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I'Z
CONSULTATIONS
<1
P O U R Meff ire A n t o i n e - P i e r r e - X a v i e r - B e r n a r d
A R R A G O N E T D E L A V A L , Ecuyer,
Défendeur,
C O N T R E
T E I L H
D am e
Je
a n n e
- G
A R D , f o n E p o u fe
e n e v i è v e
D e m a n d e re ffe s
en fe p a r a t io n d e B i e n s .
L E C O N S E IL fouff igné qui a vu le mémoire du fieur D ....
E S T I M E que fi le fieur D . . . . paroît n’avoir rien à
redouter de la demande en réparation de biens, dont il eft
t menacé de la part de la dame fon époufe, il eft néanmoins
de fa prudence & de fa délicateff e d'employer to u s les moyens
poffibles d’en éviter l'éclat. ,
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La féparation de bien, quoique moins fâcheufe & moins
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^rsA^' r».—
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rîgoureufe que celle d'habitation > nJeft pourtant pas favo-*
rable en ce q u elle eil toujours contraire à Thonjnêteté
publique, & qu’elle tend à détruire ou affaiblir l'effet des
conventions d’un contrat de mariage & des conditions fous
lefquelles les parties fe font unies j aufli faut-ii des caufes
graves pour y donner lieu.
L a règle invariable que l'on doit tenir en cette m atière,
eft que la femme ne peut demander la réparation de biens,
qu’autant que fa dot fe trouve en péril., & qu'il peut y avoir
lieu de craindre par les diflipations du m ari, ou que la femme
foit expofée à perdre fa d o t, ou une p artie, ou bien qu’il
ne refte pas un revenu fuffifant pour la dépenfe raifonnable
(de la femme ôt de fes enfans. Suivant le droit romain qui
fait notre loi dans cette m atière, la femme ne peut demander
la réparation dé biens, qu’autant qu’elle fait voir que fon
mari eft tombé dans un tel état de pauvreté, que fon bien
n'eft pas fuffifant pour répondre de la reftitution de la dot :
c'eft ainfi que l ’on doit entendre la loi 24., ff. foluto- matri~
monio. Si confiante matrimonio j dit le jurifconfulte dans
cette lo i, propter inopiam m ariti 3 mulier agere velitj-confiât
exitidè dotis exaâionem accipere ; ex qua evidentiffimè app&'
ruerit mariti facultates ad exaâionem non fufficere. Ces dernierstetmes
de la loi prouvent
qu'il
ne fuflit
»
*•
*
*pas d'une
'
’fimple
11
diifipation de la part du m ari; qu’il faut qu’elle foit teüc
u ’on puifle en concevoir un jufte fujet de craindre la
perte de tout ou de partie de la d o t; e x qua evid en tijfi^
apparuerit, ces premières paroles font bien remarquable8 >
‘ m a r in facilitâtes ad exaâionem i dotis ) non fufficere.
C e principe du droit romain ac été ad o p té^ àr ceux de noS
auteurs qüi ont eu occafion de traiter ides-féparations &
�b ien s,
il â1 fait la règle générale 4e notre jurifprudéncè
dans cette matière. Mornaç fur la loi 2 , ff- de divortus >
n-admet d’autrecaufe de réparation de biens entre conjoints,
^qu’une jufte crainte de la perte de la dot; eo ju re utimur ut
quacumque ex caufa uxor ju re 6* merità doti fuœ tïmeat\ exaudienda fit femper à judicibus s ut res fuas fib i kabeat. Mais
il faut que cette crainte ait un jufte fondement, ju r t & merità
timeat. '
M. Cochin dans un plaidoyer que l’on trouve au cinquième
volume de fes oeuvres, & dont les moyens furent adoptés
par un arrêt du 27 janvier 17 4 0 , donnoit comme un prin
cipe certain j que quand la dot de la femme eft en pleine
fureté j & par exemple , difoit-il, fi elle confifte en fonds dé
te rre , & qu’elle foit en nature, comme la fem m e, fans
laquelle on ne peut l’aliéner, n’a alors rien à craindre de
la conduite de fon m ari, fa demande en féparation ne peut
pas être écoutée, tant que fon mari fournit convenablement
à fa dépenfe.
’
O n vient de dire que l’arrêt de 174 0 jugea conformément
à.ces principes; mais ils étoient déjà confacrés par une ju ris
prudence plus ancienne.
Dans l’efpèce d’ un arrêt du dernier février 1
que Ton
trouve dans le recueil de So efve, la femme du nommé V ern o y,
marchand de L y o n , demandoit la féparation de biens, fur
le fondement du mauvais état des affaires de fon m ari, qui
tvétoit pas contefté; mais le mari offroit de dépofer entre
les mains d’un notable bourgeois la fomme de 17000 liv.t
* quoi montoit la dot de fa femme ; en conféquence, il
«u ten oit que l a fem m e.n’ayant.rien-àcraindre pour fadot-*-
A a
�( 4 )
il n’ÿ avoit pas lieu à là féparatiôn.' L ’arrêt mit-les parties
hors de cour, fur la demandé en réparation;
L es annotateurs de Dupleifis, traité de la communauté,
liv. 2 , ch. ,2 , rapportent une fent€|nce du châtelet, du
août 17 0 0 , qui déboute une femme de la demande en féparation de biens, encore qu'il parût que le mari avoit reçu
des rembourfemens de fes biens dotaux pour 160000 livres,
fans qu’il en eût fait aucun em ploi, mais parce que le mari
faifoit voir qu’il lui reftoit encoreaftez de biens-pour rem
placer la dot de fa.fem m e; quoiqu’il’ fut d’ailleurs confiant
que la dot remplacée, il n’y en auroit pas affez pour acquitter
le douaire & le préciput de la femme; mais les juges ne s'arrê
tèrent point à cette dernière circonftance, parce qu’ils regar
dèrent le douaire & le préciput comme des gains éventuels
& incertains.
Si l’on fait l’applicaeion de ces principes confacrés par 1*
jurifprudence aux faits expofés par le mémoire, il fera facile
de fe convaincre que la demande en iéparation dont eft me
nacé led. fieur D . . . . ne pourra point réuifir, fi elle'vient à
être formée.
. .“
*
E n e ffe t, quoique le Heur D ." .. . convienne qu’il y à eu
de fa part quelques diffipations de fes biens, & quJil en ait
réfulté pour 12 ou ijo ô o liv. de dettes, cependant il n’en
fera pas moins évident que la dot de fa femme eft fans péril*
C ette dot confifte en fonds 'qui compofent un corps' àe
domaine j & le domaine eft fitué en pays! coutumier’ d’ Auyergoe f o r y fuivant la difpofition detla coutum e, le i(niarl
ne peut ni vendre ni Hypothéquer‘les biens dotaux’ de
femme; il ne le pourroit pas même avec fon confentemen^j
& quant-elle voudroic concourir à ile s vendre avec lui. k *
�<(s)
fureté de la dot eft donc dans la lob mêm e; il tnç pçut Pas T
en avoir de plus folide.
, ,
^ < .1 y '-,
... Audi cette dot eft-elle entière ; & elle i*eft, d’autant plus
que-la valeur du domaine, qui la com poie, excédant dej.plus
?de 8000 liv. ce que le père vouloit donner à fa fîlle en avan
cement d’hoirie;, le m a ri a rempli fon beau-père de.cet excé•d an t, en lui abandonnant des rentes qui lui étoiem propres-,
& d’une valeur équivalente. Les rentes exifterit, ôt elles font
.entre les mains du père'de la femme.
Mais le mari a de plus amélioré les biens dotaux, & aug^
menté par là la fureté de fa fem me.; il a ’fait réparer des bâcir
itimfens utiles ; il;les a*meublés convenablement ; il a.fait des
plantations & autres réparations dans les fonds’; il dit avoir
employé à tous, ces objets 18 à 20000 liv. enforte que les biens
de la femme , -depuis fon mariage , ont acquis uft. produit infi,niment;plus confidérable., que Je feul bénéfice dü temps ne
leur aurait pas procuré , fans les dépenfes.faites par le. mari ,
pour réparer & améliorer.
,
"•
r!'
D ’un autre c ô té , la femme ne peut pas fe plaindre que fon
-marim'ait pas fourni convenablement à faidépenfe. L e fieür
; D . ' . . expbfe /dans fon mémoire, qu’ayant voulu: fe]fixer à
la campagne pour être à la porté d’y mieux faire valoir fes bieris
& ceux de fa fem me, il avoit voulu l’engager à venir avec lui
& leurs enfansy faire fon fejour ;. mais qu’il avoit inutilement
employé les prières & les follicitations,-auxquelles-fa femme
âvoitcônftamment-réfifté ; ce qui avoit produit uneiforte de
féparation. , Jla femme.ïeftant à la.ville , & leim arif'à'la'cam pà'gne; que cependant, le fie.ùr D ; . . i donnoit à la dame fon
• époufe une penfioh de .2000 liv. par an , douze fetiers-de blé',
k bois, le.fruit & le jardinage néceÎTairps à la confommatioxi
�C C 6 )
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'de Ta maifôh : périfion fiipérieure au revenu*de fa dot', q u f,
aux termes du contrat de m ariage, n'étoit que°de 17.92 litf.
par. an. Mais auifi, la femme confervoit-elle auprès d'elle fes
enfans qui étoient dîun âge trop tendre pour n’avoir pais
befoin des foins d une mère j & le fieur D . . . expofe encore!,
qu’indépendamment de cette penfion, la dame fon époufe
70uiflbit, en paraphernal, d'un revenu de $00 liv. enfin , il
ajoute qu’il a toujours été fort exaft à acquitter cette penfion.
I l réfulce donc de tous les fa its, que le mari a fourni conve
nablement à la dépenfe de fa femme ’, & qu'elle n’a point eu
de fujet de fe plaindre à cet égardl ^
;
Mais alo rs, fur quels m otifsipourroit porter la demande en
féparation de biens ? il ne pourroit y en avoir que deux ;
•ou un danger réel pour la d o t, ou le défaut de fournir à la
-femme ce qui lui eft néceiTaire mais jufqu’à p réfen t, o n ne
'voit rien de fem blàble, & il eft prouvé , tout au contraire'»
que la dot ne-court & ne peut courir aucun rifque ; q u 'e lle *
été même am éliorée, & fon produit augm enté, par les foins
iôcles dépenfes du mari ; 6c qu'enfin, la femme n’a m a n q u é
de rien , fon mari ayant fourni' très-abondamment-à Une dé
penfe plus confidérable dans une v ille , q u elle ne l’eut é té 1*
la campagne.
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Mais il y a plus ; c’eft que les faits annoncés parle m ém oire
& dont on a touché quelque chofe ci-devant, prouveraient
que la femme elle-m ê m e eft en plus grande partie caute
idea diflîpations, dont elle voudrôitiiie faire un; prétexte ^
réparation» Son mari avoit défiré de fe retirer à ’ia, campafj0® ''
ice défir étoit raifonnable^iln'avbit point de m aifonà la vilte»
fil n’avoit pas de biens aux environs , qui y exigeaflent fott
iféjQuniaU avoic de.plus l'^xeipplode fo u p èra^ réfi^ a n t
�< Î 7 ')
cam pagne, fit-cJétoit-dans le même lieu qu'habitoit fon p ère,
dans le même lieu où .écojent-fittyés^feç biens Ôc^cei^xide ifa»
femme ; tcJétoit là rqu’il lui propofoit de fe retirer avec, leu r
famille ; le féjour n’ avoit d’ailleurs rien de défagréable; il fe
trouve placé dans un des meilleurs & des plus beaux cantons;
de la province. S i [l’on ajoute que la fortune du mari & de
là femme n’écoit pas bien confidérable , eu égard à lçur con^
dition & au nombre de leurs enfans , qui ¡çroiffpit chaque
jo u r , on trouvera fans doute > que la prppofition que faifoiç
le fieur D . . . à la dame fon époufe ^étQit çlans l’ordre d’ unet
conduite fage & prûdente. Indépendamment de ces m o tifs,
la religion j l’honnêteté publiquer, tout faifoit à la femfne'un',
devoir de fe.conformer aux volontés de.fon mari>de lie fuivrfe
à la cam pagne, d’y habiter avec lui.
- ■
;
- S i elle s’ y eft refufée , s’il a fallu tenir deux m énages, l’un$
à la ville , l’autre à' la cam pagne, qui ont occâfiônné plus,
de dépenfes ; ;fi ^’éloignement volontaire de la femme a donné
lieu à d’autres inconvéniens qui ont jeté un m ari, jeune en
co re, dans quelques écarts préjudiciables à fa fortune ; fi
tout cela , il en réfulte pour 12 à jy o o o liv. de dettes, les
torts^retomberont-ils^out entiers fur l e m a ri, & xxe les fera-t
t-on pas partagera fa-femme j pour.nJavoir point fait ce que
fon mari exigeoit;d’e lle , qu i^ toit raifonn,able > & qui étoic
ion-devoir? ? !l(
^
.
- Mais dans quelles cirçonftances encore la,demande en fépa*
ration fçroit^elle formée;?, c’ eft lorfque le m ari, revenu de fes
^cartSii.quç la fem m e.Revoit.aji moins;,
par;tjp,rfe repro*
cher à elle-même j c’ eft iorfque ce mari s’ eft réuni ^ ;elle^
& M llu ira ren^u.^ut&ife;^e^ d reire;Jl faut;av$uer q u e l e m o
feroi^am ichpiû^-,,
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«»inv.-b r:.
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Ainfi , tout concourt à perfuader que le fieur D . . . n’atH
roit rien* à craindre d’une demande en réparation, qui feroit*
fans m otif & fans fondem ent, ne pouvant y en avdifcque 1&
danger de la dot., ou le refus du m ari, de fournir au x ‘dépenfes
raifonnables de la fem m e; motifs qui fenfiblement ne peuvëht exifter \ comme on l’a ci-devant démontré ; ôc puis., la
femme feroit'mal vue datis'lë'côncburs des circonftances'quife'réu n iifen t, finon pour exetifer le= mari de quelques diflipà-’
tions qu’on petit lui reprocher, du moins pour en faire par
tager le reproche à la femme.
- -Au refte^ lé mari a dans fes biens a&uels, de quoi fatisfaire
à fes d e t t e s ' i l Iui teftefoit ’encore; fes reprifesfur les biens
de/fa fémme ^ S t fqùi'confiftent, comme Ori l’^ci-deifus obJ
fervé, dans une fomme de plus de 8000 liv. qu’il a remife de
fes'propres effets à fon beau-père , pour l’exccdant de l’avancerrtetîc d’hoirie de fa'fêtt)tt\e >-&-dans les conftruâtions & répa
rations1 faites'dans-des biens' de fa femme
qui vo n t de 18 à
20 0 0 0 " 1ÎV, t i1r : '• n
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Vil« -ilU i ü . j i
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•v Enfin j il nè faut pasfimplement confidérer l’état a£uel ds
la fortune des parties ; le mari & la femme n’ont à p r é fe t
que chacun un aVancéVnent d’h o irie; mâis‘ J’uri!& l’autre -font
héritiers de leurspërér& m'èrei, dont les fucceifions accroîtro^
infiniment leuriortüne y ëul!ég2(rd à ce qu’elle feil actuellement
Encore une fo is, il n’eft pas permis dans le c o n c o u r s^
tant*de circonftances y-de laifler entrevoir au fieur D.****
la moindre incertitude' fur le fort qu'auroit la demande e,1*
iéparation';dont! on -le rnénàde, fi o n a v ô it'la témérité
la former.
" ' h ‘/ r\ '
'■ ’! '' ¿ - ‘
Mais le fieur D . ; •Jexpofe- encore' darls1fo n : mémdî1^
«que fi en dernier lieu il s’eft réuni avec la dame foh ¿poufejj
�( i> )
s’il ëft venu habiter avec elle à la v ille , il n’en a pas moins
confervé le'd éfir de Te fixer à la campagne avec fai famille"»
qu'il a efpéré qüe ce retour’ auprès'de fa femme la rendtoic
à fa tendreffe pour lui,- 6c qu’alors elle pourroit être plus
fenfible à fes représentations, pour l’engager à entrer dans
fes premières vues, ¿t qu’elle pôurroit;elle-même comprendre
que ce parti de la ; retraite à'la1 campagne devenoit d’aùtarit
plus néceifaire pour faire des économies capables de rétablir
l ’ordre dans leurs affaires; en conféquence, le fieur D . . . i
demande quels peuvent être fes droits, sJil ne pouvoit
rien obtenir par fes prières & l’honnêteté de fes procédés, r
: A cet égard y il ne peut pas y avoir deux,.avis dans le
point de droit. Q ue la femme doive fuivreiforç mari'-par
tout où il veut fixer fon fé jo u r, & qu’elle ne doive point
l ’abandonner ; cJeft une propofition qui n’a pas befoin de
preuve; c’-eit une conféquence des engagemens que la femme
contra&e dans Tordre c iv il, ôc que la religion du facrement
ne fait que refferrer & rendrè plus étroits; aufli les loix
font-elles un crime à. la femme d’abandonner fon mari ;
uxori virum relinquere nefas ejlo. D e là vient que les loix
qui ordonnent au mari de fournir à la femme les chofes qui
lui font néceffaires, y attachent la condition qu’elle demeu
rera avec lu i, & qu’elles le déchargent même des alim ens,
lôrfque fan$ une caufe’ jufte & raifon'nable la femme l’aban
donne. Ce n’eft pas feulement la demeure commune à laquelle
les loix'foum ettent Ja fem m e; elle doit, m êm e, fi le jn a ri
!■exiggij Raccompagner dansi les voyages qu’il veut entre/ prendre , & les jurifconfultes n’en exceptent que les^ça^
les voyages feroient .dangèreux , <ouv quils pourraient
expofer la femme à des chofes qui .bleiferoient 1 honnêteté
& lJla pudeur,.
1.: -n. . u,.
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»
�o ° >
r “M ais* qu«la que.’ibient jles droit? du, m ari*
quçiqi^JI
ïtài't point à: redouter ^ dem and e: ,çq /épar^non , [don^ilf.pÇ
m e n a c é y il eft-toujours.de fa:,prudence & de Ton'honnêteté,
éc on ne doute pas qu'il rje foic dans fon cœur d'employer tou|
les moyens poifibles d'éviter des éclats toujours défagréables*
tant pour le mari que pour la fem m e? dans de telles affaires,
Ainfi il ne doit rien négliger .ni du-côté des égards & des
emprèflemens pour faire oublier à fa femme les torts qu’ij
peut avoir eus avec e lle , ni du côté des repréfentations amir
cales fur l ’intérêt commun & celui de leurs enfans; il trouy
vera, fans doute, encore des reflburces dans les paren sd e
fà fem m e, qui, une fois convaincus qu’il eft revenu ¡de fes
écarts, ne pourront qu applaudir à de$ vues d'ordre & d’ar^*
rangem ent, ôc, concourir par la fageffe de leurs confeils, à
faire entrer la femme dans celles du Mari.
D élibéré
:
*
: r
à R iom le 18 décembre 17 8 3 .
AN D R AUD.
. ;
l},
•
Nota. Les circonjlances furvenues depuis la date de,cette confultation,
tnt donné lieu à celle qui Juit,
•
!. ^
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- L E S S O U S S IG N É S qui ont vu la confultation de l’un
â ’eu x, du 18 décembre 178 3 , une précédente de M* J 3oirot
èc de M ClB ergier, du 18 janvier u 7 7 9 , lia requête en Répara
tion deJ biens de la dame de L a v a l, ôc de nonveajujc^mén
¿noires,^1
’’ ’ '
lu (
. ci!
: S O N T D ’ A V ‘I S »que- fi c e tte . demande en -réparation,
¿toit accueillie dans les tribunaux, les ma r i s n e ; ferment
(déformais que des régiifeurs momentanées des b ie n id ç teuï»
�femmes : elles poürroient au gré de leur caprice, les priver
igtiominieufement de l’adminiftration que la loi leur donne
à titre d'honneur.
■ï
~ Dans quel cas la femme peut-elle demander d’être féparée
’d e biens ? C ’eiV lorfqu’elle démontre qu’elle eft fur .le. poinjt
d’être'viaim e déplorable des diffipations de fon m ari; lorfr
qu’elle a jufte fujet de craindre la perte de fa dot, & que les pourfuites des créanciers du mari ne le mettent dans l’impoiïibilité de lui procurer la fubfiftance, ainfi qu’à fes enfans.
E n un m ot, fuivant nos principes fur cette m atière, qui ne
font ignorés de perfonne, la féparation de biens eft ou une
punition des défordres exceififs d’un mari., ou un remède
à fon incapacité.
.«
O r , d'après l’état des affaires du fieur de L aval , i l
fcft impoifible à la dame fon époufe de juftifier fa prétenr
tention ; elle aura, fans doute, le fort des démarches de
plufieurs autres femmes qu’on a vu fatiguer inutilement les
tribunaux, pour tâcher de donner un libre effort à leur
humeur, 6c fe fouftraire à l’autorité légitim e, ôc quelquefois
importune de leurs maris.
D ’abord, la dot de la dame de Laval eft en fureté, puis
qu'elle confifte en immeubles inaliénables; elle a la loi pour
garante de leur confervation : ce moyen eft du plus grand
poids dans cette caufe.
A la v é rité , malgré cette circonftance, la demande de la
dame de Laval auroit quelqu’apparence de fondement, fi elle
prouvoit que fon mari a diiïipé entièrement les 40000 liv.
qui lui ont été données en avancement d'hoirie par M. de
J-aval , l fon p è re , en contrats de rente ou en fonds.yôc que
revenus de la dot J ’ deftinés aux charges du m ariage, vonfi
devenir la-proie des créanciers du fieur de L aval.
^
*
B 2
�( 12 )
*: Mais celui-ci eft en état de prouvef que de cês ,40000Ïiÿ.
¡1 en exifte en nature environ 20000 ,!y compris les 8000 liv;
qui font en dépôt, entre les mains de M . de Beauvezeix. ' „■
‘ Relativem ent aux autres rentes dont il a touché le s;.capi
taux , il n’en eft point réfulté un déficit dans fa fortune : il les
a employés en améliorations confidérables dans le domaine de
la dame de L aval; il a réparé & meublé des appartenons pour
fe loger ; fait conftruire des granges , des écuries; acheté des
beftiaux, de la futaille, & des uftenfiles d'agriculture:, -dont
ce bien étôit entièrement dépourvu : il a fait arracher & re
planter des vignes, converti des terres en prés-vergers; enforte
que la valeur du bien a été augmentée d’un tiers. Ces emplois
indiquent-ils un caractère prodigue & diflipateur ? & après une
telle adminiftration, le fieur de Laval auroit-il du s’attendre à
une demande en féparation ? eh ! que pourroit-on faire de
plu s, s’il avoit employé les capitaux qu’il a touchés., ou les
fommes qu’il a été obligé d’emprunter , à décorer un de ces
jardin s, à conftruire un de ces temples, deftinés à y jouir des
charmes de la volupté , ou à s’y livrer aux horreurs de la dé
bauche ?
• On fera encore plus convaincu de l’ économie, difonsm êm e,
de la parfimonie qui a régné dans radminiftration du fieur de
Laval. S i l’on fait attention que depuis plufieurs années, en
condefcendant aux goûts de la dame fon époufe, il a eu la
foiblefife de tenir deux ménages ; l’u n , à la v ille , l’autre, à la
campagne. Pendant tout ce tem ps, il a donné chaqu’annéeà
la dame de Laval 2000 liv. en argent, & environ 500 liv. en
b l é , vin & bois. Il n’eft refté au fieur de Laval qu'environ
1000 liv. fur quoi, il lui a fallu payer les charges : feroit-il
étonnant qu'il eût contrarié quelques dettes , pour furvenir
à fes befoins, & la dame de Laval les ayant elle-mêmQ
jiéceifitées, pourroit-elle en punir fon mari?,
�,< 1 6 } )
«„«.•lyiaViiitqut ’annonce qüe; la dame.de L a v a |,: € a .rrorn)a^t 1a
, demande■en féparationj a- biç^ mflins^cécjé. à
fur la fortune de fpn m ari, qu'elÎe ne s’ eft.prêtée aux Àiourvemens de haine 6c d’animofité que M . Teilhard de Beau■j.vezeix, fon père., à malheureufement conçues depuis long
tem p s contre fon gendre.
,
'
.
. , ,11 paroît que M . de Beauvezeix qui eft attaché à des prin
c ip e s auftères, fe prévient aifément contre ceux qui n’ont pas
xle courage de les choifir pour en faire la règle de leur con
d u ite . Que les goûts, que les temp^ramens, 'qye, les âges ,
que les circonftances diffèrent, n’importe, M .d e Beauvezeix
. n admet pas pour cela-de tempérament ; H condamne avec
. févérité tout ce qui s’éloigne, ,du plan uniforme qu’il s'eft
. tracé : le fieur de Laval eft devenu pour lui un objet de
haine, parce quJil n’eft pas. un de ces fujets inimitables, pour
lefquels tous les tem ps, tous les âges ont été les mêmes.
Ces idées, dont M. de Beauvezeix a paru toujours trop rem pli,
fe font malheureufement gliifées dans l’efprit de la dame de
Laval. C ’eft ainfi que peut-être fans le vouloir, il eft devenu
l'auteur d’une divifion qu’il eût été plus digne d’un p è re ,
d’un magiftrat, d’étouffer dès fa naiflance.
M. de Beauvezeix a d’abord tenté la voie de l’interdic
tion contre fon gendre; il a repréfenté aux parens même
du fieur de L av a l, avec cette fainte véhém ence, cette onc
tion doucereufe & perfuafive qu’un zèle pieux fait fi bien
mettre en ufage, que cette.demande devoit être accueillie,
comme le feul remède aux prétendus défordres du fieur âe
L?val : il en a engagé certains à entrer dans fes vues. Pour
vaincre le s . obftacles j on a efiayé de perfuader au fieur de
* Laval lui-même qu’il devoit fe foumettre docilement au jou g
on youloit lui impofer.
V;
r
�(( * 4 )
¿1 3Lseniiéiirr!t!e ;ta v :ai aÿant' irëjet^l,^com m e;fl t!ë\feît>:cette
2pfoj>ôfitidki ^uine^tenddit^ qüJà le déshonorer ^ratùitëmént,
‘ ori s’èti f"e ft: départi. Alors M .1 de 1Béaüvezei'x/à demandé !Jia
'nomination rd’un confeil. 'Les réponfes que-le fieur de L avâ l
a faites atfx intèrrogacôirB' tl^ ^ '^ i'ubis^ ’ont fait iléfefpérér
du fu ccès; il a expofé avec exa&ituHe l’état de fes aifFalreâ :
’ iVn a v u 'que fa fortune nTétoit pas d élab rée; qu?on fte pou‘ voit pas plus l’attaquer pour caufe de prodigalité , que de
‘ démence; que s’il avoit fait quelques dépenfes, il y avoit été
4obligé pour Fournir principalement aux befoins de fa femirie
" & de fes enfatis.1
D
C ’eft en cet état-qu'on à im aginé'la demande’en féparaV ion de biens. Lés circonftànces ne prouvent-elles pas qu'elle
eft une fuite des vexations-qu’on a fait efluyer jufqu'à pré
se n t au fieur de Laval? A qui perfuadera-t-on que la dame
‘ fon époufe y a eu recours, comme à l'unique rem ède, pour
'tirer fon mari de l'abym e dans lequel «Ifcprétend qu’il va
tomber? Ces idées de prétendue bienfaifance peuvent-elles
fe concilier avec les démarches que fait M. de Beaüvezeîx
auprès de quelques créanciers de fon gendre, pour les exciter
à fe livrer contre lui aux pourfuitës les plus.vives ?
M ais, de ce que la dame de L a v a l, ou pour mieux dire*
"M . de Beauvezeix a abandonné la voie de l’interdi£lion>
ou de la nomination d’un co n feil, il en- réfulté une fin de
non recevoir invincible contre la demande en réparation de
biêns.
~ Ç ’hitérdi&ion, ou là nomination d’un confeil, devoit avoir
"'plus efficacement l’effet de la fépa'ration ; il etf devoir réfultef
* la priv;aiiôn: de toute admiriiftration Quelconque ; niais 'tou # 9
ces- procédures avoient, fans doute, la m êm e'caufe î c’èft-àdire, la prétendue diifipacion du*fieur de Ziavial'Sii-lfe HëraH*’
�gejnwfc4e.\fe^ffairqs., <Q»U ri\Ài
-fôln
v&9X\Ç&sÂm* ■ ca.p r^ n t^i^;^B^jèTfi^Xi9« fc'P ^ ^ Ç C ^ 5y fe
mieux ^ réyflir-erv prenant la f^cpnde ?,-Le^eui;- de; levait»
ppytrlU: ne ’ point, êpre. regardé comme ' diiïïpateur, lprfqu il
s’agijttd’interdiÇtion, ôc avoir tout-à-coup,cô«e, qualité, ip.arçej
qu’on ,forme contre lui, une. demande en f^ aratiq n .j^ Ç om ;!
ment la dame de Laval entreprendra-t-elle de juftUjer to u tes
ces, inçonféquences;?tIn i! ■•»■
, •
.
-,iEnfin, la dame de^L^val demande une provifion de la,
fpmme de 2000 liv., pourrfournir à fç^ befoins y
aux ff afSj
de 1inftance.
•/ir .V ¡r;> ■
i. ^nn iir 3:r. " eviob
•Qn peut dire que cette demande eft çîcjicule : le ; fieur,dçJ
Laval a toujours fourni aux befoins de la dame fon'époufe ,
même plus abondamment que fa fortune n e -.le''lui perniettoit. Il veut enfin ,î recouvrer les droits que ¿lui donne %
qualité jdei matiij, il demandé qu’elle vienne habiter » ¡fa com
pagnie v les fecoursi qu’il.’lui a^toujpurs donnas, doivent 1^.
garantir: qu’elle n’ÿ; ¿proUverailjartiais de befoms.'nCqmment
dans cètte pofition, la dame de. Laval .a.-t-eUe pu conclure à
une provifion ? Eft-ce pour foulager le fieur de Laval:fqu!on;
forme*içontre lui des demandes au.fll ruineufes qu’a’bfurxies ? r
, iLa;:provifion 1ne peut tout /au/plus -j^rs dernandée quç .par
lal femme, quii forme lfc ;dem?n,de; çn ff4 p ^ tio n ¿ ç rcorps;.«no
pouvant vivre à la compagnie de fon m ari, il doit proviifoire^
ment: lui-’ fo\irnirKd^s alipiens. M aisjil n e n çû pas dç, même
de la femme qui n£ Içlçipande que la^ p ara tio n de;biepsj 5 ;puifcj
^eUeliiieipèuti.forcer-.fonj niaTi à ilu i foutnit d£:il4?Uy4tf£®:
lors:dfi:Xn wajfQn,, *1 no«mIuIs-.-I au ; i l u o r c v ’ ciiimuil illue
C eft ainfi que .^’en £tfj}ligueiit-U^,auteur^ qui pauSjirç^uientde la jurisprudence des^tribunaupc. p $m fa ç t, au m o tproJ^£2^.î_n, t a * nous dit qu’on accorde aü ffid ts provi/îons aux
f entl!& W hdc
�s
K\
,( 1 6 )
mais qu’on n 'en accorde pas ordinairement à celles qui dem a n
dentf eulement la féparation de biens parce que dans-ce dernier '
cas la f e mme ne doit point c ef er de vivre avec le maril
i Cette réflexion feule fuffit pour écarter cette demande e n
provifion : o n pourroit fe difpenfer d'ajouter que la dame de
L a v a l jo u it encore de quelques biens paraphernau x du pro^
d u it d e 50 0 liv an n u ellem en t
A in fi, quand on pourroit reprocher au fieur de Laval quel
ques démarches hafardées, quelques traits de légéreté, le repen
tir feu l ne doit-il pas en opér e r punition? s’enfuit-il qu’on1
doive accueillir une demande en féparation également c o n
traire aux loix & a l'ordre public? elle ne peut avoir aucun pré
te x te , dès que la dot; de la dame de Laval eft entière, que les:
fruits n'en font point faifis, & qu’il refte d’ailleurs au mari
Beaucoup plus de biens qu’il n’en faut -pour payer fes dettes.
- Que la dame de Laval & M . de Beauvezeix faff ent attenti o n qu'ils ont donné lieu aux défordres dont ils fe plai
gnen t Àprès avoir rebuté le fieur de Laval par de s procédés;
offenfans ils l’ont ifo lé, livré à lui-m êm e' dans l’âge le plus
tyrannifé par les paffions. On ne peut donc qu’ être étonné que'
M . de B e auvezeix au lieu de porter; fa fille à rem plir le
plus doux & le plus facré de fes devoirs l'éloign e d e fo n m ari,(
& la faffe paroitre en armes co n tre lui dans le fanctuaire de la
juftice ? f
L es moyens qu’on vient d’expofer, & qui feront fans doute
étendus & ¡développés avec force par le défenfeu r éclairé dufieur de L aval doivent le garantir d’une condamnation qui feroit
auffi humiliante pour lui que les fuites en feroient fâcheufes
D é lib é r é à R io m le 2 5 ju ille t 17 8 4
A N D RA U D .
G R E N IE R
A R io m c h e z M a rtin D E G O U T T E 17 8 4
�
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Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Arragonet de Laval, Antoine-Pierre-Xavier-Bernard. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Grenier
Subject
The topic of the resource
séparation de biens
droit écrit
dot
doctrine
droit coutumier
avancement d'hoirie
devoirs de la femme envers son mari
divorces
Description
An account of the resource
Consultations pour messire Antoine-Pierre-Xavier-Bernard Arragonet De Laval, écuyer, défendeur, Contre dame Jeanne-Geneviève Teilhard, son épouse, demanderesse, en séparation de Biens.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1783-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
BCU_Factums_B0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0135
BCU_Factums_M0136
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53951/BCU_Factums_B0112.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
devoirs de la femme envers son mari
divorces
doctrine
dot
Droit coutumier
droit écrit
séparation de biens