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COUR ROYALE
MÉMOIRE
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4 ” ' CHAMBRE.
POUR
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DE R IO M .
L es sieurs M A R T I N , Médecin ; M A R T I N , Greffier du
J u g e de paix-, M O N E S T I E R , U S S E L , R E Y N A U D ,
M- BONJOUR.
M A U G U E - C H A M P F L O U R , et autres Propriétaires
de T a l l e n d e , d e M o n t o n , de S a i n t - A m a n d , appelans
d ’ u n Jugement rendu par le T r i b u n a l de C l e r m o n t ;
CONTRE
Dame
J u stin e
USSEL
et
le
sieur V
in cen t
M* JOHANNEL.
C H A N D E Z O N 3 son mari, Adjoint de la com
mune de Tallende, y habitant, intimés
EN PRÉSENCE
De la dame D U V E R N I N , veuve C I S T E R N E S , en son
nom et comme tutr ice de
de dam e
H élèn e
C h arles
CISTERN ES,
V A R E N N E S , son m a r i ,
M* SAVARIN,
CISTERNES;
et du sieur de
assignes en assistance de
c a u s e , et aussi intimés;
EN PRÉSENCE
De la dame M O N E S T I E R
son m a r i ,
et d u sieur C R E U Z E T
D ’É tie n ne B O H A T - L A M I , A ntoine B O H A T - T IX IE R ,
L a u ernt T I X I E R , H u g u e s B O H A T , d i t l e G r e
n a d ier
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MeTAILHAND.
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M* D EBORD .
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B A L L E T - B E L O S T E -,
To us aussi assignés en cause, et intimés;
E N P R É S E N C E ENFIN
M9 Y E Y S S E T .
D u sieur
f.s
Nicolas
B A R B A R I N , également appelant.
discussions re la tives à l ’irrig atio n de vastes p ra iries sont
l ’objet d e la cause actuelle.
O11 sait qu’à la différence dessourecs qui naissant dans une pro
priété privée en sont l’accessoire , et dont le propriétaire peut
disposer à son gré tant que lescaux restent dans son héritage, les
cours d’eau plus considérables , tels que les ruisseaux , ne sont la
propriété de personne particulièrement ; que seulement les ri
verains ou ceux dont les cours d’eau traversent les fonds peuvent
en user à leur passage ; mais que cet usage est soumis à des règles,
à des modifications , à des conditions établies dans l’intérêt de tous
les propriétaires riverains.
Il est juste,
en effet,
que tous ceux qui sont exposés aux
ravages des eau x, aux inondations qui sillonnant leur sol
en
enlèvent la terre végétale pour le couvrir de gravier et quel
quefois de rochers, à toutes les dégradations que ne produit que
trop souvent le dangereux voisinage des rivières cl des ruisseaux ,
il est juste que tous ceux que ces désastres affligent jouissent au
nioiusde quelques avantages; que les eaux, si fréquemment nuisibles,
leur servent aussi pour féconder leur terrain, pour l’améliorer,
pour les indemniser des pertes qu’ils éprouvent journellement.
La loi devait doue, dans sa sollicitude égale pour tous les inté
rêts, veiller à une sage distribution des eaux utiles tomme dange
reuses à t o u s , et ne pas permettre qu’un seul, parce qu’il possède-
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rait une propriété supérieure, s'en emparât sans mesure et les
détournât complètement de leur cours lorsqu’il n’aurait pas à en
redouter les ravages , pour les rejeter sur les propriétés inférieures,
lorsqu’elles pourraient lui nuire.
Telle est pourtant la prétention des époux Cliandczon.
Un ruisseau appelé la Monnc, qui, découlant des montagnes,
traverse les territoires de Saint-Amand, de Tallende et de Monton, a
servi, de tems immémorial, dans le seul territoire de Tallende, à
l’arrosement d’environ cent trente mille toises des plus précieuses
prairies , presque toutes formant des vergers brillans de végétation
et de riches fruits.
Le sieur et la dame Cliandczon, qui ne sont propriétaires que
d’environ huit mille toises de terre , dont une faible partie seule
ment est riveraine du cours d’e a u , veulent détourner à leur gré
toutes les eaux , ne pas mèine les rendre à leur cours ordinaire
après en avoir u s é , et priver ainsi une foule de propriétaires infé
rieurs des bienfaits d’une irrigation dont ils avaient toujours joui.
Et ce qu’il y a de remarquable, ce n’est pas sur leur propriété
meme que les époux Cliandczon prennent les eaux qu’ils détour
nent ; c’est sur une propriété voisine qu’ils vont la chercher, et
que, par abus ou par tolérance, plaçant d’année en année, dans une
position plus élevée et plus éloignée de leur propre terrain, des
obstacles au cours naturel, au cours ordinaire des eaux , ils les
dirigent toutes dans leur héritage ; si cc n’est dans les instans de
danger, où le ruisseau, devenu un torrent dévastateur, est rejeté
dans son lit pour couvrir et dégrader toutes les prairies inférieures,
c est a - d iie , toutes les propriétés des appelans , comme l’année
présente en a fourni les plus déplorables exemples.
C est contre cet abus qu’aucune l o i , qu’aucun principe n’autorise,
que les appelans vicnnem réclamer devant la Cour. Le jugement
qu ils attaquent n a etc que le triste fruit d ’une préoccupation et
d’une erreur non seulement sur lc droit mais encore sur le fait j
c,*r la position des parties, la localité, la nature même de la de
mande, en un mot l'objet du procès paraissent avoir etc absolument
méconnus par les premiers juges.
�( 4 )
FAITS.
Les propriétés des parties sont situées dans le territoire de T a llende, entre deux ruisseaux, l’un appelé la Monne, dont le lit, placé
au midi et dans une partie plus élevée du territoire , sert à arroser
ces propriétés ; l’autre, appelé la V e yre , au nord du prem ier, et1
q u i, coulant dans un terrain plus bas , ne peut les féconder.
Un plan des lieux, annexé au mémoire , rendra plus facile l’in
telligence de la localité. On peut y voir les lits des deux cours
d’e a u , dont la pente est de l’otiest à l’est.
L e lit de la Monne, qui est celui dont nous avons principalement
à nous occuper, est tracé sur ce plan depuis les héritages du sieur
Bouchard, qui y sont indiqués par la lettre A , à l’o uest, jusqu’à
l’extrémité des propriétés des appelans, qui se terminent à l’est vers
deux points marqués par les grandes lettres Z Z.
L e sieur Bouchard possède à l’ouest, vers le point A , et sur les
deux rives de la Monne , les premiers héritages désignés sur le
plnu. Celui qui est bordé par la rive gauche de la rivière est le seul
qui puisse être arrosé à l’aide d’une prise d’eau placée sur cette
même rive plus à l’ouest. Mais les eaux peu abondantes employée*
à cette irrigation retombent dans le lit du ruisseau à la sortie de
l’héritage même.
La propriété Bouchard, sur la rive gauche, s’arrête au point B r
où commence la propriété des époux Chandczon.
Sur la rive droite , la propriété Bou< liai d s’étend plus à l’est. Elle
va jusqu’au n° 70, qui indique des vignes et broussailles appartenant
aux époux Chandczon. Ceux-ci ne possèdent que ce seul héritage
sur la rive droite de la rivière; il est bordé par le lit dans une lon
gueur de
85 mètres ou
/p toises environ ; il est élevé de plus do
30 pieds au-dessus «lu lit; et par conséquent, cet héritage* pas plus
que les héritages voisins sur la même riv e , qui sont Ions à uno
très-grande élévation , ne peut a u c u n e m e n t profiter des eaux du
ruisseau.
Les é p o u x Chande7.on possèdent, sur la rive gauche, une vigne,
�( 5 )
une terre, une noyéree ou saussaie, et des butimens marques au plaa
par les n°» G7, 68, 69 (1). Ces objets ne peuvent être arrosés ; leur
position et l’élévation du terrain ne le permettent pas.
Les époux Chandezon possèdent aussi le pré n° GG du plan : c’est'
le fonds qu’ils font arroser. Il est borné à l’ouest par leur vigne et
leur noyérée , au nord par un chemin public, à l’est par un autre
chemin public , au midi par un pré des héritiers Cisternes, n° 72
du plan , et dans une très-petite partie, c’esi-à-dirc dans une lon
gueur seulement d’environ G6 toises, p a rle ruisseau de la Monnc.
C ’est sur cette longueur seulement que touche au ruisseau ce préverger Chandezon , dont la superficie entière, y compris le n° 75
qui a été acheté d’un nommé Ballet, est de 8712 toises; et c’est
pour ce pré qu’on voudrait absorber la totalité des eaux de la Monnc.
Toutes les propriétés Chandezon ne sont bordées par la rivière,
sur la rive gauche , que dans une longueur d’environ 120 toises, et
sur la rive droite, dans celle d’environ 4 3 toises. jN o u s avons déjà
dit que cette dernière rive est très-élevée, et qu’elle est presque à
pic du lit de la rivière.
Quatre prises d’eau sont sur ce lit.
L a première, dans le pré Bouchard, en avant du point B par le
quel les eaux s’introduisent dans la propriété Chandezon, à l’aide
d’un canal qui les conduit au n° 66: L ’entrée du canal sur la pro
priété Chandezon est fixée par un agage en maçonnerie que l’on
»Ucrcepte quand 011 le veut à l’aide d’une vanne.
• A côté, et vers le même point B, mais un peu plus haut, parallèle
ment au lit de la rivière, est établi un déversoir, aussi bâti en ma*
Sonnerie sur une longueur de trois mètres seulement, et ou est placé
0rdinaircmcnl une vanne qu’on lève quand on veut rejeter l’eau
dans la rivière.
C ’est vers ce point que se trouve la prise d’eau des époux Chande
zon. Ils n’ont pas d’ailleurs de barrage fixe sur la rivière; ils 011
clèvent un en pierres mobiles, qu’ils établissent, non pcrpcndiculaire-
( 0 C»» numéro» »ont cciit il« Cartailre, «i le» me»ure» ou contenance* que Pou ¡uJiqucr.i
d*n» le rocuioire »cronl tircct du Ca.lajli« m im e .
�(6 )
ment aux deux vives mais diagonalcmcnt le long de la propriété
llotieliard. Ce barrage mobile ils l’onl prolongé en amont depuis
quelques années, et toujours do plus en plus, de manière à diriger
vers le point B dans leur canal la totalité de l’eau do la Monpe,
sur-tout lorsqu’elle n’est pas très-abondante.
Telle est la première prise d’eau faite sur la rivière. Elle ne sert
et ne peut servir qu’aux époux Chandeïion.
Lne seconde prise d’eau a lieu au point Q , en tête du pré u* 72.,
appartenant à madame Cisternes. Elle sert à arroser ce pré , et est
destinée aussi, à l’aide d’une rase ou canal qui traverse le chemin
entre les points J K , à arroser les prés n°* 320 et 32 î appartenant
53f),
U la dame Cisternes, ainsi que les autres prés marqués parles n0l
.340 jusques et compris le n°
aux appelans.
Les
555-, héritages divers qui appartiennent
prairies auxquelles cette prise d’eau devrait servir sont
d’une surface de 28,904 toises. Mais l’eau n’arçive aux derniers
héritages que lorsque les prés des héritiers Cisternes ont suffisam
ment bu; et ceux-ci eux-mêmes ne reçoivent d’eau que ce que leur
laissent parvenir les époux Chandezon, qui o n t, dit-on,-quelques
arrangemens secrets avec la dame Cisternes et avec les autres intimés.
La troisième prise d'eau se fait au point R , toujours sur la rive
48 5
gauche de la Monne. E lle est destinée à l’irrigation de
,o o toises
de prairies , divisées-entre les appelans , et désignées sur le plan
par les lettres T T .T .
La quatrième prise d’eau est pincée ou point U , sur la rive
droite de la Monne ; elle a aussi pour objet l’arrosement d’une
vaste prairie , contenant, dans le seul terroir de Tallende , 58,074
toises, et divisée entre un grand nombre des appelans.
Ces deux dernières prises d’eau sont devenues presque inutiles
quelque tcnis avant le procès, pur suite des injustes entreprises
du sieur Chandezon sur le cours d’eau, dans la partie supérieure.
Toutes ces prairies inférieures, dont la superficie totale est de
5 5
i a o , G toises, existent depuis tin teins immémorial; elles ont tou
jours usé des eaux de la Monne pour leur irrigation; élites sont gar
nies d’arbres cl forment de beaux, de fertiles vergers, qui produisent
�(
1
)
ccs excellens fruits que recherchent, dans ce canton sur-tout, les
marchands parisiens attires par l’excellente qualité des pommes qui
y mûrissent.
Ces avantages seraient perdus pour les appelans si le jugement
dont est appel était confirmé. Leurs prairies se dessécheraient ; les
arbres qui les garnissent périraient, et leurs intérêts, comme ceux de
l’agriculture, éprouveraient un immense dommage, pour satisfaire
à l’ambition et aux arbitraires volontés des époux Chandczon.
Long-tems ceux-ci, ou plutôt le sieur Ussel leur auteur, s’étaient
rendu justice; ils ne prenaient l’eau que rarement et pendant un
tems très-court, en tête de leur propriété, vers le point B, ou audessus à peu de distance. E t alors même ils n’en détournaient qu’une
faible partie; ils en laissaient arriver la plus grande quantité aux
prairies inférieures, en sorte qu’il s’operaitfacilementune distribution,
sinon régulière, au moins assez équitable pour que personne n’eût
été autorisé à se plaindre ; et si cette modération eut continue
d’être le mobile de tous, il aurait été inutile de recourir à la justice
des tribunaux.
Cependant, comme les eaux de la Monnc n’étaient pas toujours
assez abondantes, on cherrha, en l’an 9, à augmenter les ressources
qu’elles offraient en tâchant d’y réunir d’autres eaux ; savoir celles
qui servaient au routoir d’un sieur Monestier, ou qui découlaient
petites sources surgissant d.ins le voisinage.
Ce routoir est situé au nord de l’enclos du sieur Chandczon , audelà du chemin. Il est iudiquésur leplau parla lettre D. Les sources
sont à côté.
On se proposa de recueillir les eaux sortant du routoir et des
sources, dans une rase qui devait les conduire au point E du plan ,
°ù elles devaient s’introduire dans un canal découvert mais cons
truit en maçonnerie, et suivre la ligne courbe E F G II l J K. Vers
deux derniers points elles devaient se réunir au canal trans
versal existant depuis long-tems pour l’usage de la prise d’eau Q K.
Ce premier canal, s’il avait pu remplir le but propose, aurait
aussi recueilli et rend.i à leurs cours ordinaire les eaux de la
Momie, qui se scruicnt écoulées de l’onclos Chandczon, pour l’irri-
�( 8 )
galion duquel elles étaient détournées dans sa partie supérieure. Ce
canal offrait donc d’assez grands avantages à tous les propriétaires
de prairies. Aussi le projet sourit-il beaucoup au sieur Ussel, alors
propriétaire de l’cnclos Cliandezon, soil parce qu!il assainissait le
bas de son héritage, soit parce que celte nouvelle ressource
d’irrigation obtenue pour les propriétés inférieures lui faisait
espérer pouvoir retenir lui-même à son agage supérieur une plus
grande quantité d’eau ou la conserver plus long-tems pour l’arrosement de son enclos.
L e projet fut donc exécuté , sans néamoins aucune modification
des droits des parties à l’usage des eaux de la ¡\Ionnc. Un arrêté de
l’administration municipale , homologué par le préfet , autorisa à
creuser ce canal le long du chemin public qui borde , à l’est,
l’enclos Ussel, aujourd’hui l’enclos Chandezon ; le canal fut construit
en maçonnerie, et M. Ussel contribua pour cent francs aux frais do
celte construction.
Mais on ne tarda pas à reconnaître l’inutilité du canal, et l’im
possibilité de faire arriver au point K les eaux que l’on y réunissait.
En effet , si des points D , E et F l’eau arrivait facilement au
point G qui est le plus bas, il n’en était pas de même pour la faire par
1
venir au point K le long du chemin , en suivant la ligne I I J. Le
55
point K distant du point G de 1
mètres, au lieu d'être plus bas
a une sur-élévation de a mètres 76 centimètres (plus dehuit pieds);
en sorte qu'il aurait fallu un canal très-profond dans une grande
partie de sa longueur , bien cimenté pour que l’eau ne s'échappât
pas par infiltration dans le chemin 011 dans le pré Chandezon, et
qui fût revêtu de murs latéraux et saillans , pour empêcher l'en
combrement que produirait la circulation des voilures.
Ces difiicultés et d’autres obstacles que la localité présente ont
rendu tout-à-fait insignifiant ce canal, dont le lit fut bientôt couvert
de vase qui s’opposait encore au cours de l’eau. Dès l’origine même
de sa création, l’eau refoulée se pratiqua, sur le chemin qui longe
le canal à l’est, différentes issues par où elle s’échappe pour aller se
jeter au-delà , dans la V e j r c , ruisseau dont le lit est moins élevé.
J'.n 1823 , le sieur lleynaud, desservant à Tallendc et propjié-t
�( 9 )
taire de deux prés considérables de ce canton, voulut faire récurer
et réparer le canal dans l’espoir de l’utiliser ; mais il ne put y
réussir et ne fut pas dédommagé de ses dépenses.
Ce fut alors aussi que, dans l’espoir du succès dans l’usage du
canal,
le sieur Ileynaud essaya d’établir un règlement pour
l’irrigation des prés inférieurs ; il en fît faire un projet par le sieur
Chouvy, expert. Mais ce règlement n’a jamais été adopté , ni même
connu par les autres propriétaires , et le sieur Reynaud a dû
seul en payer les frais.
On prétend que ce projet de règlement avait été confié à
M. Chandezon, comme adjoint de Tallende , et que celui-ci a
«
refusé de le restituer.
Cependant, avant comme depuis la construction et l'essai du
canal, toutes les prairies avaient continué de proGtcr de l’eau
de la Monne, et de recevoir, suivant l’étendue de chaque portion,
l’eau à laquelle elle avait droit. Le sieur Ussel, beau-père du sieur
Chandezon , la détournait rarement, et en petite quantité seulement 5
et lorsqu’il la retenait trop long-tems ou en trop grande quantité ,
‘•>n se transportait vers le barrage mobile qu’il établissait momenta
nément dans le lit de la rivière le long de la propriété Bouchard ;
°n déplaçait les pierres , 011 faisait disparaître le barrage , et l’on
rendait l’eau à son cours naturel pour l’arrosement des prés infé
rieurs,.
C ’est ainsi que cela s’est pratiqué jusqu’en i
85 a. Néanmoins on
■ne doit pas dissimuler qu’à défaut dé règlement d’eau, il y avait
nécessairement de l’arbitraire dans cet usage des eau^ ; car chacun
s*en emparait plus 011 moins fréquemment, suivant sa vigilance , scs
tentatives et le degré d’insouciance ou de résistance des autres pro
priétaires. O11 11c doit pas dissimuler aussi qu’à défaut de règles fixes
et positives qui déterminassent l’exercice des droits de chacun àl irri
gation, il s’élevait souvent des querelles assez sérieuses, parce que.
•»oins la rivière était abondante et plus les besoins paraissaient
pressans , plus c h a c u n faisait d’efi’orls pour s’approprier l’eau et
arroser sa propriété particulière.
Ces discussions, ces querelles furent portées fort loin , sur-tout
2
�on 1832, année de sécheresse où M. Cliandezon , qui jouissait de
l’cnclos de son beau-père ou qui l’administrait, augmenta scs pré
tentions, fit continuer beaucoup plus haut, en amont dans le lit de
la riv iè re , un barrage mobile , placé au-dessus de la ligne de ses
propriétés, et prolongea ce barrage jusqu’à atteindre la hauteur de
/(7 mètres ou i!\ toises environ le long d’une propriété étrangère,
celle du sieur Bouchard.
Cette œuvre était illégale; car si le propriétaire riverain est au
torisé par la loi à u se r. à leur passage, des eaux qui baignent les
bords de sa propriété, il n’a le droit de les prendre que devant son
héritage même; il n’a pas le droit d’aller les chercher devant une
propriété supérieure appartenant à autrui et de les conduire ainsi
à la sienne par une espèce de canal établi sur un terrain étranger;
et lors même que le propriétaire supérieur tolérerait cette voie de
fait, ce propriétaire supérieur ne peut avoircelte tolérance, ni celui
qui l’obtient en user au préjudice des propriétés inférieures qui
bordent le lit de la rivière. L ’eau doit en effet profiter en totalité
aux propriétaires inférieurs si le premier propriétaire ne peut luimême s’en servir à cause de la position de son héritage. C ’est ce
que nous prouverons plus tard.
Celte œuvre illégale, dans un moment où la rarclé des eaux ren
dait la sécheresse mortelle pour la végétation, cette œuvre hasardée
excita des querelles pîus violentes que jamais sur le point même où
elle se pratiquait; le barrage fut détruit plusieurs fois, plusieurs fois
rétabli pour être détruit de nouveau; et cela sans beaucoup d’eflbits
puisqu’il n’y avait qu’une simple rangée de pierres à écarte:*.
ZSous n’entrerons pas dans les liicheux détails de ces luttes. Il
suffira de savoir qu’un coup de fusil fut tiré, cl que, si personne ne
fut blessé alors, des malheurs graves étaient à craindre par la suite;
on sorte qu’il était urgent de prendre des moyens pour les prévenir.
Le moyen le plus simple el le plus sur était un règlement d’eau.
Les propriétaires des prés se concertèrent pour y parvenir. Le
plus grand nombre le considérait comme indispensable. Le sieur
lisse! ou plutôt le sieur Cliandezon s’y opposa. Quelques autres
personnes dont il avait o.blenu le silence par des arrangemens parti-
�( 11 )
ailiers ne voulurent pas s’en mêler; alors commença le procès.
855
Par exploit du x i mars 1
, le sieur Martin, grellier du juge de
pa ix, d’accord avec un grand nombre d’autres propriétaires, assi
gne les époux Chandezon et le sieur Ussel, leur père ou beau-père,
ainsi que huit autres particuliers.
11 leur expose qu’il est propriétaire, ainsi que beaucoup d’autres
personnes, de prés situés sur les deux rives du ruisseau de la Monnc;
Que l’arrosement de ces prés a lieu au moyen des eaux de ce
ruisseau, qui y sont destinées;
Q u e, n’y ayant pas de règlement, lui et les autres propriétaires
de ces prés éprouvent des dillicultés journalières pour la conduite
et la direction des eaux destinées a leur arrosement ;
Que notamment, en i 8 5 2 , le sieur Chandezon avait usé de ces
eaux comme d’une propriété à laquelle il aurait un droit exclusif,
en les tenant constamment détournées de leur lit qu’il laissait à
sec; de sorte que, par le résultat de cette voie de fait, les eau x, vu
la disposition des lieux , ne rentraient pas dans leur l i t , et les prés
inférieurs en avaient presque tous été privés, ce qui avait occa
sionné un tort considérable aux propriétaires ;
Que le plus grand nombre des propriétaires des prés, voulant
faire cesser toute discussion, avaient proposé aux compris un rè
glement amiable pour la distribution des eaux dans chaque parcelle
de pré; mais que ces derniers s’y sont refusés.
Eu conséquence il les assigne pour voir ordonner un règlement
des prises d’eau dans le ruisseau de la Monnc, pour l'arrosement des
pi’és de tous les propriétaires , et pour nommer ou voir nommer
des experts qui procéderaient à ce règlement dans la proportion
de la contenance de chaque parcelle de pré, et qui indiqueraient les
travaux à faire pour l’exécution du règlement et pour faciliter le coulcment des eaux.
Il conclut, eu cas de contestation, aux dépens contre les contes
tons, sinon à ce qu’ils soient supportés par charpie partie intéressée,
dans la proportion de la contenance de sa propriété.
Le sieur Cisternes-Dclorinc, un des propriétaires riverains, fut
«iis en cause par u n second exploit du i ,r avril i
855 .
�L e io mai suivant, plus de quarante autres propriétaires de
prés intervinrent par requête et adhérèrent aux conclusions du
sieur Martin.
Dans le cours de l’instance, le sieur Ussel meurt, et la cause est
reprise par l’une de ses (¡lies, la daine Chandezon, et par le sieur
Chandezon lui-mêine, comme cédataire des droits de l’autre fille.
L ’ailaire s’instruit par des conclusions respectivement signifiées;
et l’on remarque que, parmi tous les défendeurs , les sieur et darne
Chandezon sont les seuls qui s’opposent au règlement demandé, eux
qui moins que personne cependant avaient réellement des droits à
une eau qu’ils ne pouvaient pas prendre sur le bord même de leur
propriété, et qu’ils ne pouvaient pas rendre à son cours ordinaire ,
comme la loi le prescrit, les eaux superflues qu’ils introduisent dans
leur enclos s’écoulant, après l’irrigation, ou dans le chemin C D au
nord de cet enclos, ou dans celui G II l à l’est, sans pouvoir rentrer
dans la Monne.
Parmi les autres assignés, les époux Crouzet déclarent, par des
conclusions du 7 mars i
85 /f , n’entendre prendre aucune
part à la
contestation , se réservant tous leurs droits en cas de règlement.
Sept autres défendeurs, par des conclusions du 1 1 août, deman
dent acte de ce qu’ils s’en remettent à droit en réclamant leurs dé
pens contre ceux qui succomberaient.
Le sieur Cistcrnes s’en remet aussi à droit sous toutes réserves.
Mais les époux Chandezon résistent. Ils prétendent avoir le droit
d’user à leur gré des eaux de la Monne, argumentent des chaussées,
des canaux qu’ilsdisentavoir faitset entretenus pour leur prise d’eau,
se font un moyen de la construction du canal fait en l’an g pour re
cueillir les eaux vers le chemin G II I J K , allèguent un prétendu
règlement fait en 1822, sans leur participation, entre les aun es pro
priétaires, invoquent enfin une prétendue possession exclusive et
immémoriale comme réglant l’exercice «le leurs droits.
Cette possession était illusoire; elle n’a jamais été ni exclusive ,
ni paisible, ni de l’étendue qu’ou voudrait lui donner aujourd’hui.
La construction de l’an 9 , le pi étendu règlement de 1822, ne
�(
'3
)
fournissaient aussi au sieur Ghandczon que les plus insignifiantes
objections.
Mais les époux Ghandczon se prétendaient aussi propriétaires
des deux rives de la Momie ; ils parlaient de chaussées, de
canaux construits et réparés par eux seuls; ils prétendaient que
l’eau était rendue à son cours naturel. La localité n’était pas
connue des magistrats; ils crurent que la prise d’eau existait sur la
propriété même des époux Chandezon, entre les deux rives qui
leur appartenaient; ils pensèrent que les canaux dont on argumen
tait étaient étabtis au milieu du lit même de la rivière; ils eurent
l’idée fausse que les propriétaires inférieurs voulaient se servir, pour
l’irrigation de leurs héritages, de ces canaux à la construction des
quels ils n’avaient pas concouru ; ils considérèrent enfin l’eau
comme étant rendue à son cours ordinaire dans le lit de laMonne,
après avoir parcouru les propriétés Chandezon ; et ils rejetèrent
la demande en règlement d’eau par des moti£> qui ne sont en
harmonie avec aucune des questions de la cause.
854
Ce jugement est du 28 mai i
» en voici les termes:
« Attendu que la co-propriété de la prise d’eau dont il s’agit 11’est
« pas justifiée;
« Q u’en effet d’une part il n'est rapporté aucun titre, et d’autre
« part il n’existe aucuns travaux sur la propriété du sieur Chandezon,
” exécutés par les propriétaires inférieurs;
« Q u ’ainsi les parties restent dans les ternies des articles G/j¡2 et
« G/j/, du code civil; qu’il n’est point prouvé que Chandezon ait
« excédé les droits que lui donnent ces articles ;
Par ces motifs ,
« Le tribunal déclare les demandeurs non rcccvables dans leur
« demande, et les condamne aux dépens. »
Ainsi le tribunal a supposé qu'il existait sur le lit du ruisseau des
travaux dont nous voulions profiter, tandis qu’il n’existe aucune
construction sur le lit de la rivière; tandis que la prise d’eau sti
forme à l’aide d’une simple rangée de pierres mobiles , non liées
entr’elh*!,, irrégulièrement posées et empruntées du lit mémo ;
Le tribunal a cru que nous voulions participer à cette prise d’eau,
�inadis qu’au contraire nous nous en plaignons et qu’elle nous esi
nuisible;
Il a pensé enfin que la cause restait dans les termes des articlesô/ja
et G44 du code civil, tandis que ces articles sont étrangers à la lo
calité; tandis qu’aussi l’article G44 prescrit de rendre l ’eau ¿1 son
cours ordinaire, et que le sieur Chandezon en change au contraire
le cours et la rejette, à la sortie de son fonds, sur des points éloignés
du cours ordinaire auquel elle 11e peut plus revenir.
Cette affaire était trop importante, le préjudice que le jugement
ferait éprouver aux propriétaires des prés était trop considérable
pour qu’ils 11e portassent pas leurs réclamations devant la Cour.
Les intervenans et le premier demandeur se sont réunis pour
3
854
interjeter appel, par exploits des i septembre et 2 décembre 1
-Cet appel, dirigé principalement contre les époux Chandezon ,
leurs seuls , leurs vrais adversaires} a été signifié aussi à ceux qui
.s’en étaient remis à droit, parce que leur intérêt commande leur
présence dans la cause.
La Couraura à prononcer sur les difficultés réelles qui 11’ont pas
été abordées par les premiers juges.
L ’examen des principes nous conduira à apprécier les prétentions
des époux Chandezon, à déterminer les droits de chacun des pro
priétaires riverains et à reconnaître la nécessité du règlement d’eau
qui est réclamé.
DISCUSSION.
La doctrine ancienne, telle qu’elle avait été adoptée par les au
teurs les plus respectés , déclarait les eaux communes à tous les
propriétaires supérieurs ou inférieurs dont elles bordaient ou tra
versaient les héritages.
Le droit naturel même établissait cette communauté , et quident
nuturali ju r e communia sunt ornnia heee, aar, aqua p rojlu cn s,
etc. Inst., lib. 2, tit. 1, §. 1.
l)e ce principe découle nécessairement la conséquence que les
propriétaires riverains 11e peuvent disposer des eaux courauicv
�( i5 )
comme de leur propriété p riv é e , qu’ils ne peuvent se les appro
prier exclusivement, qu’ils ont seulement le droit d’en user à leur
passage, mais qu’ils doivent les rendre à leur cours ordinaire, c’està-dire les faire rentrer, à 1’cxlrcinitc de leurs héritages, dans le lit
qu’elles s’étaient creusé.
Davot, dans son traité du droit français , tome
5 , p. 208 , s’ex
prime ainsi :
« Si le propriétaire reçoit dans son héritage l’eau qui vient
* d’ailleurs, il peut s’en servir pour son usage, mais ils ne peut en
* détourner le cours ancien, au préjudice des héritages qui sont
* au-dessous. »
L ’opinion de l’auteur s’applique comme on le voit à un terrain
traversé par un cours d’eau.
liretonnier, sur Heyrys, tient le même langage : (Observations
nouvelles, quest. 18g, livre 4, tome 2).
« Celui dans l’héritage duquel l’eau ne fait que passer, venant
«
*
*
*
d’ailleurs, 11e peut s’en servir que pour son utilité, et non pas
pour son divertissement ; il ne peut ni la ’retenir, ni la détourner
au préjudice du public ni de ses voisins, parce qu’il n’en est pas le
propriétaire, ruais un simple usager; et par conséquent il en
« doit user en bon père de famille, c’est-à-dire en bon voisin. »
Antérieurement à ces auteurs, Domat enseignait les mêmes vérités
dans son droit public , livre 1 , tit. 8 , sect. 2, n° 1 1.
L ’usage des rivières étant au public, personne 11e peut y faire
de changement qui nuise à cet usage.
'< Ainsi, quoiqu’on puisse détourner de l’eau d’un ruisseau ou
* dune rivière pour arroser des prés ou d’autres héritages ou
« pour des moulins et autres usages, chacun doit user de cctLc li«■berle, de sorte q u ’ il uc nuise point à des voisins qui auraient
un semblable besoin et un pareil droit; et s’il n’y avait pas assez
« d eau p our ton s, ou que l’usage qu'en feraient quelques-uns
* J iït nuisible a u x a u tre s, il y serait pourvu selon le besoin,
« par les officiers de qu i c’ est la charge.
(Jporlet euitn in hujusnm di rebus ulilitatem et tulelam f o cientis spectari sine tnjurui utùjue accohirum , dit une loi
�1
romaine citée par le savant auteur. (La . 1, § 7, in fin e , ÎT, ne quid
in Jlurn. )
Toutes ces opinions s’appliquent aux héritages qui sont traversés
par les cours d’eaux connue à ceux qui en sont haignés sur un
bord seulement.
Cos principes étaient consacrés par une disposition expresse de
l’art. 207 de la coutume de Normandie.
Cette doctrine est la base des divers articles du Code c iv il, qui
se sont occupés des cours d’eau.
On y remarque une différence essentielle entre les règles rela
tives aux sources et celles applicables aux eaux qui 11e naissent pas
dans un héritage mais qui y arrivent des terrains supérieurs.
v Celui qui a une source dans son fond, dit l’article 6 4 1 , p e u t
«r en user à sa volonté.
11 peut donc la retenir, la détourner, en disposer arbitrairement,
parce qu’il en est le maître, parce que la source est un accessoire
de sa propriété oii elle surgit.
Au contraire, d’après l’article G44 5 s* Je riverain ou celui dont
l’héritage est traversé par l’eau peut en user à son passage, son
usage est restreint, est soumis à des modifications et à des condi
tions qui en préviennent l’abus.
«■Celui dont la propriété borde une eau courante, autre que
« celle qui est déclarée dépendante du domaine public, peut s’en
a servira son passage pour l’irrigation de ses propriétés.
*
Celui dont cette eau traverse l'héritage peut même en user
« dans l’in ten a lle qu’elle y parcourt, mais à la charge de la ren« dro , à la sortie de scs fonds, « son cours ordinaire.
Dans los deux cas, le propriétaire du fonds, soit que l’eau le tra
verse ou qu’elle le borde seulement, ce propriétaire n’a qu'un sim
ple usage de cette eau ; seulement, s’il est propriétaire «les deux
rives, 11’élant en concurrence avec personne dans cette partie du
cours d'eau, il en use seul dans tout Cintervalle qu'elle parcourt
au milieu de sa propriété ; tandis que , s’il nVst propriétaire que
•l’une r iv e , sou usage doit sc combiner, même pour l'intervalle
pendant lequel l’eau baigne d’un côté son terrain, son usage doit se.
�( 17 )
combiner avec l’usage, avec les droits semblables qu’a le proprié
taire de l’autre rive.
Mais scs droits , dans les deux c a s , se réduisent à un simple
usage, à un usage qui n’est pas attributif de la propriété de l’eau,
a un usage qui ne doit pas devenir un abus et par lequel on ne peut
être autorisé à changer le cours de cette eau , ni même à l’absorber
en totalité au préjudice des autres propriétaires dont les fonds sont
aussi traversés ou bordés par le cours d’eau.
« Cette faculté, dit Pardessus, ne doit pas cependant dégénérer
* en une occupation tellement exclusive, que les autres en soient
* privés. L ’eau est pour tous un don de la nature -, que chacun do
* ceux à qui elle peut être utile a droit de réclamer également ;
K la seule différence consiste en ce que la disposition des lieux la
* donne à l’un avant l’autre. Mais ce n’est qu’un dépôt dont il peut
* u s e r , pourvu qu’il ne prive pas ces derniers du même droit
* (Traité des servitudes, partie 2, chap. i , sect. i , n° i o i ) .
M. Toullicr, dans son droit civil français, s’exprime dans le même
35
54
sens (liv. 2 , tit. 2, chap. 2, n° i
et 1 )*
« Si le propriétaire d’un héritage que traverse un courant d’eau
w pouvait détourner ce courant ou en retenir tonies les cauæ
« au préjudice du fonds inférieur, le propriétaire supérieur aurait
<f le même droit ; en défendant à l’un et à l’autre de détourner le
« cours de l’eau, la loi protège également leurs propriétés par la
* limitation même qu’elle y apporte; ils peuvent user de l’eau pen" dant qu’elle traverse leur héritage , l’y faire circuler comme bon
* leur semble, mais à la charge de la rendre , à la sortie de leur
« fonds, a son cours ordinaire.
De tôut ce que nous venons de dire et de la lettre même de l’ar
ticle 6/(4 il résulte en droit, i* que, si celui dont la propriété borde
une eau courante peut s ’en servir ¿1 son p a ssa g e, il ne peut pas
la conduire au-delà du point ou son héritage cesse d’être bordé par
le cours d’eau; 20 qu’il en est de même du propriétaire dont le
fonds est traversé par l’eau courante ; car d’après le second para
graphe de l’article , il 11e peut user de l’eau que dans l'¡ritenutile
elle parcourt son héritage. Donc son usage doit se borner à
�l'héritage traversé par le cours de l’eau; il ne peut être étendu à
des héritages réunis au précédent , éloignés des bords du cours
d’eau et que cc cours ne traverserait pas.
M. Proudhon, déjà si honorablement connu par son excellent
Traité de l'usufruit et de l’usage , a développé avec beaucoup de
sagacité et de sagesse, dans un nouveau Traité du domaine public,
les droits que peuvent avoir sur un cours d’eau les propriétaires
d’héritages riverains ou traversés par ce cours d’eau.
Après avoir transcrit l’art.
644 du
Code et posé aussi en prin
cipe que ces héritages ont seulement l’usage de l’eau, il fait remar
quer que , s'il était permis à tous les propriétaires riverains de
changer le cours des eaux , tantôt à droite, tantôt à gauche, cette
licence introduirait bientôt entr’eux un état d’anarchie, de débats et
de guerre civile.
11 ajoute ensuite cette observation importante
,n
:
« De là on doit encore tirer la conséquence que le propriétaire
« du fonds riverain ne pourrait y pratiquer un canal depuis le
« ruisseau, pour en conduire les eaux su r un héritage plus reculé,
« attendu que cc serait appauvrir le cours d’e a u , au préjudice des
« héritages qui sont situés , soit à l’autre bord, soit plus bas , et qui
433
421
« ont lous le droit d’en profiler. » ( V . t. 4 » p* n" *
•)
A la page
, il dit que « le propriétaire riverain du cours
4^8
« d’eau 11e pourra , au préjudice des autres propriétaires , soit
« collatéraux , soit inférieurs , le faire dériver en tout ou en partie,
« dans un réservoir ou étang, etc. »
A la page
d’attention :
4 29 > *1
d’autres remarques également dignes
« Le propriétaire d’un fonds bordant le ruisseau n’a le droit d’y
v prendre que l’eau nécessaire à l’irrigation de son propre héric tage ; donc il ne pourrait y perm ettre la confection cl’un
v aqueduc pour conduire les eauæ sur le fonds d’ un autre qu i
« serait plus recu lé; et tant qu’il n’y aurait pas prescription, les
« autres propriétaires intéressés à la s u p p r e s s i o n d’un pareil 011« vrago pourraient la demander. »
Il dit à la suite que « ce propriétaire riverain n’a le droit
�( l9 )
* d’arrosement que pour l’usage du fonds qui borde l'e a u ; s’il
« l’agrandit par des acquisitions d’aulres fonds gui ne soient p as
r euæ-m ëm es adjacens au ruisseau , il n’aura pas la faculté d’y
« faire, au préjudice des autres propriétaires, de plus grandes
« prises d’eau pour l’irrigation de ses propriétés...... La raison de
« c e la , c ’est que la servitude d’usage, qui n’est établie que pour
« un fonds, ne doit pas cire étendue à d’aulres........
« S’il ne peut en user à discrétion comme le maître de la source,
« c’est parce que les autres propriétaires, soit collatéraux, soit in« férieurs, ont aussi leurs droits, auxquels il est défendu de porter
« préjudice. »
A la page / p i , s’occupant des droits du propriétaire dont les
fonds bordent le cours d’eau des deux côtés, il souligne ces expres
sions de l’article 644 >p eu t même en user, pour en conclure que
« le propriétaire du fonds n’est toujours signalé que comme
« usager, et encore que son usage ne s’applique qu’à l’irrigation
* de ses héritages...... et qu’il ne pourrait pas recueillir e t renv fe r m e r les e a u x dans des étangs ou réservoirs. »
433
A la page
, en rappelant q u e , si l’art. 644 permet à celui dont
l’héritage est traversé par l’eau , d’en user « son passage dans
l’intervalle q u e lle y p a rco u rt, c’est à la charge de la rendre,
ci la sortie de ses fo n d s , à son cours ordinaire, l’auteur fait re
marquer que l’article ne dit pas à la sortie de son fo n d s , mais
a la sortie de ses fo n d s ; et il ajoute ensuite une observation d’une
grande justesse :
«■ C ’est pourquoi, si l’on suppose que le fonds qu’il possède à
« gauche du ruisseau, s o it, vers la région inférieure, moins pro« longé que celui qu’il possède sur la droite, et qu’il veuille le
* faire circuler ou serpenter dans l’intérieur d’un de ces fonds, il
* sera obligé de le ramener à son cours naturel vis-à-vis de la
« pointe du fonds latéral de gauche , qui est le moins p r o l o n g é ;
* attendu qu’autrement on ne pourrait pas dire qu’il l’a rendu à
* son cours ordinaire à la sortie de scs fonds. »
Des diverses règles que nous venons d’analyser, le judicieux au
teur tire plusieurs conséquences, notamment, page
435 , où il dit :
�( >0 )
.
« Que les propriétaires des fonds touchant au ruisseau dans
« la partie inférieure ont ;mssi un-véritable droit à l’irrigation de
« leurs héritages-;, droit dont il n’est pas permis de les priver,
« puisque celui qui les précède ne doit jouir des eaux avant eux
« qu’à la charge de les rendre , par un aqueduc , à leur cours ork
diuaire. Et cela est de toute justice , car comme ils 11e pourraient
« s’empêcher de les recevoir si elles leur étaient nuisibles , il faut
« bien que, réciproquement, ils aient le droit d’en exiger la trans«f mission lorsqu’elles leur sont utiles. »
C ’est d’après ces mêmes idées de justice, que l'auteur décide en
faveur des propriétaires inférieurs la question qui liait lorsque
l'héritage d’un des riverains est trop élevé pour y faire monter les
eaux ; il se demande alors si le riverain opposé doit profiter de
cette circonstance pour s’emparer de l’eau dont n’use pas celui-là,
et pour faire serpenter cette eau dans son pré ?
L ’auteur répond négativement « parce qu’il est incontestable que
<r les propriétaires des héritages inférieurs ont droit à toutes les
» eaux qui découlent naturellement des fonds supérieurs ; d’où il
<î résulte que, s i , parmi ces fonds , il y en a qui n ’absorbent auv cunc partie du fluide, ce sera une cause d’accroissement, ou
« plutôt de non décroissement dans la masse dirigée vers la ré-
44
436
«■gion inférieure. » ( V . le même tome 4 »Pag e
*> u* i
.)
Tous ces principes se résument en quelques règles positives et
conformes à la lettre comme à l’esprit de l’art. 644 du Code civil :
Un propriétaire riverain d’un cours d’eau peut se servir de l’eau
à son passage ; c’est-à-dire, qu’il doit la prendre sur sa propre r iv e ,
et 11e remployer fjii’à l’irrigation du seul héritage qui borde le cours
d'eau ;
Celui dont le fonds est traversé par l’eau peut en u ser, mais seu
lem ent dans £intervalle que l'eau y parcourt.
n’a pas le droit
11
d’élendre son usage au-delà de la limite où l’eau cesse d’avoir son
cours au milieu de scs propriétés;
Ce propriétaire doit rendre , au point extrême de celle des
rives de scs deux fonds qui est la moins p r o l o n g é e , il doit rendre ,
à l'extrémité de celle rive , ¿1 son cours ordinaire, l’eau qu’d avait
�( 21 )
Retournée, sans pouvoir en prolonger l’usage dans une partie in
férieure de son héritage, qui ne borderait pas le cours d’eau ;
C ’est devant son propre héritage , et non devant l’héritage supé
rieur d’un autre que chaque pi’opriétaire doit prendre l’eau dont
il veut user ; il n'a pas le droit de la prendre , à l’aide d’une rase ou
d’un canal, dans la partie supérieure du lit du ruisseau , ou dans le
terrain du propriétaire voisin; c e lu i-c i, simple usager lui-méme
pour sou propre héritage seulement, n’a pas aussi le droit d’auto
riser l’établissement* d’un canal ou d’un aqueduc sur son terrain
ou sur la partie correspondante du lit du ruisseau, pour diriger l’eau
sur l’héritage d’un autre, au préjudice des propriétaires inférieurs ;
ces derniers sont autorisés à faire détruire ou modifier les ouvrages
qui empêchent que l’eau ne leur a r r iv e ;.
Enfin, si certains des héritages riverains ne peuvent, à cause de
leur élévation, user des eaux pour leur irrigation, ce qu’ils ne
pourront recevoir devra profiter aux riverains inférieurs par droit
de non décroissement.
Comparons cette doctrine aux prétentions des époux Chandezon
et à la localité.
Ces prétentions , et les moyens sur lesquels elles s'appuient, sont
développés dans de longues conclusions signifiées en première
instance, le
5 mai i 83 /f, et dont voici l’analyse
:
« En fait, dit-on , la propriété des sieur et dame Chandezon est
en partie b o rd ée, en partie traversée parle ruisseau de la Monne;
« A
65 mètres environ,
au couchant de leur ve rg er, il y a une
prise d’eau consacrée par un usage immémorial ;
« L ’eau introduite dans le verger se divise en une infinité de
petites rigoles établies pour son irrigation;
*
En sortant du verger, elles se rendent dans un canal dont la
direction a été donnée par les demandeurs pour distribuer ces
eaux enlre les propriétés inférieures ;
« Si elles n’arrivent pas à leur destination , c’est que le canal est
dégradé; c’est aux demandeurs à le réparer : cela est étranger au
sieur Chandezon ;
« Il avait été fuit anciennement une distribution des eaux ; elle a
�etc renouvelée en 1822 par le sieur Chouvy, expert, entre les
propriétés inférieures; et le sieur U ssel, représenté par les époux
Chandezon, 11’y figure pas.
« En droit, le libre usage qu’ont exercé les époux Chandezon
de la prise d’eau sur le ruisseau de la Monne, pendant un tems
immémorial, est une servitude que nul ne peut leur contester ;
(f Celui dont la propriété est traversée par une eau courante a
le droit d’en user dans l’intervalle quelle y parcourt, à la charge
de la rendre, à la sortie de ses fonds, à son cours ordinaire;
« Il peut absorber entièrement l’eau, toutes les fois qu’il n'en
change pas le cours ;
« O r, les époux Chandezon entretiennent les rases qui laissent
écouler l’eau de leur veFger ;
« Ils ne peuvent être responsables de ce qui arrive par le fait
d’ouvrages inférieurs à leurs propriétés ;
« Un règlement d’eau 11e peut être demandé que par ceux qui
sont en concuiTcnce ; or, la propriété des sieur et dame Chandezon
étant traversée par le ruisseau, ils exercent leurs droits sans aucune
concurrence, et n’ont pas à ménager ceux des propriétaires
riverains ;
«■Les propriétaires" de la rive opposée pourraient seuls se
plaindre (1);
« Les époux Chandezon seuls ont établi et entretenu, à leurs
frais , les vannes et les canaux qui servent à l’irrigation de leurs
propriétés; eux seuls doivent, par conséquent, en jouir. »
Tels so n t, en résumé, les principaux moyens sur lesquels on
s’appuie pour repousser le règlement demandé.
Parmi quelques faits et quelques principes exacts , ces moyens
en présentent beaucoup d’erronnés ; et même ce qu’il y a de vrai
reçoit une fausse application.
En fa it, la propriété des époux Chandezon n’est B o r d é e que
dans une petite partie par le ruisseau de la Monne , et elle n’est
1
( 1 ) Ceci est un e erreur. V . le p»j»age de l’io u Jb o n cité |j u» liaut, tome 4,
n* » .
430
�( 23 )
traversée par ce ruisseau que dans une partie beaucoup plus petite
e n c o re , comme on peut le voir sur le plan; les époux Chandezon
ne sont propriétaires des deux rives du ruisseau, que sur une longeur d’environ G5 toises , et la plus longue ligne par laquelle ils
touchent au ruisseau sur l’une des rives , la rive gauche , n’est
15
que de 1
toises.
La partie la plus considérable^de leur propriété est éloignée du lit
du ruisseau , et se prolonge, presque en totalité, derrière le pré de
la dame Cisternes, qui est intermédiaire entre le cours d’eau et 1e
verger Chandezon ; en sorte que c’est à la darne Cisternes seule
qu’appartiennent, dans celte longue étendue, les droits de proprié
taire riverain ; o r, celte dame use elle-même de scs droits pour
l’irrigation de sa prairie.
C ’est aussi une erreur de fait de dire que les époux Chandezon
rendent l’eau à son cours ordinaire comme le veul la loi (C . C .,
art. 644)j car le cours ordinaire est le ruisseau qui est au midi;
o r , les eaux qui sortent de la propriété Chandezon tombent, en
partie, à l’aspecl opposé, au nord, le long du chemin , vers les
lettres C D du plan , et en partie, à l’est, aussi le long d’un chemin ,
vers les lettres G I I I ; et de là , il est impossible, à raison de la
disposition du terrain , qu’elles puissent rentrer dans le lit de la
Monne; il faudrait qu’elles remontassent de près de neuf pieds.
L e canal G
11 I avait été pratiqué , il est vrai,
pour recueillir les
eaux qui tombent dans les deux chemins, et qui proviennent no
tamment de plusieurs sources. Riais lors de l’établissement do ce
canal , aux Irais duquel le sieur Ussel avait contribué en l’an 9
comme tous les autres propriétaires , les riverains inférieurs ne
renoncèrent a aucuns de leurs droits sur les eaux de la Monne;
et certes, une telle renonciation, si le sieur Ussel eût pu l’obtenir,
aurait été consignée dans un traité.
L e canal, au reste, ne peut servir à l’irrigation des prés des appelans , l’eau ne pouvant monter d’environ 9 pieds , comme il le fau
drait. Il est, d’ailleurs, complètement dégradé ; il ne pourrait être
rétabli qu’à grands frais et à une grande profondeur, en le construi
sant de toute autre manière qu’il ne l’avait été dans son origine , en
�le faisant passer sous ’plusieurs ponls , et sans même qu’il pût être
d’une utilité réelle et équivalente aux dépenses qu’il occasionnerait.
IVous verrons bientôt que si le propriétaire riverain, ou celui
dont le terrain est traversé par l’eau, veut en user, c’est à lui-même
à la rendre , à ses frais , à son cours ordinaire, et qu’il ne lui est
pas permis d’en changer le cours, et de la jeter à l’aventure , à la
sortie de ses fonds, en laissant aux propriétaires inférieurs le soin
de la reprendre.
E niin, cette prétendue distribution des e a u x , renouvelée en
1822 entre les propriétaires inférieurs , est une erreur de plus du
sieur Chandezon. Jamais cette distribution 11’a été reconnue ni exé
cutée par les appelans ; il ne peut y avoir de règlement sans que
toutes les parties intéressées y concourent, le sieur Chandezon
comme les autres. Jusqu’à présent , ou au moins jusqu’en i
832 ,
avant la tentative usurpatrice du sieur Chandezon l’eau arrivait à
chaque prairie, parce que le sieur Chandezon 011 avant lui son
beau-père en prenaient peu et rarement , et que , s’ils détournaient
l’eau , les propriétaires inférieurs allaient lui rendre son co urs, en
détruisant le barrage temporaire et mobile qu'ils y avaient établi.
Tels sont les faits : examinons le droit.
Comme propriétaire riverain , le sieur Chandezon ne pourrait se
servir de Veau qu’à son passage , c’est-à-dire, sur le bord même de
sa propriété ; il n’aurait donc pas le droit de la conduire loin de
son l i t , dans un héritage ou un prolongement d ’héritage qu’il a
ajouté à sa propriété riveraine, et q u i, n’étant ni adjacent ù
la rive ni correspondant à cette riv e , ne peut avoir aucun droit à
l ’eau. C ’est ce qui résulte des dispositions do l’art.
du Code
civil; c’est ce qu'enseigne Proudhon, toine 4» I>agc 29. (V o ir
644
5
le passage e’i -dessus cité.)
Comme possédant même une propriété traversée par ce cours
d’eau , le sieur Chandezon ne pourrait user de l’eau qnv dans Cin~
tervalle qu’ elle y p arcourt, comme le dit expressément le second
paragraphe de l’art. 644’ O r » cet intervalle s arrete au point () ; le
ruisseau de la Momie ne traverse la propriété du sieur Chandezon
que dans une partie de la ligne U Q ; et a cc dernier point se* ter
mine le bord de son héritage ; à ce dernier point, il 11c possède plus
�(
*5
)
même une seule rive du cours d’eau. Ainsi, aux termes de la l o i ,
c’est à ce point Q , qu’il devrait rendre l’eau à son cours ordinaire,
c ’est-à-dire, au lit du ruisseau ; car cela est impérieusement,
prescrit par l’art. 644 du Code civil, qui lui impose cette loi
comme condition attachée à l’usage de l’eau qu’il lui accorde ;
à la charge de la ren d re, à la sortie de ses fo n d s ,
à son c o u r s
o r d in a i r e , dit l’article.*
Et remarquons que , suivant la doctrine de M. Proudhon , lors
même que la propriété du sieur Chandezon s’étendrait, sur la rive
droite, plus bas que le point Q , il n’en devrait pas moins rendre
l’eau à ce p o in t, parce qu’il serait tenu de la ramener à son cours
ordinaire, vis-à-vis de la pointe ditfonds latéral qu i est le moins
prolongé su r l ’une des rives.
Nous ne rappelons cette opinion que pour mieux fixer le sens de
644
l’article
du Code civil ; car, dans l’espèce, le point Q , sur la rive
gauche, est môme le point le plus prolongé des deux héritages que
possède le sieur Chandezon sur les deux rives (V. le plan); en sorte
que le sieur Chandezon devrait rendre l’eau à son cours ordinaire,
même plus haut que le point Q.
L e sieur Chandezon obéit-il à cette prescription de la loi ?
Use-t-il seulement de J’eau dans l ’intervalle q u e lle parcourt sa
propriété ? La rend-il, comme il l’a prétendu, comme il l’a fait
croire au tribunal de première instance, qui a adopté aveuglément
ses allégations , la rend-il à l ’extrémité de cet intervalle, c ’est-à<bre au point Q , comme il le devrait?
Non , l’ eau ne revient p a s , l’eau ne petit pas revenir à ce point ;
clic est détournée de son cours ordinaire ; elle est jetée à un tout
autre aspect que celui où coule ie lit de la Monne ; elle ne peut plus
y rentrer naturellement, parce quelle se trouve dans un terrain
beaucoup plus bas que le lit du cours ordinaire ; elle ne pourrait y
revenu' qu’à l ’aide de travaux extraordinaires et ou creusant un
canal d’une grande profondeur, (pii consommerait en frais d éta
blissement des sommes considérables, dont Ventretien annuel serait
;iussi trop coûteux parce qu’il serait bientôt encombré par les
terres , par les sables, et que l’on sc verrait enfin forcé d’aban-*
4
�donner, comme on Va déjà éprouvé , parce que toutes les fois qu’on
a à vaincre des obstacles naturels, la résistance constante de la
nature finit toujours pur triompher.
Dans de telles circonstances, que peut-on penser de l’observation
des époux Chandezon, qui disent naïvement que l’eau étant sortie
de leur p r é , ils ne peuvent être responsables de ce qui arrive par
le fait d’ouvrages extérieurs à leurs propriétés?
L ’observation pourrait être do quelque justesse, si les époux
Chandezon rendaient l’eau à son cours ordinaire , et que ce cours
fût ensuite gêné par des faits indépendans de leur volonté.
Mais il arrive précisément tout le contraire. L ’eau, comme nous
l’avons déjà dit (et il est impossible qu’on nie cette vérité de fait),
l’eau n’est pas rendue à son cours ordinaire ; et les ouvrages dont on
•
•
*
*
i
p a rle , loin de nuire à la rentrée de l’eau dans le lit de la Monne ,
avaient pour but de l’y ramener ; mais ce but n’a pu être rempli.
Au reste, ce n’est pas aux riverains inférieurs à ramener dans
leur lit naturel, dans leur cours ordinaire, les eaux dont les époux
Chandezon veulent user ; c’est à eux que la loi impose cette con
dition absolue ; c’est à eux donc , ou à renoncer à l’usage des eaux,
ou à faire et à entretenir tous les ouvrages nécessaires pour exécuter
la condition sous laquelle cet usage leur est attribué.
Ainsi, les époux Chandezon violentla loidans ses principaux points r
Us la violent en ne se restreignant pas, comme riverains , à se
servir de l’eau à sou passage, pour l’irrigation du seul terrain qui
est adjacent à la rive, mais en la détournant pour la conduire à uu
terrain plus éloigné du ruisseau , et qui, n’étant pas exposé aux inconvéuicns des eaux , ne doit pas profiler de leurs a\antages ;
Ils la violent , même comme propriétaires de fonds traversés
par un cours d’eau , en ne se bornant pas à user des eaux dans
l’intervalle qu’elle y parcourt, en ne restituant pas l’eau à l’extrémité
de cet intervalle, et en l’étendant à une propriété que celle eau ne
parcourt pas , qui est au contraire séparée du cours d’eau par une
propriété étrangère ;
Ils la vio len t, en ne rendant pas l’eau à son cours ordinaire,
comme la loi les y oblige , et en la jetant, au contraire, à.u u c
�(
27
)
grande distance, et sur un terrain beaucoup plus bas , d’oii elle ne
peut rentrer dans son Ht ;
Ils violent aussi la loi sous un autre rapport, en prenant l’eau ,
«on dans la partie du cours qui est correspondante à leur propriété,
mais au-dessus, dans une partie du lit dont est riverain un proprié
taire étranger qui n’a pas le droit de disposer de l’eau au préjudice
des propriétés inférieures et riveraines.
Si les époux Chandezon se bornaient à prendre l’eau dans la ligne
de leur propriété, c’est-à-dire, dans l’intervalle du point B au point
O , les riverains inférieurs auraient peu à se plaindre , parce qu’ils
ne seraient privés que d’une faible portion des eaux de la rivière.
L e ruisseau de là Monne coule dans un vallon; et son lit est en
caissé de manière que la rive droite étant très-élevec et tresescarpée ne peut profiter des e a u x , tandis que les terrains , sur
la rive gauche , sont inclinés eu pente plus d o u c e , et peuvent
être arrosés dans leur partie basse.
L ’enclos des époux Chandezon est un petit monticule à trois
versans , l’un au midi du (*ké de la rivière l’autre au nord du
côté du chemin C D , et le troisième à l’est , vers les lettres G H I.
Si l’eau nécessaire à l’irrigation était prise seulement vers le point
B , ou même en amont mais dans un point rapproché , il ne s’in
troduirait dans la propriété.Chandezon qu’une très-petite quantité
d’eau; l’encaissement du lit en conserverait la plus grande quantité
pour les propriétés inférieures.
Mais les époux Chandezon vont aujourd’hui prendre l’eau
beaucoup plus haut que leurs propriétés , à
45
mètres environ
au-dessus du point l i , dans la partie du lit de la rivière qui
longe la propriété Bouchard, c ’est-à-dire, à un point dont le
niveau est beaucoup plus élevé que le point B , où le lit est moins
encaissé, et à l’aide d’un barrage qui n’a rien de fixe, qui n’est
formé que de simples pierres alignées dans le lit de la rivière, non
liées cntr’elles , mêlées quelquefois d’un peu de paille; à l’aide d’un
barrage qui varie de forme et de longueur à l’arbitraire du sieur
Chandezon, et que, d’année en année, il remonte,un peu plus
haut, le long de la propriété Bouchard ; en sorte que, depuis i
85 a,
il s’est emparé, dans tous les lems, de la plus grande partie de l’eau
�de la Monne, e l , dirns les tems socs, de la totalité de cette can.
Telle est la manière dont les époux Chandezon veulent s’appro
prier l’eau de la Monne.
En ont-ils le droit ?
La négative n’est pas douteuse. La lettre comme l’esprit de
l ’article
644 du
code civil le démontrent. Cet article permet au
propriétaire riverain de se servir de l’ eau à son passage, et à celui
dont le terrain est traversé p ar l’eau d’en user dans l’intervalle
qu’elle y parcourt. Mais elle ne l’autorise pas à s’introduire audessus de la ligne de sa propriété dans le lit du ruisseau, à remonter
ce li t , à y établir un barrage pour empêcher l’eau de couler dans
sou lit naturel, pour en changer le cours et pour la diriger vers
une propriété inférieure de
45 mètres au point ou elle
est prise.
Les époux Chandezon diront-ils que le sieur Bouchard le tolère,
et que lui seul étant riverain en cet endroit, pourrait seul aussi s’y
opposer?
Un tel argument serait la plus grande des erreurs.
L e sieur Bouchard n’est pas propriétaire de l’cviu de la rivière.
Cette eau est commune à tous les riverains ; el chacun d’eux peut
seulement en user sans avoir le droit de concéder à un autre ce
qui ne lui appartient pas à lui-même.
Comme riverain, le sieur Bouchard a le droit de se servir de
l’eau pour l'irrigation de sa propriété ; et dans le fait il exerce ce
droit.
Cet usage exercé par le sieur Bouchard pour son propre avan
tage, épuise tous ses droits ; il ne lui est pas d’ailleurs permis de
tolérer dans un autre ce qu’il ne pourrait pas faire lui-mème pour
son propre avantage. Il ne peut pas autoriser le sieur Chandezon ni
qui que ce soit à établir dans la partie du lit dont lui Bouchard est
riverain, un barrage pour conduire l’eau chez son voisin ; car ce
serait se rendre maître d’une eau dont il n’a qu’un usage personnel;
ce serait disposer de la chose des riverains inférieurs.
Cette doctrine ressort clairement des dispositions de l’article G44
du code c iv il, qui a entendu concilier les intérêts de tous les rive
rains, cl qui 11e veut pas que plusieurs riverains supérieurs puissent
�( 20 )
se concerter entr’eux pour priver les inférieurs des avantages qu’ils
peuvent retirer du Voisinage d’une x’iviere trop souvent désastreuse,
pour eux par ses irruptions.
Cette doctrine est aussi professée par M. Proudhon , dans son
Traité du domaine public . dont nous avons déjà transcrit le passage
si positif où il dit que le propriétaire d’ un fo n d s qu i borde un
ruisseau n’a le droit d ’y prendre que l’eau nécessaire à l’irri
gation de son propre héritage , e t qu’il ne pourrait y perm ettre
la confection d ’un aqueduc p our conduire les e a u x su r le fo n d s
d ’un autre q u i serait plus reculé ( V . tome
4 , page 429 )-
A in si, c’est sans droit que le sieur Chandezon s’empare de l’eau
de la rivière vers un point qui ne correspond même à aucune de
ses propriétés; et les x’iverains inférieurs sont d’autant plus fondes
et intéressés à s’en plaindre , qu’en ne prenant l’eau que près de
chez lu i, il n’en pourrait retenir qu’ une partie et ne priverait pas
les vastes prairies qui sont plus basses d’une irrigation dont elles
ont toujours joui.
Nous avons démontré clairement et positivement, il semble, que
l’article 644 du code civil ne conférait pas aux époux Chandezon
les droits qu’ils s’arrogent, et que par leurs entreprises ils blessaient
ouvertement la lettre comme l’esprit de notre législation sur les
cours d’eau.
Ici se présente une autre objection tirée de l’existence des canaux
et de l’usage des eaux, usage qu’ils ont exercé eux ou leurs auteurs,
disent-ils, depuis un teins immémorial.
Relativement aux canaux et à l’agage B aux frais de l’établisse
ment desquels les propriétaires inférieurs n’avaient pas contribué ,
dit-on, il est assez étrange qu’on se soit fait de celte circonstance
un moyen devant les premiers juges.
Cet usage, utile aux époux Chandezon seuls, ces rases ou rigoles
<ln’ils ont creusés dans leur pré, ne sont que nuisibles aux riverains
infér ieurs. Ceux-ci ne pourraient s’en servir, en eussent-ils le droit;
ds n’y ont jamais rien prétendu; ce n’est pas là que gît la question
de la cause.
Quant à l’argument tiré de l’usage des e au x, il csl facile d’y ré
�pondre; cl on le sentait si bien qu’on ri’y a pas insisté en première
instance. Aussi le tribunal ne s’y esw l pas arrêté:
1
Ce prétendu usage n’a pu acquérir aiicuri droit aux époux Chaiidezon, parce qu’il n’a été ni caractérisé, ni exclusif.
Il n’a pas été caractérisé par des travaux de main d’homme, éta
blis d’une manière fixe et propres à annoncer l’intention permanente
de s’emparer des eaux au préjudice des droits des riverains inté
rieurs.
E n effet, sauf un commencement de rase pratiquée dans la pro
priété Bouchard, en amont mais à peu de distance du point B , les
époux Chandezon ni leur auteur n’ont jamais pratiqué, sur le lit de
la rivière au-dessus de leur propriété , des ouvrages apparens et
solidement édifiés, tels qu’un barrage en maçonnerie, pour diriger
dans leurs héritages les eaux de la rivière de la Monne. Ils n’y ont
même jamais élevé d’écluse eu fascines soutenues par des p ie u x, ni
aucune autre espèce de construction solide qui détournât les eaux
de la rivière et qui put faire concevoir aux propriétaires inférieurs
la crainte d’en être prives.
Ils se sont toujours bornés, lorsqu’ils voulaient s’emparer de l’eau,
à faire instantanément dans le lit de la rivière et dans la partie de
cc lit, correspondante à la propriété Bouchard, un barrage mobile j
composé des pierres prises dans le lit môme de la Monne et aux
quelles ou réunissait un peu do paille, afin de détourner les eaux do
leur cours ordinaire pour les diriger, par une espèce de cannfctcm*
porairc , le long de la propriété Bouchard, jusqu’à la rase qui
commence à une faible distance de leur propriété particulière*
c’est-à-dire, près du point marqué B sur le plan.
O r de tels ouvrages, qui ne présentaient rien de certain , rien do
fixe, rien de positif, qui disparaissaient à la moindre crue d ’eau, au
moindre mouvement de la rivière , n’ont pti constituer une ser
vitude réelle de prise d’eau, ni attribuer un droit exorbitant, un
droit contraire aux prescriptions de la loi, celui d’aller prendre, sui*la rive d’un héritage supérieur cl à un point éloigné de son propré
héritage, l’eau que la nature comme la loi destinent aux héritages
�(
ê
'
3i
)
^
inférieurs lorsque le possesseur du terrain supérieur ne peut plus
en user lui-même sur sa propre rive.
Pour établir une servitude de prise d’eau, pour acquérir par la
prescription sur le lit d’une rivière , comme sur le terrain d’autrui
un droit exclusif à des eaux qui ne nous appartiennent pas, il faut
que la possession soit caractérisée par des ouvrages apparens et
fixes, qui n’aient rien de précaire et qui ne puissent pas être
considérés comme l’eiï'et de la simple tolérance du propriétaire su
périeur , ou comme ayant pu échapper à l’attention des propriétaires
inférieurs auxquels les eaux devaient arriver. On peut invoquer sur
cette question par analogie un arrêt de la Cour de Iliom, du 2G
avril 1826. (V o ir aussi l’article 6^2 du.Code civil.)
O r, certes, à la manière dont était formée l’espèce de barrage
pratiqué par les époux Chandezon ou leur auteur, et tant que ce
barrage n’avait pas été prolongé en amont d’environ
45
mètres et
élargi sur le lit de la rivière de manière à intercepter la totalité ou
la presque totalité des eaux; en un mot tant qu’il 11’y avait pas eu
832
abus comme en j
, époque de l’origine du procès, les proprié
taires inférieurs, ainsi que le propriétaire supérieur , n’avaient dû
donner qu’une légère attention à l’entreprise des époux Chandezon,
parce qu’ils n’en éprouvaient pas un préjudice sérieux et continu.
Cette entreprise ne causait en cil et aucun préjudice au sieur
Bouchard, propriétaire supérieur, un barrage peu solide et peu
élevé n’exposant pas son héritage à être inondé.
Les propriétaires inférieurs étaient eux-mêmes peu blessés dans
leurs intérêts, soit parce que ce barrage n’existait pas constamment,
soit parce q u e , même pendant son existence primitive, comme il
était plus rapproché du point II, il ne détournait qu’une petite portion
de l’eau et en laissait arriver la plus grande quantité aux prairies
inférieures.
Ainsi, sous ce premier rappo rt, l’usage des eaux invoqué par les
époux Chandezon ne pourrait leur valoir aucun droit parce qu’il
n’aurait pas été caractérisé et que leur possession n’cîxt été que pré
caire.
Mais il y a plus, cet usage n’a jamais été exclusif.
1
�Jamais, en eiïet, avant )
832 , les époux Chandezon, ni
leur au
teur ne s'étaient emparés des eaux arbitrairement, quand bon leur
semblait, et malgré la résistance des riverains inférieurs; jamais ils
u’avaient disposé de ces eaux à leur gré ; jamais ils ne les avaient
détournés abondamment et constamment au préjudice des proprié
taires inférieurs.
S’ils usaient des eaux de la M onne, ce n’était qu'assez rarement*
et en partie seulement comme nous l’avons déjà dit; en sorte que
la plus grande masse du cours d'eau arrivait constamment aux pro
priétés inférieures.
E t si quelquefois le barrage était maintenu ou disposé de ma
niéré à détourner une trop grande quantité d’e a u , les proprié
taires inférieurs se transportaient vers ce barrage toléré plutôt que
dû ; et tantôt ils le détruisaient, tantôt ils le réduisaient de manière
à faire disparaître le préjudice qu’ils en auraient éprouvé.
C ’est ainsi que les choses se sont passées jusqu’en i
; c ’est
ainsi q u e , jusqu’à cette époque, sans qu’il y eut de règlement formé
832
et bien ordonné entre les divers propriétaires des prés supérieurs
ou inférieurs, tous cependant profitaient tour à Lourdes eaux , quoi
qu’avec peu de régularité; tous jouissaient des mêmes avantages s’ils
étaient exposés aux mêmes désastres; aucun d’e ux, pas plus les
époux Chandezon que les autres , n’avait ni 11e réclamait de privi
lège exclusif sur ces eaux.
T el a été l’unique mode de possession des époux Chandezon
ou de leur auteur. O11 le demande, pourrait-on trouver dans un tel
usage des eaux, dans une possession aussi précaire, aussi incertaine,
aussi variable, aussi peu exclusive, le principe du droit, qu’ils ré
clament aujourd’h u i , de s’emparer à leur gré et sans mesure des
eaux de la Monne ; de les retenir tant qu’il leur plairait ; de les absor
ber presqu’enticrement, soit pour l’irrigation d’une grande étendua
de propriété non riveraine du cours d’e a u , soit pour l’entretien
d’un vivier qu’ils y ont récemment établi; enfin de changer la di
rection de ces eaux sans s’inquiéter de les rendre à leur cours ordi
naire comme le veut la loi: et de prétendre encore que c ’est à ceux
<jui en ont besoin à les faire rentrer dans leur lit, tandis que Ja loi
�( 33 )
impose expressément celte charge à tous ceux auxquels elle c»
accorde l’usage?
Reconnaissons donc que les époux Chandezon ne peuvent invo
quer en leur faveur une possession caractérisée et sufiisante pour les
autoriser à priver les propriétaires inférieurs des eaux communes
que la nature a destinées à tous les riverains; reconnaissons qu'ils
sont tenus de se soumettre aux principes que nous avons ci-dessus
développés sur l’usage des e a u x ; reconnaissons q u e ,) comme
riverains, comme propriétaires même d’héritages que le cours d’eau
traverserait, ils ne pourraient prendre l’eau que sur la ligne de leur
propriété, et n'auraient pas le droit d’aller s'en emparer au préju
dice des propriétaires inférieurs, sur la partie du lit correspondante
à la propriété Bouchard; reconnaissons que, même en usant de l’eau,
ils seraient tenus de la rendre à son cours ordinaire, à la sortie de
leurs fonds et au point même où ils cessent d’être riverains; recon
naissons, en un mot, que leurs prétentions, qui tendent à violer
toutes ces règles, doivent être repoussées, et qu’il est juste de mettre
un frein à l’usage arbitraire qu’ils veulent faire d’un cours d’eau
auquel beaucoup d’autres propriétaires ont aussi des droits.
Ceci nous conduit à examiner si un règlement d'eau doit cire
ordonné.
A la suite des principes poses dans l’article
644
du Code civil
sur l’usage des eaux accordé par la loi à ceux qui possèdent des
héritages bordés ou traversés par une eau courante, vienneut des
dispositions réglementaires écrites dans l’article
645 pour faire cesser
les contestations que cet usage peut faire naître.
645
L ’article
s’exprime ainsi :
« S ’il s’élève une contestation entre les propriétaires auxquels
« les eaux peuvent être utiles, les tribunaux en prononçant doivent
« concilier Vintérêt de ¿’agriculture avec le respect du à la pro« priété ; et dans tous les cas les régleuiens particuliers et locaux
« doivent être respectés.
Cette dernière partie de l'article reste sans application dans la
ca u se , puisqu’il n’cxisle aucun règlement local et que le but du
procès est d’en faire ordonner.
5
�( 34 )
Quant à la première partie, jamais cause n’en comrhanda plus
l ’applicaiion. La lutte est engagée entre un propriétaire qui ne
possède qu’environ 8,000 toises de terrain susceptible d’irrigation,
et qui, pour en augmenter les produits ou les embellisseincus dans
son intérêt privé , veut absorber ou détourner à son gré toutes les
eaux du ruisseau de la Monne et en priver plus de 120,000
toises de prairies inférieures , toutes d’une grande valeur et d’un
produit considérable, toutes garnies d’arbres fruitiers, toutes exis
tantes en nature de prairie depuis 1111 teins immémorial, et en pos
session depuis plusieurs siècles d’un droit d’irrigatiou dont le sieur
Chandezon voudrait aujourd’hui les empêcher de jouir.
' Sans doute l’intérêt de l’agriculture ne permet pas qu’on sacrifie
ainsi à un seul, et pour un terrain d’une médiocre surface, les droits
d’un grand nombre de propriétaires et la fertilité d’une vaste éten
due d’un terrain auquel l’arrosement est nécessaire.
Cette première considération suffirait seule pour faire ordonner
le règlement réclamé.
Nous pourrions aussi invoquer contre les prétentions des époux
Chandezon , soit des autorités nombreuses, soit la jurisprudence de
plusieurs cours.
Ces prétentions sont repoussées par les observations même qui
ont été faites au conseil d’é ta t, lors de la rédaction de cette partie
du Code civil.
«• Lorsque l’eau passe par plusieurs héritages, y fut-il d i t , sans
« que personne en soit propriétaire , que le modo de jouir n’est
« établi ni par le titre, ni par la possession, ni par des réglemens
* particuliers et locaux, les tribunaux déterminent la jouissance de
« chacun par un règlement qui fixe le teins pendant lequel chaque
« propriétaire usera des eaux et même l’heure oii il pourra s’en
/|5
«f servir; et l’article G veut qu’ils combinent ce règlement de matf nière à concilier l’intérêt de l’agriculture, c ’es t-à -d ire l’intérêt
« général avec le respect dù à la propriété (Esprit du Code civil
5
<t Sur l’article G/| ).
Ici Finlérct général est. tout en faveur des appelans, et l’intérêt
de la propriété ne peut leur être opposé, puisque
uous
savons que
�(
33
)
les eaux d’un ruisseau sont communes à tous les riveraius, et
que les époux Chandezon, riverains dans une très-faible étendue de
terrain, n’avaient à ces eaux qu’un droit proportionnel el par con
séquent fort restreint ; puisque nous avons vu aussi que les époux:
Chandezon n’avaient pas le droit de prendre les eaux au point du
lit où ils s’en emparent pour les conduire à leurs héritages.
Bien plus, dans l’espèce, le respect dû à la propriété est blessé par
les entreprises du sieur Chandezon, qui violent le droit que les
propriétaires inférieurs ont acquis à l’usage de ce cours d’e au , par
une possession de plusieurs siècles.
Malleville , sur le même article
645 , dit aussi que , « si l’un des
« riverains absorbait l’eau au préjudice des autres ou en prenait un
« volume considérable, c’esfle cas de faire un règlement entr’eux,
<f et que c’est l’objet de la seconde partie de l’article
645 .
M, Pardessus, après avoir posé en principe qu’un riverain ne
peut détourner l’eau en entier sur son fonds , ajoute ce conseil re
marquable :
x Si le volume était si modique qu’il ne fut pas possible d’y faire
» des saignées , et que par cela seul les eaux devinssent inutiles ,
« il vaudrait mieux les accordera un seul pendant quelques heures
« ou quelques jours, et par ce moyen les en faire jouir su ccesii« vem ent pendant un tems proportionné à leurs besoins, que de
* ne les leur donner que partiellement, et dès-lors en si petite
« quantité qu’ils se trouvent manquer d’un élément qui peut seul
v féconder leurs héritages ; en un mot les tribunaux doivent établir
« des règles de convenance et d’équité.
Telle est la vraie doctrine. Il ne doit cire permis à aucun riverain,
quoique supérieur, de s’emparer exclusivement de l’eau au préju
dice des riverains inférieurs ; et les tribunaux doivent s’empresser
de réprimer les abus et d’ordonner les réglcmcns nécessaires pour
une sage distribution des eaux.
C ’est sur cette doctrine que s’est fondée la Cour de Riorn, on
décidant par deux arrêts , l’un du
germinal en 10, l’antre du
5
27 nivôse an 12 , que le propriétaire d’un pré supérieur où passait
un ruisseau n’avait pu relcnir l’eau cl la détourner des prés iufe«
�e 36 )
rieurs. ( V o i r ;ccs arrêts dans le journal de la C o ur, an 12., pages
1 1 6 , 120 ).
o
On p<uit consulter aussi un arrêt du parlement de Paris , du
65
j 6 juillet i o , rapporté par Mornac.
C ’est encore en adoptant et cri consacrant cette doctrine , qu’un
ai’rêt de cassation du 7 avril 1807, rejeta le pourvoi contre un
arrêt de la cour de Dijon , qui avait condamné un propriétaire su
périeur et riverain à détruire des digues et des canaux qu’il avait
établis pour s’emparer de la plus grande partie de l’ean , au préju
dice des propriétés inférieures. Une des dispositions de l’arrêt ren
voie ce propriétaire supérieur ¿1 se pourvoir en règlem ent avec
les parties intéressées. L ’arrêt reconnaît donc que des réglemeijs
sont nécessaires dans de tels cas.
•
On oppose, il est vrai, un autre arrêt du 16 juillet 1807, qui a
rejeté aussi le pourvoi contre une décision contraire. Mais ce se
cond arrêt ne peut être invoque par les époux Chandezon sous plu
sieurs rapports : 1* parce que les propriétés de celui qui se servait
des eaux étaient traversées par des ruisseaux ; qu’il ne prenait les
eaux qu’à leur passage et dans la partie du lit qui était bordée des
deux côtés par ses héritages, et qu’il n’en usait que dans Vintervalle
où le ruisseau parcourait ses propriétés ; 20 parce qu’à la sortie
de ses f o n d s , et au point où il cessait d’être riverain, il les rendait
¿1 leur cours ordinaire.
O r le sieur Chandezon ne fait rien de tout cela : 10 il ne prend
pas les eaux dans la ligne de scs propriétés; il va les prendre, sans
droit,par pure tolérance, dans lapartiesupérieure du lit, devantrheritage lîouchard à qui ces eaux n’appartiennent cependant pas, et
qui ne peut légalement en disposer ni en laisser user au préjudice
des riverains inférieurs auxquels la nature comme la loi les destinent}
nous avons déjà prouvé cette vérité de principes.
2* Le sieur Chandezon n’use pas des eaux dans l’intervalle seule
ment où leur cours traverse scs propriétés; il les conduit sur un
lorrain éloigné du lit de la rivière ; et ce qu’il y a de contraire à tous
les principes , il ne les rend pas à leur cours ordinaire , il les dé
�( 3? )
tourne au contraire de ce cours pour les faire tomber sur un terrain
beaucoup plus bas d’ou elles ne peuvent rentrer dans leur lit.
L e second arrêt invoqué ne peut donc recevoir aucune applica
tion à la cause, et la doctrine que nous avons cmise reste dans toute
sa fo rc e , protégée par la loi comme par l’équité, comme par l'in
térêt de l’agriculture.
Cette doctrine a été appliquée par un troisième arrêt plus récent
de la Cour de cassation ; cet arrêt, en date du i o avril 1821, et qui
casse une décision contraire, déclare en principe, en visant l’article
645 du code sur lequel il se fonde, que «■lorsque des propriétaires
« de dilTérens terrains ont le droit de se servir des mêmes eaux, et
« que le mode de jouissance n’est déterminé ni par les anciens
titres ni par aucun règlement particulier et lo c a l , c’est aux tri« bunaux qu’il appartient de prononcer sur les points qui divisent
* les intéressés et de fixer des règles qui préviennent tous débats
« ultérieurs.
T e l est le point de droit que pose l’arrêt.
Ce point de droit s’applique exactement à la contestation présente.
Les eaux de la Monne sont communes à tous les riverains , et
tous'ontle droit de se servir de ces eaux; nous l’avons déjàprouvé.
S ’il y a des difficultés entre les riverains sur le mode d’usage de
ces e a u x , les tribunaux sont donc appelés à faire cesser ces diffi
cultés par un règlement fait dans l’intérêt de tous.
Et comment le sieur Chandczon pourrait-il être admis à s’y op
poser , lui qui y a un intérêt plus pressant que tout autre s’il veut
obtenir ou conserver l’usage légal d’une partie de ces eaux ; lui qui,
s’il 11 y avait pas de règlement , devrait être privé de toute prise
d’eau.
1
Car rs propriétaires riverains, même inférieurs , ont le droit de
1 empêcher d exercer aucune prise d’eau ailleurs que dev;,nt s011
propre héritage ; ils ont aussi le droit d’exiger qu’il fasse rentrer
dans le lit de la rivière les eaux dont il userait et qu’il les fasse ren
trer dans leur lit au point où son héritage cesse de border le cours
d’eau.
Or, comment le sieur Chandczon arroserait-il, en sc soumettant
�( 38 )
à ces prescriptions qui lui sont cependant rigoureusement imposées
par la l o i , comme condition expresse de la faculté d’user de l’eau?
Ainsi par sa résistance illégale et injuste au règlement qui est de
mandé , il s’expose lui-même à être privé absolument de l’eau dont
il abuse aujourd’hui,
Il s’expose à en être privé ; car comme nous l’avons déjà fait ob
server il ne pourrait argumenter de prescription , puisqu’il n’a pos
sédé que précairement, puisqu’il n’avait jamais usé avant i
832 que
d’une faible partie des eau x, puisque le barrage qu’il établissait illé
galement sur le lit du ruisseau vis-à-rvis la propriété Bouchard était
détruit par les propriétaires inférieurs dès qu’ils s’apercevaient que
l’eau ne leur arrivait pas ou qu’elle ne leur arrivait qu’en moindre
quantité , puisqu’enfin jusqu’aux nouvelles tentatives par lesquelles
le sieur Chandezon a voulu s’approprier la presque totalité de l’eau
commune pour s’en servir même à embellir sa propriété et à y
établir un ou plusieurs viviers, jusqu’à ces tentatives arbitraires, les
propriétaires inférieurs avaient suflisamment fait arroser leurs vastes
prairies.
Ces propriétaires inférieurs ont donc le droit de se plaindre et
d’insister sur un règlement qui ménage les intérêts de tous.
Ils sont d’autant plus dignes d’intérêt dans celle réclamation , que
leurs prairies, dont le terrain est presqu’au niveau du lit du ruisseau,
sont chaque année exposées à d’aifligeantes dégradations par l’inva
sion des eaux j et ils ont fait cette année-ci l’épreuve la plus désas
treuse de ce danger.
Les époux Chandezon, au contraire, donl le terrain est élevé audessus du cours d’eau, sont à l’abri de ces malheurs presque annuels j
et cependant ils voudraient seuls profiter du bénéfice des eaux, eux
qui n’en redoutent pas les incommodités , pour en laisser tous les
ravages dans les
momens fâcheux aux propriétaires inférieurs
qu’ils priveraient de leur avantage dans les inomens où elles pour,
raient être utiles.
n’nst pas ainsi que la justice
Ce
se distribue.
Loin de là; l’équité ;
et la justice commandent un ordre tout oppose.
^
Cîir selon la remarque de Proudhon : « Si les près infui'icurs
�( 39 )
•
« étaient sujets à des inondations dans les crues d’eau cxtraordi« naires , cc serait là une considération majeure pour leur laisser
«• pleinement l’usage des eaux d’irrigation dans les tems ordinaires,
» plutôt que de permettre au propriétaire supérieur de s’en empa«■rer, tandis que l’organisation naturelle du sol le met à couvert
« des mêmes pertes__Secundùm naturcini e s t commoda ciijus* que rei seq u i quem sequuntur incommoda. L . 10, flf de reg.
« ju ris. »
Le cas prévu par l’auteur est celui où se trouvent souvent les
parties.
Cependant, quoique dans les tems de sécheresse l’eau puisse être
insuffisante pour tous, les appelans se sont bornes à demander un
règlement qui divisât les eaux entre tous les propriétaires supérieurs
et inférieurs dans la proportion de l’étendue des propriétés respec
tives susceptibles d’irrigation. Celte réclamation était trop juste
pour que le sieur Chandezon lui-même ne l’eût pas accueillie, si les
conseils irréfléchis de son intérêt personnel ne l’avaient complète
ment aveuglé sur scs droits.
Aussi est-il le seul qui ait résisté à la demande en règlement.
Les autres intimés ne s’y sont pas opposés; ils s’en sont rapportés à
droit en première instance; - et s’ils ne se sont pas réunis aux appe
lans, c’est qu’il existe, à ce qu’il paraît, entr’eux et le sieur Chande
zon , des arrangemens secrets qui les désintéressent.
Il
est vraisemblable que devant la Cour les autres intimés reste
ront aussi neutres dans les débats , prêts cependant à profiter du
succès qu’obtiendraient les appelans.
Mais s’ils se montraient hostiles, la dissertation à laquelle on vient
de se livrer leur sci ait applicable.
Dans cette cause, un règlement d’eau est autorisé par la loi pour
l’usage d’un cours d’eau commun à un grand nombre de proprié
taires riverains, parmi lesquels il n’en est pas un seul qui ait un droit
de possession exclusive, et dont il est juste que tous recueillent les
avantages, les propriétaires inférieurs sur-tout,
exposés aux ravages des inondations.
beaucoup plus
Ce règlement d’oau, réclamé par beaucoup , refusé par un s e u l,
�est prescrit par l'intérêt de l’agriculture, qui ne permet pas que
de vastes et de nombreuses prairies de la plus grande valeur, soient
privées d’une irrigation de laquelle elles ont toujours joui, et ré
duites à une affligeante stérilité , pour fournir à la prodigalité de
l’arrosement et aux embellissemens d’une propriété unique d’une
bien plus faible étendue, d’une bien moindre valeur.
Ce règlement d’eau est voulu par l’intérêt légitime du sieur
Chandezon, à qui la l o i , rigoureusement appliquée , refuserait
toute participation à l’usage de l’e a u , puisqu’à la sortie de ses fonds,
il ne la rend pas, il ne peut la rendre à son cours ordinaire.
Ce règlem ent, enfin, est nécessaire dans l’intérêt de l’ordre
p ublic, pour prévenir les violens débats , les dangereuses querelles
que font naître l’usage et l’occupation des e a u x , et qui peuvent
produire de fâcheux excès , dans l’irritation qui jaillit du choc des
passions, excitées, sur-tout dans les tems de sécheresse par l’ur
gence des besoins d’irrigation.
La Cour, dans sa haute sagesse, ordonnera la mesure commandée
par les circonstances , comme par la doctrine, comme par l'équité,
qui est la première des lois,
M e A L L E M A N D , Avocat.
M* B O N J O U R , avoué,
R I OM ,
IM PR IM ER IE DE SA LL E S F IL S ,
PRES L E PA LAIS.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Martin. 1836?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Bonjour
Savarin
Johannel
Chirol
Tailhand
Debord
Veysset
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
irrigation
jardins
rivières
vin
prises d'eau
canal
cadastre
sécheresse
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieurs Martin, médecin ; Martin, greffier du juge de paix ; Monestier, Ussel, Reynaud, Maugue-Champflour, et autres propriétaires de Tallende, de Monton, de Saint-Amand, appelans d'un jugement rendu par le tribunal de Clermont ; contre dame Justine Ussel et le sieur Vincent Chandezon, son mari, adjoint de la commune de Tallende, y habitant, intimés ; en présence de la dame Duvernin, veuve Cisternes, en son nom et comme tutrice de Charles Cisternes ; de dame Hélène Cisternes, et du sieur de Varennes, son mari, assignés en assistance de cause, et aussi intimés ; en présence de la dame Monestier et du sieur Creuzet son mari, d'Etienne Bohat-Lami, Antoine Bohat-Tixier, Laurent Tixier, Hugues Bohat, dit le grenadier, et de François Ballet-Beloste ; tous aussi assignés en cause, et intimés ; en présence enfin du sieur Nicolas Barbarin, également appelant.
Annotations manuscrites.
plan cadastral.
Table Godemel : Cours d’eau.
en matière de cours d’eau, les dispositions des articles 644 et 645 du Code civil ne sont applicables qu’aux cas où les droits du riverain d’une eau courante sont égaux, et où il n’y a ni titre ni possession qui déterminent des droits spéciaux en faveur de l’un d’eux. – ainsi, lorsqu’il résulte, des faits de la cause, ou de l’état des lieux, ou des documens produits, que des constructions de main d’homme ont été faites pour conduire les eaux dans la propriété de l’une des parties, et qu’elle en a profité depuis une époque reculée, il y a lieu de maintenir sa possession.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1836
1800-1836
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2810
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2811
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53566/BCU_Factums_G2810.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Amant-Tallende (63315)
Veyre-Monton (63455)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cadastre
canal
doctrine
irrigation
jardins
Jouissance des eaux
prises d'eau
rivières
sécheresse
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53567/BCU_Factums_G2811.pdf
e2ec41d41ddbea6c892e8b61887ba2aa
PDF Text
Text
P o u r les sieur et d ame C H A N D E Z O N , intim és.
C o n t r e les sieurs M A R T I N ,
RAYNAUD,
M A IG E -
C H A M P F L O U R , et autres appelans ;
Eu
présence D e s sieurs et dam es D U V E R N I N ,
TERNE.
LAM Y,
C IS-
D EV A R E N N E , C R E U ZE T , B OHATBO HAT-T IX IE R , L A U R E N T -T IX IE R ,
H U G U E S B O H A T , et autres i ntim és.
♦
- »■■■■
A E n ten d re, les appelans, les sieur et dame Chandezon se
seraient rendus coupables d’une usurpation criante ; ils
feraient à une commune entière des dommages inapprécia
bles, et à l'agriculture un tort immense.Pour arroser environ
8,000 toises de pré, ils priveraient d’irrigation 120,563 toises
de. beaux et fertiles vergers , qui existent depuis un temps im m é
morial, qui produisent d'excellens fruits; ils s e mparereraient de l ’eau
sans mesure, lorsqu'ils n’auraient pas à en redouter les ravages ,
et dessécheraienl les p rairies des appelans; mais ils sauraient s’en
défendre lorsqu’elle pourrait leur nuire. D ans les instans de
danger ou le ruisseau devient un torrent dévastateur , ils auraient
la puissance de le rejetter dans son lit pour couvrir et dégrader
les p r a i r i e s inférieures. Enfin ils auraient, par de nouvelles œ u
vres et pour satisfaire une ambition démesurée, privé les
prés des appelans d une irrigation dont ils avaient toujours jo u i ,
1
�cl à laquelle ils avaient droit comme riverains. E t tout cela, les
époux Chnndezon l’auraient fait par un abus de l ’art. G6/j du
Code c iv il, où ils ne peuvent trouver aucun droit par la posi
tion de leur propriété.
>•
Ce tableau aurait quelque chose de plausible s ’il ne manquait
pas de la première de toutes les conditions: la vérité. Nous ne
la retrouvons pas plus dans le récit des faits que dans la des
cription- des lieux.
Nous ne craindrions pas d’aborder la question , en prenant
pour unique règle l’article G44 du Code civil et les droits ou fa
cultés qu’il accorde aux propriétaires riverains d’un cours d’eau.
Peu de mots suffiraient pour réduire à sa véritable valeur le
système des appelans.
Sur 120,563 toises de terrain que contiennent les deux ter
ritoires des Bazenux et d ’entre les eaux, les appelans, qui se
plaignent , en possèdent 3o, 8y 4 , c’est-à-dire le quart. Les
nombreux propriétaires des trois autres quarts (8c),G8gt.) ont
refusé de se joindre à eux , malgré les vives instances qu’on
leur a faites et les sollicitations à domicile pour obtenir des
signatures sur un projet préparé. Ces propriétaires savaient
bien qu’on ne les privait pas d’eau ; que leurs prés arrosent ,
et que les choses se passent aujourd’ hui comme toujours. Ils
étaient convaincus qu’ils n’avaient pas le moindre intérêt à
une semblable demande , qui ne tendait qu’à semer la pertubation, sans aucun,fruit pour personne. Ils se sont tenus à l’é
cart , restant spectateurs de celte lutte qu’ils avaient droit de
trouver extraordinaire.
E n ce qui concerne les 30,87/1 toises qui sont possédées par
les appelans, la plupart de ces propriétés ne sont ni bordées ni
traversées par le cours d’eau ; beaucoup en sont fort éloignées
cl joignent, au contraire, l’autre ruisseau appelé la Veyrc. Elles
n’ont aucun droit ni servitude sur les prés supérieurs. Il est
donc évid ent, d ’a’près les appelans eux-mêmes, que tous les
�(3)
propriétaires de ces prés non riverains n’ont aucun droit au
cours d’eau de la Monne , et demeurent sans qualité pour em
pêcher l ’usage d’un propriétaire riverain dans un point supé
rieur. Allons plus loin :
Parmi ceux qui bordent le cours de la M onne, il n’en est
pas un qui puisse prendre l’eau sur sa propriété et en user ci
son passage ; pas u n , c’est l’exacte vérité.
E t , enfin , ni les uns ni les autres ne peuvent rendre l’eau
à son cours ordinaire. Pas une goutte d'eau , après l’arrosement de leurs propriétés, ne peut retomber dans la Monne;
elles tombent toutes dans la Veyre, parce que le versant, des
prés les dirige de ce côté-là , sauf celles des Bazeaux qui re
tombent dans les prés de Monlon.
Donc, et toujours d’après les appelans, pas un d’eux ne
peut invoquer le bénéfice de l’article 644, ni un droit quel
conque sur le cours d’eau dont il s’agit. Si à côté de tout cela ,
nous ajoutons q ue, di', toutes ces propriétés qui bordent le
cours de la Monrie, celle des sieur et dame C l i a n d e z o n et le
premier pré du sieur Cislerne sont, précisém ent, les seuls à
qui on ne puisse pas faire cette objection , les seuls qui, après
avoir reÇu l’eau à son passage par des travaux (Vune liante an
tiquité, la rendent à son cours ordinaire, à la sortie de leurs
héritages, on aura droit de s’étonner d’ une semblable litige
oiYdcs hommes, sans droit sur 1111 cours d’eau , font un procès
à celui-là seul, q u i, se trouvant sur un point supérieur , a le
droit d’invoquer pour lui-même le bénéfice de la loi.
Y aurait-il plus de vérité dans cette autre assertion que les
sieur et dame Cliandezon savent se préserver des ravages du
torrent dévastateur , et le rejettent sur les prés des apelans? y
aurait-il plus de bonne foi à prendre pour exemple les évènemens de 1 835 ? 11 nous suffit de dire que les sieur et daine
Cliandezon qui reçoivent l’eau de la Monne quand elle est h
sonélévation ordinaire , n’ont aucun moyen de la refou ler,
1.
�aucun ouvrage défensif qui la repousse lorsqu’elle devient un
forrenl. En i 8315, ellearavagé, danspresqueloutessesparties,
leur propriété, qui a éprouvé plus de dégâts, à elle seule , que
toute la prairie des Bazeaux et d’entre les eaux.
Enfin, dit-on , la propriété des époux Cliandezon a reçu l’eau
sans aucun travail fixe ei permanent; lesieur Cliandezon en a
abusé en ]>rolongcan1, beaucoup , en amont'sur lu propriété B ou
chard , un simple barrage mobile qui ne constate pas une
prise d’eau régulière. Ce barrage a clé détruit plusieurs fois et
plusieurs fo is rétabli pour être détruit de nouveau , de là des lut
tes violentesX'n coup defu s il fu t tiré, cl si personne ne fu t blessé
alors, des malheurs graves étaient à craindre p a r la suite.
Qu’ est - ce donc que cette manière nouvelle d’accuser les
hommes les plus honnêtes ? Qui donc a mis dans les mains du
sieur ÎNJartiu et consorts fcette arme à deux tranchans? A-t-on
voulu insinuer que le sieur Cliandezon avait menacé quelqu’un?
que sa propriété avait été le théâtre de ces luttes violentes? ce
serait une odieuse calomnie. N ’a-t-on voulu énoncer qu’ un
fait étranger à sa maison, à sa propriété,;! !ui-m em c?il fallait
s’ exprimer autrement; la justice et la vérité l’exigeaient de
concert; maij lorsqu’on s’est engagé dans une fausse voie,
rien n’est à dédaigner pour en sortir ; telle est la position des
appelons ou de ceux qui usent ou abusent du nom de la plu
part d’entre eux, jusqu’à y comprendre des propriétaires qui
rie sont pas appelans et qui ne veulent pas l’être. Nous le di
sons hautement : le sieur Cliandezon possède sa prise
d’eau par des ouvrages en maçonnerie de la plus haute
antiquité auxquels il n’a rien innové. S ’il n’y a sur la rivière
qu’ un simple barrage en pierre, il n ’a jamais été détruit. Et
jamais personne n ’a pénétré sur la propriété du sieur
Cliandezon, ni pour y prétendre servitude, ni pour y porter
atteinte à ses travaux.
Abordons les (ails de celle cause, cl commençons par quel
�(5 )
ques explications sur la localité. Nous nous servirons du
plan que les appelans ont joint à leur mémoire, tout insuffi
sant qu’il est pour faire connaître des particularités im por
tantes. Il eût été mieux de produire le plan cadastral, plus
exact et plus détaillé. Nous l’avons sous les yeux , et nous le
produirons sà l’audience avec un plan spécial de la propriété
Cliandézon et de ses alentours; mais nous pouvons , avec le
plan visuel qui nous est présenté , faire connaître les faits de
la cause et indiquer tous les détails delà localité: il est essen
tiel de les bien saisir.
Nous ne pouvons p a s, pour décrire celte localité, nous arrêter
à la prise d ’eau du verger Cliandézon. Il faut .voir iô cours
d’eau d’un peu plus haut, le considérer dans son ensemble
et dans ses détails.
11 prend sa source dans la montagne, vers le village de
M om ie, qui lui donne son nom. Partout il arrose et fertilise
des prairies , met des moulins en mouvement. Presque
partout, aussi , il est assez encaissé pour que chacun soit
obligé de prendre l ’eau à un point plus élevé que sa pro
priété. Le régime de ce ruisseau est le même dans tout son
cours, depuis sa source jusqu’à son embouchure, parce que ,
nulle part, il ne peut servir à arroser les propriétés au moment
où il les rencontre ; en sorte que s’il s’agissait uniquement
d’appliquer l’art. G44 (^u Code c iv il, et dans la supposition
que chaque propriétaire eut le droit de faire à celui qui lui est
supérieur les objections que font les appelans aux sieur et
dame Chandezon , l’eau arriverait dans l’Allier sans que
personne eût le droit de la détourner de son cours; elle de
meurerait inutile pour tous, excepté cependant les époux
Cliandézon et le sieur Gislcrne, qui conserveraient, par la
position de leurs héritages, le droit de s ’en servir. Nous n’au
rons besoin, pour nous en convaincre, que d’examiner les
�détails de ce cours d’eau depuis St-Amant jusqu’au point de
réunion de celle rivière avec celle de Y eyre; c ’cst dans cet
intervalle que se trouvent toutes les propriétés des parties.
Nous devrons noter toutefois une grande différence de position
entre les prés qui existent depuis St-Amant jusqu’au chemin
e , F , G, h , i , k , et tous ceux qui sont au-dessous.
f
Il est évident que, dans les temps anciens on dût chercher
à utiliser ces eaux au profit de tous, en respectant toutefois
les droits de ceux qui pouvaient y prétendre par la position
de leurs héritages, par exemple les sieur et dame Chandczon
et le sieur Cisterne, comme nous venons de le dire.
Deux seules voies pouvaient être prises dans l’intérêt gé
néral d is propriétés inférieures ; ou l’accord de tous les pro
priétaires ou une opération administrative. Cela était nécessaire
puisqu’il fallait distribuer l’eau entre plus de 4°o parcelles
de près, qui ne pouvaient la prendre à son passage et qu’il
fallait établir des servitudes sur les uns au profit des autres.
Le premier moyen était peu praticable, plus de deux cents
propriétaires y étaient intéressés; cependant il n’était pas
impossible'; rien ne commande mieux les hommes que leur
intérêt, et il exerce une grande influence, là où il s’agit d’ob
tenir une chose à laquelle ou n’aurait aucun droit en s’isolant.
i La voie administrative avait bien aussi scs difficultés.
Toutefois elle pouvait éprouver moins d’entraves à une
époque où la distinction des pouvoirs n’était pas si nettement
tranchée.
Nous ignorons quelle voie fut adoptée à cette époque
pour arriver à ce but. Aucun document écrit ne nous l’ap
prend et nous n’avons pas besoin de le savoir; mais la localité
atteste qu’il tùl pris des mesures dans l ’intérêt de toutes ces
propriétés; elle en montre les vestiges, soutenus par une
exécution constante qui remonté au delà de la mémoire des
hommes et que les appelans veulent détruire. C ’ est ce qu’il
�(7)
faul bien suivre sur la localité, en la parcourant depuis Sf-Amanf
Au-dessous des maisons de St-Ainarul , il existe urt
moulin qui prend l’eau par moyen d’un barrage en pierre,,
construit sur la M o n n e , «à une certaine distance, en amont.
A côté du mouün et en descendant la Monne , se trouve une
prairie appartenant au sieur de Marlillat. E lle csl à un niveau
fort élevé au-dessus de la rivière, et ne peut être arrosée
qu’en prenant l’eau au béai du moulin. Le propriétaire du pré
en a le droit et l’usage. Il existe à côté de la vanne qui conduit
l’eau sur la roue du moulin , une seconde vanne qui n ’a,
jusqu’à présent, d’autre utilité que l’arrosement du pré quand
le moulin cliôme. 11 y a enlour trente ans le meunier voulut
contester cette servitude au sieur Marlillat. il fut condamné
à la souffrir. Au surplus la pente du pré rejette l’eau dans son
lit a près l’arroscmcnt.
Après le pré du sieur Marlillat, on en .trouve un autre,
appartenant au sieurBoucliard.il est, encore trop élevé au-des
sus du niveau de l’eau, pour qu’on puisse la prendre en tête de
la propriété. Aussi Bouchard la prend-il sur une partie bassedu
pré Marlillat. Cette prise d’eau , qui n’ est pas faite pour lui
seul, a des caractères trop marqués pour que nous ne nous y
arrêtions pas un peu.
Elle est absolument du même genre que celle du sieur
Chaud ezon. Sur le cours de l’eau on voit un simple barrage
en pierres prises dans le lit de la riv iè r e , puis une simple
tranchée à la berge du pré, et, a la suile, un fossé dans lequel
l’eau s'introduit sans autre précaution. Cette rase a , sur le
pré M arlillat, tous les caractères d’un droit. E lle le coupe en
deux dans une assez grande étendue, e t dans une d i r e c t i o n
presque diagonale. Elle est bordée de deux rangées de saules;
et enfin elle est couverte d’un pont en m a ç o n n e r i e qu’elle a
rendu nécessaire pour l’exploitation des deux parties du pré.
sans le droit d’autrui et des conventions entre eu x, le p r o ;
�(8)
priétaire de cette p ra irie , assez considérable, ne se fut pas
assujetti à tous ces inconvéniens ; il n’y trouvait pas le
moindre intérêt. La rase est complètement inutile pour l’arrosement de son pré ; elle n’eût pas étc faite dans une semblable
direction , si on l’eût faite pour l’intérêt du propriétaire, et
aussi celui-ci ne conteste pas qu’elle ne soit une véritable
servitude que constatent, de concert, l’état de la localité et
l’usage constant de cette prise d’eau. Dirait-on que cela ne
constate pas un droit parce que le barrage sur la rivière n’est
pas bâti à chaux et sable?
Vient ensuite un pré à la dame Villot. Il est arrosé par la
même prise d’eau que celui du sieur Bouchard, et il ne peut
l’être autrement ; elle exerce donc une servitude sur le pré
du sieur Bouchard et sur celui du sieur Martillat.
E n fin , on trouve un second p ré , appartenant encore à
B o u c h a r d . A sa jonction avec celui de la dame V illo t, sa
surface au bord de l’eau est de dix pieds, au moins, supérieure
au lit de la rivière ; il arrose et il ne peut arroser que par la
prise d’eau établie sur le pré Martillat, dont on ne lui con
teste pas l’usage.
Tous ces prés, qui sont considérables, reçoivent donc l’eau
pnrdcux servitudes, dont l’une s’applique au pré Martillat, et
l’autre aux trois prés inférieurs. C ’est sur le dernier de ces
p ré s, celui du sieur Bouchard que se trouve la troisième
prise d’eau, destinée à la prairie des sieur cl daine Chandezon.
Pourrait-on dire que les premières qui constituent des
servitudes assez graves ont été inutilement établies ? Si les
propriétaires, qui en usent pour des prés qui sont f°<’l
étendus, pouvaient absorber l’eau delà Momie, le sieur Chan
dezon pourrail-il les empêcher delà prendre, parce qu’ils ne
le peuvent pas en iace de leur propriété? il croirait être ab
surde, Voyons si.on est plus justç à son ygard.
Ici nous a r r i y o n s a v ^ siège de la contestation, et nous pouvons
�(9)
commencer à nous servir du plan, sans en reconnaître l’exac
titude , surtout dans les détails.
Aux abords de la propriété des sieur et dame Chandezon, le niveau des prés s’abaisse sensiblement par rapport au
lit de la rivière, et leur surface est beaucoup moins inclinée.
La tête de cette propriété n’a pas plus de trois ou quatre pieds
au-dessus du niveau de l’eau, et, avec une chaussée peu consi
dérable sur la rivière , on pourrait prendre l’eau sur la propriété
m êm e, pour son irrigation. Toutefois, cela eût été plus coûteux
qu’une rase prolongée dans la prairie du sieur Bouchard ; et,
d’ailleurs, il eût été possible que quelques parties basses de
cette prairie eussent été mouillées par le reflux de l’eau. Sans
chercher les motifs qui, dans ces temps anciens, décidèrent
les parties à prendre un mode plutôt que l’autre , il est certain
que la prise d’eau du pré Cliandezon fut établie sur le pré Bou
chard à 65 mètres en amont de la propriété Ussel. Un simple
barrage en pierres, prises dans le ruisseau même , fut établi dans
la même forme que celui qui existe contre le pré Martillat
pour rarrosement des prés Bouchard et Villot. Une rase fut
ouverte sur le pré Bouchard , et des ouvrages en maçonnerie
lurent construits pour régler l’usage de l’eau.
Alors, comme aujourd’hui, on ne pouvait passe dissimuler
que le propriétaire de cette prairie avait droit, comme rive
rain, de se servir de l’eau à son passage; que s’ il lui était plus
commode et moins coûteux de s ’entendre avec le propriétaire
du terrain supérieur , que de faire une construction a d hoc
en tête de sa propriété, cela ne changeait rien à son droit. On
ne pouvait pas se dissimuler davantage que les propriétaires
inférieurs, entre lesquels on se proposa de distribuer l’eau
restée libre après l’arroseincnt des prés supérieurs qui y avaient
droit comme riverains, ne pouvaient imposer aucune condi
tion aux propriétaires de ces prés. Au reste, des ouvrages furent •
établis, sans doute par une convention avec B o u ch ard , ponr
2
�I lo )
régler la prise d’eau du sieur U ssel, l’un sur la propriété de
Bouchard, l’autre entêtcde celle d'Ussel. llssont indiqués vers
la lettre b du plan , quoique d’une manière imparfaite.
L e premier est un déversoir construit à chaux et à sable,
pour rejeter l’eau dans le ruisseau lorsqu’elle s’introduit
dans la rase, et qu’on ne veut pas la mettre dans le pré.
Le second est un massif de maçonnerie angulaire, considé
rable, que le plan n’indique pas du tout, qui a le double
objet de préserver la berge supérieure du pré d’être entamée
par les eaux, sur les deux faces, et de ménager une ouverture
pour y recevoir celles qii’on destine à l’arrosement, et aux
autres besoins de la maison Ussel. Celle construction existe
de tous temps et ancienneté, et l’ouverture, faisant acqueduc
dans toute l’ épaisseur de ce massif, à été réglée de manière
à ne laisser pénétrer l’eau que jusqu’à concurrence de ce qui
est nécessaire. E lle a 20 à 21 pouces de large, elle est recou
verte d’un liundar, et ne peut jamais absorber l’eau de la
rivière. M. Ussel n’a jamais eu, d’ailleurs, aucun intérêt à l ’y
déverser tout entière, pour inonder son pré plutôt que pour
l ’arrofer. 11 suffit, au surplus, pour s’assurer que cela est
impossible, de considérer les proportions de la petite rase
d irrigation et de l’acqueduc couvert, établi dans le massif, avec
celles du lit de rivière ,etla quantité d’eau qui y coule habituel
lement. Tel est, au surplus , l’état de cette construction ,
établie dans les temps anciens au profit de celui qui y
avait droit. 11 ne faut pas s’étonner qu’après avoir réglé,
par la dimension des ouvertures, l’ usage de la prise d ’eau,
on n’y ajoutât aucune limite de temps. 11 était assez diffi
cile aux propriétaires inférieurs de l’exiger , pas même
au siôur Duvternin, propriétairc'du n° 72 , pour lequel, comme
riverain , il pouvait prétendre'à l’usage de l’ea u ; aucun
autre ne pouvait opposer au sieur Ussel un droit personnel
qui put devenir prohibitif du sien, ni prétendre aucune es
pèce de servitude sur la propriété Ussel.
�( 11 )
E t aussi les épouxChandezon ne craignent-ils pas d’altesfcr
que jamais, et dans aucun temps, personne n’a exercé de ser
vitudes de passage ni autres sur leur propriété, et qu’on ne
s’est jamais permis en plein jour, ou quand on pouvait J e voir,
d’aller loucher aux pierres de sa prise d’eau.
}
Nous devons donner ici une explication sur la situation
topographique du pré du sieur Ussel.Sa pente est, en général,
de l’ouest à l’est, puis du nord au sud. Une très-petite partie
a cependant son versant du midi au nord ; c’est la partie
qui joint immédiatement le chemin qui est marqué sur le
plan à cet aspect. Les lignes vertes, qui indiquent les rigoles
d’irrigation , témoignent que la majeure partie des eaux tend à
se jeter vers les points i et k , où elles tombent immédiate
ment dans la r a s e K , m. Quoique celte rase ait été établie
d’ une manière plus fixe en l’an I X , depuis le point e , il n’ exis
tait pas moins auparavant une rase d ’écoulement, se dirigeant
du point K vers le point m , ou a peu p r è s , et déversant natu
rellement une partie «les eaux du pré Ussel dans la rivière.
Nous mêlions en fail que la presque totalité du pré a son
versant de ce coté i , K , et qu’avant l’an I X , la majeure
partie de l’eau retombait dans la Monnc.
Qu’on ne dise pas que cela élait impossible par la disposi
tion des lieux. On pourrait le conclure de ce qui est dit au
mémoire des appelans; maison y donne une notice fort peu
exacte des niveaux, et, au surplus, nous donnerons là-dessus,
qand il en sera te m p s, des explications suffisantes.
Nous devons remarquer ici que le sieur Ussel était pro
priétaire de la totalité de cette p rairie, de toute antiquité,
si on en excepte la porlion marquée par la lettre J ,
laquelle appartenait à B allet, et n ’a été acquise qu’en 180g;
mais celte porlion de pré recevait aussi l’airoscmcrit, quoi
qu’elle ne joignît pas le ruisseau. Près du chemin , à l’aspecl boréal, la crête du pré Chanuêzon déversait, et déverse
t
¿à
• i
•
*
�encore une petite portion de l’ eau sur la gauche; mais elle
était nécessaire à l’arrosement du pré n° 3 14 » appartenant à
François F a b re , et on l’y appliquait, quoique ce pré ne bor
dât pas le cours d ’eau ; en fin, une petite partie de l’eau se
perdait sur le chemin.
11 faut faire ici une remarque importante. Ce n’est pas seu
lement pour son pré que le sieur Ussel avait besoin d ’eau ,
mais encore pour les autres usages de sa maison. Un abreuvoir
pour les bestiaux était établi de toute ancienneté au pied de
ses bàtimens ; il était alimenté par un filet d’eau qui aurait pu
être ramené de là au point k , mais qui avait été destiné de
tout temps à l’entretien dn routoir D , appartenant au sieur
Monestier , et qui y était conduit par un agage. Tout cela se
retrouvera dans un acte de l’an IX , qui est important à la cause.
Tel est l’état de la propriété du sieur Ussel. Nous devons,
pour achever cette description , parler des propriétés infé
rieures.
A la suite du pré Ussel se trouve celui du sieur C isterne,
ce pré triangulaire, qui est marqué par le n° 72. Au-delà du
chemin, et sans autre intermédiaire, se trouve aux n°‘ 320 et
321 une vaste prairie appelée Pré-Clos , qui lui appartient
encore. Constamment, comme riverain, il avait droit, d'irrigation
pour la première; pour la seconde , ce pouvait être une ques
tion , puisqu’il ne pouvait ni prendre l’eau à son passage, ni
la rendre à son cours, au moins dans sa presque totalité. La
pente du terrain la conduit dans la Veyre, cl rie permet pas de
la ramener dans la Monne. Or, une prise d’eau fut aussi établiepourlesieur Duvernin; et, pour celle-là comme pour les autres,
011 trouva plus facile de la prolonger, sur la partie de la rivière
qui bordait la propriété de Cliandezon, par un barrage on
pierre semblable aux précédons, et un massif de maçonnerie
qui s’avance sur la propriété Cliandezon, et qui a été fait plus
tard. Ce glacis ayant été emporté ou dégradé ( cl il l’a élé plu-
�•
-
-
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03)
-
r
,
sieurs f o i s ) , il a été-fait une convention à ce sujet entre les
époux Chandezon et l e sieur Cisterne. C ’est la seule conven
tion q u ’i l s aient faite pour celte prise d ’eau. Toute supposi
tion d’un traité secret pour la cause actuelle serait une calomnie.
Ici nous devons remarquer que quoique le Pré Clos ( n°'
320, 3a i ) ne pût prendre l’eau qu’à travers le chemin pu
b lic, qu’il ne pût pas la rendre à son cou rs, et la rejetât,
en presque totalité, dans la Veyre, elle lui avait été attribuée
comme aux autres, sans préjudice des droits que la loi
accordait aux propriétaires riverains supérieurs, et qu’on ne
pouvait pas s’empêcher de respecter. Aussi, à l’entrée du pré
ii° rj2 ( au point Q, l’eau est appliquée à l’arrosement de ce
pré par des saignées faites sur la rase principale qui se dirige
au point K, pour arroser le Pré-Clos.
Observons encore que s i, avec ce mode d’arrosement, le
sieur Duvcrnin , auteur de Cisterne, eût vu absorber l’eau par
le sieur Chandezon , il n’eût pas manqué de s’en plaindre
pour le pré n* 72; car, dans loules les suppositions possibles ,
elle était perdue pour lu i, puisqu’après avoir arrosé le pré
U s s c l, elle ne pouvait retomber dans le cours ordinaire
qu’ en suivant la rase d’écoulement depuis le point k , sans
profiter à son pré. O r , conçoit-on qu’il puisse êlre vrai
(pie le sieur Chandezon absorbe l’eau , et que le sieur
Cisterne, propriétaire plus riche et plus puissant que lui,
ne s’y oppose pas? qu’ il n’ait jam ais'fait entendre à ce
sujet la moindre plainte ? Aussi n’ esl-il pas vrai que le sieur
Chandezon retienne l’eau et en prive les propriétaires infé
rieurs. Nous verrons plus tard que le sieur Cisterne n’est pas
le seul à le reconnaître. Nous en trouverons l ’a v e u formel
consigné dans les écrits du procès par les propriétaires les
plus notables du village de iTallcnde, intéressés cependant à
se plaindre s’ il en était autrem ent, puisque leurs prairies sont
inférieures sur le même cours d ’eau.
�A la suite du Pré-Clos , entre ce pré et le chemin qui est
plus b a s, au levant, se trouvent d’autres prés appartcnans à
divers propriétaires. Ils ne joignent pas la rivière, si ce n’est
les n°* 3/j9 et 355 , et n’ont de moyen d’arroseirient que par la
prise d’eau du sieur Cisterne. A - t - e l l e été établie pour eux
comme pour lui Les époux Chandezon n’ont pas à s’im m is
cer dans cette question. 11 paraît qu’ils le prétendent , sans
former cependant aucune demande contre le sieur Cisterne ;
et celui-ci paraît disposé à leur en contester le droit comme
l’usage ; mais toujours est-il permis aux époux Chandezon de
trouver extraordinaire que, sans aucun droit personnel, autre
que celui qui dériverait de la prise d’eau du sieur Cisterne, s’il
existe , ils veuillent avoir plus de droits que lui. Quelques-uns
de ces propriétaires, en effet, ont figuré parmi les demandeurs,
douze sur trente-neuf.
E n fin , à la suite du chemin que nous venons d’indiquer, se
trouvent, d’une p a rt, les prés d’entre les eaux qui sont direc
tement au-dessous, et ceux des Bazeaux, qui s’étendent sur la
rive droite de la rivière jusqu’à la rencontre des chemins, qui
s’opère près du confluent de la Monne et de la Veyre. Ces
deux prairies, ni aucune des'parcelles qui les composent, ne
peuvent user de l’eau à son passage. Toutes sont plus élevées
que le courant. Elles n’avaient donc dans aucun temps ni le
droit de l’exiger, ni celui de prohiber aux propriétaires supé
rieurs le droit de s ’e n s e r v ir ; car la prohibition suppose que,
par l’usage de l’eau , le propriétaire supérieur nuit à des droits
positifs qui sont dévolus par la loi aux propriétaires inférieurs.
Au reste, la localité atteste le soin qui fut pris dans ces temps
anciens pour utiliser, au profit de tous les prés qui font partie
de ces deux territoires, des eaux qu’ils ne pouvaient pas exiger
par un droit qui leur lut propre, mais auquel ils pouvaient
être appelés à participer dans une distribution générale , alors
qu’elles e'taient abandonnées. C’ était là , nous le répétons , une
�(i5)
bonne mesure d'administration , ou la subite d’un bon esprit
d'intelligence entre propriétaires ; mais cela ne pouvait pas
devenir un droit négatif de facultés accordées aux propriétaires
supérieurs par la position de leurs fonds.
Aussi ne voit-on plus une prise d’eau pour chaque proprié
taire , mais une prise d’eau unique pour tous, dans chaque
territoire ; et là commencent des travaux q u i, en distribuant
l’eau suivant le besoin de chacun , dénotent des servitudes
établies pour le besoin des uns sur les autres ,. tandis qu’il n’y
en a aucune d’établie à leur profit sur les propriétés supé.
rieures.
On voit au point n la prise d’eau des prés d’entre les eaux.
Une rase les reçoit au moyen de quelques pierres prises
dans le lit de la rivière, et qui font un barrage semblable
aux précédons. Cette rase se prolonge jusqu’au fond des prés
de celle région. Chacun, pour aller chercher l’eau , est obligé
de traverser les prés des voisins jusqu’à la prise d’eau , si elle
n’arrive pas , et personne n’a le droit de s’ en plaindre, ni de
remonter plus haut que le point 1\ ; On voit , sur un grand
nombre de ces prés, les ouvrages de distribution , et spécia
lement des rases d’écoulement qui foutes conduisent dans la
y ? y re tous les égoiits de l’arroscment. Or, ces propriétaires
ne se plaignent pas , les uns contre les autres , de ce qu’ils.ne
rendent pas l’eau à son cours, et la jettent dans un autre
ruisseau à la sortie de leurs fonds. Pourquoi? parce qu’aucun
d ’eux ne prend l’eau en vertu d’un droit person n el, -mais
seulement en vertu d’ une opération d ’équité réclamée par
l’utilité publique, qui.leur a procuré de l’eau qu’ils n’avaient
pas droit d’exiger; qui la leur a accordée, non en telle quan
tité , mais pour ce qui pourrait leur arriver, et cela , quoi
qu’ils ne pussent pas la rendre aux propriétaires inférieurs.
Comment donc auraient-ils , ensemble , le droit de se plaindre
contre les propriétaires supérieurs ? Est-ce que cette distribu-,
�(i6)
tion raisonnable de l’eau , ce règlement écrit sur la pierre, et
duquel seul ilsliennent leurs droits , ne doit pas être respecté
dans toutes ses parties, et exécuté comme il l’a toujours été ?
est-ce qu’ils peuvent l’amplifier à leur profit, et grever les au
tres d obligations et de servitudes qui n’ont jamais pesé sur
eux, et qui ne leur sont imposées ni par la loi ni par la
convention? Où donc pourraient-ils en puiser ledroit ?
En ce qui concerne le territoire des Bazeaux, tous les pro
priétaires de ces prés sont encore réduits à une prise d ’eau
unique et commune à tous. On la voit tracée au point U.
11 n’y a pas de jour marqué pour ces. deux prises d’eau ;
elles la reçoivent journellement l’une et l’autre, ce qui prouve
très-bien qu’il y a ordinairement de l’eau pour chacune, e t ,
à plus forte raison , que les époux Cliandézon n’empêchent
pas l’eau d’arriver.
D ’ailleurs, les prés des Bazeaux ne rendent pas non plus l’eau
danslaMonne. Après les avoir arrosés, elle va tomber dans les
prairies de Monton.
Après avoir ainsi tracé l’état où la localité a été mise depuis
les temps anciens, nous devons parler d ’une manière plus
spéciale de ce qui s’est passé d epu is, et de divers changemens
q u elle a subis.
Chacun avait joui tranquillement, lorsqu’en Pan IX l’admi
nistration communale , provoquée p a r les propriétaires intéres
sés, voulut apporter quelques améliorations à l'arrosement
des prés des Bazeaux. Ce mot Bazeaux comprenait tout le ter
ritoire au chemin Æ, quoiqu'une partie soit désignée plus
spécialement par cet autre mot : Entre les eaucc. La mairie vou
lut diriger vers ces prés des eaux dont ils n’avaient pas joui
jusqu’a lo rs, et elle le faisait sur la demande de ces propriétaires
inférieurs. Quoique bien éclairés sur leurs droits, et certes,
il y avait dans le nombre beauboup d’hommes riches et ins
truits , ils ne demandèrent pas contre le sieur Ussel qu’il fût
�( *7 )
condamné à ne point se servir des eaux, ou à remettre dans
ta Monne celles qu’il n’y rendait ipas ; ils demandèrent à l'ad
ministration de les aider à recueillir ces eau x, et à les y recon
duire (i leurs frais. L ’administration communale voulut bien
leur prêter son secours.
Toutefois, l’administration avait des précautions à prendre
à L’égard des droits acquis. Il en était de deux sortes :
i° Ceux des propriétaires supérieurs qui avaient leurs prises
‘d’eau particulières dont ils avaient joui à titre de droit et sans
trouble', suivant l’ usage observe de tout temps;
a0 Ceux des propriétaires inférieurs, spécialement de la
prairie de Monton.
A cet égard, il faut observer que la prairie de Monton est si
tuée sur la gauche, et qu’elle est arrosée par la Veyre. On voit
sa prise d’eau sur le plan à la lettre ! . uOr, en recueillant, p o u r A
les jeter dans la Monne, une partie des eaux qui jusque là
étaient tombées dans la V ey re , on pouvait faire préjudice à
l ’arrosement de celle prairie. Tallende est une section de la
commune de Monton. On pensera bien que l’administration
communale dut y porter son attention. Tous ces intérêts
furent l’objet d’un arrêté du 18 brumaire an I X , qui est fort
important en la cause.
Les appelans énoncent cet arrêté, ou un aulrc du 19 ; ils en
p a r l e n t , c o m m e d ’une chose purement acciden
telle, et qui demeure sans intérêt. Cela n’étonne qu’à d e m i ,
quand.on voit, dans leur dossier, que les appelans n’ont fait
connaître à leur défenseur que l’arrêté d’exécution du 19 bru
maire , et leur ont dissimulé celui du 1 8 , qui contient t o u t e s
les dispositions essentielles.
Remarquons ici que l’arrêté était pris -par le maire et l ’ad
joint de Monton , les sieurs Marnat-Courbayrc el L u zu y, qui,
mieux que personne, pouvaient connaître les règlemens exé
cutés jusqu’alors , o u , au m oins, le mode constant d’cxécu-'
�l( *8 )
iion. Personne, au surplus > n’était plus intéresse à le leur
iairc connaître, s’ils l’eussent ignoré, que les propriétaires des
prés des Bazeaux.
Après, avoir visé la demande de ces propriétaires , et déc laré
qu’ils se sont procuré les renseigneinens les plus précis , les
maire et adjoint arrêtent :
i° Qu’il sera dressé un devis estimatif des constructions et
réparations à faire pour faciliter l’irrigation de la partie de prai
rie connue sous le nom des Bazeaux ;
» 2° Les réparations seront faites de manière à ce qu’elles ne
» n u i s e n t e n a u c u n e m a n i è r e , aux propriétaires riverains su» périeurs ou inférieurs , et à ce qu’elles ne diminuent pas trop
» sensiblement la masse d’eau qui sert à la prairie de Monton ;
» 3° Que le montant de l ’adjudication sera réparti entre
« tous les citoyens qui possèdent des prés dans la partie de
»territoire qu’il s’agit de faire arroser, proportionnellemenl
» à l’étendue de leur terrain. »
Ici tout est remarquable.
On s’occupe de diriger vers les Bazeaux une plus grandequantité d’eau. On sait que ce sont les sources de Sarzeix, vers
la lettre e ; et l’arrêté d’exécution du ig indique plus spéciale
ment l’eau qui sort du routoir de Moncstier , et celle qui sort
du pré Ussel. Ainsi l’objet principal de cette opération adm i
nistrative est d’en faire profiler les Bazeaux, et de faire, pour
cela, les travaux nécessaires ; mais qui donc doit faire les frais
de cette direction nouvelle donnée aux eaux qui sortent du pré
Ussel Estrce le sieur U s s e l, par suite de ce qu’un proprié
taire ne peut se ¡servir de l’eau qu’à la charge de la rendre h
son cours ordinaire? Non. Ce sont les propriétaires à qui on
yeut la fairç profiter. Donc on reconnaît ’les droits du sieur
Ussel par la position de son héritage, et les règlcinens anciens;
et.ce,n’est pas seulement l’administration communale, agissant,
dans l’intérêt général , |Ce sont encore les propriétaires des
�( i9)
Bazeaux qui les reconnaissent ; car c’est sur leur demande que
tout cela se fait.
On va plus loin : on reconnaît qu’on ne peut ni ne doit
nuire* EN a u c u n e m a n i è r e aux propriétaires riverains supérieurs
f ies sieurs Ussel et Cisterne), et a u x inférieurs (François
Fabre et autres) ; et quant à la prairie de Monton , on se borne
à dire qu’il ne faut pas diminuer trop sensiblement sa prise
d’eau, en dérivant une partie de celles qui tombaient jusque-là
dans la Veyre.
On reconnaît donc, chez les propriétaires supérieurs, le
droit de jouir comme ils jouissaient, et aux propriétaires de
la prairie de Monton, le droit un peu moins positif de pro
fiter des eaux qui leur étaient parvenues jusqu’alors ; cela
semble de touti^ évidence. La direction de l’eau et sa distri
bution entre les prés des Bazeaux demeuraient donc t o u t - à fait étrangères au sieur Ussel. Les propriétaires intéressés qui
avaient présenté la pétition, n’avaient rien réclamé contre lui
ni contre le sieur Duvernirt, parce qu’ils savaient bien ne pas
en avoir le droit.
L ’arrêté d ’exécution a bien aussi son importance.
Après avoir désigné le mur à construire e , f , destiné à
retenir les eaux qui viennent de l ’enclos Monestier , le pont
qui devra, pour les recevoir, couvrir le chemin de St-Am ant,
le mur qui devra être construit pour former, avec celui du pré
Chandezon, le canal de conduite ju sq u 'à la rase qui le sépare
d ’avec le p réB allet \cn I), on indique la construction d’un autre
pont en face de cette rase ; on prévoit le cas où le niveau de
pente à observer forcerait à descendre plus bas que le mur du
Pré-Clos, et on charge l’adjudicataire de reprendre ce m ur,
de refaire le pont qui sert d’entrée au Pré-Clos, s’il n’a pas
une ouverture Suffisante pour recevoir cette augmentation
d’ eau , et oh oblige l’adjudicataire à établir le fossé d’écoulèinent k, l , m, de manière à ce que l’eau puisse coiiler rapidement.
3.
�Sans doute, on n’avait pas fait tout cela sans avoir calculé les
possibilités, en prenant un niveau de pente; et l’entrepreneur,
qui s’obligeait à faire couler l’ eau rapidem ent , devait être
assuré que la disposition de la localité lui permettait de le
promettre. Il nesetrompait pas, non plus que l’administration,
qui, sans doute, avait pris scs précautions là-dessus. Nous dé
clarons à la Cour que, d’après un nivellement régulier, il y a
i/i pieds de pente du point E au point m , et qu’il n ’y a d’obs
tacle à vaincre q u ’une contrepente de 3 pieds 6 pouces du
point e au point h , qui exige un léger remblai, ou un canal as
sez profond pour retenir l’eau. Sauf à y revenir, nous passons
outre sur cette observation, pour ne pas interrompre la suite
de l’arrêté. L ’article 7 est remarquable. Il porte :
« L ’adjudicataire sera tenu de construire un autre pont
» sous lequel passera l'eau qui arrose le Pré-Clos. II pratiquera,
j) de plus, une rase destinée à faire arroser les prés de Fran» çois Faire. »
Ce pont, pour le Pré-Clos , couvre sur le chemin la rase
d’irrigation au point K, puis cette rase venant à rencontrer le
canal dont l’arrêté porte adjudication , le pont se continue sur
le canal par un aqueduc qui introduit l’eau dans le Pré-Clos.
On établit là complètement le droit d’irrigation du sieur
Duvernin, non-seulement pour son pré supérieur que tra
verse la rase q k , mais, encore pour le P r é - C l o s , quoiqu’il
ne puisse pas prendre l’eau de la Monne à son passage; on
reconnaît que, soit par le droit, soit par suite de l’usage, évi
demment fondé sur un règlement, ancien, les propriétaires
des prés inférieurs ne peuvent pas exiger qu’il remette l ’eau
dans son cours après avoir arrosé le.pré supérieur, quoique
rien ne fut plus facile en la laissant tomber dans le# nouveau
canal, aux points k n . A u lieu de cela, 011 ordonne la cons
truction d’un pont sous le chemin, et d’un pont aqueduc pour
introduire les eaux dans le P r é - C l o s , quoiqu’après l’avoir
�(21)
arrosé, elles retombent dans la V e y re , et qu’on ne puisse pas
la reconduire à la Monne par des travaux , comme celle qui
sort du pré Usscl. A in s i, quand ces propriétaires inférieurs
peuvent reprendre l’eau , ils le font à leurs frais ; quand ils ne
le peuvent pas, ils la laissent, et elle demeure perdue pour eux.
Pourquoi cela ? parce q u e , dépourvus de tout droit tiré
de la position de leurs héritages , ne pouvant ni prendre
l ’eau à son passage, ni la rendre à son cou rs, il sentent qu’ils
n’ont aucun droit d ’investigation contre l’usage Tes proprié
taires de prés supérieurs ; et ils font consacrer ce droit par
l ’administration communale, parce qu’ils reconnaissent n’avoir
d’autre faculté que celle qui peut résulter de ses règlemens
sur les eaux que ne prennent ou n’absorbent pas les proprié«
taires supérieurs.
Allons plus loin encore: on voit lë soin que prennent soit
les pétitionnaires , soit l’administration , quant aux droits
despropriétaires supérieurs. Quoiqu’on n’ait parlé que des pro
priétaires riverains, dont le drpit est incontestable, on oblige
l’adjudicataire à faire une rase pour l’arroscment du pré de
François Fabre ( n° 3 1 4 ) » cjui assurément est fort éloigne de
la Monne, et ne peut pas y rendre l’eau. Il arrosait autrefois
au moyen de la portion des eaux q u i, en sortant de l’enclos
U ssel, se jetaient sur le chemin. Ces eaux étant interceptées
par ces nouveaux ouvrages, on veut conserver à Fabre le droit
dont il avait usé, cl on oblige l’adjudicataire à faire une rase
pour lui. Cette rase existe sur le Pré-Clos. On la voit indiquée
au plan , et M. Cistcrne la souffre.
Avant d’aller plus loin, nous devons , comme nous l’avons
annoncé ,.nous expliquer un peu plus sur les niveaux de pente
de celte partie du terrain. A entendre les appelans, l’établis
sement de la rase K M était une folie. Au lieu d’avoir une pente
suffisante pour l'écoulement, on trouvait du point g au point
K une sur-élévation de plus de huils p ied s, qui rendait ce canal
�(22)
tout-à-fait insignifiant. Si cela était, ils ne pourraient s’en prendre
qu’à eux-mêmes qui l’ont provoqué, et non au sieur Ussel, qui
n ’y avait pas le moindre intérêt, et qui ne l’a pas demandé.
Mais serait-il donc vrai que, soit les propriétaires qui l’avaient
demandé, soit l ’administration qui l’avait ordonné, soit l’en
trepreneur qui l’avait exécuté, en s’engageant à faire couler l’eau
rapidem ent , n’avaient conçu qu’une absurde rêverie? Trente
ans d’une exécution facile et complète répondent d’avance à
cette argumentation ; mais nous pouvons aussi y répondre avec
la localité.
r
Il est bien vrai q u e , dans l’état actuel, la partie la plus basse
du chemin est le point g ; que la partie la plus élevée est le
point j , en face du chemin tracé sur le Pré-Clos, et que ce
point j a six pieds d’élévation sur le point g , ce qui n’empêche
pas que du point e au point j , il n’y ait que 3 p. 6 po. de conIrepcntc, comme nous l’avons dit ; mais cela ne fait pas obstacle
à l’écoulement des eaux.
Avant l’arrcté de l ’an IX , les lieux n’étaient pas ce qu’ils sont
aujourd’hui. L e chemin n’avait pas les mêmes niveaux aux
points que nous venons d’indiquer. Le grand pont qui est sur
laM onne,au bas dupréCisterne, n’existaitpas, el, comme nous
l’avons dit, la majeure partie de l’eau du pré Ussel tombant
vers les points i et k allait se rejeter dans la Monne , à une
certaine distance, par la pente naturelle du terrain.
L ’établissement du canal, e t, bientôt après, celui du grand
pont sur la M o n n e, apportèrent des changemens notables à
cette partie du chcpiin. L e canal devant être creusé assez pro
fond en certains endroits , tous les gravois et déblais furent
rejetés sur le chem in, qui fut surhaussé d’autant. Il fallut
d’ailleurs, bientôt après, pour rendre faciles les abords du
pont, les surhausser encore dans toute cette partie ; mais cela
n’ empêcha pas l'établissement ni Futilité du canal, qui a rem
pli son objet pendant fort long-temps; et, de même, cette con-
�0 3 )
trepente, qui s’applique uniquement au rliemin, n’empêche pas
qu’après l’avoir traversé par le canal établi en l’an I X , l’eau ne
trouve son écoulement par la pente naturelle du ferraïn de k
en >ï .
Ici nous devons dire un mot de ce qui p'est passé en 1822.
Depuis vingt-un ans, le canal avait rempli son objet; cependant
il était un peu engorgé, à défaut d’entretien , comme tout ce
qui est commun à une assez grande masse d’hommes. M. Reynaud , curé de Tallende, provoqua le nettoiement de la part
des intéressés. Comme d’ordinaire, il trouva, surtout chez les
cultivateurs, la réponsede l’insouciance et la résistance de l ’iner
tie. Cependant-quelques propriétaires notables l’aidèrent, et il
y parvint ; l’ eau coula rapidement dans le canal. Plusieurs fois
le sieur Raynaud a fait opérer ce nettoiement avant ou après
1822; mais n’étant presque aidé de personne, et les irais, qu’on
ne lui rendait pas, et q ue, comme curé, il ne voulait pas exi
ger légalement, n’étant plus en proportion avec l’intérêt privé
qu’il pouvait y avoir, il a fini par y renoncer. Au surplus, et
en i 83 o , une crue considérable ravagea l’enclos U ssel, ren
versa une partie des murs au long du canal, et y déposa des
sables et graviers qui formèrent encombrement. Il était tout
naturel qu’il ne voulût pas sc charger de ce nettoiement d e
venu plus considérable.
Ce fut encore en l’ année 1822 que tous les intéresses voulu
rent procéder entre eux. h un partage d’eau par quotité de
temps. Ils en chargèrent le’ sicur C h o u vy , expert des Martres
de Veyre. Y appelèrent-ils le sïeur Ussel, le sieur Cisterne ?
N on, certes , il n’y avait rien à régler de ces deux propriétaires
à eux , mais seulement entre e u x , comme propriétaires des
prés in férieurs, sur des eaux qui étaient, pour eux, purement
accidentelles.
Ce règlement est dans les mains du sieur Chandezon , qui
l’a attaché à son dossier. Comment l’a-t-il ? comme adjoint ? î l
�( *4 )
ne le nie pas et n’a pas besoin de s’en défendre ; niais en a-til abusé en refusant de le remettre ? c ’est toute autre chose.
Cette assertion n’ est qu’une fausseté. Ce règlement lui fut re
mis par le curé R eynaud, en 1827 , afin qu’il usai de son in
fluence pour engager tous les propriétaires intérressés, qu’il lui
faisait connaître , à conco.urir au rccurement du canal ; il l’es
saya , et 11e fut pas plus heureux que le sieur Reynand. On lui
répondit que cela n’entrait pas dans ses attributions, et il dut
se taire. Depuis ce temps, il n’a pas refusé de rendre ce règle
ment signé du sieur Chouvy. Le sieur R eynaud ne le lui a pas
redemandé, et il est prêt à le lui remettre. S ’il le montre, il
n’en abuse pas, et il y trouve le témoignage q u ’il n’est ni in
téressé ni obligé au partage que ses adversaires peuvent faire
entre eux des eaux qui leur arrivent.
L ’intérêt de cette cause est donc dans cette question de net
toiement et entretien de ce canal, ou, pour mieux dire , dans
les frais qu’il peut occasioner; car de quel droit les proprié
taires inférieurs , non riverains surtout , et ne pouvant ni
prendre l’eau à son passage , ni la rendre à son cours, vien
draient-ils en contester au sieur Cha&lezon l ’usage, quel qu’il
f û t , s’il'la leur transmettait à la sortie de son fonds ? Comment
d o n c , au lieu de nettoyer la rase , ce qui était si facile et si peu
coûteux , ont-ils jugé convenable d’ouvrir une lutte judiciaire?
Et quel procès ont-ils intenté? quels en ont été les moteurs?
par quels moyens y sont-ils parvenus? c’est ce qui nous reste
à examiner.
Le besoin d’arrosement, celui de réprim er des entreprises
usurpatrices, n’ont pasélé le principede cette action. La preuve
en est, que plus des trois quarls des intéressés refusent d’y
prêter leur appui. Mais deux ou trois hommes avaient éprouvé
quelques mécomptes. Ils en accusaient, fort mal à propos’, le
sieur Chandezon, et lui tenaient rancune. Ils n’ont vu rien de
mieux que de lui faire un procès.
�(25)
Il eût été par trop choquant de le faire avec trois ou quatre
noms, inscrits dans les qualitésde lademande, sisonores qu'on
pût les supposer. Il fallait former une masse compacte pour
s’appuyer d’une apparence d’intérêt général. Un acte sous seingprivé fut dressé à l’avance et colporté à domicile, pour obtenir
des signatures et s’assurer que, quel que fût l'événement,'
les inventeurs de ce projet n’auraient qu’ une mince quotepart
de dépens à supporter.
Qui mieux que Jean-Antoine Martin pouvait remplir ce
ministère ? On sait assez l’influence que peut prendre , dans
son canton , un greffier de juge de paix. Malgré tout cela, et le
puissant appui de M. Maugue-Cliampflour, et en faisant signer
des enfans pour leurs parens, on n’a pu réunir pendant six
mois de sollicilation que 5 i signatures sur plus de 200 pro^
priétaircs qui auraient été intéressés. L ’acte est daté du 25
juillet i 832 , mais n ’a pu être signé qu’à la longue, et après
beaucoup de courses dans les villages environuans. Les sieurs
Martin et Raynaud-Marlin y sont nommés commissaires, et le
11 mars i 833 , le sieur Martin, greffier, a ouvert la tranchée en
son nom personnel. C’était être fort conséquent avec soimême.
Cette assignation est donnée au sieur Ussel et aux sieur et
dame Chandezon , et on leur accole huit propriétaires notables
de Tallende, qu’on choisit, sans qu’on sache pourquoi,
parmi ceux qui auraient eu le mêmeintérêt que le sieur Martin.
Ce sont les sieurs Bohat le Grenadier, Bohat-Lamy , gendre
de M. Lam y , juge d’instruction ; Boh at-T ixier, Laurent,
Pierre et François T ix ie r , Ballet-Belloste , et les sieur et dame
Creuzet. E n demandant, contre tous, un règlement d’eau pro
modo ju g eru m , Martin dirige toutes ses plaintes contre le sieur
Chandezon, qui, en i 832 notam m ent , a disposé des eaux
comme d ’une propriété exclusive, en les tenant continuellement
détournées de leur lit....,., dans lequel elles ne rentraient p lu s ,
4
�( 26)
p a r la disposition des lieux. C ’est au sieur Chandczon seul
qu’on paraît en vouloir.
Le i " avril suivant, pareille assignation est donnée au sieur
Cisterne-Delorme.
L e l o i n a i , 49 adhérens ( les signataires) interviennent au
procès, copiant mot-à-mot, dans une requête, l’ exploit du
greffier Martin. Se disant propriétaires de prés situes sur Fune
et l'autre rive de la M onne , ijs s’en approprient les conclusions,
et la cause se lie avec six avoués, en l’absence du plus grand
nombre des intéressés, sans lesquels on prétend faire ordonner
un partage d’eau sous le nom de règlement.
'Après avoirconstitué un a vo u é, les défendeurs ont, succes
sivement, fait signifier leurs conclusions. Nous devons remar
quer celles de MM. Bohat-Lamy et autres, qui seraient plus
intéressés que personne à obtenir justice contre le .sieur
Chandczon, s’il avait abusé de ses droits. Nous les transcri
vons telles que nous les trouvons dans le dossier des appelans, à la date du n avril 1 834 *
>
« Attendu que le sieur Chandezon n ’a ja m a is refusé Feau a u x
» défendeurs, et que, si le sieur M artin a à se plaindre de lui ,
» cela ne les regarde nullement ;
»Attendu que les défendeurs n’ont jamais entendu se refuser
» au règlement d ’eau; q u e , loin d e l à , ils le demandaient;
»> mais que ce* règlement pouvait se fa ire à Fam iable, sans
» avoir recours à la justice;
» Attendu que la contestation élevée entre les sieurs M artin
» cl Chandczon ne concerne nullement les défendeurs, qui
» n ont pas à se plaindre du m anque d'eau;
» Donner acte aux défendeurs de ce que, sur la demande
« intentée p a r le sieur Martin et autres contre le sieur Chari» dezotiy ils s’en remettent à la prudence du tribunal.
Ils n’ hésitent pas à dire que c’est une demande du sieur
Martin et autres contré Chandczon. Tout le inonde, à Tallendc,
�( 27 )
en connaissait la cause et le but réels, et aussi ne faisail-on
pas la moindre attention aux autres assignés, pas même au
sieur Cisterne, malgré l ’étendue du Pré-Clos.
Les sieur et darne Creuzet, assignés comme le sieur Lnhnt,
pour leurs prés des Bazeaux, s’ en remettent également à droit:
« Attendu que la dame Creuzet n’élève aucune difficulté sui
» le mode d irrigation qui a été suivi depuis un temps irnmémo» rial ju s q u ’il ce jo u r ; qu’elle n’entend prendre aucune part
" aux contestations élevées par le demandeur ( elle ne voit que
» Martin ) ; e t , au cas où le tribunal ordonnerait un nouveau
» règlement, elle se réserve tous ses droits et moyens.
Les autres s’en sont égalemerrt remisa droit, même le sieur
Cisterne, qui n’a vu qu’une attaque dirigée contre le sieur
Chand ezon, sans s’apercevoir, peut-être, que si la demande
était admise telle qu’ elle a été formée , il aurait bien plus à en
souffrir que le sieur Chandezon.
Toutefois, ces conclusions sont remarquables.
• Tous y reconnaissent qu’il existe un mode d'irrigation qui a
été suivi de temps im mémorial ju s q u ’à ce jo u r , et qu’il est suf
fisant ;
Que si on veut faire un autre règlement, ils y. consentent ;
mais qu'il pouvait être fa it à l'arniable ( la preuve en est dans le
i'èglement de C h o u vy , en 1822) ;
Que si Martin a .à se plaindre de Chandezon, cela ne les re
garde pas; que pour eux, ils n'ont ja m a is m anqué d'eau , et que
Chandezon ne la leur a ja m a is refusée.
E t de qui émanent ces déclarations? de propriétaires de di
vers prés épars, avec ceux des demandeurs, dans les Bazeaux
<>u entre les eaux ; de propriétaires riches et placés dans une
position indépendante.
On concevrait très-bien la possibilité de difficultés avec les
uns sans qu’elles atteignissent certains autres, si chacun avait
su prise d’eau particulière avec un droit qui lui fut propre ;
4-
�mais lorsqu’il y a une seule prise d’eau pour tous, et que cha
cun doit en profiter à son tour, suivant la position de son fonds,
comment l’eau pourrait-elle être ravie aux uns sans qu’elle le
fut aux autres? comment pourrait-elle arriver à la prise d’ eau
n ou u sans profiler indistinctement à tous? et comment sept
à huit propriétaires, dont les fonds sont parsemés sur toutes
les parties de ce téneincnt, pourraient-ils n’avoir ja m a is m an
qué d'eau, tandis qu’elle aurait manqué pour les autres ? Cela
est évidemment absurde, et laisse le moyen principal, le
moyen unique des sieurs Martin et compagnie , dans la classe
des assertions fausses, qu’on ne craint pas de hasarder pour
soutenir un procès, lorsqu’on sait que, par des moyens pris à
l ’avance , on fera supporter les dix-neuf vingtièmes des frais
par scs voisins.
O r, comme il était bien constant qu’il n’y avait drattaque
réelle que contre Chandczon , la lutte ne s’est élevée qu’avec
lui dans les plaidoiries de première instance. Martin et com
pagnie se sont abstenus de toute plainte contre l’usage de l’eau'
que lait le sieur Cisterne pour le Pré-Clos; on n’avait pas même
assigné François Fabre, à qui le sieur Cisterne la fournit; et
aussi le tribunal n’a-t-il vu et n’a-t-il jugé qu’une cause entre
les demandeurs et les époux Chandezon.
« Les sieur et dame Chandczon o nt-ils le droit d’user des
» eaux de la Monne pour l’irrigation de leur p ré -v e rg e r supé» rieur a u x prés des dem andeurs, sauf à les rendre , à leur sor» l i e , à leur cours naturel ?
» Peuvent-ils être tenus de venir à un règlement d’eau arec
» les demandeurs cl les autres défendeurs ?
»Attendu que la copropriété de la prise d’eau dont il s’agit,
» de la part des demandeurs, n’ est pas justifiée;
» Qu’e n e ffel, d’une part, il n’est rapporté aucun titre, et,
» d ’autre p a rt, il n’existe aucuns travaux sur la propriété de
» Chandczon , faits et exécutés par les propriétaires inférieurs;
�( 29 J
» Q u’ainsi, les parties restent clans les termes des articles 642
» et 644 du Code civil, et qu’il n’est point établi que Chande» zon ait excédé les droits que lui donnent ces articles ;
» L e tribunal déboute. »
Le tribunal n’aurait-il fait qu’une bévue ? nous ne le pensons
pas.
Évidemment Chandezonaunc prise d ’eau sur la rivière, et,
en tête de sa propriété , des ouvrages en maçonnerie de la plus
haute antiquité , qui n’ont été faits que pour favoriser la prise
d’eau.
Evidemment il eu avait le droit comme riverain.
évidemment encore il en a usé de tout temps comme il en
avait le droit. L ’état ancien de la localité, et les pièces du pro
cès , depuis 1 8 0 1 , le démontrent.
Évidem m ent, enfin, les demandeurs n’ ont aucune servitude
sur son terrain, aucun ouvrage qui annonce le droit de modi
fier, dans la main de Chandezon, la faculté d’user de sa prise
d’eau dans toute son étendue, comme il l*a toujours fait.
L e jugement n’ est donc pas si loin de la question. Il a d’ail
leurs jugé la cause qu’on lui plaidait ; et le changement de
système adopté sur l’appel, prouverait seulement que les de
mandeurs n’ont pu Tasseoir sur aucune idée fix e , qui eût été
néanmoins le produit nécessaire du sentiment de leur droit.
Si nous examinons, au surplus, la partie principale de ce
nouveau système, la circonstance que Chandezon ne rend pas
l’eau à son cours après s’en être s erv i, seule circonstance sur
laquelle le tribunal ne se soit pas expliqué, nous en revien
drions à dire que tout l’intérêt réside donc dans la question
de savoir sur qui doit retomber le soin d’entretenir les travaux
faits en *l’an IX pour reconduire les eaux à la rivière ; et ce
n’ était pas alors une demande au partage d ’eau qu’il fallait
soumettre à la justice. Mais nous irons plus loin que le tribu
n a l, et nous prouverons q u e , dans leur propre système, les.
appelans sont"sans qualité , sans droit et sans intérêt.
�Au reste, que s’ est-il passé depuis le jugement ?
Dabord, des désastres sur les lieux par les orages de i 835 .
Qui en a souffert ? C’est ici que les appelans en imposent à la
justice , en présentant le sieur Chandczon comme ayant su s’en
préserver. Tous ses foins perdus , une grande étendue de son
verger raviné ou ensablé par une couche très-é p a isse, une
partie des murs emportés au nord, et au long du chemin qui
vient deSt-Am and, tels sont les avantages qu’il a trouvés, en
i 835 , dans le voisinage de la Monne, qui lui a fait éprouver des
dommages évalués à 6,000 francs par les commissaires.
Dans l’intervalle, le jugement avait été signifié parles sieur
et dame Chandczon à toutes 1rs parties en cause. Elles étaient
au nombre de soixante. Trente-sept seulement en ont inter
jeté appel par trois actes différens ; vingt-trois ont approuvé
le jugement. Parmi eux sc trouvent les sieurs Cisterne, Bohat
et sept autres intéressés, qui n’avaient pas voulu sc joindre
aux demandeurs, que ceux-ci avaient assignés, et qui figuraient
comme défendeurs en première instance.Restent donc quatorze
demandeurs , qui ont renoncé à leur demande , et ont reconnu
le bien-jugé du jugement.
Encore, parmi les appelans, nous voyons figurer le nom du
sieur Reynaud, curé de Tallendc. O r, nous le disons haute
ment , M. Reynaud n’est point appelant, il n’a ni remis sa co
pie du jugement, ni donné à personne le pouvoir d ’interjeter
appel en son nom , et il ne veut pas figurer sur l’appel. S ’il
n’intervient pas pour faire rayer son nom , c’est qu’il sait bien
qu’il n’est là que pour la forme, et q u e , quoi qu’il arrive,
on ne lui demandera jamais de contribuer aux frais. Nous ne
craignons pas qu’il nous démente. Pourquoi donc son nom se
t r o u v e - t - il dans l’un des exploits d’appel? La raisrni en est
simple. La plupart des appelans sont des cultivateurs qui n’a
gissent que par l ’impulsion d’autrui, et q ui, après avoir été
condamnés une première fois, n’étaient pas disposés, sur la
�(30
foi du sieur Marlin , à continuer cc procès en cour d’appel. Or,
rien ne pouvait mieux les y décider que le nom de leur curé,
dont ils connaissent le discernement et la prudence. A u ss i, ce
nom a-t-il été ajouté en marge et par renvoi sur l’original d’appel.Le sieur Chan dezon ne peut pas le compter parmi ses ad
versaires.
Qui sont-ils, au reste, en réalité? Le mémoire imprimé
semble nous les montrer par une désignation spéciale. Quel
que pensée , sans doute, a présidé à cc choix ,
Pour le sieur Martin , greffier, le sieur Martin son frère, le
sieur Reynaud-Martin, cela va sans dire. L e premier d’entre
eux s’est assez montré pour qu’il n’y ait pas d’équivoque. Ce
n’est pas que son intérêt, et le besoin d’irrigation avec droit
de l’iiblenir, aient présidé à sa demande contre ChandczonNous'prouverons sans peine que rien de tout cela n’existe en
sa personne. Il rtc possède dans ce ténement que deux pré^.
L ’ un, de 5 ares, au n° iGoî» du cadastre, nejoint la Monnc
que par un angle à son extrémité inférieure, et ne peut ni
prendre l’eau à son passage , ni la rejeter dans son lit quand on
l ’arrose; il la rejette dans la Veyre à un poinl fort éloigné.
L ’autre , sous le n° a 5 57 , est tout à fait à l’extrémité opposée au
cours de la Monne. Pour constater q u ’il est saris droit, il nous
suffirait de lui appliquer tout ce qu’il dit dans son mémoire.
Mais nous voyons figurerparmi ces personnages M. MaugueCliampflour.
Ju sq u ’ ici son nom avait etc modestement inséré à la fin de
l’acte d’union et des exploits signifiés en la cause. Comment
donc surgit-il tout d’un coup po^r se mettre en relief en tête
d’un m ém oire, reléguant dans la qualification générale et
autres la tourbe des adhérons dont on était allé quêter les
signatures ? Serait-ce par suite de son grand intérêt ? parccqu’il
aurait une grande étendue deces vergers riverain? de la Monne,
qui sont brillans de végétation et de riches fr u i ts ? Iiélas ! non ;
�(32)
M. Maugue possède tout bonnement dans ce territoire, sous
les n0! i/(.3 o, 3 i , 3 a , 33 et 34 , une saulée d’une surface de 45
ares 'jS mètres, jeune et re'gulièrement plantée, et qui n’est
pas destinée de long-temps à devenir un pré ; une saulée fort
éloignée de la Monne , et qui ne peut en prétendre les eaux ;
qui est, au contraire, riveraine de la Veyre, et ne pourrait qu’y
rejeter les eaux de la M o n n e , si elle les recevait. S e rait-c e
parce que ce nom ne doit pas rester dans l’oubli partout ou
il se trouve? Il ne nous appartient pas de dire le contraire;
mais ce ne peut avoir é t é ie motif de personne. Serait-ce donc
la grande part qu’il a prise dans ce p ro cès, qui l’aurait fait
considérer comme un des principaux intéressés? Cela est pour
le moins vraisemblable. Mais d’où lui vient donc ce grand
zèle, s’il ne sort ni de son intérêt ni de son droit? Il y a donc
quelque motif secret qui le porte à se mettre en peinè^pour
amener le succès? Ilélas! oui. Le sieur Cliandezon ne peut ni
fig n o re rn i s’y méprendre. Il connaît la cause de la lutte qu’il
est obligé de soutenir, et il lui suffit de pouvoir se rendre té
moignage qu’il n’a rien fait pour la p ro v o q u e r, moins encore
pour faire préjudice à ses voisins.
Après avoir ainsi fait connaître les faits et la procédure, la
discussion peut être simplifiée.
Les appelans ne veulent pas reconnaître aux épou x Cliandezon d’autre droit que celui qui résulte de l’article 644 î e*
ils étalent tout le luxe de l’érudition, pour prouver qu’il ne
peut avoir aucun droit an préjudice des propriétés inférieures;
i° Parce qu’il ne peut pas prendre l’eau à son passage, sur sa
propriété même ;
2* Parce qu’il ne peut pas la rendre, à la sortie de son fonds,
à son cours ordinaire ;
Parce que, dans tous les cas, il ne pourrait en user que
pour la partie de pré qui borde le ruisseau, et non pour des
�(33)
parties inférieures, que les appelans considèrent comme n'é
tant plus riveraines. Ils se plaignent aussi de ce qu’il en use
pour la pièce d’eau de son jardin.
Toutefois, la négation de toute espèce de droit, qui résulte
rait de ces trois propositions, leur paraissant trop absolue, ils
se bornent à demander un partage d’eau sous la modeste qua
lification de règlement.
• Ils fondent leur droit soit sur l’art. 644 » s° it sur l’art. 645
du Code civil.
E n abordant la cause sous ce rapport, et abstraction faite
des autres moyens qui constatent le droit des époux Chande
zon, nous dirions aux appelans : M cdice,cnra teipsum, «V euil
lez, messieurs, vous regarder Yous-mêmes, et, avant de jeter
la pierre à autrui, vpyez si tout ce que vous avez dit n’ est pas
négatif de vos droits et exclusif de votre demande. » Cela nous
conduit à examiner tout d’abord la qualité et la position de nos
adversaires. Ce n’ est pas tout, en effet, que de former une
demande et de dire à un homme q u ’on trouve en possession:
«V ous outrepassez les facultés que vous donne la lo i; vbus
èfes en élat flagrant d’usurpation. » L ’usurpation ne peut
exister que lorsque le fait qui la caractérise porte atteinte
aux droits d’autrui. Le propriétaire qui possède n’est pas
usurpateur, si un autre ne prouve que la propriété lui apparlient ; et celui qui use d’ une eau courante à son passage, et
même en la prenant au-dessus de sa propriété, par convention
avec le propriétaire supérieur, n’usurpe le droit de personne,
si personne ne peut dire que la loi, ou un titre quelconque,
lui donne sur ce cours d’eau un droit positif auquel cet usage
préjudicie.
O r, avant d’examiner quels sont, en réalité, les droits des
époux Chandezon, qui n’ont qu’à se défendre, voyons dans
quelle position sc trouvent les aggrcsscurs sous le rapport du
droit.
�(34)
Nous ne répéterons pas ici ce que nous avons dit sur le
nombre des intéressés qui n’ont pas voulu prendre part à la
demande : un quart a réclamé pour quatre-vingt-quatorze par
celles ; trois quarts ont refusé de s’y joindre pour deux centsoixante-seize autres. Sur soixante parties, vingt-trois ont exé
cuté le jugement ; et c’est en l’absence de cinq sixièmes de
ceux qui y auraient intérêt, si les appelans avaient raison, qu’on
prétend faire ordonner un partage d’eau. Ce n’est pas une rai
son de croire que les faits allégués soient vrais.
Mais quel est le droit de ceux des demandeurs qui sont ap
pelans ?
Ce droit résulterait-il d’un titre? On convient que non ;
Résulterait-il de travaux de main d’homme soutenus de la
possession ? N o n , encore.
Il ne peut donc que résulter de la loi et des facultés qu’elle
donne d’user d’un cours d’eau. O r , cela ne peut naître que des
articles 644 et G45 .
T iésulte-t-il de l’article 644 ? Non > certes. Nous n’aurions
besoin pour le prouver que de prendrele témoignage des appe
lans ; car tout ce qu’ils invoquent contre les époux Chandezon
leur est directement applicable.
Nous l’avons déjà dit : un très-pefit nombre de leurs prés
joint le cours d’eau. Sur cent huit parcelles qui appartiennent
aux demandeurs, vingt-neuf seulement le bordent; soixantedix-neuf en sont éloignées; et ceux-là, évidemment, ne peu
vent pas invoquer l’article 644. Parmi les vingt-neuf qui
bordent le cours d’eau, aucune ne peut prendre l’eau à son
passage, ni sur les prés voisins, pour l’irrigation de sa pro
priété; d’où pourrait donc naître le droit de ces propriétaires
sur le cours de la Monnc? Où puiseraient-ils celui de contre
dire l’usage d’un tiers qui la prend au-dessus d’eux ?
Il y a plus : tous ces propriétaires ne peuvent plus la rendre,
alors qu’ils la recevraient; chacun d’eux ne s ’en plaint pas
�(35)
conlre l’autre. Comment donc auraient-ils droit et qualité pour
se plaindre contre un propriétaire supérieur de ce qu’il la
prend et ne la rend pas?
A in s i, d’après l’art. 644 > les appelans demeurent sans droit,
comme sans titre, pour attaquer le droit et la jouissance
d’autrui, et leur action tombe d’elle-mêine ; aussi essayent-ils
de se réfugier dans l’art. 64$. Là , ils. prétendent puiser
des droits pris dans l’intérêt général, et y trouver l'autorisa
tion, aux tribunaux, d ’admettre une modification du droit des
propriétaires supérieurs, résultant de l’art. 644 Nous ne croyons pas qu’on puisse aller jusque-là. Alors
môme qu’on le pourrait, il ne faudrait pas scinder les disposi
tions de l’article, et les appelans viendraient toujours échouer
contre scs dispositions expresses.
E t , d’abord, nous pourrions dire que Part. 645 n e s’appplique qu’aux contestations qui pourraient naître entre les pro
priétaires auxquels l’art. 644 accorde des droits sur le cours
d ’eau. E n effet, c ’est après avoir déterminé le droit des divers
propriétaires, dont les fonds sont bordés ou traverses par une
eau courante, que le législateur ajoute immédiatement :
« S ’il 's ’élève une contestation entre les propriétaires aux
quels ces eaux peuvent être utiles, les tribunaux doivent con
cilier, etc......» D’où il résulterait que la loi suppose contesta
tion entre les propriétaires ayant droit, d’après l’art. 644. Aussi
M. Albisson, dans son rapport au tribunat, après avoir indi
qué les diverses facultés qui résultent de l’art. 644 * ajoute:
« Mais l’usage de ces diverses facultés peut éprouver des
» obstacles, donner ouverture à des empiétemens; et la loi
» doit les prévoir sans qu’il lui soit possible de p o u r v o i r à
» tous les cas......Tout ce qu’elle peut fa ire , c’est de s’en rc» mettre à la sagesse des tribunaux........
» Le projet statue donc q u e , s’il s’élève une contestation,
» les tribunaux devront concilier l ’intérêt de l ’agriculture
>» avec le respect dû à la propriété , etc. »
�(36;
Cela est assez clair, ce semble; et, en effet, il est sensible
que la loi n établit pas des droits pour s’en jouer à l'instant
m êm e; et, qu’en autorisant les tribunaux à prendre les me
sures qui concilient l ’intérêt de l’agriculture avec le respect
dû à la propriété, elle n’entend leur en donner le pouvoir
que dans le cas où il s’élèvera contestation entre les proprié
taires qui ont droit d’y participer, et non pour l’attribuer à
des tiers , au préjudice de ceux qu’elle y appelle.
Toutefois, cet article peut encore recevoir son application
aux eaux qui, n’étant dévolues a personne par l’art. 644» resw
teraient inutiles pour les riverains, si on ne prenait pas des
précautions pour les utiliser dans l’intérêt général ; mais ce
doit être toujours sous deux conditions :
L ’u n e , que cette faculté ne portera pas atteinte aux droits
apparlenans à des tiers, à quelque titre que ce soit;
L ’autre, qui est textuellement écrite dans l’article, que les
règlemens et usages locaux existans seront observés.
O r, les appelans, en vertu de cet article, peuvent-ils exiger
qu’on leur transmette l’eau au préjudice du sieur Chandezon?
Celui-ci n’a-l-il pas des droits et une possession dérivant do
la loi, et à laquelle on ne peut pas porter atteinte?
Peuvent-ils, d’ailleurs, demander un partage, un règlem ent,
si l’on veut, au préjudice des usages anciens, des règlemens
antérieurs exécutés de tous temps?
Les actes et les fajts de la cause ne constatent-ils pas ces rè
glemens, cet usage, cette possession?
Voilà ce qui nous reste à éclaircir, en examinant les trois
propositions des appelans.
Où donc, d’abord, peut être le doute sur le droit du sieur
Chandezon , d’ user de l’eau à son passage ? Est ce qu’elle n’est
pas bordée par sa propriété ?
L ’eau est trop basse, dit-on, et le sol de la propriété trop
élevé ; par cela seul le droit s’ est anéanti.
�(37)
Tout comme si celui dont la propriété borde une eau cou
rante, non dépendante du domaine p u b l i c n ’avait pas lfc
droit, pour se servir de l’eau, d’en élever le cours par une
écluse , pourvu qu’il ne nuise pas aux propriétés supérieures ;
Comme s’il n ’aurait pas le droit d’acheter une portion de
terrain supérieur, pour y prendre l’ eau avec plus de facilité ;
Comme s’il n’etait pas indifférent, et à la loi , et à son but,
et aux propriétaires inférieurs, qu’au lieu d’élever l’eau, comme
cela se pratique partout, ou d’acheter le terrain supérieur au
sie n , il se borne à acheter ce qui lui est nécessaire pour le
passage de l’eau, alors qu’il ne se sert de l’un ou de l’autre de
ces moyens que pour arroser une propriété qui borde l'eau
courante ?
Est-ce donc que , parmi les propriétés qui bordent un cours
<l’eau , celles-là seules seraient appelées à en profiter, sur les
quelles l’eau peut entrer d’elle-même et sans le moindre tra
vail ? Est-ce que ceux des propriétaires que la disposition des
lieux obligerait à quelques frais, et qui voudraient s’y sou
mettre , seraient privés par la loi de participer aux bienfaits de
la nature ? Est-ce que la prise d’eau de Chandezon n’ est pas
constatée par des ouvrages qui portent avec eux tous les ca
ractères du droit et le sceau de l’antiquité? Est-cc que ce droit,
si bien constaté, pourrait disparaître sur la réclamation du
premier venu? Dans quels articles, dans quels termes de la
loi trouverait-on des principes aussi extraordinaires? Laissons
cette objection dans la classe des puérilités. Ce serait lui
donner trop d’importance que de s’y arrêter davantage.
M ais, dit-on, Chandezon ne peut pas, à la sortie de son
fonds , rendre l’eau à son cours ordinaire.
Nous avons démontré, d’abord, que ceux qui proposent ce
moyen contre l u i , auraient mieux fait de remarquer que s’ il
pouvait porter du doute ¿ur le droit de défendeur, il repous
serait nettement l ’aclion du demandeur , qui demeure san&
�(38)
litre, comme sans droit, dès qu’il trouve en sa personne le
vice qu’il reproche à son adversaire, et sur lequel il fonde son
action.
Mais nous ne nous sommes pas bornés là. Nous avons dit ,
en fait, qu’avant les constructions de l’an I X , les eaux, sortant
du pré Ussel, se dirigeaient en majeure partie vers le point k ,
et retombaient dans la Monne avant les prés des appclans.
Une autre partie minime allait alimenter le routoir du sieur
Monestier.
L e su rp lu s, tombant dans le chemin inférieur, allait arroser
le pré de François F a b re , article 3 1 4 O r , en l ’an I X , tout le monde a reconnu le droit de Fran
çois Fabre, et celui de Monestier pour son routoir.
A cette époque, on voulut ramener toutes ces eaux dans la
Monne, et y joindre les eaux de Sarzeix. On fit les opérations
administratives que nous avons signalées. Le canal a rempli sa
destination pendant longues années. L e sieur U ssel, et, après
lu i, Chandezon, rendaient donc l’eau dans la Monne. Aucun
fait, aucun motif de droit, ne viennent donc contrebalancer
la faculté que lui donne la loi de se servir de l’eau à son pas
sage; et nous sommes sans cesse ramenés à reconnaître que
tout l’intérêt de la cause gît dans la question de savoir à la
charge de qui seront les frais d’entretien de la rase d’écoule
ment. Nous ne finirons pas sans examiner sérieusement cette
question. Nous nous bornons, en ce moment, à montrer qu’ il
ne peut s ’en élever d’autre.
Jetterons-nous un coup d’œil sur cc troisième moyen, qu’on
prend dans la forme du verger des époux Chandezon ? 11 ne
touche au cours d’eau que dans une petite partie, 1 15 toises,
et son pré se prolonge derrière celui du sieur Cislcrnc.
Est - ce que par hazard ce serait seulement la lisière qui
touche l’eau qu’on pourrait a rro s e r ? .Est-ce que le plus ou
moins de largeur ou de profondeur de l’héritage change le droit
�(39 )
du propriétaire ? Est-ce qu’il y aurait de l’importance à ce qu’il
fût rond, long, ou carré? qu’ il eut une forme régulière ou
irrégulière ? Est-ce q u e , enfin , la loi suppose tout cela, lors
qu’elle dit en termes exprès, et sans aucune condition: « Celui
» dont la propriété borde une eau courante, peut s’en servir
» à son passage pour l’irrigation de ses propriétés? » L à il n’est
même pas question de rendre l’eau à sa sortie.
Mais quand on voudrait y appliquer ces derniers termes, appartenans au second paragraphe de l’article, est-ce q u ’il faudrait
rendre l’eau au point où on l’a prise? est-ce qu’il faudrait même
la rendre au point le plus bas de ceux où la propriété borde
le cours de l’eau ? Il est beaucoup de cours d’eau qui bordent
des propriétés dans leur limite supérieure, et après l’arrosement desquelles l ’eau ne peut pas retomber dans son lit au
point où ce lit cesse de border la propriété. Est-ce qu’elles ne
seraient pas appelées à y participer? S ’il en était ainsi , 011 pri
verait d’irrigation une immense quantité de prairies sur
toute la surface de ce département, et on entendrait l’article
644 dans un sens absurde et inexécutable.
Au re s te , nous avons démontré qu’on la rendait avant l’an I X ,
qu’on l’a rendue depuis, et que, si aujourd’hui elle ne retombe
pas dans son lit, c’est parce que les appelans ne veulent pas
prendre la peine de l’y conduire, en entretenant des travaux
qui sont leur ouvrage, et qui ont changé, en l’an IX , la dispo
sition des lieux.
Or, y sont-ils obligés, ou bien est-ce le sieur Chandezon qui
doit l’y ramener à ses frais ? Nous avons dit que nous exami
nerions attentivement cette question, qui est en effet la seule
qui s’ élève sous le rapport de l ’intérêt.
Nous avons dit qu’avant l’an I X le sieur Ussel rendait à
leur cours ordinaire'la majeure partie des eaux qui sortaient
de^son p ré ; qu’à celle époque, le creusement du canal, et, peu
ap rès, la construction du grand pont sur la Monne avaien*
�amené Iesûrhaussementdu chemin; et, dès-lors, s ’il y avait des
obstacles au libre écoulement de l’eau, ils proviendraient des
travaux réclamés, à cette époque, par les propriétaires des
prés inférieurs; et, d’ailleurs, ces obstacles seraient peu con
sidérables, puisqu’on 'peut les vaincre par le simple entre
tien du canal construit en l’an I X , et q ui, pour son établisse
ment mêm e, n’occasionna pas de grands frais.
Si l’ époque de l’an I X était celle où s’arrête l’exercice du
droit des riverain s, il faudrait, à tout ce que nous avons d i t ,
reconnaître que les époux Chandezon avaient droit à la prise
d’eau, de la manière qu’ils en usent, et que les appelans
sont sans qualité pour l’empêcher ; mais les actes de l’an I X
11e sont là que pour constater un droit antérieur, et fort an
ciennement exercé; un droit consacré par l’usage des siècles,
gravé sur la pierre, sur d’antiques travaux de maçonnerie,
qui ne laissent pas d’hésitation ; et, ainsi, les documens écrits
viennent conforter et consacrer, par la reconnaissance et l’ap
probation publique des intéressés, ce droit et rcs règlerncns
constatés par les témoignages authentiques et non équivoques
de la localité.
Que voit-on , en effet, en l’an I X ?
Les prés supérieursau chemin arrosaient, suivant leurdroit,
spécialement ceux des sieurs Usscl et Cisterne. Quant aux
propriétaires des prés inférieurs , ils éprouvaient entre eux
quelques difficultés. Ils veulent les lever, prendre des mesures
pour améliorer le mode d’irrigation.
Quel moyen combinent-ils? Est-ce celui de faire cesser ou
de modifier l’ usage du sieur Usscl ? Non. Ils reconnaissent
qu’ils ne le peuvent pas. Usscl usait d ’un droit; et, outre qu’ il
était dans une position supérieure, aucun d’eux ne pouvait
arguer d’un droit personnel suffisant pour porter obstacle à
l'exercice du sien.
Ils reconnaissent qu’il est en p o s s e s s i o n , et ne redamenl pas
�(40
contre lui qu’il prenne part à leur règlement. Ils reconnaissent,
qu’après l ’arrosement de son verger, une partie de l’eau ne
retombe pas dans la Monne, et ils cherchent à la recueillir. Or,
ils reconnaissent encore que c’est à eux à le faire ; que le prix
des travaux doit être payé parions les citoyens qui possèdent des
prés dans cette partie du tenitoire qu'il s ’agit de fa ire arroser.
Pour y parvenir, ils réclament le secours de l’administration.
Elle condescend à leur demande , elle règle tout suivant leurs
désirs, et tout s’exécute ainsi qu’ils l’avaient demandé.
Ici deux choses concourent, et elles sont déterminante s
i° L ’état des choses reconnu par tout le monde en l’an I X ,
le droit des riverains supérieurs, comme la distribution se
condaire de l’eau entre les propriétaires inférieurs , résultaient
d’accords, ou de règlcmens locaux fort anciens.
2°. L ’art. 645 du Code c iv il, seul titre des appelans , ne leur
accorde faculté qu’à la charge de ne porter atteinte à aucun
droit, et il ordonne que, dans tous les cas, les règlemens par
ticuliers et locaux sur l ’usage des eaux seront observes.
O r , dans l ’espèce, ces règlemens, ces usages, étaient,
et sont encore d’autant plus respectables q u e , d’ une part,
ils existent de la plus haute antiquité ; que, de l’autre , ils n’ont
lait que consacrer le droit des propriétaires supérieurs, con
formément à la loi, et recueillir, au profit des propriétaires
inférieurs, des eaux qui devaient être distribués entre tous,
dès qu’ elles n ’appartenaient à personne en particulier.
Il est donc évident, qu’en réduisant l’intérêt et le droit à
une distribution entre les prés inférieurs, sans rien demander
aux riverains supérieurs; qu’en reconnaissant leur droit, et
l’impossibilité d’y porter atteinte en aucune m anière , en dé
clarant, enfin, que les frais, à faire pour recueillir la petite
portion des eaux qui ne retombent pas dans la Monne , sortant
du pré U s s e l, devaient être répartis entre eux seuls , ces pro- >
priétaires n’ ont fait qu’obéir à la loi, où ils cherchaient un
.
6
�titre, et se conformer à des règlemens et usages anciens, que
la loi leur ordonnait de respecter.
Donc, il était vrai, et ils ont reconnu qu’ eux seuls étaient
obligés à reconduire l’ eau dans son l i t , s’ils voulaient la re
prendre et l’utiliser à leur profit.
Plus de trente ans se sont écoulés depuis 1801 jusqu’a i 833 ,
époque de la demande et, dans cet intervalle, ces règlemens,
désormais écrits dans ces actes authentiques comme il l’étaient
sur la localité, ont été exécutés.
Où est donc le prétexte d’une demande qui tend à les dé
truire ? Où en est le principe ? Où en est le droit? Comment
les appelans ne voudraient ils pas voir qu’elle est repoussée
par l’art.'645 , et qu’en outre, après avoir, en l’an IX , changé la
disposition des lieux, et les niveaux du chemin, ils ne peu
vent pas rejetter sur le sieur Chandezon les frais d’entretien,
que cette innovation seule à rendus nécessaires?
Dira-t-on, encore, que le sieur Ussel contribua pour 100 fr.
aux frais de construction ? Si cela était, ce serait un fait com
plètement insignifiant, pourquoi ? Remarquons le bien :
1° Il ne serait pas muins reconnu dans les actes, que les
frais étaient à la charge des propriétaires inférieurs. Un mou
vement de bienveillance ou tout autre sentiment qui aurait
pu conduire le sieur Ussel à ce sacrifice momentané , ne chan
gerait ni sou droit ni la position rcspcclivc des parties.
u°. Dans toutes les suppositions, il ne serait pas moins vrai
que tout a consisté alors, comme à présent, dons la facilité
plus ou moins grande qu’on pouvait avoir de reprendre l'eau
t/iii sort du pré Ussel, et que la demande en partage de l’eau
à un point supérieur est une mauvaise contestation.
Dira-t-on aussi que le sieur Chandezon ne peut pas dé
tourner l’eau pour un réservoir qu’il a nouvellement créé
dans son jardin? C’est encore un enfantillage.
Ce filet d’eau est celui qui entretient le routoir de Monestier,
dont le droit est reconnu partout.
�(43)
O r, qu’imporic que celte eau, suivant aujourd’hui le même
cours, traverse un petit réservoir créé par le sieur Chandezon
dans un très-petit jardin ? Il n’en change ni le cours, ni la des
tination. Comment donc en abuse-t-il, et à qui fait-il préjudice ?
Est-ce qu’il a privé quelqu’un, surtout quelqu’ un qui y ait
droit? Est ce qu’elle n’arrive pas au routoir?
M ais, dit-on, le droit lui-même est fantastique, c’est un
usage purement accidentel, qui ne résulte pas d’un règle
ment. Ussel n’avait point d'oucrages apparais sur la rivière ,
ni barrage en maçonnerie , ni écluse cri fascines soutenue p a r
des p ie u x , mais un barrage mobile instantané , et une espèce
de canal temporaire le long de la propriété Bouchard. Tout
quoi ne peut constituer une servitude réelle de prise d'eau. P. 3 o.
Si nous avions besoin d’une servitude sur la rivière, nous
dirions qu’elle est suffisamment constatée par un barrage en
pierres; qu’il nous était inutile d’en apporter de lo in , quand
la rivière en fournissait assez; qu’il nous suffisait d’en faire un
barrage solide par sa propre nature , sans avoir besoin de lier
les pierres avec du mortier ou même du béton , alors qu’il
était suffisant, sans cela, pour introduire l’eau qui nous était
nécessaire; et cela seul prouve que nous n’avons jamais
pensé à arrêter la totalité de l’eau. Aussi, est-il vrai, qu’aujour
d’hui, comme alors, l’eau qui peut s’ échapper au-dessus du
barrage, ou à son extrémité supérieure, ou à travers les
les pierres, se rend directement vers ces prés inférieurs. E t ,
au surplus, l’écluse du moulin de St-Amant, quoique plus
considérable et mieux soignée, parce que cette position l’exige,
n’ cst-clle encore qu’ un simple barrage en pierres, sans ma
çonnerie, et que la rivière a emporté deux fois dans l’été de
i835.
M ais, nous n’avons pas besoin de servitude sur la rivière.
E n y prenant l ’eau nous usons d’un droit. Seulement il notis
faut servitude sur le pré Bouchard, pour prendre l’eau à un
�(44)
point plus élevé ; or, cette servitude existe par l’existence du
barrage appuyé sur son terrain, par la rase pratiquée sur son
pré, et entretenue par Cliandczon ; par le déversoir en maçon
nerie qui constate un droit évident, et, enfin, par les ouvrages
considérables et solidement édifiés en tête du pré Chandezo»,
lesquels font corps avec les précédons, et constatent à la fois
le droit et l'usage du droit, comme ils prouvent l’existence
ancienne des règlernens locaux, en vertu desquels il a joui ,
comme ont joui Cislerne, Bouchard, V illot, Marlillat, et
tous autres propriétaires supérieurs , vers lesquels nous
n’avons pas besoin de remonter. E t enfin, tout cela n’est pas
fait pour amener l’eau à un héritage plus reculé, comme l’in
dique M. Proudhon, mais bien pour l’introduire plus facile
ment dans un héritage riverain, et qui borde l’eau dans une
longueur de i 45 toises.
Nous ne nous amuserons pas à faire de la doctrine. Nous
la réserverons pour l ’audience , s’il en est besoin , et nous ter
m inerons, sur cet art. 645 et sur la demande en règlement
d’eau, pour reproduire une citation des appelans , p. 3/t.
« Lorsque l’eau passe par plusieurs héritages, sans queper» sonne en soit propriétaire, que le mode de jo u ir n'est établi
» ni p a rle litre, ni par la possession , ni p a r des règlernens
» particuliers et lo c a u x , les tribunaux déterminent la jouis» sance de chacun , par un règlement. »
Telle est la volonté de la loi expliquée en conseil d’état,
lors de la rédaction de l’art. G45 .
A i n s i, il n’y a lieu à faire ce règlement sur la jouissance
de chacun que lorsque l’eau n’est attribuée ou 11’apparlient à
personne, lorsque le mode de jouissance n’ est déterminé, ni
p a r la possession, ni p a r des règlernens particuliers et locaux.
Cela s’accorde fort avec ce que nous avons indiqué ci-dessus,
page 5 5 , que l’art. 645 n’est jamais applicable au préjudice
des droits acquis, ou attribués par la loi, cl qu’il n’autorise
�(45)
celte distribution d’équité, qu’à lYgard;des eaux qui ne sont
pas absorbées par les propriétés supérieures.
E t cela explique, dans un sens si évident, toutes les citations
du mémoire des appelans sur l’art. 645 , et Malleville et Par
dessus et Proudhon , et, autres, qu’il nous suffit de nous
référer à cette expression si nette et si formelle de la volonté
du législateur, pour repousser leur demande.
Résumons tout ceci, et il en sortira, ce nous sem ble, des
démonstrations claires et formelles.
Avant d’examiner la position des défendeurs, il faut que
les demandeurs fassent reconnaître leur propre droit, leur
litre , leur qualité, pour exercer une action.
Sur quoi repose leur droit ?
Sur un titre? Ils n’en ont d’aucune espèce?
Sur des travaux anciens qui le remplacent ? Il n’ en existe
pas et ils ne peuvent en argumenter:
Sur une possession qui serait offensive au droit des pro
priétaires supérieurs ? Ils n’osent pas l’alléguer, et ils ne récla
ment pas à ce titre,
Serait-ce donc sur la loi, et d’abord sur l’art. 644 du Code
civil ? N on, certes.
La plupart des propriétés des appelans ne sont ni bordées,
ni traversées par l’eau courante à laquelle ils prétendent droit.
Celles qui la bordent ne peuvent s’en servir à son passage
pour l’ irrigation.
Aucune ne peut, à la sortie de son fonds, la rendre à son
cours ordinaire.
Sous ce rapport, ils sont donc sans titre et sans qualité; ils
sont non recevables.
Serait-ce sur l’art. 645 ?
D ’après le législateur lu i-m ê m e , cet article ne permet de
toucher ni aux droits acquis à des tiers , ni aux règlemens p a r
ticuliers et locaux ; il n’est applicable qu’à ceux auxquels l’art.
�644 attribue des droits, lorsqu’il y a contestation entre eux, ou
lorsque l’eau arrive sans que personne en soit propriétaire , sans
que le mode de jouir soit établi, ou par titre, ou p a r la pos
session , ou par des règlemens particuliers et locàua'.
Ici, des règlemens de la plus haute antiquité sont attestés par
tous les signes locaux , par l’existence matérielle d’anciens ou
vrages établis sur tout le cours de la Monne. Ils sont reconnus
par des gctes émanés des demandeurs.
II n’y a donc rien dans la cause qui autorise à demander, ni
qui permette d’ordonner un nouveau règlement ou partage
d ’eau , et de condamner les propriétaires supérieurs, quel que
soit leur droit, à conserver l’eau à leur propre détriment, et à
souffrir la création sur leur fonds de servitudes onéreuses,
pour des propriétés qui n’y ont pas droit.
Mais si on examine Ja position des défendeurs, qu’y voit-on?
D ’abord, un pré qui borde l’eau courante, et le droit de s’ en
servir à son passage pour Virrigation de la propriété.
En second lie u , des travaux anciens et considérables qui
constatent, et des règlemens locaux pour l’usage de ce cours
d’eau , et l’usage que le sieur Ussel a fait de son d r o it , et une
possession conforme, qui n’a jamais éprouvé d ’obstacles.
E n troisième lieu, une reconnaissance formelle de ce droit
et de ces règlemens locaux, consacrés par des actes authenti
ques, et une exécution de plus trente ans qui les a suivis.
Si, donc, les époux Chandezon ne pouvaient pas rendre
l’eau à son cours ordinaire, comme on le prétend ; s’ils ne l’y
avaient jamais rendue, comme cela serait incontestable si
la disposition des lieux s ’y opposait, leur jouissance, leur pos
session indépendante de celte condition ne serait q u e plus for
melle, plus évidente, et les propriétaires inférieurs, qui ne
peuvent pas nier que la même impossibilité les frappe , ne
pourraient pas y porter atteinte.
.A^ais les époux Chandezon rendent l’eau à son!cours ordi-
�(47;
Ici ce n’est pas le cours naturel dont il faut s’occuper, mais
Je cours ordinaire. O r, quel est-il? C elu i, sans doute, q u ia
eu lieu de tout temps.
Une partie de l ’eau, après avoir traversé le petit réservoir
du sieur Chandezon, va tomber dans le routoir du sieur Moneslicr ( les époux Creuzet ). O r, ce droit est reconnu aux
époux Creuzet parles actes de l’an IX . Chandezon, lui-même,
ne peut pas la détourner, ni porter atteinte à ce règlement
local.
Une autre partie de l’eau tombait dans le chemin avant l’an
I X , et allait arroser le pré de François Fabre. On lui en a re
connu le droit ou la possession en l’an I X , tout en lui accor
dant un nouveau mode d’irrigation.
E n iin, la majeure partie, tombant au point K , ou dans le
pré Cisterne n° 72, regagnait la rivière au-dessus des prés des
appelans.
Ces deux dernières parties de l’eau ont été réunies en l’an
I X dans le nouveau canal destiné à les ramener à la Monne.
Ce canal, et la rase d’écoulement qui est à la su ite, sont deve
nus , comme cela existait auparavant pour une grande partie,
te cours ordinaire de l’eau, et personne encore n’a droit d’y
porter atteinte.
E n fin , ce dernier règlement, confirmatif des prem iers, et
exécuté pendant plus de trente ans, a reconnu que les pro
priétaires inférieurs devaient supporter la charge de l’entretien
de ce canal qui , en changeant l ’état des lieux, leur procurait
une plus grande quantité d’eau, et eux seuls ont fait, depuis
cette époque , les réparations d ’entretien.
Si nous allons jusqu’à examiner l’intérêt de la demande,
il disparaît complètement.
i° La prise d’eau de Chandezon est réglée par les dimensions
de l’aqueduc qui est en tête de son p r é , et il ne peut jamais
absorber l’eau de la Monne au-delà de ses besoins.
1
�(48)
2° Quoique le canal de l ’an I X n’ait pas été entretenu , et
qu’il ne recueille plus les eaux depuis i 85o', l ’eau n ’a ja m a is
m anqué aux prés inférieurs, et personne n’a à se plaindre que
Cliandezon la leur ait ravie.
3” Tout intérêt apparent devant disparaître , si le canal était
nettoyé, les propriétaires inférieurs , qui seuls y ont in térêt,
ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes, si la totalité de l’eau,
qui a servi à l’arrosement des prés supérieurs , ne leur arrive
pas.
E t cela seul nous explique pourquoi, sur soixante parties
condamnées , vingt-trois ont laissé acquérir au jugement l’au
torité de la chose jugée; pourquoi les demandeurs n’ont pas
mis en cause, quoique cela fût nécessaire, les trois quarts,
au moins, des propriétaires intéressés qui ont refusé de se
joindre à eux. Ils redoutaient que cette masse imposante de
propriétaires nevînt, tout d ’une voix, crier à la justice, comme
les sieurs B o h at, Tixier et autres : M . Cliandezon ne nous a
ja m a is refusé Feau.... L'eau ne nous a ja m a is manqué. La
demande de Martin contre Cliandezon ne nous intéresse pas.
Ils est donc évident au surplus et celà-scul le prouve, que
les époux Cliandezon ne cherchent pas à s'emparer sans me
sure de toutes les eaux de la M onne, au préjudice des prés
inférieurs. Ils veulent seulement arroser , comme ils l’ont tou
jours fait, et autant q u ’il en a besoin, un verger précieux de
y ,700 toises, qui borde l ’eau courante dans une longueur de
i 45 toises, et qui en a d’autant mieux le droit, que chaque
année cl à la moindre c r u e , il éprouve tous les ravages de ce lorrcnl.
A in s i, et en dernière analyse :
Du côté des demandeurs , ni d ro it, ni qualité, ni intérêt réel.
Du còle des époux Cliandezon , droit évident, possession
constante
I
’, établie sur des travaux de main d’homme fixes et
permanens, existans d’ancienneté, inléret gravc ct considé-
�( 49)
rable. Il n’en faut pas davantage, sans doute, pour faire reje
ter une prétention q u i , loin de trouver son principe dans les
lo is , a pour unique but de détruire des droits acquis , et des
règlemens et usages locaux observés depuis les temps anciens.
Elle e st, au contraire, par cela s e u l, évidemment inconciliable
avec la justice, comme avec la sagesse de la loi.
CH ANDEZ ON ,
M e DE VISSAC , avocat,
M e JO H A N N E L , avoué licencié.
R IO M IM P R IM E R IE D E T H IB A U D F IL S
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chandezon.1836?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Johannel
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
irrigation
jardins
rivières
vin
prises d'eau
canal
cadastre
sécheresse
doctrine
inondations
barrages
altercations
moulins
servitude
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour les sieur et dame Chandezon, intimés. Contre les sieurs Martin, Raynaud, Maige-Champflour, et autres appelans ; en présence des sieurs et dames Duvernin, Cisterne, Devarenne, Creuzet, Bohat-Lamy, Bohat-Tixier, Laurent-Tixier, Hugues Bohat, et autres intimés.
Annotations manuscrites. « 21 juin 1836, 3éme chambre, arrêt »
Table Godemel : Cours d’eau.
en matière de cours d’eau, les dispositions des articles 644 et 645 du Code civil ne sont applicables qu’aux cas où les droits du riverain d’une eau courante sont égaux, et où il n’y a ni titre ni possession qui déterminent des droits spéciaux en faveur de l’un d’eux. – ainsi, lorsqu’il résulte, des faits de la cause, ou de l’état des lieux, ou des documens produits, que des constructions de main d’homme ont été faites pour conduire les eaux dans la propriété de l’une des parties, et qu’elle en a profité depuis une époque reculée, il y a lieu de maintenir sa possession.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1836
1800-1836
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
49 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2811
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2810
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53567/BCU_Factums_G2811.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Amant-Tallende (63425)
Veyre-Monton (63455)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
altercations
barrages
cadastre
canal
doctrine
inondations
irrigation
jardins
Jouissance des eaux
moulins
prises d'eau
rivières
sécheresse
servitude
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54000/BCU_Factums_DVV16.pdf
9970c63ae178d7deb31cd1644a7eb07c
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
E T PIÈ CE S
JUSTIFICATIVES,
POUR
Sieur C h a r l e s - F r a n ç o i s B U S S E T , géomètre en ch ef du
cadastre du département du Puy-de-D ôm e, habitant la ville
de C le rm o n t, plaignant ;
SUR
Un Libelle anonime imprimé par le sieur H i p p o l y t e T IL L I A R D , imprimeur, habitant à Paris, et distribue parle sieur
R O D D E aîné, agent d'affa ires, habitant la ville de Clermont
L e plus grand des besoins de l ’h o m m e , vivant en société ;
le plus im p é rie u x , peut-être, est l’estime de ceux qui l ’envi
ronnent: le s e n t i m e n t d e son mérite personnel est ins u f i sant
pour exciter en lui les plaisirs qui doivent constituer son bon
heur. Agité par toutes les affections sociales, il ne saurait
goûter les charmes d ’un sentiment tranquille, et qui ne s’é
lance pas au dehors; sa propre estime ne saurait toujours le
dédommager des sacrifices de la vertu ; tous scs efforts doivent
donc avoir pour but de déterminer en sa faveur l ’opinion de
ses semblables, et, dès cet in stan t, l ’existence morale de
l'homme doit dépendre de l’opinion des autres hommes.
L e prix qui est attaché à l’estime et. à la réputation, doit etre
îa mesure du mal que fait celui qui enlève cette propriété
sociale à un de scs semblables; aussi les libelles et les diff amations publiques, ont ils été punis par les lois de
les
peuples où la licence n’a pas été confondue avec la liberté..
Si on consulte les lois de celle nation ou la liberté d’écrire
I
�a été le plus respecté, on y verra qu’elles proscrivent les li
belles , et qu’elles les punissent à proportion de la perversité
qui les a dictés.
En Angleterre , l’auteur d’un libelle infamant est puni ,*
quoiqu’il ne soit, pas calomnieux. La vérité de ses assertions
ne le dérobe pas à la rigueur du châtiment, son écrit étant aux
yeux de la loi une accusation illégale , destinée à troubler la
tranquillité du citoyen , puisque ce n’est pas une accusation
judiciaire qui ait pour objet de purger la société du méchant
qui s’occupe à lui nuire.
La nalion la plus sensible à l’honneur, devait aussi le plus
fortement garanlir ce premier bien de l’homme ; aussi nos lois
érigent-elles la d i f f a m a t i o n en délit, et en substituant cette
expression au mot calomnie jusqu’alors employé , font-elles
suffisamment connaître que les législateurs ont senti qu’il
était impossible d’autoriser une personne à publier, sur le
compte d’un autre , des faits dont la publication causerait à
ce dernier un dommage r é e l, fussent-ils d’ailleurs vrais. De là
le principe qu’une publication qu’il y aurait une sorte de
contre-sens à déclarer calomnieuse , doit toujours être con-^
damnée comme diffamation.
Un Libelle a été publié contre lê sieur Busset : l’auteur p r i n
cipal de celte œuvre serait encore bien jeune ; cependant, au
premier coup d ’œil, on s’assure qu’il a fidèlement observé toutes
les règles de ce genre de composition. C’est un petit livre
d’injure , et il faut que ces livres soient pelits, parce que leurs
auteurs , ayant peu de raisons à donner, n’écrivant point pour
instruire, et voulant être lus , sont forçés d’être courts ; ce petit
livre n’a point de nom d’auteur , on en devine la raison ; les
assassins craignent d’être saisis avec les armes défendues.
Si ensuite on se reporte au titre, et que l’on parcoure les
vingt premières pages de cette étrange production , on s’écrie
comme malgré soi : Si c’est légèreté, méprisons ; si c’est
folie, ayons-en pitié ; si c’est dessein de nuire, pardonnons;
�cï quoique chaque ligne soit la preuve que le libeîlistc a voulu
iàire porter sa diffamation sur les goûts , sur ce qu’il désigne
comme les faiblesses ou les ridicules du sieur Busset, ce der
nier se serait bien gardé de lui intenter un procès, de peur de
devenir par cela même vraiment ridicule. Usant du privilège
de l’âge et de la supériorité de considération acquise par des
travaux honorables , il aurait peut-être bien pu ajouter de
nouveaux conseils à ceux que jusqu’i c i , il a si inutilement
donnés à ce jeune imprudent. Il aurait pu lui dire: « Qu’avez» vous fait ? Je vous ai reçu dans ma maison , vous avez été
# mon commensal, mon am i, mon obligé, et vous me dif» faniez , e t v o u s l i v r e z au r i d i c u l e votre bienfaiteur ! repentez» vous , jeune fou, d’une œuvre où vous n’avez d’autre mérite
» que d ’avoir changé en poison contre m o i, les bontés dont
» j’ai eu la faiblesse de vous combler; dérobez-vous au mépris
» public, j’y consens ; mais retenez bien , pour l’avenir, que la
» vie d’un forçat est préférable à celle d’un faiseur de libelle ;
» qu’il vit dans la fange et dans la crainte ; qu’il n ’y a point
» d’exemple qu’un libelle ait fait le moindre bien h son auteur,
» cl q u e j a m a i s on no r e c u e i l l e de profit ni de g l o i r e d a n s cette
» carrière honteuse.... » Là se serait arrêtée la vengeance du
sieur Busset.
Mais le sieur Busset devait être mis dans la nécessité d’exi
ger un autre genre de réparation. Si un écrit qui diffame est
punissable à proportion du mal qu’il peut faire , celui que l’on
examine, plus que tout autre , doit etre réprimé avec touto
la sévérité de la loi.
En effet, depuis 1816, le sieur Busset, d’abord sous le titre
d'ingénieur-yérificatcur, et ensuite sous celui de géomètre en
chef, est à la tête de 1’opéralion du cadastre du département:
les travaux sont exécutés sous sa surveillance et sa responsa
bilité , cependant le libelle s’exprime en ces termes, pag. 27 ;
* Sur votre papier, le terrain se resserre ou s a g r a n d i t ; il y a
» v id e , -superposition vous çn fa ite s à votre guise ; c’est unç
,
�« bénédiction ! l’argent est* toujours au bout ; hien gagné ou
» n on , sa valeur est la même. » Et pour que sa pensée de
vienne plus claire par un exemple , l’auteur du Libelle met au
bas de la page une note ainsi conçue : « On pourrait citer dans
» le canton de Pontgibaud deux communes dont les plans
» rapprochés laissent entr’eux un vide énorme. »
Le sieur Bussct a pour collaborateurs des géomètres dont
les travaux sont rétribués: comment en agit-il à leur égard?
Que l’on lise le Libelle; il s’exprime en ces termes, pages 27 et
28 : « Vous avez fait à peu près le partage du lio n , tout en
» vous y prenant en renard; pendant que vous donniez d’une
» main à vos pauvres arpenteurs , vous glissiez furtivement
» l'autre pour écorner leur portion. »
« Mais qu’importe ? L ’approbation administrative a passé par
» là-dessus , et vous en profitez ; je rends justice , d’ailleurs , à
» la rare habileté avec laquelle vous escamotez, une indemnité....
» Vous souvient-il de cette dernière ordonnance qui voulait
» vous soustraire deux centimes qui vous étaient alloués ; on
» vous réduisait à trois , les deux centimes r e t r a n c h e s d e v a i e n t
» refluer sur l’indemnité des géomètres , mais par un petit
» revirement, vous les avez fait passer sur vos terres; cest-à» dire, que vous avez su tes appliquer ù une partie du travail <jui
» vous est personnel, déjà énormément rétribué. Les pauvres
» diables de géomètres on/vu disparaître ces deux centimes comme
» par enchantement. Bien vous a pris , ma foi, qu’on ordonnât
» cette réduction; car aujourd’hui vous n’êtes plus chargé de
» la délimitation, et cet énorme prix de cinq centimes par
» hectare que vousavezfixépour vous-même, passaiten d’autres
» mains ; mais vous avez tout disposé, de manière que l'adminisiration a fait, passer dans votre poche , deux centimes
)> quelle en voulait tirer : jamais je n’ai vu si joli tour de gibe» cière ; ce que c’est que d’avoir pris des leçons d’un fameux
» prestidigitateur ! par l à , votre grasse rétribution est aug» méritée à tout jamais de ce petit supplément...... » ,
�Les travaux du cadastre se faisaient par anticipation ; les in
demnités n’étaient payables qu’à des époques fixes et éloignées,r
et plusieurs des géomètres n ’avaient point les ressources suffi
santes pour attendre les termes des payemens ; ils étaient ré
duits à la nécessité de discontinuer leurs travaux ou dejecourir
à l’emprunt ; le sieur Busset cède à leurs sollicitations et vient
à leurs secours: comment ce fait si simple est-il présenté par
le libclliste, page 28 : « Cet excellent métier vous fournit encore
j) l ’occasion de spéculer avec avantage et sécurité ; quand chaque
» jo u r , par de nouveaux perfectionnemens , vous engraissez.
» voire rétribution, le petit pécule de vos collaborateurs s’a^
« moindrit et décroît à vue d’œil; leurs pauvres cinquièmes
« sont devenus si maigres ,• si exigus , qu’ils ne suffisent plus
« à leurs premiers besoins; il faut emprunter sur l’avenir; alors»
» dans voire philantropie, vous avez ouvert une petite banque
» cadastrale ¿1 vos collaborateurs, moyenuant une escompte.... »
En 1826 , l’administration sentit la nécessité de soumettre
à' un nouvel examen le mode des travaux employés dans le ca
dastre ; elle crut devoir consulter les lumières de l’expérience
et le sieur Busset fut, comme beaucoup d’autres de scs col
lègues , invité à donner des indications sui les améliorations à
faire. Le sieur Busset devait obéir ; il exposa toutes ses vues ;
son manuscrit fut adressé à l’administration qui voulut bien
reconnaître que l’auteur lui avait rendu un véritable service ;
dès lors, le sieur Busset crut qu’il était de son devoir de pu
blier un travail jugé n’être pas sans utilité.
O11 sait que tout ouvrage peut être l ’objet de la critique ,
q u ’cllc p eutêtre judicieuse et instructive, ou impertinente et
erronée, suivant le degré d ’instruction de celui qui se livre à
l'c genre de polémique ; le Libelle est m ême un exemple que
la critique peut encore être haineuse, vindicative , mensongère
et de mauvaise foi ; toutefois , ce n’est pas de cela que le sieur
Busset veut se plaindre; il livre scs œ uvres, mais il veut
que 1 on respecte en lui la probité , la décence . ^’honnêteté }
�(O
enfin tout ce qui constitue la personne morale et l’homme
public. ^
O r , que dit le L ibelle, page 26 : « 11 est vrai que chez vous
» un avantage supplée l’autre ; si le mérite du livre ne tente
» pas l’acheteur, Yintrigue est là qui travaille pour ouvrir un
* débouché à vos œuvres ; déjà le Traité pratique marche es» cortépar l'approbation administrative. Je ne serais pas surpris
» q u e , par une savante manœuvre de stratégie, poussant U
» sous-directeur dans ses derniers retranchernens, vous n ’ e m •» portiez d’assaut un arrêté qui, oblige les géomètres de toutes
» classes à acheter votre in-octavo ; il deviendra aussi néces>» saire à l arpcnteur, que sa chaîne et que son équerre, et l 'on
» ne pourra d é s o r m a i s sc présenter en géomètre solliciteur,1
j» que votre Traité pratique à la main ; courage , fanfan-erispin,
» un petit renfort de pâte d abricots, un de fruits assortis, ei
j» l'administration friande est séduite , l'arrêté conquis , et les
» pauvres arpenteurs soumis à l impôt d’une a c q u i s i t i o n forcée
* du Traité pratique. >1
*
C ’est encore à propos de ce travail que le Libelle (page ï i )
s’expliquant sur le secret de la vitesse du sieur Busset dans ses
opérations, dit que « le moyen est simple et ingénieux; c’est
qu ’au lieu de déterminer le nombre des poinls exigé» par
ï l ’instruction , il n’en calcule que la moitié. »
A la page 25 , après avoir supposé que les résultats obtenus
par les opérations du sieur Busset sont erronés, le libcllisto
ajoute: « Le cadastre n’en va pas moins grand train ; l’on arrive
* par le chemin le plus court à la large et chère indemnité ;
>« le département n ’est pas exigeant, et c’est un excellent débi>• teur » ; et comme le Jibelliste craint encore que son idée nu
•»oit pas complètement rendue ou ne soit point assez promp
tement saisie , il la complète eu ajoutant : « Continuez à
m exploiter cette mine si riche et si abondante ; profitez du
f sommeil de l’autorité et de ce bon Conseil général ; cadastre*
m à force, et complétez votre pacotille...... » '
«
/
1
il
�Le sîeur Basset avait cru pouvoir couronner et utiliser les
travaux du cadastre , en dressant une carte spéciale qui donnât
aux étrangers une idée exacte de l’Auvergne , et fît connaître
aux habitans même de ce beau pays les richesses qui les en
tourent. Le libelliste déshonore autant qu’il est en lui cette
idée qu i, exécution à part, a au moins quelque chose de pa
triotique et de généreux : » J’ai déjà commencé , dit-il, un petit
» examen de votre carte grise que vous donnez comme un
* chef-d’œuvre » , et comme toute espèce d’encouragement
accordé au zèlè ou à une entreprise utile doit blesser l’envie
ignorante et orgueilleuse , le libelliste rugissant lance son der
nier trait et empoisonne , aulant qu’il est en l u i , la j o u i s s a n c e
la plus innocente en terminant ainsi: « En attendant, ce bon
» Conseil général, non content de vous enrichir parle cadastre,'
• vous comble encore pour votre talent dans la science de Cas» sini. Poursuivez , et bientôt, je n’en doute pas , nous vous
» verrons affublé d’un ruban rouge qui vous sera dûment
>• acquis, soit comme géomètre, soit comme géographe, ou
» comme écrivain , ou peut - être enfin , comme l’heureux
» bouffon des autorités. Il ne vous manquera plus qu’un titre:
» mais qui peut vous arrêter? Vous finirez par vous pousser en
» Cour ; vous pourrez alors faire une de vos plus belles gam» bades, et vous dire en gasconnant: allons, saule marquis! »;
La coupe était épuisée , le venin s était répandu , la victime
était atteinte. Ceux qui font profession d’une orgueilleuse ignorajicc, et qui voudraient que tout le genre humain fût enseveli
dans l’oubli où lisseront eux-memes, avaient lu le Libelle , et
déjà ils proclamaient que le sieur Busset avait trompé l’admi
nistration du cadastre , surpris la bienveillance du Conseil
général de département ; mais q u el’incxaclitude de ses travaux,
son imptcritiCî saJégèrcté dans toutes ses opérations , devaient
lui faire incessamment retirer la confiance qui lui avait etc
accordee. Ce n’était pas assez ; la sieur Busset , h o m m e avide
�et sani! probité , calculant sur les besoins de ses collaborateurs?
aura encore utilisé leurs talens à son profit, diminué leur ré
tribution , augmenté la sienne contre le texte précis des ordon
nances , et se présentera ainsi à ses concitoyens, brillant de
t a l o n s qui ne sont pas'les siens, et riche des dépouilles d’autrui.
Une des conditions indispensables pour assurer le succès de
la diffamation , est de la répandre avec adresse , et c’est avec
raison qu’un auteur célèbre a dit qu’il n’est pas de plate mé
chanceté, pas d’horreurs, pas de conte absurde, qu’on ne fasse
adopter aux oisifs d’une grande ville en s’y prenant bien. Mais
que doit faire l ’honnete homme pour ne point en être ac
cablé..... ? Aller droit au Bazile qui l’outrage , e t , soit qu’il se
cache sous le m a s q u e d’une douceur hypocrite , soit que plus
hardi il donne à la diffamation l’appui de son audace et d’une
franchise simulée, il faut saisir ce Prolée, l’obliger à reprendre
la forme qui lui convient, et, avant toute chose, le livrer ainsi
démasqué à la vengeance des lois.
C ’est ce qu’a fait le sieur Busset.
Le Libelle avait paru; le nom d’un personnage grotesque et
de pure invention se lisait sur le titre, et ne devait sans
doute y figurer que pour soustraire à l’action de la justice
Tingénieux et véritable auteur de ce chef-d’œuvre de grâces,
de délicatesse et de bon goût. Toutefois, sa brochure paraissait
avec le nom d’un imprimeur ; c’était donc contre ce dernier
que le sieur Busset devait diriger sa plainte, sauf à reconnaître
ensuite jusqu’à quel point cet imprimeur devait être respon
sable d’une diffamation dont il était au moins l’instrument*et
le complice.
Mais bientôt le sieur Busset fut mieux instruit : le Libelle
q u i, d’abord , se glissait en rempant auprès de quelques leeleurs bénévoles , avait enfin pris son essor, et son vol rapide
fixait déjà toute l'attention du public de Clermont.
Oucl était le lieu où cette brochure était déposée? cQmment
ci par qui était-elle distribuée i
Les
�Les renseignemcns ne se firent pas long-temps attendre : le
sieur Rodde , agent d’affaires , et tenant une maison de bains
publics, avait le dépôt du Libelle, le distribuait à toutes les
personnes qui pouvaient avoir avec lui des relations amicales
ou obligées , et chaque curieux pouvait se procurer ce petit
trésor de malices , d’injures et d’outrages, moyennant la mo
deste pièce d’un franc.
Le fait était difficile à croire ; mais lorsqu’il devint certain
que le sieur Rodde avait à ses ordres ce Mayeu qui « use de sa
» plume d'une rude manière; « qu’il pouvait encore compter
sur les efforts de paniographe, sans doute comme son digne
collaborateur, maître passé en diffamation et en faisant métier,
tandis que le sieur Rodde en fait marchandise; lorsque l’on put
lire cette phrase si respectueuse pour la justice : « Mayeu le
» Bossu, son imprimeur et le distributeur du Libelle, seront,
» comme de raison , bien et dûment châtiés, et là se terminera
»> l’histoire. » Y ajouter le genre de réparation que le sieur
Rodde réservait au sieur Busset : « le Libelle en question n’a
« pas tout dit; mais on ajoutera ce qui manque , gardez» v o u s cl e n
d o u t e r ! p u is s ie z - v o u s , iip rès c e tte é p r e u v e ,
» n’être ni plus flagellé , ni plus froisse que vous l’êtes : » (i)
11 fallut bien se résigner à tout croire, et livrer à la justice
l’audacieux q u i , se jouant de tout ce que les hommes ont de
respectable, se complaît dans le mal qu’il a fait, se réjouit
d’être l’objet d’une poursuite, par cela seul qu’il espère pou
voir abuser du droit sacré de la défense , jusqu’au point de
s’en faire une nouvelle et dernière ressource de diffamation.
Mais le sieur Rodde est dans l’erreur. La passion est une
mauvaise conseillère; elle pousse toujours à la licence les es
prits envieux, inquiets et turbulens, pour qui la liberté est un
( 0 Tous les mois en caractère italique , et les phrases renfermées dans des
guillemets, sont extraits d'une lettre de Rodde. ( Aini de la charte, i cr- ;u‘Uet
celte année. )
�( IO )
supplice, parce qu’elle prescrit l’obéissance aux lo is , com
mande le respect pour l’autorité, et. ne reconnaît au citoyen,
de droit , que sous la condition de ^pinplir strictement les
devoirs que la loi prescrit a chacun dans l’intérêt de tous.
C ’est dans cet intérêt que la loi de 181g a voulu resserrer
la liberté de la presse dans de sages et rigoureuses limites. Sa
pensée , d ’ailleurs si clairement expliquée par son texte , a été
de punir le tort qui pourrait résulter pour un particulier, tout
aussi bien d’un fai L vrai que d’un fait faux , et de faire cesser
parla les discordances que le mol de calomnie avait fait naître
entre la loi et l’opinion , le droit et le fait; et pour ne faire
entendre au sieur Roddeque des voix amies d’une sage liberté,
qu’il lise les opinions de MM. le duc de Broglic , Chauvelin ,
Guizot , Bedoch ; partout il verra que si la calomnie est un
crime très-od ieu x, ce n ’est pas à dire que la justice doive
épargner celui qui déchire gratuitement son semblable, même
lorsqu’il ne dirait que des vérités. Le siège du délit n’est pas
dans 1 imposture, il est dans le défaut d’intérêt de celui qui le
commet, et dans le préjudice qu’il cause à autrui; et si la loi
s’est arrêtée au choix du terme diffamation , c’est parce q u ’il
exprime, avec beaucoup de justesse et de netteté, précisément
l’idée que le Code pénal avait voulu attacher de force au mot
calomnie.
Que le sieur llodde ne s’y méprenne donc plus. ÏI a outragé
le plus précieux de nos droits, en faisant de la liberté de la
presse un instrument de licence. Par le fait même de la diffa
mation, il a encore créé un droit en faveur du sieur Busset ; il
s’est placé , vis-à-vis de l u i , dans un état d’abaissement légal
qui le rend indigne de recevoir aucune explication ; que ré
pondre en effet au diffamateur....? 11 est en délit, et la calomnie
n’est-clle pas une nécessité de la position où le sieur llodde
s’est placé !
C ’est donc à la justice seule que le sieur Rodde aura à ré-
�( II )
pondre. Le Libelle et la plainte sont les seules pièces du procès;
la l o i , au nom de laquelle il est prévenu, sa seule règle. Le
droit d’interroger doit êlre interdit à celui qui s’est rendu
indigne de recevoir une réponse: les principes de la loi sont
ici conformes à ceux de l’honneur; l’épée se croise-t-elle avec
le poignard?
On a fini avec le sieur Bodde ; la Justice elle-inême sait sur
lui tout ce qu’elle doit apprendre.
Mais un devoir plus doux à remplir appelle le sieur Busseti
Il est père, il est ami, il jouit de la confiance de l’administra
tion, il on a obtenu des témoignages bien doux et bien hono
rables; que de titres précieux à conserver intacts et exempts
de toute souillure....!
Ici le sieur Busset veut oublier jusqu’au nom des hommes
qui ont voulu lui nuire: si des faits accusateurs doivent être
révélés, au moins les auteurs resteront-ils inconnus; l’oubli
peut encore leur servir de refuge ; le sieur Busset se coniic
à la raison publique ; il n’a aucune vengeance â satisfaire ; il ne
veut é m o u v o i r aucune passion : que les hommes s’effacent, les
faits s e u l s d o i v e n t r e s t e r .
Les opérations du cadastre ont été définitivement ré
glées , et ont dû devenir uniformes par suite d’un Becueil
méthodique des lois, décrets, règlcmens, instructions et dé
risions intervenus sur cette partie , imprimé en 1811 , et
approuvé par le ministre des finances.
A cette époque, le cadastre devait s’exécuter dans chaque
département, sous les ordres du p réfet, et la partie d’art était
confiée à un géomètre en chci, sous le titre d’ingénicur-vérificateur , et à des géomètres de première et de deuxième
classe.
L ’jngénieur-vérificatcur devait examiner tous les sujets em
ployés à l’arpentage 7 les distribuer dans les communes, sur-
/
�veiller immédiatement tous les travaux exécutés sur le terrain,
et vérifier toutes les opérations.
Les géomètres de première classe élaient chargés de la dé
limitation de la commune, de sa division en sections, de la
triangulation , de la reconnaissance des propriétaires, du plan
parcellaire, du tableau d’assemblage, cl de la minute du tableau
indicatif.
•
L ’immensité et la variété de ces travaux exigeaient que les
géomètres de première classe qui en étaient chargés, pussent
s’adjoindre des arpenteurs pour la levée du détail ; mais comme
ces géomètres de deuxième classe devaient avoir des connais
sances suffisantes , et que la garantie la plus sûre de la
bonté des travaux , était une rétribution convenable accordée à
ceux qui les exécutaient ; ces géomètres de deuxième classe
durent être eux-mêmes agréés par l’ingénieur-vérificateur qui
fut spécialement chargé d’approuver les traités passes entre les
géomètres de première classe et de deuxième classe, et d’en
assurer et surveiller l’exécution.
Le Ilecueil mélhodique apprend que la délimitation des
communes était confiée à un géomètre de première classe ,
proposé par l'ingénieur-vérificateur, et nommé par le préfet.
Le géomètre délimitatcur était rétribué de la portion qui ,
dans l ’i n d e m n i t é d e s géomètres chargés du parcellaire , e s t
relative au travail que le délimitatcur fait à leur décharge; et
un arrêté de M. le préfet, de 1811 , fixe à cinq centimes par
hectare, pour le Puy-de-Dôme, la rétribution accordée au géo
mètre délimitatcur.
Ces règles élaient établies , lorsqu’au mois de septembre
i8 iG , le sieur Bussel fut nommé ingénieur-vérificateur du
cadastre. Il demeura constamment étranger à tous les travaux
des géomètres, e t , notamment, à la délimitation q u i, depuis
1811 jusqu’en 1821 , a été successivement confiée à trois géomètresdifférens.
�( 13 )
Mais le sieur Basset entrait en fonctiou avec le sentiment de
scs devoirs: le plus important était la surveillance et la vérifica
tion des travaux, et comment en obtenir et même en exiger de
bons, si les géomètres de deuxième classe restaient livrés à l’ar
bitraire et à la discrétion des géomètres de première classe ;
si la rétribution était moins la récompense du travail, qu’une
prime attachée à un vain titre, et un encouragement accorde
à la paresse.
Sous ce rapport, le sieur Busset avait beaucoup à faire. Les abus
étaient intolérables, les géomètres de première classe recevaient
la rétribution et les secondaires étaient chargés du travail au plus
vil prix. Que fit le sieur Busset? Il réunit les géomètres de pre
mière et deuxième classe, présida à la formation d’un tarif qui
fixait les indemnités ducs à chaque espèce de travaux, soit qu’ ils
fussent faits par des géomètres de première classe, soit qu’ils
fussent l’ouvrage de géomètres de deuxième classe, et cru t, par
cette sage précaution , avoir assuré le bien du service, de bons
travaux au cadastre, et une existence honnête à tous ceux qui
étaient appelés à y concourir.
B ien tô t
le
sie u r
Busset
a cq u it
la
co n victio n
q u ’ il
s ’ éta it
tr o m p é . Il est d e s h o m m e s q u i m é c o n n a i s s e n t to u te s les r è g le s
ou qui croient y faire exception.
lin géomètre de première classe, chargé du cadastre d’une
com m une, n’avait personnellement exécuté aucun des travaux;
tout ce qu’il pouvait p r o d u i r e était la note, écrite de sa main,
d’un canevas trigonométrique qu’il avait du tracer dans
quelques heures ; tout le reste était l’ouvrage des géomètres
de deuxième classe, et cependant ce géomètre de première
classe s’était attribué les 4^ centièmes de la rétribuliori
totale.
Ce fait ne pouvait être toléré. Le sieur B usset, par sa lettre
du 16 mars 1819 , le fit connaître au directeur des contr ibu
tions. toutefois , il fallait essayer de ramener ce géomètre au
�( *4 )
gentiment de ses devoirs ; le sieur Busset lui fit donc des ob
servations, mais elles furent repoussées avec violence et dureté,
presque même avec mépris ; les travaux furent de plus en plus
négligés , et le sieur Busset avait enfin rédigé une note qui
devait être adressée à l’administration et entraîner la destitu tion
de ce géomètre , lorsque ce dernier désarma le sieur Busset
par une déclaration qui devait lui servir de garantie pour l’ave
nir, et qui, plus que toute autre chose, met sous leur vrai
jour , el le caractère du sieur Busset, et celui de l’homme qui
après l’avoir outragé, en appelait à sa générosité. Celte lettre
présente un double portrait tracé par une main que les enne
Voir pièces jus
tificatives, n°. 1 “ . mis du sieur Busset ne sauraient accuser d’infidélité.
Jusqu’ici les travaux du cadastre s’étaient exécutés par les
%
géomètres de première et de seconde classe, qui agissaient
sous l’autorité cl sous la surveillance du p réfet, du directeur
des contributions et de l’ingénieur-vérificateur ; ce dernier
même devait, à cette époque, être considéré comme fonction
naire public , el comme tel, recevait un salaire du Gouverncr
m en t, outre la rétribution qui lui était accordée dans 1 indem
nité,
Eu 182 r , les idées changèrent : l’opération du cadastre dut
se faire par entreprise, cl devait être confiée à un géomètre cit
chef r e s p o n s a b l e , qui avait le choix de ses c o l l a b o r a t e u r s e t les
payait sur sa rétribution.
Le règlement du 10 octobre 1821 est précis sur ce point,
L ’art, i'r porte : v L ’arpentage parcellaire est confié dans chaque
?> département à un géomètre en chef nommé par le préfet ; le
» géomètre en chef a le c h o i x d e scs c o lla b o r a t e u r s , qu’il paye
y sur sa rétribution et dont il est responsable. »
Le choix du préfet était entièrement libre : ce magistrat
n’était assujetti à aucune condition ni à aucune règle, et on
yie trouve dans le règlement du 10 octobre 1821 ( page 2 3 ) ,
d ’aulre recommandation en faveur des ingénieurs en cjiçf? que
�( i5 )
Celle-ci: « MM. les préfets sentiront aussi 1’extrêmc justice de
» maintenir clans leurs places les géomètres en clief, dont, en
” général, l’administration n’a eu qu’à se louer jusqu’à ce jour. »
On sent que si le sieur Busset, par la fermeté de sa surveil
lance, avait pu acquérir des droits à la reconnaissance des
géomètres de seconde classe, il devait, d’un autre côté, avoir
excité la haine et éveillé toutes les mauvaises dispositions des
géomètres de première classe. La nomination du sieur Busset
était, en effet, menaçante pour ces derniers; ils avaient à
craindre que la responsabilité qui devait peser sur l’ingénieur
en chef, ne rendît sa surveillance plus stricte et plus rigoureuse.
La probabilité de la nomination du sieur Busset, inquié
tait ces géomètres. Ils voulurent d’abord connaître scs disposi
tions à leur égard, vinrent le trouver, et en reçurent la réponse
que leur rétribution serait en proportion de l’indemnité totale
qui serait accordée. (*)
Cette réponse devait satisfaire les géomètres ; ils s’en expli
quèrent avec le directeur des contributions dans des termes
convenables ; mais bientôt ils voulurent obtenir du sieur Busset
un e n g a g e m e n t écrit.
lin tiers fut chargé de porter celte proposition au sieur
Busset. Elle fut agréée sous la condition que les géomèlrcs dë
première classe souscriraient un engagement pareil envers leurs
subordonnés.
Un tarif fut en conséquence arrêté: on va vtfir pourquoi il
n’a pas été exécuté , et par le fait de qui la convention et le
tarif ont été anéantis.
Douze géomètres s’étaient liés par une convention ; ils
avaient un double objet ; d’abord, d’obtenir, en nom collectif, l’entreprise du cadastre; et s’ils ne pouvaient réussir , iis
(*) Celte déclaration fui faite, en outre, dans une lettre écrite à ce foncliou-
uairc j le 2rj octobre 1821,
�Voir pièce« juy*
liticalives, n°. 2.
< 16 )
voulaient au moins embarrasser le sieur Busset en le privant
de leur coopération.
Alors ces douze géomètres se lientpar un traité; ils s’enga
gent à ne point travailler pour le compte du sieur Busset. La
volonté de dix des souscripteurs est indispensable pour annu
ler celle convention ; e t , pour assurer par un dédit l’exé
cution d’un pacte aussi singulier, chacun d’eux dépose un
effet de 3 ,ooo fr. Dans le même temps, trois de ces géomètres,
pour rendre la dissolution impossible , s’unissent encore secrè
tement, et à l’insçu de leurs neuf coobligés, conviennent entre
eux de ne point travailler pour le sieur Busset.Ce nouveau dédit
est porté à 5 ,ooo fr. pour chacun d’eux , et trois effets montant
à cette somme , sont immédiatement déposés entre les mains
d’une tierce personne.
Il faut admirer la profondeur de celte conceplion ; elle est
le sublime de l'intrigue ; la manœuvre qui l’a suivie ne décèle
pas moins d’habileté.
D ’abord, les géomètres agissent auprès de M. le préfet. Ce
fonctionnaire est accablé de notes et de mémoires , et bientôt
ces géomètres se croycnt assez forts pour annoncer au sieur
Busset qu’ils ont demandé à M. le préfet la nomination d’un
géomètre en chef, pris parmi tous les ingémcurs-vcrificateurfl
de France, « vous seul cxccpté. »
Cependant le succès ne paraissait pas devoir couronner
les efforts des géomètres. L ’administration du département
était alors confiée à un préfet dont les talens r e m a r q u a b le s et
la noble impartialité , ont laissé de longs el glorieux souvenirs.
Ce magistrat dut se résigner à tout lire cl à tout entendre. C’est
lui qui avait répondu au souscripteur de la lellre n°. i*r. « La
» crosse du pistolet était donc bien longue ; « et comme, quels
que soit d’ailleurs l’impassibilité et le sang froid du magistrat
homme de bien , il est rare q u ’u n geste, un mouvement im
perceptible, ne décèle par fois le fond de sa pensée, les géomèlros
�c *7 :
mètres a v a i e n t pu croire qu’au moins leur succès n’était pas
assuré.
La seconde partie de leur traité était embarrassante. Les géo
mètres comprenaient bien que le sieur Busset n’était plus
engagé envers eux ; que , par le fait de leur injuste agression ,
ils s’étaient mis d'ans l’impossibilité de rien exiger de lui , et
ils devaient craindre de se voir privés à jamais de leur état.
Que vont faire les géomètres? Ils veulent utiliser à la fois ,
et ce q u ü eu r reste d’espérance, et les craintes qu’ils supposent
au sieur Busset. Affectant plus de douceur, et dirigés par un
reste d’égards, ils s’adressent à un tiers qui, par sa position ,
la douceur de son caractère, et la nature de scs fonctions, pou
vait exercer le plus d’influence sur le sieur Busset. Suivant les
géomètres, il n’est plus question que de mettre fin à de fâcheux
débats ; le sieur Busset doit être géomètre en chef; les géo
mètres doivent abandonner leurs prétentions ; mais il.faut;]
avant toute chose, que le sieur Busset se lie par un traité , et
qu’il accepte les conditions que les géomètres veulent bien lui
imposer.
L e s ie u r B u s se t d e va it
c o n s id é r e r d e p are ille s p r o p o s itio n s
comme déshonorantes pour lui. Il les repoussa sans hésiter et
avec indignation. Le sieur Busset n’était point nommé géo
mètre en chef; il ne voulait point devoir son titre à une
lâcheté ; s’il n’était point nommé , il n’avait aucun traité àfaire,
aucune proposition à lire, Si, au contraire, le titre de géomètre
en chef lui était dévolu., on pouvait s’en rapporter à sa géné
rosité *ct à sa délicatesse. Les torts de tous les géomètres, sans
exception, seraient oubliés ; le père de famille n’aurait pointa
souffrir de sa légèreté ou de sa passion ; chaque géomètre con
tinuera à être employé suivant la qualité qu’il avait avant ; la
rétribution sera basée sur une règle de proportion , propre à
déterminer le terme moyen entre l’ancienne indemnité et la
nouvelle qui pourrait être fixée. Voilà ce que pouvait promettre
�C 18 )
un homme d’honneur , assez ge'néreux pour oublier les mau
vais procédés ; c’est ce qu’a promis le sieur Busset : on verra
s’il a été fidèle à sa parole.
Cependant tous ces débats étaient devenus publics. Douze
géomètres , porteurs de notes et de Mémoires adressés à l’au
torité, de propositions à faire au sieur Busset, ou de conditions
à lui imposer , devaient produire une assez vive sensation.
Quel était celui qui avait arraché tant de pères de famille à
leurs habitudes paisibles , qui avait flatté leur ambilipn, et les
avait armés d’écrits de nature si différente ? Les travaux habi
tuels de ces hommes honnêtes et laborieux étaient tellement
en opposition avec le rôle qu’on leur voyait alors rem p lir,
qu’il était permis de ne voir en eux que des marionnettes
obéissant au fil d’un machiniste habile.
Parmi les metteurs en œuvre , le public désignait, en pre
mière ligne , le sieur RotUle aîné , alors chef des bureaux du
cadastre. Le sieur Busset eut la faiblesse de prêter l’oreille à
cette calomnie ; c’était en effet calomnier ce chef de bureau,
<{ue de supposer q u e , contrairement à son état cl à son devoir,
qui lui prescrivait de demeurer étranger aux débats qui pou
vaient s’élever entre le géomètre en chef et les géomèlrcs de
première classe , il aurait cependant pu prêler à ces derniers
l’appui de sa plume et de sa rare capacité. Aussi , le sieur
Busset fu t -il relevé de celte méprise d’une rude manière , et
ic 12 novembre 1821, le sieur Boddc écrivit au sieur Busset
« qu’il avait été et voulait êlre absolument étranger à la dé» marche que MM. les géomètres avaient f a i t e auprès de M. le
» préfet....» Comment, ensuite, supposer qu’en 1829, le sieur
Boddc deviendrait l’éditeur responsable , le distributeur ,
l ’ u n i q u e propriétaire des œuvres de Mayeu-le-Bossu î....
Le sieur l\odde avait raison ; sa lettre au sieur Busset était
du 12 novembre , et le 1 5 , l’auteur des réclamations et Mé
moires des géomètres se fit connaître , et revendiqua ses
�C 19 )
teuvrcs ; c’cst encore l’écrivain de la lettre n°. 1er. des pièces
justificatives. Il est bien vrai qu’il y eut quelques incrédules:
On se demandait, « où. diable a-t-il donc pris toutes ces gen
ii lillesses? » Mais il fallut céder à l’évidence, et ne plus con
tester ce précieux droit de propriété à celui qui le réclamait
avec tant d’instance.
Enfin, tous les doutes, toutes les espérances, toutes les in
quiétudes cessèrent. La nomination du sieur Busset fut
connue ; elle est sous la date du 26 .novembre 1821.
Le ministre des finances fut alors consulté sur la question
de savoir si les obligations précédemment imposées à l’ingégénieur -vérificateur du cadastre , étaient encore les mêmes
pour le géomètre en chef nommé par le préfet , en exécution
de l’article i er. du règlement du 10 octobre 1821.
Le ministre répondit à M. le préfet, le 11 décembre suivant,
e n ces termes : « Autrefois , les géomètres de première classe
>> étaient à votre nomination, c ’ e s t l e g é o m è t r e e n c h e f
>> Q U I N O M M E A U J O U R D ’ H U I S E S C O L L A B O R A T E U R S *, mais il de» vront être agréés par vous de la même manière que les
?• géomètres secondaires devaient l’étre autrefois par lui, sur
la
p ro p o sitio n
<les g é o m è t r e s tie
p rem iè re
c la s s e .
Il
Voir pièces jus
tificatives n°. 4-
Vofcpièces jus
tificatives , n". 5.
con-
>» veindra même qu’il vous fasse connaître le taux de la rétrL»
» bution qu'il s e p r o p o s e de leur accorder. »
Ainsi, le sieur B usset, géomètre en chef, avait le choix et la
nomination de scs collaborateurs ; c’est encore à lui qu’il ap
partenait de fixer le taux de leur rétribution.
Que va faire le sieur Busset?
Le 14 mai 1822, il écrit à tous les géomètres q u i, jusquelà , avaient été employés dans le cadastre; il ne fait aucune
exception, et offre à chacun d’eux du travail. Le sieur Busset,
dans le courant du même mois, reçoit neuflettres en réponse,
par lesquelles chacun des géomètres accepte les offres qui lui
sont faites.
Voir pièces jus
tificatives , n®. 6,
�II devait être ensuite question de fixer la rétribution à ac
corder aux géomètres ; mais pour cela, il fallait, avant t o u t ,
connaître le taux de l’indemnité totale qui serait fixée par l'ad
ministration.
A cet égard , l ’indemnité avait d’abord été fixée , par arrêté
du préfet , à 1 fr. 26 cent, par hectare, et à 36 centimes par
parcelle.
Le ministre avait à examiner si ce taux avait été convena
blement réglé , et, pour.cela , le préfet dut lui soumeilre la
fixalion qu’il avait faite, y joindre un rapport du directeur des
contributions, q u i , établissant létau x moyen d elà rétribution
p our les travaux exécutés jusqu’à ce j o u r , propose de fixer
pour l’avenir l’indemnité totale à 1 fr. 5 cent, par hectare , et
à 32 cent, par parcelle, avec condition q u ’ e l l e sera subdivisée
entre le géomètre en chef et ses collaborateurs , savoir : pour
les géomètres arpenteurs , 80 cent, par hectare, et 25 centimes
par parcelle.
Le ministre répond le 23 avril 1822 , approuve le choix de
M. le p r é fe t, dit que « le sieur Busset a rempli avec beaucoup
» de zèle et de talens les fonctions d’ingénieur-vérificateur,
« et qu ’il offre à l ’administration toutes les garanties désirables
» pour l’exécutiou d ’un bon travail. »
V e n a n t e n s u i t e à la f i x a t i o n d e l ’ i n d e m n i t é t o t a l e , te mi
nistre! pense qu’elle pourrait être réglée à 1 franc 20 cent, par
VToir pièces justificaiivcs, n°. 7.
1«
A
hectare , et à 36 cent, par parcelle ; qu ’on arriverait ainsi à
une réduction d ’un huilième environ ( de l ’ancienne indem
nité ), réduction qui paraît suffisante à cause de la difficulté
de l’arpentage dans le département.
Quant à la division de l’indemnité proposée par le directeur,
le ministre la désapprouve: « L ’ i n d e m n i t é de ce dernier ( du
» géomètre en chef ) est évidemment TROP f a i b l e , et suffirait
» à peine pour couvrir ses frais. »
Ici une réflexion se présente : l ’indemnité accordée avait été
L:
'
■
.
�C 21 )
C o n ven a b lem en t fix é e ; p e r s o n n e ne p o u v a it se p la in d r e , et la
rétribution, pour les travaux du P u y -d e -D ô m e é ta it même
plus forte que celle accordée à d’autres départemens o ù l’ar- Voir pièces juspenlage parcellaire présente d’aussi grandes,difficultés. A.insi, tificalives, n°.
les géomètres de première classe et tous autres, devaient trouver
dans cette indemnité une rétribution suffisante pour leurs
travaux, si, toutefois, la distribution en était faite avec équité.
Cette distribution appartenait au sieur Busset , qui devait
faire connaître à M. le préfet la rétribution qu’il se proposait
d’accorder aux collaborateurs qu’il devait ensuite nommer.
L ’opération du sieur Busset est simple, et l’esprit d’équité
qui y a présidé ressort du travail môme. Le sieur B u s s e t f i x e
le taux commun de la rétribution avant 1821 , détermine la
portion , soit de l’ingénieur-vérificateur , soit des géomètres,
dans celle indemnité. Cette opération faite, il pose le chiffre
de la nouvelle rétribution, déduction faite des indemnités fixes ,
et ces deux bases posées, il cherche les quatrièmes termes de
deux règles d e trois, et établit que l’indemnité des géomètres
étant autrefois de* 100 cent, par arpent , doit être aujourd’hui
réduite à 81» cent., et que, pour les parcelles , Ja rétribution
des géomètresqui s’était, dans l’ancien étal du Cadastre , élevée
a 27 centimes , ne peut plus èlrc , aujourd’hui , portée qu’à
2Ü cent. 4 cinquièmes.
En conséquence , le sieur Busset propose à M. le préfet de
fixer l’indemnité de scs collaborateurs à 8.1 cent, par arpent,'et
24 cent, par parcelle, qui s'appliqueront à la totalité des t r a
vaux donl le Recueil méthodique chargeait les géomètres de
première classe, m o i n s l a d é l i m i t a t i o n .
Le sieur Busset avait pu s’assurer que les géomètres de pre
mière classe abusaient de leur position vis-à-vis les géomètres
<le deuxième classe ; ces derniers avaient plusieurs (ois été
° “ l‘gés de travailler à vil prix; le service en avait souffert : le
sieur Busset veut qu’à l’avenir lout arbitraire cesse , et si le
�Voir pièces jus
tificatives, n°. 9.
(
)
titulaire d’une commune ne doit point être forcé de confier à
scs secondaires telle ou telle partie de son travail, le géomètre
en chef exige au moins que, quelle que soit celle de ces par
ties que le titulaire aurait confié à un secondaire « il devra
» leur payer la rétribution qui y sera affectée, de telle manière
» que si le secondaire exécute tout le travail d’une commune,
» il aura droit à toute l'indemnité.» Le sieur Busset présente à
M. le préfet le tableau des divers travaux dont le? géomètres
ont été chargés jusqu’ici , avec le tarif de la rétribution pro
portionnelle qui convient à chacun. Dans ce tableau, l'indem
nité totale accordée aux géomètres , est divisée par centièmes
attribués à chaque espèce de travaux , eu égard à leur diffi
culté et leur importance. On doit ajouter que le sieur Busset
prévenait M. le préfet qu’il ne s occuperait de l'organisation du
personnel de ses collaborateurs, que lorsque ce fonctionnaire
lui aurait fait connaître les dispositions qu’il aurait prises sur
la iixalion de la rétribution des géomètres.
L'arrête de M. le préfet est du 16 août 1822 ; il présente un
tableau indicatif de chacun des t r a v a u x du cadastre, et le tarif
du nombre des centièmes attribués à chaque opération. La delimitation n'est point comprise dans cet état , parce q u e , aux
termes de l’arrêté , la r é t r i b u t i o n de 85 centimes par arpent,
et de 24 c e n t i m e s par parcelle, p o r t a i t s u r la totalité des tr a
vaux m o i n s LA. d é l i m i t a t i o n . Aurcste, l’arrêté reconnaît que
la" fixation de la rétribution proposée par le géomètre en chef,
conserve à scs collaborateurs les avantages dont ils jouissaient
prédominent, sauf la réduction qui résulte de la différence exis
tante entre l’ancienne et la nouvelle rétribution. Cet arrêté dit,
en même-temps, que le prix de chacune des parties du travail
e s l bien entendu, et pourra p r é v e n i r tout arbitraire de la part
des géomètres de première classe envers les secondaires.
Il faut ici arrêter quelques résultats , et fixer , de 1821 à
1827, la position du géomètre en chel envers les géomètres
qu’il pouvait employer,
�( 23 )
Le sieur Bussct,commegéomètre e n chef, avait l'entreprise
de tous les travaux du cadastre ; il était seul responsable, envers
l ’a d m i n i s t r a t i o n , de l a bonté de ses travaux.
Les géomètres n’étaient point les associes du sieur Bnsset ;
ils n’étaient pas davantage ses co-opérateurs obligés ; le sicur
Busset pouvait les admettre ou les refuser, et les géomètres
pouvaient, à leur tour, agréer ou rejeter les traités qui leur
seraient proposes par le sieur B usset, si les travaux qui en
faisaient l’objet ne leur convenaient pas , ou si la rétribution
qui y était affectée par le tarif ne leur paraissait pas suffisante.
Les géomètres devaient demeurer étrangers à la distribution
des travaux du cadastre, et à la rétribution qui y serait attachée,
A cet égard , tout devait se faire entre l’administration et le
sieur Busset, et la fixation ainsi faite , ne pouvait être l’objet
de la critique des géomètres , dont le droit se bornait à
ACCEPTER
OU REFUSER DU T R A V A IL.
Si les géomètres ne pouvaient examiner que dans leur inté
rêt prké la quotité de la rétribution fixée pour chacun des
travaux du cadastre ; s’ils n ’avaient d’autre chose à faire que
de rechercher si chacun des travaux qui leur serait confiés
était suffisamment rétribué ; s’ils ne pouvaient avoir aucun
droit acquis à telle ou telle autre espèce de travaux , travaux
qui tous , et par la force des choses , étaient à la charge de
l ’ingénieur en chef, seul responsable, à plus forte raison devaitil être interdit à ces géomètres de se dire copropriétaires de
l ’indemnité totale , de prétendre à un partage égal ou inégal
avec le géomètre en chef, et, surtout, comment soutenir que
ces géomètres pouvaient avoir droit à une rétribution bien
certainement inapplicable à aucune espèce de travaux p u is q u e
le t a r i f les comprend tous nominativement, et rétribue chacun
d’eux en les désignant d’une manière toute spéciale.
Tout ce qui est relatif aux géomètres, se résume en deux
mo^s : ils examinent le tarif, acceptent ou refusent les ira-
�( H )
vaux qui leur sont proposes. S’ils acceptent, ils travaillent et
reçoivent leur rétribution ; tout le reste leur est étranger. -Dan s
le cadastre, les géomètres ne sont autre chose que (les ou
vriers , moyennant salaire fixé par un traité passé entre eux
et le géomètre en chef. Le géomètre en chef n’est lui-mème
que l’entrepreneur responsable du cadastre, moyennant sa
lai re ou indemnité réglée dans son intérêt particulier par
l ’administration.
Il faut continuer.
Le sieur Bussct avait la délimitation; elle lui était attribuée
par le règlement général de 1821; aussi cette opération futelle formellement exceptée des travaux compris au tarif, et
qui pouvaient être confiés aux géomètres de première et
deuxième classe. Le sieur Busset avait encore demandé et
et obtenu du ministre la permission de faire par lui-mème
la triangulation.
Tout cela était connu des géomètres.
On a vu que le sieur B u s s c t leur avait offert du travail ;
le tarif et les règles qui lui ont servi de base étaient connus
des géomètres ; les travaux qui devaient faire l’objet de leur
traite, l’étaient également. Les conditions furent acceptées par
les géomètres; les traités f u r e n t passés, et le s i e u r Bussct ,
p o u r d o n n e r à la position de ces géomètres plus de fixité et
plus d’indépendance, les fit de suite commissionner par M. le
préfet ; commissions que les géomètres n’auraient eues qu’en
1824, et qui, d’ailleurs, n ’ajoutaient rien à leurs attributions,
et ne portaient aucun changement, ni aux traités qu’ils avaient
pu souscrire avec le géomètre en chef, ni à leur première
position.
C ’est alors que les travaux du c a d a s t r e furent exécutés.
Inutile de parler des dégoûts qu’a éprouvés le sieur Bussct,
des mauvais procédés dont il a pu être l’objet. Tout cela est
oublié et ne doit point entrer dans ces observations,
Er,
�( 25 )
En 1826, I’administralion crut devoir s’occuper, plus spé
cialement du cadastre : une lettre du sous-directeur deman
dait au sieur Busset quelques indications ; ce géomètre rédigea
les observations qu’un long exercice l’avait mis à portée de
faii'e, et en adressa le manuscrit à l’administration elle-même,
qui voulut bien lui témoigner sa satislaction, par l’organne
de son directeur. « En vous livrant à un travail aussi essen» licl, vous avez rendu un véritable service à l ’administration,
» et c’est avec plaisir que je saisis cette occasion de vous
» assurer qu’elle ne perdra pas de vue les nouveaux droits
» que vous vous êtes acquis à sa bienveillance. » (Lettresignée
Cornfcl-Dincourt, 3 i mars 1827. ) Ces observations ont formé
l e t r a i t é pratique de la partie d'art du cadastre, traité i im
primé en 1827.
Le règlement sur le cadastre est du i 5 mars 1827. Ici , on
peut faire quelques rapprochemcns qui ne seront pas sans in
térêt pour les personnes impartiales. Le Traité pratique con
seillait au triangulaleur l’emploi du théodolite ; le règlement
prescrit l’usage de cet instrument. Le sieur Busset avait, dès
1822, adopté , p o u r t e d é p a r t e m e n t du P u y - d e - D ô m e , un tarif
de subdivision à l’effet de fixer la rétribution à assigner à cha
cun des travaux ; le règlement veut que des tarifs de cette nature
soient dressés dans tous les déparlemcns. Enfin, le règlement
était à peine mis à exécution, qu’une dernière lettre de l’ad
ministration signalait le Traité pratique comme un ouvrage
ufile , et le recommandait à tous les employés du cadastre. Le
sieur Busset doit même à l’injuste agression du sieur Rodde ,
une jouissanced’amour-propre qu’il n’attendait pas, tant il c^l
vrai que, malgré lui-même, le méchant peut parfois faire
quelque bien. Le sieur Busset avait été prévenu que le sieur
Rodde disait avoir adressé des exemplaires du Libelle à tous
les directeurs et géomètres en chef; ce fait dut être v é r i f i é , et
Jes réponses reçues par le sieur Busset, ont appris q u e , sur ce
�Vo ir pièces jus
tificatives, r»n. 12.
( 26 )
point, le sieur Rodde se vantait d’un mal qtiil n’avait pas fait;
la pièce d’un franc devait être en effet la condition de la distri
bution ; mais pour ne s ’ o c c u p e r que du Traité pratique , le
sieur Busset eut la satisfaction d ’apprendre que cet ouvrage
était apprécié par ses collègues « comme utile , essentiel aux
» géomèlres de toute classe , et un guide précieux à l’aide
» duquel les divers travaux du cadastre sont dirigés et exé» eûtes. »
Toutefois, ce règlement apportait quelques changemens aux
règles suivies jusqu’alors. La délimitation, qui appartenait au
géomètre en chef, d u t , aux termes du nouveau règlement ,
précéder l’arpentage de deux années au moins , et être confiée
à un seul géomètre dont la nomination était soumise à l’ap
probation du préfet. On sent que , dès lors, le sieur Busset a
dû cesser de s’occuper de la délimitation , qui est devenue la
fonction particulière et spéciale d’un géomètre préposé à cette
opération.
L ’arliclc 6 du règlement est ainsi conçu : « Afin de prévenir
>» toutes contestations dans le partage des indemnités , le géo» mèlre en chef dresse un tarif de la rétribution afférente à
» chaque partie du travail, et les géomètres de toutes classes
» sont payés conformément à cc tarif de subdivision. » Le règle
m e n t prescrit donc, en 1827 , à tous les géomèlres en chef,
une mesure que le sieur Busset avait, dès 1822 , adoplée pour
le Puy-de-Dôme. Aujourd’hui, la règle unique est : rétribution
afférente ù chaque partie de ti avait; payement de cette rétribu
tion aux géomètres de toutes classes qui auront fa it des travaux.
‘ L ’article 6 du règlement de 1827 parut exiger des explica
tions. Une instruction du 20 mai ordonne t en ces termes ,
l'exécution de cet article 6 : « La portion d indemnité que les
» géomètres en chef abandonnent aux géomètres de première
» classe ayant été précédemment fixée , le tarif de subdivision re~
» produira au total l'indemnité actuellement accordée.. Ce tarif
\
�( z7 )
*' sera dresse de manière à ce qu’il puisse servir à régler les
» intérêts des géomètres en cas de décès, d’absence , etc., »
Il faut faire remarquer que la délimitation entre spécialement
dans les travaux qui doivent être compris dans ce tarif.
Ici, se présente une idée aussi simple que positive.
La fixation de la portion d’indemnité abandonnée aux géo
mètres , ne peut être changée ; la subdivison ne peut repro
duire que le total de l’indemnité précédemment fixée et actuel
lement accordée ; donc, il n’y a plus de division possible à faire
de l’indemnité totale entre le géomètre en chel et les simples
géomètres. Ce qui a été fait à cet égard, est irrévocablement
acquis , et doit être exécuté; D ’un autre côté, le prix de la
délimitation devient une charge de la rétribution abandonnée
aux géomètres , donc les trois centimes fixés par le nouveau
tarif pour la délimitation, devaient régulièrement être pris
sur les 85 centimes par hectare et les 24 centimes par parcelle,
rétribution abandonnée par le sieur Busset, et fixée en faveur
des géomètres par l’arrêté du 16 août 1822. Cela est évident,
car la division de l’indemnité devait être répartie, et la portion
de c e l t e i n d e m n i t é p r é c é d e m m e n t a c q u i s e a u s i e u r B u s s e t , n e
p ouvait, sous aucun prétexte , être sujette à réduction ou
retranchement.
L e sieur Busset a-t-il usé de ce droit , a-t-il essayé même
d ’en user ?
Le tarif de 1822 distribuait par centièmes la rétribution do
85 centimes par hectare et 24 centimes par parcelle, accordée
aux géomètres , indemnité qui devait se répartir sur tous les
travaux du cadastre moins la délimitation. Le sieur Busset sentit
que celte c i r c o n s t a n c e devait, relativement à lui, modifier
l ’instruction du 20 mai 1827. Cette instruction établissait un
principe immuable , savoir : que la fixation de l ’i n d e m n i t é
entre le géomètre en chef et les géomètres ne serait pas
changée; inais , comme la délimitation n’avait point étç
�comprise dans la rétribution de ces géomètres ; qu’ainsi, clic
était restée à la charge du sieur Bussct ; ce dernier, dans le nou
veau tarif, greva sa propre rétribution des 3 centimes, prix de la
délimitation, de manière que l’indemnité du sieur Bussct fut
diminuée de 3 centimes, que celle des géomètres est restée
toujours la même , et que les 85 centimes par hectare et
24 centimes par parcelle, qui leur avaient été abandonnés en
1822 , n’ont , en 1827 , éprouvé aucune réduction.
Les géomètres ne pouvaient légitimement se plaindre de ce
\ c»ir pièces jus
tificatives, n°. i 3. nouveau tarif.
La position du sieur B u ssct, respectivement à eux , était
toujours la même Le sieur Bussct restait entrepreneur respon
sable du cadastre; les géomètres étaient toujours les entre
preneurs moyennant salaire, arrête et fixé entre eux et le sieur
Bussct, d’une partie des travaux confiés à ce dernier.
D ’un autre côté , l’administration avait voulu que la fixa
tion déjà faite de la rétribution des géomètres fût respectée;
elle voulait donc encore que les traités qui avaient eu lieu
entre le géomètre en chef et les géomètres le fussent égale
ment. Or, chaque partie du travail confié aux géomètres par
le sieur Bussct, n’était-elle pas spécialement indiquée par le
tarif? Ce tarif ne c o n t c n a i l - i l pas la fixa i io n de la r é t r i b u t i o n
p o u r c h a c u n de ces travaux? A quoi une nouvelle indemnité,
accordée aux géomètres, aurait-elle été dès lors applicable ,
puisque de nouveaux travaux ne leur étaient point imposés ? Pas
de rétribution sans travail, voilà la règle générale; lesgéomètres
ne peuvent en être l’exccplion.
11 importe peu (pie le prix de la délimitation fut, avant 1822,
de 5 centimes et qu’en 1827 1 cc Pr'x a‘ t
^lxe a ^ cent.;
les géomètres ne pouvaient seprévaloir de ce changement.
D ’abord, les t r a v a u x des géomètres n’étant point augmentés,
ces géomètres ne pouvaient, à aucun titre, exiger une nouvelle
rétribution.
�( 29 )
D ’un autre cote, Ici 2 centimes de différence entre le prix
de l’ancienne et de la nouvelle délimitation, étaient le résultat
d’une chance qui pouvait tourner contre le géomètre en chef,
e t , sous ce rapport, les géomètres ne pouvaient pas plus aug
menter leur rétribution de ces 2 centimes de différence, que
le sieur Busset n’aurait pu lui-même faire supporter à l’indemité des géomètres, l’augmentation qui aurait pu survenir
d,aiis le prix de la délimitation , puisque la rétribution accordée
à tous les travaux, m o i n s l a . d é l i m i t a t i o n , était irrévocable
ment fixée par le tarif. (A rrêté du iG août 1822.)
Enfin, ce qui tranche toute difficulté; le sieur Busset, comme
géomètre en chef, avait seul le droit de choisir scs employés,
et de fixer la rétribution qu’il voulait appliquer aux travaux
dont ils seraient chargés.
Les géomètres ont tout connu avant de traiter avec le sieur
Busset ; ils ont su quel était le nombre et la nature des travaux
qu’ils avaient à exécuter ; la rétribution attachée à chacun de
ces travaux. C ’est sur ces bases publiques et fixées par un tarif
administrativement formé, que leurs conventions avcclesieur
Busset ont e u l i e u ; c e d e r n i e r a t e n u à t o u s s o s e n g a g e m n n s , ’
comment donc lui adresser le plus léger reproche sur ce point ?
Tout cela est positii et ne saurait être contesté, si on s’at
tache au règlement et à la position du sicur Bussel envers ses
employés; mais un fait, bien mieux que les raisonnemens,
doit éclairer sur ce point le public, d’ailleurs si facile à abuser.
Les travaux du cadastre se sont faits par anticipation depuis
i82G ;et avant le règlement de 1827, la délimitation qui devait
précéder ccs travaux, avait été faite parle sicur Busset, sous
l’empire du règlement de 1821 : elle s’était étendue sur des
canions dont l’arpentage ne doit être achevé que cette année.
N est-il pas évident que, quels que fussent d’ailleurs les règlemens postérieurs, le prix de cette délimitation apparte
nait au sieur Busset; que personne autre que lui n’avait 1(3
�( 3° )
droit d’en profiter; qu’aujourd’hui même , personne ne pour
rait rien réclamer pour des délimitations laites en vertu du
règlement de 1827 , puisque ces délimitations n’ont eu lieu
que pour des travaux à exécuter en i 83o.
Toutefois , dans cette même année , le sieur Busset fut l’objet
de plusieurs agressions. Cinq géomètres de première classe
s’étaient unis, et à l’aide d’un sieur V ig ier, ancien géomètre
du cadastre, ils espéraient compromettre, tout à la fois, l’état,
la fortune et la considération du sieur Busset.
Le sieur Yigier se chargea de l’œuvre qui pouvait présen-r
ter le plus de difficulté, et exiger le plus de connaissances
spéciales. Sous prétexte de dévouement à son pays , il pré
senta au conseil général un long Mémoire authograpliié, de
huit pages in-folio, et le distribua à tous les membres fai
sant partie de ce conseil. Dans cet écrit, d’ailleurs peu hono
rablement qualifié par un arrêté du préfet, le sieur Yigier
critique toutes les opérations du sieur Busset ; p r o m e t , de
son chef, de très-bons travaux que, suivant lui, on peut ob
tenir avec de légères rétributions, et se présente ainsi au
département, comme destiné à y faire naître l'âge d'or du
cadastre. Honneur à ce grand citoyen!...,
De leurs côtés , l e s c i n q géomètres se p l a i g n e n t , entre
a u t r e ebose, de ce que, contrairement à l’instruction du 17
lévrier 1824, qui porte que les géomètres de première classe
seront chargés de la délimitation, de la triangulation et de la
formation du tableau d’assemblage, le sieur Busset s’est nonseulement réservé ces divers travaux, m a i s a e x c e d e l e s
R E T E N U E S q u ’ i l A U R A I T P U SE F A I K E A CET EGAI^D , dernier
reproche qui, conmie en le voit, présentait, sous une autre
form e, la principale imputation qui» plus tard, a fait l’objet
du ¡Libelle distribué contre le sieur Busset.
Les cinq géomètres élevaient bien d’autres prétentions.
1’arrêté du préfet les faisant successivement qojjnaîlrc , orç
�C 3r )
peut, sans inconvénient, les négliger ici. La narration est
déjà trop longue ; mais si un mot suffit pour diffamer l ’homme
le plus honorable , combien ne faut-il pas d’efforts pour déVoir pJèces juÿt
truire une calomnie.
tificaiives, n°, i/f.
L ’arrêté de M. le préfet est du 17 novembre 1827.
Cet arrêté considère , i°. que le sieur Busset ayant exécuté
personnellement les travaux, par suite de l’autorisation qu’il
en avait reçue du ministère, a du nécessairement toucher la
rétribution allouée à ces travaux par l’arrêté du 16 août 1822;
2°. Que le sieur Busset n’a jamais dépassé les prix fixes
par cet arrêté, dans les retenues qu’il a opérées en raison
de ces travaux , et qu’il y a calomnie de la part des péti
tionnaires sur ce point ;
3°. Que les pétitionnaires se sont permis une ailegatiotl
mensongère, lorsqu’ils ont prétendu qu’ils étaient dans lignorance sur l’existence de l’arrêté du 16 août 1822;
Que relativement à un des géomètres , le mensonge était
prouvé par un traité particulier, passé avec le sieur Busset,
le 18 août 1822, traité par lequel ce géomètre s’est engagé
a e x e c u t e r t o u s l e s t r a v a u x s p é c i f i e s d a n s l ’a r r ê t e , m o i n s ta
délimitation... . et à se conformer en tous points aux dis
positions qu’il contient;
Qu’un autre de ces géomètres était également en état de
mensonge prouvé par une lettre de lui au sieur Busset, en
date du 26 mars 1825 , lellre où ce géomètre demande le
payement des sommes acquises , cl établit lui-même le dé
compte de ce qui lui revient, d’après le tarif de 1822;
Q ’enfin, cet arrêté était nécessairement connu de tous les
géomètres, puisqu’il est rappelé dans l’instruction générale
du géomètre en chef à ses collaborateurs, du 1". mai 182!$,
sur les obligations qui sont imposées à ceux-ci, cl dont ils
ont tous reçu un exemplaire,
M. le préfet, s’expliquant ensuite sur les motils qui ont
fait agir tes cinq géomètres, et
�( 3
0
« Considérant que le droit de réclamation qui est acquis
» à tout individu qui se croit lésé dans scs intérêts , aurait
» dù cire mis en usage par les pétitionnaires, avec plus de
» modération , et sans chercher à calomnier leur chef par
» des imputations qui ont clé reconnues sans fondement, et
» q u e tout démontre qu’ils reconnaissaient eux-mêmes comme
» telles ; »>
» Considérant que les géomètres susdilsonl montré dans leur
» attaque une animosité coupable , ainsi que le désir d’im« primer sur le compte de M. Busset, une prévention dé» favorable dans l’esprit de l’administration, comme dans
.» I opinion publique ; qu’ils ont employé tous les moyens
» possibles de lui n u ire , soit par leur propre m ém oire, soit
» par la part qu’ils paraissénl avoir prise à celui signé / igier,
i> qui a été distribué à tous les membres du conseil général,
» lors de sa dernière session, et qui ne tendait à rien moins
'» qu’à faire retirer à M. Busset la confiance que le dépar» tement lui accorde, si le conseil général n’avait Jaitjustice
» de ce L i b e l l e . »
Rejette la demande collective des cinq géomètres, comme
mal fondée et contraire aux règlcmens ;
E t attendu q u e l e s faits a l l é g u é s p a r c e s g é o m è t r e s , s o n t
o u c a l o m n i e u x o u dénués de preuves ; q u e r i n t e n l i o n de
nuire à leur chef, cl de le décréditer aux yeux de /'admi
nistration est dans ¡ opinion publique, est manifeste;
Déclare que N... N... N... N... N... cessent de faire partie des
agens du cadastre, en qualité de géomètres, et. que leurs
commissions sont annulées,
Les cinq géomètres ne pouvaient reconnaître q u ’ils s’étaient
trompés. Leur conduite avait été jugée par l’administrai ion ;
mais bientôt le conseil général de département, et M. lePréfet,
seuls juges souverains d’un aussi singulier différend, fu re n t
présentés au public comme les complices du sieur Busset.
�( 33 )
Ce dernier avait, tout a la fois, trompé l'administration ,1
M. le p réfet, le conseil général, le ministre lui-même qui
avait homologué l’arrêté du 17 novembre 1827. Toutes ces
autorités devenaient les instrumens de l’orgueilleuse igno^
rance du sieur Busset , et protégeaient sà basse avidité Les
cinq géomètres et le sieur Vigier , tous seuls avaient rai
son ; mais que pouvaient ces voix généreuses contre l’igno
rance , les intrigues , et surtout les protections toute-puissantes du sieur B u sset!. . . .
Un changement de ministère est toujours un grand évé
nement. Les mécontens s’agitent, et alors les intérêts poli
tiques ne sont pas ce qui «occupe le plus certains hommes.
Le plus souvent des intrigans viennent, au nom d’une opi
nion qui les désavoue, parce qu’ils la déshonorent par leurs
excès, exiger le prix de leur dévouement. Les ames géné
reuses demandent h tous les Gouvernemens , l’établissement,
la reconnaissance et l’affermissement des principes sur les
quels reposent la sécurité , le bonheur et la prospérité de la
société entière ; l’intrigant , moins exigeant , ne s’occupe
q u e des h o m m e s ; il n e d e m a n d e a u t r e chose à t o u s tes
ministres, que l’abaissement , la perte de la fortune , de
la considération ; enfin, l ’anéantissement de l’existence mo
rale du malheureux qui s’est attiré s^liairje, ou a excité son
envie.
M. Roy avait succédé à M. de Villèle dans le ministère des
finances ; un nouveau préfet administrait le département.
Les cinq géomètres renouvellent leurs réclamations ; mais
après un examen très-attentif, elles sont encore repoussées
par arrêté du ministre q u i , entre autres motifs de sa déci
sion , donne pour raison » que les réclamans, avant d’entreprendre les travaux qu’ils ont exécutes, ont eu connaisJ> &ance de l’indemnité qui y est attachée; laquelle, confor•” Uîéjrnenl à sa circulaire du 11 décembre 1821, avait été prea-t
5
�C 34 £
», lablementréglée par un arrêté du préfet, du 16 août 1822. »
Ainsi , sur ce p oin t, il y a tout à la fois preuve de la
diffamation, de la calomnie, et du mépris pour l'autorité de
la chose jugee.
La diffamation ressort du Libelle ; le délit e s t, sous ce point
de vue , indépendant de Ja vérité du fait imputé.
Il y a calomnie dans la diffamation , toutes les pièces analisées établissent cette circonstance agravante du délit : les
règlemens, les tarifs, les arrêtés, prouvent qu’il ne pouvait
a p p a r t e n i r autre chose aux géomètres , qu’une rétribution de
centimes par hectare, çt 24 centimes par parcelle, et que
tout le reste de l ’indemnité était la propriété exclusive du
sieur Busset.
Il y a enfin mépris pour la choise jugée, puisque deux
décisions souveraines et successives étaient intervenues, et
repoussaient définitivement les prétentions des géomètres,
en les qualifiant de mensongères et de calomnieuses.
Pour faciliter l’intelligence de la suite de ces observations,
et mettre le lecteur à même d’apprécier les imputations du
L ib elle, soit relativement à la banque cadastrale tenue par
le sieur Busset, soit relativement aux vices reprochés à ses
travaux, il est indispensable de s’arrêter d’abord à quelques
faits qui peuvent servir à dévoiler le caractère des person
nages qui ont coopéré a cette œuvre de ténèbres.
En 1822, un jeune homme à peine âgé de 19 à 20 ans,
d’une rare capacité, et d’un esprit aussi aimable que léger,
se présente chc?; le, sieur Busset avec des recommandations
auxquelles ce dernier ne pouvait rien refuser.
D’abord, ce jeune homme devait, comme géomètre, aller
travailler sur le terrain ; mais il se plaignit bientôt de la
fatigue, trouva que scs forces étaient insuffisantes pour ce
genre de travail, et fut, dès cet instant, attaché aux bureaux
du sieur Busset. comme employé aux calculs de la triangula-v
�( 35)
tion. Bientôt ce jeune géomètre eut toute la confiance du sieur
B usset, et devint son ami.
L ’existence de ce jeune homme devait être bien douce.
Admis à la table du sieur Busset, vivant chez ce dernier comme
le fils de la maison ; ses appoinlcmcns qui n’étaient d ’abord
que de 3oo f r . , furent progressivement portés à i , 5o o fr. ,
et on conçoit que pour cette fixation, le sieur Busset consulta
plus ses affections que les talens et l ’activité réelle de son
jeune protégé.
Cependant ce jeune homme était bien légèr ; toute l’ac
tivité de son esprits’usailen épigramines et en bons mots : au
reste, sa dissipation habituelle , sa négligence dans les travaux
qui lui étaient Confiés ; enfin , l’oubli complet de ses devoirs ,
durent lui attirer quelques représentations. La jeunesse est
trop souvent présomptueuse ; le jeune géomètre cédatit à un
mouvement d’orgueilabandonna ses opérations, et fut bien
tôt compté parmi les employés de l’agence du sieur Piodde.
L à , toutes ses dispositions devaient être fécondées ; le sieur
Busset devînt le but ou tendaient tous les traits de ce jeune
im prudent, q u i se mit «lans l’impossibilité de reprendre les
occupations h o n o r a b l e s pour l e s q u e l l e s il était n é , et q u e même
le sieur Busset avait promis de lui confier temporairement.
Ce jeune homme est-il l’auteur du Libelle? Le style de cet
écrit paraît d’abord l’accuser, mais une lecture plus attentive
annonce bientôt qu’une main plus perverse est venu mêler
scs poisons aux attaques au moins indiscrètes de cet étourdi
qui, bien certainement, n’écrivait pointpour un public éclairé,
mais qui souriait peut-être à l’idée de surpasser, à force de mé
chanceté, les espérances de ses Mécènes et de ses lecteurs complaisans.
Ce jeune imprudent était encore dans les bureaux du sieur
B u sset, lorsque, en septembre 1826, un nouveau personnage
vint s’ÿ présenter.
�Voir pièces jus
tificatives, n°. iG.
V o i r pièces jus
tificatives ; n°. 17.
(36)
Ce nouvel employé était dans la maturité de 1 âge et dans la
for cede son talent. Comme dessinateur, il devait coopérer aux
travaux de la carte ; comme géomètre , il devait encore s’oc
cuper des plans des propriétés de S. A. R. le duc d’Orléans;
ses appointemens furent d’abord fixés à 2,400 fr.
Les relations du sicùr Busset avec son employé , durent
flatter ce dernier ; le sieur Busset s’occupait même des inté
rêts privés de ce nouveau ve n u , avait pour lui des égards et
de la çonsidération , de manière , qu’au moral , cet employé
était auprès du sieur Busset « tout comme un payjan , qui ,
» toute sa vie , habitué à manger des pommes de terre, se
» trouve tout à coup à une table bien servie ; dans la première
» position il vivait, mais dans la seconde, il vit délicieuse» ment. »
Le sieur Busset avait fait des avances à cet employé ; le
traitement de ce dernier avait été fixé plus tard à 3 ,000 francs;
200 francs de gratification pouvaient même lui être accordés,
lorsque le sieur Busset, en vérifiant les travaux de son em
ployé, et notamment c e u x de la carte , se convainquit que ces
travaux étaient erronés et mal faits. L ’employé dut recom
mencer son travail, mais les motifs de mécontentement ne
cessant pas , le sieur Busset crut devoir donner congé par
écrit, en mettrnt dans cette démarche tous les égards et tous
les ménagemens possibles , et en accordant à l’employé un
temps plus que suffisant pour se pourvoir ailleurs,
Cet employé quitta sur le champ les bureaux du sieur Busset;
alors commença la correspondance la plus violente et la plus
injurieuse ; on ne peut entretenir long-tem ps le public de
choses aussi peu dignes de son attention ; mais, au moral, le
paysan avait soudainement reparu , et pour terminer par un
coup d’éclat, il écrivit au sieur Busset « qu’il le croyait capable
» de tout; que les honnêtes gens le jugeaient capable de tout.»
Rudes expressions , sentant la manière d’un coopératcur de
Mayeu-Ic-Bossu.
�<” 3 7 )
Toutefois, cet employé avait quitté le département. Neuf
mois s ’ é t a i e n t écoulés lorsque le sieur Busset reçoit une letlrfc
de l u i , par laquelle il lui demande de l’emploi.
Ce fait est incroyable ; il vient s’ajouter à ceux qui font de
l’homme une énigme inexplicable. Toutefois , le sieur Busset
devait refuser ; on sent que son intérêt et sa propre dignité ne
lui permettaient plus d’avoir aucune relation avec un homme
dont il avait si fortement à se plaindre ; la réponse du sieur
Busset fut d’ailleurs sans aigreur, et voulant adoucir son refus
et conserver les égards dus au malheur, le sieur Busset ter
mine ainsi: « Toutefois, si mon intervention pouvait vous
» être utile pour vous faire p lacer, je m’y prêterais avec em» pressement. »
Cet employé arrive à Clcrm ont, il y venait avec la recom
mandation d’un personnage honorable : c’était la pièce qui
devait être montrée au sieur Bussct; mais ce solliciteur avait
prévu un refus, sa vengeance était toute prête, son j e u n e
camarade lui avait confié l e précieux manuscrit , les trails
pouvaient en être piquants , tnais le Libelle ayant passé
en d ’a u tr e s m a in s ; se s traits
son t a u jo u rd ’h ui e m p o iso n n é s ,
et le sieur Roddc s’est c h a r g é de l e s l e n c e r et d ’ e n f r a p p e r la
victime.
On peut actuellement reprendre le Libelle, et, d’abord, qu'est
cette banque cadastra le moyennant un escompte
Bien certainement les deux employés dont on vient de parler ne l’ont point
enrichie. Ce n’est point parce que le pécule des géomètres ne
suffisait point à leurs premiers besoins qu’ils ont recours à
l’emprunt. Les travaux du cadastre se faisaient par antici
pation; les indemnités ne devaient être payées qu’à dès époques
fixes mais éloignées , et qui ne pouvaient être devancées ; de là
nécessité, p o u r plusieurs géomètres, ou d’abandonner les tra
vaux , ou d’emprunter pour attendre le payement de l'indem
nité. Ces geometres savent , et les pièces justificatives le
Voir pièces jusliGcalives, n°. 18.
�( 38 1
prouveraient au besoin , qu’ils avaient d’abord eu recours à un
inode d’emprunt très-onéreux ; que c ’est pour faire cesser cet
abus, que le sieur Busset leur a ouvert sa bourse.... Pourquoi,
dès, lors, tant de mensonges accumulés ? Pourquoi changer
en une action sordide , honteuse et punissable , une action
généreuse et honorable ? Mais sans le jnensonge, quel serait
l ’aliment de la diffamation !
Quant aux travaux du sieur Busset, il ne peut appartenir à
un homme étranger aux connaissances qu’ils exigent, d’en
parler d’une manière satisfaisante. L ’homme le plus instruit
dans ces matières, pourrait bien , d’ailleurs, ne pas trouver
beaucoup de lecteurs. La science a des mystères que tous ne
sont pas appelas à approfondir, et on laisserait au sieur Busset
le soin de s’expliquer lui-m êm e à cet égard , si une autorité
imposante, et que l’ignorance seule pourrait repousser, ne
venait à son insçu,porter témoignage en faveur de l’Atlas opographique du département du P u y -d e -D ô m e . « L ’Atlas de
M. Busset ( dit M. Puissant) , doit, sans contredit , être
» considéré comme une des plus belles productions topogra?> phiques de notre époque ; l’auteur consacre une partie de
» sa fortune à la réussite d’une entreprise utile, dont lejrésultat
» sera de donner à un de nos départemens, une description
i> qui s u r p a s s e d e b e a u c o u p en p e r f e c t i o n t o u t e s c e l l e s quenous
avions des autres parties de la France. » ( Rapport à l’aca
démie des sciences, séance du lundi 25 niai 1820. le Globe,
tome 7, n°. 45 . )
Actuellement, le sieur Busset doit s’expliquer lui-m êm e
sur ses autres travaux , et sur les yipes cj’u ’on essaye d’y fajrp
remarquer.
« J’arrive à la partie de ma tâche qui semble la plus difficile à
remplir , c ’ e s t - à - d i r e , à la preuve que la perfidip la plus noire
a seule répandu les bruits qui circulent sur la régularité de
incs travaux. Je commencerai parle fait précisé dans ja notp
de 1 apage 2 7 .
�( 39 )
» J’afïîrme quccc fait est faux. J’cn ai fait personnellement
la vérification outre celle que j’avais ordonnée.
»Au surplus, Monsieur, l’inspecteur-général du trésor, chargé
dé la vérification de mon service , est aux portes du départe
ment ; je le supplierai de porter, avant tout, son examen sur
Ce point, et il sentira , je n’en doute pas , toute l’importante
du devoir qui lui sera imposé, de signaler à M. le Préfet l’er
reur grave dont il est question , ou de détruire les fâcheuses
impressions que peuvent avoir fait naître dans l ’esprit de ce
magistrat , des occupations trop souvent répétées , car les
germes semés par la calomnie sont rarement inféconds.
»Les travaux du parcellaire sont de deux espèces, i°. la trian
gulation qui m’est personnelle et qu’on prétend que je lais si
vite et si mal ; 2->. les plans que font les géomètres, et dont je
suis responsable , sauf mon recours contre eux.
»Quantàla première opération,lors mêmeque je dirais qu’elle
a pour base les grands travaux géodésiques que le dépôt de la
guerre fait exécuter pour la carte de France, et dont quelques
points ont été déterminés dans ce département, par M. le Co
lonel l î r o u s s a u d , a u q u e l m e j e s u i s p l u à d o n n e r d a n s mon
ouvrage, un témoignage d’estime et de reconnaissance.
» Quand j’ajouterais qu’en parlant de ce travail, dont l’exac
titude ne peut être contestée ( puisque lui-même a pour base
celui de M. Delambre, qui a servi à déterminer la longueur du
mètre); je forme des triangles qui ont des côtés de dix mille a
trente-trois mille mètres, et que je subdivise autant qu’il le
faut afin d’obtenir les points nécessaires aux géomètres pour
le parcellaire.
Quand j’affirmerais qu en opérant avec un instrument par
fait, j’arrive par celte méthode (qualifiée d’admirable par mon
détracteur le plus ardent ), a des résultats aussi précis qu’on
puisse les obtenir partout où l’on employé le même procédé,
et bien supérieurs a ceux qu on a dans les départemens où
ma méthode n’est pas suivie. »
�( 4° )
»Tout cela, dis-je, ne formerait pas de preuves en faveur de
mes résultats. Cependant, qu’on se rassure, je crois en avoir
une qui tranquillisera les moins confians.
» M. le général, directeur du dépôt de la guerre, sentant
toute l’importance de mon travail pour la carte de France ,
a demandé au ministre de la guerre l’autorisation de traiter
avec moi pour en obtenir la copie ; Son Excel, a bien voulu y
consentir, et je suis à la veille de remettre, pour cinq cantons,
des résultats qui seront soumis à des vérifications rigoureuses.
>>Si donc mes travaux n’ont pas la régularité désirable, s’ils
ne surpassent pas même (Je be£ucoup toutes les exigences des
instructions cadastrales, j’autorise M. le directeur du dépôt de
la guerre , à qui j’aurai l ’honneur d’adresser mon Mémoire , à
ine s i g n a l e r hautement au mépris et au ridicule , comme étant
à la f o i s l’hoinme le plus présomptueux et le géomètre le moins
habile.
» Quant aux erreurs des plans, si elles existent (ce que je nie
jusqu’à épreuve) , elles ne peuvent être connues, et ayoir été
signalées , que par deux espèces de personnes.
>> Par les géomètres destitués qui les auraient commises.
» Par les deux personnes déjà désignées qui ont été mes em-*
ployés de confiance, pour les vérifications, et que les instruc
tions c a d a s t r a l e s m’autorisaient à employer à ce titre.
» Si ce sont les premiers, on voit le dégréde confiance qu’on
peut accorder à leur probité et à leurs talens.
» Si ce sont les seconds, on voit jusqij’où va leur délicatesse
et leur honneur , puisque , payés par m oi, pour me signaler
les vices du travail , ils me les auraient cachés pour s’eij faire
des armes contre moi,
» Au surplus, j’invite chacun âm e signaler ces erreurs ; que
l’avis ine parvienne par une voie amicou ennemie, je Je regar
derai comme un service, et je tiendrai à devoir de les rectifier,
coule que coûte , sauf mon recours contre qui de droit, m
�( 4 0
Ces ob se rv a v a tio n s sont terminées : Le public peut actuel
lement choisir entre le diffamateur et l’homme honnête calom
nié. Le sieur Busset, fort du témoignage de sa conscience, n ’a
v o u lu faire appel à aucune passion. Levrai courage n’exclut pas
la modération. Le sieur Busset ne veut offenser personne,
mais il a usé et usera du droit de la défense avec fermeté ; et
quant à celui qui n’est point appelé à s’expliquer sur lui-même,
qui veut et doit rester étranger à toute intrigue ; qui ne fait
point de l’opposition pour offenser les principes, qui veut, aucontraire, qu’ils soient fidèlement respectés pour la garantie
de tous, ilsc contentera de répondre, avec le moraliste de tous
les. sciècles, à la malveillance dont il pourrait êLre l’objet :
Quem sua culpa premel, deceptus omiite tuen :
Ut penitùs riütum, si tentent crimina serves,
Tuterisque tuo fidentem prœsidio.
( Q. Horatii, épit. 18.)
’
’il - •••
¿/''JDÎli . ijiiYüb £>I L* i 1)3nsi
C.-F. B U SSE T , Geomètre en chef du Cadastre.
•" .
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_ .y .i !
3c d
.1
•»
M \ L A R O C H E , avoue.
J.-Cii. B A Y L E , ancien avocat a Riom.
L e soussigné, ancien jurisconsulte près la Cour royale de
l\iom, quia vu le mémoire du sieur Busset, et l’éçrit imprimé
qui y a donné lieu.
Estime que sa plainte est fondée ; qu ’il ne pouvait pas gar
der le silence sur le Libelle, sans compromettre son existence
sociale, et son état comme homme public ; q u e , d’ailleurs , sa
défense est présentée dans des termes convenables et a v e c
luette force de vérité et de raison qui assure un plein succès.
�( .4 0
Rien n’a moins besoin de preuves en ce qui concerne le sort
de la plainte. La diffamation est évidente ; or, la loi la punit
sans aucun examen de la vérité du fait. Elle cesserait d’être
digne d’elle-même ; elle offenserait la morale et la justice ,
elle ébranlerait enfin les fondemens de l’ordre social, si elle
pouvait autoriser le coupable diffamateur à offrir des preuves,
ou à diffamer de nouveau, sous prétexte de se défendre. Les
tribunaux n ’ont qu’une chose à examiner ; qu’un seul moyen à
entendre : il y a ou il n’y a pas diffamation. Là s’arrêtent
les débats d’une plainte de cette nature.
Toutefois , le sieur Busset a fait sagement, en présentant;
quoique en dehors de sa défense, les faits et les pièces qui
mettent sa conduiteaujour.il en avait besoin, moins envers cette
portion du public qui saisit avidemment les traits lancés par la
méchanceté, qu’à l’égard des hommes plus sensés , qui ne
jugent pas sans entendre , mais qui peuvent se laisser prévenir
par ces clameurs répétées qu’a bientôt enfantées la malveil
lance ; il le devait d’ailleurs à l’administration qui veut et doit
vouloir que scs agens soient irréprochables.
Peu de personnes connaissent dans le département ce qui
s’est passé à l’égard du sieur Busset depuis qu’il est géomètre en
chef; toutes les t e n t a t i v e s qu’on a faites, toutes les manœuvres
e m p l o y é e s pour le déplacer , quelquefois pour se placer soimême. Les pièces qu’il produit aujourd’hui suffisent pour dé
montrer que le mauvais succès de toutes ces combinaisons
repoussées par le premier administrateur du département ,
après une instruction fort éclairée , a seul enfanté ce nouveau
système qui consiste à le décrier publiquement par des men
songes , comme le dit l’arrêté de 1827. Triste et honteuse
ressource que repousserait la probité la moins austère. Il ne
doit donc rien redouter , ni du jugement du public, ni de
celui des tribunaux.
R i o m , le 28 juillet 1826.
D E YISSAC.
�PIÈCES JUSTIFICATIVES
. l ÜS Î E T t o l / I
Dont les originaux sont déposes en l'étude de M c C a v y , notaire
a ¡ • 'Llermont-J?
errand. « ~ . l o i ' v i n n i w o i s u o n i
•
•
- ' ■l i a < 1 ( T n f i i n
j
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g .J
ii
'
Clermont , le
"i
5 janvier
1 8 zoi
N°. I
Jr. «
M o n s ie u r ,
Dans la confiance et l ’abandon que m’inspire votre promesse, j’opte pour le
parti qui me livre à votre discrétion , c ’est-à-dire , pour la déclaration qui sup
prime la note que vous vous proposiez d’adresser à M. le directeur , sur mon
compte ; j’aime à vous donner ce témoignage de ma sincérité, il est le résultat
de l’invariable résolution que j’ai prise d’abandonner la place que j’occupe actueliemeut dans le cadastre, plutôt que d’éprouver le chagrin de voir se renouveller tes motifs de plainte que vous avez contre m o i , plus vous avez été
loyal et gè ureux dans l'entretien que f a i eu hier avec vous , plus les témoignages de
ma reconnaissance devront être multipliés ; j’ose espérer que vous m’accorderez
votre estime, c’est mon plus vif désir, et je ferai tout ce qui sera en moi pour
la mériter et vous faire oublier le passé.
J ’ai l'h o n n e u r , m o n s ie u r , d’être avec le plus profond r e s p e c t , et la plus
haute considération,
Votre très- humble et trés-obéissant serviteur ,
N.
N O TA. A in si le sieu r B usset avait contre ce géom ètre des m otif s de plainte : la conduite
d u s ie u r B u ssetavait été loyale et généreuse ; çette loyauté et cette générosité' avaient été appré
ciées par’le géom ètre q n i s’ y abandonne sans réservefaprès une lu tte scandaleuse de trois années,
et ne form e qu’ un vCEUj celu i d éfa ire oublier le passe , par une con duite qu i puisse lu i c o n c ilie r
l'estime du sie u r B u sse t: et ces protestations sont écrites le len dem ain d’ un entretien qui avait
eu lieu entre l’ in gén ieu r-v érifica teu r j t le géom ètre de prem ière classe. E t ce p e n d a n t, o n verra
b ie n tô t que ce m êm e géom ètre , n ’a pas crain t de s u n ir h plusieurs autres de ses confrères pour
n o ire au sieu r B u s s e t, qu ’il s’ est attribué la glo ire d’a vo ir été le rédacteur de toutes les’petitions
et dem andes adressées à M. le p r é f e t , à l ’ effet d’ ob ten ir que le sieu r B usset fu t exclu du co n
cours à t’ c in p lo i de géom ètre en c h e f; q u ’il s’ est présenté com m e une victim e des vexations et
’le l ’ arb itraire que le sieu r B usset exerçait contre les g é o m ètrçs; qu ’ enfin , lo rsq u e, p o u r le con
fondre , M. le p réfet lu i présenta les aveux consignés dans cette lettre , le géom ètre crut pouvoir
d ire qu’ el|B ]u j ava;t ¿ t(: <]ictde le pistolet sur lu gorge, et ne reçut du m agistral d’ autre réponse
' l " e «vile de l’ in d ign ation c l du m épris : « La crosse était donc b ien lon gue ? »
erj
�Clermont-ferrand , le
5 novembre i8ai.
M o n sieu r J
N o u s avons l ’honneur de vous p r é v e n ir, que nous adressons aujourd’hui à
monsieur le p r é f e t , une pétition tendante à le supplier de nom m er un géomètre
en chef dans ce dép artem ent, pris parmi tous les ingénieurs vérificateurs de la
F ra n ce , vous seul excepté ;
L e s sentiinens d’honneur et de délicatesse que vous nous connoissez, nous
font un devoir de vous faire part de cette démarche.
N ou s avons l’honneur de vous saluer très
m on sieu r,
respectueusem ent, e t d’être
• ■
V o s très-humbles serviteurs,
Suivent onze signatures.
N o t a . U n e n o te rem place la sig n a tu re du douzièm e g éo m ètre. S u r les douze , n e u f avaient
d e m a n d é , et six se u lem en t o n t pris du travail depuis i8 a a .
Clermont le 12 novembre 1821.
M onsieur,
J ’apprends à l ’instant qu'on m ’a présenté h M . le p r é fe t , com m e n’élant point
étranger à la démarche qui a été faite auprès de l u i , et relativement à vous, par
M M . les géomètres.
V o u lan t éviter q u’on ne fasse de cette affaire quelque chose de semblable à
celle de M . Lacconillc , attendu que je vois d’une part le mfime b u t , j’en prends
occasion de vous déclarer que j ’y ai été et que j e veux y être absolument étranger.
V euillez de votre côté ne pas vous occuper de moi plus que je veux m ’occuper
de v o u s, ne me mûlez dans aucun de vos débats; et si vous croyez devoir
parler sur mon c o m p t e , ne le faites q u d mesure et les pièces justificatives à la
main. J e vous déclare bien positivement que je ne suis pas disposé à permettre
qu’on se serve de mon nom dans aucune espèce d ’intrigue.
J e vous salue : Signé Rodde aîné.
N o t a , A insi le sie u r R o d d e est ennemi de toute especes d intrigue , on ne doit parler de lui
q u ’avec mesure et les pièces justificatives à la main.
C e sentim ent est h o n o rab le , et ann on cerait que le sieu r R o d d e a eu autrefois le sentim ent de
sa d ig n ité . 11 é crivait cela en i8 a i ; p o u rq u o i en i8 a 9 } a ttaq u e-t-ilau ssi lé gè re m e n t la réputa
tio n d’une personne q u i lu i e st, é tra n g è re , et
d e v ie n t-il colp orteur de diffam ation ? Q u e lle
�différen ce ?i e'tablir entre le sieu r R o d d e, chef de bureau du Cadastre en i 8 a i , et le sieu r R od d e
agent d'affaires à Clermont en i8 a ç !
M ais e n c o re , si le sieu r R o d d e est demeure' étran ger aux dém arches des géom ètres en i 8 i i ,
q u elle s relation s a -t - il eu depuis cette époque avec le sie u r B u sse t, qui aient pu le porter à le
c o n s titu e r son adversaire ? a - t - il parcouru la m êm e carrière que le sie u r Busset ? L eurs in té
rêts o n t-ils été confondus ? le
sieu r R od d e p e u t-il sign a ler des m otifs propres à lé g itim e r la
h ain e qu’ il porte au sieu r Busset ?
R ie n de tout cela : e sieu r R o d d e a g it sans i n t é r ê t , de g a îté d coeur et sans avantage pou r
lu i-m ê m e ; il ravit à son sem b lab le la pro p riété la plus précieuse de l ’ hom m e ; le sieu r R od d e
n ’ a pas m êm e p o u r excuse l’am ou r p ropre d’auteur à satisfaire ; les applaudissem ens des hom m es
légers qu i se co m plain sen t dans la lectu re de p rodu ction s pareilles à celles que le sieu r R od d e
vien t de join d re
à ses
agences d’ affaires , sont réservés à d’ autres qu ’ à lu i.... Q u e lu i re ste -t-il
donc ? La h o n te d’ une m auvaise a c tio n , la tache inneffaçahle dont la lo i flétrit le d iffam ateur ;
qu e le sieu r R o d d e se ra à plain d re , si un j o u r l ’ illu sio n e’ é v a n o u it, si de sang-froid il peut ap
p récier sa p osition, si enfin le R o d d e de 1811 est appelé à ju g e r avec im partialité le R od d e de 181 h.
11
Clerm ont , le i 5 novembre 1821.
•:
1 ■•
■
1
y a si peu de m é r i t e , M o n s ie u r , à exprimer passablement ce que l’on
sent bien , que je ne crois pas manquer de modestie en avouant mon ouvrage.
C ’est m o i , M o n s ie u r , qui ai rédigé les diverses réclamations qui on t été
présentées à M . le préfet relativement à vous ; mais je n’ai point seulement ex
prim é m on opinion. J ’ai exprimé, autant qu’il a dépendu de m o i , celle de tous
mes collègues , et une preuve : c'est qu’ ils les ont signées.
L a p ré s e n te n ’éta nt à a utre fin , que de vous é p a rg n e r toute incertitude /à cet
égard.
J ’ai l ’honneur , m o n s ie u r , de vous saluer.
N .......
N o t a . Cette lettre est du géom ètre qu i a é c rit c e lle no. 1er- O n d o it les rap p roch er avec soin ,
si l ’ on veut se faire une idée nette de certains h o m m es. S i la seconde lettre est vraie , com b ien
la prem ière est-elle
basse Ot v ile ? si au con traire , la prem ière lettre con tenait l ’expression
sincère des sentim ens de son a u te u r , p o u rq u o i a - t - il écrit la seconde ; pou rq u oi est-il devenu
le con seil e lle réd acteu r des géom ètres m écon teos ? L ’ état des choses ne pou vait avoir ch an g é ;
p o u r lu i , depuis le 5 ju ille t 1820 , il avait cessé ses travaux dans le cadastre , et co n sé q u e m m e n t,
il ne pou vait avo ir, depuis cettcépoque aucuns m otifs
nouveaux
de h aine ou d ’affection p o u r
le sieu r B usset.
Clcrmont-fcrrand , le 26 novembre 18 2 1 .
L e m aître des req u C tes, officier de la légion d ’h o a n ç u r , p ré fe t du P u y -d e ?
�V u l ’ordonnance royale du
21 el 22 de la loi du
3x
3 o cto b re
1821 ; p o u r l ’exécution des articles 2 0 ;
juillet précédent sur les finances , relatifs aux opérations
cadastrales qui demeurent circonscrites dans chaque département.
V u le règlement général de S on Excellence le ministre des finances du 10 du
même mois pour l’exécution desdites opérations portant :
A P i T . I er. « L ’arpentage parcellaire est confié dans chaque département à
» un géomètre en chef nommé par le préfet.
» L e géomètre en chef a le choix de ses collaborateurs, qu’ il paye sur sa ré-»
» tribution , et dont il est responsable.
A rrête :
L e sieur B u s s e t , ingénieur-vérificateur du cadastre , est nomm é géomètre en
c h ef pour la direction des travaux de l’arpentage parcellaire dans ce département.
Expédition du présent arrêté sera adressé, tant à M . B u sset pour lui tenir
lieu de commission , qu’au directeur des contributions directes.
F ait à lJbôlel de la préfecture à Q ç r m o n t - F e r r a n d , le 26 novembre 1821;
Signé B °". D U M A R T R O Y .
P o u r copie conforme :
Le secrétaire general de la prefecture
TRENQÜALYE.
Clermont-Ferrand, le 21 m ai 1822.
M o nsieu r,
Ts0. 6 .
V o u s me demande?, par votre lettre du i/t de ce m ois, si vous devez compter .
sur m oi p o u r l’ e xécutio n des travaux de l’arpentage, dont la direction vous a été
confiée par M . le préfet, el si vous pouvez me comprendre au nombre de vos
collaborateurs.
Attaché à la partie d’art du cadastre depuis l’origine de celle opération, ayant
supporté sans découragement toutes les chances malheureuses, ce n ’est point
au moment où tout peut me faire espérer un meilleur a v e n ir , que je renoncerais
volontairement aux avantages que semble promettre le nouvel ordre de c hoses,
et auquel j ’ai bien quelques droits de participer, après plus de dix-huit ans de
souffrances et de déceptions.
•fe ne croîs donc p o in t, M o n sie u r, être inconséquent avec m o i-m ê m e , et
manquer aux engagemens que j’ai pris avec mes compagnons d’infortune, en vous
déclarant i c i , que je suis prêt à prendre une part active aux travaux quc vous
êtes appelé à d irig e r, pourvu que ma rétribution soit réglée convenablement »
�qu’elle soit en rapport avec la vôtre ; que la difference en moins qui peut peser sur
la nouvelle fixation, comparée à l’ancienne, soit répartie prop ortion n ellem en t,
et que le désavantage ne retombe point en entier sur vos collaborateurs.
J ’y mets encore pour condition, que les choses seront réglées de manière à ce
qu
en remplissant mes obligations avec une scrupuleuse exactitude, je ne puisse
être tourmenté ni éliminé arbitrairement.
C e s demandes, M onsieur, sont trop justes pour pouvoir être refusées. J ’ose
donc espérer qu’elles seront accueillies par vo us, et que vous verrez dans la fran
chise avec laquelle je réponds aux ouvertures que vous m ’avez faites, une preuve
du désir que j’ai de mettre un terme à nos différens, et d’en faire à jamais cesser
les causes.
V euillez agréer l’assurance de la considération distinguée avec laquelle j'ai
l ’honneur d’être, M o n sie u r,
V o tr e très-humble et très-obéissant serviteur*
N .....
A M . le préfet du P u y - d e - D ô m e .
P aris, le a 3 avril, 1822.
J ’ai l’honneur, Monsieur le préfet, de vous adresser une copie du rapport qui
m ’a été présenté sur la fixation des indemnités attachées aux opérations de 1 ar
pentage, par votre arrêté du 3o m a rs dernier.
J e vo u s prie d’e xam in er a tt e n t iv e m e n t les o b serva tio n s que c o n tie n t ce rapport,
e t si vous les jugiez fondées, de modifier en c o n sé q u e n ce v o tr e arrêté. J e vous
serai obligé, de me m ettre, par une prompte r é p o n s e , à portée de terminer cet
objet.
J ’ai l’h o n n e u r, M onsieur le p ré fe t, de vous saluer avec un b ien sincère a tta
chem ent.
L e ministre secrétaire d’état des finances :
’ **
*
*
«
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.
.
.
'
S ig n é J o s e p h
•
d e
.
V IL L È L E .
RAPPORT.
E n execution des articles 1 et 2 du règlement général du 10 octobre 1 8 2 1 , sur
les opérations cadastrales, M onsieurtle préfet du département du P u y -d c D ô m e ,
a nommé géomètre en chuf le sieur Busset, et fixé, par arrêté p articu lier, le tau*
des indemnités attachées aux travaux de l ’arpentage.
L e sieur Iiusseta rem p li, avec beaucoup de zèle et de ta le n s , les fonctions
d ’i n gén ieur- vérificateur ; il offre & 1 administration toutes lçs garanties désirables
�pour l ’exécution d ’un bon travail. O n ne peu t, en conséquence, qu’approuver le
choix de M . le préfet. C e magistrat a , dans la rédaction de son arrêté, pris toutes
les précautions que recommandait la circulaire instructive du n d é c e m b re ,n ° 7 3 .
Quant au taux de l’indemnité, il est fixé à 1 fr. 26 cent, par hectare, et à 36 c.
par parcelle.
Il reste à examiner si ce taux est convenablement réglé: pour mettre le mi"
nistre à portée d ’en juger, on croit devoir placer sous ses yeux les détails c i après :
Il résulte du rapport du directeur des contributions, joint à la lettre de M . le
préfet, que le taux m oyen de la rétribution des géomètres, a été, pour les travaux
exécutés jusqu’à ce jour , de 1 fr. 1 3 cent, par hectare, et de 27 cent, par parcelle.
L a rétribution véritable de l ’ingénieur-vérificateur était de
3o
cent, par hectare,
et de 7 cent, par parcelle.
E n supposant que le géomètre en chef fit arpenter|, année commune ,
22,000 hectares, et 44>000 parcelles, la dépense, d’après l’ancierisystème,se serait
élevée, savoir :
P o u r un cinquième des hectares ou 4 ,4 o °d é jà levées par masses,à 1 f. i 4 c. 75,
ci........................................ ..................................................
P o u r quatre cinquièmes, ou 17,6000 non levés, à 1 fr.
43 cent.
4,9^9 fr*
.
25,168
cent...........................................................
i4»96o
Traitem ent fixe de l’ingénieur............................ ....................................
3 , 5oo
P o u r 44 i ° o o parcelles, à
34
48,577
L a nouvelle fixation d o n n e ,
P o u r 22,000 hectares
, à 1 fr.
26
ç. 27,720
P o u r 44>ooo p arc elle s, à 36 ce n t. i5 ,8 4 o
D
fr.
43,560
}
5,017
if f é r e n c e .
L a différence ci-dessus donne une éco n o m ie, qni revient du neuvième au dixième.
L e directeur des contributions, dans le rapport dont il est parlé plus h a u t ,
propose de fixer l’indemnité à 1 fr. 5 çent. par h ec ta re, et à
32 cent, par
parcelle,
qu’il subdivise entre le géomètre en ch ef et scs collaborateurs, ainsi q u ’il suit :
A ux géomètres arpenteurs, 80 cent, par hectare, et
A u géomètre en c h e f,
25
25 cent, par parcelle.
cent- par h e c ta r e , et 7 cent, par parcelle ; l’indemnité
de ce dernier est évidemment trop faible, et suffirait à peine pour couvrir ses frais.
O n pense que la rétribution pourrait fitre fixée à 1 fr. 20 cent, par hectare, et à
36
cent, par parcelle ; on arriverait ainsi à une réduction d’un huitième epviron
Réduction qui paraît suffisante , à cause de la difficulté de l’arpentage dans le d ^
parle m ent.
�( 4g 5
O n a l ’honneur de proposer au ministre de communiquer à M . le préfet du Puy*
d e -D ô m e , les observations qui précèdent.
Ci-joint un projet de lettre à ce magistrat.
L e premier com m is, etc,
. . . .
P o u r copie conforme :
Le secrétaire-général de la préfecture,
T ttE N Q U A L Y E .
• •
• •
J
P a r is , le g ju ille t 1823.
V ous m ’avez in v ité, M o n sie u r, à vous faire connaître si les géomètres de
N 0. 8.
première classe du P u y - d e - D A m e me paraissaient convenablement rétribués.
D ’après les renseignemens recueillis par l'administration, la partie de la rétribu
tion affectée aux travaux de la délimitation, de la triangulation et île l ’arpentage,<
forme un terme m o y e n , e t , en cumulant l’allocation par hectare et par parcelle ,
les sep t dixièmes de l ’indemnité entière. L es prix attribués aux trois opérations rap
pelées plus h a u t , étant, dans votre d épartem ent, dans la proportion que je viens
d’indiquer, et l’allocation totale y ayant été portée à un taux plus élevé que dans
la plupart des autreslocalités, il me paraît évident que les géomètres de première
classe ne peuvent se plaindre de la manière dont ils sont traités, puisqu’ ils sont
plus fortement rétribués que leurs collègues en général, et même que c&jix qui opèrent
dans des départeinens où l ’arpentage parcellaire présente d’aussi grandes diCfir
cultes.
J ’ai l ’h o n n e u r, M o nsieu r, de vous saluer bien sincèrement.
Le sous-directeur, chargé de la direction des contributions directes'.
Signé S A U R I M O N T .
Clermont-Ferrand, le
juillet 18aa.‘
Monsieur le P r é f e t ,
L e taux de la rétribution de mes collaborateurs devant Être appj-Quyé par vous,
j ’ai l’honneur de vous soumettre les calculs que j’ai établis pour le fixer.
Ainsi que j e vous en a i annoncé l'intention, Monsieur le préfet, je veux les
rétribuer dans la proportion qui résulte des anciens et des nouveaux p r ix , d’après
•es bases indiquées d^ns la note jointe à la lettre que S . E xc. le ministre des fi
nances vous a écrite, le a 3 avril dernier. P ar ce m oyen , je vous d o n n e , ainsi
qu’à l ’administration et au départem ent, la plus forte garantie morale de l exécu-
7.
N(>. g.'
�X
5o )
lion de mes travaux, el j ’acquiers le droit d'exiger des géomètres , non-seulemcni
de bons plans , mais encore l’exéculion de diverses dispositions importantes de»
instructions que quelques-uns ont presque toujours néglige.
L ’ ingénieur-vérificateur avait un trai
tement fixe de.............. 3, 5oo fr.
L e taux commun de rétribution des
géomètres était,
par arp. par parc.
P o u r la délimitation.
5 c. oo c.
P o u r l ’arpentage. . . 108
27
1 13
T o t a l ..
E n outre,
par arp. p. parc-
P o u r rétribution variable
27
L a délimitation rentrant
dans ses attributions , il
faut y ajouter. . . . . . .
I l faut en retrancher,
10. pou r la d élim ita
tion .........................
1°. P o u rle s p la n s
de masses , dont
l3
1/5
5
00
35
7
tion des géomètres à . . . . 100
OO
com m un es arpen
com
m u n e s , est d e .. . 8 i /5
d’impressions , étaient de i 35 et
L ’ancienne rétribu
tion était effectivem ent d e ................. * *
27
C es anciennes indemnités
variables, dans lesquelles
ne sont compris ni les appoinlemensfixes’ni les frais
tées é ta itd e a 8 i/4
q ui répartis , sur
les
7 c.
O n peut porter la rétribu
la relenue snr les
toutes
3o c .
34
c.
99 4/5
a7
L e traitement fixe , calculé sur une année moyenne , établi dans la note pré
citée de S. Exc. le ministre des finances, donne :
P o u r 22,000 arpens, à 5 c. 1,100 fr. )
,/
,,
, _
> 000 l r . , au heu de o , 5oo ir.
l Jour 44*000 parcelles, a 5 c . a , 200
3
L e s frais d’impressrons de toute espèce seront supportés comme par le passé ,
c ’est-à-d ire , q u e l e s géomètres payeront tous les imprimés qu’ils employeront
respectivement.
L a nouvelle rétribution est de
xao c. par arpent, et
L a déduction de innemnité fixes , de
5
Reste pour les rétributions variables n
5
et
36
c. par parcelle
C
3o
et
L ’indemnité des géomètres arpenteurs, pour être proportionnelle à l ’ancienne,
doit être les quatrièmes termes de ces règles de trois.
A n c i e n n e in dem n ité.
N o u velle indemnité.
T otal des géomètres.
i 35
:
100
: :
34
i
a 7.
; i
ïi
5
3o
Total des géomètres,
: 85 c. par arpent.
:
a3
4/5
par parcelle.
�I 5i î
J'a i l ’honneur de vous proposer , Monsieur le p réfe t, de fixer l'indemnité de
mes collaborateurs à
85 c. par a r p e n t ,
et 24 c * par parcelle, qui s’appliqueront à
la totalité des travaux, dont le recueil méthodique chargeait les géomètres de
première classe , moins lu délimitation.
J e ne leur imposerai d’autres obligations que celles de mettre sur les plans des
teintes plates , pour désigner les natures de cultures , et de fournir pour chaque
commune un grand carton , qui doit assurer la conservation des plans , pendant
et après leur confection. Ces objets essentiels ne s o n t , pour chacun d’eux en
particulier , que d’ une faible importance. J e désire cependant qu'ils soient tenus
de conformer leurs tr avau x, sans augmentation d’indemnité , aux instructions
que l'administration pourrait donner par la suite, y eût il augmentation de
travail,
L e bien du service , Monsieur le préfet, exige que j e conserve , comme par le
passé, des géomètres de première et de deuxième, classe, mais comme ces derniers
ont été forces plusieurs fois de travailler h v il p rix , et , pour ainsi-dire , au rabais T
je crois indispensable de les m ettre, pour l'a v en ir, à l'abri de tout arbitraire. Il est
souvent arrivé que des géomètres de première classe s’ occupaient seulement de
la triangulation , et faisaient faire par leurs secondaires des travaux d’ordre, qu’ils
payaient m a l , et quelquefois pas du tout. C es a gen s, se regardant comme des
entrepreneurs de plans, gagnaient les
44
centièmes sur des travaux q u ’ils inspec
taient à peine. C e t abus, contre lequel j’ai reçu des plaintes réitérées, et qui
deux fois a compromis le service , doit cesser aujourd hui. Le titulaire d'une cornmime ne sera point forcé de r.onfer à ses secondaires telle ou telle partie de son ira 1
v n il, mtus q u e lle s q u e soient relies dom i l les aura chargés , i l devra leur payer la ré
tribution qui y Sera affectée, de telle manière que si un secondaire exécute tout le
travail d ’une commune, i l aura droit d toute l'indemnité.
J ’a i, en conséquence, M'ï le préfet, l’honneur de vous soumettre le tableau des
divers travaux, dont les géomètres ont été chargés jusqu’i c i , avec le tarif de la ré
tribution proportionnelle qui convient à chacun.
L ’ indemnité totale est divisée par centième , ainsi q u ’elle l’a été précédemment
entre eux.
i n. V o i r le tableau , sur la feuille n°
4»
Si vous p r e n e z, Monsieur le p r é f e t , la mesure que j’ai l’honneur de vous prop o r e r , non-seulement vous préviendrez pour l'avenir toute discussion entre les
titulaires et leurs secondaires ; mais vous forcerez les premiers à s’occuper p e r
de leurs travaux , ce qui est impérieusement exigé par les intryc-,
lions et le bien du survice.
sonnellement
J ’ai l ’honneur d être , avec un profond respect
31. le
préfet,
Y o t r c , etc. : Signé B T J S S E T ,
7. '
�X 52 )
P . S . Aussitôt, TVIonsieur le préfet, que vous m ’aurez fait connaître les dispo
sitions que Vous avez prises , j e m occuperai de f organisation du personnel de mes collahoraieurs , que je soumettrai à votre approbation, pour rem plir en son entierlfc
vœu de l ’article 2 de votre arrêté du a 5 mai dernier.
P o u r copie conforme :
Le sccrrtaire-Sènèral de la préfecture,
TRENQUALYE.
N o t a . O n retrouve dans cette lettre la so llicitu d e du géom ètre en c h e f , pou r les géom ètres
secondaires.
16 Août 1822.
L e maître des r e q u î t e s , officier de la légion d’hon neur, préfet du départe
ment du P u y -d e-D ô m e .
\ u la lettre du 29 juillet dernier , de M . B u s s e t , géomètre en chef du cadastre
de ce département, par laquelle, pour se conformer au second paragraphe de
l ’article 2 de notre arrêté du
25
mai dernier, il soumet
à
notre approbation :
i ° . le tiu x de la rétribution qu’il se propose d’accorder à ses collaborateurs pour
la totalité des travaux dont le recueil méthodique chargeait les géomètres de
i rc classe. 20. le tableau des divers travaux dont ils ont été chargés jusqu’ici ,
et le tarif de la rétribution proportionnelle à payer pour chacun d’eux.
V u le rapport du directeur dès contributions directes du i 3 de ce mois , c o n
tenant ses observations et son avis sur les objets ci-dessus.
Considérant que dans la fixation proposée par M . le géomètre en c h e f, il
conserve h ses collaborateurs les avantages qu’ils jouissaient précédemm ent,
sauf la réduction qui résulte de la différence existante entre l’ancienne et la nou
, et que ses géomètres seront suffisainent rétribués au moyen de
velle rétribution
l ’indemnité de
85
centimes par a rp en t, et de a 4 centimes par parcelle qu'il
offre de leur accorder.
Considérant que la fixation q u ’il fait du prix de chacune des parties du tr a v a il,
est bien entendue , et pourra prévenir tout arbitraire de la part des géomitres
de t r<! classe envers les secondaires.
A rrê te ce qui suit :
A rt. ier.
La rétribution de
85 centimes
par arpent et de 24. centimes
par par
c elle, fixée par M . Busset, géomètre en chef du cadastre, comme devant être
payée par lui h ses collaborateurs, pour la totalité des travaux dont ils sont char
gés par le recueil méthodique , moins la délimitation, et en outre h la charge
par eux de niellrc sur les plans des teintes plates pour désigner les natures de
�Cultures, et de fo u rn ir pour chaque c o m m u n e , un grand carlon peur assurer
la conservation des plans pendant et après leur confection , et de conforme^
leurs travaux, sans augmentation d’indemnité, aux instructions que l’adminis
tration pourrait donner par la suite, y eût-il augmentation de travail est et de
meure approuvée.
A
rt.
2 e* L e s p rix réglés par ledit sieur B u s s e t , p o u r les divers travaux dont
les géo m ètres ont été chargés jusqu’ i c i , s o n t é g a le m e n t app ro u vés c o n fo r m é m e n t
au tableau ci-après :
P
rix
:
i/a
i° . P rocès verbal de la division en sections.....................................
2°. Triangulation générale et de détail................................................. 10 c.
3°.
4°.
C opie de la matrice de rôle ou liste alphabétique provisoire,
t rig o n o m é tr iq u es et tracés des carrés sur chacun e d’e l l e s ..................
5°.
x
1/2
Disposition de chaque feuille du plan , rapport des points
2
(T rav ail des secondaires, ) arpentage et rapport des p la n s,
m isea u trai,
et prise des noms de concert avec le titulaire............
G0. Prise des noms par le géomètre titulaire......................................
55
3
7 0. Recherche des noms que l’on n’a pu obtenir avec les renseign cm ens donnés p ar les indicateurs.
............................................................
1
8°. Rapport des numéros provisoires sur la liste alphabétique.. .
2
9". Première C o m m u n i c a t i o n a u x p r o p r i é t a i r e s ...............................
3
io°. Numérotage définitif des plans , et copie au net des tableaux
indicatifs............................................................................................................
2
1 1" ¡.C o n fectio n de la liste alph abétiqu e et a cco rd a v e c le tableaux
indicatifs..............................................................................................................
3
12°. Communication des bulletins aux propriétaires, rectification
qn’elle nécessite, et état d e c e s rectifications à remettre au géo
mètre en c h e f........................................... .......................................................
3
i 3\ E c r itu r e s et dssins des plans , teintes pâles p o u r la désigna
tion des natures de c u lt u r e s , et fourn iture d ’un grand ca rto n p o u r
i 4». T a b le a u d’ass e m b la g e ............................................................................
5
3
i 5°. T a b le a u dus lignes e l angles.................................................................
1
co n serv er les plans pen dant et après leu r c o n fe c tio n .........................
1G0. R a p p r o c h e m e n t e t a c c o r d des li m i t e s e n t r e le s s e c t i o n s e l l e s
• o m in u n e s, p our lequel chaque gé o m è tr e re m e ttra aux titulaires
t»s co m m u nes voisinas , un calque de leurs lim ites re spectives..........
1
17 °. D ir e c t io n des*travaux, surveillance e l vérification des s e c o n
d é e s , et rédaction de 1 état des m esu res l o c a l e s . ...................
4
00
�A
rt.
3'.
( 54 )
,
Expédition du p r i a n t a r r ê té , sera adressé tant au géomètre en chef T
qu’au directeur des contributions directes , pour q u’ils en surveillent l'exécution
chacun en ce qui le concerne,
i F a it en l'hôtel de la préfecture, à C lerm o n t-F erran d , le 16 aoAt 182»,
Signé B<*\ D U M A R T R O Y .
P o u r copie conforme: Le secrétaire-général do la préfecture. T R E N Q U A L Y Ë ,
N o t a . O n voit p.ir cet arrête que les gromAtre» devaient con form er leur» travaux aux
tructions à v e n ir , sans augm entation d’ in d em n ité, y «ût-il augm en tation de travail,
H ourlon-ytndre , H juillet i8aQ.
1N<>. 11
Monsieur et cher collègue ,
A nion retour d ’une longue tournée ,
¡1 y
a trois jours , j’ai trouvé cher moi
la lettre que vous m ’avez fait l'honneur de tu'Adresser le
de ce m o is , et je
m ’empresse d’y répondre, en vous assurant que je n ’ai point reçu le Libelle dif
famatoire dont vous m'entretçne*. J ’ai la certitude qu’il n’est pas non plus par-r
venu au directeur des contributions directes, et les nombreuses informations que
j’ai prises, me donnent l’ intime couvictiou que le Libelle dont il s ’a g i t, n'a pas
été distribué dans ce département.
V o s am is, vos collè gues, la société t o u te « n ti é r c , partageant votre juste in-,
dignation, doivent approuver la résolution que vous avez prise de poursuivre
juins
rclAche, l ’auteur de cet écrit calomnieux et mensonger ; nuis ils doivent
aussi vous rassurer sur les craintes que vous manifestez de perdre quelque chose
de l’estime de vos concitoyens. Les honnêtes gens ne prêtèrent jamais une oreille
crédule à la diffamation ; elle ne saurait avoir d'accès que chez les êtres malfaisans , envieux ou méchans. O r , je vous le demande , le blâme de ces hommes
l à , doit-il vous attrister et vous affecter sérieusement?
S o y ez assuré , mon cher collègue , que je ne lirai pas »ans un grand in t é r ê t,
le «némojre que vous m ’annonce« , et que je vous serais oLligë Je m'e nvoyer
aussitAt qu’ il p o u r r a paraître,
J e saisis avec empressement et un réritable pla isir, cette occasioo de vouj
adresser mes sincères félicitations au sujet de l'escellent traité pratique de la
partie d’art du cadastre , que vous ave* publié au 18*7. C e tr a ité , u t i l e , es
sentiel a g i géomètres de toutes classes , est pour m o i , j* vous I avoua , fran
chement et saos (batterie , un guide précieux d après lequel je dirige c l faia
exécuter les divers travaux confies k mes soins. Ma confiance, en cet ouvrap
complet f t fructueux , est d'aaUni plus grande , que j*y ai trouvé plusieur prac i p e s , dont j ’étai» «Wji pénétré , et qu'une e i p e n e o t e , acquise de vingt anoes ,
m'avait b i t adopter.
%
R c c e w s , moniteur et cher collègue , l'a aa ran ce <ic n u hante estime *
p u coujidcr^Uou triâ-Aalinp»*«,
P A D IN ,
�, le
Rennes
^
8 ju illet i 8ag.
Monsieur el cher c o llègue,
L e déair de répondre promptement à votre lettre du i " . ju ille t, ne m'avait
pas permis de voir M . D a s tis, noire d irecteur, avant de vous écrire hier ^
M . Dastis qu> »e vous connaît que de réputation , niais sous les rapports les plus
avantageux, me charge de vous dire qu’il ne lui est rien parvenu, non plus de
l i b e l l e en question.
Appelé depuis très-peu de temps aux fonctions de géomètre en c h e f, je viens
d ’apprendre, en voyant le témoignage flatteur qui en a été rendu par M M , du
dépAt de la g u e r r e , que vous étiez auteur d’un traité de triangulation. D ’après
cela , je ne puis m ie u x , monsieur et cher co llè gu e , vous exprimer tout mon
intérêt, et le respect que je professe pour vos talens ; qu’en m'empressant de vous
faire la demande «le 7 exemplaires de votre ou v ra ge , tant pour M. le directeur
que pour moi. J e vous prie de me les faire expédier de »nite , je vous en ferai
aussitôt passer le montant.
J e suis avec un respectueux dévoûm ent, monsieur et cher collègue, votre
très-humble e t trèa-obéitsant serviteur,
______________
LESNÉ.
C A D A S T R F. P A C F . L L A ! R F..
T a rif de la division de la rétribution totale allouée aux géomètres de première classe
;
pour tous les travaux dont ils sont chargés , conformément ans dispositions du règlement du i 5 mars 1837.
rétribution fixée par l'arrêté de M. If préfet , en date du iG a o â t 1 8 1 1 , est
de 85 cent, par a r p e n t , et de a 5 cent, parcelle.
11 faut
ajouter il ce article
3 cent,
par a rp ent, pour La délimitation , qui n'était
paj comprisse dans le premier tarif.
C e qui porte La rétribution to ta le , abandonnée par le géomètre en chef à scs
collaborateurs , i 88 cent. p«r a rp en t, et >4 cent, par parcelle,
la q u e lle est di»i*re ainsi qu'il suit :
Délim itation.................................................... ................................................ 3 e.
T ria ngulation.. . • i ....................... •*...................................................... ....
f Cahier du calcul des masses . . , J ; . ; ,
Travaox des géomètres
a rp e n ;, «t s ^ c . par parcelle, ci...............-3
T a r a i. l i l i î . ü ,
w
a
,
Arpentage et travaui d’ordre , 7 3 c. par
C
( S «| u
- C.
>
j i u i i ; ; . .
•;
88
< * * » » •* •« ■ « h 1« r é t n b a t m a 4 e « g é o m è t r e s , p o u r c b a q u «
p a r t s * d a t r a v a il. )
& larrf, * « • •* l « s a * * i o W « ,a a 7 ,M l 4 sppruur* par M . l r f r t h t , »» *
VTKf
,
�•V
*( - - J Î
1
. . i *
il
P R E F E C T U R E D U P U Y -D E -D O M E .
No.
14.
'
*
____ __________,
Clermont-Ferrand, le 17 novembre 1827:
L e conseiller d’é t a t , préfet du département du P u y-d e-D ô m e ,
la pétition présentée le 19 juin 1827 , par les sieurs Champomier-, Bou*
comont , Conchon , Moins et F au re , géomètres commissionnés pour les opé
rations cadastrales dansee département , par laquelle pétition ils se plaignent;
i° . D e ce que le géomètre en chef du cadastre ne leur a pas remis les comr
missions individuelles qu’üs devaient recevoir, aux termes de l’article i er. da
l'instruction ministérielle du 17 février i8a4 ;
a 0. De ce que contrairement à ladite instruction, qui porte que les géo-r
mètres de première classe seront chargés de la délimitation , de la triangulation
et de la formation du tableau d’assemblage , M . Busset s’est non-seulement ré?
serve ces divers travaux, mais il a excédé les retenues qu’il [aurait dû se faire
à cet égard ;
3°.
Enfin , de ce qu’il leur est impossible de se rendre compte de leur situa
tion, financière vis à-vis M . B u s s e t , à raison des travaux qu’ils ont exécutés,
parce que celui-ci ne leur a jamais donné que des à-comptes , en leur faisant
émarger des états auxquels ils ne comprennent rien , et demandent,
i u. Q u e leur comptabilité soit établie régulièrement par une tierce personne ;
2°. Q u e M . le géomètre en chef se renfermant dans la limi tendes instructions ?
ne s’arroge plus le droit d’exécuter des travaux qui sont dans les attributions
des géomètres de première clisse ; 36. E t enfin , qu’ iis ne soient plus souinig
à des retenues illégales sur leur rétribution.
V u te règlem en t général sur les opérations cadastrales en date du )o octobre i8ai.
V u le règlement supplémeritaire du 17 février i8a£.
V u I3 décision ministérielle en date du a janvier 18 2 2,
d ’après laquelle
*M. Busset est chargé d’exécuter par lui-même la délimitation^ la triangulation et
de former les tableaux d’asse^nblage ;
V u une seconde décision en date du zo mars i8 a £ , portant qu’il est fail ex
ception en faveur de M . B u s s et , aux dispositions du règlement supplémentaire
du 17 février précédent, et qu’il continuera à exécuter pcrsonnellemenj. lea
travaux su s m e n tio n n és ;.........................................
V u l’arrêté du prédécesseur du préfet en date du 16 août 4 8 2» , portin t fixa
tion de l ’indemnité totale allouée aux géomètres de première classe pour les
travaux dont ils sont chargés, e t la division de cette indemnité cutro le6 diverse^
parlies de l ’opération j
.
7
�( 5? 7
V u une lettre
*5 juin
3e
M» Busset au directeur des contributions,' sous la date du
dernier , par laquelle ce chef de s e r v ic e , in fo rm é , d i t - i l , que plusieurs
de ses collaborateurs se proposaient de former une réclamation tendante à o b
tenir la révision de leurs comptes avec l u i , demande lui-môme que celte r é v i
sion ait lieu sur le champ , et qu’il y soit procédé avec la plus rigoureuse at
tention.
V u le rapport de l’inspecteur des c o n trib u tio n s, chargé par le directeur de
procéder a cette vérification , en se faisant remettre préalablement une copie du
compte détaillé du géomètre en c h e f, avec chacun des géom ètres, et en appelant
ensuite ceux-ci individuellement pour discuter et reconnaître les articles de ces
comptes et en signer la balance ; duquel rapport et des décomptes qui y sont
j o i n t s , il résulte que les assertions faites par les géomètres sur l ’irrégularité de
leurs c o m p te s, sont toutes dénuées de fon dem en t, et que le géomètre en chef
e?t au contraire en avance avec l ’ensemble de ses collaborateurs d’une somme
de 9,664 fr. 96 cent.
V u un m ém oire adressé h M . le directeur par les mômes géomètres, le 9 août
dernier , dans lequel ils reproduisent les mêmes griefs que dans la pétition qu’ ils
on t adressée au p r é f e t , et avec des expressions plus inconvenantes, lequel mé
m oire a donné lieu à un second rapport de l’inspecteur, dans lequel cet agent
supérieur, après avoir déclaré que les réclamans ne sont fondés sur aucun des
points de leurs demandes, conclut à cp que le directeur propose toutes les mesures
nécessaires pour réprimer les loris graves dont ils se sont rendus cou pab les, en
imputant a leur chef des fa i t s fa u x , et c a lo m n ie u x , et qu 'ils sa vaient être tels ;
V u enfin le ra p p o r t de M . le d irecteu r des co n tr ib u tio n s d i r e c t e s , en date du
i
5 o cto b re
de rnier ;
Considérant sur le premier grief imputé à M . B u s s e t , que les commissions
délivrées par le préfet aux géomètres de première classe, conformément aux
instructions ; ayant été adressées au géomètre en chef par l ’intermédiaire de
M . l c directeur, il aurait dû faire immédiatement la remise à chacun des titulaires
qu’elles concernaient, mais que cette om ission, pu plutût oubli , que ceux-ci
auraient pu facilement faire cesser, en réclamant les commissions, ce qu’ils n ’ont
pas f a i t , ne leur ayant d ’ailleur? porté aucun préjudice, il n’y a pas lieu de s ’oc
cuper davantage de ce fait;
C o n s id é r a n t , en ce qui co n ce r n e la c o m p t a b ilit é des g é o m è tr e s avec le g é o
m è tr e en c h e f , que c e t agent ainsi que le directeu r se so n t e m p r e s s é s , l ’ un en
p r o v o q u a n t , et l’autre en o rd o n n an t une vérifica tion de la co m p tab ilité dont il
s’a g it, de p r é v e n ir une réclam atio n qui deviendrait sans o b j e t , dès l’iustan t oî|
cha cun e des parties aurait re co n nu l ’exactitude de son c o m p t e
Considérant q u e cette mesure sage et bienveillante n'a point arrfiié les récU-,
�mans; im ls que l ’instruction qu! a ¿lé faite de leur demande, établit de la manière
la plus claire l’exactitude de leu rscom p te s, dont ils ont signé d’ailleurs la balance;
Considérant qu’après celte reconnaissance et cette adhésion de leur part, ils
ont néanmoins adressé au directeur un mémoire qui reproduit ies mômes faits et
démonlreconséquemment une opiniâtreté, et une insubordination répréhensibles.
Considérant que M .B usset,ayan texécu té personnellement la délimitation etlâ
triangulation, et formé les tableaux d’assemblages, par suite de l’autorisation
spéciale q u ’il en avait reçue du ministère, a dû nécesssairement toucher la rétri
bution allouée à ces divers travaux, par l’arrété du p r é fe t, du iG août 1822 ;
Considérant qu’il résulte d e s décomptes vérifiés par l’inspecteur, r e c o n n u s et
approuvés par les géomètres, que M . Busset n ’a jamais dépassé les prix fixés par cet
arrété dans les retenues qu’il a opérées, en raison de ces travaux, et qu’il y a
donc ralom n ie de la part des pétitionnaires sur ce point-ci;
Considérant que l’ignorance dans laquelle ils prétendaient être sur l’existence de
cet arrêté du 16 août 1822, est une allégation m ensongère.
i ° . Puisque le sieur Cham poinier, l’un des réclamans, a passé an traité par
ticulier avec M . B u sse t, le 18 du même mois d’août 1822, traité par lequel il
s’est engagé à exécuter tous les travaux spécifiés par cet a r r ê té , moins la délimi
tation , la triangulation et les tableaux d’assemblages, cl à se conformer en tous
points aux dispositions qu’il contient ;
2°. Puisque le sieur B o u c o m o n t , autre récla m a nt, par une lettre à 1VI. B u s s e l ,
en date du zG mars 1825, demande le payement des sommes acquises, et établit
lui-même le décompte de ce qui lui revient, d ’après le tarif du 16 aoûl 1822;
3 °.
P uisqu’enfin cet arrêtées! rappelé dans l ’instruction générale du géomètre
en chef à ses collaborateurs, du premier mai 1823, sur les obligations qui soûl
imposées à ceux-ci, cl dont ils ont tous reçu un exemplaire ;
Considérant que l’assertion faite par eux, q u ’ils ne co pren aient rîen aux étals
que le géomètre en chel lui faisait ém arger, à raison des retenues qu’ on leur faisait
s a b i r , et dont ils ignoraient la cause, esl également mensongère, puisqu’ il résulte
de l’examen fait par ^’inspecteur du registre de com ptabilité, tenu par M . Busse»,
que les diverses retenues, qu’ il a pu faire y sont détaillées avec soin , qu'elles
étaient examinées, h des époques très-rapprochécs, par les géom ètres, el que
leurs signatures apposées sur c e registre, presque à chaque payem en t, en
sod*
une preuve irrécusable.
Considérant qu’il e s t attesté par l’inspecteur et le directeur, et qu’il résulte,
d’ailleurs, des décomptes vérifiés et signés p a r le s géomètres eux-m êm es, que
tous les travaux exécutés par eux ou par leurs secondaires , jusqu’à ce jour, |çur
ont été payés suivant les prix portés au tarif du 16 aoûl 1822;
.Considérant, à l ’égard de quelques allocations, que les pétitionnaires refusent
�( S'9 J
àtlVX. B u s s e t , ou dont ils réclament de lui le payement soit pour régularisation
de. travaux d’ordre reconnus défectueux, soit pour un payement de 800 f r . , que
M. Busset aurait fait aux sieurs Faure et Conchon , suivant l’ inscription faite sur
son-registre ; mais dont il n’a pu représenter la quittance, soit enfin pour quelques
travaux qu’e u x , géom ètres, auraieut exécutés pour le compte de M. B u s s e t , qUè
la plupart de ces réclamations, après avoir été vérifiées par l’inspecteur, sont re
connues mal fondées; inaisque pourtant ¡1 en est quelques-unes, fort peu im por
tantes , il est vrai > auxquelles il est juste d’avoir égard ;
C o n sid é ra n t, au surplus, que le droit de réclam ation, qui est acquis à tout in
dividu qui se croit lésé dans ses intérêts , aurait dû être mis en usage par les péti
tionnaires avec plus de modération , et sans chercher à calomnier leur chef par
des imputations qui ont élé reconnues sans fondement, et que tout démontre
<pi ils reconnaissent eux mêmes comme telles ;
Considérant que les géomètres susdits ont montré-dans leur attaque une animo
sité coupable , ainsi que le désir d’imprimer sur le compte de M . Busset une
prévention défavorable dans l’esprit de l’administration, comme dans l’opinion
publique ; qu’ ils ont employé tous les moyens possibles de lui nuire, soit par leurs
propres m é m o ir e s, soit par la part qu’ ils paraissent avoir prise à celui signé
f^igier, qui a été distribué à tous les membres du conseil gé n é ra l, lors de sa.
dernière session , et qui ne tendait à rien moins qu’à faire retirer à M. Busset
la confiance que le département lui a c c o r d e , si Le conseil général n’avait fait jus
tice de ce L j û ï l l e .
ARRÊTE:
A r t . I er. Les demandes formées collectivement p a r les sieurs C ham pom ier
B o u c o m o n t, C o n c h o n , Moins et F a u r e , géomètres de première classe du ca
dastre, par leur pétition en date du i g juin dernier, qu ils ont présentée ri la
préfecture , le
du même mois, et par le mémoire qu’ ils ont adressé à M . le
directeur, le g août suivant, étant mal fondées ^et contraires aux règlemens qui
ont régi le cadastre jusqu’à ce jour, sont rejetées ;
S tatuant, néanmoins, sur les réclamations particulières élevées à l ’occasion
de l ’examen des d écom ptes, et faisant droit à celles reconnues fondée, fixe, rela
tivement au sieur C h am p om ier, à 60 francs, au lieu de 200 fr. qu’ il réclame,
l ’ indemnité a laquelle il a droit pour avoir accompagné le géomètre en chef
pendant douze jours, au p lu s, dans le canton de Ro chefort, et l ’avoir aidé dans
la plantation de quelques signaux et dans ses observations trigonométriques. E n
conséquence, son com pic avec M . B u sset, sera crédité delà somme de 60 fr.
En ce qui concerne les sieurs Faure et Conchon , ordonne que leur com pic seia
crédité de ladite somme de 800 fr., dont ils refusent l ’allocation à ¡M. B u « e t ,
faute par lui de présenter leur quittance qu’il dit avoir adhérée ; lui faisant, au
surplus, toutes réserves dans le cas où il la retrouverait, ou q u’il pourrait établie.
�'( 6o )
que lesdits sieurs F au re et Conchon ont reçu celte somme. E n conséquence, le
compte de ces géom ètres, qui se soldait en faveur de M . B u s s e t, par la somme
de 1,096 fr.
3i
cent., ne se soldera plus à son profil, que par celle de 266 fr.
A l’égard du sieur B o u c o m o n t, sur la somme de
123
fr a n çs.
65
il refuse l'allocation à M . B u s s e t , il lui esl alloué celle de 22 francs
3i
c.
cent, dont
85
c e n t .,
et son com ple , qui se soldait au profit de M . Busset par une somme de
6 i francs
35
c e n t . , ne soldera plus aujourd'hui que par celle de
E n fi n , quant à la somme de
85
3g
fr.
5o
cent.
francs, qui fait l’objet de la discussion entre
M . Busset et le sieur Moins ; elle est allouée en totalité à M . B u s s e t , et le
compte du sieur M oins se soldera à son profit , comme il est établi, par la
somme de 97 francs 24 cent.
D éclare les réclamans non recevables dans le surplus de leurs demandes çt
prétentions.
2. Attendu qu’il est établi par les rapports de l’inspecteur et du direc
A rt.
teur des contributions directes,q ue les mémoires des réclamans ont été présen
tés sans nécessité, puisque la vérification de leurs comptes a précédé leurs récla
m ations, que les fails allégués par eux son t, ou calom nieux, ou dénués de toute
espèce de preuves, que l'intention de nuire à leur chef e i d e le décréditer aux
yeux de l ’administration, et dans l’opinion publique est manifeste ; que dans cet
élat de choses, le service ne pourrait que souiTrir des rapports qui continueraient
à exister entre le géomètre en chef et les p ililionn aires, que d’ailleurs l ’autorité
doit réprimer par tous les moyens qui sont en son p o u v o ir , tout acte d’insubordinatioo.
D éclare que les sieurs C ham p om ier , B o u c o m o n t , Conchon , Moins et
F aure cessent de faire partie des agens du cadastre, en qualité de géomètres de
première classe , et que leurs commissions sont annulées.
11 sera
qu’ ils
m ê m e loisible à M . B u s s e t de leur p e r m e t t re d ’a chever les travaux
auraient
entrepris,
en se c o n fo r m a n t aux in structio ns e t aux m e su re s
qu’ il jugera co n ve n a b le de prendre à ce t égard.
A rt.
3,
L ’exécution du présent arrêté est confiée à la surveillance de M . le
directeur des contributions, auquel il en sera adressé une amplialion el qtij
demeure chargé d’en remettre une expédition à M . B u s s e t , lequel en dressera
une copie à chacun des géomètres révoqués.
F a it en l'H Ôle l de la Préfecture , à Clerm ont-ferrand, le 27 novembre 1827.
Signé C te. L . D ’A L L O N V I L L E .
Le secrétuire-géneral de la préfecture (lu Puy-de-Dôme,
Signé T R E N Q U A L Y E . *
P o u r copie conforme : Le directeur des contributions directes , L E F O U R .
N o t a . Les 60 francs accordes au sieur C h a m p o m ie r, sont le prix d’ un travail extraordin aire
g a i n’ avait jam ais clé rc c la m ^
�I 6ï J
A i n s i, les résultats d’ une d ém arche aussi scandaleuse, et la restitu tion de aa
francs 85 cent;
savoir : 3 francs p o u r des im prim és , portés par erreu r au com pte du sieu r B o u co m c n t ; 10 fr.
ao cent, pour deux grands cartons qu i lu i ' appartenaient., p o u r y m ettre les deux com m unes
d o n t il avait com m en cé l ’arpentage ; enfin , q fr. 65 cent, pour erreur ré e lle qu i avait profité
à l’ ancien c h e f Je bu reau
du sieur B usset , au jo u rd h u i son collègue dans la L o iere . l.e sieur
Busset a dem andé et obtenu la restitution de ces 9 fr. 65 .
La som m e totale sur la q u elle à porté la vérification de M l ’ in specteu r ( de l8 a a à 1827 ) est
de 187,6 7 fr. 56 ( V o ir 10e. page de son R apport: )
Q u an t aux 800 ft. pour une
quittance
perdue , le sieu r busset a u rait en gain de cause en
s’ adressant aux tribunaux. Ses liv re s , tenus ré g u liè re m e n t , in d iqu en t le p ayem en t de celte
som m e , tandis que les sieur» F au rr et C o n ch o n ont td éclaré , lors de la vérification de leurs
Comptes , qu ’ils ne ten aien t aucune note
des som m es qu i le u r étaient payées par le sieu r
B u s s e t.... Chose é tra n g e ; ils avaient dépendant alors reçu a ,6 a ia fr. G8 cen t. ( Y o ir topport
de M . l’ inspecteur. )
P aris , le 12 mai 1829.
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J ’ai examiné très-attentivem en t, Monsieur le b a r o n , une réclamation qui m ’a
été présentée par les sieurs Cham pom ier , C onchon , Fau re et M o in s, anciens
géomètres du cadastre de votre départem ent, par laquelle ils se plaignent, i°. de
ce que M. B u s s e t , géomètre en chef, ne leur aurait pas remis les commissions
que l’un de vos prédécesseurs leur avait délivrées ; 20. de ce que leür c h ef ne leur
aurait pas payé exactement les rétributions qu’ ils avaient acquises ; 3°. de ce qu’ il
aurait opéré sur leur indem nité, un prélèvement trop considérable, pour les tra
vaux qu’ il avait été autorisé à exécuter personnellement.
J ’ai reconnu que si la première plainte était fondée, elle porte sur un objet
qui n’a occasionné aucun préjudice aux réclainans, et j ’ai cru, dès-lors, ne pââ
devoir m ’y arrêter ; que la Seconde est entièrement inadmissible, attendu qu’ une
vérification approfondie et contradictoire a démontré que le géomètre en chef
s'était libéré envers ses subordonnés, dans les délais prescrits; que la troisième
ne saurait être accueillie, par la raison que les réclamans, avant d’entreprendre
les travaux qu'ils ont exécutés, ont eu connaissance de l’indemnité qui y était at
tachée, laquelle, conformément ¿1 la circulaire du 11 décembre 1821 , avait été
préalablement réglée par un arrête de l’ un de vos prédécesseurs, du iG août 1821 •
Enfin , que leurs décomptes ont été basés sur un tarif régulier, revêtu de toutes
les formalités exigées et sur les traités qu’ ils avaient souscrits.
P a r ces m o t i f s , et attendu , d’une p a r t , que les nouvelles dispositions arrêtées
par l’adirfinistralion , ne peuvent avoir un effet rétroactif; de l’autre, que vous
avez statué sur la plainte, par un arrêté spécial, du 17 novembre 1 8 * 7 , q u i ,
dans toutes ses parties, m ’a paru entièrement conform e aux principes, je vous
N° 15.
�priç da fairaconna^fp aux p.tirti^ÎQgQn^ines qu’il nç peut ¿ire donné aucune suite à
la pétition qu’ils m ’ont adressée, et que les mesures que vous avez prises à leur
égard doivent avoir leur plein et entier effet.
J ’ai l’honneur, M. le baron , de vous saluer avec un bien sincère attachement.
L e ministre scrélaire- iTétat des fin an ces,
Signé R O Y .
P o u r copie conforme :
Le secrétaire général de la préfecture 1
TRENQUALYE,
E X TR A IT.
J e ne dis pas que j ’aie du regret de vous avoir ennuyé avec mes histoires amou-*
reuse$, mais il me semble si extraordinaire qu’un chef veuille s’occuper des in
térêts privés d’ un e m p lo yé , que je ne sais trop à quoi attribuer cet excès de
bonté.
•
Depuis si long-temps toutes mes relations avec mes supérieurs consistaient à
faire leur travail et à revoir m esappointem ens, qu’il me semble aujourd’hui étrange
de ne plus être dans la même situation !
J e suis tout com m e un paysan qui était toute sa vie habitué à manger des
pommes de te rre, et qui tout à coup se trouve à une table bien servie; dans $a
première position il vivait ; mais dans la seconde il vit délicieusement.
E h bien ! m o i , j ’éprouve au m oral, com m e on dit vulgairem ent, ce que le
paysan éprouve au physique. L a comparaison n’est point hyperbolique, je veux
seulement que vous le sen tiez, je n’en demande pas davantage.
Il
y a un certain bien-être qui résulte des sensations que produisent les relations
que nous avonsavec lesau tres, ceci est indépendant de la fortune, et tient seuler
m en ta u x égards ou à la considération que les autres ont pour nous ; ces égards
résultent encore de la bonté que ceux qui nous environnent; et comme il est
extrêmement rare q u ’un homme soit essentiellement bon ; i| sera tout aussi rarq
de rencontrer ces égards lorsqu’on ne peut pas les exiger, ou par son rang, ou par
sa fortune. V o ilà , M o n s ie u r , un sillogisine à ma fa ço n , je r e sais s’ il est ju ste, je
dis toujours à peu près ce que j ’éprouve.
,
Q u a n t à mon mariage, je regarde cela cojnpac une chose terminée ; mais ¡J
faut, e t c ., etc., etc.
�Clermont, le a 5 mai 1828.
Monsieur ÿ
E n réponse
à
v o tre l e t t r e , je vous dirai que N .... et N . . . . , sont de très-hon
nêtes gens, en comparaison de vous, dès-lors, j’aime mieux sortir de vos griffes
en vous laissant ce qui m ’appartient, que d’avoir un procès avec un homme que je
crois capable de tou t, et que tous les honnêtes gens ci oient capable de tout.
N ......
( * ) D eux collègues ¿u sieur B u s s e t, l ’un d’ eux avait em p loyé l’ auteur de la lettre , qu i traitait
ion ancien chef de voleur et de b riga n d , chaque fois qu’ il en parlait.
........
1
!
*
1
Paris, le 23 décembre 1828.
M onsieur,
E n vous quittant, il y 'a neuf m ots, je ne pensais guère que je ferais jamais
une tentative pour rentrer chez vous, cependant cela arrive aujourd’hui.
M ............. .. qui m ’a témoigné, depuis que je suis à P a r is , le plus vif intérêt, et
q u ia fait de nombreuses démarches pour m o i, m ’a engagé à faire le voyage de
C l e r m o n t , à m ’entendre avec vous pour redevenir votre e m p lo y é , aux mêmes
conditions qu’autrefois, avec la différence qu’ un traité donnerait de la solidité à
n os conventions; c ’est là, M onsieur, entièrement l ’idée de M ............. ; c’est lui
qui m ’a conseillé la démarche que je fais; vous la jugerez comme vous voudrez ,
je ne dis pas un mot du passé, cela serait désagréable pour vous et pour m o i, je
ferai seulem ent l’observation qu’une intution de neuf m ois, et des dépenses énor
mes que je ne pouvais pas prévoir, m ’ont placé dans une position qui influera
d’une manière fâcheuse sur le reste de ma vit.
J e s u is , M o n sie u r , le conseil de M ............. et partirai vendredi ou samedi pour
C lerm o nt muni d e lettres de M .............. tant pour vous que pour quelques autres
p erso n n es de C l e r m o n t .
J ’espère de votre délicatesse, que le contenu de celte lettre reste absolument
entre vous et m o i , au moins jusqu’au moment ofi je saurai que les propositions de
M . . . . e l l e s miennes seront acceptées ou refusées par
y o u s.
N ....
T H 1 B A U D Im p rim e u r d e là cour ro y a le , e t L ib raire à R io m , — J u ille t 182 g,-
N \ 18.
�
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Factums fonds privés
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[Factum. Busset, Charles-François. 1829]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Subject
The topic of the resource
cadastre
diffamation
libelle
imprimeurs
géomètres
malversations
rétributions
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liberté de la presse
Description
An account of the resource
Observations et Pièces Justificatives, Pour Sieur Charles-François Busset, géomètre en chef du cadastre du département du Puy de Dôme, habitant la ville de Clermont, plaignant ; Sur un Libelle anonyme imprimé par le sieur Hippolyte Tilliard, imprimeur, habitant à Paris, et distribué par le sieur Rodde aîné, agent d'affaires, habitant la ville de Clermont
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1829
1811-1829
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
63 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV16
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
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Domaine public
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Text
4
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MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J a c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n zy ,
mairie de B esset, département d’A llier, intimé
et défendeur en opposition;
C O N T R E
,
et G a b r i e l L A N D R I È V E t
fermiers habitans du lieu de Chantagret mairie du
Peyrouse, appelans et demandeurs en opposition.
C h a r le s -P ie r r e
►I
i
•'v
P NDANT le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
E
Privezac a réaffermé aux appelans deux domaines ou
leur famille a trouvé le germe d’une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer en l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
�méi-aire. E n abusant des nouvelles lois sur les tran
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce ù quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme ctaZ—
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il, n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la loi du 6 messidor an 6 , l ’arriéré
des fermages. Les premiers juges ont dit n on ; leur langage
est celui de la loi.
FAITS:
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R io m , canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-considérables, connus sous les noms de Chantagrct et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent comptant.
Le
août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de liuit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des Landriève la ferme des domaines
de Cliantagret et Cornassat. L e cours de ce nouveau,
l^ail devoit commencer seulement à la Saint-Jean 1788,
çt, finir à. la Saint-Jean 1797. L e prix, ostensible fui de
5
�la somme de 1,300 francs ai’gen t, quarante - cinq livres
de beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy liabitoit la capitale ; sa naissance
et son rang l ’attachoient à la cour. Eloigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L andriève
les exploitoient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit noble, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne devoit que
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes avoient un grand intérêt à mettre en évidence
des fermages moindres en sommes ; mais ils n’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des contre - lettres ou des effets an
nuels , qui pour l’ordinaire égaloient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les affaires
n’étoient pas en -très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le prix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1790, le citoyen de Priveznc acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devant
notaire ¿1 Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoître.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A 2
�toutes choses dans le plus mauvais ordre. Il vit les L an driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat ; il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le üt.
Lorsqu’il fut question de passer nouveau b ail, les
Landriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pressans. Celui-ci étôit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attaclioit peu de p rix au papier-monnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce 11e fut pourtant pas une raison
d ’exclusion contr’eux; il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit aloi*s pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire ,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, ( id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
.rm x
d ’a r g e n t
.
Ce bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4 ; il y a pourtant cette différence , que par
l’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux Landriève
le droit de prendx-e chaque année dans un bois, appelé
les Saulzeix., la moitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accord oit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que par le bail de l’an 4 ,
les Landriève furent chargés des contributions, tandis
qu’ils n’y étoient pas obligés par celui de 1784.
L e p rix annuel du bail de l’an 4 fut convenu à la
�( 5 )
■
somme de 3,000 francs, payable au dom icile du citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste prix de la ferm e de ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 178 2, six
bœufs arans, neuf vaches mères, un taureau, une v êle,
trois suivans et trente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 626 francs : les L andriève s’en
gagent à en rendre pour même somme en fin de ferme ;
quant aux brebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d’alors. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi pour éviter l’écueil du papier-monnoie.
L e citoyen de Privezac étoit dans la ferme persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité; les L an d riève,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
.montrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l ’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X V I. E t enfin pour le prix de ladite ferm e, lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audit citoyen
bailleur, chacun a n , aux lieu x portés ci-dessus, l a s o m m e d e
5 , 0 0 0 FRANCS EN NUMERAIRE OU VALEUR REPRESENTATIVE, e n deUX
termes égaux de chacun i,5oo francs; le premier payement échoira
le 11 novembre 1797 >
•second le 2^ ju in 179 8 , et ainsi con
tinuer, etc.
^
�( 6 )
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéroient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 )»
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils avoient versé
beaucoup d’argent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les Landriève jouiroient
des biens du citoyen de P riveza c, .pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Privezac fit aux
Landriève commandement de payer la somme de i , 5o o fr,
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A veyron ,
( et encore en la m aison et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a -M a is o n -N u e , com m une
du Pey.rouse, pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le mot pour mot de cette
élection ).
L e 21 du mcrnc m ois, les L an driève firent au citoyen
de P rivezac, (a u domicile du citoyen B r u n ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
fermage sur le taux du bail de 178 4; 20. de celle de
42 francs pour la dîme supprim ée; 30. de celle de 6 liv.
10 sous pour frais du commandement de p a ye r; et
rien pour le beurre et les poulets ; et rien pour le bois
des Saulzeix. X/C citoyen Brun n’a voit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m o is,
�( 7 )
les Landriève assignèrent le citoyen de P riveza c, au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l ’an 4 , au taux de celui
de 1784 ; 2°. en réitération et consignation de leurs offres..
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la cii’constance pour prendre contre lui jugement par défaut ; il’
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 es^ réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les L andriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme écliu le
2.1 brum aire an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. lueurs offres sont déclareés suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1) Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les baux passés entre le i 'T. janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprimés, quel
ques expressions et dénominations de monnoie que les baux em
ploient.
Attendu que tous doutes à cet égard sont lèves par l’article II de
la loi du G messidor an 6.
Attendu que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à réduction.
Attendu le fait constant que le bail desdits biens ne s’élevoit,
en 1790, qu’à une somme de i,3oo francs.
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�•
( -8 )
P o in t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis
de
»
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire *an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail à ferm e , la’
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5o centimes pour frais ; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4» demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes éclius que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d ’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d'autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte aux demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, i®. de la somme
de 65 o francs pour le terme de leur ferm e échu le 21 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de 42 francs pour la 'valeur de la dtme sup
primée, qui doit être jointe au prix de l ’ancien bail ; 3°. de celle
de Gfrancs 5 o centimes pour frais ; déclare lesdites offres bonnes
et valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d ’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne , en
conséquence, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du prix du bail échu le 21 brumaire an 6 , que de la totalité
de la valeur de la dlme des fruits récoltés en l ’an 5 , qui doit en
faire partie , ainsi que des frais fa its par le citoyen Brunei; et
condamne ce dernier aux dépens.
sition
�C-9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité (les
offres et lit continuation des poursuites commencées.
L e 3 floréal an 9 , jugement contradictoire rendu entre
les parties, au tribunal civil de l’arrondissement de R iom ;
l’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en
réduction ; l’exécution pleine et entière du bail de l’an
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé k continuer ses poursuites (1),
(1)
Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune*
par leur acte du 9 vendémiaire an G , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’a g it, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 , néanmoins elles n'ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages échus, d ’après les form el
voulues par les lois subséquentes.
Attendu que l’article VIII de la loi du 6,messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
de? fermiers le payement de tous les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
- Attendu que les parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui étoient échus à cette époque.
Attendu pareillement qu’à l’audience du ci-devant tribunal du
départem ent, elles n’ont fait les offres intégrales de tous lesdità
termes échus h cette1époque,
'
Attendu que les offres'd'un demi-terme par elles faites, et autres
accessoires, n ’ont pas été renouvelées à domicile, ni e ffe c tu é e s au
bureau de conciliation, en consignant au moins le moulant de cc
qu’elles avoient offert à l’audience.
Attendu que d’après toutes ces c o n s id é r a tio n s , les parties dit
citoyen Baylp n ’ont pas satisfait, ni à ce qui étoit prescrit par lq
13
4
6
?
�( 10 )
L e ‘28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des L«indriève.
- L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
J.ié 4 du même m ois, offres réelles faites par les L an
driève au citoyen d e P riv e z a c , (en son nouveau domi
cile actuel à Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,362 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail cle 1784 échus alors, pour
'intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l’audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
¿lat.
L e 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
donne, i ° . aux L an d riève, acte de leurs offres de la
somme de 6,352 francs 90 centimes*, 20. au citoyen de
P riv e za c, acte de ce qu’il offre de recevoir à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable.
loi du g fructidor an 5 > ni à cc qui ctoit ordonné par celle du
6 messidor an G.
L e tribunal, par jugement en premier ressort, reçoit la partie
de Lougnon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans e ffe t; et sans s’arrêter ¿1 ¿a demande
en réduction du prix du bail du germinal an 4 , dans laquelle
8
les parties du citoyen B a jle sont déclarées non-recevables, fai
sant droit au fond, ordonne que ledit bail du 8 germinal an 4
sera exécuté suivant sa forme et teneur, jusqu’à l’expiration d’icelui j,
prdonne en outre que les poursuites commencées seront continuées,
et condamne les parties du citoyen Bayle aux dépens.
I
�Réception par le citoyen de Privezac de la somme de
5,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen G-ourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et m oyens res
pectifs demeurant réservés a u x parties.
L e prem ier floréal an 10 , défaut contre les L an d riève,
défaut non expédié.
L e i 5 du même m ois, opposition par les Landriève,
M O Y E N S .
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une méditation sage. Dans le nombre de ces
lois ils ne se sont pas mépris ; ils ont approprié à l’espèce
celles qui lui appartiennent.
Il en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettoit à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du m axim um (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
ont été passés postérieurement à la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le maximum, seront réduits au prix du.
bail précédent, etc.
(2) A rt. l'\ A dater de la publication de la présente lo i, chaque
B 2
�( « “)
Celle du 18 fructidor an 4 ,. lit une exception à la ré
duction exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. Dans cette exception elle com prit les baux
stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , En sorte que
par-là , le propriétaire qui avoit contracté moyennant
des écus, fut assuré de 11’èti e payé qu’en écus et sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 1
quand ou disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de papicr-m onnoia Les mots non
stipulés en denrées ou en n u m éra ire, qui y sont aussi 7
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la stipulation en numé
raire ( 1 ).
V ien t ensuite la loi si connue du 9 therm idor an 5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3 ,
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
citoyen sera libre de contracter comme bon lui semblera. l.e s
obligations qu’ il aura souscrites seront eocéculees dans les termes
et valeurs stipules.
(1) A rt. III. L a réduction pfononcée par l ’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du hiaximum, aura son effet pour Tan 5
comme pour l’an /(, et en général pour toute la durée desdits baux.
JLa même réduction pourra être demandée sur les baux n o n
STirULÉS
EN D E N R E E S OU
EN N U M E R A IR E , p o s té r ie u r s
OU
i " . J tm -
pier 179 2 , dont les anciens prix sont augmentés de plus d’un
cinquième.
�C 13 )
bail de 1790 , s’il en existe u n ; 20. au taux'fixé par des
experts, s’il n’y a point de bail existant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V I I ) que pour le p rix ou
l’évaluation du p rix de 1790, on ajoute les dîmes et autres
charges .supprimées’par la loi du 10 avril 1791 e t autres:
elle veut que l’on comprenne aussi lès so m m es'q u i, pro
m ises, soit et titre de pot de v in , so it p ar cohtre-lettre,
soit de toute auti-e m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dans le temps partie du p rix.
• L ’article X oblige le ferm ier à demander par écrit la
réduction : il doit le faire dans le mois de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y. est nonrecevable (1). i,
( L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , explique,
l’article V I de celle du 9 fructidor an 5 ainsi qu’il suii^
<c Sont compris dans l ’article V I de lu loi du 9 fructidor
» an 5 , et susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article, les baux stipulés, en tout ou en partie, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier janvier 1 7 9 2 , et la
» publication de la loi du 5 therm idor an 4 , relative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé» nominations de rrïonnoie, qui y aient été employées ».
Mais la même loi ( article V III ) ,astreint les ferm iers,
i° . à requérir dtms le mois la réduction ^ 20. ¿1 payer
dans le même délai au propriétaire, soit le montant des
(1)
A rt. X . Ceux des fermiers qui ayant, d ’après les articles
précédons, droit à la réduction du prix de leur b a il, ne l’auroient
pas encore demandée ou obtenue, seront tenus, a te in e d ’en'
£the o éch u s, de la demander par écrit, dans le moïs qui suivra
la publication de la présenté.
�C *4 )
termes échus suivant le bail de 179 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets affermés, et cela dans le cas où il n ’ y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
pax-ce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
P ar l ’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette lo i
ne sont pas faites p o u r les b a u x passés par anticipation,
at dont le ¡preneur ne seroit pas encore entré en jouissance. L e bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
messidor an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 j elle est
donc, applicable à la cause.
(1) A rt. y i I L Les fermiers qui provoqueraient la réduction
du prix du b ail, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n r e ce v a b le s ,
q u e d a n s iæ m o is q u i s u iv r a
l a p u b l i c a t i o n d& l a
p r é s e n t e , e t q u ’ e n p a y a n t d a n s l e m êm e m o i s , o u a u p r o p r ié
ta ir e ,
ou au receveur des domaines, suivant les cas,:
S o it l e -
MONTANT DES TERMES ECHUS, d ’ atRES LE BAIL EXISTANT EN 17 9 O,
soit, à défaut de bail ou dans le cas de l’article V ci-d e ssu s,
QUATRE FOIS LA CONTRIBUTION FONCIERE de Vail 5 , <loS objets
dont il s’agit, sau f à compter, même à re'pe'ter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(2) A rt. X V . Toutes contestations non définitivement terminées,
seront jugées en conformité de la présente.
\ •
�( i 5 )
L ’analyse de ces lois met bien en évidence le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément 'dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l’opérer légitim em ent.
A in si donç nous aurions à traiter deux questions;
l’une de savoir si le bail du 8 germinal an 4 est sujet
à réduction ; et l’autre de savoir si les Landx’iève y
sont reccvables : nous nous attacherons ‘principalement
à cette dernière. Nous ne ferons ressortir que comme
moyens de considération les circonstances relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a fin de non-recevoir cer
taine , une discussion plus étendue scroit superflue.
§ 1er.
• •
F in de ?ion recevoir.
L e 9 vendémiaire an 6 les Landriève ont'signifié
qu’ils requéraient la réduction du p rix du bail du 8
germinal an 4 , au taux de celui de 178 4, en vertu de
la loi du 9 fructidor an 5.
Celte réquisition paraîtrait être venue dans le m o is,
à compter de la publication de cette loi ; parce que
cette publication n’a été faite au département du P u yde-D ôm e', que le 23 fructidor an 5.
Maïs il ne sufiisoit pas d’une simple réquisition de la
part des fermiers. Elle conslituoit seulement une demande;
et une demande n’est pas toujours un droit invariable
ment acquis. U ne demande n’est que le commencemçnt
d’ une contestation.
i
�^ \\\.
( 16 )
P o u r que tout soit r é g lé , il faut entre les fermiers et
le propriétaire, ou un consentement réciproque, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep oser, ou un jugement qui en tienne lieu. P o u r que
tout soit certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie ;
il faut,qu’ils le fassent ou par eux ou par un fondé dq
p ou voir spécial ^et meme que l’on donne au propriétaire
copie de ,1a procuration, parce que les fermiers y coiii
tractent un engagem ent, celui de payer sur l’ancien bail,
Sans -signature, la réquisition peut être désavouée : il n’y
a i-jen de constan,t.
Ici point de signature de la part des I;an d riève,n i d’un
fondé de pouvoir spécial. L ’exploit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en un
tribunal de district dans l’A v eyro n , huissier qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte,
que les L an driève auroienl pu s’en m oquer im puném ent,
si l ’on ayoit voulu les prendre au mot sur l’effet de leur
réquisition.
A u reste il n’y avoit rien.de terminé entre les parties,
lorsqu’à paru la loi du 6 messidor an 6. V o ici quello
étoit leur position respoctive au moment de là publication
de cette lo i : nous venons,de le dire, les Landriève a voient
requis la réduction le 9 vendémiaire an 6 : le citoyen
de Privezac n’y avoit pas adhéré ; au con traire, il leur
avoit fait le 16 nivôse su iva n t, commandement de payer
la somme de iô o o francs, pour le demi-terme échu de
la ferme sur le pied de 3000 francs par an. L e 26 du
même mois , les Landriève l ’avoient fait assigner au
tribunal
�( 17 )
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
voir, prononcer sur la réduction requise par l’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la loi
du 6 messidor an 6, il n’y avoit encore rien de réglé
ni par leâ parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien formelle.
Elles se trouvoient donc précisément dans le cas de
l’article X V . L ’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conformité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
Landriève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. "VIII) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fin de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c’est ce que n’ont pas fait les Landriève : en effet,
au moment de l’émission de cette lo i, étoient échus les
termes de novembre 1797 ( ou brumaire an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 ) ; ces deux termes form oient,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
Il est vrai que les Landriève ont offert au citoyen de
Privezac ( au domicile du citoyen Brun ) , le 21 nivôse
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme échu
le 11 brumaire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et eniin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
Mais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. X-e p rix du bail
étoit payable au dom icile de ce dernier \ cela est dit dans
C
�(iS)
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m êm es ain si, puisqu’ils sont allés au
domicile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 prairial an 9. L e domicile élu par le citoyen
de Privezac cliez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
L andriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat formel cio toucher ( 1 ). Ici rien de.tout cela.
2 0. C e s o ffres s e ro ie n t e n c o r e in su ffisa n te s, p a rc e q u e le
( 1 ) D en izart, <verbo o f f r e s , n . 20, dit : « Les offres doivent
»
»
»
»
»
>!
»
«
»
être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
désigné pour la convention. O n ne peut pas valablement les
faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déccmbrc 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossm'e, quoiqu’elles eussent été réitérées à l’audience sur le bureau ( en cause
principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les acte»
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre-, parce que
« cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
» signifier à une partie parviennent sur le champ à son procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�( *9 )
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesLnndriève i\ payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. L e s Landriève n’ont rien offert pour cela.
3°. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux Landriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P uy-de-D ôm e, le 27 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils dévoient donc alors deux années q u i, suivant le bail
de 178 4, auroient monté à 2,600 francs do prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingldi x livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-terme, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. Il
y auroit donc insuffisance énorme,
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des afj'res labiales ne libéroient pas,
Les tribunaux les jugeoient toujours comme non-avenues,
quand elles n’étoient pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de consignation par le débiteur. Dans le
G z
4 »
�'
.
.
( 20 } .
nouveau d roit, même règle, (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies ; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
I c i, point de consignation par les L an d riève; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
L es choses en étoient en cet état de.dénûrnent absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an 9 : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même des
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueur; il veut très - formellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ ê t r e
DÉ CLA RÉ S n o n - r e c e v a b l e s , que dans le m ois q u i
suivra la publication de la, présente, e t q u ’ e n p a y a n t
d a n s LE MÊME MOIS. Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on ne paye pas aussi dans le m ois, c’en est
fait ; le ferm ier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; et
les tribunaux n’ont qu’à en faire l’application.
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an 5. I l en est de même
de ceux qui ont fa it des offres et consignations valables et suf
fisantes.
�( 21 )
Que les Landriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs olives du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résulte
qu’il est payé , et qu’il ne souiïre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire ; il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de la part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au propriétaire, et il
n’est pas au pouvoir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
20. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé; la fin de nonrecevoir étoit encourue; la justice avoit prononcé la
pein e; les choses 11’étoient plus entières.
3°. Suivant la loi du 6 messidor, c’étoit ici une affaire
d’argent ; les Landriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne Payant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l’appel ils seroient
non-rcccvables à purger la demeure : la sentence scroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute du payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. Par conséquent le tribunal de Riom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o it - il o,Très et consignation ou payem ent? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et môme après l’a p p e l,
ne peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut être question que du an benè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
4°. L e citoyen de P rivezac, en recevant les sommes
offertes en cause d’a p p el, ne les a touchées qu’à bon
compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit. Il lui étoit dû plus de 12,000 francs , il n’a reçu
qu’entour 6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tortprésenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
Nous allons le démontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non recevables eu leurs demandes en ré
duction,
§ 1 1 ,
Ce seroii pour lecitoyen de Privezac un grand m alheur,
si les Landriève pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui par le bail
du 8 germinal an 4. S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 1784, ils y auraient l’avantage
�23
(
)
criminel de jouir de ses biens moyennant ün p rix moindre
que celui qu’ils ont payé au sieur de T illy .
E n effet, dans l ’exactitude des laits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Chantagret et de Cornassat, est
celui stipulé au bail de germinal an 4* L e bail de 1784
et autres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auroient dû marquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en éloient que plus mal soignés. P ar cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l’ê tre .D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans on faire mention dans les b a u x , des sommes con
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent besoin), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paroissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièmes
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1784 a été passé
pour commencer seulement en 1788. Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà existans.
S i aujourd’hui le citoycnde P rivczac étoit réduit au prix
du bail tic 178 4 , au p rix ostensible de 1,300 francs, il
s’ensuivroit qu’il n’auroit pas le prix réel. Il n’auroit
aucune ressource pour se faire faire raiso n du prix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’ily a u ro it
�(H )
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le propriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l’auroit pas.
Q u ’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
taine , autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, il est dit dans ce b a il, i°. que le citoyen de
P riveza c a ffe r m e « p rix (Vargent. E n F r a n c e , quand en
l ’an 4 on disoit argent, personne 11e se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier-m onnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin ces maux pour l’avenir.
2°. Ce bail exprim e encore que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des especes métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stijmlés en écus, ne
scroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, elc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées ; cet usage donne
toujours la mesure de l’intention des parties. O r , une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�Ç a 5 .)
num éraire on vouloit dire é c u s , et non assignais ou
mandats , se trouve dans la relation du contrôlé du
bail de germinal an 4 , faite au Bureau de M on taigut,
le 12 germinal. Dans cette relation, on vo it quelle; con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100'francs en "mandats,
et 5 'francs en num éraire ( 1 ) . D elà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme dit1nu
m éraire ; il s’ensuit' cjue l ’on né considéroit c o m m e numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant’de Français.
'
30. L e bail du 8 ’germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l ’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistaient en six
bœufs arans, neuf vaclies m ères, un taureau, une jeune
vache et trois suivons; total, vingt bêtes à cornes. E h bien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme -de
526 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour neuf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû compter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du b a il , tandis qu’il ne recevroit que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
seroit én orm e; elle seroit de 15,300 francs : elle vaut
(x) Enregistré à Montaigut le 12 g e rm in a l an 4 * Reçu xo 5francs
en mandat de loo francs et 5/m/2Ci üE ÀUMÉitAiRE, Signe Piètre.
D
¿ ig s
a ï A
�( 2 0 )
bien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les L an driève aient fait une fortune de 80,000 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils devraient être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en num éraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le tribunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
qu’a dû éprouver celui de l ’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l ’affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un m oyen infaillible pour forcer les L an driève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’au ro ien t plus eu la ferme des deux domaines
en question.
GOURBEYRE.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n a l d ’appel.— A n 10.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Table Godemel : Fermier - qui, en vertu de la loi du 9 fructidor an 5, a demandé la réduction du prix de son bail, lorsqu’il n’a pas été statué sur cette demande avant la publication de la loi du 6 messidor an 6, a-t-il dû faire les offres exigées par l’article 8 de cette dernière loi ? peut-on lui appliquer les dispositions de l’article 15 qui veut que toute contestation non définitivement terminée soit jugée en conformité de ce que cette loi prévoit ? ou bien, le droit de réduction était-il acquis au fermier par le simple effet de sa demande ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1796-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1416
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
BCU_Factums_M0234
BCU_Factums_G1417
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53230/BCU_Factums_G1416.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53733/BCU_Factums_M0234.pdf
78e90b66d07aefbf4e6875d40d25fe59
PDF Text
Text
MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J
acques
B R U N E L D E P R IV E Z À C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n z y ,
mairie de B esset, département d’A llie r, intimé
et défendeur en opposition
C O N T R E
C h a r l e s - P i e r r e et G a b r i e l L A N D R I E V E
,
,
fermiers, habitans du lieu de Chantagret mairie du
,
Peyrouse appelans et demandeurs en opposition.
le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
Privezac a réafferm é aux appelans deux domaines où
leur famille a trouvé le germe d’ une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer eu l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
P
en d an t
�.
( 2 }
.
méraire. E n abusant des nouvelles lois sur les t r a n
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses ; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce- à. quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la lo i du 6 messidor an 6 , l’arriéré*
des fermages. Les premiers juges ont dit non ; leur langage
est celui de la loi..
F A IT S.
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R iom ,. canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-con
sidérables, connus sous les noms de Cliantagret et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent' comptant.
L e 5 août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de huit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des L andriève la ferme des domaines
de C liantagret, et Cornassat. L e cours de ce nouveau
bail devoit commencer seulement î\ la Saint-Jean 178&,
et finir à lu Saint-Jeun
1797*
Pr^x ostensible fut de
�(3 )
'
îa somme de 1,300 francs argent, quarante - cinq- livres
cle beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy habitait la capitale ; sa naissance
et son rang l’attaclioient à la cour. E loigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L an driève
les exploitaient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit n ob le, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne de voit que.
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes a voient un grand intérêt a mettre en évidence
des fermages moindres en sommes; mais ils 11’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des co n tre - lettres ou des eiTets an
nuels , qui pour l’ordinaire égal oient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les alfaires
n ’étoient pas en très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le p rix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1 7 9 0 ,1 e citoyen de Privezac acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devantnotaire à Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoîlre.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A u
�( 4 ) _
tontes choses dans le plus mauvais ordre. II vit les L a n driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat -, il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le lit.
' L orsq u ’il fut question de passer nouveau b ail, les
L andriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pi'essans. Celui-ci étoit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attachoit peu de p rix au papier-m onnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce ne fut pourtant pas une raison
d’exclusion contr’e u x -, il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit alors pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, (id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
PRIX
D’ARGENT.
. C e bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4; il y a pourtant cette d iffére n ce, que p ar
l ’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux L andriève
le droit de prendre chaque année dans un b o is , appelé
les Saulzeixr la m oitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accordoit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que p a rle bail de fan 4 ,
les Landriève
furent chargés
des contributions,' tandis
«
^
qu’ils 11’y étoient pas obligés par celui de 1784.
.
L e prix, annuel du bail de l’ail 4 fut convenu à la
�( 5 }
..
.
Somme de 3,000 francs, payable au dom icile dn citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste p rix de la ferme de.ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 1782, six
bœufs arans, neuf vaches m ères, un taureau, line v êle,
trois suivans et tx-ente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 5a 6 francs : les L an driève s’en
gagent à en rendre pour môme somme en fin de ferm e;
quant aux b rebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d ’a lo rs. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi p o u r éviter l’écueil d u papier-monnoie.
I,e citoyen de Privezac étoit dans la ferm e persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l ’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité, les L a n d rièv e,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
m ontrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X Y I . E l enfin pour le p r ix de ladite ferm e , lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audie citoyen
bailleur} chacun a n , a u x lieuoc portés ci-dessus, l a somme de
3,000
l'HANCS EN NUMÉltAIUE OU VALEUR nEHlÉSENTATTVE , Cil deUX
termes égaux tic chacun i , 5.oo francs; le premier payem ent échoira
le 11 novembre 1797 , le second le 24 ju in 1798 et a in si con
tinuer, etc.
�.
.
(6 )
,
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéx’oient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 ).
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils a v o i e n t versé
beaucoup d’ax*gent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les L andriève jouiroient
des biens du citoyen de P rivezac, pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Px*ivezac fit aux
Landi’iève commandement de payer la somme de i , 5oo fr.
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A v e y r o n ,
( et encore en la m aison .et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a - M o iso n -N u e, com m une
du P e jr o u s e , -pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le m ot pou r mot de cette
élection ).
L e 21 du même mois , les Landrièv.e firent au citoyen
de P rivezac, ( au domicile du citoyen Brun ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
ferm age sur le taux du bail de 178 4 ; 2°. de celle de
42 li'ancs pour la dîme supprimée ; 30. de celle de 6 liv,
I.o sous pour frais du commandement -de payer ; et
rien pour le beurre et les poulets; et rien pour le bois
des Saulzeix. L e citoyen Brun n’avoit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m ois,
�(
7
).
.
les Landriève assignèrent le citoyen de P riv e z a c , au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l’an 4> au taux de celui
de 1784; 20. en réitération et consignation de leurs offres.
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la circons
tance pour prendre contre lui jugem ent par défaut ; il
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 est réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les Landriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme échu le
2,1 brumah-e an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. Leurs offres sont déclarées suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1)
Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les haux passés entre le 1". janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprim és, quel
ques expressions et dénominations de inonnoie que les baux em
ploient.
A ttendu que tous cloutes à cet égard sont levés par l'article II de
la loi du 6 messidor an 6.
A llen d u que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à r é d u c t io n .
A llen d u le fait constant que le bail desdils biens ne s’élevoit,
en I 79°> (Iu’à une somme de i,5oo frîmes.
•
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�.
.
.
.
( 8 )
.
P oin t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis de
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail a ferm e , la
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5 o centimes pour frais; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4> demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes échus que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d’autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte a u x demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, 1*. de la somme
de 65o francs pour le terme de leur ferm e échu le 2 1 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de l\2 fra n cs pour la 'valeur de la dlme sup
prim ée, qui doit être join te au prix- de l ’ancien bail ; 5°. de celle
de G francs 5o centim es pour fra is ; déclare lesdites offres bonnes
et 'valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne, en
con séqu en ce, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du p rix du bail échu le 21 brumaire an G , que de la totalité
de la 'valeur de la dîme des fru its récoltés en l'an 5 , qui doit en
faire p artie, ainsi que des fra is fa its par le citoyen B ru n ei; et
coniUimne ce dernier a u x dépens.
_
silion
�.
t 9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité des
offres et la continuation des poui'suites commencées.
L e 3 floréal an 9, jugement contradictoii-e rendu entre
les parties, au tr ib u n a l civil de l’arrondissement de R iom ;
l ’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en*
réduction -, l’exécution pleine et entière du bail de l’an.
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé à continuer ses poursuites (1).
(1) Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune,
par leur acte du g vendémiaire an 6 , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’agit, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 ., néanmoins elles n ’ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages cchus, d’après les formes
voulues par les;lois’subséquentes.
Attendu que-l’article VJIII de la loi du 6 messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
des fermiers le payement de tous 'les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
^ A tten d u que lés parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui éloient éclius à cette époque. ‘
Attendu pareillement qu’à ’l’qudicnce du ci-devant tribunal du
départem ent, 'eîle6 r>\}nt fait les1 6ffres: intégrales de tous lesdits
ternies échus à> cette époque. ‘ ■
'*
Attendu que les oflies cPuh denlùlerme par elles faites, et autres
accessoires* <n’onl pas'été renouvelées à dom icile, ni'-'cilecluees ait
bureau do conciliation, en consignant du in o ii'S ^ '1^0' 1^ 1^ dû çé
qu’elles avoient offert ù l’audNmfce.
"
'* "
1
Attendu que d’après toutes ces c o n s i d é r a t i o n s , lès parties du
C i t o y e n Bayle n ’ont pas satisfait, n i £1 ce qui étpit prescrit par la
‘
B
�*■ . ^10) .
.
c L e 28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des Landriève.
. L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
• L ë 4 du même m ois, offres réelles faites par les Landriève au citoyen d e P riv e z a c , (en son
domi
cile actuel ii Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,352 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail de 1784 échus alors, pour
intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l'audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
état.
L e 6 therm idor an 9 , jugement contradictoire 'q u i
don n e, i°» aux L a n d rièv e, acte de leurs offres de la
somme de 6,362 francs 90 centim es; 2«. au'citoyen de
P rive za c, acte de ce qu’il offre de recevoir'à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable. "
1 . ‘
loi du g fructidor an
6 messidor an G.
5,
ni à ce qui ctoit ordonné par celle du
•
,
r
l
i
, L e tribunal, par jugement en premier ressorly reçoit,la partie
de Lorignon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans effet ; et sans s ’arrêter à la demande
en réduction du p rix du bail d u ¡8 germinal an 4> dans laquelle
les parties du citoyen B a y lc sont déclarées noiv-recevablès, fai-.
6ant droit au ioïid , ordonne que ledit lj;iil du '8 germihal an
sera exécute suivant sa form e et .teneur, jusqu’à l ’expiration d ’iceJui;
ordonne en oulreque les poursuites commencées seront continuées,
condamne les parties du citoyen lîajle aux dopçns,.
,.
,
�C rô
..
_
Réception par le citoyen de Privezac «le' la somme de
S,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen Gourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et moyens res
pectifs demeurant- réservés a u x parties.
L e premier floréal an 10 , défaut contre les L an driève,
défaut non expédié.
L e i 5 du môme m ois, opposition par les Landriève,
1
M O Y E N S .
j
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une m é d ita tio n sage. D a n s le n o m b r e d e ces
lois ils n e se so n t p as m é p r is ; ils o n t a p p r o p r ié à l ’espèce
celles qui lui appartiennent.
'
•
Il
en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettait à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du maxim um . (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à «contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
Ont été passés postérieurement i la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le m axim um , seront réduits au p r ix du
bail précédent, etc.
(2) A rt, I", A dater de la publication de la présente lo i, chaqu»
B 2
�.
t 12 )
,
,
- Celle du 18 fructidor an 4 , .fit une exception à la r é •duclion exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. ;Dans cette exception elle com prit les baux
.stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , E u sorte que
p a r-là , le propriétaire qui ayoit contracté moyennant
des'éctts, fut assuré de n’èti’C'payé qu’en écuset' sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du .substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 ,
quand 011 disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de;'papier-monnoie. Les mots non
stipulés en deiirées ou en num éraire ? qui y sont aussi r
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la .stipulation en numé
raire ( 1 ).
’
' '
1-'-V ient ensuite la -loi.si connue 'du 9 therm idor an
.5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
ci'loycn sera libre de contracter comme bon lui semblera. L e s
obligations qu’ il aura, souscrites seront exécu tées dqns les ternies
et valeurs stipules.
,
(1) A rt. III. L a réduction prononcée par l’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du m axim um , aura son effet pour l’an 5
comme pour l’an 4 >et en général pour toute la durée desdits baux.
L a même réduction pourra être demandée, sur les b a u x non
STirur.ÉS en df.nhkes ou kn •numkrauik, postérieurs au - i " . ja n
vier "179 3 , dont les anciens p r ix sont augmentés' 'de p lm J ’ un
cinquième.
'
'
�•X 13 )
b ail de 1790 , s’il en existe'u n ; 20. au, taux fixé par des
.experts, s’il n’y a point de bail èxistant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V U ) que pour le p rix o.u
l ’évaluation du pi‘ix de 1790 , on ajoute lés dunes et asulres
.charges supprimées p a rla loi du 10 avril 1791
a^ res.ï
.elle;veut que l’on comprenne aussi les sommes q:ui^pro
m ises, soit a titre d ép ôt de v in , so it par]contre-lettre5
s o itd e toute autre m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dajis le temps partie du p rix.
/ ' '>•
- L ’article X oblige le fei'm ief y ;depa,ander p ar éqrit la
réduction : il doit le faire dans le m ois.de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y est nonrecevablej (r). ‘ ,
IVarticle I I de-la loi du
messidor ari 6., (expliqua
l ’article V I de celle du 9 fructidor a n '5 , ¡¡ainsi;qu^ii suit'*
« Sont compris clqns l ’article V I'd e lu ¡loi ilu.'9:J[iîuçfeidor
» an 5 , et .suscepliblcs'de la ryductiünjlipe.ntiounéc, audit
p article, les baux stipulés, en tout ou en ¡partie,, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier'jajjvier;::i792, et La
6
» publication de la loi du
5 tliennidor an 4 , r elative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé
» nominations derm om ioie , cjui1y aient été'çmployées ».
••
'r
• 1 • 11.*1 *1 *
‘ •* T7 'î •' [’ ' ’ 1» '4ï
. Mais
V III')
les ferm iers,
.) A la 'môme 1loi
’• iv‘article
*
' 'i astreint
'Y 'ft
"r
1°. à .¿requérir dans le mois la .rédiicfion
à payer
dans le jrnômc délai .au. propriétaire,-, soit-Je ipontant des
t ■ îl
(1) A rt. X . Ceux des
f e r m
t
; . . V •i : i f .f\ *i
.^’après jes.articles
i e r s , q u i
précédons, droit à la réduction du prix de l.e y r .Î w l 1 - a u r q i ç n t
pas encore demandée 011 obtenue, s e i v f . i t : >iA •
.p V i
ΔX’he d éch u s, de la demquder par écrit, dans le¿n o is fjiu¡s^iiyra
la publication de la présente.
.
•V »
1
�.
C 14)
ternies échus suivant le bail de 1 7 9 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets afferm és, et cela dans le cas où il n’y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur : sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
parce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
.
^
P a r l’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce.sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette loi
ne sont pas faites pour les baux passés par anticipation,
et dont le preneur ne seroit pas encore entré en jouis
sance. L e »bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
m essidor'an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 ; elle est
donc applicable à la cause.
_________ 7 . '_______
-
'
'J. • i y
'
'
(1) A rt. Vlir. L es fermiers qui provoqueroient la réduction
du prix du b a il, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n recevab les,
que
p r é s e n te ,
q u ’e n
e t
dans
le
m ois
p a ya n t
g u i suivra la p u blica tio n de la
dans le
même
m ois,
ou
au proprié
ta ir e , ou au receveur des dom aines, suivant les cas,
m o n ta n t des term es
échus,
d 'ap rès l e
d ail
exista n t
soit
en
le
1790,
so it, h défaut do b a il ou dans le cas de l’article V c i-d e s s u s ,
q u a t r e f o i s l A c o n t r i b u t i o n F O N C I E R E de Vau 5 , des objets
dont il s’agit, s a u f à com p ter, m êm e à répéter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(a) A rt. X V . Tontes contestations non définitivement terminées,
seront jugées eu conform ité de la présente.
�( i 5 )
- E ’analyse de ces lois met Lien en .évidence-le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l ’opérer légitimement.
*
t
•
A in si donc nous aurions à traiter deux questions ;
l’une de s a v o ir si le bail du 8 germ inal an 4 est'sujet
à réd u ctio n ; et l’autre d e 'sa vo ir si les Là'ndrièvë ÿ.
sont rècevables : nous nous attacherons principalement
à cette, dernière. Nous ne ferons ressortir; que comme
m oyens de considération les circonstances ¡relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a Æn dei nonrrecevoir cei>.
ta in e , une discussion plus étendue seroit superflue^ u
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r L e 9 'vendémiaire^an ' 6 r, les ‘’Lan drièvèiion t signifié
<|u’ils' requéraient-lit ¡réduction du prixi du :'<bail r du 8
germ inal an 4 , au taux de celui de 178 4, en ;vertu tde
la loi f du 9 fructidor an 5» r i l! 1-> v'ji !i iJ- 'i ' î ' .
’ • Cette réquisition paroîtroit ê tre veriue! dansde/m ois,
3u com p tei\ dé la 'p u b lica tio n de cettei lo i'; parce ’gué
ceLte publication -n’a 'é té faite au département d u 1Puy~
de-Dôme'^ que Ae1 231 fructidor an* 5 .rio;b u b ' -i ;;i
•
’" M ais-il ne' suffisait; pas d’une simple; ré q u is itio n de la
part des fermiers. Elle constitiioitseulemëntrmieideriiande;et une demande n’est pas toujours un droit, invariable
ment acquis. Une demande n’est que le commencement
d’une contestation.
;-
1)1 -
‘
�.
( 16 )
.
P o u r que tout soit réglé , il -faut "entre les fermiers et
lé p ro p riétaire, ou un consentement récip roq u e, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep o ser, ou un jugement qui en tienne lieu. P ou r que
tout soit'certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie
il faut qu’ils le fassent ou par* e u x ’ ou par un fondé- de,
pouvoir:spécial j etm ëm d que l’on donne au propriétaire
copie de' la procuration, parce que les fermiers y con
tractent ùn engagcrttenty celui de payer sur l’ancien bail.
Sans signature ÿlar réquisition peut être désavouée : il n’y.
a rion>deçanstâratji
t
' ;
Ici point de signature de la part des L an d riève, ni d’un
fondé de pouvoir spécial. L?ex!plôit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en vin
tribunal de distijôfci'idans lV k v e ÿ r o n 'h u is s ie r qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte
qitê. Îes-Laaadidè^èrfiiiroient !pu(Yen;moqùer ■impunémen t ,
di l’on ¡¿.véitLVüiilitcles prendre! au m’ot sur lleffet de-leur
réquisitions -à 8 "i l > iuioj 'ï >
ni; , ¡\ r» i¿.ri•rrrt
A u reste il n’y avoit rien.de term idé’en(i-e,les)par,tîesy
lorsqu’à.' ipîirLÏï laulor-dui6 imossidoii an,j6.'iydrei )quoi le
etqit leuivposi‘ti'én‘ji’ti8peotive oit môj0a£nt<de<lai publication;
île cfcUeloL:,nous venons de le dire', leSrLandrièvc avoiei^t
requis la réduction.île 9 vendém iaire aü 6,: lp' citojyeifc
dé -PriiVGiiâc! n>’y[a^oit«-pas adhéré ;’hu contraire', il leur
av6it faitblerr 6'nivôse su iv a n t, commandement de payer
k fe^mme' de' rôboi francs, pour le d e m i- te r m e échu de
lftiJarme’-Siir le pied de 3000 Irancs par an. L e 26 du
moine mois , lçs Landriève l’avoient fait assigner au
tribunal
�( i7 >
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
vo ir prononcer sur la réduction requise par l ’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la lo i
du 6 messidor an 6 , il n’y avoit encore rien de réglé
ni par les parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien form elle.
Elles se trouvoient donc précisém ent dans le cas de
l’article X V . -L’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conform ité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
L an driève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. V I I I) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fui de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c ’est ce que 11’ont pas fait les L an driève : en effet,
au moment de l ’é m is sio n de ceLle l o i , étoient échus les
termes de novem bre 1797 ( ou brumaii-e an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 )-, ces deux termes form oien t,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
. Il est vrai que les L an driève ont offert au citoyen de
Privezac ( au dom icile du citoyen Brun ) , le 21 n iv ô s e
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme écliu
le 11 brum aire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et enfin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
M ais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. IiC p rix du bail
etoit payable au dom icile de ce dernier ; cela est dit dans
c
�.
.
( ï8 } .
.
,
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m ô m es ain si, puisqu’ils sont allés au
dom icile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 p r a i r i a l an 9. L e domicile élu par le citoyen
de P rivezac chez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
Landriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat form el de toucher ( 1 ). Ici rien de tout cela.
2°. Ces offres seraient encore insuffisantes, parce que le
( 1 ) D en izart , verbo o f f r e s , r i . 20, dit : « Les offres doivent
» être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
v personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
» désigné pour la convention. On ne peut pas valablement les
» faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
» convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
» jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déj) cembre 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossure, quoi
» qu’elles eussent été réitérées ù l’audience sur le bureau ( en cause
}> principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les actes
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre, parce que
» cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
n signifier à une partie parviennent sur le champ à scm procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�C T9 )
_
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesL an driève à payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. Les Landriève n’ont rien offert pour cela.
30. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux L andriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P u y-de-D ôm e, le 2 7 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils devoient donc a lo rs deux années q u i, suivant le bail
de 1 7 8 4 , auroient monte à 2,60 0 fra n cs de prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingtdix livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65 o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-term e, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. 11
y auroit donc insuffisance énorme.
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des offres labiales n e libéroicnt pas.
Les tribunaux les jugeoient toujours c o m m e non-avenues,
quand elles iréloiept pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de c o n s ig n a tio n par le débiteur. Dans le
G %
�.
,
/ 20 ]
~
.
nouveau d ro it, même règle (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
- I c i ,■point de consignation par les Landriève ; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
Les choses en étoient en cet état de dénûment absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an g : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même de&
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueu r; il veut très - form ellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ê t r e
D É C L A R É S N O N - R E C E V A B L E S , que dans le m ois qui
suivra la publication de la présente, E.T q u ’ e n p a y a n t
d a n s l e m ê m e m o i s . Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on 11e paye pas aussi dans le m o is, c’en est*
fa it; le fermier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; efe
les tribunaux ri ont qu’a en faire l’application.
'
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an
5.
I l en est de même
de ceu x qui ont f a it des offres et consignations valables et suf
fisa n tes.
'
�(
21
)
^
Que les L andriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs offres du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résülte
qu’il est payé , et qu’il ne souffre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire', il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de rla part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au p rop riétaire, èt il
n’est pas au pou voir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
•
-2°. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé;; la firi d e-n on recevoir étoit encourue ; la justice avoit prononcé la
peine ; les choses 11’étoient plus entières.
30. Suivant la loi du 6 m essidor, c’étoit ici une a ffa ire
d’argent ; les L andriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne l ’ayant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S ’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l ’appel ils seraient
non-recevablcs à purger la demeure : la sentence seroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute dir payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. P ar conséquent le tribunal de R iom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�»
t C 23 )
du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o i t - i l oiYres et consignation ou payement ? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et même après l’appel ,
lie peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut êtr« question ’que du an henè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
•
’4°.' L e citoyen de P riv e za c, en recevant les sommes
offertes en cause d’q p p el, ne les a touchées qu’à bon
.compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit.' Il lui étoit- dû pltis de 12,000 francs , il n’a reçu
q u’èntour j6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
■
0 ‘ 5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tort présenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
:Nous, allons le dém ontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers .juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non reçevables en leurs demandes en ré-r
dnçtion, ‘
: ; ■
>
•
§
II.
C eseroitpour le citoyen de Privezac un grand m alheur,
6i les L andrieve pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui parole bail
du 8 germinal an 4* S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 178 4, ils y auroient l’avantage
�( 23 )
^
Criminel de jouir de ses biens moyennant un prix moindre
que celui qu’ils ont p^yé au sieur de T illy .
En effet, dans l’exactitude des faits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Cliantagret et de Cornassatj est
celui s t i p u l é au bail de germ inal an 4 .' L e bail de 1 7 8 4
et antres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auraient dû m arquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en étoient que plus m al soignés. Par cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l ’être. D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans en fa ir e m e n tio n dans les b a u x , des sommes con^
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent b esoin ), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paraissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièm es
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1 7 8 4 a été passé
pour commencer seulement en 1 7 8 8 . Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà ex is tan s.
Si aujourd’hui le citoyen de P rivezac étoit r é d u it au prix
du bail de 178 4 , au prix ostensible de i,3 ° ° francs, il
s'ensuivrait qu’il n’auroit pas le p rix réel. Il n’aurait
aucune ressource pour se faire faire raison du p rix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’il y aurait
�.
.
.
.
,
(
2
4
)
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le pi’opriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l ’auroit pas.
Q u’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
tain e, autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, i l est dit dans ce b a il, i° . que le citoyen de
P r iv e z a c a ffe rm e à p r ix d'argent. E n F ran ce, quand en
l’an 4 on disoit argent, p e r s o n n e ne se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier - monnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin' ces m aux pour l’avenir.
20. Ce bail exprim e encoi*e que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des espèces métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stipulés en écus, ne
seroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, etc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées; cet usage donne
toujours la mesure de l’ intention des parties. O l-, une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�.
(
_
’ um éraire on vouloit dire é c u s , et non assignats ou
n
m andats , se trouve dans la relation du contrôle du
bail de germinal an 4 , faite au bureau de M o n taig u t,
le 12 germinal. Dans cette relation, 011 voit que le con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100 francs en mandats,
et 5 francs en num éraire ( 1 ). Delà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme du nu
méraire ; il s’ensuit que l ’on ne considéroit comme numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant de Français.
30. L e bail du 8 germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistoient en six
bœufs arans, n e u f v a c h e s m ères, un taureau, une je u n e
vache et trois suivans; total, vin gt bêtes à co rn e s. E h Lien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme de
5z 6 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour n euf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû com pter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du bail , tandis qu’ il ne recevrait que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
serait én o rm e; elle serait de 15,300 francs: elle vaut
(i) Enrcgislró à M onlaigut le 12 germinai an /{. Kecu 10Zfraitcs
en mandatile 100 Jvancs et 5 fra n cs de numéuaiue. Signe Pietre.
'
D
�( 25 )
b ien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les Landriève aient fait une fortune de 8 0 ,0 0 0 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils d evroien t être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en numéraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le ti'ibunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
q u’a dû éprouver celui de l’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l'affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un moyen infaillible pour forcer les Landriève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’auroient plus eu la ferme des deux domaines
en question.
G OURBEYRE.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d ’appel,— A n 10,
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1784-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0234
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
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Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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278270f648bcc51e287e2073f84209b6
PDF Text
Text
4g i
t r ib u n a l
MÉMOIRE
EN
d ’a p p e l
fiéantàRiom.
RÉPONSE,
P O U R
, P i e r r e et G i l b e r t L A N D R IE V E ,
père et fils, cultivateurs habitans du lieu de
Chantagret, commune du P eyrou ze, appelans
d’un jugement rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom , le 3 floréal an 9 ,
C h a rle s
et demandeurs en opposition ;
C O N T R E
,
B R U N E L D E P R I V E Z A C pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de Besset, département de l'Allier, intimé et
défendeur en opposition.
'J a c q u e s
,
J a c q u e s Brunel de Privezac a affermé, le 8 germinal
an 4 , deux domaines aux appelans le prix de ce bail
A
�( a )
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784; et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
année, pendant la durée du bail.
Les fermiers réclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lois, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se llattent au contraire de démontrer que
sa’ prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
Le 5 août 1784, un sieur T iïly , propriétaire de deux
domaines appelés de Gliantagret et de Cornassat, situés
�( 3 )
commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne devoient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de survine , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
en vertu de la loi JEmptorem j mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût éclioir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudrait abuser, ne peut être
d’aucune importance*, elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce métallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-loi’s concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. VI^ régla
A a
�(.4 )
que tous les baux qui avoient été passas entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4,
seraient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à prix d’ar
gent, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la réduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi
nations de monnoie qui y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6,
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils entendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Le 16 nivôse an 6, il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i , 5oo fr. en numéraire, pour
le premier terme écliu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers, pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent 11 faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac, le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commandementi total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du déj>artement du Puy-de-Dôme, pour voir
dire que conformément aux art. V I et IX de la loi du
6 fructidor an 5, et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, h celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
Un premier jugement par défaut, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
La cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiers au tribunal
d’arrondissement de cette commune, pour procéder sur
cette opposition.
La cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire qui, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 germinal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nopobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�demandée, en ne faisantpointles offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
On prétend que l’article V III de la loi du 6 messidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, les fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
. les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. Les appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience de la somme de 6,362 francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres, renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
donne aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à bon compte
,
�( 7 ).
. .
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réformer , il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t, quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui a levé le maximum ,
» seront réduits au prix du bail précédent , en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» môme article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an .5 , dit « q u e ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
>3 du 4 nivôse an 3 , portant suppression du maxim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 1790. »
L ’article V II de la même loi veut « que l’on corn» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
» la valeur des dîmes et autres charges supprimées par
A 4
^
�(S )
la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
tenus les fermiers, ainsi que les sommes q u i, promises ,
soit à titre de pot de vin, soit par contre-le tires, soit
de tout autre manière, seront reconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte ce que les
» baux, soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
j) dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article V I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent -, passés entre le I e r . janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex» pressions et dénominations de monnoie qui y aient
» été employées. »
L ’article V III veut «que les fermiers qui provoque» roient la réduction du prix de leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - recevables, que dans le
» mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au pi-opriétaire ? ou
»
»
»
»
»
�( 9 )
»
»
»
»
»
»
»
au receveur du domaine, suivant les cas, soit le montant des termes échus.suivant le montant du bail de
1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’article V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
objets dont il s’agit., sauf à compter et parfaire , ou
même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation déiinitive. »
Telle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cm devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lo is , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la lôi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans, et faire obstacle ù leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduire.
Le bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement -à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
La dénomination & argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6, ne
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 -, c’est-à-dire, antérieure à la loi
du 6 messidor.
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles V I et IX de cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes échus.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du prix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
Vouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet, la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes échus d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de réduire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux fermiers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les conti’aignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du pi'ix du
bail antérieur, offroient tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin; il étoit payable en deux
termes égaux, l’un au jour de N o è l, le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 janvier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers ù payer 3,000 francs par année, pour un bail
�( 12 )
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction, dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V III de la loi du 6 messidor.
M ais, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente 11’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au m om ent des offres les fei’miers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
Mais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas offert ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres j si la discus
sion se prolongeoit; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an y , il etoit échu
d’autres termes , l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condarimation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et rien ne les obligeoit à faire de nouvelles offres.
Il est plus difficile d’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du a i nivôse an 6,
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à domicile, il suffisoit de les réitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé ;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
meilleur moyen d elà diminuer, ou d elà détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf année^, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T illy , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens , s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste valeur, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intimé , au fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
redevables à la proposer. Il observe judicieusement que
la lin de non-recevoir doit être examinée la première,
�parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a été signifiée dans un temps utile; mais, sui
vant lu i, une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction. Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
Un des grands griefs contre cette demande, c’est que
l’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pouvoir ;• l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu, et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
L ’intimé ajoute, qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, lorsqu’à paru la loi du 6 messidor an 6 ; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deDôm e, il n’y avoit encore rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r, dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’aifaire doit
être jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus ; et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( i5 )
Il sê présente deux réponses péremptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelans eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement à la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi dit, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoîe qui y aient été em
ployées; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression numéraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes éclius ; il suffiroit
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor, en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
n’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
■est forcé d’en convenir. M ais, d it - il, ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni h mon domicile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen Brun, et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’ap pu ie , ce ne seroit
point à lui à proposer une semblable objetion. Le citoyen
de Privezac a changé cinq ou six fois de domicile pendant
�(.*)
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l ’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à'son domicile. L ’article X V du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine, seront conduits à Riom ou à Clerm ont,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000 francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci-dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’Aveyron, que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron, en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
Brun, cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les ofïi’cs le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de Brunei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les offres valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�f 17 3
io j
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition foi’mée au jugement du tribunal civil du
27 tliermidor an 7, le citoyen Brunei a assigné les appelans au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement: mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A veyro n , il élit
domicile dans la commune de Chauzy, département
d’Allier.
Gomment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou à Clcrmont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d ro it-il que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A veyro n , tantôt du
département d’A llie r, suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un mot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement; élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun; c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre, qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
4M
1
|
,
�( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
On ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
X^es appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e, dès qu’il a stipulé le
payement en numéraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a dû compter sur 27,000 francs, et qu’il ne touchcroit
que n , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, scroit énorme, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais les Landriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeraient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. La loi a prononcé,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
Par conseil, P A G E S ( de Riom ) , anc. jurisconsulte.
B A Y L E ,
< *>
a«
(o,
avoué,
f"
A RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
/S4 ^
v
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Fermier - qui, en vertu de la loi du 9 fructidor an 5, a demandé la réduction du prix de son bail, lorsqu’il n’a pas été statué sur cette demande avant la publication de la loi du 6 messidor an 6, a-t-il dû faire les offres exigées par l’article 8 de cette dernière loi ? peut-on lui appliquer les dispositions de l’article 15 qui veut que toute contestation non définitivement terminée soit jugée en conformité de ce que cette loi prévoit ? ou bien, le droit de réduction était-il acquis au fermier par le simple effet de sa demande ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1796-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1417
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0234
BCU_Factums_M0233
BCU_Factums_G1416
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53231/BCU_Factums_G1417.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53732/BCU_Factums_M0233.pdf
71020f039f7e2494bb57ca332f6e629a
PDF Text
Text
TRIBUNAL
MEMOIRE
EN
d ’a p p e l
,
séan tàR iom .
RÉPONSE,
POUR
et G i l b e r t L A N D RIE V E ,
père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de
C h a r le s , P ie rr e
C h a n t a g r e t , commune d u P e y r o u z e , appelans
d ’un jugem ent rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom, le 3 floréal an
et demandeurs en opposition ;
9,
C O N T R E
J A c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de B esset, département de l ' a l l i e r et
défendeur en opposition.
J a c q u e s Brunel de Privezac a afferme, le 8 germinal
an 4 deux domaines aux appelans , le prix de ce bail
A
�( a ) ‘
^
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784', et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
annee, pendant la durée du bail.
Les fermiers reclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lo is, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se flattent au contraire de démontrer que
sa prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
L e 5 août 1784, un sieur T i ll y , propriétaire de deux,
domaines appelés de Chantagret et de Cornassat ; situéa
�( 3 )
#
Commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne dey oient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de surv in e , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
. en vertu de la loi JEmptorem ; mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût échoir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
■prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudroit abuser, ne peut être
d’aucune importance; elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce m étallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-lors concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. V I } régla
A a
�( 4 )
.
tpae tous les baux qui avoient été passés entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4?
seroient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à pi'ix d’ar
gen t, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la i-éduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi-,
nations de monnoie qu i y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils enlendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Iæ 16 nivôse an 6 , il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i,5oo fr. en num éraire, pour
le premier terme échu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers , pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent à faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac , le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commande
ment ; total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
_
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du département du Puy-de-D ôm e, pour voir
dire que conformément aux art. V I et I X de la loi du
6 fructidor an 5 , et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, à celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
U n premier jugement par d éfau t, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
L a cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiei's au tribunal
d’arrondissement de cette com mune, pour procéder sur
cette opposition.
L a cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire q u i, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 gei’minal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nonobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�(
6
)
demandée, enne faisant poiiitles
offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
O n prétend que l’article V III de la loi du 6 mfessidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, le's fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies , ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. lies appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience delà somme de 6,362francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres , renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac ; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
dorme aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à' bon compte
,
•
-
.
�C7 )
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réform er, il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t , quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui ¿1 levé le m axim um ,
» seront réduits au prix du bail précéden t, en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» même article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790 ; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an 5 , dit « que ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
» du 4 nivôse an 3 , portant suppression du m axim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 179°* a
L ’article V II de la même loi veut « que l’on com
» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
a la valeur des dîmes et autres charges supprimées pair
'’
A 4
�.
.
( 8 )
■
.
» la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
»
»
»
»
tenus les ferm iers, ainsi que les sommes q u i, promises,
soit à titre de pot de v in , soit par contre-lettres, soit
de tout autre manière, seront inconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte « qiie les
» b au x , soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
a dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article Y I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
'
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent, passés entre le I er. janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex
» pressions et dénominations de monnoie q u i y aient
» été employées. »
L ’article V III veut « que les fermiers qui provoque
» roient la réduction du prix de Leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - rccevables , que clans le
55 mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au propriétaire } ou
�( 9 )
_
» au receveur du domaine , suivant les-cas, soit le mon
» tant des termes échus suivant le montant du bail de
» 1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’arti» cle V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
» objets dont il s’a g it, sauf à compter et parfaire , ou
» même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation dé
» iinitive. »
T elle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cru devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lois , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la loi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans , et faire obstacle à leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduii’e.
L e bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
lia dénomination argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6 , 11e
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre, de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 ', c’est-à-dire, antérieure à la loi
du. 6 messidor.
“
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles Y I et IX cle cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes éclius.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du pi'ix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
V ouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet , la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes éclius d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de_ réd uire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux ferm iers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les contraignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du prix du
bail antérieur, offroicnt tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin ; il étoit payable en deux
termes égau x, l’un au jour de Noël , le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 jan vier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers à payer 3,000 francs par année, pour un bail
�.
.
^ 12 ) .
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction , dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V H I de la loi du 6 messidor.
M a is, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente n’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au moment des offres les fermiers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
M ais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas oiï’e rt ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres ; si la discus
sion se prolongeoit ; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an 7 , il étoit échu
d’autres termes, l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condamnation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et, rien ne les obligeoit à faire de nouvelles olires.
Il est plus difficile d ’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du 21 nivôse a n 6 j
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir ; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à dom icile, il suffisoit de les reitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
''meilleur moyen d e là dim inuer, ou d e là détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf années, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T i ll y , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens, s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste va le u r, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intim é, aii fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
l'ccevables ¿1 la proposer. Il observe judicieusement que
fin de non-recevoir doit être examinée lu prem ière,
�( H )
parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a é.té signifiée dans un temps utile ; mais, sui
vant l u i , une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction, Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
U n des grands griefs contre cette demande, c’est que
l ’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pou voir; l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu , et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de- „
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
. L ’intimé ajoute qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, loi'squ’a paru la loi du 6 messidor an 6; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deD ôm e, il n’y avoit encoi'e rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r , dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’ail’aire doit
ctre jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus \ et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( x5 )
Il se présente deux réponses péi^emptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelons eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement î\ la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi d it, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoie qui y aient été em
ployées ; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression num éraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes échus ; il suffirait
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor , en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
ü’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit. échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
est forcé d’en convenir. M ais, d i t - i l , ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni à mon dom icile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen B ru n , et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’appuie, ce ne seroit
point i\ lui à proposer une semblable objetiou. L e citoyen
de Privezac a changé cinq ou six lois de domicile pendant
�'
,
.
(i6)
.
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à son domicile. L ’article X V - du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine , seront conduits à Riom ou à C lerm on t,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci - dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’A veyron , que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron , en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
B run , cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les offres le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de B runei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les ofires valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�C1 7 )
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition formée au jugement du tribunal civil du
27 thermidor an 7 , le citoyen Brunei a assigné les appe
lons au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement : mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A v e y ro n , il élit
domicile dans la commune de Cliauzy , département
d’A llier.
.
Comment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou ù Clerm ont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d r o i t - i l que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A v e y r o n , tantôt du
département d’A llie r , suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un m ot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement-, élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun-, c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre , qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
�,
( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
O n ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
Les appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l ’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e , dès qu’il a stipulé le
payement en num éraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a du compter sur 27,000 francs , et qu’il ne toucheroit
que i i , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, seroit énorm e, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais Icsljandriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeroient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. L a loi a prononcé ,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
s
Par conseil, PAGES ( de Riom ), anc. jurisconsulte.
BAY L E ,
avoué.
A R io m , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1784-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0233
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0234
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53732/BCU_Factums_M0233.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem