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MEMOIRE
EN RÉPONSE,
COUR ROYALE
DE RIOM.
CHAMBRE
Des Appels de Police
Correctionnelle.
COMPAGNIE DE MENAT,
En la personne des Gérans, appelans et
intimés ;
P our
la
CONTRE
"*Les Sieurs M O SSIE R et D A U B R Ê E , intimés et appelans;
ET ENCORE CONTRE
Les Sieurs DUMONT et DEROSNE, intimés;
N o u s publions notre défense, puisque le sieur Mossier le
veut. Nous eussions désiré l’éviter, dans le pays, même, où
réside la famille honorable à laquelle il appartient, et que nous
ne voudrions pas blesser ; mais il faut se défendre, alors qu’il
ne craint pas d’accuser avec une témérité sans exemple. Il taxe
ses adversaires d’un esprit de tracasserie ; il les montre comme
savourant le triste avantage de lui causer un grand préjudice,
paralysant toutes ses ressources, et retenant dans leur caisse, les
fonds qui lui sont dûs. Il semblerait à l’entendre qu’ils ne sau
raient goûter de plus grand plaisir que celui de lui faire du
mal. Il est impossible d’être plus inattentif dans scs paroles,
plus irréfléchi dans scs accusations.
Ces êtres haineux que le sieur Mossier désigne , sont deux
négocians recommandables de la ville de Clerm ont, dont la
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vie est publique, dont aucun précédent n’a fait suspecter là
plus rigoureuse délicatesse.
Ce sont deux hommes qui gèrent l’affaire d ’une Compagnie
de laquelle ils sont simples actionnaires, de même que le sieur
Mossier; qui avaient, conséquemment, le plus grand inte'rêt
à favoriser les opérations de Mossier , au lieu de les traverser ;
qui avaient un intérêt personnel à faire circuler des fonds, au
lieu de les retenir ; et q u i, aujourd’h u i , ne sont que les organes
de la Compagnie toute entière.
Ce sont deux hommes q u i, par bienveillance pour le sieur
Mossier, l’ont soutenu contre la masse des actionnaires, et lui
ont fait conserver, imprudemment sans doute, un titre que la
Compagnie voulait lui retirer ; deux hommes, enfin, qui n’ont
d ’autre reproche à se faire que d’avoir eu trop de confiance en
lui ;d ’avoir cru qu’il mettrait un vifintérêt à faire prospérer une
entreprise qui présentait à leur société des avantages immenses,
e t , par conséquent, à l’industrie une spéculation licite autant
que fructueuse, si elle eût etc bien dirigée.
Cet espoir s’est évanoui ; cette entreprise a etc étouffée dans
songerme; des fonds considerables y ont été perdus ; les ac
tionnaires ont vu disparaître tout cela. Pourquoi ?
Parce que le sieur M ossier, au lieu de ces connaissances qu’il
se targuait d’a vo ir, et qu’on lui supposait, n’y a porté qu’une
funeste et trop notable incapacité; au lieu de zèle , que de l’in
curie ; et qu’enfin , voyant, par expérience , que ni scs moyens
personnels, ni ses goûts, ni ses habitudes ne pouvaient s’ap
proprier à cette situation nouvelle, il cru pouvoir séparer ses
intérêts de ceux des actionnaires , et qu’après avoir manqué à
tous ses engagemens , et ne pouvant douter qu’il ne fût repro
chable , il a cru trouver une porte de salut, en faisant un procès
à la Compagnie dont il devait soigner les intérêts.
Ils s’était engagé à fabriquer et à livrer, h 9 fr. 5o cent., le
noir propre au raffinage, et à 20 fr. le noir propre aux couleurs ;
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;
il lui offre comme matière de choix, et il a voulu la contraindre
à recevoir, au plus haut prix convenu, tous les déchets de sa
fabrication ; des noirs fins, de la poussière, qu’il convient luimême n’être bonne à aucun usage, et qu’il a long-temps ven
due comme engrais. Il faut lui prendre et .lui payer 20 f r ., ou
tout au moins9 fr. o c. le quintal, cette matière inutile , pré
cisément parce qu’elle n’est bonne à rien. Telle est la préten
tion du sieur Mossier ; semblable à ce fondeur inhabile autant
qu’audacieux, qui, après s’être engagé à livrer du métal pur
et dégagé de tout alliage , venait en requérir le prix en offrant
des scories.
O ui, certes, il y a préjudice, et un grand préjudice ; mais
il est pour la Compagnie. La plus belle et la plus facile entre
prise a été p a r a l y s é e ; deux cent mille francs y ont été jetés
sans le moindre fruit, par des industriels, des ne'gocians, des
propriétaires, qui y avaient vu des avantagés publics et parti
culiers; et tout cela, nous ne craignons pas de le dire, p arla
faute du sieur Mossier, par une continuité de fautes lourdes,
grossières, par un manque total de volonté ; et il accuse ! et il
demande des dommages-intérêts !.... Il faut donc dérouler les
faits assez nombreux de ce procès, dont il oublie les uns , et
dénature les autres ; ils sont établis par des actes clairs et précis
par une correspondance qu’il ne peut pas récuser ; ce sont là
les sources où nous allons puiser. S i , comme nous le pensons,
les conséquences en deviennent accusatrices contre l u i , il ne
pourra s’en prendre qu’à lui-même et à son imprudence.
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�(4)
FAITS.
Il y a quelques années qu’on découvrit à Menai un banc de
schiste bitumineux, que les chimistes crurent pouvoir appro
prier à la décoloration des sucres et sirops. L ’industrie s’en
empara; c’était une belle spéculation que celle de créer, en
concurrence du noir animal, une préparation meilleure, peutêtre , et à un prix de beaucoup inférieur.
L ’entreprise paraissait devoir réussir sans être sujette à
beaucoup de chances. Le banc était situé à dix minutes d’une,
roule royale, et il suffisait de le couper devant s o i, au niveau
de terre , sans avoir besoin de faire de travaux au-dessous du
s o l , ni de grands frais d’extraction. E nfin, la matière ne sem
blait pas exiger des préparations longues et hasardeuses. Il fal
lait seulement du soin et de l’attention pour la trier, la dégager
des pyrites, la faire calciner, et la réduire en poudre , soit
avant, soit après la calcination.
Le brevet d’inveiition fut obtenu, et la concession faite au
sieur Bergounhoux, pharmacien, puis elle passa dans les mains
des sieurs Chevarrier, Comitis et Cournon. Les concession
naires firent quelques essais sous la direction du sieur Mossier;
ils réussirent mal, et reconnaissant d’ailleurs qu’à eux seuls
ils ne pouvaient pas soutenir le poids d’une entreprise aussi
vaste, et qui ne pouvait être quelque chose qu’en la sortant
des bornes étroites où ils étaient obligés de l’enfermer , ils
pensèrent à la céder à une Compagnie, seul moyen de la faire
prospérer.
Une procuration fut donnée au sieur Mossier pour vendre
J’iinmeuble el leur privilège, au prix de n o ,o o o fr. Cette cessoin fut faite par Mossier aux sieurs Blanc et Guillaumon ; et
le i avril 1827, ceux-ci admirent le sieur Mossier, person-,
ncllcment, pour un tiers dans leur acquisition.
Les sieurs Blanc et Guillaumon établirent immédiatement
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®
�( 5)
leur société en nom collectif sous la raison sociale, P. Blanc et
Guillaumon ; puis ils appelèrent des associés en commandite,
en émettant cent actions de 2,000 fr. chacune. Ces cent actions
furent remplies en très-peu de temps. Les sieurs Blanc et
Guillaumon en conservèrent vingt pour leur compte person
nel, et formant, d’ailleurs, le noyau derassociationenleurnom
collectif, ils en demeurèrent gérans. Le sieur Mossier abuse de
cette qualité pour les faire considérer comme de simples agens
d ’un caractère inquiet ettracassier, tandis qu’ils étaient et sont
encore les véritables propriétaires, intéressés plus que per
sonne à protéger tous les élémens , tous les moyens de pros
périté qu’on pouvait mettre en jeu pour faire réussir cette en
treprise.
Le mai, la société des actionnaires se constitua. Elle nomma
cinq de ses membres pour former le conseil d’administration.
Dans dette première réunion générale , on s’occupa du choix
du Directeur. MM Blanc et Guillaumont présentèrent le sieur
Mossier, qu’ils avaient déjà associé, pour un tiers, sinon à la
société en nom collectif, au moins à la concession. Ils doivent
dire ici qu’ils éprouvèrent beaucoup de contradictions de la
part de quelques actionnaires , spécialement des précédons
propriétaires, qui prétendaient avoir eu à se plaindre de son
peu d aptitude et de la mauvaise direction qu’il avait donnée
à l’entreprise. Les gérans objectèrent qu’il avait abandonné
une bonne pharmacie poür s’y livrer ; que lui ou les siens
avaient assez d’actions pour y être fort intéressés , etc.... ; on
transigea. Cela fut le principe delà détermination qui fut prise
le lendemain par le conseil d’administration, auquel était ré
servée la nomination des employés.
En effet, le ïo mai, le conseil, après s’élrc constitué, dé
clara inviter le docteur Bardonnet « à surveiller les diverses
» opérations chimiques que nécessiterait la préparation du
» schiste , en qualité de Directeur honoraire. »
arrêta que M. Mossier remplirait provisoirement les fonc
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tions de Directeur , restant à M enât, se réservant de fixer les
appoinlemens, lorsqu'il nommera définitivement le titulaire.
E n fin , il créa deux emplois subalternes aux appointemens
de 1,200 fr. chacun.
est facile de voir pourquoi le Directeur ne fut nommé que
provisoirement; p ou rqu oi, à côté d’un pharmacien chargé de
cette direction, un médecin fut nommé Directeur honoraire
pour surveiller les opérations chimiques. C ’était évidemment
le résultat de quelques incertitudes sur l’admission du Direc
teur et sur la capacité du sieur Mossier. Les sieurs Blanc et
Guillaumon ne craignent pas qu’on leur objecte que les diffi
cultés étaient émanées d’eux.
Bientôt après, le sieur Mossier se rendit à Lyon pour y faire
confectionner un appareil en fonte, indiqué par M. B arruel,
pour diminuer la dépense du combustible, et séparer le corps
gras de la poudre décolorante, de manière à en faire de l’huile
à brûler.
A son retour, il fit construire douze fours à la fois, sans con
sulter personne, croyant sans doute au-dessous de lui de s’as
sujettir à un essai. Aucun d’eux ne put servir à rien ; et la
Compagnie perdit ,ooo fr. qu’ils avaient coûté. Il en fut de
même de l’appareil que le sieur Mossier ne put ni employer,
ni monter ; et ce fut encore une dépense inutile de 2,800 fr.
Enfin, les résultats furent tellement à l’inverse de ce qu’on en
avait espéré, qu’un grand nombre d’actionnaires demandèrent
la révocation du sieur M ossier, ou, pour mieux dire , la ces
sation d’un provisoire adopté par considération pour l u i , et
à la demande des gérans. On transigea encore ; on arrêta, sans
en faire registre, qu’on lui donnerait un Adjoint. On lui pro
posa l’un des actionnaires, recommandable à tous égards ; il le
refusa, sous prétexte que le caractère de cet Adjoint serait in
compatible avec le s ie n , et que ce serait une dépense inutile.
On attendit.
Quelque temps après, le mal empirant encore, on fit venir
11
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de Lyon un homme intelligent et habitué à la préparation
du noir animal, un fabriquant dont 1’établissement avait été
incendié. Le sieur Mossier le reçut mal, et ne tarda pas à le
molester. Le second jour, il déclara aux gérans qu’il ne pou
vait pas rester. « Malgré le besoin que j’ai, leur dit-il, de ré
cupérer ce que j’ai perdu, je préfère retourner à L y o n , plutôt
que de vivre avec un homme à qui je déplais.» C ’est ainsi que
le sieur Mossier, méconnaissant les devoirs de sa position,
faisait prévaloir son esprit d’absolutisme , et un amour-propre
mal entendu. Les gérans s’en sont aperçus beaucoup trop tard,
et lorsque le mal s’était aggravé.
Pendant tout ce tem ps, des essais avaient été faits , le sieur
Mossier s ’en étant mis en peine, avait fabriqué des noirs de
belle qualité; des échantillons q u ’on trouva superbes, avaient
été obtenus et envoyés en divers lieux. C ’est à cette époque
-que se rapporte la lettre du sieur Bardonnel, dont on cite un
fragment à la page du Mémoire ; mais on ne montre pas ce
qu’ajoutait le sieur Bardonnet, comme moyen de réussir et
d’éviter la concurrence. Il disait :
« Il ne s ’agit plus que de suivre le procédé que j e vous aiin» d iqu é, et que je crois le plus sûr et le plus économique. Ne
» vous en écartez p a s, et soyez certain de voir bientôt notre
» noir convenablement placé dans le co m m erce.....................
3
» J’attends très-prochainement les échantillons que je vous ai
» demandés ; soignez-les bien, faites éventer la jleur, pour qu’il
» n ’y ait pas de gomme qui s’opose à la filtration de la clairce.
» I l ne faut ni trop fin , ni trop gros ; mais des grains bien
» égaux. » Saisissons bien ces dei'niers mots, nous aurons
les appliquer lorsque les faits seront un peu plus connus. C ’est
le sieur Mossier lu i-m êm e qui produit celte lettre, et en ar
gumente. Elle est d’ailleurs en harmonie avec les réflexions de
M. Barruel, qui avait fait une vérification attentive des lieux,
et fourni un rapport fort détaillé :
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�(8).
« La mine est inépuisable , disait-il ; elle peut fournir jà
» toutes les parties du monde , quelque consommation qu’on
» en fasse. »
Mais il ajoutait : « Le procédé suivi jusqu’à ce jour pour
» la calcination est vicieux sous plusieurs rapports, tel que la
» construction des fours, etc.... Je ne balance point à conseiller
» de changer totalement le mode de fabrication.
» S i on exécute fidèlement le mode de préparation que j e vois
» indiquer pour le noir minéral, j’ose garantir que très-pro» chainement il jouira d ’uneréputation supérieure au meilleur
» noir d’os; de plus, on peut compter sur un placement im» mense.
» Le genre d’appareil que je propose, et dont je fais passer
» le plan, aura l’avantage d’être moins coûteux, etc., etc.»
Nous avons déjà parlé de cet appareil et du résultat.
Telles étaient les garauties et les heureux auspices sous les
quels on ouvrait cette branche d’industrie.
Bientôt des commandes furent faites aux gérans. La lettre du
sieur Bardonnet en a n n o n c e une considérable. Leur corres
pondant de Nantes vint à Clermont ; et sur le témoignage avan
tageux qu’il rendit de ces échantillons, ils firent fabriquer une
plus grande quantité. Plus tard, ils expédièrent sur les pre
mières places; Paris, Marseille, Lyon, Nantes, Londres , etc.
La suite des temps leur a prouvé combien ils avaient été induits
en erreur.
Toutefois , la Compagnie sentit qu’elle ne pouvait pas tenir
cet établissement en ré g ie , et malgré les espérances qu’elle
concevait, et la confiance excessive des gérans dans les soins
et l’habileté du sieur Mossier, elle prit le parti de se décharger,
moyennant un prix fixe , de fous les soins d’une régie et de
tous les hasards de la fabrication. Les gérans, en l’apprenant
au sieur Mossier, l’engagèrent à la prendre pour son compte.
Celte négociation fut préparée par une correspondance.
Dans une première lettre , du 1" juillet 1828 , le sieur
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M ossier, s’excuse sur les mauvais résultats obtenus dans le
principe. Ce n’était point sa faute, dit-il ; puis entrant dans le
désir de la Compagnie, il indique la possibilité de traiter avec
.elle. Les gérans lui avaient répondu et demandé qu’il fit des
propositions formelles. Nous devons avouer qu ’ils désiraient
de le voir charge de la fabrication ; ils étaient aveugles sur son
com pte, et ne pouvaient se rendre aux objections de plusieurs
actionnaires.
°
Il leur écrit, le juillet 1828 :
«Je m ’empresse de vous présenter les propositions que vous
m ’avez demandées :
» i° Je prends l’engagement de livrera la Compagnie, cha
que mois, une quantité de 60 à 200 milliers de noir pour
clarifier et pour couleurs, fabriqué, blutté, emballé et conduit
à Clermont et Vichy, moyennant 9 fr. les 100 kilogrammes ;
» 2° Chaque livraison sera soumise à l'essai de la personne
commise à cet effet par la Société. »
Nous ne copierons pas toute cette lettre, qui indique
d ’autres conditions , parce qu’elles se retrouvent dans le traité
dont nous allons rendre compte. Nous en parlons seulement
pour faire voir que les propositions ont élc bien entendues
par lui, puisqu’il les a méditées et les a faites lui-incine ; la
Compagnie s’élant bornée à les accepter. On y remarque, pour
la première fois, l’indication du noir pour couleur. C ’est que
le sieur Mossier avait cru pouvoir approprier à cet usage la
matière calcinée, et spécialement la partie la plus iinc, qui
était, par cela seu l, impropre au raffinage. N i trop gros, ni trop
f u i , avait dit le sieur Bardonnct. On verra comment le sieur
Mossier a réussi dans celtespéculalion. Elle est l’e point de dé
part et la cause principale du procès actuel. Au reste, nous
devons dire qu’en finissant, le sieur M o s s i e r repousse le désir
de quelques sociétaires, de lui donner un associé pour la f a
brication ; il se fonde sur la modicité des bénéfices. Toujours
est-il que scs propositions ayant élé acceptées , il fut passé
2
5
�( 1° )
cnlre les gérans et l u i , à la date du 7 août, le traité qu’il a
analysé dans son Mémoire. Avant d’y arriver, disons un mot
d’une déclaration par lui donnée dans l’intervalle. Elle répondra
peut-être aux reproches si vifs qu’il fait aujourd’hui aux gé
rans, en les accusant de ne lui avoir rien fourni de ce qu’ils
devaient fournir; elle est du i juillet 1828.
«Je soussigné, François Mossier, Actionnaire et Directeur
» provisoire de la Compagnie de Menât, promets de justifier
» de l’emploi de toutes les sommes que j’ai reçues jusqu’à ce
» jour pour le service de la Compagnie, et déclare que si,
» contre toute attente, lors.de la reddition des com ptes,il
» survenait quelques difficultés, je m’oblige à en garantir les
» gérans. » Au surplus, voyons le traité.
i° II s ’engage, moyennant g fr. par 100kilogrammes, de livrer
chaque mois à la Compagnie une quantité de trente à cent
milliers métriques de noir, pour clarifier et pour couleurs,
parfaitement calciné, bluüé, emballé, etc^
20 Chaque livraison sera soumise à l ’inspection et Fessaid'un
agent de la Compagnie, qui ên vérifiera Tétat ou le condition
nement.
3
Les autres conditions sont transcrites ou analysées au Mé
moire Mossier, sauf l’art. 11 , p a rleq u clil donne, en garantie
ses quatre actions qui seront inaliénables jusqu’à l’entier ac
complissement des conditions stipulées ; il est donc inutile de
les répéter.
Sans examiner autre chose en ce m om ent, retenons bien, de
ce traité , que les noirs devaient être propres pour clarifier et
pour couleurs; que lui, Mossier, chargé.dc les fabriquer,de
vait les livrer parfaitement calcinés etbluttés, et qu’avant de
les recevoir, la Compagnie avait droit de les soumettre à l ’essai
d un agent, nommé par elle.il serait difficile, dès lors, dépenser
que la Compagnie dût prendre tout ce qu’il plairait à M o s s i e r
de fabriquer , n’importe que la matière offerte ne pût s e r v i r
ni à clarifier, ni à faire des couleurs. On voit bien q u ’ e l le avait
�voulu sc décharger de tous les risques de la fabrication ; de
tous les inconvénierfk'de la régie ; el que livrant la matière
• prem ière, et payantTe noir fabriqué suivant le prix convenu,
elle avait le droit d’exiger du noir parfaitement propre à rem
plir son objet, sans avoir à se mêler désormais de la fabrication,
si cen csl pour en faire l'essai et en vérifier îe conditionnement. Il
est clair, enfin , que si le conditionnement n ’était pas*conforftie
à l’usage auquel le noir était destiné par l’acte même ; si Pessai
n’était pas satisfaisant, elle ne serait pas obligée de le recevoir.
Il est im p o s s ib l e s reculer devant cette proposition, à moins
qu’on ne soit résolu à nier l’évidence.
Remarquons, toutefois, que ce traité fut passé immédiate
ment après l’époque où des-échantillons satisfaisans (superbes
disait-on), avaient été fournis par le sieur Mossier, et où les
gérans avaient raison suffisante d’espérer quelque chose de
lui. C ’est ce que nous confirme la délibération du conseil
d ’administration, qui approuve le traité fait par les gérans. On
y lit ce préambule :
« Un grand nombre d’essais ayant été faits, soit sur latnanière
» la plus économique de fabriquer le noir de schiste, soit sur
» les résultats que devait donner ce noir , convenablementfa» brique, on a acquis la certitude que les obstacles qui s’op» posaient à l’admission de la matière dans les rafineries ,
» étaient vaincus, et que, dès lors , il ne restait plus qu’à se
» livrer à une fabrication étendue.
» Divers marçhés à livrer ont été conclus sur les échantil» Ions envoyés par les gérans.
» Pour satisfaire aux demandes faites et à celles qui pour» ront survenir, M. Mossier, Directeur provisoire, a fait di» verses propositions ; elles ont été débattues en conseil d ad» ministration. Des bases ont été arrêtées; et, d’apres ces
« bases, les gérans ont conclu, avec M. Mossier, le traité
» suivant, qui a été pleinement approuvé par MM les Admi» nislrateurs, comme le moyen le plus propre d’atteindre le
2.
�(
1 2
} -
» buFproposé. » Le traité est ensuite trjyjscrit littéralement.Par suite de ces espérances , conçues’iwr tout le monde , à
la suite des échantillons q u ’avait fournis îe sieur Mossier, et •
des succès qu’ils avaient e u s , la Compagnie voulut étendre les.
élémcns de préparation. Elle acheta, près de Clerm ont, un
moulin pour faciliter à la fois les moyens de moudre, blullcr et
emballer , £t, aussi, la surveillance et le droit de vérification
réservé par le traité aux agens de la Compagnie. Elle livra'
cette usine au sieur Mossier, chargé de toutes ces opérations
par l ’arL i er. Une autre délibération approuv^^ette opération,.
à la date du i " septembre 1828.
Nous avons vu, dans le traité , que le sieur Mossier pro
mettait livrer du noir propre aux rafineries et aux. couleursi
Quelles pouvaient être la force et les conséquences de cfette
promesse? Il est facile de les déterminer, 'et il est utile de les.
envisager, dès à présent, pour bien comprendre ce qui va
suivre..
•
La Compagnie n’avait d’abord supposé à la matière d’autre pro
priété qüc celle du r a f f i n a g e , c o m m e l e t é m o i g n e n t s o n prospec
tus et Ses délibérations précédentes ; mais, appropriera la fabri
cation des couleurs.cc qui ne serait pas bon pour les rafineries,
c’était un moyen de tout utiliser; et, sous ce rapport, un avan
tage pour la société. Le sieur Mossier en ‘offrit la promesse ,
et 011 en accepta l’engagement. Toutefois, cela ne pouvait pro
duire qu’un seul résultat. Si après avoir fourni du noir propreau raffinage et r e c o n n u , tel /îprès l'essai , le sieur Mossier
fournissait encore du noir propre aux couleurs, et qui fut re
connu bon , la société devait les recevoir. S’il ne pouvait en
fournir de cette dernière espèce, mais seulement de la pre
m ière, elle devait s’en contenter. Enfin, s’il ne fournissait
rien du tout, il s’élevait une autre question. Cela pouvait
naître des défauts de la matière ou de ceux de la fabrica
tion.
Le premier cas était peu probable : on ne pouvait même
�(i3)
pas le supposer. Les résultats avantageux, obtenus en dernier
lieu et agréés par les propriétaires des raffineries, avaient dû
rassurer la Compagnie et lui donner la plus grande confiance.
Toutefois , supposé que cela arrivât, et que le sieur Mossier,
sans une faute grave, ne pût pas obtenir de produits con
formes à son engagement, c’était un malheur commun , une
fausse spéculation établie sur des bases erronées, où la Com
pagnie devait perdre ses frais d’achat, de construction , tout
son matériel et ses dépenses, et le sieur Mossier ses frais de
fabrication. C ’était lui, après to u t, qui pouvait le moins s’en
plaindre, car, pharmacien par état, choisi, par cette raison ,
comme Directeur provisoire dès le principe , il avait tout
connu, tout calculé, et s’était chargé, en pleine connaissance
de cause , de fabriquer et fournir à un prix convenu. C ’était
donc son avis, e t , par-dessus to u t, sa promesse écrite qui en
gageait la Compagnie dans des dépenses énormes, pour réa
liser une espérance qu’elle avait pu concevoir , qu’il avait
confirmée après ses expériences, et qu’il s’était engagé à réa
liser. Certes, il n’aurait pas pu se plaindre s i , dans une pareille
position , la Compagnie s ’était résignée à perdre tout ce
qu’elle avait jeté dans cette entreprise, en se réduisant à re
fuser à Mossier le prix d’une matière qu’il ne pouvait pas lui
fournir comme il s’y était engagé ; car elle ne lui doit que le
prix de celte matière, et elle ne peut le devoir que lorsque
Mossier Ja livrera parfaitement propre ou à clarifier, ou aux
couleurs, et lorsque scs propriétés auront été constatées par
la vérification et l'essai des agens de la Compagnie.
Dans h; second cas , et supposé que la faute provint du
sieur Mossier, ou de son inconduite, ou de son défaut de
soin, ou d’une mauvaise fabrication, la Compagnie, qui lui
avait tout livré, moyennant promesse de fournir de'la matière
parfaitement fabriquée , avait le droit de le rendre responsable
du dommage qu’il causait par une faute grave.
Enfin, si la Compagnie, manquant à scs engagemens, et à
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fournir ce qu’elle avait promis, oubliait ses propres intérêts
jusqu’à entraver la fabrication et à la rendre impossible ; sup
position tellement ridicule que l’esprit la repousse tout natu
rellement , il y aurait eu à voir si Mossier, à son tour, ne pou
vait pas réclamer indemnité.
Voilà, indubitablement, le résultat immédiat de la conven
tion faite entre les parties. Nous aurons donc à faire , d’après
les faits matériels du procès , l’application de l’une ou l ’autre
des règles que nous venons de reconnaître. C ’est pour cela
q u ’il faut porter une grande attention sur des faits que le sieur
Mossier s’efforce de travestir.
Nous pouvons, dès à présent, remarquer que le noir propre
à clarifier devant être ni trop gros, ni trop fin , comme le porte
la lettre du sieur Bardonnet, il restait après le moulage ,
bluttage, etc, une plus ou moins grande quantité de matière
ou trop fine , ou trop grosse, et plus spécialement trop fine
pour y être employée. C ’était un véritable déchet, comme il
en résulte d e toutes e s p è c e s de préparation des matières
brutes. O r, ce déchet était plus ou moins f o r t , suivant que la
fabrication était plus ou moins soignée ; et nous verrons plus
tard, que le sieur Mossier , qui s’en plaint, y a pris si peu
de soin , y a mis si peu d’attention , que par son propre fait,
ce déchet est devenu fort considérable, proportionnellement
aux résultats obtenus. Les expériences faites pendant que la
fabrication était en régie , jointes aux avis de MM. "Bergounh o ux, Lecocq et Darcet, avaient convaincu les gérans que le
noir fin se dissolvait dans le sirop , et qu’au lieu de clarifier
il noircissait ; ce noir fin devait donc être rejeté. Cela seul pro
duisait habituellement un déchet de plus de trente pour c e n t ,
qui devient plus considérable lorsqu’on fabrique mal.
Le rapport de M. Barruel apprenait qu’une expérience
faite d'après son procédé, lui avait produit sur. cent parties de
schiste :
�Noir mineral
58
H u ile ............................................................................
7
Sulfate d’ammoniac....................................................
i 1/2
66 1/2
Le déchet était donc d e ............................................
33
ip
Encore fallait-il des préparations chimiques; fort soignées.
C ’est précisément ce déchet que Mossier avait espéré rendre
propre aux couleurs. Il en avait communiqué l’espérance à la
Compagnie ; elle avait agrée sa proposition de le livrer pour
cet usage, et avait contracté l’engagement de le lui payer au
même prix que le noir à clarifier, lorsqu’il le livrerait parfai
tement fabriqué; mais là s’arrêtaient les obligations de la Com
pagnie; et c’était, à coup $ûr, l’affaire du sieur Mossier, d’exé
cuter ce qui était convenable pour approprier aux couleurs ce
qui ne serait pas bon pour clarifier. Jusques-là on ne lui devait
rien pour cette matière inutile; c’était à lui à s’en défaire, et
à la placer à son grc, comme il l’a fait long-temps, en la ven
dant pour engrais; il est vrai qu’alors on ne la lui payait pas
g fr. le quintal métrique.
Toutefois, remarquons encore que le sieur Mossier avait
conçu fort légèrement cette espérance. Il avait cru qu’il suffi
sait que le noir fut beau, et que la poudre fût fine. Cela aurait
été fort commode et très-p'eu couteux pour lui : ses bénéfices
eussent été énormes, car, sans rien ajouter à ses frais de fa
brication , les déchets eussent autant valu que la matière choi
sie ; mais il était dans l’erreur. Il fallait pour cela quelques
préparations chimiques, quelques précautions qu’il 11c prît
pas, que vraisemblablement il ne connaissait pas ou ne savait
pas employer. Huit mois se passèrent, pendant lesquels, tou
jours présomptueux par suite de sa confiance en lu i-m ê m e ,
toujours négligent et peu soigneux, il n’obtint que des résu!-
�(
1
6
}
.
tats fort au-dessous de ce qu’il avait fait espérer ; des noirs
imparfaits, dont le prix et les frais de transport, payés par la
Compagnie , sont restés en pure perle pour elle.
Une correspondance assez suivie, sur les principales villes
manufacturières de France, témoigne de l’aclivité des gérans
et de l’inutilité de leurs efforts pour placer ces noirs livrés
par le sieur Mossier, et expédiés sur tous les points.
A Bordeaux , après avoir fail Fexamen , on a reconnu , diton , (jue cette qualité de noir ne pouvait réellement convenir.
A Marseille, il est infiniment au-dessous de ceux qu’on em« ploie. Six persones différentes l’ont employé en regard d’ un
j> essai de leurmatière accoutumée. Le résultats été, chez tous,
y> que leur noir a la propriété de dessécher plus promptement
» l’huile, et de faire un plus beau.vernis, tandis que celui-là
j> produit un noir mat.... Vous nous obligerez, ajoute la lettre,
» de nous autoriser, de manière ou d’autre, à nous débarrasser
» de celte matière, ainsi que de celle de voire envoi .précé» dent, qui est pire , et dont nous ne pouvons rien tirer. »
A Lyon , des caisses d'échantillons de noir ont été remises
à huit maisonfc différentes. « Tous les ont fait essayer........
» Aucun n’en a été content. Tous ont tenu le même langage ;
»> qu’il était trop lourd ; que la qualité leur importait moins
» que la légèreté..... Les dilficullés sont insurmontables, etc.»
E videm m ent, le noir mat et la pesanteur ne pouvaient venir
que d’un défaut de fabrication ; de ce que l’huile n’était pas
bien extraite; et de ce qu’on ne suivait pas les procédés de
M. Barruel ; mais le sieur Mossier a-t-il jamais écouté per
sonne ?
Partout ailleurs il en fut de même. Cependant, la Compagnie
avait reçu., depuis le 2 août 1828 jusqu’au mois d’avril 1821),
29,708 kilogrammes de noir à clarifier, et 9,061 kilogrammes
de noir fin , donné par Mossier comme noir à couleur. Enfin ,
il lui en avait vendu 4
kilogrammes pour engrais, non
compris celui livré à des tiers ; et il a tellement raison d’ac
,^ 3
�17 )
cuser les gérans de malveillance, q u e , d’une p a r t , ils lui
passèrent plus de trois mille francs pour les frais de nourri
ture q u ’il avait faits pendant sa régie; et qu’au 2 mai 1829, ils
étaient en avance à son égard de 6,600 fr., comme le témoi
gnent ses comptes courans chez M. Blanc.
Quoiqu’il en soit, on sentit le besoin de prendre des pré
cautions d’une autre nature ; car le traité passé avec Mossier
n’empêchait pas la surveillance ; au contraire, elle devenait
plus impérieuse , par la force même du traite. Or, il était de
venu nécessaire, pour qu’il fût exécuté convenablement,
qu’un homme habile fût adjoint au sieur Mossier. Le sieur
Daubrée se présenta; le sieur Daubrée, industriel de profes
sion , et apportant avec lui la réputation d ’un homme instruit
dans ces matières. U n trailé fut fait avec Mossier et l u i , le
7 avril 1829. Il faut encore le bien connaître. Le sieur Mossier
en a rendu compte aux pages 7 et 8 de son Mémoire. On peut
s’y reporter, on peut même s’arrêter un instant sur les préeau lions qu’il prend, avant tout, pour montrer le but et l’esprit,
soit de ce traité, soit de celui qui l’avait précédé, conventions,
d it-il, qui ne pouvaient s'entendre que de noirs tels qu'ils avaient
été fournis ju sq u ’alors par le sieur Mossier..... Tels que celui
dont les échantillons avaient paru superbes.
Il est facile de réduire cette augmentation à sa véritable va
leur.
O u i , si les noirs étaient bons et de recette ;
N o n , s’ils ne l’étaient pas.
O u i, s’ils étaient conformes aux échantillons trouvés sui*îon, s’ils ne l’étaient pas.
Observons d ’ailleurs que, d’une part, les noirs reçus pré
cédemment par la Compagnie, mais rejetés du commerce, ne
pouvaient être un engagernenl pour l ’avenir ; et qu’il suffisait
au sieur Mossier qu’elle ne prétendît pas répéter le prix de
celte matière inutile, qu’elle avait reçue et payée avec trop de
3
�(
»8
)
confiance; sans que cela pût l’obliger à subir à jamais de pa
reilles deceptions.
E t en second lie u , la réception faite par les gérans dans un!
temps où il n ’y avait qu'une régie, sous la direction provisoire
du sieur Mossier, ne pouvait plus être un exemple, après
des traités faits pour éviter les inconvéniens graves dont on
avait fait l’expérience.
Le sieur Mossier ajoute quYZ s ’associa le sieur Daubrée.
Est-ce qu’il nierait que cette association fut exigée par la
société, dans l’intérêt de tous? Cette mesure, il faut le dire,
était devenue nécessaire pour soutenir une entreprise qui
tendait à se perdre, isolée dans ses mains; et qui s’est à peu
près perdue, parce que cette condition a été violée.
Quoiqu’il en s o it , et malgré la mésaventure du noir à cou
leurs , il fut encore la première stipulation du traité. Les gé
rans eussent été imprudens , sans doute, d’en favoriser encore
la spécvdation, si elle eut été faite par régie, aux frais de la
Compagnie. L ' é p r e u v e paraissait suffisante; mais ils ne cou
raient aucun risque à promettre de l’accepter lorsque les en
trepreneurs le leur livreraient propre à l’usage auquel on le
destinait, et il était parfaitement libre à ceux-ci d’en courir la.
chance.
Toutefois, il fallut faire entendre que les pertes précédentes
étaient provenues d ’un défaut de prévision ; que la préparation
de ce n o i r e x i g e a i t des procédés chimiques, des frais qu’on
n ’avait pas pu faire jusqucs-là , par la fixation d’un prix trop*
rabaissé ; les entrepreneurs s’engagèrent à le fabriquer au prix
de 20 fr. les 100 kilogrammes ‘r et ils demandèrent une augmen
tation o c. sur le noir à clarifier. Ces propositions furent ac
ceptées , quoique beaucoup plus onéreuses, et quoique le
bail de Mossier eût long-temps à courir.
5
Le traité fut rédigé fort clairement L ’art. 1" fixe, comme
nous l’avons d i t , les prix, de la marchandise fabriquée aux
�(
>9
)
frais des entrepreneurs, et qu’ils devront fournir, t e s expres=
sions dont on se sert sont remarquables :
• g fr. o c. pour noir propre au raffinage ;
20 fr. pour le noir propre aux couleurs.
L ’art. 2 porte qu’ils seront conformes aux échantillons ca
chetés , déposés entre les mains des gérans ; et on se récrie ,
en disant que l’échantillon du noir propre aux couleurs n’a ja
mais été déposé. Qu’importe ? ce n’était pas sans doute la
Compagnie, ni les gérans , qui devaient confectionner cet
échantillon , et eux seuls pouvaient se plaindre de ce que les
entrepreneurs ne les avaient pas fournis. A u surplus, on en
voit facilement la raison. On n’était pas du tout fixé sur la cer
titude de cette fabrication pour les couleurs. Si elle ne réussissait
pas, comme nous l’avons dit, les entrepreneurs et la Com
pagnie se trouvaient quittes là-dessus, et personne n’eut pu
penser, en lisant ce traité, que les entrepreneurs y trouveraient
un prétexte de faire prendre à la Compagnie tous les noirs
qu’ils n’auraient pas pu rendre propres au raffinage , quoi
qu’ils ne fussent pas propres aux couleurs. Telle est pourtant
l ’absurdité que le sieur Mossier avait conçue, et avec laquelle
il lui eut été facile de s’enrichir, au détriment de la société ;
car il eut eu intérêt à ne fabriquer que très-peu de noir gros,'
qui ne lui était payé que g fr. o c . , et à faire beaucoup de fin ,
à augmenter les rebuts, q u ’il eût fait payer 20 fr ., précisément
pareequ ’ils n’eussent été bons à rien. C ’est ce q u ’il osa pré
tendre durant un arbitrage, dont nous parlerons plus tard ; et
s’il ne l’ose plus aujourd’h u i, il demande encore qu’on lui paye
tout au même prix , soit le bon , soit le mauvais ; en sorte qu’il
serait de nul intérêt qu’il fournît de bonne ou mauvaise ma
tière ; qu’il serait inutile à la Compagnie d’avoir fait un traité,
de faire une vérification, et de soumettre les produits à l'essai.
Autant vaudrait pour elle , en séparant le bon et le mauvais ,
tout pèsera la fois, sans distinction; expédier lebon, et garder
le mauvais pour en faire du fumier, en payant l’un et l’autre.
5
5
�(' 20 )
Nous ne transcrirons pas ce traité ; mais nous sommes obligés
de relever les clauses essentielles.
Les art. 2,
déterminent plus spécialement les qua
lités du n o ir , la vérification , l'essai, les qualités à fournir.
L ’art. 8 porte que le noir livré sera livré payé chaque mois ;
que s’il reste incomplet, par faute de constructions, il pourra
être fait aux entrepreneurs, sur l’avis du conseil d’administra
tion , telles avances, qui seront évidemment couvertes par la va
leur des noirs aliénés. Nous aurons à appliquer cet article à un
moyen qu’invoque le sieur Mossier, qui s’est plaint du défaut
de construction d’un hangard.
Les art. 9 et 10 doivent fixer l’attention:
« Tous ics engagemens contractés par les entrepreneurs ,
» concernant l’exploitation , leur seront personnels , et rien ne
» pourra être réclamé par des tiers à la Compagnie. »
Pour la garantie du présent bail, ils laisseront en dépôt,
chez M. blanc, quatre actions inaliénables ju sq u ’à fin de bail
cl reddition de compte.
Pourquoi toutes ces précautions ajoutées à la faculté de vé
rifier et d’essayer, si on devait tout prendre sans choix?
Par l ’art. 1 1 , Mossier et Daubrée s’engagent à payer la
ferme du moulin, les contributions de Clermont et Menât;
Par l’art. 12, les gérans leur abandonnent un sixième des
bénéfices de gérance, qui leur étaient passés par la Compagnie,
outre le tiers déjà cédé à Mossier. Ils font donc un sacrifice
personnel pour obtenir l’adjonction du sieur Daubrée.
Par l’art, i/f, on accorde aux entrepreneurs un droit de com
mission sur les ventes.
Trois pour cen t, pour les noirs à raffiner ;
Six pourcent, sur les noirs à couleurs;
On voit que des avantages beaucoup plus grands étaient faits
aux entrepreneurs par ce nouveau traité , et il est évident que
la Compagnie qui aurait pu exiger l’accomplissement des con
ditions beaucoup plus douces, stipulées p a r l e b a i l d e M ossier,
4
5
�( 21 )
ne consentit à en accepter de nouvelles qu’à raison de l’asso
ciation du sieur Daubrée, qui seul, pouvait les exiger; elle
avait donc intérêt à la présence de cet associé ; au moins est-il
évident qu’elle croyait en avoir un fort grand , et qu’elle mettait
plus de prix à sa participation qu’à toutes les promesses’ du
sieur Mossier. Aussi, en trouve-t-on des traces dans l’art. 16,
où, après ^avoir dit que le décès de l ’un des deux entrepre
neurs entraînerait la nullité des traités, on ajoute:
« Si M. Daubrée prédécède, M. Mossier ne pourra continuer
» lentreprise que du consentement des gérans et adminisira» teurs. Le cas arrivant de M. M ossier, Usera loisible à M. Dau» brée de continuer, en s ’adjoignant un de ses frères, ou, àdé» faut, il sera tenu , comme dessus, d’obtenir le consentement
» des gérans et des administrateurs. »
Pourquoi ces précautions absolues à l’égard de Mossier , si
on avait confiance en lui? Serait-ce, comme il l’a dit, par la
seule raison qu’il n’avait pas de frère? Mais alors, pourquoi
annuler un traité suffisant avec lui, et accepter des conditions
plus onéreuses, à raison de l’appel d’un tiers ?
Le sieur Mossier répète ici, page 10, ce qu’il a dit sur la
qualité des noirs , à l’occasion du premier traite ; il le déve
loppe davantage, en disant qu’il n’y avait eu jusque-là aucune
distinction entre le noir gros et le noir fin , que l’un et l’autre
sont propres aux raffineries, et qu’on les a reçus pendant plu
sieurs années. Nous ne répéterons pas ce que nous avons dit ;
et nous observerons seulement que la Compagnie n’a jainâis
refusé de recevoir les noirs propres au raffinage, et qu’elle n ’est
pas obligée à les recevoir autrement*. Nous ne devons pas
omettre de rappeler la délibération du conseil d’administra
tio n , qui approuve ce traité; elle démontrera mieux encore
l’esprit dans lequel il avait été fait.
« Les gérans de la Compagnie de Menât, ayant pensé que
» l'adjonction et. la j>arùcipation d'un Jiornrne expérimenté dans
» le genre d ’affaires que nécessite l’établissement de l ’usine
�■'C: 0
( 22 )
» de M enât, ne pourrait être qu’extrêmement utile à eux ci
» aux actionnaires, se sont mis en rapport avec M. Daubrée,
» ancien raffineur de sucres , chez lequel diverses expériences
» avaient été faites sur la puissance décolorante des noirs, et la
» manière dont ils devaient êtrefabriqués. Il en est résulté le traité
suivant, auquel MM. Besse, Prévost, Bardonnet, Roddeet
» Cournon, ont donné leur approbation, comme membres du
» Conseil d ’administration. »
Ces signatures, en effet , terminent la délibération. Cela ne
laisse aucun doute sur le but et la cause de ce traité, qui n’avait
pour objet que le noir propre à la décoloration ou raffinage.
Après ce traité, le sieur Daubrée fit Un voyage à Lyon pour
tacher de donner du crédit aux noirs à couleurs. Par une lettre
du io avril, il rend compte des objections qu’on lui a faites
et qu’il a vérifiées : Ce noir est trop lourd, on le regarde comme
supérieur pour les peintures à fresque ; mais *il faut employer
quelques moyens chimiques pour lui enlever de son poids; enfin,
il est intimement convaincu qu’on doit réussir en changeant le
mode de fabrication,
Dans une seconde lettre du i avril, il parle des essais qu’il
a faits avec des négocians pour obtenir plus de légèreté ; ils
ont parfaitement réussi ; il ne s'agit plus que de les répéter en
grand pour établir le coût de l'opération. Il va se rendre le plus
tôt possible à Clermont.
Il est donc évident qu’il y avait à améliorer la fabrication
par des moyens chimiques ; qu'il fallait en changer le mode ;
qu’il l’àvait essayé; qu’il allait revenir à Clermont pour cela ;
que , dès lors , il n’était*plus un simple voyageur, comme le
dit M ossicr, mais la cheville ouvrière de la fabrication.
Peu nprès , il fut passé, le i" mai 1829, un traité pour la
vente, avec un sieur Dumont. Il en a été rendu compte aux
pages iü et 11 du Mémoire M ossicr.Dum ont, dit-il, avait in
venté un procédé qui rendait le noir gros préférable au noir
fin ; mais il prenait une partie de noir fin ( un septième). Les
3
�(a3)
gérans se réservaient de prendre le surplus. Donc, dit-il encore,
le noir fin était propre à cet usage ; donc, tous les noirs, indis
tinctement,, devaient être reçus par la Compagnie.
Belle conséquence! Le sieur Mossier n’a-t-il donc pas lu
dans ce traite que si Dumont s’obligeait à prendre un septième
du n o ir, dit noirfin, il ajoutait : à raffinerie, parjaitementpurgé
de la poussière impalpable, propre à la décoloration des sirops P
N ’a-t-il pas compris que si les gérans se réservaient de vendre
le surplus, c’était toujours du noir propre à la décoloration,
et dans l’esprit de leur traité avec Mossier , qui les obligeait
à prendre, à g fr. o cent., les noirs propres à rafinerie? Cela
voulait-il dire : tous les produits, tous les noirs indistinctement ;
soit qu'ils fussent ou non propres au raffinage?
Au reste, remarquons que les gérans vendaient seulement
18 fr. les cent kilogrammes de noir rendus à Paris. On voit que
jusque-Jà les bénéfices n’étaient pas considérables, en dédui
sant d e s i 8 f r ., i° 9 fr. ocent.; 2°les frais de port ; °l'intérêt
de la mise de fonds.
5
5
3
Au reste, un fait se place à cette époque, et n’est'pas du tout
indifférent.
C ’est le lendemain, 2 mai, que Mossier régla son compte
avec le trésorier de la Compagnie, et que le trésorier se trouva
en avance à son égard de 6,600 fr. A cette époque il existait dans
le magasin plus de 800 quintaux métriques de l’espèce de noir
qui fait aujourd’hui l’objet du procès. On le demande: si celte
matière, qui eût été en valeur de 7,600 fr., eût dû être à la
charge de la Compagnie, Mossier se fût-il reconnu débiteur
de 6,600 fr ., sans réclamer qu’on le reçut en payement? Ce
n ’est pas seulement de son silence que nous tirons cet argu
ment , car le même jour il donna une déclaration qu’il a reti
rée depuis, et qui est encore attachée à son dossier ; elle est
ainsi conçue :
« Je déclaré devoir à M. P. Blanc, trésorier de la Coinpa» gnic de Menai, la somme de 6,600 f r ., qu’il m'a avancéc
�.
(
2
4
}
yy sur les livraisons de noir que je dois faire à la Compagnie
» toutes les livraisons faites ju sq u ’à ce jo u r , ayant été réglées et
» payées par le trésorier. »
A u reste, c’est un fait utile à constater, que le 2 mai 1829 ,
les gérans étaient en avance de 6,600 f r ., par suite de la faci
lité que le sieur Blanc avait donnée au sieur Mossier de
prendre des fonds dans sa maison sur sa seule signature. En
rapprochant cette circonstance de l’art. 8 du traité du 7 avril,
où, dans le cas d’insuffisance de construction, les gérans ne
s’obligeaient qu’à des avances de fonds, et encore à condition
qu elles seraient évidemment couvertes par la valeur des noirs
calcinés , on pourra apprécier les diverses déclamations du
sieur Mossier. D ’ailleurs, une assemblée générale, du 8 juin,
approuva tous les actes passés , soit avec D um ont, soit avec
Daubrée et M ossier, et fixa les dépenses faites jusqu’alors à
192,596 fr. On voit que la Compagnie n’avait pas craint de
faire des frais pour son entreprise. O r , une partie notable de
celte somme avait clé employée par le sieur Mossier ; il n’a
vait donc pas été en souffrance, comme il le prétend ; e t ,
d ’ailleurs, il ne s’en était jamais plaint; il n’avait rien réclamé
qu’o n n ’eûtfaitou qu’on ne l’eût autorisé à faire à l’instant même.
Ici se place un acte fort extraordinaire, que les gérans et la
Compagnie ont ignoré long-tem ps, et qu’on avait pris grand
soin de dissimuler. Le sieur Mossier le dissimule encore en
quelque sorte ; il le j elle hors de sa date, et se borne à en
dire un mot à la page i , comme d’un acte indifférent dont il
avait oublié de parler.
Il y avait à peine trois mois que les gérans avaient passé le
traite du 7 avril 1829, qu’ils avaient fait des sacrifices consi
dérables pour obtenir l’association du sieur D aubrée, et sou
obligation de concourir à la fabrication , lorsque les deux en
trepreneurs détruisirent , à part eux, cette convention, qui
était principale pour la Compagnie. Ils le firent par un acte du
16 juillet 1829.
3
�( a5 )
L ’harmonie n’avait pas régné long-temps. Le sieur Mossier,
toujours absolu , toujours entiché de lui-même, voulait, à tout
p rix, faire prévaloir des idées que le sieur Daubrée n’adop
tait pas. Sa prétention à tout diriger pouvait devenir dange
reuse pour le sieur Daubrée. L ’expérience de celui-ci, sa pré
sence , sa participation , étaient fort incommodes au sieur
Mossier, qui ne voulait pas qu’on changeât le mode de fahrica
tion , car il n’y a jamais de bien fait que ce qu’il fait. Aussi, ne
tarda-t-il pas à prétendre que leurs caractères ne pouvaient
sympathiser (c’est ce q u ’il avait dit et prouvé à tout venant) ;
e t , cTailleurs, la manière d ’opérer de M. Daubrée , ses plans ,
ses projets, ne s ’accordent pas avec les miens, disait le sieur
Mossier , s’il faut s ’en rapporter à une copie de lettre qui est
jointe à son dossier, comme ayant été écrite aux gérans, le
28 juin 182g. Il résulterait aussi de cette lettre , que M. Dau
brée proposait de se charger seul de la fabrication, en don
nant une indemnité à Mossier ; que les gérans favorisaient
cette proposition , qui entrait dans les vues de la Compagnie,
puisque croyant ne pouvoir réussir avec Mossier tout seul, elle
avait acheté, par des sacrifices, l’adjonction du sieur Daubrée ;
puisqu’elle regardait avec lui comme convenable de changer le
mode de fabrication ; mais comment faire admettre cette con
cession à la vanité et à l ’entêtement ? Le sieur Mossier préféra
sacrifier ses intérêts à son amour-propre; et sentant bien que,
ni les gérans, ni la Compagnie, ne consentiraient à l’accepter
une troisième fois comme Directeur ou Fabricant unique , il
dégoûta tellement le sieur Daubrée; que celui-ci ayant trouvé
à faire une autre spéculation qui lui souriait davantage , ils
rompirent ensemble toute association. Il f a u t voir encore celte
nouvelle convention.
Le préambule est une précaution oratoire , une simple fic
tion.
Les deux entrepreneurs n'entendent nullement rien changer
aux conditions du traité du 7 avril, en ce qu'elles ont d ’obliga-
4
�( *6 )
lion de leur part envers les gérans, mais prévenir des contestalions dans leurs attributions.
i
Suivent les conditions privées de ces Messieurs :
Toutes les conventions relatives à la fabrication du noir, au
matériel de l’établissement, restent personnelles à M. Mossier,
qui promet renvoyer indemne M. Daubrée de toutes pour
suites intentées , à défaut, par M ossier, de livrer les quantités
de noir demandées , ou des marchandises mal fabriquées. Yoilà
l ’art. i". C ’est ce qu’on appelle ne rien changer aux conven
tions faites à Fégard de la Compagnie, alors qu’elle avait fait
tant de sacrifices pour appeler Daubrée à la fabrication, et ne
pas avoir, comme précédemment, des marchandises mal f a
briquées.
Par l’art. 2 , Daubrée se charge de faire toutes les tournées
pour le compte de la Société : donc, ce n’était pas là l’unique,
ni le principal objet des gérans en l’appelant à Menât. C a r , en
ce cas, il n ’y avait pas besoin d’un nouveau traité pour l’y ré-,
duirc.
Daubrée se réserve, par les articles suivans , l’indemnité
de o
et de irancs, sur les ventes de chaque espèce de noir ;
les droits de commission, accordés par l’art. 14, sauf 2 francs,
qui sont laissés à Mossier; on lui laisse enfin l’avantage de
toutes les autres stipulations du traité du 7 avril, spécialement
la moitié des bénéfices de gérans, qui lui restent en totalité.
Enfin, par l’art. , pour se mettre d’accord avec le préam
bule, on stipule qu’on écrira aux gérans une lettre qui n’a
jamais été écrite, et qu i, vraisemblablement, ne devait pas
l ’être.
,25
3
8
On voit que chacun fit sa part sans s’inquiéter des intérêts
de la Compagnie. La répartition des bénéfices lui eût été fort
indifférente, si le sieur Daubrée fut resté chargé de la fabri
cation ; mais il l’abandonna immédiatement. Le sieur Mossier
sc débarrassa d ’un homme qui l’incommodait, pour lequel il
avait de l’anthipathic; et le sieur Daubrée porta son industrie
�*7
, (
)'
dans la nouvelle fabrique de sucre de la plaine de la Vaure i
sauf à laisser la Compagnie et la fabrication du noir embarras
sées de la présence du sieur Mossier , livré à lui-m êm e et à
l ’orgueil insupportablè de ses prétentions.
Le sieur Dumont avait fait des demandes de noir assez
fortes ; les gérans l’annoncèrent aux entrepreneurs par lettre
du août. Ne s’occupant que des noirs à clarifier, seul et pri
mitif objet de la spéculation, ils leur demandent de fournir
une quantité déterminée de noir à clarifier. Tout est à remar
quer dans cette lettre , d’ailleurs fort courte.
Elle est écrite à MM. Mossier et Daubree: « Conformément.
» à Fart. de notre traité du 7 avril dernier, nous avons l’hon» neur de v o u s prévenir que nous avons besoin de 80,000 kilo» grammes, chaque mois, de noir propre à la décoloration des
» sucres, dont la grosseur ne devra pas excéder la toile n° o ,
» ni dépasser, pour la finesse, la toile n° 100, c’est-à-dire,
» conforme à l'échantillon cacheté avec M . D um ont, et dont
» vous avez connaissance. Veuillez prendre vos mesures........
»> Nous vous prions ne nous accuser réception de la pré» sente. »
*
Ainsi on s’adressait, comme on en avait le droit, à M M . Mos
sier et Daubree.
A in si, ces Messieurs connaissaient la convention faite avcc
Dumont.
A in s i, il avait été déposé un échantillon de n o ir , qui ne'
devait pas excéder la toile n° o , ni dépasser celle n° 100 ;
et ils le connaissaient , et cela était conforme au traité du
7 avril.
Ainsi, ce noir était celui qu’on avait admis comme propre à
la décoloration des sucres.
Voilà des faits conslans, posés par cette lettre. Ont-ils été
contestés ? Jamais. Le sieur Mossier ne l’eût pas osé. Ils
étaient vrais , positifs. Il crut être quille en ne faisant pas de
réponse.
■
'
3
3
3
3
4<
�( 28 y, ''
«Une lettre de rappel lu i'fu t écrite lé 8 octobre; elle est
courte et expressive :
« Nous vous confirmons notre lettre du
août dernier, qui
» est restée sans réponse, malgré notre invitation de nous en
» accuser réception.
' » Nous vous prions , pour le bon ordre, de vouloir bien ré» parer cette omission. »
' On voit que les gérans ne demandaient cela que pour le bon
ordre dans’üne opération commerciale. Ils ne mettaient pas.
en doute que les entrepreneurs ne se fussent mis en mesure
de fournir , alors , surtout, qu’ils n’avaient rien dit ni écrit de
contraire.
n
Voyons la réponse; elle a bien son mérite :
3
i a Octobre. _
3
« J ’ai l’honneur de répondre à votre lettre du août......;
» que je suis en mesure de fournir et même de dépasser la
» quantité de noir qui m ’est demandée, pourvu que la Com» pagnie, de son côté, et aux termes de l’art. i de notre con» vention , qui l’oblige à faire toutes les constructions néces» saires à la fabrication du noir, me mette en possession d ’un
» hangard indispensable pour abriter le schiste, le noir et les
» ouvriers. Le retard de cette construction est le seul obstacle
» à l’exécution actuelle de votre demande. »
A in s i, il ne se plaint pas de ce qu’on écrit ¿Daubrée comme
à lui ; il n’avertit pas qu’ il est resté seul chargé de la fabrica
tion ; il était convenu qu’il écrirait une lettre; une occasion
se présente où il ne pouvait pas garder le silence sans une
coupable dissimulation, et il ne la saisit pas. La convention
qu’une lettre serait écrite était donc aussi une fiction.
Il ne désavoue pas connaître la convention de Duinont, l'é
chantillon déposé; il ne se plaint pas de la qualité du noir de
mandée ; il ne nie p a s , enfin, que cette commande ne soit con
forme au trailé.du 7 avril ; au contraire , il y consent, il est en
mesure de fournir et même de dépasser la quantité demandée.
3
�( 29 )
'E n f in , tout en représentant à la Compagnie qu’elle doit
faire toutes les constructions nécessaires à la fabrication , il ne
réclame qu’une seule chose, un hangard.... . qui encore n’est
nécessaire que pour abriter. C’est là le seul obstacle , dit-il, à
l ’exécution actuelle de la demande.
Tout cela est fort clair, et n’a pas besoin d’autres comment
tàires.
-L e même jour, 12 octobre , les gérans faisaient signifier à
Mossier une sommation de fournir la quantité de noir demandé,
déclarant qu’ils le font pour établir leurs diligences aux yeux
du sieur Dumont et des actionnaires.
Nous avons dû placer immédiatement, tout ce qui était re
latif à la lettre du août, pour ne pas rompre l’harmonie des
faits. Nous devons revenir maintenant sur un acte intermé
diaire , qui se lie aux faits ultérieurs, et qui est, dans la cause,
de la plus haute importance.
L ’association du sieur Daubrée à la fabrication, semblait
accroître et assurer les espérances. Le sieur Dumont crut pou
voir s’approprier cette spéculation par un acte d’une autre
nature ; et les gérans, en accédant à la demande qu’il en f i t ,
et en acceptant une somme fix e , par année , déchargée de
toute chance, crurent avoir mené à bien cette entreprise,
qu’ils avaient considérée , des le principe , comme sûre et
d ’une facile exécution.
Le 8 septembre , ils passèrent un bail au profit du sieur
Dumont; nous sommes obligés de nous réduire à l’analiscr ;
nous le ferons avec exactitude ; mais cela est nécessaire, puisque
le sieur Mossicr s’en est à peine occupé. Il faut en bien saisir
les clauses et le caractère, soit entre les parties qui l’ont con
senti, soit à l’égard de Mossier, qui l’a accepté plus tard.
Les gérans afferment au sieur Dumont, pour quinze années,
l’entier établissement, le moulin de Clermont, et le privilège
exclusif des‘brevets obtenus par M. Bergounhoux pour la car
bonisation du schiste, et son application à la décoloration des
3
�( 5° )
sucres et sirops. On voit que la Compagnie ne s’occupe tou*
jours que de cet objet p rin cipal, et qu’elle ne regarde pas
l ’application aux couleurs, comme chose obligée, ni sur la
quelle elle compte.
« M. Dumont déclare avoir parfaite connaissance : i° de
» l ’acte de société ; 2° Des conventions verbales, faites avec
31 Mossier et Daubrée; 3° De celles faites pour le transport, avec
» Thomas Yeysset; il se substitue au lieu et place de la Com» pagnie de Menât, tant envers le gouvernem ent, qu’envers
» MM. Mossier et Daubrée, et M. Thomas Y eysset, avec les—
» quels la Compagnie a déjà traité. »
A près l’expiration des arrangemens pris avec Mossier et
Daubrée , Dumont continuera les engagemens de ces derniers
vis-à-vis la société.
L ’art. 4 fixe les quantités de noir que Dumont pourra faire
fabriquer, et stipule un supplément de p rix, s’il l’excède.
L ’art. 5 fixe le prix du bail à 12,000 fr. la première année ,
et 24,000 fr. pour chacune des quatorze autres.... sans diminu
tion pour les cas fortuits ou imprévus.
Les constructions sont à la charge de Dumont. Il fournira
un cautionnement de 40,000 fr. en immeubles, et les construc4 ions seront acquises à la Société.
Il pourra céder en tout ou partie , à qui bon lui semblera.
E n fin , l ’acte sera n u l, s’il n’est ratifié par la Compagnie,
d’ici au 3o septembre.
Cet acte, signé à C lcrm ont, par Guillaum on, le 8 septembre,
et à Paris, le ao, par le sieur D um on t, fut soumis, le 24, à l ’as
semblée des actionnaires. II présentait des avantages tellement
positifs, qu’il était impossible de ne pas l’approuver. Avoir un
produit annuel de 24,000 fr. quitte et net, avec décharge complelte de tous soins de fabrication, de toute responsabilité;
laisser en présence, Dumont d’une part, Mossier et Daubrée
de l’autre; rester tout à fait en dehors des périls et des inquié
tudes; n’avoir plus à se mêler de rien , si ce n’est d’assurer le
�( 3i )
payement des 24,000 fr. ; tels étaient les avantages que les gé
rans eurent à présenter à la Compagnie. Sur trente-un action
naires , vingt-huit ont paru à la délibération. Nous avons be
soin de nous y arrêter un peu.
Il est dit, d’abord , qu’il a etc donné lecture du traité conclu,
sauf Fapprobation individuelle de tous les actionnaires, et dont
l ’objet est de substituer M. Dumont à tous les droits de la Com
pagnie , sous des conditions dont on rend compte successive
ment.
« Un membre demande si dans la nouvelle position où les
» gérans se trouvaient placés, l ’acte de société ne serait pas
» susceptible de quelques modifications? » Nous devons re
marquer cette phrase, qui avait trait à l’indemnité accordée
aux gérans, pour les peines qu’ils avaient à se donner. On se
rappelle que cette indemnité, consistant dans une part des
bénéfices, avait été cédée, pour moitié, à Mossier et à Daubrée, par le traité du 7 avril 1829. Il est question de la supr
p rim er, puisque la gérance change tout à fait de nature.
Voyons ce qui se passe :
« M. Blanc a aussitôt "déclaré qu’ils se départaient, pendant
» la durée du bail avec Dum ont, de leur portion, au bénéfice
» des actionnaires. M. Guillaumon a fait instantanément la
» même déclaration ; mais ces messieurs avaient précédemment
» concédé moitié de leurs parts à M , Mossier, qui, de son côté,
» en avait rétrocédé moitié au sieur Daubrée.
Après cette déclaration publique, faite par les gérans sur la
provocation d’un actionnaire, lesieurMossierétait dans l’obli
gation de s’expliquer. En cédant, à lui ou à Daubrée, pour
l ’avantage de la société, la moitié de leurs bénéfices person
nels , les gérans avaient montré du désintéressement elle désir
bien v if de faire prospérer l’entreprise. Mais Daubrée, qui en
avait un q u a rt, d ’après le traité du 7 avril, n’était pas présent ;
c’était donc le cas, ou jamais, pour le sieur Mossier, de dé
clarer que la moitié entière avait passé dans'scs mains, par une
�( 32 •)
convention postérieure au 7 avril ; et de dire s’il entendait,
ou non , y renoncer. Que répondit-il?
« M. Mossier s’est départi de sa portion, se réservant de
» conférer avec M. Daubrée, absent pour le moment, pour
» obtenir son désistement, »
Voilà de la bonne f o i, sans doute. Dirait-on , par hasard ,
que c’était sérieusement qu’il était dit dans l’acte du 16 juillet
qu’on écrirait une lettre aux gérans, pour leur faire connaître
la retraite du sieur Daubrée? N ’est-il pas évident qu’ils n’en
savaient rien , le 24 septem bre, plus de deux mois après, et
que ce jour-là on le leur dissimulait encore? On avait donc
intérêt à le leur laisser ignorer; ils avaient donc intérêt à le
savoir, et cet intérêt naissait de celui qu’ils avaient eu à associer
le sieur Daubrée à \afabrication , et des sacrifices qu’ils avaient
faits pour l’obtenir.
Quoiqu’il en soit, la délibération continue:
« D ’après ces assurances , données par les divers intéressés,
» on a mis aux voix l’approbation ou le rejet du marché conclu.
» Les voix ont été unanimes pour Tadoption. Tous les action
na naires étaient présens en personne ou par procuration , à
» l’exception de MM. B esse, Cavy, Chevarrier et mademoiselle
» Engelvin, qui seront ultérieurement priés d’accéder à la
» présente délibération, ainsi que MM. L ccoq, de Paris , et
»> Fauquc, de Saint-Étienne. » Cette dernière condition a été
remplie par l’adhésion ultérieure des six actionnaires absens.
A in s i, la convention qui substitue Dumont à la Compagnie,
soit à l’égard du gouvernement, soit à Tégard de Mossier et
Daubréey soit enfin envers Thomas Veysset, a été agréée et
acceptée par tous les intéressés.
Le sieur Mossier dit qu’ il ne l’a acceptée que comme ac
tionnaire, et non comme entrepreneur. Cette explication
évasive fera-t-elle fortune? Passe encore, s’il n’avail figuré dans
Ja délibération qup par cette expression générale : Tous les
�:
( 35 1
actionnaires ont adopté. Toutefois, il lui serait difficile , dans
les circonstances, de scinder son acceptation , à moins qu’il
veuille nous donner la parodie d’une scène de Molière; mais
n ’y a-t-il que cela? Est-ce que, par hasard, ce n’était pas
comme, entrepreneur, que les gérans lui avaient cédé une part
de leurs benefices personnels? Est-ce que ce n’est pas l’entre
preneur qui a pris la parole pour dire qu’il se départait de sa,
portion?Serait-ce encore comme actionnaire qu’il se serait ré
servé d’en conférer avec M. Daubrée? Mais Daubrée n’était
même pas actionnaire.
Au reste, il faudrait aller plus loin, pour pouvoir contester
les conséquences de ce fait, il faudrait nier le fait lui-même.
Le sieur Mossier l’a essayé assez publiquement, pour que
nous puissions retracer ici une scène d’audience, qui n’aura
pas sans doute échappé à la mémoire des magistrats.
En plaidant la cause devant la Cour, sur la fin de l’année
dernière, l’avocat des gérans disait que cette acceptation,
signée du sieur Mossier, l ’avait dépouillé de toute action
contre e u x , et qu’il était réduit à agir contre les sieurs Dumont
et Derosne (ce dernier devenu associé de Dumont). Pour dé
tourner l’effet de cette argumentation , le défenseur de Mossier
dit qu’il n’avait pas signé la délibération. On croyait être cer
tain du contraire , et on le soutenait ; on lisait en effet ces mots
parmi les autres signatures.
Mossier, tant pour lui que pour M. Breschet.
M. Brcsclict est le beau-père du sieur M ossier,'et action
naire comme lui. A in s i, ces mots: Pour lui, signifiaient que la
signature était celle du sieur Mossier, qui avait signé pour soi
et pour son beau-père.
On nous apprit alors que cettesignature était celle de la dame
Mossier, qui avait, toutefois, bien évidemment signé et parlé au
nom de son mari. II fallut bien le croire; c a r, lorsque nous pro
duisîmes des lettres, quittancesot effets, pour justifier quec’était
l’écriture de M ossier, on nous fit apercevoir que quelques-unes
�(
3 4
)
......................................................................................................................
'étaient de la main- de la femme, et qu’aussi l’écriture différait
de celle du mari. 11 fallut reconnaître le fait; mais il fut facile
de démontrer que si la signature avait élé donnée à domicile;
il importait très-peu que la fem m e, sans aucune indication
qui pût le faire soupçonner, eût signé pour son m ari, puisque
le mari n’avait ni rétracté son acceptation , ni retiré son con
sentement d’abandonner sa part des bénéfices; que le sieur
Breschct n’avait pas plus que l u i , contesté la sincérité de son
approbation , et q u e , ni l’un , ni l’autre, ne le contestaient au
moment de la plaidoirie. Le sieur Mossier aperçut qu’il se
fourvoyait, et n’insista pas sur ce fait, qui ne pouvait produire
aucun résultat qui lui fût favorable. Aujourd’hui, il se réduit
à parler de sa qualité intentionnelle. Nous n’en disons pas
davantage , et nous reprenons notre narration
Nous omettons pour le moment quelques actes judiciaires,
qui commencèrent, entre les gérans et les entrepreneurs, le
procès qui fut jugé par des arbitres. Nous les reprendrons
plus t ard. Il nous semble plus opportun d ’achever de faire
connaître les faits relatifs au t r a i t e , p a r c e que l’incident d’ar
bitrage s’en détache tout à fait. Ce sera soulager l’attention et la
m ém oire, que de ne pas croiser des faits , dont chacun dépend
de plusieurs actes éloignés les uns des autres.
Comme le traité du 8 septembre ne devait être définitif
qu’après avoir été approuvé par tous'les actionnaires, il fut
délivré, par les membres du conseil d’administration, un cer
tificat ainsi conçu :
« Nous, soussignés, membre du conseil d’administration
» de la Compagnie de M enât, certifions que tous nos cointé/> ressés ont donné leur assentiment aux accords faits pour
» l’espace de quinze années entre les gérans de la Compagnie ,
» d’une p art, et M. Julien D um ont, de Paris, d’autre part ; et
» que la caution de M. Derosnc , pour l’exécution des enga» gemens dudit D um ont, est a gréée, à la charge par le s u s d i t
�»
(
55
)
1
s> de la faire régulariser. À Clermont , e deux de'cembre 182g.
» Signé, Besse, H. Cournon, Prévost. »
Cet acte apprend que le sieur Derosne s’était présenté
pour fournir le cautionnement de 40,000 fr. Il avait, en effet,
dès le 27 septembre, écrit aux gérans pour leur annoncer qu’au
moyen de son association au bail de Dumont, il leur offrait
une hypothèque de 40,000 f r ., qu’il autorisait à prendre sur
ses biens.
Le 2 octobre, les gérans avaient accepté cette proposition.
Enfin , comme la conclusion de cette affaire importante ne
pouvait s’opérer par une simple correspondance , le sieur
Guillaumon, l’un des gérans, prit le parti de se rendre à Paris,
où il s’aboucha avec les sieurs Dumont et Derosne. Eloigné
de toute dissimulation , il parla du procès déjà existant sur la
prétention de Mossier, de faire recevoir comme propres aux
couleurs des noirs qui n’avaient pas cette qualité, et qui pou
vaient n’être considérés que comme des rebuts. Derosne, qui ne
connaissait que Dumont et son traité, et qui voyait pour la
première fois le sieur Guillaumon, conçut quelques inquié
tudes ; il craignit qu’on ne f î t , plus tard, le dépôt d ’un échan
tillon au préjudice de Dumont et lui; et, dans le but unique
de s’en préserver, il demanda à Guillaumon une déclaration
du fait, qui lui fut remise, sans la moindre difficulté. Elle est
conçue en ces termes :
« Je soussigné, gérant de la Compagnie de Menât, certifie
» que l’échantillon de noir fin à couleur, qui devait être dé» posé cacheté, conformément au traité fait entre ladite Com» pagnic cl MM. Daubrée et Mossier, le 7 mai 1829, n’a pas
» encore été déposé, et qu’il n’a été déposé que Véchantillon
» de noir en grain, propre à la décoloration des sirops , et pa» reil à celui cacheté étant entre les mains du sieur Dumont.
» Je déclare, en outre, que la Compagnie n’est pas d’accord
» avec les sieurs Mossier et Daubrée, relativement au noir fin
j> à couleur, qui ne lui a pas paru propre à remplir cette destir
.
5
�( 30 )
» nation, et que cette question est actuellement soumise a des
» arbitres. »
Le sieur Mossier prétend nous faire accroire qu’il compte
beaucoup sur cette p ièce, et qu’il y trouve un moyen saillant ;
c’ est de la jactance. On voit qu’elle renferme seulement la dé
claration d’un fait qui a été avoué dans tous les tem p s, par
toutes les parties, et qui demeure tout à fait sans influence,
comme nous le verrons plus tard. Ne nous écartons pas des
termes de celte déclaration , pour y chercher autre chose que
ce qu’elle dit, et l’appliquer à un objet auquel elle demeure
tout à fait étrangère et reconnaissons qu’il n ’est pas étonnant
q u ’on ne trouve pas dans la main des gérans l’échantillon du
noir propre aux couleurs, puisqu’on n’a pas pu fabriquer
ce noir ni en masse , ni en échantillon.
La négociation de Guiljaumon à Paris, fut d’ailleurs prom p
tement terminée. De concert avec Dum ont, il déposa, dans
l’élude de M* F évrier, notaire, le bail du 8 septembre, et le
certificat du Conseil d’Administralion. Le sieur Derosne in
tervint pour fournir son hypothèque, et tout fut irrévocable
ment consommé quant au bail de Dumont. Il fut , avec De
rosne , mis en possession de tout le matériel ; et cet acte , après
avoir etc approuvé par tous les intéressés, fut exécuté par la
Compagnie, par les Entrepreneurs ; et, enfin , par Dumont et
Derosne. Nous ferons connaître les faits d’une exécution vo
lontaire et continue, émanés de toutes les parties; mais il ne
faut pas laisser aussi loin derrière nous ceux qui sont relatifs
à la contestation qui eut lieu devant les arbitres, et qui, d’ail
leurs , se lient avec les faits d’exécution.
I c i , le sieur Mossicr veut imputer au sieur B lan c, une sorte
de mauvaise f o i , pour avoir réclame personnellement le rem
boursement des G,600 fr. d’avances par lui faites, d’après l’ar
rêté du 2 mai 18x9, tandis que la Compagnie en avait fait
compte au sieur Blanc, comme gérant. II faut expliquer ce
�( 57 )
fait : Le sieur,Blanc ayant fait cette avance, sans approbation
et contre le désir exprimé par les actionnaires , par. conse'quent avec ses deniers personnels , en avait réclamé la répé
tition contre Mossier. Celui-ci objecta qu’il ne la devait qu’à
la Société, qui en avait fait compte à la caisse du sieur Blanc.
Certain de n’en avoir rien reçu , le sieur Blanc persista. Le tri
bunal de commerce, sans désemparer, ^envoya chercher le re
gistre des délibérations de la Compagnie , qui était déposé
chez le Secrétaire,: il se trouva q u e , par un renvoi mis après
coup, et hors la présence du sicuç Blanc, en marge de la dé
libération du 8 juin , la Compagnie avait compris cette avance
dans le règlement, sans cependant qu’elle y soit nominative
ment désignée. Le sieur Blanc l’ignorait; il n’avait rien reçu. Le
iribunal de commerce crut alors devoir renvoyer la décision
aux comptes à faire avec la Compagnie. Le sieur Blanc n’était
pas moins créancier fort légitime de cette somme de 6,600 fiNous avons vu, ci-dessus, que le 12 octobre 1829 , les gé
rans avaient fait à Mossier une sommation de fournir la quan
tité de noir demandé par Dumont. Le 14 du même m o is,
Mossier leur donna une assignation tendante à nomination
d ’arbitres, pour statuer, soit sur la mise en demeure , résul
tante de l’acte du 12, soit sur les suites du défaut de construc
tion d’un hangard. Les arbitres furent nommés , et devant eux
s’élevèrent des difficultés plus considérables. Le sieur. Mossier
prétendit que les gérans devaient accepter indistinctement
tout le noir fin provenu de la fabrication.
Nous avons besoin d’éclairer à fonds cette partie des faits
de la cause , pour détruire une allégation qui est la cheville
ouvrière du sieur Mossier. Il prétend, page i et suivantes,
que jusqu'au 1" septembre .1829, les gérans d’abord, et Du,inont ensuite , « qui s'était chargé de tout prendre jusqu'à ccttp
» ép o que, n’élcvaicnt pas de difficulté sur les noirs. Ils les
» recevaient tous , principalement conifnc propres a la raffine» rie ; mais en partie, aussi, comme propre aux couleurs, car les
4
�( 3« )
'» plus fins, notamment ceux qui étaient en poudre impalpabie}
» pouvaient servir à cet usage. »
« Mais, continue-t-il, au i cr septembre, Dumont ne dut plus
recevoir qu’un septième de noir fin, et les gérans ne retirant
pas le surplus qu’ils s'étaient cependant réservé de vendre, il se
form a un germe de discussion. Alors furent signifies les actes
des 12 et 14 octobre, et le procès commença. » N ’oublions pas
cela. Pas de grief au sujet des noirs fins fabriqués avant le
i " septembre ; mais, depuis cette époque, on n’a plus voulu
les recevoir comme par le passé, et ils se sont amoncelés.
Voilà le point de départ du sieur M ossier, qui consiste,
après t o u t , dans une allégation tellement vagu e, qu’il est im
possible d’y saisir un fait précis.
En la prenant telle qu’elle est, on pourrait demander au
sieur Mossier quel jour les gérans ou Dumont ont r e ç u , en
partie, des noirs comme propres aux couleurs ; en quelle quan
tité ils les ont reçus; comment ils les ont vérifiés, essayés; s’ils
les ont payes, 20 fr. depuis le traité du 7 avril, ou seulement 9 fr.
o cent., ou seulement 2 fr., en les considérant comme engrais?
Nous demanderions comment il a fait passer de la poudre im
palpable, alors que, pour le noir à couleurs, elle n’aurait pas été
complètement triée et séparée de tout autre noir fin ; et que,
comme noir fin à raffinerie, le traité du 1" mai, entre les gé
rans et'Dumont, démontre que pour être de recette , il devait
être parfaitement purgé de la poussière impalpable; or, cela devan t
être vrai, avant comme après , il est de toute impossibilité que
Dumont ait reçu les noirs fins, sans qu’ils eussent les condi
tions prescrites, pas plus avant qu’après le 1" septembre 1829.
Aussi, voyons-nous que le sieur Mossierne présente là-dessus
que des allégations vagues, et qu’il serait plus qu’embarrassé
de préciser.
Mais il y a plus : Celte allégation est de toute inexactitude.
Nous allons le prouver, pièces en m ain, et avec le jugement
arbitral lui-môine.
5
�{, 3° ] .
Rappelons d ’abord que l'échantillon des noirs à raffinerie
avait été déposé, et q u ’il faisait la règle des parties.
Rappelons qu’on n’avait pas pu faire de noir à couleur, car
il ne suffisait pas, pour cela, d’oblenir de la poussière impal
pable, surtout si elle était mélangée , et si la matière, non suf
fisamment dégagée des pyrites , était composée de parties
hétérogènes.
E t comme on ne refusait pas de recevoir ce qui e’tait con
form e à Féchantillon, nous pourrions dès lors demander ou
peut être le principe d’une action, et à quoi pourrait servir
l ’exemple d’un précédent supposé vrai.
Mais n’oublions pas ce que nous venons de dire. Ce précé
dent n’existait pas. Ouvrons le jugement arbitral: il men
tionne des faits qui sont d’ailleurs établis par les pièces du
p rocès, spécialement l’état des livraisons faites par Mossier à
Dumont depuis le 2 mai 1829; c ’est là certainement ce qui
doit prouver le vrai ou le faux de l’allégation du sieur Mos
sier, sur les réceptions faites par Dum ont, de tous les noirs
indistinctement jusqu’au
septembre 1829, et en quantité
plus grande qu’on ne l’a fait depuis.
L e jugement nous apprend d’abord que Mossier n’invoquait
pas alors ce précédent; il n’y a pensé que depuis le procès
actuel. Il ne produisait l’état des livraisons faites depuis le
2 m a i, que pour en faire entrer le prix dans son compte. On
rappelle qu’il y avait eu règlement le i w mai. O r , le jugement
les fixe comme il suit :
Noir à raffinerie,
5 ,654 k.
Depuis le 14 mai............................... o
Du 2 au 1 4 ........................................
7,861
i
5X5 ^¡1,
^
Noir à couleurs........................................................
Noir d’en g ra is............................. ’ .........................
4
2®9
2 2
T o t a l .............................^9,046.
�( 4o )
On voit que la proportion est bien moindre q u ’un septième;
et, qu’en som m e, la livraison , qui devait être de
,ooo kilo
grammes par mois, était réduite à c),o kilogrammes pour
cinq mois et plus ; et le sieur Mossier ne s’en plaint pas ; donc,
il n’est pas vrai, comme il le prétend aujourd’hui, qu’avant le
i cr septembre, on eût pris tous ses.noirs indistinctement ; ou
si on avait tout pris, on avait reçu en noirs fins, qu’il disait à
couleurs, beaucoup moitié d’un septième, et il n’y avait pas
feu de diminution de recette au i cr septembre.
A u reste , le sieiir' Mossier n’ayant livré que g,o
kilo
grammes de noirs, du 2 mai au i cr septembre, n’avait pas tout
livré ; il était resté dànfc les magasins une quantité assez con
sidérable de ces noirs fins, quoiqu’il en eût vendu beaucoup
pour engrais à pleins tombereaux. Quoiqu’il en dise aujour
d ’hui, c’était cet approvisionnement que, devant les abilres, il
voulait forcer la Compagnie à recevoir pour du noir à couleur.
On ne peut donc pas trouver, dans les faits antérieurs au juge
ment arbitral un précédent qui serait, d ’ailleurs , complète
ment inutile; voyons si le jugement arbitral peut en établir
un autre, qui serve de pre'jugé pour la prétention actuelle du
sieur Mossier.
5 46
35
5 /(.6
Avant d’examiner cc point par l’exposé des faits qui le con
cernent , relevons encore un fragment de cette décision.
Le prétexte du procès alors intenté était pris du défaut
de construction d’un hangard ; le sieur Mossier demandait
20,000 fr. de dommages-intérêts pour cela et pour le refus des
noirs en contestation.
Les arbitres disent:
.
.
« Que les parties sont.censées js’cfrp réciproquement satis» faites de l’exécution donnée aux conventions du 7 ‘ avril,
» dès qu elles ne se sont pas adressées des demandes d’exécuj> tion plus strictes;
» Que les gérans se sont mis en mesure de faire construire
* des hangards, dès Tinstant que le sieur Mossier les a réclamés. »
�(40
E t ils rejettent cette demande.
En effet, immédiatement après l’acte du 14 octobre t le
liangard avait été construit par Dumont et Derosne, à la charge
de qui étaient toutes les constructions.
En ce qui concerne les noirs en magasin, amoncelés, dit'
Mossier , par le refus de Dumont de les recevoir, depuis le
i er septembre, le jugement arbitral nous apprend qu’il n’en
avait formé la demande qu’après l’acceptation du compromis
par les arbitres, et seulement par acte du n novembre.
»
»
»
»
»
« Que , le lendemain, les gérans leur présentèrent une requête, dans laquelle , croyant qu’il s ’agissait, dans la sommalion d elà veille, de noirs propres à la décoloration des sucres,
ils demandaient qu’il fût ordonné une expérience pour reconnaître si ces marchandises étaient, ou non, propres à la
décoloration des sirops. »
A insi, on voit que les gérans offraient de recevoir tout ce
qui serait noir propre à raffiner, suivant les termes de la con
vention, et qu’ils ne songeaient pas au noir à couleur, parce
que , après une foule d ’essais , d’envois sur tous les points , et
de pertes considérables, il était avéré qu’on n’avait pas pu
l ’obtenir, et qu’on y avait renoncé.
Mais, comme le sieur Mossier n’avait pas l’espérance de
faire passer pour noir à raffiner tous les déchets qui n’étaient
pas conformes à l’échantillon déposé, et que d’ailleurs il y avait
beaucoup plus de profit à les faire passer comme noirs à cou
leurs , alors qu’on devait les payer 20 fr., et qu’il n’y avait pas
d ’échantillon pour les comparer, il demanda qu’il fussent reçus
comme noirs à couleurs.
Nous l’avons déjà dit , s’ils étaient propres aux couleurs, il
fallait les accepter comme tels.
S’ils ne l’étaient pas, il fallait rejeter la demande, car ils
n’étaient ni recevables ni offerts comme noirs à raffinerie.
Il est donc évident que si les choses fussent restées dans cet
6
�( 42 )
état, les arbitres ne pouvaient pas condamner la Compagnie à
les p rendre, ni sous l’un , ni sous l’autre rapport.
C ’est cependant ce qu’ils ont la it, comme on le voit à la
page 16 du Mémoire Mossier. Quelque fait spécial, non encore
connu, a donc amené ce jugement, ou bien il serait de l’espèce
de ceux dont on dit quelquefois qu’ils sont bons pour ceux
qui les ont obtenus, ctpourla chose à laquelle ils s ’appliquent.
Examinons bien celui-ci, et ne faisons pas le procès des arbi
tres avant d ’en savoir un peu plus.
Ils commencent par dire que les parties se méprennent sur
les qualités des noirs, l ’un les offrant comme noirs à couleur,’
et l ’autre demandant qu’il soit vérifié s’ils sont propres à la
décoloration; ils provoquent une réunion et des explications,
puis ils jugent, lis disent que ce noir a été bien calciné et blutté.
Ils reconnaissent qu ’il ne peut pas être reçu comme noir
à couleur.
E t ils ajoutent, que dans le doute de Vemploi au<\x\c\ il pourra
être destiné, et à défaut d 1échantillon qui puisse serçir de base
f ix e , il est de justice, en attribuant le noir à la Compagnie, de
le lui faire payer au plus bas prix.
En sorte qu e, ne le recevant pas comme noir à couleur ; ne
pouvant pas dire qu’il est recevable comme noir à raffiner,
puisqu’il n’était pas conforme à l'échantillon , ils l’adjugent à
la Compagnie , dans le doute de son emploi.
Ne voit-on pas clairement que cette décision fut le produit
naturel de la réunion que les arbitres avaient p rovoqu ée, et
des explications qu’elle produisit? disons tout ce qui se passa.
Pour être mieux instruits des détails relatifs à cette question}
les arbitres avaient appelé le sieur Daubrée; celui-ci était peu
intéresse à la question; car, quoiqu’en dise M ossier, ces noirs
dataient, au moins en partie, d’une époque antérieure au
traité du 7 avril.
Le sieur Daubrée, interrogé par les arbitres sur le point de
savoir s’ils étaient propres aux couleurs, répondit que non,
�au moins en les prenant tels qu’ils étaient ; mais qu’ils pour
raient le devenir avec d’autres préparations ; que dans l’état
actuel ils pouvaient se mélanger utilement avec le noir animal.
Pour prouver qu’il en a la conviction, ( très-hasardée pourtant
comme on le verra) , il offrit d’en prendre mille quintaux mé
triques, à 9 fr. Lesgérans consultèrent les administrateurs. La
majorité décida que la différence du prix n’étant que de o c.
par quintal métrique, ce n’était pas la peine de soutenir plus
long-temps le procès. Ils donnèrent un consentement tacite ,
et voilà comment fut rendue cette décision, qui serait si sinr
gulière, cette circonstance à part.
L e sieur Daubrée est en cause ; il plaide contre les gérans ,'
qui réclamaient et ont obtenu contre lui des dommages-intérêts.
Or , les gérans ne redoutent pas qu’il les démente sur ce
point. Il a , à son tour, spéculé faussement, et fait en cela un
assez mauvais marché pour ne pas l’avoir oublié. Ces noirs, que
dans l ’origine tout le monde avait regardé comme un véritable
rebut, sont demeurés au Havre, repoussés p arle commerce,
perdus pour le sieur Daubrée, qui n’a pas pu les payer au terme;
et un jugement du tribunal de commerce du 2S février i i ,•>
constate la condamnation qu’ont obtenus les gérans contre lui
à ce sujet.
A in si, point de précédent qu’on puisse invoquer, point de
chose jugée, q u ’on puisse tirer de ce jugement arbitral. La
question qui se présente aujourd’hui, quelle qu’elle soit, sera
toute neuve , et il faudra que le sieur Mossier la soutienne par
les moyens qui lui sont propres , et qu’il cesse de l’envelopper
de toutes ces chimères avec lesquelles il veut essayer de faire
illusion, s’il ne se fait pas illusion à lui-même
Nous voudrions être plus courts, et nous voyons avec peine
que de simples allégations nous mènent aussi loin ; mais il ne
faut qu’un mot pour alléguer un fait, et lorsqu’il n’est pas
exact, il faut expliquer toute la vérité pour s’en défendre.
Nous arrivons à ce qui concerne les actes nombreux d’exé-
5
85
(i.
�( 44 )
cution da bail fait à Dumont et Dcrosne; l ’acceptation que
Mossier et Daubrée en ont faite, et d’où nous tirons la consé
quence que Mossier n’a d’action que contre eux, et non plus
contre la Com pagnie, depuis le bail déposé chez F é v rie r,
notaire.
Avant tout, et pour bien saisir les conséquences de ces faits
d’exécution, rappelons que Dumont avait contracté l’obliga
tion expresse de se substituer à> la Confyagnie de Menât,
i° Envers le gouvernement; 2° Envers les sieurs Daubrée et
Mossier; ° Envers le sieur V eysset, entrepreneur des trans
ports. Ils devaient donc mettre la Compagnie à l’écart, en se
mettant en relation avec ces trois sortes d’intéressés. Rappelons
aussi que ce traité soumis à l’assemblée générale des action
naires , avait été accepté et approuvé par Mossier , soit comme
actionnaire, soit comme entrepreneur. Celte acceptation réa
lisait donc à son égard la stipulation que nous venons de signa
ler, et entraînait la c o n s é q u e n c e q u ’ il devait traiter directement
avec ceux qui s’étaient substitués à la Compagnie, et qu’il venait
d’accepter comme tels. Nous apprécierons maintenant, avec
plus de facilité, les faits ultérieurs d’exécution.
Il y eut d’abord approbation complette, par Dumont et Derosne, du traité du i6 juillet, qui dispensait Daubrée de la
fabrication. Ils firent plus, ils l’établirent leur agent; en sorte
qu’il y eut , par le fait , novation complette de qualités dans
les relations qu’ils ont eu avec la Compagnie. O r , ce change
ment de qualités fut nécessairement opéré par le concours de
Mossier, Daubrée, Dumont et Derosne, qui ont tous procédé
ensemble dans ces qualités nouvelles ; et, à coup s û r , la Com
pagnie ne pourrait pas voir retomber sur elle les actes qui en
sont résultés.
A u ssi, voyons-nous que le bail du 8 septembre est exécuté
entre e u x , sans que les gérans soient appelés ni considérés,
par eux, comme parties nécessaires, et cela par une continuité
d’actcs remarquables.
3
�v *
(45)
C ’est la société Dumont et Derosne, qui fait exécuter les
constructions réclamées par Mossier.
Elle passe seule un traité avec Veysset, entrepreneur des
conduites, et en change les conditions.
C’est elle seule qui reçoit la livraison du noir.
C ’est elle seule qui en paye le prix.
Le 8 décembre 1829 , Mossier reconnaît avoir reçu de Daubrée, pour le compte de Dum ont, 742 fr. 60 cent , en deux
traites sur Paris , pour solde de 8,088 kilogrammes de schiste,
que f a i livrés dans le mois de novembre ; plus, 1,000 f r ., en
une traite sur Paris, à compte sur les livraisons de décembre.
A i n s i , il livrait directement, recevait directement de D u
mont, par les mains Ae Daubrée, son agent, des traites sur
Paris ; et enfin, reconnaissait, en l ’absence de la Compagnie/
et sans réserve , avoir reçu le solde des livraisons de dé
cembre.
5
Le i décembre, reconnaissance de 2,000 fr.; absolument
semblable, sur les livraisons à faire en décembre.
L e mêtne jour, autre de 200 fr.
Le 8 janvier,reffctde 800 fr ., tiré par Mossier, mais écrit et
signé par sa fem m e, sur Daubrée.
Le 26, Derosne lui écrit:
V ous avez été informé par M M . les Gérans de la Compagnie
de M enât, qu’ils avaient cédé cette exploitation à M. Dumont ;
vous avez, été également instruit, par ces Messsieurs etM . Daubrée , que je m’étais associé à M. Dumont.
L ’acte de ma Société a été enregistré au tribunal de com
merce et déposé.
J’ai l’honneur de vous confirmer cette association, et de vous
transmettre la signature sociale.
Voilà bien, de la part de Derosne, l ’exccution à l’égard de
Mossier. Celui-ci a-l-il reculé ? Voyons encore.
Le fe'vrier, lettre de Derosne et Dumont à la maison Blanc;
qui n’est là que comme banquier ; cart sous les rapports de
4
�( 46 )
la gérance , le sieur Blanc devient tout à fait étranger : « Pro» fitant de vos offres de service, nous venons vous prier de
» remettre à M. Daubrée , notre agent, pour l ’opération de
» Menât, la somme de >ooo f r . , destinée à solder à M. Mos» sier une partie de la fabrication.
» Vous voudrez bien demander à M. Daubrée un reçu, qui
'» portera qu’il a reçu de vous cette somme, pour acquitter ,
» en notre nom , les dépenses de l’établissement de Menât.
» Nous attendons de M. Daubrée le compte de fabrication
» du mois de janvier; aussi-tôt que nous l’aurons reçu , nous
» vous prierons de faire, à M. Daubrée, l’avance du montant
» de la somme que nous aurons à solder. »
Ce payement a été fait, car, le 9 février, quittance par Mossier de 3,228 f r ., reçus de Daubrée, pour solde des livraisons
'jailes en décembre etjanvier. E t le compte est tellement exact
pour solde, qu’il est ajouté :
4
P lu s , 20 fr. pour intérêts desdits payémens.
5
L e , Derosne et Dumont tirent, sur Blanc, un effet de
i,o
fr. au profit de Mossier, valeur en compte.
Le 6 mars, quittance de 245 f r . , reçus de Daubrée , pour
solde de 5,98g kilogrammes de noir, livré dans le mois de fé
vrier. Il faut bien remarquer cette époque. Tout ce qui devait
être livré et r e ç u , l’avait donc été avec arrêté pour solde jus
qu’au i ,r mars.
Le 10 mars, un reçu est plus remarquable: il est donné au
sieur Blanc; et au lieu de dire qu'il paye comme gérant et
pour la Com pagnie, on dit qu’il paye pour le compte de
MM. Ch. Derosne et D um ont, de Paris. On reconnaît donc
que les gérans n’y avaient que faire.
A la vérité, ce reçu est signé seulement du sieur Daubrée;
mais cctlc circonstance ne fait qu’ajouter à la force du fait, car
Daubrée a versé dans les mains de Mossier; nous le prouvons.
Derosne était Clcrinont, Mossier lui a v a i t demandé une
nvance, car il faut bien observer que toujours, et dans tous
34
5
�(47
)
les tem ps, les actes du procès constatent, que soit les gérans;
soit, après eux Derosne et Dumont, ont tou jours versé à Mos
sier des sommes qu’il demandait et acceptait comme avances,
tandis qu’il prétend qu’on lui a retenu ses fonds. Sur cette
demande de Mossier , Derosne écrivit à la maison Blanc la
lettre suivante, à la même date, 10 mars:
« Je reçois la visite de M. M ossier, qui m ’expose que se
» trouvant avoir besoin de fonds pour le payement de ses ou» vriers,il désirerait que je le misse à même des’en procurer en
» compte sur la livraison de noir qu’il doit effectuer demain,
» entre les mains de M. Daubrée. Je ne vois aucun inconvénient
» à faire celte avance à M. Mossier , et je viens vous prier de
» lui remettre ,ooo fr. contre la quittance de M . Daubrée , et
» vous voudrez bien créditer le compte social de cette somme,
5
3
» Pour la régularité des choses, je crois devoir signer au nom
» de notre Société.
« Ch. D e r o s n e e t D u m o n t . »
Le sieur Mossier ne désavouera vraisemblablement pas ce fait;
ni son acceptation de ,ooo fr. à lui remis, et qui doivent être
portés dans son compte avec Derosne. Or, qu’en résultc-t-il ?
Ce n ’est pas aux gérans qu’il demande le prix de ses livrai
sons, mais à Derosne. C’est Derosne qui demande à la maison
Blanc ,ooo fr., pour lui faire une avance d’un jour.
C ’est à Mossier qu’on la prie de remettre ces ,ooo fr.
Ce sera à compte de la livraison de noir que Mossier doit
faire le lendemain à Daubrée.
Et voilà ce que Mossier accepte, ce qu’il reçoit des mains
de Blanc, non plus pour les gérans, mais pour le compte de
Derosne et Dumont, à qui seul il l’avait demande.
Le 11 mars, quittance par Mossier de oof. reçus de Daubrée,
à compte sur la toiture du hangard que j 'a i entrepris à Menât.
Ainsi, comme par le passé, c’était lui qui faisait construire,
et on ne lui faisait jamais attendre les fonds nécessaires.
3
3
3
3
�( 48 )
Nous observons, d’ailleurs, pour qu’on sache bien qu’il n’y a
aucune différence à faire entre la signature deMossier et de sa
femme, que la plupart de ces quittances et même des effets sont
écrits et signés par la fem m e, comme s’ils émanaient du mari.
Nous ne finirions p a s, si nous voulions étaler ici tous les
actes d’exécution , et développer leurs conséquences.
Nous passons sans intermédiaire à un acte de beaucoup
postérieur, mais qui est venu consommer l’acceptation de
l ’acte du 8 décembre, et les preuves que lajustice pouvait en
exiger.Nous le montrons immédiatement, par cette cause. Jus
qu’aux dernières audiences de la Cour, il était demeuré in
connu aux gérans, qui n’avaient pas, en effet, grand besoin
de le connaître, puisque, de fait , on les avait mis hors d’in
térêt et laissé tout à fait hors ligne, après le traité du 8 sep
tembre. Pendant les plaidoiries et pour se défendre d’un
moyen qu’opposait le défenseur des gérans, le sieur Breschet,
beau-père de Mossier, sortit ce traité de sa poche en en argu
menta. 11 ne fallait qu’un coup-d’ccil pour en saisir la portée,
alors que le sieur Mossier avait nié son acceptation du bail du
8 septembre 1827; et aussi f u t - i l , dès ce moment , retenu
comme pièce essentielle au procès. La Cour va juger si nous?
nous trompons ; elle y trouvera des aveux qui lui paraîtront
bien étranges à côté du plan de défense du sieur Mossier. Il
porte avec lui, ce nous semble, la confirmation de tout ce que
nous avons dit jusqu’à présent.
Nous croyons devoir continuer de rappeler les points capi-î
ta u x , avant d ’exposer un acte qui s’y rapporte : c’est le inoyen!
de ne pas se méprendre sur les résultats. Rappelons donc
qu’avant de céder le privilège à Dumont, pour le temps de sa
durée , les gérans avaient leur situation fixée à l’égard de Mos
sier et Daubrée, par le traité du 6 avril 1829, et que cette
convention était faite pour toute la durée du privilégç.
.Que, sans la participation de la Com pagnie, Mossier avait
�C 49 )
4
'
rompu son association avec Daubrée, quoique le s gérans eus
sent fait des sacrifices pour l’obtenir.
Et n’oublions pas q u ’après le traité du 8 septembre avec
Derosne, ceu x7 ci avaient approuvé la retraite de Daubrée t
l’avaient pris pour leur agent, et avaient consenti à ce que
Mossier demeurât seul chargé de la .fabrication. Enfin , que
Mossier avait accepté tout cela ; et., qu’après tout, il lui deve
nait , sous ce rapport, beaucoup plus avantageux d’avoir af
faire à Dumont et Derosne qu’aux gérans ; e t , aussi, avait-il
fait, avec eux seuls , tous les actes d exécution de son marché*
O r, le 24 janvier i i, il juge convenable, par une conven
tion particulière avec e u x , de faire de nouvellçs conventions *
et d’annuler complètement celles du 7 avril 1829 , auxquelles
il avait porté secrètement un premier coup par la convention
particulière avec Daubrée. Voyons cet acte; il exigera quelques
explications un peu longues, mais tout y est précis : tout y est
décisif, sur les détails comme sur la question.
- Par l’art. i eI M . Mossier se charge de la fabrication des noirs
de Menât, pour tout le tem p s, jusqu’à l’expiration du brevet
d ’invention, aujourd'hui la propriété de MM. Dèrosne et Dumont,
qui s’y trouvent subrogés par suite de la cession que leur en
a faite la compagnie de Menai.
1
Le prix est fixé à 10 fr. 28 cent, par 100 kilogrammes, pour
les 45o,ooo kilogrammes qui seront les premiers livrés pendant
Je cours de chaque année; et à 10 fr. pour l'excédant.
On ne parle pas encore de noirs à raffiner, ni de noirs à
couleurs; mais on va voir quel cas on fait du noir fin, que Mossicr a voulu forcer à prendre, d’abord comme noir à couleur,
et ensuite comme noir à raffiner.:Nous copions:
« Les noirs fin s provenant du bluttage, c ’est-à-dire, qui pasn seront à travers la toile n° 100 , resteront la propriété de
» MM. Derosne et Dumont, qui, s’ils jugentià propos d’en
» faire des expéditions, n’auronl à rembourser à M. Mossier,
» que scs frais d’emballage et de transport. »
83
�'i "
'
•
5
( o)
II y a une explication toute entière clans ce paragraphe.
»
On voit que les noirs fins , provenant du blultage, sont ceux
qui passent à travers la toile n* 100. Or, ce sont les résidus du
bluttage, que les arbitres ont déclaré parfaitement bien bluttes.
On voit que cette fixation, au-dessus du n® 100 , adoptée
par le traité de Dumont, du i er mai 182g , était la seule qu’on
pût adopter ; comme de fait, elle avait toujours été exécutée
d ’après l’échantillon déposé suivant le traité du 7 avril.
'
On voit enfin, que si on pouvait essayer encore d’en faire
des expéditions , ce serait sans aucun espoir actuel d’en tirer
du profit ; et, qu’aussi, Mossier convient de les livrer comme
des déchefs sans aucun prix.
Mossier avait encore fait des calculs, et il les montrait comme
moyen d’une spéculation grande et avantageuse.
'
« I l se prêtera,dit-on, à toutes modifications.... dans le mode
» de fabrication, dont le coût ou revient se trouve consigné
» dans un état annexé aux présentes, et certifié par lui ; lequel
» état a servi de base aux prix ci-dessus fixés. » II est dit en
suite, q u e s’il e n r é s u l t e é c o n o m i e , e l le p r o f i t e r a à M M.Derosne et D u m o n t, mais de manière à ce qu’il obtienne tou
jours 1 fr. o cent, de bénéfice par kilogramme sur les
o,ooo
premiers livrés, et 1 fr. 20 cent, sur les autres. A in s i, n’y eûtil de livré que les 4^0,000 kilogrammes, il aurait une remise
annuelle de 6,750 f r ., ce qui ne serait pas d é j à trop m a l, sans
parler de sa part dans les bénéfices de société. O r, il y aurait
eu certainement b é n é f i c e p a r la fidèle e x é c u t i o n de ce traité,'
et de ceux qui l’avaient précédé. Poursuivons.
Après avoir parlé du dépôt de trois échantillons pareils de
noirs à raffinerie, on ajoute :
« S i , par suite, MM. Derosne et Dumont venaient à utiliser
» les noirs fins, il en serait également fait trois échantillons
» pour servir de type. »
Preuve évidente, fournie par le sieur Mossier, que jusqueslà les noirs fins n’avaient pas été utilisés.
5
45
�( 5i )
Preuve évidente que l’échantillon ne devait être déposé?
dans tous les temps possibles , que lorsqu’on aurait obtenu ;
par la fabrication, le moyen de le faire et d’utiliser le noir fin.
Cela seul repond a beaucoup d’argumens du Mémoire du
sieur Mossier.
Les art. et suivans , jusques et compris le 12', répètent
avec quelques changemens , les conventions de l ’acte du
7 avril 182g.
L ’art. 12 stipule la résolution pour toute infraction essen
tielle, et la faculté à Dumont et Derosne, de placer un agent à la
tête de Fentreprise, tout cela bien entendu, sans s’inquiéter des
droits de la Compagnie, q u ’on ne reconnaissait plus, et à la
quelle on n’avait plus eu affaire pour l’exploitation, depuis le
traité avec Dumont, du 8 septembre 182g.
Aussi, l’art. i ajoute:
« Les présentes régleront désormais les rapports de MM. Dau» bree et Dumont avec M. Mossier , sans aucun égard au traité
» passé avec MM. Daubrée et Mossier, et la Compagnie, le
» 70(77’/ 182g; lequel, en ce qui concerne MM. Derosne,
» Dumont et Mossier, demeure, à partir de ce jour, pleine» ment anéanti. »
On le demande, si Mossier n’eût pas accepté la substitution
de Dumont et Derosne, depuis le traité du 8 septembre 182g,
pour le compte de Derosne et Dumont', s ’il n’eût pas fait la ré
ception de toutes les sommes qui lui ont été payées par le
sieur B lan c, depuis le traité du 8 septembre, et qu’il eût voulu
exécuter son traité, vis-à-vis la Compagnie, eût-il pu faire
un acte de cette nature ? et lorsqu’il a dit que le traité du 7 avril
182g était annulé, seulement à partir de ce jo u r , n’est-ce pas
parce que, jusques-là, il l’avait exécuté (tant bien que m a l , il
est vrai), d ’a b o r d avec les gérans, puis avec Derosne et Dumont?
N ’cst-il pas évident, en effet, q u e , depuis le 8 décembre,
l ’exécution avait eu lieu directement et exclusivement avec ces
derniers? Cet acte n’est doric que la consommation de celte ac-
4
4
7-
�( ?a )
çeptation, sa réalisation par écrit, alors que, des le principe,
/ elle avait existe pleinement par la mutation des personnes, et
le changement des qualités.
Après avoir présenté ensemble tout ce qui est relatif à ces
faits d’exécution et d’acceptation de la cession du septembre,
il faut revenir sur nos pas , et faire connaître la demande qui
a commencé le procès. Une première sommation fut faite le
24 mars i o, c’est-à-dire, peu de jours après le dernier paye
ment du 10 mars, sur la livraison à faire , le lendemain, àu sieur
Daubrée. Nous ne perdrons pas de vue que les livraisons anté
rieures avaient été réglées le six du même mois, jusques et
compris le mois de février, au moyen d’une quittance pour
so ld e, donnée sans la moindre réserve.
>
Par cette sommation , Mossier expose ce qui résulte des con
ventions passées entre la compagnie et le requérant, en qua
lité d'entrepreneur de la fabrication des noirs..... I l parait, ditil, que la Compagnie a fait des conventions avec Dumont et
Derosne, qui les autorisaient à r é c l a m e r la livraison des noirs ;...
que plusieurs livraisons ont été effectuées ; mais que depuis
peu de jo u rs, ces messieurs ont élevé la prétention de ne re
cevoir qu’une partie des noirs fabriqués, annonçant hautement
qu’ils n’étaient pas tenus de recevoir indistinctement tous les
produits.
Assurément, tout n’est pas franchise dans cet exposé, sur
tout dans ces mois : Il parait, si singulièrement dubitatifs ;
mais il est bon de remarquer que ce n ’est que depuis peu de
jours , qu’il a à se plaindre , et que sa plainte porte sur ce que
Derosne ne veut plus rcccxoiv indistinctement lous les produits,
fut-ce les rebuts.
Il ajoute qu’il n’a lait aucune convention avec Dumont et
Derosne , qu’il n’entend point nuire à scs conditions avec les
gérans, et il leur fait sommation de déclarer : « S’ils consen» tent qu’il divise les produits de la fabrication , a u q u e l cas ils
» seront tenus de retirer et p a y e r, dans les vingl-quatrc
8
83
�53
( (
-y.
» heures, la totalité des noirs qui sont en magasin. » Il faut con
venir que l'approvisionnement ne pouvait pas être considéra
ble, s’il ne datait que du 10 mars. Toutefois , Mossicr déclare,
qu’il persiste à refuser toutes livraisons à Durnont et Derosne.
Pourquoi donc cette volonté nouvelle, après avoir livré exacte
ment jusques et compris Iô 11 mars ? Nous ne transcrirons pas la
réponse des gérans, nous dirons seulement qu’ils déclarent
n ’avoir aucune explication à donner à Mo ssicr, agissant indi
viduellement , la société ayant traité avec lui et Daubrée ; qu’au
surplus, M. Dumont lui a été subrogé, etc.... Ils rappellent
l ’acte de cession du 8 septembre, l’approhalion de Mossicr ,
du 24 septembre , et l’exécution que Mossier lui a donnée , en
faisant des livraisons et recevant des payemens. Il protestent
de leurs dommages.
Le sieur Mossier, page 19, veut référer cette sommation à
une lettre de Derosrie, du 26 janvier i o, laquelle aurait été
provoquée par la déclaration de Guillaumon , au sujet de la
non-existence de l’échantillon du noir fin. Il rend compte de
cette lettre , qui démontre, suivant lui: i° que le noir fin pou
vait servir à un double usage, aux couleurs comme à la raffi
nerie ; 20 que Derosne et Durnont avaient déjà reçu beaucoup
de noir fin. II nous suffira d’ajouter ce qui .manque de cette
lettre , pour qu?on puisse juger de la justesse des argumens du
sieur Mossier.
Remarquons qu’elle était écrite par Derosne , immédiate
ment après la consommation de son traité avec la Compagnie ,
mais bien après celui du i ermaii829, qui fixait la qualité du noir
àraffinerie, conformément à l’échantillon. O r,iId ità Mossicr:
« Comme vôtre traité avec la Compagnie parle d’un autre
» échantillon qui doit être propre à la fabrication des couleurs,
» nous désirons que vous fassiez le dépôt de cet éclianhllon , afin
»> que nous puissions nous assurer de sa qualité auprès des
» marchands de couleurs, et que nous arrêtions ensemble dé» finiüvement quelle devra être la qualité de ce noir. »
83
�54
•(
î
A in si, d’après Derosne lui-m êm e, comme d’après la simple
raison, c’était Mossier, chargé de la fabrication, qui devait
fabriquer et déposer l’échantillon.
Il était toujours temps de le faire , et on ne le refusait pas, on
le lui demandait, au contraire.
Et c’est après avoir répété cette faculté, l ’avoir sommé de
remplir cette obligation, que Derosne ajoute que jusques-là ,
jusques à nouvel ordre, se tenant au sens littéral du traité du
7 avril, il ne prendra que du noir gros grain, conforme à l'échan
tillon déposé. Remarquons bien que Dumont n’invoque pas
pour cela son traité particulier du i 'r m a i, mais bien celui du
7 avril, que Mossier ne pouvait récuser, et que Dumont offrait
d’exécuter. Ainsi, la Compagnie devait demeurer en dehors;
car on ne pouvait lui demander que cela. Elle en avait chargé
Dumont; Mossier l ’avait accepté ; celui-ci se soumettait à l’exé
cuter ; où était donc la question et l’intérêt d’un procès ? Il ne
dépendait que de Mossier de faire prendre du noir fin, en dé
posant l’échantillon. Que ne le faisait-il? La déclaration de
G u i l l a u m o n n ’ y apportait pas d’obstacle ; elle prouvait seule
ment qu’on avait eu trop de confiance au sieur Mossier, en re
connaissant , le 7 avril 1829, que l’échantillon avait été déposé;
tandis qu’il ne l’était p as, et qu’on s’en rapportait à lui pour le
faire. Il ne peut pas aujourd’hui tirer avantage de ce qu’il ne l’a
pas fait, ni se plaindre de ce que Guillaumon l’a reconnu, alors
qu ’il était obligé de l’avouer lui-même. Cette déclaration ne
p o u r r a i t lu i avoir été préjudiciable qu’autant qu’il soutiendrait
avoir déposé l ’ é c h a n t i l l o n , c o m m e le portait son traité; mais
il reconnaît le contraire, il ne peut donc pas exiger, et ne
pouvait pas forcer Derosne à recevoir des noirs non encore
admis par sont traité du 7 avril, puisqu’il n’y avait pas d’échan
tillon de noir fin, ni pour couleur, ni pour clarifier.
Il argumente encore de ce que Derosne lui dit: qui si dans la
suite ils ont besoin de noirf i n , soit pour la fabrication des cou
leurs , soit pour remplacer le noir animal dans les raffineries,
�t 55 )
ce sera Tobjet de nouvelles conventions {p. 20). Au moins fallaitil copier la phrase tout entière. La voici :
« Si par la suite nous croyons devoir vous demander du
» noir fin , soit propre à la fabrication des couleurs, soit pour
» remplacer le noir animal dans les raffineries, le premier
» devra être conforme à \'échantillon que nous avons encore à
» reconnaître y et le second sera l’objet de nouvelles conven» tions entre nous, puisqu'il n ’en est pas question dans le traité
» passé. » A in s i, tout se bornait à dire : Déposez l ’échantillon
du noir à couleur ; jusque-là nous ne recevons rien. Quand au
noir fin à raffiner , nous verrons ; mais il n’en est pas question
dans votre traité avec la Compagnie ; exécutons ce traité. C’est
ce que la Compagnie lui a répété sans cesse, et ce que nous
avons expliqué dans ce Mémoire ; aussi a-t-il invoqué des
exemples et non des conventions. Nous avons démontré que
ces précédens n ’existaient pas.
L e (’i2 avril, autre sommation. Mossier se plaint de ce que
« les magasins qui lui ont été livrés, sont tellement encombrés
' » par les noirs, que la Compagnie a refusé de retirer depuis le
» 24 mars dernier, que ceux provenus de la fabrication jour» nalière ne peuvent pas y être abrités.» II invoque l ’exemple
du jugement arbitral, et déclare qu’il suspendra la fabrication
le 1 , et réserve ses dommages-intérêts pour le tort qu’il en
éprouvera.
L e 14, les gérans dénoncent ces sommations à Daubrce ; et
le 12 , aux sieurs Dumont et Derosne. C ’était la seule marche
qu’ils eussent à tenir; car, subrogés qu’étaient ces derniers
aux obligations de la Compagnie envers Mossier, ils devaient
faire cesser la demande, si Mossier leur offrait des noirs de'
recette , ou prouver qu’ils n’étaient pas obligés de les re
cevoir.
Mais alors, comment les auraient-ils reçus jusqu’au 24 mars,
et comment, cejour-là, était née une difficulté?Si ce fait était
v ra i, et qu’il dût entraîner des conséquences, c ’était b»'1"
5
�( 56 }
affaire dè le supporter, car il était en dehors du traité du
7 avril 1829.
Le
avril, Mossier déclara cesser toute fabrication, et ne
vouloir livrer de noirs que jusqu’à concurrence dé ,000 f r . ,
qu 'il avait reçus cTavance.
Le 17 m a i, Mossier donna une assignation devant le tribu.nal de commerce. C ’est là que commence le procès.
Après avoir dclayé dans son exposé des injures personnelles
,contre les gérans , il les assigne : « pour se voir condamner à
» prendre, retirer et payer la totalité des noirs gisans dans les
» magasins ou dans la cour du moulin de Clermont, confor
m
a mément aux dispositions de la sentence arbitrale du 17 fé» vrier i o; être condamnés par corps en 40,000 francs de
» dommages-intérêts, et oo fr .p a r chaque jo u r de retard, à
» partir de ce jour. »
;
A travers tous les moyens de faire fortune, dont le sieur
Mossier avait pu se bercer, celui-ci aurait été, sans doute, le
meilleur et le plus facile; 40,000 fr. pour commencer, ’puis
• oo fr. par jour! Quelle mine à exploiter, sans autre peine que
celle qu’il aurait fallu prendre pour prolonger un procès!
Toutefois, pourquoi tant de noirs amoncelés dans une cour,
si ce n’était des rebuts? Lui avait-on jamais refusé les fonds
nécessaires pour abriter le noir de recette?. Il n’avait demandé
que deshangards, et la société Derosne l’avait immédiatement
mis en mesure de les faire. Il les avait construits. Lui avait-on
refusé la livraison des noirs conformes à l’éçhanlillon déposé,
et au traité du 7 avril? Jamais. O r, nous répétons sans cesse
que c’est là toute la question.
• Devant le tribunal de commerce, le sieur Mossier répéta les
-mêmes conclusions.
Nous devons ajouter que, par acte du 21 m a i , et ne pou
vant pas se dissimuler sa situation vis-à-visDumont et Derosne,'
il les assigna pour voir déclarer le jugement commun avec
23
3
83
5
eux.
5
�7 V
( 57 )
Les gerans demandèrent que Mossier fût déclaré non recevable, en tant que sa demande élait dirigée contre la Compa
gnie, laquelle serait mise hors d’instance. En cas d’interlocu
toire, ils requéraient des mesures dans l ’intérêt de l’exploita
tion.
Le sieur Daubrée conclut à être mis hors de cause, en pro
duisant le traité par leq u el, dit-il, son association avec Mos
sier , avait été' rompue sans la participation de la Compagnie.
La Compagnie conclut alors à ce que Mossier et Daubrée
fussent tenus de diriger l’exploitation de concert ; et, pour ne
l ’avoir pas fait, condamnés à 4,000 fr. de dommages-intérêtsQuant à Dumont et à Derosne , ils'se retranchèrent dans
l’exécution de leur traité du 8 septem bre, 6t persistèrent à
soutenir qu’ils ne devaient recevoir que le noir conforme à
l ’échantillon déposé; que les noirs fins devaient rester pour
le compte de l ’Entreprcneur ou de la Compagnie, si , par
suite des discussions élevées , l’engagement de la Compagnie
n était pas rempli. Ils conclurent à 20,000 fr. de dommagesintérêts.
Ces dernières conclusions conduisaient tout naturellement
à rechercher si le traité fait avec Dumont, par la Compagnie ,
était ou non conforme à celui du 7 avril, qu’elle avait fait avec
Mossier et Daubrée. S’il l’était, la Compagnie pouvait laisser
le combat entre eux ; o r , nous prouverons qu’ils étaient con
formes.
En cet état, le tribunal renvoya les parties devant un de scs
membres pour tenter une conciliation.
I c i , deux lignes du sieur Mossier exigent encore une ex
plication.
II dit, page 2 1, que « tout était convenu, mais les gérans
» se rétractèrent et la justice dût prononcer. »
Tout était convenu , en effe t, devant lejugc - commis
saire. La Compagnie y faisait en faveur de Derosne et Du
mont , des concessions que lui arrachait la nature de l’en8
�(58)
treprise et la crainte de la détruire ; par conséquent, de tout
p e rd r e , si la mésintelligence continuait. Peut-être e û t -il
été désirable que, dans cet intérêt même , on eût mis de
côté quelques mouvemens d’un juste a m o u r-p ro p re , mé
prisé quelques injures et le ton que le sieur Mossier mettait
à ses exigences; mais on ne peut blâmer la sensibilité d’hommes
Jionnêtes, qui, après avoir éprouvé une injure, n e peuvent
pas se résigner à la p a y e r , si modique que soit la somme
qu’on leur demande. A u surplus, comme il s’agit d’un fait qui
n’est écrit nulle part, le rédacteur de ce Mémoire va laisser
parler les gérans eux-m êm es, en transcrivant une note qu’ils
lui ont remise :
« Le juge-commissaire, magistrat probe et pacifique, avait
?> eu plusieurs entrevues avec M- Derosne ; il se plaignait que
» le prix du bail était trop élevé ; que s’il n’obtenait une di» minution , il prendrait des mesures pour se retirer de cette
» affaire ; qu’alors la Compagnie n’aurait plus d’autre recours
» que contre Dumont, qui est un honnête h o m m e, mais sans
* fortune ; ce motif, et autres moyens que l’on fit valoir , dé» cidèrent la Compagnie d’accepter les conditions suivantes :
« i° Le prix du bail, qui était de 24,000 fr., devait être réduit à
i7,5oo fr. ; 2°L cs sieurs Derosne et Dumont reprenaient à la
» Compagnie, au prix d’achat, le restant des noirs provenant
» du premier arrangement fait avec Mossier ; ° Ils se char» geaient également de celui que le sieur Mossier veut impo« ser à la Compagnie ( nous ignorons à quelles conditions ) ;
» ° Toutes les parties renonçaient à leur demande en indem» nité; ° Chacun devait payer scs frais; (ceux de la Compagnie
» s’élevaient alors à 8 ou g fr., pour deux significations.) »
Telles étaient étaient les bases de cet arrangement, bien ar
rêté et convenu entre toutes les parties, en présence du jugecommissaire.
« L ’on se donna rendez-vous pour le matin, chez M. Jouvet,
» avocat, pour en faire la rédaction ; cettcréunion eut eifec-.
3
4
5
�7»?
( 50 )
25
î> tivemcnf lieu dans la soirée du i[\ au
juillet, où furent
» présens MM. Jo u v e t, M ichel, avocat, Bayle-M oulliard,
» Dessaigne, Derosne, Mossier, Brcchet et les deux Gérans ;
» le traité étant terminé, l’avocat du sieur Mossier prend la
» parole et dit : que sa partie se faisait toute réserve en dom» mages et intérêts envers la Compagnie. Celte demande inat» tendue , qui était contraire à ce qui avait été arrêté chez le
» juge-commissaire, fit croire aux gérans que le sieur Mossier
» cherchait un prétexte pour se rétracter; ils quittèrent l’as» semblée avec humeur;de se voir jouer de la sorte.
» Le lendemain, le sieur Breschet, beau-père du sieur Mos» s i e r , se rendit chez M. Bardonnet, l’un des administra» tcurs , pour l’engager de faire allouer à son gendre, par la
» Com*pagnie , une somme de cinq cents francs , pour payer
» les frais. Cette proposition fut repoussée par tous les action» naires présens à Clerm ont, ne voulant pas sanctionner une
» injustice par une récompense réclamée avec des formes et
5» un caractère injurieux.
» Cependant, M. Derosne partit le lendemain pour Paris.
» Il y arriva précisément au moment des événemens de juil» let , qui ont contribué d’aggraver la posilion des action» naires. L ’un des Gérans , accompagné d’un de MM les Ad» ministrateurs, se rendit, quelques temps après, auprès de
» l u i , pour voir s’il serait possible de terminer sur les derj> nières bases arrêtées, et que le sieur Mossier avait seul
» suspendues; il nous répondit que d’après l’inccrlitudc de la
» guerre ou du maintien de la paix, il ne voulait plus sous» crire aux dernières conventions; qu’en outre, l’on s’occupait
» d’un moyen pour revivifier le noir animal, et que si l ’on
» parvenait à réussir, cette matière éprouverait une si forte
» diminution, qu’il aurait plus d’avanlage , en faisant des sa» crificcs, de demander la résiliation du bail, que de conti» nuer l’exploitation.»
fallut donc se résigner à venir devant le tribunal. Il
11
8.
'
�(. 6 0 ) .
ordonna une expertise, qui devait durer quatre jours, pour
vérifier si les entrepreneurs auraient pu par le passé , et
peuvent présentement, avec les machines fournies par la so
ciété, fabriquer une moindre quantité de noir fin. Le juge
ment porte qu’il est rendu, sans rien préjuger sur lesjins de
non-recevoir , moyens et conclusions des parties, m a is unique
ment dans le but (Téclairer la religion du tribunal.
Ici nous laissons encore les gérans eux-mêmes rapporter ce
qui résulte de celte vérification.
Les experts commencent par rendre compte de leur voyage
à Menât, d’où ils se rendirent, avec M. Mossier , au moulin
appartenant à la Compagnie ; ils trouvèrent dans celte usine
deux ouvriers occupés à travailler; ils remarquèrent, i° que la
manière d’engrainer était mal conçue : l’on appuyé les sacs sur
les trémies, ce qui dérange le moulin ; un ouvrier était assis sur
le tambour, pour faire tomber le schiste avec la main dans
l ’œil de la meule ; il en résulte qu’il est physiquement impos
sible que cet ouvrier puisse résister long-tem ps, et qu’il serait bientôt étouffé par la poussière occasionnée par la chute
et le broiement du schiste ; aussi , en l’absence du maître,
l ’ouvrier doit-il abandonner son poste. Le sieur Mossier répond
qu ’il reconnaît la justesse de ces observations, et que lorsqu’il
quitte pour aller diner, et qu'il revient, il ne retrouve que du fin.
( Le sieur Mossier ne reste pas une heure par semaine au
moulin. )
Les experts indiquent qu’il serait facile de parer à cet in
convénient , avec un frayon qui ne coûte que à G fr. Ils re
marquent que le noir, après avoir été broyé par les meules
tombe dans une caisse, au lieu d’être conduit par un tuyau en
fer bl inc dans une poche, ce qui incommoderait moins les ou
vriers, et permettrait de survcillerlcurtravaü; IesieurMossier
répond qu’il a renoncé à y mettre des poches, parce qu'on les lui
volait. Bonne raison , sans doute , mais que n’en prend-il soin.
Les experts disent au sieur Mossier : Vous devriez opérer
5
�( GI ) .
dans le sens contraire; vous devriez faire moudre le schiste
avant de le calciner; vous auriez économie dans le combus
tible , le travail serait moins pénible, et les frais de transport
moins considérables, pour celui qui est impropre à la clari
fication. Le sieur Mossier répond: « Je le sais, puisque, l année
» passée, nous en avons fa it l'essai avec M. Derosne ; quoique
maintenant il dise le contraire dans son Mémoire, (page 27.)
C ’est une méthode q u ’il n’a jamais voulu mettre en usage, et
qui serait cependant la plus économique.
Le schiste ne se carbonise point sur des grilles de fer, comme
il l’avance encore dans son Mémoire ; mais bien dans des vases
en fonte ou en terre cuite ; dans des creusets. Les experts
ajoutent : qu’ils n’ont pu faire aucune opération avec les fours
destinés à la calcination , attendu que les briques tombaient.
Voilà bien assurément tous les indices d’une fabrication
mauvaise et mal soignée.
Au reste, il fut convenu, pour la commodité de tous, entre
le sieur Mossier et les experts, que l’opération aurait lieu à
C lerm ont, et que le sieur Mossier y ferait conduire une cer
taine quantité de schiste calciné. « Le 8 octobre, continuent
» les experts, nous nous sommes rendus au moulin des Carmes,
» appartenant à la Compagnie; nous y avons trouvé M. Mossier,
» l ’un des entrepreneurs , et M. Chennat, régisseur de la
» Compagnie de Menât, lequel nous a dit : que sans aucune
» approbation ni improbation du jugement rendu par le tri» bunal de commerce de cette ville , le
septembre der» n ie r , m ais, au contraire , sous toutes réserves des droits
» et actions de la Compagnie, il comparaissait uniquement
» tant pour veiller à scs droits contre les sieurs Mossier et
» Daubrée , entrepreneurs , que contre les sieurs Derosne et
» Dumont; il nous a requis de consigner sa déclaration dans
» notre procès verbal. »
Les experts commencent leur opération par former trois
lots des dix-huit boges de noir calciné, pesant :,io o demi kilo-
3
�■
.
(
6
2
1
grammes chacun, que le sieur Mossier avait fait conduire de
Menât : ils les tirent au sort ; le n° tombe au sieur Mossier
il est prie' de commencer le travail, comme il opère ordinai
rement, afin de servir de marche aux experts ; ils observent,
d’abord, que le sieur Mossier fait moudre son schiste sans, au
pre'alable, l’avoir fait trier; son opération terminée, on lui de
mande quels sont les résultats ; il répond que cela est inutile.
A lo rs, les experts trient le leur, le concassent convenablement
en morceaux égaux autant que possible. Ayant remarqué que
les boges contenaient beaucoup de poussière, ils le passent à
travers une grille en fer , maillée ; après l’avoir ainsi préparé ,
ils l’ont fait moudre dans le petit moulin ; ensuite, ils l’ont
mis dans des sacs auxquels ils ont apposé le cachet de M. Gér e s t, l’un d’eux. Le lendemain , les experts ont repris leur
travail. « Nous avons pensé, disent-ils, qu’il vallait mieux faire
» moudre de suite le schiste contenu dans les six sacs, for« mant le dernier l o t , afin d’arriver à des résultats plus posi» tifs, en faisant passer dans les cylindres une plus grande
» quantité de marchandise , et en opérant sur une masse plus
» forte. Nous avons remarqué , en vuidani les six derniers
» sacs, que le schiste n'était pas semblable à celui que nous avions
» fait moudre la veille, et quyil y avait une plus grande quan» tité de noir fin ; nous avons cependant continué notre opé« ration. »
Les experts rendent compte que lorsqu’ils ont voulu faire
repasser le son de la même manière qu’ils avaient fait pour le
schiste entier, le sieur Mossier s ’y est opposé en disant que
ce n’était pas ainsi qu’il opérait lui-même; les experts lui ont
observé que, dès qu’il y avait deux méthodes, il fallait em
ployer la meilleure ; e t , malgré cette opposition , ils ont con
tinué comme ils l’avaient décide.
Cette première épreuve ayant paru insuffisante aux experts,’
pour connaître d’une manière précise le résultat, ils décidèrent
d ’en faire une seconde; mais ils trouvèrent encore de l’oppo-
3
�sition de la part du sieur Mossier, qui prétendait qu’ayant
travaillé le temps indiqué par le tribunal, ils n’étaient plus
en droit de continuer; cependant , après lui avoir observé
qu’ils avaient employé beaucoup de temps à piquer les meules,
les mettre d ’aplomb, trier, casser et passer le schiste, il con
sentit à leur accorder encore le temps nécessaire pour faire
une expérience sur dix quintaux seulement , qu’ils firent
moudre presque en totalité au même instant.
- L e lendemain , g novem bre, à huit heures et demie du ma
tin , ils se rendirent à l’usine de l’établissement, dont les clefs,
disent-ils, restaient chaque soir entre les mains de M. Mossier;
nous açorjf remarqué que toute chose n'était pas dans le même
état que la veille.
« A u moment où nous voulions nous mettre à l’ouvrage, en
» présence de M. Foureau, employé de M. Mossier, et de
» M. Chennat, régisseur de la Compagnie, nous nous aper« çûmes que l’on avait enlevé environ une quarte de schiste ,
» que nous avions laissé la veille, dans la trémie; nous inter» rogeons M. Foureau , et les ouvriers , on nous répond
» que personne n’est monté au moulin, que l’on n’a rien tou» clié. Celte circonstance éveille nos soupçons, e t , après nous
» être concertés, nous pesons de nouveau les sacs contenant
» le noir b r u t , moulu la veille, et cacheté par nous ; cette nou» vclle pesée nous donne un poid de mille neuf demi kilogram» mes ; et cependant, nous n’en avions mis que dix quintaux,
» dont il aurait fallut déduire le déchet nécessaire pour la mou» t u r c , et que l’on peut évaluer à kilogrammes, et la quarte
» du schiste, laissée par nous dans le moulin. »
Ici, faisons remarquer à la Cour une erreur grave, qui se
trouve dans le Mémoire du sieur Mossier (page
.)
Les experts disent qu’ils ne pesèrent la veille que dix quin.
taux de schiste, et que le lendemain ils trouvèrent mille neuf
demi kilogrammes, ce qui fait n euf livres de p lu s, et non pas
neuf cent livres, comme le sieur Mossier l’a fait imprimer.
5
25
�( 64)
Continuons à copier le rapport des experts : « Nous ne pou» vions nous expliquer cette différence; nous aimions à croire
» que nous n’avions pas été trom pés, et que celte différence
» pouvait provenir d’une erreur; dans cette persuasion, nous
» vuidons un premier sac, désirant continuer nos travaux;
« mais nous voyons que ce sac renferme une quantité plus
» considérable de noir fin, qu’il n’aurait dû en contenir ;
» étonnés, de plus en p lu s, nous examinons avec soin les
>> autres sacs : le cachet existait, les sacs n’avaient pâs été dé» cousus; M, Morateur, l ’un de nous, coupe le fil; il était
» intact, et, cependant, le sac renfermait du noir fin impal» pable, en grande quantité. Sur cette entrefaite, arrivent suc» cessivement MM. Blanc et Guillaumon, gérans ; MM. Roux» Laval, Roux-Jourdain et Goyon, actionnaires; nous leur
» faisons part de ce qui arrive.
» M. Goyon, l’un des actionnaires, nous invite à mention-;
» ner, dans notre rapport, que, le lundi matin, la croisée du
« p r e m i e r étage du côté droit de la pièce où est le ventilla» te u r, et d o n n a n t s u r la c o u r , q u i av a it d û être f e r m é e le
» samedi, avait été trouvée ouverte ; et que cinq à six car» rcaux avaient été brisés ; nous lui avons répondu, avec le
» commis de M . Mossier, que le vent seul avait occasionné co
3> dégât; et que, d ’ailleurs, celte circonstance était insigni'
» fiante, puisque les clefs restaient, chaque soir entre les mains
» de l'entrepreneur, M. Mossier.
» E n f i n , pour arrivera la découverte de la vérité, M. Gé» rest, l’un de nous , est d’avis de tourner, sans dessus des» sous, la balle déjà décousue par M. Morateur, ce qui est
» fait à l’instant; nous reconnaissons alors, q u ’une incision;
3> d'environ un pied de longueur, a etc faite à la toile, un peu en
3> biaisant; que c ’est par cette ouverture que la substitution du
» noir fin au noir gros a dû être fa it e , et que cette opération a
P été faite très-récemment.
)>A ussitôt, nous faisons appeler M. Mossier, qui était dans
�( 6 5 ) ,
.
» une autre pièce de l’usine, en présence de MM. Guillaumon,'
» Roux-Laval et Foureau; nous lui adressons de vifs re» proches s^ir une manoeuvre aussi déloyale, qui tendait à
» ruiner notre opération; M. Mossicr répond d’abord, que
» c’est peut-être le résultat d’une erreur de ses ouvriers, qui
» auraient échangé une balle de noir gros ; mais nous faisons
» remarquer àM. Mossier que le sac a été coupé avec un cou» teau et recousu, et que l’on a substitué du noir fin à du noir
» gros ; M. Mossier nous répond que c ’est sans doute un de ses
» ouvriers, q u i, croyant lui rendre service, aurait fait cette sub» stiiution ; q u ille connaît bien, et que lui, ainsi que son épouse
» lui avaient bien défendu de le faire; qu'il ne voudrait p a s,
» pour dix mille francs , que cela fû t arrivé; cependant nous
» devons déclarer, continuent les experts, que M. Mossier n'a
» ni réprimandé, n i renvoyé aucun de ses ouvriers. Le premier
» sacvidé, pouvait contenir environ i à 20 demi kilogrammes
» de noir fin ; le second sac pouvait en contenir de l\o à o , le
» tout provenant de la substitution.»
5
5
L ’on se demande, quels éclaircissemens les juges ont-ils pu
recueillir d’une semblable épreuve, faite sous l’influence d’une
fraude aussi honteuse? Enumérons tout ce qui a été fait pour
'tromper les experts, et nous verrons que l’expression est
applicable.
r L ’on conduit du noir schiste de Menât, dans lequel il y
avait déjà de douze à quinze pour cent de poussière; le sieur
Mossier répond, quand on lui en fait l’observation, que ce sont
les cordes qui l’ont moulu; sans doute, sur les voitures.
a0 L ’on remarque que les six boges qui ne purent pas se
moudre le même jour, et qui furent laissées au moulin jus
qu’au lendemain, contiennent plus de noirfin que celles de la
veille ;
3
° Une pyrite, de la grosseur d’un œuf, est introduite avec
le schiste, pour détourner les meules de leur aplom b, les faire
9
�( 66
)
tourner plus long-temps , et obtenir une plus grande quantité
de noir fin ;
4° L ’on veut
passer le son dans le moulin quff l’on croit le
plus favorable , le sieur Mossier veut s’y opposer.
5°
E n fin , les experts prennent la précaution de peser le
sebiste, de cacheter les sacs ; e t , pendant la nuit, au moyen
d ’une large incision pratiquée au fond desboges, l’on substitue
au noir qu’ils avaient moulu la veille, du noir fin, et le tout
pour tromper la religion du tribunal.
Malgré sa déclaration, le sieur Mossier eut la hardiesse de
faire plaider, devant le tribunal de commerce, que l’on avait
vusortirles gérans de la cour, nuitamment. Nous n’entrepren
drons pas de nous justifier d’une aussi plate calomnie ; nous
dirons seulement que, désirant connaître le résultat de l’opé
ration , nous nous rendîmes au moulin, par la petite barrière ,
à six heures et demie du soir ; arrivés au m oulin, nous trou
vâmes un ouvrier du sieur Mossier dans la cour, qui nous dit
que les experts venaient de sortir, et q u ’ils avaiqfat passé par
la barrière de Montferrand , de crainte que la petite fût
fermée.
Toutes les fenêtres en dehors sont grillées ; la cour est close
par un mur de io pieds de hauteur ; le sieur Mossier couchait
dans l’appartement occupé jadis par l’agent de la Compagnie ,
qui n ’est pas éloigné de quatre toises des meules; les clefs
étaient dans sa chambre ; les trois ou quatre ouvriers, qui cou
chaient au moulin, étaient à son service.'llA in s i, pour que la
fraude eût été commise par tout autre que1les personnes qui
habitaient le moulin , il faudrait supposer que les fraudeurs
eussent passé par le trou de la serrure, et qu’ils n’eussent ré
veille aucun des habitans de la maison.
En rendant compte du résultat de leurs opérations, les ex
perts déclarent que sur cent kilogrammes de schiste calciné ,
ils ont obtenu;
�/
7
0
0
3i
00
C 67 )
E n noir fin im palpable .............................
N ° 2 , fin p alp ab le.....................................
Noirs gro s, de trois numéros , ensemble
Son, dont deux tiers bons.......................
L ’autre tiers m auvais...............................
Déchet sur le p oids, par l ’évaporation .
27
5 i 6° ) 5
3 64 {
1 81
3 87
1
T otal
. . .
100
00.
Ainsi, le noir bon est obtenu dans la proportion de 55,24/000
sur 100.
• N ’examinons pas même s’il faudrait y ajouter le noir fin
n° 2, qui porterait cette quantité à 62,5i/ioo ; nous n’avons
pas besoin d’éclaircir ce fait pour lequel il suffirait aie savoir
si ce noir fin passe ou non dans la toile n° 100 ; car c’gst là le
caractère de l’échantillon déposé et accepté par Mossier comme
par tous ; mais tenons-le pour noir fin , et voyons ce qui de
vrait en résulter ; il faut tirer à l’instant les conséquences du
fait :
L e traité du 7 a v ril, entre la Compagnie , d ’une p a rt, Mos
s i e r et D ’aubrée, de l’autre*, constate que l’échantillon du noir
fin avait été déposé, cacheté, entre les mains des gérans. C ’est
un fait qui n’a jamais été contesté par aucune des parties.
L e traité fait entre la Compagnie et Dumont, le i"m a i sui
vant, c’est-à-dire trois semaines après, constate encore que la
livraison devra être faite, conformément aux échantillons ca
chetés et déposés entre les mains des parties.
Ils doivent prendre proportionnellement:
i° 3o kilogrammes de noir en grain ;
2° 5 kilogrammes de noir, dit noirfin à raffiner.
Mais ce noir fin , pour être propre à*la décoloration, doit
être purgé de la poussière impalpable.
E t , en effe t, comme nous l’avons vu plus h au t, la poudre
impalpable se mêle ayec le sirop , et ne fait que le noircir,
9-
�( 68- )i
effet physique, que tout le monde peut comprendre. D ’ailleurs,
dans son dernier traité avec Derosne, du 24 janvier t i ,
Mossier, qui avait voulu le rendre propre aux couleurs, pré
cisément, suivant lu i, parce qu’il serait impalpable ( v. son
M ém oire, p. 14 ) , et qui n’avait pas pu y parvenir, reconnaît
si clairement qu’on n’a jamais pu le rendre u tile, et qu’il est
obligé de le céder sans p rix , que nous n’avons plus aucune
preuve à faire là-dessus.
Il résulte donc nettement de ce travail des experts, que
,. /100 pour cen t, se réduisant en poiidre im p a lp a b le so n t
un véritable déchet; et que, si le noir fin, n° 2 , ne peut pas
ètte-feçu'domme noir'gros ou eii grain, e t doit; passer comme
fin., il’ne se trouve plus que'pour 8 ,
/100 pour cen t..O r,
Derosne^getDumont n'ont jamais refuséde recevoir quinze pour
cent, ce qui est la proportion.de sur
;- et souvent ils ont
reçu davantage. Nous ne faisons que tracer ici le résultat d’actes
non contestés.
De quoi donc le sieur Mossier a-t-il le droit de se plaindrë ?
Au reste,les experts font une dernière observation; ilsdissnt :
Nous avons obtenu 62, i/ioo pourcent. Il est à remarquer
que nous avons opéré sur du schiste calcine'.
On pourrait, nous le pensons, obtenir du noir gros en plus
grande proportion, en employant les moyens suivons :
Le sieur Mossier les copie, page 26: il dit que les experts
les ont employés; mais on voit le contraire, d’après cette ma
nière de s’exprimer des experts eux-memes ; cela est d’ailleurs
prouvé par le rapport, où ils montrent qu’une pyrite a dérangé
leur seconde opération. Donc, le triage des pyrites n’était pas
bien fait. D ’ailleurs, ils n’avaient pas pu remplacer le frayon, etc.
Remarquons que cela ne change pas les machines avec les
quelles Mossier avait*opéré jusques-là; qu’ainsi, tout consis
tait de sa part dans un mode meilleur de s’en servir.
C’est après ce rapport que les premiers juges ont rendu le
jugement dont est appel. Le président était décédé dans l’in-
83
33 83
83
5
5
35
�( 6 9 ) ..........................................................................
fërvallci Le sieur Mossier avait fait dire à trois des juges des’abstenir; deux autres se récusaient. Le tribunal ne se trouva
plus composé. Il fallut appeler un notable. Le sort tomba sur
un pharmacien.
II faut retracer les singulières dispositions de ce jugement :
Il condamne les gérans ;
i° A prendre livraison des noirs fins, fabriqués depuis le
lîail du 18 décembre 1829, et ce, dans la proportion de 40 ki
logrammes, sur 100 kilogrammes de noir en grains, et à les
payer 9 fr. 5o c . , c’est-à -d irele prix des noirs à raffinerie;
A payer à Mossier 2,000 fr. de dommages-inférets.
II condamne Derosne et Dumont à prendre et retirer ces
noirs des mains des gérans, mais à en payer seulement i ki
logrammes sur 4o; les
autres leur demeureront comme in-,
demnité de la suspension de la fabrication ;
5
25
5
' II condamne Daubrée à oo fr. de dommages-intérêts ;
Et enfin , condamne la Compagnie à tous les dépens.
Il est assez difficile de s’expliquer'comment le tribunal a fait
remonter la livraison de ces noirs au 18 décembre, lorsque les
pièces du procès constataient que tout avait été livré, retiré;
et réglé, pour solde , jusques au i er mars , et que les somma
tions faites par Mossier, les 24 mars et jours suivans, et enfin,
l’exploit de demande, lui-même, constataient qu’ilscplaignait
seulement du refus, depuis peu de jo u rs, depuis le mois de
mars, et q u ’il n ’avait pas saisi le tribunal d ’autre chose.
;
A la vérité, sa demande portait sur tous les noirs1, gisans
dans les magasins ou dans la cour ; mais , de deux choses
l une ;
Ou l’allégation qu’on avait tout re ç u , indistinctement, jus
ques et compris février, était vraie, cl alors il ne pouvait
pas y avoir encombrement ;
Ou elle n’eiait pas vraie ( et il faut bien le reconnaître) , et
alors son moyen principal, unique , était complètement de-
�( 7° ) ’
tru it, et cependant c’est encore le pivot du jugem ent, qui se
fond sur les re'ceplions faites antérieurement.
E n fin , le jugement n’adopte pas cette demande intégrale
ment; il l’applique seulement aux noirs qui ont étéfabriqués
depuis le 18 décembre. Mais quels seront-ils? Sera-ce ceux qui
sont dans la cour ou dans les magasins? Enfin, que deviendra
le surplus? J\este-t-il pour le compte du sieur Mossier? Et
pourquoi donc, s’il a raison ?La Compagnie sera donc con
damnée à prendre, à jamais, tous les rebuts pour des produits ?
Quant à Dumont et Derosne, le tribunal dit qu’ils se sont
engagés à se subroger à la Compagnie , et à remplir ses obli-,
gâtions envers les entrepreneurs ;
Quela déclaration de Guillaumon, qu’il n'y avaitpas d ’éckan-f
tillon, n ’est qu'un hommage rendu à la vérité; quelle ne contient
aucune dérogation au bail; qu’au contraire, il résulte des termes
de l’acte, qu ’ils sontpropriétaires de tous les noirsfabriqués, quelle
que soit leur propriété.
Il semblait résulter de là que Dumont et Derosne devaient
se subroger, pour le tout, à la Compagnie; que c ’était à eux à
recevoir les noirs, comme la Compagnie qu’on y condamnait;
et qu’enfin, s’il y avait dommage pour quelqu’u n , pour ne
l ’avoir pas fait, c’était à eux qu’était la faute, et à eux qu’il
fallait imputer la suspension provenue de ce fait. Cependant,
c’est la Compagnie qui est condamnée à leur laisser , sans
aucun p r ix ,
kilogrammes sur 100, à titre de dommages-intéréts ; mais puisque le tribunal décide , en principe , que
Dumont et Derosne sont obligés de les recevoir , comme la
Compagnie les reçoit elle-même ; et que c’est pour celte fois,;
seulement, qu’il les dispense de les payer, par ce quela sus
pension leur a fait dommage , la Compagnie sera-t-elle obli
gée, à l’avenir, de les leur livrer gratis? Il est bien assez logique
de dire qu’ils devront les payer, car, le principe qui l e s force
à rpcevoir restera, tandis que l’ejcception passagère, qui pro-
25
�( 71 ) .
duit les dommages-inlérêts, aura disparu.Toutefois , c’est une
position qui n ’est pas ncltemcnt exprime'e par le jugement.
Nous n’appelons pas l’attenlion de la Cour, sur les autres
motifs de ce jugement. Nous n’entreprendrons pas non plus
•une discussion raisonne'e des griefs d’appel. La Compagnie,
■
en répondant au M ém oire, a eu pour objet principal de faire
connaître les actes et les faits ; et nous avons eu so in , en les
exposant, d’en montrer les conséquences. Il nous suffira donc
•de résumer quelques réflexions pour faire ressortir nettement
les moyens de la Compagnie.
Peu de jours après le jugement, la Compagnie fut obligée
de passer elle-même un nouveau bail avec Dumont et Derosne.
L ’état où avait été mise cette exploitation, si belle dans le prin. c ip e , la força à subir des modifications considérables.
Au lieu de 24,000 fr., prix du bail du 8 septembre 1829,
la Société ne recevra plus que 10,000 fr., à titre de forfait.
i
La quantité de noir à fabriquer est réduite dans la même
proportion ; l’excédent au delà du taux fixé, sera payé sur le
pied de un franc cinquante centimes.
L ’art. 8 porte :
»
»
»
»
»
»
«Les noirs fins ne pouvant actuellement avoir d ’emploi avantageux, MM. Derosne et Dumont seront libres de les anéantir. Cependant, s’ils trouvaient à en placer, ils payeraient à
la Compagnie une somme de vingt centimes par chaque
quintal métrique, vendu dans le Puy-de-Dôme et départemens limitrophes; et cinquante centimes, pour chaque quintal
métrique , expédié pour toute autre destination.
A r t. q.
.
•J
J iJfilip :
c-i '
« Si Dumont et Derosne pouvaient trouver le moyen de rendre
les noirspns propres aux couleurs, un nouveau supplément
de p r ix , pour la Compagnie, serait réglé amiablement, sinon
à dire d’experts.»
�(
72 )
•A ut .
io .
«Les modifications et changemens nécessaires pour diminuer
la quantité de noir fin actuellement produite dans la fabrication,
exigeant une dépense d’environ 6,000 fr., MM. Derosneet Duruont pourront s’en indemniser, en prenant chaqueannée. pendantsixans, .100,000 kilogrammes de noir gros grains, en susde
la quantité convenue, sans payer la redevance d?un franc cin
quante centimes par 100 kilogrammes.»
Ces trois articles nous démontrent ces vérités d’ailleurs si
palpables, qui résultent de tout l’ensemble des faits.
i° Les noirs fins ne peuvent trouver d’emploi avantageux.
Si on trouve à en placer, Derosne et Dumont payeront 20 c.
dans'un ca s, et o c. dans l’autre. Terme m oyen ,
c. Cette
proportion est remarquable avec le prix auquel la Compagnie
est condamnée à recevoir actuellement, du sieur Mossler ;
tout; celui qui a piu. résulter de sa fabrication. N ’est-ce pas
9 fr. 60 c. ? Et Mossier, dans son traité du 24 janvier
, les
a abandonnés tout à fait. Dans tous les cas , si on le? expédie ,
il n’aura droit qu 'aux frais & emballage et de transport.
5
35
i83i
20 Comme noirs à couleur, on ne leur reconnaît aucune
propriété. , .
3° Quelques changemens
ou modifications peuvent amener
une diminution dans la quantité de cç n o i r , actuellement
produite par la fabrication.
RÉSUME.
I
»
Pour discuter plus à son aise, le sieur Mossier nous a sup
posé un système en quatre propositions, qu’il discute succes
sivement :
mcvV
L ’action deTVIossier est non recevablc; il ne pouvait la
diriger que contre Decosne et Dumont ;
f
�:;/ j
-< 2° Il s ’était engagé à fournir des noirs à couleur , et ceux
qu’il présente n’y sont pas propres ;
° Il pouvait fabriquer une plus grande quantité de noir gros
-grain;
t
” Il ne hù était pas permis de se séparer de Daubrée sans
le consentement de la Compagnie.
Tout ce que nous avons posé en point de fait, tout ce que
'nous avons tiré de conséquences, démontre que quoiqu’on
lui dise tout cela, la défense des gérans ne consiste pas dans
ce plan fait àplaisir. Nous pouvons résumer, en peu de mots,
le résultat de tout ce que nous avons dit, et c’est là qu’on ap
préciera les vrais moyens de la Compagnie.
La difficulté s’élève à raison des noirs sortis de la fabrica
tion , et q u i, n’étant pas conformes à l’échantillon déposé pour
noir à raffinerie , n’ont pas pu être appropriés aux couleurs.
Les sieurs Dumont et Derosne disent qu’ils ne sont pas
tenus de les recevoir, parce qu’ils ne sont pas dans la con
vention , pas conformes à l’échantillon ; qu’en ce qui les con
cerne, ils ne doivent recevoir que du noir en grain, qui ne
passe pas à travers la toile n° ioo; qu’enfin, si Mossier a fait,
avec la Compagnie, des conventions qui l ’autorisent à en dé’
livrer d’autres, moyennant un prix convenu, c’est à la Com
pagnie de les prendre et d’en payer le prix.
Il n’y a pas le moindre doute , qu’à considérer la question
sous ce point de vue , Derosne et Dumont auraient complète
ment raison. Ils l’ont certainement à l’égard de Mossier, car,
il'n e peut pas les forcer à recevoir ce qu’ils ne se sont pas
obligés à prendre; et, alors, il ne resterait plus qu’à decider
s’il peut en imposer la condition à la Compagnie.
Pour cela , il lui faudrait prouver que la Compagnie s’y était
obligée à son égard ;
,
Ou par des actes formels ,
Ou par quelque chose qui pul en tenir lieu.
Voyons s’il remplit cette condition.
io
3
4
�7
'( " -V)
Il n’invoque pas , d’une manière bien précisé , sïi ¿ônvention du 27 janvier 182g avec les gérans ; mais il en résulte,
suivant lui, qu’on devait prendre, indistinctement, tout ce qui
serait fabriqué ; et que le type de Dumont, du noir qui n’exédera pas la toile n° 100 , n’a jamais été sa règle avec la
Compagnie.
La Compagnie répond :
Que les actes sont formels; qu’ils ont été tous acceptés et
exécutés par Mossier pendant long-temps, et qu’il n’a plus
rien à demander à la Compagnie.
Nous avons montré ci-dessus, pages
et suivantes» tous
les faits d’exécution; il nous reste à démontrer, nettement, le
but dans lequel nous entendons les invoquer ; à en faire l’ap
plication à ce que nous venons de dire ; éprouver, en Un mot,
que Dumont et Derosne, étant obligés, par leur traité du
8 septem bre, à se substituer à la Compagnie de M enât, à
l’égard de Mossier, Mossier est également obligé à rèm plir,
envers Dumont et Derosne, toutes les conditions stipulées
entre eux et la Compagnie.
Il n’y aurait pas le moindre d o u te à cela, et personne ne
pourrait élever la plus petite difficulté, si on était bien con
vaincu que le traité du 7 avril, avec Mossier , est entière
ment conforme à la convention faite avec D um ont, le i er m a i,
et au bail définitif du 8 septembre suivant. O r, nous allons le
prouver.
L ’art. i er du traité 7 du avril, entre les gérans, d’une part ;
Mossier et Daubrée, de l’autre , porte nettement que les en
trepreneurs fourniront :
Moyennant 9 fr. o cent., du noir propre au raffinage;
Moyennant 20 f r . ,
du noir propre aux couleurs.
Ce noir devait être vérifié, essayé, et conforme aux échan
tillons cachetés, déposés entre les mains des gérans.
Qui avait confectionné ces échantillons ? Sans nul doute , les
entrepreneurs.
45
5
�Qui les avait cachetés et déposés entre les mains des gérans ?
Eux , sans doute ; eux seuls, car eux seuls pouvaient les con
fectionner; eux seuls avaient droit et intérêt de le faire.
Jamais on n’a prétendu que cet échantillon eût été dénaturé,
et il ne pouvait pas l’être sans le consentement des entrepre
neurs, à moins qu’il ne le fût frauduleusement. O r, c’est une
accusation qu’on n’a jamais hasardée.
Trois semaines étaient à peine écoulées, que les gérans ,
à qui il ne suffisait pas de payer le noir, et qui devaient
aussi le faire écouler, passèrent avec Dumont le traité du i eI
mai (i).
'
Par l’art. i M, ils s’engagent à lui livrer, jusqu’au i e,septembre
tous les noirs provenant de lafabrication, c’est-à-dire, tous ceux
qu’ils devaient recevoir de Mossier , suivant le traité du
7 avril.
'
A partir du i" septembre, ils s’engagent à lui livrer ,ooo ki
logrammes par mois.
Ces conventions étaient tout à fait étrangères à M ossier, et
il est évident que la fixation des quantités, au i" septembre
seulement, provenaient de ce que la fabrication n’étant pas
encore en parfaite activité, Dumont devait se contenter, jusques-là , de ce qu’on pourrait faire.
Tout serait hors de contestation, s’il n’y avait que cela1;
mais le traité s’explique davantage.
Dumont était l’inventeur d’un procédé spécial applicable au
noir en grain , d’une certaine grosseur, et il stipule que sur
les
,ooo kilogrammes, o,ooo, ne devront pas excéder la
grosseur de la toile , n°3o, ni dépasser, pour la finesse, la toile
n° 100. Puis, il applique les ,000 kilogrammes restans, au
noir dit fin à raffiner, qu’il s’oblige de prendre, pourvu
qu’il soit parfaitement purgé de la poussière impalpable ,
35
35
3
5
( 1) Vuir cl-dcssui, page 3 o.
ÎO.
�*
.
( 7 ?’J
propre à la décoloration des sirops, et conforme aux'échan
tillons déposés.
Avanl de rechercher si Mossier a accepté ces conditions pour
lui même, reconnaissons qu’il est impossible qu’elles aient
été faites sans lui ; car les gérans traitaient pour faire écouler
les noirs qu’ils devaient prendre. C ’était là toute leur spécula
tion , et on ne concevrait pas qu’ils se fussent obligés envers
les acheteurs, autrement que les entrepreneurs ne s’étaient
obligés vis-à-vis eux.
D'ailleurs, Daubrée était le seul fabricant qui connût le pro
cédé du sieur Dumont, et il ne pouvait pas s ’y tromper.
Il est vrai q u ’au traité du 1" mai on remarque deux sortes
de noir, le noir en grain , dont la dimension était déterminée;
et le noir, ditfin , q u i, devant être purgé de la poussière impal
pable , était encore en grain, mais plus petit, comme qui
dirait de la poudre à canon, d’un côté , et de la poudre de
chasse, de l’autre.
Mais ces deux noirs devaient être conformes à des échan
tillons déposés.
L ’ont-ils été ? Qu’on fournisse du noir qui y soit conforme.
Un d ’eux ne l ’est-il pas? Que le sieur Mossier ne s’en prenne
qu’à lui-mêine ; car , le 7 a vril, comme le 1" m ai, on ne doit
recevoir que du noir conforme à l’échantillon.
Enfin, offre-t-on des noirs purgés de la poussière impalpable ?
Non. C ’est la poussière elle-même, cette poussière qu’on vou
lait rendre propre aux couleurs, pour lesquelles il la faut impal
pable, et qu’on offre pour raffiner, parce qu’on ne peut pas y
réussir.
Si cela pouvait être , si la Compagnie était obligée à re
cevoir la totalité des matières fabriquées , savoir : Go pour
cent de noir en grain , 4o pour cent de noir fin, c’est-à-dire ,
cent pour cent, cette matière aurait, pour le fabricant , le
rare privilège de ne laisser aucun rebut ni déchet ; et on
se demanderait pourquoi et dans quel intérêt la Compagnie
�77
C
)
1
a inséré dans son traité toutes ces sottises d’échantillons,
d’essais, de vérifications, qui dégénéraient en ridicule?
- Allons plus loin :
L’acte du i er mai constate aussi le dépôt d’un échantillon.
C ’est un fait certain, sur lequel jamais il ne s’est élevé la
moindre contestation. Or„ de deux choses l’une :
v> Ou cet échantillon était celui-là même quiavait été déposé, le
7 avril, et alors les entrepreneurs doivent livrer, et Duinont
et Derosne doivent recevoir le noir qui y est conforme.
Ou il a été changé, et il n’a pu l’être qu’avec la participa
tion de Mossier et Daubrée, et il les engage encore à le suivre
pour la fabrication.
E t, dans l’un et l’autre cas, s’ils n’ont pas déposé le second
échantillon du noir dit fin , ils n e peuvent forcer à recevoir du
noir qui n’a point de matrice.
Allons plus loin encore.
Le
août, les gérans demandent à Mossier et Daubrée,
80,000 kilogrammes par mois; et ils n’omettent pas de dire que
ce noir doit être propre à la décoloration des sucres; qu’il ne
devra excéder, ni la ioile n° o , ni celle n° ioo, c'est-à-dire ,
conforme à Féchantillon déposé avec M. Dumont, dont vous
avez connaissance; ils ne laissent donc rien ignorer. II y a plus,1
ils ajoutent qu’ils font cette demande, conformément au traité
du 7 avril. Si elle s ’en écartait, c’était bien le cas de s’en
plaindre. Si le noir que Mossier et Daubrée devaient fournir;
conformément au traité du 7 avril n’était pas celui qui était
fixé entre les toiles n° o et n° 100, c’était bien le cas de le
dire et de se récrier ; si , enfin , l’échantillon, déposé avec
Dumont, n’était pas celui du 7 a v r i l , s’il ne devait pas faire la rè
gle, s’il n’était pas vrai que Mossier en eût connaissance, il de
venait nécessaire de réclamer; ou bien, il faut le dire, il
reconnaissait que les conventions faites avec Dumont étaient,
en tout, conformes aux obligations contractées par lui-même;
et, alors, il fallait les exécuter.
3
3
3
�V-"
Que dil Mossier, sep are de Daubrée sans la participation
des gérans, comme l’a écrit Daubrée luirmême ?
Il garde trois mois le silence; puis, sur une lettre de rap
pel, il répond le 12 octobre :
Je suis en mesure de fournir et même de dépasser la quantité
de noir qui m'est demandée, pourvu ,que la Compagnie..... me
inctle en possession d’un hangard.... C'est le seul obstacle à
l'exécution actuelle de votre demande. Il reconnaît donc que
l’échantillon déposé avec Dumont était le sien , et qu’il était
obligé de livrer du noir conformé à cet échantillon. Or, cela
nous suffit.
Remarquons que la demande n’était pas faite pour un jour,
pour un mois , mais potjr tout l’avenir, jusqu’à révocation ou
nouvel ordrç\ 80,000 kilogrammes par mois, suivant la con
vention faite avec Dum ont! Or., pas la moindre réclamation
sur les ,ooo kilogrammes de noir fin à prendre contre o,000
de noir en grain, ce qui aurait fait près de 12,000 kilogrammes
par mojs contre 80,000 kilogrammes. Pourquoi ? Parce que
Mossier n’en avait pas déposé d’échantillon ; que ce noir ,
cpmmo nous l’avons dit et prouvé , n’était pas propre à la
décoloration, et qu’à supposer même que Dumont voulût
en recevoir de bonne volonté, Mossier n’avait pas le droit
de l’y contraindre.
Et cependant, q u ’arriv<?~t-il-? Des livraisons considérables
s.çnt faites, dirccteinent de Mossier à Dumont et Derosne, sans
que les gérans y soient appelés. Les comptes sont arrêtés , le
prix des noirs payés sans leur participation ; e t , cependant ,
ç’es.t le $ieur Blanc qui paye, non sous la raison sociale P. Blane
cl Gqillaunion, mais sous la raison de banque Bonfils,P. Blanc
et Fils, Or,cette distinction de qualités, est précieuse; elle est
faite, d’une part, par Dumont et Derosne; et, en même-temps,
par Daubrée , devenu leur agçnt, d’entreprcnpur qu’il était ;
ut, enfin 1 par ÎNIossier > qui exécute avec ces nouveaux pro
priétaires du privilège, les cugogemens contractés par lui avec
5
3
�Í7&)
Itï Corripàgrtié,' l'è 7 avril, et pair la Compagnie dvec Dumont,
lés i " mai et 8 Septembre. Oh peuf së repôrtër aux pagës 4
et suivantes, O11 nous avons ànalisé ces faits d’èxéculioti.
Et ces faits Sont d’autant plus expressifs * d’autant plus forbièls -, qu’ils sont tous là conséquence de l’offre que Dürnont
hvàit faitë à MóSsier cTeácdcuter le traité du 7 avril, et de i’avis
q'U’il lui avdit donné de son propre traité.
Les faits qui ont suivi portëht plus lbiri énCdré Ià: démons
tration. Si notiS ouvrons un compte coiirant, produit au pro
cès et arrêté pour solde, à la dale du i riiarS i$ o, nous y
lisons au prëmiër article :
í<Pour 28,217 kilogrammes de noir de tôiifé espèce , foUr-i
iiis depuis le 2 mai jusqu'à la mise en possession de M M . D e
rosne et Diimont. »
D onc, cette mise en possession , qui a été constatée par un
recoleirtertt d'inventaire et des actes authentiques , a été un
point de séparation adopté quant aux qualités et aux droits des
parties.
Donc, cette séparation, la substitution de Dumont et Derosne
a été acceptée par Mossier ; et quand il n’y aurait pas eu sépa
ration complète ¿ quand la Compagnie n’aurait pas été écartée
par Dumont et Derosne, qui pourtant, comme propriétaires du
privilège, devaient se substituer, Mossier n’aurait pas moins été
tenu d’exécuter, a l’égard de tous , la convention du 1" mai *
qui ne s’écartait pas de celle du 7 a v ril, qu’il avait d’aillcurà
formellement acceptée; et la Compagnie y restant en causé ,
aurait le droit de l ’y contraindre.
Enfin, si on jette un regard sur le trailé qu’il a passé avec
Dumont et Derosne, le 24 janvier i i , on s’étonne de tant
d’insistance, soit sur les faits, soit sur Ici droit.
Est-ce que Mossier n’y constate pas ouvertement le droit
qu’il avait, p a r la substitution de Dumont et Dèrosnë, de rom
pre toute relation avec la Compagnie? de jeter loin de lu i, de'
concert avec les substitués, le traité qu’ils avaient fait avec le¿
5
5
83
3
�( 8o )
gérans le 8 septembre? de faire avec eux des conventions nou
velles? Est-ce qu’il n’avait pas, jusque-là, exécuté, de fait, ce
dont il constatait le droit par cet acte ignoré de la Compagnie?
Est-ce qu’il n’est pas évident, par cela s e u l, que l’échantillon
déposé, soit le 7 avril, soit le 1" mai 182g, est constamment
celui qui l’est encore aujourd’hui, et qui a été continuellement
le type des livraisons antérieures? L ’action du sieur Mossier,
si elle se trouvait fondée, ne peut donc être supportée que par
Dumont et Derosne, qui avaient promis de se substituer?
Cela paraît fort clair.
M a is, dit-on , ce n’est ni de cet échantillon, ni du noir en
grain qu’il s’agit; c’est du noir fin, que Derosne et Dumont re
fusent, précisément parce qu’il n’y avait pas d’échantillon , en
se fondant sur la déclaration donnée par Guillaumon, le 18 dé
cembre. ;
Très-bien : que Dùmont et Derosne aient raison , nous ne le
contestons p a s, mais il faut prouver que la Compagnie , en ce
cas, est obligée.
Elle aussi répondra : précisément parce qu’il n’y avait pas
d’échantillon, je ne suis pas obligée ; car cela seul est un
indice que M ossier,'qui devait , avant tout, le fabriquer,
n ’a pas pu obtenir du noir fin propre à la décoloration ; il n’a
pas pu faire la matrice”, et , par conséquent , ne peut pas
exiger qu’on réçoivc du noir qui n’a pas d ’étalon, et q u ’on ne
peut pas comparer (quoique la condition fut expresse), avec
un échantillon qui n ’existe pas.
On conçoit très-bien que si, avant le traité du 8 novembre,
il avait existé un échantillon du noir fin , cela pourrait servir
de motif pour forcer la Compagnie à le recevoir, sauf, cepen
dant , la vérification et l’essai, qui lui sont toujours réservés,
afin'de'savoir s’il est propre à raffiner , comme le portait le
traité du 7 avril; et alors, la déclaration'dc Guillaumon de
viendrait'utile, à Dumont et Derosne; ce serait leur b o u c l i e r
pour se défendre; mais que signifie-t-elle, dès qu’il n’y a pas
�.‘
c «* )
plus d’échantillon pour la Compagnie P. Blanc et Guillaumont, que pour la Compagnie Ch. Derosne et Dumont ? dès
que la déclaration ne fait que reconnaître un fait vrai pour
tout le monde , et dont les conséquences profitent à tout le
monde , puisqu’elles sont écrites dans le traité du 7 a v ril,
aussi bien que dans celui du 1" mai? Il est donc évident, sous
ce rapport, que la condition delà Compagnie est et doit être la
même que celle des sieurs Derosne et Dumont ; ou, pour mieux
dire, que le procès, si réellement on peut y voir une ques
tion, ne peut exister qu’entre Mossier et eux.
Voilà le résultat évident des traités passés entre toutes les
parties ; e t , m êm e, nous ne craignons pas de le d ire , de l’exé
cution qu’ils ont reçue. Le sieur Mossier ne justifie donc pas
sa demande avec les actes.
Il veut la justifier par les faits. On a toujours reçu, dit-il,
d’abord, les gérans ( et le jugement arbitral les y condamne };
ensuite, Dumont et Derosne ont continué de recevoir.
La réponse sera simple.
Si le fait était v r a i, l’encombrement, prétendu immense,
dont on se plain t, n’existerait pas.
En ce qui concerne la réception par les gérans, antérieure
ment au jugement arbitral, nous avons démontré ci-dessus,
page 37 et suivantes, que ce précédent n’existait pas, et que
quand ils auraient fait quelques réceptions partielles , elles se
raient sans conséquence, puisque les envois avaient prouvé
qu’ils n’étaient pas conformes au traité fait avec M ossier, et
qu’ils avaient occasionné à la Compagnie des frais énormes
en pure perte.
Quant au jugement arbitral, nous avons encore démontré ,
page 40 et suivantes, qu’il était sans influence sur le procès
actuel.
En ce qui concerne les réceptions faites par Dumont et De
rosne, s i e l l e s étaient vraies, et qu’elles dussent établir un
droit pour Mossier, ce serait à eux à en supporter les effets.
U
�{ *2 )
■
Ils ont reçu partiellement, à ce qu’il paraît, mais sansla par
ticipation de la Compagnie , hors la présence de laquelle a été
exécuté le traité du septembre.
Us auraient reçu bénévolement avant le 24 janvier 1 17
car leur traité ne les y obligeait pas , à défaut d’échantillon.
S i , d’ailleurs, ces noirs étaient propres à leur industrie , si
ceux qu’on offre le s o n t, ils doivent les recevoir, si Mossier a
le droit d’exiger qu’on les prenne.
S’ils n’y sont pas propres, Mossier ne peut pas obliger, ni
eux , ni la Compagnie, à les prendre, et ils ont eu droit de
cesser la réception le jour qu’il leur est devenu impossible
de les écouler utilement pour eux. O r, cette impossibilité,
la complète inutilité de ces noirs, est reconnue par Mossier
lui-m êm e, au traité du 24 janvier i i.
Voilà toutes les conséquences que pourrait avoir le fait de
réception. Jamais il ne pourrait se refouler contre la Compa
gnie.
En présence de ces faits, de ces conséquences, si inévitables,
le sieur Mossier appelle à son secours les moyens de consi
dération. Il se présente comme une victime; l u i , père de fa
mille , contre une Compagnie, plus riche et plus puissante,
et beaucoup plus capable de supporter une perte de cette
nature.
Celte position ne changerait, ni le fait, ni le d r o it, ni leurs
conséquences inévitables.
M. Mossier n’est pas seulement un individu , un père de
famille, il est membre de cette Compagnie ; il y a p lu s, il est,
vis-à-vis elle, ¿’entrepreneur de la fabrication, obligé, à ses ris
ques et périls, défaire du noir parfaitement propre aux usages
déterminés par écrit.
Il a fait du noir bon, on l’a reçu et payé.
Il a fait des rebuts , chose inévitable, sauf la quantité, on
n’en veut pas.
Qui a tort ou raison?
8
83
83
�y
..................................................( « 3 ‘ )
Il pouvait faire des bénéfices considérables, s’il eut bien fa
briqué, s’il eût suivi les méthodes et les conseils qu’on lui
avait donnés par écrit ; il ne l’a pas voulu.
Il n’a voulu écouter personne.
Il a chassé tous ceux qui y apportaient leur expérience.
Il a engagé la Compagnie dans des frais considérables , qui
ont été en pure perte.
II a abusé de la confiance aveugle que les gérans avaient en
l u i , et les a exposés aux reproches des actionnaires , pour s’en
être trop rapporté à son expérience , qu’il faisait sonner si
haut.
Enfin, il a paralysé , par son incapacité et son incurie, une
entreprise qu’on croyait sûre, et dont les résultats pouvaient
être immenses. Que veut-il donc à la Compagnie, lorsqu’elle
y perd 200,000 fr. et plus? Et qu’y perd-il, si ce n’est le bé
néfice de ses spéculations personnelles?
Au surplus, les faits avec lesquels il veut faire cette illusion,
ne sont pas vrais.
- Dans ses sommations du mois de mars , et son exploit de
demande , il reconnaît que Derosnc et Dumont n’ont refusé
de recevoir que depuis quelques jours; et il avait réglé, avec
eux , ses comptes de février pour solde et sans réserve.
Il dit avoir cessé la fabrication , et il l’a continuée ; les états
de la maison Derosne le constatent.
Depuis le mois de mars, qu’a commencé le procès , et où
Mossier annonçait qu’il suspendrait la fabrication , à jour fixe,
les états de réception constatent que jusques et compris le
kil°g*
o juin , il a été liv ré , de noir en grain................ 97»
Et pour le même temps, et le mois de juillet,
Dumont et Derosne ont reçu, en noir fin. . . .77,481
L ’envoi de ces livraisons a été fait par Thomas, le ig no
vembre i i.
Il
nous importe fortpeu que Dumont et Derosne aient reçu
des noirs fins dans cette proportion ; c’est bien leur affaire, et
11.
4-77
3
83
�' 84 )
nous ne répéterons pas ce que nous avons dit là-dessus; mais
nous ajouterons qu’ils les ont reçus, en vertu du traité du
24 janvier, qui les autorisait à les prendre, sans prix, ¿'ils
ponçaient parvenir à les utiliser, ce qu’on reconnaissait à peu
près impossible.
La fabrication a cessé, il est vrai, au mois de juillet dernier.
Mais pourquoi ? Une lettre de Charles Derosne et Dumont va
nous l’apprendre.
P a r is , a5 février ï8 5 a .
• »! . I
MM. Blanc et Guillaumon aîné.
*
« Je suis honoré de votre lettre du 19 courant, par laquelle
vous d é s i r e z connaître quels sont les motifs qui nous ont fait
suspendre l’exploitation de Menât. Je vous dirai, Monsieur»
que c’est uniquement la mauvaise confection des noirs fabri
qués par M. Mossier, qui nous a mis dans l’obligation de re
noncer à son emploi, ne pouvant plus tenir aux reproches
que nous recevions journellement des consommateurs ; nous
nous sommes trouvés forcés de prendre ce parti, pour ne pas
perdre toute notre clientelle. Je suis d’accord avec vous,
Monsieur; le schiste est un excellent décolorant, et bien su
périeur au noir animal ; mais pour qu’il ait toute sa propriété,
il faut qu’il ait subi toutes les préparations , avec soin, conve
nablement; chose que M. Mossier n’a jamais faite, et dont je
le crois incapable, puisque, malgré toutes les réclamations
que nous n’avons cessé de lui faire, il ne nous a jamais envoyé
que des produits mal fabriqués sous tous les rapports.
» Nous voyons, comme vous, avec peine, les mines se dété
riorer, faute d être en activité; nous désirons, plus que per
sonne, un changement dans cet état de choses. M . Derosne,
�(S M
qui se propose de faire un voyage à Clermont, très-inccssamm en t, doit faire des tentatives pour y parvenir. »
» J ’ai l’honneur, etc.
J. D umont.
Ce résultat est Celui qu’on avait obtenu à Lyon , Marseille,
Bordeaux, dans le principe.Nous l’avons indiqué ci-dessus ,
page 16; et nous pouvons ajouter ce qui résulté de deux
lettres de Londres, des i octobre et 19 décembre i o.
On y qualifie cette entreprise : h a malheureuse affaire du
noir minéral.
Dans la première , on y demande d'être débarrassé de cette
triste minérale...... Si on n’a pas reçu réponse, d’ici au 9 no
vembre , on jettera au fumier cet article, qui est, vraiment,
pire que rien.
Dans la seconde , on annonce que tous les consommateurs ,
ayant déclaré que l'article ne vaut absolument rien, on le jette
en ce moment au fum ier, parce qu’il encombre les magasins.
Voilà un échantillon des pertes énormes de la Compagnie.
Voilà la matière que te sieur Mossier veut aujourd’hui donner
à 9 fr. o c», après avoir inutilement essayé de la faire prendre
à 20 fr.
En vérité, on s’étonne de tant d’obstination, de tant d’aveu
glement , et il ne reste qu’une chose à dire : c’est que la Com
pagnie attend la justice , et qu’elle croit avoir été juste, pour
le moins, en se résignant à souffrir, sans réclamation, les
pertes énormes qu’elle a éprouvées, par la faute des entrepre
neurs; plus spécialement par la retraite du sieur Daubrée, la
négligence et l’incapacité du sieur Mossier.
Nous ne discuterons pas plus amplement les motifs du juge
ment dont est appel, ils sont suffisamment refutes par la force
des faits et des actes produits ; mais nous ferons ressortir cette
singularité des premiers juges, qui, entre les deux entrepre
neurs, Daubrée et Mossier , ( tous deux ne faisant qu’un pour
4
5
83
�( 86 )
5
la Compagnie, ) condamnent à oo fr. de dommages-intérêts,
celui dont la faute consiste à avoir abandonné la fabrication ,
et accorde, au contraire, 2,000 fr. d’indemnité à celui qui a
ruiné l’entreprise. E n core, si on n’avait pas motivé cette in
demnité sur la suspension de la fabrication , fait complète
ment inexact, puisqu’elle a continué pendant et après le juge
ment, et n’a été suspendue, plus tard, que par la faute de
Mossier, comme le prouvent toutes les circonstances du pro->
ces, et, spécialement la lettre de Ch, Derosne et Dumont, que
nous venons de porter.
Nous terminons ces observations que nous eussions voulu
rendre plus courtes. Nous avons tâché de bien faire comprendre
les faits et leurs conséquences; c’était l’essentiel pour la Com
pagnie; c’était aussi'l’essentiel pour les gérans, que le sieur
Mossier accuse de lui avoir fait préjudice, pendant que plu
sieurs actionnaires leur reprochent de lui avoir donné trop de
confiance, et de l’avoir trop favorisé. Leur consolation est de
penser q u ’ ils sont sans reproches , et que le simple exposé des
faits suffit pour le démontrer à tous les yeux.
?
P. B LAN C et G U IL L A U M O N , Gérans.
M e d e V ISSAC , Avocat.
M. B A Y L E , Avoué.
RIOM IMPRIMERIE DE THIBAUD AVRIL 1852
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mossier. 1832]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Bayle
Subject
The topic of the resource
mines
exploitation du sol
schiste
sociétés par actions
noir animal
commerce
industrie
moulins
bail d'entreprises
procédés de fabrication
Daubrée (Edouard)
voyageurs de commerce
exportations
tribunal de commerce
arbitrages
experts
dissolution de sociétés
brevets
chimie
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour la compagnie de Menat, en la personne des gérans, appelans et intimé ; contre les sieurs Mossier et Daubrêe, intimés et appelans ; et encore contre les sieurs Dumont et Derosne, intimés.
Annotations manuscrites. « 19 juin 1832, 3éme chambre civile, ou chambre correctionnelle...1er octobre 1835, arrêt de rejet de la cour de cassation. Sirey, 1836-1-65 ».
Table Godemel : Cession : 7. les cédataires ou subrogés aux droits d’une compagnie de mines, peuvent-ils soutenir, que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession ou transport à l’entrepreneur, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à cause des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement le traité relatif à l’exploitation, avec l’entrepreneur, ils avaient en eux même la faculté de faire cette signification, s’ils la jugeait utile ? Qualité : 7. un individu, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la compagnie, ayant comparu à un acte de subrogation fait au nom de la compagnie, qu’il a signé, sans déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, et n’avoir en rien fait novation à ses droits, résultant de son autre qualité, celle d’entrepreneur ? Mines : 4. actionnaire de la compagnie des mines de Menat exploitant une fabrique de noirs de deux espèces, l’une dite noir gros grain, et l’autre dite noir fin, le sieur mossier, qui avait traité avec elle le 7 avril 1829 pour la fabrication de ces deux espèces de noir, a-t-il pu assigner les gérants pour les faire condamner, avec dommages intérêts, à retirer tous les noirs fabriqués ou, n’a-t-il eu d’action directe que contre les sieurs Dumont et Derosne, subrogés aux droits de la Compagnie par traité du 8 septembre, même année ?
Mossier, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la Compagnie, ayant comparu à l’acte de subrogation du 8 septembre, qu’il a signé, sans toutefois déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, celle d’actionnaire, et n’avoir en rien fait novation à ses droits résultants de son autre qualité, celle d’entrepreneur ?
Le noir en magasin a-t-il pu être refusé par la Compagnie, ou par ses cédataires ? Le refus de renvoi a-t-il causé préjudice à l’entrepreneur Mossier et donné lieu à des dommages intérêts ? Contre qui, des gérants ou de la Compagnie, ou des subrogés, ces dommages intérêts doivent-ils être prononcés ?
Les sieurs Dumont et Derosne devenus cédataires ou subrogés aux droits de la Compagnie par l’effet du traité du 8 7bre 1829, peuvent-ils soutenir que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession à l’entrepreneur, Mossier, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à raison des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement l’acte du 7 avril précédent, ils avaient eu eux même la faculté de faire cette notification, s’ils la jugeaient utile ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1832
1825-1832
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
86 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53553/BCU_Factums_G2716.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Menat (63223)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bail
bail d'entreprises
brevets
chimie
commerce
Daubrée (Edouard)
dissolution de sociétés
experts
exploitation du sol
exportations
industrie
Mines
moulins
noir animal
procédés de fabrication
schiste
sociétés par actions
tribunal de commerce
voyageurs de commerce