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TRIBUNAL
D E F E N S E
DE
PO U R le C. J UDDE-LARIVIERE ;
C O NTRE la dame B R A N D Y ? épouse
se disant divorcée du C. G O U R S A U D U M A Z E , demanderesse en cassation.
DIVORCE SIMULÉ,
OU FRAUDULEUX ET NON EXÉCUTÉ.
U
n
acte
p a rties ,
de
et
d iv o rc e ,
qui
q u i n ’a r e ç u a u c u n e e x é c u tio n e n tre
a été sim u lé
ou
f r a u d e r le s d r o i t s d ’ u n c r é a n c i e r ,
consenti
e s t -il
tout
exprès
pour
o p p o sa b le à c e c r é a n
c i e r , p l u s q u e n e s e r a i t u n e s é p a r a t i o n s i m u l é e , f r a u d u l e u s e et
non exécutée ?
T e l l e sera la p r in c ip a le q u estio n à ju g e r : — e lle in téresse é m i
n e m m e n t et l a fo i d u e a u x tra n s a c tio n s s o c ia le s , et la sa in teté d e s
m o e u rs , e t le r e p o s d e s fa m ille s.
CASSATION.
SECTION
c iv il e
.
�(»)
F A I T S E T P ROC É DURE.
A u 5 nivôse <lc l ’an 2 , les biens de la dame Brandy , femme
mineure du C. Goursau-Dum azé, étaient grevés de i g , 5oo livres
de dettes.
Pour se libérer de ces dettes , les deux époux ven diren t,
conjointement et solidairement , à Judde-Larivière , au prix de
20,200 livres , le domaine de la Renaudie , dont la valeur réelle
pouvait être de 10,000 livres écus.
L a mineure avait donc bénéficié de 10,200 livres par cette
vente : il paraissait impossible qu’elle eût jamais intérêt à l ’at
taquer.
Mais l'avilissement ultérieur du papier-monnaie lui fit espérer
de rembourser son acquéreur avec des valeurs nulles. — D e là
trois procès successifs : le premier , en restitution comme m i
neure ; le second , en rescision pour lésion d'outre moitié 3 le
troisièm e, encore en restitution pour cause de minorité.
L e tribunal observera quele premier procès en nullité pouv cause
de minorité avait été entrepris pendant que la dame Brandy était
encore mariée au C. Goursau-Dum azé : heureuse alors de celte
u nion, elle ne songeait point il la rompre.
Mais le mari ne pouvait reve nircontrc la vente qu’il avait ga
rantie. — E tla femme ne pouvait revendiquer un dom aine, pour
en remettre les jouissances sous la main de son m ari, qui les avait
aliénées.
Cette fu sio n dés intérêts de la dame B ran d y, et des intérêts
de son m ari, avait donc été un. obstacle au succès du premier
procès en nullité. — En sorte que pour intenter un nouveau
procès en restitution pour m inorité, la dame Brandy avait à
opérer préalablement une division d ’intérêts , à obtenir la qualité*
d 'administratrice de scs biens.
Pour atteindre ce b u t, la dame Brandy aurait pu demander litséparation. de ses biens • mais il eût fallu accuser son mari de
mauvaise administration; et le contraire était notoire: — il eût fallu
/
�*
3
*
( 3 )
persuader aux juges que celte séparation n’était pas frauduleuse
o r, il eût été évident qu’elle était faite seulement pour revenir
contre la vente. — Il eut fallu surtout e x é c u te r la séparation
de biens ; et mille raisons d ’intérêts s’opposaient à cette exé
cution.
L a dame B ran d y, ou pour mieux dire le C. Goursau-Dum azé,
son mari , éhercha donc un moyen à l ’abri de tous ces inconvéniens. — Et pour être réputée nécessairement administratrice
de ses biens , la dame Brandy se pourvut d ’un acte de d i
vorce.
L e 8 brumaire an 8 , les deux époux , devant l ’oflicicr p u b lic,
signèrent un acte de divorce par consentement mutuel.
Mais ils conservèrent la môme table , le même l i t , la même
.»
gestion d ’affaires.
Judde-Larivière produit l ’acte de naissance d’une fdle née de
l ’union continuée de ces prétendus divorcés. — C et acte est signé
par Goursau-Dumazé lui-même , et par lç père de lu tJdame
Brandy.
! t.
Elle-même est convenue au procès ( et c’est constaté par le ju
gement ) que , dans les contrats passés depuis son d ivo rce,. elle
a paru sous Vautorisation du ,C. Goursau-Dumazé. — Elle est
aussi convenue qu’il n ’a pas cessé d 'administrer S C S biens.
Quoi qu’il en s o it, aussitôt l ’acte de divorce sign é, c’est-à-dire
le 7 frimaire an 8 , nouvelle citation en restitution pour m inorité,
a. la requête de la dame B ra n d y , en sa qualité de femme divorcée.
Sur cette'assignation, Judde-Larivière n’opposa qu’une fin de
non-reccvoir , prise de la nullité du divorce , du défaut de
qualité.
D e son côté , la dame Brandy prétendit que Judde-Larivière
n’était pas recevable à querelcr son divorce.
8 fructidor an y , — jugement contradictoire qui admet la dame
Brandy à procéder en qualité de femme divorcée.
Appel. — Judde-Larivière avait, en première instance , querèlé le divorce comme nul, de nullité absolu e, pour irrégularités
�( 4 )
essentielles ou invalidité. En cause (l’appel, il ajouta que le divorce
était aussi n u l, de nullité relative à son égard, ou non opposable,
en ce qu’il était sim ule , et n ’avait pas reçu .exécution par la désu
nion effective des personnes et des biens. -,
■
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26 mossidor an 9 , — jugement du tribunal d ’appel séant à L iinoees.
j ^
.
*
,1
». '
.
Sur la question de savoir si Judde-Larivière était recevable à
quereler le divorce de la dame B ra n d y , le tribunal considère que
l ’acquéreur d ’un domaine est essentiellement recevable à quereler
l ’acte au moyen duquel 011 prétend l’évincer.
Sur la question de savoir si la dame Brandy était recevable à pro
céder en qualité de femme divorcée, le tribunal considère que le
divorce est régulier et validé.
1
Que , cependant, deux époux qui continuent à vivre ensemble,
qui contractent ensemble, qui réunissent leurs soins pour l ’admi
nistration de leurs biens , ne peuvent avoir eu véritablement l ’in
tention de rompre le lien qui les unissait. *— D ’oü il" suit‘ que le
divorce est non sérieu x ou sim ulé , et non opposable.
r
Que , d ’ailleurs, la continuité de vie commune doit suffire pour
empêcher qu’un divorce soit opposable a u x créanciers j de
môme q u ’elle empêchait jadis une séparation d ’avoir effet à l ’é
gard des créanciers ( l ’article 11 du $ 3 cîe la loi du 20 sep
tembre 1792 n’attribuant au divorce que les mêmes effets d ’une
séparation. )
1
' Par c e s motifs , le tribunal déclare la dame Brandy non-rece~
vable , quant ¿1 présent.
Contre ce jugement la demanderesse présente six moyens d^
cassation..
,
,
R É P O N S E
A U X S I X M O Y E N S D JE C A S S A T I O N .
« L
e p r e m ie r
MOV e n c s t p r i s d c c e q u e lu s i m u l a t i o n n ’ a é lé
�( 5)
&
«5 alléguée qu'en cause d ’a p p el, — ce qui est qualifié, de conlra« vention à l ’article 7 de la loi du 3 brumaire an 2 , lequel détVrul
« de Amncr en cause d ’appel de nouvelles dem andes. »
11 .
-,
r
1
Mais l ’exposant n ’a formé qu’une seule demande : — en cause
d ’ap p el, comme en première instance , il a demandé que M arie
Brandy fut déclarée non-recevable.
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En cause d ’a p p el, comme en première instance > il a même
fondé sa fin de non-recevoir^sur la nullité du divorce.
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A la vérité , devant lè tribunal de première instance, il n’avait
querelé le divorce que pour nullité absolue ou invalidité ; et en
cause d ’a p p e l, il l ’a q uerelé, de p lu s, pour nullité relative ou
non-opposabilité , à cause de la simulation. r
(.j
Mais ce n ’est là qu’un dévetoppement de défense. — Ce n’est
du tout point une dem ande nouvelle.
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A in s i, point de contravention à l ’article 7 ^dc la loi du
maire an 2.
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3 b ru
« L e deuxîèm e moyen est pris dé^cc qu’un simple créancier a
« été re çu ’à quereler un divorce pour vice de simulation ; — ce
« que la dame Brandy appelle une contravention aux principes
« sur les questions d'état relatives au mariage formé ou <lis—
« sous. »;
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Réponse, — i° . Un moyen basé ,§ur la contravention à des prin
cipes 11’est pas un moyen de cassation : il faudrait présenter uiip
contravention à la loi.
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2°. L e jugement attaqué n’a pas, pronoiicé l ’invalidité du di
vorce : — donc il 11’a pas porté atteinte à Vétat civil de la dame
Brandy ; — donc les principes sur la stabilité de l’état civil doivent
rester ici sans application.
3 °.
La dame Brandy invoquerait vainement les principes
généraux sur les questions d ’état 5 car la seule raison <l'intérét
public peut, entraver l ’exercice 'd es actions qu’autorise l'in -
�(<S)
te'rét p riv é: o r, son cœur doit l ’avertir ({ue son divorce n ’est pae
du tout intéressant pour le public.
^
.?
Elle ne peut sérieusement établir de comparaison entre la
faveur due à un mariage , et l ’espèce d ’accueil que mérite un
divorce.
.
Sans doute il est éminemment' utile que des enfans, nés sur
la foi d ’un mariage apparent, ne soient pas relégués dans la
classe humiliée des'enfans illégitimes ou bâtards. — Sans doute
il est éminemment utile à la morale publique de ne pas cher
cher un odieux concubinage là où chacun s’était plu à res
pecter l ’union, sacrée de deiix époux légitimes.
D e là , l’irréfragabilité du mariage contre les atteintes des tiers,
surtout des créanciers.
Mais si qucreler un divorce c’est précisément préparer le bon
heur des enfans ; si c’est préserver la société d ’un scandale ; si
tous les motifs d ’utilité , de moralité pu bliqu e, se réunissent
également pour favoriser les mariages et pour restreindre les
d ivo rces, la conséquence^ n’en, est-elle pas q u e , moins il est
permis d'attaquer un m ariage, plus il doit être permis d ’atta
quer un divorce ?
L e cœur d ’une mère a-t-il pu ne pas sentir que le divorce
prépare aux enfans une jeunesse douloureuse, une éducation
dépravée , qu’il leur ôte toutes les chances de bonheur et de
v e r tu , qu’il les1vend plus mallikureux 'qùé des orphelins ?
Et la dame Brandy réclame la faveur de la loi pour cette
espèce d ’acte immoral et barbare !
,
Lu loi protectrice des enfans a un tout autre langage : elle or
donne impérieusement aux juges d ’être favorables à toute action
dirigée contre un divorce , a u t a n t qu’ils doivent être difficiles
quand il s’agit de roinprp, un.mariage*;.
......
Solutioncm cnim rnatrirnonii- >difficihorcni debcrc
favor imperat liberorum. ( L . , Cad. de Jiep itd .) i
8
esse
�A in s i, les principes mêmes de la matière étaient favorables
à l ’action de Judde-Lai’ivière.
Donc point de fondement au second moyen.
*
■ « L e t r o i s i è m e m o t e n de la dame Brandy est pris de ce que
« Judde-Larivière avait une voie plus simple que l ’exception do
« simulation. — Et cette voie plus simple la dame Brandy nous
« l ’indique dans l ’article i x dù § 3 de la loi du 20 septembre
,1 . Ε
,
« 1792. »
Réponse. — Il est difficile de comprendre comment un moyen
de cassation pourrait résulter de ce que Judde-Larivière n ’aurait
pas em p loyé, pour sa défense , la voie la plus simple.
Il est plus difficile encore de com prendre. pourquoi l'article
tm d u $ 3 de la llo i d u i 30 septembre 1792 > nouSje$t-indiqué
comme une voie plus simple , tandis.!que cette ))iênie dispo
sition a été appliquée -, et .que la dame Brandy prétend non
a p p lica b le .
. >
* ^
.
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.
•
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•
.
J.
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vjC iroisjeme moyen ne peut avoir aucune consistance.
V.
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« L e q u a t r i è m e m o y e n est pris de ce que le tribunal d ’appel
« ;i supposé susceptible de simulation un acte q u i, de sa nature ,
<< ne peut être simulé : — ce que la dame Brandy appelle une
« contravention à l'essen ce d es choses. »
R ép onse: — i° . L e tribunal décidera s’il connaît des contra
ventions à l’essence des choses, alors que cette prétendue essence
des choses n’est pas définie par la ïoi.
. >r
î ;!r.
Mm '
2°. Nous laisserons ¿1 l ’enfant de la dame Brandy , né depuis
son divorce , d ’examiner 1111 jour s’il a dépendu de son père et
de sa mère de lui ravir son état d ’enfant légitim e, et son droit
de successibilité. — Il Cxàininer.-V , ce malheureux enfant , s’il
y a divorce sans intention de se désunir à jamais. Divortium
non est nisi verum , qitoil animo èonstituèndi perpétuant dissensionem fit. ( L. 3 , H’, de Divortiis. )
1
Il examinera si un mariage , diésous par u n , consentement
�H Ô
( 8
)
mùlu’e l^'ne se é ta b lit point aussi par une réunion mutuelle.
Ciini eadetn m ulier ad eumdem virum revcrtatur , id matrivionium idem esse 'videtür'. ( L . 3 i» , 1T. de Ritu Nuptiarum. )
%
3 °. Quant à nous ', la question n ’est pas 4 p savoir s’il existe un
divorce , s’il a été fait v a lid em en t, s’il a été détruit >effacé par
la réuuion. — Bien queladame.Bx’andy le suppose constamment.,
ce ii’est pas la question à juger : — il s’agit seulement de savoir
si un divorce valide est susceptible de simulation.
O r. 7, l'affirmative
est écrite dans les lois
it
1i . romaines et dans les
lois,françaises,
r
TL
- it ,
j
j
A R o m e, l ’action en simulation de divorce était permise au
père dont la fille avait fait un acte de divorce tout exprès pour
le ifrustrer de sa dot profccticc ( laquelle retournait au p è r e ,
lorsque'la fdlem ourait dans l’état du mariage. )
S i ^fîlia èm ancipata idcirco divèrtat , at maritum lucro
dotis a fficia t, patrem fra u d et , qui profectitiam dotent potuit
petCt '6 , si constante matrimonio decessisset , ideo patri succiirrendum e s t , ne dotem perdat. ( L . s i F ilia. if. de D û ’ . )
A Rome , on tenait que la simulation de divorce ne nuisait à
personne; conséquemment que chacun pouvait arguer le divprce
de simulation.
Jma^inaria répudia et simulata nullius sunt monieriti, nec
P
i
ilV . • >■• •»!> îiirrti
cuiauam i\ocent.
» • i
1 .t ((j i: >>
.olr.#. •«.
.• *) •> •
En France , le divorce n’était admis que relativement à la
table et au lit , ( comme disent les auteurs ) f/uoàd niensam et
thor'itnï.
'
•>
i.
.
‘J
Mais , sous lps rapports établis en Fi a n ce , le divorce pouvait
élrc quçrçlé dp sbtmlatipn ou collusion.
. Les .arrêtiÿtps g o n t . ¡ r e m p l i s d ’exemples de divorces ou de
s é p a r a t i o n s de corps et, de biens ^annullés pour avoir été collusoirement consentis. ■
,a \
En F ra n ce , l’ancicnuc législation allait jusques à admettre la
�( 9 )
querele de simulation contre les m ariages, dont lu stabilité est
bien autrement importante que celle des divorces. — T els étaient
les mariages secrets et les mariages in extrem is.
Un homme se marie à l ’instant où. la m ort, planant sur sa tête ,
ne lui permet pas de se proposer une cohabitation perpétuelle.
Et bien , le mariage , quoique v a lid e , n ’a pas d '.effets civils ,
parce que l ’intention est contraire à l ’acte.
Une servante est épousée par son maître : cependant à tous
les yeux elle reste servante — Et bien , un tel mariage , quoique
valide , n’a pas à.'effets civils ; la loi n’y voit pas la réalité d'un
jnariage : elle n’y voit que la honte d ’un concubinage. ( Ord,
de 1689. — Edit de mars 1697. )
t.
Dans l ’un et l'autre cas , le mariage reste sans effets civils à
l ’égard des tie rs , parce qu’en réalité il n’est pas ce qu’an
nonce la form e , parce qu’il tend moins à faire des époux qu’à
frauder des successibles.
Par la même raison il serait possible et moral que le divorce
restât sans effets civils , lorsqu'on réalité il n’est pas ce qu'an
nonce la fo rm e , lorsqu’il tend moins à la désunion des époux
qu’à la ruine des tiers.
« L a dame Brandy nous dira-t-elle qu’il faut juger la ques« tionseulement d ’après les lois nouvelles? »
Sans doute l ’examen des lois nouvelles aura son tour, et sera
le siège principal de la difficulté. Mais ici nous avions à examiner
si le divorce, par son essen ce , est susceptible de simulation \ si
le jugement qui a prononcé l ’affirmative a contrevenu à l ’e j .
sence des choses
•
': s’il a dit une absurdité.
O r , ce qui a été pratiqué chez les Romains dans des circons
tances toutes semblables } ce qui a été consacré par les plus sages
de nos ordonnances , n’a sans doute r ie n , d ’absurde , rien de
contraire ¿1 l'e sse n ce des choses.
<c Vainement la dame Brandy nous dira que l ’essence du di-
3
�'l\ v D
'*
( 10
)
a vorce consiste dans l'assemblage des formalités prescrites ; que
« feindre nn divorce c’est l ’opérer -, que conséquemment il est
« impossible de le simuler. »
Toutes ces assertions sur l ’importance des formalités légales
pourraient nous conduire à une question très-délicate ; savoir s i,
à l ’égîird des actes qui tiennent essentiellement à la nature , au
droit des gens , la loi est créatrice de leur existence, ou si elle
en est seulement protectrice.
Mais il est inutile d e nous jeter dans ces abstractions ; — il
suffit d ’observer que la dame Brandy joue sur le mot simulation ,
cl le dénonce dans le sens où il n ’a pas été pris dans le jugement.
« Elle suppose que le divorce a été déclaré sim ulé ; en ce sens,
« qu’il n ’est qu'apparent, qu’il n ’est pas r é e l, qu’il n’a pas
« d ’e x is te n c e et de validité. »
A u contraire, le jugement a reconnu l ’acte de divorce exista n t
et valide.
Il a déclaré le divorce sim u lé , en ce sens seulement que les
* époux n’ont pas eu intention de séparer ni leurs personnes ni
leurs biens -, qu’ils n’ont voulu que frauder leurs créanciers.
L a question se réduit donc à savoir si la fra u d e , la collusion ,
la sim ulation, poursuivie par les lois dans toute espèce d ’acte,
devient respectable et sacrée, alors que le fraudeur se couvre
d ’un acte de divorce.
Sur la question ainsi posée , il est perm is, sans doute , de se
prononcer pour la négative , sans être absurde, sans contrevenir
à l ’essence des choses: — c’est ce qu’a fait le jugement.
.Voilà pour le quatrième moyen.
« L e c i n q u i è m e e t l e s i x i è m e m o y e n s sont pris d ’une pré€ tendue contravention aux articles i et 2 du $ 3 de la loi du 20
« septembre 1793 , e t , par suite, d ’une fausse application d e l ’ar« tiele 1 1 du même $ 3 . »
Que portent ces dispositions?
'
�/{ o i
(
11
)
L ’article premier rend a u x ép o u x divorces leu r entière indé
pendance , avec la fa c u lté de contracter un nouveau mariage.
— Et l ’article 2 leur donne la fa c u lté de se remarier ensem ble.
Mais le jugement attaqué ne prive pas la dame Brandy de la
faculté de se rem arier, soit avec son m a ri, soit avec tout autre
homme.
O ù est donc la contravention ?
« La dame Brandy fait résulter une contravention à l ’article 2
<( de ce que le jugement a déclaré, d it-elle, le divorce ejf'acé, le
<( mariage rétabli par le seul fait que les époux n’ont pas cessé
d ’habiter et d ’administrer ensemble. »
Mais le jugement ne déclare pas le divorce e jfa c é , ni le ma
riage rétabli.
L e jugement a reconnu le divorce existant et valide: — iln ’a Tait
que le déclarer sans e jfe t , quant à p résen t, a l'égard des créan
ciers.
Il n ’a donc pas contrevenu à l ’article 2.
Quant à l ’article prem ier, qui assure à la dame Brandy son e n
tière indépendance
« elle insinue que le jugement l ’a privée
K de son indépendance , en ne lui reconnaissant pas , quant à
« p r é se n t, le droit (opposable à ses créanciers) d ’administrer
« scs biens. »
'
C e qui suppose en principe général « que le droit d ’administrer
« les biens de l ’épouse est un droit m arital, un apanage de la
« puissance m aritale, vin effet d e là dépendance de l'épouse,
« qui doit cesser lorsque son mariage cesse.
On trouve bien dans quelques auteurs, surtout parm ilesancicns,
que le mari a la jouissance et l'administration des biens de la
fem m e, comme b a il, gardien o u mainbourg, c'est-à-dire comme
Bon seigneur et maître.
Mais ces expressions et ces idées n ’ont eu de vérité que jadis }
lorsque les maris achetaient leurs femmes , ou lorsqu’ils fai
saient , à raison de leurs fiefs, le service militaire. ( Deluuricre sur
jLiOysel, Viv. 1 , litre 2 , § 20 j et titre 4 > $ 3 . )
�t
(
1
2
)
C ’est ainsi que, selon le premier droit romain , le mari était le
seigueur de sa fem m e, le maître de sa d o t, et son tuteur perpétuel.
A ujourd’hui nos lois et nos mœurs 11c comportent plus ce droit
de seigneurie person nelle , ou de tutèle nécessaire.
En pays coutumier et en pays de droit é c r it, la femme , en sc
m ariant, peut conserver l ’administration de ses biens : il lui suffit
de le vouloir.
Donc cette administration de biens de l ’épouse n ’est pas 1111 apa
nage de la puissance maritale.
D onc la disposition lé g a le , qui assure l'indépendance de la
femme divorcée, 11e dit p a s, par cela même , qu’elle ait le droit
d ’administrer scs biens.
D onc il n ’y a pas été contrevenu.
Observons d ’ailleurs que le jugement n ’a prononcé sur les effets
du divorce que relativement a u x créanciers : — il est donc sans
rapport avec les articles 1 et 2 , qui disposent sur le d ivorce, quant
à scs effets entre épouæ.
Reste à examiner la disposition de l ’article 11 du § 3 , que la
dame B randy prétend mal appliquée. V oici comment elle est
conçue :
T ou t acte de divorce sera sujet a u x mêmes form alités d 'e n
registrement et de publication que l'étaien t les ju gem en s de sé
paration ; et le divorce ne produira, à l'égard des créa n ciers
des é p o u x , que les mêmes effets que produisaient les sépara
tions de corps ou de biens.
Cette disposition assimile évidemment le divorce à la sépara
tion dans ses effets à l ’égard des tiers. — L ’un et l ’autre sont
donc, sujets aux mêmes formalités subséquentes , et ne produisent
effet qu’après ces formalités remplies.
Etconiment le législateur a u r a i t - i l pu se dispenserd’as similer le
divorce ¿1 la séparation , quant à ses effets ,¿1 l ’égard des créanciers ?
L e divorce ne produit pas d ’autres changcmens extérieurs que
la séparation. — S ’il emporte de plus la faculté de convoler , cetfe
�( i3 )
différence est. sans rapport avec les créanciers : le convoi n'aug
mente ui ne diminue leurs droits.
L e divorce et la séparation se ressemblent tellement, que jadis la
séparation de corps était a p p e l é e divorce , divortium ¿1 m en sd et
thoro , — Les jurisconsultes disaient même que celte séparation
d i s s o u t le m ariage , à l'e f f e t du partage d e la com m unauté
e t d es e ffe ts c iv ils du ‘m ariage. ( Bouclieuil, sur la coutume du
Poitou , article 239 , n°. 60. )
» A in si, le législateur a dù nécessairemant prescrire , cc mme il l’a
fait, que le divorce soit assimilé à la séparation , pour !es fo rm a
lité s à observer , et pour les droits à exercer à l ’égard des créan
ciers.
L a dame Brandy nous propose une version toute différente, et
en fonde la nécessité sur des principes qui lui sont propres.
;I
A u lieu du texte de la lo i , elle nous propose cette rédaction :
« Quoique le divorce dissolve entre les époux le m ariage, comme
« s’il n’avait jamais existé, — néanm oins,à l ’égard des créanciers
« qui ont contracté sur la foi du mariage existant, les droits que
« leur donnait le mariage subsisteront. — Ainsi ils pourront con<c server contre les époux divorcés les mêmes droits qu'ils au« raient eus contre des époux simplement séparés. »
Si le législateur avait disposé littéralement « que le divorce dis« soûl, le mariage , com m e s ’i l n'avait ja m a is existé, » — et
« que les époux ne sont pas dégagés de leurs dettes par un acte de
« divorce , » on adeuserait le législateur d ’avoir dit une e rre u r, et
une insignifiance. ■
— Une e r re u r ,... car il n’appartient qu’à un ju
gement d ’annullation de faire que le mariage soit comme s’il n ’a
vait jamais existé. — Une in sig n ifia n ce ,.... car il est si évident
que ni le divorce ni aucun autre changement de condition ne
peuvent affranchir les débiteurs de leurs dettes, que ce n’est
du tout pas la peine de le dire par une disposition législative.
Cette version de la dame Brandy ne peut donc être adoptée, à
raison de ce qu’elle renferm e.
Elle doit aussi être rejetée à raison de ce qu’clle om et ; — car
�-
( H
)
celle version ne serait relative qu’aux droits des créanciers, au
lieu qu'elle doit aussi être relative aux form alités à remplir par
les divorcés , pour que leur divorce ait effet.
L a dame Brandy , pour faire adopter sa version , accuse le
jugement , qui a appliqué la loi dans le sens littéral, d ’avoir
méconnu tous les principes,dont voici la lliéoi’ie :
*
Jadis la séparation de corps et de biens avait lieu sous là
ti condition résolutoire de la: réconciliation des cœurs , ou du
« rétablissement de la fortune.
« O r , le divorce est absolu , exempt de toutes conditions ; il
« ne peut être effacé ni atténué que par un nouveau mariage.
« Donc il existe une grande différence entre le divorce et les
« séparations , quant à leurs effets , même à l ’égard des tiers. >.»
D e ce raisonnement , nous contestons et les principes et la
conséquence : — c’est-à-dire que les principes ne prouvent rie n ,
et que d ’ailleurs ils ne sont pas vrais.
L e jugement attaqué , se fondant sur la lo i , a assimile le
d i v o r c e à u n e sé p a ra tio n d a n s ses effets h l'egard des créait ciers. — O r , la dame Brandy invoque contre ce jugement des
principes sur le d ivo rce , considéré dans scs effets entre les
cpouoc. — Bien évidemment., c’est changer la question, ou éluder
la difficulté -, car savoir quel est ¡’effet du divorce à l ’égard
des créanciers , n’est pas la question de savoir quel est l'effet
du divorce entre les divorcés eux-mêmes.
L a dame Brandy affecle de confondre la validité d ’un acte et
scs effets entre p a r ties, avec son opposabilité, ou ses effets
<i l'égard des tiers.
C e sont cependant des qualités très-dislinctes, et qui se règlent
par des principes tout diflérens.
En g én éral, la validité d ’un acte dépend de Yohservation des
form alités légales. — ^ u contraire , il a ou n ’a pas e ffe t, scion
�la bonne ou mauvaise f o i (les parties co.nl raclantes. — IL est ou
n’est pas opposable aux tiers , selon qu’il est ou n ’est pas fra u
d u le u x cl dommageable.
Les donations, les ventes, les actes de m ariage, et les jugemens de séparation peuvent être revêtus de toutes les for
malités qui les rendent valides , et cependant n ’être pas oppo
sables : ces actes et tous autres peuvent avoir effet entre parties ,
sans avoir effet à l'égard des tiers. — Ainsi l ’.Utuite l ’usage
de tous les jours.
L e divorce lui-même est littéralement , et par l ’article i x
que nous discutons , déclaré sans effet à l ’égard des créanciers ,
tant qu’il n ’a pas ét<i enregistré et publié (d an s les pays de
communauté ) : ce point ne saurait être con sisté.
D onc autre chose e s t, même à l ’égard du divorce , l ’effet entre
parties, et l ’effet envers les créanciers.
D onc les principes de la dame Brandy sur la nature du di
vorce , sur ses effets entre parties , ne prouveraient, rien contre
le jugement qui a disposé sur les effets du divorce à l'égard d ’un
créancier.
Actuellem ent examinons si la théorie de la dame Brandy ,
fausse dans ses conséquences , repose sur des principes qui
6oient vrais.' ■!' r r
î
1
,
. t.-"'
« Elle affirme que jadis les séparations étaient prononcées sous
« la condition résolutoire d ’une réconciliation des cœurs , ou
« d ’un changement dans la fortune. »
Mais la fortune pouvait se rétablir , et les coeurs pouvaient se
réconcilier, sans que le jugement dç séparation cessât d ’exister
et d ’avoir effet : — il suflisait que les époux s’abstinssent de réunir
leurs corps ni leurs biens.
S ’il y avait une condition résolutoire } ce n’était donc pas
celle qu’indique la dame Brandy.
'
Quelle était cette condition ?
Il est généralement reconnu que le fait de non-exécution du ju-
�genient de séparation, suffisait pour que le jugement restât
sans effet. ( A rt. 2,3/| de la coutume de Paris , formant le droit
commun ). — Egalement il est reconnu qu’au cas d 'exécu tion , il
suffisait ultérieurement du fait contraire , c’est-à-dire de la réu
nion des personnes ou des biens , pour détruire tout effet du
jugement de séparation.
Donc l 'e ffe t des jugemenç de séparation dépendait absolu*ment de la volonté des époux.
Si donc la séparation était prononcée sous une condition réso
lutoire , c’était sous la condition d ’un changement de volonté
dans les époux.
L e magistrat n’intervenait dans les séparations , comme dans
le mariage , que pour le maintien de l'intérét public. Il ne
pouvait prononcer que sous ce rapport. — T o u t ce qui con
cerne purement l ’intérét privé des époux étant du ressort de
leur volonté , le magistrat devait s’en rapporter àeux-m em es.
Quoi qu’il en soit, un jugement de séparation n’obtenait pas
d ’effe t, ou perdait tout son effet , selon' la volonté des époux.
L a disposition judiciaire était subordonnée à la volonté des par
ties. — Tenons ce point pour constant.
Il importe à la cause de soigneusement distinguer ce qui est
l ’effet nécessaire de la lo i, et ce qui dépend de la volonté des
époux. — L a discussion qui suit aura pour objet d ’établir que
si la dame Brandy n’est pas encore réputée administratrice de ses
biens , c’est par le fait de sa volonté.
Reprenons la théorie de la dame Brandy :
« Elle affirme que le divorce est absolu , et opéré sans condition
« aucune. »
1
■
.
Ici est encore une équivoque:
, .(r
,
,
L e divorce est en effet opéré absolum ent, quant aux per
sonnes.
�4
or
( -*7 )
A u contraire , en ce qui touche les biens , l ’efict tlu divorc#
n ’est rien moins qu’absolu.
L e divorce ne saurait avoir plus d ’effet pour dissoudre , que
le mariage n’en a pour unir.
O r , le mariage n’a pas d ’effet absolu sur les biens.
En pays coutumier et en pays de droit écrit, les biens de la
femme qui se marie sont dotaucc ou paraphernaux , propres ou
communs , confiés à l ’administration du mari , ou réservés à
l ’adininistratiou de la fem m e, le tout selon sa volonté expresse
ou tacite.
Aussi on distingue partout ce qui appartient à Yacte de cé lé -*■
bration de l ’ofllcier c iv il, d’avec ce qui appartient au contrat du
notaire.
Nulle part on ne confond le lien conjugal qui affecte les
personnes , et le lien socia l qui se rapporte aux biens.
En ce qui touche leur personne , les époux reçoivent le joug
de la loi : dès l ’instant qu’ils ont voulu se marier , leur volonté
ne compte plus ; la loi seule règle le lien conjugal.
M ais, en ce qui touche les biens des époux , la loi s’en re
met à eux-mêmes. — Si elle dispose , ce n’est que subordonnément à leur volonté : Provisio hominis fa c it cessare provisionem le gis.
Sous ce rapport, les époux , entièrement leurs maîtres , règlent
leur sort comme des associés.
C e qui faisait dire aux anciens procureurs du Châtelet de
Paris que la communauté entre les époux n’est autre chose
qu’une société , et se règle par les mêmes principes ( ainsi at
testé par l’actc de notoriété du 18 janvier 17 0 1.)
Mais si l ’épouse en se mariant n ’est lié e , quant à scs b ien s,
que par un lien social ; si la loi ne dispose pour elle que subordonném ent à sa volonté , la conséquence eft est que l ’épc/use ,
en se divorçant, 11’csl déliée, quant à ses biens, que d ’une manière
subordonnée à sa volonté.
C ’est-à-dire que , si , en opérant son divorce , elle veut ne pas
rompre le lieu social, ne pas opérer une séparation de biens ,
3
�(
18
)
si clic ne veut pas en reprendre l ’administration , la loi doit
repu ter la société continuée : tanidi'u socielas d u râ t, quamdiu
voluntaspersévérât.
En un m ot, la loi permet à ceux qui se marient' d ’être époux
non associés : — donc elle permet à ceux qui se divorcent d ’être
associés non époux. — T elle est en substance la théorie que nous
opposons à la théorie de la dame Brandysur les effets du divorce,
quant aux biens.
L ’acte de divorce n’a opéré, quant à ses biens , que subordon
n é nient à sa volonté : — de même qu’un statut matrimonial, à l ’é
gard des biens de la femme qui se marie -, — de même encore
qu’ un jugement de séparation, à l ’égard de la femme qui demande
à se séparer.
T o u t gît donc dans ce seul point : quel lisage la dame Brandy
a- t-elle voulu faire de son acte de divorce relativement à la sé
paration , à l ’administration de ses biens ?
O r , il est constaté par le jugement que la dame Brandy n ’a
pas voulu faire usage de son acte de divorce , qu’elle n’y a
donné aucune espèce d ’crxccuUon -, qu'elle u conservé l ’adminis
tration de scs biens à son ci-devant mari.
D o n c, nonobstant l ’acte de divorce , l ’administration des biens
de la dame Brandy est restée dans les mains du C. GoursauDum azé, — non cn q u aliléd ’qpoï/a:, de supérieur y mais en qua
lité d ’a s so c ié , chef de l’association.
A in s i, et par l ’analogie des principes les plus usuels , se trouve
justifiée la disposition de l ’art. 11 du $ 3 de la loi du 20 sep
tembre 179 2, dans le sens applique par le jugement dont il
s’agit.
M a in te n a n t a p p r é c io n s le m o r c e a u d e la r e q u ê te e n ca ssatio n
't
q u i est l e p l u s p r o p r e à é b l o u i r .
« J e su is d i v o r c é e , et n o n d i v o r c é e , d i t l a d e m a n d e r e s s e : — d i
te v o r c é e , p u i s q u e je p u i s c o n t r a c t e r u n n o u v e a u m a r i a g e : — « n o n
« d i v o r c é e , p u i s q u e je n e p u i s a g i r à p r é s e n t c o m m e l i b r e c o n t r e
k un acquéreur
d e mes biens. »
�4
( 19 )
« Et. quand cessera cette suspension temporaire ? faut-il ne plus
<( voir mon ci-devant époux ? faut-il le liaïr ? faut-il de mauvais
« procédés, des sévices, de mauvais traitemens,? »
Non , madame j non: le jugement que vous dénoncez est beau
coup plus sage qu’il ne vous semble.
L e jugement reconnaît votre personne lib r e , parce qu’il
existe un acte de divorce régulièrement prononcé.
?
Quant à vos biens , il vous a déclaré non encore adminis
tratrice } parce q u e , de fa it , vous n’avez pas repris et voulu
reprendre cette administration ; parce que , d ’api'ès ce fa it, la
loi réputé l ’administration restée dans les mômes mains.
« Vous demandez quand se lèvera cette suspension temporaire? »
Il nefaut ni haine, ni mauvais procédés, ni mauvais traitemens.
Supposez que votre acte de divorce est un jugem ent de sé
paration ; — faites ce qui serait nécessaire pour que le jugement
de séparation devînt opposable à des tiers : — et dès lors votre
acte de divorce pourra être opposable , avoir tout son effet.
L a suspension temporaire dont se plaint la dame Brandy sera
\
,
donc levée , alors que , de fa it, il y aura entre elle et son mari
désunion des personnes et des biens ; — alors que , deve
nant étrangère à la personne , h la maison , à la gestion de son
mari , à ses enfans, peut-être elle pourra savourer l ’isolement et
les angoisses
^ /j^ ietyn ère^ qui î^’x^ as craint de
R É D U ISO N S t o u t e c e t t e a f f a i r e , b e a u c o u p t r o p c h a r g é e d e d i s
s e r t a t i o n s s u r l a f a v e u r d e s q u e s t i o n s d ’é t a t , s u r l a n a t u r e d e *
s é p a r a t i o n s et d u d i v o r c e , s u r le s e ff e t s d e l à p u i s s a n c e m a r i t a l e ,
s u r l a d i f f é r e n c e d u l i e n c o n j u g a l et d u l i e n s o c i a l e n t r e é p o u x .
Il suffit à notre cause d ’observer au tribunal qu’il s’agit
ici uniquement de V effet d'un divorce relativement à un
créancier. — Le cas étant prévu par la l o i , tout se réduit à com
parer le texte de la loi au texte du jugem ent, et h voir s’ils sont
en opposition. Yoici l ’opération :
<J°)
�L e d ivo rce, à l'égard des créanciers , n ’a que les mêmes
effets d ’une séparation de corps ou de biens : — c’est le texte de
l’art. 11 du $ 3 de la loi du 20 septembre 1792.
O r , toute séparation reste sans effet à l ’égard des créanciers ,
tant qu’elle n ’a pas été exécutée. ( A rt. 1 34 de la coutume de
Paris , formant le droit commun. )
D onc le divorce est sans effet à l ’égard des créanciers, tant
qu’il n’a pas reçu exécution. — Conséquence inévitable.
Mais le divorce de la dame Brandy n’a reçu , quant à présent,
aucune exécution , ni par la séparation des personnes , ni par
la séparation des biens. — Le fait est constaté, et n’est pas conteste.
Donc le divorce de la dame Brandy ne peu t, quant à p resen t,
avoir effet a l'égard des créanciers. — C ’est ce qui a été jugé.
Ainsi se justifie le motif pris de l ’union continuée des personnes
et des biens , ou de la non exécution du divorce.
Quant au m otif pris de la simulation } ou de la fraude , il re
pose sur les mêmes principes , puisqu’une séparation simulée ou
frauduleuse 11c serait pas opposable.
T elles sont les deux bases, également solides, sur lesquelles re
pose le jugement attaqué. — Il suffirait d ’une seule pour le rendre
indestructible.
C o n c lu sio n s.
— A u rejet d e la demande en cassation. J . - B . S i r e y ,
Le C. S IR E Y ,
pour le défendeur.
L e C. M É J A N ,
pour la demanderesse.
d e L ’I m p r i m e r i e DE BRASSEUr AINÉ , R U E DE LA H AR PE , N». 477.
Nota. On s’engage , dans c e tte imprimerie , à donner , dans le court espace de
quatre heures , sans frais extraordinaires, l’epreuve d’une feuille d'im pression, pourvu
que les feuillets de manuscrit ne soient écrits que d’un côté.
�
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Factums Godemel
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Description
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjean
Subject
The topic of the resource
divorces
divorces simulés
divorces par consentement mutuel
fraudes
créances
communautés familiales
coutume du Poitou
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Défense pour le C. Judde-Larivière ;Contre la dame Brandy, épouse se disant du C. Goursau-Dumazé, demanderesse en cassation. Divorce simulé, ou frauduleux et non exécuté.
Annotations manuscrites. Exposé et motifs détailles dans Sirey, Vol. 3, p. 331, première partie.
Table Godemel : Divorce : 2. un divorce a pû être argué de simulation, en ce qui touche les biens des divorcés, et relativement aux créanciers.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Brasseur aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_M0232
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Renaudie (domaine de)
Vayres (87199)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
communautés familiales
coutume du Poitou
Créances
divorces
divorces par consentement mutuel
divorces simulés
fraudes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53731/BCU_Factums_M0232.pdf
3403b504dff06b6f62ea4d87e67c823b
PDF Text
Text
A P P E RCU
TRIBUNAL
DE
CASSATION.
POUR
le C.en J U D D E -L A R IV IÈ R E ,
-,
,
..
d e fen d eu r ;
‘
C O N T R E la dame B R A N D Y
demanderesse.
L a
J
dam e B r a n d y n e cesse d e p r é te n d r e q u ’en la d é c la ra n t
non-recevable , q u a n t à p r é s e n t , a e xcip er d e son d iv o rc e (e n
ce qui tou ch e la c o m m u n a u té de biens) , à I’ég a rd d ’ un cré a n
cier , o n a porté atteinte à son éta t c iv il de femme divorcée.
E lle ne veut pas entendre qu e son état d e fe m m e ou d e d i~
vo r cé e ne fait rien au procès.
P o u r éc laircir le sens d u jugem ent attaqué , p o u r q u ’ il p a r o isse bien
n’a v o ir a ucu nem ent disposé sur l 'état civil d e l a
dame; B r a n d y , rem ontons aux élém ens de cette affaire à l ’état
origin aire de la contestation.
L a d a m e -Brandy , pen dan t q u ’clle était fem m e G o u r s a u - D u mazé , était co m m u n e en. bieus . soit eu v e rtu d e son co n trat de
SECTION CIVILE
raPI orteur.
�m a r ia g e ,
soit p ar la force d u stalxit mûri c pal qui r é j i t R o -
ehouart ( jadis généralilé de Poitiers. )
D u r a n t le m a ria g e , et sans a vo ir cessé d ’être com m uns en
biens , les d e u x époux v e n d ire n t c o n jo in te m e n t un domaine.
C e tte vente sera n u lle , sans doute ; p arce qu e la venderesseé t a t m ineure. — Il s’agit seulement de déterm iner q u an d sera
ouverte l ’action en restitution.
Judde L a r iv iè r e , q u i a acquis de la com m unauté ou société,
p rétend ne p ou v oir être r e c h e r c h é , ju s q u ’à ce q u ’il y ait dissolu
tion effective de la com m unauté ou société qui lu i a vendu.
Il prétend que la dam e B r a n d y ne peut re v e n d iq u er ce d o
maine , tant q u ’elle sera de fait a s s o c ié e , com m u n e avec G o u r sau -D u m a zé tant qu e réclam er au nom de m adam e 6era récla
m e r p o u r le p rofit d e monsieur.
C ’est parce que la d am e B r a n d y avait encore son m ari p our
a s s o c ié que , lors d e sa p rem ière aclion en restitution , Ju ddeL a r i v i è r e fut fond é à lu i opposer une fin d e n o n -re ce vo ir.
Si la dam e B r a n d y , au lieu d ’être en co m m u n a u té d e b ien s
eut été mariée avec c occlus ion d e co m m u n a u té e t sép a ra tion d e
b ie n s ; si entre elle et son mari il n ’y avait eu ni société pour
les acquêts , ni société p ou r le m énage ; si elle avait eu à part
ses propriétés , scs revenus et ses dépenses , (ainsi q u ’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits para p lie r n a u x ') lu.dame
B r a n d y aurait été recevahle , m êm e d u r a n t son m a r ia g e , à reve
n ir contre la vente par elle faite étant m ineure.
D a n s cette h y p o t h è s e , il n ’y aurait eu ni d r o i t s , ni intérêts
d u mari à opposer -, la dam e B r a n d y ,
fem m e G o u r s a u - D u -
mazé , eût été pleinem ent accueillie à r e v e n d iq u e r le dom aine
vendu.
A i n s i , la fin de n o n -re ce vo ir opposée à la dam e B r a n d y (lors d u
p rem ier procès) ne reposait au cu n em en t sur son é ta t c i v i l , sur
la q u alité àa fe m m e G o u r s a u - D u m a z c ; mais sur le f a i t d e s o
c i é t é , sur ce lle circonstance de f a i t , q u ’ elle était co m m u n e e n
b ien s avec le citoyen G oursau-D um azé.
C o n s é q u e m m e n t, p our ôter to u l fondem ent à la lin de non-
�r e c e v o ir , il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais \qf a i t d e
s o c ié t é : il fallait , non cesser d ’ être ép o u se , mais cesser d ’être
réellem ent com m u n e e n b ien s. C on séquem m ent enfin , dans ce
n o u vea u procès com m e dans le p rem ier, la question se réd uit à ce
p oint : les intérêts sont-ils encore co nfond us? y a-t-il encore com
m unauté , m élange de L ie n s , s o c ié té entre la dam e B r a n d y et
G oursau-D um azé ?
« L a dam e B r a n d y est co n ven u e q u ’elle habite , mange et
« couche avec G oursau-Dum azé-, que leurs b ie n s , leurs r e v e n u s ,
« leurs dépenses sont a d m in istrés p ar lu i -, q u ’ainsi
l ’ exige
« son intérêt et celui de ses enfaus. — M ais elle nous défend
« d ’appeler cette com m ixtion un e s o c ié té d ’aucune espèce.
« N o n une s o c ié t é c o n ju g a le
puisqu’il n ’y a plus d e ma-
« riage qui en soit la source.
« N o n une s o c ié t é o rd in a ire , p u is q u ’il n ’ existe pas d 'é crit
« qui la constate. »
Q u e lle ([lie soit l’espèce d e société existante, peu nous importe ;
l ’essentiel est de savoir s’il en existe uue qui ren d e les in térêts
com m u n s entre G ou rsa u -D u m a zé et la dam e B ra n d y .
O r ce p'.iiul pouvait être constaté sa n s écrit. — L e principe
« que les sociétés doiven t êlre écrites » ne regard e que les a sso
c ié s c n lr ’ cuæ ; il ne re ga rd e pas les tie rs : à l ’égard des t ie r s , il
suilit que la société soit p ro u vée par des faits, p ar des a v e u x , par
la notoriété publiq ue , ( ainsi jugé le 23 messidor an 9 , au
rapp ort du citoyen Babille , sur la d e m a n d e r e je té e de la veuve
N o r m a n d et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’ espèce , la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalem ent d u fait s e u l , de la réunion des personnes ,
et d u mélange des biens.
L a dam e B r a n d y , habitante de R ochouart , est régie par la
coutume d u Poitou , dont l ’article
admet la s o c ié té ta isib le ,
ou ta cite , e n tr e d e s m a jeu rs ha bitant e n s e m b le , e t vivant
d e s m êm es b ie n s d e p u is un an e t un jo u r.
« C ette société taisible , (d it B o u ch e u d sur l ’article 2'ïi , 11".
5 7 , ) e u tr ’aulrcs que le mari et la i e m in e , a souvent
l ’un
�( 4 )
* d ’eux q u i en est le c h e f, com m ande a u x autres ,fa it toutes les
« affaires de la communauté , et en est appelé le maître ,
<? d ’après la loi i , ff. de Pactis. »
,
5
L e tribunal d ’appel pou voit d o nc , en p rc sc 'n d a n l d e l ’acle
de divorce , décider dans l ’espèce q u ’il y avait fusion d ’intér é t s , c o m m u n a u t é , ou société véritable; q u e , sous ce r a p p o r t , la
revendication
faite
au nom de
m adam e
devait to u r n e r
au
profit de jîionsieur.
L e trib un al pouvait d é cid e r que la com m unauté d e biens , née
jadis avec le lien conju gal , était a u jo u r d ’h u i conservée ou re
n o uvelée par la volonté des divo rcé s , par le fait d ’habitation et
administration commune.
O h ! si la question
qui nous divise a
pu être décidée
en
p rescin dan t de l ’acte de d ivo rce et de ses effets , en ne considé
ra n t qu e le fait de com m unauté
ou
société c o n v e n tio n n e lle ,
le jugem ent est loin d ’avoir m é co n n u l ’essence d u d i v o r c e , d 'a v o ir
statué sur une question d ’état.
A ctu ellem en t que nous voilà fixés sur l ’état précis de la co n
testation , exam inons le jugem ent.
E t p u is q u ’il ne s’agit qu e de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de biens, souvenons-nous que la d é
cision sur le d ivo rce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la com m unauté de biens ■
, que le mot m êm e divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu, qui tou ch e à la personne,
mais dans le sens relatif au p ro c è s , en ce qui touche la co m
m unauté de biens.
L e ju gem ent déclare la da m e B r a n d y n o n -r e ccv a b le h e x c ip e r
d e son d ivorce ; c ’c s t - a - d i r e que tel que soit l ’acte de d i v o r c e ,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôié , p a r son f a i t ,
le droit d ’en tirer avantage > (fuant a p r ése n t.
L e jugem ent déclare le divorce non opposable, quant a pré
sent; c ’est-à-d ire que tel (pie soit l’acte de d iv o r c e , tels que soient
scs effets n a tu rels, sa vertu légale ou naturelle se trouve ncutraUsée ou suspendue par le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dam e B ra n d y .
�C 5 )
L a dam e B r a n d y est réputée en état d e société continuée ou
renouvelée avec G o u r s a u - D u m a z é ,
N o n par défaut d e vertu originaire dans l ’acte de son d i v o r c e ,
mais p ar suite d ’une restriction apposée a u x effets natui’els d u
d ivo rce , p ar le fait de sa volonté -, ou p a rce q u ’il lu i a p lu de
r e n o n c e r aux eiïcts d u d ivo rce en ce q u i touche la séparation
des biens , ou parce q u ’il lui a p lu d e r e n o u v e le r l ’association,
au cas q u ’elle fû t dissoute.
Q u els sont les faits , quels sont les actes de volonté qui ont fait
p résu m er au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait d é cla re r le divorce sans effet, en ce qu i touche les biens?
L e fait de co-ha! itation et de co-administration -, — le fait d e
sim ulation ou d e fra u d e , — tel est le ju gem ent d é n o n cé :
D a n s son d is p o s it if , il déclare la dam e B r a n d y non recevable
à opposer son d ivo rc e ( en ce qui touche scs effets sur la com
m unauté de biens. )
D a n s ses m otifs , il considère qu e le d iv o rc e ( relativem en t
à la séparation des biens ) est simulé ou fr a u d u le u x
et no n
exécuté.
O r , est-il un e loi qui dise positivement q u 'u n e fem m e est
recevahlc à exciper de son d iv o rc e , ( p ou r se d ire séparée d e
biens) alors m êm e qu e le d ivo rc e n ’ a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore q u ’il y ait simulation au p r é ju
dice des créanciers ?
N o n , aucune loi n ’a tenu u n langage si p e u r a i s o n n a b l e
si peu moral.
L a d a m e B r a n d y invoquait d ’abord les art. I cl H d u §
,
3
de la loi d u 20 septem bre 1792 sur le divorce.
M ais ces d e u x articles ne disposent qu e sur la facullt; de se
rem a rier : s'ils assurent V in d é p e n d a n c e des ép o u x , c est en ce
sens q u 'ils sont alfrancbis d u jo u g c o n ju g a l, ([lie le lien p e r
s o n n e l est dissous. — Point de rapp ort avec notre espèce , où il
s agit seulement d u sort des bien s.
E lle invo quait aussi l ’art. X I , p ortant q u ’à l ’ ég a rd d e s c r é a n
c ie r s le d ivorce n ’ a d 'e j f e l q u e com m e u n e sé p a r a tio n .
�-
( 6 )
Mais le sens naturel de celte disposition est tout en fa v e u r du
jugement :
C a r si le ju gem ent déclare q u ’un d ivo rce simulé , ou fra u d u le u x
et non exécuté , 11’a pas effet à l ’é g ard d e créanciers , c ’est p ar la
raison q u ’une séparation sim u lé e , frau d u le u se , et non e x é cu té e ,
n ’aurait pas d ’effet à l ’égard des c r é a n c ie r s , et parce qu e le d i
vo rce n ’a effet que com m e une séparation.
En vain la dam e B r a n d y s’évertue p our p ro u v e r que la sim u
lation n ’est pas réelle , et que ce q u ’elle a fait n ’a rie n d e fr a u
d u le u x ou d ’illicite.
L a l o i , qu i lu i a perm is d e cesser d ’être l ’épouse d ’un m ari par
qu i elle serait m a lh e u r e u se , n ’a certainem ent pas v o u lu q u ’elle
cessât d être son épouse p ou r d e v e n ir sa co n cu b in e \ q u ’elle
conservât p our elle seule toutes les do uceurs d u m ariage , en
faisant rejaillir tous les effets d ’ un d ivo rc e sur ses créanciers , ou
sur les m a lh e u r e u x fruits de ses voluptés illégitimes.
Il y a f r a u d e , en ce q u e V in te n tio n d e la loi est h o rrib le
m ent trompée , à la fa veu r de l ’observation ju d a ïq u e d e la le ttre
de la loi.
Il y a sim u la tio n ou f r a u d e , en ce qu e la dam e B r a n d y a con
senti 1111 acte de divorce p ou r p a ra ître séparée de biens -, alors
que de fait il y a fusion d ’ intérêts , com m unauté ou société de
biens , identité d ’administration -, alors q u ’ elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable p our elle.
I o u t le public est convaincu , ( et la dam e B r a n d y se glorifie
de cette croyance) q u ’aussitôt le dom aine r e v e n d i q u é , ou le procès
fin i, l ’aclc de d ivo rce sera d é t r u i t , ou p ar une transaction ju d ieiaire qui le dé clare n u l , ou , s’il en est b e s o in , p ar un nouvel
acte de mariage.
O r , il y a dans ce m anège tant d 'im m o r a lité , tant d ’incon
venance , tant d ’oppositiou avec les vues d u lé g isla te u r, q u ’il est
impossible de ne pas y
vo ir simulation , artifice , fraude.
l'.l dans les cas de divorce , com m e dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul n e d o it profiter de la fraude
qu'il a machinée au d étrim en t d ’autnii.
L i d:i ne B randy dénature le sens de la disposition légale-.
/
�p o u r lui faire dire seulement qu e le divorce ne dispense pas
les époux de remplir leurs obligations , contractées pendant
le mariage •• mais ce n ’est là q u ’ une interprétation h a s a r d é e ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter u n e ou vertu re d e cassation.
D e notre p a r t , ce n ’est pas interpréter , c’est s’attacher au
texte de la loi , d e d ire q u ’un d ivo rc e simulé , ou f r a u d u le u x ,
et non exécuté , reste sans effet à l ’ é g ard des créanciers.
C a r s’il ne restait pas sans e f f e t , dans ces cas , le divo rce aurait
plus d ’effet q u ’un jugem ent de séparation , p u is q u ’un jugem ent de
séparation simulée ou frauduleuse , et no n exécutée , reste sans
effet à l ’égard des créanciers.
L e législateur a u ra it-il d û établir u n e différence entre les actes
d e d ivo rce et les jugem ens de séparation , quant à leurs effets à
l ’é g a rd des créanciers?
Ici la dam e B r a n d y p eu t p a rco u rir u n clia m p v a ste en c o n
jectures.
«
Q u an t à nous , nous avons suffisamment dém ontré q u ’ en ce qui
touche le sort des b ie n s , et relativem ent a u x c r é a n cie r s, le d ivo rc e
est absolum ent un acte de mêm e nature q u ’une séparation.
11 nous suffit de dire q u ’à cet é g ard le divo rce et la séparation
sont assimilés par la loi ( bo n n e ou m auvaise ) ; que l ’un et l ’autre
ont les mêm es effets , en ce qui touche le sort des biens , relative
ment a u x créanciers.
L a dame B r a n d y ne ré p o n d ra jamais à cet argument.
« Si u n d iv o rc e s im u le , fr a u d u le u x et non exécuté avait eflet
« à l ’égard des c r é a n c ie r s, il aurait plus d ’effet q u ’ un jugement
«. de séparation.
« O r , la loi asshnile le d ivo rc e et la séparation, dansleui-s effels,
« à l’éim id des créanciers.
« D onc,
à l ’égard de créanciers , un d ivo rc e simulé ou f r a u
d u le u x et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a d a t n c B r a n d y se retranch edalis l a d sposition de l'a rticle IV du
même p a r a g r a p h e ,— qui ne dit rien de la co m m u n a u té ou s o c ié té ,
�(
8
)
continuée ou re n ou ve lé e après l ’acte d e divorce. — V o i c i le
texte d e la d is position :
•
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de biens,
ou à la société d’acquêts
qui
A EXISTÉ
entre
eux
, soit
par la loi , soit par la convention, comme si lu n d’eu x était
décédé.
A in si , et d 'après cette disposition , si des épo ux divorcés
avaient à régler la com m unauté qui a e x isté entre e u x , ils a u
raient les m êmes droits respectifs que si l ’un d ’eux était, décédé.
Mais s il le u r plait
de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n ’oppose au cu n obstacle , a u cu n e
restriction à l ’exercice de leu r volonté.
L a dam e B r a n d y a le courage d e professer q u e des époux
d ivo rcés peuvent rester amans. — E lle serait p a r trop in co n
séquente d e n ie r q u ’ ils puissent rester associés.
E t s'ils p eu ven t rester, ou seulem ent d e v e n ir associés, la
question d e communauté ou de société n ’est presque plus q u ’une
question d e f a i t , dont la décision , q u a n d elle serait e r r o n é e ,
ne serait jamais u n e contravention à la loi.
D a n s tous les cas , que ce soit un e simple question de f a i t ,
que ce soit, une question com pliquée de fait et de d roit , Reste ,
q u ’ en
déclarant la dam e B r a n d y
non - recevable
à exciper
de son divo rce , p ou r se dire séparée d e biens , pour opposer
cette séparation a des
cré a n cie rs, le jugem ent n’a pas
ju gé
une question d ’eta t , n ’ a contrevenu à aucune loi , et s'est a u
contraire conform é a l'article X I d u p aragrap he III d e la loi
d u o septembre 1 7 9 2 qui assimile le d ivo rc e et la sé p a ra tion
dans leurs e ffets à l ’égard des créanciers.
3
C o n c lu s io n s , com m e p ré c é d e m m e n t au rejet d e la d e m a n d e
en cassation.
L e C SlREY ,
p o u r le d é fe n d e u r.
Le C.eMÉJAN
p o u r la dem a n deresse..
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
coutume du Poitou
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1790-AN 11?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0232
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Relation
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BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_G1218
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Rochechouard (87126)
Rights
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Domaine public
communautés familiales
coutume du Poitou
divorces simulés
fraudes
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Text
APPERCU
i
T R IB U N A L
D S
C A SSA T IO N .
SECTION C IV IL E .
POUR le C.en J U D D E - L A R I V I E R E ,
défendeur ;
C O N T R E la dame B R A N D Y ,
demanderesse.
L a . dame Brandy ne cesse de prétendre qu’en la déclarant
non-recevable, quant à p ré s e n t, à exciper de son divorce (en
ce qui touche la communauté de biens) , à l’égard d ’un créan
cier , 0n a porté atteinte à son état civil de femme divorcée.
Elle ne veut pas entendre que son état de fem m e ou de di
vorcée ne fait rien au procès.
Pour éclaircir le sens du jugement attaqué pour qu' il pa
roisse bien n’avoir aucunement disposé sur l'état civil de la
dame B randy , remontons aux élémens de cette affa ir e a l'état
originaire de la contestation.
La d a m e B randy , pendant qu’elle était femme Goursau-Dumazé } était commune en biens , soit en vertu de son contrat de
Le C. C O F F IN H A L ,
rapporteur,
j
�(»)
m ariage, soit par la force du statut nnxr. c pal qui 1 é0it Roehouart 'jadis gé .éraîi é de Poitiers. )
Durant le mariage, et sans avoir cesse d’être communs en
biens , les deux époux vendirent conjointement un domaine.
Cette* vente sera n u lle, sans doute ; parce que la venderesse
éta.t mineure. — 11 s’agit seulement de déterminer quand sera
ouverte l ’action eu restitution.
Judde Larivière , qui a acquis de la communauté ou société ,
prétend ne pouvoir être recherché, jusqu’à ce qu’il y ait dissolu
tion effective de la communauté ou société qui lui u vendu.
Il prétend que la dame Brandy ne peut revendiquer ce do
m aine, tant qu’elle sera de fait associée , commune avec Goursau-Duma/.é ; tant que réclamer au nom de madame sera rtcla
mer pour le profit de monsieur.
C ’est parce que la dame Brandy avait encore son mari pour
associé
, lors de sa première action en restitution, JuddcLarivière fut fondé à lui opposer une fin de non-recevoir.
Si la dame B ran d y, au lieu d ’être en communauté de Liens
eût été mariée avec exclusion ule communauté et séparation de
biens ; si entre elle et son mari il n’y avait eu ni société pour
les acquêts, ni société pour le ménage •, si elle avait eu à part
ses propriétés, ses revenus et ses dépenses , (ainsi qu’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits parapher/taux') la dame
Brandy aurait été recevahle, même durant son mariage, à reve
nir contre la vente par elle faite étant mineure.
Dans cette hypothèse , il n’y aurait eu ni droits , ni intérêts
du mari à opposer 3 la dame Brandy , femme Goursau-Dumaze, eût etc pleinement accuedhe a revendiquer le domaine
vendu.
A insi, la fin de non-recevoir opposée à la dame Brandy ('lors du
premier procès^ -ne reposait aucunement sur son état c iv il, sur
la qualité àc fem m e Goursau-Dumazé ; mais sur le fa it de so
ciété , sur celte circonstance de fait, qu’elle était commune en
biens avec le citoyen Goursau-Dumazé.
Conséquemment, pour ùter tout fondement à la liu de non-
�C 3 )
recevoir, il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais le fa it de
Société : il fallait, non cesser d ’être épouse , mais cesser d ’être
réellement commune en biens. Conséquemment enfin , dans ce
nouveau procès comme dans le premier, la question se réduit à ce
point : les intérêts sont-ils encore confondus? y a-t-il encore com
munauté , mélange de biens, société entre la dame Brandy et
Goursau-Dumazé ?
« La dame Brandy est convenue qu’elle habite, mange et
« couche avec Goursau-Dumazé-, que leurs biens, leurs revenus,
« leurs dépenses sont adm inistrés par lui -, qu’ainsi l’exige
« son intérêt et celui de ses enfans. — Mais elle nous défend
« d’appeler cette commixtion une société d ’aucune espèce.
« Non une société conjugale , puisqu’il n’y a plus de ma« riage qui en soit la source.
« Non une société ordinaire , puisqu’il n’existe pas à ’écrit
« qui la constate. »
Quelle que soit l’espèce de société existante, peu nous importe;
l’essentiel est de savoir s’il eu existe une qui rende les intérêts
communs entre Goursau-Dumazé et la dame Brandy.
Or ce point pouvait être constatée sans écrit. — L e principe
a que les sociétés doivent être écrites > ne regarde que les asso
ciés entr’eu x ; il ne regarde pas les tiers : à l’égard des tiers, il
suffit que la société soit prouvée par des faits, par des aveux, par
la notoriété publique , ( ainsi jugé le 33 messidor an 9 , au
rapport du citoyen Babille , sur la demande rejetée de la veuve
Normand et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’espèce, la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalement du fait seul, de la réunion des personnes ,
et du mélange des biens.
L a dame Brandy , habitante de Rochouart, est régie par la
coutume du Poitou, f dont l’article 33 1 admet la s o c ié t é taisible t
ou tacite , entre des majeurs habitant ensemble > et vivant
des mêmes biens depuis un an et u n jour.
« Cette société taisible, (dit Bouchcuil sur l’article 33 1 , n°.
« 5 7 ,) entr’autres que le mari et la femme, a souvent l’un
�( 4 )
« d'eux qui en est le c h e f, commande aux autres ,fa it toutes le s
« affaires de la communauté , et en est appelé Je maître ,
« d ’après la loi 1 5 , ff. de Pactis. »
L e tribunal d’appel pouvoit donc , en prescindant de l ’acte
de divorce , décider dans l’espèce qu’il y avait fusion d ’inté
rêts, communauté, ou société véritable-, q u e, sous ce rapport, la
revendication faite au nom de madame devait tourner au
profit de monsieur.
L e tribunal pouvait décider que la communauté de biens , née
jadis avec le lien conjugal , était aujourd’hui conservée ou re
nouvelée par la volonté des divorcés , par le fait d ’habitation et
administration commune.
Oh ! si la question qui nous divise a pu être dé-idée en
prescindant de l’acte de divorce et de ses effets , en ne considé
rant que le fait de communauté ou société conventionnelle,
le jugementest loin d ’avoir méconnu l ’essence dudivorce, d ’avoir
statué sur une question d ’état.
Actuellement que nous voilà fixés sur l ’état précis de la con
testation , examinons le jugement.
Et puisqu’il ne s’agit que de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de b ie n s , souvenons-nous que la dé
cision sur le divorce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la communauté de biens -, que le mot même divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu , qui touche à la p erso n n e,
mais dans le sens re la tif au procès, en ce qui touche la com
munauté de biens.
L e jugement déclare la dame B ra n d y non-recevable à e x c ip e r
de son divorce i c’est-à-dire que tel que soit l’acte de divorce,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôté , p a r son fa it ,
le droit d’en tirer avantage , quant à présent.
Le jugement déclare le divorce non opposable, quant à p r é
sen t; c’est-à-dire que tel que soit l’acte de divorce, tels que soient
scs eflets naturels, sa vertu légale ou naturelle se trouve neutra
lisée ou suspendue p a r le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dame Brandy.
�C5 )
L a dame Brandy est réputée en état de société continuée ou
renouvelée avec Goursau-Dumazé,
Non par défaut de vertu originaire dans l’acte de son divorce,
niais par suite d ’une restriction apposée aux effets nature's du
divorce , par le fait de sa volonté ■, ou parce qu’il lui a plu de
renoncer aux effets du divorce en ce qui touche la séparation
des l)icns , ou parce qu’il lui a plu de renouveler l ’association,
au cas qu’elle fût dissoute.
Quels sont les faits , quels- sont les actes de volonté qui ont fait
présumer au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait déclarer le divorce sans effet, eu ce qui touche les biens?
L e fait de co-ha' itation et de co-administration •, — le fait de
simulation ou de fraude
tel est le jugement dénoncé:
Dans son d is p o s it f, il déclare la dame Brandy non recevable
à opposer son divorce ( en ce qui touche ses effets sur la com
munauté de biens. )
Dans scs motifs , il considère que le divorce ( relativement
à la séparation des biens ) est simulé ou frauduleux et non
exécuté.
O r, est-il une loi qui dise positivement qu’une femme est
recevable à exciper de son divorce, ( pour se dire séparée de
biens) alors même que le divorce n’a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore qu’il y ait simulation au préju
dice des créanciers ?
Non , aucune loi n’a tenu un langage si peu raisonnable,
si peu moral.
La dame Brandy invoquait d ’abord les art. I et il du $ 3
de la loi du ao septembre 1792 sur le divorce.
Mais ces deux articles ne disposent que sur la faculté de se
rem arier : s’ils assurent. V'indépendance des époux, c est en ce
sens qu'ils sont affranchis du jou g conjugal, que le lien per
son nel est dissous. — P o i n t de r a p p o r t avec notre espèce , oii il
s’agit seulement du soi t des biens.
Elle invoquait aussi l’art. X I , portant qu’à l’egard des créan
ciers le divorce n ’a d ’cJJ'et </ue ccmtne une séparation.
�(6 ;
Mais le sens naturel J e cette disposition est tout en faveur du
jugement :
Car si le jugement déclare qu’un divorce sim ulé, ou frauduleux
et non exécuté , n’a pas effet à l’égard, de créanciers , c’est par la
raison qu’une séparation simulée, frauduleuse , et non exécutée,
n’aurait pas d ’eflet à l’égard des créanciers, et parce que le di
vorce n’a effet que comme une séparation.
En vain la dame Brandy s’évertue pour prouver que la simu
lation n’est pas réelle , et que ce qu’elle a fait n’a rien de frau
duleux ou d'illicite.
L a lo i, qui lui a permis de cesser d ’être l’épouse d ’un mari par
qui elle serait m alheureuse,n’a certainement pas voulu qu’elle
cessât d’être son épouse pour devenir sa concubine ; qu’elle
conservât pour elle seule toutes les douceurs du m ariage, en
faisant rejaillir tous les effets d ’uu divorce sur ses créanciers f ou
sur les malheureux fruits de ses voluptés il lé g it im e s .
11 y a frau d e, en ce que Y intention de la loi est horrible
ment trompée, à la faveur de l ’observation judaïque de la lettre
de la loi.
Il y a simulation ou fra u d e , en ce que la dame Brandy a con
senti un acte de divorce pour paraître séparée de biens •, alors
que de fait il y a fusion d’intérêts , communauté ou société de
biens , identité d’administration -, alors qu’elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable pour elle.
Tout le publie est convaincu , ( et la dame Brandy se glorifie
de cette croyance) qu’aussitôt le domaine revendiqué, ou le procès
fini, 1 acte de divorce sera détruit, ou par une transaction judi
ciaire qui le déclare n u l, ou , s’il en est besoin, par un nouvel
acte de mariage.
O r, il y «
ce manège tant d ’immoralité, tant d ’inconvenanct, tant d’opposition avec les vues du législateur, qu’il est
impossible de ne pas y voir simulation , artifice , fraude.
l'jt dans les cas de divoice , connue dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul ne doit profiter de la fraude
qu’ il a machinée au détriment d ’autrui.
Ija diime Brandy dénature le sens de la disposition légale,
�(7 )
pour lui faire dire seulement que le divorce ne dispense pas
les épou x de rem plir leurs obligations , contractées pendant
le mariage : mais ce n’est là qu’une interprétation hasardée ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter une ouverture de cassation.
De notre part, ce n’est pas in terp réter, c’est s’attacher au
texte de la lo i, de dire qu’ uu divorce simulé , ou frauduleux,
et non exécuté , reste sans effet à l’égard des créanciers.
Car s’il ne restait pas sans effet , dans ces cas , le divorce aurait
plus d ’effet qu’ un jugement de séparation , puisqu’ un jugement de
séparation simulée ou frauduleuse, et non exécutée , reste sans
effet à l’égard des créanciers.
L e législateur aurait-il dû établir line différence entre les actes
de divorce et les jugemens de séparation, quant à leurs effets à
l ’égard des créanciers?
Ici la dame Brandy peut parcourir un champ vaste eu con
jectures.
Quant à nous , nous avons suffisamment déniontré qu’en ce qui
touche le sort des biens, et relativement aux créanciers, le divorce
est absolument un acte de même nature qu’une séparation.
Il nous sufiit de dire qu’à cet égard le divorce et la séparation
sont assimilés parla loi ( bonne ou mauvaise ) ; que l’un et l’autre
ont les mêmes effets, en ce qui touche le sort des biens , relative
ment aux créanciers.
L a dame Brandy ne répondra jamais à cet argument.
« Si un divorce simulé, frauduleux cl non exécuté avait effet
« à l’égard des créanciers, il aurait plus d’effet qu’ un jugement
« de séparation.
« O r, la loi assimile le divorce et la séparation, danslcui’s eflels,
« a 1 égard des créanciers.
« D onc, a l’égard de créanciers,, un divorce simule ou frau
duleux et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a damelîraml y se retranchedans la disposition de l’article IV du
môme paragraphe, —qui ne dit rien de la communauté ou société,
�continuée ou renouvelée après l’acte de divorce. — Voici. le
texte de la disposition
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de b ien s,
ou à la société d'acquêts q u i A e x i s t é E N T R E E U X , soit
p ar la. l o i , soit p a r la convention., comme si l 'un d ’ eu x était
décédé.
Ainsi , et d ’après cette disposition , si des époux divorcés
avaient à régler la communauté qui a e x is té entre eux , ils au
raient les mêmes droits respectifs que si l’un d eux était décédé.
Mais s’il leur plaît de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n’oppose aucun obstacle , aucune
restriction à l’exercice de leur volonté.
La dame Brandy a le courage de professer que des époux
divorcés peuvent rester amans. — Elle serait par trop incon
séquente de nier qu’ ils puissent rester associés.
Et s’ils peuvent re s te r, ou seulement devenir a sso ciés, la
question de communauté ou de société n’est presque plus qu’une
question de f a i t , dont la décision, quand elle serait erronée ,
ne serait jamais une contravention à la loi.
Dans tous les cas , que ce soit une simple question de f a i t ,
que ce soit une question compliquée de fait et de droit , Reste ,
qu’en déclarant la dame Brandy non - recevable à exciper
de son divorce, pour se dire séparée de biens , pour opposer
cette séparation à des créanciers, le jugement n’a pas jugé
une question d’état, n’a contrevenu à aucune loi, et s'est au
contraire conformé à l’article XI du paragraphe III de la loi
du 20 septembre 1792 , qui assimile le divorce et la séparation
dans leurs effets à l'égard de's créanciers.
Conclusions, comme précédemment, au rejet de la demande
en cassation.
Le C.enS I R E Y ,
pour le défendeur.
L e C .en M E J A N ,
pour la dem anderesse.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0616
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0232
BCU_Factums_G1218
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53876/BCU_Factums_M0616.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochechouard (87126)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communautés familiales
divorces simulés
fraudes