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PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Les sieur et dame RABUSSON DE V A U RE,
intimés ;
CONTRE
Les sieur et dame H IL L IA R D , cotuteurs de
demoiselle D
umont
, appelans.
Le s sieur et dame Rab usson de V au re sont divisés
d’intérêts avec la demoiselle D um ont, leur nièce. Ils ont
proposé leurs moyens avec modération , mais ils se
plaignent à juste titre du ton d’aigreur qui règne dans
la défense de leurs adversaires.
Les expressions outrageantes sont répandues avec pro•. !
A*
• ' -i .
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�( 2)
fusion. On lit à chaque-page, artifice, ruses, détours,
cupidité en délire, tours deforce de l’esprit hum ain, etc.
L e cœur de la clame Ililliai’d se brise, les m œ ursfré
missent , Vétonnement balance îindignation, parce que
les cohéritiers de la demoiselle Dumont réclament leur
portion héréditaire dans les biens maternels.
C'est fouler aux -pieds, de la manière la plus scan
daleuse, le pacte defa m ille le plus sacré, que de disputer
à. la demoiselle Dumont un préciput qu’on devroit s’em
presser de lui accorder, quoique les lois le lui refusent,
pour la dédommager des pertes immenses qu’elle a faites.
On ose rappeler la mort tragique d’un père infortuné,
lorsque la dame Hiliiard, son épouse, s’est remariée dans
la première année de son deuil; et c’cst dans les bras
d’un second ¿-poux qu’elle vient faire parade d’une ten
dresse exclusive pour sa fille du premier lit.
On accuse un ancien magistrat, qui jouit à juste titre
de l’estime publique, dé s’étre enrichi des dépouilles de
son beau-père, d’avoir acquis sans bourse délier, en
puisant dans celle du sieur Dumont. Et si on en croit
la dame H iliiard, la dame de Vaure a été avantagée de
plus de i ooooo francs, par des dons annuels ou par des
donations déguisées
Cependant le sieur de Vaure n’a point augmenté sa
fortune; il est, comme;dans les premières années de son
mariage, au-dessus des besoins, jamais obéré parce qu’il
n’emprunta jamais; et la note qui le concerne personnel
lement est d’autant plus indécent«5* que
dame Hiliiard
ne peut ignorer l’emploi qu’a fait M . Dumont de ses
revenus; elle sait qu’il a payé plus de 130000 francs de
�( 3 ),
dettes, comme, par exemple,"33140 fi\ aux créanciers
de son fils, premier mari de la dame ïliliiard; 3200b.fr.*
aux héritiers Dumont-Lacliassagne ; 6000 fr. au sieur
Chabot, de Moulins ; ôooo fr. à la dame Beaufort, de
Montluçon ; 4000 fr. au sieur Chaudillon, 4000 fr. à la
dame Lagrange, de Chantelle; 2Ôooo fr. restés dûs sur
le prix des domaines de Saulzet*, 20000 fr. au sieur de
D ouzon, à qui il payoit encore 3000 fr. de rentes via
gères, etc., etc.
- Les sieur et dame de Vaure répondent par des faits à
des assertions injui’ieuses, et fort inutiles pour la cause.
Ils finiront par observer que la dame Hilliard avoit toutes
sortes de motifs pour être plus modeste ; qu’elle donne
un mauvais exemple ci sa fille, qu il fuuOruit entretenir
dans de plus douces pensées ; elle devroit surtout lui
rappeler qu’elle a reçu souvent de son aïeul des témoi
gnages de tendresse, et que la dame de V au re, sa tante,
lui a donné des preuves multipliées de son affection,
pendant un an qu’elle a été confiée à ses soins. •Les déclamations de la dame Hilliard ne font point
ornement dans une cause dégagée de toutes circonstances,
et qui ne présente que des questions purement de droit.
La terre de Mont est l’objet du litige; c’est un conquôt
de communauté des sieur et dame D u m o n t, auteurs
communs des parties.
Ils étoient domiciliés, et la terre de M ont est siluée en
coutume de Bourbonnais.
- Cette coutume admet l’égalité la plus parfaite entre les
enfans; elle ne permet aux pères et mères de disposition*'
A a
�(4)
libérales qu’autant qu’elles sont faites par contrat de ma
riage au profit des contractans.
L e mari est le chef de la communauté ; il dispose seul,
à titre onéreux ou gratuit, de tous les acquêts, pendant
la durée du mariage.
Mais du moment de la dissolution il cesse d’être le
chef; il n’est qu’un simple associé, et ne peut plus par
conséquent disposer que de sa portion.
Maintenant la dame Dumont a - t- e lle pu faire une
donation en préciput à son fils, d’un conquêt de com
munauté, du vivant de son m ari, et par le contrat de
mariage de ses filles?
A - t - e l l e pu transmettre à son mari le droit d’élire*
c’est-à-dire, le droit de faire ce qu’elle.
pouvait faire
elle-même? L e mari a - t - i l p u , après la dissolution du mariage r
donner à son fils la portion qu’amendoit sa femme dans
un conquêt de communauté ?
Telles sont les questions principales; et il ne faut pas
recourir à des tours de Jbrce de Yesprit humain pour
les résoudre. A la vérité la dame Hilliard ne les a pas
présentées ainsi y mais elle trouvera bon que chacun les
pose à sa manière.
Si on daigne ensuite descendre jusqu’aux questions,
secondaires,
Des filles peuvent-elles être tout à la fois apanées et
retenues ?
L ’institution faite en faveur de lat dame de Vaure estelle grevée de la condition irritante d’abandonner à son
frère la terre de M ont en préciput ?
�( 5)
Peut-on éluder la disposition prohibitive de la lo i,
par des conditions illicites ?
Les premiers juges se sont avisés de décider négati-r
veinent ; et suivant la dame H illiard , c'est h délire de
la présomption.
Ne seroit-ce pas porter trop loin l ’abus du sophisme.
que de tenter de justifier cette décision ?
Au moins la dame Hilliard ne se plaindra pas que
les intimés aient voulu fatiguer son attention, ou lasser
sa patience leur tâche ne sera ni longue ni pénible.
Déjà les sieur et dame de la Roque qui ont le même
intérêt, ont publié leur défense; les règlemens de famille
sont connus ; les motifs et le dispositif du jugement sont
rapportés - il faut surtout éviter ic» ^¿p4titions»
L a première question se divise en deux parties : la
dame Dumont a-t-eîle p u , pendant le mariage, disposer
d’un conquêt de communauté au profit de son fils ?
p o u v o i t-elle le faire, dans tous les cas, par le contrat
de mariage de ses filles ?
Prem ière partie. L e mari est le chef et le maître de
la communauté j il a le droit exclusif de donner, vendre
et aliéner h sa volonté les meubles et les acquêts faits
pendant le mariage ; mais il ne peut le faire que par
contrats entre-vifs, et non par contrats ayant trait à la
mort : telle est la disposition de l’article 236 de la cou
tume de Bourbonnais, qui est en ce point conformé à
toutes les coutumes de communauté.
La femme qui est en la puissance de son m ari, n’a
aucune participation aux objets communs, si la coutume
restreint le droit du mari aux Contrats entre - vif3 ?
�( 6)
M. Auroux nous en donne la raison sur l’article cité,
n°. 7. Il dit que « si le mari pouvoit disposer par contrats
« à cause de m ort, la disposition tomberoit dans un
« temps auquel le droit du mari cesse, et que la femme
« commence à y avoir un droit effectif.
'« Pendant le mariage, le droit de la femme sur les
« acquêts, n’est^ qu’un droit ha bitu el• mais il devient
« actuel après la dissolution de la communauté; ce qui
« fait qu’on dit que le mari vit comme maître absolu, mais
« qu’il meurt comme associé. » Ce n’est donc que pen
dant le mariage qu’il peut disposer en maître de tous
les acquêts ; sa volonté fait la l o i , et la femme est obligée
de la respecter; elle ne prend ni ne peut prendre aucune
part aux dispositions des Liens de cette nature.
La femme ne peut môme disposer de ses propres
qu’avec le consentement de son mari, et sous son autorité;
comment auroit-elle donc eu le droit de donner à son
fils moitié de la terre de M o n t , q u i , de l’aveu de tout
le inonde, est un conquêt de communauté ?
Comment surtout auroit-elle pu donner à son fils cette
moitié, par le contrat de mariage de sa fille, lorsque
• l’article 217 de la coutume de Bourbonnais porte en
termes précis que « les père et m ère, ou F un d’e u x ,
« ne peuvent donner entre-vifs à leurs enfans , hors
« contrat de m ariage, soient leidits enfans émancipés
« ou non ? »
« La disposition de cet article, dit A u r o u x , n°. 2 ,
« a pour principe l’égalité que la nature désire entre
« les enfans, étant juste que ceux qui sont égaux en
u naissant, et qui doivent l’être dans l’uffectiou de leurs
�( 7)
« père et'mère, le soient aussi clans le partage de leurs
« biens. »
Auroux ajoute, n°. 3 , que « cette prohibition de la
« coutume s’entend directement et indirectement, et par
« quelque manière que ce soit. » Suivant cet auteur,
n°. 8 , la donation faite hors contrat ne profiteroit pas
au donataire, quand il voudroit renoncer à la succession
pour s’en tenir à son don ; et Decullant, bien pénétré
de la prohibition absolue de la coutume, s’exprime ainsi :
eritm cum paragraphus noster intendat œqualitatem
ínter liberos, ut notât MoHnœus, et non excipiat nisi
donationern fa cta m façore m atrim onii, censeo extra
hune casum prohiberi donationern cuidonatarius etiarn
cibstinendo ab hcereditate non possve *tar-e.
Passant à l’article 219 de la même coutume, les do
nations, conventions, institutions d’héritiers, faites en
contrat de mariage, sont bonnes et valables au profit
et utilité des mariés et de Vun d'eux, ou des descendons
du mariage ; ce qui veut dire que ceux qui contractent
mariage, ou les descendans, peuvent seuls profiter des
avantages stipulés. Favor hujus paragraphi, nubentes
tantum , et ex eodem matrimonio descendentes, ajficit
in tantum , ut si institutio fa c ta fu e r it in gratiam
contrahentium et aliorum non contrahentium , pro
portionibus contrahentium valeat, et pro non nubentium partibus corruat.
Voilà sans doute une décision précise et absolue, et
on ne peut en tirer d’autre conséquence, sinon que la
dame Dumont n’a pas eu le droit, pendant le mariage,
de s’occuper, encore moins de disposer de tout ou de
�( 8 ) ■
partie d’un conquêt de communauté; 2 °. qu’en lui sup
posant un droit quelconque, elle n’auroit pu le donner
à son fils que par son contrat de mariage.
E t certes, si elle ne pouvoit pas disposer, à plus forte
raison n’a-t-elle pu conférer à son époux le droit d’élire
son fils ou tout autre, pour recevoir ce bienfait; car le
droit d’élire suppose un droit préexistant plus étendu.
A vant de transmettre le pouvoir de ch oisir, il faut
pouvoir donner; ainsi, par exem ple, une femme mi
neure ne pourroit donner à son mari la faculté d aliener
ses biens, puisqu’elle ne peut elle-m êm e les vendre;
ainsi, la femme qui se trouve dans la prohibition de
disposer, ne peut transmettre à un tiers la faculté de
choisir un de ses enfans pour recevoir une libéralité de
sa part, lorsqu’elle ne peut par elle-même exercer cette
libéralité.
D ’ailleurs le droit d’élire que donneroit un époux à
l’autre, ne se ro it-il pas en contravention formelle à
l’article 226 de la coutum e, qui prohibe les avantages
entre m ari, femme et enfans, par dispositions entre-vifs
pendant le mariage? Cette prohibition, dit encore Auroux,
s’entend tant directement qu’indirectement. Cet auteur
regarde unjidéicom m is notamment comme une manière
indirecte d’éluder la défense de la lo i, et veut que celui
à qui on donne ne puisse faire la donation à la personne
prohibée, ni la retenir pour lu i, mais il doit y renoncer
«n faveur de l’héritier.
Un fidéicommis a beaucoup de similitude avec le droit
d é lire ; et cette option a été regardée comme une manière
indirecte d’éluder la prohibition de la l o i, par un arrêt
du
�( 9 )
du 18 mai 1736, rapporté p a r 'l’Epine de Grainville.
L ’arrêt ari nu lia une institution faite par un père au profit
de l’un de ses enfans qui seroit choisi par sa seconde
femme, par cela seul que l’option de l’enfant institué
avoit été donnée à la seconde fem m e, qui ne pouvoit
recevoir qu’une portion d’enfant moins prenant.
Ce droit d’élire doit donc être regardé comme non
avenu.
La dame Dumont a prédécédé son mari ; son fils ne
s’est marié qu’après la mort de sa mère; tous les enfans
ont été saisis des biens maternels, et notamment de la
portion des acquêts qui l’evenoient à leur mère : le sieur
D um ont pere n’n pin»
cjn’iin simple associé. Comment
auroit-il pu dès-lors donner à son fils la portion d’acquêt
dont les héritiers de sa femme étaient saisis? Ce seroit
évidemment disposer de la chose d’autrui, puisquè les
héritiers maternels avoient un droit actuel à la moitié
de tout ce qui compose la communauté. Cette proposi
tion est trop claire pour avoir besoin d’un plus grand
développement. Pourquoi d’ailleurs se livrer à des dis
sertations oiseuses, lorsque déjà les sieur et dame de la
Roque ont présenté leurs moyens avec la plus grande
étendue? La dame Hilliard diroit peut-être que les sieur
et dame de Vaure ont voulu fa ire briller leur esprit,
ou séduire par le prestige d'une fa u sse éloquence.
On va passer aux questions secondaires ; on discutera
ensuite rapidement les fins de non-recevoir qu’oppose la'
d me Hilliard.
La dame de Vaure, par son contrat de mariage, est
instituée héritière par égalité avec les autres enfans? sous
B
�( IO )
la réserve expresse de la terre de Mont, pour en disposer,
de la part des père et mère, au profit de tels de leurs
autres enfans qu’ils jugeront à propos, même de la future.
On a prétendu faire résulter de cette clause que la dame
de Vaure étoit bien retenue dans la maison pour tous les
biens de la succession, mais qu’elle étoit apanée et exclue
l’elativement à la terre de Mont, d’après l’article 305 de
la coutume de Bourbonnais, qui est une coutume d’ex
clusion.
On se fonde sur une consultation donnée par trois
jurisconsultes de Clermont, à la dame de Vaure ellemême, et dont on dit avoir une copie collationnce.
Etoit-il bien permis à la dame Hilliard d’argumenter
d’LUie Consultation confidentielle, donnée à la partie ad
verse, quand bien même la dame de Vaure auroit eu
la franchise de la communiquer? Ce n’étoit point ainsi
qu’on en usoit autrefois au barreau ; mais la dame Hilliard
nous apprend qu’on voit tous les jours des choses nou
velles.
Il est rare cependant qu’on soit obligé de discuter, et
qu’on oppose à une partie la consultation qu’elle a de
mandée dans son intérêt : mais en mettant le procédé à
l’écart, on prouvera que ce système est erroné dans le
fait et dans le droit.
Dans le fait, parce que la dame de Vaure est retenue
dans la maison même pour cet objet; les père et mère
lui laissent l’espoir successif comme «ux autres enfans,
en se réservant la liberté d’en disposer à son profit.
Dans le droit, parce qu’ une fille ne peut être en même
temps apanée et retenue, forclose dans une portion des
�C 11 )
biens, et héritière dans l’autre. Cette singularité impli
quèrent contradiction. L ’apanage est une exclusion absolue;
tellement que la fille apanée devient étrangère à la suc
cession, et qu’un cohéritier pourroit exercer contr’elle
la subrogation d’action, si elle achetoit un droit indivis
d’un autre cohéritier.
La forclusion est une dénégation de la qualité d’hé
ritier ; l’une ne peut subsister avec l’autre. Comment
seroit-il possible que, d’une part, la fille n’eut pas le
droit de porter un œil curieux dans les affaires et les.
papiers de famille, de connoître la consistance d’une suc
cession , et qu’en même temps elle eut tous les droits de
l ’ h é r i t i e r , d e t o u t v o i r , d e tout examiner, de provoquer
le partage?
La dame Hilliard a prévu l’objection-, elle convient
même du principe que les deux qualités sont inconci
liables; mais elle voudroit le restreindre à un cas où il
ne peut jamais avoir lie u , à une forclusion légale pro
noncée par le seul effet de la loi municipale.
C’est ce qu’il est difficile de comprendre. On ne con
cevra jamais ^comment il pourra arriver, lorsque la for
clusion est légale, qu’elle sera partielle ; car ici tout ou
çien.
Ma ¡menant qu’est-ce qu’une forclusion convention
nelle? Toujours la même chose qu’une forclusion légale,
surtout dans une coutume d’exclusion, où la renonciation
de la fille est comptée pour rien , ou du moins est con
sidérée comme surérogatoire, d’après la loi du 18 plu
viôse an 5 .
Et qu’on ne dise pas que le père a le droit de faire
B *
�C 12 )
eette bigarrure, d’apaner sa fille dans une partie, de la
retenir dans l’autre : du moment qu’il honore sa fille de
la qualité d’héritière, cette qualité est indivisible; elle
efface toute idée de forclusion et d’exclusion. Il en est
ici comme des testamens chez les Romains, où le testateur
ne pouvoit mourir partim testatus, partim intestatus.
Ces idées sont simples, n’ont rien d’exagéré, et répondent
suffisamment à la proposition des sieur et dame Hilliard.
D e u x i è m e q u e s t i o n . L ’institution faite au profit
de la dame de Vaure ne contient point la condition
irritante d’abandonner à son frère la terre de Mont en
préciput. L e rédacteur du contrat n’a stipulé que des
clauses inutiles relativement à cet immeuble.
En effet, les père et mère se sont réservé deux choses
qui n’étoient pas à leur pouvoir. La première, est celle
où il est dit que les père et mère se réservent le droit
de disposer de la terre de M o n t, au profit de celui de
leurs enfans qu’ils jugeroient à propos, même de laju tu r e .
Ils trompoient la dame de Vaure lorsqu’ils lui ont donné
cet espoir. La coutume ne leur auroit permis une dis
position au profit de la dame de V aure, qu’autant qu’elle
auroit été faite par contrat de mariage : dès qu’ils la
marioient sans disposer de cet objet à son profit, ils ne
pouvoient plus le faii’e dorénavant, pas même par tes
tament ; car dans cette coutume on ne pouvoit cumuler
la qualité d’hériter et de légataire : voilà donc une clause
inutile et trompeuse.
Par la seconde, il est dit qu’en cas de non disposition ,
la terre appartiendra à leur fils qui ne contracte pas ;
cette clause n’étoit pas plus utile que la première. André
�'■ '
( 13 )
Dumont, étranger à ce contrat , n’étoit pas saisi -, il ne
pouvoit l’être valablement que par son conti’at de ma
riage.
Gela posé, la terre de Mont a toujours demeuré dans
la succession ah intestat • et chacun des enfans successi
vement institué par égalité, a dû espérer que tant qu’il
n’y auroit pas de disposition expresse de cet immeuble
par le contrat de mariage de l’un d’e u x , il auroit un droit
égal dans la terre de Mont : cet espoir est devenu une
certitude pour la portion maternelle, dès que la mère
est morte avant le mariage de son fils, et sans en avoir
disposé par le contrat de mariage de la dame de Beauv e g a r d , sa s e c o n d e fil lu.
Qu’importe maintenant que la mère, qui ne pouvoit
pas donner un conquêt de communauté, qui n’auroit pu
disposer d’un propre que par le contrat de mariage de
l’un de ses enfans , ait ajouté que « l’institution de la
« dame de Vaure n’est faite que sous la condition de
« cette disposition, à la charge par elle de laisser jouir
« le survivant des instituans, de la portion qui lui seroit
« revenue dans les biens du prédéccdé, sans lesquelles
« charges et conditions l’institution n’auroit été faite, et
« la futui*e auroit été apanée moyennant la dot qui va
« lui être constituée. »
Ce n’est là qu’une tournure indirecte pour éluder une
loi prohibitive ; et on ne peut le faire, d’après Auroux,
par quelque manière que ce suit ; s’il en étoit autre
ment, la prohibition de la loi seroit inutile, et les hommes
ne manqueroient pas de moyens pour l’éluder. Dans une
coutume d’égalité, il faut surtout bien se g a r d e r d’établir
�( i4 )
un intermédiaire dont on pourroitse servir pour gratifier
tel enfant au préjudice de tel autre : cette vérité avoit
été bien sentie lors de la publication delà loi du 17 nivôse
an 2. On sait que le système restrictif de cette loi n’étoit
pas pour les libéralités entre époux; elle leur donnoit
au contraire la plus grande latitude lorsqu’il n’y avoit
pas d’enfans; et bientôt les époux voulurent se servir de
cette faculté , pour transmettre tout ou partie de leurs
biens à des parens incapables, en imposant cette con
dition aux donations qu’ils se faisoient de l’un à l’autre.
Ils se servoient de l’argument favori de la dame Hilliard :
« Il dépend de celui qui donne, d’imposer à ses libéra« lités les conditions qu’il lui plaît. » Mais la loi inter
prétative du 22 ventôse an 2 , questions 11 et 13, vint
annuller toutes ces conditions comme 11’étant que des
fidéicommis , ou des intermédiaires pour contrarier le
système de la loi.
N ’y a - t - i l pas ici même raison? Les sieur et dame
Hilliard pouvoient-ils faire disparoître leur incapacité,
ou contrarier le principe de la loi municipale, par des
conditions illicites , ou par un intermédiaire qui détwuiroit le système d’égalité proclamé avec autant d’éDergie, en termes irritans et prohibitifs, ne peuvent
les père et mère donner, etc. ?
Mais, dit la dame Hilliard, malgré la p r o h i b i t i o n de
l’article 2 1 7 , malgré la disposition de l’article 219, qui
dit que les dispositions ne saisissent que les contractons,
il est cependant un moyen de faire l’équipollent d’une
institution au profit d’autres personnes que des mariés.
Ce moyen, Auroux l’indique sur l’article 219, n°. 28;
�( i5 )
il consiste à instituer la personne mariée , à la charge
d’associer ses frères et sœurs à l’institution : par cette
voie, les associés, quoique non contractans, sont saisis
de leur portion , par cela seul que l’association est une
charge de l’institution.
O r , la condition du préciput n’est autre chose qu’une
condition de l’institution ; donc André Dumont a été
valablement saisi du préciput, quoique non contractant.
Voilà bien l’objection dans toute sa force.
Il est aisé d’y répondre. On convient que la charge
d’associer a été admise en jurisprudence ; on s’est fondé
sur l’avis du jurisconsulte en la loi Cum ex filio , ff. D e
vulg. et pupill.
Maïs quelle différence énorme
entre l’association, et la condition qu’on voudroit lui assi
miler!
Dans le cas de l’association , l’institué est saisi du titre
universel : c’est lui qui a tout ; l’associé ne tient rien de
l’instituant-, il ne le prend que de l’institué. C elui-ci a
des chances favorables à courir, comme, par exemplè,
le prédécès de l’associé, même avec enfans, car les enfans
ne seroient pas associés : hœres socii m eiy non est socius
m eus; la révocation de la charge ou de la condition, car
l’instituant peut révoquer toutes les clauses onéreuses, et
ne le peut qu’en faveur de l’institué.
I c i , au contraire , la dame de Vaure n’avoit rien à
gagner, et tout a perdre; elle n’étoit point saisie du titre
universel; le père ne pouvoit plus révoquer la condition
à soi] profit, et sa disposition n’avoit d’autre objet que
d’éluder la prohibition de la loi : ce n’étoit pas un titre
honorable qu’il vouloit donner h sa fille; il cherclioit un
�( i6 )
moyen d’avantager son fils, dans le cas où il ne pourroit
pas le marier ; de faire en un mot ce que la loi lui défendoit.
Gomment une semblable condition seroit-elle licite? ne
faudroit-il pas rayer absolument l’art. 217 delà coutume?
La dame ïïillia rd , poussée jusqu’au dernier retran
chement, n’a plus d’autre refuge que son arrêt de 1716;
elle se plaint de ce qu’ Auroux en a parlé trop légè
rement : mais cet arrêt unique est bien plus développé
dans un manuscrit qu’elle a le bonheur de posséder. E t
il a jugé en thèse, qu’une institution pouvoit être grevée
d’un p récipu t, au profit d’un non contractant, lorsqu’il
a été la condition de l’institution faite au profit d’une
fille q u i , sans cela, eût été apanée.
Ce manuscrit, quel qu’il soit, p o u r r o i t - il balancer
l’autorité de la loi et en modifier la rigueur? Auroux
en avoit bien assez dit sur l’arrêt invoqué par la dame
Hilliard.
Ce commentateur éclairé commence à poser en prin
cipe , sur l’article 308 de la coutume , n°. 4 , que le
préciput n’est valable qu’autant qu’il est fait en contrat
de mariage, et en fa v e u r d’icelui ,* il rappelle les termes
de l’article 217 , et l’observation de Decullant.
« A la vérité, ajoute-t-il, nombre suivant, par arrêt
« du 22 mai 1716 , le préciput de 30000 francs fait à
« Sébastien M aquin, par le contrat de mariage des dames
« ses sœurs , fut confirmé ; mais il étoit dit par leur
« contrat de mariage que dans le cas où lesdites dames
« voudraient contester ledit préciput, elles demeureroie fit
« apanées pour 24000Jfrancs chacune. »
Et c’est à raison de l’apanage si disertement exprimé,
quç
�( 17 )
que l’arrêt jugea la validité du préciput ; aussi MenudeL
dit-il que c< pour ôter tout doute, il est à propos de
« dire par le contrat, que les père et ruère ont doté la
« fille de la somme de.......... ., à la charge de venir à
« la succession en rapportant; et qu’où elle fourniroit
« débat’ contre ledit préciput, déclarent qu’ils apanent
« ladite fille de la somme d e ........., parce qu’en mettant
« simplement la clause qui/s instituent ladite fiile sous
« ledit préciput, elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée,
« à défaut de l’exécution de ladite clause , qui sonne
« toutefois en une institution conditionnelle, et que les
« mots qui seroient dans le contrat, sans lequel préciput
cî les pere et incit* 1 iiuioicnt
te
«
«
«
^ ne sct*oient pcïS UD.
apanage formel, mais plutôt une simple énonciation du
dessein d’apaner, lequel n’étant pas disertement expliqué, ne l’empêclieroit pas de venir aux successions
des père et mère, en rapportant. »
Dans le contrat de mariage de la dame de V au re , il
n’y a point comme dans celui des dames M aq u in , que
si elle conteste le préciput, elle sera apanée à la somme
d e . i l y est seulement dit, que sans les charges et
conditions, l’institution n’auroit été faite, et la future
auroit été apanée moyennant la dot qui va lui être
constituée. 11 n’y a dans ce contrat qu’une simple énon
ciation du dessein d’apaner, et non un apanage précis;
dès-lors on ne pourroit même appliquer l’arrêt de 1716.
On ne doit pas dissimuler que M enuàel ne trouve
pas l’objection considérable, parce que, suivant ce com
mentateur, le mot dot emporte avec lui l’apanage; mais
ce n’est pas là l’opinion d’/luroux , qui tranche la
G
�( 18 )
question, et ne considère pas l’arrêt de 1716 comme
devant faire la règle : il en rend compte comme d’une
exception particulière , unique ; et il est remarquable
que sur une question aussi importante, et dans un temps
où tout étoit en faveur des mâles, il n’y ait qu’un seul
préjugé rendu dans des circonstances particulières qui
ne se rencontrent pas dans l’espèce.
Que sera-ce donc aujourd’hui que les lois nouvelles
se rapprochent davantage de l’égalité entre les enfans;
et que le Code Napoléon est plutôt restrictif que libéral,
lorsqu’il s’agit de dispositions en ligne directe !
Eh ! pourquoi s’occuper si long-temps du contrat de
mariage de la dame de Vaure ? Ce n’est point en vertu
de ce titre qu’elle vient à la succession de la mère ; les
choses ne sont plus au même état : le père a fait des
dispositions particulières dans le contrat de son fils, qui
font disparaître les clauses des contrats précédens. L a
dame de Vaure se présente pour recueillir la succession
maternelle, ouverte ab intestat, ou ce qui est la même
chose, sans aucun règlement valable.
La dame Hilliard qui redoute cette manière toute
naturelle de se présenter, la prétend non recevable à
abdiquer un titre onéreux.
Elle a exécuté, dit la dame Hilliard, les clauses et
les conditions de son institution; elle a reçu, par exemple,
son avancement d’hoirie : mais c’est encore chose nou
velle , que de faire résulter une iin de non-recevoir
d’une action si simple. Où a-t-on trouvé que l’héritier
qui reçoit un avancement d’hoirie, c’est-à-dire, une chose
qui lui donne la qualité d’héritier, qui est promise avant
�( j9 y
l’ouverture de la succession, qui est sujette à rapport
lors du partage, et qui n’est donnée qu’en attendant le
partage, soit non recevablè à venir à la succession comme
héritier ab intestat ?
Ce n’est pas sérieusement, sans doute, que la dame
Hilliai-d propose cette objection; elle ne peut pas ignorer
que tant que l’héritier ne s’est pas immiscé, il a toujours
>le droit d’abdiquer un titre onéreux, pour s’en tenir à
la qualité d’héritier ab intestat.
Mais la dame de Vaure a laissé jouir son père des
biens de son épouse, et ce ne peut être qu’en vertu des
clauses de son contrat qui lui en imposoit l’obligation :
donc elle a exécuté les conditions de son institution.
Singulière conséquence. Quoi! la dame de Yaure, patrespect pour son père, n’a pas voulu provoquer un par
tage ; elle a désiré dans son intérêt qu’il n’y eût pas
d’inventaire dissolutif, et que la communauté se con
tinuât -, elle a craint, si on v e u t , que ses recherches
donnassent de l’inquiétude ou du chagrin à son père,
qui avoit une longue habitude d’administration; et elle
seroit non recevable !
La crainte révérencielle , dit la dame H illiard, ne
peut suffire, ni pour fonder une action, ni pour justifier
une exception; l’article 1114 du Code Napoléon con
sacre ce principe.
Ce n’est pas là ce que dit le Code : il dit bien que la
seule crainte révérencielle ne suffit point pour annuller
un contrat, lorsqu’il n’y a pas eu de violence exercée ;
mais il faut entendre sainement cette disposition, c’està-dire, que si la dame de Yaure avoit passé un acte, 1111
�(2 0 )
traité avec son p è re , et qu’elle attaquât cet acte par le
seul motif de la crainte révérencielle; si elle n’étoit pas
dans la dépendance de son p ère; si son consentement
avoit été libre, et qu’elle n’eût point, d’autre motif à
opposer ce ne seroit pas suffisant pour faire annuller
l’acte.
Mais ici il n’y a point d’acte, point de consentement:
on n’oppose à la dame de Vaure que son silence ou son
inertie; on ne lui fait d’autre reproche que d’avoir resté
dans l’inaction pendant la vie de son père; ce seroit lui
donner tout au plus l’avis de demander la restitution
des jouissances perçues par le père, si d’ailleurs elle ne
préféroit la continuation de la communauté.
L es sieur et dame d e Vaure ne pousseront pas plus
loin leurs observations : ils se proposent de développer
leurs moyens avec plus d’étendue, lors de la plaidoirie
de la cause ; ils se sont expliqués sans prétention ; et
quoiqu’ils eussent dû s’attendre à quelques égards de la
part de leur nièce ils ne cesseront d e lu i donner des
exemples de modération et de décence.
Signé R A B U S S O N D E V A U R E .
DUM ONT DE VAURE.
*
M e. P A G È S (de R iom ), ancien avocat,
«
M e. V E R N I È R E , avoué.
I
A
R IO M ,
11
de l’imprimerie de T h ib a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Juillet 1808.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rabusson de Vaure. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jutier
Huguet
Bernardi
Decombrousse
Chabroud
Mailhe
Poirier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour les sieur et dame Rabusson de Vaure, intimés ; contre les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt 1ére section 5 août 1808.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1801
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
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Coverage
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Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
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PDF Text
Text
REPONSE
Des Sr. et Dme. DE LA ROQUE DE MONS,
intimés,
AU M É M O I R E
D e s sieur et dame H I L L I A R D , cotuteurs de la
demoiselle D u m o n t , appelans.
sieur et dame de la Roque exercent des droits
consacrés par la nature et les lois ; et si leur réclamation
contrarioit les sieur et dame H illiard, ils ne devoient la
discuter qu’avec calme et décence : ils eussent peut-être
persuadé alors qu’ils croyoient avoir une bonne cause,
et qu’elle pouvoit se passer de personnalités et de décla
mations. Mais ce n’est point là le plan qu’ont voulu suivre
L
ES
A
�( o
les sieur et dame Plilliard. Les personnalités leur ont paru
devoir tenir le premier rang dans leur défense *, les
moindres circonstances leur ont paru de grands moyens;
et s’il falloit les suivre pas à pas, il faudroit écrire pour
les voisins et les voisines, qui seroient peut-être fort en
état de juger une partie des faits articulés, et de les dé
m entir, plutôt que pour la cour qui n’a qu’une simple
question de droit ù juger.
A insi, pour être entendu de la cour, il suffit de mettre
sous les yeux les expressions même des.'actes qui cons
tituent le litige.
F A I T S .
L e sieur Jean D u m o n t, et la dame Procule P itat,
eurent de leur mariage trois enfanS , M arie, épouse du
sieur de V aure, M arguerite, mère de la dame delà Roque,
et A n d ré , père de l’appelante. .Les filles furent mariées
à- l ’âge de dix-sept ans.
'
L e contrat de la dame de V a u r e , en date du 19 no
vembre 17 7 5 , contient ce qui suit :
« En faveur du m ariage, les sieur et dame Dumont
« ont institué la demoiselle future, leur fille, leur hé« xùtière par égale portion* avec les autres enfans qu’ils
« auront au jour de leur décès, de tous les biens dont
« ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse
« qu’ils se font de la terre de M ont, consistante e n . . . . .
« avec les bestiaux qui pourroient la garnir , jusqu’à
« concurrence de 5ooo livres, ensemble tous les vaisseaux
«- vinaircs} ainsi que les meubles meublans . . . . . , ar-
�( 3 )
geiHerie, en l’état que le tout se trouvera au décès du
dernier mourant ; en outre la somme de 6000 livides
que lesdits sieur et dame Dumont se proposent d’em
ployer en acquisition de fonds, cens et devoirs, pour
être annexés à ladite terre, et en faire partie, pour,
par lesdits sieur et dame D u m o n t, ou le survivant
d’eux, disposer de ladite terre au profit de tels de leurs
enfans .qu’ils jugeront à propos, même de la future,
par quelqu’acte que ce s o it, d’entre-vifs ou à cause de
m ort, sous signatures privées ou par-devant notaire;
dans laquelle réserve les sieur et dame D um ont, père
et mère de la future, entendent être comprises toutes
constructions nouvelles : et dans le cas de non dispo
sition de leur p a rt, ladite terre de M o n t , avec les
bestiaux qui se trouveront la garnir, jusqu’à concur
rence de ladite somme de 5ooo francs, les vaisseaux
vinaires, meubles meublans, lin ge, batterie de cuisine
et argenterie, en l’état que le tout se trouvera, ap
partiendront à André D um ont, leur fils, lequel en
demeurera précipué, ainsi que des annexes qui auront
été faites à ladite terre , jusqu’à concurrence des
6000 livres; ladite institution faite sous ladite réserve,
et à condition de ladite disposition, et encore à la
charge , par la fu tu re, de laisser jouir le survivant
des père et m ère, de la portion qui lui seroit revenue
dans les biens du prédécédé : sans toutes lesquelles
charges, clauses et conditions, ladite institution n’auroit
été faite , et la future auroit été apanée moyennant
« la dot qui va lui être constituée. »
En avancement de leur future succession , lesdits
A a
�(4)
sieur et dame Dumont ont constitué en dot à la future
la somme de 30000 livres, et 10000 livres de bien paraphernal. L a disposition est terminée ainsi : « Sera
. «. néanmoins tenue ladite demoiselle future, de rapporter
« tant ladite somme de 10000 livres à elle donnée pour
« lui tenir lieu de bien paraphernal, que celle de 300001.
« à elle aussi donnée en avancement d’hoirie, pourvu
« que le payement en ait été fait lors de l’ouverture
« des successions des sieur et dame ses père et m ère,
« ou de moins prendre dans lesdites successions. »
Chaque fois que les sieur et dame Hilliard ont rap
porté les stipulations de ce contrat de m ariage, ils se
sont arrêtés après ces mots : en avancement de leur
fu tu r e succession, lesdits sieur et dame D um ont ont
constitué en dot j cl la, demoiselle ¿future , la somme
de 30000 livres. Ils ont affecté d’omettre la dernière
clause, qui caractérise de la manière la plus précise la
constitution faite à la future, et explique que les 100001.
sont un bien paraphernal; que les 30000 ne sont pas
une constitution dotale, mais un* avancement d’hoirie ;
que la future est tenue de rapporter le to u t, lors de
l’ouverture des successions de ses père et mère.
La mère de la dame de la Roque se maria le 10 fé
vrier 1777? avec le sieur Grellet de Beauregard. On lit
dans leur contrat que : « Dans l’esprit du contrat de
« mariage de demoiselle Marie Dumont, lcur= fille aînée,
« avec M. Joseph Rabusson de Vaure , passé devant
« R o llat, notaire, le 19 novembre 1 7 7 5 , les sieur et
« dame Dumont ont institué la demoiselle future leur
« héritière par égale portion avec les autres enfans<
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
.
[
5
3
qu’ils auront au jour de leur décès, de tous les biens
dont ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse qu’ils se font de la terre de M o n t, telle qu’elle
est expliquée au contrat sus-daté, ensemble des autres
objets qui y sont détaillés, et de la somme de 6000 1.
dont il est parlé , p o u r, par lesdits sieur et dame
D um ont, ou le survivant d’e u x , dans les termes du
même contrat, disposer de ladite réserve au profit
de tels de leurs enfans, même de la future, par les
moyens et de la manière expliquée audit conti’at.
« Cette institution faite, en outre, aux mêmes charges
« que celles expliquées audit contrat; et en avancement
« de leur future succession, lesdits sieur et dame D u « mont ont constitué, etc., etc. » L a future est obligée
au rapport de tout ce qu’elle aura reçu. Il est bien exprimé
dans ce contrat que les sieur et dame Dumont se sont
réservé la terre de M ont avec les accessoires, pour en
disposer en faveur de tels de leurs enfans qu’ils jugeront
à propos ; mais ils ne disent pas qu’à défaut de dispo
sition, elle appartiendra par préciput à André D um ont,
et que sans cette disposition, ils auroient apané la
future : ce qui donne lieu de penser que leur volonté
n’étoit plus la m êm e, ou qu’ils craignoient que le ma
riage n’eût pas lieu si l’on pouvoit supposer que l’ins
titution de la future ne fût que conditionnelle.
En vain les adversaires prétendent - ils que ces mots ,
dans les term es, renferment les dispositions irritantes
par l e s q u e l l e s ils voudroient repousser les filles des sieur
et dame Dumont. 11 est de principe que les prohibitions,
de même que les peines, ne s’étendent pas au-delà des
�( 6 )
cas exprimes ce qui n’a été interdit qu’à une personne,
ne peut, par induction, être regardé comme interdit
à une autre. La disposition de la terre de Mont
étoit un objet assez important, pour qu’il fallût en faire
mention expresse dans le contrat de mariage de la dame
de Beau regard, si les père et mère vouloient qu’elle ap
partînt à André D um ont, en vertu de ce contrat. L ’institutiou de la mère de la dame de la Roque ne peut
être conditionnelle, lorsqu’il n’a été stipulé aucune con
dition dans son contrat ; le mot charges ne se rapporte
qu’à l’usufruit des biens du prédécédé, réservé en faveur
du survivant des père et mère : les contrats de bienfai
sance sont de droit étroit, tout y est de rigueur. Les
actes des 19 novembre 17 7 5 , et 10 février 17 7 7 , sont
des traités passés entre des familles différentes : les obli
gations de l’une sont étrangères à. l’autre.
ga
Marguerite D u m on t mourut le 8 avril 1783, huit jours
après avoir donné naissance à la dame de la Roque. La
dame Dumont ne survécut à sa fille qu’environ six mois:
• elle étoit commune en biens avec son mari ; il en con
serva la possession comme chef de la communauté, qui
se continua avec ses enfans.
André Dumont se maria en 1789. Il est dit dans son
« contrat: En faveur du présent mariage, le sieur Dumont
« père a institué et institue son fils, par égales portions avec
« ses deux sœurs, épouses de M M . Rabusson de Vaure
« et Grellet de Beauregard , de tous les biens meubles
« et immeubles dont il mourra vêtu et saisi ; et comme
« par le contrat de mariage de dame Marie Dumont ,
« épouse dudit Rabusson de V a u re, ledit sieur Dumont
�(7)
père, et ladite défunte Procule P itat, son épouse,
s’étoient conjointement réservé, même au survivant
d’eu x , la faculté de disposer au profit de tels de leurs
enfans qu’ils jugeroient à propos, et par tel acte que
bon leur semblerait, de la terredeM ont, consistante, ..
et en cas de non disposition desdits objets du vivant
desdits. sieur et dame Dumont , ils appartiendront
en toute propriété, et à titre de préciput, audit sieur
futur ép o u x, ainsi que les annexes qui auroient été
faites à ladite terre, jusqu’à concurrence de la somme
de 6000 francs.
« Et
mme ladite dame Pitat est décédée sans avoir
manifesté scs intentions à l’<5garcL de la réserve ci-dessus
désignée, ledit sieur Dumont père, usant de la faculté
de pouvoir disposer de là totalité desdites réserves,
déclare qu’il dispose, à titre de préciput, au prolit
dudit sieur futur époux, tant de ladite terre de M on t,
circonstances et dépendances d’icelle, que de tous les
autres objets ci-dessus spécifiés, et tel que le tout est
désigné et spécifié en ladite réserve portée au contrat
de mariage ci-dessus d até, des sieur et dame Rabusson
de Vaure ; p ou r, par ledit sieur futur, faire le prélè
vement et entrer en jouissance de ladite terre de M ont,
et de tous les autres objets compris en la présente dis
position , immédiatement après le décès dudit sieur
Dum ont; sous la réserve que se fait ledit sieur Dumont
p è re , de la somme de 30000 francs, à -prendre sur
ladite terre de M ont / pour en disposer en faveur de
' tels de ses enfans ou petits-enfans qu’il jugera à propos,
même en faveur dudit sieur futur, par tel acte d’entre-
�«f
«
«
ce
«
«
«
«
«
(
8
)
.
vifs, à cause de m ort, ou sous signatures privées, que bon
lui semblera ; et de suite ledit sieur Dum ont, en faveur
dudit mariage , a disposé et dispose en faveur dudit
sieur futur é p o u x , sur la susdite somme de 30000 fr.
réservée, de celle de 10000 francs ; de laquelle ledit
sieur son père se charge de lui servir l’intérêt au taux
de l’ordonnance, sans aucune retenue , jusqu’au remboursement, qu’il lui sera loisible de faire quand il
le jugera à propos.
« D e la même somme de 30000 livres, réservée par
« ledit sieur Dumont père, il a présentement disposé et
« dispose, en faveur de demoiselle Procule Grellet de
« Beauregard, sa petite-fille, fille de Jean-Baptiste Grellet
« de Beauregard, et de feue dame Marguerite D um ont,
« de la somme de 5ooo liv ., à prendre sur ladite réserve,
« payable après le décès dudit sieur Dumont père, seuec lem ent, par ledit sieur futur ép ou x, sans intérêts jus« qu’audit décès, après lequel ils auront cours au taux
« de l’ordonnance, jusqu’au remboursement, que ledit
« sieur futur sera tenu de faire dans deux ans du décès
« de son dit père; et dans le cas où ladite demoiselle
« Grellet, ou ses père et mère, contreviendraient direc
te tement ou indirectement à la disposition fa ite par ces
« présentes, de ladite terre de'M ont, en faveur du sieur
«f fu t u r ép o u x, la disposition de 5ooo livres, fa it e en
« fa v e u r de ladite demoiselle G rellet, sera et demeurera
k nulle et de nul e jfe t, et comme non fa ite ' pareille« ment, dans le cas où ledit sieur Dumont père ne dis—
« poseroit pas de son vivant des ï 5 ooo livres restantes
ft de la susdite somme réservée, elle demeurera réunie
« à
�( 9 )
« à ladite terre de M o n t, et appartiendra audit sieur
« futur époux, sous la réserve que ledit sieur Dumont
« père se fait de la jouissance, pendant sa v ie , de la
« susdite terre de M o n t, pour, après son décès, appar« tenir en toute propriété audit sieur futur époux et
« en avancement d’hoirie et de ladite institution, ledit
« sieur Dumont père a constitué en dot audit sieur futur
« la somme de.........etc., etc. »
Suivant la disposition de l’article 217 de la coutume
de Bourbonnais, sous l’empire de laquelle vivoient les
parties, la disposition de 5ooo francs, faite en faveur de
Procule G rellet, étoit nulle; la condition onéreuse dont
elle étoit grevée l’auroit aussi empêchée de l’accepter :
mais nu mois de brumaire an n , ie sieur D um ont,
présent au contrat de mariage de ladite Procule G rellet,
sa p e tite -fille, augmenta de 10000 francs l’avancement
d’hoirie promis à sa mère ; il stipula que 5ooo fr. seroient
rapportés au partage, et que les autres 5ooo non sujets
à rapport seroient payés sur la réserve qu’il s’étoit faite
en disposant de la tei’re de Mont.
A u mois de novembre i 8o 5 , le sieur Jean Dumont
décéda : c’étoit l’époque où ses enfans devoient faire
valoir leurs droits héréditaires. Les dames de Vaure et de
la R oque, après avoir fait examiner les contrats ci-dessus
cités, se sont empressées de déclarer qu’elles 11’entendoient pas contester à la demoiselle Anne Dum ont, fille
et unique héritiere d’André , la moitié de la terre de
M o n t, qui avoit appartenu au feu sieur Jean D u m o n t;
mais qu’elles se croyoient fondées à recueillir leur portion
dans l’autre m o itié, qui étoit la propriété de la dame
B
�( 1° )
Pitat, décédée avant le mariage d’André Dumont. Mères
de fam ille, et appelées par la nature et la loi au partage
égal de la succession de ladite dame Pitat, devoient-elles,
au préjudice de leurs propres enfans, abandonner à leur
cohéritière, qui recueillera les quatre sixièmes de cette
terre, la petite part que leur, attribue la coutume à
laquelle les parties étoient soumises ?
Les qualifications odieuses que les sieur et dame Hilliax-d
'ont données à la conduite des dames de Vaure et de la
R o q u e, et les inventives prodiguées dans le mémoire
!des adversaires, rejailliront sur leurs auteurs. Les sieur
et dame de la R oque, par attachement pour leur cousine
rgermaine, aimënt à se persuader qu’elle n’a aucune part
à cette indécente'diatribe.
;Lës tuteurs d e: mademoiselle ODumont troublent mal
% propos la cendre de son respectable aïeul, lorsqu’ils
disent qu’il l’a laissée dans l’abandon. On >trouverait les
preuves d’envois d’argent qu’il1lui a faits. Il est notoire*
daiis le pàj^s que quelques années avant sa mort, il la
fit venir d’une ville éloignée, où elle habitoit avec ses
tuteurs, auxquels il fit?passer pour les frais de voyage
et retour une somme plus!forte que celle qui étoit né'cessaire. Lorsque sa petite-fille partit, son trousseau étoit
bien différent de celui qu’elle avoit porté :,les autres
enfans du sieur Dumont auroient vu avec plaisir qu’il
eût fait davantage pour elle; mais-le désir de payer ses
dettes enchaînoit sa générosité.
Il n’est pas moins facile d’écarter le reproche que les
appelons font aux; dames de V a u re et de la R o qu e, sur
la conduite par elles tenue depuis le commencement du
�( II )
procès. A peine, disent-ils, la demande fut-elle formée,
qu’on vit les dames de Vaure et de la Roque poursuivre
l’audience avec une activité sans exemple, ü n croiroit
sur cette allégation que .lorsque, l’affaire'fut jugée, l’ac
tion étoit intentée depuis peu de jours : il s’étoit «coulé
une année entière ; on ne peut supposer qu’il ait été
employé des sollicitations pour obtenir, après un si long
temps, le jugement d’une affaire provisoire, en ce qu’elle
suspend le partage des successions des sieur et dame
•Dumont.
Les sieur et dame Hilliard se plaignent de ce qu’à
l’audience du 8 août, leur avocat ayant plaidé pendant
trois heures , les dames de Vaui-e-et de la Roque lais
sèrent obtenir un défaut; ils attribuent à des combinai
sons astucieuses, et à des manœuvres ténébreuses, une
chose fort simple. Il avoit été signifié, le 14 juillet pré
cédent, un écrit signé de M . Chabroud, intitulé : Notes
pour mademoiselle Dumont. Cet écrit fut envoyé aux
sieur et dame de la. R o q u e q u i' habitent le département
de la Creuse; ils l’avoient.fait.passer à leur conseil pour
y répondi-e;et leur avoué ayant reçu cette réponse peu
de jours avant le 8 août, n’avoit. pu se préparer à plai<der. L e sieur de V au re, qui avoit quelque répugnance
à plaider devant le tribunal dont il étoit membre, voyant
, que l’avoué des sieur et dame de la Roque 11’étoit pas
p r ê t , laissa prendre défaut.
Si le défenseur des sieur et damp Hilliard eût eu avec
ceux de- ses parties adverses d e s. communications ami
cales, ils l’eussent prévenu qu’il$. n e plaideraient pas à
cette audience. L ’avoué,des sieur et dame de la Roque
3 z
�( *4 )
clairem ent, dans le contrat de mariage d’André , son
fils; il y énonce les différens objets qui composoient la
réserve, et ne fait nulle mention des 6000 francs. Lorsqu’il
dit à la fin de sa disposition, que tous les objets énu
mérés appartiendront à André D um ont, il ajoute, ainsi
que les annexes qui auroient étéfaites à la terre de Mont,
ja sq u à concw'rence de 6000 francs. Lés titres d’acqui
sition et rachat de cens existoient alors; ces acquisitions
avoient été réunies à la terre de Mont : le sieur Dumont
vouloit qu’elles continuassent à en faire partie. Mais on
voit très-distinctement qu’il n’est pas entré dans la pensée
des instituans, qu’outre ladite terre et ses dépendances,
on pourroit encore exiger la somme de 6000 livres.
Par le contrat de mariage de son fils, le sieur Dumont
se dépouilla entièrement, quant à la propriété, de ce
qu’il vouloit lui donner. Les mots, avec les annexes qui
auroient été f a it e s , ne peuvent s’entendre que du passé,
et non d’acquisitions à faire dans la suite, pour joindre
à un objet, dans ce que le sieur Dumont avoit cédé
sa propriété. Il avoit si peu l’intention d’ajouter à la
valeur des choses par lui données, qu’il la diminua par
une réserve.
' Quant aux dépens, la demoiselle Dumont ayant suc
combé sur l’objet principal de la contestation, devoit
supporter une partie des frais. Les sieur et dame de
la R oque, en signifiant le jugement, se sont reservé de
poursuivre la réparation de ces deux griefs, pour lesquels
ilsseproposentd’interjeter incidemment appel. Les tuteurs
de mademoiselle Dumont sont appelans des dispositions
qui ont déclare huile la donation en préciputdè’ ld' terre
�(
)
de M ont, pour la moitié provenante du chef de la
dame Pitat. C’est sur cet appel qu’il faut en ce moment
se fixer.
MOYENS.
Il ne sera échappé à aucune des personnes qui ont lu
le mémoire de mademoiselle D um ont, que ce n’est pas
sur les dispositions de la coutume, qui fait loi entre les
parties, qu’elle fonde ses prétentions; elle n’en invoque
textuellement aucun article. E h ! comment eût-elle pu
s’en prévaloir, lorsqu’il n’en est aucun qui lui soit favo
urable ? C’est en citant des autorités et des préjugés pres
que tous puisés dans des ouvi'ages étrangers à la coutume
jie Bourbonnais , ou clans des îtianusevils inconnus aux
sieur et dame de l a vRoque, qu’elle prétend établir une
jurisprudence qui anéantiroit les dispositions de la loi
sous l’empire de laquelle vivoient les parties.
On pourrait soutenir que cette loi étant claire et pré
cise , les cours actuellement existantes doivent la faire
exécuter, sans égard pour une jurisprudence qui s’en
sçroit écartée. Mais ou verra dans la suite qu’à raison des
circonstances particulières de cette affaire, les appelans
ne peuvent tirer aucun avantage de la prétendue juris
prudence qu’ils voudraient faire admettre.
Désirant rapprocher les réponses des objections, afin
de rendre plus lumineuse la réfutation du mémoire de
leurs adversaires, les sieur et dame de la Roque auraient
voulu suivre l’ordre que les sieur et dame Hilliard ont
adopté : mais il y a dans leur mémoire tant de diffusion1
et d’incoJiérauce ! il faudroit revenir sans cesse sur ses
�c 16 )
pas. Il a donc paru plus simple d’établir quelques pro
positions qui détruisent de fond en comble le système
des appelans : on réfutera en même temps les objections
qui s’y rapportent.
PREMIÈRE
PROPOSITION.
L a coutume qui régit les parties est une coutume
d'égalité ; elle ne permettoit ni d'avantager
A n dré D u m o n t, dans les contrats de mariage
de ses sœurs, ni de les exclure des successions,
par dot ou apanage ¡ à moins que ce qui aurait
été donné à ce titre ne leur eût été irrévoca
blement acquis a Vépoque desdits contrats, et
sans être retenues dans la famille par une ins
titution; stipulation qui ne se trouve pas dans
ceux des dames de Vaure et de Beauregard.
Pour établir cette proposition et les suivantes , les
sieur et dame de la Roque n’ont pas cru devoir secouer
la poussière des anciens manuscrits des avocats de la
ci-devant province de Bourbonnais ; il leur a paru que
ceux qui ont des procès seroient trop malheureux, si
pour apprécier leurs droits il falloit fermer le livre de
la l o i , et y suppléer par les décisions de quelques
hommes plus ou moins éclairés. Cette manière de juger
seroit sujette aux plus graves inconvéniens. Un avocat
qui a fait prévaloir son avis, l’a consigné dans des notes
où
�( 17 )
oïl sans doute il n’a pas rappelé toutes les circonstances
qui auroient pu faire juger le contraire; dans le même
temps, son voisin rendoit peut-être une décision opposée.
Seroit - il juste de s’en rapporter à l’un plutôt qu’à
l’autre? N’cst-il pas plus raisonnable de laisser à l’écart
tous ces écrits p rivés, et de ne consulter que la loi à
laquelle les parties doivent obéir ?
Les contrats de mariage de tous les enfans des sieur
et dame Dumont ont été passés sous l’empire de la cou
tume de Bourbonnais. Cette coutume veut que les enfans
partagent également les biens des auteurs de leurs jours.
Les articles 217 et 219 prohibent toutes donations et
avantages en faveur des enfans, si ce n’est en contrat de
mariage. L ’article 321 ne leur permet pas de prendre part
à une succession comme héritiers et comme légataires.
M . A uroux des Pommiers, que nous citerons souvent,
parce que son commentaire a presque obtenu l’autorité
de la lo i, observe, sur l’article 317 de ladite coutume,
que « sa disposition a pour principe Végalité que la nature
« désire, étant juste que ceux qui sont égaux en nais« sance, et qui doivent l’être dans l’affection de leurs
« père et m ère, le soient aussi dans le partage de leurs
« biens. La donation entre-vifs a été exceptée, parce qu’il
« eut été difficile aux pères et mères de marier leurs
« enfans, s ils n’avoient pas eu la liberté de leur faire
« des donations entre-vifs en les mariant. »
Ce n’est donc que pour l’intérêt des mariés, et dans
leur contrat de mariage, qu’il est libre aux pères e t mères
de faire des donations entre-vifs à leurs enfans. Dumoulin,
sur le môme article de la coutume de Bourbonnais, dit
C
�C 18 )
que cela a été étendu aux ascendans , toujours en vue
de l’égalité -, façore œqualitatis.
On trouve à l’article 219 , nombre 13 et suivans, de
nouveaux développemens. M. A uroux s’y exprime en
ces termes : « Une condition pour la validité des insti« tutions contractuelles, est qu’elles soient faites en
« faveur des mariés ¿ ou de l’un d’eux, ou des descen
te dans du mariage. » C’est la disposition de notre cou
tume et de plusieurs autres ; tel est aussi le sentiment de
nos commentateurs. F a çor hujus paragraphi, dit M. de
Culant, nubentes tantum et ex eodem matrimonio des
cendentes affîcit, in tantum ut si institutio fa c ta ,fu e r it,
in gratia contrahentium, et aliorum no?i contrahentiu n i, pro portionihus contrahentium valent 3 et prç
non jiubentiuni parhbus corruat•
« Ainsi si un père fait une institution contractuelle
« en faveur de deux de ses enfans, dans le contrat de
« mariage de l’aîné des d eu x , il n’y aura que le seul
« aîné qui sera institué d’une institution contractuelle,
c< le puîné ne l’étant que par un acte' non valable à
et son égard -, la raison est que la faveur du contrat
« de mariage ne concerne que les mariés et leurs des-« cendans du mariage. » C’est le raisonnement de
M . Lebrun , Traité des successions, liv. 3 , cliap. 2, n°. 1 a.
D ’où cet auteur conclut que quoique la donation faite
aux futurs conjoints n’ait pas besoin d’être acceptée par
eux, néanmoins si elle conceraoitdes personnes étrangères,
elle devroit être acceptée par eux. M. le président B uret
pousse la chose si lo in , qu’il prétend qu’une donation,
faite en faveur de mariage à l’un des conjoints, dont il
�( z9 )
feroit sur le champ cession à une personne étrangère,
seroit n u lle, par la raison que cette donation ne seroit
pas censée faite au profit et utilité des m ariés, comme
le requiert notre article.
Par suite du même principe d’égalité, M . Auroux
décide, à l’article 321, qu’en ligne directe, le legs fait,
même au fils de l’h éritier, seroit déduit et précompté
sur la portion héréditaire du père.
Ce seroit une grande erreur de croire que l’article 305
a dérogé à cette égalité voulue par la coutume de Bour
bonnais ; il porte : c< Fille mariée et apanée, ne peut
« demander légitime ni supplément d’icelle. »
Les rédacteurs de la coutume , en déclarant forcloses
les filles mariées et apanées, n’ont pas eu intention de
les traiter moins favorablement que les garçons : ils ont
pensé qu’elles se marieroient plus avantageusement, si
au lieu de leur part dans une hérédité incertaine j on
leur constituoit une somme fix e , dont elles ne pussent
être privées par les événemens auxquels seroit exposée
la fortune de leurs père et mère.
« L ’apanage des filles, dit M . A u ro u x , sur cet article,
« ou leur exclusion de la succession de leurs père, mère,
« aïeul ou aïeule , même des successions collatérales,
« dans les termes de représentation établie par notre
« coutume en faveur des mâles , pour la conservation
« des familles, n’a rien d’injuste, parce qu’une succession
« pouvant diminuer, comme elle peut augmenter, cette
« incertitude fait que l’on suppose toujours de la justice
« et de l’égalité dans les exclusions tacites qui sont faites
C a
�( 20 )
cf moyennant un certain prix et une certaine récom« pense. »
L e texte et le commentaire de cet article de la cou
tume du Bourbonnais , font connoître qu’elle diffère
essentiellement de la coutume d’Auvergne. Dans cette
dernière, la fille mariée, dotée ou non, ne peut, suivant
l’article 20 du chapitre 1 2 , venir aux successions au
lieu que la coutume du Bourbonnais n’exclut que les
filles dotées et apanées.
Il sembleroit que la loi n’étant pas censée contenir des:
termes inutiles , il faut pour forclore la fille dans les
pays régis par la coutume de Bourbonnais , que son
contrat contienne dot et apanage. Mais les sieur et dame
de la Roque ne dissimulent pas que, par un usage peu
favorabLe au sexe le plus facile à opprim er, on considère
comme dotée et apanée toute fille à laquelle il a été
fait une constitution de dot irrévocable , sans aucune
réserve de participation à l’hérédité. On suppose que
les auteurs de ses jours ont entendu l’apaner, quoiqu’ils
n’aient pas dit que la dot qu’ils lui donnoient étoit à
titre d’apanage.
Appliquons ces principes à la cause, et prouvons que
les filles des sieur et dame Dumont n’ont été ni apanées
ni dotées.
Quoique les termes du contrat de mariage de la dame
de la R oque la mettent dans une position plus avan
tageuse , nous allons raisonner comme si toutes les sti
pulations du contrat de la dame de V au re se trouvoient
dans celui de la dame de Beauregard.
�C 21 )
Nous soutenons qu’il n’y a dans lesdits contrats ni
dot ni apanage.
Il n’y a pas d’apanage, parce qu’il y a institution : ces
deux dispositions sont incompatibles *, et'les auteurs
communs ont déclaré qu’ils n’apanoieni pas leurs filles.
Il n’y a pas de d o t, parce qu’il n’a été rien donné
irrévocablement : tout ce qui a été constitué aux filles
ne l’a été qu’en avancement d’hoirie, et à la charge du
rapport.
Les sieur et dame Hilliard seroient donc réduits, pour
combattre cette évidence de principes, à prétendre en
point de droit, qu’une fille peut être en même temps
lievititîre et apanée; m ais ce seroit une erreur choquante '
car par l’institution elle est retenue dans la maison
paternelle ; par l’apanage elle en est excluse : et on ne
peut tout à la fois être retenu dans la maison et exclu
de la maison.
O r, il a été fait une institution d’héritières en faveur
des dames de Vaure et de Beauregard , avec réserve
d’un objet dont la disposition pouvoit avoir lieu en leur
faveur ; elles n’ont donc pas été apanées.
Lorsque M . Auroux d it , dans son commentaii’e sur
l’article 305 de la coutume de Bourbonnais, « qu’une
« fille mariée par pèi'e et mère , à qui on a donné
« quelque chose de certain, est réputée apanée, et par
« conséquent excluse des successions, quoiqu’elle n’y ait
« pas expressément renoncé , et qu’on ne se soit pas
« servi du mot apané, attendu qu’il n’est pas nécessaire
« pour la validité de cette exclusion tacite et coutumière
�« qu’on se soit servi du mot apanê, pourvu qu’il y ait
« dotation faite à ladite fille. »
Il est évident que cet auteur s’exprime ainsirpour les
cas où les père et m ère, dotant leur fille, n’auroient pas
expressément énoncé s’ils entendoient qu’elle vînt ou
non à partage de leur succession; alors, d it-il, il y a
renonciation tacite et coutumière : mais cette renonciation
ne peut être supposée, lorsqu’elles ont été formellement
instituées héritières.
Après avoir fait l’institution avec réserve , et même
conditionnelle si l’on v e u t, les père et mère ont ajouté
que s’ils n’avoient pas fait cette institution, ils auroient
apané ; ce qui explique clairement qu’ils ont mieux aimé
faire l’institution que Fapanoge; car lorsqu’on annonce
que si on n’eût pas fait telle chose, on en eût fait une
autre, on dit positivement que c’est la première et non
la seconde qui a été faite.
Il est indifférent que les auteurs communs eussent pu
apaner, dès qu’ils n’ont pas usé de ce droit; s’ils eussent
fait un apanage de la manière voulue par la coutum e,
il eût été valable ; mais la disposition qu’ils ont préférée
étant prohibée par la l o i , doit être annullée.
Après l’institution , les père et mère ont dit qu’en
avancement de leur future succession, ils constituoient
en dot à la future la somme de. . . . qu’ils l’ont, par une
disposition subséquente, obligée de rapporter lors de
l’ouverture de leurs successions, ou de moins prendre dans
lcsdites successions. Les appelans voudroient adroitement
assimiler cette constitution de d o t, qualifiée d’avance-
�( *3 )
ment d’hoirie, et sujette à rapport, avec la dot dont
parle M. A u ro u x ; mais elles n’ont aucune analogie. Celle
qui est spécifiée par cet auteur, a lieu lorsqu’il n’a pas
été dit si la fille auroit ou non part aux successions; et
dans les contrats des dames de Y aure et de Beauregard,
elles ont été expressément instituéesliéritières. M . Auroux
dit positivement qu’il faut, pour la validité de la cons
titution de d o t, que la fille ait reçu un prix certain ,
une récompense qui soit hors des atteintes de tous les
événeinens : mais les sommes promises ou données aux
dames de Vaure et de Beauregard étant sujettes à rapport,
leur frère, héritier comme elles , devoit y prendre p a rt,
Js’il ii’en eût pas reçu d’égales.
Cette partie du commentaire de M . A uroux s’accorde
avec ce qu’il avoit précédemment énoncé, que l’apanage
des filles ou leur exclusion n’a rien d’injuste, parce que
les successions pouvant diminuer comme elles peuvent
augmenter, cette incertitude fait que l’on suppose toujours
de la justice et de l’égalité dans les exclusions tacites,
faites moyennant xin prix certain.
Les constitutions faites aux dames de Vaure et de
Beauregard, ne leur ont pas été irrévocablement acquises,
puisqu’on les a obligées d’en faire le rapport; ce n’est
pas un prix certain que celui qu’on n’est pas maître de
garder.
Afin de rendre cette vérité plus sensible , on a dit aux
adversaires : Supposons que postérieurement aux contrats
de mariage des dames de Vaure et de Beauregard, la
fortune des père et mère se fût évanouie ; et certes de
■pareils exemples ne sont pas rares. D ’après la loi qui
�Ch )
leur étoit faite dans leurs contrats, lesdites dames n’auroient pu s’empêcher de partager , avec l’héritière de
leur frère, tout ce qu’elles auroient reçu en avancement
d’hoirie.
Dans leur m ém oire, les adversaires cherchent à faire
entendre que ces dames, en renonçant à l’institution,
auroient conservé ce qu’elles avoient reçu , pourvu que
le fils eût trouvé sa légitim e, à défaut de laquelle la
fille même dotée est tenue de l’apporter.
Cela pourroit être vrai s’il n’y avoit dans les contrats
de mariage qu’une dot pure et simple.
Mais précisément les sieur et dame Dumont ont voulu
empêcher que les futures ne profitassent de la faculté de
retenir leur d o t , et ils ont fait ce qui étoit en eux pour
les
empêcher.
i ° . Ils n’ont donné cette dot qu’à titre d’avancement
d’hoirie.
20. Craignant qu’à ce titre encore les futures ne re
tinssent cet avancement, ils ont stipulé que la fu tu r e
seroit néanmoins tenue de rapporter la somme à elle
donnée en avancement.
Si les auteurs communs s’étant ruinés, les filles avoient
voulu garder ce qu’elles auroient reçu, avec quelle véhé
mence les adversaires ne se seroient-ils pas élevéscontre
cette prétention! Ils auroient dit avec raison qu’il n’y
avoit pas dans le contrat des dames de Vaure et de
Beauregard de constitution dotale; qu’il ne leur avoit
été rien donné ou promis qu’à titre d’avancement d’hoirie;
que tout ce qui a été reçu de cette manière est par sa
nature sujet à rapport, lors de l’ouverture des successions;
qua
e n
�( 25)
que par une stipulation bien expresse, à laquelle nulle
loi ne 9’opposoit, on les a obligées à ce rapport; qu’ainsi
leur frère doit en avoir le tie rs, étant institué comme
elles héritier pour cette quotité.
Ainsi les dames de Vaure et de la Roque , qui auroient été contraintes de partager avec l’héritière de leur
frère ce qu’elles avoient reçu, doivent, par réciprocité,
profiter des avantages que leur procurera le partage égal
des autres biens des successions communes.
f Les appelons ont dit que pour décider s’il y a eu un
apanage , il faut examiner si les père et mère ont eu
l’intention d’apaner , plutôt que les termes dont ils se
sont servis , voltmtatern potius quant vcrbci spectavi
placuitj mais il importe peu de rechercher l’intention ,
lorsqu’elle ne pouvoit suffire sans un prix certain qui
n’existe pas. Loin que cette intention ait été telle que
les sieur et dame Hilliard la supposent, elle étoit abso
lument contraire ; on en trouve la preuve dans le propre
contrat de mariage d’André Dumont. Si lors du contrat
de mariage de la dame de V a u re , dans lequel les père
et mère disent que sans l’institution ils l’auroient apanée,
leur intention eût été que cette clause produisît l’eifet
d’un apanage, personne ne devoit mieux le savoir que
le législateur de la fam ille, le sieur Dumont père; il
a prévu dans le contrat de mariage de son fils , le cas
ou la dame de la Roque se refuseroit à la délivrance
du préciput dont il disposoit en faveur d’André Dumont.
S’il avoit entendu, lors du mariage de ses filles, qu’elles
dussent etre regardées comme apanées, dans le cas oii
elles refuseroient d’exécuter les conditions attachées h
V
�( a6 )
l’institution, le sieur Dumont n’eût pas manqué de dire
que la dame de la R o q u e, si elle contestoit le don en
préciput, devoit être restreinte aux 40000 francs cons
titués à. sa m ère, en avancement d’h oirie, et que son
fils recueilleroit toute son hérédité.
A u lieu de cela, le feu sieur Dumont ne suppose
pas même que la dame de la Roque puisse jamais être
privée de sa part héréditaire, persuadé que le contrat
de mariage de la dame de Beauregard ne contenant
aucune disposition de préciput en faveur d’AndréD um ont,
la dame de la Roque pourroit le contester-, il lui fait
un don de 5ooo francs, si elle respecte la disposition
dudit préciput ; et en cas qu’elle ne veuille le souffrir,
il la prive de ce don. C’est, suivant le meilleur interprète
des c l a u s e s contenues dans les contrats de mariage des
filles, la seule peine qu’elle peut encourir. M algré la
grande envie qu’il avoit d’avantager son fils, le sieur
D u m o n t ne se croit pas autorisé à donner atteinte à l’ins
titution de ses filles : son fils n’est institué comme elles,
et conjointement avec,elles, que pour la même quotité.
Relevant avec l’apparence du triom phe, des objec
tions moins importantes, les sieur et dame Hilliard ont
passé celle-ci sous silence, quoiqu’elle leur eût été faite
dans tous les écrits signifiés en première instance ; ils
ont senti l’impuissance d’y répondre rien de plausible.
L e don de 5ooo francs fait à la demoiselle de Beauregard, dans le contrat de mariage de son oncle, étoit
radicalement nul, suivant les articles de la coutume déjà
cités, qui ne permettent de gratifier les enfans que dans
leur propre contrat de mariage. La condition apposée à
�( *7 )
cc don étoit d’ailleurs trop préjudiciable à la dame de la
Roque, pour qu’elle l’acceptât. Aussi n’a-t-elle jamais ré
clamé cette somme en vertu du contrat de mariage du 31
mai 1789. Mais le sieur Dumont père, présent au mariage
contracté par ladite demoiselle de Beau regard , le 30 bru
maire an 11 , augmenta de 10000 francs la constitution
faite à sa mère en avancement d’hoirie, et stipula que
de ces 10000 francs, 5 seroient sujets à rapport, s’ils
avoieiit été payés , et que les 5 autres seroient pris sur
sa réserve de la terre de Mont.
C ’est eh vertu de cette disposition affranchie de toute
condition, et faite dans le propre contrat de la dame
de la R o qu e, qu’elle a exigé ces 5 ooo francs, dont la
demoiselle Dumont lui sert l ’intérêt -, en attendant qu’elle
puisse les acquitter. Quant aux i 5 qui formoientle restant
de ladite réserve, le feu sieur Dumont en a fait donation
à la dame Narjot, fille de la dame de Yaure. Les tuteurs
de la demoiselle Dumont ayant formé demande en nullité
de cette donation, par la même requête qui a précédé
la demande en partage et délivrance de préciput, dirigée
contre la dame de Y a u re , les sieur et dame de la R oque,
ces derniers, pour ne pas surcharger d’un objet étranger
la contestation relative au partage et au préciput, à
laquelle les sieur et dame Narjot ne sont pas intéressés,
après avoir observé qu’il devoit être traité séparément,
sont restés spectateurs du débat qui existoit entre la
demoiselle D u m o n t, les sieur et dame Narjot.
Néanmoins la loi du 18 pluviôse an 5 , attribuant aux
héritiers non avantagés les réserves dont les instituans
D 2
�(
2 8
)
n’auroient pas valablement disposé, les sieur et dame des
la Roque ont pris devant les premiers juges des con
clusions tendantes à ce que la demoiselle Dumont fût
condamnée, si la nullité de la donation faite à la dame
Narjot étoit prononcée, à leur payer j 5oo francs faisant
moitié de la somme donnée, avec intérêts et frais. En
première instance, la demoiselle Dumont a été déboutée
de sa demande en n u llité, et condamnée à payer à la
dame Narjot les i 5ooo francs. On voit dans les motifs
des juges de Gannat, qu’ils ont été principalement dé
terminés par la considération que la demoiselle D u
mont étoit sans qualité pour contester ladite donation,
attendu que ce droit n’appartenoit qu’aux héritiers lé
gitimés;
O
" c’est-à-dire,* il la dame de V a u rc et à la dame
d e la R o q u e .
L e mémoire que les appelans ont fait imprimer ne
dit rien de ce qui s’est passé depuis ledit jugem ent,
entre la demoiselle Dumont et les sieur et dame Narjot.
Les sieur et dame de la R o q u e , qui n’en ont pas connoissance, doivent faire remarquer que si les sieur et
dame Hilliard ont interjeté appel vis-ù-vis des sieur et
dame N arjot, dans le cas où la cour prononceroit la
nullité de cette donation de iôooo francs, il y auroit
lieu d’adjuger la moitié de cette somme , aux sieur et
dame de la R oque, conformément aux conclusions par
eux prises en première instance, et à la loi du 18 plu
viôse an 5. Si au contraire les sieur et dame Hilliard
sont repoussés par la fin de non-rccevoir qui les a fait
succomber en première instance, les sieur et dame de
�( 29 )
'
la Roque entendent se réserver tous leurs droits à la
moitié de ladite somme de iôooo francs, pour les exer
cer quand et ainsi qu’ils aviseront.
SECONDE
PROPOSITION.
Tout don de préciput est formellement prohibé par
la même coutume, hors du contrat de Venfant
qui se marie. S i la jurisprudence Va admis, d’une
manière indirecte, dans les contrats de mariage
des filles instituées héritières, ce n est quautant
q u e lle s auroient été en même temps' dotées moyen
nant un p r ix certain et une récompense irrévo
cable.
i
Forcés de reconnoître dans leur mémoire qu’André
Dumont n’auroit pu être avantagé d’un préciput par le
contrat de mariage de ses sœurs, si cet avantage lui eût
été fait directement, les appelans se bornent à soutenir
qu’il a pu le recueillir par voie indirecte, à cause de la
condition mise à l’institution de ses sœurs.
Si on écoute la voix de la raison, il semble que toute
violation de la loi doit être également réprim ée, et que
le but du législateur est manqué s’il souffre qu’on ob
tienne par artifice ce qu’il a expressément défendu.
L ’article 308 de la coutume du Bourbonnais est ainsi
conçu :
. « Donations faites par père, mère ou autres ascendaos
« à leurs descendans, en préciput, en contrat de ma-
�( 30 )
« nage et faveur d’icelu i, ne sont sujettes à collation
« entre les donataires et leurs cohéritiers. »
Cet article est si formel qu’il n’a pas besoin de com
mentaire : ouvrons néanmoins celui de M. Auroux.
A p rè s avoir dit qu’il faut que le préciput soit donné
expressément à ce titre, il ajoute : « Une seconde condi« tion requise pour la validité du préciput, est qu’il
« soit fait en contrat de mariage et faveur d’icelui, ainsi
« qu’il est dit dans notre article; et la raison est qu’aux
« termes de l’article 217 suprà, les pères et mères ne
« peuvent donner entre-vifs à leurs enfans, hors contrat
« de mariage, » C’est l’observation de M. de Culant sur
notre article : « In gratiam contrahentïs matrimonium ,
« d it - il, alias m o r i b u s n o s tr is n o n v a l e t , hoc quia
« extra contraction matrimonii et ejus favorem non
« valet d o n atio facta liberis à parentibus. A rt. 217. »
M . A u ro u x ne compose pas avec la loi ; comme elle
il dit que le préciput n’est valable qu’autant qu’il est
fait en faveur de ceux qui se marient. L ’opinion de
M . de Culant, qu’il rapporte, n’est pas moins tranchante:
in gratiam contrahentis matrimonium et ejusjavorem ,
alias non valet.
« A la vérité, continue M . A u ro u x, par arrêt rendu
« au rapport de M . l’abbé Pucelle , le 22 mai 1 7 1 6 ,
« entre les dames Maquin et leur frère , le préciput
« de 30000 fr. fait au frère dans le contrat de mariage
« de ses sœurs, par les père et m è r e , fut confirmé :
« mais c’est parce que ce préciput étoit une clause et
« condition du rappel et institution desdites dames,
« sans laquelle réserve du préciput il étoit dit que
�yt
( 31 )
lesdits père et mère lesauroient apanées, et sous conVention que, où lesàites dames voudraient contester
ledit préciput, elles demeureraient apanées pour la
somme de 24000 fr a n c s chacune ; ce qui se pratique
ainsi dans cette province. »
Les appelans se sont persuadés que cet arrêt étoit
à leur avantage , tandis qu’il leur est absolument con
traire. M . A u r o u x , en rapportant les motifs qui ont
déterminé cet a rrê t, fait connoître qu’il n’est pas en
opposition avec ce qu’il a dit précédemment. Les mots
soulignés ci-dessus le sont aussi dans le commentaire
de M . A uroux ; ils contiennent la stipulation expresse
d’un apanage qui doit demeurer aux filles , et tenir
lieu de leur portion héréditaire r si elles ne veulent
souffrir le préciput. En disant qu’on a jugé ain si, par
cette raison, M . A uroux exprime d’une manière évi
dente que sans cette stipulation ont eût jugé différem
ment •, d’ou il résulte que les dames de Vaure et de
Beauregard, qui n’ont pas été apanées, et auxquelles
il n’a été rien constitué qu’en avancement d’hoirie, et
à la charge du rap p o rt, sont fondées à soutenir que
l ’arrêt de 1716 a préjugé p o u r, et non contr’elles.
Enfm M . A uroux qui avoit cité M . Menudel l’apporte
son avis, dans lequel cet auteur après avoir dit qu’on
reçoit le préciput dans le contrat de mariage des filles
instituées lieritieres à cette condition, conseille de mettre
dans le contrat que les père et mère ont doté la fille
de la somme de.... h la charge de venir à la succession
en la rapportant, et qu’où elle fourniroit débat contre
ledit préciput, ils déclarent qu’ils apanent ladite fille h
«
«
«
«
«
\
�( 3 0
la somme d e ....... parce qu’en mettant simplement la
clause qu’ils instituent ladite fille sous ledit préciput,
elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée, à défaut d’exé
cution de ladite clause , qui sonne toutes fois en une
institution conditionnelle, et que les mots qui seroient
dans le contrat, sans lequel préciput les père et mère
l ’auroient apanée, ne seroient pas un apanage form el,
mais plutôt une simple én'oncintion du dessein d’apaner,
lequel n’étant pas diserlement expliqué , ne l’empê
che roi t pas de venir à une succession ab intestat des
père et m ère, en rapportant. Laquelle objection n’est
pourtant pas considérable , parce que le mot de dot
emporte quant à soi l’apanage, lequel est valable ah'qito
dato 2>cl promisso de pressenti.
Quoique l’avis de M . Menudel ne soit pas rédigé avec
toute la clarté qu’on pourroit désirer, on y voit que
.la solidité des stipulations par lesquelles on voudroit
assurer au fils un préciput dans le contrat de mariage
de ses sœurs , est subordonnée à la constitution d’une
dot de prœsenti. Les mots laquelle objection n'est pour
tant pas considérable, se rapportent aux difficultés que
la fille élèveroit, en alléguant qu’elle n’a pas été expres
sément apanée; ce q u i, suivant M . Menudel et même
suivant M . A u ro u x , peut être suppléé par une consti
tution à titre de dot.
L ’arrêt du 22 mai 17 16 , comme l’avis de M . Menudel,
ne peuvent être opposés, parce que les contrats de ma
riage des dames de Yaure et de Beauregard ne con
tiennent pas les deux clauses d’institution conditionnelle,
et stipulation de dot, tenant lieu de la portion hérédi
taire.
�( 33 )
faire. Les auteurs communs n’ont ni apané , ni eu
l’intention d’apaner leurs filles.
A u décès de la dame D um ont, ses filles ont été saisies
du tiers qui revenoit à chacune d’elles dans sa succession,
par la règle le mort saisit le vif. L e sieur Dumont père
n’a pu, postérieurement à ce décès , transmettre à André
Dumont la moitié de la terre de M on t, qui avoit appar
tenu à sa mère. La donation faite audit André Dumont
ne peut être validée par la faculté d’élire que les père
et mère s’étoient déférée mutuellement. Nul ne peut
faire par autrui ce qu’il ne lui est pas permis de faire
lui-même. Dès que la loi municipale défendoit impé
rieusement à la dame Dumont d’avantager son fils dans
un autre contrat de mariage que le sie n , le pouvoir
donné au mari est vicieux dans sa source : tout ce qui
a été fait en vertu de ce pouvoir est nul.
Dans nos mœurs , le droit d’élire a toujours été
regardé comme abusif ; il doit surtout être rejeté lors
qu’on ne l’a déféré que pour se procurer le moyen d’avan
tager une personne prohibée. Celui à qui ladite faculté
d’élire a été donnée ne pouvoit la recevoir , parce que
les articles 226 et 227 de la coutume de Bourbonnais,
défendent, durant le mariage, toute association, dona
tion ou autre contrat entre la femme et le mari, même
les donations mutuelles, s’ils ont des enfans.
Vainement les sieur et dame Ililliard disent-ils que
la faculté d’elire seroit n u lle, si elle étoit confé rée par
disposition directe, mais qu’elle peut valoir comme con
dition de l’institution des filles; qu’elle ne conféroit
E
�( 34 )
aucun avantage à l’époux survivant ; qu’ainsi elle n’étoit
pas contraire aux lois prohibitives d’avantages entre
époux.
3N’est-ce pas un avantage bien ré e l, et d’une grande
im portance, que celui qui met à la disposition d’un des
époux environ la moitié des biens de l’autre? D ’ailleurs
la loi n’a pas fait de distinction -, elle a prohibé toute
association, donation ou autre contrat entre époux,
même les dons mutuels : sa disposition doit être exécutée
par tous ceux qui étoient soumis à son empire.
Ce qui sera dit ci-après sur la question de savoir si
les stipulations prohibées peuvent valoir comme condi
tion d’une institution, s’appliquera à cette faculté d’élire
que les appelans vouloient en première instance faire
valoir comme mandat ou procuration; moyen qu’ils
ont abandonné, parce qu’on leur a observé que tout
.mandat expire à la mort du mandant, et que les morts ne
sauroient contracter, ni en personne, ni par procureur.
’ Il y avoit un autre vice dans la disposition de la
terre de M on t, et la faculté d’élire qui s’y rapportoit.
: Cette terre étoit un acquêt de communauté dont le
mari est seul maître, suivant l’article 136 de la même
coutume : les dispositions que faisoit la femme relative
ment à un bien sur lequel elle n’avoit pas de droit
acquis, étoient une usurpation du pouvoir que la loi
donne au mari seul sur les biens de la co m m u n a u té . O n
peut, disent les appelans, disposer d’un droit éventuel;
cela est vrai : mais la dame Duinont n’a pas disposé
'hypothétiquem ent; elle a donné, comme a elle appar-
�>/
. (
3
5
)
tenant, un bien qui étoit entre les mains de son mari.
-Aux textes les moins équivoques de la coutume, aux
suffrages de ses plus habiles interprètes, les sieur et
dame Hilliard opposent les notes manuscrites d’un ancien
avocat de M oulins; ils disent que ces notes ont été com
muniquées aux sieur et dame de la R oque, qui ne les
ont p oin t/ vues, et seroient hors d’état d’en vérifier
l’écriture. Nous avons fait connoître à quels dangers on
s’exposeroit si on vouloit asseoir des jugemens sur de
pareilles bases.
Les sieur et dame Hilliard ont encore cherché à tirer
avantage d’une consultation obtenue, d is e n t-ils , par
M . de Vaure l u i - m ô m e , de M M . B o iro t, Bergier et
D artis, sous la date du 12 décembre i 8 o 5 . Les appelans
assurent qu’ils ont copie de cette consultation, que cepen
dant ils ne tiennent pas du sieur de Vaure.
Ces jurisconsultes ont été d’avis, et c’est une erreur
échappée à des hommes très - éclairés, que le préciput
devoit être relâché à la demoiselle D um ont, en vertu
de l’institution de ses tantes ; ils ont aussi décidé qu’on
ne pouvoit regarder comme valable la faculté que les
père et mère s’étoient donnée, et au survivant d’eux,
par le contrat de la dame de V a u re, de disposer de la
totalité de la terre de M ont, au préjudice de l’institu
tion faite au profit de ladite dame, par égalité avec ses
frère et sœurs, soit parce que la coutume contenoit
des prohibitions particulières pour les dispositions des
pères et mères à leurs enfans, et pour les dispositions
entre ép ou x, soit parce que la terre de M ont étant un
E a
�, ( 36}
acquêt de communauté, la dame Pîtat donnoit ce qui
étoit sous la puissance du mari seul; qu’ainsi la repré
sentante d’André Dumont ne peut avoir la moitié de la
terre de M on t, qui a appartenu à la succession de la
dame Pitat, en vertu de la disposition faite en faveur
d’A ndré D u m o n t, par son contrat de mariage.
Enfin ils ont décidé que la somme de 6000 livres,
réservée pour acquisition de cens, et dont les premiers
juges ont mal à propos attribué la moitié à la demoiselle
D u m on t, ne pouvoit lui appartenu'.
Les sieur et dame Hilliard s’emparent de ce qui est
à leur avantage, dans cette consultation, et rejettent
tout ce qui est contraire à leurs intérêts.
En coutume d’A u v e r g n e , l’exclusion de la fille mariée
est de droit -, elle ne peut venir aux successions que par
un rappel formel dé ses père et mère : mais il n’en est
pas de même ën Boui’bonnais, où la fille a des droits
égaux à 'ceux de ses frères, dans la succession de ses
père et mère ; que pour être privée de ses droits, il
faut qu’on lui en ait assuré le prix de manière qu’elle
puisse gagner comme perdre à cet arrangement, suivant
les événemens auxquels sera exposée ensuite la fortune
de ceux dont elle auroit été instituée héritière : d’où
résulte la nécessité de faire, avec l’institution condition
n elle, une constitution de dot irrévocable, afin que si
la fille n’accfcpte pas la première, elle soit forclose par
la seconde.
�(
TRO ISIÈM E
37
),
PROPOSITION.
S i les conditions apposées à une institution sont
contraires aux lo is , Vinstitué peut profiter de
l ’institution sans exécuter la condition ; il peut
aussi renoncer a Vinstitution ; et la fille qui n a
pas été apanée, ou à laquelle il n a pas été f a it
une constitution dotale} telle quelle doit être pour
tenir lieu d’apanage, vient à la succession comme
héritière naturelle et légitime.
Pour tacher de persuader qu’André Dumont a pu
être avantagé par préciput, dans le contrat de mariage
de ses sœurs, de la moitié de la terre de M o n t, qui
appartenoit à sa m ère, parce que la destination de ce
bien , et le pouvoir d’élire donné au survivant des
époux , étoient des conditions de l’institution , les appelans exposent dans leur mémoire (page 10 et suivantes),
que la raison dit à qui veut l’entendre, qu’il est loisible
à celui qui exerce une libéralité, d’y apposer telles con
ditions qu’il juge convenables, pourvu qu’elles ne soient
contraires ni aux lois, ni aux mœurs; que c’est à celui
qui est l’objet de la libéralité, à l’accepter ou à y re
noncer; mais s’il l’accepte, il doit remplir les charges
et conditions qui y sont imposées ;
Qu’A uroux et Lebrun décident qu’on peut faire
l’équipollent d’une institution contractuelle , au profit
d’autres personnes que les mariés, en instituant la per_
�t 33 )
sonne mariée à la charge d’associer ses frères et sœurs
pour certaine quotité de l’institution ; ce qui vaut à leur
profit comme une condition de l’institution, parce que
l’association étant une charge de l’institution dont elle
fait partie, l’ institué est dans la nécessité, ou de renoncer
à l’institution, ou de consentir à l’association;
Que deux frères s’étant institués réciproquement dans
le contrat de mariage de l’un d’eux, celle faite en faveur
de celui qui ne se marioit pas , valoit comme condi
tion; que l’article 1121 du Code Napoléon a consacré
ces principes ; que cette disposition au profit d’un tiers
peut être révoquée par l ’instituant, qui n’est pas lié ,
mais le donataire ou l’institué ne peut se dégager qu’en
renonçant au bienfait ;
Que des conditions pouvant être apposées à une ins
titution , on ne voit pas ce qui pourroit faire obstacle à
ce qu’un institué fût tenu de souffrir le prélèvement d’un
précipu t, comme condition de son institution ; qu’un
instituant pouvant faire passer à des tiers une quotité de
succession, comme condition de l’institution faite au profit
de celui qui se m arie, on doit à plus forte raison décider
qu’une disposition au profit d’un tiers, qui n’a pour but
qu’une chose déterminée, peut valoir comme condition
d’une institution, suivant la maxime qui peut le plus
peut le moins ; qu’il y a plusieurs décisions d’avocats de
M ou lin s, sur un manuscrit de l’un d’e u x , et un arrêt
du 22 mai 17 16 , cité par A u ro u x, et dont les circons
tances sont développées dans ledit manuscrit ;
Que les contrats de mariage des filles des sieur et dame
Dumont contiennent une institution restreinte par la sti-
�( 39 )
pulation d’une réserve modifiée par plusieurs conditions
qu’il a plu aux instituans d’y apposer, tellement liées
avec l’institution , qu’on ne peut en supprimer une sans
anéantir, dans le vœu des instituans, l’institution ellemême •,
Que l’objection tirée par les dames de Vaure et de la
R oque, des articles 217 et 226 de la coutume, dont l’un
s’opposoit à la disposition faite au profit d’André Dum ont,
dans le contrat de mariage de ses sœurs, et l’autre à la
faculté d’élire, se détruit, en ne confondant pas les dis
positions principales et directes avec les dispositions rela
tives et conditionnelles; que l’institution faite par un père
en faveur de deux enfans , par le contrat de mariage de
l’un d’eu x , étoit nulle à l’égard de celui qui ne se marioit
p as , tandis que si l’institution n’étoit faite qu’en faveur
de celui qui se m arioit, à la charge d’associer son frère,
la disposition étoit valable au profit de ce dernier, comme
condition de l’institution faite à son frère; de m êm e, en
coutume de Bourbonnais, la disposition faite par des
époux pendant le m ariage, au profit du survivant, de
l’usufruit des biens du prédécédé, étoit n u lle , comme
contenant un avantage prohibé, tandis qu’elle a toujours
été considérée comme valide, lorsqu’elle se rattaclioit à
une institution de leurs enfans , et qu’elle en étoit la
condition ; ce qui est attesté par A u r o u x , sur les arti
cles 226 et 227 ; que c’est sur ces principes que repose
la consultation de M M . B oirot, Bergier et D artis, dont
les sieur et dame Hilliard argumentent longuement.
Nous n’avons omis aucunes des raisons par lesquelles
�( 4° )
les appelans veulent établir que la fille d’André Dumont
doit avoir, par préciput, la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame P itat, comme étant une
condition de l’institution de ses tantes.
En analisant ces raisons, on voit d’abord qu’à l’art. 308
de la loi municipale , qui défend toutes donations en
préciput, si ce n’est dans le contrat et en faveur de
l’enfant qui se m arie, les sieur et dame Hilliard n’en
opposent aucun autre duquel on puisse tirer des induc
tions contraires; mais ils disent que suivant M . A u ro u x,
dont l’avis est conforme à celui de Lebrun, on peut faire
indirectement, et par condition apposée à une institution,
des dispositions en faveur d’autres que les mariés ; qu’on
peut instituer celui qui se m arie, à la charge d’associer
telle ou telle personne, et donner l’usufruit au survivant
des é p o u x , en stipulant cette condition dans une insti
tution.
La première réflexion qui se présente est que M . A uroux
q u i, dans son commentaire sur les articles 219 et 224,
indique le moyen de faire l’équipollent d’une institution
contractuelle au profit d’un autre que les mariés, en ins
tituant la personne mariée à la charge d’associer l’autre,
ayant établi de la manière la plus positive, lorsqu’il traite
du préciput, qu’on ne peut le donner qu’à celui qui con
tracte mariage, on doit en conclure qu’il n’en est pas de
l’association, dont la coutume ne parle pas, comme du
préciput sur lequel elle a une disposition prohibitive trèsexpresse.
Dans les pays où l’association est en usage, elle a lieu
autant pour l’avantage de l’institué que pour celui de
l’associé.
�(4 0
l’associé. Ce dernier est retenu dans la maison; il aide à
cultiver les biens, à faire valoir les entreprises de com
merce. Les sieur et dame Hilliard ont cité un arrêt rap
porté par M. A u ro u x , qui confirma une institution réci
proque , faite par deux frères dans le contrat de mariage
de l’un d’eux ; mais ils se sont bien gardés d’ajouter que
M . Auroux donne pour motif que c’étoit une convention
par l’effet de laquelle les deux frères couroient même
chance, et dont le bénéfice dépendoit uniquement de la
survie.
Ces stipulations, qui peuvent tourner au profit de
l’institué, ne sauroient être comparées avec un don en
p r é c ip u t, qui a essentiellement pour objet de détruire
l’égalité voulue par la coutume à laquelle les parties
étoient soumises.
Quant à l’usufruit, les appelans ont cité le n°. 30 du
commentaire de M . A uroux , sur l’article 327 de la cou
tum e, où il dit que les conjoints père et mère, mariant
leurs enfans, peuvent convenir, en leur faisant des do
nations ou les instituant leurs héritiers, que lesdits enfans
laisseront jouir le survivant de leurs père et m è re , ainsi
qu’il est dit dans l’article 281 de la coutume de Paris,
qui s’observe en Bourbonnais, suivant M M . de Culant,
D uret et Semin : E o casu , dit M . de Culant, Jilius
recipt'oce censeiur usum Jructum douasse superstiti.
Il résulte de ce passage, que le conjoint survivant n’est
pas censé tenir l’usufruit de l’autre conjoint, auquel la
loi interdisoit cette libéralité - qu’ ü la reçoit p a r l ’e ffe t
du consentement de l’héritier institué, sans doute m a je u r ;
car M . A uroux ajoute, dans le nombre suivant, qu’il
F
�faut , pour la validité de cette convention, qu’elle soit
faite avec tous les enfans héritiers, à mesure qu’ils se
marient. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il s’agit de déroger
à une loi précise, il ne faut pas raisonner d’un cas à un
au tre, n’y ayant jamais mêmes circonstances et mêmes
motifs.
L ’arrêt de 1 7 1 6 , cité dans les prétendues notes de
M . Beraud, et rapporté par M . A uroux loin d’être
contraire aux sieur et dame de la R o qu e, confirme les
principes- sur lesquels ils se fondent, attendu , comme
nous l’avons déjà d it , qu’il n’adjugea le- préciput qu’à,
raison de ce qu’y ayant dans les contrats des dames
M aquin , institution conditionnelle et apanage form el,
il falloit qu’elles prissent l’institution, ou qu’elles fussent
forcloses.
. M al à propos les appelans o n t-ils invoqué la dispo
sition de l’article 1121 du Code N apoléon, qui permet
de stipuler au profit d’un tiers, lorsque telle est la con
dition d’une donation que l’on fait à un autre ; cet article
suppose que la stipulation a pour objet une chose qui
n’est défendue par aucune l o i , sans quoi il seroit en
contradiction avec l’article 900, qui répute non écrite
toute condition contraire aux lois, et avec l’article 1108 ,
qui v eu t, pour la validité d’une obligation, qu’elle ait
une cause licite. La même raison écarte l’allégation que
les contrats de mariage sont susceptibles de toutes con
ventions; celles qui tendent à violer la l o i , ne sont pas
plus permises dans les contrats de mariage que dans les
autres actes.
Les appelans auroient beaucoup mieux fait de garder
�( 43 )
le silence sur la consultation de M M . Boirot, Bergier et
Da rtis , dont ils se prévalent, quant au point qui leur
est favorable , et qu’ils rejettent dans tous les autres. S’il
faut croire, sur l’allégation des adversaires, que ces juris
consultes, décidant quatre questions, ont erré dans les
trois où ils ont contrarié les prétentions de la demoiselle
Dumont , elle ne peut exiger qu’on prenne leur avis
pour guide en jugeant l’autre question, qu’ils ont décidée
contre les sieur et dame de Vaure.
En Bourbonnais, le mot dotée n’étoit synonyme d’a\panée que lorsque les père et m ère, mariant leur fille,
lui av o ie n t , avec intention de l’exclure de leur succes
sion, constitué un objet déterminé dont elle ne pou voit
être privée par les événemens auxquels leur fortune
seroit exposée, et qui formoit ainsi lejprix de la renon
ciation tacite que la fille étoit présumée avoir faite aux
Buccessions des auteurs de ses jours. Les sieur et dame
Dumont n’ont fait ni voulu faire une constitution de
ce genre.
■Le contrat de ‘mariage de la dame de 'Vaure contient
la preuve que dans l’intention des instituans le mot
dot n’étoit pas synonyme à'apanage ; car ils ont cons
titué une dot, et ont dit qu’ëlle n’étoit pas un apanage;
qu’ils en auroient constitué une à ce titre, s’ils n’avoient
mieux aimé instituer la'future comme ils l’ont ifait.
Ce ne sont pas les mots, comme les appelans l’ont dit
eux-m êm es, qu’il faut considérer en pareil cas, mais
la chose qui a été réellement faite par les père et mère.
O n t-ils privé la fille de la qualité d’héritière, si elle
n’acceptoit'pas l’institution'? L ’o n t-ils alors qfïranchie
F 2
�C44)
des charges et des inquiétudes de l’hérédité? L u i ontils donné le prix de sa renonciation tacite, en lui assurant
une somme qu’elle conserverait indépendamment de tous
les événemens ? Ne lui on t-ils réservé aucun espoir
successif? On pourrait dire, quand ils n’auroient em
ployé ni le mot d o t, ni celui d'apanage, qu’il y a for
clusion. Si au contraire la fille a été retenue dans la
fam ille, et instituée héritière; si ce qui lui a été donné
ou promis n’étoit qu’un avancement d’hoirie qu’on l’a
obligée de l’apporter, et q u i, par conséquent , n’étoit
pas une récompense certaine, eussent-ils dit expressé
ment qu’ils ont doté et apané leur fille, elle ne serait
pas forclose.
Les. auteurs communs attachoient si peu au mot dot
l’idée présentée par celui d'apanage, qu’ils se sont servi
des mêmes expressions dans le contrat de mariage d’André
Dumont ; il y est dit : « En avancement d’h oirie, le
« sieur Dumont père « constitué et constitue en d o t,
« au sieur futur époux , la somme de 40000 livres, qui,
« avec celle de 10000 livres provenante de la réserve,
« font 5oooo livres; laquelle constitution dotale sera
« imputée, etc. » Les mots constitué en dot et consti
tution dotale, employés et même plus répétés dans le
contrat de mariage du frère, que dans celui des soeurs,
ne permettent pas de douter qu’on 11’y attachoit pas.,
dans la famille, le sens que les appelans voudraient lui
donner pour le rendre identique avec celui d'apanage..
Ce qui a été dit précédemment , répond aussi à l’ob
jection que les père et mère pouvant livrer leur fille
�à une forclusion absolue, ont p u , à plus forte raison,
ne la forclore qu’en partie , et l’obliger à respecter la
destination d’un objet particulier : 011 ne conçoit pas
trop comment, dans la même succession, une fille peut
être héritière en partie, et forclose pour une autre partie.
Mais les instituans n’auroient p u , suivant la loi qui les
régissoit, forclore la fille par leur simple volonté ; elle
étoit appelée, par cette lo i, à partager leur succession;
on ne pouvoit la priver des droits qu’elle y avoit, que
par l’espèce de composition à forfait, qui se trouve dans
la constitution d’une dot certaine et irrévocable, tenant
lieu de cc qu’elle auroit recueilli dans des successions
qui pou voient diminuer comme augmenter.
L ’adage qui peut le plus peut le m o in s, est ici inap
p licable, puisque les père et mère 11’ayant pas constitué
à leur fille une dot telle qu’il la falloit pour opérer la
forclusion, ils ne pouvoient la priver ni de la totalité,
ni de partie de leurs successions. Eussent-ils pu la livrer
à une forclusion absolue en l’apanant, cette circons
tance est indifférente, dès qu’ils ne l’ont pas apanée. Il
en est comme si un particulier, voulant gratifier son
am i, lui faisoit vente d’un bien sans stipulation de p rix;
l’acquéreur n’acquerroit aucun droit par un pareil contrat,
quoiqu’il fût certain que le vendeur auroit pu valablement (
lui faire une donation cent fois plus considérable. Tant
pis pour l’avantagé, quand celui qui vouloit le gratifier
a fait ce qu’il ne pouvoit pas faire, au lieu de faire ce
qui eût été valable.
Il est certain que la terre de M ont n’a été mise hors
de l’institution faite en faveur de la dame de Vaure ,,
�( 4 0
qu’èn ce sens, qu’elle pouvoit ne pas la trouver dans
l’hérédité : c’est le seul effet qu’étoit susceptible de pro
duire la longue stipulation insérée dans son contrat de
mariage. La réserve de cette terre rendoit les instituons
maîtres d’en disposer par acte valable ; et si la dame
D u mont eût été présente au contrat de mariage de son
'fils , et lui eût donné en préciput sa moitié de cette
te rre , la fille d’A ndré D u m ont, à laquelle on ne con
teste pas l’autre moitié donnée par le père, auroit aùssi
recueilli celle-oi.
Non-seulement le contrat de mariage de la dame de
V a ure ne l’a point privée de l’espérance d’avoir part à
cet immeuble ; elle pouvoit ’môme l’avoir en totalité, si
ses père et mère en disposoîent en sa faveu r, comme
ils s’en étoient réservé le droit. A défaut de disposition
valable, cette terre rentroit dans la masse de l’hérédité,
et toiis ceux qui y venoient avec un titre universel devoient la partager.
A l’allégation, quon peut fa ir e indirectement ce qui
est prohibé ouvertement, les sieur et dame de la Roque
ont opposé la maxime bien plus digne d’être consacrée
par la justice, que la condition contraire aux lois ou aux
bonnes mœurs, est réputée non écrite; qu’ainsi, celui
qui en a été grevé n’est pas tenu de l’exécuter. 'Ils ont
v. soutenu que la loi ordonnerait vainement, s’il étoit permis
de se soustraire à son empire par des voies tortueuses et
indirectes ; rque cette vérité étoit écrite dans les anciens
livres, comme elle l’est dans les articles 900 et 1174 du
Code Napoléon; enfin, qu’elle avoit été proclamée par
plusieurs arrêts solennels.
�( 47 )
Denizart, dans sa collection de jurisprudence, au mot
Dispositions conditionnelles, n°. 2 1 , en cite un rendu
en la grand’chambre du parlement de Paris, le 13 mai
1762. Il s’agissoit d’une institution d’héritier faite par le
sieur de V auban , en faveur de son n eveu , à la charge
de laisser à la veuve la jouissance de plusieurs terres
situées dans des coutumes qui prohiboient les avantages
entre époux. L ’institution fut maintenue , et l’héritier
déchargé de la condition. Cet arrêt rendu sur les con
clusions de M. Joly de Fleury, est aussi rapporté dans la
collection des décisions nouvelles, vulgairement appelée
Nouveau D enizart, au mot Avantage prohibé. On y voit
que la veuve faisoit valoir que la disposition devoit être
exécutée en tout son contenu; que l’héritier n’étant ins
titué que sous cette condition, ne pouvoit se dispenser
de l’accomplir ; qu’à la difficulté qui naissoit de la con
dition sous laquelle l’héritier éloit institué, on observoit
qu’elle devoit être regardée comme non écrite, puisqu’elle
étoit contraire à la prohibition expresse de la coutume:
et il fut ainsi jugé.
Par un autre arrêt du 2 avril 176 2 , rapporté dans
la môme collection, le parlement de P aris, dans le ressort
duquel avoient été. passés tous les contrats de mariage des
enfans des sieur et dame D u m ont, consacra les mêmes
principes, et jugea de plus que la prohibition d’avan
tager, dans les coutumes qui la contenoient, étoit absolue,
et pouvoit etre opposée par tous ceux qui y avoient
intérêt, sans examiner si elle avoit été introduite en leur
faveur ou non.
Il seroit trop long de rapporter l’espèce de cet arrêt ;
�54>
( 48 )
il suffit de remarquer qu’on opposoit aussi à. l’héritier
qu’il n’étoit pas recevable à attaquer la principale dispo
sition de l’acte dont il tiroit lui-même son droit à l’hé
rédité ; que cet acte étoit un tout dont on ne pouvoit
diviser les dispositions; il répondoit que les lois 14 , au
digeste D e cond. et déni. , et la loi 9 , §. 10, D e hœred.
inslituend. , décident qu’une condition nulle peut être
attaquée par le légataire, sans qu’il soit exposé à perdre
son legs. M . l’avocat général écarta les fins de non-rece
vo ir, et se fonda sur ce que l’article de la coutume étant
impératif, la prohibition étoit d’ordre public, et absolue;
qu’elle avoit été introduite par les lo is, de peur que les
conjoints ne se dépouillassent trop facilement par un
amour m utuel, et plus encore pour enlever une source
de division dans les mariages, empêcher le plus adroit,
le plus intéressé de tromper l’autre, le plus violent, le
plus emporté , de forcer l’autre à donner : et toutes les
fo is, disoit ce magistrat, que quelqu’un pourra établir
un droit, une qualité, une action, la justice doit saisir avec
empressement l’occasion de faire prévaloir sur la dispo
sition prohibée de l’homme, la disposition prohibitive
de la loi.
Hors d’état de citer aucune disposition de la coutume,
ni aucun préjugé favorable au système qu’ils voudroieut
faire adopter, les appelans s’emparent de quelques phrases
d’un discours de ce très-savant jurisconsulte, qui remplit
avec tant de distinction l’une des places les plus éminentes
de l’ordre judiciaire. Mais dans la cause où M. Merlin
portoit la parole, il s’agissoit d’une condition d’épouser
telle personne ; condition qui, à l’époque où elle avoit
été
�(49 )
é,té imposée n’étoit pas illicLle ; et ici la condition a pour
objet un don en p récip u t, que le texte le plus formel
de la loi municipale défendoit de donner à l’enfant qui
ne contractoit pas mariage. M . M erlin disoit que si la
condition dont il s’occupoit devoit être considérée comme
illicite, elle conduiroit à dire qu’il falloit regarder comme
nulle l’institution faite sous cette condition.
Un pareil résultat ne procureroit aucun avantage à
la demoiselle Dumont : les dames de Vaure et de la
Roque se trouveroient placées dans la même position
que si elles s’étoient mariées sans contrat de m ariage,
ou si leurs père et mère n’avoient pas été présens à
leur contrat ; alors elles i-ecueilleroient toujours le tiers
de tous les biens de la dame P itat, leur m ère, décédée
intestat. L ’arrêt du 22 nivôse an 9 , dont les adver
saires isolent un considérant, se rapporte aussi à une
condition qui n’étoit point illicite ; et s’il y est dit que
dans les actes entre-vifs, il faut respecter la volonté de
tous, ce ne peut être que relativement aux actes synallagmatiques, consentis par des personnes capables de conI tracter, et non pour ceux où une mineure a été, en fraude
de la l o i , grevée d’une condition à laquelle il lui étoit
impossible de donner un consentement valable.
Par une bizarrerie bien extraordinaire, tout ce qui
est dit dans cette partie du mémoire des appelons est
en contradiction avec ce qu’on lit à la page i 5 , où parlant
de l’arrêt de 1716 , rapporté par A u ro u x , qui valida une
disposition en p récip u t, apposée comme condition à
une institution d’héritier, dans un contrat où on avoit
en même temps apané une fille majeure, les appelans,
G
�C5o )
disent que si cette clause de préciput eût été contraire
il la lo i, ainsi que le porte un des considérans du ju
gement de Gannat, elle auroit été réputée non écrite,
nonobstant la menace de forclusion ; qu’il a toujoui-s été
de principe qu’une clause pénale ne pouvoit valider
une clause contraire à la l o i , parce qu’autrement on
pourroit se réserver les moyens de violer la loi.
Les appelans conviennent ic i, d’une manière bien
expresse, que si les conditions mises à l’institution de
la dame de Vaure étoient contraires à la lo i, elles sont
censées non écrites. Il ne sagit donc que d’examiner le
fait; et pour cela il suffit de lire le contrat du 19 no
vembre 1775. La dame D um ont, en avantageant son
fils de sa portion de l,à terre de M on t, en cas qu’elle
n ’ e n d i s p o s â t ,pas autrement, et donnant à son mari le
droit de. la lui transférer, violait ouvertement les articles
3 1 7 , 219 et 321 de la coutume sous l’empire de laquelle?
elle v iv o it, qui défendent aux pères et mères d’avantager
leurs enfans, si ce n’est par leur.propre contrat de mariage,
ou p<jr legs tenant lieu de portion héréditaire; l’art. 227,
qui ne permet point aux époux ayant enfans de se-faire,
aucun avantage, mêmepardonmutuel', durant le mariage;
l’article 136, qui l’endant le mari seul maître de la com
munauté , prive la femme du droit de disposer des biens
qui la composent.
L a condition.de respecter le préciput eût-elle été
obligatoire'pour les dames de Vaure et de la R o q u e ,elles peuvent s’en dégager en s’en tenant à la qualité
d’hériticres naturelles et légitimes. Lq coutume du Bour
bonnais, aïticle.223, dit que rhéritier institué. est libre
�( 5i )
de renoncer. M . A u ro u x, sur cet article, observé què
celui qui a été institué héritier par son contrat de mariage,
peut renoncer, si bon lui semble } à la successiori de
l’instituant, quand elle est échue, par hl raison qüe
l’institution contractuelle n’a été introduite qu’eii faveur
des mariés et de leurs descendans, et qu’il est librë à tui
chacun de renoncer à une-cliose introduite en sa faveur^
joint que l’héritier contractuel n’étbit pas en état d’ac
cepter la succession lors de l’institution, puisqu’elle ri’étôit
pas encore ouverte, et qu’il n’a contracté que sur Ici
faculté d’être héritier s’il le véüt.
T o u s les auteurs que les sieur et damé ïlilliard ont
cités comme disant que des associations et ddns d’üsufrilit
peuvent être maintenus, s’ils sont une condition de l’ins
titution , se fondent sur ce que ¡’institué ne pèiit s’àin
franchir dé la condition qti’en renonçant à l’iilstitutioü ;
d’où il suit qu’au moyéii de èetté réiidficiatiüiri, l’insti
tution et les conditions qui ÿ tint été fiiisës sënt éorfime
non avenues.
O r , si l’institution n’existoit Jjaà,- l^îs dattieè dé Vâuf-ë
et delà Roqué, contre lesquelles il a ’ÿ à aucune forclusion
légale ni conventionnelle, cdirïttié ôn' î’à:prouvé ci-devant,
recueilleroient le tiers dé touté là succession dé là dame
1 itat, leur mère et aïeule, èri qualité de ses héritières
naturelles ét légitimes : on rie saüroit donc les en priver.
A la page 33 de leur m ém oire, les appelait ont cru
faire une forte- objection, en disant qu’ori petit opposer
aux- dames de Vaure e t de la Roque Qu’elles se p r é s e n te n t
pour succéder'en vertu dé leur institution, ou q u ’e lle s
renoncent à c& titré -q u e d&És lé prerûier cas, leur titré
G 2
�( 52 )
étant indivisible, elles doivent l’exécuter intégralement;
que, dans le second cas, n’étant plus instituées, elles ne
sont que dotées, et dès-lors forcloses de d ro it, parce
qu’aux termes de l’art. 3o 5 , et suivant la jurisprudence la
plus constante, toute fille simplement dotée est par cela
même apanée ; d’où il résulte qu’elles ne peuvent venir
comme héritières ab intestat.
On peut répondre aux appelans : Ce dilemme, qui
renferme la quintessence de tous vos moyens, n’est qu’un
tissu d’erreurs.
i°. En nous présentant comme héritières instituées ,
nous ne serions pas obligées d’exécuter intégralement
le titre qui contient l’institution; nous en séparerions
la condition de souffrir le préciput, le don fait à André
Dumont dans le contrat de mariage de ses sœurs, étant
prohibe par la loi qui nous régissoit. Nous profiterions
de l’institution comme s’il n’existoit pas de condition,
celles de ce genre étant réputées non écrites. Si ce qui
est prohibé ne pou voit pas être séparé de ce qui est permis,
on violerait les lois quand on voudrait.
Lorsqu’il est question d’une stipulation faite dans un
acte passé entre majeurs et usans de leurs droits, cha
cune des parties étant aussi coupable que, l’autre de la
contravention à la lo i, on annulle purement et simple
ment la convention. Mais ce qui a été stipulé dans le
contrat de mariage des dames de Vaure et de Beauregard,
n’est pas leur ouvrage : âgées alors d’environ dix-sept
ans, soumises à la volonté des auteurs de leurs jours,
qui dictoient la disposition, elles n’ont pu ni consentir
ni la combattre. Ce sont leurs père et mère qui ont
�( 53 )
cherché à se soustraire à la prohibition ; et malgré la
faveur que les appelans veulent qu’on accorde a ce qui
est fait indirectement, la prohibition doit produire son
effet.
2°. D e ce que les dames de Vaure et de Beauregard
ne seroient plus héritières instituées , en renonçant a
cette qualité , il ne s’ensuivroit pas qu’elles ne fussent
plus héritières : leur position seroit la même que si lors
de leur établissement il n’avoit pas été passé de contrat,
ou si elles s’étoient mariées avec les droits qu’elles
pourroient avoir. Alors la fille vient aux successions
comme héritière naturelle et légitime , et y prend sa
portion de tout ce dont les auteurs de' ses jours n’ont
pas valablement disposé ; filins aut Jilia ergo hcercs.
3 °. Ni l’article de la coutume que les sieur et dame
Hilliard ont cité,, ni la jurisprudence, ne disent point
que la fille simplement dotée est par cela même apanée;
ils ne regardent comme apanage que la dot qui a été
constituée avec intention qu’elle fût le prix de la portion
héréditaire ; prix qui doit être certain, et hors des at
teintes de tous les événemens auxquels est restée exposée
la fortune des père et mère. On a vu que celle des dames
de Vaure et de Beauregard n’étoit pas de ce genre.
Dans tous les raisonnemens qui se rattachent à leur
dilem m e, les adversaires ont oublié que les dames de
Vaure et de Beauregard étoient héritières naturelles et
légitimes des sieur et dame Dumont ; elles doivent, à
ce titre recueillir les mêmes avantages qu’avec celui
d’héritières instituées. Espérant arriver plutôt à leur but,
elles out réclam é, comme héritières naturelles et légi-
�Ç54 )
times, le tiers de tous les biens généralement quelconques,
appartenons à la dame Pitat, leur m ère, qui n’en a fait
aucune disposition valable : et dans le cas où il y auroit
quelque difficulté ( ce qui n’est pas vraisemblable ) à
leur adjuger ledit tiers de tous les biens de la dame
P itat, en leur qualité d’héritières naturelles, elles de
mandent qu’il leur soit adjugé en vertu de l’institution
contractuelle faite à leur profit par ladite dame Pitat.
On a démontré jusqu’à l’évidence que la constitution
qui leur a été faite en avancement d’h o irie, n’est point
uue dot tenant lieu d’apanage ; que leurs père et mère
n’ont pas eu l’intention de les apaner, et qu’ils n’auroient
pu le faire de cette manière : ainsi rien ne s’oppose à
ce qu’elles recueillent, comme héritières naturelles et lé
gitimes , le tiers de tous les biens de leur m ère, décédée
intestat. S’il ne leur étoit possible d’obtenir le tiers
desdits biens, qu’en qualité d’héritières contractuelles,
alors, mais seulement alors, il faudroit se fixer sur reflet
que doivent produire les stipulations contenues dans leurs
contrats de m ariage, et examiner si nonobstant la prohi
bition expresse de la coutume, la fille d’André Dumont
doit obtenir en préciput la moitié de la terre de M ont,
appartenante à la dame Pitat, qui n’en avoit pas disposé
valablement.
Que les sieur et dame Hilliard cessent de se persuader
qu’en répétant sans cesse qu’il faut que les dames de
Vaure et de la Roque soient, ou instituées, ou apanées,
on finira par les en croire sur leur parole. Elles ont
un double titre d’héritières, et peuvent préférer celui
qui leur est le plus avantageux, suivant la maxime
�( 55)
Quoties dupîici jure defertur hcereditas sublato novt
super est vêtus. La nature et la loi appellent tous le;
enfans à recueillir également les successions des auteurs
de leurs jours, lorsque les actes par lesquels on a voulu
donner atteinte à ce droit ne sont pas valables ; ou lorsque
l’enfant peut venir auxdites successions, sans se prévaloir
de ces actes, il est dégagé de toutes les charges et con
ditions qu’on a voulu lui imposer.
QUATRIÈME
PROPOSITION.
L e s dames de Vaure et de la Roque n o n t f a i t
aucun acte qui leur ait im prim é la qua lité (th é -
ritières instituées , ou dont on puisse induire
quelles se sont considérées comme apanées.
Ne pouvant se dissimuler que si les dames de Vaure
et de la Roque appréhendent la succession de la dame
P ita t, comme héritières naturelles et légitim es, il faut
regarder comme non avenues l’institution, et la condi
tion de souffrir le préciput, les appelans prétendent que.
les dames de Vaure et de la Roque ont exécuté san
reserve les contrats de mariage dont il s’agit; que pai
là; elles se sont rendues non recevables à les attaquer:
ils font: résulter cette exécution de ce qu’elles ont reçu
le tout , ou partie de leurs dots, du vivant de leurs
père et m ère, de ce que l’une:d’elles a reçu annuelle
ment depuis le décès de sa mère les intérêts de ce qui
lui était d û , et enfin de ce que Tune: et l’autre ont
t
> r.
�yÇ'-'
;
.
(-5 6 )
laissé jouir le survivant des père et mère des biens (lu
prédécédé.
Gene peut être, disent-ils, en qualité d’héritières na
turelles qu’elles ont reçu leurs constitutions de d ot; car
le droit de l’héritier naturel ne peut s’ouvrir qu’au
décès de la personne à qui l’on succède. Ce ne peut
être en qualité de filles mariées et dotées, car elles
auroient été forcloses et réduites à un apanage. Ayant
reçu en qualité d’héritières instituées, et l’institution
étant indivisible, elles n’ont pu la recueillir sans se
soumettre à relâcher à l’héritière de leur frère le préciput qui en est une charge.
.E lles ont aussi laissé jouir leur p ère, pendant plus
de vingt ans, de la succession de leur m ère, en vertu
de la condition qui avoit été apposée à leur institu
tion. La crainte révérencielle qu’elles allèguent est un
m otif chimérique; elles ne persuaderont à personne que
par le seul eifet de cette crainte elles aient ainsi laissé
jouir leur père d’une succession opulente, qu’elles pouvoient appréhender depuis plus de vingt ans, lorsqu’on
considérera surtout que depuis 1789, le sieur Dumont père
ne pouvoit plus disposer que d’une somme de iô o o o f.;
qu’il est d’ailleurs plus naturel d’admettre qu’elles ont
laissé jouir le père de lu succession de la dame P itat,
pour remplir l’obligation qui leur étoit imposée, comme
condition de l’institution, que de supposer qu’elles ont
agi^ainsi par le puéril motif d’une crainte révérencielle:
eussent-elles agi par cette crainte, elles ne pourroient
espérer d’être relevée de l’exécution de leurs contrats
de mariage, parce que l’article 1114 du Code Napo
léon
�Iéon consacre l’ancien principe, que la seule crainte révérencielle ne peut suffire pour fonder une action ; qu’il
y a parité çle raisons pour décider qu’elle ne peut jus
tifier une exception; que les lois romaines rejetoientla
crainte prétendue révérencielle , e t n’admettoient l’excep
tion de la crainte que lorsqu’elle étoit l’effet d’une vio
lence illicite, et contraire aux bonnes mœurs.
Nous avons rapporté très-fidèlement tout ce qui a
été dit par les adversaires pour fonder leur prétendue
fin de non - recevoir ; il sera facile d’anéantir ce fruit
d’une imagination féconde.
Il a été prouvé précédemment que lorsqu’un acte
contient des stipulations contraires aux lo is, on doit les
considérer comme non écrites, et exécuter l’acte comme
si elles n’existoient pas, n’y ayant à cet égard aucune
indivisibilité ; que si cette assertion pouvoit être con
tredite relativement aux actes passés entre majeurs, qui
étant tous deux coupables de la contravention à la lo i,
sont tenus de l’exécuter tel qu’il est, ou de consentira
son anéantissement total, il ne sauroit en être de même
d’une condition dont l’objet étoit prohibé , qui a ét<?
imposée à une mineure par ceux sous la puissance des
quels la nature et la loi l’avoient placée : ainsi les dames
de Vaure et de la Roque devant être dégagées de la
condition illicite qui leur a été imposée dans l ’institu
tion , leur droit n’en seroit pas moins certain quand
elles auroient exécuté sans réserve les contrats de ma
riage qu’on leur oppose.
Mais .nous allons démontrer que toutes choses sont
entières à leur égard.
H
�Il est bien constant qu’elles n’ont fait aucun acte dans
lequel elles aient pris la qualité d’héritières instituées.
Toutes les fois qu’on veut induire de quelques faits la
renonciation à un droit certain, tel que celui de renoncer,
il faut que lesdits faits soient tels qu’ils n’auroient pas eu
lie u , si ceux qui en sont les auteurs n’avoient été décidés
à prendre la qualité dont ils voudroient ensuite se dé
pouiller.
Ces principes sont v rais, même dans le cas où l’hé
ritier se seroit immiscé dans les biens de l’hérédité.
M . Lebrun, en son Traité des successions, liv. 3, chap. 8,
section 2 , rapporte ce que dit M. l’Epine de Grainville
à l’occasion d’un arrêt de 1724, qui jugea qu’ une dame
L eclerc, qu’on vouloit faire réputer héritière à cause
de diiFérens actes qu’elle paroissoit avoir faits en cette
qualité, avoit pu renoncer. Ce magistrat observe que
ledit arrêt sert à faire connoître qu’on ne doit se porter
qu’avec scrupule à déclarer héritier celui qui n’a pas
intérêt de l ’être ; que les actes qu’on peut lui opposer
ont souvent des motifs bien diiiérens, et que les seuls
qui doivent lui faire donner celte qualité sont ceux qui
établissent qu’il a voulu la prendre et s’en attribuer le
profit -, à quoi M . Lebrun ajoute qu’il suffit que l’on
puisse faire une chose en quelqu’autre qualité que celle
d’béritier, pour n’être pas réputé l’avoir faite en ladite
qualité d’héritier.
Les mêmes principes peuvent être invoqués par l’hé
ritier naturel et légitim e, exem pt, en cette qualité, de
toutes charges, lorsqu’on veut le faire déclarer héritier
contractuel pour l’obliger d’exécuter des conditions qui
lui ont été imposées en fraude de la loi.
�Il
ne résulte de la réception des sommes qui ont été
touchées par les dames de Vaure et de Beauregard, au
cune approbation de l’institution : ces sommes étoient la
représentation des alimens que les pères et mères doivent
à leurs enfans , comme ceux-ci en doivent à leurs pères
et mères lorsqu’ils sont dénués de biens. Ce qui avoit été
promis en avancement d’h oirie, n’avoit rien de commun
avec l’institution ; car on pouvoit instituer sans avance
ment d’hoirie, ou donner un avancement d’hoirie sans
institution. Ainsi ce qui a pu être reçu par les filles des
sieur et dame Duraont, en attendant l’ouverture de leurs
successions , ne les a point privées du droit d’examiner
dans la suite à quel titre elles dévoient appréhender lesdites successions.
L e second fa it, duquel on veut faire résulter l’appro
bation de l’institution, est la jouissance laissée au p è re ,
des biens de son épouse décédée.
A cet égard, les appelans ont trouvé commode de dis
simuler la réponse tranchante et décisive qui leur avoit
été faite en première instance. On leur avoit dit : Nos
père et mère étoient en communauté ; l’intérêt des dames
de Vaure et de la Roque étoit que cette communauté
ne fût pas rompue : or, la continuation n’auroit pu avoir
lie u , si les enfans avoient retiré des mains du sieur
Dumont les biens de leur m ère, dont les fruits appartenoient à la communauté. Ainsi la jouissance desdits
biens n’est pas restée au p è re , à cause de la condition
mise à l’institution , mais par un m otif bien différent,
et pour l’intérêt des héritiers de la dame Pitat.
N ’y eût-il pas eu de communauté, les d a m e s de Vaure
H ^
�( 60 )
et de la Roque n’auroient pas préjudicié à leurs droits,
en laissant jouir leur père de l’hérédité m aternelle,
pendant un temps moindre que celui qui est nécessaire
pour la prescription. Cette négligence à réclamer les
biens maternels est un fait négatif, qui ne sauroit être
considéré comme une approbation de l’institution.
Tous les jours on voit des pères privés de l’usufruit
par des secondes noces, sans que leurs enfans profitent
du bénéfice de la loi ; et jamais cependant on ne s’est
avisé de soutenir qu’ils dérogeassent à rien par ce silence,
ni même qu’ils fussent non recevables à former leur
demande en privation, après une longue jouissance du
père. L e silence des dames de Vaure et de la Roque
n’est donc ici qu’un effet de la révérence paternelle, et
de la crainte que la privation de cette jouissance n’en
gageât le sieur Dumont à frustrer ses filles de partie des
biens qu’elles espéroient trouver dans sa succession.
Les sieur et dame Hilliard ont opposé que depuis
1789 , le sieur Dumont n’avoit plus à sa disposition
que i 5ooofrancs ; que suivant le Code c iv il, la crainte
révérencielle ne pouvoit fonder une action; qu’il y avoit
même motif pour une exception ; que les lois romaines
n’acceptoient pas l’exception de la crainte révérencielle,
mais seulement celle qui étoit l’effet de la violence.
Relativement au ne jtejus J h cer et, il y a inexactitude
à dire que depuis 1789, le sieur D u m o n t ne pouvoit
disposer que de i 5ooo francs ; il pouvoit disposer de
» v in g t, la dame de la R oque n’étant pas saisie de la
somme à elle donnée dans un contrat qui n’étoit pas le
sien : mais ce n’est pas sur ces 20000 francs qu’il faut
�( 61 )
apprécier l’effet du mécontentement que ledit sieur D umont auroit pu concevoir. Il avoit la liberté de vendre ;
il pouvoit faire des dons, soit de la main à la main ,
soit par obligations simulées. Irrité contre sa fam ille,
son affection se seroit portée sur des étrangers.
L ’article 1114 du Code Napoléon, qui dit que la seule
crainte révérencielle ne peut pas fonder une action ,
fignifîe que celui qui voudroit revenir contre un acte,
sous prétexte qu’il ne l’a signé que par révérence pa
ternelle , ne seroit pas écouté, s’il n’alléguoit aucun
autre motif ; ce qui ne paroît pas comprendre le ne pejus
J 'a c e r e t , c’est-à-dire, une autre crainte bien plus forte,
celle d’être privé de la plus grande partie de l’h érédité,
sur laquelle on avoit droit de compter.
Si la crainte révérencielle ne peut suffire, suivant le
Code c iv il, pour fonder une action, il n’y a pas parité
de raisons pour l’exception ; c’est-à-dire, pour celui qui
étant maître d’exercer ou ne pas exercer un droit, sus
pend , par révérence paternelle, l’exercice de ce droit
durant le temps où il ne périclite pas. L ’enfant qui n’a
pas agi en pareil cas, a cédé à l’un des plus doux sentimens de la nature : il eût dû malgré la crainte révé
rencielle résister à son père, s’il avoit exigé un acte de
renonciation au droit qui lui étoit acquis; mais dès que
le droit ne se perdoit pas, on ne peut que louer l’enfant
d’avoir garde le silence. Elle seroit bien dure, la loi qui
placeroit une fille tendre et soumise dans l’alternative,
ou de priver ses enfans d’une partie de leur fortune,
ou de remplir d’amertume les derniers jours de celui à
qui elle doit la vie.
�( 62 )
La fin de n on -recevoir est le plus pitoyable des
moyens opposés par les appelans ; il seroit inapplicable
à la dame de la R o q u e, qui n’avoit que huit jours lors
qu’elle a perdu ;sa mère décédée avant l’accomplisse
ment de sa majorité. Les 6000 livres payées à compte,
sur ce qui lui a voit été constitué en avancement d’hoirie,
l’ont été au tuteur naturel de ladite dame de la Roque.
Par l’effet des nouvelles lois elle a atteint sa majorité
d ix -h u it mois avant la mort du sieur Dumont , son
aïeul ; mais dans cet intervalle il n’a été fait aucun acte
approbatif de l’institution; et aussitôt après la mort
dudit sieur Dumont elle a manifesté qu’elle entendoit
réclamer sa portion dans la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame Pitat; et par conséquent
ne pas approuver les actes qui.auraient dérogé à ce
droit.
CINQUIÈME
PROPOSITION.
Quand les termes des contrats de mariage des
dames de Vaure et de Beauregard , contien
draient constitution d’une dot, telle quelle doit
être pour former apanage ; quand il seroit dit
expressément que si elles contestoient le pre'ciput,
elles seroient réduites à cette d ot, il riy auroit
pas lieu de les déclarer déchues du bénéfice de
V institution, mais seulement dyordonner la dé
livrance dudit pre'ciput.
Les sieur et dame Ililliard ont souvent manifesté
�dans la cause un grand désir de dépouiller les dames
de Vaure et de la Roque de leurs droits héréditaires.
Espérant leur faire abandonner par la crainte une partie
de leur patrimoine, on a plusieurs fois fait circuler le
bruit qu’elles couroient risque d’être réduites à la somme
qui leur avoit été constituée en avancement d’hoirie ;
mais il faut rendre aux appelans la justice de dire qu’ils
ont eu la pudeur de ne pas prendre de conclusions à cet
égard devant les premiers juges. C’est une contradiction
dans leur conduite , de discuter en la cour d’appel un
objet qu’ils n’ont pas demandé en première instance.
Ils auroient fait vainement cette demande, même dans
le cas où les contrats de mariage dés daines de Vaure
et de Beauregard auroient contenu la stipulation la plus
expresse que si elles contestoient le préciput, la somme
constituée en avancement d’hoirie tiendroit lieu d’apa
nage. L e droit sacré qu’ont les enfans à la succession des
auteurs de leurs jou rs, eût fait regarder la peine comme
comminatoire : on eût ordonné la délivrance du pré
ciput, sans égard à la demande en déchéance de la por
tion héréditaire.
Les appelans nous ont eux-m êm es fourni la preuve
de cette assertion, à la page 14 de leur m ém oire, où
ils l'apportent, d’après M . Beraud, les circonstances de
l’arrêt de 17 16 , cité par M . A uroux. Les filles qui, lors
de cet arrêt, avoient contesté le préciput, étoient ma
jeures à l’époque de leur contrat de mariage; elles étoient
instituées héritières sous réserve de 30000 liv. données
en préciput à leur frère, et avec convention expresse
qu’où lesdites filles voudroient contester ledit préciput %
�'
( 64 )
elles demeureroient apanées à la somme de 24000 liv.
Cet apanage form el, et moyennant un prix certain, les
obligeoit à souffrir le p réciput, ou à se contenter de
l’apanage. L e premier tribunal ordonna que le fils prélèveroit ledit préciput.
Sur l’appel, l’intimé forma incidemment demande ten
dante à ce qu’en conséquence de la contestation du pré
cip u t, ses sœurs demeux-assent apanées, conformément à
la clause expresse stipulée dans leurs contrats de mariage;
mais l’arrêt qui intervint, en confirmant le préciput, mit
hors de cour sur la demande en déchance de la portion
héréditaire.
Les contrats de mariage des dames de Vaure et de
Beauregard les placent dans une position bien plus avan
tageuse que celle où se trouvoient celles qui donnèrent
lieu à l’arrêt de 1716. Les dames de Vaure et de Beauregard n’avoient que dix-sept ans lox’s de leurs contrats
de mariage, les autres étoient majeures; circonstance bien
importante. Il n’y a pas d’apanage, pas même de cons
titution de dot certaine, en faveur des dames de Vaure
et de Beauregard; les autres étoient expressément apanées
à une somme déterminée. Il étoit stipulé dans les contrats
de mariage de celles-ci que si elles contestoient le pré
ciput , elles demeureroient apanées à la somme qui leur
étoit constituée; tandis qu’au contraire les père et mère
des dames de Vaure et de Beauregard ont dit dans le
contx*at de la dame de Vaure qu’ils 11e l’avoient point
apanée ; et le sieur Dumont père a prévu , dans celui
d’ André D um ont, le cas où la dame de la Roque contesteroit le préciput. Loin de déclarer qu’en ce cas elle
ne
�( 65 )
ne pourroit exercer ses droits héréditaires, il s’est borné
à dire qu’elle devroit être privée de 5ooo, francs dont
il lui faisoit don sur sq réserve; et il n’a institué son fils
héritier que pour un tiers, conjointement avec ses sœurs :
de sorte que la demoiselle Dumont ne pouyroit réclame^
qu-delà du tiers des successions à partager, sans contre
venir de la manière la plus formelle au liti’e qui, lüi
assure en préciput la moitié de la terre de M ont, apparf
tenante au feu sieur Dum ont, son aïeul. Elle peut d’autant
moins contester les droits de ses cohéritières, qu’il n’çst
pus douteux que le feu sieur Dumont n’eût fait aucun
avantage audit André Dum ont, $’¡1 eût pensé que lui ou
ses représentai» essayeraient de dépouiller 1rs dames de
Voure et de Beeuregard d’une partie des droits coqsacrés
par leurs contrats de m ata ge, et jnême par celui dudit
André Dumont.
S I X I È M E
PROPOSITION.
L a disposition du jugement dont les sieur et danie
H illia rd sont appelans, doit être maintenue tant
en faveur des sieur et dame de Vaure, que des
sieur et dame de la Roque ; mais s 1il y avait
difficulté v is -à -v is des prem iers, il 11 en existe
aucune relativement aux sieur et dçime de la,
Roque.
$ ie n convaincus que les droits de la dame de V a u r e ,
leur t a n te , sont incontestables ? les sieur et dame de la
�(
66)
Roque ont toujours raisonné comme si le contrat de la
dame de Beauregard contenoit les mêmes stipulations.
Mais les clauses irritantes de celui de la darne de Vaure
n’ont pas été mises dans celui de la dame de Beauregard;
il n’y est fait nulle mention qu’en cas de non disposition
de la terre de M ont, elle appartiendra à André D um ont,
ni que l’institution des filles soit grevée de cette condition ;
il n’est pas exprim é, comme dans le premier, que sans
ces conditions l’institution n’auroit pas été faite, et qu’elle
eût été apanée : des clauses de cette nature ne peuvent
se suppléer. On dit bien que l’institution de la dame de
Beauregard est faite aux mêmes charges que celles expli
quées dans le contrat de la dame de V a u re, mais cela
ne peut s’entendre que de l’usufruit réservé en faveur du
survivant*, il n’est nullement parlé de conditions.
M al à propos les appelans prétendent-ils que le mot
charges comprend la réserve d’usufruit, et la destination
de la terre de Mont. Dans le contrat de la dame de V aure,
les instituans ont bien distingué ces deux choses. Lors
qu’ils stipulent la réserve d’usufruit, ils disent à la charge
de laisser jo u ir ; lorsqu’ils rappellent la destination de la
terre de M ont, ils se servent de ces mots, et à condition
de ladite disposition.
L e meilleur interprète des actes dont il s’agit étant sans
contredit le sieur Dumont père qui en est l’auteur, on
ne sauroit trop faire remarquer comment il les a entendus.
Toute sa pensée est dévoilée dans le contrat de mariage
d’André Dunoont : s’il lui donne le préciput, c’est, dit-il,
parce que la faculté d’en disposer lui a été attribuée par
la dame Pitat, son épouse, dans le contrat de mariage
�( 67 )
de la dame de Vaure. Il n’eût pas manqué d’exprimer
que cette faculté lui appartenoit eu vertu des contrats de
mariage de ses deux filles, s’ils eussent contenu les memes
stipulations.
Faisaut ensuite donation à la dame de la Roque d’une
somme de 5ooo f r ., il lui impose l’obligation de con
sentir audit préciput, et vent qu’elle soit privée de cette
somme de 5ooo francs , si elle ou ses père et mère con
treviennent à la disposition qu’il fait en faveur d’André
Dumout.
Eût-il pris tous ces moyens, s’il eût cru la dame de
la Roque obligée par le contrat de mariage de sa mère
à soutlrir ledit p r é c i p u t ? N ’auroit-il pas plutôt l’appelé
que c’étoit une condition de l’institution de la dame de
Beauregard, si vraiment son institution eût été condi
tionnelle ?
Ces réflexions sont simples •, elles portent la convic
tion dans tous les cœurs, malgré la subtilité avec laquelle
les appelans cherchent à les écarter : ils font des mots
dans ¿’esprit, un talisman qui suffit à tout. Mais qui
est-ce qui ignore qu’une condition à laquelle on voudroit
donner l’efTet de priver l’héritière instituée de sa portion
dans l’un des objets les plus considérables de la. sucession
qui lui étoit promise, devoit être exprimée avec d’autant
plus d’energie, qu’il est de principe que les peines ne
peuvent etre appliquées qu’à celui qui y a été positi
vement soumis?
La famille paternelle de la dame de la Roque a dû
penser que le contrat de-mariage de la dame de Be.'U regard seroit son unique loi ; elle étoit loin d’iniagiuer
la
;
*
�( 68 °
que dans ui^ coutume d’égalité , qui met les plus grands
obstacles aux dispositions en précipu t, André Dumont
en réclameroit un très - considérable , en vertu d’un
contrat de mariage qui n’étoit pas le sien, et dans lequel
il n’est pas même nommé.
S i , contre toute vraisemblance , la dame de Vaure
venoit à succomber, les sieur et dame de la Roque ont
lieu de croire que la disposition du jugement dont est
appel , qui a déclaré nulle la donation en préciput de
la terre de M o n t, pour la moitié provenante de la dame
Pitat , seroit toujours maintenue à leur égard. Ils ont
démontré précédemment que les mauvais raisonnement
sur lesquels les appèlans fondent une fin de non-recevoir
inadmissible, ne peuvent ‘s’appliquer ni à la dame de la
Roque , ni à la dame sa mère , à raison de minorité.
O n feroit des répétitions inutiles, si l’on suivoit les
sieur et dame Hilliard dans leur critique des motifs qui
ont déterminé les premiers juges, lorsqu’ils ont décidé,
sur les conclusions conformes du procureur im périal,
que la moitié de la terre de M on t, qui avoit appartenu
à la dame P itat, seroit partagée entre tous ses enfans ;
ils ont fait une juste application de la loi sous l’empire
de laquelle ils sont nés et ont toujours vécu. On iie sauroi't
douter qu’ils n’en aient saisi le véritable sens.
R É S U M É .
Il
résulte des propositions établies dans le present mé
m oire,
iu, Q u’André Dumont ne pouvoit recevoir aucun avan-
�( 69 )
tage de ses père et mère dans les contrats de mariage
des dames de Vaure et de Beauregard; que la dame Pitat
étant décédée avant le mariage dudit André D um on t,
il n’a pu recueillir dans tous les biens qui lui avoient
appartenu, qu’une portion égale à celle de ses sœurs.
2°. Que la disposition en préciput qui a été faite en
faveur du môme André D um ont, dans lé contrat de
mariage de la dame de V aure, étant prohibée formelle
ment par la coutume de Bourbonnais, à laquelle les
parties étoient soumises , doit être déclarée nulle et
comme non avenue.
3°. Qu’il en est de même de la faculté d’élire donnée
par ladite daine Dumoüt à son m ari, soit parce que ladite
coutume ne permettoit aucunes donations ni autres contrats
entre époux, soit parce que cette faculté d’élire ne pourroit être considérée que comme une procuration ou un
mandat; et il est de principe que tout pouvoir finit à la
mort de celui qui l’a donné.
4°. Que la disposition de la terre de M ont, ainsi que
la faculté d’élire, ne sauroiënt être maintenues, comme
étant une condition de l’institution faite dans le contrat
de mariage de la dame de V au re, attendu que les con
ditions' contraires aux lois ou aux mœurs sont réputées
non ecrites , et n’empêchent pas l’exécution de l’acte
dans lequel elles ont été mal A propos insérées ; qu’il
doit plus particulièrement en être ainsi, lorsque l’enfant
auquel la condition a été imposée, iie pouvoit, à cause
de sa minorité , donner aucun consentement qui lui fût
préjudiciable.
5°. Qu’il seroit également contraire aux lois et à la
�.
( 7° )
m orale, qu’on pût faire par voie indirecte ce qui est
expressément prohibé. Si quelques auteurs ont dit qu’en
contrat de mariage on pouvoit instituer avec l'obligation
d’associer une tierce personne à l’institution, et stipuler
un don d’usufruit en faveur de celui des instituans qui
su rvivrait, c’est parce que l’association peut procurer
des avantages à l’un comme à l’autre des associés; et ce
n’est pas comme donation, mais comme acte de reconnoissance de la part de l’institué, que la clause d’usufruit
obtient son effet. A u surplus, n’y ayant pas égalité de
raisons, on ne sauroit en induire qu’il est permis, malgré
la disposition de la loi m unicipale, et le sentiment de
ses plus célèbres commentateurs, de donner un préciput
à l’enfant qui ne contracte pas mariage.
6°. Que la coutume de Bourbonnais étant une coutume
d’égalité, les pères et mères ne pouvoient forclore leurs
filles de leurs successions, par le seul empire de leur
volonté : il falloit, pour lesapaner, qu’ils leur donnassent
un prix certain par la constitution d’une dot qui leur
fût irrévocablement acquise. Si quelques auteurs, et un
arrêt de 1716 , ont déclaré valable un préciput (donné au
fils, dans le contrat de mariage de ses sœurs, c'est parce
que leurs contrats contenoient deux stipulations bien dis
tinctes , institution sous la condition du préciput, et
apanage formel ; au lieu que les sieur et dame Dumont
n’ont rien constitué à leurs filles qu’en avancement d’hoirie,
et à la charge du rapport : ils ont expressément déclaré
dans leur contrat de mariage , et dans celui d’ André
D um ont, qu’ils n’avoient p a s entendu les apaner, ni les
priver, dans aucuu cas, du partage égal avec leur frère;
�( 71 )
et ce dernier n’ayant été lui-même institué que pour un
tiers , conjointement avec les dames de Vaure et de
Beauregard , n’a transmis à son héritière aucun titre
#en vertu duquel elle puisse prétendre au-delà de cette
quotité.
7°, Que les appelans peuvent d’autant moins tirer
avantage, relativement à la succession de la dame Pitat,
de la prétendue condition relative au préciput, que les
dames de Vaure et de la Roqu e ayant le droit de re
cueillir sa succession en qualité d’héritières naturelles et
légitimes, si cette condition étoit valide, elles s’en trouveroient dégagées en n’acceptant pas la qualité d’héritières
instituées, et s’en tenant à celle d’héritières naturelles
et légitimes.
8°. Que les dames de Vaure et de la R o q u e, qui
n’ont p ris , dans aucune circonstance , la qualité d’hé
ritières instituées, ne sauroient être privées du droit de
venir à la succession de la dame Pitat, comme ses héri
tières naturelles et légitim es, qu’autant qu’elles auroient
fait des actes incompatibles avec cette dernière qualité :
au lieu que les deux faits dont les appelans essayent de
tirer avantage, sont absolument insignifians ; la réception
du tout ou de partie de ce qui avoit été constitué en
avancement d’hoirie, n’ayant rien de commun avec l’ins
titution , et la jouissance laissée au père des biens de
son épouse étant une suite de la communauté conjugale,
dont la continuation ne pouvoit avoir lieu au profit des
etafans , qu’en par eux laissant cette jouissance à leur
père.
< 9°* Que nul des moyens opposés par les sieur et dame
�(7 0
Billiard, ne sont applicables à lu-daine de 1<>R oque, le
contrat do mariage de sa mère ne contenant aucune dis-'
position en faveur d’André D u m o n t, et à raison de
l e u r minorité , ni la dame de Beauregard, ni la dame de
la Roque n’ayant pu faire aucuns actes préjudiciables ;
do sorte que la disposition du jugement dont la demoiselle
Dumont est appelante, d o it, dans tous les ças, ■
être
confirmée vis-à-^vis des sieur et dame d elà Roque.
" P . 5 . Quoique dans.cette affaire il n’ait déjà été que
trop parlé de consultations, on ne peut se dispenser de
dire un mot sur celles que les appelans ont fait imprimer
à la suite de leur mémoire ; elles sont données par cinq
jurisconsultes , dont quatre avoient, avant le, commence
ment du procès, signé en faveur de mademoiselle Dumont
une autre, consultation, qui a été communiquée, et est
en quelque sorte une pièce du procès, puisque les tuteurs
l’ont présentée au conseil de fam ille, pour obtenir son
autorisation. Si la cour veut se la faire représenter, elle
remarquera qu’il existe une différence notable entre les
moyens sur lesquels la prétention de mademoiselle D u
mont étoit fondée dans la première consultation , et ceux
qui 6ont présentés dans le mémoire.
On soutenoit principalement dans la première consul?
tation , que la disposition faite par la dame P ilât, lors
du contrat de mariage de la dame de V n u re, devoit
valoir comme legs, ou disposition testamentaire en faveur
d’André Dumont ; mais les sieur et dame de la Roque
ayant démontré dans les écrits par eux signifiés en
première instance, que si la demoiselle Dumout obtenoit,
à
�(73 J
à titre de disposition testamentaire, la moitié de la terre
de M o n t, qui avoit appartenu à la dame P itat, elle ne
pourrait, suivant l’article 321 de la coutume à laquelle
les parties étoient soumises , prendre autre chose dans la
succession de ladite dame P ita t, parce que dans cette
coutume d’égalité, l’un des enfans ne peut être héritier
et légataire. Les appelans ont changé de langage, et mis
à la page 27 de leur m ém oire, qu’André Dumont ne
recueille point le préciput à titre de legs; qu'on ne lui
a donné ni légué la terre de M ont directement; qu’il ne
la recueille que par l’effet de la condition imposée à l’ins
titution des iilles. Ainsi la première consultation, et celle.'
qui ont a p p r o u v é le m é m o i r e , n ’ éta nt pas appuyées SUl’
les mêmes hases , il est probable que les avocats qui les
ont signées n’avoient pas suffisamment examiné.
D ’ailleurs, les unes et ¡les autres .paraissent données
sur un extrait du contrat Ide mariage de la dame de
V au re; extrait dans lequel a< été-«omise la clause qui
Pobligeoit au rapport de tout ce qui lui étoit promis
par ses père et mère. Cette clause formant la preuve
la moins équivoque que la dame de Vaure n’avoit pas
été d otée, dans le sens qui rend ce mot synonyme
d ’apanée, celte omission a pu induire en erreur les juris
consultes qui ont signé toutes lesdites consultations.
Les sieur et daine de la Roque auraient *pu en faire
imprimer un très-grand nombre.;■
-mais ;ils n’ont-pas cru
devoir faire usage de pareilles armes: ils citeront néan
moins des suffrages dont on doit faire d’autant plus do
cas que ce ne sont pas eux qui les ont provoqués.
E u l’i i n - 6 , lo feu sieur D u m o n t voula nt savoir quel
• IC
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'J '
�( 74 )
effet produiroient les lois nouvelles sur les dispositions
par lui faites, et etre instruit de celles qui lui étoient
encore,permises, lit faire un mémoire à consulter, qui fut
envoyé avec les copies des’contrats de mai'iage de ses trois
enfans, à un jurisconsulte très-distingué, alors membre du
conseil des anciens, et aujourd’hui du sénat. Ce juriscon
sulte s’environna des lumières de plusieurs membres des
conseils, qui s’étoient spécialement occupés des lois rela
tives aux successions. Parmi les questions proposées par
le feu sieur D um ont, étoit celle qui est l’objet du procès.
Dans la réponse qu’il reçut, il est dit que l’héritière
d’André Dumont ne peut à aucun titre recueillir la
moitié de la terre de M o n t, qui avoit appartenu à sa
mère; que les filles des sieur et dame Dumont, qui,
étant héritières naturelles et légitim es, n’ont pas même
besoin
de se prévaloir de l’institution faite en leur
faveur dans leurs contrats de mariage, doivent partager
cette moitié de ladite terre.
Après le décès du sieur D um on t, cette consultation
a été trouvée sous les scellés, et fait partie des papiers
de sa succession. Les sieur et dame de la Roque l’ont
citée dans les écritures par eux signifiées en première
instance. Si leur assertion eût été contredite, il eût été
facile au tribunal de se la faire représenter.
Les sieur et dame de la Roque éprouvent la plus
douce satisfaction h rappeler un autre fait cité dans la
même écriture, et dont ils ont la preuve. L ’ inventaire
du mobilier de M ont ayant donné aux héritiers l’occa
sion de manifester leurs prétentions respectives sur la
terre de M o n t, les appelans se firent autoriser par le
�(
)
conseil de famille à soutenir celles de mademoiselle Dumont, après .avoir obtenu la consultation dont nous avons
p a ilé, qu Jls communiquèrent aux dames de Vaure et
e la Roque. Elles s’étoient également consultées, et
voient une si grande confiance dans leurs moyens ,
q u e es n’hesiterent pas à proposer aux tuteurs de la
demoiselle Dumont de faire délibérer les jurisconsultes
qui avoient donné leur avis en sa fa ve u r, avec ceux
qui en avoient^ émis un contraire, et de se conformèr ‘â
«> ecision qui serait rendue par ce tribunal arbitral.
1 ous les risques d’un pareü parti S o ie n t poui les dames
f " Vaure c, de la R oql,e ; ^clles p W ô ic n t
r e v e n ir '
eontie ce. qL„ a u r o n s
mademoiselle
DiJniont « .r o * si «l]e m
voftlu. ^ ' C c a question',
apiès sa majorité ,‘ ce.qùe. les arbitres auraient'décidé.
Mais voulant 4 tout prix éviter un procès, et persuadées '
que ma emoiselle-Dumont ne reviendrait pas ccmtfç .ce
qui aurait clé jugff en- grand», .oonnoissdycc de icfu »
les dames 9 e V rnre « . de la Rbc/ue d é v o ie n t ardem
m en tq u e leiiï proposition -fût'accepté« : elle ne.'le fut
q u i! falloit plaider.
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n’1n !!irn f°û'lu' i dCS întimées P^ouve que les Appëlansn . uioient ga, du les acctfseï' d'avidité', et d’avoii* voulu,
s le P'occs a ju g e r, firire*brillér leuV esprit aux dépans de la justice et de la l,„nne foi. Les efforts faits par
les dames de Vaure et a é 'V f c o q u c , pour éviter M
p io ccs, ont excédé les bornes de la prudence; et elles
evoitnt se croire exposees à aucuns reproches, en
�réclamant la foible portion qui leur revient d ans un
immeuble dont il n’a été fait, à leur préjudice, aucune
disposition valable. *
.
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Signé. L A R O Q U E
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avoué licencié.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. De La Roque. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tardif
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse des sieur et dame de la Roque de Mons, intimés, au mémoire des sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
76 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1802
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1801
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53331/BCU_Factums_G1804.pdf
3165fdc4966a60d05146bd2a44a09d30
PDF Text
Text
HILLIARD , cotuteurs
D u m o n t , appelans;
P o u r les sieur et dame
de la demoiselle
RABUSSON
D E VAURE et D E L A R O Q U E intimés.
C o n t r e les sieurs et dames
,
L E S O U S S I G N E , qui a lu le mémoire imprimé
pour les sieur et dame H illiard, cotuteurs de la demoi
selle D u m o n t, appelans, contre les sieur et dame R a
busson de V a u re, et contre le sieur de la Roque, intimés-,
qui d’ailleurs connoissoit déjà la contestation, sur les
pièces originales qui lui avoient été communiquées à
P a ris, afin de connoître son opinion,
E s t d ’ a v i s que la prétention des sieur et dame
Rabusson de V a u r e , et du sieur la R o q u e , est absolu
ment destituée de fondement, et que le jugement rendu
par le tribunal civil de Gannat doit être infirmé.
O u n’a pu soutenir cette prétention qu’en se créant
Une fausse logique, à l’aide de laquelle on n’a pas craint
d’attaquer tous les principes.
Quand il y auroit quelque subtilité dans les raisonnemens des sieur et dame Rabusson de V au re, et du sieur
de la R o q u e , cette subtilité n’échapperoit certainement
pas aux lumières de la cour d’appel ; mais il est constant
A
�•> I
(
2 )
que ces raisonnemens n’ont pas même le triste mérited’etre subtils.
L e droit de la mineure Dum ont prend son fonde
ment, et dans les clauses des conti'ats de mariage de Marie
et Marguerite D u m o n t, filles de Jean Dumont et de
Procule P it a t , et dans les dispositions de l’article 3 o 5 >
de la coutume du Bourbonnais.
On sera dans la v é r i t é , en conciliant les unes avec
les autres , en considérant les conventions établies dans
les contrats de mariage comme des modifications à la loi
municipale ; modifications uniquement avantageuses aux
filles qui se marioient, et contre lesquelles elles s’élèvent
avec une injustice qui tient du ridicule. En partant de
là , on sera conduit à cette, conséquence certaine, que
M a r i e et Ma rg u er it e D um ont n’ont dû avoir que la partie
des biens de leurs père et mère qui leur a été assurée
par leurs contrats de mariage , et que tout le surplus
est devenu le patrimoine d’A n d ré Dumont.
R e m e t t o n s -nous encore sous les yeux les clauses du
contrat de mariage de Marie D u m o n t, fille aînée, en
observant qu’elles feront connoitre aussi les clauses du
contrat de mariage de Marguerite D u m ont, fille puînée,
parce que, malgré quelques réflexions qu’on a faites pour
établir une différence entre ces clauses, il sera aisément
reconnu , lors de la discussion générale des mo yens , qu’il
n’y en a aucune, et que les clauses du second contrat se
réfèrent entièrement à celles du premier.
Les filles furent instituées héritières par égales portions
avec les antres enfans; mais ce fut en même temps sous
la r é s e r v e expresse que Jean Dumont et Procule Pitat.
�(3 )
se firent de la terre de M on t et autres objets. Il fut dit
que les sieur et dame D u m o n t, ou le survivant (P eu x,
pourroient disposer des objets réservés, nu profit de tels
de leurs enfans qu’ ils jugeroient à propos , môme de la
future, par quelqu’acte que ce fût. Il fut ajouté que dans
le cas de non disposition de la part des père et m è r e ,
la terre de M o n t , et les autres objets réservés, appartiendroient en toute propriété à André D u m o n t, leur
fils, lequel en demeureroit précipité.
A la suite de ces dispositions 011 inséra encore la clause
suivante : « L a d ite institution f a i t e sous ladite réserve,
« et ¿1 condition de ladite disposition , et encore i\ la
« charge par la future de laisser jouir le survivant de
« ses père et mère de la portion qui lui seroit revenue
« dans les biens du prédécédé ; sans toutes lesquelles
« charges , clauses et conditions ladite institution
« n ’ a u r o i t é t é f a i t e , et la future auroit été apanée
.« moyennant la dot qui va lui être constituée. »
V ien t ensuite la constitution de dot, faite en avance\ ment des futures successions, de 30000 livres.
Procule Pitat décéda en 1783, sans avoir fait d’autres
dispositions que celles contenues dans les contrats de
mariage de ses filles.
A n dré D u m o n t, son fils , se maria en 1789.
Par son contrat de mariage, Jean D u m o n t, son père,
rappelant le défaut de dispositions ultérieures de la part
de Procule P ita t, son épouse, et la faculté de disposer
accordée au survivant d’eux par les contrats de m a r i a g e ,
disposa à son prolit de la totalité des réserves portées
par ces mêmes contrats.
A 2
�( 4 )
'
r
.
Contester cette disposition, en ce qui concerne Procule
P it a t , c’est attaquer l’évidence. Cette disposition doit
autant avoir son effet que celle faite personnellement par
Jean Dumont.
P o u r s’en convaincre encore plus, il faut rapprocher
des conventions et des faits qu’on vient de rap p o rter,
les dispositions de l’article 305 de la coutume de Bour
bonnais : « Fille mariée et apanée par père ou par
« m è r e , aïeul ou aïeule paternels ou maternels , après
« le décès de ses père ou m ère, aïeul ou aïeule paternels
c< ou maternels, ne peut demander légitime ni supplé« ment d’icelle, ni aussi venir à succession collatérale,
« dedans les termes de représentation, tant q u 'il y a
'« mâle ou d e s c e n d o n s d e m â le , soit mâle ou femelle,
« héritant ès-dites successions , combien qu’elle n’y ait
« expressément ren on cé, etc. »
A quoi se réduisent les conventions établies par les
contrats de m ariage, combinées aVec les dispositions de
la coutume.
Il n’est pas exact de d ir e , ainsi que le répètent sans
cesse les intim és, et comme on le voit dans le jugement
dont est appel, que Jean D um ont et Procule Pitat n’ont
pas apané Marie et Marguerite Dumont; que s’ils eussent
voulu que leurs filles fussent réduites à un apanage, ils
se sei’oient servis d’expressions qui ne laisseroient aucun
doute sur leur volonté.
Q u’ont fait Jean D um ont et Procule Pitat? Ils avoient
le pouvoir de forclore ou apancr leurs filles, et de les
réduire à une dot; mais par attachement pour elles, pour
les marier pins avantageusement, et dans les vues d’un
�(
5 )
arrangement salutaire à leur fa m ille , ils ont voulu ne
pas exercer en son entier la faculté que leur donnoit la
loi. Ils ont jugé à propos de limiter le droit de forclore;
mais la limitation d’un droit n’en est-elle pas l'exercice
même ? et celles contre lesquelles l’exercice de ce droit
pouvoit être dirigé dans toute sa fo rce , peuvent-elles
se, plaindre d’une limitation qui est entièrement à leur
avantage ?
Sans doute M arie et Marguerite D um ont ont reçu,
par leurs, contrats de m ariage, le droit de participer,
comme héritières conventionnelles, aux successions de
Jean D um on t et de Procule P ita t; mais ont-elles été
investies de ce droitt d’une manière indéfinie ? Ce droit
art^il été la base fondamentale des conventions de leurs '
contrats de m ariage? a - t - i l été accordé comme étant
l’effet d’une volonté absolue de Jean Dum ont et de
Procule Pitat? art-il été créé dans toute l’étendue possible,
sans conditions, abstraction faite des dispositions de la
loi municipale, et de la faculté de forclore qu’elle attribuoit à J e a n .D um ont et à Procule P ita t?
Il faudroit aller jusque-là pour soutenir la prétention
dep intimés ; aussi n’onti-ils pas manqué de se placer
dai^SiCette position»
Mais p o u r. peu qu’on réfléchisse suv. les dispositions
faite? , paTf.les contrats, d e , mariagi?. , on est convaincu
quelles n’ont,jamais-étç détachées de l'influence que la
loi municipqlç exçrçoitsur lç sort de M arie et Margperiter
Durp.qotj au mpment de leu 3ç;rnqpiage, lorsque la volonté
desppère; etf mère, concouroit ,qvoç le yœ,u de. la loi..
Lovsqu’jlos’agit/ d’intçrprétqp dps clauses do, contrats
A 3
�de m ariage, de démêler les vues qui ont présidé à des
arrangemens de fam ille, on ne doit pas toujours être
asservi à un ordre d’écriture. O r , en se pénétrant de
l ’ensemble des dispositions des contrats de mariage de
M arie et Marguerite D u m o n t , il devient évident pour
tout homme qui recherche la vérité de bonne fo i, que
l ’apanage ou la forclusion moyennant une d o t , ont été
la première idée qui se soit présentée à l’esprit des contractans, et que la seconde idée a été la limitation de
ce droit que les père et mère n’ont point voulu exercer
dans toute la rigueur.
L ’attribution que Jean D um ont et Procule Pitat ont
accordée à leurs filles, du droit de leur succéder, mais
non par égalité avec leur fils, et sous des réserves posi--'
tives et déterminées, stipulées en faveur de ce fils auquel
la l o i , de son propre ministère, les déféroit; cette attri
bution, disons-nous, n’a pu être autre chose qu’une
exception h la forclusion , ou une limitation du droit
de forclore. L e droit de succéder qu’ont eu Marie et
M arguerite D u m o n t, n’est point émané de la loi ; il a
été l’effet de la volonté des père et mère : ceux-ci avoient
le droit de les en p r iv e r , ils le leur ont accordé, mais
ils ne l’ont pas fait pleinement ; ils ont mis des bornes
à ce d ro it; ils ont voulu qu’il ne portât que sur une
partie des biens ; et en voulant cette restriction, ils ont
entendu que le restant des biens demeurât sous l’empire .
de la loi qui les attribuoit au fils, s’il n’en étoit pas
privé dans la suite par la volonté des père et mère.
T o u t ce qu’on vient de dire résulte de ces termes qui
s’élèveront toujours avec la plus grande force contre la
�C7 )
prétention des intimés : « Ladite intitutîon fa it e sons
« ladite réserve, et à condition de ladite disposition..,. « sans toutes lesquelles charges , clauses et conditions
« ladite institution n ’ AUROIT é t é F A I T E , ET LA
« f u t u r e a u r o i t é t é a p a n é e moyennant la dot qui
« va lui être constituée. »
Si Jean Dum ont et Procule Pitat eussent apané
M arie et Marguerite Dum ont moyennant une dot ,
elles n’auroient rien à prétendre dans les successions de
leurs père et mère ; Jean D um ont auroit eu seul le droit
de recueillir ces successions, en payant les dots. C ’est
un point qu’on ne r év o q u e pas en doute.
E t parce que Jean D u m o n t et P r o c ul e Pitat ont
voulu adoucir le sort de leurs filles ; parce qu’ils ont
voulu modifier en leur faveur le pouvoir qu’ils tenoient
de la lo i; parce qu’ils ont accordé qu’elles eussent, môme
à titre d’héritières conventionnelles, une partie de leurs
biens, outre la dot qui leur étoit constituée, mais en
réservant le restant et en confirmant la destination que
la loi en faisoit à leur fils, on prétendroit qu’il est résulté
de là que les filles sont devenues tout à coup habiles à
succéder, comme si leurs père et mère n’avoient jamais
eu le droit de les priver de leurs successions, comme s’il
n’y avoit point eu d’enfant m â le , et de la même manière
que si le droit de forclore les filles, y ayant un enfant
m âle , n’eût jamais existé !
Quelles sont les personnes qui pourront jamais être
convaincues de la vérité d’une pareille proposition ? C ’est
un principe élém entaire, indiqué par la seule raison ,
que celui qui peut le plus, peut à plus forte raison le
�moins. Jean Dum ont et Procule Pitat pouvant priver,
leurs filles du droit de leur succéder, moyennant les
dots qu’ils leur assuroient, pouvant le faire sans qu’ il y
eût de leur part aucune disposition en faveur de leur
fils ? celui-ci tenant les
* biens de la seule volonté de la Loi,
on sent qu’à plus forte raison ils ont pu relever leurs-,
filles de la forclusion coutum ière, sous des conditions,
et que ces conditions forment une loi domestique qu’il
n’est pas permis aux filles d’enfreindre.
Il y a eu un avantage pour les filles à être relevées^
de la forclusion ; cet avantage, on l’a teim de la conven
tion ; il y a été apposé des conditions. O r , on ne peut
profiter de l’avantage sans se soumettre aux conditions
sous lesquelles il^ a été fait : voilù les premières, notions
de droit contre lesquelles il est impossible qu’on s’élève
avec succès.
!
Il n’y a pas eu de convention simple et absolue/, i l i;
n’y a eu qu’une convention modifïcative de la lpi. La^.
convention a déféré aux filles une partie des biens, outre,
la d o t, et la loi a exercé tout son empire sur le surplus r
des biens;'elle les a réservés au fils, d’accord avec le vœu.,
des père et mère. Ceux-ci ont .voulu, ou qu’on s’en tînt
à la convention telle qu’elle étoit ré g lé e, et avec toutes,,
ses conditions , ou qu’on fût renvoyé à la loi. O r , la loi
perinettoit la forclusion, et les père et mère ont déclaré,)
qu’ils vouloient cette forclusion, si les filles ne se teupient
pas a la convention : « 'Sans toutes lesquelles charges,
« '.clauses et conditions ladite., institution rtauroit été
« f a i t e , et la future auroit été apanée m oyennant la
« dot (lui va lu i être constituée, y
�( 9 )
.
..
On 11e conçoit donc pas qu’on puisse dire qu’il n’y a
pas eu d’apanage dans les contrats de -mariage de Marie
et Marguerite Dumont. Celui qui auroit pu être entiè
rement libéré en donnant un écu, ne le seroit donc pas
parce qu’il en auroit voulu donner cinq ?
D u raisonnement des intimés il résulteroit encore que,
dans les principes de la coutume de Bourbonnais, un pèi’e
qui auroit eu un fils et deux filles, se seroit trouvé dans
celte nécessité absolue, ou de forclore ses filles de sa suc
cession , moyennant une d o t , ou d’assurer une égalité
pai'faite entre le frère et les sœurs : système dont l’ab
surdité se sent sans aucun effort de raison. T^a loi qui
to lé r o it, à l’égard des filles, une rigueur admise dans
des vues de bien public, permettoit sans doute un adou
cissement, bien loin de vouloir en punir des pères et
mères et ceux des enfans qui étoient l’objet de celte
rigueur.
L e second moyen sur lequel les intimés se fo n d e n t,
consite à dire qu’ André Dumont n’a pu prétendre dans
la succession de Procule Pitat une portion de biens plus
considérable que ses sœurs, parce qu’il n’y a point eu
en sa faveur une disposition directe de la part de P ro
cule Pilât.
En raisonnant ainsi on élude la question qui est
juger, pour en présenter une qui n’existe pas.
On ne sera jamais dans la question , tant qu’on di
visera les conventions portées par les contrats de mariage1
de Mario et de Marguerite D u m o n t, tant qu’on iso l cm
l’ensemble de ces conventions des dispositions de l’art. 306’
delà coutume de Bourbonnais, qui en sont le régulateur..
Il est probable
qu’on
uc désavouera
P:ts *c
principe 1
�.que les contrats de mariage ont toujours été susceptibles
de conventions et de conditions qui ne blessent ni les
mœurs ni l’ordre public. Si cela est certain, il l’est éga
lement que Marie et Marguerite Dumont n’ont dû suc
céder à leurs père et mère que sous les conditions et
réserves stipulées dans leurs contrats de mariage.
An dré Dumont a puisé pour lui ou sa descendance.,
le droit de succéder à Procule Pitat comme à Jean D u
m o n t , dans la disposition de la lo i, tant que Procule
Pitat et Jean Dum ont ne se départii'oient pns de la fa
culté qu’ils avoient de forclore ou apaner leurs filles
moyennant une dot. Ils n’ont pas voulu cette forclusion
pleine et entière ; ils y ont dérogé dans l’intérêt de
leurs filles : mais le droit de succéder de celles - ci n’a
,dû être que partiel; ce droit a dû être mesuré par la
dérogation même apposée par les père et m ère, surtout
dès qu’ils ont déclaré qu’on ne pourroit diviser les con
ventions sous lesquelles les filles étoient mariées, et que
sans l’espoir que ces conventions tiendroient telles qu’elles
étoient réglées, les filles auroient été apanées moyennant
la dot qu’ ils constituoient de suite.
Les parties, lors des contrats de mariage, et d’après
ce qui y a été convenu, ont donc été dans une position
telle, que tout ce que les filles ont dû avoir dnns les
successions de leurs père et m ère, elles n’ont pu y pré
tendre que parce que leurs père et mère n’ont pas voulu
les en priver en les livrant à toute la rigueur de la loi;
et que tout ce dont il n’étoit pas disposé en faveur des
filles, demeuroit sous l’empire de la loi, et revenoit par
cela seul à A ndré D u m o n t, à moins que ses père et
mère n'eussent voulu , d’après la réserve particulière
�(
11 )
qu’ils s’en étoient faite, o n tr a r ie r le vœu de la loi par
leur volonté.
Il n’a donc point fa llu , en faveur d’A n d ré D u m o n t,
de disposition directe de tout ce qui n’étoit pas donné
précisément à ses sœurs ; la simple réserve du surplus
des biens devenoit, par la force des clioses, par la com
binaison de la loi municipale avec les conventions des
contrats de mariage des sœ urs, une saisine en faveur
d’A n d ré D um ont : cette saisine auroit pu être anéantie
par les père et m è r e , par l’effet de l’exercice du droit
qu’ils s’étoient réservé, de disposer îY leur gré des biens
qui n’étoient pas assurés aux filles. Ma i s ce droit n’ayant
pas été e x e r cé , et au contraire Jean D u m o n t ayant dis
posé des biens réservés en faveur d’A n d ré D u m o n t ,
tant pour lui qu’en vertu du pouvoir que lui avoit
conféré Pi'ocule Pitat, en ce qui la concernoit, tous les
biens, excepté la portion qui en avoit été donnée à Marie
et Marguerite D u m o n t, ont été irrévocablement assurés
à A n d ré Dumont. t a loi et la volonté de ses père et
mère ont concouru pour en fixer la propriété sur sa tete.
A i n s i , tout se réduit à ce moyen inattaquable , que
Ma rie et Marguerite Dum ont ne peuvent succéder que
comme leurs père et mère ont voulu qu’elles succédassent;
qu’elles ne peuvent venir à leurs successions qu’en rem
plissant les conditions qui leur ont été im posées, parce
que c’est un des premiers principes du droit et de l’équité
que personne ne peut diviser son titre. Les-premiers juges
seront sans doute les seuls qui penseront que « les clauses j
« charges et conditions apposées aux i n s t i t u t i o n s des daines
« de Vaure et de Beauregard , étant contraires-à la lo i,,
�( 12 )
S ’il y a quelque ch ose de contraire à la
craint pas de dire que c’est cette opinion
choque la raison ; elle attaque la doctrine
auteurs ; elle est combattue par la pratique
l o i , on ne
m êm e; elle
de tous les
de tous les
temps.
Telles sont les réflexions, auxquelles le soussigné croit
devoir se borner , parce qu’il les regarde comme seules
décisives. Il lui suffit de renvoyer, relativement à tous les
autres moyens qui ont été opposés par les intimés , et
au défaut de fondement des autres motifs du jugement
qui est attaqué, au mémoire imprimé et distribué pour
la mineure Dumont. Elle peut se reposer sur la discussion
lumineuse et savante qu’il ren ferm e, et qui décèle un
vrai talent. La justice oblige même d’avouer qu’on trouve
dans ce mé moi re les réflexions que le soussigné vient de
faire, parce qu’il ne laisse rien à désirer.
Si le soussigné a présenté ces réllexions , s’ il ne s’est
pas contenté de donner un simple assentiment aux motifs
développés dans, le mémoire , c’est parce qu’il a cru
devoir prouver de plus en plus qu’ il a sur la question
une opinion fortement prononcée. Il a en effet la con
viction q u e les moyens des intimés sont, à proprement
parler, des chicanes créées par l'imagination, dans la vue
de priver la mineure Dumont d’un patrimoine acquis à
son malheureux père , aussi solidement et aussi légale
ment qu’ il ait été possible.
Délibéré à R iom, par l’ancien jurisconsulte soussigné,
ce 26 juillet 1808.
G R E N IE R
( du Puy-de-Dôme ).
A R I O M de 1’im p rim e tie do T h i b a u d - L a n d r i o t , im p rim e u r de la C o u r d ’appel.
�
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[Factum. Hilliard. 1808]
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secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
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forclusion
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Titre complet : Consultation pour les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans ; contre les sieurs et dames Rabusson de Vaure et de la Roque, intimés.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
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De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1804
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
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avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
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b13da05e373257f25f1ccc84d756b56d
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Text
PRÉCIS
COUR
i m p é r i a l e
DE RIOM.
PO U R
Sieur C l a u d e M I C H E L E T
i . r®C
et dame M a g d e l e i n e
:
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I
hambre.
P A S T I E R , son é p o u s e , habitans de cette ville
de R io m in tim és:
. .
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CON T R E
M* --- T1-1
L e sieur
T A L O N , a u ssi h a bitan t de cette
C la u d e
v i l l e , appelant d 'u n jugem ent rendu a u tribunal
civil de R io m , le 3 1 décembre 1812.
L
es
sieur et
dame M i c h elet
se
voient
obligés
d’e n trer en lice av ec le sieur T a l o n , leur g e n d r e ,
et sa p r é te n tion inconvenante leur rappelle des sou
venirs déchira ns.
I l s ont
lui a
perdu
survécu
est
leur
fille u n iqu e;
mort
un enfant qui
dans leurs bras. D an s ce
1
�(2)
cruel état d ’is o l e m e n t , qui
se fait si pé niblement
sentir, et dont rien ne console, ils croyaient au moins
être
à l ’abri
favorisé
de
de toutes recherches.
la f o r t u n e , marié ,
Leur
gendre ,
ayajit des enfans
d ’ une seconde u n i o n , a réparé toutes ses pertes , et
oublié ses premiers liens ; ou du moins il ne s’en
souvien t que pour f a t i g u e r des parens m alheu re ux
dont il n’eut jamais à se pl ain dre, et qui ont rempli
a v e c exactitude tous les engagemens q u ’ils avaient
contractés.
D é j à un premier ju g em e nt a proscrit la demande
du sieur T a l o n ; sera-t-il plus h e u r e u x sur l’appel ?
Le
c r a i n d r e , ce serait douter de la justice et des
lumières de la Cour.
F A I T S .
L e 1 7 pluviôse an 6 , le sieur Claude T a l o n épousa
la demoiselle Gilb ert e Michelet ; ses père et m èr e
l’instituèrent .leur héritière générale et univers elle,
à la charge de l ’usufruit de la moitié des biens au
profit du survivant.
Us constituèrent à leur fille un trousseau é v a l u é
à 1,200 f r . , dont le contrat tient lieu de quittance.
« Et pour tenir lieu de plus
ample ava n c e m e n t
« d'hoirie , les sieur et dame Michelet s’obligent de
« recevoir les futurs é p o u x dans leur m aison , de les
« nour rir, chauffe r, éc la ire r, blanchir et entretenir
�« pendant leur co h a b it a tio n , ^eux et leurs enfans à
« naître du présent m ar ia g e , à la charge par le futur
« de rapporter ses soins, tr avaux et industrie, et le
« rev enu de ses biens ».
I l est dit que pour dédom m ag er le futur ép o u x
de la confusion de ses travaux et
in d u str ie , ainsi
que du rev enu de ses biens, le sieur Michelet l ’associe
po u r moitié à son c o m m e r c e , ainsi q ü ’aux acquisitions
d ’im m e u b l e s , et placement des capitaux q u ’il pourra
faire dans la suite ; et pour déterminer les profits ou
les pertes de la société, la valeur actuelle des m ar
chandises et autres effets de c o m m e rce appartenons
au sieur M i c h e l e t , a été fixée entre les parties à la
so m m e de 8,ooo fr. Cette somme doit être pr élevée
pa r le sieur Mic hel et en cas de partage de la société ,
en marchandises aux prix de leur a c h a t , sans que
sous aucun prétexte , elles puissent être évaluées à
plus haut prix pou r le pr élèvement.
E n cas d ’inc omp atibilité, les sieur et dame M ich elet
constituent, en avancement d 'h o irie, à la futu re, leur
fille , une rente annuelle
de
dix setiers from en t ,
payab le ch aque année de six en six m o i s , à c o m
m e n c e r le premier paiement au jour de la séparation.
Cet avancement d’hoirie doit s’imputer en totalité sur
la succession de celui de ses père et mère qui viendra
à prédécéder.
Il est aussi stipulé entre les ép o u x une c o m m u
nauté
de biens meubles
et çonquêts imm eubles à
2
�(4)
faire pendant la durée du mariage. L a future doit
confondre
iooo
dans cette co m m un aut é
francs sur sa
une pomme de
constitution de d o t ; le surplus
lui demeurera propre.
L e survivant des ép ou x doit gagner sur les biens
du pr édécédé la so m m e de 2000 francs, et si c ’est
l’ép ou x , il gagnera le trousseau de sa fe m m e , aux
charges de la Coutume.
I l est enfin ajouté que les père et mère des fu tu r s
se r é s e rv e nt , chacun en ce qui le c o n c e r n e , la ré
version des objets par eu x ci-dessus constitués en cas
de prédécès des futurs é p o u x , sans enfans, ou de
leurs enfans sans descendans , « sans néanmoins que
«■ladite réversion puisse porter atteinte aux gains et
« avantages acquis au survivant des é p o u x , en vertu
« des clauses du présent contrat de mariage ».
L e co ntra t, au surplus, ne contient aucun en ga
gem ent personnel des père et m è r e , aucune garantie
de leur part pour les gains stipulés.
Ce mariage n ’a pas eu une long ue durée ; les sieur
et dame Miclielet eurent le malheur de perdre leur
fille unique dans les premiers jours de ventôse an 9.
Elle laissait une fille dans le plus bas âge.
U n mois après le décès de sa f e m m e , et le premier
germinal an 9 , il fut passé un traité entre le sieur
Miclielet et le sieur T a l o n , portant dissolution de la
s iciété contractée entre eux lors du m a r i a g e ; l’a ct if
de la société fut porté à 9,200 francs, ce qui donnait
�1,200 francs de b é n é f i c e , dont moitié revenait au
sieur Talon.
L e traité porte quittance de cette somm e de 600 fr.
de la part du sieur Ta lon , qui reconnaît aussi avoir
reliré de la maison de son b e a u - p è r e , le trousseau,
bardes et nippes de sa f e m m e ; et il est stipulé que
les autres clauses du contrat de m a r i a g e , du 17 plu
viôse an 6 , resteront dans leur force et vigueur.
Il restait un gage de cette u n i o n ; le sieur T a l o n ,
dans les premiers m om en s , avait pris cet enfant auprès
de lui; mais bientôt il lui devint à c h a r g e , lorsqu’il
eut contracté de no uve au x liens ; cependant le sieur
M ic helet était
exact à p a y e r la
rente
q u ’il avait
promise > mais il était dévo ré d ’inquiétude sur le sort
de sa petite f i l l e , dont la santé était chancelan te; il
croyait s’apercevoir que cet enfant était à charge à
une n o uve ll e-é pous e, et ne recevait pas tous les soins
q u ’exigeaient son é t a t , et la faiblesse de sa santé.
O n doit pardonner quelque chose à un aïeul dont
la tendresse est a larm é e, et qui n’a d ’autre consolation,
d ’autre espoir que dans un enfant qui lui tenait lieu
de sa fille chérie : le sieur Ta lon 11e fut pas indulgent ;
1 aigreur s’en m ê la; il y eut des écrits qui alla ie n t jusqu aux injures. On fera grâce au sieur Ta lon de quel
ques lettres, qui ne feraient honneur ni à son style, ni
pe ut -êt re à son cœur; il suffit de dire q u ’il re n v oy a
assez durement cet enfant à son a ïe u l , qui le reçut ave c
bienveillance; que les soins les plus tendres lui furent
�«*•'
(
6
)
prodigués, mais soins inutiles ! l’enfant a succombé à
ses m a u x , et l’aïeul a p a y é tous les frais de maladie
ainsi que les frais funéraires.
Gilber le T a l o n , petite-fille du sieur M i c h e l e t , est
déc édée le 2 décem bre 1809. L e sieur Miclielet avait
jusques-là acquitté la rente des dix seliers de blé : sa
dernière quittance est du i 3 septembre de la m ê m e
année 1809.
L e s fraisde maladie, q u ’il a payé s, se portent, d ’après
les quittances, à i ô o f r . , et les frais funéraires à 8 3 fr.,
ce qui fait la so mme de 243 fr. Il est facile de v o i r ,
d ’après cet a p e r ç a , que le sieur Miclielet est cr éa n
cier de son g e n d r e , quand il pourrait réclamer ce qui
a couru de la rente depuis le 20 a o û t , époqu e de
l ’é c h é a n c e , jusqu’au 2 déc em b re 1809.
Mai s le sieur T alo n a une toute autre id é e , il pense
que celt e rente de dix setiers de b l é , promise pour
tenir lieu d ’alimens, n’est pas éteinte par le décès de
sa fille. Suivant lui, c ’est une rente pe rp étuelle, transmissible, q u e le sieur Miclielet doit lui servir à per
p é tu ité , ou du moins l e s ie u r M i c l i e l e t est te n u de lui
p a y e r la so m m e de 2,000 fr. stipulés pour gain de
survie dans son contrat de mariage.
E n c o n s é q u e n c e , et par acte du 2 3 mai 1 8 1 0 , il
fait notifier son contrat de mariage aux sieur et dame
M i clie le t , avec sommation de satisfaire à la teneur
d’i ç e l u i , e t pa ye r les arrérages échus de la rente de
dix seliers de froment en deniers ou quittances, depuis
�(7)
la date de son con tra t, à en continuer le service et
paiement à l'avenir et à chaque te rm e, sinon et faute
de le fa ir e, il déclare q u ’il se pourvoira à l ’effet d ’ob
tenir une grosse en fo rm e exécutoire de son contrat de
m a r ia g e , pour les y contraindre par les voies légalesj
il se fait aussi réserves de tous autres droits.
On ne voit pas trop pourquoi le sieur T alo n s’adresse
aussi à la dame M i c h e l e t , sa b e l l e - m è r e , qui n’a que
des biens d o ta u x , et n’a contracté auc un e obligation,
du moins v alab le, par le contrat de mariage de sa fille.
L a dot , ou avancement d’hoirie sont la dette du p è r e ,
mais le sieur T a l o n n’a rien voulu-avoir à se reprocher,
et la dam e Michelet a resté en qualité.
Elle a formé , conjointement avec son m ar i, oppo
sition à celte espèce de com m andem en t fait dans une
fo rm e n o u v e ll e , et sans être muni d ’un litre en forme
exécutoire. L e s sieur et dame M ic hel et observent q u’ils
ne devaient rien à leur g e n d re ; que la rente ou pension
par e u x promise à leur fille, n’était qu'en r em p lac e
ment des alimens q u ’ils devaient fournir ; que leur
obligation était éteinte par la mort de leur 1111e et
pe lit e-fïlle.
Sur cet exp osé, une ordonnance en r é f é r é , rendue
à l'hôtel du Pré siden t, le 27 juin 1 8 r o , re n v o y a les
parties à l’au die nce , toutes choses demeurant en état.
L e s poursuites ont été suspendues jusqu’ au i 3 d é
cembre 1 8 1 3 , q u ’il a été rendu ail tribunal civil de
celte ville, un jugeme nt contradictoire, dont il importe
de connaître les motifs et le dispositif.
�(8)
« Considérant que la future seule s’oblige au paie» ment de la somme de 2,000 fr. de gain de su rvie,
» et qu ’ ainsi ses biens seuls actuels 011 à venir y élaient
» affectés ;
» Considérant
q u ’on ne saurait - regarder com m e
» biens acluels de la f u tu re , ni c o m m e une donation
» perpétuelle et transmissible, un objet dont elle a pu
» disposer c o m m e d'un bien actuellement et irrévo» cablement acquis, la simple
obligation contractée
» par ses père et mère de recevoir les ép ou x dans leur
» maison, de les nourrir, chauffer, etc., pendant leur
» cohabitation et celle de leurs enfans;
» . Q u e cette nourriture et ce l o g e m e n t, sansaffecta» lion de capital, sont censés personnels à la future
» et aux enfans à naître, et doivent s’éteindre a vec e u x ;
» Considérant que l’obligation de paye r chaque ann ée
» dix setiers de b l é , obligation conditionnelle, subor» donnée au cas d ’incompatibilité, n’étant que le rem» placement de la nourriture et du l o g e m e n t , n ’eut pas
» d’ autre ca rac tèr e, et ne fut pas d’autre nature que
» celle dont elle devait tenir lieu , le cas a v e n a n t;
» Considérant que la clause de réversion fut, en ce
» p o i n t , sans objet et inconciliable m ê m e avec une
» libéralité q u i , ne dessaisissant le donateur d’aucune
» partie de ses biens , se bornait à des alimens à prendre
» à sa t a b l e , et à participer à une habitation cotn» mune ou bien à une fourniture annuelle de dix
» setiers de blé pour en tenir lieu ; q u ’ainsi on ne saurait
» en inférer rien d ’utile à la cause ;
» En
�» E n ce qui est relat if aux arrérages de la re n t e ,
» attendu q u ’ils sont dus jusqu’au décès de l ’enfant
» T a l o n , et que le sieur Michelet ne fait point d ’offres
» à cet ég ard ;
» L e tribunal jugeant en premier ressort, déclare le
» sieur T a l o n n on -r ec ev ab le dans sa dem an d e, co n» d a m ne le sieur Miclielet à justifier de sa libération
» de ladite rente de dix setiers de blé jusqu’au décès
» de l ’enfant T a l o n , et à pa ye r tous arrérages q u ’il
» pourra devoir sur icelles; com pense, dans ce cas, les
» d é p e n s ; ' e t ' s i toutefois il n’est dû aucuns arrérages,
» co ndam ne le sieur T a l o n en tous les dépens ».
L e sieur T a l o n , qui ne court aucun risque de pe rd re ,
q u i certat de lucro ca p ta n d o , ne se tient pas pour
b a t t u , et veu t épuiser tous les degrés de juridiction; il
rit de sa dé fa ite, et a l'indiscrétion de publier q u ’ il a
la certitude d’être plus h eur eux en la Cour. C ette ja c
tance ne doit pas effrayer; les principes, les motifs les
plus puissans de considération se réunissent e n .f a v e u r
d ’ un père m a l h e u r e u x , qui gém it sur son sort, et doit
plutôt rec ev oi r des consolations q u’ un accroissement
d ’infortune. L e sieur T a l o n devait le sentir, et s u r - tout
s apercevoir q u ’il m anque aux c o n v e n a n c e s , aux égards
q u ’il doit à son b e a u - p è r e , en affichant une prétention
inconsidérée.
Mais il est des personnes qui ne s’occupent et ne
voient que leurs in t é rê t s, et ne se mettent pas en peine
de justifier leurs pr océd és, p o u rv u q u ’ils trouvent leur
3
�profit : si la délicatesse y r é p u g n e , le bénéfice d éd o m
mage.
Le
sieur T a l o n ,
malgré son apparente s é cu r it é ,
obtiendra-t-il la continuation d ’ une rente à pe rp ét uité ,
c o m m e i l l’a dem andée par son exploit d u 2 3 mars 18 10 ?
ou f e r a - t - i l cond am ner son b e a u -p è r e au paiement
d’ une so m m e de 2,000 fr., à laquelle il réduit sa pré
tention en dernière analyse.
Que l est son titre ? un contrat de mariage par lequel
le père de sa f e m m e s’o b l ig e , à titre d ’a va n ce m en t
d ’h o i r i e , de lui fournir des alimens, dans sa m a i s o n ,
o u , pour en tenir l ie u , une rente de dix setiers de blé.
O n ne voit rien jusqu’ici q u ’une convention qui
ne peut avoir plus d ’étendue que la durée du mariage;
ce n ’est pas un avancement d ’hoirie, proprement dit;
il n ’y a aucune transmission de la propriété d ’ un m o
bilier ou d’ un i m m e u b l e , en attendant Fouverture de
la succession.
E n g é n é r a l , un a v a n ce m en t d ’hoirie n ’est autre
chose q u ’u n e r e m i s e anticipée , d ’u n e portion de la
succession q u ’on doit recueillir un jo u r ; l ’enfant qui
la reçoit est tenu de la rapporter lors de l ’ouverture
de la su cc es sio n , et dans la rigueur de l’ancien droit ;
l ’enfant ne pouvait se dispenser du rapport, m ê m e en
renonçant à la succession; tel est l ’avis du savant D u m oulin , sur le § 17 de l ’ancienne co u tu m e de P a ri s ,
n°s. 1 et 4 : n on licet ig itu r hoc casa J ilio
se tenere
a d donalLonem sibi f a c t a m , abslinendo se à succès-
�( II )
sione , secl necesse habet vel adiré vel rem donatani
restituere.
Il faut co n ven ir que l’opinion de ce jurisconsulte,
qui faisait loi de son t e m s , ne fut pas suivie dans la
jurisprudence. On pensa générale ment que le fils p o u
vait conserver l ’objet donné en a v a n ce m en t d ’hoirie,
en re n on ç ant, sauf le retranchement pour les légitimes.
Mais dans quel cas? lorsque l ’avan ce men t d ’hoirie con
sistait en un corps ce rta in; q u ’il y avait transmission
réelle ou d’ un mobilier ou d ’un immeuble.
Il n’en est pas de m ê m e lorsque l’avanc emen t d’hoirie
ne consiste q u ’en un simple reven u , une pension ,
une prestation annuelle ; ce re v enu n’est alors q u ’ une
provision alimentaire pour aider l ’ un-des é p o u x à sup
porter les charges du mariage; et l’obligation s’étein t
par le décès de l ’ép o u x auquel elle a été promise. C ’ est
ce q u i a été jugé bien fo rm e l le m e n t , et en th ès e, lors
d ’ un arrêt de la C o u r , du 24 mai 18 08, rendu sur les
conclusions de M. le Président B o n a rm e s , qui rempla
çait M. le Procureur général. E n voici l’espèce.
L e s sieur et dame Pé rig and de R o c l ie n e u v e avaient
marié leur fille unique a v e c le sieur B o n h o m m e - L a jaumont. Par ce co nt ra t, du 27 messidor an 3 , il fut
con venu que les futurs feraient leur dem eure et rési
dence en la maison et compagnie de leur père et m è re ,
qui s’ obligèrent de les nourrir. E n cas d’incom p ali bilité , ils s’obligèrent de donner aux fu tu rs, le jour de
leur s o r t i e , la jouissance de la maison qui était alors
4
�(
12
)
occ up ée par le frère du sieur R o c h e n e u v e , a vec les
meubles énoncés au contrat , et de leur p a y e r , pour
ch aq ue a n n é e , de quartier en quartier, et par a v a n c e ,
à co m p t er du jour de leur sortie, une so m m e de 1,200
f ra nc s, et la quantité de i 5 seliers de blé-seigle.
L e s futurs se font ensuite respec tivement donation
de l’entier usufruit des biens qui se trouveront appar
tenir au p r e m ie r mourant lors de son décès.
L a demoiselle Périgaud est morte sans pos térité5 ses
père et mère lui survivent.
L e sieur L a ja u m o n t fait sommation à son beau-père
de lui p a y e r les arrérages de sa pens ion, depuis sa
sortie de leur m a i s o n , et dem ande , c o m m e le sieur
T a l o n , la continuation de la rente pendant sa v i e ,
c o m m e usufruitier des biens de sa femme.
L a j a u m o n t , c o m m e T a l o n , prétendait que cette
rente était un av a n ce m en t d’hoirie transmissible, qui
avait saisi du m o m e n t m ê m e la d a m e , leur f i l l e , et
dont le mari devait jouir à titre d’ usufruitier pendant
sa vie.
L e sieur R o c h e n e u v e répondait q u ’il n’avait rien
d o n n é ; q ue la rente stipulée par le contrat de sa
f i l l e , n’était
q u ’en
remplacement de la nourriture
q u ’il sréiait obligé de f o u rn i r; mais que ce lte obli
gation s’éteignait
par le prédécès de sa f ille, q u i ,
n ’aya n t pas s u c c é d é , n avait pu rien tr ansmetlie a
son époux.
1 ^ tribunal civil avait déclaré I i ü j a u m o n t non r e -
�c e v a b l e , et n’avait m ê m e donné aucun effet au c o m
mandement pour les arrérages échus avant le décès
de la dame Lajaurnont.
L ’arrêt de la C our rectifie le ju gem ent à cet égard;
mais « en ce qui louche les arrérages de la pension
« réclamée par L a ja u r n o n t , pour le tems postérieur
« au décès de sa f e m m e , et pour l ’a v e n i r pendant
« la dur ée de la vie du m ar i;
« A t ten d u qne la pension et jouissance convenues
« par le contrat de mariage du 27
messidor an 3 ,
« en cas d ’incompatibilité, n’ont été assurées q u ’en
« remplaceme nt de la nourriture et du logement que
« les père et m ère s’étaient obligés de fournir aux
« deux é p o u x dans leur propre maison ;
« A t te n d u
que
ces
conventions
ne
doivent pas
« avoir plus d ’étendue que la durée du m a r i a g e , et
« se sont éteintes par le décès de la dame Lajaurnont ;
» A tte ndu que les ép oux ne se sont fait par leur
« contrat de m ar iage , d ’autre donation
en usufruit
« que des biens q u ’ils auraient au m om ent de leur
« décès ;
« Atte ndu que la dam e Lajaurnont n’en avait aucun
« a 1 instant de sa mort , arrivée avant q u ’elle eût
« recueilli auc un e
succession ; que tout, son r ev en u
« consistait dans une pension qui lui avait été assurée
« accidentellement en cas d ’inc ompatibilité, pension
« qui a été anéantie
par sa m o r t , et qui ne peut
« pas revivre au profit du m a r i , en contemplation
�cc duquel elle n a v a it pas été stip u lé e, et qui n ’avait
« uni quement lieu que pour soutenir les charges du
c< m ar ia ge ;
« L a C o u r confirme quant à ce , elc. ».
Q u e le sieur T a l o n lise et q u ’il se juge : peut-il y
avoir
d ’espèce
plus
semblable.
Mirhelet , c o m m e
R o c h e n e u v e , s’oblige de r e c e v o i r les ép ou x à sa c o m
pagnie , de les n ourr ir ; en cas d ’incompalibilité , il
donne
en re m placem ent dix selicrs de froment par
a n n é e ; il ne iîxe
aucun capital; ce
n ’est point en
contem plation de son g e n d r e , «[ju’ il promet de paye r
cette rente ; elle n’a d’autre objet que des alimens ,
des m oyen s de soutenir les charges du mar iage ; donc
l ’obligation ne peut pas avoir plus d ’étendue que la
dur ée du m ar ia ge, et s’est éteinte par le décès de la
da m e Talon.
L a dame T a l o n , c o m m e la dame L a j a u m o n t , n’a
.recueilli auc un e succession, n ’a laissé aucuns b ie n s ;
tout ce q u ’elle avait consistait dans cette rente
de
d ix se t ie rs , qui lui avait été assurée accidentellement,
en cas d ’incompatibilité , et pour
tenir lieu de la
nourriture et du logement.
Cette pension s’est anéantie ave c elle ; ses père et
m è r e n ’ont rien p r o m i s , ne se sont engagés en rien ,
n ’ont garanti aucun des gains. L e sieur T a l o n ne peut
donc avoir aucune action contre eux.
L ’appelant est bien convaincu que la constitution
d’ une simple re n t e , pour le cas d ’inc omp atibilité, doit
�( i5 )
^
cesser a v e c le mariage , mais il voudrait trouver dans
son contrat des clauses qui la rendent transmissible,
011 du moins jusqu’à concurr ence des ga in s ; en co n
séquence , il propose plusieurs objections, i
1.® L a future a dû c o n f o n d r e , dans la c om m un auté
conjugale , une som m e de i o o o francs à prendre sur
sa constitution de d o t , et il ne lui a été constitué
q u ’un trousseau et la rente dont il s’agit ;
2.° Les père et mère de la future ont stipulé la
réversion des
objets par eux constitués, en cas de
décès de t leur fille sans e n f a n s , et des enfans sans
descendans ; il est dit que cette réversion ne pourra
porter atteinte aux gains et avantages acquis au sur
v iv a n t des futurs époux.
Le
sieur T alo n conclut de cette stipulation, q u ’il
existe une transmission réelle et perpétuelle; que cette
rente
survie
constituée est au moins affectée au gain
de
2,000
francs,
et
que
dès-lors le
de
sieur
M ichelet est te nu , pe rso nnellem ent, de lui p a y e r c e ll e
s o m m e , si mieux il n’aime continuer le service de
la rente.
4
C ’est sur-tout ce dernier m o y e n sur lequel le sieur
T a l o n co m pte le plus, car il conviendrait aisément
qu il n en a pus d'autre.
E n ef fet , la première objection est insignifiante et
n ’a aucun fondement ; la confusion que la f e m m e
doit faire pour prendre part à la c o m m un auté , est
u n e confusion
é v e n t u e l l e , qui ne doit
avo ir
lieu
�*(■>&
( 16 )
q u ’aulant que la c o m m u n a u té serait profitable. T o u t
à été terminé à cet ég a r d , et le sieur T a l o n y
a
trouvé un b én éfic e; la société contractée avec son beaupère , a eu un act if de 1,200 francs, dont la moitié
a été reç ue par T a l o n , ainsi q u ’il résulte du traité du
p rem ier germinal an 9. Sur cette som m e de 600 f r . ,
il en revenait celle de 3 oo francs à sa fe m m e c o m m e
c o m m u n e \ on ne lui a rien dem ande a ce sujet ;
mais il est bien évident que la som m e de 1000 francs ne
doit plus être confondue , dès q u’on n’a point eu égard
à la c o m m u n a u t é , et dans tous les cas , ce ll e somme
ne pourrait être prise que sur les biens q u ’aurait re
cueillis la dame T a l o n ,
si elle avait succédé à
pè re et mère ; cette survie
ses
devait avoir lieu dans
l ’ordre de la n a t u r e ; c ’est sur cet aven ir q u ’on a
c o m p t é , puisqu’il n’y a eu a u c u n e autre constitution,
et le sieur T a l o n ne pouvait pas s’y m é p r e n d r e ; il
n ’a dû espérer autre chose que les biens qui pro
viendraient des sieur et dame M i c h e l e t , et que la
d a m e , son é p o u s e , ne pouvait
recueillir q u ’en leur
survivant.
T o u t a été subordonné à cet évé ne m ent ; les père
et mère n ’ont vo ulu se dépouiller de rien : ils ont
promis leur succession et rien de plus. Les conventions
personnelles des é p o u x , les gains q u ’ ils ont stipulés,
n ’ont
eu
d ’autre
base
que
l’espoir
de
succéder;
le prédécès de la fille a tout a n é a n ti ; les disposiiions
sont devenues caduques dès que la iille n’a pu succéder.
M a is
�s.
( i7 )
Mais à quoi b o n celt e clause de re tour , dira le sieur
T a l o n ? Il faut bien lui donner un effet q u e l c o n q u e ;
les père et mère ont manifeste par-là leur inlenlion
de transmettre à leur fille une rente en propriété , pré
cisément pour la garantie des gains, en cas de prédécès.
D o n n e r un effet quelconque à une clause inutile! O n
n ’ en voit pas la nécessité. Il faut d ’ailleurs ne pas o u
blier que le contrat de mariage est de l’an 6 , anté
ri eu r à la publication du C o d e Nap oléon ; on doit se
reporter à l ’anci enne co u tu m e de la p r o v in c e , où les
ascendans ne succédaient pas. T e l l e est la disposition
prohi bilive de l ’art. 2 du tit. 1 2 , qui a été modifié
par l’art. 3 , qui fait succéder les ascendans quant a u x
meubles et acquêts aut rem ent faits et avenus que par
hoirie ou succession ab intestat.
C ette
exclusion
cou tumière de
toute succession
luctueuse avait fait introduire dans tous nos 'contrats
l a clause de réversion au profit des asc en da ns , de tous
les objets par eu x do nn és ; elle était tellement d ’u s a g e,
q u ’on en a v u dans les contrats qui n e contenaient
q u e de simples institutions. E t il n ’est pas étonnant
q u ’on l ’ait insérée dans le contrat de mariage du sieur
Talon.
D ab o rd , sous l ’em p ire de la loi du 1 7 nivôse an 2 ,
la présence des frères faisait cesser le droit de s u c cessibilité des ascendans.
L a clause était nécessaire pour le sieur Talon p ère,
qui constituait à son fils dix septerées de terre en
3
�( i8 )
avan ce m en t d’h o i r i e ; i l est bien certain que si le sieur
T a l o n fils fût mort avant son pè re , ses frères auraient
succédé
pour
l ’imm euble
donné
en
av a n ce m en t
d' hoirie , et le pè re a dû le prévoir.
Il
n ’est pas étonnant alors q u ’on ait stipulé une
réversion g é n é r a l e , tant pou r le père du futur que
pour les père et m ère de la f i l l e , chacun en ce qui
les concerne ; cette clause n ’a pas m êm e
dû être
m é d i t é e , parce q u ’elle ne pouvait nuire à pe rson ne,
quoique surabondante : utile per in u tile non vitiatur.
Elle n’était pas également tout à fait inutile pour
les sieur et dam e M i c l i e l e t , qui avaient constitué à
leu r fille un trousseau évalué à 1,200 fr. en Fan 6 ;
le mari ne gagnait pas
le trousseau ; il fallait une
convention ex presse, ainsi q u ’il a été jug é par p l u
sieurs Arrêts de cassation, parce que toutes C outu m es
étaient abrogées par la loi du 17 nivôse; il est c o n v e n u
par le contrat que le mari le gagnera pour sa survie ;
si le mari était mort
le
p r e m i e r , et q u ’ensuite la
f e m m e eût prédécé dé ses père et m èr e , il fallait
encore les clauses de réversion pour que les père et
m è r e pussent reprendre le trousseau q u ’ils avaie nt
constitué à leur fille; voilà donc un motif pour stipuler
la réversion , s'il n’avait pas été dit que cette ré v er
sion serait sans préjudice des gain s, le retour aurait
privé le mari survivant du trousseau malgré la co n
vention , à raison du prédécès de la
c a s , les choses retournnt
fille; dans ce
leur p r em ier é t a t , les*
�3^
( i9 )
ascendans reprennent ce qu'ils- ont d o n n é , franc et
q u i t t e , indé pe nda m men t de toutes stipulations p e r
sonnelles entre les ép ou x ; il a donc fallu dire encore
pour ce trousseau , que la réversion serait sans p r é
judice des gains. P a r conséquent , la stipulation du
retour est justifiée par cela seul q u ’elle a un o b j e t ,
q u ’elle porte sur une constitution
quelconque , sur
une chose donnée par les père et mère.
Mais vou drait-o n encore que c e ll e réversion
sans objet , q u ’il n ’y
fût
eût rien à reprendre par les
ascendans? alors il faudrait dire a ve c les premiers juges,
que cette clause est inconciliable ave c une convention
p r é c é d e n t e , qui ne dessaisissait le donateur d ’aucune
portion de ses biens, qui se bornait ¿1 des aliinens 011 à
une fourniture annuelle de deniers pou r en tenir lieu.
Mais prétendre qu' un e clause de réversion change
la nature et le caractère des dispositions qui précèdent j
q u ’ une rente annuelle ou pension en remplacement de
nourr it u re , devient une propriété transmissible, une
re d e v a n ce perpét uelle, lorsqu’ on convient q u e , sans la
stipulation du retour, elle serait éteinte p a r l a mort de
celle q u i e n fut l ’o b je t, c ’est le comble de l ’a b s u r d i t é ;
c est un système subversif qui ne peut entrer dans une
tête bien organisée.
U n e clause de retour n’est q u ’ une précaution q u ’on
peut prendre sans c o n s é q u e n ce , stipuler sans nécessité,
q u o iq u ’elle soit indispensable, lorsqu’ il y a une dona
tion ; dans ce cas elle a l ’eifet de faire retourner au dona-
�’
(
20
)
teur les objets par lui donnés ; si’l n’y a pas de do
nation, elle devient inu tile, mais ne peut être vicieuse
ni aggraver le sort de celui qui a cru devoir la stipuler.
U n e donation, au contraire, ne se présume pa s, ni
ne peut être t a c i t e , il faut q u ’elle soit expresse; la
fa v eu r des contrats de mariage ne va pas jusqu’à faire
supposer une chose qui n’existe pas. Et pour que le sieur
Ta lo n pût réclamer son gain de su rvi e, il faudrait abso
lu m e n t , ou que le sieur Michelet eût d i t , qu'en cas de
prédécès de sa fille, la rente q u ’il lui constituait serait
le gage des gains promis au su rvivan t, ou qu'au m ê m e
cas il eût promis de garantir ces m êmes gains sur ses
biens personnels.
L o in de tr ouver rien de semblable dans le contrat
de m ar iage , on y voit tout le contraire; on y re m ar
que une intention bien prono nc ée des père et m è r e ,
de ne contracter aucune obligation; ils n ’entendent se
dessaisir de rien ; ils veulent bien avoir leurs enfans
auprès d’e u x , les nourrir et e n tr e te n i r, les l o g e r , etc.;
mais ils ne souscrivent à cette obligation que pour
enga ger leurs enfans à rester à leur compagnie , et s’ils
ne pe uvent com pat ir, ils pourvoie nt à leurs alimens,
mais par le m o yen d ’ une redevance annuelle, subor
donnée à la durée du mariage.
lies autres
conventions
matrimoniales
entre
les
futurs leur sont absolument personnelles : les père et
mère de la future y sont étrangers; ils ne promet lent
à leur tille que leur succession, et rien de plus. P o u r
�( 21 )
lÿ j
avo ir cette succession, il faut survivre a u x instituans;
et les é p o u x devaient l’espérer; mais ce n’est q ue sur
cette fortune à venir que la fe m m e a pu asseoir la
confusion de la c o m m u n a u té , c o m m e le pa iem e nt
des gains ; le mari n'a dû com pter que sur les biens
que sa f e m m e aurait un j o u r ; il a couru la ch ance
du pr édécès, puisque sa f e m m e n ’avait rien d’acquis;
il n’a exigé aucune sûreté, aucune garantie des père
et m è r e ; ce u x -c i n’ont pas voulu en d onn er; ils n’ ont
r i e n pr om is; n ’ont rien affecté : c ’était un hasard à
courir. L e sieur T a l o n avait toutes les chances dans
l ’ordre de la nature ; il s’en est contenté ; il a tout mis
au hasard ; le sort lui a été contraire , puisque sa f e m m e
n ’a recueilli aucune succession : c ’est un malheur pour
l u i ; c'est une consolation pour les père et m ère de
n ’être pas dépouillés de leur v i v a n t , pour enrichir un
gendre qui leur devient étranger, et qui a trouvé un dé
d o m m a g e m e n t à ses peines dans les bras d’ une seconde
épouse.
Quelle différence dans leur deslinée! L e sieur T a l o n
a tout réparé par un nouvel établissement. Ri en ne
peut remplacer dans le cœur d ’ un père et d ’une m ère
1 enfant q u ’ils ont perdu. Faudrait-il encore que la
perle de leur fille fût suivie de celle de leur fort u n e?
que les recherches continuelles, les vexations odieuses
d’ un gendre leur rappellent, à chaque instant, leur
m a l h e u r ? Loin de nous une pareille idée! Elle révolte
lout à la fois la n a t u r e , la justice et l’équité.
�( 22 )
Qu e le sieur T a l o n cesse donc de se faire illusion ;
q u ’il abandonne une .prétention odieuse que la déli
catesse re pouss e, que la loi condamne. Q u ’il sache que
toutes les faveurs seront aujourd’hui pour ceux qu'il
a tt a qu e; que loin de trouver dans son contrat une dis
position à son pr ofi t, on chercherait
à l’effacer s’il
pouvait y en exister; que tousles principes s’opposent
¡1 ce q u ’on puisse iaire résulter une obligation tacite
d ’une clause surabondante, dont Feffel est de conserver
au lieu de n u i r e , et qui ne peut jamais aggraver le sort
de ce ux qui Font stipulée.
Il
ne reste plus q u ’un mot à dire sur les arrérages de
la pension, antérieurs au décès de l 'e n f a n t; le^ sieur
T a l o n n ’avait rien demandé à ce su jel, et il est facile
d ’établir la libération du sieur Michelet ; il a toutes ses
quittances jusqu’au 20 août 1809. L ’enfant est décédé
le 2 déc em b re su iv ant; il y aurait donc trois mois et
douz e jours d ’arrérages, qui ne donnent pas le tiers de
la rente : ce serait à peu près trois setiers; mais le sieur
M ich e le t rapporte les quittances des frais de maladie
et d ’en te rrem en t, q u ’il a p a y é s , et qui seraient à la
charge de son gendre : ces objets se portent à 260 fr.;
le sieur M ich e le t est donc créancier au lieu d ’être
débiteur.
E n f i n , le sieur T a l o n a mal à propos compris la dame
Michelet dans ses poursuiles. On a déjà ‘dil que la dame
M ich elet n ’avait que des biens do ta u x ; q u ’elle n ’avait
pu contracter d’engagemens valables pendant le m a -
�.
riage ; que l’avancement d ’hoirie était la dette du p è r e :
le sieur T a l o n est d o n c , dans t ous les cas, non re c e vable contre la dame Michelet.
.
.
Mais cette dernière observation n’est que pour l ’ho n-
neur des règles. On croit avoir démon tré que le sieur
T a l o n a créé une chimère pour la combattre et q u ’il
" •• est absolument sans action contre le sieur •Michelet :
"
’que toutes les conventions de s on contrat sont anéanties
par le prédécès de son épouse,
-
4*
..
Signé- M I C H E L E T .
M .E P A G E S ,
ancien A v o c at.
% . «
*
M. e T A R D I F , A v oué-Licencié.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Michelet, Claude. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Tardif
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
rentes
rentes en froment
société de fait
société de commerce
communautés
coutume d'Auvergne
frais de maladie
frais funéraires
jurisprudence
dot
obligation alimentaire
pension de réversion
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Claude Michelet et dame Magdeleine Pastier, son épouse, habitans de cette ville de Riom, intimés ; contre le sieur Claude Talon, aussi habitant de cette ville, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Riom, le 31 décembre 1812.
note manuscrite : « Le jugement a été infirmé par arrêt du 10 mars 1813. Voyez les motifs à la suite du mémoire ».
Table Godemel : Avancement d'hoirie : 2. la constitution, par les père et mère de la future, en avancement d’hoirie d’une rente en grains est la constitution d’un capital de rente et non d’une simple pension viagère. cette constitution est une véritable donation entre vifs qui a saisi les contractants ; ce capital doit être affecté en paiement des gains de survie et autres avantages stipulés en faveur de l’époux survivant par le même contrat de mariage. Si dans le contrat de mariage il y a 1° stipulation de communauté entre les époux, avec déclaration d’un apport déterminé, par la future ; 2° clause de retour au profit des père et mère, constituants, sans préjudice aux gains et avantages stipulés entre les époux ; ces circonstances prouvent que l’intention des constituants était conforme à la convention effective.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
An 6-1810
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2213
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53442/BCU_Factums_G2213.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
communautés
coutume d'Auvergne
dot
frais de maladie
frais funéraires
jurisprudence
obligation alimentaire
pension de réversion
rentes
rentes en froment
société de commerce
société de fait
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53443/BCU_Factums_G2214.pdf
778f4b4528dfa917dff65bfb4460a4fd
PDF Text
Text
PRECIS
EN R E P O N S E ,
POUR
Sieur C l a u d e T A L L O N , appelant;
c o n t r e
,
.
Les sieur et dame M IC H E L L E T intimés
S
’ i l est légitime de stipuler des gains de survie par
des contrats de m ariage, il ne sauroit y avoir ni incon
venance, ni indélicatesse ,à les réclamer, lorsque l’évé
nement y a donné ouverture.
Cet usage nous a été transmis par nos pères, et nos
pères pensoient aussi-bien que nous; ils avoient admis
ces sortes de pactes, non-seulement comme des conven
tions licites, mais comme des stipulations qui leu r paroissoient tenir à la dignité même du contrat de mariage»
A
�(O
Ils ne crurent jamais qu’un gain de survie dût consoler
un époux d’une séparation cruelle; mais ils pensèrent
que ce seroit déshonorer le mariage que de s’étudier,
par une séparation absolue d’intérêts, à en rompre tous
les souvenirs, en même temps que la mort en briseroit
les liens ; ils regardèrent les dons réciproques comme
de précieux témoignages d’affection ; e t, bien loin de
taxer d’avidité la demande de ces avantages, ils auroient
regardé comme un outrage l'oubli ou le dédain du survi
vant des époux.
Qu’auroient-ils donc pensé de celui q u i, en les refu
sant après les avoir autorisés ou même prom is, eût ac
cusé d’injustice l’époux qui les auroit demandes?
Les sieur et dame Michellet parlent d’inconvenance,
d’aigreur ï :mais pourquoi? Que faisoit cette* accusation
à la cause? L e sieur Talion ne suppose pas qu’il;s y trou
vent une grande jouissance’; loin d’établir sur ce point
une discussion qu’il ne redouteroit p as, il n’y trouve
qu’un motif de plus de'se rappeler que leur fille fut son
épouse, et qu’il se doit à. lui-même une modération sans
bornes.
Toute la cause est. de savoir si la disposition formelle,
et valable: ea soi j dï'im contrat de mariage,, doit être exé**
cutée, QU s?il. suffira, à- celui qui veut s?y soustraire de:
prétendre qu’elle n’est pas. assez'précise pour l’obliger,,
et q.ue , loin d e l’entendnê dans lie sens;auquel elle produit
un eflet, la justice doit fermer les yeux ù sa clarté, à son
évidence, pour décider, contre toutes les. règles, qu’elle
n?est qu’une stipulatiôu vaine, une promesse inutile qu’i l f
faut chercher ¿à effacer du contrat ou elle est écrite-
�(
3
)
C ’est en effet la prétention des intimés; c’est la doc
trine qu’ils professent.
L e fait est tout entier dans les clauses de l’acte.
L e sieur Talion et la demoiselle Michellet contractèrent
mariage le 17 prairial an 6.
Les père et mère de la future lui constituèrent un
trousseau estimé 1,200 francs.
. ?
.
t
E t pour lui tenir lieu de plus ample avancement d’hoi
rie , ils promirent recevoir les futurs à leur compagnie,
les loger, nourrir et entretenir, à la charge par le futur
d’y apporter ses soins, travaux et industrie, et le revenu
de ses biens..
! J<
P o u r dédommager le fu tu r époux de ce rapport, il
fut associé au commerce du sieur Michellet.
E t cette société fut absolument indépendante de la
communauté entre époux, stipulée par le même acte.
Nous arrivons aux clauses essentielles.
A rt. 7. « E n cas à!incompatibilité , lesdits sieur et
« dame Michellet c o n s t i t u e n t en avancement d'hoirie
« à la future u n e r e n t e annuelle de dix setiers de
« froment. »
Remarquons bien ces expressions.
Les père et mère ne disent pas que la promesse de
nourrir et entretenir sera remplacée par u n e pension
de dix setiers de froment.
Ils constituent une rente.
Ils la constituent en avancement d'hoirie; et comme
une constitution de rente est toujours censée la repré
sentation d’un capital quelconque, et qu’il n’y a réelleA 2
�,
(4 )
rfient pas de rente constituée sans capital, la conséquence
naturelle qu’ il faut tirer, dans le droit , de ces termes
du contrat, c’est que le capital de cette rente est réelle
ment la cliose constituée en avancement tfhoirie.
Mais l’intention des parties se manifeste de la manière
la plus évidente par les autres stipulations du contrat.
L ’article 8 établit une communauté entre les époux;
il n’en remet pas la réalisation au cas où la demoiselle
Michellet aura recueilli les successions de ses père et
mère ou àé l’ un d’eux; il suppose au contraire qu’elle
produira son effet immédiatement après le décès de la
future, en quelque temps qu’il arrive; car il est expres
sément stipulé que la future y confondra r,ooo francs,
èt qu’elle les prendra sur sa constitution de dot.
Assurément ces 1,000 francs n’étoient pas pris sur le
trousseau, qui ne pouvoit en aucun cas‘entrer dans la
communauté, et qui d’ailleurs, par un article subséquent^
devenoit la propriété du m ari, en cas de survie.
Cependant ils devoient être pris sur la constitution
de dot.
J' '
Donc on avoit constitué une dot.
Donc cette dot étoit susceptible de supporter un re
tranchement de 1,000 francs.
Donc cette dot, qui ne pouvoit être une simple pen
sion, étoit la propriété actuelle de la future épouse.
Donc enfin cette dot, qui n’étoit autre chose que la
constitution de rente , avoit consisté dans le capital de
cette rente, puisque le capital seul pouvoit supporter
le retranchement.
Les conséquences que produit lu stipulation de l’art. 8 ,
�(
5
)
âe réunissent donc à celle que le droit nous indique sur
le sens de l’article 7.
E t assurément cette seconde clause n’est pas faite dans
un moment où la forme de la constitution de dot étoit
déjà oubliée par le rédacteur du contrat, puisqu’elle la
suit immédiatement, et que ces deux clauses sont na
turellement censées s’expliquer l’une par l’autre.
L ’article 10 porte la stipulation d’un gain de survie
mutuel de 2,000 francs.
*
Cette stipulation étoit réciproque ; elle étoit faite sans
préciser aucune époque, ni la restreindre à aucun temps,*
elle devoit avoir lieu à l’instant môme du décès de l’un
ou de l’autre des époux ; elle étoit assise par le sieur
Talion sur ses biens actuels ; et s’il eût prédécédé son
père et son épouse, il n’y eût pas eu la moindre difficulté
sur le payement, quand bien même sa veuve se serait
remariée, et auroit eu d’autres enfans. Et certes, fûtelle décédée sans autres héritiers que ses père et m ère,
les sieur et dame Michellet n’en eussent pas fait grâce.
E t certainement aussi le sieur Talion père ne leur
eût pas répondu par des injures.
La présomption naturelle, la seule conséquence hon
nête est donc que l’engagement réciproquement stipulé
étoit en effet réciproque;
Que la demoiselle M ichellet, qui recevoit le don,
et le stipuloit avec l’assistance et sous l’autorisation de
ses père et m ère, ne faisoit pas une promesse fallacieuse;
' Que la constitution de dot, déjà sujette à un retran
chement de 1,000 francs, pour la mise en communauté;,
seroit aussi sujette au gain de survie.
�( 6 )
Y eût-il eu des doutes dans la stipulation, la présence
et l’autorisation des sieur et dame Michellet eussent forcé
de l’interpréter ain si, à moins qu’ils ne préfèrent cette
conséquence inévitable, que leur présence et leur au
torisation furent un piège tendu à la bonne foi du sieur
Talion et de sa famille , q u i, certes , par la franche
et confiante loyauté de tous ses membres, eût été in
capable de s’en d.éfier.
L e contrat de mariage se fût-il borné à ces premières
expressions, elles ne laisseroient donc pas le moindre
doute. Mais poursuivons.
Immédiatement après la stipulation du gain de survie,
arrive cette clause :
« Outre le gain m utuel, la future, venant à survivre,
« recouvrera son trousseau ; elle aura pour robes de
« noces, bagues et joyaux , outre ceux dont elle se trou« vera saisie, la somme de 1,000 francs ; elle sera de plus
ce habillée de deuil.
« Audit cas de survie, elle aura pour douaire, pen« dant sa viduité , UNE PENSION A N N U E L L E de 400 fr. »
I c i , deux remarques essentielles ;
L ’une, que la future au profit de qui on stipuloit
tous les gains de survie que pouvoient fournir les an
ciennes rubriques, eut vraisemblablement, ainsi que ses
père et m ère, l’intention de donner effectivement les
2,000 francs, qui étoient le principe et, pour ainsi dire,
le gage de ces dons.
La seconde et la plus saillante, c’est que les parties
ont bien su , quand elles l’ont voulu, exprimer qu’elles
restreignoient à une'pension l’avantage, le don qui de-
�(7)
voit cesser de droit avec la vie pu la viduité. L e rédac
teur du contrat étoit un jurisconsulte consommé, pour
qui la variété d’expressions ne pouvoit être indifférente,
qui ne pouvoit pas se méprendre de l’une à l’autre, et
qui depuis long-temps étoit familier avec le sens et les
effets qu’on doit donner au mot rente et au mot pension^
L ’article 14 porte que Je f u t u r , en cas de su rvie ,
gagnera le trousseau , aux charges de la coutume.
Donc ce trousseau qui devoit être, dans un cas, re
couvré par la femme comme une chose nécessaire à son
vêtement, et q u i, dans l’autre, devoit être gagné par
le m ari, n’éto it, ni par le fa it, ni dans l’intention des
parties, le fonds sur lequel on pouvoit prendre les 1,000 f,
de la constitution de dot „ qui devoient entrer en com
munauté.
Allons plus loin.
Les sieur et dame Micliellet avoient si bien constitué
une dot en propriété à leur fille , ils étoient tellement
prévoyans, tellement inquiets sur le sort de cette d o t,
qu’au moment où- le sieur Talion parle de se réserver,
le retour de l’avancement d’hoirie, ils-veulent qu’on les*
associe à cette stipulation; et le rédacteur du contrat,,
chez qui rien n’étoit irréfléchi, et qui ne se permettpit
pas des stipulations inutiles, y écrit cette clause :
« Les père et inère des fu tu rs se réservent, chacun
« en ce qui les concerne , LA RÉVERSION DES OBJETS;.
« r A R EUX Gi - d e s s u s CONSTITUÉS, en cas de predeces
« des futurs sans enfuns, ou- leurs eufuns- sans descen
te dans. »
Qu’ont donc voulu dire les sieur et dame M icliellet,
en ce qui les concerne , s’ils n’avoient donné h leur fille
�( 8 )
qu’une simple pension qui devoit, de droit, s’éteindre
par le décès ?
Que veut dire ce mot réversion ?
Il signifie, sans doute, retourner, reven ir: revertí.
O r, pour qu’une chose revienne, il faut avant tout
qu’on l’ait donnée avec dessaisissement.
Sur quoi doit porter cette réversion ?
Sur les objets constitués par les sieur et dame M ichellet.
Qu’avoient-ils constitué ?
Une rente.
Quel est l’objet de cette clause ?
. D ’empêclier que leur fille, à qui ils l’avoient cons
tituée, n’en disposât à leur préjudice, si elle n’avoit pas
d’enfans ;
'
E t même d’empêcher que ces choses se trouvant dans
sa succession, personne y succédât en tout ni en partie,
exclusivement à eux.
r Donc , et c’est là une conséquence irrésistible , ils
avoient constitué une chose susceptible d’être transmise,
et q u i, si la future n’en disposoit pas, devoit se trouver
dans sa succession.
' Donc cette chose, cette rente , n’étoit pas une simple
pension.
D o n c, pour nous servir des termes des sieur et dame
Michellet et des juges dont est appel, cette idée d’une
simple pension, contraire à la lettre du contrat et à la
constitution d’une rente en dot , est inconciliable avec
toutes les stipulations de l’acte et toutes les conventions
du mariage.
Si la clause s’arrêtoit là, ses effets ne scroient guères
�C9 )
équivoques ; car comment supposer que cette interdic
tion de disposer, faite à la fille , pût frapper sur les
stipulations même du contrat, qui toutes essentiellement
liées, étoient présumées faites en contemplation les unes
des autres, et devoir s’exécuter simultanément , bien
loin qu’elles pussent s’entre-détruire?
Comment décider que la réserve du retour pût avoir
lieu même au détriment du gain de survie promis sous
l’autorisation des sieur et dame Michellet, et qui n’avoit
d’autre gage que la constitution de d o t?
Cependant il eût pu rester un doute; mais autant les
sieur et dame Michellet avoient eu d’inquiétude sur le sort
de la rente, en cas de prédécès, autant la famille Talion
fut prévoyante sur les difficultés qui pouvoient naître
de cette clause de réversion; et elle exigea, pour plus
de clarté, cette exception si form elle:
« Sans néanmoins que ladite réversion puisse porter
atteinte AUX GAINS E T A V A N T A G E S acquis au sur« vivant des fu tu r s époux , en vertu des clauses du
« présent mariage. »
«
Ici tout est clair, toute équivoque disparoît ; et re
marquons bien que cette clause, dans laquelle les futurs
époux ne stipulent pas, est toute personnelle aux père
et m ère; que ce sont eux seuls qui parlent, qui se font
des réserves, ou contractent des obligations.
I,es sieur et dame Michellet, qui viennent de stipuler
le retour de la rente, consentent qu’elle ne leur revienne
pas au préjudice des gains et avantages qui peuvent
résulter du contrat.
Ils reconnoissent donc, ils stipulent eux-mêmes, que
B
�< 10 )
cette rente demeurera affectée au payement des 2,000 fr.j
Que si le capital en appartient à leur fille , comme
on n’en peut pas douter, ils renoncent à le reprendre,
tant que les 2,000 francs ne seront pas payés;
Que si au contraire ce capital est demeuré leur pro
priété personnelle , si l’unique but de la réversion a été
de stipuler formellement que la rente cesseroit par le
prédécès, comme ils le prétendent .aujoiird’h u i, le seul
et unique objet de l’exception a été de promettre euxmêmes et personnellement que la rente ne cesseroit pas,
qu’ils ne la retireroient pas au préjudice du gain de
surv-ie.
Qu’on explique autrement cette clause î personne n’a
osé le tenter. L e juge dont est appel lui-mème n’a pu
lui donner un autre sens.
Ces explications étoient utiles, même dans l’exposé
du fait, pour bien saisir les clauses du contrat; la dis
cussion en sera d’autant plus allégée.
L e mariage dura trois ans, au bout desquels le sieur
Talion eut le malheur de perdre une épouse qu’il afï'eciionnoit, et q u i, certes, n’avoit jamais eu à se plaindre
de ses procédés. Douée des qualités morales, elle étoit
affligée d’ une très-m auvaise santé ; elle lui laissa en
jnourant une fille dont la constitution foible et humo
rale ne fit concevoir que des çniintes, et que tous les
«oins de la tendresse paternelle n’ont pu conserver à la
•vie.
*• Les sieur et dame Michellet sc plaisent, sur cet article,
à rappeler au sieur Talion des circonstances qui purent
*tre affligeantes pour lu i, Biuis qui ne peuvent attaquer
�¿fil
( ” )
ni son cœ ur, ni sa délicatesse; elles le convainquirent
de cette triste vérité, que l’empressement des sieur et
dame Michellet à marier leur fille unique, n’avoit été
chez eux que le produit d’une spéculation.
< L e décès de la dame Talion fut suivi d’ un partage de
société, que les sieur et dame Michellet rendirent né
cessaire , et d’une séparation qui s’effectua en germinal
an 9. L e partage de cette société constate un modique
bénéfice de 1,200 francs, pendant un commerce de trois
années : 600 francs furent payés au sieur Talion. A cette
époque l’enfant vivoit encore.
Cet acte étoit indépendant de tous les droits qui pouvoient naître du contrat de mariage, d’un époux à l’autre;
cependant le sieur Talion exigea et le sieur Michellet
souffrit celte convention précise :
- a Les autres clauses du contrat de mariage du 17 plu« viôse an 6 , resteront dans leur fo rc e et vigueur. »
Pourquoi cette convention qui s’étend à toutes les
clauses du contrat, sans restriction, si les sieur et dame
M ichellet, qui commençoient dès-lors à être obligés au
payement effectif de la rente, ne reconnoissoient qu’elle
devoit être assujettie à l’exécution de celles relatives aux
gains de survie, qui étoient, en ce seus, les plus essen
tielles du contrat, celles que cette réserve pouvoit plus
spécialement concerner ?
En 1806, le sieur Talion pensa à contracter un nou
veau mariage ; les sieur et dame Michellet le virent
d’ un mauvais œ il; le sieur Talion, qui chérissoit son
enfant, n’avoit jamais refusé de le leur confier; sa santé
foible et chancelante exigeoit des soins assidus ; il le$
^
�( 12 )
lui avoit toujours prodigués. Sa seconde épouse n’avoit
pas de meilleur moyen de lui être agréable qu’en al
lant sur ce point au-devant de ses désirs; elle les prévint
toujours attentivement : ses soins personnels , ceux des
sieurs Barthélémy, Gerzat, Desanges, témoignoientleurs
efforts pour conserver cet enfant.
Mais un enfant du nouvel hymen vint exciter l’envie
des sieur et dame Michellet ; des soupçons injurieux ,
des déclamations publiques, des lettres insultantes, fu
rent lancés sur le compte du sieur Talion et de son
épouse ; il répondit en se plaignant, mais avec honnê
teté , quel que puisse être d’ailleurs le plus ou moins
de pureté de son style , qui est encore l’objet d’une
critique au moins déplacée. Peut-être une lettre écrite
par sa femme, en son absence, et après la plus inju
rieuse provocation, se ressentit-elle d’ un certain ressen
timent; le sieur Talion en seroit fâché , mais son épouse
lui paroîtroit excusable, et les appelans ne pourroient
s’en prendre qu’à eux-mêmes.
Depuis cette époque, l’enfant resta dans la maison
de son aïeul; elle y mourut quelque temps après.
Nous ne reviendrons plus sur cette épisode si inutile^,
si étrangère à la cause; le sieur Talion ne laisse échap
per qu’à regret le peu de mots qu’il s’est cru. obligé de
répondre.
11 est inutile aussi de renouveler ici lrexposé de sa de
mande et de ce qui s’est passé depuis ; la Cour connoît
la procédure et le jugement dont est appel.
Avant d’en examiner le bien ou mal ju g é , le sieur
Tullou se doit; il doit à la Cour elle-même, de répondre
�C13 )
à une imputation qui semble avoir été le'véritable et
l’ unique but du mémoire des intimés.
« L e sieur Talion rit de sa défaite, et a l’indiscrétion
« de publier qu’il a la certitude d’être plus heureux en”
« la Cour. »
L ’extrême impudence de cette bravade que le sieur
Michellet a tout à la fois l’adresse et l’insolence de placer
dans la bouche du sieur Talion,- suffit pour en détourner
l’effet.
' ’
■
•
) r;
- L e sieur Talion n’a ni accusé.ses juges, ni méprisé
leur jugement, ni témoigné sur l’appel une confiance
présomptueuse.
Il a formé sa demande parce qu’il l’a crue légitim e;
Il l’a formée parce que son conseil a pensé qu’elle
étoit fondée. Une consultation donnée bien avant la pour
suite a toujours resté attachée à son dossier.
Ce conseil lui-même atteste que le sieur T alion , plai
dant avec peine, avoit un extrême désir de voir terminer
cette affaire en première instance; et qu’il a mis à la
plaider toute l’attention qu’il auroit-pù y mettre, si elle
eût été jugée en dernier ressort.
. L e sieur Talion a été condamné : bien éloigné d’in
sulter ses juges par un rire dédaigneux, pleinement con
vaincu qu’ils l’ont condamné en leur âme et conscience,
il a craint que son conseil ne se fût trompé.
IL lui a témoigné ses craintes.
j;
Sans se croire infaillible, ni mépriser l’opinion des
juges de première instance, l’avocat a persisté dans son
avis.
r ■'
11 a cru qu’il étoit permis au sieur T alion , comme à
�W*
'
.!..
.
( H )
tout autre, de porter en la Cour une demande légitime
et qui lui paroissoit juste ; il a conseillé l’appel * il le
soutient avec modestie quoiqu’avec confiance.
. Mais cette confiance, produite par la cause elle-même,
n’est injurieuse pour personne.
Depuis l’appel, il a entendu plus d’une fois parler
de l’espoir du sieur T alio n , de sa certitude même; il
n’a jamais entendu ce propos, semé dans les rues, que
de la bouche des partisans de Michelet.
Quel a été son but? celui d’exciter quelque préven
tion secrète ? L a sagesse de la Cour plane au-dessus de
ces méprisables stratagèmes; elle ne verra que la justice
et le droit des parties.
E t cela seul suffit au sieur Talion et à son conseil,
pour se fortifier dans leur confiance, puisqu’ils croient
que le premier juge est tombé dans l’erreur.
Mais insensiblement nous nous'éloignons de la cause;
réduisons-nous à une discussion simple et rapide.
Il est de principe que tout don ou constitution de
de dot en avancement d’hoirie est une véritable dona
tion entre-vifs, qui saisit le donataire à l’instant même.
On le reconnoît.
L a seule objection des intimés consiste à dire qu’il
n’y a pas ici de constitution de chose certaine, mais
seulement une pension faite en remplacement de la nour
riture et entretien qui devoient finir avec la v ie, et qui
n’a pu avoir d’autre caractère.
C’est cette objection qu’il s’agit de détruire :
L e droit et le fait semblent la .repousser de concert.
�4ü
(.5)
La circonstance que la disposition telle quelle , n’est
faite qu’en cas d’incompatibilité, est d’abord fort in
différente , et n’empêche pas qu’elle puisse être faite
entre-vifs, et qu’elle soit considérée pour ce qu’elle est
réellement.
Chaque contrat a ses dispositions particulières. Lors
que les père et mère s’engagent à recevoir les époux,
iis prévoient presque toujours le cas d’incompatibilité.
, Les uns remplacent leur obligation par une somme
fixe., ou une rente annuelle dont le capital n’est pas
exigible.
Les autres, par le don d’ un immeuble en jouissance
ou en propriété.
Les autres, par la promesse d’une simple pension via
gère.
Les autres enfin, pour retenir davantage leurs enfans,
ne leur promettent rien du tout.
Toutes ces stipulations sont habituelles, toutes-sont
dans l’ordre de la lo i, toutes reçoivent leur exécution
quoique faites seulement pour les cas d’incompatibilité.
Ic i, les sieur et dame Michellet ont constitué une
rente.
Ils l’ont constituée en avancement d'hoirie.
E t pour mieux s’expliquer encore, ils l’ont qualifiée
ailleurs une constitution de dotj
O r, nous l’avons dit, la constitution de rente est une
chose certaine ; elle représente toujours l’intérêt d’un
capital quelconque.
Celui qui la constitue, reste débiteur du capital, quoi
qu’avec la faculté de ne pas la rembourser.
*
�Mi*
(
)
E t celui à qui appartient la rente, et qui cède à un
tiers la rente qui lui est d u e , cède non-seulement la
rente annuelle , mais ses droits sur le capital, quoiqu’il ne
soit pas exigible, et qu’il n’en parle pas.
Rendons cela plus sensible par des exemples appliqués
à la cause.
Si la demoiselle Michellet, ayant des frères ou sœurs,
eût survécu à ses père et m ère, que son droit à la suc
cession se fût trouvé au-dessous de la valeur de la rente,
n’eût-elle pas eu la faculté de s’en tenir à son don ? ses
frères ou sœurs acceptant la succession, n’eussent-ils pas
été obligés de la lui payer annuellement?
Mais s’ils eussent voulu se décharger de cette obli
gation annuelle, ils eussent eu le droit d’en faire le
remboursement.
Eussent-ils p u , dans ce cas, lui élever des difficultés
sur l’évaluation du capital, sous le prétexte qu’elle n’eût
été que viagère? Elle eût repoussé vigoureusement ce
système, par cette seule réflexion : On m’a constitué une
rente; j’ai le droit de m’y tenir, vous avez celui de
la rembourser ; mais nulle part on n’a stipulé qu’elle
seroit viagère; e t, faute de cette restriction, vous ne pouvez
faire le x-emboursement qu’à vingt capitaux pour un.
Si même la demoiselle M ichellet, survivant seule à
ses père et m ère, la question se fût élevée entr’elle et
des créanciers, y auroit-il eu le moindre doute? ne se
seroit-on pas fait scrupule de lui contester la pro
priété en sa personne, de cette rente perpétuelle, coinmo
d’une constitution de dot qui Pavoit saisie?
Par quelle étrange illusion vcrroit-on aujourd’hui avec
d’autres yeux ?
�4 /7
( *7 )
Nous avons démontré d’ailleurs qu’indépendamment
du droit, les stipulations même du contrat de mariage
établissoient l’intention formelle, bien disértement expri
m ée, de constituer une rente et un capital de rente, et
non de promettre une simple pension.
E t si les termes pouvoient être ambigus * il faudrait leâ
interpréter par la commune intention des pàrtiei.
Il seroit donc fort peu essentiel que là demoiselle
Michellet se fût seule obligée au payement des 2,000 fi*.,
puisqu’elle y a obligé ses biens présens, qu’elle étoit pro
priétaire delà rente, que la commune intention de toutes
lespai ties a été certainement d’y affecter cette inême t'ente.
Mais comment n’a-t-on pas vu de la part des sièur
et dame Michellet une obligation personnelle ?
Cette obligation, inutile dans le cas où lai propriété
de la rente auroit été transmise à la dôme T a llo ii, est
manifeste dans le cas où , en constituant une rèntfe, les
intimés n’auroient contracté l’obligation de rie la payeï
que jusqu’à un temps limité.
En effet, dans le cas où la rente appartient à la fille,
la réversion qu’ils stipulent leur. remet une propriété
qu’ ils avoient perdue ; et l’exception qu’ils souffrent k
l’exercice de ce droit, n’est autre chose que l’affectation
de la rente au gain de survie, après le cas de réversion.
Mais si on suppose que la rente n’a été que Viagère,
qu’elle a dû cesser avec la v ie , la réversion stipulée par
les sieur et dame M ichellet, en ce qui les éoncerne , n’ai
d’autre objet que de dire pOsitivemenf que la: rente
cessera au cas "de prédécès. Les termes sans néan
moins, etc., ne sont alors autre chose qu’une prom'éss«}
solennellement faite à l’époux, qu’elle ne cessera pas art
C
\
�C *8 )
préjudice de 'Son gain de- 2,000 francs; or, celui qui
doit la rente quoique viagère, et qui promet qu’elle ne
cessera pas après le décès , pour un cas spécialement
prévu, promet et s’engage personnellement de la conti
nuer, pour le cas prévu , si mieux il n’aime payer la
somme pour la sûreté de laquelle il a fait cette promesse»
Ces vérités paroissent assez évidentes pour justifier la
confiance qu’on attribue au sieur Talion, que son peu
de connoissance en affaires ne lui a pas permis d’avoir ,
mais dont son conseil n’a jamais pu se défendre, malgré
son respect pour, un premier jugement.
.
<■/
, Qu’a-t-on dit pour les affaiblir ? '
« Que cette clause de réversion est sans objet en ce
* point ; qu’elle est même inconciliable avec une libé« ralité qui ne dessaisissoit le donateur d’aucune partie
« de ses biens. »
j ■;
,Oui, sans doute, elle seroit sans objet, non-seulement
en ce point, mais en tout ce qui concerne les sieur et
dame M ichellet, s’il falloit l’entendre comme eux.
-3
Elle ne s’appliqueroit pas au trousseau, qui, en cas de
prédécès de la femme, devoit appartenir au mari, par la
stipulation du contrat, non comme une libéralité, mais
aux charges de.la coutume-, qui, en cas de prédécès du
m ari, devoit retourner ù la femme, et certes, avec une
liberté telle que toutes les clauses de réversion possibles
11’auroient pu l’empecher de s’en servir, de l’user, de levendre, d’en disposer, en un m ot, sans eu laisser la
moindre partie au moment de son décès.
Elle ne pourroit pas s’appliquer davantage à la cons
titution de rente, puisqu’on n’eu rcconnoîtroit plus dans
le contrat de mariage.
�( 19 )
Elle seToit donc absolument sans objet et ¿ans effet.
. Mais l’article i i ô j du Gode Napoléon, veut q u e ,
« lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, on doive
« plutôt l’entendre dans celui avec lequel elle peut pro~
« duire quelqu'effet , que dans le sens avec lequel elle
« ne pourroit en produire aucun. »
Mais dans ce cas ce ne seroit pas seulement celte clause,
mais
encore celle qui constitue la rente
en avancement
„
*
d’hoirie , celle qui stipule qu’une somme de 1,000 francs
sera prise sur la constitution de d o t , pour la verser
dans la communauté; ce seroient toutes les stipulations
essentielles du contrat de mariage , qui deviendroient
inutiles et sans effet, et qu’il faudroit non plus chercher
à effacer , mais effacer effectivement du contrat de ma
riag e, pour satisfaire les sieur.et dame Micliellet.
A u lieu de regarder la clause de réversion comme in
conciliable avec la libéralité, suivant l’idée que le pre
mier juge en avoit conçue et le sens qu’il lui a voit donné,
il falloit regarder , au contraire , l’interprétation qu’il
donnoit à cette libéralité , comme inconciliable avec une
constitution de dot et avec toutes les stipulations du con
trat; il falloit, au lieu de détruire toutes les clauses de
l’acte les unes par les autres, les concilier ensemble pac
leur sens naturel et si palpable, et appliquer cette autre
règle de droit, consignée dans l’article 1 1 6 1 du Code ;
« Toutes les clauses des conventions s’interprètent les
« unes par les autres, en donnant à chacune le sens
v qui résulte de Pacte entier. »
On invoque l’arrêt des Rocheneuve et Lajaumont.
Assurément le sieur Talion, eu soutenant sa demande,
ne s’est pas engagé à faire la critique de cet arrêt.
I
�( 20 )
. Il seroit en effet fort semblable à la cause actuelle, s’il
n’y manquoit pas précisément, et la constitution d’ une
rente en avancement d’hoirie, et la stipulation personnelle
des père et mère, que leur droit de réversion n’aura pas
lieu , c’est-à-dire, que la rente ne cessera pas au préjudice
du gain de survie.
S i , malgré cette différence, le sieur Michellet a cru
y trouver de l’analogie; s’il a cru pouvoir se fier assez
sur l’application qu’il veut se faire de cette décision , pour
justifier à ses propres yeux le refus d’une chose qu’il a
solennellement prom ise, le sieur T a llon ne doit plus
s’étonner.
Mais il a le droit de penser que les clauses de son
contrat de mariage ne furent pas vaines; qu’il ne fut pas
seul valablement engagé ; que les promesses qu’on lui fit
ne furent pas trompeuses ; que sa famille et lui ne furent
pas dupes d’un blâmable artifice. Il ne pensoit assurément
pas que cette cause eût besoin d’ une défense publique,
mais il ne pouvoit la redouter; il n’a pas craint de ramas
ser le gant que lui a jeté le sieur Michellet : satisfait d’avoir
mis au jour sa cause et sa conduite, il attendra maintenant
avec sécurité une décision qu’il respectera, quelle qu’elle
so it, parce qu’il y verra toujours l’empreinte de la justice,
C. T A L L O N .
Me. V I S S A C , avocat .
Me. I M B E R T , avoué ,
A R IO M , de l’Imp. d e TH IBA U D , im prim. de la Cour Impériale, et libraire,
ru e des Taules, maison L andriot . — Février 1813.
�
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[Factum. Tallon, Claude. 1813]
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Vissac
Imbert
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
rentes
rentes en froment
société de fait
société de commerce
communautés
coutume d'Auvergne
frais de maladie
frais funéraires
jurisprudence
dot
obligation alimentaire
pension de réversion
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour sieur Claude Tallon, appelant ; contre les sieur et dame Michellet, intimés.
Table Godemel : Avancement d'hoirie : 2. la constitution, par les père et mère de la future, en avancement d’hoirie d’une rente en grains est la constitution d’un capital de rente et non d’une simple pension viagère. cette constitution est une véritable donation entre vifs qui a saisi les contractants ; ce capital doit être affecté en paiement des gains de survie et autres avantages stipulés en faveur de l’époux survivant par le même contrat de mariage. Si dans le contrat de mariage il y a 1° stipulation de communauté entre les époux, avec déclaration d’un apport déterminé, par la future ; 2° clause de retour au profit des père et mère, constituants, sans préjudice aux gains et avantages stipulés entre les époux ; ces circonstances prouvent que l’intention des constituants était conforme à la convention effective.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 6-1813
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2214
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2213
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53443/BCU_Factums_G2214.jpg
Coverage
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Riom (63300)
Rights
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Domaine public
avancement d'hoirie
communautés
coutume d'Auvergne
dot
frais de maladie
frais funéraires
jurisprudence
obligation alimentaire
pension de réversion
rentes
rentes en froment
société de commerce
société de fait
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53664/BCU_Factums_M0123.pdf
d9f873d69dbf1788ba4e4554f184ae27
PDF Text
Text
S
p
r
é
c
i
ci
s Î
s
POUR
P I E R R E D E L E S V A U X , tuteur et légitime administrateur de ses enf'ans mineurs, et de défunte Élizabeth
Gendret, son épouse, intimé et demandeur en oppo- département
de
sition :
CONTRE
E L I Z A B E T H P O N C E T , veuve et commune d'A n toine G en dret, tant en son nom , q u'en qualité de
tu trice, à l' interdiction de L o u is G endret, son f i l s ,
cisela n te d'un jugement rendu au tribunal civil du
département de l'A llie r , le 14 therm idor, an 4 , et
défenderesse en opposition.
QUESTIONS.
U n inventaire infidelle et inexact, peut-il interrompre une
co m m u n a u té conjugale?
’
Le mariage de la fille, hors de la maison, es!-il suffisant pour
dissoudre la communauté Qui s,etoit continuée avec elle?
La demande en partage de la communauté, a-t-elle dû être
formée dans les dix ans de la majorité ? l’action a-t-elle pu être
exercée pendant la vie du père?
C e t t e cause fournit un nouvel exemple de l’avidité
d 'une seconde fem m e, qui cherche à dépouiller les enfans
♦
tr ib u n a l
civil
�B C2 )
.
,
du premier l i t , et soutient ses prétentions avec un achar
nement inconcevable.
Croit-elle donc mériter assez de faveur, pour faire fléchir
les principes les plus certains ; o u , a-t-elle conçu le dessein
de fatiguer un père de huit enfans, et d’obtenir, par lassitude
ou par surprise, ce que la justice ne sauroit lui accorder?
Depuis près de quatre ans, elle promène l’intimé de tri
bunaux en tribunaux : par-tout elle a succombé; mais elle
n’en retient pas moins dans ses mains toute la fortune de
son mari. Elle a su éluder jusqu’ici le partage d’une com
munauté opulente dont elle voudroit dissimuler les forcesj
elle a calculé, qu’en jouissant de tout, elle rendroit toujours
moins qu’elle n’a pris.
Il est temps que cette lutte finisse; il est temps qu’É lizabeth Poncet restitue, par un compte rigou reu x, tout ce
qu’elle retient si injustement.
Les faits qui donnent lieu à la contestation sont simples.
Antoine Gendret, beau-père de l’intim é, a été marié
deux fois; en premières noces avec Marie Genest, d’où sont
issus deux enfans, Louis et Elizabeth Gendret.
E n secondes noces, Antoine Gendret a épousé ÉlizabetH
Poncet; il n’est provenu de ce mariage qu’un seul enfant,
qui est interdit pour cause d’infirmité.
P a r le premier contrat de Gendret qvec Marie Genest,
du i 5 mai 17^7, il fut stipulé une communauté de tou?
biens meubles, et acquêts immeubles; et ce mariage n’a
duré que deux ans : Marie Genest mourut le 12 septembre
1759.
Le 18 février 1761, Antoine Gendret fit procéder, coa-
�C3 )
jointement avec ses sœurs, au partage des biens délaissés
par ses père et mère ; il acquit la portion du mobilier rêve»
nant à ses sœurs, moyennant une somme de 1951
qui,
jointe à celle de 5 oo
q u il étoit tenu de rapporter à la
masse, formoit celle de 2461 ir \ la totalité de cette somme
a été acquittée aux dépens de la communauté.
Quatre mois après, et le 8 juin 17 6 1, Antoine Gendret
convola avec Elizabeth Poncet. Six jours auparavant, il
feignit de faire procéder à un inventaire dissolu tif; il choisit,
pour y procéder, un expert à ses ordres, et qui étoit son
débiteur ; un seul jour suffit pour la confection de cet in
ventaire , et on n’est pas étonné qu’un acte fait dans un
aussi court délai, soit erroné et infidelle, et qu’il y ait
beaucoup d’objets omis,
_ I-e second contrat de mariage d’Antoine Gendret et
d Élizabetli Poncet, contient un nouveau pacte de co m m U '
nauté entre les deux époux; chacun d’eux d o ity confondre
une somme de 600 #*, pour y prendre part.
L e 22 janvier 1776, M arie-Élizabeth Gendret, fille du
premier lit , contracta mariage avec Pierre D elesvaux,
intimé : elle se constitua en dot tous les biens qui lui éloient
échus par le deces de Marie Genest, sa mère} ensemble la
portion qui lui etoit acquise dans les profits de la commu
nauté contractée entre ses père et mère. Antoine Gendret
déclare a ce sujet que, lors de son second m ariage, il fut
procédé à un inventaire dissolutif de communauté, suivant
lequel le profit se trouva monter à une somme de 6000
de laquelle il revenoit * 5oo ^ à Élizabeth Gendret, pour
sa moitié dans la portion qu’amendoit sa m ère, attendu
qu’il y avoit deux enfans du premier lit.
�..
.
( 4 ')
.
.
' L e pore s’oblige aù payement de cette somme', et se
■départ de tous les droits qu’il pouvoit avoir sur les bestiaux
qui garnissoient les immeubles de ses enfans, du chef de
-Marie Genest, leur m ère, ainsi que dë-tous les droits qu’il
clisoit lui être acquis sur les biens de ses enfans, notamment
des dettes par lui payées, dont il s’étoit fait réserve par
l’inventaire prétendu dissolutif.
’
' Antoine G en d ret constitue de son ch ef, à sa fille, pour
dot et apanage, là somme de 13600
au moyen de quoi
elle n’avoit plus rien à prétendre dans sa succession. Cette
som m e, réunie à celle de i5oo 1i~,' à laquelle le père prétendoit fixer-les profits de la com munauté, est stipulée
payable à difîérens termes; celle de 5ooo ^ seulement ne
p e u t être exigée qu’après son décès.
• Antoine Gendret, père, est mort depuis environ deux ,
ans.
' ■
■ Marie-Elizubeth Gendret et Pierre Delesvaux, son mari,
intentèrent la demande en partage de la communauté, et
soutinrent qu’elle s’étoit continuée avec les enfans du pre
mier lit; de sorte qu’il devoit en être attribué à ces derniers
un tiers, un second tiers à la succession paternelle, et un
troisième à Élizâbeth Poncet.
• Celle-ci soutint, au contraire, qu’il n’y avoit pas eu de
continuation de communauté; que celle qui existoit avec
la premièi’e femme, avoit été interrompue, par l’inventaire
prétendu dissolutif du 2 juin 1761. Elle insistoit sur le par
tage de la seconde communauté, en deux portions égales,
dont lu n e lui appartenoit, et dont l’autre devoit être attri
buée à la succession de son mari.
.
•
9
.■
�.
,
. c 5 }
Ces différentes prétentions furent d’abord ¡Portées devant
un tribunal de famille, où il s’éleva des discussions sans nom
bre, qui n’ont pu être ^’déesavant la suppression. Élizabeth
Gendret, et Pierre Delesvaux, son mari, se sont pourvus
au tribunal civil de l’Allier, par exploit du 2,5 floréal., an 4;
ils ont demandé que, sans s’arrêter à l’inventaire prétendu
dissolutif, du 2 juin 17 6 1, qui seroit déclaré nul et fraudu
leux, il seroit procédé au partage des biens meubles et im
meubles de la communauté existante entre Antoine Gendret
et Marie Genest, sa première femme, continuée pendant le
Second mariage avec Élizabeth Poucet,pour en être délivré
aux demandeurs leur portion aiFérente, conformément aux
lois.
Cette demande étoit fondée sur l’inexactitude et l’infidé
lité de l’inventaire du 2 juin. Prem ièrem ent, on avoitfait
porter, comme profit de com m unauté, les bestiaux qui
garnissoient le domaine de Marie Genest, t a n d i s que ces
bestiaux appartenoient évidemment aux enfans du premier
lit. G’étoit déjà, de la part de Gendret, une première infidé
lité, de les inscrire sur l’inventaire, parce que ce domaine
étoit garni de bestiaux, lors du prem ier mariage.
Secondement, Gendret avoit fait le partage des biens de
scs père et mère,avant l’inventaire;il ¿voit acquis la portion
du mobilier qui icvenoit a ses sœurs, et n’a pas porté sur
l’inventaire le prix de cette acquisition, quoiqu’il en appar
tînt évidemment moitié à la communauté.
L e 3 décembre 1767,acquisition d’un immeuble, moyen
nant la somme de 100
une de 600 le 18 février 1758,
une de 90 le 17 octobre de la même année, une de 40 le
�m
_
.
23 février 17 % , une de 120 le 20 janvier 17 6 1,une de'240
le 17 avril suivant; on ne trouve aucun de ces objets dans
l’inventaire du 2 juin.
Gendret a également omis les profits de la ferme d’un
domaine, qu’il avoit pris à ce titre le 10 novembre iy 58f
pour six années consécutives, moyennant 5 oo ^ par année;
il n ’ a pas fait mention d’une obligation de 73
5 ^, qui avoit
été consentie à son profit le 12 janvier 1759.
Il a gardé le silence le plus absolu sur la ferme de la cidevant commanderie du M ayet, dans laquelle il a fait sa
fortune, et dont il étoit fermier depuis 1760; il n’a pas inscrit
ïa somme de 89 10 qu’il avoit reçue à compte sur diffé
rentes obligations consenties à son profit; on ne trouve point
encore dans cet inventaire deux acquisitions par lui faites
les 27 avril et 27 août 1761 ; l’une de 240 ^ l ’autre de 300
dont le prix avoit été payé long-temps auparavant la passa
tion des actes; il a encore omis une somme de 120 ^ d’une
part, et celle de 1230 ^ d’autre, dontil étoit créancier depuis
le 21 mars 1760, et pour lesquels il lui avoit été délaissé en
payement différens immeubles, par contrats des n et 23
janvier 1762.
. ■
' U n inventaire de ce genre ne pouvoit pas interrompre
la communauté, puisqu’il' est inexact et frauduleux. L a
bonne f o i, la sincérité et l’exactitude la plus scrupuleuse,
doivent présider à un inventaire dissolutif, sur-tout dans
le cas d’un convoi, parce que la loi n’a plus la même con-,
fiance dans l’époux qui forme de nouveaux liens.
Cependant la veuve Gendret essaya d’écarter ces argumens victorieux ; elle, voulut distinguer la négligence de la.
�. ,
ï ^
fraude ; et, quoiqu elle ne put pas dissimuler les omissions1
dont se plaignoient les enfans du premier l it , suivant elle,
à peine son mari avoit commis de légères négligences.
Elle alloit jusqu’à prétendre que l’inventaire même étoit
inutile, et que le mariage de la fille, hors la maison pater
nelle , suiïïsoit pour interrompre la communauté. Mais *
comme Élizabeth Gendret s’étoit réservé expressément
tous les droits qui lui étoient échus du côté de sa m ère, que
cette réserve repoussoit l’objection d’Élizabeth Poucet, elle
crut pouvoir écarter la juste réclamation de Delesvaux, par
une fin de n on -recevoir; elle le soutint sans action, faute
de s’être pourvue en restitution dans les dix ans de majorité,
à compter de son mariage.
Cette fin de non-recevoir étoit un bien foible moyen«
Elizabeth Gendret pouvoit-elle perdre ses droits, parce
qu’elle avoit eu des ménagemens et des procédés pour son
père? pouvoit-elle se plaindre cl’une fraude par lui com
m ise, lorsqu’il avoit entre ses mains tous les titres, tous
les renseignemens qui pouvoient la faire découvrir ? Ce
n’est qu’après le décès de son père, qu’Élizabeth Gendret a
pu prendre connoissance des forces de sa succession; qu’elle
pouvoit etre éclairee sur ses droits. Ge n’est qu’à compter
de ce jour, qu’elle a pu exercer son action.
E n cet é ta t, et au moment où la cause alloit recevoir
’ sa décision, Élizabeth Gendret est décédée , laissant huit
enfans mineurs. Pierre D elesvaux, son m ari, a repris
l’instance, en qualité de tuteur de ses enfans, et la cause
portée à l’audience du tribunal civil du département
de 1 A llier, le 14 therm idor, an 4 , il y est intervenu un
�.
( .8
■
.
jugement q u i, « sans s’arrêter à la fin de non-recevoir ,
« opposée par Elizabeth Poucet, non plus qu’à l’inventaire
«du 2 juin 1 7 6 1 , qui est déclaré inildelle et insuffisant,
« pour opérer la dissolution de la com m unauté, et
* continuation de communauté qui avoit existé entre
« Antoine Gendret et sa première femme , Elisabeth
« Poncet et leurs enfans, faisant droit sur la demande
« formée par Élizabeth G en dret, et D elesvaux, son
« mari , condamne Elizabeth Poncet à ouvrir le partage
« des biens meubles et immeubles de la communauté
« existante entre Antoine G endret, et Marie G enest,
« sa première fem m e, et continuée pendant le second
«m ariage d’Antoine G endret.avec Élizabeth P o n cet,
« pour en être délivré auxdits Delesvaux et sa fem m e,
« le tiers du chef de Marie Genest ; auquel partage il
« sera procédé par experts, en la manière ordinaire ; et
« auxquels experts , tous titres , papiers et renseignemens
«concernant la com m unauté, et continuation d’icelle,
« seront communiqués par ceux qui en sont dépositaires ;
« lors duquel partage , Delesvaux sera tenu de rapporter
« la somme de i 5oo livres, reçue ci compte dans ladite
« communauté et continuation d’icelle j ensemble les
«intérêts, à compter du jo u r'q u e le payement en a
« été fait, comme aussi toutes autres sommes qu’il'pouiToit
« avoir reçues, ou qui auroient été payées en acquit et
« décharge d’Élizabetli Gendret ; dépens compensés,
« même le côut du jugement, lesquels dépens doivont etre
« employés en frais de partage. »
K
Élizabeth'Poncpt a poussé le délire jusqu’à interjeter
appel
�(9 )
appel de ce jugement; elle ne s’est pourtant pas aveuglée
jusqu’au point d’en espérer la réformation ; elle a sollicité
un arrangement, et ce n’étoit qu’un piège qu’elle tendoit
à la crédulité de l’intimé q u i, lorsqu’il étoit le plus
occupé d’un projet de conciliation, a reçu la signification
d’un jugement par défaut, que l'appelante a surpris devant
le tribunal d’appel. Il s’est empressé d’y former opposition.
Il va s’occuper de présenter ses moyens, et il parviendra
aisément à justifier le jugement rendu en cause prin
cipale.
L e premier principe, en matière de communauté,
est que la continuation a lieu entre les enfans du pré
décédé et le conjoint du survivant, toutes les fois qu’il
n’y a pas eu d’inventaire dissolutif > ou lorsque cet inven
taire est inexact ou infidelle. .
.• L ’article 240 de la coutume de Paris, et l’article 270
de la coutume de Bourbonnois, qui régit les parties,
portent expressément que la communauté se continue
avec-les enfans et le survivant des conjoints, si le sur
vivant ne fait aucun inventaire, partage, division, ou
autres conventions équipollentes à partage, dans qua
rante jours, à compter du décès du prem ier mourant.
•• La continuation de communauté, suivant la définition
qu’en donnent tous les auteurs, est une société légale
qui se forme entre le survivant de deux époux communs
en biens, et les héritiers du prédécédé. Il y a cette diffé
rence entre là communauté et la continuation, que la
première est une société conventionnelle qui n’a lieu que
par le consentement exprès ou tacite des deux époux 3
2
v
�\
( 1° )
B
la seconde, au contraire, est établie par la lo i, et a lieu
contre le gré de l’époux survivant qui ne remplit pas
les formalités prescrites pour empêcher cette continuation.
Pour dissoudre une communauté, il faut nécessairement
faire procéder à un inventaire dissolutif; mais qu’est-ce
qu’un inventaire dissolutif? c’est une description exacte,
fidelle et détaillée, des effets, meubles, créances et papiers
de toute espèce, qui composent la communauté. L ’in
ventaire , suivant l’expression des auteurs, doit être franc,
lo y a l, sincère , exact et iidelle ; les plus petites omissions,
quoiqu involontaires, rendent l’inventaire n u l, et n’em
pêchent pas la continuation de la communauté, C’est ce
qui a été décidé par un arrêt de règlement, du 4 mars 1727,
dont le m otif fut que le défaut de quelques formalités,
empechant la dissolution de la communauté , à plug
forte raison les omissions, quelles qu’elles soient, devoient
produire le même, effet, puisque ces formalités n’onfc
été établies , que pour éviter les omissions et les inexac
titudes.
,
- Pour qu’il y ait lieu à la continuation de com munauté,
il n’est pas même nécessaire qu’il y ait fraude de la part du
survivant • il suffit qu’il y ait négligence notable / parce
qu il doit veiller pour ses mineurs , à ce que l’inventaire
soit iidelle. Un arrêt de 1725 a jugé la question en thèse?
On va en rappeler l’ospèce.
>
Tie nommé D arm ancourt, perruquier, avoit. fait faire
un inventaire, dans lequel h vaisselle d’argent de la
succession étoit détaillée ; le nombre des pièces étoifc
é c rit, ainsi que le prix du marc ; mais la quantité de
�(M )
ïnarcè étoit en blanc ; l’étain étoit de même désigné,
le poids en blanc ; en pareille circonstance, il n y avoit
pas de fraude de la part du survivant; mais seulement
négligence de n’avoir pas fait' passer sur le ch am p , la
Vaisselle inventoriée, dont les pièces étoient d’ailleurs
suffisamment désignées, ainsi que le prix de la matière.
C ’étoit de sa part un pur oubli de n’avoir pas réparé
cette négligence, en faisant peser la vaisselle à la vacation
suivante; cependant, par sentence du chatelet, la conti
nuation de communauté fut ordonnée, et sur l’appel,
arrêt confirmatif. Une foule d’autres arrêts ont jugé la
question uniform ém ent; l’u n , du 12 mai 17 4 7 , dans la
cause de la ci-devant comtesse d’Arcourt ; un autre, du
12 septembre 176 2 , dans la cause de la veuve M ign ote,
'contre son 'fils ; un troisième , du 7 septembre 1758 5
dans l’espèce de cet a rrê t, Antoine A llo a rt, meunier à
Orléans, après le décès de sa fem m e, «voit fait faire
tin inventaire , daxis lequel il n’avoit pas déclaré trois
dettes actives ; l’une de 64
l’autre de 74 ^"10 J, 1 autre
de i 5o' i1~. L ’inventaire fut déclaré frauduleux, et il fut
jugé que la communauté avoit continué entre" le père
et les en fans du prem ier lit. *
Tous les jurisconsultes qui ont traité la m atière, ont
un langage uniforme sur cette question. Ferrières, sur
l’article 240 de la coutume d e.P aris; Duplessis, traité
'de‘la communauté de biens, liv. 3 ; Louet et Brodeau,
I.. G. somm. 30; le B ru n , P otliier, Lacom be, au mot
'■communauté, sect. 6 , part 4.
En appliquant ces principes à l’espèce, on voit que
•
2
�p
( 12 ■)
l’ inventaire, dont argumente la veuve G en d ret, est
défectueux, iniidelle et inexact, sous tous les rapports.
Il a été rédigé avec précipitation 5 un seul jo u r, une
seule vacation a suiïî pour détailler et estimer le lin g e ,
les meubles meublans, les denrées , les bestiaux des
dom aines, tout le mobilier de la communauté auM ayet ;
dans la même séance , 011 a fait aussi la description des
papiers.
.
Les effets de la communauté ont été évalués à vilpi*ix;
on en jugera par quelques exemples.
i
L etain est estimé 12 J la livre ; il en valoit alors pins
de 36 «A L a toile de plain est estimé 20 J l’aune j elle se
vendoit à cette époque plus de quarante. Sept cuves à
couler 70 poinçons, jauge du M ay et, sont éstimées i 5o
o r , une cuve a toujours valu à raison de 6 ^ ", par
chaque poinçon qu’elle contient ; celles-ci devoient donc
être portées au moins k 420 tf~. L e vin est porté à 10 8 J
le poinçon , et suivant les mercuriales de 1 7 6 1 , pour la
ville de Gusset, le poinçon valoit alors 20 ^ 10-f. Quatre
paires de gros bœufs limousins, ne sont estimés en tout,
que 700 a- : ils valoient alors au moins 300 ^ la paire.
On ne s’est pas même donné la peine de détailler la
quantité et la nature du bois de sciage : on l’a évalué en
niasse avec le bois à brûler. L ’argenterie n’a point été
pesée; on n’a pas spécifié le nombre des marcs; un
tapissier et un marchand de la campagne 1 ont estimée
en masse , sans observer aucune des règles prescrites pour
l'évaluation de l’argenterie; cette seule omission suffiroit
pour faire ordonner la continuation do la communauté ^
td’après Tarrêt de 17^ 5.
�. .
x? )
, Antoine Gendret a trompé ses enfans du premier lit-* en
.portant comme profits de la communauté, les bestiaux qui
garnissoient le domaine de Marie G enest, sa première
.femme ; il a omis les acquisitions par lui faites,et dont on
adonné précédemment le détail; les sommes qu’il avoit
payées à ses sœurs, lors de son partage; les obligations qui
lui étoient dues.
• Il a voulu faire un avantage prohibé à sa seconde femme,
en omettant dans l’inventaire les bénéfices de la ferme delà
ci-devant commanderie du M ayet, dans laquelle il est
.notoire qu’il a fait sa fortune.
Enfin, à l’époque de l’inventaire dissolutif, le plus âgé de
ses enfans du premier lit n’avoit pas même quatre ans; et
cette circonstance obligeoit le père à veiller encore avec plus
,de scrupule à l’intérêt de ses mineurs, et à ce que son inven
taire lût exact.
•
*
La veuve Gendret n’a pas pu dissimuler les omissions
dont se plaint l'intim é; mais elle a prétendu que la conti
nuation de la communauté étant considérée comme une
peine que la coutume prononce contre le survivant infidelle, <
la négligence ou l’oubli ne devoit pas être puni comme
une omission volontaire.Elle a dit que dans l’espèce les inté
rêts des mineurs avoient été conservés, puisque les objets
omissont constatés par desactes authentiques, que les enfans
ont touj ours pu se procurer dans les dépôts publics. Suivant
elle,les omissions ne sont pas assez considérables, pour les
regarder cômme frauduleuses; on peut tout au plus les
attribuer à l’oubli ou à une légère négligence, qui ne peut
entraîner la continuation de la communauté.
�'
.
(
1 4
)
,
•
•
.
.
La réponse à cette objection se tire des omissions même
dont on a donné le détail; de la vilité du prix dans la prisée
dti mobilier; de l'infidélité dans l’estimation de l’argenterie:
la fraude et l'inexactitude éclatent de toutes parts; et, si quel
ques objets omis sont constatés par des actes publics, il de
vient souvent impossible à des enfans âgés de trois ou
quatre ans, de découvrir, vingt ans après, des contrats
d’acquisitions, bien plus encore des obligations q u i,
d’après l'usage, ne portent pas minute, et ne sont expé
diées qu’en brevets.
O n ne pouvoit pas également vérifier ou connoître le
-produit des bénéfices qu’avoient faits Antoine Gendret,
dans la ferme du M ayet, et sur laquelle l’inventaire est
absolument muet.
Il est vrai que la veuve Gendret a voulu élever des
doutes sur l ’époque où Antoine Gendret'a été fermier1;
elle a prétendu qu’il ne pouvoit pas l’être, lors de
l’inventaire de 1761 , parce qu’en i j 5j , il avoit été
consenti un bail de ferme du même o b jet, à Élizabeth
B o rn e , mère d’Antoine G endret, pour six, années con
sécutives.
Mais on a levé cette équivoque, par le rapport de
l’extrait mortuaire d’Élizabeth Borne. Elle est morte
en 1759, et Gendret, son fils, s’est subrogé à sa jouissance.
L e 6 novembre 1760, il s’est fait consentir un nouveau
bail, en son nom, pour cinq années qui de voient prendre
cours au premier mai - 1761. Dans ce bail Antoine
"Gendret y prend la qualité de fermier actuel de h eommanderie; cc qui prouve invinciblement qu’il étoit fermier
�c
. 1
5
\
antérieurement à l’inventaire dissolutif- p^r conséquent
cette jouissance précédente devoit entrer dans la com
munauté.
. A u surplus, d’après les arrêts qu’on a cités , et l’opinion
des auteurs les plus accrédités, il faut tenir pour certain
que les plus petites omissions, quoiqu’involontaires,
1a plus légère, négligence, suffiraient pour opérer la
continuation de la communauté; à plus f o r t e raison doitelle continuer dans l’espèce, o\i l’inventaire est frauduleux,
inexact, incçmplet et infidelle.
.. .
c On. passe maintenant à la seconde question, qui-est de .
savoir- si le mariage' de Marie -É lizabeth Gendret,, hors
la maison paternelle, a pu dissoudre la-communauté.
Ç é jà on doit considérer que le mariage d’Élizabeth
G en dret, avec Pierre JDelesvaux, n’a été contracté que
le 2 janviep 1776 , lorsqu’elle étoit encore pn minorité ;
i l n y a pas de doute, même dans le système de la veuve
Gendret, que la communauté se seroit continuée au moins
jusqu’à cette époque ,• mais ce seroit contre l’évidence
et, contre les principes qu'on voudrait soutenir, que-le
marjage de la fille , hors la,m aison, suffit pour dissoudre
Ja çommunauté.. Ce ¡points de jurisprudence a été jugé
par plusieurs, arrêts. On cite avec avantage, celui qui
est rapporté dans Bardet, sous la date du premier août
1640,, dans la >cause de Marie Esm ond, contre son frère.
Çpt, ?rret a jugé en thèse que même en pays de -droit
écj’i t , où la communauté ne peut avoir lieu,.que par une
stipulation expresse , elle n’étoit point dissoute par le
mariage et la dot constituée à la fille. O n rappeloit dans
�, (.i 5 )
.
les moyens du frère, l'opinion de Dumoulin , sur l’art.
270 de la coutume du Bourbonnois, qui pense que le
mariage de la fille empêche la continuation; mais malgré
cette autorité, il fut jugé que la communauté avoit
continué.
Cet arrêt est d’autant plus rem arquable, 1°. que la
fille , dans l’espèce, avoit renoncé à la succession échue
de sa m ère; 20. que la succession étoit en pays de droit
é crit, où la communauté n’est pas légale , où elle ne
peut avoir lieu que par la stipulation expresse des époux ;
ce qui pourrait ne la faire considérer que comme une
société ordinaire, qui se dissout par la mort de l’un des
associés. Cependant, M. l’avocat généralTalon soutint que,
dès qu’en pays de communauté , il y avoit continuation
de com m unauté, à défaut d’inventaire dissolutif, par
identité de raison, elle devoit être continuée en pays
récri par le droit romain : l'intérêt dr>s encans l’emporta
sur toutes les subtilités du droit. '
=
Ici, Élizabeth Gendret est encore plus favorable. Elle
habite en pays de communauté légale; elle n'a pas renoncé
à la succession échue de sa m ère; elle se lest au con
traire expressément constituée; elle ne-peut donc pas
avoir interrompu une communauté qui fait partie de
cette succession.
Ha question, a été discutée par A uroux des Pommiers j
sur l’art. 270 de la coutume de Bourbonnois. II cite
plusieurs jugemens conformas à l’arrêt qu’on vient de
rappeler; néanmoins il semble incliner en faveur de
l'opinion de D um oulin, mais toujours dans l’hypotèse
où
�( *7 )
où la fille auroit renoncé par son mariage à la succes
sion échue.
»
Cette autorité ne peut donc s’appliquer à l’espèce,
puisque Elizabeth Gendret s’est constitué toUs les droits
de sa mère. Au surplus, l’avis de D um oulin, et celui
d’A uroux ont été contredits par tous les auteurs qui ont
écrit sur cette m atière, et sur-tout par les jurisconsultes
modernes. L e b ru n , traité delà communauté ; Ferrières,
dans sa nouvelle institution coutumière, tom. 2, tit. 3 ,
de la continuation , etc. de Laurières dans sa note sur la
règle 11 de Loisel; P o th ier, traité de la communauté, liv.
d eu x, page 4 87, enseignent tous que le mariage de la
fille n’est pas un acte suffisant pour dissoudre-la commu
nauté à son égard, et qu’elle en est quitte pour rapporter
ce qu’elle a reçu pour cet objet. Enfin la question a été
jugée en thèse, par un arrêt récent, du 3 mai 1758, dans
la coutume de Bourbonnois.Cet arrêt, connu sous le nom
des V id a lin , a décidé que la communauté avoit continué
au profit des filles V id a lin , nonobstant les clauses de re
nonciation insérées dans leurs contrats de mariage ; et,
quoiqu’il leur eût été constitué et payé différentes sommes,
pour la portion quipouvoit leur revenir dans la com mu
nauté.
Ce qui tranche d’ailleurs toute espèce de difficulté,
c’est la circonstance que M arie-Elizabeth Gendret étoit
mineure lors de son mariage'; car tous les auteurs qui ont;
professé une opinion contraire, et qui ont pensé que le
mariage pouvoit interrompre la communauté, conviennent
néanmoins que cette interruption ne peut avoir lieu à
l'égard des mineurs.
3
�r ( i 8 ')
Il ne reste donc plus qu’à examiner le dernier moyen
proposé par la veuve Gendret, qui consiste à soutenir que
la femme 'Delesvaux auroit dû se pourvoir dans les dix
ans , à compter de sa majorité.
' Ce système est contraire à tous les principes reçus. Il
est bon d’observer ici, qu’il n’est pas du tout question d’une
demande rescindante ou rescisoire, qui doit être formée
dans les dix ans de la m ajorité, d’après l’art. 134 de l’or
donnance de 1539. Il s’agit tout simplement d’une de
mande en partage de la communauté; o r , personne n ignore quune demande en partage ne se prescrit que
par trente ans continuels et accomplis, et la prescription
ne pou voit commencer à courir que du jour du décès
du père. •
Il peut d’autant moins y avoir lieu à une demande
•*
il
• •
• 9•
rescindante ou rescisoire, que Marie-Elizabeth Gendret
n’a point renoncé à la succession échue de sa mère.
Y eut-elle expressément renoncé , on ne pourroit lui
opposer de fin de non recevoir, pendant la vie de son
père ; la prescription ne peut commencer qu’au moment
oii on est en état d’agir : or , Marie-Élizabeth Gendret
ne pouvoit pas agir .pendant que son père v iv o it; tous
ses titres, ses facultés , étoient entre les mains de son
p ère, son tuteur’naturel ; elle ne pouvoit pas vérifier si
l’inventaire étoit exact ou frauduleux; en eût - elle la
faculté, le respect et la confiance qu’elle .devoit avoir
dans la tendresse de son père, ne lui permettoit pas
d’en user.
D ’un autre côté, le délai pour demander compte d’une
�( i9 )
communauté continuée, ne peut courir que du-jour où
elle est légalement dissoute i jusque-la les communs ne
prescrivent pas les uns contre les autres; l’époux sttrvivivant administre tant pour lui que pour ses enfans;
et il en/est des communs comme des cohéritiers qui
cohabitent ensemble et jouissent indivisément; la pres
cription ne court pas tant que dure la jouissance iudivise;
elle ne commence à courir, que du jour que cesse cette
jouissance.
E nfin, fû t - il question d’une demande rescindante,
Faction en restitution seroit encore admissible, même
après les dix ans de m ajorité, par la raison que toutesles fois qu’il y .a fraude ou d o l, ce, n’est jamais qu’à
compter du jour où la fraude est découverte, que la
prescription peut cou rir, d’après l’article 44 de l’ordon
nance de i 5 io.
O r, la femme Delesvaux n’a découvert et n’a pu dé
couvrir les vices de l’inventaire du 2. juin 17 6 1, les
fraudes, les infidélités et les omissions dont elle se plaint,
qu’après le décès de son père, dans la succession duquel elle
a trouvé des renseignemens qui lui étoient inconnus, et
qu’elle ne pouvoit se procurer pendant la vie de son p ère,
qui avoit tant d’intérêt à les cacher. O r, tant qu’elle n’a pas
connu la fraude, elle a été dans l’impossibilité d’agir; elle
n ’a pu attaquer 1 inventaire. On ne peut donc lui opposer
aucune fin de non recevoir; et cette proposition paroît si
évidente, qu’elle ne mérite pas de plus grand développe
ment.
On pourrait ajouter qu’en coutume de Bourbonnois, le
�p ère, n’ayant que la garde , devient aussitôt après qu’elle
est finie, un v éritable tuteur; qu’il en contracte toutes les
obligations, principalement celle de rendre compte de sa
gestion ; que l’action en reddition de compte dure trente
ans, à compter de la majorité; qu’ainsi l’action de la femme
Delesvaux seroit toujours entière sous tous les points de
vue.
'
Que faut-il de plus pour établir le bien jugé du jugement
dont est appel? La veuve Gendret auroit du se rendre
justice à elle-même, et éviter une publicité qui ne fait hon
neur ni à sa délicatesse, ni à la mémoire de son mari.
Ainsi semble, à R io m , le 28. germ inal, an 5 de la
république française. P A G E S .
A R IO M , D E L ’IMPRIMERIE DE LAN D RIO T.
;
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delesvaux, Pierre. An 5]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
secondes noces
jurisprudence
partage
coutume du Bourbonnais
fraudes
inventaires
communautés
Description
An account of the resource
Précis pour Pierre Delesvaux, tuteur et légitime administrateur de ses enfants mineurs, et de défunte Élizabeth Gendret, son épouse, intimé et demandeur en opposition ; contre Élizabeth Poncet, veuve et commune d'Antoine Gendret, tant en son nom, qu'en qualité de tutrice, à l'interdiction de Louis Gendret, son fils, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil du département de l'Allier, le 14 thermidor, an 4, et défenderesse en opposition. Questions. Un inventaire infidelle et inexact, peut-il interrompre une communauté conjugale ? Le mariage de la fille, hors de la maison, est-il suffisant pour dissoudre la communauté qui s'étoit continuée avec elle ? La demande en partage de la communauté a-t-elle dû être formée dans les dix ans de la majorité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 5
1757-An 4
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0123
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Relation
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BCU_Factums_M0122
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