
jardin. «
Q u e ces choies réciproquement reçues ne feroient dorefna- «
vant fujettes à raport ni autre partage. «
Q u e Marguerite &: Pierre ne pourroient plus rien prétendre «
fur les biens de leurs pere & mcrc tant que ceux-ci vivroient ; «
mais qu’après leurs décès , ils partageraient également en deux «
portions viriles tout les meubles, effets mobiliers & immeubles de leurs «
fuccéjjîons, dédu&ion faite du préciput de Pierre , ik des légi- «*
times d’A ntoine ou d’A nne-M aric. «
Q u ’à l’cntrctcnement de l ’AéVe les Parties obligeoient leurs «»
biens, même Antoine Bourzeis à le faire 'valoir, Sc à garantir la fom - «1
me ¿c les autres effets qu'il avoit reçus. «
R even u de Paris , A ntoine Bourzeis ne trouva perfonne qui
oiat lui aprendre I’uiage qu’on avoit fait de fon blanc ligne; il
fui vit l’ailîgnation qu’il avoit autrefois donnée afin d’également »
Jean D ejax l ’entretint encore dans ion ignorance par un Aéto
écrit de fa m a in , cju’il lui fit lignifier le 25. Juin 1693. co m m e
s’il eût toujours été qucllion de cette allignation ou d’un égale
ment fujet à co n te ih tio n ; .mais enfin , la befogne faite fut
déclarée > A n to in e Bourzeis vit fon blanc ligné actuellement rem
p li , l’A tte du 29. Avril 1693. la fuperchcric qui y avoit donné
l i e u , l’iniquité qu’ il reufermoit : C om m en t après tout reelamer
A ij
�4.
.
dès qu’il eût fallu manifefter un faux des plus graves, & Te d c fhonorer foi - même en indiquant, les coupables > un beau p e r e ,
une belle mere , un beau frerc , dont l'honneur lui e'toit aufli
cher qu’il devoit l’être.
Il prit donc le parti du filence, il paroît qu’on lui délivra les
titres de partie des créances codées par l’A<5Vc, qu’il fe repofa du
refte fur le droit qu’auroit toujours fa femme de faire corriger
toute inégalité$ il e'toit même de fa prudence de filer d ou x, Jean
D ejax devenoit infiniment riche , altier , & il e'toit piqué
d ’avoir été aflîgné ; fon ftile dans l’Aéte du 25. Juin le fait c o n noître.
L e décès arrivé d’Halips M abille ne fut fuivi d’aucun événe
m ent ; Jean D ejax reffca en polfeilîon des biens de fa fu cc:i!îon ,
la famille fut tranquille jufqu’en 1707.
Pour lors Jean Dejax fut attaqué d’une maladie defefperee; les
grands biens qu’il a v o it, principalement fon argent comptant , oir
la plénitude de fes greniers, interelferent Pierre Dejax -, A n to in e r
eonftitué dans l’Ordre de Prêtrife , époufa fes vues ; nous ne par
ierons plus d'A nnc-M aric qui ctoit déjà Rcligicufc.
Ces deux frcrcs unis perfuaderent au pere commun , qu’il n’eur
jamais inflitué Marguerite ion héritière pour m oitié, s’il eût cfpcré
de faire une fortune fi brillante; qu’il feroit auiîi injufte q u ’evtraordinaire qu’elle put recouvrer une dot ii confidcrabie quecelle qu'elle trouveroit dans le paitage de fa fucccflîon ; que leur
nom devenoit recommcndablc par la pluralité des mâles qu’une
bru fécondé lui avoit donnez f & le bon homme reçut leurs im prefiions, il adopta l’A£lc d relie dont on va parler.
Jean Dejax lui-même le prefenta à Antoine Bourzcis , en lur
annonçant que fon intention étoic qu’il le fignât &c qu’il le fîc
iigncr par Marguerite Dejax.
A n to in e Bouzcis en remontra l’injuftice , il réfifta.
Jean D ejax s’emporta , il menaça de difpofer de la main A
I l main , & de réduire fes volontez ; il com m anda , A n to i
ne Bourzeis fut oblige de donner parole ; il n’eut que le tems
de fc rendre auprès du Prévôt de L a n g h a c , de lui confier fa
plainte des fu ggeilion s, ou des im portunitez des e n fa n s , des me
naces ou îles emportemens du pere; la fuperchcrie qu’ils avoient
déjà pratiquée pour former le prétendu également de 1693. ou
l ’iniquité qu’il renfermoit, n’y furent point o u b l i é e s . T ra n q u ilc fu r
cetre plainte qu’il fit le 7. Juin, il figna &: fit figner par fa fem
me le 5. Juillet fu iv a n t, l'A£tc que les frères D ejax avoient con
certé : en voici l ’analyfc.
�5
Il y cft parlé de l ’Aéte de 1693. com m e d’un premier dé- «
laiflemenc de partie des biens de Jean Dejax &: d’H alips M a- «
b ille , à Pierre & Marguerite Dejax. «
Il cft dit que Jean Dejax voulant encore plus favorife* Tes «
deux e n fa n s, ne leur laiil'er aucun fujet de conteftation pour «
le partage de fes biens & de ceux d’Halips M a b ille , il fait au- «
tre délaiflement de tous les biens qui lui reftent. »
M arguerite Dejax fous l’autorité de Ton m a r i , «5c Pierre De- «
jax acceptent le d éla iflem en t, prient leur perc de faire le par- «
tage tant des biens délaiiTez que de ceux d ’Halips Mabille. «
Jean Dejax fe rend à leur p ricre , & après avoir examiné la «
confiftance de tous les biens, il trouve qu’il revient à Margue- «
rite pour (a portion & m o itié, des Contrats de rente , Obligations s «
Fromcffcs dr Cheptels, au nombre de 4 9 . le tout montant à «
5460. liv. 1. f. 9 d. «
Il ajoute qu’à fa requ ifition, Pierre D ejax compte de fes de- «
niers à A ntoine Bourzeis une fomme de 1000. liv. que cette «
femm e & les papiers délivrez font la portion afférente de Mar- «
guérite D ejax dans les biens &: fucceilion de fes pere ¿c merc. <•
Il continue , que le furplus des mêmes biens appartient à «
Pierre D e ja x , tant pour la portion que pour ion préciput de »
1000. liv. la fomme de 1000. liv. qu’il vient de co m p te r, on au- •
très fommes par lui payées en f acquit de fon perc.
<«
Pierre Dejax cft chargé de payer encore cri l ’acquit du même. «
A u iicur Prévôt du C hapitre de B rio u d c, 60. liv. pour un ref- «
tant d ’arrerages de F erm e; 72.5. liv. pour un terme à échoir 5 «
1450. liv. pour une année fuivante, m oyenant quoy il cft fu- «
brogé au bail. «
A u T h é o lo g a l, 120. liv. au m oyen de quoy pareille fubroga- «
tion. «
A u x Cordeliers , z i . Üv. 13. f de r e n te , com me s’il n’y ei'ic «
point de fond plus avantageux. «
A u x C o lle & cu rs, la T a ille de l’année courante, com m e fi la «
récolte à faire n'eût pas été plus précicufc. «
A la Fabrique de Sr. Pierre , une fondation annuelle de 6. liv. «
& 6. liv. de peniion à Anne-M arie Dejax R clig icu fc , com m e «
ii c ’eût été des objets bien confidcrablcs. «
Il cft aulfi chargé de faire cclfer une demande en garantie que «
Guillaume Peliflicr avoit intentée, com m e s’il eût "fallu afliïrcr »
par des avantages anticipez , cette prétention qui n’a jamais eu «
de fuite. <•
i
�P
f
; f! Elle n’a
» Il eft convenu que Pierre Dejax payera de plus au perc com¡amais ¿té „ rnun une fomme de 600. liv.
yc"’
« Il eft arrêté que certaines créances demeureront en com mun
» entre îes enfans ; que Pierre s’en chargera par inventaire pour
» en pouriiiivre le recouvrement à frais co m m u n s, fans qu’il foie
« tenu d'aucune d iligen ce, prefeription ou infolvabilité.
» Double claufe , qu Antoine Bourzeis tant en fon nom propre & pri»> v é , qu'en qualité de m ari, folidairement » promet ne plus faire demande
I I ctoit •> aucune , s’oblige à l'entretenement & entière exécution de l'Acte , palle
- »orsd’état „ cn ja nmifon de Jean D e ja x .«
: i 0UIr'
L ’Inventaire à faire fuivant l’Acte étoit tout p r ê t , il fut iîgné
'. {
cn même tems.
!
T e l fut le partage qu’A n to in c Bourzcis fut obligé d’accepter
|
des biens de Jean Dejax- ou de la fucceiïîon d’Halips M a b ille ,
j,
inftruit & chargé par détail d’un lot pour fa fe m m e, mais dans une
ignorance entière de cc qui compofa celui de Pierre D ejax 5 privé
de toute part dans les biens finguliers d’Halips Mabille , dans les
deniers comptans > les meubles & les immeubles de Jean D ejax.
t:
D iviiîon léonine & inique s’il cn fut jamais,
f
L a maladie de Jean D ejax fc de'clara cependant par une mort
j,
prochaine.
A ntoine Bourzcis fc vanta imprudemment qu’il trouveroit
i
m oyen d’avoir juftice cn faifant mettre des fcellez, & valoir la
|
plainte ou les proteftations qu’il avoit faites devant le Prévôt de
L anghac 5 les D ejax prévinrent fes refolutions ; dans une feule nuit
I
ils enlevèrent leur pere moribond & dépouillèrent fa maifon de
j
routes choies.
!
Il ne fut plus poffiblc de le voir que chez Pierre D e j a x , cn[i
vironné de Prêtres confidcns, ou de f e s f é d u û c u r s , qui au moindre
!'
mot fonnant te m p o re l , avoient foin d’impofer filence &: de con L.
.
t
!’
|
t
j
Í
•j
*
gcdicr.
Les pleurs de la fille ¿conduire fouleverent le voifinage ; fes
freres cn furent épouventez j ils appcllcrent le mari dans une
chambre particulière; cc fut là qu’ils entrèrent cn nouveau marché des droits de leur fœur , de la plainte ou des proteftations
qui avoient tranfpiré ; qw'Antoinc Bourzcis deja découragé par A?
divertijjement qui vcnoit d’a r r iv e r , fc laifla tenter pour de l'argent : Pierre D ejax compta cent p iftolcs, A n to in e B o u r z c i s remit
la plainte 011 les proteftations, & prcfquc toutes les pic'ces q u ’il
y avoit énoncées > on lui fit faire un billet pur & fimplc de la
iom in e, qui fut depofé entre les mains d ’A n to in e De j a x , pour no
�lui être rendu qu’après un traité confirm atif du partage. T o u t e cet
te oeuvre fut dattée com me le billet du y. OEîobre 1707. A ntoine
Bourzeis montra des efp eces& dit à fa fem m e qu’elle auroit lieu
d ’être contente > elle fe retira dans cette confiance j Ton pere m ou
rut deux jours après dans la maifon fufpecte où il avoit été' trans
p o rté, & Pierre Dejax commença de s’épanouir dans les aifes de
la jouiflance.
A u mois de M ay 1708. A ntoine Bourzeis tenta de recouvrer
Ton biiler, pour fe pourvoir ferieufement contre le partage de 1707.
Il fit ailigner devant l’O ffic ia l, A n to in e D e j a x , qui en étoit le
'dépolitaire ; mais ce Prêtre fc fit un p oin t d’honneur de le punir
de ce qu’il s’éloignoit des fictions dont on étoit convenu ; il remit
aufîl-tôt le billet à Pierre D e j a x , & fe laiiTa condamner par dé
faut à le rendre à A ntoine Bourzeis.
Pierre Dejax de fon côté ne perdit pas de tems à en »former
demande 5 il obtint Sentence de condamnation au Bailliage d’A igucperce.
A rm é de cette S en ten ce, il fit fçavoir à A ntoine Bourzeis qu’il
falloir payer ou s’approcher pour traiter fuivantles conventions qui
avoient été faites ; A n to in e Bourzeis ne Iaiifa pas que d’obtenir &
faire fignrfier des Lettres de refeifion qui furent ccntejlèes en cette Séncchauflee 5 mais déjà un impitoyable Sergent étoir chargé de co n
traindre, de faire des faiiies réelles & m obilières; A ntoine Bour
zeis chargé d’une famille nombreufe & peu com m ode , eut été
perdu s’il eut réfifté plus long-tems au parti que Pierre D ejax
aimoit mieux ; il craign it, il fc liv r a , il adopta le T ra ité que
Pierre D ejax avoit fait dreifer , il le ligna & le fit figner par fa
femme le 2. Février 1 7 1 2 . m oyenant un dcfijiemcnt que Pierre
D e ja x lui donna fcparcmcnt de l’effet de la Sentence, la rcflitution du billet de 1000. Iiv. & 500. liv. payez co m p tan t; voilà le
v ra y ; voici ce que l’Aéte contient.
Il énonce dabord des moyens de reilitution pour A n to in e <«
Bourzeis & fa fe m m e, des défenfes pour Pierre D e ja x .«
Et après que Pierre D ejax a reprefenté de nouveau les effets «
mobiliers qui lui avoient été' delaiifcz par les A & cs de 1693. &: «
1707 que Marguerite Dejax & fon mari fe font exactement in- *
form ez de la confiihincc de tous les biens des fuccefïjons pater- «
nellcs & maternelles, de la valeur du m obilier &: de toutes les «
charges pallives , Pierre Dejax paye par forme de fupplémcnt «
& ioulte de parrage, la fomme de 1500. liv. quitte fa foeur de«»
la m oitié de toutes les dettes qu’il a payées. «
�s
» L ’on procédé tout de fuite au parcage des e ffe ts, qui fuivanc
l ’A & e de 1707. e'toient rcltez communs , & avoient étédépofez
par Inventaire entre les mains de Pierre Dejax. L ’on convient
q u ’il en retiendra une certaine partie pour en pouriuivre le recouvrement.
« Antoine Bourzcis & fa femme ratifient les Aétes de 1693. &
« 17 0 7 . fc défiftent de leurs lettres & dem and e, & s’ob lig e n tfo » lidairement à l ’entrctenemcnt de l ’A & e .
C ’eft-à-dire» que toute la dot de Marguerite D e ja x , ou fa por
tion dans les fucceflîons de fes pere 6c mere> ( qui fuivant Pierre
D e ja x lui-même dut toûjours être d 'une moitié égale à la fienne )
fut enfin arrêtée, tant en bons qu’en mauvais effets , à une fomme
de 10810. liv. 1. f . 9. d. c ’cft cffe&ivement tout ce que l’on pouroit dire qu’A ntoinc Bourzeis auroit reçû depuis leur C on trat de
mariage. L'évcnement apprendra que ces 10S10. liv. 1. f. 9. den.
n ’ont pas valu 6000. liv. que Jean Dejax fcul avoit plus de 100000.
liv. de bons biens à Ton décès j que Marguerite D ejax auroit dû
recouvrer dès 1707. plus de jo o o o . liv.
Elle n ’eût fans doute jamais accédé au dernier A éte, fi elle avoit
été inftruite de fes d r o it s , ou il Ton mari gêné par des condam
nations &: par le mauvais état de fes affaires, ne l ’y a v o it pas
forcée : Elle auroit du moins r e c la m é , fi fon a&ion n'eût pas dû
réfléchir contre Ton m a r i , auquel les D ejax n ’avoient jamais man
qué de faire promettre touteforte de garanties-, elle vit avec patience
que la portion que Ton frere avoit tant ambitionnée &C r e te n u e ,
eût rendu fes tributaires plus de vingt Villages des environs de
B rio u d e , qu’elle l ’eût mis en état de prêter à tout ven a n t, d’acquérir tout ce qui paroifToit à ven dre, 6c d efo u ten ir le rang que
leur pere com mun avoit e u , de premier entre les riches de la Ville i
mais enfin , elle ne put tenir contre les reproches qu’elle en en
tendit de toute part; elle prit le j>arti de faire une donation univerfelle au Demandeur fon fils a in e , à charge d ’une certaine lé
gitim e pour fes autres enfans; l’A f t c en fut pafie à Paris en vertu
j e fa Procuration le 11. A vril 1 7 2 1 .
Ainfi faifi des droits de fa mcrc , le Dem andeur écrivit à Picrro
D eiax » il en reçut auifi quelques lettres, qui quoique mefurées,
laiflent entrevoir toute l’injuilicc de fa conduite pafféc. L ’on pré
tend dans le monde que trop prefi’é d ’expliquer quel pouvoir avoir
été fon lot dans le partage de 1707. il aima mieux mourir que de
continuer aucun commerce avec le Dem andeur, ou que de s’en
tretenir d ’matière dnnr iv>bjec ne tendoie q u a lui faire di
minue*
«
».
«
»
�-
9
,
$ 9 3
ininucr de rim m enfité des biens qu’il avoic extorquez.
. Il fallut donc avoir affaire à ion héritier -, ce fut Je D éfen
deur i il étoit déjà A v o c a t ; il a vo it paru au Barreau de cette Sénéchauflée, il s’y é toit fait des amis & des admirateurs , il ne
l ’avoic quitté qu’après des exploits d'éclat , garants des préféren
ces qu’il emportoit > rien n’étonna Je Demandeur qui fçavoit qu’il
n ’cflT ni amitié-ni mérite qui puillcnt devenir titres dans la juftice
diftributive : au c o n tr a ir e , comm e s’il eût dû trouver un A d v erfaire capable de fe juger lui-même , il obtint de premieres Lettres
de refeifion , qu’il fit lignifier en 1 7 1 2 . Une péremption furvenuë
l ’obligea d’en prendre de fécondés qui furent iignifiées en 1 7 3 1 .
après une rénonciation à ia fuccdilïon de fon pere ; & ¿1 a eu la confolation de s’aflurer par des procédures de contu m ace, que le D é
fendeur eft effectivement periuadé de I’injuftice de fa c a u fe , q u ’un
appointement recherché par une plaidoirie de fa façon pouvoit être
ion unique moyen de continuer la jouilíancc des biens qui ne lui
appartiennent pas.
Ces Lettres de rcfciiion attaquent l’egalcment du 29 Avril 1693.
le partage du 5 Juillet 170 7. & l’ Aéte du z Février iy iz .
Les conclufions du Demandeur portées par l ’Exploit ou R e q u ê
tes des 3,1 Janvier , 4 A o û t 1 7 3 1 ................................................ 173^*
font compofécs de pluficurs Chefs : les voici.
A ce qu'il plaife déclarer nuls les trois À cíe s de 1693 • V ° 7 - &
Prem ier
en tout cas enteriner les Lettres de recifion & mettre les Parties en l'état C h i f quelles ètoient avant les mêmes Attes .
Ce faifant , jans qu'il foit befoin de partage , qui par le fait de
'
Pierre D ejax eft devenu impoifible , condamner le Défendeur com- M * H£ F '
me héritier du m êm e , a pa'ier au Demandeur en qualité de donataire univer f eid e Marguerite D e ja x , la fomme de 4 5 0 0 0 liv. par forme de fouit e ,
Cr d'également, à raifon des biens qui furent donnez, ou dclaijfez, à Pierre
D e j a x par fon contrat de mariage du 21 Janvier 1692.. ¿ r de ceux dont
i l s’empara enfuite de Í A ¿le du 5 Juillet /707. tant en deniers comptans ,
meubles , effets mobiliers » quimmeubles > ayant appartenu à Jean\Dejax
a Halips Mabille.
j n x intérêts de U même fomme de 4 7 0 0 0 liv . a compter dudit jour 5 T r o i s i b * .
'juillet 170 7.
.
.
.
,
mi C h i f ,
Aux offres quefa it le Demandeur de jurer i n 1i t e m , que, an même jour 5 Quat»iej
Juillet i j o j . l e s biens qui avoient appartenu a Halips Mabille, ou ceux qua - M 1 C h « »
voit atf ¡tellement Jean D ejax de fon c h e f , en deniers comptans , meubles,
effets mobiliers & immeubles, étoient du moins de valeur de 1 0 0 0 0 0 liv.
Et où il y auroit la moindre difficulté à prononcr des à prefent C i n q u i b ’ CCttc çondamnacion de 4J000 liv. S¿ in t é r ê t s , moyennant le fer- M*Cmr,
B
�âe>o
S i x i e ’ me
Cuti.
v 1^
10 ■ . . .
ment offert , cc que le Dem andeur n’eftime pas, avant faire drottr
fu r ce c h e f , permettre an Demandeur de faire preuve , tant par Titres de
vant M. le Rapporteur que par Témoins & commun? renommee, on par
cen/ures Icclefiafliques devant un Juge non fufpcét fur Jcs lieux , que
les biens qui avoient appartenu à Hxhps Mabille , ou ceux que Jean D ejax
avoit de (on c h e f à fon décès , tant tn deniers comptons que meubles , effets
mobiliers dr immeubles , ¿1 oient du moins de valeur de îoooco. liv . ou de
J olt ph‘ s foi* Peu moins fo rte.
A u dernier cas , condamner le Défendeur en \ oooo /. de provifion &■
aux dépens, aux proteftations que fait le D em andeur de révoquer néan
moins s’il y échet l ’alternative qui fait la matière de ce dernier CheiL
Il ne s’agit plus que de faire voir que ces différentes c o n d u
irons font juftes > fondées ou bien vérifiées..
Examen du premier C h e f des conclufîons du Demandeur , con
cernant la nullité des A fie s , ou ï entérinement des
Lettres de rejcijion.
Moyens de
Jean D e ja x & Halips Mabille n’inilituèrent pas feulement M arnullité,
guérite D e ja x leur béritiere pour m oitié > ils lui prom irent encoreexpreflemenr l'égalité , en lui conjlitnant fa dot.
Les deniers co m p ton s, Jcs meubles & les immeubles qu’elle auroit dû prendre ou recueillir dans les fucceflions de fes pcrc &:
incrc , avoient donc l ’imprciTîon de biens dotaux. Il n’en faut pas.
douter , puifquc dans fa dot avoient été compriics l'iujlitutiou &■
l'égalité qui dévoient les lui allure r.
Par légalem en t de 1 6 9 3 . par le partage de 1 7 0 7 . par l’A & c
de 1 7 12 . les D ejax lui firent difpofer de la moitié de ces deniers ,
de ces meubles & de ces im meubles, pnifqn'elle n'eu eut pas la moindre
portion } on lui fît par confcqucnt difpofer de fes biens dotaux.
L e mari c r la femme conjointement ou féparément confiant le mariage }.
ne peuvent vendre , aliéner , permuter > ni autrement difpofer des biens
dotaux de ladite femme au préjudice cCicelle, & font telles dtfpofit ions nul
les , de nul effet & valeur. C'efi la difpofition textuelle de la Coutume , 77/. .
4 . art. 3.
La L oy Un. au dig. de rci ux. aft. porte , fundum dotaient non f>~
lum bipotbeca tittdo dare , ncc confentiente muliere , matitus poffit , f t d nec
alienare ; termes négatifs & prohibitifs qui emportent la même, nul
lité j parce que l’on fçait que nullum paéfum, nullam conventionem
nullum contrattum tnter eos videri fubfecuttm qui contrabunt leçe contrahere prohibent ;f t d é ' f i q»id fubfecutum ex eo v cl ob id quod interdicente
�lege factum e(l, illud caffum Atque inutile e jl, fuffrcit enim Icgijlatori pro
hibaijje éjtiod jieri non vult.
T ou rcs les L oix qui peuvent régir les P a rtie s , concourent donc
à prononcer la nullité des Aétes où la femme a difpofé de fes biens
dotaux j elles ne s'attachent q u ’au f a i t , fans confiderer la manière
dont il a fucccde ; il enfuit que les A&es de
de 17 0 7 . &
de 1 7 1 1 .- cù l'on fit que M arguerite Deiax diipofa des biens qui
faifoic-nt partie de fa dot, font 8c doivent abfolument être déclarez,
nuls.
Il cft de principe , qu’en cas d’A&es paflcs com me ce u x dont
^ ^
il s’a g i t , contre la Coutum e 8c les Loix du P a y s , les Juges peu- dansm f0r'
vent les annullcr de leur autorité. L e Dem andeur auroit donc pu Enchir. §.
fe difpenfer d’obtenir des L ettres : II n’en demande l ’enterinemenc tc°snuac"
qu’en tant que befoin f e r o i t , & il va montrer que fi les Actes con
tre lefquels il réclamé pouvoient n’être pas déclarés n u ls, ils feroient du moins fujets à refeifion.
Celui de 16 0 ?. ne fçauroit être regardé que com m e«» également Moyens de
t-x •
x -r
1
> ii
. / / o
<1 refcilien.
■pour Marguerite D ejax , a raifon de ce qu elle avoit ete actuelle
m ent moins conftituée par fon contrat de mariage , que Pierre
D e ja x 11’avoit reçu ftiivant le lien.
Dans celui de 1707. l’on ne rcconnoît qu’ un d éla iiîcm cn t, ou
m e diviftort, com m e par portions é g a le s, des biens de Jean Dejax ,
•8c de ceux de la fucceifion d’Halips Mabille.
Enfin, celui de 1713. ne fut pallè que pour accorder une foid te,
•en confirmation des précédons.
Ces trois Aétes ne font donc en effet qrinn partage com m encé ,
continué & clos , des biens ou dçs fucceflions de Jean Dejax 8c
d ’Halips Mabille.
La lcfion , le d o l , &c la force font en général les caufes de refeiiîon , que les L o ix ont marquées en matière de partage.
Lcfiou
Il cii de l’cflcncc des partages , que chacun des héritiers trouve
dans cc qui lui cft d o n n é , la jufte valeur de ce qui lui appartient,
8c île cc qu’il poiîcdoic auparavant par indivis. En effet quand on
fait un partage , l’on 11c penfe pas faire un commerce ou un ne- u amouj
gocc , mais régler 8c fixer fes droits en divifant également cc qui des uf,
étoit indivis : L ’opération du partage n ’eft q u ’une cfpccc J c H j l +-n* |
com pte , où il s’agit de délivrer à un chacun cc qui lui cft dû > & 1 l '
i
où l ’erreur doit toujours être réparée , le partage étant toujours
cenfe im parfait, jufqucs à cc que chacun des héritiers ait eu ciivi- fait. ign,
fément cc q u ’il avoit par indivis ; cnfortc que la reftitution n’eft
q u ’une véritable demande en achèvement de partage.
La lciion , ou l ’inégalicc cil donc une bonne caufc de refeifion
B ij
�j| 4 & L
I
'■
>;
i ;*
i.ji
|:
i
,
i
j
'* * *
,i
GodeF. far en matière de partages : tous les Auteurs qui en o n t traité î'attef-oriburiT ccnt 5
nc ‘f° nc difeordans que fur le plus ou le moins ; l’opicomm.utr, nion qui regne aujourd’hui eft , fque ceiTant toutes circonftances
intJJvIornac particulières, la léfion foit du tiers au quart; quelque légère qu’ellefur la mi- parût ici , tautilla , non modica mniis , elle icroit cependant d’une
me loy.
autorité abfolue, non feu lem en t, parce que fuivant tous les ActesJ o c ^ t ^ olu
S|ucftion » l*1 volonté écrite des D ejax fut que Marguerite
fur"l’art, eût un partage égal, mais encore , parce que ayant été inftituée hécoiud<d-a r*tlere Pour m oic^ , ou ¿’égalité lui ayant été promife par ion c o n paris q. g. trat de m ariage , fon pere lui-même ne fut pas le maître d’y con■
, 41, ac. tr e v e n ir , ou de lui faire un partage qui contînt la moindre inegalicé.
L ’on nc diifimulera pas qu’il eft des L o ix dans le Digeftc &:
>•;
dalis le C o d e qui a u to rife n t, qu’il eft aufli des Arrêts qui ont con¡1
. fumé des partages faits par peres 6c meres entre leurs enfans, quand
!l
même ils contcnoient quelque inégalité.
1,
M ais ces Loix & ces Arrêts ont toujours fuppofé trois conditionst.
qui nc fe rencontrent pas dans notre cfpecc.
*
La première , que les partages faits par peres & meres- fuilenc
oeuvrer de liberté , d ’un jugem ent fain & a tt e n t if, du fccret m ou
vement de la nature , qui anime toujours à bien &: à bonne fin..
l,
L a fé c o n d é , que l ’inégalité fût légère &c connue.
La troiiiém c, que les partages fuilent A & cs de lib é r a lit é , c’eft|
à-dire de biens qui appartinrent aux partageans, ou dont ilseuflenc
actuellement la libre difpofition.
U n pere qui nc s’eft pas de'ja dépouillé , qui n’a jamais promis
d’egalité , partage de bonne foi fes biens entre fes enfans > le par
tage paroît aucunement inégal ; n 'im p o rte , il faut le confirmer j
cette liberté , dont il a pû uferde partager inégalement , affinera
d ’autant plus le rcfpcft que les enfans doivent à leurs peres & mè
res , fuivant les Loix divines & humaines ; voilà en abrégé toutes
les Loix & tous les Arrêts fur cette matière.
Alais il partage inégalement , par la force des fuggeitions, des
;
im portunitez , des menaces , ou des contraintes ; au préjudice
,
d ’une inftitution contraducÜc , d’une égalité pluficurs fois prom. Cora* mife , &L fur laquelle a dû com pter une famille étrangère en concnfcsccr.t. traitant alliance ; il partage encore ainii des biens qui nc lui
*L-s biens avo>cm "amais appartenu ; il n’eft ni L oi x ni Arrêts qui ayent
! l il’Halipi 3 Utoriie tel jugement i
la r.iifon fufiit pour le profcrirc.
> Mabilc.
Lxaminons prcfintcm ent quelle pourroit être la léiion qui ré»,
fultcroit des Aéics dont jl s’agit.
Ufionre*
L ’A ijc de 1693. devoit être un également de M arguerite à Pierre
i.iu«» & Dcjjx>
b
�13
t*^ ç
Il ctoit impoflible de le former fans connoitre la valeur des l’A&e
meubles & des immeubles que l ’un &¿ l ’autre avoient reçu.
l69 3Les meubles ne furent point réprefentés, l ’on n’en déclara pas
même arbitrairement quelle pouvoir en être la valeur.
Les immeubles ne reçurent aucune eflimation.
T o u te s choies relièrent fans prix.
C e n’cfl donc plus un é g a le m e n t, puifque l’on ne fçauroit égaler Bonif.to
que de liquide à liquide : ce n’eft qu’un A¿1 zefjenticllement défe&ueux
& infoutenable > qui ne refpire que leTion ou in é g a lité , abfolument PaPon‘,i
fujet à refcifion.
i j tic
M arguerite D ejax n’auroit reçu fuivanc cet A i l e que des créan
ces fur particu liers, mais des créances dans la plus grande partie
de nulle valeur , ou litigieufes : celle de 1 50 liv. fur Eftival*Roman
dont les biens étoient depuis long tems en dccret , étoit abfolu
m ent caduque : celle de 500 liv. fur les Chaudons n’étoit qu’une
prétention non liq u id e , dépendante de l'événement d’un procès qui
dure encore , & dans lequel le Défendeur cil Partie , & c . Pierre
D e ja x au contraire n’eut que chofes certaines, profitables & de
bonne garde 5 des m e u b le s , des m a ifo n s , un jardin : ainfi lé g a le
ment manqua encore, eu égard à la bonté des biens donnez à Pierre
on
D e j a x , la léfion fcroit certaine par la qualité des e ffe ts , ou du moins l ^ tic.
y
de la plus grande partie des effets ccdcz à Marguerite Dejax. H
jfaudroit toujours entériner les Lettres.
La claufe infcrce dans l’A & e que les chofes réciproquement reçues
ne feront plus fnjettes à rapport ni à antre partage , ne fait que réalifer
actuellement la Ic’fion ¿C l’inégalité ; fi ce que Marguerite Dejax
recevoir, joint à cc qu’elle avoit déjà re çu , avoit pii l’égaler à Pier
re , ou ii ce qui avoit été conflitué à Pierre , n’eut pas été de plus
grande valeur, l’on n’eût pas pris la précaution de itipulcr qu’il n’y
auroit plus de rapport ni de partage à cet égard ; cette flipulatio»
cil même contraire aux bonnes moeurs autant qu’elle auroit auto
rité Pierre Dejax à s’enrichir aux dépens/de fa fecur , qu’elle tendroit à exclure encore toute garantie pour raifon des chofes de nonvaleur 011 litigieufes que Marguerite auroit reçu ; cc qui efl rcprouvé par toutes les L oix ; ainfi jugé par diflerens Arrêts ; même la côu
nonobilant les défenfes de recourir , qu’un pcrc qui n’auroit pas eu cha.ul
1* t
•
•
'
c 'r
*
Bonif.i
les mains hccs pourroit avoir prononcccs en îaifanc partage.
a.iiT-,
L ’on entend par ces confédérations qu’il n’eil point équivoque
que T A d e de 1 6 9 ? . n’emporte inégalité , que la lcfion qui en rc- n ° “pi
fuite peut être du tout au to u t, que par le (cul moyen de léfion il
feroit fujet à refcifion.
Lfciioi
L ’A il e du 5 Juillet 1707. c i l //»partage que Jean’Dejax prre commun fît entre les c n la n s , non feulement de fes propres biens ou de fa i ‘7 ü7'
�f
■
v
||i
*4
•
.
fucccflion à échoir, mais encore de ceux de la fucceifion échue d ’H alips M abille fa femme.
‘ Le Dem andeur ne fait point ici valoir que de q u a ra n te -n e u f
ji:
créances codées à Antoine Bourzeis 8c fa femme par ie même Adtc >
!
douze étoient actuellement de nulle valeur , qu’il en a encore les
i
T itre s accompagnés de pourfuices fans efïcr. Que les D ejax firent
j‘
ctat contre M arguerite d’une fomme de 240 liv. que le pere avoic
i
auparavant ccdée à Antoine Bourzeis m oyennant fitisjaction.
j*
C e qui doit fuffirc , c ’cft que l’A & e annoncé com m e un partage
dçs biens de Jean D ejax & d’Halips M a b ille , ne donne cependant
|
cpririoiiTahce quelconque de ces biens : Jean D ejax n’y déclaré &
■
dénombre que les effets en papiers, qu’il afligne pour la portion de
;.J
M arguerite ; ce qui peut compofer la part de Pierre eft Ia i il c dans
4
Jc<; tenebres ;
des lors ce n ’eft plus un partage , qui fuppofe en
|!
tviâence toutes les chofes partageables : ce n’eft plus une diviiion
£■
de tous biens , puifque les papiers ailîgncs à Mnrgucrirc font abfo|lfi jugé lum ent tout ce qui y paroit ; ce n’eft qu’un A
cffcntidlcmcnt déf Arrêt fe d u e u x com m e celui de 1693. refpirant Ieiiôn & inégalité , abfo*ç~b' lu m ent infourenablc.
^Con.
En e f f e t , com m ent reconnoître que le lot expliqué pour M arguérite Dejax auroit été égal à celui de Pierre, dont on ne donnapas le moindre détail : C ’en eft affez en cette matiere de bonne f o y ,
pour conclure qu'elle fut partagée inégalement , ou qu’elle fut lézée
à tous égards ; la léfion peut même être porte'c au plus haut d ég ré,
i
dès que les Dejax dérobèrent le moyen d’en défînii le taux.
Il y a p lu s , à n ’en juger que par les énonciaticm fugitives que
l ’on trouve dans l ’A ftc de 1693. ^cs ^*cns d e là fucccilîonvd’Hahps
M abille étoient conlidcrablcs ; clic avoir eu de l'argent , des meubles ,
1
des immeubles, fuivant un A & c palfé devant M artihon Notaire ; 6c
encore des m.u/ons, ja rd in s , vignes & rentes. Jean Dejax en difpofa
1
quoiqu’il n’y eut aucun d roit; il dclaifla tout indéfiniment à Pierre,
& Marguerite n’y eut rien , quoiqu’elle en fût déjà propriétaire pour
'•
moitié : L ’cntrcprifc de Jean D ejax à cet égard n ’cft-cllc pas manifefte ? La léfion qui en rcfulte n’cft-cllc pas certaine ?
>n teL ’Acte du 2 Février 1707. fut figne par Antoine Bourzeis & fa
."‘j t,c femme , moyennant 1500 liv. de foulte ou de fupplénicnt * mais cette
fomme ne répara point la léfion refultante des A & c s précédons, la
les Uiion refta toujours plus que fuffifante pour opérer une refeifion à
‘ o liv»
'
1
4
^
4
*
.'.le
tous égards.
ï: Ac
Quand on a procédé de bonne foy à un partage , quand il n’y a
que de la lé/ion , 1 ’on peut prendre la voye de Jitpplcment ou defoulte i
7o7°il dans cc cas la foulte , ou le fupplément fc doit faire en biens héredi-z
�I5
.
V '<1*ires, & non pas en deniers , où la leiîon n’eflt point réparée > la futaflne'
raifon de cette refolution e ft, que le fondement d e là reftitutionou kmcntic
du fupplément qui eft d û , coniifte en ce que celui qui i'c plaine n’a Dumoui
pas eufa part afferente des biens com m uns.Voilà quelles font les régies, i"1111>artSupposons i c i , que les A d e s de 1693. &
i j o j . c u i ï c n t été paf- i4 fs°UC’
fés de bonne foi ou fans d o l , q u ’il r.’y eût que de la léiïon ; nous
dirons avec avantage , que par l’A£te de 1 7 a . Pierre D ejax ne ré
para p int cette lciion , ou qu’elle iubiîiLe toujours pour opérer une
rcfciiion à tous é g a r d s , puilqu’U ne donna de foultc ou de fupplemenc quen deniers , puifqu’il n’en donna point en bi:ns héréditaires ,
q u ’il cil toujours vrai que Marguerite Dejax n’y eut point fa par:
Afferente , qu'elle n’y eut nicme part quelconque.
C e qui pourra faire mieux entendre tout ccci , c ’eft que par
l ’Adte de 1 7 1 1 . Pierre Dejax n’accufa en aucune maniéré la 'valeur
des fuccellions paternelle ôc maternelle , 011 de ce qu’il en
avoit amande , foit en argent c o m p t a n t , ioit en m e u b le s , effets
mobiliers ou immeubles : mais s’il ne donna point à connoître lit
valeur de ce q u ’il avoit am ande, com m ent arrêter que les 1500 liv.
q u ’il paroitroit avoir donné , furent une foultc ou un Supplément ca
pables de lui égaler fa feeur ? plaifante foulte qui ne répondit qu a
î ’indefini ; qui ne fentiroit pas que l’indefini ne fut ménagé que
pour cacher l’inégalité ou la lciion > T o u r ce que l’on voit ici de
certain , c'eft que l’on ne voit poinr que Marguerite Dejax a it eu
ce qui pourroit valoir la m oitié qui devoir faire fon partage ,
ou qu’elle ait eu aucune part dans les meubles , les rentes, les im
meubles de fes pere & mcrc ; en voilà plus qu’il ne faut pour refcindcr & reformet* ; pour rechercher l'égalité promife par differens
Fratn
C o n t r a t s de mariage , pour fc rendre aux vœ u x de la nature qui nom,nc
, 1,
*
i t x 1
commu
ré ta b lit entre frerc & i œ u r , a ceux-mêmes que les Dejax voulurent w s a ppa
faire paroître dans tous les ailes dont il s'agit, autant qu’ils y dé- &
d a tè re n t conftamm enc, partager pour moitié Marguerite Dejax. Elle
n ’auroit eu fuivanr ces A & e s ou fuivant fon C on trat de mariage , (od o. 1
que 108 10 liv. 1 f. 9 d. qui n'en ont pas produit iix; les fculsbicr.s c- de 1
que Jean D ejax avoit à fon d é c è s , valoient plus de cent mille livres: ^uJ*
Marguerite Dejax auroit dû y prendre plus de 5.0000 liv pour fa
part, dont elle auroit joui depuis 17 0 7 . qui lui auroient fourni de
quoi élever fc s e n fa n s , les retenir auprès d’elle , 6: les doter com
me Pierre Dejax fit à legard des liens ; la chofe eft trop criante i
il cil tems que la Juftice parle.
M ais £0 "n’eft pas tout , le Dem andeur pourroit mettre à l 'écart
Mo
fes moïens de nullité & de lézion > les A iles dont il s’agit ne fçau- t,e
roient tenir contre le dol qui fut pratiqué pour y a rriv er, les for-
r *r \
�i.
•
j;;
!i
;
Moyen
mer ou IesToutenir. Ils font tous l ’ouvrage ¿¡(thématique de Pierre & d’A n to in e D cjax ; c’efl à eux que s’adrefleront les termes dont
le Demandeur fera obligé de fc fervir pour s’expliquer, exciter la
jufle indignation des Magiftrats ou la rigueur des L oix ; il protefle
qu’il n’aura jamais en vue Jean D e ja x , qui ne fut lui-même que la
viétime de leur féduétion.
Les D ejax ne firent qu'un fa u x A ft e en faifant figner par leur
,
i!cd<î’A£i* ^œur
Pr^tcndu également de 1693.
C
y luppoferent préfent A n to in e Bourzeis qui étoit à Paris, éloi*1
g n é de cent lieues de Brioude où l ’Adtc fut paifé. Son abfence eit
prouvée par un A & e d’affirmation de voïage auGrcffe du Parlem ent,
!
& par une lettre que Jean Dejax lui écrivit en même tems 5 fi fa
|.
lignaturc paroît enfuite de l ’A & e , ce n ’eft que parce que les D e ja x
extorquèrent & abuferent du blanc ligne qu’il avoit lai île à fa femme. Le faux cil é v id e n t, il n’eft point de faux fans dol perfonnel j
|
la circonilancc que les D cjax défendirent encore le 2.5 Juin à la
v
demande d’Antoine Bourzeis , comm e ii l’A d e du
Avril précep
dent n’eût point cté paflë , ou qu’ils le tinrent encore caché plus
;
de quatre mois après fa date , cara£tcrife infiniment, & l ’on entend
(
que l’A & c fut même nul autant que M arguerite D c ja x ne le ligna
conflam m ent qu’en l’abfcnce ou fans l’autorifation de ion m arijainii
l ’Aetc ne fucceda pas fans d o l , qui ccilant les moïens de nullité &
de lézion , fufiiroit pour faire entériner les lettres de rcicifion.
Moyen*
O n ne parvint à I’A ft e de 17 0 7 . on ne le forma , ôc on ne le
pi contre foutint pendant la vie de jean D e ja x , que par le dol.
Ait: de
A va n t l’A & c , ce ne fut que fuggeltions, im portunitez , mena
7«7ces & contraintes : c ’cft un point dont il n’y a plus à douter i la
plainte ou les protcflations qu’A n to in e Bourzeis avoit faites devant
le Prévôt de Langhac des le 7 Juin p ré c è d e n t, les pièces qu’il
avoit en même tems repréfentées & fait parapher , l’ailu ren tî le
Dem andeur 11’a ni la plainte ni toutes Icspie'ces, mais il ne ce fle d c
les avoir que parce que Pierre D ejax fc lcs fit rendre des le
O c
tobre 170 7. moïenant les cent pifloles q u ’il compta j cette attention
de fa part d ’en compofcr & :de s’en emparer, marquent l’imprcflion
qu’elles avoient déjà faite fur fon cfprit » &: fonde l’indu&ion que
le Demandeur en tire 5 ce qui fuffic après tout , c’cil qu'elles font
conilatées par taven que Pierre D c ja x en fit dans l ’A tte de 1 7 1 : .
L ’A & c ne rcfpirc encore que fraude.
S ’il y eut quelque examen de la confiflancc des biens pater
I
nels &: m a te rn e ls , l’ A & c nflûrc que Jean Dcjax en auroit eu
le privilège exclufif f A ntoine Bourzeis &: fa femme n’y eurent au
cune p a r t , ils n ’eurent connoiflancc que des papiers qui leur fu
rent;
�l7
rent d é liv r e z , tous les biens au refte furent délaiflez à Pierre Dej?.x fans le moindre dénom brem ent ou le moindre détail : ainfi ,
s’il eft vrai que les Dejax laiflerent voir à A n to in e Bourzeis &: fa
femm e , que les deniers ou les papiers a&ucllement délivrez pouvoient monter à 6 46 0 liv. i f. 9 d. il eft vrai auffi qu’ils ne leur
donnèrent connoiffancc quelconque que ces 6460 liv. 1 f 9 d. fuffent la m oitié de tous les biens paternels Sc maternels, ou que
ce qui fut délaifle à Pierre, ne fut pas plus que la moitié qu’il devoit feulement avoir , outre fon préciputdc 2000 liv.
Nulle efpe'ce de biens e n év id e n ce , nulle représentation de titres,
pas même le moindre état de leur qualité & v a le u r , foit en de'tail,
l'oit en quantité': défauts ciTenticls en partage qui marquent ici un
deffein formé de la part des Dejax , de ne contra&er avec A ntoine
Bourzeis & fa femme qii’en les laiflant dans une erreur e n tière , tel n . ck
dsl qui fuftitàfaire entériner les Lettres de refeilion , comme il a p*toa
toujours été jugé en fcmblable rencontre.
L ’Acte p o rte, que Pierre Dejax paye 1000 liv. de fes deniers à
A n to in e Bourzeis &: fa fem m e; mais tout le m ondefçait que Pierre
D ejax n’étoit en état de compter cette fomme , que parce que fes
jn o ien s d’acquérir avoient déjà pénétré dans la maifon & dans les
coffres de fon pere : qui ne voit encore que le payement ne fut feint
des deniers du fils , que pour accréditer l ’A£te , & l’avantager tou
jours en fraude dcJa fille, s’il arrivoit que l’A & e ne dût pas fubfifter ? Q uel dol que l’on caraitérife par une impofture , pour en éten
dre l’ciïct jufques dans l’avenir !
Il eft dit dans l’A & e , que Pierre Dejax a fait d’ autres payemens en
l’acquit de fon pere ; & ces payemens font auflî des caufes du délailfcment qui lui eft fait du fut plus des biens : mais ils furent abfolnmcnt controuvcs-, Jean Dejax ne dut jamais » de tout le monde lui
dut j aufTi ne p u t - 011 nommer une feule perfonne à laquelle Pierre
Dejax auroit ainfi payé;fuppofition qui annonce toujours q u c l ’A cte ne fut forme que par le dol pour frauder &c ruiner Marguerite
Dejax.
~
L ’A ile contient que Pierre D ejax payera différons arrérages de
Ferme échus & à é c h o i r , Sc l’on préfente encore ceci com m e des
charges bien réelles qui auroient donné lieu à lui délaiifcr le furplus
des biens indéfiniment > exprefîîon fauilc , qui ne fut em ployéeque
pour mafqucr de nouveaux titres de lib é ra lité , des fubrogations
gratuites à differens b au x, ou à une multitude d'attions nées & à
naître ,q u i dévoient procurera Pierre Dejax des rccouvremens con
sidérables fur le pafle &C des avantages infinis dans l’avenir. Q u el
fond de d o l , qui dans la formation de l’A ttc alla jufqu’à l’étude
C
�18
& au choix des termes pour éblouir &: tromper une femme !
Enfin il n’eft pas douteux que l’Aéle ne fubiîfta pendant la vie de .
'!!)
J e a n D e ja x , que parce que Pierre & A ntoine continuèrent leursi -,
fuggeftions, leurs im p o rtu n itez, qu’ils y ajoutèrent des violences.
Par quels autres moïens auroient-ils donc enlevé ce perc mou^
rant de fa maifon pour lui voir perdre la vie dans c ç lle d e Pierre ii,
E t quels auroienc été leurs deileins ii ce ne fut celui d’empêcher
que Jean Dejax encore vivant ne pût entendre des. remontrances
capables de lui faire faire des réflexions , de lui faire reparer les dé
fauts du partage qu’on lui avoit fait faire î ou celui de fouftraire
toutes les preuves qu’Antoine Bourreis auroit trouvées de leur in ijlj quité fous des fccllez après fa mort ? ou enfin celui dém énager l’occafîon de forcer Antoine Bourzcis au filcn ce , en lui donnant de.l’a r g e n t, en lui faifant figner un b i l l e t , dont la condamnation le.
conduiroit néceflaircment à un traité > Q u el dol qui con'iîftc dans*,
lin fyflhéme e n tie r , propre àregler l’avenir comme le préfent!'
If.Moyersde
L ’A & e du z Février 1 7 : 2 . ne fucceda, que parce que Pierre D e¡■!i*Aû.°ntï j ax avoic fa,t enlever fon pere moribond ,.que parce qu’il avoit d é; j i 7 n.
pouillé fa maifon , mis la main fur tous les papiers avant qu’A n toine Bourzcis pût prendre connoiifance de rien , que parce qu’ili
'i: J u i
avoit compté une fomme de iooo.liv . ravi fa plainte ou fes p ro|
teftations & fes pièces , qu’il l’avoit obligé de dépofer un billet
f j
qu’il avoit obtenu une condamnation toujours enraïante , qu’il
s e t o it r c n d u lc maître nbfolu : pourroit-on dciircrdcs circonftancesde dol plus certaines 2c plus intcreflantes ?
L ’Aéfce ne fut encore co n fhu it dans ces circonflances que pour
i'i.,
donner à entendre que Pierre Dejax auroit repréfenté les (ffets mois.
|i-‘
U n s qui lui avoient été délaijfez , ou qu Antoine Bourzcis c r Ja fem m e fc
K 1:
fe r oient exactement informez de la confiflancc de tous les biens des fn ecefr
fwns des pere & mere. Eh ! com m ent le c ro ire , quand 'J’A fte Iuiv|
même prouve q u ’il n’ÿ eut point d'état fo u rn i, ou le moindre dé^
cail des effets mobiliers ¡’ qu’à l’cgard des autres b ie n s , A n to in e
Bourzcis &: fa femme ne virent aucuTis titres ; Q u e l’on ne fçauroit
encore faire voir qu’en aucun tems ils euflent eu la moindre connoiflance des immeubles d’Halips Mabille ou de JeanD ejax ! Pier
re Dejax leur fie encore reconnoître des charges paffives qu'il ne
’t Q«i per pUc pas expliquer, &: dans !a vérité il n’y en eut jamais, c ’cft-à-di■''tohïVcd^s rc >
f urer}t plutôt trompés qu'ils ne contrafferent , que l’Actc d o it
i j l j ; n o r a n i ' ‘ toujours être refeindé p*r le dol de Pierre D c jn x , quand même il 11c
?j|>innia«■
]nac f^roj'c pas nul , ou fujct à rcfciiîon par moïen de léfî'on.
V
ilntinftiu”
Ainfi ou les Aéles-dont il s’agit^ font nuls comme emportant
r»icnium aliénation «.le biens dotaux , ou la lézion U l ’inégalité qui y régnent
�.
19
doivent les faire cafter, ou le dol que les D e ja x pratiquèrent pour
y arriver, les former & Iesfo utenir, ne permet pas qu'on les laiflfe
lubfiiler ; c ’eft ce qui établit Je premier ch ef des conclufions di|
Demandeur. M ontrons tout de fuite que les objections que le D é fendeur a annoncées à cet égard , ne içauroient toucher.
O B J E C T I O N S
DU
DEFENDEUR.
L e Défendeur a donne à entendre par fa conduite, qu’il fc prévaudroit de deux fins de n o n -rec ev o ir dans la forme ; c ’eftla reilourcc
ordinaire de ceux qui aim ent jouir du bien d’a u tru i, & qui defefpcrent de leur droit au fond.
Sa première fin de non-recevoir confiile en ce que , fuivant l u i ,
le Demandeur n’aura pas obtenu íes Lettres dans les dix ans preferits
par les -Ordonnances de 151 o. &: de 1535.
Il appuïo la fcconde, de ce qu’au m oïen de l’Aéle du 1 Février
171 2. q u ’il appelle Tranfiittion , les Lettres doivent paroître n'être
plus recevables, fuivant l ’Ordonnance de 1560.
R éponje à la, premiere fin de non - recevoir you a U prescription
de dix ans que le Défendeur fonde fur les Ordonnances
de 15 1 o . &
1535.
L e Dem andeur obfervera d ’abord que ces Ordonnances ne com
prennent que les Contrars contre lcfquels il cil befoin de Lettres,
& non pas ceux qui c o m m c l’égalcm cnt de 1693. le partage de 170 7.
ou l’ A ft c de 171 z. font contraires aux L o ix & à l a Coutum e du
P a i s , abfolumcnt n u ls, de nul cfFct ÔC valeur , contre lcfqucls il cil
permis de reelamer fans Lettres pendant 50 ans : &: c ’cil ce qui
met tout d’un coup le Défendeur hors d’état d’invoquer les mêmes
O r d o n n a n c e s , ou de faire ufage de la prefcription de dix ans.
Q u e l’on iuppofc après tout que dans l’cfpécc particulière il eût
ctc befoin de L ettres, le Défendeur n ’en fera pas plus avancé.
Marguerite D ejax ctoit encore dans les liens du mariage au
mois d ’Avril 1 7 2 1 . lorfque par une donation univcrfcllc elle fit
Rafler fc* droits fu ria tête du Demandeur fon fils pour les pouriuivre.
Le Demandeur obtint &: fit íignificr fes Lettres dans les dix a n s, à
com pter du jour de cette donation , c’cft-à-dirc, des le 30 D é ce m
bre 1730. ou dès le 31 Janvier 1 7 3 1 . &: il foutient que cela doit
fuffirc, parce que dans les tems antérieurs à cette d on a tion , M a r
guerite D ejax lut toujours à couvert de la prefcription des dix ans j
en voici la preuve.
C i;
Trintactl°ms ,n.non tam' ’
pacifeimr
pitur j'.ç?
5 . i . ñ. de
tranû
�Marguerite D ejax en puiflance de m ari, ne put ni ne dut jamais
agir de ion c h e f 3 la prefeription ne courut donc point contre elle;
c ’effc ainii qu’en décident les Ordonnances de 1 5 1 a . & 1 5 5 5 . e Hes~
m êmes, puifque en cas dempèchemens de droit ou de fa it, elles ne fonc
courir la prefeription qu’i compter du jour qutls auront cejféi &: ce ci
eft conforme à la difpofition de d ro it, contra non valentem agere non>
currit prœfcriptio.
A utant qu’Antoine Bourzeis parut dans les a&es dont il s’agit,,
les D ejax le firent obliger perfonnellcmcnt &: Solidairement avec fa
fem m e, à les entretenir & faire exécuter..
L ’aétion que M arguerite Dejax auroit pu intenter auroit donc ré
fléchi par une action en recours contre A ntoine Bourzeis. Et c ’eft
principalement par cette raifon que Marguerite Dejax toujours ma
riée n'eut jamais le pouvoir d’agir, qu’elle fut fans-ccife à c o u v c ic
de la prefeription des dix ans.
Il
rie pouvoir être queftion que de fes biens dotaux y l’a&ion en
appartenoit à A n to in e Bourzeis; prendre des mefures pour pou
voir l'exercer e lle -m ê m e , c’eût été expofer Antoine Bourzeis aux
pourfuites les plus rigoureufes, & à reffentir tout le poids de la rcititu tio n , troubler la paix dom eftique, manquer d ’obéïc aux loix
politiques & naturelles, qui font le fondement des loix civiles.
La prefeription eft encore confidcréc en droit com me une aliéna
tion vo lo n ta ire, aliénâtionts verbum,ctiam ufucapionem commet, vixenim ut non videatur alienare qui patitur ufucapi. Autorifer la preferip
tion contre les femmes tandis qu’clJes font fous la puiflance de
leurs m a ris ,cc feroit violer les Loix & la C outum e qui interdifent
I aliénation des biens dotaux : elles n’ont pas eu la liberté d’a g ir ,
il eft jufte d ’o p p o f e r comme une barrière i n v i n c i b l c j ’incapacitc de
preferire contre elles : plus l’indifférence ou la négligence des ma
ris paroifient avoir été grandes, plus il faut redoubler d’indulgen
ce pour le fccours des femmes, qui de leur ch e f n ’ont pas pû veiller
à la confcrvation de leurs droits.
C 'e ftfu r ces différentes raifons que le Parlement a toujours ju g e
la femme à couvert de la prefeription pendant le cours de fon nia** liage; jufqucs là même que par Arrêt du premier Juillet 1672.. il a
été décidé que les dix ans des Ordonnances de 1 5 10. & 1535* nc
courent point, q u o i q u e faction que la femme auroit pu intenter,
II'eut pas du réfléchir contre le mari.
O n laiile préfcntcmciic au Défendeur à réfoudre fi Sa première
fin de non recevoir peut faire fortune.
�zi
'/f/S
-iv
R éponje a la fécondé fin de non-recevoir tirée de /’ Ordonnance de
1 5 6 0 . appellée lOrdonnance des Tranjafiions.
.
C ette Ordonnance autorife toutes tranfattions qui ont été faites fans
dol & force ; veut que contre icelles m l nefo it reçtt Jous prétexte de lésion
¿outre moitié de jufle p rix, ou. autre plus grande quelconque, on ce qu'on dit
en latin Dolus rcipfa, mais que les Juges des l'entrée du Jugement, s'il riy
a autres chojes alleguées contre icelles tranfafîions , déboutent les impétrans
des Lettres >& de l'effet & entérinement dicelles
les déclarent non recevables.
L ’on voit déjà que cette Lo y n’a point e'té faite pour le D é fe n
deur en cette affaire.
En effet, elle n’autorife que les tranfa&ions pafl’ées fans dol & for
ce -T mais l’on a bien prouvé que l’auteur du Défendeur ne parvint à
l’a d e de 17 12. que par le dol &: par la f o r c e , qu’il ne le conftruifit
& Ht iigner qu’avec les mêmes moyens.
Elle ne déclare de fin de non-recevoir, que contre ceux qui re-,
clament fous prétexte de le'zion, fans alleguer antre chofe -, mais le
Défendeur allègue nullité & fraude , c’eft-à-dirc tels moyens» ou
tre Ja lézion, que l’Ordonnance même dont le Détendeur prétend
s’appuyer, prête fon autorité pour faire iucccder la refeifion. La
Sentence qui appointe l’a déjà jug é, puifque le Défendeur n’a point
été écouté des l'entrée du Jugement. L ’on a tout lieu de feHatter aprèscela qu’i l ‘ne comptera pas plus fur la fccondc que fur la première
fin de non-recevoir j que le premier clict des concluions du D e
mandeur, concernant la nullité des adlcs, l'entérinement des Lettres
dont il s’agit, uc fouftrira pas la moindre difficulté»
%
E xa m en du fu r plus des concluions du D e m a n d e u r , Jur la con
damnation a flu elle de 4.5 0 0 0 / v. çjjr in térêts, moyennant Çon
Çcrmcnt in licctn ; c r Jubfidiaircm ent fu r la preuve pa r com
mune renommée , & c . proviflon fa ite de 1 0 0 0 0 /¿V.
Nous partirons ici d’un principe autorife par tous les Aute ur s,
Si interefje(ropter dolum extrtum , alio modo probari non pojfit quam jura mentoejus aijus interejl , intereffe juramento fatis probatum e r it , quanda
dolus ejl. vents..
C e principe cil fondé fur la L o y 5. ff. de in lie. jure jur. ïn atfioni*
bus in rem (¿r in adexbibcndnm, <dr in bona fidei jndiciis in Utcm jnratur
cb dolum. C e qui cft confirmé dans la Loy z y §. 10. fh de lixrcd.
petit.
cattll.
C o tu ,*
�11«
»
' N\
il
ifj
II n’eft donc pas douteux que le ferment in ¡item a lieu dans les
J|j
Caufes q u i , com m e celle-ci, annoncent des Jugemens de bonne f o i ,
j|jsatfet en des partages de fucceilion, ou des revendications de juile portion
W z/iïT ’ch. P-our un cohéritier. Plufîeurs Arrêts l’ont ainfi jugé.
■§t.
T o u t ce que les L o i x & I e s Arrêts exigent, c ’eft qu’il paroifledans
le fait que le demandeur n’ait perdu la preuve de fon intérêt que
par le dol de fa Partie; ou que par le dol de fa Partie il ne Soit
plus poflîble de reconnoicre toutes les chofes qui fuffiroient pour,
eilimer ion intérêt j 8c nous fommes précifément dans le même cas.
Après que la nullité des Aftes dont il s ’agit aura été p ro n o n cée ,
ou que les Lettres de refciiion auront été entérinées, il feroit natu
rel d’ordonner un partage des biens & fucceflions de Jean D ejax 6c
Halips M a b ille, pourquoi les Parties rapporteroient ou repréfenteroient tout ce que leurs auteurs auroient reçu >mais ce partage eft
impoflîblc» 6c il l’eft devenu par le dol de Pierre D e ja x , que le D é
fendeur repréfente.
L e partage cil impofllble, parce qu’il ne fer oit p a s , comm e il
devroit l ’être, de tous les biens, ou de la totalité des fucceflîons de
Jean Dejax & Halips M a b ille; il ne le feroitp as, parce que l’on ne
fçauroit com pter fur le rapport ou fur la représentation que le D é
fendeur pourroit faire du c h e f de Pierre Dejax : com ment y comp
te r , quand le Défendeur ne fçauroit juiliüer que fes rapport & repréfentation fufl'cntftneeres dr entiers, de l'argent c o m p ta n t, des meu
bles, des grains, des dettes a&ivcs, dont fon perc s’empara fans compte,
fans mefure, fans état, fans inventaire \
*
Le même partage, qu’il auroit été naturel d’ordonner, n’cil de
venu impoifible que par le dol que Pierre D ejax pratiqua en l’anncc
1707. le Dem andeur en a déjà expliqué des preuves au-deilus de
tout contredit : ce font celles-là même qu'il a données des fuggeftions
du même, de fes importunitez, , de Jes fraudes, de fes violences, de fes déprédations, dre. pour fefaifirde tous les biens paternels & maternels,
fans que Marguerite Dejax eut la moindre connoijfance de leur valeur,
de leur confiilancc, de leur q u a lité ,o u de leur quantité.
D ès qu'il feroit impoflible de former un partage, des que l ’impoilîbilitè de le former ne provient que du dol de Pierre D e ja x ,
l ’intérêt du Demandeur ne fçauroit plus recevoir d’eftimation que
par fon ferment in litem , 6c c'eil ce qui doit conduire à la condam
nation qu il d e m a n d e , fans q u il foit bejoin de partage.
En vain objeéleroit-on que ce ne fut que fur la foi du partage
de 17 0 7. que Pierre D ejax prit fans compte fans mefure, fans état
fans in ven ta ire ,ce que Marguerite n’eut pas des biens de leurs perc
& merc : ce 11c feroit oppojcr que le dol m ê m e , pour e x e u f r le
�dol : ce fut moins Paéïc de 1707. que le dol pratiqué pour le fo r
m er, qui conduifit Pierre Dejax à ce moïen de ruiner fa fœur. C e
feroit donc s’appuyer du dol que de s’appuyer de l’a& e; arrêtons
que l’a d e ne doit jamais profiter; que le Défendeur ferait d’autant
moins raifonnable en re'iiftant au ferment/» lite m y que la refeifion
qui en eft le principe fut agitée & conteftèe, avec fon auteur en 1 7 1 1 .
qu’il ne l’arrêta que par une continuation du dol qui lui avoit déjà
été fi avantageux, que le Défendeur lui-même n’en eft pas e x e m p t,
autant que par fes contumaces depuis 1 7 z z . il donne lieu au dépetiiTemcnt débouté autre preuve.
Q u ’on ne s’étonne pas au refte, de ce que le Demandeur porte
fes concluiîons jufqu’à 45000 liv. ou même jufqu’à 51000 liv. en
fuppofant que ce que fa mere reçut, pût valoir 6000 liv.
Pierre D e ja x , homme a cco rt, & guidé comme les a&es le prou
vent , ne fit pas difficulté de s’y exp ofer, plus content de payer que
de partager.
11
eft encore de notoriété publique que les fculs biens de Jean
D e jaxvaloien t à fon décès plus de 100000 liv. les honnêtes gens de
la Ville que le Défendeur ne tient point en dépendance, parlent pour
p l u s l a diftribution que Pierre D ejax en fit en 172.1. c’eft-à-dire»
treize ans après la mort de fon pcre,’ fuffiroit pour en convaincre.
O utre les libéralitcz qu’il fit à fa fe m m e , cinq de fes enfans fu
rent légitimez de 34000 liv.
Le Défendeur en eut plus de 100000 liv. par inftitution. Il en
jouit encore au vû & fçû de tout le monde. C ’eft, fuivant lu ij cet
Ample patrimoine qui a pû l’enlever au Barreau & au fervice de fa Pa
trie , pour ne s’occuper que de le contempler & de le conferver.î
ce n’eft que parce q u ’il cit véritablement am ple, que le Détendeur
vit encore dans lecelibac avec une fœur déjà âgée de trente ans, ceux
dont il a recherche' l’alliance, Payant reconnu charge de reftitutions
coniidtrablcs & trop effrayantes.
Il
n’eft pas douteux que Pierre D ejax n’ait difpofé entre fes enfans de 134000 liv. fuppofons que fon petit com m ercc.de cierges
dans la V ille de Brioudc lui en eut valu trente-quatre , & encore de
quoi gratifier f i femme (nous faifons certainement bonne compofition , car perfoune de fon métier n’y fit jamais de tels g a in s , ) il
eft déjà manifefte q ifil en refte cent qui 11c peuvent provenir que de
Jean D ejax ôc Halips M abillc , que la demande de 4.5000 liv. dont
il s’agit eft entièrement mefurée*
Q u a n t aux intérêts , nulle difficulté qu’ ils font dûs depuis le
5 Juillet 1707. que Pierre D ejax s ’empara de tout ce qui dévoie fa».
�z4
rc la juftc portion de M arguerite dans les biens & fucceffions des
perc & m erc com m uns.
Que fi l’on pouvoit héfiter de prononcer; ( comme le Demandeur
conclut! ) la condamnation de 4 5 000 liv. & in té rê ts, ce qu’il n’a
pas lieu de croire , il f e foumet, fa u f néanmoins à changer de volon
té fi le cas y é c h e r , a prouver par tit r e s , par té m o in s, par com mune
renommée & par cenfures Ecclefiaftiqucs , ce qui pourra fonder la
m ême condamnation , indépendamment de fon fe r m e n t, m litem.
Il
eft ordinaire de permettre cette preuve en matière de fouftractions 5 le Demandeur ne s’arrêtera point à l’établir, il préiume
m êm e que c ’eft tout ce que le Défendeur foühaitcra pour éloigner
de rendre jitftice.
Mais en cas que l’on prenne le parti de le faire recourir à la
m êm e preuve , le Demandeur a lieu d’cfpcrcr une provilion de
10 0 0 0 liv. en voici les raifons.
C e feront toujours les D ejax qui par leur dol l’auront réduit à
cette reiTourcc pour recouvrer fes biens , digne de tous fes foins ,
de fa préfcncc fur les lie u x , & fujette à beaucoup de dépenfes $ il
ne feroit pas juftc qu’il la pratiquât à fes dépens.
Des que les A & es dont il s’agit ne fubfifteront plus par nullité
ou par refeifion, le Défendeur; comme repréfençant Pierre D ejax, 11c
fera plus qu’un cohéritier induement faili des univerfalitez des fuc-,
cédions des aycul & aycule co m m u n s, d’argent com ptant, de meu
bles , effets mobiliers & d’immeubles qui lui profitent fans cefl’c ,
pendant que le Demandeur, comm e repréfentant Marguerite D e j a x ,
n ’a que des papiers de nulle valeur > ou qui ont à peine produit
é o o o liv.
Les Parties auront auflîun droit épal par indivis en toutes choies ;
le Dcfcn.lcur ne fera pas plus fonde à continuer d’en jo u ir ,q u e le
Demandeur en droit de fe mettre en poiTcifion de celles qui paroiffent.
Dans les circonftanccs où ils fe tr o u v e n t, il eft impofliblc de ne
pas concevoir (garanties à p a rt) qu’il s’en faut de beaucoup que
Marguerite Dejax n’ait eu fa juftc portion dans les biens &c fucccffions dont il s’agit » que 10000 liv. ne r e m p l i r o n t pas feulement les
intérêts du moindre fupplémentque l’on puiij^ adjuger en définitif:
le Demandeur fc contente d ’une pareille fournie pour provifion ; il
n ’eft perfonnequi ne fente que le Défendeur continuera de jouir à
bon m a r c h é ; qu’un Scqucflrc auquel le Demandeur auroit pû exci
ter en le fournifTant de fa part, le gêneroit infiniment plus pendant
l ’inftrudion de l'in terlocutoire,& ju fq u a la fin de cette contcftation,
mais
�I
1 i*
m ais encore une fois le D em andeur ne com pte que fur une condam
nation a& uelle , parce que le fait peut l’a u to rife r, & que le droit
l'exige.
Le Défendeur inftruira tant qu’il jugera à p rop os, le Demandeur
lui déclare qu’il'em p lo ïe dès à prefent ce M émoire pour toute réponfe &c contredit. Signé B o u r z e i s .
Xour
n a i r e
l’aîné , Proc.
�P
I
E
C
E
S
Q ue le Demandeur a produites ou employées pour juflifier du
contenu aù préfent M émoire .
A premiere du n Janvier 1681. eft une expédition du Cont rat
de mariage de Marguerite Dejax avec Antoine Bourzeis.
L a deuxième du n N ovem bre 1 6 9 1 . eft employ du C on trat de
mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chaffein , contenant plus
fortes configurions que celle de Marguerite Dejax.
L a troiiîcme prouvée par la feptiéme qui iu it, eft employ de la
demande d’A ntoine Bourzeis afin d’égalemcnr.
La quatrième du 2 S A v r il 1693. eft un A il e d'affirmation de
voyage par A ntoine B o u rz e is , au Greffe du Parlemenr.
La cinquième du même jo u r , cil une Lettre de Jean Dejax à A n
toine Bourzeis , étant actuellement à Paris.
La fîxiéme du 29 A vril 1693. cil une expédition du prétendu
également de M arguerite à Pierre Dejax , où l’on fuppofe préfent à
Brioudc A ntoine Bourzeis, qui étoit a&uelicm cnt à Paris.
L a fcpticmc du 25 Juin 1693.
1111 A c lc écrit de la main de
Jean Dejax &z fîgnifié de fa p a r t , comme li l’A cle précèdent n’eut
pas encore été pafle.
La huitième enoncée dans /a vingtièm e ci a p r è s , cil employ des
plainte
proreftations d’A n to in c B o u rzeis, devant le Prévôt de
L a n g h a c , en datte du 7 Juin 1707.
La neuvième du 5 Juillet 170 7. eft le prétendu partage des biens
de Jean D ejax & d’Halips M abillc , entre M arguerite & Pierre
D e ja x .
La dixième cil emploi du fait c o n f ia n t , que peu de tems après
ce dernier Aèle , Pierre D ejax fit enlever Jean fon pcrc moribond >
le fit tranfporrcr dans fa maifon , où il 11c fut pas pofliblc de nii
p .u lc r , &: où il mourut.
La onzième du 10 Oètobrc 1701. cil une cciTion moyennant fatisfa&ion par Jean Dejax à A ntoine B o u rzeis, de la fomme de 240
liv. à recevoir de M. D alcgrc , dont 011 fît cependant état pour
M arguerite Dejax dans le prétendu partage de 1707.
La douzième du 9 Octobre 17 0 7 . cil emploi du billet de 1000
L
�■ if/ y
>■ i
!
liv. d’A ntoine Bourzeis au profit de Pierre Dejax , il fera produit
!
ci-après.
^
€
|
L a treizième du 20 Mai 170 8 . cvt la demande d ’A ntoine Bour
zeis en reilitution du b ille t, contre AntoineÆ)ejax qui en avoit été
rendu dépofitaire pour fureté de la'co nvention expliouée au M é
moire.
j
La q u a to r^ ém e du dernier Juillet 1708. cft la Sentence de
rOfficialité contre Antoine Deiax.
La quinzièm e du 11 M a y , cil la demande que Pierre Dejax for
ma contre A ntoine B o u rzeis, pour raifon du même billet qu’Antoine D ejax venoit de lui remettre.
La feiziéme du 22, Février 1710. eft la Sentence de condamna."
tion que Pierre D ejax obtint à Aigueperfe, contre Antoine Bour
zeis.
La d ix-fep tié m e du 22 Mars 17 10 . eft emploi des Lettres de
Antoine
refciiion qu’A ntoine Bourzeis obtint contre les A ftcs de 16 9 5 . & éto^tclic
l 7 ° 7 ' .V
,
. nie«‘ fais
L a aix-huitiem c du 11 Mars 1 7 1 1 . cil: 1 Exploit de fîgnification dct«ainte& demande en entérinement des mêmes Lettres.
3 hia v^in"
L a d ix-n eu vièm e du 25 Juin 1711. cil la copie des défenfes & ¿'¿Cana-conteilations de Pierre Dejax.
nation
La vingtièm e du 1 Février i y u . i c f t le prétendu T ra ité fur les S K l
précédentes Lettres & demande.
très.
La vin g t-u n iè m e du 9 Octobre 1707. cil le billet d’A ntoine
Bourzeis de 1000 liv. qui lui fut rendu en lignant le précèdent
T r a i t é , avec la Sentence, feiziéme pièce , au dos de laquelle Pierre
D ejax déclara s’en départir.
La vingt-deuxième & la vingr-troifiéine des n Avril 1721. & 1,
■
O flo b re 1729. font la donation de Marguerite D ejax au profit du
Dem andeur fon fils , &: la rénonciation de celui-ci à la fucccifion
d'Antoine Bourzeis fon pcrc.
La vingt-quatrième de r7 î i . cil emploi du T cila m cn t de Pierre
D e j a x , contenant diilribution entre fes enfans ou fa femme de plus
de 134000 liv.
'■
L a vingt-cinquième du 10 Juin 1721. cil la groiTe des premières
Lettres de refciiion obtenues par le Dem andeur contre les rmi«
Aftcs en qucflion.
La vingt-fixiéme du 30 Décem bre 1730. cil la Groflc des fécon
dés Lettres.
L a vingt-icp'tiémc‘ dû 31 Janvier 1731. cil l*ExpIoit'de iïgnificat*on ôc demande en entérinement acs uciniercs Lettres.
�•2 8
conclufions prifes par le D em andeur.
La tr e n t e - unième du 26 A v r il 1732,. fignifiée le 15 Novem bre
1734. eft une Sentence par défaut faute de défendre, adjudicativc
des mêmes co n clu fions.
La trente-deuxième du 23 Novembre 1 7 34. eft l ' oppofition du
D éfendeur à la précédente Sentence.
>
La trente troifié me du premier Août 1735.
eft une requete du
Dem andeur pour faire conclure fur l’oppofition du Défendeur.
La trente quatrième du 2 A o û t , eft copie d’une R eq u ête, du
D éfendeur , tendante aux mêmes fins
La trente-cinquième du 9 du m ême m o i s , eft une Semence qui
du confentcment du D em andeur, reçoit le Défendeur oppofant.
La trentc-fixièmc du 1 D écem bre 1 7 35. eft la Sentence qui ap
pointe fur les Lettres.
La trente-feptiémc , eft l’appoin tem ent fur les autres demandes.
La trente-huitièm e, eft la Requête du D e m a n d e u r, contenant
les conclufions mentionnées au préfent M ém oire , & fur lefquelles
il s’agit de prononcer.
n ;ut
î•
'> &
De l'imprimerie de Charles Osmont rue S Jacques à l'Olivier
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bourzeis, Pierre. 1773?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tournaire
Subject
The topic of the resource
successions
partage
contrats de mariage
fraudes
égalité des héritiers
lésion
dol
biens dotaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire servant d'avertissement, pour Maître Pierre Bourzeis, anciens Avocat en la Cour, donataire universel de Marguerite Dejax fa mère, demandeur. Contre Maître Julien Dejax, avocat en Parlement, fils et héritier de Pierre, défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Charles Osmont (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1773
1666-Circa 1773
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vieille-Brioude (43262)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52995/BCU_Factums_G0517.jpg
biens dotaux
contrats de mariage
dol
égalité des héritiers
fraudes
lésion
partage
Successions