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c749493710e4eba6066788165b83dc0b
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aisons s a v o i r : Q a e i u
S — A u d i e n c e publi ~
f l i é ve ni n, p r é s i d e n t ,
a
Vernière-Pbilibée,
L L V iX iV / .
i u d i t e u r , tous t n e m -
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r o c u r e u r g é né r a l . —
» ro p r i é t a i r e , d e m e U '
en v e r t u d’ un a r r ê t é
Uabitans des vi l l a ge s
t ib b e s - S o u b r a n n e s et
, tous lesdits v i l l a g e s
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ès-monlagne, appe2 de l’ ar r ondi s s e me nt
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3 s e p t e mb r e s u i va n t ,
c^i'ou’
I l d u C u n t a l , en date
art,
r a n t en l a v i l l e d ’ A n (i a v o u é , d’ aut r o part,
n e , p r o p r i é t a i r e , dei i p p o l y t e L a C o n t , son
îie de S a i n t - E l i c n n c ,
/ .
XT *LMil-
)ine repr é s e nt a nt , en
let 1 8 2 6 , les li abi l ans
He Si E l i e n n e , le loul
, du 2 a v r i l l#2<),
r a r r ê t é du consei l de
T a i l l i a u d , son a v o u é ,
/;yssct. — E l M Josephiparanl par M e Lafont.
sou m a ri, de lui nutot
/eure , Jean Dubois, Jac*
enfans mineurs, Jeanne
"Vltivaleurs, demeurant
aient du ti ibunal civil
f
�L o u i s - p h i l i p p e , roi des Français, à tous ceux qui ce» présentes verront, salut, faisons savoir : Que la
cour royale séant à R io m , département du Puy-de-Dôme, a rendu l’arrêt suivant : — Audience publi
que de la seconde cbambre civile, du vendredi 10 juin i 8 3 i ; — Siégeatis MM. Thévenin, président,
chevalier de TOrdre royal de la Légion-d'Honneur, G e ne ix , Portai de S l-V id a l, Vernière-Philibée,
Mandosse de Nevrezé, Calemard du Genestoux, conseillers, rt VTeriiy, conseiller-auditeur, tous uienjbres de ladite cb am b re.— Assistant M. Daniel, substitut du parquet, pour M. le procureur général.—
Entre M. Jean-François Fonteilles, maire de la commune de Riom ès-montagne, propriétaire, demeu
rant au lieu des Mazets, susdite commune de Riom, agissant comme représentant, en vertu d’ un arrêté
du conseil de préfecture du département du C antal, en date du 2<} juillet 1826, les babitans des villages
de Châteauneuf-llaut, Châteauneuf-Bas, ou les Moulins, Soigeat, Embesse, les Ribbes-Soubrannes et
Soutrannes, les Planchettes, Lasiléol et B altes, Ponschez Mouguerre e tL a co u slry , tous lesdits villages
dépendant de la ci-dcvant commune de Châteauneuf et aujourd’ hui de celle Riom ès-montagne, appe
lant d’ un jugement rendu contradictoirement, par le tribunal de première instance de l’arrondissement
de Mauriac, département du Cautal, le a avril 1829, aux fins des exploits des 4 et 8 septembre suivant ,
autorisé à suivre le susdit a p p e l, par arrêté du conseil de préfecture du département du C antal, eu date
du i 5 janvier i 8 3 l , comparant par M* Jean-Pierre Tailliand , son avoué, d’ une part,
Et M. Siméon Mignot, chevalier de la Légion-d’IIonneur, propriétaire, demeurant en la ville d’ Annonay, département de l’ Ardèche, intim é, comparant par M e Etienne V ey sset, son avoué, d’autre part,
— Et M. Joseph-Gabricl-Edouard Dubois de Saint-Etienne, comte de Saint-Etienne, propriétaire, de
meurant en la commune de Saint-Etienne, intim é, comparant par M* François-Hippolyte Lafont, son
avoué, aussi d’autre part. — Entre M. Jean-François S a u v a t , maire d e là commune de Saint-Etienne,
propriétaire, demeurant au lieu de Caclicbcure, commune de Saint-Etienne, comme représentant, ru
vertu d ’ un arrêté du conseil de préfecture du département du C an ta l, du 2y juillet 18 2 6 , lus babilans
et communautés des villages de Vousseyres, du Mazou, du Partus et du b.iurg di- Si Etienne, le loul
commune de S l-E licn n e , appelant du susdit jugement du tribunal civil de Mauriac, du 2 avril 1 82g, eux
fins des exploits des 8 cl 1 1 septembre s u iv a n t, autorisé à suivre ledit appel , par arrêté du conseil de
préfecture du département du Cantal, du i 5 janvier i 8 3 i, comparant aussi par Mc Tailliand, son avoué,
d’une p a r t ,
. Et M. Siméon Mignot, propriétaire à Annonay, intim é, comparant par M e Veysset.— Et M JosephGabriel-Edouard Dubois, de St-Etienne, propriétaire à S t-Etienne, intimé, comparant par M 1" Lafont.
;— Entre Catherine Dubois, veuve Chavinier, Anne Mosnier et Jean Boulin, sou mari, de lui autoFrançois Mosnier, Jean et Jacques Dubois frères, Anne Mosnier, fille majeure, Jean Dubois, Jacques Raboisson, Louis Dubois, ve u f de Claudine Raboisson, tuteur de leurs eufans mineurs, Jeanne
Tis ee,
D u rif, fille majeure, Antoine Dubois cl Pierre Raboisson, tous propriétaires-cultivaleurs, demeurant
au lieu de M oul-dc-Bcllicr commune do Saint-Etienne, appelant du susdit jugement du tribunal civil
�de M au riac, du 2 avril 1829, suivant exploit du 22 septembre de la même année, comparant par
1.1e Autoine S a v a rin , leur avoué.
Et M . Siméon M ignot, propriétaire à Annonay, intimé, comparant par M e Veyssct.— Entre sieur
Siuiéou Mignot, propriétaire à Aunonay, appelant dudit jugement rendu par le tribunal civil de M au
riac, le 2 avril 18 2 9 , aux fins et exploits des 25 , 28, 29, 3 o septembre, 1 er et 9 octobre de la même
année, et 8 juin i 83 o , intimé, sur les appels incidens ci-après, et demandeur en garantie, comparant
par i\le Vcyssct. — Et M . Burnaid de Lassalle, propriétaire, demeurant au hameau de Clravinier, com
mune de Cros, intimé et appelant incidemment, du susdit jugement, comparant par M c Pierre-IIippol y le Allary, son avoué. — Et M . Marc-Chaj les-Edouard Fonteillcs, capitaine de cavalerie, propriétaire
à Riom ès-montagne, héritier de M . Louis Vigier, avocat, sieur Pierre-CIaude Danglaid, propriétaire,
demeurant au lieu de Sidour, commune de Riom-ès-Montagne; sieur Antoine Chevalier Dulau, direc
teur des postes, demeurant à A urillac; M. Sauvat, maire de la commune de Saint-Etienne, représentunt les habitans du village de C lavière, même commune de St-Etienne, en vertu d'un arrêté du con
seil de préfecture du département du Cantal , du 29 juillet 1826, dame Anne Choriol, veuve de Pierre
Fonteillcs, cohéritièie de ceux deseseufans décédés après leur père, Marie-Jeanne Fonteilles, Antoine
Fonleilles, Catherine Fonteilles, Jean Fonteilles, tous propriétaires au lieu de la Cousty, commune de
lîiorn-ès-Montagne, tous hér itiers de Pierre Fonleilles, leur père, et par représentation de Jean F ouitriIles, lenraïeul, et d’autre Jean Fonleilles, l e u r bisaïeul, tous intimés et incidemment appelans du
jugement susdatô, comparant par M e Jean-Pierre Tailhand, leur avoué.
lit les administrateurs de l’hospice de Saler», intimés, comparant par M e Antoine Gayte-L arigau d ie,
lcui avoué. — Et M . Joseph-Gabriel-Edouaid Dubois, de Saint-Etienne, intimé cl défendeur en garjn tiu , comparant par M e Liiont. — Et enfin, entre M . Joscph-Gabriel-Edouard Dubois de SaintEtienne, propriétaire à Saint-Elicnue, appelant du susdit jugement, du 2 avril »829, suivant exploits
des 29 a v r il, 10 et t8 mai i 83 o , comparant par M c Lafont. — Et M . Bernard de Lassallcs, intimé,
comparant par M c Allary. — El sieur M a r c - C h a i les Edouard Fonteillcs, héritier de M. V ig ier; sieur
Pierre-CIaude Danglard ; sieur Antoine Chevalier D nfau; M. Sau va t, maire de Saint-Etienne, repré
sentant le village de C lavicre; Anne Choriol, veuve de Pierre Fonleilles; Marie-Jeanne, Antoine, Ca1 lie* inc et Jean Fonteilles, tous intimés, comparant par M c Tailhand.
M c Tailhand, avoué du sieur Ponteille*,
rnaitc, de la commune de Riom-ès-Montagne, agissant
rumine représentant plusieurs villages, appelant, a conclu à ce qu’ il plaise A la cour, dire mal jugé,
bien appelé, émondant, garder cl maintenir les appelants d a n s la jouissance qu’ ils ont toujours en des
différais droits d’ usage , chauffage, cl autres énoncés en leur litres et caractérisés par Irur possession
dans la foiêl d’Algprc* el champs d’Algèics, condamner le sieur Mignot en 3 ,000 francs de dommagesintérêts envers le« appelans; condamner les intimés aux dépens des causes principales et d’apptl , et
ordonner la rostitut on de l ’ amende.
�Subsidiairement et.en cas ele difficulté, admettre avant faire droit, les appelants à prouver tant pnr
litres que par témoins, qu’ils ont constamment joui des droits d’ usage dont il s’agit dans la forêl d’ A lgères, pendant les 3 o années avant la demande du sieur Mignot, au vu cl si'i et du consentement soil de
l ’administration, soit des sieurs de Saint-Etienne, dépens en ce dernier cas réservés.
M° Tailliand, avoué du maire de Saint-Etienne, agissant dans l’intérêt des villages sus-énoncés, a
conclu à ce qu’ il plaise à la cour, dire mal jugé par le jugement dont est appel; bien appelé, ¿mandan!,
déclarer le sieur Mignot non recevablc dans toutes ses demandes; guider el maintenir les liabitans des v il
lages de Part us, de Mazou, de Vousseyre et du bourg de Saint-Etienne, dans la possession et jouissance
des droits d’usage que leur confèrent leurs titres dans le bois d’ Algères; condamner le sieur Mignot à
3,000 fr. de dommages-intérêls ; condamner en outre les intimés aux dépens des causes principales et
d'appel, et ordonner la restitution de l’amende.— Subsidiairement el en cas de difficulté, douner acle
aux appelans de ce qu’ils offrent de prouver, tant par titres que par témoins, que de tout temps et an
cienneté, et notamment depuis plus de 3 o ans avant la demande du sieur Mignot ils ont joui des droits
d’usage dont il s’agit, paisiblement et publiquement, avec vû et sù et du consentement soit de3 proprié
taires, soil de l’autorilé administrative; dépens en ce dernier, cas réservés.
M ‘ S a v a rin , pour les liabitans de Monlbellier, a conclu à ce qu’ il plaise à la cour, dire qu’ il a été mal
jugé par le jugement dont est appel, en ce qu’il a déclaré les appelans non-reccvables dans leur interven
tion, bien appelé; émendant et faisant ee que les premiers juges auraient dû faire les recevoir itilervenans dans la cause, et statuant au fond et réformant, les garder et maintenir en leur nom personnel, dans
la propriété et possession du bail dont il s’agit; ordonner en conséquence que la délimitation de la forêt
d’ Algères avec le bois D an g eyrc, ordonnée par le jugement dont est appel, aura lieu contradictoirement
entre les appelans et le sieur Mignot.
Et attendu que le sieur Sau va t, maire de la commune de.Sainl-Etienne est en cause, donner acle aux
appelans de ce que par ces présentes, i l s déclarent interjotler appel cvntre ledit sieur Sauvat, en sa dite
jugement du a avril 1 8 2 9 , cl ce en tant que besoin serait; en conséquence réformant à sou
q u a l it é , du
égard , dire que les appelans seront'gardé» et maintenus en leur 110111 personnel, ui singuli dans les droits
donl
il s’agit; déclarer commun avec lui l’arrêt à intervenir, e l condamner les intimés aux dépens c l ui-
donner la restitution de 1 amende.
M c V.-ysset, p o u r le sieur Mignot, a conclu à ce qu’ il plaise à la cour, dire qu’ il a été mal jugé par le
jugement du tribunal civil de Mauriac, du a avril 1829, eu ce qui concerne les s i e u r s de la Salle, D anglard, V i g i e r , Chevalier D ufau, les héritiers Fonteilles de Lacously, et les habitan* du village do Clôvierc, émendant et faisant ce que les premiers juges auraient dû faire, les déclarer purement et simple
ment non-rccevablos dans leurs demandes et prétentions relatives aux droits d usago dans les foret*
dont est question, ou en tous cas les eu débouter, les c o n d a m n e r aux dépens des causes principales il
d’appel; el ordonner que l’amende sera rendue.
�Dire qu’ il a été bien jugé par le susrllt jugement quant aux chefs critiqués par les habitant) du village
<le Montbellier ut sin g u li, et par les maires des communes de Saiut-Etienne et Riom-ès-M ontagne,
comme représentant les villages ci-dessus désignés, ordonner que les chefs dudit jugement sor
tiront leur plein et entier effet, et condamner les appelan9 en l’amende et aux dépens de la cause d’ap
pel. __Subsidiairement et en cas d’admission de quelques-uns desdits droits d’ usage, dire aussi qu’il a
été mal jugé par le jugement susdaté, au chef qui a prononcé la nullité de la clause additionnelle ins
crite au cahier des charges , le 9 avril 18 2 5 , émendant, ordonner que le prix de l’adjudication des forêts
soumises auxdits droits d’usage, sera diminué dans la proportion des droits adjugés, et ce par experts
convenus ou nommés d’office, déclarer l’arrêt commun avec e u x , autoriser en outre le sieur Mignot à se
retenir en outre sur le prix réduit de son adjudication tous les frais qui seront par lui faits, ensemble
tous les frais qui ont été ou qui seront mis à sa charge respectivement aux usagers.
Plus subsidiairement encore dire mal jugé au chef relatif à la garantie, émendant condamner le sieur
de Saint-Etienne à garantir et indemniser le sieur Mignot de la non-exécution de la clause additionnelle
par lui insérée, en lui remboursant la valeur des droits d’ usage en principal, intérêts et frais, le con
damner en outre à le garantir de toutes condamnations de dépens et enfin le condamner en tous les frais
à son égard, et ordonner que l’amende, consignée sur cet appel, sera rendue.
M° Lafont, pour le sieur de S aint-Etienne, a conclu à ce qu’il plaise à la cour donner acte au sieur
de Saint-Etienne de ce qu’il a interjette appel dans l’intérêt du fond de la cause et pour qu’ on ne lui im
putât pas d’avoir laissé périr les droits soit do la succession bénéficiaire, soit ceux qui pouvaient lui ap
partenir, lui donner acte également de ce que à l'égard des usagers ou prétendus tels, il adhère aux con-L
clusions du sieur Mignot pour, par ledit sieur Mignot, user de son appel comme bon lui semblera à l’é
gard des autres parties.
Déclarer ladite demande en garantie non-recevable, condamner soit le sieur Mignot, soit les parties
qui succomberont aux dépens de lu cause d’appel et ordonner la restitution de l ’amende. — Mc A llary,
avoué du sieur Bernard , cointe de Lyssallc, a conclu à ce qu’ il plaise à la cour, en ce qui touche l’appel
principal, dire bien ju g e , evec amende et depenB.— En ce qui touche l’appel incident interjeté par le
sieur de Lassalle, dire qu il a été mal jugé par le jugement dont est appel en ce qu’ il n’a point adjugé de
dommages-intérêts au sieur de Lassalle pour tout le temps de la privation do son droit d’ usage, émendant
et faisant ce que les premiers jugc3 auraient i{û faire, condamner le sieur Mignot à payer la somme de
quatre mille francs, à titre de doinmagps-intéiè{s, audit sieur de Lassale, aux dépens laits sur l’appel in
cident à la restitution de l'amende consignée sur ch| appel«
Subsidiairement et eu cas de difficulté, ordonner que par experts convenus ou nommés d’office, l e lendnc du droit d'usage dont il s’agit sera déterminée et Jcs dommages éprouves, appréciés, pour, sur
leur rapport, Être statué ce qu’ il appartiendra, dépens en ce cas léservés.
M* Tailhand, pour Ica sieurs Fonteilles, Danglard, Chcvalicr-Dufau et le maire des liabjtans
�de Clavière» a conclu à ce qu'il plaise à la cour, en ce qui touche l ’appel principal, confirmer ledit ju
gement avec amende et dépens; et, statuant sur l’appel incident, dire qu’ il a été mal jugé quant aux
dommages-intérêts, par le jugement dont est appel, bien appelé, émendant, condamner les sieurs Mignot
et Dubois de Saint-Etienne, solidairement, en deux mille francs de dommages-intérêts, envers chacun
des susnommés, si mieux n’aime la cour ordonner que l ’appréciation desdits dommages-intérêts, sera
faite par experts convenus ou nommés d’oBice en la manière ordinaire; condamner dati9 tous les cas lesdits sieurs Mignot et de Saint-Etienne, à l’amende sur l’appel incident et a u x dépens.
Et eu ce qui touche le sieur C hevalier-Dufau, condamner le sieur Mignot à 1200 francs de dommagesintérêts, envers lu i, à raison du préjudice qu’il a éprouvé depuis le jugement dont est appel, par suite
de la privation du bois nécessaire à l ’ usage et chauffage de son domaine de Clavière. — Subsidiairement
ordonner que les dommages-intérêts dont il s’agit seront estimés par experts. Et dans tous les cas, con
damner les appelaus aux dépens à son égard. — M* Tailhand, pour la veuve Fonteilles et autres, a con
clu à ce qu’il plaise à la cour, eu ce qui touche l’appel principal, dire bien jugé avec amende et dépens.
En ce qui touche l’appel incident, dire qu’il a été mal jugé, quant aux dommages-intérêts par le ju
gement dont est appel; bien appelé, émendaut, condamner les sieurs Mignot et de Saint-Etienne soli
dairement , à 2,000 francs de dommages-intérêts envers les héritiers Fonteilles; les condamner en ontie
à l’amende sur l’appel incident et aux dépens.— Subsidiairement ordonner que les d o m m a g e s - i n t é r ê t s
dont il s’agit, seront estimés par experts convenus ou nommés d’office ; condamner dans tous les cas les
sieurs Mignot et de Saint-Etienne aux dépens. — M e Larigaudie, pour les administrateurs de l’hospiciî
de Salers, a conclu à ce qu’il plaise à la cour dire que par les motifs exprimés au jugement dont est ap
pel il a été bien ju gé , mal et sans cause appelé, ordonner que ce dont est appel sortira son plein et entier
effet, et condamner l'appelant en l’amende et aux dépens.
P O IN T D E F A I T . — L e sieur Gaspard Dubois de Saint-Etienne, dont les biens ont etc séquestres
pendant le cours de la révolution , a laissé pour lui succéder, deux fils , les sieurs Joseph-Gabriël-Edouard
D u b o is
de St-Etienne, et Ignace-JIippoly te Dubois de St-Elienne, lesquels n’ont accepté sa snccession que
sous bénéfice d’ inventaire. Ce n’est que par suite de la loi du 5 décembre i 8 i 4 , que le sieur de St-Elienne
est redevenu propriétaire de diverses forets dont I état l’avait dépouillé et qui n’avaient pas encore élu
Vendues. — Le a i août 18 1 9 , sur la demande des héritiers bénéficiaires du sieur de Saint-Etienne père,
tendante à ce qu’ ils fussent autorisés a laire procéder à la vente des biens immeubles dépendant de ladite
succession, il intervint au tribunal de première instance de M auriac, un jugement qui oiduiuia avant
faire droit, que les biens immeubles provenant de ladite süccession seraient v u s , visités et estimés par
experts. Cette opération a été faite ainsi qu’ il résulte d’ un rapport clos le 3 o juin 1 8 2 0 , q u i a été homo
logué par autre jugement du 29 janvier 18 2 2 , lequel jugement ordonne en nieme temps que la vente et
adjudication desdits immeubles sera poursuivie et consommée devant Me M aurct, notaire ù Mauriac.
Pendant 1 opération des experts, le 6ieur Ignacc-Dypolitc Dubois de S l- £ lj e m jC est aussi déccdé, et
�le sieur Joseph-Gabriel-Edouard Dubois de S t-E lic n n e, son frk re , n’a accepté sa succession que sous
bénéfice d’inventaire. — Ce dernier se prétendant créancier des successions de son père et de son frère ,
ne crut pas devoir poursuivre lui-même la vente et adjudication desdits immeubles. Ces poursuites
furent dirigées par M c Rig al, notaire, qui avait été nommé curateur auxdites successions, par jugement
du 7 février de la même année 1822. — Pour parvenir à celte adjudication , on déposa, le a 5 mars 1822,
un cahier des charges, dans lequel, après avoir énuméré les immeubles à vendre, d'après les indica
tions portées au rapport des experts, on imposa aux adjudicataires, entr’autres conditions, celle de
souffrir toutes les servitudes p a s s i v e s dont se trouvaient grevés les immeubles, sans, par e u x , pouvoir
prétendre à aucune diminution de p r i x , ni exercer aucune demande en recours et garantie pour raison
de dégradations, défaut de mesure et quotité, ou en raison desdilcs servitudes, ni aous aucun autre
prétexte quelconque, n’entendant, est-il dit, le sieur de Sl-Etienne vendre lus immeubles que dan*
l’état où ils se trouvent.
Pendant la durée de ces poursuites, toutes ou presque toutes les pat tics qui figurent dans la cause
comme îéclamans des droits d’ usage daus les forêts provenant de la succession du sieur Saint-Etienne
père, se présentèrent devant M '.M auret, notaire, et consignèrent sur la minute du cahier des charges,
différens dires, desquels il résulte qu’elles avaient des droits d’ usage, de chauffage et de pacage à exer
cer sur lesdites forêts, qu’elles entendaient en conserver l’exercice, et elles demandaient que l ’adjudica
tion n’eût lieu qu’à la charge de leurs droits d’ usage, ou que, dans tous les cas, l’adjudication fût renvoyée
jusqu’à ce qu’ il aurait été prononcé irrévocablement sur le mérite de leurs prétentions. Les babitans de
Moulbtllicr se présentèrent aussi, et outre leurs droits d’ usage, ils se prétendirent proptiétaires d’ une
pat tic de la foi êt d’Algèi e.
11 est mentionné au susdit cahier des charges, qu’ à raison de ces réclamations et autres qui sont inu
tiles à rappeler pour la causc, le curateur déclara s’opposer à l’adjudication jusqu’après une décision de
la ju stice, mais par un dire, en date du 8 avril 1825, il se départit de cette opposition, et donna les
mains à l’adjudication, sans énoncer aucun motif. — Le lendemain neuf a vril, le sieur de Saint-Etienne
se présenta à son tour devant le notuiie Mauret, cl après avoir critiqué dans un d iie , les différentes ré
clamations
consignées au cahier des charges, il déclara qu’ il croyait de sou intérêt, ainsi que de celui des
créanciers do la succession Saint-Etienne, et des prétendans aux droits d’ usage, d’ajouter de nouvelles
clauses. En effet, il ajouta que les adjudicataires partiels ou les adjudicataires en masse seraient assujétis
aux droits d ’ usage, chauffige, pacage, réclamés dans les forêts dépendant desdites successions, en faveur
de ceux des réclamans qui justifieraient de titres valables, s’ il était ainsi dit et ordonne par la ju stice,
et à l’obligation de souffiir la distraction des objets revendiqués en favrm dqs réclamans qui justifie
raient de litres valables, s’ il élait ainsi dit et ordonné par la justice , sauf à eux à se poui voir, ainsi que
de droit, s’ ils le jugeaient convenable, pour se faire adj uger une d i tniuulion pi 0 port ion née aux pertes qui!«
épiouvaieut par suite des droits d’ usage, c hauf f - ’ g e , pacago, propriété ou copropriété, qui pourraient êtie
accordés à etitains des l é Ja m a n s , et ce sans approuver eu aucune uiauièic les deruièies réclamation*.
�Il fut encore ajouté audit cahier des charges, que les adjudicataires partiels, ou l’adjudicataire en niasse
seraient tenus de poursuivre, dans le plus b ief délai possible, le jugement de toutes les demandes rela
tives, soit aux droits d’usage, chauffage et pacage, soit en revendication de propriété de partie desdits
immeubles, afin que les créanciers éprouvent le moins de retard dans la distribution du prix de l ’ad
judication. — Pour parvenir à la vente, de nouvelles affiches furent apposées, et on y fit la mention ex
presse des clauses additionnelles ci-dessus. — Au jour indiqué pour l’adjudication définitive, une nou
velle clause fut encore insérée ; ce fut de charger l’adjudicataire des bois , de consigner une partie de son
prix dans les quarante jours de son adjudication, que, si n o n , il serait poursuivi par voie de folle enchète.
C’est en ccl état qu’eut lieu l ’adjudication définitive, et que, le 2 mai 18 2 5, le sieur Saint-Étienne fils
devint adjudicataire de tous les immeubles dont la vente était poursuivie, et ce moyennant la somme de
196,o 85 f., aux charges,clauses et conditions portées au cahier descharges et additions d’icelui.— Par acte
reçu aussi par Mc Mauret, notaire, en date du lendemain 3 mai 1825, M. de St-Etienne fit en faveur de M.
Siméon M ign ot, une déclaration de m ieux, à raison de différens immeubles qui lui avaient été adjugés
par l’acte ci-devant relaté, et notamment 1. pour la forêt appelée grande forêt d’A lg ères, située dans les
dépendances de la commune de Saint-Étienne, 2. pour celle appelée Bois du Champ d’ Algères, située dans
les dépendances de la commune de Riom-ès-Montagne ; 3 . pour celle de Brugali , située dans les dépen
dances de la commune de Tremouille-M archal; 4 . pour celle de G ra v iè rc , située, partie dans le canton
de La'our, et partie dans le canton de Champ,
Celte déclaration de mieux fut faite , moyennant la somme de 100,000 f r . , et en outre aux charges,
clauses et conditions insérées au cahier des charges et additions d’icelni, et encore à la charge de verser
à la caisse des consignations, dans les quarante jours, une somme de 5 6 ,0 0 0 fr., montant de l’estimation
des forêts et bois ci-dessus. — Ces adjudication et déclaraliou dr mieux ont cté transcrites au bureau de
l’arrondissement de Mauriac, le i. juillet i 8 a 5 . Le sieur Mignot a ensuite consigné la somme de 5 6 ,000
f r . , et enfin, le i4 juillet suivant, les adjudicataires ont dénoncé à tous les créanciers inscrits les adjudi
cation et déclaration demieux dont il n’agit. Il est à remarquer que dans cette notification dont une copie
est produite, on ne pailc pas de la clause additionnelle relative à la diminution du p r ix , dans le eus
d'admission de lout ou pat lie des susdits droits d’ usage, etc.
A p r è s avoir fait autoriser les maires des communes de Saint-Étienne et Riom ès-Montagne, par ar
rêté du conseil do préfecture du département du Cantal, sous la date du 2 9 j ui l l e t 1 8 2 6 , M. Mignot fit,
par requête cl exploit des 7 septembre, 10, i l , 12 et i 4 octobre de la mime année 1826, assigner, soit
les maires desdites communes, ¿s—qualités qu’ ils agissent, soit 1rs sieurs Delasja'e père et fils, d’ Anglard,
Vigicr, et les héritiers Fonteilles de la Coustie, soit enfin le s i e u r de Saint-Étienne et les administrateurs
de l’ hospice de Salcis , corn inc premiers créanciers inscrits du sieur de Saint-Étienne, devant le tribunal
de picinière inslaucc de l’arrondissement de Mauriac, pour le voir garder cl maintenir dans la propriété,
�possession el jouissance desdites forêts d’ Algère» de Lachamp d’ Algère, de Brugeilli et de Gravières,
exempte de toute servitude, droit d’ usage, chauffage et pacage ; en conséquence, se voir lendits assignés
débouter purement et simplement de leurs réclamations et prétentions dans lesdites forêts, à tous droits
d’ usage, chauffage, pacage et copropriété, en cas de représentations de titres de leur part, voir déclarer
leadits titres prescrits par le non usage pendant plus de trente ans, et par le défaut de marques et de
délivrances écrites de l a p a it du propriétaire desdiles forêts, et se voir condamner aux dépens.
L e sieur Mignot conclut en même temps à ce que, dans le cas où quelques-uns des défendeurs justifie
raient de titres valables et non prescrits, et obtiendraient les droits d’usage et autres objets réclamés , il
lui fût accordé, conformément au procès-verbal d’adjudication, nne diminution de prix proportionnée
aux pertes qu’ il éprouverait, et ce d’après estimation par experts ; à ce qu’on ordonnât toutes plantations
de bornes qui pourraient être requises p o u r séparer les forêts par lui acquises, des bois et autres héritages
des défendeurs, et enfin à ce q u e , en attendant la décision définitive de la contestation , il fût fait défen
ses à toutes les parties de s’introduire dans lesdites foicts.
Les administrateurs do l’ hospice de Salers, n’ayant point comparu sur celte assignation , il fut obtenu
contre eux un jugement de jonction, le 12 décembre 1826, qui fut signifié avec nouvelle assignation,
par exploit du 19 février 18 3 7 . — Antérieurement à cette demande, et par exploit du 3 janvier i8 a 6 ,
le sieur Chevalier-Dufau, héritier de M. Armand, ci-de vaut conseiller en la cour, avait fait assigner le sieur
Mignot devant le même tribunal de M auriac, pour le voir maintenir dans son droit d’ usage et chauffage
dans la grande forêt d’Algère , sc voir condamner à lui faire délivrance de quinze pieds d’ai bres qui lui
étaient nécessaires, sans préjudice d’ un plus grand nombre, s’ il y avait lieu ; comme aussi pour voir dire
et ordonner son cantonnement dans ladite foret. Sur cette demande, un jugement du 20 avril 1H26
avait ordonne la mise en cause du sieur de Saint-Etienne et du premier créancier i n s c r i t , el cette dis
position avait été exécutée.
Il
a été statué sur toutes ces demandes par jngement du 24 juillet 1827, qui a séquestré les diverses
forêts dont il s’agit, et a ordonné que les défendeurs seraient tenus de justifier des titres établissant leur*
droits.— E11 exécution de ce jugement, les usagers ont prétendu justifier leurs droits d’ usago à l’aide
des titres suivans : savoir, le sieur d’ Anglard, au moyen i u d’ un acte du 9 juillet 1807, portant vente
par le sieur Chahancs-Sauvat ; ledit sieur d ’ Anglard et son épouse nu prolit de M. Gaspard Oubois de
Saint-Etienne, d’un domaine appelé du Mazou, sous la condition que les vendeurs se réservent, pour
leur domaine de Sédour, le droit d’ u*age, chaulTagc et foretage, qui était urte dépendance du domaine
de Mazou, pour en jouir dans la forêt d’A lg ère, et avec convention que si l’acquéreur rentrait dans la
propriété de la forêt d’Algère qui était alors séquestrée et confisquée, il s’obligeait dc laisser les vendeurs
user du droit ci-dessus ; 2 0 d’une reconnaissance du 7 juin ifi 3 8 , de laquelle il résulte une concession
de droit d’usage dans lu forêt d’ Algèrc, en faveur de divers habilans du lieu de Mazou ; 3 ' d’une vente
du domaine cl«' Mazou et d’un droit d’ usage cl de chanflagc dans la foiêl d’Algère pour ledit domaine»
�consentie le i 5 juin 1689 par le sieur Saint-Etienne, au profil du sieur Chaumcil, aux droits duquel se
prétend le sieur d’ Anglard ; le sieur de Lassalle, au moyen d’ iui acte du 2 mars 1706, portant concession
d’ un droit d’usage et de chauffage dans la forêt de Gravifere, par Messire Daujouy à M. Georges Roussillon, que l’on dit aïeul maternel du sieui de Lassalle. 11 a été ajouté que M. de Lassalle père avait été
porté sur la liste des émigrés comme le sieur de Saint-Etienne, qu’ il n’était rentré en France qu’en 180a.
L e sieur Vigier, au moyen 1 ° d’ un acte du 16 septembre i 6 3 3 , portant concession d’ un droit d’usage
et chauffage dans la forêt d’Algère par le sieur de Bérenger, seigneur de Châteauneuf, à Pierre Bouaigre de Bioin-ès-Montagnc ; 2 U un acte du 2 janvier 1666, par lequel le susdit droit d’ usage aurait été
cédé par les Bouaigre à Hugues Clianet, que le sieur Vigier représente; 3 ° un arrêté du district de
Mau riac du 5 fructidor an II, et un arrêté de l’administration centrale du département du Cantal du
i 5 germinal au V I I I , qui maintiennent ledit sieur Vigier en possession du susdit droit d'usage;
Le sieur C bevalier-D ufan, au moyeu i ° d’ un acte du 10 juin 1637, portant reconnaissance par G il
bert Chavignier, que l’on dit représenté par le sieur Armand, ancien conseiller, et autres habitans du
village de Clavière, paroisse de Saint-Etienne, en faveur de M. de Saint-Etienne, du droit qu’ils ont
de la coupe du bois dans ses iorêts d’A lgère, pour s’en servir à leur usage et chauffage; 2° un arrêté de
l’administration centrale du Cantal, en date du l 3 germinal an V I I I , que sur le vu fie l’ acte de i 6 3 3 ,
et considérant que les habitans de Clavière ont incontestablement le droit d’ usage et chauffage dans la
forêt d’Algère, maintient M. Armand dans ledit droit ; 3 U un arrêté du conseil de préfecture du Can
tal du 3 o septembre 1807, qui, sur le dépôt du susdit titre, conformément à la loi de l’an X I , et con
sidérant que M. Armand et d’autres habitans de Clavièrcs n’ont jamais été troubles dans le droit de
prendre dans la forêt d’ Algèrc du bois pour la construction de leurs batimens, maintient le sieur A r
mand dans ledit droit; 4 ° une décision de M. le ministre des finances, en date du 1 1 janvier 1809, con
tenant approbation de l’arrêté du conseil de préfecture du 3 o septembre 1807 ;
• Les héritiers Fou teilles do la Coustie, au moyen 1° d’ un bail em pli ithéo tique, consenti le 1 3 juin 1672,
au profit de Jean Fonteilles, leur auteur, par le sieur Dubois de Saint-Etienne , pour sun droit d’ usage et
chauffage dans les forêts d’Algèrc et Chavagnac; 2° l’ ariêté dn préfet du département du Cantal du six
brumaire an X I , qui maintient le sieur Fonteilles père dans ledit droit d’usage; 3 ° l’acte de dépôt dts
susdits titres fait, le 5 messidor an X I , au secrétariat de la sous-préfecture de Mauriac.
, Les habitans de Clavièrcs, au moyen des titres et actes invoqués par le sieur Clievalier-Üufau, repré
sentant M. Armand. Les habitans du village de Châteauneuf et ceux de Pons, au moyen i u d’ une sen
tence rendue, lc 19 mars 1 6 1 2 , en la justice de Châteauneuf, entre le seigneur de Châteauneuf et un
nommé Jean Chaumcil, du village de Pons, portant entre autres dispositions que ledit Chaumcil est main
tenu dans la possession cl saiüine de jouir du bois d’ Algèrc, tant en la forme et manière que les habitans
de Châteauneuf en jouissent, et ce comme lubitans du lieu de Pons, village dépendant de ladite sei
gneurie do Cliàteauneul ; au une transaction du 5 mai iG4 i , par laquelle le sieur de Bérenger aurait
�permis à cinq individus de Châteauneuf «le prendre et couper dans la foièt d’ Algère du bois pour leur
usage et chauffage ; 3 “ un acte d u 3 o nivôse an V, par lequel diveis habitan* de plusieurs villages de la
justice de Châteauneuf se seraient réunis ut singuli pour nommer un gardo pour la conseivation de la
forêt appelée la Champ-d’Algère.
Les habitans du village de la Cousty, au moyen des actes invoqués par le sieur Fonteilles de la Cousty j
plus, un acte du 8 décembre i 5 2 g , portant vente par M. Dedienne, à un nomme Floret, d’ une portion
de bois indivise avec les habitans de Montbellier et d’ Albaniac. — Pour les habitans de Lasiliol et d’Einbesse, outre les titres de la communauté de Châteauneuf, on a invoqué une reconnaissance du 5 septem
bre i 637 , par divers habitans dénommés des villages de Lassiliol et d’Einbesse, en faveur du sieur de
Béranger, pour les portions par eux détenues de la forêt d’Algère. — Pour les habitans de Vousseyre,
commune de Saint-Etienne, on a produit une transaction du ¡" o c t o b r e 1 6 1 7 , portant concession, par
M. Cbabanes, à divers individus dénommés, tous habitans du village de Vousseyre, d’ un droit d’usage
et chauffage dans la forêt d’Algère. — Les habitans du village de Saint-Etienne ont argumenté d’ une sen
tence du 1 " mars 1 63 g , dans laquelle des individus dénommés, demeurant à Saint-Etienne, sont auto1 isés à couper, à volonté, dans la forêt d’Algère. — Les habitans du Mazou ont fondé leurs droits snr une
reconnaissance du 17 juin i 6 38 . — Ceux du Partus ont invoqué, i ° une reconnaissance, du 5 juin i 6 4 o,
par des habitans dénommés du village de Partus au sieur de Saint-Etienne, par laquelle ils déclarent
qu’ils ont droit de prendre du bois dans la forêt d’Algère pour leur usage et chauffage ; 2 0 un actc de dé
pôt de cette reconnaissance fait au secrétariat de la sous-préfccture de Mauriac, le 2 1 messidor an X I ,
par les habitans dudit village de Partus.
Les sieurs Mignot et Saint-Etienne ont cherché à repousser ces titres, soit parce qu’ ils n’étaient pas
produits en forme probante, soit parce qu’on ne pouvait pas représenter ceux en faveur desquels ils
avaient été consentis, soit par rapport à ceux invoqués par les communautés d’habitans, parce qu’ils ne
s’appliquaient qu’à des individus ut sin gu li, soit d ’ailleurs parce que ces titres étaient éteints à défaut
d’ uue possession légale, que les arrêtés administratifs ne pouvaient relever d ’ une prescription alors en
courue; qu’enfin il y avait déchéance, parce que fi s litres n’avaiont pas été produits conformément aux
lois des 25 venlùse an X I et i 4 ventôse an X I I .
Le i 4 janvier 1828, C a t h e r in e D u b o i s , veuve Cliavinier, et autres habitans du v illa g e de Montbellier, agissant ut sin gu li, Tuent sign ifie r, dans la c au se , uue requête, par laquelle ils demandèrent à être
reçus paities intervenantes, c l, par suite, h cire maintenus dans la propriété du bois d’ Algèrc indivis
enl re eux et le sieur de S t - E t i e n n e , et, par suite, à ce que des bornes lussen I plantées avec le sieur Mignot.
Pour justifier leur dioit de propriété sur le susdit bois d Algèrc, ils invoquaient, i° la vente consentie
le 8 décembre i 5 u<) par le sieur Dedienne, à Jean et Antoine l'lorct, de la moiIié d’ une portion de bois
indivise avec les habitans do Montbellier et d’Albaniac; 2° une vente soui signature privée, dn 4 juin
178 9, par laquelle divers individus de Moutbcllicr cl uu du villngo d ’Albaniac transmettent à M. de
�Sainl-Etienne lenr portion de la superficie du boi? d’Algfcre.
Cetle intervention a été critiquée. — II est à remarquer que les usagers, moins toutefois le sieur Chevalier-Dufau , conclurent, en première instance, à ce qu’il leur fût accordé des dommages-intérêts pour
le non exercice de leur droit, qui se trouvait paralysé par suite du séquestre prononcé sur la demande
du sieur Mignot.
C ’est en cet état de choses qu’après des plaidoiries contradictoires de la part de toutes les parties, il
est in te rven u , le 2 avril 1829 , un jugement contradictoire qui est ainsi conçu : — En ce qui touche
la demande des administrateurs de l’ hospice de Salers, tendante à ce que les clauses ajoutées au caliier
des charges, lors de l’adj udication définitive des biens dépendans des successions bénéficiaires de Gaspard
et Ignace-Hyppolite Dubois de St-Etienn e, soient supprimées et regardées comme non advenues.-—
Attendu que le cahier contenant les clauses, charges et conditions sous lesquelles la vente des biens
dépendant des successions bénéficiaires Dubois de St-Elienne devait avoir lieu , ayant été signifié et
déposé conformément à l’ai t. 972 du code de procédure civile , en l ’étude de Me Mauret, notaire, commis
p a r l e tribunal, pour procéder à ladite vente, il ne pouvait y être apporté aucune modification ni
changement que par le tribunal (art. 973) et sur la réclamation de toutes parties intéressées.
Attendu, en f a it, que le cahier des charges déposé ez-mains de Mauret, le u 5 mars 18 2 2 , contient
cette clause, que l’adjudicataire sera tenu de prendre les immeubles dans l’état où ils sc trouveront au
j o u r de l’adjudication, de souffrir toutes les servitudes passives dont ils se trouveront grevés, sans par
lui pouvoir prelendre à aucune diminution du p r i x , ni exercer aucune demande en recours et garantie
pour raison de dégradations, de défaut de mesure et qualité, ou en raison desdites servitudes, ni sou*
aucun prétexte quelconque. — Attendu que l’adjudication provisoire a eu lieu le 19 mai 18 2 2 , sous
cette clause expresse.— Attendu que lors de l’adjudication définitive et peu avant d’y procéder, il fut
ajouté à la requête de l’héritier bénéficiaire poursuivant la vente, une clause par laquelle il est dit que
l ’adjudicataire pourra se pourvoir devant qui de droit pour obtenir une diminution sur le prix de son
acquisition , en raison des pertes qu’ il pourrait éprouver par suite des prétentions de plusieurs usagers ,
qui seraient maintenus dans leurs droits d’ usage.-— Attendu que le sieur Dubois de St-Etienne n’avait
aucune qualité ni pouvoir pour modifier le cahier des charges primitivement déposé. — Que si le n o t a i r e
a cru ne pouvoir sc dispenser d insérer cette nouvelle clause dans le cahier des charges, il n ’ a u r a i t pas
dû au moins proccdti à 1 adjudication définitive qu’au préalable il n’ ait été statué par le tribunal sur
le maintien ou le rejet de celte addition. — Attendu que le cahier des charges, déposé le u5 m ars, chez
M L Mauret, notaire, n’ajant subi aucun changement, en veitu d’une d é c i s i o n du tribunal , qui seul
avait le pouvoir de le modifier, l ’adjudication définitive des biens dont s’ agi t doit rester faite sous
1 empne des clauses et conditions qui y sont portées , et que celles qui y a v a i e n t cté mal à propos et
i n l e m p e s t 1vement ajoutées, doivent être regardées comme non a d v e n u e s .
Eu cc qui louche les d io ib cl prétentions des particuliers, villages et communes, sur les droits
�d ’ usnge et clianiT ^f» fju’ i ' i prefrn. lent a v o i r dan* les forêts dépendant des'successions bénéficiaires dont
s’a g i t , v e n d ue s et adj ugées au sierr Mi;,no!, le 3 mai i 8 * 5 , apiès avoir rempli les formalités voulues
par la loi. — Attendu , en dioit .q u ’aux termes de l’oi donnance de îGGg, lit. 20 , art. 7 , les droits
d’usage dans une forêt n’ont j amai s pu être exercés par l'usager qu’en vertu d’ une délivrance obtenue
par ce dernier. — Que les lois cl rêgleinens fore, texrs concernant (’administration et la-conservation des
bois de l ’ Et a t , doivent êt 1 e appliqués a u x bois et forêts des particuliers, aux termes de l’art. 5 du lit. 2 6,
et l’ar t. 28 du lit. 3*2 de l’ordonnance de 1669, et d’après le décret du 27 nivôse an »3 . — Attendu que
les droits d’ usage dans les forêts ne constituant qu’ une servitude sur la propriété d’autrui et une servi
tude discontinue, 11e peuvent s’acquérir que par titres, et conséquemmeut ne peuvent et ne doivent être
prouvés que par titres, à moins cependant que les servitudes de cette nature, acquises par la possession,
eussent pu s’acquérir de cette manière, aux termes des slatuts de la localité.— Qu’ il en est de même lors
que le droit d’ usage est réclamé à litre onéreux, lorsque l’ usager justifie du paiement de la redevance.—
Attendu que si la possession sans titieest insuffisante pour l’établissement d’ un droit d’ usage, le titre sans
la possession est également impuissant pour conserver ce dioit d’usage, d’où il suit que l’usager qui a
cessé de jouir pendant Uente ans, perd son droit d’ usage— Que c’est vainement que l’on prétendrait que
l’ introduction de l’ usager dans le bois de l’Etat ou du propriétaire soumis à son usage et sans délivrance
préalablement obtenue de l’autorilé compétente ou du propriélaire, doit être considérée comme l’exer
cice légal de sou droit, puisque, aux termes de l’ordonnance, et d’après la jurisprudence constante de la
Cour de cassation, ce fait de sa part ne peut être cousidéré que comme un délit dont l'effet ne saurait
être inlcrrnptif de la prescriplion.
Attendu que pour conserver la possession d'un droit il faut en jouir selon le titre et dans les termes de
la loi j que tout acte de violence, tout fait quelconque de jouissance, lorsqu’ il est réprimé par la loi ,
ne saurait jamais constituer un fait de possession. — Attendu que quelques soient les termes du titre de
l ’usager, il ne peut jamais être dispensé de demander au propriétaire du bois la délivrance et la marque
du bois dont il a besoin , préalablement à toute introduction et à toute voie de fait de sa part dans le bois
soumis à son droit d’ usage.
Que ers règles importantes doivent être maintenues avec soin dans l ’intérêt p u b l i c , dans l’intérêt des\
propriétaires des bois soumis à l’usage, et même encore dans celui des usagers. — Attendu que la loi du
28 ventôse an 1 1 a déterminé que les communes et particuliers qui so prétendront fondés par titres ou
possession en droit de pâturage, paccage, chauffage et autres usages de bois, tant pour bâtimens que
pour léparations dans les forêts nationales, seront tenus , dans les six mois qui suivront la publication
do la présente lo i, de produire, sous récépissés, aux secrétariats des préfectures et sous-préfectures,
dans l’arrondissement desquelles les forêts prétendues grevées desdits droits se trouvent situées, les titres
ou actes possessoires dont ils infèrent l’existence, si non, et ce délai passé, défenses leur sont faitesd’en
continuer l'exercice, à peine d’etre p o u r s u i v i s et punis comme délinquans, — Attendu que les dispo-
t
�silions de cette lo i, qui auraient pu être considérées comme comminatoires, ont été renouvelées par une
loi subséquente, laquelle a déclaré formellement et irrévocablement déchus de leurs droits, les prétendans aux droits d’ usage qui n’auraient point satisfait à la loi du 28 ventôse an 11 , dans les délais
fixés , c’est-à-dire dans les six mois qui ont suivi la promulgation de cette loi, du i 4 ventôse au 12 .
En ce qui touche le sieur V ig ie r , juge de paix du canton de Riom.
Attendu que les titres des 5 o septembre i 6’33 et g janvier iG66, en vertu desquels le sieur Vigier
piéleud avoir di oit d’ usage et chauffage dans la forêt d’ Algères, pour ses maisons et domaines, sis en la
commune de Riom , ne sauraient être valablement critiquées. — Que le sieur Vigier étant aux lieu et
place du sieur Pierre Bonnaigue, il a droit de jouir des droits d’usage et chauffage, tels que celui-ci
avait le droit d’en jouir, aux termes des actes ci^-dessus relatés. — Attendu que peu après l’émigralion
du sieur Dubois de St-Etienne, et peu après le séquestre ou la confiscation d e leurs bois, le sieur Vigier
s’est empressé de constaler et de f a i r e r e c o n n a î t r e , par l’administration d’alors, ses droits d’usage et dp
chauffage dans la forêt d’ Algère. — Que ces faits résultent des pièces produites au procès, et notamment
d’ une pétition du 5 fructidor an 2 , qui fut suivi d’ un arrêté conforme à sa demande. — D’ une autrç
pétition du ¿5 pluviôse an 8, appuyé d’ un avis favorable de l’agent forestier, et suivie d’ un arrêté de
l'administration centrale du département, qui maintient le sieur Vigier dans son droit d’ usage et chaufr
fage dans la forêt d’Algères. — Attendu que les lois de ventôse de l’an 1 1 et de l’an 12 n’exigeaient pas
qu’il fui par l’autorité départementale statué sur la production des titres sur les droits des produisans ;
que ce pouvoir ne compétait qu’à l’autorité judiciaire et non à l’autorité administrative, qui n’avait
que celui de vérifier si le titre produit conférait les droits d’ usage réclamés, pour pouvoir en continuer
la jouissance sans abus et conformément à l’ordonnance. >— Qu’ainsi ces arrêtés, quels qu'ils fussent,
n’étant pas de rigueur, ne pouvaient pas èlre considérés comme une décision de l’autorité administra
tive, puisque la loi ne le commandait pas, ces arrêtés n’avaient pas besoin de la sanction du ministre.—
Que l’on pourrait peut-être avec quelque raison prétendre le contraire, s’ il y avait eu dissidence entre
l ’autorité et le prétendant droit d'usage sur les droits réclamés par celui-ci dans une forêt de l’E lat
parce qu’alors il y aurait eu (ce litige existant) décision de l’autorité administrative.
Attendu que le sieur Vigier n’a point laissé prescrire son droit d’ usage et de chauffage dans la forêt
d’ Algères, puisque maintenu dans son droit par I urrêté du i 5 germinal an 8 , ou 5 avril irtoo, il ne
s’est pas écoulé trente ans depuis celte époque jusqu à sa demande. En ce qui touche le sieur Chevalier,
Attendu que le sieur Chevalier se présente en qualité de légataire universel du sieur Armand ; que
cette qualité ne lui esl pas contestée.— Attendu qu’il est constant en fait que le sieur Armand possédait
au village de Clavières, commune de St-Etienne, un domaine composé de bâtimens et terres; lequel
domaine esl aujourd’ hui possédé et joui par le sieur Chevalier. — Attendu qu’aux termes de l’acte du
10 juin l 6 3 7 1 passé devant Lcsalut et Dufour , notaires, le sieur Dubois, alors propriétaire de la forêt
d’Algères, reconnut que les habilans de Clavières avaient le droit de prendre dans cette forêl du boi?
�pour s’en serviràleur usage et chauffage.— Attendu que c’est en sa qualité de propriétaired’ nn domaine dans
le village de Clavières que le sieur Armand a produil à l'autorité administrative, conformément aux lois
de ventôse an 1 i et an l a , le titre de juin iG 37, afin de conserver pour son domaine ses droits d’ usage
et de chauffage dans la forêt d’ Algères. — Que c’est en la même qualité que l'administration lui a re
connu ses droits d’ usage et de chauffage, ainsi que cela résulte, i ° d’ un arrêté de l’administra lion cen
trale, du i 3 germinal an 8 ; i" d’ un arrêlé du conseil de préfecture du département du Cantal, du 3 o
septembre 1 8 0 7 . — Attendu que le s i e u r Armand a rempli toutes les formalités voulues par les lois; que
T i e n ne justifie qu’ il eut cessé d’être en possession de s on droit antérieurement à 1807, et que quoiqu’ il
ne justifie pas que depuis cette époque il lui ait été fait délivrance de bois, pour l’exercice de son droit,
conformément à l’ordonnance, son droit n’ a pu prescrire, trente ans ne s’étant pas écoulés depuis 1807.
Attendu dès-lors que le sieur Chevalier élant au lieu et place du sieur Armand , a conservé tous ses
dioits d’usage et chauffage dans la forêt d’Algères, pour son domaine situé dans le village de Clavières.
En ce qui touche le village de Clavières, régulièrement représenté en la cause par le maire de la
commune de St-Eticnne.
Attendu que les lois des 28 ventôse an 1 1 et i £ ventôse an 12 n’ont exigé de la part des communes et
particuliers qui se prétendaient fondés par litres ou possession en droit d’usage et de chauffage dans les
forêts de l’E t a t , que la production de leurs titres dans le délai déterminé, si non qu’ils seiaient déchus
de leur droit. — Attendu qu’il est constant que le litre en vertu duquel la section de Clavières prétend
aux droits d’usage et de chauffage dans la forêt d ’Algères, la déclaration du 10 juin i 6 3 ? a été produit«
et mise sous les yeux de l’autorité administrative.— Que ce fait résulte d’ un arrêté du conseil de pré
fecture, en date du 3 o septembre 18 0 7, pris à l’égard du sieur Armand et rapporté ci-dessus.
Attendu que les communes et les particuliers n’ont pu être astreints à remplir des obligations què ne
leur imposaient pas les lois ci-dessus rapportées; que la production des titres est la seule obligation
imposée par la loi. — Qu’il était inutile de joindre à cette production une pétition tendante à être main
tenu dans les droits d’usage et de chauffage dont on était en possession, et que l'absence d'une décision
de l’autorité administrative sur le vu des titres, est une circonstance absolument indifférente, puisque
d’ 1111 côté la loi no le commandait pas, et que de l’autre la décision administrative ne pouvait être que
la mention que le titre produit donnait les droits d’ usage et de chauffage réclamés.— Attendu que dèi
qu’ il est constant et établi que le titre du 10 juin 1G37, en vertu duquel le village de Clavières réclam e
les droits d’usage et chauffage dans la forêt d’Algèro, a été produit ainsi que l’ exigeait la loi ; qu’ il doit
également rester pour constant qu’à l’époque de la production du titre , le village de Clavières était en
possession de scs droits d ’ usage et de chauffage.
Attendu que depuis celte époque il ne .s’est pas cconlé
un temps suffisant pour prescrire, — Attendu, au surplus, qu’il résulte d un certificat produit au pioeès,
que le titre du 10 juin iG 37 a été produit à I autoiité administrative, dans l’ iutérêt du village de Clavières, et pour faire r e c o n n a î t r e les droits d u s a g e et cliaufi<igc que les habitons ont le droit d’exercer
�dans la forêt d’ Algères.
En ce qui touche le sieur d’Anglard.
Attendu que le sieur d’ A n g la r d est au lieu et place du sieur ChabanneSauvat, son beau-père ; que celle
qualité ne lui est pas contestée.— A t t e n d u , en f a it , que le do m a in e du Mazou appai tenait autrefois au.
sieur Sanvat ; qu’à ce domaine étaient attachés des droits d’ usage et de chauffage dans la foiêt d’ Algères ,
aux termes d’une reconnaissance de 16 8 8 , du titre de vente, de 1689, et d’ une transaction de i 6 4 i ;
lesquels titres sont joints an procès, et ont été produits conformément aux lois de ventôse de l ’ an 1 1 et
de l’an 1 2 , à l ’autorité administrative, ainsi qu’il appert d’ une pétition du sieur Sau vat, à laquelle est
joint l’avis du sous-préfet. — A t t e u d u que par acte sous seing-privé, en date du 9 juillet 180 7, enre
gistré à Riom-ès-Montagne le ag avril 18 2 2 , les sieur et dame d’Anglard et le s ie u r S a u v a t, leur père
et beau-père , o n t veudu aux sieur Gaspard Dubois de St-Etienne et à d e m o ise lle Angélique, sa sœur,
le domaine du M azou, avec réserve expresse des droits d’ usage et de chauffage qu’avaient les
vendeurs dans la forêt d’Algères, pour le domaine vendu, à l’effet de les transporter à leur domaine du
Sidour. - - Que par ce même acte, il fut convenu que si les sieur et demoiselle de Sl-Etienne rentraient
dans la possession et propriété des bois alors séquestrés, ils s’engageaient à concéder aux Vendeurs les
droits d’ usage et de chauffage pour le domaine de Sidour , tels qu’ils les avaient pour le domaine du
Mazou, et dont ils s’étaient fait réserve. — Attendu que les sieur et demoiselle de Sl-Etienne sont ren
trés dans la possession et propriété des biens soumis au droit d’ usage et chauffage pour le domaino du
M azou, et ce eu vertu de la loi de décembre i 8 i 4 . — Attendu, en droit, que les conventions légalement
formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. — Attendu que toute obligation conditionnelle ,
lorsqu’on la fait dépendre d’ un événement futur et incertain, n’est point prohibée par les lois, lorsque
la condition ne se rattache pas à une chose impossible, ou qui soit contraire aux lois ou aux bonnes
mœurs. — Attendu que toute condition doit être accomplie de la manière que les parties ont voulu et
entendu qu’elle le fut.
Attendu que la condition sous laquelle les sieur et demoiselle de Sl-Etienne ont acquis le domaine dn
Mazou ne se rattachait pas à un événement impossible ; qu’elle n’ est ni prohibée par la loi ni contraire
aux bonnes mœurs, d’où il suit qu’elle doit recevoir son entière exécution , l’événement prévu étant
arrivé. — Attendu dès-lors que l’on ne saurait contester au sieur d’Anglard son droit d’usage et de chauf
fage dans la forêt d’ Algères, pour son domaine de S ed ou r, tel et ainsi qu'il en jouissait et qu’il avait droit
d’en jouir pour son domaine du Mazou, alors qu’ il en était le propriétaire.
En ce qui touche les sieurs Delassalc père et fils.
Attendu que ls sieur üclassale fils n’a jamais prétendu de son chef à aucun droit d usage dans les forêts
adjugées au sieur Miguot ; que c’est donc à tort qu’il a été assigné et compris dans 1 instance.
Attendu que sa mise hors de cause ne saurait éprouver aucune difficulté.
Att endu que par contrai
reçu Porte, uotaiic à B o r t , le 2 mars 1706, messire Jacques d'Enjoiguy donna et accorda au sieur Rous-
�sillon , auteur du sieur Uelassalle, pour les siens ou ayant cause, le droit d’usage et de chauffage dans
la forêt de Gravières, dont la famille de St-Elienne est devenue propriétaire, et qui est comprise dans
l ’adjudication faite ou profit du sieur Mignot.— Attendu qu’ilest constant en fait quelors de [’émigration
du sieur Delassale, scs biens ont été mis sous le séquestre, et qu’à celle même époque les bois de G r a v i è r e , appartenant à la famille de St-Elienne, étaient également sous le séquestre , en vertu des lois alors
en vigueur. *— Attendu que durant cet état de choses, la prescription n’a pu courir contre le sieur D classale, pour cause de non jouissance de son d ro it, puisque les bois soumis aux droits d’usage et les l ù t iuicns pour lesquels le droit d ’usago avail été étab li, étaient dans les mêmes mains. — Attendu que l’on
ne justifie pas que depuis la rentrée en France du sieur Delassale, jusqu’au jour de la demande, il se
soit écoulé trente ans utiles pour prescrire. — Attendu dès-lors que l’acte du a mars 1706 doit recevoir
ia pleine et entière exécution, conformément aux lois et règlemens en matière de droit d’usage et de
chauffage.
En ce qui touche le sieur Fonteillcs de Lacousty.
Attendu qu’ il résulte d’ un acte de 16 7 2 , que François Dubois de St-Etienne, alors propriétaire d e là
forêt d’Algères, concéda à Jean Fouteille et ù Anne Ray mond , sa femme , les droits d’ usage et de chauf
fage dans ladite forêt d’Algères, pour eux et leurs successeurs.— Attendu qu’il n’est pas contesté que
Fonteilles soit le descendant de cet autre Jean Fonteilles.— Attendu qu e, conformément aux lois de
ventóse an 1 1 et an 12 , les litres constitutif» de ces droits d'usage ont été produits à l’autorité adminis
trative, ainsi qu’il résulte d’ un arrêté du préfet du Cantal, du 6 brumaire an 1 1 . - — Attendu que ce
titre ne conceme en aucune manière les autres liabitans du village de Lacou sty.— Attendu que celte
section n’ayant point satisfait aux loi» ci-dessus citées , par le dépôt de leurs titie s , entre les mains de
l ’administration , les liabitans Sont demeurés déchus de leurs droits d’ usage et de chauffage.
E11 ce qui touche les liabitans du village de Tartus. — Attendu qu’il n’est pas justifié qu’ ils aient
produit leurs titres à l ’autorité administrative , conformément aux lois de ventôse on 1 1 et de l’an 12 \
que la pièce produite et de laquelle 1 on voudrait faire résulter que les titres ont été déposés à la sous*
préfecture de Mauriac, n’émanant pas d ’ u n officier public, ne sauraient suffire pour établir le fait du
dépôt.— En ce qui touche les liabitans du bourg de Sl-Eticnne ; ceux du village de VouBseyre; c e u x
<lu village du Mazou et autres en cause, tous représentés par le maire de la commune de S t - E l i e n n e . __
E n ce qui touche les liabitans du village do Pons. — En ce qui touche les liabitans des villages de Lassiliïol et Embesse. — E11 ce qui touche les liabitans du village de Châteauncuf, haut et bas, et autres en
cause.— Et les liabitans du bouig de R io m , tous représentés par le mairo de Riom-ès-Montogues.—
Attendu qu’il n’est pas justifié que conformément aux lois de vcnlôse de l’an 1 1 et de l’an 1 2 , les tities
rn vertu desquels ce* diverses communautés piétendenl droit d’ usage dans la forêt d’Algères aient élu
produits à l’autorité administrative. — Attendu qu’à délaul de production de leurs titres elles sont delueurécs déchues de lcuis droits, aux ternies du la loi de v e nt ôs e an i 3 ; que les dispositions de cello
�dernière loi ne sauraient être considérées comme comminatoires.—-Attendu an sirp lu s que ces commu
nautés d’habitans n’établissent pas légalement, d’avoir dans les trente ans, avant l’action, exeicé paisi
blement les droits d’ usage et de chauffage qu’ ils réclament aujourd’ hui, d’où il suit que leurs titres
seraient prescrits pour nou jouissance pendant trente ans. — Qu’il en est de même à l’égard des sieurs
R a y n a l , Cbagrave el L a s s i l l a t , et de Pierre Marion, habitant au lieu de Châteauneuf. — En ce qui
touche les parties de Me Durieu ( les habitans de Montbellier), intervenant dans la cause. — Attendu
que les titres en ve ilu desquels elles se prétendent co-propriétaires du bois d’ Augeyre et Combechèvre,
indiquant de la manière la plus claire et la plus formelle, que cette co-propriété réside sur la tête des
habitans du village de M ontbellier; que ne contenant aucune indication nominative et individuelle,
l ’on doit tenir pour constant que le droit appartient à la totalité des habitans du village de Montbellier.
Attendu que l ’acte sous signature privée, à la date du 4 juin 1 7 8 9 , visé pour timbre et enregistré à
Mauriac le 1 9 novembre 18 2 7 , ne pouvant être opposé valablement à des tiers qui n’ont pas été parties
contractantes, n’ a aucune force pour établir, en faveur de ceux des habitans de Montbellier qui y sont
en nom, la propriété exclusive du bois d’Augère et Combechèvre.— Attendu au surplus que cet acte
n’a nullement porté atteinte aux anciens titres des 8 décembre i 5 ag et 20 décembre i 5 3 3 . — Attendu
que la communauté des habitans de Montbellier étant représentée dans la cause par le maire de la com
mune de St-Elieune, leur intervention devient sans objet et tout-à-fait inutile. — Attendu qu’il résulte
des titres produits et non critiqués sérieusement, que les habitans du village de Montbellier sont co
propriétaires par indivis du bois d’Augère et Combechèvre. — Attendu que la délimitation de ce bois
avec la forêt d’Algères, vendue au sieur Mignot, n’ayant jamais été faite, il est de l’ intérêt de toutes les
parties qu’il y soit procédé, prenant pour base les titres respectivement produits par les parties.
Attendu au surplus que cette délimitation est sollicitée respectivement par les habitans de Montbellier
et par le sieur Mignot. — Attendu qu’ il a été mis en fait que, pendant l’ instance, les habitans de Montbellier n’ont cessé de couper des arbres dans la forêt indivise, et que les limites n’étant pas encore dé
terminées, il est probable que quelques coupes ont eu lieu dans la partie qu i, en définitif, ne restera
pas leur propriété. — Attendu qu’ un tel état de choses ne peut que dégénérer en abus, et o c c a s i o n n e r un
grand préjudice à toutes les parties. — Attendu qu’ il est de leur intérêt, et pour la conset vation des
bois limitrophes, qu’ il ne soit fait aucune entreprise quelconque , jusqu’après l’opération des experts et
1 homologation de leur lapport. — Attendu que cette mesure, loin de préjudicierà leurs droits respectifs,
11e tend au contraire qu’à les conserver.— Par ces motifs, le tribunal jugeant en piemier ressort, et
après en avoir délibéré, ordonne que les clauses additionnelles au c a h i e r des charges déposé ès-mains de
M a u r e t , notaire, lo vingt-cinq mars 1 8 2 2 , inséiécs au moment de l’adjudication définitive, seront
supprimées et regardées comme non advenues.— Ordonne, en c o n s é q u e n c e , que les adjudicataires des
biens dépendant des successions bénéficiaires des sieurs Gaspard et Ignace-IIippolj te Dubois de S a i n t -
Etienne , seront tenus de se conformer , en tous points et sans restriction aucune, aux clauses et condi-
�lions insérées au cahier (les charges déposé ès-mains de Mauret, notaire, le a 5 mars 1822. — Sans s'arlêter ni avoir égard aux moyens, fins et conclusions prises par le sieur Mignot contre les sieurs V ig ier,
Chevalier, le village de Clavières, d’Anglard, de Lassalle, Fonteilles de Lacousty. — Les maintient
en possession et jouissant e de leurs droits d’usage et chautfage, conformément à leurs titres , savoir : le
sieur de Lassale, dans la forêt des G ra v iè re s , et les autres dans la foiêt d'Algères, en , par e u x , se con
formant aux lois et règlemens qui régissent les bois et forêts des particuliers ; en conséquence, ordonne
que par le sieur Mignot il sera lait délivrance à chacun d’eux , du bois nécessaire à leur usage et chauf
fage, constalion préalablement faite , conformément à la lo i, de la quantité et de la nature du bois
qui leur est nécessaire, soit pour l ’ usage, soit pour le chauffage et demande en délivrance, préalable
ment adiessées au propriétaire. — Statuant sur la dematido du sieur Mignot, à l’égard des villages du
Paitus, bourg de Saint-Etienne, village de Vousseyre, village du Mazou et autres, dépendant de la
commune de Sainl-Etienne, représenlés en la cause par le maire de la commune de Saint-Etienne ;
village de Pons, village de Lassilliol, Châteauneuf, haut et bas, le bourg de Riom et autres villages
dépendant de ladite commune de llio m , jepiésentés en la cause par le maire de la commune de Riom, et
encoie à l’égard des sieurs I îa y n a l, Chagrave, de Lassilliol , Pierre Marion, habitant à Châteauneuf.
— Décla re prescrits les litres produits par eux au procès, ainsi que les droits d’ usage et chauffage aux
quels ils prétendaient en vertu desdits litres, dans ledit bois et forêt d’Algères. — Leur fait défense de
s’ introduire jamais désormais dans lesdites foiêls, en leur prétendue qualité d’ usagers, aux peines de
droit. — Déclare les ha bi ta ris de Montbellier non îecevables dans leur intervention , et statuant tant
sur la de mande du maiie de la commune de St-Elienne, comme représentant le village de Montbellier,
que sur celle du sieur Mignot, adjudicataire. — Oi donne que par les sieurs Roussellot, Rixain et
Meilhac-Qilb< rtlieil, que le tribunal nomme d’office, serment par eux préalablement pieté devant
Maillies, doyen des juges, il sera procède à la délimitation du bois appartenant à la c o m m u n a u t é de
Montbellier, de celui adjugé an «ieur Mignot; à cet effet devront les experts dresser un plan géomé
M
trique de l’état des lie u x , et indiquer sur ce plan la ligne démarcative des deux propriété* et des lieux
où devront cire placées des bornes. — A ces fins ordonne que par les parties il sera fait remise aux e x
perts, dans les trois jours de leur prestation de serment, des titres sur lesquels chacune d’elles base scs
prétentions — Fait défense aux parties, aux peines de d r o it , cl nonobstant appel ou opposition quel
conque, de couper, sous quelque pi e texte que ce soit, du bois, soit gros ou menu , sur pied ou branches,
dans les deux forêts, j u s q u ’a p r è s 1 homologation du rapport d experts.— Met hors de cause le sieur do
Lassalle fi’s. — Condamne les habitans de Monlbrllicr aux dépens, occasionnés par leur intervention ,
suivant la taxe qui en sera faite.— Condamne le sieur Mignot aux dépens, à l’égard de l'hospice île
SaIers et des sieu<s V igier, Chevalier, d’Anglard, de Lassalle père et lils, bouteille de Laeonsty, el ù
l’égard du village de Clavières. — Condamne les auties parties aux dépens envers le sieur Mignot.
Réserve i statuer sur ceux faits comme ceux à faire entre la communauté des habitans de Montbellier
�•et le sieur Mignot. — Par exploits des 4 et 8 septembre 18 2 9 , le maire de la commune de Riom -ès'
Montagnes, agissant dans l’ inléiêt des villages ci-dessus dénommés, a interjeté appel de ce jugeaient,
tant contie le sieur Mignot que contre le sieur de Saint-Etienne. L e maire de la commune de SaintEtienne a aussi fait appel du susdit jugement contre les sieurs Mignot et Saint-Etienne, par exploits des
8 et 1 1 septembre de la même année. — De leur côté, Catherine Dubois, veuve Chavinier, et autres
liabitans du village de Montbellier, agissant ut sin g u li, ont encore interjeté appel de ce jugement contre
le sieur Mignot, suivant exploit du 22 septembre 1829.
Par autres exploits des 2 5 , 28, 2 9 , 3 o septembre, i er et 9 octobre de la môme armée , et 8 juin i 83 o,
M. Mignot a fait appel du jugement susdaté, tant contre MM. Vigier, d’ Anglard , de Lassalle, ChevalierD u fa u , les héritiers Fonteilles de Lacousty, it les habitans des villages de Clavières, dans la personne
du maire de la commune de Saint-Etienne, que contre M. de Saint-Etienne et les administrateurs de
l Liospice de S alers, comme premiers créanciers inscrits de la succession de M. de Saint-Etienne.
Enfin , par exploits des 29 avril , 10 et 18 mai i 83 o , M. de Saint-Etienne a également fait appel du
susdit jugement contre les sieurs Vigier, d’ Anglard, de Lassalle, C hevalier-D ufau, les héritiers Fonteillcs de Lacousty et les habitaus de Clavières. — Toutes les parties ont comparu, soit sur ces appels ,
soit sur les significations d’arrêts de jonction qui ont été obtenus les 3 mars et 1 er décembre i 8 3 o. Par
ces arrêts, les appels ont été joints; et par celui du i er décembre i 83 o , il a été en outre ordonné que
les maires des communes de Riom-ès-Montagnc et Saint-Etienne justifieraient, dans le mois^d’un arrêté
du conseil de préfecture du département du Cantal, portant autorisation d ’interjeter appel du susdit
jugement du 2 avril 1829. C ’est en exécution de cet arrêt que les maires des deux communes ont rap
porté les deux arrêtés du l 5 janvier i 8 3 i , lesquels arrêtés les autorisent à ester en justice devant la
cour sur les appels par eux interjetés du susdit jugement du 2 avril. — Les parties ont respectivement
fait signifier leurs moyens de défenses. — Indépendamment des titres et moyens présentés en première
instance, le sieur de Lassalle a invoqué une lettre sans date précise , à lui écrite par M. de Sl-Etienne ,
tim brée
et enregistrée à Riom , le 29 avril 1 3 3 « , par laquelle ce der nier annonce que le Gouvernement
ayant l’intention de restituer aux anciens émigrés les forêts ayant moins de cinq cents arpens d’étendue ,
et ajoute ce qui suit : « Ainsi ma fo rêt de Gravières ne les ayant pas {/es cinq cents arpens) , tu te chaufferas,
mon bon am i, à ton a ise , d ’après ton titre, d
Les habitans du village de Pons ont aussi invoqué les dispositions d’ un jugement en date du 16 prairial
an 9 , rendu au tribunal concctionnel de M auriac, entre l’ agent foiestier de la maîtrise de S a in t-F lo u r,
et les nommés Rispal, dudit village de Pons, duquel il résulte que lesdits Rispal auraient été renvoyés
d’ une plainte contre eux dirigée par l’administration forestière, à raison de l’enlèvement dans la foret
d’Algère d un arbre abattu par les vents. — Dans l'intérêt des communes appelantes, on a encore argu
menté d un acte reçu de M u rât, notaire à Riom-ès-Montagnes, sous la date du 3 o nivôse an 5 , par lequel
divers individus agissant ut singuli, et appartenant aux villages de R io m , chez Mouguère, L a s s ilio l,
�Som’gheac, les Planchetle*, les Ribes-Soutrannes, Embesse , les Ribes-Soubrannes , Cbâtcauneuf, les
Moulins el Pons, se sont réunis et ont nommé un garde particulier pour veiller à la conservation de la
forêt d’Algères, dans laquelle ils ont, disent-ils, un droit d’ ussge immémorial et fondé sur la sentence
de i 5 ia — Pendant l’instance d’appel, le sieur Vigier est décédé , et postérieurement le sieur Fonteilles
a repris à son lieu et place. — Par son écriture, contenant l’énoncé de ses moyens, le sieur Mignot a
conclu à ce que dans le cas d ’admission de quelques-uns des susdits droits d’usage et de rejet de sa de
mande, en diminution du prix de son adjudication, le sieur de St-Etienne fut tenu de l’indemniser de
la valeur desdits droits en principaux, intérêts et fra is.— Pendant les plaidoiries, le sieur Mignot a
produit un très-grand nombre de procès-verbaux dressés contre plusieurs individus habitant les villages
ci-dessus dénommés, pour raison de coupes de bois par eux faites dans les forêts ayant appartenu à la
famille St-Etienne. — Lors de la plaidoirie de la cause, l’ avorat du sieur Mignot a soutenu que par les
mots u»age et chauffage, l’ usager devait être restreint à prendre du bois pour son chauffage, et que
l ’application de ce principe devait être faite à la cause. — C’est eu cet état de choses que la cause a
piésentc à juger les questions suivantes :
P O IN T D E D R O IT . Les titres invoqués par les prétendus usagers sont-ils rapportés en forme pro
bante? — En admettant que les litres dont argumentent les maires des communes de Riom-ès-Montagne
et Saint-Etienne, dans l’intérêt des villages qui sont appelans, soient réguliers , les droits d’ usage ré
clamés ne sont-ils pas prescrits et éteints, soit à défaut par les usagers de justifier d'une jouissance lé
gale, en d’autres termes de prouver par écrit la délivrance qui leur aurait été faite par le propriétaire
de la forêt ou de ses préposés, soit à défaut de production de leurs titres dans les formes et délais voulus
par les lois de l’an 1 1 et de l’an 12 ? — Les babitans de Lacously, ut universi, peuvent-ils se prévaloir
des actes des 8 décembre i 5 2 g et 20 décembre i 5 3 3 ? — Le récépissé des titres du village de Partus, à
eux délivré le 21 messidor an 1 1 , par le secrétaire de la sous-préfecture de M auriac , n’ayant été suivi
d’aucune décision ou arrêté de l’administration, peut-il être considéié comme étant s uf f i s a nt pour re
connaître leur prétendu d r o it, ou au moins comme interrompant la prescription ? — L e jugement du
16 prairial an g peut-il être davantage une reconnaissance en faveur des habitans du village de Pons ?
L ’arte du 3 o nivôse an 5 , portant nomination d’un garde, doit-il être c o n s i d é r é comme une preuve
écrite de la possession des habitans y dénommés , surtout dès que ces individus y figurent ut smguli ; que
dans la cause, on réclame un droit pour le corps commun des villages , dès qu enfin cet acte n’a été con
tradictoire avec aucune partie intéressce, ni avec la famille S a i n t - E t i e n n e , ni avec 1 Etat qui la repré
sentait? — N’y ayant point d’appel de la part des habitans de M o n t b c l l i e r ut singuli, contre le corpa
commun du même village de M onlb ellier, de la disposition qui a rejeté leur intervention , leur appel
qui n’a été dirigé que contre le sieur M ig n o l, peut-il produire un résultat quelconque ?
Les droits réclamés par les sieurs de Lassallc , Fonteilles , héritiers du sieur V igier ; d’ Anglard , Clievalier-Dufau , les héritiers Fonteilles de Lacousty et les habitans de Clavières, sont—ils justifies et ont-
�ils été légalement conservés? — L e droit du sieur de Lassalle n’ est-il pas dans tous les cas reconnu par la
lettre de M. de Saint-Etienne, qui a été timbrée et enregistrée le 29 avril i 8 3 i ? — Les habitans de
Clavières peuvent-ils se prévaloir des arrêtés et décisions rendus en faveur de M. Armand, encore bien
que dans ces arrêtés et décisions ils 11e soient pas en qualité ? — Est-il dû aux usagers dont les droits
sont maintenus des dommages-intérêts pour leur non-jouissance depuis le jugement qui a prononcé le
séquestre des forêls adjugées au sieur Mignot? — Est-ce le cas de faire estimer ces dommages-intéréts
par des experts ? — De quelle époque ces dommages-intérêts sont-ils dus au sieur Chevalier? — Com
ment doivent être interprétées ces stipulations de droit d’usage et de chauffage? — Après le dépôt d’un
cahier des charges pour parvenir à la vente de biens immeubles dépendant d’ une succession bénéficiaire,
peut-il y être fait des additions sans qu’elles soient autorisées par un jugement émanant du tribunal qui
a ordonné la vente? — Le tribunal civil de Mauriac a-t-il bien jugé, en décidaut qu’il 11’avait pu être
rien ajouté au cahier des charges après l’adjudication préparatoire, et que l’addition faite par le sieur
Saint-Etienne devait être regardée comme non avenu, étant faite au préjudice des créanciers?
Dans l’espèce, les additions qui sont relatives à la diminution proportionnelle du prix de l’adjudication
doivent-elles sortir effet surtout dès que le sieur Mignot u’cii a fait aucune mention dans la notification
de son titre d’acquisition aux ciéanciers inscrits des sieurs de St-Etienne ? — L ’appel du sieur Mignot
contre le sieur de St-Etienne, pour cette même diminution de p rix , est-il fondé? — La demande en ga
rantie du sieur Mignot contre le sieur de St-Etienne , n’ayant pas été formée en première inslance, ne
doit-elle pas être déclarée non-recevable quant à présent ? — Quitte des dépens ? — Pour minute ; signé
Veysset, avoué.
J
Signifié les présentes qualités i ° à M* Jean-Pierre Tailliand, avoué de MM. les Maires de Riom cs-M ontagne, et Saint-Etienne, ès-qualités qu’ils agissent, soit comme représentant les liabilans des
villages qui sont appolanset du village de Clavière, de MM. Fonteilles, héritier de M.Vigier, CbevalicrDufau, d’Anglard et le» héritiers Fonteilles de Lacousty; 2 ° à M* Antoine Savarin, avoué de Catherine
Dubois et autres habitans de Montbellier; 3 ° à Me Jeau-Baptisle-Victor Rougier, avoué de M. de SaintEtienne; 4 “ à Me Pierre-IIippolyte Allary, avoué de M. de Lassalle; 5 o à Me Antoine Gayte-Larigaudie,
avoué des administrateurs de l’ hospice de Salers, et ce pour parvenir à l’expédition de l’arrêt rendo entre
les parties et sans aucune approbation préjudiciable dudit arrêt — Riom , le 28 juin i 8 3 i, coût 3 franct
5o centimes, non compris l'enregistrement, signé Collât, liuissier-audiencier.
M ” Tailliand et Allary ont déclaré former opposition aux présentes qualités. Riom, ce 28 juin i 8 3 i,
s i g n é Collât, huissier.— Enregistré à Riom, le 29 juin 1 8 3 1, folio i 5 o,verso c. 12, reçu 5 francs 5 o cent,
dixième compris, signé Mioche, receveur. — Suit 'ordonnance intervenue sur l’opposition ci-dessus
: Vu les qualités ci-dessus et des autres paris transcrites; l’opposition formée à ¡celles par
M e Tailliand et Allary, avoués ; la sommation faite à la requête de M* Veysset, avoué du sieur Mignot,
mentionnée
¿ M * Tailliand, avoué de MM. Dauglard el aulie», et à M* Allary, avoué de M. de Lassalle, de comp*~
�raîtreen notre hôtel; ce jourd’hui, à trois heures de relevée, pour déduire les cause* et moyens de leur
opposition ; — Ouïs les avoués en leurs observations; —Nous Antoine Thévenin , président de la seconde
chambre civile de la cour royale de Riom, chevalier de l'ordre royal de la Lcgion-tl’IIon neu r; __Consi
dérant que lors de la plaidoirie de la cause, l’avocat du sieur Mignot a élevé la question de savoir quelle
devait être l’étendue des mots usage et chauffage, que parsuitc, celte question a été examinée el décidée
par la cour ;
Ordonnons qu’il sera fait mention de cette circonstance dam le point de fait, qu’en outre une question
sera posée quant à ce, dans le point de d io il.— Fait et oïdonné en notre hôtel, à Ilium , le 3 o juin i 8 3 i,
cinq heures du soir. Signé T h éve n in , président — Après avoir oui à l’audience du vingt-un avril der
n ie r, Tailliand, avoué des habitans de la commune de Riom-ès-Montagne, en ses conclusions, BtrnetRollande, leur avocat, dans une paitiede sa plaidoirie; à celle du lendemain ledit Mc Ber net, dans la
suite de sa plaidoirie; ledit M e Tailhand, avoué des habitans de Saint-Etienne, M ‘ Tailhand a îu é , leur
avocat, dans sa plaidoirie; Me Savarin , avoué des liabitans de Montbellier, en ses conclusions ; Me C halu s, leur avocat dans sa plaidoirie; ¡VIe Veysset, avoué du sieur Mignot, en ses conclusions, à celle
du vingt - trois dudit; M e Allemand, avocat de ce de rn ie r, dans une partie de sa plaidoirie,
à celle du 27, ledit Me Allemand, dans la suite de sa plaidoirie; M e Allary, avoué du sieur de L assale , en ses conclusions ; Me Bayle-Charmensat, son avocat, en sa plaidoirie ; à celle du 28 , T ailhan d ,
avoué du sieur Fonteilles, en ses conclurions; Tailhand aine, son avocat, en sa plaidoirie ; Lafond ,
avoué du sieur Dubois de Saint-Etienne , en ses conclusions ; M e de Vissac, son avocat, en sa plaidoirie ;
Larigaudie, avoué des hospices de S alcrs, en ses conclusions ; M e Duelozel, leur avocat, en sa plaidoirie ;
Tailhand, avoué dej sienr d ’Anglard, C h e valier-D ufau , en ses conclusions; M e Bernet, leur avocat,
en sa plaidoirie ; ledit M ' B ernet, dans sa réplique , pour la section de Riom-ès-Montagne; et encore
ledit M ' B ernet, en remplacement de Me Tailhand a în é , dans sa réplique pour les habitans de SaintEtienne ; Me Chalus avocat des habitans de Montbellier, dans sa réplique; M® A l l e m a n d , avocat du
sieur Mignot, dans sa réplique; à celle du \ mai su ivan t, M. Grenier, avocat-général, pour M, le
procureur-général, en ses conclusions verbales et motivées, et qu’à cette dernière audience la C o u r ,
après avoir commencé sa délibération , attendu les difficultés que présente la cause el la longueur de la
discussion, a eu déclaré la continuer en chambre du conseil, pour l’arrêt être prononce a l’audience de
ce jour. — Statuant sur les différeus appels qui ont été interjetés, du jugement rendu par le tribunal
civil de Mauriac, le 2 avril 182g.
En ce qui touche ceux émis tant contre le sieur Mignot que contre le sienr Dubois de St-Etienne ,
par le sieur Fonteilles, maire de la commune de Riom-ès-M ontagne, comme représentant les villages
de Châteauneuf hau t, Chàteauneuf bas, ou les M oulins, Sanégrat, Etnbesse, les Ribes-Soubrannes et
Soutiennes, les Planchettes, Lassiliol et Barthes, Pons, Chez-Mougueyres et I.acousty. — Et p a rle
sieur S a u v a t , maire de S t-E tien n c, agissant comme représentant les habitans et communauté dca v il
�lages du Partus , de Vousseyre, de Mazou et du bourg de Saint-Etienne.— Déterminé par les motifs
exprimes au jugement dont est appel, lesquels étant piisdu fonds, même du droit, rendent inutile l’exanieu des questions qui se rattacheraient, soit à la forme des titres produits, soit à la qualité dans laquelle
agissaient les paities qui figuieot auxdits actes. — Et ajoutant à ces motifs, iclativement au village de
Lacousty. — Attendu que les titres des 8 décembre 1529 et 20 décembre i 5 3 5 , par lui invoqués , l’ont
été également par le village de Montbellier, et ont servi de fondement à l’allocation qui a été faite aux
habitans de ce village de partie du bois d ’Angère et de Combechèvre. — Attendu qu'il ne peut être fait
double emploi de ces titres ; que les habitans de Montbellier, dans l’état des choses, seraient les seuls
i n t é r e s s é s à coutester la prétention du village de Lacousty, et que les habitans de Montbellier n’ont pas
été intimés sur l’ appel et dans l’ intérêt des habitans de Lacousty. — Relativement au village de Partus.
Attendu qu’en admettant la régularité du récépissé délivré le 2 1 messidor au xi , par le secrétaire de
la sous-piéfecture de M auriac, il en résulterait seulement que le dépôt des titres des habitans de Partus
les aurait relevés de la déchéance prononcée par les lois des 28 ventôse an 1 1 et i 4 ventôse an 12 , maifr
que leurs droits n’ayant été reconnus par aucun acte émané de l’administration, demeureraient tou
jours sou» le poids de la prescription trentenaire qui se trouvait acquise à l’époque du dépôt des titres,
et non interrompue par l’exercice d’une possession régulière et légale. — Relativement au village de
Pons. — Attendu que le jugement intervenu correctionnellement le 16 prairial an g , entre l’agent fo
restier de l’ancienne maîtrise de Saint-Flour, poursuites et diligences du commissaite du Gouvernement
près le tribunal de M a u r ia c , d’ une part , et Louis Rispal et son neveu, d’autre p a rt, outre qu’ il statue
vt singuli contre ces deux individus, qui n’avaient aucune qualité pour représenter le corps commun des
habitans de ce village , ne porte aucuue reconnaissance du dioit dont cxcipaient les prévenus, et sc
borne à les renvoyer, quant à piésent, de la plainte coutie eux intentée; que ce renvoi laissait entière
la question de prescription, du moins pour le passé, et celle de la déchéance qui plus tard aété prononcée
par les lois des 28 ventôse an 1 1 et 14 ventôse an 12.
Relativement à celles des sections, dont quelques habitans figurent ut singuli dans le procès-verbal de
nomination d’un gaide pour le bois de Lachamp, qui est sous la date du 3 o nivôse an 5 . — Attendu que
cet acteaété fait ut singuli par un p •t it nomhrëdes habitans de chacunede ces sections ; que les partie» qui
y figuient dénient formellement à d’autres les droits qu’il» prétendent appartenir à eux seuls ; que le
garde étant ir.ême nommé pour maintenir ces prétendus droits exclusifs, le piocès-vei bal dont il s’agit
»erait plutôt contraire que favorable aux pi ¿tentions ut universi de ces différentes sections. — Attendu ,
d’ailleurs, que si l’an êt de la Cour et celui de la Cour de cassation, rendus dans l'aflaire de dame Miramon, ont admis d’auties actes de possession que ceux procédant d’ une délivrance préalable, ces actes
doivent toujours avoir ce caractère de légalité, qui seule peut leur d o n n e r de la valeur.
Attendu que les faits interruptifs de piescriptiou , en tant qu’ils ne seraient pas la possession ou déten
tion réelle de la chose ou du droit, ne peuvent Clio que des actes conliadicloijcs et respectivement
�consentis, ou des demandes dûmrnt notifiées aux termes dos arlicles 2 2 4 a , 2243 et 2244 du code ci v i l ,
<jui i.’a fait à cet rgaid que reproduire 1*»« ancien* principes. — Attendu qu’ un procèd-verbal fait à huis
clos, bois la présence des paitie* inté restées, et sam les }' avoir appelées, qui au surplus n’a été ni
communiqué ni notifié dans les temps à l’autorité administrative, qui repiéaentait le sienr de SaintEtienne, n’est ni un fait de possession rétlle et naturelle, ni un acte judiciaire ayant caractère pour
interpeller et pour être interruptif de prescription. — Eu ce qui touche Catherine D u b o i s , veuve
Cbavignier, Jacques Raboisson, Louis L’ubois et consorts, tous liabitans du village de Montbellier ,
agissant ut singuli, qui ont été iutervenans en première instance et qui sont appelans en la Cour, parties
de Chalus. — Attendu que le sieur Mignot n’a point appelé de la disposition du jugement de première
instance, qui a ordonné la délimitation du bois d ’Augère, comme appartenant à la communauté de
Montbellier, de celui adjugé au sieur Mignot ; qu’ il e*t indifférent pour ce dernier que le droit qui a
été reconnu appartenir aux liabitans de ce village soit attribué à quelques-uns d’eux exclusivement
aux autres, ou à tous ut singuli, au lieu de leur appartenir ut universi. — Attendu que les premiers
juges, en reconnaissant dans leurs motifs que d’après les titres représentés par les habitans de Mont
pellier, l’ on devait tenir pour constant que le droit par eux réclamé appartient à la totalité des habi
tans du village, et que l ’acte du 4 juin 1789 ne pouvait être opposé valablement à des tiers qui n’ y au
raient pas été parties contractantes, n’ont pas entendu accorder un droit de copropriété à ceux des
habitans actuels du village de Montbellier, qui ne représenteraient pas à titre successif ou à titre oné
reux et particulier, ceux des anciens propriétaires qui ont acquis originairement la partie du bois
d’ Augère dont il s’agit ; qu’il restera toujours aux habitans de Montbellier à établir quels sont ceux
d’entr’ enx qu i, d’après les actes des 8 décembre 152 g, 20 décembre i 5 3 3 , 2 1 et 22 février i 6 4 i , ou
tous autres qu’ ils pourront rapporter, doivent y prendre part, à l’exclusion de ceux qui n’ y auraient
aucun droit ; que le sieur Mignot ayant appelé le maire de Saint-Etienne à représenter les habitans du
village de Montbellier, en les considérant comme formant un corp» commun, celui-ci a dû figurer
pour la conservation des intérêts de tous ceux qui auraient des droits à p r é t e n d r e , droits dont le maire
n’a pas d û se rendre le dispensateur et 1 arbitre ; que ce sera à ceux des habitans dudit village qui ré
clament à titre particnlier, après que les droits dont il s’agit auront été fixés par la délimitation or
donnée par le jugement dont est appel, avec le sieur M ignot, à faire régler si la portion qui leur sera
attribuée devra appartenir à tous les habitans ut universi, ou à quelques-uns d’entr’eux seulement ut
singuli. — Mais que dans l’état où la cause s’est présentée en première instance, et où elle se présente
aujourd’ hui sur l’appel, ce n’otai t pas le cas d examiner la prêtent ion des parties de Chalus, et que sous
co ¡a p p o rt, c’est avec juste motif que les premiers juges ont rejeté leur intervention.
A t t e n d u a u surplus que n ’ y a yant pas eu de la part des parties de Chalus d’appel régulièrement
formé contre la communauté des habitans du village do Mont b e l l i e r , en f aveur de laquelle il a été pro
noncé par les premiers juges, il y a nécessité do mai ntenir la disposition du j ugement de première i n i -
�lance en ce point, en réservant aux parties de Clialns à exercer ultérieurement, si bon leur semble,
contre qui et ainsi qu’il appartiendra, telle action qu’elles aviseront pour raison des droits qu’ elles
prétendent leur appartenir ut singuli, sur la paitie du bois d’ Augères dont il s’agit.
En ce qui touche les appel* interjetés, tant par le sieur iVIignot que par le sieur Dubois de SaintEtienne, contre le sieur Bernard de Lassalle, partie de Bayle ; le sieur Isaac-Charles-Edouard Fonteilles,
agissant eu q u a l i t é de légataire universel du sieur Vigier ; le sieur Pierre d’ Anglard , le sieur Antoine
Chevalier -Dufau , le sieur Jean-François S a u v a t , rnaiie de la commune de Saint-Etienne, comme re
présentant les habitans de la section de Clavières, parties de Bernet-Rollande j Anne Choriol, veuve
de Pierre Fonteilles; Marie-Jeanne, Antoinette, Catherine et Jean F onteilles, ses enfans , parties de
Tailhand. — Attendu que les forêts dont il s’agit avaient été attribuées à l’E t a t , du chef du sieur do
S ain t-E tie n n e, ém igré, et qu’elles n’ont été réintégrées dans ses mains que par l’ effet de la loi du 5
décembre i 8 i 4 . — Attendu que la remise faite par cette loi a eu lieu sous la condition que tous les droits
acquis antérieurement à des tiers, par actes judiciaires ou administratifs, passés avec eu x, sortiraient
leur plein et enlier effet, et que dès-lors le? anciens propriétaires ne les ont recueillis qu’avec les droits
et les charges qui les affectaient dans les mains do l ’ Etat. — Attendu que les arrêtés administratifs q u i,
soit sur le dépôt des titres fait en conformité des lois de ventôse de l’an 1 1 et de l’an 1 2 , soit sur des pé
titions et demandes des usagers, ont reconnu et consacré leurs droits, sont aujourd’ hui inattaquables. —
Attendu que ces arrêtés ne sont pas seulement à considérer comme de simples avis ; qu’ ils sont des ré
solutions contensieuses devenues irrévocables, avant la loi du 5 décembre i 8 i 4 , pour n’avoir pas été
attaquées devant l’ autorité supérieure compétente. — Attendu qu’en les supposant même rendus hors
de la présence et du concours des agens de l’administration forestière, ils auraient toujours le caractère
d ’actes contradictoires ématrans de l’E t a t , lors propriétaire, ou quoique ce soit des administrations
départementales qui stipulaient pour lui ; qu’en tout cas, et quelque soient ces actes, étant formellement
maintenus par l’article i*r de la loi précitée, ils vaudraient comme ratification, et auraient effacé toutes
prescriptions et déchéances préexistantes.
A d o p t a n t a u s u r p lu s les m otifs d ’a p rè s le squ e ls les p r e m i e r s ju g e s ont a c c u e illi les pré te n tion s do
chacun
des i n t im é s , et a jo u ta n t en ce
q u i re g a r d e quelques-uns d ’eux. — Relativement a u s ie u r
de Lassalle. - - A t t e n d u q ue 6on droit a été fo r m e lle m e n t re c o n n u p a r le s ie u r de S a i n t - E t i e n n e , ain s i
q u ’ il ré s u lte d u c o n ten u en un e le t t re q u ’ il lu i a é c r it e a n t é r ie u r e m e n t à la re s t it u t io n , la q u e l l e a été
e n r e g is t r é e aous la date du 2 9 a v r i l d e r n i e r ; q ue si l’ on ne p e u t r e n o n c e r à l'a v a n c e à la p r e s c r ip t i o n
q u i n est pas e n c o r e a c q u i s e , rie n dans le d r o it ne s’oppose à la renonciation de la p r e s c r ip tio n a c q u i s e ,
lo r s m ê m e q u e ce tte r e n o n c ia tio n serait s u b o rd o n n é e à un cas éventuel. — Relativement au v i l l a g e de
C l a v i è r e s . — A t t e n d u q u e le dépôt de scs t it r e s , fait a u s e c r é t a r ia t de la s o u s - p r é f c c t u r e de M auriac,
est r é g u l i e r , a u x termes des lois dos 2 8 ve n t ô se an 1 1 et 1 4 ventôse an 12 , et q u e le récépissé d é l i v r é
p a r le a e c i é t a i r e , le i 3 messidor an 1 1 , d o it f a i r e p le in e foi en j u s t ic e j q u ’il ne p e u t ê t re a r g u é d’ inefl*
(
�oacilé, sous prétexte quele secrétaire d’ une sous-préfacture n’était p u fonctionnaire public, mais seu
lement un agent particulier, parce qu’en ordonnant le dépût au secrétariat de la sous-préfecture , la loi
que l’on ne peut soupçonner de d o l , entendait nécessairement qu’ un acte passé au secrétariat fut vala
blement certifié par l’agent «emplissant le ministère de secrétaire, qu’ en lui conférant par là des fonctions,
elle lui donnait des pouvoirs et un caractère suffisant pour 1rs remplir, ce qui. écarte le moyen de dé
chéance dont a cherché à “e prévaloir contre le droit réclamé par le village de Clavières — Que pour
ce qui est de la prescription, elle a été effacée par la reconnaissance formelle d ’ une possession sans trouble
de la part des habitans de ee même village, qui se trouve consignée dans deux arrêtés rendus par l’ad
ministration du département du ca n ta l, et par le préfet du même département, les i 3 gei minai an 8 et
3 o septembre 1 8 0 7 , sur les pétitions de M. Arm and, aujourd’ hui représenté par le sieur C h e valie rDufau, dans lesquelles il a été déclaré que les habitans du lieu de Clavières ont incontestablement le d ro ii
d’usage et de chauffage dans la forêt d’Algères ; qu’ il est vrai que le village de Clavières n’est pas en
qualité dan* ces air êtes, mais qu’aucune loi ne s’opposant à ce que celui qui serait admis à la preuve
écrite d’ un fait, ne puisse exciper d ’une reconnaissance consignée dans un acte authentique et émanant
de son contradicteur légitime ; il s’en suit que les droits réclamés par le village de Clavières lui ayant été
reconnus de la manière la plus expresse et la plus positive par ces deux arrêtés, ils forment pour eux un
titre irrévocable, en même semps qu’ils leur attribuent un droit acquis, qu’un ne saurait désormais
leur contester.
En ce qui touche les appels incidens qui ont été exercés parles intimés ci-dessus dénommés, relative
ment aux dommages-intéiêts auxquels ils ont conclu. — Attendu que s’ il est de principe que les droits
facultatifs d’ usage et de chauffage ne tombent jamais en arrérages, il doit y avoir exception pour le cas
où l’ usager a été empêché d’exercer son droit par le fait du propriétaire du fond grevé ; que ce fait comme
tous ceux qui causent préjudice, donne lieu à des doinrnagcs-intérèts, aux termes de l’aiticle i 3 8 i du
code civil.
Attendu que ces dommages consistent dans la valeur des objets dont on a été privé et qu’on a dû ou
pu se procurer ailleurs; — Attendu que la privation de leurs droits remontent pour les usagers qui sont
et incidemment appelants au jour où le sieur Mignot s’est fait nommer gardien séquestre des fo-
i n t i m é s
Tets dont il s’agit. — Attendu que les promiors juges ont ommis de statuer sur le» demandes en indemnité
qui leur avaient été soumises de la pari des mêmes usagers, à l’exception du sieur Chcvalier-D ufau ,
successeur de M. Aimand qui a réclamé pour la première fois en cause d’appel;
E t à l’égaid dudit sieur C hevalier-D ufau; attendu que sa demande 11c peut être accueillie par la cour
que relativement aux dommages qu’il a éprouvé depuis l’instance d’appel, aux termes do l’article 4 (i4
du Code de procédure civile; que pour les préjudices antérieurs il ne peut que lui être réservé de se
pourvoir ainsi qu’ il avisera devant les juges competens;
Attendu que ces dommages-intéiêts ne peu
vent être convenablement appréciés que par experts à ce connaissants, eu égard au caractère et à l’étcn -
�due des droits concédés par les titres; — E t pour prévenir une difficulté que le siear Mignot, parti«
d’Allemand, a élevéu en la cour, en prétendant que le droit d’ usage et de chauffage ne peut et ne doit
s'entendre que de la facullé de prendre le bois nécessaire à son chauffage.
Attendu que l’ usage et le chauffage constituent deux droits essentiellement distincts, que si le droit de
chauffage lorsqu’ il est ainsi spécifié, doit ctre limité à la délivrance du bois à brûler, le droit d’ usage n’a
d’autre borne q u e celles qui sont prescrites par les titres de concession et la possession on les réglemens
sur la police des forêts; qu’ainsi toutes les fois que les actes de concession, comprennent en même tems
le droit d’usage et de chauffage, les experts devront reconnaître que les usagers ont la faculté de réclamer
non-seulement le bois nécessaire à leur chauffage, mais encore les bois dont ils peuvent avoir besoin
pour réparations ou constructions, et opérer d’après ces bases: — En ce qui touche l’appel inteijetté par
le sieur Mignot, contre l’ hospice de Salers, partie de Duclozel. — Egalement déterminée par les motifs
des premiers juges. — Et attendu que les acquéreurs de biens compris en l’adjudication du 3 mai 1 8 2 5 ,
en notifiant cette adjudication aux créanciers inscrits, en conformité de l’art. 2 i 83 du Code civil, et en
faisant connaître le prix et les charges faisant partie des conditions de la vente, se sont bornés, d’après
une copie imprimée de cette notification, qui se trouve jointe au dossier du sieur D ’anglard, l’ une des
parties de la cause, à déclarer, comme charges de la vente, que les adjudicataires seraient tenus de
prendre les immeubles dans l’état où ils se trouveraient au moment de l’ adjudication et de souffrir tou
tes les servitudes passives dont ils se trouveraient grevés sans pouvoir prétendre à aucune diminution du
p rix ni exercer aucune demande en garantie pour raison de dégradations, défaut de mesure ni quotité
sans
y rappeler l ’ addition au cahier des charges dont le sieur Miguot a prétendu se prévaloir en première
instance et sur l ’ apprl.
Attendu que, par cette notification, qui doit avoir été faite dans les mêmes termes, à tous les créanciers
in scrits, il se serait formé entre le sieur Mignot et les hospices de Salers, comme avec les autres créan
ciers, un contrat judiciaire d’après lequel le sieur Mignot se serait soumis au payement du prix do son
adjudication, avec la charge de souffrir les servitudes passives dont les bois par lui acquis se trouvaient
grévés, sans aucune diminution du p rix , ce qui le rendrait encore non-recevable à invoquer la nouvelle
addition portée au cahier des charges que les premiers juges ont justement écartée, en la considérant
comme non-écritc, et non-avenue.
En ce qui touche l’appel que le sieur Mignot a interjette contre le sieur Dubois do Saint-Etienne, en
même temps que contre l’ hospice de Salers, le 8 juin r 83 o — Attendu que cet appel a eu pour objet delà part
du sieur Mignot, d’obtenir sur le prix de son acquisition la diminution des droits d’usage qui seraient
appartenir à des tiers; que la cour ayant reconnu, relativement à l’hospice de S alers, que dans
l’ intérêt dudit hospice et des autres créanciers Saint-Etienne, la disposition du jugement dont est appel
reconnus
<jui a rejeté la clause additionnelle porlée au cahier des charges, et par suite la prétention du sieur M i
gnot devaitêlre maintenue, il y a môme raison de Je décider ainsi v is-à -vis le sieur de Saint-Etienne
�puisque l’appel du sieur Mignot, à l’égard de ce dernier, n'a été fonde que sur la même cause et n’a clé
appuyé que par les mêmes motifs employés conlre l’hospice de Salers. — En ce qui touche la demande eu
garantie que le sieur Mignot a exercée contre le sieur de Saint-Etienne par les conclusions subsidiaires
qu’ il a prises lois de la plaidoirie do la cause — Attendu qu’ une demande en gaiantie constitue dans ses
rapports, entre le garant et le garan ti, une demande principale qui est soumise aux deux degrés de ju
ridiction.— Attendu que celle dont il s’agit n’a pas élé foimée en cause principale, mais uniquement
sur l’appel, ee qui la rend non-recevable, et dispense la cour d'en examiner le mérite, au fond.
Pat ces diflerens motifs, — i,a cour, vidant le délibéré en la chambre du conseil prononcé à son au
dience du 4 mai dernier.— En ce qui touche les appels interjetés par le sieur Fontéilles, en sa qualité de
maire de la commune de Riom-ès-M ontagne, comme représentant les villages de Chêteau-Neuf-Haut
Château-Neuf-Bas, ou des moulins, Songeât, Embesse, les Ribcs-Soubi anes et Soutranes, la Planchette
Lassiliol et Barth e, Pons, cher Mougueyte et Lacousty ; par le sieur Sau va t, maire de Saint-Etienne
comme représentant les habitans des villages du Parlus, de Vousseyre, du Mazou el du bourg de SaintE tien n e ; et par les liabitans du village de Montbellier, agissant ut sin gu li; met lesdils appels au néant,
ordonne que le jugement dont est appel sera exécuté quant à eux selon sa forme et teneur, sauf anxdits
Labitans de Montbellier à exercer après la délimitation ordonnée par le jugement dont est appel, contre
qui et ainsi qu’ il appartiendra, telle action qu’ ils aviseront pour raison desdioits qu’ils prétendent leur
appartenir ut singuli, sur la partie du bois d’Augère qui a été attribué par le même jugement à la com
munauté des babitans du même village.
E u ce qui touche les appels interjetés par les sieurs Mignot et Dubois de Saint-Etienne, contre les sieurs
Danglard, Delassalle, Fontcilles, Vigier, Chevalier-D ufau, la veuve et les héritiers Fonteilles de L a cousty, et les habitans du village de Clavières, met également lesdits appels au néant; ordonne que le ju
gement dont est appel, sortira à l’ égard des intimés, son plein et entier effet. — E t faissant droit sur
l ’appel incident des sieurs Dauglard, Delassalle, Fonteilles, Vigier, Chevalier-D ufau, la veuve et les
héritiers Fonteilles de Lacousty, et des habitans du village de Clavière, condamne le sieur Mignot à les
indemniser, à titre de dommages-intérêts, de la non-jouissance des droits d’usuge et de chauilagc dans
lesquels ils ont été maintenus par le jugement dont est appel et dans l e s q u e l s ils le sont aussi par le pré
sent arrêt, s a v o ir : Les sieurs Danglard, Delassalle, Fonteilles, Vigier, la veuve et les héritiers Fon
tcilles de Lacousty et les habitans du village de Clavières, depuis le jour où le sieur Mignot a été nommé
gardien séquestre des forets grévées desdits droits d’ ueagc et de c h a u f f a g e , et le sieur Chevalier-Dufau,
depuis la demande qu’ il en a formée sur I appel, sauf à se pourvoir pour les préjudices antérieurs qu'il
prétendrait avoir éprouvés, contre qui et ainsi qu il avisera.
Et pour être procédé à l’apprécialion et fixation desdits dommages-intérêts, ordonne q u e , dans les
trois jours de la signification qui sera faite du présent airèt à personne ou domicile, les parties convien
dront d’experts, sinon, et faute de ce faire dans ledit d é la i, nomme pour y procéder, les sieurs Rousse-
�lot-Rixarn rt M eilh a c -G ilb 'rte it, experts, nommés par le jugement dont est appel, pour la délimitation
ordonnéeparicelui, lesquelsouceux.qui seront nommés par les parties, aprèsavoir piétésermentpar devant
M Mailhes, doyen des juges du tribunal de M au riac, commis par le tiibunal, et que la cour commet au
besoin de nouveau, en procédant à la fixation desdits dommages-intélêts, d’après les titres qui leur se
ront produits par les partie*, considéreront que l’ usage el le chauffage constituent deux droits distincts;
que si le droit de chauffage doil être limité à celui de piendre du bois à briller, les droits d’ usage et de
chauffage réunis confèrent aux usagers la faculté de réclamer, non-seulement le bois nécessaire à leur
chauffage, mais encoie le bois dout ils peuvent avoir besoin pour réparations ou constructions , et de
vront opérer d’après ces bases; et dans le cas ou quelques-uns des experts ci-dessus indiqués seraient
décédés, ou autrement empêchés, ordonne que ceux qui seront nommés en »emplacement par le tri
bunal de première instance , pour opérer la délimitation du bois d’ Augères, prescrite par le jugement
io n t est appel, procéderont aussi à la fixation des indemnités accordées aux usagers par le présent arrêt.
Ordonne qu’ il sera procédé à l’ une et à l’autre disdites opérations dans le délai de trois mois, à
compter de la signification du présent ; et que dans le cas où tl s’élèverait des contestations cuire les
parties, lors des opérations d’ experts ou de l’homologation de leur rapport, il y sera statué par les pre
miers juges, tant par rapport a u x indemnités, que relativement à la délimitation, sauf l’appel en la
cour s’ il y a lieu.
Sans 8’a trèler à l’appel interjeté pat le sieur M gnot, vis-à -v is l’ hospice de Salers, qui est mis au
néant; maintient la disposition du jugement de ptrnnère instance, qui a déclaré les clauses addition/ ntlles au cahier des charges déposé li 25 mars 18 2 2 , insérées au moment de l’adjudication définitive,
supprimées comme non avenues, el par suite île laquelle il a été dit que les adjudicataires des biens des
sieurs de Sain t-Etienne seront tenus de se conformer , sans aucune restriction, aux clauses et conditions
porlces au cahier des charges dudit jour a 5 mais thaa ; ordonne qu'en ce point le jugement dout est
appel recevra sa pleine et entière exécution. — Met les sieurs Mignol cl de Saint-Etienne hors de cour,
sur l’appel du 8 juin l 8 3 o. — Déclare le sieur Mignot non recevable duns la demande en garantie qu’il
a formée en la Cour contre le sieur de S a in t - E lic n n e , saut à la itn o u v e lle r, si bon lui semble, pardevant les juges coin pet eus, toutes exceptions coût 1 ai 1 es demeurant 1 éservées à qui de droit. — Et pour
ce qui est des autres dispositions du jugement dont est appel, auxquelles il n’ aura pas été dérogé par le
présent arrêt, ordonne que ledit jugement sortira effet. — Condamne le sieur Fonteilles, maire de la
commune de Riom -ès-M ontagues, et lo sieur S a u v a i , maire de la commune de Saint-Etienne, chacun
en ce qui le concerne , aux qualités dans lesquelles il procède, à l’aitrende encourue par leur appel
resptctii el aux. dépens de la cause d’appel envers les sieurs Mignot et Uubois de Saint-Etienne.'
Condamne pareill< rneril Catherine Dubois, veuve C havignier, Jacques Haltoisson , Louis Dubois et
consorts, habitans le village rie Mont bel lie r , agissant ut sin fîu ii, parties de Chalus, à l’amende de leur
appel et aux dépens faits sur rcelui envers le sieur Miguol. — Condamne le sieui Mignot tt le sieur fle
�Sain t-Etienne, chacun en ce qui le concerne, aux amendes par eux encourues et aux dépens de la cause
d’appel envers les sieur Bernard de Lassalie, partielle B a y le ; le sieur Isaac-Cliarles-Edouai cl F o n tcilles, repiésenlant le sieur V ig ier; le sieur Pierre d’ Anglard, le sieur Antoine C h e v a lie r-D u fa u , les
habitans de la section de Clavières, parties de B e r n e ! ; la veuve el les héritiers de Pierre Fonteilles ,
paities de Tailhand ; ordonne que les amendes consignées par ces derniers sur leurs appels incidens
leur seront restituées — Condamne également le sieur Mignot aux dépens faits en la Cour envers
l ’hospice dr S a l e i s , par suite de son appel du 8 juin i 83 o . — Compense les dépens faits sur le même
appel, entre le sieur Mignot et le sieur de Saint-Etienne. — Condamne le sieur Mignot aux dépens
faits sur la demande en garantie qu’ il a formée contie ledit sieur de Saint-Etienne, en la Cour. — Et
poui ce qui est du coût du piésent arxêt, ordonne qu’ il en sera supporté uu dixième par le maire de
Riom-ès-Montagnes, un autre dixième par le maire de Saint-Etienne, chacun a u x qualités dans les
quelles il agit; un autre dixième par la veuve Chavignier, Jacques Raboissun, Louis Uubois et consois,
Jialiilansde Montbellier, agissant ut singuli ; six dixièmes par le sieur Mignot et le sieur Dubois de
Saint-Etienne, conjointement, et l ’autre dixième par le sieur Mignot seul.— Faisant droit à la demande
de Me Tailhand , lui fait distraction des dépens d’appel adjugés aux habitans de Clavièi es et aux héritiers
Fonteilles de Laeou sly,ses parties, d’apiès l’affirmation par lui faite à la Cour de les avoir avancés.—
A >a minute ont signé Thevenin, président, et Laussedat, commis-greffier. — Enregistré à Riotn , lo
28 juin i 8 3 i , folio 19 0 , verso, case 5 , irçu onze francs, 1 0 e compris, signé Mioche, receveur.
Mandons et ordonnons à tous huissiers sur ce requis de mettre le présent arrêt à exécution ; à nou.
piocuiem s généraux et à nos procureurs près les tribunaux de première instance d’y 'tenir la main ; à
tous commaudans et officiers de la foice publique de piêter main forle lorsqu’ils en seront légoIrmeuL
requis. — En foi de quoi ledit arrêt a été signé par M. le piésideut ot le greffier. — Pour expédition,
le greffier en chef d e là Cour royale de Riom , signe Garron.
�
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Arrêt. Cour d’Appel de Riom. 10 juin 1831]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
droit d'usage
hospices
coupe de bois
adjudications
droit de chauffage
experts
biens nationaux
pacage
communaux
bornage
eaux et forêts
usages locaux
Description
An account of the resource
Arrêt de la Cour d’appel de Riom du 10 juin 1831
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1831
1512-1831
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV29
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Salers (15219)
Riom-ès-Montagne (15162)
Annonay (07010)
Moussages (15137)
Mazou (domaine du)
Saint-Étienne-de-Chomeil (15185)
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Domaine public
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biens nationaux
bornage
communaux
Coupe de bois
droit d'usage
droit de chauffage
eaux et forêts
experts
hospices
pacage
usages locaux
-
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d87c2a9861c528a5635d906e10c1a347
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/
# 0
(it
PRECIS
EN RÉPONSE,
POU R
L e sieur V
Comte de B E S S E D E L A R I C H A R D IE , intimé ;
ictor
CONTRE
Le sieur Comte de G E N E S T É T D E
S A IN T -D ID IE R et le sieur CHANSON,
appelans;
,
EN PRÉSEN CE
Des sieurs et dames du C HILLEAU, ROMAIN,
V E R R IE R , et autres, intimés ;
E n publiant sa défense, le sieur de St.-D idier a cru qu’il
avoit à repousser des însinuations odieuses, et même à
se justifier contre l’allégation du sieur de Besse , que sa
creance est le résultat d’un concertfr a u d u le u x pratiqué
�entre le sieur de S t.-D id ier père et la darne de R ochechouart , veuve de Besse . S’il avoit cru apercevoir cette
allégation de fraude, comme un fait dont le sieur de Besse
accusoit sa m ère et son b eau -frère, il auroit été. conve
nable d’^ réfléchir à deux fois, et de bien s’assurer que les
paroles dusieur.de Besse ne pouvoient pas etre entendues
dans un m eilleur sens, avant de lancer contre lui de sem
blables reproches ; il eût été peut-être plus séant encore, de
la part de son gendre , de dissimuler des accusations qui ,
jusque-là n’avoient reçu aucun caractère de publicité
celle d e- l’audience eût pu suiFir au sieur de St.-D idier,
surtout dès que la lutte se fût élevée entre son beau-père
et l u i , et peut-être qu’avec un peu de réflexion , il ne se
sëroit c r u , ni obligé, ni autorisé à insinuer, moins encore
à écrire ouvertem ent, que le père de son épouse cherchoit
à le dépouiller de safo rtu n e.
M ais à com bien plus forte raison ce système de défense
doit-il paroître extraordinaire ^.lorsque l ’inspection de la
procédure apprend que ces accusations ne se trouvent nulle
part ? que le sieur de Besse, bien loin d’im puter un con
cert de fraude à la dame sa m ère et au sieur de St.- D id ie r ,
n’a fait autre chose que de rendre compte d’une circons
tance dont il d evoitla déclaration à ses créanciers, et pour
laquelle il a emprunté les propres paroles de sa mère ?
que cette circonstance de fa it, et la manière dont il en a
usé, n’imputoient de fraude à personne? qu’e n fin ,il de
meure é v id e n t, par le M ém oire du sieur de S t.-D id ier
liri«-même, que le défaut de sincérité reproché aub illetde
rj5,ooo fr. n’accusoit, ni la dame deRochechouart qui l’avoit
fait de bpnnc fo i, ni le sieur de St.-D idier père qui l’avoit
�reçu de m êm e, et qui n’en a jamais usé, ni le sieur de St.-Didier fils qui l’a réclamé sans en connoître personnellement
l’origine ? Pourquoi donc le sieur de St.-D idier a-t-il cru
que sonbeau-père l’avoit mis dans la nécessité de se justifier ?
Placé lui-m êm e, en face de la justice, entre des créanciers
auxquels il doit la vérité toute entière, et ses enfans qui, tout
en figurant parm i e u x , se trouvent dans l’ordre de ses plus
chères affections , le sieur de Besse répétera cette vérité
telle qu’elle est •, il la livrera , et à scs créanciers qui l’ont
réclam ée, et à la justice qui doit la reconnoître et la fixer ;
il croit, au surplus, devoir réduire la discussion de sa cause
aux termes les plus simples. C ’est là tout son b u t, en ré
pondant au M ém oire du sieur de St.-D idier. Il sera néces
saire de reprendre un peu les faits, en évitant toutefois ce
qui ne seroit qu’une inutile répétition.
L e contrat de mariage de Claude de Besse et de Louise
de Rochechouart, père et m ère de l’in tim é, est le premier
acte qui doit fixer l’attention ; il est le fondement de la cause,
puisque la demande du sieur de St.-D idier a pour objej:
d’être colloqué en sous ordre comme créancier de la dame
de Rochechouart , et q u e , dès lo rs, il faut bien connoître
la nature et l’étendue de ses reprises sur les biens de son
m ari.O r,on saitqu’ellesconsistentdansunedotde 6o,ooofr.
un gain de survie de 10,000 f r ., et un dcTuaire annuel
de 5 ,oco fr.
Il faut rappeler encore, sur ce prem ier acte, que le sieur
de Besse, père de l’intim é, y fut institué h éritier universel
�de son p è r e , avec substitution des terres d’Aulhac , Ghâteauneuf- D u d ra e, et autres, et que, le sieur de Besse a été
appelé à recueillir le bénéfice de la substitution.
O n sait aussi que par son testament du 20 mai 1 7 7 3 ,
Claude de Besse légua tout ce dont il pouvoit disposer,
i ° . en préciput à sou fils pour la p ro p riété; 20. à son
épouse pour l ’usufruit; qu’en mariant sa fille avec le sieur de
St.-Didier, la da me veuve de Besse lui constitua 120,000 fr.,
dont 110,000 fr. pour biens paternels, et 10,000 fr. de son
propre ch ef; et que le contrat de mariage porte renoncia
tion à la succession des père et mère. O n sait enfin que p a rle
contrat de mariage de L o u is-V icto r-E u sto rg u e de B esse,
in tim é, du i 5 octobre 1 7 8 7 , la dame de R ochechouart, sa
m è r e , lui fit donation de tous ses biens présens et à v e n ir ,
sous réserve d’usufruit, et de disposer d’une somme de
20,000 fr. ;
V oilà les faits prélim inaires q u'il suffit de résumer. Nous
devons appeler un peu plus l’attention sur ceux qui vont
su ivre, nous bornant à observer ici qu’aucune circonstance
précise n’a été indiquée par l’a p p e la n t, de laquelle on
puisse induire, avec vraisem blance, que la dam edeRochechouart avoit eu besoin d'em prunter à son gendre une
Somme de 75,000 fr. deux jours avant le contrat de mariage
de soniîls. T outefois, il est permis de dire qu’il eût été fort
extraordinaire que la dame de Besse, qui n’avoitpour toute
fortune que 70,000 f r ., comme cela est fort bien constaté
dans l’instance actuelle, eût voulu paroître faire à son fils
un don considérable par son contrat de m ariage, et tromper
la confiancedela famille de Bosredon, si elle eût ét è,depuis
deux jours seulement , débitrice envers son gendre de
�5,000 fr. de plus qu’elle n’avoit. M ettant à part toute con-
noissance particulière des faits, le sieur de Besse a eu le droit
de dire que cela n’étoit pas possible, parce que sa m ère et
son beau-frère étoient trop honnêtes pour avoir fait ou
autorisé une semblable combinaison; et certes ce neseroient
pas ces paroles q u i, sur ce fa it, accuseroient leur délica
tesse. Ajoutons, au reste, qu’au m oment de son m ariage, le
sieur de Besse n’avoit point de dettes. Celles qu’il avoit con
tractées précédem m ent avoient été acquitées bien avant
son mariage , avec le p rix de la vente d’un bois dépendant
de la terre du Pu y-de-C elle.
Nous arrivons à une époque désastreuse pour toutes les
parties; désastreuse pour*le sieur de Besse, que sa position
obligea de s’expatrier, et dont tous les biens furent vendus
nationalement ; plus désastreuse encore pour les sieur et
dame de St. - D id ier q u i, pour être restés sur le sol fran
çais , périrent sous la haché de la révolution. Exam inons
d’un peu plus près ce qui s’est passé à cette époque dans
la famille de Besse, et, sans rien ôter du mérite de la con
duite louable des sieur et dame de St.-D idier, n’accusons pas
si promptem ent le sieur de Besse de les payer d’une noire
ingratitude. Comme on l’a déjà d it, il suffît ici d ’in vo qu er
les propres paroles de la dame de Rochechouart sur des
faits qui lui étoient personnels.
Elle étoit en Suisse. Les lois sur la confiscation étoient
prom ptem ent parvenues à la connoissance des émigrés.
Les biens du fils alloient être vendus par suite de son émi
gration ; la dot de là mère alloit être perdue par la même
cause ; on pensa à la conserver par un m oyen indirect. Sûre
de la probité sévère de son gendre, la dame de Besse lui fit
�parvenir un billet de 75,917 fr ., daté du 13 octobre 1787.
E lle crut, et on crut sans doute autour d’elle que cette pré
caution suffiroit, et que le sieur de S t.-D id ier, en paroissant perdre 6,917 fr. sur sa créance, pourroit facilement
répéter les 70,000 fr. de reprises de sa belle-mère, en exer
çant ses droits contre la succession de son m a r i, ce qui sans
doute parut facile lorsqu’on arrêta cette combinaison. On ne
pensa pas, on ne sut pas que des billets sous seing privé ne
font pas foi contre des tiers; qu’ils ne prennent date, à leur
égard , que par des formalités qu’on ne p o u v o it pas rem
p lir, ou des faits qui n’existoient pas; q u ’enfin, le G ou
vernement français prenoit des mesures pour paraliser les
fraudes qu’on pouvoit com m ettre à son é g a rd , et on de
meura dans la sécurité ; ou n e'pouvoit (.railleurs rien faire
de plus pour sauver quelques débris du nauffrage.
M a is, eu France, où 011 n ’agissoit alors qu’avec les plus
sévères précautions, et où il étoit plus facile de se procurer
des conseils éclairés, on eut bientôt remarqué le foible de
cette précaution que la dame de Besse avoit prise cotnme
un moyen de salut; on la rejeta comme un moyen ineffi
cace, et on y suppléa par des voies plus sûres et plus avan
tageuses.
La forclusion des filles et les renonciations par contrat
de mariage a voient été abolies; on ne pouvoit plus opposer
à la dame de S t.-D id ier son pro p re contrat de mariage
pour l’exclure du partage des biens, et il étoit facile de
profiter de ces dispositions dans un moment où l’efferves
cence accordoit tout aux légitimaires. Un tribunal de fa
m ille fut composé. On exposa , devant lu i, que la daine de
St.-D idier avoit été énormément lésée par son contrat de
�_( 7 )
mariage; qu'elle n’avoit rien reçu sur sa constitution;qu'elle
avoittoujourseul’intentionde réclamer lepartage,etqu’elle
a voit droit à la moitié des biens; elle les réclama , et ces conclusionslui furent adjugées.Une sentence arbitrale ordonna
Je partage du ch ef paternel, et condamna la dame d e R o chechouart à rendre le compte de tutelle de la dame de St.D id ie r, e t , tant elle que son fils, à lui payer solidaire
ment 10,000 f r . , montant de la dot constituée par la m ère,
de son propre chef. A v e c ce ju g em en t, les sieur et dame
de St.-D idier se pourvurent auprès de l’adm inistration, et
y obtinrent la délivrance de la moitié de tous les biens;
m ais, pour ce la , il fallut dissimuler, soit le contrat de m a
riage de Claude de Besse, portant substitution au profit
de son fils, soit le testament de 1 7 7 3 , qui lui donnoit toute
la quotité disponible. Cette opération fut consommée par
un partage administratif, le 23 germ inal an 2. L ’intention
des sieur et dame de S t.- D id ie r étoit pu re; elle a été res
pectée par ceux qui leur ont succédé ; on n’a jamais hésité
à le reconnoître, ni à rendre à leur mémoire le juste hom
mage qui lui.étoit dû. E n cela, d’ailleurs, ils avoient leur
avantage personnel, puisque devant retenir dans tous les cas
le montant réel de la dot de la fem m e, il y avoit beaucoup
plus d’avantage pour eux à recevoir une quotité de biens,
qu’à demander , sur*ces biens, le payement d’une somme
d’assignats, qui avoit déjà perdu beaucoup de sa valeur
num érique. On vo it qu’il ne fut pas question , dans tout
cela, du billet de 75,9 17 fr., qu’on auroit, sans doute, pré
senté plus hardiment, s’il eût été donné, en 17 8 7 ,pour une
dette réelle.
Les choses ont resté en cet état jusqu’au moment où le
�m
calme se rétablit en France. L a dame de Besse rentra de la
Suisse vers 1800; le sieur de Besse, son fils, qui étoit en
Russie, ne rentra que long-temps après elle, et après la loi
d’amnistie.
Il fallut alors déterm iner la position de l’un et de l’autre,
respectivem ent aux biens dont la propriété avoit appartenu
au fils, et l’usufruit à la m ère. Est-il bien vrai que l’attri
bution de m oitié des biens à la dame de S t.-D id ie r étpit
irrévocable? que le délaissement fait par l’administra
tion étoit sans rem ède? Il faudroit bien le reconnoitre
quand bien même cela n’eut pas été juste, si l’administra
tion , décidant bien ou mal des questions dont elle eût eu
connoissance, avoit reconnu, avec une suffisante juridic
tio n , des droits q u e , vigoureusem eut, elle auroitp u con
tester; mais on ¿toit loin de cette ihèse; d’une p a rt, on
n’a voit obtenu d’elle le partage qu’au m oyen d’ un jugem ent
arbitral qui l ’avoit ordonn é, et elle n’avoit fait que se con
form er à ce ju g e m e n t, sans exercer elle-m ême aucun acte
de juridiction; or, ce jugement n’avoit jamais été notifie
lorsque le sieur de Besse rentra de Immigration. D ’un autre
côté, c’étoit en dissimulant, en retenant des pièces déci
sives , q u o n l’avoit obtenu; o r, en ce cas, le jugem ent
re n d u , comme la transaction faite envers la partie lésée,
étoient sujets à rétractation. Si lè directeur des domaines ne
l avoit pas de m an d ée , c’éto it, sans d ou te, par l’ignorance
des actes, ou parce que , dans l’intérêt de la famille que la
loi révolutionnaire dépouilloit de ses biens, l’administration publique avoit eu certaine bienveillance. Q uoiqu’il en
so it, M . de Besse pouvoit très-bien ne pas penser que sa
sœur fût propriétaire irrévocable, même, légalement par
lant.
�. <9 )
lan t. Sans doute, il n’auroitpas eu besoin des moyens légaux
avec les sieur et dame de St.'D id ier ; mais ils devenoient
utiles, alors que son décès avoit transmis toute sa fortune à
un enfant qui étoit dans les liens de la m inorité.
Il faut apporter une sérieuse attention à l’examen de la
transaction du 9 frim aire an 1 3 , moins pour en rechercher
le principe qui , dans toutes les suppositions , se seroit
tro u vé sans difficulté dans l’honnêteté des personnes ,
que pour en calculer les résultats, et reconnoître Tinfluence
q u ’il peut avoir sur la contestation actuelle.
R em arquon s, d ’a b o rd , qu’il n’est relatif qu'au x biens
paternels. Ils étoient dans la main du mineur de St.-D idierj
mais il a v o it, d’une p art, à justifier sa propriété à l’égard
du sieur de Besse; de l’au tre, il avoit à répondre aux ac
tions de la dame de Besse , son a ïe u le, q ui prétendoit ré
clam er ses reprises et son usufruit, et à celle de V ictoire de
Rochechouai’t , sœur de la dame de Besse, laquelle réclam oit le payem ent d’un billet de 64,000 f r . , qui lui avoit
été fait par Claude de Besse, son beau-frère.
L e tuteur ne pouvoit pas traiter sans précaution. Aussi
p rit-o n d’abord un avis du conseil de fam ille, et M . de
Besse croit se rappeler qu’on y avoit ajouté une consulta
tion de trois avocats, parm i lesquels figuroit M e. D elacalp ra d e , jurisconsulte distingué de la capitale.
Q uoiqu'il en so it, dans ce traité, on com m ence par re
connoître que M . de Besse est, à la fois, recevable et fondé
à rev en ir, contre le jugem ent et le partage de l’an 2 , le
quel viole ouvertem ent ses droits , puisqu’on n’y a eu
égard , ni au contrat de m ariage de Claude de B esse, p o r-
�X
»0 )
tant substitution au profit de V icto r de Besse, ni à sod
testament portant, au profitdu fils, attribution du p récip u t
de tous les biens libres de droit écrit, et du quart des biens
de coutume*, que la dame de Besse y est également recevable et fo n d é e , parce qu’elle n’y est pas partie, et qu’il
vio le ses droits comme usufruitière, et on arrête que le par
tage demeurera nul et comme non avenu.
O n règle ensuite les droits des parties sur les biens; et,
en payem ent de la dot de la dame de St.-D idier, on lui dé
laisse la terre de Sfc.-Pal, et l’action en reprise contre le
G ouvernem ent, à raison de certains biens vendus sur elle
par suite de sa condamnation. L e tuteur renonce à tous
les autres biens , q u ’il remet au sieur de Besse et à la dame
de Rochecliouart.
Il faut s’arrêter un peu sur la disposition des art. 8,
9, io et i r .
P a r l’article 8 , ce on renonce , pour le mineur de
» St.-D idier, à répéter les sommes payées par ses tuteurs
» et administrateurs , soit à madame de R o c h e c h o u a rt ,
» veuve de Besse, son aïeu le, à compte des intérêts de
» ses créances et reprises, et des arrérages de son douaire
» sur les biens de Claude de Besse, soit à madame V icto ire-
i)
»
»
»
»
Rose de R och ech ouart, à compte sur les intérêts de ses
créances sur la même succession, et au m oyen de ce.......
le mineur demeure quitte et déchargé de toutes autres
et plus amples restitutions de jouissances des biens, et
de toute action pour dégradations, etc. »
P ar Part. 9 , la dame de Besse demeure déchargée de
l’intérêt des 10,000 fr. qu’elle avoit promis de son chef à
6a fille , en avancement d’hoirie*
�( II )
Par l’art. 1 0 , la dame de Besse et V ictoire de R o cliechouart, sa sœ ur, se départent de leurs hypothèques sur
la terre de Saint-Pal.
E n fin , et par l’art, n , elles se réservent l’une et l’autre
>5 tous leurs droits , actions , reprises et créances sur la,
» succession de Claude de B esse , pour les faire-valoir et
» exercer dans toute leur intégrité, sans novation ni déro» gation , en capitaux et intérêts , contre M . V icto r
» de Besse, et toutes les hypothèques qui leur sont ac» quises sur tous les biens de ladite succession, autres que
» la terre de Saint-Pal. »
Nous rapportons toutes ces clauses comme appartenantes
au fait du p ro cès, parce q u ’elles sont exclusives de la pen
sée que la dame de Besse fût alors débitrice du m ineur de
St.-D id ier, au lieu d’être sa créancière*, parce que le délais
sement des b ie n s, pour les soumettre à l’usufruit de la
dame de R ochecliouart, étoit incompatible avec la préten
due créance que le m ineur auroit eu contre elle, et qu’il ne
se réservoit m ême pas ; parce qu’enfin, tout cela démontre
que la demande en restitution des biens étoit appuyée sur
,des m oyens solides, indépendamment de la bonne foi des
parties. Il ne faudroit donc pas aujourd’h u i s’en faire un
m oyen de décolorer les réclamations ultérieures du sieur
de Besse.
A p rès la mise en possession du sieur de Besse, l'exécu
tion de ce traité fut consommée entre la dame de R och ech o u art, sa m ère, et lui. P ar un autre acte du 9 ventôse
«n 1 3 , pour tenir lieu à la m ère de son usufruit sur le quart
des bieiïs de coutume et la totalité des biens de droit écrit,
le sieur de Besse lui délaissa la jouissance de tous les biens
�qui lui avoient été remis par le mineur de St.-D idier, sous
là seule condition d’y confondre le tiers de Vintérêt annuel
de ses créances propres, pour restitution de dot , reconnoissances, gains exigibles et antres reprises, et de payer,
en totalité, l ’intérêt des créances de V ictoire de Rochechouart, sa sœur, sur la succession de Claude de Besse;
elle se réserva les deux autres tiers pour s en fa ir e payer ,
ainsi qu’ il appartiendra , ainsi que des capitaux et des
arrérages du temps passé.
ces
dispositions auroient m anqu é d’harmonie avec la position
N o u s p o u v o n s rem arquer encore co m bien toutes
des parties, si le m ineur de S t.-D id ier eût été alors créan
cier d'une somme de 7 5 , 9 1 7 fr. et intérêts depuis 1 7 8 7 , q u i
lui auroient donné le di-oit de cürïgcx* une action contre
Iiouise de R o c h c c h o u a r t sur la jouissance des mêmes biens
qu’il venoit d’abandonner, et sur la propriété m êm e, en
exerçant les droits de sa débitrice, pour le payement de ces
reprises, qu’elle s’étoit réservés dans tous ces actes, comme
en étant réellem ent créancière. L.e traité de frimaire, et la
remise des biens au sieur de Besse, n’eussent-ils pas été une
véritable d é cep tio n , alors qu e redevenant, par les résul
tats de ce traité , le seul et unique héritier de ses père et
m è re , V icto r de Besse fût resté seul passible, envers le mi
neur de St.-D idier, d’une créance qui absorboit et au dek\
les droits et reprises de sa m ère? Ce ne pu t ni ne dut être
l ’intention, ni le but d’aucune des parties contractantes.
L e sieur de S t.-D id ier épousa la demoiselle de Besse, sa
cousine, le 5 février 18 11. La dame de R ochechouart, son
aïeu le, s’obligea de garder et nourrir les époux Sans sa
m aison , e u x , leurs domestiques et leurs ch evau x, sans
�.
(>
3)
.
que rien lui fît penser que toute sa fortune appartenoit à
son petit-fils, et qu’elle n’auroit pas de quoi satisfaire à sa
créance.
P eu après, le sieur de St.-D idier parvint à sa majorité.
G’est à cette époque qu’il place la remise de la promesse de
75,917 fr., du 13 octobre 1787. L e sieur de Besse n’a pas
besoin de rechercher la vérité de cette indication ; rien ne
lui commande d’exam iner, ni même de contester ce fait
d’ailleurs peu vraisemblable.
Gomment con cevoir, en effet, que le dépositaire, cet
ami fidèle et d é v o u é , ait tardé si long-tem ps, non-seule
m ent à rem ettre le b ille t, mais même à le faire connoître?
Q uelle force secrète l’obligeoità le dissim uler, à le tenir
caché au véritable propriétaire, et à lui laisser faire des actes
q u e , certes, il n’eût pas dû consentir purem ent et sim
plem ent, s’il l’eût connu ?
O n nous dit que le dépositaire étoit m ort et que ce fut
son fils qui rem it la promesse.
M ais à supposer que le dépositaire connût la valeur de
cette prom esse, et les effets qu’elle devoit avoir dans l’in
tention des parties qui l’avoient réciproquem ent souscrite
ou acceptée, le fils étoit-il instruit de son origine et de sa
véritable cause? L ’a-t-il remise avec cette explication pré
cise que c’étoit une créance ré e lle , on seulement comme
un effet p i avenant du sieur de S t.-D id ier, et devant être
remis à son fils, n’im porte sa valeur et l’usage qu’il devoit
în faire? E n fin , le ministère de ce fils du dépositaire, ne
’est-il pas borné à dire à M . de S t.-D id ier : V o ilà une pro
uesse qui fut déposée dans les mains de mon père par le
rôtre, lorsqu’il se vit au moment de quitter la vie; que j ai
�( *4 )
gardé fidèlement après lui, et que je vous remets de même ?
L e sieur de St.-D idierne s’est pas positivem ent expliqué
là-dessus, mais il faut le croire a in si, et M . de Besse le
pense, parce que rien ne lui dém ontre que le dépositaire
ait su et déclaré qu’il étoit de sa science que la dette étoit
réelle, et parce que rien n’apprenant, d’ailleurs, que le dé
positaire eut su qu’elle n’étoit que simulée , le sieur de
Besse veut conserver l’idée que son gendre a entamé cette
poursuite dans l’ignorance de la cause réelle du b ille t, et
dans la croyance qu’il en étoit légitim em ent créancier ;
cela ne change rien , d’a illeu rs, aux droits respectifs des
parties.
La demande en payement du billet fut form ée en 1816;
la dame de Rochechouart argumenta de la simulation. C e
m oyen ne portoit pas préjudice à l’honnêteté des parties;
la simulation n’auroit eu lieu que pour sauver quelque
chose de la confiscation prononcée contre les ém igrés , et
le m ineur de St.-D idier devoit ignorer les circonstances
dans lesquelles ce billet avoit été consenti. D ’ailleurs, il ne
falloit pas s’étonner qu’au m oment le plus orageux de la
révolution , et alors qu’une condamnation terrible frappoit
son épouse et lui, le sieur de St.-D idier eût déposé cet écrit
plutôt que de le supprim er. Galculoit-il froidement en ce;
m oment-là ce qui devoit arriver dans l’aven ir? Il cherclioit à sauver quelque chose à la main-misé nationale; il
étoit loin de calculer les intérêts des membres de sa famille,
les uns à l’égard des autres, et de prévoir des dissension;
entre eux. Sa belle-m ère, son beau -frère, son fils, tou
cela étoit pour lui une seule et même chose, une seule <t
même personne, lui présentoit un intérêt collectif, et a
�( a )
. . .
R épublique se présentoit, d’autre part, à sa pensée, comme
l ’unique adversaire contre lequel il falloit m ettre, autant
que possible , les intérêts de sa famille à couvert, alors que
cette puissance form idable alloit lui arracher la vie. A u
reste , les m oyens qu’employa la dame de Besse furent
puisés dans des faits qui tendoient à dém ontrer la simula
tion du b ille t, et l’impossibilité qu’il eût été fait en 1787.
Sa contexture, la stipulation des intérêts, non-seulement
inusitée, mais prohibée en 1787; la nature même du papier
qu’elle crut possible de distin guer, parce q u elle l’avoit
fait en Suisse; tout cela ne fut em ployé que comme preu ve
d’un fait principal qu’elle déclaroit, parce qu’il lui étoit
personnel, savoir, qu’elle avoit envoyé ce billet de Suisse,
pou r fournir un m oyen de sauver quelque chose de sa
fortune, dans l’intérêt de la fam ille entière.
C e moyen eût pu être bon dans la bouche d’un autre, mais
émané de la dame de Besse elle-m êm e, il ne pou voit servir
que pour produire la conviction dans l’esprit du sieur de
S t.-D id ier; mais au cas con traire, quelqu’évidente qu’ait
pu être la simulation, comme il n’y avoit là aucune circons
tance d e d o l personnel, la dame de Rochechouart n’étoit
pas recevable à l’invoquer contre un billet consenti par
elle-m êm e, et dont elle ne contestoit pas la signature, aussi
fût-elle condam née; on dit qu’elle ne critiqua son b illet,
q u ’elle ne résista à la condamnation que par l’instigation de
son fils qui l’avoit subjuguée; mais, d’une p art, rien neperm et de penser qu’elle eût contracté une dette semblable
qui excédoit sa fortune ; de l’au tre, elle ne se défendoit que
par l’avis de son conseil, M e. B e rg ie r, dont une lettre en
datedu 1 7 mars i8i5, se trouve encore audossier; M e* Ber-
�(i6 )
gier luï prédisoit qu’elle succom berait m algré la simu
lation , mais il lui disoit, en même tem ps, qu’il étoit de sa
délicatesse et de sa justice de déclarer la vérité ; que sa dé
licatesse, en effet, devoit souffrir « de se v o ir accusée, ou
« d’avoir dissipé toute sa fortune, par un em prunt dont il
« étoit impossible d’apercevoir l’em ploi u tile, ou de s’être
« rendue in solvable, 'à dessein de trom per les promesses
« d’hérédité faites à son fils dans son contrat de m ariage,
« pour gratifier sa fille de tout son avoir.» Enfin, lui disoitil , cette déclaration est de justice,« parce que la publication
« de la vérité préparera à votre héritier contractuel les
« moyens de faire valoir un jour avec succès la simulation
« de la créance. »
L a dame de Besse, après s’être défendue en prem ière ins
tance, et y av o ir été condam née, se pourvut par appel; mais
un arrêt contradictoire confirma le jugement. N ous aurons
à exam iner s’il p e u t, dans son exécution , porter atteinte
à des droits antérieurement acquis; toujours nous est-il permisde rem arquer, en passant,que le jugement auroit poussé
la rigueur bien lo in , s’il eût étendu les condamnations
jusqu’aux intérêts antérieurs à la demande ; car si le b illet
é toit de 1787, les intérêts n’étoient pas valablement stipulés,
et ils n’a voient pas co u ru , dès lors qu’il n y avoit pas eu d’as
signation donnée pour produire cet effet. S’il n’étoit pas de
1 7 8 7 , les m oyens invoqués par madame de Besse reprenoienttout leur empire. A u reste, le jugement condamnoit
aux intérêts tels que de droit. On aura donc, dans tous les
cas, le droit d’exam iner quels intérêts seroient dus com m e
accessoires de la créance.
• On sait que madame'de Besse est morte le 26 juin 1822 ;
que
�(
«7
)
que le sieur de Besse a accepté sa succession sous bénéfice
d’inventaire; que, plus tard, il a form ellem ent déclaré s’en
tenir à sa donation, à la charge des dettes existantes au
temps où elle lui fut fa ite , et ne vouloir prendre aucune part
auxbiens acquis depuis cette époque. O n sait enfin que les
contestations actuelles se sont élevées sur la distribution du
p rix d’ une vente volontaire faite par le sieur de Besse; c’est
sur ce p rix que le sieur de St.-D idier, exerçant les droits de
sa belle-m ère, a dem andé,
i° . L a collocation de sa débitrice,
P o u r le montant de sa d o t ..................
60,000 f. »
Son gain de s u r v ie ...................................
10,000
»
»
Les intérêts depuis 1777* . ................. • 155,035
L ’arriéré du d o u a ir e ...............................
2 5,000
»
T OTAL..........................
2°. Sa propre collocation en sous o rd re,
P ou r la dot de sa m è r e . .................... ...
.25o,035
w
10,000 f. »
Les intérêts................................ .................
9^67
L e m ontant de la promesse de 1787. .
Les intérêts depuis 178 7....................... ..
Les d ép en s.................................................
74,980
138,713
i >474
»
»
m
234,634
»
T o t a l ....................
»
Parm i les créanciers produisans, plusieurs étoient, par le
rang de leurs inscriptions, antérieurs au sieur de S t.-D id ier,
aussi prétendit - i l , que de la dame de R och ech ouart,
d evo itêtre colloquée à la date de son contrat de mariage.
P ou r ce la , il auroit fallu prouver que la dame de Besse
a voit acquis une hypothèque légale par la publication du
3
�( *8 )
Code ci vil, quoique, dès 1777, elle fût veuve et libre de ses
droits. Ilau roit fallu établir aussi qu’elle avoit droit de ré
clamer hypothécairement les intérêts ou sommesannuelles
à elle dues, alors qu’elle avoit joui des biens de son m a r i,
au moins jusqu’à 1792, et depuis l’an 13 , et tandis que dans
cet intervalle de 1792 à l’an 1 3 , c’étoit le sieur de St.-D idier
lui-m êm e qui avoit jo u i, ou pour lui son tuteur.
L e juge fit son état de collocation , et rejeta la préten
tion du sieur de St.-D idier, parce que les biens et créances
de la mère s’étoient confondus dans la main de son fils,
son seul h éritier, et que le sieur de St.-D idier n’avoit pas
demandé la séparation des patrimoines de la m ère et du
fils.
A v a n t l’expiration dum ois, le sieur de St.-D idier consigna
un contredit sur le procès verbal ; il demanda la séparation
des patrim oines, et poussant les prétentions jusqu’au der
nier degré d’exagération , il porta les créances de la dame
de Besse à 362,867 f r . , en y comprenant 292,867 fr. d’in
térêts ou arrérages de douaire , et les intérêts du tout depuis
l’an 13.
C ’est à ce contredit que le sieur de Besse a rép o n d u ,
dans l’intérêt de ses créanciers comme dans le sien propre ,
et c’est cette réponse tant critiquée qu’il faut rappeler en
peu de mois ;
Il commence par contester la quotité de la créance de
C a sa tj, et il indique la réduction qu’elle doit subir.
E n ce qui concerne le sieur de S t.-D id ier, il soutient
qu’il ne peut demander la collocation delà dame de Rochechouart, pour ses reprises, parce qu’elles sont devenues la
propriété de lui sieur de Besse, par sa donation du i 5 oc-
�( 19 )
tobre 1787 , et qu’il a fait choix des biens présens, d’abord
par sa déclaration de n’accepter la succession que sous bé
néfice d’inventaire, et ensuite parson option plus expresse,
faite au greffe en 1826 ;
Q ue ce billet du 13 octobre 1787 ne sauroit être consi
déré comme une dette antérieure dont sa donation auroit
été gré vé e , puisqu’il n’a acquis de date certaine qu’en 1816 ;
Que d’ailleurs le billet n’a été que simulé ; que la dame
deR ochechouart, citée en justice, l ’a formellement déclaré;
Q uesionsoiU enoitqu’ila vo itétéfaitréellem en ten 1787,
deux jours avant son m ariage, ce à quoi il résistoit comme
à un fait in exact, il tendroità rendre illusoires les disposi
tions de son contrat de mariage.
« A u ssi, continuoit-il, de deux choses l’une : ou le billet
« a été anti-daté, et il n’a été souscrit que pour sauver une
ce partie des biens de la famille, ou il a été consenti en 178 7,
« el le 13 octobre, et il n’a pu l’être qu’en fraude des dispo« sitions que madame de Rochechouart devoit faire le sur« lendemain en faveur de son fils*, » il terminoit par conclureque lebilletavoitétéfaitplus tard, et envoyé de Suisse
après rémigration ; par conséquent, il repoussoit le moyen
de fraude qu’il venoit d’employer par exception, et seule
ment comme réponse à un argument.
On le demande, qu’ya vo it-il d’injurieux pour qui que ce
soit dans ce moyen h ypoth étiqu e, qui n’ étoit écrit là que
dansune supposition émanée dusieur de St.-D idier, et que,
le sieur de Besse repoussoit par une négation form elle ?
lies parties en vinrent à l’audience; la C our connoît les
dispositions du jugementdont est appel; elles sont analysées
au M em oired u sieur de St.-Didier, pages2oet suivantes.TiC
3 *
�C 20 )
sieur de Besse n’a besoin de s’en occuper que dans la partie
qui le concerne. Il importe peu d’ailleurs de discuter sur
la tierce-opposition qui avoit été formée en première ins
tance seulement, etqu ele tribunalne pouvoitpas admettre
contre un arrêt; c’est un moyen qui reste aux parties lésées,
et qu’elles peuvent prendre en présence de la C o u r , s’il
paroît nécessaire ou utile. Bornons-nous à voir la cause du
sieur de Besse dans son état actuel.
. L e jugement décide que la dame de Besse n’avoit d’hy
pothèque qu’à la date de son inscription du i l octobre
1 8 1 7 ; mais il déclare sa créance conservée pour 120,000 f.
à cette date, en y comprenant les intérêts de ses reprises,
depuis le contrat de mariage de son fils.
Il colloque en S O U S ordre le sieuv de S t .-D id ie r pour les
10,000 fr. de d o t de sa m ère, et les intérêts depuis le décès;
Il déclare que le sieur de Besse a été saisi des biens pré
sens de la dame sa m ère, par la donation portée dans son
contrat de m ariage;
Q ue la promesse de 75,917 f. n’ayant acquis date certaine
qu’en 1 8 1 6 , elle ne peut porter atteinte à cette donation ;
E n conséquence, il distingue les biens présens et à venir
de la dame de Rochechouart. Sa dot étant de 70,000 f. en
capital, on en déduit i°. 10,000 f. pour la dot constituée à
la dame de St.-Didier, 20. 20,000 f. que la mère s’étoit réser
vés par la donation, et on réduit, par conséquent, les biens
présens à 40,000 fr. ; les 30,000 fr. restans et les intérêts de
la d o t, forment les biens à venir.
Distribuant ensuite ces biens à venir entrelesdeux créan
ciers qui y ont droit ( le sieur de St.-D idier et la dame
du Chilleau ) , le jugement ordonne qu’en cas de rejet de
�( 21 )
la tierce-opposition du sieur de Besse au jugement et arrêt
qui ont alloué le billet de 75,917 f. , le montant des biens
à venir sera réparti entre eux au marc le franc ;
E t qu’au cas contraire o ù , par l’admission de la tierceopposition du sieur de Besse, la promesse de 1787 seroit
écartée , la somme seroit attribuée aux dames du Chilleau
jusqu’à concurrence de leur créance , et que le surplus
seroit distribué aux créanciers du sieur de Besse.
Telles sont les dispositions du jugement qui concernent
le sieur de Besse et ses créanciers personnels-,lesieur de St.-Didier s’en plaint; il a interjeté appel, et a saisi la Cour du droit
de prononcer de nouveau sur les droits des parties. Nous
allons exam iner ses griefs et les moyens qu’il propose pour
les justifier. Nous suivrons l’ordre qu’il a adopté lui-m êm e,
et nous aborderons im m édiatement ses objections contre le
jugem ent, sans commencer par établir dans un ordre con
venable les moyens du sieur de Besse; il sera suffisant, sur
chacun des points soumis à la C o u r, de les présenter en ré
ponse à ceux du sieur de St.-Didier. Nous prouverons, en
même temps, que le jugement, en certains points, fait pré
judice su sieur de Besse, et nous rétablirons ses droits, sauf
à les exercer, en prenant la voie de ra p p e ltincident, par des
conclusions précises.
D IS C U S S IO N .
Il n’y a aucun intérêt à examiner si la séparation des pa
trimoines a dû être ordonnée, ni si le jugement qui l’a or
donnée est ou non passé en force de chose jugée; on a u r o i t
eu le droit de dire que ladonation faite par la dame de Besse,
de ses biens présens, ayant été dirigée par elle au profit de
�de l’héritier de son m a r i, lequel étoit en même temps dé
biteur de ses reprises, et ces reprises n’étant autres que les
biens présens, la créance de la mère contre le fils avoit été
éteinte par la confusion ; mais ce résultat ne pouvant s’ap
pliquer qu’aux biens présens effectivement donnés, et le
jugement les ayant attribués au sieur de Besse, il ne fait
en ce premier point aucun préjudice à personne.
L a première objection proposée contre le jugement con
siste à dire que la donation de 1787, dont on déclare ne pas
contester la validité , a été im plicitement ré v o q u é e pa rle
traité du 9 ventôse an 1 3 , où la dame de Rochechouart se
réserve les capitaux de sa créance; cela ne pouvoit être,
dit-on, sans que le sieur de Besse renonçât à sa donation; car
jusque-lù , sa mère n’avo it conservé qu e l’u s u fr u it , et par
cela seul elle n’avoit plus le droit d’exiger les capitaux; elle
n’a pu reprendre ce droit que par la renonciation expresse
ou implicite de son fils à l ’effet de sa donation.
Il ne faut pas beaucoup d’efforts pour repousser un ar
g u m e n t aussi puéril.
D ’une part, l’usufruitier a toujours le droit de toucher
les capitaux pour exercer sa jouissance de la manière qu’il
lui convient le m ie u x , sauf à donner caution s’il n’en est
pas dispensé ; ainsi, la dame de Besse n’a fait que se réser
ver un droit qui lui appartenoit incontestablement.
De 1autre, on n’est jamais censé avoir abandonné un
droit acquis, si on n’y a renoncé formellement. Ce n'est pas
en souffrant une simple réserve de droits ou de préten
tions , qu’on peut être présumé avoir renoncé à une pro
priété, Tavoir transmise à un a u tre , à son propre détri
ment; on n’annule pas ainsi les actes par des présomptions,
�( *3 )
surtout quand elles sont aussi vagues, et, mieux encore,
lo rsq u e , comme dans l’espèce, les réserves pourroient
exister, même être adoptées p a rle consentement de l’autre
p a rtie, sans porter atteinte à ses propres droits. O r, on ne
peut pas douter que la réserve faite parla dame de R oche
chouart , à laquelle, d’ailleurs, le sieur de Besse n’a parti
cipé par aucun assentiment, étoit parfaitement compatible
avec l’exécution de la donation. C ’en est assez sur cette ob
jection, présentée en hésitant, et à laquelle l’appelant luimême semble n’accorder aucune confiance.
L a seconde porte sur la fixation des biens présens, dans
laquelle, le sieur de S t-D idier signale deux erreurs.
i ° . E n ce que , ne laissant que 70,000 fr. dans les biens
à ven ir, sur les 120,000 fr. conservés par l’inscription, on
attribue 5o,ooo fr. aux biens présens, tandis qu’ils ne sont
que de 40,000 f r ., puisque sur 70,000 fr. qui composent
le capital des reprises, il faut distraire, i ° . 10,000 fr. pour
la dot promise à la dame de S t.-D id ier; 2°.20,000 f. r é
servés sur la donation par le contrat de mariage même;
20. En ce que l’inscription devroit s’appliquer en tota
lité aux biens A v e n ir, parce qu’elle n’avoit pas pu être
prise pour conserver une donation qui se soutient par ellem êm e, mais bien une créance qui a besoin de son secours ;
qu’ainsi, cette inscription devoit être appliquée toute en
tière aux biens à venir q u i, seuls, com posoient désormais
la créance de la dame de Besse, puisqu’elle n’étoit plus
propriétaire de ce q u e lle avoit donné.
Nous croyons pouvoir dire que le prem ier membre de
cet argum ent est lu i-m ê m e établi sur une double erreur
�0 *4 )
et de fait et de d ro it, et que le second tend un peu à la con
fusion des idées; qu’au surplus, il disparoît devant le fait.
E t d’abord, il y a erreur de fait en ce que si les premiers
juges ne conservent que 70,000 fr. pour les biens à venir,
sur le montant de l’inscription, ils ne laissent pas pour
cela 5o ,o o o fr. aux biens présens, mais seulement 40,000 fr.;
car ils ont commencé par attribuer 10,000 fr, au sieur de
St.-D idier pour la dot de sa m è re , dont ils l’établissent
créancier directement ; c’est ensuite qu’ils attribuent
70,000 fr. aux biens à ven ir dont 20,000 f r . pour la ré
serve fa ite au contrat de m ariags , et les 5o,ooo f r , restans pour intérêts et autres droits non liquidés ,* et aussi,
immédiatement après avoir hypothétiquem ent distribué
ces 70,000 fr. entre les deux créanciers , en sous-ordre, le
jugem ent ajoute : Ordonne q u e , dès à présent , il sera délivré au sieur de G enestet , bordereau de collocation de
la somme de 10,000f r . et intérêts ci-dessusfixés pour la
dot de sa mère ,* ainsi, on distrait, sur les 120,000 fran cs,
i° . 70,000 francs sur les biens qu’on qualifie à venir ;
20 .10,000 fr. pour la dot de la dame de St.-D idier; en sorte
qu’il ne reste évidem ment que 40,000 fr. pour faire face
aux biens présens.
M ais il y a aussi erreur de droit, et cette erreur existe
dans le jugem ent comme dans la pensée de l’appelant;
aussi, peut-elle devenir le fondem snt d’un appel incident
que le sieur de S t.-D id ier se réserve de faire par un acte
régulier.
L e tribunal dont est appel a considéré la donation de
^1787 comme g re vée, tout à la fo is, des 10,000 fr. consti
tués
�tués à la dame de S t-D id ier, et des 20,000 fr. réservés par
cet acte; pour apprécier sainement cette disposition, il faut
partir des principes.
T o u te donation entre-vifs, de biens présens, a pour ef
fet immédiat de saisir le donataire de la propriété des
biens donnés. S’il existe des droits de réserve lé g a le , et que
la donation excède la quotité d ispon ible, les héritiers à
réserve n’ont qu’un droit de retranchement ; c’est là un
principe de tous les tem ps, et qui tient à la nature même
des choses; il est rép été dans les art. 938, 920, 9 2 1, 922
et autres du Code civil. Ce principe s’applique à la donation
de biens présens et à ve n ir, lorsque le donataire opte pour
les biens présens, parce que l’acte prend, par cette option,
le caractère de donation entre*vifs pure et sim ple, et doit
être exécuté comme tel. Cela résulte d’ailleurs des art. 17
et 18 de l’ordonnance de 1 7 3 1 , qui régit le contrat de ma
riage du sieur de Besse.
Si la donation était faite de tous biens sans aucune excep
tion ni réserve, le retranchem ent seroit de d ro it, jusqu’à
concurrence de la légitim e des autres enfans,etle donataire
auroit dû le souffrir.
M ais si la légitim e est sacrée, les dispositions faites par
le père ne le sont pas m oins, et on ne doit y porter atteinte,
pour la légitim e, que lorsqu’il n'y a pas de biens libres
sur lesquels on puisse exercer le droit de réserve légale.
O r , ce droit ne s’ouvre que par le décès de l’auteur
commun ; il ne peut être exercé que sur la succession ,
et il doit épuiser les biens libres avant d’en venir au
retranchement. C ’est encore la disposition de l’art. 34 de
1 ordonnancede 1731, répétée par l’article923duCodecivil.
�( 26 )
Ces principes sont applicables à la cause.
La dame de Besse avoit donné à sa fille 10,000 fr. pour
sa dot.
E lle a ensuite donné tous ses biens présens à son fils, sous
la réserve de 20,000 , mais avec stipulation que si elle n’en
disposoit p a s, ils feroient partie de la donation. E lle n’a
pas chargé, en outre, son donateur delà légitim e de sa sœur.
Si la mère fût morte sous l’ordonnance de 1 7 3 1 , le sieur
de Besse, en acceptant les biens présens, fût resté proprié«taire de la totalité , même des 20,000 f r . , puisqu’elle n’en
avoit pas disposé , mais il eût été "obligé de payer les
10,000 fr. de sa sœ ur, soit parce qu’elle étoit donataire
avant lu i, soit parce que sa légitime étoit sacrée.
Cependant cette obligation n’eût pesé sur lui qu’à dé
faut de biens li b r e s 5 car si la dame de Besse eût acquis
d’autres biens depuis la donation, la dame de St.-D idier eût
dû les épuiser avant d’agir par voie de réduction.
E lle n’a pas acheté; mais la loi a paralysé dans ses mains
le droit de disposer des 20,000 fr ; ils sont restés libres, au
moins jusqu’à concurrence du tiers de ses biens, au delà
duquel le Code civil lui défendoit de disposer de tout ce
qui étoit encore disponible. D onc la dame de St.-D idier,
ou son fils qui la représente, a dû prendre ses 10,000 fr.
sur les biens libres, c’est-à-dire, sur les 20,000 fr. réservés,
et que le tribunal d o nt est appel a qualifiés biens à veniret, dès lo rs, puisque la donation n’étoit pas chargée à la
fois de la légitim e et de la réserve, elle ne doit pas être ré
d uite, par double emploi de l ’un et de l’autre, et elle doit
dem eurer pour 5o,ooo fr., dès que les 20,000 fr. suffisent
et au delà pour rem plir la légitim e.
�( 27 ) •
_.
Si le sieur de St-D idier eût accepté la succession de la
dame de Besse, il n’auroit d roit, du chef de sa m è re , qu’au
tiers des 70,000 fr., parce que ce seroit pour elle la réserve
de la loi. L a réserve se seroit réunie à la donation pour
tout ce qui excède le tiers, d’après les art. 913 et 1086, et
la jurisprudence. O r , en ce cas, le sieur de B esse, en vertu
de sa donation, retiendroit les deux tiers des biens, m on
tant à 46,666 fr. 66 cent, il ne peut pas avoir moins
M ais la dame de St.-D idier ou son fils a renoncé à la suc
cession pour s’en tenir à sa dot; le sieur de Besse est don c resté
seul successible; o r , com m e, en sa qualité de donataire, il a
fait option pour la donation des biens présens, aucun héri
tier à réserve n’a droit de venir par retranchem ent; c’est
ici que nous allons ap ercevo ir, d’une manière plus sen
sible, l’erreur dans laquelle est tom bé le tribunal dont est
appel.
Il a attribué 30,000 fr. au sieur de S t-D id ier, à deux
titres diiférens.
i ° . 10,000 fr. comme appartenant à sa m ère, par son
contrat de mariage de 178 4 , et venant en déduction des
biens présens donnés en 1787 ;
2 ° . 20,000 fr.,n o n plus du ch ef de sa m è r e , comme en
étant saisie, mais du ch ef de son p è re , comme créancier
de la dame de Besse.
E t comme cette créance étoit postérieure à la donation,
il a déclaré que les 20,000 fr. étoient des biens à venir
qui avoient du être saisis par un créancier.
Cependant, n’éto it-ce pas une partie des biens présens
au moment de la donation? n’est-il pas constant qu’au m o
ment où elle fut consentie, ces 20,000 fr. faisoient partie
4*
�. f 28 )
de la dot appartenant actuellement à la dame de Besss?
Comm ent alors les en détacher pour les attribuer à un
créancier postérieur, et com m ent opérer, pour cela , un
double retranchem ent, et des biens libres non donnés, et
de la légitim e qui devoit d’abord se prendre sur ces biens
libres?
Il semble donc évident que le jugem ent contient, à cet
égard , un double emploi qui doit être réform é.
L a seconde partie de l’objection que nous examinons
disparoît au premier examen.
E lle im porteroit d’abord fort peu au sieur de Besse, qui
ne resteroit pas moins propriétaire de tout ce que lu i at
tribue la donation de biens présens.
D ’ailleurs, pour p o u v o ir profiter d’ une inscription de
120.000 fr. pour lui seul, il faudroit que le sieur de St.Didier établît que la dame de Rochechouart, pour le capi
tal resté en dehors de la donation.de 1787, avoit droit à
des intérêts q u i, aglomérés avec ce capital, produiroient
ï2 0 ,o o o fr. Si nous en avions besoin, nous forcerions le
sieur de St.-Didier à reconnoître son erreur sur ce chapitre
des intérêts; car le capital, fût-il de 30,000 fr. au lieu de
20.000 f r . , les intérêts dussent-ils être comptés depuis
1787, ce qui est repoussé par les actes du procès, cela ne
feroit jamais 120,000 fr.
Mais pourquoi s’épuiser en démonstrations lorsqu’un
fait tout simple et fort positif repousse cette objection?
N ’est-il pas nécessaire au sieur de S t.-D id ier, pour lui
donner une couleur, de dire que l’inscription ne peut avoir
été prise que pour la partie des biens de la dame de Besse,
non comprise dans la donation ? qu’elle n’avoit pour objet
�( *9 )
que de conserver une créance et non une donation entre
vifs qui se soutenoit par elle-m êm e, c’est-à-dire, qu’elle
doit s’appliquer seulement au capital de 30,000 fr. qu’on
.excepte de la donation, et aux intérêts qu’il a pu produire?
Mais remarquons que cette inscription qui a été prise
par le sieur de St.-Didier lui-même, comme exerçant les
droits de la dame de R och ech ouart, exprim e très-bien
qu’elle a pour objet de conserver,
60,000 f. »
i° . L e principal de la dot....................
10,000
»
2°. L e gain de survie..........................
3°. Les intérêts de l’un et l’autre. . . .
5o,ooo
»
T o ta l......................................
120,000
»
A in s i, sauf 10,000 francs que le sieur de St.-D idier a
négligés , on ne sait p o u r q u o i , c’est le capital entier
q u ’on veut conserver, et les intérêts de ce capital, p ro
portionnellem ent à chacune de ses parties ; comment
donc celui-là même qui a pris cette inscription, peut-il
ainsi la dén atu rer, lorsqu’elle est si claire?
E t ne doutons pas qu’il ne fallût le faire ainsi, mal
gré la donation; car cet acte qui avoit bien dessaisi la
dame de R ochechouart, à l ’égard de son fils, n ’avoit
pas mis la somme dans les mains de celu i-ci; il n’avoit
pas besoin d’inscrire contre sa m ère pour conserver sa
donation ; mais pour en obtenir l’effet, il falloit que la
créance de sa donatrice fût conservée à l’égard du débi
teur. A in si, l’inscription étoit nécessaire pour toute la
créance de la dame de Rochechouart contre son m ari;
c a r , entre e u x , il ne s’agissoit plus de donation, mais
�( 3°)
seulement d’une créance; cet argum ent n’est d on c, en
réalité, qu’une erreur d’esprit.
M ais il y a p lu s, et ceci nous amène à relever une
autre erreur dans le jugement. E n attribuant 40,000 fr.
au sieur de Besse, sur le montant de l’inscription, on
les prend sur la masse des 120,000 ; cependant cette
somme ne com prend que 60,000 fr. de capital , et les
40, 000 fr. sont une somme capitale; il falloit donc, ce
sem ble, y ajouter tous les intérêts de ce capital qui sont
dus au sieur de Besse , au moins depuis la m ort de la
dame sa m è re , puisqu’ils lu i appartiennent,directem ent,
et q u e, m êm e, il en étoit à la fois créancier et d ébiteur;
le sieur de Besse a donc le droit de dem ander, en ce
p o in t, la rectification du jugem ent.
L a troisième objection du sieur de St.-D idier est celle
qui lui a souri davantage. Il s’y est com plu, et son M é
m oire la délaye dans des explications fort étendues. E lle
consiste à établir une différence entre les qualités du
sieur de Besse. C o m m e donataire, dit-il, le sieur de Besse
p e u t, il est v r a i, se jouer des jugemens rendus posté
rieurem ent avec la don atrice, même y form er tierceopposition , et à ce titre on ne peut pas lui opposer la
promesse de 1787 , ni les jugemens qui l’ont validée.
On ne le conteste pas; mais il est héritier bénéficiaire,
et ce titre n’est plus com patible avec sa tierce-opposi
tion ; or on ignore s’il la renouvellera ou n o n , et on
adroit de se plaindre que le jugement n’ait rendu qu’une
décision hypothétique ; il falloit rejeter cette tierce-oppogifion, dès lors surtout qu’elle n’étoit pas reccvable de-
�(30
vant les premiers juges. O n entre ensuite dans des détails
assez étendus sur la réalité de la créance; on s’efforce
d’écarter tout ce qu’a dit la dame de Besse, et son fils
après elle , pour prouver qu’elle a voit eu une cause si
m ulée, et on se bat les flancs pour dém ontrer que le
sieur de St.-D idier étoit incapable de participer à une
frau d e, et cTavdir les intentions qu'on lu i suppose.
Q uelqu’étendue que so it, à cet égard , la discussion à
laquelle s’est liv ré le sieur de S t.-D id ier , il est assez
difficile de deviner la conséquence qu’il entend en tirer;
cela ne pourroit se reconnoître qu’à des conclusions bien
précisées. Celles de l’exploit d’appel sont tout à fait gé
nérales; elles tendent à faire rejeter la tierce-opposition,
à déclarer que les biens à venir de la dame de Besse
se portoient à 312,869 f r . , à lui attribuer tout le béné
fice de l’inscription, à critiquer, si on le juge co n v en ab le ,
l ’inventaire fait par le sieur de Besse après la m ort de
sa m ère, à le faire déclarer héritier pur et sim ple, etc.
M ais rien n’explique le m oyen dont on vient de p a rle r,
et cela n’étonne pas, puisque l’appelant lui-m êm e l’in
dique comme un m oyen nouveau, comme une distinction
qui a été n égligée en prem ière instance.
Q ue le sieur de Besse, en sa qualité d’héritier b én é
ficiaire , ne soit pas recevable à form er tierce-opposition
aux jugemens rendus contre son a u teu r, c’est ce qu’on
n’auroit pas besoin de contester ; ce n’est pas à ce titre
qu’il a résisté à l’exécution du jugem ent et de l’arrêt,
qui ont prononcé la condam nation; toutefois, nous au
rions le droit à notre tour de faire une grande distinction .
S'il est vrai qu’en général l’héritier doit exécuter les
�( 32 )
engagemens pris par son auteur, et les condamnations
prononcées contre l u i , c’est uniquement parce qu’il le
représente, qu’il est son ayant cause, et ne peut avoir
plus de droits que lui ; mais ce principe cesse toutes les
fois que l’héritier peut être considéré comme tiers, respec
tivem ent à l’acte qu’il conteste, et cela arrive lorsqu’un
acte auroit pour résultat de porter atteinte à des droits
qui lui sont réservés par la loi , ou attribués par des
actes antérieurs.
Ainsi M . de Besse, même pour réclam er l ’exécution
d’une institution précédente, pouvoit critiquer le billet
qu’avoit fait sa m ère après l’avoir institué. Il n’avoit
peut-être pas absolument besoin , pour cela , d’une tierceopposition ÿ la condamnation pro n on cée contre sa m ère
ne pouvoit pas plus le frapper que l ’engagement qu elle
avoit pris elle-m êm e pendant sa vie. Com m e institué,
il étoit une tierce personne, et n’étoit pas tenu des faits
de sa m ère, en tant qu’ils étoient un m oyen indirect
de porter atteinte à son institution ; aussi voit-on tous
les jours des héritiers institués, ou à réserve, obtenir
la nullité des avantages indirects, par voie d’action ou
d’e xcep tio n , sans avoir besoin d’em ployer les voies ex
traordinaires.
E t il n’im porte pour cela que la mère ait eu ou non
intention de nuire lorsqu’elle a fait le billet ; qu elqu e
b on n e, quelque louable même q u ’on pût supposer son
intention, il suffit que l’acte puisse être présumé avan
tage indirect, et qu’il nuise , j^ar ses résultats, à des
droits acquis antérieurem ent, pour qu’on doive l’annuler
à l’égard de l’institué. Il n’importe encore qu’il y ait eu
condamnation
�..................... X 33 )
condamnation contre la m ère qui n’étoit pas reeêvablé
à revenir contre son propre fait, et q u i , se fût-elle
laissé condamner volontairem ent , ne pouvoit pas nuira
à son héritier institué.
Si donc le sieur de Besse avoit accepté la donation
de Liens présens et à ven ir, cas auquel il ne seroit qu’un
véritable héritier institué, il auroit droit et qualité pour
s’en p lain d re, fût-il même héritier pur et simple , et
c’est alors seulement qu’il y auroit lieu à examiner s’il
est ou non obligé de form er tierce-opposition.
Mais ce n’est pas du tout la question. L e sieur de Besse
a déclaré s’en tenir à la donation, et n’a accepté la suc
cession que sous bénéfice d’inventaire; par cela se u l,
il ne i’acceptoit pas comme institué; il se réservôit seu
lem en t le titre d ’héritier n a tu re l, avec les prérogatives
de l’héritier bénéficiaire.
Sous ce dernier rapport, il faut en co n v en ir, il n’auroit
le d ro it, ni de critiquer les actes de son auteur, puis
qu’il n’a point de réserve , ni de form er tierce-opposi
tion aux jugemens rendus contre lu i; mais c’est ici qu’il
faut bien s’entendre.
L e sieur de S t.-D id ie r prétend-il seulement que le
sieur de Besse ne peut user de ce droit en qualité d’hé
ritier , et pour ce qui concerne ses droits com m e héri
tie r , tandis qu’il le conserve comme donataire, et pour
ce qui interesse 1exécution de sa donation? Nous serons
parfaitement d’accord avec lui. Il semble bien le dire,
pa. 35 et 36; mais, cela supposé, toutela discussion h laquelle
il s’est livre devient inutile et sans objet; car le tribunal
dont est appel n’a pas décidé autre chose. Il se borne
5
�( 34)
à dire que le billet n’a pu nuire à la don ation , qu’il
restreint, m êm e, autant que possible.
Mais voudroit-il prétendre que la qualité d’héritier
s’oppose à ce que le sieur de B esse, comme donataire ,
puisse réclam er l’exécution de sa donation, et l’annulation
des actes qui y font préjudice ? C’est une toute autre question
sur laquelle l’esprit est d’abord frappé de cette p e n séeq u e
ce résultat ne pouvoit être opéré que par la confusion
des qualités de donataire et d’héritier ; encore auroit-il
fallu que cette confusion p r o vîn t de la qualité d’héritier
du sang; car ainsi que noiis l’avons observé, l” institution.
elle-même produisoit, par sa date, un p rivilège à l’ins
titué , pour tout acte postérieur qui tendroit à y porter
atteinte.
M a is co m m en t
ce m oyen de confusion, si nécessaire
p o u rta n t, pourroit-il être invoqué contre le sieur de
Besse, alors que son prem ier acte a été de se retrancher
dans une déclaration de bénéfice d’inventaire dont ie
p rivilè ge principal étoit « de ne pas confondre ses hiens
« personnels avec ceux de la succession ? . . . . même de
j) p o u vo ir se décharger du payement des dettes, en aban» donnant tous les biens de la succession aux créan» ciers et légataires ? » Par cela seul qu’il ne confond pas,
il peut opter pour les biens présens, et alors il est un
donataire pur et sim p le, non sujet ci rapport ; les biens
sont retranchés de la succession, et il peut les retenir
comme ses biens personnels, en abandonnant aux créan
ciers tous ceux de la succession ; et aussi le sieur de
Besse, qui pouvoit faire cet abandon par un acte posté
rie u r, a fait une option form elle des biens présens, et
�( 35)
a consom m é, par cela seul, la distinction de ses qualités
et de ses droits , qui résultent déjà suffisamment de sa
déclaration de bénéfice d’inventaire.
Cette seule remarque suffit pour décider la question,
si on suppose que la pensée du sieur de St.-D idier est
poussée jusque-là; car si on vouloit dire que l’accepta
tion de l’hérédité bénéficiaire fait perdre au donataire
le bénéfice de division , il n’auroit plus le droit de retenir
les biens présens, et il n’y auroit plus de différence entre
l ’acceptation pure et simple et celle faite sous bénéfice
d’inventaire. L e seul privilège qui y soit attaché disparoitroit d onc, et autant vaudroit effacer de nos lois l’article 802 du Code civil.
A la v é r ité , on a d it , dans l’exploit d’ap p el, que l’op
tion étoit ta rd ive ; mais on n’a rien fait pour justifier cette
assertion, qui n’est absolument fondée sur rien. L ’héri
tier naturel n’a-t-il pas le droit de renoncer, [tant qu’il
ne s’est pas im m iscé? Cette faculté d’accepter ou de ré
pudier ne dure-t-elle pas pendant le laps de temps requis
pour la prescription la plu slon gue'( art. 789 ) ? N ’a-t-il
pas le droit de se porter héritier bénéficiaire pendant
le même tem ps, s’il n’a pas fait acte d’héritier ( art. 800 ) ?
ne conserve-t-il pas, en ce dernier cas, après tout cela ,
la faculté d’ abandonner les biens aux créanciers, et d’exer
cer ses propres créan ces, tout en gardant le titre d’héritier
bénéficiaire, et quoique les actions doivent être exercees contre lu i? Si tout cela est, comme on ne peut pas
en d o u te r, com m ent contesteroit-on le bénéfice de di"
vision ( ce qui seroit contester le bénéfice d’inventaire j
h celui q u i, sans retard , a pris les précautions légales,
S *
�( 36)
et qu’on n’accuse pas sérieusement d’étre héritier pur et
simple ? Par cela se u l, il a conservé ses droits personnels,
et iis ne sont pas de nature différente comme donataire
que comme créancier. S’il est donataire d’une somme,
il n’est qu’un véritable créancier, et peut la réclamer,
d’après l’art. 802; s’il est donataire d’ un im m euble, il
est propriétaire; l’immeuble est son bien \personnel, et
il peut le réclam er, d’après le même article. Dans tous
les cas, ses droits sont distincts; il est donc ¿1 temps de
faire son option, alors qu’il seroit à temps d’abandonner
les biens de la succession bénéficiaire aux créanciers ; c’est
seulement pour consommer son option qu’il la déclare;
car il en avoit suffisamment conservé le droit. E n cela
il ne change, ni sa position , ni celle des créanciers,
n’exerce aucune action nouvelle, ne revient pas contre
son propre fait, et ne trouve contre lui aucun motif
de déchéance qui puisse devenir une fin de non-recevoir.
En deux mots, son option, qui n’est autre que le droit
de diviser, et, de l’essence même de la qualité qu’il avoit
prise, et y dem euré inséparablement attachée.
Si jamais on a pu faire une difficulté sur le droit de l’héiîtier bénéficiaire, de conserver une donation qui lui auroit
été faite par son auteur, elle n’a été agitée qu'entre héritiers,
et parce que l’hérilier, même bénéficiaire, est toujours su
jet au rapport envers sou co h é ritie r. Il s’est élevé dans
l'ancien droit beaucoup de difficultés sur le point de sa
voir si l ’héritier bénéficiaire qui abandonne les biens aux
créanciers, fait une véritable renonciation qui l’autorise
î\ déposer le titre d’héritier, en telle sorte, qu’il devienne
étranger à la succession, comme s’il eût répudié dès le pria-
�C 37 3
cipe, et qu’il faille nommer un curateur, s’il n’y a pas d’autres
héritiers qui ayent accepté. Certains docteurs étoient de cet
avis; mais d’autres auteurs avoient adopté l’opinion con
traire, et appliquoient à ce cas la m axim e: Semper' hœ res ,
nunquam desinit esse hœres .
On partoit de ce principe pour rechercher si le donataire
qui s’est porté héritier bénéficiaire, peut renoncer à son
titre pour s’en tenir à la donation, et en refuser le rapport à
son co-héritier; la plupart des docteurs soutenoient l'affir
m ative ; cependant un arrêt du 20 avril 1682, rapporté au
Journal du palais, décida le contraire. M . L e b ru n , liv. 3,
chap. 4 ,n °. 34, combat fortem ent cet arrêt. Il observe que
l ’avocat qui soutenoitson avis, au lieu de s’arrêter à l’usage
des renonciations, s’éto it, m a la p ro p o s , renfermé dans
les principes du droit rom ain, et avoit avancé des proposi
tions qui blessoient les fondemens de notre jurisprudence
en matière de renonciation; aussi, dit-il : les principes du
droit romain quijurentbien rétablis , et dont la Cour étoit
pénétrée , prévalurent , et notre droit ou notre usage qui
f u t un peu trop ni clé avec le droit romain, en souffrit quelqu atteinte, M . L ebrun rapporte quantité d’autres arrêts
qui avoient jugé la question en sens contraire à celui de 1682.
Mais remarquons bien que cette question n’étoit éle
vée qu’entre h éritiers; qu’elle ne fut décidée que par
suite de la position des h éritiers, les uns à l’égard des
autres, et parce qu’entre e u x , mais entre eux seuls, on
jugea d evoir appliquer dans toutesa rigueur, même à Thé**
ritier bénéficiaire, la m axim e semel hœres .
M ais, soit cet a rrê t, soit l’universalité des docteurs, reconncissoient que cela n’avoit pas lieu à l’égard des créan-
�. c
38
\
ciers et légataires, ou même à l’égard des donataires pos
térieurs. O n peut, non-seulem ent, vo ir là-dessus Lebrun
et autres auteurs, mais encore consulter, au Journal du
p a la is, la discussion savante et fort étendue des moyens
respectifs, et le résumé des motifs q u ia vo ien t déterminé
l ’arrêt. Ils démontrent que c’est par une exception propre
à l’héritier , mais qui n’appartient ni aux créanciers ,
ni aux légataires, que l’héritier bénéficiaire ne fut pas
admis dans la renonciation pure et simple à l’hérédité.
O r , ici, en quels termes se présente la question?
D eu x héritiers présomptifs étoient appelés à la succes
sion de la dame de Besse; le sieur de St.-D idier, par rep résentationdesa m ère,et le sieur de Besse, deson propre chef.
L e sieur de St.-D idier s’est empressé de répudier, pour
s’en tenir à sa qualité de créancier.
L e sieur de Besse restant seul, a accepté sous bénéfice
d’inventaire. Il faut le reconnoître; cette démarche n’avoit
d’autre but et d’autre effet que de le constituer administra
teur de la succession, d’éviter dans l’intérêt des créanciers
et de la succession elle-m êm e, la nomination d’un curateur,
et les form alités , toujours fâcheuses , qu’occasionne une
répudiation.
A u jourd ’hui, Ialutte s’élève entre lui, d’une part, comme
donataire ou créancier, et à la fois héritier bénéficiaire, et
le sieur de S t.-D id ier, com m e créancier seulement.
E t , dès lors, aucun des motifs qui ont dicté l’arrêt de
1682 ne se rem ontre, et nous sommes au contraire dans
le cas précis où la doctrine universelle des docteurs et des
arrêts, autorise l’héritier bénéficiaire à renoncer aux biens
de l’h éréd ité, à l’égard des créanciers et légataires.
�( 39 )
Sans développer ici avec beaucoup de détails cette doc
trine incontestable et sans laquelle le p rivilège de l’h éri
tier bénéficiaire seroit entièrement anéanti, bornons-nous
à l’autorité très-précise d eM . Chabot de l’A llie r , sur Farticle 802. A p rès avoirexam iné la question en g é n é r a l, il
fait l’application des principes au cas particulier, et se borne
à dire, en termes formels :
« E n fin , et toujours par les mômes m otifs, l’héritier bé« néficiaire qui se trouve seul héritier , n’est pas tenu de
« rapporter, au profit des créanciers et légataires, les biens
« qu’il avoit reçus du défunt par actes entre-vifs, et il les
c garde sans qu’ils soient aucunement soumis aux dettes
« et charges de la succession. » Puis il ajoute au n°. suivant:
« A u x termes de l’art. 802, l’héritier bénéficiaire qui
« v e u t se d écharger du p a y e m e n t des dettes, doit aban« donner tous les biens de la succession................................
« Dans ces biens, ne sont pas compris ceux qui sont énon« ces dans le n°. précédent, puisqu’ils sont biens person« nels à l’héritier bénéficiaire. »
Cette doctrine d écoule, en effet, des principes les plus
purs du d r o it, qui dégénéreroient bientôt en argutie ,
comme on le disoit autrefois des subtilités du droit romain,
s i, parce q u ’on peut d ire , semel hœres semper hœres , un
héritier bénéficiaire perdoit le droit de diviser son titre, et
de faire une option qui est aussi bien dans l’essence du titre
que dans la nature de sa qualité.Par cela seul qu’il n’a accepté
que sous bénéfice d’inventaire, le sieur de Besse a suffisam
m ent annoncé qu’il ne com ptoitpassur les bénéfices delà suc
cession ; qu’il ne vouloit pas la confondre avec ses droits et
ses biens personnels, ni contracter ? sur ces biens etdx’Olts;
�( 40)
aucune obligation envers les créanciers de sa mère. Cela
n’est-il pas c la ir , positif ? Si on pouvoit conserver des
doutes sur la vérité de ce point de d ro it, qu’on consulte
encore M . Chabot sur l’art. 85 j , où il établit, entre autres
choses, que le créancier ne peut s’adresser à l’héritier bén é
ficia ire qui est donataire en même temps, que dans le cas où
il seroit lui-m êm e créancier d 'un héritier pur et sim ple ,
parce qu’alors il auroit un droit personnel et direct. O r ,
tout cela s’applique au donataire de biens présens et à venir,
comme à la donation sim ple, parce que si l’acceptation
sous bénéfice d’inventaire ne consomme pas l’option , elle
tren est pas exclusive, et q u e, bien loin de là , elle en an
nonce l’intention; qu’elle en prépare et en ménage les
moyens , bien loin de p o u v o ir en entraîner la déchéance.
N o u s ne croyons pas que cette doctrine soit susceptible
■de difficultés sérieuses, ni qu’il faille accumuler les cita
tions pour l’établir. A u surplus, s’il en est besoin, on la
développera davantage à l’audience; il suffit, quant à pré
sent, d’avoir posé les principes.
Que résulte-t-il de tout cela ? D eu x conséquences trèssimples;
L ’une, que si le sieur de St.-D idier prétend que l’accep
sous bénéfice d’inventaire a ôté au sieur de Besse
le droit de critiquer la promesse de 1787 et les jugemens
qui l’ont suivie, en tant qu’ils porleroient atteinte à sa do
nation , il est com plettem cnt dans l ’erreur, et que le sieur
de Besse, comme donataire, et jusqu’à concurrence de sa
donation , est à la fois recevable et fondé à y résister ,
tation
même à form er tierce-opposition au jugem ent et à l ’a rrê t,
si bon lui semble;
L ’au tre,
�( 41 )
L ’a u tre , que s’il veut dire seulement q u e, comme h éri
tier bénéficiaire, et pour en faire profiter la succession , le
sieur de Besse ne peut pas user de la tierce-opposition ,
parce qu’il représente sa m ère en celte partie, il n y a pas à
discuter; car c’est ce qu’a jugé le jugem ent dont est a p p e l, et
ce dont le sieur de Besse ne se plaint p a s, sauf les erreurs
qu’il a signalées.
E t, dès lors, il semble évident qu’en ce qui concerne le
sieur de B esse, la tierce-opposition est un élément tout
à fait inutile; le tribunal n’en a pas eu besoin et ne s’y est
pas arrêté en cette partie du jugem ent où il a déclaré que le
sieur de Besse, comme donataire, np pouvoit être tenu de
la créance, parce qu’elle n’avoit pas date certaine avant sa
donation, et que le jugement qui avoit condamné person
nellem ent la dame de Besse , ne p o u v o it pas l’atteindre
com m e donataire antérieur, parce q u ’il n ’a v o it pas plus
d’étendue que la promesse e l l e - m ê m e , et ne frappoit que
la succession de la dame de Besse. C ’est seulement p o u r la
distribution des biens de la succession , entre le sieur de
St.-Didier et la dame d u C h ille a u , que le juge a subor
donné le règlem ent des droits de l’un et de l’autre à l’issue
de la tierce-opposition . L e sieur de Besse a déjà déclaré
qu’en cette partie le jugement l’intéressoit moins que ses
créan ciers, et il ne croit pas devoir s’occuper de la tierceopposition sous ce rapport qui leur est particulier.
I l seroit com plettem ent inutile de discuter les m oyens
que le sieur de S t.-D id ier a longuem ent développés, sur la
question de savoir si le,billet de 1787 est réel ou sim ulé;
s’il étoit ou nou réellem ent dû à son père par la dame de
6
�( 42 )
Besse. Ces m oyens ne seroient nécessaires que pou r en
dégrever la succession ; or , sous ce point de vue , le
sieur de Besse a déjà dit ce qu’il pensoit de sa position
comme héritier bénéficiaire. Il a rép été, après sa m ère, ce
qu’il croit , ce qu’il sait être la vérité ; scs créanciers
peuvent la saisir et en user comme ils croiront conve
nable. E n ce qui le concerne, il n’a argum enté que de sa
donation , et sous ce rapport il n’est plus besoin de discuter.
L e jugem ent est cla ir, précis et conform e à la l o i, nous
l’avons suffisamment dém ontré ;
Il
est, au reste, une circonstance fort remarquable que
nous avons d’éjà indiquée; c'est que si la promesse étoit
r é e lle , il n’y auroit plus de donation ; que la famille de
Bosredon et le sieur de Besse auroient été abusés lors de
son m ai'iage, puïsquer-j créancière seulement de 70,000 fr,
en capital, la dame de Rochechouart auroit été débitrice de
75,9 17 fr*
peut-on supposer raisonnablem ent, hon
nêtem ent, ( tranchons le m ot ) , que deux jours avant
le mariage de son fils, la dame de Besse se soit dé
pouillée de ses biens présen s, alors qu’elle en avoit déjà
prom is, et que deux jours après elle devoit en consommer
la donation au profit de son fils ? P eu t-on penser que c’est
après s’être ainsi dépouillée le 1 3 , qu’elle a exécuté le i 5
une disposition qui n’étoit plus qu’un simulacre de dona
tion , et sous la foi de laquelle néanmoins a été contracté le
m ariage d e là demoiselle de B o s r e d o n ? pcut-on le croire,
lorsqu’on ne voit pas le m oindre emploi de cette somme?
peut-on le faire présum er parce qu’on aura dit que le sieur
de Besse avoit des dettes tandis qu’ il le nie ? que son ma-
�C 43 )
riag e a fait des dépenses, et que c’est le sieur de St.-D idier.
qui a fourni l’argent à sa belle-m ère pour les payer, tandisque c’étoit une charge du fils? n’est-il pas évident que si
la mère eût voulu lui faire cet avantage in d irect, et enle
ver tout espoir à sa fille dans ses propres biens, elle ne se
fût pas adressée à son gendre pour lui en fournir les
m o yen s? N e cherchons pas toutes les circonstances qui dé
montrent que cette dette n’étoit pas réelle -, elles sont
trop frappantes pour ne pas opérer d’elles - mômes la per
suasion, la conviction m êm e; mais pourquoi prendre la
peine de prouver la vérité d’ un fait par les circonstances,
lorsqu’un moyen de droit se présente , qui rend cette
recherche inutile et sans objet?
T o u tefo is, qu’on ne dise plus qu’en cela, le sieur de
Besse accuse sa mère et son b eau -frère d’avoir ourdi une
fraude, et son neveu de vouloir en user. E n disant qu e
si le billet étoit sincère à la date du 13 octobre 1787, il
seroit une fraude à sa donation, il n’a eu d’autre pensée,
e t, en effet, il en a immédiatement conclu qu’indépen
damment de ce que cette précaution eût été fort mala
droite , il suffit que ce fût une fraude pour qu’on ne doive
pas y croire, parce que, soit madame de Besse, soit M . de
St.-D idier, en étoient incapables; q u e , par co n séq u en t,
M . de St.-Didier fils, qui n’a pas connu par lui-même les
circonstances du fait, et qui ne paroît avoir reçu à ce sujet
aucune instruction précise, a donné trop de confiance à
une date qui a pu néanmoins être le garant de sabonnefoi.
Q u ’on ne répète pas davantage que cette fraude est
invraisem blable, parce que toutes ces circonstances dé6 *
�( 44 )
m ontrent que la dame de Besse n’a jamais pu en avoir l’in
tention , qu’elle eût tourné au profit de son gendre et non
de sa fille qui n’avoit pas d’enfans ; que sa prédilection
étoit pour son fils; qu’enfin, l ’appelant est porteur d’un
jugement et d’ un a rrê t, et que le sieur de Besse ne peut
pas espérer de les détruire ,* car nous redirons éternelle
ment : c’est parce que tout cela est v r a i, et parce qu’il est
vrai en même temps que si le billet étoit sincère il seroit
une fraude, que nous soutenons qu’il ne l’est pas, et que la
dame de Rochechouart n’a menti ni à la justice, ni à ellem êm e, en soutenant, jusqu’à la m o rt, qu’elle l’avoit en
v o y é de Suisse, pendant son ém igration, comme un m oyen
de lui sauver quelque chose; et com m ent le sieur de S t.D id ier pouvoit-il attester le contraire et affirmer que le
le sieur de Besse s a it , m ieux que perso 7in e , quelle a été
sa destination, ce qui insinue qu’il en a profité, alors qu’il
recon n oît, dans son m ém oire, page 43, ce qu’z7 n’aperson« nettement aucune connoissance positive desfaits; qu’il
cc a dû prendre les choses en l’état où il les a trouvées , et
« n’a fait une réclamation qu’avec la conviction qu’il étoit
cc créancier de son aïeule. » Q ui donc a contesté sa convic
tion ? Mais comment le sieur de Besse seroit-il obligé de
s’y rendre, alors q u ’il est certain du contraire, et que les
circonstances bien expliquées le dém ontrent ? et comment
seroit-il dans la nécessité de faire plier sa donation contrac
tuelle devant un quarré de papier dont il connoît l’origine,
et dont le sieur de St.-D idîer seroit fort embarrassé de jus«
tificr la destination et Cemploi.
O n veut que le sieur de Besse soit en contradiction avec
�( 45)
Iui-mcme; car si la promesse a été souscrite en 1787, pour
quoi dire q u elle a été envoyée d e F rib o u rg , et si elle a
été faite pendant l’ém igration, comment prétendre qu’elle
auroit été souscrite pour rendre illusoire la donation de
1787? L e sieur de St.-Didier nous perm ettroit-il de lui de
mander s’il ne sait rien de m ieux pour déconsidérer la dé
fense du sieur de Besse? n’est-ce pas là une objection sans
couleur comme sans consistance ? O n lui a dit que si le
billet avoit été fait en 17 8 7 , il seroit une fraude à la dona
tio n , et que le donataire n’en seroit pas chargé. C ’est un
point assez reconnu ; mais on a ajouté que dans la vérité du
fa it, il avoit été en voyé de Suisse après l’ém igration , et
que le sieur de Besse n’avoit p a s, à cet ég a rd , le moindre
scrupule à se faire en le contestant. Cela est-il clair? est-cc
tom ber en contradiction, et s’écarter des convenances, ou
bien est-ce parler raison et tenir un langage décent ? Peutêtre , avec de la réflexion , le sieur de St.-D idier auroit-il
pensé que rien ne l’obligeoit à voir, dans la conduite de son
beau-père, les intentions q u i l lu i suppose.
N e seroit-ce pas lui qui ne se seroit pas bien exactement
fendu compte d’un f a it , et qui seroit sur un point en con
tradiction avec lui-m êm e? Le moyen de fraude à la dona
tio n , lui a paru d’autant plus blamable dans 1û bouche du
sieur de Besse, que la dame de Rochechouart ne Vavoit
pas imaginé, quoiqu'elle eût contesté la demande en
payement (page 39) >^ sem ble, dès lo r s , que c’est un rêve
du sieur de Besse, et pourtant, pour se défaire plus sûre
ment de ce m oyen, le sieur de St.-D idier ajoute, pas plus
loin qu’à la page 41 :
S l6 lir ^e
-^esse
prouvé n i la
�( 4« )
fr a u d e , n i la sim ulation ...... A u reste, les moyens q u ’il a
proposés devant les premiers juges leur étoient déjà con
nus; déjà ils en avoient f a i t justice lorsqu'ils lu i fu ren t
présentés pour la premièref o i s , par la dame de Rochechouart elle-mémê ; et à la page 43 : Madame de Besse
avoit déja présenté les prétendus indices de simulation
que Ton a reproduits devant les premiers juges , et un ar
rêt en a fa it juctice.
Il
ne faut ici aucunes réflexions, elles seroient d’autant
superflues que ce n’est pas là. la cause. L e sieur de Besse a
prouvé que les trois moyens proposés contre lui par le
sieur de St.-D id ier sont erroués ; que sa donation résiste au
billet de 76,917 f r ., et à tout ce qui l’entoure ; qu’elle se
soutient d’elle-m em e, et que le j u g e m e n t doit être main-»
tenu sauf les r ectifications qu’il a indiquées. Il eût eu à se
rep ro ch er, sans doute, de taire la vérité à la justice. C ’est
bien alors qu’il se fût exp osé,vis-à-vis ses créanciers, à
être accusé de collusion avec son gendre, et sa position fût
devenue beaucoup plus embarrassante, car la fraude eut
été plus vraisemblable. Il s’est conduit autrement parce
q u ’il a cru le devoir. Iln e veut pas plus accuser son gendre,
que se faire accuser de collusion avec lu i, et après avoir
soumis à la Cour des faits plutôt que des moyens , il doit
attendre son arrêt avec calme et sécurité.
Me. D E V I S S A C , Avocat.
M e. T A I L H A N D F ils , Avoué-licencié .
T H I B A U D , Imprimeur de la Cour royale et Libraire à Riom . — A vril 1828.
�
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Comte de Basse de Larichardie. 1828]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Tailhand fils
Subject
The topic of the resource
émigrés
créances
biens nationaux
successions
dot
douaire
contrats de mariage
testaments
condamnation à mort
forclusion
Description
An account of the resource
Précis en réponse pour le comte de Besse de Larichardie contre le comte de Genestet de Saint-Didier et le sieur Chanson, appelans; en présence des dames du Chilleau, Romain, Verrier et autres, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1828
1787-1828
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV23
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_DVV21
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Pal (terre de)
Sainte-Catherine (63328)
Vernet-Chaméane (63448)
Aulhac (Terres de)
Puy de Celle (Terre de)
Fribourg (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
condamnation à mort
contrats de mariage
Créances
dot
douaire
émigrés
forclusion
Successions
testaments
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Text
/Jt*
MÉMOIRE
COUR ROYALE
POUR
DE RIOM.
M. le Com te D E G E N E S T E T D E S A I N T - D Ï D I E R ,
A p p ela n t et In tim é;
CONTRE
1° L e sieur C H A N S O N , B a n q u ier, aussi Appelant
et Intimé;
i° L es dam es D U C H I L L A U et les sieurs R O M A I N
et D E T E R V E S , leurs maris ;
3 ° L es
ép o u x V E R R I E R , et autres
sieur E t i e n n e T E Y S S I E R /
° L e sieur L ’H É R I T I E R
° L a dem oiselle F E R U R I E R ;
4
5
6° L e
héritiers d u
sieur B E R C H U T ,
T ous créanciers d e M . le Com te D E
BESSE,
aussi Intimés;
8° Enfin M . ' V
ic t o r ,
Com te D E B E S S E D E L A
R I C H A R D I E , aussi Intimé.
U n o r d r e ouvert au tribunal d ’Issoire, entre les
créanciers de M. le comte de Besse, a donné lieu à des
contestations aussi graves que nombreuses.
L a créance de M. de Saint -Didier, su r- to u t, a été
l'objet des plus vives attaques.
M. de B esse a prétendu, sans l ’établir,
tantot que
—
2° CHAMBRE*
�cette créance était simulée ,
résultat
d ’ un
concert
tantôt q u ’elle était le
fraud uleux,
pratiqué
entre
M. de Saint-Didier et la dame de Rochechouart, veuve
de Besse ,
sa débitrice , pour rendre illusoire une
donation, dont M. de Besse réclame lui-méme l ’exécution.
Ces moyens présentés par M. de Besse,
beau-père de M.
premier a b o rd ,
de Saint -Didier,
oncle et
semblaient,
mériter quelque confiance,
ail
mais ils
étaient écartés par toutes les circonstances de la cause.
On ne sait pourquoi les premiers juges n ’ont pas
statué sur la question soulevée par M. de Besse : en
prononçant sur les autres difficultés qui leur étaient
soumises, ils n’ont pas décidé si M. de Saint-Didier
était ou non créancier de Madame de Rochechouart,
et pouvait exercer les droits de cette dernière.
des premiers juges a été le principal objet
de l ’appel de M. de Sa in t-D id ier; il est important
C e silence
pou r tous les créanciers
créance soit enfin connu : toutes les parties intéressées
à contredire sont en présence; pourquoi laisserait-on
subsister des contestations q u ’il est si facile de ter
miner ?
M. de Saint-Didier n ’expliquera point ici pour
quoi le père de son épouse cherche à le dépouiller de
sa fortune.
Placé entre les convenances que lui imposent ses
affections les plus chères, et la nécessité de repousser
(Tes insinuations odieuses, il justifiera la légitimité de
sa créance, sans aucune récrimination.
�Son caractère connu , son rang et ses relations dans
la société lui font un devoir de donner quelque p u b li
cité à sa défense.
FA ITS.
Le
août 1 7 6 5 , M. le marquis Claude de Besse
de la Richardie contracta mariage avec Mademoiselle
Louise de Rochechouart.
L a future se constitua en d o t , de ses deniers pa rti
culiers, 20,000 liv. 5 il lui fut constitué, en outre, par
ses père et mère 4°?ooo liv.} et ces deux sommes furent
reçues par le futu r époux.
Il fut stipulé en faveur de la future un douaire
préiix tle 5 ooo liv. par a n n é e , et un gain de 10,000 liv.
en faveur du survivant des époux, sur les biens du
prémourant.
Q u a n t au f u t u r ,
il fut institué par son père son
héritier universel.
Enfin , par le même contrat,, les sieurs de Besse de la
Richardie père et fils, pour soutenir l ’état et le lustre
de leur maison, substituèrent les terres d ’A u l h a c , de
C h a t e a u n e u f - d u - D r a c et a u t r e s ,
et quatre
cents
marcs de vaisselle d ’argent à celui des cnfans mâles à
naître de ce mariage, q u ’il plairait au futur époux de
choisir, pourvu q u ’il 11e fut pas engagé dans les ordres
sacrés ;
mais il y fut expressément déclaré que ces
substitutions ne pourraient
porter aucun préjudice
aux droits, actions et hypothèques de la demoiselle
future épouse, tant pour ses gains et douaires que pour
�.
(
4
,}
sa d o t , et q u ’elle serait toujours préférée aux substi
tutions, à défaut de bieus libres suffisans.
Deux enians sont nés de ce mariage, Marie-Louise,
et Louis-Victor-Eustorge de Besse.
Le 20 mai 1 7 7 3 , Claude de Besse fit un testament
olographe, par lequel il légua à la dame de Rochechouart, son épouse, et à Vi ct or de Besse, son fils,
tout ce que les lois de son domicile et de la situation
de ses biens lui permettaient de leur donner, voulant
que tout ce qui reviendrait à son fils en vertu de cette
disposition, lui appartint par préciput et avantage sur
sa sœur.
C e legs fut fait à Madame de Rochechouart pour
l ’ usufruit seuleme nt, et à M. Vi ct or de Besse, pour
la propriété.
C laude de Besse décéda le i
3 juin
1777? laissant ses
deux enfans encore mineurs, sous la tutelle de leur
mère.
La
M.
demoiselle
Marie-Louise
.Tean-Baptiste-IIector
de
de
Besse ,
Genestet ,
épousa
comte
de
Saint-Didier.
On voit dans leur contrat de mariage, en date «lu
I er août 1784? cl ue hi daine de Rochechouart, mère de
la futu re , lui constitua en d o t , p o u r biens p a tern els,+
la somme de 110,000 l i v . , dont 70,000 liv. devaient
être payés lors du mariage de M. A iclor de Besse, frère
de la fu tu r e , et le surplus après le décès de la dame
de Rochechouart seulement, au moyen de quoi la
future renonça à la succession échue de son père.
D e son chef, la daine de Rochechouart constitua à
�la dame sa fille, la somme de 10,000 liy., aussi payable,
lors du mariage de M. Victor de Besse, ou au plus
tard dans dix années, avec intérêts ju squ’au paiement;
et la future renonça pareillement en faveur de son
frère a la succession de sa mère,
ainsi q u ’à toutes
autres à échoir de l ’estoc maternel.
M. le marquis de S a in t -D id i e r,
père du f u t u r ,
l ’institua son héritier général et universel de tous les
biens dont il mourrait saisi et vêtu.
Peu de tems après son m a r i a g e M . le comte de
Saint-Didier recueillit le bénéfice de cette institution ;
il avait déjà recueilli la succession de la dame de
Th é l i s , sa mère, et se trouva possesseur d ’une fortune
très-considérable.
Cependant
M a d a m e de R o c h e c h o u a r t ,
malgré
les
revenus que lui assurait sa qualité d ’usufruitière des
grands biens de la maison de Besse, non seulement 11e
paya point la do t q u ’elle avait promise à la d ame de
Saint-Didier, sa fille, mais encore eut s ou ve nt recours
à la bourse de M. de Saint-Didie r, son gendre.
L ’habitude q u ’elle avait de tenir un grand état de
maison, la dépense que lui permettait sa fortune, les
dissipations de son fils, devenu, jeune encore, officier
dans les gardes françaises, les charges de la succession
de Besse l ’obligèrent à des e m p r u n t s réitérés.
Bientôt M. Vict or de Besse contracta mariage avec
mademoiselle de Bosrcdon de
Sugère,
l ’une des plus
fiches héritières de la province. On conçoit ([ne cette
circonstance dut occasionner de grands frais, des fêtes
brillantes, de magnifiques présens de noces. M. Victor
�de Besse ne jouissait alors d ’aucuns biens; la dame de
Rochechouart pourvut à tout. C ’est encore
M. de
Sain t-Didi er qui prêta h sa belle-mère les sommes
dont elle eut besoin à cette époque.
L a dame de Rochechouart reconnut la dette q u ’elle
avait contractée. L e i
3 octobre
1787 , il en fut fait un
règlement : elle souscrivit, en faveur de M. de SaintD i d ie r , une promesse sous seing-privé, 011 elle déclara
lui devoir la somme de 7 5 ,9 1 7 liv. q u ’il lui avait
prêtée en différentes fois, et promit lui en faire le
remboursement à la première réquisition, avec l ’intérêt
k cinq pour cent.
L e surlendemain,
i
5
octobre 1 7 8 7 , »eut lieu le
contrat de mariage de M. Victor de Besse.
L a dame de Rochechouart, sa mère, lui fit donation
entre-vifs de tous ses biens présens et à ven ir, sous la
réserve de 20,000 liv. , pour en disposer c o m m e elle
aviserait. E lle se réserva aussi l ’ usufruit des biens
donnés, ainsi que tous les droits c l u su fru it et autres
à elle acquis sur les biens de la succession de Cla ude
de Besse son mari. Néanmoins elle abandonna à son
fils la jouissance de la terre du Puy-de-Celle et de ses
dépendances.
Peu d ’années après survint la révolution. M mc de
Rochechouart et son fils émigrèrent. Tous leurs biens
furent mis sous le séquestre national.
M. de Saint-Didier et son épouse étaient restés en
France. Us obtinrent de la nation le partage des biens
délaissés par Claude de Besse. C e partage
eut
lieu le
�• (
7
)
23 germinal an i ( 1 2 avril 1794)« L a moitié de ces
biens fut attribuée à Mme de Saint-Didier.
Peu de mois après ce partage-, M me de Saint-Didier,
son m ari, plusieurs autres personnes de leur famille
furent condamnés par le tribunal révolutionnaire. L a
confiscation de leurs biens fut prononcée au profit de
l ’É t a t .
M. de Saint-Didier laissait un fils, à peine âgé de trois
ans. 11 voulut lui conserver la somme qui lui était due
par M me de Rochecliouart; mais prévoyant que celle-ci
était appelée par la loi à la tutelle de cet enfant, fondé
peut-être dans sa défiance, M. de S a in t -D id i e r, avant
d ’aller à la m o r t , déposa entre les mains d ’un ami la
promesse du i octobre 1 7 8 7 , avec recommandation
de ne la remettre à son fils., que lorsqu'il serait pa r
3
venu à sa majorité.
Orphelin et sans ressource, le mineur de SaintDidier fut recueilli d ’abord par cet am i, allié de sa
famillej plus ta rd, il fut confié aux soins de M. de
Vissaguet, l ’ un de ses païens paternels, nommé son
t u t e u r , à défaut de païens plus rapprochés.
Lors que le calme fut enfin r é t a b li , M mc de Rochechouart et M. Victor de Besse son fils profitèrent des
lois d ’amnistie, et rentrèrent en France.
A cette époque la nation avait vendu la terre du
l^uy-de-Celle, et d ’autres propriétés qui avaient été
mises dans le lot de M. de Besse, lors du partage de
1 an
a. Q u a n t aux autres biens provenus de son père,
d après tontes les lois alors en vigueur, et d ’après ce
�( 8 ) .
même partage, devenu irrévocable, ils appartenaient,
sans contredit, au mineur de Sa in t-D idier.
Néanmoins ce que M ,ne de Rochechouart et M. de
Besse n ’auraient pu obtenir alors de la justice, ils
l'obtinrent du tuteur Yiss ague t, q u i , consultant plus
en cela l ’équité que les intérêts de son pupille,, fit, au
nom 'd e (^ lui-c i, des sacrifices q u ’il est facile de re
connaître.
Le
3,
et par la médiation d ’un
fit avec
M me de Rochechouart et
9 frimaire an i
jurisconsulte,
il
M. Victor de Besse, son fils, un traité dont il est
i m p o r t a n t de rappeler quelques clauses.
M. de Vissaguet y reconnut d ’a b ord , en sa qualité
de tu te u r, que M. Victor de Besse était recevable et
fondé à att aquer, par la voie de l ’appel, le jugement
qui avait ordonné le partage de l ’an 2, en ce que ce
avait attribué à la dame de Saint-D idie r, sa
sœur, la moitié de tous les biens de la succession de
jugement
Claude de Besse. Il reconnut la dame de Rochechouart
fondée a l ’attaquer aussi par voie de tierce-opposition,
parce que ce jugement 11e lui avait pas réservé l ’ usu
fruit des biens de son mari.
L e partage fa it, le
germinal an 2 ,
23
entre la
république et M me de Saint -Didier, fut déclaré n u l ,
et les parties rétablies dans tous les droits q u ’elles
avaient avant le partage annulé. L ’on procéda à un
nouveau
règlement;
et pour remplir le mineur de
Saint-Didier de tous les droits paternels légitimaires,
et autres, de la dame sa mère dans la succession de
]\I. C la u d e de liesse sou a ïe u l, il lui fut laissé, à titre
�9
' (
)
de partage par a tt rib u t io n , i° la terre de Saint-Pal,
située dans la Haute-Loire; i° l ’action à exercer contre
le trésor p u b li c , pour la restitution du produit de la
vente de deux domaines dépendans de la terre du
Puy-de-C elle, qui avaient été vendu s, comme biens
de condamnés, après la mort des sieur et dame de
Saint-Didier.
M. de Y i s s a g u e t , en sa qualité de t u t e u r , aban
donna à M. Vi ct or de Besse tout le surplus des biens.
Il fut convenu, en outre , que M n,e de Rochechouart
d emeurerait déchargée, pour tout le tems de sa vie, de
l ’intérêt de la dot de 10,000 f r . , par elle constituée,
de
son chef, a la dame de Saint-Didier sa lîlle, et que
le principal 11e pourrait être exigé q u ’après le décès de
la da me de Ro che cho ua rt .
Enfin la dame de R o c h e c h o u a r t et la demoiselle
Victoire-Rose de Rochechouart sa sœur (créancière de
la succession de Besse , et partie dans ce traité) se
départirent,
c ha cu n e
en
ce qui
la concernait, des
hypothèques q u ’elles pouvaient avoir sur la terre de
S a in t -P a l , et consentirent que lesditcs hypothèques
fnssent restreintes aux autres biens de la succession de
Clau de de Besse, sous la réserve de tous leurs droits,
actions, reprises et créances contre cette succession et
contre M. Victor de Besse.
Il n ’est pas inutile peut-être de remarquer ici q u ’à
cette époque la plupart des créanciers de INI. Victor
de Besse, qui figurent dans la cause actuelle, n ’avaient
aucun droit hypothécaire sur les biens dont il s’a g it ,
ou même n ’étaient pas créanciers de M. de Besse.
�L e 9 ventôse an i
3,
il fut fait un second traité
entre M mc de Rochechouart et M. Victor de Besse
son fils.
Il y
fut stipulé que
le legs d ’ usufruit fait par
Cla u d e de Besse au profit de la dame Rochechouart,
par son testament de 1 7 7 3 , continuerait d être exécuté
selon sa forme et teneur; que pour lui tenir lieu de
son usufruit la dame de Rochechouart jo u i ra it} à titic
de partage par att ribut ion, de tous les biens remis et
délaissés à M. de Besse par le tuteur du mineur SaintD i d i e r , aux termes de la transaction du 9 frimaire
précédent.
Mais comme la qualité d ’usufruitière de la dame
de Rochechouart l'obligeait à paye r, pendant la durée
de son u s u f ru it,
l ’intérêt
des capitaux dus par la
succession de Claude de Besse, proportionnellement à
la portion des biens de la succession dont elle devait
jo u i r , il fut stipulé q u e , pour remplir sa contribution
auxdites charges, la dame de Rochechouart confondrait,
pendant tout le teins de sa jouissance, l ’habitation
dans le château d A u l h a c , stipulée en son contrat de
25
mariage du
août 17 Gf» , et le tiers de l'intérêt
annuel de ses créances propres, pour restitution de dot,
reconnaissances,
gains exigibles, et autres reprises,
ainsi que le tiers du douaire à elle diï en vertu de son
contrat de mariage, ou autres titres. L es autres d e u x
tiers des mêmes intérêts , douaire et ¡tension lui de
meurèrent réservés, p o u r s ’en fa ir e p a y er ainsi q u 'il
appartiendrait, de même que des capitaux cl de tous
arrérages du tems passe. E lle demeura aussi chargée
�d ’acquitter en totalité ,
pendant
la durée* de son
usufrui t, l ’intérêt annuel des créances de
de Rochechouart sa sœur, montant a
capital.
dame Rose
64 ,000
fr. en
C e t acte était évidemment la su it e , l ’exécution de
3
celui du 9 frimaire an i . Toutes les conventions q u ’il
renferme sont justes et équitables, et l ’on ne fait q u ’y
reconnaître les droits de M me de Rochechouart, soit
comme créancière, soit comme usufruitière des biens
de son mari.
Il est à remarquer toutefois q u ’il 11’y est fait aucune
mention de la donation de biens présens et à. v e n i r ,
que Mme de Rochechouart avait faite h M. de Besse son
fils ? par le c ont ra t de mariage de ce dernier.
Cette
donation semble même implicitement anéaïitie par cet
acte, pu isque , du consentement du sieur de Besse, la
dame de Rochechouart s’y fait la réserve de toutes ses
créances, en principaux et intérêts , p o u r s ’en fa ir e
p a y er ainsi q u ’il appartiendra; et ces créances compo
saient toute la fortune, ou si l ’on veut tous les biens
présens de la dame de Rochechouart.
3
Quoi q u ’il en soit, depuis ces deux actes de l ’an 1 ,
la dame de Rochechouart, ou pour mieux d ir e , M. de
Besse, son fils, qui a toujours vécu et habité avec elle,
a joui de tous les biens remis par le tu teu r du mineur
de Saint-Didier.
Depuis cette époque aussi, M. de Besse a contracté
des dettes considérables, ou conféré des titres authen
tiques a différens créanciers,
qui,
lors de ces deux
�raités dd r au i
3,
( 12 )
n ’avaient aucuns droits hypothé-
aires sur les biens dont il s’agit.
Cependant le mineur de Saint-DidieiAjue sa jeunesse
ivait empêché de connaître scs malheurs et la situation
le sa fortune, était enfin parvenu à sa majorité.
Il avait reçu du fils de son fidèle dépositaire la
uomesse,
e i
souscrite par Madame de Rochechouart,
3 octobre
1 7 8 7 ; il demanda vainement à sa débi-
rice de lui faire une reconnaissance authentique de
ette somme. La dame de Rochechouart, octogénaire
•t subjuguée par son fils, était trop faible pour prendre
conseil d ’elle-même, et reconnaître la justice de la
réclamation ; on rejeta pour elle toutes les propositions
Je M. de Saint -Didier, qui alors forma une demande
judiciaire. .
Il obtint, le
4 novembre
1 8 iG, au tribunal d'Issoire,
un jugement qui tint pour reconnues les écriture et
signature de la promesse de 1787 , et lui conféra
hypothèque sur les biens de la dame de Rochechouart.
Par un second jugement du 6 août 1 8 1 7 , celle-ci
liit condamnée, par dé faut, à payer le montant de la
promesse en pr inc ipal et i n t é r ê t s ; il est vrai q u ’elle
y forma opposition, mais elle en fut déboutée par un
troisième ju g em e nt, du f> mars 1 8 1 8 , et encore par
défaut de plaider.
La dame de Rochechouart en interjeta appel. Devant
les premiers juges, sans désavouer sa signature, elle
avait prétendu que la promesse n ’était pas sincère;
qu elle n’avait été faite q u ’afin de sauver quelques
débris de sa fortune menacée de confiscation, à cause
�(
*3
)
le son émigration; q u ’à cet effet elle avait envoyé ce
ullct à M. de Saint-Didier, son gendre, de Fribourg
en Suisse; elle ajoutait que ce billet était écrit sur du
papier suisse, et que d ’ailleurs la correspondance des
parties établissait la preuve de la simulation.
Dans son exploit d ’appel, elle prétendit que ce titre
'tait n u l et v i c i e u x , pour n ’avoir pas été revêtu des
caractères nécessaires à sa v a lid ité ;
elle reproduisit
d ’ailleurs les moyens qu'elle avait déjà présentés devant
les premiers juges, mais de pareilles allégations, dé
nuées de preuves, étaient trop invraisemblables pour
être accueillies; aussi la C o u r , ( 2 e ch a m b re), par un
arrêt contradictoire du 17 août 1 8 1 9 ,
confirma
le
jugement du 5 mars 1 8 1 8 , non seulement par les
motifs y exprimés, mais notam m ent, parce que les
fa it s de simulation n’étaient nullement prouvés.
Il était donc irrévocablement jugé que Madame de
Rochechouart était débitrice de M. de Saint-Didier,
son petit-fils, de la s o m m e de 7 5 , 9 1 7 liv. 10 s., et des
intérêts de cette somme depuis l'année 1787 ju s q u’au
réel paiement.
M. de Saint-Didier se contenta de faire des actes
conservatoires, pour la sûreté de sa créance, et ne fit
aucunes poursuites contre Madame de Rochechouart.
Celle-ci décéda le 26 juin 1822, au château d ’Aulhac,
où elle résidait avec, M. de Besse, son fils. C e dernier,
par acte fait au greffe d ’Issoire, le
déclara n’accepter
sa succession
3 o septembre
1822,
que sous bénéfice
d inventaire.
Il parait que plus tard , il a fait procéder à l inven-
�(
'4
)
taire de quelques effets mobiliers et papiers q u ’il a
déclaré dépendre de la succession de sa mère.
Q u a n t a M. de Saint-Didier, qui était aussi appelé
h recueillir la succession de la dame de Roc hechouart,
il a répudié cette succession pour s’en tenir à sa qualité
de créancier.
Les choses étaient dans cet état , lorsque M. de
Besse, par acte du 12 août 1 8 2 3 , a vendu au sieur
Brun,
notaire au
Ver net ,
différens
immeubles,
moyennant la somme de £9,000 fr.
L ’acquéreur a fait notifier son contrat d ’acquisition
aux créanciers inscrits, et par s u it e, un ordre a été
ouvert au tribunal d ’ïssoire, sur la réquisition des
époux Romain et consorts.
Beaucoup de créanciers ont produit et demandé
collocation ,
notamment les héritiers T e y s s i e r , les
le sieur Pouget subroge aux
droits du sieur C a s a t y , les sieurs Molin ier, B r a o n ,
époux Ro mai n et consorts,
Be rch ut et L ’héritier, la demoiselle F éburi er;
enfin,
M. de Saint-Didier.
Il est indispensable, pour l ’intelligence du jugement
dont est appel , de dire un mot des titres de ceux de
ces créanciers qui ont donné lieu à des contestations.
Les héritiers Teyssier ont p r o d u it ,
consulaire, et par d é f a u t ,
du
23
i° une sentence
juillet 1790,
qui
condamne M. de liesse îi payer au sieur Teyssier la
somme de
5200 liv. ,
montant d ’ une lettre de change,
avec intérêts depuis la demande;
a0 une inscription
prise le a5 septembre 1809, pour le principal et les
intérêts alors
échus; 3° une
seconde, du
3 juin
1817,
�prise seulement
pour les intérêts échus depuis le
a 3 ju i lle t 18 12 ; 4° en fin , une troisième inscription
prise le i
3
septembre 1822,
en renouvellem ent clos
deux précédentes.
Les époux Romain et consorts ont demandé à être
collo({ués, en v e r t u ,
i° d ’ une promesse souscrite par
M. de Besse, sous le cautionnement de Madame de
Roc hechoua rt, le 11 novembre 1 8 10 ,
de 1
5,320 liv.
de la somme
tournois, payable en 12 années, et douze
termes égaux, à commencer du i cr janvier 1 8 1 2 , avec
intérêt à cinq pour cent; 20 d ’ un jugement par défaut ,
3
du 12 janvier 1 8 1 , qui a condamné M. de Bésse et sa
mère à
payer
aux dames Du chillau les termes alors
échus de ladite créance, et ceux à échoir, à mesure de
chaque échéance, ledit jugement suivi d ’acquiescement
sous seing-privé;
3° d ’ une inscription du 23 février 1 8 13,
renouvelée le 19 février 1823.
Le sieur Pou ge t, aujourd ’hui représenté par le sieur
C h a n s o n , a pr o d u it ,
i ° une
obligation consentie pvar
M. de Besse, le 19 avril 1796, en faveur du sieur JeanBaptiste Casaty., it a li en , devant T obie C arm in lran ,
nota ire-juré à F r ib o u ig en S u isse ,
de
33 , 6 oo liv.
de France, en principal, avec intérêts à
cinq pour cent;
tant le dépôt
de la somme
i° un acte du 1 1 août 1807 , consta
de rette
ob lig ati on ,
Mc Ferrère, notaire à Bordeaux;
3°
eu
l ’étude de
une inscription
du 21 mars 1814 ? et uu acte de cession de cette
s é a n c e par le sieur C a s a t y , en faveur de Pouget.
Enfin, M. deSaiut-Didier demandait à être colloque,
i° pour la somme de 10,000 f r . , montant de la dot
�(
.6
)
que la dame de Rocliechouart avait constituée à h
dame de S a in t - D id i e r ,
sa fille,
par son contrat de
mariage, du i cr août 1784; 20 pour le montant de la
promesse
du i
3 octobre
1 7 8 7 , en principal, intérêts
et frais.
Mais pour parvenir à cette collocation, M. de SaintDidier demandait d ’abord que la succession de M n,e de
Rocliechouart fût colloquée pour le montant de toutes
les reprises et créances q u ’elle avait à répéter contre
MM. de Besse père et fils, il demandait que cette collo
cation eût lieu à la date du contrat de mariage de la
d ame de Rocl iechouart.
Outre les diiTérens titres dont on a déjà parlé, M. de
Saint-Didier produisait une inscription en date du
11 octobre 1 8 1 7 ,
par lui prise comme exerçant les
droits de la dame de Rocliechouart, sa débitrice, pour
de la somme de 120,000 fr.
29 octobre 1824, M. le juge-commissaire fit un
conservation
Le
règlement provisoire de collocation.
Il rejeta la demande de M. de Sa in t-D id ier, sur le
motif q u ’il avait renoncé à la succession de la dame
de Rochechouart, son aïeule; q u ’au moyen de cette
renonciation, M- de Besse sur lequel l ’ordre était
ouvert, se trouvait seul héritier de sa mère,
et q u ’il
s’était opéré en sa personne une confusion qui avait
éteint toutes les créances de la dame de Rochechouart;
q u ’en fin M. de S a i n t - D i d i e r n ’avait formé aucune
demande en séparation des patrimoines pour empêcher
cette confusion.
M. le commissaire proposa ensuite de colloquer les
�<1
(
)
autres créanciers dans l ’ordre su iv an t,
héritiers T e y s s i e r ,
C a s a ty ,
les époux
le sieur Molinier,
pour des
intérêts,
les
savoir : les
Romain,
Pouget ou
encore les époux Romain
héritiers Teyssier pour
des
intérêts, le sieur Braon , la demoiselle Féburier, et le
sieur L ’héritier; il rejeta la demande en collocation du
Berchut comme prématurée, à cause de l ’usufruit
sieur
de M. de Besse.
C e règlement a donné lieu à de nombreuses contes
tations.
D ’a b ord ,
M. de Saint-üidi er a demandé la sépa
ration des patrimoines de Madame de Rochechouart et
de M. de Besse, et réitéré sa demande en collocation.
Il a critiqué ensuite plusieurs des collocations pro
posées par le juge-commissaire;
Celle des héritiers Teyssier, parce que leur inscrip
tion du 2
5 février
1809, n ’ayant pas été renouvelée,
avait cessé d ’avoir son effet; q u e celle par eux prise
le 3 juin 1817 ne l ’avait été que pour conserver les
intérêts de leur créance; q u ’enfin, ils ne devaient être
colloqués pour le capital q u ’à la date de leur inscription
du i
3 septembre
1 822 ;
Celle des époux Romain et consorts,
parce que le
8 3
jugement par défaut du 12 janvier i i , par eux
pr od uit, était périmé, faute d ’exécution dans les six
mois,
et que l ’acquiescement
q u ’y avaient donné
M. de Besse et la dame de Rochechouart n ’ayant pas
de date certaine antérieure k son enregistrement du
2
juin i 8 2 3 j
11e pouvait être opposé aux créanciers
•
inscrits antérieurement;
3
�Celle du sieur C a s a t y ,
parce que son titre était
n u l , ayant été consenti par M. de Besse,
frappé de mort c i v il e } parce q u e ,
émigré et
d ’ailleurs ce titre
ayant été consenti devant un notaire étranger,
ne
pouvait avoir aucun effet hypothécaire sur des biens
situés en France.
Au surplus, tous les autres créanciers se sont réunis
à M. de Saint-Didier pour contester la collocation du
sieur Casaty..
L e sieur L ’héritier et d ’autres créanciers avec lui
ont aussi contesté les réclamations de M. de SaintDidier.
Ils ont p rét end u qu e sa d e m a nd e en sépara
tion de patrimoines n ’avait pas été formée en tems
utile j
que
la dame
de Rochechouart
d ’hypothèque légale antérieure
au
n ’avait
Code c i v i l ,
pas
et
q u ’efle n ’avait pris aucune inscription sur les biens de
son mari. Ils ont contesté même la validité de celle
prise par M. de Saint-Didier, le i r août 1 8 1 7 , comme
exerçant les droits de sa débitrice.
Ils ont aussi demandé le rejet de la collocation du
sieur Molinier, sur le motii que ce créancier n ’avait
pas d ’ hypothèque sur le bien dont le prix était en
distribution.
L e 6 mars 1826, il a été fait par M. de Bcsse lin
dire au procès-verbal d ’ordre.
I) a soutenu que la créance du sieur Casaty devait
être considérablement rédu ite, et en a indiqué les
causes.
Relativement
à M. de Saint-Didier et à ses réclama
tions, M. de Besse a prétendu que, dès le 1 5 octobre 1787,
�(
19 )
les reprises de la clame de Rocliechouart étaient de
venues sa propriété, en vertu de la donation de biens
présens et à venir dont on a déjà parlé j que.» confor
3
mément à l ’ordonnance de i ^ i
il avait déclaré s’en
tenir aux biens présens, et q u e , quant aux biens à
venir qui composaient la succession de la dame Rochechou art , il n ’avait accepté cette succession que sous
bénéfice d ’inventairej que dès-lors la promesse
75,917
de
l i v . , produite par M. de S a in t-D id ier, ne
pouvait lui être opposée, n ’ayant pas de date certaine
à son égard, n ’ayant été enregistrée q u ’en 1816.
Il a contesté ensuite la sincérité de cette promesse,
et suivi le système déjà présenté
M me de* Rocliechouart.
sans succès par
Il a soutenu de plus que si l ’on supposait que la
date de ce billet fut sincère alors, ayant été souscrit
deux jours avant son mariage, cet acte aurait été fait
le b u t de rendre illusoire la donation que la
dans
dame de Rocliechouart voulait faire en sa faveur.
Enfin que la dame de Rocliechouart étant usufrui
tière des biens de son mari se devait à elle-même le
montant de ses reprises.
Cependant le tribunal d ’Issoire, par un premier
jugement en date du 8 mars 1 8 2 6 , a déclaré le patri
moine de la dame de Rocliechouart séparé des biens
de INI. de Besse son iils. C e jugement a renvoyé les
parties à l ’audience, poùr y être statué sur les contes1 a lion.s relatives à l'ordre des collocations.
Dans cet état de choses, deux nouvelles demandes
�( 20 )
sont venues ajouter encore aux difficultés qui déjà
s’étaient élevées.
D ’abord, par une requête du 8 avril 1826 , M. de
Besse a formé tierce-opposition incidente aux divers
jugemens que M. de Saint-Didier avait obtenus contre
M “ ' de Rochechouart, les
5
4
novembre 1 8 1 6 , 6 août
1817,
mars 18 1 8 , ainsi q u ’à l ’arrêt confirmatif, du
17 août 1819.
E n second lieu , et le 11 du même mois, les héritiers
Teyssier ont aussi formé une demande incidente en
3
nullité du traité du 9 ventôse an i t, q u ’ils ont pré
t e n d u avoir été fait en fraude de leurs droits.
C est sur toutes ces difficultés q u ’a été rendu, le 9
août
1826,
un
jugement dont il est
essentiel de
donner sommairement l ’analise.
Les premiers juges ont reconnu d ’abord que la subs
t i t u t i o n , dont se t ro uv ai ent grévées les terres d ’Alilhac
et de C h â t e a u n e u f - d u - D r a c ,
l ’exercice des droits
ne pouvait
hypothécaires
empêcher
de la dame de
Rochechouart, mais ils ont décidé que son hypothèque
légale n ’avait pu exister indépendamment de l ’inscrip
tion ,
11
et
que dès-lors,
octobre
1817,
M. de S a in t-D id ier,
de 120,000 f r . ,
conséquence,
date
elle n ’avait de rang q u ’au
de l ’inscription prise par
et d ’eifet que pour la somme
conservée par cette inscription;
en
ils ont; ordonné que Madame de Roche
chouart serait colloquée à la date de cette inscription.
Statuant sur la demande de INI. de Saint-Didier, le
jugement dont il s’agit ordonne q u ’il sera colloqué en
^ous-oidre, sur le montant de la collocation revenant
’
�( 21 )
à la succession de Rochechouart,
pour la somme de
10,000 l i v . , montan t de la dot constituée à la dame
de Saint-Didier par la dame de Rochechouart,
dans
son contrat de mariage du I er août 1784? et pour les
intérêts de cette somme, depuis le décès de la dame de
Rochechouart, conformément au traité du 9 frimaire
3
an i .
•
*
Q u a n t à la demande en collocation de la somme
de 7 5 , 9 1 7 l i v . , montant de la promesse de 1 7 8 7 ,
et
des accessoires de cette créance, les premiers juges ont
considéré :
i° Que la dame de Rochechouart avait fait à M. de
Besse son f i l s , par son contrat de m aria ge, donation
de tous ses biens présens et à ve nir; que d ’après
l ’article 17 de l ’ordonnance de 1731 , M. de Besse avait
le droit de s’en tenir aux biens présens, en payant les
dettes existantes
k l ’époque du
contrat de
mariage,
et
q u ’il n ’avait accepté que sous bénéfice d ’inventaire la
succession de sa mère ;
20 Que la promesse souscrite par Madame de Roc he
c h o u ar t,
octobre
au profit de M.
de Sain t-D id ier ,
le
i3
1 7 8 7 , n ’avait eu de date certaine à l ’égard
de M. de Besse que le 2 octobre 1 8 1 6 ,
date de son
enregistrement; que dès-lors, elle était censée posté
rieure à ce contrat de mariage , et 11e devait former
q u ’ une dette des biens à venir.
E n conséquence,
les premiers juges ont distingué
les biens présens de la dame de Rochechouart,
lors
contrat de mariage de son fils, d ’avec ses biens à
venir.
�( 22 )
Us ont déclaré que les biens^ présens consistaient
dans la dot et le gain de survie de la dame de Roclie
chouart, m o n t a n t à 70,000 liv. , d ont il faut déduire
d ’abord la somme de
10,000 liv.
que la dame de
Rocliechouart avait constituée en dot à la dame de
Saint-Didier sa fille, et qui a été attribuée à M. de
Saiut-Didier fils,
ainsi q u ’on l ’a dit plus h a u t,
et
celle de 20,000 liv. que la dame de Rochechouart s était
réservée p a r l e contrat de mariage de son fils,
et ils
ont décidé que, ces déductions faites, le surplus appar
tenait à M. de Besse, et entrait dans la masse à
distribuer.
Us ont déclaré pareillement que les biens à venir,
composant la succession de la dame de Rochechouart,
consistaient dans cette somme de 20,000 liv. réservée,
et dans les intérêts de la dot et des reprises de la dame
de Rochechouart, échus depuis le contrat de mariage
de son fils, mais que M. de Saint-Didier n ’avait inscrit
que pour 120,000 f r . , somme sur laquelle il fallait
déduire le montant des biens présens,
q u ’en consé
quence il 11e restait de conservé p o u r les biens à v en ir,
par cette inscription, q u ’une somme de 70,000 fr.
Los premiers juges ont considéré ensuite que deux
créanciers inscrits se présentaient pour être colloqués
sur ces biens à v en ir, savoir : M. de Saint-Didier et les
daines Duc hillau (les époux Romain et consorts), pour
le cas 011 elles ne seraient pas colloquées utilement sur
M. de Besse; mais qne la promesse de 1787, produite par
M. de Saint-Didier, était contestée par M. de
que
Besse;
ce dernier avait formé tierce-opposition aux jugemeus et
�(
23
)
arrêts qui en ont ordonné le paieme nt,
sur laquelle
tierce-opposition , les parties fera ien t leurs d iligen ces
p o u r fa ir e statuer en la manière ordinaire...... y et par
tous ces motifs (sans statuer sur le mérite de cette
tierce-opposition),
ils ont ordonné que dans le cas
où la tierce-opposition dont il s’agit serait écartée,
la
somme formant les biens à venir de la dame de Rochechouart serait divisée au marc le fr a n c , entre M. de
Saint-Didier et les dames D u ch il la u ;
E t q u e , dans le cas où cette tierce-opposition serait
admise,
et la promesse de 1787 écartée,
les dames
Du chill au seraient payées du montant de leur collo
cation , et
ce qui resterait après leur acquittement
appartiendrait aux créanciers de M. de Besse, dans
l ’ordre de leur collocation.
Au
surplus,
les
premiers juges
ont
ordonné
q u ’il
serait délivré à M. de Saint-Didier bordereau de coJlo
cation pour la s o m m e de 10,000 liv. , montant de la
dot de sa mère, et pour les intercts de cette somme.
Ils ont déclaré q u ’il 11’y avait pas lieu à statuer sur
la demande incidente des héritiers Teyssier, en nullité
3
du traité du 9 ve ntosean i .
Relativement à leur demande en collocation , il a
été décidé, par le jugement dont il s’a g i t , que leur
inscription du 9.5 septembre 1809 se tr o u v a it périmée
à défaut de renouvellement; que celle du
3 juin
1817
n ’ avait pour objet que la conservation de nouveaux
intérêts échus depuis la première; q u ’eniin ils ne
seraient c o l l o q u e s q u ’à la date de leur inscription du
�i
3
(
*4
)
septembre 1 8 2 2 , pour le capital et autres acces
soires de leurs créances, pour lesquels ils avaient été
mal à propos compris sous l ’ article
3 du
procès-verbal
de collocation provisoire.
E n ce qui touche les réclamations élevées contre la
collocation des dames Duchillau , le jugement dont est
appel a décidé q u e M . de Saint-Didier, n ’ayant pas plus
de droits que M me de Rochechouart sa débitrice, n ’était
pas fondé à critiquer l ’acquiescement fait par ladite
dame au jugement par d éfau t, du 12 janvier i
8i 3,
produit par lés époux Romain et consorts ; que cet
ac qu ie sc e me nt ne pouvait être c r i ti q u é non plus par
les autres créanciers produisans , parce.;(^jie , d ’après
l ’article 116 6 du Code civil, ils ne pouvaient exercer
les droits exclusivement attachés à la personne du
d é b it e u r , et que la prescription établie par l ’art. i
56
du C o d e de procédure est t ou t entière dans l ’ intérêt
du condam né, que la loi n ’a pas voulu laisser dans les
liens d ’ un jugement q u ’il pouvait ignorer; que ce
m o ti f n ’existait point pour les tiers; que cette pres
cription était personnelle à la partie défaillante, et ne
pouvait être opposée que par cette dernière.
Mais ce jugement a reconnu néanmoins que la
créance des dames Du ch illau était payable en douze
termes, et q u e , d ’après la loi du
3 septembre
18 0 7 ,
leur inscription du 2.3 février 1 8 13 n ’a pu conserver
d ’autres termes que ceux échus à cette époque;
en
conséquence, il a maintenu sur ce point le travail du
juge-corn missaire.
Les premiers juges ont rejeté la demande en colloca-
�( »
5)
tion du sieur C h an son , cessionnaire de la créance
Gasaty.
, Ils ont considéré à cet égard que l ’on ne pouvait
invoquer pour le sieur C a s a t y , originaire de Mila n,
ni les dispositions de l ’article 11 du Code civil, ni celles
du traité de réciprocité, existant entre la France et le
duché de M i la n , fait à V i e n n e , le 24 juin 1 7 6 6 ,
ratifié par le traité de Campo-Formio et par celui de
Paris;
Qu e ces traités ne pouvaient régir les actes faits
hors de la France et du Milanais, quoique passés entre
des sujets de ces deux gouvernemens; q u ’ils ne peuvent
gouverner que les actes passés sur les territoires respec
tifs de ces puissances, sur-tout lorsque ces actes ont'
pour objet de grever, par droit d ’hypothèque, une
portion quelconque de ces territoires ;
Que le droit d ’hypothèque
étant un
droit réel
affectant principalement le sol, le pacte q u i le c o nst itue
n ’est valable q u ’autant q u ’il est fait sous la domination
des puissances à qui ce sol appartient, parce qu elles ne
peuvent donner force d ’exécution a des stipulations
faites hors des pays de leur obéissance, quand elles
auraient eu lj^u entre leurs sujets respectifs.
Ils ont encore motivé cette disposition sur ce que
l ’acte du 9 avril 1 7 9 6 , passé entre le sieur Casaty et
M. de Besse, l ’avait été à Fribourg eu Suisse; et sur
ce que l ’on ne peut invoquer non plus pour Casa ty
les traités.de réciprocité passés entre les cantons suisses
83
et hi F ran ce? notamment celui du 27 septembre i o ,
siu ce q u e ces traités ne sont relatifs q u ’aux sujets nés
�( 2(5 )
ou naturalisés suisses, et q u ’il Ser-ait contraire à leur
esprit, d ’admettre que des étrangers à la Suisse pussent
venir y contracter et invoquer en leur faveur les p r iv i
lèges qui ne sont accordés par ces traités q u ’aux sujets
respectifs des deux nations; q u ’enfin le sieur Casa ty
est né à M i l a n , et q u ’il n ’est pas établi q u ’il se soit fait
naturaliser en Suisse.
Les premiers juges se sont encore déterminés par les
dispositions de l ’article 2128 du Code c i v il ,
qui ne
permet pas que les contrats passés en pays étrangers
puissent donner hypothèque sur les biens situés en
F ia n c e , s’il n ’y a des dispositions contraires à ce prin
cipe dans les lois politiques.
* Ils ont enfin reconnu que les actes récognitifs faits
en France par M. de Besse de l ’acte du 19 avril 1 7 9 6 ,
en faveur de C a s a t y , ne confèrent aucune hypothèque
h ce d e r n i e r ,
et q u e d ’ailleurs son inscription n ’ a
élé
prise q u ’en vertu de l ’acte du 19 avril 1796.
Les premiers juges ont également rejeté la demande
en collocation du sieur Mo bili er, comme n ’ayant pas
d hypothèque valable sur les immeubles dont le prix
est à distribuer.
E n ce qui touc he enfin la demande «n collocation
du sieur B e r c h u t ,
cessionnaire de la créance de la
demoiselle Rose Parfaite de Rochechouart,
à
64 >000
montant
? et soumise à l ’ usufruit de M. de B esse ,
ils ont ordonné que c el te somme serait t ouchée par le
créancier
sur qui les fonds m a n q u e r a i e n t , à la charge
par lui de donner c au tio n,
de la restituer au sieur
B e r c h u t , lors du décès de M. de Besse.
�27
(
)
D u reste, le jugement dont il s’agit ne parle d’aucun
des autres créanciers produisans.
Il en a été interjeté appel par le sieur C h ans on ,
cessionnaire de la créance C a s a t y , et par M. de SaintDidier. Ces deux appels ont été joints par un arrêt de
la Cour. Toutes les principales questions qui ont été
soumises aux premiers juges se présentent donc aujour
d ’hui de nouveau.
Les bornes de cet écrit ne sauraient permettre à
M. de Saint-Didier de les discuter toutes j il s’occu
pera spécialement d ’examiner la question qué présente
sa cause particulière; quan t aux autres, il se conten
tera de les indiquer avec les observations indispensables
pou r iixer sur chacune d ’elles l ’attention de la Cour.
A p p e l de M . de Sa in t-D id ier.
L ’on doit rappeler d ’abord à la C o u r que le patri
moine de M me de R oc he c h o u a r t a été séparé de celui
de M. de Besse son fils, par un jugement qui a depuis
long-tems acquis l ’autorité de la chose jugée ; que
M. de Saint-Didier ayant renoncé à la succession de
la dame de Rochechouart son aïeule, ne figure à l ’ordre
•que pour y exercer* les droits de sa débitrice. Il est
donc essentiel avant lout de déterminer d ’une manière
précise les droits et créances de M me de Rochechouart
contre la succession de Cla ude de Besse, ou q u o i que
ce soit, contre M. Vict or de Besse son fils.
Les premiers juges ont bien reconnu que ces reprises
COnsi8taient dans la dot, les gain de survie et le douaire
de M «le Rochechouart , et dans les intérêts de ces
�mêmes créances; mais ils n ’en ont pas déterminé la
quotité. Il est important néanmoins que ces droits
soient fixés d ’une manière invariable, pour q u ’il ne
s’élève plus à l ’avenir de difficultés à cet égard.
L ’on ne peut y parvenir sans examiner le mérite de
la donation faite par M rae de Rochechouart, le
i
5
octobre 17 8 7 , en faveur de son fils, de tous ses biens
présens et à venir.
M. de Saint-Didier n ’entend pas contester la validité
de cette donation. Il sait qu étant faite par contrat de
mariage, elle était autorisée par les dispositions de
l ’article 17 de l ’ordonnance de 1781 , qui régissait les
parties; mais il laisse à juger si cette donation n ’a pas
été implicitement anéantie par le traité fa it , le 9 ven
3
tôse an 1 , entre Mme de Rochechouart et son fils.
E n effet, les brens donnés par M"'e de Rochechouart
(au moins ses biens présens lors du mariage) consis
taient uniquement dans ses reprises matrimoniales
contre la succession de C lau de de Besse, ou contre
M. Victor
de Besse son h é r i t i e r ,
c'est-à-dire , en
créances et sommes d ’argent.
Cett e donation avait eu pour effet de saisir irrévo
cablement le donataire de la propriété de la chose
donnée, c’est-à-dire, d ’éteindre jus q u’à due concur
rence sa dette envers M mc de Rochechouart. Celle-ci
s’était à la vérité réservé l ’ usufruit des biens donnés;
mais cet usufruit consistait évidemment dans la pres
tation annuelle de 1 intérêt des sommes qui laisaient
l ’objet de la donation; quant au paiement des capitaux,
011 n ’avait plus le droit de l ’exiger.
�(
29
)
C ep en d a n t, par le traite dn 9 ventôse a n . i
3,
la
clame de Rochechouart se réserve les intérêts de sa
créance, p o u r s e n fa ir e p a yer ainsi q u ’il appartiendra,
de même que des c a p ita u x , et de tous arrérages du
tems passé. Elle pouvait donc , en vertu de ce traité,
exiger le paiement des sommes par elle données :
M. de Besse son fils pouvait y être contraint,
sans
égard à la donation. Ell e pouvait donc disposer de la
chose donnée au préjudice du donataire : il y avait
consenti, et il en était bien le maître; il avait donc
par cela même renoncé au bénéfice de la donation; et
l ’on peut considérer cette renonciation comme une
condition inséparable des autres conventions faites par
le traité du 9 ventôse an i .
M. de Saint-Didier se bornera à ces courtes obser
3
v atio n s, et s’en remet à la sagesse de la C o u r , sur la
question de savoir si cette renonciation est suffisam
ment exprimée, et si M. de Besse peut réclamer
aujourd ’hui l ’exécution de la donation dont il s’agit.
Mais en supposant, avec les premiers juges, q u ’elle
puisse recevoir son effet, et que M. de Besse ait fait en
tems utile sa déclaration de s’en tenir aux biens présens
lors de son contrat de mariage, il est évident q u ’alors
il faudra distinguer en lui deux qualités : celle de
donataire , et celle d ’héritier bénéficiaire de la dame
de Rochechouart;
qualités bien différentes dans les
droits q u ’elles donnent à M. de Besse, comme dans
les obligations qu elles lui imposent; et il sera facile
de reconnaître que les premiers juges u ont point assez
fait cette distinction importante.
�Dans celte hypothèse donc, la donation n ’ayant
d ’effet que pour les biens présens, il faut les déter
miner; et comme la dame
70.000 l i v . ,
de Rochechouart , sur
somme à laquelle s’élevaient ses reprises
matrimoniales, avait déjà disposé de 10,000 liv. en
faveur de la dame de Saint-Didier sa fille, et q ue , par
le contrat de mariage de son iîls, elle s’était réservé
20.000 liv.., les biens présens donnés à M. de Besse
s’élèvent à °jOOO liv. Cett e somme seule peut être le
4
gage de ses créanciers personnels.
Q uan t aux biens à v e n ir,
ils se composent du sur
plus des reprises de la dame de Rochechouart, c ’està-dire, i° des 20,000 liv. réservées; 20 des intérêts des
capitaux de ses reprises dotales et des arrérages de son
douaire.
Ces intérêts ou arrérages n ’ont pas été payés à la
dame de Rochechouart. M. de Besse l ’a reconnu luimême par le traité d u 9 ventôse an i ., dans lequel
3
la dame de Rochechouart s’en est fait expressément la
réserve. Ils sont dus à sa succession, savoir : pour la
totalité., depuis l ’année 177 7? époque du décès de
C la u de de Besse, ju squ’à ce même traité de l ’an i ;
et pour les d eux tiers seulement, depuis ce traité
3
j u s q u ’au décès de M me de Rochechouart.
Voilà quels sont réellement ses biens à v e n ir , qui
ne peuvent appartenir à M. de Besse ou à ses créanciers
personnels,
q u ’après le paiement des créanciers de la
succession.
Il a donc été mal jugé par les premiers juges, ou
plutôt ils ont commis une erreur, en décidant que les
�( 3i )
biens présens
5o,ooo liv.
donnes à M.
de Besse s’élevaient à
Il est inutile d'insister plus long-tems sur
ce point.
M.
de
Saint-Didier
avait
prétendu
devant
les
premiers juges que la succession de la dame de Roche
c ho ua rt
devait être colloquée à la date de son contrat
de mariage de 1 7 6 5 ,
en vertu de son hypothèque
légale. On lui a opposé la jurisprudence qui semble en
effet repousser cette pr é te n t io n , la dame de Rochechouart n ’ayant pas pris d ’inscription depuis la pro
mulgation du Code civil, il ne renouvellera donc point
cette prétention.
Mais en admettant que la succession de la dame de
Rochechouart ne doive, comme l ’ont décidé les premiers
juges, être colloquée q u ’à la date de l ’inscription du
11
octobre
1817,
prise par M.
de Saint-Didier,
exerçant les droits de sa débitrice,
il a été mal jugé
par le jugement dont est appel, en ce q u ’il n ’a pas
ordonné que cette succession serait colloquée pour la
somme entière de 120,000 fr.,
conservée par cette
inscription.
E t en effet,
les premiers juges en ordonnant la
collocation de la dame de Rochechouart,
ont décidé
q u ’il fallait d abord distraire les biens présens donnés
au sieur de Besse, c’est-à-dire,
5o,ooo
liv. de la Somme
de 120,000 fr. , conservée par l ’inscription de M. de
Saint-Didier, et que le surplus seulement ( c ’est-à-dire
la somme de 70,000 f r . ) , devait être affecté aux biens
a v en ir ,
chouart.
oL dévolu aux créanciers de la dame de Roche
�Cette disposition contient deux erreurs : la première,
en ce que le jugement dont est appel fixe à la somme
de
5o,ooo
fr. les biens présens donnés a M. de Besse,
tandis que l ’on vient de prouver q u ’ils ne s’élèvent
q u ’à 4°-»000 fr- >
La seconde, en ce q u e ,
n ’attribue à l'inscription
contre toute raison,
du
ii
octobre
1817
l ’on
que
l ’effet d ’avoir conservé 70,000 f r . , tandis q u ’elle a été
prise pour 120,000 fr.
N ’est-il pas évident que cette inscription n ’a été
prise que pour conserver une créance, et non les effets
d ’une donation qui existait indépendamment de l ’ins
cription, et que jamais l ’inscription n ’a eu la propriété
de donner effet à une donation; que d ’ailleurs, si l ’on
juge que la donation de biens présens faite en faveur
de M. de Besse, doive être exécutée, alors elle a saisi
le donataire , dès le jour de son contrat de mariage
de 1 7 8 7 , pour la propriété des biens donnés; et
M. de Besse étant lui-même débiteur des reprises de sa
m ère , cette donation a eu pour effet et n ’a eu d ’autre
effet que de diminuer ces reprises par la compensation?
D ’ une autre part, il est bien certain que les biens
présens donnés par M",c de Rocliechouart à son fils,
en 1 7 8 7 , n ’appartenaient plus à Madame de Rochechou artj ne faisaient plus partie de ses créances contre
son iils; M. de Saint-Didier n ’a donc pu ni vo u l u , par
son inscription du 11 octobre 1 8 1 7 ,
conserver une
partie de créance qui n ’appartenait plus à sa débitrice,
mais il a conserve une somme de 120,000 f r . , et sa
débitrice est créancière
de sommes beaucoup
plus
�(
33
)
considérables; la succession de cette dernière doit donc
être colloquée pour la somme entière de 120,000 fr.
à Valoir sur ses créances.
Deux créanciers se présentent pour être colloques
en sous-ordre, et au marc le franc,
rev enant à
la succession de Rochechouart, i ° les époux
et consorts,
Romain
sur les sommes
dont Madame de Rochechouart
avait cautionné la créance. M. de Saint-Didier n ’a pas
d ’iutérêt à contester leur demande, mais elle ne peut
être accueillie qu'au tant que les époux Romain ne
seraient pas colloqués utilement sur M. de Besse, leur
débiteur p r i n c i p a l , et sjTuf la subrogation en faveur
de la succession de Rochechouart, aux droits hypothé
caires et aux inscriptions des époux R o m a i n sur les
biens de ce d é b i t e u r ;
20 M. de Saint-Didier pour ses deux créances. Q u a n t
à la première, celle de 10,000 f r . , montant de la dot
de sa mère, il ne peut s’élever a u c u n e d if f i c ul t é ;
Pou r la seconde, celle de 7 5 ,9 1 7 liv. 10 s.,
intérêts,
l ’on a déjà dit que M. de Besse,
et
devant
les premiers juges, avait formé tierce-opposition aux
juge mens et arrêt qui ont condamné la dame de Roche
chouart à payer le montant de cette promesse.
Cette tierce-opposition a été formée incidemment
aux autres contestations relatives à l ’ordre dont il
s’agit ; elle l’a été par un dire au procès-verbal du
juge-commissaire, par une requête signifiée à avoué;
les premiers juges eu étaient donc valablement saisis,
mais iis ,,’o u t rien décidé sur son mérite; seulement, ils
ont ordonné que les parties feraient diligence pour y
5
�(
34
)
/’a ire statuer en la manière ordinaire,
et ont rendu
ensuite deux décisions hypothétiques.
Ils ont ordonné que dans le cas où la tierce-oppo
sition d e M . de Besse serait écartée, la somme formant
les biens à venir de la dame de Rochechouart serait
divisée au marc le franc entre M. de Saint-Didier et
les dames D u c h il l a u , et que dans le cas contraire, les
dames Duchillau seraient payées du montant de leur
créance, si elles ne ¡mouvaient l ’être utilement sur les
biens de M. de Besse, et que ce qui resterait après leur
acquittement appartiendrait aux créanciers de M. de
Besse dans l ’ordre de leur collocation.
C ett e disposition cause à M. de Saint-Didier le
préjudice le plus considérable, et rien ne peut justifier
le silence gardé par les premiers juges sur celte tierceopposition ; ils
n ’ont
considéré ni l ’embarras d ’un
procès q u ’ ils laissaient subsister, ni l ’ impor tanc e qu il
y avait à statuer sur le mérite de la demande en collo
cation de M. de Saint -Didier,
en présence de toutes
les parties intéressées; ils n ’ont donc statué que sur
une partie des difficultés qui leur étaient soumises,
et il en résulte q u ’ il serait impossible d ' o r do n ne r la
délivrance des bordereaux de collocation , tant qu'il
n ’aurait pas été fait droit sur la tierce-opposition de
M. de B esse.
11 est donc indispensable que la C o u r répare cette
omission
des premiers juges ; et c ’est là le principal
objet de l ’appel de M. de Saint-Didier.
A u surplus ,
1 article
4 y5 du
il
suffit de lire les dispositions de
Code de procédure civile pour recon-
*
�(
35
)
naître que cette tierce-opposition n ’était point recevable , formée devant les premiers juges, et que ces
magistrats n ’étaient pas compétens pour en connaître.
L a loi veut que la tierce-opposition formée par action
principale soit portée au tribunal qui
a rendu le
jugement attaqué; si la tierce-opposition est incidente,
elle
ne peut être portée q u ’à un tribunal égal ou
supérieur à celui qui a rendu le jugement attaqué.
O r , M. de Besse ne p ou va it , devant le tribunal de
première instance d ’Issoire, former tierce-opposition à
un arrêt rendu par la Cour. Les premiers juges étaient
incompétens pour statuer sur le mérite de cet arrêt;
ils devaient donc déclarer M. de Besse non recevable
dans sa prétention; et M. de Saint-Didier est bien
fondé à se plaindre de ce q u ’ils ne l ’ont point fait.
Il sait bien toutefois que devant la C o u r M. de
Besse pourra réitérer cette tierce-opposition.
On ne peut croire que devant les premiers juges
M. de Besse ait
:igi- de son propre mouvement;
il
feindrait d ’oublier ce q u ’il sait mieux que personne,
puisque c ’est lui qui a profité en majeure partie des
sommes que M. de S a in t - D id i e r avait prêtées à la
danie de Rochechouart.
Quoi qu il en soit, M. de Saint-Didier 11e redoute
nullement le nouvel examen que l ’on pourrait faire de
son titre de créance : il n ’aspire q u ’à voir terminer
toute discussion sur ce point.
Mais il est utile de faire une grande distinction dans
*es qualités dont M. de Besse est revêtu.
L ou ne
contestera point q u e , comme donataire, il
�( 3G )
ait le droit de former tierce-opposition aux jugemens
et arrêt qui ont ordonné l ’exécution de la promesse
de 1 7 8 7 ; cette promesse n ’ayant pas de date certaine
antérieure à la donation, 11e peut lui être opposée.
Mais est-il recevable de même en sa qualité d’ héritier
bénéficiaire, à former tierce-opposition à des jugemens
et arrêt rendus contradictoirement avec la dame de
Rochechouart q u ’il représente? Non sans doute, et les
dispositions de la loi établissent contre lui une fin de
non recevoir insurmontable.
U ne partie ne peut former tierce-opposition à un
jugement qui préjudicie à ses droits, q u ’autant que ni
elle ni ceux q u ’elle représente 11’y ont pas été appelés
( C o d e de procédure, art.
474 )*
S ’il en était autrement, ce serait remettre en question
avec 1 héritier la chose déjà jugée avec son auteu r; ce
serait éterniser les contestations.
E n opposant celte fin de non recevoir, M . de SaintDidier la présente plutôt pour s’opposer à la violation
des véritables principes que pour éviter l ’examen de
ses titres de créance, et il ne lui sera pas difficile de
démontrer l ’invraisemblance et le peu de fondement des
allégations qui ont été présentées devant les premiers
juges.
M.
de
Saint-Didier
se présente avec un titre entière
ment écrit et signé par. sa débitrice, avec des jugemens
et un arrêt qui ont acquis l ’autorité de la chose jugée;
comment espère-t-on les détruire?
de Besse f>rétend d’abord que le billet n ’est pas
sincère, qu’il est antidaté, q u ’il a été fait à Fribourg
M.
�37
(
)
en Suisse pendant Immigration de la dame de Roche
chouart, et q u ’il fut envoyé à la sollicitation de
M . de S a in t-D id ier} qui était resté en France, et qui
voulait sauver de la confiscation la fortune de sa belleinère.
Mais d ’a b ord , comment supposer que la dame de
Rochechouart n ’eut pas pris une contre-lettre, ou que
du moins, elle n ’eût pas gardé pour l u i en tenir lieu,
l ’écrit par lequel M. de Saint-Didier l ’avait sollicitée
de lui envoyer cette promesse; en second lie u , il faut
convenir que l ’artifice eût été maladroit; Madame de
Rochechouart n ’avait point d ’i m m eu ble s, par consé
quent pas de fortune
apparente ,
elle était simple
créancière de la succession de son mari; M. de SaintD i d i e r , sur le po int d ’être proscrit à son tour, se serait
bien gardé de se présenter à la nation comme créancier
de sa belle-mère avec un titre sans date certaine; c’eût
été courir à sa perte. Il ne pouvait donc avec ce billet,
sauver de la confiscation des biens que n ’avait pas
Madame de Rochechouart; et quant aux immeubles de
la maison de Besse, la dame de Saint-Didier son épouse
pouvait les réclamer comme héritière de C la u de de
Besse son père; elle.le fit eu e f f e t, pu isqu’elle en fit le
partage avec la république en l ’an 2.
On a dit en second lieu que M. de Saint-Didier
préféra ensuite un autre m o y e n ,
que l ’on cacha le
contrat de mariage du sieur de Besse et le testament
de son p è r e , que l ’on se garda bien de parler des
stlbsiit,u tions
des terres d^Vulhac et de C h à te au neuf,
que la dame de Saint-Didier se présenta comme a ya n t
�(
38
)
droit à la moitié de la succession de son père, et q u ’il
l ’obtint en trompant l ’administration.
Mais ne sait-on pas que ces substitutions étaient
devenues insignifiantes, que M. de Besse était frappé
de mort civile, que l égalité était proclamée par la loi
de l ’époque,
que cette circonstance seule fit attribuer
la moitié des biens de Cla ude de Besse à Madame de
Saint-Didier? E t d ’ailleurs, M. de Besse pourrait-il
faire un reproche à M. de S a i n t - D i d i e r d ’avoir voulu
conserver la plus grande partie possible des biens de sa
famille; n ’était-ce pas dans l ’intérêt de M. de Besse
que l ’on agissait ainsi, n ’était-ce pas dans l ’espoir de
l u i rendre plus tard ces mêmes biens; la c o n d ui t e du
tu teu r Vissaguet ne l ’a-t-elle pas suffisamment prouvé,
M. de Besse a-t-il donc oublié que ces biens lui ont
3
été restitués en l ’an i ; et son langage actuel n ’est-il
pas au moins déplacé, pour ne rien dire de plus?
Poursuivons. M. de B e s s e , t o u j o u r s pour établir
l ’antidate, prétend que cette promesse est écrite sur
du papier suisse. Il relève la circonstance ^ que M. de
Saint-Didier, d ’après cette promesse, aurait fait un rè
3
glement avec M me de Rochechouart, à Aulhac, le 1 octobrc i 787, et que cependant le i ,f.u t pa ssé à A u llia c le
contrat de mariage de l u i , sieur de Besse; que M. de
5
Saint-Didier n ’a point signé cet a c t e , et que par
conséquent il ne s’y trouvait pas.
Il est facile de répondre à ces nouveaux moyens.
L a promesse écrite sur d u p a p ier suisse : cela serait,
que la circonstance serait^ fort indifférente ; mais où
en est la preuve? Ell e esWck-ite sur une demi-feuille
�(
3g
)
de papier non timbré, et ce papier ne porte le signe
particulier d ’aucune manufacture.
E n second lieu, M. de Besse choisit mal ses citations.
Il devrait savoir que son contrat de mariage ne fut
point passé à Aulhac, mais bien au château de Sugères.
Il en trouvera la preuve dans l ’expédition q u ’il a com
muniquée lui-même. Il y verra de plus que M"10 de
Saint-Didier
sa
sœur
a
signé
ce
contrat.
Mais ?
d'ailleurs, que signifierait la présence de M. de SaintDidier à A u l h a c , à l ’époque où la promesse fut sous
crite? Que l parti pourrait-on tirer de son absence? Son
épouse y était, et a pu faire un règlement avec la dame
de Rocliechouart; celle-ci a pu le faire elle-même,
hors la présence de M. de Saint-Didier, souscrire la
promesse d ’après ce règlement, et la lui adresser
ensuite........ M. de Saint-Didier fils ne peut avoir une
connaissance personnelle de ce q u i s’est passé, mais il
produit un titre.
N e pouvant pas trouver dans ces premiers moyens
la preuve de la simulation et de l ’antidate, M. de Besse
présente un autre système; il prétend que la dame de
Rochechouart n ’a fait aucun
emploi de la somme
prêtée par M. de Saint-Didier; q u e , si la date de la
promesse du i
3 octobre
1787 est sincère, cette ob li
gation n ’a été souscrite que dans le b ut de rendre
illusoire et de frauder la donation que M mR de Roche
chouart devait faire en faveur de M. de Besse, le
surlendemain i
5 octobre
M 1"' île Rochechouart
1787.
n’avait pas imaginé
ce dernier
m oyen, q u o iq u ’elle eut contesté la demande de M. de
�(
4°
)
Saint-Didier , et en première instance, et en appel.
Il est encore très-facile de le détruire. E t d ’abord
il est possible et même très-vraisemblable que M mc de
Rochechouart n ait pas eu besoin personnellement de
la somme empruntée. M. de Saint-Didier n ’est pas
obligé d ’é tablir q u ’elle en ait seule profité; M. de
Besse sait mieux que personne quelle a été sa desti
nation.
Cependant comment pourrait-il v oi r une libéralité
déguisée dans la promesse du i
3 octobre
1787? M. de
Saint-Didier était étranger à la famille de Besse, et
dès-lors la d ame
donné à l u i ,
de R oc he cho ua rt ne
lui aurait
pas
mais bien directem ent h son épouse.
Vou drait-on prétendre q u ’il était personne interposée?
Mais à cette époque il n ’avait point d ’enfans;
et
d ’ailleurs cette allégation , comme toutes les précé
d e n t e s , m a n q u e r a i t a b so l u m e n t de v raisemblance.
M me de Rochechouart pou vait, avec de l ’économie,
augmenter de beaucoup sa fortune. N ’avait-elle pas un
douaire, un usufruit considérables ? Elle marie sa il lie
la première, et ne lui promet que 10,000 fr. ; elle
exige que cette fille renonce, en faveur de son frère,
à sa succession, et à toutes autres à échoir du côté
maternel. Trois ans après, elle fait donation à ce
même (ils de tous ses biens présens et à venir; elle se
départ en sa faveur d ’une partie de son usufruit. Sa
fille, depuis son mariage, cesse d ’ habiter avec elle, et
lui devient pour ainsi dire étrangère. Son fils, au
contraire, ne la quitte p o i n t \ elle le suit dans Immi
gration; elle revient avec lui pour continuer de vivre
�(
4« )
ensemble : la mort seule peut les séparer. Sur qui donc
se portaient de préférence les affections de cette mère?
O ù trouve-t-on le moindre in d i c e , la moindre pré
somption qui annonce q u ’elle ait voulu avantager sa
fille?........ La promesse était du
Rochecliouart
i
3
octobre. M me de
pouvait à cette époque faire directement
une donation à sa fille, pu is q u’elle ne s’était pas liée
en faveur de M. de Besse; elle pouvait se dispenser de
donner à celui-ci__ C om m en t concilier tout ce q u ’elle
a f a i t , avec les intentions q u ’on lui suppose?.......
Il faut en convenir,
frau de,
M. de Besse n ’a prouvé ni la
ni la simulation q u ’il reproche au titre de
créance de M. de Saint-Didier.
A u reste,
les moyens q u ’il a proposés devant les
premiers juges leur étaient déjà connus;
déjà ils en
avaient fait justice, lorsqu’ils furent présentés pour la
première
fois pour M me de Rochecliouart elle-mome.
L e sieur L ’ héritier qui figure dans la cause comme
créancier de M. de Besse s’était aussi emparé des mêmes
moyens, et avait formé tierce-opposition aux jugemens
et arrêt produits par M. de Saint-Didier; mais il ne
tarda point à reconnaître q u ’il n ’y était ni recevable
ni fondé : il s’en départit presque immédiatement;
c’est sans doute pour le consoler de cet échec que
M. de Besse a consenti à ce que cette tierce-opposition
fût présentée de nouveau sous son nom.
Sans doute aussi la cause de M. de Besse est la même
que celle de ses créanciers, mais jusqu’à présent, ni ses
f
créanciers ni lui n'ont présenté aucun moyen sérieux
G
�(
4’
)
pour démontrer la prétendue simulation de la promesse
du i
3 octobre
1787.
L a sincérité de cette promesse, la vraisemblance du
prêt, sont justifiées au Contraire par toutes les circons
tances de la cause.
Q u e l q u ’importante que soit la somme prêtée, elle
est en harmonie avec la fortune des parties;
M. de
Saint-Didier père était a même de prêter une somme
aussi considérable, tout comme M n,c de Rochechouart
sa belle-mère pouvait en avoir besoin, pour elle ou
pour son fils.
dettes nombreuses contractées par M. de Besse
prouvent seules la possibilité de ce prêt. Pendant son
Le s
émigration, à une époque où il ne possédait absolument
rien, Casaty lui a bien prêté une somme de
33^6oo liv.;
comment trouverait-on étrange q u ’à une époque plus
he u r e u s e , M a d a m e
de Rochechouart, usufruitière de
tous les biens de Cla ude de Besse,
ait pu emprunter
en différentes fois la somme de 7 5 , 9 1 7 l iv .; et si M. de
Saint-Didier son gendre était à même de lui prêter
cette
somme,
il était bien naturel que Madame de
Rochechouart s’adressât à lui plutôt q u ’à des étrangers.
E n f i n , le système d ’alternative présenté par M. de
Besse prouve toute l ’invraisemblance de ses allégations;
en effet,
si la promesse du i3 octobre 1787 a été
réellement souscrite à cette époque , pourquoi dire
qu elle a été envoyée de Fribourg, pendant rémigration
de Madame de Roc hec houa rt, et sur la sollicitation de
M. de Saint-Didier;
si elle avait été faite pendant
l ’émigration, comment prétendre en
même tcms q u ’elle
�aurait été souscrite dans le but de rendre illusoire la
donation faite en faveur de M. de Besse en 1787?
Q ue l ’on considère m aintenant, que M. de SaintDidier rapporte un titre écrit et signé par Madame de
Rochechouart, et contre lequel la preuve testimoniale
n ’est point admissible; que Madame de Rochechouart,
en 1 7 9 1 > reconnaissait si bien la sincérité de son obli
gation q u e, dans ses lettres à Madame de Saint-Didier
sa fille,
elle lui exprimait ses regrets de ne pouvoir
s’acquitter envers M. de Saint-Didier; que Madame
de Rochechouart ( o u plutôt sous son nom M. de Besse
lui-m êm e)
avait déjà présenté les prétendus indices
de simulation que l ’on a reproduits devant les premiers
juges, et q u ’un arrêt en a fait justice; que M. de
Besse n ’est point recevable à critiquer cet arrêt rendu
contradictoirement avec sa mère q u ’il représente, et
l ’on ne saurait croire que sur des allégations si légère
ment hasardées , l ’on puisse ané ant i r la créance cle
M. de Saint -Didier, et lui enlever une aussi grande
partie de sa fortune.
Faut-il ajouter à tout ce qui précède, que M. de
Saint-Didier qui réclame une créance de la succession
de son père,
n ’était pas né lorsque fut souscrite la
promesse de 17 8 7; qu' il était encore au berceau, lors
de la mort de son père, et ne peut avoir personnellement
aucune connaissance positive des faits; il a dù prendre
les choses dans l ’état où il les a trouvées, et il n a
fait une réclamation q u ’avec la plus entière conviction
q u ’il était réellement
chouart son ayeule.
créancier
de Madame de Roche
�(
44
)
Sa demande n ’a donc pas eu pour objet de frustrer
les créanciers de Besse du gage de leur créance, comme
ils l ’ont prétendu devant les premiers juges. II n ’a
réclamé que sa chose : Cuicjue suum .
Il suffît d ’ailleurs de se rappeler les circonstances de
la cause, pour être convaincu que M. de Saint-Didier
est incapable des intentions q u ’ondui a supposées.
M. de Saint-Didier n'a pas réclamé contre l'acte du
9 frimaire an i , par lequel M. de Vissaguet son
3
tuteu r a restitué à M. de Besse tous les biens qui
avaient été attribués à M me de Saint-Didier par le
partage de l ’an 2 , fait eu tr’elle et la république.
Cependant ce partage était irrévocable ; il avait été
fait en vertu de jugement rendu contradictoirement
avec la nation qui représentait M. de Besse. M. de
Besse, amnistié, devait respecter tout ce que la nation
avait fait pour l u i , ou comme exerçant ses droits
pendant son émigration.
M. de Vissaguet, tuteur du mineur de Saint-Didier,
n ’avait aucun droit, aucune qualité pour abandonner
à M. de Besse des biens qui étaient devenus la pro
priété de son pupille.
D e v e n u m a j e u r , M. de Saint-Didier po u v a i t faire
3
annuler le traité du 9 frimaire an 1 , et rentrer dans
la propriété de tous les biens délaissés à M. de Besse.
Les créanciers qui figurent dans la cause actuelle
n’avaient alors aucun droit hypothécaire sur ces biens.
Il en serait résulté que M. de Besse, n ’ a y a n t plus
aucuns biens, aurait eu moins de facilité à emprunter,
et les parties ne seraient pas en présence.
�(
45
)
M. de Saint-Didier n ’en a rien fait. Comm ent se
trouve-t-il récompensé de sa conduite?—
L ’on croit toutes ces réflexions plus que suffisantes
pour démontrer à la C o u r , i° q u ’il est indispensable
de statuer sur la tierce-opposition de M. de Besse, en
présence de toutes les parties intéressées;
Que la seconde créance de M. de Saint-Didier est
sincère et légitime; q u ’elle doit être colloquée, tant en
principal q u ’intérêts et frais, et en sous-ordre, sur les
sommes qui formeront la collocation de la succession
de Rochechouar t, et sauf c o ntri b utio n , au marc le
fran c, avec les époux Romain et consorts.
A p p e l du sieür Chanson.
L e 19 avril 1 7 9 6 , M. V i c t o r de Besse, alors émigré,
consentit, devant un notaire suisse, une obligation de
la somme de
33 ,600 liv.
de France, en faveur du sieur
C a s a t y , né à Mila n, et résidant à Lauzanne.
A u p ai eme nt de cette somme, il obligea tous ses
biens présens et h. venir.
Plus tard, Casaty sembla reconnaître lui-même que
cette obligation ne pouvait avoir en France aucune
force exécutoire, puisque, le 11 août 1807, il en fit le
dépôt dans l ’étude de Me Ferrère, notaire à Bordeaux,
pour y être placée au rang de ses minutes. C e dépôt
fut fait d ’ailleurs par le seul C a s a t y , et hors la pré
sence de M. de Besse qui n ’y fut point appelé; il n a
donc pu apporter le moindre changement aux effets
de l ’obligation du 19 avril 170^*
H paraît néanmoins q u ’en
vertu de cet acte,
le sieur
�( 4G )
C asaty a fait plusieurs commandemens de payer à
M. de Besse, et q ue, le 21 mars 1 8 1 4 , il a pris ins
cription sur les biens de son débiteur.
Il
lieu en
parait aussi q ue , par suite d ’un ordre qui a eu
1821
au tribunal d ’Issoire, et sur le prix
d ’autres biens vendus par M. de Besse, le sieur Casaty
a été colloqué pour une somme de 3670 fr. 72 c . ,
imputable d ’abord sur les frais, et ensuite sur les
intérêts échus de sa créance.
C ett e collocation ne peut évidemment avoir aucune
influence sur la contestation actuelle, soit parce q u ’elle
n ’a pas été ordonnée contradictoirement avec tous les
créanciers intéressés à c ont re di re, et n o t a m m e n t avec
M. de Saint-Didie r, soit parce q u ’alors la question
qui se présente aujourd’hui ne fut point soulevée.
On 11e parle donc du bordereau qui fut délivré au
sieur C a s a t y , le I er août 1 8 2 1 , que pour faire re
marquer à la C o u r q u e sa créance se t ro u va réduite à
la somme de 37,4 3 9 fr. 74 c . , en principal ou intérêts;
et c ’est sans doute par erreur que le sieur P o u g e t ,
cessionnaire du
sieur
Casaty ,
a demandé h
être
colloqué pour 43,276 fr. 14 c.
P e n d a n t le cours de l ’ instance, le sieur Chanson
est devenu lui-même cessionnaire de Pouget. L ’on a
vu
que sa demande en collocation avait été rejetée,
parce que l ’acte de 1796 n ’a pu conférer hypothèque
au sieur C a s a t y , sur des biens situés en France.
L ’appel du sieur Chanson fait que la question se
présente devant la C o u r , dans les mêmes termes que
devant les premiers juges.
�47
(
)
On ne contestera point que M. de Besse ait pu
s’obliger personnellement envers le sieur C a s a t y ; mais
l ’a-t-il
fait
valablement ,
d ’ hypothèque
France? T o u s
sur
avec
des biens
les principes
droit
de suite
immeubles
se
situés
ou
en
réunissent pour la
négative.
Rappelons d ’abord une distinction q u ’il ne faut pas
perdre de v u e , en examinant cette question vraiment
importante : c’est la différence qui existe entre l ’obli
gation et l ’hypothèque.
L a première est sans contredit du droit des gens ,
comme le sont les transactions, les acquisitions, et
autres actes de cette nature. E n quelque lieu que ce
s o i t , on
p e u t c ontract er v a l a b l e m e n t
une obl i gati on
personnelle;
Mais la seconde, l ’hypothèque résulte, au contraire,
de la loi civile, qui régit les fonds sur lesquels elle est
constituée; et le droit civil n ’est ét ab li q u ’en faveur
des citoyens de chaque É t a t.
L ’hypothèque ne peut être produite que par l ’au
thenticité de l ’acte; et l ’authenticité elle-même ne
peut émaner que
du
souverain
qui est investi de
l ’autorité p u b li q u e , ou des officiers qui
ont
reçu de
lui un caractère suffisant pour l ’exercer en son nom.
Pour constituer une hypothèque, il faut donc deux
conditions indispensables : d ’ab o r d , capacité de la
Personne qui la constitue; il faut évidemment q u ’elle
soît majeure, capable d ’aliéner et d ’ hypothéquer ses
biens, et q Ue par conséquent elle ait le libre exercice
de ses droits civils ;
�(
48
)
E,n second lieu, compétence de l ’ofiicier ministériel
qui
reçoit la convention
de laquelle doit résulter
l ’ hypothèque; il faut q u ’il ait caractère pour donner
à cet acte l ’authenticité
qui
seule peut le rendre
exécutoire.
Dans l ’ancienne jurisprudence, on regardait comme
de simples promesses, ou
comme titres
purement
ch irographairesj les engagemens contractés devant des
officiers publics étrangers.
Cette doctrine est attestée par les auteurs les plus
recommandables, notamment par Mornac qui
s’en
exprimait ainsi : O bligatio extra g a lliu m contracta ,
pro sin ip lici chirographo est in g a llid .
L ’article 121 de l ’ordonnance de 1629 en contenait
même une disposition expresse : « Les contrats reçus
« ez-royaumes étrangers, pour quelque cause que ce
« soit, n ’ au ront aucune hypothèque ni exécution en
« notre royaume; ains tiendront lesdits contrats lieu
« de simples promesses. »
Il
est vrai que tous les Parleinens n ’avaient pas
enregistré cette ordonnance; mais elle était exécutée
quant à cette disposition qui n ’était elle-même que la
confirmation d ’ un droit plus ancien ( v o i r l’historique
de la législation sur cette matière,, Traité des hypo
thèques, tome i rr, pages 19 et suivantes).
Ces principes étaient en vi gue ur,
lorsque M. de
Besse souscrivit l ’obligation du 9 avril 1796? en faveur
de Casaty.
Ils ont été confirmés depuis par la disposition de
l ’article 2128 du Code civil; cet article néanmoins y
�(
49
)
apporte une modification importante; il ne prive les
actes passes en pays étranger de la faculté de conférer
hypothèque sur des biens situés eu Fra nce , q u ’autant
q u ’il n ’existe aucunes dispositions contraires à ce prin
cipe, dans les lois politiques ou les traités.
E n revenant à la cause, il est facile de reconnaître,
i° que M. de Besse,
a l'époque de l ’obligation du
9 avril 1 7 9 6 , était émigré français, et par conséquent
frappé de mort civile; tous ses biens immeubles situés
en France étaient devenus la propriété de la nation ,
il n ’avait pins l ’exercice d ’aucun droit civil, ni la
capacité nécessaire pour constituer une hypothèque sur
des biens situés en F ran ce, et qui d ’ailleurs 11e lui
appartenaient plus ( V o i r la loi du 28 mars 1 7 9 3 ,
concernant les émigrés, section i rc, art. i cr. ) ;
20 Que le notaire-juré de Fribourg qui a reçu l ’obli
gation n ’avait aucun caractère,
aucune compétence
pour donner à cet acte la force d ’e xéc ut ion en F i a n c e ,
avec suite par hypothèque.
Le sieur Chanson a prétendu devant les premiers
juges pouvoir se placer dans le cas d ’ une exception
semblable à celle prévue par l ’article 2128 du Code
civil,
ce qui conduit à rechercher si à l ’époque de
l ’acte passé entre M. de Besse et le sieur C a s a t y , il
existait des traités qui permissent q u ’un Français pût
contracter en Suisse un engagement susceptible de
conférer hypothèque ci un Ita lien sur des biens situés
en ï'ra n ce.
L e sieur Chanson a invoqué à cet égard différens
traités de réciprocité faits à différentes époques,
7
soit
�(
5o
)
entre la France et le duché de M i la n ,
soit entre la
France et la Suisse.
Quelques-uns sont de beaucoup postérieurs à l ’acte
du 9 avril 1796; par conséquent n ’ayant pas d ’effet
rétroactif, ils ne peuvent servir à décider la question.
Aucu n d ’ailleurs ne peut recevoir d ’application dans
la cause, comme l ’ont fort bien démontré les motifs
du jugement dont est appel.
E n effet, le sieur Chanson a voulu d ’abord puiser
ses moyens de défense dans le traité fait à Vien n e, en
1 7 6 6 , entre la France et le duché de Milan, et dans les
traités de Gampo-Formio et de Paris, qui l ’ont ratifié.
On lui a répondu avec raison , que ces traités ne
peuvent régir que les actes passés en France ou dans
le Milanais, entre des sujets nés ou naturalisés dans
ces deux G ouv er nem ens \ et l ’acte produit par le sieur
C h an son a été fait en Suisse.
Il
a invoqué ensuite les traités de réciprocité existant
entre les cantons suisses et la France, et notamment
83
celui du 27 septembre i o .
On lui a répondu q u ’ils n ’étaient relatifs q u ’aux
¿ujets nés ou naturalisés suisses, et le sieur C asaty
q u ’ il représente était milanais.
L ’on a déjà fait connaître, dans l ’exposé des faits,
les principaux motifs qui ont servi à écarter la préten
tion du.sieur Chanson. Plus on les méditera, plus on
sera convaincu que les premiers juges ont lait une
saine application
des véritables
principes.
L obligation consentie par M. de Besse, en faveur de
C a s a t y , ne peut donc être considérée que comme une
�(
5i
)
simple promesse, incapable de conférer une hypothèque
sur des biens situés en France; et il a été bien jugé
par la disposition du jugement dont est appel, qui a
rejeté la demande en collocation du sieur Chanson.
Il
reste à dire quelques mots
relativement à la
créance des héritiers Teyssier.
On a vu q u e , devant les premiers juges, les héri
tiers Teyssier avaient demandé incidemment la nullité
du traité de ventôse an i
3,
3
fait entre YIme de R o c h e
chouart et M. de Besse son fils, parce que ce traité
aurait été fait en fraude de leurs droits.
Les premiers juges ont rejeté cette demande, en la
considérant sans intérêt pour les héritiers Teyssier; et
en effet il est difficile de concevoir en quoi une sem
blable demande aurait pu leur profiter, lors même
q u ’on l ’aurait admise.
On ne pense pas q u ’elle soit renouvelée devant la
Cour;
mais s’ il en était a i n s i ,
répondre; et cette prétention
facile
d ’y
serait repoussée
par
il serait
toutes les circonstances qui ont précédé, accompagné
3
ou suivi les deux actes faits en l ’an i .
Les droits de la dame de Rochechouart contre la
succession de Claude de Besse étaient incontestables;
ils étaient bien plus importans et plus anciens que la
créance des héritiers Teyssier. Co mm ent M m0 de Roche
c ho ua r t
aurait-elle agi en fraude des droits de ces
derniers, en stipulant la conservation de ses créances
personnelles ?
Q u a n t au rang de collocation qui a été attribué aux
héritiers Teyssier par le jugement dont
est
appel, il
�( 52 )
suffit de lire les motifs de ce jugement, pour recon
naître q u ’il a été bien jugé à leur égard; et la confir
mation de cette disposition ne semble faire aucune
difficulté.
On ne parlera point des autres créanciers, soit parce
que leurs créances n’ont pas été contestées devant les
premiers juges, soit parce que les motifs du jugement
dont est appel indiquent suffisamment ce qui est par
ticulier à chacune d ’elles.
Telles sont les difficultés que présente cette cause.
On a retracé tous les faits dont la connaissance
paraissait indispensable à sa décision : c’est le principal
b u t que s’est proposé M. de Saint-Didier. Il espère avec
confiance que l ’arrêt de la C our dissipera bientôt les
doutes injurieux que l ’on a vo ulu élever sur la légiti
mité de sa créance.
Le C o m t e D E SAINT-DIDIER.
J.-J. C I I I R O L , A v o ca t.
C
RIOM ,
amille
IMPRI MERI E DE SALLES F I L S ,
C H I R O L , A v o u é.
P RES L E PALAIS DE J U S T I C E .
�
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A name given to the resource
Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Comte de Genestet de Saint-Didier. 1827?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
J.- J. Chirol
Camille Chirol
Subject
The topic of the resource
successions
dot
douaire
émigrés
créances
contrats de mariage
testaments
condamnation à mort
biens nationaux
Description
An account of the resource
Mémoire pour M. le comte de Genestet de Saint-Didier, appelant et intimé; contre 1° le sieur Chanson, banquier, aussi appelant et intimé; 2° les dames Duchillau et les sieurs Romain et Deterves, leurs maris; 3° les époux Verrier, et autres, héritiers du sieur Etienne Teyssier; 4° le sieur Lhéritier; 5° la demoiselle Feburier; 6° le sieur Berchut, 7° tous les créanciers de M. le Comte de Besse, aussi intimés; 8° enfin M. Victor, comte de Besse de la Richardie, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1827
1773-1827
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
52 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV21
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_DVV23
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Coverage
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Sainte-Catherine (63328)
Vernet-Chaméane (63448)
Aulhac (Terres de)
Puy de Celle (Terre de)
Fribourg (Suisse)
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biens nationaux
condamnation à mort
contrats de mariage
Créances
dot
douaire
émigrés
Successions
testaments
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MÉMOIRE
FO U R
Le sieur J e a n - A n t o in e C H A B R O L , propriétaire
à C lerm o n t-Ferran d , place M ichel-de-l’Hospital,
appelant d’un jugem ent rendu au tribunal de pre
m ière instance de C lerm o n t-Ferran d , le 25 août
1837, signifié le 9 novem bre suivant 5
CONTRE
Les sieurs A n t o i n e et J e a n G ILLET, beaux-frères,
marchands horlogers à Clermont-Ferrand.
l i E S questions que le sieur Chabrol se voit contraint, pour sa sûreté, de
soumettre aujourd’hui à la décision de la Cour royale, sont, à notre avis,
des plus simples, nous dirons presque des plus vulgaires :
Le vendeur peut-il forcer son acquéreur à se libérer, tout en lais
sant peser sur sa propriété l’inscription d’office et le privilège des
précédents vendeurs, surtout lorsque cet acquéreur a stipulé dans
son contrat, de la manière la plus expresse, qu’il ne pourrait être
obligé au payement, qu’autant qu’on le débarrasserait de cette ins
cription et de ce privilège?
Lorsqu’il a été convenu que le payement n’aurait lieu qu’après
1 accomplissement de certaines conditions , auxquelles le vendeur
1
�s’est soum is, peut-il se faire payer le prix, sans remplir les condi
tions?
Particulièrement les sieurs Gillet peuvent-ils exiger le payement
du prix dû par le sieur Chabrol, et se soustraire eux-mémes à l’obli
gation qu’ils ont contractée de désintéresser leurs vendeurs? Le sieur
Chabrol n’est-il pas bien fondé à suspendre le payem ent, tant que
le prix n’est pas em ployé, conformément à la convention , à éteindre
totalement l’action dos précédents propriétaires?
« Le vendeur peut-il imposer à l’acquéreur cette dure condition :
» de ne pouvoir consigner (son contrat le lui défend), de garder
» cependant une propriété grevée, et de rester indéfiniment exposé
» à tous les dangers, à tous les inconvénients d’un semblable état
» de choses? »
Dans de pareilles circonstances, et indépendamment de ce que
l’échéance du terme convenu n'est p o in t arrivée, ainsi que nous le dé
montrerons, l’opposition du sieur Chabrol u’est-elle pas bien fondée?
Nous diviserons cette discussion en trois parties :
Dans la première, il sera démontré que le sieur Chabrol ne doit rien aux
sieurs Gillet, tant que ceux-ci n’auront pas payé eux-mêmes ce qu’ils doi
vent personnellé'ment aux précédents vendeurs, tant qu’ils refuseront de four
nir à leur acquéreur les garanties résultant de la loi et de la conventiom.
Dans la deuxième, nous prouverons que les sieurs Gillet n’ont rien à de
mander au sieur Chabrol, parce que Véchéance du terme du payement n’est
point arrivée.
l a troisième partie seca consacrée à la réfutation du jugement de pre
mière instance.
PREMIÈRE PARTIE.
Garanties résultant, de la loi et de la convention..
L e domaine de Saulzcl, mis en vente pendant plusieurs années, est resté
orl lonÿ-temps sans trouver d ’acquéreurs, par l'a raison que le droit de
dropriété des vendeurs était susceptible d’ôlre mis en doute.
�Les sieurs Gillet, spéculateurs plus hardis que leurs concurrents, n’ont
acquis ce domaine qu’en prenant de grandes précautions; ils n’étaient pas,
eux non plus, sans inquiétudes; leur contrat d’acquisition, du 26 septem
bre 1828, fait connaître le motif de leurs craintes ; ils n’ignoraient pas que
l’acte du 10 prairial an ix, par lequel Mme deSaint-Mendes,étanten puissance
de mari, ayant alors des enfants, et en ayant eu depuis, rétrocédait il son
neveu , Jérôme-Emmanuel Aubier, purement et simplement, et à vil prix,
ce même domaine qu’elle avait acquis nationalement le 25 thermidor an iv,
à un prix considérable par elle soldé; que cet acte était d’une validité fort
équivoque, et masquait une véritable donation entre-vifs, dont la nullité
peut encore être réclamée par Mme de Saint-Mendes elle-même, après la
mort de son mari , ou par ses enfants.
Les sieurs Gillet, en traitant de l’acquisition du domaine de Saulzet,
avec les héritiers du sieur Jérôme-Emmanuel Aubier, ont agi sous l’inlluence de cette idée qu’il existait, ou pouvait exister un jour pour eux , un
danger d’éviction, dont la cause n’a point encore disparu ; aussi font-ils sti
puler solidairement les quatre vendcresses et les maris de deux d’entre elles.
11 ne leur suffit pas que ceux-ci contractent en leurs simples qualités de
m aris, il faut encore qu’ils s’obligent en leurs propres et privés noms.
D’autre part, ils prévoient, dans deux clauses différentes , le cas où ils ne
pourraient se libérer par une cause quelconque , et alors ils font stipuler
que l’intérêt de leur prix sera réduit à 4 pour cent : cette cause quelconque,
qui doit faire obstacle à leur libération, les inquiète et les préoccuppe à un
point extraordinaire.
Cette même crainte, ce même danger, les sieurs Gillet les ont légués au
sieur Chabrol, leur sous-acquéreur, pour une partie du domaine de Saulzet;
mais de cette qualité d’acquéreur partiel naissait, pour le sieur Chabrol,
un nouveau danger qui lui était particulier , et contre lequel il a dû se pré
munir d’après la maxime : Vigilantibus jura subveniunt.
Le nouveau danger, dont nous voulons parler, rémltait de l'état d’indivi
sion . dans lequel se trouvaient les vendeurs des sieurs Gillet, par rapport au
domaine de Saulzet, et qui donnait à chacun de ces vendeurs, bien qu'ils
se fuisent divisé le prix de la vente, un privilège atteignant la totalité du
domaine vendu, et le droit d'exercer leur action résolutoire contre les sieurs
(iillet, sans s'inquiéter des sotts-acquéreurs ; ce qui n’aurait pas eu lieu , si
la vente eût été précédée d’un partage, parce qnn’alors chacun des héritiers
�( * )
Aubier, étant censé n’avoir hérité que des objets échus à son lot, se trou
vait 6ans droit aucun sur les objets échus aux lots de ses cohéritiers.
Cet état de choses était bien fait pour éveiller la sollicitude du sieur
Chabrol : nous allons voir quelles précautions il a prises, quelles conven
tions il a faites avec ses vendeurs, qui, en sentant l’opportunité, qui, oc
cupés de réaliser leur bénéfice, ne songeaient sans doute pas alors à les
rendre illusoires.
Par acte du 1er septembre 1829, les sieurs Gillet ont vendu, avec leur
garantie solidaire, au sieur Chabrol, une portion du domaine de Saulzet,
moyennant un prix, qui, par un autre acte du 21 mai 1831, se trouve
aujourd’hui réduit à la somme principale de 27,875 fr. 35 cent.
Le sieur Chabrol, par ce même contrat de vente , s’est obligé, sur l’indi
cation et la délégation des sieurs Gillet, à payer cette dernière somme à
Mrae de Tournemine, pour ladite somme être imputée sur la portion reve
nant à cette dernière dans le prix de la vente consentie par les héritiers
Aubier de la Montheille auxdils sieurs Gillet.
Viennent ensuite les dispositions suivantes, textuellement extraites du
contrat de vente :
« Il est expressément convenu entre les parties à ce sujet :
» 1°. Que M. Chabrol ne sera tenu d'effectuer que les derniers payements
» auxquels lesdits sieurs Gillet sont tenus envers ladite dame de Tourne—
» mine, et qu’il profilera des termes et délais stipulés au profit des sieurs
» Gillet, dans le contrat de vente du 26 septembre 1828, et qui résulte» raient , soit de ce qu’une partie de la somme , revenant à Mrao de Tour» nemine , n ’est payable qu’à la mort de M. Emmanuel Aubier de la Mon» theille, ou à l’expiration de l’année qui suivra son décès, soit de ce que
M. et M,uc de Tournemine, étant obligés de faire remploi de la portion
» revenant à ladite dame de Tournemine, mettraient du retard à faire ledit
» remploi ;
» 2°. Que de son côté M. Chabrol sera tenu de remplir les obligations
» contractées par les sieurs Gillet envers M. et Mm0 de Tournemine, en
» ce qui concerne la portion du prix qu’il doit payer en leur acquit, qu en
» conséquence il ne pourra consigner que dans les termes et de la manière
» stipulée dans le contrat de vente ci-dessus relaté ;
a 3". Que M. Chabrol profitera de tous les droits desdits sieurs Gillet
» relativement aux payements à faire, et notamment de la réduction de
�» l'intérêt à 4 pour cent par an , dans tous les cas où lesdits sieurs Gillet
» auraient le droit d’en profiter ;
» 4°. Qu’au moyen des payements effectués par M. Chabrol , il sera
» subrogé, jusqu’à duc concurrence, dans lous les droits, actions, privi» léges et hypothèques des précédents vendeurs, pour sûreté de son acqui» sition.
» Il est encore bien entendu et convenu que la fixation des payements
» ci-dessus indiquée ne sera obligatoire pour M. Chabrol , quant aux ca» p ita ux, qu’autant q u il n existerait point, lors des échéances, d’inscription
» hypothécaire d’aucune espèce, sur les biens vendus, du chef des vendeurs
» ou de leurs auteurs, autre que l’inscription d’office des précédents ven» deurs, pour raison de la somme restant à payer par M. Chabrol. »
Est-il besoin de s’appesantir sur les dispositions de ce contrat? leur
texte seul ne fait-il pas connaître l’esprit qui les a dictées, le but et l’in
tention des parties contractantes? Ces délais, m ais, avant tout, ces sûretés
et ces garanties, le sieur Chabrol n a-t-il pas bien entendu se les assurer ?
L’intention des sieurs Gillet n’a-t-elle pas été de les lui accorder de la
manière la plus large ?
Ces conventions font la loi des parties : Contractus stricti juris. Comme
ici le sens est sans ambiguïté, il n’est point, suivant Toullier, sujet à inter
prétation ; mais, quoiqu’il en soit, nous prouverons que nous ne redoutons
point l’interprétation.
Par l’extrait que nous venons de donner du contrat de vente du l or septembre 1829 , et qui contient tout ce qui intéresse cette cause , nous voyons
d’abord que les sieurs Gillet donnent au sieur Chabrol leur garantie person
nelle et solidaire.
C’était toujours, à tout hasard, une garantie éventuelle contre les dangers,
dont la crainte préoccupait, ajuste titre, le sieur Chabrol; contre l’éviction
dont il est encore menacé, ainsi que tous les acquéreurs du bien de Saulzet,
de la part de Mmc de Sainl-Mendes ou de scs héritiers.
Mais ce n’est pas tout; celte garantie pouvait faillir, et le sieur Chabrol
devait se prémunir contre le nouveau danger qui naissait pour lui de sa
qualité de sous-acquéreur.
il a dit alors aux sieurs Gillet : « Comme par votre acte du 26 septembre
» 1828 , les héritiers Aubier vous ont vendu, moyennant 138,000 francs,
» un domaine indivis entr’eux; je ne puis, moi, qui n’en ai acquis que
�» pour 27,875 fr. 35 c. , vous payer le prix de ma revente partielle, que
» lorsque vous aurez soldé votre prix ; autrement je me trouverais sous le
» coup de l’action résolutoire ou du privilège de vos vendeurs. »
Les sieurs Gillet se sont empressés de lever celte difficulté, et il a été
stipulé expressément convenu que le sieur Chabrol ne serait tenu d'effectuer
(jue les derniers payements.
Vient ensuite une stipulation qu’on pourrait considérer comme purement
de style, comme n’ajoutant rien aux garanties de droit, et comme n ’ayant
pas attiré beaucoup l’attention des parties ; elle prouve toutefois le soin que
les contractants ont apporté à ne négliger aucune sûreté ; c’est la clause qui
porte, qu’au moyen des payements effectués par l u i , le sieur Chabrol sera
subrogé dans tous les droits et actions des précédents vendeurs.
Ce n’est, en effet, que dans la situation la plus défavorable , en désespoir
de cause , que le sieur Chabrol pourrait faire valoir cette subrogation ; il
faudrait qu’il eût d’abord subi le dommage et les frais de l’éviction, pour
se lancer ensuite dans les chances et les nouveaux frais d’une action récursoire, dont il ne sortirait certainement pas sans un préjudice notable.
Cette subrogation que lui donnerait-elle? une créance, une action. O r,
ce n’est pas là ce que le sieur Chabrol a entendu acquérir; ce n’est pas là
ce qu’on a entendu lui assurer: c’est une propriété incommutable et liquide.
M eliùs est liabere re m , q u àm actionem .
Mais cependant cette stipulation , en apparence si peu importante en ellemême , vient encore, par la force des termes de sa rédaction , à l’appui de
notre système , que proclament d’ailleurs si haut toutes les clauses de notre
contrat, et qui consiste à dire que les sieurs Gillet doivent se libérer inté
gralement avant qu’aucune demande des fonds puisse nous être faite.
Comment concevoir, en effet, que la dame de Tournemine, étant créan
cière de 60,274 fr., le sieur Chabrol pût être , pour sûreté de son acquisition,
subrogé efficacement dans tous les droits des précédents vendeurs, si cette
dame ne se trouvait pas entièrement désintéressée par le fait du payement
que lui ferait le sieur Chabrol?
Mais, si Mmn de Tournemine, si les autres vendeurs ne sont intégralement
payés, ils conservent donc une partie de leurs créances , une partie de leurs
droits, actions, privilèges et hypothèques ; et cependant vous nous ave/
promis que nous serions subrogés dans tous leurs droits ; comment pou
vons-nous les avoir tous, si d’autres en conservent une partie? Car, enten
�dez-vous bien, iL y a tous, tous les droits, actions, privilèges ét hypothèques
des précédents vendeurs ; et c’est justement pour lest avoir tous, qiie nous
avons commencé par stipuler que nous ne ferions que les derniers payements.
Ainsi donc, lors de la rédaction du c o n trat, il entrait bien dans votre
pensée intime, sieurs Gillet, aussi-bien que dans celle du sieur Chabrol,
que vous étiez tenus de vous libérer intégralement, avant qu'il fût lui-même
obligé d'effectuer aucun payement ; car cette pensée ressort de toutes vos
stipulations, même de celles qui sont en apparence les plus indifférentes.
Cette même pensée ressort encore très-clairement, à notre avis, de la
fixation des termes de payement \ car , ainsi qu’on le verra plus tard , te
dernier payement de p r i x , réservé au sieur Chabrol, devant suivre, à une
année d’intervalle, Vavant-dernier, à la charge des sieurs Gillet, il est
clair qu’il entrait alors dans la conviction des contractants, qu’à l’époque
où le sieur Chabrol payerait, les sieurs Gillet se seraient eux-mêmes libérés
intégralement depuis un a n , et qu’ainsi le sieur Chabrol pourrait, sans
difficulté aucune , être subrogé à tous les droits, actions, privilèges et hypo
thèques des précédents vendeurs.
Vous le voyez , sieurs Gillet, toutes les clauses de notre contrat concourent
k un seul et même but , celui de l’évidence ; rendez-vous donc enfin à
cette évidence. Payez, vous ne pouvez échapper à cette nécessité ; payez,
ce grand procès ne tient qu’à cela; payez, remplissez vos engagements , et
alors il sera temps pour m u s d’examiner dans quels termes et dans quels
délais nous sommes tenus de remplir les nôtres envers vous.
N’êtes-vous pas encore convaincus ? Oh ! mais il nous reste de quoi ré
duire une obstination plus tenace encore que la vôtre. Vous n’avez pas sans
iloute oublié la clause finale de nos conventions ; cette clause que nous avons
exprimée avec des termes , s’il est possible, plus sacramentels que les autres;
que nous avons rejetée à la lin pour qu’elle les dominât toutes , pour qu’elle
en expliquât et mît au jour la véritable pensée. Cette clause, qui prouve
avec tant d'évidence que les termes et délais, convenus: entre nous, l'ont été
principalement dans un intérêt' de garantie et de sûreté pour l’acquéreur;
clause que nous voulons répéter ici, parce qu’en elle se trouve, de la ma
nière la plus absolue, votre condamnation définitive.
« Il est encore bien entendu et convenu que la fixation des parje» ments ci-dessus indiquée, ne sera obligatoire pour M. C habrol,
�»
»
»
»
»
quant aux capitaux, qu’autant qu’il n’existerait p oin t, lors des
échéances, d’inscription hypothécaire d’aucune espèce, sur les biens
vendus du chef des vendeurs ou de leurs auteurs, autre que l’inscription d’office des précédents vendeurs, pour raison de ta somme
restant à payer par M. Chabrol. »
Cela est-il assez clair? N’est-il pas vrai que les payements que nous avons
fixés , que j ’ai promis de faire , ne sont pas obligatoires pour moi ; qu’en un
mot, vous n’avez rien à me demander, quant aux capitaux, tant que vous
ne m ’aurez pas rapporté mainlevée et radiation de toute inscription hypo
thécaire, et notamment de l'inscription d’office des précédents vendeurs, en
totalité , moins la somme que j ’ai été chargé de payer pour vous.
Avant de lancer contre moi un commandement de payer, la prudence et
vos propres engagements ne vous obligeaient-ils pas, indépendamment des
délais que vous m ’avez promis , à faire ce simple calcul :
Nous devons, à nos vendeurs, ou du moins ils ont contre nous , sur la
totalité du domaine de Saulzet, un privilège indivisible, une inscription
d’office, pour............................................................................................ 138,000f 00r
Le sieur Chabrol est chargé de payer pour nous..................... 27,875 35
Nous devons donc , a u x ternies d t nos conventions , l u i ------------
rapporter , avant qu’il lui soit rien demandé , mainlevée
et radiation de celte inscription d’oflice , jusqu’à concurrence
(]c.................................................................................................................110,124f 65e
Tel est en effet le langage que le sieur Chabrol est en droil de tenir aux
sieurs Gillet : nous ajouterons que, pour procéder régulièrement, ces der
niers, auraient dû lui signifier cette radiation.
Que les sieurs Gillet payent donc ce qu’ils doivent, car il faut toujours en
revenir là; qu’ils payent et qu’ils justifient de leurs quittances ; non pas de
quittances sous signatures privées »• qui peuvent s’égarer , disparaître ou
s’anéantir ( car il faut aller au-devant de toutes les subtilités ) , mais de
quittances authentiques, dont on puisse retrouver la trace , de quittances
qui puissent servir de titres de propriété , éteindre définitivement le privi
lège et l’action résolutoire, et opérer la radiation de l’inscription d’office.
( Arrêt de la Cour royale de Bordeaux, du 17 décembre 1835. )
Nous ne pouvons nous dispenser de transcrire ici un autre arrêt de la
�Cour royale de Iîordeaux, du 17 février 1812 , dont la jurisprudence n’a
reçu jusqu’à ce jour aucune atteinte. Les motifs de cet arrêt et l’espèce
dans laquelle il a été rendu , sauf la question du cautionnement, ont des
rapports trop directs avec l’affaire qui nous occupe, et précisent trop exac
tement les positions respectives des parties actuellement en cause , les consi
dérants en sont trop remarquables , pour que nous négligions ce nouvel
argument en notre faveur.
« Attendu , porte cet arrêt, que, lorsque le terme d’une obligation
» est joint à une condition , et qu'elle lui est subordonnée , le payement
» ne peut être exigé, malgré l’échéance du terme, si la condition n’est
» pas remplie ;
» Attendu q u e, par le contrat de yente du 30 novembre 1808 , il
» a été formellement stipulé que les appelants ne pourraient exiger le
» payement du restant du prix de la maison par eux vendue, quen
» rapportant la radiation des inscriptions prises sur cette maison, et
» en donnant en outre à l’acquéreur la certitude quelle serait entiè» renient affranchie de tous droits et prétentions étrangères ;
« Attendu qu’ils n ont pas rempli cette obligation préalable , puis» qu’il est justifié que la maison par eux vendue est encore hypothé» quée , dans l’intérêt du trésor public , contre François Rochctle
» père ;
» Attendu que l’article 1653 du Code Napoléon , qui permet aux
» vendeurs d’exiger le prix, en donnant caution , si l’acheteur est
» troublé, ou a juste sujet de craindre un trouble ou une éviction,
*> n’est pas applicable au cas où le vendeur n’a pas rempli les condi» lions de la vente , et qu’un cautionnement ne peut pas suppléer «
» iaccomplissement d’une stipulation écrite, à moins que toutes les
» parties n’y consentent;
» La Cour reçoit Michel Rochette et Jérôme Lcscure opposants
» pour la forme envers l’arrêt du 30 décembre 181.1, (qui avait fait
» suspendre les poursuites des vendeurs jusqu’au rapport de la radia» lion), néanmoins ordonne qu’il sera exécuté selon sa forme cl te» neur, etc. »
2
�Nous avons jusqü’à présent argumenté des garanties étipulées dans Fè
contrat d’acquisition du sieur Chabrol. On ne pourrait àous contester ces
gdranties, ou nous en priver, que par une violation ou tine fausse application
de l’art. 1627 du Code civil, qui porte : Les parties pourront ajouter a la
garantie de droit. Ces garanties , ainsi stipulées , nous appartiennent donc
bien.
Mais allons plus loin ; supposons, pour un instant, que ces conventions
protectrices n’aient point été écrites aussi clairement dans notre contrat ;
nous y renonçons pour un moment ; nous supposons qué , lors de la rente ,
il n a été fait aucune stipulation sur la garantie ( art. 1626 du Code civil} ,
croyez-vous que votre prétention en serait beaucoup meilleure? Croyezvous que nos positions respectives seraient beaucoup changées? Ne savezvous pas que nous aurions alors pour nous les articles 1626 et 1G53 du
Code civil ?
Entre celle hypothèse et l’état réel des choses , nous ne trouvons, quant
à n ou s, qu’une seule et légère différence ; c’est que , dans le cas où nous ne
pourrions invoquer que la garantie de droit, vous auriez , en vertu de l’ar
ticle' 1653 , la faculté de loucher le prix de noire acquisition , en fournissant
caution , tandis que cette faculté vous est interdite par íes conventions exis
tantes.
l>u resto, mémo obligation de votre part d’éleindre le privilège des pré
cédents vendeurs , de rapporter mainlevée de leur inscription d’office, jus
qu’à concurrence de la somme principale de 110,124 fr. 65 c. ; de faire les
premiers payements , et ce , il peine de violation des articles précités; même
droit pour nous d’exiger toutes ces justifications, et de faire les derniers
payements ; m ê m e d ro it, que nous accorde l’art. 1653, de suspendre le paye
ment du p r i x , puisque nous avons juste sujet de craindre d'être troublés par
Vaction hypùthécairô de vos Vendeurs : en un mot, le procès est toujours le
même.
Tout ce qui se passe dans celle affaire est une malière à de sérieuses ré
flexions pour le sieur Chabrol : puisque les sieurs Gillet s'obstinent h ne
point payer les précédents vendeurs , c’est que sans doute ils ont l’intention
de conserver ces fonds pendant un temps indéterminé ; sans doute aussi ces
vendeurs ne consentent à laisser leurs fo n d s qu’en conservant, dans leur en
tier, leur privilège indivisible sur la totalité du domaine de Saulzct ; et pôur
cela il faut que le sieur Chabrol, qui a dCquis le droit de faire le dernier
�( H )
payement, fasse cependant lç premier. Les précédents vendeurs ont certai
nement le droit de stipuler leurs garanties en accordant un emprunt ; mais
faut-il que les sous-acquéreurs du domaine de Saulzet les fournissent ces
garanties? Que les sieurs Gillet empruntent s’ils veulent sur leurs propriétés,
et non pas sur les nôtres ; car nous ne pouvons pas, nous, rester éternellement
exposés sans défense à toutes les chances de leurs bonnes ou mauvaises af
faires. D’une fois que nos fonds seront sortis de nos mains , nous n’aurons
plus d’action pour les redemander , et nous resterons cependant sous 1«
coup de l’action résolutoire et hypothécaire.
Les sieurs Gillet ont fait sur la revente du domaine de Saulzet, sur nous ,
un bénéfice considérable, il est juste qu’ils en profitent ; mais il est juste
aussi qu’ils nous rendent nos propriétés liquides et purgées ; ils ne peuvent
prétendre s’en servir encore après les avoir aliénées ; ils ne peuvent avoir /a
cJüqsc et le p rix ,
Nous avons encore un sujet plus grave et plus réel, s’il est possible , de
nous inquiéter et de craindre ; nous savons, de science certaine, que vous ne
vous êtes point libérés, sieurs Gillet , puisque vous ne justifiez d’au^ifu
payement, puisque l’inscription d’oflicc existe entière; mais nous savons
aussi de science certaine que vous vous êtes fait payer une grande partie des
prix de vos reventes du domaine de Saulzet, par d’autres sous-acquéreurs
plus faciles ou moins prudents que nous.
Que sont donc devenus ces fonds , sur lesquels nous avons un juste droit
(Je contrôle ; nous, qui devons être subrogés à tous les droits des prépédents
vendeurs? auraient-ils été détournés de leur véritable destination, qui était
l'extinction de tout privilège antérieur au nôtre? Le sieur Chabrol peul-if
être contraint de demeurer plus Jong-lemps dans une semblable confusiop?
«t ces considérations ne l’obligetfk-elles pas fi exiger toutes les garantes qui
Uii oijt été promises ?
SECONDE PARTIE.
Délais stipulés.
La discussion qui prççède a prouvé surabondamment cpmi>iep
fondés les motifs tTopposiliofl ¡du sieur Chabrol. Sans doute, il n’éjUut pa#
hç»ojn 4 ’autant pfeuy.es accumulées $ i-,exjst#flcje de l’ipscriptiou d’pffipc
oi l'art,
çiyjj devaient wpus #ufôrs,, çjl fti PPM* .soi&gie* e#Jr&
�( ta )
dans quelques développements , c’est que nous avons voulu démontrer que
le sieur Chabrol avait pour lui, non-seulement le droit, mais le bon droit.
Nous pourrions nous arrêter ici, car le triomphe de notre cause est désor
mais assuré; toute question relative aux termes et délais stipulés entre les
parties peut paraître maintenant oiseuse : ce n ’est en effet que lorsque les
sieurs Gillet auront fait disparaître les obstacles qui s’opposent à la libéra
tion du sieur Chabrol, que celui-ci devra s’occuper d'examiner si le terme
de son obligation est arrivé.
Toutefois, poursuivons nos adversaires jusque dans leurs derniers retran
chements ; fonons-les d’avouer que leur injuste entreprise ne peut pas même
se colorer du moindre prétexte, et qu’ils ont fait au sieur Chabrol un ou
trage g ra tu it, en le traînant devant les tribunaux, lorsqu’ils savaient bien
que , d’une p a r t , ils n’avaient pas eux-mêmes rempli leurs engagements,
et que, de l’autre, les délais stipulés pour le payement à effectuer par le
sieur Chabrol n’étaient pas expirés.
Par la copie textuelle que nous avons donnée plus haut dos conventions
existantes entre le sieur Chabrol et les sieurs Gillet, on a vu « que ces der» niers Font chargé de payer son prix à M"‘e de ïournemine ; que le sieur
» Chabrol n’est tenu d’effectuer que les derniers payements auxquels lesdits
» sieurs Gillet sont tenus envers ladite dame de Tournemine ; qu’il doit
» profiter des termes et délais stipulés , au profit des sieurs Gillet, dans le
» contrat de vente du 26 septembre 1828, et qui résulteraient de ce que
» M. et MD1C de ïournemine , étant obligés de faire remploi de la portion
» revenant à ladite dame de Tournemine, mettraient du retard à faire ledit
» remploi ; et qu’enfin les sieurs Gillet ont subrogé le sieur Chabrol à tous
» leurs droits, ainsi qu’à leurs obligations, envers Mmo de Tournemine pu» rement et simplement, sauf l’exécution des conditions stipulées , et sauf
» encore la faculté qu’ils lui ont donnée de ne payer que le dernier terme. »
11 est bien entendu que nous mettons à part, pour un m om ent, la clause
finale, la clause la plus essentielle de ces conventions, sans l'exécution
préalable de laquelle aucun payement n’est obligatoire pour le sieur Chabrol,
et que nous ne nous occupons ici que de la question des termes, indépen
damment de la question de garantie , que nous avons suffisamment débattue,
et qui est pour nous la question la plus importante, la question vitale’.
Cela posé, nous allons rechercher dans le contrat de vente du 20 sep
tembre 1828, la solution de la question, purement secondaire, qui nous
�( 13 )
.
- :
occupe en ce moment. Les conventions contenues en ce contrat appartiennent
au sieur Chabrol qui y est subrogé ; les sieurs Gillet ne peuvent le priver ni
du bénéfice des termes , ni de la réduction du taux de l’intérêt stipulés en ce
contrat ; ils ne peuvent en un mot reprendre ce qu’ils ont cédé , ce qu’ils ont
vendu , ni imposera leur acquéreur des conditions plus dures que celles qu’il
a acceptées; ils n’auraient d’action contre lui que pour l'exécution de ses
obligations envers M,n<‘ de Tournemine, en cas de retard, et toutefois encore,
ainsi que cela a été démontré, seulement après qu’ils auraient exécuté euxmêmes les leurs.
Commençons par transcrire ici les dispositions de ce contrat qui intéressent
notre cause :
« A r t . 9. La porlion du prix revenant à MmR de Tournemine , sera payée , savoir :
» quinze mille francs, le 1er novembre 1834; autres quinze mille francs, le l ernovem» bre 1835; cl vingl-un mille cinq cent vingt-quatre fraiics, le 1er novembre 183(5.
» Néanmoins, comme la portion revenant il Mme de Tournemine dans le domaine de
» Saulzet lu i est dotale , ainsi qu'il résulte de son contrat de mariage susdit, du 2!) mai
» 1827, cl que l’aliénation n’en a été permise que sous condition expresse qu’il serait
» fait emploi du prix en fonds certains, i l demeure convenu que les acquéreurs ne seront
■■
)> tenus de vider leurs mains qu’à la charge par M . et M me de Tournemine de justifier
» d'un remploi suffisant.
» A r t . 10. Dans le cas o ù , aux époques ci-dessus déterminées ,
et Mme de Tour» nemine n’auraient point encore faille remploi exigé, les acquéreurs ne pourront par
» ce motif consigner cette portion du p r ix , el seront tenus de la garder dans leurs mains
» jusqu’à l’expiration de la treizième année, c’est-à-dire jusqu’au 1er novembre 18i2 ;
» mais dans ce cas , l'intérêt, à partir du 1er novembre 1830 , sera réduit à quatre pour
» cent, el l ’inscription d’office prise au nom de Mme de Tournemine sur le domaine qui
» fait l’objet de la présente vente , sera restreinte jusqu’à due concurrence , de telle
» sorte que , si les sieurs Gillet revendent partie dudit domaine , ils pourront toucher le
» prix des reventes des mains des nouveaux acquéreurs, el ce , nonobstant l’inscrip« tion de Mme de
, à la charge par eux d'établir qu'ils possèdent des biens
» libres de tous privilèges et hypothèques d'une valeur d'un quart en sus , de la part
» héréditaire de
de Tournemine , ou de telle somme qui pourra lui rester duc.
» Et dans l ’intervalle de 1830 à 18'iü , si M. el M mc de Tournemine trouvaient à faire
n ce remploi convenable , leur portion du p rix deviendra exigible et sera payable en
« deux termes, d'une année à l'autre, à la charge par eux de prévenir les acquéreurs
ï> six mois d'avance.
» A r t . I L Si au 1er novembre 18V2 , les sieurs fiillet ne pouvaient valablement se
» libérer, soit parce que M. et Mra# de Tournemine n’auraient pas fait le remploi voulu,
r> soit pour toutes autres causes provenant de ces derniers ou de leurs ayants-droil r
» lesdits acquéreurs pourront consigner cette porlion de prix.
M.
Tournemine
Mmo
�( **.)
» Abt.
12. A la mort (le M. Emmanuel Aubier de la Montheille, ou à l'expiration de
* J’année qui suivra son décès, le capital de vingt mille francs , resté entre les mains
» des acquéreurs pour le service de la rente viagère à lui due . sera divisé entre les ven» deurs ou leurs ayants-droit, dans la proportion ci-dessus déterminée, savoir : un hui» tième ou quatre trente-deuxièmes montant à deux mille cinq cents francs à Mino veuve
*
?
»
»
à
Aubier de la Montheille ; un trente-deuxième , montant six cent vingt-cinq francs ,
à M"“' de. Fontenille ; quatorze trente-deuxièmes, montant à huit mille sept cent cinqxtanle francs, à M mo de Tourncmine ; et enfin treize trente-deuxièmes, montant à
huit mille cent vingt-cinq francs , à M!lc Aubier.
rt 13.
par une cause quelconque
»A .
11 demeure convenu que s i,
, les acquéreurs
» ne pouvaient valablement se libérer des portions du prix revenant âMraede Fontenille,.
» àMme veuve Lamonlhejlle et Mllu Aubier, aux époques ci-dessus déterminées, l'intérêt
» sera réduit à quatre pour cent par an , jusqu'en 1812 , époque à laquelle ils pourront
n opérer la consignation. »
*'
Avant de nous livrer à l’examen approfondi de ces conventions, il faut
d’abord fixer deux faits extrêmement importants dans la discussion : le pre
mier est que le décès de M. de Tournemine, arrivé le 25 juin 1835, a fait
cesser la condition de remploi qu’on a vu ci-dessus stipulée ; qu’en consé
quence (nous sommes en cela d’accord avec nos adversaires), ce décès a rem
placé le remploi exigé, et que la date du décès tient lieu pour nous de la
date du remploi.
Le second de ces faits est qu’on ne nous a notifié ce décès , qu’on ne non«
â prévenus , qu’on ne nous a donné la justification exigée parle contrat pour
faire courir nos délais , que le 29 décembre 1830 , et que cette même justi
fication n’a été donnée aux sieurs Gillet, nos vendeurs, par M,nc de TourBemine , que le 8 du même mois.
Quoique les clauses ci-dessus transcrites ne soient pas rédigées avec toute
la lucidité désirable , cependant il est facile d’en saisir l’esprit et le véritable
sens ; l’intention des contractants a été , sans nul doute , de fixer les paye—
qients de telle sorte que les acquéreurs, auxquels on interdisait la faculté
de consigner, ne fussent pas cependant exposés, par l’époque incertaine d"
remploi, à se voir demander le payement d’une somme considérable aq mo
ment où ils s’y attendraient le moins, ni obligés à la garder improductive
entre leurs mains pendant un temps plus ou moins long. La rédaction eût
pu sans doute faire encore mieux ressortir celte intention des parties , qui
toutefois est exprimée et qui existe réellement dans les termes du contrat ,
comme nous allons le démontrer,
Lu effet, l’art. 9 stipule comme règle générale : u que le# acquéreur# «e
�>> seront tenus de vider leurs mains qu’à la charge par M. et Mme dé Tour» nomme de justifier d’utï remploi suffisant : » ce qui veut dire qu’on ne
payerait au terme, qu’autant que le remploi serait effectué, et qu’on en
justifierait. Comment, en effet, puisqu’il y a , dans tous les cas , condition
de remploi, exiger le payement sans justifier du remploi?
Nous disons que cette clause stipule d’une manière générale, parce que
effectivement elle s’applique aussi-bien , et peut-être plus spécialement,
aux termes qui la suivent qu’à ceux qui la précèdent ; et si quelquefois on
a omis de répéter cette obligation de justifier, c’est que , la règle générale
une fois posée , 0 1 1 n’a plus compris le remploi séparé de sa justification , of
que toutes les fois qu'il s’est agi de prendre ce remploi pour point de départ
d’une échéance ou d’un terme de payement, on a toujours entendu parler du
remploi justifié.Vous êtes en effet obligés envers nous, non pas positivement
au remploi ; car , au contraire, ce remploi vous e s t , dans tous les cas, facul
tatif; mais vous êtes obligés envers nous, dans tous les cas , à la justification
du remploi, si vous voulez, dans un temps fixé , loucher vos fonds, afin
qu’étant avertis, nous puissions prendre nos mesures.
C‘csl en vain qu’on voudrait aujourd’hui abuser d’une certaine négligence
de rédaction , pour changer le véritable sens de la convention. Quoi! on
aurait accumulé les précautions pour que les acquéreurs ne fussent point
surpris, pour qu’ils fussent, dans tous les cas, bien et dûment prévenus,
pour qu’ils sussent bien à quelles échéances ils devaient tenir leurs fonds
prêts; dans quelles circonstances il leur était loisible de les placer à des
termes plus ou moins longs ! El malgré tout ce luxe de prévoyante , ces
acquéreurs, auxquels il est interdit de consigner, vont se trouver obligés ,
pendant huit années consécutives, de garder devant eux une somme qui ,
pendant la première année , sera de 15,000 f r . , de 30,000 fr. pendant la
deuxième , et pendant les six dernières de 6 0,27i fr. (art. 9 et 12), sommes
dont ils ne pourront aucunement disposer , et qu’on pourra leur demander
à chaque jour, à chaque heure , à chaque instant ! Car , n’en douiez point,
telle est la conséquence absurde, mais rigoureuse de votre raisonnement r
et nous prenons l’engagement de vous le démontrer tout à l’heure de la
manière la plus péremploire.
Non ! telle n ’a point été l’intention des parties , telles ne sont point fours
conventions; ce n’est pas non plus dans ce sens que ces conventions soiil
exprimées , et s’il y avait doute sur le sens littéral des termes T ce qui n’est
�pas, ce serait le cas ou jamais, d’appliquer le précepte : In conventionibus
contrahcnlium voluntas , potiùs quant verba , spectare placuit.
Tenons donc pour constant, dans la suite de celle discussion, que par
remploi, nous devons entendre, non le fait seul du remploi, mais le remploi
justifié , la justification du remploi ; car cela est exprimé dans la disposition
générale qui dit : « Que comme le remploi est nécessaire , les acquéreurs
» ne seront tenus de vider leurs mains qu’à la charge par les vendeurs de
» justifier du remploi ; » car cela est encore répété plus bas , lorsqu’il est
dit : « A la charge par eux de prévenir les acquéreurs six mois d’avance. »
O r, dans l’espèce, puisqu’il s’agit d’un remploi, prévenir et justifier fin
remploi, c’est tout à fait la même chose ; prévenir de quoi? de l'accomplis
sement du remploi; c’est en justifier ; cette justification est donc indispen
sable dans tous les cas ; et cela est si vrai, qu’on ne peut admettre le système
contraire sans fausser l’esprit et la leltre de la convention , sans tomber dans
la conséquence absurde que nous venons d'indiquer.
Les clauses du contrat de vente du 26 septembre 1828, en ce qui con
cerne le prix dû à Mme de Tournemine , prévoient deux cas, créent deux
périodes bien distinctes ; et d’abord l’art. 9 stipule que ce prix sera payable
en trois termes: aux 1ers novembre 1834, 1835 et 1836. Comme pendant
celte première période de huit ans, les acquéreurs avaient des termes de
payement bien fixés ; qu’ils étaient par là bien avertis, c’était à eux à s’ar
ran ger com m e en toute autre convention de vente où l’on stipule des termes.
Ils devaient tenir leur argent p r ê t , et disposer leurs placements de telle
manière que si on leur justifiait du remploi pendant cette même période , ils
eussmt à payer immédiatement tous les termes échus, lors de la justifica
tion , ou autrement ces mêmes termes à mesure de leurs échéances.
Mais on concoit que pour cela il fallait que la justification fût faite pen
dant la première période, c’est-à-dire, avant le 1er novembre 1830 ; c’était
déjà une gêne assez grande pour les acquéreurs, de demeurer pendant deux
ans, du 1er novembre 1834 au 1er novembre 1830, dans l’incertitude de
savoir si le remploi serait notifié ou non pendant cet intervalle, et exposé»
;i se voir demander, du jour au lendemain , une somme de 15 ou 30,000 fr.
Aussi l’on s’empresse de faire cesser cet état d’incertitude et de gêne ;
à défaut par les vendeurs d’avoir justifié du remploi aux époques ci-dessu»
déterminées , c’est-à-dire avant le 1er novembre 1836, nous entrons dans la
deuxième période, du 1er novembre 1836 au 1er novembre 1842; les ac
�quéreurs, tenus en suspens jusque-là, et dans l’attente de la justification,
deviennent libres ; ils disposent de leurs fonds comme ils l’entendent, et
nous sommes régis par l’article 10.
Cet article pourvoit avec sollicitude aux intérêts des deux parties; dans
1*intérêt des vendeurs, il commence par stipuler que les acquéreurs, nonobs
tant le défaut de remploi , ne pourront consigner, et par compensation , il
réduit , en faveur des acquéreurs, le taux de l’intérêt à quatre pour c e n t,
à compter du 1er novembre 1836 ; il leur accorde la facilité de placer leurs
fonds à longs termes; ils les garderont jusqu'au 1er novembre 1842.
Mais comme il pouvait arriver que dans l’intervalle de 1836 à 1842, les
sieur et dame de Tournemine eussent trouvé un remploi convenable , on
veut leur accorder à Cet égard toute facilité , en ménageant toujours les
intérêts des acquéreurs, qui auraient alors placé leurs fonds, et l’on stipule
que , dans ce cas, « la portion de prix revenant aux époux de Tournemine,
» deviendra exigible et sera payable en deux termes, d’une année à l’autre,
» à la charge par eux de prévenir les acquéreurs six mois d’avance. »
Le prix ne peut donc devenir exigible, pendant cette deuxième période, si
ce n’est en deux termes, d’une année à l’autre, et encore à la charge par
les vendeurs de prévenir, ce qui veut dire justifier du rem ploi, six mois
d’avance , et l’on voit ainsi que cette justification est nécessaire dans tous
les cas; qu’elle a été stipulée pour les deux cas: dans le premier, pour
obliger à payer de suite les termes échus, ou, à leurs échéances, ceux à
échoir; et dans le second, pour faire courir ces deux termes d'une année
à l’autre , lesquels doivent commencer six mois après avoir prévenu.
Ainsi entendues dans leur sens raisonnable et vrai, ces conventions sont
d'une clarté remarquable , d’une application facile ; elles n’ont rien que
de fort naturel et de fort juste.
Mais si vous voulez user de subtilité , si vous voulez aujourd’hui faire
comprendre ces conventions dans un sens différent de celui suivant lequel
vous les avez formées, si vous voulez méconnaître la clause essentielle et
générale qui dit : Qu’attendu que le remploi est obligé, les acquéreurs ne
videront leurs mains qu’à la charge par les vendeurs de justifier du remploi ;
çlause qui domine et explique toute la convention , clause applicable aux
deux cas, et plus spécialement au second, où elle est répétée; si vous voulez
prétendre « que les vendeurs n ’étaient tenus de justifier que lorsqu’ils vou» (iraient exiger le prix ; que daus l’esprit de la convention, le remploi peut
3
�»
»
»
»
être séparé de sa justification , et enfin que nous n avons pu disposer de nos
fonds qu’à la condition de nous assurer et de prouver que le remploi n était
pas arrivé à temps ; » oh ! alors nous allons voir où vous conduit un pareil
système. »
Remarquons en passant, qu’en exigeant que nous prouvions que le rem
ploi n'est pas arrivé, on demande /’impossible : il y a en France dix mille
trois cents notaires, un nombre fort considérable de receveurs de l’enre
gistrement, et quand même on admettrait que le remploi ne peut être fait
à l’étranger, on conçoit que cette preuve serait toujours au moins fort dif
ficile.
N’est-il pas clair que l’acquéreur, livré à ses propres affaires, comptant
sur la justification promise, habitant une autre région que celle des ven
deurs , ne pouvait avoir la certitude nécessaire pour disposer ses placements ,
pour prendre des engagements importants , qu’au moyen de celtc justification
indispensable ; et que non-seulement il ne pouvait pas prouver, mais encore
fu’il devait ignorer ce remploi, jusqu’au moment où on le lui ferait con
naître ?
Voyez maintenant quel effet monstrueux votre système fait produire à
la convention. Vous prétendez « que l’exigibilité n’est subordonnée qu'au
» remploi avant le 1er novembre 1836, et non à la justification dans le
» m êm e délai. » D’où il résulte rait que le re m p loi étan t fait p enda nt la
première période, le payement deviendrait, par cela seul, exigible pen
dant la seconde , sans que les vendeurs fussent aucunement tenus de justifier
ni de prévenir. Car tel est le sens de votre proposition , ou elle n’en a aucun ,*
eh bien! si le remploi a eu lieu de 1828 à 1834, les acquéreurs auxquels
on ne l’aura point notifié par négligence, caprice ou toute autre cause,
puisqu'au surplus , selon votre avis , on n’y est pas tenu , ces acquéreurs
vont donc rester du 10T novembre 1834, jo u r de la première échéance, au
1er novembre 1842, jour auquel la faculté de consigner leur est enfin accor
dée ( art. 11); c’est-à-dire , pendant huit années consécutives , sous le coup
d’un commandement de payer q u i pourra les frapper à tout instant! cl par
cela seul que le remploi aura été effectué avant le 1er novembre 1836, on
sera dispensé de les prévenir ; il faudra qu’ils payent au moment même, sans
terme , sans délai , sans répit! nul moyen d’échapper à cet étal d’anxiété,
à celle torture continuelle. Non , cette sollicitude si vive pour les acqué
reurs, qui paraît avoir préoccupé les contractants, n’était rien qu’une
�amère dérision ! Ils ne pourront même pas consigner pendant ce délai /
Nous avons prouvé que ce n ’est point ainsi que s’exprime la convention ,
et que s’il y avait lieu de l’interpréter, ce n ’est pas non plus dans ce sens
qu’il faudrait le faire.
Avant d’aller plus loin , nous avons encore h faire une observation trèsimportante. C’est que par ces mots : Justifier du rem ploi, avertir, on doit
nécessairement entendre non pas une justification, un avertissement verbal,
mais une notification , une mise en demeure , un acte formel et authentique.
On n’a pas pu l’entendre autrement, car, d’une part, il ne suffisait pas que
les acquéreurs apprissent, même avec certitude, que le remploi était fait ,
ils avaient encore à examiner s’il était r'ègulier et quelles échéances on avait
fixées dans le nouveau contrat de vente , afin de pouvoir eux-mêmes s’y
conformer ; d’autre p a r t , il était nécessaire d’une notification formelle qui
liât les parties entre elles , de manière à ce que si l’une devenait obligée
au payem ent, l’autre né p û t , après avoir prévenu , se dispenser, sous aucun
prétexte, de recevoir. C’était une opération importante pour les acquéreurs
de déplacer environ 00,000 fr., de changer et déranger leurs dispositions
prises , et celles des personnes qui détenaient leurs fonds; il ne fallait pas
(jno cette opération , une fois terminée, pût être rendue vaine par un chan
gement de volonté ou une circonstance quelconque.
Nous faisons cette observation pour aller au-devant de toutes les asser
tions, même les moins vraisemblables, de nos adversaires, et pour détruire
les fausses inductions qu’ils cherchent à en tirer, à défaut de meilleurs
moyens; car, nous l’affirmons, et nous en convaincrons nos juges par les
circonstances de la cause et les pièces qui sont entre nos mains , le sieur
Chabrol n’a été prévenu, ni officieusement ni légalement, qu’après Vexpira
tion de la première période, que postérieurement au 1er novembre 1836.
Ces principes une fois reconnus, il est facile d’en faire l ’ap plication à
l’espèce particulière qui nous occupe.
Le sieur Chabrol a vu , avec satisfaction , arriver le 1er novembre 1836 ,
«ans qu’aucune demande ni aucune signification lui eût été faite; parce
qu'alors il a été délivré de l’embarras de tenir des fonds toujours prêts pour
payer à la première réquisition , parce qu’il a lu dans le contrat d’acquisi
tion des sieurs Gillet, qu’à partir de cette époque, on ne pouvait rien exi
ger sans avoir prévenu six mois d’avance; que de plus, le prix dû à
Mm,; de Tournemine devenant alors exigible en deux termes, d'une année à
�Vautre, et la dette du sieur Chabrol n ’atteignant pas le montant du premier
terme, il aurait toujours, pour se libérer, un délai de dix-huit mois après
qu’on aurait prévenu ; puisqu’il n’était tenu d’effectuer que les derniers
payements, et qu’il devait profiter des termes et délais stipulés.
Ainsi donc le sieur Chabrol, indépendamment de ce qu’il connaissait
l’existence de l’inscription d’office, dont la radiation ne lui était point
rapportée , s’est reposé sur la foi de ces conventions ; il a disposé des fonds
qu’il avait entre ses mains, il a prévenu ses débiteurs qu’ils n’eussent point
à se déranger encore, il a prolongé les délais qu’il leur avait accordés.
Nous avons dit qu’il n’avait pas été prévenu , même officieusement, avant
le premier novembre 1836, du décès de 3VI. de Tournemine, décès qui rem
place ici le remploi ; et en effet le sieur Chabrol n ’a jamais été mis en
rapport avec Mme de Tournemine; jamais, ni par écrit, ni verbalement,
elle ne lui a fait connaître ni le décès, ni son désir d’être payée.
Il ne connaissait point les vendeurs des sieurs Gillet, et il n’avait avec
ces vendeurs aucune relation directe ou indirecte, et quant aux sieurs Gillet
eux-mêmes , il ne les fréquentait pas davantage ; il n’avait avec eux que les
relations strictement indispensables ; il ne les voyait qu’une fois par an
pour le payement des intérêts de son prix, payement qui a toujours été
effectué directement entre leurs mains, conformément au contrat, et ainsi que
sept quittances données p a r eux en font fo i.
Ces sept quittances successives, ainsi données purement et simplement
par les sieurs Gillet, jusqu’au 12 novembre 183G , sans aucune mention rela
tive à l’exigibilité du capital, prouvent bien évidemment qu’on ne songeait
point, avant cette époque, à demander le payement du prix, et qu’on n ’a
point prévenu le sieur Chabrol. Ces quittances, en effet, ne sont point
intervenues entre gens ignorants des affaires. Or, que se passe-t-il ordinai
rement dans les cas semblables? Pour le moindre congé, si l’on se dispense
d’un acte extrajudiciaire, n’a-t-on pas toujours la précaution d’insérer,
dans la quittance du loyer , une mention , ou de souscrire ou faire souscrire
séparément une déclaration qui atteigne le même but? Et lorsque le contrat
exige unc justification, un avertissement, comment supposer que pour lixer
l’exigibilité d’une somme importante , on se soit contenté d’un simple
avertissement verbal, et qu’on ail négligé l’une des précautions si simples
que nous venons d’indiquer?
Le sieur Chabrol est un homme actif, et qui apporte à ses affaires les
�soins les plus vigilants; il a su rtout, nous pouvons la dire avec assurance,,
la réputation d’être exact à remplir ses engagements, et si on Vpût prévenu,
même officieusement, comme nos adversaires le prétendent, il ne se fut
pas endormi ; les registres de son banquier auraient témoigné de son activité
à réunir ses capitaux. Loin de là, nous le voyons en 1835 et 1836, faire
divers placements assez importants, et employer ses fonds disponibles à la
construction d’une maison clans son enclos.
Seulement, le 12 novembre 1836, le sieur Gillet aîné, en recevant, pour
lui et pour son beau-frère , une année d’intérêts, annonce au sieur Cbabrol,
eu termes assez embarrassés, que M. de Tournemine est décédé, et qu’il
pourrait se faire qu’on demandât le payement du prix. C’était le 12 no
vembre , date de la quittance du sieur Gillet (notez bien que le délai de ri
gueur était passé); le sieur Cbabrol ne perd point de temps, le 14 du
même mois il obtient une consultation, délibérée à Riom , qui apprécie les
conventions dans leur véritable sens, et qui décide que le sieur Chabrol ne
sera tenu de payer que dix-huit mois après la notification.
Cette consultation a été communiquée les jours suivants aux sieurs Gillet,
et, pour toute réponse , on a , avec une activité assez remarquable, malgré
la longueur et le nombre des actes à transcrire, fait à la fois notification et
commandement aux sieurs Gillet le 8 décembre 1836, et au sieur Chabrol
le 29 du même mois.
C’est que sans doute par la précipitation des poursuites, par l’affront
d’un commandement de payer, on voulait intimider le sieur Chabrol ,
l'empêcher de réfléchir sur ses dangers, et emporter l’affaire d’emblée.
Ainsi donc le sieur Chabrol n’a été prévenu, soit légalement, soit officieu
sement , que postérieurement au 1er novembre 1836, et en conséquence, il
a acquis le droit de ne payer que dix-huit mois après avoir été prévenu.
C’est en vain que les sieurs Gillet affirment le contraire, leurs assertions
sont démenties par toutes les circonstances que nous venons de rapporter.
Quoi ! on sait que l’on est tenu de prévenir, de justifier, on a l’intention
d’exiger immédiatement le principal, et l’on vient toucher les intérêts! et
l’on, en donne quittance sans y faire insérer aucune réserve relative au
capital.! et l’on ne prend aucune de ces précautions qu’on ne négligerait pas
pour le moindre congé! L'intention n’était donc pas alors bien arrêtée. Et
d’ailleurs les sieurs Gillet n’ont-ils pas aussi affirmé devant le tribunal de
première instance, que jamais le sieur Chabrol n ’avait payé ses intérêts
�entre leurs mains, qu’il les avait toujours payés aux précédents vendeurs?
Et nous, nous affirmons que tous nos payements, au nombre de sept, ont été
effectués par nous entre les mains des sieurs Gillet; que les sieurs Gillet se
sont personnellement présentés sept fois en notre domicile, pour toucher ces
intérêts annuels, et que sept fois ils nous en ont donné quittance de leur
main. Nous affirmons que jam ais nous n’avons payé aux précédents vendeurs,
et pour preuve de nos assertions, nous rapportons : 1°. le texte de notre
contrat d’acquisition, qui porte : « Lesquels intérêts mondit sieur Chabrol
» promet et s’oblige de payer auxdits sieurs G illet, annuellement au pre» mier novembre; » 2°. et les sept quittances qu’ils nous ont fournies , et
que nous avons conservées.
Il faut donc en revenir à ce qui est juste et vrai. Il faut qu’aujourd’hui
nos adversaires conviennent qu’ils ne nous ont prévenus d’aucune manière ,
avant le temps fixé; qu ’ils n’en avaient pas mênie l’idée; mais que, ce délai
expiré, quelques réflexions nouvelles, quelques circonstances favorables,
quelques besoins imprévus, les ont portés à vouloir récupérer le temps
perdu , et nous enlever les avantages de notre contrat, que cependant nous
avions acquis assez cher!
Nous avons, au surplus, démontré que le sieur Chabrol, eût-il été pré
venu verbalement en temps utile, ce qui n’est pas, cet avertissement verbal
n’était rien d’assez prononcé , d’assez positif et d’assez précis , pour fixer
l’exigibilité de la créance , et ne pouvait remplir le but du contrat.
Le décès de M. de Tournemine a fait cesser la nécessité du remploi;
il en lient lieu absolument, il ne fait que le remplacer; c’est ce que nous
disons avec nos adversaires, avec le tribunal de première instance.
Toutefois nous devons faire remarquer, avant de terminer ce chapitre,
que ce décès apporte à l’état des choses une différence assez essentielle et
toute à notre avantage; c’est qu’une justification, une notification formelle
et régulière, est encore plus nécessaire et plus obligatoire , s’il est possible ;
c’est qu’aussi les délais stipulés sont encore plus indispensables h l’acqué
reur dans le cas du décès que dans le cas du remploi.
Kn effet, le remploi effectué et notifié même verbalement, fixait au moins,
d’une manière certaine, la position de l’acquéreur; il existait, dans ce cas,
un contrat authentique capable d’engager réciproquement les parties, et
dans lequel l’acquéreur, pourvu qu’on voulût bien le lui communiquer,
pouvait puiser la connaissance positive de ses engagements; l’état d’incer
�titude et de gêne , que nous avons signalé plus haut, cessait pour lui,
jusqu’il un certain p oin t, du moment que l’acte de remploi existait, et qu’il
en avait la certitude.
Mais le décès du m a ri, même parvenu à la connaissance de Vacquéreur,
et non légalement notifié , dispensait bien la femme du remploi, mais ne
l'obligeait pas à recevoir; il n ’autorisait pas l’acquéreur à l’y forcer, ni
même à consigner contre la défense portée au contrat; si Mme de Tournemine,
qui avait un intérêt fixe avec un privilège certain sur les biens vendus,
redoutant le déplacement de ses fonds, préférait garder cette position . elle
en était bien la maîtresse; l’acquéreur, lié par son contrat, ne pouvait
pas l’en faire sortir ; personne ne pouvait la priver du bénéfice de cette
stipulation , faite, il est v r a i, dans l’intérêt de l’acquéreur, mais qui n ’avait
pas moins engagé ce dernier.
Cela posé, il était nécessaire, jusqu’au 1er novembre 1836, que M,ne de
Tournemine eût notifié avant le terme, avec l’acte de décès, sa volonté de
recevoir, pour que la seule échéance de ce l or novembre 1836, obligeât au
payement. Passé ce terme de rigueur, la notification était encore nécessaire,
non plus pour obtenir le payement immédiat, mais pour prévenir l’acqué
reur de la volonté de recevoir , et faire courir les nouveaux délais , de six
mois et de dix-huit mois, après lesquels la somme devrait être soldée.
En voilà assez pour qu’il soit démontré que l’opposition du sieur Chabrol
était également bien fondée, soit qu’on veuille la considérer sous le rap
port des délais qui lui ont été solennellement promis; soit qu’on veuille
envisager les conditions que les vendeurs ont acceptées, les justes craintes
du sieur Chabrol, et la question des garanties qui lui sont accordées par
sa convention , aussi-bien que par la loi.
TROISIÈME PARTIE.
Jugement de première instance.
La réfutation des motifs , sur lesquels le tribunal de première instance a
fondé son jugement du 25 août 1837 , est maintenant pour nous chose
facile; car la discussion qui précède el l’exposé sincère des faits ont déjà
détruit la plupart des arguments du dispositif de ce jugement.
Pour relever les erreurs dans lesquelles le tribunal a été e n tr a în é , nous
allons donc nous contenter de donner la transcription des attendus du
jugement, que nous ferons suivrc'de quelques réflexions.
�1°. « Attendu que par acte de vente du 26 septembre 1828, les frères Gillet ont
*> acquis des héritiers Lamontheille le dom; iae de Saulzet, moyennant 138.000 IV. ;
» et que le 1er septembre 1829 , ils ont revendu au sieur Chabrol pour 29,538 fr., d’hé» ritages provenant de cette acquisition. »
Nous ferons seulement rem arq uer, sur cet attendu , que la contenance
des héritages vendus au sieur Chabrol, ayant été, dans le contrat de 1829,
déclarée être de beaucoup supérieure à la contenance réelle, les sieurs
Gillet ont enfin consenti , le 21 mai 1831 , après plusieurs arpentages et
réarpentages successifs, à réduire ce prix h 27,875 f. 35 c.
2U. « Attendu qu'aux termes de cette dernière vente , le sieur Chabrol, substitué aux
» droits et charges de ses vendeurs , s’est obligé « paijer pour e ux , à la dame de Tour» nemine . le montant de son acquisition , après l’échéance du dernier terme exigible
» par cette dame. »
Ce mot substitué, énoncé ainsi d’une manière absolue , n’est pas exact,
et fait voir combien le tribunal a mal lu et apprécié le texte et le sens des
conventions; le sieur Chabrol n’est pas substitué purement et simplement ,
comme le jugement l’énonce; il est substitué, mais sous des conditions que
doivent préalablement accomplir les sieurs Gillet ; tant que ces conditions
ne sont pas remplies , il n'est pas substitué ; il ne le sera réellement et effec
tivem ent q u ’alors.
~
Obligé à payer après l'échéance du dernier terme exigible par cette dame :
c’est encore là une bien fausse interprétation. Le sieur Chabrol est obligé à
payer non-seulement , après l’échéance , etc— mais encore après que les
sieurs Gillet auront fait tous les payements précédents; après qu’ils auront
rapporté mainlevée et radiations de toutes inscriptions , et notamment
de l’inscription d’office des précédents vendeurs , en totalité , moins la
somme restant à payer par le sieur Chabrol ; après qu’ils auront fait cesser
ses justes craintes d’être troublé ; car, si l’on a stipulé que le sieur Chabrol
ne lerail que les derniert payements , ce n’est pas uniquement dans le but
de fixer un terme de payement, comme paraît l'entendre le tribunal, c’est
bien plu» encore dans un but de sûreté pour l'acquéreur, et pour avoir la
certitude que tout privilège antérieur serait totalement éteint , comme au
surplus nous l’avons démontré dans la première partie de ce mémoire , de
manière à n’y plus revenir.
Il est à regretter que parmi ces nombreuses circonstances, qu’il était
�indispensable d’examiner et d’apprécier, pour fixer l’exigibilité, le tribunal
n ’en ait envisagé qu’une seule , et surtout qu’il n ’ait point porté son atten
tion sur l’article 1653 du Code civil, et sur cette clause essentielle et si
importante : Il est bien entendu et convenu que la fixation des payements cidessus indiquée , ne sera obligatoire pour le sieur Chabrol, etc. ( Voyez
page 7 et suivantes du présent mémoire ).
3°. « Attendu dès lors que la partie de Michel ( le sieur Chabrol ) n’a que les mêmes
» droits que celle de Latour (les sieurs Gfllet), et c’est uniquement dans l’acte du
» 26 septembre 1828 qu’il faut puiser la solution de la question d’interprétation sou-1» levée par l’opposant. »
Toujours même préoccupation de la part du tribunal ! ainsi , par cet
attendu , se trouvent annihilés tous les engagements des sieurs Gillet envers
le sieur Chabrol, toutes les conditions de garantie, contenues dans le contrat
du 1er septembre 1829, dont nous avons fait connaître l’importance et la
lucidité.
4°. a Attendu qu’aux termes de l’article 9 de ce contrat, la porlion du prix, reve» nant à Mrae de Tournerninc, était payable en trois termes, dont le plus reculé
» expirait le 1er novembre 1836 , si avant cette époque i l avait été fait des acquisitions
x> en remploi à son profit, ou , ce qui était la môrne chose , s i , dans le môme d é la i, le
r> remploi était devenu inutile par la dissolution du mariage. »
Ici encore la convention n’est pas exactement rappelée ni énoncée dans
son véritable sens ; nous avons , en effet, démontré avec une grande évi
dence ( page 15) que l’échéance des termes était déterminée, non par le
remploi seu l,\n par l’événement qui le rendait inutile, mais par la ju s
tification de ce remploi ou de cet événement ; nous avons fait voir que la
convention devait être entendue et était exprimée dans ce sens , et que le
«ystème contraire conduisait à une conséquence inadmissible et absurde,
que le tribunal n’a pas aperçue , celle de contraindre un acquéreur auquel
on a interdit la faculté de consigner , pour lequel le contrat de vente
témoigne tant de sollicitude , h garder dans ses mains , pendant huit
années consécuiives, uue somme considérable, pour la payer à première
réquisition.
5°. n Attendu que M. de Tourncmine étant mort le 22 juin 1835 , sa veuve a pu, sans
* ^emploi , exiger et toucher le p rix , après les délais accordés aux acquéreurs , pn
4
�» justifiant uniquement que la condition , m ise’à leur libération immédiate, était
x> arrivée dans les délais stipulés , c'est-à-dire*, avant le 1er novembre 1836. »
Il a été démontré ( page 17 ) que M,nc de Tournemine ayant laissé arriver
le 1er novembre 1836 , et laissé commencer la deuxième période, sans
avoir fait aucune justification , le prix est devenu , pendant cette période ,
exigible en deux termes , d’une année à l’autre , et encore à la charge xle
prévenir six mois d’avance , el que par conséquent le tribunal s’est trompé
en disant que Mrae de Tournemine a pu exiger et toucher le prix en ju sti
fiant.
du
6°. « Attendu que le 8 décembre 1836, il a été signifié aux frères Gillet , e t , le 29
» même mois , par ces derniers , au sieur C habrol, l'acte de décès du sieur de Tojjru neminc , avec commandement de payer. »
La dame de Tournemine , non plus que les sieurs Gillet, n’avait aucun
droit de faire a la fuis la signification du décès et un commandemant de
payer, puisque le contrat porte que, pendant cette période de six ans , du
1er novembre 1836 au 1er novembre 1842, le prix ne pourrai^ être exigé
qu’à la charge de prévenir six mois d'avance. La dame de Tournemine devait
donc d’abord prévenir, c’est-à-dire, justifier du remploi ou du décès, et
six mois après , elle aurait été en droit de faire un com m andem ent «le
payer pour la première moitié de ce qui lui est dû. Et nous avons
démontré ( page 22 ) que cet avertisiement„ cette justificalioi}, était encore
plus nécessaire , s’il est possible, dans le cas du décès que dans le cas du
remploi.
d
7°. « Attendu que le contrat n’obligeant lavendercsse à justifier de I exécution de
la condition de remploi ou de son inutilité , que lorsqu'elle voudrait exiger le prix,
n sans déterminer de délai pour cette justification, il est évident que l’exigibilité n était
« subordonnée qu’au remploi , avant le 1er novembre 1836, et non à la justification
» dans le mémo délai ;
puisque
qu’au
8°. « Attendu que l’article 10 vient ajoutera cette démonstration,
les gtj» pulations qu’il renferme, ne sont encore rendues expressément applicables
cas
j> où le remploi seulement, el non le remploi et la justification n’auraient pas été faits
« dans le délai de l’article 9 ;
9°. « Attendu que de la combinaison de ces clauses, il résulte évidemment qu’au mo» ment de l’acle , M. de Tournemine était dans l’inleulion de faire emploi avant
d le l ur novembre 1836 ; il
avait intérêt; Jes acquéreurs devaient compter , et ainsi
y
y
�» prévenus, ils n’ont pu disposer de leurs fonds, ou les conserver jusqu’aux termes
» nouveaux stipulés par l’art. 10, qu'à la condition de s'assurer et de prouver que le
» remploi n'était pas arrivé à temps. »
Nous avons prouvé sans réplique, dans la deuxième partie de ce mémoire,
que tous les principes émis ci-dessus par le tribunal , sans exception , sont
complètement erronés ; nous avons démontré l’impossibilité où était
l’acquéreur de s'assurer et de prouver que le remploi n'était pas arrivé ; nofts
ne recommencerons pas celte discussion.
Mais nous rappellerons encore, de peur qu’on ne l’oublie, que quand
même tous les délais seraient expirés depuis cent ans , quand même nos ad
versaires auraient droit sur tous ces points, ils auront toujours cent fois
tort, l’opposition du sieur Chabrol sera toujours bien fondée, tant qu’ils
s'obstineront à lui refuser les mainlevée et radiation promises, il laisser
peser sur sa propriété l’inscription d’office et le privilège des précédents
vendeurs, et enfin à ne point effectuer les premiers payements.
10°. « Attendu qu’à ces déductions tirées des actes viennent se joindre des considéra» lions puissantes tirées des faits. »
11°. « Attendu que les sieurs Gillet qui auraient le même intérêt que le sieur Chabrol.
» et avec lesquels seuls a été passé l’acte qu’i l s’agit d'interpréter, reconnaissent que
» tel a été le sens de la stipulation; ils soutiennent encore, avec la partie de liouqanne,
» que la partie de Michel a été informée officieusement avant le 1er novembre 1836, du
» décès du sieur Tournemine, et tout le fait présumer ; des termes d’intéréts échus, de» puis ce décès, ont mis les parties en position de s’expliquer sur le remboursement,
» la dame de Tournemine avait le plus grand intérêt à l’exiger , et la rapidité des com» mandements lancés par elle après Vexpiration du dernier terme, prouve son intention
» dont elle avait dû faire précéder la manifestation rigoureuse, et de démarches propres
» à éviter des frais, et de la justification de son droit; enfin , une consultation délibérée.
» à Riom , le \\novembre 1836 , constate formellement que la partie de Michel était
v «visée de ce décès bien avant le commandement. »
« Les sieurs Gillet qui auraient le même intérêt que le sieur Chabrol ».......
Comment nos adversaires ont-ils pu abuser à ce point le tribunal? Et contro
qui donc avons-nous été et sommes-nous en procès, si ce n’est contre les
sieurs Gillet?
Ce n’est pas contre les précédents vendeurs ; nous n’avons avec eux aucun
point de contact jusqu’à présent ; la délégation faite h
p v /lt
si elle n’existait pas, puis^ü’
acceptée par nous que flpus
�conditions non encore accomplies ; et si ces précédents vendeurs agissaient
contre n o us, ce serait aux sieurs Gillet à nous garantir.
Contre M. de Fontanges? ............ Mais M. de Fontanges n ’est pas sérieuse
ment notre adversaire ; peu lui importe ( il nous l’a déclaré ) que ce soient
les sieurs Gillet ou le sieur Chabrol qui fassent les premiers ou les derniers
payements.
Mrae de Tournemine ?__ Eh ! qui nous dira aujourd’hui si Mrac de Tournemine__ m ourante\\\.... avait une volonté bien ferme et bien arrêtée île
nous intenter un injuste procès? s i , dans la douleur d’un récent veuvage ,
et dans l’épuisement de sa longue maladie , elle a pu apporter à cette affaire
toute l’attention nécessaire? Près de laisser des orphelins en ce monde,
n ’avait-elle pas, dans ces moments suprêmes, de plus graves et de plus
dignes préoccupations?
L ’intérêt des sieurs Gillet, nous l’avons fait toucher du doigt aux pages 10
et 11 de ce mémoire.
L ’intérêt du sieur Chabrol, c’est de purger sa propriété, c’est de se libérer
avec sûreté dans les délais convenus; d’exécuter et de faire exécuter son
contrat d’acquisition; d’avoir une propriété dont il puisse librement dis
poser, qui ne soit point affectée et hypothéquée à des emprunts étrangers ;
c'est de ne point se laisser imposer un cautionnement forcé.
Le tr ib u n a l a donc été grave m e n t in d u it en erre u r , lo rs q u ’ il a pensé que
les sieurs Gillet auraient le même, intérêt que le sieur Chabrol ; c’est au con
traire entre eux que le débat a réellement lieu ; rien de plus opposé que leurs
intérêts.
Le tribunal a pu facilement s'y méprendre ; car en effet, en bonne logi
que , les sieurs Gillet devraient avoir le même intérêt que le sieur Chabrol ;
et c’est justement de cette anomalie , de celle position étrange qu’ils se sont
faite, de ce renversement des idées, que nous avons conclu qu’il y avait,
dans leur conduite , un but caché , et que nous sommes arrivés ii la connais
sance de la vérité.
« Ils soutiennent encore avec la partie de Jlouganne que fa partie de Michel
» a été informée officieusement.......... » Nous avons fait connaître , page 21,
quelle confiance pouvaient mériter ces assertions; nous avons établi par
des pièces, par des dates précises, par les plus fortes présomptions, que le
sieur Chabrol n ’avait été informé du décès de M. de Tournemine que le 12
novembre 183G.
�Q u a n ta M. de Fontanges (partie de Rouganne ), il n ’était pas présent à
l’audience; il sait bien aussi qu’il ne nous a jamais prévenus, à aucune
époque, et il est évident que le tribunal a ici commis une erreur. ( Voyez
page 20. )
E t , au surplus, nous avons prouvé d’une manière évidente (page 10),
que c’était fausser l’esprit et le texte de la convention , que de vouloir
remplacer, par un simple avertissement verbal, la justification, la notifica
tion qu’elle exige.
« La rapidité des commandements »....... Ces commandements, quelque
rapides q u ’ils fussent, n’en étaient pas moins faits tardivement, c’est-à-dire,
à une époque ou nous avions acquis le droit de nous libérer, dix-huit mois
après le commandement ou signification dont il s’agit; nous nous sommes
expliqués ( page 21 ) sur cette rapidité, nous avons fait voir quelle induclion on devait en tirer; et quant à l'intention et à la volonté de Mme de
Tournemine, nous avons également fait connaître, quelques lignes plus
h a u t , ce qu’on doit en penser.
« Elle avait dû faire précéder la manifestation de son intention de dé» marches propres à éviter des frais , et de la justification de son droit ».......
Voilà une présomption que rien n’appuie, que tout contredit; aussi le tri
bunal ne l’énonce-t-il qu’avec doute : Elle avait dû.
Sans doute nous sommes persuadés que si nous eussions été en rapport
;ivec Mme de Tournemine, nous nous fussions fort bien entendus avec elle.
Mais rappelons-nous bien que Mme de Tournemine ne nous connaissait en
aucune façon , quelle n avait point accepté la délégation , qu’elle n’avait
aucun droit ni litre pour s’adresser à nous , qu’elle n’était pas en état de
faire des démarches, et que si, coque nous n’admettons pas, elle avait
réellement justifié de son droit aux sieurs Gillet, ces derniers qui voulaient
nous faire payer et s’en dispenser Knous étourdir sur nos dangers, nous ef
frayer , nous intimider p a r la rapidité des commandements, se sont bien
gardés de nous en faire part, ou du moins ne l’ont fait que tardivement, et
en termes ambigus, honteux et peu précis, et seulement le 12 novembre 1836
( Voyez page 21 ).
« line consultation délibérée à Iiiom , le 14 novembre 1830....... » Cette
consultation est un des meilleurs arguments en faveur du sieur Chabrol ; elle
prouve sa bonne foi, elle prouve qu’il n‘a pas été avisé en temps utile; car
c’est alors qu’il aurait consulté ; le 12 ou lui fait connaître qu'on pourrait lui
�rédamer le prix; étonné d’une semblable demande, croyant avoir dix-huit
mois devant lui h comjplcr de la notification , sachant d’ailleurs qu’on n’était
j>as en règle pour toucher, il consulte le 13 à Clermont, le 14 à Riom: les
avis lui sont favorables; il les communique à ses adversaires (les sieurs
G illet), qui lui répondent par une rapidité de commandements singulière
ment remarquable, et toutefois tardive.
« Avant le commandement, » soit, mais non avant le 1er novembre 183G ;
et, encore une fois, toutes ces allégations, tous ces dires, auraient-ils
même quelque fondement, ne pourraient jamais tenir lieu de la notifica
tion , de la justification, de Y avertissement léyal qu’exige le contrat, pour
que l’acquéreur puisse se mettre en mesure ( Voyez page 19 ) ; justification,
avertissement que le sieur Chabrol n ’a reçus que le 29 décembre 1836.
« 12°. Attendu que vainement le sieur Chabrol soutient que n’étant obligé qu’à payer
» 1rs derniers termes des sieurs G illet, tant que ceux-ci ne seront pas entièrement libén rés, il ne peut être contraint au payement;
» 13°. Attendu en effet que la clause qu’indique ici l’opposant se réfère évidemment
» aux termes stipulés par les vendeurs, et non à l’époque où se libéreront réellement les
n sieurs Gillet, la partie de Rouganne ayant son privilège sur les deux ventes, et celle
» de Latour, qui lu i déléguerait lep rix dû par le sieur Chabrol, ayant bien p u et voulu
» accorder le délai le plus éloigné, mais non un délai différent ou plus long que celui
» qu'ils avaient eux-mêmes ;
» 1 l n. Attendu, quant au* intérêts, que courant en vertu de l’art. 9 du contrat, et en
* vertu du commandement, ils sont dus à 5 pour cent, le cas de l’article 10 n’étant pas
3 arrivé ;
» 15°. Attendu dès lors que la demande de l’opposant ne s’appuie sur aucune raison
» solide;
» P a r c e s m o t i f s , le tribunal le déclare mal fondé dans son opposition, l’en déboute,
» le condamne à payer aux héritiers de Tournemine la somme de 27,875 fr. 35 centimes
» portée en la vente du l rr Septembre 1829, enregistrée, aux intérêts depuis le 1er no» >ombre 1830, et aux dépens, n
Les principes ci-dessus émis ont été complètement réfutés dans tout le
cours de ce mémoire , et particulièrement dans la première partie; pour évi
ter la satiété, nous ne ferons que de très-courtes observations.
« Vainement le sieur Chabrol soutient.......» ; mais si les sieurs Gillet ne
commencent par se libérer, le privilège subsistera sur la propriété du sieur
Chabrol ; ce n'est donc pas vainement que la convention et la loi autorisent
ce dernier à ne faire que les derniers payements, et à garder ses fonds tant
�que les sieurs Gillet ne se seront pas eux-mêmes libérés : c’est cet état de
choses que nous avons le droit de faire cesser, c’est l'extinction de ce
p rivilège que nous demandons et qu’on ne peut nous refuser.
« Le.s sieurs Gillet n'ont pu ni voulu accorder un délai différent, ou plus
» long que celui qu'ils avaient eux—mêmes....... » Non-seulement ils ont pu
et voulu l’accorder ce délai différent ou plus long ; mais ils l'ont posi
tivement, expressément, solennellement accordé pour le cas où il existerait,
lors des échéances , des inscriptions hypothécaires de quelque espèce qu’elles
fussent, sur les biens vendus, du chef des vendeurs ou de leurs auteurs; de
telle sorte que la créance des héritiers de Tournemine serait-elle même
échue, par rapport aux sieurs Gillet, elle ne le serait pas à l’égard du sieur
Chabrol.
« Attendu que lorsque le terme d'une obligation est joint à une condition ,
» et qu’elle lui est subordonnée, le payement ne peut être exigé, malgré
» l’échéance du terme, si la condition n’est pas remplie. » Qu’arriverait-il
dans ce cas? c’est que les sieurs Gillet seraient soumis à payer de leurs
propres deniers, à garantir même le sieur Chabrol, et ne pourraient que
s’imputer à eux-mêmes le tort de n’avoir pas rempli leurs engagements
envers lui (Voyez la conventioa , page 7 , et l’arrêt de la Cour royale
de Uordeanx , page 9 ).
J. A, CHABROL.
Clekhokt , Imprimerie de THIBAUD—LANDRIOT.
�
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrol, Jean-Antoine. 1837?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
J.A. Chabrol,
Subject
The topic of the resource
ventes
domaines
biens nationaux
indivision
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Jean-Antoine Chabrol, propriétaire à Clermont-Ferrand, place Michel-de-l'Hospital, appelant d'un jugement rendu au tribunal de première instance de Clermont-Ferrand, le 25 août 1837, signifié le 9 novembre suivant; contre les sieurs Antoine et Jean Gillet, beaux-frères, marchands horlogers à Clermont-Ferrand.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud-Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1837 ?
1828-1837
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV08
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Saulzet (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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domaines
indivision
ventes
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MEMOIRE
P O U R
D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
J u l ie n
CONTRE
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son mari yjuge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de Brioude ;
D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E ,fille majeure,
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit P i e r r e D A L B IN E et de ladite
D E J A X , son épouse ,
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit
Montbrizet-Gizaguet ;
' Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la lo i, pour éluder la
prohibition de la loi, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lois, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? Telle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�(2)
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame Dalbine, tous l’effet d’un plan cons
tamment suivi, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfans ; savoir, Julien, V ita l,
Antoine premier, Antoine second du nom , et AnneMarie Dejax, première du nom.
Julien, V ital, et Antoine premier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
Anne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
Tartel; elle a survécu à son mari, et vient elle-même
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
A n toin e D e ja x , second du nom , s’est marié avec M arieTh érèse D elchier.
De ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
Julien Dejax, appelant;
Anne-Marie Dejax, seconde du nom, veuve Peyronnet j
E t Agnès D ejax, épouse du citoyen Dalbine, juge.
Celle-ci a eu , de son mariage avec ledit Dalbine, trois
enfans; A n n e-M arie, qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et Marie Dalbine*
Telle est la généalogie des parties»
�Anne-Marie Dejax, première du nom, veuve Tartel,
n’avoit point eu d’enfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien, V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom, l’avoient prédécédée. Antoine, second du
nom, laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les lieritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’Antoine, second du nom, il n’en
restoit que trois , par le décès de Vital-François.
A nne-M arie D ejax, seconde du nom , s’est mariée
en 1770, avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
mariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien Dejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de sa part, même de ses fa its et pro
messes , et entièrement aux risques, périls et fortune
du donataire.
Lu s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
1
Il n’en a pas-clé de même pour la dame D albinc.
Par son contrat de mai'iage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit •, elle lui a donné, en outre, une
somme de 2,000 fv., payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
Le 19 novembre 1778 , elle dispose en faveur de
A 2
�C4 )
Anne-Marie Dalbine , sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. La donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géi’a et administra à son gré ; elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
On va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit»
Les actes vont se succéder.
i i novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
que, si les quittances en avoient été fournies par la dame
D albine, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-même, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vue*, de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novembre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame Dalbine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée do
Tusage delà vue; se réservant, est-il ajouté, la consti
tuante , de toucher et recevoir elle-même les sommes qui
seront payées par ses débiteurs} de manière que lu datne
�(5)
Dalbine sera censée rüavoir absolument rien reçu en
vertu des présentes ; et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 \ la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixième,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
Le 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. La donation fut évaluée à
une somme de 11,600 fr ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la minute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
Le 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lui avaient été adjugées moyennant
�( 6)
la somme de 2,95o f r . , mais auxquelles elle avoit fa it
des réparations considérables, pour, par la dame D albine, jou ir d'icelles dans Vétat où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,221 j\
par elle déjà payée ¿1 la nation, et à la charge âe payer eï
la nation le restant de Vadjudication. I<e contrat 11e man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r .,
qui devoit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220 fr.
Ce n’étoit point assez. 21 vendémaire an cinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, mari d’AiméMarie Dalbine.
Par cet acte, il est dit que la dameDejax, veuve Tartet,
a fait vente à Montbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-devant religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé parla nation; 30. de
tous les m eubles, outils aratoires, et généralement de tous
les meubles étant au pouvoir du métayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître dudomaine de Vazeliettes , sous la réserve de Tusufruit
de tous les objets vendus. La vente est faite moyennant la
somme de 25,000 francs, dont le contrat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et les capitaux des reinboursemcns qui étoient
faits par les débiteurs.
�6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la niece, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c'est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so?nmes , tant en principaux,
intérêts que fra is , ainsi, est-il ajouté , que le montant
du prix de la vente de Vazeliettes par elle consentie au
profit de défunt Gizaguet, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé à son gré, soit ¿1 payer partie de ses
dettes contractées, ou à ïentretien de sa maison ou
autrement, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insiiffisans pour fo u rn ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
Enfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8, par
lequel, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame Dalbine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
E lle est décédée le 4 vendém iaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-dire , dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. Elle a
fait citer à ces fins le cit. Dejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
Le cit. Dejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
�(S )
19 messidor de la même année, la dame Dalbineet son
m ari, les enfans Dalbine, c’est-à-dire, Marie Dalbine,
Pierre Dalbine et Anne-M arie D albine, veuve Montbrizet-Gizaguet ;
Savoir : la dame Dalbine et son mari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, Pierre, et Anne-Marie Dalbine, veuve Gizaguet, enfans dudit Dalbine, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
Et encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germ inal an 5 , du domaine et métairie de Vazeliettes
et du Poux, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été «tatué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D ejax, et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Yazeliettes et le P o u x, et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en être délaissé à
la dame Dalbine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D ejax, veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, revenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : Dans la
moitié pour Xinstitution de la dame D albine, sont com
prises toutes lesfacultés de disposer de la défunte,faites
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2; en con
séquence la disposition du sixièm e, enfaveur des enfans
D albine, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( IO )
consentemenths avons m is, sur ce chef> hors d*instance,
sa u f à sc pourvoir contre leur mère> ainsi qu’ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’un mois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du mobilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux; n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. Le jugement oixlonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante delà succession de la défunte,et de rendre comptey
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belmont, notaire.,
. Condamne le citoyen D ejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
Le citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes :
i° . La donation faite, en faveur des enfans Dalbine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation ^du iy floréal an 2 , à l’acqui
sition des deux maisons nationales;
3°. La vente du 21 vendémiaire an 5 , consentie au
citoyen Montbrizet-Gizaguet ;
�Et enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
- La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte dé démontrer la négative.
i Donation du 17 germinal an 2.
Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d'état. Les enfans Dalbine l’ont reconnu eux-memes ;
ils ont déclaré ' qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an 2 y qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
On a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine; mais
on s’est abusé;
L ’art. X V I porte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l’avenir à la faculté de
disposer j au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage dés successions; savoir , du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux ; et du dixième ;
si l’on a dés héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendi*e la lo i, què de penser
qu’ellé a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu’après avoir défendu d’avantager directement les successibles j elle a permis de les avantager indirectement.
Ce seroit preter une absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que ië successible v i t , ses en
fans ne sont point en ordre de succéder \ il leur fait
B 2
�( 12 )
obstacle. Mais il est certain aussi, que le père'et le fils
ne sont censés, en droit’, faire qu’une seule et même per
sonne. Pa ter et filin s un a eaàemque persona.
La loi, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. Or , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
l’enfermer un avantage indirect ?
La coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens paraphernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres à qui le m ari puisse ou doive
succéder ,*parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donnèr indirectement ce qu’on ne
peut directement.
Et, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit commun , et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rap
porter il la succession ce qui «voit été donné au petitfils; et, respectivement, le petit-fds ce qui avoit été donné
au père?
La loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
autorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite à retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixième, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�(i3)
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
' L ’article X X I porte que si le donataii’e ou héritier
institué est- en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
"Et l’article X X IIporte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
- Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r, auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaire?
L ’article X X V I defend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif ; et
il est ajouté, ou à ses descendons. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
D ira-t-on que la loi ayant parlé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant n’a pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( i4 )
siorii E n fin , la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre ses puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 17 nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’an des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition -f
comme faite indirectement au profit die l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée nulle, d’abord en
première instance, au tribunal d’arrondissement de cette
commune) et ensuite sur l’appel en ce tribunal.
«
Subrogation du 17 jlo rca l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na~
tionales, n’est évidem m ent qu’une donation déguisée sOus
le nom de vente.
Ce n’est pas sans doute par la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger de la natiire de l’acte, mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, et consacré par les lois.
Parmi les différons textes de lois, on peut citer la loi
SuJpitius, au digeste, D e donationibus inter virum et
uxoram, et la loi Niidâp au cod. D e contrahenda emp~
tionex
�( i5 )
Papon , sur la loi Suïpitius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à chose que la loi ne permet, 1 on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et juge
« qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’un de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner , fait, par testament ou conti'at entre-vifs,
« confession que l’autre lui a prêté, ou employé à ses
« affaires, ou délivré, ou remis en ses mains certaine
« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
« fait tel p rêt, ou remis, employé, ou délivré la somme.,
« La simulation, dit le mémo auteur dans. un auti'e
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat, chose dont
« néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap*
« parence pour le contrat passé entre les parties. Un
« homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r ix , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
« si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera nulle, comme le dit Ulpien. »
Et Papon cite ladite loi ISudâ.
« Quoique les parties, dit Ricard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 16 )
« un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
eu provoquent la nullité.
• A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer : Dans un acte
devant notaires il faut, dit-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
public, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport à l’officier public.
Et de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, Plu s valere quod agitur, quàrn quod sirnulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’efl
détermine pas toujours la nature; si,malgré la dénomina
tion
�C r7 )
tion que les parties lui ont d o n n ée, on peut l ’arguer de
simulation et de fraude , comment s’établit maintenant
cette simulation et cotte fraude ?
Par les circonstances. .
t raus ex circonstantiis probarî potest, dit D um oulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F raus, dit énergiquement d’Argentré, sur l’article
CGXCVI de la coutume de Bretagne , probatur conjecturis antecedentibus , consequentibus et adjunctis.
Falsissim im i, a jo u te-t-il , quod quidam putaverunt non
nisi instrumentis probarî posse; facta enim extrinsecus
fraudent potiùs probant, quia nemo tarn supinus e s t ,
ut scribi patiatur quœ fraudulenterfacit.
La fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. De la vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
Citerons-nous encore Denizard. lies donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 17 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile: aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect-, au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mômes auteurs, les principales
circonstances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La première, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas personasfacilè prœsumitur.
C
�( 18 )
La seconde , la non-nécessité de vendre, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
La troisième, si les actes sont géminés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
certitude.
En un m ot, comme dit d’A rgentré, dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les circonstances antécédentes et
subséquentes.
La parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r ix , tout se rencontre ici. Le notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
n a n te s , on ajoute les circonstances antécédentes et subsé
quentes ; si l’on juge, pour rappeler les expressions de
d’Argentré, ex adjunctis, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
La dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et de l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
et interdit toutes donations, à charge 4e rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou ù ses descen-
�( 19 )
dans; et de ce que cet article ne parle que des ventes a fonds
perdu, la dame Dalbine et son mnri n’ont pas manque
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire , autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la maxime, Inchtsio unius est exclusif) chenus.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’anmille pas; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55e. question :
« A ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion, et
« sans aucun des vices qui pourraient annuller le
« contrat. »
Fixons-nous sur ces dernières expressions.
On voit qu’on n’a pas môme osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes simu
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. Le doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
des ventes faites de bonne fo i, et non en fraude; des.
ventes sincères, et non des ventes simulées. On voit
même, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
« Sur la cinquante-cinquième question, ¿jjue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
G a
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commerv ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion, ni
« défaut de payement. »
Qu’induire de là ? La question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
à un héritier présomptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée ?
Cette question est sans doute bien diiféi’ente.
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeîiettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de 25,000 francs,
numéraire métallique, laquelle somme, e st-il dit, la
venderesse reconnaît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 25,000 francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? Et si cette somme avoit été
payée comptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves,tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son armoire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
• Mêm<^circonstances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix; point d’attestation tic
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
Mais, de plus, réserve de la part de la venderesse de 1 usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, tresordinaire au contraire dans les donations ; réserve qui
seule suffiroitpour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l’article X X V I de la loi du 17 nivôse.
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds perdu, prohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement dfes
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame Dalbine, du domaine de Fontanes , domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-Marie Dalbine,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2, procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
La loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? Elle inter
pose ses enfans.
; Donation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�(
22
)
alors disponible, envers les non successiblcs, c’est-à-dire,
du sixième.
La q u o t i t é disponible, o u , pour mieux dire, qu’elle
croyoit disponible, étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveugle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été payée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seroient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C ’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendém iaire an 5.
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame Dalbine ait fo u r n i quittance aux
débiteurs, c’est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes sommes, tant en principaux, in
térêts que fr a is.
Et il est ajouté, ainsi que le montant du prix de la
Vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x.
Pourquoi cette dernière mention ? Q u ’ e t o i t - i l besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la vente? N’étoit-ce pas elle-même
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre comptable , des sommes par elle reçues et quit~
tancées ; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’achève-t-il pas de décéler
la fraude ?
Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa maison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa vie, même du
domaine vendu ; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
Enfin, testament du 9 messidor an 8, qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
On a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
La lo i, a-t-on d it, ne défend que les ventes h fonds
perdu, faites à des successibles. O r, ic i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu ; e t, d’un autre côté, n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger h la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa
succession.
La donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme?Ne profite-t-elle pas aux enfans communs? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner à la femme et aux enfans ? La
�( H' )
loi ne défend-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement , et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la circonstance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au mari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
Autre jugement du tribunal d’appel séant à Rouen,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
Voici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« Deux questions ont été posées :
« La première consistoit à savoir quelles sont les con« ditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
« fait par un père, à l’un de ses enfans ou de ses gendres.
« La seconde avoit pour objet de reconnoitre si Le« monnier, acquéreur, avoit rempli les conditions néces« saires pour la validité de son acquisition.
« Le tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la pre« mière de ces questions , que les principes et la juris« prudence, fondés sur l’art. CCC CX X X 1V de la cou« tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( *5 )
« ticle IX de la loi du iy nivôse an 2, se réunissent pour
« établir qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
ft père l’un do ses enfans, 11’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le jusle prix de
« la chose acquise, et qu’il justifioit de l’emploi des de« niers de la vente, au profit du vendeur.
« Et sur la seconde question, il lui a paru que L e« monnier n’avoit point rempli les conditions requises
« pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
cc sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point unepreuve
« de l’emploi des deniers , en faveur du vendeur, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par Dumoulin, en ces termes :
« Conclusum quod in venditionefactâjilio velgenero,
« confessio patris non valet de recepto, etiamsi nota
is. rius dicat pretium receptum coram se.
• « D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’Eure, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réform é ; et le contrat de vente, passé par le défunt
« H erm ier à L em onnier, son gen dre , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testament du 9 messidor an 8.
Un premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour quel département il étoit
établi. Titre Ier. scct. II , art, X II de la loi de ly y i.
Une seconde nullité, de ce qu’il n’a pas désigné le n°.
de la patente. Loi sur les patentes*
D
t
�( 26 )
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse, c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surnom , et non par son vrai nom.
L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r,
celui qui ne signe pas son vrai nom ne signe véritable
ment pas.
Le nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement siuver/zat ; il
devoit signer Ci'oze.
Un décret de l’assemblée constituante, du 19 juin 1790,
art. 11, porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille.
Autre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X \ III y
porte, qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera que leur nom patronimique, c’està-dire , de baptême, et celui de la famille, et leurs fonc
tions ou professions.
6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter de nom ni de prénom, que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécutif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�( 27 )
On citera l’ordonnance de Henri II, de i 555 , qui a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citera l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article GGXI, qui porte les mômes dispositions.
Et, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
même, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de famille, après avoir déclaré son prénom : Ego
Joannes...................testarnentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. Singulos testes, dit cette loi, qui testamento adhibenturproprio chirographo annotare convenit, quis, et cujus testamentum signaverti. Il faut que, par l'acte même, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le témoin, quel
est ce témoin. Un surnom peut être commun à plusieurs.
Le nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne signe pas par son nom , est comme s’il ne
signoit pas.
Le testament est donc nul ; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
. Dans tous les cas, le testament ne pourrait avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( .2 8 }
seulement qu’elle n’en auroitpas disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D ans la moitié, est-il dit,
pour Cinstitution de la dame D albine, sont comprises
toutes les facultés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ites depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. On ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2,
ou, pour mieux dire, à celle du 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible-, et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi il faudroit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible, et la donatiap>du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son'contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à A n n e -M a r ie D albine-, en tant du m oins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyi'onnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
Le jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
On voit combien cette cause est importante. Elle n’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt le
succès qu’elle attend , il n’y auroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. L e s fraudes, déjà trop
communes, se multiplieroient ; la loi seroit sans objet ; la
�(2 9 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a-t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreroient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G E S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d R i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d’appel. — A n 11.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
successions collatérales
donations
coutume d'Auvergne
droit intermédiaire
doctrine
nullité du testament
surnoms
défaut de nom patronymique
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
testaments
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
Description
An account of the resource
Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Jospeh Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1771-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0932
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Fontanes (domaine de)
Brioude (43040)
Rights
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abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
défaut de nom patronymique
doctrine
donations
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
successions collatérales
surnoms
testaments
ventes
-
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Text
POUR
Mme MARIE-CHARLOTTE
DE
CASSAGNES
DE
BEAUFORT
DE
MIRAMON, Ve de M. le Marquis D uplessis-C hatillon ,
APPELANTE ;
CONTRE
*
M. P i e r r e BADUEL, ou ses héritiers et ayant-cause,
INTIMÉS.
— ----------
■rg»g(JO«^ ■
----------
Nous avons déjà dans trois mémoires ou consultations, produits
devant le tribunal d'Aurillac, examiné les différentes questions qui
vont être agitées à la Cour royale, et qui n'ont pas été jugées
en première instance. Nous nous en référons, à cet égard, à ce qui
a été dit dans ces mémoires, dont les doctrines ont depuis obtenu,
dans quelques espèces semblables, la sanction de la Cour suprême.
Mais un incident inattendu est venu com pliquer ce procès d’une
question nouvelle, la seule qui ait été décidée par le jugement dont
est appel. Nous ne l'avions pas prévu, et il n'était pas de nature à
l’ètre. C'est un fait inconnu qui a surgi au milieu des débats, et du
quel on voudrait faire résulter que les héritiers Baduel, de qui nous
réclamons la rente emphytéotique d'un bail qu'ils tiennent de nos
auteurs,
o n t interverti le litre de leur possession par un acte du 19
septembre 1793, et qu’en conséquence ils peuvent se prévaloir de
�la prescription qui aurait couru à leur profil depuis cette époque.
Voici cet acte :
« L'an mil sept cent quatre-vingt-treize et le second de la répu« blique, le 19 septembre, avant midi, à la requête d ’ Antoine Bà« duel, propriétaire cultivateur, au hameau de Lollière, commune
« de Saint-Clément, où il fait élection de domicile dans sa maison
« d'habitation, je Jacques-Alexandre Cheylus, premier huissier im« matriculé au ci-devant baillage du Carladès à Vie, y demeurant,
« soussigné, suis allé au domicile que fait en la ville de Vie, le ci« toyen Germain-François Arnal, homme de loi, et administrateur
« de la régie nationale, receveur des droits d ’enregistrement, au« quel, parlant à sa servante, lui ai notifié, signifié et laissé copie de
« bail à nouveau cens emphytéotique et investison perpétuelle, con« senti au profit du requérant, par Alexandre-Emmanuel Cassagnes
« de Beaufort, ci-devant marquis de Miramon, seigneur de la Roque
« et autres lieux, devant Trainier, notaire, le G mars 1755, dûment
« contrôlé, insinué et en forme, et du domaine de Lollière, situé en
« ladite commune de Saint-Clément ; en conséquence, ayant été
« instruit par affiche posée dimanche dernier à la porte de l'église
« dudit Saint-Clément, à la diligence dudit Arnal, qu'il devait être
« procédé dimanche prochain vingt-deux du courant, à la vente
« par adjudication au district, du beurre et fromage énoncés en
« l’acte susdaté, et attendu que conformément au décret de la Con« vention du 17 juillet dernier, il est dit dans l'article 1er que toutes
«redevances ci-devant seigneuriales, droits féodaux, censuels,
« fixes et casuels, mêmes ceux conservés par le décret du 25 août
« dernier, sont supprimés sans indemnité; l'article 2 n’excepte que
« les rentes ou prestations purement foncières et non féodales', et
« l'art. 3, que les arrérages des droits supprimés, portés par l'art.
« 1", lesquels sont éteints sans répétition des frais ;
« Ai dit et déclaré audit Arnal, que le requérant entend jouir du
* bénéfice de la loi; en conséquence, il est opposant et s'oppose par
�«
«
«
«
ces présentes à la vente et adjudication du beurre et fromage dudit domaine de Lollière, et autres denrées, si aucunes y a portées
en ladite affiche, protestant de nullité de ladite vente et adjudication qui pourrait se faire au préjudice du présent acte d’ opposi-
« tion, duquel ai baillé et laissé copie audit Àrnal, ensemble du
« susdit bail, en son domicile et parlant comme dessus, le tout à fin
« de dépens, dommages-intérêts, au cas où il soit passé outre.
« Signé Cheylus. — Enregistré à Yic, le 19 septembre 1793.
« Reçu quinze sols. — Signé Arnal. »
C'est sur cet acte que s’est principalement fondé le tribunal de
première instance d’ Aurillac, dans son jugement du 27 mars 1838,
ainsi c >ncu
* :
« En ce qui touche la prescription invoquée par Baduel,
« Attendu que par l’ article 6 de la loi du 19 août 1789, toutes les
« rentes foncières perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de
« quelque espèce qu'elles fussent, quelle que fût leur origine, et à
« quelques personnes qu'elles fussent dues, furent déclarées rache« tables ;
<r Attendu que par l’art. 1er du titre 3 d elà loi du 15 mars 1790,
« tous droits et devoirs féodaux ou censuels utiles qui avaient été
« le prix ou la condition d’ une concession primitive de fonds, fu« rent pareillement déclarés rachetables ;
« Attendu que l’art. 8 de la même loi dispose que toutes les ren« tes, redevances et autres devoirs rachetables, sont soumis pour
« le principal à la prescription établie relativement aux biens im« meubles, c ’est-à-dire à la prescription de trente ans ;
« Attendu qu’il ne paraît pas que la loi du 29 décembre de la
n même année 1790, ait rien changé aux dispositions de la loi du
« 15 mars précédent ; qu’ il parait qu’ elle ne fit que régler le mode
« et le rachat desdites rentes ; qu’ ainsi sous ce premier point de vue,
« en supposant que la rente dont s’agit fût. une rente purement
« foncière, il s’ensuivrait toujours qu’ elle serait prescrite, puisque,
�« d'après l'art. 8 d e là loi du 15 mars 1790, la prescription aurait
« commencé à courir à compter du jour où la rente n’ aurait pas été
« servie, c ’est-à-dire à compter du 19 septembre 1793, date de la
« déclaration faite par Baduel, par acte extrajudiciaire dudit jou r,
« signifié à Arnal, receveur des biens nationaux, qu’il n ’entendait
« plus payer ladite rente comme étant supprimée par la loi du 17
« juillet 1793, et qu’ il se serait écoulé depuis celte époque un délai
« de plus trente ans, suffisant pour prescrire ladite rente ;
« Attendu que c’est en vain que la dame Duplessis-Châtillon, pour
« écarter la prescription, invoque l’ art. 2236 du Code civil qui dis« pose que ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais,
« par quelques laps de temps que ce soit, parce que quand il serait
« vrai, ce qui n’ est pas constaté, que Baduel n’eùtjoui, d ’après l’acte
<r du 10 mars 1755, que comme propriétaire utile du domaine de
« Lollière, dont la propriété directe aurait resté au sieur de Mïra-
« m on, ledit Baduel aurait réuni par les lois nouvelles, sur sa tête,
« les deux propriétés par l’effet du rachat qu ’il avait le droit d’exer« cer, et parce qu ’enfin l’ art. 2238 du même Code civil dispose
« que les personnes énoncées dans les articles déjà cités, peuvent
« prescrire, si le titre de leur possession se trouve interverti ;
« Attendu que dans l’espèce il y a eu interversion formelle sur
« l’exécution de l’ acte du 6 mars 1755, par l’ acte extrajudiciaire du
« 19 septembre 1793, puisque par cet acte notifié au receveur des
«
b ie n s
et revenus nationaux, ledit Baduel lui déclara qu’ il s’ oppo-
« sait formellement à la vente de la rente énoncée dans l’ acte dudit
« jour G mars 1755, et fromages, grains et autres objets portés dans
a ledit acte, sur le fondement que ladile renie avait été supprimée
« par la loi du mois de juillet 1793; qu'ainsi ledit Baduel a le droit
« d’ invoquer les dispositions de l’ art. 2238 du même Code civil,
« d 'o ù il suit encore, sous ce second point de vue, que l'auteur de la
« dame Duplessis-Châtillon est non recevable ;
« Attendu que dès que l’ aclion de la dame Duplessis-Châtillon se
�«
«
«
«
«
«
«
trouve éteinte par la prescription, il s'ensuit q u ’il est inutile de
s’occuper de la question de savoir si la rente dont s’agit est une
rente foncière, ou une rente féodale ou entachée de féodalité, puisque quand elle serait déclarée foncière, elle ne serait pas plus
avancée, devant toujours être déclarée non recevable dans sa demande; qu’ainsi c ’est le cas, sans entrer dans d'autres examens,
de la déclarer non recevable;
« Attendu, quant aux dépens, que c ’ est la dame Duplessis-Châtil« lou qui les a occasionnés, qu’ainsi c ’est à elle à les supporter ;
* Le tribunal, jugeant en premier ressort et en matière ordinaire;
« ouï, pendant six audiences, les avoués des parties, M. le baron
« Delzons, avocat de la dame Duplessis-Chàtillon ; M. Viole, avocat
« dudit Baduel, déclare la dame Duplessis-Cbâtillon non recevable
« dans sa demande, et la condamne aux dépens;
« Jugeant MM. Vigier de Meullet, président; Cabanes, Verniols,
« d’Estanne de Bernies, ju g es; assistant M. Bastard, procureur
« d u roi. »
Comme nous n’ avons à nous occuper pour l’appréciation de ce
jugement, que d’ une simple question de droit, citons l’ art. 8 du dé
cret des 15 et 28 mars 1790, invoqué par les premiers juges.
Cet article porte :
« Tous les droits féodaux et censuels, ensemble toutes les ren-
«
«
«
«
«
«
«
les, redevances et autres droits qui sont rachetables par leur naturc, ou par l’effet des décrets des 4 août 1789 et jours suivans,
seront, jusqu’ à leur rachat et à compter de l’époque qui sera déterminée par l’art. 33 du tilre 2 du présent décret, soumis pour
le principal à la prescription que les différentes lois et coutumes
du royaume ont établie, relativement aux immeubles réels, sans
rien innover, quant à présent, à la prescription des arrérages. »
Les premiers juges ont pensé avec raison que cette loi rejetait
notre espèce dans le droit commun ; mais ils ont erré en appliquant
les principes: ils se sont trompés en fait et en droit.
�En fait, même en admettant qu'il y aurait dans l’espèce une inter
version de titre, résultant de l’acte extrajudiciare du 19 septembre
1793, ce qu'on a contesté et dû contester, la prescription aurait été
interrompue par la loi des 5 et G décembre 1814, relative aux biens
non vendus des émigrés; et la nouvelle prescription qui pourrait
dater de cette époque ne serait pas encore accomplie.
En d roit, l’ article 2238 du Code civil qu’ ils ont pris pour base
de leur jugement est inapplicable, et il y a lieu d’ appliquer tout au
contraire l’ article 2236 du même Code qui porte que ceujc qui possè
dent pour autrui ne prescrivent jamais par quelque laps de temps que ce
soit.
Ainsi toute notre tache consiste à démontrer :
1° Q uelaloi des 5 el Gdécembre 1814 a interrompu la prescription
invoquée par les héritiers Baduel, comme leur seul titre;
2° Qu’ il n’ y a eu aucune prescription depuis celte époque.
PREMIERE PARTIE.
La loi des 5 et G décembre 18Lj a interrompu la prescription invo
quée par les héritiers Baduel, comme leur seul litre.
Les héritiers Baduel invoquent la prescription trentenaire, aux
termes de-l’article 8 de la loi des 1 5 - 2 8 mars 1790 que nous venons
de rapporter. Ils font courir cette prescription de la contradiction
faite à l’ ancien propriétaire par l’acte extrajudiciare du 19 septem
bre 1793. Mais l'ancien propriétaire, c ’est-à-dire l’ État qui était h
tous ses droits, a disposé de la propriété, et a fait incontestable
ment acte de maître les 6 - 6 décembre 1814. Alors la prescription
invoquée n’ était pas acquise. Les trente ans requis par laloi n’étaient
pas révolus. La prescription a été interrompue au profit de ceux
à qui l’État a fait son transport.
Il s'agit donc uniquement de savoir quelle est la nature de 1 acte
�du gouvernement sanctionné par la loi que nous invoquons, quel est
le caractère, l'esprit de la loi.
Pour se fixer sur celte question, il suffit de prendre les feuilles
du Moniteur, contenant les séances de la chambre des députés des
17, 25, 26, 27 et 31 octobre, et du 4 novembre 1814, dans lesquelles
la loi pour la remise des biens non vendus aux émigrés fut discutée
el adoptée.
M. Bcdoeh , organe de la commission chargée d ’examiner le projet
de loi, se crut obligé de faire un blâme sévère du discours de M. le
ministre, qui en exposait les motifs. Il l’ accusa de former un
contraste avec la loi même.
« Ce contraste est t e l , disait le rap-
« porteur de la commission , et dans les principes et dans les expres« sions du rédacteur, que si on jugeait de la loi par l'exposé, l'exa« men de ses dispositions et de ses termes mêmes pourrait en prendre
u une fausse direction. » {Moniteur du 19 octobre 1814). C’est qu’en
effet M. le ministre Ferrand avait entendu que le projet de loi n'était
pas le bienfait d ’un acte spontané de la libéralité du gouvernement,
mais seulement la déclaration d'un droit préexistant à la loi. Cette
doctrine fut repoussée avec énergie par la commission et par la
chambre. L’ orateur de la commission rappela les différentes lois qui
ont été rendues contre les émigrés, pour arriver à cette conséquence
(pie leurs biens étaient acquis à la république.
« L'Assemblée nationale, disait-il, par un décret du 9 février 1792,
« mit les biens des émigrés sous la main de la nation et sous la sur« veillance des corps administratifs.
« Le 30 mars suivant, elle rendit un autre décret, par lequel elle
» déclara que les biens, ainsi que leur produit , étaient affectés à
« l'indemnité due à la nation.
« Le 23 juillet de la même année, elle prononça la confiscation et
« la vente au profit d e l ’Etat, des biens des émigrés.
« Enfin, par une loi du 28 mars 1793,1a Convention nationale dé« clara que les émigrés étaient bannis à perpétuité du territoire
�« français, qu'ils étaient morts civilement et que leurs biens étaient
« acquis à la république.
«E n
exécution de ces diflerens d écrets , la majeure partie
« des biens des émigrés fut vendue, et l’État se rendit lui-même ga« rant de ces ventes.
« La constitution de l’an VIII donna une nouvelle force à cette
« garantie, en déclarant, par une disposition de l'article 9 3 , que
« les biens des émigrés étaient irrévocablement acquis au profit de
«la république, et par l’article 94 , qu 'après ane vente légalement
« consommée des biens nationaux, quelle qu’ enjâ t l'origine, l’acquéreur
« légitime ne pourrait en être dépossédé, sauf aux tiers réclamans à
« être, s’il y a lieu, indemnisés par le trésor public. »
Voilà pourquoi la commission proposa de supprimer le titre du
projet de loi dont la rédaction était .linsi conçue :
«Projet de loi relatif à la restitution aux émigrés de leurs biens
« non vendus. »
Et de le remplacer par celui-ci :
« Projet de loi relatif aux biens non vendus des émigrés. »
Pareillement, comme les mots restituer et restitution se trouvaient
dans plusieurs articles du projet de loi, la commission y substitua
partout les mots remettre et remise.
Ces amendemens furent longuement discutés dans les séances
des 25, 26, 27 et 31 octobre 1814, et ils furent adoptés avec la
loi le 4 novembre suivant, à une immense majorité. Sur 192 volans,
169 membres votèrent pour le projet amendé par la commission ,
et 23 contre. ( Moniteur du 5 novembre 1814, page 1246. )
Il n’ est donc pas douteux que la remise des biens non vendus
des émigres est une véritable libéralité, et non pas une r e s titu tio n .
La jurisprudence est aujourd’ hui fixée sur ce point. Voyez notam
ment les savans arrêts de la Cour royalede Dijon, troisième chambre,
du 12 avril 1821; S., 21, 2 , 1 2 6 ; — de l a C o u r royale de Toulouse,
deuxième chambre, du 20 août 1824 ; S., 25, 2, 407;
de laCoui de
�Cassation, du 4 juillet 1825; S., 2 5 , 1, 368. Nous observerons
néanmoins que la question ne s’était jamais encore présentée,
comme dans l’ espèce actuelle, dégagée de toutes circonstances de
fait , et que c ’ est la première fois que les tribunaux sont appelés
à juger uniquement si l’Etat était ou non propriétaire des biens
confisqués sur les émigrés.
ment pas une, soit qu’ on
cipes , comme l’ ont fait les
Toulouse, cités ci-dessus;
La question ainsi posée, n’en est réelle
veuille l’expliquer par d’ anciens prin
arrêts des Cours royales de Dijon et de
soit qu’ on se borne à la résoudre par
les discussions de la chambre des députés qui ont pré; aré la
rédaction et l ’adoption de la loi. Mais toute discussion nous semble
inutile puisqu’ on ne pourrait sérieusement révoquer en doute le
droit de l’ Etat sur les biens qu’ il a confisqués, sans nier tout à la
fois le principe comme le fait de la loi, c ’est-à-dire sans nier la
révolution.
On pourrait faire une objection plus sérieuse, plus spécieuse du
moins. Nous réclamons du chef de M. le marquis de Miiamon le
domaine deLollière, comme non vendu. Nous le réclamons d’ après
l’arh'cle 2 de la loi des 5 - fi décembre 1814. Mais cet article est re
la! if uniquement aux biens immeables séques/rés ou confisqués pour
cause d émigration, et qui font actucllemen' partie f/n domaine de
l’ Etat. — Or, le domaine de Lollière n’ a été ni séquestré ni cont
fisqué; il n’ a jamais fait partie du domaine de l’Etat. Il n’ était
point compris dans l’énuméralion des biens invendus, s’élevant
ensemble à un revenu de 9,383,965 francs, et dont le tableau dé
taillé fut rnis sous les yeux de MM. les membres de la Chambre
des députés par le rapporteur de la loi des 5 - 6 décembre 1814.
(Voir le Moniteur du 19 octobre 1814, page 1176.)
Nous acceptons l’objection dans toute sa force. Mais si nos ad
versaires en avouent les conséquences, à quel titre possèdent-ils, et
.pourquoi viennent-ils invoquer la prescription ? Quels avantages
peuvent-ils alors tirer de l’acte extrajudiciaire du 19 septembre
2
�»
— 10 —
1793, qui est jusqu'à présent toute la base de leurs prétentions ?
Quel serait le sens de cet acte signifié à un fonctionnaire public,
prétendu représentant de l’Etat, qui lui-même n'eut représenté per
sonne ?.C a r , s’ il n'y avait point eu de confiscation par l’ Etat, pour
quoi signifier à PEtat des réclamations quelconques sur la chose
confisquée? Mais il allait confisquer, et la réclamation l’en a empêché !
il a reconnu qu'il était mal fondé, et que Baduel était en droit de
garderies biens litigieux! Eh bien, nous concluons de là qu'en ce
qui touche ces biens, l’ Etat ne s'est pas mis au lieu et place de l'an
cien propriétaire. Quant au détenteur, a-t-il pu, par son acte signifié
à un tiers, se changer à lui-même la cause de sa possession?— Non,
il ne l’a pas pu. Son titre est resté toujours le même; il n’a pas subi
la moindre altération : il en serait autrement si, au lieu de s’opposer
à la vente que PEtat voulait faire à cette époque, il avail acquis de
l'État. Cette acquisition eut indubitablement opéré une conversion
de titre qui eut fait courir la prescription , et les frères Baduel au
raient aujourd'hui deux titres pour u n , leur titre d'achat et la pres
cription. Mais ils n'ont ni l'un ni l’autre dans la position où ils sont
placés; ils n’ ont pas le litre d'achat, puisqu'ils n'ont acquis en
aucune sorte; ils n'ont pas la prescription qui n'était pas accomplie
en 1,814, et qui n’a pu l’être depuis cette époque. S'il n'y a pas eu
de confiscation par l'État, ils sont dans le cas de l'article 223G du
Code civil, et ils ne peuvent jamais prescrire par quelque laps de
temps que ce soit.
On pourrait insister, et dire que si l'État n 'a pas confisqué, il avait
le droit de con fisq u er, et qu'il pouvait toujours s’ emparer des biens
qu'il avait négligé de s’ approprier par erreur ou par omission. D ’où
la con séq u en ce possible que l’abandon présumé qu'il aurait fait de
s«s droits en faveur des tiers détenteurs, eût pu constituer pour
ceux-ci un droit véritable, un titre à la prescription. — Mais outre
que la prescription n'était pas encore acquise en 1814, cette simple
présomption d'abandon ou de donation, en faveur de tiers incon-
�—
11
—
nus, devra-l-elle prévaloir sur la remise faite expressément’par l'État, et avant tout droit acquis de ces tiers, en faveur des ayant-droit
qu’ il adésignés ? D’ ailleurs cettequestion n’est pas nouvelle : elle s’est
présentée devant les tribunaux, et il a été jugé que la loi du 5 dé
cembre 1814, en réintégrant les émigrés dans la propriété de leurs
biens non vendus, alors existans dans les mains de l’É tat, ne les a
pas seulement réintégrés dans les biens dont l’ Élat était en posses
sion de fait, qu’ elle les a encore réintégrés dans toutes les actions
t
que l’ Etal aurait pu exercer lui-même pour recouvrer des biens
contre des tiers détenteurs. Voyez l’ arrêt de la Cour de Cassation du
10 août 1829. (S., 29,1,383.)
Nous croyons avoir suffisamment établi que la loi des 5 et 6 dé
cembre 1814, a interrompu la prescription invoquée par les héri
tiers Baduel, comme leur seul titre, et répondu aux objections les
plus spécieuses qu’ on puisse nous faire. Il nous reste à démontrer
qu’il n'y a eu aucune prescription depuis cette époque.
DEUXIEME PARTIE.
Les héritiers Baduel ne peuvent se fonder sur aucune prescription
depuis la loi des 5 - 6 décembre 1814, jusqu’à ce moment.
En effet, d’ après l'art. 8 du décret des 15-28 mars 1790, qu’ on
cite à l’appui du jugement du 27 mars 1838, les rentes, redevances
et autres droits qui sont rachetables par leur nature, ou par l'effet
des décrets des 4 août 1789 et jours suivans, sont soumis pour le
principal, à la prescription que les différentes lois et coutumes du
royaume ont établie relativement aux immeubles réels, c'est-à-dire
à la prescription de trente ans.
Tout ce qu’on peut conclure de cette loi, c'est 1° que la rente
foncière due par les héritiers Baduel a été'soumise pour le princi
pal à la prescription trentenaire;— 2° que celte prescription doit
être établie d'après les lois et coutumes du royaume relativement
�aux immeubles.—'La loi dit encore que rien n'est innové sur la
prescription des arrérages
1° Nous disons que la renie n’est soumise, pour le principal,
qu’à la prescription trentenaire. C’est en effet ce qui est écrit tex
tuellement dans la loi. Cette prescription, aujourd’ hui la plus lon
gue de toutes, est la seule qui dispense celui au profit duquel elle
exisle de rapporter un titre de sa propriété, et qui ne permette pas
qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise f o '. (C. civ.
2202 ).
,
Les autres sortes de prescription, celles par dix et vingt ans, exi
gent : 1° l’acquisition ; — 2° la bonne foi; — 3° le juste litre. Ces
trois conditions sont formellement requises par l’ arl. 2265 du Code
civil qui commence par ces mots : celui qui a c q u i e r t de b o n n e f o i et
par j u s t e t i t r e un immeuble> en prescrit la propriété par dix ans, etc.
Le droit d ’acquisition ne peut pas être un effet du temps : Tempus non est moclus conslituendi vel dissolvendi juris. Il suppose le fait
actuel de l’homme et le concours de deux volontés , au moins
présumables.
La loi veut que l’acquisition soit faite avec bonne foi. La bonne
foi est un accessoire obligé de l’ acquisition , d ’où il suit qu'il n’ y
a pas de bonne foi possible quand l’acquéreur savait que celui qui
lui transmettait la chose n’ en était pas propriétaire; ou qu’ il n’avait
pas le droit et la capacité de l’ aliéner.
Il
est donc indispensable, avant t o u t , de prouver l’ acquisition.
Cette acquisition faite avec bonne foi pourra seule enfanter le juste
titre. Mais s’ il n’y a pas d’acquisition , comment prétendre agiter
les questions de titre et de bonne foi ?
Ainsi, dans l'espèce, les héritiers Baduel n’ ont aucune des pre
mières conditions voulues pour la prescription par dix et vingt ans,
et nous n’ avons pas à nous occuper de savoir s'ils ont ou n’ont pas
de bonne foi dans leur possession, celle bonne foi qui est, dit
M .T roplon g, la croyance ferme et intacte q u 'o n est propriétaire;
�qui n’a lieu qu’avec la conviction que nul autre n'a droit à la chose,
qu'on en est le maître exclusif, qu'on a sur elle une puissance
absolue. — Nous ne demanderons pas aux héritiers Baduel s’ ils ont
eu vraiment jamais cette croyance ferme et intacte qu'ils étaient pro
priétaires des biens qu'ils savaient tenir à titre de bail, de M. le mar
quis de Miramon, ou de ses auteurs? Celte première condition de
la légitimité de la prescription, ils en sont totalement dépourvus. Ils
ne peuvent pas l’avoir-, ils sont non recevables à l'invoquer à l'ap
pui de leur possession.
Diraient-ils que l’acte extrajudiciaire du 19 septembre 1793 leur
a donné titre nouvel, et qu'ils ont pu prescrire par dix et vingt ans,
à partir de ce nouveau titre? Ce serait mal entendre el mal appliquer
l'article 2238 du Code civil qui fonde l'interversion de titre des
personnes qui possèdent pour autrui sur la contradiction qu’ elles ont
opposée au droit dupropriétaire. Dans notre espèce, cette contradic
tion n'était autre chose qu'une fausse application de l’article i er de
la loi du 17 juillet 1793, dont le sieur Baduel se prévalut pour se
dispenser de payer sa rente emphytéotique, sous le prétexte que
celle rente était féodale. L'Etat avait le droit de contester celte al
légation, ou même d'exiger la rente, sans s’ occuper de l’allégation.
C’ étail à Baduel de prouver son exception. Mais l’Etaln'a exercé son
droit de maître qu’en 1814, lorsqu’ il a disposé de toutes les pro
priétés dites nationales en faveur de ceux sur lesquels elles avaient
été confisquées, de leurs héritiers ou ayanL-cause. Jusque là, il avait
indubitablement conservé son droit d’ exiger la rente. Qu’eût pu
répondre Baduel? Qu'il y avait prescription ? — Mais la prescrip
tion n'était pas acquise; car l'État pouvait exercer son droit pendant
trente années, d'après l’article 8, précité, du décret des 15 et 28
mars 1790, depuis rappelé par l'article 530 du Code civil. — Que la
rente était féodale? — Mais celte assertion eût été détruite par la
seule production du titre prétendu féodal. Les tribunaux auraient
prononcé, celle question ne pouvant être légalement résolue ni par
�— 14 l’administration de l'État, ni par la Chambre des députés qui a le
droit de faire les lois, mais non pas celui de les appliquer. C’est en
core aujourd’hui la seule question à juger dans ce procès. On
conçoit que les adversaires veuillent l’éluder par des fins de nonrecevoir. Ils n’ ont point intérêt à porter le débat, sur ce terrain. Ils
savent trop bien que la rente emphytéotique du domaine de Lollière est une rente purement foncière et non féodale.
Dans aucun cas, la prescription dont il s’ agit dans l’article 2238
du Code civil, ne peut être la prescription par dix et vingt ans.
C’est nécessairement la prescription trentenaire, puisque la pres
cription étant en elle-même un moyen odieux, il n'est pas permis
,d*én abréger la durée par voie d ’ interprétation, et que les prescriplions spéciales ne peuvent s’ appliquer qu’ aux cas expressément
déterminés par la loi.
2° Nous soutenons que les héritiers Baduel n’ ont pu dans aucun
temps invoquer la prescription trentenaire, telle q u ’elle est établie,
d ’après les lois et coutumes du royaum e, relativement aux im
meubles.
D’ abord ils ne le pouvaient pas en vertu de leur titre emphytéoti
que. Il est de règle que l’emphytéote, fermier à très longues années,
est assimilé au bailliste et trouve dans la nature de sa possession le
même empêchement pour prescrire. L’ empereur Justin le décidait
ainsi dans la loi 7, § 6 ,C. de prescrip . 30 vel 40. — « Nulla scilicet
« danda licentia vel ei qui jure emphyteolico rem aliquam per qua« draginta, vel quoscumque alios annos, detinuerit, dicendi ex tran« sacto tempore dominium sibi in iisdem rebusquæsitum esse; cum
« in eodem statu semper manere datas jure emphyteotico res
» oporteat. »
Par arrêt du'21 août 1734, le Grand Conseil a jugé qu’ un héritage
donné à emphytéose devait retourner au bailleur, quoique depuis
l’expiration du bail il se fût écoulé plus de 80 ans.
Ils ne le pouvaient pas en vertu des lois et coutumes du royaume
�- 15 —
quidéclaraient pareillement les emphytéoses imprescriptibles,et qui
d'ailleurs n’ admettaient pas qu'un possesseur précaire, quel qu’il fût,
pût jamais prescrire, quand la causede sa possession n’était pas chan
gée. Ce changement s’opérait de deux manières, soit par une cause
venant d ’ un tiers, alirjuâ extrinsecàs accedente causâ, soit par la c o n
tradiction au droit du propriétaire. L’article 2238 du Code n’a fait
que reproduire et consacrer ces doctrines. Mais la contradiction ou
l'interversion n’ opérait la translation de la propriété q u ’au bout de
30 ou 40 ans. Si donc le vrai propriétaire usait de son droit avant
l’expiration de ce laps de temps, l’interversion ne s’ opérait point et
la contradiction restait sans effet.— « Mais comme l’interversion ne
« forme pas un litre légitime, dit Dunod, page 37, et qu ’elle est or« dinairement accompagnée de mauvaise f o i , elle ne suffît pas pour
« donner lieu aux prescriptions qui demandent la bonne foi et le
« titre, elle n’autorise que celle de 30 et de 40 ans ; et il y a des au« teurs qui disent qu’ il faut distinguer dans les droits incorporels,
« celui avec lequel on a interverti la possession du tiers avec lequel
« on voudrait prescrire. Car à l’égard du premier, l’ intention de ce« lui qui prescrit lui étant connue, la prescription commence d ’ a« bord et s’ acquierl par 30 ans. Mais à l’égard de l’ autre, s’ il
« possède encore civilement, animo, il semble qu'il relient toujours
« la possession, lorsque l’ interversion n’ est pas faite avec lui, jus« qu ’à ce que par un long espace de temps, il soit censé l’avoir
« abandonnée ; après quoi seulement l’ on commence à prescrire
o contre lui. »
Nous ne voulons point nous prévaloir de celle distinction, quoi
qu'elle nous soit favorable. Elle nous est totalement inutile, puis
que la prescription Irenlenaire n'ayant pas, dans notre espèce, été
acquise à l'égard de l’ Etat, les 5-6 décembre 1814; l'Etat pouvait
à la même époque disposer, comme il a disposé, valablement des
biens confisqués, au profit de l'ancien propriétaire, de ses héritiers
ou ayant-cause. Dès ce m om ent,ce propriétaire originaire est rentré
�— 16 —
dans tous ses droits, et a pu exiger le paiement 011 le rachat de la
rente. Les héritiers Baduel se sont alors bien gardés de lui faire aucune
notification qu'ils entendaient jouir comme maîtres. Dans la position
nouvelle où ils se trouvaient placés par la loi, cette notification qui
pouvait avoir ses dangers, eût été fort inutile. On ne peut se dissi
muler que si les héritiers ou ayant-cause deM. de Miramon avaient
gardé le silence encore pendant trente ans, à partir de la loi des 56 décembre 1814, ils ne dusssent être repoussés par une prescrip
tion qui prendrait sa source, non dans la qualité de la possession
des détenteurs actuels du domaine de Lollière, mais dans la na
ture du droit de remise qu'ils prétendraient exercer en vertu de cette
loi, droit nécessairement prescriptible.
Nous venons de voir que les deux points auxquels se réduit le j u
gement d’Aurillac, du 27 mars 1838, sont erronés sous le double
rapport de la prescription et de l’ interversion de litre, puisqu’on
ne pouvait invoquer ici que la prescription trentenaire, q u ’elle
n'était pas acquise en 1814, et qu'elle n'a pu courir depuis cette
époque.
Que l’ interversion de titre n’ayant pu également conférer de droits
qu'il partir de l’expiration des trente ans requis pour la prescrip
tion, cette interversion, en supposant qu'elle ail corn meneé, est restée
sans effet, puisqu’ il n’ y avait point de droit acquis aux tiers-déten
teurs, lorsqu'elle a été interrompue parle fait de la loi de 181 i.
Quant à l’objection qu’ on pourrait tirer de la mobilisation des
renies par l’effet de la loi du 1 1 brumaire an VII , combinée avec
les articles 52Í) et 530 du Code civil, il est aujourd’ hui de jurispru
dence constante que cetle mobilisation n’ a pas frappé les renies
emphytéotiques qui sont demeurées purement foncières et suscep
tibles d’ hypothèque, comme les immeubles. (Voyez notamment. l’ar
rêt de la Cour royale de Paris, du 10 mai 1831, S., 31-2-153; et le
pourvoi contre cet arrêt, rejeté par la Cour de Cassat ion, le 19 juillet
1832, S., 32-1-531.)
�Reste la question des arrérages sur laquelle rien n’est innové, par
l’article 8 de la loi des 15 * 28 mars 1790. Mais depuis, l’article
2277 du Code civil, réalisant enfin la sage ordonnance du 15 ja n
vier 1629, tombée sitôt en discrédit par la disgrâce du chancelier
deMarillac, son auteur, arrivée l’année suivante, a soumis à la pres
cription quinquennaleles arrérages des rentes perpétuelles et viagè
res, les loyers des maisons, et le prix de ferme des biens ruraux;
les intérêts des sommes prêtées, et généralement tout ce qui est
payable par année, ou à des termes périodiques plus courts.
On sait que ces arrérages n’ étaient généralement prescriptibles que
par trente ans. Mais celte question est indifférente aujourd’hui,
puisque, aux termes de l’article 2281 du Code civil, toutes les
prescriptions de ce genre qui auraient com mencé, ne fût-ce qu’ à la
promulgation du titre d e là prescription, faite le 29 mars 1804, ont
été accomplies le 29 mars 1834 ; et que, depuis ce moment, l’ article
2277 du même Code gouverne, à cet égard, tous les anciens
titres.
Toutefois ces principes généraux devaient être restreints dans
l’espèce, la coutume d ’ Auvergne ne permettant pas que l’ emphytéote pût être condamné à payer plus de trois ans d’ arrérages.
Voilà pourquoi nous n’ avons conclu qu’ à trois années de paiement
d e là rente de Lollière, devant le tribunal d’ Aurillac. Mais depuis,
l’ incident dont nous venons de nous occuper, s’ il avait quelque fon
dement, aurait changé cet état de choses. Il y aurait eu novation de
titre pour les héritiers des ayant-causede M. de Miramon, parlefail
de la loi des 5-6 décembre 1814. Le nouveau titre de l’ appelante
ne pouvant être régi que par le Code civil, elle aurait droit à
cinq années des arrérages de la rente réclamée, et il faudrait réformer
et amplifier, en ce point seulement, les conclusions prises en pre
mière instance, en y persistant pour le reste.
A Paris le 8 juillet 1838.
�— Í8 —
Nous adhérons au mémoire qui précède, et nous estimons aussi
que le tribunal d ’Aurillac a fait une fausse application des principes
qu’ il a rappelés.
§ Ier
Le bail emphytéotique du 6 mars 1755, était (personne ne peut le
méconnaître) un titre essentiellement précaire , qui ne permettait
pas à Baduel d’acquérir par prescription, la propriété des héritages
dont la jouissance seulement lui était concédée
Le tribunal objecte quela rente due par Baduel, pour prix de cette
jouissance, étant devenue rachetableet prescriptible parles lois de
1789 et 1790, la prescription de la rente, une fois acquise, aeu pour
conséquence d’assurer à Baduel la propriété des immeubles euxmêmes.
La réponse est, Io que, si la prescription d ’ une rente foncière pro
prement dite met le débiteur à l’abri de toute action ultérieure, c ’est
que le titre primitif constitue une véritable aliénation de la propriété
à son profit, et q u ’il en est quitte pour le service de la rente, tandis
que parle bail emphytéotique, la propriété continue de résider sur la
tète du bailleur, qui a toujours le droit d ’ y réunir la jouissance, du
moment où, par un motif quelconque, le preneur prétend se dispen
ser du service de la rente;— 2° quant à la faculté de rachat, sans doute
Baduel,s'ill’ avaitexercée, serait devenu propriétaire incommutable;
mais pourquoi? c ’est qu'il se serait opéré alors une novation dans le
titre primitif, c ’est que Baduel aurait payé le prix de l'immeuble,
c'estquc la qualité d'acquéreur sérieux et définitif aurait remplacé,
dans sa personne, celle de détenteur précaire que lui avait seule
ment conférée le contrat de 1755.
§H .
Aussi le tribunal d ’Aurillac a-t-il cherché une interversion du titre
originaire dans l’ acte exIrajudiciaire du 19 septembre 1793.
�— 19 —
Mais c'est une erreur, car la contradiction que Baduel a opposée
par cet acte, à l’agent de l'administration, ne concernait que la qua
lité de la rente, qu'il prétendait être supprimée comme féodale; il ne
s'agissait nullement là de la question de propriété de l'immeuble
même, dont, par conséquent, Baduel continuait de jouir au même
titre que par le passé, ne pouvant d'ailleurs se changera lui-même
la cause et le principe de sa possession (C. civ. 2240), possession dont
la nature précaire, encore une fois, résistait perpétuellement à la
prescription (2236-2237).
D'où il faut conclure que madame la marquise Duplessis-Châtillon est recevable et fondée à demander, comme elle l’a fait, aux hé
ritiers Baduel, soit la continuation de la rente, soit, s'ils s’y refu
sent , la restitution des héritages compris dans l'emphytéose du
6 mars 1755 (indépendamment même de l'argument tiré d e la lo i du
5 décembre 1814).
A. PAILLET.
ODILON BARROT.
Paris, le 8 juillet 1838.
mv
U
PARIS
IMPRIMERIE
DE
MAULDE
ET
t^(f-
RENOU
RUE
BAILLEUL
PRES
DU
LOUVRE.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Cassagne de Beaufort De Miramon, Marie-Charlotte. 1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bole
A. Paillet
Odilon Barrot
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
rentes féodales
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
doctrine
droit écrit
franc-alleu
directe seigneuriale
jurisprudence
droit de guet et de garde
Masuer
forains
corvées
code civil
droit intermédiaire
domaines agricoles
fromages
vin
percière
droits rachetables
titres nobiliaires
lods
terriers
retrait féodal
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour madame Marie-Charlotte de Cassagne de Beaufort de Miramon, veuve de monsieur le marquis Duplessis-Chatillon, appelante ; contre monsieur Pierre Baduel, ou ses héritiers et ayant-cause, intimés.
Annotations manuscrites. « le 8 août 1838, 1ére chambre, arrêt confirmatif ».
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Maulde et Renou (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1838
1755-1838
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2817
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2813
BCU_Factums_G2814
BCU_Factums_G2815
BCU_Factums_G2816
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53573/BCU_Factums_G2817.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Clément (15180)
Lollière (domaine de)
Vic-sur-Cère (15258)
Carladès
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
Code civil
corvées
coutume d'Auvergne
directe seigneuriale
doctrine
domaines agricoles
domaines seigneuriaux
droit de guet et de garde
droit de propriété
droit écrit
droit intermédiaire
droits féodaux
droits rachetables
émigrés
forains
franc-alleu
fromages
jurisprudence
lods
Masuer
Percière
poids et mesures
prescription
rentes féodales
retrait féodal
retranscription de bail
terriers
titres nobiliaires
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53572/BCU_Factums_G2816.pdf
346941c5d22fc82aeedec091af387eda
PDF Text
Text
POUR
Le Sieur Antoine BADUEL, propriétaire-cultivateur,
demeurant à Lafage, commune de Saint-Clément;
et le Sieur Antoine BADUEL, 2e du nom, aussi
propriétaire-cultivateur, demeurant à Lollière, commune de Saint-Clément, défendeurs;
CONTRE
Dame Marie-Charlotte CASSAGNE-BEAUFORT d e
M ir a m o n , veuve de M. le marquis D u p l e s s i s C h a t i l l o n , agissant comme héritière bénéficiaire
de M. le marquis de Miramon, son père, demeurant
à Paris, rue du Bac, n° 128, demanderesse.
— ..................... — 1 ■
—
M adame la marquise veuve de M. Duplessis-Châtillon , représentant,
dit-elle, M . le marquis de Miramon , son père , dont elle est héritière
sous bénéfice d’inventaire , a publié u ne consultation signée par d’honorables avocats , et plusieurs Mémoires ayant pour objet de prouver
qu'elle est recevable et fondée à demander la revendication d’héritages
jadis accensés , ou à exiger le service des rentes et prestations portées
par les titres d’accensement. Les Mémoires se réfèrent les uns aux autres,
et tous ont pour base la consultation. Leur publication , en précédant
eo
demande
tu
judiciaire, semble avoir été faite pour épouvanter d’avance et décourager au moins des adversaires fort modestes sans doute,
qui ne craignent aucun danger, quand ils ont pour eux la consécration du tems et la protection des lois.
il y a quarante-cinq ans que de simples cultivateurs possèdent paisiblement et sans trouble , par eux ou leurs auteurs , des biens-im-
�(2)
meubles libres de toute redevance seigneuriale et fe’odale. Ils les ont
recueillis ainsi dans la succession de leurs païens ; ils n'ont même pas
l'idce que ce patrimoine de famille ait jamais pu être différent de ce
qu’il est aujourd'hui. Et voilà pourtant qu’après un demi-siècle , ils
son^ troublés dans leur bonne foi , comme dans leur sécurité. Celle
sécurité aurait-elle été trompeuse? Cette possession de bonne loi pen
dant un si long-tems serait-elle illusoire ? Nous ne le pensons pas.
Avec eux nous avons confiance dans les lois, et la justice qui les ap
plique. Nous croyons que M"1“ de Châtillon s’ est bercée d’espérances
chimériques, et que ses demandes ne sont ni recevables ni fondées.
F A IT S .
Madame la marquise Duplessis-Châtillon est l’une des trois filles
qui ont survé’c u à M . le marquis de Miramon , leur père. Elle seule*
cependant, a conçu le projet d’attaquer les détenteurs actuels des do
maines de la Roussicrc, hollière, Lacroux, Lajâge situés dans la cou1'
mune de Saint-Clément, et les détenteurs du moulin de Marjons
ses dépendances, situé dans la commune de Polminhac.
Elle a publié un premier Mémoire, ou consultation pour M . le marquis
Duplessis-Châtillon, qui n’a rien à dire , parce qu'à madame sa mère
seule il appartiendrait de parler dans la cause ; et cette consultation .
signée des noms les plus honorables ( i ) , datée de Paris, le 5 mai 1837 »
expose les prétentions de M. le marquis , et cherche à justifier ces pré
tentions , ce qui est dans la règle.
Madame la marquise de C hûlillon, après avoir parlé par son
’
prend elle-même la parole, et public trois Mémoires (2) , dont l’un est
particulièrement dirigé contre M. Pierre Baducl ou ses héritiers et ay‘ini'
cause, comme détenteurs du domaine de hollière. Elle y prend la qualité
d héritière bénéficiaire de M . le marquis de ¡Miramon , son per •
Dans ce mémoire, imprimé, publié avant toute citation en justice ’
M m<î de Châtillon conclut ainsi : « Plaise au tribunal c o n d a m n e r le
» sieur Baducl ou ses héritiers et ayant-cause, à payer à la requérante
» trois années des arrérages de la rente consentie par le bail cmpby
(1 ) Celle consultation est signée par MM" B o l e , l ' u . ’ I H p i n , O i > i i .o s ll.wmoï , A. P a iia OT. e l j î ;
(Je Y atw f .snil . Il est a observer fj'ic , relativement nu domaine «le Loi.ufcitis , la consultation rul
sonne sur un acte du I!) juillet 1084, totalement ¿traiter aux héritiers II aduel .
(2) Ces trois Mémoires 11e sont signés que par MM" Houe et A. P a illk t .
�”
"
”
*
”
“
"
"
*
“
”
(3)
tcotiquc du sixième jour de mars de l’an 1755, laquelle consiste par
chaque an, i° en 2() quintaux de fromages, tant d’été que d’automne,
pesés au Poids de la ville d’Aurillac ; 2° 45 setiers bled seigle, mesure du Mur-de-Barrez ; 3° un quintal beurre ; 4° un cochon g r a s ,
payable à descente de montagne, ou 3o livres pour prix d’icelui ;
5“ un veau gras; 6“ deux paires de chapons; 70 vingt aunes de toile
femelle; — et à se r v ir a l’avenir ladite rente, année par année, soit
aux époques fixées par le bail emphytéotique , soit à telles autres
époques qui seraient fixées par le jugement ou consenties par les
défendeurs, si mieux n’aiment le sieur Baduel et ses ayant-cause raclieter la rente ou bien déguerpir. »
Ces conclusions sont incomplettes d’après l’acte du 6 mars 1 7 5 5 ,
*ïue nous transcrivons ci-après. M me Duplessis-Châtillon oublie de de
mander l'exercice de la justice haute, moyenne et basse, le droit de retention par prclation , les lods et ventes , les tailles aux quatre cas , et
outres droits et devoirs seigneuriaux stipulés par cet acte. En effet, voici
Ce htre qu’il importe de connaître.
<( I-’an mil sept cent cinquante-cinq et lo sixième jour du mois de mars aprèsj au château de Pestels, paroisse de Polminliac , par-devant le notaire royal du
^Hlago immédiat du Carladès, résidant au lieu do Polminliac, soubsignés, présents
°s témoins ci-après nommés, fut présent très-haut et très-puissant seigneur m essire AleX;ii)(]rc-I’ inaiiuel de Cassanhes de Beaufort, chevalier, marquis do Miramon, seigneur
dudit Pestels, Polminliac, Marions, Teyssières-les-Bouliès, Saint-Chaumiel et Saint^'rgues en Jourdanne, Laroque, Saint-Clément, Brezons, Cezeps, Monréal, Nebrousse, Paulhac, Balzac, Saint-IIéran, Cocudoux, Lasalle, la Calsade, Selles,
assinhac, le Cayre, Loubegeac, Lafage, Mougranat ; baron de Foulholles et do
*°u; conseiyneur do Vie et de Thiézac, et autres ses places, liabilant en sondit châ*eau de Pestels; lequel, de gré, pur et franc vouloir, a baillé et baille par ces
I*1«seules, à nouveau bail emphytéotique, nouveau cens et nouvelle inveslison,
* *>'er|e Baduel, laboureur, habitant de la ville de Yic en Carladès, à présent
urn'u,r de M. le marquis de Boussille, en son domaine de Mourèzo, ici présent
acceptant, son domaine appelé de Lollière, dépendant de sa terre et seigneurie de
ar»(jue, composé de maison, grange, vaclial, prés, champs, terres, bois eu
C()uiniun , pâturages, communaux, moutague de Bannes au prorata, et de la
contenue de trente tôtes d’herbages, et autres terres cultes et incultes dépendant
“ dit domaine; le tout, ainsi et de même que (îeraud Prunct et scs autres précé^ens fermiers ont accoutumé de jouir, sans autre réserve que des bois propres et
Particuliers dudit seigneur, si aucuns en y a dans ledit domaine, Oîitres toutefois
flue les bois communs qui en dépendent qui demeurent de la comprise des pré
�(4)
sentes, duquel domaine de Lollière et ses dépendances, tel et do môme qu’il est
ci-dessus baillé, j compris les prés et grange situés au lieu et appartenances do
Laroque, il sera ci-après fait un état particulier cuire ledit seigneur, bailleur, et ledit
Baduel, preneur, de tous les bâtiraens et héritages qui le composent. Le présent bail
emphytéotique à nouveau cens et nouvelle investison fait par ledit seigneur marqua
de Miramon audit Baduel, pour et moyennant le cens et rente annuels, perpétuels,
seigneuriaux cl uniformes de fromage vingt-neuf quintaux tant d'été que d'automne,
portables et posés au Poids de la ville d’Aurillac; plus de la quantité de qua
rante-cinq setiers seigle, mesure du Mur-de-Barrès; plus un quintal de beurre,
un cochon gras payable à descente do montagne ou trente livres pour le prix
d’icelui, au choix dudit seigneur bailleur; plus un veau gras, deux paires cha
pons, deux ports de vin du vignoble en sondit château de Postels, et vingt aunes
de toile femelle ; lesdits quarante-cinq setiers seigle dite mesure, payables et
portables audit château de Pestels à chaque féte Saint-Michel, de môme qi'°
toutes les autres choses ci-dessus spécifiées, annuellement en leur tems et saison,
le tout censuel et raddituel, avec tous droits de directe et justice haute, moyenne et
basse, usage et exercice d’icelle, meze, mixte, impere , droit de rétention par pre~
lation , lods et ventes et tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays d’ AuuergM >
et autres droits et devoirs seigneitriaux dûs et accoutumés et contenus aux terriers an
ciens dudit seigneur de sadite seigneurie de Laroque. Auxquelles charges et conditions
ledit Baduel a accepté le présent bail en emphytéose, et sous et en c o n s é q u e n c e
d’icelui reconnaît tenir et avoir le susdit domaine dudit seigneur, marquis de Mi*,
ramon, et a promis et s’est obligé ledit Baduel de payer et porter comme il
est ci-dessus dit, les susdits cens et rente de vingt-neuf quintaux de fromage»
etc., de même que toutes les autres choses ci-dessus s p é c i f i é e s annuellement en
tous tems et saison à perpétuité, audit seigneur , marquis do Miramon et aux siens
à l’avenir, à commencer , etc., tant et si longuement qu’il jouira et sera tenan
cier dudit domaine de Lollière, lequel il a promis melliorer à son pouvoir,
ne le détériorer, vendre ni aliéner à personnes do droit prohibées, ni y nul(re
cens sur cens, ni autre pension annuelle, sans le scù , vouloir e t c o n s e n t e m e n t
dudit seigneur et de scs successeurs ; et d ¡celui domaine de Lollière faire nouvelle
reconnaissance à toute mutation de seigneur ou de paysan, toutes et ((liantes fois qu ^
en sera requis, et d’icelle comme des présentes, bailler et fournir à ses frais e t
dépens expédition en bonne et due forme audit seigneur et aux siens à l’avenir ;
et à 1 égard du droit d ontréo do la présente investison , il a été réglé entre les par*
tics à la somme de trois mille livres, etc. »
T e l est la cté dont M rae la marquise Duplcssis-Châtillon demande
1 exécution partielle contre les héritiers représentons , ou ayant-caiisc
«lu sieur Pierre B a d u e l, de même que par la consultation et les ¡>JC"
moires publics, elle reclame l'exécution d ’actes semblables concernant
�(5 )
les domaines de la Roussière, de Lafage, de Lacroux situe's , ainsi
que le domaine de Lollière , dans la paroisse ou commune de Saint—
Clément.
Mais ici, une difficulté sc présente. Par exploit du 12 brumaire an X I ,
(3 octobre 1802), M m0 A n ne-Jea nne Cassagne-Mirarnon , procédant
tant en son nom propre et p r iv é , suivant l ’acte passé à P a ris, le 20
aodt 1790, devant Boursier et son confrère, notaires, entre elle , son feu
rnn,i , et Jean-Gaspard Cassagne-Beaufort-Mirarnon , son p ère , que
comme mère et tutrice de ses enfans, forma devant le tribunal de pre
mière instance d’ Aurillac , contre le sieur Pierre Griffuel, détenteur
du domaine de Lafage , la même demande que prétend former au
jourd’hui la dame Duplessis-Châtillon, sa sœur; et elle en fut déboutée
par jugement du 4 frimaire an XII (26 novembre i 8o 3 ).
Ce n’est pas tout. L e 11 frimaire an XI (2 décembre 1802), la même
anie » agissant dans tes mêmes qualités, forma une demande semblable
contre le sieur Pierre T r i n , détenteur du domaine de la Roussière, et
n°us croyons que cette demande a eu le même sort que celle dirigée
c°ntre le détenteur du domaine de Lafage.
dame Anne-Jeanne Cassagne-Mirarnon était, comme madame
Uplessis-Châlillon, une fille de M. le marquis de Miramon. Les de
mandes qu’ elle formait en l’an X I , contre les détenteurs des domaines
e Lafage et de la Roussière étaient faites du vivant de M. le marquis
e Miramon , et par suite d’un acte passé avec lui , à P a r is , le 20 août
l ?i)° i acte qui devait lui avoir transmis les droits de M. le marquis
^ Miramon. Comment se fait-il donc aujourd’hui que madame de Châ^ 0n > se disant héritière bénéficiaire de son p ère , vienne réclamer cour° les détenteurs des mêmes domaines de Lafage et de la Roussière ,
^ e,i sa qualité d’héritière de son père , des droits que celui-ci aurait
nsrnis à son autre fille , la daine Anne-Jeanne Cassagne-Mirarnon,
Par 1acte du 20 août i7()0?
d’ J C'S^ c^ lc^e “ ex2>liquer , on en conviendra ; et pourtant, cela est
aI)lcs la consultation délibérée le 5 mai 18^7. On répondra sans doute
j1” 0 ’ dans ces procès intentés en l’an XI , à la requête de la sœur de
du r*116 * * lnanIu' sc
Gbâtillon , il n’ était pas question du sieur Bala
^
(^oma‘ne
Lollière , ce qui est vrai ; mais puisque , d’après
j,] Co!1st>llatioa , M n,c de Châtillon se croyait autorisée, en sa qualité
<]e eri^ re bénéficiaire , à exercer contre les détenteurs des domaines
e ^ aJoge et de la Roussière , des droits qui auraient appartenu à sa
�( 6 )
sœ ur, en vertu de l’acte de 1790, et qu’en cela elle se trompait évi
demment , les siéurs Baduel se croient bien fondés , à leur t o u r , à
demander communication de ce traite' de famille, à provoquer un conipulsoire , si besoin est , alin de savoir si le domaine de Lollicrc est
ou non compris dans les arrangemens portés par ce traité, et si îMm°
de Châtillon a qualité pour s’adresser aux détenteurs de ce domaine
situé, comme ceux de Lafage et de la Roussicre , dans la c o m m u n e de
Saint-Clément.
A i n s i , les qualités de la demanderesse sont encore incertaines , et
les sieurs Baduel déclarent ne pas lui reconnaître, en ce moment, 1e
droit qu’elle prétend exercer.
Cependant, elle a fait signifier aux héritiers Baduel , le 21 août 18^7 ?
l’acte du 6 mars 1755 , qu’ elle qualifie d’acte d’inveslison , e t , le 2 sep
tembre suivant , elle leur a notifié un commandement de payer lcS
arrérages de la rente , avec déclaration que , faute d e paiement, elle
poursuivrait contre eux l’cxccution de son titre par toutes les voies
de droit. Ceux des héritiers Baduel que ce commandement pouvait con
cerner se sont empressés d’y former opposition par acte e x t r a - j u d i c i a i r e
du 4 du même mois ; et ils viennent maintenant exposer dans ce m é m o i r e ,
les motifs d’une opposition qu’ils croient bien fondée. Ils ne d i r o n t
pas que M me Duplessis-Châlillon fait une tentative insensée ou du moin5
téméraire , pour rétablir en France le régime de la féodalité ; ce se
rait, nous en sommes surs , mal interpréter une pensée qui n’a PaS
une aussi vaste étendue. Il est certain , toutefois , que les Mémoire*
publiés ont répandu dans le public , et particulièrement dans la classC
estimable des cultivateurs , des idées fâcheuses qui troublent la scCl1
rité d’un grand nombre de propriétaires. Il est bon de les r a s s u r e r »
en attendant que les tribunaux viennent eux-mêm es leur a p p r e n d r e »
par la solennité des arrêts , que les lois subsistantes n’ont rien per
de leur vigoureuse efficacité.
Les héritiers Baduel ont à répondre à quatre Mémoires, car, b)Cn
qu’ ils ne soient pas tous dirigés contre eux , ils se réfèrent l’un à 1 a u t r e »
et lous ont pour objet de démontrer que M me de Châtillon , en sllP
posant ses qualités reconnues , est recevable e t fondée à d e m a n d e r 1 e%e
cution de lacté d u (i mars lyiïi», à faire revivre, par c o n s é q u e n t )
titre q u i , selon nous , est frappé , tout-à-la fois , par la prescript*°n
par les lois suppressives de la féodalité, comme nous allons le démontre1
Nous le ferons avec ordre cl méthode , ce nous semble , et nous auii°
�( 7 )
.
'
l’occasion de discuter toutes les objections, en nous occupant succes
sivement ;
10 De la nature de l’acte du 6 mars 1755 , qui sert de base aux de
mandes de M ’re de Châtillon ;
2° De la question de savoir e n t h è s e g é n é r a l e , si les baux emphy
téotiques, à cens ou à rentes , sont frappés de la suppression prononcée
Par les lois de 1792 et 1793, quand ils sont mélangés de féodalité;
3° De la question de savoir PARTicuLiÈRtMtNT , si les baux emphy
téotiques perpeiuels sont atteints par ces lois suppressives ;
4° De l’application de la doctrine établie aux paragraphes 2 et 3 cidessus , à l’acte du 6 mars 1755;
5° De l'objection tirée de ce que la ci-devant Auvergne était un
Pa>s allodial ;
6" Enfin , de la prescription , qui , dans tous les cas , rend la dame de
Châtillon non recevable dans ses demandes.
En plaçant le moyen tiré de la prescription, à la suite de l’ examen
du titre , de l’a n a ly e des lois et de la jurisprudence sur la suppression
la féodalité , nous n’avons d’autre objet que de suivre un ordre
plus lo gique , sans entendre préjudicier en aucune manière, aux droits
ceux pour qui nous écrivons. Il nous a paru plus convenable de
Cor>stater le véritable esprit des lois de la matière, la juste application
*lu* doit en être faite à la cause actuelle , avant de prouver que même
dans le doute la prescription protège les héritiers Baduel contre les
demandes de leur adversaire.
§ 1".
la nature de l'acte du 6 mars 1755. — I l est bail à c e n s ,
plutôt que bail emphytéotique.
Ce n’ est pas une futile distinction à établir ’, celle du bail à cens et
11 bail emphytéotique, bien qu’ en définitive, les résultats doivent être
es mêmes quant à l'application des lois abolitives de la féodalité. INIais
me de C h âlillo n , ou ses Mémoires , tiennent beaucoup à donner à
du g mars 1755 le caractère de bail emphytéotique; e t, pour
l t ster dans la vérité, nous devons simplement rechercher la nature de
cel- acte afin d’ en mieux connaître les effets ou les conséquences.
L acte de 1755 par lequel M. le marquis de Miramon concède à
•erre Baduel le domaine de Lollière, e s t , si l’on s’en rapporte à sa
ré<laotiqu , un bail emphytéotique et un bail à cens, on y voit que M . de
�( 8 )
Miramon baille à nouveau bail emphytéotique, nouveau cens et nouvelle
investison, son domaine de Lollière, dépendant de sa seigneurie de Laroque.
Ces expressions le caractérisent aussi bien nouveau bail à cens que nou
veau bail emphytéotique. Dès lors, les termes ne décident rien. Mais on
sait que la nature des contrats se détermine, non par les qualifications
qu’il a plu aux parties contractantes de leur donner, mais par la subs
tance des clauses qu’ils renferment. C'est un principe de tous les tem s,
consacré de nouveau par notre code civil, dont l’article n 56 prescrit
de rechercher dans les conventions quelle a été la commune intention
des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des
termes.
En partant de cette r è g le , et recherchant l’intention des parties , il
est difficile de trouver dans l’acte du 6 mars 17 5 5 , la simple emphytéose des Romains, qui ne savaient pas ce qu’était la directe seigneuriale ,
la justice haute , basse et m oyenne, la taille aux quatre cas , et les au
tres droits et devoirs seigneuriaux, qui se rapportent au régime féodal,
et caractérisent le véritable acccnsernent.
Il est vrai que suivant l’annolateur de Boutaric , traité des droits sei
gneuriaux, page 2 , l’essence du bail à cens et du bail emphytéotique,
ainsi que le fonds de ces deux contrats , sont absolument les m êm es,
puisque l’un et l’autre sont également un contrat par lequel il n’y a que
le domaine utile qui soit aliéné , tandis que la dominité directe reste
au bailleur avec une rente qui lui est payée en reconnaissance de la
direclilé ; ce qui fait que le contrat est spécifiquement le même. « La
» différence, ajoute-t-il, ne vient que des biens qui font le sujet de
» l’un ou de l’autre. Le bail à cens est le bail d’un fonds noble et féo » dal, au lieu que le bail emphytéotique est celui d’un fonds qai est
» tenu en roture. » E t c’est cette qualité des biens qui fait dire aux auteurs
du répertoire universel,* V° emphytéose : En France, l'emphytéose faite
par un seigneur d’ un héritage qui fait partie de son domaine féodal, a
le même effet que le bail à cens.
M . Merlin, dans ses questions de droit, V® M oulin, dit que : « Si un
» seigneur de fief donnait en emphytéose une partie quelconque de son
» domaine féodal, sa concession ne serait pas une emphytéose propre» ment dite , mais un véritable bail à cens. C ’est ce qu’établit Ilerve dans'
» sa théorie des matières féodales , tome 2 , page 3a<) : 1' emphyteose, à per» peluite, dit i l, est un vrai bail à cens ou un vrai bail à rente, suivant
» que le bailleur est ou seigneur de fief-, ou simple propriétaire de censives. »
�( 9 )
Ajoutant à ces autorités celles que nous invoquons au § S ci-après où
nous aurons occasion «le revenir sur cette distinction à faire entre les
biens nobles et les biens roturiers pour caractériser le bail à cens ou le
bail emphytéotique , il est impossible de ne pas reconnaître un bail à
cens dans l'acte du 6 mars 1755. Nous ne considérons pas uniquement,
pour le qualifier ainsi, les expressions bail à cens employées dans l’a c te ,
mais nous voyons la nature des biens concédés. Nous voyons que le
domaine de Lollière, loin d’être un bien roturier, était éminemment noble
dans les mains de M. le marquis de Miramon , qu’il dépendait de sa sei
gneurie de Laroçue, que M. le Marquis se réservait sur ce bien les droits
et devoirs seigneuriaux contenus aux terriers anciens de la seigneurie de Laroque; et de ces indications, puisées dans l’acte même , nous tirons la con
séquence que M. le marquis de Miramon a voulu faire et a fait réellement
tin bail à cens et non un bail emphytéotique. Une des conditions de l’acte
le prouve d’ailleurs d’ une manière claire et précise. M. de Miramon
y fait défense expresse au preneur de mettre cens sur cens sur le domaine
de Lollière. Cette prohibition , étrangère au bail emphytéotique , est
précisément de la nature du bail à cens. D ’ où il faut conclure que ce
serait commettre une erreur manifeste que de qualifier de bail emphytéo
tique l’acte dont il s’agit.
Nous lui conserverons cependant cette dénomination dans le cours
de ce Mémoire, uniquement pour la facilité de la discussion. Nous
pouvons d’autant mieux employer l’expression de bail emphytéotique ,
qu’elle est indifférente comme nous allons l’établir dans le § suivant.
§2.
H est indifférent de considérer l'a cte de i y 55 com m e b a il em phy
téotique ou ba il à cens ; il est toujours un titre fé o d a l ou m élangé
de fé o d a lit é , fr a p p é p a r les lois suppressives.
Après avoir affranchi les personnes , l’assemblée nationale s’occupa
de la libération du sol français. C ’était une mission digne d’elle, et
fIu elle remplit avec de sages précautions. La liberté esl un breuvage
enivrant pour les peuples qui n’y sont pas habitues. Si la pensée
de régénérer l'homme et la terre qui le porte était à la hauteur
de cette auguste assemblée , les grands hommes qui la composaient
savaient aussi combien il fallait de prudence pour prévenir cet enivre
ment dangereux. Ils ouvrirent le sanctuaire avec précaution, e t , pour
2
�( 10 )
ne pas éblouir des yeux accoutumes à la servitude , ils n’accordcrent
que successivement, et p e u - à p e u , une liberte' qui, dans leur inten
tion, devait un jour être entière.
Les décrets des
G, 7 , 8 et 11 août 178g, en détruisant le régime
féodal établirent cette distinction : Les droits et devoirs féodaux ou censuels , ceux qui dépendaient ou étaient représentatifs , soit de la main
morte personnelle ou réelle , soit de la servitude personnelle , furent
abolis sans indemnité. T ous les autres furent déclarés rachetables et main
tenus jusqu’au rachat.
On sentit le besoin d’une énumération détaillée des droits seigneuriaux
supprimés et de ceux qui étaient maintenus et rachetables. L a loi du
i 5— 28 mars 1790 survint, et par son titre 3 , art. 2 , elle classa parmi
les droits rachetables. « Toutes les rentes seigneuriales annuelles en argent,
» grains, volaille , cire, denrées ou fruits de la terre, servis sous la déno» mination de cens, cencives, surcens , capcasal, rentes féodales , sei» neurialcs et emphytéotiques , champart, tasque , terrage, arage , agrier ,
» comptant, so été , dîmes inféodées , ou sous toute autre de'nomina» tion quelconque , qui ne se paient et ne sont dus que par le pro» priétaire ou possesseur d’ un fonds, tant qu’il est propriétaire ou pos» sesseur, et à raison de la durée de sa possession.»
L a loi du 1 8 -2 9 décembre
*a m&ne année, après avoir, par son
article 1 " , déclaré rachetables toutes les rentes foncières perpétuelles
de quelque espèce qu’elles fussent , régla par l’art. 5 , du titre 3 , le
mode et le taux du rachat pour les baux à rente, ou ernphytéose p e r p é tu e lle
et non seigneuriale , qui contiennent les conditions expresses de payer
au bailleur un droit de lo d s , ou autre droit casuel quelconque en cas
de mutation.
C ’est ici que s’arrrete la première période du système d ’ a f f r a n c h is s e
ment. O n voit que la suppression n’avait encore porté que sur une
partie des redevances féodales , et que l’autre était maintenue, mais
les droits étaient déclarés rachetables.
Il fut fait un pas de plus par la loi du 18 juin — 6 juillet I 792,
Cette loi supprima sans indemnité, tous les droits casuels, soit c e n s u e ls ,
soit jéodea ux, et tous ceux qui en étaient rcprésentaiijs , c o n n u s sous les
noms de quint, requint, treizième, lods et trezains , lods et ventes, etc.,
qui se percevaient à cause des mutations qui s u r v e n a i e n t dans la pro
priété ou la possession d’un fonds , sur le v e n d e u r , 1 acheteur, les
donataires , les héritiers , et tous autres a y a n t- c a u s e du précédent pro-
�( Il )
priétaire ou possesseur; à moins , est-il dit, que lesdits droits ne fus
sent justifiés par le titre primitif d’inféodation , d’accensement ou de
bail à cens , tire le prix ou la condition d ’une concession de fonds pour
lequel ils étaient perçus; auquel cas, lesdils droits continuaient d ’être perçus
et d ’être rachetables.
L a loi du 2 5 - 2 8 août suivant confirma celle du 18 ju in , et suppri
ma sans indemnité, « tous les droits féodeaux ou censuels utiles , toutes
" les redevances seigneuriales en argent, grains, volailles, cire, den» rc'es ou fruits de la terre, servis sous la dénomination de cens, cen" cives, surccns......... et généralement tous les droits seigneuriaux, tant
" féodaux que censuels , conservés et déclarés rachetables par les lois an» térieures , quelle qu’en soit la nature et leur dénomination , etc. »
Toutefois , l’art. 5 excepta de cette suppression sans indemnité , les
droits qui auraient pour cause une concession primitive de fonds; et l’art.
*7 fit encore exception pour les rentes champarts et autres redevances
qui ne tenaient point à la féodalité, et qui étaient dues par des parti
culiers à des particuliers non seigneurs ni possesseurs de fiefs.
Ici finit la seconde période.
La première n’ avait supprimé sans indemnité qu’une partie des droits
féodaux et avait déclaré l’autre partie rachetable , la seconde periods
supprima de plus une partie de ces droits , maintenus d’abord et ra
chetables, et n’excepta de la suppression que les droits dûs pour con
cession de fonds , ou par de particuliers à de simples particuliers.
Mais vint ensuite la loi du 17 juillet 1 7<)3, dont l'article 1er supprima
sans indemnité toutes les redevances ci-devant seigneuriales , droits féo
daux , censuels , fixes et casuels , même ceux conservés par le décret du
aoât 1792. L ’article 2 ne maintint que les rentes ou prestations purerement foncières et non féodales.
C ’est la troisième et dernière p é r io d e , car les lois et autres dispo
sitions législatives survenues depuis , ne sont qu’interprétatives de la
loi du 17 juillet i7j)3.
Ainsi , d’après cette loi , les rentes purement foncières et non féo
dales > sont les seules qui soient maintenues ; les droits même conservés
par la loi du 25 août 1792 ’ comme ayant pour cause une concession
de fonds , ne le sont p o in t , s’ils ne sont purement fonciers, c’est-àdire , sans mélange de féodalité.
On ne tarda cependant pas à vouloir faire des distinctions , malgré
les termes positifs de la l o i , en demandant la séparation dans les actes
�( T2 )
de concession primitive de fonds , à titre d’inféodation ou d’accensement, de ce qui e'tait purement foncier, d’avec les droits q u i , sous
le nom de cens et de censualité, rappelaient le régime féodal aboli.
Une loi du 2 octobre 1 7 9 Î , rejetta cette distinction et cette sépara
tion par l’ordre du jour , de sorte qu’il devait être désormais bien
reconnu , que toute renie due pour concession de fo n d s, cesse d’êlre
purement foncière, quand elle est mélangée de droits féodaux ou sei
gneuriaux.
Il 11 en fut pas moins proposé à la convention nationale , peu de
tems après cet ordre de jour, la question de savoir si l’administration
des domaines nationaux pouvait recevoir le rachat offert d’une rente de
35 setiers de b lé , qualifiée foncière et seigneuriale p a r le titre primitif
ou bail d’héritage , dans lequel était en même tems stipulé un droit de
cens emportant /ods et ventes. Par la loi du 7 ventôse an II , la con
vention déclara qu’il n’y avait pas lieu à délibérer, attendu « que déjà
» elle a déclaré par un décret d’ordre du jour , du 2 octobre 17g3 ,
» q u elle avait entendu, par la loi du 17 juillet précédent, supprimer
» sans indemnité les rentes foncières qui avaient été créées , même par
» concession de fo n d s, avec mélange de cens ou autre signe de seigneurie
» ou de féodalité. »
Interprétant encore le véritable sens de la loi du 17 juillet 1703,
line autre loi du 29 floréal an I I , déclara supprimée sans i n d e m n i t é
toute redevance ou rente entâchée originairement de la plus légère
marque de féodalité.
Ce commentaire donné par la législature elle-même, par cette légis
lature qui avait rendu la loi du 17 juillet 1793, manifeste clairement
le sens de cette dernière l o i , et l’on ne peut s’y méprendre. A u s s i ,
ne fut-il plus question, pendant quelques années, de chercher à tourner
la loi pour échapper à scs dispositions précises.
Mais sous le consulat, alors que d’autres idées paraissaient prendre
faveur, et que les législateurs interprètes n’ étaient plus là pour pro
clamer leur pensée, quelques tentatives furent faites. On e s s a y a de res
susciter le système de séparation de la partie féodale de la rente d avec
la partie foncière. Le conseil d’état fut appelé à en délibérer ; et par
son avis du 3o pluviôse an X I , après avoir rappelé la loi du 17 juillet
1 79 3 , les décrets des 2 octobre et 7 ventôse an I I , l’ordre du jour
portant refus de proroger le délai fixé pour le brûlement des litres
constitutifs et récognitifs de seigneurie , et d’autoriser la séparation
�( i3 )
de ce qui pouvait être purement foncier, qui « annonce clairement
* que. la convention regardait tous les droits quelconques établis par
» les titres , comme supprimés par une suite de leur mélange avec des
" cens ou autres signes de féodalité; après avoir ajouté que telle avait
» été depuis l’opinion constante du corps législatif; qu elle s’est ma» infestée eu l’an V , en l’an VIII dans les discussions sur les projets
“ présentés à l’effet d’établir une distinction entre les rentes et pres* tâtions créées par des actes constitutifs ou récognitifs de seigneurie,
" pour soustraire à la suppression celles qu’ on regardait comme pu“ rement foncières ;
Après avoir dit « qu’il n’ est pas possible de méconnaître des inten" tions aussi évidentes, et qu’il ne peut y avoir, lieu à interpréter des
* dispositions qui ne sont nullement obscures ;
“ Le conseil d’état fut d’avis que toutes prétentions , de quelque na“ ture qu elles pussent être, établies par des titres constitutifs de rede" vances seigneuriales et droits féodaux, supprimés par le décret du
” 17 juillet 1793, ont été pareillement supprimées, et que l’on ne
" pourrait admettre les demandes en paiement de ces prestations , sans
changer la législation. »
Se méprendre maintenant sur le sens et sur le but de cette législa
tion , ce serait fermer les yeux à l’cvidcnCc , et se jetter volontairement
dans l'erreur. Q u’011 d is e , tant qu’ on v o u d ra , qu’il y aurait eu justice
d établir la distinction demandée, on peut avoir raison en faisant le
procès à la l o i , mais ce procès ne prouverait autre c h o se , si non que
loi existe, et qu’il faut lui obéir. O r , cette l o i , ou plutôt ces
lois que nous avons analysées avec la plus sévère exactitude, ne font
aucune différence à l’égard des titres constitutifs ou récognitifs de sei
gneurie ou droits féodaux. Elles ne distinguent pas si les litres sont
dcs baux emphytéotiques 011 à cens, ou bien s’ils doivent avoir toute
autre dénomination; elles 11e voient, dans les titres, quels qu’ils soient,
les signes de féodalité ou de seigneurie qui peuvent y exister ;
si de tels signes s’y rencontrent, les lois prononcent la suppres
sion des titres sans égard aux redevances que ce mélange impur cesse
faire considérer comme des prestations purement foncières.
^ avis du conseil d'état du 3o pluviôse an XI n’est pas le seul qui
se soit expliqué sur le véritable sens des lois suppressives. Nous al
lons montrer dans le paragraphe suivant la persistance de ce conseil
® repousser toute idée rétrograde, particulièrement en ce qui concerne
es baux à cens et les baux emphyteoliques.
�Quand on considérerait l'acte du 6 mars 1 755 comme un véri
table bail e m p hy t é o t i qu e , il n'en serait pas moins frappé par
les lois suppressives de la féodalité.
L ’ emphytéose à lems doit être distinguée (le l’emphytéose perpétuelle.
Dans l’origine , le bail emphytéotique n’avait qu’une durée limitée qui
ne pouvait excéder 99 a n s , ou la vie d’un homme , ou bien la vie
du preneur et celle de ses enfans. L ’emphytéose perpétuelle fut dans
la suite autorisée , et elle existait à l’ époque de la loi du 29 décembre
1790, dont l’article I er prohibe pour l’avenir les baux à rente ou emphytéose perpétuelle. L ’article 53o du Code civil a confirmé cette prohi
bition.
U ne emphyte'ose à tems n’ était considérée que comme un simple
louage , bien que des différences essentielles dussent la distinguer du
louage ; tandis que l’emphytéose perpétuelle était une véritable transmis
sion de propriété , une vente réelle. A u ssi, les lois suppressives de la
féodalité et la jurisprudence ont-elles soigneusement distingué ces deux
espèces d’emphytéose.
Sous le gouvernement im périal, il y eut quelque velléité de revenir
au système de séparation des droits féodaux et seigneuriaux d’avec la
prestation foncière, et des essais furent faits. P o u r ne pas suivre la
même voie dans laquelle on s’était précédemment engagé, on inventa
la distinction entre les pays d'allodialitè et ceux où la maxime, nulle
terre sans seigneur, était de droit commun. Un décret du 25 nivôse an
X I I I , ordonna , en conséquence , que des redevances originairement im
posées au profit du chapitre de l’église d’Aix , et qui étaient mélan
gées de féodalité , continueraient d’être servies comme redevances em
phytéotiques , et sans charge de lods et demi-lods qui y avaient été ajoutés
indûment et sans titre par les bailleurs. Ce d é c r e t, en opérant la sépa
ration de la partie purement foncière de celle qui était féodale, et
ordonnant le paiement de la première à l’état, représentant alors l’c'glise
d’A i x , rouvrait la porte à l’introduction d’un système si long-tenis et
si nettement repoussé ; de plus , il établissait une distinction entre les
titres frappés de suppression , et classait les baux emphytéotiques au
nombre de ceux que la suppression ne devait pas atteindre. Enfin, il
était le premier acte de l'autorité publique qui distinguait les personnes ,
suivant qu’elles avaient droit de seigneurie ou qu’elles ne 1avaient pas. Un
�( i5 )
arrêt de la cour de cassation, du 10 février 1806, ne tarda point à se pro
noncer dans le même sens pour une redevance établie dans le PorenIrui, pays allodial.
Mais on s’effraya bientôt des conséquences d’une rétroactivité dont
l'effet certain était de porter le tiouble dans les familles , d’anéantir
les traités , les actes , les conventions de toute nature qui avaient été
la suite de l’abolition du régime féodal, et de détruire les garanties
hypothécaires des créanciers. I)e nombreuses réclamations s’ élevèrent
de toute part, et de nouvelles dispositions législatives, en sanctionnant
les lois subsistantes , vinrent calmer les esprits. La jurisprudence ellemême ajouta son autorité interprétative à la puissance des décrets et
des avis du conseil d’état.
Il est utile de présenter ici l’analyse chronologique de ces nouvelles
dispositions législatives et de la jurisprudence, pour démontrer avec plus
d évidence encore le véritable esprit de la législation , en ce qui con
cerne la suppression des droits féodaux , et prévenir des erreurs dans
lesquelles 011 pourrait facilement se laisser entraîner. Cela est néces
saire d’ailleurs, parce que AI“1' de C h âlillo n , dans sa consultation
et dans ses Mémoires , s’arrête précisément à cette époque dont nous
venons de parler où le gouvernement impérial faisait un pas rétrograde, entièrement à rebours des lois existantes.
Un avis du conseil d’ état, du i 3 messidor an X III, rendu six mois
après celui du 25 nivôse de la même année , commence cette série
de dispositions interprétatives qui doivent désormais faire règle pour
1application des lois concernant le régime féodal. Le conseil d’état
avait à examiner un projet de décret tendant à déclarer maintenues des
redevances à prestation de fruits, mêlées de cens, portant lods, amende
et seigneurie, dues par les habilans d’ Arbois, en vertu de titres d’acccnscmcns consentis par des individus que l ’on prétendait avoir pris
r,,al~à-pr0p 0s la qualité de seigneur. Ce projet fut rejeté par les motifs
suivan's :
* Considérant que lorsque le titre constitutif de la redevance ne
“ présente aucune ambiguité , celui auquel le titre est opposé ne peut
" être admis à soutenir qu'il n'avait pas de seigneurie ;
* Considérant que toutes les dispositions législatives, et en dernier
“ üeu l’avis du conseil d’état du 3 o pluviôse an XI , ont consacré
” la suppression de toutes redevances, de quelque nature qu’elles
” puissenL ê t r e , établies par des titres constitutifs de redevances sei-
�( 16 )
» -gneuriales et droits féodaux supprimés par le décret du i y juillet
« 1793. »
L e gouvernement renh'ait ainsi dans la saine interprétation des lois
de 15 matière , et se mettait en harmonie avec les lois des. 2 octobre
1793 et 29 floréal an II.
L e 23 avril 1807, un décret impérial, rendu à l’occasion de rede
vances provenant de concessions faites à titre de cens annuel et per
pétuel emportant lods et ventes , retenues et tous autres droits censaux et seigneuriaux, quoique l’abbaye de Sainte-Benigne ne possédât
pas les terrains à titre de fief, et qu'elle n'y eut aucun droit de sei
gneurie, s’exprimait ainsi : « Considérant que les redevances dont il
» s’agit sont entachées de féodalité par leur mélange avec des droits
» de lods et ventes, et autres supprimés p arle s lois ; que d’après l’avis
» du i 3 messidor an X III, approuvé par nous , il n’y a pas lieu à exa» miner si lesdits religieux possédaient les fonds à titre de seigneurs. »
E t le décret prononça la suppression sans indemnité de ces redevances.
Ce décret prenait l’avis du conseil d’état du i 3 messidor an X I I I , pour
base de sa d écision, parce que cet avis était rentré dans les vrais
principes. Nous verrons dans la suite que M . M erlin, procureur gé
néral à la cour de cassation , qui avait conclu plusieurs fois dans le
sens du décret du 25 nivôse an X III, revint aussi sur ses pas , et recon
nut que l’avis du conseil d’état tranchait, pour l’avenir , toute difficulté.
Un avis du conseil d’état du 17 janvier 1809, approuvé le 2 fé
v rie r, rejette une réclamation des hospices d’A i x , et s’exprime avec
plus de précision encore. « A tten d u , porte cet a v is , que les rede» vances perpétuelles établies par des titres qui portent en même tems ,
» soit stipulation de lods et ventes ou dem i-lods, soit réserve de la
» seigneurie directe , sont comprises dans les abolitions sans indem» nité prononcées par les lois antérieures , quelle que soit la dctiomi» nation du titre ou la qualité de la personne au profit de qui les re~
» devances ont été étublies. » C ’est conforme au décret du 23 avril 1807,
qui déclare indifférent pour la suppression des redevances, que le
bailleur de fonds eût droit de seigneurie ou qu’ il ne l’ait point. Mais
l’avis du conseil d’ état ajoute de plus qu’il n’y a pas lieu de con
sidérer la dénomination du titre, c’est-à-dire, qu’il importe peu que le
titre soit qualifie de bail à c e n s , de bail à r e n te , ou de bail em
phytéotique.
�( '7 )
D ’ailleurs, il existe des dispositions semblables pour les emphyteoses ,
et notamment pour des emphyteoses créées en pays de droit écrit.
Une décision ministérielle avait autorisé l'administration des domaines
à poursuivre le paiement des arrérages des redevances affectées sur
les biens donnés en emphytéose, dans le ci-devant évêché de Baie et le
pays de Porentrui , pays régi par le droit écrit. L e conseil d’éta t, par
son avis du 8 avril 1809, approuvé le i 3 , rapporta cette décision, et
déclara les redevances comprises dans l ’abolition de la féodalité.
« Considérant, porte cet avis, que les titres, joints aux réclamations
» desdites communes , présentent des emphytéoses perpétuelles , consenties
» par les bailleurs à titre de fiefs sous la reserve de la seigneurie, avec la
" stipulation de lods et ventes à chaque mutation. »
Aussi M. Merlin qui avait porté la parole comme procureur-général
à la cour de cassation , lors de l’arrêt contraire du 10 février 1806, se
hâte-t-il de dire, dans le Repertoire universel, V° f i e f , sect. 2 , ^ 7 ,
que cet arrêt ne peut plus faire autorité, depuis que le conseil d’ état
a pris le parti d’assimiler aux redevances mélangées de droits féodaux,
les rentes constituées par des baux emphytéotiques, contenant stipulation
soit d’ un droit de lods , soit d’un droit de relief à chaque mutation.
Et la cour de cassation est elle-même revenue sur la jurisprudence
qu’aurait établie l’arrêt du 10 février 1806. L e 4 juillet 1809, elle a eu
1 occasion d’examiner à fonds cette question , qu’ elle a résolue dans le
sens des décrets et avis du conseil d’état que nous venons de rappeler.
11 s’agissait encore d’une redevance emphytéotique , assise sur des héri
tages situés dans le Porentrui. Un arrêt de la cour d’appel de C o lm a r ,
du 8 thermidor an X I I , antérieur par conséquent à la jurisprudence
du conseil d’ état et aux décrets que nous venons de citer , avait or
donné la continuation du paiement de cette redevance. Cet arrêt fut
cassé par la cour régulatrice , et les motifs de cassation méritent d’être
textuellement rapportés , parce qu’ils reçoivent une application directe
a la cause des sieurs Baduel.
L ’arrêt commence par viser les lois du 18 juin 1792, le décret du 23
avnl 1807 , et les avis du conseil d’état rappelés ci-dessus ; p u is, il ajoute :
" Attendu que des dispositions de ces lois combinées avec les dis* positions de ce décret impérial et des avis du conseil d’état, rendus
’* eu interprétatation , il résulte évidemment que toutes redevances cm* phyteotiques établies à perpétuité par des titres qui portent en même
® tem s, soit des droits de lods et ventes à chaque mutation , soit réserve
3
�( 18 )
»
»
*
»
»
de seigneurie directe, sont dans le ci-devant pays de Porentrui même , comme dans tous les pays de l’ancienne France , comprises
dans l’abolition de la féodalité , quelle que soit d’ailleurs la dénomination du titre, ou la qualité de celui en faveur duquel ces redevances sont consenties ;
» Attendu que la redevance emphytéotique , comprise au bail du 29
» janvier 174$, et dont il s’agit , est de ce genre ; et en effet :
» i° Elle est dite à perpétuité;
» 20 Elle contient une réserve de seigneurie , puis qu’elle soumet
» le preneur à l’obligation de reconnaître le bailleur comme seigneur
» direct de la terre grevée de cette redevance ;
» 3 ° Elle est accompagnée d’ un droit de lods et ventes, puis que le
» preneur s’oblige à payer un droit de 2 sous par livre du prix de la
« vendition ou cession qu’il fera ;
» Attendu qu’il est stipulé en outre , dans ce bail , un droit de relief,
» puisque le preneur s’y oblige , à chaque changement de main par
» dc'ccs, ou tout autrement, de reprendre cette terre, dans le délai de
» six semaines , des mains du bailleur , de lui payer à chaque reprise
» huit livres bâloires , et de renouveller alors la lettre de fief ;
» Attendu que le preneur s’oblige de plus, pour lui et ses successeurs,
» de prendre jugement du bailleur dans toutes les contestations qu’il
/ » aura à l’ occasion de cette terre ; et que de cette soumission il ré» suite que le bailleur avait un droit de justice sur cette terre , dont
» l’existence serait, au besoin , attestée notamment par la sentence ar» bitrale de i4 8 6 , jointe aux pièces et invoquée par le demandeur,
» droit éminemment féodal , et compris tel dans l’abolition du régime
» féodal ;
» Attendu que s i , comme le prétend le défendeur, à l’aide d’une tran» saction de 149- * postérieure à cette sentence arbitrale , le chapitre
» de Sainte-Ursanc a alors renoncé à tout droit de justice sur le ter» ritoire dans lequel est assise la terre sur laquelle est affectée cette
» redevance , il eu résulterait alors que le chapitre aurait u s u r p é ,
» en I 745 > ce droit de juridiction qui avait cessé de lui a p p a r t e n i r ,
» et se serait dès-lors arrogé un devoir féodal auquel il n 'a v a i t aucun
» droit, ce qui suffirait, d'après l'avis du conseil d ’état , approuvé le 28
» messidor an X I I I , et le décret impérial du 23 avril 1807 , pour faire
j» tomber cette redevance dans lit suppression de la jéod a lité;
» Attendu enfin , que de tout ce dessus , il suit que la redevance
�( T9 )
» emphytéotique, dont il s’agit, était, si non seigneuriale de sa nature,
» du moins mélangée de droits et devoirs féodaux , et comprise dans
» tous les cas , dans cette suppression ;
» Et que l’arrêt attaqué , en confirmant purement et simplement le
* jugement dont était appel, qui avait avait déclaré cette redevance pu» remerut foncière , et ordonné que le paiement en serait continué comme
» par le passé , a évidemment violé les lois , ainsi que le décret impe» rial et les avis du conseil d’état ci-dessus transcrits, c a s s e , etc.»
( Sirey , tome 9 - 1-387).
Le lendemain, 5 juillet 1809, un autre arrêt de la cour régulatrice
cassa celui de la cour d’appel de C olin ar, dans la cause du sieur T hevenol, contre le sieur Moniemdon , par les mêmes considérations et les
mêmes motifs , et surtout , parce qu’il résulte de la combinaison des
lois, décrets et avis du conseil d'c'tat, « que l’intention évidente du lé» gislateur est de frapper du même anathême et de soumettre à la
" suppression sans indemnité , non seulement les redevances emphy” téotiques perpétuelles , qualifiées seigneuriales , quoiqu’ elles ne pusM sent pas l’être, ainsi que celles auxquelles cette dénomination appar“ tenait réellement, mais encore celles déclarées foncières , mais à
* l’occasion desquelles ceux qui les avaient constituées s'étaient dits
* seigneurs , encore bien qu’ils ne le fussent p a s , et n’eussent sur les
» héritages grevés de ces redevances aucune seigneurie ; — qu’il suffit
» même pour cette suppression , que ces redevances , quoique foncières ,
» encore bien que celui qui les a constituées ne se fu t pas dit seigneur,
" fussent accompagnées et mélangées de charges féodales , parce que
" là où le titre n ’estpoint équivoque, il nest besoin d ’aucun examen ultérieur. »
Enfin, un arrêt de la cour suprême, du 18 juillet de la même année ,
déclara frappées de la suppression, les emphytéoses perpétuelles dans le
pays de Porentrui , établies avec stipulation seulement des droits de
consentement aux mutations par ventes, des droits de relief, et des peines
de commise. (Sirey, tome 9 - 1 - 3 9 3 ) .
La cour régulatrice persista dans cette jurisprudence qu’il est impos
sible de ne pas reconnaître comme fondée sur les principes qui ont
déterminé l’abolition du régime féodal et la suppression de tout ce qui
se rapportait à ce régime.
L e 17 juillet 1811 , elle eut de nouveau à résoudre la question dans
une espèce où l’ hospice de Drtle soutenait, que n’étant pas seigneur du
lorrain accensé, le census et le laudirnium stipules au titre primordial, n’a
�( 20 )
vaient rien de féodal ; que les redevances reclamces étaient de simples re
devances emphytéotiques. La cour de cassation, par son arrêt, proscrivit ce
système, et déclara de nouveau : « Q u ’il n’y a pas lieu d’examiner si les fonds
» sont réellement possédés à titre de seigneurie , et qu’il suffit, pour
» l’abolition des redevances , qu’elles soient entachées de féodalité par
» leur mélange avec des droits de lods et ventes , et autres droits sup» primés. » (Sirey, tome 1 1 - 1 - 3 7 7 . )
Nous pourrions citer un grand nombre d’autres arrêts interprétatifs
du sens des lois abolitives de la féodalité , notamment celui de la cour
de cassation du 2 mai 1808 , d’après lequel la clause de cens portant
lods, lo i, amendes , retenues et seigneurie , indique la rétention de la
seigneurie féodale. (Sirey, tome 8 - 1 - 3 12);
Celui de la cour d’appel de Besançon, xlu 29 avril 180g, portant
que la simple qualité de seigneur, prise dans le titre, frappe la rente
de suppression, sans indemnité. (Sirey, tome 9 - 2 - 2 1 2 ) ;
Celui de la cour de cassation, du 4 avril 1810, d’après lequel, la
redevance créée par un ci-devant seigneur sur des fonds dépendant de
sa seigneurie , à titre d’accensement , même sans réserve de directe , est
de plein droit récognitive de la directe féodale , et par conséquent sup
primée. (Sirey, tome io)-i-3o2) ;
L ’avis du conseil d’état du i 5 septembre 1810, approuvé le 2.3, qui
prononce l’annulation de toutes les soumissions ou obligations de payer
les capitaux ou les arrérages , souscrites par des emphytéoses , depuis
l’abolition du régime féodal ; et la rénonciation pour l’état au bénéfice des
jugemens passés en force de chose ju g é e , qui ont condamné des emphy
téoses à servir les rentes établies sur les héritages dont ils sont détenteurs.
¡Niais il faut se borner , cl nous avons d’ailleurs suffisamment cons
taté l’interprétation donnée par le gouvernement et par la cour de cas
sation aux lois abolitives de la féodalité;
Il nous reste à faire l’application de ces lois et de ces interpréta
tions législatives ou judiciaires au titre du 6 mars 1755, eu nous ré
servant de revenir sur les objections qui ont été faites ou qu’ on pourrait
faire, car nous n’ en voulons laisser aucune sans réponse.
§ 4.
Preuves de la féodalité de Facte du 6 mars 1755.
Qui contracte dans cet acte ? Quelle est la p e r s o n n e qui concède le
domaine de Laitière? C ’est le « très-haut et très-puissant seigneur, messire
�( 21 )
» Alexandre-Emmanucl de Cassa'nhes «le Beaufort , chevalier, marquis
»» de M iramon, seigneur de Peslels , Polminhac , M arions, Tcissicrcs1• les-Bouliès , le Chaumeil et St-Cirgues-de-Jordanne , Laroque, St» Clément, Brezons, Cezens, Monréal, Nerebrousse, Paulhac, Balsac,
" Saint-llcran , Cocudoux , Lasalle , Lacalsade , Selles , Bassinhac ,
” Lecayre , Loubejac , Lafagc , Mongranat; baron de Foullioles et de
” (ïiou ; conseigncur de Vie et Thiézac et autres ses places. » Certes,
v°ila des titres nobiliaires et féodaux que nous ne reprochons pas à
M. de Miramon, mais que nous devons faire remarquer dans l’intérêt
bien entendu de la cause.
L e concédant du domaine de Lollière était marquis de Miramon !
P r i qu’était-ce qu’un marquis, avant la révolution de 178g? C ’était
jadis , mais il y a du tems , un seigneur préposé à la garde des fron
tières de l’é ta t, qu’ on appelait marches. Plus tard , ce ne fut qu’un
titre de dignité donné à celui qui possédait une terre que le souverain
avait érigée en marquisat.
Dans l’ordre des dignités féodales et politiques , le titre de marquis
était pins considérable que celui de comte.
M. le marquis de Miramon était de plus seigneur de Pestels , P o l^ m lia c , etc. , et particulièrement de Laroque.
Q u’était-ce autrefois qu’un seigneur ?
Loyseau, Traité des seigneuries, chapitre xer, n° 2 4 , e t c ., enseigne
que seigneurie signifie puissance; il distingue la seigneurie privée, qu’il
°elinit puissance en propriété, de la seigneurie publique , qu’il définit
Puissance de domination.
La seigneurie privée ou la puissance en propriété serait donc \cdominium
directurn q u i , aux termes des lois romaines , est le droit du propric» taire , et le droit de directe retenu par le bailleur à emphytéose.
Mais assurément M. le marquis de Miramon , en se qualifiant de
Scigneur de Pestels , Polminhac , Laroque et autres vingt-une paroisses
011 localités, et conseigncur de V ie et Thiézac , n’entendait pas se dire
Propriétaire de tous les héritages situés à Peslels, Polminhac, Laroque,
101 Thiézac, e t c ., etc. L e titre de seigneur qu’il prenait dans l’aclc
e *7^5 , comme dans tous les actes par lui souscrits, n’avait donc
aucun rapport ¿1 la puissance en propriété dont parle Loyscau , ou bien
au dominium directurn des lois romaines ; il ne pouvait s’appliquer
(j u a la puissance de d o m in a tio n c’est-à-dire, à cette puissance féodale
écoulant naturellement alors de la qualité de marquis, de seigneur,
e monseigneur et de baron.
�( 22 )
Il faut donc reconnaître qu e, soit comme marquis, soit comme sei
gneur , M. de Miramon réunissait en sa personne toutes les qualités
nobiliaires et féodales qui désignent ou un seigneur de f i e f , ou un
seigneur censitaire ; e t , nous nous empressons de le d ir e , cette der
nière dénomination serait trop modeste.
Maintenant que ces qualités sont établies, rappelons l’arrêt déjà cité
de la cour de Besançon , du 29 avril 1809 , qui déclare supprimée la
rente ou redevance , par cela seul que le bailleur avait pris dans le
titre la simple qualité de seigneur.
Rappelons encore un arrêt de la cour de cassation , du 4 novembre
18 18 , qui déclare abolie toute rente censuelle établie par une personne
qui prend le titre de seigneur, encore qu’ elle ne le fût pas. (S ir e y ,
tome 19— 1 — 37).
D e là résulte qu’alors même que M . de Miramon aurait pris une
qualité qui ne lui appartenait pas , ce que nous sommes loin d’ad
mettre, la redevance qu’il réclame des sieurs Baduel, ne serait pas moins
une redevance supprimée sans indemnité.
Ainsi les lois suppressives de la féodalité frappent déjà le titre de 175.),
par les qualifications seules que M. de Miramon a prises dans cet acte.
Poursuivons.
M . le marquis de Miramon donne à nouveau bail emphytéotique, nou
veau cens et nouvelle investison, son domaine appelé de L ollière, « dé» pendant de sa terre et seigneurie de Laroque-» , com p osé, etc.
M . de Miramon s’ était déjà qualifié de seigneur de Laroque T et main
tenant il désigne le domaine de Lollière comme dépendant de sa terre
et seigneurie de Laroque, ce qui veut dire certainement que ce domaine
était un démembrement de son fief de Laroque. Dans tous les cas, ce
domaine de Lollière est suffisamment désigné comme une dépendance
de la seigneurie de M . de Miramon, et c’en est assez pour caractériser
l’origine féodale de ce b i e n , et amener l’application des lois abolitives
de la féodalité.
Après avoir spécifié et détaillé la redevance payable à M. le marquis
de Miramon , l’acte ajoute : « L e tout censuel et redditucl, avec tout
» droit de directe et justice haute, moyenne et basse, usage et exercice
« d’icelle , m ère, mixte, impère , droit de rétention par prèlation , lods
» et ventes, et tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays d Au»> vergne , et autres droits et devoirs seigneuriaux dûs et accoutumés ,
» et contenus aux terriers anciens dudit seigneur de sa seigneurie de La» roque, cto. »
�( 23 )
P ar conséquent, la redevance imposée par M . le marquis de Miramon,
est pas seulement censuelle et reddituelle , elle est faite,
i° Sous la reserve de la directe, ce qui concerne évidemment, d’après
les explications que nous avons données sur la qualification de seigneur,
la directe seigneuriale, et non le dominium directurn des lois romaines ,
011 le droit que tout propriétaire d’héritages peut encore se réserver
en donnant ces héritages à bail emphytéotique à tems. E t la preuve qu'il
11 est pas possible de comprendre autrement cette réserve de la directe,
résulte des expressions qui suivent immédiatement ce mot de directe.
2° Sous la réserve du droit de justice haute, moyenne et basse, etc.
Nous n’avons pas besoin d’examiner ici en quoi consistait la haute,
Moyenne ou basse justice. On peut consulter à ce sujet C h ab rol, Cou
tume d ’Auvergne, en tète du chapitre 2. Il nous suffit de dire q u e ,
Quoique le droit de justice n’implique pas nécessairement l’ existence
d u n fief, parce que la justice et le fief peuvent se trouver en des
Plains différentes, la présom ption, d’après le droit com m u n, était en
faveur du seigneur hau t-justicier, Y 0 C habrol, loco citato, tome i ,
PaSe 3g. Il est vrai que dans les pays allodiaux on ne reconnaissait
nul seigneur sans tilre , et que celte maxime s’appliquait au seigneur
iaut-justicier, comme à tout autre. Mais ici , nous avons , dans le
nieme tilre , la preuve de la seigneurie du fief, et du droit de justice
dans la personne de M . le marquis de Miramon. T o u t se trouve réuni
Sllr la même t ê t e , et caractérise de la manière la plus formelle les
droits féod aux de celui qui se réserve en même tems la directe, et les
droits de justice haute, moyenne et basse. L e droit de rendre la justice
, en e ffe t, une émanation de la souveraineté , de la puissance pu1(llle , et le seigneur qui possédait ce droit et se le réservait dans un
a c le , n’agissait plus comme un simple propriétaire , mais bien comme
Un seigneur usant de sa puissance féodale.
3° Sous la réserve du droit de rétention par prelation.
Çe droit de prèlation, c’esl-à-dire de retraire le domaine en cas d’alienation par le concessionnaire, est commun au bail à cens et à l’emphy*éose; c est une conséquence de la directité que le seigneur s’est réservée.
4“ Sous la réserve des lods et ventes.
Ajoutons ici q u e , dans la suite de l’acte de 17^5, le sieur Pierre
uel » concessionnaire du domaine de Lollière, « promet de ne le
vendre, ni aliéner à personnes de droit prohibées, ni y mettre cens
sur c e n s n i autre pension annuelle, sans le s c û , vouloir et consen-
�( 24 )
» tement dudîl seigneur (M. de Miramon) et de ses successeurs ; et
» d’icelui domaine fournir nouvelle reconnaissance à toute mutation de
» seigneur ou de paysan, toutes et quantes fois il en sera requis. »
O r , celte défense d’aliéner sans la permission du seigneur, est une
précaution prise pour assurer le paiement des droits de lods et ventes,
droits reconnus fé o d a u x, et comme tels abolis par les d écrets, avis
du conseil d’état et arrêts que nous avons précédemment rappelés. La
réserve des lods et ventes est donc une nouvelle circonstance carac
téristique de la féodalité dont l’acte de 17^5 se trouve entaché.
Quant à l’obligation de fournir une nouvelle reconnaissance à toute
mutation de seigneur ou de paysan, c’est-à-dire, chaque fois que lar
directe seigneurie changerait de main par décès ou autrement, et chaque
fois que le domaine de Lollierc passerait sur la tête d’un autre paysan,
c’ est une condition particulière et spéciale au bail à cens, aux actes
constitutifs d’une censive et de droits seigneuriaux.
5° Sous réserve des tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays
d’ Auvergne.
Argon et ses annotateurs, liv. 2 , chap. 4 i titre des ccnsivcs cl droits
seigneuriaux, nous font connaître ce que c’ est que la taille aux quatre
c a s, redevance féodale, s’il en fut jamais. C ’est le double des devoirs
que le sujet doit ordinairement, et qu’il paie au seigneur.
i° Quand il est fait chevalier;
2° Quand il marie noblement sa fille aînée ;
3 ° Quand il est prisonnier de gu e rre , pour payer sa rançon ;
4e Quand il part pour une expédition en terre sainte , ou pour la
visite des saints lieux.
L a Coutume d’ Auvergne, chapitre 2 5 , intitule des tailles, gaits et
AUTRES
SERVITUDES,
p o r t e .’
Art. i cr. « Le seigneur haut-justicier a droit el faculté de tailler 5« hommes
» reseans et sujets en sa haute justice, cl pour raison d’icellec/z quatre cas»
» Art. 2. C ’est à sa vo ir, quand il se fait chevalier ; quand il va en
» voyage o u tre -m e r visiter la terre sainte; quand il est prisonnier
» des ennemis , et quand il marie scs filles en premières nopces. (**)
( ') L a ta ille a u x quatre c a t, telle que l’imposait le seigneur de Laroque, n'était pas aussi douce
que celle de la coutume. Nous voyous dans une reconnaissance du \ï juin KiS4, imprimée dans le
Mémoire contre les héritiers A uzoi.lk, qua le seigneur stipule en ces termes : « K l davantalge , de payer
» le double cens dudit argent <v. quatre cas en suivant; sçavoir: pour la iriuvelle chevalerie dudit seigneur
» de Laroque, pour le mariage de scs lils, lilles, frères, sniirs, nepveus et niepees, ou pour les mettre en
» religion ; pour le fait de la guerre ou arriére-han que ledit seigneur sera mande par le r o i, notre »il« r
» pour retirer ledit seigneur de prison, étant faict prisonnier en faict de guerre ; etc. »
�( 25 )
On voit que la coutume attribue la taille aux quatre cas à tous les
seigneurs liauts-justiciers , et que ¡NI. de Miramon l’impose, à ce titre ,
au concessionnaire du domaine de Lollière. Est-ce là , nous le deman
dons , une rente, une prestation purement foncière? N ’cst-ce p a s , au
contraire, comme l’indique la rubrique du chapitre 25 de la C ou tu m e,
une servitude, une de ces obligations inutiles à qualifier, auxquelles la
féodalité' avait soumis les personnes et les choses ? Peut-on d o u te r,
après une telle condition, que l’acte de 1745 dont on demande l’exé
cution , soit un titre mélange de féodalité et par conséquent atteint
par la loi du 17 juillet 179'^ ? Si l’on en doutait, il suffirait de lire
ce que dit à ce sujet D u n od , traité des prescriptions, partie 3 , cha
pitre n : « L ’origine des tailles, dit-il, est plus incertaine. On peut
” cependant l’attribuer à la promesse qu'on fa isa it ja ire aux esclaves,
* qu’ils feraient des dons à leurs maîtres, particulièrement dans le cas
” de mariage de leurs filles, lorsqu’ils seraient affranchis. Les seigneurs,
n ont étendu ce droit à d’autres cas extraordinaires , auxquels ils étaient
” constitués en dépense ; surtout pour une cause p u b liq u e , comme
” pour rançon , nouvelle chevalerie et voyage d’outre-mer ; lesquels
” joints au mariage d’une fille du seigneur , font les quatre cas auxquels
" les tailles sont dues aux liauts-justiciers par leurs sujets dans cette
” province. »
6° Enfin , M. le marquis de Miramon se réserve les autres droits et
devoirs seigneuriaux dus et accoutumés, et contenus aux terriers anciens
dudit seigneur de la seigneurie de Laroçuc.
Il serait important de consulter ces anciens terriers de la seigneurie
de Laroque , puisqu’ils énoncent la nature des droits et devoirs dûs
et accoutumés, dont M. le marquis de Miramon se fait la réserve. A
défaut de ces pièces importantes , nous ferons observer que la réserve
a pour o b je t , non-seulement les droits, niais encore les devoirs sei
gneuriaux. Si l’on pouvait contester sur cette expression droits seigneuriaux, bien qu’ elle caractérise assez nettement la nature féodale des
droits réservés , au moins ne peut-on pas raisonnablement élever des
difficultés en ce qui concerne les devoirs seigneuriaux réservés. Les de
voirs ne sont ni un cens , ni une rente , lorsque surtout ils sont ex
primés par opposition aux droits. Les devoirs s’ entendent alors de quelque
chose de personnel, tel que la foi et, hommage , quand ils concernent
seigneur, ou la corvée et autre servitude personnelle, quand ils re
gardent le paysan. En se réservant donc les devoirs seigneuriaux, M. le
4
�( 26 )
marquis de Miramon avait imposé au concessionnaire du domaine de
Lollière et à ses héritiers et a ya n t-ca u se , des obligations féodales,
tenant uniquement à la féodalité , et qui doivent disparaître avec elle
et avec tout ce qu’elle a touché et vicié.
Nous avons d i t , au n° 4 ci-dessus, que le sieur Pierre B a d u e l,
en acceptant la concession de INI. le marquis de M iram on, avait promis
de ne mettre cens sur cens sur le domaine de Lollière, ni autre pen
sion annuelle, sans le consentement du seigneur. Cette prohibition
tient encore à la nature du contrat de bail à cens, et non à celle
du bail emphytéotique, ce qui confirme de plus en plus notre allé
ga tio n , que l’acte du 6 mars 1755 n’est pas une emphyléose.
P o u r démontrer le contraire, M me de Châtillon , dans le Mémoire
qu elle a publié , prétend que cet acte renferme même un véritable
bail emphytéotique à tems. On sent bien l’intérêt qu’aurait la deman
deresse à prouver qu’ effectivement l’acte de 1755 n’est autre chose
qu’ une emphyléose temporaire, puis qu’alors elle ne serait point frap
pée par les lois abolitives de la féodalité, l’ einphytéose à tems n’étant
considérée que comme une espèce de louage par plusieurs arrêts ,
notamment l’un de la cour royale de R o u e n , du 1 " août 1811. (Sirey,
tome 1 2 - 2 - 7 6 . ) Mais les principes de la matière et la simple lecture
de l’acle ne permettent pas de faire celle erreur.
En principes, l’emphyléose est censée faite à perpétuité , si , par une
clause expresse, elle n’est stipulée temporaire, c’ est ce qu’atteste le
Rcpertoire universel, V° emphyléose , § 1“ . A i n s i , quand même il 11c
serait rien dit dans l’acte de 1755 sur la durée de la concession, elle
serait réputée perpétuelle.
Mais il s’en faut bien que cet acte soit muet à cet égard. Il est
formellement exprimé que la concession est faite pour et moyennant le
cens et rente annuels et perpeluels , seigneuriaux et uniformes d e , etc.
Plu s loin , il est ajouté que le sieur Baduel a promis et s’est obligé
de payer les susdits cens et rente de même que toutes les autres char
ges ci-dessus spécifiées annuellement en leur tems et saison a ri;ni>KTurrE
audit seigneur marquis de Miramon et aux siens.
V ainem ent, dit-on, dans le Mémoire publié que c e s mots : Perpétuels
et Perpétuité ne concernent que le service et le paiement des presta
tions , sans se rapporter à la durée de la concession. Nous répondons
que celte distinction est plifs subtile que solide ; que la perpétuité con
sentie pour le paiement des prestations est nécessairement corrélative à
�( 27 )
la perpétuité de la dure'e de la concession ; que l’une ne peut exister sans
I autre , et qu’il serait dérisoire de prétendre avoir assujetti le sieur
Baduel à servir perpétuellement une rente , tandis qu’il ne pourrait
jouir que temporairement du domaine productif de la rente.
A in s i, l’acte du 6 mars 1755 est un acte où la féodalité sue par
tous les pores , si l’on peut s’exprimer ainsi ; c’ est une concession à
perpétuité faite sous des Conditions que les lois , les décrets , les avis
du conseil d’état et les arrêts frappent de suppression sans nul doute.
II faudrait une préoccupation bien singulière pour rester dans l’indécision à cet égard, après avoir lu l’acte , et parcouru la législation de la
Matière ; il nous reste cependant une réponse à faire à l’objection ti
rée de Yallodialité de la ci-devant Auvergne , objection d’avance refutée
parce que nous avons déjà dit , sur laquelle néanmoins il est à pro
pos de revenir pour completter la défense des héritiers Baduel.
§ 5objection tirée de ce que la ci-devant Auvergne était un pays allodial
ri a aucune jorce ni application dans la cause actuelle.
Obligés de traiter une matière aujourd'hui peu connue , et dont un
deuii-siècle d'affranchissement nous a heureusement débarrassés, on nous
pardonnera de donner quelques définitions inutiles sans doute aux an
ciens jurisconsultes, nos maîtres; mais qui faciliteront à beaucoup d’au
tres l’intelligence d’une discussion étrange aujourd’hui , quoique elle
devienne nécessaire dans la cause des héritiers Baduel.
O11 appelait pays dallodialité, ceux où les héritages fonciers étaient
tenus en jranc-alleu.
L e mot alleu avait originairement la même signification que celui d'im nuiuble , d ’heritage. Le terme de franc fut ajouté, dans la suite, pour
désigner l ’alleu ou l’héritage entièrement libre.
Ainsi , le Jranc-alleu était une propriété foncière entièrement lib r e ,
rçui ne reconnaissait aucun seigneur, et, par conséquent, exempte de
lous droits seigneuriaux.
l)ire comment il y avait en F ra n c e , dans le pays des F rancs, des
héritages libres el d’autres qui ne l’étaient pas , serait fort long et fort
uficile, car les auteurs Montesquieu, Mably, Boulainvillers et beau
coup d’autres , ne sont point d’accord. L ’opinion le plus généralement
admise , fait remonter à l’époque de la conquête la division et la dis
�( 28 )
tinction des biens en francs-alleux et en biens soumis aux droits et
devoirs seigneuriaux. Il serait plus curieux qu’utile de rechercher les
causes de cette division.
Ce qu’il importe de bien prc'ciser, c’est que , d’après Argou, desfiefs,
chapitre 3 , et tous les auteurs qui ont écrit sur les matières féoda
les le jrapc- alleu n’est autre chose qu’un héritage qui ne dépend d’au
cun seigneur, ni en fief ni en censive , qui ne doit ni foi et hom
mage , ni autres devoirs seigneuriaux.
D ’après l’article 68 de la Coutume de P aris, et les dispositions d’un
grand nombre d’autres coutumes , e t , en cela , tous les auteurs sont
d’un avis conforme , il y avait deux sortes de franc-alleu , le noble et
le roturier. L e franc-alleu noble était celui qui avait ju stic e , cen sive,
ou fief mouvant de lui. L e franc-alleu roturier était celui qui n’avait
ni ju s tic e , ni aucune mouvance.
Quand nous disons que le franc-alleu était un héritage indépendant,
ne devant ni f o i , ni hommage ou autres droits seigneuriaux , nous ne
voulons pas dire qu’il y avait en France des héritages possédés à titre
de souveraineté, car les francs-alleux étaient comme les autres héri
tages , sous l’ empire de la souveraineté royale , surtout en ce qui con
cernait la justice, les seigneurs hauts-justiciers, comme on les appelait
alors, étant obligés de reconnaître que leur justice était une éma
nation de la puissance royale ou souveraine.
Cela p o s é , et pour rentrer dans la cause voici comment on a cher»
ché à éluder les dispositions des lois abolitives de la féodalité , à l’ égard
des rentes et redevances assises sur des héritages situés en pays allo
d ia l, c’ est-à-dire , tenus en franc-allcu.
L ’art. i cr de la loi du 17 juillet 1793, a-t-tin d it, ne supprime que
les redevances seigneuriales , et l’art. 2 maintient les rentes et prestatalions purement foncières. O r , dans le pays d’allodialité , où les
héritages étaient francs et lib re s, toutes les redevances étaient de leur
nature purement foncières , et par conséquent maintenues par la loi
même du 17 juillet 1793; et quelques arrêts avaient admis ce système
qui tendait à sauver les débris du naufrage léodal. Nous avons même
déjà vu le décret impérial du 2«1) nivôse an XIII , adopter celte idée.
Continuant le raisonnement, 011 a d it: L e t i t r e 3 i de la Coutume
d’Auvergne, et Chabrol, son savant c o m m e n t a t e u r , établissent 1allodialitc du haut et bas-pays d’Auvergne. Le c o m m e n t a t e u r ajoute même
que ce titre 3 i de la Coutume , a etc reçu en entier par les habitons du
�( 29 )
droit écrit d'Auvergne. D o n c , les rentes et redevances pcrar concession
de fonds dues par des héritages situés en Auvergne, ne peuvent être
entâchées d’une féodalité impossible, puisqu’elle est repoussée par la
Coutume ; et dès-lors , les rentes censuelles ou emphytéotiques n’y ont
pas été supprimées sans indemnité par les lois de 1792 et I 7 g 3 , qui
n ont frappé que les rentes féodales.
Ce système , qui n’est pas nouveau, car nous l’avons déjà vu se for
muler , sert de base à la consultation et aux Mémoires de M mc de
Chûtillon. L a consultation et le Mémoire s’efforcent de le rajeunir au
moyen de quelques arrêts mal compris , qu’il suffira d’expliquer pour
dissiper de trompeuses illusions.
Quand nous admettrions, avec Chabrol, que le titre 3 i de la Cou
tume était reçu en pays de droit écrit d’Auvergne , ce qui serait dou
teux pour le Carladès , d’après le procès-verbal, il 11’cn résulterait point
Que tous les héritages étaient nécessairement allodiaux. Chabrol luimême a soin de nous prémunir contre cette idée, en convenant, tome 2,
page 677 , que « s’il y a un bail à cens , ou une reconnaissance qui
” )' équipolle , la présomption d ’allodialité est totalement détruite quant
” a l’héritage qui y est compris. » Cela devait être, en eifet, à moins
de prétendre , malgré l’évidence , que tous les biens étaient roturiers
dans le haut et bas-pays d’Auvergne.
« D e cela seul qu’un pays était allodial, dit M . Dalloz aîné, \ ° féo * dalité , chap. 2 , scct. i re, n° 8, il ne s’ ensuit pas que toutes les Te" devances qui y étaient créées n’ étaient point féodales ; elles avaient
” ce caractère lorsque la redevance était féodale par sa nature ou sa
" qualification ; » et il cite , pour confirmer cette règle , l’arrêt de la
cour de cassation du 27 février 1809 , qui décide que , dans le pays
de Jranc-alleu , il ne résulte autre chose si non , que sous le ressort
des coutumes les plus allodiales, il n’y avait pas de seigneur sans titre.
Dalloz aurait pu citer, à ce sujet , un grand nombre d’autres dé
cisions semblables.
Effectivement , l’arrêt de la cour de cassation , du 23 vendémiaire
an X I I I , rapporté par M me de Cliàtillon sous le n° 5 , des pièces justi
ficatives annexées à la consultation , décide de la même manière en
Ce qui regarde précisément la Coutume d’Auvergne. Il rejette le pourvoi
contre un arrêt de Iliom , parce que « toutes les redevances dues sur
" les biens situés dans le ressort de cette coutume, soumise n la maxime,
” nul seigneur sans titre, étaient de leur nature réputées purement fon-
�( 3o )
» cières , à moins que le contraire ne f û t positivement stipulé par acte
» valable. » (S ir e y , tome 5— i — 5 7 .)
Plus re'cemment, et le 25 mai 1824, la cour régulatrice, en recon
naissant qu’aux termes du droit romain, les droits de cens, commise ,
etc. , pouvaient être imposés aux preneurs des baux emphytéotiques
proprement dits, sans avoir un caractère fc’odal dans un pays d’allodialilé,
ajoute : Pourvu que les circonstances particulières de la transaction n ’clablissent d'ailleurs sa nature féodale , ou mélangée de féodalité. ( Sirey ,•
tome 25— 1— 219). E t il est à remarquer que, dans l’espèce jugée, le
bailleur n’était point seigneur du territoire, et qu’il ne s’était pas at
tribué cette qualité dans l’acte constitutif de la redevance.
C ’est donc le'titre qu’il faut consulter et non la coutume ; c’est dans
le titre qu’il faut chercher les preuves de la féodalité, parce que s’il
est vrai que , sous les coutumes allodiales , la maxime nul seigneur sans
titre, est le droit commun , le titre forme le droit exceptionnel, et
qu’avec ce titre , s’il renferme des signes de féodalité , les héritages
cessent d’être régis par le principe de l’allodialitc'.
L ’arrêt de la cour de cassation, du 27 février 1809, que nous venons
de citer , consacre cette doctrine , et ajoute , en parlant des titres,
que « l’esprit général de la législation relative à la suppression des droits
» féodeanx, est d’en détruire toutes les traces, même dans ce qui n ’ayant
» pas pour base le pouvoir fé o d a l, en réveillerait cependant (idée par des
» stipulations qui en supposent l'existence, et qui ne pouvaient légalement
» émaner que de lui; que c’ est aussi dans ce sens que s’expliquent et
» l’avis du conseil d’é ta t , du i 3 messidor an X I I I , et le décret im» périal , du 3 avril 1807. » ( S ir e y , tome y — 1— 242.)
Une rente était qualifiée dans le titre, de cens annuel et perpétuel,
nature d ’ernphytéose, portant lods et ventes, retenue, rem uage, et tous
autres droits censaux et seigneuriaux. Il s’agissait de biens concédés
dans un pays d’allodialité. Par arrêt du 3o mai 1809 , la cour de cas
sation déclftre cette rente féodale et supprim ée, « attendu que la qua» lilication de la rente dont il s’agit, et les droits qui y sont inliérens ,
v dispensent d’examiner le point de f a it , si le bailleur originaire des
» fonds qui y sont affectés, en était le seigneur, ou s’il les possédait
» allodialcment ou en simple censive, puisqu’il résulte de la qualification
» et des droits attachés à la rente, qu’il s’était réservé une directe sur
» les fonds par lui concédés ; — qu’ il suffit que les droits de lods et
» v e n te s, et autres que le bailleur a établis ou <iu il s est fait recon-
�( 3i )
» naître , soient contraires à la liberté et aux avantages de Vallodialitê,
“ et «le la franchise que les lois précitées ont eu pour objet ; que les
» droits réservés par le propriétaire de la rente soient les mêmes , et
J> qu'ils produisent les mêmes effets que les droits féodaux qui ont été
® abolis , pour que les principes qui ont déterminé cette abolition,
’> soient applicables à ladite rente.» ( Sirey , tome 10— i — 2ÜG. )
Ces arrêts et bien d’autres que nous pourrions citer, sont conformes
au* principes des lois abolitives de la féodalité, tels que les lo is, les
décrets , les avis du conseil d’état et les diverses autorités que nous
avons rappelés au § 3 , ci-dessus , les ont établis. Il en résulte que
le titre et les stipulations qu’il renferme sont seuls à considérer , même
dans les pays allodiaux , pour décider si les redevances sont ou non
féodales. Le territoire disparait dans cette appréciation où il ne s’aque de vérifier le titre ; et c’est pour n’avoir pas bien réfléchi sur
cette doctrine de la jurisprudence que beaucoup de personnes se sont
hissées induire en erreur sur son véritable esprit.
oppose cependant deux arrêts qui semblent à des yeux prévenus,
contraires à la doctrine que nous venons d’ établir; examinons.
Par arrêt du i 5 février i 83o , la cour royale de Rioin avait déclare
Cnlaché de féodalité et frappe de suppression le bail à cens d’une
Raison située dans la coutume allodiale d’Auvergne, bien que le bailleur
n ait point pris dans l’acte la qualité de seigneur ; mais il s’était réservé
h directe seigneuriale. L a cour régulatrice a casse' cet arrêt, le 3 i dé
cembre i 833 , « attendu que la maison baillée à rente , élait tenue en
" franc-alleu roturier ; que par une conséquence nécessaire, le 'bail—
leur ne pouvait conférer à cet héritage une qualité féodale , ni se
conférer à lui-même la qualité de seigneur, que la directe seigneurie
* dont parle la Coutume d’Auvergne , ne peut s’entendre que du dotni” fuurn dirccturn, tel qu’on l’induit des lois romaines , et qui ne tient
a rien à la féodalité ; — attendu , dans l’espcce que le bailleur non
* seulement n’était pas seigneur , mais qu’il ne s'est pas donne cette qua“ Me ", e tc ., (Sirey, tome 34— i — 171.)
Il nous parait difficile de voir dans cet arrêt une contradiction avec
teux précédemment rendus par la même cour ; nous y trouvons , nous ,
au contraire , une confirmation des arrêts antérieurs. La cour régula
trice commence par rendre hommage au principe «le l’allodialité , et
a la maxime nul seigneur sans titre; p u is , examinant le litre, elle voit
1 U il s’agit d’un iranc-allcu roturier, que le bailleur n'avait pas la puis
�( 32 }
sance d'ennoblir, et qui mime n’avait pas eu cette prétention puis
qu’il ne s’était pas qualifié seigneur. Dans celte circonstance, il eût été
bien rigoureux de voir dans le titre des signes de féodalité, et de ne
pas reconnaître dans la directe seigneuriale reservée , cette seigneurie
privée , ou puissance en propriété , dont parle L o y se a u , Traité des sei
gneuries , c’est-à-dire , le simple dorninium directurn des lois romaines.
Cet arrêt est donc en harmonie avec la jurisprudence, et si parfaite
ment d’accord avec elle , que la cour de cassation a soin de faire re
m arquer, dans un considérant particulier , que non seulement le bailleur
n’ était pas seigneur, mais qu’il ne s’est pas donné cette qualité, motif
qui laisse supposer que , s’il en eût élé autrement, s i , dans le titre ,
le bailleur s’ était arrogé la qualité de seigneur, la décision aurait pu
être différente.
Un autre arrêt de la cour de cassation, du 3 juin i 835 , le dernier
sur cette matière qui soit rapporté par les arrêtistes, est relatif à un
droit de percière ou charnpart , établi pareillement dans la Coutume
d’ Auvergne. En rejettant le pourvoi contre un arrêt de lliom , la cour
reconnaît que la percière n’emporte pas la directe seigneurie , et elle
ajoute :
« Attendu que l’Auvergne était un pays allodial, régi par la maxime ;
» nul seigneur sans titre, et où fief et justice n’avaient rien de commun ,
» où , par conséquent , le droit de guet , l’obligation de se présenter aux
» assises , se référaient à la justice , étaient dûs au seigneur liaut» justicier, rationc superioritatis, sans avoir rien de féodal; — attendu
» que les titres des percières dont il s’a g it , ne sont ni féodaux , ni
» mélangés de féodalité. » (Sirey, tome 35— i — 3 a 4 .)
Il y a dans les motifs de cet arrêt , une distinction entre le f i e f et
la ju stice, qui s’accorde peu avec ce que dit M. Dalloz aîné, V° féodalité r
sect. i rc, ait. i cr, que, « lorsqu’il s’agit de décider si un cens est sei» neurial ou ne forme qu’une simple rente foncière , la haute justice
» résout la queslion : le cens dû au seigneur haut-justicier est, par
» cela seul , réputé seigneurial. »11 y a peut-être aussi d é s a c c o r d avec
les avis du conseil d’état et les décrets que nous avons précédemment
cités. Mais enfin , il n’y a pas contradiction avec la règle posée dans
tous les arrêts , que pour les pays allodiaux il faut s’en référer au titre
et savoir s’ il est féodal ou s’il ne l’est point.
Esl-il bien vrai d’ailleurs que fie f et justice n’ont rien de commun
daus les pays allodiaux ; cl doit-on entendre cette proposition en cc
�( 33 )
se n s , que la haute justice exclut dans ces pays la présomption de
féodalité , malgré les titres ? Ce serait, nous le cro yon s, pousser trop
loin les conséquences du principe que fief et justice n’ont rien de
commun. Si l’un peut être séparé de l’autre et n’en dérive pas né
cessairement , les coutumes et les auteurs nous apprennent pourtant
que fief et justice peuvent se trouver réunis dans la même main. Bacq u e t , Des droits de ju stice, chapitre 6 , après avoir établi , au n° 4 i
que fief et justice n’ont rien de commun , que le fief peut appartenir
à l’un et la justice à un autre , les suppose réunis dans la même
personne lorsqu’il dit : « Quand le vassal baille à son seigneur do* minant l’aveu et dénombrement de son fief, il fait mention expresse
" qu'audit j i e f il a justice haute, moyenne et b a sse, ou bien haute
” justice seulement, ou bien moyenne el basse justice tout seulement. »
D u n o d , Traité des prescriptions, chapitre 8 , s’exprime ainsi : « Les
" justices ayant donc été usurpées par les possesseurs des fiefs et à
" l’occasion des fiefs , elles y furent communément unies , et en firent
M la partie la plus noble. Ce ne fut néanmoins que par accident; car
“ la justice en elle-même est différente du fief, comme l’autorité pu” blique diffère de la propriété , et le droit du souverain de celui du
" particulier ; en sorte que l’un n’emporte point l’autre. Ainsi l’on peut
” avoir la justice sans aucune directe dans un territoire , et toute la
" directe du territoire sans la justice. C ’est pourquoi les auteurs disent
” que fief et justice n’ ont rien de commun , l’un n’attirant pas néces” saireinent l’autre , quoiqu’ils soient ordinairement unis. » E l c’est ce
que démontre dans la cause actuelle, le titre du 6 mars i j 55 , où M. le
Marquis de Miramon stipule tout à la fois , comme seigneur du terri
toire et comme haut-justicier.
L arrêt que nous examinons , attribue au seigneur haut-justicier et
non au seigneur féodal, le droit de guet; el la consultation de M me de
Chalillon invoque la pratique de ÎNIasuer et C h a b r o l, pour démontrer
que ce droit n’avait rien de féodal.
Cependant, l'article i o , titre 2 de la loi générale du i 5— 28 mars 1790,
concernant les droits féodaux supprimés sans indemnité , abolit formel
lement les droits de guet et de garde, comme droits féodaux. De
Plus , soit Mazncr , soit Chabrol , et tous les auteurs , établissent
que le droit de guet étail une servitude personnelle à laquelle le sei
gneur avait droit de contraindre ; c’é ta il, comme Bœrius le décide ,
dccisio 212, nos 8 cl 21 , des corvées dues pour les réparations du clià' 5
�( 34 )
leau. II les considère , dit C h a b r o l, tome 3 , page 4^0 , comme faisant
partie du château même , sunt partes castri. Ce droit de guet fut fixe
à cinq sous par a n , par l’ordonnance de Louis X I , de 147f) ? et ^
se payait sur ce taux en Auvergne. Despcisses , tome 3 , page 2 1 6 ,
n° 5 , cite un arrêt du parlement de Paris , du 22 avril i 5 i 8 , por
tant que ce droit était du , même après que le château était démoli.
On peut donc être surpris que l’arrêt de la cour de cassation , en
distinguant le fief et la justice , ait attribué le droit de guet à cette
dernière, et surtout qu’il ne l’ait pas considéré, de même que la loi
du i 5— 28 mars 1790 , comme un droit éminemment féodal et supprimé.
D ’ailleurs, peut-on sérieusement prétendre que le droit de guet n’avait
rien de féodal , parce qu’il se référait à la justice , étant dû au sei
gneur haut-justicier rationc superioritatis? ce serait contredire l’histoire
de l’établissement des justices seigneuriales ; ce serait oublier q u e ,
dans l’origine, les possesseurs de fiefs étaient guerriers et juges en
même tems ; que leur justice et leur fief étaient révocables, et devin
rent permanens , héréditaires et patrimoniaux par suite de l’usurpation
des seigneurs sur la puissance souveraine. L a taille aux quatre cas
était aussi attribuée, comme le droit de g u e t , aux seigneurs haulsjusticiers par le titre 25 de la Coutume d’Auvergne; serait-il raison
nable de soutenir que c ’est pour la justice et rationc superioritatis, que
les vassaux étaient obligés de payer quand le seigneur haut-justicier
était fait chevalier, quand il mariait ses lilles , quand il était prison
nier de g u e rre , quand il lui prenait fajitaisie de faire un voyage en
terre sainte ?
Quoiqu’il en soit, il ne résulte pas de cet arrêt que la haute jus
tice et le fief soient incompatibles , et que la justice , excluant l’idée
de la féodalité, il n’y ait plus lieu d ’examiner les litres pour savoir
s’ils ne contiennent rien de féodal. La cour de cassation qui a pu
se tromper dans l’un de scs m otifs, ajoute celui-ci ; « Attendu que
» les titres des pcrcières dont il s’a g it , ne sont ni féodaux , ni mi:» langés de féodalité , » et prouve par là-même qu’il faut toujours
recourir au titre.
L e titre sur lequel la cour a prononcé était constitutif d’un droit
de percière, portion de fruits qui se prélevait sur la terre m ê m e ,
comme l’atteste C h a b r o l, tome 3 , page ¿3. C ’est donc d une part de
récolte qu’il s'agissait, d’ une espèce de dîme foncière, et non d’ un
bail à cens , ou emphytéotique. La cour de lViom , et la cour de cas
�(35)
sation après elle , ont bien pu ne pas reconnaître ni caractère de féo
dalité',, ni mélange de féodalité dans une concession de terrain sous
réserve d’une part aux fruits.
Cet arrêt ne peut donc faire naître l’idée d’un changement de juris
prudence. Il suffit, pour se convaincre du contraire, de bien se pé
nétrer des circonstances sur lesquelles la cour régulatrice a eu à pro
noncer , et des motifs de sa décision.
Quant à la cour royale de Riom , elle vient de prouver par un arrêt
récent, que sa jurisprudence n’a point varié. Par acte du 3 octobre i y i o ,
ta veuve du marquis de Chavagnac, tutrice de son fils m ineur, dé
laisse à titre de rente annuelle foncière et non rachetable , à Pierre
Baratier , un champ situé au M e y n ie l, paroisse de L u g a r d e , mouvant
en roture de la terre de Lugarde , aux cens anciens el accoutumés, et
Moyennant 60 francs de rente. L e 21 mai 1776, Pierre Tournadrc fut
subrogé aux droits de Pierre Baratier, et le 24 fructidor an X , il
approuva et ratifia le contrat de rente annuelle de 60 francs du 3 oc
tobre 1 y5o. Cette rente fut postérieurement transmise aux pauvres de
Lugarde. L e maire de la commune , dans l’intérêt des pauvres , assigna
]cs héritiers Tournadrc devant le tribunal civil de M urât, en paiement
de cette rente; el le 27 novembre 1833 , jugement qui déclare l’acte
du 3 octobre 1750 et celui du 24 fructidor an X , nuls et de nul effet,
et le maire mal fondé dans ses demandes ;
« Attendu que la loi du 17 juillet I7g3 a supprimé non-seulement
M les cens seigneuriaux et les redevances qualifiées seigneuriales, mais
" encore les rentes foncières crcces simultanément avec ces redevances,
" avec ces cens ; que la convention nationale a interprêté dans ce sens
” la loi du 17 juillet 1793, par deux décrets, le premier, du 2 no” vembre i 7[)3 ; le second, du 17 venlAse an II;
- " Attendu que , dans les pays de droit é c r i t , la renie foncière était
“ considérée comme féodale , toutes les fois qu’elle avait une origine com" rnune avec un cens proprement dit;
” Attendu qu’ on ne peut supposer aux législateurs de I7y3 d’avoir eu
“ ^intention de donner à la loi du 17 juillet, dans les pays coutuntiers,
” une exécution moins étendue que dans les pays de droit écrit ;
” Attendu que l’acte du 24 fructidor an X , est purement récognitif,
" qu’il n’opère pas novation , cl que par suite , il est entaché du même
" vice que le litre primordial, etc... »
, Ce jugement a été conlinné par arrêt de la cour royale de R iom ,
du
juillet i 837 .
�( 36 )
Tenons donc pour certain qu’il n’y a pas de changement de ju
risprudence ; e t , disons-le hautement, s’il y en avait, ce ne serait
pas une raison pour déserter les lois existantes. Les jurisconsultes sa
vent bien que la jurisprudence est parfois obligée de céder aux néces
sités passagères de la politique; c’est un malheur dont nous avons été
témoins au commencement du régime impérial. La restauration, il
faut en convenir , se défendit d’ un exemple semblable , puisque par la
loi du g novembre i 8 i 5 , article 8, elle déclarait coupables d’actes sé
ditieux toutes personnes qui répandraient ou accréditeraient les bruits
du rétablissement des dîmes ou des droits féodaux. Sous l’empire des
institutions de juillet i 83o , on n’ a pas à craindre non plus de ces
retours à de vieilles idées dont la magistrature française s’est pour
jamais débarrassée. Suum cuique sans doute ; mais il ne faut point ren
verser les lo is, ou leur donner des interprétations forcées qui.ont le
même résultat, pour rétablir ce qui ne peut plus exister, et le rétablir
au préjudice de nouveaux droits acquis.
Concluons de tout ce qui précède q u e , pour les pays d'allodialité,
comme pour les autres contrées, les lois de 1792 et I 7 g 3 , frappent
également de suppression les rentes et redevances féodales ou mélan
gées de féodalité.
Alors revient naturellement ce que nous avons exposé sur le cai'aclère féodal de l’acte du 6 mars l'jS j , dans le § 4 ci dessus. M. le mar
quis de M iram on, s’il vivait encore , trouverait fort étrange qu’on mit
en doute sa qualité de seigneur, lui qui comptait dans scs titres vingt
et quelques seigneuries , sans y comprendre les coscigneuries de V ie
et de Thiézac ; lui qui joignait à la directe seigneuriale les droits de
justice haute , moyenne et b a sse , qui se réservait le droit de retrait
ou de prélation, les droits de lods et ventes , et enfin , la taille aux
quatre cas, cl autres droits et devoirs seigneuriaux.
E t savez-vous à quoi il faudrait réduire tant de titres, tant de droits
superbement proclamés ou imposés, pour éviter en pays allodial, l’ap
plication des lois suppressives de la féodalité ? Il faudrait avouer que
ces nombreuses seigneuries ne constituaient qu’un alleu roturier; il fau
drait déclarer, à la face de la justice cl des hommes trompés, que
M . le marquis de Miramon n’était qu’un simple roturier comme ses
paysans , qu’il n’avait que des biens et des droits possédés en roture ,
et que le haut et puissant seigneur, comme il est q u a li f i e dans 1 acte de
1755, n’était quun vilain, comme 011 daignait nous nommer alors, nous
�( 37 )
tous qui n’ avions ni seigneuries , ni directe , ni haute, moyenne ou basse
justice, ni droits de rétention par prélation, de lods et ventes, et q u i ,
privés <le la taille aux quatre cas, étions obligés de nous racheter nousnicmes si nous étions prisonniers de g u e rre , et de marier nos filles
a nos frais et dépens. Certes ! maigre l’intérêt de la cause , nous ne
croyons pas que cette injure soit sérieusement faite à la mémoire de
^ 1- le marquis de Miramon.
On se trompe , au reste , sur les effets ou les conséquences de l’ai—
lodialité. On se trompe , parce qu’ on ne veut pas remarquer la dif
férence qu’ il y avait dans les pays allodiaux entre les héritages nobîts
et les héritages roturiers, ou bien entre les fiancs-alleux possédés par
les nobles et ceux possédés par les roturiers. On confond volontaire
ment ces deux espèces d’héritages pour les soustraire ensemble à l’appl'cation des lois suppressives de la féodalité : c’est une erreur qu’il
importe de relever pour l’empêcher de se répandre.
différence entre le franc-alleu noble et le franc-alleu r o tu rier,
c°nsiste principalement en ce que le propriétaire du franc-alleu noble
pouvait l’inféoder ou l’accenser, tandis que l'acccnsement ou l’inféodatioil
du franc-alleu roturier ne pouvait jamais avoir lieu. De cette règle féodale
(lue nous allons établir, résulte la suppression ou non-suppression des
prestations et redevances.
l*our justifier cette proposition , nous pourrions citer le titre ic),
article 5 , des arrêtés de Lamoignon, portant : « Celui qui possède un
’’ banc-alleu roturier, ne peut donner aucune portion de son domaine
a cens. » Nous nous bornerons à rappeler ce que dit M. ilenrion
e Pansay, dans ses Dissertations féodales, tome i cr, article alleu} § <).
Le propriétaire d’uu alleu roturier , dit le savant jurisconsulte , ne
peut ni l’inféoder ni l’accenser ; il y en a une infinité de raisons : la
principale, c’est qu’ on ne peut donner à fief ou à cens que des hcr*tages nobles; c’est que, pour pouvoir communiquer ou se réserver
puissance féodale, il faut l’avoir, il faut en être investi; enfin,
c est que les fiefs sont des dignités réelles , et que le r o i , ou ceux
flUl en ont reçu le pouvoir de lui, peuvent seuls conférer les dignités,
^e qui constitue la noblesse d’un héritage, c’ est un titre de seigneurie
aJ°uté à la propriété. Le franc-alleu noble est donc_une seigneurie,
Uu
actif. Un fief est un héritage dans lequel la propriété est unie
“ ,l la puissance publique....... »
peu plus loin , il continue : « Sans doute le propriétaire d’un
�(38 )
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
héritage peut le vendre, le donner à renie, à bail emphytéotique, en
un m o t , en disposer comme il le juge à propos ; mais cette règle
reçoit une exception à l’égard du cens. Pour avoir le droit d’imposer
sur un immeuble une redevance censuclle et seigneuriale, il ne suffit
pas d’ en être propriétaire , il faut avoir cette propriété à titre de
seigneurie : celte décision sort de la nature des choses. Le bail à cens
s’ établit par la séparation du domaine direct et du domaine ulilc ;
ce dernier passe seul entre les mains du prem ier, le premier demeure en celle du bailleur. A la vérilé , le bail emphytéotique cmporte de même la séparation des deux domaines ; et tout le monde
peut donner à emphytéose 1111 héritage tel qu’il soit, noble ou roturier. Mais il faut distinguer deux espèces de domaines d irec ts, l’un
particulier et privé , l’autre public et seigneurial. Il ne reste entre les
mains du bailleur à emphytéose que la directe privée ; et le contrat
d’accenseinent doit emporter la directe seigneuriale et publique ; c’ est
cette directe seigneuriale qui en constitue l’essence. »
A cette imposante autorité nous pouvons ajouter celle de Chabrol »
tome 2 , page 677 , qui déclare formellement que l’existence d’un bail
à cens, ou d’une reconnaissance qui y équipolle, détruit totalement
la présomption de l’allodialité ; ce q u i , certes , est d’une autre consé
quence , puisque le bail à cens suffit, lui s e u l , pour soumettre les
héritages au régime féodal. Nous pouvons enfin, invoquer l’opinion
de M. M erlin, questions de droit, V° rente fo n ciè re, § 14-, qui recon
naît sans difficulté que le franc-alleu noble peut seul être inféodé ou
accensé.
Maintenant qu’il est établi que les immeubles roturiers ne p o u v a i e n t
être inféodés ou accenses , et que l’ existence d’un bail à cens détruit
l a présomption d’allodialité, parce que les biens nobles pcuvcnL seuls
être accenses , et l’être par un seigneur fé o d a l, nous demanderons à
M",e de Ghàlillon si le domaine de L ollière, baillé à nouveau cens et
nouvelle investison, par l’acte du 6 mars 173.5, était un allodial ro
turier dans les mains de M. le marquis de Miramon , son père ; si
ce domaine , situé dans la seigneurie de Laroquc dont M. de Miramon
était le seigneur, a pu être concédé comme roturier, alors (p ie le
concédant établissait, par acte de concession, des redevances censuclles , reddituelles , avec tout droit de directe , de liaulc , moyenne
e t basse justice , droit de rétention , lods et v e n t e s , taille aux quatre
cas et autres droits et devoirs seigneuriaux contenus dans les anciens
�( 39 )
terriers de la seigneurie de L aro que ; si enfin, la directe réservée
peut être , avec ce grand cortège de féodalité , reconnue pour ce domaine direct et privé dont parle M . Henrion de P a n sa y , ce deminiurn directurn des lois romaines q u i , dans les pays d allodialité comme
dans les pays où la maxime nulle terre sans seigneur était adoptée, se
réservait sur les biens roturiers. Nous sommes persuadés que sa réponse,
quoique contraire à l'intérfit de sa cause, sera conforme à sa loyauté,
et quelle conviendra franchement de la qualité nobilière du domaine
concédé.
Eh bien ! cette qualité nobilière des immeubles situés dans les pays
allodiaux, cette seigneurie ajoutée à la propriété, comme le dit Ilenrion
forme un fie f, c’est-à-dire, un héritage dans lequel la propriété est unie
à la puissance publique. C ’est ce qu’était évidemment le domaine de
Laitière entre les mains de M. le marquis de Miramon , et ce qu ôtaient
tous les héritages possédés par lui dans les vingt ci quelques seigneuries dont le titre de 1755 nous donne l'énumération. Voilà ce qui
Résulte, sous l’ empire de l’allodialité de la coutume d’ Auvergne, de
^ distinction établie entre les francs-alleux nobles et les fiaucs-alleux
roturiers ; voilà ce qu’il fallait observer pour ne pas se jetter dans
d absurdes contradictions en parlant de 1allodialité.
I)u reste , cette digression est sans utilité réelle dans la cause , parce
qu en prenant le domaine de Lollière pour un franc-alleu roturier, les
prestations et redevances créées par la cté de 1755, n en seraient pas
^oins supprimées. M . Merlin , procureur général à la cour de cassation,
a long-tems fait triompher par ses éloquens et savans réquisitoires ,
Cc système qui tend à distinguer les allodiaux nobles des allodiaux
roturiefS • mais après l’avis du conseil d é ta t, du i 3 messidor an X III,
^ reconnut la nécessité de renoncer a cette distinction. On peut von
Ce qu’il dit à cc s u j e t , dans le Répertoire universel, V° cens , § 8 ,
Pa£e i 37 , et dans les questions de droit, V “ rente foncière , § 4 , p. 3()3 ,
' 0,1 après avoir établi cette doctrine , que le propriétaire d un francalleu roturier ne pouvait le concéder ni à fief ni a cens seigneurial,
tll,e par conséquent, la rente qualifiée seigneuriale qu il s était reservée,
11était point abolie par la loi du 17 juillet 1793 , il ajoute en note : « Cette
” c°nséquence, quelque conforme qu’elle soit aux principes rigoureux
“ du droit , 11c pourrait plus être admise aujourd’hui que dans le
" cas où le bailleur aurait fait connaître par l’acte qualifié de bail à hef
* ou de bail à cens , qu’il n’ était pas seigneur et n’ entendait pas le
�( 4o )
» devenir par cet acte. C ’est ce qui résulte de l’avis du conseil d’état
» du i 3 messidor an X III, et du décret impérial du 2.3 avril 1807.
» La cour de cassation elle-même l’a ainsi jugé par plusieurs arrêts. »
Nous avons rapporté au § 3 ci-dessus, cet avis du conseil d’ c'tat et
le décret cités par M. Merlin ; nous avons de plus fait connaître d’au
tres avis du conseil d’ état et plusieurs arrêts dans le même sens. Il suffit
de les lire avec un peu d’attention pour demeurer convaincu que, mê
me dans les pays d’ailodialité, les redevances et prestations résultant
de concession de fonds , ont été supprimées par les lois de «792 et
I 7 g 3 , quand les titres reservent au bailleur des droits et devoirs qui
se rapportent à la féodalité.
§ 6.
Dans toutes les hypothèses, les demandes de M mt de ChûlUlon sont
repoussées par la prescription.
Nous avons placé cette proposition la dernière , parce qu’il était dans
l’ordre naturel de démontrer la suppression des redevances féodales
ou censuelles que M rae de Châtillon veut faire revivre , avant de s’oc
cuper de la prescription qui , dans tous les cas possibles , vient assurer
aux héritiers Baduel la propriété libre de toute redevance , d’héritages
qu’ils possèdent paisiblement depuis plus de quarante-cinq ans.
C ’est ici le moment de présenter à la justice des considérations q«1
ont bien leur importance. Il a sans doute été fâcheux pour le s pro
priétaires d'héritages et droits féodaux de se voir subitement dépouillés
d’une partie de leur fortune. Ce malheur ne s’excuse pas à nos yeux
par la violence et les nécessités d'une révolution. Mais la même raison qui
nous fait environner de respect les droits acquis , ne nous permet pas
d'approuver des réclamations tardives qui , à leur tour , n’ont et ne
peuvent avoir d’autre but que de dépouiller des fils et petits-fils de
biens qu’ils ont recueilli par succession , qu’ils possèdent l é g a l e m e n t à ce
titre. La prescription est la patrone du genre humain , disait un e m p e r e u r ;
et cela est vrai , parce que la prescription , surtout la p r o s c r i p t i o n trentenaire , est la sauve-garde des droits de propriété. Les biens accensés ,
tous ceux dont les redevances ont été supprimées par les lois de 1792
et 1793, sont possédés depuis, libres des charges qui les grevaient et
en rendaient la valeur presque nulle dans les mains des premiers te
nanciers. Les enfans de ces premiers possesseurs ont recueilli ces me-
�( 4t )
mes biens avec toute la valeur que leur donne l’affranchissement des
droits et devoirs seigneuriaux. Ils les ont partage's en cet e'tat et dans
la pleine confiance qu’ils devaient avoir dans les lois d’affranchissement
et de libération. Des dots ont été constituées et payées eu égard à la
nouvelle valeur de ces biens ; de nombreuses transactions de famille
ont leur base dans cette valeu r, et des créanciers ont consenti à pren
dre pour gage et sûreté hypothécaire, ces mêmes biens libres de re
devances.
Il faut renverser et détruire tout cela , si vous voulez faire revivre
des redevances éteintes depuis si long-tems. Il faut opérer une ré
volution nouvelle, et ruiner , à leur t o u r , ces enfans , pères de famille
aujourd’h u i , ces créanciers qui ont eu foi dans les lois existantes et
dans le long silence des ci-devant seigneurs ou de leurs héritiers.
Y aurait-il de la raison et de la justice !' nous ne le pensons pas.
Les lois politiques ne sont point les seules qui le défendent ; les lois
civiles viennent encore au secours des droits acquis , en offrant à ceux
(iui possèdent , le moyen de la prescription comme une barrière in
franchissable à des prétentions surannées.
Nous ne devons pas être surpris que M me de Chatillon veuille faire
considérer comme bail emphytéotique Uacte du 6 mars 1755, quoique
cet acte soit plutôt un bail à cens ; et qu’elle le présente comme un
bail emphytéotique temporaire. En faisant admettre qu’il s’agit d’une
concession emphytéotique à tems , elle éviterait le moyen invincible de
la prescription , si d’ailleurs les lois suppressives de la féodalité ne
s’appliquaient pas ; et l’acte ne serait plus qu’une espèce de louage,
^«prescriptible de sa nature : ce système , s’il n’est pas fondé , ne man
que point d’adresse.
Nous avons déjà prouvé § 4 ci-dessus , que l’acte de 1 7 5 5 , n’est
Pas un bail temporaire , mais bien une concession à perpétuité ; inutile de revenir sur les preuves que nous en avons données. Voyons donc
Maintenant , si , en supposant un simple bail emphytéotique , et lui
conservant cette dénomination pour la facilité de la discussion , celte
espèce de contrat a de l’analogie avec le louage , notamment quand
les biens sont concédés à perpétuité.
fleineccius dans ses leçons élémentaires sur le Droit civil romain , liv. 3 ,
remarque la différence qui 'existe entre le louage et 1 emphytéose. « Le conducteur, dit-il, est tenu de faire la prestation du salaire
* promis, el l’emphyléose du canon. Dans le louage, le salaire est en
6 -
�(42)
» raison des fruits de la chose du bailleur ; dans l’emphytéose, la. re» devance est modique ; elle est due en vertu de la chose propre au preneur,
» et en reconnaissance du domaine supérieur et direct. »
L ’emphytéote, ajoute-il , perçoit tous les fruits, et même fait sien
le trésor qu’il trouve dans le fonds. Il a le droit d’imposor des servi
tudes ; il peut changer la face du fo n d s, il peut l'aliéner, le donner
entre-vifs, l’échanger, l’hypothéquer ; droits qui certainement ne com
pétent pas au preneur à louage qui paye un salaire ou une redevance pour
une chose qui ne lui appartient pas. Enfin , une autre différence existe ;
c’est que le preneur par bail à louage a droit à une remise de prix
du bail dans le cas de perte des fruits par force m ajeure, tandis qu’il
n’y a jamais de remise pour la prestation du canon emphytéotique.
Il est facile de voir par ces différences entre l’emphytéose et le louage ,
que le bail emphytéotique transmet au preneur le droit utile de pro
priété , ce que ne fait pas le bail à louage.
Voilà ce qui subsistait avant 178g.
Alors on disputait sur la question de savoir si le cens ou la rente
étaient prescriptibles. C h ab rol, dans son savant commentaire, tome 2 ,
pages 668 et suivantes , examine longuement cette question , rapporte
l’opinion des auteurs et cite les nombreux arrêts qui ont décidé pour
ou contre. Il fait voir la difficulté et ne la résout point ; cependant,
l’art. 2 , du titre 17 de la Coutume d’Auvergne p o r te : « T o u s droits
» et actions cens , rentes, servitudes et autres droits quelconques pres» criptibles, soyent corporels ou incorporels , se prescrivent, acquièrent
» ou perdent par le laps et espace de trente ans continuels et accom» plis ; » et il est remarquable que les opinions qui admettent la pres
cription se fondent particulièrement sur les principes de l'allodialilé des
héritages en Auvergne , parce que la prescription du cens les fait rentrer
dans le droit commun.
Les partisans de l’imprcscriplibilité raisonnaient a in s i, d’après Cha
brol , loco cítalo , page 677. Le cens est imprescriptible , disaient-ils ,
» parce que le dQinaine direct , réservé par le seigneur , est regardé
» comme une portion de la chose qui le doit : « L e seigneur est cense
» posséder le domaine direct , comme l’ emphytéote possède le do» mai ne utile. Les droits incorporels sont susceptibles de possession ,
» et elle se conserve par la seule intention. Ainsi , l’cinphyléotc ne
» possédant que le domaine u t ile , ne peut prescrire le domaine direct
» qu’il 11c possède également. » La division des deux dominités , c est
�( 4'* )
a-dire , la séparation du domaine utile et du domaine d ir e c t, était donc
la raison déterminante de l’imprescriptibilité. O r , si cette séparation a
légalement cessé d’exister , si le domaine utile et le domaine direct se
sont réunis en la personne du preneur ; si cetle réunion a duré pen
dant un laps de tems suffisant à prescrire, il faudra bien admettre , même
en supposant l’imprescriptibilité originaire du cens, que, les motifs de
cette imprescriptibilité n’existant plus, la prescription a couru au profit
d» preneur et de ses héritiers ou ayant-cause,
Eh biçn ! Par l’article 6 de la loi du i l août 1789, toutes les rentes
foncières perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de quelque espèce
Çu’elks fussent, quelle que fût leur origine, à quelques personnes quelles
fussent dues, ainsi que les champarts de toutes espèces, et sous toutes
dénominations, furent déclarés rachelables. Il fut défendu en même tems,
de plus, à l’avenir, créer aucune rente non remboursable.
L ’article Ier du titre 3 de la loi du i 5 mars 1790, déclara pareillement
^achetables tous les droits et devoirs féodaux ou censuels utiles qui
étaient le prix et la condition d'une concession primitive de jonds ; et
article 2 présuma tels , sauf la preuve du contraire , toutes les rede
vances seigneuriales annuelles en argent, grains, volailles, cire, denrées
0u fruits de la terre, servis sous la dénomination de cens, censives,
surcens , capcasal , rentes féodales , seigneuriales ou emphytéotiques ,
chaniparl , etc.
La loi du 18 décembre de la même année, après avoir de nouveau
déclaré rachetables toutes les rentes foncières perpétuelles, régla, dans
So» titre 3 , le mode et le taux du rachat ; et l’article 5 de ce titre
s °ccupa spécialement du rachat des baux à r e n te , ou emphyteose per
pétuelle et non seigneuriale, contenant la condition de payer des droits
e lods et des droits censuels aux mutations.
Ces lois ont donc déclaré rachctable le cens ou le canon emphy
téotique comme toutes les autres rentes foncières et perpétuelles. Nulle
1 iculte 11c peut s’élever à cet égard, e t , au besoin, les articles £29
«>3o du code civil viendraient confirmer cette doctrine.
Maintenant , que rc'sulte-il de ce changement apporté par les lois de
*789 cl 1790 à l’ancienne législation sur les redevances emphytéotiques
Perpétuelles ?
11 en résulte , d’après l’avis du conseil d’état , approuvé le 7 mars
1 °8 , que « les titres q u i , qualifiés d’emphytéoscs perpétuelles aban“ donnent ensemble la jouissance cl la propriété, ne sont autre chose
�( 44 )
» qu'une aliénation absolue qui fa it reposer la propriété sur la tête de
» Vacquéreur à pareil titre. »
Il
en résulte, comme le dit M. Duranton , Cours de Droit français,
tome 1 9 , page ;5()0 , que « la propriété a passe toute entière sur la tête
» de l’emphytéote , même avant le racliat , par la faculté qu'il a ac» quise , et qu’ont encore ceux qui n’ont point racheté , de se libérer
» de la redevance ; et le concédant n’a plus eu qu’un simple droit de
>» créance , un droit purement mobilier ; en sorte qu’il n’a plus eu le
» droit d’hypothéquer le fonds , et le concessionnaire l’a eu plein et
» entier , non plus comme simple emphyléote, mais comme propriétaire
« absolu du fonds , en restant débiteur de la prestation annuelle , et avec
» la faculté de s’en racheter. » Nous observerons que cette doctrine ,
quant au droit du concessionnaire d’hypothéquer le fonds tenu à eniphytéose, a été consacrée par 1111 arrêt formel de la cour de cassation,
du 19 juillet i 832. (Sirey , tome 3a — 1— 53 1.)
11
ne peut donc plus être^ question aujourd’hui , en matière d’ emphytéose , de comparer ce contrat au bail de louage , et de parler de
possession précaire. La doininité , autrefois séparée , repose maintenant
toute entière sur la tête du concessionnaire qui n’est plus débiteur que
d ’une rente rachetable à volonté. Devenu propriétaire absolu, in to to ,
sa possession est celle de tous les propriétaires d’héritages chargés de
rentes foncières.
Ces principes reconnus , la question de prescription est d’ une solu
tion facile, puis qu’elle rentre dans l’application des règles ordinaires;
et , peut-être , aurait-il sufli de dire que nos lois et nos codes ne re
connaissent plus , à cet égard , de droit exceptionnel.
P ou r appliquer ces règles ordinaires du droit c i v i l , il ne faut pas
continuer à se faire illusion , eu regardant les fonds concédés à titre
d ’emphyléose, comme si le seigneur ou bailleur y avait conservé quelques
droits de propriété : (“) ce serait le moyen de ne jamais s’entendre.
Il ne peut s’agir maintenant que de la rente ou redevance , et de la
question de savoir si cette rente est prescrite , ou si elle ne l’est pas.
O r , nous devons nous reporter, à ce sujet, à l’art. 8 , de la loi du
i 5 mars 1790, qui porte expressément, que toutes les rentes, redevances
et autres droits rachetables, sont soumis , pour le principal, à la pres(*) <'.c fond» est appelé chef-certi dans les Mémoires de la dame de CliAlillon ; cest une erreurLe chef-cens n'est autre chose que le premier ccus dont uu htiriUige est eliargé. — Folhier, intend• >
nu titre 2 de la Coutume d Orléans.
�(4M
crîptîon établie relativement aux immeubles réels ; et à l’art. 33 du titre 2
<le la même loi , qui fait courir cette prescription à partir du 5 mars 179O.
Ainsi d o n c , voilà la rente ou redevance déclarée prescriptible par
cela seul qu’ elle est rachetablc ; et le point de départ de la prescription
fixe au 5 mars 1790.
Il
serait superflu d’ examiner qu’ elle était la durée de tems nécessaire
pour la prescription , parce que s’étant écoulé depuis cette époque ,
plus de 47 ans , la prescription serait acquise , quelle que fut l’hy
pothèse dans laquelle M me de Châtillon voudrait placer sa cause.
Le code civil , titre de la prescription , publié le 25 mars 1804, pose
Cn principe , dans son article 2219, que la prescription est un moyen
d acquérir ou de se libérer par un certain laps de tems , et sous les con
ditions déterminées par la loi. Le tems voulu dans l'espèce actuelle ,
est celui de trente ans, d’après l’art. 2262.
Trente années sont quelque chose dans le cours de la vie humaine.
M est bien juste que celui qui a possédé pendant un laps de tems si
considérable, sans avoir été inquiété dans sa possession , soit protégé
par la loi et maintenu dans cette possession paisible, à l’abri de toute
recherche et de toute tracasserie. Aussi , cette protection a été considérce comme tellement équitable et nécessaire , dans l’intérêt de l’ordre
public et du repos des familles, que l’art. 2281 du code civil a même
l'cduit à cette période de 3o années les prescriptions commencées k l’époque de sa publication, et pour lesquelles il aurait fallu , suivant les
anciennes lo i s , un plus long délai.
Cependant, la consultation, qui ne s’occupe nullement de la presCription établie par l’article 8 de la loi du i 5 mars 1790, prétend
Page 18, que la prescription ne peut courir qu à partir de la qua
trième année après la promulgation du code civil; et elle le prétend sans
donner aucun motif d’une opinion que nous devons trouver au moins
singulière. Il est vrai que la consultation parle de l’action en déguer
pissement ; et si nous sommes parvenus ^ deviner la pensée du ré
dacteur , il a voulu dire , sans doute , que cette action en déguerpisSe,nent étant jadis autorisée après la cessation, pendant trois ans ,
du service de la re n te , ce n’est qu'après ces trois ans expirés, et
par conséquent, la quatrième année après la publication du code civd > que l’action s’est ouverte et que la prescription a commencé.
Ce raisonnement est faux cn tous points. D ’abord , il ne s’agit pas
en ce moment de l'action en déguerpissement qui n’ existe plus et ne
�( 46 )
peut plus exister en faveur du bailleur qui n’a conserve , comme nous
l ’avons démontré, qu’un simple droit de créance sur les fonds con
cédés ; ensuite , parce qu’en reportant le commencement de la pres
cription à la promulgation du code civil seulement , il n’ en sorait
pas moins v r a i , en fa it , que la rente avait cessé d’être servie depuis
plus de trois ans avant ce code , et que l’action en déguerpissement,
si elle avait existé , se trouvant ouverte depuis long-tems , ce ne se
rait plus le cas d’ajouter aucune année supplémentaire aux 3o années,
fixées par l’article 2262.
D'ailleurs , il n’ est pas e xa ct, en principe , de prétendre ajouter au
délai rigoureusement fixé pour l’exercice d’une action , les années pen
dant lesquelles on a négligé de faire ce qui devait empêcher cette
action. La négligence du débiteur motive l’actio n , mais ne prolonge
point la durée du tems pendant lequel elle doit être exercée. Ne seraitil pas absu rde, par exemple , que le créancier d’une rente qui n’aurait
pas été servie depuis 32 ans , c’est-à-dire, depuis la date du titre cons
titutif, prétendit être encore dans le délai de poursuivre le débiteur
en remboursement du capital, sons prétexte qu’il faut ajouter aux 3o
années de prescription , les deux années de cessation de paiement q u i ,
d ’après l’article 1912 du code civil, motivent l’action en remboursement ?
M me de C hâtillon, dans son M ém o ire, va plus loin encore : elle
veut faire porter à 60 années le tems nécessaire pour acquérir la pres
cription ; et voici le raisonnement qu elle fait. Elle commence par se
placer dans la catégorie des absens, et invoque à l’appui de sa thèse ,
les dispositions du code civil sur les biens des absens. Un homme
s’absente , dit-elle , et ne reparaît qu’après 3o ou 4 o ans. Son absence
n’a pas été déclarée, e t , à son retour, il aura le droit de rentrer
dans la propriété de ses biens , sans qu’on puisse lui opposer aucune
prescription acquise.
Elle suppose ensuite la déclaration d’absence et l’envoi de ses hé
ritiers présomptifs en possession provisoire de scs biens dont ils ont
joui depuis plus de 3o ans. En ce ca s, dit-elle, même après l’envoi
en possession définitive, l’absent, s’il reparaît, ou ses enfans et des
cendais directs, recouvreront les b ie n s , lors même qu’il se serait
écoulé plus de Go ans depuis la disparition de l’absent.
T o u t cela est vrai ; mais pourquoi ? parce qu'il s’agit d’une matière
spéciale , parce que la possession provisoire qui doit d’abord être de
mandée , n'est qu'un dépôt entre les mains de ceux qui 1 ont obtenue,
�( 47 )
article 125 du code civil ; et le dépositaire ne prescrit jamais , ar
ticle 2236. Il peut d o n c, à la rigueur, s’écouler 40 , 5o et même 60
a«s « pendant lesquels la prescription ne courra point.
Mais après l’envoi en possession définitive, il n’en est plus de même;
ceux qui possèdent, possèdent animo dom ini, et prescrivent contre
toute réclamation qui ne serait pas faite dans les trente ans, article 133.
L ’exemple est donc mal choisi. Il l’est d’autant plus mal, qu’il prouve
contre M me de Miramon. En effet, l’ envoi en possession définitive qui
fait commencer le cours de la prescription , produit un résultat pareil
a celui des lois de 1789 et 1790, qui , en déclarant toute espèce de
rente foncière rachelable, ont consacré le droit de propriété absolue
sur la tête du redevable , et commencé pour lui le cours de la pres
cription de la rente.
Un aulre argument de même force est encore présenté dans le Menioirc do M me de Châtillon.
Elle y parle de propositions que le sieur Baduel , grand-père, au
rait faites à M . le marquis de M iram on, décédé enj 1810 , et sans
‘ »diqner la date de ces propositions qui seraient conçues en ces ter
mes : « Il y a apparence que M. de Miramon 11’ignore pas la loi du
” 29 décembre 1790, relative au rachat des rentes foncières. En con’* séquence , s’il veut me traiter favorablement, nous ferons un forfait
*• de gré-à-gré relatif au rachat de la renie du domaine de Lollière ,
" déduction faite du cinquième d’icelle , suivant la loi du i 5 pluviôse
" an V ' pour raison des contributions , q u i , pour lors , est réduite
a 34 seliers blé , et 23 quintaux cinq livres fromage et les suites ,
”
pour lors nous prendrons une évaluation commune depuis 3o ans
’’ au plus ; cl pour lors Baduel ferait des termes honnêtes à M . de M in fanion, que la loi soit rapportée ou no n , et M . de Miramon doit
considérer qu’il a été donné trois mille livres d’en trée, etc. »
f
cst 1e texte rapporté dans le M ém oire, texte dont la rédaction ,
*ord à la première personne , puis à la troisième , laisserait sup
poser que ces propositions émanent et n'émanent pas du sieur B a d u e l .
^ en soit de celte contradiction , 011 sent bien que les petits—
| s d.u sieur Baduel îte peuvent avouer ni désavouer une pièce sans
atc et dont 1 ct-cœlera annonce qu’elle n’est publiée qu'en partie.
I1"' de Châtillon prétend , page 1 1 , qu’il n’y a pas 3o ans que les
legociations entre M . Baduel et M. le marquis de Miramon sont inClroinpucs ; et celte observation est faite à coup-sûr, pour échapper
�( 48 )
aux conséquences de la prescription trentenaire, q u e , dans l'idée du
Mémoire , ces négociations auraient interrompue.
Nous ne trouvons , ni dans le code c i v i l , ni dans aucune loi anté
rieure , ce mode d’interruption de la prescription. Nous voyons bien
que d’aprcs l’art. 2248 du code civil, la reconnaissance que le débiteur
ou le possesseur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait, inter
rompt la prescription ; mais l’écrit cité par la dame de Chatillon n’est
pas une reconnaissance de la dette. Ce serait, tout au plus , un arrange
ment proposé , resté dans les termes d’un simple projet , en suppo
sant encore que l’écrit soit de la main du sieur B a d u e l, et signé de lui.
Mais quand même cet écrit serait un acte r é e l, un accord , une transac
tion entre le sieur Baduel et M. de Miramon, il ne serait pas d’ un grand
poids dans la cause. Un décret impérial de 24 juin 1808 , approuvé
le 3 i mai, déclare nulle et sans effet une transaction faite à l’occasion
du titre de concession d’un moulin , moyennant un cens emportant lods
et ventes, défaut et amende, transaction (jui avait été exécutée pendant
cinq ans. Le décret décide que n ’ayant pas traité sur la question de l(t
féodalité, la débitrice de la rente n’avait par conséquent pas renoncé
au bénéfice de la loi du 17 juillet i7<)3.
L a cour de cassation a été plus explicite encore , en décidant, par
arrêt du 26 octobre 1808 , qu’entre un ci-devant seigneur (ou ses ayantdroit) et son tenancier , la loi n’autorise pas un acte récognitil d’une
rente féodale pour être payée comme foncière. (Sirey, tome 11 — 1— 3 a3 .)
L a cour royale de Iliom a jugé de même sur la ratification, faite de
puis les lois abolitives de la féodalité , d'un bail emphytéotique per
pétuel , avec droits censucls et reddituels, lods et ventes et autres droits
el devoirs seigneuriaux. Par arrêt du 4 avr*l 1811 , elle a déclaré la ra
tification nulle , parce qu’ elle ne renfermait aucun traité sur le vice du
titre primitif. ( Journal des audiences de la cour de liio r n , année 1811»
page 258.)
11 y a plus encore : Un arrêt de la cour de cassation , du 27 juillet
1818, a positivement déclaré que le paiement des redevances depuis
les lois abolitives , 11c peut priver les redevables du bénéfice de ces lois ,
à moins dune rénonciation expresse de leur part. (Sirey, tome 19— 1 — 126.)
Que peuvent donc signifier, en présence de ces autorités législative?
et judiciaires , les prétendues propositions faites par le sieur Baduel»
on ne sait o ù , à quelle époque , cl qui, dans aucun ca s, 11e sont ni
une reconnaissance , ni un traité , ni une renonciation , au bénéfice des^
�(49)
lois et de la prescription? Elles annonceraient sans doute de bonnes
intentions de la part de celui qui les aurait faites ; mais leur nonacceptation , en les réduisant à un projet honorable d’un côté, prouverait
que , de l’autre , on n’entendait se soumettre à aucune modification et
réduction , et qu’ on avait l’intention de courir la chance des e've'nemens.
Eh bien ! le tems et les évènemens ont prononcé : Il faut savoir accepter
les faits accomplis.
Soit donc que la prescription n’ait commence' qu’à l’ époque de la
promulgation du code civil, c’est-à-dire le 25 mars 1804, il s’est écoule',
depuis , plus de 33 années utiles à la prescription de l’acte de 1755.
Mais si, comme cela doit être , la prescription court du 5 mars 1790,
ou seulement du 2 novembre 1794 1 à cause de la suspension prononcée
Par les lois des 6 juillet 1791 et 20 aoiit 1792, il s’est ccoulé 47 ou 43
ans , près d’un demi-siècle pendant lequel le domaine de Lollière , pos
sédé en toute propriété par ses détenteurs, a successivement p a s s é ,
a titre héréditaire, entre les mains de trois générations, c’en est assez
P°ur que la prescription soit acquise.
Ici se termine la défense des héritiers Baduel. Sans avoir suivi pasd~pas, la consultation et les Mémoires publiés au nom de M me la
^ r q u i s e Duplessis-Châtillon , ils ont cherché à démontrer, dans un
Pel‘t nombre de propositions , que l’acte dont M me de Châtillon de
mande l’ exc'cution, est un acte féodal de sa nature, ou mélangé de
féodalité , et frappé de suppression absolue par les lois de 1792 et
*793, dont l’intention et le but sont clairement manifestés par les lois,
es décrets , les avis de conseil d’é ta t, les arrêts postérieurs. Ils ont
*epOndu aux objections faites , e t , se prêtant à la supposition de dii•cultés qui n’existent p as, ils ont établi que le titre de 1755 est même
elruit par l’effet de la prescription ; de sorte q u e , sous tous les rapP°rts , les demandes de la dame de Châtillon sont inadmissibles. C ’est
^aintenant aux tribunaux saisis de la cause , à prononcer et décider
* d est bien opportun de soulever des questions qui se rattachent à
!*n Régime proscrit depuis un demi-siècle , et que nos mœurs et nos
ln5tituti0ns nouvelles repoussent avec plus d’énergie que jamais.
V I O L L E , Avocat,
Et Conseiller do Préfecture à Aurillac.
f
PELET, Avoue.
OBSËKVATlOft
7
�OBSERVATION ESSENTIELLE
il
Pendant que ce Mémoire était à l’impression, et par acte du 20 septembre 1837,
Mme Duplessis-Châtillon a fait signifier aux cohéritiers Baduel la rénonciation de
ses deux sœurs à la succession de M. le marquis de Miramon, père commun ; et,
en même tems, elle les assigne devant le tribunal de première instance d'Aurillac
en main-levée de leur Opposition du 4 du même mois. Cette assignation donne
lieu à deux observations :
1°. Mms Duplessis-Châtillon ne prend plus, comme dans les actes précédens, la
qualité d'héritière sous bénéfice d’inventaire; elle agit comme seule et unique
héritière de M. son père ;
20. Elle désavoue qu’il ait été publié des Mémoires; désaveu surprenant et dont il
est difficile d'expliquer le motif, lorsqu’il est de notoriété publique que la Consul
tation et les Mémoires sont entre les mains d’un grand nombre de personnes, et
qu’ils ont été distribués à MM. les juges et membres du parquet du tribunal d’Aurillac. Y aurait-il quelque petite ruse de basoche dans ce désaveu ?..... Nous
verrons.
Aurillac, imprimerie de P. PICUT. — Septembre 1837.
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baduel, Antoine. 1837]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Violle
Pelet
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
rentes féodales
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
doctrine
droit écrit
franc-alleu
directe seigneuriale
jurisprudence
droit de guet et de garde
Masuer
forains
corvées
code civil
droit intermédiaire
domaines agricoles
fromages
vin
percière
droits rachetables
titres nobiliaires
lods
terriers
retrait féodal
opinion publique
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Antoine Baduel, propriétaire-cultivateur, demeurant à Lafage, commune de Saint-Clément ; et le sieur Antoine Baduel, deuxième du nom, aussi propriétaire-cultivateur, demeurant à Lollière, commune de Sain-Clément, défendeurs ; contre dame Marie-Charlotte Cassagne-Beaufort de Miramon, veuve de monsieur le marquis Duplessis-Chatillon, agissant comme héritière bénéficiaire de monsieur le marquis de Miramon, son père, demeurant à Paris, rue du Bac, n° 128, demanderesse. [suivi de] Observation essentielle
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de P. Picut (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1837
1755-1837
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2816
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2813
BCU_Factums_G2814
BCU_Factums_G2815
BCU_Factums_G2817
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53572/BCU_Factums_G2816.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Clément (15180)
La Roussière (domaine de)
Lollière (domaine de)
La Croux (domaine de)
La Fage (domaine de)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
Code civil
corvées
coutume d'Auvergne
directe seigneuriale
doctrine
domaines agricoles
domaines seigneuriaux
droit de guet et de garde
droit de propriété
droit écrit
droit intermédiaire
droits féodaux
droits rachetables
émigrés
forains
franc-alleu
fromages
jurisprudence
lods
Masuer
opinion publique
Percière
poids et mesures
prescription
rentes féodales
retrait féodal
retranscription de bail
terriers
titres nobiliaires
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53571/BCU_Factums_G2815.pdf
41c30e1b0bb0dbc06e61db9ef81cc37a
PDF Text
Text
p
T
TRIBUNAL
de
POUR
PREMIÈRE INSTANCE
D ’A U R IL L A C .
Mme M a r i e - C h a r l o t t e d e CASSAGNE DE BEAU,
.
FORT DE MIRAMON, veuve de M. le Marquis
François-Félix Duplessis-Châtillon, en sa qualité
d’héritière bénéficiaire de M. le Marquis de Miramon, son père, D e m a n d e r e s s e ;
CONTRE
MM. A n t o i n e BADUEL, comme détenteurs du do
maine de Lollière, appartenant a la succession bé
néficiaire dudit Marquis de Miramon, D é f e n d e u r s .
Le 21 août 1837, madame la marquise Duplessis de Châtillon a
fait signifier aux héritiers Baduel un acte du 6 mars 1755, qui les
oblige à la prestation d’une rente emphytéotique, au profit du
marquis de Miramon, son père, de ses héritiers ou ayant-cause.
Le 2 septembre suivant, elle leur a notifié un commandement de
payer les arrérages de la rente.
,|
Aujourd’hui elle les poursuit devant le tribunal civil d ’Aurillac,
faute de paiement, pour obtenir contre eux l ’exécution de son
titre.
Madame de Châtillon avait déjà publié quatre mémoires sur
Audience du
_
�2
PREMIÈRE P A R T IE .
celle affaire, l’un en forme de consultation générale; les (rois
autres contre les héritiers Druo, les héritiers Auzolle, et les héri
tiers Baduel. Ces derniers seulement viennent de répondre dans
un écrit fort insidieux, qu’il importe d’autant plus de réfuter que
la matière q u ’il a pour objet étant fort peu connue maintenant, on
est obligé d ’en faire une étude spéciale pour décider les questions
que ce procès présente à résoudre.
La consultation avait été demandée par M. le marquis de Chàtillon pour sa mère. Elle portait sur quatre héritages dont deux
seulement sont réclamés aujourd’hui. Le rédacteur du mémoire
en réponse se prévaut de celte double circonstance pour nier les
qualités de la demanderesse, qui résultent de ses titres héréditai
res, et de la renonciation de ses deux sœurs à la succession de
M. le marquis de Miramon, père commun, qu'elle a fait signifier
aux héritiers Baduel, par acte du 20 septembre dernier. Il oppose
en outre des exceptions de chose jugée à la demande des domai
nes de Lafage et de la Koussière qui ne sont pas demandés. C’est
à quoi se réduisent les six premières pages du mémoire.
On examine dans ce qui suit jusqu’à la quarante-neuvième page
inclusivement:
« 1° La nature de l’acte du G mars 1755, qui sert de base aux
demandes de madame de Châlillon, contre les héritiers Baduel j
a 2° La question de savoir, en thèse générale, si les baux em
phytéotiques, à cens ou rentes, sont frappés de la suppression
prononcée par les lois de 1792 et 1793, quand ils sont mélangés
de féodalité;
i
« 3° La question de savoir particulièrement,' si les beaux em
phytéotiques perpétuels sont atteints par ces lois suppressives ;
« 4 “ L ’a p p l i c a ti o n d e la d o c t r i n e é t a b l i e a u x p a r a g r a p h e 2 e t 3
c i - d e s s u s , à l’a c t e d u G m a r s 1755.
« 5° L’o b j e c t i o n t i r é e d e c c q u e la c i - d e v a n t A u v e r g n e é t a it
u n p a y s a ll o d i a l .
« G° Enfin la question de la prescription. »
�IL n ’ y
a
pas
de
pr e sc r ipt io n
.
3
Nous répondrons d ’abord au sixième et dernier de ces para
graphes , parce que , s’il était vrai qu’on pût opposer la pres
cription à madame d e C h â lillo n , il serait inutile d’examiner si
sa demande contre les héritiers Baduel est féodale ou non féo
dale.
Quant aux cinq autres, nous n ’avons jamais contesté que les
rentes mélangées de féodalité ne fussent frappées de suppres
sion ; mais nous soutenons que l’acte du 6 mars 1755 n ’est point
féodal, parce que la»féodalité ne se présume point dans la cou
tume d ’Auvergne , et q u ’elle ne résulte pas des clauses de l’acte.
Ainsi , nous écarterons la presque totalité du mémoire de nos
adversaires , qui est étrangère aux difficultés qui s’élèvent entre
nous.-Nous réfuterons tout le reste, t
PREMIERE PARTIE.' '
Les demandes de madame la marquise de Châtillon ne sont pas
repoassees p a r la prescription.
Nous avions é ta b li, pages 5, 14 , 15 et suiv. de la consultation
du 5 mai 1837, q u e , pour q u ’on put opposer la prescription à
madame la marquise de Châtillon , d’après le droit c o m m u n ,
qui ne nous empêchera pas de nous prévaloir des lois spéciales,
il faudrait une interversion de titre, un changement dans la qua
lité de la possession. Sans cela , ou prescrirait contre son titre,
ce qui serait contraire à tous les principes anciens et nouveaux.
Que cette interversion pouvait résulter d’un acquisition faite par
«les tie rs, ou d ’une dénégation légale de la redevance, mais non
d’une transmission à titre héréditaire , ou d’une simple cessation
dupaiinent des rentes promises. Nous avions d it, avec M.Toullier,
que , dans notre espèce, c ’est-à-dire , « à l’égard des rentes fon-
�“*
a
«
«
«
«
PREMIÈRE PARTIE.
cières créées antérieurement à la promulgation du Code, quoique aujourd’hui meubles et rachetables, le débiteur ou ses
héritiers pouvaient encore s’en libérer par le déguerpissement
ou abandon du fonds , parce que les dispositions du Code ne
peuvent avoir d’effet rétroactif. »
Nous avions ajouté que le bailleur pouvait, dans la coutume
d ’Auvergne, exercer l’action en dégaerpissement trois années
après la cessation de paiement de la redevance; q u’il n ’avait droit
q u ’à trois années d’arrérages , quelle que fut la durée de la ces
sation , fût-elle de mille a n n é e s , suivant l’expression énergique
de Dumoulin ; que du moment q u’il n ’y avait, dans l’espèce,
ni interversion de litre, ni dénégation légale d e là redev an ce,
il fallait exécuter l’ancien titre, qui ne pouvait être apprécié que
d ’après les lois d e l à coutume d ’Auvergne, les seules qui l’a
vaient toujours régi. Voilà pourquoi nous avions conclu :
Qu’il plût au tribunal condamner les sieurs B aduel, comme
héritiers directs du preneur originaire, à payer à la requérante
trois années des arrérages de la rente consentie par le bail em
phytéotique du 6e du mois de mars de l'an 1755, et à servir à
l’avenir ladite rente , année par année , si mieux n ’aimaient les
sieurs Baduel racheter la rente, ou bien déguerpir.
Ce langage était simple et conséquent. L’auteur du mémoire
en réponse a feint de ne pas l’entendre. Cependant personne
ne pouvait jug er mieux que lui, que la seule question à exami
ner était ici celle de savoir si l’interversion de titre qui n ’existe
pas en fait dans la cause , pouvait résulter implicitement du fait
de la loi. Mais comment résoudre cette question pour les défen
deurs ? Il est clair q u’il faut une interversion de titre pour que
le titre ancien ne soit pas exécuté, et que cette interversion ne
peut résulter implicitement du fait de la loi. Il aurait fallu , pour
anéantir des contrats quelconques p a s s é s antérieurem ent a nos
lois nouvelles, que ces lois les eussent expressément abolis ,
�IL
n ’y
a
pas
DE PRESCRIPTION.
Ô
ce qu ’elles n’ont fait que pour les actes ou droits féodaux e lcen suels; ou'bien q u ’elles eussent positivement déclaré que le titre
ancien serait remplacé pas le litre dont elles auraient imposé
les conditions. Nous verrons , dans le cours de la discussion , ce
q u ’ont fait les lois spéciales sur les baux à rentes emphytéoti
ques. Il est vrai que les défendeurs assurent que l’acte du 6
mars 1755 est un acte féodal : nous démontrerons q u ’ils se
trompent. Ecartons premièrement ce q u ’ils disent de la pres
cription.
'
Ht, d’abord , remarquons! q u ’après avoir rapidement esquissé
une savante analyse des lois des 5 mars 1790, 6 juillet 1791,: 20
août 1792,'et des articles 529 et 530 du Code civil, on suppose
partout ce q u ’il faut prouver, c’est-à-dire que ces lois générales
ont opéré une interversion de titre- Il faut convenir qu’elles ont
pu déclarer,et on t déclaré prescriptibles-des droits qui n ’étaient
pas d ’abord prescriptibles; mais elles n’ont pas changé le titre du
possesseur originaire, et comme des dispositions de cette nature
doiventêtre restreintes plutôt q u ’étendues, la seule conséquence
rigoureuse q u ’on pourrait tirer de l’article 8 de la loi du 15 mars
1790, tel q u’il est cité, page 44: d ^ m é m o ire , serait que toutes
les rentes, redevances et autres droits rachetables, sont soumis
à la prescription p o u r l e s t i f . u s a c q u é r e u r s . Mais cet article-ne
porte point atteinte à la maxime qu'on ne peut pas prescrire contre
ion titre (C. c. 2240). Le principe qu’il renferme a été d ’ailleurs
de nouveau consacré par l’article 2239 du Code civil , ainsi
conçu : « Ceux à qui les fermiers, dépositaires et autres déten« teurs précaires ont transmis la chose par un titre translatif de
v propriété, peuvent la prescrire ». Encore faut-il, même dans ce
cas, que l’acte translatif de propriété ne rappelle point le titre
purem ent précaire du vendeur, parce que ce dernier ne peut
pas avoir transmis d ’autres droits que ceux qu ’il a déclarés. Le
seul droit que les lois nouvelles aient introduit en faveur des
�G
PREMIÈRE PARTIE.
preneurs originaires ou (Je leurs héritiers directs, est celui de
racheter la rente. Ju sq u ’à ce rachat, la rente reste pour eux ce
q u ’elle était par son litre. On ne peut dire que l’article 8 de la
loi du 15 mars 1790 ne distingue point; qu'il déclare les rentes
et redevances de toute nature rachelables etprescriptibles, parce
que cette manière d ’entendre la loi la rendrait contraire aux
principes, et q u ’il ne faut admettre d’antinomies que lorsque
toute conciliation raisonnable est impossible. D’ailleurs voyons
cette loi; ouvrons, non plus le mémoire de nos adversaires,
mais le bulletin officiel, le texte entier de la loi.
C’est une l o i générale concernant les droits féodaux supprimés
sans indemnité, e t ceux déclarés rachetables. Nous pouvons , par
conséquent, la repousser hautem ent, comme inapplicable. Elle
s’occupe uniquement des droits féodaux. Nous ne réclamons
point de droits féodaux. On invoque l’article 8 ; lisons cet
article.
1
« VIII. Tous les droits féodaux cl censuels, ensemble toutes
« les rentes, redevances, et autres droits qui sont rachetables
« par leur nature ou par l’effet des décrets du 4 août 1789 et
« jours suivans (par lesquels le régime féodal est entièrement
« détruit), seront, ju sq u ’à leur rachat, et à compter de l’époque
« qui sera déterminée par l’article 33 du litre 2 des présentes,
« soumis, pour le principal, à la prescription que les différentes
« lois et coutumes du royaume ont établie .relativement aux im« meubles réels, sans rien innover, quant à présent, à la près« cription des arrérages ».
On voit que cet article, fidèle à la rubrique de la loi, n ’a pour
objet que les droits féodaux et censuels, ou tout ce qui est relatif
au régime féodal, aboli par les décrets des 4, (>, 1, 8 et 11 août
1789, ainsi q u ’il est dil dans le préambule. Ajoutez que l’articlc
n ’établit aucune prescription nouvelle r e l a t i v e m e n t aux immeu
bles réels, et q u ’il s'en réfère aux différentes lois et coutumes du
�Xi1)
IL
n’y
A PAS DE PRESCRIPTION.
7
royaume. Cette citation est donc déplacée et ne prouve absolu
ment rien pour nos adversaires, puisqu’ils n ’ont aucun besoin de
la prescription, s’ils dém ontrent que nous réclamons u n droit
féodal.
D’aüleurs rien n'est plus élémentaire ni plus juste que les p rin
cipes que nous invoquons. Nous disons aux héritiers Baduel :
« Votre père ou grand-père, s’il vivait encore, n ’aurait pu pres« crire la toute propriété du domaine de Lollière, q u’il avait reçu
« du marquis de Miramon, à titre d ’emphytéose. Il n ’aurait
« pu que prescrire les arrérages des redevances, à l’excep« tion des trois dernières années. Telle était la loi de son titre.
« Vous ne faites que continuer votre père ou votre aïeul. Vous
« possédez en vertu du même t i t r e , sans aucun changement
« dans la qualité de la possession. Vous avez tous les droits
« q u ’ilavaitlui-mème; mais vous n ’en pouvezavoir davantage.Si
« vous aviez vendu vos droits successifs depuis que la coutume
« d ’Auvergne est abolie, que les lois anciennesontété changées, le
« titre de vos acquéreurs au domaine que vous possédez, e û t été
a régi par les lois nouvelles ; mais ces lois ne peuvent pas avoir
« de rétroactivité par le seul fait de leur existence. La rétroacti<f vite ne saurait se présumer, et vous la présumeriez nécessaire« ment, si vous vouliez soumettre à la loi nouvelle, des contrats
« passés sous les lois anciennes, alors que cette même loi ne l’a pas
« expressément ordonné : or, toutes les dispositions rétroactives
'< de la loi nouvelle ne frappent que les droits féodaux et censuels,
« et pas d ’autres droits. Rendez-nous donc l’héritage de notre
« père que vous retenez sans aucun titre ...... » Cette d éten
tion injuste, dans son p rin c ip e , ne peut être légitimée par la
longueur de la possession.La détention est injuste dans son
principe : 1° parce qu'on n ’a point respecté la condition de
la redevance dont la stricte observation pouvait seule la légitimer;
2” parce que les héritiers Baduel ne pouvaient pas se prévaloir du
�8
,i
PREMIÈRE P A R T IE .
,
titre emphytéotique de leur père, puisque l’emphytéose n’avait
été consentie q u ’à Pierre Baduel seulement. Q u’il n ’est point dit
dans l’acte q u ’elle ait été consentie à Baduel e t a u x s i e n s ; q u ’ainsi
l’emphytéose du 6 mars 1755 était essentiellement temporaire
ou à vie du preneur. Qu’on ne peut pas induire le contraite des
termes de l’obligation prise par Baduel de p a yer et porter les sus
dits cens et rente... a p e r p é t u i t é . . . au marquis de Miramon et aux
siens... TANT ET SI L ONGUEM EN T Q u ’i l . JOUIRA ET SER A T ENANC IE R DUDIT
d o m a i n e d e L o l l i e r e , car ce mot de
perpétuité est immédiate
m ent suivi d ’autres termes, qui en limitent formellement l’éten
due à la durée de la jouissance par le tenancier : or, cette jo uis
sance n epouvants’étendre audelà de la vie, il suit de là que le bail
emphytéotique a pris fin à la mort de ce tenancier, et que de
puis cette époque ses héritiers ont joui sans aucun titr e ,d ’où nous
concluons qu ’ils n'ont pu prescrire.
Le mémoire en réponse rte se dissimule pas que si le bail
emphytéotique est réellement temporaire, on ne peut point op
poser de prescription. Nous avons montré par les termes mêmes
de l’acte qu'il est temporaire. Mais nos argumens ont plus de
portée. Dans l’hypothèse où nous sommes placés, en l’absence
de tiers acquéreurs, d ’interversion de titre, ou de dénégation lé
gale de la redevance, nous repoussons la prescription tant pour
le bail emphytéotique perpétuel que pour le bail temporaire.
Les héritiers Baduel expliquent la prescriplibilité prétendue du
bail emphytéotique perpétuel par l’article G de la loi du 11 août
1789, « par lequel, disent-ils, page 43, toutes les rentes foncières
« perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de quelque espèce
« qu’elles fussent, quelle que fut leur origine , à quelques per« sonnes qu ’elles fussent dues, ainsi que les champarts de toute
« espèce, et sous toutes dénominations, furent déclarés racheta« bles. » Il ne suivrait pas de là que ces ventes fussent prescrip
tibles. Mais lorsque plus tard les articles 529 et 530 du Code civil
�IL n ’y
k
PAS DE PRESCRIPTION.
9
ont mobilisé ces rentes, elles sont devenues seulement alors pres
criptibles, comme nous l’avons établi dans la consultation du 5
mai, d ’après les doctrines expliquées dans les considérans d ’un
arrêt de la Cour de cassation, sections réunies ( lire l’arrêt dans
Dalloz, 3G-1-41). Néanmoins, même dans ce cas, la prescription
ne s’est opérée q u ’en faveur des tiers-acquéreurs. Les preneurs
originaires sont restés sous la loi de leur titre, en ayant de plus la
faculté de racheter la rente, parce que les lois ne disposent que
pour l’avenir. Tout cela a été développé dans la consultation et
appuyé des autorités les plus imposantes. Il nous suffira de faire
observer que le rédacteur du mémoire en réponse n ’a pas même
abordé notre observation que les héritiers directs du preneur em
phytéotique , alors même qu’ils auraient été légalement investis
du domaine de Lollière, ne pouvaient en aucun cas prescrire con
tre leur titre.
Il faudrait donc, pour repousser la demande de madame la m ar
quise de Châtillon, que ses titres fussent féodaux ou mélangés de
féodalité. Ils ne le sont p o in t, comme on va le voir.
DEUXIÈME PARTIE.
L ’acte du G mars 1755 ri est point féodal, ni mélangé deféoaalüf.
Notre honorable adversaire consacre une grande partie de son
mémoire à soutenir que les actes féodaux sont abolis, et que celte
abolition a été étendue, par une loi du 29 floréal an I I , a toute re
devance ou rente entachée originairement de la plus le'gèrc marque
de féodalité. Tel est le principal et comme l’unique objet de ses
s § 1, 2 et 3 qui s’étendent de la page 7 à la page 20. Eh bien !
nous ne contestons pas le moins du monde scs principes sur ce
2
�10
DEUXIÈME P A R T IE .
p o in t; mais nous contestons l’application q u ’il veut en faire à
l’acte du 6 mars 1755, tant dans les paragraphes cilés que dans les
suivans. C’est la mineure du syllogisme auquel se réduit tout son
travail. En démontrant qu’elle est fausse, nous aurons détruit son
mémoire radicalement, et il n’en restera rien q u ’on puisse opposer
à nos prétentions.
Le paragraphe premier du mémoire s’attache à distinguer le
bail à cens proprement dit, ou cens féodal, du bail emphytéoti
que. Il soutient que l’acte du 6 mars 1755 est un bail à cens
féodal. Son principal argument repose sur ce que le bail à cens
est le bail d'un fonds noble et féodal; au lieu que le bail em
phytéotique est celui d ’un fond qui est tenu en roture. Il ap
puie sa distinction d ’une citation de l'annotateur de Boutarie,
traité des droits seigneuriaux, page 2. Ici encore notre contradic
teur suppose ce qu’il faut prouver, que le mol cens introduit,
n ’importe comment, dans un bail quelconque, le rend féodal.
Cependant ce mot se prend pour toutes sortes de renies, c’est
un terme générique dont on peut se servir indifféremment pour
indiquer les redevance foncières, emphytéotiques ou autres.
Voilà pourquoi la rente de l'émphyléose ainsi, que celle de cetts,
porte également le nom de censive. Ces paroles sont précisément la
fin de la phrase de l’annotaleur de Boutarie, citée dans le mé
moire des héritiers Baduel (voir le traité des droits seigneuriaux,
pag. iij, dernières lignes (1). Il paraît que notre adversaire s’en
est rapporté à une citation de M. Merlin, q u e s t i o n s d e d r o i t , verbo,
( 1) M* Viollc, rédacteur du mémoire, qui avance dansl’observation essentielle,
ajoutée page 60, que Mmc de Cliùlillou désavoue, dans l’acte du 20 septembre
1837, qu’il ait été publié des mémoires, a aussi tronqué cet acte. La copie,
sur papier libre, envoyée par M. Hampon à M. Bole, à P aris, porte qu’il n’y
a pas eu de mémoires publiés, à moins ceux confiés à l’ancicn avocat de (a
dame requérante (Mc Viollc).
�LA BENIE DE LOLLlÈUE
n ’ e ST
POINT FÉODALE.
t 1
Moulin. M. Merlin cite aussi par erreur la page 2 pour la page 3;
mais il dit après cette citation: « Ajoutons que le franc-alleu
« noble, c’est-à-diredéeorédes titres deseigneurieetdejustice, peut
« aussi bien être donné en emphytéose que le franc-alleu roturier ,
« c’est-à-dire dénué de justice et de seigneurie. M. Boutaric ni
« son annotateur ne le disent, mais cela sesenlde soi-même.» Ainsi
parle M. Merlin, l. c , page 277, qui ne fait néanmoins, quoiqu’il
en dise, q u ’abréger et reproduire l’opinion professée par Bou
taric, au traité cité, chapitre 13, page 377, lignes 31 et suivantes.
Dans plusieurs contrées, et particulièrement dans les pays al
lodiaux, la dénomination de cens était commune à la rente sei
gneuriale, au canon emphytéotique et à la rente foncière.
L'acte du G mars 1755 est qualifié de bail emphytéotique. Cette
qualification lui convient, et elle n ’esl pas détruite parce que la
rente de Pemphytéose aura été désignée comme fiouveau cens, ou
comme censive.
Après Boutaric, on cite Merlin. Ecoutons Merlin, s’adressant
à la Cour de cassation, dans l’affaire de Jean Salomon et consorts,
( \ Juthss, r é p e r t o i r e u n i v e r s e l , verbo Cens,% 5, pages 129 et
suivantes.— Troisième édition. — Après avoir dit que le mot
cens ne signifie par lui-même q u ’une ren te, une prestation,
un revenu quelconque, il cite une dissertation de feudo censuali,
qui se trouve dans le thésaurus ju risJ e u d a lis d ’Inichen, imprimé
à Francfort en 1750. tom. 2, page 45. « L ’auteur de cette disser« talion, disait M. le procureur général à la Cour suprême, s ’oc« cupe des différences q u ’il y a entre le bail à fief annuel, et le
« bail à emphytéose; et à ce sujet, il s’exprime en ces termes: ou
“ la chose est concédée purement et simplement à censou à rente
perpétuelle, sous réserve du domaine direct, de l’investiture,
« du droit de lods ; et dans ce cas le bien n ’est pas fief, mais sim0 plement ccnsive : ou la chose est concédée à cens, avec réserve
« du domaine direct, de l’investiture, et, comme il arrive sou-
�12
DEUXIÈME PARTIE.
« vent, du droit de lods; et alors,
« MAGE,
c ’e s t
s ’i l y a r é t e n t i o n
UN F IE F CE NSUEL; SI LA F OI-H OM MAGE
n ’ e ST
de
la f o i- hom
PAS R E S E R V E E
« c ’ e s t u n e e m p h y t é o s e ..... Rien à conclure ici de la dénominatiot
« de cens donnée à la redevance.. ..
« Sans doute il est des pays où une redevance originairemen
« foncière, due à un ci-devant seigneur, doit être présumée avoi
« été originairement seigneuriale ; mais quels sont ces pays ? G
« sont ceux où était en vigueur, avant l'abolition du régime féodal
« la règle nulle terre sans seigneur.
« Mais dans les pays allodiaux, rien n ’empêche de présumei
« que le seigneur à qui est due une rente foncière, l'a stipulée pai
« un simple bail à rente qui ne cohtenai t de sa part aucune réserve
«du domaine direct; et non seulement rien n’y fait obstacle à
« cette présomption, mais elle est la conséquence nécessaire de la
« maxime, nul seigneur sans titre.
«Telle est la distinction que nous tracent les principes es« sentiels et fondamentaux de cette matière, et il ne faut pas
« croire q u ’elle soit en opposition avec l’article 17 de la loi du
« 25 août 1792.
« Cet article ne dit pas que les rentes foncières dues à des ci« devant seigneurs soient abolies : il dit seulement que les rentes
« foncières dues à des particuliers non ci-devant seigneurs sont
«maintenues. Il sc tait donc sur les rentes foncières dues à des ci« devant seigneurs, et, par cela seul qu’il se tait à leur égard, il ne
«les abolit ni ne les maintient: il s’en réfère aux principes du
«droit co m m un, qui établissent, entre les pays allodiaux et les
« pays non allodiaux, la ligne de démarcation dont nous venons
« de parler. »
Ces principes furent consacrés par l’arrct du 11 germinal an
XIII, au rapport de M. Lombard-Quincieux (S. 2. 148). La même
question avait été résolue dans le môme sens, par la même Cour,
�LA RENTE DE L0LL1ÈRE
h ’ e ST
POINT FÉODALfc.
15
pour la coutume d’Auvergne, le 13 vendémiaire de la même an
n é e ^ . 5. 1. 57).
On voit, tant par la citation de-M. Merlin que par les doctrines
des plus habiles feudistes, que le bail emphytéotique et le bail à
cens proprement dit, qui avaient d’ailleurs tant de rapports, dif
féraient cependant d’une manière essentielle, mais sur un seul
point. La rétention de là foi-hommage était de l’essence du-bail à
cens proprement dit, mais ne l’était pas du bail emphytéotique.
Peu importait d ’ailleurs la qualification du bail. On avait beau
l’appeler emphytéotique, s’il contenait«rétentiori de la foi-hom-j
mage, ou si la redevance était stipulée en reconnaissance de la
seigneurie, c’était un bail à cens proprement dit, une rente seij
gneuriale, dans le sens de la loi du 25 août 1792; mais s’il n i
contenait pas rétention de la foi-hommage, si la redevance n'étaij
stipulée que pour une concession originaire de fonds, c’était un
bail emphytéotique.
Dans son § '2 , le rédacteur du mémoire en réponse se borne à
une exposition doctrinale des trois périodes de la législation qui
frappa graduellement de suppression les droits féodaux, en les
déclarant en partie rachetables et les maintenant jusqu’au rachat,
ensuite en les annulant sans indemnité, même ceux conservés et
déclarés rachetables par les lois antérieures, enfin, en supprimant
aussi toute redevance ou rente entachée originairement de la plus
légère marque de féodalité.
Nous n ’avons rien à dire contre ces principes ; notre unique
objet est de faire voir qu’on ne peut pas nous les appliquer.
Le mémoire ajoute, page 13 : « O r cette loi, ou plutôt cés lois
* que nous avons analysées avec la plus sévère exactitude, ne font
« aucune différence à l’égard des titres constitutifs ou récognitifs
«de seigneurie ou droits féodaux. Elles ne distinguent pas si les
“ titres sont des baux cmphylcotiqu.es ou à cens, ou bien s’ils doi« vent avoir toute autre dénomination ; elles ne voient dans les ti-
�14
DEUXIÈME PARTIE.
« très, quels qu ’ils soient, que les signes de féodalité ou de sei«gneurie qui peuvent y exister; et si de tels signes s’y rencon« trent, les lois prononcent la suppression des litres, sans égard
« aux redevances que ce mélange impur cesse de faire considérer
«comme des prestations purement foncières.» Cette consé
quence que notre adversaire a tirée de ses principes est vraie gé
néralement; mais elle est fausse dans l’espèce. Il existe une dé
claration de Louis XV, qui, quoique donnée seulement pour la cidevant P rovence, n’est pas moins applicable à tous les pays de
franc-alleu, ainsi que l’a si profondément établi M. Henrion, dans
ses Dissertations féodales , t. 1 , article A lleu , et M. îtlerlin
après lui, questions de droit, Ferbo , Rente seigneuriale, § 12. 11
est vrai que cette déclaration est postérieure à l'acte du G mars
1755, puisqu’elle est du 2 janvier 1769; mais elle s’applique, par
une disposition formelle de l’article 2 , aux redevances emphytéo
tiques stipulées dans des contrats antérieurs. La voici :
I
'V "
a Les gens des trois étals de noire pays de Provence rio^s auraient fait r t» présenter que l'usage du droit éc"i< qui régit la Provi ::cc, aurait donné lieu
a à une sorte d’emphytéose, *j: r lauucll«* 1er. ¿»rcpiiétaires de terres en franc« alleu-roturier , en cédant la propriété utile desdites te rre s , s’en réservent
« la propriété foncière, et n’en font l’aliénation qu’à la charge de redevances,
« de droits de lods et ventes en cas de mutations, du droit de prélation ou de
• retrait, et quelquefois môme à la charge de foi et hommage; en sorte qu’il
« paraîtrait en résulter une espèce de directe ayant la plupart des attributs
a des fiefs, ce qui les aurait fait qualüier abusivement dans les actes, de fiefs,
« de directes nobles et féodales, et de seigueuries : que ces qualifications
« auraient donné lieu aux fermiers de nos droits de franc-fief, de prétendre
o (jue ce droit leur est dû, lorsque ces directes emphytéotiques passent entre
« les mains de roturiers et sont possédées par eux; et de former contre les
« possesseurs de ces redevances, des demandes à l’occasion desquelles il se
« serait élevé un grand nombre de contestations actuellement pendantes en
« notre conseil, sur quoi ils nous auraient supplié de vouloir bien les faire
« cesser, en expliquant nos intentions à cet égard. Nous nous sommes en
�LA RENTE DE LOLLlÈRE
n’est
POINT FÉODALE.
15
« conséquence fait rendre compte de l’origine de cet usage, et nous aurions
« reconnu qu’il pouvait provenir de ce'que notre déclaration du 12 décembre
« 1676 et noire edit du mois d’août 1692, en conservant à la Provence, l’u« sage de cette sorte de contrats, ne se seraient pas suffisamment expliqués
« sur leur nature ; qu’elle ne peut cependant être douteuse, puisqu’il nous
« seuls appartient le droit d'annoblir, tant les choses que les personnes; que
« d’ailleurs les emphytéoses diffèrent essentiellement des inféodations, en ce
« que, suivant les principes du droit féodal, celui de prélation ou re tra it ne
« peut appartenir qu’au possesseur du lief; au lieu que dans cette espèce de
« bail emphytéotique, le droit de prélation peut devenir réciproque, et s’exer*
« cer également par le propriétaire de la redevance foncière, lorsque le fonds
« est aliéné, et par le propriétaire du fonds, lorsque la redevance est ven« duc ; ce qui a même été ainsi réglé par deux statuts des comtes de Provence,
« accordés, l’un dans l’année 1293, à la ville de Sallon, et l’autre en l’année
« 1352, à celle d'Aix. Nous avons, en conséquence, résolu de tellement déter*
miner la nature de ces emphytéoses, qu’elles ne puissent être en aucun cas re« gardées comme formant des fiefs et seigneuries, et que les possessions des
« redevances emphytéotiques ne puissent être inquiétées pour le paiement des
« droits de franc-lief. A ces causes et autres considérations à ce nous mouvant,
« de l’avis de notjçc çonseilet de notre certaine science, pleine puissance et au« torité, avons dit, déclaré et ordonné, d$ons, déclarons et ordonnons, voulons
« et nous plaît ce qui suit : — Art. 1er. Les redevances créées pour la concession,
« à titre d’emphytéose, de terres et héritages tenues en franc-alleu roturier dans
« le pays de Provence, ne pourront, en aucun cas, être qualifiées de directes
« nobles et féodales, de fiefs et seigneuries; encore que par les contrats, les
« bailleurs se réservent les droits de lods et ventes, et quelesdits contrats con« tiennent stipulations du droit de prélation ou de retrait. Défendons à tous
* notaires, gardes notes et autres, d’employer lesdites qualifications, comme
« aussi d’énoncer danslesdits contrats, aucune réserve de foi et hommage en
« faveur des bailleurs.— A rt. 2. Les qualifications énoncées dans l’article
« précédent, qui auraient été données P A n d e s c o n t r a t s a n t é r i e u r s a n o * t r e p r é s e n t e d é c l a r a t i o n , a u x r e d e v a n c e s e m p h y t é o t i q u e s stipulées par
« lesdits c o n tra ts, seront regardées comme nulles, ainsi que les réserves de foi
« et hommage qui y seraient exprimées, et ne p o u r r o n t lesdites qualifica« lions et réserves changer la nature desdites redevances et celle des héri*
" tages qui en sont l’objet. Défendons, en conséquence, aux fermiers de nos
�16
OEUXIEMK PARTIE .
« domaines, d’exiger, t a n t p o u r l e p a s s é q u e p o u r l ’ a v e n i r , aucuns droits de
« franc-fief pour la jouissance desdites redevances, encore qu’elles fussent
« possédées par aucun de nos sujets roturiers. — A rt. 3. Avons dérogé et déro« geons à tous édits, déclarations et autres lettres, et particulièrem ent à notre
« déclaration du mois de décembre 1076, et à notre édit du mois d’août
« 1692, en ce qui pourrait être contraire à la teneur de ces présentes. »
Il résulterait de cette déclaration, qui se fonde sur les prin
cipes généraux de la matière dans tous les pays allodiaux, qu ’a
lors même que le marquis de Miramon aurait inféodé et accensé
son domaine de Lollière, ce qu ’il n’a pas fait, ces clauses d’inféodation et d ’accensement devraient être réputées non écrites, et
que, la rente fût-elle qualifiée seigneuriale ne serait pas abolie
parla loi du 17 juillet 1793. Mais nous ne voulons pas nous en
prévaloir.
Notre contradicteur, poursuivant l’exposé de ses doctrines,
essaie d ’établir, § 3, pag. 14 et suivantes, que si l’acte du 6
mars 1755 était un véritable bail emphytéotique, il n ’en
serait pas moins frappé par les lois répressives de la féodalité.
C’est ici qu’est toute l'alfaire, et l’on nous permettra de discuter
minutieusement les théories expliquées dans cette partie de son
.aémoire.
On y distingue l’cmphytéose à temps de l’emphytéose perpé
tuelle qu’on dit abolie par l’article Ie' de la loi du 29 décembre
1790, et depuis encore par larticle 530 du Code civil. Ces d e r
nières paroles sont une erreur grave. L’article 530 du Code civil,
ne parle que des rentes établies h perpétuité. Or, il y avait autre
fois une différence capitale entre les rentes emphytéotiques et les
rentes à perpétuité. Celles-ci emportaient une aliénation absolue;
point de droits seigneuriaux comme dans le cens, point de réten
tion dç domaine direct comme dans l’emphytéose : tout passait
lu preneur, tout lui appartenait, sans aucune autre charge que la
-"ente stipulée par le bail. Merlin, verbo Cens, § 5, p. 126.
�LA. RENTE DE LOU.lÈRE
n ’ e ST
POINT FEODALE.
17
De ce que le Code civil ne s’est pas occupé d u contrat emphy
téotique, nous tirons la conséquence que ce contrat est toujours
régi par les lois intermédiaires qui en ont parlé, c’est-à-dire par
des lois spéciales qui ne rentrent pas dans la loi commune du
Code civil, et qui peuvent y faire exception.
Eludions ces lois.
La première, du 15-28 mars 1790, se bornant à déclarer rachetables les rentes emphytéotiques de toute n a tu re , nous n’avons
rien à en dire, puisque nous ne nions pas que ces sortes de rentes
ne soient rachelables.
La seconde, du 18-29 décembre de la même année, reconnaît
expressément, par le texte formel de l'article 5 du titre 3, q u ’une
rente emphytéotique peut être perpétuelle et non seigneuriale,
puisqu’elle s’occupe expressément des empliytéoses perpétuelles
et non seigneuriales. En effet, cet article est ainsi conçu :
« 5. Lorsque les baux à rente, ou emphytéose perpétuelle et
« non-seigneuriale, contiendront la condition expresse imposée
« au preneur et à ses successeurs, de payer au bailleur un d ro it
« de lods ou autre droit casuel quelconque en cas de mutation,
« et dans les pays où la loi assujettit les détenteurs auxdits ti« très de bail à rente ou emphytéose perpétuelle et non sei« gneuriale, à payer au bailleur des droits casuels aux muta« lions, le possesseur qui voudra racheter la rente foncière ou
« emphytéotique sera tenu, outre le capital de la rente indiquée
« en l’article ci-dessus , de racheter les droits casuels dus aux
* m utations, et ce rachat se fera aux taux prescrits par le décret
* du 3 mai, pour le rachat des droits pareils ci-devant setgueu" riaux, selon la quantité et la nature du droit qui se trouvera
* dû par la convention , ou suivant la loi. »
Mais nous avons, dans l’espèce, peu d'intérêt à défendre les
e,nphytéoscs perpétuelles, puisqu’on a déjà prouvé, par les lermes même de l’acte du (i mars 1755, que l’emphytéosc consentie
3
�18
DEUXIÈME PARTIE.
à Pierre Baduel était uniquement temporaire. Notre adversaire
prend condamnation, page 26, sur l’emphytéose temporaire : il
conteste seulement le sens du contrat qui fait notre titre, et il
nous oppose les principes applicables à l’emphytéose perpétuelle.
Nous ne parlerons que de ces principes.
'
L’article Ier du titre Ier de la même loi jiorte : « Toutes
« les rentes foncières perpétuelles...... quelle que soit leur
« origine....... seront rachetables...... au taux qui sera ci-après
« fixé. Il est défendu de plus, a l ’a v e n i r , créer aucune rede« vance foncière non remboursable, sans préjudice des baux à
« rentes ou emphytéose, et non perpétuels, qui seront exécutés
o pour toute leur durée, et pourront être faits, à l’avenir, pour
« 99 ans et au-dessous, ainsi que les baux à vie, même sur plu« sieurs tètes, à la charge qu’elles n ’excéderont pas le nombre
a de trois. »
L'article 2 ajoute immédiatement : « Les rentes ou redevances
« foncières établies par les contrats connus en certains pays sous
« le titre de locaterie perpétuelle, sont comprises dans les dispo« sitions et prohibitions de l’article précédent, sauf les modiûca« tions ci-après sur le taux de leur rachat. »
Nous concluons de là : 1° que toutes les emphytéoses et locateries perpétuelles existantes avant cette loi sont devenues rache
tables; 2° qu ’il n’est plus permis de créer à l’avenir aucun bail
emphytéotique, aucune locaterie non viagère dont la durée lé
gale puisse avoir plus de 99 ans, et qui ne soit remboursable après
cette époque.
Or, de ce que les emphytéoses et locatcries perpétuelles sont
devenues rachetables, il s’en suit, non pas q u ’elles sont abolies,
mais qu ’on [»eut les racheter. Elles existent donc toujours jusqu’au
rachat ; et, s’il n ’y a pas de rachat, la propriété desJonds concédés «
titre de baux emphytéotiques perpétuels ou héritables, n ’appartient
aux débiteurs des rentes, qu'à la charge p a r eux de remplir les con~
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IlENTE DE L 0 L L 1 E R E N EST P O IN T
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FE O D A L E.
19
'
diliotis de leur bail. Ces paroles sont tirées de l’avis du Conseil
d’État, du 7 fructidor an XIII, cité par M. Merlin, Reperl. /^ E m phytéose, § 6 , pag. 528.
Le législateur a pu fixer au rachat ün délai fatal. S’il ne l’a
point fait, la rente reste ce q u ’elle était a son origine; mais elle
est de plus rachetablè, nonobstant toute convention contraire.
Le rachat est aujourd’hui de son essence, et cette faculté, déri
vant uniquem ent delà loi, n ’est plus prescriptible.
Mais on ne voit nulle part qu’on ait fait une obligation de la fa
culté de racheter les renies foncières,’et bien moins encore qu ’on
aitpresôril un délai fatal', après lequel le bailleur serait dépouillé
sans indemnité, au profit du preneur qui n’aurait pas voulu ra
cheter. Une telle disposi tion eût été absurde, parce qu’elle eût fait
de la faculté de rachat une faculté dérisoire.
Quand nous disons q u’on n ’est pas obligé de racheter les rentes
foncières, et que la faculté de rachat est imprescriptible, nous
n ’entendons point'que cette faculté soit perpétuelle. Elle doit se
renfermer dans les limites de la disposition qui ne permet pas que
des baux quelconques puissentètre faits pourplusdequatre-vingtdix-neufans, et ce délai doit courir dé là date delà loi' d ùr 18-29 dé
cembre 1790, et non de là date dés bau* dont plusieurs pouvaient
alors avoir plus de quatre-vingt-dix-neuf ans d’existence! Ils’n ’en
sont pas moins compris dans les dispositions de l’article 5, cité cidessus. Cette loi rie lés a pointabolis. Mais en les déclarant racîiétablcs, et en fixant la durée q u’ils pourraient'avoir à l’avenir, elle
a fait une novation dk titre, et ceMlitré nouvel se trouve nécessaire
ment régi par la loi dc'sW créàtiori'qui le valide pour qiiiitre-vingtdix-neüf'a'hs, ét‘qln lé rend raclietable pour toui le temps dé celte
durée.
Nous croyons avoir suffisamment1établi juscjuV préseni que; là
demandé de riladiirhe lii’inirquise de Ch'iltiUon contre les héritiers
N,aduèl; est conformé aux principes'du' droit'coVnlnün . si* on les
�20
DEUXIÈME PARTIE.
invoque, et q u ’elle n’a rien de contraire aux règles spéciales de la
matière qui lui laissent encore un très long délai, pour mettre les
détenteurs du domaine de Lollière dans l’alternative de racheter
la rente, ou de la servir.
Il n'est pas inutile de faire observer que l'article 3 du titre 5 de
la loi que nous commentons, ne veut pas même que les rentes fon
cières dont il s’occupe perdent leur nature immobilière par la fa
culté de rachat. Voici ce qu’il porte :
« La faculté de rachat des rentes foncières ne changera pareil« ment rien à leur nature immobilière, ni quant à la loi qui les
« régissait; en conséquence, elles continueront d ’ètre soumises
« aux mêmes principes, lois et usages que ci-devant, qu ant à l’or« dre des successions, et quant aux dispositions entre vifs et tes« tamentaires, et aux aliénations à titre onéreux. »
Sous ces mots de rentes foncières, l’article comprend générale
ment toutes les rentes dont il est parlé dans la loi, et particuliè
rement les emphytéoses perpétuelles et non seigneuriales.
Pour échapper à des lois si claires et si précises, notre adver
saire n’a d ’autre ressource que d ’établir que notre emphytéose
est seigneuriale. Nous pourrions nous en tenir àce q u e nous avons
dit à cet égard, mais q u ’on nous permelte d’y revenir un moment,
puisque aussi bien c’est un point du litige digne de quelque at
tention.
Sur quoi donc voudrait-on fonder cette assertion que notre em
phytéose est seigneuriale ? On a vu que cette qualité ne résulte
pas de ce que la rente est duc à un seigneur; q u ’elle ne pouvait
venir que des conventions accessoires de l’obligation de payer la
rente, comme par exemple de la réserve de la directe. Mais ces
mots ne doivent s’entendre que de la directe emphytéotique.
« Et dans le fait, dit M. Merlin, q u e s t i o n s d e d u o i t , verbo , rente
« seigneuriale, § 1 1 , page 6GÎ>, ne sait-on pas que les juriscon« suites ont toujours reconnu deux sortes de directes , la directe
�LA l i t S T E DE LOLLILRE
n ’ e ST
POINT FÉODALE.
21
« seigneuriale et la directe emphytéotiqueP Dunod en fait expres« sèment la remarque dans son Traité des prescriptions, partie 3 ,
* chap. 10; et nous devons ajouter que quoique la première de
« ces directes ait été abolie avec la féodalité qui en était la source,
" la seconde subsiste encore et subsistera tant que la loi civile
« n ’ôtera pas au propriétaire d 'u n héritage franc et libre , la fa« culte d ’en concéder le domaine utile, à la charge d ’une rede« vance annuelle, récognitive du domaine direct q u ’il retient de« vers l u i , c’est-à-dire q u ’elle subsistera toujours. » — Le même
auteur traite cette question ex professo dans plusieurs endroits de
ses ouvrages qu’il serait trop long de citer. Nous nous contente
rons d ’extraire quelques passages décisifs de son Répertoire , v°
fief, sect. 2, § 7. — « De même, dit-il, page 242, que dans le bail
« à cens seigneurial, le bailleur retient à soi la seigneurie directe;
« de même aussi dans le bail à emphytéose , le bailleur retient à
« soi la directe emphytéotique et assurément les redevances re« cognitives de la directe emphytéotique ne sont pas seigneu« riales; elles ne sont pas abolies par la loi du 17 juillet 1793 . —
« Témoins deux arrêts de la Cour de cassation, qui l’ont ainsi
« jugé.
« Le premier est celui du 29 pluviôse an I I , que nous avons
« déjà cité.
« Le second arrêt a été rendu dans la coutume d’Auvergne où
« l’allodialité est toujours présumée de droit comme dans la ci-de« vanl Alsace, comme dans le ci-devant Porentruy...» (V. Cens,
S 8 , n . 2.)
« . . . La question se présenterait dans une coutume soumise
* à la règle, nulle terre sam seigneur,... c ’est la directe seigneu* riale, et non pas la simple d i r e c t e emphytéotique, que le bailleur
« serait censé s’être réservée.
« M ais, dans les pays allodiaux , dans les pays ou le bail
* à cens seigneurial ne se présume pas, la présomption de l’em-
�22
DEUXIEB1E PARTIE.
a phytéose doit i’em porler; e ttb u te directe,' réservée sans a u n e
« expression, ne peut être entendue què de la directe e.nrphv« téotique. »
Notre auteur cite à l’appüi de ses doctrines un arrêt du 24 ven
démiaire an XIII, au rapport de M. Ruperon, par lequel la Cour
de cassation a jugé non aboli! par la loi du 17 juillet 1793, un
droit d e persière ou champart que les sieur et dame Lasalle récla
maient sur des héritages situés dans leur ci-devant seigneurie
de Blanzat, régie par la coutume d ’A uvergne, et que l’on pré
tendait avoir été originairement seigneuriale;
n
Il cite un autre arrêt de la même Cour du 9 floréal an XIII.
au rapport de*'M. R ousseau, qui a cassé un arrêt de la Cour
d’appel de Trêves , et proclamé le principe que la présomption
de la qualité purement foncière des redevances } est admise , datis
le cas mcme où elles sont dues à des seigneurs dans les pays allo
diaux. ( V. Tiers ou quart-raisin. )
Enfin M.. Merlin cite encore un décret impérial du 9 vendé
miaire an XIII qui décide que, dans les pays allodiaux, ce n’est
Jjas en fief, mais eni franc-alleu q u’un seigneur de fief est cérisé
posséder les héritages dont la nature n ’est déterminée ni par ses
litres, ni par sa possession.
C’est à l’aide de toutes ces autorités que l’ancien procureurgénéral à lîl'Cour de cassation provoqua l'arrêt d u '10 février 1806,
311 rappôrlide M. Zangiarconii, qui rejeta la demande en cas
sation d’un a rrê t du tribunal civil de Delemont. Le tribunal
¡■ivait condamné le sieur Ilertzeis ii payer comme redevanbe fonhièrodt m aintenue-par les'loi«», une rente établie dans le? PorenIruy; pays allodial comme-la ci-devant Auvergne.
Ndtlle adversnire'soiitient, pagd 15; ligne 21 de son mémoire,
que cet arrêt et ceux qui l’ont précédé, comme le d é c r e t impérial
dui 9 > vendémiaire an X III, sont -e n t i k r k m e n t a ‘ n K i s m i n s o e s l o i s
KxisïANTïfc,'Nous aurions désiréqu’unè assertioh sinrnnbhantc frit
�/
/V
LA KENTE DE L O L U È n r
¡n ’ e ST P O IN T FE ODA LE.
23
appuyée de quelques preuves. Mais c’est encore sur la parole du
maître que nous devons croire. On cite, il est v r a i , un avis du
Conseil d’Etat du 13 messidor an XIII; mais, d ’après le texte mêmp
desconsidérans de cet avis, tels qu ’ils sont reproduits dans le mé
moire en réponse , même page 15 , lignes 33 et suiv., il est évi
dent que cet avis est inapplicable à notre espèce , puisqu’il
suppose manifestement que le titre de la redevance dont il s’a
gissait, dans l’affaire portée au Conseil d’Etal, était féodal, et que
la redevance était seigneuriale. C’est là précisément ce qu ’il
fallait établir. Voici le texte entier de l’arrêt du Conseil d /É ta t,
qui n ’a rien de contraire aux doctrines que nous avons éta
blies.
« 2 ju ille t 1805. — 13 messidor an XIII.
« Le Conseil d’Etat, sur le renvoi qui lui a été fait par Sa Ma« jesté Im périale, d ’un rapport du Ministre des finances, et d ’un
« projet de décret tendant à déclarer maintenues des redevances
« à prestation de fruits, mêlées de cens portant lods, loi, amende
« et seigneurie, dues par des habitans de la commune d’Arbois,
« en vertu d e t i t r e s d ’ a c c e n s e m e n t consentis par des individus que
« l’on prétend avoir pris mal à propos la qualité de seigneurs ,
« — considérant que lorsque le litre constitutif de redevances ne
« présente aucune am biguïté, celui auquel.ce titre est opposé ne
« peut pas être admis à soutenir q u ’il n’avait pas de seigneurie,
« — considérant que toutes les dispositions législatives, et, en
0 dernier lieu, l’avis du Conseil d’Etat du 30 pluviôse an II, ont
" consacré la suppression de toutes prestations, de quelque na* ture qu’elles puissent être, établies p a r des titres constitutifs de
« redevances seigneuriales et droits féodaux supprimés par ledécret
0 du 17 juillet 1793, — est d’avis q u’il n’y a pas lieu d ’adopter le
9 projet présenté par le Ministre. »
�24
DEUXIÈME PAfiT lE.
Nous repoussons l’autorité (le cet avis qui ne peut pas nous at
teindre : i° parce que la commune d ’Arbois n’était pas en pays
allodial; 2° parce qu'il s’agit ici de titres d’accensement, et non de
titres emphytéotiques ; 3° parce que la féodalité de ces litres était
évidente.
iNous repoussons pareillement l’autorité du décret impérial du
23 avril 1807. Il s’agit, dans ce décret, d ’un bail à cens, propre
ment dit, consenti au profit des religieuses de Saint-Bénigne, de
Dijon, le 30 avril 1664. On sait qu’un bail de cette nature élail
féodal;
Enfin nous repoussons l’avis du Conseil d ’Etat du 17 janvier
1809, approuvé, p o u r c e q u i c o n c e r n e l e c a s p a r t i c u l i e r , le 2 fé
vrier suivant, relativement à une réclamation des hospices d’Aix,
parce que la restriction de l’approbation ne permet pas que celle
autorité tire à conséquence. Ajoutez qu’on lit dans l’avis du Con
seil d’Etat, sur cette même affaire, en date du 7 mars 1808, que
le décret du 17 nivôse an X III, « portant que les redevances ori« ginairement imposées au profit du chapitre de l’église d’Aix,
« sur les héritages de divers particuliers, continueront d’être
« servies comme redevances emphytéotiques, et sans la charge
« des lods et demi-lods qui y avaient été ajoutés i n d u e m e n t e t
« s a n s t i t r e s par les bailleurs, n a p o in t pu être d’ordonner le str« vice des renies auxquelles les lois reconnaîtraient un caractère
* essentiel de féodalité ; — que si la non féodalité de ces rentes est
< contestée, l a q u e s t i o n d! o i t ê t r e p o r t é e d e v a n t l e s t r i b u n a u x . »
Ainsi l’avis du Conseil d ’Etat, du 7 mars 1808, ne se prononce
que sur une question de compétence. C’est une simple opinion
que nous nous empressons de partager; ce n ’est pas une loi ni un
jugement qiron puisse opposer h nosprétentions. Si le décreldu 17
nivAse an XIII affranchit les redevables du chapitre d’Aix de la
charge de lods et demi-lods, ce n ’est pas que ces lods et demi-loris
lussent féodaux, c’est uniquement, ainsi que le décret le déclare^
�LA. RENTE DE LOI.LlÈR E
n ’ e ST
POINT FEODALE.
parce q u’ils avaient été ajoutés au bail
in d u e m e n t
et
25
sans t it r e s .
Dans toutes ces objections de notre adversaire, nous ne voyons
rien qui soit contraire aux principes sur lesquels nous avons
fondé les droits de madame la marquise de Ch&tillon au domaine
de Lollière.
»
Notre contradicteur s’appuie encore d'u n avis du Conseil d ’Etat, du 8 avril 1809, qui lui paraît assimiler aux redevances mé
langées de droits féodaux, les rentes constituées par des baux
emphytéotiques, consentis par les bailleurs, a t i t r e d e f i e f , scus la
réserve de la seigneurie, avec la stipulation de lods et ventes à cha
que mutation. Mais nous ne contestons pas q u ’une emphytéose con
sentie à titre de fie f ne soit féodale. Seulement nous affirmons
que les emphytéoses d’Auvergne n'étaient pas et ne pouvaient pas
être consenties à titre de fief. Ces expressions même à'emphytéose à titre de fief, nous sembleraient presque un oubli total, ou
plutôt un non-sens de la langue du droit féodal. On pouvait bien
consentir un fief, ou portion de iief, à titre d'emphytéose; mais
vous ne trouverez point dans les ouvrages des anciens feudistes
cette étrange qualification d ’emphytéose « titre d ejief. Cependant
elle est consignée dans l’avis du Conseil d’Etat, du 8 avril 1809, ap
prouvé le 13 avril suivant, et rapportéen entier dans le quatrième
volume des additions de M. Merlin, à sa troisième édition, v° Fief}
pag. 577.
Ces additions ne sont pas toujours heureuses. Notre affaire va
le démontrer.
« Dans les véritables principes, disait cet auteur au temps de
« toute sa force, R é p e r t., v° F ief, sect. 2, §. 3, lrc colonne, page
« 223, ligues 47 et suiv., c’est à celui qui prétend q u ’un bien
«est fief plutôt que franc-alleu, à prouver que ce bien procède
''originairement de la concession d’un seigneur qui s’en est re° tenu le domaine direct, avec la foi.
�26
DEUXIÈME P A R U E .
« Car la concession de l’héritage est le premier des titres; et
« sans celui-là, tous les autres sont nuls.
« Mais l’usage, bien plus que la raison, l’ascendant des sei« gneurs, bien plus que l’autorité de la loi, ont apporté une modi« fication à cette règle. Il y a des provinces où la concession est
« légalement présumée; il y en a d ’autres où toute terre est présu« mée franche si le seigneur ne démontre le contraire. »
Dans les coutumes allodiales, et particulièrement dans celle
d’Auvergne, on présumait toujours le franc-alleu , s’il n ’y avait
preuve du contraire.
Il résulte de là, non pas que l’emphytéose du 6 mars 1755 ne
doive pas être présumée consentie à titre de fie f, langage que nous
ne saurions approuver; mais q u ’on ne peut pas présumer que
l’emphytéose de Lollière provint ou fût détachée d’une terre
tenue à titre de fief, puisque cette terre n ’était pas fief, mais bien
franc-alleu.
Telles sont les doctrines longuement expliquées par 31. Merlin,
dans les vingt-quatre colonnes de son Répertoire, v° /'7<?/Jsect. 2,
§ 7 ,e td a n su n grand nombre d ’autres articlesdes questions d e d ro it
ou du répertoire. Notre adversaire mentionne une espèce de ré
tractation dece grave jurisconsulte à l’article cité, v® Fief, scct. 2,
§ 7.0ncliercherait inutilement cette rétractation dans la troisième
édition; mais il est vrai de dire q u ’au premier volume de ses addi
tions, publié en 1821, et formant le quatorzième de son grand ou
vrage, page 577, on lit ces mots:
« F ii;k, scct. 2, § 7, pag 2iG, col. 2, après la ligne 5, ajoute/ :
« Cet arrèl ( il s’agil de l'arrêt de la Cour de cassation du lOfé« vrier 1806), quoique fondé sur les vrais principes, ne peut ce«. pendant plus faire autorité , depuis que le Conseil d ’Etal a pris
« le parti d’assimiler aux redevances mélangées de droits féo«daux, les rentes constituées par des baux emphytéotiques
�LA RENTE DE LOLLlÈnE Pc’EST POINT FÉODALE.
27
» conlcnant stipulation, soit d ’un droit de lods, soit d’un droit de
« relief à chaque mutation.»
Suit l’avis du Conseil d ’Étal, du 8 avril 1809, approuvé le 13
avril suivant.
Voilà dans quels termes est conçue la nouvelle opinion de
M. Merlin.
Remarquez 1° qu ’il persiste dans ses doctrines, puisqu’il les
déclare fondées sur les vrais principes; 2° que sa citation des avis
du Conseil d’Élat n’est point entière, ce qui la rend inexacte. On
vieut de voir que si le Conseil d ’Etat avait écarté des redevances emphytéotiques des hospices de la ville d'Aix, la charge des lods
etdemi-lods qui y avaient été ajoutés, ce n’était pas que celte
charge fût féodale: c’était uniquement parce q u ’elle avait été
ajoutée i n d u e m e x t e t s a n s t i t u e s . Enfin q u’est-ce après tout que ces
avis du Conseil d ’Etat sur une question que le Conseil d’Etat
déclare lui-même ne pouvoir être jugée que par les tribunaux or
dinaires? Nous le demandons à lout homme de bonne foi, est-ce
bien sérieusement q u ’on voudrait opposer les quatre lignes des
additions, ou si l’on veut de la nouvelle édition de M. Merlin, à
des théories exposées par lui quelque temps avant, d’une manière
si profonde, après de si pénibles recherches et tant de travaux,
;iprès s u rto u t q u ’elles avaient déjà reçu la consécration de la
Cour suprême? Mais ce serait le dépouiller de son nom, et rayer
de nos annales judiciaires ses plus beaux titres de gloire, ses titres
d’immortalité.
On nous oppose encore plusieurs arrêts de laC ourde cassation,
deux notamment des 4 et 5 juillet 1809. Dans notre consultation
du ü mai dernier, nous avons pu cependant argum enter d arrêts
tout récens, plus explicites encore que ceux rapportés parM. Mer
lin. Nous ne prétendons pas soutenir l’infaillibilité de la Cour
de cassation; mais en supposant que les deux arrêts, des 4 et 5
juillet 1809, eussent décidé que les emphytéoses perpétuelles
�28
•
DEUXIÈME P ART IE .
étaient féodales, ces deux arrêts ne pourraient faire ju ris p ru
dence, en présence d ’arrêts antérieurs et postérieurs de la même
C our, qui ont. jugé le contraire. Voyons cependant.
Le mémoire en réponse fait connaître une partie des considérans du premier de ces arrêts ; mais il ne dit point que le bail
dont il s’agissait était un bail à cens, une emphytéose seigneuriale,
consentie par une lettre de fief, dans le ci-devant évêché de
Bâle et le pays de Porentruy, avec réserve d’un droit de relief que
l’article 1er de la loi du 18 juin 1792, place expressément au nom
bre des droits féodaux q u ’elle supprime sans indemnité. Il ne dit
pas que le bailleur, évêque de Bàle, était feudataire et vassal de
l’empereur d ’Allemagne, seigneur suzerain, tant en ce qui c on
cernait l’évêché et ses dépendances, que les biens particuliers de
l’évêque ; et que l’acte du 29 janvier 1745, par lequel il accensa
purement et à perpétuité une terre de la seigneurie de Porentruy,
à Jean-Claude Baillif de Courtedoux, n était q u ’une lettre de fief,
une sous inféodation, doublement (ëodale. Ces circonstances sont
rappelées en tête de l’arrêt de la Cour de cassation, et étaient
suffisantes pour motiver l’annulation de l ’arrêt rendu lie 8 ther
midor an XII, par la Cour d ’appel de Colmar, qui avait ordonné
le paiement de la rente réclamée comme purem ent foncière.
Qu’importe maintenant que', dans la surabondance de ses motifs,
la Cour de cassation se soit éloignée des vrais principes? Elle fait
autorité par sa décision qui est juste et légale; mais ces motifs
n ’on t de poids que par leur plus ou moins de connexité avec la
nécessité de la décision.
Ces réflexions peuvent s’appliquer encore à l’arrêt du 5 juillet
1809, dans la cause du sieur Thévenot contre le sieur Montaudon. Pour n ’en pas douter, on n ’a qu ’à jeter les yeux sur quel
ques uns des motifs de cet a rrêt, sur le suivant, par exemple : 1
« Attendu, en fait, quant au bail emphytéotique consenti, le
« 7 janvier 1687, par le chapitre de Saint-Germain, à Thévenot
�H
LA RENTE DE LOLI.IÈRE
n ’ e ST
POINT FÉODALE.
29
« el consorts, que l’héritage y énoncé est baillé en Jîefh éri« tab/e\
« Que le preneur est tenu, à chaque changement de main par
« décès, de reprendre le fie f ex. de p a y er au chapitre p a r chaque
« reprise dix sous bâlois, ce qui, d’après les monumens publics
« du pays, était considéré comme un droit de reliej;
« Et que de cette stipulation et de cette qualification, il résulte
« notamment que celte redevance est mélangée de féoda« lité......»
C’est par ces motifs que la Cour a cassé et annulé, le 5 ju illet
1809, l’arrêt rendu, dans cette cause, le 28 floréal an XIII, par
la Cour d’appel, séant à Colmar. On pouvait citer un troisième
arrêt de la même Cour, rendu le même jo u r, dans l’affaire Morel,
C. W etter et Lecomte, au sujet encore d’un droit de relief q u i ,
dans le langage des lois françaises, était un droit féodal. O n cite
celui du 18 juilleL 1809, où il y avait aussi stipulation de droits
de relief, et celui du 17 juillet 1811 qui s’explique par une cir
constance particulière constitutive d’un droit féodal. Le 2 juillet
1742, l’hospice de Dôle avait baillé à C. A. Sengon et H. Yerguet,
un terrain îi titre d'accensement perpétuel, et moyennant le cens
annuel, perpétuel, irrédimable et imprescriptible de 91 liv. 16 s.
8 d . — Le tribunal de I)ôle et la Cour de Besançon avaient jugé
que cette redevance n ’était pas féodale. La Cour de cassation en
!> jugé autrem ent, — « parce qu’il suffit, dit-elle, dans les consi« dérans de son arrêt, que les termes de l’acte portant constitu« tion de cens imprescriptible et irrédimable, avec lods et vente
0 en cas de mutation, ne laissent aucun doute sur l’intention de
« créer une redevance seigneuriale. » Mais la féodaiité de cette
redevance tient h la constitution du cens imprescriptible et irré
dimable qui en fait un véritable bail à cens seigneurial. Nous
n ’avons rien de pareil dans notre espèce.
Enfin, notre adversaire nous oppose deux autres arrêts de
�30
DEUXIÈME PARTIE.
la Cour de cassation, l’un du 2 mai 1808, l'autre du 4 avril
1810. Ni l’un ni l’autre ne sont applicables.
Le premier, rendu sur les conclusions de M. le procureur gé
néral Merlin, déclara la rente dont il s’agissait féodale, parce
qu’elle était mêlée de cens; le second est dans le même cas, ainsi
que l’indique le très laconique dispositif de l’arrêt :
« Considérant que la rente dont il s’agit ayant élé créée par
« un ci-devant seigneur, sur les fonds dépendans de sa seigneu« rie, e t a t i t r e d ’ a c c e n s e m e n t , cette rente est de plein droit re« cognitive de la directe féodale, et par conséquent supprimée
<( par les lois ;
« La Cour rejette, etc. »
Nous avons réfuté toutes les assertions de notre adversaire dans
ses § § 1 , 2, 3 et 0, sans en rien excepter ni réserver. Nous pas
sons aux §§ 4 et 5 , relatifs à ses preuves prétendues de la fé o
dalité de l’acte du G mars 1755, et à ce q u ’il appelle Vobjection tirée
de ce que la ci-devant Auvergne était un pays allodial. Ces deux
paragraphes se lient essentiellement, puisque ce qui était fé o d a l,
dans certaines coutumes, ne l’était pas dans celle d’Auvergne.
L’auteur du mémoire en réponse feint de voir une preuve de
féodalité de l’actudu G mars 1755, dans les qualités nobiliaires du
bailleur. Qui contracte dans cet acte , se demande-t-il i‘ C’est un
très haut et très puissant seigneur , chevalier, marquis , baron ,
conseigneur !,.. « Assurément, poursuit-il, page 21 , M. le mar« quis de Miramon, en se qualifiant de seigneur de Pestels , Pol« minhuQ» Laroque, et autres vingt-un paroisses ou localités, et
« coMseignertK de Vie et Thiézac, n ’eutendait pas se d ire />/*>v pr¡¿taire de Ions les héritages situés à Pestels, Polm inhac, La• roque, Vie, Thiézac, etc., etc. » Non, M. de Miramon n’enten
dait pas se dire propriétaire de lous les héritages situés dans ces
lieux, mais il avait partout des titres de propriété. C’est en vertu
de ces titres q u ’il se disait seigneur deces propriétés, désignée*
�/
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LA RENTE DE LOI.l.lKRE
n ’ f ST
POINT FEODAL!'..
31
sous le nom de la localité où ellesélaient situées et dont elles étaient
souvent la portion la plus importante. Il pouvait les d on ner et il
les donnait à bail emphytéotique, ce qui constituait à son profit
une redevance ou censive toute foncière. Mais il n ’entendait pas
assujettir à cette censive les héritages dont il n ’était pas proprié
taire, et qui se trouvaient situés dans les lieux dont il pouvait être
seigneur, conseigneur, chevalier, baron ou marquis , parce que
tous ces p a y s é t a i e n t allodiaux, et q u ’on n ’y reconnaissait pas de
seigneur sans titre ; toute seigneurie y supposait propriété. Le
savant auteur du mémoire en réponse explique très bien, d ’après
Loiseau, les deux sortes de seigneuries qu’on reconnaissait autre
fois, l’une ayant trait à la paissance de propriété, c’était le dominimn directum de la loi romaine; l’autre à la puissance de domina
tion, c ’était la seigneurie féodale.
Dans les coutumes allodiales, comme était celle d’Auvergne ,
on ne reconnaissait pas de seigneur sans titre, ce qui voulait dire
que le seigneur n’avait aucune puissance de domination su r les
tenanciers des héritages dont il n ’était pas propriétaire. Dans
d’autres coutumes, dites féodales, où dom inait la maxime nulle
terre sans seigneur, le seigneur n ’avait besoin d ’aucun titre pour
exercer la puissance de domination, dans toute la seigneurie,, et
pour imposer un cens aux habitans du pays, ou aux paysans, scs
vassaux. C’était le cens seigneurial qui se payait en reconnais
sance de la seigneurie, in recognitionevi dominii. On voit combien
cette distinction est importante. Elle est établie par Chopin , Du
moulin, Cambolas, Salvaing, Bouhier; par M. Merlin , après
eux, Flépei t. v° Enclave ; cl l’on ne comprendrait pas qu ’elle eut
été si légèrement trailée, et meine méconnue par notre adversaire,
page .‘ÎG , si les besoins de sa cause ne le condamnaient point a
l’oubli de principes q u ’il eût assurément très bien détendus, sans
la circonstance accidentelle et toute fortuite, <jvii a si m alh eu reu
sement tourné contre nous des talens qui avaient protégé , pen
�32
DEUXIÈME PARTIE.
dant une durée de plus de vingt ans, les droits et intérêts de ma
dame la marquise de Châlillon et de sa famille.
C’est par suite de cette confusion , faite si habilement par no
tre adversaire, dns coutumes allodiales et non allodiales , q u’il
donne à la seigneurie de Laroque , page 22 , le titre de fiel, d ’où
il conclut que la seigneurie de Lollière , dépendance de la sei
gneurie de L aro qu e, n’était par conséquent qu’une portion de
fief donnée en emphytéose. Un fief donné en emphytéose ! Cela
se comprend. C’est le langage de nos lois anciennes. Mais il
n ’est pas vrai que M. de Miramon possédât le domaine de Lol
liè re , ni aucune de ses terres du pays d ’Auvergne, à titre de
fief. Q u ’est-il besoin de rappeler, avec Montesquieu, Mably, Henrion , l’origine historique des fiefs, et ce q u ’on entendait sous
cette dénomination ? après tout ce q u ’on a d i t , cet étalage d ’é
rudition est fort inutile. Vous prétendez que notre terre de La
roque est un fief! C’est à vous de le prouver. En a tte n d a n t,
comme elle est située en pays allodial , nous avons le droit de
soutenir, même sans preuves, q u ’elle est franc-alleu. Néanmoins,
si vous pouvez déchiffrer et parcourir des litres qui se conti
nuent sans interruption depuis les 13e et 14* siècles jusqu ’aux
temps présens; si vous avez au moins une ou deux années à
consacrer à celte laborieuse et pénible élude ; madame la mar
quise Duplessis de Châlillon vous ouvrira ses archives et la vo
lumineuse collection de ses anciens titres de propriété sur
les terres de Pestels, Polminhac , Marions, Teissières-les-Iîoulies,
le Chaumeil de Saint-Cirgucs-de-Jordanne, Laroque, Sainl-Clémens, Brdzons, Cézens, Monréal, Nérebrousse , I’aulhac., Balzac,
Saint-lléran, Cocudoux , Lasalle, Lacalsade, Selles, IJassinhac,
Lecayre, Loubejac , Lafage, Mongranat , Foulholes, Ciou, Vie
et Thiézac, et autres places. Ces titres proviennent d’achals ,
échanges, transactions, contrats de mariage , donations entre
vifs et testamentaires, successions et autres manières d’acqué
�L\
RENTE DE LOLLIÈRE
n ’e ST
POINT FÉODALE.
33
rir aux termes de nos lois civiles. Pour le seul domaine de Lollière , si minime dépendance de la seigneurie de Laroque, nous
avons vu près de quatre-vingts titres sur parchemin qui sont les
titres des premiers possesseurs de ce bien, titres dont personne
assurément n ’avait encore imaginé de contester la validité. Ma
dame la marquise Duplessis de Châtillon n’a pas besoin de re
monter si haut pour prouver la justice de ses prétentions. Elle
fonde sa demande sur sa qualité d ’héritière bénéficiaire de M. le
marquis de Miramon , son père , jo in te ^ la circonstance que ce
qu’elle réclame aujourd’hui a été fort heureusement oublié dans
l’immense confiscation de ses palrimoines. Ce n’est point une
rente féodale,, un fief abo li, puisque ces rentes féodales, ces fiefs
ne supposaient pas de titre , pas de propriété. Le fiéf propre
ment dit était une concession gratuite , libre et perpétuelle d’une
chose immobilière ou réputée telle , avec translation du domaine
utile , et réserve de la propriété directe, à charge de fid élité
et de service (1). C’est la définition de D um oulin, l’oracle
«lu droit féodal. A insi, pour tenir une terre en fief, il fallait
1° un seigneur suzerain qui l’eùtdonnée gratuitement, librement
et pour toujours, avec réserve de la d ir e c te ;’ 2° un feudataire
qui l’eut acceptée à charge de reconnaître le droit réservé, c ’està-dire de foi et hommage. Qu’ont fait les lois anti-féodales? Elles
ont maintenu la concession et supprimé le droit réservé, le cens
payé en reconnaissance de la seigneurie , le cens féodal. Mais
dire que le domaine de L o llière, acquis à titre onéreux par la
familie de Miramon, et annexé à la seigneurie de Laroque , pos
sédée de temps immémorial , aussi à titre onéreux , est un fief
(1) Bencvola , libéra et perpétua conccssio rci inimobilis, vel æquipollentis, ciini tradilione utilis dom inii, proprictatc re te n ta, sub fulelitate et
exhibiiione servitiorum. Mol. in cons. par. tit. 1. tn p r a 'J n° 104.
�34
DEUXIÈME P ART IE .
ou démembrement d ’un fief, par cela seul que AI. de Miramon
s’est dit seigneur de Laroque, seigneur de Lollière, c’est vou
loir abuser des mots et donner à la loi une extension qu’elle ne
peut pas avoir; c ’est supprimer, contrairement à la loi, non pas
un droit féodal , niais le droit de propriété le plus inviolable.
Pour prouver que la redevance réclamée des sieurs Baduel
est féodale, notre adversaire se fonde surtout sur un passage de
l’acte du 6 mars 1755, qui après avoir spécifié et détaillé la rede
vance payable à M. le marquis de Miramon, ajoute ces mots : « Le
« tout censuel et rédituel, avec tout droit de directe et justice
« haute, moyenne et basse, usage et exercice d’icelle, mère, mixte,
« impère, droit de rétention p a r prélahon, lods et ventes, et taille
« aux quatre cas accoutumés au présent pays d ’Auvergne, et
« autres droits et devoirs seigneuriaux dus et accoutumés, et con« tenus aux terriers anciens dudit seigneur de la seigneurie de
« Laroque, etc. »
On voit là six causes de stipulations féodales, qui sont :
1°
2°
3°
4°
5°
6°
La directe;
La justice haute, moyenne et basse;
La rétention par prélalion ;
Les lods et ventes ;
La taille aux quatre cas;
Les droits cl devoirs seigneuriaux.
Quant à la réserve de la directe, nous n’ajouterons rien à cc
qui précède. Nous avons déjà bien suffisamment établi que la
directe emphytéotique n ’est pas féodale, comme le cens seigneu
rial; elle est de pur droit privé, cl aucune puissance de domina
tion n ’y est attachée. Voyez Merlin, Questions de droit,verbo'Xmh â g e , tome 9, pag. 17 et suiv. et pag. 50 el s u iv ., où cc point de
droit est traité avec étendue et de la manière la plus lumineuse.
La réserve de la justicc haute, moyenne et basse, se trouve dans
�I,A RENTE DE L0LL1EBE
n ’ e ST
POIIST FÉODALE.
35
le même cas. Comment notre savant adversaire a-L-il pu nous
mettre dans la nécessité de lui rappeler ce brocard de notre an
cien droit : F ief et justice n’ont rien de commun? Toutes les ju r i
dictions émanent du Roi, comme de leur source, dit D um oulin,
de manière q u ’aucun seigneur en France n ’a la justice en son
fief, terre ou seigneurie, sans un litre particulier; c’est-à-dire
sans une concession du Roi, justifiée par écrit, ou par une
possession immémoriale. Il ne faut pas confondre le droit de
justice avec le droit féodal. Autre chose est la juridiction et la
majesté royale ; autre chose le domaine direct, féodal ou censuel,
et l’obligation du vassal ou du censitaire de le reconnaître. Aliuct
jurisdictio et Majestas regia, aliuddomininm feudalevel censuale et
eorum recognilio. Dumoulin, sur Paris, § 1, Gloss., 6.
Cependant, les justices étant devenues des biens patrimoniaux,
elles pouvaient être aliénées en tout ou en partie, ce q u ’il faut
entendre avec ce tempérament qu’il ne soit pas permis à l’acqué
re u r d’ériger un iribunal séparé, où la justice soit rendue parti
culièrement en son nom ; mais q u ’il faut que la justice continue
d’être exercée comme elle l’était auparavant. Dumoulin, su r Pa
ris, § 1, Gloss. 5 , n° 62 , et § 16, n° 25. En effet, il ne peut
pas dépendre des particuliers de multiplier les justices. Ce droit
n’appartient q u’au Roi. Un arrêt du 3 juillet 1625, rapporté au
premier tome du Journal des Audiences, Iiv. 1er, ch. 61 , a jugé
que le seigneur haut-justicier ne pouvait, en donn an t une terre
en arrière-fief, concéder la moyenne et basse justice à son vassal.
Cet arrêt est parfaitement conforme aux principes, parce que
toutes les justices se trouvant comprises dans la haute, le sei
gneur haut-justicier qui aliénait seulement la moyenne et basse
justice, créait deux justices nouvelles, et usurpait un droit ré
galien.
Il est vrai que les seigneurs haut-justiciers jouissaient du droit
de déshérence, de celui de confiscation, de celui de s’approprier
�36
DEUXIÈME PARTIE.
les biens vacans,'et de celui de triage sur les biens communs.
Mais'le droit de déshérence, le droit de confiscation, le droit aux
biens vacans, le droit de triage ne tenaient ni à la mouvance féo
dale, ni à la directe censuelle ; ils dépendaient uniquement de
la justice,' et constituaient par conséquent des biens tout-à-fait
distincts des biens aliénés par les contrats , où les justices étaient
réservées. Comment cette réserve pourrait - elle être féo
dale ?
La rétention par prélalion et la réserve des lods et ventes, la
condition de ne mettre cens sur cens, celle de fournir une nou
velle reconnaissance à chaque mutation de seigneur ou de
paysan/appartenaient à la nature de Femphytéose non seigneu
riale, et ne constituaient rien de féodal.
« La rénovation de l’investiture à chaque mutation de posses« scur, disait M. Merlin, en s’adressant à la Cour de cassation,
« dans l’affaire H ertzeis, contre la Régie de l’Enregistrement
« et des Domaines, et le paiement d’un droit pour cette rénovao tion, n ’est, pas particulière aux fiefs ; elle est commune aux em« phytéoses, et elle a même été introduite, dans celles-ci, par la
« législation rom aine, qui bien certainement ne connaissait pas
« la féodalité : Necessitatem autem habere dominos (dit la loi der« nière, de jure emphyteutico, au Code), noviun emphyteutam in
a possessionem sm cipcre, non perprocuratorem , sed ipsos dominos
« perse, velper litteras suasj vel, si hoc non potnerint vel noluerint,
« p e r depositionem apud magistrum censuum, velprœsentibus tabu
le lariis per attestalionem ....... et ne avaritiâ tanti domini magnant
« molem pecuniarum super hoc cfflagitent , non amplius eis liceat
« pro subscriphone suâ vel depositione, nisi quadragesimam p a r
ti tem pretii velœstimationis loci qui a d alium trans/ertur, accipcre. »
Merlin, Repcrt. v°, f i e f , seel. 2 , § 3, pag. 240.
La ¡prohibition de mettre cens sur cens sans le consentement du
seigneur n ’aurait pas eu besoin d ’être écrite, puisque par Far-
�LA RENTE DE L0LL1ÈRE
n ’ e ST
POINT FÉODALE.
37
licle 4 du chapitre 20, la couiume (l’Auvergne déclare que cens
■sur cens n’a point de lieu sans le consentement du seigneur direct.
Comment une clause de cette nature, une clause de ne point faire
quelque chose qui p o u r r a i t en soi, et sous certaines c o n d itio n s,
être féodale, serait-elle entachée de féodalité PMais c’était, dit-on,
pour assurer le paiement des droits de lodset ventes, droits abo
lis comme féodaux?— Entendons-nous.
Le mot lods se prenait généralement pour tout droit dû au
seigneur pour l’aliénation faite du fonds, et ce mol ventes, pour
le droit dû pour l’achat. Dumoulin, sur Paris, lit. 2 , § 74,
num. 4. On voit par là que c’était une espèce de pot-de-vin qui
devait être payé par l’acquércur, quand le contrat avait reçu son
exécution.
Les lods étaient dus par les héritages, et le seigneur foncier
avait l’action hypothécaire et l’action personnelle pour les ré
clamer. Loyseau, Traité du déguerpissement, liv. 1er, chap. 10,
n° b, 6 e t ! . Ainsi Henri IV, ayant acquis à Fontainebleau quel
ques terres relevant de la dame d ’Alonville, en paya les lods.
Galand, en son Traité du[ranc-alleu, pag. 31, etsuiv.
Mais si le contrat d ’achat, si l’emphyléose avait pour objet un
fief, ou démembrement de lief, les lods étaient dus au seigneur
immédiat du fief. Si le vendeur n’était pas le seigneur immédiat
du fief, ils étaient dus au seigneur plus proche et immédiat du
vendeur. D’Argentré, incons. Brilan., art. G8, in fin. et in tract, de
Innd. cap. 2, inprincip., et Julius Clarus, § E m phyt., quæst. 23,
num. 1. En ces cas, les lods et ventes étaient féodaux, parce que
les lods étaient les fruits du fief. D’Argentré, ibid.
Ainsi la nature des lods et ventes réservés dans un bail em
phytéotique, dépendant de la nature de l’cmphytéose, il faut dis
tinguer si les emphyléoses équipollent à des baux à cens sei
gneurial, ou si elles sont de véritables emphytéoses, telles que
les définit le droit romain. Dans la première hypothèse, les lods
�38
DEUXIÈME PART IE.
et ventes étaient féodaux; ils ne l’étaient pas dans la deuxième.
Notre adversaire prouve la féodalité de l’emphytéose par la
féodalité des lods et ventes, et la féodalité des lods et ventes
par la féodalité de l’emphytéose. Tout son mémoire ne présente
guère q u’une longue série de dialèles, ingénieusement variés
sous toutes les formes.
Nous disons , nous , que notre emphytéose n’a rien de féodal
en elle-même; que c’est l’emphyléose ordinaire de la loi romaine ;
et qu ’on ne peut la présumer féodale en pays de franc-alleu,
où toutes les terres sont présumées libres, comme en pays de droit
écrit. Voyez Merlin, Répei't . , v° Franc-alleu, § 14, p. 346 et aliàs
pas sim.
La réserve de la taille aux quatre cas accoutumés au pays d’A u
vergne, n ’est pas plus féodale que les autres dont on a parlé, puis
que la cause de ces prestations était toujours une concession o ri
ginaire de fonds, une concession non féodale. Pour que la taille
aux quatre cas fût féodale, il aurait fallu qu’elle imposât des ser
vices personnels au profit du seigneur. Mais la taille en Auvergne
n ’était qu’une prestation du double de la redevance promise, dans
les quatre cas prévus par l’article 2 du chapitre 25 de la coutume.
Si cette redevance n ’était pas féodale, l’obligation de la payer
deux fois ne pouvait pas l’ôlre davantage. La féodalité n’était pas
non plus dans la cause de l’obligation, car cette cause était un
événement qui eut pu devenir la condition de tout autre contrat
du droit commun, condition aussi casuelle que potestative, at
tendu q u’il ne dépend pas absolument de la seule volonté d’un
individu de se faire chevalier, d ’aller outre-mer visiter la Terre
Sainte, d ’etre prisonnier des ennemis, pas même de marier ses fil
les en premières noces.
Le sixième et dernier grief, reproché au titre de madame la
marquise do Chàtillon, relatif au domaine de Lollière, est que ce
titre réserve les autres droits et devoirs seigneuriaux, dus et ac
�LA RENTE DE LOLLIP.RE
n ’e ST
POINT FÉODALE.
39
coutumes, et contenus aux terriers anciens dudit seigneur de la
seigneurie de Laroque.
Il faut ici ne pas oublier que dans la coutume d ’Auvergne il
n’y avait que des seigneurs fonciers; que la seigneurie féodale n ’v
pouvait ê t r e établie que par titre; q u ’ainsi les droits et devoirs
seigneuriaux dus et accoutumés ne pouvaient avoir rien de féo
dal. L’expression devoirs, corrélative à celle de droits, indique
l’obligation du seigneur q u i, dans certains c as, était obligé à
l’égard des habitansde son territoire. Tel était son devoir de les
recevoir, eux et l e u r s biens, dans son château, en cas d’invasion
de l’ennemi. De leur côté, les habitans ou paysans lui devaient le
droit de guet et garde. Les droits et devoirs étaient réciproques.
Mais, dit-on, pour savoir s’il n’y avait pas quelque chose de féodal
dans le titre deM. le marquis de Miramon, il faudrait voir l’énumérationde ces droits etdevoirs seigneuriaux, tels q u ’ils sont contenus
aux terriers anciens de la seigneurie de Laroque. Qu’on produise
ces terriers!... » En nous je ta n t cedéfi, on pense peut-être que les
terriers ont été brûlés ou perdus, et que celte production est im
possible. Nous ne nous expliquerons pas à cet égard, quoique
nous sachions très bien que les terriers n ’avaient rien de féodal.
Madame la marquise deChâtillon a justifié sa demande en produi
sant le titre du G mars 1755. C’est aux héritiers Baduel à prouver
leurs exceptions, ficus excipiendo fil actor.
Nous n ’avons presque rien à dire sur le paragraphe 5 du mé
moire en réponse au sujet de l’allodialité de la ci-devant Au
vergne. Notre adversaire n ’a pu s’em pêcher de la reconnaître, et
il se borne à soutenir que la présomption allodiale qui s’attache
aux actes passés sous l’empire de cette coutume, pouvait être dé
truite par un titre féodal, ou entaché de féodalité. C’est très vrai,
et nous ne l’avons nié ni dans notre consultation, ni dans nos
mémoires. La question n ’était pas là : la question était de savoir
si telleou telle clause présumée féodale dans le droit commun, ou
�DEUXIÈME P ART IE .
dans certainescou tûmes, était féodale dans lacoutum ed’/\uvergne.
Nous avons prouvé q u ’elle n ’étaitpas féodale,quand la féodalité ne
ressortait pas évidemmentdu contrat e tq u ’il était nécessaire de la
présumer. Nous avons fait v o irqu en o trecon trat,o u l’acteduGmars
1755, n ’avait par lui-même rien de féodal. Notre adversaire, tou
jours fidèle à son système de prouver la question p a rla question,
suppose partout que notre litre est féodal, et il nous repousse
par les loissuppressives de la féodalité. Il nous accuse de pousser
au rétablissement d ’un régime délesté, et d’émouvoir les habitans
du pays d’Auvergne. Il appelle à son aide les souvenirs de la res
tauration qui avait déclaré coupables d’actes séditieux toutes
personnes qui répandraient ou accréditeraient le bruit du réta
blissement des droits féodaux ; et il se flatte que sous l’empire des
institutions de juillet 1830, on n ’aura point à concevoir de pa
reilles craintes.— Tout cela sans doute est fort éloquent, mais ne
touche point à notre bail emphytéotique du domaine de Lollière,
et ne prouve nullement que les héritiers Baduel ne doivent point
racheter ou servir leur rente foncière.
Toutefois on voit dans les 13 pages de ce paragraphe une
idée nouvelle q u’il faut réfuter pour ne rien laisser sans réponse.
Pressé par les conséquences que nous avions tirées de l’allodialilé de la coutume d’Auvergne, notre adversaire n’imagine rien
de mieux que de rappeler la distinction du franc-alleu, en noble
et en roturier. Il convient que nos raisonnemens peuvent s’ap
pliquer au franc-alleu roturier.» Mais votre franc-alleu, nous dit-il,
était un franc-alleu noble, puisque vous étiez noble, chevalier,
baron, marquis; que vous aviez haute, moyenne et basse justice,
tous les droits et devoirs seigneuriaux. »
Nous répondons q u ’il ne s’agit pas de prouver la noblesse de
M. le marquis de 3Iiramon, mais la noblesse de sa terre, de
son franc-alleu. Celte noblesse, comme celle des personnes , ne
pouvait s’établir que par litres.
�l.A H ENTE T>E LOLLIKRE n ’f.ST POINT FÉODALE.
41
* Ce qui constitue la noblesse d’un héritage, dit Ilenrion dans
* ses dissertations féodales, tome 1, article A lle u , § 9, c’est un
« titre de;seigneurie ajouté à la propriété...... Un alleu noble
“ ne peut:dônc exister qu’en vertu d ’une concession émanée de
« celui dans lequel réside, l’autorité souveraine. » Où donc est ce
titre, cette concession pour l’héritage deLollièrePJusqu a produc
tion du titre qui l’aurait érigé en terre noble, cet héritage est
présumé roturier en pays de droit écrit, et en pays de franc-alleu.
(Merlin, v° Franc-fief, § 2.) Nous ne pouvons nous empêcher de
faire remarquer q u’ici encore notre adversaire fait la pétition de
principe. Il lui faudrait prouver que l’héritage est noble ou non
roturier. II affirme qu’il est noble, et il en conclut que notre rente
emphytéotique est féodale. Nous nions le principe et la consé
quence. Le principe, puisqu’à défaut de litres constitutifs de la
noblesse de l’héritage, il doit être présumé dans la condition natu
relle, dans le droit commun de tout héritage qui est d’être ro tu
rier. La conséquence, parce q u ’alors même que le domaine de
Lollière serait une terre noble, on ne pourrait pas en conclure la
nullité de la rente emphytéotique, qui n ’en serait pas moins pureihent foncière et non féodale, puisqu’il n ’en est pas de l’emphytéose comme du bail à cens, et que tout le monde pouvait donner
à emphytéose u n héritage tel q u ’il fût, noble ou roturier. (Henr i o n , /. t . j ; et q u ’il suffit pour que la redevance ne soit pas
censée féodale q u ’elle soit payée pour prix de la concession ori
ginaire du fonds grevé de la rente, é t'n on pour aucune recon
naissance de la seigneurie, puissance 'publique. Mais quant au
bail à cens, pour avoir le droit d’imposer sur un immeuble, une
redevance censuelle et seigneuriale, ce n’était pas assez d ’en
être propriétaire, il fallait avoir cette propriété à titre de sei
gneurie. ( Henrion, ibid. ) Notre adversaire cite , comme nous*,
H etirion, même article, même paragraphe; mais il parle du
�i-
D E U X IE M E P A R T I E .
bail-à cens, et nous parlons du bail emphytéotique; il conclut
d‘une chose à une autre, manière de raisonner toute sophis
tique. Les paragraphes 4 et 5, qui comprennent depuis la page
20 ju sq u ’à la page 40, ne contiennent plus rien à répondre.
Nous sommes donc arrivés au terme de notre tâche. Nous avons
suivi pied à pied nos adversaires, et nous avons démontré contre
eux 1° q u ’il n ’v a pas de prescription acquise, au profit des hé
ritiers Baduel, contre l’acte d u 6 mars 1755; 2° que la rente
emphytéotique créée par cet acte, pour prix du domaine de Lollière, n ’est point féodale.
Nous avons réfuté leurs objections, qui se réduisent à dire, en
ce qui touche la prescription, que notre emphytéose étant per
pétuelle, la propriété a passé tout entière sur la tête de l’emphytrote, et que la prescription s’en est ensuivie par cela même; en
ce qui touche la féodalité, que la féodalité est abolie, et que notre
rente est féodale parce qu ’elle est rédituelle et censuelle, et ac
compagnée de clauses et conditions féodales.
Nous avons répondu , sur la prescription, q u ’on ne peut point
l’opposer aux termes du droitcommun, puisqu’il n ’y a pas de tiers,
acquéreurs, et que les héritiers Baduel ne peuvent prescrire
contre leur litre. Qu’on ne peut pas non plus l’opposer encore
aux termes des lois spéciales sur les emphytéoses perpétuelles,
antérieures à ces lois.
Nous avons d it, sur la féodalité, que nous ne contestions
point, et que nous n ’avions jamais contesté son abolition, mais
que notre litre n ’était point féod al, ni entaché de féodalité ,
parce q u’il n’avait pour objet aucun bail à fief ou bail à cens
seigneurial ; que les clauses et conditions de ce titre apparte
naient à la n ature de l’emphytéose, et que n’ayant en elles-mêmes
rien de féodal, elles ne pouvaient pas être présumées féodales en
�LA RENTE DE LOLLIKRE
n ’ e ST
POINT FEODALE
43
pays de franc-alleu, où les terres sont présumées libres jusqu’à
preuve du contraire.
On concevra que nous n’ayons pas relevé le reproche de quel
ques arrêts mal compris, mémoire de M. V iolle, page 29, ligne 10,
et d’absurdes contradictions, même mémoire , page 39, ligne 20,
q u ’on n ’a pas pris la peine de nous signaler. Nous ne sommes
pas habitués à des argumens de cette nature , et ce sont les seuls
que nous ayons laissés sans réponse.
Restent les considérations!..Faut-il dépouiller les héritiers Baduel de biens qu’ils possèdent depuis 46 an s, paisiblement et
sans trouble ? Cette possession qu’on nous assure de bonne foi
aurait-elle été illusoire pendant si long-temps? ■
— Notre ,adversaire ne le pense p o in t, mémoire c ité , page 2 , et nous le pen
sons , 1° parce que le temps ne suffit pas pour légitimer une
possession, ni pour faire courir une prescription quelconque ;
2° parce que la possession des héritiers Baduel n’a jamais été ni pu
être de bonne f o i, puisqu’on ne peut pas ignorer le titre de sa
possession , et q u ’on n’est pas de bonne foi contre son titre.
Mais le pays d ’Auvergne s’émeut de nos prétentions! — Nous
ne craignons pas ces alarmes préten d ues, et nous ne püuvons
pas y croire. La cause des héritiers Baduel n ’a rien de commun
avec leurs voisins ou tous autres qui ont acquis légitimement
de la nation les biens immenses de M. le marquis de Miramon.
On n ’a pas la folie de vouloir revenir sur ces ventes doublement
irrévocables, et par l’effet des lois qu i les ont prescrites et qui ont
reçu leur exécution, et par suite de la loi de l'indemnité qui a
désintéressé les anciens propriétaires de ces biens vendus natio
nalement. Mais dans ces ventes on a oublié quelques domaines
qui sont restés depuis dans les mains des colons, fermiers ou pre
neurs à titre précaire. Pourquoi la fille, l'héritière bénéficiaire
�14
DEUXIEME PAUTIE.
de M. l e (marquis de Miramon n ’aurait-elle pas le droit de les
réclamer? Ces biens n ’ont pas été confisqués. La nation ne s’en
est pas emparé , ne les a point vendus ni donnés, n ’en a disposé
en aucune sorte. Seraient-ils dans ses m ains, une loi prescrit de
les rendre. (Loi des 5-6 décembre 1814.)
Nous nous contenterons de faire observer que par l’effet
des lois sur les émigrés, qui paraissent n ’avoir été appliquées
que par erreur à M. le marquis de M iramon, non émigré , il
se vit réduit avec son épouse, lui naguère si magnifique, si
grand et si généreux , à ’trouver ‘dans des secours étrangers et
dans un zèle admirable du service le plus dévoué (1), de quoi
fournir aux premiers besoins de sa v ie , aux nécessités de son
existence ! ! ! Ainsi , sur trois filles qu ’il a laissées après lui ,
deux ont renoncé à sa succession , et la troisième ne l ’a accep
tée que sous bénéfice d'inventaire. Cependant, si du magnifi
que site du château de Miramon , au dessus de Vie, aujourd’hui
propriété de simples chaudronniers, vous portez vos regards, au
tant q u’il pourront s’étendre, sur un immense lointain d’un pays
riant et fertile, partout et de tous côtés, vos yeux s’arrêteront sur
quelque riche domaine ayant appartenu à la famille deM. de Mirainon, jusqu’aux jours de l’émigration et des ventes et confiscations
dites nationales. Elle a beaucoup souffert des loisde cette époque,
qui ne devaient pas l’atteindre. Nous ne venons pas ici nous livrer
pourelle à des plaintes inutiles et sans but; ce sontdes faits accom
plis ; nous les avons acceptés et acceptons, mais tels q u ’ils sónr,
sans les restreindre ni les aggraver. Les héritiers Caduel veulent
être plus sévères que la loi et nous ravir, à leur profit, ce qu'elle
(1) Mademoiselle llumcl. Tout le inonde sait à Auriliac, les soins généreux
rendus» Monsieur et Madame de Miramon, par cette respectable (ille.
�L a r e n t e d e L O L L I E R E n ' e s t P O IN T
45
FÉ O D A L E .
nous avait laissé par oubli, ou par quelque fausse e t trop rapide
appréciation de nos titres.
C’est au tribunal civil de la ville d ’Aurillac à décider s’il fera
maintenant, contre le marquis de Miramon ou ses héritiers et
ayant-cause, ce que n ’ont pas fait les administrations révolu
tionnaires au temps de la république; et s’il reconnaîtra aux hé
ritiers Baduel, par cela seul que leur possession précaire de l’hé
ritage que nous réclamons s’est continuée furtivement, sous un
faux prétexte , un droit de propriété sur cet héritage , que même
l’état ne pourrait avoir aujourd’hui par le double fait de son an
cienne confiscation et de la durée de sa jouissance.
Paris, le 15 novem bre 1837.
A . P A IL L E T ,
BOLE,
!
Avocats à la Cour royale de Paris.
Le baron DELZONS, Avocat plaidant à Aurillac.
RAMPON, Avoue.
E rratum . Page 7, ligne 29. La détention est injuste, etc.
nons que la détention, etc,, etc.
l is e z
: Nous soute-
PA RIS. — MAULDE E T R E N O U , IM P R IM E U R S , R U E B A IL L E U L , 9 e t 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Cassagne de Beaufort De Miramon,Marie-Charlotte. 1837?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
A. Paillet
Bole
Delzons
Rampon
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
rentes féodales
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
doctrine
droit écrit
franc-alleu
directe seigneuriale
jurisprudence
droit de guet et de garde
Masuer
forains
corvées
code civil
droit intermédiaire
domaines agricoles
fromages
vin
percière
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réplique pour madame Marie-Charlotte de Cassagne de Beaufort de Miramon, veuve de monsieur le marquis François-Félix Duplessis-Chatillon, en sa qualité d'héritière bénéficiaire de monsieur le marquis de Miramon, son père, Demanderesse ; contre MM. Antoine Baduel, comme détenteurs du domaine de Lollière, appartenant à la succession bénéficiaire dudit marquis de Miramon, défendeurs.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Maulde et Renou, imprimeurs (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1837
1755-1837
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2815
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2813
BCU_Factums_G2814
BCU_Factums_G2816
BCU_Factums_G2817
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53571/BCU_Factums_G2815.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Roussière (domaine de)
Lollière (domaine de)
La Croux (domaine de)
La Fage (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
Code civil
corvées
coutume d'Auvergne
directe seigneuriale
doctrine
domaines agricoles
domaines seigneuriaux
droit de guet et de garde
droit de propriété
droit écrit
droit intermédiaire
droits féodaux
émigrés
forains
franc-alleu
fromages
jurisprudence
Masuer
Percière
poids et mesures
prescription
rentes féodales
retranscription de bail
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53570/BCU_Factums_G2814.pdf
c3f08c7e6499bfb2f8d03d918a5c80c4
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MEMOIRE
ET C O N S U L T A T I O N
P OUR
M. le Marquis D U P L E S S I S - C H A T I L L O N ;
CONTRE
Les
détenteurs
L O L L IÈ R E ,
de ses
domaines
LA CROUX ,
de
LA
RO U SSIÈRE ,
L A FAGE ,
situés
dans
la paroisse de S a in t-C lém en t, en Auvergne.
-------—
——
\
,
«
L E C O N S E I L S O U S S I G N E , q u i a lu q u a tr e r e c o n n a i s s a n c e s n o
tariées de b a u x e m p h y t é o t i q u e s , p u b li é e s d a n s les p iè c e s j u s t i f i c a
tives c i - jo i n t e s , 1" p a rtie , n “‘ 1, 2 , 3 et 4 ; et q u i a e n t e n d u M. le
m a r q u i s D u p le s s is - C h â tillo n d an s sa c o n s u lt a t i o n v e rb a le ;
C O N S U L T É su r les q u e s tio n s de s a v o i r : 1° Si le s su s d ites re
c o n n a i s s a n c e s n o ta r ié e s p e u v e n t d is p e n se r d e r e p r é s e n t e r le titre
p r im o r d ia l des b a u x e m p h y t é o t i q u e s a u x q u e l s elles se r é fè r e n t ; —
2* S i c e titre est p r e s c r i p t i b l e ; — 3 ° S ’il est fr a p p é d e n u llit é c o m m e
féo d al ; —
4° S ’il est d é tr u it o u in te r v e r ti p a r les lois n o u v e l l e s ;
E S T I M E q u ’il y a l i e u de r é s o u d r e a f f i r m a t i v e m e n t la p r e m iè r e
q u e s tio n , et n é g a t i v e m e n t les trois au tres.
«
A i n s i , n o u s p e n s o n s q u e les r e c o n n a i s s a n c e s d is p e n s e n t d u titre
p rim o r d ia l ;
Q u e ce titre n ’est p o in t p r e s c r i p t i b l e ,
N ’est p o in t f é o d a l ,
N ’est p o in t d é tr u it o u in terverti p a r les lois n o u v e lle s.
N o u s a llo n s tra ite r s u c c e s s i v e m e n t ces q u a tr e q u e s tio n s .
�i-
2
PREM IÈRE Q U ESTIO N .
r
Q u elle est la valeur actuelle des quatre l'cconnaissanccs notariées des
bau x em phytéotiques de la R o u ssiè re , la F â g e , L olliere et la C r o u x ,
dom aines situés dans la paroisse de S a in t-C lé m e n t, en A u v er g n e ?
— ■P eu v e n t-e lle s dispenser le consultant de représenter le b a il p r i
m itif?
D ’a p rè s l ’a rticle 1 357
C o d e c i v i l , « les actes r é c o g n it ifs n e d is
p e n s e n t p o i n t de la r e p r é s e n t a t io n d u titre p r i m o r d i a l , à m o in s q u e
»sa t e n e u r
n 'y
soit s p é c i a l e m e n t r e la t é e . N é a n m o i n s , s ’il y a va it
» p lu sie u rs r e c o n n a i s s a n c e s c o n f o r m e s , s o u t e n u e s de la p o ssessio n ,
«et d o n t l ’u n e e u t tr e n t e a n s de d a t e , le
créancier p ou rrait
être
» d i s p e n s é de r e p r é s e n t e r le titre p r i m o r d i a l. »
D a n s n o tre e s p è c e , o n n e p r o d u i t q u ’u n e se u le r e c o n n a i s s a n c e
p o u r c h a q u e b a il e m p h y t é o t i q u e ; elle e s t , il est v r a i , fort a n c i e n n e .
S e lo n D u m o u l i n , § 8 , g l . , n* 9 0 , c e tte c i r c o n s t a n c e d ’u n e g r a n d e
a n c i e n n e t é , si elle e s t s o u t e n u e de la p o s s e s s i o n , p e u t é q u i p o ll e r
au titre p r i m o r d i a l , et d is p e n s e r le c r é a n c i e r de le ra p p o r te r, P o t h i e r r e p r o d u it c e t t e o p in io n d a n s so n n° 7 7 7 d u T r a ité des O b lig a
tions. O n sait q u e t o u t e s le s d is p o sitio n s d u C o d e c i v i l , s u r
cette
m a t i è r e c o m m e su r b i e n d ’a u t r e s , o n t été co p iées p r e s q u e littérale
m e n t de Potlu'er , ce q u i d o n n e b e a u c o u p d e p o i d s à so n o p in io n
pour
les q u e s tio n s q u e le C o d e 11’a p a s s p é c i a l e m e n t p r é v u e s , et
q u i p e u v e n t ê tre c o n s id é r é e s c o m m e u n e c o n s é q u e n c e d es a n c i e n s
p r in c ip e s .
M ais il est u n e c i r c o n s t a n c e d é c is iv e q u i d o n n e
a ux reco n n ais
s a n c e s p r o d u i t e s p a r le c o n s u lt a n t t o u te la fo rce d u titre p r i m o r d i a l :
c ’est le c o n t e n u
de ce s a c t e s , q u i p r é s e n t e n t u n é ta t d e s c r i p t i f des
lie u x d o n n é s à b a il e m p h y t é o t i q u e , et q u i r e la t e n t s p é c i a l e m e n t l ’ob_
je t et les c o n d i t i o n s d u c o n t r a t . L e c o n s u lt a n t est d o n c b ie n d an s
l ’e x c e p t i o n p r é v u e p a r l ’a rtic le 1 5 3 7 . l i n e l l e t , q u e fa u t - i l e n te n d r e
�o
p a r ces m o ts : a moins que sa teneur n ’y soit spécialem ent r e la té e? L a
loi n ’a pas v o u lu dire q u e l ’a c te r é c o g n i t i f d e v a it r e p r o d u ir e la co p ie
littérale et au l o n g d u titre m ê m e ou d e ses d is p o sitio n s . R é f é r e r lu
t e n e u r d ’u n titre , ce n ’est pas le c o p i e r , ce n ’est pas n o n p lu s se
b o r n e r à l’i n d ic a tio n du titre : c ’est e n dire le c o n t e n u , e n p r é s e n
ter l ’a n a ly s e . L e s r e c o n n a i s s a n c e s p r o d u ite s r e m p lis s e n t la r g e m e n t
c e tte c o n d i t i o n , c a r les d é ta ils q u ’elle s d o n n e n t de l ’o b je t e t des
c o n d itio n s d u c o n t r a t y so n t é n u m é r é s d ’u n e m a n i è r e si m i n u t i e u s e ,
q u ’i l e s t p r o b a b le q u e le titre p r im o r d ia l
y est r e p r o d u i t , c o m m e
l ’e x ig e n t les c a n o n is te s et D u m o u l i n : ad longum tenor....... enarralo
toto tenore.
N o u s n ’h é s it o n s pas à d é c id e r q u e ces r e c o n n a i s s a n c e s d is p e n s e n t
le c o n s u lt a n t
de r e p r é s e n te r le titre p r i m o r d i a l , s ’il est p e r d u , et
q u ’elles fo n t p reu ve, e n ce cas , de t o u t ce q u e l l e s c o n t i e n n e n t . « L e
« C o d e , d i t M . T o u l l i e r . t o m e 8, p. 6 84 , n ° /| 85 , n ’e x ig e m ê m e pas
• q u e l ’acte r é c o g n it i f soit a n c i e n ; il ne p o u v a it l ’e x ig e r san s t o m b e r
» d a n s u n e c o n t r a d i c t io n m a n i fe s te a v ec l ’article i 555 , n. 1 , q u i
» d o n n e à la co p ie tirée e n p r é s e n c e d u d é b i t e u r , p a r le d é p o sitaire
»de la m i n u t e , la m ê m e foi q u ’à l ’o r i g i n a l , s ’il est p erd u , q u o iq u e
• la co p ie n e soit pas a n c i e n n e .
» A p lu s forte r a i s o n , 011 ne p o u r r a it r e fu se r à l ’acte r é c o g n it i f, qui
» est 1111 vé rita b le o r i g i n a l , la fo r ce de su p p lé e r le titre p r im o r d ia l
kq u ’u n e
La
s im p le co p ie p e u t s u p p lé e r . »
co u tu m e
d ’A u v e r g n e
p r o c la m a i t les m ê m e s ' p r i n c i p e s .
et
n ’était p a s m o in s fa v o r a b le ..
« L e s r e c o n n a i s s a n c e s , dit C h a b r o l , t o m e 2 , p. 70 2 et s u i v a n t e s ,
• les r e c o n n a is s a n c e s s u p p lé e n t au b a il à c e n s ; m a i s , c o m m e elles
» n e s o n t q u e des r a tific a tio n s , q u e l q u e s a u t e u r s o n t e x i g é q u ’il y en
» ait p lu s ie u rs , et au m o in s , s ’il 11’y en a q u ’ u n e se u le , q u e l l e soit
» a n c ie n n e ou q u ’elle en r a p p e lle u n e a u t r e , o u q u e l l e soit e n la v e u r
de l ’é g l i s e o u d u s e ig n e u r h a u t - j u s t i c i e r , o u , e n fin , qu elle soit s u i /tvie de p r e s t a t i o n s , o u a c c o m p a g n é e d ’a d m i i u c u l e s . »
C h a b r o l r ap p elle , e n t e r m i n a n t ce p a s s a g e , u n e s e n t e n c e de la
�sé n é c h a u s s é e d ’A u v e r g n e , c o n f ir m é e p a r a r r ê t , la q u e lle
avait j u g é
su ffisante u n e se u le r e c o n n a i s s a n c e de d e u x ce n ts a n s , sans p r e sta
tio n s , e n fa v e u r d e la d a m e m a r q u i s e de L a f a y e t t e .
Il
sera it
bon
q u e le c o n s u lt a n t p r o d u i s i t , à l ’a p p u i d es actes
r é c o g n it ifs d o n t il v e u t se p r é v a l o i r , u n e p reu v e de p o ssession ou
jo u i s s a n c e d e
ses
auteurs,
qui
d o it r é s u lte r des lièves et r e ç u s
q u i é ta ie n t en u s a g e d a n s la c o u t u m e d ’A u v e r g n e et a u tr e s c o u t u m e s ,
d e p u is la fin d u s e iz iè m e siècle. O n a p p elait ainsi u n e e s p è c e d e r é
p e r t o ir e , u n e t a b le im a g i n é e p o u r fa cilite r la p e r c e p t io n d e s c e n s .
C e t t e t a b le c o n t e n a i t le n o m de l 'h é r i t a g e , c e lu i d u c e n s i t a i r e , l ’o b
je t de
la r e d e v a n c e et le p a i e m e n t . S o u v e n t o n se c o n t e n ta it de
m e t tr e u n e c r o i x à c ô t é d e l ’a rticle p o u r p r e u v e des p a ie m e n t s . Q u e l
q u e fo is les fe r m ie rs se s e rv a ie n t d e s p r e m iè r e s lettres de l ’a lp h a b e t
p o u r i n d i q u e r q u ’ils a v a ie n t r e ç u les a n n é e s d e l e u r b a il. L a lettre A ,
m ise à c ô t é de l ’a r t i c l e , su p p o s a it le p a i e m e n t de la p r e m iè r e a n n é e ,
la lettre B
de la s e c o n d e , et ainsi d es au tres. ( C h a r r o i . , Coutume
d ’ A u v erg n e, t. 2, p. 684 et su iv a n te s . )
N o u s p a ss o n s à la s e c o n d e q u e s tio n p ro p o sée.
DEUXIÈME QUESTION.
IsCS b a u x emphytéotiques des quatre dom aines situés dans la paroisse de
S a in t-C lé m e n t, en A u v e r g n e , sont-ils p rescrip tib les? E n d ’ autres
term es, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers et ayants-cause
o n t-ils pu acquérir ou transm ettre pa r prescription la tonte-propriété
des biens soum is à Vem phytéose?
La
so lu tio n n é g a tiv e d e c e t t e q u e s tio n ne p e u t p a s . ê t r e d o u
teu se. 11 est «le règle q u e <r p o u r p o u v o ir p resc rire il fau t u n e pos» se ssio n c o n t i n u e et non i n t e r r o m p u e , ¿
t it re de propriétatiie .*
(C.
civ. 3 2 2 9 . )
De là , cette c o n s é q u e n c e é crite d a n s u n e fo u le d e lo i s , r e n o u v e l é e s
p a r l ’a rticle 2250 du C o d e c i v i l , q u e « c e u x qu i p o s s è d e n t pofh- ;m-
�»tru i n e p r e s c riv e n t j a m a i s , p a r q u e l q u e laps de t e m p s q u e ce soit.
»— A i n s i , le fe r m ie r , le d ép o sitaire , l ’u s u f r u i t i e r , e t to u s a u t r e s q u i
» d é t i e n n e n t p r é c a i r e m e n t la ch o se d u prop riétaire., ne p e u v e n t la
»prescrire.
» L ’a rtic le 22.57 a jo u te q u e «les h é r itie r s de c e u x qui
» t e n a i e n t la c h o s e à q u e l q u 'u n d es titres d é s ig n é s p a r l ’article p r é c é » d e n t , ne p e u v e n t n o n p lu s p resc rire. » U n te x te si cla ir n ’a b e s o in
d ’a u c u n c o m m e n t a i r e .
C e t t e d isp o sitio n d u C o d e civil e x ista it d a n s les lois 1, C . com. de
usucap. —
1 , C od .
in
quib. caus. 3 et d a n s la loi 2 , § i 3 f f .p r o •
herede. E lle s ’a p p liq u e à l ’e m p h y t é o t e , q u o i q u e le C o d e n ’en ait
p o in t r a p p e lé le n o m ; il est fra p p é de la m ê m e i n c a p a c i t é q u e le
fe r m ie r o rd in a ire : c e tte i n c a p a c i t é n e cesse p a s p a r l ’e x p ir a tio n d u
b a i l , p a r c e q u e la fe r m e est c e n s é e p r o r o g é e p a r t a c it e r e c o n d u c
tio n . L e s h é r itie r s s u c c é d a n t à la fe r m e s u c c è d e n t ù l ’i n c a p a c i t é de
l e u r a u t e u r . P a r arrêt d u 21
août 1 7 3 4 ,
le
G ra n d -C o n seil a jugé
q u ’ u n h é r ita g e d o n n é e n e m p h y t é o s e d ev a it r e t o u r n e r au b a i ll e u r ,
q u o iq u e d e p u is l ’e x p ir a t io n d u ba il il se fû t é c o u lé p lu s de q u a trev in g ts ans.
Q u a n d 011 a c o m m e n c é à p o s s é d e r p o u r a u t r u i , o n est t o u jo u r s
p r é s u m é p o s s é d e r a u m ê m e t i t r e , s ’il n ’y a p r e u v e du c o n t r a ir e . ( C .
c i v . , 2 2 J 1. ) O n n e p e u t p a s p rescrire c o n t r e so n titre, e n ce se n s q u e
l ’o n n e p e u t pas se c h a n g e r à s o i - m ê m e la c a u s e et le p r in c ip e de
sa p o ssession ( I d . , 2 2 4 0 ) : TSemo sibi potest m utare causant posscssionis—
P o u r d é tr u ire c e t t e p r é s o m p t io n , il fa u d r a it u n e in te r v e r
sion de t i t r e , c ’e s t- à - d ir e u n c h a n g e m e n t d a n s la q u a lité de la p o s
session.
T e l s so n t les p r in c ip e s d e d ro it c o m m u n , a n c ie n s e t n o u v e a u x .
M ais q u e lle é t a i t , en cette m atière, la loi sp éciale d ’A u v e r g n e ?
L 'a r t i c l e
2 1 8 d e la
c o u t u m e d ’A u v e r g n e c o n s a c r a it le p r in c ip e
g é n é r a l de la p r c s c r i p t i b i li t é p a r tre n te ans. M ais elle a d m e tta it des
droits i m p r e s c r i p t i b l e s ; et la fix a tio n faite p a r cette c o u t u m e des d if
fé r e n te s p r e s c rip tio n s à tre n te ans n e . s ’e n t e n d , dit C h a b r o l , t. 2,
pag.
G68,
q u e des d ro its p rescrip tibles, et n ’est relative q u ’a u x
�G
p r e sc rip tio n s lé g a le s
de d i x , de v i n g t a n s ,
de' tr e n t e et q u a ra n te
ans.
Q u e l s é t a ie n t les d ro its i m p r e s c r i p t i b l e s ? — L a j u r i s p r u d e n c e et
les a u t e u r s d o n t l ’a u to rité a v a it le p lu s d e p o i d s , d i s t i n g u a i e n t . l e
c h e f - c e n s , ou le c e n s e n t o t a l i t é , d u c e n s de q u o tité o u d es a rré
r ag es . Ils d is a ie n t q u e le c l i e f - c e n s éta it im p r e s c r ip tib le e n A u
v e r g n e , im p r e s c r i p t i b l e à to to , niais q u e les a rr é r a g e s é t a ie n t p r e s
cr ip tib les. O n cita it u n a rr ê t d u 4 m a r s 1 6 0 7 , r e n d u e n fa v e u r d u
■
s e ig n e u r de T h i e r s ( M .
de M o n tp e n s ie r ) , c o n t r e le n o m m é C h a -
b r i o t , q u i d é c l a r e i m p r e s c r ip tib le u n c e n s d û su r u n e v ig n e situ ée
d a n s le te r ro ir de T h i e r s , p a y s de c o u t u m e , q u o i q u ’il y
eût cent
a ns q u ' a u c u n e p r e s t a tio n n ’e û t été fa ite a u s e ig n e u r terrier.
T o u t le p a y s d ’A u v e r g n e n ’éta it pas r c g i p a r la m ê m e loi. U n e
p a rtie se g o u v e r n a i t e n t i è r e m e n t p a r le d ro it é c r i t , u n e
a u tr e p ar
l e d r o i t é c r i t e t p a r l a c o u t u m e ; u n e t r o is iè m e s ’éta it s o u m is e à la c o u
t u m e d u B o u r b o n n a is . L e s lo c a lité s d o n t il s’a git a u p r o c è s é ta ie n t
situ é e s d a n s la p a ro isse d e S a i n t - C l é m e n t , q u i o b é is s a it au droit
é c r i t , ain si q u ’o n p e u t vo ir d a n s l ’état d es lie u x p l a c é a u
cem en t du
com m en
p r e m ie r v o l u m e d u C o m m e n t a i r e de la c o u t u m e , pa r
C h a b r o l , p a g e 5 G.
D a n s le d e r n i e r é ta t d e la j u r i s p r u d e n c e , le c e n s o u c h e f - c e n s
a v a i t , a p rè s d es arrêts
c o n t r a i r e s , é té en fin r e c o n n u c o m m e i m
p r e sc rip tib le d a n s la p a rtie de d ro it é c r it d ’A u v e r g n e .
M ais l ’im p r e s c r ip tib ilité de la d ir e c te s e ig n e u r ie ou d o m a in e d i
rect d u
b a i ll e u r e m p h y t é o t i q u e n ’a va it j a m a i s é té m is e en d o u t e .
T o u s les a u t e u r s t ie n n e n t u n a n i m e m e n t q u e l ’e m p h y t é o t e n e [»eut
p a s p resc rire c o n t r e so n t i t r e , pas p l u s q u e le fe r m ie r o u le c r é a n
c ie r h y p o t h é c a i r e , m ê m e q u a n d il y a u r a it c e s s a tio n d e p a i e m e n t
p e n d a n t m ille a n n é e s , d it D u m o u l i n , à m o in s q u ’il n ’y a it eu in t e r
version de t i t r e , c o m m e q u a n d o n c h a n g e l ’é ta t et la q u a lité de la
p r e m iè re p o s s e s s io n , o ù q u e l ’e m p h y t é o t e , d é n i a n t le d o m a i n e d i
rect au b a i ll e u r e m p h y t é o t i q u e ,
le p r e n d p o u r l u i - m è m e e t c o m
m e n c e à p o ss é d e r de son c h e f : Q u u m d iü cnim possidet tn hac cam<)
�7
et in luic q u a litate, etiam per spatium m ille annorum nunquam prœscrib i t ,q u ia ...S i c u t in sim ili em p h iteu ta , colonus, creditor hypothecarius,
quam dià in illâ qu a litate possident, etiam si n ih il so lv a n t, nec a lite r reco g n o sea n t, nullo tempore p ræ serib u n t, nec unquam incipiunt prœscrib ere, n is i in d ie quâ , possessione p rio ri intei-versâ , cœperint pro suo
possidere ( C a r o l . M o lin e i O p é r a , t o m . I , p. 2 1 9 ).
N o u s n ’a v o n s p a s à n o u s o c c u p e r (le la d i s t i n c t i o n fa ite p a r la
c o u t u m e e n t r e l e c e n s d es b a u x o r d i n a i r e s , e t le c e n s des b a u x e m p l i y t h é o t i q u e s . L e s a rr é r a g e s d e s p r e m ie r s n e se p r e s c r i v a i e n t q u e
p a r t r e n t e ans. M a i s l ’e m p h y t é o t e n e p o u v a it ê tre c o n d a m n é à p a y e r
p lu s d e trois a n s d ’a rrérag es . « L a l o i , d it C h a b r o l , t. I I , p a g .
» a d é s ir é p r é v e n i r la g r a n d e m u l t i p l i c a t i o n
d e s a r r é r a g e s , d a n s la
» cra in te q u e l ’e m p l iy t é o t e n e fû t t r o p grevé. »
M ais t o u t e s ces r e n t e s n ’o n t -e lle s p a s été fr a p p é e s de n u llit é pa r
les lois des 25 a o û t 1 7 9 2 et 1 7 j u i l l e t 1 7 9 0 ?
N o n , c a r e lle s n ’o n t
a u c u n e c a u s e fé o d a le , c o m m e o n v a le voir.
TROISIÈM E QUESTION.
L e s rentes emphytéotiques d ’ A u v e r g n e ne sont nullem ent féodales.
L a loi des 25 -28 a o û t
d ’a b o r d , art.
1 7 9 2 , r ela tive a u x d ro its f é o d a u x , a tt e in t
1 " , t o u s les e ffe ts q u i p e u v e n t a v o ir é té p r o d u i t s par
la m a x i m e nulle terre sans seigneur.
M ais o n sait q u e la
co u tu m e
d ’A u v e r g n e r e c o n n a i s s a it , to u t au c o n t r a i r e , la m a x i m e n u l seigneur
sans tit r e , d ’où il su it q u ’il fa lla it u n titre p a r t i c u l ie r p o u r éta b lir
la d ir e c te . C e titre , t o u te p e r s o n n e n o b le o u n o n n o b le p o u v a it l ’a c
q u é r i r : ce q u i fait d ire q u e c e tte c o u t u m e éta it a llo d ia le , c ’es t-à -d ire ,
s e lo n 1 e x p lic a t io n de C u j a s , liv. 2 , des F ie f s , tit. 1 7 , f r a n c h e de t o u l
v a s s e la g e , de t o u te fé o d a lit é .
L a rticle 5 de la m ô m e l o i , e n a b o lis s a n t to u s les d ro its i é o d a u x
o u c e n s u e ls u tile s , t o u te s les r e d e v a n c e s s e ig n e u r ia le s a n n u e ll e s en
a r g e n t , g r a i n s , v o l a i l le s , e t c . , e x c e p te e x p r e s s é m e n t le c a s o ù ils
�seraient ju s tifié s avoir pour cause une concession p rim itive de fo n d s,
l o r s q u e cette c a u s e se trouvera clairem ent énoncée dans l'acte, prim or
d ia l d ’ inféodation, d'accenscm ent ou de b a il à cens.
L e s titres p r o d u its p a r le c o n s u lt a n t
sont é v id e m m e n t
d a n s le
cas de c e tte e x c e p tio n . Mais la loi d u 17 ju i l l e t 17 9 0 a s u p p r i m é ,
sans i n d e m n i t é , t o u te s les r e d e v a n c e s c i - d e v a n t s e ig n e u r ia le s , m ê m e
celles c o n s e r v é e s p a r le d é c r e t des 2 5 - 2 8 a o û t 1 7 9 2 .
A i n s i , la seule q u e s tio n à e x a m i n e r est c e lle d e sa v oir si les r e n
tes r é c l a m é e s p a r le c o n s u lt a n t so n t d es r e d e v a n c e s s e ig n e u r ia le s ,
si la d ir e c te se ig n e u r ie q u i s ’y tro u v e st ip u lé e p o u r le b a i l l e u r d oit
s ’e n te n d r e d a n s l ’a c c e p t i o n fé o d a le ou se p r e n d r e p o u r le
d o m a in e
d ir e ct d a n s l ’a c c e p t i o n o r d in a ir e d u d ro it é c r it e n g é n é r a l , et de la
c o u t u m e d ’A u v e r g n e en p a r t ic u lie r .
D u n o d , T r a ite des P r e s c r ip tio n s ,p a r t i e 5 , c lia p . 1 0 , n o u s a p p r e n d
q u e s o u v e n t , p a r u n e c o n f u s i o n de t e r m e s , o n a q u a lifié d e directe
le d rô it d ’ u n e r e d e v a n c e s tip u lé e p o u r c o n c e s s io n de f o n d s , le d ro it
q u e d o n n e l ’e m p h y t é o s e ; d ’o ù il fa u t c o n c l u r e q u e le m o i directe ne
d é s ig n e pas to u j o u r s u n d r o it ’ féod a l.
Il s ’agit u n i q u e m e n t d a n s les titres p r o d u its p a r le c o n s u lt a n t d ’un
bail à c e n s e m p h y t é o t i q u e , e t n o n d ’a u c u n b a il à c e n s s e ig n e u r ia l.
O n ne p e u t dire q u e le c e n s e m p h y t é o t i q u e p r e n d
la n a t u r e d u
ce n s s e ig n e u r ia l p a r c e la se u l q u ’il est d û à u n s e ig n e u r , c a r il est i n
co n t e s ta b le q u e d a n s les p a y s a ll o d i a u x la c o n c e s s io n p a r bail à re n te
p u r e m e n t f o n c iè r e é ta it p r é s u m é e p l u t ô t q u e la c o n c e s s io n p a r ba il
à c e n s se ig n e u r ia l. ( M e r l i n , Rëpert.
v° C e n s ,
§ 5,
pag. i 3 i , 3e
»'•dit. )
D ’a illeu rs , la C o u r de ca ss a tio n a ju g é , l e a ô v e n d é m ia i r e an i 3 ,
q u ’ u n e re n te ne p o u v a it pas être p r é s u m é e s e ig n e u r ia le p a rc e q u ’elle
était d u e à u n se ig n e u r . L e m ê m e a rr ê t d é c i d e a ussi q u ’a v a n t le C o d e
ci\il la loi n e d é fe n d a i t p a s de j u g e r q u ’u n e s e u le
r e c o n n a is s a n c e
suffit p o u r é t a b lir u n e re n te ( voir c e t arrêt d a n s Sin iiY , ô.» 1 ^ ->7 »
et d a n s les p iè c e s ju s tific a tives c i - j o i n t e s , a* p a r t ie , 11° 5 ).
V o u d r a it - o n a r g u m e n t e r co n t r e les p r é t e n t i o n s d u c o n s u lt a n t , d«
�9
ce q u e les a c te s d o n t il v e u t se p rév a lo ir r é se r v e n t au s e ig n e u r les
d ro its d e l o d s e t vente*, r é te n tio n p a r p r é l a t i o n , et a u tres d ro its de
d ir e c te s e ig n e u r i e , e n s e m b l e , t o u t e j u s t i c e b a u t e , m o y e n n e et b a s s e ,
les c e n s et r e d e v a n c e s c o n v e n u s , et les a u tr e s d ro its et d evoirs se i
g n e u ria u x ?
.
M ais-, d ’a b o r d , il a été j u g é p a r a rrêt d u p a r l e m e n t . d e P a r is , d u
5 fév rie r 1 7 8 6 , a u su je t d e la terre d e P o l i g n y , q u e d an s les p a y s
a ll o d i a u x où il n ’y a p o in t de statu t c o n t r a i r e , l ’a llo d ia lité est aussi
b i e n de d ro it p o u r les s e ig n e u r ie s d é c o r é e s de h a u t e , m o y e n n e et
b a ss e j u s t i c e , q u e p o u r les fo n d s p o ss éd é s e n r o tu re ( M e u l i n , /. c.,
p. 10 0 ).
Q u a n t a l a r é s e r v e 'd e la directe seig n eu rie, ces m o t s 11e d o iv e n t
ici é v i d e m m e n t s ’e n t e n d r e q u e du dom inium directum d es e m p h y t é o tes,
de la directe emphytéotique telle q u ’o n l ’e n t e n d d a n s les lois
r o m a i n e s , d a n s l ’é d i t d u m o is d ’a o û t 1 G 9 2 , et d a n s la d é c la r a tio n
d u 2 ja n vier 17 6 9 . E n ce s e n s , la d ir e c t e s e ig n e u r ie 11e t ie n t rien
de la féo d alité. C e tte i n t e r p r é ta t io n sort n a t u r e l l e m e n t de la c o m b i
n a iso n des a rticles 1 et 2 d u c h a p itr e 5 i de la c o u t u m e d ’A u v e r g n e ,
p u i s q u e , s u iv a n t l ’a rticle i e r , t o u s c e n s et r e n t e s d u s su r h é r ita g e s
certain s e m p o r t e n t directe seigneurie , et q u e l ’article 2 p o rte aussi
q u e q u i c o n q u e a c q u ie r t c e n s o u r e n t e s u r fo n d s a l l o d i a l , a c q u ie r t la
directe; q u e , de c e t t e id e n t ité d o n t se sert la c o u t u m e d a n s d e u x ar
ticles q u i se s u iv e n t , il fa u d r a it , p o u r i n t e r p r é te r le m o t directe d an s
le se n s f é o d a l , a ller j u s q u ’à dire q u e t o u t p a r t ic u lie r q u i a lié n a it
son fo n d s en A u v e r g n e , m o y e n n a n t u n e r e d e v a n c e .,c e n s o u r e n t e ,
se fa isa it u n f i e f , se fo r m a i t u n e v r a ie d ir e c t e fé o d a le : ce
q u i est
a b s u r d e , et c e q u e la c o u t u m e d ’A u v e r g n e n e su p p o s e n u lle paft.
( Voyez, l ’arrêt de la C o u r d e c a s s a t io n , d u 21 b r u m a i r e an 1 /j, d an s
M erlin , /. c. p. 1 0 7 ) .
L a d ir e c t e p u r e m e n t
e m p h y t é o t i q u e n ’a pas été c o m p ris e d an s
l’a b o litio n d u r é g i m e f é o d a l , et
le s r en tes r é c o g n it iv e s de c e t t e d i
re cte su b s iste n t e n c o r e a u j o u r d ’h u i d a n s t o u te l e u r é t e n d u e . C ’est
c c q u i a été j u g é p a r u n a rrêt de l a C o u r de c a s s a t io n , d u 26 plu viôse
a
�10
F
an 1 1 , q u ’o n p e u t v o ir d a n s S i r e y , 5 , i , 16 2 . O n y lit q u e la d irecte
qui tirait so n e x i s t e n c e d e c e t t e a n c i e n n e ma’x i m e : nulle terre sans
seig n eu r, es t la se u le q u e les lois a ie n t a b o li e ; q u e ce lle q u i d eva it
so n e x i s t e n c e à u n e c o n c e s s io n d e f o n d s su bsistera
t a n t q u e la loi
n ’ô te ra p a s au p r o p rié ta ir e le d ro it d e c o n f é r e r sa p r o p r ié t é m o y e n
n a n t u n e r e d e v a n c e q u e l c o n q u e , c ’e s t - à - d i r e q u ’elle e x istera t o u
jou rs.
Un avis d u C o n s e i l - d ’É t a t ( S. 8, 2, i 3 4 ) a a ss im ilé la c la u s e d e
p e r p é t u i té d es l o c a t e r i e s o u e m p h y t é o s e s p e r p é t u e lle s à la réserve de
la d irecte s e ig n e u r i e , et l ’a q u a lifié e de fé o d a le . M a is , o u t r e q u e c e t
avis a b i e n p e u d e p o id s d a n s u n e p a r e ille q u e s t i o n , la d ir e c t e sei
g n e u r ie n ’a y a n t rie n d e fé o d a l d a n s la c o u t u m e d ’A u v e r g n e , la f é o
d a lité n e p e u t p a s p l u s s e p r é s u m e r d a n s c e t t e c o u t u m e p o u r la c la u s e
d e p e r p é t u ité q u e p o u r d ’a u tr e s c la u s e s .
Q u a n t à la r éserv e d e s lo d s et v e n t e s , elle e s t e n c o r e a tt a c h é e à la
n a t u r e do l ’e m p l iy t é o s e , q u i e m p o r t e à c h a q u e m u t a t i o n u n d ro it
de l o d s , taudim ium .
L e s r e d e v a n c e s e m p h y t é o t i q u e s d o i v e n t d o n c c o n t i n u e r d ’é tr e ser
vies c o n f o r m é m e n t a u x titres q u i les c o n s t i t u e n t : c ’est ce q u e d é c i d e
f o r m e l l e m e n t u n d é c r e t im p é r i a l d u 25 n iv ù s e a n i ô , r a p p o r té d a n s
'
M e r lin , /. c ., p . 1 5 4 11 se ra it fa cile d e m u lt i p li e r les a u to rité s et les citations;. m a is n o u s
c r o y o n s i n u t i le d ’e n t r e r d a n s p l u s d e d éta ils s u r u n p o in t q u i ne n o u s
pa ra ît p o in t souffrir d e d ifficu lté.
11 est c e p e n d a n t u n e o b je c t io n g r a v e q u ’on p e u t tirer des term es
de 1 a cte d u î a n o v e m b r e 1 6 8 3 , le q u e l stip u le le d ro it de fa ire gu et et
gçirde au château de la Roque. C e t t e st ip u la t io n p o u r r a i t p a ra ître fé o
d a le , d ’a près les t e r m e s e x p r è s d e l ’a rtic le 10 d u titre 2 de la l o i d e s
i 5 - 2 8 m a r s 179 0. M ais 011 a vu q u e les s t i p u la t i o n s de lo d s et v e n te s ,
et a u tres q u e le s lois d é c l a r e n t fé o d a le s , n e l ’é t a ie n t p a s d a n s la c o u
t u m e d ’A u v e r g n e ; il en é t a i t d e m ê m e d u d r o it d é f a i r e g u e t et g a r d e.
C e n ’éta it
pas
d a n s cette
co u tu m e
u n e s e r v itu d e p e r s o n n e lle ;
m a is b i e n u n e s e rv itu d e r é e l l e , é t a b lie d a n s l ’in t é r ê t c o m m u n tan t
I
,
�n
•
d u s e i g n e u r q u e des p a y s a n s , q u i a v a ie n t le d ro it de se r é fu g i e r en .cas
d e péril é m i n e n t , a vec le u rs b i e n s , d a n s le c h â t e a u . C ’est de là q u e
v e n a i t le d ro it de g u e t et g a r d e , qui é ta it c o m m a n d é p a r l e u r p r o
pre i n t é r ê t , et q u i l e s o b li g e a i t
à. c o n t r ib u e r a vec
le s e ig n e u r à
c e r ta in e s r é p a r a t io n s d é t e r m i n é e s p a r l ’u s a g e . U n e p r e u v e q u e ce
d ro it n ’é ta it pas u n e s e rv itu d e p e r s o n n e l le é t a b lie en fa v e u r d u se i
g n e u r , c ’est q u e si le c h â t e a u était trop é l o i g n é o u tro p p etit et q u ’i l '
n e p û t c o n t e n i r les p a y s a n s a v e c le u rs b i e n s , ils n e d e v a i e n t p lu s ni
g u e t ni g a r d e , et a v a ie n t le d ro it d ’a lle r faire g u e t et g a r d e a illeu rs,
p r è s d ’u n c h â t e a u p lu s v o i s i n , o u q u i p û t a u b e s o i n les r e c e v o i r e u x
e t le u rs b ie n s . Il fa u t l i r e , s u r c e t t e q u e s t i o n , la P r a tiq u e de M a s u e r ,
é d itio n de P a r i s , 1 5 19 , fo l. 10 2 . N o u s n o u s b o r n e r o n s à
en rap
p o r t e r la t r a d u c t i o n fr a n ç a is e , p a r A n t o i n e F o n t a n o n , 3' é d itio n ,
P a r i s , 1 58 1. A u t i t r e 8 , des ta ille s , c o lle ctes, g u e ts , e tc ., p a g . 553 ,
§ § i 4 et i 5 , o n lit ce q u i s u it :
« § 14. L e s e ig n e u r a y a n t u n c lia s te a u ou f o r t , p e u t , e n t e m p s de
» g u e r r e , c o n t r a i n d r e les h a b i t a n t s de sa j u r i d i c t i o n à faire le g u e t ,
>>çt c o n s é q u e m m e n t les r é p a r a t io n s e n so n c l i a s t e a u . T o u t e s f o i s , il
» fa u t c o n s id é r e r si le c lia s te a u est a ssez fo rt en g r a n d e u r et fo r te » resse p o u r la d é fe n s e d e s d ic ts h a b i t a n t s et de leurâ b i e n s , et si les» d i c t s h a b i t a n t s p e u v e n t a v o ir a c c è s a u d i c t c l i a s t e a u , en p éril éin i» n e n t : c a r s’il y a vait l o n g u e d i s t a n c e , de f a ç o n q u e l ’a c c è s l e u r
»soit q u a s i i m p o s s i b l e , ils d o iv e n t a vo ir r e c o u r s au p lu s p r o c h a i n
• c l i a s t e a u , et e n ic e l u i faire le g u e t et r é p a r a t i o n s . . . . T o u t e s f o i s , le
» s e ig n e u r est t e n u de c o n t r i b u e r , p a r c e q u e c e la r e d o n d c p r in c i» p a i e m e n t à so n u tilité .
» § 1 5 . Q u a n t a u x fo r a in s se Retirant avec le u rs b ie n s e n q u e lq u e
»ville m u r é e et g a r n ie de fo s s e / , ils s o n t te n u s à la r é fe c tio n et
p r é p a ra t io n d ’i c e u x , se lo n la fa c u lté d es b ie n s q u ’ils y o n t
m is,
» e n c o r e q u ils a ie n t d es m a i s o n s l o u é e s , p o u r c e q u e cela v ie n t
au
» profit et u tilité d ’u n c h a c u n . E t e n o u t r e , y fa is a n t l e u r d e m e u r e et
« r é s id e n c e en cas de p éril é m i n e n t , p e u v e n t être c o n t r a in ts de faire
»le g u e t et a s s is t e r a la g a r d e des p o r t e s , p r i n c i p a le m e n t s ’ils ne le
�'
•- K
'
¿2
» fa isa ien t e n a u tre lieu. A u t r e c h o s e serait des r é p a r a t io n s des c h e » m in s et d es p o n t s , c a r le u rs lo c a t e u r s s o n t t e n u s à c e l a , c ’est-à»dirc les p r o p r i é t a i r e s des m a is o n s q u ’ils t ie n n e n t à lo u a g e . A u s s i
» u n fo r a in n ’est t e n u d e p a y e r l a taille r o y a l e , p o u r c e q u ’elle doit
» s ’im p o s e r a u x p e r s o n n e s en r a is o n des b ie n s. >•
N ’est-il p a s é v i d e n t , d ’après c e l a n g a g e , q u e d a n s la c o u t u m e
d ’A u v e r g n e la se rv itu d e de g u e t et g ard e n ’était p a s d u e à la p e r s o n n e , m a is à la c h o s e : ce q u i n e p e u t c o n s t i t u e r u n e s e rv itu d e fé o d a le ?
L e c a r a c t è r e des se rv itu d e s fé o d a le s est d ’etre p u r e m e n t p e r s o n n e l le s
et de c o n t r a i n d r e u n e p e r s o n n e au service d ’ u ne a utre p e r s o n n e . M ais
l o r s q u e l ’o b lig a tio n a p o u r o b je t l ’e n t r e t i e n o u la r é p a ra t io n d ’u n
b i e n c o m m u n , t a n t d a n s l ’in t é r ê t de l ’o b lig é q u e d u c o -tr ^ ita n t, o ù
p e u t être la féo d alité ? O r , les c h â t e a u x , en A u v e r g n e , é t a ie n t , c o m m e
on v ie n t de v o i r , l ’asile fo r c é des p o p u la t io n s cir c o n v o is in e s ; elles
p o u v a i e n t s ’y r e tir e r , s ’y lo g e r a v e c le u rs fa m ille s , d a n s des cas p r é
vus. C e d ro it n ’a c e r t a i n e m e n t rie n de féo d a l.
O n p e u t e n c o r e lir e , su r c ette q u e s tio n , le C o m m e n t a i r e de C h a
b r o l , s u r l ’art. 455 de la c o u t u m e d ’A u v e r g n e .
« L e g u e t , d it- il,
» p a g e 4 4 9 » t o m e 3 , est u n e e s p è c e d e c o r v é e é ta b lie p o u r l ’utilité
» c o m m u n e d es j u s t ic ia b le s et d u s e ig n e u r . C e d ro it a pris sa n a issan ce
» d a n s ces t e m p s m a l h e u r e u x o ù n u l n ’éta it e n sû reté c h e z soi ; tel
» q u i s ’éta it c o u c h é lib re se tr o u v a it es cla v e à so n réveil : ses effets
» é t a ie n t pillés j sa f e m m e et ses filles vio lées ; la fo rce et la vio len ce
» d é c i d a i e n t . L e s s e ig n e u r s lé s p lu s p u iss a n ts se fo r t i fi c r c n t d a n s leurs
» c h â t e a u x ; le u rs su je ts ét e m p h y t é o t e s s ’y retir a ie n t avec le u rs e f« fets, quand
i l s 'é t a i e n t m e n a c é s de q u e l q u e i n v a s i o n ; p o u r a c -
» q u é r ir ce d r o it, ils s ’ass u jettis sa ien t à g a r d e r le c h â t e a u et à e n tr e
t e n i r les fo r tifica tio n s; les voisin s s ’y s o u m e t t a i e n t aussi l o r s q u ’il
» n ’y avait p o in t de c h â t e a u - f o r t d a n s le lieu où ils h a b ita ie n t . » C es
pa ro les p r o u v e n t b ie n q u e le g u e t , e n A u v e r g n e , était é ta b li d an s l ’in
térêt c o m m u n d u s e ig n e u r et d es ju s tic ia b les .
N o s p r in c ip e s s o n t c o n s a c re s p a r un arrêt de la C o u r de c a ss a tio n ,
du 3 juin
i 8 3 5 , rap p o rté p a r Si r e y ,
tom e
35 , p r e m iè r e pa rtit1,
�13
p a g . 024 et su iva n tes. N o u s l ’a vo ns c ité t e x t u e l l e m e n t en e n t i e r ,
a u x p iè c e s ju s tific a tiv e s , 2 ' p a rtie , n° 6.
.
,-
V o y o n s m a i n t e n a n t si les a n c ie n s titres., i n v o q u é s p a r le Consul
t a n t , n ’o n t p a s été d é tr u its o u intervertis p a r le s lois n o u v e lle s.
QUATRIÈME Q U ESTIO N .
Les b a u x dont il s ’ a g it n ’ ont été d étruits ou intervertis, à l ’ég a rd du
bailleur o rig in a ire , n i p a r les lois des 18-29 décem bre 17 9 0 et 11 bru
m aire an 7 , ni pa r les dispositions d u C o d e civil.
L a p r e m iè r e de c e s lois, c e lle des 18-29 d é c e m b r e 1 7 9 0 , q u i dé
cla re r a c h e t a b l e s t o u t e s les r e n t e s fo n c iè r e s p e r p é t u e l l e s , soit e n
n a t u r e , soit en a r g e n t, de q u e l q u e e s p è c e q u ’elles so ie n t, et q u e lle
q u e soit l e u r o r ig in e {tit. t , art. 1 . ) , n e c h a n g e a it r ie n à l e u r n a
tu re i m m o b i l i è r e , ni à la loi q u i les rég is sa it (tit. 5 , art. 5 ) ; e lle
11e d é r o g e a it e n rie n a u x droits,- p r iv ilè g e s et a ctio n s q u i ' a p p a rte
n a ie n t c i - d e v a n t a u x b a i ll e u r s de f o n d s , soit c o n t r e les p r e n e u r s p e r
s o n n e l le m e n t , soit s u r les fo n d s b a illé s ;’i r e n t e (art. 1 , même titre).
E lle fixait le m o d e et le t a u x d u r a c h a t . T o u t r e d e v a b le q u i v o u
la it r a c h e t e r la r e n t e o u r e d e v a n c e f o n c iè r e d o n t so n fo n d s éta it
g r e v é , é ta it t e n u de r e m b o u r s e r , a v e c le ca p ita l d u r a c h a t , t o u s les
a rr é r a g e s q u i se tr o u v a ie n t d u s , t a n t p o u r les a n n é e s a n t é r ie u r e s , q u e
p o u r l ’a n n é e c o u r a n t e , au p r o r a ta d u t e m p s q u i s éta it é c o u lé d e
puis la d e r n i è r e é c h é a n c e j u s q u ’au jo u r d u r a c h a t (tit. 5 , art. i/j).
C e t t e f a c u l t é de r a c h a t , é ta n t a u j o u r d ’h u i de d ro it c o m m u n , n ’est
p l u s p r e s c rip tib le c o m m e elle l ’éta it autrefo is. M ais tou t l ’e fT e td e c e
p r i n c i p e de la loi n o u v e lle est d ’a c c o r d e r a u x d é b ite u r s des rentes
f o n c i è r e s , u n d ro it q u ’ils n ’a v a ie n t p a s a n t é r ie u r e m e n t . C e d ro it
n ’est pas u n e o b li g a t i o n , et le d é b i t e u r de la r e n t e est to u jo u r s p a r
fa i te m e n t lib re de la r a c h e t e r a u x c o n d i t i o n s v o u lu e s pa r la l o i , o u
de c o n t i n u e r de la s e r v i r , s o u s p e in e de d é g u e r p i s s e m e n t , fa u te d e
p a i e m e n t de la r e d e v a n c e .
�A près la loi d u 18 d é c e m b r e 1 7 9 0 , est v ç n u c la loi d u 11 b r u
m a ir e an 7 , su r le r é g i m e h y p o t h é c a i r e , q u i porte', art* 7 , q u e les rentes
constituées3 les rentes foncières3 et tes autres prestations que la loi a dé
clarées raclietables, ne pourront plu s à l'a v en ir être frappées d ’hypo
thèques. C e t a rticle est u n g r a n d p a s vers la m o b ili s a t io n des r en tes ;
m a is c ette m o b ili s a t io n n e r é su lte n é c e s s a ir e m e n t ni d e ce q u e les
r e n te s so n t d é c la r é e s r a c li e t a b le s , ni de c e q u ’elle s n e p e u v e n t p lu s
être fr a p p é e s d ’h y p o t h è q u e s .
E lle n ’a été p a rfa ite q u e p a r les lois p o s t é r ie u r e s . 'V o y ez les c o n
sid éran ts d ’u n arrêt de la C o u r d e c a s s a t i o n , c h a m b r e s r é u n i e s ,
d u 2 7 n o v e m b r e i 855 . (S. 55- 1 , 900. — D . 56 , 1, 4 i - )
D ’a i l l e u r s , d a n s a u c u n c a s , o n n é p o u r r a i t o p p o s e r au c o n s u l
t a n t la loi d u 11 b r u m a i r e a n 7 , p u i s q u e t o u s les titres q u ’il p r o
d u it à l ’a p p u i de ses p r é t e n t i o n s o n t é té cr é é s a v a n t c e t t e loi.
L e s art. 5 29 et 55 o d u C o d e civil s o n t les p r e m i è r e s ' l o i s - q u i
a ie n t r é e l le m e n t c h a n g é la n a t u r e d e s r e n t e s , les p r e m iè r e s q u i les
a ie n t r e n d u e s e n t i è r e m e n t m e u b l e s . « D a n s l ’a n c i e n n e j u r i s p r u d e n c e ,
» d i t M . T o u l l i e r , t o m e 5 , n° 55 2 , p a g . 2 2 1 , elles ( le s r e n t e s ) é t a i e n t
»des d ro its r é e l s , d es d é li b a t i o n s de la p r o p r i é t é ; et c o m m e p e r » s o n n e n e p e u t être fo r c é d e v e n d re son b i e n , il éta it de l e u r e s se n ce
» d e n ’être p a s r a c l i e t a b l e s , t e l le m e n t q u e si la fa c u lté de les r a c h e
t e r é ta it s tip u lé e d a n s le c o n t r a t de bail à r e n t e , c e tte fa c u lté se
» p r e sc riv a it p a r tr e n t e ans.
» M ais le C o d e les d é c la r e m e u b l e s et e s s e n ti e lle m e n t r a c h e t ù b l e s .
»sa n s q u ’o n p u iss e s t ip u le r le co n t r a ir e (art. 5 2 9 c t 55 o ). Il e n r é » su ite q u e l l e s ne s o n t p lu s d es d ro its r é e l s , et q u ’elles n ’a ffe c te n t
» p lu s le fo n d s q u e p a r h y p o t h è q u e o u p rivilè ge. L ’o b lig a tio n de les
• p u r g e r n 'est d o n c p lu s p u r e m e n t r éelle d a n s la p e r s o n n e d u p r e » n e u r ou d e ses h é r itie r s , q u i ne p e u v e n t p l u s se lib é re r a u t r e m e n t
» q u e p a r le r a c h a t .......
•
M ais à l ’é g a r d d es r e n te s fo n c iè r e s cr é é e s a n t é r ie u r e m e n t à la
’ p r o m u lg a t io n du C o d e , q u o iq u e a u j o u r d ’h u i m e u b l e s et r a c h e t a » )>les, le d é b i t e u r o u ses h éritiers p e u v e n t e n c o r e s ’en lib ére r p a t le
�15
» .d ég u erp isse m e n t o u a b a n d o n d e fo n d s , p a r c e q u e les d is p o sitio n s d u
» C o d e n e p e u v e n t a v o ir d ’effet ré tro a c tif. »
C e t t e d is tin c tio n est fort im p o r t a n te d a n s l ’e s p è c e p r o p o s é e . Si l ’o n n e p e u t faire r é t r o a g ir les d is p o sitio n s d u C o d e civil p o u r res
t re in d r e les d ro its d u p r e n e u r o u de ses h é r itie r s , o n ne le p e u t p a s
d a v a n ta g e p o u r r e str e in d re les droits q u e lé s lois a n c i e n n e s d o n
n a ie n t au b a ille u r . Il fa u t r e sp e cte r t o u s es d ro its a c q u i s , so u s p e in e
d e v io le r la g r a n d e et sa lu ta ire m a x i m e q u e les lois ne disposent que
pour l ’avenir.
D e là n o u s c o n c l u o n s q u e le b a i lle u r e m p h y t é o t i q u e o u ses h é
r it ie r s , p r o p rié ta ir e s de r e n te s f o n c iè r e s c r é é e s a v a n t la p r o m u l g a
tion d u C o d e civil, o n t t o u j o u r s l 'a c t i o n e n d é g u e r p i s s e m e n t , fa u te
de p a i e m e n t de la r e d e v a n c e , et q u ’a u c u n e p r e s c r ip t io n n e d o it leu r
être o p p o sée à c e t é g a r d , p a r c e q u e le p r e n e u r n i ses h é r itie r s n e
p e u v e n t p r e s c rir e c o n tr e le u r s titres.
'
J u s q u e là ces p r in c ip e s n e n o u s p a r a i s s e n t p a s 'd e v o i r être c o n . t e s t é s ; m a i s le c o n s u lt a n t n e dit pas d e p u i s q u e lle é p o q u e les r en tes
e m p h y t é o t i q u e s d o n t il s ’a g it o n t cessé d ’être p a y é e s , ni s ’il y a d e s
t ie rs-a cq u éreu rs.
N o u s p e n s o n s q u e s ’il n ’y a p o i n t de m u t a t i o n , ni d 'in te r v e rs io n
d e t i t r e , ni d é n é g a t i o n lé g a le d e l à r e d e v a n c e , la ces sa tio n de p a i e
m e n t d es r e n t e s e m p h y t é o t i q u e s n e s a u r a it suffire p o u r la p r e s c r ip
t io n , q u e lle q u e p û t être sa d u r é e , p a r c e q u e la p r e s c rip tio n d o it avoir
u n p o in t de d é p a r t a u tre q u e le titre d e la r e d e v a n c e . S ’il en éta it
a u t r e m e n t , o n p r e s c rir a it c o n t r e so n t i t r e , o n v io le ra it c e c é lè b r e
a x i o m e q u i, d e p u is d es s iè c le s , f o r m e la règle de n o s t r i b u n a u x : ad
prim ordiurn titu li om nis form atur eventus.
S ’il y a d es l i e r s - a c q u é r e u r s , il fa u t d is t in g u e r s ’ils o n t a c h e t é
a v a n t o u après la p r o m u l g a t i o n d u C o d e civil.
S ’ils o n t a c h e t é a v a n t la p r o m u l g a t io n d u C o d e c i v i l , il fa u t e n
co re d i s t i n g u e r s ils o n t fait o u n o n la sig n ifica tio n d u t r a n s p o rt au
b a ille u r o rig in a ir e . C e n ’est q u e d a n s l ’h y p o t h è s e de cette s i g n i fi c a -
�tion q u ’ils se s o n t d o n n é u n titre p r o p re , u n titre n o u v e l q u i p e u t
o p é r e r la p r e s c rip tio n , p a r c e q u e c e l t e s ig n ific a tio n p e u t être c o n
sid érée c o m m e u n e d é n é g a t i o n du d o m a i n e d ir e c t au b a ille u r e m
p h y t é o t i q u e , c o m m e u n e c o n t r a d i c t io n de so n titre : ce q u i suffisait
a u t r e f o i s , 'e t suffit e n c o r e , p o u r o p é r e r u n e in t e r v e r s io n de titre. —
V o y e z U u p e r r i e r j Q uestion s n o ta b les, liv. 2 , c h a p . 7 ; — M erlin.,
v° P re s cr ip tio n s, 5e é d i t i o n , p a g e 477 > et le C o d e c i v i l , art. 2208 .
S ’il n ’y a p o i n t eu de s ig n ific a tio n de t r a n s p o r t , ils 11e s o n t en
q u e l q u e sorte q u e de s im p le s m a n d a t a i r e s de l e u r v e n d e u r , q u i n ’a
p u l e u r c o n f é r e r q u e les d ro its q u ’il a va it l u i - m ê m e . L e v e n d e u r l e u r
a t ra n s m is les b i e n s a vec t o u te s les c h a r g e s d o n t ils é t a ie n t grevés ,
e t il n e p o u v a it p a s en être a u t r e m e n t , ca r les a c q u é r e u r s é ta ie n t
t e n u s de p u r g e r , p o u r se g a r a n t i r d e to u te s p o u r s u i t e s , et p a r c o n
s é q u e n t te n u s de r e m b o u r s e r le c a p ita l de la r en te. ( A r r ê t de la C o u r
de ¡Nîmes, d u 20 fr im a ir e an i 4 - — S. 6 , 2-82. ) S ’ils ne l ’o n t p o in t
f a i t , ils n e s o n t p o i n t v a l a b l e m e n t saisis à l ’é g a r d d u b a ille u r e m
p h y t é o t i q u e , et ils n ’o n t p u c o m m e n c e r a u c u n e p r e s c r ip t io n c o n t r e
lu i, p a r c e q u ’ils n ’o n t p o in t e t q u ’ils n e p e u v e n t i n v o q u e r c e t t e sorte
d ’in t e r v e r s io n de titre q u i r é s u lte r a it de la sig n ific a tio n d u t r a n s
p o rt au vrai p r o p rié ta ir e . A i n s i , les
tie rs -d é te n te u r s n ’o n t a cq u is
d ’a u tr e s d ro its q u e c e u x d es p r e n e u r s o r i g in a ir e s ; ils s o n t à leu rs
lieu et p l a c e , et la v e n te est c o m m e n o n a v e n u e à l ’é g a r d d u b a i l
le u r e m p h y t é o t i q u e . E lle n ’a d ’effet p o u r l ’a c h e t e u r q u ’à l ’é g a r d du
v e n d e u r ; elle n ’en a p o i n t à l ’é g a r d des tiers a u x q u e l s le tra n sp o rt
n ’a p o in t é té sig n ifié. L e 10 ve n tô se a n 1 2 , le t r i b u n a l d ’ap p e l de la
S e in e a j u g é q u ’en pareil c a s , le d é f a u t de s ig n ific a tio n é q u iv a la it
au d é fa u t de t i t r e , et q u e le n o u v e l a c q u é r e u r n ’a va it ja m a is été va
l a b le m e n t saisi à l ’é g a r d d e s tiers. ( S. 4 > 2 , 70 4 )• H n ’a d o n c pu
prescrire c o n t r e e u x , ni p a r les a n c ie n s p r i n c i p e s , ni p a r les n o u
v e a u x q u i les r e p r o d u i s e n t , ainsi q u ’il r é su lte des t e r m e s d e l ’article
a2.")8 d u C o d e c i v i l , q u i n ’a d m e t de p r e sc rip tio n en fa v e u r d es d é
te n te u r s p ré ca ire s c o n t r e les b a illeu rs o rig in a ir e s de b ie n s i m m o b i
li e r s , q u e tou t a u t a n t q u ’il y a eu in terversio n de t it r e , soit p a r u n e
�17
v a u s c v e n a n t d ’u n t i e r s , soit p a r la c o n t r a d i c t io n au d ro it d u pro
p r i é t a i r e , q u i est ici le b a i ll e u r e m p h y t é o t i q u e .
i,
Si l ’a cq u isitio n d es b ie n s e m p h y t é o t i q u e s est p o sté r ie u r e à la p r o
m u lg a t i o n d u C o d e c i v i l . il est certain q u e la m o b ilis a t io n d es r e n
te s , *par l ’effet de la loi n o u v e l l e , les a r e n d u e s p r e sc rip tib le s pa r
tre n te a n s ; m ais cette p resc rip tio n n e p e u t c o m m e n c e r q u e du j o u r
d e l ’a c q u is it io n faite a près la p r o m u l g a t io n d u C o d e civil. E lle ne
p e u t d a te r de c e tte p r o m u l g a t i o n , p a rc e q u ’elle n e c o u r a it pas au
p ro fit des v e n d e u r s , d é te n t e u r s p r é c a ire s des b i e n s e m p h y t é o t i q u e s .
11 ;n’y a eu in te r v e r sio n de titre p a r le fait de la loi q u e p o u r les n o u
v e a u x a c q u é r e u r s s e u le m e n t. C e t t e c i r c o n s t a n c e n e l e s a p a s d isp en sés
d e se c o n f o r m e r a u x a rticles 2 1 83 et 2 1 8 4 d u C o d e c iv il, q u i p r e s c r i
v e n t la n o tifica tio n à faire p a r l e n o u v e a u p r o p rié ta ir e a u x c r é a n c ie r s ,
avec offre de p a y e r j u s q u ’à c o n c u r r e n c e s e u l e m e n t d u prix., to u tes
les d ettes e x ig ib le s ou n o n e x ig ib le s . S ’ils o n t n é g li g é de r e m p lir ces
c o n d itio n s , ils 11e p e u v e n t a u j o u r d ’h u i r é c l a m e r le b é n é fic e de ces
lois p o u r se g a r a n tir de l ’effet d es p o u rs u it e s d u b a ille u r e m p h y t é o
tiq ue. P e u im p o r te q u ’en soi la c r é a n c e soit d é so r m a is p r e sc rip tib le
011 n o n p r e s c rip tib le ; du m o m e n t q u e le b a i lle u r e m p h y t é o t i q u e rtv
pa ra ît a vec son titre , et q u ’il p e u t a gir d i r e c t e m e n t , la q u e s tio n ne
d o it p lu s être co n s id é r é e d ’u ne m a n i è r e a b s o l u e ; elle est t o u te r e
lative, e t q u a n t à l u i , sa c r é a n c e o rig in a ir e reste im p re s c r ip tib le .
T o u t e f o i s , il est p o ss ib le q u e le b a i lle u r e m p h y t é o t i q u e 11e se soit
pas c o n f o r m é
a u x d isp o sitio n s de l ’a rticle 07 de la loi d u 11 b r u
m a ir e an 7 , q u i v o u la it q u e les d ro its d ’h y p o t h è q u e o u p r iv ilè g e ,
e x ista n ts lors d e la p u b lic a t io n d e c e t t c lo i, fu s s e n t in s crits d a n s trois
m o is p o u r to u t d éla i. M ais c e tte n é g l i g e n c e ne d o it pas lui
faire
p erd re ses d roits. L ’a rticle 267 d e la loi d u 9 m e s s id o r a n 3 , r e p r o
d u it d e p u is p a r l ’a rticle 3 g de la loi d u 11 b r u m a i r e an 7 , se b o rn e
à d é c la r e r q u e les h y p o t h è q u e s q u i n ’a u r a ie n t pas été inscrites d an s
le d élai v o u lu n ’a u r a ie n t effet q u ’à c o m p t e r d u jo u r d e l ’in s c r ip tio n
q u i en sera re q u ise p o s t é r i e u r e m e n t : — c ’est là toute la p e in e légale
de la n é g lig e n c e .
3
�M ais q u e d o it faire le c o n s u lt a n t p o u r r e n t r e r e n possession di
ses droits?
L a loi 2 , C od e de ju r is p . emphyt. , d é c i d e , en g é n é r a l , q u e l'e m p liy t é o te q u i ne p aie p a s p e n d a n t trois a n s , ou ne c o n s ig n e pas les
a r r é r a g e s , p erd t o u t le d ro it q u ’il a v a it s u r la c h o s e . Il est d 'a illeu rs
o rd in a ire d e s tip u le r d a n s les b a u x à r e n te q u e , fa u te de p a i e m e n t
p e n d a n t trois a n s , le c o n tr a t d e m e u r e r a n u l et r é s o l u ; a in s i, la r é so
l u t io n s ’o p ère ta n t e n ve rtu de la c o n v e n t i o n , q u ’en c o n s é q u e n c e de
la loi.
M ais c e tte p r iv a tio n n ’a p a s lieu d e p le in d ro it : il fa u t la d e m a n
d er e n ju s tic e . 11 n est p a s
n é ce ss a ir e de p r e n d r e i n s c r ip t io n p o u r
la co n s e r v a tio n de c ette f a c u lté , q u i n ’est p o in t s o u m is e aux f o r m a
lités éta b lie s p a r les lois s u r le r é g i m e h y p o t h é c a i r e . (V o ir a u x p iè c e s
j u s tific a tiv e s , 2*partie, n ° 7 , l ’arrêt de la C o u r de c a ss a tio n , d u 1 1 o c t o
b re 1 8 1 4 , S . , i 5, î, i4 7 - ) U n a u t r e a r r è t d e l a m ê m e C o u r a p a r e i ll e i n e n t
d é c i d é , le i 6 j u i n 1 8 1 1 , q u ’u n ba il à r e n t e fo n c iè re r e n f e r m e essen
t ie ll e m e n t u n p a c t e
c o m m i s s o i r e ; q u ’il n ’e m p o r t e de sa
n a tu re
a lié n a tio n de p r o p rié té q u e so u s la c o n d i t i o n de p a i e m e n t ; q u ’ainsi
le c r é a n c i e r d ’ u n e r e n t e , cr é é e p a r c o n c e s s io n d e fo n d s , p e u t d e
m a n d e r le d é g u e r p i s s e m e n t , fa u te de p a i e m e n t des a r r é r a g e s , e n
c o re q u ’il n ’ait pris a u c u n e i n s c r i p t i o n , q u e l 'i m m e u b le ait été
h y p o t h é q u é au profit d ’u n t i e r s , et q u e le d é b i t e u r de la re n te a it
la fa c u lté de la r a c h e te r . ( V o ir S . , » 1 , 1 , 53 ; , et les p iè c e s ju s t ific a
t iv e s ; a* p a r t ie , 11" 8. )
C e t t e a c t io n en d é g u e r p is s e m e n t est u n e a c tio n q u i se ratta c h e
a u x a n c i e n s p r i n c i p e s , et q u i , pa r cela s e u l , n ’est p a s m o b iliè r e .
M a i s ,a l o r s m ê m e q u 'e ll e a u r a it été r e n d u e m o b i l i è r e , elle n e p o u r
rait pas être p r esc rite a v a n t le 5 i m a r s 1858 , p u i s q u e , m ê m e d an s
la p lu s f â c h e u s e h y p o t h è s e , la p r e sc rip tio n 11e p o u r r a i t c o u r ir q u ’à
p a rtir de la q u a tr iè m e a n n é e après la p r o m u l g a t io n d u C o d e civil.
L e c o n s u lt a n t d evra d o n c m e t tr e les d é t e n t e u r s d e s e s l i i o n s en
d e m e u r e de lui p a y e r : i° u n e a n n é e d es a rrérag es
d e v a n c e s fo n c iè re s s t ip u lé e s en
d es r en tes et re
service d e j o u r n é e s d 'h o m m e s , d e
�c h e v a u x , b ê t e s de travail et de s o m m e o u de v o i t u r e , é v a lu é s ainsi
q u e de d ro it ;
2° T r o is a n n é e s des arrérag es des r e d e v a n c e s fo n c iè r e s s t ip u lé e s
e n a rg e n t c o m p t a n t , et de lu i servir ù l ’a v e n ir , e x a c t e m e n t , lesd ites
r e n i e s , a n n é e p a r a n n é e , si m i e u x ils n ’a i m e n t d é g u e r p i r , o u les
r a c h e te r .
L a raison d e c e t t e d is tin c tio n est p u is é e d a n s l’a rticle i 5 d u titre 5
de la loi d u 18 d é c e m b r e 1 7 9 0 , q u i p o rte q u e les r e n t e s et r e d e
va n ce s e n n a tu re n e s ’a r r é r a g e r o n t p o in t.
E n r é s u m é , il reste éta bli : i° q u e les r e c o n n a i s s a n c e s p r o d u i t e s
p o u r r a i e n t d is p e n se r le c o n s u lt a n t de r e p r é se n te r les titres p r i m o r
d ia u x a u x q u e l s elles se r é f è r e n t ;
20 Q u e ces titres s o n t im p r e s c r ip tib le s ;
5° Q u e les r e n t e s q u ’ils o n t é ta b lies n e s o n t pas fr a p p ées de n u l
lité c o m m e f é o d a l e s ;
4 ° E n l i n , q u e ni les lois des 1 8 - 2 9 d é c e m b r e 1 7 9 0 , et 11 b r u
m aire a n 7 , ni les d isp o sitio n s d u C o d e civ il, n ’o n t c h a n g é la n a tu re
de ce s r en tes e n les r e n d a n t r a c h e ta b le s , et q u e le c o n s u lt a n t a t o u
jours le d ro it de ren tr e r d a n s ses p r o p r i é t é s , si m i e u x n ’a i m e n t les
d é b ite u r s , soit d é g u e r p i r , soit r a c h e t e r , o u servir le s rentes.
D é lib é r é à P a r i s , le 5 m a i
18 3 7 .
''B O L E .
P u . D U P IN .
O D IL O N
BARROT.
A. P A I L L E T .
II.
de
Y A T IM E SIS’ IL.
�PIÈCES JUSTIFICATIVES
PR E M IÈ R E PA R T IE . — T IT R E S.
( N 'â .)
LA ROUSSIÈRE.
Antoine et Guillaume Trine, cousins, laboureurs, habitants du village de
la Roussière, paroisse de Saint-Clément, lesquels, solidairement l’ un pour
l’autre, et le seul pour le tout, sans faire division ni discussion, y renonçant
de leur bon gré et volonté, ont reconnu et confessé tenir et posséder en
emphytéosc perpétuel, tènement et p a gé zie, du puissant seigneur messire
Claude de Brezons, chevalier, seigneur, baron de La R o q u e , M ontm ayoux,
Paulhac, Bulsac et Samtheran, résidant ordinairement h son château et place
dudit Paulhac, près la ville de B rioude, absent, mais pour lui présents,
stipulants et acceptants, les notaires royaux soussignés h l’original du présent,
comme personnes publiques, commissaires députés en cette partie, à savoir:
Un domaine et tènement appelé de la Roussière, situés audit village, et
appartenances d’icelui, consistant :
i* En une maison à trois étages, couverte de tuiles, contenant sept toises
de face et trois et demie de profondeur;
a0 Une élable et grümge contenant dix-huit toises de face et quatre de
profondeur ;
3° Autre ¿tnb'le et grange contenant environ douze toises de face et quatre
de profondeur;
4° Autre ¿table et grange contenant cinq toises de face et trois do pro
fondeur ;
»
5° Autre élable et grange contenant huit toises de face et quatre de pro
fondeur.
Cours et terrains contigus auxdits bâtiments :
i° Un jardin potager et h chanvre de la contenue de quatre seterées, h<
semer chenovis;
a0 Loges l\ pourceaux et volaille;
�22
TIÈCES JUSTIFICATIVES.
5° Divers prés tic la contenue de quatre-vingts journaux de faucheur;
4° Un moulin h deux meules dans l’un desdits prés , sur le ruisseau
d’égout;
5° Divers champs de la contenue de soixante seterées terre labourable;
6° Divers pâturages, bois et autres terres inculles, de la contenue de cent
seterées terre ;
7° Une montagne avec dcuxburons et loges h veaux et à pourceaux , de la
contenue de cinquante têtes d’herbage ou environ , compris la troisième
partie d’un bois situé dans ledit tènement de la Roussière, appelé de la Devèze, contenant en tout trente seterées ou en viro n , et d’ icelui prendre et
user pour chauffage, y passer lesdits bestiaux, le tout conjoint et incorporé
ensemble, tenant et aboutissant dans le même tènement appelé de la R o u s
sière, qui fut donné et délaissé à titre de nouveau bail emphytéotique per
pétuel, par défunt puissant seigneur messire Jacques de Brezons, vivant,
seigneur baron desdites terres et seigneuries, capitaine d’une compagnie
d’ordonnance, et maréchal de camp de l’ armée du r o i , h Pierre et Antoine
Trinc frères, pères desdits reconnaissants, suivant lo contrat sur ce, fait et passé
par-devant Boissy, notaire royal à Vic, le trois février mil six cent vingt-neuf,
où les propriétés, possessions et héritages composant ledit tènement sont
spécifiquement dénombrés, le tout h présent confiné en son entier, du sep
tentrion par les montagnes appelées d ’Esclaux et de Lalandes; du midi par
les prés et champs de Pierre T r i n c , fils dudit Antoine reconnaissant, et le
pré du seigneur de Lasalle Salvagnac; d’orient par le bois dudit seigneur
d’ un bout h l’autre; et d’occident par la montagne dudit seigneur, appelée
de Belle-Vesle, auxquels confins, bornés et lim ités, doivent être mis et
ailichés suivant ledit contrat de bail emphytéotique;
8* Plus, leur part et portion de pâtureaux com m uns, fra u x , bois et autres
choses qui sont communes, indivises, entre eux et les autres habitants emphytéotes de ladite seigneurie de La Roqu e, et spécialement du bois de la
Boulesque , appartenant en propre audit seigneur, étant situé 5 l’endroit du
côté de la montagne de la Cepceyrc, pour leur usage. Quant aux outils ara
toires et autres nécessaires pour lo service dudit tènement et domaine de lo
Roussière , encore de pouvoir faire passer et repasser toute sorto de bétail
dudit domaine dans le bois de la Goulcsque dudit seigneur, et do couper
toutes sortes de bois, arbres, buissons des haies et endroit* dépendant do
�PREMIÈRE PARTIE. —
TIT8ES.
23
tout ledit tèncment, et ledit bois étant coupé, le pouvoir vendre h autrui
ou faire b r û le r , et autrement en faire et user ainsi que bon leur semblera.
Sous les cens et redevances :
Annuellement et perpétuellement en pagézie, de la quantité de soixantehuit quintaux fromages de montagne, un quintal beurre aussi de montagne,
poids de la ville d’Aurillac !
Quatre gellines;
Un veau de lait gras, le tout bon, suffisant, et de recette; que Iesdits Trinc
cousins, reconnaissants solidairement comme dessus, ont promis et s’obligent
payer et délivrer audit seigneur, ses fermiers et receveurs, savoir:
Lesdits fromages peser et recevoir dans les burons de ladite montagne, ti
chacun jour de Sainte-Foi, sixième octobre un chacun'an; et où il n’y aurait
assez de fromage d’été dans ledit buron pour suffire î» ladite quantité de
soixante-huit quintaux , ledit seigneur, et ses successeurs h l’ avenir, seront
tenus de prendre le surplus qui manquera en fromage d’autom ne, qui se
feront avant ln fête des Rois, aussi bons et de recette.
Lesdites gellines portables, et aussi ledit veau de lait gras, au château dudit
La Roque, ¡celles gellines à Saint-André apôtre, et ledit veau ¿1 la fête de
Pâques, après au suivant.
En outre, seront tenus lesdits T r in c reconnaissants, ou l’ un d’e u x , par
même solidarité que dessus, de faire audit seigneur, et sesdits successeurs
h l’avenir, un port de vin avec une paire de bœufs chacun an, h l’ arrièresaison et aux environs ladite fêto Saint-André apôtre, du vignoble du Quercy,
audit château de La Roque perpétuellement.
Aussi ont reconnu lesdits Trinc, reconnaissants pour eux et leurs successeurs
à venir, devoir audit seigneur, et h ses suctésseurs aussi à l’avenir, pour
raison et à cause dudit tènement sus-confiné et déclaré, propriétés, posses
sions et héritages qui le com posent, le droit de faire guet et garde audit
château de La Roque, en temps dû et accoutumé, droit de lods et ventes,
rétention par prélation.
Lnscmble, toute justice haute, moyenne et basse, mère mixte, empire et
tout exercice d ¡celle, être bons et fidèles tenanciers, payer les susdits cens
et redevances aux terme* ci-dessus réglés, et les autres droits et devoirs sei
gneuriaux, n y mettro cens sur cen s, ni autres charges, au préjudice dudit
*cigneur. F aire montre et vue oculaire d’iceux, (aire semblable reconnaissance
�2/i '
HÈCES JUSTIFICATIVES.
quand requis en seront et leurs successeurs h l’ avenir, et lui donner l’expé
dition en grosse î» leurs dépens, et généralement faire lout ninsi et comme
de bons paysans sont tenus faire, le tout suivant et conformément audit bail
emphytéotique dudit jour trois février 1G29, et sans rien innover aux parties,
aux autres conventions portéos par icelui respectivement, m êm elesd its
reconnaissants, à ce qui regarde l’effet do la taiile. Car ninsi tout, ce dessus,
lesditsTrinc reconnaissants l’ont promis et juré n’ y contrevenir directement,
ni indirectement, h peine de tous dépens, domaiges et intérêts, et h ce faire
ont solidairement, comme dessus, obligé, affecté, etliypothéqué, tous et cha
cun leurs biens , meubles et im m eubles, présents et à v e n ir , même et par
exprès, sans qu’une qualité déroge ü l'autre, de la généralité h la spécialité,
n i , au contraire , le susdit lènement reconnu , propriétés, possessions et
héritages qui le composent, avec les fruits, revenus et émoluments d’iceux,
pour quoi faire se sont soumis aux rigueurs de toutes cours royales qu’il
appartiendra, même de la cour et juridiction ordre dudit seigneur de La
R oqu e, voulant être contraints h l’ usage et stil d’ icelles et que une rigueur
de cou r; qu e,po ur raison de ce, sera accommencé pour l’autre non cessant,
renonçant à toutes exceptions de fait, de droit, qui pourraient être 5 ces
présentes contraires.
Fait et passé audit lieu de La Roque, paroisse dudit Saint-Clément, dans
la maison de Bernard Boisset, h ô te , le douze novembre après m idi, l’an
m i ls ix cent quatre-vingt-trois, en présenco de M* Guillaume Trin , prêtre
de la communauté de l’église dudit Saint-Clément, et M* Guillaume Apchier,
praticien du village de Lasscnac, paroisse de Cezeus, et Antoine Péchnud,
cle r c, résidant audit Cezcns, signés ù l’original des présentes, et lesdits
reconnaissants n’ayant su signer de ce requis.
S ig n e , B l a k c , Notaire.
( K* 2. )
L Ü L M iiIlE .
Jean Bastides a i n é , habitant au domaine de Lollièrc, paroisse do Snintiilément, faisant tant pour lui que pour autre Jean Bastides, son frère, au-
�25
PttEMIÈItE PA11TIE. - TITRES.
quel il promet faire agréer et ratifier le contenu en ces présentes, toutes et
«{liantes fois qu’ il en sera requis, î» peine de tous dépens, dommages et
intérêts des intérêts, de son bon gré et volonté, a reconnu r l confessé tenir
et posséder en emphyléose perpétuelle, lènemenl cl pagézie, du puissant sei
gneur inessire Claude de Brezons, chevalier, seigneur, baron de La llofjuc,
Montmayoux, Paulhac, Lalnac, Saint-Iléran et autres places,'résidant ordi
nairement h son château dudit Paulhnc, en la ville de Brioude, absent, mais
pour lui présents, stipulants et acceptants, les notaires royaux soussignés,
comme personnes publiques, commissaires députés en cette partie, h savoir :
ledit domaine et linement appelé de L o lliè re , situé audit lieu et apparte
nances de Lollière, que ledit seigneur aurait ci-devant baillé et délaissé auxdits Bastides frères, à litre d’investison et bail emphytéotique perpétuel, par
contrat passé par-devant Martin, Boudesd, notaires, le vingt-huitième août
mil six cent quatre-vingt-un : ledit domaine consistant en une maison h trois
étages, couverte de tuiles, contenant cinq toises de face et trois et demie de
prolondeur au four; loge h pourceaux; trois jardins, do la contenue, tous
trois, d’environ six cartonnées, pour semer clicnevis, laitues de terrain; une
élable et grange de la conteniie*de trois toises et demie de largeur ci seize
toises de longueur, avec un aire sur sol; le tout contigii, allouant et abou
tissant, confinant en leur entier du Septentrion : par le grand chemin qu’on
va de Paillieyrols en la ville d’Aurillac ; et de tous les autres aspects par les
champs dépendants dudit domaine de Lollière. Plus deux prés joignants, l’ un
appelé- Despradaux , et l’autre D u prodel, contenant tous deux environ huit
journaux de faucheur, confinés ; du Septentrion par le ruisseau appelé de
Cantcrimne; du Midi par ledit chemin dudit Pnillioyrols audit Aurillac;
d’ Orient par un bois levé dépendant du domaine de la Fage; et d’Occidcnt
par un pré et bois sive Vernieyres dépendant du domaine de Mourèzc. Plus
un autre pré appelé le Manis, contenant environ six journaux de faucheur,
confiné : du Septentrion par les prés et champs dudit domaine du Mourèzc;
du Midi par le pré de derrière, la grango dudit domaine de Lollière; d ’ Orient
par le pâturage et bois, broussaillc, appelé Labuge-Pialade; et d’Occidcnt
par ledit champ de Derrière la Grungc ci-après reconnu. Plus ledit pâturage
et bois, broussaillc, appelé la Buge-Pialade , contenant environ six selcrécs,
confinant : du Septentrion pnr le chemin dudit Pnillioyrols audit Aurillac;
du Midi par le champ appelé de Devant la Grango ci-après reconnu ; d’Orient
4
�20
TIKCES JUSTIFICATIVES.
pur le bois levé dudit domaine h la F a g e; cl d’Occident par ledit pré du
Manis ci-dessus reconnu. Plus ledit champ appelé de Derrière la G ran ge,
contenant environ trois seterées terre, partie duquel étant présentement en
buge, confiné : du Septentrion par le chemin dudit domaine de Mourèze;
du Midi pnr le chemin susdit ; d’ Orient par le même chemin ; et d ’Occident
pnr autre chemin qu’ on va dudit Mourèze h Paulhac. Plus un autre champ
appelé de Devant la Grange , contenant environ quarante-cinq seterées,
confiné : du Septentrion par le susdit chemin'dudit Paillieyrols audit Aurilluc; du Midi par le champ d’ Ktienne Fabre , maréchal; et d’Occident
pr.r les bâtiments et pré de la Gorale dudit domaine de Lollière ci après
reconnu. Plus ledit pré appelé de la C o m b e , contenant environ trois jo u r
naux de faucheur, confiné : du Septentrion par le champ de la Froinental
dudit domaine de Lollière; du Midi par la Buge do
, de Pra-
d e b c n c , pré do Jacques Dégoul dudit Pradebenc ; d’ Orient par le susdit
champ de devant là ; et ¿ ’ Occident par le champ del Qucyrel dudit domaine
de Lollière ci-après reconnu.
Plus ledit champ appelé Delgueyrel, contenant environ douze seterées,
confiné: du Septentrion par autre champ ci?après reconnu appelé do Laubré;
du Midi parla Buge dudit domaine Delleus; d’ Orienl par ledit pré de la Combe;
et ¿ ’Occident par autre pré aussi ci-après reconnu, appelé Prot de Casorne.
Plus ledit champ appelé de Laubré, contenant environ six selerées, confiné :
du Septentrion par ledit chemin dudit Paillieyrols audit Aurillac; du Midi
par ledit pré do la Couilic et ledit champ de la Fromental; d’ Orieiit par
lesdits bâtiments, parties et terrains dudit Lollière ; et d’Occidenl par ledit
pré de la Casorne. Plus ledit champ appelé de la F ro m en ta l, contenant
environ quatre seterées, confiné : du Septentrion par ledit champ de Laubré
et ledit pré de la Casorne; du Midi par ledit champ Delgueyrel ; d’ Orient
par led it pré do la Com be; et d’Occidenl par ledit pré de la Casorne. Plus
ledit pré appelé de la Casorno, contenant environ seize journaux de fau
cheur, confiné: du Septentrion par le communal de la Cans dudit Lollière ; du
Midi par le pré de maitio Joseph F a b re , avocat do Vie ; d’Orient pnr les
dits champs de L a u b ié , de la Fromental et Delgueyrel; et d ’ O c c i d e n t par
les terres et bois broussailles de lo Casorne, contenant environ huit seterées,
confinant: du Septentrion par ledit communal de la Cans; du Midi parles
terres et bois broussailles dudit F a b re , avocat; d ’ O r i e n l par ledit pré de la
�PREMIÈRE PARTIE. — TITRES.
27
Casorne; cl ¿ ’Occident par ledit communal de In Cans. Plus mie buse appelée
D c l- lio c , contenant environ quatre scieries, confinée : du Septentrion par les
terres dudit domaine ds Mourèze; du Midi par ledit chemin dudit Paillieyrols
audit Aurillac ; et d’Occident par le roucher dudit Lollière. Pliis ledit bois
indivis entre ledit Bastide et lesdits jésuiies d’Aurillac, contenant tout ledit
bois,environ quinze scie ries, confiné en son entier: du Septentrion par ledit
champ appelé de Devant la Grange; du Midi par 1rs bois de Jean Dégoul et
Jacques Dégoul dudit Pradebenc; d’Orient par lesdits bois et terres dudit
Étiennc F a b re , maréchal, et le bois de Jacques Dégoul ; et d’ Occident par
divers héritages des habitants dudit Pradebenc.
Plus un pré appelé Pro t-C laux, contenant environ un journal, confiné:
du Septentrion par le chemin qu’on va dudit Mourèze aux Ultes; et de tous
les autres aspects par ledit communal appelé de la Cans. Plus ledit com
munal appelé de la Cans, contenant environ soixante seterées, terre confinée:
du Septentrion par le communal dudit Mourèze appelé de la Cans; du Midi
par la Cnns dudit sieur F a b r e , avocat; ¿'Orient pur Iesdiles terres et bois
broussailles de la Casoritè, plusieurs rochers entre deux; et d’Occident par la
(’ ans
du village de l’ Ernel, une base entre deux, faisant les limites, el
généralement tout ce tp i dépend el peut dépendra dudit domaine de Lollière,
avec tous droits ¿ ’entrées, servitudes, privilèges dus, anciens d'accou tu m és
sous les cens et rente annuelle, perpétuelle et uniforme, c l en pagézie, de la
somme de quatre cents livres, prix réglé par ledit contract ¿ ’¡nvestison el
bail emphytéotique perpétuel : laquelle somme de quatre ccnls livres ledit
Bastide a promis et s’ oblige payer fiudil seigneur et porter audit chateau de
La Roque, annuellement h perpétuel, un chacun ou en deux termes égaux,
le premier le jour et fêle de N o ë l , el le second le jour et fêle ¿e Saint-JeanBaptislc, ¿e chacune ¿es années.
De p l u s , ledit Basti¿c reconnaissant sera tenu et s’oblige ¿ ’ aller faire
voitureret apporter nadit chateau de La lloque; un chacun dft aussi perpé
tuellement une charretée de vin que ledit seigneur achctcra au vignoble b ses
dépens, et ladite voiture et port dudit vin sera fait aux dépens dudit
ilastide. Pourra icelui Bastide reconnaissant couper, prendre et emporter
un chacun ou à perpétuel, trois arbres bois do hêtre, autrement face du bois
<t forêt diulit seigneur, que part de le ruisseau D égo u l, propre et réservé
audit seigneur, poi»«’ lesdits trois arbres être employés aux utils ¿ ’agriculture
�28
PIÈCES JUSTIFICATIVES,
dudit domaine , h la charge d’ averlir pour lui ledit seigneur ou son fermier
lorsqu’ il les voudra couper, prendre et emporter. Aussi ledit Bastide recon
naissant, pour lui et scs successeurs à l’avenir, pour raison et h cause dudit
domaine de Lollière, propriétés, possessions et héritages qui le composent,
le droit do faire guet et garde audit c'hateau de La Roque en lomps dû et ac
coutumé. Droit de lods cl ventes en mutation de mains, rétention par droit
de prélation; ensemble toute justice haute, moyenne et basse, more mixte,
empire et tout exercice d’ icelle, être bon et fidèle tenancier r payer ladite
somme de quatre cents livres aux termes ci-dessus réglés, faire ladite voiture
et port de ladite barrique de vin lorsqu’il en sera requis, ne mettre cens sur
cens ni autres charges au préjudice dudit seigneur, faire vue et montre
oculaire desdites propriétés et héritages ensemble, et reconnaissance quand
requis en sera et ses successeurs îi l’avenir, et en donner expédition en bonne
et duc forme, h ses dépens, audit seigneur, et généralement faire tant ainsi et
comme en bon paysan est tenu faire îx son seigneur, car ainsi tout ci-dessus
ledit Bastide reconnaissant l’ a promis cl juré tenir, et n’ y jamais contrevenir
directement ni indirectement par quelque cause, occasion et prétexte que ce
soit, h peine de tous dépens, dommages et intérêts, et à ce faire a obligés,
affectés et hypothéqués tous à chacuns les biens meubles et immeubles pré
sents et avenir, spécialement ledit domaine de Lollière reconnu, propriétés,
possessions et héritages qui le composent, avec fruits, revenus cl émolemcns
d’iceux : pour quoi faire s’est soumis aux rigueurs de toutes Cours royale«
qu’il appartiendra, même de la Cour et juridiction ordre de ladite seigneurie
de La Iloque, voulant être contraint suivant l’usage et stil d’icclles.et qu’ une
rigueur de Cour que pour raison de ce qui sera commencé pour l’autre non
cessant, renonçant 5 toutes exceptions do fait et de droit qui pourraient être
h ces présentes contraires. Fait el lu audit lieu de La Roque, maison de Bernard
de Boissel haute , le dix-neuvième jour du mois de juillet avant midi , mil
six cent quatre-vingt-quatre, en présenco de Guillaume Apchier, praticien
du village de Lussenac, paroisse de C ezens, et Pierre R c v a l, huissier dudit
Cezens, signés h I original des présentes, et ledit Bastide reconnaissant ne l’a
su faire de ce requis.
S ig n e B l a n c , not ai re.
�PREMIÈRE P4RTIE. — TITRES.
29
( K - 3 .)
• LA c n o u x .
Antoine Auzolle, fils h Pierre, laboureur, habitant du village de La Croux,
paroisse de Saint-Clément, de son bon gré et volonté, a reconnu et confessé
tenir et posséder en emphytéose perpétuel tènement et pagézie, du puissant
seigneur messire Claude de Brezons, chevalier, seigneur, baron d eL a R o q u e,
Montmayoux, Paulhac, Balsac et Saint-Héran, r é s id a n t o F d in a ir e m e n t à son
château et placeduditPaulhac, lès la ville deBrioude, au Bas-Auvergne,absent;
mais pour lui présents, stipulants et acceptants les notaires royaux soussignés,
comme personnes publiques, commissaires députés en cette p a rtie ,
à
savoir : Un corps de domaine et métairie sis et situé audit village et appar
tenances de La Croux, que les prédécesseurs d u d i l seigneur auraient baillé
et délaissé aux prédécesseurs dudit A u zolle, à litre de nouvelle investison
et bail emphytéotique perpétuel, suivant le contrat sur ce fait et passé pardevant Dumas, notaire royal, vingt-sept décembre mil six cent douze, con
sistant :
i°. En une maison à quatre étages , couverte de paille , contenant quatre
toises de face et trois et demie de profondeur; cour nu-devant, et jardin
de la contenue d’environ quatre cartonnées, pour sômer chenevis; le tout
joignant et attenant ensemble, confinant en leur entier : du Septentrion par
une rue publique, et le four c f l e jardin dudit A u zo lle , à cause du bail e m
phytéotique perpétuel ; du Midi par autre rue publique
dudit village ;
d’Orient par autre jardin dudit Auzolle, de son ancien patrimoine; e t d ’ Occident par le chemin qu’on va dudit La Croux audit saint Clément, aux det
tes contenues, et confins compris, et englavés lesdits four et jardin.
2*. Plus une établo et grange contenant douze de longueur et quatre de
largour, parties de fumier, aire ou sol, et-un champ appelé Delpuech , con
tenant dix cartonnées : le tout contigu et adjacent, confinant en leur e n
tier : du Septentrion par nutro champ dudit Auzolle, do son patrimoine; du
Midi
et d Occident par le chemin qu’on va dudit La Croux à la tuillèrc;
et d’Orient par ledit chemin qu’on va dudit La Croux au d it Saint- Clément.
3°, Plus un autre jardin et champ joig n a n t, appelés Delacombo et Dugnot, contenant tout environ trois seterées terre, confinant : du Septentrion
�30
PIÈCI-S JUSTIFICATIVES.
par le jardin de Pierre Àuieilliaii ; du Midi par le communal dudit villnge ;
d’Orient par ledit jardin dudit Pierre Auieilhan, le jardin du gérant lisdouloux ; et d’Occidenl par le jardin de George llecural.
4°. Plus autre pré appelé Lasgoutles-Basses, contenant environ dix jour
naux de faucheur, confiné: du Septentrion par le chemin qu'on va dudit vil
lage de La Croux à Vie ; d’Orient par le pré de Jeanne Lacroux, veuve, dite
Joanniquo; du Midi par les prés de la Ganc, de la Live et de la S ì,igne, autre
ment des Serres ci-après mentionnées; et d’Occident par le communal d u
dit village, et susdit chemin qu’ on va d’icclui audit Vie.
ii°. Plus autre pré appelé de Gane , de la Live et de la Saigne de Legue ,
autrement des Serres, contenant environ quinze journaux de faucheur, c o n
finé: du Septentrion par ledit pré de Lasgoultes-Basses, ci-dessus reconnu;
d’Orient par le pré dudit Esdouloux et le pré de Jean Lacroux ; du Midi par
les prés de la Izoulles et la côte dépendant du domaine de Mourèze; et
d’Occidenl par le pré d’Abian, dudit domaine de Mourèze.
T)0. Plus un autre pré appelé le Pradel de B ru n et, contenant environ Irois
qunrls de journal de faucheur, confiné : du Septentrion par le pré de Jean
Calmon Bousquet; d’Orient par le pré dudit Récurât et d’Antoine Auziol ;
du Midi par le pré dudit Auziol et le champ dudit Auzolle reconnaissant,
de son patrimoine; et d’ Occidenl par autre champ d’icelui Auzolle , d épen
dant dudit bail emphytéotique.
7°. Plus un mitre pré appelé lePrat-Long, contenant environ un journol de
faucheur, confiné : du Septentrion et d’Orij'nl par le pré dudit Auzolle; du
Midi par le champ d’icelui Auzolle; et d’Occident par aulre champ dudit
Auzolle, dépendant dudit bail emphytéotique.
»S\ Plus un autre pré appelé Prnt-Mort;', contenant environ deux journaux
de faucheur, confiné : du Septentrion p a rle pré de la Gleyse dudit Aii/.olle;
d’ Oricnt par le chemin qu’on va dudit Lacroux h T hiézac; du Midj par le
pré de Borio dudit Auzolle; et d’Occidcnt par ledit Pré-Long ci-dessus r e
connu.
Plus un autre pré appelé d’Extrase, contenant enviion deux journaux de
funchcur, confiné : du Septentrion pur le chemin tendaul de C.urebourse a la
Tuillère; d’Orient par autre chemin susdit duditLn Croux audit Thiézac; du
Midi par lo pré d’Antoine \ iollard ; t l d’Occident par les champs desdits
(iéraud, Ksdouloux et Jeanne Lacroux Joaunique.
�PREMIÈRE PAT.TI1Î. -TITRES.
31
. 9°. Plus autre pré appelé Lou-Gombel, contenant environ cinq journaux de
faucheur, confiné : du Septentrion par le champ des dames religieuses de la
Visitation, à Sainl-Flour; d’ Orient par le .pré desdites dames religieuses,
et un petit pré d’Antoine et Marguerite Auzolle de Saint-Clément ; du Midi
par le champ de Jeanne l l e y t , veuve do M* Martial d’ A b crn n rd , notaire
d’AurillaC, et autre petit préd e ladite R ey tj et d’ Occident par ùutre champ
desdites religieuses. ‘
•
10». Plus autre champ appelé Del Gouteilzou et do Lasparrso, contenant
environ quatresetérées, confiné: du Septentrion par le champ dudit Auzolle
de son fait particulier; d’ Orient par le champ desdites dames religieuses;
du Midi par le champ de ladite Lacroix Joannique ; et d’Occident par le
champ d’Antoine Lacroux.
ï i°. Plus unpetit champ appciédelGoubel,contenant environ unesetérée,
confiné: du Septentrion par le pré desMonnies dudit Auzolle de son fait par
ticulier; d’Orient par ledit pré Del Goubcl ci-dessus reconnu ; du Midi par le
champ desdites religieuses; et d’ Occident par le champ appelé dudit Esdouloux.
12°. Plus un autre champ appelé de la Vaissière , contenant environ sept
cartonnées, confiné: du Septentrion p a rle chemin dudit Antoine Lacroux;
d’Orient par ledit chemin dudit village h ï u il l è r e ; du Midi et d’Occidenl
par le champ dudit Auzolle reconnaissant, de son fait particulier.
i 5°. Plus un nuire champ appelé de la Croix d’E x trex , contenant environ
dix cartonnées, confiné: du Septentrion par le communal de la Gonleilze et
d itls s a r d ; du Midi par le pré d’Extrex, dudit bail emphytéotique ci-dessus
reconnu; d’ Orient par ledit chemin qu’on va audit Thiézac; et d’Occident
par le champ dudit Esdoulonx.
i/|°. Plus autre champ appelé Lou-Camp de-Marty-d’Extrex', contenant
environ quatre setérées, confiné: du Septentrion par le communal appelé des
iss a r d sjjlu Midi parledilchemih dudit La Croux nudit Thiézac; d’Orient par
lo champ dudit Antoine Lacroux; et d’Occident par le champ do Marguerite
Armandies, fillo îi leu Uunoît.
i 5®. Plus autre champ appelé Lou-Calcadis, contenant environ dix carton
nées, confiné : du Septentrion par le champ del Calcadis dudit domaine de
Mourèzc; d’ Orient par le coudcrc commun del Calcadis, et le chemin par
lequel l’on va de Currhourtsc à Vcrnet.
�3*2
HÈCES JUSTIFICATIVES.
i6°. Plus autres champs appelés Deltremou-Lcus-des-Camps, et pièce rcdonde, et de Puech-Ferre, joignant, contenant par ensemble environ cin
quante selérées terre, confinant en leurentier : du Septentrion par le champ
de Jean Viallard ; d’Orienl par le pré de Jean Calmon et ledit Pral-Long cidessus reconnu, et Pradel dudit Auzolle, de son fait particulier; du Midi par
le pré do Laprégne, de ladite Jeanne Lacroux Joanuique; et d’ Opcidenl par
le communal du Puech-Ferre, et champ dudit Esdolloûx.
17°. Plus un pré appelé de Losgnnes , contenant environ un journal de
faucheur, que ledit Auzolle, reconnaissant, tient par permutation de ladite
Lacroux Joannique, en contre-change d’ un autre pré appelé Lasgoultes-llau
tes, dépendant dudit bail emphytéotique; enfin du Septentrion, Orient et
Midi, par les prés de la Ganc, de la Line, de la Saigne, de Lègue et des Ser
res, ci-dessus reconnus , le ruisseau appelé de la Gnne, et ledit chemin dudit
La Croux audit Vie.
18°. Plus un champ appelé de Curebourse, contenant environ cinq carton
nées, confiné : du Septentrion et d’ Orient par ledit communal dePuech-Ferre;
du Midi par le pré de Marguerite Lacroux, veuve de Jean Boise ; et d ’Occi
dent par le grand Thermidor du Puech Bossct h la Tuillère.
190. Plus trente têtes d’herbage à la montagne dudit seigneur de La Roque,
appelée de B e lle-V iste, située dans le district de ladite paroisse de SaintClément, avec un buron : toute ladite montagne contenant environ
d’herbage, confiné : du Septentrion par le communal et maison
de la Tuillère, appartenant à Marguerite Gaillard , veuve de Pierre Benoch ,
dudit la Tuillère, de la montagne de l’Estrade, appartenant à M. M* Jean (Je
Culdaguès, président à la Cour des aides, h Clermont; d’ Orient par le bois
commun de la Goulesquc; du Midi par la montagne de Megeannc-Cornc, ap
partenant à ladite Reyt, veuve dudit Dabernard , et le bois de la Roussière ;
et d Occident par la montagne appelée du Caylal, appartenant à Antoine
d’Uumières, écuycr sieur de Le Begeac.
ao*. Plus dépendantes et indépendantes dudit bail emphytéotique perpé
tuel, ail cens cl revenu annuel, redituelct perpétuel, pour tout ce dessus Ircnlesix quintaux de fromages bons et marchands, et un carteron beurre aussi
bon et marchand : le tout poids d’Aurillac; un chareau , deux gellinrs dp
r e c e t t e , et le port d’ une barrique do vin h aller prendro au vignoble du
Q ucrcy, et la conduire audit château de Lnroquc, ii la saison qu’il plaira
�/
A
PREMIÈRE PARTIE. -TITRES.
33
a u d i t s e i g n e u r , et c e s er a à f e i u l r o U d u d i l v i g n o b l e du Q u e i c y q u e led it s e i
g n e u r a c h è t e r a le v i n , san s q u ’ ic e lu i s e ig n e u r soit ten u de r ie n c o n t r i b u e r à
ladite v o i l u r e , le s q u e ls t r e n t e -s ix q u i n t a u x d e f r o m a g e , e t le d it c a r t c r o n de
b e u r r e , e t le d it s e i g n e u r e t ses s u c c e s s e u r s , à l ’ a v e n i r , s e r o n t t e n u s d ’e n v o v e r
•
•
*
o u a lle r luire p e s e r , p r e n d r e et r e c e v o i r u n c h a c u n au b u c o n d u d it r e c o n n aissan t, le j o u r d e l à S a i n l - G é r a 'u d . e t l e s d i t s c h e v r e a u e t g c ll iu e s p a y a b l e s e t
p o r t a b l e s a u d i t c h â t e a u , Aussi un c h a c u n , led it c h e v r e a u h P â q u e s e t les d ite s
g c lli n e s h N o ë l , et a u t r e m e n t c o m m e r é s u l t e d u d it b a il e m p h y t é o t i q u e p e r
p é t u e l , a u q u e l il n ’e st rie n d é r o g é p a r la p r é s e n t e d é c l a r a t io n e t r e c o n n a i s
s an ce .
Confessant ledit A u z o lle , reconnaissant ledit seigneur avoir sur les pro
priétés et héritages susdits cl reconnus oulre et au par-dessus, les redevances
ci-dessus s p é c i f i é e s , .droit et lods et ventes, droit de rétention par droit de
prélalion et advanlnge, le cas advenant et tout autre droit de directe sei
gneurie, ensemble loutc justice haute, moyenne et basse mère mixte , em
pire et exercice d’ icelle; et généralement ledit reconnaissant s’est soumis en
vers ledit seigneur el lesdits successeurs à l’ aven ir, à tous et chacun lus
autres droits et devoirs seigneuriaux, à la réserve de la taille aux quatre cas.
Et aussi s’est soumis aux mêmes clauses, rigueurs, soumissions et renoncia
tions portées par la déclaration et reconnaissance rendue audit seigneur,
par Pierre A m eilh a u , dudit Lncroux, devant lesdits notaires commissaires
susdits, le six juin dernier, de laquelle lui a été fait lecture du mot îi m ot,
tout au long. Fait et passé audit lieu de Laroque. dans la place publique du
dil lieu, le troisième jour du mois de septem bre, avant m i d i , mil six cent
quatre vingt-cinq, en présence d’ Antoine Laroque, marchand dudit La Roque,
• paroisse de Saint-Clém ent, et Jean Boudon ; clerc du village de Lapeyro
Piarre.
I)e Paulliac signées it l’original/les présentes, avec ledit Auzolle recon
naissant, et François Ameilhau , limitant du village de L u b a r ie , paroisse
dudit Saint-Clément, qui n’n su signer de ce requis.
S ig n é B l a n c , notaire.
4
5
\
�PIÈCES J ljSTIFICATi YES.
( N ' 4 .)
LA
FA G lï.
Barthélémy Malgràs, laboureur, habitanl.au lieu et domaine de la Fage,
paroisse de Suint-Clément, du son bon grc et volonté, a reconnu et confessétenir et posséder en emphyléose et perpétuel tellement et pagezie, du puis
sant seigneur messire Claude de B r e z o n s, chevalier seigneur , baron de la
Roque, Monlmayoux, Paulhac, Balzac, Saint-Iléron, et autres places, rési
dant ordinnircment îi son château et place dudit P au lh ac , en la ville de
Briotide au bas Auvergne; absent,mais pour lui présent,stipulant cl accep
tant, les notaires royaux, soussignés comme personnes publiques, commissai
res, députés en cette partie; h savoir : Un corps de domaine et métairie sis
et situé audit lieu , et
appartenance de la F a g e , que ledit seigneur de. la
Roque aurait ci-devant buillé cl délaissé audit Barthélémy Malgras, h litre
de nouvelle investiture et bail emphytéotique perpétu el, suivant le contrat
sur ce fait cl passé par-devant Caflinial, notaire r o y a l, le vingt-quatrième
mai mil six cent soixante-seize , consistant en différentes propriélées, pos
sessions ethérilages, ci-après désignés, limités et confinés, cl premicremrnten
une maison à deux étages compris le sellier avec cheminée, entrée servitude
au-devant, et au-dessus grange et ¿table , sol du côté du septentrion, porte
du fermier du côté d’.cricnl, jardins potagers au derrière de ladite maison,
jardin îi chanvre au-devant ladite grange du côté du,m idi, four contigu
auxdiles maison et grange, pré au-dessous,-¡cellesmaisons et granges a p p e
lées de la Goutte, Pro-Voullet, de la Boigues, do Tram cyrcs; terres appelées
Dclcamp Redon de B a u d y , les lernièyres Delcnmp cl Dontcuil : le tout joi
gnant et attenant ensemble, conlennftt lesdils jardins, environ six carton
nées pour semer chenevis, en prés vingj journaux do faucheurs ou environ ,
en terres environ cinquante seterées, confinant en leur entier, do septentrion
par les buges et champ des damos religieuses du couvent de la Visitation de
la villo de Sa in l-H o ur, h cause de leur domaine de Cnflolain ; do Midi et
d’O ccidcnt, par le ruisseau de Canlcronue , encore d’Occidcnt par le pré de
Jean Calmon , et d’Oricnt par le ruisseau do Goulettc ; plus, en bois pnrlio
levé et partie broussailles et terres appelées de C o u rbio y res, contenant en
champs terro labourable environ trois seterées , et bois levé ou
brous-
�PREMIÈRE PARTIE. -TITRES.
suilles environ
cinquante seterées , confinant en. leur entier par ledit
ruisseau de Gculeltes , et
Midi,
3")
audit ruisseau Canteronne ; (¡’Orient ,
du
p a r la terre et bois d’Etienne Fabre , maréchal dudit Courbières;
il'Oceident, parles buges et terres du domaine d cl’Ollière, c l bois du domaine
de Mourèze; et du Septentrion p a r l e bois de Georges, ouvrier, et audil
ruiseau de Canteronne et un chemin par lequel ou va du village de Cassa
t e
audit domaine de l’Ollière. Plus en une barthe et bois broussailles ap
pelé deLastremeyres,contenant environ trois seterées, confiné : d’ Orientpar
ledit ruisseau de Canteronne ; du Midi par le pré dudit ouvrier ; d’ Occident
par le chemin susdit dudit village do Cassagnes , audit domaine de l’O l
lière; et du Septentrion par le pré dudit domaine de l’OHière, et audit ruis
seau deCanteronne. Plus en une terre et buges ou bois et bar the, contenant
environ.six seterées appelésBoigueBasseD elm iexet delaBoigue-IIaute, contenanten bois, bugesou barthes, bois broussaille, environ huitseterées, con
finant : du Septentrion par les buges dudit domaine dé l’Ollière; du Midi, par
le bois dudit domaine de Mourèze; d’ Occident par lesdites buges dudit do
maine de l’ O llière, et d’Orient par le même chemin qu’on va dudit Cessagne audil l’ Ollière. Plus en un pré appelé Pral-Migier, et champ appelé del
Sivedal, joignant, contenant environ un juurnal el d e m i, et en terres cinq
seterées, confinant en leur entier : d’Orient parle communal des habitants du
dit lieu de la Roque appelé de La Salle; du Midi par la terre de Bernard
Boissct-llaste, et le pré de Pierre Jurquet; et d’ Occident par le pré du
seigneur de Uoussilîe, à cauâe de sou domaine de la Gaminade* et le chemin
qu’ on va dudit Cassngnc au lieu de la lloqu e; et du Septentrion par le mê
me chemin.
Plus un pré appelé de Pesquier^ contenant
environ ciuq journaux de
fa u ch eu r, confiné : d’Orient par le chemin qu’ on va dudit Cassagne à Con
l’o len; du Midi par nuire chemin tendant dudit Cassagnes audit Confolen ;
il’ Occident par le pré de Claude Bonnal, et ledit' ruisseau de Goulettes; et du
Scptcutrion par autre
chemin qu’on va dudit lieu do la Roque audit lieu
de la Fage. — Plus en un autre pré, terre et pâturage joignants, appelés des
Vicrs, contenant, en pré et pâturages, dix journaux de faucheurs ou environ,
eten torredix-huit seterées ou environ, confiné : d’Orientpar le pré de Jean
Mondât, et communal des habitants dudit lieu d e là Roque; du Midi par le
communal et terre d’Annel Malgras, et au susdit pré appelé del Pejquior, les
�3G
PIÈCES
ju s t if ic a t iv e s .
susdits chemins de la.Fage h la Roque, entre d e u x ; d’ Occident par le ruis
seau dos Gouleltes et du Septentrion par le passage desdites dames religieu
ses de la Visitation-Notre-Dame de Saint Flour, et le chemin tondant dudit
Confolen , ou Heu de la Roque et nu prò dudit Annct Malgras , au milieu
duquel pré de Viers et dudit paturage est ledit chemin traversant dmlit Cassa g n e , audit Confolen.
Plus une nuire terre appelée aussi de Viers, contenant environ quatre seterées, confinée : d’Orient par ledit chemin tendant dudit Cassagne audit la
Roque; du Midi, par le pré dudit Pierre T rin e; d’Occident par le pré et par
le pâturage desdites dames religieuses, et la terre dudit Trine ; et du Septen
trion par la terre dudit Malgras.
Plus une autre terre appelée de Paubercyres, contenant environ quatre seterées, confinée : d’Orienl, parle chemin appelé de Pauberceyres, tendant du
dit Cassagne audit La R o qu e; du Midi par la terre, dudit Malgras ; d'Occi dent par la lerre dudit Pierre Trine et la terro de Suzanc de Laubré, femme
de maître Jean F u b rie r , procureur au siège de V i e ; et du Septentrion, par
la terre dudit seigneur de Roussiile.
Plus une autre terre appelée del Fagens, contenant environ trois selcrées,
confinée : d’ Orient par la terre dudit seigneur de Roussiile; du Midi par la
terre de ladite L au b ré; du Septentrion p a rle pré de Jeanne Cliastre, fem
me de Pierre Lnfon; etd'O ccident, par le ruisseau desG oulettes, et avec les
autres confrontations plus vraies, si point y en a , entréo issue et servitudes
anciennes, ducs et accoutumées, prises et perceptions d’eaux. Plus en vingtcinq têtes d’herbages dans la montagne dite Claux hauts cl bas; plus toutes
les autres propriétés et choses dépendantes, et qui peuvent dépendre du
dit domaine
de la Fage , et dudit bail emphytéotiquo perpétuel d ’icelui, au
censet revenu annuel, rédituelet perpétuel pour tout ci-dessus, de la quan
tité de vingt-huit quintaux fromage et demi-quintal beurre: le tout bon et
m archand, pur et net, poids d’ Aurillac, que ledit Barthélémy Malgras re
connaissant n promiset s’est obligé de payer annuellement audit scigncurde
Ln Roque ou h ses fermiers, un chacun pour la fête deSaint-Michel-Arebangc.
Plus do faire voîturer et charrier avec bœ ufs, une barrique a u d it sei
gneur du vignoble du Q u c r c y , chacune année audit jour et fêle de SaintMichel-Archnngo , d e 'l ’endroit dudit vignoble du Q ucrcy, q u e ledit seigneur
fera a c h e te r , qui sera conditilo par ledit reconnaissant et Ì» scs d épen s, au-
�PREMIÈRE PARTIE. -TITRES.
37
«lit château de La Roque, le tout conformément h autre contrat «Vin vos tison
dudit domaine, du dernier octobre mil six cent dix-huit, auquel je n’ai rien
dérogé par la présente déclaration et reconnaissance,-confessant ledit Malgras, reconnaît ledit seigneur avoir sur toutes lesdites propriétés , posses
sions et héritages ci-dessus reconnus, outre et autres par-dessus lesdites re
devances ci-devant expécifiées, droits de lods et ventes, droit de rétention
par droit de prélation et advantages le cas advennnt, et tout autre droit de di
recte seigneurie; ensemble toute justice, haute, moyenne et basse, m ère,
mixte, empire et exercice d’icelle, et généralement. Ledit reconnaissant s’est
soumis envers ledit seigneur et ses successeur.'h l’ avenir, à tous et chacun les
autres droits et devoirs seigneuriaux, h la réserve de la taille aux quatre cas,
et aussi s’est soumis aux mêmes clauses , rigueurs , soumissions et renoncia
tions portées par la déclaration et reconnaissance rendue audit seigneur des
propriétés, possessions et héritages que Annet Malgras , son frère, a reconnu
do son fait particulier qu’ il tient et possède, dépendant de la seigneurie de
La Roque , devant lesdits notaires commissaires susdits, le dernier août, de
•laquelle il a entendu la lecture qui lui a été faite tout au long et mot à
mot. Fait et passé audit lieu de La Roque, dans la place publique, le quatriè
me jour du mois de septembre mil six cent quntre-vingl-cinq,avant midi, en
présence de M. Jean S o b ricr, procureur aux cours royales de V ie , rési
dant audit La Roque, et Jean B eu d eu , clerc, résidant au lieu et paroisse de
Cezens, signés h l’original des présentes ; et ledit reconnaissant n-’ a su signer
de ce requis. — Signé B l a n c , notaire.
�38
PIÈCES JUSTIFICATIVES. - DEUXIÈME PARTIE.
( i V 5 .)
Arrêt de la Cour de "cassation., recueil de S i r e y , t. 5, i ” partie, p. 5 - .
R E N T E . --- T lT I tE PRIMORDIAL. ---- P ü R C lk R E .
Une rente est-elle présumée seigneuriale, parce qu’ elle est due à un seigneur?
— Rés. nég.
Lorsque ¿’existence de la rcn le est avérée, et que sa nature est présumée foncière,
le débiteur qui excipe de son abolition est-il obligé de ju stifier par litre
q u e lle a été créée seigneuriale? — Rés. aff.
I a percière ( d’ A u v e rg n e) est-elle présumée rente foncière ? — Rés. aff.
(Jacoux, Mouly et consorts, demandeurs. — Delassalle et sa fem m e, dé
fendeurs.)
Entre les sieur et dame Delassalle , ci-devant seigneurs hauts-justiciers de •
la baronnie de Blanzac, et leurs ci-devant tenanciers Jacoux, Mouly et con
sorts, il était constant en point do fait :
Q u e , par acte du 17 mai 1 7 7 2 , les tenanciers avaient reconnu « tenir,
»porter et posséder, et les auteurs et prédécesseurs avoir, de tout temps et
»ancienneté, tenu, porté et possédé de Simon-Claude Amable de T u b c u f,
»seigneur de Blanzac, en un tènement, e t c .,d e terres, charmes et rochers >
» etc. ; »
Que. ln redevance établie consistait en une portion de fruits;
Que les biens arrentés étaient situés sur le territoire régi par la coutume
d ’Auvergne.
L e seigneur prétendait que l'existence de la rente étant établie par l’ acte
du 10 mai 1772 , elle devait lui être payée, à moins que les débiteurs de la
rente , excipant de l’ ubolition, ne justifiassent qu'elle fût seigneuriale.
Ceux-ci répondaient qu’ il.sullisait do la qualité de seigneur dans le pro
priétaire do la r e n t e , pour qu’elle fût réputée seigneuriale.
8 nivôse an 11. — Arrêt de la cour d’nppcl séant h R io m , »u profit du
seigneur; — considérant que la coutume d ’ Auvergne est allodiale ; qu ainsi
les rentes sont présumées foncières; que la présomption est plus forte h l’é-
�ARRÊTS DE LA COUU DE CASSATION.
39
giird des percières, donl les arréarges pouvaient être demandés de vingt-neuf
a n s , à la différence du cens seigneurial, dont les arrérages se prescrivaient
par trois ans : et que la coutume ne parle point des percièrcs dans les divers
titres qui concernent les droits féodaux et seigneuriaux.
Pourvoi en cassation pour contravention aux articles 5 et 17 de la loi du
a 5 août 1 7 9 2 , ainsi conçus :
( A r t. V .) c Tous les droits féodaux ou censuels utiles, toutes les rede-
» vances seigneuriales annuelles, et-généralement tous les droits seigneuriaux
» conservés ou déclarés rachetables par les lois antérieures... sont abolis sans
»indemnité, h moins qu’ ils no soient justifiés avoir pour cause une conces» sion primitive de fonds.
{ A r t . X V I I . ) > Ne sont point compris dans le présent déçret les rentes,
»champarts et autres redevances qui nn tiennent point à la féodalité, et qui
»sont dus de particuliers à particuliers non seigneurs ou possesseurs de fiefs.»
Les demandeurs voyaient dans ces deux dispositions com binées, que les
particuliers non seigneurs ou possesseurs de fitfs étaient dispensés de justi
fier que la- rente eût pour cause une succession primitive de fonds.
Ils e n c o n c l u a i e n t , a contrario sen su , o u p a r l a r è g l e qui de uno d icit, de
nllero n e g a t , q u e les s e ig n e u r s n e p o u v a i e n t ê t r e d isp en sés d e c e l l e p r e u v e .
Ou , en d’autres termes, qu’ il suffisait de la qualité do seigneur pour que
la renie fût présumée seigneuriale.
Les demandeurs trouvaient cette doctrine justifiée par un décret du G mes
sidor an 2 , portant : — «La Convention nationale, après avoir entendu le
»rapport de son comité do liquidation sur la pétition des citoyens P ip elet,
» père et fils, considérant que les citoyens Îip elet père et fils étaient ci devant
»seigneurs dp L a illy , que la rente dont le remboursement ost réclamé était
»duc sur un bien situé sur la paroisse du même nom ; que la loi du 25 août
» 1792 n’excepte de la suppression que les rentes purement foncières dues à
» des particuliers von seigneurs ni possesseurs de fiefs; el enfin que lesdits Pi-
»pclel 11e sont pas dans le cas de l’cxceplion : — Décrète qu’il n’ y a pas
»lieu 5 liquidation. »
•
V o ilà , disaient-ils, clairement décidé q u ’ u n e renie 11’csl pas purement
foncière lorsqu’elle est due à un ci-dcvant seigneur; que cette qualité do sei
gneur lui donne une couleur de rente seigneuriale , et la fait présumer telle
jusqu’h justification du contraire.
�fiO
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
—
DEUXIÈME PARTIE.
Après avoir amplement développé tous les moyens cjui faisaient présumer
la foncialité de la percière, les défendeurs se sont attachés h prouver, en géné
ral, que lu qualité de seigneur ne suffisait pas pour faire présumer une rente
seigneuriale, pour obliger le propriétaire h justifier par titre de sa foncialité.
Ils ont invoqué un arrêt de la C o u r , rendu le 5 pluviôse au 11 , par la
section des requêtes, au rapport de M. B o yer, sur la demande rejetee de
Fleehlein et consorts, en matière de rentes colongérrs ( i).
Ils ont rappelé comment M. M erlin,.procureur-général impérial, avait
alors réfuté l ’argument pris de l’article 5 de la loi du «5 août 1 792 , et celui
qui était pris du décret du 6 messidor an 2.
C ’est un principe, disait ce m agistrat, qu’un seigneur peut posséder des
renies purement foncières. — Donc celui qui prétend le contraire doit en of
frir la preuve ; — et la présomption contraire n’est point établie par la loi
du 25 août 1792.
L ’ art. 5 maintient les renies seigneuriales qui sont prouvées, par litre pri
mitif, être récognitives d’ une concession d’ immeubles. Quant aux rentes sei
gneuriales dont l’origine n’est pas constatée par de pareils tilres, la loi les
déclare abolies sans indemnité. — Mais la loi ne s’arme de celle rigueur qu’à
l ’égard des rentes seigneuriales ; elle ne dit rien des rentes foncières.
L ’arl. 17 porte bien que la loi du 25 août 1792 n’ost pas faite pour les
rentes purement foncières dues î» des particuliers non seigneurs. — Mai»
quant aux renies foncières dues b des ci-devant seiggeurs, la loi ne s’ex
plique point. Et l’art. 2 d elà loi du 17 juillet 1790 les maintient, puisque,
sans exception, elle maintient les renies purement foncières et non féodales.
A u s s i, le 7 ventôse an 2 , la Convention nationale déclara-t-elle abolie une
rente, non parce qu’elle était due h un seigneur, mais parce q u e , réunie îi
un cens emportant lods et vente , elle était seigneuriale et qualifiée telle.
Si le décret du G messidor an 2 semblo décider que la qualité de seigneur
.sullit pour faire présumer la féo d a lité , c ’est parce q u e , dans l’espèce propo
sée , la renie était réclamée sur un bien sis dans le ci-devant Verm and ois,
pays n o n -allodial, où l’on’ tenait pour maximo : 11tdle terre sans seigneur , où,
conséquemment, toute renie première ¿luit réputée seigneuriale,
M. le procureur-général Merlin, dans celle cause de p ercière, comme
( 1 ) V o jc z S irc y , llc c u c il d e l ’an 1 0 , p. 2 1 5 .
�ARRÊTS DE LA COUR DE CASSATION.
/jl
dans colle tle rentes colongeres , a été d’avis que la qualité de seigneur ne suf
fisait pas pour que la rente fût présumée seigneuriale; et attendu q u e , dans
l’espèce, l’existence de la rente était constatée et que la Coutume la pré
sume foncière , — il a conclu au rejet.
A rrêt.
Attendu (sur le moyen du fond de l’ affaire) que ia Coutume d’Auvergne
étant purement a llo d ia le, ainsi que cela résulte de la comLinaison de plu
sieurs de ses articles et de la jurisprudence constante du pays ;
Que, par conséquent, toutes les redevances dues sur les biens situés dans
le ressort de cette Coutume qui était soumise à la maxime : nul seigneur sans
titres, étaient, de leur nature, réputées purement foncières, à moins que le
contraire ne fût positivement stipulé par acte valable ; qu’il est d’autant n^oins
permis de supposer qu’en Auvergne les redevances connues sous le nom de
perr.ières étaient exceptées de cette conséquence générale résultant d e l ’allodia-
lité, et réputées, de leur nature, seigneuriales ou censuclles; que, de l’aveu des
demandeurs, il n’en est pas dit un mot dans les divers litres de la Coutume
qui concernant les droits féodaux et seigneuriaux , et qui en font une longue
énumération ; et qu’en oulrc la cour d’appel met en fa it, ce qui n’est point
contesté non p l u s , qu’ il est de principe reconnu , qu’à la différence du cens,
dont la Coutume ne permettait de demander que les trois dernières années
d’arrérages , on pouvait, au contraire , demander vingt-neuf années d’ arréra
ges ou fruits de la pcrcicre.
Q ue l’ article 5 de la loi du 25 août 1792 n’oblige que les propriétaires de
droits féodaux ou censucls h représenter le litre primitif, et que l’article 17
dispose que les rentes et cliamparls purement fonciers ne sont pas compris
dans la disposition do cet article 5 ; que si ce même article ajoute : «et autres
redevances qui ne tiennent point à la féodalité, et qui sont ducs par des par
ticuliers h des particuliers non seigneurs ou possesseurs de fiefs », on ne saurait
induire de ces dernières expressions, non-seulement que le législateur uit
d it , mais encore qu’il ait entendu dire «pie désormais, et par dérogation aux
lois antérieures , toutes les renies purement foncières , lorsqu’elles se trouve
ront ducs à des ci-devant seigneurs ou possesseurs do fie fs , seront réputées
féodales cl obligeront les propriétaires h représenter le titre primitif.
A t t e n d u enf i n q u e , p a r a u c u n e îles cl a us e s des act e s p r o d u i t s a u p r o c è s ,
6
�hll
PIÈCES JUT1FICATIVES. —
DEUXIÈM E
PAIïTIE.
il n ’c s l é ta b li q u e les «leux p e r c i è r e s d o n t ¡1 s ’ agit e u s se n t un c a r a c t è r e féo d a l
ou se ig n e u r ia l.
P a r t e s m o t i f s , la C o u r r e j e t t e , e t c .
D u 25 v e n d é m ia i r e a n
i 3 . — C o u r d e c a s s a t i o n .- — S e c t i o n c i v i l e — P r é
sident, AI. M a lc v ille . — Rapporteur, AI. R u p e r o u . — P la id a n t, MAI. D u fr e s ncau c l G uich a rd .
N . B . — L e m ô m e a r r ê t d é c i d e aussi q u ’ a va n t le C o d e c i v i l
d é fe n d a it p a s
de j u g e r q u ’ u n e se u le r e c o n n a i s s a n c e
lu loi ne
s iifiï l p o u r
établir
u n e re n te .
(N * 6 .)
M ê m e R e c u e i l , t. 55 , i r* p a r t ie , p . 5 a/[ e t s u iv an tes .
i “. R E N T E
F É O D A L E . — P e r c i Lr e .
a 0. R k c o k s a i s s a k c e . —
T
itre
primordial.
i ° E n pays d’a llo d ia lité , les percières, ou renies en portions de fru its, n'avaient
pas essentiellement le caractère de droit féo d a l; elles étaient réputées fonciè
res, ci m oins.de stipulations contraires ; —
Ces rentes n'ont donc pas été a t
teintes par les lois abolitives de la féodalité ( i ) ; et cela encore que lis débi
teurs aient reconnu q u ils tenaient de la directe seig neu rie, et que les fonds
étaient mouvants de la ju s tic e du seigneur; qu'ils aient aussi reconnu devoir
un droit de guet, cl se soient soumis « l'obligation de se présenter aux assises :
toutes ces stipulations sont insuffisantes pour établir un mélange de féoda
lité. ( L L . 2.r) a o û t 1 7 9 2 e t 1 7 j u ill. 1 7<>3.)
•i° I)e simples reconnaissances antérieures au C od e civil peuvent être regardées
comme suffisantes pour établir l ’ existence d ’une ancicnni r en te, bien qu’ elles
ne relaient pas la teneur de l ’acte prim ordial. ( C o d . c i v . , 1 0 5 7 . ) (a)
( S o u c h a t e t a u t re s —
L e s h é r it ie r s R id o n
C . de Y i l l e m o n l e i x . )
de V i l l e m o n l e i x r é c l a m a i e n t d e s s i e u r s
Soucliat ,
(1) C’est ce que la Cour dp cassation avait déjà décidé. J'uy. t. 5, i , 57, et J u r h p , du 1 9 ' ttt'c/r,
v* ¡lent» fio d a te, n* 8 0 . — I oy. uussi le Ilipcrt. de M erlin , v" T errage, $ l ,r.
(2) / ov. J’arrf-t filé dans la note précédente, -r- f ’oy. aussi t. 28, 2, 270 et 2 7 7 ; — Ju riip r.
(ï* tiicle, v* Rente t J 1",
,I»
�ARRÊTS DE I,A COUP. DE CASSATION.
Ù3
lix ier et autres, le paiement de plusieurs rentes pvreières (espèce de droit
de champart) dass en vertu d’anciennes reconnaissances.— Les défendeurs
soutenaient que ces fentes étaient nlleinles par les loisabolitives de la féo
dalité, soit comme étant essentiellement seigneuriales, soit comme se trou
vant mélangées de féodalité ; e t , pour établir le mélange de féodalité, les
défendeurs argumentaient de ce que les actes produits constataient que les
débiteurs avaient reconnu tenir de la directe seigneurie du baron deVillemonteix; de ce qu’ ils avaient aussi reconnu que les fonds concédés étaient situés
dans la ju s tic e liante , moyenne et ¿•nsse du seigneur; de ce qu’ils s’étaient
soumis au paiement d ’un droit de guet, et h l’obligation de comparaître aux
ossises, à peine d’amende; enfin, de ce que les reconnaissances étaient por
tées dans un terrier où figuraient d’autres reconnaissances féodales. — En
outre, les défendeurs opposaient le défaut de représentation des titres pri
mordiaux , et prétendaient que les reconnaissances invoquées ne pouvaient
suppléer ces titres.
Les premiers juges déclarèrent les rentes frappées d’abolition; mais sur
l’appel, c l le 2y mai i 834. la Cour royale de Riom rendit un arrêt ailirmatif,
motivé principalement sur ce que la Coutume d’Auvergne, dans le ressort
de laquelle se trouvaient situés les fonds concédés, était une Coutume allo
diale , et que le pays était régi par la maxime : n u l seigneur sans litre. —
Quant au défaut de représentation des litres prim ordiaux, l’arrêt considère
que les reconnaissances rappelant ces titres et ayant été insérées au terrier
des demandeurs, doivent faire pleine foi et justice tant que les défendeurs
ne démontreront pas qu’elles contiennent autre chose que ce qui élait con
tenu dans les titres anciens.
POURVOI .en cassation par le sieur Souchat et consorts : i* pour viola
tion des lois nbolitives des rentes féodales ou mélangées de féodalité; —
pour violation] des règles relatives h la preuve de l’exislencc des rentes.
(Art. 5 d e là loi du a 5 août 1792,01 art. 1537, Cod. civ.)
ARI\KT.
LA C O U R ; Attendu, sur le premier m oyen, qu’il en est de la percière
conune du champart : ce n’est pas un droit essentiellement féodal; il n’est
pus incompatible avec la directe; il n’emporte pas la directe seigneuriale, et
même les mots directe seigneurie 11c supposent point, en pays allodial, une
�PIÈCES JUSTIFICATIVES. - DEUXIÈME TAHTIE.
Uh
mouvance féodale : c ’est le dominium directum retenu par le bailleur ït cmphy téoso ;
*
Attendu que l’Auvergne était un pays allodial régi par la maxime : nul
seigneur sans litr e , et où fief et justice n’avaient rien de commun , o ù , par
conséquent, le droit de guet, l’obligation d e sc présenter aux assises, se ré
féraient à la justice, étant.dus au seigneur haut justicier, ralione superioritatis, sans avoir rien de féodal; — Attendu que les titres des percières dont
il s’ agit ne sont ni féodaux ni mélangés de féodalité;
Attendu, sur le deuxième m o y en , que l’obligation de rapporter le titre
primitif n’est imposée, par l’art. 5 de la loi du 25 août 1792, que relative'
ment aux droits féodaux; que l’art. 1307, God. civ., ne pourrait être appli
qué à la cause sans effet rétroactif, et que la question étant fort controversée
avant le Code civil, sans qu’il existât de loi positive, In Cour royale de Piiom
a pu, sans violer aucune l o i , admettre comme suifisnntes des reconnaissan
ces qui contiennent l’ aveu du droit, la confession de la dette , qui sont la
loi dos conventions, et forment, entre les parties, des actes parfaits, le lien
civil résultant du consentement qui forme le contrat, des reconnaissances
qui sc réfèrent h d ’anciens titres remontant aux années 1765, 153g et 1542 ;
— Rejette, etc.
Du 3 juin i 835. — Ch. req* — P r è s ., M. Borel. — lîa p p ., M. Mesladicr.
— C o n cL , M. Lebeau, f. f. d’ av. gén. — P l . , M. Garnier.
( I V -7 .)
Même R ec u e il, t. i 5 , 1” partie, page 147P A C T E C O M M I S S O I R E . — D é g u e r p i s s e m e n t . — P i u v h . é g k . — In s cjiip noN
HYPOTHÉCAIRE.
f a pacte commissoire (ou la faculté de reprendre la chose aliénée à défaut d ’exé
cution des conditions de l ’aliénation, telles, par exem ple, (jue la condition
de paiem ent du p rix) est essentiellement compris dans le bail à rente, foncière.
— A i n s i , le défaut de paiement résout le contrat, et autorise l ’ action en
déguerpissement . — C e droit de reprendreest (entre le bailleur et le preneur)
�ARRÊTS DE
la
COUK HÉ CASSATION.
/|5
toute autre chose qu’ une créance soumise pour sa conservation a u x form a li
tés établies par les lois sur le régime hypothécaire. (Loi du i 8-29 décem
bre 1790, tit. 1 " , art. 1 et 2; tit. 5 , art. 1 et 3 ; — Loi du 11 brumaire
an 7, sur les hypothèques, art. 4°- — Cod. civ., art. 1284» 2106.)
( Galonier — G. Vors. )
.
1—
».
1:
Ces questions ayant déjh ¿té agitées devant la Cour de cassation , et jugées
dans un sens moins restreint par arrêt du 1G juin 1811 (V. tom. u ,
r*
p a r t ., pag. 3 5 7 ) , il suffira de dire ici un mot du fait qui a donné lieu à l’ ar
rêt suivant.
Le sieur Vors,détenteur d’ un domaine baillé en 1770, à titre de locatairie
perpétuelle, no payait pas la rente stipulée pour prix du bail. Déjà, en 1 an 8 ,
il avait été condamné au paiement de plusieurs années d’arrérages échus;
depuis cette condamnation il avait également négligé le service de la rente.
E n fin , le 5 avril 1808, il fut rendu contre lui jugement portant condamna
tion au paiement de nouveaux arrérages é ch u s, cten outre au déguerpisse
ment , si, dans le délai de trois m o is , il n’ avait purgé la demeure. — Sur
l’ap p el, un arrêt de la Cour de Nismes avait réformé et rejeté la demande en
déguerpissement; a Attendu que pnr les nrl. 1 et 2 du lilro 1 " , la loi du
18 décembre 1790 a déclaré rachetables les redevances foncières établies
par des baux h locatairie perpétuelle; qu’ elle a , par cela seul, aboli l’action
en déguerpissement; et q u e, pour leur conservation,elle a soumis ces ren
tes aux formalités de l’inscription hypothécaire , et qu’ ici le créancier de la
redevance n’ a point rempli ces formalités» » — Sur le pourvoi du sieur
Galonier, cet arrêt a été cassé.
A iuiêt (par défaut).
L A C O U R : — Vu les articles 1 et 2 du tit. 1 " de la loi du 29 décembre
1 790, et les art. 1 cl 3 du tit. 5 de la même loi ; — Vu la loi du 11 brumaire
an 7 et autres sur le régime hypothécaire;
Attendu que, d’ après les articles 1 et 3 précités du lit. 5 de la loi du 29
décembre 179 0 , le rachat autorisé par l’ art. 1 " du tit. i " d c la même loi
" ’a rien changé h la nature des rentes foncières, ni aux droits en résultant
pour le bailleur; q u e , suivant les lois et la jurisprudence ancienne, le pacte
commissoire était de la nature du contrai do bail îi renie foncière, et que
ce principe a même élé appliqué h tous les contrats synallagmaliques, pnr
�PIÈCES JUSTIFICATIVES. —
ftC>
DEUXIÈME PARTIE.
P a r i. 1 1 84 «1» C o d e c i v i l ; q u ’ il s uit de là q u e le d r o it q u i c o m p è t e a u b a i l
l e u r d e r e n t r e r dans son f o n d s , e u v e r l u d u p a c t e c o m m i s s o i r e , £1 d é fa u t de
p a i e m e n t d e la r e n t e f o n c i è r e , e s t , au m o in s d a n s so n a p p l ic a t i o n a u
prdiieur
e t vis-à-vis d e c e d e r n i e r , a b s o l u m e n t é t r a n g e r a u x lois s u r le r é g i m e h y p o
t h é c a i r e , e t se c o n s e r v e in d é p e n d a m m e n t d e s f o r m a li té s é ta b lie s p a r ce s lois;
q u ’ ainsi l ’a r r ê t a t t a q u é , e n d é n ia n t au d e m a n d e u r l ’e x e r c i c e de c e d r o i t ,
so us le p r é t e x t e du d é f a u t d ’in s c r i p ti o n d e sa p a r t s u r les b ie n s a ff e c t é s à ln
r e n t e , n fait u n e f u i s s e a p p l i c a tio n des lois s u r le r é g i m e h y p o t h é c a i r e ; et
f o r m e l l e m e n t v io lé les a r t ic l e s 1 *r e t 5 du lit. 5 < l e l a l o i d u y g d é c e m b r e 17 9 0 ;
— C a s s e , etc.
Du
11
octobre
4 - — C o u r du c a s sa tio n . — S e c t i o n c i v ile . —
18t
RI. le b a r o n M o u r r e , p . —
Prcs.
Rapp. M. B o y e r . ;— C oncl. M. G i r a u d , a v o c . g é n .
P l. -M. M a ilh e. ( Z . )
(iV 8.)
M ê m e I l e c u e i l , t. 1 1 , 1 " p a r t ie , p . 0 5 7 .
j ”.
PACTE
CO M M ISSO IRE.
—
P ropriété. —
H y p o t h è q u e . —r R e s t e
FOSClfcnE. - DÉGU ER PI9SEM EN T.
a°.
T
ierce
-
opposition
.
—
R
eprésentation
judiciaire
.
—
C
réancier
.
1". U n bail à rente foncicrc renferme essentiellement un pacte commissoire : it
n’ em porte, de sa nature, aliénation de p rop riété, ¡¡ne svtts la condition du
paiement. — A in s i, le créancier d'une rente créée pour concession de fonds
peut demander le déguerpissement, faute de paiement des arrérages, encore
ou il n'ait pris aucune inscription, que l'imm euble ait été hypothéqué au pro
fit d'un tiers, et que le débiteur de la rente ail la faculté de ta racheter.
20. Les créanciers hypothécaires ne peuvent form er tierce-opposition aux j u g e
ments rendus, sans fraude, contre leur débiteur, et passés en force de chose
j u g é e , encore que leur hypothèque se trouve sans effet par suite de ces j u g e
ments. — D ans ce eus, les créanciers ont été représentes au jugem ent par
leur débiteur.
( C o d . P r o c . c i v . , a rt. 074*)
(L a dam e S q u iro ly —
C. D écès-C anpènr. )
L e .r> s e p t r m b r e 1 7 ‘i 1 , l’ un d e s n u tc u r s de Décès- C a n p è n e d o n n a , ù titre
�ARRETS DE LA COUR DE CASSATION.
47
de bail à Iocatairié perpétuelle, à l’un des auteurs du sieur Squiroly, deux
domaines situés dans lo ressort du parlement de Toulouse.
Le sieur Squiroly négligea de servir la r en te, c l , en l’ an g , il fut con
damné au'fléguerpissement; le jugement fui confirmé par un arrêt du 4 août
1808, çt mis h exécution.
'
Observons qu’à cette époque le créancier n’ avait rempli aucune formalité
pour la conservation do sa rente, devenue rachetable par l’effet de la loi du
29 décembre! 1790; tandis que la dame Squiroly avait pris une inscription
hypothécaire pour la*conservation de sa d ot, sur les deux domaines tenus
par son mari, à tilro de locntairie perpétuelle.
La dame Squiroly, après avoir fait prononcer la séparation de biens entre
elle èl son mari, fit sommation au sieur Décès-Canpène de lui payer le mon
tant do sa dot; ou de délaisser les immeubles sur lesquels elle avait pris une
inscription.
Décès-Canpène répondit que le pacte commissoire avait eu l’effet de faire
rentrer dr.ns ses mains les immeubles donnés à locatairic perpétuelle, quittes
de toutes hypothèques; q u e , d’ailleurs, la dame Squiroly ne pouvait avoir
plus de droilsj que son créancier, et que le jugement qui avait ordonné le
déguerpissement, ayant acquis l’autorité d e là chose jugée, était inattaqua
ble de la part du sieur Squiroly el de scs créanciers.
Le 23 août »809, jugement du tribunal civil de M u r e t, qui débouta la
dame Squiroly de sa demande.
Sur l’nppel, elle forma tierce-opposition à l’arrêt du 4 août 1808, confir
mât^ du jugement qui avait ordonné le déguerpissement; mais ses moyens
échouèrent, comme ils avaient échoué en première instance.
Un arrêt do la Cour de Toulouse la débotita de sn tierce-opposition et de
son appel.
P O U RVO I en cassation.
La demanderesse invoquait d’abord les dispositions de l’art. i “ du lit. 2
de la loi du a 9 décembre 1790, qui déclarent rachetablcs toutes rentes cl
redevances perpétuelles; elle disait que celte loi avait converti les droits des
propriétaires do rentes foncières eu des créances personnelles, et que les dé
biteurs étaient devenus propriétaires inconiinulobles des immeubles affectés
au service des rentes; que, par conséquent, ils avnicnt pu les aliéner et les
hypothéquer, du moment que la loi sur le rachat avait été promulguée; que,
�48
p iè c e s
ju s t if ic a t iv e s ,
d e u x iè m e
p a r t ie .
—
ARRÊTS,
dès ce moment, le sieur D écès-C anpèn e aurait dû prendre inscription sur
les biens de son débiteur pour la conservation de ses droits ; mais qu'ayant
négligé de remplir cette formalité , il ne pouvait exercer scs droits qu’ après
les créanciers inscrits de son débiteur; que, d’ ailleurs, il devait poursuivre
le paiement de sa rente par la voie de l’expropriation forcée , et non pas de
mander le déguerpissement ;
Q ue la Cour d’appel de Toulouse, en déclarant la tierce-opposition mal
fondée, avait violé l’art. 474 du Code de Procédure; qu’il est faux, de dire
qu’ un débiteur représente son créancier; que, s’il en était ainsi, il s’ensui
vrait que les créanciers hypothécaires n’ auraient aucun droit à exercer toutes les fois qu’ il plairait à leur débiteur d’aliéner les biens affectés au paie*ment de leurs créances, puisque les acquéreurs seraient fondés à soutenir
que la vente est parfaite à l’égard du vendeur, et que ses créanciers n’ ont pas
plus de droit que lui.
A rrêt.
LA CO U R : — Sur les conclusions de M. Daniels, avocat-général ;
Attendu que la loi du 29 décembre 1790, qui a rendu rachetables les ren
tes foncières perpétuelles, n’a pas changé la nature de ces rente s , et que le
pacte commissoire est de leur nature ;
Attendu que l’exécution du pacte commissoire, dérivant du titre origi
naire, résout le contrat ab initio, e t , par conséquent, efface toutes les hypo
thèques intermédiaires.
Attendu que l’arrêt contradictoire du 4 août 1808, conforme à ce prin
cipe, avait de plus acquis l’autorité de la chose jugée lorsque la réclamante
y a formé opposition ;
Attendu qu’elle ne pouvait avoir plus de droit par son hypothèque que
son débiteur lui-même, qui n’ avait qu’ une propriété résoluble; q u e , dans
cet état de ch oses, cette tierce-opposition aurait é té mal fondée
quand
même elle eût été rece vable;
Attendu, enfin, que l’arrêt attaqué n’est contrevenu à aucune loi, et s’est
c o n f o r m é , au contraire , à l’ ancienne jurisprudence, à laquelle la loi du
29 décembre 1790 n’ a porté aucune atteinte : — Rejette.
Du 16 juin 1811. — Section des requêtes. •— P r . , M. le baron Henrion.
R app., M. Lefessier Grandpre y.
Im p r im e r i e d e T E R Z U O L O R U E D E V A U G IR A R D N 1 1
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Duplessis-Chatillon. 1837?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bole
Ph. Dupin
Odilon Barrot
A. Paillet
H. De Vatimesnil
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
rentes féodales
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
doctrine
droit écrit
franc-alleu
directe seigneuriale
jurisprudence
droit de guet et de garde
Masuer
forains
corvées
code civil
droit intermédiaire
domaines agricoles
fromages
vin
percière
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation pour M. le marquis Duplessis-Chatillon ; contre les détenteurs de ses domaines de la Roussière, Lollière, la Croux, la Fage, situés dans la paroisse de Saint-Clément, en Auvergne [suivi de ] Pièces justificatives.
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Terzuolo (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1837
1651-1837
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2814
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2813
BCU_Factums_G2815
BCU_Factums_G2816
BCU_Factums_G2817
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53570/BCU_Factums_G2814.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Clément (15180)
La Roussière (domaine de)
Lollière (domaine de)
La Croux (domaine de)
La Fage (domaine de)
La Roque (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
Code civil
corvées
coutume d'Auvergne
directe seigneuriale
doctrine
domaines agricoles
domaines seigneuriaux
droit de guet et de garde
droit de propriété
droit écrit
droit intermédiaire
droits féodaux
émigrés
forains
franc-alleu
fromages
jurisprudence
Masuer
Percière
poids et mesures
prescription
rentes féodales
retranscription de bail
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53569/BCU_Factums_G2813.pdf
2de4f6544249d9da4ed6b5b3a52238a9
PDF Text
Text
TRIBUNAL
DE PREMIÈRE 1NSTA
D ’A U R I L L A C .
audience du
Mme
M a r ie - C h a r lo t t e
de C A S S A G N E S
D E
B E A U -,,
veuve, de M . le Marquis
François-Félix Duplessis-Châtillon, en sa qualité
d’héritière bénéficiaire de M. le MARQUIS de Miramon, son père, D e m a n d e r e s s e ;
*
F O R T
D E
M IR A M O N ,
CONTRE
M. P i e r r e B A D U E L , ou s e s h é r i t i e r s e t a y a n t - c a u s e
comme détenteurs du domaine de Lollièr e appartenant à la succession bénéficiaire dudit Marquis
de Miramon, D é f e n d e u r s .
.
. il O üi .« u -o h
,
,<
FAITS.
'
Le 5 mai 165 4 Claude de Brezons, Chevalier, Seigneur de la
R oque, M assebiau, P aulhac, Saint-H éran et autr e s p l a c e s
acquit de G uillaum e de la V olpillière, par-d evan t J a c q u e s
Bardol, notaire garde-notes, tabellion royal de Sain t F l o u r
terre et seigneurie de Lollière, situées dans la paroisse de SaintClém ent, près de V ic-en-C arladès, datis la H aute-Auvergn e.
L'acte porte « que les biens vendus, nobles et allodiau x , re « lèvent en fief et hommage du roi notre sire , à cau se d e sa
�—
2
-
iA/i ‘H 1/11 o comté de Ylàrlat; qu’ils sont déchargés de tous profits féot.r<w
n«i '»'U daux, dette»i-hypothèques et autres charges quelconques;
,3ajji«U a,<- « qu’en outre il est vendu audit seigneur de La R oque, de
—
x cens fonciers uniformes, argent°49 sous G deniers, seigle qua\ih vMwi\»tk« torze setiers deux cartons, n euf setiers avoine , le tout mesure
_
«-de'La* S o c q u e ¿"'trois manœuvres à faucher, trois gellines et
« demie et un chevreau qu’il a droit de prendre et percevoir
«'.sur les édifices, ténem çnt et dépendances de Morèzes dans
« ladite paroisse de Saint-Clément, suivant et conformément aux
« terriers et anciennes reconnaissances énoncés en l’a rrèl de
« la Cour du parlement de Paris, d ’entre Gabriel de la Volpil« lière, François Dupouget de Nardailhac, Marguerite Ouvrier,
« J e a n F a b r i, du 1er ju in 1630, et tout ainsi et de même que
« ledit sieur de L ollière, vendeur, et ses prédécesseurs l’ont,
«-jédr
lpei*^t/j, lésiHtes rerites'1relevant d e ‘sa majesté quilles
«-pareillement de tous profits féodaux et autres usages , dettes
«? et hypothèques. » Le prix de la vente était de 18,500 francs,
dont 8,500 fr. furent payés com ptant, et les, 10,000 francs restans le 29e jo u r de novembre l’an 1G58, ainsi q u’il résulte de la
quittance annexée à l’acte de vente.
En conséquence, les seigneurs de La Roque se sont mis en
possession des domaine et seigneurie de Lollière. Nous pro
duisons au procès leurs baux, lièves, comptes de fermages et
autres preuves de leurs jouissances pendant près d ’un siicle ,
et | jjysqy’çi, l’an ,^755 qu’ils consentirent , le (>« jo u r du
mçjSj'Cjfj *pars)>; nouveau bail em phytéotique, nouveau cens et
nQjj^pj|.e inyestison, du domaine de Lollière à Pierre Baduel,
labouç£^r,>_ h^ibitarjt de la ville de Vic-en-Carladès, « pour
«_ fljtj m oyennant (nous copions textuellement les termes de l’acte),
« les ceijiS/et rente annuels, perpétuels, seigneurs et uniformes
« de frp{i)fige 29, q u in ta u x ,, tant d ’été que d ’automne, porta• bles et ppsés au,poids dç
ville d ’Aurillac ; plus de la quan-
�-
3
—
« tité de 45 setiérs ble-seigle, mesiire dii m ur de Barrés;
« plus un quintal de beurre, un cochon gras, payable à descente
« de montagne, ou 30 livres poiir le prix d ’icelui, au choix du dit
« seigneur bailleur; plus u n veau gras, deux paires d e 'c h a « pons, deux pois de vin du vignoble du château de P estel,
* et 20 aunes de toile femelle; lesdils 45 setiers'seigle, dite
« mesure, payables et portables audit château de P e s te l, à cha« que fête de Saint-Michel, de même que toutes les autres choses
« ci-dessus spécifiées , annuellement en leurs temps et saisons ;
« le tout censuel et rédituel, avec tous droits de directe justice,
« h au te, moyenne et basse, usage et exercice d’icelle; m ère,
« mixte, im p è re , droits de rétention par prélation, lo d set v e n te ,
« et taille aux quatre cas accoutumés au présent pays d’Auver« gne, et autres droits et devoirs seigneuriaux dus et accoutu« més et contenus aux terriers anciens dudit seigneur, de sadite
« seigneurie de La Rocque, auxquelles charges et conditions le« dit Baduel a accepté le présent bail en emphytéose, et sous et
« en conséquence d’icelui, reconnaît tenir et avoir le susdit
* domaine dudit seigneur, marquis de M iram on, et a promis et
« s’est obligé, ledit B aduel, de payer et porter, comme il est ci« dessus d it, les susdits cens et rente de 29 quintaux de fro* mage à chacune fête de Saint-Géraud et aux R o is, au poids
« de ladite ville d ’Aurillac; les susdits 45 setiers seigle, susdite
« mesure du mur de Barres audit château de Pestel, à chaque
« fête de Saint-Michel, de même que toutes les autres choses ci« dessus spécifiées, annuellement en leurs temps et saisons à
« perpétuité...... Tant q u ’il jouira et sera tenancier dudit do« maine de Lollièrc, lequel a promis meillorer à son pouvoir,
« ne le déterriorer, vendre ni aliéner h personne de droits pro« hibés, ne y mettre cens sur cens, n ’y autre pension annuelle,
« s:insle vouloir et consentement dudit seigneur et de ses suc* cesseu rs, et d’icelui domaine He Lollière faire nouvelle recon-
�_
4
—
« naissance à toute mutation de seigneurs ou de paysans , toutes
« et quantes fois qu ’il en sera requis, et d’icelle comme des
-, présentes bailler, et fournir à ses frais et dépends, expédition
« en bonne el due forme audit seigneur et aux siens à l’avenir,
« et à l’égard du droit d ’entrée de la présente investison, il a été
« réglé entre les parties à la somme de 3,000 livres. »
Un acte particulier, reçu Ratignac, notaire royal, constata que
le cheptel el les outils et meubles excédaient en valeur les 3,000 li. vres d’entrée qui ont été payées par le sieur Baduel pour son
investison.
Le sieur Piqrre Baduel, ainsi mis en possession de Lollière, paya
fort exactement ses redevances foncières, ainsi q u ’il résulte des
Î*
.I
,
lièves.et quittances. Mais quand la révolution de France eut
éclaté, que M. le marquis de Miramon eut été inscrit sur la liste
des émigrés et son bien frappé de confiscation, M. Baduel voulut
se prévaloir de ces circonstances. L’administration locale avait
mis en vente le domaine de Lollière le 22 septembre 1793. Le 19
du même mois, M. Baduel fit opposition à cette vente par acte de
Chaylus, huissier, et donna copie de l’acte du G mars 1755 aux
administrateurs du district de Saint-Flour, qui renvoyèrent l’op
position et les pièces y jointes au Corps-législatif à Paris. Il eut
éle contraire à tous les principes que le pouvoir législatif se fût
immiscé de l’application des lois; cependant les pétitions de
M. lladuel ne furent pas inutiles, car le domaine de Lollière ne
fut pas vendu. Mais ce résultat n ’a rien pu ni dû préjuger sur la
question de savoir si la rente de Lollière était féodale.
31. le marquis de Miramon ne resta pas long-temps en émigra
tion; ifprofila du bienfait de la loi du Gfloréal an X(2G avril 1802),
pour rentrer en France. Le consul Lebrun, qui fui consulté dans
ses intérêts sur la valeur du bail emphytéotique de Lollière el sur
le droit'queM . de Miramon pouvait avoir de réclamer ce domaine,
répondit qu ’il ne voyail rien dans ce litre de contraire au droit
�de propriété de M. le marquis de Miramon, et q u ’il n ’y apercevait
aucune expression qui e û ttraitiàila féodalité. M. Baduel conçut
dès lors le désir de traiter avec le bailleur* et de racheter la fente
aux termes des lois. Il fît des propositions raisonnables, dont le
projet^ écrit de sa main, a été retrouvé dans les papiers de la
succession de M. le marquis de M iram on, . décédé en l’an 1810.
On y lit ces mots : « 11 y a apparence que M. de Miramon n'ignore
« pas la loi du 29 décembre 1790, relative au rachat des 'rentes
« foncières. En conséquence, s’il veut me traiter favorablement,
« nous ferons un forfait de gré à gré relatif auîrachat de la vente
« du domaine de Lollière, déduction faite du cinquième d’icelle,
« suivant la loi du 15 pluviôse an V, pour raison des contribu« lions, qui, pour lors, est réduite h trente-quatre sétiers blé, et
« vingt-trois quintaux cinq livres fromage et les suites, et pour
• lors nous prendrons une évaluation commune depuis trente ou
« plus ; et pour lors Baduel ferait des termes honnêtes à M. de
a Miramon, que la loi soit rapportée ou n o n , et M. de Miramon
« doit considérer qu’il a élé donné trois mille livres d'entrée,elc.^.»
M. de Miramon n ’était pas du tout éloigné d’accepter cçs con
ditions; mais quelques créanciers ayant pris inscription sur ses
biens, M. Baduel craignit d’être recherché s’il rachetait la rente
postérieurement à celte inscription, et il garda tout. A ujourd’hui,
uneayanl-causede M. le marquis de Miramon, c’est-à-dire madame
sa fille, la marquise Duplessis deC hâtillon, qui a accepté sa suc
cession sous bénéfice d’inventaire, vient réclamer le domaine de
Lollière comme n’ayant jamais cessé d ’appartenir à son père, puis
q u ’il n ’a jamais été ni vendu ni confisqué par la nation. 'Tel est
l’état de la cause.
—«—
' T
11“
DISCUSSION.
•
f:
,
Il s’agit par conséquent de savoir: 1° si la 'ren te imposée à
�—
6
—
M. Baduel, pour le domaine de Lollière, est féodale ; 2° si les dé
tenteurs précaires de ce domaine ont pu en acquérir la toute
propriété par la prescription.1 '>< ‘J
*
U'est évident que si la renie de Lollière n ’est pas féodale,
les lois relatives à l'abolition de la féodalité n’ont pas pu' l'at
teindre, et que ces lois spéciales ne sont nullement applicables à
l’espèce ;
Qu’ainsi les questions de propriété et de prescription'soulevées
dans celte cause, doivent se résoudre par les titres des parties et
par les principes de la loi commune.
,1 II faut examiner l’affaire sous ces deux rapports.
t: ¡)m
i)l'l
:'
PREMIERE
Q U E S TIO N .
!0 : '
,1‘ri
:i ‘La rente de Lollière n'est pas féodale,
i
Nous soutenons que la rente de Lollière n ’est pas féodale, ni
entachée de féodalité, et q u’elle n'a pas été supprimée par les lois,
bien qu’elle ail cessé d ’être payée par l’emphytéote. Cette cessa
tion de paiement peut bien prouver qu’on s’est prévalu de l’oc
casion pour exciper d ’un prétexte de féodalité et refuser de servir
la renie; mais elle ne prouve pas que ce prétexte soit vrai, que la
rente soit féodale.
Avant d ’examiner cette question avec toute l’attention q u’elle
exige, qu'il nous soit permis de faire observer que les choses sont
encore entières, que le domaine de Lollière n ’ayant été ni vendu
ni confisqué par l’Etat, dans les circonstances les plus orageuses,
c’est pour la première fois que les tribunaux sont appelés h déci
der s’il faut en dépouiller M. le marquis de Miramon, ou ses ayant,
cause, en vertu des lois sur les émigrés. Seront-ils plus sévères
aujourd’hui q u ’on ne l’eût élé quand ces lois révolutionnaires
venaient d’étre proclamées ? Il faudrait les restreindre, loin de les
�étendre, et ne pas y voir ce qui n ’y est pas. On a dit q u ’un des
chefs suprêmes de la république avait décidé que le titre consti
tutif de l’emphytéose de Lollière n’avait rien de féodal et n ’était
point supprimé. Cependant on n ’avait mis sous les yeux de ce
consul qu’une simple copie de l’acte du 6 mars 17 55, sans lui pré
senter l’acte du 6 mai 1654, qui en est toute la base, et qui déter
mine d’une manière si précise le caractère allodial de la propriété
que nous réclamons»
, 11 •
Qu’est-ce en effet que la féodalité ? Quelle a été la pensée de l^As- >
semblée constituante quand elle en a décrété la proscription dans la
lameuse nuit du 4 août 1789? Croit-on qu ’elle n ’ait voulu que por
ter atteinte aux droits inviolables delà propriété, la base essentielle
de toute société, de tout état politique?— Non certes! telle n’a
pas été la pensée de ces grands hommes. Ils ne voulaient point/ils
n ’entendaient point frapper au cœur l’état social. Cette œuvre de
mort n ’eût été digne ni de leur intelligence, ni de leur mission; Ils i
voulaient en changer la forme, en rejeter la vieille dépouille. Quoi- »
que la féodalité eût été déjà rudement atteinte par le ministère de
Richelieu et par le règne de Louis XIV, qui avaient délivré la
couronne des rivalités seigneuriales, elle se trouvait encore active
et puissante dans les relations de la vie privée. On avait affranchi
le chef du peuple, maison n ’avait pas encore affranchi leipeuple^i
dont la dépendance des seigneurs était constituée sur une obliga
tion de services personnels et de redevances qui prenaient leur
origine dans la qualité du seigneur. Voilà ce que l’Assemblée con
stituante a voulu prescrire, non pour ébranler les bases de là pro
priété, mais pour qu’elle ne reposât désormais que s u r ’des fondemens que la raison et la dignité de l’homme pussent avouer. Aussi
l’on peut remarquer qu’elle a toujours conservé partout les rentes
foncières. Elle n ’a aboli sans indemnité que les redevances quiisei
payaient pour prix d elà protection des seigneursj en exceptant
formellement les droits qui, quoique perçus sous’des dénomina-
�—
8
—
tiorts féodales, seraient justifiés ¡avoir pour cause<des concessions
de fonds..(Loi des 15-28 mars 1790, lit. 2, art. 11.)
La loi des 25-28 août 1792 est encore plus explicite» L’article 5 •
de cette loi, après avoir fait [’énumération la plus complète de
tous les droits seigneuriaux, tant féodaux que censuels, conservés
ou déclarés rachetables par les lois antérieures, et qu’elle abolit
sans indemnité, excepte néanmoins toujours le cas où ils seraient
justifiés avoir pour cause une concession primitive de fonds, la
quelle sfecause,dit l’article précité, ne pourra être établie q u ’autant
q u’ellese trouvera clairement énoncée dans l’articleprim ordiald’inféodation, tl’accensement ou de bail à cens qui devra être rapporté.
A cet égard, on ne peut rien ajouter aux titres produits par les
ayant-cause de M. le marquis de Miramon, qui peuvent y joindre
tous ceux; de leurs prédéctesseursi pendant plusieurs siècles.
Une loi d u 19 juillet 1793 a supprimé sans indemnité toutes les
redevances ci-devant seigneuriales' et droits féodaux, même ceux
conservés pari 1«Sdécret du 25;'août 1792. Voyons cette loi.
L’article l.»r porte que « Toutes redevances ci-devant seigneu*
« riales, droits féodaux, cerisuels, fixes et casuels, même ceuxcon* serves par le décret du 2& août dernier (1792), sont supprimés
« dans indemnité; * L’ariicle 2 excepte des dispositions de l’article
précédent, l<Ss renies ou prestations purement foncières et non
féodales. Ainsi, toute la question est donc toujours de savoir si la
renie emphytéotique pour le domaine de Lollière étaii féodale ou
non. féodale. En fait, il est manifeste que cette rente est foncière,
purement foncière, puisqu'elle est imposée pour une concession,
de fonds et non pour aucune considération de personnes ; peu im
porte la qualification de la redevance et la dénomination donnée
au droit du bailleur emphytéotique. Ainsi, la Cour de cassation ;■
jugé et jugoitoujours quei des rentes qualifiées féodales sont dues,
lorsque la suhstançcidel’acte indiquequ’elle&nesont point féodales
(Ca«tM 19 février 1.80G.—S. G, 2,, 124 ).j que la renie qualifiée ré-
�—
9
—
cognitive de la seigneurie, mais créée par l’aliénation de l’immeu
ble que le bailleur possédait en franc-alleu, est simplement fon
cière (Cass., 11 germinal an XIII.— S. 5,2, 148) ; q u ’enfin, un bail
emphytéotique n ’est point aboli comme féodal, quoique lebailleur se soit réservé un cens ou tout autre droit,- ayant un nom
féodal (Cass., 30 brumaire an X. — S. 3, 1, 17). Les baux em
phytéotiques à cens ne sont point féodaux, alors même que le
bailleur est u n ancien seigneur féodal. Les fermiers sont tenus de
continuer les services des redevances promises (Rouen, l ^ a o ù t
1811. — S .1 2 , 2, 76). Telle est la jurisprudence d ed ro it commun .
La coutume d ’Auvergne est encore bien plus favorable. Là, non
seulement la féodalité ne se présumait jamais, mais elle n ’y ré
sultait pas des réserves et stipulations qui en auraient été la
preuve dans d ’autres coutumes. Voilà comment toutes les fois
qu'il s’agissait d ’uti bail emphytéotique, la clause de cens annuels,
perpétuels, seigneurs et uniformes, avec tous droits de directe
justice, haute, moyenne et basse, usage et exercice d ’icelle , mère,
mixte, impère, droits de rétention par prélation, lods et vente et
autres droits et devoirs seigneuriaux, n ’était pas une clause féo
dale, mais une clause purem ent contractuelle et foncière, ainsi
q u’on l’a plus amplement établi dans la Consultation imprimée cijointe, du 5 mai dernier. Lés droits et devoirs seigneuriaux ne
doivent s’entendre dans cette coutume que des droits et devoirs
domaniaux, selon la doctrine savament développée par M. Merlin,
Questions d e d ro it, verbo t e r r a g e , et consacrée récemment encdre par u n arrêt de la Cour suprême (Cass., 3 ju in 1835.—
S. 35 , 1 , 324 ). Nous no reviendrons pas sur ces prin
cipes déjà suffisamment expliqués, et nous nous bornerons à
rappeler que, d ’après le titre d’acquisition du domaine de Lollière, en 1654, ce domaine relevait directement du Roi, comme
toutes les terres en relèvent aujourd’hui en France, immédiate
ment et non médiatenent, c ’est-à-dire et non par aucun intermé-
�—
10
—
diaire obligé, seigneur féodal. Il n'y a point ce que nous appelons
féodalité à relever directement du souverain, que ce souverain
soit prince, soit peuple ou sénat. Celte sujétion est la loi néces
saire de la société civile, qui lie tous ses membres pour n ’en
faire q u ’un corps homogène. Tout au contraire, la féodalité, en
nemie de l’unité, se fonde sur une polyarchie jalouse et mal assise,
qui est, par cela même, un principe de division, de querelles in
testines et d’épuisement national,
La rente emphytéotique pour le domaine de Lollière n ’est
point féodale : on ne peut donc prétendre q u ’elle est abolie ; mais
si la rente n ’est point abolie, comme, grâce aux soins de M. Ba
d u e l, le domaine de Lollière n ’a été ni confisqué, ni vendu par
la nation , à qui ce domaine doit-il appartenir au jou rd ’hui q u ’il
est réclamé par les Héritiers du vrai propriétaire? M.Baduel leur
sera-t-il préféré? Pourquoi cette préférence? D'où pourraient lui
venir de semblables prétentions ? M. Baduel ne peut invoquer la
prescription, et il n’a ni titres ni droits, comme on va le voir.
D EUXIÈ M E QUESTION.
Les détenteurs de J.ollière ne peuvent invoquer la prescription : ils
n ’ont n i titres ni droits.
Il suit de ce qui précède que M. le marquis de Miramon n'a
jamais été dépouillé par l’Etat du domaine de Lollière. Il ne peut
donc pas le réclamer de l’Etat comme invendu, aux termes de lu
loi du 5 décembre 1814: il ne peut invoquer que les principes de
la loi commune; mais cetle loi est bien suffisante pour protéger
et faire valoir tous ses droits.
i
Supposons q u ’un homme s’absente en laissant une p ro cu ra
tio n , ou si l’on veut un détenteur précaire de ses biens immeu
bles, tel que colon partiaire, fermier ou cmphytéote.Son absence
se prolonge vingt, trente, quarante ans , ou davantage. Les par
ties intéressées négligent de se pourvoir devant le tribunal de
�première instance, afin que l’absence soit déclarée. Il reparaît
après celle époque. Il n ’est pas douteux qu ’il aura le droit de
rentrer dans la propriété de ses biens, el q u ’on ne pourra lui op
poser aucune prescription acquise, à cet égard, à son préjudice.
Il n ’aura perdu que les fruits par chaque cinq ans (2277, C. civ.).
Voyons une autre hypothèse, et supposons que les parties in
téressées ont fait déclarer l’absence ; que les trente ans de l’en
voi en possession provisoire s e r o n t écoulés, avec toutes les for
malités voulues par la loi ; et que l’absent reparaisse, ou que
son existence soit prouvée, même après l’envoi définitif, eh bien!
ses droits ne seront pas contestables ; et quelle q u ’ait été la d u
rée de son absence, il recouvrera ses biens , le prix de ceux qui
auraient été aliénés, ou les biens provenant de l'emploi qui aurait
élé fait du prix de ses biens vendus (Code civil 432). Ses enfans
ou descendans, jouissent du même droit pendant les trente a n s,
à compter de l’envoi définitif (133, C. civ.). Il faudra, dans ce der
nier cas, plus de soixante ans pour pouvoir opposer la prescrip
tion , alors que les parties intéressées, vigilantes et actives,
auront suivi, sans interruption cl sans perdre-un moment, tou
tes les phases de la procédure. C’est, à ce prix seulement q u ’el
les au ro nt pu conserver leurs droits et prescrire. Combien l’hy
pothèse dans laquelle se présentent les enfans ou descendans
de ¡VI. le marquis de Miramon , est plus favorable! Aucun envoi
en possession de leurs biens n ’a jamais eu lieu en faveur du dé
tenteur qui sc les adjuge ; ce délenteur n’est point au nombre des
héritiers présomptifs qui auraient eu le droit de le réclamer , el la
justice n ’aurait pu l’ordonner pour lui; enfin , le délai de soixante
ans n’est pas expiré. Il n ’y a pas même trente ans que les négocia
tions entre M. Baduel et J\I. le marquis de M iramon, sont in ter
rompues. Il faul donc renoncer à ce premier moyen d’établir le
droit prétendu du sieur Baducl. Il faut aussi renoncer à tous les
argumens q u ’on pourrait tirer en sa faveur des lois révolution*
�»aires , puisqu'il est établi que ces lois ne sont pas applicables au
domaine de Lollière, heureusement oublié ou délaissé par la na
tion , dans la mesure qui frappa de confiscation les biens de M. de
Miramou , émigré.
Ou’on nous dise donc à quel titre le sieur B aduel, ou ses avantcause , prétendent à la toute propriété du domaine de Lollière ?
Ce n ’est pas en vertu de la coutume d ’Auvergne , qui déclarait le
chef-cens imprescriptible à tolo, même par mille ans. (Voir la con
sultation imprimée , pag. 6 et suiv. ) Serait-ce en vertu des lois
ordinaires sur la prescription ? L’affirmative n’est pas soutenable.
Elle choquerait les principes les plus élémentaires de la matière ,
et méconnaîtrait toutes les règles du droit. O uv ron s, au hasard,
le titre du Code sur la prescription.
a Article 2229. Pour pouvoir prescrire , il faut une possession
a continue, et non interrompue, paisible , publique , non-inter« rompue, e t a t i t r e l>e p r o p r i é t a i r e .
« 2230.On est présumé posséder pour soi, et à litre de propriétaire,
« s’il n ’est prouvé qu’on a commencé à posséder pour un autre.
« 2231. Quand on a commencé à posséder pour autrui, on est
« toujours présumé posséder au même titre , s ’ i l n ’ y a p a s p r e u v e
«
c o n t r a ir e.
»
Il est bien démontré, el sans doute ou ne contestera point que
M. Baduel a commencé à posséder pour 31. le marquis de Miramou.
Ce l’a il est prouvé p arles litres p ro du its, et n ’est point du tout
con les table.
M. Baduel n’a donc jamais possédé a t i t r e d e p r o p r i é t a i r e , e!
par conséquent il ne peut prescrire.
Dirait-il qu'il y a eu interversion de titre ? Ce serait à lui dVu
faite la preuve. Où est celte preuve ? Résulterait-elle de ce que
le Corps-législatif a accueilli favorablement sa pétition et permis
q u ’il ne fût point inquiété pour le service des rentes emphytéoti
ques ? Mais cette prise en considération d ’une pétition n esl point
�—
13
—
un .acte qui puisse opérer une interversion de t i t r e , t,çl que serait
un acte ,de dgnation fait régulièrement par l’E ta t, ,ou u p acte 4 e
Pautqrité judiciaire qui aurait prononcé que la re p te servie par
Baduel était féodale. Si M. Baduel, après la prise en considéra
tion de sa pétition , eut fait juger que sa rente était féodale, p’il
n’eût pas craint de s'adresser, dès le principe, aux cours <Je ju s
tice , nous convenons q u ’un jugement qui, à cette époque, aurait
fait droit à ses prétentions, aurait opéré en sa faveur une inter
version de titre, à partir de laquelle il aurait pu commencer de
prescrire la toute propriété du domaine de Lolliere, meme dans
le cas où la loi du 17 juillet 1793, que le jugement lui aurait, se
lon nous , fort mal appliqué, aurait été rapportée plus tard.
Mais il n'en a pas été ainsi. M. B ad uel, qui avait commencé de
posséder pour a u tru i, a continué de posséder au même titre. Il
n ’a pas de preuve contraire,
Passons à d ’autres textes du Code civil.
« A r t . 2236. Ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent
« jam ais, par quelque laps de temps que ce soit. — Ainsi le fer« m ier, le dépositaire, l’usufruitier, et tous autres qui détiennent
'i précairement la chose du propriétaire, ne peuvent la près*
« crire.
« A rt . 2337. Les héritiers de ceux qui tenaientla chose à quel« q u ’un des litres désignés par l’article p récéd en t, ne peuvent
« non plus.prescrire.
« A r t : 2 2iO. On ne peut pas prescrire contre son litre, en ce
« sens que l’on ne peut point se changer à soi-même la cause et
« le principe de sa possession.
« A r t . 2211. On peut prescrire contre son l i t r e , en ce sens
« que l’on prescrit la libération de l’obligation que Ion a con« traclée. »
Des textes si clairs n’ont besoin d ’aucun commentaire. Il est
bon cependant de f’.iire rem arquer, sur ce dernier arlicle, que la
�—
14
—
prescription de libération ne porte point sur le titre même que la
coutume d’A uvergne, appelé chef-cens, mais sur l’obligation qui
résulte du titre., sur le cens ou redevance. Dans la coutum e
d'Auvergne, l ’emphytéote ne pouvait être condamné à payer plus
de trois ans d ’arrérages. C’est tout ce que nous réclamons au
jo u rd ’hui.
CON CLU SIONS.
plaise au tribunal condamner le sieur Baduel
ou ses héritiers et ayant-cause à payer à la requérante trois années des arrérages de la rente consentie par le bail emphytéotique du 6ejo u r du mois de mars de l’an 1755, laquelle consiste,
par chaque an : 1° en 29 quintaux de fromage, tant d ’été que
d’autom ne, pesés au poids de la ville d ’Aurillac; 2° 45 setiers
blé-seigle, mesure du m ur de Barrés ; 3° un quintal de beurre;
4° un cochon gras payable à descente de montagne, ou 30 livres
p o u r prix d ’icelui; 5° un veau gras;
deux paires chapons;
7° vingt aunes de toile femelle ;
« Et à servir à l’avenir ladite r e n te , année par a n n é e , soit aux
époques fixées par le bail em phytéotique, soit à telles autr es
époques qui seraient fixées par le jugement ou consenties par
les défendeurs , si mieux n ’aiment le sieur Baduel et ses ayantcause racheter la rente ou bien déguerpir. »
« P ar c e s m o t i f s ,
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
C’EST JUSTICE!..
A PAILLET BOLE Avocats à la Cour royale de Paris.
RAMPON , avoué.
-
.... .
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’ ----------------
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�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Cassagne de Beaufort de Miramon, Marie-Charlotte. 1837?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
A. Paillet
Bole
Rampon
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour madame Marie-Charlotte de Cassagne de Beaufort De Miramon, veuve de M. le marquis François-Félix Duplessis-Chatillon, en sa qualité d'héritière bénéficiaire de M. le marquis de Miramon, son père, Demanderesse ; contre M. Pierre Baduel, ou ses héritiers et ayant-cause, comme détenteurs du domaine de Lollière, appartenant à la succession bénéficiaire dudit marquis de Miramon, défenseurs.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Maulde et Renou, imprimeurs (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1837
1651-1837
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2813
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2814
BCU_Factums_G2815
BCU_Factums_G2816
BCU_Factums_G2817
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53569/BCU_Factums_G2813.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Saint-Clément (15180)
Lollière (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
coutume d'Auvergne
domaines seigneuriaux
droit de propriété
droits féodaux
émigrés
poids et mesures
prescription
retranscription de bail
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53568/BCU_Factums_G2812.pdf
b0a9022963a399305f31c27a8c7b0ad0
PDF Text
Text
COUR DE CASSATION.
MEMOIRE
C H A M B R E DE S r e q u ê t e s
M. B E R N A R D ,
'
Conseiller-Rapporteur.
'
M. N I G O D
Avocat g é n é r a l
POUR
CHARLES X et M. le marquis
de P A S T O R E T ,
agissant au nom et comme tuteur de Henri-CharlesF erdinand-D ieudonné,
duc de Bordeaux et Louise-
M arie-Thérèse-d’A rtois, enfans mineurs de feu M. le
CON TRE
M. le préfet du Cher, représentant l’État.
FAITS.
!
L a foret d’Yèvre, confisquée en 1792 , fut remise à M gr. le comte
d ’Artois, en vertu d e la loi du
5 décembre
¡rrfcjEftgya
duc de Berry ;
4
18 1 -
M. le comte d’Artois a fait donation le 9 novembre 1 8 1 9 , à
Mgr. le duc de Berry, de la nue-propriété de cette forêt. Au décès
de M. le duc de B er r y , la nue-propriété comprise dans la donation,
est passée à leurs altesses royales Mgr. le duc de Bordeaux et m a
demoiselle d’Artois, héritiers de M. le duc de Berry, leur père.
�(2 )
Suivant la régie des domaines , la forêt d'Yèvre est d’origine d o
maniale, et à ce titre la loi du 14 ventôse an 7 lui est applicable.
On sait que la loi du 12 mars 1820 a limité l’effet de la loi de ven
tôse, et prescrit à la régie des domaines de faire, dans les trente
ans, sommation aux
détenteurs et possesseurs de ces biens,
d ’avoir à se conformer aux lois sur les biens engagés. Par suite elle
a déclaré ces mêmes possesseurs propriétaires incommutables à
défaut de poursuites par la régie dans le délai ci-dessus fixé.
I/administration des domaines prétend q u e , dans le but d ’in
terrompre cette prescription, elle a fait, le 6 mars 182g, à madame
la duchesse de Berry, comme tutrice de ses enfans mineurs, la
sommation prescrite. Voici dans quels termes celte sommation au
rait été signifiée à madame la duchesse de Berry : « E n son domicile
« au château des T u ileries, et en la personne de M . le marquis de
« Sassenay, secrétaire des commandemens et administrateur général
« des finances de son altesse royale 3 en parlant à un suisse dudit
« château. »
La copie n’est jamais parvenue h sa destination, et l’existence
de cet acte est restée ignorée ju s q u ’après les événemens de i
83o.
A cette é p o q u e , 011 sut par voies indirectes, que le domaine
comptait réclamer, à l’égard de la forêt d ’Y è v re , l’application de la
loi de ventôse, et q u ’il entendait se prévaloir, comme acte inter
rupt^ de prescription, de la sommation dont il vient d ’être parlé.
Les agens de madame la duchesse de B erry demandèrent commu
nication de cette pièce. Mais elle leur fut refusée.
Peu de temps après parut la loi du 10 avril i
83a ,
qui prescri
vait la vente, dans un délai fixé, des biens appartenant à Charles X
et aux princes de sa famille. Le domaine ne donnait aucune
suite à la sommation
faite à sa requête. Madame la duchesse
de B erry voulut faire cesser l'incertitude et l’espèce de trouble
apporté aux droits de scs enfans par la prétention qu’élevait
�(
5
)
le domaine. A ce l effet elle présenta, conformément à la loi de 1790,
un Mémoire au préfet du Cher, établissant que la forêt d’Yèvre
n’était point domaniale; elle exprimait dans ce M ém oire, h la date
du 3o janvier i
833 :
« qu ’elle était dans l’intention de se pourvoir
« en justice pour faire déclarer n ü l l r et sans h f f e t la signification
« à elle faite de la part de la régie des domaines à raison de la
« forêt d ’Y èvre. » Ce passage est littéralement rappelé dans la
855. (Pièce produite, n° 2.)
dès à présent, qu’à cette époque du 5 o janvier i 855 ,
requête du préfet, signifiée le 17 juin i
Observons
les 5o ans exigés pour la prescription par la loi du 1 2 mars 1820
étaient plus que révolus.
Sur le vu du Mémoire présenté au préfet par madame la duchesse
de B c rry , il fut pris un arrêté portant que la question de doinanialité serait soumise aux tribunaux. Alors madame la duchesse de
B erry prit l’initiative, et assigna l ’Etat en la personne de M. le
préfet du Cher. Elle exposait dans son exploit d’assignation, qui est
855
à la date du 4 avril i
, que it la sommation du 6 mars 1829^
« nulle en la form e, et sur laquelle le domaine n ’a encore rien dit
« ni signifié, cause le plus grand préjudice aux ventes à effectuer ; »
la demanderesse concluait ensuite à ce que la sommation fût consi
dérée comme nulle et non avenue, et par voie de conséquence, à
ce que la loi du
ventôse an 7 fût déclarée non applicable aux bois
dont il s’agit. (P ièces produites, n° 1.)
Le préfet répondit à celle assignation le 17 juin même année,
et il fut répliqué au nom de Charles X et de madame la duchesse de
B crry, lc>4 janvier de l’année suivante. Dans cette dernière requête,
on soutenait, comme on devait le fa ir e , que la loi du i/j. ventôse an 7
n’était point applicable, et l’on terminait par les conclusions ci-après :
« Dans ces circonstances, c’est donc le cas de conclure a ce q u e ,
« sans s’arrêter ni avoir égard à la sommation notifiée à madame la
« duchesse de Bcrry, en qualité de tutrice, de ses enfans f par exploit
�« du G mars 1829, de la part de l’administration des domaines, non
(( plus q u ’à la requête signifiée au nom de M. le préfet du Cher,
« par exploit du 10 juin dernier, il plaise au tribunal de B o u rg es,
« dire et ju ger ainsi q u ’il y a déjà été conclu, que la loi du 27 ven« tôse an 7, sur les domaines en g a gés, n’est point applicable à la
« forêt d ’Yèvre. En conséquence, que les enfans de feu ]\I. le duc
« de B erry seront maintenus dans la propriété, et Charles X dans la
« jouissance usufruitière de la forêt d’Yèvre jusqu’à ce qu’ils aient
« trouvé à vendre ladite forêt en conformité de la loi du 10 avril
« i
83 a. E n fin , condamner M.
le préfet aux dommages-intérêts des
« sus-nommés à donner par état et aux dépens, et ferez justice.
« B o urges, l e
4 janvier 1804. »
L e moyen de nullité n ’était point abandonné dans cette requête,
et il avait été articulé en termes formels dans l’exploit introductif
d ’instance. — Comment donc la Cour royale de Bourges a-t-elle pu
décider qu e, par leurs défenses au fond, les demandeurs avaient cou
vert la nullité de la sommation, et que cet acte valant comme acte
interruptif, le bénéfice de la prescription était éteint pour les mi
neurs? Celte fin de non recevoir n’avait pas même été opposée par
le préfet, lorsque, le
5 février 18 3 4 ,
il répondait à la requête con
tenant les conclusions au fond. — Mais reprenons les faits.
Quoique l’instance fût engagée, le conseil de famille des jeunes
princes se trouvait dans une ignorance entière de la teneur de cet
acte que le domaine s’abstenait de produire. On apprit qu’il 11’était
plus dans ses m ains, et q u e , suivant acte du 2 mai i
1
833, l’original
en avait été déposé par la régie en étude de M° Chodron, notaire
à Taris. Sur l’expédition qui en fut demandée, on put en connaître
le contenu et spécifier le moyen de nullité dont il était entaché.
C ’est ce qu’on s’empressa de faire au nom des princes.
Des conclusions furent signifiées à cet eiîct, le 1 1 avril i
85/|. 11 y
est dit que : « Vainement l’Elat prétendrait que la prescription a été.
�< ï< ô K
(
5)
« interrompue par la sommation du G mars 182g, puisqu’il résulte
« de cette sommation elle-même q u ’elle n’est jamais parvenue à ma« dame la duchesse de Berry, n’ayant élé signifiée ni à sa personne
« ni à son domicile, ni laissée à une personne attachée à son service ;
« qu’ainsi cet acte est évidemment nul. » (Pièces produites, n° 4.)
L e préfet combattit ces conclusions par une troisième requête où il
soutient que les moyens de nullité ne sont pas fondés ; et qu’en tout
cas on n’est plus recevable à s’en prévaloir, madame la duchesse
de Berry ayant par sa requête du
4 janvier conclu
au fo n d , avant
de les proposer.
C’est dans cet état que le tribunal de Bourges a rend u le 11 juillet
1S 54 le jugement dont la teneur suit :
« Considérant que l ’action dont est saisi le tribunal a pour objet
actuel de faire lever l'obstacle apporté par l’Etat à la libre disposi
tion de la part des demandeurs de la forêt d’Y è v re ;
« Que cet obstacle consiste dans la sommation du 6 mars 18 2g,
qui met madame la duchesse de B erry audit nom en demeure
d’acquitter la finance réglée par la loi du i /j. ventôse an 7, et q u i ,
suivant la prétention de l’Etat, est due à cause de la forêt d’Yèvre,
qu’il considère comme domaine engagé;
« Qu’il ne s’agit pas, quant a présent, d ’examiner si l’Etat est
fondé à réclamer l’application dis la loi précitée; q u ’il y a lieu
préalablement à toute discussion au fond, à statuer sur les moyens
préjudiciels soulevés par madame la duchesse de B e rry ;
« Considérant q u ’elle attaque comme nulle la sommation susdatée, et que de cette nullité elle tire la conséquence que la pres
cription établie par la loi du 12 mars 1820 n’ayant pas été valable
ment interrompue, PEtat est sans droit de provoquer les dispositions
finales de la loi de ventôse an y • qu ’il y a donc nécessité d’examiner
la valeur du moyen de nullité ;
« Considérant que madame la duchesse de B e rr y , s’attachant aux
�termes dans lesquels est conçue la sommation, la soutient nulle,
parce q u ’elle n’aurait point été faite suivant les règles écrites aux
art. 68 et 69 du Code de procédure civile;
« Considérant en droit q u e , pour être valable, tout exploit doit
être fait à personne ou domicile; que le législateur, prévoyant le cas
où le défendeur serait absent, autorise l'officier instrumentaire à
déposer la copie entre les mains d’un parent ou d ’un serviteur, et
même, dans quelques cas, de certaines personnes désignées spécia
lement ;
« Considérant, en ce qui touche les membres de la famille
royale, que Cordonnance du 20 avril 18 17, art. i er, a réglé que les
diverses significations judiciaires ou extrajudiciaires qui leur seraient
faites lorsqu’ils auraient leurs domiciles dans des palais, châteaux ou
autres habitations royales, seraient remises aux suisses ou concierges
desdites habitations;
« Considérant que ces diverses prescriptions de la loi et de l’or
donnance ont été scrupuleusement remplies, puisqu’on lit dans la
sommation qu’elle est faite à la personne de madame la duchesse
de Berry, en son domicile au château des T uileries, en parlant à un
suisse dudit château ainsi déclaré; qu’à la vérité on rencontre dans
le parlant à , cette énonciation : En la personne de M. de Sasscnay,
secrétaire des commandcmcns de M adame, etc.; mais que cette
surabondance ne saurait vicier l’exploit, s i , d ’ailleurs, ainsi q u ’il
vient d ’être dit, il remplit le vœu de la loi ; qu’ il résulte de ce qui
précède que le moyen de nullité n’est pas fondé, mais que le fût-il,
il serait victorieusement repousse par le mode de procéder qu’a suivi
madame de Ucrry; — Q u ’en cfl’ct, elle a déclaré danslesdivers actes
du procès qu'elle entendait aller en avant sur la sommation du
0 mars 182g; qu e, par l’adoption de cette marche, elle a fait de
cet acte extrajudiciaire un véritable acte de procédure, acte même
fondamental de sa poursuite, et q u e , sous ce rapport, la nullité
�(
7
)
serait couverte, aux termes de l’art. 175 du Code de procédure
civile, faute d'avoir été proposée avant tout examen au fond ;
w Considérant que le seul moyen de nullité u ’est pas le seul
argument qu’ait soulevé madame la duchesse de B e r r y ; q u ’elle a
en outre dénié à l’Etat le droit de faire la sommation dont il s’a g it ,
se fondant à cet égard sur deux moyens qu’il est nécessaire d ’ap
précier ;
« En ce qui touche le moyen résultant de l’exécution donnée par
les agens de l ’état à la loi du
5 décembre
1S 1/*.;
« Considérant que celte loi n ’a ordonné q u ’une chose, la restitu
tion aux émigrés des biens séquestrés ou confisqués pour cause
d ’émigration, et non vend us; q u ’elle ne s’est point occupée du ca
ractère de domanialité que pouvaient avoir ces biens; q u e , dans
l’espèce, il a suffi que la qualité d’émigré du comte d’Artois fût
dûment constatée pour que la forêt d ’Y èvre, q u i, malgré la confis
cation, n ’avait point été vendue, lui fût restituée;
« Que la commission chargée de l’exécution de cette loi n'avait
point à s’occuper de l’origine des propriétés dont elle ordonnait la
délivrance; qu e, si elle l’eût fait, elle fût sortie de scs attributions ;
et encore moins eût-elle eu le droit, pas plus que les autres agens
qui ont concouru a la restitution de la foret d’Y è v r e , d ’aliéner ce
qui pouvait faire partie du domaine de l’Etat, en l’absence de toutes
dispositions législatives expresses;
'< Considérant, enfin, sur le moyen puisé dans la loi du 8 avril
i
834 , que
cette loi n’a réglé que l’usufruit que s’était réservé
Charles X , mais qu ’elle est absolument muette sur la question
fondamentale du procès qui est de savoir si la forêt d ’Yèvre est ou
non domaine engagé;
« L e tribunal, sans s’arrêter au moyen de nullité invoqué par
Madame duchesse de Berry contre
la sommation du
G mars
�18 2g, et sans avoir égard aux autres moyens préjudiciels, les d é
clare mal fondés, etc... »
Sur l’appel interjeté par madame la duchesse de B e r r y , la Cour
royale de Bourges a rendu l’arrêt dont voici la teneur :
« La Cour, après en avoir délibéré, a reconnu que la cause pré
sentait à ju g er les questions suivantes : i ° L ’administration étaitelle recevable à faire la sommation du 6 mars 182g? 20 L e sa p p e lans sont-ils recevables à proposer la nullité de cette sommation ?
3° Cette sommation est-elle nulle?
k
Sur la première, considérant que la loi du 12 mars 1820 as
treint l’administration à faire des réserves pour l’exécution de la loi
du 14 ventôse an 7 , dans l ’acte de remise des biens qui sont res
titués en exécution de la loi du
5
décembre i
8i4;
mais q u ’il
résulte des termes de cette loi qui ne rétroagit pas que l’obligation im
posée n’est relative q u ’aux biens à remettre et non à ceux déjà res
titués; que, par l’article 7 qui précède, cette loi oblige l’administra
tion pour les biens possédés par les anciens propriétaires à faire une
sommation d’exécuter la loi de l ’an 7; que la forêt d ’Yèvre avait
été restituée en 18 16; q u ’elle était possédée en 1820 par les anciens
propriétaires; q u e , dès lors, la seule formalité par l’administra
tion était la sommation prescrite par l’art. 7 de la loi de 1820;
« Sur la deuxièm e, considérant q u ’aux termes de l’article 175
du Code de procédure toute nullité est couverte par la défense au
fond', que, dans l’espèce, lesappelans soutenaient que la sommation
du G mars 1829 est nulle pour avoir été signifiée en la per
sonne du secrétaire des commandemens de la duchesse de B e rry,
et pour n’avoir pas été signifiée au véritable domicile; mais qu’a
vant de faire valoir cette exception, les appelans ont par requête
du 4
ja n v ie r
18 34
conclu au fo n d , sans attaquer sous le rapport
de sa validité intrinsèque la susdite sommation; qu’à la vérité, ils
opposent que la tutrice n’a pas pu couvrir un moyen de nullité
�( 9 )
cou Ire l’intérêt des mineurs, mais qu’en procédure, les déchéances
sont opposables à toute personne ayant qualité pour agir, et qu’au
surplus un tuteur a toujours la faculté de reconnaître que la copie
d ’un exploit dont l’original est représenté, lui a été valablement
remise, le fait lui étant personnel; q u ’il devient inutile d’examiner
la troisième question ; adoptant au surplus les motifs des premiers
juges sur les deux premières, dit bien j u g é , mal appelé, ordonne
l’exécution du jugement de première instance, etc. »
Cet arrêt de la Cour royale de Bourges est déféré à la censure
de la Cour de cassation :
i° Pour violation de l’art. 68 du Code de procédure civile; fausse
application des art. Gg et 173 du même Code, et contravention aux
dispositions des art. 2221 et 222a;
20 Pour contravention aux dispositions de l’art. 9 de la loi du
13 mars 1820.
DISCUSSION.
P R E M IE R
M OYEN.
La Cour royale de Bourges s’est approprié les motifs des pre
miers juges sur la question de savoir si les appclans (aujourd’hui
demandeurs en cassation) étaient recevables h opposer la nullité de
la sommation du G mars 182g. Elle s’est prononcée pour la négative,
refusant ainsi de s’occuper de la seconde question, celle relative au
moyen de nullité formellement invoqué devant elle dans l’intérêt des
mineurs. La Cour, sur ce moyen, n’adopte point les motifs des prem icrsjugcs, et n’en donne elle-même aucun. La question de prescrip
�tion se trouve donc écartée plutôt que résolue par l’arrêt. Du reste,
quant au préjudice, il n’est pas moins le même pour les mineurs;
et, comme ce préjudice est la base du présent recours, c ’est par un
coup d’œil jeté sur la sommation de 1829 qu’il faut commencer la
discussion.
Si cette sommation est nulle,
toute action domaniale était
éteinte, et il y avait prescription acquise aux mineurs.
S ’il y avait prescription, a-t-on pu par un acte de procédure y
renoncer au préjudice des mineurs? Y a-t-on effectivement re
noncé? Telle est la question du procès.
§ IerL a sommation était nulle.
A u x termes de l ’article 68 du Code de procédure civile, tous
exploits doivent être faits à personne ou domicile. Voilà la règle g é
nérale. L ’art. G9 indique quelles exceptions sont apportées à cette
règle. — De ces exceptions aucune n’est applicable aux princes
du sang royal. — L a règle générale subsiste donc à leur égard
comme à l’égard des plus simples particuliers. Or, la règle, c’est que
la personne assignée soit comprise nommément dans l’exploit d ’as
signation, et cela à peine de nullité de l’exploit : l’art. 70 le décide
en termes formels.
La régie s’est-cllc conformée à ces dispositions impératives dans
la sommation faite a sa requête le 6 mars 1829? Evidemment non »
car cette sommation destinée à madame la duebesse de Berry est
faite à la princesse en la personne de M. le marquis de Sasscnay.
Or, M. le marquis de Sasscnay n ’avait, en quoi que ce fût, qualité ou
caractère pour représenter madame la duchesse de B erry en j u
gement.
Il y a donc ici une première contravention, et une contraven
tion grave aux textes formels des articles précités, dès que madame
�(11
)
la duchesse de Berry n’a pas été assignée dans sa personne. Elle
ne l’a pas été davantage, comme on va le voir, à son domicile réel et
lé g a l, pas plus que M. le marquis de Sassenay.
C ’est au château des Tuileries que celte prétendue sommation
aurait été faite, suivant ce qu’indique l’original; or, ni madame la
duchesse de B erry ni M. le marquis de Sassenay n’avaient leur do
micile aux Tuileries. Ce domicile était a l’Elysée-Bourhon. C’est
un fait facile à établir.
D’abord, M. le marquis de Sassenay, secrétaire des commandemens de madame la duchesse de Berry, ne remplissait au château
des Tuileries aucune espèce de fonction. La charge, dont il était
pourvu auprès de la princesse, le retenait, au contraire, a l’ElyséeBourbon où madame la duchesse de B erry et ses enfans avaient
conservé le personnel attaché à leur service, leurs tableaux, leurs
galeries et tout leur mobilier.
Des actes publics et nombreux témoignent d ’ailleurs du domicile de
M. de Sassenay : nous produisons l ' u n acte de notoriété reçu à Paris
p arM . Esnée,notaire, Icq mai x
; a ° l ’acte de célébration de ma-
834
5
riagede mademoiselle de Sassenay, en date du a mars 1 8 2 g , dans
lequel il est dit que mademoiselle de Sassenay habite avec ses
père et mère à l’Elysée-Bourbon ;
h la date du 2g juin i
854 , où
3° une lettre de M.
de Sassenay,
il déclare n’avoir jamais eu de loge
ment aux Tuileries et avoir conservé jusqu’aux événemens de i
83o
celui qu’il avait à l’Elysée-Bourbon.
L e domicile de M. de Sassenay n’était ¡donc ni en fait ni en
droit au château des Tuileries.
Il faut en dire autant à l’égard de madame la duchesse de Berry.
En effet, il est incontestable que l’Elysée-Bourbon ne fût le do
micile propre et personnel de M. le duc de B e r r y , de son vivant ;
o r , la fem m e, aux termes de l’art. 108 du Code civil, n ’a d ’autre
domicile que celui de son m ari, et si le mariage vient à se dissoudre,
�(
12)
elle conserve le domicile ancien ju s q u ’à ce q u ’elle ait manifesté l’in
tention de letransférer dans un autre lieu. Sans doute, et nous l’ac
cordons,la preuve de celle intention peut dépendredes circonstances;
mais ces circonstances, quand on les invoque comme constitutives
d ’un fait de ch a n g em en t, doivent être claires, caractéristiques et
décisives. Dans le doute, c ’est pour le domicile déjà établi q u ’il
faut se prononcer : c’est ce que la Cour a ju g é notamment dans
une instance en règlement de ju g e , au rapport de M. le conseiller
B a y e u x , et sur les conclusions conformes de M. l’avocat-général.
(Affaire Ancessy.) .
La loi romaine définit le domicile « ubi quis rerum atque fortxmarum
suarum summam constituit; ttndè non diseessurus si nihil evocetjUndc
cùtn profectus est peregrinari videlur; quod si rediit} peregrinari jam
destitit. La résidence même prolongée ne détruit pas l ’ancien domi
cile; c’est encore ce q u ’établissait INI. l’avocat-général dans l’affaire
Ancessy.
Peut-on dire que le séjour plus ou moins prolongé de ma
dame la duchesse de B crry au château des Tuileries ait constitué
un abandon formel de son domicile de droit, quand on sait que
l’Elysée-Bourbon continuait à être habité par les personnes attachées
au service de la princesse? Ce serait admettre que ces mêmes per
sonnes auraient pu se créer un domicile distinct et séparé du domi
cile de la princesse, en continuant, toutefois, de lui appartenir par les
liens d ’un service spécial et journalier. Ajoutons, enfin,que la nature
des fonctions de la plupart d’entre elles attestent que non seulement le
dom icile, mais même l’habitation s’était conservée pour madame
la duchesse de Berry à l’E ly sé e , quoiquellc eut une résidence aux
Tuileries. Deux lettres attestent cette vérité, l’une à la date de 1831
et l ’autre à celle de 1828. Elles sont écrites par le secrétaire des commandemens de la princesse, et portent le titre suivant : Elysi’e Bour
bon, cabinet particulier de son altesse royale.
Le principal établissement était donc resté à l’Elyséc-Bourbon; et
�(
15)
avec lui s’cst conservé l’ancien domicile, car le fait de séjour et de
résidence n’ont jamais suffi, aux yeux de la lo i, pour faire perdre
le domicile antérieurement établi.
Nous produisons de même l’extrait d ’une procuration à la date
du 23 avril i
83o , où il est dit
que madame la duchesse de B erry
démeurant à l’Elysée-Bourbon a constitué pour son mandataire M. de
Sassenay, demeurant à l’Elysée-Bourbon. Divers actes publics énon
cent le domicile de madame la duchesse de B erry en ces termes :
« demeurant à Paris à l’Elysée-Bourbon, rue du Faubourg-SaintHonoré, alors logée aux Tuileries. »
Cette indication se trouve notamment dans l ’acte de partage de
la communauté, en date du 21 janvier 1821. Et en effet la princesse
n’avait aux Tuileries q u ’une simple résidence et une habitation
de convenance; quant au principal établissement, c’est h l ’Elysée
Bourbon qu’il était constamment resté.
Sous ce second rapport, la sommation du 6 mars était encore ir
régulière, nulle et sans effet. (Art. 70 du Code de procédure.)
L e tribunal de première instance de Bourges avait échappé à la
difficulté par un seul mot. Suivant lui les dispositions du Code de
procédure n’étaient pas applicables à la cause ; c’était d’après les
dispositions toutes exceptionnelles de l’ordonnance du 20 août 1 8 1 7 ,
que ce moyen de forme devait être apprécié, et la question de nul
lité ou de validité résolue. Cette ordonnance porte :
« Les significations aux personnes qui ont leur résidence habi
tuelle dans nos palais, châteaux, maisons royales et leurs dépen
dances, seront faites en parlant aux suisses ou concierges desdits
palais; ils ne pourront refuser d’en recevoir les copies, et il leur est
enjoint de les remettre incontinent à ceux q u ’elles concernent. »
Cet article n ’a pas le sens qu’on affecte de lui donner.
11 s’ap
plique, suivant nous, aux gens attachés à titre de service ou en
�vertu d’une ch arge, soit à la personne, soit à la maison ou du roi
ou des princes. C ’est ce qu ’indiquent suffisamment les mots : rési
dence habituelle, dont se sert l’ordonnance. Du reste, elle n’a pas
pour objet de régler la question de domicile, à l’égard de ceux qui
occupent u n emploi avec résidence dans les diverses habitations
royales. L ’article io g du Code civil a statué pour ce cas. L ’ordon
nance n'a eu q u ’un seul objet en vue : indiquer dans quelles
formes on procéderait à l’égard des personnes qui avaient leur
résidence habituelle dans les palais royaux. Si on donnait à cette
disposition un autre sens, on Arriverait à dire q u ’un simple fait
de résidence dans une maison royale, n’y remplît-on aucun service,
suffirait pour opérer un changement de domicile; c’est ce que n’ad
met point le Code civil et ce q u ’il proscrit même formellement.
Au surplus, cette sommation, en ce qui concerne madame la
duchesse de B e r r y , eût-elle pu valablement se faire au château
des T u ile rie s, ce que nous sommes loin d ’adm ettre, son irré g u
larité, en ce qui concerne M. de Sassenay, n’en resterait pas
moins établie; car, d ’ une part, M. de Sassenay était domicilié à
l ’Élysée-Bourbon, e t, d’autre p art, il était sans qualité pour rece
voir une signification q u i, concei’nant des enfans mineurs, ne pou
vait être utilement faite qu’à la tutrice et à sa personne.
La nullité de la sommation du G mars 182g n’est donc pas dou
teuse en point de d roit, et nous n’insisterons pas plus long-tem ps
sur cette démonstration.
Si on objectait que l ’article G8 du Code de procédure n’est relatif
q u ’aux ajournem ens, et ne s’applique point aux sommations ou
autres actes extrajudiciaires; pour toute réponse, nous renver
rions aux Dictionnaires de D roit, et notamment au Répertoire de
Jurisprudence, t.
5 , p. 3 i , où
l’on voit que le mot exploit est un
terme générique, désignant les divers actes faits par ministère
d’huissier pour assigner, ajourner, saisir, etc.
�(
15)
§ II.
La prescription était acquise.
La nullité de la sommation établie, cet acte disparaissait d e la
cause, et l’action du domaine devenait sans objet. L ’art, g d e là loi
du 12 mars 1820 est ainsi conçu : « A l’expiration de trente années
« à compter d e là publication de la loi du 14 ventôse an 7 , les do« maincs provenant de l’E t a t , cédés à titre d’engagement ou d ’é « change antérieurement à la loi du i er décembre 1790, autres que
" ceux pour lesquels auraient été faites ou seraient faites, jusqu’à
« l’expiration desdites trente années, les significations et réserves
« réglées aux art. 7 et 8 , sont déclarés incommutables entre les
« mains des possesseurs actuels, sans distinction de ceux qu i se
« seraient conformés ou non aux dispositions des lois du i 4 ven<t tôse an 7 , 12 pluviôse an 12 , 28 avril 1 8 1 6 , et i
5 mai
1818* »
On ne conteste pas le sens, du reste assez clair, de cet article;
l’arrôt ne conteste pas davantage que le laps de temps requis pour
la prescription ne fût révolu ; il ne combat même pas le mérite de
nos moyens de nullité contre la sommation, et même il évite d ’a
dopter sur ce point les motifs des premiers ju g e s ; c e qui porterait
à croire que ces moyens de nullité lui ont paru sérieux.
Mais il nous dit à peu près, sauf les termes :
Le moyen de prescription a été compromis et déserté. Par la
requête du 4 janvier i
834 ,
on a conclu au fond pour les mi
neurs. On a d o n c, par là , validé en la form e, la sommation du
6 mars 1829, et on a fait produire à cet acte tout son effet légal,
celui d interrompre la prescription au profit du domaine et au
préjudice des mineurs.
On voit donc que si la tutrice eût gardé le silence sur la préten*
duc sommation, si elle eût négligé d ’en demander la nullité, ou si,
�(
16)
ayant demandé cette nullité, elle se fût abstenne de conclure au
fo n d , la prescription, a l’heure où nous sommes, serait acquise aux
jeunes princes à titre de droit incontestable, sa u f la question de
nullité de la sommation ; question que la Cour de Bourges n’a pas
voulu résoudre, que le tribunal pourtant avait résolu, mais par
des motifs qui sans doute ont peu touché les magistrats d’appel,
puisqu’il ne les ont pas adoptés.
Suivant la C o u r , c’est la tutrice elle-même qui a forclos volon
tairement ses mineurs du droit de proposer la nullité dont il s’agit ;
mais si de cette nullité dérivait pour les mineurs le bénéfice d ’une
prescription, le fait de forclusion, vrai ou supposé, imputé h la
tutrice, que serait-il, sinon une véritable renonciation au bénéfice
de la prescription? O r, une pareille renonciation, quel que soit le
mode dans lequel elle ait lieu, peut-elle engager le mineur ?
La renonciation à la prescription, dit M. Troplong, est un acte
pertonalissimc. Comment pourrait-il être exercé par ceux qui n ’ont
qu’un simple mandat d ’administrer ?
Voudra-t-on prétendre qu’il ne s’agit pas ici d ’une renonciation
proprement dite, mais de la simple reconnaissance d ’un fait? E t,
pour rappeler les termes de l’arrêt, dira-t-on : « Q u ’en procédure
* les déchéances sont opposables à toute personne ayant qualité
« pour a g ir , et q u ’au surplus un tuteur a toujours la faculté de
« reconnaître que la copie d’un exploit dont l’original est représenté,
« lui a été valablement rem is, le fait lui étant personnel?»
Ce raisonnement est basé sur une supposition que les faits d é
5
mentent. Jamais madame la duchesse de I erry n’a avoué que la
copie de la sommation lui eût été valablement remise, comme
semble l’insinuer l’arrêt; ajoutons même qu’elle a constamment
soutenu le contraire. On se rappelle d’ailleurs après quel délai et à
force de quels soins on est parvenu, seulement en i
834 , à se pro
curer, en l’étude de M* Chodron l’expédition de cet acte q u i, fait
en 1 8 2 g , ne fut déposé pour minute à ce notaire q u ’en i
833.
�(
17 )
L ’arrêt, en faisant allusion au cas d ’aveux faits par un tuteur,
que la copie d’ un exploit lui a été valablement remise, s’est donc
jeté dans des hypothèses de pure invention, au lieu de juger la
question véritable du procès.
Est-il vrai, d ’ailleurs, en droit, que la tutrice eût eu le pouvoir
de sacrifier, plutôt par cette voie que par telle autre, un moyen de
9
prescription acquis a se mineurs !
L ’art. 2221 nous dit : La renonciation à la prescription est e x
presse ou tacile; l’art. 2222 : Celui qui ne peut aliéner ne peut
renoncer à la prescription acquise. La renonciation expresse et la
renonciation tacite sont donc placées sur la même ligne.— Les mêmes
conditions de capacité sont exigées pour l’une et pour l’autre. — On
ne peut pas plus renoncer d’une manière tacite q u ’on ne pourrait le
faire en termes exprès et formels. — L ’art. 2222 et sa prohibition
s’appliquent dans l’un et l’autre cas. I ô i eadem ratio, ibi idem ju s
dicendum est.
Mais si le tuteur est dépourvu de capacité pour renoncer ouver
tement à une prescription acquise à son mineur, c’est à coup sûr
q u ’il lui est interdit de se prêter par une voie détournée à un acte
qui aurait le même résultat.
Autrem ent, serait-il bien difficile de concerter un simulacre de
débat judiciaire. Le tuteur s’y présenterait, conclurait au fon d ,
et les droits des mineurs seraient sacrifiés sans retour.
Dans le système de l’arrêt de Bourges, il n’y aurait même pas de
requête civile possible pour les jeunes princes , car la requête civile
n’est admise que si le mineur n’a pas été valablement défendu. Or,
on ne manquerait pas d’objecter aux princes qu’ils ont dans l’espèce
été défendus par leur tuteur lui-m êm e, puisque le moyen de pres
cription a été formellement proposé, tant en première instanc« qu ’en
appel, ainsi que la nullité de la sommation.
Tenons donc pour constant q u e , soit d ire cte m e n t, soit indirec
tement , d’une manière expresse ou par des voies détournées, la re-
3
�nonciation à la prescription ne saurait avoir lieu au préjudice du
mineur.
Le résultat est le même pour le mineur dans l’un et l ’autre cas,
et c’est surtout au résultat que la loi s’attache dans les articles
précités.
Voici comment s’exprime M. le conseiller T ro p lon g , dans l’ou
vrage déj'a cité, p. 109 : « Sous un autre rapport, la renonciation à
« la prescription est l’omission d’un moyen péremptoire qui mi« litait en faveur du mineur. De quel droit scs représentans et ses
« défenseurs veulent-ils q u ’il soit n é g lig é ? .......Remplissent-ils leur
« mission, lorsqu’ils laissent leur mineur indéfendu, eux auxquels
« s’appliquent ces paroles du jurisconsulte Marcellus : « Tulorit
« prœcipuum est officium , ne indefensum pupillum relinquat ? ;>
S i , au nom d ’un m ineur, la prescription avait été d ’abord pro
posée, puis abandonnée ou négligée dans le cours d ’une instance,
les auteurs s’accordent h reconnaître que le m ineur, devenu majeur,
serait en droit de faire réformer le jugem ent par la voie de la r e
quête civile. Pourquoi la loi lui réservc-t-elle ce re cou rs?... C ’est
parce q u ’il n’a pas été défendu, parce qu’il ne l’a pas été valable
ment , parce q u ’il y a eu violation des garanties tutélaircs!.. E h
bien ! dans la cause actuelle on aurait sacriiié les intérêts du m ineur,
on lui aurait enlevé un droit acqu is, et tout recours serait fermé
tant à lui q u ’à son tuteu r; car il serait étrange de voir un mineur
revenir, par la voie de la requête civile, proposer devant la même
Cour un moyen q u ’elle aurait déj'a repoussé presenté par le tuteur.
On objecte qu’entendus dans ce sens, les articles du Code civil
sont inconciliables avec le prescrit formel de l’art. iy 5 du Code de
p ro cé d u re , qui décide que : « Toute nullité d’exploit ou d ’acte de
« procédure est couverte si elle n ’est proposée avant toute défense
u ou exceptions autres que les exceptions d ’incompétence. « Nous
répondons, q u ’en fût-il ainsi, ce serait au Code civil q u ’il faudrait
s’en tenir, parce que là est la règle spéciale sur la capacité du tuteur
�(
19)
rt les garanties dues au pupille. Mais la contradiction n’existe
réellement p as, et rien n ’est plus facile que de concilier ces
diverses dispositions. Indiquons un exemple pris entre plusieurs
autres.
Un tuteur est assigné devant un tribunal incompétent, et l’ex
ploit d’assignation se trouve nid en la forme.
Le tuteur comparaît sur cet exploit. Il fait des actes de procédure;
il défend au fond; peut-être se sera-t-il par là rendu non recevable
à proposer plus tard la nullité de l’assignation. Voilà un cas où
s’applique, si l’on veut, l’art. 170 du Code de procédure.
Que si l’on s’étonnait que le tuteur p ût, dans ce cas, couvrir par
une défense au fond la nullité de l’assignation, et ne le pût pas dans un
autre ,... nous dirions que la différence est fort sensible entre l’une
et l’aulre espèce. L orsque le tuteur néglige, en thèse générale, de de
mander la nullité d ’un exploit, qu’il y renonce m ê m e , il peut se faire
qu’il n’y ait pour le mineur q u ’un simple préjudice de mauvaise
administration, et il faut en dire autant d’un maire ou de tout autre
administrateur. C’est dans ce sens que doit être entendue la juris
prudence. Aucun texte de loi ne trace au tuteur, en termes impéra
tifs, le modo de procédure qu’il croit devoir adopter dans la limite
de scs pouvoirs. Quand il en choisit un de préférence, il n’excède
pas sa capacité d’administrateur. En un m o t, il n’aliène point.
Mais s’il se trouve que le mode de procédure par lui suivi con
tienne une aliénation directe ou indirecte d’un droit, o u , ce qui est
la même chose, si cette procédure entraîne renonciation à une pres
cription révolue, constituant à ce titre un droit a cq u is, un droit
immobilier, l’art. 1 7 5 , quelle que soit la généralité de ses termes,
cesse d ’être applicable. Pour l’appliquer, il faudrait fouler aux pieds
les article 2221 et 2 2 2 2 ; o r , ces articles contiennent les règles fontamentalcs sur la capacité et l’étendue des droits du tuteur.
Ajoutons que le tuteur avait proposé ce m o yen , et q u ’ainsi il
n’avait plus le droit d ’en faire l’abandon.
�L ’arrêt a donc violé les art. 2221 et 2222 ; de plus, il a faussement
appliqué l’art. 173 du Code de procédure, car, loin d ’avoir aban
donné le moyen de nullité dont il s’agit, la tutrice l’avait au con
traire formellement r e se rv é , proposé et développé.
Les actes de procédure établissent celte vérité.
Madame la duchesse de Iïerry, dans son Mémoire présenté à
M. le préfet du Cher, suivant le prescrit de la loi du
5
novembre
1 79 0 , annonce ( c ’est M. le préfet q u i, dans sa requête du 29 mai
1
835 ,
rapporte les termes du Mémoire en ce point) : « Qu’elle est
dans l’intention de se pourvoir en justice pour faire déclarer nulle
et sans effet la signification à elle faite de la part de la régie des
domaines, à raison de la forêt d ’Yèvre.» (Pièces produites, n° 2).
Ce n ’est pas de cet acte, assurément, q u ’on peut induire une renon
ciation h la nullité de la sommation.
Voyons les actes subséquens :
Dans l’exploit introductif d ’instance en date du 4 avril i
833 ,
les
demandeurs en cassation insistent sur la nullité de la sommation.
Voici leurs conclusions : « Attendu que cette sommation du G mars
« 1 8 2 g , nulle en la forme et sur laquelle le domaine n ’a encore rien
« dit ni signifié, cause le plus grand préjudice aux ventes à eiïec« tuer, par la crainte qu’elle inspire aux amateurs d ’avoir à se dc<( fendre d’un procès, et par le prétexte qu’elle fournit aux spécu« lateurs de déprécier la propriété;
it V oir dire que la sommation faite le G mars 1829, à la requête
« de M. le directeur général des domaines , sera considérée comme
« n u l l e et non ave xu e . «
A insi, dans le Mémoire au préfet, dans l’exploit introductif d’instancc, avant qu’011 eût même l’idée d ’une défense au fond, il est con
clu au nom de la tutrice en termes explicites, précis et formels, à la
nullité de la sommation.
Le tribunal de première instance avait prétendu que la nullité
était couverte, faute d ’avoir été proposée avant
toute défense
�( M )
au
fond. C ’était tout simplement une
erreur matérielle
que
commettait en cela le tribun.il. La défense au fond n’a été pré
sentée que le
4 janvier 1 854 ; et, dès le 4 avril i S 53 , comme on l’a
vu , le moyen de nullité avait été proposé par l’exploit introductif
d ’inslance. Si la nullité n’avait pas été textuellement spécifiée dans
cet acte m ê m e, c’est par une raison fort simple et que les faits de
cette cause n’expliquent malheureusement que trop.
L es conseils de la tutrice ignoraient la teneur de cette sommation.
Madame la duchesse de Berry n’en avait jamais eu connaissance,
M. de Sassenay non plus. On sait que l’original n ’indique point à
quel suisse du château la copie en a été remise, si même elle l’a été,
ce qui est très douteux. Dans cet état de choses, que pouvait on
spécifier? Rien. On n’a pas manqué de suppléer à ce silence, dès
q u ’on a pu se procurer en l’étude de M e Chodron, en i
834, l ’expé
dition de la sommation.
La Cour royale a évité de tomber dans la même méprise que le
tribunal; mais elle en a commis deux autres tout aussi graves,
car, pour trouver dans l’article 17 3 , le principe d ’une déchéance
applicable aux m in e u rs, il lui a fallu (le mot est exact) changer
jusqu’aux termes de cet article, et en dénaturer le sens.
Suivant-elle, toute nullité est couverte par la défense au fond.
L ’article 173 ne dit rien de semblable. Voici son texte: Toute
nullité d ’exploits ou d ’actes de procédure est couverte, si elle n ’est
p r o po sé e
avant toute défense ou exception.
L a différence est notable, car il suflit, d ’après l’article 1 7 3 , que
la nullité soit
p r o p o sé e
avant toute défense. A cette condition,
011
échappe à la déchéance, c’est ce que porte l’article.
Plus lo in , il est vrai, la Cour se sert d’autres expressions; elle dit
qu avant de faire valoir leur exception les demandeurs ont pris des
conclusions au fond.
Faire valoir est une expression qui n’est pas dans la loi. L ’arrêt l’a
substituée fort arbitrairement à celle de proposer, la seule qui s’y
�trouve; o r , cette variante n ’est pas sans importance, et peut-être
a-t-elle été employée h dessein. Certes, la Cour n’eût pas osé avancer
que la nullité n’avait pasétê proposée. L ’exploit introductif eût donné
à celte assertion un démenti trop formel. Elle a donc trouvé plus
commode d ’écarter le terme employé par l’art. 1 7 5 , pour en substi
tuer un autre qui lui parût s’adapter plus facilement à sa thèse.
A u surplus, d ’après l’art. 1 7 3 , la défense au fond a pu être pré
sentée sans inconvénient, une fois la nullité proposée. Cette défense
était même une procédure devenue inévitable;
l’administration
gardait le silence sur le mérite de la sommation; les demandeurs
avaient argué cet acte de nullité dans un exploit introductif. P o u vaient-ils se dispenser d ’en venir à une discussion sur le fond ? Ce
subsidiaire n ’était-il pas, vu l’état de l’instance, devenu indis
pensable ?
Les demandeurs n ’ont pas fait autre chose que traiter ce moyen
subsidiaire, dans la requête q u ’on leur oppose. C’est un acte de
l ’avoué rédigé dans son étude, peut-être sans sa participation, ainsi
qu’il n’arrive que trop souvent. On y expose les faits et les moyens
de la cause, cela est vrai; mais il est vrai aussi q u ’on y demande en
termes formels et de nouveau, « que le tribunal n’ait aucun égard
à la sommation du G mars 182g. » N’est-ce pas là reproduire le
moyen de nullité? ce qui d’ailleurs était superflu.
La nullité proposée dès le début de l’instance 11’avait pas été
développée, on en convient, antérieurement à la requête du 4 jan
vier; mais où a-t-on vu que l’art. 173, qui exige que la nullité soit
proposée avant toute défense au fond, ait exigé de même que les
moyens de nullité soient développés, sous peine de déchéance ? La
Cour de Bourges apercevait sans doute celte distinction, quand
elle a substitué ces expressions faire valoir à celles dont se sert
l’art. 173.
Au surplus, une raison péremptoire s'opposait, nous ne saurions
trop le répéter, à ce que cette nullité pût être discutée avant le
�( 23)
jour ou elle l’a été. La signification du 6 mars 1829 n’était point
dans les mains de madame la duchesse de Berry. Il a fallu obtenir
une expédition de cet acte. Muni de ce docum ent, l’avoué déve
loppa, p a rle s conclusions du 11 avril, le moyen de nullité primi
tivement articulé et proposé suivant le vœu de l’art. 170.
L ’avoué n ’a donc pas renoncé à la nullité et par sujte à la pres
cription; il n’était pas autorisé à faire cette renonciation. Il n’eût
pu prendre sur lui de la faire sans s’exposer à un désaveu. 11 n ’a
pas encouru cette peine.
On n ’objectera pas sans doute que la Cour royale dans sa déci
sion s’est particulièrement fondée sur des appréciations de faits et
d’actes q u i , bonnes ou mauvaises, échappent a la censure d e là
Cour; car elle a , au contraire, méconnu l’existence d’un acte et
substitué dans une matière de droit strict, des termes arbitraires
aux termes employés par le législateur.
E n fin , le p r é fe t, en répondant le
3 février (pièce produite,n. 3)
à la requête du 4 janvier précédent, n’avait nullement excipé de la
fin de non recevoir.
Les choses étaient donc entières quand les demandeurs, dans
leurs conclusions du
nullité.
3 avril suivant,
ont développé leur moyen de
5
L ’a v o u é , aux termes de l’art. /jG , n’a-t-il pas eu le droit de
modifier les conclusions antérieures, et rectifier ce qui eût été sus
ceptible de l’être? Mais, à vrai d ire, rien n’était à rectifier, nous
croyons l’avoir suffisamment démontré.
En nous résum ant, nous dirons que la sommation est nulle, et
pour n’avoir pas été signifiée à personne , et pour n ’avoir pas été
signifiée à domicile. Si cette sommation est nulle, elle n’a pu inter
rompre la prescription. Si la prescription n ’a point été interrompue,
elle s’est trouvée acquise aux mineurs à partir de 1800. La nullité
de la sommation a été proposée dans l’exploit introductif d’ instance.
En fait, la tutrice n ’a point renoncé aux effets de cette nullité. E n
�( 24)
droit, la loi lui interdisait de le foire. La Cour royale, en jugeant
le contraire, a donc formellement violé les art. 2221 et 2222 du
' Code c iv il, combinés avec l ’art, g de la loi du 12 mars 1820, et
fait une fausse application de l’art. 170 du Code de procédure
civile.
Ainsi se trouve justifié le pourvoi formé dans l’intérêt des
mineurs.
Quant au roi Charles X , le bénéfice de la prescription lui était
évidemment acq u is, et il était recevable à l’opposer. Il est usu
fruitier de la forêt d’Y cv re . Pour interrompre la prescription à son
é g a rd , il eût été nécessaire q u ’une signification personnelle lui fut
faite dans les formes voulues par l’art. 69.
Cette signification n’a pas eu lieu. L a seule qui ait été faite par
le domaine, est la sommation du G mars, qui, au dire même du do
maine, 11e concernait que madame la duchesse de Berry. Il y avait
donc prescription au profit de Charles X .
Charles X est-il censé avoir renoncé à ce moyen? On 11e saurait
le prétendre raisonnablement.
La prescription, dit l’art. 2224 du Code civil’, peut être opposée
en tout état de cause, même devant la Cour royale, à moins que la
partie qui n’aurait pas opposé ce m o yen, ne doive, par les circon
stances, être présumée y avoir renoncé. Dans la cause, on ne peut
alléguer aucun fait de renonciation ni aucun abandon du droit
acquis, en ce qui concerne Charles X .
Le moyen de prescription a été proposé devant la Cour, ainsi qu’il
résulte des qualités de l’arrêt où il est dit : « Déclarer prescrite tant
au profit desdits enfans du duc de Berry q u ’au respect de Charles X ,
toute réclamation de l’Etat, relativement à la forêt d ’Yèvrc. Lors
même q u ’elle pourrait être considérée comme soumise aux dispo
sitions de la loi du 14 ventôse an 7.
L a Cour devait donc déclarer le roi Charles X affranchi de toute
�( 25 )
action en ce qui concerne l’usufruit. La fin de non recevoir ne pou
vait l’atteindre.
L e s exposans persistent dans leurs conclusions.
PRODUCTION.
1° Exploit introductif d ’instance.
2° Requête du 1o juin 1
833.
3° Requête du préfet à la date du 3 février.
4 ° Conclusions du 11 avril 1 834 5° Requête du 4 avril 1835.
6° Sommation du 6 mars 1829.
7 0 Acte de notoriété du 28 mars 1
835 .
8° Acte de notoriété des 9 et 12 mai 1
83 o.
4 août 1826.
834-
9° Acte notarié du 20 avril 1
10° Acte notarié du
1 1 ° Acte notarié du 21 janvier 1821.
12 0 Acte notarié du
4 ju ille t
1820.
PRO DU CTIO N N O U V E L L E ,
Requête du
4 janvier 1 834 M A N D A R O U X -VE R TA M Y,
A v o c a t a u c o n se il d ’ c ta t e t à la C o u r d e ca ssa tio n .
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pastoret.1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandaroux-Vertamy
Subject
The topic of the resource
forêts
domanialité
nullité
prescription
biens nationaux
émigrés
domiciliation
exploit
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Charles X et M. le marquis de Pastoret, agissant au nom et comme tuteur de Henri-Charles-Ferdinand-Dieudonné, duc de Bordeaux et Louise-Marie-Thérése-d'Artois, enfans mineurs de feu M. le duc de Berry ; contre M. le préfet du Cher, représentant l’État.
Annotations manuscrites. « 18 avril 1838, arrêt de rejet. Sirey 1838-1-309 ».
Table Godemel : déchéance : 1. la déchéance du droit de proposer une nullité d’exploit couverte par des conclusions au fond, peut-elle être opposée au tuteur qui a conclu au nom du mineur, encore bien qu’il s’agisse d’un exploit interruptif de la prescription qui courait au bénéfice du mineur ? ne saurait-on considérer la renonciation au droit de proposer la nullité ou la déshérence de ce droit, comme une renonciation à la prescription ? Nullité : 13. une nullité d’exploit est-elle couverte par des conclusions au fond, encore bien que, dans des écritures antérieures à ces conclusions, on eut demandé la nullité de l’exploit, si d’ailleurs la cause ou le moyen de nullité n’a jamais été spécifié ?
la déchéance du droit de proposer une nullité d’exploit couverte par des conclusions au fond, peut-elle être opposée au tuteur qui a conclu au nom du mineur, encore bien qu’il s’agisse d’un exploit interruptif de la prescription qui courait au profit du mineur ? ne saurait-on considérer la renonciation au droit de proposer la nullité ou la déchéance de ce droit, comme une renonciation à la prescription ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Madame Poussin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1838
1792-1838
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2812
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Mehun-sur-Yévre (18141)
Yèvre (forêt d')
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53568/BCU_Factums_G2812.jpg
biens nationaux
domanialité
domiciliation
émigrés
exploit
forêts
nullité
prescription
-
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2b8b0ee9bb699c886182dc66bcfb838b
PDF Text
Text
7
/
s*.-r
M
É
M
O
I
R
en r épo n se.
E
�EN RÉPONSE ;
M. J a c q u e s D E L S U C , p r o p r ié t a ir e et
an cie n n o t a ir e , habitant du lieu de Sain t-
P ou r
P a r d o ux - L a t o u r , intimé ;
C o n tr e M . J e a n -M a rie
N E Y R O N -D E S A U L -
N A T S , propriétaire, habitant au lieu de StGenès, appelant d'un jugement par défaut
rendu au tribunal civil d Issoire, le 27 juil
let 1827 ,
1
L
1
•
A contestation so ulevée entre les p arties, est relative à u n
droit d ’usage, dans u n e fo rê t appartenant à M . Desaulnats,
L e titre co nstitutif de ce d ro it a déjà fait n a îtr e , devant la
C o u r , de sérieuses discussions, et appelé u n examen sévère.
Mais u n arrêt in te rlo c u to ir e a fixé décid ém ent l ’état de la
c a u s e ; la p re u v e ordonnée est essentiellem ent p ré ju d icie lle ;
l ’arrêt porte sur le p rin c ip e qu i était contesté, et a u q u el se trouve
sub ordo nne le fond de la décision ; i l ne s’agit donc p lu s qu e
de r e c h e r c h e r si la p re u v e a été faite dans les termes et avec le s
c onditions imposées par les magistrats.
�(
2
)
T e l sem blerait être l ’u n iq u e p oint de v u e sous le q u e l les
débats do iv en t a ctu e lle m e n t s’engager.
T o u te fo is , d ’autres prétentions viennent de su rg ir : l ’a p p e la n t,
in q u ie t d u résultat p ré p a ré p a r les e n q u ê te s, s’efforcerait a u jo u r
d ’h u i de rem ettre en question tout ce q u e la C o u r paraît avoir
ir ré v o ca b le m e n t d é cid é ; il v o u d ra it soum ettre à u n e n o u v e lle
discussion des titres a n cie n s, sur lesquels il y a cliose j u g é e ; il
Voudrait contester l ’existence d u d roit d ’usage en lu i-m ê m e , et
d o n n e r la vie à u n e partie d u p rocès à janjais éteinte.
S ’il fallait m êm e ra p p e le r toutes les prétentions de M . D esauln a ts, il en ré sulterait q u e la possession de M . D e ls u c n ’est pas
é t a b li e ; e lle ne serait entourée d ’a u c u n e des circonstances p r o
pres à lu i im p rim e r u n e force lé g a le ; ce n ’est q u ’a ccid e n te l
le m e n t , et p ar suite d ’ une toléran ce de ve n u e dangereuse entre
les mains de M . D e l s u c , q u e ce lu i-ci a urait c h e r c h é à c o lo r e r
u n titre ir r é g u lie r en la f o r m e , et no n souten u d ’un e véritable
possession.
L à ne s’ari’êteraient pas les griefs de l ’appelant.
S u b s id ia ir e m e n t , i l d éterm in e à priori les ob ligations de
M . D e lsu c , <?t p réten d rait ne pas r e tro u v e r dans les tém oignages
r e c u e illis p ar M. le conseiller-co m m issaire, ces éléinens conser
vateurs d ’u n d roit d’ u sa g e , c ’e st-à -d ire , les faits successifs de
d é livra n ce p ar le p r o p r ié ta ir e , et le p a y e m e n t de la red eva n ce
par l ’usager.
C e p e n d a n t, et à toute f in , si l e d r o it p o u v a it être établi ,
M . Desaulnats en ré cla m e ra it la re strictio n , e u égard au titre
q u i le r e n f e r m e , et au domaine q u i doit en p rofiter.
V o i l à , en r é s u m é , les prétentions de l ’appelant : nous avions
besoin de les é n o n cer de suite, p a rce q u ’elles seront im m édiate
m e n t mises en regard avec les faits et actes"du p ro cè s, dont l ’e x
posé sim p le et fidèle retracera la lim ite q u e la C o u r a en tendu
poser entre la c a u s e , telle q u ’ elle se d é v e l o p p a i t devant e ll e , à
�(3)
la p re m iè re a u d ie n c e , et la cause telle q u ’elle est encore à ju g e r .
L e s magistrats ont p ris la p ein e d ’e x a m in e r , dans les plus
grands détails, tous les titres anciens invoqués dans l ’intérêt de
M . Delsuc et c e u x opposés p a r M . D esaulnats; cette investiga
tion s’est éten d u e sur la fo rm e des actes, co m m e sur la nature
et l ’effet des conventions y relatées; les m oyens respectivem ent
p ro d u its à l'a p p u i de ch a q u e p rétention ont été p are ille m en t
a p p ré cié s; l ’arrêt in terlocu to ire en fait fo i.
C e n ’est q u ’après a vo ir r e c o n n u et p ro cla m e l ’existence d u
d roit d ’ usage p o u r
31 . D e l s u c , q u e la question de savoir s’il avait
été conservé par u n e possession lé g a le , a d éterm in é la p re u v e
o rd o n n é e p ar la C o u r .
A ce seul p o i n t , à ce seul fait est v e n u se rattacher la néces
sité d ’ un in te r lo cu to ir e . M . D e ls u c y a-t-il co m p lètem en t satis
fa it? c ’est là l ’objet a ctu e l du procès. L e s autres difficultés n ’exis
tent p lu s entre les parties.
•
N o u s verron s b ie n tô t q u e si des ob ligations étaient imposées
à l ’in tim é , il les a«largement r e m p lie s ; il aurait m ê m e dépassé
les ex ig e n ces de l ’arrêt.
L e d roit d'usage a été lé g a le m e n t co n se rvé : nous a Ilo n s(|B K ^
q^ M ^ e d é m o n tre r.
FA IT S.
L e sieur D e lsu c est p ro p riéta ire d ’u n dom aine appelé de la
G u iè z e , a u q u e l sont attachés les droits contestes d’usage et de
c h a u ffa g e , dans la forêt de la R o c h e , appartenant a u jo u r d 'h u i
a u sieur Desaulnats ; le titre g énérateur de ces droits est sous
signature p r iv é e , et en date d u 17 dé ce m b re iG 54 *
L a concession iaîle p a r le sieur de la B a r g e , seigneur de
L a r o c h e , et alors propriétaire de la fo r ê t du m êm e n o m , est
c o n ç u e en ces termes :
« A v o n s , p ar ces présentes, in v estiet investissons Jean F u m â t ,
1.
�(
4
)
» ferm ier de ladite seigneurie de L a r o c h e , ci-p ré se n t, de nos bois
ü> et forêts appelés de la M a lg u iè ze et de L a r o c h e , dépen dan t
» desdites seigneuries de L a r o c h e -, p o u r en jo u ir p o u r son usage,
des maisons, p o u r les ténemens des villages de G u iè z e et de
j> Pissol, soit p o u r son ch auffage et réparations q u ’il p o u rr a it faire
>> dans lesdits tén e m e n s, à la ch a rg e q u ’il sera tenu de p a y e r an» n u e lle m e n t , à ch a q u e fête S t-N ico la s d ’h iv e r , la quantité d ’u n
» setier d ’avoine qu*il sera tenu d ’ap p o rte r audit L a r o c h e , a
A u p ie d <le cet a c te , o n lit les mots suivans:
« E t en foi de c e , nous sommes soussignés et ledit FumaL^ ^ il
« ch â te a u de la B a r g e , 17 dé ce m b re iG 34 .
» ^Signé L abar Ge .
» E t p o u r u n s e t ie r , m esure de L a r o c h e ,
» S ig n é F u m â t . »
C e lt e re con n a issan ce , co n trô lé e et insinuée ù L a t o u r , le
avril
172G, a été d é p o sé e , le 8 d é c e m b r e
5o
r y g i ^ p a r le sieur
G a b r ie l R e b o u l de F o n f r e y d e , habitant de la v ille d e C l e r m o n t ,
au n o m b re des m inu tes d u sieur C h assaigne, ç o ta ire en la m êm e
v i l l e ; le sieur B leton p è r e , l ’ un des p ropriétaires du dom aine de
J a J B ^ c z e , n ’a pas été é tra n g er à c e dépôt.
I l est facile de v o ir q u e , p a r ces stipulations , co m m e
l ’ indication d ’ une é p o q u e a n n u e lle de p a y e m e n t de r e d e v a n c e ,
sans en fix e r d ’ailleurs la d u ré e , cette concession était re vê tu e
d u caractère de p erp é tu ité ; et c ’est aussi dans ce sens q u ’e lle a
constam m ent r e ç» u son e x é cu tio n .
S i q u e lq u e s actes p ro d u its e t rem on tant à u n e é p o q u e assez
r e c u l é e , n e p arlen t pas en termes exprès des droits d ’usage, soit
en faveur d u p ro p rié ta ire d u dom aine de la G u i è z e , soit à la
ch a rg e d u seign eur de L a r o c h e , o n p e u t * e x p l iq u e r aisément
ce silence avec les clauses elles-m êm es de ces actes. O n p e u t
é galem ent opposer des titres n o m b r e u x et positifs sur ces d roits,
toujours re co n n u s et toujours exercés.
�( S )
In te rro g eo n s successivement ces différens actes.
L e 21 ju ille t 1657 , les seigneuries de L a r o c h e et de la Tar»
tière ont été vend ues par le sieur C risto ph e-F ran çois de la B a r g e ,
au sieur A n to in e N e y r o n de Buisson ; o n n ’y ra p p e lle pas ex p li
citem ent , il est "vrai, les droits d ’usage, mais il y est déclaré que
tout est vendu , ainsi que lesdites seigneuries ont été jouies par le
seigneur vendeur et ses prédécesseurs, sans en rien retenir n i ré
server, et l ’o n in d iqu e <les b a u x à ferme consentis, no tam m ent
à Jean F u m â t.
O n vo it q u e l ’état des ch oses, tel q u ’il avait été précédem m ent
établi p ar le seign eur v e n d e u r , éiait respecté ; e t , si les clauses
d e l ’acte ne sont pas fo rm e lle m e n t énonciaiives d u droit ou de
la ch a rg e actuellem ent en lit ig e , elles n ’en sont pas exclusives;
•ce titre n ’émanait pas au surplus de l ’usager; il n ’y était pas
.partie.
D e 1657
xi
1 7 2 9 , pendant soixante-douze ans, il n ’est p ro d u it
-aucun acte dans le q u e l le d roit d ’ usage ait été rappelé.
O n sait seulem ent q u ’au
4 avril 1 7 2 9 , é p o q u e à la q u e lle le
fo n d é de p o u v o ir du sieur F u m â t a fferm a, p o u r six années con
sé cu tives, m o ye n n an t 65 o fr. a r g e n t, le dom aine de la G u i è z e ,
;à A n n e t P la n e s, ot à Jean et A n to in e G o i x , p ère et f ils , c e u x - c i
(le s G o i x ) éta ie n t les anciens ferm iers; car ils sont désignés eu
la qu alité de laboureurs, habitants au domaine de la G uièze.
L e b a i ll e u r , après a vo ir fourni le détail des im m eu bles donnés
à f e r m e , se contente de-dire q u e le tout est affermé-, ainsi et de
môme que ledit domaine aurait été jo u i les années*précédentes par
lesdits G o ix . Cette circo n sta n c e , q u e les mêmes preneurs , à
l ’e x ce p tio n d ’u n s e u l , co ntinu aient u n e jouissance dont les ser
vitudes actives et passives le u r étaient parfaitement c o n n u e s ,
-rendait in u tile toute e x p lic a tio n précise sur les droits d ’ usage ;
aussi le bail n ’en fait pas m e n tio n , et ne devait p as, dans la p o
s itio n p a rtic u liè r e des p a r tie s , en faire m ention.
�(
6
)
I l laisse à la ch a rg e d u b a i ll e u r le p ay e m e n t de tous les c e n s ,
rentes et tailles dus sur le d o m a in e , avec ob lig atio n d ’en garantir
les p r e n e u r s ; de là en co re d é co u la it la dispense de s’e x p liq u e r
sur le p ayem ent d u setier d ’a v o in e , m ontant de la red eva n ce
a n n u e lle stip u lée dans l ’acte d u 17 d é ce m b re iG 54-.
C e p r e m ie r b a il d u 4- a v r il 1 7 2 g , a été re n o u v e lé à l ’e x p ir a
tion des six an n ées, le
3 o mars 1 7 5 5 , en fa ve u r d ’À n n e t Planes
s e u le m e n t , l ’u n des ferm iei’S, m o y e n n a n t G60 fr . a r g e n t, p o u r
trois o u six années. I l y a m êm e silence su r les d r o i t s , m êm e
o b lig a tio n de la p art d u b a ille u r , rela tive m en t au p ay e m e n t ;
mais il est égalem ent déclaré q u e le tout est afferm é, tout ainsi
et de même que ledit domaine et trente-deux têtes d ’herbages ont
été jo u is , les années précédentes, pa r ledit P la n es.
U n troisièm e b a il fut consenti p o u r t r o i s , six o u n e u f années,
le 17 mars 1 7^ 0 , p a r !a dem oiselle G a b r ie lle F u m â t , à A n t o in e
P la n e s , f i l s d ’A n n e t , p ré c éd e n t ferm ier. L a connaissance q u e le
p r e n e u r avait p a r l u i - m ê m e des objets q u ’il affermait et des
bénéfices y attach és, fut ra p p e lé p ar ces mots : T out ainsi que
ledit preneur, son défunt p èr e , et les autresprécédens ferm iers en
ênt jo u i.
A cette é ji o q u e , lo dom aine de la G u i è z e , ainsi q u ’il
én o n cé a u x différens b a u x ci-dessus r a p p e lé s , était afferm é avec
tous les h éritages dépen dan t d ’u n autre dom aine appelé d ’A u z a t ,
d o n t la fam ille F u m â t était aussi p ro p rié ta ire ; ces d e u x domaines
p o u v aie n t être alors ré u n is à u n e seule et m êm e fei'ine; mais des
afctes p ostérieurs attestent q u e cette e x p loita tio n c o lle c tiv e et
sim ultanée des d e u x p ro p riétés entre les m êm es m ains, n ’a pas
été de lo n g u e d u r é e , et i l n ’existe au p rocès a u c u n élém en t
q u i conduise à penser q u e les droits d ’usage attrib ués a u d o
m aine de la G u i è z e , aient p ro fité , p ar d o u b le e m p l o i , au d o
m a in e d ’A u z a t.
L e fait r e la t i f à l’exp lo ita tio n séparée , q u i se tro u v e d ’a cco rd
�(
7
)
avec les souvenirs des vieillards de la co m m u n e , se ¡mise dans un
acte sous seing prive', d u 5 i mai 1757 , ratifié'le
23 janvier 1768 ;
c ’test la vente p a r sieur A u g u s t in D a u p h i n , c h e v a lie r , seign eu r
de Cazelles le M o n t e l- d e - G e la t , au sieur Jean B u r i n , du dom aine
d ’A u z a t , paroisse de S t - P a r d o u x , tout ainsi et de même que Jean
R o u x , fe r m ie r , en a j o u i, suivant bail du G novembre 1754..
D ès l ’année 17^ 4 , le fe rm ie r d u dom aine de la G u iè z e n ’était
d o n c p lu s celu i d u dom aine d ’A u za t ; A n to in e Planes, q u i jouissait
d e l ' u n et de l ’a u tre en v e r tu du bail d u 17 mars i j 5o , consenti
p o u r tro is, six ou n e u f a n n é e s , a v a it , à la fin d ’un trien n a l, sti
p u lé de n o u velles c o n v e n t io n s , p ar suite desquelles le dom aine
d ’A u z a t avait été détaché de c e lu i de la G u iè z e , et afferm é sé
p a r é m e n t, le 6 n o ve m b re 17^4» a Jean R o u x .
A l ’e xp ira tio n d u bail d e 17 ^ 0 , ces d e u x domaines (en ce
q u i to u c h e la p ro p rié té ) passèrent en d ’autres mains.
P a r acte d u 29 mars 1 7 5 8 , la dem oiselle G a b r ie lle F u m â t ,
alors épouse d u sieur A n to in e de B o n n e t , stipulant en q u alité
d e dame et maîtresse de ses b ien s paraphei’n a u x , v en d it au
sieur B u r i n , se ign eu r de S t - P a r d o u x , devenu p ro p riéta ire d u
dom ain e d ’A u z a t , c e lu i de la G u i è z e , et les tre n te -d e u x têtes
d ’herbages.
L a vente est consentie avec les servitudes dues et a c c o u t u m é e s ,
et autres, ses circonstances et dépendances, tout ainsi et de mêm e
q u ’ il était co m p o sé , et q u e ladite dam e o u ses auteurs en avaient
jo u i o u d û j o u i r , ou le u rs ferm iers, et par exprès ledit sieur de
S t-P a r d o u x , pour l'avoir fa it exploiter l’ année dernière, et Antoine
P lanes , précédent ferm ier, suivant le bail du 17 mars
>'t‘Çu
M ou lin , notaire.
L e sie u r de S t- P a r d o u x déclare q u ’un e expédition de ce bail
lu i a été remise p a r la dame venderesse, q u i p r o m e t , d é p l u s ,
f o u r n ir les litres q u ’e lle p e u t a vo ir , en o u tre sa lo n g u e et paisible
possession et de ses a u teu rs, d ’u n temps im m é m o ria l, des susdites
choses ve n d u e s, et p lu s q u e suffisantes à p rescrire.
�( 8 )
,
. _
II afferm a, p a r acte d u 14 mars 1 7 7 $ , à F ran ço is S e r r e es
A n to in e G a t i n i o l, Son g en d re, habitant à A u g ero lles,, p o u r trois,
six et n e u f années, le dom aine de la G u i è z e ; et c o m m e ces prg-n e u rs , étrangers à la c o m m u n e , entraient p o u r la p re m iè re fois
dans la p r o p r i é t é , il le u r fut im p o sé , en term es e x p r è s , l ’obli-t
gation de p a y e r au seign eu r de L a b r o , u n setier avoine et u n e
p o u le c h a q u e , pour droit cCinvestison dudit domaine, dans la fo r ê t
de L aroche, et de passer dans les planchers de la § mn 8e deux,
arbres qu’ ils devaient prendre dans la mêmeforêt.,
V o i l a le droit d ’usage et la redevance y attachée f o r m e lle m e n t
é n o n cé s; ce n ’était pas là u n e in n o va tion a u x clauses desprem iers,
b a u x continu és avec les mêmes ferm iers ou leurs enfans; c ’était u n e
nécessité de la position d u p ro p rié ta ire avec de n o u v e a u x f e r
m iers pris hors la c o m m u n e , et dès lors ign ora n t l ’éten due
des droits et des charges d u dom aine dans le q u e l ils entraient.
P a r ce b a i l, les p reneurs étaient égalem ent tenus de d é liv r e r c h a
q u e a n n é e , au b a ille u r , qu atorze chars de bois à b r û le r , à p re n d re
dans la forêt de L a r o c h e ; mais cette c h a r g e ^ in d c p e n d a n t e des
droits attribués au dom aine de la G u i è z e , dérivait e xclu sivem en t
d ’autres droits concédés a u dom aine d e B u isson, dont le sieur
*
L u r i n , b a i l l e u r , était aussi p ro p riéta ire. Ces derniers droits sont
ç n c o r e e xercés et non contestés p a r le sieur Désaulnats.
I l é t a i t , sans d o u t e , perm is au sieur B u r in d ’ im poser à son fer^
xnier de la G u iè z e l ’ob ligation d e p q r t c r dans sa maison le bois
q u ’il p o u v ait perso nnellem ent p r e n d r e , co m m e u s a g e r , à raison
de son dom aine d u B uisson; ce transport était jine augm entation
d u p rix d u b a il, et n ’aggravait pas 1? servitude du p ro p rié ta ire de
la forêt, relativem en t a u x droils d ’usage de la G u ièze: les qu atorze
chars de bois étaient j>i’is no n en vertu des droits attachés au d o
m a in e de la G u iè z e , mais seulem ent en v e r tu des droits d ’usage,
plors et en co re appartenant au dom ain e d u B u isson.
C ’est p eu de mois après ce b a i l , et le 19 o c to b r e 1773 , cjue
�sieur B u r i n , seign eu r de S t - P a r d o u x , maria sa fille avec le sieur
A le x a n d r e B leton , et lu i constitua en dot une somme de 8,ooo fr.
q u i fut payée au m o y e n d u délaissement, en toute p r o p r ié té , d u
dom aine de la G u i è z e , com posé de m aison, grange et é ta b le s ,
])rés, terres, bois, pacages, frau x et c o m m u n a u x , avec le droit
d ’ usage, est-il d i t , et prendre du bois dans la forêt Laroche, tout
ainsi et de même que ledit sieur B u rin p ère, ou ses ferm iers, en ont
jo u i ou du jou ir.
.
L e p rix d u d o m a in e, fixé à la somme de 19,860 f r ., dépassait
de b e a u c o u p la consti tution de dot de 8,000 fr. ; aussi le 'g e n d re
f u t ch argé de p a y e r la différence.
I l est à r e m a rq u e r q u e dans ce délaissement, n ’étaient pas
com pris ,
i°. L e d roit de pacage et défrichem en t au co m m u n al appelé
llen ardèche. Plateaux et V e r g n e d u M a s, ainsi qu e les trented e u x têtes d ’h erb ag e s, faisant ci-devant partie d udit d o m a in e ;
2 \ U n petit héritage appelé la M a y , p récéd em m en t aliéné.
Ces exceptions dim inuaient l ’étendue d u dom aine , et restrei
gnaient fortem ent les droits concédés au nouveau pro priétaire.
T o u te fo is, les droits d ’usage et de cliaulïage étaient ici f o r m e lle
m ent rappelés, et ce qu i devait au besoin le u r im p rim e r u n e
grande consistance , c ’est q u e parm i les témoins assistant au c o n
trat de m ariage/figu rait le sieur Jean Caquet, capitainedes chasses
et poches de la terre de L a b r o , représentant d u propriétaire de
la forêt de L a r o c h e , et co ntradicteur légitim e de l'u sag e r; il ra
tifiait, par sa présence, tout ce qu i était déjà établi et se trouvait
consigné relativem ent à ces-droits d ’usage et de chauffage : il
laissait aux énonciations faites en ce contrat de mariage toute le u r
vé rité et toute le u r force. Aussi n ’est-ce pas sans doute sérieu
sement q u e le sieur Desaulnais a p r é t e n d u , dans son m é m o ire ,
q u ’à cette é p o q u e , 011 ne doit.p as être surpris de vo ir des p ro
priétaires de domaines voisins de la fo r ê t tenter de s’ attribuer de tels
3
�( 1 0 -)
droits; le propriétaire de la fo r ê t habitant assez loin de là , ne pouvaitqup faiblem ent surveiller sa propriété, et s ’ assurer de la vigilance
ou de la fidélité de ses gardes.
L a réponse à ces allégations, assez singulières dans la b o u c h e de
l ’a p p e la n t , se tro u vera it éci’ite dans le contrat de m ariage q u i
v ie n t d'être ra p p e lé , et dans les clauses y relatées; mais i l e s t ,
d ’ailleurs , des faits aussi précis h ra p p e le r, et q u i p o u v a ie n t être
à la connaissance d u sieur Desaulnats.
L e bois de L a r o c h e était incontestablem ent le bois des m o n
tagnes le m ie u x su rv e illé ; il n ’avait jamais été co m p ris dans les
b a u x à ferm e de la terre de C h a r t r e i x , et des autres propriétés
d u sieur d e L a b r o , qu i s’en était réservé spécialem ent l ’a d m i
nistration et la su rv eilla n ce : à cet effet , il
dans son ch âteau
avait
établi ,
de L a b r o , le sieur Jean C a q u e t , avec le
titre d e capitaine des chasses et p êc h e s de la terre de L a b r o ;
c e lu i- c i v eillait à la conservation de la f o r ê t , délivrait le bois
a u x usagers, et recevait les délivrances a u x q u e lle s ils étaient
ten us; c ’était à la fois, il faut le d i r e , u n se rvite u r a c t if et u n
h o m m e p ro b e et sévère.
C o m m e n t, dès lors, adm ettre lé g è re m e n t q u e des droits d ’ usage
p ouvaien t être fa cile m e n t c r é é s , ou au m oins q u e des tenta
tives aient été pratiquées dans ce b u t , par les p ropriétaires des
dom aines voisins de la f o r ê t , et q u e l ’absence d u sie u r L a b r o
ait laissé p lu s de facilité a u x entreprises?
D e pareilles insinuations sont co m p lè te m en t démenties par les
fonctions de su rv eilla n ce et de p ro te c tio n , p a r tic u liè r e m e n t co n
fiées au sieur C a q u e t , dont le caractère et les h abitudes devaient
insp irer autant de confiance au p ro p riéta ire de la fo r ê t, q u e de
earanties aux usagers.
D
o
D ’autres actes émanés du n o u v e a u p r o p r ié ta ir e , le sieur B le t o n , vie n n e n t se r é u n ir à tout ce, q u i avait été p ré c éd e m m e n t
la it, et en consacrer la m êm e e x é c u tio n . L e 9 mars 177/1, il a
�affermé p o u r trois ou six années , m o yen n an t i , o 5 o fr. a r g e n t , à
F ra n ço is S e r r e et A n to in e G a tin iol , son g e n d re , ancien fe r
m i e r , le domaine de la G u ib ze, sans en rien réserver ni retenir,
à l ’e x ce p tio n des objets délaissés à titre de ferme à A n to in e Planes,
et q u i n ’étaient pas de In c o m p ris e d r fp i’ésent b ail.
L e s p reneu rs étaient expressément ob ligés de p a y e r chaque
année , et sans a u cu n e d im in ution du p rix de le u r b a i l , la rente
due p o u r / inveslison des Lois, et de passer d e u x poutres sur les
bâtiinens du d o m a in e, suivant l ’indication d u -b a ille u r ; la nature
et la v a le u r de la rente
à p a y e r ne furent pas in d iq u é e s, p u isqu e
les ferm iers étaient les mêmes q u e c e u x de l ’année p récéden te ,
et q u e dans ce bail avaient été d ’abord inséi’es les détails les plus
p récis en ce point.
O n p ro d u it u n e quittance sous la date d u
3 o mars 177^ , f o u r
le p rix de-la ferm e de l ’année 1 7 7 3 , dans la q u e lle il est énoncé
q u e les ferm iers d e v a ie n t , de p lu s , ra p p o rter les quittances de
la dîm e du c u ré , et c e lle d u sieur de L a b r o , p o u r les bois.
L e m êm e dom aine de la G u iè ze fut afferm é, par acte d u
3o
mars 17 7 8 , à Joseph et Jean R o u x , q u i fu re n t astreints fo rm e l
lem en t à jîayer la rente d u e au sieur de L a b r o , p o u r raison du
d r o it d ’investison de ce d o m a in e, dans la forêt de L a r o c h e ,
laquelle rente, est-il d i t , consiste en un setier d ’avoine.
Il résulte des actes p roduits p ar le sieur D e sa u ln a ts, q u e la
seign eurie de L a r o c h e et la fo rê t en dépen dan t, ont été vendues
le 17 août 178/; , par le sieur de L a b r o , à u n sieur I3rassier, et
q u e des difficultés ont été soulevées par le sieur N e y r o n de la
T a n iè re ,
lig n a g er.
parent du v e n d e u r , qu i voulait e x e rc e r le retrait
U n traité sous la date du 10 ja n v ie r 178 5 , mit fin à cette c o n
testation. L e sieur de L a b r o , en délaissant la terre de L a r o c h e
au sieur de la T a n i è r e , déclara le s u b r o g e r a tous ses d r o its,
sans néanmoins aucune garantie dans tout ce qu i était rela tif a u x
2.
�12
)
droits d ’ usage qu i pouvaient, être dus dans le bois de L a r o ch e , et lu i
céda les redevances dues par les usagers , p o u r s’en faire p a y e r
co m m e il aviserait.
P e n d a n t la ré v o lu tio n , le séquestre national fut apposé sur la
terre de L a r o c h e , et co m m e le sieur N e ÿ r o n de la T a r t iè r e était
p la c é sur la liste des é m ig ré s, le G o u v e rn e m e n t se m it én posses
sion de la fo rê t de L a r o c h e , et se tro uva ainsi en ra p p o rt d irect
avec les usagers.
L e sieur B leto n s’empressa de faire valo ir, auprès de l'a u torité
adm inistrative, les droits attachés à son dom ain e de la G u i è z e , et
ne tarda pas h en o b te n ir l’ e x e r c ic e , co m m e p ar le passé.
I l avait d ’a bo rd satisfait a u x e xigen ces des lois de p o lic e sur
les forêts (celles des 2<S ventôse an
il
et 14. ventôse an 32), en
d é p e çan t, sur ré cé p issé , ses titres au secrétariat de la p réfectu re.
O n sait q u e la co m m u n e ou le p a r tic u lie r ayant d roit d ’usage
dans les lorêts nationales, ne p o u v a it , après ce dépôt co nstaté,
être privé de son droit d ’usage , et e m p ê ch é dans son e x e rc ic e .
C ’est dans ce sens q u e le préfet du P u y - d e - D ô m e re n d it, en
ternies g é n é r a u x , u n a r r ê t é , sous
date d u 18 t l i e r m ij o r an 12;
et en ex é cu tio n d ’ i c e l u i , la d é livra n ce et distribution de bois a u x
usagers de la forêt de L a r o c h e e u t lieu , p o u r l ’ordinaire de
l ’an i/|, ainsi q u ’ il résulte d ’ un procès vei’bal rédigé le 29 fruc
tid o r an 10 , par l ’inspecteur des eaux et fo r ê ts , le sieur B o u tarel ; il y déclare avoir m a rq u é cent arbres s a p in s , dans le
canton app elé de C h a n la g o u x , près Charlane, et (ait re m a rq u e r
q u e si ce n o m b re excède do
25 ce lu i de l ’ordinaire de l ’an i3 ,
c ’est qu e les besoins sont plus pressans , et ne d o iven t pas se r e
n o u v e le r p ério d iq u e m e n t.
Parm i les usagers qui ont été admis à cette d é livra n ce , on r e
m a rq u e , au n° 7, le sieur B l e t o n , de T a u v e s , qu i n ’eut p oint
p a r t , est-il d i t , à la distrib u tio n de l ’ord in a ire de l ’an i 5 , p o u r
réparations de son domaine de la G u ièze , et a u q u e l dix arbres
sont a ctu ellem en t délivrés.
�( 1 3 }
C est à p eu près à c e lle é p o q u e , q u e le sieur A m a b le -C a b riè 'l
R e b o u l , représentant de Jean et autre Jean F u m a i , avec lesquels
avaient élé passés deux actes, l ’un d u 1 5 janvier 1 56 1 , et l ’autre
i n v o q u é dans la cause , celu i d u 17 décem b re 160/1 , présenta au
p ré fe t et à l ’administration forestière l ’expéditio n de ces acles,
déposés dès le 8 d é ce m b re 1791 , dans l ’étude d u sieur Cliassaigne , notaire à C l e r m o n t , afin de se fui»e m a in ten ir dans la
possession des droits d ’usage que ces mêmes titres lu i conféraient.
L e conservateur des eaux et forêts tle la d ixièm e division , ap
p elé à s e p r o n o n c e r sur le mérite de cette réclam ation, l ’a ccu e illit
dans son e n t i e r , ainsi q u ’il ré su lte 'd e son a vis, d u 27 d écem b re
1806; on y vo it q u ’il a soigneusem ent exam iné les titres p r o
d u its; q u ’ il a consulté préalablem ent les agens forestiers de la
lo calité , et c ’est après ces examens et ces formalités prélim inaires,
q u ’il estime que le sieur R e b o u l doit être m aintenu dans la pos
session des droits d ’usage accoî’dés aux F u m â t , p o u r le u r c h a u f
fage et p o u r l ’entretien de le u r p ro p riété située dans les villages
D e lm a s - T o u r r e , de G u iè z e e t P i s s o l, à la ch arge de p ay e r ch a q u e
a n n é e , à la S aint-N icolas, entre les mains du r e c e v e u r des d o
m aines, le p r ix de d e u x setiers d ’a v o in e , m esure de L a t o u r , et
m êm e de p a y e r tous les arrérages de cette redevance qu i p o u
vaient être dus.
D e p u is , co m m e avant cet a v is , qui devait profiter au sieur
B le t o n , à raison d u dépôt d u litre du ^ d é c e m b r e 1G04, les dé
livrances co ntinu èren t en faveur des usagers : on r a p p o r te .d e u x
p ro cès v e r b a u x des 26 ju illet 1807 et
5 août 1808 , constatant des
délivrances p o u r réparations de son dom aine de la G u iè z e . L ’un
de ces p rocès v e rb a u x , ce lu i du 5 août 1808, récem m ent d é
c o u v e rt , n ’avait pas encore été p ro d u it : il y est e x p liq u é qu e la
position des usagers est actu e lle m e n t devenue plus favorable ;
q u ’à la décision p rovisoirem ent ren d u e par arrêté du p r é fe t, du
j 8 therm idor an 1 2 , a succédé une décision d éfin itive, ren d u e
�!
(
4
.)
p ar le conseil de p ré fe ctu re , au p ro fit d e l à p lu p a r t des usagers;
et q u o iq u e l ’insp ecteur des eaux et forêts n ’eût pas été officielle
m e n t p ré v en u de cette d e rn iè re d é c is io n , il c r u t d e vo ir écarter
des droits d ’usage les individus dont il avait lu i-m êm e p ro v o q u é
1 éloignem en t par ses co nclusions. L e s délivrances ont été en effet
opérées dans ce sens.
O n a déjà v u q u e f dès les p rem iers m om ens de la mainmise
d u G o u v e r n e m e n t sur la fo rê t de L a r o c h e , et de sa su rv eilla n ce
p ar l ’administration f o r e s tiè r e , les droits du sieur B leton fu re n t
r e c o n n u s , et l ’e x e rc ic e en fut lé g a le m e n t m aintenu.
Il faut actu e lle m e n t r e c h e r c h e r q u e lle a pu être la c o n d u ite du
sieur N e yro n -D e sa u ln ats , après a vo ir fait le v e r le séquestre et
r e c o u v r é sa p ro p rié té . N o u s allons la t ro u v e r c o n fo r m e au titre
de l ’iisager et à son a n cie n n e possession. E t d ’a b o rd , constatons
l ’é p o q u e où la réin tég ration dans la p ro p rié té de L a r o c h e a été
effectuée. O n est d ’acco rd sur ce p o in t : c ’est en l ’année 1809.
S ’ il fallait en c ro ire le sieur N e y r o n -D e s a u ln a ls , il ignorait
alors la consistance et les charges de sa propriété, il savait va gue
ment q u ’ elle était grevée de divers usages.
T e l l e p o u rra it être, sans d o u te , la position ordinaire d ’ un n o u
v eau p ro p rié ta ir e ; mais telle 11’était p as, dans le cas p a r tic u lie r ,
ce lle du sieur D esaulnats, qu i re tro u va it auprès de lu i tous les
m o ye n s de s’é cla irer, et a d u en p ro fite r. L a p ré te n d u e ign oran ce
dont on veut bien le gratifier, dans cette circon sta n ce , n ’est e llem êm e q u ’un e p récau tion oratoire h ab ile m e n t e m p lo y é e , et
dont la portée est facile à saisir : iftfa lla it, par a v a n c e , justifier
le sieur Desaulnats dans ses actes u lté r ie u r s , e x p liq u e r les faits
successifs de d é liv ra n ce volontaire ; il fallait e x p l iq u e r les r é c e p
tions annuelles d ’a v o in o , co m m e p rix de la redevance. Ces faits
d e v a ie n t'ils ê trc considérés co m m e l’e x é c u tio n d ’ un titre et d ’un e
possession r e c o n n u e , o u ,
a u c o n t r a i r e , n ’ être q u e la suite
d ’ une ig n o ra n ce q u i n’avait p u en co re s’é c la ir e r?
�(
>5
)
C ’était là l'e x c u s e q u ’on cntendaitse ménager; mais il n ’y avait
pas de débats à so u le ve r, de questions à poser sous ce r a p p o r t ,
ni d ’excuse à a c c u e i ll ir : il suffisait de savoir ce qu i s’était passé
en 180g.
. L e sieur M a n a r a n ch e , attaché en qu alité d ’h o m m e d ’aiFaires
au sieur Desaulnats p ère, depuis 178 1, habitait la maison de SaintP a r d o u x ; il régissait les biens, prélevait les revenus et surveillait
la forêt de L a r o c h e . O n 11e d é livrait d u bois a u x usagers qu e
d ’après ses o rd re s; il reste mêm e dans les souvenirs des h abhans
de la c o m m u n e , q u ’il ne faisait les délivrancés q u ’après avoir r e
c o n n u les besoins, et q u e l’usager inexact à p a y e r la redevance
é p r o u v a it lu i-m ê m e à son tou r des len teu rs, lo r s q u ’il réclam ait
d u bois.
L e sieur M anaranche était en co re l'agent du sieur D ésa u ln a is,
et résidait dans sa m a is o n , à l ’é p o q u e de la levée du séquestre
su r la forêt de L a ro ch e .
C o m m e n t admettre raisonnablement q u ’un serviteur aussi zélé
et aussi in stru it, n'aura pas fait connaître à son m a ître ,
dès
l ’année 1809, la consistance et les charges de la fo rê t; ne lui aura
pas in d iqu é les usa g ers, les droits q u ’ ils exerçaient avant le séques
t r e , et les redevances a u x q u e lle s ils étaient assujettis? C o m m e n t
admettre q u e le sieur D e sa u ln a ts, so ig n eu x de ses intérêts et h ab ile
à les d é fe n d r e , n ’aura pas r e ç u de son agent tous les renseigneinens
q u ’il pouvait désirer, et n ’aura pas co n n u le n o m b re exact des usa
gers, ce u x q u ’ il devait a ccu e illir, et c e q u ’ild e v a h leu r dem ander?
V o i l à , il se m b le , des circonstances propres à écarter la p r é
tendue ign o ra n ce d u sieur Desaulnats, ign orance q u i , "dans tous
les ca s, n ’aurait p u long-tem ps se p ro lo n g er, p uisque les documens étaient n o m b r e u x , fa cile sà re tro u ve r et saisir, et par suite,
l ’investigation devait être p ro m p te et rapide.
C ’est aussi, on p eu t le d i r e , en grande connaissance de cause,
q u e le sieur Desaulnats a successivement lait d élivrer du bois
�au sieur B leio n p è r e , soit p o u r l ’usage de sesbâtim ens, soit p o u r
son c h a u ffa g e , et a r e ç u , des ferm iers de ce d e r n ie r , les setiers
d ’avoine qui représentaient le p r i x de la concession.
Ces délivrances qui n ’avaient rien de p ré c a ir e ni de provisoire,
ont e u lie u p en dan t près de d ix ans, depuis i8 o c )à 1 8 19 : il est
bien vraisem blable q u e , dans ce laps de tem ps, le sieur D e sa u lnats n ’aurait pas m a n q u é de vérifier les titres attributifs d u droit
dont s’a g it , si déjà il n ’avait e u la p ré c au tio n de s’assurer de le u r
teneur, et de p re n d re auprès de ses agens tous les renseignemen9
nécessaires.
I l faut a jo u ter q u e si c e t ex a m en o u si ces renseignem ens
avaien t été contraires à la possession de l ’ usager, le sieur Desaulnats aurait refusé les délivrances a n n u e lle s , o u aurait eu le soin
de constater ce p r o v i s o ! ^ q u ’il p rétend a c tu e lle m e n t le u r c o n
server. C o m m e n t p o u r r a it-o n c r o ir e à u n e tolérance ou b i e n
v e illa n ce d ’aussi lo n g u e d u r é e , entre voisins, en présence des inte'rêts d u sieur Desaulnats.
L e s choses étaient en cet état, lo rsq u ’u n e saisie im m o b iliè re
fut p ra tiq u ée sur les im m e u b le s du sieur B leto n , ù la req u ête des
h éritiers d u d u c de Castries: le ca h ie r des charges indiquait le
dom ain e d e la G u iè z e et un e m ontagne co m m e objets à vendre ,
11e ra p p ela it p a s , en termes e x p r è s, le d roit d ’usage qu e les p o u r suivans pouvaient fort b ie n ne pas co n n a ître ; m a is il é la itd é c la r é
q u e le dom ain e était ven d u tel q u ’ il se co m p o se , avec ses servi
tudes actives et passives, et q u e les adjudicataires p re n d ra ie n t les
biens tels q u ’ ils se t r o u v e n t .*
I l est mêm e à r e m a rq u e r q u e les poursuivans , m al éclairés sur
la vé rita b le éten due d u d o m a in e, om iren t de c o m p re n d re dans
l'e x p ro p ria tio n d e u x h éritag e s, q u i, depuis, ont été vendus p ar le
pieur B leton , e io n t, par co n sé q u en t, d im in u é d ’autant ce dom aine.
L ’adju dication a été faite le i 5 n o v e m b re 1 8 1 9 , m o ye n n an t
lu som m e de 17,000 fi\, à M . le d u c de Castries, q u i bientôt, par
�' 7 ).,
l ’interm édiaire des son fondé de p o u v o i r , s u b r o g e a , dans^ les
m êm es termes et au m êm e p rix , le sieur D e ls u c , à tous les droits
q u i ven aien t de lu i être attribués.
.D ès ce m o m e n t, le sieur Desaulnats se trouva en présence du
sieur D e lsu c ; il fit p o u r lu i ce q u ’il avait fait p o u r le sieur
Bleton ; il continu a les délivrances constamment acco rd é es, d e
puis la concession de iG 5 4 , a u x diiïerens propriétaires d u d o
m aine de la G u iè ze . D e son .côté, le sieur D e l s u c , en recevant
le b o is , s’empressa de faire porter successivement chez le sieur
Desaulnats, les setiers d ’avoine représentatifs du p rix de la co n
cession.
C e t état de chose q u i , par lu i- m è m e , n ’avait rien de p ro v i
so ire , et n ’était réellem en t q u e la reconnaissance d ’un droit jus
q u ’alors incontesté, cessa tout à co u p en 1827 > P ar 1° refus du
sieur Desaulnats à d é liv re r lê bois nécessaire au sieur D e l s u c ,
p o u r la réparation de ses bâliinens de la G u iè ze .
C ’est là l ’origin e de l ’instance actuelle.
L e sieur D elsu c fait n o tifie r , le 2 3 mars 1 8 2 7 , au sieur D e
saulnats, i°. l ’acte d ’investison d u d roit d ’ usage, consenti, le 17
d é ce m b re iC 5 /|, par Jean de la B a r g e , seign eur de L a r o c h e , à
Jean F u m â t f 2". le contrat de vente consenti au sieur B u r i n , le
27 mars 1758 ; 5 °. le contrat de mariage de la demoiselle B u rin , d u
19 octo bre 1770. 11 expose ensuite q u e , par l ’acte de iG 3 4 , leseig n e u r de L a r o c h e avait investi, « à titre de p erp é tu e lle inves» tison, Jean F u m â t , à son bois app elé de L a r o c h e , p o u r d ’i» ce lu i en p re n d re et em porter par ledit F u m a i et les siens, à
» p e r p é tu ité , tant p o u r son chauffage q u e p o u r c lo r e et fermer
» ses h éritag es; q u e ledit F u m â t était autorisé à p ren d re du
» bois de sapin p o u r bâtir et édifier maisons, granges, étables,
» m o u lin s et autres édifices, etc. ; q u ê t a n t lu i-m êin e aux droits
» de ce dernier, et sur le p oint de construire un bâtim ent dans le
» dom aine de la G u i è z e , il a le d r o i t , a u x termes de l ’acte d ’in-
3
�( i 8 )
» vestison s u s - é n o n c é , de p re n d re dans le b o is de L a r o c h e , ap» p'arienant au sieur Desaulnats, tous les bois en sapin nécessaires
» p o u r la co n stru ctio n d u d it b â tim e n t, a u q u e l le sieur D e lsu c
» se p ropose de d o n n e r u n e lo n g u e u r de 24 m ètres
» mètres (78 p ie d s ) , et un e la r g e u r de 11 mètres
33 ce n ti-
(33 p ie d s).»
L e sieur D e lsu c somme le sieur Desaulnats de d é cla r e r s’il e n
te n d , ou n o n , m a r q u e r o u faire m a r q u e r p a r son fore stie r, les
a r b r e s , essence s a p i n , nécessaires à cette co nstru ctio n ; le sieur
D esaulnats refuse de répondi'e et de signer.
C ’est alors q u e , p a r u n e x p lo it sous la date d u 29 m ars 18 2 7 ,
i l y a e u citation en co n cilia tio n su r la dem ande tendante à faire
co n dam n er le sieur Desaulnats h d é liv r e r au sieur D e l s u c , ainsi
q u ’il v ien t d ’être é n o n c é , le bois nécessaire à la co n stru ctio n
d ’u n b â tim e n t, suivant les dimensions déjà rappèlées.
L e s parties ne p u r e n t s’accorder*au b u r e a u de p a i x , et u n e as
signation do n n ée a u x mêm es fins, saisit le trib u n a l c iv il d ’Issoire.
U n ju g e m e n t r e n d u p ar d é f a u t, le 27 ju ille t 18 27, après c o n
clusions signifiées, a a dju gé la dem ande d u sieur D e ls u c .
C ’est de cette décision q u e le sieur Desaulnats a interjeté
a p p e l devant la C o u r ; il a ré p o n d u à u n interrogatoire sur faits
et a rticle s, q u e le sieur D e lsu c avait fait o rd o n n e r p a r arrêt d u
i 3 a oû t 1829.
L e sieur Desaulnats a v o u e , dans son interi’o g a t o ir e , q u e lq u e s
d élivra n ces de b o is de chauffage o u autres, ainsi q u e la ré ce p tio n
de p lu sieu rs s e tie r sd ’avoine. C o m m e n t , en e ffe t, était-il possible
d e contester ces d e u x faits, si faciles à p r o u v e r ? M a is, tout en
les reconnaissant, il entend le u r conserver un caractère to u t
à fait p r o v i s o i r e , et su b ord o n n é à l ’exam en u lt é r i e u r d u titre
s u r le q u e l le sieur D e lsu c vo u la it a p p u y e r ses droits. I l croit
même Vavoir prévenu q u e si le d roit n ’était pas f o n d é , l ’u n p a y e
rait l ’avoine et l ’autre le boiS.
L e système de réserve embrassé p a r le sieur D esaulnats, dans
�(> 9 )
son interrogatoire, s’est constam ment re p ro d u it dans tout le cours
d u procès. C e p e n d a n t, il faut b ie n le d ir e , si un e retenue cal-*
c u lé e , u n e p ru d e n ce r e m a rq u a b le p e u v e n t sft trouver dans le
langage d u sieur D esa u ln a ts; s’il sait e x p liq u e r avec u n e sage
m esure les actes q u ’il a p u f a ir e , il est so u ven t, dans ces actes
eux-m êm es, u n dém enti fo rm e l à la pensée ou à la volonté que
l e u r auteu r vo u d ra it y rattacher. N o u s aurons l ’occasion de le
faire a p e r ce v o ir au m o m ent de la discussion de la cause.
C ’est Te i 5 'mars i 85 o q u e la C o u r a r e n d u l ’arrêt in t e r lo c u
t o ir e , sur l ’e x é cu tio n d u q u e l les parties sont actuellem en t en
contestation. T o u s les m o yens en droit et en fa it, et m êm e c e u x
en la fo r m e , fu r e n t lo n g u em en t discutés et soigneusem ent e x a
m in é s; l ’existence en elle-m êm e d u droit d ’usage et de cliaufiage
appartenant au sieur D e l s u c , fu t re co n n u e et p ro c la m é e ; il ne
s’éleva de d o u t e , dans l ’esprit des m agistrats, q u e sur son ex e r
c ice pen d an t les trente années antérieures à la demande. C ’est à la
p re u v e de cet e x e rc ic e q u e le dispositif de l ’arrêt a été resti'eint.
V o i c i les termes dans lesquels i l est c o n ç u (1) :
( i ) M . Désaulnats n’a cru devoir rappeler dans son M é m o i r e , que certaios
motifs de l'arrêt interlocutoire, propres à colorer ses prétentions. N o u s en in
diquons ici tous les motifs ; ils serviront de réponse à plusieurs moyens in
voqués dans l ’intérÊt de l ’appelant; ce sera abréger d’autant la discussion.
« E n ce qui to u ch e , est-il d i t , la validité ou invalidité de l ’actc du 17 dé
cem bre i 63^, et l ’ effet qu’a dû avoir cet a c t e , lequel porte concession d’un
droit d’usage dans les bois appelés de M a lguiè ze.et L a r o c h e , dépendans de
la seigneurie de L a r o c h e , pour en j o u i r , par le concessionnaire, pour son
usage des maisons; pour ses ténemens des villages de Guièze et P issol; pour
chauffage et réparations q u ’il pourrait faire dans lesdits téneinens, moyennant
les charges qui y sont énoncées ;
» Considérant q u e , quoiqu’il ne soit pas dit par cet acte que la concession
est faite à pe rp étu ité, on ne peut douter qu’elle n’ait dû avoir ce caractère ;
» Q u ’en effet il y est dit : « N o u s soussigné Jean- 13aptiste de la B a r g e , set-
3.
�( 20 )
« L a C o u r o r d o n n e , avant de faire droit a u x p arties, ei sans
•» p ré ju d ice des m o y e n s , tant de fait q u e de d roit, qui le u r sont
» respectivem ent réservés , q u e le sieur D e ls u c p ro u v e r a , tant
gneur dudit lieu et de L aroche, a v o n s , par ces présentes, investi et investissons
Jean F u m a i , notre fermier de ladite seigneurie de L a r o c h e , de nos Lois et
fo r êts , etc. ; »
» Q u e ces te rm e s , avons investi et investissons, ne compatissent guères avec
une simple faculté de percevoir un droit d'usage qui n’ eût élé que tem poraire;
que ces expressions se trouvent dans les actes anciens portant concession de
propriété d’immeubles à titre de cens , laquelle concession était toujours per
pétuelle ; que d’ailleurs si la concession dont il s’ agit n’ eût été que temporaire,
on n ’ eût pas manqué de le stip u le r , en marquant l ’époque de la durée de la
concession ;
» Q u ’ on voit ensuite que la concession est faite sous la condition que le.
concessionnaire sera tenu de payer un chacun an , à chaque jour de St-JVico!as
d 'h iv e r , un setier d ’a vo in e, qu’ il sera tenu de porter audit L a r o c h e ; que cctle
obligation générale et indéfinie, imposée au concessionnaire de porter la re
devance chaque année, à un jour in d iq u é, suppose nécessairement la p erp é
tuité de la prestation, parce qu’on ne peut raisonnablement supposer qu’on
n ’ eût pas limité la prestatio n , par la mention de sa d u ré e , si la concession
n’eût dû ôtre que tem poraire;
» Q u on^ne peut pas plu? supposer que la concession ne dût avoir lien que
pour le temps que J ea n F u m â t devait Ctre ferm ier de la terre de L a r o c h e ,
parce qu’ il est bien sensible que les mots noire ferm ier de la seigneurie île La
roche , ne sont em ployés que par forme de désignation de l'in dividu, mais non
par form e de restriction de la durée de la c o n c e s sio n , au temps pendant lequel
J ean F u m ât devait ôtre fermier ; qu’ une pareille restriction ne peut se suppléer
sans courir le risque de détruire une c o n v e n tio n , lorsque tout annonce un
esprit différent ;
» Considérant qu’ on ne peut pas attaquer cet acte de nullité en la forme ,
sur le fondement qu’ il n ’est pas dit qu’ il ait été fait d o u b le , et qu’ il ait élé
approuvé par les parties ; ce qui a lieu ordinairement pour les actes sous seing
privé ;
» Q u e d’aborJ
»
¡1 est
dii dans l ’a c t e , en f u i de quoi nous sommes soussignés; ce
�( 21 )
« p ar titres q u e par té m o in s, q u e , dans le cours des (renie années
» qu i ont p récéd é la dem ande, il a , lu i ou c e u x qu ’il représente,
» e x e rc é le d roit d ’usage q u ’ il réclam e sur le bois de L a ro clie ,
qui se rapporte an concédant et ledit F u m â t ; que l ’extrait de cet acte , délivré
par C hassaigfle, notaire à C l e r m o n t , chez lequel il fut déposé le ÎÎ décembre
1 7 9 I i ap p reud que l ’acle était revêtu de la signature de L a Barge , qui était
celle du concédant; et que par forme de l ’approbation de l'a cte, la signature
de F u m â t , qui était le concessionnaire , est précédée de ces mots : Pour un selier
avoine, mesure de Larorhe;
» Considérant que les vices de forme qui pourraient exister dans un acte de
cette ancien n eté, et à une époque où l’expérience apprend que la jurisprudence
n ’était pas fixée avec précision sur les formalités des actes sous seing privé ,
qui pouvaient être syuaitogmatiques , seraient couverts par des mentions con
tenues dans des actes postérieurs qui supposent l ’existence réelle du droit d’u
sage en question ;
» Q u e c ’est ce qui résulte d’ un traité du i o janvier 1 7 8 5 , reçu Baptiste et
son co n fr èr e, notaires à C l e r m o n t , lequel traitij, fait entre le sieur D um as de
L a b ro , le sieur Brassier et le sieur N e y ro n de la T a r t i è r e , représenté par le
sieur N e y ro n Desaulnats , apprend que sur une vente faite par le sieur de Labro
«u sieur B rassier, de la terre de L a r o c b e , dont faisaient partie les bois sujets
au droit d’usage dont il s’a g ît, le sieur N e y r o n de la Tartière avait exercé un
retrait lignager contre ledit B ra ssie r ; qu’ il s ’était élevé des contestations à ce
su jet, e n iie lesdits sieurs de L a b r o , Brassier et N e y ro n de la T a r t i è r e , qui
prirent fin par ce traité, dont le résultat fut le délaissement fait de la terre de
Laroci/e au sieur N ey ro n de la T a rtiè re ; qu’on voit dans ce traité une clause
qui p o r t e , article
3 , que
le sieur de L ab ro entendant subroger le sieur de la
T a r t i è r e , sans néanmoins aucune garantie, dans tout ce qui est relatif aux droits
d’ usage dans les bois de L a r o c h e , lui a cédé les redevances dues par les pré
tendus et soi-disant usagers, à l’ effet par ledit sieur de la Tartière de s’en faire
payer c o w n e il a v is e r a , pour les redevances échues et m im e celles à écbeoir à
l ’a v e n ir , le tout à scs périls , risques et fortune , com m e dessus est dit ;
» Q u e cette clause prouve incontestablement qu’ il existait des droits d’usage
, qui étaient le prix de certaines redevances, ou qu’au moins ces droits d’usage
étaient réclamés ; çt on peut présumer facilement que celui en question était
�» a u v u , a u s u , et d u consentem ent d u p ro p riéta ire d u bois
» p ré te n d u assujetti au» d r o i t , ou de c e u x q u ’il représente.
» Q u e le sieur D e lsu c p ro u v e ra é g a le m e n t , et de la m êm e
du n o m b r e , d’après les titres précédem m ent rappelés et ceux dont il sera parlé
dans la suite.
*
» C onsidérant que le sieur N e y ro n -D é sa u ln a ts ne peut tirer aucune induc
tion de ce q u e , dans une vente notariée qui a été faite le 27 juillet 1657 , par
le sieur C hristophe-Fra nçois de la B a r g e , au profit de M . G eorges N e y r o n ,
prieur de B riffon s , représenté par le sieur N e y r o n - D é s a u ln a ts , de la terre de
la Tartière et de la seigneurie de L a r o c h e , et domaines en d ép en d a n t, il n ’ est
fait aucune mention des droits d’usage auxquels les bois des terres vendues
eussent été assujettis ;
1
» Q u ’ un pareil silence ne saurait avoir assez de f o r te pour porter atteinte à
un droit qui serait déjà établi en faveur des tiers, sur l ’objet qui serait vendu;
que d’ailleurs il est dit à la suite de la clause portant vente des deux seigneuries
de la Tartière et de L a r o c h e , le tout ainsi qu’elles ont été jouies par le seigneur
vendeur et scs prédécesseurs, sans en rien retenir ni r é serve r; que de cette
dernière clause il résulte que l ’on a entendu vendre les biens tels qu’ ils se com
portaient, et par conséquent avec leurs droits actifs et passifs ;
» Q u e d’ailleurs l ’acte de 1 7 8 5 , dont il est ci-dessus pa rlé , prouve bien que
les biens étaient assujettis à des droits d ’usage ; qu’ on pourrait d ire, il est vrai,
que dans l ’intervalle de 1657 à 1785 , ces droits avaient disparu , par rachat ou
autrement; mais que c ’ est là une sim ple présomption qui est c o m b a ttu e 'p a r
les circonstances;
» Considérant qu’ on ne peut non plus tirer aucune induction de ce q u e ,
dans l ’acte d’adjudication du domaine de la G uièze faite au duc de Castries sur
le sieur TUcton, partie saisie, le i 5 novem bre 1 8 1 9 , il n ’est point fait mention
du droit d’usage qui devait appartenir à l ’adjudicataire sur les forêts de
Laroche !
» Q u ’on ne doit pas perdre de vue le principe qu’un droit d’usage n ’est
point un droit personnel, mais un droit r é e l , inhérent aux biens et bâtimens
pour l ’usage desquels il a été concédé; qu’ il ne peut être vendu seul et séparément;
en sorte qu’ il suit toujours les biens et bâtimens qui ont été l ’objet de sa
destination ;
» Q u e d’ailleurs il n’est pas étonnant que l ’adjudication n’ en fasse pas men-
�» m a n i è r e , q u e , dans le même espace de temps, ledit sieur D elsu c,
» ou c e u x q u ’il re p ré se n te , ont p a y é .la redevance, p r i x
du
tîon ; que le duc de Castries , créancier thi sieur B l e t o n , propriétaire du do
maine de la G u i è z c , et qui faisait vendre ce domaine sur expropriation forcée ,
était uniquement occupé de faire mettre à fin cette expropriation ; et qu’il en
tendait que ce domaine fût adjugé tel qu’il se c o m p o rta it, et avec tous les droits
actifs et passifs qui s’y rattachaient; que c’ élait là où se terminait son in té r ê t;
que cela devait être a in si, parce que tous les titres qui établissaient des droits
en faveur des biens saisi* étaient au p o u v o i r , non du duc de C a s tr i e s , mais
bien au pouvoir du sieur B l e t o n , partie saisie, qui ne pouvaitpas être forcé à les
r e m e tt r e , et que cet état de choses est prouvé de la manière la plus positive
par une clause'de la vente du domaine de la G u iè z e , faite par le. duc de Castries
qui en était devenu adjudicataire, ou par le sieur C h a r o la is, son fondé de
p o u v o ir s, au profit du sieur D e l s u c , par acte notarié du 12 févrfer 1821 , dans
laquelle clause il est dit que le sieur D elsuc se pourvoira ainsi qu’ il avisera,
po ur se procurer les titres de propriété dudit d o m a in e , le sicuç Charolais dé
clarant qu’il n’ en existe aucuns dans ses mains e l dans celles de M . le duc de
Castries ;
» D e tout quoi il résulte que le droit d’usage dont il s'agit a toujours suivi
naturellement le domaine de la G u i è z e , parce qu’il n’y a eu aucune renoncia
tion ou abdication directe ou indirecte de la part de ceux qui en étaient p r o
priétaires, ni de la part de celui qui l ’avait fait saisir et adjuger, et qui avait
"intérêt de le 'c o n s e r v e r , bien loin de le laisser perdre ;
» Considérant que dans plusieurs titres subséquens, le droit d ’usage dont il
s ’agit est rappelé par ceux qui avaient intérêt et qui n ’avaient d’autre, titre à
faire valoir que celui de iG 3£; que par acte notarié du 19 mars 1 7 5 8 , dame
G a brielle F u m â t , épouse du sieur de B o n n et, qui représentait les sieurs F u m â t ,
en faveur desquels ce droit d’ usage avait été constitué, com me maîtresse de ses
biens paraphernaux, vendit au sieur Jean B u rin -D u b u isson , le domaine de la
G u iè z e ; qu’ il y fut stipulé que la vente était faite avec les servitudes dues et
a ccoutum é es, et a u tres, ses circonstances et dépendances, sans réserve au
cune , tout ainsi et de m êm e qu’ il est c o m p o s é , et que ladite dame et ses auteurs
en ont joui ou dû jo u ir , ou leurs fermiers ;
» Q u e le 19 octobre 1 7 7 3 , le môme sieur Burin-Dubuisson ayant m arié
�(
'a 4
)
» droit d ’usage p réten du ; sa u f a u sieur N e y r o n - D e s a u ln a t s , fa
» p re u v e co n tra ire. » .
.
demoiselle Marie B u r i n , sa fille, a v tc le sieur Alexandre B l e t o n , lui consti
tua en dot le môme domaine de la G u i è z e , et qu’ il y esl dit avec le droit
d ’usage , et prendre du bois dans la forât de Laroche , tout ainsi et de même
que le sieur B u rin on ses fermiers en ont jou} ou dû jouir;
» Q u e par acte notarié j du
mars de la m êm e année 1 7 7 3 , le sieur B urin
avait affermé le domaine de la G uièze à François S erre et An toin e G atiniol ;
qu’ on y voit la charge imposée aux fermiers de payer au sieur de L a b r o , un
setier d’avoine et une p o u le , pour droit d’ investison dudii domaine dans la
forêt de L a r o c h e; qu’ il est ajouté que les preneurs seront en outre tenus du
passer deux arbres dans le plancher de la grange , qu’ ils prendront dans ladite
forât ;
« Q u e la m êm e charge est encore imposée pour le m êm e droit d’investison ,
par le sieur B l e t o n , par un bail de ferme du mêm e d o m a in e , par lui fait
devant notaire,, le g mars 1774., aux mêmes fermiers ci-dessus, et par un autre
bail <le ferme fait aussi devant n o ta i r e , en faveur des nommés H o u x , le
20 mars 177 8;
» Considérant qu’ en 1791 , et à raison de l’ inscription du nom du sieur
N e y n n de la T a n i è r e sur une liste d’é m igrés, le séquestre national ayant été
apposé sur la terre de L a r o c h e , le G ou v ern e m e n t s’étant mis en possession et
jouissance de cette terre et de ses dépendances, lou s ceux qui prétendaient
Sire usagers dans la forêt de L a r o c h e , du nombre desquels était le sieur B l e t o n ,
réclamèrent le droit d’usage en question , contre l ’administration des biens
séquestrés; que les usagers dans la forêt de L a r o c h e , qui avaient déposé leurs
titres a>i secrétariat de la préfecture , en exécution d une loi du 28 ventAse
an 1 1 , furent maintenus provisoirement dans leur droit de chauffage et autres
usages, par un arrêté de la préfecture du département du P u y - d e - D ô m e , du
18 thermidor an 1 a ; qu’ en conséquence de cet a rr ê té , il fut fait aux usagers
une distribution de différens arbres , par un acte fait par l ’ inspecteur des fo r êts,
err date du 29 fructidor ari i 3 , dans Içquel on voit figurer le sieur B le to n pour
tine certaine quantité d’a rb r e s , pour réparations à faire dans son domaine de la
G u iè z e ; le tout néanmoins sous la véserve des droits da G ou v e r n e m e n t; qu’ on
voit encore dan* un autre acte du
25 juillet
1 8 0 7 , une nouvelle distribution
�(
a5 )
E n exé cu tio n de cet a r rê t, les parties ont respectivem ent fait
p r o c é d e r à l ’audition des témoins ; nous aurons à exam iner les
enqu êtes et à en constater les résultats.
entre les usagers, parmi lesquels est compris le m im e sieur B le to n * au n° 6 ,
pour chauffage pour son domaine de la G u iè z e , et au n° 1 8 , po ur réparations
à faire au même dom aine;
» Q u e le sieur D elsu c a avancé et soutenu que les mômes délivrances de bois
d i chauffage et de construction avaient eu lieu , selon ses besoin s, pendant les
années suivan tes, jusqu’à sa demande ;
» Considérant q u e , d’après cet état de choses , il doit demeurer pour certain
que le sieur D elsuc a , en sa fa veu r, de son chef ou de ceux qu’il représente,
un titre quî lui donnerait droit à l ’usage qu’il réclame ;
» Mais considérant q u e , suivant la jurisprudence, ce titre ne suffit pas pour
l ’ établissement d’un pareil d roit; qu’ outre ce t i t r e , il doit Être fondé sur une
possession trentenaire, postérieure au titre; parce qu’à défaut de cette posses
sio n , ce litre serait prescrit, et que cette prescription aurait opéré l'affranchis
sement du d r o i t , quand même il aurait été établi long-temps auparavant;
» Considérant encore q u e , suivant cette même jurisprudence, pour que la
possession soit val.ible et puisse opérer son e f fe t, il faut qu’ elle soit accom
pagnée de la délivrance du b o i s , faite du consentement du propriétaire, et de
la prestation de la redevance moyennant laquell« la concession du droit d’usage
,9 été faite dans le principe ;
» Considérant que le sieur D elsuc ne rapporte ni la preuve par écrit du con
sentement donné à chaque d élivrance, p a r l e propriétaire, ni la preuve du
pa y em en t de la redevance, i chaque délivrance, et qu’ il offre seulement de
prou ver par tém oins, soit le consentement à la délivrance, soit le payement de
ia redevance, et c e , dans le cours de trente années avant la demande;
» O r , considérant que toutes les mentions contenues dans tous les actes cidessus énoncés , doivent être regardées , au m o i n s , comme autant de conimencemens de preuve par écrit du consentement à la délivrance et du payement
de la redevance ; q u ’on doit encore attribuer le même effet aux décisions
prises par l'administration , qui ont maintenu le sieur B l e t o n , ou ceux qu’ il
r e p r é s e n te , dans l ’exercice du droit d’ usage dont il s’a g it, m im e quoique ces
décisions n’ aient été que provisoires et prises sous la réserve des droits du
4
�I l s’agit
ü a ctu e lle m e n t de r e c h e r c h e r ,
i". Si au m ilieu des faits et actes d e la cause , tels q u ’ ils ont été
r a p p e lé s , si dans le u r com binaison avec les dépositions des té
m oins eniencfiis, le sieur D e lsu c a co m p lè te m en t satisfait au v œ u
de l'arrêt de la C o u r .
'
2°. Q u e l est l ’état présent d u dom ain e? L ’étendue et dim ension
p rim itiv e m e n t assignées a u x bâ tim e n s, seront-elles changées p ar
les réparations d u sieur D e l s u c ?
L a position d u p ro p riéta ire grevé d u d ro it d ’u s a g e , sera-t-elle
a g g ra v é e p ar suite des recon struction s et réparations du sieur
D elsu c?
§ P r. L a prcm 'e imposée au sieur D elsuc a t-elle é té fa ite P
T e l le est, il no us s e m b le , la question u n iq u e de la cause, la
seule q u i ait été re te n u e p ar la C o u r , et d o n t la solution doive
a c tu e lle m e n t fixer l'attention. I l n ’existe p lu s d ’in certitu d e sur
le d roit d ’usage et de c h a u ffa g e , qu i était d ’a b o rd co n testé : il
n ’est p lu s de doute à so ulever sur l’existence d u titre en lu i-m ê m e .
Il doit demeurer certain, on t dit les magistrats dans l ’ un des
motifs de le u r décision , que te sieur D elsuc a , en sa fa v e u r , de
son c h e f ou de ce u x q u ’ il représente, un titre qui lu i donne droit à
l'usage qu'il rcclnme.
V o ilà u n e disposition définitive et in a tt a q u a b le : e lle place
do rén a v an t, à l’abri de tou te discussion n o u v e l l e , la réalité d u
droit qui a etc r e c o n n u , et l ’on p eu t ineinc ajo u ter q u e , sous
f
G o u v e r n e m e n t, puisque, d’après les circonstances, il ne dépendait pas du
sieur M e lo n , ou de ceux iju'il r eprésente, d’ exercer autrement leurs droits, :
. .. Par tous ces motifs ,
» La Cour , etc. «
�( 27 )
ce r a p p o r t , l ’arrêt n ’a p lu s ?e caractère d ’un arrêt in terlo cu to ire ;
il devient contradictoire , ordinaire et définitif.
I l est vrai q u ’u n e p re u v e a été o r d o n n é e , celle de savoir si
le sieur D elsuc a e x e rc é u n e possession dans u n délai déterm iné;
mais cette p re u v e est essentiellement jir é ju d ic ie lle , p u is q u ’elle
repose sur le p rin c ip e d u droit q u i était controvex’sé entre les
p a r tie s , et
auquel se tro u v e évidem m en t s u b o r d o n n é le fond de
la décision. P eu im p orte la qu alificatio n d ’in te r lo c u to ir e im p ri
m ée à l ’a r r ê t; e lle lu i app artient, sans d o u te , dans le résultat
qu i g ît en p r e u v e ; mais il n ’ en est plus de m e inc dans le ré
sultat d é d u it de l ’exam en des litre s, et q u i a c o n d u it à l’econnaître et p ro c la m e r les droits d u sièur D elsuc.
C ’est sous ce dernier p o in t de vue q u e la décision ne p e u t
p lu s être attaquée.
P l u s i e u r s arrêts de C ou rs royales ont déjà accepté ce! te d istin c
t io n , et la C o u r de R io m l ’a elle-m êm e posée, le 10 février i 83 i ,
dans la cause d u sieur R e y n a u d , co n tre B o hat-Lam y.
A i n s i , il n ’est p lu s perm is a u sie u r Desaulnais , co m m e il l ’a
fait, de reprendre le p r o c è s , tel q u ’il se présentait à la p rem ière
a u d ie n ce ; tout exam en critiq u e sur les titres invo qués p a r le
sieur D e ls u c , et qui tendrait à contester ses droits en eux-mêmes,
est désormais interdit : il y a cliose ju gée sur ce p o in i ; elle doit
ê lre respectée : la discussion reste e n tiè re , seulem ent sur les té
m oignages respectivem ent p ro d u its; ce sont les seuls élémens à
in terro g e r et à débattre.
C e t état de la cause ainsi f i x é , doit être respecté avec d ’au
tant plus de raison, q u e l ’arrêt de la c o u r atteste q u e les titres
o n t été successivement et sérieusement examinés ; q u e la réponse
a été fo u rn ie à tous les m o y e n s , com m e à toutes les objections.
I l suffit, p o u f s’en c o n v a i n c r e , de consulter les n o m b r e u x mo
tifs donnés sur ch a cu n des actdl présentés'à l ’appui des p ré te n
tions respectives des parties.
4.
�( 2* }
V o y o n s d o nc q u e lle était la p reu ve à faire par le siëur Del-'
s u c , et q u elle s conditions y étaient attachées.
II devait p r o u v e r ,
i°. Q u e dans le cours des trente années qui ont p récédé la de
m ande , il a v a it , lu i o u c e u x q u ’il représente, exei-cé le droit
d ’usage q u ’il réclam e sur le bois de L a r o c h e , au v u , au su et d u
consentem ent du p ro priétaire ;
2°. Q u e dans le même espace d e tem p s, il a p a y é la r e d e v a n c e ,
p r i x d u droit d ’ usage.
C ’est h ces d e u x faits p rin c ip a u x q u e la p re u v e était ram enée ;•
l ’e x e rc ic e d u droit d ’usage, ainsi q u ’ il était c o n d itio n n é , et le
p ay e m e n t de la redevance. Cette démonstration n ’était m êm e pas
e x ig é e p o u r tous les ans; il suffisait de la re tr o u v e r dans le cours
des trente années antérieures à la dem ande.
L a dem ande ayant été formée en 1-827 , il fallait dès lors
r e m o n te r ju sq u ’en 1797 p o u r r e m p lir le voeu de l ’arrêt in te r lo
cu to ire ; c ’est dans ce laps d e temps de 1797 à 1 8 2 7 , q u e les té
m oins devaient déposer des faits relatifs à la d é livra n ce et au
p ay e m e n t de la redevance.
^
Ces faits se rattachaient à trois époques bie n distinctes.
L a prem ière co m p ren ait l ’e x e rc ic e de la possesion à éta b lir
p ar le sieur B leton , alors p ro priétaire d u dom aine de la G u i è z e ,
p en d an t la su rv eilla n ce de l'adm inistration des e a u x et forêts ,
ju s q u ’à l ’année 1809, o ù le sieur N e yron -D e sa u ln ats fit lever l e
séquestre et re co u vra sa p ropriété.
L a d e u x iè m e é p o q u e co m p ren ait en co re la possession du sieur
B l e t o n , à justifier depuis 1809 ju s q u ’au jo u r de l ’adju dication
et revente d u dom aine (en 1819 et 1 8 2 1 ) , en faveur d u d u c
de Castries, ou q u o iq u e ce s o i t , d u sieur D e lsu c.
L a troisième é p o q u e , plus re stre in te , s’ était é c o u lé e ju sq u ’au
jo u r d e la d e m a n d e , et devait ra p p e le r les faits personnels au sieur
D e lsu c. Cette p re u v e ainsi resserrée duns cette p ério d e de temps.,
�( 29 )
pouvait se faire tant par titres q u e par témoins ; e t, à Cet égard ,
il est, avant les témoins q u i seront interrogés p lu s tard , des élémens d ’appui à in v o q u e r par le sieur D e l s u c , et qui se puisent
dans lesdiiFérens actes par lui produits.
A peine les lois de p o lic e sur les bois et forêts , celles des 2S
v e n t o s e a n 11 et in v e n t ó s e an 12 ont-elles p a r u , q u ’u n arrê té ,
d u préfet du P u y -d e -D ô m e , sous la date d u 18 th e rm id or an 12,
a m aintenu provisoirem ent les usagers dans l ’exei’cice de le u r
dro its, ju squ’à décision contraire, à la ch arge p ar e u x de justi
fier d u dépôt de leurs titres, avec récépissé d u secrétariat.
C e lte formalité de dépôt des litres * dont l ’in e x é cu iio n semblait
entraîner d é ch é an ce ,’ n ’a pas é t é , com m e on sa it, exactem ent
r e m p lie p a r les com m unes et par
les p a rtic u lie rs ayant d roit
d ’ usage ; on sait aussi qu e les autorités administratives n ’ont pas
v ig o u re u s em e n t frappé de déch éan ce les usagers retardataires ;
il en est u n grand n o m b re q u i ont été relevés de cette déch éan ce :
on le u r a donné toutes les facilités possibles; on a re co n n u le u rs
d r o it s , toutes les fois q u e l ’occasion s’est p résen tée; et le C od e
forestier lui-m êm e r e n f e r m e , dans son art. 6 1 , u n nouveau délai
de d e u x années, en faveur des usagers q u i, depuis q u in ze ans, n ’a
vaient pas usé d u bé n éfice q u e la loi le u r a cco rdait.
T o u te fo is , tlès les p re m ie rs m om ens de la p u b lication des lois
de ventôse an n
et an 12 , des délivrances de bois avaient e'ié
r é g u liè re m e n t faites a u x usagers de la forêt de L a r o c h e . Il résulte
en effet d’un procès verbal dressé le
29 fru ctid o r an*i 3 , p a r le sieur
B o u t a r e l , insp ecteur des eaux et forêts, q u ’il a v a it , à cette époque,
distribu é d u bois p o u r l ’ordinaire de l ’an i/f. Le m êm e procès
v e rb a l constate u n e d élivra n ce précéden te p o u r l ’an i 5 , dont
les besoins, est-il d i t , avaient été plus pressons, et dépassaient de
-vingt-cinq arbres les besoins de l ’an i/J.
P a rm i les personnes a ya n t pris part à
cette délivrance de bois
p o u r l ’an i/j, on re tr o u v e au n° 7 le sieur B leton , qui n ’avait pas
�p ro fit 4 dë la d istribu tion de l ’an i 5 , et q u i r e ço it pour les répa
rations de son domathe de la G u ièze, d ix arbres m arqués depu is le
n°
3 6 . . . jusques et co m p ris le n° 46.
II est vrai q u e ce p rocès verbal c o n t i e n t , au p rofit du G o u
ve rn e m e n t, telles réserves et restrictions de d r o i t , si le cas y
é c l i e t , après le ju g e m e n t q u e devait p r o n o n c e r l e conseil de p ré
fe ctu re su r les diverses p ro duction s de litres faites par les d ifierens usagers dénom m és audit p ro cès v e r b a l ; mais u n avis d u
co n se rva te u r des eaux et forêts, re n d u le 27 d é ce m b re 1 8 0 6 ,
statua sur le m é rite des titres des i 5 jan vier i 5 6 i et ^ .d é c e m b r e
i 6 5 4 , q u i avaient été sim ultaném en t déposés a u secrétariat de
la p r é l e c t u r e , par le sieur G a b r ie l R e b o u l , le m êm e q u i déjà
avait déposé ces litres, en 1791 , en l ’étu de d u notaire Chassaigne.
I l fut alors re c o n n u q u e ces actes étaient r é g u li e r s , q u ’ils a c c o r
daient a u x F u m â t des droits d ’usagé et de chauiFage dans la
f o r ê t de L a r o c h e , et q u e Jeurs représentons devaient êti’e m ain
tenus dans la possession de ces droits , à la ch a rg e de m a rq u e et
de d élivran ce , et de p a y e r la r e d e v a n c e , ainsi q u e tous arrérages
q u i p ouvaien t en être dus.
L e bén éfice de cet avis d u conservateu r des e a u x et forêts
n'était pas u n iq u e m e n t r e c u e i ^ i p ar le sieur R e b o u l ; il ne lu i
était avantageux q u ’à raison d u titre d u i 5 janvier i 5 6 i , p o u r
les p ro priétés p r o v e n a n t des F u m â t , et situées dans les vil-t
la g e s d e D e lin a s-T ou rre et P i s s o l , tandis q u e le dépôt de l ’autre
titre du 17 d é c e m b r e iG 5 4 , fait en m êm e temps q u e c e lu i de
i 5 Gi , profitait e x clu siv e m e n t au sieur B l e t o n , co m m e r e p r é
sentant aussi les F u m â t , p o u r son dom aine de la G u iè z e .
"
C ’est en e x é cu tio n de cet avis fa v o r a b le , q u e les délivrances
on t c o n tin u é p o u r les années 1808 et 1809, et ont été faites,
no tam m ent au sieur B le to n , co m m e ayant des droits d ’usage et de
ch auffage , ainsi q u ’ il résulte de d e u x p rocès v e r b a u x sous Iqi
date des 2 5 ju ille t 1807.01
5 août 1808,
�( 3 -i )
C e d e rn ie r p ro cès verbal , no n rapporté à la prem ière a u
d ie n c e , apprend q u e la position des usagers n ’avait plus rien de
pro visoire en i 8 o 3 ; q u ’a cette é p o q u e , vine décision définitive
avait été re n d u e par le conseil de p ré fe c tu r e , et avait enfin fixé
la position des usagers. Si toutefois, com m e il convient de le
faire o b se r v e r , l ’insp ecteur des eaux et forêts, lors de son trans
p o r t , avec le
sous in s p e c te u r , le garde général et les gardes p a r
t ic u lie r s , dans la forêt de L a r o c h e , p o u r assister à la m a rq u e
et d é livra n ce des b o is , d é cla re , en ce mêm e p ro c è s v e r b a l , qu e
la décision d u conseil de p réfectu re ne lu i était pas co n n u e
officiellement, il n ’en constate pas moins l ’existence des disposi
tions p rin c ip a le s; il in d iq u e surtou t les élém ens personnels de
déterm in ation qu i devaient le g u id e r p ou r les distributions de
b o i s a fa ir e , et qui se p u isaien t, no n-seulem ent dans l ’opinion
p u b l iq u e signalant les
faux « s a g e r s , dont il avait lu i- m ê m e ,
p a r ses conclusions devant l ’autorité administrative , p ro v o q u é
l ’é lo ig n e m cn t, mais encore dans ses propres renseigneinens et
l ’exam en des titres de ch a q u e prétendant droit.
Il
est juste d e dire q u e ce procès verbal de 1828, com m e tous
c e u x pro duits par le sieur D e ls u c , n ’ont été considérés par l'arrêt
de la C o u r , q u e co m m e des com m en cem ens de p re u ve par é c r it,
p a r c e q u ’jls r e n fe r m e n t, dpns le u r c o n t e x t e , des réserves au
p ro fit d u G o u v e r n e m e n t , et sem blent ainsi n ’avoir q u ’ un effet
p ro v is o ir e ; cependant il faut b ie n aussi rem a rqu er qii’à cette
é p o q u e , le sieur B leto n était dans l ’im possibilité d ’e x e rc e r autie m e n t ses droits : il ne dépendait pas de lu i de se placer dans
u n e position différente; il se trouvait e n ch a în é vis-à-vis l ’autorité
administrative , avec la q u e lle il devait nécessairement se m e u re
e n ra p p o rt, p o u r la conservation de ses droits : c ’est elle qui ,
p a r la force de® lois transitoires, était appelée à exam iner les
titres et j u g e r le u r validité ; c ’est elle q u i , p ar une décision pres
q u e so u v e ra in e , maintenait les usagers en possession, ou les re
poussait à jamais.
�( S * ) '
'
L e sieur B leton dut r e m p lir les prescriptions de ces lo is ; il y
a satisfait p a r lu i-m ê m e , o u p a r le sie u r R e b o u l , stipulant dans
u n intérêt c o m m u n , lors d u dépôt de titres au secrétariat de la
p r é fe c t u r e . U n avis favorable du conservateur des eaux et forêts
considéra ces titres co m m e incontestables, et en consacra tous
les effets. I l était^reconnu q u e les représentans des F u m â t , en
ve rtu des actes de i 5 6 i et i 6 5 4 , devaient être m aintenus dans
la possession des droits d ’usage et de chauffage.
Si. u n e co n d ition était imposée à l 'e x e r c i c e de ces d r o it s ,
s a v o ir , le p ay e m e n t de la red eva n ce et des arrérages q u i p o u
vaient être du s, on ne p e u t contester l ’e x é c u tio n de cette c o n
dition , inséparable de la d é liv ra n ce d u b o i s , p u is q u e ces d é l i
vrances ont eu lie u à p lu sieu rs fois, ainsi q u ’il appert des différens
p ro cè s v e r b a u x de l ’an i 3 , i/fj 180 7, 1808; e tc ., car il y avait
o b lig ation , de la part des agens d i f G o u v e r n e m e n t , de p e r c e v o ir
la redevance au fu r et à m esure de ch a q u e distribution de bois ;
et des délivrances successives n ’auraient p u s’effe ctu e r sans le
p a y e m e n t du p r i x de la concession.
L e sieur Bleton a d o n c f a i t , pendant la d o u b le surveillance
des autorités administrative et forestière, tout ce q u ’il lu i était
possible de faire p o u r la constatation et la conservation de ses
d r o its; il les a e xercés dans les termes et suivant le m ode im r
posés p ar les lois et p ar les actes de l ’é p o q u e : «en agissant au*
tre m en t ; il se fût exposé à un e d é ch é an ce .
.
F a u d ra -t-il lu i adresser a u jo u r d ’h u i le r e p r o c h e d ’avo ir exc>
c u té la l o i , et de s’ être co n fo rm é a u x mesures indiquées p a r les
autorités com pétentes en cette m atière ?
D ’a ille u r s , ces actes a d m in istratifs, ces procès v e r b a u x des
agens forestiers, s’ ils n ’ont été retenus au p rocès q u e co m m e des
co m m e n ce m e n s de p re u v e p a r é c r i t , ils sont fa cile m e n t corrorb o ré s par les enquêtes. C ’est là q u e la p résom ption déjà acquise
a u sieur D e l s u c , p résom ption q u i tendait à faire cro ire à H
�( 33 )
conservation d ’un droit dont la C o u r avait p ro cla m é l ’e x isie n c e
p a r son a r r ê t , v ie n t r e c e v o ir son com plém ent.
l’en ferm é
dans
Tout y
sera
ces tém oignages : la d é livra n ce , com m e les
m o ye n s de l ’attester ; l ’em p lo i d u marteau destiné à m arqu er les
a r b r e s, com m e le p a y e m e n t de la re d e v a n c e ; e n f i n , la déclara
tion d u p ro p riéta ire de la forêt , portant q u e la délivrance
v a la it, à e lle s e u le , u n e qu ittance. O n y verra constam ment le
p ro p rié ta ire de la f o r ê t , o u ses agens , en présence des ferm iers
d u dom aine de la G u i è z e , assister a u x distributions d u b o i s ,
ne les contester jamais, et im p rim e r ainsi fo r c e et e x é cu tio n a n
n u elles a u x titres de l ’usager.
L e s tém oins produits p a r le sieur Desaulnats lu i-m ê m e v ie n
d ro n t rapp eler l ’expression de l ’op in ion p u b l i q u e , en î-econnaissant d e s 'd r o its q u e la p lu p a r t d ’entr’e u x on t toujours vu
e x e rc e r
sans opposition. C ’est aussi sous la promesse de ces
résultats ,* q u e l ’on p e u t in te r r o g e r , avec co n fia n c e , les déposi
tions re cu e illie s, et dire p a r avance q u e le sieur D e l s u c , q u i
n ’avait à p ro u v e r q u e qu elq u e s faits isolés, et passés dans le cours
des trente années avant la demande , est re m on té a u delà d u
term e fixé p a r l ’arrêt j il a surtou t co m b lé l ’intervalle des .deux
é p o q u e s, p ar des faits p lu s n o m b r e u x et p lu s détaillés q u e c e u x
mis à sa charge.
E n e ffe t , au lie u de s’a rrêter à l ’année 1 7 9 7 , p o in t de départ
r i g o u r e u x de la p r e u v e à f a i r e , et q u i co m p ren d le temps d u
sé q u e s tr e , le sieur D e lsu c a v S u lu dém o ntrer q u ’avant la m ain
mise d u G o u v e r n e m e n t, il y avait e u , co n tra d ictoire m e n t avec
le sieur L a b r o , ancien p ro p rié ta ire de la fo rê t de L a r o c h e ,
e x e rc ic e des droits d ’usage attachés au dom aine de la G u iè ze .
A v a n t d ’entendre les témoins sur ces actes conservateu rs, pas
sés sous leurs y e u x , on p e u t , en ce q u i con cern e le sieur L a b r o ,
ra p p e le r surabondam m ent la p re u v e écrite au p ro c è s , de la
reconnaissance d u droit ; elle se p u ise dans le contrat de mariage
�* s.
( 3 4 }
d u 19 o c to b r e 17 7 ^ , ce lu i de la dem oiselle B u r i n , fille de Jean
B u r i n , seign eu r de S t- P a r d o u x , avec le sieur Bleton , r e c e v e u r
des domaines. O n sait q u e les p ère et frère de la f u t u r e , en lu i
délaissant la p ro p rié té d u d o m ain e de la G u iè z e , y rattachèrent
f o r m e lle m e n t le droit d ’ usage j' et de prendre du lois dans la fo r ê t
de L a roch e, tout ainsi et de même que ledit B u rin p ère , ou ses
ferm iers, efiiont jo u i ou du jou ir.
U n e p are ille stip u la tio n , u n iq u e m e n t faite entre les m e m b re s
d ’ une m êm e fa m ille , ne p o u v ait sans d o u te être attrib u tiv e d 'a u
cu n droit sur la forêt de L a r o c h e , si déjà il n ’existait et n ’avait
r e ç u u n e e x é c u tio n lé g a le ; ce n ’ était pas là u n lien p o u r le p r o
priétaire grevé de la s e r v itu d e , et q u i n ’aurait pas assisté au
contrat de m a r ia g e , p o u r en a p p r o u v e r ou co n tre d ire les c o n
v e n tio n s ; mais telle nétait p as, en ce m o m e n t, vis-à-vis le sieur
de L a b r o , la position des parties contractantes; elles a g issaien t,
elles in d iq u a ie n t et précisaient leurs d ro iissu r la forêt de Laroche-,
en présence d u seign eu r lu i - m ê m e , o u q u o i q u e ce so it, d u
sieur C a q u e t , son a g en t, h abitant au ch âteau de L a b r o , avec la
q u alité dè capitaine des chasses et p êches de la terre d ç L a b r o .
C e c o n tra d ic te u r lég itim e a co m p a r u au contrat de m a riag e ;
il en a laissé é c r i r e , sans op position a u c u n e , toutes les clauses
relatives à la forêt q u ’il était spc'cialement ch a rg é de s u r v e ille r ,
et dont il devait b ie n connaître les usagers. Il n ’a pas contesté
le d ro it é n o n cé dans un acte so le n n e l; il a fait p lu s , il l’a for
m e lle m e n t a p p r o u v é par sa présence et p ar son silence. .L e sieur
C a q u e t , serviteu r zélé et d évo ué aux intérêts de son maître , n ’a u
rai t-il pas, à l ’in stan t, repoussé les prétentions de la fam ille
B u t i n , si u n titre a n c i e n , soutenu d ’un e lo n g u e possession,
n ’avait re n d u in u tile toute co n tra d ictio n à ce sujet?
. Aussi l ’ indication de ce droit incontesté, et de ses ch a rg e s,
a-t-elle successivement été insérée dans les b a u x à ferm e de 177^
et 1 7 7 8 ; et la C o u r e lle -m cm e , en im p rim a n t l'a u torité de la
�( 35 \
chose ju g é e , à l ’exisicn ce com m e à l ’e xercice légal des droits
d usage dans la forêt de L a r o c lie , depuis l ’année iG 5 /|, jo u r où
le droit a pris naissance, ju s q u ’en l ’année 1 7 9 7 , p oint de départ
des trente années de possession à p ro u v e r avant la d e m a n d e , la
C o u r , disons-nous, n ’a e ntendu p erm ettre dorénavant que la
cr itiq u e des tém oignages r e cu e illis dans le c e rcle p ar elle tracé.
C on sulton s donc les enquêtes.
P lu sie u rs témoins déposent des faits qu i se sont passés à l ’ép o q u e
o ù le sieur de L a b r o était en co re propriétaire de la forêt de
L a r o c h e ; c ’est, com m e on le v o it , rem on ter au delà des e x i
gences de l ’arrêt interlocutoire.
^
L e p rem ier de l'enq uête d ir e c te , P ierre C h a n e t , actuellem ent
âgé de soixante-seize ans, déclare q u ’il était d o m e stiq u e , il y
a en viron cinq uante ans ( c ’est-à-dire, en 1 7 8 0 ) , chez G a t i n i o l ,
fe rm ie r du dom aine de la G u iè ze : à cette é p o q u e , il est allé
p lusieurs f o is , d'après les ordres de son m a î t r e , ch e r c h e r du
bois dans la forêt de L a r o c h e . L a d élivra n ce a été e ffe c tu é e , à
c h a q u e f o is , par le nom m é S t-Jean, garde d u sieur de L a b r o ;
e lle portait tantôt sur du bois m ort a b a tt u , tantôt sur des arbres
m o r t s , mais en co re sur p i e d , q u e le g a r d e , à défaut de m a rtea u ,
m arqu ait avec la cognée d u t é m o in , en lu i défendant de c o u
p e r d ’autres arbres.
Cette d é p o sitio n , bien positive au moins p o u r les droits de
ch a u ffa g e , a été co rro b o ré e p ar ce lle du p re m ie r tém oin de la
co n tin u ation de l ’e n q u ê te , et ce lle d u d e u x iè m e témoin de
l ’enquête directe. C e d e r n ie r , Joseph C h a n e t , a été aussi le d o
m estique du ferm ier G a li n io l, en 1 7 7 2 , h u it ans avant l ’entre'e
de P ie r r e C h an et dans Je même d o m a in e; il est a llé , com m e
l u i , p ren d re souvent du bois de chauffage dans la forêt de .La
r o c h e ; il agissait avec la plus grande co n fian ce, car le ferm ier
lu i avait dit de n ’avoir au cu n e i n q u ié iu d e , M. Bleton ayant
droit dans celte forêt.
5.
�.
(
36
)
L e tém oin ajoute q u e si d u bois d ’usage o u de constru ction
n ’a pas été p r i s , c ’est q u e , p en dan t le temps de son s e r v i c e ,
a u c u n e réparation n ’a été faite dans le dom aine ; cependant il a
e n te n d u le fe rm ie r a n n o n c e r 'q u e lq u e f o is q u ’il y avait nécessité
de ré p a re r le sol de la maison d ’h a b ita tio n , et q u ’à cet e ffe t, il
faudrait a lle r c h e r c h e r d u bois dans la forêt de L a r o c h e .
V o i l à trois témoins d o n t les déclarations précises et c o n c o r
dantes sur les mêmes fa its, attestent positivem en t q u ’à l ’ép o q u e
où le sieur de L a b r o était e n co re p ro p rié ta ire de la forêt de
L a r o c h e , les droits attachés a u dom aine de la G u iè z e s’ex e rçaient dans l e u r p lé n itu d e . C ’est en présence d u garde d u sieur
d e L a b r o , c ’ est avec son consentem ent, et su r l ’indication p a r
l u i donnée de certains a r b r e s , q u e l ’usager faisait a n n u ellem en t
sa p rovision de bois de ch a u ffa g e . Si à cette é p o q u e , a u c u n bois de
co n stru ctio n n ’a été réclam é, c ’est seulem ent parce q u e la nécessité
d ’u n e réparation n ’élait pas d even u e u rg e n te. T o u te fo is , Joseph
C h an et déclare a vo ir parfaitem ent conservé le so u ven ir q u e le
f e r m ie r se p roposait d ’a lle r c h e r c h e r d u bois p o u r re m e ttre à
n e u f le sol de la maison d ’h abitation .
O n c o n ç o it , en e ffe t, q u e le d ro it d ’usage n ’est jias a stre in t,
p o u r sa co n s e rv a tio n , à u n e x e r c ic e a n n u e l et constam m ent r é
p é t é ; il se m aintient p a r le besoin de la ré p a r a tio n , q u i p e u t ne
se faire sentir q u ’à des intervalles é lo ig n é s; il renaît à ch a q u e
fois avec le besoin lu i-m ê m e ; tandis q u e le d ro it de chauffage
est de toutes les années, et co m p o r te des faits successifs de dé
liv r a n ce dans la m êm e p ério d e de temps.
A p r è s la constatation de ces faits de d é liv ra n ce , rem ontant a u x
années 1772 et 1780 , ¡faits q u e le sieur D e ls u c n ’était pas tenu
de p r o u v e r , nous arrivons à l ’c p o q u e o ù le sieur N e y r o n de la
T a r t iè r e , représenté a u jo u r d ’h u i p a r l e s ie u r N e y r o n - D e s a u ln a t s ,
est d e ve n u p ro priétaire de la te r r e de L a r o c h e . C ’est le 10 ja n
v ie r 1 7 8 5 , q u ’u n traité fait entre le sieur D u m as de L a b r o , le
�( 37 )
sieur Brassier et le sieur N e y r o n de la T a r liè r e , a assure' la m u
tation de p r o p r i é t é ; p ar l ’une des clauses, le sieur de L a b r o
entendait su b ro g e r le sieur de la T a r li è r e , sans néanmoins a u
c u n e g aran tie, dans tout ce qu i était r e la tif aux droits d ’usage
dans la forêt de L a r o c h e , et lu i cédait les redevances dues par
les usagers, à l ’eiTet de s’en faire p a y e r com m e il aviserait; le
tout à ses risques et périls.
Cette clause de non-garantie contre l ’ancien p ro p rié ta ire d é
m o n tre é vid em m en t que les litres constatant les droits d ’usage
et le montant des redevances dues p ar les u sa g e r s, ont passé dans
les mains d u sieur de la T a r t iè r e , lors de
1 acte de 1 78 6 ; la r e
mise de ces titres devenus inutiles au sieur de L a b r o ,• a d û suivre
nécessairement la transmission de la p ro p r ié té ; c ’était la consé
qu e n ce forcée de la clause de non-garantie ; car si l ’on mettait
h la ch arge du n o u ve a u p ro p rié ta ire tous les droits d ’u s a g e , il
fallait aussi q u ’on lu i fo u rn it tous les titres et p a p ie rs, au m o y e n
desquels il p o u rra it repousser des prétentions illégitim es ou
exagérées. L e sieur de la T a r tiè r e , en acceptant cette p o s itio n ,
conservait d o n c par-devers lu i les élemens propres à écarter tout
ce q u i tendi’ait à la ren d re p lu s mauvaise.
C e tte [explication ré p o n d ra it p ar avance , s’il était b e so in , aux
induction s présentées p a r le sieur Desaulnats, et résultant de ce
qu e le sieur D e lsu c n ’aurait r ie n d é co u v e rt sur l ’existence de
son d ro it ( ce q u i n ’est p lu s a u jo u r d ’h u i susceptible de contesta
tions) dans les archives d u sieur de L a b r o ; on pressent q u e cette
d éco u verte était devenu e impossible p ar le fait m êm e de la r e
mise de tous les p ap iers, notes et docum en s p rovenant du sieur
de L a b r o , entre les mains d u sieur N e y r o n de la T a r l i è r e , au
jo u r d u traité d u 10 ja n v ie r 1785.
T e l l e n ’est pas d ’a ille u r s, nous l'avons déjà d i t , la question
actu e lle d u procès.
A l ’é p o q u e o ù ce traité fut c o n s o m m é , et mêm e dès l ’année
�i 38, }
1781 , le sieur M anaranclie était établi dans la maison d u sieur
Desaulnats p è r e , à S t - P a r d o u x , e n qu alité d ’agent d'affaires :
c ’est lu i qu i percevait les p rix de fermes d ’ un grand n o m b re de
do m ain es, les renies d u village des A u ln a t s , les cens de la terre
de Cros et de la T a n i è r e , les redevances des usagers dans les fo
rêts de L a r o c h e et de C li i r o u z e ; il faisait m a r q u e r et d é liv r e r ,
en sa p ré se n c e , les bois destinés a u x usagers , etc.
U n e co m p ta bilité à la ,fo is considérable et c o m p li q u é e , e x i
geait des écritu re s assez r é g u liè re s : le sieùr Desaulnats p è r e ,
h o m m e in s tr u it, adm inistrateur h a b ile et é c o n o m e , résidait à
p ein e six mois de l’année dans ses p ro priétés de m o n tag n e ; mais
son agent d ’affaires lui rendait c o m p te , au mois u n e fois p ar a n ,
des recettes et d^s dépenses. C ’est aussi parm i les registres et les
n o m b r e u x papiers retro uvés dans la succession d u sieur Desaul
nats p è r e , et q u i étaient si décisifs p o u r la cause de l ’i n t i m é , que
le sie u r Desaulnats fils a d u connaître à la fois, et le d roit q u 'il
conteste a u jo u r d ’h u i , et le p ay e m e n t de la red eva n ce qui en
consacrait l’e x e r c ic e .
j ■ •
On^cônçoit son intérêt h re ten ir et d issim u ler toutes ces piqces
de c o n v ic t io n ; mais des déclarations de témoins vo n t su p p lé e r
fa c ile m e n t à ce silence.
I l en est deux- qui ra p p e lle n t notam m ent des délivrances faites
h l’é p o q u e o ù le sieur M an aran clie était l ’h o m m e d'affaires de
la maison D esaulnats; leurs dépositions ont été vive m en t atta~
. quéds ; tous les efforts de l ’investigation la p lu s scru p u leu se ont été
épuisés, dans l’ intention de les d é p o u i ll e r d e la confiance q u ’elles
m éritaient
ju stem ent.
Cette attaque se co m p re n d
a isém e n t,
lo r s q u ’ on sait qu e ces d e u x tém oins! en parlant de faits p erso n
nels , satisfaisaient ainsi à la d o u b le e x igÎ7e n c e de l’arrêt in terlo cn to ir e ; car ifs déposaient, en m êm e tem ps, sur la d élivran ce du
b o is , et sur le payem ent de la redevance. Q u e lle s ont été ces dépositions? c ’est ce q u ’ il im p orte d ’abord
�(V )
de connaître : nous p ou rro n s ensuite a p p récier les reproches.
L é g e r D u f a u d , troisième témoin de l ’enquête d i ie c t e , âgé de
cin q u an te ans , est le fils d ’ un ancien ferm ier du domaine de la.
G u i è z e , dans le q u e l il est entré à l ’âge de h u it ans, c’est-à-dire,
en 17 8 8 ; il y a d em euré pendant onze ans, c ’est-à-dire, jusqu’en
1 7 9 9 ; il déclare q u e , dans cet in te r v a lle , il est a l l é , non-seule
m ent p re n d re très-ordinairement d u bois de chauffage dans la
forêt de L a r o c h e , soit en p ré se n c e , soit en l'absence du g a rd e ,
mais en co re q u e d e u x ou trois ans après l ’entréè dans ce do m ain e,
en 1790 o u 1 7 9 1 , on eut besoin d ’ un p a r c , et q u e la délivrance
du bois a été laite par lé no m m é T a iJ e t , garde du sieur D esaulna ts; il en fu t'd e mêm e p o u r la réparation d u sol de la grange :
la d élivra n ce d u bois a été faite p ar le mêm e g a rd e , à un e ép o q u e
q u e le tém oin f ix e , u o is ou quatre ans avant sa sortie du d o
maine. . •
I l ne p e u t assurer si ce garde m arquait lès arbres d ’u n m a r
teau forestier ou de toute autre em p rein te , p arce q u ’éiant encore
je u n e , et plus spécialem ent ch argé de la surveillan ce des be s
t ia u x , il laissait a u x do m estiqu es, plus robustes qu e lui,, le soin
d ’abattre les arbres qu i le u r étaient m arqués. Mais il déclare se
ra p p e le r p ositivem en t q u e le bois n ’était jamais abattu ni enlevé
h ors la présence o u sans l ’autorisation du garde.
L e troisième tém oin de la co ntinu ation de l ’e n q u ê te , p arle de
faits semblables de délivrance d ’usage. Jean B r u g e a i l , âgé de
67 a n s, déclare en effet q u ’il y a trente-sept ou tre n te -h u it ans,
et p eu t-être p lu s , étant au service du sieur Bleton , à T a u v e s,
ch ez le q u e l il a d em eu ré onze ans, les ferm iers de la G u iè ze vin
re n t p ro ve n ir le sieur B leton q u e la-toiture de la grange du d o
maine avait été abattue par les vents : c e lu i- c i se
rendit aussitôt
à S a in l- P a r d o u x , en rapporta u n b ille t d u sieur M a n a r a n c h e ,
h o m m e d ’affaires d u sieur Desaulnats, qu i l'autorisait- à faire
c o u p e r le bois nécessaire aux réparations ; ce b ille t fut r c n '« pu
�t é m o i n , avec re com m a n d a tio n d ’a lle r p r é v e n ir le ch a rp e n tie r
d u sieur B le t o n , et les gardes de la forêt. L e s arbres ont été
m arqués par les gardes, et enlevés p ar les soins d u ch a rp e n tie r
et d u tém oin.
U n e d e u x iè m e fois, la maison e lle m êm e d u fe rm ie r ayant eu
besoin de ré p a ra tion s, le sieur B le to n ob tin t égalem ent l ’autol’isation de faire c o u p e r , dans la fo rê t de L a r o c h e , le bois qui
lu i était nécessaire; ce bois à été aussi m a r q u é et enlevé.
.L e s ferm iers d u dom ain e avaient l ’o r d r e le p lu s exp rè s, d onné
p a r le sieur B l e t o n , de n e jamais c o u p e r des arbres v i f s , sans
q u ’au p réalable ils n ’eussent été m a rq u és suivant les indications
d u p ro p r ié ta ir e de la forêt.
_
T e lle s sont, en substance, les d e u x dépositions des tém oins
critiq u és p ar l ’appelant. D ès q u ’on les co n n a ît) i l est facile de
c o m p re n d re l ’intérêt d u sie u r D esaulnats.à en alFaiblir la fo rce ;
mais il n ’est pas moins facile h eu reu se m e n t de repousser les c o n
tradictions q u ’on a b ie n v o u j u le u r p rê te r .
L ’ un de ces tém oin s, L é g e r D u f a u d , n 'a u ra it p u , a dit l ’a p
pelant , v o ir la d é livra n ce de bois de co n stru ctio n p a r le garde
T a l l e t , puisque ce garde était alors mort depuis plusieurs années ;
il avail été assassiné, dès 1792 , dans la jo r ê t même de Laroche :
Vacte de son décès le prouve.
A cet é g a r d , il est u n e d istin ctio n à f a ir e , et q u e le tém oin
lui-mêtne n ’a pas m an q ue de déposer. II r a p p e lle d e u x faits sé
parés de d é livra n ce d ’usage p ar le garde T a l l e t , et in d iq u e d e u x
épo ques différentes.
U n e p rem ière fois, d e u x o u trois ans après son entrée dans
le dom aine de la G u iè z e ( c ’était en 1790 o u 1 7 9 1 p u is q u e l ’e n
trée rem ontait à 1788) , T a l l e t , g a rd e d u sieur Desaulnats p è r e ,
et r e c o n n u com m e t e l , avait d istribu é du bois p o u r la co n stru c
tion d ’un p arc. Il est hors de doute q u e ce p re m ie r fait est an
té rie u r au décès de T a l l e t , qu i n ’a e u lie u q u ’en 1792 ; il n ’y a
�( 4i )
'
d o nc là a u cu n e contradiction ni r é e lle , ni apparente : la d écla
ration reste ici dans toute sa force.
Il est vrai q u e le m êm e tém oin parlerait d ’ une a u tre délivrance
faite p ar le m êm e g a rd e , p o u r les réparations d u sol de la grange,
trois 011 qu atre ans avant sa sortie d u d o m a in e , et q u i viendrait
se p la ce r vers l ’année 179S ou 1799, é p o q u e du séquestre.
L ’im possibilité de cette d é livra n ce serait dès lors attestée, à
Cette é p o q u e , p ar le décès d u garde. C o m m e n t, s’é c r ie - t- o n ,
ajo uter confiance à la déposition d ’un tém oin si complaisant P
L a réponse à cette observation qui paraît ju ste en e lle-m ê m e ,
au p re m ie r aspect, se puise dans les détails fourn is p a r le tém oin
lu i- m ê m e : on r e m a rq u e d ’abord q u e si l ’e r r e u r sur le temps
p récis de la d é livra n ce est é v id e n te , elle p e u t cependant ne pas
e n le v e r à l ’existence du fait m atériel toute sa r é a lit é ; d ’un autre
•côté, l ’âge en co re tendre de ce tém oin , au m om ent o ù les distri
bu tion s ont eu li e u , n'a d û lui laisser q u ’un so uven ir p e u fidèle
sur la date; tandis q u ’au c o n tra ir e , des circonstances p lu s faciles
à re ten ir frappaient nécessairem ent l ’esprit d ’ un enfant : c ’était
la présence du m êm e garde assistant à d e u x délivrances; c ’était
l ’objet de ces délivrances profitant a u m êm e dom aine h ab ité p a r
le tém o in , l ’un e servant a la construction d ’un p a r c , l ’antre à la
réparation d u sol de la gran ge.
V o ilà les impressions jîrem ières et durables q u i se sont natu
rellement. placées dans la m ém oire et ont p u s u r v i v r e , in d é p e n
dam m ent de la vérité de la d a te; de pareilles impressions servi
r a ie n t , au b e so in , à rectifier la date faussement énoncée. Les
d e u x faits ont pu se succéder à p eu d ’in te r v a lle , et les deux dis
trib ution s être l ’œ u v r e du garde T a lle t. C ’est ce q u e le souvenir
d u témoin a dû conserver co m m e chose certaine et positive; c est
aussi ce q u ’il faut a d m e ttre , sans q u e le démenti de la date d o n
née pat- le tém oin puisse l ’e m p orter.
Au. su r p lu s , le p re m ie r fa it, r e la tif à la d é livra n ce de bois
6
�( 42 )
p o u r u n p a r c , esi hors de toute contestation ; il reste au p ro c è s,
p o u r a ccr o îtr e les faits déjà p ré c é d e m m e n t é ta b lis , et attester
l ’e x e rc ic e c o n tin u des m êm es droits d ’usage, a u v u , au s u , et d u
co n se n te m e n t d u p ro p rié ta ire de la fo r ê t.
Q u a n t à la déclaration d u d e u x iè m e t é m o i n , Jean B r u g e a il ,
q u i ra p p e lle ra it des faits de d é livra n ce rem on ta n t exclusivem ent,
ainsi q u ’o n le p r é t e n d , à 1792 o u 1 7 9 3 , c ’ est-à-dire, a u c o m
m e n c e m e n t d u séqu estre, et q u i auraient e u lie u de la part d u
sieur M a n a r a n c lie , agent d ’affaires d u
sieur D e sa u ln a ts, on a
d it et l ’ on devait dii’e avec raison ( e n adoptant u n p are il p o in t
de d é p a r t ) , q u e le sie u r M an aran clie n ’avait évid e m m en t a u c u n e
autorisation à d o n n e r à cette é p o q u e , p u is q u e c ’était le sieur
B le t o n lu i-m ê m e q u i , c o m m e r e c e v e u r des dom aines, régissait
la f o r ê t séquestrée.
M a is u n e sim p le e x p lic a tio n fo u rn ie p a r le tém oin lu i-m ê m e ,
lo rs de sa dé p o sitio n , rép o n d a it e n co re à l ’o b je c tio n de l ’ap p e
lant. I l suffit, en e lf e t, de lir e attentivem ent cette d é p o sitio n ,
p o u r lu i co n server toute la fo rce et to u te la co nfiance q u i d o i
v e n t l ’e n t o u r e r ; c a r i e tém oin n e s’est pas u n iq u e m e n t restreint
à fix e r ces délivrances émanées d u sie u r M a n a r a n clie , à tre n te sept o u tre n te -h u it ans é co u lés au jo u r d e la déclaratio n ; il a aussi
a jo u té ces m o ts, et peu t-être plus : il a d o n c laissé u n e plus g ra n d e
la titu d e à la déterm in atio n vraie de l ’é p o q u e o ù les délivrances
ont été faites; et p o u r la r é g l e r avec p lu s de c e r t it u d e , c ’est l u i m ê m e q u i c o m m e n c e , avant d ’e x p o se r les faits à sa connaissance,
d ’a n n o n ce r q u ’il y a trente-sept o u tren te-h uit a n s , et peut-être
p lu s , a-t-il a jo u té , q u ’ élant au service d u sieur B l e t o n , il a v u
les fe rm ie rs de la G u iè z e a r r iv e r à T a u v e s , et p r é v e n ir q u e la
to itu re de la grange avait été a battue p a r les v e n t s , etc.
L e tém o in n ’a d o n c pas resserré dans le c e r c le de la p é r io d e
r e te n u e p a r l ’a p p e la n t, ce q u i était à sa connaissance perso nnelle,
et ce q u i pouvait c o n c e r n e r soit le sieur B l e t o n , soit le sieur
�( 43 )
M anaran clie. L a m é m o ire d ’u n c u lt iv a t e u r , toujours p lus fidèle
sur les circonstances des faits dont il d é p o se , qu e sur le u r date
p ré c ise , n ’était pas m ê m e en défaut dans ce cas p a r t ic u lie r ,
p u is q u e Jean B r u g e a i l , en se présentant devant le conseillercom m issaire, avait pris la p ré c au tio n de tém oigner de son em
barras h fixer avec ce rtitu d e l ’é p o q u e de ces faits; c ’est ce qui
e x p liq u e , après u n e in d ica tion a p p ro x im a tiv e de trente-sept ou
tren te-h uit ans, ces m o ts, et peut-être plus.
C ’en est assez, sans do ute, p o u r effacer e n c o r e , sous ce n o u ve a u
r a p p o r t , les critiques de l ’a p p e la n t; un e le c t u r e p lu s attentive
les aurait d ’abord écartées.
A i n s i , de tous ces prem iers faits d é c o u le la p re u v e acquise et
incontestable q u ’au j o u r d u séquestre de la forêt de L a r o c h e , en
i j ( j i , les droits d u sieur B leto n étaient entiers p o u r le chauffage
co m m e p o u r l ’ usage.
Ont-ils été conservés pendant la d u ré e d u séqu estre; c ’est ce
qu i ne p e u t d o n n er lie u à a u cu n e difficulté.
D e n o m b r e u x p ro cè s vei’b a u x sont rapportés ; ils justifient des
délivrances faites au sieur B leto n q u i , p a r lu i o u le sieur R e b o u l,
agissant dans u n intérêt c o m m u n , avait e u le soin de déposer son
titre au secrétariat de la p ré fe ctu re . L a m ain ten ue dans la pos
session avait été déterm in ée p ar l ’avis d u conservateur des eaux
et forêts, e t, en e x é cu tio n d ’i c e l u i , les distributions de bois d ’u
sage et de chauffage avaient co n tin u é.
T o u t e f o i s , il faut le recon n aître , ces d é liv r a n c e s, co m m e on
l ’a d i t , sem blent être provisoires seulem en t : les procès verbaux,
.ainsi q u e les actes administratifs pro duits dans la cause, r e n
fe rm e n t, au p ro fit d u p ro p r ié ta ir e , telles réserves et restrictions
de droit, s i le cas y éch et; mais il im p orte de rapp eler i c i , ce
q u ’on a déjà fait r e m a rq u e r a ille u r s , qu e ces réserves, tout à fait
m omentanées et presque de f o r m e , ont d û s’évan o uir b ie n t ô lj
p a r l ’ effet d ’u n e décision définitive q u e le conseil de p réfectu re
�( h\ )
'
avait r e n d u e , et qui se tro u ve é n o n cé e au d e rn ier p rocès verbal
de d é liv r a n c e , ce lu i du
•
5 août 1808.
D ès ce m om ent ( l'in s p e c t e u r des eaux et forêts le déclare lu i-
m êm e dans ce p ro c è s v e r b a l) , la situation des usagers qui ont fa it
les dépôts de titres, en conformité de la lo i du 28 ventôse an 1 1 , et
qui avaient été provisoirement adm is, par un arrêté du préfet du
P u y -d e -D ô m e , du 18 thermidor an 1 2 , à jo u ir des droits que ces
dépôtsfaisaient présum er, est devenue plusfavorable, par la décision
positive que le conseil de préfecture a rendue en fa v e u r de la plupart
des usagers.
L e sieur B leto n se trouvait n a tu re lle m e n t p la cé dans cette si
tuation in d iq u é e p ar l ’in sp ecte u r des e a u x et forêts; il devait dès
lo rs en r e c u e illir tous les avantages : c o m m e n t, en e ffe t, auraitil p u m a n q u e r a u x p re scrip tio n s de lo is , q u ’en sa qu alité de
r e c e v e u r des domaines et de régisseur de la forêt de Laroclie., il
était tenu de co n n a ître m ie u x q u e j^ersonne?
C ’éiait p o u r l u i u n e nécessité d ’intérêt et de p o s itio n , q u e de
se m ettre en m esure vis-à-vis l ’a u to rité adm inistrative.
M ais il y a plus e n co re : et la C o u r s’est empressée de le d écla
r e r p ar l ’ un des m otifs de son arrêt : c ’est q u e le sieur B le to n ne
p o u v ait pas e x e r c e r a u tre m e n t scs droits. S era it il d o n c a u jo u r
d ’ h u i f r a p p é , p arce q u ’il a u r a it e x é c u t é , p o u r la conservation
de la c h o s e , les o b lig atio n s rig o u re u se m e n t imposées p ar la loi
du temps? F a u d ra it-il ê tr e , à son é g a r d , p lu s sévère q u e la loi
e lle -m ê m e ?
Dans tous les cas, ces délivrances provisoires, si l ’on v e u t , p r é
sentent ce caractère précieuJc q u ’on ne peut le u r e n le v e r ; c ’est
q u ’elles arrivaient à la suite d ’autres d élivrances légalem ent fa i
tes; c ’est q u ’a 1 é p o q u e du séqu estre, en 1791 , les droits du sieur
B le to n étaient a
1 a b ri de toute p re sc rip tio n ; c ’est q u e le u r e x e r
c i c e depuis 1791 ju s q u ’en 1 8 0 9 , é p o q u e de la réin tégration de
1 ancien p r o p r i é t a i r e , dans les termes c l avec le m ode déterm inés
�( -'|5 )
p ar les lois transitoires, a conservé au passé tout son b é n cfic e, et
a revêtu d ’une présom ption légale et perm anente des droits mis
à p ro fit en p résence de l ’E iat ou de ses agens, légitimes contra
dicteu rs, et q u i n ’ont p r o n o n c é a u cu n e déchéan ce.
C ’esL au moins le résultat q u ’ il faut a cce p te r , au m ilieu de cette
in ce rtitu d e de législation , pendant la d u ré e du séquestre. Il nous
Suffit de savoir qu e le sieur Bleion l ’a traversé ave c des droits
toujours intacts, toujours exercés; com m e ils p o u v a ie n t , co m m e
ils devaient l ’être à cette épo que.
E n 1809, à la rentrée du sieur Dcsauînats dans la forêt de L a
r o c h e , l ’o rd re déjà établi a été co m p lètem en t r e sp e cté ; le n o u
veau p ro p rié ta ire n ’a pas c h e r c h é à contester les droits du sieur
B l e i o n , ni ce u x des autxcs usagers, dont il avait lu i-m ê m e une
parfaite connaissance. T o u s les p ap ie rs, tous les litres destinés à
l ’é cla ire r sur le n o m b re des usagers, co m m e sur l'éten d u e de
le u rs droits e i de leurs ch a rg e s, s’étaient retro uvés dans la su c
cession du sieur Desaulnals p è r e , et indépen dam m ent de ces renseignem ens faciles à r e c u e i lli r , l ’appelani avait e n co re auprès de
l u i , en 180g, le sieur M a n a r a n c lie , ancien s e r v ite u r , décédé
seulem en t en 1 8 1 2 , q u i , pen dan t longues années, avait p r é c é
d e m m e n t fait m a r q u e r et délivre r le b o is, et p erçu les redevances
des usagers.
E n vain s’est-on c o m p lu à présenter l ’appelant com m e in h ab ile
à ju g e r , dès les prem iers m oin ens, les droits du sieur B le io n , et
c e u x d ’autres réclam ans; en vain a-t-on dit qu’ en se montrant alors
trop sévère, il eût crainl d ’être injuste ; il crut donc devoir accorder
du l/ois, en attendant q u 'il p û t vérifier les titres.
U ne p a re ille c o n d u it e , lo u ie laudative d ’ailleurs p o u r le sieur
Desaulnals , p o u r r a -t-e lle être a c c u e illie sans opposition ? faudrat-il admettre avec c o n fia n c e , q u e le p re m ie r sentiment d ’ un
p ro p rié ta ir e , justement soigneux de ses intérêts, h abitué à les r é
g l e r avec o rd r e , h ab ile à les
p ro tég er,
ait été aussi empressé
�< 40 ) _
.
c l aussi b é n é v o le ? faudra-t-il re co n n a ître de b o n n e f o i, q u e la
crainte d ’u n e injustice ait d o m in é l ’esprit d u sieur Desaulnats ,
lo r s q u ’il n ’avait pas p ré a la b le m e n t v é r ifié , ainsi q u ’il v e u t bien
le d i r e , le titre justificatif’ de sa p ré te n tio n ?
F a u d r a - il c ro ir e enfin , q u e l ’appelant a r é p u d ié tous les avan
tages de sa p o s i t i o n , en 1809; q u ’il ait n é g lig é de co n su lte r tous
les anciens re gistres, tous les papiers de fa m ille entre s e s m a in s r
et q u ’il n ’ait pas m êm e in terro g é celu i q u i p o u v ait tout lu i d ir e ,
to u t lu i a p p r e n d r e , le sieur M a n a ra n ch e ?
Y o i l à , il fa u t en c o n v e n i r , de n o m b r e u x élém ens à la portée
de l ’a p p e la n t, et q u i devaient fixer incessamment la position des
usagers à son égard. E h b ie n , à l’en c r o ir e , ils auraient éclairé n o n
pas un sentim ent de ju stice, le p r e m ie r q u ’ils d evaient faire naître,
mais u n sentim ent de b ie n v e illa n c e q u ’o n ne dem andait p a s,
p a rce q u ’on l ’a cco rd ait co m m e u n e faveur.
L ’é lo g e , nous ne craignons pas de le d i r e , p e u t avo ir sans d o u te
son cûlé séduisant : mais la vérité m ise au gran d j o u r , ne lu i
d o n n e r a it - e lle pas q u e lq u e fo is u n dé m e n ti?
N o u s allons e n co re no us en a p e r c e v o ir , en p a rco u ra n t r a p i
dem en t les dépositions des tém oin s, sur les délivrances faites p a r
le sieur D e sa u ln a ts, depu is 1809; c a r i e caractère q u i les en toure
p r o u v e r a évid em m en t q u ’elles n ’avaient rie n de p ro visoire, et qu e
le p ro p rié ta ire de là f o r ê t , en les e f fe c t u a n t , entendait r é e lle
m ent consacrer la reconnaissance d ’un d ro it ju s q u ’alors e x e r c é ,
et no n pas fa ire des concessions m om entanées à des rapports de
b o n voisinage.
I l suffira de r a p p e le r q u e lq u e s dépositions des n o m b r e u x té
m o in s déposant sur ces faits.
L e c in q u iè m e tém oin de l ’e n q u ê te d i r e c t e , an cien g ard e de la
fo rê t de L a r o c h e , et q u i , p lu s tard , après la levée d u séqu estre,
passa au service de M . Desaulnats pendant c in q années, dépose
q u e lo rsque ce lu i- c i avait été réin té g ré dans sa p r o p r ié té , il lu i a
�(
47
)
e ntendu dire au n o m m é Chassagne , fermier- du dom ain e de lu
G u i è z e , q u i lu i demandait d u bois de c o n s t r u c t io n , qu’ il ne lu i
en marquerait p oin t, tant qu’ il ne payerait pas la redevance.
C o m m e on le v o i t , le d roit d ’ usage n ’était donc pas conlesté
en lu i-m ê m e ; le sieur^DesauInats le reconnaissait, au co n tra ir e ,
fo rm e lle m e n t, p u is q u ’il n ’en faisait dé p e n d re l ’e x e rc ic e qu e d ’un
fait perso nnel au fe rm ie r , celu i du p ay e m e n t de la red evance.
N o u s verron s b ie n lô t qu e ce p ay e m e n t a été effectué avec
e xa ctitu d e . U n e seconde circonstance est ra p p e lé e p ar le m êm e
tém oin : e lle est rela tive à un autre fe rm ie r d u do m ain e, appelé
Goigou-Baraille -, il e u t besoin de bois p o u r réparation des bûtim e n s , depuis la p o rte de la g ran ge , au-dessus de la maison , j u s
q u ’au f o u r : la délivrance en fu t opérée p a r le sieur Desaulnats
et p ar M i c h e l, son d o m e stiq u e , remplissant égalem ent auprès
de lui les fonctions de g a r d e , et d 'h om m e de confiance.
L e tém oin n ’affirme pas, il est vrai, q u e M . D esaulnais était
présent à cette d é liv r a n c e , mais il assure qu e M i c h e l a m arqu é
et d élivré le b o is, ce q u i devait être facile p o u r ce d e r n i e r ; car,
dit le d é p o s a n t, lorsque M . Desaulnats était absent, son domestique
M ich el était porteur du marteau propre à marquer le Lois.
L e d om estiqu e avait en effet la p lu s grande confiance de son
m aître : c ’est lu i q u i , depuis plusieurs a n n ées, connaissait le
n o m b r e et les droits des usagers : c ’est lu i qu i rem plaçait le sieur
D esaulnats, et m a r q u a it, en son a b se n c e , a\ec le marteau fo
restier laissé entre ses m ains, les arbres de chauffage et d ’usage.
A u s s i, q u e l q u e soit le doute à é le v e r sur la présence du sieur
D e sa u ln a ts, a u j o u r de la d élivran ce faile au ferm ier G o i g o u ,
p o u r les réparations des bâtim ens de la G u i è z e , il faudra toujours
r e c o n n a îtr e q u ’il y a ce rtitu d e acquise p ar la déclaration du té
m o i n , sur la présence d u dom estique M i c h e l , représentant en ce
p o in t le p ro p riéta ire de la f o r ê t, et caractérisant la d é livra n ce
q u ’il e ffe c tu a it , p a r le signe le m oins é q u i v o q u e , l ’e m p rein te du
m arteau d o n t il était le p o rte u r.
�I
( 4.8 )
L e h u itiè m e tém o in , ferm ier du dom aine il y a q u in ze a n s ,
et qu i était a llé à plusieurs fois dans l ’arrière saison, c h e r c h e r d u
Lois de chauffage, atteste égalem ent q u e ce bois avait été m a rq u é
p ar M i c h e l , désigné par lui co m m e garde du sieur D esaulnats,
et q u i se servait à cet effet d ’ un marteau forestier.
T e l était d o n c l’o rd re établi p a r l ’a p p e la n t, en son a b s e n c e ,
afin de satisfaire a u x besoins des usagers, q u e des circonstances
im p ré v u e s, surtout p o u r les bois de c o n s t r u c t io n , p o u v a ie n t faire
naître tout à co u p ; ils tro uvaient sans re ta rd , auprès d u garde
M i c h e l , les m o yen s d ’o b te n ir
ré g u liè re m e n t ce q u e le sieur
Desaulnats n ’aurait p u le u r refuser.
L e septième tém oin, qu i est en co re u n an cien fe rm ie r, parle de
b o is de chauffage m arqués et d é livrés par le sieur D esaulnats; il
avait d ’a b o rd d é cla ré q u e c e lu i- c i lu i avait aussi d é liv r é d u bois
p o u r réparations a u x bâtim ens du d o m a in e ; mais en co n su lta n t
m i e u x ses so u ven irs, il dépose q u e ce bois de co n stru ctio n a été
r é cla m é et r e ç u p a r le sie u r B le t o n , sans p o u v o ir toutefois se
r a jip e le r par q u i il fut m a rq u é et d é livré .
Cette différence établie p ar certains tém oins, qu an t a u x p e r
so nnes, p o u r r e c e v o ir le bois de ch auffage o u d ’usage, se c o m
p r e n d aisément par la destination de l ’objet d é liv ré , et l’intérêt d u
p ro p r ié ta ir e d u d o m ain e dans l ’u n o u l ’autre cas. S ’agissait-il d u
bois de ch auffage? le fe rm ie r était a p p e lé en p re m iè re l i g n e , à
s’ en o c c u p e r ; il devait faire p o u r l ’h iv e r la provision du dom aine;
ce soin le tou ch a it p a r tic u liè r e m e n t; c ’était en q u e l q u e sorte sa
chose p r o p r e . S ’agissait-il, au c o n t r a ir e , d u bois d ’usage? la
position ri’était p lu s la mêm e; il fallait alors rép a rer u n bâtim ent
d o n t la conservation ne devait intéresser q u e seco ndairem en t le
f e r m i e r , et intéresser p lu s sp écialem ent le p ro p riéta ire : la p ré
sence de c e lu i- c i, qu i n ’était pas d ’ailleurs d ’o b lig a t io n , p o uvait
dans ce ca s, n a tu r e lle m e n t in te r v e n ir avant c e lle d u ferm ier.
C ’est ce qu i est a rriv é dans les circonstances indiquées pur le
�^
( 4 9 )
septième tém oin. I l a r e ç u , en sa qu alité de ferm ier, le bois de
ch a u ffa g e , et le sieur B le t o n , intéressé à surveiller le c h o ix des
a rb re s, a r e ç u le bois d ’usage. Cette e x p lic a tio n , qu i doit s’a p
p liq u e r à d ’autres déclarations de tém oins, p e u t faire com prendre
aisément q u e tous les ferm iers q u i se sont succédés dans le do
m aine de la G u ie z e , n ’ont pas toujours assisté à la m arque et dé
liv r a n ce im médiate d u bois destiné aux réparations; ils n ’arrivaient
’ souvent dans la forêt qu e p o u r ex p lo ite r les a rb re s, c ’est-à d i r e ,
p o u r c o n s o m m e r l ’opération p réalablem ent et contradictoirem ent
arrêtée entre le p ro priétaire d u domaine et celu i de la forêt. I l
fa u t en co re ajouter qu e la nécessité d u bois d ’u s a g e , n ’a pas d û
se faire sentir aussi souvent q u e ce lle d u bois de chauffage.
L e s n e u v iè m e et d ixièm e témoins de l ’en qu ête directe p arlen t
de faits co ncernant à la fois la possession du s ieur B leto n et ce lle
d u sie a r D e lsu c ; ils constatent tous d e u x des délivrances de bois
de chauffage et d ’usage : c ’était tantôt le sieur Desaulnats q u i fai
sait m a rq u er et dé livre r le bois en sa p ré se n c e , tantôt le garde M i
c h e l se u l, entre les mains d u q u e l était déposé le marteau forestier.
L e n e u v iè m e tém oin dit a vo ir e u beSoin, à d e u x lois, de bois
d e co nstru ctio n p o u r ré p a re r d ’a b o rd le sol de la g ra n g e , et
ensuite u n e petite étable : les réparations ont été faites p a r le
ch a rp e n tie r G a y : dans les d e u x circon sta n ces, on avait p ris dans
la forêt de L a r o c h e , le bois qu i avait été préalablem ent m arqu é.
Ces d e u x témoins s’accordent à dire q u e l ’ex e rc ic e des droits
appartenant a u dom aine de la G u i è z e , n ’a jamais été contesté par
le sie u r Desaulnats lu i-m ê m e , q u i n e réclam ait q u ’u n e chose
à c h a q u e dem ande en d é liv ra n ce , s a v o ir , le p ayem en t de la
r ed eva n ce. A p e in e ce p a y e m e n t , s’il avait été retardé p ar la
n é g lig e n ce d u. f e r m i e r , était-il e f f e c t u é , q u e la délivrance s’e x é
cutait sans a u c u n e autre opposition.
P a rm i les autres témoins de l ’enqu ête directe, il en est encore
d e u x q u i v ien n en t à l ’ap p u i des mêmes faits, déjà si b ie n cons-
7
�( 5° )
tatés. L ’u n d ’e u x , le o n z iè m e , fe rm ie r du dom aine depuis Iiuit
ans, dépose q u e , pendant les qu atre p rem ières années, il est allé
p re n d re d u bois de c h a u ffa g e , d e u x fois par a n , au printem ps
et h l ’autom ne. S i x délivrances lu i on t été faites p a r le sieur
D e sa u ln a ts, et d e u x autres p ar son garde M i c h e l.
I l ajoute q u ’à u n e é p o q u e où les vents avaient abattu u n e
quantité d ’arbres assez co n sid érab le p o u r entraver le passage
des hom m es et des b e s tia u x , le bois q u i fu t alors d é liv r é p o u r
le c h a u ffa g e , avait été p r é c é d e m m e n t du marteau par le
sieur Desaulnats.
C ette p ré c au tio n d u p ro p rié ta ire de la fo r ê t, répétée à c h a q u e
d é liv r a n c e , d é m o n tr e , co m m e on p eu t aisém ent le p ressen tir,
q u e , dans cette circo n sta n c e , co m m e dans toutes les autres déjà
r a jip e lé e s , la distribu tion d u b o is , au m ilie u des dégâts o c ca sionés p ar les vents, n ’était pas sim plem ent faite à litre de b o n
AToisinage; car a u trem en t à q u o i bon l ’e m p rein te d u m a r t e a u ?
E l l e ne devenait ici néccssaii’e q u e p a rce q u ’en consacrant u n
d r o i t , e lle consacrait u n e ch a rg e.
L ’autre tém o in , le d o u z iè m e , est le n o m m é G a y , ch a rp e n tie r ;
il a , co m m e on le sait, été ch a rg é de différentes réparations a u
dom aine de la G u iè z e .
I l dépose q u e , p o u r faire ces réparations au sol de la g ra n g e
ci à l’habitation m êm e d u fe rm ie r, sur le d e r r iè r e , à l ’aspect de
n u i t , les bois on t été pris , il y a h u it o u n e u f a n s , dans la fo rê t
de L a r o c h e , et marqués par M . Desaulnats et son g a r d e , en sa
présence ( d e lu i d é p o s a n t ), et en c e lle du sieur D e l s u c , sans
n éanm oins afiirmer q u e celui-ci était p ré s e n t; mais il p en ch e ce
p en d an t à cro ire q u e M . D e ls u c a d û assistera c e lle opération ,
p arce q u ’on ne m arqu ait pas ord in a irem en t du bois en son a b
sence.
C e n o u v e a u fait de d élivran ce , aussi bien caractérisé, sera-t-il
égalemeint considéré p a r le sieur Desaulnais, co m m e l ’elfel d ’un e
�to lé ra n ce , ou le résultat d ’un bo n voisinage? U n e sim ple obser
vation repousserait de semblables explications. Si ce fait eût
a p p a ru seul au p r o c è s , il remplissait le voeu de l ’arrêt in te r lo
c u t o i r e , en ce qu i co n ce rn e la délivrance d u bois d ’usage, qui
ne se re p ro d u it pas annu ellem ent. Il aurait attesté q u e , clans le
cours des trente années antérieures a la dem an de, la délivrance
d u bois de, construction avait été fa ite , au m om ent de la néces
sité, au v u , au su, et du consentement du propriétaire; dès lors la
p re u v e mise à la ch arge de l’in tim é, sous ce rapport, était a c c o m
p lie .
Mais le sieur D elsu c n ’est pas r é d u it, co m m e on-a p u le v o ir ,
à in v o q u e r un fait u n iq u e de d é liv r a n c e , soit p o u r le droit d ’u
sage, soit p o u r le droit de chauffage. C e lu i q u i vient d ’être r a p
p e lé p ar le tém oin G a y , se ré u n it à tous les faits n o m b r e u x
déclarés par les autres témoins; ils s’enchaînent m u tu e lle m e n t ,
et co n tin u e n t, de l ’ un à 1 a u tre , cette possession légale q u i n ’a
jamais été in t e r r o m p u e , et qu e les anciens , com m e les n o u v e a u x
pro priétaires de la forêt de L a r o c h e , ont toujours respectée.
C ’est ainsi q u ’une seule et m êm e possession, ce lle des sieurs
B leto n et D elsU c, se trouve successivement établie p ar ra p
p o r t au sieur de L a b r o , au g o u v e rn e m e n t, et au sieur Desaulnais.
L e provisoire p e u t-il co m p orte r un e p areille d u r é e ? L a tolérance
est-elle aussi lo n g u e m e n t g én éreu se?
U n état incertain p o u r le p ro p rié ta ire, et bie n v eilla n t p o u r
l ’usager, aurait p u , sans d o u te , se co m p re n d re pendant quelques
a n n ées; mais lorsque le môme d ro it, reposant sur u n titre an
c i e n , s’e x e rc e p u b liq u e m e n t et co n tra d icto ire m e n t, pendant
p lu s de d e u x s iè c le s , il n ’est plus possible d ’associer le provisoire
à la validité du litre , et à la fa veu r d ’une possession entourée
d ’un aussi lo n g temps.
UèeonnaissonS-le d o n c ; e t , sans q u 'il soit besoin d ’interroger
de n o u ve a u x témoins , notam m ent les d eu x ièm e , quatrièm e et
7
*
�( 5 2 }
six iè m e de la co n tin u a tio n d ’e n q u ê te , présentant les mêm es r é
sultats, reconnaissons q u e le sieur D e ls u c a co m p lè te m en t ju s
tifié la m a in ten u e de ses d ro its, q u an t à la d é livra n ce d u b o is ,
p a r u n e x e rc ic e c o n t in u , et c o n n u d u p ro p r ié ta ir e de la forêt.
T o u r s les faits déclarés p ar les té m o in s, sont p r é c is , positifs et
p ro ba n s ; ils s’ab u te n t t o u s , sous ce p o in t de v u e , ave c la p r e u v e
im posée p ar l ’arrêt in te r lo c u to ir e ; ils en rem plissent les e x i
g ences.
I l est surtou t ici u n e r e m a rq u e im p orta n te à p oser, c ’est q u e la
p r e u v e de ces d élivra n ces successives, au v u , au s u , et du conseil'
tement du propriétaire, n ’ est affaiblie, en a u c u n e m a n iè r e , p a r
l ’e n q u ê te c o n tra ir e . L a p lu p a r t des tém oius entendus à la r e
q u ête d u s i e u r D e sa u ln a ts, o n p e u t d ire p resq u e tous, n e savent
rie n sur la contestation a c tu e lle ; le u rs déclarations tendraient
se u lem e n t ( et c ’est là l ’ensem ble de cette e n q u ê te ) , à la ire
co n n aître les bo n n es dispositions d u sieur D esaulnats, à l ’é gard
d e ses voisins, en le u r p erm ettan t facilem ent de p re n d re d u b o is
q u i, su iva n td e u x tém oins, n ’était pas m a r q u é avant la r é v o lu t io n ,
et q u i , depuis, l ’avait tou jou rs é té ; mais ces bo n n es dispositions,
h o n o rab le s p o u r le sie u r D esaulnats, p e u v e n t être a g réées, sans
p o r t e r d ’a ille u rs atteinte a u x droits d u sieur D e ls u c ; u n e dis
t r ib u tio n b é n é v o le de b o is de c h a u ffa g e , se c o n ç o it aise'm enten
certain temps des années , et p o u r certaines gens.
I l n ’y a là a u c u n e in d u c tio n à re te n ir co n tre l ’ intim é.
I l en d o it être de m êm e de ce q u e le q u atriè m e tém oin a p u
f a i r e , dans ses p ro p re s c o n v e n a n c e s , p a r r a p p o r t a u sieur D e saulnats; s’il fa u t l ’en c r o ir e , il avait élevé la p ré te n tio n d ’u n
d ro it d ’usage, et o b te n u provisoirement de l ’app elant q u e lq u e s dé
liv ra n c e s , en attendant l ’e xam en de ses d r o it s : il a u ra it m êm e
p a y é la r e d e v a n ce ; mais en i 8 i 5 o u 181G, c e t état p ré c aire n ’a
p lu s e u lie u ; le tém oin n ’a ya n t pas tro uvé son t i t r e , a cessé spon
tanément de ré cla m e r d u bois.
�(
53)
y )
V o ilà en co re u n fait assez insignifiant dans la cause, et q u i , en
le supposant e x a c t , reste exclu sivem ent personnel au tém o in ; iï
n ’apporte a u cu n e conséqu en ce contre les droits du sieur D e lsu c ;
la position n ’est p lu s la m ê m e , com m e il est facile de le rem ar
q u e r : il suffit, a u s u r p l u s , de d ire q u e le titre n ’est pas ici perdu,
et q u e les caractères des n om breuses délivrances faites à l'intim é
n e présentent rien de p ré c a ire .
P e u im p o rte e n fin , q u e le second t é m o in , déposi taire des pa
piers relatifs à la terre de L a b r o , à la q u e lle était attachée la forêt
de L a r o c h e , a it, d ’après la demande d u sieur D e l s u c , exam iné
les titres, p o u r savoir si u n e fa m ille F u m â t n ’avait pas q u elq u e s
droits sur cette f o r ê t, et q u ’il n ’ait rien d é co u v e rt ; cette r e c h e r
c h e , in u tile m e n t f a i t e , n e saurait n u ir e a u succès de l ’action
D e l s u c , p u is q u ’i l p ro d u it le titre des F u m â t dont il est l ’ayant
d r o it, et justifie l ’e x e rc ic e des droits en résultant.
A i n s i , to u t a été p r o u v é , quant à la d élivran ce d u bois de
chauffage et d ’usage, non-seulem ent dans le cours des trente an
nées antéi’ieures à la d em an de, mais p o u r des temps p lu s r e c u
lés : T u n e des conditions de l ’arrêt in te r lo cu to ir e d u 1 5 mars i 85 o
a été re m p lie .
A c t u e l le m e n t , il faut d ém o n trer q u e le p ay e m e n t de la rede
v a n c e , élém en t inséparable d u d ro it d ’u sage, tel q u ’il était
c o n fé ré p a r l ’acte d u 17 d é ce m b re 160/1., a suivi ou pre'cédé la
d é liv r a n c e ; c ’est la seconde co n d itio n dont l ’accom plissem ent
devait être p ro u v é p a r le sieur D e l s u c , a u x termes de l ’arrêt
in terlo cu to ire .
P a rc o u r o n s rapidem ent les dépositions des témoins sur cette
partie d u procès.
L e troisième de l ’en qu ête d ir e c te , L é g e r D u f a u d , qui se t r o u
vait dans le dom aine en 1788, dépose q u ’on payait annu ellem ent
la r e d e v a n c e , en h iv er o u au co m m e n ce m e n t d u p rin tem p s; il se
r a p p e lle avoir entendu d ire p ar son p è r e , tantôt q u ’il revenait de
�( 54 )
p o rte r l ’avoine due p o u r cette redevance au sieur M anaran ch e
liom m e d ’aiFaires d u sieur D e sa u ln a ts, tantôt q u ’il fallait p re n d re
la ju m en t d u d o m a in e , et a lle r p o rte r cette avoine audit sieur
Manare* nch e.
L e troisième tém oin de la co n tin u ation d ’e n q u ê t e , dont la
déclaration se rapp orte à la m êm e é p o q u e , atteste égalem ent le
p ay e m e n t a n n u el de la redevance ; il l ’a portée lu i- m e m e à S ain tP a r d o u x , lie u d ’habitetion d u sieur Desaulnats et de son h o m m e
d'affaires.
U n e circon stance p ro p re à fix e r les,souvenirs d u tém oin est
r a p p e lé e par lui ; il a va it, u n e a n n é e , fait m esu rer l ’avoine ré
co lté e dans le dom aine de l a G u i è z e , e t , de son côté , le fe rm ie r
avait mis un sac à l’é c a r t , p o u r le p o r t e r a S a in t-P a rd o u x ; mais
il le négligea , et l ’année suivante , le sieur M a n a ran ch e é c r iv it
au sieur B le t o n , p o u r le p ré v en ir de ce t o u b li. C ’est alors q u e
le d é p o sa n t, d ’après les ordres de son m a îtr e , se rendit à Ja
G u i è z e ; y fit m esurer d e u x setiers d ’avoine q u ’il ch argea sur u n e
ju m e n t. C ’est aussi lu i-m ê m e q u i les porta à S a i n t - P a r d o u x , au
sieur M a n a r a n c h e , dont q u itta n ce lu i fu t donnée et rapportée
au sieur B leton .
V o i l à , il faut en c o n v e n ir , d e u x dépositions b ie n précises et
concord an tes sur le p ay e m e n t de la re d e v a n ce , avant l ’apposition
d u séquestre sur la forêt. E lle s présentent ce p o in t de vu e assez re
m a r q u a b le , c ’est q u ’en retraçant des faits personnels à c h a c u n des
tém o in s, et q u i ne laissent a u c u n d o u te sur la lib é ra tio n a n n u e lle
d u prix «le la co n ce ssio n , il y est lait m ention d u soin p a r tic u
lie r de l ’agent d ’alfaircs, le sieur M a n a r a n c h e , à ne laisser eiï’e c tu e r les d élivrances q u ’au fur et à mesure du p ay e m e n t de la
red eva n ce. U ne p rem ière d élivran ce p o uvait a vo ir li e u , sans e x i
g e r à l ’instant et p réa la blem en t q u e l ’ usager r e m p lît cette o b l i
gation ; mais avant la sècb'nde , l ’o u b l i , s’ il avait été com m is , était
aussitôt r a p p e lé ; il fallait im m édiatem ent le réparer : c ’était lu
condition p re m iè re d ’ une n o u v e lle d istribu tion .
�(
55
)
C o m m e n t c ro ire dès lors a u n o n -p a y e m e n l, à la suite des n o m
breuses délivrances soit au sieur B l e i o n , soit au sieur D elsue ,
délivrances attestées p a r tous les tém oins? C ’est ce q u ’il est impos
sible d ’admettre. L a présom ption contraire serait toute de droit ;
e lle m iliterait ici avec l ’intérêt du p ro p r ié ta ir e , qui l ’averiissait
suffisamment, à c h a q u e dem ande de l ’u s a g e r , s’il y avait eu silence
des témoins sur ce point.
M a i s , dans le cas p a r tic u lie r rapp elé p ar le troisième témoin
de la co n tin u ation d ’e n q u ê te , il n ’est pas nécessaire de r e c o u r ir
à ces'p réso m p tion s; le p ayem en t a été certifié par u n e qu ittance
fo u rn ie au d é p o sa n t, et q u ’il a lu i-m êm e remise au sieur JBlcton.
Jusque-là l ’e x e rc ic e du d roit a été légal ; la possession s’est m ain
tenue avec toutes les conditions déterminées par l ’a c te d e c o n c e s
sion de i G 3 4 , et retenues p a r la décision de la C o u r .
A l lo n s plus en avant, et -voyons ce qui s’est passé au temps d u
séquestre sur la forêt de L a r o c h e . A cette é p o q u e , le sieur Bleton , en sa q u alité de re ce ve u r des domaines , était l ’adm inistra
te u r de la forêt ; il aurait mêm e été c h a rg é , à en ju g e r par q u e l
ques actes, de r e c e v o ir le p rix des concessions faites aux diiférens
usagers. E n acceptant cet ordre de c h o s e s , le sieur B leio n a dû
s’ en a cq u itte r r é g u l i è r e m e n t , et ne pas o u b lie r de co m p re n d re
dans le r e co u v r e m e n t ce q u ’il était perso nnellem ent tenu de
p a y e r. U n e n é g lig e n ce à cet égard eût été un m anquem ent à des
d e vo irs, dont il connaissait toute l ’é te n d u e , et q u ’011 ne p eu t
g ratuitem ent lu i supposer.
M a is , on le dem an de, q u e l p o u v ait être l ’intérêt du sieur Bleton dans les payeinens de redevance imposée a u x droits d ’usage
d u dom ain e de la G u iè z e ? devait-il en profiter jiersonnellem e n t?
N o n , sans d o u te : il ne jouissait pas par lu i-m ê m e de ce d o
m a in e , q u ’il avait constam ment affermé , com m e de n o m b r e u x
tém oins.en dépo sent, et l ’un e des conditions expresses du bail
�(
56
)
(le sieui’ B leton fils , troisième tém oin de l ’e n q u ê te co n tra ire , le
déclare) était de p a y e r au sieur D esaulnatsj en sus d u p r i x , u n
setier d ’a vo in e p o u r les droits d ’usage. O r , q u e l le q u e p û t être la
b ie n v e illa n c e d u r e c e v e u r des dom aines "vis-à-vis les ferm iers d u
do m ain e de la G u i è z e , il n ’avait a u c u n bé n éfice à attendre de
l ’in e xactitu d e de ses ferm iers : ce u x -ci étaient, au co ntraire ,
co m m e le p ro p rié ta ire , puissam m ent intéressés à satisfaire soi
gneusem en t à le u rs o b l i g a t i o n s , afin d ’o b te n ir l ’e x é c u tio n de
l ’o b lig a tio n c o r r é la t iv e , la d é liv ra n ce de bois.
Il faut b ie n e n c o r e r e m a r q u e r q u e ces délivrances étaient r é g u
liè re m e n t faites par l ’in sp ecteu r des eaux et forêts , en p résen ce
d u so u s-in sp ec te u r, d u garde g é n é ral et des gardes particuliers.
S i des p ayem ens n ’avaient pas été effectués, i l y avait aussitôt
p lu s d ’un e v o ix p o u r r é c la m e r , et les délivrances n e p ou v aien t
être ré e lle m e n t faites q u e p a r la connaissance acqu ise , o u p a r
la ju stification p ré a la b le d u p a y e m e n t de la re d e v a n ce . O n doit
c o n c lu r e de là q u e toutes les d élivra n ces attestées a u x différens
p rocès v e r b a u x p ro d u its dans la ca u se , em p o rten t avec elles la
dém onstration lé g a le de l'a cq u itte m e n t de la re d e v a n ce . L ’Etat
o u ses agens présens à ch a q u e d é l i v r a n c e , n ’a u ra ie n t pas alors
m a n q u é de la suspendre à l ’égard des usagers en retard de p a y e r
le p r ix de le u r concession.
F e r a -t-o n u n r e p ro c h e au sieur B l e t o n , o u q u o i q u e ce s o i t ,
au sieur D e lsu c qu i le re p ré se n te , de n e r a p p o r te r a u c u n e q u it
ta n c e , pas m êm e c e lle r e ç u e par le troisième tém oin de la co n
tin uation d ’e n q u ê t e , et remise au sieur B leto n ? C e r e p r o c h e
p e u t facilem en t s’écarter p ar cette c ir c o n s ta n c e , q u e la maison
de ce d e rn ie r a été in cen d iée le
25 août 1 8 2 8 , et q u ’au m ilie u du
désordre occasioné par u n p areil é vé n e m e n t, des papiers im p ortan s, des do cum en s p r é c ie u x , des quittances on t p u disparaître.
Si cette ex p lic a tio n , d ’a illeu rs b ie n p r o b a b le , devait tomber4
devant u n inventaire des papiers d e l à fam ille B l e t o n , et n ’énori'
�(
*7 )
çant a u cu n e qu ittance , il faudrait alors en reve n ir a u x clauses
des différons b a u x d u dom aine de la C u iè z e ; là on verrait q u e le
fe rm ier était seul tenu de p a y e r a n n u ellem en t la re d e v a n ce , et
p ar su ite , devait séul re tir e r et ga rd er les quittances. C ’était la
lib é ra tio n d ’ une ch a rg e imposée vis - à-vis un tiers. L e propi iétaire d u dom aine n ’était pas astreint à r é cla m e r et conserver ces
q u itta n c e s , p arce q u ’à ses y e u x , Ja d é livra n ce successivem ent
laite du bois de chauffage et d ’ usage, dénotait suffisamment l ’a c
q u itte m e n t de la redevance. S i un obstacle avait surgi , c ’est
co n tre le fe rm ie r q u ’il se serai): r e to u r n é , et lu i
aurait d e
m andé la p re u v e d u p a y e m e n t; c ’en était assez p o u r laisser la
qu itta n ce entre les mains d u fe rm ie r, partie p r in c ip a le et inté
ressée à en su r v e ille r la c o n se rv a tio n , soit p o u r la m o n tre r au
p r o p r ié ta ir e d u d o m a in e , ce qu i p ro u va it l ’e x é c u tio n d u b a i l ,
soit p o u r en justifier auprçs du p ropriétaire de la fo r ê t, ce q u i
assurait les réclam ations de bois.
A i n s i , q u elle s que soient les idées à a cce p te r dans ces p r e
m iers temps d ’o r a g e , au m o m ent du séquestre sur la forêt de
L a r o c h e , à u n e é p o q u e o ù les lois étaient e n co re transitoires,
e tle s m o yen s d ’e x e r c è r ré g u liè re m e n t les droits en co re incertains,
il faut cependant recon n aître q u e l ’ordre c o m m e n c e à se réta
b l i r p a r l ’arrêté d u p r é fe t, du j 8 t,hei-midor an 12 , donnant e x é
c u tio n a u x lois de p o lic e de ventôse an 11 et 12 , sur les forêts.
Dès ce m o m e n t , l ’autorité p u t co n ven ab lem en t a g i r , ré p r im e r
les usu rp a tion s, et sanctionner les droits a pp u yés de titres vala
b l e s .- C ’est dans cette dernière catégorie q u e le sieur B leto n fut
im m édiatem en t placé. Dès l ’an i 5 , des délivrances de bois lu i
avaient é té p ro v iso ir e m e n t faites. D èsil’année
i.8q0, il fut m ain
t e n u , par u n avis favorable du conservateur des eaux et forets,
dans la possession de ses droits d ’usage et de chaufl"ag e > en ^,n >
d ’autres p ro cès v e r b a u x de d é liv r a n c e , de 1807 et 1 S 0 8 , sont
venus co n sa cre r définitivem ent un ex e rc ic e l é g a l , c est-a-dire,
8
�. ( 58 )
des délivrances constam m ent suivies d u p ay e m e n t de la re d e
v a n c e . C e sont là des actes administratifs et forestiers q u i reste
ro n t au p ro cès co m m e pièces probantes. L e u r n o m b r e dispense
de la p r o d u c t io n des q u itta n c e s, soit p arce q u ’elles ont d û rester
entre les mains des fe r m ie r s , soit p arce q u e les délivrances ont
d û sim ultaném en t c o n c o u r ir avec le p a y e m e n t d e l à redevance.
L e s o b lig ation s étaient ici corrélatives. L a d é livra n ce de bois
faite au sieur B le to n , em p ortait a vec e lle en m êm e temps la r e
connaissance d ’ un d ro it q u ’on ne p o u v a it alors e x e r c e r a u t r e
m ent , et l ’acq u itte m e n t de la ch a rg e q u ’o n n e p o u v ait jamais se
dispenser de payei'.
C ’est ainsi q u e les choses ont d û se passer ju s q u ’en 1809, é p o q u e
de la ré in té g ration d u sieur Desaulnats dans la p ro p r ié té de la fo
r ê t de L a r o c h e .
E c l a ir é p a r les registres et papiers de fa m ille mis à sa disposi
tio n , co m m e p ar les renseignem ens d u sieur M a n a r a n c h e , alors
e x is ta n t, sur la v é r ita b le p osition des usagers, sur le u r s droits
et leurs titres, le sie u r Desaulnats s’empressa d e r e c e v o ir le p r i x
des délivrances q u ’ il ne p o u v a it contester au sieur B leton .
O n a déjà v u q u e de n o m b r e u x tém oins déposaient de ces d é li
vrances ; il ne reste p lu s q u a r e c h e r c h e r dans les e n q u ê te s , si le
p a y e m e n t de la re d e v a n ce est aussi b ie n constaté.
U n e d é clara tio n im p ortante à saisir, dès le p r e m ie r e x a m e n ,
est c e lle d u d ix iè m e t é m o i n , de M a r ie E r a g n e , fem m e de F r a n
çois S e y c h a l , ferm ier d u dom ain e de la G u iè z e . P e n d a n t la p r e
m iè re année de l ’acq u isitio n d u sieur D e ls u c , e lle avait engagé
son mari à dem an der a u sie u r Desaulnats u n e qu itta n ce de l ’a
v o in e q u ’ il lu i avait p o rté e : q u e lle f u t sa r é p o n s e ? Q u ’ en h ù
délivrant du bois, c ’était sa quittance.
C e lt e réponse , q u e les faits successifs de d é livra n ce c o n firm en t
p le in e m e n t , e x p l i q u e , dès l ’entrée de c a u s e , la co n d u ite d u
6ieur D esaulnats, vis-à-vis les ferm iers d u dom aine de la G u i è z e ;
�( % )
c était de ne pas le u r d o n n er u n e quittance de l ’avoine q u ’ils
lu i p o r ta ie n t; il y suppléait aussitôt, en faisant la délivi’ance ;
e lle était en ellet u n acte vo lo ntaire d u p ro priétaire de la fo rê t;
elle devait être aussi u n signe caractéristique d u p a y e m e n t, sur
tout lo r s q u ’ e lle se re p rod u isait pen dan t p lusieurs années. Ce
m o d e d ’agir étant c o n n u , il n ’est p lu s d ’e x ig e n ce à faire valoir
co n tre le sieur D e l s u c , s’il ne p r o d u it pas de p iè c e accusant
littéralem ent la ré cep tion de q u e lq u e s seiiers d ’avoine ; les f e r
m iers d u dom aine de la G u iè z e en auraient in u tile m e n t ré cla m é
d u sieur D esa u ln a ts, qu i n ’était pas dans l ’h ab itude d ’en fou rn ir.
L a circonstance rapp elée p a r ce dixièm e t é m o i n , ne fait pas
seulem en t naître ces l’é ile x io n s, mais e lle do n n e aussi la m esure
des m o yen s opposés p ar le sieur Desaulnats co n tre l ’in tim é, car
il lu i fait positivem ent le sin g u lier r e p r o c h e de ne pas représen
ter a u jo u r d ’ui la qu ittance q u ’il n ’a pas v o u lu lu i-m ê m e d o n n er.
C ’est-à-dire , q u ’avec ce s y s tè m e , les droits d u sieur D e lsu c
seraient livrés à la discrétion de son a dversaire, d o n t le lana
ens de sa situao acoe varierait a u f u r et à m esure des cliancem
o
tio n . T a n tô t i l recevrait l ’avoine des fe rm ie r s, et le u r fe ra it, en
l’e m p la ce m e n t de q u it t a n c e , les délivrances de b o is ; tantôt il
viendrait so u ten ir q u e les délivrances n o n a p p u yées de q u itta n c e ,
n e sont pas suffisantes p o u r co n stitu er la possession lé g a le de
l ’ usager. D e pareils m o yens p ortent h eu reu sem en t avec e u x le u r
désaprobation ; les in d iq u e r c ’est déjà les flétrir.
S i d o n c le sieur Desaulnats n était pas dans l ’h ab itu d e de f o u r
n i r la qu itta n ce de l ’a v o in e , i l s’agit de consulter au m oins les
tém o in s sur la réalité des livraisons. A cet é g a r d , les déclarations
sont aussi n om breuses q u e positives.
L e c in q u iè m e tém oin de l ’en q u ê te d irec te , ancien garde de la
f o r ê t de L a r o c h e , et p lu s tard , au service d u sieur Desaulnats,
l ’a e ntendu d ire (c o m m e on l ’a déjà r a p p e lé ) , au n o m m é C hass a i g n e , fe rm ie r d u d o m a in e , q u i lu i demandait d u bois de
8
.
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.
c o n s t r u c t io n , q u ’il ne lu i en m a rqu era it p o i n t , tant q u ’ il ne
p a y e ra it p a s la redevance. L e tém oin n ’a pas vu p o rte r l ’avoine
chez
D e sa u ln a ts, mais il a o u ï dire q u e cette redevance était
payée.
L e s'x ièm e tém oin , fils d u n o m m é Cbasisagne, désigné dans la
d é iL u a t io n p ré c é d e n te , fo u rn it des détails p r é c i s , et q u ’il était à
m êm e du Lien c o n n a îtr e , sur les livraisons d ’avoine
II dépose
q u e dans le co urs des trois années de jouissance du dom aine de
la G u i è z e , son père ne piiya p o i n t , la p re m iè re a n n é e , la re d e
vance ; niais à la Seconde a n n é e , le garde de la f o r ê t , app elé
G è n e sl, refusa de lü i d é liv r e r d u L o i s , s’il né se libérait pas.
C ‘est alors q u ’il j>aÿit à M . Desaulnats la quantité d ’ iin Setier
a v o in e ; il n ’y W t pas de p ay e m e n t p o u r la troisièm e a n n é e ,
p a rce q u e ce feriiïith’ ‘¿ôi'tit d u dom ain e avant l'é p o q u e fixée
p o u r cet olijét.
L e septième t'émôÎri'|iarle aussi d ’u n refus d u sieur D esaulnats,
il y a seifce'ans, à liv r e r d u bt>is!d e ;coristrüctiôn , si la red eva n ce
•
r
n ’ éiaii pas p a y é e ; le déposant porta Iui-mêm bïhi ebâteilu un setier
d ’avoine q u i IVu m ésiire’et recti p a r le homitié R i b e y r e , domes
tiq u e d u siéitr DèSaulnrits, et é e l u i - c i fit blors la d élivra n ce
ré cla m é e .
L a p lu p a rt1des paydinèris de la r e d e v a n c e :ont été reçus par le
sleü r Desaiiliiiits; “c ’ést ce (pii résulte hotariitiiént des déposi
tions des n e u v iè m e et on zièm e tém oins de l ’en q u ê te directe.
O n pelit ég alem eh t cBrièulter lés décldratidris dès liiiitiènie et
ti e i i l ù m c ‘ de la hiêmè éhJpiète ; ils constatent lès inêriteS faits
de ‘rccCptîbn d ’a i b l n e ^ H r les bôihtribs de coilfiririée de l ’a p p e
lant.
A p i'tt fa v ô ir fait c ’d riniiîtrc dès tém oignages aussi positifs, aussi
'détaillés èt n o m b r e u x £ilr le pnyétnent de la rédévarice , et q u e
l ’ en qu êté coiWVaire, 'm ü é tte e n fc e 'p o h it, n'a pli dès lors déhiéntir
b u ;iU(5u i i c r , , îl" iie p c ’u t 'jlliis a ctu e lle m e n t s’é le v e r le m oindre
�( G I )
■doute sur la conscrvalion des droits d’ usage et de chauffage at
tachés au dom aine de la G u iè z e . T o u t est évidem m ent p r o u v é ,
soit avec les titres invoqués dans l ’ intérêt du sieur D e ls u c , soit
avec les élém ens fournis p ar les enquêtes.
S i , à l ’entrée du p r o c è s , l ’existence d u d ro it était contestée,
les titres repoussés co m m e in a p p lica b les , les faits de possession
c o m m e n o n perlin en s et ne p ouvant être f o u r n is , la question
n ’est plus restée la m êm e à l’audien ce de la C o u r ; là , u n e lo n g u e
discussion a jeté la lu m iè re sur la véritable difficulté d u procès.
C e n ’ est p lu s le d ro it en lu i m êm e qu i devait être co n te sté , c ’est
son e x e rc ic e légal pendant le cours des trente années antérieures
à la dem ande q u ’il fallait p ro u v e r.
L e sie u r D e lsu c a-t-il satisfait à la p re u v e telle q u ’elle était
c o n d itio n n é e ? A-t^il établi co n cu rre m m e n t la d é livra n ce des
b o is d ’usage et de chauffage , et le p ayem en t de la r e d e v a n c e ,
au v u , nu su , et du consentement ctu propriétaire de la forêt ?
C e tte q u e s t io n ;est résolue co m p lètem en t par les résultats des
e n q u ê te s ;
ils attestent q u e la possession de l ’in tim é , dont la
d ém onstration n e s’est pas arrêtée au c e r c le posé par l ’a r r ê t ,
et q u i est re m on té e b ie n au delà des trente a n n ées, se trouve
caractérisée p ar tous les élém ens conservateurs en celte m atière,
c ’e st-à-d ire , par le p ay e m e n t de la redevance et p ar des d é li
vrances a n n u e lle m e n t faites p a r le p ro p rié ta ire de la fo rê l. Cette
possession a été c o n t in u e , p u b l i q u e , et à titre de propriétaire
d u dom ain e de la G u ieze.
L ’arrêt in te rlo cu to ire (le la C o itr est-il actuellem en t re m p li?
c ’est ce q u ’il est perm is de d écid er en faveur du sieur D e l s u c ,
et dès lors la dem ande se tro u ve co m p lètem en t justifiée.
L ’a p p e la n t, justem ent in q u ie t des résultats apportés p ar les
enqu êtes , ch e rch e ra it subsidiairem ent à faire réd u ire le d roit
d ’u sa g e ; est-il en co re fond é dans cette n o u v e lle prétention? C e
sera l ’ob jet d ’ un exam en rapide.
�( 6 0
§ II. Q u e l est l ’état présent du domaine de la G u ièzeP L ’étendue
et dimension primitivement assignées a u x lâtim ens , seront-elles
changées par les réparations du sieur D elsuc P
L e sieur Desaulnats l ’a dit avec raison : c ’est dans le titre
c o n stitu tif d ’un droit d ’usage q u ’on d o it r e c h e r c h e r et son ob jet
et son éten due. L à , tout a été p r é v u , q u an t à l ’état a ctu e l des
bâtim ens et à le u r agrandissem ent fu t u r ; l à , le p ro p rié ta ire de
la forêt a p u re stre in d re , à sa v o lo n té , les droits co n cédés, o u ,
au c o n tr a ir e , l e u r d o n n e r u n e extension p lu s grande q u e les
besoins du m om ent.
C ’est d o nc le titre d u sieur D e ls u c q u ’il faut d ’a b o rd consulter,
p o u r se faire un e idée exacte de la concession et de sa m esure.
O r , q u elle s sont les conventions insérées dans l ’acte d u 17 dé
c e m b r e iG 5 4 ?
O n y r e tr o u v e u n e investison de la forêt de L a r o c h e , en faveur
de Jean F u m â t , fe r m ie r de la se ign eu rie de L a r o c h e , p our en
jo u ir pour son usage des maisons, pour les ténemens des villages de
G uièze et P is s o l, soit pour son chaiiffage et réparations q u ’ il pour
rait fa ire dans lesdits ténemens, à la charge, etc.
D e u x droits essentiellem ent distincts sont ici rappele’s : le d roit
de ch auffage et celu i d ’ usage. L e p r e m i e r , lo r s q u ’il est ainsi sp é
cifié, co m m e dans l ’espèce, doit être lim ité à la d é liv r a n c e d u b o i s
à b r û l e r , tandis q u e le d roit d ’ usage n ’a d ’autres bo rnes q u e celles
qu i sont prescrites par les titres de concession et la possession,
o u les règlem ens sur la p o lic e des forêts. A u s s i, toutes les fois
q u e les actes de concession co m p re n n e n t en m êm e temps le
d r o it d ’ usage et de c h a u f fa g e , il faut recon n a ître q u e l ’usager a
la fa c u lté de ré cla m e r n o n - s e u le m e n t le bois nécessaire à son
c h a u f f a g e , mais en co re le bois d o n t il p e u t a v o ir besoin p o u r
réparations o u constructions.
Ces p rincip es ont ré ce m m e n t x’e çu le u r a p p lica tio n dans l ’af-
�6
{ 63 ) .
f a ir e M i g n o t , co n tre les liai»tans de Riom-ès-Montagnes, et autres.
( A r r ê t , C o u r d e R i o m , 2e c h a m b . , 10 juin i 8 3 i.)
S i d o n c le sieur D e ls u c , co n tra irem en t au titre du 17 d é
ce m b re iG 3 4 , était a u jo u rd 'h u i dans l ’ intention de construire
u n nouveau b â tim e n t, o u m êm e d ’éla rg ir les bases sur lesquelles
les anciens bâtim ens sont éta b lis, il est h ors de doute q u ’en exa
m inant l ’étendue de ses droits, et lu i opposant son acte de c o n
cession , on p o u r r a it lu i d ire q u e celu i à q u i un e servitu d e est
d u e , ne p e u t en user q u e suivant son titre, sans p o u v o ir r ie n fa ire
p o u r l ’aggraver.
Mais telle n ’est pas p ré se n te m e n t, telle n ’a jamais été la p r é
tention de l ’in t im é ; il possède, dans les dépendances d u d o
m a in e de la G u i è z e , d e u x bâtimens q u i se com posent d ’un e
m aison destinée à l ’habitation d u f e r m ie r , et à seize toises d ’i n
t e r v a l le , d ’un e gran ge et écurie. V o i l à les seuls bâtim ens q u i
existaient à l ’é p o q u e de la concession de iG 3 /| ; il n ’en a été
co n stru it a u c u n autre.
L a sim ple inspection atteste (et cela ne p eu t être d o u te u x p o u r
le sieur D e s a u ln a ts ), q u e ces bâtim ens sont fort anciens : le u r
c o n stru ctio n p r e m iè r e , qu i re m o n te vraisem blablem en t à p l u s de
d e u x siècles , a été faite d ’un seul je t ; le u r vétusté se trahit fa
cile m en t. O n re con n a ît en effet, soit à la m a ç o n n e r ie , soit à la
d irec tio n des fenêtres et j o u r s , co m m e à l ’état de la c h a r p e n t e ,
q u e ces bâtim ens n ’ ont jamais été ni p lu s , ni m oins grands q u ’ils
n e sont a u jo u r d ’h u i.
Q u e lle est m aintenant la dem ande d u sieur D e ls u c ? a-t-elle
p o u r b u t d ’adjoin dre de n o u velles constructions aux anciennes,
o u m êm e d ’a gran dir celles a ctu ellem en t existantes? N o n , sans
d o u t e , et c ’est ici q u e la méprise d u sieur Desaulnats a été grande.
L ’intim é est se u lem e n t o b lig é de recon stru ire ou de réparer
les g ran ge et é cu r ie qu i tom bent en r u in e ; mais il n'excédera pas
d ’un e seule lig n e , soit en lo n g u e u r , soit en la r g e u r , les d im en -
o's
�/
( G4)
sions déjà ëiablies. O n bâtira sur les mêmes fon d em en s, et tout
sera r e p r o d u i t , co m m e p a r le p a ssé , dans les mêmes p roportion s.
I l ne s’agit d o n c pas d ’un e n o u v e lle c o n stru ctio n sur un p o in t
o ù e lle n ’au ra it jamais e x is té , ainsi q u e le sieur D e sa u ln a tsji
v o u l u le faire c ia in d r e ; c ’est sim p le m e n t la réparation d 'u n e an
cie n n e c o n s t r u c t io n , q u ’ il était im possible de retarder p lu s lo n g
temps.
A v a n t de c o m m e n c e r la ré p a ra tio n , le sie u r D e ls u c a d û p r é
v e n ir l’appelant ; il lu i a fait c o n n a îtr e , p ar acte e x tra -ju d icia ire ,
d u 20 mars 1827 , q u e l bâtim ent il entendait reco n stru ire o u r é
p a r e r , q u elle s en étaient les d im e n sio n s, afin q u e .celui-ci p û t
v o ir p ar lu i-m êm e si l ’entreprise était u rg e n te o u io r t u t i l e , et
si e lle était selon la q u alité de l ’usager.
C ’était la m a rch e p rescrite p ar les articles i 5 et i/jde la .coutume
d u N iv e rn a is ,f o r m a n t le d r o it c o m m u n en ces matières. Le^ sa
vant co m m e n ta te u r de celte C o u t u m e , G u y - C o q u i l l e , o b se rv e ,
à ce s u j e t ,
*
Q u e le seigneur a intérêt de connaître quel bâtiment ; car s’ il voulait
fa ir e bâtiment non nécessaire ou de plus grande étoffe .que la qualité de^
Cusager ne porte, le seigneur lu i pourrait le refuser; aussi, pour sa
voir quelle sorte de bois et e n quelle qualité V.usager en aura besoin.
A in si le sieur Desalnats, averti .par la som m ation CAtra-judi•ciaire d u 25 mars 1 8 2 7 , a c l e >
Pr «m >er m o m e n t , h portée
d ’a p p ré c ie r la nécessité de la r é p a r a tio n , et d ’en constater par
lui-m iîm e la vé rita b le é ten d u e. I l lu i a été fa cile de recon n a ître
q u e les anciens bâti mens d u dom aine de l a G u i e z e n ’elaient pas
•c h a n g é s ; q u e c ’était p o u r le u r état p r im it if q u e lo droit d ’ usage
était'tiniqueinent r é c la m e , et q u e la re co n stru ction .p ro jetée n ’ag-.
•gravait, sous a u c u n r a p p o r t , la servitu de d u e .p a r le .p ro p rié taire
de la forêt d e 'L a r o c h e .
Ces e x p lic a tio n s , in tu ile s, sans d o u te , p o u r 'le .sie u r iDçsaul*
‘ jiats q u i devait très-b ien savoir à q u o i.s ’en tenir su r ;les répara»
�C 65 )
tions d ô n t s’a g it , tém oigneront a u moins à la C o u r des disposi
tions réelles d u sieur D e ls u c , à ne pas dépasser les lim ites fixées
p a r son titr e , et à r é g le r ses entreprises p ar la m esure de ses
droits. L e s anciens bâtim ens, près de s 'é c r o u le r , seront re co n s
truits sur les mêmes bases, d ’après les mêmes dimensions ; voilà
la cause de la réclam atio n faite par Je sieur D elsuc ; v o ilî aussi
les motifs de l ’a c c u e i ll ir , p u isq u e l’état an cien est respecté dans
les jn o p o r tio n s p rim itiv e m e n t éiablies.
I l est en co re d ’autres craintes manifestées p ar le sieur Desaulnats, à l ’occasion de ces réparations ; il sera facile de d ém o n trer
é g alem en t q u ’elles n ’ont a u cu n fondem ent.
O n p réten d q u e le dom aine de la G u i è z e , p o u r la totalité d u
q u e l le d ro it d usage est dem an dé, est be a u c o u p p lu s co n sid é
r a b le a u jo u r d ’hui q u ’ il ne l ’était en iG 5/|.. O n r a p p e lle ce qui
s’est passé en 1 7 2 9 , jet l ’on dit q u ’à cette é p o q u e le sjeu r F u m â t
avait r é u n i , dans la mêm e main d u m êm e f e r m i e r , a son d o
m aine de la G u i è z e , tous les héritages dépendant d ’ un autre do
maine appartenant aussi au sieur F um ât.
E h b i e n , en supposant ces faits e x a c t s , q u e lle in flu e n ce a p p o r
teraient-ils,dans les réparations telles q u e le sieur D e lsu c entend
les faire ? Q u e signifierait l ’accroissemepit d u dom aine de la
G u i è z e , çi les re con stru ction s actuelles ne se p ro p o r tio n n e n t pas
avec la n o u v e lle éten d u e de la p r o p r ié té de l !i n t i i n é , mais d o i
v e n t rester, au c o n t r a ir e , avec les dimensions de bâtim ens, telles
q u ’elles existaient en iG 5 4 ?
1:
L a position d u s ie u r Desaulnats ne -pourra dès lprs en soufTrir,
p u is q u e l ’agrandissement ne porterait ré e lle m e n t q u e su r le ter
rain en c u lt u r e . M ais
il y a p l u s , c ’est qup d ’autres idpes se p résen
t e n t, et q u ’elles sont m êm e l«s seulep à a cce p te r. O n a c r u devQj’r
r aiso n n er dans l'h y p o th è s e o ù le dom aine d ’A u z a t serait encore
r é u n i à ce lu i de la G u i è z e ; si pela éta it, il aurait fyllu r e c o n
naître q u e les bâiitnen? d ’A u z a t , bien p lu s vastes q u e ceuje de la
9
�G u i è z e , se tro u va ie n t fo rcé m en t co m p ris dans cette r é u n i o n , et
q u ’ainsi les récoltes des d e u x dom aines se distribu aient n a t u r e l
lem en t dans le u rs bihimens respectifs : mais tel n ’est plus, depuis
lo n g u e s an n ées, l’ état des clioses; les d e u x d o m a in e s, soumis
m o m en ta n ém en t à u n e seule et m êm e e x p lo ita tio n , s o n t, depuis
1 7 6 4 , com m e on l ’a in d iq u é dans l ’exposé des faits, séparés et
jouis p a r d e u x ferm iers difierens.
L e dom aine d ’A u z a t reste d o n c étra n g er à cette contestation.
Q u a n t au d o m ain e de la G u iè z e , il est a u jo u r d ’h u i m oins c o n
sidérable q u ’il ne l ’était a u tre fo is , m a lg ré les adjo nctions assez
récentes d ’un petit p ré et d ’u n e teri’e ; ces o b je ts, en v a le u r de
3 ,o o o fr., com p en sent b ie n fa ib le m e n t les pertes é p ro u vé e s p a r le s
réd u ctio n s faites lors d u co n trat de m a riag e d u 19 o c to b r e 1 7 7 5 .
O n v o it dans ce contrat q u e les sieurs B u r in p ère et fils , en
délaissant en toute p ro p r ié té , à le u r fille et soeur, le d o m ain e
de la G u i è z e , ave c ses droits d ’ usage et de ch a u ffa g e , en e x c e p
tèrent néanm oins le d roit de pacage et d é fr ic h e m e n t dans le
co m m u n a l lien a rd cch e , P la te a u x et V e r g n e d u M a s , ainsi q u e
les têtes d ’h e rb a g e faisant ci-devant partie d u d it dom aine , et u n
p etit h éritage app elé la M a y , tout qu oi, est-il d i t , est aliéné cidevant, et ne f a it point partie du susdit délaissement.
C e n ’est pas tout ; à l ’é p o q u e de l ’e x p r o p r ia tio n d u d o m a in e ,
d e u x héritages n ’ont pas-été co m p ris dans la saisie, et ont été
ven d us par le sieur Bletori.1
O n d em a n d e a c tu e lle m e n t si les m inces acquisitions faites p ar
le sieur D e l s u c , p e u v e n t se u lem e n t r e m p la c e r les réd u ctio n s
q u i vie n n e n t d ’être signalées.
E n fin , u n e d e rn iè re ob je ctio n est soulevée par le sieur D esauln a ts; il p ré te n d q u e le sie u r D e ls u c a a c q u is , avec le dom ain e
de la G u i e z e , q u a ra n te -u n e têtes d ’h e r b a g e , et q u ’il les fait
c o n so m m e r en été p ar ses bestiaux.
L ’np2>eliuu sait m ie u x q u e p e r s o n n e , q u e tous les co rp s de
�( p7 )
d o m a in e , dans les m ontagnes d ’A u v e r g n e , ont besoin, p o u r ê ire
co m p le ts , d ’u n pacage fort éten d u. L e délaissement du dom aine
de la G u i è z e , p orté au contrat de mariage d u 19 o c to b re 1770 ,
atteste positivem ent q u e des têtes d ’h erb ag e en faisaient a u t r e
fois p a rtie ; il n ' y aurait d o n c pas a u jo u r d 'h u i d ’augm entation
sous ce rapport.
Ces pacages situés sur la ch aîn e des monts D o r e , sont q u e l
q u efo is à la distance d ’u n e , de d e u x et m êm e de trois lieues
de la m é ta ie rie; les vaches laitières y sont co nduites au m ois de
m a i , et ne r e v ie n n e n t à la ferme q u ’au mois de n o v e m b re sui
vant.
A cette é p o q u e , fa u t-il, co m m e l ’a p ré te n d u le sieur D e sa u lna ts, des bâlim en s p lu s vastes p o u r lo g e r ces b estiau x étrangers,
a - t - il d it, a u x besoins d u dom aine?
M ais (et c ’est la p re m iè re réponse à toutes les craintes p e u
fondées de l'a p p e la n t) , les bâlim ens ne sont pas ch a n g és, ils ne
le seront pas p ar les réparations à i a i r e , et ils r e ç o iv e n t, com m e
p a r le passé, les bestiau x si p eu étrangers a u x besoins du domaine,
q u ’ils en conrposent le p rin c ip a l r e v e n u .
D ’a ille u r s , il y a nécessité de lo g e r les bestiaux en n o m b re
suffisant p o u r co n so m m e r les fourrages r e c u e illis dans ce d o
m a in e ; e t , sous ce n o u ve a u r a p p o r t , il im p orte de ra p p e le r q u e
les bâlim en s de la G u i è z e , dont la co n stru ctio n p rim itiv e r e
m onte à p lu s de d e u x siècles, ne co m p o rte n t q u e la dim ension
a b so lu m e n t nécessaire p o u r co n te n ir les récoltes du dom ain e et
les bestiau x q u i d o iv en t les co n som m er.
C ’en est assez sans doute p o u r rassurer le sieur Desaulnats, q u i
n ’a pas c r u d e v o ir é le v e r jamais la m êm e difficulté à l'é g a rd des
v in g t dom aines a u q u els il f o u r n it , c o m m e à celu i de la G u i e z e ,
le bois d ’u s a g e , et q u i tous ont leurs m ontagnes et des bestiaux
en ra p p o rt avec l ’é te n d u e des pacages.
I l fa u t d o n c l e re con n a ître : le sieur D e l s u c , justem ent fondé
�( C8 )
_
dans sa dem ande en d é li v r a n c e , a d û la form er et la so u te n ir
devant l ’a u to r ité ju d ic ia ir e .
U n t i t r e , dont la date embrasse a u jo u r d ’h u i près de d e u x
siè cle s, r e n fe rm e les droits d ’usage et de ch auffage dans la forêt
de L a r o c h e ; des actes n o m b r e u x les ont constam m ent rapp elés;
u n e possession légale en a conservé toute la force , toute l ’éten
due.
L e s p ropriétaires d e là forêt, en se succédant l ’un à l ’a u t r e , ont
respecté des droits aussi clairem en t établis, aussi constam m ent et
aussi p u b liq u e m e n t exercés.
L ’état, en s’em parant de la forêt., exam ina les titre s, s’e n q u it
de la possession et de ses caractères; il a r e c o n n u le d r o i t , il a
lait les délivrances.
L ’ancien p ro p rié ta ire lu i-m ê m e , en accep tan t le b ie n fa it d ’une
r é in té g r a t io n , s’est empressé d e c o n tin u e r l ’o rd re établi ; il a fait
en gran de connaissance de ca u se , des délivrances a n n u e lle s , et
r e ç u le p ay e m e n t de la redevance.
U n d ro it d ’usage et de c h a u ffa g e , ainsi p ro té g é par la fa ve u r
d ’un
lo n g tem p s, ainsi caractérisé p ar la
ch a în e no n in ter
r o m p u e de n o m b r e u x actes et de n o m b r e u x faits de possession
lé g a le , d e va it-il être contesté?
C ’est au m o m ent o ù les réparations de bâtim ens m enaçant
m i n e , ont fait r é c la m e r la d é liv r a n c e des bois de c o n s t ru c t io n ,
q u e le p rocès a surgi ; alors tout a été mis en q u estio n : l ’existencc
co m m e la conservation d u d r o i t , l ’a p p lica tio n d u titre c o m m e
les effets de la possession.
U n arrêt de la C o u r , en fixant l ’état de la contestation , a d é
cidé q u e le d ro it était c e r t a in , q u e le titre p ro d u it donnait d r o it
à l ’u s a g e , tel q u ’il était dem andé. Si u n doute seul a p ré v a lu , a u
m ilie u des débats de l ’a u d ie n c e ; s’il a frap p é l’esprit d e s m agis
trats, et passé dans le u r dé cision in t e r lo c u to ir e ; si , e n ijn , il a
fa llu ju stifier q u e le d r o i t , tel q u ’il était r e c o n n u , nvait été
«
�( 6 9 )
e x e r c é , pendant les trente années antérieures à la d e m a n d e , au
v u , a u s u , et d u consentem ent d u p ro p rié ta ire ?
C e tte q u e stio n , la seule r e te n u e au p r o c è s, est décidém ent r é
so lue p ar les enquêtes. E lle s ont évidem m en t p ro u v é l ’exe rc ic e
lé g a l d u d roit c o n c é d é en 1 6 3 4 ; e lle s e n o n t dém ontré la conser
vation p a r des faits gém inés de possession, au v u , au s u , et du
consentement du propriétaire de la fo r e t.
T o u t e s les condition s imposées par l ’arrêt in t e r lo c u to ir e , ont
d o n c été rem plies. T o u t e fo is , le sieur D e lsu c se serait-il f a i t il
lusion? o u s’em p arant d u langage de son adversaire, ne serait-il
pas m i e u x fo n d é q u e lu i à dem ander quelle est celle des parties
que la ju stice et l 'équité protègent?
Mais c ’est a u x lu m iè re s, c ’est à la sagesse de la C o u r , q u e la
solution définitive de cette contestation déjà si l o n g u e , ap p a r
tient actu e lle m e n t. L ’in tim é doit attendre avec respect et co n
fiance, u n e décision dont il ne saurait craindre les résultats.
D E L S U C aîné.
. P . C . T A I L H A N D fils, avocat.
T A I L H A N D , a voué-licencié.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsuc, Jacques. 1831]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delsuc
P. C. Tailhand fils
Tailhand
Subject
The topic of the resource
droit d'usage
séquestre
biens nationaux
bois
coupe de bois
droit de chauffage
pacage
droit de bâtissage
eaux et forêts
émigrés
témoins
communaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour M. Jacques Delsuc, propriétaire et ancien notaire, habitant du lieu de Saint-Pardoux-Latour, intimé ; contre M. Jean-Marie Neyron-Des Aulnats, propriétaire, habitant au lieu de Saint-Genès, appelant d'un jugement par défaut, rendu au tribunal civil d'Issoire, le 27 juillet 1827.
Table Godemel : Usage (droits d') : 2. dans la contestation relative à un droit d’usage de prendre des bois de construction dans les forêts de la Malguièze et de Laroche appartenant au sr Désaulnats ; celui-ci prétend que ce droit ne résulte pas des titres produits, ni de la possession ; qu’il serait éteint par non usage ; et que, dans tous les cas, il ne pourrait être éxigé pour la réparation ou reconstruction de la grange qui fait l’objet de la contestation, parce qu’elle n’aurait été construite qu’après l’acte de concession du 17 décembre 1764, et après diverses augmentations faites au domaine de la Guièze, qui appartient à Delrue ; demandeur en délivrance. Quid ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1831
1764-1831
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
69 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2714
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2712
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53551/BCU_Factums_G2714.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Tour-d'Auvergne (63192)
Augerolles (63016)
Auzat (domaine d’)
Lagièse (domaine de)
La Roche (forêt de)
Pissols (village de)
Buisson (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
bois
communaux
Coupe de bois
droit d'usage
droit de bâtissage
droit de chauffage
eaux et forêts
émigrés
pacage
séquestre
témoins
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53549/BCU_Factums_G2712.pdf
22750a9fd41b35ca133ea1c7f10a76ab
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
M . J e a n - M a r i é N E Y R O N - D E S A U L N A T S , pro
priétaire , habitant au lieu de St-Genès, a p pe la nt
d'un jugement par d éfau t} rendu au tribunal civil
d ’Issoire, le 27 juillet 1 8 2 7
CONTRE
M .
J
a c q u e s
D E L S U C , propriétaire et ancien no ta ir e,
h a b i t a n t d u lieu d e S t - P a r d o u x - L a t o u r , Intimé.
U n droit d’usage, réclame par M. D elsuc, dans une forêt appar
tenant à M.D ésaulnats , est l’objet du procès.
Le sieur Delsuc invoque un titre et une longue possession accom
pagnée de paiement de redevance.
Le titre sur lequel il s’appuie est tellement équivoque, qu’il s’en
est servi seulement devant la cour. Jusques-là il s’était fondé sur
un autre titre , qu’il est, aujourd’h u i, obligé d’abandonner.
Ce titre, au reste, et les droits qui pourraient en résulter ne lui
ont jamais été transmis, et ne l’avaient même pas été à ceux qu’il
prétend représenter.
Q u a n t à la possession qu’il allègue, elle n’est pas établie ; la déli
vrance prescrite par les lois forestières pour donner à la possession
un eff e t légal, le paiement de la redevance , exigé aussi pour faire
COUR ROYAL
D E IUOM.
I re CHAMBRE.
�( o
considérer cette possession comme le résultat d’un droit reconnu ,
la continuité nécessaire pour en consacrer les avantages, en un mot,
aucun des caractères propres à rendre, en pareille matière, une
possession valable et utile, aucune des conditions que veulent les
principes et la jurisprudence, ne se rencontrent dans les faits dont
déposent les nombreux témoins qu’a fait entendre M. Delsuc.
Tout ce que démontre clairement l’ensemble de cette cause ,
c’est que ce droit d’usage, qui était attaché , dit-on , à un domaine
appelé de Laguièze , était resté, pendant un demi-siècle au
moins, sans exercice ; que dans la suite un nouveau propriétaire
du domaine, qui cependant n’avait pas acquis l’usage, chercha à lui
donner une v ie , une consistance qu’il n’avait jamais eue, ou qu’il
avait perdue depuis long-tems; que ces tentatives furent, sur-tout,
réitérées , et accompagnées d’un commencement de succès dans un
tems où la forêt était frappée du séquestre national ; que depuis la
réintégration de cette forêt dans les mains du propriétaire, des rela
tions de voisinage et d'affaires avaient déterminé celui-ci à consentir
à quelques délivrances provisoires, en attendant que les titres eussent
été communiqués et les droits vérifiés , et que c’est à l’aide de ces
vagues élémens, et en abusant d’une tolérance que l’on devait croire
sans danger, qu’aujourd’hui le sieur Delsuc veut s’arroger un usage
auquel, il ne saurait se le dissimuler, il n’a réellement aucun droit.
Il fait plus; il cherche même à donnera ce prétendu droit une étendue
que ne comporteraient, ni le titre dont il argumente, ni la compo
sition de l’ancien domaine.
FAITS.
La forêt de Laroche, dans laquelle le sieur Delsuc veut exercer
un droit d’usage, était une dépendance de la propriété seigneuriale
de Laroche, et fut l’objet des deux actes qu’on a successivement fait
valoir dans le cours du procès. L ’un de ces actes est du i 5 janvier
1 56 1 ; l’autre du 17 décembre i 63 /f
Par le premier, le sieur Jean de Laroche, alors propriétaire de
cette forêt, concéda à Jean F umat, clerc du village du mas Del Tourr c,
le droit, ¡tour lui et les sien s, à perpétuité , de p ren d re, couper,
�( 3 )
.
m ,
et emporter au villageDelm asDelTourreeta ses appartenances, du
bois de la forêt de la Malguièze et de Laroche, tant pour son chauf
fage d’un feu seulement, que pour clore et fermer ses héritages, et
pour tous autres usages, avec cette convention, qu’il ne pouvait
prendre du bois de sapin que pour bâtir, édifier et réparer maisons,
granges, étables, moulins, et autres édifices.
Le prix de la convention fut de 20 fr., dont l’acte porte quittance,
et de deux cartons de cens et rente annuelle.
Cette concession perpétuelle, mais restreinte au village Del Mas
Del Tourre, fut suivie en 1634-> l l décembre, d’une autre con
cession qui ne semblait que temporaire, qui est contenue, non dans
un acte authentique comme le premier, mais dans un acte sous seing
privé, par lequel le sieur De La Barge, alors propriétaire de la forêt,
investit le sieur J e a n Fumât son ferm ier, est-il dit, d’un droit
dans cette forêt pour son usage des maisons , pour ses tènemens
des villages de Guièze et Pis sol, soit pour son chauffage et
réparations qu’il pourrait faire dans lesdits ténemens, à la charge
de payer chaque année la quantité d’un setier d’avoine qu’ il
serait tenu de porter audit Laroche.
Cet acte qui n’est pas fait double, qui ne déclare pas la concession
perpétuelle, qui ne parle que de simples réparations et non de
constructions à faire, qui rappelle seulement les maisons de Fumât
dans les deux villages , sans indiquer d’autres bûlimens, tels que
granges, étables, moulins, etc., cet acte ne paraît pas avoir reçu
une exécution soutenue ; rien n’établit même qu’il en ait reçu
aucune; et ce qui est constant, c’est que de 1729 à 1773, l’on ne
trouve absolument aucune trace qui indique que personne ait songé
à l’exécuter.
C ’est, en effet, ce que démontrent plusieurs baux successifs du
domaine de la Guièze , dont le premier remonte au 4 avril 172g.
Par ce bail, le sieur François Fumât, procureur d’office au
bailliage de Montaigut-le-Blanc, et y habitant, donna à ferme pour
six années a Annet Plane et à Jean et Antoine G a y s, son domaine
de la Guièze et trente-deux têtes d’herbagès de la montagne de
Montaigut.
�Le preneur s’oblige à clore et à bien cultiver les héritages; on
le soumet aussi à entretenir les bàtimens de menues et légères
u
réparations.
Et cependant on ne lui parle pas du droit d’usage qui aurait été
attaché au domaine , d’un droit qui lui aurait fourni son bois de
chauilage comme celui dont il devait a voir besoin pour les réparations.
Aussi ce fermier n’est-il pas chargé de payer la redevance qui
aurait été le prix de l’usage.
C’est à la charge du bailleur seul, que, d’après une stipulation
expresse du b ail, demeurent les cens et les rentes comme les impôts
dont était grevé le domaine.
A l’expiration de ce premier bail, un second fut consenti pour
trois ou six années, par acte du 3o mars 1755 , par le même sieur
François Fum ât, eu faveur d’Annet Plane, l’un des précédons
fermiers. L ’on y remarque le même silence sur le droit d’usage et
sur la redevance , en même tems que la même charge imposée au
preneur de clore les héritages et d’entretenir les bàtimens.
Un troisième bail fut consenti pour trois, six ou neuf ans, le
17 mars 1750, par la demoiselle Gabrielle Fumât à Antoine Plane,
fils d’Annet, fermier antérieur.
Le preneur est chargé de clore les prés, d’entretenir les bàtimens
de menues et légères réparations , de payer les impôts, mais en
diminution du prix du bail.
On n’y parle encore, ni du droit d’usage, ni de la redevance.
11 est évident que si un droit d’usage avait été attaché au domaine,
ce droit, destiné au chauffage de ceux qui y auraient habité et aux
réparations à faire aux bàtimens, eût été déclaré au fermier pour
qu’il l’exerçât; il est évident encore que la redevance qui en était le
prix eût été aussi mise à sa charge.
Le silence de ces baux, dont le dernier à duré jusqu’en 1758 ,
démontre clairement que le droit n’existait pas, soit que la concession
de i6 7>4 fût seulement temporaire, soit qu’011 y eût renoncé depuis
long-tcms.
La lecture de ces divers baux donne lieu à une autre observation
fort importante.
�( 5 )
Le domaine de la Guièze est aflerme avec tous les héritages d é
pendant d’un autre domaine appelé d’A u z a t, le tout apparte'
teliant au sieur Fum ât, est-il dit.
Ainsi le domaine de la Guicze, qui ne se composait autrefois, et
notamment en iG 3/f, que d’héritages situés dans les dépendances du
village de la G uièze, avait reçu , dès 172 g, un accroissement consi
dérable par l’adjonction de tous les héritages qui composaient un
autre domaine situé à Auzat.
O11 concevra facilement que cet accroissement et la réunion dans
les mains du même fermier de trente-deux tètes d’herbages, objet
indépendant aussi du domaine et du ténement de la G uièze, durent
rendre nécessaire l’augmentation des bàtimens, et par conséquent
beaucoup plus onéreux pour la lorôt de la Roche, un droit d’usage
qui primitivement aurait été restreint aux besoins d’un très-petit
domaine.
Le bail de 1750 venait d’expirer, lorsque le domaine delà Guièze
changea de maître.
Par acte du 29 mars 1758 , la demoiselle G abri clic Fumât, alors
épouse d’un sieur Bonnet, vendit ce domaine et les trente-deux tètes
d’herbages à M. Jean Burin, seigneur de Saint-Pardoux.
Le domaine fut vendu avec ses servitudes dues et accoutumées ,
ses circonstances et dépendances, ainsi qu’il était composé , et que
la dame Bonnet et ses auteurs en avaient joui ou du jo u ir, ou leurs
jerm iers , et par exprès ledit sieur de St.-Pardouæ pour l’avoir
fa it exploiter l’année dernière, et Antoine P la n e , précédent f e r
m ier} suivant le bail du 17 mars 1760, reçu M oulin, notait e.
Il est dit plus bas que le sieur de Saint-Pardoux a déclaré avoir
une expédition du b ail, que lui avait remise la dame Bonnet, lors
de la retraite du fermier Antoine Plane.
Dans cette vente il n’est encore fait mention, ni d’aucun droi1
d’usage dans la foret de la Hoche, ni de la redevance qui en aui’ait
été le prix.
C’est dans un bail du 14 mars 1773 , qu’il est parlé pour la pre
mière fois d’un droit d’investison pour le domaine de la G u ièze,
dans la forêt de la Roche.
�(6 )
Par ce dernier b ail, ce même M. Burin , acquéreur en 1758 , à
qui il n’avait été vendu aucun droit d’usage, et qui n’avait reçu aucun
titre justificatif d’un tel d ro it, voulut s’en arroger u n , à l’aide de
quelques clauses qu’il inséra dans l’acte ; mais , comme il n’avait
aucun titre en son pouvoir, dans son ignorance, soit sur la consis
tance du droit m êm e, soit sur la redevance qui devait en être le
p r ix , les clauses qu’il dicta n’étaient en harmonie avec aucun des
actes de i 56 i ou de 1634.
Il soumit ses fermiers à lui délivrer chaque année quatorze chars
de bois à brûler, à prendre dans la forêt de la Roche ; comme s i,
en supposant même qu’un droit de chauffage eût été attaché à ce
domaine, il pouvait être permis de conduire et de faire consommer
ce bois ailleurs que dans le domaine même.
Les fermiers furent aussi chargés de payer au seigneur de Labro
un setier avoine et une poule, chaque année , pour droit d’investison du domaine dans la forêt de Laroche.
Et néanmoins, dans les actes que l’on invoque aujourd’h u i, s’il
était parlé d’uu setier d’avoine , il n’était pas au moins question de
poule.
L ’année même de ce bail, le domaine de la Guieze fut délaissé
par le sieur Burin à sa fille qu’il mariait avec le sieur Bléton. Dans
le contrat de mariage qui est du 17 octobre 1773, le domaine fut
cédé en paiement de la dot de la demoiselle Burin , avec le droit
d ’usage r e t prendre du bois dans lafo r e t de L aroche, tout ainsi
et de même que ledit Burin ou ses ferm iers en ont jo u i ou du
jo u ir , est-il dit.
D ’ailleurs , on n’énonce pas de redevance , quoique le prix du
domaine soit fixé à 19,860 fr., tandis que la dot n’était que de la
somme de 8,000 fr. Le gendre s’oblige à payer la différence.
Aussi le domaine est-il délaissé avec promesse de garantir,
fournir et fa ire valoir, de tous troubles et évictions généralement
quelconques , sans qu’aucune charge soit imposée pour le droit
d’usage ; circonstance qui indique combien peu étaient claires et
déterminées les idées du sieur Burin sur l'existence, l’étenduC et les
�Si)
conditions du prétendu droit qu’il déclarait abandonner avec
domaine.
L e sieur Bléton, nouveau possesseur, afferme le domaine le
g mars 1774? *1 charge le fermier R epayer, chaque année, la
rente due pour l’im estison du bois , sans en indiquer la nature
et la valeur.
La même charge est imposée dans un autre bail du 20 mars 1778 ;
mais cette fois-ci 011 déclare que la redevance annuelle consiste en
un setier d’avoine. Au reste, le titre constitutif du droit n’est visé
dans aucun de ces baux.
O11 verra dans la suite combien a été imparfaite la preuve qu’a
voulu faire le sieur Delsuc , soit de l’exercice du droit d’usage aux
époques de ces divers baux , soit du paiement regulier d’une rede
vance, ce qui aurait été le principal caractere dun véritable droit
de ce genre.
Oue des propriétaires de domaines voisins delà forêt aient tenté,
d’ailleurs, de s’attribuer de tels droits , on n’en sera pas surpris si
l’on considère que le propriétaire de la forêt, habitant assez loin de
là , ne pouvait que faiblement surveiller sa propriété et s’assurer de
la vigilance ou de la fidélité de ses gardes ; si l’on fait attention aussi
que le bois étant alors d’une valeur presque nulle et d’un débit
difficile , une surveillance rigoureuse présentait peu d’intérêt -, si
l’on remarque enfin que la forêt était réellement soumise à d’autres
droits d’usage; ce qui ne permettait pas toujours de vérifier si fous
ceux qui s’y introduisaient étaient de vrais usagers, et ce qui était
très-propre à favoriser les entreprises de ceux qui cherchaient à se
créer des usages.
La seigneurie de Laroche et la forêt qui en dépendait avaient été
vendues le 17 août 1784, par le sieur de Labro à un sieur Brassier.
Le sieurNeyronde la Tanière, parent du vendeur, exerça le retrait
lignager; il fut subrogé à la vente , par acte du dix janvier 1785.
L ’acte porte que l’acquéreur n’aurait à exercer aucune action en
garantie contre l’ancien propriétaire, à raison des droits d’usage qui
pouvaient êtx’e dus dans le bois de Laroche.
Le sieur Neyron la Tarlière, qui n’avait acquis cette propriété
�•>
C S ).
q ne pour le sieur Noyron Désaulnalts, fut placé sur la liste des émi
grés ; et cette circonstance fit mettre sous le séquestre national la
forêt de Laroche : elle y est restée jusqu’à la fin de l’année 1809.
Durant cet intervalle, comme auparavant, il 11e paraît pas qu’il
ait été payé aucune redevance pour le prétendu droit d’usage que
l’on réclame 5 car l’on 11’en rapporte pas de quittance.
Cependant la forêt fut peu respectée par les habitans des lieux
voisins. Abondonnée en quelque sorte dans les premiers tems du
séquestre, beaucoup de prétendus usagers s’y introduisaient et y
prenaient du bois, sans délivrance, sans contrôle.
Dans la suite, et lorsque parut la loi du 28 ventôse an 1 1 , sur la
police des forêts de l’Etat, quelques-uns de ceux qui se croyaient
des droits d’usage déposèrent leurs titres au secrétariat du dépar
tement, comme le prescrivait la loi.
t
Parmi ces prétendus usagers , l’on doit remarquer AinableGabriel Ileboul, représentant de Jean et autre Jean Fumât, avec
lesquels avaient été passés les actes des i 5 janvier i 56 i et 17 dé
cembre 1654.
Le sieur Reboul, qui seul avait ces actes en son pouvoir, après
les avoir déposés dès le 8 décembre 179 1, dans l’étude du sieur
Chassagne, notaire à Clermont, en relira une expédition qu’il pré
senta au préfet et à l’administration forestière, afin de se faire atttribuer les droits d’usage que ces actes rappelaient. 11 obtint même du
conservateur des eaux et forêts de la 1o®division un avis favorable ,
ci la charge de verser, chaque année, entre les mains du receveur
des domaines, le prioc de d eu x setiers d'avoine, mesure de
Lalour, et même de payer tous les arrérages de celte redevance
qui pouvaient être dus.
Cet avis n’eut cependant aucune suite ; M. Reboul n’obtint rien,
et même ne réclama plus, à ce qu’il parait, soit que le droit lui parut
trop équivoque, soit qu’il considérât la redevance comme trop
onéreuse.
<
Mais le sieur Bléton père était alors receveur des domaines. Les
titres déposés par le sieur Reboul lui furent connus ; et comme le
Je droit d’usage lui avait été indiqué dans son contrat de Inariago
�de 177s , il crut pouvoir profiter de cette découverte, et il réclama
lui-méme ce droit pour son domaine de la Guièze. 11 réussit à se
faire comprendre, en i8 o5 , en 1807 et en 1808, dans plusieurs
délivrances accordées provisoirement, en attendant que les titres
des usagers lussent vérifiés et leurs droits reconnus.
Mais ces délivrances lurent laites sous la réserve expresse des
droits du gouvernement.
Quelqu’insignifianlcs qu’elles soient pour établir le droit d’usage ,
on les invoque néanmoins aujourd’hui, quoique l’inspecteur forestier
lut sans qualité pour reconnaître un tel droit, et quoiqu’il n’ait été
payé alors aucune espèce de redevance.
Ce fut à la fin de 1809, que le sieur Neyron-üésaulnats parvint à
faire lever le séquestre et à recouvrer sa propriété.
11 en ignorait et la consistance et les charges ; il savait vaguement
qu’elle était grevée de divers usages. Beaucoup d’usagers se pré
sentèrent ; la plupart n’avaient pas de titres , mais ils en certifiaient
l’existence ; ils promettaient de les rapporter incessamment. Le
sieur Ncyron-Désauhials ne crut pas devoir se montrer trop diffi
cile dans ces premiers terns. Il suivit l’exemple de l'administration ,
et fit comme elle quelques délivrances provisoires, mais sans tirer
à conséquence, et en attendant que les titres des usagers lui fussent
produits.
C ’est ainsi qu’il délivra du bois pendant pendant plusieurs années
à certains voisins, auxquels il en a , dans la suite, refusé, après avoir
assez long-tcms réclamé leurs titres, qu’ils ne lui ont pas produits
ou qui se sont trouvés vicieux.
C ’est ainsi qu’il a fait, notamment, diverses délivrances au sieur
Bléton, quoique scs titres ne lui fussent pas connus, mais avec lequel
il avait des rapports de voisinage et de bienveillance réciproque.
Les fermiers du sieur Bléton ont même conduit chez le sieur
Désaulnats quelques setiers d’avoine , en attendant que les droits
respectifs fussent réglés.
Dans ces circonstances , les immeubles du sieur Bléton furent
frappés d’une saisie immobilière; et, le 1 5 novembre 1819, le do
maine de la Guièzc et quarante-une tètes d’herbages de la montagne
�( 10)
de Montaigut furent vendus judiciairement, au faible prix de
17,100 fr., somme inférieure de plus de 2000 fr. à celle à laquelle
avait été évalué le domaine seul, près de 5o ans auparavant, dans le
contrat de mariage du sieur Bléton père, avec la demoiselle Burin ,
le 19 octobre 1773.
Dans le détail des objets vendus, il n’est pas fait la moindre men
tion du droit d’usage ;
Dans le cahier des charges, l’adjudicataire n’est soumis au paie
ment d’aucune rente, d'aucune redevance.
L ’adjudication avait été faite au duc de Castries.
Le sieur Delsuc lui fut bientôt après subrogé par un fondé de
pouvoir, au môme prix et aux mêmes conditions.
Le sieur Delsuc, devenu propriétaire du domaine de Laguièze,
invita le sieur Désauluats à lui délivrer du bois dont il avait besoin.
Celui-ci pouvait-il s’y refuser? Le sieur Delsuc était le plus proche
voisin du sieur Désaulnats. Il existait entr’eux journellement des re
lations de tout genre. Le sieur Désauluats consentit donc à lui faire
des délivrances provisoires, en attendant que les droits du sieur
Delsuc fussent examinés. C elui-ci fit, de son côté, porter chez.
M. Désaulnats quelques setiers d’avoine qui ne furent aussi reçus
que conditionnelleineut, et sans que le droit fût reconnu.
Cependant ce provisoire devait avoir un terme; et les droits du
sieur Delsuc ne paraissant pas justifiés au sieur Désaulnats, il y eut
refus de délivrance de bois : alors commença le procès.
Le 23 mars 1827 , le sieur Delsuc fait signifier au sieur
Désaulnats, 10 l’acte d’investison d’un droit d’usage, consenti le
i 3 janvier i 56 i , parle sieur de Laroche à Jean Fumât, ensemble,
est-il dit, l’acte de ratification de ce droit, du 17 décembre 16545
20le contrat de vente consenti au sieur Burin , le 27 mars 1758 ;
5 ° le contrat de mariage de la demoiselle Burin, du 19 octobre 1773.
Il expose ensuite que , par l’acie de i 56 i , Jean Fumât avait été
autorisé à prendre, dans la foret, du bois de sapin pour bdtir et
édifier ma ¿sons, granges, étcibles, moulins et autres édifices, etc.;
qu il est aujourd’hui auæ droits du sieur Fum ât ; qu’ il est sur le
point de construire un bâtiment dans le domaine de la Guièze ,
�et qu’ il a le droit, a u x termes de Pacte d’investison sus énoncé,
de prendre dans le bois de Laroche et de Malguièze , apparte
nant au sieur Désaulnats, tous les bois en sapin nécessaires
pour la construction dudit bâtim ent, auquel le sieur Delsuc se
propose de donner une longueur de 24 mètres 55 centimètres
(78 pieds), et une largeur de 11 mètres (55 pieds).
En conséquence, le sieur Delsuc somme le sieur Désaulnats de
lui délivrer les arbres nécessaires à cette construction.
Cette sommation fut suivie d’une cédule en conciliation , du
29 mars 1827 , fondée sur l'acte du i 5 janvier i 56 i , et tendante
à faire condamner le sieur Désaulnats à délivrer au sieur Delsuc le
bois nécessaire à la construction d’un bâtiment ayant les dimensions
qui viennent d’être indiquées.
Le sieur Delsuc ne comparut au bureau de paix que par son fondé
de pouvoir; et la conciliation n’ayant pas eu lieu, une assignation
fut donnée aux mêmes fins, toujours en vertu de celte prétendue
concession, du i 5 janvier i 56 i la seule qui soit rappelée dans
l’exploit d’ajournement, comme dans la cédule en conciliation.
Des conclusions sont signifiées dans les mêmes termes, le 27
juillet 1827 ; et un jugement par défaut, obtenu le même jour, par
le sieur Delsuc, lui adjugea sa demande, en se motivant aussi uni
quement sur l’acte du 1 5 janvier 1 56 r.
Le sieur Désaulnats interjeta appel de ce jugement devant la
Cour ; il a répondu à un interrogatoire sur faits et articles qu’a de
,
mandé le sieur Delsuc ; il y a parlé de quelques délivrances de bois
de chauffage ou autres qu’il avait accordées provisoirement au sieur
Delsuc ; il a reconnu aussi avoir reçu quelques setiers d’avoine ,
mais sans entendre attribuer aucun droit, seulement en attendant que
les titres fussent vérifiés et les difficultés résolues.
La cause portée à l’audience du i 5 mars i 85 o, le sieur Delsuc ,
q u i, jusqu’alors, avait invoqué seulement l’acte d’investison du 1 5
janvier i 56 i , parce que cet acte seul pouvait justifier l’exagération
de sa demande , se ravisant un peu tard , fit principalement usage
du second acte, du 17 décembre 1 634 î al° rs
C ou r, s’occupant
moins de l’étendue du droit que pouvait concéder ce second acte,
�que tie sa validité et de son exécution, ordonna, « avant de faire
« droit aux parties, et sans préjudice des moyens, tant de fait que
« de droit qui leur sont, est-il d it, respectivement réservés, que le
« sieur Delsuc prouverait, tant par litres que par témoins, que,
« dans le cours des trente années qui ont précédé la demande, il
<; avait, lui ou ceux qu’il représente, exercé le droit d’usage qu’il
« réclame sur le bois de Laroche , au v u , ou su et dre cousenle« ment du propriétaire du bois prétendu assujetti au droit, ou de
« ceux qu’il représente ;
« Que le sieur Delsuc prouverait également, et de la même tna<( nière, que, dans le même espace de teins , ledit sieur Delsuc, on
«• ceux qu’il représente, ont payé la redevance, prix du droit
« d’usage prétendu j sauf au sieur Neyron-Désaulnats la preuve con« traire. »
Les motifs particulièrement applicables à celte disposition inter
locutoire sont ainsi conçus :
« Considérant que, suivant la jurisprudence, ce titre (celui de
« iG34) ne suiïit pas pour l’établissement d’un pareil droit; qu’outre
« le titre, il (le sieur Delsuc) doit être fondé sur une possession
(<
■trentenaire, postérieure au titre ; parce qu’à défaut de cetie pos« session, le titre serait prescrit, et que (être prescription aurait
« opéré l'affranchissement du droit, quand même il aurait été établi
« long-tems auparavant ;
« Considérant encore q ue, suivant cette même jurisprudence ,
« pour que la possession soit valable et puisse opérer son effet, il
« faut qu’elle soit accompagnée de la délivrance du bois, faite du
« consentement du propriétaire , et de la prestation de la rede«■vance, moyennant laquelle la concession du droit d’usage a été
« faite dans le principe ;
« Considérant que le sieur Delsuc ne rapporte, ni la preuve par
« écrit du consentement donné à chaque délivrance par le pro« priétaire, ni la preuve du paiement de la redevance, à chaque
« délivrance, cl qu’il offre seulement de prouver par témoins, soit
« Je consentement à la délivrance , soit le paiement de la redevance,
« dans le cours des trente années avant la demande j
�A y
« O r , considérant que toutes les mentions contenues dans tous
« les actes ci-dessus énoncés doivent être regardés comme autant de
« commencemensdepreuveparécritduconsentementàladélivrance
« et du paiement de la redevance; qu’on doit encore attribuer le
« même effet aux décisions prises par l’administration , qui ont
« maintenu le sieur Blé ton ou ceux qu’il représente dans l’exercice
« du droit d’usage dont il s’agit, même quoique ces décisions n’aient
« été que provisoires et prises sous la réserve des droits du gouver« nement, puisque, d’après les circonstances, il ne dépendait pas
« du sieur Bléton, ou de ceux qu’il représente, d’exercer autre<f ment leurs droits. »
En exécution de l’arrêt, des enquêtes respectives ont été faites.
Nous aurons à les discuter.
Tels sont les faits d’après lesquels nous avons à examiner ,
i° Les titres et les droits du sieur Delsuc ;
20 S’il a exercé une possession légale du droit d’usage qu’il
réclame ;
5° Quels seraient, au reste, l’objet et l’étendue de ce droit
d’usage.
§ I"
E xa m en des titres et des droits du sieur Delsuc.
Le sieur Delsuc invoquait d’abord un seul litre, un acte d’investison du i 5 janvier 1 56 1.
C’est cet acte seul qui est rappelé, soit dans l’exploit introductifde
l’instance, soit dans les conclusions prises, soit dans le jugement
dont est appel.
Et cependant cet acte est absolument étranger au domaine de la
Guièze auquel le sieur Delsuc veut rattacher le droit qu’il réclame.
Car la concession du 1 5 janvier 1 56 1 est faite seulement pour des
propriétés situées au village Del Mas Del Tourres. Il y est dit que
le seigneur de la lloche investit, à titre de perpétuelle vestison
Jean Fum ât, du droit de prendre, couper et emporter par ledit
Fumât et les siens , à
ses appartenances ;
p erp étu el
, au village D el Tourres, et à
�Il rinSrcst.it aussi du droit de prendre du sapin dans la même forêt
pour bâtir et édifier maisons, granges, étables , moulins et autres
édifices , iceu x réparer, et fa ire dudit bois de sapin, tant pour
les réparations desdits bdtirnens, qu’autres ses affaires.
Cette concession e st, comme on le v o it, des plus larges ; elle
s’applique, soit au bois ordinaire pour le chauffage et la clôture des
héritagesj soit au bois de sapin nécessaire pour réparer; soit, et ce
qui est bien plus important, à tout le bois de sapin dont Fumât
pourrait avoir besoin pour bâtir et édifier m aisons, granges,
é tables, Moulins et autres édifices ; en sorte qu’il était loisible à
Fumât, d’après la généralité des termes de la concession, de faire,
aux dépens du bois de la forêt, toutes les constructions qu’il aurait
jugées utiles.
Mais le droit concédé est restreint au village Del Mas Del Tourres,
et à ses appartenances ; il ne s’étend pas au-delà des limites de ce
village; il n’y est aucunement question du village de la Guièze. O r,
ces deux villages et leurs ténemens étaient autrefois, comme aujour
d’hui, absolument distincts; donc, l’acte de i 56 i n’est pas appli
cable au village de la G u icze, où le sieur Delsuc est propriétaire.
Cet acte de i 56 i ne peut lui servir de titre. Comment se
fait-il donc qu’il n’ait agi pendant tout le cours de l’instance qu’en
vei'tu de cet acte? et qu’après s’être borne à rappeler dans la som
mation qui avait précédé le procès, un autre acte du du 17 décembre
i 634 > qu’il présentait seulement comme la ratification du premier,
il n’ait fondé ses réclamations dans la cédule en conciliation comme
dans l’exploit d’ajournement, dans ses conclusions et dans le juge
ment, que sur cet acte isolé de i 56 i , sur cet acte qui 11’attribuait
aucun droit d’usage pour le domaine de la Guièze ?
Cette singularité trouve son explication dans quelques obser
vations.
Par l’acte de i 65 /\, le seigneur de la Barge investit Jean Fumât
son fermier, des bois de Malaguièze et Laroche, pour en jo u ir
pour son usage des maisons , pour ses ténemens des villages de
Guièze cl Pissol, soit pour son chauffage et réparations.
|.l n’est pas dit dans cet acte, comme dans le premier, que la
�( .5 )
k f
concession est perpétuelle , et qu’elle est accordée pour le sieur
Fumât et les siens.
Il n ’y est pas stipulé, comme dans le précédent, qu’elle aura lieu,
non seulement pour l’usage des maisons et ténemens , ce qui ne
s’entend que du chauffage , mais encore pour bâtir et édifier
meusons, granges, ètables , moulins e t autres édifices.
Il n’y est parlé que de réparer , ce qui ne signifie évidemment
pas faire des constructions nouvelles et considérables, ce qui ne
peut s’entendre que d’entretenir les constructions déjà existantes.
Or, le sieur Delsuc voulait faire construire un nouveau bâtiment
et un bâtiment considérable , puisqu’il doit avoir 78 pieds de
longueur sur 33 pieds de large : car tel est l’objet du procès.
S’appuyer sur l’acte de 1634-» ç’eût été manquer son b u t, soit à
cause de l’obscurité de ses termes sur la durée de la concession,
soit parce qu’il n’y était parlé d’usage que pour réparer et non
pour construire. Pour éviter ces difficultés , c’est l’acte seul de
1 56 1 qu’il invoque; c’est d’après l’acte seul de 1 56 1 qu’il obtient,
par défaut, il est v r a i, ce qu’il demande.
Mais devant la C o u r, le change ne sera pas pris, et le titre de
ï 5 6 i sera nécessairement déclaré étranger au domaine du sieur
Delsuc , puisque ce domaine n’est pas situé dans les dépendances
Del Mas Del Tourres , auquel Mas s’applique exclusivement l’acte
de i 56 i .
Ainsi disparaît ce premier titre servant de base à la demande que
nous contestons.
A l’audicncc de la Cour, lesieur Delsuc a invoquél’actc de 1634.
Mais, en supposant même , ce que les circonstances rendent fort
douteux, que l’usage dont il est parlé dans ce second acte doive être
perpétuel, limité à de simples réparations à faire , le droit d’usage
concédé par ce titre n’autoriserait pas à réclamer du bois pour une
vaste construction, telle que celle qu’on se propose.
Au reste, tel qu’il est, le droit concédé par cet acte a-t-il été
transmis au sieur Delsuc? avait-il été transmis, avant lui, aux sieurs
Burin et Bléton?
La négative est démontrée par tous les baux qui ont précédé
-/0
v,
�( «6 )
l’époque à laquelle le domaine de la Guieze passa de la famille
Fumât aux familles Burin et Bléton. INous voulons parler des baux
des 4 avril 1729, 5o mars 1755 , 17 mars ly S o , baux qui se sont
prolongés pendant environ trente ans, et dans aucun desquels il
n’est fait mention, ni d’aucun droit d’usage attaché au domaine sur
la foret de Laroche, ni d’aucun paiement de redevance.
Ce silence est une preuve non équivoque que dans la pensée du
bailleur, comme dans celle du preneur, il n’était dû au domaine de
la G uieze, ni droit de chauffage ni droit d’usage pour réparations,
sur la foret de Laroche. Car si un tel droit avait existé, le fermier
en aurait été prévenu, puisqu’il en aurait dû jouir; et s’il eût été
autorisé à en user, il aurait été aussi nécessairement chargé de
payer la redevance annuelle qui aurait élé le prix de sa jouissance.
Cependant on ne lui impose aucune charge de redevance.
Au contraire , c’est le bailleur q u i, par les expressions vagues
cl générales de ces baux, demeure chargé de tous les cens et rentes
dont le domaine pouvait être grevé.
La conséquence de tout cela est simple ; c’est que le droit d’usage
n’était pas exercé ; c’est que la redevance n’était pas payée, soit que
la famille Fumât eût considéré comme temporaire seulement la
concession faite en 1654 par le seigneur de Laroche à Jean Fumât,
alors son ferm ier, est-il dit; soit que le prix annuel du droit
d’usage parût, à celte famille plus onéreux que n’était utile l’usage
même à un époque où le bois, sur-tout dans le voisinage des forêts,
était sans aucune valeur.
Quelle que soit, au reste, la cause du silence des actes et des
faits, il n’en est pas moins vrai qu’on ne trouve absolument aucune
trace de l’exercice de ce droit d’usage, pendant les cent années
antérieures au 29 mars 1758 , date de la vente que fit là demoiselle
Fumât, épouse Bonnet, au sieur Burin , du domaine de la Guieze ,
pour lequel ce droit est aujourd’hui réclamé.
Mais jetons les yeux sur cet acte de vente. Y trouverons-nous
quelque chose qui rappelle le droit, qui l’indique même, quoique
un peu vaguement?
l'ion; nous 11’y trouverons rien, absolument rien.
�Que l’on se fixe sur les termes de cette vente (nous les avons rap
portas dans l’exposé des faits); l’on y verra que le domaine est vendu
au sieur Burin dcSt-Pardoux, tel que celui-ci en avait jo u i l’année
dernière, et tel qu’en avait joui aussi Antoine Plane, précédent
ferm ie r, suivant le bail du 17 mars i^So , reçu Moulin, notaire.
Ainsi c’est au dernier bail de 1 qSo , que l’acquéreur est renvoyé
pour connaître la consistance du domaine ; et il est ajouté qu’une
expédition du bail a été remise à cet acquéreur.
O r, le bail est muet sur le droit d’usage et sur la redevance. Le
fermier ne jouissait pas de cet usage ; il ne payait aussi d’après le
bail aucune redevance.
Comment donc supposer que la dame Fumât ait entendu vendre,
et que le sieur Burin ait entendu acquérir un droit dont ils n’ont pas
parlé, un droit accompagné d’une charge à laquelle l’acquéreur n’a
pas été soumis?
Comment présumer aussi que le sieur Burin, qui avait joui du
domaine, l’année antérieure à la vente, n’y eut pas fait exprimer le
droit d’usage, si réellement il l’avait exercé ?
Certes, ce silence des baux de 1729, 1755 et iqSo sur l’usage
et la redevance, aurait frappé l’attention de la Cour , si ces baux lui
avaient été connus lors de l’arrêt interlocutoire (i); elle aurait, sur
tout, remarqué avec surprise qu’il n’en était pas fait la moindre
mention dans le dernier bail de 1760 auquel la vente se référait; et
considérant l'inexécution plus que séculaire de la concession pré
tendue perpétuelle de 1654, peut-être eût-elle regardé comme inutile
d’ordonner la preuve de l’exécution postérieure qu’alléguait le sieur
Delsuc.
Le silence de ce bail sur le droil d’usage, explique pourquoi il
11’a pas été produit par le sieur Delsuc , qui l’avait à sa disposition
aussi bien que la vente.
Ajoutons une observation importante.
Ces titres que l’on invoque aujourd’hui, ces actes de i 56 i et de
i 634 n’étaient pas dans les mains des familles Burin et Bléton ;
ils ne leur avaient pas été remis par la dame Fum ât, lors de la
(1) Le sieur D csaulnats s'est procuré des expéditions de ces baux à l'aide d’ uu couijK üioire,
�( 18}
vente. Ces actes se trouvaient au pouvoir de la famille Reboul qui
représentait la famille de Fumât pour d’autres propriétés. Ce fut un
sieur Reboul qui les déposa, le 8 décembre 1791 , dans l’étude de
M e Chassagne, notaire ; ce fut aussi un sieur Reboul qui, pendant le
séquestre de la forêt de la R oche, et lors de la publication de la loi
du 28 ventôse an 11 , déposa , dans son propre intérêt, et comme
représentant de Jean Fumât, au secrétariat de la préfecture du Puyde-Dôme , l’expédition de l’acte de dépôt constatant l’existence des
actes des i3 janvier i 56 i et 17 décembre i 63 /f. C’est ce qu’atteste
un avis donné, le 17 décembre 1806, parle conservateur des eaux
et forêts de la 10e division.
Et ce qu’il y a de remarquable, le sieur Reboul n’a rien obtenu et
ne demande rien, tandis que la famille Burin et Bléton, qui n’avait
pas de ttres, qui n’avait pas fait de dépôt a la préfecture, mais qui
fut instruite, sans doute, du dépôt fait par le sieur Reboul, réclama
et obtint quelques délivrances de bois, seulement provisoires, il est
vrai. Sic vos non vobis mcllijicatis opes.
Ce fut pendant la durée du séquestre national, que furent décou
verts par la famille Bléton ces actes de i 56 i et i 654 qui étaient
restés jusques là dans l’obscurité et sans exécution; qui ont été remis,
il y a peu d’années, au sieur Delsuc, devenu adjudicataire sur saisie
immobilière du domaine de la Guièze, et sur lesquels celui-ci se
fonde aujourd’hui pour réclamer un droit d’usage qui ne lui a pas été
vendu , pas plus qu’d ne l’avait été à la famille Burin, et pour oilrir
comme prix du droit une redevance annuelle dont il n’a pas été
chargé. Car l’adjudication du 1 5 novembre 1819 est aussi muette
et sur le droit et sur la redevance.
Ainsi point de transmission, ni au sieur Burin ni au sieur Delsuc,
des droits d’usage que pouvaient avoir les Fumât en vertu des actes
de 1561 et i 654 J point d’exécution d’ailleurs de ces actes, pendant
un siècle et plus, antérieurement à la vente faite au sieur Burin , du
domaine de la Guièze; point d’énonciation même du droit et de la '
redevance dans aucun acte authentique ou sous seing-privé, anté
rieur à 1770.
Comment le sieur Delsuc pourrait-il prétendre, et que ce droit
a cté conservé, et qu’il en est propriétaire ?
�( T9 )
Dirait-on qu’il est rappelé dans des baux de 177^ , de 1774* de
1778, et dans le contrat de mariage de la demoiselle Burin avec le
sieur Bléton ?
Mais tous ces actes, étrangers au propriétaire de la forêt de la
Roche, ne peuvent être invoqués contre lui.
Mais si l’usage avait été légalement exercé , si une redevance avait
été réellement et régulièrement payée 011 en trouverait quelques
traces écrites ; des quittances plus ou moins anciennes seraient rap
portées. O r, l’onne produit rien, on 11e présente aucun écrit, aucun
commencement de preuve écrite émanée des anciens propriétaires
de la forêt, qui indique soit l’existence du droit, soit le paiement de
la redevance. Et certes dans de telles circonstances les sieurs Burin
et Bléton avaient trop d’intérêt à retirer des quittances de la rede
vance comme preuve de leurs droits, pour ne pas en exiger s’ils
l’eussent réellement acquittée.
Cependant c’est à la preuve testimoniale seule , à laquelle le sieur
Delsuc s’ost vu dans la nécessité d’avoir recours pour se procurer
des argumens, afin de suppléer et aux preuves écrites que la loi
paraît e x ig e r, et même , en quelque sorte , aux titres dont il est
dépourvu.
Nous verrons si cette preuve est assez forte, assez caractéristique,
assez positive, pour attribuer au sieur Delsuc un droit qu’il a vai
nement cherché à faire ressortir de ses titres, qui le repoussent par
leur silence.
§ H.
L e sieur D elsuc a -t-il exercé une possession légale du droit
d’usage ?
Nous avons ci-dessus transcrit les termes de l’arrêt interlocutoire
rendu par la Cour.
Nous y avons vu que la Cour avait décidé q ue, suivant la juris
prudence , un titre ne suffisait pas pour l’établissement d’un droit
d’usage ; qu’outre ce titre, le droit devait être fo n d é sur une pos
session trentenaire, postérieure au titre, parce qu’ ci défaut de
cette possession , ce titre serait prescrit.
Que, suivant cette même jurisprudence} pour que lapasses-
�( 20 )
s ion soit 'valable et puisse opérer son e ffe t, il faut qu'elle soit
accompagnée de la délivrance du bois, fa ite du consentement
du propriétaire, et de la prestation de la redevance, moyennant
laquelle la concession du droit d’usage a été faite dans le principe.
Ainsi l’usager même qui a un titre positif doit prouver trois choses
pour en réclamer l’eiTet :
i° Qu’il a possédé le droit qu’il réclame ;
2° Qu’il a payé la redevance qui en était le prix ;
5° Qu’il a reçu du propriétaire la délivrance du bois.
La simple possession, non accompagnée des deux conditions
prescrites, serait sans force, sans eiTet légal, et n’empêcherait pas
le cours de la prescription, c’est-à-dire de l’extinction du droit.
Cette doctrine , consacrée par la Cour, a été empruntée, soit des
auteurs les plus recommandables, soit d’une jurisprudence qui n’est
pas équivoque.
Le paiement de la redevance est une condition nécessaire, indis
pensable pour la conservation du droit de l’usager. C ’est ce qu’en
seigne Fréminville dans sa pratique universelle des droits seigneuï’iaux, tome 5 , page 22G.
« Il est certain, dit-il, que le seigneur peut prescrire la servitude
« de l’usage , lorsque l’usager ne paye pas la redevance.
v Le droit d’usage est une véritable servitude, qui 11e peut se
«■soutenir qu’en remplissant régulièrement par l’usager ses obliga« lions annuelles ; il ne lui sert de rien de se maintenir en jouissance
« et en possession de son usage. Celte possession, par elle-même,
« ne lui donne aucun droit, c’est la redevance. Ce n’est donc pas
« la jouissance qui acquiert, et conserve le droit, c’est la prestation
«■de paiement qui renouvelle le titre, suivant la loi : qui enini in
v tam longo prohæoque spatio ju s minime consecutus e s t , serd
t< pæmtentid ad pristinam servitulem desiderat.
Selon Coquille, cité par l'auteur, il faut même, pour conserver
le droit, que la prestation soit faite au seigneur ou à, son receveur
comptable, qui en ait com pté, et non pas ¿1 un ferm ier, qui a
toujours les tnaius ouvertes pour recevoir, et n’ a pas grand in-
�térct au droitfon cier du seigneur, et dont le fa it ne peu t nuire
au seigneur pour la possession ou pour la prescription.
Ces principes sont d’une grande sagesse. Ils ont pour but de mé
nager les intérêts légitimes du propriétaire comme ceux de l’usager,
de faire connaître avec certitude au propriétaire du bois l’exercice
des usages qui grèvent sa propriété , et de prévenir les entreprises
obscures et les spoliations clandestines qui ne se pratiquent que trop
souvent dans les forets.
C ’est dans le même but qu’a été prescrite la délivrance que doit
obtenir tout usager, délivrance qui s’opère par une marque faite
avec le marteau du propriétaire sur le bois que celui-ci livre ou fait
livrer à l’usager.
Cette délivrance est d’autant plus indispensable, que l’usager peut
seulement exiger le bois qui lui est nécessaire ; qu’il faut donc véri
fier d’abord l’étendue de scs besoins, et que trop souvent il serait
disposé à prendre largement et à excéder de beaucoup le nécessaire,
s’il lui était permis d’agir sans contrôle , et si son arbitraire était sa
seule règle.
Aussi la nécessité de la délivrance préalable par le propriétaire à
l’usager a-t-elle été établie par diverses ordonnances de nos rois ;
aussi a-t-on toujours considéré comme délit le fait des usagers qui,
sans délivrance préalable, coupaient et enlevaient le bois auquel des
titres leur donnaient droit ; aussi de nombreux arrêts ont-ils con
damné à des amendes, à des dommages-intcrêls, les tisagers qui
négligeaient de se soumettre à cette importante condition.
On peut citer, sur cette question, une savante dissertation de
M. Merlin, dans son répertoire, au mot usage (droit d’).
On peut voir aussi, dans tous les recueils, de nombreux arrêts
qui ont puni comme délits des usages exercés sans cette formalité de
rigueur , quelque certains d’ailleurs que fussent les droits des
usagers (i).
L ’omission de cette formalité, impérieusement ordonnée, en
traîne la prescription du droit d’usage, parce que, quelque possession
(1) Voir notamment des arrêts.
�( 22\
défait qu’ail eue l’usager, celte possession, dépourvue descaracteres
propres à la rendre valable, cette possession qui n’aurait été qu’une
suite de délits , celte possession illégale, doit être considérée comme
n’ayant pu interrompre la prescription, ni empêcher l’extinction du
droit d’usage.
Telle est la conséquence que déduit M. Merlin de la doctrine
qu’il professe ; telle est celle qu’ont adoptée plusieurs arrêts de la
Cour de Riom, et qu’a consacrée la Cour de cassation elle-même,
par sa jurisprudence. On peut citer notamment l’arrêt Bertrand, du
a5 août 1826; l’arrêt Locard, du 4août 1828, et l’arrêt Romeuf, du
20 juin 1827. La Cour de cassation, par arrêt du 27 janvier 182g ,
a rejeté le pourvoi qui avait été formé contre l’arrêt Locard.
L ’application de ces principes à la cause de M. Désaulnats doit
repousser la prétention du sieur Delsuc ; car celui-ci n’a prouvé,
ni le paiement de la redevance , prix du droit d’usage dont il s’agit,
ni la délivrance faite par le propriétaire à l’usager.
Déjà, en discutant les litres du sieur Delsuc et des sieurs Bléton
et Burin, ses prédécesseurs, nous avons remarqué qu’antérieure
ment à 1773, il n’existait aucune trace de l’exercice du droit de
l’usage , ni du paiement de la redevance.
Nous avons vu en effet que pendant le siècle qui a précédé cette
époque, et notamment depuis 1729, aucun bail et absolument au
cun acte, même purement énonciatif, n’avait rappelé ni le droit
d’usage ni la redevance qui en était le prix.
Si l’on se fixe sur ce qui est postérieur à cet acte, l’on voit bien
que le droit est indiqué dans les baux de 1775 , de 1774, de 1778;
niais il reste encore incertain si réellement on a usé du droit; il
reste aussi incertain, et c’est le point principal, si la redevance an
nuelle a été payée ; aucune quittance 11’est produite pour constater
les paicinens ; aucun acte absolument ne les énonce.
Et cependant les anciens propriétaires de la forêt donnaient des
quittances aux usagers qui s’acquittaient. C ’est ce que prouve la
déposition du sieur Ilenoux, un des témoins de l’enquête contraire,
ancien usager de la forêt. Ce témoin déclare avoir parmi scs papiers
des quittances attestant le paiement de la redevance.
�( =3 )
Et cependant encore le sieur Delsuc n’a épargné aucun soin,
aucune recherche pour se procurer des preuves du paiement de
cette redevance; ils’est adressé, parl’intermédiaire d’un de ses parons,
au sieur Culhat, dépositaire des papiei’s de la famille Labro, de cette
famille à laquelle appartenait avant 1785 la forêt de Laroche; il a
examiné les registres, les papiers de cette famille, et néanmoins
il n’a rien découvert, ou au moins on doit le penser ainsi puisqu’il
n’a rien produit.
En vain, pour écarter ou affaiblir le défaut de représentation de
quittance, le sieur Delsuc a-t-il rapporté à l’audience de la Cour un certificat d’incendie attestant que la maison du sieur Bléton,
ancien prétendu usager, avait été la proie des flammes.
La présomption du brûlement des quittances disparaîtra aujour
d'hui que M. Bléton fils, deuxième témoin de l’enquête contraire,
a déclaré non seulement qu'aucun papier de la succession de son
père n'avait été brûlé, mais encore que lors de l'inventaire des
papiers de cette hérédité, il 11e se trouva rien qui eût rapport à la
redevance, prix du droit d’usage.
Ainsi, point de quittance de la redevance avant 1775; point de
quittance aussi depuis 1773 jusqu'au moment où l'émigration du
sieur Neyron de la Tartière fil séquestrer la forêt de Laroche ;
Point de quittance encore pendant la durée du séquestre qui
s'est prolonge de 1792 à 1809;
Poin d'émargement de paiement dans les registres des préposés
des domaines de l’Etat ;
Enfin aucune preuve légale du paiement de cette redevance n'est
produite, non seulement pour les trente années, mais encore pour
les cent ans qui ont précédé l'époque à lrquelle M. Désaulnats a
recouvré ses bois.
De là on doit conclure, si la doctrine ci-dessus développée est
exacte , que le droit d'usage était depuis long-tems prescrit et anéanti
au moment où M. Désaulnats, en 1809, est rentré dans ses bois. Nous
examinerons bientôt si ce droit perdu a été recouvré depuis.
Pour repousser l'argument, on invoquera sans doute quelques
dépositions de témoins qui parlent du paiement de la redevance.
�............... ( ?4 )
L'objection sera facile à détruire.
Cinq témoins de l’enquête directe et autant de témoins de l’enquête
contraire ont parlé de faits antérieurs à 1809.
Sur ces dix témoins, deux seulement que le sieur Delsuc à fait
entendre parlent du paiement de la redevance.
Trois des plus anciens témoins, qui sont restés, avant 1789,
dans le domaine de la G uièze, parens ou domestiques des anciens
fermiers, non seulement 11’ont pas vu payer la redevance ; mais ils
n’en ont pas même entendu parler. Ce sont les xer et 2e de la pre
mière enquête et le 1er de la continuation.
Semblable déclaration sur celte redevance par cinq témoins de
l’enquête contraire, les 5% 6e, 7% 9e de l’enquête contraire, et le
I er de la continuation de cette enquête. Deux de ces témoins sont
également restés dans le domaine à ces époques anciennes ; un autre
a été domestique du sieur Neyron ; cependant ils n’ont jamais vu
porter la redevance d’avoine ; ils n’ont même jamais entendu pai’ler
de cette redevance.
Le 9e témoin de l’enquête contraire dit qu’un ancien fermier lui a
déclaré qu’il ne donnait pas d’avoine.
Les deux seuls témoins qui parlent de la redevance , sont le 3e de
l’enquête directe , et le 3e aussi de la continuation d’enquête ;
L ’un d’eux , âgé de 5o ans, nommé Léger Dufaud; l’autre , âgé
de 67 ans, nommé Jean Bruglial. (1)
Léger Dufaud déclare qu’il était âgé de 8 ans, lorsque son père
devint fermier du domaine de la Guièze ou il resta 11 ans.
(t Quant à la redevance , d it-il, il sait qu’on la payait annuelle« m e n t , en hiver, ou au commencement du printems; parce que
« tantôt il a entendu dire à son père qu’il revenait de porter l’avoine
« due pour celte redevance à M. Manaranches, homme d’affaires
« de M. Désaulnats ; tantôt qu’il fallait prendre la jument du
« domaine, et aller porter cette avoine au même M. Manaranches.
Une telle déposition, fondée sur des souvenirs d’une personne
(1) Il y a un autre témoin , le /j1»*, qui <lit avoir vu deux fois les gariles Madceuf et Fa\i¡»ières venir chercher île l’ avoine. Ces parties étaient ceux de l’ Ëtat pendant le séquestre.
lie fait signalerait un abus, non un paiement légal.
�( >5 )
ftgée seulement de huirans lors des ouï-dire qu’elle retrace, une
telle déposition qui s’applique à une cliose qui devait peu fixer
l’attention et frapper l’esprit d’un enfant de liuit ans , peut paraître
assez extraordinaire. Elle surprendra sur-tout si on la compare à
celle du septième témoin de l’enquéle contraire, q u i, étant, à la
même époque, dans le domaine, où il servait comme domestique,
n’a cependant eu aucune connaissance de la redevance, et ne l’a
jamais vu porter.
Au reste , le témoin ne dit pas avoir vu porter l’avoine ; il déclare
seulement avoir entendu dire qu’on revenait de la porter ou qu’il
fallait aller la porter.
O r, quelle confiance aura-t-on dans un simple oui-dire, si l’on
se rappelle celte règle de Loisel : oui-dire va par vdle ; en un
muids de ouï-dire, il n’y a pas de plein. Un seu l œ il a plus de
crédit que d eu x oreilles n’ ont d ’a u d i vi.
Remarquons aussi que s’il était vrai que l’avoine eût élé portée
au sieur Manaranches, celui-ci eût donné une quittance; car elle
eût été nécessaire au fermier pour prouver au propriétaire du do
maine que la redevance avait été acquittée.
O r, aucune quittance n’est produite ; aucune quittance n’a été
trouvée dans les papiers du sieur Bléton père, lors de l’inventah'e
qui en a été fait. (Voir la déclaration du sieur Blélon fils, troisième
témoin de l’enquête contraire).
Remarquons enfin q u e, selon la déposition du témoin, il serait
entré au domaine de la Guièze en 1788 , et y serait resté onze ans ,
c’est-à-dire jusqu’en 1799 ; et que c’est pendant ces onze ans que la
redevance aurait élé portée annuellement au sieur Manaranches,
homme d’ailaires du sieur Désaulnats.
Mais la forêi de Laroche fut séquestrée à la fin de 1792 , à cause
de l’émigration de M. Neyron de la T anière, qui en était seul le
propriétaire apparent ; et depuis le séquestre qui s’est prolongé jus
qu’en 1809, c’est au bureau des domaines qu’aurait été payée la
redevance, si réellement 011 avait acquitté celte charge. O r, il
11’apparaît aucune quittance du receveur, et ses registres de celte
époque ne font mention d’aucun paiement ; c’est en effet ce qu’at-
�( *6 )
teste un certificat délivré à M. Désaulnats, par le receveur des do
maines.
Combien de motifs de suspicion s’élèvent contre cette étrange
déposition ?
Nous en ferons remarquer quelques autres encore dans la partie
de la déposition du témoin , où il parle de l’exercice de l’usage.
L ’autre témoin, Jean Brughal, qui parle aussi delà redevance, nous
apprend qu’il est entré au service du sieur Bléton, il y a trente-sept
ou trente-huit ans, ce qui remonte à 1792 ou 1795, c’est-à-dire à
l’époque même où la forêt de Laroche fut séquestrée, et où elle
cessa, par conséquent, d’être régie par le sieur Neyron-Désaulnats
ou par son homme d’affaires, pour être placée sous l’administration
des agens du domaine.
Cependant ce témoin parle de la redevance, comme l’ayant por
tée une fois à M. Manaranches, qui avait écrit à M. Bléton, pour se
plaindre de ce que son fermier Dufaud avait négligé de la payer.
11 ajoute qu’après la fin du bail de Dufaud, il régit deux ans le
domaine, et porta, ces deux années , l’avoine de la redevance au
sieur Manaranches.
Enfin il déclare que celui-ci lui donna des quittances qu’il remit
au sieur Bléton.
Pour faire apprécier la sincérité de cette déposition, quelques
observations seront suffisantes.
On remarquera, d’abord, sa contradiction avec celle de Léger Du
faud, précédent témoin, qui atteste l’exactitude du service annuel delà
redevance. Mais ce qui est plus digne d’attention, c’est la partie de
la déclaration de Brughal, où il parle de l’avoine qu’il aurait portée
au sieur Manaranches pendant deux années de suite , après l’époque
où le fermier Dufaud avait quitté le domaine.
Ce fermier, entré dans le domaine eu 1788, y était resté 11 ans,
c’est-à-dire jusqu’à 1799.
A lors, depuis long-tems la forêt de la Roche était sous le séquestre
national, et administrée par les préposés de l’Etat, c’est-à-dire par
le sieur Bléton père lui-même, en qualité de receveur des domaines.
O r, c’cst précisément pendant ce tems-là que le témoin, si on
�( 27 )
veut l’en croire, aurait porté de l’avoine , deux années de suite, au
sieur Manaranclies, qui lui en aurait fourni quittance.
Comment expliquer cette assertion? Et quelle confiance avoir
dans des dépositions de témoins qui ont si évidemment altéré la
vérité dans des points aussi essentiels? y/& uno disce omnes.
Le témoin, lorsqu’il a parlé, avait oublié le séquestre national; il
a hasardé tout ce qu’il a cru utile à celui dans l’intérêt duquel il dé
posait. Aveuglé par son propre zèle, il a voulu tromper la justice;
sa déposition est indigne de confiance.
Comment concilier, au reste, ce qu’il atteste sur les quittances
que lui aurait données le sieur Manaranclies , en 1799 et en 1800 ,
avec la circonstance qu’il ne s’en est pas trouve dans les papiers du
sieur Bléton p ere, inventoriés après son décès, quoique cependant
le sieur Bléton fils ait déposé que dans l’inventaire auquel il a pré
sidé , il peu t certifier que rien d’ essentiel n’a été omis , notam
ment des quittances de la redevance dont il est question, qu’il
n'aurait pas manqué d ’y faire comprendre s’ il s’ en f u t trouvé,
et quoique ce témoin irréprochable ajoute qu’il n’ a rien trouvé qui
se rapportât à celte redevance.
Cependant, c’est sur les dépositions de ces deux seuls témoins, que
le sieur Delsuc peut s’appuyer pour la preuve des paiemens de la
redevance.
Puisque toutes les circonstances signalent comme invraisemblables,
et plus que suspectes, ces deux dépositions isolées ; puisque l’allé
gation des deux témoins est démentie par la déclaration d’un grand
nombre d’autres témoins, plusieurs desquels étant au service des
anciens fermiers du domaine , étaient plus à portée de connaître ce
qui s’y passait, et qui n’ont cependant jamais entendu parler de la re
devance ; puisque cette allégation est détruite par le défaut de rapport
de toutes quittances de la redevance, par l’absence aussi d’émarge
ment, dans les registres des receveurs des domaines, de tout paie
ment qui leur aurait été fait, il faut reconnaître qu’il n’est pas prouvé
que la redevance ait été payée ; qu’il n’est pas établi, par conséquent,
que le droit d’usage ait été légalement execule, et qu’ainsi, comme
l’enseigne Fréminville, comme l’ont décidé les motifs de l’arrêt
�( =8 )
interlocutoire , le droit d’usage était éteint en 1809 , lorsque
M. Désaulnats a obtenu la main-levée d’un séquestre que l’erreur
avait fait mettre sur la forêt de Laroche.
Ce premier moyen suffirait au succès de la cause deM. Désaulnats.
Mais on peut y ajouter celui du défaut de délivrance du bois
destiné aux besoins de l’usager.
L ’on se rappelle la doctrine professée par tous les auteurs, établie
par la jurisprudence, adoptée par les motifs foi’mels de l’arrêt
interlocutoire sur la nécessité de la délivrance à faire par le
propriétaire à l’usager; et l’on n’a pas oublié que c’est en consé
quence de ces motifs, que la Cour a soumis le sieur Delsuc à
prouver que l’usage avait été exercé, au v u , au su et clu consen
tement du propriétaire de la fo ret de L a ro ch e, ou de ceucc qu’ il
représente.
O r , en nous fixant sur une longue série d’années antérieures
à 1809, époque de la cessation du séquestre, la preuve ordonnée
a-t-elle été faite ?
De nombreux témoins ont été entendus sur ce fait. Plusieurs
parlent du bois de cliauflagc pris par les fermiers du domaine de la
Guicze. Trois témoins parlent aussi du bois pris pour réparations ;
mais aucun de ces divers témoins 11e dit que le bois était marqué ou
qu’il ait été pris au vu, au su et du consentement du propriétaire.
T ou s, à l’exception de trois, reconnaissent qu’il 11’y avait eu ni
marque ni délivrance. Ils ne se rappellent pas si le bois pris pour
des constructions était marqué.
L ’un des témoins, le sixième de l’enquête contraire , dit qu’avant
la révolution, il a été domestique du sieur Désaulnats, et que celuici, qui était très-facile, laissait prendre du bois à tout le monde,
sans qu’il fût marqué ; il ajoute qu’il 11’a même jamais vu de marteau.
Le témoin dit aussi que, depuis la révolution, la forêt était au
pillage , et que prenait du bois de chauffage et d’usage qui voulait.
V
oilà à quoi se réduisent les preuves de l’exercice du prétendu droit
d’usage, soit avant la révolution, soit pendant son cours. Certes , il
serait dilïîcile d’y reconnaître l’exercice régulier et légal d’un droit
réel ; on 11e peut y voir que des actes de clandestinité, de tolérance,
�( 29 )
ou de voie de fait, qui ne peuvent pas fonder une possession
légitime.
Les témoins ne se rappellent pas davantage d’avoir rencontré le
garde.
Mais il est trois témoins isolés, dont les dépositions doivent
donner lieu à quelques observations.
On remarquera cependant que l’un d’eux, qui est le premier de
l’enquête , ne parle que dubois abbattu ou sec marqué par le garde,
non du marteau du propriétaire , mais seulement d’un coup de
hache; ce qui n’était ni légal ni propre à prévenir les abus de
l’usager ; car la marque d’un coup de hache n est pas fort difficile
à imiter.
Une telle délivrance, à laquelle rien ne prouve que le proprié
taire ait jamais consenti, une délivrance aussi peu soigneuse est
d’autant moins caractéristique d’un fait de possession de l’usager ,
qu’elle pouvait bien être un acte de complaisance du garde , q u i,
à ce qu’il paraît, d’après le témoin lui-même, mangeait de tems en
teins t'hez les voisins de la forêt, et sans doute chez les propriétaires
du domaine de la Guieze.
Le bois de chauffage, dont parle uniquement ce témoin, pouvait
paraître au garde d’une assez faible valeur pour ne pas se faire
scrupule d’en laisser prendre aux fermiers du domaine.
Quant aux deux autres témoins, qui disent que du bois de cons
truction a été marqué par les gardes pour l’usage du domaine, il
est à remarquer que ce soin ces mêmes deux témoins qui ont déposé
avec tant de complaisance sur le fait du paiement de la redevance ,
et dont il est impossible de ne pas considérer comme suspectes
autant qu erronnées les deux obligeantes dépositions.
L ’un de ces témoins, Léger Dufaud , entré dans le domaine
en 1788 , et qui en est sorti en 1 799, déclare que trois à quatre ans
avant sa sortie , du bois de construction fut délivré et marqué par
le nommé Tallet, garde de M. Désauliiats, pour réparer le sol de
la grange du domaine.
On reconnaîtra que cette déposition est d’une étrange vérité, en
remarquant, d’une part, qu’à l’époque signalée, le domaine était
�( 3° )
sous le séquestre national, et par conséquent sous la surveillance des
gardes forestiers de l’État, et en apprenant aussi que ce Tallet était
alors mort depuis plusieurs années ; il avait été assassiné, dès 1792,
dans la forêt même de Laroche; l’acte de son décès le prouve.
L ’aulre témoin, Jean Brughal, entré au service de M. Blélon, en
1792 ou en *795, c’est-à-dire au commencement du séquestre,
prétend aussi que dans le cours des onze ans de son service, des
arbres furent délivrés et marqués par les gardes , pour réparer une
grange abattue, et ce sur la demande de M. Bléton, et sur l’autori
sation du sieur Manaranches, agent d’affaires de M. Désaulnats. Et
cependant cet agent d’affaires n’avait évidemment aucune autorisa
tion à donner durant un séquestre, pendant lequel c’était le sieur
Bléton lui-même , qui, comme receveur des domaines, régissait la
forêt séquestrée.
On voit combien peu sont dignes de confiance ces dépositions
isolées, sur lesquelles cependant s’appuierait toute la preuve de la
délivrance exigée par la lo i, pour l’exercice légal du droit d’usage.
Ainsi l’on doit reconnaître que celte preuve n’est pas faite , et que
rien n’établit que ceux que représente le sieur Delsuc aient exercé
ce droit, avant 1809 , au v u , au su et du consentement clupro
priétaire de la forêt.
Et cependant l’arrêt a exigé celte preuve ;
Et cependant le sieur Delsuc s’y était soumis.
Donc, puisqu’il n’y a pas satisfait, sa réclamation doit être rejetée,
parce que son droit s’est éteint, faute du paiement de la redevance,
ou pour ne pas avoir obtenu du propriétaire de la forêt la délivrance
du bois qui lui était nécessaire, o u , enfin , pour ne pas avoir usé de
son d roit, au v u , au su et du consentement de ce propriétaire.
Le sieur Dclsuc argumenterait-il des délivrances qui lui ont élé
faites pendant la durée du séquestre ?
L ’argument tomberait devant quelques observations.
Ces délivrances ont toutes été provisoires seulement; toutes ont
été faites avant que les titres et les droits des usagers eussent été
examinés et confirmés par le conseil de préfecture ; toutes émanent
d’un inspecteur, trop instruit pour ne pas savoir qu'il n’était pas
�appelé à régler les droits et à être le juge de la validité des titres,
ni de la conservation ou de l’extinction de l’usage. Ces délivrances
précaires ne peuvent donc être d’aucune influence dans la cause ;
elles sont d’autant moins justificatives de l’usage, que dans les proccsverbaux même qui les contiennent, l’inspecteur forestier a eu la
prudence de faire , au profit du Gouvernement, telles réserves et
restrictions de droit} s i le cas y échet, est-il dit, après le jugement
qu’aura prononcé le conseil de préfecture sur les diverses pro
ductions de titres faites par les usagers.
Ainsi les délivrances provisoires laissent intacts les droits res
pectifs ; et si le droit d’usage n’avait jamais existé , ou s’il n’existait
plus, ces délivrances ne lui ont pas donné la vie.
O r , nous avons prouvé que, dès avant 1809 ou même dès avant
1789, le droit fort équivoque d’ailleurs du sieur Bléton, ou de ses
prédécesseurs, avait été anéanti, parce que jamais il 11’avait été lé
galement exercé, et que jamais il 11’avait été accompagné du paie
ment de la redevance qui en était le prix. Ce prétendu droit ne gre
vait donc plus la forêt de Laroche, lorsqu’à la fin de 1809, cette
forêt fut rendue à M. Neyron-Désaulnats, son ancien propriétaire.
Pour le faire revivre, il eût fallu à l’usager, ou un nouveau titre,
ou une possession légale de trente ans. Le sieur Dclsuc peut-il in
voquer l’un ou l’autre des deux moyens ?
Examinons ce qui s’est passé depuis 1809.
Lorsque M. Désaulnats recouvra sa forêt, un grand nombre de
personnes se présentèrent à lui comme usagers. Leurs droits
n’étaient pas établis, mais ils en certifiaient l’existence; ils disaient,
les uns, avoir égaré leurs titres , les autres les avoir déposés au
secrétariat de la préfecture; tous promettaient d’en justifier inces
samment ; beaucoup d’enlr’eux avaient reçu , pendant la durée du
séquestre, quelques délivrances provisoires qui pouvaient être
considérées comme un indice de leurs droits.
Le sieur Désaulnats, qui, privé depuis près de vingt ans de sa
propriété , n’en connaissait pas bien ni les droits ni les charges ,
pouvait-il se montrer trop sévère dans ces premiers teins? il eût
�( 3 0
craint d’ètre injuste. Il crut donc devoir accorder du bois en atten
dant qn’il pût vérifier les titres.
Parmi les réclamans était M. Bléton, alors propriétaire du
domaine de la Guièze. M. Bléton et M. Désaulnats avaient
entr’eux des relations créées et entretenues par un bon voisinage et
par des circonstances qui se rattachaient môme à la main-levée du
séquestre.
M. Bléton avait aussi obtenu des délivrances provisoires.
M. Désaulnats ne pouvait pas être rigoureux à son égard.
Mais il entendait que le provisoire ne serait maintenu définitive
ment qu’après la vérification des titres et des droits.
Le domaine de la Guièze ayant été vendu, et le sieur Delsuc en
étant devenu propriétaire, le sieur Delsuc qui avait journellement
avec le sieur Désaulnats des relations d’affaires , le provisoire se
prolongea entr’e u x, mais aussi sous la promesse réitérée que des
titres justificatifs seraient produits , examinés et appréciés, et sans
que, de part ni d’autre, on entendît, l’un s’attribuer, l’autre concédef
un droit définitif.
C ’est par suite de ce provisoire, que quelques setiors d’avoine
ont été portés à différentes époques, à Saint-Pardoux, chez le sieur
Désaulnats , presque toujours en son absence, par les métayers ou
fermiers de la G u ièze, les sieurs Bléton et Delsuc ayant voulu sans
doute envoyer cette légère indemnité pour le bois qu’ils recevaient
de teins en tems. Si des reçus n’ont pas été donnés, c’est parce que
le sieur Désaulnats était rarement présent lors de la remise de
l’avoine , ou qu’on ne lui en demandait pas; car il en aurait donné
sans difficulté, niais en expliquant dans les quittances les intentions
communes, et en se faisant les réserves nécessaires (i).
Ainsi se sont écoulées quelques années, pendant lesquelles une
confiance réciproque n’a pas permis de penser à prendre aucune
précaution contre les conséquences que l’on veut tirer aujourd’hui
de ce provisoire.
( i)C e p e n d a n i, peu <le lenis après l'acquisition du sieur Delsuc, le sieur Désauluals refusa
une quittance au fermier de celu i-ci, qui la demandait pure et simple.
*
�( 33 )
Mais enfin cela devait avoir un terme : des titres attributifs ou
conservatifs du prétendu droit, des titres formels n’étant pas pré
sentés , le sieur Désaulnats a refusé du bois , et alors est né le
procès.
Aujourd’hui, qu’a prouvé le sieur Delsuc, par son enquête? Que
du bois lui avait été accordé à différentes fois; qu’il avait aussi été
porté de l’avoine chez le sieur Désaulnats.
Mais tout cela était déjà connu dans la cause. Tout cela avait été
déclaré par le sieur Désaulnats lui-même dans son interrogatoire,
sauf les exagérations de certains témoins , q u i, comme ce n’est que
trop le malheureux usage, sont allés au-delà de la vérité , soit par
infidélité de mémoire, soit par toute autre cause.
Rien donc de moins important que cette partie de l’enquête. Car
ce n’est point pour des faits postérieurs à 1809, pour des faits déjà
constans dans la cause, que l’enquête avait été ordonnée par la Cour;
elle eût été absolument inutile. C ’est pour les faits antérieurs, c’est
pour la preuve du paiement de la redevance et de la délivrance légale,
soit avant 180g, soit avant 178g, que l’enquête a été jugée nécessaire,
parce que les faits étaient allégués avec insistance par le sieur Delsuc,
qui présentait à l’appui de ses allégations des baux qui pouvaient
leur prêter quelque appui.
Et cependant nous avons vu combien peu les allégations avaient
été justifiées, nous avons vu même que des baux plus anciens encore,
auxquels se rattachait la vente du 27 mai’s 17 58 ^ démontraient que
le droit d’usage réclamé 11’avait pas été vendu au sieur Burin, et
que celui-ci n’avait p u , en conséquence, le transmettre au sieur
Bléton ; nous avons vu enfin que ce prétendu droit n’avait jamais été
légalement exercé par la famille Burin et Bléton, et que , lorsqu’on
supposerait même que quelquefois du bois aurait été pris par leurs
métayers dans la forêt de Laroche, c’eût été sans que la délivrance
en fût faite, sans que cette délivrance s’opérât par l’cmpreiute du
marteau du propriétaire, et sans même que le prétendu usage eût
été exercé au v u , au su et du consentement du propriétaire de
la forêt, comme 011 avait offert de le prouver.
Dans de telles circonstances, le droit ayant été depuis long-tems
5
�(3 4 )
anéanti, pourrait-on considérer les faits postérieurs à 1809, comme
l’ayant fait renaître ?
Non , sans doute, à moins qu’un nouveau titre émané du proprié
taire ne l’eût renouvelé, ou qu’une possession trentenaire et légale
ne put tenir lieu d’une concession nouvelle.
Nous disons une possession légale; c’est-à-dire une possession
continue , non à titre précaire, mais à titre de propriétaire du droit,
une possession caractérisée par le paiement de la redevance et par
des délivrances annuelles faites par le propriétaire de la forêt, une
possession, enfin, qui se fût prolongée pendant tout le tems nécessaire
pour acquérir la servitude, c’est-à-dire pendant les trente ans que la
loi exigeait pour suppléer au nouveau titre.
O r, c’est évidemment ce que n’ofire pas l'enquête.
Nous avons déjà indiqué le résultat des dépositions relatives aux
faits antérieurs à 1809; et nous avons vu qu’elles n’établissaient rien
de positif en faveur du prétendu usager.
Quant aux faits postérieurs, quelque caractérisés qu’ils fussent,
ils seraient insuffisans pour rendre l’existence à un droit d’usage
antérieurement éteint, puisque ces faits ne remonteraient pas, à
beaucoup près, aux trente ans nécessaires pour acquérir le droit
par la prescription.
Mais parcourons ce que disent les témoins sur ce qui s’est passé
depuis 1809.
Le cinquième témoin de l’enquête directe parle d’un seul fait de
délivrance de bois, marqué, dit-il, par le sieur Désaulnats ou
Micliel, son domestique. Le témoin ne peut cependant affirmer la
présence de M. Désaulnats.
Le sixième témoin déclare que son père, fermier pendant deux
ans et demi à la G uièze, prit pendant deux années du bois de chauf
fage ; il le prit sans qu’il lui fût marqué ; il ne dit pas même que ce
fût du consentement du propriétaire. Il ajoute qu’il ne remit pas
d’avoine la première année ; qu’il en remit un setier la seconde,
parce qu’un garde nommé Guest refusa de lui délivrer du bois, s’il
ne payait pas cette redevance.
Cette déposition indique le peu d’exactitude du pVétendu paie
ment de la redevance , et fait voir qu’en supposant l’existence du
�( 35 )
d roit, le propriétaire de la forêt, qui n’avait aucun moyen d’exiger
la redevance, aurait été absolument à la discrétion de l’usager de
qui il dépendait de payer ou de ne pas payer cette redevance, selon
qu’il lui aurait plu de prendre du bois ou de s’en abstenir.
On doit conclure de là qu’un tel usage était nécessairement pré
caire ; carie propriétaire ne pouvait pas être lié, si l’usager ne
l’était pas lui-mêine. Si donc il y a eu quelquefois des délivrances
de bois et des paiemens momentanés de redevance , cela ne pouvait
être que provisoire, comme l’a déclaré M. Désaulnats.
Le septième témoin, dont la déposition a des vai’iations, parle
du refus que lit, dans une circonstance, M- Désaulnats, si on ne
lui payait pas de redevance. Il dit qu’il porta un setier d’avoine, et
qu’alors on lui donna du bois de chauffage.
11 parle aussi du bois de construction reçu par M. Bléton ; il
ignore par qui ce bois fut marqué et délivre.
D ’autres témoins parlent encore de bois de chauffage, et quelquesuns de bois de construction, qui aurait été pris dans la forêt. Peu
de témoins seulement disent que ce bois leur était délivré. Un d’eux
déclare qu’il était marqué à l’avance. Le neuvième dit avoir, la
première année, demandé du bois de son propre mouvement,
INI. Delsuc ne lui ayant pas donné d’ordre, parce qu’il n’avait pas de
titre.
Plusieurs disent aussi avoir porté de l’avoine. Aucun n’a reçu de
quittance. Le dixième dit en avoir demandé une fois, de crainte
que M. Blcton n’en exigeât.
11 est bien certain que le sieur Désaulnats se serait empressé à
donner cette quittance, mais en y insérant les conditions et les ré
serves nécessaires.
L ’on remarquera que la plupart des témoins qui parlent d’avoine
par eux portée au sieur Désaulnats avaient été les fermiers des
sieurs Bléton ou Delsuc, et qu’ils déposent en quelque sorte dans
leur propre cause sur le fait de l’avoine, s’ils s’en sont fait tenir
compte, quoiqu’ils ne l’eussent réellement pas remise à M. D é
saulnats.
Le dixième témoin de l’enquête directe dépose d’un fait qui
prouve combien le sieur Delsuc doutait lui-même de la réalité du
f/5
�( 3 6 )
droit d’usage qu’il réclame. Il avait des réparations à faire à sa
maison du domaine de la Guièze ; et, au lieu de se faire délivrer du
bois par. le sieur Désaulnats, il en prit dans une forêt dont il est luimêine propriétaire, appelée Bois de la Jarrige.
Ce fait est aussi attesté par le cinquième témoin de la continuation
de l’enquête directe, et par le deuxième témoin de la continuation
de l’enquête contraire.
Le onzième témoin, aussi fermier à la Guièze, demanda un jour
à M. Désaulnats de la rame pour clore les héritages. Le sieur Dé
saulnats lui dit ne pas en avoir, mais lui permit de prendre des
écoudards ou des croûtes de rouleau, enlevées par la scie.
Tous ces faits annoncent la facilité du sieur Désaulnats, tant qu’on
n’exigeait pas du bois de lui à titre de droit, tant qu’il espérait qu’on
justifierait enfin des titres annoncés.
Cette facilité, il la montrait à l’égard de plusieurs autres habitans
des lieux qui, cependant, n’avaient aucun droit d’usage. C’est ce
qui aurait été clairement démontré par l’enquête, si le sieur Delsuc,
a qui la connaissance de cette vérité de fait paraissait dangereuse s
ne s’était pas opposé aux interpellations que le sieur Désaulnats a
voulu faire faire sur ce point à plusieurs des témoins même de l’en
quête directe, notamment au prem ier, au cinquième et au huitième
témoins.
Le sieur Désaulnats désirait que l’on demandât aux témoins s’il ne
leur avait pas fait à eux-mêmes et ci d'autres personnes des déli
vrances de bois, sans qu’ elles eussent des droits d’uscige dans
la fo r ê t, et sans même en exiger de paiement, mais seulement
par des considérations de bon voisinage.
La question n’a pas été faite, parce que le sieur Delsuc s’y est
opposé, sous prétexte qu’elle ne se rattachait pas directement aux
faits retenus par l’arrêt.
Cependant un fait semblable est rapporté par les 4 e et 5®témoins
de l’enquête contraire. Il s’applique au noimné Antoine Gardelle,
qui , pendant le séquestre, avait été compris dans le tableau des
usagers auxquels l’inspecteur forestier avait fait des délivrances pro
visoires. Quoique ce Gardetle n’eût pas trouvé le titre,qu’il annon
çait , M. Désaulnats lui a délivré provisoirement du bois, cl cela,
�C 37 )
pendant plusieurs années ; et il a reçu aussi de lui la redevance qu’il
disait devoir. Mais le droit n’étant pas justifié, la délivrance à cessé.
C ’est ce qu’attestent, soit Gardette lui-même, soit le témoin qui
lui succède.
L ’exemple de Gardette est absolument conforme à ce qui s’est
passé avec le sieur Delsuc. Pour l’un comme pour l’autre, le sieur
Désaulnats a été officieux et facile ; pour l’un comme pour l’autre, il
n’avait entendu faire qu’une concession provisoire ; pour l’un comme
pour l’autre , il avait été convenu que l’usage cesserait si des titres
justificatifs et conservatifs du droit n’étaient pas rapportés. La con
vention a été exécutée à l’égard de Gardette; le provisoire a même
été interrompu. Le sieur Delsuc , au contraire , veut le rendre dé
finitif.
Y
parviendra-t-il? lui qui n’a acquis aucun droit d’usage par
l’adjudication de 1819, et qui 11’a aussi été chargé d’aucune rede
vance indicative d’un tel droit ; lui dont les prédécesseurs même
en propriété, les sieurs Burin et Bléton, n’avaient également acquis
aucun droit de ce genre, puisque la vente de 1758 11’en énonce pas,
et que le bail de 1750, auquel cette vente se réfère, écarte même
l’idée de tout droit d’usage attaché au domaine vendu ; lui qui n’a
pas prouvé que ce droit d’usage eût été légalement exercé dans
aucun tems, ni avant ni depuis 1789, puisqu’il 11e rapporte aucune
quittance du paiement de la redevance qui en était le p rix , puis
qu’il n’est pas établi qu’il ait été fait jamais de délivrance par le pro
priétaire au prétendu usager, ni même que celui-ci ait exercé ce
droit, au v u , au su et du consentement du propriétaire de la
foret ; lui enfin qui voudrait profiter d’une tolérance, d’une com
plaisance de bon voisinage , pour s'attribuer sur le sieur Désaulnats
un droit onéreux, 1111 droit q u i, en supposant même qu’il eût existé
dans le dix-septième siècle, aurait depuis long-temps été anéanti par
* la renonciation tacite de l’usager; celui-ci, à une époque où le bois
était sans valeur, ayant sans doute voulu s’affranchir de la redevaucc
annuelle qui en était le prix.
La réclamation du sieur Delsuc doit donc être rejetée.
Mais en supposant qu’il eût un droit d’usage sur la forêt, exami
nons en quoi ce droit devrait consister.
�(38
)
S iii.
Quels seraient l’objet et l’étendue du droit d’usage ?
C ’est dans le titre constitutif d’un droit d’usage qu’on doit re
chercher et cet objet et cette étendue.
Le sieur Delsuc présente deux titres, l’un du i 3 janvier i 56 i ,
l’autre du 17 décembre i 634 *
Nous avons démontré déjà que l’acte de i 56 i était étranger à la
cause ; qu’applicable seulement aux propriétés que Jean Fumât
possédait alors au village Del Mas Del Tourres, il ne pouvait être
invoqué pour un domaine situé au village de la G uièze, dont il 11e
parle pas.
C ’est donc sur l’acte seul de 1634 q116 l’on
se fixer, en con
sidérant même comme concédé valablement et à perpétuité le droit
d’usage qui y est énoncé.
O r , que porte cet acte? L ’investison de la forêt de Laroche en
faveur de Jean Fumât, pour son usage des maisons, pour ses ténemens des 'villages de la Guièze et Pissol, soit pour son chauf
fa g e et réparations , qu’ il pourrait fa ire dans lesdits ténemens.
II est inutile de nous occuper du village de Pissol, où le sieur
Dclsuc ne possède rien des anciennes propriétés de Jean Fumât (1).
Le village ou le ténement de la Guièze sont seuls à considérer,
parce que ce village ou ténement est dans la cause le seul objet du
droit réclamé.
Quant à l’étendue du droit, il est fixé par les termes mêmes de
l’acte : pour chauffage et pour réparations, y est-il dit.
O r c’est un principe élémentaire, que celui à qui une servitude
est due, ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir rien
faire pour l’aggraver (argument de l’article 702 du Code civil).
Ce principe s’applique notamment aux droits d’usages dans les
bois. L ’usage accordé pour une maison ne peut être étendu à plu
sieurs. L ’usage attribué à une mélaii’ie ou à un domaine ne peut être
(1) Les representans des Fumât) quant au domaine de Pissol, n'ont jamais considéré
JUcLe
de i 63 4 comme leur attribuant aucun droit d'usage,
�( 3g )
réclamé .que pour ce domaine , et seulement tel qu’il existait au mo
ment de la concession ; il ne peut être étendu à de nouveaux bàtimens , à de nouvelles propriétés qui auraient été réunies à l’ancien
domaine ; car ce serait évidemment aggraver la condition du fonds
dominant, c’est-à-dire du propriétaire de la forêt.
Toutes ces vérités élémentaires sont professées comme telles par
tous les auteurs qui se sont occupés de servitudes comme par tous
ceux qui ont traité des droits d’usage dans les bois.
Le sieur Delsuc paraît cependant les méconnaître; car le domaine
de la Guièze, pour la totalité duquel il réclame un droit d’usage ,
est beaucoup plus considérable aujourd’hui qu’il ne l’était en 1654.
En effet, les baux produits par M. Désaulnats, ces baux anté
rieurs à la vente faite le 29 mars 1768, par la demoiselle Fumât au
sieur Burin, tous ces baux nous apprennent que, des 1729, le sieur
Fumât avait réuni dans la main du même fermier à son domaine de
la G uicze, tous les héritages dépendant d’un autre domaine
appelé d’ A u za t, appartenant aussi au sieur Fumât. C’est ce
qu’on lit dans les baux des 4 avril 1729, 5 omai 1755, 17 mars 1750.
Et remarquons que le sieur Burin acheta en 1758 ces deux
domaines ; car la vente lui en fut faite en se référant au dernier bail
du 17 mars i j 5o.
Ainsi, ce n’est plus seulement pour le petit domaine primitif de
la Guicze que le droit d’usage est réclamé; c’est pour un gros
domaine qui s’est accru notamment de l’augmentation de tous les
héritages qui formaient autrefois le domaine distinct appelé d’Auzat.
D’autres adjonctions ont aussi été faites à cet ancien domaine par
des acquisitions successives qui embrassent la totalité du tellement
de la Guicze. Autrefois il existait un village dans ce tellement. Ce
village est rappelé dans l’acte même de i 634 - Dans ce village, se
trouvaient nécessairement plusieurs habilans ; car on ne donne pas
le nom de village à une propriété isolée. Ce nom 11e convient qu’à
une agglomération d’habitations. Les divers habilans devaient avoir“
chacun la propriété d’une portion quelconque du ténement. Le
contraire ne peut se supposer, sur-tout pour un pays de montagne.
Or aujourd’hui le ténement entier est la propriété du sieur Delsuc.
�( 40 )
Aujourd’hui tous les bâtimens qui sont sur ce ténement lui appar
tiennent; et c’est pour le ténement entier, c’est pour la totalité de
ces bâtimens qu’il réclame le droit d’usage en litige, sans remarquer
que nécessairement aujourd’hui il y a plus de bàtimens pour ce
domaine qui a reçu et qui reçoit encore de grands accroissemens,
qu’il n’en fallait pour les besoins du petit domaine que possédait
Fumât en i 634 Nous disons que ce domaine reçoit encore des accroissemens ;
c’est ce que nous apprend môme le onzième témoin de l'enquête
directe, qui parle d’un pré et d’une terre récemment acquis par le
sieur D elsuc, qui en a défriché, dit-il, trois septerées.
Il est fort bien, sans doute, que M. Delsuc augmente ses pro
priétés ; mais il ne serait pas juste que cette augmentation aggravât
le droit d’usage dû à l’ancien domaine, et que le sieur Désaulnats
dut fournir tous les bois nécessaires, soit à construire, soit à réparer
des bâtimens qui ont dû être augmentés dans la proportion de l’aug
mentation des héritages annexés au domaine.
Une autre observation est également digne d’attention.
Le sieur Delsuc a acquis avec le domaine de la Guicze quaranteune tètes d’herbages de la montagne de Montaigut. Ces quaranteune têtes d’herbages, il les fait consommer, en été, par des bestiaux
qu’il loge, en hiver, dans les bâtimens de son domaine de la Guièze;
et l’on conçoit que pour loger cette quantité assez considérable de
bestiaux étrangers aux besoins du domaine, il lui faut des bâtimens
plus vastes.
Les bâtimens ont dû même recevoir une grande augmentation
dès le tems où l’on avait réuni à l’ancien domaine, non-seulement
tous les héritages dépendant du domaine d’Auzat, mais encore
trenle-deux lêtes d’herbages de la montagne de Montaigut ; et celle
double réunion remonte au moins à 1729, ainsi que le constate le
bail de celte époque.
Comment pourrait-on soumettre le sieur Désaulnats à souffrir un
usage que l’on étendrait ainsi à tous les besoins que produisent et à
tous les bâtimens qu’exigent des accroissemens qui "ont plus que
�(4 0
double l’ancien domaine, et qui aggraveraient ainsi de plus du
double l’ancien droit concédé par l’acte de 1654 *
Telle est pourtant la prétention du sieur Delsuc. C’est, ce qu’an
nonce au moins la demande en délivrance qui a été l’origine et la
cause du procès actuel.
Par les actes qui ont précédé ou introduit l’instance, le sieur
Delsuc a déclaré qu’il était sur le point de construire un bâtiment
dans le domaine de la Guièze ; il a prétendu avoir le droit de prendre
dans la foret de Laroche le bois nécessaire à cette construction, et
il a demandé qu’on lui en délivrât la quantité suffisante pour un bâ
timent d’une longueur de 26 mètres 32 centimètres, ou 78 pieds,
et d’une largeur de 11 mètres , ou 53 pieds.
L ’acte de 1654 ne l’autorisait, sous aucun rapport, à faire une
telle réclamation.
En effet, i° l’ancien domaine de la Guièze, tel qu’il existait en
i 6 3 4 , avant tous les accroissemens qu’il a reçus, notamment en
1729, n’avait pour tout édifice qu’un seul bâtiment sous le même
toît, dont une partie servait de logement au fermier, et une autre
partie d’établerie ; la partie supérieure de cette établerie formant la
grange, ainsi que cela est d’usage sur les lieux. Ce bâtiment suffi
sait aux besoins d’un domaine alors peu considérable, et où l’on
ne plaçait ni les bestiaux nécessaires à l’exploitation du domaine
d’Auzat, ni ceux qui consomment, l’été, les têtes d’iierbages que
l’on a réunies au domaine.
Le sieur Delsuc, au moment actuel, a , dans le lénement de la
G u ièze, beaucoup plus de bâtimens qu’il 11e lui en faudrait pour
l’exploitation de l’ancien domaine. S’il lui plaît de faire de nouvelles
constructions dans ce ténement, il n’a pas le droit d’exiger de
M. Désaulnats qu’il lui en fournisse les matériaux; car, en supposant
même que le titre parlât de bois de construction, il est certain que
cela ne pourrait s’entendre que pour les bâtimens nécessaires aux
besoins du domaine, tel qu’il existait autrefois, et non pour ceux
d’un domaine beaucoup plus considérable.
a0II est à remarquer même que l’acte de 1634- n’accorde pas de
droit d’usage pour des constructions à faire ; il ne parle de bois que
�( 4* )
pour chauffage ou pour réparations. Une telle concession ne s’ap
plique évidemment pas à des constructions nouvelles et à des cons
tructions aussi considérables que celles que veut faire le sieur Delsuc.
Réparer n’est pas construire ; ce n’est pas établir de nouveaux biitiinens, c’est seulement entretenir les anciens.
La demande en délivrance du sieur Delsuc a donc été peu réflé
chie ; et l’on doit penser que s i, au lieu de s’appuyer comme il l’a
toujours fait, sur l’acte de i 5G i qui ne s’applique pas au domaine
de la Guièze, il se fût fixé sur le seul titre qui parle de ce domaine,
sur l’acte de i 634 » sans doute il aurait reconnu qu’il n’élait pas au
torisé à demander du bois pour construire , aux dépens du sieur
Désaulnats, un vaste bâtiment de 78 pieds de longueur sur 33 pieds
de largeur, et que le droit d’usage qu’avait obtenu Jean Fumât, ce
droit d’usage limité, soit par les termes même de l’acte, soit par le
peu d’étendue et de valeur du domaine de la Guièze, lors de la
concession, lui permettait seulement de réclamer du bois pour ré
parer la seule maison désignée dans l’acte de concession, où il n’est
parlé ni de grange ni d’autre édifice, ni même du droit de bâtir ou
de construire.
On le voit donc : le sieur Delsuc s’est fait illusion ; sa demande
en délivrance est contraire au titre même qu’il invoque ; cette de
mande, qui est cependant le fondement de tout le procès actuel,
devrait donc être rejetée , même lorsqu’il ferait considérer le droit
d’usage porté par l’acte de i 63 /|. comme lui ayant été réellement
transmis, et comme ayant été légalement conservé. Il devrait suc
comber dans l’action qu’il a formée, sauf à lui à user, dans la suite,
conformément et dans les limites de l’acte de i 634 >du droit d’usage
que cet acte confère.
T el serait, sans doute, clans l’instancc actuelle, le sort de la ré
clamation hasardée par le sieur Delsuc , lors même qu’on lui recon
naîtrait un droit d’usage.
Mais ce droit lui appartient-il? lui a-t-il été vendu? avait-il été
vendu au sieur Burin en 1758?
C ’est ce que la lecture des ventes ne permet pas de supposer.
En 1758, le sieur Burin achète le domaine de la G u icze, tel qu’il
�( 43 )
_ ctait designé dans un bail de 1750, tel qu’en jouissait l’ancien fermier.
O r, le bail était muet sur le droit d’usage, et le fermier n’en jouissait
pas.
En 1819, le duc de Castries devient adjudicataire du domaine;
et peu de tems après il le revend au sieur Delsuc; et l’adjudication
et la revente sont silencieuses aussi sur le droit d’usage et les rede
vances.
On n’en sera pas surpris, si l’on se rappelle les faits, et si l’on
reconnaît, en remontant à un siècle et plus , qu’il n’existe aucune
trace du paiement de la redevance ; que l’exercice légal du droit
n’est pas prouvé ; qu’aucune possession , caractérisée par une dé
livrance faite à l’usager, n’a été établie.
Ainsi, le sieur Delsuc veut obtenir ce qui ne lui appartient pas ;
il veut se procurer un bénéfice auquel il 11 a pas droit. C erlat de
lucro captando.
' Le sieur Désaulnats, au contraire, refuse de payer ce dont il n’est
pas débiteur. Il résiste à un droit d’usage, dont l’unique prix aurait
été une redevance annuelle que l’usager n’a pas servie; à un droit
dont sa foret n’est pas grevée ; à un droit dont elle aurait été af
franchie, par le fait de l’usager lui-même, depuis plus d’un siècle; à
un droit, enfin , auquel 0n voudrait même aujourd’hui donner une
extension arbitraire. L e sieur Désaulnats veut éviter une perte :
C ertat de damno vitando.
Quelle est celle des parties que la justice et l’équité protègent ?
NEIRON D E SA U L N A T S.
M e ALLEM AM D, Avocat.
M® MARIE , Avoué-licencié.
RI O M , de l'imprimerie de S A L L E S
fils
,
près le Palais de Justice.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Neyron-Desaulnats, Jean-Marie. 1828?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Neiron des Aulnats
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
droit d'usage
séquestre
biens nationaux
bois
coupe de bois
droit de chauffage
pacage
droit de bâtissage
eaux et forêts
émigrés
témoins
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour M. Jean-Marie Neyron-des Aulnats, propriétaire, habitant au lieu de Saint-Genès, appelant d'un jugement par défaut, rendu au tribunal civil d'Issoire, le 27 juillet 1827 ; contre M. Jacques Delsuc, propriétaire et ancien notaire, habitant du lieu de St-Pardoux-Latour, Intimé.
Table Godemel : Usage (droits d') : 2. dans la contestation relative à un droit d’usage de prendre des bois de construction dans les forêts de la Malguièze et de Laroche appartenant au sr Désaulnats ; celui-ci prétend que ce droit ne résulte pas des titres produits, ni de la possession ; qu’il serait éteint par non usage ; et que, dans tous les cas, il ne pourrait être éxigé pour la réparation ou reconstruction de la grange qui fait l’objet de la contestation, parce qu’elle n’aurait été construite qu’après l’acte de concession du 17 décembre 1764, et après diverses augmentations faites au domaine de la Guièze, qui appartient à Delrue ; demandeur en délivrance. Quid ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie De Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1828
1561-1828
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2712
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2714
BCU_Factums_G2710
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53549/BCU_Factums_G2712.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Tour-d'Auvergne (63192)
Auzat (domaine d’)
Lagièse (domaine de)
La Roche (forêt de)
Pissols (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
bois
Coupe de bois
droit d'usage
droit de bâtissage
droit de chauffage
eaux et forêts
émigrés
pacage
séquestre
témoins
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53531/BCU_Factums_G2616.pdf
220a1061d356e9b8159648977a06b17c
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Text
RÉPONSE.
�RÉPONSE
PO U R
Jeanne
AUBIGNAT,VeVILLEVAUD, Appelante;
CONTRE
Le Sr CHAMBAUD, Adjudant Com m andant,
Officier de la Legion-d’Honneur, ci-devant
Maire de Chamalières et Royat, Intimé.
L e sieur Chambaud termine son Mémoire par d ire, pag. 8 3 ,
q u 'il doit être assez, généreux pour oublier et pardonner.
II est facile de pardonner aux autres le mal qu’on le u r a fait.
Il n’est pas toujours aussi facile d e
pardonner à soi-même,
si l’on descend dans son cœur et qu’on interroge sa conscience,
surtout quand on jette un coup-d'œil sur sa poitrine, pag. 8.
L e sieur Chambaud ne veut pas seulement être généreux envers
la veuve V illevaud, il veut encore l’être envers son défenseur,
en prenant la peine d’excuser son zèle, qu’il attribue à la bonté
et à la simplicité de son cœur, qu’il veut bien qualifier d ’honorables.
Sans chercher à analiser le sens de ces expressions, on se con
tentera de répondre qu’il ne suffisait pas de la bonté et de la
simpliste du cœur pour entreprendre une tache aussi pénible ,
que la defense de la veuve V illevaud, lorsqu’il s’agissait de lutter
avec tant de désavantage pour le faible contre le fort;
Pour l’opprimé contre l’oppresseur;
Pour une malheureuse paysanne, pauv r e , ru in ée, délaissée
�O )
par la nature entière; contre l’homme puissant, entoure de*
prestiges, des cordons, des grades et de la fortune.
Il fallait être animé d’un sentiment plus honorable; de l’atta
chement à ses devoirs, qui ne permet pas à l’homine public de
refuser son appui au malheur, et de capituler avec les considé
rations.
L e fait avéré dans la cause, est que la veuve Villevaud a été
'dépouillée d’une somme de 10,862 fr. 5o c . , qui formait à peu
près toute sa fortune.
On dit que ce fait est acéré : le sieur Cliambaud s’en explique1
ainsi dans son premier M ém oire, pag. 2 :
« Que la veuve Villevaud ait été victime de la fraude de deux
» ci-dêvant notaires, dont l’opinion publique a fait justice; c ’est,
» ce qui est malheureusement trop vrai pour elle : mais prétendre
» que le sieur Cliambaud a p u y contribuer dune manière quel» conque, c’est ce qui n’est ni vrai ni vraisemblable.»
O r, ce fait que le sieur Cliambaud dit n’être ni vrai ni vrai
semblable, qu’il ait contribué d'une manière quelconque dans l’acte
frauduleux dont la veuve Villevaud a été victim e, et qui a opéré
ga ruine, elle demande a éiii. orlmisc à en faire la preuve tant
par titres que par témoins.
E lle va bien plus loin : elle demande à faire la preuve que
c’est le sieur Cliambaud qui a m édité, préparé, dirigé et con
s o m m é cet acte frauduleux, de concert avec les deux ci-devant
notaires dont l opinion jniblique et J'ait justice•
C ’est en vaïn que le sieur Cliambaud a recours à de misérables
s ub t erf uges et à de vaincs subtilités de chicane pour échapper
5 la vérité qui le p resse, et qu’il qualifia les faits qu’on lui
oppose d’invraisemblables et d’insuüisan: pour établir sa culC ’cst encore vainement qu’il invoque avec jactance le jugement
du tribunal de première instance qui les a déclaré tels,
L ’alfaire alors 11’élait pas instruite;
^• f
Les faits n’claicnl ni suflisanuucnt développés, ni précises ;
�?3 )
Ceux même qui étaient connus ne l’ctaient qu’imparfaitement ;
E t beaucoup d’autres, d’une importance m ajeure, ne sont
parvenus qu’après le jugement à la connaissance de la veuve
Yillevaud.
Au surplus, le sieur Chambaud a - t - i l bien réfléchi sur les
conséquences de ce genre de défenses , et des efforts inouis
qu’il fait pour repousser, comme inadmissibles ou comme insuf
fisantes, toutes les preuves q u ’offre contre lui la veuve Yillevaud?
S’il est vrai que le sieur Chambaud n’ait pas contribué, d'une
manière quelconque, à l’acte frauduleux dont elle a été victime;
S’il est vrai, comme il le répète à toutes les pages de son second
M ém oire, qu’il ait absolument été étranger à cet acte; qu’il ait
été fait sans son concours, à son insçu et hors sa présence ,
pourquoi fuit-il, avec tant d’opiniâtreté, la lum ière, et s’opposet-il, avec tant d’efforts, à laisser sortir la lampe de dessous le
boisseau ?
'> P°g. 2.
Un homme comme le sieur Chambaud, officier supérieur}
montrant sur sa poitrine la glorieuse distinction, récompense de
ses services....; entouré de l'estime de ses camarades, de la confiance
et de lamitié de tous ceux qui le connaissent, doit ¿ lie comme
la femme de César, il ne doif pao £uc auupçonné.
On ne peut discuter cette affaire , et se faire entendre, sans
rappeler les faits qui l’ont fait naître.
Il ne faut pas les chercher dans les 83 pages du dernier
Mémoire du sieur Chambaud , ils se perdent dans la discussion,
et on ne peut suivre sa marche sans courir le risque de s’égarer
et d’égarer la justice.
Nous prendrons ces faits dans son premier M émoire, imprimé
et signifié le y août 1820, où il s’exprime en ces termes :
« Le sieur Girard , ancien notaire à Chamalières, avait acquis
» du sieur Dalbiat le pré du lïreüil , dépendances de Royat j
» le prix avait été stipulé payable dans 12 ans.
» Par acte du 21 juin 1808, passé devant C h evalier, notaire,4
» le sieur G irard vendit à Jeanne A u b ign at, veuve Y ille v a u d ,
�( 4 }
» et à Léger Bourgougnon, son gen dre, une partie considérable!
» du pré du Breiiil.
» La veuve Villevaud entrait pour neuf dixièmes dans l ’ac» quisition , et son gendre pour un dixième.
» Cette vente fut faite moyennant le prix de n , 3 i() livres
» tournois, dont 7,81g livres payées comptant, et les 3,75o livres
» restant, payables au i 5 novembre suivant.
» Il fut stipulé que le vendeur ne pourrait exiger le rem» boursement de cette somme qu’en fournissant une hypothèque
» pour la sûreté totale de la v e n te, ou en en donnant caution.
» Cette clause était importante pour la veuve Villevaud, puis
ai qu’elle avait à redouter deux actions hypothécaires ; d’une
» p a r t, Girard n’avait pas payé le prix de son acquisition au
» sieur D albiat, premier vendeur, qui dès lors avait un privilège
» sur l’objet vendu; de l’autre, le pré du Breiiil était grevé
» de l’hypothèque légale de la dame Dalbiat : nous allons voir
» coinmetit le sieur G irard , de concert avec le sieur Chevalier,
» a effectué l’emploi promis à la veuve Villevaud ».
C ’est toujours le sieur Chambaud qui rend compte des faits.
« Lie i 3 mai iRoq, le sieur Fonghasse, tant en son nom qu’en
» qualité de procureur fondé de la darne Fonghasse , sa mere ,
» souscrivit au sieur Girard , dcv«iiii ciic-miior 7 notaire, une
» obligation de 10,862 fr. 5o c., payable dans cinq ans, l’intérêt
» à cinq pour cent, avec l'affectation spéciale d’une maison sise
» rue de la Treille. Cet acte porte en outre la stipulation
y> suivante :
» Ledit sieur Girard déclare que ladite somme principale
» provient des deniers de Jeanne Aubignat, neuve J'illevaud, et
y, de Légeï Bourgougnon, son gendre, et fa it partie du prix de la
» vente que ledit Girard leur a consentie d'un pré situe à lloyaf,
» suivant l'acte passé devant nous Chevalier, notaire, le 21 ju in 1808,
» au moyen de. lafjuelle déclaration ledit sieur Fonghasse sera
« tenu, comme il’s'y oblige, de ne faire le remboursement de ladite
y> soiiiritc i]tien présente desdits Alibignat cl Bourgougnon, pour
v veiller ¿1 l'emploi'(Tiêelle, conformément audit contrut de vente.»
�fAi «4 .
( 5 )
» En vertu (le celte obligation, le sieur Girard prit une ins» criplion sur le sieur Fonghasse le 16 juin suivant.
» Au m oyen, continue le sieur Cliambaud, de cet emploi
» illusoire, la veuve Villevaud se libéra de la somme d e 3 ,5oo fr.
» qu’elle restait devoir à G irard , et celui-ci lui donna quittance
» finale le 12 mars 1812. Cet acte, passé comme les autres devant
» Chevalier, est pur et sim ple, et ne contient point, de la part
» de la veuve V illevaud, acceptation de la charge de remploi ;
» on y trouve seulement par simple énonciation ,
. .
» Que ladite somme présentement (juit/ance'e, ainsi que cçlle
» formant le surplus du prix de ladite vente, ont ¿te employées par
» Girard au désir du même acte de vente, par hypothèque spéciale,
» suivant obligation reçue par le même notaire le i 3 mai 1809,
» consentie au sieur Fonghasse. »
On a vu plus haut que le sieur Cliambaud. qualifie dillussoire
l’engagement contracté par le sieur Fonghasse, dans son obligation
du i3 mai 1809, de n’en faire le remboursement qu’en présence
de la veuve Villevaud et de son gendre, pour veiller à l’emploi
d’icelle, parce que cet engagement n’avait pas été accepté par la
veuve Villevaud.
M ais, outre que le sieur Fonghasse et sa mère ayant promis
de ne pas faire le remboursement des 10,862 fr. 5o c . , au sieur
Girard, qu’en présence et du consentement de la veuve Villevaud,
leur engagement était sacré; le sieur Cliambaud sait mieux que
personne quelle en était la valeur, lui qui a louché les 10,862 fr.
5o c. à la place cl au préjudice de la veuve Villevaud.
Voilà le moment critique de l ’affaire; et quoiqu’on ne puisse
plus suivre mot à mot la narration du sieur Cliambaud, comme
011 l’a fait jusqu’ici, on y trouve encore, au milieu d e ’l'obscurité
dont il cherche à s’environner, des sillons de lumière suifisans
pour nous diriger et nous conduire .nu bul.
11 nous dit qu’il élail créancier de la veuve V illevau d , d ’une
obligation de 6,000 fr;
Qu’après plusieurs avertissemens formels , mais infructueux,
une sommation lut faite au mois de décembre i8 i3 , c’cst-à-dirc,
�I* . :
'
( 6 )
environ un mois avant le fameux acte du 27 janvier 1814, que
le sieur Chambaud reconnaît lui-méme avoir clé l’ouvrage du
dol et de la fraude.
« A cette époque , dit-il, le mauvais état des affaires de Girard
» et de Chevalier était à son comble. »
Ce passage est précieux ; il prouve que le sieur Cliambaud
connaissait alors parfaitement le mauvais état des affaires de
Girard: et comment l’aurait-il ignoré? ils étaient amis insépa
rables ; il passait sa vie dans la maison Girard ; il était en tout
son conseil et son guide.
On lit a la suite de ce passage que « G irard, qui crut voir
» l’occasion de toucher de l’argent, chercha à appiloycr le sieur
» Cliambaud, par l'entremise de la veuve Villevaud, et fit un
» demi-aveu sur sa position de fortune. »
Ainsi, Girard se sert d’une personne interposée pour appitoyer
le sieur Chambaud sur son so rt, lui qui avait à sa disposition
tant d’autres moyens plus efficaces.
E t de qui se sert-il pour cela ? D ’une paysanne qui ne sait ni
lire ni écrire, et qui est, sans contredit, la femme la plus bornée
de sa commune.
Quoi qu’il en soit, lo sieur Girard fait au sieur Chambaud un
demi-aveu de la position de s<i fortune.
Il ajoutait qu’il « n’avait qu’un moyen de se tirer «l’embarras,
» c’était que le sieur Chambaud consentît à accorder le délai
» d’un an à la veuve V illevaud, pour le payement de ce qu’elle
» lui devait, et que celle-ci consentit de son côté à transférer sur
» le domaine de la Garandie, appartenant à lui Girard, l ’hypothèijite quelle avait sur la maison Fonghasse, pour une somme
y> d'environ 11,000 fr .»
Ici l’intrigue commence à se dérouler.
Le mauvais état des affaires de Girard et de Chevalier était à
son comble.
G irard n’avait qu’un m oyen de faire de l ’argent, et de se tirer
de l'em barras où il se trouyait ; il eu fait confidence au sieur
Chambaud.
�( 7 }
Ce m oyen, celait que la veuve T^dlevaud consentît de son côté
à transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant à lui
Girard, l'hypothèque quelle avait sur la maison Fongha sse, pour
une somme d ’envirop 1 1,000 fr .
« Alors, disait Ærirard, (on copie toujours le premier Mémoire
» du sieur Chambaud,), la somme que j e toucherai sur la maison
y> Fonghasse, et environ 7,000 lr. que je puis mettre en recou» vrement dans mon étu d e, me mettront à même de faire face
» à toutes mes affaires. »
Voilà donc le projet form é, et d’après le sieur Chambaud luimême , c’est lui qui en est le confident.
Déjà on peut s’apercevoir, s’il est vrai comme il le dit dans
son M ém oire, qu'il n ’a pu y coopérer d'une manière quelconque,
Mais allons plus loin. Que dira le sieur Chambaud, s’il est
prouvé que c’est lui qui s’est chargé de 1 exécution de ce projet,
et qui en a conduit le fil jusqu’au dénouement?
D ’abord il sollicite, avec les plus vives instances, la veuve
.Yillevaud, comme il en est convenu avec G irard, de donner
main-levée de son hypothèque sur la maison Fonghasse, et de
la transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant à Girard;
et il lui prom et, si elle veut s'y prêter, la plus grande indul
gence pour le payement de son obligation de 6,000 fr.
Pour lui inspirer plus de confiance, il lui remet un écrit de
sa inain, produit au procès et conçu en ces termes :
« Il existe une hypothèque de 11,000 fr. que la veuve Yillevaud
» a placé sur une maison de Clermont»
» On demande qu’elle en donne main-levée, pour la transférer
» sur un domaine de montagne, de la valeur de 3o,ooo fr. qui
» n’est grevé d’aucune hypothèque. »
Et le sieur Clmmbaud atteste à la justice, avec un front d ’ai
rain , (/it il n ’a pu coopérer, en manière quelconque, à ce transfert
frauduleux dont lu veuve. P^illevaud a été victime; que tout ce qui
s'est passé à cet égard a été fa it sans son concours, à son insçu
et hors sa présence, et lui est absolument étranger.
�( 8 )
Cependant on a vu que c’est lui qui a etc le premier confident
du projet ;
Que lorsqu’on lui en a fait la confidence, le marnais état de$
affaires de Girard était à son comble.
II d it , dans cet endroit de son ancien M ém oire, qu'il lui fit un
demi-aveu de sa position.
(
E t on voit dans la page 9 de ce premier M ém oire, qu’il en
était si parfaitement instruit, qu’il en fit part à son ami Bouchet*
qui était dans une trompeuse sécurité, et qu’il s’écrie : « Où
>1 n aurait-elle pas conduit le malheureux Bouchcl, si un ami
y> plus sincère n ’avait pas veillé sur lu i? »
^
Ainsi, c’était dans la pleine connaissance que le mauvais état
des affaires de Girard était à son comble, qu’il approuve son
projet de déterminer la veuve Villevaud à transférer, sur le do
maine de la Garandie, l’obligation de 11,000 fr. qu’elle avait sur
la maison Fonghasse, et qu’il dresse scs batteries pour emporter,
la place.
L e prem ier moyen qu’emploie le sieur Cham baud, est la per
suasion ; et pour mieux circonvenir la veuve V illevaud, il ne
craini pas d’assurer par son écrit qu’elle ne court aucun risque
a faire ce qu’on lui propose.
L e sieur Chambaud nous dit que l’écrit qu’il a donné à la
veuve Villevaud était une note à consulter.
Quoique cette qualification soit fort étrange dans la bouche
d’un colonel ou d’un adjudant-général, peu importe de quelle
manière cet écrit soit qualifié, il n’en prouve pas m oins,
Premièrement, que le sieur Chambaud était parfaitement au
courant du projet de faire transférer l’obligation de 1 1,000 fr.
qu’avait la veuve'Villevaud sur la maison Fonghasse, sur le
domaine de la Garandie, appartenant à G irard;
<
Secondement, qu’il était l’agent de Girard pour mener à fin
cette intrigue;
E t cela, malgré la pleine connaissance qu’il avait que le mauvais
état (1rs affaires de Girard était à son comble.
Quoi qu’il en soit, ni cet écrit, ni les sollicitations j o u r n a l i è r e s
�( 9 >
du sieur Chambaud, ne purent déterminer la veuve Villevaud à
se prêter à ce que lui et Girard exigeaient d’elle.
Le s i e u r Chambaud eut alors , recours à d’autres moyens.
On a vu qu’il était créancier de la veuve Villevaud d’une obli
gation de 6,000 f r ., qui était échue depuis long-temps ;
Qu’il était d’autant plus pressé de toucher le remboursement
de scs fonds, q u e , « dans la situation critique où étaient alors
» les affaires publiques, tout capitaliste , et particulièrement tout
» capitaliste militaire, sentait la nécessité de faire rentrer son
» argent ( premier M ém oire, pag. 4- ) » ;
Q u’il était convenu avec son ami Girard, qu’il « consentirait à
» accorder le délai d’un an a la veuve Villevaud, pour le payement
►
> de ce qu’elle lui devait, pourvu que celle-ci consentît de son
» côté à transférer sur le domaine de la Garandie, appartenant
» à lui Girard, l’hypothèque qu’elle avait sur la maison Fonghasse,
» pour une somme d’environ n ,o o o fr. »
Il prit donc le parti de changer de ton avec la veuve Villevaud;
il la menaça des poursuites les plus rigoureuses, et joignant le
fait aux menaces , il lui envoie des huissiers le 22 janvier 1814,
cinq jours avant l’acte du 27 janvier, pour la contraindre au
payement de son obligation: ce commandement est joint aux
pièces.
Mais ce genre de menaces îiyant encore été insuffisant pour
déterminer la veuve Villevaud au sacrifice qu’il exigeait d’e lle ,
il eut recours à un autre moyen qui lui parut devoir être plus
efficace : il la menaça et la fit menacer de faire partir son fils
pour les armées dans les 24 heures.
La veuve Villevaud offre la preuve de ce fait, et elle produira,
pour l’attester, des témoins rccommandables.
Elle pourrait d’ailleurs invoquer sur ce fait, comme sur les
précédens, la notoriété des communes de Royat et de Chamalières.
Tous les habitans de ces communes ont été instruits, dans le
teins, de scs malheurs, des moyens employés pour obtenir d’elle
�C 10 )
les sacrifices qui ont opéré sa ruine, et ils en conservent encore
de profonds souvenirs.
C ’est en vain que le sieur Cliambaud, pour éluder la preuve
de ce fait relatif à la conscription, nous dit que le fils de la
;veuve Villevaud en était exempt comme fils de veuve ;
Q u’il était d’ailleurs peu propre au service militaire.
Comme si de pareils moyens suffisaient pour bannir la terreur
du cœur d’une mère qui aurait sacrifié toute sa fortune pour
empêcher le départ de son fils.
Q u’on se rappelle , comme le dit le sieur Cliambaud dans
son prem ier Mémoire , la situation critique où étaient alors les
affaires publiques.
Qu’on se rappelle toute la France orientale couverte des ar
mées de l’Europe coalisée.
Q u’on se rappelle la levée des gardes-d’honneur composée de
tous les jeunes gens des familles aisées dont un grand nombre
étaient fils, et même fils uniques de veuves, et qui tous avaient
payé leur tribut à la conscription, ou avaient des remplaçans
aux armées.
Alors le besoin était tel que tout conscrit était soldat, et que
celui qui nTétait pas bon pour être encadré dans la lign e, était
utilement employé dans les charrois.
Le sieur Chambaud invoque encore, sur ce fait, son défaut
d’influence dans la conscription militaire.
I c i , la veuve Villevauil est obligé de s’arrêter.
On a dit quelque part : Malheur à celui tpii soulèverait le voile
de la société: on peut dire avec bien plus de vérité !-Malheur à
celui qui soulèverait le voila de la conscription !
La veuve Villevaud croit être forcée de se restreindre à ce
qui lui est personnel; peulrctre lui ierait-on un reproche d’aller
- plus loin: c’est aux témoins qui ont plus de latitude, si la C our
daigne les interroger et les entendre, à nous apprendre si le
sieur Cham baud, officier supérieur et maire des c o m m u n e s de
Chamalières et R oyat, était sans influence, et quelle ¿tait sa
manière d’en user dans ces matières.
�'( II )’
Quoi qu’il en so it, la veuve Villevaud fut tellement effrayée
'de cette dernière m enace, qu elle n hésita plus a faire le sacrifice
q u ’on exigeait d’elle.
Elle était déjà décidée à se prêter à t o u t , lorsqu’il lui
p a r v in t un écrit qu’on lui dit être signé du sieur Chambaud ,
qui contenait la garantie du transfert de son hypothèque sur le
domaine de la Garandie.
Elle a appris depuis que ce dernier écrit était faux ; elle ne
se rappelle pas s’il lui a été remis directement par le sieur
Chambaud ou par un tiers; mais ne sachant ni lire ni écrire, elle
jnc pouvait avoir aucun doute sur sa sincérité.
Le rendez-vous fut donné chez Chevalier, notaire, dans la
matinée du 27 janvier.
La veuve Villevaud cro ît, sans toutefois en avoir la certitude,
qu’elle y fut conduite par le sieur Chambaud lui-meme.
Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elle s’y trouva avec les sieurs
Chambaud et Girard, et que là fut rédigé, en présence du sieur
Chambaud, l’acte tant sollicité et tant désiré par l’un et par l’autre.
On y expose que, par acte du 27 janvier 1808, le sieur Girard
vend it à la veuve Villevaud, et à Léger Bourgougnon, son gendre,ce dernier pour un dixième seulem ent, un pré situé dans les
«lependances de R o yat, moyennant 11,177 ^r>
c- > avec con
vention que le sieur Girard serait obligé de fournir une hypo-fhèque spéciale pour sûreté de ladite vente;
Que pour se conformer à cette clause, en présence et du
consentement de ladite Aubignat et dudit Bourgougnon, le sieur
Girard avait prêté au sieur Fonghasse, et à la dame D ésoches,
sa mère, la somme de 10,862 fr. So c., suivant obligation reçue par
ledit Chevalier, notaire, le i 3 mai 1809, avec déclaration, dans
ladite obligation, que les fonds prêtés provenaient du prix de
ladite vente, et que le remboursement ne pourrait en être
effectué qu’en présence desdils Aubignat et Bourgougnon, pour,
veiller à l'emploi de cette somme;
Q u ’aujourd’h u i, ladite Aubignat étant seule intéressée dans
cette affaire, « e t ne voulant aucunem ent gêner la libération
�'( 12 )
» dudif sieur Fonghasse, attendu que ledit sieur Girard offrait
» une garantie suffisante pour le prix de la vente ci-dessus
i» datée,, par hypothèque dont il sera ci-après parlé..
» Elle consentait, comme elle consent par ces présentes, que
» le sieur Fonghasse se libère, hors sa présence, de ladite somme
» de 10,862 fr. 5o c. envers ledit. Girard , ainsi qu’il avisera,
» et sans qu’il soit besoin de veiller à l’emploi d’icelle.»
E n conséquence, est-il ajouté, du consentement présentement
donné par ladite Aubignat , et pour lui donner une garantie pluj*
que suffisante du prix de la vente dudit jour 21 juin , le sieur
Girard a spécialement affecté et hypothèque un corps de domaine,,
situé au lieu de la Garandic, commune de Saint-Barthclemid’A ydat, consistant en bâtim ens, prés , terres et pacages , sur
lequel ladite Aubignat pourra prendre de suite inscription
conformément audit acte de vente précité.
- L e sacrifice consom m é, la veuve Viilevaud se relire.
Mais il n’en est pas de même des sieurs Girard et Cbambaud~>
• Us entrent, avec Chevalier dans une chambre qui était a côté
de son étude; e t, après une conférence secrète, Chevalier sort
et dit à son maître clerc : V ous ne ferez l'inscription de la veuve
.Vdlevaud que lors ijn on vous l onlom 1eru,
• E t en effet, cette inscription n’a clé faite par chevalier q u e
plus de trois mois après l’acte du 27 janvier.
' -Ce fait était accablant pour le sieur Chambaud, lui qui n’avaii
cessé de dire, d’écrire et d’imprimer, qu'il n'avait coopéré d'aucune
manière à tout ce qui s'était passé entre Gnard et la veuve T' dlevaud;
'!que tout s’était fa it à son insçu, sans son concours et hars sa
'présence.
Il a cherché quels pouvaient être les témoins qui s’élaieni
'trouvés chez Chevalier, notaire, le 27 janvier i 8 i 4 ; il a jeté les^
'ycux'sur M. Pineau, son maître clerc, et actuellement notaire,,
et il lui a fait écrire pour savoir s’il avait connaissance de ce
'qui s’était passé chez Chevalier, notaire, lors de la rédaction de
l*acte du 27 janvier 1814>-
�M. Pineau a répondu qu’il ne se rappelait pas les faits sur
■lesquels on lui demandait des eclaiicissemens.
Celle lettre est transcrite dans le Mémoire du sieur Chambaud,
pag. 78, et il croit pouvoir en conclure que ces faits sont faux
el controuvés.
M. Pineau a agi en homme sage, qui ne devait pas s’expliquer
s u r des faits aussi graves, sans nécessité; on doit louer sa prudence
et sa discrétion, mais il n’en faut pas conclure qu’il aura aussi
peu de mémoire s’il est interroge par la justice el sur la foi du
serinent.
Au surplus, qui a dit au sieur Chambaud qu’il ne peut pas y avoir
d’autres témoins de ces faits que M. Pineau, et qu’il ne peut
pas se trouver d’autres genres de preuves, tels que des aveux
des uns ou des autres des artisans de cette manœuvre?
Mais tout n’était pas fini par cet acte de transfert, si 1 obligation
Fonghasse restait dans les mains de Girard ; comme le mauvais
état de ses affaires était à son combla, elle devenait la proie de
ses créanciers ; et le sieur Chambaud n’avait pas entendu tra
vailler pour la masse, mais bien pour lu i, pour scs parens et
scs amis.
Il fallait donc promptement sortir des mains de Girard cette
obligation Fonghasse.
Le sieur Chambaud, parent de l’intim é, était créancier comme
lui de Girard; il fallait sauver sa créance, et le tirer de la faillite
ou de la déconfiture qui était parfaitement connue de l’intim é,
et qui à chaque instant pouvait devenir publique.
En conséquence, il se fait céder à lui et à son .parent Chambaud
l’obligation Fonghasse, débarrassée des entraves de la veuve
Villevaud. , ■
L ’acte de transfert était du 27 janvier i 8 i 4*
L ’acte de cession est daté du 5 février suivant.
Mais, quand on voit que ‘c’est un acte passé devant le même
Chevalier, notaire, si peu délicat dans scs fonctions, et qu’il
était de la plus grande urgence de transférer, dans le moment
même en mains tierces, cette obligation Fonghasse, pour éviter
�?
'p
( 14 )
que l’acte fait avec la veuve V illevaud, ne fût connu par les
autres créanciers G irard , et que cette obligation ne lut saisie
par eux, on peut dire, sans être taxé d’incrédulité, que ce second
acte fut fait le même jour et dans le même instant que celui fait
avec la veuve Villevaud, parce que le second acte était la con
séquence immédiate du premier, et qu’il n’était que le corrollaire et le complément de ^opération.
A u surplus, rien n’était plus facile que de faire faire celte
cession le même jour à lui et au sieur Chainbaud, son parent,
attendu que l’un et l’autre n’avaient rien à débourser pour celte
cession ; car on lit dans cet acte que « la présente cession e§t
» faite moyennant pareille somme de 10,862 fr. 5o c., que ledit
» sieur Girard déclare avoir ci-devant reçue desdits sieurs Chain» b au d , dont quittance. »
Comment Girard avait-il ci-devant reçu des sieurs Chambaud,
cessionnaires, les 10,862 fr. 5o cent., montant de l’obligation
Fonghasse, qu’il leur cède? ce ne peut-être que parce qu’ils
étaient l’un et l’autre ses créanciers de cette somme.
Ils faisaient, à la vérité, un acte prohibé par les lo is, ^en ce
que le sieur Chambaud sachant que le mauvais état des affaires
de Girard était, y, son co m b le , il ne lui était pas permis de se
payer ni de faire payer ses parens et ses amis an préjudice des
autres créanciers ; cc p’était qu’une peccadille aux yeux de l’in
térêt personnel.
Tandis que si l ’on veut expliquer autrement cette quittance,
si le sieur Chambaud veut prétendre, comme il n’a ccssé de le
dire dans ses M ém oires, qu’il ne lui était rien dû par Girard
avant cet acte de cession, il est impossible de concilier cette
assertion avec la quittance qui constate qu’il n’a pas donné une
obole à Girard pour le prix de cette cession, et qu’il en avait
payé le prix antérieurement.
O ï» convient que la mention de la quittance est sincère pour
le sieur Chambaud, cessionnaire de l’intimé : pourquoi cette
mention serait-elle fausse pour lui ?
�<
)
L e sieur Cliambaud fait sur cette cession une version , q u i,
prenant pour une vei î t e , ne fait qn ajouter a ses torts.
Si^on/cn croit, dès que Girard se vit débarrassé des entraves
que la veuve Villcvaud était en droit de mettre à la libération
du sieur Fonghasse, il colporta son obligation chez tous les
capitalistes de Clermont pour se faire des fonds, et il ne put y
réussir.
Le sieur Cliambaud voulut bien se prêter à en accepter la
cession, de concert avec le sieur Cliambaud, son parent, qui
ne l’est plus aujourd’hui qu’au huitième degré ( 2e M éin ., p. 24.)
Ce qu’il en fit, ce fut pour obliger son protégé Bouchct, dont
toute la fortune était compromise pour avoir cautionné Girard.
E t c’est à cette occasion qu’il s’écrie : « Trompeuse sécurité! où
» n'aurait-elle pas conduit le malheureux Bouchct, si un ami
» plus sincère n'avait pas veillé sur lui? »
Cet arni plus sincère, c’était le sieur Cliambaud, qui prétend
n’avoir agi dans tout cela que dans l’intérêt du sieur B ouchct,
dont il voulait éviter la ruine.
Adoptons cette version: le sieur Cliambaud en sera-t-il plus
innocent aux yeux de la loi et de l’équité?
É tait-il plus juste de sacrifier la veuve V illcvau d, et de lui
faire perdre 10,862 f. 5o c. qui lui étaient assurés sur la maison
Fonghasse, pour les faire gagner à son parent Cliambaud, et
à son protégé, son secretaire, Bouchct?
Son action serait bien moins odieuse et bien plus excusable, s’il
avouait franchement qu'il a fait tout cela pour lui-m êm e et
dans ses intérêts, parce que c’est un sentiment qui est dans
la nature, Proxirnus sum mihi.
Mais, abuser de la faiblesse et de l’ignorance d’une malheureuse
paysanne, sans défenses, pour la dépouiller de toute sa fortune,
saus autre intérêt que de la faire passer à des étrangers, c’est
aggraver ses torts, et rendre la fraude plus odieuse.
Au surplus, le sieur Chambaud n’a pas travaillé en vain en se
faisant céder par Girard l’obligation Fonghasse, débarrassée des
entraves de la veuve Yillevaud; il n’a pas perdu un moment pour
�( i6 )
en faire le recouvrement ; il a poursuivi le sieur Eonghasse à
toule outrance , il lui a refusé impitoyablement jusqu’au moindre
délai; il a de suite mis sa maison, rue de la Treille, îfen Expro
priation forcée; elle a été vendue: il en a poursuivi l ’ordre, il
a été .colloque en première ligne; les bordereaux ont été délivrés,'
et il a touché, ainsi que le sieur Chambaud, son parent et son
concessionnaire, le montant de l’obligation en principaux intérêts
et frais.
Tandis que la veuve Villevaud a été recherchée par madame
Dalbial pour son acquisition du pré du Jîrciiil, e t, elle a été
obligée de la payer une seconde lois.
E t qu’à l ’égard du transfert de son hypothèque sur le domaine
de la Garandie ; outre q u e , par une manœuvre crim inelle, son
inscription n ’a été formée au bureau des hypothèques que plus
de trois mois après l’acte du 27 janvier 1814; ce fameux do
maine que le siepr Chambaud assurait avec tant de confiance,
par son écrit rapporté au procès , valoir 3o,ooo fr.', et n'être
grevé d ’aucune hypothèque , n’a été vendu que g ,000 fr., et se
trouve grevé d’un grandnombrc d’hypothèques légales, judiciaires,
et conventionnelles.
C ’est dans cet état de choses que faiTairc 5C présente à la Cour.
La veuve Villevaud demande à faire preuve des faits qu’elle
a articulé tant par litres que par témoins.
Le sieur Chambaud dit n’avoir coopéré en manière quelconque
à*l’acte de transfert du 27 janvier 1814, qu’il prétend lui être
absolument étranger, et avoir été fait à son. in sçu , sans son con
cours et hors sa présence.
La veuve Villevaud rapporte un écrit du sieur Chambaud, qui
contient la preuve contraire.
E lle rapporte le premier Mémoire du sieur Chambaud, signifié
au mois d’août 1820, qui contient les aveux les plus précieux
sur toute sa conduite dans cette affaire, qui prouvent qu’il était
parfaitement instruit que le mauvais état des affaires de Girard
était il son comble , lorsqu’il lui a confié son projet de faire
�w*
*•
( 17 )
renoncer la veuve Villevaud à son hypothèque sur ]a maison
Fonghasse;
Qiii prouve que lui, sieur Cliambaud, premier confident de ce
projet, est devenu l’agent de toute cette intrigue, et que c’est
par son fait qu’ elle a été mise à fin, au préjudice de la veuve
.Villevaud dont elle a opéré la ruine.
Com m ent, dès lo rs , peut-on refuser à la veuve Villevaud la
preuve testimoniale qu’elle sollicite avec tant d’instances depuis
le commencement de cette contestation?
Si
on consulte le texte des lois, nous lisons dans l’art. i 348
du Code civil, que les règles, établies sur l’inadmissibilité de la
preuve testimoniale, reçoivent exception lorstjft’il s’agit d’olili-* '
gâtions qui haïssent Vie contrats, et* de*délits itt iptasi délits. ■ .
E f”dan$ Faïf. T S .^ -q u e ' Pj
^ ct'ptm m esl-adm isc lorsque.
l'acte ¿si attjfffué pouf- cMï£k d e'd o l'eï de'frandéï
O n retrouve les mêmciT’ prinerpes'•'datis-Hous J e s .auteurs
\^
ont traité ja.*nalieret ‘
/
v
JVlaÿs ne. s’agît-il que des’ faits Oitl;intrires,»éti-aftgers au dol et,à
la fraijde? Ù^sfifliV qù'xT existe des pr^uY.evécriteSjdc ces faits v
ÿu" Kesoiri*, pôhfrai-Cnt «opérer J3 .co ^ ic^ io ^ in iais qu’ôn ’ ,
V s
♦vpiii bieii ne* coniiaétCt^iCi qn U CiW} nie ^est com 1nci 1ce 111ens de *’ *'
__ v V .»y_*r '
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T------1- ' ---- L ’a^t“^ ^U-4Slrft ao.*le J ’ordonnançe^dc, 1 GG ^adin& w ln^cuve*
testimoniale dans lés cas ou elle est jffoTiibïTtr,* loislju d—
y
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existe un commencement de preuve par
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G’est donc uiu point de legislà\feîf*â t a b r i de to o te-céh traV £
diction*.* *
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' ' ’O n cr3i f dtîvbii* Faissoi» au* d4|jpjn5Cll?^Ç.U:t»ve,^Xc. -VillcYaucl-,
^
le soin de donner à l’audience tout le développement dont ces
principes sont susceptibles.
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«»v**» A
�( 18 )
La veuve Villevaud terminera sa discussion
qu’elle a faite en commençant.
Elle articule contre le sieur Chambaud des
de son intérêt que ces faits soient éclaircis:
rien à se reprocher, est fort de sa conscience
lumière.
par une réflexion
faits graves ; il est
l’homme qui n’a
et ne fuit pas la
Me BOIROT, ancien Jurisconsulte.
Me VEYSSET, Avoué
/*> x Cutt~. Ovxa. Cl*, j CvJk
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4 * c>yut4 a iovUr- LUAJAfML*
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A. CLERMONT - FERRA N D , DE L’IMPRIMERIE DE PELLISSON, IMPRIMEUR.,
■ ^
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C4 mm<mAuiw <a»W*. ii» ^ iù 4 u».
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S A IN T -G E N E S E T S A IN T -E S P R IT
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubignat, Jeanne. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Veysset
Subject
The topic of the resource
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
faux
experts
arbitrages
notables
domaines agricoles
opinion publique
chantage
infirmes
banqueroute
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse pour Jeanne Aubignat, Veuve Villevaud, Appelante ; contre Le Sieur Chambaud, Adjudant Commandant, Officier de la Légion-d'Honneur, ci-devant Maire de Chamalières et Royat, Intimé.
Annotations manuscrites. Arrêt de la 1ére chambre, 1822, arrêt complet.
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pellisson (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2616
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2615
BCU_Factums_G2614
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53531/BCU_Factums_G2616.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Lagarandie (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
arbitrages
banqueroute
biens nationaux
chantage
conscription
Créances
doctrine
dol
domaines agricoles
experts
Faux
fraudes
hypothèques
illettrisme
infirmes
magistrats municipaux
notables
notaires
opinion publique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53530/BCU_Factums_G2615.pdf
0543eba27d03b7a008122f3dd9b942ba
PDF Text
Text
MÉMOIRE
COUR ROYALE
DE RIOM.
E N
R E P O N S E ,
I Te C H A M B R E .
P O U R le sieur
CHAMBAUD ,
C h e v a l ie r ,
Colonel
d ’E t a t-M a jo r , en retraite, Officier de l ’Ordre ro ya l
de la Légion d ’H onneur,
C le rm o n t , intim é ;
A U B I G N A T veu ve de
P r o p r ié ta ir e R
Pierre
V i l l e v aud,
o y a t , appe lant e.
,
, ,
Q ucm sua culpa prem e t dcccptus omitte tucri.
A t penitas notum si tentent crimina
Tuterisquc tuo fidentem prœsidio.
serves
II o r a t . , ep ist. 18 .
n
U auteur célèbre a dit « q u 'il n ’y a pas de plate
« méchanceté, pas d ’ horreurs, pas de conte a b s u r d e ,
« qu 0n ne fasse adopter aux oisifs d ’ une grande ville
e n
$*+{% % %
habitant de la ville de /mluuum* oib*±
CO N TR E
Jeanne
^
s’ y prenant b ie n , et q u ’ il a vu les plus honnnêtes
�( * )
« gens près d ’être accablés sous le poids de la calomnie. »
C ett e cause est un exemple d ’une vérité aussi affli
geante pour la morale que pour la société.
L e sieur C h a m b a u d , officier' su péri eur, montrant
sur sa poitrine la glorieuse distinction, récompense de
ses services, devenu père de f am ille , voué à l ’éduca
tion de ses enfans, entouré de l ’estimede ses camarades,'
de la confiance et de l ’amitié de tous ceux qui le con
naissent , a vu troubler les douceurs de sa retraite par
l i n e accusation de d o l et de fr a u d e aussi, fausse que
hardie.
U n e bouchère, q ui fréquente depuis trente ans la
halle de C l e r m o n t ; une femme d ’un esprit souple et
défiant, a c c o u t u m é e \ u x procès et aux ruses qui peu
vent en assurer le succès, a eu l ’audace et l ’adresse
d ’ourdir contre le sieur C h a m b a u d la trame la plus
déliée et la plus odieuse.
L a veuve V i ll ev am l a v a i t é p r o u v é u n e perte c o n s i d é
rab le, q ui pouvait sensiblement d i m i n u e r sa f o r t u n e .
Son m a l h e u r , q u o iq u ’elle ne pu t l'imputer q u ’à ellemème ou à la prévarication d ’ un sieur C h e v a lie r, no
taire à C l e r m o n t , q u i avait toute sa confiance, la
rendait
intéressante.
C o m m e n t devait-elle détruire cet intérêt q u ’inspire
toujours celui q ui n ’a d ’autre reproche à se faire, que
de n ’avoir pas porté assez de vigilance à la conservation
de ses droits ? E l l e se choisit u n e victime : c ’esL le
sieur C h a m b a u d , absolument étranger aux actes q u ’ e l l e
a contvuetés, q u i doit l ’indemniser du tort q u e l l e a
�¿prouvé; il le d o i t , parce q u ’il a ¿ té l ’artisan d u dol
et de la fraude, et q u ’ il eu a p ro filé.
Si ou en croit la veuve V i l l e v a u d , le sieur C h a m b a u d
a a b u s é des choses les plus sacrées pour l ’induire en
erreur,
la tromper, et compromettre sa fortune.
E lle avait confiance au sieur C h a m b a u d . C ’est l u i
q u i l ’a sollicitée de consentir à l ’acte cj_ui devait lu i
être si funeste.
E lle était débitrice du sieur C h a m b a u d : ce dernier
la menace de poursuites rigoureuses pour contraindre
sa volonté.
E l l e était mère d ’ un fils soumis à la conscription ;
le sieur C h a m b a u d , ancien m ilitaire, et maire de sa
commune, lui fait craindre l ’effet de sa double in
fluence. L e fils de la veuve partira, si l ’engagement*
n ’est pas contracté.
L l l e îcsiste cncoie ; le sieur C h a m b a u d lu i remet
un b illet cle garantie ; alors elle cède, et se rend chez
le notaire.
L e sieur C h a m b a u d est présent à l 'a c te } c ’est lui
qui le dirige, qui empêche de prendre la seule pré
caution qui pourrait au moins sauver quelques débris
de lu fortune de la veuve Vi ll ev aud.
Pourquoi tant d ’artifice et de violence de la part du.
siem C h a m b a u d ? ........... Il était créancier de G i r a r d ,
a\eo lequel la veuve Vi ll ev aud contract ait; et connue
le mauvais état des affaires de G ir ard était co nnu du
sieur C h a m b a u d , ce dernier avait intérêt à priver la
v e u v e Villevaud de son gage, à le re p la c e r entre 1m
�mains tle son débiteur , pour pouvoir ensuite le prendre
en paiement de sa créance : c’est ce q u ’a effectivement
fait le sieur C h a m b a u d , q u i , le même j o u r , ' a acquis
de Girard l ’obligation qui servait de gage à la veuve
V i ll e v a u d , et que celle-ci venait d ’abandonner.
Ces plaintes graves, ces faits si habilement liés, qui
trouvaient leur explication dans le b illet de garantie
clonnd p a r le sieur C ham baud à la veu ve V ille v a u d
n ’étaient pas tous de l ’invention de cette dernière j
elle avait été p u i s s a m m e n t a i d é e p a r u n c o n s e i l intim e,
dont l ’opinion a ensuite fait justice, et qui a étc o b lig é
de quitter la ville de C le r m o n t p o u r aller porter ailleurs
sa fatale industrie.
Mais ces plaintes et ces faits furent soumis à l ’examen
‘ de jurisconsultes graves, trop amis de leur profession,
trop esclaves des devoirs q u ’elle impose, pour ne pas
employer t o u s leurs efforts à dévoiler le dol et la fraude.
L a VCUVe V i l l e v a u d p r o d u i s a i t l e bille t de garantie /
elle reçut et du t recevoir l e c o n s e i l d ’ e n f a i r e u s a g e ,
et de l ’entourer de tous les faits qui pouvaient donner
le plus de force et d ’effet à cette pièce importante.
Après dépôt préalable de la pièce chez un notaire,
le sieur C h a m b a u d fut cité en conciliation. Sa seule
réponse
récritu re
fut
du
do
soutenir fa u sses
la
signature
prétendu billet de garantie,
et
et d ’en
demander la représentation j mais son adversaire, qui
s’ attendait à cette dénégation, et qui avait sa réponse
prête, affecta-t-elle de regarder la fausseté de ce billet
comme un moyen de fraude de p l u s , employé par Ie
�( 5 )
sieur C h a m b a u d ; e t , dénaturant sa propre cit ation,
où elle avait
Chambaud 3
écrit
q u ’elle tenait ce b illet d u sieur
elle d i t , axi bure au de conciliation, que
ce dernier le lu i avait f a i t remettre.
Cette découverte était un grand pas vers la vérité :
aussi la veuve V ill ev a u d parut-elle reculer devant son
propre o u v r a g e ! ........ H u it mois s’étaient écoulés; un
remords salutaire la retenait encore, lorsque le sieur
C h am b a u d , qui avait intérêt à faire reconnaître la
fausseté de cette pièce et à la détru ire , traduisit luimême son adversaire devant les tribunaux.
L a veuve V i ll e v a u d retrouva alors sa hardiesse 5 le
conseil intime lui dit : « Vous ne savez ni lire ni
« écrire, que peut-on vous faire? Ne me nommez
« pas, moi qui suis l ’auteur du b i l l e t ,
« votre demande ». L a
et formez
veuve V i ll e v a u d suivit
ce
conseil.
Qu oi q u ’il en soit, le billet reconnu faux , la défense
du sieur C h a m b a u d était facile :
i° L a veuve Vi ll ev aud demandait une somme de
10,862 francs; mais où était son titre? E lle n ’avait
point été placée dans V im possibilité d ’en a voir; elle
a v a it , au contraire, senti la nécessité d ’en obtenir
un : elle l’avait elle-même produit........... Mais cette
pn:ce était j'econnue f a u s s e , et 11e pouvait rester au
procès, que pour attester la perversité de la veuve
Vi llevaud j cl faire rejeter la preuve des faits qu/elle
osait articuler;
2° L ’acte passé avec Girard n ’ avait rien fait perdre
�à la veuve V i l l e v a u d , q u i n ’était saisie, n i p a r une
acceptation fo r m e lle
n i p a r une inscription 3 du
gage q u ’elle soutient lui avoir été enlevé; de manière
q u ’elle devait se trouver heureuse d ’obtenir une ga
rantie q u ’elle n'avait pas;
3° Le
veuve
sieur
C h a m b a u d , loin de v o u lo ir nuire à l a
V i l l e v a u d , d e v a it, au contraire, 'v e ille r a la
conservation de ses intérêts. Il était créancier de cette
fe m m e , d ’une somme de 6000 fr; il n'avait d ’autre
hypothèque que les immeubles dont l a v e u v e V i l l e v a u d
pouvait craindre l ’éviction. Si sa garantie s’évanouis
sait, l ’éviction pouvait préjudiciel’ au sieur C h am b a u d ,
et lui faire perdre sa créance;
4 ° Po u r q u ’il y ait (loi et f r a u d e il f a u t , d’ un
côté
, q u ’il y ait eu des manœuvres p o u r induire en
erreur, ou détourner d ’ une chose u tile , e t , d e l ’ a u t r e ,
que l ’ o n a i t été dans l ’im p ossibilité de s ’en garantir.
•— Q l l a fait le s i e u r C h a m b a u d ? I l a donné note a
consulter, ou il in diquait la v a le u r du bien q u e la
veuve V ill ev au d devait recevoir en garantie, et disait
q u i l n ’y avait p a s d 'h y p o th è q u e s.— Qu e devait faire
la v e u v e Vill ev au d? Prendre des renseignemens, s’assurer
de la vérité de ces faits : c’est précisément le parti
q u ’on
a pris avant de contracter avec G i r a r d ........
Ces moyens, réunis à la fausseté du billet de ga
ranti e, détruisaient le système de la veuve V i l l e v a u d ,
et
démasquaient
complètement tout l ’odieux de sa
Conduite.
Mais pour ne rien laisser à désirer, le sieur Chain-
�baud,
répondant
aux faits
articulés par la veuve
V i l l e v a u d , en démontrait la fa uss etc ,
et prouvait
notamment,
i° Que le fils de la veuve V ill ev a u d avait été réformé
avant
l ’acte q u i fait l ’objet du procès ;
2° Q u ’il n ’était p oin t créa n cier de G i r a r d ; q u ’il
n ’avait connu l ’em b a n a s de ses affaires, que posté
rieurement à l ’acte dont il s’a git ; que s i, plus t a r d ,
il était devenu acquéreur de moitié de l ’obligation
abandonnée par la
veuve
V ill ev au d , c ’était
obliger un homme auquel il devait toute sa
pour
protection,
et empêcher q u ’il ne fût victime des cautionnemens
q u ’il avait prêtés à G ir a r d ;
3° Enfin le sieur C h a m b a u d démontrait que le
retard mis à l ’inscription de la veuve V i ll e v a u d ne.
pouvait pas lui être im p u t é ; que c’était à cette femme
à surveiller ses in t é rê t s,
ou au moins au notaire
C h ev al ier, q u i avait toute sa confiance.
Ces moyens furent accueillis , par jugement du
tr ibun al civil de C le r m o n t , qui rejette la demande do
la veuve Vi ll ev aud.
L e sieur C h a m b a u d jouissait d ’ un moment de repos,
lorsque les intrigues de son adversaire recommen
cèrent. E l l e interjette
appel du jugement.
Bientôt
elle publie q u ’elle a découvert de nouveaux laits; e l l o
en to u re , elle h a r c e l l e les amis du sieur C h a m b a u d ;
elle les fait t r e m b l e r pour sa réputation ; elle exigo
que ce dernier ach èi e, par un sacrifice, un Mémoire
dont
la publication
doit
le
couvrir
de* honte et
�'( 8 )
d ’opprobre........ L e sieur C h a m b a u d n ’ hésite pas : un
coup-d’œil jeté sur sa poitrine devait lui enseigner
son devoir ; il répond : L 'h on n eu r me d éfen d de
transiger.
En fin le Mémoire paraît. Dès les premières lignes,
le sieur C h am b a u d voit son nom uni à ceux de C h e
v a l ie r ,
notaire à C le rm o n t ;
de G i r a r d , notaire à
C ham alièr e, tous deux en banqueroute frauduleuse;
de Chevalier sur-lout dont le nom a été flétri par un
arrêt de la C o u r d ’assises de ce département. L e sieur
C h a m b a u d y est désigné comme l ’auteur tm l ’instru
ment d ’une fraude pratiquée entre lui et ses deux
complices, et le se u l que la ju s tic e puisse atteindre.
Il continue sa lecture; e t , si les faits et les moyens
peuve nt, par leur inexactitude et leur faiblesse, lui
inspirer de la sécurité sur l'événement du procès, il
n ’est pas moins indigné des outrages dont il est l ’objet.
Mais la v e u v e V i l l e v a u d n ’ é t a i t p o i n t e n c o r e satis
faite; le Mémoire pouvait n e pas a v o i r a s s e z d e pu bli
cité. Elle insère dans un journal un article ayant pour
objet de faire connaître scs plaintes, et de répandre
ses diffamations ( i ) .
C ’est ainsi que le sieur C h am b a u d a pu observer
les effets de la calomnie; craintive dans son origine,
elle n ’osait l ’attaquer q u ’avec précaution, et ne semait
q u ’en courant le trait empoisonné. Bientôt plus hardie,
elle veut porter des coups plus surs, marche à décou(i) Aiui
la Charte, 22 janvier 1822 , n° 7.
�v e r t , et réunit toutes ses ressources pour attirer sur
sa victime un cri général de haine et de proscription.
Les a r t i f i c e s de la veuve V ille vaud ont été tels ,
q u ’elle est parvenue à attacher à sa cause le nom d ’ un
juri sconsulte également recommandable par son hon
nêteté et son amour pour la justice : on ne se per
mettra point de blâmer sa conduite en cette occasion;
mais, quelque force q u ’il apporte dans cette cause ,
comme on craint beaucoup plus son autorité que ses
raisons, il sera le premier à désirer que l ’on en écarte
sou nom, pour n ’en interroger que
les faits et les
moyens.
FAITS.
L
e
sieur G ir a r d, ancien notaire à Chamalière, avait
acquis de M. D a l b ia t, ancien procureur du Roi
ù
C le r m o n t , un pré appelé le P r é clu B r e u ils situé à
Royat, moyennant la somme de 22,000 francs, stipulée
payable dans douze ans. '
L e 21 juillet 1808, par acte passé devant C hevalier,
notaire à C le rm o n t, le sieur G irard vendit à Jeanne
A u b i g n a t , veuve V i l l e v a u d , et à Léger Bourgoignon,
son gendre, partie du pré du Breuil. Jeanne Aubignat
entrait pour neuf dixièmes dans cette acquisition :
Bourgoignon n ’y figurait que pour l ’autre dixième.
Le
prix de c e t t e v e n t e
fut fixé à la somme de
U , 3 if) f r a n c s , sur laquelle 7819 francs furent payés
com pt ant, et les 3 , 5 <>o f r a n c s restant furent stipulés
payables au 11 novembre suivant; mais il fut convenu
?
�que le vendeur ne pourrait recevoir cette dernière
somme, q u ’en fournissant hypothèque pour la totalité,
ou en donnant caution.
Cet te clause était
importante;
et les acquéreurs
devaient rigoureusement exiger son exécution, puisque
de son accomplissement seul dépendait leur securité,
ayant tout à-la-fois à craindre la recherche hypo th é
caire et par privilège du sieur D a l b i a t , encore créan
cier du p r i x , et l ’exercice de l ’hypothèque légale de la
dame D a l b i a t , dont le prix du Breuil était encore
grevé.
,
Cependant la veuve V ill ev au d et son gendre ne sen
tirent pas assez le danger q ui les menaçait, ou au
moins ils ne px’irent aucune des précautions que leur
situation exigeait.
E n ef f e t,
i 3 mai 1809, par acte passé devant C h ev a lier,
notaire a C l e r m o n t , lu s i e u r F on g h ca sse, tant e n son
nom que comme fondé de pouvoirs d e sa m è r e , c o n
Le
sentit au sieur G irard une obligation de la somme de
10,86a fr. 5 o c . , payable dans cinq ans, avec intérêt
à 5 pour 100.
Il hypo th éq ua spécialement au paiement de cette
obligation une maison située à C le rm o n t , rue de la
Treille;
et l ’obligation termine par une stipulation
ainsi conçue :
« G ira rd déclare que la somme principale provient
« de Jeanne A u b ig n a t, veuve V ille v a u d , et de L ég er
« Bourgoiÿîion j son gendre, et fait partie du prix de
�( 11 )
« la vente de 1808. A u moyen de cette déclaration ,
« Fonzheasse sera tenu, comme il s’y oblige, de ne
« faire le remboursement de ladite somme ,
q u ’en
« présence de la veuve V ille v a u d et de B ourgoignon 3
« pour veiller à l'emploi d ’icelle, conformément au
« susdit contrat de vente. »
Ni
la veuve
Vill ev a ud ,
i*
ni
Léger Bourgoignon
n ’étaient parties, ni présens à cet acte; cependant il
faut convenir que Girard y avait fait une stipulation
q u i pouvait leur être u t il e , s’ils déclaraient vouloir
en profiter; mais, ju sq u’à cette déclaration, la stipu
lation pouvait être révoquée; Girard pouvait l ’anéantir,
et céder sa créance à tout autre, hors la présence et au
détriment de la veuve Villevaud,
L a veuve Villevaud n ’avait point accepté la stipula
tion faite à son profit; elle n ’avait point pris d ’inscrip
tion , mesure qui lu i était d ’ailleurs interdite avant la
signification du transport faite au -débiteur. L e sieur
Girard seul a v a it , le 16 ju in
1809, inscrit sur
la
maison donnée en hypothèque par Fongheasse, lorsque,
le 1-2 mars 1809, la veuve V i l l e v a u d donne quittance
à G irard de la somme de 3 5 oo lrancs, à elle restée
due sur la vente du 21 juillet 1808. C e l te quittance
ne contient pas d’acceptation de la stipulation insérée
en l ’obligation du
i3 mai
1809, mais on y trouve
une énonciation ainsi c o n c i l e : « (inc la somme (ju il« ta n cée, ainsi que c e lle formant le surplus du p r ix
« de la v e n t e , ont été em p lo y ée s, p a r G ira rd
« désir du
même acte de vente ,
au
par hypot hèque
�« spéciale , suivant obligation, du
i 3 mai 1809. »
Il est évident que cette énonciation ne contenait
point accoptation de la st ip ulat ion, équivalant à trans
p o r t , insérée dans l ’acte du i 3 inai 18095 cette sti
pulation ne liait donc point G ir ard; m ais, lors même
q u ’elle aurait produit un engagement propre à obliger
ce dernier, elle était encore inutile dans les intérêts
de la veuve V i l l e v a u d , q ui ne pouvait être saisie, îi
l ’égard du sieur Fongheasse, d é b i t e u r , que par la
notification du transport, et que jus que -là, ce tiers
avait le droit de payer le sieur G ir a r d , et était vala
blement libéré.
Ainsi la veuve V i l l e v a u d ,
n ’ayant ni accepté ni
notifié le transport contenu en l ’acte du i 3 mai 1809,
n ’ayant pris ni pu prendre aucune inscription sur la
maison Fongheasse,
n ’avait aucune garantie pour le
prix de la v e n t e du 21 juillet 1808.
Jusque-lîl
le sieur
Cihamluiud
était ahsolumen t
étranger aux affaires et aux intérêts de la veuve V i l l e
v a u d ; il 11e la connaissait même que par un procès
q u ’elle lui avait suscité en 1806, à l ’occasion du dé
frichement d ’ un ch em in ; contestation qui fut soumise
à l ’arbitrage de INI* Rispal, et terminée à l ’avantage
du sieur C h a m b a u d , par une transaction conforme îi
la décisioi\ de cet expert (1). Mais en 1 8 1 0 , le sieur
C h am b a u d eut avec la veuve Villevaud des relations
(1) La citation en conciliation et la transaction sont rapportées.
�(
,3
)
«
d ’intérêts , qui durent lui faire désirer vivement la
prospérité et la sûreté de la fortune de cette dernière.
L e 6 avril 1 8 1 0 , la veuve Vill ev aud empru nta au
sieur C h a m b a u d une somme de 6000 francs, et lu i fit
une obligation, reçue G i r a r d , notaire à Chamalière,
payable dans un a n , avec l ’intérêt à cinq pour cent.
E lle lui donna pour hypothèque spéciale deux prés.
L e plus considérable en contenance et en valeur était
précisément ce p r é du B r e u il} vendu par M. Dalbiat
à G i r a r d , et p a r ce dernier à la veu ve V i l l e v a u d .
O n sent assez que le sieur C h a m b a u d d e v a i t atta
cher le plus grand prix à la conservation d ’une hypo
thèque qui était la seule garantie du paiement de sa
créance,
les facultés mobilières d ’une bouchère ne
pouvant
lui présenter que des ressources bien insuffi
santes, sur-tout pour une somme aussi considérable.
L e sieur C h a m b a u d prit inscription, le 27 d u même
mois.
On arrive à la fin de 1 8 13. L a veuve Vi ll ev aud ne
s’était point libérée envers le sieur C h a m b a u d , quoique
son obligation fût échue et exigible depuis le mois
d ’avril 1 8 1 1 . C ette femme était encore en retard de
payer les intérêts j de manière que le sieur C h am b a u d
crut devoir la contraindre au
remboursement ,
et
chargea, h la fin du mois de décembre, le sieur G ir a r d ,
notaire, de lui lairc notifier un commandement de
payer. C et acte a été rédigé, mais n ’a pas été signifié.
Comme ces menaces de poursuites ont pu donner
au sieur Girard l ’idée de détruire la stipulation con-
�signée en l'obligation du i 3 mai 1809, en donnant
toutefois une garantie hypothécaire à la veuve Viilev a u d , et que cette dernière? en consentant à ce chan
gement , y
mettait
pour condition , que le sieur
C h a m b a u d lui accorderait un délai d ’un an pour le
paiement de l ’obligation de 1 8 1 0 , il est indispensable
d ’examiner les moyens q ui ont été employés par le
sieur Girard et la veuve V i l l e v a u d , pour atteindre
leur but.
Le
sieur
G irard
était notaire à C l i a m a l i è r e , e t
adjoint du sieur C h a m b a u d , alors maire de Chamalière et de Royat. L e sieur Girard était un homme
paraissant tout occupé de ses affaires, très - r é g u l i e r
dans'sa con du ite , vivant retiré, d ’ une grande réserve
dans la conversation, sur-tout quand i l s’agissait de
ses affaires. L e sieur C h a m b a u d ne vivait pas avec lui
mais il avait avec le sieur Girard les
relations que l e u r p o s i t i o n r e n d a i t i n d i s p e n s a b l e s ’, et il
était naturel q u ’habitant une maison de c a m p a g n e
dans l ’in tim ité ;
un peu éloignée de C lia m aliè re , le sieur C h am b a u d
vi n t descendre chez son a d jo in t , lorsque les affaires
de la mairie ou les siennes propres l ’y appelaient. A u
reste, il n ’avait avec l e sieur G ir a rd aucun intérêt qui
leur fut com m un ; il ne connaissait pas l’état de ses
affaires; il ne devait même pas chercher à les c o n
n aît re, puisqu’il est faux que le sieur Girard fut son
débit eu r; enfin le sieur Girard avait, comme notaire,
la ronfiance du sieur C h a m b a u d , et non celle de la
veuve Villevaud.
�■
•
.
( < n
Dans le même tems existait a Clermont un sieur
C h e v a lie r, notaire. C et homme avait su s’attirer une
confiance générale, et jouissait de l ’estime publi que.
Il était recherché et admis dans la bojme société; on
pouvait dire de lu i q u ’il était l ’ame de toutes les
affaires et de toutes les fêtes; et si ses nombreux amis,
, clupés p a r l u i , l ’ont
ensuite abandonné,
pourquoi
aujourd’h u i , pour nuire au sieur C h a m b a u d , voudraiton lui accorder les honneurs d ’une in tim ité , que l ’on
sait bien q u ’il n ’a jamais ob te n u e, m érit ée, ni même
désirée ?........
L e sieur Chevalier était lié d ’intérêt et d ’affaires
avec le sieur Girard. C e l t e circonstance, que les ban
queroutes simultanées de ces deux notaires ont rendue
p u blique, était entièrement inconnue au sieur C h a m
b a u d , et p o u v a it , au contraire, être a la connaissance
de la veuve V i l l e v a u d , qui était la protégée du sieur
C h ev alie r, son conseil ordinaire.
L a mère du gendre de la veuve V i ll e v a u d avait sevré
un des enfans de la dame C h eva lie r; c e l l e - c i était la
marraine d ’ un de ses petits-enfans; et il s était établi
entre elles une espèce d ’intimité, par suite de laquelle
la dame Chevalier allait fréq uem m en t, dans la belle
saison, passer des journées entières à R o y a t , et appor
tait à la veuve V illev aud de vieilles hardes dont elle
lui faisait cadeau , pour vêtir scs enfans.
Ces circonstances ne. sont pas sans intérêt dans le
procès; elles peuvent aider à découvrir les véritables
causes qui ont porlé la veuve V ill ev a u d à traiter avec
�le sieur Girard-, à apprécier les relations de cette veuve
avec Chevalier et G i r a r d , et à dévoiler les motifs q ui
l ’ont ensuite portée à in ten te r , contre le sieur C h a m
baud , la singulière action sur laquelle la C o u r a
à prononcer.
11 ne faut pas perdre de vue que le sieur C h am b a u d
avait chargé Girard d ’exercer les premières poursuites
q u ’il voulait diriger contre la veuve V ille vau d. G ira rd
avait dù prévenir cette veuve : il ne lui avait encore
rien fait s i g n i f i e r ; et l ’on p e n s e b i e n q u e la v e u v e
V ill ev aud n ’avait pas manqué de confier à. Chevalier
les craintes que les poursuites d u sieur C h am b a u d
pouvaient lui inspirer.
Il peut être que la position de la veuve V i ll ev a u d
inspira aux
associés Girard
et Chevalier l ’idée de
détruire la stipulation insérée en l ’acte du i 3 mai
1809, et de la remplacer par une hypothèque. C ett e
mesure d é t r u i s a i t l e s o b s t a c l e s q u e le sieur Fongheasse
pouvait apporter à sa libération, et r e n d a i t plus f a c i l e
la négociation de cette obligation. Mais tout cela ne
pouvait s’exécuter, sans que le sieur C h a m b a u d con
sentit à accorder un délai à la veuve Villevaud-, faveur
que cette dernière désirait vi vem en t, et que l’on osa
espérer de la complaisance du sieur C ham b a ud.
P o u r atteindre ce b u t , le sieur Girard fit une con
fidence au sieur C h a m b a u d ; il lui avoua devoir une
somme de 17,000 francs à différons créanciers;
lui
donna des explications sur l ’obligation F o n g h e a s s e ;
lui dit que la veuve Vi ll ev aud consentirait à iransfervr
�(
J7
)
Vhypothèque q u ’elle avait sur la maison Fongheasse,
sur le domaine de la G a ra n d ie , appartenant, à
G ir a r d ; et q u ’au moyen de ce transfert, sa libération
deviendrait facile, pu isq ue , outre les 11,000 fr. q u ’il
toucherait
de l ’obligation Fongheasse, il pouvait encore
compter sur 7000 fr. de recouvremens de son étude;
niais il ajoutait que cet arrangement ne pouvait s’eficct u e r, q u ’autant que le sieur C h a m b a u d consentirait
à accorder à la veuve Y il l e v a u d un délai d ’ un a n ,
pour le paiement de son obligation; délai que G i r a r d
et la veuve Y il levau d
sollicitaient
avec
beaucoup
d ’empressement.
L e sieur C h a m b a u d devait céder à ces instances; il
n ’était point l ’ami du sieur G ir a rd; mais sa position
pouvait l ’intéresser sous plus d ’un rapport : le sieur
C ham b aud et Girard remplissaient ensemble des fonc
tions administratives ; le sieur Girard exerçait une
profession qui inspire de la confiance; il était père de
famille : n ’était-il pas naturel de l ’aider à sortir de
1 embarras momentané dans lequel il se trouvait? D ’un
autre côté, dans la supposition même que la veuve
Vill ev au d aurait eu une hypothèque sur la maison
Fongheasse (ce qui n’était pas), le transfert q u ’ 011 lui
proposait ne pouvait que lui être avantageux. Le sieur
C h a m b a u d avait voulu acquérir le domaine de la
Garandie; il eri avait offert 22,000 fr. ; il savait que
cette propriété avait augmenté de valeur ; le sieur
Girard assurait q u ’elle n ’était grevée d ’aucune h yp o
théqué . ainsi aucun danger 11c paraissait menacer' les
3
�( >8 )
intérêts de la veuve V i l l e v a u d , auxquels ceux du sieur
C h am b a u d étaient d ’ailleurs si intimement liés.
Il convient de se faire ici une idée positive de la
v a le u r du domaine de la G a ra n d ie , et de Y état appa
rent des affaires du sieur Girard.
L e sieur Girard avait acquis le domaine de la G a
randie par parcelles, moyennant la somme.de 20, i 33 lr.
20 c. (1). Il avait animé cette propriété de bestiaux
d ’ une valeur considérable ; deux cents moutons et
vingt-deux bêtes à cornes avaient été achetés par lui 5
Girard avait en outre construit des batimens pour
rétablissement d ’ un m o u l in , faiL des réparations et
des plantations d ’une grande valeur*, de manière q u e ,
sans rien exagérer, on po u v a it , en 1814? porter la
valeur de ce bien à la somme de 3 o,ooo francs ; mais
sa situation et son produit viennent encore confirmer
cette i d é e . L e domaine de la Garandie est situé dans
"Un pays de m o n t a g n e .
D e s b a u x aut hentiques, des
a3 juillet 1810 et 21 février 1 8 1 2 , établissent q u ’ il
était affermé 1 4 19 francs*, et comme l ’on sait que la
valeur vénale des biens de montagne est bien supé
rieure à leur produit réel, comment se refuser à l ’idée
que ce domaine 11e va lût réellement 3 o,ooo fr. (2)?
L ’état apparent des affaires du sieur Girard n’avait
rien d ’inquiétant 5 il déclarait que le bien de la G a
randie 11’était grevé d ’aucune inscription : c’était un
(•) i.es expéditions de ces acquisitions partielles sont
(2) Les deux liaux à ferme sout rapportés.
rapportées.
�( * 9 .)
fait à. vérifier ; il ne restait donc que l ’hypolhèquo
légale de la femme, réglée depuis, par jugement du
3 août 1 8 1 6 , à la somme de 7 7 1 9 fr. 66 c. ( 1 ) ; h y
pothèque
légale q ui avait
d ’ailleurs pour
garantie
d ’autres propriétés du m a r i , et notamment une vigne
de vingt-six œuvres, située aux Roches; un pré situé à
T h è d e , ces deux objets vendus à la veuve G a r d y ,
moyennant la somme de 7600 francs; en fin , une cave
placée à Clermont.
C e t aperçu montre que le transfert d ’ hypothèque
que demandait G i r a r d , loin d ’être nuisible à la veuve
V i ll e v a u d , devait, au contraire, lui être avantageux :
un domaine présentait en effet une garantie plus sure
q u ’une maison de ville, sujette à des accidens difficiles
à prévoir; mais si l ’on ajoute que la veuve V i l l e v a u d
n ’avait pas d ’ hypothèque sur la maison; q u ’elle n ’était
pas même saisie vis-à-vis le sieur Fongheasse, par une
acceptation de la somme q u ’ il pouvait devoir au sieur
Girard (circonstances ignorées du sieur C h am b a u d ) ,
on demeurera encore plus fortement convaincu que
l'affectation d ’ Ilypothèque offerte par
Girard
était
u t il e , et même indispensable à la veuve Villevaud .
Quoi q u ’il en soit, ces conventions se méditaient
entre le sieur Girard et la veuve Ville vau d : eux seuls
pouvaient connaître leur position respective, l ’état de
leurs propres affaires; et le sieur C h am b a u d ne pou
(1) L a noie de ce jugement est rapportée.
�vait y être appelé que pour rendre le service auquel
il s’était engagé, en accordant un sursis à la veuve
Ville vaud .
Mais la veuve Ville vaud prenait des renseignemens j
elle savait ou avait pu savoir que lé sieur Clia mbaud
avait voulu acheter le domaine de la Garandie.
Cette
veu ve, comme débitrice du sieur C li a m b a u d , avait
avec lui des relations qui étaient devenues plus fré
quentes par la nécessité où elle se trouvait d ’en obtenir
un sursis pour pouvoir traiter avec Girard.
L e sieur C h a m b a u d fut donc interrogé par la veuve
Vi ll ev a ud; il lui fit franchement connaître ce q u ’il
savait de l ’état des choses; m ais, pour qu'elle put
s’éclairer davantage et vérifier par elle-même tout ce
q u ’il lui était important de savoir, le sieur Cliam b aud
remit à cette veuve une note à consulter, qui fait pièce
au procès, et qui est ainsi conçue :
« Il existe une h y p o t h è q u e d e i i ,000 francs, que la
« veuve V ill ev a u d a placée sur une m a i s o n à Gler« mont (1). On demande q u ’elle en donne main-levée,
(1) L e sieur Cliambaud ignorait donc que la veuve Villevaud nravait
point d'hypothèque sur la maison Fongheassp; il ignorait également
que cette femme n’était point saisie, vis-à-vis le sieur Fonghcasse, du
montant de l’obligation du i 3 mai 1809 : la veuve Villevaud avait
soigneusement caché ce fait au sieur Chambaud, qui avait cependant
le plus grand intérêt à le connaître, puisque l’hypothèque de la maison
Fonghcasse devait £tre la garantie de la vente du pré Dalbiat, et que cc
pie avait été donné pour hypothèque de l'obligation consciUic par la
veuve Villevaud au sieur Chambaud.
�( «
)
i< pour le transfert sur un bien de montagne, de la
« valeur de 3 o,ooo francs, q ui n ’est grevé d ’aucune
« hypothèque. »
Q u ’avait
à faire la veuve V ill ev au d ? Sa conduite
et ses démarches étaient réglées par la note qui lu i
avait
été remise, et rien n ’était plus facile à obtenir
que les renseignemens q u ’elle avait à prendre. Elle
devait s'enquérir de la valeur du domaine de la Garnndie : les gens du pays pouvaient lui donner, sur ce
f a i t , les détails les plus minutieux et les plus exacts;
la veuve Ville vaud devait les consulter. C ’est aussi ce
q u ’elle a fait ( i ) .
E l l e devait ensuite rechercher si le domaine de la
Garandie était ou non libre d ’inscriptions. U n certi
ficat du conservateur des hypothèques devait lui faire
connaître ce fait; et un homme d ’affaires pouvait l u i
apprendre que l ’hypothèque légale de la femme affecte
les biens du mari. L a veuve V i ll e v a u d prend encore
ces renseignemens : c’est le sieur Chevalier qui a été
consulté par elle, et qui lui a p r o d u it , avant l ’act e,
comme elle le reconnaît elle-même, un certificat né
gatif d ’inscription.
Après avoir obtenu tous ces renseignemens, la veuve
Villevaud arrête définitivement ses conventions avec
le sieur Girard. Chevalie r, notaire à C le rm ont, devait
recevoir leur acte et en être le rédacteur; il a v a i t ,
(i ) Ce fait est prouvé au proct's, par une déclaration de Charles
Constant.
�comme on a v u ,
toute la
confiance de la veuve
V i l l e v a u d , et avait été chargé par elle de vérifier si le
domaine de la Garandie n ’était grevé d ’aucune ins
cr iption.
L e 27 janvier 1 8 1 4 5 Girard et la veuve V illev aud
se rendirent d a n s ' l ’ étude du notaire Chevalier. L e
sieur C h am b a u d ne devait y paraître et n ’y parut
r ée ll em en t, que pour remettre à la veuve Ville vaud
la promesse de suspendre pendant un an l ’expropria
tion q u ’il voulait diriger contre elle. C e j o u r même
C hevalier produisit à la veuve V i ll e v a u d un certificat
négatif d ’inscription (elle convient de ce fait). Elle
consentit alors à ce que le sieur Fongheasse se libérât,
hors sa présence, envers le sieur G i r a r d , du montant
de l ’obligation du i 3 mai 1809, et r e ç u t , pour ga
rantie de la vente que lui avait consentie G i r a r d ,
le 21 juillet 1808, une affectation hypothécaire sur
le domaine de la G a r a n d i e , a v e c convention q u ’elle
pourrait prendre d e s u i t e inscription sur celle pro
priété.
L e sieur C h a m b a u d était entièrement étranger îi
cet acte. Il 11e pouvait être garant d ’aucune des suites,
soit q u ’elles fussent favorables ou nuisibles aux intérêts
de la veuve Villev au d. C ’était sur-tout à cette dernière
à surveiller son inscription, ou au moins au notaire
C h e v a l ie r , q ui avait été le directeur principal de cette
affaire, et q u i , par élat comme par devoir,
devait
"veiller à ce q u ’il ne fut porté aucune atteinte aux
droils d'une clie nl e, sur les volontés de laquelle il
�( 23 )
■avait acquis tant d ’empire. C est cependant le retard
mis à l ’inscription de la veuve V i ll e v a u d , qui a été la
véritable origine du procès actuel \ et on verra bientôt
comment cette femme a conçu le projet de rendre le
sieur Ch am baud garant du préjudice q u ’elle a éprouvé,
par suite de sa négligence ou de la prévarication d u
sieur Chevalier.
Quoi q u ’il en soit, les sieurs G ir a rd et C h e v a lie r,
ayant o b t e n u , par l ’effet de l ’acte du 27 janvier 1 8 14 ,
la libre disposition de l ’obligation Fongheasse, pen
sèrent, dès-l’instant m êm e, à l ’utiliser, et à se pro
curer de l ’argent en la négociant. Cet te obligation fut
immédiatement colportée dans toute la ville de C le r m o n t , et présentée à plusieurs riches capitalistes,
parmi lesquels on peut citer les sieurs Pejoux-Vialefont
et Bonne-Lavie.
L e sieur C h a m b a u d ne s’occupait point de ces né
gociations. Absolument étranger aux affaires des sieurs
G ira rd
et C h e v a l ie r ,
n ’ étant
le créancier d ’aucun
d ' e u x , il devait peu lui importer de savoir ce que
deviendrait l ’obligation du i 3 mai 1809, et en quelles
nxaius elle passerait.
Cependant les efforts du sieur Girard pour négocier
cette obligation , son empressement à obtenir de l ’ar
g e n t , le retard q u ’il mettait à faire honneur à scs
propres engagemens,
avaient
excité l'inquiétude do
quelques-uns de ses créanciers, et devaient bientôt
rendre public le mauvais état de scs affaires.
L a première notion q u ’eut le sieur Chambaud à ce
�sujet, lui fut donnée par un sieur C ham b aud-B la n ch a rd , son paient au huitième degré.
L e sieur Chai nb au d-Bla nch ard était créancier de
G i r a r d , d ’ une somme de 2444 francs, en vertu d ’un
titre. Il faisait des démarches actives pou r obtenir le
paiement de sa créance ; et le sieur Girard , pour
éviter des poursuites , lui proposa de le subroger à
l ’obligation du i3 mai 1809, mais sous la condition
expresse que ce q ui r e s t e r a i t d u sur le montant de
cette o b l i g a t i o n , la créance d u sieur C h a i n b a u d Blanchard dé du it e , serait payé comptant.
L e sieur C ham baud -B lancha rd lit alors connaître
à son parent sa position envers G ir a r d , et la proposi
tion qui lui était faite par ce dernier. L e sieur C h a m
b a u d lui conseillait d ’accepter; mais le sieur Cliamb a u d - B l a n c h a r d , craignant d ’être obligé d ’en venir u
une expropriation pour être payé du sieur Fongheasse,
montrait de la r é p u g n a n c e ;i s o u s c r i r e cet e n g a g e m e n t .
Il disait, d ’ailleurs, q u ’ il 11’avait pas les f o n d s n é c e s
saires pour payer le surplus du montant de l ’obligation.
Il engageait même le sieur C h a m b a u d à se réunir à
lui pour l ’acquérir; mais ce dernier, se trouvant dans
la même position de son parent , et 11’ayant point
d ’argent disponible , refusa d ’accéder à l ’invitation
du sieur Blanchard; et, pour le m om en t, ce projet
fut abandonné.
h Mais le sieur C h a m b a u d fut bientôt instruit d ’ un
tait qui devait lui donner de plus vives i n q u i é t u d e s .
Il rencontra M ' D e l a u u e , défenseur a g r é é a u tribunal
�■ ( »5 )
de commerce de Clermont , et tenant
un bureau
' d ’agence dans cette ville. Me Dclaune p o u v a i t , par Ja
nature de ses fonctions, connaître la position du sieur
Girard. Il ne craignait pas de dire que les affaires de ce
notaire étaient en très-mauvais é t a t , et se rendait à
Chamalière pour obtenir le paiement de deux effets,
montant ensemble à 3 o 5 o francs. M e Delaune montra
même ces deux lettres de change au sieur C h a m b a u d ,
qui vit avec douleur que l ’ une d ’elles était souscrite
par G i r a r d , et endossée par B o u c h e t, de R o y a t , et
Pautre souscrite par B o u ch et lui-même, avec l ’endos
sement de Girard.
C ette communication affligea profondément le sieur
C h am b a u d : le sieur Bouchet était secrétaire de la
mairie dont le sieur C h am b a u d était maire \ le sieur
Bouchet avait été et était encore le précepteur des
deux fils du sieur C h a m b a u d . L a fille de ce dernier
avait eu pour nourrice la femme du sieur Bouchet ;
de manière que tout semblait lui faire un devoir de
venir au secours d ’un malheureux qui pouvait être
victime de son obligeance et de sa trop grande confiance
au sieur Girard. D ’un autre côté, le sieur Bou ch et
était hors d ’état de supporter une perte considérable :
toute sa fortune se composait de 8000 fr. d ’immeubles;
ses travaux étaient d ’ailleurs peu lucratifs, et 3 ooo f r . ,
actuellement exigibles ,
traîner sa ruine.
devaient nécessairement e n
L e sieur Chambaud n’hésita point sur le parti q u ’il
avait à prendre : il voulait être utile au sieur Bouchet
4
�^fA
( 26 )
et employer toutes ses ressources pour le secourir ;
mais il lui était indispensable de connaître préalable
m e n t , et au ju ste , la position de celui q u ’il voulait
obliger; aussi, dans le premier mom ent, se borna-t-il
à prier M e Delaune de ne rien pr éc ip it er, et de lu i
accorder quelques jours de réflexions.
L e sieur C h a m b a u d eut un entretien avec Bouchet.
C e malheu re ux , séduit par G i r a r d , avait eu la fai
blesse de le cautionner pour une somme de 7700 f r . ,
et frémissait en mesurant la p r o f o n d e u r d e l ’abîme
q u ’il avait ouvert sous ses pas. L e sieur C h a m b a u d
avait bien quelques ressources; il était créancier d ’obli
gations assez considérables, et d ’une rentrée certaine;
mais il lui fallait de l ’argent pour acquitter les effets
dont M e Delaune était porteur.
L e sieur C h a m b a u d , en obligeant le sieur Boucliet,
un double o b j e t , celui de payer la créance D e
l a u n e , p o u r l a q u e l l e 11 é t a i t menacé de poursuites
rigoureuses, et de lui faire o b t e n i r u n n a n t i s s e m e n t
avait
pour les sommes q u ’ il avait déjà payées ou q u ’il devait
encore pou r le compte du sieur Girard.
C o m m en t le sieur C h a m b a u d s’y prit-il pour a t
teindre le b u t q u ’il se proposait ?
Il était créancier, d ’un nommé Charles C o n s ta n t ,
d ’ une somme de 3 ooo f r . , et son obligation avait une
montagne pour hypothèque.
Charles Constant avait
d ’autres créanciers, parmi lesquels figuraient les sieurs
Be rn ard,
marchands
ferrailleurs à Cle rmont , ‘l 11*
poursuivaient son expropriation; mais l ’ un d ’eux ayant
�t 27
ftccjuis la p r o p r i é t é de Charles C o n sta n t , moyennant
lu somme de 12,000 fr. , un 01 die oniiiiblc fut ouvert
devant Me Taché ,
notaire à C le r m o n t j et le sieur
C h am b a u d put bientôt s’assurer q u ’ il ne devait être
payé
de sa créance q u ’au g mai 1 8 1 5 . C e délai était
lon g, et ne s’accordait pas avec l ’emploi que le colonel
C h a m b a u d voulait faire de ces fondsj aussi, en exa
minant l ’ordre, le colonel s’étant aperçu que le sieur
( Moriu , banqu ie r,
également créancier de
Charles
C o n s t a n t , d ’une somme de 3 ooo francs, devait être
payé très-prochainement du montant de sa créance 5
sachant d ’ailleurs que
son beau-frère, le sieur B u
jadoux, orfèvre, était l u i - m ê m e créancier d u sieur
M o rin , fit des démarches pour obtenir un changement
de rang, et parvenir à être colloqué à la place du sieur
Morin. Cela fut effectivement exécuté : Morin donna son
mandat en paiement au sieur Bujadoux, q u i consen
tit à ce que le colonel C h a m b a u d en fit usage *, de
cette m an iè re ,
ce dernier accéléra la rentrée de sa
créance, et se trouva dans la position d ’être utile à
Bouchet (1).
Ces précautions étant prises, le colonel Chambaud
(0
Tout cela est prouve, i° par la quittance donnée par Morin à
Cliailcs Constant, de la somme de 3ooo francs payés par les sieurs Closel
et Joseph Bernard, acquéreurs de ses Liens; 20 par une procuration,
du
avril i 8 i 5 , donnée par le colonel Chambaud au sieur Bujadoux
pour sc faire payer, par les sieurs Closcl et Bernard, de la somme de
3 ooo francs cjui lui ¿luicul dus par Constant ; 3 ° par une déclaration
�( »8 )
revit le sieur C h am b a u d - B la n c h a r d , et ils convinrent
d ’accepter, chacun pour moitié,
la subrogation de
l ’obligation Fongheasse, que le notaire Girard devait
leur faire; mais comme le colonel n ’avait d ’autre b ut ,
dans celte affaire , que celui d ’exercer un acte de
bien faisance envers Bou ch et , et d ’empêcher q u ’il ne
fut victime de la confiance trop légère q u ’il avait eue
en G i r a r d , il fut convenu avec ce dernier que le
colonel arrêterait les poursuites de M e D e l a u n e , en
payant ses créances, et q u e , sur le r e s t a n t du prix
de la cession, Bouchet serait mis à couvert des sommes
q u 'il avait empruntées ou cautionnées dans l ’intérêt de
Girar d.
Les deux cédataires atteignaient ainsi leur b u t :
C h a m b a u d - B la n c h a r d , créancier de. G i r a r d , obte
nait le paiement de sa créance, et le colonel servait
ses affections, en rendant service à Bouchet. Aussi ,
tout étant ic gl e, le 5 fcvn cr 1 8 1 5 et i>ar
acte reçu
A
»
C h e v a l ie r , notaire, G ir ard transporta, avec subroga
tion , au colonel C h a m b a u d et ail sieur C h a m b a u d Bl anch ard , l ’eiFet de l ’obligation Fongheasse, du i 3
mai 1809, et de l ’inscription qui l ’avait suivie.
Ce
du sieur lîujadoux, du 22 janvier 1822, qui établit qu’ il y a eu
changement de rang entre Bujadoux et le colonel; que les fonds pro
venant de la créance Moriu ont été employés à payer le prix de la
cession Fongheasse, et ont été touchés par M 0 Delaune, qui les a
reçus comme créancier ou fondé-de pouvoir des créanciers de Girard
cl Bouchet.
�( 20 1
transport fut signifié à Fongheasse, le 22 du
même
mois.
Les sieurs C h am b a u d avaient, comme on l ’a v u ,
accepté, chacun pour moitié ,
l ’effet du
transport
du 5 février 1B 1 4 ? dont le prix n ’était autre que la
somme de 10,862 fr. 5 o c . , montant de l ’obligation
du i 3 mars 1809.
Il
est
inutile
de
rechercher
comment
le
sieur
Ch am baud-B la nchard s’est acquitté de sa moitié du
prix de cette cession, pu isque, plus heureux que le
colonel , il a pu échapper aux poursuites et aux diffa
mations de la veuve V i l l e v a u d , quoique seul il fût
créancier du sieur G ir a r d ; mais il est indispensable
de faire connaître les moyens employés par le colonel
pour opérer sa libération.
Ces moyens furent simples, et sont déjà suffisamment
indiqués par ce que l ’on connaît des faits de la cause.
M e Delaune était porteur de deux effets; le premier,
à éch éance le 20 mai 18 14 5
somme de 2000 f r . ,
souscrit par Girard et endossé par Bouchet; le second,
qui devait échoir le 22 du même m ois, de la somme
de i o 5 o fr. , était souscrit par Bouchot et endossé par
Girard. L e colonel C h am b au d paya ces deux créances
moins 5 o f r . , et en retira les litres. Ensuite le colonel
C h a m b a u d , pour s'acquitter dos ?.4 3 i b ‘*
centimes
restant pour parfaire la somme de 5 /|3 i fr. 2S c e n t . ,
prix de la subrogation de l’obligation de 10,862 fr.
5 o centimes, dont ¡1 avait acquis la m oit ié, fit remise
à Girard d ’obligations qui lui étaient ducs par dift’é-
�( 3o )
rens particuliers; et ce dernier, à son t o u r , suivant
la convention qui avait été arrêtée, en transporta à
Bouchet ce qui lui était nécessaire pour le nantir des
sommes q u ’il avait payées ou devait payer à sa dé
charg e, et le mettre à couvert des effets des cautiounemens q u ’ il lui avait prêtés (i ).
Si l’on s’arrête un instant sur ces faits, la réflexion
la plus sérieuse ne saurait permettre d ’y apercevoir,
ni l ’intention du c o l o n e l de trom per la veuve V illev aud ,
ni même la possibilité que cette veuve souffrit le plus
léger préjudice par l ’effet du transport fait aux sieurs
C h a m b a u d , si toutefois elle avait eu la précaution de
surveiller ses droits.
E n effet, s’il est vrai que l ’intérêt soit le mobile
le plus ordinaire des actions des h om m es , et q u ’il
faille rechercher, dans l ’am ou r de soi-même mal en
tendu , l a cause ou l ’origine des actes qui affligent
la morale ou t r o u b l e n t l a s o c i é t é , ou se demande
( i ) Ces faits sont prouvés , i° par le rapport de l ’effet de iooo francs,
acquitté des deniers du sieur Chambaud; 2° par un extrait du livrejournal de M® Delaunc , établissant que le colonel Chambaud a payé les
deux effets qui étaient dus par Girard et Bouchet ; 3° par la déclaration
de six débiteurs du colonel Chambaud, donnée devant Pclissière, notaire
à Chamaliérc, le
23 janvier
1822, prouvant qu’ils ont payé aux sicnrs
Girard et Bouchet ce qu’ ils pouvaient devoir au colonel Chambaud,
savoir : à Girard, la somme de 1700 f r . , cl à Bouchet, celle de 700 fr. ,
faisant ensemble les 2^00 fr. qui étaient encore dus par le sieur Clmmfoaiul, pour s’acquitter du prix du transport que lui
Girard.
avait
consenti
�( 3. )
vainement les motifs qui auraient pu porter le colonel
C h a m b a u d à nuire à la veuve Y illevau d . L e colonel
ne pouvait porter à cette femme ni haine n i a ffection
personnelle : leur position sociale les tenait à une trop
grande distance l ’un de l ’a u t r e , pour q u ’aucun de ces
pù t déterminer sa volonté ou influencer sa
sentim ens
conduite. Si l ’on consulte les intérêts pécun iaires q u i
seuls pouvaient établir quelques relations entre ces'x
deux ind iv idus, on s’assure que la veuve Y il l e v a u d
devait au colonel C h a m b a u d Gooo fr. , somme bien
considérable pour sa fortune. C e cap it al, si important
pour le colonel, avait pour hypothèque et garantie'
p rin cip ale
le p r é provenu du sieu r d ’A lb ia t : ainsi
le colonel C h a m b a u d , loin de chercher à nuire à la
veuve Y i l l e v a u d , devait au contraire, dans son in térêt'
p er so n n el, vivement d é sire ra i fa ir e tout ce q u i pou
vait coopérer à la prospérité des affaires de sa dé b i
tr ic e , et à assurer ainsi l ’effet de l ’ hypothèque q u ’il*
avait sur ses biens.
U n sentiment aussi naturel était-il combattu par
des a ffection s ou
un
intérêt c o n t ra ir e , assez
fort
pour porter le colonel à se nuire iï soi-m êm e , en
causant
un
préjudice à la veuve Y il l e v a u d ?
Mais
aucune intimité n ’existait entre le colonel et le notaire
G i r a r d ; toutes leurs relations se bornaient à celles
que faisaient naître leurs fonctions d ’administrateurs
de la même mairie. L e colonel ne connaissait point
l ’état des affaires <le G ir a r d ; la circonspection de ce
dernier les avait entourées du voile le plus épais, voile
�(
que le
colonel
n ’avait
)
aucun intérêt
à soulever,
puisque Girard ne lu i devait absolum ent rien y fait
important et dont la certitude est aujourd’ hui acquise
au procès, puisque tous les efforts de la veuve Villevaud ont été inutiles pour établir que le colonel f û t
créancier de G ir a r d , et q u ’elle en est ré du it e, sur ce
f a i t , à ses assertions personnelles, q u i , dans tous les
cas, seraient insignifiantes, mais dont le mensonge est
encore prouvé par la conduite odieuse et coupable çle
cette femme. O u sent assez q u e l ’ i n t é r ê t q u e Bouchet
inspirait au colonel ne pouvait être ni assez v i f , ni
assez a v e u g l e , pour le porter à pratiquer une fraude
dont il aurait été la première victime.
E n f i n , si le colonel C h a m b a u d eut désiré la cession
de l ’obligation du 1 3 mai 1809, et q u ’ il eût pensé
q u ’il était de son intérêt de l ’ob te nir, avait-il besoin
pour cela de la coopération de la veuve V i ll ev au d , et
de la porter à s o u s c r i r e l ’acte du 2 7 janvier 1 8 1 4 ? “
]\Iais la veuve V ill ev a u d était é t r a n g è r e îi l ’obligation
Fongheasse; elle n ’y était point partie; elle ne l ’avait
point acceptée; elle ne se l ’était appropriée par aucune
notification ,
ni même par aucune
inscription ; de
manière que cette obligation était toujours restée à la
disposition de G i r a r d , qui pouvait ou en recevoir le
m o n t a n t , ou en transmettre les effets à un tiers, hors
la présence de la veuve V i l l e v a u d , sans que le cédataire eut rien à craindre des oppositions ni des pour
suites de cette femme.
Cette démonstration
devient
encore
plus
évi
�(
33
)
d e n t e , si l ’on consulte la position de la veuve Villevau d.
Comme on l ’a d i t , l ’obligation Fonglieasse ne lui
transm ettait
aucun d r o i t , pu isq u’elle n ’y était point
pa rti e, et q u ’elle ne se l ’était appropriée par aucun
acte. L acquisition q u ’elle avait faite de Girard était
donc dépourvue de toute espèce de garantie, jusqu’à
l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ; mais, par cet acte, la veuve
Vi ll ev aud acquérait une hypothèque sur le domaine
de la G ara n die, qui n’était grevé d ’aucune inscription,
ainsi que cette femme le reconnaît elle-même, et que
l'établit d ’ailleurs le certificat qui est rapporté; donc
la veuve V i l l e v a u d , loin de faire aucune perte ou de
compromettre ses intérêts en souscrivant cet act e,
faisait au contraire une chose qui lui était avantageuse
sous tous les rapports , et portait ainsi remède aux
suites funestes de la négligence q u ’elle avait mise à
s’approprier l ’obligation Fonglieasse.
Mais pour que l ’acte produisit des effets avantageux,
il fallait q u ’il fût exécuté, et q u e , suivant ce qui y
est prescrit, l ’inscription à laquelle il donnait droit
fut prise de suite. L a veuve Vill ev a ud néglige une
formalité aussi essentielle, ou au moins elle ne la
remplit que le 11 mai 1814 5 quatre-vingt-treize jours
après l a c t é du 27 janvier; e t , pendant ce te m s, u u
sieur B o u ch o t, de C l e r m o n t , poursuit Girard pour le
contraindre au paiement d ’ une somme de 5 ooo francs.
Il obtient de son débiteur une hypothèque sur le
domaine de la G a ra n d ie , prend inscription le même
�34 )
jour que ïa veuve V i l l e v a u d , et se trouve ainsi en
(
concurrence avec elle.
L a veuve Vi ll ev aud ne devait imputer q u ’à ellemême les effets de sa propre négligence; mais au moins
si elle voulait adresser à q u e l q u ’un des reproches
fon d és, elle ne pouvait raisonnablement se plaindre
que du
notaire C h e v a l ie r , en qui
elle avait placé
toute sa confiance.
Il
faut en effet c o n v e n i r q u e cet homme paraît avoir
cruellement abusé du ci'édit q u ’ il avait a c q u i s dans la
ville de C l e r m o n t , et q u e , comme beaucoup d'autres,
la veuve V i ll e v a u d a été sa victime.
Les notaires Chevalier et Girard étaient liés d ’amitié
et d ’intérêt; leur chute devait être prochaine; et ils
sentirent la nécessité de réunir leurs efforts pour en
reculer l ’instant et cacher l ’ état de leurs affaires. Pour
c e la , il f a l l a i t , autant que possible, éviter ou retarder
tout CC q ui pouvait d o n n e r fies c r a i n t e s s u r leur solva
bilité , ou diminu er leur crédit; de là le retard mis
par Chevalier à l ’ inscription de la veuve V i ll ev a u d
contre Girard. Il est même à présumer que l ’inscrip
tion n ’aurait point été prise, si l ’audace de ces deux
notaires n’eù i éveillé la surveillance du colonel C h am b aud .
L ’obligation Tongheasse avait été reçue par C h e v a
lier. C e notaire et son associé Girard vouluren t abuser <1«
la m i n u t e , q u ’ils colportaient chez tous les c a p i t a l i s t e s
de C l e r m o n t , afin d ’en faire ressource et de la eeder
Une seconde f o i s , après le t r a n s p o r t q u ’ils en avaient
�(
35
'
)
consenti aux sieurs C h a m b a u d , le £> février i 8 i 4 * L e
colonel, informé de ces démarches, app rit 'b ie n tôt-,
par de nouvelles informations, que l ’ inscription de la
veuve V i l l e v a u d avait été négligée. Cette d o u b l e per
fidie devait exciter toute l ’indignation d’ un militaire :
aussi le
colonel
Chambaud ,
dont
l ’activité
était
doublée par un ressentiment bien légi tim e, m u lti
pliait-il les démarches pour découvrir C h e v a lie r, q ui
l ’évitait
avec le plus grand s o i n ,
et
parvint-il à
l ’o b l i g e r , tout à-la-fois, à prendre inscription pour la
veuve V i l l e v a u d , et à renoncer au projet d ’escroquerie
avait conçu.
Considérée sous ce point de vu e, la position de la
q u ’ il
veuve Vi llevaud était malheureuse. L e colonel C h a m
b a u d , il est v r a i , n ’avait rien à sc reproch er, même
dans le for i n t é r ie u r } sa conduite était conforme aux
règles prescrites par la délicatesse la plus susceptible ,
et devait être approuvée par tout homme d ’honneur.
C e p e n d a n t , d ’ un autre c o t é , on ne pouvait se défendre
d ’ un sentiment de pitié pour une foin nie de la classe
d e l à V i l l e v a u d , sans instruction, présumée 11 avoir
aucune connaissance en affaires, et dont l'hypothèque
avait péri, ou au moins était considérablement dimi
nuée par la prévarication du notaire, dont le devoir
était de 1’asSurcr et de la conserver; niais cet intérêt
cesse, et se change même bientôt en un sentiment
d ’ indignation bien v i f , si l’on examine de plus près la
conduite de la veuve Villevaud.
L e tort q u ’avait souffert cette femme pouvait aisé
�ment se réparer : le notaire Girard laissait des res
sources suffisantes pour l ’ indemniser, si toutefois elle
eût profité de ses avantages, et apporté à la conserva
tion de ses droits un peu de vigilance et d ’activité.
M a i s , loin de-là, la veuve Vill ev aud néglige toute
précaution , n’exerce aucune des actions que la loi lui
o u v r a it, laisse échapper son gage, v en d u te v i l p r ix ,
s’évanouir toutes les autres ressources de son débiteur;
dédaigne même de produire à l ’ordre; et l'o n ne saurait
comment expliquer une négligence'aussi s o u t e n u e et
aussi déplor able, si l ’événement ne venait apprendre
que cette étrange conduite était le fruit de la médi
ta tion, et combinée pour servir bientôt de prétexte
aux diffamations que cette veuve s’est permises, et à
l ’action odieuse
q u ’elle a dirigée contre le colonel
Chambaud.
Quelques détails sur ces faits sont indispensables.
1° A 1 époque d e l a d i s p a r i t i o n de G i r a r d , le do
maine de la Garandie fut abandonne, et les bestiaux
q u i l ’animaient furent vendus.
La veuve Y il levau d
pouvait veiller à la conservation des récoltes et du
prix de ces ventes; elle devait même faire tous ses
efforts pour s’en emparer et en profiter; cependant la
veuve Y il lev a u d ne fait aucune démarche, ne prend
aucune
précaution, et, cette première ressource lui
échappe.
2° Il est établi, par le rapport des actes, que G i r a r d
avait acquis les différons héritages composant 1« do
maine de la G a ra n d ie , moyennant 22,8/1 î ir. 20 c .;
�e t , par les baux à fe rm e, que cette propriété était
d ’un revenu de i 4 T9
ainsi,
bien é v i d e m m e n t ,
le domaine valait au moins 3 o,ooo f r . , sur-tout si on
ajoute l ’augmentation du prix q ui devait résulter de
l ’adjonction des best ia ux, des plantations et répara
tions faites par G ir a r d , et de la construction de bàti
mons pour l ’établissement d ’ un m o u l in , objet qui seul
va ut plus de 3 ooo fr. Cependant une propriété aussi
précieuse est vendue moyennant 9000 fr. L a vilité du
prix de la vente était évidente. L a veuve Y i l l e v a u d ,
comme créancière in scr ite , avait le droit de faire une
surenchère : elle n ’ use point de cette facu lté, et , par
sa négligence, elle laisse ainsi disparaître et s anéantir
les deux tiers de son gage. Mais la veuve Y i l l e v a u d
connaissait la valeur du domaine de la Garandie }
outre la note à consulter, q u ’elle avait obtenue d u
colonel C h a m b a u d , elle avait pris des renseignemens
avant Vacte du vingt-sept ja n v ie r 1B x4 ? postérieure
ment à la v e n te , elle renouvela ses démarches; et ,
ayant obtenu les mêmes résultats, elle manifesta 1 in
tention de faire
u n e
surenchère ; mais plus ta rd, ses
dispositions changèrent, et elle ne craignit pas de dé
clarer que si elle avait abandonné ses d ro its, c ’est
p arce q u e lle avait un b illet de garantie du co lo n el
Chant ban d (1).
3 ° Un ordre est o u ve rt, et la veuve Y il le v a u d ne
(1) Une déclaration de Châties Cuiütaut, du
commitc tous ces faits.
23
janvier 182a, fait
�( 38 )
fait aucune production. Cependant elle ne pouvait être
primée que par
l ’ hypothèque légale de la femme ,
hypothèque légale q u ’e lle con n a issa it, et qui avait
été fixée à la somme de 7 7 1 9 fr. Go c. , par jugement
du 3 août 1 8 1 6 , et q ui d ’ailleurs était éteinte,
ou
au moins pouvait l ’être par la valeur des autres pro
priétés appartenant à Girard. L a veuve V ill ev a ud était
ensuite en concurrence avec le sieur Bouchet, de C le r
m o n t , dont la c r é a n c e était de ^996 fr. ; mais cet
objet devait nécessairement souffrir une d i m i n u t i o n
considérable, s’il n ’était même totalement acquitté par
l ’effet de la saisie que Bouchet avait faite du cau
tionnement de G ira rd et de l ’usufruit de la moitié
des biens de sa femme, à laquelle il avait survécu ;
précautions que la veuve Y il l e v a u d avait entièrement
■négligées de prendre dans son intérêt (1).
Voila b i e n des négligences. U n abandon aussi com
plet, de la part de la v e u v e " V i l l u v a u d , d e s m o y e n s qui
pouvaient lui conserver ses droits, serait inconcevable,
si les faits ne venaient ensuite apprendre quelles étaient,
en agissant ains i, les véritables intentions de cette
fem me.
L e colonel C h a m b a u d avait été maire d eC ham aliè re
(1) Le certificat d’inscriptions, rapproché des titres qu’ il relate, et
qui sont rapportés, prouve que la veuve Villcvaiul n'était primée <[,|U
p:»r l'hypothèque légale de la femme, et venait en concurrence avec
Bouchet, les autres inscriptions étaiil prises sans droit, et les créances
ayant été acquittées.
�et de Royat jus qu’en juillet i 8 i 5 . L a veuve V ill e v a u d
avait un fils soumis à. la conscription , et x’eforme, le
3 décembre i 8 i 3 , comme estropié et infirme.
Cette
femme était encore débitrice du colonel d ’une somme
de 6000 f r., dont elle s’était libérée le 1 5 février i 8 i 5 :
elle réunit tous ces faits, les combine péniblement; et,
aidée des conseils d ’ un homme profondément immoral,
parvient à ourdir un plan de calomnies et, de diffama
tions, à l ’aide duquel elle espère donner quelque fa
veur à l ’action q u ’elle veut diriger contre le colonel.
Cependant la veuve V i ll e va u d n ’avait encore aucune
idée fixe, ni plan définitivement arrêté; la nombreuse
série de ses suppositions, contradictions et mensonges
ne devait être inventée ou produite q u ’en d é t a il , et
suivant les besoins de sa cause.
L a première idée q u i préoccupa la veuve V i ll e v a u d
et son conseil intime fut q u ’il lui fallait un titre pour
légitimer une demande contre le colonel C h am b a u d :
cela était embarrassant; le colonel ne l u i avait rieu
promis : il ne lui avait remis q u ’ une note à consulter,
propre à la diriger dans les démarches qu elle avait à
faire et dans les renscignemeps q u ’elle avait à recueillir;
mais ces difficultés devaient être bientôt surmontées
par les heureuses dispositions de la veuve V i l l e v a u d ,
aiclee du génie de son digne coopérateur. La note à
consulter, du colonel C h a m b a u d , devait servir deb a se
à l’écrit que l’on m éd it a it ; e t , au moyen d ’ un chan
gement et d ’une addition, ajoutés à la rédaction
la
veuve Vill ev aud se fait écrire et fa b r iq u e r un titre ,
�C 4o )
q u ’elle dépose, le 3 juin 1 8 1 8 , chez Me C â v y , notaire
à Clernicmt.
C e tt e pièce est ainsi conçue r
« Il existe une hypothèque de 11,000 francs, que la
« veuve V i l l e v a u d a placée sur une maison à C lerm on t,
« et
je
« sur
lu i
dem ande
main-levée pour la faire transférer
un domaine de m o nt a g n e , de la valeur
de
« 3 o,ooo f r . , qui n ’est grevé d ’aucune hyp ot hèq ue,
«
e t JE PROMET S LA. G A R A N T I R E T L A F A I R E T E N I R Q U I T T E .
« S ig n é A .
Si
CllAM BAUD.
»
l ’on rapproche cette pièce fausse de la note û
consulter, donnée par le colonel, et rapportée
à
la
page 20, on voit que l ’inventeur, pour faire un billet
de garantie d ’une pièce aussi simp le, n ’a eu besoin,
en la copiant et en la revêtant d ’une fausse signature,
que de faire demander la main-levée
et
p a r le c o l o n e l ,
d a n s son in té r ê t}
en substituant aux mots o n d e
m a n d e , ceux-ci : j e l u i d e m a n d e , e t d ’ a j o u t e r ensuite à
la rédaction de cette note à consulter, la p r o m e s s e d e
garantir et cle fa ir e tenir quitte > comme conséquence
nécessaire de la main-levée que le colonel avait de
mandée, et que la. veuve Vi llevaud devait lui accorder.
C e premier pas f a it, la veuve Ville vaud cite, le
3 août 1 8 1 9 , le colonel C h ain b au d eu conciliation.
Dans cette citation, ou elle demande contre le colonel
le paiement du montant de son obligation, et conclut
à l ’adjudication de dornmages-intérêts, elle expose, eu
termes généraux, q u ’ellq a été victime du dol
etde
la
fraude pratiqués par le colonel pour lui faire souscrire
�l ’acle du 27 janvier 18147 contenant abandon de son
hvpothèque; que cet acte était fait clans les intérêts
du colonel, créancier de G ira rd , q u i , par ce m o yen,
était parvenu à mettre sa créance à couvert; la veuve
Villevaud ajoute q u ’ott ne parlera point de toutes les
m anœ uvres, de tous les m oyens que mit en usage le
co lo n el C h a m b a u d y mais que lorsq u’elle a consenti à
l ’établissement de son hypothèque sur le domaine de
la G ara ndie , le colonel
lui
rem it
un écrit klans leq u el
il lu i prom it toute garantie. A u reste, la veuve V i ll e
vaud ne donne point copie de cet écrit, et n ’indique
pas le notaire chez lequel il est déposé.
Les parties comparurent au bureau
de paix.
La
réponse du colonel fut simple : il n ’est point partie
en l ’acte du 27 janvier 1814 ? cet acte était consenti
au profit de G ir a r d , qui pouvait disposer de l'o bli
gation en faveur de qui bon lui semblerait; ainsi le
colonel ne devait ni ne pouvait rien promettre à la veuve
V ill ev aud; mais le colonel déclarait en outre n ’avoir
ja m a is é c r i t , s i g n é , ni d é l i v r é aucun engagement
à cette veuve; il la sommait de représenter cette pièce,
protestant de
f a u x
} et se faisant, à cet égard, réserve
de toute action civile et criminelle.— L a veuve V i ll e
vaud exhiba alors d ’une expédition d ’ un acte de dépôt
de cette pièce chez C a v y , notaire, et ajouta que si
çet écrit 11 était p a s du c o lo n e l, ce serait une nou
v elle supercherie q u ’elle n’a f>u soupçonner.
Ainsi, en réunissant ce qui est contenu en 'la citar
lion et au procès-verbal, relativement à cette pièce,
6
�t f r i
( 4
0
on voit que la veuve était préparée à répondre aux
objections; que l ’écrit devait être présenté comme
a y a n t é t é r e m i s p a r le c o l o n e l ,
le n iait, la
fa u sseté
lu i
et que si ce dernier
de cet écrit devait être invoquée
comme moyen par la veuve V i l l e v a u d , et être pré
sentée comme l ’ouvrage du colonel, et
une su p erch erie
employée par lui pour tromper la v e u v e , en lui fai
sant
l u i
-
m êm e
rem ise
d ’une pièce aussi importante ,
comme vraile, q u o iq u ’elle fût fausse. L a suite appren
dra comment la veuve V i ll ev au d a été ensuite obligée
de reconnaître la fausseté de cette pi è c e , de l ’aban
d on ner, ainsi que de démentir l ’odieuse fable dont
elle avait accompa^jié cette production.
On
pourrait penser que la résistance du colonel
C h a m b a u d , et les moyens q u ’il employait pour la
justifier, inspirèrent à la veuve V ill ev a u d quelques
craintes, de salutaires réflexions; peut-être même ses
remords l ' e m p ê c h è r e n t en e f f e t , pendant plus de huit
m o i s , de former sa demande ; et il
est p r o b a b l e
que
cette femme n ’aurait point rompu le silence, si le
colonel, pressé par le désir de repousser la calomnie
dont il était l ’o b je t , et sentant d ’ailleurs la nécessité,
dans l ’ intérêt de ses enfans, de détruire et faire dé
clarer fausse la pièce q u ’elle avait osé produire contre
l u i , ne l ’avait lui-même prévenue.
L e 22 avril 1820, le colonel C h a m b a u d somma ,
par acte extra-judiciaire, la veuve V i ll ev au d de dé
cl ar er si elle entendait se servir de la pièce p:>r elle
déposée chez M r C a v y .
C e l l e f e m m e r é p o n d q u ’elle
�C 4 3 -)
F
n ’entend rien aux affaires; que tout ce q u ’ e lle sait ,
c ’est q u e l l e a donné au co lo n el onze m ille fr a n c s
dont elle n ’a rien to u ch é ; d ’ailleurs, la veuve Y i l l e
v a u d , sans s’expliquer sur la pièce qui faisait l'objet
de l ’acte auquel elle avait à répondre, finit par déclarer
q u ’elle
ofire de s’en rapporter à la décision de deux
jurisconsultes.
Cett e réponse est des plus singulières. C e n ’est plus,
en effet, un b ille t de garantie que lu i a remis le
co lo n el C ha m ba ud} pour lui tenir lieu de l ’ hypotbèque
q u ’elle aband onn ait, mais c’est actuellement nnc somme
de 11,000 fr. q u ’elle, veuve Y i l l e v a u d , a donnée au
colonel C h a m b a u d , et q u ’elle réclame. Il n ’est plus
question de pièce ou de titre qui puisse lui donner
action contre le colonel.
Quoi q u ’ il en s o i t , le colonel donna des suites à
cette première démarche. L e 22 mars 1820 , la veuve
Y il l e v a u d fut assignée devant le tribunal
civil de
C l e r m o n t , pour répondre-sur la demande qui était
formée contre elle, i° en d é s a v e u et lacération de la
pièce déposée chez M* C a v y ; 20 en réparation d ’ hon
n eu r , et suppression d ’écrits calomnieux; 3 ° en dommages-intérèts applicables aux pauvres, du consentement
du colonel C h am b a u d .
La veuve Y il l e v a u d était enfin obligée de s’expliquer j
il fallait répondre à la demande du colonel : tous dé
tours, tous subterfuges devenaient désormais impossibles
et inutiles; la vérité allait être connue : et la veuve
Y i l l e v a u d savait bien q u ’elle ne p ou v a it so u te ni r, par
�44 )
aucune ressource, le singulier titre q u ’elle avait eu
(
l ’audace (le se créer.
L a veuve V illev aud hésite encore : près d ’ un mois
s’est écoulé sans q u ’elle se soit arrêtée à aucun parti.
U n retour franc à la vérité pou vait désarmer son ad
versaire et la Justice, lui rendre des droits à l ’estime
q u ’elle avait cessé de mériter; mais le conseil intime
l ’obsède; il lui fait entendre que son ignorance doit la
mettre à l ’abri de t o u t e s poursuites relativement à la
pièce fausse; q u ’elle en sera quitte pour d é c l a r e r que
cet écrit lui a été remis, p a r personnes i n c o n n u e s de
la part du colonel; enfin , la v e u v e , ainsi rassurée,
travaille, de concert avec son digne coopérateur, au
plan de diffamation qui doit être substitué au billet
de garantie f a u x , que l ’on était forcé d ’abandonner.
C ’est alors que la qualité de maire du colonel et de
créa ncier de la veuve J^ illeva u d est destinée à donner
de la force et dé la v r a i s e m b l a n c e a u x moyens de d o l
et de fr a u d e q u ’elle veut employer; le colonel l ’aura
excédée de sollicita tion s verbales, il les aura renouvelées
plusieurs fois par écrit
la veuve "Villevaud s’arrête
là; c’est d ’abord tout'ce q u ’elle invente. Les menaces
du colonel de faire partir son f i l s ,
ses sollicitations
pou r obtenir les écrits q u ’il avait eu l ’imprudence de
lu i adresser, la scène de Chevalier, ne devaient point
figurer dans ce premier plan. L e génie même ne crée
pas tout du premier jet.
Knfin, six ans et sept mois s’étaient
l’acte de transfert
de . l ’ h y p o t h è q u e de
écoulés
depuis
la veuve Ville-
�(45 )
vau d ; la conscription avait ¿té abolie depuis le même
tems; il y avait cinq ans et demi que la veuve V i l l evaud s’était libérée envers le colonel C h a m b a u d ; de
puis juillet
i
8 i 5 , le colonel avait cessé ses fonctions
de maire, et le notaire G ir ard avait disparu dans le
moi s
de novembre de la même année, lorque la veuve
V ill ev a u d , dix mois après la citation en conciliation,
et deux mois après les poursuites que le colonel avait
exercées contre elle, se décide elle-même à former sa
demande, par exploit du 12 juin 1820.
Les conclusions de la veuve Villevaud ont pour objet
de contraindre le colonel k lui rembourser la somme
de 11,862 fr. 5 o c . , q u ’elle prétend que le colonel a
touchée à sa place, dans l ’ordre Fonghasse, et à l u i
payer 6000 francs pour dommages-intérêts.
Si l ’on en croit le libelle de cet exploit, l ’acte du
27 janvier 18 1 4 est n u l , parce q u ’il est le fruit du
dol et de la fraude pratiqués par le colonel C h a m b a u d ,
dans son intérêt, et pour s’approprier, comme créan
cier de G i r a r d , et au détriment de la veuve V i ll e v a u d ,
le montant de l ’obligation Fonghasse. C e dernier a
effectivement employé, pour l ’obtenir, les manœuvres
les plus coupables. Maire de sa co m m une, et créancier
de la veuve V ill ev aud, il a abusé de l'influence que
pouvait lui donner cette double qual ité ; d ’abord il a
employé des sollicitations verbales; les ayant vainement
réitérées, il les a renouvelées p a r é c r it, CE
qui
SERi
JU STIF IÉ y enfin la veuve Vill ev aud n’a été vaincue
que p a r un nouvel écrit (¡ni lu i est p a r v e n u , ( ¡u c llc
/
�a cru être de la main du c o lo n e l, et signe' p a r lu i.
A u re ste , la veuve Vill ev aud ne parle point encore
de la menace que lui aurait faite le colonel C h a m b a u d ,
de faire partir son fils comme conscrit.
Les expressions de la veuve V ill ev au d sont remar
quables : les sollicita tion s du co lo n el ont é té renou
velées p a r é c r it ! ........ Combien de fois? O ù sont *ces
écrits? pourquoi la veuve Vi ll ev aud ne les rapportet-elle pas? — E l le a é té 'vaincue p a r un nouvel écrit
q u i lu i est p a r v e n u , q u e lle a cru être de la main du.
c o lo n e l, et sig n é p a r l u i ! ....... Mais cet écrit est-il
autre que celui déposé chez M e C a v y ? Dans ce cas où
est-il? pourquoi ne le produit-elle pas? S i, au contraire,
c ’est le m êm e , cette pièce est fausse; la veuve V i l l e
vaud est obligée d ’en convenir; mais encore la veuve
V illev aud
se contredit elle-même sur le fait de la
remise de cet éc rit, p u is q u e , dans sa citat ion, elle
(lit que le co lo n el le lu i a r e m i s y q u ' a u bureau de
p a i x , elle soutient que la fa u s s e té serait une nouvelle
supercherie d u c o lo n e l; q u e , dans l ’acte extrajudi
ciaire , elle refuse de s’expliquer sur cet é c r i t , et
cherche
à dénaturer le f a i t , en substituant une somme
de onze m ille f r a n c s 3 p a r e lle prétendue donnée au,
c o lo n e l, au b illet de garantie q u e lle aurait reçu de
l u i , tandis q u e , dans l ’assignation du 12 j u i n , elle
détruit elle-même toutes ces premières déclarations, eu
disant que l ’écrit lu i est p a r v en u , expressions qui font
parfaitement comprendre que le colonel n ’aurait pas
remis lui-même U la v e u v e V i l l e v a u d la pièce dont il
�s ’a g it , mais q u ’il l ’aurait f a i t parvenir à celte femme
par un tiers. Ainsi la veuve V i l l e v a u d ; après avoir
commence par fa b r iq u e r un titre f a u x pour se créer
un droit contre le colonel, a ensuite recours au men
songe pour excuser une action aussi criminelle , et
donner quelque apparence à la calomnie qui devait
servir de fondement à l ’imputation de clol et de fra u d e
q u ’elle voulait substituer à la pièce fausse pour sou
tenir sa demande. Mais ce q u ’ il y a de certain sur ce
p o i n t , c’est que la veuve Vill ev aud ne rapporte aucun
écrit établissant des so llicita tio n s j ou constatant une
promesse de garantie de la part du colonel; que tou t
se réduit à la production de la note à co n su lte r, si
favorable au colonel, et si propre à dévoiler la con
duite artificieuse de la veuve Villevaud.
Dans ses conclusions signifiées, la veuve V i ll e v a u d
ajoute aux imputations contenues dans le libelle de
son e xp loit, que le colonel a employé la menace pour
la porter à souscrire l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ; q u ’il
a même contraint sa vo lo nté, en la m enaçant de fa ir e
p a rtir son f i l s com m e conscrit.
L e colonel C h am b a u d devait penser q u ’enfin la
veuve Vill ev a ud avait épuisé toutes ses ressources; il
crut en conséquence q u ’ il était de sou devoir de lui
répondre, et publia un premier Mémoire à cet effet.
Ses moyens étaient aussi simples que péreuiptoires.
D ’ab ord , partant du fait certain q u ’il n’avait con
tracté aucun engagement vis-à-vis la veuve V i l l e v a u d ,
et q u ’étant prouvé que cette femme avait fabrique
�une pièce fausse pour se faire un ti tr e , il soutenait que
toute action de dol et de fraude, relativement à l ’acte
du 27 janvier 1814 , ne pouvait être dirigée que contre
G i r a r d , partie en cet acte, et qui seul en aurait profité.
L e colonel disait ensuite q u ’il n ’avait jamais été
créancier de G ir a r d ;
q u ’ainsi il 11’avait jamais été
intéressé, même indirectement, à l ’acte dont la nullité
était demandée; mais q u e ,
lors même q u ’il serait
établi que G ira rd était le débiteur du colonel , la
veuve Ville vaud ne pouvait tirer de c e l l e c i r c o n s t a n c e
aucun parti avantageux, pu isque , par sa négligence
et à défaut d 'acceptation et de notification de la délé
gation faite en sa fa veur , par l ’acte du i 3 mai 1809,
cette obligation Fonghasse n ’avait jamais cessé d ’être
la propriété de G ir a r d , qui avait conservé la iacullé
de subroger à ses droits qui bon lui semblerait, sans
que la veuve V ill ev aud put s’en plaindre et critiquer
ce transport.
En fin le colonel C h am b a u d répondant aux im pu ta
tions qui lui étaient adressées, et notamment aux
menaces q u ’il aurait faites de faire partir le fils de la
V i ll ev a u d comme conscrit,
faisait observer que ce
jeune homme, disgracié de la n a tu r e, petit de taille,
estropié d ’ une main , avait des motifs de réforme telle
ment évidens, q u ’ il n ’avait aucune difficulté à craindre
ou à surmonter pour l ’obtenir; que d ’ailleurs, en fait,
cette réforme étant du 24 janvi er, 11’avait pu être la
cause impulsive ou influente de l’acte du 27 janvier^
qu'elle précédait de plusieurs jours,
�(
49 )
L a cause en cet état fut, portée au tribunal civil de
Cle rm ont j elle y fut l ’objet
d ’une discussion très-
solennelle, et il est important d ’analiser le jugement
q u i int ervint, le 11 août 1820, et qui se fait remar* quer par la solidité, la profondeur et la clarté de ses
motifs.
L a veuve V ill ev au d concluait à la nullité de l ’acte
du 11 janvier i 8 i 4 j et demandait contre le colonel
la restitution de la somme qu il avait reçue par suite
du transport de l ’obligation Fonghasse.
A l ’appui de ces conclusions, la veuve disait que
l ’acte du 11 janvier 1 81 4 était l ’œuvre du dol et de
la fraude du colonel, auquel elle avait profité, ainsi
q u ’elle offrait de le prouver. E lle ajoutait q u ’elle avait
été induite à consentir cet acte par les sollicitations
verbales et écrites du co lo nel, et par les menaces q u i
lui étaient faites de faire partir son fils comme conscrit,
faits dont elle offrait également la preuve. En fin e lle
a r tic u la it, com m e f a i t n ou vea u 3 q u ’elle se proposait
également d ’établir par témoins, q u e ,
postérieu rem en t
ïi l ’acte du 11 janvier 1814* le colonel l ’avait sollicitée,
de remettre les d e u x b illets q u i l lu i avait don n és 3
sous le p rétexte que ces d e u x p ièces étaient désorm ais
inutiles.
Sur ce premier point :
L e ju g e m e n t , s’arrêtant au principe qui exige que
to u t
demandeur
établisse
sa
demande ,
reconnaît
d ’abord en f a i t , que la veuve V i ll e v a u d ne prouve
rien ; que la fraude d o n t elle se plaint est invraisem7
�( 5o )
b la ble; que les faits q u ’elle articule sont inadmissibles
et sans gravité ; que la fausseté même de quelques-uns
est manifeste. E n droit : les premiers juges pensent
que
l ’admission de la preuve
offerte par la veuve
Y i l l e v a u d , outre q u ’elle serait une contravention for
melle à la règle qui défend l ’admission de la preuve
dans tout différend qui excède en valeur la somme de
i 5 o francs, et un exemple de la facilité avec laquelle
on peut renverser les conventions, doit dans l ’espèce
particulière être d ’autant plus f o r t e m e n t rejetée, que
l ’objet de la veuve Y il l e v a u d serait d ’o b t e n i r , sans
titre contre le colonel, une condamnation infamante
de la somme de 10,862 francs.
E x a m in a n t ensuite l ’article 1 1 1 6 du Code c i v i l ,
inv oq ué par la veuve Y i l l e v a u d , le jugement reconnait
q u 'il 11e peut s’appliquer q u ’aux parties contractantes5
q u e , dans ce cas seulement, on peut dire que Tune
a trompé l ’ a u t r e , m a i s q u e , dans l ’espèce, cet article
ne pouvait être i n v o q u é , p u i s q u e le c o l on e l était
étranger à l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 , et n ’en avait
retiré aucun bénéfice.
Les premiers juges croient devoir ensuite se fixer sur
chacun des faits articulés par la veuve V illev aud .
Ils s’occupent d'abord des sollicitations verbales et
écrites q u i lui auraient été adressées par le colonel.
Les premiers juges, après s’être convaincus du peu
d ’importance et de l ’insignifiance de ces sollicitations,
rejettent à cet égard la preuve offerte par la veuve
Yillevaud,
et se motivent sur ce que ceito femme
�n'avait point déclaré accepter l ’emploi fait en sa faveur
p ar
l ’obligation du i 3 mai 1809, et n ’avait même pas
pris d ’inscription en ver tu de ce titre ; sur ce que
l ’emprunt fait par Fonghasse n ’était autorisé par la
mère que jusqu’à concurrence de la somme de 10,000 fr.,
nu lieu de celle de 1 1 , 1 7 7 ^r * ? montant de l ’obliga.tion ; enfin sur la raison déterminante que C h am b aud
n ’étant pas créancier de G i r a r d , n'avait aucun intérêt
à l ’acte du 27 janvier 1814*
Q u a n t aux menaces faites par le colonel à la veuve
„Villevaud, et q ui auraient eu pour objet d ’inspirer
des craintes à cette femme sur le départ de son fils
comme conscrit,
L e tribunal rejette également la preuve de ce f a i t ,
parce que le colonel, comme maire, ne pouva it avoir
aucune influence au conseil de révision, où il n ’avait
pas même voix consultative; parce que le fils V i ll e v a u d
était atteint d ’infirmités q u i rendaient sa réforme im
m anq uab le; enfin parce que les opérations du conseil
de révision étaient terminées dès le 24 janvier 1 8 1 4 ,
conséquemment avant l ’acte du 27 , consenti par la
V ill e u a u d à G i r a r d , et hors la présence du colonel
Chambaud.
La justice devait enfin s’ occuper du fait art ic u lé ,
pour la première fois,
Villevaud,
à l ’audience,
par la veuve
et consistant à soutenir que le colonel
l ’avait sollicitée de lui remettre les deux billets q u ’il
lui avait adressés, comme désormais inutiles.
S u r ce p o i n t , le t r i b u n a l considère q u e ce fait n ’a
�été articulé q u ’en désespoir de cause. Il fixe ensuite
son attention sur le défaut d ’intérêt du colonel, q ui
n ’avait accepté la cession du 5 février 1 8 1 4 j» fIue pour
obliger le sieur Ch am b aud-B la nchar d et être utile à
Bouchet. E xa m in an t la pièce produite et avouée, le
tr ibunal reconnaît que cette note , qui ne contient
aucun conseil (ce q ui d ’ailleurs serait insignifiant)',
n'est autre chose q u ’ un Mémoire à consulter, propre
à éclairer la V ill e v a u d et à la d i r i g e r dans les renseignemens q u ’elle avait à prendre. Q u a n t au second écrit
déposé chez M e C a v y , et argué de faux par le colonel,
sa fausseté est reconnue; un m o tif relève même à cet
égard les variations de la veuve V i l l e v a u d , q u i , dans
sa c i t a t i o n , soutient que le co lo n el le lu i a j'em is,
tandis q u ’ensuite.elle déclare q u ’on le lu i avait f a i t
parvenir. Toutes ces circonstances, jointes au retard
de q u a t r e m oi s a p p o r t é à l ’inscription de la veuve
V i l l e v a u d , au fait c e r t a i n q u e l ’ i i yp oi l iù cj ue légale
avait pour garantie d ’autres biens que le domaine de
la G a ra n d ie , et réunies au silence gardé par la veuve
Vi ll ev aud pendant quatre ans et d e m i, et lorsque tous
les dangers q u ’elle signale étaient passés, et que conséquemment ses craintes devaient avoir cessé; tous ces
motifs réunis décident le tribunal à rejeter les preuves
offertes par la veuve Vi ll ev aud.
Il fallait ensuite examiner la demande du colonel
C h a m b a u d , consistant à obtenir la suppression <1« la
I’ièce fausse déposée chez M* C a v y , et des donnnagesintérêts.
�fÛ» ' *¡09
( 53 )
Su r le premier chef de cette demande, le tribunal
reconnaît la fausseté de la pîece, fausseté q ui était
d ’a i l l eu rs
prouvée par la sommation faite par le colonel
et par le silence gardé par la veuve V i l l e v a u d ; et sur
le
second,
le tribunal pense que l ’ignorance de la
veuve V i ll e v a u d peut l ’excuser; q u ’ il est possible que
quelques malveillans l ’aient trompée et induite en
erreur.
E n conséquence, le t r ib u n a l , statuant sur les deux
demandes, déboute la veuve V i ll ev au d de celle par
elle formée ;
déclare
fausse
la
pièce déposée chez
M° C a v y ; ordonne q u ’elle sera rayée et biffée de ses
minutes; et condamne la veuve Vill ev a ud aux dépens,
pou r tous dommages-intérêts.
C e jugement, en rendant au colonel C h a m b a u d une
justice rigoureuse et éclatante, ét ait, à l ’ égard de la
v e u v e ,V i l le v a u d , un acte d ’indulgence, dont toutefois
son adversaire se félicitait. L ’attention que le tribunal
avait portée à l ’examen de cette cause, les motifs pnissans q u ’il avait développés à l ’appui de son jugem ent,
l ’espèce de pitié q u ’il montrait pour les malheurs de
cette fe m m e, tout semblait se réunir pour l ’éclairer
et dissiper son erreur, si toutefois les passions pouvaient
se calmer à lu voix de la raison.
Mais la veuve V i ll e v a u d n’était pas vaincue; bientôt
elle interjette app el, prépare de nouveaux artifices, et
devient plus menaçante que jamais. L e colonel C h a m
baud devait faire la triste expérience q u ’ il est bien peu
d ’ hommes q ui sachent se garantir de l ’esprit de pré-
�vention, ennemi mortel de la justice et de la vérité.
Les déclamations, sans cesse répétées,
de la veuve
V i l l e v a u d , ses feintes douleurs, la perte q u ’elle éprou
v a i t , attachent à sa cause un jurisconsulte éclairé ,
mais dont l ’a me privilégiée
ne peut supposer tant
d ’astuce et de perfidie. Bientôt les apparences les plus
légères, les indices les plus équivoques sont réunis avec
art ; la haine de la cliente parait diriger la plume de
l ’avocat, q u i , sans a u t r e e x a m e n , d o n n e créance aux
faits les plus invraisemblables.
U n M é m o i r e parait
pour soutenir l ’appel; la chaleur et la rapidité du
s tile , les suppositions q u ’il co nt ient, des rapprochejnens injurieux pour le colonel, tout y semble réuni
pour amonceler des nuages funestes sur le fait à exa
m in er; et l ’adresse de la composition pourrait un ins
t a n t en imposer, si le défaut de critique q ui a inspiré
ce travail ne v e n a i t f r a p p e r les esprits ju d ic ieu x, et
leur montrer que le r é d a c t e u r , s e m b l a b l e à c e l u i q u i ,
à force de fixer une place v i d e , croit y voir un objet
q u i n ’existe pas, n’avait fini par regarder comme réels
les faits les plus invraisemblables et les plus absurdes.
Quoi q u ’ il en soit, la veuve Vill ev a ud annonce dans
son Mémoire que les faits de la cause n ’avaient pas
été suffisamment éclaircis en première instance; que des
circonstances graves avaient é té om ises; cependant la
lecture la plus attentive montre q u ’ il ne contient autre
chose que les faits déjà connus, et que la seule circons
tance nouvelle serait que « depuis le j u g e m e n t , la veuve
« Villevaud a appris q u ’après la co n lo c t io u de l ’acte t
�p
(55,)
« èt lorsqu’elle se fut retirée, C h a m b a u d , Girard et
« Chevalier entrèrent dans une ehambre à coté, d ’où
« ils sortirent après un entretien secret, et que le
« sieur Chevalier dit k son maitre-clerc, en présence
« de C h am b a ud et de G ira rd : Vous ne ferez l ’ins« cription de la veuve V i l l e v a u d , sur le domaine de
« la G aran d ie , que quand on vous le dira». On verra
bientôt ce que l ’on doit penser de ce dernier fait et de
la bonne foi de celle qui l ’a inventé.
C e Mémoire contient, au reste, deux aveux pré
ci eux; le premier est la reconnaissance formelle, faite
par la veuve V i ll e v a u d , de la fausseté de la pièce dé
posée chez M e C à v y ; elle avoue q u ’à cet égard il a été
bien jugé , et q u ’elle s’est
assurée que
cette pièce
n ’était ni écrite ni signée de la main du colonel.
Plus h au t, après avoir parlé de son désespoir et des
sacrifices q u ’elle était résignée à faire, elle ajoute
« Mais ce qui ne lu i permit plus d ’hésiter, ce fut u n
« écrit q u ’on lui fit parve nir, qui paraissait signé
« par C h a m b a u d , par lequel il lui
garantissait
for-
« mellement la validité du transfert». Ainsi , d après
la veuve Vill ev aud elle-même, la cause déterminante
de l ’acte q u ’elle a consenti était la pièce fausse, qui
lui serait parvenue p a r v oie indirecte
et p a r d ’autre
personne que le co lo n el. E n admettant cette explica
tion , comment ce dernier pourrait-il être responsable
de l ’erreur de la V i l l e v a u d ? ..........
Mais la veuve V i l l e v a u d n ’était poi nt satisfaite •
elle aspirait à la c él é b ri té , v o u la it faire d u b r u i t , et
j
�■
espérait
'
(
56
)
q u ’ une grande publicité
rendrait
sa cause
meilleure, en ajoutant à la gravité de ses diffamations.
C on tr e toutes les convenances et tous les usages reçus,
sur-tout en matière civile, un article est inséré dans
u n des journaux d u département', la veuve Ville vaud
y est peinte comme une victime du dol et de la fraude
pratiqués par le colonel.......... Ce-derni er pouvait ré
pondre -, mais il a d ù dédaigner de pareils moyens ,
laisser son adversaire goûter l ’affreux plaisir attaché à
la méchanceté satisfaite , et attendre avec calme et
respect sa justification de la justice de la Co ur.
D ISCU SSIO N .
L ’analise exacte et raisonnée des faits de la cause
faisant parfaitement
connaître
l ’esprit de passion ,
d ’injustice et de haine qui a animé la veuve V i ll e v a u d ,
. lors des poursuites q u ’elle a dirigées contre le colonel
C h a m b a u d , e t les s e n t i m e n s généreux q ui dirigeaient
ce dernier, lors des actes q u i l u i o n t été consentis,
ainsi que son défaut d ’intérêt à rien faire de nuisible
à la veuve V i l l e v a u d , il semble que toutes explications
ultérieures seraient inutiles pour faire repousser l ’appel
de cette femme.
Cependant,
po u r ne
rien laisser à dés irer,
examinera
les différentes questions
présenter;
et,
q ui
on
peuvent se
pour plus de c l a rt é , on divisera la
discussion en différons p a r a g r a p h e s q u i auront pour
objet de démontrer :
Que la demande de la veuve V i ll e v a u d excédant
�i 5 o francs, et cette femme n ’ayant jamais été. dans
l'impossibilité de se procurer un titre , ne peut y
suppléer par la preuve par témoins;
20 Que l ’intérêt de la veuve Vill ev a ud étant d ’avoir
une h yp oth èque , l ’acte du 27 janvier 181/j- lui était
avantageux ;
que
d ’ailleurs
le
colonel
C h am b aud
n ’ayant aucun intérêt à lui nuire, et étant au contraire
grandement intéressé à la conservation des ses droits,
ne peut être supposé avoir coopéré à aucune fraude;
3 ° Q u e , dans les circonstances de la cause et dans
la position ou se trouvaient les parties, les principes
repoussent toute idée de dol et de fraude;
4 ° E n f i n , et dans tous les cas, que les faits articulés
par la veuve V i l l e v a u d , soit ceux antérieurs à l ’acte
du 27 janvier, soit ceux qui ont accompagné cet acte,
soit enfin ceux q ui l ’ont s u iv i, ne sont q u ’un tissu de
contradictions et de mensonges.
§ IerL a dem ande de la veuve V d le v a u d ex cé d a n t 1 £>0f r . y
et cette fe m m e n ’a yan t jamais é t é dans l isipossi
b i l i t é de se procurer un TITRE, ne p eu t être admise
à y sup p léer p a r la preuve p a r tém oins.
Les principes qui servent à prouver cette proposition
,S0nt simples et laciles à établir.
L ’article i 3 / | i
d u C o d e civil v e u t q u ’ il soit passé
acte de va n t notaire ou sous signature p r iv é e , de toutes
8
�choses excédant la somme ou valeur de i 5 o francs.
L a loi n ’admet d ’autre
exception à cette règle,
que le cas oii il y a commencement de preuve par
écrit (Gode civ il, article 1.347), et cel u i où il y a eu
impossibilité de se procurer une preuve littérale.
( C o d e c i v i l , article i 3 /|8 ).
La
veuve Vi ll ev a ud ne peut point invoquer la pre
mière exception, puisque sa demande est de 10,862 fr.
20 centimes, et q u ’elle ne rapporte aucun commen
cement de preuve par écrit : il convient donc de se
fixer sur la seconde.
L ’ordonnance de Moulins gardait le silence sur ce
point -, la cause en était sans doute que personne
n ’étant tenu à l ’impossible, on ne peut reprocher de
n ’avoir point de preuve par écrit à celui qui n ’a pu
s’ en procurer : Im p ossibilium n u lla o b lig a tio , dit la
loi 1 8 j j f . D e rcgulis ju r is .
deux excep
tions fondées sur l ’impossibilité de se p r o c u r e r des
L ’o r d o n n a n c e d e
1 GG7,
en établissant
écrits dans une nécessité pressante, la première « pour
« dépôt nécessaire, ru in e , tu multe ou naufrage, ou
« en cas d ’accidens imprévus » (a rt . 3 , titre 2 0 ) , la
seconde « en cas de dépôt fait entre les mains de l ’hôte
« ou de l ’ hôtesse en logeant dans une hôtellerie » ,
11’énonçait point le principe général auquel ces excep
tions doivent se rattacher; mais il est évident que
c’étaient des cas restés dans les termes du droit commun,
où l’admission de la preuve testimoniale ne devait
avoir d ’autres bornes que la
prudence
des juges , la
�loi n ’ayant pu la défendre. C ett e doctrine, fondée sur
la raison, a été développée, il y a plus d ’uu siècle,
par un grand magistrat, M. l ’avocat général Joly de
F l e u r y , qui établit que les cas d ’ impossibilité ne sont
point des exceptions, mais bien des cas q ui n’ont ja m a is
é t é , qui n ’ont ja m a is pu être compris dans la prohi
bition (i ).
C e silence de notre ancienne législation devait être
remarqué par un esprit aussi judicieux que celui du
savant P o t h ie r; aussi cet a u t e u r ,
pour
faire cesser
cette omission, propose-t-il deux principes qui ont
en tr ’eux une corelation in t im e ,
et dont les consé
quences bien déduites peuvent suffire pour résoudre
toutes lés questions sur l ’admissibilité de la preuve
par témoins.
L e premier principe est « que celui q ui a pu se
« procurer une preuve par écrit n ’est pas admis à la
« preuve testimoniale , pour les choses excédant la
« valeur de 100 francs » ( a u j o u r d ’hui i 5 o fra n cs ). —
( T r a it é des Ob lig ation s, n° 7 5 i ) .
L e second principe est « que toutes les fois qu il n ’a
« pas été possible de se procurer une preuve é c r it e ,
« la preuve testimoniale est admise ». ( V o y e z id e m ,
n° 77 5 )L ’article i 348 du Code civil a recueilli ces règles,
et leur a donné force de loi. Il établit e n f effet une
(i)
Plaidoyer du a août 1 7 0 6 ,
des Audiences.
I
rapporte à sa dalc au Journal
�exception à la prohibition de la preu ve , « tontes les
« fois q u ’ il n ’a pas été possible au créancier de se pro« curer une preuve littérale de l ’obligalion qui a été
« contractée envers lui ». E t pour empêcher
tonie
méprise sur le genre d ’impossibilité que la loi désigne,
le législateur donne de suile des exemples propres à
développer le principe q u ’ il a posé, à faciliter sa jusle
application,
et à développer,
par les conséquences
q u ’on en peut tirer, ainsi que par les analogies, quelle
est la nature des impossibilités qui d i s p e n s e n t de sc
procurer un éc rit, et qui permettent de faire admettre
la preuve testimoniale.
Ainsi l ’article 1 3 48 nous apprend que l ’exception
, q u ’ il établit s’a p p l iq u e ,
i° A u x obligations q ui naissent cles quasi-contrais
et des d élits ou quasi-délits ;
■ 20 Aux dépôts n é c e s s a i r e s faits en cas d ’in cen d iey
ruine, tum ulte ou n a u fra g e, et à ceux faits par les
voyageurs en logeant dans une hôtellerie ;
3 ° A u x obligations contractées en cas iVaccidens
im prévus , ou l ’on ne pourrait pas avoir fait les actes
p a r écrit ;
4 ° A u cas oii le créancier a p erdu le titre qui lui
servait de preuve litté r a le , par suite d ’ un cas f o r t u it ,
im p rév u , et résultant d ’une f o r c e m ajeure.
O u pourrait examiner si les cas prévus dans cet
article sont restrictifs ou simplement én o n cia lifsy mais
nne pareille question serait oiseuse dans
l ’espf Ve
par
ticulière, pu isq ue , en considérant ces cas comme de ^
�sim p le s
exe m p les
3 il est impossible que la veuve
Vi llevaud puisse se placer dans une analogie q ui lui
soit
f av or a bl e .
E n effet :
L a veuve V i ll e v a u d et le notaire Girard figuraient
seuls dans l ’acte du 27 janvier 1814? cIa ^ avait pour
objet de faciliter la libération de Fonghasse, et de
donner à la veuve le domaine de la Garandie pour
hypothèque : le colonel C h a m b a u d n ’était point partie
en cet acte; quelles obligations ce titre pouvait-il donc
imposer à un étranger ;} rl o u t son effet 11e devait-il pas
se restreindre aux parties contractantes? et si la veuve
Vi llevaud avait reçu du colonel une promesse de ga
rantie,
ne devait-elle point se procurer une preuve
littérale constatant cet engagement, et fixant ses suites
et ses effets?
L a veuve Vi ll ev aud ne peut se placer dans aucune
exception; sa position n ’ava it , en effet, rien d ’extraor
dinaire; elle traitait avec un de ses concitoyens, avait
pris tous les renseignemens propres à l ’éclairer, passait
avec Girard un acte par-devant notaire; et si le colonel
devait y figurer comme garant, 11 etait-il pas naturel
que la veuve Ville vaud exigeât q u ’il y devînt partie,
ou q u ’au moins il souscrivit uu -engagement parti
culier ?
I l n ’y avait à cet égard aucune difficulté à vainc re,
puisque la veuve V i l l e v a u d (page 7 de son Mémoire)
nous apprend que le c o lo n el était chez C h e v a lie r, le
37 janvier 1 8 1
4 5 et
q u ’il est effectivement
certain
�( 62 )
q u ’il y parut pour remettre à cette femme le sursis
q u ’il lui avait promis; conséquemment, toutes les
parties étant en présence, les explications étaient fa
ciles, et rien n ’était plus simple que à 'e x ig e r un titre
d u co lo n el com m e g a ra n t, ou de ne p a s traiter avec
G irard.
Cela devient bien plus évident, quan d on considère
que la veuve Y il le v a u d reconnaît q u ’elle sentait ellemême la nécessité d ’avoir un titr e , et q u ’elle n ’aurait
point traité sans l ’écrit q u o n l u i fit. p a r v e n i r , et q u i
lu i paraissait sign é p a r C ham baud (Voy. le Mémoire,
page G).
Suivant elle, la promesse du colonel lui
serait donc parvenue avant le 27 janvier; mais, à
cette ép o q u e , se trouvant avec lui chez C h e v a lie r,
au moment décisif, lorsqu’elle allait contracter avec
G i r a r d , que ne s’expliquait-elle avec le colonel Cliamba ud sur un billet de garantie donné sans o b je t , et
q u ’elle tenait, n o n pas tlu c o l o n e l , mais q u i lui serait
parvenu p a r v o ie in d irecte?
Dans l ’ordre ordinaire des choses, tout cela serait
inconcevable; mais quan d on connaît les faits de cette
cause, les explications deviennent faciles. L a veuve
V ill e v a u d n ’a obtenu du colonel C h am b a u d que la
note à consulter, q ui lui a servi h prendre les renseignemens qui lui étaient nécessaires; elle n ’a reçu do
lui aucun conseil, et encore moins la promesse d ’au
cune garantie. L a fausseté de la pièce déposée chez
INI* C a v y est aujourd’ hui reconnue; les variations do
la veuve Ville vaud prouvent s u f f i s a m m e n t q u elle l ’c|.
�.
( 63 )
fait fabriquer , ou q u ’au moins elle en a usé sciem
ment. A quoi donc doivent servir cette p iè ce , ces
faits, aveux et variations, s’ils ne prouvent point que
le colonel n ’avait contracté aucun engagement envers
la
veuve
Y i l l e v a u d ; que s’ il avait promis une garantie,
elle serait établie par ti tr e,
puisque la veuve avait
senti la nécessité d ’en avoir u n , et q u ’il lui était f a
c ile de l ’obten ir; q u ’enfin c’est cette nécessité même
qui a porté la veuve V i ll e v a u d à commettre une action
criminelle, pour se donner les moyens de diriger une
action contre le colonel ?...........
S II.
V in té r ê t cle la veuve V ille v a u d étant d 'a v o ir une
hy p oth èq u ej l ’acte d u 27 ja n v ie r 1 8 1 4 lu i était
avantageux. — L e co lo n el n ’avait aucun intérêt h
nuire h cette fe m m e y il était s au contraire} inté
ressé à la conservation de ses droits.
L a preuve de cette double proposition est facile à
faire.
O n s’assure de l ’ intérêt de la veuve Vill ev a ud à
souscrire l ’acte du 27 janvier 1B 145 fIl,i
donnait
une hypo th èq ue , en se fixant sur sa position an té
rieure, qu il iaut apprécier avec les principes les plus
élémentaires.
L a vente consentie par Girard à la veuve V i l l e v a u d
est du 21 juillet 1808; il y est dit que le vendeur
�( <54 )
lie pourra recevoir le dernier paiement qu'en f o u r
nissant hypothèque p o u r la to ta lité, ou en donnant
caution. U n e condition si essentielle n ’a été consentie
par Girard que par l ’acte de i 8 i 4 L ’obligation du i 3 mai 1809 était consentie, par
le sieur F on g h a sse, en laveur de G irard. L a
V ille v a u d n ’y
veuve
était poin t partie. C e t acte lui était
absolument étranger, et les déclarations et stipulations
q u ’ il contient 11e pouvaient lui profiter
qu elle les aurait formellement acceptées.
q u ’autant
E n f i n , la quittance du 12 mars 1812 est donnée
par la veuve V ille v a u d à G ira rd : le sieur Fonghasse
11 y com paraît point ; de manière que les énonciations
q ui y sont contenues ne pouvaient produire a son
égard aucune obligation.
L a position de la veuve Vi ll ev a ud étant connu e, il
iaut consulter les principes.
« On peut s t i p u l e r a u p ro f it <l’ un tiers, lorsque
« telle est la condition d ’une stipulation que l ’on fait
« pour soi-mème.......... C e lu i q u i a f a i t cette stip u la
it lion ne p eu t p lu s la r é v o q u e r s i le tiers a d é cla r é
« v o u lo ir en profiter ( C o d e civil, article 1 1 2 1 ) .
« L e cessionnaire 11 est sa isi, à l’égard du tiers, que
<1 par la signification du transport, f a it e au débiteur,
<, — Néanmoins, le cessionnaire peut également être
« saisi p a r l'a ccep ta tion du transport, f a it e par le
« d é b ite u r ,
parm i
acte authentique (Code c i v i l ,
« art. 1G90).
« «57, avant que le cédant ou le cessionnaire en(
�( 65 )
« sign ifié le transport au déb it eur ,
c e lu i-c i avait
a p a y é le cé d a n t, il sera 'valablem ent libe/e » ^Codc
c i v il , article 1691).
Tels sont les principes. Ils exigent si rigoureusement
la signification du transport par le cé da nt, ou l'ac
ceptation du déb it eur , q u ’ il a été jugé q u ’on ne peut
prendre inscription sans acceptation préalable et for
melle, et q u e , dans aucun cas, l'inscription ne peut
être réputée acceptation et en tenir lieu (1).
Il faut actuellement revenir sur la position de la
veuve Villev aud . Girard devait lui fournir une hypo
thèque ou une caution : elle n ’avait obtenu ni l ’ une
ni l ’autre.
Girard avait stip u lé p o u r elle dans l ’obligation d u
i3 mai 1809; mais cette stipulation pouvait être ré
voquée, la veuve V ille v a u d n ’ayant p oin t d é c la r é
v o u lo ir en profiter.
L ’énonciation comprise dans la quittance du
12
mars 1812 , donnée par la veuve Vill ev aud à G i r a r d ,
était absolument étrangère à Fongliasse, qui pouvait
valablement se libérer entre les mains de Girard et de
tout
cessi onnaire
qui aurait pris la précaution
negligee
par la veuve V i l l e v a u d , de signifier le transport ou
de le fa ir e accep ter p a r le débiteur.
Ainsi la veuve V i ll ev a u d n ’avait ni hypothèque
ni c a u tio n , ni garantie; elle devait vivement désirer
(1) Voyez Sirey, tomo 10 , partie 1” , page 209.— D enevcrs, tome 8,
partie 1” , page 269.
9
�une de ces sûretés, et ne pouvait céder à aucune im
pulsion ou sollicitation étrangère, lorsqu’elle acceptait
l ’aftectalion hypothécaire
qui lui était
donnée par
l ’acte du 24 janvier 1 8 1 4 j acte q u i , dans tous les cas,
n ’é t a i t , de la part de G i r a r d , que
l ’exécution
de
l ’obligation q u ’il avait contractée , par la vente du
2.1 juillet 1808, de fournir une hypothèque à la veuve
Villevaud .
Mais était-il de l ’intérêt du colonel C h am b au d de
tromper cette veuve ?
D ’abord le colonel n'était point créancier de Gira rd ,
avec lequel d ’ailleurs il n ’avait rien de commun.
La
veuve Vill ev aud lui devait, au contraire, une somme
de Gooo francs, par obligation du G avril 181 0; celle
obligation avait pour principale hypothèque le pré ,
acquis par la V i l l e v a u d , de G i r a r d , le 21 juillet 1808;
et peut-on supposer que le colonel eût voulu pratiquer
une fraude pour se nuire ¿1 lui-ninnc et perdre sa
créance, si la daine Dalb ia t exerçait une action hypo
thécaire, et si les hypothèques légales absorbaient la
fortune de Girard ?
Ces réflexions, en prouvant les deux propositions
que
l ’on a voulu examiner
dans
ce
paragraphe ,
ajoutent une nouvelle force aux moyens déjà développés
dans le premier, et rendent plus pressante la nécessité
où se trouverait la veuve Vi ll ev a ud de prouver par
litre la promesse de garantie q u ’elle soutient lui avoir
<‘té iuiic par le colonel, garaulie que^
da ns
les cir-
�( g7 )
constances, celtc femme n a p u ni désirer ni demander,
et que le
col on el
n ’avait aucun intérêt à lui offrir.
S III.
D a n s les circonstances de la cause } et dans la position
où se trouvaient les parties 3 les principes repoussent
toute idée de d o l et de f r a u d e .
Les circonstances de la cause et la position des,
parties ne pouvaient faire supposer que le colonel
C h a m b a u d aurait à répondre à une action de dol et
de fraude. Etranger à l ’acte de 18 1 4 ? n ’y ayant aucun
in té rêt, comment serait-il garant de ses suites? L a
veuve
Vi lle vaud ne rapporte aucun titre; elle en est
réduite à la note à consulter qui lui a été donnée par
le colonel C h am b a u d : comment cette n o te, destinée
à éclairer cette femme sur ses véritables intérêts, et
qui , sous aucun rapport , ne pouvait l ’induire en
erreu r,
servirait-elle
de fondement à la singulière
demande q u ’elle a formée ?
Q u ’enseignent les principes?
L e dol an nul le la convention , parce q u ’il produit ou
entretient l ’erreur q ui détruit le consentement dans son
principe (Code c i v i l , art. i 109). Mais pour que l’erreur
détruise le consentement, i l f a u t q u e lle soit déterm i
n a n te, et que les artifices ou finesses aient pour objet
d'induire la personne contre
qui
elles sont pratiquées à
une convention p r é ju d ic ia b le ........ , ou à la détourner
d ’une chose utile ( L o i 1 , § 2 , j f . D e dolo m a lo .).
�f G8 )
Mais, pour q u ’ il y ait ouverture à une action pour
cause de d o l , il ne suffit pas q u ’il y ait eu des fin esses
et des artifices pratiqués pour induire q u elq u ’ un à une
convention préjudiciable, ou le détourner d ’une chose
u t i l e , il faut encore que celui q u i se plaint puisse
prouver q u ’i l n a p u se garantir des embûches q u i lui
étaient tendues; autrement il ne saurait soutenir q u ’il
y a eu d o l , puisque, d ’une p a r t , il peut arriver que
celui qui serait présumé l ’avoir pratiqué eût été trompé
comme l u i , et q u e , de
l ’a u t r e ,
il a u r a i t
à. s’imputer
la faute d ’avoir négligé de s’éclairer, quand il le pou
v a i t , sur ses véritables intérêts, et de n ’avoir point
examiné les faits sur lesquels reposaient les craintes ou
les espérances qui l ’ont in du it à une a c t i o n , ou l ’en
ont détourné.
L ’intention de tromper est le principal et même
l ’ unique caractère auquel on puisse distinguer le dol ;
aussi il n ’ y a p o i n t de d o l , si une partie a été trompée
sans que son erreur puisse être attribuée à personne :
c ’est ce qui le distingue de la faute : D o lu s , ciun adest
lœ d en d i animus, cu lp a , fa c tu m inconsultum quo a lteri
nocetur.
Les lois et les jurisconsultes font une distinction
entre le dol réel, d o lu s re ip sd , cas dans lequel on est
trompé par la chose plutôt que par la pe rs on ne, et
si n u llu s d o lu s intervenu s tip u la n ts, sed res ipsa in se
tlolum habet (loi 3 6 , J f. D e v . o
b
et le dol déter
minant ou in cid en t, le dol personnel, d o lu s m alus
q u i dcdit causant con tractui. ( l l n b c r u s auJ/< D e dolo
m a lo , n° /j ; Y o ë t , c o d ., u°» 3 et /j).
�h e d o l incident et personnel opère la nullité radi
cale de l ’a c t e , et donne ouverture à une a c t i o n , parce
que les manœuvres qui ont été pratiquées l’ont seules
déte rm iné, et en ont été l ’unique cause; mais le d o l
réel n ’est point une cause de n u l l i t é , parce que la
volonté de la partie contractante n ’a été déterminée
par aucun artifice q u ’elle ne p û t découvrir; q u ’elle
s’est elle-même trompée sur les accessoires de son enga
gement , sur la chose ou sur le p r i x , et q u ’elle a k
s’imputer de n ’avoir pas pris toutes les précautions qui
pou vaient faire cesser son ei’reur.
L a loi ne voit ni fraude ni d o l , là où celui q u i
se plaint a à se reprocher sa faute, son imprudence,
ou une confiance excessive. Elle' ne peut venir au
secours que de ceux qui ont été victimes d ’artifices ou
d ’embûches dont toute la prudence humaine n ’a pu les
garantir; autrement il y a lieu à l ’application de la
maxime V ig ila n tib u s ju r a subveniunt.
Ces principes sont ceux de la C o u r de cassation,
q u i , dans un de ses arrêts, pose comme maxime « que
« les prom esses fa lla c ie u s e s ne sont pa s d o l y que
« celui qui en est victime ne peut a ccu ser que sa
« confiance excessive y q u ’en conséquence il ne peut
« invoquer la preuve testim o n ia le, sous p rétexte de
« d o l et de fr a u d e . » ( i )
( 1 ) 2 avril 1 8 1 2 . — Cassation.— T u r i n . — S i r o y , to m e i 3 , partie 1” ,
page 1 4 6 .— D e n cY crs, Ionie 1 1 , p a itic 1” , page m .
�( 7° )
Voici l ’espèce de cet arrêt :
U n e propriété rapportant 3 £>oo fr. de revenu avait
été vendue 16,000 f r . , avec stipulation de la faculté
de rachat pendant deux ans. L ’acquéreur entretint le
vendeur dans l ’espérance de lui rétrocéder les objets
v e n d u s , même après l ’expiration du délai apposé à la
faculté de réméré; il empêcha même le vendeur d ’em
prunter la somme qui lui était nécessaire pour exécuter
ce rachat. U ne instance s’étant engagée, la C o u r de
T u r in crut voir dans ces faits un dol et une fra ud e, et
en ordonna la preuve.
Mais l ’acquéreur se pourvut en cassation, et soutint
que l ’arrêt avait violé les articles 1 3 4 1 ? i 346 et i 348
du Code civil, et avait admis une exception qui n ’était
point portée dans les article 1 347 et 1 3 48 du même
Code.
L e vendeur répondait à ces moyens par l ’exception
de dol.
Mais la C o u r de cassation
cassa
l ’arrêt de la C o u r
de T u ri n , par le double m oti f q u ’il y avait contraven~
tion à V article treize cent quarante-un du C o d e civil,
en ce que cette C o u r avait admis une preuve que la
loi rejetait, contre et outre le contenu en un acte, et
d ’ un fait allégué après l’acte; q u ’ il y avait également
fa u s s e application de l ’article
voilée sous
1111
i
3 /j 8 du C o d e civil,
vain prétexte de dol et de
fraude,
puisque le vendeur pou vait avoir la preuve . littérale
du fuit art iculé; q u ’il ne pouvait se plaindre ni de dol
�(
71
)
ni de frau d e, mais bien accuser sa faute et son im
prudence.
L ’application de ces principes est facile à faire.
L a veuve Yil lev aud prétend avoir été trompée sur
la valeuj du domaine de la G a r a n d ie , et sur l ’exis
tence des hypothèques grevant cette propr ié té.— Mais
d'abord la veuve Y il le v a u d se plaint d ’un d o l réel qui
ne pouvait donner ouverture à aucune action; ensuite
elle po u vait , pour la valeur du domaine, prendre des
renseignemens sur les l ie u x , s’assurer au bureau des
hypot hèques, qui est p u b li c , s’il existait ou non des
inscriptions sur la Garandie, et consulter des avocats
relativement aux hypothèques légales. Si elle n ’avait
point pris ces précautions, elle aurait commis une
faute et une imprudence, mais elle ne pouvait accuser
personne de dol ou de fraude.
L a note à consulter qui lui avait été remise par le
colonel devait lui servir de guide et la diriger dans les
renseignemens q u ’elle avait à prendre. Si elle s’cn fût
rapportée aux énonciations contenues dans cette note,
et q u ’elle eût été trompée, elle ne p o u v a it , d'après les
principes, accuser le colonel C h am b a u d de dol et de
frau d e,
puisque ce dernier pouvait s’abuser comme
elle sur la véritable valeur du domaine de la Garandie,
et sur 1 existence des inscriptions, et que les éclaircissemens a prendre sur ce point la regardaient exclusi
vement. Mais les indications données par le colonel
étaient exactes, et sont justifiées par le rapport des
acquisitions et des baux à ferme. L a veuve Y i l l e v a u d
�I 72 J
avait use de cette note pour prendre des renseignemens
ultérieurs sur la valeur du domaine,
ainsi que le
prouve la déclaration de Charles Constant. L e notaire
Chevalier avait retiré pour elle un certificat négatif du
bureau des hypothèques. L ’hypothèque légale avait
pour sûreté d ’autres biens plus que suffisans pour la
garantir. L a veuve était donc parfaitement éclairée;
et l ’on cherche v a in e m e n t , en droit comme en f a it ,
quels motifs ont pu la porter à accuser le colonel do
dol et de fraude.
S
IV.
L e s f a it s a rticu lés p a r la veuve V ille v a u d , soit c e u x
antérieurs à l'a cte d u 27 ja n v ie r , soit c e u x q u i ont
accom p agné cet a c te } soit enfin c e u x q u i l ’ont
s u iv i 3 n ’étant q u ’ un tissu de contradictions et de
m ensonges} la
p r e u v e no s a u r a i t
en être adm ise.
L ’exposé raisonné des faits de cette cause, et les
détails q u ’a nécessités la discussion à laquelle on s’est
déjà liv r é , doivent dispenser de rentrer dans l ’examen
de leur ensemble; e t , pour ne pas user de redites ou
de répétitions inutiles, on se bornera à examiner, dans
ce paragraphe, quelques-uns des faits qui n’ont pu
trouver place dans le plan que l ’on s’était proposé, et
à quelques réflexions relativement à ceux sur
la veuve Vi ll ev aud insiste le plus
servent de base à ses objections,
fortement,
l es qu el s
et
qui
�( ?3 )
Q uan d a u x fa its antérieurs à l ’acte du 27 janvier
1 814 ,
On sait que le colonel n ’avait avec Girard aucune
liaison d ’afï’ection ni d ’ailaires; q u ’ il n’avait aucune
relation avec C h e v a lie r, et que la veuve Y i l l e v a u d ,
au contraire, accordait toute sa confiance à ce dernier,
dont elle se faisait honneur d ’être la protégée. L a
communauté d ’intérêts qui existait entre Girard et
C hevalier est également c o n n u e •, et l ’on sait comment
le colonel, créancier de la veuve Y i l l e v a u d , q u ’il vou
lait contraindre au remboursement, fut induit à lu i
accorder un dél ai, et comment il lui donna une note
à consulter, propre à l ’éclairer sur la valeur réelle du
domaine de la G aran d ie , q u ’elle devait recevoir en
hypothèque de G ir a r d , et sur les inscriptions qui pou
vaient peser sur ce bien.
Rien n est plus simple que l'enchaînement de ces
faits, et plus propre à prouver la franchise du colonel
et la loyauté de sa conduite ; cependant la veuve insiste
et soutient q u ’en souscrivant l ’acte du 27 janvier 1 8 1 4 ,
elle n ’a fait que céder aux sollicita tion s et aux menaces
du co lo n el.
Mais quelles sollicitations le colonel C h a m b n u d ,
absolument étranger aux affaires de G i r a r d , grande
ment intéressé au contraire à la
pr os pé ri té
de celles de
"Villevaud , a-t-il pu lui adresser, pour la porter à
un acte nuisible, et dont les funestes efi’ets devaient
rejaillir sur lui-même? U n e pareille supposition n ’estelle pas invraisemblable? peut-elle être accueillie par
10
�( 74 J
un esprit judicieux , lors même que la fausseté du
fait sur lequel elle repose 11e serait pas démontrée, et
q u ’il 11e serait pas p r ou vé, par le rapport de la note à
consulter, que le colonel, bien loin de faire aucunes
sollicitations à la veuve V i ll e v a u d , n ’ a f a i t que céd er
¿1 ses in sta n ces, en lui donnant les renseignemens per
sonnels q u ’il pouvait avoir, et en lui délivrant une
note propre à la diriger dans les éclaircissemens ulté
rieurs q u ’elle avait à se procurer ?
Quelles sont les menaces du colonel, qui ont pu
porter la veuve V ill ev aud à contracter avec Girard^
S ’en laissait-elle im poser p a r la q u a lité de maire ? .......
— Mais le colonel exerçait ces fonctions en 1806, et la
veuve Vi ll ev a ud ne craignit point de lui intenter un
procès pour le défrichement d ’un chemin !
L e craign ait-elle com m e d é b itr ic e ? ........... — ■Mais
précisément cet te q u a l i t é devait la mettre à l ’abri de
toute espèce d ’em b ûch e, si t o u t e f o is le colonel eut été
capable d ’en tendre, puisque sa créance avait pour
hypothèque principale le pré D a l b i a t , à la garantie
'duq ue l le domaine de la Garandie devait être affecté
par l ’acle de 1 8 1 4 ’•
A -t-e lle é té d écid ée p a r la m enace de fa ir e p a rtir
son f i l s ? — Mais , comme l ’ont observé les premiers
juges, le colonel C h a m b a u d n ’était point membre d u
conseil de révision ; comme m ai r e , il n’y avait pas
même voix consultative. D ’ un autre co té, les infir
mités du jeune Villevaud rendaient sa ré/orme indis
pensable; enfin les opérations du ce conseil étaient
�( 7* )
terminées dès le "i!\\ et l a c t é souscrit par la veuve
V i ll ev a u d est du 27 janvier 1 8 1 4 * Aucunes menaces
relatives à la conscription ne pouvaient donc influencer
sa détermination.
Mais encore tous ces faits seraient moins des ruses
et des artifices constituant le dol et la fraude , que
des actes de violence; et à quelle époque cette violence,
le pouvoir et l ’influence du colonel C h a m b a u d au
raie nt-ils cessé? L a conscription était abolie dès le
11 avril 18145 le colonel avait cessé d ’être maire en
juillet
i
8 i 5 ; la veuve V ill ev au d s’élait libérée le 1 6
février de la même année : elle n ’avait donc plus rien
à craindre; et ira-t-on supposer q u e l l e eut gardé le
silence ju sq u’au 12 juin 1 8 2 0 , et q u e l l e se fut laissé
prévenir par les poursuites du colonel relatives à la
pièce fausse q u ’elle osait produire, dans la circonstance
sur-tout ou la déconfiture de Girar d était connue et
publique par sa disparition, qui remonte au 11 no
vembre 1 8 1 5 .
E nfin la déclaration de la veuve Villevaud (V oyez
son Mémoire, page 6) fait cesser toutes difficultés re
latives à l’ influence de ces sollicitations et menaces.
Suivant e lle -m ê m e , elle n ’a cédé q u ’à Y écrit fju ’on
lu i J it parvenir : cet écrit serait donc la véritable
cause de son engagement; mais comme la fausseté de
cette pièce est au jo u rd ’ hui reconnue; que les variations
et les mensonges de la veuve Villevaud ne permettent
pas de se méprendre sur l’auteur de ce f a u x , lu
ïuiualilé de ce fait sert à lout expliquer; e t , se réunis-
�( 7g )
sant aux autres circonstances de la cause, elle doit
prouver à l ’esprit le plus prévenu, que la veuve Y il levaud n ’a pas du craindre,
pour nuire au colonel ,
d ’ajouter à une action coupable tout l ’odieux d ’une
calomnie.
Les circonstances qui se rattachent im m édiatem ent
à l ’acte du 27 janvier 1814 étaient des plus simples.
C e t acte fut reçu par Chevalier. C e notaire pro
dui si t, comme la veuve Y il l e v a u d le reconnaît ellem ê m e , un certificat négatif d ’ i n s c r i p t i o n s s ur les biens
de Girard. L e colonel avait promis à sa débitrice un
sursis d ’un an; il parut un moment chez Chevalier
pour faire la remise de cette pièce : la veuve Y il le v a u d
veut tirer parti de cette circonstance, et cote dans son
Mémoire (page 9 ) , comme fait nouve au , et qui n ’a
pas été soumis à l ’examen du tribunal de C le r m o n t ,
« q u ’après la confection de l ’acte, et lorsqu’elle se fut
« retirée, C h a m b a u d , G i r a r d e t Chevalier entrèrent
«
dans une cham bre
à
c ô té , d ’où ils sortirent
après
« un entretien s e c r e t et que le sieur C hevalier dit
« à son m a ître-clerc, en présence de C h a m b a u d et de
« Girard : V o u s ne fe r e z l'inscription
« Y il l e v a u d
de la veuve
sur le domaine de la Garandie , que
« quand on v ou s le dira. »
D ’abord ce (ait, tel q u ’il est présenté, est insigni
fia nt, et ne prouve rien contre le colonel; et comme le
dol et la fraude ne se présument pas, q u ’ils doivent
être clairement prouvés, la veuve Villevaml
ne
pour
rait les établir que par des faits tellement posiliis ,
�( 77 )
q u ’ils pussent résister à toute autre interprétation; et
q u ’a p p r e n d -
elle ? Que Cham baud entra dans
une
cham bre à c o t é , avec G irard et C heva lier; q u ’ ils en
sortirent après un entretien secret. — Us étaient donc
sans témoins? Quel était leur entretien? était-il secret?
avait-il pour objet les affaires de la V i ll e v a u d , ou des
choses indifférentes
et qui
lui fussent absolument
étrangères? A u ta n t de questions q u ’il est impossible
d ’éclaircir.— M ai s, à la s o r t ie , Chevalier dit à son
maitre-clerc : V o u s ne fe r e z rinsci'iptioTi que quand
on v o u s le d ir a .— -Que signifie encore cela ? N ’esl-il
pas naturel q u ’ un notaire se réserve la direction des
affaires de son cabinet, q u ’il les ordonne, qu il les sur
veille? et dans les expressions prêtées à Chevalier y at-il un seul mot qui puisse prouver, et même faire
supposer q u ’ il ne serait pas pris d ’inscription dans
l ’intérêt de la veuve V i ll e v a u d ?
Mais cette assertion est encore une invention et une
calomnie odieuse de la part de la veuve Villev au d. A u
27 janvier 1 8 1 4 ? Ie maître-clerc de Chevalier était
M e Pinea u, homme recommandable sous tous les rap
ports, et aujourd hui notano a Saint-Cieimain-Xjain—
brou.
L o r s q u e
le Mémoire d e l à veuve Vi ll ev aud parut,
le colonel, qui n’avait aucune preuve à redouter, sentit
cependant la nécessité d ’expliquer sa conduite en fait,
et de dévoiler l'abominable intrigue dont 011 voulait
le rendre victime. L ’avocat q u ’il avait honoré de sa
confiance exigeait d ’ailleurs des éclaircissemens ; des
questions furent en conséquence adressées à M e P i n e a u ,
�(78 )
q u i, le iG février 1 8 2 2 , répondît « q u ’il ne se rapu p ela it p a s la présence du colonel, et encore moins
« sa participation auæ prétendus f a i t s rapportés au
« Mémoire de la veuve Y i l l e v a u d , et qui ont suivi
« im m édiate men t, dit-on, la confection de l ’acte de
« transfert » (1). Cependant ce fait était assez no
ta b le, cette conversation assez singulière pour frapper
l ’attention j et il est probable que si elle eut existé,
celui qui recevait la recommandation q ui en était
l ’objet se la s er ai t rappelée.
Les circonstances postérieures à l ’acte du 27 janvier
ï 81 4 ? et colles qui se rattachent à l ’acte de transport
de l ’obligation, fournissent encore quelques objections
h la veuve V ille vaud .
On se rappelle les eflorts de Girard et de Chevalier
pour négocier l ’obligation Fonghasse, efforts renou
velés même après le transport qui avait été fait aux
sieurs C h a m b a u d $ on s a i t a u s s i les causes q ui ont
porté le colonel C h a m b a u d à accepter la cession de la
moitié de cette ob lig ati on , et comment il en a payé
le prix dàns les intérêts du sieur B o u c h o t, auquel il
voulait être ut il e ; il est donc inutile de revenir sur
des faits aussi clairement établis, et de s’arrêter aux
objections q u ’ ils détruisent.
Mais la veuve Y i l l e v a u d pose en fait que la cession
qui transfert la créance Fonghasse au sieur C h am b a u d
(1) Cette lettre Cit au dossier,
�( 79 )
est du même jour que l ’acte qui lui donne une hy
pothèque sur le domaine de la Gaiàndie.
dates détruisent cette assertion.
Mais les
L ’hypothèque
ac
cordée par Girard à la veuve V ill ev au d est du 27 jan
vier 1 8 1 4 j
cession de 1’obligation est du 5 février
( n e u f jours après) ; et comme un acte authentique
fait toujours, par l u i - m ê m e ,
foi de sa date , toute
autre explication serait in utile, si le colonel , pour
mettre de plus fort en évidence la mauvaise foi de
son adversaire, 11e rapportait un extrait du répertoire
de C h e v a lie r, oii l ’on trouve quatorze actes intercalés
entre ceux des 27 janvier et 5 février 18 j 4Il
ne
faut pas revenir sur le retard apporté à
l'inscription
de la veuve "Villevaud; il a ete suffisam
ment établi que cette omission était du fait de cette
veuve ou de Chevalier son conseil, et q u e , sous a u c u n
rapport, elle ne peut être imputée au colonel, qui ,
au contraire, en a exigé la réparation aussitôt q u ’il
a pu la connaître.
On pourrait même se dispenser
de nouvelles explications sur le fait articulé par la
veuve V i l l e v a u d , pour la première fois à l ’audience ,
( j u ’e l l e a é t é s o l l i c i t é e d e r e m e ttr e L E S D E U X b i l l e t s
<jxie l u i avait, d o n n é s le c o l o n e l ,
s’ il 11e se présentait
un rapprochement frappant, qui montre tout à-la-fois
que la veuve V ill ev a u d a en son pouvoir les deux
pièces dont elle parle , et que le colonel n’a pu eu
réclamer la remise, une d ’elle étant insignifiante 011
absolument favorable à ses intérêts ,
étant absolument inconnue.
et l ’autre lui
�'£$1
( 8o )
E n effet, il est prouvé q u ’il existe deux pièces au
procès : la première est la note à consulter, donnée
par le colonel à la veuve Villevaud : c ’est elle qui ly.
rapporte 5 le colonel la reconnaît et s’en empare. O n
a pu apprécier combien les conséquences qui s’en dé
duisent sont peu favorables à celle qui la produit.
L a seconde est la pièce déposée par la veuve V ill ev aud
chez M c C a v y ; et comme cet écrit est faux; que la
veuve reconnaît elle-même q u ’il n'est ni écrit ni signé
p a r le c o l on el , c o m m e n t cc d e r n i e r l ’ a u r a i t - il d e
mandée, ne pouvant la connaître? C om m en t même,
la connaissant, l ’aurait-il réclamée, puisque ,
sous
aucun r a p p o rt, elle ne pouvait lui être opposée ?
A u rés u m é,
L a demande de la veuve V i ll ev a u d est non recevable
et mal fondée.
NoN-RECEVA.ni,r..— P u i s q u e , é t a n t de 10,862 francs
5o centimes, sa demande deva it, aux termes de l ’ar
ticle 1 3 4 r du Code c i v i l , être fondée sur 1111 titre;
que la veuve V i ll e v a u d , 11e pouvant se placer dans
aucune des exceptions prévues par les articles 1.347 ° ’t
1 3 4 8 du même C o d e , n ’ayant jamais été dans Finir
possibilité d ’obtenir un litre du colonel, chose qui lui
était au contraire très-facile, si ce dernier eut contracté
des engageinens envers elle. L a veuye V i ll e v a u d , ayant
au contraire senti et reconnu la nécessité d ’avoir <:o
t i tr e , puisque,
à l ’appui de sa demande,
elle
en a
produit un q u ’elle a ensuite été obligée d ’abandonner
�( 8 0
comme faux , ne saurait avoir d ’action contre le colonel
Chambaud.
M al
f o n d é e
.
— Parce que la veuve Vill ev aud avait
intérêt à recevoir l ’ hypothèque qui lui était accordée
par l’acte d u . 27 janvier 1814? puisque antérieurement
elle n ’avait ni h y p o t h è q u e , ni caution , ni garantie de
la sûreté de la vente que lui avait consentie Girard des
prés provenant de la dame d ’A l b i a t ;
colonel C h a m b a u d ,
parce
que le
bien loin d ’avoir intérêt de lui
n u i r e , devait au contraire, comme son créancier, et
ayant
pour hypothèque le pré d ’A l b i a t , désirer la
prospérité de ses affaires, et tout ce qui pouvait con
solider la propriété de cet héritage entre les mains de
sa débitrice : double circonstance qui rend invraisem
blable et détruit toute allégation de dol et de fraude
contre le colonel ;
Parce que la loi et les principes ne permettent pas
de regarder comme des ruses ou des artifices consti
tu ant le dol et la fraude , l ’erreur dans laquelle la
veuve V illev aud serait tombée relativement à la valeur
du domaine de la Garandie et des hypothèques q u i
pouvaient grever cetie propriété , quand bien même
les éclaircissemens q u ’elle aurait pris n ’auraient eu
d ’autre fondement que la note à consulter qui lu i
avait été remise par le colonel;
Parce q u e , enfin, les faits articulés par cette femme
ne présentent rien de pertinent; que la veuve V i ll e
v a u d , sans cesse en contradiction avec elle-même,
dément ou détruit ses propres assertions; que ses men-
�(8 , )
songes répétés, la pièce fausse dont elle a sciemment
fait us age , les artifices dont elle a constamment u s é ,
entourent sa cause d ’une juste défaveur, qui ne permet
pas à la justice de s’éloigner des règles, pour permettre
à la veuve Y il l e v a u d de hasarder la preuve de ses diffa
mations et de ses imputations calomnieuses.
L e colonel C h a m b a u d a enfin rempli la tâche q u ’il
s’ était imposée. L a dignité de la Justice et le respect
q u ’il lui porte ont du modérer les élans d ’une trop
juste sensibilité.
Victim e
de
la m a c h i n a t i o n
la plus
perfide et la plus atroce, il a dù en développer toutes
les causes avec modération, en faire connaître tous les
ressorts, sans se livrer toutefois k aucun sentiment de
haine ou de vengeance. Les détails dans lesquels il est
entré peuvent présenter quelque lo ngu eu r; mais les
effets de la calomnie sont si difficiles k détruire! L e
empoisonné, lancé par une main cr iminelle, part
avec ra p id it é , a t i e i n t l a v i c t i m e , la frappe comme
l ’éclair qui précède la fo u d re ; et si l a b le ss ur e n ’est
trait
point morte lle, elle est au moins longue et difficile k
g u é r ir , et trop souvent la cicatrice reste.
L ’indignité de la conduite de la veuve V ill c va ud a
été telle, son insistance k nuire si prononcée, que le
colonel C h a m b a u d aurait pu désirer une satisfaction
plus complète, et l ’obtenir de la justice de la C o u r ,
en interjetant appel incident du ju g e m e n t , et en pre
nan t des conclusions propres k faire supprimer les
écrits q ui le diffament et le calomnient. Mais que
peuvent signifier les déclamations de celle femme? Sou
�( 83 )
délire , sa bassesse et sa méchanceté sauraient-ils
atteindre u n homme d ’honneur, q ui devait des expli
cations à ses amis et à ses concitoyens........ , mais qui
doit être assez généreux pour ou blier et pa rd o n n er?
C e Mémoire aura sur-tout produit tout son e f f e t ,
s’il désabuse le jurisconsulte honorable qui a été la
première v i c t im e d 'a r t if ic es auxquels la bon t é et la
simplicité de son coeur ne pouvaient résister. L e plus
beau triomphe d u colonel serait de forcer la conviction
r
et de commander l ’estime de cet homme respectable :
toutefois i l ne désire pas q u ’il se repente, q u ’aucuns
remords, aucun ch agrin ne viennent troubler le cours
d ’une si belle v i e ! ........ mais q u ’au moins il apprenne
à mieux placer ses bienf aits, et que cet exemple lui
r a p p e l l e , pour
ne l ’oublier jamais , cette maxime
morale de Térence :
B en efa cta m ale c o llo c a ta m a lefa cta existim o.
L e Chevalier C H A M B A U D .
M e Jn. - C h. B A Y L E ainé , ancien A v o ca t.
M e B R E S C H A R D , A v o u é -L ice n cié .
ERRATA.
P age 1 1 , ligne 2 1 , au lieu de 1809, lisez 1812.
l b i l. Au lieu de la veuve V illevaud donne quittance à G ira rd , lisez
Girard donne quittance à la veuve V illevaud.
Page 13 , ligne 2 5 , au lieu de décembre, lisez novembre.
R IOM; IMPRIMERIE DE S ALLES; PRÈS LE PALAIS DE
JUSTICE»
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chambaud.1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Breschard
Subject
The topic of the resource
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
faux
experts
arbitrages
notables
domaines agricoles
opinion publique
chantage
infirmes
banqueroute
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, Pour le sieur Chambaud, Chevalier, Colonel d’État-Major, en retraite, Officier de l'Ordre royal de la Légion d'honneur, habitant de la ville de Clermont, intimé ; contre Jeanne Aubignat, veuve de Pierre Villevaud, Propriétaire à Royat, appelante. Quem sua culpa premet, deceptus omitte tueri. At penitus notum si teutent crimina, serves, tuterisque tuo fidentem praesidio. Horat., epist. 18.
Annotations manuscrites. « 13 octobre 1822. preuve ordonnée ».
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1791-1822
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
83 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2614
BCU_Factums_G2616
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53530/BCU_Factums_G2615.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Lagarandie (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
arbitrages
banqueroute
biens nationaux
chantage
conscription
Créances
doctrine
dol
domaines agricoles
experts
Faux
fraudes
hypothèques
illettrisme
infirmes
magistrats municipaux
notables
notaires
opinion publique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53529/BCU_Factums_G2614.pdf
451e21711534cff57cd88e109ef63056
PDF Text
Text
MÉMOIRE.
�COUR ROYALE.
MÉMOIRE
_
____
1 ere CHAMBRE.
POUR
;
A U B I G N A T . , V e uv e de
V ILLE V A U D
Propriétaire à
Appelante;
J e a n n e
P ie r r e
Royat„
CON
T R E
*
Le sieur P i e r r e C H A M B A U D . , AdjudantCommandant, Offer de la Légion-d’honneur,
, ancien Maire de C hamalières e t Royat ,
habitant de la ville de Clermont , Intimé
al'
•’i¡ J ‘illOiü
A
L veuve Villevaud a dénoncé à la justice une m anœ uvre dont,
'r
elle a été victi m e , et qui a entraîné sa ruine.
jr
C ette manoeuvre est l’ouvrage du sieur Chambaud , réuni avec
le sieur C h e v a lie r, notaire à C lermont , et G irard, notaire, à
Chamalières, ses deux amis.
Les deux derniers ont fait une banqueroute frauduleuse, et
sont en fuite,
Le sieur Chambaud est le seul que la justice puisse atteindre.
I l a été le principal instrument de la fraude; il en a conçu le
projet, il l’a dirigé avec art, il l’a mis à fin, il en a profité: en
résultat, il a touché 10,893 fr. 79 c., qui appartenaient à la veuve
Villeva u d , et qui lui étaient destinés..
�O ) •
Elle demande la restitution de cette somme ; si elle ne l ’a pas
obtenue en cause p rincip ale, c’est parce que les faits n’étaient pas
suffisamment éclaircis;
C ’est parce qu’elle avait omis d ’en articuler de graves, échappés
à sa mémoire affaiblie par ses m alheurs, ou qui ne lui étaient
pas alors suffisamment connus;
C ’est, enfin, parce qu’elle avait négligé de faire la recherche de
rènseignemens précieux qu’elle s’est procurés depuis.
A u jou rd ’hui, le dôl, Jà fraude, et les manœuvres pratiquées par
le sieur Chambaud, pour opérer la ruine de la veuve Y illc v a u d ,
et s’enrichir de ses dépouilles, sont dévoilés; et il n’échappera j)as,
devant la Cour, aux condamnations qu’elle a vainement sollicitées
contre lui devant le tribunal de première instance.
- ' n r F : ■!>
F A I T S :
M. Dalbiat, ancien procureur du Roi à Clerm ont, avait acquis,
par adjùdibatibn nationale0; lé i 3 juin 179 1, un pré situé à R o y a t,
appelé le ¿ré. du Breuil,' dépendant du prieuré de Royat.
M. Dalbiat revendit ce pré , le 3 frimaire an 11 , au sieur Girard,
notaire a Chamalières, moyennant 22,000 liv. tournois.
Cette somme ne fut stipulée payable que dans douze ans.
L e sieur Girard abusa de ce long intervalle, pour tromper les
habitans de Royat, auxquels il avait eu l ’art d’inspirer de la
confiance.
Il consentit, à plusieurs'habitans de cette commune, des ventes
pîfrticllcs' de ce pré du B r e u il, dont il toucha le prix.
La principale fut celle de dix jo urn au x, qu’il consentit, par
acte du 21 juin 1808, à la veuve Villevaud cl à Ligier Lourgoignon,
son gendre ; savoir , n e u f dixièmes pour elle, et un dixième pour
son gendre.1
L é ’prix de cette'vente fut fixé à 11,177 fr- 5° c ., ou 11,379 liv.
tournois.
Il fut payé sur ce prix 7,819 fr. comptant.
Les 3,io o fr. restans furent stipulés payables le 11 novembre
suivant.
�(3)
Mais il est dit que « le sieur Girard ne pourra exiger le re m '
» boursement de ladite somme restée d u e , qu’en fournissant une
>> hypothèque spéciale, pour la sûreté du prix total de la^prçsente
» ven te, avec faculté de prendre inscription ,.,;ott|en donnai^
» bonne et suffisante caution pour ta sûreté de laditehyp 0ti)èque. ^
Le sieur Girard parut se mettre en devoir de remplir cct en-^
gagement.
r> u
.oo. nn
L e i 3 mai i8 o g , il fit un prêt de roj862, fr; 5 o ç. au sieur
Fontghasse fils, et à la <lame veuve D é so ch e s, sa mèrp.
u, .
Ce prêt était destiné à former le cautionnement du sieur
Fontghasse, nommé receveur jpripcipalj.jdes.j Droits-réunis, à
Thiers ; il devait être remboursp aux prêteurs danç cin q ans r
c’est-à-dire, le i 3 mai i 8 i 4 *
•
,
,«r .
l"lu-uix
Cette somme fut hypothéquée spécialement .suc la maison ;de
•la dame Fontghasse, située rue de la T reille ; et on lit / dans
l ’obligation, la clause qui s u it:
ü{> j ’ • . .,
« Ledit sieur Girard déclare que ladite soipm e principale ci» dessus provient des deniers de Jeanne Aubignat, veuve Yille» v a u d , et de Ligier Bourgoignon, son gendre , et fait partie du
» prix de la vente que ledit sieur Girard lui a consentie d ’un p ré
» situé à R o ya t, suivant l’acte passé devant Chevalier et son
» collègue , le 21 juin 1808. A u moyen de laquellè déclaration,
» ledit sieur Fontghasse sera tenu , comme il s ’y oblige [ de ne
» faire le remboursement de ladite somme qu'en présence desdits
n Aubignat et Bourgoignon, pour veiller à l'emploi d'icelle, conjbr” nié ment audit contrat. »
A u moyen de cette précaution, les deniers de la veuve Villcvaud
étaient en sûreté; c’est-à-dire, qu’en supposant que le sieur Girard,
qui avait pris douze ans pour payer à M. Dalbiat le prix de
son acquisition du pré du B r e u il, ne satisfît pas àses engagcinens,’
et q u e lle , veuve Villevaud, fût recherchée par ce vendeur pri
m itif, elle retrouvait nécessairement son prix dans la maison
Fontghasse, attendu que l'hypothèque du sieur G irard, sur cette
maison, était la p rem ière, et que les sieurs et dame Fontghasse
ne pouvaient se libérer de cette somme sans la présence et le
�(4)
concours de la veuve Villevaud , et sans qu’il en fut fait emploi.
Cependant on verra bientôt qu’il en est arrive tout autrement:
Que l’obligation de 10,862 fr. 5o c . , consentie par les sieurs
et dame Fontghasse au sieur G ira rd , a passé depuis entre les
mains "du siéur Chambaud , son ami , son créancier et son
cessionnaire
Que cette somme a été touchée au préjudice de la veuve
Villevaud à qui elle était destinée ;
Que la veuve Villevaud a perdu sa 'sûreté sur la maison
Fontghasse;
Q u ’elle a été recherchée depuis par la dame Dalbiat pour son
acquisition du pré du B r e u il, qui n’avait pas été payée au sieur
Dalbiat par le sieur G irard, son acquéreur immédiat ;
Q u ’elle est obligée de payer cette acquisition une seconde fois;
Q u ’elle est ru in é e, et cela par le fait du sieur C ham baud,
qui s’est enrichi de ses dépouilles.
Com m ent tout cela s’e st-il opéré?
C ’est ce qu’il s’agit d’expliquer;
L e sieur ChainJjaud était maire de Chamalières et Royat.
Il a va it, a c e t i t r e , d a n s c e l t e c o m m u n e , c e t a s c e n d a n t que
donne sur le peuple l’habitude de commander et l’art de so
faire obéir.
11 était intimement lié avec le sieur Girard, notaire àChainalières,
et avec toutes les personnes de sa maison.
Com m e le sieur Chambaud était habituellémcnt dans la
maison G ira rd , il lui fut facile de s’apercevoir, sur la fin de
l ’année i 8 i 3 , du mauvais état de ses affaires, et qu’il était dès
lors en état de faillite, ou de déconfiture. On verra m êm e ,
dans la suite , qu il est p r o u v e , par scs propres a v e u x , qu’il en
avait une parfaile connaissance.
L e sieur Chambaud cfait créancier de Girard de sommes
considérables.
Le sieur Chambaud-lilanchard, son proche p a re n t, était dan»
la même position.
�/*<)
(5)
L e sieur C h a m b a u d chercha des l o r s , de concer t avec G irard,
à mett re à couv ert sa créance et celle de son parent.
Girard n ’ a v a i t d'effet disponible que l’obligation Fontghassey
mais cet e f l e t était la garantie de la v e u v e V illevau d , et l’emploi
des deniers qui formaient le prix de son acquisition du pré du
B rcu il-
11 fallait donc, avant tout, obtenir d’elle le sacrifice de ses
droits sur celte obligation.
L ’entreprise semblait difficile ; mais le sieur Chambaud avait
à faire à une paysanne illitérée, et qui n’avait pas m êm e l ’in
telligence ordinaire aux personnes de sa classe.
Il commença par employer auprès d’elle les moyens de
douceur et de persuasion ; il lui fit entendre qu’il avait besoin
du désistement de son hypothèque sur la maison Fontghasse ,
et qu’il lui ferait donner en rem placem ent, par le sieur Girard ,
une hypothèque sur son domaine de Lagarandic, situé com mune
de St-Barthélemy d’A y d a t , qui était en valeur de 3o,ooo fr, et
sur lequel il n’existait aucune hypothèque.
Ces premières tentatives verbales n’ayant pas r é u s s i , il ne
craignit pas de les consigner par écrit.
Il donna à la veuve Villevaud un écrit de sa m ain, qui est
rapporté au procès,
C e t^ c r it est conçu en ces termes:
« Il existe une hypothèque de 11,000 fr., que la veuve Villevaud
a placée sur une maison de Clermont.
« On demande qu’elle en donne main-levée pour la transférer
» sur un domaine de montagne de la valeur de 3o,ooo f r . , qui
n n’est grevé d’aucune hypothèque. »
1-ic sieur Chambaud cherchait, par cet écrit, à induire en
erreur la veuve Villevaud.
Ce domaine de Lagarandic, qu’il certifie valoir 3o,ooo fr., a été
vendu depuis 9,000 fr.
L l pendant qu’il attestait que ce domaine n’était grevé d’aucune
hypothèque, il était bien des fois couvert par l'hypothèque
légale de la femme G ira rd , ou par d ’autres hypothèques c o n
ventionnelles ou judiciaires.
�(6)
•
Q u o i q u ’il en soit, la veuve Villcvaud, qui ne savait ni lire,
ni é c r ir e , ayant communiqué ce papier à quelques personnes
de confiance, on lui en fit connaître l’insuffisance, et elle refusa
de se prêter à ce que le sieur Chambaud exigeait d’elle.
L e sieur Chambaud changea alors de ton avec la veuve Villevaud.
II lui avait prêté une somme de 6,000 fr,' par obligation passée
devant G ira rd , notaire, le 6 avril 1810.
Il n ’est peut-être pas inutile d’observer que l’intérêt ne fut
fixé dans cette obligation q u ’au taux légal de cinq pour cent ;
tuais q u e , dans la réalité, il fut convenu à dix, ce q u i .» été
religieusement exécute par la veuve V illevau d , qui a la preuve
écrite de la main du sieur C ham bau d , du taux auquel elle payait
cet intérêt.
L e sieur Chambaud trouvant la veuve Villevaud rebelle à scs
volo n té s, la menaça d’exercer contre elle des poursuites rigou
reuses pour la contraindre au remboursement de son capital,
dans un temps où l’état de ses affaires 11e lui permettait pas
d’eifectuer ce remboursement.
Mais Ces premières menaces n ’ayant produit aucun effet, il
en fit d’un autre genre.
La veuve \ illevaiid avait un fils aîné soumis à la conscription ;
cette loi n’avait jamais été si sévère que dans le passage de 1813 à
1814*
"
' L e fils Villcvaud avait, à la vérité, plus d ’un titre à l’e xem ption,
soit comme fils de veuve, soit comme peu propre d’ailleurs au
service m ilitaire.
Mais que pouvaient la raison et même la loi contre la puissance?
On menaçait de l’envoyer dans les charois de l’arm ée, où tout
conscrit pouvait être admis sans égard aux causes qui pouvaient
l'exem pter du service militaire.
Ce dernier coup porta le désespoir dans l’âme de la veuve
Villcvaud. Elle aurait tout sacrifié pour sauver son fils; mais ce
q»‘> ne lui permit plus d ’hésiter, ce fut un écrit qu’011 lui fit
parvenir, qui paraissait signé par le sieur Chambaud, par lequel
il lui garantissait, formellement la validité du transfert de sou
�(7)
hypothèque tic la maison Fontghasse sur le domaine de Lagarandie, qu’on lui assurait de rechef valoir 3o,ooo fr., e t-n ’être
grevé d’aucune hypothèque,
L a veuve Villevaud prit alors l e tparli’ de céder aux instances
du sieur Cham baud, et de faire ce qu’on exigeait d’elle.
L e sieur Chambaud redevint doux et caressant ; il luiindiqùa un jour pour se trouver chez Chevalier, notaire: elle
s’y rendit au jour indiqué ; elle y trouva le siéur Chambaud
Girard et Chevalier, qui l’y attendaient.
«
La veuve V illeva u d , qui ne savait ni l i r e , ni é c r ir e , n’eùfc;
besoin que de donner son consentement de se départir de son
hypothèque sur la maison Fontghasse, et de la transférer sur.
le domaine de Lagarandie.
On rédigea de suite un acte, dans lequel on expose que, par acte
du 27 janvier 1808, le sieur Girard vendit à la veuve Villevaud et
à Ligier Bourgoignon, son gendre, ce dernier pour un dixième
seu lem en t, un pré situé dans les dépendances de lloyat
moyennant 11,177 fr. 5o c., avec convention que le sieur Girard
serait obligé de fournir une hypothèque spéciale pour sûreté"de
ladite vente;
Que pour se conformer à celte clause, en présence et du
consentement de ladite Aubignat et dudit Bourgoignon,ilfe sieur
Girard avait prêté au sieur Fontgliasse et à la dame D é soch es,
sa m è re , la somme de 10,862 f r . , suivant obligation reçue par
ledit Chevalier, notaire, le i 3 mai 1809, avec déclaration, dans
ladite obligation, que les fonds prêtés provenaient du prix de la
vente dudit jour 21 ju in , et que le remboursement ne pourrait
en être effectué qu’en présence desdits Aubignat et B ourgoignon,
pour veiller à l’emploi de cette somme ;
Q u ’aujourd’hui, ladite Aubignat étant seule intéressée dans
cette atfaire, « et ne voulant aucunement gêner la libération
» dudit sieur Fontghasse , attendu que ledit sieur Girard offrait
» une garantie suffisante pour le prix de la vente ci-dessus datée
» par l’hypothèque dont il sera ci-après parlé,
» Elle consentait, comme elle consent par ces présentes, que
>> le sieur Fontghassc serlibère, hors sa présence, de ladite somme
�(8)
» de 10,862 fr. envers ledit sieur G ir a r d , ainsi qu’il avisera 7
» et sans qu’il soit tenu de veiller à l ’emploi d ’icelle.
» E n conséquence, est-il ajouté, du consentement présentement
» donné par ladite Aubignat, et pour lui donner une garantie
» plus que suffisante du prix de la vente dudit jour 21 ju in , le
» sieur Girard a spécialement affecté et hypothéqué un Corps
» de domaine situé au lieu de Lagarandie, commune de St» Barthélémy d’A y d a t , consistant en bâtim ens, p r é s , terres et
» pacages, sur lequel ladite Aubignat pourra prendre de suite
> inscription, conformément audit acte de vente précité. »
Il est bon de remarquer q u e , dans la contexlure de cet acte ,
on affecte de n ’exiger le transfert de la créance* de la veuve Villevaud, sur le domaine de Lagarandie, que dans l’intérét du
sieur Fontghasse, qui était étranger à cet acte, et qui l ’ignorait,
pour ne gêner aucunement, y est-il dit', la libération du sieur
Fontghasse, comme s’il avait iniporté au sieur Fontghasse de
payer les 10,862 fr. au sieur Girard, ou à la veuve Villevaud.
On peut encore remarquer qu’on affecte de dire qu’on offrait
à la veuve Villevaud une gar antie suffisante ; et de répéter plus
bas, une garantie plus que suffisante, quoique cette garantie fut
absolument i l l u s o i r e .
E n f in , on doit encore remarquer qu’il était convenu , par cet
a c te , q u ’on ferait de suite, au nom de la veuve Villevaud, une
inscription sur le domaine de Lagarandie; inscription qui devait
être faite par le sieur Chevalier, et aux frais de ceux qui avaient
exigé d ’elle un si grand sacrifice , tandis (¡ue cette inscription
n ’a été mise au bureau des hypothèques que le 11 niai 1814 »
trois mois dix-sept jours après la convention.
A la vérité, quand celle inscription eût été faite de suite,
comme l’exigeait l’a c t e , la veuve Villevaud 11’cn serait pas plus
heureuse , et sa créance n’en serait pas moins perdue : la valeur
réelle du domaine de Lagarandie étant bien des fois absorbée
par les hypothèques légales ou conventionnelles antérieures,
quoique le sieur Cliambaud eut attesté cent fois à la veuve Ville
vaud , verbalement et par é c r it , que ce domaine était en valeur
de 3o,ooo J r ., et n 'était grevé. d'aucune h ypothèque*
�y
y
(9 )
>
5- v j
Mais la veuve Villcvaucl a appris depuis, et postérieurement
au j u g e m e n t rendu au tribunal de Clcrmont , qu’après la con
fection de l’a i l e , ci lorsqu’elle se fut retirée de l’étude du notaire,
les sieurs Cliambaud, Girard et Chevalier entrèrent dans une
chambre à c ô t é , d’où ils sortirent après un entretien s e c re t,
et que le sieur Chevalier dit à son inaître-clcrc, en présence du
sieur Cliambaud et. de Girard : P^ous ne ferez l'inscription de la
veuve Vil/evaud, sur le domaine de JLcigarandie, tpie quand on
vous le dira.
I)e sorte que le retard de cette inscription n ’a pas été seule
ment 1’cffet d’une négligence impardonnable, mais l’efTet d'une
collusion reprehensible des trois personnages qui s’étaient réunis
pour tromper la veuve Villevaud , et la dépouiller de sa fortune.
L e sacrifice de la veuve Villevaud, de son hypothèque et de
son p rivilè g e , sur la maison Fontgliasse, a été à peine consommé,
que l’obligation Fontgliasse, débarrassée de toutes ses entraves/
est devenue la propriété du sieur Cliambaud; et cela, p ar'u n acte
de cession, qui a sans doute etc fait le même jour, mais qui
n’a ete date que de quelques jours après.
Cette cession, dans laquelle le sieur Cliambaud fait figurer avec
lui le sieur C liam baud, son p a ren t, se termine en ces termes :
« La •présente cession est faite moyennant pareille somme
» de 10,862 f r . , r,o c . , que ledit sieur Girard déclare avoir ct-de.» vaut. reçue desdits sieurs Cliambaud , dont quittance.
Expressions desquelles résulte la preuve mathématique , que
les cessionnaires étaient créanciers du sieur G ir a r d , puisqu’ils se
faisaient céder celle obligation en payement des sommes ci-devant
reçues d’eux par le sieur Girard.
L e sieur Chambaud , ainsi parvenu à ses lins , a cherché à
mettre a profil l’ Iu'ureuse position où il s’était [»lacé aux dépens
de la veuve Villevaud.
Il a poursuivi le payement de l’obligation dont Girard lui avait
làil le transport.
il a m is la maison Fontgliasse en expropriation forcée.
Ellp a été vendue juridiquement.
\
�( IO )
11 a poursuivi l ’ordre du prix.
Il a été colloque u tilem en t, cl il a touché seul, ou avec le sieur
Chambaud-Blanchard , son parent, 10,893 fr. , 79 c . , dans le
courant de l’année 1816.
Pendant que le sieur Chambaud touchait ainsi des deniers qui
avaient été destinés primitivement à assurer à la veuve Villevaud
le prix de son acquisition du pré du B reu il, q u ’elle avait compté
au sieur G irard, elle était recherchée en éviction par la dame
Dalbiat.
O11 a vu que le sieur Girard , en achetant du sieur Dalbiat
le pré du Breuil, avait obtenu douze ans de délai pour en payer
le prix.
L e sieur G ira rd , loin de se libérer du capital, n’avait pas
même été exact à payer les intérêts.
La dame Dalbiat, qui'était aux droits de son mari, se pourvut
alors contre les tiers - détenteurs de ce p r é , et spécialement
contre la veuve V ille v a u d , qui en possédait une portion consi
dérable.
La veuve Villevaud sc vit donc obligée de payer une seconde
fois le prix de son acquisition, ou du moins elle en paye
annuellement les intérêts, jusqu’à ce qu’il plaise à la dame
Dalbiat d ’exiger le remboursement de son capital, ou de l ’évincer
de sa propriété, ce dont elle est journellement menacée.
L e danger pressant que faisait courir à la veuve Yillfcvaud
la recherche de la d^me Dalbiat,. lui fit ourrir les yeux sur la
profondeur du précipice que le sieur Chambaud avait creusé
sous ses pas.
Elle prit des renseignemens sur le domaine de Lagarandie
que le sieur Chambaud lui avait fait substituer à l'hypothèque
qu'elle avait sur la maison Fonlghasse.
Elle apprit que ce domaine (pie le sieur Chambaud lui avait
assuré tant de fois, verbalement et par écrit, cire rf'u/ic valent4
de 3o,ooo j r . , était, bien loin d'en valoir la moitié;
E l qu'au lieu de 11’clre grevé d’aucune hypothèque, cumule il
�(n)
•1
r•
l'assurait par son é c r i t , il était grevé de l'h y p o th èq u e légale de
irard qui
la femme- G
Girard
qui en absorbait la valeur et au d e là , et q u ’ il
était en outre grevé d’une multitude d’hypothèques convention
nelles ou judiciaires, dont plusieurs étaient antérieures à l ’acte
du 27 janvier 1814 » cl nuiraient rendu son inscription insigni
fiante , quand elle aurait été faite de suite comme le portait cet
•acte.
Elle a alors porté ses plaintes au sieur Chambaud sur le funeste
résidtal de ses procédés à son égard ; mais elle n’y a trouvé que
durcie , et scs plaintes n’ont produit d’autre effet q u e . d e lui
attirer des injures.
Accablée par scs m alheurs, s e u le , sans a p p u i, et dépourvue
de ressources pécuniaires, elle a passé quelque temps a gémir
sur son sort, sans avoir ni les moyens de recourir aux tribunaux ,
ni le courage de dénoncer à l ’opinion publique un homme d ’un
état aussi imposant que l’était le sieur Chambaud.
Ce n ’a été qu’au mois d’août 1819, q u e , bien convaincue q u ’elle
n’avait rien à espérer, à l’amiable, du sieur Cham baud, elle est
parvenne à vaincre sa rép ugnance, et à dénoncer aux tribunaux
les manœuvres qu’il avait pratiquées pour opérer sa ruine et
s’approprier ses dépouilles.
La veuve Yillcvaud a comm encé par d époser’ chez M e Cavy ,
notaire, le billet de garantie qui était dans ses mains , qu’elle
croyait signé du sieur Cham baud, auquel elle attachait trop de
prix pour ne pas en assurer l’existence,
K l par exploit du 3 août 1819, après avoir exposé les fails r
cl spécialement l’écrit de garantie dont elle avait fait le d é p ô t ,
a fait citer le sieur Chambaud devant le juge de paix de
son dom icile, pour être concilié, si faire se pouvait, sur la
demandé qu’elle se proposait de former contre lui, « tendante
» a ce qu’il f,U condamné à lui payer et rembourser la somme
» de 10,862 fi-. f»o c.., montant de l’obligation souscrite par les
» sieur cl dame Font {»liasse, laquelle devait servir d’emploi pour
le prix de l’acquisition qu’elle avait faite, de G ira rd , du pré
« du Iircuil, ensemble au payement des intérêts deladile somme
�¡A
( 12 )
»
»
•»
«
à compter du moment q u ’elle a clé obligée de payer le même
prix de son acquisition à la dame Dalbial, ou d’en servir
l'intérêt, comme aussi à lui payer des dominages-inlérêls ,
à donner par déclaration, et aux dépens. »
L e sieur Charnbaud a paru devant le juge de paix; il a pré
tendu (pie « l’e x p o s é , fait par la veuve Villevaud dans sa
» citation, était faux et supposé, injurieux cl calomnieux, et
» qu’il entendait en demander la suppression avec dommages» intérêts. »
II ajoute qu’il est tres-étonné que la veuve Villevaud ose
annoncer q u ’ e l l e tient de lui un prétendu é crit, portant une
garantie quelconque de l'effet de son désistement de son hypo
thèque sur la maison Fontghasse; qu’il n’a jamais écrit, signé,
ni délivré un pareil écrit, contre lequel il proteste de faux-,
et il se réservç, en conséquence, toute action, soit civile., soii
criminelle.
La veuve Villevaud n’avait garde de s’attendre à une pareille
défense: ne sachant ni lire, ni écrire, il avait été facile d ’abuser
de son ignorance et de sa simplicité ; et 011 lui a assuré qu’en
effet l ’ é c r i t qu'elle a d ép o sé , n’est ni de l’écriture du sieur
Charnbaud , ni signé p a r lùi.
L e sieur Charnbaud, ayant appris q u e , malgré sa dénégation
d ’avoir signé cet écrit , la veuve Villevaud n’en persistait
pas moins dans ses plaintes , il a cru pouvoir l'effrayer par
un acte instrumentaire qu’il lui a fait faire par huissier, le
22 avril 1820, par l e q u e l , après avoir dit qu’il se proposait
de se pourvoir en justice , pour faire déclarer cet écrit
faux , .fabriqué, et faire condamner la veuve Villevaud en ses
d o m m a g e s -in té rê ts , dans le cas où elle persisterait à v o u lo ir ,
s’en serv ir, il l’a fait som mer de déclarer si elle entend faire
usage, soit envers lu i, soit envers ses ayans-cause, dudit écrit
déposé par elle chez M e. C avy, notaire, et si elle persiste dans
ses dires injurieux et calomnieux par elle laits au bureau de
conciliation , ou si (.|l(. conSt.nt à ce que ces dires soient suj»primes , et lcdil écrit retiré des mains du notaire pour être
�( i3 )
biffe et lacéré , üt rnieux elle n ’aime donner déclaration authen
tiq u e , d e v a n t notaire, qu’elle reconnaît ledit écrit faux , et non
émané dudit sieur .Chainbaud , et les dires insérés au procèsvcrbal de non conciliation, du i lÿ août 1B19, injurieux et
calomnieux.
La veuve Villevaud a répondu à cet acte instrumentaire , q u ’elle
ne connaissait rien aux affaires judiciaires ; que tout ce qu’elle
sait, c’est qu’elle a donné au requérant une somme de 11,000 fr.,
cl qu’elle n’a rien touché;
Q u ’au surplus, vu son ignorance, elle invite le requérant à'
choisir uu ou plusieurs jurisconsultes, pour régler, à l’amiable,
s’il est p ossib le, l’affaire dont il s’agit.
Cet acte instrumentaire fut suivi d’une assignation donnée, par
le sieur Chainbaud, à la veuve V ille v a u d , le 22 mai su ivan t,
tendante à ce qu’il lui fût donné acte du désaveu qu’il faisait
d’avoir écrit et signé l’acte déposé, par la veuve Villevaud, chez
M c. C a v y , notaire , lequel serait supprimé et lacéré , com m e
fabrique.
V oir pareillement ordonner q u e , sans s’arrêter , ni avoir égard
aux prétentions et demandes énoncées dans sa citation du 3 août
181 g, dans lesquelles elle sera déclarée non recevaîde et mal fondée,
les termes injurieux.cl calom nieux, insérés soil dans ladite cita
tion , soil dans le procès-verbal du juge de p a ix , seront sup
primés ; qu’elle sera condamnée en 2,000 fr. de dommagesin té rêls, applicables aux pauvres; que le jugement à intervenir
sera imprimé cl aiïiçhé au nombre de cent exemplaires aux frais de
Jadilc veuve V illeva u d , e t’ qu’elle çera, en ou tre, condamnée
aux dépens.
veuveV illevaud, de son coté, a fait assigner le sieur Chainbaud,
le 12 juin suivant, pour voir dire et ordonner q u e , sans s’arrêter
au département de sou hypothèque et p riv ilè g e , sur la maison
Fonlghasse, qu’elle a donné, par l’acte passé devant C hevalier,
notaire, le 27 janvier ,814, lequel sera déclaré m i l , frauduleux
cl comme non avenu , ledit sieur Chainbaud sera condamné
�f
( 4 )
à lui rendre cl restituer la somme de i o , 8 c)3 fr. -9 c . , qu’il a
touchée a son lieu et place, par sa collocation dans l’ordre de
la maison Fontghasse, aux intérêts de ladite som m e, d ep u is le
jour q u ’a eu lieu ladite collocation ; se v o i r , en o u tre, condam
ner en la somme de G,000 fr. de'dommages-intérêts envers elle,
et aux dépens.
D epuis, l’exposante, en persistant dans ses premières con
clusions , a signifié des conclusions m otivé e s, tendantes subsidiairement à ce qu’il lui fut permis de faire preuve, tant par
titres que par té m o in s , des faits de dol et de fraude qui
étaient alors à sa connaissance, cl des manœuvres pratiquées
par le sieur Chambaud pour la tr o m p e r, et obtenir d’elle le
département de son hypothèque et privilège sur la maison
Fontghasse, pour les remplacer par une inscription sur le do
maine deLagarandie dont il exagérait sciemment la valeur, pour
l ’induire en erreu r, et qu’il attestait n’être grevé d'aucune hypo
thèque, tandis que la valeur en était bien des fois absorbée par
des hypothèques légales ou conventionnelles, existantes lors de la
rédaction de cet acte.
L e sieur Chambaud a défendu à cette demande, en désavouant
tous les faits articulés par la veuve Villevaud;
E n présentant l’écrit de sa main , qu’il lui avait remis, comme
un m émoire à consulter dans scs intérêts ;
En prétendant q u ’il eut été sans intérêt dans toutes les ma
nœuvres ([non lui im pute, ne lui étant rien du par le sieur
Girard ;
Eu assurant que l’acte du 27 janvier lui était étranger, cet acte
n ’étant passé qu'entre la veuve Villevaud et Girard , et hors de
sa présence ;
Ou a l'égard des prétendues menaces faites à la veuve Villevaud
par lui ou par ses agens, q u ’elles étaient d ’autant moins vraisem
blables, (¡ne tout était terminé pour la conscription à l’époque
de crt acte; que d’ailleurs son (ils était exempt , par la loi, du
service militaire x et qu'il était personnellement sans a u c u n e
influence possible dans celle partie.
�( i5)
Enfin il a ajouté que si la veuve Yillevaucl avait perdu sa
créance , c’était par sa fa u te , "et pour n’avoir pas fait son ins
cription , sur le domaine de Lagarandie, immédiatement après
l’acte du 27 janvier.
C e genre de défense, et la hardiesse des dénégations du
s i e u r Chambaud , en a imposé au tribunal de première ins
tance; et la cause portée à l’audience du 18 août 1820, il est
intervenu jugement contradictoire q u i , sans s’a rrê te r, ni avoir
égard aux faits articulés pau la veuve Y illc v a u d , qui sont dé*
clarés inadmissibles, ordonne que l’écrit, attribué au sieur Qbantbaud , déposé parmi les minutes de M e. C avÿ, notaire, le 19 juin
181g, sera rayé et biffé ; que mention sera faite dudil jugement
en marge de l’acte de dépôt, et condamne la veuve Yillévaud
aux dépens pour tous doimnages-intérèts.
1c
La veuve Yillcvaud .est appelante de ce jugement.
Non pas dans la partie qui est relative à l’écrit qui est déposé
chez M e. Cavy , notaire, elle s’est assurée qu’il n’est ni écrit de la
main du sieur Chambaud, ni signé de lui : elle n’a donc rien
à opposer à celte parlie du jugement.
L e tribunal a ob servé, avec raison, que ne sachant ni lir e , ni
écrire, ce n’est pas a elle qu’on peut attribuer cet écrit ; il ne lui
reste donc qu’à gémir sur les funestes effets d’une supercherie
dont elle ne peul atteindre les auteurs.
Mais elle dénonce à la Cour ce ju gem ent, pour avoir repoussé
ses plaintes sur le dol , la fraude, et les manœuvres pratiquées
par le sieur Chambaud pour lui enlever sa fo rtu n e , et s’en em
parer pour son compte et pour celui du sieur •C ham bau d , son
parent.
Depuis ce jugem ent, elle a fait de précieuses découvertes , fjoit
en preuves écrites , soit en faits nouveaux , ou qui avaient échappé
a sa mémoire , ou q ui soui parvenus depuis à sa connaissance; el
elle se flatte que ces preuves de tout genre 11e seront plus
écartées par le reproche commode de rinadiuissibilile, comme
elles l’oul été en cause principale.
’
�( i6 )
Los principes sur le dol et la fraude sont écrits clans tons les
livres.
L e jurisconsulte Labeo en donne la définition en ces termes ;
D olu s malus est omnis calliditas , ftd la c ia , rnachiuatio, ad cir~
cum tenicndum , j'a llen d u m , decipiendmn alterum adhibita.
Expressions que Danty traduit en ses termes, dans scs additions
sur le traité de la preuve par témoins, de Boiceau, cliap. 7, n°. 10:
« Dol mauvais • on entend toutes sortes de finesse, de trom» perie, ou de fraude, concertée pour surprendre et pour tromper
» un aulre. »
Telle est encore la défmilirin que nous en donne Barb eyracx
sur Puffendorf, dans son Traité du droit de la nature et des gens,
Liv. 3 , cliap. 6 , aux notes:
» Par dol, dolus malus, on entend toutes sortes de surprise, de
» fra u d e, de finesse, de fein te, de dissimulation; en un m o l ,
» toute mauvaise v o ie , directe 011 indirecte, positive ou négative,
» par laquelle 011 trompe quelqu’un malicieusement ».
i- D u m o u lin , cl différons autres jurisconsultes, et après e u x ,
D an ty, a l'endroit cité, développent le vrai sens de chacune de
Ces Irois expressions, em p loyées, par te jurisconsulte romain,
dans la définition du dol , calliditas, fa lla c ia , inachiuntio , et par
lesquelles il a voulu marquer trois différons degrés de dol.
« Le p rem ier, appelé calliditas, est celle dextérité que les
» Latins appellent soh rtin n i, par laquelle un liommc a d ro it,
» cl qui a de l’expérience dans les affaires , engage une
» personne simple à faire ce qu’il veut, cl le m èn e, comme
>>■on d it, p a r l e nez, non pas ouvertem ent, mais par dos ma- •
» nières cachées, et avec une apparence «le sincérité dont il
» \n c sa défie pas: ce qui csl fort bien exprimé par le mol
» cirainu tinirc. »
. « Le second d e g r é , appelé f a lla c ia , est la fraude qui se
» «oinmcl manifestement par des paroles affectées ou équivoques ,
» et par des mensonges.
« Le troisième degré, niachi/iatio , est la surprise qui se fa il
�( T7 )
» par des voies indirectes et par de mauvais m o y e n s , qui pas« sent jusqu’il ce que. nous appelons fourberie.
» An reste, ajoute-t-il, n°. i 5 , le dol peut se définir, en
» général, tout dessein frauduleux de nuire à autrui, soit que
» cela se fasse avec déguisement et avec simulation, soit que
» cela se fasse ouvertement. »
Et. nous lisons dans l’article 1109 du Code civil, « qu’il n’y
» a point de consentement valable, si le consentement n’a été
» donné que par e rreu r, ou s’il a été extorqué par violence,
» ou sur/ms par dol. »
11 ne nous reste donc qu’à faire l’application de ces principes
à la cause.
La veuve Villcvaud achète de Girard un pré qu’il avait
acquis lui-même du sieur D alb iat, et dont il 11e lui avait pas
payé le prix , qui n’était payable que dans le ternie de douze
années, qui n’était pas expiré,
L e prix de l’acquisition de la veuve Villcvaud était de 11,379 liv.
tournois.
Elle ne paye qu’en prenant la précaution de l ’emploi de ses
deniers.
Girard fait un prêt aux sieur et dame Fontghasse, qui lui
en consentent obligation solidaire, payable dans cinq ans, et
l ’assurent par première hypothèque sur la maison de la dame
Fontghasse, située .à C lc rm o n t, rue de la Treille.
Ou stipule, dans cet acte, que les deniers prêtés proviennent
de la veuve Villcvaud , et sont le prix de la vente du pré du
ïïreuil. 11 est ajouté que les sieur et dame Fontghassc seront
tenus, comme ils s’y o b lig e n t, de ne faire le remboursement
de la somme prêtée qu’en présence de la veuve Villcvaud, et
de Son g e n d re , alors intéressé pour un dixième dans l'acquisition
du pre du U rcuil, pour veiller à l'emploi dicelle conformément
au conlral.
Le terme de cinq ans , lixé pour le remboursement du capital,
étant sur le point d’e x p ir e r , le sieur C ham bau d , qui connaissait
3
;
�(i8)
parfaitement le mauvais état des affaires du sieur Girard , et qui
ne voyait aucune ressource dans les moyens personnels de son
d é b ite u r , pour se faire payer de sa créan ce, et de celle du
sieur Charnbaud, son p arent, conçut alors le projet de sacrifier
la veuve Villevaud, et de prendre sa place.
C ’est ce qu’on a p p elle, en matière de fraude , concilium.
Ce projet a été suivi d’exécution; et on trouve ici concilium
et evenlus.
L e sieur Charnbaud emploie d’abord envers la veuve Ville
vaud des sollicitations amicales.
Ces sollicitations n’ayant pas réussi, il les consigne dans un
écrit q u ’il remet à la veuve Villevaud.
« Il existe, porte cet écrit, une hypothèque de 11,000 fr.
» que la veuve Villevaud a placée sur une maison de Clermont.
« On demande qu’elle en donne main-levée pour la transférer
» sur un domaine de montagne, de valeur de 3o,ooo fr, qui
» n ’est grevé d’aucune hypothèque. »
Si on veut commenter cet é c r it , on se demande d ’abord
comment le sieur Charnbaud était instruit qu’il existait une
inscription de 11,000 fr, faite par la veuve Villevaud sur une
maison de Clermont, si ce n’csl parce que le sieur G irard, son
ami in tim e, l’avait instruit de toutes ses affaires, et l’avait initié
dans le secret de sa position.
On demande qu’elle en donne main-levée.
Quel est celui qui demande que la veuve "Nillcvaud d onne
cette main-levée ? Ce n’est pas le sieur G ira rd , qui n’est pas
m ême dénommé dans cet é c r it , et qui n’a pas pris la peine de
l ’é c r i r e , c’est' celui dont il est l’ouvrage, et qui devait en
p ro fite r, ainsi que son p a r e n t, créancier comme lui du sieur
Girard.
Et quels moyens le sieur Charnbaud emploie-t-il pour par
venir à son but? La fraude cl le mensonge, callidiiatem ,fallacùun,
machinnlionem.
On demande la mn’m -lcvée de celle i n s c r i p t i o n p o u r la Iransf érer
sur 1111 domaine de montagne, appartenant au sieur Girard, de
valeur de 3o,ooo IV.
�(*9)
.
Et cclte valeur était tellement exagérée par le sieur Chambaud/
qu<5 ce domaine a été ven d u , d ep u is, 9,000 fr.
L e sieur Chambaud ajoute que ce domaine n'est grevé d'aucune
h y p o th è q u e , el i l est établi que non-seulement la valeur de ce
domaine était épuisée, et bien au delà, par l'hypothèque légale
d e là fem m e, mais que ce domaine était encore couvert d’autres
i n s c r i p t i o n s judiciaires ou conventionnelles, pour des sommes
énormes dont plusieurs existaient au moment o ù le sieur Chambaud traçait ces lignes.
Ainsi le sieur Chambaud usait de d o l , de fraude et de men
songes ; il employait tout à la fois, calliditatem, fallaciam et
machinationem: et contre qui usait-il de tous ces m oyens? contre
une malheureuse villageoise, illitéré e , sur laquelle il avait l ’as
cendant de la puissance, qu’ il aggravait encore par des menaces
<Tcxcrcer contre elle des poursuites rigoureu ses, pour la forcer
au remboursement d’un capital de 6,000 fr. qu’elle était hors
d ’état de faire , et des menaces plus effrayantes encore d ’accabler
son fds du poids de la conscription.
C ’est ici le cas de rappeler la défense du sieur Chambaud
devant les premiers juges, qui est développée avec complaisance
dans les nombreux considérans qui précèdent le dispositif du
jugement.
Il s’est présenté continuellement comm e étant sans intérêt
dans cette affaire;
Comme étant étranger à l’acte du 14 janvier i8 i/ f, <lans lequel
non-seulement il n’était pas en qualité, mais qui avait été fait
hors de sa présence.
O r , tout est faux et mensonger dans ces faits,
L a veuve Yillcvaud offre de prouver que le sieur Chambaud
ctait avec Girard chez Chevalier, notaire; qu’il a assisté h la
rédaction de 1acte ; (pie la veuve Yillcvaud s’étant retirée de
1 étude du notaire, les trois amis sont entrés dans une chambre
a c<'»té de l’étu de, d’où ils sont sortis après une conférence se
crète, à la suite de laquelle Chevalier a dit à son maître-clerc,
�•V
( 20 )
en présence du sieur Chambaud et de Girard: V m s ne ferez l'mscription île la vaine J^illeiaud, que lorsqu'on vous le dira.
Quant au prétendu défau! d’intérêt, tant de fois répété par le
sieur Chambaud, c’est encore un m ensonge, démontré par une
preuve é c rite , émanée de lui-même.
On a vu qu’aussitôt après avoir obtenu le. sacrifice qu’il exigeait
’d e la veuve Yillevaud, de son inscription sur la maison Fontghasse,
p ou r la transférer sur le domaine de Lagarandie, il a trouvé le
m oyen de s’approprier l’obligation de 10,862 fr. 5o c., qu’avait
le sieur Girard sur cette maison.
Il s’est fait c o n s e n t i r à lui et au sieur Chambaud , son parent,
la cession de cette obligation, qui a sans doute été faite le
m êm e jour et au m êm e instant, quoique le complaisant notaire
Tait datée du 5 février, huit jours après l ’acte du 27 janvier.
Mais cette date est assez indifférente; ce qui est bien plus
important dans cet acte, c’est la reconnaissance que fait le sieur
Girard , que « cette cession est faite moyennant pareille somme
:» de 10,862 fr. 5o c . , que le sieur Girard déclare avoir ci-devant
» reçue desdils sieurs C ham baud, dont quittance. »
Si le sieur Girard avait ci-devant reçu des sieurs Chambaud
la somme de 10,862 fr. 5o c., il était donc leur débiteur de
cette som m e, au moment qu’il leur transférait son obligation de
la même somme sur la maison Fontghassc; il leur transférait
donc cette obligation pour se libérer envers eux. L e sieur Cliainbaud n’élait donc pas sans intérêt pour lu i, et pour son p a re n t,
lorsqu’ il exigeait avec tant d ’instance, de la veuve Y illev a u d , la
main-levée de son inscription sur la maison Fontghassc, et son
transfert sur le domaine de Lagarandie.
L e sieur C ham bau d , qui a senti toute l'importance de ce fait,
a cherché à en prévenir les conséquences qui devaient naturclkv
ment en résulter contre lui. 11 s’est donc retourné de toutes les
manières pour y répandre une obscurité ténébreuse; mais tous
les efforts qu’il a faits pour cela se retournent contre lu i, et ne
le rendent que plus coupable.
�( 21 )
D ’a b o rd , q u a n t à la partie de la cession qui concerne le sieur
Chambaud-Blanchard, son parent, le sieur Clnunbaud s’exprime
en ces Lcrmcs, dans un Mémoire imprimé q u ’il a distribué en
cause principale , page t).
. .
« Les deux cessionnaircs entraient pour chacun moitié dans
» le prix de la cession : le sieur C ham baud-B lanchard a fait.
» tenir à compte sur sa portion ce <jid lui était du ; le surplus,
» il l’a payé en argent, c i ....................................... 5 , 43 i fr. 25 c. »
L e sieur Cliambaud ne dit pas ici ce qui était dù à son parent;
d’après l ’acte de cession, il est prouvé que c’était la totalité de.
sa moitié du prix de cette cession, puisque le sieur Girard
l ’avait reçue de lui ci-devant : et quand il y aurait eu quelque
léger appoint, à donner pour solde, une pareille minutie ne
tirerait pas à conséquence.
L e sieur Cliambaud est bien plus embarrassé pour sa moitié
du payement du prix de la cession.
D ’ab o rd , à l’en croire, ce qu’ il en a fait a été pour obliger
le sieur Boucliet.
« Le sieur Cliambaud, est-il dit dans ce M ém oire, a fait
» appeler le sieur B o u c h e t, (¡ni était bien loin de se douter du
» mauvais état des affaires de Girard.
»
»
«
»
»
»
« Il fait ensuite dire a Boucliet qu’il a cautionné Girard pour
7,700 fr, cl (pie, dans sa simplicité, il ajoute q u ’il 11c peut
pas croire avoir été trompé par son camarade d’enfance, par
celui qu’il regardait comme son meilleur ami. Trom peuse
sécurité! s’écrie le sieur Cliambaud; où n’aurait-clle pas conduii le malheureux Boucliet, ^i. un ami plus sincère n’avait
pas veillé sur lui,? »
Que d’aveux précieux dans ces lignes!
. ^ m a r q u o n s d’abord (pie le sieur Cliambaud fait appeler le
sicui B o u cliet, (¡ni était loin de se douter du mauvais état des
affaires de Girard.
Le sieur Cliambaud l’en instruit; et Bouchet, dans sa sim pli
cité, 11e veut pas y croire.
�*
»-
'l
( 22 )
Que faut-il conclure de tout cela ? Que le sieur Chambaud
était parfaitement instruit du marnais état des affaires de Girard,
p u isq u ’il en instruit les autres ;
Q u e , dès lors, tout ce qu’il faisait était de mauvaise foi;
Q u e c’était de mauvaise foi, et pour tromper la veuve Yillev a u d , qu’il la pressait par tarit de m oyens, soit verbalem ent,
soit par é c r i t , soit, par des menaces de tout g e n r e , de donner
la tnnin-lcvée de son inscription sur la maison Fontghasse, sa
chant bien q u ’en la transférait sur le dom.nine de Lagarandie,
elle perdrait nécessairement sa créance, attendu le mauvais état
des affaires de Grirard ;
Q u e c’était de mauvaise foi qu’il se faisait céder l’obligation
de Girard sur la maison Fontghasse, puisqu’il ne pouvait accepter
cette cession sans contrevenir aux lo is , et faire tort aux autres
créanciers ;
Q ue rien n ’est moins excusable que d ’avoir ruiné la veuve
Villevnud , et de lui avoir fait perdre sciemment sa créance ,
pour l'eillcr, comme il le d i t , sur le sieur B o u ch et, qui a trouvé
en lui un ami plus sincère que Girard , son camarade d’enfance,
p u is q u e , à l ’en c r o i r e , i l s e r a i t parvenu à sauver sa créance en
sacrifiant la veuve N i l l e v a u t l .
L e sieur Chambaud ajoute qu’il a payé au sieur Delaune 2,000 f,
sur le p'rix de la cession ;
Et qu'il a cédé à Bouchet des obligations pour le restant,
mrtiris 3 i fr. 25. c. q u ’il a payés au sieur G ira rd , en deniers,
pour appoint.
»tn. ii
11 faut convenir que le slctfr Chamband a une mémoire heu
reuse, puisqu'il se rappelle du nombre ‘des centimes qu’il a
payé au sieur G ira rd , le 27 ja m icr 1814.
M ais, d ’une part, cette version est inconciliable avec le texte
de la cèssion, qui atteste que le sieur Girard était débiteur de
la totalité du prix envers les deux cedataires.
D ' a u t r e - p a r t , si cette version était v r a i e , le sieur Cha i nb au d
serait bien ¡»lus c o u p a b l e , p uisqu' il ne lut resterait nicnie
pas
I excuse d e l'intérêt p e r s o n n e l , et q u ’ il aurait gra t ui t ement , et de
�( 23 )
gaîté de cœur, sacrifié une malheureuse veuve, sans défense, pour
enrichir (le ses dépouilles le sieur Chambaud-Blanchard, son
proche p a re n l, et le sieur Bouchet, son am i, dont il aurait
payé les créances, au moyen de l'obligation Fontghasse, nonseulement au préjudice de la veuve Villevaud à qui elle appar
tenait , mais au préjudice des autres créanciers Girard.
C ’est le cas de dire que le sieur Chambaud s’esl pris ici dans
ses propres filets.
Il
ne sera pas plus heureux dans le genre de défense^ qu’il
a employé devant les premiers ju g e s , sur le retard de l’ins
cription prise, au nom de la veuvp Yilleyaud , sur le domaine de
Lagarandie.
C ’est sa faute, a-t-il dit, si elle a perdu sa créance ; c’est parcç
q u’au lieu de faire son inscription au bureau (les h y p o th è q u e s ,
immédiatement à la suite de l’acte du 27 janvier 1814, çlle ne
la formée qu’au mois de mai suivant.
Mais comment concilier ce reproche que fait ici le sieur Chanibaud à la veuve Villevaud avec les laits dont elle offre la
p reuve; que lorsqu’elle se fut retirée de chez le notaire, les
trois amis , les sieurs Cham baud, Girard et Chevalier entrèrent
dans une chambre a coté de l ’etudc, d’où ils sortirent après un
entretien secret, et que Chevalier dit à son maître-clerc., en
presence du sieur Chambaud et de Girard : Jro\is ne ferez l'ins
cription de la veuve P'illevaud, que lorsqu'on vous en donnera
l ordre.
Comment concilier ce reproche avec le fait constant et consacré
par l’ usage, que c’était à C hevalier, notaire , ou à scs clercs, à
faire cette inscription , et non à une paysanne illilérée , qui devait
nécessairement s’en rapporter à eux , ne pouvant pas la faire
par elle-même ?
Comment concilier ce r e p r o c h e , avec la parfaite connaissance
qu’avait le sieur Chambaud du mauvais état des affaires du
sieur (iirard, dont il instruisait si bien Cham baud-Blanchard,
son parent, et B o u ch et, son a m i, tandis que non-seulement
il cachait ce mauvais état des affaires de Girard à la veuve
�( 24)
V illcv a u d , mais qu’il afTcctait de lui exagérer sa fo rtu n e , verba
lement et par écrit, pour mieux la trom per, et qu’il lui assurait
que cette fortune n’était grevée d ’aucune hypothèque. ( * )
Mais ce reproche n’est pas seulement fait de mauvaise foi
par le sieur Chambaud à la veuve Villcvaud ; il est encore dé
montré q u e , lors même que l ’inscription de la veuve Villcvaud ciit
été faite le jour même de l’acte du 27 janvier i8i/f, elle 11e lui
aurait pas été plus avantageuse que celle qui a été faite pour
elle au mois de mai suivant;
Soit parce que le sieur Chambaud l’avait trompée d ’une ma
nière étrange, sur la valeur du domaine de Lagaramlie, qui a
été vendu f),ooo f r . , tandis qu’il le portait à 3o,ooo fr ., par son
écrit qui est dans les mains de la veuve Villcvaud ;
Soit parce qu’il attestait que ce domaine n’étail grevé d’aucune
hypothèque, tandis que non-seulement la valeur en était bien
plus qu’absorbée par l’hypothèque légale de la dame G irard,
dont les droits lui étaient parfaitement connus;
Soit parce qu’il y avait trois autres inscriptions sur ce domaine,
ou généralement sur tous les biens du sieur Girard , antérieures
a l’acte du 27 janvier i B i /J, qui montaient à environ 28,000 fr.
Ainsi , le reproche que lait le sieur Cliamhnud à la veuve Vil
lcvaud d ’avoir perdu sa fortune par sa faille, el pour n ’a v o i r
pas fait son inscription immédiatement après l’acte du 2 7 'jan
v ie r, n’est pas plus heureusement imaginé que son prétendu
défaut d ’intérêt dans cette affaire ; que le fait (pic l’acte du
27 janvier a été fait en son absence, qu’ il lui était absolument
étranger, cl qu’il était lait-uniquem ent dans l’intérêt du sieur
Girard.
Le sieur Chambaud n'est pas plus heureux dans ses réponses
aux reproches que lui a laits la veuve Villcvaud , de lui avoir
(*; \.*'s d r ttr s *1»’ ('»irar<! * in setite* j u s q u ' a u
12 mai i S r r>, m o n te n t à 1 2 0 , 7 [ f i fr. *
jio n <011^11 ¡» l'i n s c r ip t io n h’ gale d e mi f e m m e , q u i m o n ta it a n m o i n s à
12 ,0 0 0 l r , ,
n o n compris, w» «lrttrs «ïiiroKia p liair e*.
l*,t l a
to talité
de
»es b i e n s a O l e \ r n d u e ,
par
actes
vo lo n taires,
m j/i o
** f r .
�Uts$
(¡>5)
fait et fait faire des m en aces, soit de la poursuivre rigoureuse
ment pour la forcer au remboursement des 6,000 fr. q u ’elle lui
d e v a it, soit de faire partir son fds, si elle sc refusait à ce qu’il
exigeai* d’elle.
A l’en c r o ir e , tout était terminé pour la co n scription , a
l’époque où l ’on suppose qu’il a fait ces menaces ; et il était
tellement étranger et sans pouvoir lui n u i r e , qu’il suifit de la
seule invraisemblance de ces faits, pour les faire rejeter.
Gomme si tout le monde ne savait pas que , sur la lin de 1813,
et. au commencement de 1814, il n’y avait point de bornes aux
abus du p o u v o ir , et aux vexations en matière de conscription ;
Comme si l’on ignorait que rien n’était im po ssib le, dans ce
genre, à un maire tel que le sieur Cliam baud, q u i réunissait a ce
titre un grade militaire qui lui donnail un ascendant, et un degré
de puissance auquel il était impossible à la veuve Yillevaud de
résister.
L e sieur Cliambaud croit encore pouvoir écarter ces faits, en
opposant que le fils de la veuve Yillevaud était n on -seu lem en t
exempt comme fils de v e u v e , mais comme im propre au service
militaire ; comme si on ignorait que tel conscrit qui ne pouvait
etre encadre dans un corps de troupe de ligne, était employé
utilement dans les charois de l’armée.
D ’ailleurs, la veuve Villevaud était-elle en état de juger du
plus ou moins d’effet que pouvaient avoir les menaces du
sieur Cliambaud ? c’est sur les inquiétudes si naturelles de la
tendresse maternelle ; c’est sur sa crédulité et son ignorance , qui
étaient bien connues du sieur Cliam baud, qu’il faut calculer la
vraisemblance de ces m enaces, et non sur le plus ou le moins
de possibilité qu’aurait eu le sieur Cliambaud de les mettre à
exécution.
A u surplus , il n’est pas à craindre qu’on ose élever des doutes
sur 1 admissibilité de la preuve testimoniale des faits articulés par
la veuve Yillevaud.
La plupart de ces faits sont déjà établis par des preuves
écrites irrécusables: et ne voudrait-on les considérer que comme
(commencement de preuves par é c r it , il nous suffirait d ’invoquer
�( 26 )
l ’articlc 1 347 du Code civil, qui porte que les règles établies sur
l ’inadmissibilité de la preuve testimoniale , reçoivent exception
lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit;
L ’article 1348, qui porte que ces règles reçoivent encore excep
tion , lorsqu’il s’agit d’obligations qui naissent de contrats, et de
délits ou quasi délits ;
E t l’article 1 353 , dans lequel on lit que « les présomptions qui
ne sont pas établies par la l o i , sont abandonnées aux lumières
et à la prudence du magistrat, qui ne doit admettre que des
présomptions g ra ve s, précises et concordantes, et dans les
cas seulement où la loi admet les preuves testimoniales, à
moins que l'acte ne soit attaqué pour cause de fraude ou de dol.
Il
ne faut, d ’ailleurs, jamais perdre de v u e , dans ces ma
tières , ce que nous dit le judicieux Coquille, dans son Commen
taire sur l’art. 4o du chap. 4 de la Coutume de Nivernois, que
« ceux qui veulent faire frau d e, travaillent de tout leur pouvoir
» à la couvrir; q u ’elle ne serait pas fraude, si elle n ’était occulte,
» et par regle générale, se dit qu’ez choses qui communément
» sont de difficile preuve ; on doit recevoir les preuves par con» jectures , et telles qu’on les peut recouvrir ; et peut-on joindre
différentes sortes de preuves imparfaites, pour en faire une
complète ? »
On ne peut donc refuser à la veuve Villevaud la faculté de réunir
tous les genres de preuves propres à constater le dol et la fraude
dont elle a été victime. L e jugement qui a déclaré inadmissible,
ou la preuve testimoniale, ou les faits articulés par la veuve Villev a u d , est un vrai déni de justice qu’elle dénonce à la C o u r ,
devant laquelle les opprimés sont assurés de trouver justice et
protection.
Me B O I R O T , ancien Jurisconsulte.
M e V E Y S S E T , Avoué
A CLERMONT, I)E L’IMPRIM ERIE DE PELLISSON, IM P.-LIBRAIRE,
AU C O lN DES R UES SAINT - GENES ET SAIN T E S P R I T,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubignat, Jeanne. 1821?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Veysset
Subject
The topic of the resource
banqueroute
notaires
dol
biens nationaux
créances
hypothèques
magistrats municipaux
abus de faiblesse
conscription
fraudes
illettrisme
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jeanne Aubignat, veuve de Pierre Villevaud, Propriétaire à Royat, appelante ; contre Le sieur Pierre Chambaud, Adjudant-Commandant, Offer de la Légion-d'honneur, ancien Maire de Chamalières et Royat, habitant de la ville de Clermont, Intimé.
Table Godemel : Dol : 3. lorsque les faits mis en preuve auraient, s’ils étaient prouvés, le caractère de dol, fraude, séduction et violence mis en usage dans la vue d’engager une partie à abandonner ses droits, pour en profiter à son préjudice ; les juges peuvent admettre la preuve testimoniale, aux termes des articles 1116 et 1382 du code civil. – on ne peut opposer, en ce cas, les dispositions de la loi qui interdisent toutes preuves contre les conventions faites entre parties ou contre des obligations dont l’objet excéderait 150 francs, parce qu’en matière de fraude, dol, séduction et violence, il ne dépend pas de la partie contre laquelle ces moyens ont été pratiqués, de se procurer une convention ou des preuves qui aient pu l’en mettre à l’abri.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pellisson (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1821
1791-1821
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2614
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2615
BCU_Factums_G2616
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53529/BCU_Factums_G2614.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Royat (63308)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113 )
Aydat (63026)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
banqueroute
biens nationaux
conscription
Créances
doctrine
dol
fraudes
hypothèques
illettrisme
magistrats municipaux
notaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53417/BCU_Factums_G2121.pdf
b89f963bc6f5af571d3730902c80bbea
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Text
MÉMOIRE
.
EN
RÉPONSE,
~
DE r io m :
'
I re . CHAMBRH ü
POUR
Sieur Jean-Henry DES ISSARTS, intimé
incidemment appelant;
et
CONTRE
Les sieur et demoiselle BANCAL , les sieur
et dame DALBINE appelans et incidemment intimés.
■- *
*
«
*
î
L E sieur Bancal des Issarts n’eut pas eu l’idée de pu
blier sa d éfen se, si on ne lui en eût donné l’exemple.
Il n’en eût eu aucun besoin,, après le m ém oire de
ses adversaires, s’ils eussent fidèlement exposé les faits.
A
�•
.
.
.
(
2
}
E t même aujourd’h u i , quoique la cause soit dénatu
r é e , il y est moins forcé peut-être par le besoin de sa
défense, que pour justifier une conduite qu’il ose dire
sans reproche.
Il a demandé deux choses :
i° . Sa part héréditaire dans la succession paternelle.
2°. U n compte de l ’administration de ses bien s, qu’on
avoit faite en vertu de sa pi*ocuration.
O n lui a répondu par deux fins de nanrrecevoir.
A sa demande en partage on a opposé un écrit par
lequel il a déclpré tpnir quiftg la; §uccessipn de son p è r e ,
et consentir à l’exécution d’un testament qu’il ne connoissoit p a s, et par lequel il étoit prétérit.
E t au même temps on reconnoissoit, ce qui d’ailleurs
résulte clqiçenipnî de cet é c rit, qu’il l ’a voit donné sans
rien recevoir de
success/qp.
.; •
_•
O n a combattu la demande relative aux jouissances de
ses biens, par des arrêtés decpm pte sur des objets parti
culiers, et seulement pour les années postérieures à 1796.
.. 4\îais on n’a pas arficqlé, et on n’articulera pas même
aujourd’hui qu’aucune somme a it‘ été payée, ni aucun
compte rendu pour les années antérieures de la gestion,
ni pour la totalité des choses jouies. ‘
O n est allé plus loin ; on a formé contre le sieur Bancal
une demande incidente en remise d’ un acte qui n’a jamais
existé.
O n lui a imputé de l’avoir Soustrait.
■
?
• O n l’a accusé de m entir à sa conscience.
L e sieur Bancal l’avoue : il lui est difficile*de penser
que si ses neveux eussent été livrés à e u x -m ê m e s , s’ils
�( 3 )
eussent bien connu les élémens des comptes déjà rendus,
et auxquels ils n’ont jamais directement participé , ils
eussent élevé cette lu tte , bien moins encore qu’ils y
eussent ajouté l’outrage. Jusqu’à présen t, il les avoit
crus incapables de déguiser la v é r i t é , plus incapables
encore de la trahir par un mensonge. Il se plaît à leur
rendre ce témoignage ; il se plaît à penser que cétte
vérité a été cachée à leurs propres yeux par un tiers qui
seul l’a parfaitement connue, qui a fait toutes les affaii’es,
dressé tous les comptes, et abusé plus d’une fois de l’imprévoyanté facilité du sieur dés Issarts.
I *
Cette cause n’a besoin qiie d’être connue. L e sieur des
Issarts peut avoir fait des fautes dans son intérêt per
sonnel , en ne calculant pas assez, et n’exigeant pas en
même temps tout ce qu’il pôuvoit demander; mais quand
bien même ces fautes pourroient nuire à sa demande, ce
que ne permettent pas les principes, elles ne seroient
qu’un témoignage de plus de sa bonne foi et de sa trop
grande confiance.
L e fait est assez compliqué ; il 'deinande à être bien
saisi : on va l’exposer ici sans déguisement. L e feieiir
Bancal ne dissimulera pàfe ce qui peut en apparence se
présenter contre sa demande : la justice saura tout ap
précier.
Dominique-Françoifc Bancdl et Arine Cosse, auteüta
communs, eurent sèpt enfanâ ; six fils appelés Dortiini^uc-Jeany Antciine^-Frunçais^ Fulcrarid-Poscal, Joseph,
Jèa n -L o u is, Jetm-Henry* et urie fille appelée T h é r è s e
Aa
�o
\\
.
( f }
Ils ne firent aucune distinction entre leurs enfans quant
h l ’éducation qui leur fut donnée ; elle fut également
soignée pour to u s , et tous en profitèrent égalem ent,
chacun dans leur état. On se voit obligé de le démon
trer ; car les appelans ont recherché jusque dans une
prétendue différence d’éducation du sieui’ des. Issarts,
et dans une plus grande dépense faite exclusivement
p o u r l u i , le principe de l’oubli qu’en avoit fait le père
commun dans son testament de 1784.
L ’a în é , D o m in iq u e-J ea n , fut élevé dans la maison
paternelle \ il fut formé de bornée heure au commerce
intéressant que faisoit cette famille. On sait assez qu’ il
consistoit principalement en une belle manufacture de
bas de soie, et une vente habituelle de soies non ou
vrées. Destiné à être l’héritier de la famille, Dom iniqueJean Bancal se livra de bonne heure à ce com m erce,
que ses enfans tiennent encore aujourd’hui.
A n toine-François et J o s e p h , après avoir fait leurs
études, entrèrent dans la partie des domaines. O n sent
que les dépenses de leur éducation durent être longues,
puisqu’avant d’obtenir des emplois on est long-tem ps,
et très-long-temps surnum éraire, c’e st-ù -d ire, occupé
dans un bureau , sans recevoir aucun émolument. E n
1 7 8 4 , lors du testament du p è r e , l’un étoit contrôleur
ambulant des dom aines, et devint ensuite receveur de
l ’enregistrement à Dijon ; l’autre étoit contrôleur des
actes à A p ch o n , et y acheta ensuite un oüice de notaire.
Fulcrand-Pascal mourut sans postérité.
J e a n -L o u is fut élevé dans les écoles militaires; ses
dispositions naturelles et son application, engagèrent le
�( 5 0 .
père à le pousser dans une carrière brillante. En 1784,il étoit capitaine de génie.
T o u t ce que nous disons est établi par le testament
de 1 7 8 4 , ou d’autres actes que les appelans ont dans
leur dossier.
Jean-H enry, après ses études, entra chez un procureur
au cliâtelet ; après six mois d’exercice, il gagna sa pen
sion , et devint bientôt maître clerc. Il passa ensuite chez
M e. B eraud, n otaire, où il gagna 800 francs; il n’y
demeura qu’un an. Il désira faire son droit à Orléans :
son père eut la bonté de condescendre à ses désirs, et
de l’y entretenir pendant trois ans. Il revint ensuite à"
Paris ; et après quelque temps encore de cléricature,
il acheta l ’office de notaire au cliâtelet. M e. Beraud eut
la bonté de le cautionner; son père et son frère caution
nèrent M e. Beraud : le sieur des Issarts l’a payé de ses
propres deniers, sans q u’il en ait rien coûté à son père.
V o ilà la vérité ; le sieur des Issarts n’en parle que pour
démontrer que son père ne peut pas l’avoir prétérit avec
intention, et que certainement au moins il n’avoit pas
eu le motif qu’on lui prête. Il n’envie pas à ses frères
ce qu’ils ont reçu; mais il a voulu prouver qu’il n’avoit
pas reçu davantage.
Si on le n ie , le sieur Bancal n’a pas la prétention que
la justice doive croire à son assertion, plutôt qu’à la
négation absolue de ses adversaires; mais au moins devrat-elle cédor à des preuves, et certainement ce qu’on vient
de d ire, lui démontrera qu’elle a été trom pée, loi'squ’on
lui a insinué que lui seul avoit reçu une éducation so ig n e e , et avoit été ïo b je t de la plus grande affection j
�(6>y
lorsqu’on lui donne a croire que tous les autres avoient
été réduits à une éducation au moins m odeste, et lui*
seul élevé au com ble de la -prospérité par les énormes
sacrifices du père.
Les enfans de l ’héritier institué lui envieroien t-ils
donc la portion de tendresse que ses père et mère eurent
poür lu i? se seroient-ils persuadés que toute leur afTec-:
tion s’étoit concentrée en lui seul, parce q u ’il étoit le
plus jeu n e? Ils le rem arquent avéc affectation; cependant
l ’institution de leur p è re , et là prétérition du plus je u n e ,
leur démontrent le contrairè d’une fcnanière palpable.
Q ue n’orit-ils donc envié aux autres les efforts q u’avôit
faits le père pour en maintenir d e u x , pendant longues
années, dans des bui-eaux, comme surnuméraires, et leur
procurer des emplois; un aiitré dans les écoles et dans
le corps militaire du g é n ie?
Ê n 1 7 8 8 , Jean-Henrÿ Bancal së défit de sa charge
dè notaire; il y àvoit fait dëé économies, et se vit à
même de faire qüelquès ‘acquisition!?.
>
Il n’eh fit cejséndànt pa's jusqu’au moment de la rév o
lution. ËUes devinrent alors plus faciles et plus fructuéü&të, par la itiise èn vénte des domaines üàtionatix.
Projetant de revenir habiter son pays [natal, il donna »
ën 1 7 9 1 , à son frère a în é , ürié prôcüratiôn pour ache
ter des propriétés et g é ie r sês biefaé : le père cûmiiiun
¿toit alors décédé ‘depuis 1790.
S o n frèïé'èk& cüta le m aiïdatdV cc fidélité; fe siëur t]Cs
Issai’ts a souvent témôigrié p ar écrit lù réfcônnoîssahfcë
qu ’ il en avoit. Il est loin d e v o i r cîirfngé de penséë.
Ld pi-ëiniôre adquisitioü frit cellé d’un doriiainè à A u l -
�t 7 )
nat; elle fut faite le i juin 1 7 9 1 , moyennant 40,100 fr.;
les intérêts portèrent la somme à 41,297 francs, que le
sieur des Issarts paya en eptier, et qu’il a voit achevé de
5
solder le 27 mai 1793.
A cette ép oqu e, et dès 1 7 9 2 , il étoit députp à la con
vention nationale, par conséquent très-occupé des af
faires publiques et des mouvemens de la révo lu tion ,
et très-peu en état de donner le moindre soin à ses af
faires personnelles.
L e I er. juillet, fut acquis le pré-verger des Carmes,
moyennant , qo francs. L e 19 du même m ois, le sieur
des Issarts paya i , oo fr. L e surplus , montant à 4,712 f r .,
55
5
fut payé par le sieur Bancal, aîqé.
L e 27 juillet 1 7 9 1 , il .acquit le domaine de Bonneval. Cette acquisition' étqit considérable.; elle fut faite
moyennant 124,100 francs, q u i , cumulés avec les in
térêts à ven ir, prqduisirent 136,645 francs ; le sieur des
Issarts ne put en payer que ,086 fr ., dont p,ooo fr.
furent acquittés le 27 août 1 7 9 1 , un mois après l’adju
dication; le surplus, montant à 58,469 fr., fut acquitté par
l’aîné. Nous aurons bientôt occasion de faire une re
58
5
marque importante sur l’époque de ces ppyemens et de
ceux qu’il a faits pour les adjudications postérieures.
Six autres acquisitions furent successivement faites dp
divers héritages détachés dans la commune d’Aulnat.
L e sieur des Issarts paya 300 francs sur celle c}u pré L iand i e r , acquis le 4 mai I 7 9 2 i tout le reste été payé par
l ’aîné.
Observons ici que ce fut à peu près l’époque à la
quelle le sieur .Bancal fut livré aux A u trich ien s, chez
�( 8 )
lesquels il resta trois ans en captivité, et n’en revint
que pour passer au conseil des Cinq-cents. Pendant tout ce
temps il ne put ni payer, ni ré g ir , ni jouir ses proprié
tés; le sieur Bancal aîné, ou mieux encore le sieur L o u yrette, agent d’affaires assez connu, administra, perçut les
revenus et paya diverses sommes. C ’est ici le lieu de
faire une remarque essentielle sur l’époque des payemens
faits en papier-monnoie par le sieur Bancal aîné.
U n état de ces payemens, écrit de la main deL o u yrette,
apprend qu’il a versé 124,485 francs sur les diverses ad
judications. Il est essentiel de se fixer sur les époques.
E n 1791 il paya seulement 1,104 francs.
E n 1 7 9 a ..................................... 10,878
E n 1 7 9 3 ..................................... 8,410
E n l’an 2 ................................... 22,400
j
E n l’an 3 ................................... 81,693
E t de cette dernière somme, 57,693 francs furent payés
dans les six derniers mois de l’an 3 , c’e s t - à - d i r e , au
moment de la plus grande dépréciation des assignats.
O n voit que les payemens augmentoient à mesure
que les assignats perdoient davantage. O n sait que le
sieur Bancal ainé jouissoit de toutes les propriétés ac
quises pour son frère. Les revenus étoient considéra
bles; le prix des ventes seul démontre qu’ils devoient
l ’être. Une partie étoit en ferm e, une autre en régie ou
en réserve. Il ne falloit pas , à cette ép o qu e, une grande
quantité de denrées pour rem plir un portefeuille d’assi
gnats , et l’administration recevoit pour valeur nominale
•les assignats dépréciés. Il ne fut donc pas très-difficile
au sieur Bancal aîné de payer 124,485 fr. Les 10,878 fr.
payés
�4 fC > 7
9
(
) ..........................
payés en T792, quoique déjà dépréciés, avoient peutêtre plus de valeur que tout le reste ensemble.
L e sieur des Issarts rentra dans sa patrie dans le cours
de l’an 5 ; il vint momentanément dans sa fam ille, et
bientôt Louyrette lui pi’ésenta des comptes et des projets
d’actes qu’il est essentiel de connoître.
U n premier état porte le tableau de toutes les acquisitions
faites, de leurs dates, et de celles de chaque payement fait par
l ’un ou l’autre des deux frères : c’est dans ce tableau que
nous avons puisé tout ce que nous venons de direà ce sujet.
U n second porte la fixation des sommes payées par le
sieur Bancal a în é , pour Bonneval seulem ent, et leur
réduction en numéraire suivant les époques; on y ajoute
les intérêts à dater de chaque ép o q u e, et on forme un
total d e ............................................................ 18,647 f.
O n porte ensuite « les constructions,
« plantations, achats de futailles, impo
li s itio n s , faits a B on neval, en 1 7 9 2 , à.
» c*
ce 14,377 fr- 5 réduits , suivant l’é c h e lle. .
Les intérêts de cinq a n s .........................
»
»
•
»
•
-
«
.
8,463
2 ,1 1
5
2C},2251.
1
■ 1
■■ 1 ■
■
»C.
O n y ajoute la valeur de certains four
rages , prétendus tirés des prés acquis par
le sieur Bancal a în é , et consommés à
B o n n e v a l. . . . . . . W . v ......... .......................' 2, i 5 o
T o t a l ....................................................... 31,375 f.
»
» c.
V ien t ensuite une grave observation de la façon du
sieur Louyrette, qu’il est utile de transcrire littéralement.
« L e citoyen Bancal aîné seroit en droit de demander
B
�C 10 )
« une indemnité sur les pertes qu’il a éprouvées dans
« toute sa gestion, attendu que les sommes par lui ayan
te cées, pendant tout le temps de son administration,
« ne lu i sont rentrées que long-temps après , et par
« conséquent en valeur bien moindre que celles qu’il
« avoit avancées. Les dépenses étoient journalières, m o« mentanées; les recettes de ferm ages étoient annuel« les et toujours retardées ,* en conséquence, la perte
« qu’il annonce est vraie et sensible. I l est constant que
« les payemens des J e r mages de 1794 ne lu i ont été
« fa its qu’à Cépoque oit les assignats étaient sans va« leur, et que soixante mille livres qu'il s'est trouvé
« avoir reçues sur les arrérages , ne lui ont pas valu cent
« cinquante écus. L e citoyen Bancal aîné ne compte pas
« le linge qui s’est usé et p e r d u , les sacs, les dépenses
« qu’ il a faites pour d’autres petits objets, encore moins
« son travail, ses soins; «n portant le surplus à sa plus
«
«
«
«
juste valeur, après .ayoir épuisé, anéanti son commerce,
et avoir éprouvé la rigueur de la dépréciation du papier-m onnoie, il est créancier généreux et malheureux
IJ
f» » c.
de la somme d e .........................................
« P lu s , pour avances en num éraire,
« suivant le com pte.....................................
2,298
»
3 375
« P lu s, pour argent prêté à son frère.
600
T o t a l .......................................................
34>273
»
»c.
Ces avances en numéraire se réfèrent sans doute à un
compte particulier, fourni en même temps par le sieur
L o u y re tte , des revenus de 1796.
Ce co m p te , toujours émané du sieur L o u yrette , et
�# o a
( >1 )
écrit de sa m a in , est intitulé : Recettes faites en numé
raire, sur les produits des baux à ferme et denrées de
1796. Les détails n’y embarrassent pas; il a en tout trente
et une lignes.
L e total de la recette, pour Bonneval,
est d e ................................................................
E t pour A u ln at, un seul à-compte d e . .
15
2,914 f.
931
» c.
»
3,845
»
* L a dépense est portée à 5,963 . s.
E t dans cette somme on voit deux ar
ticles remarquables ;
2 81
i° . P o u r im positions. i , i . u s .
20. P o u r dépense de
jou rn ées d'ouvriers pour
les m oissons, battages, ven(
danges, depuis le 12 mai
1796, jusqu’au 30 août 1797 2,905
8
4>I23 I* *9 s*
E n sorte qu’une année de récolte de Bonneval n’avoit
produit que 2,914 francs, et les journées em ployées,
pendant seize mois , pour moissonner, battre et vendan
g e r , avoient absorbé, A 9 fr. près, la valeur des denrées et
des prix de ferme d’une année entiere, sauf le prix delà,
récolte en v i n , qu’on y dit perçu par le sieur des Issarts.
E t cependant il y avoit pour 1,218 francs d'impôts.
Compte fait des dépenses montant à . .
5,963b
s.
3^845
»
avec la recette montant à .........................
5
L e sieur des Issarts se trouvoit débiteur,
sur 179 6, d e ...................................................
2 ,11 8 !.
5 s.
�( 12 )
'Q uoique Bonnevnl rapporte environ ,ooo francs.
C ’est apparemment ce qui a fondé l’article des avances
en numéraire, porté au compte de Bonneval à 2,298 fr.
5
L e sieur des Issarts ne peut pas expliquer la différence
de 180 francs; il reçut ce compte de bonne f o i , croyant
bien qu’on le lui rendoit de même. S’il en parle aujour
d’h u i, ce n’est pas pour demander un nouveau compte
pour cette année particulièrement; il sait assez qu’il doit
le prendre tel qu’il est, puisqu’il l’a reçu les yeux fermés;
mais c’est pour ne rien taire, et pour prouver qu’à aucune
époque on n’a compté des revenus de 1 7 9 1 , 179 2 , 17 9 3 ,
1794 et 1 7 9 5 , que son frère aîné ou JLouyrette avoit
cependant perçus.
Revenons aux 'avances pour Bonneval, arrêtées à
34,273 liv. 19 s.
Remarquons bien que cette somme de 34,273 francs
est précisément celle qui fît le reliquat du compte pré
tendu fait double , le 13 messidor an , et dont on parle
aux pages 5 et 6 du m émoire des appelans; et dès quenous en avons les élémens, il nous sera facile de voir
si le fait articulé par les appelans est vraisemblable, ou
même possible.
Il y eut un compte, cela n’est pas douteux ; il fut p ré
senté par le sieur L ouyrette, écrit de sa main. L e sieur
B^ucal le représente ; on vient de le transcrire fidèlement.
A la vérité, si on se fût borné à ce projet, le sieur
5
Bancal aîné n’y eût pas trouvé de titre : et il devoit lui
eu être donné un ; mais cela fut fait : il reçut un billet
p u r et simple de 34,273 francs, que lui fit le sieur des
lssarts, lo 6 vendémiaire an 6 , et dont il a conservé
�( 13 )
la copie. Fixons-nous sur scs termes ; ils sont absolument
concordons avec la teneur du compte présenté par
Louyrette.
« Je soussigné reconnois que , compte f a i t des
« sommes qui ont été avancées par mon fr è r e a ¿né
« tant pour compléter le prix des sommes de mon ad« judication du domaine de Bonneval ,q u e pour recans
ie tructions, plantations , achat de fu ta ille s , contribu
ai tions publiques , et autres objets d’amélioration faits
« audit dom aine, ledit compte f a i t , tant des capitaux
« que des intérêts , jusqu’au I er. juillet d ern ier, je dois
7
à mon frère aîné, la somme de trente-quatre mille
deux cent soixante-treize livres d ix -n eiif so u s , que
je m’oblige de payer aux époques qui seront convenues entre nous, avec les intérêts à cinq pour cent,
c< à compter du I e r . juillet dernier. »
L e I er. juillet 1797 étoit précisément le 1 3 messidor
an 5 , jour auquel on rapporte cet arrêté de compte
prétendu fait double, avec des conventions si importantes.
S’il eût existé, il n’eut pu être que la copie fidèle du
«
«
«
«
projet de L o u yrette,q u e Jean-Henry Bancal a encoredans
les mains, car l’époque en est la m êm e, puisque les intérêts
sont arrêtés au
I er.
juillet 1797 ; le résultat en est le même,
puisque les appelans conviennent, et que tous les comptes
postérieurs établissent que la créance fixée au 13 messidor
5
an
fut de 34,273 francs : ainsi il est évident que ce ré
sultat égal n’eût pu être que le produit des mêmes
élémens.
O r , dans le projet de Louyrette, ni dans le billet, on ne
trouve rien qui ait rapport aux jouissances perçues par
�( *4 )
•
l’aîné, ni à l’abandon des adjudications partielles ; et si on
l’y eût com pris, on eût été obligé de retrancher de la
créance i , oo francs payés sur le pré des Carmes, 300 fr.
payés sur le pré L ia n d ie r, et les intérêts de ces deux
sommes; ce qui eût diminué d’autant les 34,273 francs.
L ’a-t-on fait?
Les appelans ont osé l ’affirmer, pages 23 et 24 de
leur m ém oire, et il le falloit bien ainsi pour donner
quelqu’apparence de vérité à leur assertion ; mais le
tableau de compte écrit de la main de L ouyrette , qui
contient tous les élémens de la créance de 34,273 livres
19 sous, dépose hautement d’une vérité contraii*e.
Il n’est donc ni vrai ni possible que cet arrêté de
compte eût compris l’abandon des adjudications par
t ie lle s , et cependant fixé la créance à 34,273 liv. 19 s.
5
D ’autres réflexions tirées du fait, et qu’il ne faut pas
en séparer, l ’établiront formellement encore.
Nous avons vu de quelles parties a été composé le
compte de L ouyrette; uniquement des sommes payées
par Bancal a în é , sur B o n n e v a l, des intérêts de ces
sommes ju sq u ’au I e r . ju illet 1 7 9 7 , des constructions,
réparations, plantations, achats de futaille, im p osition s,
faits à Bonneval , en 1792 , et des intérêts "pendant
cin q ans ; enfin de la valeur des foins prétendus tirés
des propriétés acquises par l’a în é , et consommés à Bon
neval.
T o u t cela réuni forme la créance de 34,273 liv. 19 i.
L e sieur des Issarts s’oblige ¿\ la payer sans q u’on lui
fasse aucune déduction.
E t cependant l’aîné avoit joui pendant tout ce temps
�if/ 5
( i )
des biens acquis ; il sembloit naturel de ne pas répéter
le prix des adjudications, moins encore les im positions
et les in térêts, lorsqu’on avoit été payé de tout ou par
tie, et peut-être surpayé par les jouissances. O n dit sur
p a y é , et cela n’étonnera pas; car le sieur Bancal aîné
5
n’avoit pas seulement joui de B onneval, mais encore
du domaine d’A u ln a t, qui ne lui devoit r i e a , puisqu’il
n’y a voit rien dépensé, et que le prix en avoit été to
talement payé par le sieur des lssarts, et aussi des autres
propriétés détachées, que ce dernier avoit payées en
partie.
D ira - t-on encore qu’il en rendit un compte p a r t i
culier ?
M a is , d'une part, si cela eût été, la créance de
34,273 fr. en eût été au moins diminuée de beaucoup,
sinon absolument éteinte.
D e l’a u tr e , cette idée est impossible à faire accor
der avec la circonstance prétendue que le sieur Bancal
devint en même temps propriétaire des héritages dé
tachés; car il est matériellement impossible qu’ il pût
tout à la fois conserver ces h éritages, sans rendre les
i ?8oo francs, avoir rendu compte des jouissances, et
cependant rester créancier de 34,273 francs.
Mais l’écrit de L ouyrette, dans les ,réflexions qui le
terminent, suffit pour tout expliquer.
Il convient que les som m es p a r lu i avancées dans
tou t le temps de son adm inistration lu i sont rentrées.
Il se plaint seulement qu’elles ne lu i sont rentrées
que long-temps après j p u r con séquent? en valeurs bien
m oindres.
�( 16 )
Il dît que les recettes de fermages étoient annuelles,
mais toujours retardées ; que les payemens de ceu x de
1794 ( an 2 ) lu i ont é t é ju it s au m om ent où les assi
gnats étaient sans valeur.
E n fin , il convient qiC il a reçu 60,000,fr a n c s sur les
arrérages ; mais, suivant l u i , ils ne lui ont pas valu cent
cinquante écus.
Cependant il compte tout ce qu’il a avancé, sans dé
duction des sommes rentrées.
Q u ’importent les époques de dépréciation ? n’avonsnous pas remarqué que l’an 3 , notamment les six derniers
m ois, furent celles où le sieur Bancal paya pour son
frère 81,693 francs, et qu’en l’an 2 , ou 179 4 , il avoit
payé 22,400 francs ?
O ù prit-il ces fonds? f u t - c e dans son portefeuille?
a l l a - t - i l jusqu’à é p u is e r , anéantir son co m m erce,
comme le prétendoit L o u yrette? Assurément 81,693 fi\
de l’an 3 , ne pouvoient pas y porter atteinte ; et il ne
seroit pas étonnant, d’ un autre cô té, que ce commerce
ne fût pas très-florissant, à une époque où il n’étoit pas
plus facile de vendre des bas de soie, qu’il n’étoit prudent
de s’en vêtir.
• •
Comment donc expliquer cette incohérence du compte
présenté par L o u y r e tte , si on ne reconnoît qu’en se res
treignant au remboursement des sommes payées sur Bonn e v a l, et en avouant que ces avances avoient é té , quoi
qu’on moindre valeur, couvertes par les jouissances et
la rentrée des arrérages, et ne les déduisant pas, il
entendit rejeter cette valeur sur les sommes qu’ il avoit
avancées pour les autres adjudications, et dont il ne demandoit
�¿ f(S
( 17 )
mandoit pas alors le compte ni le payement; qu’il en
tendit fixer seulement ses avances pour en avoir un titre,
comme le sieur des Issarts avoit dans sa procuration et
la jouissance publique de ses b ien s, qu’avoit faite son
fr è r e , un titre toujours v iv a n t, pour en demander le
com pte?
Cette id ée, la seule possible, est bien exclusive encore
de l ’existence d’ un abandon des héritages acquis partiel
lem ent; sans cela le compte de l’an
seroit inexact. L e
billet de l’an
su rpris, et l ’omission étant établie par
les détails du com pte, ce seroit une erreur toujours ré
6
5
parable; il faudroit revenir à com pte; et bientôt les élémens du billet de 34,273 francs, et des quatre obliga
tions qui le représentent, disparoîtroient entièrement. E t
c’est là ce qu’a demandé le sieur des Issarts, parce que
les sommes avancées pour les adjudications partielles ,
sont bien loin de couvrir celles reçues par le sieur Bancal
a în é , sur les cinq années de jouissances.
Il ne faut cependant rien taire. L ors du compte de
l ’an , ou du billet de l’an 6 , ou même après ( le sieur
5
des Issarts ne s’en rappelle pas ) , Louyrette lui présenta
un projet d’a cte , qu’il n’eut besoin que de lire pour le
refuser : il faut le faire connoître.
A p rè s un assez long préambule sur les qualités des
parties, et les événemens qui avoient précédé l’époque
des comptes, on faisoit parler ainsi le sieur des Issarts:
« Je reconnois que mon frère m’a présenté le com pte
« détaillé des avances qu’il a bien voulu faire pour m o i,
a ainsi que le compte des recettes q u 'il a fa ite s du
« produit de ces mêmes biens ju sq u 'il ce jo u r ; qu’ayant
C
%
�^
w
(
1 8
)
«. bien examiné et calculé le tout, j& me suis trouvé
« redevable envers lu i de 34,763 livres 19 s o u s, valeur.
« num éraire en écus. »
Rem aïquons la conséquence qui résultoit de cette pre
mière partie de l’acte. L e sieur des Issarts, constitué dé^
bileur de 34,273 livres 19 sous, par un compte qui ne
contenoit aucune déduction des sommes reçues pendant
tout le temps de la jouissance antérieure, reconnoissoit
que ce reliquat étoit fo r m é , non-seulement du compte
des avances, mais encore de la déduction des som m es
reçues.
Il fulloit bien un peu compter sur la confiance du sieur*
B ancal, et sur une vivacité de caractère qui ne lui permettoit jamais de réflexion envers les personnes qu’il ne
soupçonnoit p a s, pour lui tendre ce piège.
P o u r le libérer des 34,273 livres 19 sous, on lui faisoit
ensuite consentir pour 24,000 f r . , et avec pleine garantie,
une vente du domaine d’A u ln a t, qui lui coûtoit 41,297 f . r
payés par lui seul.
. O n lui faisoit faire un billet de i o , oo f r . , payable
dans uu an avec intérêt.
O n lui faisoit reconnoître que son frère aîné avoit payé'
la totalité du prix des adjudications partielles, notam —■
m ent du verger des C a rm es; et sans bourse d é lie r, ni'
lui rendre les 1,800 fr. par lui payés, 011 le faisoit re
noncer i\ la déclaration de m ie u x , faite à son profit.
O u faisoit accepter cette déclaration, cette vente e t
cet abandon par le sieur Bancal aîné.
5
E t on faisoit obliger le sieur des Issarts u en passée
acte par-devant notaire, à f r a i s communs..
�19
'(
)
L e sieur Bancal des Issarts se révolta contre cette pro
position.
/
P o u rq u o i, en effet, e iit-il reconnu que la fixation
de sa dette à 34,273 fr. étoit le résultat du compte dé
ta illé de toutes les avances et des recettes q ii’a ç o itfa ite s
le sieur B a n c a l du produit de ces mêmes b ien s, lorsque
le détail des comptes qu’il avoit entre les mains lui apprenoit que les recettes n’avoient été ni déduites, ni
précomptées ?
• Pourquoi e u t - il donné pour 24,000 fr. le domaine
d’A u l n a t , qui lui en coûtoit 4 1 ,2 9 7 , à celui-là même
qui en avoit joui cinq ans, sans lui rendre compte des
jouissances ?
- Pourquoi eût-il abandonné la déclaration de m ie u x ,
faite en sa fa v e u r , sans déduire sur sa dette 1,800 fr,
q u’il avoit avancés ?
E t surtout comment eût-il p u , dès qu’il s’obligeoit h
payer les 34,273 fr., abandonner ces héritages, sans rien
réclamer de ce qui devoit opérer compensation , et ab
sorber bien au delà ce que le frère aîné avoit payé pour
ces adjudications ?
E n fin , pourquoi se fût-il obligé à payer à frais com
muns le coût d’ un acte que la vente d’A u ln at devoit
rendre considérable ?
A u reste, il lui suffit de nier formellement que ce
double ait jamais existé ; et son assertion mérite autant
de f o i, elle vaut autant, pour la justice, que celle de
ses adversaires.
A la v é r ité , ils prétendent en établir l’existence par
des comptes postérieurs, qui parlent de ce compte verbal
G 2
�v>\v
5
(
20
)
J'ait en m essidor an
,* mais il y a loin d’ un com pte
verbal à un double qui contient un abandon de pro
p riété; et bien loin d e ji ie r le compte verb a l, le sieur
Bancal l’a toujours reconnu , puisque , dès le premier
instant du procès, ce compte, écrit de la main de L o u yrelte, a été attaché à son dossier.
Et on sait que ce compte fut suivi d’un billet pur et
simple de 34,273 fr. Il ne pouvoit y avoir aucun autre
acte pour cet objet.
Mais le sieur des Issarts a de meilleures preuves encore
à donner de ce qu’il avance.
Lorsque l’affaire a com m encé, il a produit non-seu
lement le compte des 34,273 liv. 19 s., mais aussi le
projet d’acte dont nous venons de parler : il l’a com
m uniqué sans défiance à ses adversaires.
E n réponse à cette communication'franche et amiabley
on trouve dans le dossier des adversaires une note écrite
de la même main ( celle de Louyrette ) ; et il le falloifc
bien ainsi, car lui seul a connoissance de ce qui s’est passé
à cette époque. L e sieur dès Issarts atteste qu’il n’a jamais
eu affaire qu’à lu i, que jamais il n’a ouvert la bouche à'
son frère des comptes qu’ils avoient ensemble. Son frère
¿toit dans un état d’infirmité assez g ra v e ; il ne s’occupnit pas d’affaires, et le sieur Louyrette lui a voit expres
sément recommandé de ne pas lui en parler; sa foible
santé n’étant p a s , d isoit-il, capable de le supporter.
Q u o i qu’ il en soit, voyons la réponse de Louyrette surla communication qui lui a été donnée de ce projet d’acte*
« Environ quatre m ois après le compte arrêté le«r 13 m essidor an
5 ? le sieur des Issarts, pour se libérer'
�4
é
«
«
«
«
«
«
«
«
«
cc
«
«
«
«
(y
( 2Ï ) ~
envers son frère du reliquat de Ta somme de 34,273 liv.
19 s . , lui proposa la cession du domaine tl’A u l u a l ,
pour la somme de 24,273 f r . , et promeüoit de payer
les 10,000 fr. restans en peu de temps. L e sieur Bancal
aîné refusa la proposition, en lui remontrant que l’eniploi qu’il avoit fait de ses fonds p a r ses a cquisition s
particulières , ou pour libérer celles faites pour le
sieur des Issarts, avoient altéré les fonds nécessaires à
son com m erce; qu’il ne pouvoit absolument faire de
nouvelles acquisitions; et la proposition en resta lù.
« Cette proposition étoit écrite d o u b le, sans date ni
signature : tous sont restés entre les mains du sieur
des Issarts. L ’ un a été produit à l’audience, et se trouve
encore dans le dossier remis à M'. G a r r o n , son avoué,
O n ignore l’usage qu’il en veut faire; mais, dans tous
les ca s, il est contre l u i , etc. »
Cette explication est curieuse.
Cette proposition dont parle la n ote, et qu’on a v u e
dans le dossier de l’intim é, n’est autre chose que le projet
de compte et traité dont on vient de parler.
Remarquons bien que Louyrette , qui doit m ieux
que personne en savoir l’époque, puisqu’il est écrit de
sa m a in , la fixe A quatre mois environ après le compte
de messidor an .
5
Remarquons aussi que c’est I,onyrette qui a fait tous
les comptes et tous les projets du sieur Bancal aîné, et
qui s’en est toujours occupé exclusivement à tout autre,
parce qu’ il faisoit tontes ses affaires.
Comment se fait-il maintenant, si cette proposition
étoit émanée du sieur des Issarts, et qu’elle fut faite:
.
^
�' v'
(2 2 )
'
à son f r è r e , 'c ’e s t - à - d i r e , au sieur L o u yrette, qui seul
traitoit des intérêts du* sieur Bancal aîné ; co m m en t, di
s o n s -n o u s , se f a it - il que cette proposition, présentée
au sieur Louyrette en deux doubles, se trouvât écrite
de sa m a in , et que déjà il y eût consigné l’acceptation
du sieur Bancal aîné , dont il dirigeoit toutes les démar
ch es? N ’est-il pas é v id e n t, au contraire, que ce projet
q u i se trouve dans le dossier du sieur des Issarts, lui fut
présenté comme une proposition de son fr è r e , par le
sieur L o u yrette, son intermédiaire?
E t si cette proposition fut faite quatre m ois après
le compte de m essidor an
, comment L ouyrette y
consigna-t-il comme convention nouvelle et non encore
écrite, l’abandon des héritages détachés, et l’acceptation
5
du sieur Bancal, si déjà cet abandon étoit consommé
depuis quatre mois ?
Comment le sieur Bancal aîné refusa-t-il cet aban
d o n , que cependant Louyrette lui faisoit accepter, et
po u r lequel on lui faisoit faire encore un sacrifice de
1,800 fr. payés en 1 7 9 1 , tandis que lui-meme avoit payé
ces propriétés en assignats dépréciés, et que le sieur des
Issarts eût trouvé un grand bénéfice à les reprendre?
Croira-t-on maintenant au double sous seing privé du
13 messidor an ?
Ce n’est pas que le sieur des Issarts conteste qu’il ait
5
voulu se libérer en abandonnant le domaine d’A uln at;
q u’il ait su gré à son f r è r e , de ses peines et de ses soins.
Il n’a jamais manqué d’exprimer une reconnoissance quiest encore dans son cœur : aussi n’a-t-il jamais regretté
à son frère ni à ses n e v e u x , les agrémens, les a van-
�42!
23
(
)
tages réels qu’ils trouvoient dans la jouissance de BonD e v a l ; mais il n’a jamais proposé de céder son domaine
d’Aulnat pour la moitié de sa va leu r, et de ce qu’il lui
coûtoit réellement. Il se persuade que si ses neveux
eussent réfléchi davantage, ils n’eussent pas cru, et n’eus
sent pas prêté leur nom aux imputations injurieuses
q u’on lui a faites.
D e tout ce que nous venons de dire résulte, ce semble,,
l ’éclaircissement d’un fait qui n’a pas besoin d’auti’es
preuves.
L e sieur Bancal aîné a joui de tout depuis chaque
acquisition.
5
Il a présenté , en messidor an
, un compte de ses
avances pour le domaine de Bonneval seulement.
Il n’y a pas compris ses avances pour les autres ac
quisitions.
11 n’en a pas déduit ce q u ’il avoit reçu pour les jouis
sances de cinq années.
Il a reçu un billet de 34,273 livres ig so u s, m on
tant de ses avances pour le payement de Bonneval.
E t il n’a été rendu à cette époque aucun compte ni
des autres avances, ni des sommes qui pouvoient les
compenser.
V o ilà en résultat la réalité du fa it; c’est à cela qu’il
faut le réduire. Il a été nécessaire de rétablir en commen
çant, afin de bien le fixer avant d’en voir la suite. Ce
récit, qui tient de la discussion , nous dispensera d’y re
v e n ir , et mettra à même de saisir beaucoup plus ai
sément le sens et les conséquences des actes postérieurs.
Nous arrivons à celui epu est le plus important de la
cause.
�C 24 )
L e sieur des Issarts avoit pour son frère le plus grand
respect et la plus teadre amitié ; il ne faisoit que lui
rendre un sentiment de tendresse, que son frère lui avoit
toujours témoigné ; aussi reçut-il sans examen le compte
que lui présenta le sieur L ouyrette, parce qu’ il avoit la
confiance de sou frère ; aussi signa-t-il sans réflexion l e
Lillet de 34,273 francs, lorsque le sieur Louyrette le lui
proposa , s’imaginant avec raison que ce compte des
avances pour BounevaJ. n’étoit pas exclusif du compte des
revenus qu’on ne cessoit pas un seul instant de lui devoir.
Il n’avoitpas davantage réclamé le principal ni les jouis
sances de sa portion héréditaire; il avoit été toujours et
exclusivement occupé des affaires pu b liqu es, et avo!t
abandonné à son frère le soin des siennes p ro p res, dont
il ne connoissoit pas la moindre chose,
L e billet de 34,273 fr. fut bientôt suivi d’un autre écrit,
U n projet d’alliance avoit été conçu entre sa nièce et lui;
son frère lui en avoit même écrit pendant qu’il étoit au
conseil des Cinq-cents. Il ne connoissoit pas alors le testa
ment de son père; mais il savoit que son frère ne se soucioit pas de démembrer ses propriétés, et de rendre un
com pte de jouissances. Plein de reconnoissance pour la
conduite de son f r è r e , et se laisant aller à un m ouve
ment irréfléch i, il remit un jour à sa nièce qui se trouv o it seule avec l u i , cette déclaration du i er. prairial an 6 ,
dont on tire une fin de non-recevoir contre sa demande
en partage : elle est, ù ce qu’il p aroît, entièrement écrite
de sa main.
« Je déclare, d it-il, que je consens à la pleine et entf tière exécution du testament de mon père ; que je f a i s ,
«c en
�$23
5
( î
)
« en tant que de besoin , toute délivrance de legs et
« dispositions fa ite s pat' mon père; et que je quitte
« aussi sa succession et celle de ma mère de toutes choses
« quelconques, sans réserve , en remerciant D i e u .d e
« toute la reconnoissance que je leur dois. »
Cet écrit ne lui fut dicté ni demandé par personne ;
il le donna par une impulsion dont il ne chercha pas
à se défendre; il le confia à sa nièce, et à sa nièce seule.
Il crut que son frère en éprouveroit du plaisir, qu’il y
seroit sensible; il trouvoit son indemnité dans les con
ventions du mariage.
L a simple inspection démontre qu’il fut l’ouvrage de
sa seule pensée, qu’il ne fut qu’ un véritable projet où il
consigna ses intentions que personne ne connoissoit, et
que personne n’accepta comme une obligation actuelle et
valable en soi.
Depuis , le sieur des Issarts continua la môme manière
de v iv r e ; il reçut des comptes partiels sans ombrage
comme sans défiance. Cet état de choses a duré jusqu’à '
son mariage avec la demoiselle Girard.
L e i er. floréal an 7 , il reçut du sieur Louyrette un
état de compte de tout ou partie de ses revenus, depuis
le i cr. juillet 1797.
7 499
,
l. 16 s.
L a dépense fut portée à .......................
La recette seulement à ............................ 7>3r9
»
Il se trouva débiteur de 360 livres 16 sous, qu’on
convint de porter au chapitre de dépense du com pte
suivant.
L e 20 thermidor an 8 , nouveau compte des recettes
et dépenses, depuis le I er floréal an 7.
D
�( 26 )
La recette fut d e ...................
La dépense d e ..........................
6,7
I.
4,684
2 s»
Il y eut donc excédant d e .....................
2,100 .
1
» s.
85
On compte ensuite trois ans (Cintérêts des 34,2731.19s.;
on eu déduit les 2,100 liv ., et ajoutant 3,0401. i s. 9 d.
qui restent, aux 34,273 liv. 19 sous, on l'orme un capital
de 37,314 liv. 5 sous 9 den., dont le quart produit chacune
des obligations de 9,328 liv. 11 sous, qui furent deman
dées au sieur des Issarts, et qu’il consentit à ses neveux,,
à la charge de l’intérêt à cinq pour cen t’, qu’il a servi
depuis.
L e billet de 34,273 francs comprenoit déjà 4,81 fr.
d ’ intérêts ; ils avoient produit d’autres intérêts qui sont
calculés avec ceux du capital, et montent, au 20 theivmidor an 8, toute déduction faite, à 3,040 liv. i sous;
5
5
5
et ces intérêts d’intérêts sont encore confondus dans le
capital des obligations, pour produire d’autres intérêts.
L e sieur Bancal a tout signé avec une confiance sans
bornes.
Toujours est-il démontré que l’arrêté de compte à
34,273 francs, a été la baSe de celui de l’an 8. Ce dernier
s’y r é i è r e ,e u le rappelant comme compte verbal fa it
au mois de messidor an 5 ,• il est établi sur les memes
bases, fait dans les mêmes expressions, et seulement pour
le temps postérieur au précédent.
Et ainsi-il demeure constant que les appelans, nantis
des jouissances qu’ ils ont faites pendant lecoursdu papîermonnoie , ont néanmoins contre leur oncle une créance
de 37,314 francs, dont ils pei’coivent les intérêts, quoi-
�271
(
que les Siemens qui en ont formé le capital, fussent plus
q u ’absorbés par ces jouissances.
?
C ’est à ce compte du 20 thermidor an 8 , que les appelans fixent l’époque à laquelle ils prétendent que le
sieur des Issarts redemanda le prétendu double de l’an ,
p our ne pas fa ir e double emploi.
Cette assertion est aussi impossible qu’inexacte.
D ’abord ce n’eût pas été avec le compte de l’an 8 ,
ni avec les obligations, mais bien avec le billet de ven
démiaire an 6 , que cet arrêté eût fait double emploi.
20. O n ne craignoit pas de faire double emploi de
l ’arrêté de compte de l’an 8, avec les quatre obligations,
puisqu’on laissoit subsister l’un et l’autre.
3°. Si même le double emploi eût existé entre un
compte de l’an , et celui de l’an 8 , ou les obligations',
il n’en étoit pas de même de l’abandon des héritages dé
tachés, qui emportoit tradition de p ro p rié té , et qui ne
se retrouvoit nulle part ailleurs.
Sans doute on ne pouvoit guère répéter cette trans
lation de propriété dans les obligations ; mais dès qu’in
dépendamment de ces titres particuliers, on conservoit
un compte sous seing p r iv é , on pouvoit tout aussi-bien
le faire d o u b le , en y transcrivant les conventions ex
primées dans celui de l’an .
5
5
5
E t qui doutera que les sieurs B an cal, ou pour eux
le sieur Louyrette, eût manqué à le faire, et à conserver
ce titre unique de propriété , q u e , suivant l u i , il avoit
cru devoir exiger en l’an ?
Qui croira qu’ il s’en fût départi au moment même
o u , donnant au sieur des Issarts une marque de défiance,
D 2
5
�.
' (28)
il exigeoit au nom de ses neveux des obligations nota
riées au lieu d’un b illet, et se hâtoit de mettre aux h y
pothèques des inscriptions qu’il avoit promis de ne pas
prendre?
^
D ’ailleurs, le sieur des Issarts a prouvé que ce compte
ne fut autre que le projet qu’il représente, de la main
de L o u yrette, et que le x’eliquat en fut fixé par un billet
pur et simple qu’il a retiré ou dû retirer ( il l’a perdu
de v u e ) en consentant les obligations.
L e sieur des Issarts avoit seul en son pouvoir tous les.
arrêtés de compte signés de sa nièce et de l u i , puisqu’ils
n’out pas été faits doubles; il a tout produit dès le pre
mier instant, quoique quelques-uns se présentent en ap
parence contre sa demande. Comment soupçonner qu’il
ait détourné la moindre chose ?
Comment surtout l’en accuser durement, sans preuves
et sans vi’aisemblance..
D eu x autres comptes ont été projetés, mais non arrêtés,,
en l’an ro et 11. L e sieur Bancal doit néanmoins convenir
qu’ il a payé 692 francs dont il n’a pas de quittance, et
qu’on lui a dit être avancés outre les jouissances de ces.
deux années : il n’y a vu aucune conséquence pour les
temps antérieurs.
Les choses ont resté en cet état, jusqu’à l’époque où
le sieur des Issarts a épousé la demoiselle G ii’ard d’A u Jjièrc.
- Les appelans disent qu?il a gardé long-temps le silence
qu’ ils alloient le poursuivre eu payement des obligations
la vérité est qu’il'a réclamé presqu’aussitôt. Des pou r
parlers, des projets d’arrangement, deux ans employés à
�( 29 )
~
un arbitrage in fru ctu eux, ont retardé les poursuites ;
elles n’ont commencé que le 11 octobre 18 11. Il faut se
fixer sur la demande.
E lle a deux objets très-distinctement énoncés.
i° . L e partage de la succession des père et mère. L e
sieur des Issarts demande sa portion afférente, et conclut
contre ses neveux au rapport du m obilier, du fonds de
com m erce, de l’ inventaire, etc.
20. Il demande le compte de la gestion et
tration des domaines nationaux acquis; savoir,
maine situé à A u ln a t,e £ autres héritages, du
de Bonneval, et du p r é - v e r g e r situé près les
adminis
d’un do
domaine
Carmes :
ladite a d m in istra tion , est-il dit, rem ontant à l'époque
de chaque adjudicationRemarquons bien ici que le sieur des Issarts, dans sa
demande, comprenoit tous les biens acquis, même les
héritages détachés , puisque tous ces autres héritages
situés ù A u ln a t, et le pré des Carm es, remplissent les
adjudications. Il les regardoit donc tous comme à lui.
Mais ce qu’ il y a d’étonnant, c’est que le rédacteur
de l'exploit, ignorant sans doute que le sieur des Issarts .
11e possédoit, ni ces autres héritages, ui le pré des Carmes,,
se borne à demander les jouissances passées, et ne con
clut pas au désistement.
Observons aussi qu’ il demande un compte g é n é r a l,.
sans prétendre rien changer aux comptes particuliers de
chaque année, qu.’il supposoit devoir y être portés tels,
qu’ils sont, saut les erreurs ou omissions reconnues.
Les défendeurs se présentent, concluent à c e q u ’ il soit
déclaré non recevab le, subsidiaircment débouté ; et c’est
�(3 0
en cet état que la cause ést' portée à l’audience du tri
bunal de Clerm ont, le 13 mars 1812.
L e sieur des Issarls, en renouvelant ses conclusions,
demanda subsidiairement le compte des cinq années an
térieures à 1796.
- Il demanda aüssi le désistement du verger des Carmes,
aux-offres de tenir en com pte les sommes payées; mais
sans demander celui des autres héritages détachés dont
il continua de réclamer les_ jouissances.
- Les défendeurs reprirent leurs conclusions tendantes
à la fin de n on -recevo ir, subsidiairement au débouté.
Ils opposèrent, quant aux com ptes, que le sieur des
Issarts n’étoit plus recevable, depuis les obligations de
l ’an 8 , à demander aucun compte antérieur.
»
E t quant aux comptes postérieurs, ils soutinrent,
d ’une p a r t , qu’ils ne pou voient concerner ni le sieur
Bancal ni la dame Dalbine, et que mademoiselle Bancal,
qui seule avoit g é ré , les avoit tous rendus.
O n ne trouve nulle part de conclusions tendantes à
la rertiise du prétendu acte double du 13 messidor an .
Mais ils semblent eu x -m êm es demander la révision
du com pte, en soutenant qu’on devoit leur tenir compte
du p r ix des bestiaux qui n’avoient pâs été compris dans
les comptes.
L e tribunal a ordonné le partage, le désistement du
p r é , et la révision des comptes par Boutai , notaire, à
l ’effet de savoir si le p ri* des bestiaux y est compris; et
il a rejeté la demande d’un compte général formée par
5
le sieur des Issarts.
Les adversaires ont interjeté appel,
«•
�(
3
1
}
i 0'. En. ce que l’écrit de l’an 6 a été rejeté;
2?. E n ce que le désistement du pré des Carmes a
¿té ordonné;
3°, Eu ce que le sieur des Issarts n’a pas été condamné
à remettre le prétendu double de l ’an ,
L e sieur des Issarts a lui-même interjeté appel inci
dent, en ce que le tribunal a rejeté sa demande en com pte;
il demande le compte gén éral, subsidiairement celui des
cinq années antérieures à 17 9 6 , et celui des héritages
détachés, pour tout le temps de la jouissance; enfin, il
réclame la procuration donnée en b la n c , pour vendrç
le domaine d’Aulnat.
5
T e l est l’état de la cause : nous pouvons la discuter
dans le même ordre que l’ont fait les appejans; c’est-ù-,
d ire, exam iner, i° . le mérite de la demande en partage,
et de la déclaration de l’an 6 , et en même temps la fia
de non-recevoir incidemment proposée contre la nul
lité de cette déclaration.
2°. La demande en désistement du verger des Carmes.3 9. L a demande en reddition de compte.
§. I er.
\
La déclaration de Tan 6 est-elle un acte va
lable qui puisse écarter la demande en par~
tage ?
A v a n t d’aborder cette question, le sieur Bnncal des'
Issarts n’a pas dû se dissimuler que les circoüi>tanceS'
exigeoient de lui une autre explication..
�(3 0
Il ne suffît pas, en effet, à l’homme probe et délicat,
de critiquer dans sa forme un acte qu’il a consenti en
m ajorité; car il a dû avoir des motifs de le consentir,'
il a dû savoir ce qu’il faisoit; et la solennité de l’acte
n’ajoute rien à la réalité de son engagement, s’il s’est
réellement et valablement engagé.
‘ -1A u ssi, le sieur des Issarts a suffisamment fait sentir dans
le récit des faits, dans quelles circonstances et par quel
mouvement il donna cette déclaration. Nous reviendrons
sur cette explication ; mais il im porte, avant to u t, de bien
conn oître, en d r o i t , quelle peut-être la valeur de cet
écrit : nous serons mieux à même d’en déterminer les
conséquences , surtout en le rapprochant des circons
tances qui y ont donné lieu.
O n le considère comme approbation du testament, et
abdication de la légitime : la simple réception du legs,
dit-on , vaut approbation form elle; et cette approbation*,
toujours considérée comme valable en soi, exclut la que
relle d’inofficiosité, même la demande en nullité du tes
tament.
• ,
O n cite des textes q u i , dit-on , le décident formelle
ment et pour tous les cas.
Il est très-vrai,en d ro it, que la réception du legs ex
clut la plainte d’inofficiosité ; mais c’est une erreur trèsgrave que de vouloir étendre ce principe à tous les cos:
l ’ordre môme des principes ne le permettroit pas; il
suffit, pour s’en convaincre, de les méditer un instant.
L ’ héritier de d r o i t , qui est réduit par le testament à
un legs moindre que sa légitim e, peut refuser le legs
et demander l’intégralité de ses droits! Néanmoins il
�33
(
)
n ’y est pas o b lig é , et il est absolument le maître d’exé
cuter le testament, si d’ailleurs il trouve en lui-même
des motifs de le respecter, ne fussent-ils puisés que dans
sa délicatesse ou dans les convenances. 11 est censé avoir
connu le testament, par cela seul qu’ il a reçu le legs.
A in si il ne peut pas dire ensuite qu’il a été induit en
erreu r, ou qu’il n’a pas connu les dispositions du tes
tament, puisque son approbation, accompagnée de la
réception du legs, démontre qu’il en a connu toute la
substance, et que la lecture du testament même ne lui
en eût pas appris davantage.
A llo n s plus loin. L ’héritier exhérédé par un testa
m ent, peut encore l’approuver, car l’exhérédation n’est
pas par elle-même un vice; elle peut être fondée sur
une juste cause , et dans ce cas l’héritier peut avoir pardevers lui des motifs de garder le silence, soit parce
que la cause étant vraie, l ’exhérédation est valable, soit
parce que des motifs de respect pour lu i-m ê m e peuvent
lui faire éviter avec réflexion de rendre p u b liq u e, et
l’exhérédation, et les motifs qu’on y a donnés.
Aussi la lo i, présumant ce m otif, dit-elle q ue, dans
ce c a s, l ’héritier qui a connu le testament, et qui en a
demandé l’exécution au nom d’ un autre dont il étoit
procureur fondé, a fait une approbation valable. A g n o visse enirn videtur qui quale quale ju d iciu m defuncti
comprobavit. Ce sont les textes dont s’autorisent les
appelans.
La raison de ces dispositions de la loi est bien simple.
Dans ces cas comme dans tous ceux d’inoiliciosité, la
disposition portée au testament est valable en soi ; elle
E
�.
f 34 5
n’est ni contraire aux bonnes mœurs, ni prohibée p a r
les lois : le testament peut subsister avec elle.
'
Mais il en est bien autrement des nullités intrinsèques;
par exem ple, la prétérition : c a r , soit d’après les lois
romaines, soit même d’après l’article 53 de l’ordonnance
de 173 5 ,1a prétérition est un vice radical et substantiel,
par la seule force duquel le testament est annullé d e
plein d roit; tellement que si l’enfant prétérit ne s’en
plaint pas, tout autre héritier non prétérit peut demander
la n u llit é , et la justice doit la prononcer.
Cela est fo n d é, non-seulement sur ce que la loi ne
permet pas qu’on touche à la légitime des enfans, mai&
encore sur l’injure qui résulte de l’omission. Elle ne
s’en remet plus à personne pour venger cette in ju r e ;
elle déclare qu’elle lui est insupportable; et pour la
bannir à jam ais, elle prononce elle-même la n u llité,
et déclaré sans force l’acte qui la renferme.
Cette doctrine nous est enseignée par les deux doc
teurs les plus solides et les plus lumineux du droit écrit,
D o liv e et Furgole. Elle est celle des lois comme celle
des principes et delà saine raison : nous allons le prouver
immédiatement.
Iiii loi i rp. ,ff. D e Jiis qvœ u t indign. au fe r ., s’ex
prim e ainsi : P o s t legatum acceptum , non tantùrn licebit fa is uni arguera testa mentum , sed etiarn non ju re
fa c tu m contendere : inojjiciosum autern dicere non perviittitu r.
V o ilà une disposition générale qui n’est faite pour
aucun cas particulier, mais qui prévoit les difficultés
et prévient les mauvaises applications, en établissant
une distinction de principe. .
�Ainsi l’héritier qui a reçu son legs ne peut plus cri
tiquer le testament comme inofficieux.
Mais il peut l’arguer de faux.
• E t il peut tout aussi-bien en demander la n u llité,
¿V/ est contraire a u x lo is , sans que la réception du legs
y fasse obstacle.
Il est cependant possible de rejeter certaines de
mandes en nullité ; par exem p le, des nullités pure
ment de forme extrinsèque, qui ne touchent pas à la
substance du testament, et que l’héritier peut négliger.
A in si on a vu des exemples qu’ une nullité de forme que
l ’héritier avoit pu ou dû connoître, étoit déclarée cou
verte par la réception du legs. C ’est dans cette espèce
que se range l’arrêt de la Y o lp iliè r e , cité par les appelans.
E t c’est aussi le cas dont parle R icard , lorsqu’il dit que
le testament peut subsister par la seule volonté du défunt,
si l’héritier le reconnoît et l’a p p ro u v e , quoiqu’il soit
invalide en solenn ité; parce q u e , dans ce cas, le tes
tament subsiste malgré la nullité d e f o r m e , tant qu’elle
-n’est pas prononcée. Mais ces sortes de nullités ne sont
pas de celles qui sont toujours réservées, parce qu’elles
vicient le testament, comme les cas de prohibition ab
solue, qu’exprime la loi par ces termes: N o n ju re fa ctu m .
L a loi
L e §.
I er.
5 , au
même titre , n’est pas moins formelle.
nous dit : D e eo vero q u ileg a tu m accepit f s i
' neget ju re fa c tu m esse testar/ientum , divus pins Uct
rescripsit : cognati Sophronis licet ab Jiœrede instituto
acceperunt legata , tarnen s i his ( hceres ) ejus condi
t io n s f u e r i t visus ut obtinere hœreditatem non p o ssit
<et ju re intestati ad eos cogna tos p ertin et, pet ere hœ re
dit a te t u ipso ju re potuerunt.
�i 3 6 },
V o ilà encore un principe général tracé par la loi. II
est toujours le même.
Il ne faut pas dissimuler cependant qu’ immédiatement
l’empereur semble apporter une modification à cette
règle qu’il vient de prescrire par ces termes rigoureux
ipso ju r e . O n n’y. auroit trouvé aucune conséquence, si
Güjas n’y avoit prêté un sens extrêmement étendu et
absolument contraire au texte. C ’est avec F u rg o le , et
sur l’évidence du f a i t , que nous le disons ainsi.
!La loi continue en ces termes :
P ro h ib en d i autem s in t, an non , ex cu ju sq u e.p eis o n a , con dition e, œ ta te, cognita causa à ju d ice constituendum erit.
Ces expressions ne doivent pas être séparées de la
phrase qui précède. Dans la première on trouve la
r è g le , et dans la suite on trouve l’exception ou plutôt
la modification. Et comme remarque F u rg o le, Cujas a
fait de l’exception la règ le , et de la règle l ’exception.
Ces derniers termes de la loi , traduits soit littérale
ment , soit dans leur sens naturel, semblent devoir s’ex
pliquer ainsi :
« Néanmoins ils seront repoussés ou non, suivant que
« le jug e en décidera en pleine connoissance de cause,
« en consultant l’â g e , la condition et la position des
« personnes. »
Assurément cela ne veut pas dire que la nullité ne
pourra être admise que dans le cas de m inorité, ainsi
que l’ont prétendu Cujas et quelques auteurs après lui;
car il eut été, d’une p art, tres-inutile d’une loi spéciale
pour dire que le mineur peut se faire relever d’une
�37
(
)
réception do legs et d’une approbation de testament ,
comme de tout autre acte; les principes généraux sur
la minorité le disoient assez : de l’autre , le premier
m em bre, qui à lui seul contient la rè g le , eût été inex
plicable. T o u t ce qu’on peut y v o ir , c’est qu’en ouvrant
la voie de la uullité malgré la réception de legs, la loi
ne veut pas cependant que cette règle soit absolue, et
elle donne au juge toute la latitude possible pour l’ad
mettre ou la rejeter , suivant que l’ùge et la condition
des personnes , et l’ensemble des circonstances donne
ront à la demande un caractère de bonne ou mauvaise foi.
C ’est ainsi, en effet, que l’explique la loi 4 3 , ff. D e
hœred. p e tit., qui rapporte le même rescrit.
Im perator A n to n in u s , rescrip sit, d i t - e l l e , e i , q u i
legatum e x testamento ab&tulisset causa cognita hœ~
reditatis petitionem negandam e s s e , SCILICET SI MA
NIFESTA CALUMNIA S ïf.
Cette interprétation de la loi elle-m êm e ne laisse sub
sister aucun doute sur le sens d’ailleurs simple et naturel
du rescrit d’Antonin ; évidemment il en résulte que le
juge peut toujours admettre la demande en nullité, mal
gré la réception du legs, a-moins que les circonstances et
la qualité des personnes ne lui démontrent qu’elle est
de mauvaise foi : Scilicet s i m anifesta calum nia sit.
Aussi Furgole a - t - i l professe celte doctrine avec as
surance; on trouve au cliap. 6 , sect. 3 , n°. 126 etsuiv. ,
une profonde et lumineuse dissertation , où il développe
les véritables principes de cette matière: il est impossible
de ne pas s’y rendre.
11 est vrai qu’ü combat l’opinion d’auteurs non moins
�»V
/
(
3
8
3
recommandables, Cujas, R ica rd , Brodeau; mais outre
qu’en droit écrit l ’autorité de F u r g o le , appuyée sur ta
loi m ê m e , est toujours plus imposante, il faut remar
quer que ces auteurs sont divisés sur un point qui n’est
pas le nôtre; car ils le sont principalement sur ce que
F urgole prétend appliquer à toute espèce de nullité ,
même à celles purement extrinsèques, le principe de la
l o i ; ce que les autres avoient nié ouvertement : et il est
vrai que quelques arrêts rapportés par L ouet et Brodeau,
comme celui de la V o lp iliè r e , les y avoient autorisés. >
Gela p o s é , de quelle conséquence peuvent être les lois
et les autorités citées par les appelans? Elles sont toutes
dans le cas de l’inofficiosité , ou de ces nullités extrin
sèques qui peuvent diminuer de la solennité, mais qui
ne touchent pas à la substance du testament. Que l’on
examine les textes et les opinions invoqués par eux
partout on verra que soit les textes, soit les arrêts qui
ont fondé les o p in io n s, notamment celle de L ou et et
B rod eau, ne se rapportent qu’aux cas dont nous venons
de parler.
E h ! comment l’appliquer au cas de la prétérition ?
a-t-il la moindre analogie avec l’approbation résultant de
la réception d’un legs? Non sans doute; car s’il dépend
de l’héritier de recevoir moins que sa légitime , et de
s’en contenter par des considérations quelconques, il n’a
pas la puissance de faire valoir un testament qui le frappe
de prétérition, puisque son propre sileqce n’empêcheroit
pas la nullité , et qu’ un autre pourroit aussi-bien que
lui la faire prononcer. C ’est ici qu’on va sentir l’im pos
sibilité d’appliquer au cas de la prétérition les lois et les
exemples invoqués.
�39
(
)
U n héritier peut en général approuver un testament :
cela est v r a i , lorsque le testament contient une disposi
tion quelconque qui le concerne; car il peut en recon
noitre la justice; encore faut-il que cette disposition soit
autorisée par la loi. Et voilà pourquoi l’exhérédation
ne peut donner lieu qu’à la plainte d’inofïiciosité, parce
qu’elle est permise dans un testament, à moins qu’elle
ne soit fondée sur une cause fausse; ca r, en ce cas, dit
encore F iirgole, elle est semblable à la p rétéritio n , et
entraîne nullité.
Mais si le testament est muet sur l’ un des héritiers
directs, il ne peut être un titre pour l’exclure, et aucune
approbation ne peut le faire valoir comme titre d’exclu
sion. Une approbation , pour être valable, et avoir un
effe t, suppose une disposition préexistante. E t de même
que la simple l’atification faite par un m ineur, d’un acte
essentiellem ent n u l, et auquel il n’étoit pas personnel
lement partie, comme émancipé, est un acte sans force
ni valeur, quia hujusm odi ratio n ih il ddt ; de même la
simple approbation par le prétérit d’un testament entaché
de prétérition , ne peut produire aucun effet ; car ce
testament n’est pas un obstacle à son droit de légitime.
Ce n’est pas que l’enfant prétérit soit obligé de récla
mer sa portion héréditaire; il peut l’abandonner, il peut
la ce der, il peut reconnoitre qu il l’a reçue; mais alors
lq titre de son cohéritier ne résulte pas du testament >
mais bien de l’acte consenti depuis l’ouverture de la suc
cession ; et voilà pou rquoi on exige que cet acte soit va
lable en lui-même , et emporte disposition , sans cela
l ’action en pétition d’hérédité est toujours admise.
�w
.
( 4 0 )
Cela est évident, cela est dans toute la rigueur des
principes; la loi les eût méprisés si elle eût dit le con
traire. Mais cela est aussi dans la l o i , comme nous l’avons
v u ; cela est dans la jurisprudence des arrêts, comme
l ’atteste F u rg o le , et comme le prouve un arrêt du 13
juillet 17 4 0 , rendu dans les plus forts termes.
A ntoine V iala avoit légué > oo francs à Antoine et
Jeanne, ses enfans, et 1,000 francs seulement à M arie,
femme F a u ré , son autre fille; sa femme fut instituée
h é r itiè r e , sans charge de fidéicommis. Les legs ne furent
pas faits à titre d’institution.
A p rès le décès d’A n to in e , le sieur F a u r é , époux de
M a r ie , reçut le legs de 1,000 francs, et en donna quit
tance. A ntoine etM arieform èrent demande en délivrance
du legs de 3,5oo francs, et obtinrent, le 10 septembre
1 7 3 6 , un arrêt qui le leur adjugea en principal et in
35
térêts. Antoine décéda avant de l’avoir reçu.
Bientôt a p rès, Jeanne et les enfans Fauré deman
dèrent la cassation du testament, et la délivrance de
leur légitim e, tant de leur chef que de celui d’A ntoine; et
malgré la quittance du sieur F a u r é , et l’arrêt de 1736,
leur demande fut adjugée, parce que les enfans du tes
tateur n’étoient pas institués, et que la nullité fut consi
dérée comme absolue.
Ce cas, assurément, est bien plus fort que celui ou
les enfans sont absolument om is, et où la prétérition est
complète. O n ne peut pas citer d’exemple plus tranchant.
Les principes une fois bien connus, et leur application
bien déterminée en gén éral, examinons l’écrit dont il
s’agit en la cause. V a u d r a - t - i l comme approbation?
comme renonciation ? comme quittance?
�4
( i )
- i° . Comme approbation !
- Nous l’avons déjà dit : on ne peut ratifier par une
simple approbation qu’un acte valable dans scs élémens,
et dans lequel on est partie ; on ne peut approuver un
testameot d’une manière valable respectivement à soi, que
lorsqu’on y est dénommé par une disposition quelconque.
Hors ces cas, il faut que l’approbation ne soit pas pure
et simple, mais qu’elle emporte disposition actuelle.
Encore fa u t-il, pour que l’approbation soit valable,
qu’elle soit faite en pleine connoissance de cause; ce que
l ’on ne présume jamais de d r o it, ù moins que l’acte ap-probatif ne le démontre : n i s i cognitis perspictisque
verbis testainçnti. Combien n’a-t-on pas vu d’exemples
d’approbations annullées par cela seul que le testament
n ’étoit pas daté , ni ses dispositions visées ; ce qui se
.rencontre dans l’espèce.
Cela est dans l’ordre des principes généraux du droit.
Q u ’est-ce, en effet, qu’ une approbation en g é n é ra l?
.que faut-il y trouver pour qu’elle valide un acte nul ?
-Il faut, dit D u m o lin , qu’elle soit faite cuni causœ co~
g n itio n e ; que celui qui approuve soit pleinement ins
tr u it du vice de l’acte, sciens nullitatem et vitium con jir m a t i : elle est sans force, si elle est faite seulement
in fo rm a com m uni.
Il explique ensuite à quels caractères on reconnoîtra
■
la n u llité, ou la validité de l’approbation.
Elle sera nulle comme faite in fo r m a com m uni, quando
non exprim itur ad longum , ténor con/irm ati, sed confir m a n s se refert ad illud et confirm ât sicut sine pra^vitate, vcl sicut jettte et légitima obtcntum f u i t .
�C 42 )
Elle sera valable, au contraire, comme emportant nou
velle disposition quando enarrato toto tenore confir7n a ti approbatur, recogniscitur et confu inatur ¿1 putestatem Icibente.
Les articles 13 3 8 , 1339 et 1340 du Code Napoléon r
ont érigé en loi positive ces principes que la jurispru
dence avoit jusqu’alors constamment adoptés; seulement
ils contiennent quelques exceptions qui ne s’appliquent
point à notre espèce, quoique les appelans aient l’air
de citer avec quelque confiance l’article 1340 ; car il est
toujours vrai qu’on ne peut approuver sans le connoître
un acte nul en soi ; et la connoissance n’est jamais p r é ’sum ée, si elle n’est positivement établie par l’acte approbatif.
Ces principes s’appliquent aussi-bien aux testamens
qu’à tout autre acte et à toute espèce de convention..
E t voilà pourquoi le testament nul pour cause de pré
te n t io n , ne vaut ni comme fidéicommis, ni même par
la force de la clause codicillaire. Ord. de 173^, art. 33.
* V o ilà pourquoi encore le testament imparfait en la vo
lo n té, n’est pas validé par un codicille parfait, à 7/ioins
que les dispositions ne soient répétées dans le codicille.
C ’est la doctrine de tous les auteurs, F u rg o le , Ricard^.
Henry s , Rousseaud-Lacom be, etc.
Comment donc concevoir qu’il soit validé par une
approbation pure et sim ple, qui ne constate même pas
que le testament ait été con n u ?
E t si l'h éritier, par respect pour la mémoire de son
p è r e , avoit voulu l’approuver sans le connoître, dans la
juste confiance q u’il étoit au moins honorable pour lui^
�43
C
)'
r
pourroît-on en tirer la conséquence qu’il a approuvé sans
le savoir l’injure qui lui étoit faite?
*Qu’il a entendu déverser sur lui-même tout l ’odieux
d’ une prétérition ?
Q u ’il a uroi t accepté, sans les avoir et sans le d ire, l ’injure
d’une exhérédation infamante, et fondée sur de fausses
causes?
Disons-le sans hésiter : cela n’est p a s, cela ne peutêtre ; et si une approbation n’apprend pas que celui de
qui elle est émanée a connu le testament, au moins en
le datant et en le visant d’une manière spéciale, elle ne
peut le faire valoir.
L e sieur des Issarts l’atteste, il ne connoissoit p a s,
en l’an 6 , le testament de son p è re ; il ne l’a v u , pour
la première fois , qu’après son m ariage, et lorsqu’il a
voulu connoître sa position et réclamer ses droits. Il ne
se x’appeloit pas du tout à cette époque la nature de
l ’écrit qu’il avoit remis à sa nièce, sans quoi son pre
mier chef de conclusions eût été d’en demander la remise.
I c i, les appelans ont fait leur thème avec beaucoup
d’aisance.
« L e p è re, disent-ils (page 3 ) , est m ort en 1790; après
« son décès, tous seà autres enfans se sont empressés d’ap« prouver et exécuter les volontés de leur père; ils ont
« reçu les legs sans réserve : les appelans ont les quit« tances en leur pouvoir.
« L e sieur des Issarts ne voulut pas être en reste, etc. »
Ailleurs ils disent encore ( pag. 17 et 18 ) : « Il savoit
« qu’il n’y avoit rien pour lui (dans le testament); il
« ne veut rien exiger. L e père étoit mort depuis huit
Fa
�44
(
)
« ans*; ses dernières volontés a voient été exécutées par
« les autres enfans; l’héritier institué étoit en possession
co de l’universalité des biens ; le sieur des Issarts étoit
« majeur depuis longues années : il a donc agi en con« noissance de cause. »
Il semble à ces mots que le sieur des Issarts habitoit
la maison paternelle, qu’il en connoissoit les moindres
détails; qu’immédiatement après le décès du père, tous.
' les enfans se sont réunis pour approuver ses dispositions,
et que le sieur des Issarts n’a fait que les imiter. O n a
leurs quittances I
*
Répondons par des faits.
, A v a n t et après la mort du père, le sieur des Issartshabitoit Paris; le père étoit mort le 2 5 novembre 1790,.
et dès 1791 il donnoit une procuration à. son frère pour
administrer ses biens. Il 11e connoissoit ni l’état de la
fortune ni les affaires de la fa m ille, auxquelles sa posi
tion antérieure n’avoit pas permis qu’il fût jamais initié..
Il ne connoît pas l’époque à laquelle tous les autres
enfans ont ou peuvent avoir cédé. Les appelans rap
portent deux quittances seulement ; elles sont à la date
des 20 frimaire an 7 , et 24 pluviôse an 8. Ils ne s’étoient
donc pas si fort empressés ! L e sieur des Issarts n’a donc
pas été seulement l’imitateur d’un élan qu’auroit dicté
à tous le respect filial, et la juste disposition du père!
L a première de ces quittances est de Bancal, notaire.
Il approuve le testament de son p è re , e tc« conséquence
reconnaît avoir reçu le m ontant du legs J a it par ledit
testam ent, etc.
L a seconde est du receveur de Dijon. 11 rcconnoît
�45
(
)
avoir reçu 3,000 fr a n c s pour ses droits lêgitim aires,
fixés p a r le testament du 31 août 1784, etc. L e legs
n’étoit pourtant que de s , oo francs.
Ainsi ces deux frères approuvent, au moyen de ce qu’ils
reçoivent leur legs, et le legs f i x é par ledit testament.
Ainsi ils ap p rou ven t, comme conséquence de la récep
tion du legs, et ils le font en connoissance de cause.
E t en effet, on ne conçoit pas d’approbation sans un
principe et un m otif pris hors d’elle-même. Celui qui
reçoit un legs s’en contente, et en donne quittance. L e
prétérit à qui on fait vaguement approuver un testament,
5
ne s’engage à r ie n , puisqu’il n’approuve rien qui le con
cerne.
Cependant le sieur des Issarts, long-temps avant ses frè
res , avo it, dit-on , approuvé le testament. Quel avoit été
le ¡principe de cette approbation ? Les appelans essayent
encore d’y donner un prétexte : il avoit reçu quatre f o i s
sa légitime. Mais où est le témoin qui dépose de cette v é
rité ? Ce n’est ni cet acte, ni aucun autre acte; cependant
cet écrit ne peut pas valoir sans cela.Cette vérité prétendue est d’ailleurs repoussée par le
moyen de fait dont on l’étaye. Nous avons prouvé que
l’éducation du sieur des Issarts n’avoit rien eu de plus
coûteux que celle des autres ; il avoit fait ses études et
son d r o it, comme le capitaine de génie avoit fait scs
cours de mathématiques; et avant de devenir notaire,
il avoit utilement employé son travail.
A u reste, on le répète, pour que la justice pût s’ar
rêtera ces motifs, il faudroit qu’elle rn puisât la source
dans l’acte m êm e, c’est-à-dire, qu’elle pût le considérer
comme valant cession, quittance ou l'cuoucûition,
�( 46 )
Com m e cession !
O ù en seroit le prix ? où seroit l’engagement réci
proque? où en seroit le premier élément ? cette cession
seroit-elle faite à une personne certaine? est-elle acceptée
par quelqu’u n ? le cédant est-il déchargé des dettes?
Non. L e frère a în é , dit-on , étoit en possession de tous
les biens : qu’importe! en é t o it - i l moins débiteur des
légitimes ou des portions.de ses cohéritiers ? Il n’en avoit
encore délivré aucune. O ù est donc le lien réciproque
entre cohéritiers ?
Comme quittance!
Il est très-vrai que pour faire valoir une quittance,
il n’est pas nécessaire d’exprimer qu’on a reçu la somme
Ôu la chose quittancée, mais il faut au moins qu’on la
reço ive; sans cela la quittance n’est plus qu’une abdica
tion de sa créance, une renonciation au droit de la
demander.
Il n’en est pas d’ailleurs de la quittance que donne un
individu d’une créance ordinaire, comme de la pétition
d’hérédité ; car l’héritier n’est exclu qu’après avoir
réellement reçu sa p o rtio n , ou l’avoir c é d é e , ou avoir
renoncé à ses droits avec une juste cause. Un partage
môme n’est pas un acte absolument définitif, car la pro
messe de ne plus se rechercher n’empêche pas l’action:
en rescision. Et une simple déclaration qu’on ne veut
rien de la succession de son p ère, ou qu’on la tient quitte
sans rien recevoir, sans la connoître, ni par soi-même,
ni par un inventaire fidèle et rég u lier, seroit un titre
irréfragable !
Com m e renonciation !
�47
(
)
Une renonciation à une succession, comme celle dont
on excipe, ne doit pas être l’ouvrage d’un seul; elle
est révocable tant qu’elle n’a pas été acceptée. Ne l’at-on pas soutenu avec succès, et la Cour ne l’a - t- e lle
pas textuellement décidé dans la cause du sieur de
Chalagnat , malgré une renonciation solennellement
faite au greffe, à deux successions, et rétractée pour
une seule?
M a is, dit-on, la renonciation d ’un héritier fait place
-à un autre; il n’y a pas d’engagemens réciproques.
Rien de plus singulier que cette application.
O u i , sans doute, la renonciation d’ un héritier fait
place à l’autre; celui-ci, quoique p lu s ilo ig n é , a le droit
d’exclure le plus proche, en acceptant à sa place : mais
d’abord il faut une renonciation valable .et régulière ;
et jamais on n’a considéré comme valable, en cette ma
tière, une simple déclaration unilatérale, sous seing
p r iv é ; 2°. si le plus éloigné ne se présente pas pour
accepter, le plus proche peut reprendre la succession ,
si bon lui semble; il n’a besoiu que de changer de vo
lonté.
Ici le sieur des Issarts auroit renoncé : sa renonciation
seroit valable, quoique non acceptée, et il seroit encore
h éritier; c’e s t - a - d ir e , héritier pour les créanciers, et
pas pour lui-mêm e. E u effet, l’acte de l ’an 6 contient
une véritable acceptation de succession, car le sieur
des Issarts f a i t délivrance de tous legs. Cette bizarrerie
exclut le moyen de renonciation, et démontre que le
sieur Bancal ne connoissoit pas le testament, puisqn’étant
prétérit et ne recevant rien , il ue pouvoit pas faire
�'
i. \ \
( 48 )
.
délivrance des legs ; puisqu’approuvant la p rétéritîo n ,
il ne devoit pas tenir quitte ;-car, en ce sens, on ne lui
devoit rien, et aussi il ne recevoit l’ien.
L ’approbation reste donc isolée; mais quelle sera sa
valeur? osera-t-on dire q u’elle en aura davantage qu’une
donation que le sieur des Issarts auroit faite le même
jour à son frère ? elle seroit révoquée par la survenance
d’enfans.
'
E t on voudroit qu’ une approbation pure et simple,
donnée sans rien recevoir, eût plus de force en ellemême!
Remarquons enfin qu’il s’agit moins ici d’une question
de renonciation, que d’ une action en pétition d’hérédité
d’un héritier contre l’a u tre, et que constamment cette
action ne peut être éteinte que par une quittance, une
cession ou une donation valable et non ré v o q u é e ; et
comme il n’y a pas de quittance sans payement, de cession
sans p r ix , de renonciation sans acceptation, de donation
valable lorsqu’il survient des enfaris, l’action en pétition
"d’hérédité du sieur Bancal est admissible.
E t comment ne le seroit-elle pas ? L a nature de l’é
c r it, ses termes, son contexte, démontrent qu’il ne fut
pas l’ouvrage d’une volonté réciproque, mais celui de
l ’impulsion d’un seul. L e sieur des Issarts, plein de res
pect pour son frère, disons-le, pénétré de reconnoissance
pour toutes les preuves de tendresse qu’ il en avoit reçues,
ne vouloit pas lui céder en générosité. Il connoissoit son
désir de conserver intacts les biens de la famille; espé
rant une union dont les conventions dévoient et au delà
l ’indemniser, il avoit cru prouver à sa nièce et à son
frère
�49
46?
(
)
frère sa confiance sans b o r n e , et son empressement à
leur être agréable. Sa nièce fut dépositaire de cet écrit ;
il le fit seul ; il étoit seul avec sa nièce lorsqu’ il le lui
remit. L ’union projetée n’eut pas lieu; un autre mariage
s’est fait ; des enfans sont survenus : et cet écrit seroit un
acte valable ! il auroit lié une partie et non pas l’autre !
Mais tout ce que nous avons dit seroit inutile, si le
temps pendant lequel l’action étoit ouverte s’étoit écoulé
sans réclamation , si cette action n’éloit plus recevable.
O n oppose une fin de non-recevoir de dix ans, et on
invoque l’article 1304 du Code Napoléon. Répondons
immédiatement à cette fin de non-recevoir, sans en faire
un chapitre particulier; elle ne demande pas une longue
discussion, et ne sauroit être séparée de ce qui précède.
D e quoi s’agit-il ?
»
D ’une action pure et simple en pétition d’hérédité.
Cette action dure trente ans : cela est incontestable, &
moins qu’ une convention intermédiaire ne la repousse.
P o u r lors l’action doit être précédée ou au moins ac
compagnée d’une demande dont le but soit d’écarter cette
convention , c’est-à-dire, d’une demande en nullité ou
rescision.* On voit en effet que l’article 1304 du Code
ne parle que d’une convention.
La Cour a appliqué ce princice à la cause du sieur
S au ln ier, parce que depuis une vente consentie sous
Fempire du C od e, dix ans s’étoient écoulés sans récla
mation de Jacquot , qui prélendoit la faire déclarer
frauduleuse. On a jugé que dix ans lui avoient suffi pour
se p o u rvo ir, depuis le jour où il avoit connu la fr a u d e ,
et qu’après ce terme il 11’étoit plus recevablç à demander
la nullité de la convention.
G"
�M a is, par arret du 22 février 1 8 1 2 , la Cour a jugé
aussi, dans la cause des Portas, que l'approbation donnée
à un acte n u l, et la réception du prix de cet acte par
celui-là même qui l’avoit consenti, n’étoit ni une ap
probation valable, ni un acte contre lequel il fallût se
p ou rvoir dans les dix ans.
« Attendu , porte l ’arrêt, que la cession de 1766 avoit
« pour objet les droits du vendeur dans la succession
« de ses père et mère vivans; qu’une pareille convention
« étoit prohibée par les lois; qu’elle n’a pu être validée
« par la quittance de 1788, puisque cet acte n’exprime
« ni la substance du contrat,’ ni le m otif de l’action en
« nullité, ni l’intention de réparer le v i c e . . . . et qu’il
« ne s’est pas écoulé un temps suffisant pour la prèscc cription de Paction en nullité. »
, L ’application de cet arrêt à la cause est un peu plus
facile que celle de l ’arrêt Saulnier. O n y voit au moins
que la simple approbation d’un acte nul n’écarte pas la
demande en n u llité, et ne la convertit pas en un simple
droit de rescision, quoique l’acte approbatif soit synallagmatiqur.
A plus forte raison, dès qu’on a prouvé qu’ il n’est
émané du sieur Bancal aucun acte, aucune convention T
pas même une simple disposition qui lui ait arraché sa
portion héréditaire, il n’a besoin de former aucune de
mande en nullité ni en rescision ; et en effet il n’a de
mandé ni l’une ni l’autre, mais seulement un partage de
succession. Et dès qu’il n’y a pas trente ans de prescrip
tion , sa demande est recevable.
O u lui reproche d’avoir gardé quatorze ans le silence*
�5
( i )
D ’abord, ce ne seroit pas une fin de non -recevoir;
E n second lieu, les appelans n’ignorent pas qu’après la
déclaration de l’an 6 , le sieur des Issarts a resté quelque
temps encore éloigné du lieu de sa naissance; que bientôt
après son mariage il a réclamé verbalem ent; que l’espé
rance de terminer à l’amiable, lui a fait long-temps différer
une action judiciaire; enfin, que plusieurs années se sont
passées à parler d’arrangemens, et à tenter un arbitrage.
L e délai de son action n’est donc pas un moyen à lui
opposer.
§. I L
Demande en désistement du pré des Carmes»
Ce chef ne demande pas une longue discussion.
L e pré-verger, situé sous les Carmes, a été acheté p o u r
' le sieur des Issarts; l’adjudication et une déclaration de
mieux l’attestent. L e sieur des Issarts a payé i , oo fr.
sur le prix de l’adjudication.
Quel acte l’a dépouillé de cet propriété ? comment
a-t-elle passé dans les mains d’un autre? qui lui a rendu
5
5
ses i , oo f r . ? Si ces questions restent sans répon se, la
demande est établie.
O n a tenté de les prévenir. U n abandon'de la décla*
ration de mieux a été supposé dans un compte du 13
5
messidor an .
O n a supposé encore que les i , oo fr. y a voient été
5
portés; les appelans l’ont cru et l’ont articulé.
Mais le sieur des Issarts est porteur du projet de compte
présenté par Louyrette à cette époque; et il n’y est qucsG- 2
�.
(
5 2
)
t io n , ni de la'déclaration de mieux , ni desri,5 o o fr.
qu’on prétendoit avoir comptés.
Cependant le résultat du compte ¡fo r m é (Vautres éïém e n s, est identiquement le même que celui dont les appelans conviennent. Il fit la matière d’un billet sous seing
privé ; il est rappelé dans le compte de l’an 8 , et fait
le fondement des quatre obligations consenties aux enfans
Bancal.
Il n’y a donc eu ni pu avoir d’autre compte, ni d’autre
co n ven tio n , puisque surtout le sieur des Issarts n’auroit
pu abandonner à son frère le profit de la déclara tion
de m ie u x , sans recevoir au moins ce qu’il avoit versé
en assignats de 1791 , tandis que le surplus n’a voit été
payé par son frère qu’en assignats dépréciés. E t certai
nement les i , oo'fr. ne lui ont jamais été comptés, pas
5
plus que les 300 f r . , payés sur les autres héritages acquis
partiellement à Aulnat. Nous croyons avoir suffisamment
établi tout cela dans le récit des faits.
O ù est donc le titre des appelons, pour détruire celui
du sieur des Issarts ?
Les appelans se sont fait un grief d’appel, de ce qu’on
n’a pas ordonné la restitution de leur prétendu double
de l’an ; mais on ne le pouvoit pas, sans qu’ils en eussent
légalement prouvé l’existence, et on le pouvoit encore
m oin s, parce qu’ ils se bornoient à en faire un moyen
d’éxception ; car on ne trouve ni dans la pro céd u re,
ni dans le jugement aucunes, conclusions sur cette remise.
5
Comment donc .prétendent-ils se les faire adjuger en la
Cour ?
'
. L e sieur des Issarts, qui n’a pas lui-m êm e rédigé ses
�53
(
)
conclusions, s’étonne qu’il y ait une demande positive
pour le pré des Carmes, et qu’on se soit b o rn é, pour
les autres héritages partiels, à demander la restitution
des jouissances. 11 a voit demandé d’abord cette restitu
tion pour le domaine d’Aulnat et autres héritages, le
domaine de Bonneval et le pré des C arm es, ce qui emportoit prétention de propriété du tout.
Cette prétention, appuyée sur un titre authentique,
ne fut pas formellement accompagnée de la demande en
désistement.
Elle a été ensuite positivement formée pour le pré
des Carmes seul.
j
L e sieur des Issarts ne peut pas aujourd’hui proposer
à la C our de recevoir et de juger une demande plus
am ple; il faut bien qu’il la prenne telle qu’elle a été
form ée; mais ce qu’on vient de dire démontre qu’on ne
peut tirer aucun argument contre lui de la forme de sa
demande, puisqu’il a prétendu à la propriété de tout;
.et, au surplus, ce qui sera jugé pour le pré des Carmes
entraînera une conséquence forcée pour les autres hé
ritages.
.
§.
IIL
f
Demande en reddition de compte.
Ce chef de demande est plutôt de fait que de droit j
il n’entraînera pas non plus une grande discussiou , puis
que nous en avons forcément mêlé quelque chose dans
le récit des faits.
Il est constant, en d ro it, que les erreurs et les omis
sions vérifiées dans des com p tes, peuvent toujours être
recliCces : ce principe ne sera pas conteste.
�5
( 4 )
II est constant, en fait,
*
Que le sieur Bancal a în é , et après lui la demoiselle
B an cal, sa fille, ont géré et administré, depuis 1 7 9 1 ,
les biens et les affaires de l’intimé ;
' Q u ’ils ont rendu, ou qu’un tiers a rendu pour e u x ,
des comptes de diverses espèces ;
D ’abord un compte de tout ce dont l’aîné étoit créan
cier pour les avances de Bonne v a l,
Ensuite un compte de diverses années de jouissances,
en commençant à 1796 seulement;
Que le sieur des Issarts a reçu ces comptes partiels
d’années détachées.
Mais il résulte de ces états de compte, q u ’il n’a jamais
} été question entre les parties des jouissances antérieures
à 179 6, non plus que de celles postérieures, pour le pré
des Carmes et les autres héritages : et en comparant les
comptes partiels, leurs résultats et les obligations qui
constituent sa dette, il est évident qu’on n’a jamais fait
déduction de ces jouissances, que les appelans ont ce
pendant perçues.
M a is , dit-on, ces comptes, ces obligations et le paye
ment de 692 francs, résultat des états de l’an 1 0 , cons
tituent autant de fins de non-recevoir contre une de
mande en reddition de compte.
Gela demande explication.
‘ O u i , sans doute, il y fin de n o n - r e c e v o ir pour les
comptes rendus, mais non pour ceux qui ne Io sont pas.
L ’omission une fois vérifiée, comme elle l’est certaine
m ent, le sieur des Issarts a le droit de la faire réparer ; et
cela no peut sc faire quo par un compte.
Mais ce compte no pouvant Être quo celui-dos chosos
�55
(
)
omises, le sieur des Issarts sera obligé de souffrir, quelle
qu’en puisse être l’exagération, la fixation faite pour cer
taines années -, ainsi les obligations seront portées en
compte comme créance arrêtée, et supporteront seule
ment la déduction des choses omises.
Cela ne semble pas douteux ; et c’est cependant tout
ce qu’a demandé le sieur des Issarts, et ce que lui a re
fusé le juge dont est appel.
S’il eût payé les quatre obligations dont il produit
les élémens, il pourroit, en vertu de l’art. 1257 du Code
Napoléon, répéter ce qu’il auroit payé sans le devoir.
Comment donc seroit-il non recevable à vérifier ces
comptes, pour avoir consenti des obligations? L e juge
pourroit-il trouver dans la loi une exclusion aussi ri
goureuse ? L e sieur des Issarts ne sauroit se le persuader,
et s’il en étoit ainsi, il s’y soumettroit sans m u rm u re,
satisfait de penser q u e , tout en prononçant la fin de nonrecevoir, le juge demeureroit persuadé qu’il n’a jamais
reçu ce qu’il demande.
On ne refusera pas au moins de lui rendre sa procu
ration.
L e sieur des Issarts ne s’arrêtera pas longuement ici
sur 1’observation de ses n eveu x, qu’il leur a occasionné
des dépenses considérables en vivant chez e u x , et d’une
manière qui n’étoit pas la le u r; 011 l’ticcoseroit de pe
titesse, peut-être, s’ il alloit jusqu’à contester cette vérité
prétendue. Il ne le fera pas moins, tout en avouant qu’il
a quelquefois vécu chez ses n eveu x, mais sans jamais don
ner lieu à aucune dépense extraordinaire.
Non , le sieur des Issarts ne m ent pas à sa conscience ;
il n’est pas dans l'égarement : il y fut un instant, peut-
�56
(
)
être, lorsqu’il livra l’écrit de l’an 6 à une nièce qu’il
affectionnoit, qu’il estimoit, et qu’il ne cesse pas d’es
timer. Ce mouvement spontané dût-il lui devenir nui
sible, il ne sauroit roug ir, ni de son irréflexion d’alors,
ni de sa conduite actuelle. La justice dût-elle condamner
sa prétention , elle ne s’armera pas contre lui d’une in
dignation qu’il n’a pas encourue; elle ne le repoussera pas.
Outragé par ceux qui lui appartiennent de plus près,
il auroit le droit de se plaindre des injures dont on l’a
accablé sans preuve comme sans utilité; il pourroit de
mander à la justice une réparation qu’elle ne lui refuseroit pas; m ais, fort de sa conscience, il dédaigne ces
moyens de la l o i , surtout envers des neveux qui sont
dans l'égarement. Il a exposé sa cause; il s’est fait un
devoir de la faire connoître telle qu’elle est; il a dit ce
qui lui a paru en sa faveur; il n’a pas dissimulé ce qui
présente contre lui des apparences : satisfait d’avoir
éclairé sa con d u ite, il livre maintenant sa cause à la dé
cision de la justice.
Signé J . H . B A N C A L .
M e. V I S S A C , avocat.
Me. G A R R O N jeune, avoué licencié.
A RIOM, de
l’imp. de TH IBAU D , imprim. de
la
Cour impériale, et libraire
rue des T aules, maison L andriot ., — Novembre 1812.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Issarts, Jean-Henry des. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Garron
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
notaires
biens nationaux
experts
testaments
créances
assignats
jurisprudence
administration de biens
manufacture de bas de soie
ventes
offices
domaines agricoles
industrie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour sieur Jean-Henry des Issarts, intimé et incidemment appelant ; contre les sieur et demoiselle bancal, les sieur et dame Dalbine, appelans et incidemment intimés.
Table Godemel : approbation. Voir mineur. Voir autorisation : 2. l’approbation d’un testament nul pour cause de prétérition rend-elle non recevable à l’attaquer ensuite ? la déclaration, de la part de l’enfant prétérit, qu’il consent la pleine et entière exécution du testament de son père, fait délivrance de toutes dispositions contenues sans ledit testament et quitte, si besoin est, sa succession de toutes choses quelconques, équivaut-elle à une approbation expresse ? quel délai l’enfant prétérit avait-il pour se pourvoir contre cette déclaration, devait-il agir dans les dix ou les trente ans ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1785-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
56 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2121
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2120
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53417/BCU_Factums_G2121.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Aulnat (63019)
Romagnat (63307)
Bonneval (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
assignats
biens nationaux
Créances
domaines agricoles
experts
industrie
jurisprudence
manufacture de bas de soie
notaires
offices
renonciation à succession
Successions
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53416/BCU_Factums_G2120.pdf
0cc1d0b52d49da4ffb3629e7fc42883a
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Text
PRÉCI S
POUR
Sieur
B A N C A L , demoiselle
B A N C A L , dame J a c q u e t t e
B e n o it-D o m in ique
M a gd elein e
B A N C A L , épouse de sieur
COUR
im p é r ia l e
DAL-
M au rice
deriom.
i re. C
« H A M B RE.
B IN E , chirurgien , et le sieur M a u r i c e
D A L B IN E , son m a ri, à l’effet de l’autoriser,
tous habitans de la ville de Clerm ont-Ferrand,
appelans d’un jugem ent rendu au tribunal
civil de la m ême v ille , le 13 mars 1 8 1 2 , et
intimés;
C O N T R E
*
'
Sieur J e a n - H e n r i B A N C A L D E S
I S S A R T S } propriétaire intimé et in
cidemment appelant.
L E sieur Bancal a reçu de son frère et de ses neveux
des services signalés; il leur doit son existence et la con
servation de sa fortune. L a demoiselle Bancal aînée a
A
—
*
r
a
�( O
employé sa vie entière à être utile à son oncle; et jus
qu’ici le sieur Bancal n’a cessé de donner à sa famille
des témoignages de reconnoissance.
Plein de respect pour la mémoire de son p è r e , il a
souvent exprimé ce sentiment dans ses écrits ; il en rem ercioit la providence. Il a trouvé dans son frère aîné,
père des appelans, le meilleur ami, un bienfaiteur éclairé,
un agent officieux : il a consigné sa gratitude dans une
foule de lettres qu’on fera bientôt connoître.
Aujourd’h u i , dirigé sans doute par une impulsion
étrangère, il a cru devoir attaquer le testament de son
père, et a form é, contre ses neveux et nièces, une de
mande en partage des successions de ses père et m è r e ,
et en compte de la gestion que son frère et sa nièce ont
eue de ses biens personnels.
Un égarement passager le rend injuste envers sa famille.
Il est pénible pour les appelans de plaider contre leur
..oncle, d’être contraints de dévoiler ses torts, et de lui
rappeler tout ce qu’il feint d’avoir oublié.
F A I T S .
Dominique «François Bancal, et dame Anne Cosse,
auteurs communs des parties, ont eu six enfans : leur
fortune étoit très-médiocre.
L e sieur Bancal des Issarts étoit le plus jeune de leurs
enfans *, il fut constamment l’objet de leur plus tendre
affection. Il n’y a point de sacrifices qu’ils n’aient faits,
ainsi que leur fils aîn é, pour lui donner une éducation
soignée. Lors de sa sortie du collège, ils l’ont ten u , à
�jv
( 3 )
grands frais, dans les écoles de d r o it, soit à Orléans ,
soit à Paris; ils lui ont ensuite fourni des ressources pour
acquérir une charge de notaire au châtelet de Paris, qui
a été la source de sa fortune.
Il étoit au comble de la prospérité, et son père crut
avoir assez fait pour lui. L e 8 septembre 1784, le père,
veillard vénérable, fit son testament olographe. 11 règle
la légitime de ses enfans puînés à une somme de 2,5oo fr.
chacun; il omet à dessein le sieur Bancal des'Issarts; il
institue son fils aîn é, père des appelans, son héritier
universel.
Ce testament fut connu de ses enfans, et notamment
du sieur Bancal des Issarts, qui, dit-on, fut le premier
a reconnoître la justice de l’omission, en ce qui le concernoit. Il avoit reçu bien des fois sa légitime, et ce
n’étoit de sa part qu’ un acte de justice.
L e sieur Bancal père a survécu long-temps à son tes
tament; il est mort octogénaire, le z 5 novembre 1790.
Après son décès, tous ses autres enfans se sont empressés
d’approuver et de respecter les volontés de leur père ;
ils ont reçu le legs sans réserve : les appelans ont les
quittances en leur pouvoir.
L e sieur Bancal des Issarts ne voulut pas être en reste;
il désira donner à son frère aîné des preuves de sa reconnoissance et de sa loyauté. L e 1er. prairial an 6 , il
lui remit une déclaration ainsi conçue : « Je déclare que
« je consens la pleine et entière exécution du testament
« de mon père ; que je fais, en tant que besoin, toute
« délivrance de tous legs et dispositions faits par mon
« père; et je quitte aussi, si besoin est, sa succession et
Aa
�«
«
«
«
celle de ma m ère, de toutes choses quelconques, sons
réserve, en remerciant Dieu de toute la reconnoissance
que je leur dois. A Clermont-Ferrand, etc. Signé JeanHenri Bancal. »
A l’époque de cette déclaration, la succession du père
étoit déjà ouverte depuis huit ans. L e sieur des Issarts
n’avoit rien réclamé; il a gardé le silence jusqu’au n oc
tobre 1 8 11, c’est-à-dire, pendant vingt-un an depuis le
décès du père^ et à peu près quatorze ans depuis son ap
probation.
L e sieur des Issarts, prévoyant les orages révolution
naires, avoit revendu son office de notaire avec des bé
néfices considérables. Il eroyoit avoir beaucoup de fonds
à placer, et il forma le projet d’acquérir des biens na
tionaux, rapprochés du lieu de son origine. En 1791
il charge son frère aîné de lui faire ces acquisitions dans
les environs de Clermont, et celui-ci remplit son mandat
avec autant de zèle que d’exactitude.
Il achète notamment, pour le compte de son frè re ,
un domaine ù A ulnat, provenu des cordeliers de Montferrand; un domaine bien plus considérable encore, connu
sous le nom de Bonneval, provenu des religieux pré
montrés de Clerm ont, situé dans les appartenances de
Romagnat.
Mais le sieur des Issarts se trompa dans ses calculs ; il
ne put envoyer ù son frère les fonds nécessaires pour faire
le payement de ces différentes acquisitions; et celu i-ci,
pour éviter la déchéance , se vit obligé d’avancer scs
propres deniers, et d’épuiser pour cela toutes ses res
sources personnelles.
�(
5
)
L e frère aîné et sa famille se sacrifièrent pour la régie
de ces mêmes biens. Les bâtimens, entièrement dégradés,
furent reconstruits; on les garnit de mobilier; les fonds
furent réparés et améliorés ; et toujours aux dépens du
père des appelans.
Enfin, le 13 messidor an 5 , les deux frères sont venus
à compte de toutes les avances faites par l’aîné. Ce compte
a été arrêté en deux doubles sous seing privé : le père des
appelans s?est trouvé créancier de la somme de 34,273 fr.
o cent, en numéraire.
L e I er. nivôse an 7 ( décembre 1798 ) , le sieur Bancal
aîné est décédé : ses enfans ont continué de régir les biens
de leur oncle comme l’avoit fait leur père.
L e i er. floréal an 7 , les parties réglèrent leur compte
a partir du 13 messidor an , jusqu’à ce jour I er. floréal
an 7.
Ensuite, il fut fait un nouveau compte définitif, le
6 fructidor an 8 , par le résultat duquel le sieur des
Issarts se trouva leur débiteur de 37,314 liv.
s. 9 d .,
dont il leur consentit quatre obligations notariées, de
9,328 francs
centimes.
Dans ces quatre obligations, le sieur Bancal des Issarts
rcconnoît devoir à chacun de ses neveux et nièces cette
somme de 9,328 fr.
cent., « pour le quart revenant
« à chacun d’eux dans celle de 37,314 liv. 5 s. 9 d . , que
« le confessant devoit, en principal et intérêts, à la suc« cession de défunt Jean-Dominique Bancal, son frère,
« père des acceptant, pour avances qu’il avoit faites pour
« le payement de partie du prix du domaine de Bonneval,
« reconstruction de la maison et autres butinions, achats
5
5
5
55
55
�W
( 6 )
« de meubles, pressoir, cuves et autres futailles, plan« tation de verger, jardin, et autres améliorations faites
« audit domaine de Bonneval, suivant le compte verbal
« qui en avoit été fait entre le confessant et défunt Jean« Dominique Bancal, son frère, au mois de messidor
« a?i . »
L e sieur des Issarts s’obligea de payer cette somme dans
six ans, avec l’intérêt à cinq pourcent. Les parties avoient
conservé respectivement leur double du compte arrêté
le 13 messidor an , qui contenoit d’autres conventions
fort importantes entre les deux frères. Il fut arrêté no
tamment que neuf adjudications partielles faites au sieur
Bancal aîné, au nom de son frère, et qui montent en
semble à la somme de 38,150 francs , resteraient en
propriété au sieur Bancal aîné, comme les ayant toutes
acquittées de ses deniers. Les neuf expéditions, ainsi
que les quittances, demeurèrent au pouvoir du frère
aîné. Les expéditions et quittances des adjudications des
domaines d’Aulnat et de Bonneval furent remises au
sieur des Issarts.
—
^
Ce dernier, lors de l’arrêté de fructidor an 8 , de
manda à ses neveux la remise de leur double, afin d’évi
ter, disoit-il, un double emploi. Et ses neveux, pleins
de confiance, lui remirent leur titre, sans même exiger
un récépissé : ils auraient craint de blesser la délicatesse
de leur oncle; et sans doute qu’il a lui-même oublié qu’il
avoit en ses mains le titre de ses neveux : on le lui rap
pelle, pour qu’il veuille bien le leur restituer.
Cet acte, en effet, est très-im portant; il contient le
désistement du sieur des Issarts de oeuf objets au profit
'îv ’
5
5
%
�(
7
)
de son frère aîné. I.es expéditions et les quittances ont
toujours resté au pouvoir des appelans ; et ils en ont
conservé jusqu’ici la jouissance.
Peut-être eût-il été plus sage, de la part du père des
appelans, de se faire consentir une subrogation par acte
public; mais il y avoit tant d’harmonie et de confiance
entre les frères , que l’aîné étoit dans la plus grande
sécurité : et les appelans ne feront pas à leur oncle l’in
jure de penser qu’il veuille retenir cet acte, lorsqu’on
lui aura rappelé qu’il l’a en sa possession.
Ce n’est pas qu’ils ne pussent y suppléer jusqu’à un
certain point, puisque l’existence de ce compte est rap
pelée dans tant d’actes divers, notamment dans une lettre
et une procuration, du 19 messidor an 7 , dont on aura
bientôt occasion de parler; dans le compte du 6 fruc
tidor an 8 ; dans les obligations consenties au profit des
appelans. La subrogation des neuf objets portés par ce
compte n’est-elle pas constante, par le payement des in
térêts du montant des obligations et de partie des capi
taux , par la remise des titres et des quittances du prix
de ces mêmes objets, qui sont encore au pouvoir des
appelans, et par la jouissance non interrompue depuis
cette époque de la part des appelans et de leur père.
On pourroit y joindre la lettre du 19 messidor an 7,
dont voici un extrait. « Vous savez que je suis venu ici
« en grande partie pour voir, d’après l’état de ma for« tune, comment je pourrai m’acquitter, le plutôt pos« sible, de ce que mon frère a bien voulu payer pour
« l’acquisition de mes biens. Je crois qu’il est de mon
« devoir de ne pas différer plus long-temps de réaliser
�(
«
«
«
«
«
«
«
«
«
8
)
le projet dont je vous ni fait part, de transmettre la
propriété du domaine d’Aulnat. Je joins ici une procuration pour cela. Je vous prie de réfléchir sur ce
qu’il y a de mieux à faire à cet égard , et d’en conférer avec mes frères et le sieur Louyrette. C’est un
devoir pour moi ; c’est le vœu de mon cœur, de faire
tout ce qui est juste et convenable, et de conserver
toute ma vie la plus vive reconnaissance de tout ce
que mon frère et la famille a fait pour moi. »
A cette lettre est jointe une procuration par laquelle il
donne pouvoir de transmettre la propriété, possession et
jouissance d’un domaine situé à Aulnat, consistant, etc.,
qu’il a acquis de la nation, suivant le procès verbal d’ad
judication, du i juin 1791 ; faire cette translation, ou
aux enfans de son frère aîné, pour se libérer envers eux
de ce qu’il leur d o it , du chef de leur p è r e , pour le
montant de différentes sommes que son frère a payées
pour lui sur les acquisitions des biens nationaux qu’il a
faites dans le district de Clermont, suivant le compte qui
en a été fait; ou faire cette translation à toute autre per
sonne , et faire à ses neveux et nièces, enfans de son frère
aîné, la délégation du prix de la vente, pour se libérer
envers e u x ; passer et signer tous actes, etc.
C’est après la mort du père et du frère aîné, après le
compte de l’an 5 , la déclaration de l’an 6 , que le sieur
des Issarts reconnoît sa dette envers scs neveux, qu’il veut
vendre pour se libérer ; et il ne réclame rien sur les
adjudications partielles qui avoient resté entre les mains
de son frère : la dette est indépendante de ces objets. Les
appelaus n’abusent pas de la confiance de leur oncle; ils
5
�ne veulent pas acquérir. Il substitue des obligations à
cette procuration -, et ses neveux n’ont d’autres torts à se
reprocher que d’avoir réclamé des droits légitimes et
sacrés, le payement de leurs obligations, qui sont la plus
grande partie de leur fortune. Ils étoient sur le point de
former leur demande en justice, lorsque le sieur des
Issarts a voulu les prévenir.
Par exploit du n octobre 1 8 1 1 , il les assigne pour
venir à partage des successions des père et mère et aieux
communs ; il demande qu’il lui^. soit délaissé un sixième
des biens pour sa portion afférente , avec rapport de
jouissances, payement des dégradations par eux commises,
ou leur p è re , dans les immeubles de la succession, avec
les intérêts du tout à mesure de chaque perception.
Il conclut aussi à ce que ses neveux et nièces soient
tenus de faire le rapport des meubles meublans, mar
chandises et dettes actives, dont eux ou feu leur père se
sont emparés, suivant l’inventaire ou la preuve par com
mune renommée.
Il demande, en second lie u , que les appelans soient
condamnés à rendre compte de la gestion et administra
tion qu’a eue feu leur père, en vertu de sa procuration,
des domaines nationaux dont il est devenu acquéreur;
savoir, d’un domaine situé à A u ln a t , et autres héri
tages j d’ un autre domaine appelé de Bonneval, et d’un
pré-verger provenu du chapitre cathedral ; ladite admi
nistration et gestion remontant et ayant pris cours depuis
les adjudications ( 1791 ) , jusqu’en l’an 11 ou 1803, et ce,
suivant l’estimation qui en sera faite par experts, avec les
intérêts des jouissances à compter de chaque perception.
B
�( * o
Il conclut enfin à une provision de 12,000 francs.
Les appelans, fort étonnés d’une attaque aussi impré
v u e, opposent la déclaration du iei\ prairial an 6 , pour
écarter la demande en partage; ils argumentent de tous
les comptes, des 13 messidor an ,1er. floréal an 7 ,6 fruc
tidor an 8 , 10 nivôse an 10 , 26 frimaire et icr. ventôse
an 11. Ce dernier prouve que Magdeleine Bancal, qui
avoit continué jusqu’à cette époque l’administration du
domaine de Bonneval, étoit en avance d’une somme de
692 liv. i s. depuis le compte de fructidor an 8.
L e sieur des Issarts ne fait pas grande attention h
ces moyens ; il trouve seulement que c’est une manière
commode de l’écarter du partage par une fin de nonrecevoir.
Quoiqu’il ait consenti ci la pleine et entière exécution
du testament de son père, il ne l’a pas approuvé. Quoi
qu’il ait tenu quitte sa succession, et celle de sa m ère,
de toutes choses quelconques, sans réserve, il n’a pas
donné de quittance; et sa déclaration ne vaut, ni comme
approbation, ni comme quittance, ni comme donation,
ni comme renonciation : c’est comme s’il n’avoit rien
dit. Sa déclaration n'est qu u n chiffon méprisable, qu’il
a donné à son frère pour se moquer de lu i, et qui a
été bien dupe de s’en contenter. A l’égard de la ges
tion , il a été trom pé; erreur ne f a i t pas compte; il
invoque la disposition de l’article o
du Code Napo
léon.
La cause portée à l’audience du tribunal de Clerm ont,
première cham bre, il a été rendu, le 13 mars dernier,
un jugement ainsi conçu :
5
5
2 58
�•( II )
« En ce qui touche la demande en nullité du testa« ment de l’auteur des parties;
« Attendu que ce testament est nul pour cause de
« prétérition, le sieur Bancal n’y ayant pas été appelé1;
« Attendu que l’acte du i er. prairial an 6 est inva.« lide et n u l, ne pouvant valoir, ni comme approba« tion du testament, ni comme quittance; que dès-lors
« il ne peut avoir l’effet de rendre inadmissible l’action
« en nullité dudit testament.
« En ce qui touche la demande en reddition de
« compte ;
- « Attendu qu’il est avoué par les parties qu’elles sont
« venues à compte, qu’il existe des arrêtés faits entre
« elles.
« En ce qui touche la demande en désistement di
« pré des Carmes;
« Attendu que rien n’établit que le demandeur en
■
« ait fait la transmission au profit de ses neveux et
« nièces.
« En ce qui touche la demande en partage;
« Attendu le principe que nul n’est tenu de demeure:
« dans l’indivision,
« L e tribunal, sans s’arrêter ni avoir égard au testa« ment de l’auteur commun , non plus qu’à l’acte du
« I er. prairial an 6, qui sont déclarés nuls et de nul
« effet, ordonne que les parties viendront à division et
« partage des biens du sieur Bancal, père et grand-père
« des parties; auquel partage ils feront tous rapports
« et prélèvemens de droit, pour du tout en être dé*
« laissé à chacune d’elles sa portion afférente; et pou1
B 2
�( 12 )
parvenir audit partage, etc. ; déboute le sieur des
Issarts de sa demande en reddition de compte; con
damne les héritiers Bancal à se désister , en faveur
de leur on cle, du pré dit des Carmes ; à rendre
compte des jouissances par eux faites ; condamne le
sieur des Issarts à leur rembourser la somme de 4,000 fr.
montant de partie du prix dudit pré, qu’eux ou leurs
auteurs ont payé en assignats, et ce, valeur réduite
d’après l’échelle de dépréciation du papier-monnoie;
ensemble à leur payer les intérêts à compter de l’é
poque où les payemens ont été faits : lesquels intérêts
et améliorations demeureront compensés avec les jouis
sances du pré dit des Carmes, dont le désistement a
été ci-dessus ordonné.
« A l’égard des bestiaux inis dans le domaine de
Bonneval ; attendu qu’il est articulé par les héritiers
Bancal, qu’eux ou leurs auteurs en ont fait l’achat;
et que, de la part du sieur des Issarts, il a offert d’en
faire raison, si cet objet n’a pas été compris dans l’ar
rêté de compte. L e tribunal ordonne que les parties
se retireront devant Boutai, notaire, commis à cet
eiFet, à l’effet de vérifier si, dans les arrêtés de compte,
la valeur desdits bestiaux y a été comprise; et dans le
cas où le contraire seroit reconnu, le tribunal con
damne dès-u-présent, et sans qu’il soit besoin d’autre
jugement, le sieur des Issarts à payer à ses neveux et
nièces la somme de y 5 o francs pour la valeur des
bestiaux; compense les dépens, pour être employés
en frais de partage; met les parties hors de procès
sur toutes autres demandes. »
�5
Ce jugement a été signifié à domicile, le i mai
dernier.
Les héritiers Bancal ont interjeté appel de ce juge
ment, notamment, i°. en ce que le tribunal de Clermont n’a pas jugé que l’écrit donné par Bancal des
Issarts au père des appelans, le i er. prairial an 6, valoit
quittance et décharge du payement des sommes revenant
au sieur des Issarts, pour sa légitime dans les successions
de ses père et mère ; et qu’il n’a pas été déclaré non
recevable, ou subsidiairement débouté de sa demande
en partage desdites successions. •
2°. En ce qu’il n’a pas été déclaré non recevable, ou
au moins débouté de sa demande en désistement et res
titution de jouissances du pré des Carmes; e t , enfin,
en ce qu’il n’a pas été ordonné que le sieur Bancal des
Issarts rapporteroit le double du compte fait entre lui
et son frère aîné, le 13 messidor an 5 .
D e son côté, le sieur Bancal des Issarts a interjeté in
cidemment appel du même jugement, en ce que le tri
bunal n’avoit pas ordonné un nouveau compte.
T e l est l’état de la cause ; elle présente dans sa dis
cussion deux chefs de demande bien distincts, et qui
n’ont aucun rapport entr’eux. Il s’agit d’examiner, dans
la première partie, si le sieur Bancal des Issarts a ap
prouvé le testament de son père par l’acte du i er. prai
rial an 6 ; si cet acte peut valoir comme quittance; s’il
est unilatéral, ou s’il devoit être fait double; 20. si, en
supposant que cet acte fut nul dans le principe, le sieur
des Issarts seroit recevable i\ l’attaquer après plus de dix
ans d’exécution. Dans la seconde partie, on examinera
�4
( i )
si le sieur des Issarts est fondé dans sa demande en désis
tement du pré dit des Carmes; et, enfin, s’il estrecevable
à demander un nouveau compte de gestion.
t
P
r e m i è r e
p a r t i e
.
§. 1er.
L e sieur Bancal des Issarts a approuvé le
testament de son père,
11 est certain que le testament olographe du sieur
Bancal père étoit imparfait et n u l, pour cause de prétérition ; il est inutile de s’appesantir sur un point de
droit aussi certain : les lois romaines et les anciennes
ordonnances prononcent cette nullité. Non-seulement le
père étoit obligé d’appeler et nommer tous ses enfans,
mais il devoit même leur donner la légitim e, à titre
à?institution, d’après la novelle i i et l’ordonnance de
1735. Mais, en môme temps, il n’y a pas de nullité plus
apparente que la prétérition ; et le fils qui a été prétérit
n’a pas pu l’ignorer.
Dès-lors, la plus légère approbation a dû suffire pour
écarter dans la suite toute demande en nullité. Ce prin
cipe est fondé sur les lois romaines et sur le droit fran
çais. La loi 1 6 , au code D e testant., porte: A d jicien dum e s t, ut qui ex testamento vel ab intestato hœres
exstiterit : etsi voluntas defuncti circa legata, legibus
non sit subnixa , tanien si sua sponte agnoverit im pïendi eam nccessitatem habeat.
5
�( i 5 )
La loi 32, ff. D e inoff. test.> est infiniment précieuse
dans l ’espèce ; elle repousse la demande d’un fils exhérédé , par cela seul qu’il auroit reçu une procuration
d’un légataire, pour demander la délivrance du legs.
S i exhœredatus petenti legatinn ex testamento advocationem prœ buit, procurationemve susceperit - removetur ab accusatione. Agnovisse enim videtur, qui quàle
quale judicium defuncti comprobaçit. Telle est la doc
trine de tous les auteurs, et notamment de Cujas, Brodeau , H enrys, etc.
A la vérité, on a voulu établir une distinction entre
les testamens inofficieux et les testamens nuls. On a pré
tendu que les lois dont on vient de rappeler les dispo
sitions, ne s’étoient occupées que des testamens inofficieux;
que dès-lors l’approbation de l’héritier ne pouvoit écarter
que la querelle d’inofficiosité , et n’empêchoit pas de
demander la nullité du testament. L e savant R ica rd ,
dans son Traité des donations, partie 3, n. i
, a com
battu cette opinion ; il pense que le consentement prêté
par l’héritier le rend non recevable à contester la dis
position du défunt. « La raison de cette résolution ,
« dit-il, résulte de ce que dans l’exécution d’une dona« tion ou d’un testament, quoiqu’invalide en solennité,
« ou excessif en sa qualité, il ne laisse pas de s’y ren« contrer -une obligation naturelle , qui dépend de la
« volonté du défunt, que l’héritier veconnoît par son
« approbation; et ce qui étoit capable d’arrêter l’effet
« de cette vo lo n té, n’est qu’un empêchement civil, in« troduit en faveur de l’héritier seulement, auquel il
553
�( 16 )
53 peut par conséquent renoncer, comme il fait par son
« consentement. »
Plus bas, Ricard ajoute que « les formalités d’un acte
« ne servent que pour sa justification, et pour faire voir
« qu’il est véritable. De là vient qu’elles ne sont pas né« cessaires, lorsque les parties intéressées en demeurent
« d’accord : c’est, en ce cas, un fidéicommis qui subsiste
« sur la bonne foi de l’héritier, et sur sa connoissance. a
Ricard s’appuie sur la loi 2, cod. D ejid eico m . Curn non
ex sola scriptura, sed ex conscientia relicti fideicom ?7iissi defuncli volant a ti satisfactinn esse videatur.
Ricard n’est pas le seul qui ait professé cette doctrine :
Brodeau, lettre L , somm. ; Henrys, tom. 2 , liv. ,
quest. i ve. , ont également pensé que l’approbation d’un
testament nul écartoit toute demande de l’héritier. Il est
vrai que Furgole a été d’un avis contraire. Mais en exa
minant bien l’avis de Furgole, il n’a entendu parler que
d ’un vice caché, qu’il n’étoit pas au pouvoir de l’héritier
de découvrir, lorsqu’il a donné son approbation : encore,
malgré la sagacité de cet auteur, il ne détruit pas les
motifs qui ont déterminé l’opinion de Ricard ; et la ju
risprudence du parlement de Toulouse, qu’il invoque,
n’a pas été uniforme; car Catelan, liv. 2 , cliap. 33, rap
porte un arrêt de ce parlement, du 14 février 1681, qui
déclare un fils non recevable à attaquer un testament
qu’il avoit approuvé, quoiqu’il n’eut pas été appelé dans
ce testament à titre d’institution. Aussi tous les avis se
•sont réunis pour décider que l’héritier qui a approuvé
le testament est exclu de toute demande, lorsque la nul
6
6
lité
�( 17 )
lité est apparente, qu’il a pu la connoître; tandis qu’au
contraire il peut revenir, lorsque la nullité est cachée,
qu’il n’a pu la p ré v o ir, parce qu’alors son approbation
n’est plus que reflet de l ’erreur.
L e dernier commentateur de la coutume d’Auvergne,
sur l’article 5o du titre 12, rapporte un arrêt rendu au
rapport de M.Robert-Saint-Vincent, en 1778, qui vient à
l’appui de la distinction qu’on a établie. Le comte d’A illy
avoit institué le marquis de Chombonas son héritier uni
versel, et avoit fait un legs particulier au profit du sieur
de la V olpilière, l’un de ses héritiers présomptifs. L e
légataire reçut le legs. Il voulut ensuite attaquer le tes
tament, sous le prétexte que la minute n’étoit pas écrite
de la main du notaire, et qu’il n’avoit eu connoissance
de ce vice que depuis sa quittance ; il fut déclaré non
recevable, parce qu’il n’avoit dépendu que de lui de
vérifier la minute avant d’accepter, et que rien ne prouvoit qu’il n’avoit connu la minute que depuis sa quit
tance.
Dans l’espèce particulière, le sieur Bancal des Issarts
n’a pu ignorer le vice du testament de son père ; tout
pro u ve, au contraire, qu’il l’a connu. I l consent à la
'pleine et entière exécution de ce testament; il fait déli
vrance de tous legs et dispositions : c’est le style d’un
homme exercé, d’un homme du métier. Il tient quitte
les successions de ses père et mère de toutes choses quel
conques , sans réserve. Il savoit donc que le testament
contenoit des le g s , qu’il 11’y avoit rien pour lui ; il ne
veut rien exiger. Le père étoit mort depuis huit ans ;
G
�(. 1 8 ? ,
ses dernières volontés avoient été exécutées par les autres
enfans; l’héritier institué étoit en possession de l’univer
salité des biens ; le sieur des Issarts étoit majeur depuis
longues années : il a donc agi en connoissance de cause.
Il a voulu donner cette marque de respect et de défé
rence à la mémoire de son père : quale quale testamentum approbaçit. Il est donc non recevable, par cela seul
qu’il a approuvé ce testament.
On peut ajouter, à l’appui d’une proposition aussi
évidente, la disposition de l’article 1340 du Code Napo
léon , qui porte : « La confirmation, ou ratification, ou
« exécution volontaire d’une donation, par les héritiers
« ou ayans-cause du donateur, après son décès, emporte
a leur renonciation à opposer soit les vices de fo rm e ,
« soit toute autre exception. »
Quoique la succession soit ouverte long-temps avant
la publication du Code, il n’en est pas moins applicable
à la cause, parce qu’il ne fait pas droit nouveau en cette
partie, qu’il se réfère h l’ancienne disposition des lois, et
fait cesser toute controverse.
M ais, dit le sieur des Issarts, cette déclaration ne vaut
rien; on ne peut la considérer comme une quittance,
ni comme une renonciation, ni comme une donation :
elle n’a pas été faite double ; elle contenoit cependant
des engagemens synallagmatiques. Les premiers juges ont
dit la même chose dans leurs motifs; mais, comme le
sieur Bancal des Issarts, ils ont mis en fait ce qui est en
question, sans nous apprendre pourquoi ils annulloient
ainsi un acte qui doit avoir son exécution. C’est se mettre
�( 19 )
^3
fort à son aise pour raisonner comme pour décider; mais
il faut convenir que ce n’est pas au moins la manière de
convaincre même les plus crédules.
• E t pourquoi cet acte ne vaudroit-il pas comme quit
tance? L e sieur des Issarts dira que ce seroit une quit
tance sans prix : et où a-t-il trouvé qu’il fût nécessaire
d’exprimer un prix dans une quittance? Tenir qu itte,
c’est reconnoitre qu’il n’est rien d û , et que le montant
de l’obligation a été acquitté. Ainsi le sieur Bancal, en
tenant quitte la succession de ses père et mère, a reconnu
qu’il .a reçu ce qui devoit lui revenir. Il pouvoit être
généreux, et il ne l’a pas été, puisqu’il est constant qu’il
avoit au moins reçu quatre fois le montant de sa légitime.
L e créancier du montant d’une obligation ou d’un billet,
qui donneroit quittance pure et simple, ou qui tiendroit
quitte le débiteur, sans exprimer qu’il a i*eçu le p r i x ,
pourroit-il réclamer le montant de son obligation? le
débiteur ne seroit-il pas valablement libéré? et n’en
est-il pas de même d’un légitimaire qui tient quitte l’hé
ritier de tous ses droits généralement quelconques?
Il est permis, sans doute, de renoncer à un droit
acquis, à une exception que donne la loi civile : unicuique licet ju r i pro se introducto renunciare. La loi
permettoit au sieur des Issarts d’user de l’exception de la
prétérition ; il a renoncé à cette exception, et cette re
nonciation est sans retour : rernittentibus actiones su u s,
dandus non est regressus. Comment le sieur des Issarts
voudroit-il faire entendre que son acte ne vaut pas re
nonciation, lorsqu’il a formellement tenu quitte de toüte
C 2
'
;
�( îo )
espèce de droits dans les successions de ses père et mère?
O r , une renonciation faite en majorité est toujours irré
vocable.
Une quittance, une renonciation, est un acte unilatéral;
il dépend d’une seule volonté. Il n’a pas besoin d’être
fait double, puisqu’il émane d’un seul, et qu’il n’engage
que celui qui le souscrit. La renonciation d’un héritier
fait place à un autre; mais il ne peut y- avoir d’engagemens réciproques lorsqu’il s’agit d’une renonciation pure
et simple. Il faudroit en dire.de même d’une renoncia
tion aliquo clato, d’une cession de droits moyennant un
prix; elle n’auroit nullement besoin d’être faite double,
si le prix étoit payé comptant ; elle ne seroit synallagmatique qu’autant que le prix seroit stipulé payable à
termes, parce que, dans ce cas, le débiteur doit s’obliger
au payement du p r i x , et qu’alors il y a engagement ré
ciproque.
Que le sieur des Issarts dise, tant qu’il lui plaira, que
son acte ne vaut pas comme donation; on ne l’a jamais
prétendu. Il n’est entré dans l’idée de personne qu’il ait
été généreux ; mais on a dit qu’il fut juste une fois dans
sa vie.
§. 11 .
L e sieur Bancal des Issarts est aujourd'hui non
recevable à attaquer de nullité l'acte du I er.
prairial an 6.
En admettant pour un moment que cet acte fût nul
�( 21 )
dans le principe, que le sieur des Issarts fût autorisé ù
revenir contre ses engagemens, pour cause de nullité,
ou par la voie de la restitution , il devoit former sa
demande dans les dix années.
C’est un principe constant, établi par l’article 1 34 de
l’ordonnance de 1639, qui embi’asse tous les cas de nullité
ou de lésion, et qui n’en excepte pas même les causes
de déception : c’étoit un règlement aussi sage qu’utile.
Il importe que le repos des familles ne soit pas conti
nuellement troublé. D ix ans de majorité sont sans doute
plus que suffisans pour connoître ou rechercher ses droits.
L ’article 1304 du Code Napoléon fait aujourd’hui cesser
tous les doutes, la diversité de la jurisprudence, et les
distinctions subtiles entre les nullités absolues et les nul
lités relatives. Cet article veut que dans tous les cas
ou l’action en nullité, où la rescision d’une convention,
n’est pas limitée à un moindre temps, par une loi par
ticulière, cette action ne dure que dix ans.
La Cour a appliqué avec sévérité la disposition de
cet article, par un ari’êt du 22 .juin 18 12, dans la cause
du sieur Jacquot, Contre le sieur Saulnier. Il s’agissoit
d’une vente faite par un débiteur au préjudice de ses
créanciers. Il étoit démontré que l’acquéreur avoit par
ticipé à la fraude *, on lui reprochoit même de l’avoir
provoquée, et d’avoir abuse de son ministère de juge
de paix, pour priver le créancier de son hypothèque.
Mais ce créancier avoit laissé passer plus de dix ans
sans attaquer cette vente, depuis qu’il en avoit eu connoissance. En conséquence, la Cour le déclara non re-
�(
22
)
cevable; mais prouva qu’elle ne se déterminoit que par
cette fin de non-recevoir, en infirmant le jugement dont
étoit appel, en ce qu’il avoit statué sur le fond.
Dans l’espèce particulière, le sieur des Issarts a donné
cette quittance huit ans après la mort de son père : de
puis cette déclaration , il a laissé passer quatorze ans
sans se plaindre, sans rien réclamer : donc il ne peut
plus aujourd’hui en demander ni la nullité ni la res
cision.
Et lorsqu’on voit que le sieur Bancal des Issarts n’a
fait en cela qu’un acte de justice; que c’étoit.un foible
dédommagement de ce qu’il en avoit coûté à son père,
à son frère aîné, pour lui procurer l’état brillant au
quel il étoit parvenu, on ne peut s’empêcher de rendre
hommage à la sagesse des lois qui ont limité la durée
d’une action de te genre, et qui préservent les appelans des ambitieuses et tardives recherches d’un oncle si
injuste à leur égard.
Les appelans se voient obligés de rappeler ici que leur
oncle a été logé , n o u r ri, chauffé , éclairé chez eux
pendant tous ses séjours à Clermont, qui ont été trèslongs et très-fréquens depuis la révolution.
Accoutumé aux aisances de la capitale , il ne vivoit
pas comme e u x , il ne mangeoit pas à leurs heures, il
lui falloit un ordinaire particulier; il leur a occasionné
des dépenses très-considérables en tous genres. Ils ont
tout payé pour lu i, pendant ses séjours, quand il étoit
malade ; ils ont fourni à tous les frais : et s’il s’agissoit
de faire un compte, il seroit bientôt prouvé que la nio-
�( 23 )
clique portion qu’il pourroit prétendre seroit absorbée
bien au delà par les avances qu’ils ont faites pour lui.
A u surplus, les appelans se réservent tous leurs droits
à cet égard.
D
e u x i è m e
p a r t i e
.
§. I er-
Demande en désistement du pré dit des Carmes.
Rien ne prouve la transmission de cet objet, ont dit
les premiers juges, au profit du père des appelans. L e
sieur des Issarts a-t-il pu résister au. cri de sa conscience,
lorsqu’il a réclamé cet immeuble? il fait partie des neuf
adjudications partielles dont le prix a été payé par le
père des appelans : les quittances’et les premières grosses
des adjudications ont resté en son pouvoir. L e sieur des
Issarts a dans les mains les deux doubles de l’arrêté de
compte du 13 messidor an : qu’il les produise; on y
lira qu’il n’a voit payé autre chose, sur ces adjudications
partielles, qu’une somme de i , oo francs sur le prix de
l’adjudication de deux œuvres de p ré -v erg er du cha
pitre catliédral, sous les Carmes Déchaussés; et celle
de 300 fr. sur l’adjudication d’un journal un quart de
p ré , au terroir du pré Liandier, adjugé le 4 mai 1792;
qu’au moyen de ce que le père des'appelans demeuroit
propriétaire de ces objets, ces deux sommes, montant
à 1,800 francs, ont été déduites sur le com pte, et que
5
5
�24
(
)
le sieur des Issarts se trouva encore débiteur envers son
frère aîné de la somme de 34,273 liv. 10 s. en numé
raire, qu’il s’obligea de rembourser à. volonté et requête,
avec intérêts à cinq pour cent.
L e sieur des Issarts, en payant cette somme, demeuroit propriétaire du domaine d’A u ln at, et de celui de
Bonneval qu’il habite actuellement : les adjudications par
tielles restoient au sieur Bancal aîné. Les appelans ont
demandé que leur oncle fût tenu de restituer le double
qui lui a voit été confié. Le sieur des Issarts n’a pas
répondu sur ce point ; et le jugement dont est appel
est aussi muet à cet égard : c’est un des griefs des ap
pelans. Ils ont rappelé, en commençant, les différentes
circonstances et les écrits qui pourroient, dans tous les
cas, suppléer au défaut de rapport de ce double , du
13 messidor an . Les appelans, d’ailleurs, seroient en
état de prouver l’existence de cet arrêté de compte,
puisqu’ils ont des commencemens de preuves par écrit.
5
§. I I .
L e sieur des Issarts est non recevable h demander
a ses neveux un compte de gestion.
Cette demande en nouveau compte est vraiment in
concevable : le sieur des Issarts en a été débouté par les
premiers juges, et ce chef est l’objet de son appel inci
dent. Cependant ces comptes ont été rendus avec la plus
grande exactitude, et sont tous rapportés, à l’exceptioa
de
�5
( 2 5 )
de celui du 13 messidor an , que l’intimé a en son
pouvoir. Un second a eu lieu le I er. floréal an 7 , et
part depuis le 13 messidor an . Un troisième est du 6
fructidor an 8; dans celui-ci, il fut imputé 2,100 francs
dont la demoiselle Bancal aînée restoit débitrice, sur
5,141 fr. montant de trois années d’intérêts de la somme
de 34,273 liv. 10 s. dont l’intimé s’étoit reconnu débi
teur envers son frère. Ces intérêts, réunis à la somme
principale, portèrent la dette à 37,314 fr. que le sieur
des Issarts divisa en quatre obligations de 9,328 francs,
au profit de chacun de ses neveux et nièces; il s’obligea
au payement de ces quatre obligations dans six années,
à la charge de l’intérêt à cinq pour cent sans retenue.
Comment le sieur des Issarts se seroit-il reconnu débi
teur, si ses neveux lui avoient dû un compte? Un qua
trième compte a été rendu par la demoiselle Bancal,
depuis le 6 fructidor an 8, jusqu’au 10 nivôse an 10.
Enfin un dernier, qui termine la gestion, parce qu’à
cette époque le sieur des Issarts étoit marié, est du 26
frimaire an 11 ; ce fut le terme de la gestion officieuse
de la demoiselle Bancal : elle est bien récompensée de
ses soins.
On voit, dans ce dernier compte, que la demoiselle
Bancal étoit créancière de son oncle de 692 francs, dont
le sieur des Issarts lui fit le remboursement ; au moyen
de quoi, elle le tient quitte de tout reliquat antérieur,
sans préjudice du principal des obligations, et des inté
rêts d’icelles depuis le 10 messidor an 10.
- N ’est-il pas évident q u e , loin que le sieur des Issarts
D
5
�(
2
6
}
ait rien à prétendre contre ses neveux et nièces, il doit
tout, au contraire, h leur générosité et à celle de leur
père; et lorsqu’il écrivoit à sa nièce, le 22 messidor an 6 ,
qu’il ne cesseroit d’avoir pour elle la plus vive reconnoissance de tous les soins qu’elle prenoit pour lui; lors
q u e, le 19 messidor an 7 , il disoit qu’il conserveroit
toute sa vie la plus vive reconnoissance de tout ce que
son frère et sa famille avoient fait pour lu i, lorsqu’il le
répétoit le 7 vendémiaire an 8, le 14 pluviôse an 9 , le
i floréal an 10 , le 27 frimaire an 1 1 , ces témoignages
réitérés de reconnoissance et de tendresse n’étoient qu’une
foible expression de celle qui leur étoit due.
Comment le sieur des Issarts a-t-il pu oublier tous les
services qu’il a reçus! la mémoire des bienfaits passe-telle donc aussi vite que le sentiment du plaisir ! L e sieur
des Issarts p ou rro it-il obtenir un partage, lorsqu’il a
approuvé le testament de son père, consenti à sa pleine
et entière exécution, et renoncé à tous ses droits ; lors
qu’il a laissé passer plus de vingt-trois ans depuis la mort
du père, et plus de quatorze ans depuis sa quittance,
sans rien réclamer ? pourroit-il demander un compte de
gestion, lorsqu’il l’a reçu avec tant d’exactitude, et qu’il
a lu i-m êm e payé le reliquat? p ou rroit-il réclamer le
désistement d’un immeuble, lorsqu’il n’en a pas payé le
p r ix , lorsque son frère en a joui depuis 1 791, et tandis
qu’il n’a pas osé demander les autres objets partiels dont
ses neveux sont en possession? peut-il ainsi mentir à sa
conscience, lorsqu’il a dans les mains l’acte fait double,
qui en a transmis la propriété à son frère aîné ? Des pré-
5
�7
( 2 )
tentions aussi exagérées ne peuvent être que l’effet d’un
égarement dont rougira bientôt le sieur des Issarts : dans
tous les cas, la justice les repousseroit avec indignation.
Signé B e n o i t - D
M
agdeleine
BANCAL, M
om inique
BANCAL,
B A N C A L , J acquet te
aurice
DALBIN E.
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
Me. D E V È Z E , avoué licencié.
A R IO M , de l’imp. d e TH IB A U D , imprim. de la Cour Impériale, et libraire;
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1812..
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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A name given to the resource
[Factum. Bancal, Benoît-Dominique. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
notaires
biens nationaux
experts
testaments
créances
assignats
jurisprudence
administration de biens
manufacture de bas de soie
ventes
offices
domaines agricoles
industrie
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Benoît-Dominique Bancal, demoiselle Magdeleine bancal, dame Jacquette bancal, épouse de sieur Maurice Dalbine, chirurgien, et le sieur Maurice Dalbine, son mari, à l'effet de l'autoriser, tous habitans de la ville de Clermont-Ferrand, appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de la même ville, le 13 mars 1812, et intimés ; contre sieur Jean-Henri Bancal des Issarts, propriétaire, intimé, et incidemment appelant.
note manuscrite : « voir arrêt de la cour, seconde section, 27 septembre 1812, au journal 1813, p. 29. »
Table Godemel : approbation. Voir mineur. Voir autorisation : 2. l’approbation d’un testament nul pour cause de prétérition rend-elle non recevable à l’attaquer ensuite ? la déclaration, de la part de l’enfant prétérit, qu’il consent la pleine et entière exécution du testament de son père, fait délivrance de toutes dispositions contenues sans ledit testament et quitte, si besoin est, sa succession de toutes choses quelconques, équivaut-elle à une approbation expresse ? quel délai l’enfant prétérit avait-il pour se pourvoir contre cette déclaration, devait-il agir dans les dix ou les trente ans ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1785-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2120
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2121
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53416/BCU_Factums_G2120.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Aulnat (63019)
Romagnat (63307)
Bonneval (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
assignats
biens nationaux
Créances
domaines agricoles
experts
industrie
jurisprudence
manufacture de bas de soie
notaires
offices
renonciation à succession
Successions
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53414/BCU_Factums_G2118.pdf
0d89169b77656f0081fcf5fb7b75e0f4
PDF Text
Text
CONCLUSIONS MOTIVÉES
Sieur C h a r l e s - M a r g u e r i t e. A R R A G O N È S - L A V A L ,
propriétaire, habitant à Clermont-Ferrand , demandeur;
Pour
M M . les A d m i n i s t r a t e u r s des Hospices de
la même ville , duement autorisés par arrêté de la
Préfecture du 28 mai 18 12, défe ndeurs.
Contre
A CE Q U ’IL P L A I S E AU T R I B U N A L ,
E N ce qui t ou ch e la f o r m e des séparations de p atri moine s ,
A t t e n d u que l’article 880 du code Napoléon m e t la séparation
des patri moines au rang des actions ;
A t t e nd u que cette séparation ne peut être faite d ’office p ar le
j ug e-c ommi ss ai re à l’or dr e , mais q u ’elle doit être e x pr e s s é m e n t
d emandée par le c r é a n c i e r , suivant les articles 8 7 8 , 880 , 2 1 1 1
du m ê m e C o d e , ainsi que l ’e xi geai ent p r é c é d e m m e n t l ’article 1 4
de la loi du 11 b r um ai r e an 7 , et la loi p r e m i è r e au digeste ,
liv. 42 , tit. 7 , de. separationibus , $. 4 et 8 ;
A t t e n d u que , d ’après l’article 8 7 8 dudit C o d e , cette dema nde
p ou v an t êt re dirigée c ontr e tout c r é a n c i e r , il est indi spensabl e
de la faire connaître au moins p a r des conclusions précises dans
l ’acte de produi t e x ig é p a r l’article 754 du code de P r o c é d u r e ;
At t e n d u , dans le fait , que M M . les Admi ni st ra te urs des
hospi ces n ’ont poi nt demandé la séparation des patri moines par
l eur acte de p r o d u i t , ou requête de collocation du 9 mars 1 8 1 1 ;
q u ’au contraire
ils ont e x pr es s é m e n t r é c l a m é l eur collocation
p a r pré f é rence a t ous c r é a n c i e r s , et par privil ege c ons er vé p a r
i n s c r i p t i o n s u r l e p r i x d e l a v e n t e d e s d o m a i n e s ' provenant de-
la successiondedefuntL
igierR
eynouard
E n ce qui touc h e
l e
f o n d
A tt e n d u q u e , d ' a p r è s l’article 879 du C o d e , l e droit de
de ma nde r la séparation des p a t r i m o i n e s , ne peut plus être e x e r c é ,
l or sq u ’il y a novation dans la c réance c ont r e le d é f u n t , p a r
l ’ acceptation de l'héritier pour débiteur ;
Atte ndu que c e tte acceptation résulte d ’ un fait s i m p l e , qui
se manifeste par les circonstances p ropr es à le caractériser ;
A tt end u q u e , dans l’ h y p o t h èse a c t ue l l e , une foule d e c i r c o n s
t an ces c o n c o u r e n t à d é m o n t r e r que M M . les A d m i n i s t r a t e u r s des
�(
2
)
hospices ont accept é L ig i er R e y n o u a r d , fils et hé ri ti er da Jean ,
p our leur d é b i t e u r , et q u ’il fuifit de r appe le r ces circonstances
p o ur en être convaincu.
E n effet , 1.” la créance de 4 ,600 l 'v que la R ép u b l i q u e a
cédée a u x hospices , étant e xi gi ble c ontr e J<'an Heynouard depuis
1 7 6 7 , suivant les conventions portées en l’acte du 29 mai 1 7 6 2 ;
c ’était le cas d ’èn d ema nde r le p a i e m e n t , au lieu de p r endr e une
ratification ou titre nouvel de L i g i e r Re y no u ar d , son fils.
2.“ A u 11 iloréal an 1 0 } é poque d e l à nouvelle reconnaissance
de Ligi er R-synouard, il n ’y avait aucune nécessité d ’e xi ge r cette
r e c o n n a i s s a n c e , puisque le der ni er c o mm a nd em e nt fait à Jean
son pè re est du 5 oc to bre 1 7 8 0 , et que la prescription de trente
ans n ’aurait pu , à p art i r de cet exploi t , s'effectuer q u ’au 5
oc to b re 1 81 0 , à cause de la suspension de la prescription
p end an t cinq a n s , p r o n on c é e par la loi du 20 s e p te mb r e 1792.
5 .“ P ar ce titra n o u v e l , il a été accordé i mpl ici tement â L i g i e r '
R e y n o u a r d t erme et d é l a i , puisqu’il y est c onvenu q u ’il payera
2»o francs par an p o u r l’intérêt du c a p i t a l , tant q u ’ il sera en
de me ur e d ’en faire le r e m b o u r s e m e n t , convention qui , quoique
le délai du r e mb o u r s e m e n t ne soit pas f i x é , e mpor t e nécessai
r e m e n t un délai q u e l c o n q u e , et manifeste suffisamment que la
c r é a n c e , quoi qu ’e x igi bl e hic el m in e, n e sera point exi gée de
quel que t e i n s , à la faveur des intérêts à c o ur i r a u profit du créancier.
4 .° C e tt e intention du c réanci er d ’accorder t e r me et délai au
débi teur , se manifeste enc or e par son silence p end an t près de
quatre ans , pui sque le« Ad mi ni st r at e u rs des hospi ces n ’ont
c o m m e n c é à ré cl ame r les arrérages et s eul eme nt 1600 f rancs du
c a p i t a l , que par un c o m m a n d e m e n t du g j anvi er 1806.
5 .° L ’i ntention du débi teur d ’o bt e ni r ternie et délai ne so
manif este pas moi ns que celle du c r é a n c i e r , quand on voit q u ’il
achète celte l av eur , d iarimunfcen convertissant eu val eur de f r a n c s ,
sans diminuti on , une créance de 4Uoo l i v . ,
1Wuter
p a.yop ■
«) wo--fr
G." L ’acceptation de L i g i e r R e y n o u a r d p o u r d é b i t e u r , se r e
connaît , no n s eul ement pa r ces nou ve a ux nrrangemens , mais
e nc or e parco q u ’il était avantageux p o u r les hospices d ’avoir
p o u r débi teur un hé ri ti er qui avait pe rso n ne ll eme nt des biens
assez consi dérabl es et sans i nscription. C e qui ex pl iq ue p our quo i
l ’on n ’a p i s inséré dans la ratification la c la us e , san.s novation ni
il,'rotation , q<»o l ’on empl oi e toujours quand on craint d ’o p é r e r
la novation.
7 P. L i g i e r R e y n o u a r d a n o n - s e u l e m e n t consenti que l ’acte
du 29 niai 17Ü2 soit e xé cut oi r e contre lui
c o mm e il l’était
�(
3
)
cont re «on p è r e ; mai s ou lieu de l ’h y p o t h è q u e générale résultant
de cet u ü d e n titre , on lui a fait h y p o t h é q u e r spéci alement son
domaine de ches Jallat , le créanci er reconnaissant pa r l à- mê me
que ce domaine qui venait de la succession de Jean , s ’élait
confondu avec les biens de Ligi er .
S ”. L e comiçanriement fuit â L i g i e r R c y n o u a r d le y j anvier 180G,
J’inscriplioif t a f â i i î s ê 7so 1fPf\. 1-?FMe*-W}«'VJ;i 1
»^permettent
pas de douter que les Administrateurs des hospices ne l’aient accepté
p o u r débiteur. Mais 'ce qui porte au plus haut degré d ’évidence
cette vérité , c ’est que dans la requetc en collocation
ils y
e xp os e nt qu’il s ’agit de distribuer le p r i x de la vente des d o
mai nes adjuges au sieur L a v a l , provenant de la succession da
défunt Jjigier Jleynouard , et q u ’ainsi ils avouent n et t eme nt la
confusion des b i e n s , p ui squ’ils n e distinguent eu aucune manière
les domaines p ro ve na nt de R e y n o u a r d p è re , et q u ’ils sont si
éloignés de d ema nde r la séparation des p a t r i m o i n e s q u ’ils r e
qui èrent au contraire l eur collocation c o m m e créanciers p ri vi
légiés , et p ar pr é fé r enc e a ux autres oiéanciers.
A t t e n d u que l ’acceptation de l ’hériti er p o u r débiteur est un
f a i t , qui pa r sa nature produit seul la novation dont parle l ’article
du code , novation particulière et d ’une loute autre espèce
que les novations ordi nai ies dans les contrats et obl ig at i on s, dont
les règles sont tracées dans les articles 12 71 et suivons du code ^
c o m m e l ’a jugé. la c our cl’A i x , par u n et du 21 août 1 8 1 0 ; mais
novation dont les caractères p ri n c ip a ux sont indiqués par la loi
r omai ne déjà c i t é e , §. 1 0 , 11 et i 5 , p a r l e Drun , page f î i t j ,
D o m a t , p age 210 , R o u s s e a u - L a c o m b e , page 4 8 1 , et par C h a b o t
( de l ’All ier ) , c omment a i r e des successions , 0. 2 „ p. GOo.
A tt e n d u que , dans l e s principes du droit rappel és par l ’ o t h i e r ,
traité des obligations , tome 2 , page roü , les tuteurs et A d m i
nistrateurs pe uv ent faire novation ;
A t t e n d u q u e , d ’après l’arrêt é du G o u v e r n e m e n t du 19 v e n
démiaire an 1 2 , tout ce (pii est fait par le re ce ve ur des h o sp ic e s,
dans le cercle de ses obli gations' , est r éputé fait p ar les A d m i
nistrateurs , et 11e peut etre par e u x désavoue ;
A t t e n d u d ’ailleurs q u e , suivant l ’article S80 du c o d e , l ’aclion
en séparation des patri moines ne peut être e x e r cé e à l ’égard de*
i mmeubl es q u ’autant qu'ils existent dans les mains de l’héritier ;p
A t t e nd u que si , sous la loi du 11 b r umai r e an 7 , la cour de
cassation a j ugé que la séparation des biens pouvait être de
man dé e m ê me après la vente des i mmeubl es du défunt , mais avant
la distribution du p r i x , il n ’en est plus «le m ême sous l'empire
du code N a p o l é o n , à cause de l’éncr gic de sa disposition p i c citee , lorsque les i mme ub le s du défunt ont été vendus , soit
�vol ontai rement , soit f o r c é m e n t , c o m m e l ’a observé M. D e n e v e r s ,
greffier d e la section civi le , pa ge 599 , an 1809 ; et q u’aussi
l ’on ne peut plus e x e r c e r la séparation des pat ri moines sur la
f ond
que l’hé r it i er du déf unt a pris en é change d ’ un i m
me ub le p ro ve na nt du défunt , c o m m e l ’a observé M. C h a b o t ,
conseiller en la m ê me c o u r , dans s on commentaire sur les s uc
cessions
A t t e n d u , en f ai t, que les biens de Jean et de L ig i er R e y n o u a r d
ont été vendus par autorité de justice les 25 et 3 o juin 1 8 1 0 , e t
m ê m e r evendus par le sieur L a v al ;
A t t e n d u que M M . les Ad mi ni st r at e ur s ont été appelés à la
v e nte , c o m m e créanci ers inscrits sur L i g i e r R e y n o u a r d , et que
n ’ayant poi nt demandé la séparation des pat ri moines au m o m e n t
où les biens allaient sortir des mains de l’h é r i t i e r , ils ont élevé
contre e u x la fin de non r ec e vo i r p re vu e pa r l ' article 880 du code ;
A t t e n d u que les A dmi ni str ate urs des hospi ces ayant dema ndé
e x p r e s s é m e n t leur collocation p ar p rivil ège et p r é f ér e nc e à t o u t
c r é a n c i e r , sur les domaines provenant de la succession de L igier
R eynouard , ils ne p euv e nt p l u s , sous aucun r a p p o r t , re ve ni r
sur leurs pas p o u r d ema nde r la séparation des biens de Jean
R e y n o u a r d , dont ils ont conservé la confusion de toutes les
maniè re s ;
A t t e nd u , e n fin , que les hospices n ’ont ni privil ège ni p r éf ér enc e
à ré cl ame r sur les biens de L i g i e r , mais q u ’ils ne doivent être
colloques à l’ordre q u ’au r ang de leur inscri pti on , c o nf o r m é m e n t à
l ’art. 2 1 5 4 du code N a p o l é o n ;
O r d o n n e r q u ’ il n ’ y a lieu à la séparation des p atri mo ine s de Jean
et de Ligi er R e y n o u a r d , en faveur des h o s pi c es ; q u ’ils seront
seulement colloqué s au rang de leur inscription , e t les conda mne r
aux dépens.
Signé A R R A G O N È S - L A V A L .
C.
L . R O U S S E A U , ancien avocat.
N O Y E R - B R A C H E T , avoué.
A
CLER M O N T F E R R A N D ,
Cbez J. V E YSSET , imprimeur-Libraire , rue de la Treille.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Arragonès-Laval, Charles-Marguerite. 1811?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Rousseau
Noyer-Brachet
Subject
The topic of the resource
créances
séparation de biens
hospices
biens nationaux
bienfaisance
responsabilité des administrateurs
novation
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions motivées pour sieur Charles-Marguerite Arragonès-Laval, propriétaire, habitant à Clermont-Ferrand, demandeur ; contre MM. les Administrateurs des Hospices de la même ville, duement autorisés par arrêté de la Préfecture du 28 mai 1812, défendeurs.
Table Godemel : Ratification : 5. les notaires recevant l’acte de ratification ou titre nouvel d’une créance, peuvent-ils en même temps l’accepter pour le créancier absent, et celui-ci n’est-il pas réputé l’avoir accepté lui-même en prenant une inscription en vertu de cet acte ? les administrateurs auraient-ils excédé leur pouvoir en faisant une pareille acceptation ? y a-t-il en ce cas novation ? Séparation de patrimoine : 1. la séparation des patrimoines peut-elle être faite d’office par le juge commissaire à l’ordre, ou doit-elle être expressément demandée par le créancier ? 2. peut-elle être accordée au créancier qui a accepté l’héritier du défunt pour créancier débiteur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1811
1762-1811
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2118
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2117
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53414/BCU_Factums_G2118.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
biens nationaux
Créances
hospices
novation
responsabilité des administrateurs
séparation de biens
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53413/BCU_Factums_G2117.pdf
4dc5857383ea598eebbcae4837591170
PDF Text
Text
MÉMOIRE
P O U R
S ie u r C h a r le s
-M
arguerite
A R R A G O N È S - L A V A L , pro
An 1812.
à
p r ié ta ir e , h a b ita n t à C le r m o n t - F e r r a n d , d e m a n d e u r ;
C O N T R E
M M . l e s A d m i n i s t r a t e u r s des H ospices de la même
v i l l e , d é fe n d e u r s .
QUESTIONS.
L
A séparation des patrimoines peut-elle être faite d’office par
le juge commissaire à l’o r d r e ,
ou doit-elle être expressément
demandée par le créancier ?
2.0 L a séparation des patrimoines p e u t-e lle être accordée au
créancier qui a accepté l’héritier du défunt pour débiteur ?
3 .“ Les notaires recevant l’acte de ratification ou titre nouvel d’une
c re a n c e , peuvent-ils en même tems l'accep ter pour le créancier
absent, et celui-ci n’e st-il pas réputé l’avoir accepté lu i- m ê m e en
prenant une inscription en vertu de cet a c t e , en faisant notifier un
1*01%,(j"
�(2
)—
------------------------
commandement au d é b ite u r , et en requérant sa collocation, toujours
en vertu de cet acte ? L e s Administrateurs auraient - ils e xcédé
leurs pouvoirs en faisant une pareille acceptation ?
L e s hospices étant des établissemens publics
fondés pour le
soulagement de l'humanité souffrante , méritent sans
contredit
la protection du gouvernement et de la justice» Néanmoins quelle
que puisse être la faveur dont ils jo u isse n t, jamais elle ne peut
aller jusqu’à 1rs faire prim er des créanciers dont les droits ont
été conservés avant les leurs. Soumis aux lois comme tous les
c it o y e n s , ces établissemens ne peuvent invoquer aucune excep
tion qui ne soit établie formellement en leur faveur. Dans l’in
cident qui s’élève sur l’ordre ouvert pour colloquer les créanciers
de feu sieur L igier R e y n o u a r d , on va démontrer que les règles,
ont été ouvertem ent violées pour faire primer le sieur ArragonèsLaval par les hospices , tandis qu’au contraire , dans la volonté de
la loi , il tlevait les p rim e r ; q u ’a in s i, il est urgent de reconnaître
et rétablir les rangs que doivent avoir légalement à l’ordre chacun
d,e ces deux créanciers.
F A I T S .
L e sieur A r r a g o n è s-L a v a l, créancier du sieur L igier Reynouard
p our une somme de 20,62.5 f r a n c s , a fait procéder à l’expropria
tion de ses biens , et est devenu adjudicataire de trois domaines
p ar trois jugemens rendus en ce tribunal les
m oyennant la somme de
42,585
23 et 3 o
juin 18 10 ,
francs ; il a ensuite requis le 11
janvier 1811 la nomination d’un juge-commibsaire pour procéder
à l’o r d r e , et AI.
Chassaing ayant été
n o m m é , l’ordre a été
ouvert le 7 février suivant.
L e î y du même mois J le sieur A rragonès-L aval a
sommé les
créanciérs de produire ; et sur le vu des titres des h osp ices, M.
Chassaing a fait la séparation du patrimoine de Jean R eynouard
p è r e , d ’avec celui de Ligier Reynouard fils, et a colloqué sur le
patrim oine du
père les h o sp ic e s , en
sotte que le sieur A r r a -
gouès-Laval n ’a pu être colloque que sur le patrim oine du f i l s ,
«
�insuffisant pour le p a y e r , tandis qu’en ne faisant aucune séparation des patrimoines , comme la loi le prescrivait dans l'h y p o llu é e actuelle ,
paye ,
le sieur Laval primait
sinon de la
totalité
de
les hospices
sa créance , au
et était
niuins de la
majeure paitie.
Cette sépatation des patrimoines et la collocation des hospices
ont été contredites par le sieur Arragonès-Laval ; et cette contra
diction fait la matière d’ un incident à l ’ordre qui donne lieu de
discuter les questions ci-dessus proposées,
P R E M I È R E
Q U E S T IO N .
L a séparation des patrimoines est un droit accorde aux créan
ciers du défunt pour obtenir leur paiement sur ses propres biens,
quand la fortune de son héritier est douteuse , et qu’à cause de
la confusion , il y aurait à craindre pour les créanciers du défunt
de n ’être pas payés sur le patrimoine de l ’héritier.
L ’article 878 du code Napoléon dit : « ils ( les
créanciers )
î) peuvent demander , dans tous les c a s , et contre tout créa n cier,
)) la séparation du p a trim o in e du d é fu n t d ’a vec le p a trim o in e de
l’ héritier ».
L ’art. 880 ajoute : » à l’ égard des immeubles , l ’action peut être
jj exercée tant qu’ ils existent dans les mains de l ’heritier. »
L ’art. 2 111 porte que » les créanciers et légataires qui dem andent
la séparation du patrimoine du d é fu n t, conform ém ent ù l’art. 8 7 8 ,
au titre des su cc e ssio n s, co n serven t, & c.
L ’art. i
4 de la loi
du 1 1 brumaire autorisait aassi les créanciers
du défunt à dem ander cette séparation.
Ces articlés nous font voir que la séparation des patrimoines doit
être demandée au j u g e , et q u ’il ne peut , sans celte demande, la
prononcer. Puisque la loi
met cette
séparation au nombre des
a ctio n s, il est sensible que le juge ne peut y statuer tant qu’ elle
n ’est pas formée. L a loi premiere du titre 7 , de separalionibus ,
au digeste, liv.
4a ,
exigeait de même que la séparation des biens
d ’une succession fût demandée. S ed etiarn advcrsiisJlscurn et m uni•
a
)
ti j î ' !
�\ *r V
t
\
V
’
c i p e s i m p e l r a r c t u r s e p a r c i l i c , $. 4 , q u i c r e d i t o r e s p o s s i n t s é p a r a »
t i o n e m i m p e t r a r e ? §. 8.
Ici nous voyons que les hospices ont obtenu la séparation des
patrimoines sans l’avoir demandée , qu’ainsi M. le juge-com missaire
l ’a faite d’ olïïce en leur faveur.
E n e f fe t , la requête qui accompagne la production des hospices
contient les conclusions su iv a n te s, signées de M. Chassaing fils ,
leur avoué.
C e c o n sid è re, M onsieu r le ju ge-com m issaire , v u l ’exposé ci-dessus , led it
sieu r R ousset ( re c e v e u r des liospiccs ) , re q u ie rt à ce
qu’ il vous plaise
ordonn er que par p riv ilè g e conserve p ar in scrip tion et p a r préférence à tous
autres cré a n cie rs, colloqu er les hospices , i.° pou r une som m e p rin cip ale d e ....
N u lle part la séparation des patrimoines n ’y est demandée ; au
co n traire, la requête a pour objet la collocation au prem ier rang
sur les biens de L igier R e y n o u a r d , en vertu de l’in scrip tio n , et
cependant cette séparation a eu lieu , et les hospices ont été col
loques les prem iers sur le patrim oine de Jean R eynou ard père.
Il est donc évident que la séparation des patrimoines a été
faite d ’office , ce qui est contraire à la loi et ne peut subsister.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
L a séparation du patrimoine du défunt ne peut plus avoir lieu
quand les créanciers du défunt
ont
accepté son héritier pour
débiteur; ainsi l ’a voulu le code N a p o lé o n , ainsi le voulaient les
lois romaines.
L ’article
8^8
du Code déjà cité porte'bien que « les créanciers
» peuvent demander , dans tous les c a s , et contre tout cr é a n cie r ,
» la séparation du patrim oine du défunt d ’avec le patrimoine de
)) l’ h é r itie r )>.
Mais l’article 879 ajoute : « ce droit ne peut cependant plus
» être exercé , lorsqu’il y a novation dans
la créance contre le
» d é f u n t , par l’acceptation de l’ héritier pour débiteur ».
Cette
restriction a été
puisée dans le texte
prem ière , nu digeste , livre 4 2 , titre
I l l u d s c ie n d u m
7-
même de
la loi
e s t , co s d e tn à n i c r e d ito r c s p o s s e im p é tr a n t
«
�separalionem , q u i non novandi anirno ab hæ rede stip u la it sunt.
Cœ teriim si eum hoc anim o secu ti
s u n t , a m iseru u t
sepa ra -
tionis com m odum : quippè consccuti sunl nomen hœ red is , nec
p ossu n t ja m se ab eo s e p a r a r e , q u i quodarnmodo eum
e leg e -
runt. S ed et si usuras ab eo ed m e n te } q u a si eum eligendo
exegerunt : idem erit probandum } $ 10.
Ite m q u æ r itu r , si satis accep erunt ab e o , an im petrent sep a rationem ? et non p u to : h i enim secuti sunt eum fa r té quem
m ovebit. Q u id ergo si satis non idoneym acceperunt ? E t sib i
im putent cu r m inus idoneos fid e ju sso r e s a c c ip ie b a n t, §. 1 1.
S i q u is p ig n u s ab hæ rede a cce p er it, non est e i concédé rida
separatio , q u a si eum secutus s i t , neque enim J e i endfis est q u i
q u a lite r q u a liter , eligen tis tam en
secutus est
Les
15 .
dispositions de cette
m ente ,
hœ redis personam
loi sont d ’autant
plus p ré c ie u se s,
qu’elles nous donnent la parfaite intelligence de l ’article 879 du
C o d e , dpnt les expressions
très - concises pourraient
ouvrir un
champ assez vaste à l’interprétation. Il sulïit de remarquer que
cet article n’a eu pour objet que de reproduire en peu de mots
les règles développées dans cette loi romaine.
C e l l e - c i nous a p p r e n d do n c que les c ré a n cie rs du d éfun t ayant
u n e fois agréé
pour
d é b ite u r
son h é r i t i e r ,
dem ander la sép aration de leurs
deux
ne
peuvent
plus
p a trim o in e s ; q u ’il y a
accep ta tio n de l’h é r itie r p o u r d é b ite u r , lorsque
les
c ré a n cie rs
du défunt se sont fait assurer le u rs créan ces p a r l ’h é r i t i e r ,
ou
s’ ils ont stipulé des intérêts de l ’h é r i t i e r , ou s ’ils ont p ris de lui
un
rép o n d a n t m ê m e in s o lv a b le , ou s ’ils en o p t p ris un gage p o u r
le u r sûreté.
T o u s les auteurs qui ont écrit sur cette matière ont enseigné la
même d o ctrin e , notamment R o u s s e a u -L a c o m b e , page
48 j
de sa
ju risp ru d en ce c iv ile , et le Brun dans son traité des su cc e ssio n s ,
page (JiG, où ils disent que la séparation des biens ne peut être
demandée , si le créancier du défunt a stipulé son dû de l ’héritier.
l}om at, ppge 2 i 5 , dit de même , que si un créancier du défunt
.innove sa dette , et se contente de l ’obligation de l’héritier , il
2
�ne pourra demander la séparation des bien
3 du
d é f u n t , car il
n ’est plus créancier que de l’héritier.
Ce point de droit étant constant , il ne s’agit plus que d’exam iner
s i , dans le fait , les administrateurs
des hospices
ont
accepté
L ig ie r Reynouard , fils et héritier de Jean , pour leur débiteur.
Par acte du 29 mai 1 7 6 2 , passé devant T am en et Chasseguay ,
notaires a C lerm o nt , Étienn e Bosgros , bailli de Briffons , vendit à
Jean Reynouard le domaine de chez Jallat, moyennant 6,000 f r . ,
dont il délégua
5,000
fr. a u x daines hospitalières de C le r m o n t ,
p our l’ingrès en religion des demoiselles Bosgros. Quoique Jean
R eynouard n’eût p ayé comptant à la supérieure que
4 oo
f r . , et
qu ’il se fût obligé de payer le surplus à termes rapprochés , il
paraît que ces dames n ’exigèrent point le c a p it a l, et se contentè
rent des intérêts.
Jean R e y n o u ard est m ort en 1 7 8 3 , laissant L i g i e r , son f i l s ,
p ou r son héritier.
Les biens de l ’église devinrent domaines nationaux par l’eifet
des dispositions de la loi du
4 août 17^9*
L e 8 floréal an 7 , le sieur T a b a r i e r , receveur dés domaines ,
p rit une inscription en vertu de ce t it r e , au profit de la république ;
mais cette inscription était sans va leu r, parce qu’ elle ne contenait
pas d’élection de domicile , et qu’elle ne frappait que sur les biens
de B o s g r o s , et non sur ceux de R e y n o u a r d , véritable d é b ite u r ,
qu ’ainsi elle était faite en contravention à l’art.
ji
17 de la loi du
brumaire an 7.
D ’après un arrêté du gouvernement du 7 messidor an g , les
créances qui avaient appartenu aux dames hospitalières ont été
concédées aux hospices de Clermont.
Le
îi
floréal an 1 0 ,
L ig ie r
R eynouard
souscrivit
devant
M M . Grimardias et S arra y , notaires à C le r m o n t, un acte de rati
fication du titre de 1762.
O n y l i t , qu’il consent à ce que le contrat du 2q mai 176»
soit exécutoire contre l u i , comme il l’était contre Jean Reynouard
3
son père ; qu’ il s’oblige à payer a o fr. par an , sans re te n u e , p our
l ’intérêt du capital de
46oo f r . ,
tant qu ’il eera ken demeure d ’en
�( 7 )
faire le r e m b o u rse m e n t; qu’il hyp othèqu e son domaine de chez
Jallat, et que les notaires recevans
acceptent cet acte de ratifi
cation , au nom et pour M M . les Administrateurs des hospices.
A celte é p o q u e , L ig ie r Reynouard avait une fortune apparent e
assez considérable sans inscriptions. Il suffisait d’en prendre une
valable en vertu de cet acte , et les hospices se seraient trouvés ses
premiers créanciers ; mâis on a attendu jusqu’au i g avril 1809
p our prendre cette inscription, et dans l’intervalle les choses ont
changé de face.
E n 1806 , L ig ie r R eynou ard
5
emprunta i ,ooo fr. au sieur
A r r a g o n è s - L a v a l e t lui constitua une rente viagere de 1 8 7 0 fr.
Avant de placer dans ses mains une si forte somme , le sieur Laval
fut vérifier ses inscriptions, car il était prudent de savoir com
bien L igier R ey n ou ard aVait de dettes indépendamment de l’h y p o
thèque légale de sa femme. L e sieur Laval trouva quelques inscrip
tions de peu de valeur, à l’exception de celle prise par le sieur T ab ar i e r , dont la nullité était saillante, et celle du sieur Guillem in ,
qui donnait lieu à l’ emprunt de L ig ie r R e y n o u a rd exprès pour
l ’acquitter. Cela détermina le sieur Laval à placer ses fonds. E n
conséquence le contrat de rente viagère fut passé devant C h e v a l i e r ,
notaire, le G juin 1 8 0 6 , et inscrit le o du même mois. Depuis
3
d ’autres créanciers se sont inscrits de meme.
M a in te n a n t n ’est-il pas évident que les hospices ont accepté
p o u r leur débiteur l ’héritier du d é fu n t, et tous les caractères de
cette accep tatio n , spécifiés dans la loi romaine , ne se re n co n tre n tils pas ici pour nous en convaincre ?
N ’e st-ce pas L i g i e r Reynouard , héritier de J e a n , qui a assuré
la créance des hospices ? c e u x -c i n ’ont-ils pas stipulé de lui (les
intérêts? ne leur a-t-il pas conféré une h ypothèque pour leur bûreté ?
n ’a-t-il pas consenti en leur faveur que le titre de 176a soit e xécu
toire contre l u i , comme il l’était contre son pere ?
C e r te s , s’il n ’y a pas là une novation p a r fa ite , il no s’en trouTera jamais.
Au surplus , cette n o va tio n , établie par la loi romaine et l ’art. 879
du code N a p o lé o n , est toute sp écia le, et ne se détermine point
�( 8 )
par les régies générales de la novation dans les contrats et obli
gations qui fait la matière de lu section 1 1 , du chapitre ô , titre 5 >
liv.
5
du code.
C ’est ce que la cour d’A i x a très-bien remarqué , en jugeant
contre les sœurs T h u r b e t * par arrêt du 21 août 1810 , que la nova
tion requise par l’art. 879 pour faire cesser le droit «le la séparation
des p atrim oines, s’opère par l’acceptation seule de l ’héritier pour
débiteur.
O on sidéiant que la facu lté réservée p ar l ’a rt. 878 a u x créan ciers d u d é fu n t,
de dem nidt'r la séparation de son p a trim o in e d’a vec celu i de l ’ h éritier , ne
p e u t plus , d ’après l ’a rt. 879 , être exercée , lorsq u ’ il y a n o va tio n dans la
c r é a n c e , con tre le d éfu n t , p a r l ’ acceptation de l'h é ritie r pou r d é b ite u r; qu’ il
n ’en est pas de la n o va tio n dont p a rle cet a rticle , connue de la n ovation p ro
p rem en t d ite , telle qu’est définie dans l ’a rticle d u code q u i y est r e la tif ; que y
dans ce d ern ie r cas , la n o va tio n s’opère lorsqu’un n o u ve au d éb iteu r est
su b stitu é à l’ancien , q u i est déchargé par le créan cier , ou lorsque par l ’efiut
d ’ un n o u v e l en gagem en t , u n n o u veau créan cier est substitué à l’ancien ,
en vers leq u el le d éb iteu r se tro u v e déchargé j tandis que , dans l ’ au tre , elle
s’opère seu lem ent par l ’acceptation de l’h é ritie r p o u r d é b ite u r.— V o ir D e n c v c r s ,
an 181 x , page 98. S,
Il faut donc reconnaître p our une vérité incontestable, que l’acte
de ratification du 11 floréal an 10 contient une novation qui fait
cesser l’action en séparation des patrimoines , et qu ’ainsi cette sé
paration ne pouvant être accordée aux hospices , ils ne doivent
être collo-iués à l’ordre q u ’avec los créanciers de L ig ie r Reynouard ,
fils et héritier de Jean , au seul rang que leur donne la date de
leur in scription , conformément à l’art. 2 i 5 i du code Napoléon ;
que ilès-lors ils seront primés par le sieur A r r a g o n è s-L a v a l, créancier
inscrit avant eux.
T R O I S I È M E
Q U E S T IO N .
M M . les Administrateurs des hospices objectent que la ratifi
cation de L igier Reynouard ayant été reçue en leur absence par
les notaires , n ’a pu les engager ; q u ’ils ne sont pas liés par les
actes , poursuites et diligences de leur receveur , et qu’eu x-m êm es
auraient excédé leurs pouvoirs en contractant une novation dange
reuse pour les hospices.
:
�Il est assez étrange de voir un créancier se plaindre de ce qu’en
son a b se n c e , les
notaires rédacteurs
d’un acte de
ratification
à son p r o f it , l’aient accepté pour lui. Est-ce donc à leur insçu et
sans leur consentement que
cet acte a eu lieu ? e s t - c e
Ligier
R eyn ou ard , d é b it e u r , qui a choisi les notaires rédacteurs de cet
a c t e , et qui leur en a dicté le contenu? cela n ’est ni v r a i , ni vrai
semblable.
'
'
Dans les pièces produites à l’ordre pour les hospices , nous
avons remarqué q u ’ a u dos de l’expédition du titre du 29 mai 1 7 6 2 ,
étaient écrits de la main de M. Ch assaing, alors chargé de la per
ception des rentes dues aux hospices , ces mots :
M.
G riin ard ias
fera de
su ite
la ratification
de l ’ a c te 'p o r ta n t intérêt
de 2 3 o fr . en fa v eu r de l ’iiosp ice, au 110m de L ig ie r R e yn o u a rd , p ro p riétaire ,
du lie u de lîriffon s.
Voilà qui prouve que les notaires avaient été chargés , de la
part des Administrateurs des hospices , de passer cet acte.
Aussi avons-nous encore remarqué qu’au bas de l’expédition
de l ’acte de ratification du 11 floréal an 10 , produite pour les
hospices , M.e G rim a rd ia s, qui a gardé la minute , a écrit ces mots :
exp éd ié a u x A d m in istra te u rs de l'h o sp ice .
Du re ste , les notaires rédacteurs de cet acte pouvaient vala
blement l’accepter pour M M . les Administrateurs absens.
P o th ie r , dans son traité des o b lig a tio n s, tome 1 " , page 98 ,
dit : m nous pouvons prêter notre ministère à une autre personne,
« afin de contracter pour elle , de stipuler et de promettre pour
» elle ; et en ce cas , ce n’est pas proprement nous qui contractons ,
)j mais c ’est cette personne qui contracte par notre ministère. »
G a rn ie r-D e sc h ê n e s, dans son traité élém enta ire du n o ta r ia l,
page
485
, observe « qu’ il n ’est pas nécessaire que le créancier
» soit présent dans l’acte du titre nouvel pour l’accepter. L ’accep» tation faite pour lui p a rle s notaires, comme il est assez d’ usage
» que cela se fasse , tient lieu de la sienne , sans cependant qu’elle
» puisse piéjudicier à ses droits , si l’acte récognitif 11’est
pas
» conforme au titre originaire. »
l/absence de M M . les Administrateurs n’a donr porté aucune
atteinte ù la validité de l ’acte de ratification du 11
3
floréal an
�10 , dés que les notaires recevans l’ont accepté pour eux.
Si
cependant ils l’eussent trouvé préjudiciable à leuis droits, ou non
conforme au litre
originaire , ils auraient pu le refuser
réclamer un autre. M a is , loin d e - là ,
MM.
les
et en
Administrateurs
l ’ont regardé si profitable , qu’ils en ont fait usage,, à la diligence
du sieur R o u s s e t , leur receveur.
Dans la vérité , cet acte était e x c e lle n t , si Pon
eût pris ins
cription sur Ligier R eynouard pendant les quatre années qui ont
suivi; mais l ’on a attendu sept a n s , car ce n’est que le 19 avril
1809 que le sieur R o u s s e t , receveur
des h o s p ic e s , a pris une
inscription de 6,<260 francs , au nom de MM., les Administrateurs.
Il
avait déjà fait un commandement à L ig ie r R eynouard le 9
janvier 1806 , en vertu de l’acte de ratification du 11 floréal an
10
,
dont
il
lui avait fait meme notifier
c o p ie ; et
com prend pas c o m m e n t , à cette époque m ê m e ,
si utile
l’on ne
pour
p rend re une inscription , il négligea d ’assurer le rang de l'h y
pothèque. Quoi qu’il en soit , le sieur Ilousset a produit à l’ordre
les titres des hospices. L a requête du 9 mars 1811 , qui est pré
sentée au nom de MM. les Administrateurs , et qui contient aclede p r o d u i t , conformém ent à l ’article 754 du Code de Procédure,,
justifie qu’ils n ’avaiunt pas même l’idée de demander la sépa
ration des patrimoines. O n a f a i t , dans cette requête , l ’ historique
des titres des h osp ices; on y a énoncé le titre originaiie du 29
mai 1762 et ses causes ; ensuite on a rappelé comment
L igier
R eynou ard avait passé devant M.® G r im a r d ia s , le 11 floréal an
jo ,
un acte de ratification , où il avait consenti que cet ancien
titre fut exécutoire contre l u i , comme il l’était contre son père j
comment ce titro nouvel avait été suivi d’un c o m m a n d e m e n t du
9 janvier 1806 et d ’une inscription
du 19
avril
1809 ; et les
conclusions n’étant que la conséquence naturelle de cette narra
tion , t e n d e n t, comme on l’a déjà vu , à co que les hospices soient
colloqués par préférence à tout autre créancier ,
à
cause du
privilège conservé par l’inscription.
Quoi ! tous ces actes faits au nom do M M . les Administrateurs
à. la diligence du sieur R o u s s e t , leur receveur , no sont-ils dono
�LA
l
pas autant d’aclcs approbatifs
11
du
J
titre nouvel du 11 floïéal an
j o , accepté pour eux par les nolaires recevans ? lie sont-ils pas
, dès-lors réputés avoir accepté eux-m êm es cet acte de ratification ?
comment peuvent-ils aujourd’hui les méconnaître ou s’en dégager?
*
To us
ceux qui ont des intérêts à démêler avec les hospices
les entendent sans cesse invoquer des privilèges
aucune trace d a n s'la législation ,
dont il n’y a
mais qui pcuveiit en imposer
;
j
à ceux qui ne l ’ont point étudiée;
C e serait biën , en effet , un singulier privilege que celui de
I
pouvoir méconnaître un acte
de ratification
passé devant des
notaires mis en Oeuvre par le percepteur des redevances dues
,
aux hospices , un co m m an d em en t, une inscription et une requête
'
dé collocation faits
du receveur.
aü nom des A d m inistrateurs, à la diligence
Il n’est pas moins extraordinaire d’entendre dire
que les Administrateurs eux-mêmes auraient excédé leurs pouvoirs
en contractant personnellement avec L igier Reynouard , et en
I
approuvant un acte de ratification qui contiendrait une novation
'
dangereuse pour les hospices.
j
|
I
Remarquons d’abord qu’il n ’y a eu de dangereux pour les
hospices que la n é g lig e n ce de ses préposés qui ont p ris une
inscription tardive ; et la p re u v e , c ’est que si l'in scrip tio n avait
été faite api'ès l ’acte de ratification, et même encore au com
mencement de l ’année 180 6, il n ’y aurait aucun procès entre les
p artie s, parce q u e , d'une p a r t, les hospices auraient été assurés
d ’être p ayés, et que de l’a u t r e , le sieur A rragonès-L aval , averti
hypothè-
;
p ar cette inscription qu’il aurait trouvée au bureau des
f
q u e s , n ’aurait point placé son argent dans les mains de L ig ie r
Ileynouard. E s t - il'd o n c juste que le sieur Laval paye les fautes
des préposés des hospices ?
|
N ou s savons que l'article'
1125
du code Napoléon porte q u e :
« T o u te personne peut contracter, si elle îi^en est pas déclaiée
» incapable par la loi » ; que l’article 1124 ajoute que : « les
» incapables de contracter sont les m in e u r s, les in terdits, les
)) femmes m a riées, dani les cas exprimé!, par la lo i, et
géné-
» ralement tou* ceux auxquels la loi a interdit certains contrats j »
�qu’enfin l’article 7
V -
125
)
""
dit qne « le m in e u r , l'interdit et la femme
)) mariée ne peuvent a tt a q u e r , pour cause d’ incapacité , leurs
P engagemens , que dans les cas prévus par la loi. Les personnes
)) capables
de
s’engager
ne
peuvent
opposer
l’incapacité
do
» m in e u r , de l'interdit ou de la femme m a riée , avec qui elles
)) ont contracté ».
Ces principes existaient avant le C o d e , à l ’exception des droits
de la femme mariée qui n ’étaient pas tou t-à -fait aussi étendus.
A u surplus , quel avantage peut-on tirer pour les hospices des
dispositions que nous venons de rappeler ?
L e s hospices ne sont point dans la classe des mineurs ni des
interdits.
O u prescrit contre la nation , les établissemens publics et les
communes , art. 2227 du code Napoléon.
A u contraire , on ne prescrit point contre les mineurs et les in
terdits , art.
225 a.
L es mineurs et interdits ont une hypothèque légale sur les biens
<le leur t u t e u r , art.
2 12 1. Cette hyp othèqu e e x is t e , indépen
damment de toute in sc r ip tio n , art 2 i5 5 .
Au contraire, l'h ypoth èque légale de la nation , des communes
et des établissemens publics , sur les biens des receveurs et adminis
trateurs comptables , doit être conservée par une inscription ,
54
art. 2121 et 2 1 .
On a vu dernièrement les Administrateurs des hospices de la
ville d ’ A u d e n a rd e , créanciers de la succession du sieur D e s m e t ,
leur r e c e v e u r , i.° pour le capital et les
arrérages d ’une r e n t e ,
2°. pour un reliquat de son compte , vouloir assimiler les hospices
à des m in e u rs, et faire valoir à l’ordre leur hypothèque légale,
de la même manière que les mineurs. Ces Administrateurs allaient
jusqu’à soutenir que les biens des hospices faisaient partie des
domaines nationaux , et qu ’ainsi ils devaient jouir des mêmes
privilèges.
On leur a répondu qu’à la vérité la loi du a
avait déclaré
propriétés
5
messidor an a
nationales l’a ctif des hôpitaux ,
mais
que cette loi avait été rapportée par celle du iG vendémiaire an
5;
que l’hypothèque légale que leur attribue le code n ’existe qu u la
�(
1 3 }
charge de l’inscription , tandis que celle des mineurs existe in d é
pendam m ent de l ’inscription.
L e tribunal de prem ière in stan ce, par jugem ent du 26 f t v i i e r
1808 , et la cour de Bruxelles
par arrêt du 10 mai 1 8 0 9 , pros»
crivirent les prétentions de 1’ Àdministration des h o s p ic e s , et son
pourvoi fut encore rejeté par arrêt de la conr de cassation du
12 mars 1 8 1 1 . — V o y ez Denevers , an 1811 , page 228.
Déjà
la conr de cassation , par arrêt du 22 pluviôse nn
,
avait jugé contre les Administrateurs des hospices de Chantilli ,
i.° qu’il n ’existe aucune loi en vigueur qui déclare les biens des
hospices domaines de
la nation ; 2.0 qu ’il appartient aux tri
bunaux de connaître du contentieux des biens des hospices ;
5 .° que
les Administrateurs doivent être autorisés à plaider par le conseil
de P r é fe c t u r e , dans les formes prescrites p ar la loi du 29 ven
démiaire an
5. —
V oyez D e n e v e r s , an i
5,
5
page g . S.
A l ’égard des Administrateurs des hospices , -que sont-ils y et
quels contrats la loi leur a -t-e lle interdits ?
L e s Administrateurs des hospices sont les tuteurs de ces é ta blissemens. Car quoique les hospices 11e soient pas dans la même
classe que les m in e u rs et les in terd its , ils sont au nom bre de
c e u x auxq uels la loi a interdit certains contrats. Les Adm inistra
teurs ne peuvent aliéner. Ils ont la surveillance générale de toutes
les parties de l ’établissement. Ils ont les pouvoirs nécessaires pour
faire tous
les actes d’administration ; néanmoins , ils ne peuvent
plaider sans être préalablement autorisés par le conseil de P r é
lecture , suivant les lois des 29 vendémiaire on 5 , et 28 pluviôse
an 8 ; ils peuvent cependant transiger en certains cas y avec l ’a p
probation
du G o u v e r n e m e n t
( art.
i
5
de l ’arrêté
des consuls
du 7 messidor an 9. )
D u r e s t e , ils ne peuvent excéder leurs pouvoirs en acceptant
l ’acte récognitif d ’une redevance ou créance ,
lors mêm e qu’il
contiendrait novation ; c’est ce que nous allons démontrer par les
principes du droit les plus certains.
P o t b ie r , dans son traité des obUgciliorw, t o m e s , pnge 106 f
dit : « qu’ il n ’y a que ceux à qui l ’on peut payer valablement
» qui puissent faire novation
du la dette. A i n s i , puisqu’on
no
�» peut payer valablement à un m in e u r , à une femme non a uto» risée de son m a r i, à un in te r d it, on doit décider que c e s p e r » sonnes ne peuvent faire n o v a lio n de ce qui leur est d û , liv .
5t
» liv . 2 0 , } 1 . " d. tit. »
» F "ice versa , celui à qui l ’on peut payer une d e t t e , peut
» aussi ordinairement faire novalion : cu i rectè s o lv itu r , isetiarn
» novara p o test ,• liv . 10 , f f . , de novat. »
» Un tu te u r, un c u ra te u r, un mari peuvent faire n o va tio n ,
» liv . 2 0 , § i " ,
l.ftn,§
i " ,
f f , d. l i t . »
» L a paiement fait à ceux à qui la loi donne qualité pour rece5> voir à la place du c ré a n cie r, est valable. »
» L a loi donne cette qualité
aux tuteurs , pour recevoir ce
» qui est dû à leurs mineurs ; aux curateurs des interdits , pour
» recevoir ce qui est dû à ces interdits ; aux m a r is , pour rece» voir ce qui est dû à leurs femmes qui ne sont point séparées;
w a u x receveurs d ’ h ô p ita u x , de fa b r iq u e s , ce qui est dû auxdits
» hôpitaux. »
» Ces personnes ont qualité pour r e c e v o ir , non-seulement les
» revenus des biens des personnes dont elles ont l ’administration ,
» mais même les principaux de leurs r e n t e s , lorsque les débiteurs
» jugent à-propos de les rem bourser , sans qu’il soit besoin qu ’il
)) intervienne pour cet effet aucune ordonnance du juge ; et les
)> débiteurs
qui ont payé entre
les mains de ces personne»,
» sont parfaitement lib é ré s, et n ’ ont aucun recours à cra in d re ,
» quand même ces personnes auxquelles ils ont payé , d evien » draient insolvables , page 22 . »
On v o it donc que si le tuteur d’ un mineur ou d ’un interdit a
]a puissance de faire novation , d f o r t i o r i, les Administrateurs
des hospices peuvent la faire.
E t e n c o r e , remarquez que la loi accorde cette puissanco aux
tuteurs pour
la novation des
contrats et obligations , dont les
principes sont bien plus délicats que ceux de la novation simple
qui s’o p è r e , comme dans notre espèce , par le seul fait d’accepter
p our son débiteur l ’héritier du défunt.
Q uel argument peut
donc m aintenant
fournir aux hospices
�l ’article 1272 du code N a p o lé o n , qui
porte que « la novation
» ne peut s’opérer qu’entre personnes capables de contracter«?
O ù trouver un commentaire plus judicieux de
cet article que
dans le passage de P othier que nous venons de citer ?
Vainement M M . les Administrateurs diront qu’ils n ’ont point
comparu à l’acte de ratification , et qu’ils ne l’ont point accepté
personnellement ; nous allons leur prouver que tout ce qui a été
fait
en leur nom
équivaut,
de leur p a r t , à une acceptation
personnelle. Mais > pour bien
s’en convaincre , examinons ce
qu’est le receveur des hospices.
L a loi a donné aux hospices , outre les A d m in istra teu rs, un
agent comptable et payé.
Elle
lui
a prescrit des
obligations
considérables, et l’a soumis à la responsabilité.
L ’article i . ' r de l’arrêté du gouvernement du 19 vendémiaire
an
12 veut que
les
receveurs
des hospices
fassent toutes les
diligences nécessaires pour la recette et la perception des revenus,
pour le recouvrement des legs et donations; qu’ils fa s s e n t fa i r e
à la requête des adm inistrations des h o s p ic e s , contre tous les
d é b ite u r s , les e x p lo its , significations , p oursuites et com m a n dem ens n écessaires ; qu’ils avertissent les Administrateurs de
l ’échéance des baux ; q u ’ils e m p ê c h e n t les prescriptions ; qu’ils
veillent à la conservation des dom ain es, droits } privilèges et
hypothèques ; qu’ils r e q u ire n t à cet effet l ’ inscription au bureau
des h y p o th èq u es
de tous le s titres q u i en sont susceptibles p
et qu’ils tiennent registre desdites in scrip tio n s, et autres pour
suites et diligences.
L ’article 2 les autorise à se faire délivrer par ^Administration
des hospices une expédition en forme de tous les co n tra ts, titres
nouvels, déclarations , b a u x , ju g e m e n s , et autres actes concer
nant les domaines dont la perception leur est c o n fié e ,
ou à se
faire remettre par tous dépositaires lesdits titrer et a c te s , sous
leur récépissé.
L ’article
5
veut .qu’il leur soit alloué
une somme
travail dont ils sont c h a rg é s , et la responsabilité
imposée.
p our le
qui leur est
L article 4 prescrit aux A dm inistrateurs do Rassurer
chaque
�mois des diligences des receveurs par la
registres.
L ’article
5
soumet ces receveurs aux
vérification
de leurs
dispositions
des
relatives aux comptables des deniers p u b lic s ,
lois
et à leur respon
sabilité.
M a in te n a n t, comment M M . les Administrateurs pourront-ils
se dégager de tous les actes faits ici en leur nom ? Combien de
désaveux ne leur faudrait-il pas faire , quand ils en auraient le
pouvoir ?
Désavoueront - ils les notaires qui ont reçu et accepté pour
eux
l ’acte de
iatification du
ji
lloréal an
10 ? on a vu qu’ils
n ’avaient reçu cet acte qu’à l ’invitation par écrit de M. Chassaing.
Désavoueront-ils M. Chassaing ? mais il était alors chargé de
tous les recouvrem ens des hospices. C ’est un fait notoire.
Désavoueront - ils le commandement fait en leur nom le g
janvier 1806 à L ig ie r U e y n o u a r d , à la diligence du sieur R o u sa e t,
leur receveur ? On a vu que ce receveur était obligé , par l’article
1.
de 1 a n e te ci—dessus ra p p o rte , de faire faire ce commandem ent. C ’est donc un acte fait en vertu du pouvoir que la loi
lui avait
donné, en vertu d’une obligation que la loi lui
avait
imposée sous sa responsabilité. L ’ Administration ne peut
donc
le désavouer, non plus que l ’huissier qui l ’a signe.
Il
en est de même de l ’inscription prise le 19 avril 1809, et
de la requête de production à l ’ordre pour titre colloque.
M M . les Administrateurs ne peuvent désavouer aucun de
actes , d’abord parce q u ’ils
ces
étaient tous commandés par la loi
au receveur , qui devait agir à la requête de l ’Administration des
h o s p i c e s , et ensuite parce q u e , d ’après la même l o i , les A d m i
n istrate u rs , en vérifiant les registres du roceveur tous les m o is ,
ont nécessairement pris connaissance
de ses d ilig en ce s,
et les
ont approuvées-* puisqu’ils n ’y ont mis aucun obstacle.
Il
p ar
en résulte que tout ce qu’ il a fait pour eux est réputé fait
eux , et que tout concourt à prouver qu’ils ont fait
acceptation formelle de L ig ie r
Reynouard , fils et héritier de
J e a n , pour leur débiteur.
O u sent bien
que le
une
but de M M . les Administrateurs
, on
�------------------------------ -— -------k ■/ ;
-------------------------------------
me!tant de côté l ’acte de ratification de Ligier R e y n o u a rd , et
tous les actes p ostérieurs, pour s^en tenir à l’ancien titre du 2g
inai 1762 , serait de demander la séparation des patrimoines ,
pour laquelle il n ’est pas nécessaire d ’avoir une inscription. Alors
les intérêts des hospices seraient à couvert , la négligence des
préposés qui
ont inscrit trop tard serait réparée , et le sieur
A rragonès-Laval payerait leur propre faute. Heureusement pour
lui que la loi le met à l’abri d’une pareille injustice; car enfin,
ce n’est pas à lui à réparer un préjudice qui n’ est pas de son fait.
Il
ne faut pas même croire qu’on puisse restituer les hospices
contre tous ces actes , quoique les conséquences en soient fâcheuses
pour eux.
L e s droits des tiers , une fois acquis valablement, ne peuvent plus
recevoir d ’atteinte. L a législation consacre partout cette m axim e,
particulièrement
en matière d’hypothèque et d’inscription , où
les restitutions opéreraient un bouleversement
général parmi les
créanciers.
C ’est dans cet esprit que le code Napoléon refuse la restitu
tion , même aux
m in e u rs, aux in terd its, aux femmes m ariées,
contre le défaut d’acceptation ou de transcription des donations ,
sauf leur recours contre leurs tuteurs ou maris (art. g . ).
C ’est ainsi que les mineurs et les interdits n ’ont de recours que
42
contre leurs tuteurs, pour la perte qu’ils épro u ven t, lorsque la
négligence de leurs tuteurs a laissé frapper contre eux les pres
criptions particulières énoncées dans la section
liv.
5
4
du tit. 2 0 ,
( art. 2278. ).
C ’est aussi dans le même esprit
que l’art. 22 de la loi du 11
brumaire an 7 » rendait solidairement responsables les
subrogés
t u te u rs , et les nominateurs des tuteurs et curateurs , du préju
dice qu’auraient
eprou\e les mineurs par le défaut d ’inscription
en tems utile sur
ces mêmes tuteurs
et curateurs ,
et que la
nieme lesponsabilité était établie contre les p è r e , mère et tuteur
des époux m ineurs, pour le défaut ou retard des inscriptions de
leurs conventions el droits matrimoniaux.
C ’est enlin
ce qui a fait juger par la cour de T r ê v e s , le 19 g er.
�minai an 11 , et ensuite par la cour de cassation , le 7 germinal
an 12 , que les mineurs ne pouvaient être restitués
contre la
tarclivelè de l’inscription , quoiqu’elle leur fît perdre des créances
considérables, même privilégiées.
Dans l’état des productions à l’o r d r e , il faut absolument recon
naître que
les hospices doivent être
colloqués avec
les autres
créanciers de Ligier Reynouard , et au seul rang que leur donne
la date de leur inscription.
4
On ne sait trop ce qu’ on a voulu dire dans leur requête de
production , en demandant que p a r p riv ilèg e conservé p a r leu r
in scrip tion , ils soient colloqués les prem iers. D e quel privilège
entendait-on parler ? o u e st donc ce privilège ? plus on relit cette
requête,moins on peut c o m p r e n d r e les conclusions qui la terminent.
'
O u y expose qu’ il s’a git de d istrib u er le p r ix de la ven te des dom aines
adjugés
au
sieu r
■Reynouard;
L a v a l , p ro v e n a n t de
la succession de d é fu n t L ig ie r
que le» droits des hospices résu lten t d ’un contrat de ven te
du 29 mai 176a , ratifié le 11 Jlo réa l a n 10, p a r L ig ier R e y n o u a r d , q u i a
consenti que l ’ancien contrat f u t exécutoire contre lu i , com m e il Cé ta it contr*
son père ; qu’en v e rtu de ces actes , les liosptces ont pris inscription le ig
a v r il 1809 , su r les biens de Jean et L ig ie r R eyn ou ard , père et fils.
Dans cet exposé , il n ’y a rien qui établisse un privilège en
faveur des hospices , ni qui puisse déterminer la justice à les
colloquer les premiers.
L a confusion des biens de Jean et de L igier R e y n o u a r d , père
et fils , ayant été consacrée par l’acceptation de ce dernier pour
débiteur, il est indifférent que l’inscription ait énoncé les biens de
l ’un et de l'autre. Nulle division ne peut plus s ’en faiie , et la date
de l’ inscription est la seule chose à consulter. Il n ’existe en faveur
des hospices aucun p rivilège; car il y a une grande différence
entre un simple droit d ’hypothèque et un privilège ; l ’ancien titre
de
1762
ne donnait même aux dames hospitalières aucun p ri
vilège. Dans cet acte , le sieur Bosgros , vendeur , avait délégué
à ces dames une somme de
son
acquereur. P a r cette
5 ,000 fr. à prendre sur Jean Reynouard ,
délégation acceptée } elles devenaient
créancières de Jean R e y n o u a r d , mais non creancieres privilégiées.
U aurait fallu pour cela que le vendeur concédât tous ses droits
Jt privilèges à ces d a m e s, par une stipulation iurmellc.
�-------------------------------------- Ç— J
i
A u surplus , les hospices n’en seraient pas p lus avancés. L ’art.
39 de la loi
du 11 brumaire an 7 , porte que « les hypothèques qui
» n ’auraient pas été inscrites avant l’expiration des trois m o is ,
n ’auront effet
qu’à com pter du jour
de l ’inscription qui en.
» serait requise postérieurement. Dans le même c a s , les privi» lèges dégénéreront en simple
hypothèque , et n ’auront rang
» que du jour de leur inscription ».
Aucune inscription valable n’ayant été prise dans ce délai, il est
clair que les hospices n’ont de privilège sous aucun ra p p o rt, mais
une simple hypothèque,dont le rang date du jour de l’inscription.
Nous terminerons cette discussion par observer qu’il est vrai
que le sieur A rragonès-Laval a revendu les domaines à lui adjugés;
qu’il a fait un bénéfice de 10,000 francs sur le p rix qu’il les a
achetés ; que si cette somme eût pu l ’indemniser de la p erle dont
il est menacé sur sa c r é a n c e , il aurait laissé passer la colloca
tion des hospices , quoiqu’indûment faite ; mais ce bénéfice ne
peut pas même suffire pour couvrir les
l ’expropriation , et la somme de
56oo
charges et les frais de
francs qu’il a été dans le
cas de payer à l’abbé R eyn ou ard , pour faire cesser la demande
en partage qu’il avait f o r m ée , et qui entravait la poursuite de la
saisie-im m o b i l ia i r e , som m e dont 0n lui a refu sé la collocation
à l’o r d r e , parce que la créance de cet abbé R eynou ard n’était
pas inscrite. L e sieur Laval , en passant à l’ordre avant les h os
p ic e s , é p r o u v e ra toujours une perte assez f orte sur sa créance;
et pour que personne n ’en doute , il offre à M M . les A dm inis
trateurs de subroger
les hospices à son bénéfice, s’ils veulent
lui payer sa c r é a n c e , ses frais et la somme qu’il a payée à l’abbé
R eynouard. Cette offre convaincra la justice de la loyauté de ses
procédés , comme elle doit être convaincue de la bonté des moyens
de sa cause. C ertat de dam no v ita ndo et non d e lucro captando.
S ig n é A R R A G O N È S - L A V A L .
C.
L . R O U S S E A U , ancien avocat.
N O Y E R - B R A C H E T , avoue.
A C L E R M O N T-F E R R A N D
Chez J. V E Y SSE T , Imprim eur-Libraire, rue de la T reille
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Arragonès-Laval, Charles-Marguerite. 1811?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Rousseau
Noyer-Brachet
Subject
The topic of the resource
créances
séparation de biens
hospices
biens nationaux
bienfaisance
responsabilité des administrateurs
novation
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur Charles-Marguerite Arragonès-Laval, propriétaire, habitant à Clermont-Ferrand, demandeur ; contre MM. les Administrateurs des Hospices de la même ville, défendeurs. Questions. 1°. La séparation des patrimoines peut-elle être faire d'office par le juge commissaire à l'ordre, ou doit-elle être expressément demandée par le créancier ? 2°. La séparation des patrimoines peut-elle être accordée au créancier qui a accepté l'héritier du défunt pour débiteur ? 3°. Les notaires recevant l'acte de ratification ou titre nouvel d'une créance, peuvent-ils en même temps l'accepter pour le créancier absent, et celui-ci n'est-il pas réputé l'avoir accepté lui-même en prenant une inscription en vertu de cet acte, en faisant notifier un commandement au débiteur, et en requérant sa collocation, toujours en vertu de cet acte ? Les Administrateurs auraient-ils excédé leurs pouvoirs en faisant une pareille acceptation ?
note manuscrite : « 24 août 1812, 1ére chambre, arrêt. Voir journal des audiences, 1812, p. 361. »
Table Godemel : Ratification : 5. les notaires recevant l’acte de ratification ou titre nouvel d’une créance, peuvent-ils en même temps l’accepter pour le créancier absent, et celui-ci n’est-il pas réputé l’avoir accepté lui-même en prenant une inscription en vertu de cet acte ? les administrateurs auraient-ils excédé leur pouvoir en faisant une pareille acceptation ? y a-t-il en ce cas novation ? Séparation de patrimoine : 1. la séparation des patrimoines peut-elle être faite d’office par le juge commissaire à l’ordre, ou doit-elle être expressément demandée par le créancier ? 2. peut-elle être accordée au créancier qui a accepté l’héritier du défunt pour créancier débiteur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1811
1762-1811
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2117
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2118
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53413/BCU_Factums_G2117.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
biens nationaux
Créances
hospices
novation
responsabilité des administrateurs
séparation de biens
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53405/BCU_Factums_G2109.pdf
4ca543d361f47305e9ffcb90857b1f64
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Text
COURTE RÉPONSE
A U X D E R N IE R S M O T S
du
sieur
GENEIX.
LE sieur Besseyre n’écrira plus pour raisonner, moins encore
pour abuser de la permission de répondre ; il n’a d ’autre objet
que de rappeler à la Cour un de ses arrêts, et de démentir une
assertion téméraire.
Il n’avoit pas davantage pour but de raisonner, de discuter,
dans un écrit qui n’étoit qu’un résumé de la cause, et où on ne
veut voir que des redites frivoles.
Aussi le sieur Geneix s’écrie-t-il avec une sorte de satisfac
tion , qu’on a passé sur la question principale comme sur les
charbons arden s , et qu’on s’est borné à soutenir que la trans
cription étoit nulle ; d’où il conclut que la vente elle-m êm e
seroit n u lle , que Besseyre n’auroit pas de titre , et qu’il seroit
fort heureux de ne payer que 10,000 francs. Voilà bien certai
nement de la puérilité.
Besseyre a examiné le cas où la transcription seroit faite dans
un autre bureau que celui de la situation des biens ; supposition
où conduit nécessairement le système du sieur Geneix.
Il a dit que ; dans ce c a s , la transcription seroit sans effet
vis-à-vis les tiers qui contracteroient ensuite avec le vendeur;
et il a dit une vérité constante, fort étrangère à toute question
de n u llité, et surtout fort exempte de ridicule.
Il a dit que tout le système du sieur Geneix et de l’art. 2106
du Code étant que la transcription vaut inscription, elle ne
�pourroit, dans son systèm e, avoir cet effet qu’autant qu’elle
seroit régulière , qu’elle seroit faite au bureau de la situation,
qu’elle désigneroit cette situation sans équivoque , etc. Voilà ,
sous le Code, toutes les conséquences qu’auroit la transcription
vis-à-vis ceu x qui auroient contracté 'postérieurement avec le
vendeur ; mais ces conséquences n’existent même pas sous la
loi de brumaire an 7 , qui ne donne pas cet effet à la transcrip
tion sans le secours de l’inscription.
Q u ’importe la situation, dit-on encore? Un arrêt de la Cour
impériale d’Aix a décidé qu’elle n’est pas toujours indispensable.
E t comment le seroit-elle ? L ’erreur est si innocente ! elle ne
nuisit à personne.
C ’est ici que s’applique parfaitement un arrêt de la première
chambre de la C o u r , rapporté au Journal de 18x1, page 341 >
et qui vaudra bien pour elle un arrêt de la Cour d’Aix.
L e 5 juin 1809, la veuve D evèze consent une obligation de
5,700 francs à Pierre Julhe ; elle hypothèque un champ situé
a u x appartenances et tellem ent des Tuiles : l’héritage est
confiné vaguem ent, sans indication de la commune.
Le 8 du même m o is, inscription sur cet héritage situé au x
appartenances de M a s sia c , terroir des Tuiles.
Les 10 et 12 du même m ois, deux autres obligations à D elbet
et Mathias; elle hypothèque le même champ situé a u x appar
tenances de M assiac , terroir des Tuiles : elle leur déclare en
m êm e temps que ce champ est déjà hypothéqué à Pierre Julhe
pour 5,700 fra n cs.
Un ordre étant ouvert, Delbet et Mathias contestent l’ins
cription de Julhe. On leur oppose non-seulem ent que l’erreur
est innocente et ne leur a pas n u i, mais que leur titre même
leur a fait connoltre l’hypothèque, et qu’ils sont de mauvaise
f o i , puisqu’ils doivent en respecter les énonciations.
Arrêt sur les conclusions de M. Touttée. La Cour juge que
l’inscription n’est pas valable, parce qu’on n’y trouve point la
situ ation , que quoique D elbet et M athias aient eu connois-,
�(3)
sartce de thypothèque u /7s, ne Vont point approuvée, et qu’ils
ont .conservé le droit de la critiquer en tout état de cause.
Par quel lacté Besseyre'a-t-il reconnu la créance' et .l’ins
cription de Geneix? seroit-ce pour avoir, au mépris de son
titre et de ses actes prétendus conservatoires, payé à son ven-r
deur la totalité du prix?,,,
•i
On ne fait point grâce au sieur Besseyre, même sur ce point
de fait; le sieur Geneix se perm et, sur de prétendus rapports,
d’attester que le sieur Besseyre a retenu ces 10,000 fran cs, et
qu’ils sont entre les mains d’un banquier de Glermont; ne veut-il
pas m êm e, pour donner plus de crédit;à son assertion, insinuer
que c ’est par une louable .discrétion qu’il avoit jusqu’à présent
gardé le silence 2 ;
v:
Avant que d’avancer effrontém ent un fait aussi in ju rieu x,
il falloit au moins lui donner un air de vraisemblance.
Quelle apparence que le sieur B esseyre, connoissant le droit
de G eneix, n’ait voulu donner ni à lu i, ni à son vendeur cette
somme de 10,000 francs , qu’il ait préféré l’exposer dans une
banque sans aucun profit pour lui-m ém e, et avec la certitude
de la devoir toujours à l ’un ou à l’autre ? est - ce qu’on iroit
jusqu’à supposer qu’il est convenu avec Guillemin de partager
le profit de cette supercherie ? On ose se flatter que le sieur
Geneix ne poussera pas jusque-là ses audacieuses calomnies.
Le sieur Besseyre ne craint pas l’examen de sa probité ; il n’est
ni préteur ni agioteur : il avoit, suivant l’a cte , acheté sa pro
priété 40,000 francs; elle lui a coûté 10,000 francs de plus; il
les a payés en totalité, avec le prix principal de la vente : voilà
la vérité des faits. Il savoit que quand on a acheté on paye, et
il a été fort exact à remplir cette obligation natu relle, parce
qu’il ignoroit que certaines formalités légales pouvoient rendre
dangereux son empressement à se libérer entre les mains du
vendeur.
11 est donc certain , autant que possible , que le sieur Besseyre
ne connoissoit pas la créance de G e n e ix , sans quoi il eût été
�(4)
.
de son intérêt de l’acquitter, plutôt que de payer à Guillem in
10,000 francs de trop, ou de les mettre chez un banquier. La
remise des titres n’empécheroit pas cette vérité de fait ; mais
le vendeur n’a remis que les titres qui étoien t e n son pouvoir;
et remarquons que la vente faite à Besseyre n’est pas la pre
m ière qui indique la situation à Chamalière : la précédente le
portoit aussi.
Il est certain que l’inscription est nulle intrinsèquement.
Et il ne l’est pas moins aux yeux du sieur B esseyre, que la
transcription n’en tenoit pas lieu sous la loi de brumaire an 7 ,
et q u e , dans l’espèce surtout, elle ne peut lui préjudicier.
Sans vouloir discuter de nouveau , le sieur Besseyre supplie la
Cour de porter son attention sur ses mémoires et sa consultation,
même sur le résumé auquel on s’est cru obligé de répondre,
malgré ses redites et sa frivolité.
M e. V I S S A C , avocat.
♦
Me. G O U R B E Y R E , avoué.
A R IO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la C our im périale, et libraire,
rue des T a u les, maison L a n d r io t. — Juillet 1 8 13.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Besseyre. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Courte réponse aux derniers mots du sieur Geneix.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53405/BCU_Factums_G2109.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
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6c8ef25daf2a968af5dbdbdec524365f
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Text
ENCORE QUELQUES MOTS
POUR
,
. . .
*
Le sieur G E N E I X , intimé ;
CO NTRE
7
Le sieur B E S S E Y R E , appelant.
Lo
rsq u e
le
résumé du sieur Besseyre m ’est tombé d a n s le s
m ain s, et que j ’ai vu au bas la signature d ’un avocat distingué,
j ’ ai cru y trouver des m oyens solides à com battre ; je l’ai lu
avec avid ité, et je n’y ai trouvé que des redites frivoles.
Il a essayé d'abord de donner le change sur le véritable état de
la question ; nous l ’y ramènerons.
L a question n ’est pas uniquem ent, ni même principalement,
de savo ir, com m e il l e d it, si l’inscription d ’ office, prise sur la
transcription de la revente que je fis de la maison de plaisance des
R oches-du-Seminaire, le24
prairial an 1 o , à D e b en s , qui a
revendu à G u illem in , et celui-ci à B e sse y re , a frappé la trans
cription de la troisième revente faite à ce dernier acquéreur,
e n l’an 1 3 : elle est principalement de savoir si cette inscription
d'office étoit nécessaire pour conserver mon privilège de premier
1
�( 2)
vendeur. Je soutiens qu’elle étoit surabondante t et que la trans
cription de la vente par moi faite au sieur D ebens, sous le régime
de la loi du 1 1 brum aire an 7 , suffisoit seule, et indépendam
ment de toute inscription , pour conserver mon privilège de pre
m ier ven deur, sous ce régim e, comme elle suffit aujourd’hui
sous le régime du Code N apoléon, d ’après l ’article 2 10 8 de ce
Code, purement interprétatif de l’article 29 de la loi de brumaire
an 7 ; et je crois ce point de droit démontré jusqu’à un tel degré
d ’évidence, aux pages 7 et suivantes, jusqu’à la page 16 de la
consultation im prim ée, signée des jurisconsultes B ergier, D artis
et Beille;B ergier; et dans celle du jurisconsulte B o irot, pages 12
et i 3 , que l ’opinion contraire ne peut plus trouver un seul
partisan.
A ussi le sieur Besseyre a-t-il passé sur celte question principale
et seule d écisive,
comme sur les charbons ardens. Lorsqu ’ il
hasarde quelques mots de contradiction, aux pages 7 et 8 , il
ne raisonne pas , il ne discute p a s, il redit seulement de vaines
frivolités déjà détruites sans retour.
Son em barras est tel qu’à la page g , il ne voit d’ autre expédient
que de braver le rid icu le, en soutenant la transcription du 5 o
prairial an 10 nulle, parce qu’elle fu t , comme le vouloit la loi,1
une copie fidèle du contrat de vente du 2 4 , qui contenoit une
indication erronnée sur la situation de l’immeuble vendu. Il n V
pas vu que cette erreur de situation ne pourroit pas vicier la trans
cription, qui étoit alors le complément de la vente ( 1 ) , sans
•vicier aussi la vente. O r, si la vente que je fis à Debens le 2/f prai
( 1 ) A rlic lc 2G do la loi du 1 1 bru m aire an 7.
�13)
(3)
rial ëtoit nulle, les reventes faites par Debens à G u ille m in , et
par Guillemin à B esseyre, sercient nulles aussi, parce qu'elles
n ’émaneroient pas de ■véritables propriétaires. Quel titre auroit
alors le sieur B esseyre, acquéreur de la chose d ’autrui, pour la
conserver sans payer au légitime propriétaire le reliquat du pre -*1
m ier prix qui lui reste d û ? A u lieu de résister au payem ent de ce
reliq u at, ne doit-il donc pas se féliciter, au con traire, d'en être
quitte pour si peu de chose ( i ) ?
1
A près c e la , quand je passerois au sieur Besseyre son rigorisme
pointilleux sur les défectuosités d ’une inscription d ’office, superflue
pour la conservation de mon privilège, il n 'y gagneroit rien.
Néanmoins je ne dois pas le lui passer : car ce qui a été dit
dans les précédens mémoires , principalement dans les deux
derniers, pour dém ontrer que l’erreur involontaire qui se glissa
dans la vente du 24 prairial an 1 0 , transcrite le 3 o, et dans
l ’inscription
d’office qui l ’ acco m p agn a , sur la situation de la
maison de plaisance des Pioches-du-Séminaire , dont il s’agit, ne
vicie point cet acte conservatoire, parce qu’ elle fut innocente et ne
nuisit à personne, reste dans toute sa fo rce , et en reçoit même
une nouvelle de la dissertation insérée, sur cette m atière, dans le
dernier cahier du journal de S ire y , 2e partie, page 1 7 7 , et de
1 arrêt de la Cour impériale d ’ A i x , qui est à la su ite , page 18 7 .
( 0 11 doit d ’autant m oins y ré s is te r, q u e , s’il fau t en cro ire des rap p o rts de
personnes dignes d’être c ru e s , lo sieu r B essey re, lors do son acq u isitio n , retint
en scs m ain s, du consentem ent de G u ille m in , son ve n d eu r, les 10,00 0 francs do
capital qui m ’étoient restés d û s , et q u ’il mo refuse m aintenant : on ajo u te mémo
lu e lu somme est encoro on d épôt entre les m ains d'un banquier de C io rm o n t,
q u o n p ou rroit n o m m er, au b e so in , p o u r ôtro versée en m es m ain s, au ssitô t
que la C o u r aura confirm é le jugem ent de C lerm ont.
�!
(4)
Cet arrêt a décidé, en e ffe t , « que l'on ne peut pas dire que l ’indi» cation de la com mune où est situé l ’immeuble frappé d'inscrip» tion , soit toujours indispensable ; et qu ’il faut juger autrem ent,
» toutes les fois que l’indication faite sans ce seco u rs, paroitra
» cependant satisfaisante, et: non susceptible de faire naitre des
« erreurs sur l’identité de l'immeuble » , comme dans l ’espèce ,
où il étoit de toute impossibilité que le sieur Besseyre se méprit
sur l’application de l’inscription d' office du 30 prairial an 1 0 , aux
Roches-du-Sém inaire qu’il achetoit, en 3 e ou 4 * m ain , du sieur
G u illem in , puisqu’il lui rem it tous les titres de cette propriété.
G E N E IX .
A
C L E R M O N T , de l’imprimerie de
L
a n d r io t
libraire , grande rue St.-Genès.
, imprimeur-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix. 1813?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Encore quelques mots pour le sieur Geneix, intimé ; contre le sieur Besseyre, appelant.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2108
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53404/BCU_Factums_G2108.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53403/BCU_Factums_G2107.pdf
a8a900dd39f98ff7948f43f978aae65a
PDF Text
Text
lo t
P R É C I S .
l
I
XOJ
�PRECIS
<. ' *r •
EN R É P O N S E ,
! r*f
POUR
Le sieur B l a i s e G EN E IX , propriétaire, habi
tant de la ville de Clermont intimé;
c o n t r e
L e sieur J o s e p h B E S S E Y R E , propriétaire
habitant de la même ville , appelant d 'un
jugement rendu au tribunal civil de Cler
mont, le 8 juillet 1 8 1 2 .
■
I
LE sieur Geneîx n’a pas reconnu , dans le mémoire
de l a
' ppelant, la cause qu’il avoit plaidée en première
instance ; mais il y trouve de fausses assertions qu’il,
A
�¿y A
^ )
réduira à leur juste va le u r, des faits inexacts qu’il doit
rectifier, une confusion d’idées et de principes qui n’ont
rien de commun avec la question, quelques réticences,
et une oiiiissiôn importante qu’il faudra relever.
L ’intimé étoit loin de prévoir que le sieur Besseyre
auroit la prétention de rendre sa défense publique; cet
appareil est ordinairement réservé pour les causes d’uu
intérêt majeur, qui exigent de longs détails, ou qui
présentent des questions ardues.
I c i , rien de -plus-simple. L e sieur Geneix a vendu sa
propriété ; il* im reste <lù Sur ie prrx une somme de
10,000 francs en principal , et plusieui's années d’intérêts.
Son acquéreur a fait transcrire; le conservateur a fait
une inscription d'oiïice, au profit du vendeur, pour la
partie idü prix ¡dèfiftl il -étoit créancier.
;
Cette propriété a passë isudoessivement ein tplusieurs
mains; l’appelant en est actuellement détenteur. Le ven
deur originaire suit son immeruble entre les mains de
celui qui le possède; il réclame du sieur Besseyre, par
la force ‘de son privilégè, le payement de ce qui lui
veste dû en principal qt intérêts.
C o m m e n t concevoir qu’une demande de cette nature
puisse faire la matière d’ un procès?'Que le sieur Besseyre
soit péniblement afl’e cté-d’ime pareille atteinte; il a dû
la p ré v o ir, dès qu’il est porteur de tous les titres qui
constituent la créance* du sieur Geneix. Aussi a-t-il pris
le seul parti qui pût lui con venir, celui d’exercer son
recours contre ses vendeurs ; recours qu’il s’est fait adjugeripar le jugement dont est appel,
i 11 s’agit )donc d’examiner maintenant bî le sienr Bes-
�(3 )
seyre <ftst de bonne foi dans sa prétention ; o’est ce qu’on
aura bientôt la facilité d’apprécier, lorsqu’on connoîtra
plus particulièrement les faits et les circonstances qui
ont donné lieu à la contestation.
F A I T S .
>:
•
•
,
L e i i février 17 9 1, les administrateurs du. district de
Clermont adjugèrent au sieur M arlet, négociant a Clexm ont,'non deux propriétés, comme il plaît à.l’appelant
<3e le d ire , mais le bien des R oches, provenant du grand
séminaire de Clermont. On lit dans leijugement dont est
appel, qu’il est déclaré dans le procès verbal que ce bieo
est situé dans les dépendances de Clermont.
L e 17 du même mois , le sieur Marlet subrogea le
sieur G en eix, sans aucune garantie, à une partie de l’ad
judication qui lui avoit été faite du bien des R o ch es,
situé dans les dépendances de cette ville de Clerm ont,
appartenant ci-dc\>ant à M M . du grand séminaire do
cette ville.
« Ladite partie, à laquelle le sieur Geneix demeure
« subrogé, consiste en la m aison, bâtimens, etc. » Suit,
la désignation des héritages qui y sont également compris.
Le prix de l’adjudication est de 2 ^ 56 q francs.
Cette propriété est avantageusement située ; le sieur
Geneix y lit d’assez grandes réparations; il eut même
un démêlé avec la mairie de Clennont, à l’occasion des
eaux. Le grand canal qui conduit les eaux à Clermont
traverse cette propriété; et il se trouve un aquéduc, fait
A a
�( 4 )
dé main d’hom m e, par lequelMe séminaire prenoît le
trop plein du canal pour son usage.
L e sieur Geneix vouloit être maintenu dans ce droit;
et il est vrai qu’il expose que les Roches sont situées
dans la commune de Chamalières ,* mais on voit de
suite le motif : Chamalières étoit en pays de coutume,
où les servitudes s’acquéroient par trente ans de jouis
sance; le sieur Geneix n’avoit d’autre titre que sa pos
session ; en droit écrit elle eût été inutile : il avoit donc
besoin d’argumenter de la <coutume.
\
;
• Cette démarche, ou si' on veut cette déclaration,
tout indifférente qu’elle est dans la cause, a été relevée
•avec soin par le sieur Besseyre. Il observe aussi que le
sieur Geneix payoit l’impôt à Chamalières, ce qui n’est
pas plus déterminant; parce qu’il peut très-bien se faire "
qu’à l’époque de l’adjudication, les Roches fussent dans
les dépendances de Clermont, et qii’ensuite, par une
nouvelle division du territoire, pour l’assiette de l’im
p ô t, les Roches aient été comprises à,Chamalières, pour
raison de ce.
Cela même est d’autant plus vraisemblable, que la
situation des Roches - Galoubie , limitrophes de celles
du séminaire, a été vérifiée lors d’un procès qui s’éleva
entre la veuve Quayïon et le sieur Mallet de Lavédrine.
Cette situation pouvoit faire une très-grande diffé
rence, relativement au testament du sieur Quayron , qui
avoit institué sa femme son héritière universelle. Si les
Roches eussent été en coutume, l’institution auroit été
réduite au quart. E t il fut constaté qu’à l’exception
�C5 )
d’une très-petite partie basse, toute la partie en côte étoit
dans les dépendances de Clermont.
Mais pourquoi s’attacher à ces détails minutieux ,
lorsque déjà la situation étoit indiquée, comme dépen
dances de Clermont, par deux actes authentiques.
L e 24 prairial an 10, le sieur Geneix subrogea à son
tour le sieur Debens ¿1 son adjudication ; et comme il
remettoit les deux titres précédens, il dut s’y conformer,
et déclara encore que cette propriété étoit située dans
les dépendances de Clermont.
Personne n’ignore à Clermont que Debens n’étoit pas
le véritable acquéreur; il n’avoit aucuns moyens pour
acheter : c’étoit un jeune militaire sans fortune. L e gé
néral Joba, son vitric, cchetoit et payoit sous le nom
du fils du premier lit de sa femme. Cette circonstance
a donné lieu à un grand procès entre le général Joba
et son beau-fils; procès qui a été terminé, par arrêt de
la C o u r, en faveur du général.
Quoi qu’il en so it, la subrogation est faite à Debens
moyennant 36,697 francs 5o centimes. L e contrat porte
quittance de 26,697 : restoit du 10,000 francs, stipulés
payables dans quinze mois, sans intérêts jusqu’à ce, mais
avec l’intérêt à cinq pour cent, sans retenue, après le
terme.
Le 30 prairial, six jours après la vente, le sieur Debens
fait transcrire son contrat. Le conservateur fait une ins
cription d’oflice au profit du vendeur, pour la somme
restée due; et le conservateur dut suivre, pour la situa
tion , la désignation exprimée au contrat. Cette inscrip
tion, comme on voit, n’est pas du fait du sieur Geneix;
�maïs elle a e u , comme toute autre, son effet pendant
dix ans.
L e général Joba se repentît bientôt d’avoir été géné
reux ; et tout ce qu’il put obtenir de son beau-fils, ce
fut une cession de l’usufruit de ce même bien pendant
Sa vie et celle de son épouse : mais comme il restoit en
core dû 10,000 francs à G eneix, il fut stipulé que le
prix de l’usufruit étoit de cette somme de 10,000 fr.
O n doit remarquer, comme une circonstance essen
tielle de cet acte, qui est du 21 vendémiaire an 1 1 , que
le général Joba se charge expressément de payer et
porter au sieur G e n e ix , ci-d evan t propriétaire dudit
bien , cette somme de 10,000 fr a n c s qui lui est restée
due sur le prix de sa vente, et qu e, pour la sûreté de
Ce payement, le général Joba et la dame Bâtisse, son
épouse, hypothèquent spécialement tous les biens qui
leur appartenoient à l’époque de cet acte, qui leur ont
appartenu depuis, et qui leur appartiennent, situés dans
l'arrondissement de Clermont.
L e 5 pluviôse an 1 1 , inscription de Geneix sur tous
les biens du général J o b a , conformément à ce qui étoit
exprimé dans la cession du 21 vendémiaire précédent.
L e général Joba fut bientôt obligé de partir. Sa femme
fut assez adroite pour obtenir de lui une procuration gé
nérale, pour régir, administrer, faire toutes ventes, etc.
En conséqueD ce , le sieur Debens, et la dame Bâtisse,
f e m m e «îobn , stipulant tant en son nom que comme
f o n d é e de la p ro c u ra tio n de son mari, v e n d ire n t le bien
des Roches ou sieur G uillem in, receveur de Penregis'ti'cment à Clerm ont, par acte du 8 frimaire an 13 : le
�(7 )
premier vend la propriété , la seconde vend l’usufruit
Ce bien des Roches est encore indiqué comme pro
venant du sieur Geneix. On rappelle l’adjudication, et
les subrogations précédentes; il est fait remise de tous
les titres à l’acquéreur; le contrat en fait mention : mais
il est désigné c o m m e sis dans la C om m u ne de Chamalières.
Cette vente est faite moyennant la somme de 25 ,ooo f r .,
dont 10,000 fr. pour la jouissance, et i5,ooo fr. pour la
propriété. Il est dit que 10,000 fr. ont été payés à la dame
Bâtisse, avant ces présentes, pour 1a jouissance; et les
1 5.000 fr. sont stipulés payables h Debens pour la pro
priété , savoir, 5 ,ooo fr. dans deux années et demie, et
10.000 fr. dans trois ans, avec l ’intérêt à cinq pour cent,
sans retenue.
La dame Bâtisse donne mainlevée de l’inscription prise
par elle et son mari sur Debens; l’un et l’autre ensuite*
c’est-à-dire , Debens et la clame Bâtisse, donnent aussi
mainlevée de toutes inscriptions prises à Clermont ou à
Tliiers contre Geneix. On «’en étonne : mais tout an
nonce que ce ne pouvoit être qu’une inscription conser
vatoire qu’on avoit prise contre le vendeur.
Guillemin ne conserva pas long-temps cette propriété.
Le 10 fructidor an 13» il'la revendit au sieur Besseyre3
qu’on dit originaire de Marvejols, fort ignorant de tout
ce qui se passoit dans le département du Puy-de-Dôme j
et surtout ne connoissant aucune des propriétés de la L imagne.
«On ne sait pas pourquoi le sieur Besseyre se donne
cette origine étrangère, lorsqu’il appartient à une an
cienne famille de V iv c ro ls , et qu’on l’a vu passer sa vie
�(8)
à Clermont et à R io m , où il servoit dans la maréchaussée;
par conséquent, toujours sur les grandes routes. 11 connoissoit mieux qu’un autre les propriétés adjacentes et
l’iigréinent de leur sol, qu’il avoit tout le loisir de con
sidérer.
Il achète la propriété des Roches, telle que Guillemin
l’a voit acquise de Debens, du général Joba et de sa
femme ; il se fait remettre tous les titres de propriété
qui étoient entre les mains de Guillemin : la vente faite
à ce dernier y est relatée ; et le sieur Besseyre a dû y voir
que Guillemin n’étoit pas libéré, qu’il étoit encore dé
biteur de 1 5 ,ooo francs, dont le payement ne devoit être
effectué que dans cinq ans.
Il a dù voir encore, par les autres ventes qui lui ont
été rem ises, que le sieur Geneix étoit créancier de la
somme de 10,000 francs; et il n’a rien négligé dans ces
détails, puisqu’il a dans son dossier le procès verbal
dressé à l’occasion des eaux, en l’an 9, les inscriptions du
sieur G e n e ix , tant sur Debens que sur le général Joba.
Ainsi, le sieur Besseyre n’a pas dit la vérité, lorsqu’il
a prétendu qu’il ignoroit que Geneix fût encore créan
ci er ; il n’a pas dit la vérité , lorsqu’il déclare qu’il n’avoit trouvé aucune inscription sur cette propriété.
Il est vrai que le vendeur déclare qu’elle est située
dans les dépendances de Chainalières; mais il avoit entre
ses mains tout ce qui avoit été remis par les précédens
vendeurs à Guillemin , notamment l’adjudication et la
subrogation de 1791 , ainsi que la subrogation de l’an
• j o , qui établissoit Geneix créancier de 10,000 francs,
U vente du 7 frimaire au 1 3 , qui établissoit Guillemin ’
débiteuç
�débiteur de i5,ooo francs, enfin le bordereau de l’an 10.
Cependant, malgré toutes ces instructions, il paye
40,000 francs comptant à Guillemin. Il permettra , sans
doute, de le taxer d’imprudence, si cela est certain; car
l’argent n’est pas payé à la vue des notaires. Et d’ailleurs,
qu’importe à la question? a-t-il pu payer au préjudice
des créanciers? Voilà toujours ce qu’il faudra examiner.
L e 4 frimaire an 14 , Besseyre a fait transcrire son
contrat ; mais il n’a fait aucune notification aux créanciers.
Cette transcription est postérieure à la publication du
Code Napoléon.
A u milieu de tous ces arrangemens, 'sui*vient le gé
néral Joba, que personne n’attendoit, pas même sa femme.
Il se voit, en arrivant, dépouillé de tout ce qu’il possédoit.
On a voit vendu le bien des Roches qu’il affectionnoit,
sa maison de Clerrnont qui lui étoit précieuse : en un
m o t, il se plaint de ce que sa femme et son fils ont abusé
de sa procuration , et lui ont tout vendu sans rien payer.
Il forme la demande en nullité de tous ces actes frau
duleux. Il assigne le sieur Guillemin et le sieur Besseyre,
en désistement du bien des R o ch es, au moins quant
à l’usufruit qui lui appartenoit pendant sa vie. L ’affaire
traîne en longueur; mais elle est jugée par un jugement
contradictoire de Clerrnont, du 4 juillet 1807 , qui dé
clare les ventes nulles contre Debens et sa m ère, dé
clare le jugement commun avec Guillemin et Besseyre , et
condamne ce dernier à se désister du bien des Roches,
au profit du général Joba.
Guillemin , qui avoit pris le fait et cause de Besseyre,
se tient pour ba ttu , et garde le silence. Besseyre interB
�IU
(' IO )
jette appel du jugement, aux risques et périls de son
garant. Guillemin sent le danger de sa position ; il traite
avec le général Joba , le 8 mars 1808 : celui-ci se départ
de l'effet du jugement, et coDsent que Besseyre reste
en possession.
Ce département est fuit moyennant la somme de
19,000 fr. , sur laquelle somme le général Joba en dé
lègue expressément 10,000 fr. au sieur G en eix, que Guil
lemin s’oblige de payer, en acceptant la délégation.
Il est vrai que le général Joba se réserve, quant à
la somme déléguée, toute répétition contre Debens; et
c’étoit une suite des condamnations qu’il avoit obtenues
contre son beau-fils, qui étoit tenu de lui rendre compte
des sommes touchées.
Mais il n’en est pas moins vrai que le sieur Geneix
étoit toujours créancier de cette somme de 10.000 fr.
E h ! qui auroit donc payé Geneix? Etoit-ce Debens?
D ’une part, il n’en avoit pas les moyens, et son vitric
se plaignoit de ce qu’il avoit tout dissipé, sans payer
aucune dette. D ’un autre c ô té , Debens n’en étoit pas dé
biteur, puisque, par l’acte du 21 vendémiaire an 11 ,
le général Joba s’étoit expressément chargé de payer
cette somme au sieur Geneix. Cet acte avoit été remis
à ce d ern ier, puisqu’en vertu d’icelui, et notamment
de la clause par laquelle le général Joba s’obligea la
p a y e r, le sieur Geneix avoit pris une inscription contre
lui. Etoit-ce le général Joba ? Il reconnoît bien ne pas
l ’avoir p ayé, puisque, par le traité du 8 mars 1808,
le général délègue cette somme au sieur Geneix. Etoitce Guillemiü ? Mais cela est impossible, puisque, peu
�#01
(II )
de jours après ce traité, Guillemin est tombé en dé
confiture, et a présenté un passif q u i, par son énormité,
a épouvanté ses créanciers et le public.
Com m ent, d’après ces faits , peut-on présumer que le
sieur Geneix a été payé ? et les premiers juges n’ont-ils
pas eu raison de dire que des présomptions de ce genre
ne pouvoient détruire un titre authentique ?
Le sieur Besseyre a parlé dans son mémoire d’un acte
du 7 nivôse an 1 3 , portant vente de la part de la dame
Bâtisse, à Debens, son fils, de la maison appartenant
au général Joba ; il prétend que, parmi les conditions
de cette vente, Debens étoit délégué à payer à Geneix
les 10,000 francs qui lui étoient dûs. Cet acte ne se
trouve pas dans le dossier de l’appelant; on ne le connoît pas; mais ce qu’il y a de certain , c’est que le gé
néral Joba prétendoit que Debens n’a voit rien payé;
qu’il fit prononcer la nullité de la vente; que Debens
succomba en la C ou r, sur son appel ; et que , soit lors
du jugement, soit lors de l’arrêt, il fut démontré que
Debens ne prouvoit et n’établissoit aucun payement :
il a gardé le silence depuis l’arrêt.
Mais, dit-on , Geneix aussi a gardé le silence jusqu’au
17 octobre 1810 , et c’est un capitaliste exact. Que
pouvoit faire le sieur Geneix? pouvoit-il plaider contx*e
Debens, qui est sans ressource? pouvoit-il attaquer Guillemin, lorsqu’il étoit en déconfiture, poursuivi et em
prisonné pour dettes? qu’avoit-il à craindre avec son
privilège et son inscription.
L e défaut do poursuites pendant deux ou trois ans
n’a jamais été une présomption do payem ent, encore
B a
�moins une quittance. Il a pris à cette époque une ins
cription contre les sieurs Debens et Besseyre; cette ins
cription n’indique pas la situation ; elle est faite en re
nouvellement d’une inscription du 1e1'. messidor an 10,
qui n’a jamais existé.
Eli! qu’importe l’inscription de 1810 ! elle valoit bien
la peine d’occuper, lorsqu’il en existe une très-i’égulière, du 11 mars 1812, faite en renouvellement de celle
du 30 prairial an 10; inscription qui est venue dans les
dix ans, qui conserve le privilège du sieur Geneix, et
dont le sieur Besseyre n’a pas attaqué la forme.
, On verra bientôt si la transcription du sieur Besseyre,
du 4 frimaire an 14, a effacé ce privilège. Enfin, le
26 août 1 8 1 1 , le sieur G eneix, dont la patience est
lassée, qui a été si souvent délégué pour n’être pas payé,
fait un commandement à Debens, principal débiteur,
de lui payer la somme de 10,000 francs en principal,
et de 3,958 francs pour intérêts échus. .
L e 10 septembre 1 8 11, le sieur Geneix fait dénoncer
au sieur Besseyre, tiers détenteur, ce commandement
infructueux , lui donne copie de sa ven te, de la trans
cription , de l’inscription et de son numéro, et lui fait
so m m a tio n de payer la somme de 10,000 fr. en capital,
3,958 francs pour intérêts échus, si mieux il n’aim e
déguerpir les immeubles affectés au privilège du ven
deur, et que le sieur Besseyre possède.
L e 14 décembre i 8 r i , commandement, tant à Bes
seyre qu’à Debens, pour parvenir à la saisie immobilière.
L ’appelant qui, depuis sa mise en possession du bien
des Roches, u’avoit pas eu ua instant de repos, qui a
�US
( «3 ) .
■
' .
été acteur dans le procès du général J o b a , qui avoit
tous les titres dans les mains , qui a nécessairement
connu la transcription et l’inscription d’office, qui n’a pu
ignorer la créance du sieur Geneix, puisqu’il a connu
le traité du 8 mars 1808 , qui lui assure sa propriété,
et qui contient la délégation de 10,000 francs au profit
du sieur Geneix ; l’appelant, dit-on, a l’air de se ré
veiller d’aussi loin qu' Epim énide; il s’étonne qu’on ose
troubler son sommeil, et qu’un vendeur indiscret vienne
réclamer l’eifet de son privilège entre les mains de celui
qui possède l’immeuble qui en est le gage.
L e 24 décembre 1 8 1 1 , il présente requête pour former
opposition à ce commandement, et il dénonce en même
temps ce commandement à Debens, G uillem in, et au
général Terreyre, héritier bénéficiaire du général Joba:
il les assigne tous eu recours.
On en vient à référé sur cette opposition. Ordon
nance du président, qui ordonne que les poursuites com
mencées seront continuées.
L e 19 mars 1812, nouveau commandèment, tant à
Debens qu’à Besseyre.
.
,
L e 8 juin 18 12 ,saisie immobilière du bien des Roches,
dénoncée à Besseyre.
Le 26 ju in , dénonciation . à l’appelant, des procès
verbaux d’apposition du placard.
Debens et Guillemin, défendeurs en recours, font
défaut; mais le général Terreyre fournit ses défenses,
et rapporte le traité du 8 mars 1808, passé entre Je gé
néral Joba et Guillemin, ce dernier faisant tant pour lui
que pour Besseyre, par lequel acte Joba laisse entre
/
411
�( *4 )
les mains de Guillemin la somme de 10,000 francs, pour
éteindre la créance de G en eix, à la charge par Guil~
le min de rapporter ?nainlevée de Vinscription du sieur
G en eix.
L e général Terreyre soutient que Besseyre est mal
fondé dans sa demande en garantie, et qu’il n’a pas plus
de droit que n’en auroit Guillemin lui-même.
L e 11 mars 18 12 , inscription du sieur Geneix, en
renouvellement de celle du 30 prairial an 10, par con
séquent en temps utile. Il y a deux bordereaux, l’un contre
ü e b e n s , sur le bien des Roches, situé dépendances de
C ham alières; l’autre contre la succession J o b a ,su r sa
maison, spécialement affectée au payement de la somme
de 10,000 francs , par l’acte du 21 vendémiaire an 11.
• L a cause portée à l’audience du tribunal de Clermont,
le 8 juillet 18 12 , y est intervenu le jugement que l’ap
pelant a transcrit dans son mémoire. On n’en rappellera
pas les dispositions, pour éviter des répétitions inutiles;
cependant il est nécessaire d’observer que ce jugement
pose, en troisième question, celle que vo ici: « L ’ab« sence de D ebens, au service, est-elle une cause sufk fisante pour faire surseoir à la vente sur le sieur Bes« seyre? » Et ce jugement contient une disposition qui
valoit la peine d’être écrite : E t néanmoins sursoit de
quatre mois à Cexécution du présent jugement envers
toutes tes parties.
O n ne trouve pas cette disposition dans le mémoire
de l’appelant. On ne fera pas l’injure au défenseur de
l’avoir passée sous silence à dessein ; sans doute que sa
copie est ihexacte, ou que l’omission a été involontaire;
�c
15
)
#
elle auroit cependant abrégé la discussion du dernier
chapitre ; et si quelqu’un a i se plaindre de ce sursis,
c’est sans doute l’intimé, qui n’avoit pas réclamé.
Le sieur Besseyre s’est rendu appelant de ce jugement.
Ses moyens d’appel n’ont rien de spécieux ; ils roulent
sur un misérable équivoque , et on finit par ne pas
l’entendre. Il se plaint de l’imperfection de la loi sur
les hypothèques ; elle paroît cependant fort claire, au
moins sur la question qu’il voudroit élever.
11 dit avec v é r ité , que la vente consentie par Geneix
à Debens'a eu lieu sous l’empire de la loi du n bru
maire an 7 , puisque cet acte est du 24 prairial an 10 ,
et la transcription de D ebens, du 30 du même mois.
Mais quelle différence cela peut-il faire pour la dé
cision de la cause? L ’article 29 de la loi du 11 brumaire
an 7 porte : « Lorsque le titre de mutation constate
« qu’il est dû au précédent propriétaire, ou à ses ayans»< cause, soit la totalité ou partie du p r ix , ou des presv tâtions qui en tiennent lie u , la transcription conserve
« à ceux-ci le droit de préférence sur les biens aliénés,
« à l’effet de quoi le conservateur des hypothèques fera
« inscription sur ses registres, des créances non encore
« inscrites qui en résulteraient, sans préjudice, etc. »
L ’article 2108 du Code Napoléon porte : a L e vendeur
« privilégié conserve son privilège par la transcription
« du titre qui a transféré la propriété à l’acquéreur, et
« qui constate que la totalité ou partie du prix lui est
« due, à l’effet de quoi la transcription du contrat, faite
v par l’acquéreur, vaudra inscription pour le vendeur,
« et pour le p â le u r qui lui aura fourni les deniers payés ,
�4
( 16 )
« et qui sera subrogé aux droits du vendeur parle même
« contrat.
« Sera néanmoins tenu le conservateur des hypothè« ques, sous peine de tous dommages - intérêts envers
a les tiers , de faire d’office l’inscription sur son registre,
« des créances résultant de l’acte translatif de propriété,
« tant en faveur du vendeur qu’en faveur du prêteur,
« qui pourront aussi faire faire, si elle ne l’a été, la trans« cription du contrat de vente, ¿\ l’effet d’acquérir l’ins« cription de ce qui leur est dû sur le prix. »
La première idée qui se présente, en comparant ces
deux lois, c’est qu’elles s’accordent parfaitement sur le
point principal, que la transcription du contrat vaut ins
cription pour le vendeur, et lui conserve son privilège
pour le prix resté dû sur la vente. Et lorsque le vendeur,
sous la loi du n brumaire, comme sous le Code Napo
léon , a la certitude que l’acquéreur a fait transcrire son
contrat, il n’a plus aucune précaution à prendre ; il est en
pleine sécurité pour sa créance, ou la partie du prix
qui lui est due.
On sent aussi, à moins de se refuser à l’évidence,
que l’obligation imposée au conservateur de faire ins
cription d’office , n’tist pas dans l’intérêt du vendeur,
m ais bien dans l’intérêt des tiers qui pourroient dans la
suite contracter avec l’acquéreur.
Ils doivent être avertis que cet acquéreur, q u i, au
moyen de son acquisition, peut offrir un gage suffisant,
ne présenteroit qu’un gage trompeur, si on ne savoit pas
qu’il doit encore tout ou partie de son acquisition. Il faut
çlonc donner une grande publicité à cette créance, avertir
les
�(GÎ7))
t
lit)
■les tiers de.-çe tenir'en garde; et voilà l’unique but de
•la loi, en ordonnant ^auriconseryateur de faire-une ins
cription d’office.
'
Mais de ce que la loi impose cette obligqtion au con
servateur, elle ep débarrasse nécessairement le vendeur;
elle veille pour lui; elle ne l’assujétit;ù aucuue précaur
tion; elle lui «lit au-contraire que l'acquéreur, en trans
crivant,! lui assure ses créances; en même temps elle
veut aussi que les tiers soient bieni prévenus que cet
acquéreur n’est pas quitte du prix de l a t e n t e , et qu’en
hypothéquant sa nouvelle propriété, tceux qui contracteroient'envers lui seroient primés par le privilège du
.bailleur de fonds.
Voilà comment il faut entendre sainement les deux
lois; voilà comment on doit expliquer la disposition du
Code, qui rend le conservateur responsable de-sa négligence envers les tiers.
Comment élever des doutes sur un point aussi clair,
sur des expressions aussi positives, l’inscription conserve
au vendeur? Voilà qui est positif : un effet présent, ab
solu y qui n’est subordonné à aucune condition , le devoir
imposé au conservateur, n’a rien qui concerne le ven
deur; sans quoi le vendeur auroit été lui-même obligé
de veiller à ses intérêts, et de faire une inscription,
nonobstant la transcription.
Mais le sieur Besseyre s’inquiète peu que la loi dise que
la transcription conserve le droit de préférence au ven
deur; il veut trouver une très-grande différence entre la
loi du 11 brumaire, et le Code Napoléon ; il convient que
le Code ne laisse pas de doute, puisqu!il assortit le conC
Oj {
�(ill
' ( <8 )
'sérvàteur à une grande responsabilité envers les tiers :
‘Élors il avoue q u é le ’vëndeur'n^pàs besoin de faire ins
cription. Que le conservateur soit vigilant ou négligent,
il suffit qu’il y ait'transcription. ; n* ' . - '•>' :
Il n’en est'pas de même'dte la';lôi'du n brumaire a n '<7.
Sentez-vous la forcé de ces-mois, a l'effet de qu6i?~Q uëlle
puissance?magiqüe doivetit avoir ces expressions? Elles
ne peuvent dire autre chose, sinon que la transcrip
tion ne conserve les droits du'vendeur, qu’autant que
le conservateur fait une inscription d'office* de sorte
qu’il faut tout à< la fois ti'ânscription et inscription
d’office, quoique le vendeur ne ¿oit pas tenu d’inscrire ;
et cela est si v r a i, que cette loi du n brumaire n’assujétit le conservateur à aucune responsabilité.
;
Quoi! parce que le Conservateur omettroit'l’inscrip
tion d^ofïice, on voudroit en tirer la 'conséquencetque le
vendeur a perdu son privilège lorsque le contrat a été
transcrit? Mais*alors le conservateur pouvoit donc im
punément priver le vendeur de tout droit sur le prix
de sa vente, quoique la loi veuille que ce-vendeur soit
’dans une parfaite àécürité-, lorsqu’il a la certitude que
son a c q u é r e u r a transcrit. '
■ Voilà ce qui est absolument déraisonnable : ce sys
tème monstrueux seroit subversif de toute propriété.
La loi n’a-t-elle pas satisfait-à tout, lorsqu’elle a dit que
la transcription conserve, lorsqu’elle a assujéti le con
servateur à tenir un registre public des transcriptions
des actes de mutation, qui doivent être faites en entier,
de manière que tous les' tiers puissent connoître les
charges d’une vente et le- débet de l’acquéreur.
�( 19 )
M l
. On peut sans doute, tirer un argument . puissant de^
l’article Ô2 de la même loi du n brumaire; c’est celui
qui exprime les cas où le conservateur est responsable.
Cet article dit que « les conservateurs sont respon-,
« sables du préjudice qu’occasionneroit, 1?. le défaut^
« de mention sur leurs registres, des transcriptions des
« actes de mutation , et des inscriptions requises en leurs
« bureaux.
- 0u )(
;
Dès que cet article ne s’occupe pas des inscriptions
d’office, mais rend les conservateurs responsables du dé
faut de mention des transcriptions, il n’a donc atta
ché d’importance, il n’a donné d’effet qu’aux trans
criptions, pour conserver le p rivjlége, et ne considère
rinscriptionjd’office quecomme uneformalité plusample,
qui doit donner plus de, facilité, sans cependant qu’il
y ait de nécessité absolue; parce que la transcription
de l’acte en entier., donne encoi’e plus de lumières
qu’une inscription d’office, avec d’autant plus de raison
que cette loi regardoit la transcription comme le conplément de la vente : tant qu’elle n’étoit pas transcrite
elle ne pouvoit être opposée aux tiers qui auroient
contracté avec le vendeur (. art. 26 de la loi ) , au lieu
que, sous le Code, la transcription n’opère pas la tra
dition, et n’a d’autre objet que de purger les hypothèques.
L e sieur Besseyre ajoute : Il n’est pas douteux que,
sous la loi du 11 brumaire, tous privilèges, sauf ceux
exceptés par l’article 1 1 , ne se conservent que par l’ins
cription. E xceptio Jirm at régulant,
Cela est certain, mais il faut s’entendre. Si un acqué
reur n’a pas transcrit, qu’il revende à un autre, et que
C a
�..
...
..
ce dernier i rinsfcrivey1a1o ts les créniiCT'ers du secbntl ac
quéreur paSsèroiënt ‘avant le vendeur du premier, si
celui-ci n’a pas inscrit; maisi si le premier acquéreur a
transcrit, son vendeur auroit conservé son privilège;
et si M , Merliû a d i t , si les arrêts ont jugé que le pri
vilège ne pouvoit ‘sé"conserver sans inscription1, ce n’est
jamais que lorsque l’acquéreur avoit négligé de transcrire.
O n défie l’appelant de citer un préjugé qui’ ait décidé
que le vendeur perdoit <son privilège faute d’inscription,
lo rs q u e son acquéreurfavoit' fait ti^aïiscririe son‘ contrat;
et M. Merlin lui dira tbut le contraire.1'
,!
'■
Mais jusqu’ici l’appelant a créé des monstres pour les
combattre, et raisonne toujours dans l’hypothèse que le
conservateur n’a pais fait d’inscription d’ôffice. ’ "
CependantJil en existe une, du même jour que la
transcription, et dans ce Cas tous ‘les argumens^’évanouis
sent , le traité ex prôfesso de la hiatière n’est plus que
pour notre instruction. • * t 1
* J’
‘C ’est alors que Besseyre ‘d évient plxis ingénieux. Cette
inscription d’office n'est rîèn, s’écrie-t-il; elle est irrégu
lière, erronée; elledéclare le bien des Roches situé dans
les dépendances de C lerm on t, il est situé dans celles de
Chamalières; le*sieur Geneix le sa voit depuis l’an 9 : celii
est prouvé par sa requête contre la municipalité de
Clermont.
Si le sieur Besseyre le savoit, le conservateur des hy
p o th è q u e s le savoit-il? L e district vend l’objet, comme
situé dans les dépeüdances de Clermont ; Marlet su
broge, et déclare la même situation ; Geneix vend comme
ou le lui avoit déclaré : le conservateur de-voit faire
�( 21 )
t2 ,ô
une inscription conformément au contrat; il ne pouvoit
pas la faire autrement; il eût fait un acte irrégulier, si sont
inscription n’avoit pas été exacte et conforme à la vente.
; Le conservateur ju sq u e-là a donc fait son devoir;'
le vendeur a fait le sien aussi; car, subrogeant le sieur
Debens à son contrat, sans autre garantie que de ses
faits et promesses, il a dû s’expliquer suivant la décla
ration'faite daps son -contrat.
S’il a plu dans la suite à Debens de vendre, avec
toute garantie, à Guillemin, de déclarer.la situation
du bien des Roches à Chamalières, et si Guillemin a
fdit ensuite la même déclaration à Besseyre, l’un et l’autre
n’ont pu nuire au sieur G en eix, qui n’étoit pas présent
à ces actes; et Besseyre n’a pu ignorer l’identité du biea
qui lui étoit vendu, avec .celui que Geneix ayoit cédé
à Debens, puisqu’on lui remet tous les actes qui éta
blissent l’origine de cette propriété, qu’on n’oublie pas
même la pétition de Geneix pour les eaux., et la icon-*
cession que lui en a faite la municipalité de Clerinont.
Ge n’est donc -que sur une misérable équivoque .que
se défend l’appelant; et il n’est pas de bonne foi. Il existe
au surplus une inscription d’olïice très-régulière, et qui
ne pouvoit être faite autrement, puisqu’elle est éprise
sur la vente.
Les premiers juges ont donc sagement décidé que l’ins
cription d’office désignant la situation ¿elle qu’elle est
indiquée dans le contrat même, s’il y a erreur, c’est aux
parties à se l’imputer ; et comme Debens ne p o u r r o it pas
s’en prévaloir, Besseyre, qui le représente, pe peut pas
avoir plus de droit que lui.
s
�Suivant l’appelant, ce motif fourm ille ¿Terreurs, et
n’auroit de foudement qu’autant que Debens auroit fait
une indication erronée. On ne sent pas trop cette diffé
rence; on ne voit pas comment Geneix, qui avoit acheté
ce bien déclaré dans les dépendances de Clerm ont, qui
a subrogé avec la môme indication, pourroit être vic
time de ce que Debens en a indiqué une autre, lorsqu’on
ne conteste pas 1'‘ identité de l’objet, lorsqu’on s’est fait
remettre, comme condition de la vente, tous les titres
de propriété.
Mais est-il bien vrai qu’ une erreur dans la situation
rendroit l’inscription irrégulière ? La loi veut bien que
le bordereau indique Tespèce et la situation des biens
hypothéqués ; mais il peut se glisser des erreurs sur cette
situation , au moins pour les communes environnantes.
Les nouvelles divisions du territoire, pour l’assiette de
l’impôt, ont porté de grands changemens pour cette si
tuation. 11 est à croire q u e, lors de l’adjudication, le
bien des Roches étoït dans les dépendances de Clermont;
qu’il a pu être ensuite dans celles de Chamaliqres, lors
de la matrice des rôles. Et p ou rroit-on croire qu’une
in sc rip tio n seroit nulle , parce qu’on auroit dit situé à
R io m , quoique l’immeuble fût situé à M o za c, qui n’est'
qu’ un faubourg de cette ville, comme ChamalièresTest
de Clermont, s’il y avoit une désignation suffisante pour
faire reconnoitre l’immeuble? Il n’y a pas, dans l’espèce,
deux biens de même nom : celui qui est à côté s’appelle
les Roches -G aloubie; l’autre est les Roches du Sémi
naire. Il n’y a pas à s’y tromper; et ce n’est là qu’une
misérable chicane.
�n i
( 23 )
L ’arrêt de Santon, qu’on cite, est bien différent, ainsi,
que*celui de<l’A et de I’ e . Dans celui de Santon, une
inscription étoit faite sous le nom de M arie Santon ,*
‘l’autre l’étoit sous le nom de M arie-M atthieu Santon :
le conservateur jugea que ce n’étoit pas le même indi
vidu et il pouvôit avoir raison. Dans le second, un A
o u un E peut encore laisser des doutes sur l’identité de
l’individu. Ces deux arrêts n’ont donc aucun rapport à
l’espèce.
i Suivons encore l’appelant dans ses derniers débats. Il
faut surtout lui rappeler que lors de sa transcription de
■
l’an 1 4 , l’inscription d’office étoit encore dans toute sa
vigueur; elle 11’avoit que quatre ans de date; et ce
seroit encore une grande question à examiner, que celle
de savoir s i , lorsque la loi veille aux intérêts du ven
deur , lorsqu’elle conserve son privilège par la trans
cription, qu’elle le dégage de tous s o in s, cette inscription
a besoin d’être renouvelée dans les dix ans. Mais il ne
faut pas chercher des questions oiseuses, sur une matière
aussi fertile, et encore trop peu connue, puisque l’ins
cription du 30 prairial an 10 a été renouvelée le 11
-mars 18 12, c’est-à-dire, dans les dix ans.
■ C ’est alors que le sieur Besseyre s’écrie qu’il a fait
transcrire dans l’intervalle , et que sa transcription a
purgé les hypothèques non inscrites. C’est ce qu’on appelle
juger la question par la question. Besseyre a transcrit,
mais n’a pas notifié ; il n’a donc pas purgé les hypo
thèques. Pour y parvenir , il falloit faire notifier aux
créanciers inscrits. Si Besseyre vouloit le faire aujourd h u i, i\ devroit notifier à Geneix , sauf ensuite à con
tester à l’ordre la validité de son inscription.
�( H )
Mais on croît avoir* prouvé qu’ il existoit une inscrip
tion valable; et celle en renouvellement, dont on-n’a
pas contesté la régularité, ainsi que cela est établi par
le jugement dont est appel, conserve tous les droits de
Geneix.
L ’inscription de l’an 10 conserve l’hypothèque pour
les intérêts de deux ans; celle en renouvellement com
prend tous les-intérêts échus jusqu’au jou r; c’est un
accessoire du principal, que le tiers détenteur .ne peut
refuser, dès qu’il n’a pas purgé les hypothèques qui
grèvent son acquisition.
L e sieur Besseyre reproche au sieur Geneix la rigueur
de ses poursuites; plus haut il se plaignoit que le sieur
Geneix eût attendu si long-temps, et vouloit faire naître
de ce retard une présomption de payement : il tombe
en contradiction sans s’en apercevoir.
Il dit qu’il a fait des offres du principal : il a donc
reconnu qu’il le devoit. Mais il n’a pas réalisé ses offres;
le jugement dont est appel le constate : il falloit donc
bien le poursuivre pour parvenir ali payement.
Malgré ses offres, il soutient encore, et c’est par là
qu’il termine sa défense, que les circonstances ne per
mettent pas en ce'moment la mise à exécution du titre
sur les immubles qui ont appartenu à Debens, et qu’on
poursuit de son Chef.
Ces circonstances dérivent de l’absence de Debens,
militaire en activité de service. Il cite la loi du'6 bru
maire an 5 , le décret de Sa Majesté, du 16 mars 1807.
Mais q 11’ont de commun la loi et le décret avec les
poursuites exercées contre Besseyre, qui jouit, aux
Roches, d’un doux repos?
�<î
( 25 )
.....................................
La loi ne dit-elle pas que le créancier privilégié ou
hypothécaire a le droit de suivre son gage en quelques
mains qu’ il passe? Si Debens est débiteur, B esseyre est
tiers détenteur de l’immeuble hypothéqué. Geneix peut
donc , indépendamment de ses poursuites contre Debens,
exercer son action hypothécaire contre Besseyre : l’une
est absolument indépendante de l’autre; il n’a besoin que
de prouver qu’il est créancier; o r, il rapporte un titre
authentique qui l’établit, une inscription qui le conserve.
Il a donc eu le droit de poursuivre Besseyre , malgré
l ’absence de Debens. La faveur due à un militaire qui
verse son sang pour la patrie ne se communique pas au
tiers détenteur de ses biens.
L e sieur Besseyre ne s’étoit pas vanté d’avoir obtenu,
sous un aussi vain prétexte, un sursis de quatre mois :
certes, ce sursis n’avoit aucun fondement; et le sieur
G eneix s’en plaindroit, si ce délai n’étoit déjà expiré
depuis long-temps.
Mais , plus de retard ; il faut qu’un créancier soit
enfin payé d’une dette aussi légitime; et le sieur Geneix
a droit de l’espérer de la justice de la Cour.
^ Signé G E N E I X .
M e. P A G E S , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R i o m , de l’imp. de T H IB A U D , im prim . de la C our im périale, et lib raire,
ru e des T aules, maison L andriot. — Janvier 1 8 1 3 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Blaise. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour le sieur Blaise Geneix, propriétaire, habitant de la ville de Clermont, intimé ; contre le sieur Joseph Besseyre, propriétaire, habitant de la même ville, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Clermont, le 8 juillet 1812.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2107
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53403/BCU_Factums_G2107.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53402/BCU_Factums_G2106.pdf
1a69a46c4c364a52048fe4c56237c723
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Text
RÉSUMÉ
\
Pour le sieur BE SSE YRE , appelant ;
contre le sieur G E N E I X .intimé.»
j
T o u t ce qui a été dit jusqu’à présent de part et
d’autre se réduit à une seule question purement de droit:
il faut enfin présenter cette question dans le cadre qui
lu i appartient, e t , en résumant la discussion, la d é
pouiller de tout ce qui peut lui être étranger.
L e fait consiste dans un seul mot.
Guillem in a vendu à Besseyre une propriété appelée
les R oches, située dans la commune de Chamalière. Cette
p r o p r ié té , passant en diverses m ains, avoit appartenu
au sieur G e n e ix , qui l’avoit achetée comme située dans
les appartenances de Clermont; sa vente avoit été trans
crite , et le conservateur avoit pris une inscription d’of
fice pour 10,000 francs restés dûs sur le bien des Roches,
situé à Clerm ont.
L a vente faite à Besseyre a été transcrite sans que le
sieur G eneix ait pris d’autre inscription; il a renouvelé
ensuite celle du conservateur, en 1810 et 1812 : dans la
première il n’indique pas la commune où le bien est
situé; dans celle de 1 8 1 2 , voulant rectifier l’erreu r, il
renouvelle , sur les Roches situées à Chamalière , une
inscription prise sur les Roches situées à Clermont.
1
)
�C* )
T o u te la question est de savoir si l’inscription d’office
de l ’an 10 a frappé la transcription de Besseyre; la so
lution tient à deux questions secondaires :
io. Si l’inscription frappe sur les Roches situées à
Chamalière ;
2°. Si la transcription de G eneix peut suppléer à l’ins
cription.
‘
A
L a nullité de l’inscription, considérée en elle-même,
ne peut pas être la matière d’un doute.
; L e système hypothécaire établi par la loi de brumaire
an 7 , reposoit sur deux bases essentielles, la spécialité,
la publicité. La loi créoit un ordre de choses jusqu’alors
inconnu ; elle imposoit aux créanciers l’obligation de
s’inscrire ; e t , pour prévenir toute espèce d’erreurs ou
de surprises, elle environnoit l’inscription de certaines
formalités pour la plupart substantielles. Quelques-unes,
cependant, purement accidentelles, et ne tenant pas à la
substance de l’inscription , n’étoient pas exigées aussi
strictement.
O n a d é c id é , par exemple , qu’ une erreur dans le
prénom du créancier, ou l’oubli de sa profession, n’entraînoient pas la nullité de l’iuscription , si d’ailleux*s la
personne étoit désignée de manière à ne pas s’y mé
prendre , parce que la publicité est suffisante dans ce
cas. Mais on a jugé qu’une erreur dans le nom étoit
un vice radical ; qu’ un a ou un e mal fait étoit un
m otif de nullité. O n se rappelle l’arrêt de la seconde
chambre de la C o u r, qui déclara nulle l’inscription d’un
sieur M artinet, parce que sou nom avoit été écrit M ar-
îin a t , quoique d’ailleurs l’indication de la personne con
tînt tout ce qui est exigé par la loi.
�L a Cour de cassation a ju g é , le 6 juin 1 8 1 0 , qu’ une
inscription étoit nulle, faute de l’indication du domicile
réel du créancier.
E t le 7 septembre 1807, elle avoit déclaré nulle une
inscription de 348,994 francs, quoique bien régulière
dans tous ses p o in ts, si ce n’est dans la date du titre,
qui avoit été dit du 13 septembre, au lieu du 13 no
vem bre de la même année.
O n est épouvanté de cette rigueur, au premier aperçu;
mais on l’a jugée nécessaire pour conserver la loi dans
son intégrité.
I l ne peut pas être douteux que la situation des biens
ne soit une des indications les plus essentielles à la spé
cialité. Celui qui consulte le registre des hypothèques,
avant d’acheter, d’em prunter, de traiter, en un m o t, à
quel titre que ce soit avec le propriétaire , n’a pas besoin
d’aller sur les lie u x , de savoir si les biens sont situés
sur la limite de deux com m unes, si la porte d’un enclos
donne sur le chemin qui les sépare, si l’erreur dans la
désignation est démontrée par la simple inspection des
l i e u x , etc. ; il n’a qu’une chose à consulter, c’est le re
gistre des hypothèques; il n’a qu’ un seul* point d’ap p u i,
c’est le certificat du conservateur. A v e c cette garantie,
il lui importe peu que les désignations soient vraies ou
fausses , et ni la loi ni les tribunaux ne s’inquiètent
de savoir si l ’homme qui a traité savoit ou pouvoit
savoir par d’autres données, qu’ une inscription prise sur
un immeuble situé à C le r m o n t, avoit eu pour objet
un immeuble situé à Chamalière.
Sans cela, le système hypothécaire, au lieu d’assurer
�(4 )
la validité d’un acte quelconque à celui qui traite, ne
seroit plus qu’ un chaos épouvantable qui banniroit toute
sûreté.
(
'
L e créancier à qui on donneroit la propriété pour
h y p o th è q u e , avec une fausse indication de la commune
où elle est située, exclueroit un créancier postérieur,
sous le prétexte qu’il connoissoit personnellement l’im
meuble; l’acquéreur qui voudroit faire un ordre du prix
de sa propriété, située à C h am alière, ne demanderoit
pas l’extrait des inscriptions sur celle du même n o m , située
à C lerm on t, et seroit exposé à payer deux fois, etc., etc.
C ’est donc le registre seul qui fait le titre et la loi des
parties. L ’homme qui prête, celui qui ach ète, celui qui
v e n d , y trouvent toute sûreté , s’ils se conforment à la
loi : les inconvéniens du système de G eneix seroient tels,
que le peu de prévoyance de la loi seroit déshonorant
pour elle.
L e sieur Geneix en paroît convaincu ; il est réduit à
un moyen qu’il appelle de d r o it , et qui consiste à dis
tinguer le cas où Terreur est involontaire , et sans
mauvais dessein , de celui où elle a pour objet de nuire
à autrui; ¿ q u o i il ajoute que les Roches du séminaire
sont aussi connues à Clermont que la halle au b lé, les
églises, le collège, etc. : ensorte que le sieur Besseyre,
arrivant de M a rv e jo ls, a pu et dû savoir que ce bien
des Roches n’étoit qu’à deux toises des appartenances
de Clermont.
C'est-à-dire, que pour savoir si une inscription est
nulle en la fo r m e , lorsqu’elle contient une erreur subs
tantielle, il faudra commencer par juger la qualité de
�( 5)
l ’erreur, l’intention de celui qui l’a commise, et enquêter
sur la question intentionnelle. Que le sieur Besseyre est
petit ! que ses cavillations sont puériles ! que le sieur
Geneix au contraire est gran d, qu’il e s t admirable lors
qu’il crie à la subtilité ! M ais, de bonne fo i, est-ce donc
encore la loi qui se prete à cet étrange sophisme ?
O u i, sans doute, s’écrie le sieur G eneix, c’est le lan
gage môme de la loi que je tiens ici. Q u’importe l’erreur
de nom ? N ih il fa çit error n om inis , ciwi de corpore
constat. La loi du 11 brumaire an 7 a bien dit que l’ins
cription devoit indiquer la situation des biens ; la juris
prudence , comme la raison, ont bien dit que cette for
malité étoit substantielle; mais, dans l’espèce, l’erreur
est tellement innocente, qu’ il faut mépriser cette rigou
reuse disposition, et im iter, pour une hypothèque, ce
que faisoit le législateur romain p o u r le legs d’ une chose
certaine, mais faussement désignée : ISon idcirco rniniis
çleberi.
Très-bien ; naguères on soutenoit en bon français un
principe semblable. L ’article 2136 du C o d e, disoit-on
. dans un mémoire im prim é, déclare bien stellionataire
les maris et les tuteurs qui auront consenti ou laissé,
prendre des hypothèques sur leurs im m eubles, sans dé
clarer expressément que lesdits immeublçs étoient assujétis à l’ iiypotlièque légale des femmes et des mineurs;
mais, comme ce sens apparent produiroit une injustice
évidente , gardons-nous de tomber dans ce piège. L e
grand Doinat a dit que dans ce cas il falloit chercher
non ce que dit la lo i , mais ce qu'elle veut ; nous pou
vons donc interpréter à notre guise l’article 2136.
3
�^
' ‘
{ 6 )
Ce raisonnement n’empêcha pas que le sieur Courby
ne fût déclaré stellionataire, quoique le sieur Jo u b ert,
son o n cle, au moment où il avoit contracté , sût bien
qu’ il étoit m arié, connût bien l’iiypothèque légale de sa
fe m m e , etc.
D e même i c i , fût-il prouvé que le sieur Besseyre connoissoit la véritable situation de l’im m euble, et l’erreur
de l’inscription , la loi ne seroit pas moins fo rm elle, et
l’inscription n’en seroit pas moins radicalement nulle;
elle le seroit pour un créancier , elle l’est pour un acqué
re u r, parce qu’elle l’est par la disposition de la loi, qui
ne considère ni les personnes, ni les circonstances ; qui
ne permet pas d’accomoder à l’ un ou à l’autre la vali
dité d’ une inscription, et à qui il importe fort peu qu’une
propriété soit à deux toises ou à deux lieues de la com
mune qu’on indique, si elle n’y est pas réellement située.
M a i s , qu’ai-je besoin de cette inscription , s’écrie le
sieur Geneix ! ma transcription y su p p lée, pu isq ue,
d’après la loi m êm e, elle conserve mon privilège.
C ’est ici que les efforts et les dissertations abondent,
moins pour expliquer la l o i , que pour en effacer les
termes positifs et impérieux , et pour prouver encore
par des lois romaines une proposition tirée de la loi de
brumaire an 7.
Nous l’avons déjà rem arqué, cette loi introduisit un
mode tout n ouveau; elle établit la formalité de l’ins
cription, et celle de la transcription, jusqu’alors incon
n u e s ; elle voulut tout à la fois ,
Par l’article 3 , que le privilège n'eut d'effet que par
l’inscription ;
�(7 )
' E t , par l’art. 29, que la transcription pût le conserver.
Ces deux articles paroissoient inconciliables. Ils l’eussent
été en e ffe t, si la loi ne se fût pas expliquée davantage;
ca r, rem arquons-le b ie n , pour nous préserver d’ une
erreur où est tombé le sieur G e n e ix , l’article 3 ne s’oc
cupe pas des privilèges anciens, qui sont réglés par
l ’article 39; il parle de ceux à acquérir dorénavant.
P o u r concilier les deux articles, la loi répète dans
la suite de l’article 29 les termes propres de l’article 3.
Cet article 3 venoit de dire : Les privilèges rí ont d effet
que par l’inscription.
L ’article 29 disoit au contraire : L a transcription con
serve le privilège du vendeur.
Mais immédiatement l’article ajoute : A l ’ e f f e t d e
q u o i , le conservateur fera inscription des créances
non encore inscrites. Nous voilà revenus à la disposition
de l’article 3.
D on c il faut une inscription pour le privilège du
vendeur-, comme pour tous les autres ;
D onc cela seul peut donner effet à ce privilège comme
à tous les autres \
D o n c , s’il n’y a pas d’inscription, ou que l’inscrip
tion soit n u lle , le p rivilèg e est sans effet;
D on c la seule chose qu’ait voulu la l o i , la seule pré
rogative qu’elle ait donnée, le seul mot qu’elle ait tout
u la lois dit et en ten d u, c’est que si on use du moyen
de transcription pour purger les hypothèques, le con
servateur veillera aux intérêts du vendeur, et sera tenu
de conserver ses droits sans qu’il ait besoin de s’en mêler.
Il parut suffisant au législateur de veiller de cette maniere aux intérêts du vend eur, pendant q u’il dormiroit
�(S )
lui-même ; il p o u v o it, sans être injuste, laisser à sa propre
vigilance le soin de conserver ses droits ; il put donc
tout aussi-bien mettre à ses périls le défaut d’exactitude
du conservateur; et puisque déjà il y avoit de sa faute,
il étoit juste, sans d o u te, de lui en faire supporter la
p e in e , plutôt que de la rejeter sur des tiers q u i , con
'
tractant de bonne f o i, ne pensoient pas à consulter le
registre des transcriptions.
L e Code Napoléon en a disposé autrement. Il a toutoujours exigé l’inscription même pour la conservation
du privilège; mais il a donné à la transcription des effets
plus étendus.
Il dit, en l’article 2106, que les privilèges ne produi
sent d’eifet que par l’inscription.
Mais bientôt il en excepte le ve n d e u r, qui conser
vera son privilège par la transcription , à Peffet de q u o i ,
dit l’article 2108, la transcription vaudra inscription.
. Cet article est fort clair; mais sa disposition même
devient une arme pour le sieur G en eix ; il n’est, suivant
lui, qu’explicatif de la loi du 11 brumaire an 7 , et il faut
en conclure que cette l o i , en disant toute autre chose,
n’avoit voulu dire que cela.
Cette idée, tout ingénieuse qu’elle est, seroit repoussée
p a r le simple rapprochement des textes de l’une et l’autre
l o i , considérés tels qu’ils sont; mais, si on y ajoute la
discussion du Couseil d’état, dont le sieur Geneix a fort
inutilement essayé de renverser le sens, on ne doutera
pas que les deux lois n’aient eu des volontés toutes diffé
rentes , et que l’une ait fortement étendu la disposition
de l’autre.
E n second lie u , nous plaçant même sous la disposi-
�( 9 ) ..............................
tion du C o d e , la position des parties ne changêroit pas.
En effet, tout l’effet de la transcription est de valoir
inscription ,• elle ne peut donc pas avoir plus de force
que si elle étoit une inscription véritable. O r , comme
inscription elle est frappée d’ un vice radical ; ce vice
est encore dans .la transcription : la question resteroit
donc toujours la même.
M a is, dit-on , c’est toujours une transcription, et une
transcription est toujours valable.
O u i , pour ce qu’elle est : supposons, par exem ple,
que Chamalière et Clerm ont, quoique limitrophes, soient
situés dans deux arrondissemens différens, la transcrip
tion sera sans effet.
Supposons aussi qu’un créancier qui aura une hypo
thèque légale ou judiciaire, même conventionnelle , sai
sisse l’immeuble sur le tiers détenteur; que la transcrip
tion le lui montre comme situé à Clermont ; il fera viser
son procès verbal de saisie par le greffier du juge de
paix de la commune de C lerm ont; et, d’après les articles
6 7 5 , 676 et 7 1 7 du Code de procédure, il aura fait à
grands frais une expropriation nulle, quand bien même
la propriété saisie seroit noh pas à deux toises, mais à
deux pouces du chemin qui sépare les deux communes.
E t une fausse indication dans l’inscription ou dans la
transcription seroit indifférente ! N ’insultons pas ainsi le
législateur. Lorsqu’il a ordonné une form alité, comme
essentielle à un a c te , que l’omission de cette formalité
entraîne vis-à-vis les tiers des conséquences funestes, il’
ne peut pas être que cette omission ne rende pas illu
soire et s.ins effet l’acte à la validité duquel on en avoit
attaché l’observation.
�( 1° )
On critique l’application faite par la consultation de
Paris, de l’arrêt du 17 mai 18 0 9 , parce qu’il s’agissoit
d’un privilège ancien. Mais qu’importe l’espèce particu
lière du fait ; les auteurs de la consultation l ’avoient
exposé tel qu’il est; mais il s’agit de savoir de quel prin
cipe on en faisoit dépendre la décision.
>
O r , on disoit que le privilège du vendeur n’étoit pasi
assujéti à l’inscription , parce q u ’il n'étoit pas spéciale
ment désigné dans Varticle 39.
5
E t la Cour de cassation, après avoir dit que l’art. 3 9 ,
par une dénomination g é n é r a le , comprend le privilège
des vendeurs comme les autres , ajoute immédiatement,
pour décider la question en gén éral, « que d’ailleurs le
« privilège du vendeur n ’est pas ,au nombre de ceux
« que par ses articles 11 et 12 la loi a dispensés de
« la fo r m a lité de îinscription . »
C ’est en effet ce dont on s’assure en lisant tous les
articles de la loi qui y sont relatifs. L e sieur Besseyre
les avoit cités dans son premier m ém oire, page 13 ; ils
démontrent la nécessité de l’inscription pour tous les
p rivilè g e s, même celui du vendeur ; et c’est le principe
que l’arrêt de cassation a décidé.
D on c le privilège du vendeur n’a d’effet que par
l ’inscription.
D onc la transcription n’a l’effet de le conserver que
par l’inscription d’office qui l’accompagne.
Un tiers peut toujours connoître une inscription, en
réclamant l’état de celles qui existent sur son vendeur
ou son débiteur; il ne peut pas de même connoître tou
jours une transcription.
Et encore une fois la connoissance de fuit, ou la pré-.
\
�( II
)
so'mption 'de cette connoissance, ne suffit pas. L a Cour
'n ’a-t-elle pas décidé que de deux acquéreurs, le pre'm ier qui avoit transcrit devoit avoir la préférence ,
quoique le second acquéreur connût la première vente,
qu’il eût fait faire la sienne avec précipitation, pour
déjouer le premier a cq u éreu r, et que , connoissant son
intention de faire transcrire son acte, il eût abusé de sa
confiance pour courir à toute bride au bureau de la
transcription , et y fût arrivé une heure avant lu i? L a
.Cour de cassation n’a-t-elle pasrejeté le pou rvoi? Q u’importeroit donc que le sieur Besseyre eût connu l’erreur?
< Mais de bonne f o i , qui pourroit croire que Besseyre
eût jeté 10,000 francs dans la m e r, s’il eût connu le
droit qu’avoit un tiers de les redemander? où donc eût
été son in térêt? D e deux choses l’ une; ou l’inscription
étoit valable, et alors il n’y avoit de danger que pour
l u i ; ou elle étoit n u lle , et il ne faisoit que profiter,
dans l’ordre de la lo i, de la faute d’un autre.
M ais, dit-on, quel intérêt a-t-il à contester ? il a tout
moyen de se faire payer sur la maison de Joba ou l’enclos
de Guillernin.
Mais Guillernin avoit depuis long-temps beaucoup plus
de dettes que de b ien s, lorsqu’il vendit à Besseyre.
E t quant a la maison Joba , il ne pourroit agir que
comme subrogé à G en eix ; et celui-ci, qui peut se faire
payer de cette m anière, est bien plus coupable de ne pas
s’en servir, qu’ un tiers acquéreur qui se défend de payer
10,000 francs qu’il ne doit pas, pour être réduit ¿\ une
garantie hypothécaire.
Enfin, le sieur Besseyre est sans in térêt, parce qu’il
ne pourroit pas échapper à la résiliation.
�too
(12
)
Plaisante manière d’établir la légitimité d’une action
par la menace d’une autre. Cette fanfaronnade peut-elle
changer la question ? Que le sieur Geneix ne s’épuise
pas tant à prouver d’avance que sa demande seroit recevable ; qu’il se retranche dans la cause actuelle ; qu’il
prouve qu’il a conservé son privilège. S ’il forme dans la
•
suite une autre dem ande, le sieur Besseyre se défendra;
mais certes il ne redoutera pas l’arrêt des R o ch efort,
dans lequel la question ne se présentoit pas, puisque,
nécessaires ou non , leur droit étoit conservé par des
inscriptions.
L e sieur Besseyre termine. Quoiqu’ un des défenseurs
du sieur Geneix lui dise qu’il n’a pas le sens com
mun ; qu’ un autre lui répète sans cesse qu’il est un tracassier, un ch ica n ier , un homme de mauvaise f o i ,
q u i ment à sa propre conscience , e tc , e t c ., le sieur
Besseyre ose se flatter que la C our verra dans sa con
duite une défense légitim e; dans sa cause, d e la bonne
f o i, et dans les injures qu’on lui adresse, le désespoir
d’une demande que rien ne justifie.
Signé B E S S E Y R E .
M e. V I S S A C , avocat.
Me . G O U R B E Y R E , avoué.
A R IO M , de l’imp. de THIBAU D , Imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT — Juin 1813.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Besseyre. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
pays de droit coutumier
Description
An account of the resource
Titre complet : Résumé pour le sieur Besseyre, appelant ; contre le sieur Geneix, intimé.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2106
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2107
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53402/BCU_Factums_G2106.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
pays de droit coutumier
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53401/BCU_Factums_G2105.pdf
4ec2e3b7752420b47cdb80f35a91e498
PDF Text
Text
CONSULTATION.
J E S O U S S I G N E , qui a vu et examiné le jugement rendu
au tribunal d’arrondissement de Clerm ont le 8 juillet 1812, entre
le sieur Geneix et le sieur Besseyre, qui a maintenu le pri
vilège et l’hypoth èque du sieur Geneix sur le bien national des
Roches, venu du Séminaire de C lerm on t, acquis par le sieur
Besseyre ;
L ’appel de ce jugement par le sieur Besseyre, à la Cour
impériale
L e précis imprime par le sieur Besseyre, sur cet appel
L e précis en réponse du sieur Geneix ;
Les notes contenant une série d’arrets, que le sieur Besseyre
prétend favorables à sa cause :
qu’il a été bien jugé par ce jugem ent, et qu’il ne
peut manquer d’être confirmé par la Cour impériale.
E
stime
Ce procès est né d’une erreur de fa it, mais d’une erreur
insignifiante et sans objet
Il éto
i
simple dans son principe on est parvenu à le comA
�* ' 7i\
'•<
( 2 )
pliquer eu multipliant les malentendus sur les faits, et en se
livrant dans le droit aux discussions les plus abstraites.
Il est essentiel de le ramener à sa simplicité primitive.
Il appartenoit au grand Séminaire de Glermont un bien
appelé les Roclies-du - Séminaire, qui n’étoit éloigné que de
quelques centaines de toises de la place de Jaude.
Cette maison de campagne étoit, pendant l’hiver, un but de
promenade pour le grand Séminaire; et pendant la belle saison,
les Supérieurs et les Elèves y passoient deux jours par semaine.
Ce bien a été vendu nationalement, comme tous les autres
biens du clergé.
Il a été adjugé au sieur M arlet par les Administrateurs du
district de Clermont, le 11 février 1791.
On avoit cru jusqu’ici qu’il avoit été adjugé comme situé
dans les dépendances de la ville de Clerm ont, ce qui, au
surplus, eût été assez indifférent ; mais il n’en est rien.
L e procès verbal d’adjudication porte expressément qu’il
est situé dans la commune de Cliamalières.
Il est adjugé sous la dénomination de bâtimens, jardins et
enclos, appelés des Roches ;
A v e c différentes vignes plus amplement désignées dans cette
adjudication *, le tout ci-devant joui par le Séminaire diocésain
de Clermont.
Les mêmes désignations se trouvent dans l’estimation des
experts, dans les premières soumissions des encliéi’isseurs, et
dans les affiches qui ont précédé l’adjudication.
Et cette adjudication a été faite en présence du sieur Serve,
nommé à cet effet commissaire de la commune de Cliamalières.
L e sieur M arlet subrogea le sieur G eneix k la majeure partie
de son adjudication le 17 du môme mois de février, et spéciale
ment à ce qui composoit les biitiinens et l’enclos j et c’est dans
�cet acte de subrogation que s’est faite la première erreur sur la
situation.
On y lit que le sieur M arlet subroge le sieur Geneix « à l’effet
» de partie de l’adjudication à lui faite par M M . les Administra» teurs du Directoire de district de cette v ille , par procès
» verbal du n du présent mois, du bien des Roches, situé
» dans les dépendances de cette v ille , appartenant et joui
»> ci-devant par MM. du grand Séminaire. »
Et les objets qui composent cette subrogation y sont exacte
ment confinés par tenans et aboutissans, et notamment par les
chemins publics qui les bordent au jour et à la nuit.
lie sieur G en eix, devenu possesseur de ce local, y fit de
grandes réparations; il l’embellit au point d’en faire un objet
de curiosité, comme M o n tjo ly , Loradoux, et l’enclos des
Roches - G a lo u b ie , qui en est très-près, et qui est, comme
les Roches-du-Séminaire, situé dans les dépendances de Cliamalières.
Après avoir gardé ce bien neuf à dix ans, le sieur G eneix
subrogea à son lieu et place le sieur D ebens, fils du premier
mariage de la dame Bâtisse, épouse du général Joba.
Cette subrogation a été faite le 24 prairial an 10.
On y lit que « le sieur G eneix subroge le sieur Debens à
» l’effet de la subrogation à lui consentie par Biaise M arlet,
» devant Ghassaigne et son confrère, notaires à Glermont, le 17
» fevrier 1791 j laquelle subrogation, faite audit sieur Geneix
» par ledit M arlet, fait partie de l’adjudication à lui faite au
» Directoire du district de Clerm ont, par procès verbal du 11
* février 17 9 1, du bien des R oches, situé dans les dépen» dances de cette v ille , joui ci-devant par le grand Séminaire
" d'icelle. »
Les objets compris dans cette subrogation y sont exactement
confinés,
A2
�ÎY
( 4)
' Cette subrogation a été faite moyennant 36,697 fr. 5o c.
L e contrat porte quittance de 26,697 ^r*
Il restoit dû 10,000 fr ., qui furent stipulés payables au sieur
Geneix dans quinze mois, avec l’intérêt à cinq pour cent, à
partir de l’écliéance du terme.
E t on lit à la fin de l’acte, que « le sieur Debens reconnoît
» que ledit Geneix lui a présentement fait remise des titres
» ci-dessus visés et datés, dont décharge. »
L e sieur Debens a fait transcrire son contrat le 3 o du même
mois de prairial, et le conservateur a fait une inscription d'office
pour les 10,000 fr. qui restoient dûs au'sieur Geneix sur le prix
de la subrogation.
Cette subrogation étant faite sur celle faite par le sieur Marlet
au sieur G e n e ix , la première erreur a dû se perpétuer \ le bien
des Roclies-du-Séminaire a dû être énoncé comme étant situé
dans les dépendances de Clerm ont, et cela sans le concours des
parties intéressées, et par le seul fait du notaire, qui a dû se
conformer à l’acte qu’il avoit sous les yeux.
La transcription en a été faite avec la même énonciation.
Cette énonciation a été répétée dans l’inscription d’office} et
elle a dû l’être, puisqu’elle a été faite sur l’acte de subrogation.
L e 21 vendémiaire an 1 1 , Debens vendit au général Joba, et
à la dame Bâtisse, son épouse, l’usufruit et jouissance de ce bien ,
tel qu’il étoit désigné en l’acte de subrogation du 24 prairial
an 10, à la charge, entr’autres conditions, de payer au sieur
Geneix les 10,000 fr. qui lui restoient dûs.
D epuis, et le 8 frimaire an i 3 , Debens et sa m ère, celle-ci
tant en son nom que comme fondée de pouvoir du général
Joba, son m ari, vendirent la propriété et la jouissance de
ce même bien au sieur Guillemin.
Cet acte fait expressément mention que ce bien est situé dans
les dépendances de Chamalières.
�11 y est, au surplus, exactement confiné comme dans les
actes précédens, et on y lit en outre ce qui suit :
« Ledit bien dont la propriété appartient audit sieur Debens,
» et la jouissance audit sieur Joba et à la dame Bâtisse, son
» épouse, suivant le contrat de subrogation, du 24 prairial
» an 10, consenti par le sieur Biaise G en eix audit Sieur
» D ebens, etc. »
E t cet acte fait expressément mention que les vendeurs ont
présentement fait remise au sieur Guillemin de tous titres rela
tifs au bien vendu.
On ne voit pas que, dans cet acte, on se soit occupé des
10.000 fr. dûs au Sr Geneix pour reste du prix de sa subrogation
du 24 prairial an io*, et cela, sans doute, parce que Debens en
ayant chargé le général Joba par l’acte du 21 vendémiaire
an 11 il s’en est cru libéré.
Quoi qu’il en soit, G uillem in, après avoir gardé ce bien pen
dant quelques mois, le revendit au sieur Besseyre le 10 fructi
dor suivant.
On trouve dans cet acte, comme dans les précédens, le détail
exact des objets vendus et de leurs confins, et renonciation qu’ils
sont situés dans les dépendances de Chomalières j
Et on y fait encore mention expresse que l’acquéreur reconnoit que Guillem in, vendeur, lui a fait remise de tous les titres
relatifs audit bien.
Il s’éleva, peu de temps après, un grand procès entre le géné
ral Joba, sa femme, D ebens, Besseyre et Guillem in, qui avoit
principalement pour objet ce bien des Roches, dont le général
Joba réclamoitla jouissance qui lui avoit été assurée par Deben9,
par l’acte du 21 vendémiaire an 11.
Pendant ce temps-là, le sieur Geneix n’étoit pas payé de ses
10.000 fr., ni par D eben s, son débiteur, ni par le général Joba,
que Debens ayoit chargé de sa libération.
�( 6 )
E t bientôt après on lui donna un troisième débiteur, qui étoit
encore d’un bien plus mauvais acabit que les deux premiersr.
Par l’événement du procès, le général Joba avoit obtenu
l’usufruit du bien des Roches \ le sieur Besseyre alloit être
évincé, et Guillemin étoit condamné à le garantir de cette
éviction.
Guillem in, pour éviter l’effet de la garantie qu’il devoit au
sieur B e s se y re tra ita avec le général Joba, de son usufruit,
par acte du 8 mars 1808.
Par le résultat de ce traité, Guillemin fut chargé par le géné
ral Joba, de payer et acquitter au sieur Geneix la somme de
10,000 francs, qui lui étoit due, ainsi que les intérêts.
Ceux qui ont connu ce troisième débiteur, ne douteront
pas qu’il ne paya pas mieux que n’avoit fait le général Joba et
Debens; bientôt après il fit faillite.
L e sieur G eneix, dont la patience étoit épuisée, prit enfin le
parti de recourir à son ga g e, le bien des Roches.
En conséquence, et le 10 septembre 1811, il se pourvut contre
le sieur Besseyre, dans les formes prescrites par l’art. 21 Gg du code.
Besseyre a résisté à ces poursuites, en opposant la prétendue
nullité de l’inscription d’office, faite par le conservateur, dans
l’intérêt du sieur G eneix, le 3 o prairial an 10, sur le fondement
qu’elle étoit faite sur un bien situé dans les dépendances deClerm o n t, tandis que ce bien étoit situé deux toises plus loin,
„dans les dépendances de Cliamalières.
M ais quelle différence peut faire celte situation dans cette
affaire ?
L e sieur Besseyre ignoroit-il qu’il achetoitlebien desRochesdu-Séminaire ?
Que ce bien qu’il aclictoit du sieur Guillemin, venoit du sieur
Debens ?
Que le contrat de subrogation du sieur Geneix au sieur
�(7 ;
^
Debens, étoit transcrit, et q u e le conservateur avoit fait, pour Je
sieur G en eix, une inscription d’office de 10,000 francs, qui
restoient dûs sur le prix ? Comment auroit-il pu l’ig n o rer,
lorsqu’on lui remettoit, dans l'instant même , toutes les pièces
qui constatoient ces faits ?
Quel est d’ailleurs le but de la loi dans toutes les énoncia
tions qu’elle exige dans les inscriptions, sur la nature des biens
sur lesquels frappent l’hypothèque et le privilège et sur leur
situation ? C ’est d’assurer l’identité du bien grevé , et de celui
dénommé dans l’inscription.
O r , quel doute peut-il y avoir sur cette identité, lorsqu’on
voit partout que le bien adjugé primitivement à M arlet,
Subrogé par M arlet au sieur Geneix ,
Subrogé par celui-ci à D e b en s,
Revendu par Debens et sa mère à G uillem in ,
E t enfin revendu par Guillemin à Besseyre,
Est le bien des Roches qui a appartenu au Séminaire ?
Et quel doute peut-il rester à cet acquéreur sur ce point,
lorsqu’on lui remet tous les actes qui constatent l’origine de
ce b ie n , et cette série de transmissions depuis la première vente
nationale j u s q u ’à lui ?
Q u e , lorsqu’il s’agit d’un cham p, on mette quelqu’importance à une dénomination plus ou moins exacte de sa situa
tio n , cela se conçoit, parce que l’erreur, dans ce cas, peut
avoir quelque conséquence;
Mais elle ne peut jamais en avoir, lorsqu’il s’agit d’un bien
comme celui-ci, généralement connu par son nom des Rochesdu-Séminaire, par son ancienne destination, par une notoriété
telle, qu’on ne connoît pas mieux la halle au bléj, et toutes
les places publiques de Clermont.
La subrogation primitive du mois de février 17 9 1, n’est
pas nulle, quoique ce bien soit dit situé dans les dépendances
�de C lerm ont, tandis qu’il est à deux toises plus loin dans les
dépendances de Chamalières.
La subrogation faite par le sieur Geneix à Debens, n’est
pas plus nulle, quoiqu’elle contienne la même erreur.
Il faut en dire de même de la transcription faite par le
conservateur ; quoiqu’elle soit faite avec la même erreur, elle
n’en produit pas moins son effet.
O r , si la transcription est valable, l’inscription d’office doit
nécessairement l’être égalem ent, attendu qu’elle a dû être
en tout conforme à la transcription qui lui servoit de base.
L e sieur BessejTre n’est pas de bonne foi, quand il dit que,
voyant l’inscription du sieur G e n e ix , il a dû croire qu’elle
frappoit sur le bien des Roches - G aloubie, situé dans les
dépendances de Clermont.
D ’abord, le bien des Roches-Galoubie n’est pas situé dans
les dépendances de Clerm ont, mais bien dans les dépendances
de Cham alières, comme celui des Roches-du-Séminaire.
En second lie u , quand le bien des Roches-Galoubie eût été
situé dans les dépendances de Clermont, il eût été impossible de le
confondre avec celui des Roclies-du-Séminaire, ces deux biens
étant entourés de murs, étant tous deux également connus, et
tous deux distingués par leur dénomination, l’un des RochesGaloubie , et l’autre des Roches-du-Séminaire , et aussi diffi
ciles à confondre que M ontjoly et Loradoux.
En troisième lieu , comment le sieur Besseyre auroit-il pu s’y
m éprendre, lui qui ne pouvoit pas ignorer qu’il achetoit un
bien national, tandis que les Roches-Galoubie étoient un bien
patrimonial ?
L u i qui achetoit ce bien avec la désignation de tous ses
confins, et qui avoit sous ses y e u x , à quelques toises de dis
tance, les Roches-Galoubie qui avoisinoient sa propriété?
L ui à qui on remettoit, au moment même de son acquisition,
�(9)
l'adjudication de ce même b ie n , la subrogation qu’en avoit
faite le sieur G eneix au sieur Debens, la transcription de cette
subrogation, et l’inscription prise d’office par le conservateur,
pour le sieur G e n e ix , sur cette même subrogation?
Y a-t-il du sens commun de prétendre que le sieur Besseyre a
pu croire que ces titres qu’on lui i*emettoit, et spécialement
cette inscription du sieur G en eix, pouvoient avoir pour objet
tout autre bien que celui qu’il acquéroit ?
En un m ot, quand la loi exige que l’inscription contienne
l’indication de l’espèce et de la situation des biens sur lesquels
le créancier entend conserver son hypothèque ou privilège, elle
n’a d’autre but que d’éviter que le conservateur et les tiers
puissent être induits en erreur sur l’objet sur lequel frappe
l’hypothèque ou le privilège du créancier*, or , ici cette erreur
étoit impossible : l’objet frappé du privilège du sieur Geneix
étoit désigné de manière à ne pouvoir s’y m éprendre, nonseulement par sa dénomination, mais par ses confins aux quatre
aspects, qui étoient exactement rappelés ; et le sieur Besseyre le
pouvoit si p e u , qu’il avoit dans ses mains tous les titres qui
constatoient l’identité parfaite du bien qu’il acquéroit, et du
bien qui étoit grevé de l'hypothèque et du privilège du sieur
G en eix, dont on lui remettoit l’inscription d’office prise par
le conservateur dans son intérêt.
L ’objet de la loi étoit donc parfaitement rempli ; il ne restoit
rien a désirer pour la sûreté du créancier et pour l’instruc
tion de l’acquéreur, qui n’a pu être ni dans l’ignorance, ni
dans l’erreur sur la ci'éance du sieur G e n e ix , et qui dès lors
ne peut avoir le moindre prétexte pour s’y soustraire.
Tout ce que nous venons de dire est pris dans la raison;
et des arrêts sans nombre qu’on a cités dans cette affaire, il n’en
est pas un qu’on puisse opposer au sieur G eneix, et qui ait
la moindre application à l’espèce, c’est-à-dire, à une erreur aussi
B
�innocente et aussi indifférente, attendu q u eleb iep des Roclies
étoit aussi connu que le collège, la halle au blé , les églises
et les places publiques de Clerm ont, et que l’indication de
sa situation dans les dépendances de Chamalières, ou dans les
dépendances de Clerm ont, dont ce bien n’est éloigné que de
deux toises, ne pouvant tirer à conséquence pour qui que
ce soit, ce seroit calomnier la loi que d’en induire .qu’il a
pu entrer dans ses vues de transformer cette erreur invo^
lontaire et insignifiante en un vice tellement radical et absolu,
qu’il entraîne la déchéance de l’action du vendeur, et la perte
du prix de sa vente.
A u surplus, la loi, au besoin, viendroit à son appui pour
repousser cette absurde rigueur.
N ihil enim fa c it error nomi nis , ciim de corpore constat,
dit la loi 9 , au D ig ., liv. 18 , tit. i " .
Toutes les fois que l’objet est certain , ciim de corpore
constat, quand il y auroit quelqu’erreur dans la dénomina
tion ou dans la situation , nihil fa c it error, parce qu’au vrai il
n’y a pas d’erreur quand les parties se sont parfaitement enten
dues, et qu’il n’est pas resté d’incertitude sur ce qui faisoit
l ’objet de leur convention.
O n en trouve encore un exemple dans la loi 3 5 , au D ig .,
liv. 32 , tit. i 8r, qui a une parfaite analogie à notre espèce.
'Sempronius fait un legs à deux de ses affranchis ; il donne
à l’u n , fundum trebellianum, qui est in regione duellata.
Il donne à l’autre fundum satrianum, qui est in regione
N i pli and.
L e testateur a un fonds de ce nom, vocabulo satrianus; mais
il n’est pas situé in regione Niphanâ.
La loi dit qu’il n’en doit pas moins être délivré au léga
taire , quoiqu’il se soit glissé une erreur sur sa situation.
Non idcircô minus deberi, quia in regione desigtianda lapsus
esset.
�Ces principes s’appliquent parfaitement à l’espèce; il n’y
a jamais pu y avoir d’erreur sur le bien sur lequel frappoit
l’inscription d’office du sieur G eneix , dès qu’il étoit démontré
au sieur Besseyre, et par les .localités, et par tous les titi'es
qui étoient dans ses mains, que ce bien, vendu par le sieur
G en eix, et sur lequel frappoit l’inscription d’office du con
servateur, étoit le même bien , qui des mains du sieur Geneix
étoit passé dans les siennes, soit qu’il eût été désigné comme
situé dans les dépendances de Clermont ou dans celles de
Chamalières : Non idcirco minus deberi, quia in regione designanda lapsus esset.
‘
Il sembleroit assez inutile, d’après cela, de s’occuper delà
question de savoir si la transcription de l’acte de subrogation,
consenti par le sieur G eneix au sieur D ebens, n’étoit pas seule
suflisante pour assurer ses droits, indépendamment de toute
inscription , ce qui rendroit indifférente la validité ou l’inva
lidité de l’inscription d’office fait'e par le conservateur dans
l’intérêt du sieur Geneix.
Mais s’il étoit besoin de s’expliquer sur cette question , lé
soussigné n’hésileroit pas à décider que la loi du 11 brumairë
an 7, n’exige rigoureusement l’inscription que pour conserver
les privilèges antérieurs à cette loi, parce que c’étoit le seul
moyen de donner de la publicité à l’existence de ces privilèges.
Mais dès le moment que la loi a introduit la transcription
des actes de mutation sur un registre toujours ouvert à tous
venans, elle a mis, par cela seul, les tiers à l’abri de l’erreur
et de la surprise.
Cette décision est confirmée par la disposition de l’art. 2108
du Code, dans lequel on lit que « le vendeur privilégié con» serve son privilège par la transcription du titre qui a transféré
» la propriété à l’acquéreur, et qui constate que la totalité
>• ou partie du prix lui est due. »
�Ici tout est terminé dans la loi pour l’intérêt du vendeur ; son
privilège est assuré par la transcription; et la seconde partie de
cet article, relative à l’inscription exigée du conservateur, n’est
qu’une précaution qui, à son égard, devient surérogatoire.
L e consul Cambaeérès s’en explique ainsi, dans la discussion
.qui a eu lieu au Conseil d’Etat, sur la rédaction de cet article :
u Quand la transcription atteste que le prix n’a pas été payé
» en entier, le public est suffisamment averti: ni les acquéreurs,
» ni les prêteurs, ne peuvent plus être trompés; toute inscrip» tion particulière devient donc inutile, et il n’y a pas de motifs
» d’en faire une condition qui expose la créance du vendeur,
» si le conservateur est négligent. »
M . Treillard, à qui ces raisons du consul Cambacérès paroissent décisives, « propose de déclarer que la transcription vaudra
» inscription pour la partie qui n’auroit pas été payée. »
M . Jolivet insiste sur l’inscription, mais en ces termes, qui
sont précieux, et qui déterminent., de la manière la moins
équivoque, l’esprit de cette loi :
« L e C. Jolivet demande que néanmoins, afin que le registre
.» des inscriptions soit complet, la loi oblige le conservateur
i> d’y porter la créance du vendeur., sans que cependant l’omis.» sion.de cette form alité nuise à la conservation du privilège. *
A in si, quand la loi exige l’inscription, c’est au conservateur
qu’elle impose cette formalité, c’est pour rendre son registre
co m p let, c’est pour le mettre lui-même à l'abri des erreurs
qu’il pourroit commettre, et pour sa propre sûreté, sans que
cependant Vomission de cette form alité nuise à la conserva
tion du privilège.
C ’ est vainement qu’on veut trouver quelque différence sur ce
point, entre la loi du 28 ventôse an 11, insérée dans le Code
Napoléon, et celle du 11 brumaire an 7.
L ’une et l’autre prescrivent la transcription de la ve.nte, et
l'inscription d’office de la part du conservateur.
�'( i 3 j
. . .
Mais l’une et l’autre prescrivent cette inscription d’office au
conservateur, et non au vendeur.
L ’une et l’autre la prescrivent sans y attacher la>peine de
nullité \ et une nullité aussi rigoureuse, et qui produiroit des
effets aussi désastreux, que defaireperdre au vendeur son hypo
thèque et son privilège pour le prix de sa ven te, ne sauroit sc
suppléer.
Si d’ailleurs cette inscription d’office n’est pas de rigueur sous
l’empire d elà loi du 28 ventôse, il n’y a pas de raison pour
qu’elle fût plus rigoureuse sous l’empire de la loi du 11
brumaire.
La formalité de la transcription est la même sous l’une et
l'autre lo i5 elle produit les mêmes effets. Pourquoi donc l’ins
cription d'office, de la part du conservateur, en produiroit-elle
de différens ?
Pourquoi son omission seroit-elle fatale sous la loi du 11 bru
maire, et ne le seroit-elle pas sous la loi du 28 ventôse?
Pourquoi la plus légère erreur ou omission dans cette ins
cription d’office, de la part du conservateur, opéreroit-elle la
ruine du vendeur sous la loi du 11 brum aire, tandis qu’elle
seroit sans conséquence sous la 'loi du 28 ventôse ?
On sent que de pareilles idées répugnent à la raison.
11 suffit que la loi ait laissé le soin de cette inscription au
conservateur, et qu’elle en ait dispensé le vendeur, pour q ue,
par cela seul, elle n’y ait pas attaché la fatalité de la déchéance j
car il seroit absurde de prétendre qu’un vendeur a pu perdre
le prix de sa chose sans le savoir, et parle fait d'un tiers q u i a agi
sans son concours, et sur lequel il n’a pu avoiraucune influence.
Non debet altcri per altemm iniqua conditio inferri. R eg. 74*
D e rcg. fur.
- A in s i, quand il n’y auroit pas eu d’inscription <3’office faite
par le conservateur, au nom du sieur G eneix, ou quand cette
�N>
04)
inscription d’office contiendroit un vice quelconque, le pri
vilège du sieur Geneix n’en seroit pas moins assuré, d’après la
maxime triviale, Quod abundat non viciât : à combien plus
forte raison doit-on le considérer comme assuré dans la circons
tance, lorsque le prétendu vice, qu’on reproche à l’inscription
d’office dont il s'agit, est une erreur purement involontaire,
que cette erreur étoit absolument insignifiante, et qu’elle étoit
sans objet dans son principe, comme sans conséquence dans
ses résultats?
On ne peut rien opposer de satisfaisant contre de pareils
moyens. C ’est vainement qu’on entasse arrêts sur arrêts,
sophismes sur sophismes, pour rendre spécieuse la défense du
sieur Besseyre ; tout cet étalage d’érudition , et tous ces raisonnemens captieux, viennent échouer contre ces idées simples.
L ’inscription étoit superflue pour conserver le privilège du
sieur G en eix, dès que son contrat de vente étoit transcrit.
Cependant il existe une inscription d’office ;
E t cette inscription, que l’on critique, est conforme à la
transcription, et conforme au contrat.
Et si le contrat et la transcription contiennent une erreur dans
fénonciation de la situation, cette erreur n’en est plus u n e,
dès qu’elle n’a ni trompé, ni pu tromper personne; que l’énonciation delà situation du bien dont il s’agit, dans les dépendances
de Clermont, ou dans les dépendances de Chamalières, n’en
étoit pas moins l’énonciation du bien des Roclies-du-Séminaire,
d’un bien exactement confiné à tous les aspects, d’un bien
acheté, vendu et revendu comme bien des R oches, ayant
appartenu au Séminaire, et connu comme tel de toutes les
parties intéressées, comme du public. JSihil enim fa c it error
nom inis, ciim de corpore constat.
Il est temps, au surplus, que le système des nullités, en ma
tière d’inscription, fusse place à la raison; qu’on ne puisse plus
�( 15 )
d ire , comme l’a fait u n auteur récent (1), l’inscription est
« comme environnée d e piéges; elle;peut être nulle dans les
M prénoms, dans la profession, dans le domicile réel ou élu du
» créancier, dans la date du titre, dans l’époque de l’exigibilité
» de la créance elle peut l’être par bien d’autres accidens
» encore, par mille moyens que l'esprit de perfection a libérale» ment procréés : de là une foule de procès qui seroient risibles
»> dans leurs discussions, s’ils n’étoient désastreux dans leurs
» résultats : on ne peut plus dormir en paix sur une inscription. »
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 22 mai 18 13.
B O I R OT.
( 1) M. Hua, D e la nécessité e t des m oyens de perfectionner la législation hypo
thécaire. Discours préliminaire, page 8.
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P ré fe c tu re , et L ib ra ire, grande rue St.-Genès.
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0<Ja*^Cîlam-ulâ—Cou*iiu^.t¿^ cûcmavul au-U/t cyjji—Ítfw-^un^úA\jM_ c^u^íx¿—4^**^
v<^- caunoí*-, uc*~&~ Couxiítáxr
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
note manuscrite avec l'arrêt.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2105
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53401/BCU_Factums_G2105.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53400/BCU_Factums_G2104.pdf
5d498250d011b562835c7f882f948778
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JUSTIFICATION
Du jugement rendu au Tribunal civil de
Clermont le 8 juillet 1 8 1 2
Entre sieur B la is e G E N E I X , poursuivant, en la
forme autorisée par l’art. 216 9 du Code Napoléon,
le payement de la somme capitale de 10,000 fr.
et des intérêts, dont il reste créancier, sur le prix
de la revente qu’il fit au sieur DEBENS, le24
prai
rial an 10 (1), du domaine ( ou maison de plai
sance) des Roches-du-Séminaire de Clermont,
intimé ;
E t le sieur B E S S E Y R E , troisième acquereur 3 et
détenteur actuel de cet immeuble appelant.
L e jugement attaqué a décidé, en point de droit, que la trans
cription du contrat de vente conservoit, sous le régime de
la loi du 11 brumaire an 7, comme elle conserve sous le régime
(1) On ne doit que du mépris à l'allégation hasardée par le sieur Besseyre , que le
sieur G eneix réclam e une créance éteinte : un titre authentique de créance ne se détruit
pas par d’impudentes déclamations.
�actuel du Code Napoléon, le privilège du premier vendeur
contre fous les acquéreurs successifs ultérieurs, pour le paye
ment de ce qui lui restoit dû sur le prix de la première vente,
nonobstant que le dernier acquéreur ait transcrit, et que le
prem ier contrat d'aliénation (également transcrit) , contînt,
ainsi que Vinscription cl office dont il fut accompagné, une erreur
de fa it relativement à la situation de l’immeuble, déclaré situé
dans les dépendances de Clermont, tandis qu’il ne fait que
toucher au territoire de cette v ille , et qu’il est bordé au nord
par le chemin vicinal qui sépare les deux communes de Cler
mont et de Chamalières.
Ce jugement a-t-il violé la loi en prononçant de la sorte ?
Telle est la question soumise à la Cour impériale par l’appel du
sieur Besseyre.
Il ne faut pas de grands efforts, ce semble, pour dissiper
les illusions avec lesquelles le sieur Besseyre combat le juge
ment attaqué, et pour réunir tous les suffrages au parti de
la confirmation. D eux motifs également d é c i s i f s doivent, en effet,
subjuguer toutes les opinions.
L e premier est que la transcription de la vente suffisoit
seule, sans le secours de l’inscription d'office, sous le régime
de la loi du 1 1 brumaire an 7 , comme sous le Code Napoléon,
pour conserver le privilège du premier vendeur.
¡Le second est que dans la supposition même où l’inscription
d'office auroit été nécessaire pour produire cet effet, Yerreur
sur la vraie situation de l’immeuble vendu, échappée dans le
contrat de vente, et répétée dans l’inscription à'office, ne tireroit
point à conséquence pour la conservation du privilège du ven
deur, parce qu’il n’auroit pas pu en résulter de méprise sur
l’application du privilège conservé.
Nous espérons de porter la conviction dans tous les esprits,
sur ces deux vérités ;' mais avant de l’entreprendre, nous devons
«
�fS
( 5) '
rétablir deux points de fait, sur lesquels l’exposé du sieur Besseyre
manque d’exactitude, et dont le redressement peut avoir une
grande influence sur la décision de la Cour, par la défaveur
qu’il jettera sur la cause du sieur Besseyre, qui chicane sans
intérêt réel.
Première supposition inexacte.
L e sieur Besseyre a dit : « D eux propriétés appelées les
» Roches , presque limitrophes, sont situées, l’une dans les
» dépendances de Chamalières : c’est celle que j’ai achetée du
» sieur Guilleinin, qui la tcnoit du sieur Debens, et celui-ci
* du sieur G eneix; l’autre est située dans les dépendances de
» Clemxont : c’est sur celle-là seulement que paroissoit porter
» l’inscription d'office, prise pour le sieur Geneix, sur les R o» clies situées dans les dépendances de Clermont. J ’ai dû voir
» cette inscription sans m’en inquiéter, puisqu’elle ne me
» menaçoit pas, et payer le prix de mon acquisition avec la
» plus entière sécurité, sans m’y arrêter : donc la fausse indi» cation de cette inscription d’ojfi.ee m’a trompé. Puis-je être
» victime d’une méprise qui n’est point de mon f a it , et qui,
» pour avoir été involontaire, n’en est pas moins un piège
» tendu aux tiers q u i, comme m o i, ignoroient la carte du
» territoire ? »
Arrêtez, sieur Besseyre, et rentrez dans la voie du vrai et
de la bonne foi. Oui certainement, il existe dans le territoire
des Roches, très-voisin de la ville de Clermont, non-seule
ment deux, mais même trois enclos, formés de vignes, de jar
dins, de bosquets, et d’autres propriétés, appelés tous trois
les Roches, dans chacun desquels est une maison de plaisan ce,
et qui ne sont distingués que par les noms des anciens proprié
taires desquels ils proviennent. L ’un est appelé les Roches2
�Galoubie, du nom du sieur Galoubie, notaire à Clermont, qui
le p o ssé d o it v e r s le milieu du d e r n i e r siècle; l’autre appelé les
Roches-du-Séminaire, du nom de l’établissement ecclésiastique
auquel il a appartenu jusqu’à la révolution, pendant laquelle il
a été vendu comme domaine national-, le troisième, de création
toute r é c e n t e , s’appelle les Roches - F a jo lle , a c t u e l le m e n t
p o s s é d é par M. Vimal-Lajarrige, conseiller de Préfecture-, il
est intermédiaire entre les Roches- G aloubie, possédées par la
veuve Queyron, r e m a r i é e au sieur IVlosnier, et les Roches-duSém inaire, que possède le sieur Besseyre; mais ces trois maisons
de p l a i s a n c e , auxquelles le nom des Roches est commun, sont
toutes situées dans la commune de Cham alières, qui com
prend le territoire des Roches en entier -, et aucune des trois
n’est située dans la commune de Clermont (i).
( i ) Le fait est n otoire, et tout ce que l’on a dit, de part et d’au tre, dans les précé
dons m ém oires, à ce su jet, manque d’exactitude; notamment ce qui est d it, aux pages
4 et du précis du sieur Geneix,de la situation des Roches-Galoubie. L a vérité est que le
5
procès qui eut lieu entre M . D elavédrine, acquéreur des droits successifs des héritiers de
droit du sieur Q u eyro n , et la veuve Q u eyro n , héritière testamentaire do son mari ,
ne rouloit pas sur la situation de la maison de plaisance dos Roches-Galoubie. On
convenoit que cette m aison, où le sieur Queyron faisoit sa résidence h ab itu elle, étoit
dans la commune de C ham alières, pays de coutume ; le point de fait contesté étoit
seulement de savoir si le sieur Queyron étoit mort dom icilié aux R oches-G aloubie ,
pays de coutume , ou à Clerm ont, pays de droit é c rit, attendu qu'il avoit toujours
conservé un logement à C lerm ont, rue des Gras. M . D elavédrin e, aux droits des héri
t i e r s nitureU de Q u eyron , le soutenoit mort dom icilié aux Roches, p ays de coutume,
et il en concluoit que le testament no valoit que pour le quart du mobilier qui suivoit
le dom icile. Il fut jugé que lo domicile étoit à Clermont; e t , par suite , l’héritière tes
tamentaire «b tin t tout le mobilier. Quant aux im m eubles, on étoit d’accord que l’enclos
des Roches étoit en totalité dans la communo de Chamalières , pays de coutume; qu’il
n’y avoit dans le territoire de Clermont qu’un verger séparé de l’enclos par lo chemin
qui fait la limite des deux communes , et qui ne porte point le nom des Roches : ea
conséquence, elle n’obtint en propriété que ce verger détaché des R o ch es, et le quart
disponible do l’enclos et maison do plaisance de» R o c h e s, en vertu des dispositions
testamentaires de son m a r i, avec l’usufruit du to u t, qui lui avoit etc donné par con
trat do maria go.
�f7
(5)
Il est remarquable, au surplus, que la maison des Rochesdu - Sém inaire, acquise en dernier lieu par le sieur Besseyre,
est plus voisine que les deux autres, du territoire de Clermont.,
puisque sa façade nord-est, ainsi que la porte d’entrée, donnent
immédiatement sur le chemin vicinal qui sépare les deux
communes, au lieu que les bâtimens des R o c h e s - Galoubie
et des Roclies-Eayolle, sont -à quelque distance de la limite du
territoire de Clermont, et n’y touchent que par un côté de
leurs enclos respectifs.
D ’après cet état des lie u x , il est bien sensible que le sieur
Besseyre ment à sa propre conscience, lorsqu’il feint d’avoir
cru que l’inscription d’o ffice, prise au nom du sieur Geneix,
en l’an 10 , sur la transcription de la vente des Roches-duSém inaire, faite par celui-ci au sieur D ebens, ne frappoit que
les Roches- G a lo u b ie, sous le frivole prétexte qu’elle avoit
été prise sur un domaine situé dans les dépendances de
Clermont.
En effet, la maison des Roches- Galoubie est plus enfoncée
dans le territoire de Chamaliôres, que celle des Roches-duSétninaire puisque la première est sur la hauteur du coteau,
presq.u’à .l'extrémité occidentale de son enclos, tandis que celle
des Roches-du-Sém inaire est au bas du coteau, et au bord
du chemin qui sépare les deux communes. Si l’on pouvoit
croire l’une de ces deux maisons de plaisance située dans la
commune de Clermont, ce seroit donc bien plutôt les Rochesdu-Sém inaire, que les Roches-Galoubie.
D ’ailleurs, comment le sieur Besseyre auroit - il pu se
méprendre sur l’application de l’inscription prise d’office
poule sieur G en eix, au domaine des Roches que lui revendoit Guillemin , lorsque Guillemin revendoit comme il avoit
acqiùs de D eben s, acquéreur de G en eix ; que le contrat
d’acquisition de Debens lui fut remis ; qu’il étoit transcrit ; qu’il
3
�put et dut le consulter pour sa sûreté \ et qu’il y vit que c’étoit
laux Roches-du-Séminaire, vendues par Geneioc h Debens, par
Debens à Guillemin , et par Guillemin à lui B e s s e jre }
qu’elle s’appliquoit nécessairement et uniquement ?
O r , si avec une pareille certitude il a eu l’imprudence de
payer le prix de son acquisition sans précaution, à qui doit-il
s’en prendre des suites de sa légéreté, si ce n’est à lui-même?
Seconde supposition inexacte.
L e sieur Besseyre croit apitoyer ses juges, par ses doléances
simulées sür le danger presque certain de perdre le montant
de la créance du sieur G en eix, s’il «st obligé de la pnyer
comme tiers-détenteur de l ’immeuble hypothéqué, par la raison
qu’il n’auroit qu’un recours illusoire, soit contre Guillemin ,
Son vendeur immédiat} qui a fait cession de biens, soit contre
Debens , militaire sans fortune, dit-il.
Indépendamment de ce que le défaut de fortune du sieur
Debens , n’est qu’une allégation injurieuse, n’a-t-il pas une
hypothèque assurée, pour sa garantie, sur un enclos précieux
situé près de la barrière, à la sortie de Clermont, sur la route
de Paris, qui y fut spécialement hypothéqué par le sieur
Guillemin , son vendeur , dans le contrat de vente du 10 fruc
tidor an i3 ? et s’il avoit négligé de conserver cette hypothèque
par une inscription, seroit-ce au sieur Geneix à en souffrir ?
Enfin , dans tous les c a s , ne sera-t-il pas subrogé aux droits
6t hypothèques du sieur G èneix, lorsqu’il lui aura payé sa
créante ? ne sera-t-il pas fondé , à ce titre, à faire valoir lï/zjcription hypothécaire que le sieur Geneix prit, en temps utile,
sur la maison du général J o b a , obligé à Ce payement ? Ce
gage est assurément bien suffisant pour répondre de son in
demnité.
�( 7 )
J ca
Par là disparoissent les moyens de considération par les
quels le sieur Besseyre espéroit de faire fléchir la loi en sa
faveur. Jamais tiers-acquéreur n’eut moins que lui de droits à
l’indulgence. Voyons donc quelles sont les obligations que
lui impose une application sévère de la loi, puisqu’il doit
être contraint, sans ménagement, à s’y soumettre.
M O YENS
P
DE
remier
D R O IT .
moyen.
L a transcription de la vente suffisoit, sous le régime de
la loi du i i brumaire an 7 , comme elle suffit sous le régime
du Code Napoléon , pour conserver le privilège du vendeur,
sans le secours de Vinscription d’office prescrite a u x con
servateurs , sous les deux régimes , uniquement pour empêcher
des surprises contre les tiers, de la part des acquéreurs qui
nJauraient pas intégralement p a yé le prixules premières acqui
sitions. Nous en resterons convaincus, si nous ne confondons
p a s , comme Vont fa it le sieur Besseyre et ses conseils, les
privilèges existans, lors de la publication de la loi du 1 1 bru
maire an 7 , avec ceux qui ne sont nés que postérieurement.
Cette loi éleva un mur de séparation entre le passé et
Yavenir s en matière de privilège.
Les articles 3 7 , 38 et 3g voulurent, pour le p a ssé, que
tous privilèges déjà existans, sans distinction ni exception,
fussent rendus publics par l’inscription , dans le délai de trois
m ois, et que s’ils ne l’avoient pas été dans ce délai, ils dégé
nérassent en simple hypothèque, et n’eussent de rang qu’à
compter du jour de l’inscription qui en seroit prise tardive
ment. 11 suit de là que l’inscription fut Tunique moyen offert
par la loi a u x anciens créanciers privilégiés, pour conserver
4
�• U
( 3 )
leurs privilèges quels qu’ils pusseut être, même celui du
vendeur. C'est ce qu’a spécialement décidé, et ce qu’a Uni*
quement décidé l’arrêt de la Cour de cassation , du 17 mai 1809,
que les auteurs de la consultation délibérée à Paris, le iG mars
deriiier, appliquent à contre-sens, avec une étonnante con
fiance , à la cause du sieur Besseyre (1).
Voilà ce que régla la loi de l’an 7 , pour le passé ; mais
il en fut bien autrement pour l’avenir, car l’article 11 admit
certains privilèges sur les immeubles, qui furent dispensés d’ins
criptions (2) ; et, d’ un autre côté, l’article 29 voulut que, dans
le cas où le titre de mutation constateroit qu’il était du au
précédent propriétaire ou à ses ayans cause , soit la totalité
ou partie du p r i a : 3 soit des prestations qui en tenoient lie u ,
la transcription conservât ¿1 ceux-ci leur droit de préférence
sur les biens aliénés.
Il est vrai que le dernier membre de l’article ajoute ces
expressions louches : à l’effet de quoi le conservateur des
hypothèques fa it inscription sur ses registres. La subtilité
s’en est emparée, et a dit : A l’effet de quoi ! Cela veut dire,
sans aucun doute, que le conservateur fait inscription d 1office, à
l ’effet de conserver le privilège de la créance du vendeur.
Donc ce n’est pas la transcription du contrat qui opère cet
effet, mais seulement l’inscription de la créance.
( 1) Cet a rrê t, également cité dans la note imprimée du sieur Besseyre de quelques
arrêts 6ur la m atière, fut rendu au sujet de la vente de la terre de la T o u rrc tte, en
date du 5 novembre 17 9 0 , conséquemment antérieure de plusieurs années à la loi de
brum aire an 7 , concernant le nouveau régimo hypothécaire. N ous en parlerons avec
plus de détail aux pages i5 et 1/,.
Les arrêts des ifi fructidor an 12 et 16 fructidor an i , cités dans la même note
impriméo du sieur B esseyre, pages i ,e et ?., ont été également rendus dans des espèces
*)ù il s’ugissoit aussi du privilège du vendeur, pour p rix de ventes antérieures à la loi
3
de l ’an 7.
( î) Les articles 2 1 0 1 et 2 10 7 du Code N apoléon , ont la m im e disposition.
�6l\
(9)
Quel!:: pitoyable argutie! quoi! parce qu’une expression
impropre aura échappé au législateur-, parce qu’au lieu de
dire, en conséquence de q u o i, le conservateur sera tenu'de
prendre inscription dans Vintérêt des tiers ; il aura d it, à Veffet
de quoi, le conservateur sera tenu de prendre inscription -,
il sera permis de travestir la loi en ridicule ! de l’entendre
dans un sens qui la rend contradictoire avec elle-même', et
d’y trouver tout à la fois le blanc et le noir ! d’y lire que
la transcription du titre de mutation consen’e , et qu’elle ne
conserve pas le privilège du vendeur! Comment des hommes
aussi sages, d'aussi bons esprits que les conseils du sieur Besseyre,
ont-ils pu hasarder, pour la première fois, ce commentaire
injurieux aux législateurs, dix ans après que l’équivoque sur
laquelle ils jouent, a été levée par l’article 2108 du Code
Napoléon ?
Comment, avec la bonne foi qui guida toujours leur plume,
n’ont-ils pas vu que l’article cité du Code est une explication
trop judicieuse, un développement trop lumineux de l’art. 29
de la loi de brumaire an 7 , pour qu’il reste des doutes à
résoudre? qu’il n’a dérogé en rien, pour le fo n d , h cette pre
mière loi ? qu’il a seulement déterminé le véritable sens dans
lequel elle doit être entendue, lorsqu’après avoir dit, comme
e lle , que le vendeur privilégié conserve son privilège par la
transcription du titre qui a transféré la propriété à Vacquéreur,
et qui constate que la totalité ou partie du prix lui est due,
il ajoute : « A Veffet de q u o i, la transcription du contrat, fa ite
» p ar Vacquéreur, vaudra inscription pour le vendeur; et sera
» néanmoins, le conservateur des hypothèques, tenu, sous peine
» de tous dommages-intérêts envers les tiers, de faire doffice
» l’inscription sur son registre, des créances résultantes de
” l’acte translatif de propriété, tant en faveur du vendeur
» qu’en faveur des prêteurs? »
5
�(io)
Ici l’inscription d'office de la créance du vendeur est pres
crite au conservateur, comme elle l’étoit, dans le même cas, par
l’art. 29 de la loi de brumaire an 7 : n’est-il pas naturel d’en
conclure qu'elle l’est aussi dans le même sens? qu'elle n’avoit,
dans la première lo i, que le même but qui lui est assigné par la
seconde, c’est-ù-dire, d’avertir les tiers qui pourroient con
tracter avec l’acquéreur, de l’existence d’une créance privilégiée
sur l’immeuble ?
La transci’iption de la vente donne déjà cet avertissement,
mais d’une manière qui n’a pas paru au législateur assez
directe , pour mettre à l’abri de toute surprise les tiers, c’est-àdire , les préteurs ou les seconds acquéreurs de bonne fo i,
auxquels il vouloit donner une protection spéciale.
L e premier soin de tout prêteur et de tout nouvel acquéreur,
doués de la prudence la plus ordinaire, est, en effet, de vérifier
sur les registres des inscriptions, s'il en existe ou non qui'
grèvent l’immeuble par lui acquis ou sur lequel on lui donne
hypothèque, avant de se dessaisir, soit du prix de l’acquisition
qu’il fait, soit des deniers qu’il prête; mais presque tous s’en
tiennent à cette première vérification, et très-peu pousseroient
la vigilance jusqu’à vérifier aussi les registres des transcriptions
conservatoires des privilèges des anciens propriétaires , s’jls ne
recevoient pas Yéveil par le registre des inscriptions. C’est pour
cela que le législateur a prescrit aux conservateurs d’accom
pagner la transcription des ventes dont les prix resteroient dûs
en totalité ou en partie, d’une inscription d'office, qui est une
sentinelle avancée que le prêteur et le nouvel acquéreur trou
vent postée sur le registre des inscriptions, qu’ils consultent
toujours nécessairement , et qui les avertit de consulter aussi le
registre des transcriptions auquel elle se réfère. Mais on conçoit
que cet éveil purement officieux, et qui n’est pas prescrit««
vendeur créancier privilégié, à l ’insu duquel il se fait, au
�( 11 )
¿x>
contraire -, qui l’est seulement au fonctionnaire salarié pour
transcrire la vente ; une inscription surérogatoire, enfin, qui
n’est faite que dans l’unique vue de tenir le registre des insci’iptions complet, comme le disoit Yi. le conseiller d’état Jo liv e t,
lors de la discussion de l’art. 2108 du Code Napoléon; on
conçoit, disons-nous, qu’une pareille inscription, totalement
étrangère au prem ier ven deu r, ne sauroit rien ajouter ni re
trancher à sa sûreté.
Lorsque le législateur a fait dépendre d’une inscription la
conservation de l’hypothèque ou du privilège d’une créance,
c’est au créancier qu’il a imposé l’obligation de la requérir,
comme l’indiquoit la raison (1). Conséquemment, l’article 29
de la loi du 1 1 brumaire an 7 avoit suffisamment déclaré que
l’inscription d’office de la créance du premier vendeur, consta
tée par le conti'at de vente soumis à la transcription, n’étoit
pas prescrite pour la conservation du privilège de cette créance,
par cela seul qu’il n’avoit chargé que le conservateur de Veffec
tuer , sans imposer l’obligation au vendeur, ni de la requérir,
ni de veiller à ce qu'elle fût faite, en même temps qu’il déclaroit
positivement son privilège conservé pa r la transcription.
Concluons de là , avec certitude, que l’esprit et le sens de
cet article 29 fut exactement le ‘même que celui de l’article
2108 du Code Napoléon, quoiqu’il y ait quelque différence
dans les expressions entre les deux lois: en un mot, que
l’article 2108 est purement interprétatif de l’article 29 de la
loi de brumaire an 7. Par une suite, dès que le sieur Besseyre
et ses conseils sont forcés de reconnoître que la transcription
seule sullit pour la conservation du privilège du vendeur, sous
le régime du Code Napoléon, sans le secours de l’inscription
5
2 34
4
( 1)
Voir les articles 1 2 , i , 1 6 , 1 7 , 39 et « do la loi du xi brumaire an 7 , et les
articles 2 1 0 9 , a u o , 2 U i ,
i > d e . du Code Napoleon.
�doffice, parce que l’article 2108 en dispose ainsi sans équivoque,
ils doiventreconnoître aussi qu’il en étoit de môme sous le régime
de la loi du 1 1 brumaire an 7 , malgré l’équivoque de sa rédac>
tion, parce que le vrai sens de cet article étoit le même que celui
de l’article 2x08 du Code, qui, encore une fois, n’en est que
le développement ; car ils savent bien que c’est plutôt à l’inten
tion manifeste de la loi qu’il iaut s'attacher dans l’application,
qu’<m sens littéral des termes : Scire leges non hoc est verba
earam tenere, sed vint ac potestatem (1).
E ts i m axim e verba legis hune habeant intellectum, tamen
mens legislatoris aliud vult (2).
L e raisonnement captieux delà consultation délibérée à P ari s,
par lequel ses auteurs ont invoqué l’opinion imposante du
prince Cambacérès, à l’appui de l’interprétation sophistique
qu ils donnent a l’article 29 de la loi de brumaire an 7 , ne
séduira assurément personne.Lorsque Son Altesse s’éleva contre
la première rédaction de l’article 2108 du Code Napoléon,
présentée au Conseil d’état, en ce qu’après y avoir dit que
le vendeur privilégié conserve son privilège par la transcrip
tion du titre qui a transféré la propriété à l’acquéreur, et qui
constate que la totalité ou partie du prix lui est due, il étoit
ajouté ( comme dans l’article 29 de la loi de brumaire an 7 ):
« A reffet de quoi., le conservateur fuit d'office, sur son registre,
» l ’inscription des créances non encore inscrites qui j'ésultent
« de ce titre ; » lorsque Son Altesse s’éleva, disons-nous, contre
ces expressions à Veffet de quoi, qui lui sembloient propres
à faire regarder l’inscription d ’office comme une condition qui
exposeroit la créance du vendeur, si le conservateur étoit négli
gent, la pensée du Prince qui les repoussoit, 11e se portoit
( 1 ) L e g e 1 7 , f f . d e legibus.
3
(2) i , § 2 , f f , de excus. tiit.
�6S
C i3 )
certainement pas sur l’effet qu’elles devoient avoir produit
jusqu’alors dans l’application de la loi de brumaire an 7 , où
elles se trouvoient également : rien.11’autorise à croire, en effet,
que la rédaction de cette première loi fût présente à son esprit.
Il les réprouvoit, ces expressions, dans la loi nouvelle, dont
le projet étoit à la discussion, comme susceptibles d’une inter
prétation qui rendroit cette loi dangereuse et inconséquente,
sans s’occuper aucunement du sens relatif dans lequel les mêmes
expressions avoient-du être entendues par le passé, lorsque
l’occasion d’appliquer l’article 29 de la loi de brumaire an 7
s’étoit présentée. 11 ne s’agissoit pas de cette question transi
toire et relative au p a ssé; mais seulement de {vàxe, pour Vave
nir, une bonne loi, qui ne laissât aucune prise aux cavillations
de la subtilité.
C’est donc par un grand abus du raisonnement, que la consul
tation argumente pour l'interprétation de la loi de l’an 7, sur
lequel la pensée du prince Cambacérès ne se portoit point,
de (juâ cogitatum non est, ce que Son Altesse n’a dit que dans
la discussion du Code civil, qui fixoit seule son attention.
Les auteurs de la consultation n’ont pas raisonné avec plus
de justesse, lorsqu’ils ont appelé, à l’appui de leur opinion
erro n é e , la jurisprudence de la Cour de cassation. Quoique
cette Cour ait payé plus d’ une fois le tribut inévitable de
l’entendement humain à la subtilité, en matière (Vhypothèques,
jamais elle n’a prononcé la nécessité de cumuler la transcription
du contrat de vente avec Vinscription d'office, pour conserver
le privilège du vendeur, sous le régime de la loi de bru
maire an 7.
On l’a déjà dit : ils ont pris absolument à contre - sens
l’arrêt du 17 mai 18 0 9 , qui est leur seul cheval de bataille.
De quoi s’agissoit-il, en effet, dans cette alla ire? Non pas de
6avoir , comme dans Vajfaire présente, par quels moyens se
»
�conservoit, sous la loi de brumaire an 7, le privilège du vendeur,
pour les prix des ventes faites postérieurement à la publication
de cette loi, qui organisa un système hypothécaire tout nouveau;
mais uniquement de savoir comment se conservoit, sous cette
lo i, le privilège du vendeur resté créancier de partie du prix
d’une vente antérieure de huit ans à l’an 7, puisqu’elle étoit du
5 novembre 1790.
O r, qu’ont de commun ces deux questions?
L ’arrêt a sagement décidé,
Premièrement, que le sort du privilège du vendeur, créancier
du prix d’une vente antérieure à la loi du 1 1 brumaire an 7,
étoit soumis à l’article 3g de cette loi, qui avoit prononcé l’ex
tinction de tous les privilèges antérieurs qui ue seroient pas
inscrits au bureau du conservateur dans le délai de trois mois,
et leur conversion en simple hypothèque, laquelle ne devoit
prendre rang que du jour où elle seroit inscrite.
E n second lieu, que le privilège des ayans cause du vendeur
de la terre de la Tourrette, aliénée par contrat du 5 novembre
17 9 0 , s’étoit éteint, et avoit dégénéré en simple hypothèque,
faute par ces créanciers, originairement privilégiés, de n’avoir
requis, dans le délai fatal de trois mois, ni l’inscription de leur
créance, ni la transcription du titre de mutation qui en auroit
tenu lieu.
Troisièmement, que l’article 29 delà loi de brumaire, qui
conservoit le privilège du vendeur par la transcription, ne con
cernait que les mutations h faire à l’avenir, et que dès lors la
transcription tardive de la vente du 5 novembre 1790, qui
n’avoit été requise que le 16 thermidor an 1 2 , non plus que
Vinscription d ’ojjice de môme date, qui l’avoit accompagnée,
ne sauroient avoir produit l'effet de rendre l'existence à un
droit de privilège que la loi avoit anéanti.
�(l5)
'
.& ■
Quatrièmement, enfin, que la créance, dont le privilège avoit
dégénéré en simple hypothèque, qui, aux termes de l’article 39
de la loi de l’an 7, ne devoit avoir rang qu’à compter de sa datej
étoit primée par la créance de la femme de l’acquéreur, qui •
avoit pris inscription sur son époux, le 6Jlo réal an 7.
R ien de plus conforme à la loi que ces dispositions} mais aussi
Tien de plus étranger à la question présente, où il s’agit du p ri
vilège du vendeur, pour le prix d’une vente du 24 prairial an 10 ,
postérieure, de plus de trois ans et demi, à la loi de brumaire
an 7, et qui fut transcrite, six jours après sa date, le 3o du même
mois. Certes, on ne dira pas ici, comme dans l’affaire jugée par
l'arrêt du 17 mai 1809, que la transcription fut tardive, et ne
peut pas faire revivre un privilège éteint *, il faudroit pour cela
qu’elle n’eût été faite que postérieurement à la transcription du
contrat de revente fait au sieur Besseyre: o r, elle l’a précédé
de plus de trois ans. Vouloir assimiler deux espèces si dispa
rates, c’est, en vérité, une distraction trop forte, pour ne pas
étonner.
Après avoir ainsi Forcé le sieur Besseyre, jusque dans son
dernier retranchement sur ce premier point de droit5 après
avoir dissipé tous les nuages qu’il a essayé de répandre sur cette
vérité d’une évidence palpable, que la transcription du titre de
mutation avoit, sous la loi de brumaire an 7, la vertu de con
server seule, et sans le secours de l’inscription d ’office, le privi
lège du vendeur, comme elle l’a sous le régime du Code
Napoléon, nous pourrions nous arrêter, et nous dispenser de
justifier la régularité de l'inscription d'office, qui accompagna
la transcription de la vente du 24 prairial an 10 , superflue au
èicur G eneix, et uniquement faite dans l’intérêt des tiers. Néan
moins, pour ne rien négliger dans une affaire à laquelle l’esprit
de parti a donné, dans l’opinion publique, une importance
qu’elle ne sonibloit pas mériter, nous allons voir que la critique,
�( »6 )
qu’a faite le sieur Besseyre, de cette inscription, est tout aussi
pitoyable que les sophismes qu’il a accumulés, pour faire croire
à la nécessité de cette mesure conservatoire.
S econd
moyen
de
droit.
L ’inscription d’office, qui fut prise par le conservateur le
3o prairial an 10 , lors de la transcription de la vente du
24 du même m ois, est nulle, nous dit-on : toute inscription
doit, à peine de nullité, indiquer la situation de l’immeuble
hypothéqué, ce qui doit s’entendre de la véritable situation.
L ’inscription d ’office, du 3o prairial an 10 , pèche en ce point,
puisqu’elle place dans les dépendances de Clermont le domaine
des Roches-du-Séminaire, sur lequel elle fut prise, tandis qu’il
est situé dans la commune de Chamalières.
Que cette cavillation est puérile ! Gomme si une erreur de
fa it involontaire, et sans mauvais dessein, pouvoit jamais être
fatale, lorsqu’elle ne nuit à personne! On dit, en général, que
l’erreur de droit n'excuse pas, et que Verreur de fa it ne nuit
jam ais. Ces deux règles ne sont pas toujours vraies; mais elles
reçoivent peu d’exceptions., principalement celle qui veut que
Verreur de fa it ne nuise pas à celui qui la commet involontaire
ment et sans fraude,, lorsqu’elle ne préjudicie à personne (1).
O r, telle est Terreur sur la situation des Rochcs-du-Sém in a ire
à Clermont y qui se glissa dans la revente de ce domaine national,
( 1) P a r ce m o tif , i° . un arrêt de la Cour impériale do M e tz , du 12 juillet 1 8 1 1 , a
jugé , 1 • que l’erreur d’une année, dans la date du titre , n'annuité pas l’inscription ;
2 . qu’il en est de môme de l’erreur commijo dans l’indication.de lepoquo de l'exigi~
bilité anticipée d’un an.
85
2 0. Un précédent arrêt de la Cour de R o u en , du 14 novembre i o , avoit jugé
qu’une inscription n’est pas nulle, quoiquo le créancier y ait été désigné sous d’autres
prénoms que les siens, lorsqu'il n'y a aucun doute sur l'identité.
�(17)
que fit le sieur Geneix au sieur Debens, le 24 prairial an 10 ,
où il fut dit que ce domaine étoit situé dans les dépendances de
Clermont, et qui passa inévitablement dans l’inscription (f office ,
lors de la transcription de cet acte de mutation, qui en fu t le
type. On se flatte d’avoir démontré jusqu’à l’évidence, aux pages 5
et 6 ci-dessus, qu’elle ne pouvoit nuire à personne, tromper per
sonne, et qu’elle n’a point induit le Sr Besseyre en erreur (1).
Nous sommes donc en droit d’en conclure que les arguties de
ce tiers-acquéreur imprudent, pour échapper aux poursuites
hypothécaires du sieur G e n e ix , par la nullité imaginaire de
l’inscription d 'o ffice, dont il dédaigna l’avertissement, ne sauroient faire la plus légère impression sur des Magistrats qui
surent toujours se mettre en garde contre les prestiges et les
jeux de mots de la subtilité.
La collection insignifiante des nombreux arrêts que le sieur
Besseyre a publiés, pour fa ire preuve du rigorisme de la juris
prudence, qui déplace les propriétés pour un zeste en matière
d’hypothèques , n’en imposei-a pas davantage. Il suffit, pour
écarter son influence, de dire qu’aucun de ces nombreux arrêts
n’a de rapport,' ni prochain, ni éloigné, avec la question à juger
dans l’affaire présente, si ce n’est ceux des 17 mars 1809, 16
fructidor an 12 , et 16 fructidor an. i3 , cités aux pages i re
(0
L e S r Besseyre voudroit faire croire que cette fausse indication fut faite à dessein,
attendu qu e, si le S ' Geneix: avoit été induit en erreur par la revente que lui consentit
M arle t, prem ier adjudicataire, où la même inexactitude se tro u ve, il avoit bien eu le temps
d etre détrompé par une jouissance de dix an s, pendant lesquels il avoit payé l’impôt foncier
à Cliamalières. M ais qui ne voit que si Vindication fautive de la situation de l ’im m euble,
échappée par inadvertance dans le contrat d’acquisition du sieur G en eix, fut répétée
dans l’acte de revente qu’il consentit au sieur Debons, ce ne fut pas par le fait du sieur
G e n e ix , mais seulement par lo fait du n o taire, qui copia servilement, dans la seconde
revente , l’indication do la situation dans les dépendances de Clermont, qu’il lisoit dans
la prem ière, sans prendre garde à la m ép rise, et que l’on ne pout rien en conclura
•contre la bonno foi du siour G eneix, qui n’y avoit aucun intérêt, ni présent ni éloigné,?
*
�( i8 )
et 2*. O r, nous avons victorieusement écarté leur application à
l’espèce, en observant aux pages g et 17 qu’ils n’ont jugé la
nécessité de Vinscription pour conserver le privilège du ven
deur, que pour les ventes antérieures à la loi du 1 1 brumaire
an 7.
Enfin, la Cour repoussera avec d’autant moins d’hésitation
les tentations importunes qui l’obsèdent, que la victoire qu’elle
accorderoit au sieur Besseyre, ne sei’oit qu’un triomphe d’un
jour ; car s’il échappoit aux poursuites hypothécaires du sieur
Geneix , il seroit bientôt forcé de céder à la demande en
résiliation du contrat de vente du 24 prairial an 10 , et de
toutes les reventes qui l’ont suivi, à défaut de payement du
prix de la première, que le sieur Geneix ne manqueroit pas
de former le lendemain de ¡’infirmation du jugement de Clermont, sur le sort duquel la Cour va prononcer.
L ’arrêt de la Cour, du vendredi 17 novembre dernier 18 12 ,
confirmatif d’un jugement de Clermont, du i 5 décembre 1808,
rendu sur la plaidoirie de M c Beille et de M e Vissac, lui assu
rerait le succès de sa nouvelle attaque, s’il falloit en venir là.
Il a été rendu entre les sieurs Rochefort et imtres héritiers
Thomas, créanciers de Claude Rodier, prem ier acquéreur, par
contrat du 18 juin 17 9 3 , de la maison Thomas, située à Cler
mont, à la charge d’acquitter, en diminution du p rix , diffé
rentes rentes qu’il n’acquittoit pas. Louis Dupic et Magdeleine
V crd ier, seconds acquéreurs, qui n’avoient pas été chargés
de ces rentes, avoient fait transcrire leurs titres de mutation;
celui de Rodier ne l’avoit pas été ; les créanciers des rentes délé
g u é e s n’avoient pas fait d’enchères. Fondés sur cette négligence,
les derniers acquéreurs se croyoient h l'abri d’atteinte. li é bien!
les héritiers Thomas demandent la résiliation de la vente du 18
juin 1793, contre Rodier, acquéreur, faute de payement inté
gral du prix, ainsi que des reventes contre Dupic et la Verdier,
�j!
( 19 )
veuve Guiné. Cette résiliation est prononcée à Clermont, maigre
tous les efforts des derniers acquéreurs; et sur l’appel, le juge
ment est confirmé p a r la Cour (1).
Voilà le sort qui attend le sieur Besseyre, s’il a le succès dont
il se flatte contre le sieur Geneix dans la contestation actuelle.
Que gagneroit-il donc en obtenant l’infirmation du jugement
dont il est appelant ? R ie n , puisqu’une nouvelle attaque, pire
dans ses conséquences que la prem ière, succéderoit aussitôt
Une Cour souveraine, que la sagesse inspire, pourroit-elle jeter
les parties dans ce circuit d’actions, qui n’auroit pour résultat
qu’une multiplication inutile de frais pour arriver au même but?
Que conclure de là? Que l’intérêt du sieur Besseyre luimême se réunit à l’intérêt de la justice, pour solliciter de la
sagesse de la Cour, la confirmation d’un jugement que la tracas
serie seule attaque.
Telle est l’opinion des jurisconsultes anciens soussignés.
D é lib é r é à Clermont-Ferrand, le 16 mai 18 1 3 .
B E R G IE R .
D A R T IS , B E IL L E - B E R G IE R .
( 1) Pareils arrêts, 1 °. de la Cour de Rouen, du 14 décembre 1808 ; 2 0, de la Cour
impériale de Paris, du 14 août 18 12 .
A. C L E R M O N T , de l'imprimerie de L à n d r i o t , Imprimeur de la
Préfecture, et Libraire, grande rue St.-Genès.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Blaise. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Dartis
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Justification du jugement rendu au Tribunal civil de Clermont, le 8 juillet 1812, entre sieur Blaise Geneix, poursuivant, en la forme autorisée par l'art. 2169 du Code Napoléon, le payement de la somme capitale de 10,000 fr. et des intérêts, dont il reste créancier, sur le prix de la revente qu'il fit au sieur Debens, le 24 prairial an 10, du domaine (ou maison de plaisance) des Roches-du-Séminaire de Clermont, intimé ; et le sieur Besseyr, troisième acquéreur, et détenteur actuel de cet immeuble, appelant.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2104
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
BCU_Factums_G2108
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53398/BCU_Factums_G2102.pdf
783fa343b9c25932410c88bef44f2439
PDF Text
Text
CONSULTATION.
L E C O N SE IL S O U S S IG N É , qui a pris lecture des
pièces et procédures d’une contestation pendante en la
Cour impériale de R iom , entre le sieur Etienne-Joseph
B e s s e y r e , appelant d’un jugement rendu au tribunal
de première instance de Clermont, le 8 juillet 1 8 1 2 , et
le sieur B laise G e n e i x , intim é;
E s t i m e que le sieur Geneix n’est pas fondé à réclamer
un privilège sur le domaine des Roches, appartenant au
sieur Besseyre.
En effet, le sieur Besseyre a acquis du sieur Guillemin,
par acte du 10 fructidor an 1 3 , un bien appelé des Roches ,
sis dans les dépendances de Chamalières lequel bien
le sieur Guillemin avoit acquis du sieur Debens, et du
général Joba et sa femme, par acte du 21 vendémiaire
an I I .
L e sieur Besseyre a fait transcrire son contrat au bureau
des hypothèques de l’arrondissement, le 4 frimaire an 14.
. L e sie u r Geneix réclame un privilège sur ce domaine,
en vertu de deux inscriptions;
L ’ une, du 30 prairial an 10 , prise d’office par le con
servateur, contre le sieur-Debens, sur la .terre des Roches,
située dans les dépendances de Clerm ont , pour une
somme de 10,000 l i v ., principal resté dû sur une vente
ou subrogation faite par acte du .24 prairial an 10.
1
�L ’autre inscription, qui est du n mars 1 8 1 2 , a été
prise par le sieur G eneix, en renouvellement de la pre
mière, de même contre le sieur Debens, et sur le domaine
des Roches ; mais il est dit situé dans les dépendances
de Chamalières.
L e sieur Besseyre soutient que la première inscription 7
à laquelle seule on doit avoir égard , parce que la der
nière n’en est que le renouvellement, et d’ailleurs est
bien postérieure à la transcription de son contrat d’ac
quisition; il soutient, disons-nous, que cette première
inscription n’est point applicable au domaine qu’il a
acquis , qu’il n’y a point d’identité, puisqu’elle a été
prise sur un domaine situé dans les dépendances de
Clermont , et que celui qu’il a. acquis est situé dans les
dépendances de Chamalières.
.< En tout cas, qu’il y auroit vice de désignation, et
même équivoque, parce qu’il existe un autre domaine
des Rocher , et qui est réellement situé dans les dé
pendances de Clermont.
A cela le sieur Geneix répond que-la transcription
de son contrat a valu inscription, et a assuré ses droitsSu b sid iuii*em cn t 7 il s o u tie n t q u e l ’ in scv ip tio n est ré
gulière.
, E t finalement, que quand elle seroit irrégulière, s’a gissant d’une inscription d’office, et non de son fait, on;
ne pourroit lui en opppser l’irrégularité.
Tout cela ne æcltsi paroît pus' fondé ; nous allons en
déduire les raisons. ;
1°. Loin de v o ir, dans la loi du 1 1 brumaire an 7 ,
sous l’empire de laquelle a été prise l’inscription donfl
�ïl s’agit, que la transcription du ‘cohtrat vaut inscrip
tion pour le vendeur, qui reste créancier de tout ou
partie du prix de vente , nous y voyons tout le contraire.
Elle pose, par l’article 2 , la règle générale pour les
hypothèques et les privilèges ; elle porte que l’hypothè«jue ne prend rang, et les privilèges sur les immeubles
rCont d'effet que p ar leur inscription dans les registres
publics à ce destinés.
E lle ne fait qu’une seule exception à ce principe :
Sauf, est-il d it, les exceptions autorisées par l’art, i t .
E t il n’est point question, dans cet article, du privilège
du vendeur.
L a loi n’en parle, pour la première fois , qu’à l’ art. 14 .
Cet article porte que « les créanciers ayant privilège
« ou hypothèque sur un immeuble , peuvent le suivre
« dans quelques mains qu’il se trouve , pour être payés
« et colloqués sur le p r ix , dans l’ordre suivant. *
E t au n°. 3 , on lit :
« L e s précédens propriétaires, ou leurs ayans-cause,
'« dont les droits auront été maintenus, selon lesform es
« indiquées par la présente , pour ce qui leur restera
« dû du p rix , ou pour les charges qui en tiendront
« lieu. »
La loi annonce, comme on le v o it, des fo rm es pour
maintenir les droits des propriétaires. E t quelles sont
ces formes ? On va le voir par l’article 29 : voici com
ment il est conçu.
« Lorsque le titre de mutation constate qu’il est dû
« au précédent propriétaire ou à. ses ayans-cause, soit
« la totalité du prix , soit des prestations qui en tiennent
�«
«
«
«
«
( 4 )
lie n , la transcription conserve *à ceux-ci le droit de
préférence sur les biens aliénés; ¿1 îeffet de quoi le
conservateur des hypothèques fa it inscription , sur
ses registres, des créances non encore inscrites qui
en résulteraient. »
Nous ne pouvons voir dans cette disposition , et nous
ne concevons pas comment on peut y voir que la trans
cription vaut inscription pour le vendeur. On ne peut
pas contester raisonnablement que l’inscription d’office,
dont elle parle, ne soit prescrite pour la conservation
des droits du vendeur. Cela est littéralement écrit dans
la loi. O r, si elle est prescrite à cet effet , elle est donc
nécessaire : la transcription ne vaut pas inscription.
Enfin , l’article 39 , concernant les hypothèques et pri
vilèges du passé, veut que les privilèges comme les hy-*
pothèques soient inscrits dans les trois mois; sinon, estil dit, iis dégénéreront en simple hypothèque , et iïa u
ront de rang que du jour de leur inscription.
E t la Cour de cassation a jugé plusieurs fois que cela
ctoit applicable au privilège du vendeur, notamment
par un arrêt du 17 mai 1809, rapporté au Journal de
jurisprudence, parD enevers, année 18 0 9 , poge 212.
Il s’agissoit, dans l’espèce, d’un contrat de vente du 5
novembre 17 9 0 , qui 11’avoit été transcrit que le 16 ther
midor an 1 2 , postérieurement à une inscription prise
par un autre créancier.
E t le vendeur ou ses nyans-cause n’avoient pris euxmêmes inscription que le 9 vendémiaire an 13.
.11 fut jugé qu’ils étoicnt primés par le créancier plus
diligent.
�( 5)
33
« La lo i, dit la Cour clans ses molifs, comprend évi
te demment le privilège du. vendeur, puisqu’elle ne fait
« à cet égard'aucune distinction, ■puisque d'ailleurs la
« privilège du vendeur ii'estpas au nombre de ceux que
« parles articles n et 1 2 , elle a dispensés de laforrna« lité de Tinscription. » mi
r
Voilà les dispositions de la loi du 1 1 brum aire, con
cernant le privilège du vendeur.
Il nous paroît, nous le répétons, qu’elles établissent
formellement la nécessité d’une inscription pour la con
servation de ce privilège.
^
>
Mais s’il peut encore rester quelques doutes, ils devront
cesser lorsque nous aurons fait connoître la discussion
qui a eu lieu au Conseil d’état, sur la rédaction de l’ar
ticle 2108 du Code Napoléon.
Voici comment étoit conçu le projet qui fut présenté
à la discussion :
,
« L e vendeur privilégié conserve son privilège par
« la transcription du titre qui a transféré la propriété
« à l’acquéreur, et qui constate que la totalité ou partie
cc du p rix lui est due; à l’effét de quoi, le consérva
te
«
«
«
«
teur fait d’oifice l’inscription, sur son registre, des
créances non encore inscrites qui résultent de ce titre.
( Le vendeur peut aussi faire faire la transcription du
contrat de vente, à l’effet d’acquérir l’iuscription de
ce qui lui est dû à lui-même sur le prix. ) »
A l’exception de cette dernière phrase, l’article pro
jeté n’étoit, comme on le v o it, qu’une copie de l’a r
ticle 29 de la loi du 1 1 brumaire. Il portoit de moine que
Ia transcription conservoit le privilège du vendeur j de
�m
même il prescrivoit au conservateur d éfa ire une ins
cription d'office à cet effet.
E t l’on va voir comment ces dispositions furent en
tendues.
« L e consul Cambacérès, porte le procès verbal, trouve
« la disposition de cet article fort sage. Il voudroit ce« pendant que Veffet ne dépendit pas de Veooactitude du,
« conservateur.
« Il est inutile, c o n tin u e -t-il, de faire inscrire la
« créance du vendeur, afin que chacun sache que l’im« meuble est grevé, et qu’il n’y ait pas de surprise. Quand
« la transcription atteste que le prix n’a pas été payé
« en entier, le public est suffisamment averti : ni les
« acquéreurs, ni les prêteurs ne peuvent plus être trom*« pés. Toute inscription particulière devient donc inu* tile; et il n’y a pas de motifs d'en fa ir e une condition
« qui expose la créance du vendeur, si le conservateur
« est négligent. »
Cette opinion sur le sens de l’article présenté ne fut
point contestée.
A u contraire, on ne s’occupa que de pourvoir à l’in
convénient prévu.
M . Treiîhard proposa de déclarer que la transcrip
tion vaudroit inscription pour la partie du prix qui
ri!aurait pas été payée.
M . Jollivet demanda que le conservateur fut néan
moins obligé de prendre une inscription, sans que ce
pendant l’omission de cette formalité nuisît à la con
servation du privilège.
E t ces deux propositions ayant été adoptées, l’article
fut rédigé ainsi qu’on le voit aujourd’hui.
�(7)
P e là il résulte que l’on jugea que, suivant le projet;
d’article qui n’étoit, comme nous l’avons dit, qu’une co
pie de la disposition de la loi du n brumaire, la trans
cription ne valoit pas inscription, et qu’il falloit une ins
cription d’office pour conserver les droits du vendeur,
puisque l’on ajouta que la transcription •vaudroit ins
cription.
Il est à remarquer aussi qu’ on ne pensa pas, comme1
le consul, que la transcription suffisoit pour avertir les
acquéreurs et les prêteurs, puisque dans la rédaction
de l’article, on exigea une inscription d’ofîice dans l’in
térêt des tiers.
Tout cela nous est confirmé par M . le sénateur comte
de Malle ville , dans son analise sur'l’article 2108.
A près avoir dit qu’il n’étoit question, dans le projet,
que du vendeur, et non du prêteur, et qu’on étendit
la disposition à ce dernier, il continue et dit :
« Dans ce projet, on àvoit encoreJ'ait dépendre en
« quelque sorte la conservation du privilège du ven« deur, de Vexactitude du conservateur , qu on chargeoit
« defa ir e Vinscription de la créance du vendeur sur sort
« registre.
'■
« Ce vico fut corrigé, et cependant, pour l’instruction
« des tiers , et pour que le registre des inscriptions fût*
« coinplet, on obligea le conservateur, sous sa respon« sabilité, à. faire l’ inscription d’office.
« Cet article, ajoutc-t-il, est une amélioration à la
« loi de brumaire , qui ne parloit pas de tout cela . »
D ’aprôs ces explications, on no peut douter que sous
l’empirîe de la loi de brumaire, la transcription n’avoit
�m
pas l’effet de valoir inscription pour le vendeur, mais
qu’il falloit une inscription pour conserver ses droits. J t
Veffet de q u o i , etc., dit la loi de brumaire.
A u reste, cette discussion nous paroît être à peu près
inutile.
En effet, il existe dans l’espèce une inscription d’of
fice, et l’on ne peut contester du moins qu’elle n’ait été
prise pour la conservation des droits du vendeur. Il
faut donc juger le mérite de cette inscription; il faut
juger la question de l’affaire, et non une autre.
D ’ailleurs, comme on vient de le vo ir, ce n’est pas
la transcription , c’est l’inscription seule qui est censée
avertir les tiers ,* c’est pour e u x , et dans leur intérêt,
qu’elle est prescrite en tous les cas. Quand donc il existe
une inscription , c’est uniquement à cette inscription
qu’il faut s’arrêter.
Enfin, l’inscription étant conforme au contrat, si elle
est irrégulière, la transcription participe du même vice,
et ne peut avoir plus d’effet.
A tous égards donc, vil ne peut être question que du
mérite de cette inscription.
C ’est la seconde question que nous avons à exam iner:
2 °. L e moyen de nullité, opposé contre l’inscription,
est pris de l’article 17 de la loi du 1 1 brumaire.
Suivant cet article, toute inscription doit contenir,
entr’autres choses, t*indication de fespèce et de la situa
tion des biens sur lesquels le créancier entend conserver
son hypothèque ou privilège. . ,
.
t \
Même disposition dans le, Code Napoléon , qrt. 2129.
Q ue cette fo rm alité soit essen tielle; pt q u ç 's o n inob-
servati on
�(9 )
servation entraîne la nullité de rinscription , c’est ce qui
n’est pas douteux. Il n’y a rien de plus important que
de faire connoître d’une manière certaine, l’immeuble sur
lequel on entend conserver une hypothèque ou un pri
vilège : c’est la première chose à faire. Autrement,
ceux qui auroient à traiter avec le propriétaire, pourroient être induits en erreur.
L a question s’est présentée plusieurs fois à la Cour
de cassation, et toujours elle a jugé que des inscriptions
qui ne contenoient pas une désignation parfaite de l’es
pèce et de la situation des biens, étoient irrégulières
et nulles.
Nous nous bornerons à faire connoître un de ces arrêts.
En voici l’espèce :
Les sieurs Dupont et Delhon avoient pris des inscrip
tions contre le sieur Cousinet, leur débiteur, les 4 et
9 prairial an 7 ;
L ’u n , conformément à son titre, sur tous ses biens
présens et à v e n ir , et notamment sur les biens q u il
possédoit dans rétendue du bureau des hypothèques
établi à M uret ;
E t l’autre, aussi suivant son titre, sur tous ses biens
situés dans les communes de Pinsaguet et de Roques.
Les biens du débiteur ayant été vendus par expro
priation, et l’ordre étant ouvert, ces inscriptions furent
contestées par un créancier postérieur, le sieur Molles.
Il les soutint vicieuses l’une et l’autre ; par le défaut
de désignation de l’espèce des biens.
Il opposa encore ^particulièrement contre celle du sieur
2
�Delhon, qu’il y ayoit erreur sur la situation des biens',
parce que Cousinet n’en possédoit aucun dans la com
mune de Roques, qui étoit indiquée dans l’inscription.
Ces moyens ne furent accueillis, ni par le tribunal de
M u ret, ni par la Cour impériale de Toulouse.
Mais le sieur Molles se pourvut en cassation.
E t la Cour de cassation, par arrêt rendu au rapport
de M . Gaudon, le 23 août 180 8, cassa l’arrêt de la Cour
impériale de Toulouse.
Elle considéra, entre autres choses, « que les articles
« 4 et 17 de la loi du 1 1 brumaire an 7 exigent Tin
te dication de la nature et de l’espèce des biens hypo^
« théqués; que la volonté du législateur est d’autant
« moins incertaine, qu’il l’a exprimée de nouveau dans
« l’article 2129 du Code Napoléon ; qu’une convention
« d’hypothèque, et des inscriptions qui ne remplissent
« d'aucune manière une des form alités essentielles
u exigées par la loi, sont nulles, et q u e , p ar conséa quent , elles ne peuvent profiter des avantages que la
« loi n'accorde qu'aux conventions , et aux inscrip« tions conformes à ce quelle prescrit. »
Cet arret est rapporte an Journal îles audiences, par
D enevers, année 18 0 8 , page 4 12 .
Dans l’espèce de l’affaire présente , l’inscription ne
pèche pas par un défaut d’indication de l’espèce, mais
bien de la situation des immeubles auxquels ou veut en
faire l’application.
E lle est prise sur la terre des Roches, située dajis
les dépendances de Clermont.
�( II )
^
E t le domaine acquis par le sieur Besseyre, auquel
on prétend l’appliquer, est situé, au contraire, dans les
dépendances de Chamalières.
Il n’y a donc pas d’identité.
Bien p lu s, on a sout.enu pour le sieur Besseyre , et \
il est avoué par le sieur G eneix, qu’il existe un autre
domaine des R o c h es , lequel est réellement situé dans
les dépendances de Clermont.
En sorte, qu’à moins d’une vérification de l’espèce
des dépendances de l’ un et de l’autre domaine, et en
ne considérant que l’inscription, il faudroit plutôt l’ap
pliquer à cet autre domaine, qu’à celui acquis par le
sieur Besseyre.
Il y a donc un double vice dans cette inscription :
erreur sur la situation , et équivoque sur l’immeuble
hypothéqué.
A cela on a fait plusieurs réponses pour le sieur Geneix.
D ’abord on a voulu faire considérer le lieu de Chamalières , comme une dépendance de Clermont.
Mais cela u’est pas exact; c’est une commune distincte,
qui a sa municipalité et son rôle particulier de contri
butions. L e procès verbal de saisie immobilière en fournit
la preuve ; il contient un extrait de ce rôle ; et l’on y
voit qu’en l’absence du sieur Besseyre , la copie de la
saisie a été laissée à l’adjoint du maire.
Ou a dit ensuite que les deux domaines étoient dis
tingués par des dénominations différentes ; que celui du
sieur Besseyre étoit connu sous le nom des Roches du
Sém inaire, et l’autre des Roches Galouby.
Il se p eu t, en effet, que le domaine du sieur Bes-*
2 *
�seyre, qui a appartenu autrefois au sém inaire, en ait
pris le nom , et ait été appelé les Roches du Séminaire,
tant que le séminaire l’a possédé. Mais il paroît que
cette dénomination a cessé, car elle n’est rappelée ni dans
le contrat de vente fait par le sieur Debens au sieur
Guillem in, ni dans celui fait par ce dernier au sieur
Besseyre. L e domaine n’est indiqué dans l’un et dans
l ’autre que par le nom des R oches, et par sa situation.
Quant ù l’autre domaine des Roches , on ne voit rien
qui justifie qu’il ait le surnom des Galouby.
E n fin , on a dit que le sieur Besseyre, ayant reçu du
sieur Guillem in, son vendeur, les titres de propriété du
domaine des Roches, a dû connoître la créance du sieur
Geneix.
Mais on a répondu, d’après le contrat, que le sieur
Guillemin ne lui a remis que ceux qui étoient en son
pouvoir. E t quels étoient ces titres? C’est ce qu’on ne
Toit pas.
On peut ajouter qu’en tout cas la remise n’en a été
faite au sieur Besseyre que lors de la passation de l’acte,
qu’il n’a pu en prendre connoissance qu’après, et que
cette connoissance auroit été tardive et inutile, puisqu’il
avoit payé le prix de son acquisition.
Tout ce qu’on peut opposer de plus fort au sieur
Besseyre, c’est qu’il est d’usage que celui qui veut vendre,
communique ses titres h celui qui veut acquérir.
M ais si cela a eu lie u , il faut croire qu’on n’a pas
donné communication au sieur Besseyre du contrat de
vente fait par le sieur Geneix au sieur Debens; car, s’il
«voit eu connoissance de la créance du sieur G eneix,
%
�pour restant de p rix de vente, il n’ariroit pas payé â son
vendeur, quelque solide que parût alors sa fortune, la
totalité de son prix.
Il faut croire que le sieur Guillemin ne lui a fait connoître que son contrat d’acquisition du sieur Debens et
de la dame Jo b a , lequel ne parle d’aucune créance de
propriétaire antérieur, et en exclut même toute idée,
puisque le prix entier est stipulé payable aux vendeurs.
En un m ot, on ne peut pas supposer de mauvaise
foi au sieur Besseyre ; elle est invraisemblable ; il auroit
agi contre son propre intérêt.
i En nous résumant, en ce qui concerne l’inscription,
nous estimons qu’elle est irrégulière, et ne remplit pas
le vœu de la loi.
3 ° . Si elle est irrégulière, il faut l’annuller, c’en est
la conséquence nécessaire.
Peu importe qu’il s’agisse d’une inscription d’office. L a
loi est générale ; il n’y a point d’exception,' et l’on n’a
pas dû en faire, parce que toutes les espèces d’inscriptions
ayant le même objet, doivent être conçues dans la même
forme.
- D ’ailleurs, le conservateur n’a pris cette inscription
que d’après le contrat, et conformément à ses énoncia
tions. Il a indiqué la situation du domaine telle qu’elle
est déclarée dans l’acte de vente. L e vice qui s’y trouve
vient de l’acte môme. O r , cet acte est l’ouvrage du sieur
Geneix; c’est donc sur lu i, en dernière analise, que re
tombe l’irrégularité.
Inutilement a-t-on dit qu’il a vendu comme il a acheté,
�( *4 )
que la même énonciation vicieuse se trouve dans la vente
qui lui a été faite.
Cela pouvoit être sans inconvénient alors. C’étoit un
domaine acquis de la nation; il n’y avoit ni transcription
à faire, ni même de lettres de ratification à obtenir. Les
biens nationaux étoient vendus francs et libres de toute
hypothèque.
Mais il en étoit autrement quand, en l’an 1 0 , le sieur
Geneix a revendu ce même domaine au sieur Debens,
et qu’il est resté créancier d’une partie du prix ; il a dû
savoir que pour conserver un privilège à raison de cette
créance, en cas de transcription par son acquéreur, il
falloit que la véritable situation du domaine fût énoncée,
tant pour la régularité de la transcription, que pour la
validité de l’inscription d’office à prendre, à l’effet de
conserver son privilège. S ’il ne l’a pas fa it, c’est négli
gence de sa p art, et lui seul doit porter la peine de sa
négligence : elle ne peut pas nuire à un tiers qui a con
tracté de bonne foi avec un propriétaire ultérieur.
Nous pouvons confirmer ceci par un arrêt de la Cour
d’appel de P aris, du 5 décembre 1 8 1 1 , rapporté par
M- Sirey, dans son Recueil de jurisprudence, année 1 8 1 1,
page 259.
Il s’agissoit d’une inscription prise le 13 septembre 1806,
par un sieur Courault , sur les biens de dame Agla6
d’Aulnoy , femme divorcée de la Valette, sa débitrice.
Peu de temps après, cette dame vendit tous ses biens
meubles et immeubles au sieur M ille, et prit dans l’aclo
\es noms d\Aglao Charlary de llo u vrcs; elle omit celui
�de (TAuînoy, mais, à ce qu’il paroît, sans intention de
fraude.
L e contrat fut présenté à la transcription, et le con
servateur, qui ne vit point le nom de d’Aulnoy , délivra
lin certificat de non-inscription.
Mais ensuite, le sieur Mille ayant revendu ces mêmes
biens aux sieurs Laborde et Semezis, et ayant énoncé
dans l’acte tous les noms de sa venderesse, lorsque les
sieurs Laborde et Semezis firent transcrire leur contrat,
le conservateur délivra extrait de l’inscription du sieur
Courault.
De là contestation.
Les acquéreurs se pourvurent en radiation de l’ins
cription ;
E t le sieur Courault en recours et garantie, tant
contre le conservateur que contre la dame cdAulnoy.
Il s’agissoit de savoir si les biens vendus pouvoient être
grevés de l’hypothèque du sieur Courault;
Et , au cas contraire, contre qui le sieur Courault pouvoit avoir recours.
La Cour d’appel jugea que la transcription du contrat
du sieur Mille avoit affranchi les biens de l’hypothèque.
Elle jugea encore qu’il n’y avoit pas de faute de la
part du conservateur , parce qu’il avoit été induit en
erreur par le contrat.
Et comme cette erreur étoit le fait de la dame d’A ulnoy,
elle fut condamnée à payer au sieur Courault le mon
tant de sa créance.
,
A in si, il fut jugé que cette dame étoit responsable de
l’omission d'un de ses uoms; dans la vente qu’elle avoit
�( 16 )
faite, et par suite de l’erreur involontaire du conservateur.
Cette décision est marquée au coin de la sagesse et de
la justice, et la Cour impériale de Riom ne peut mieux
faire que de la prendre pour guide.
E lle doit juger de même que le sieur Geneix est res
ponsable de l’erreur qu’il a commise, par rapport à la
situation des biens, dans la vente qu’il a faite au sieur
Debens , ainsi que des vices de l’inscription qui a été
prise par le conservateur, en conséquence du contrat.
D é l i b é r é à Paris le 1 6 mars 18 13 .
B O U C H E R E A U , G U IC H A R D ,
Avocats à la Cour de cassation.
À R lO M de l’imp. d e TH IBA U D , imprim. de la Cour Impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Mars 1813
�
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Title
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bouchereau
Guichard
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2102
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53398/BCU_Factums_G2102.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
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f901c5a312c03699069c688b53002ba7
PDF Text
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PRECIS
i
s
POUR
Sieur
B E S S E Y R E , propriétaire, habi
tant à Clermont, appelant;
J
oseph
CONTRE
t
Sieur
G E N E I X , aussi propriétaire ,
habitant la même ville i n t i m é .
B
l a is e
L E sieur Besseyre, acquéreur, en l’an 13, d’une pro
priété appelée les Roches, située dans les dépendances
de Cham alière, ne vit aucune inscription sur cet im
meuble, et en paya le prix comptant.
Il a demeuré paisible possesseur, jusqu’au 10 sep
tembre 1811 , sans être troublé par personne.
A cette époque, il a reçu du sieur Geneix une som-
A
�( 2 )
mation de lui payer 13,600 francs, ou de délaisser l’im
meuble.
v
II y a formé opposition.
Ces poursuites avoient pour fondement une inscrip^
tion de 13 ,5oo francs , prise, le 30 prairial an 10 , sur le
bien des Roches, situé dans les dépendances de Clermont.
L e sieur Besseyre en a demandé la nullité, aux ris
ques et périls de ses vendeurs, qu’il a voit appelés en
^C'^sntânlM’fdkibsidiairement, il a réclamé un sursis, com<2* ^ JOlsll1déf i e r les circonstances même de la- cause.
^ L e tribunal de Clermont a rejeté ses moyens, déclaré
l’inscription valable, et ordonné la continuation des
poursuites.
Possesseur de bonne foi d’un immeuble qu’il ne connoissoit pas avant son acquisition, et dont il a du payer
le prix avec confiance, Te sieur Besseyre a soumis cette
décision à la censure de la Cour. Ses moyens sont écrits
dans la loi même,, et accompagnés de toute la faveur
que mérite une causô juste et une défense' légitime.
F A I T S .
D eux propriétés, appelées les Roches, sont presque
limitrophes. L ’une' est située dans les dépendances de
Clermont; l’autre dans la commune de Chamalière.
Celle-ci fut adjugée nationalement à Biaise Marlct,
le 11 février 1791 ; et, le 17 du même mois, Murlet
subrogea le sieur Biaise Geneix à une partie de son ac
quisition.* Par ces*deux actes, la propriété fut dite située
dans les dépendances de Clermont,
1
il
�C 3 )
L e sieur Geneix en a resté propriétaire jusqu’au 24
prairial an 10. Il a e u , pendant ce long intervalle, le
temps d’apprendre que le bien des Roches, qu’il a voit
acquis, étoit situé dans la commune de Chamalière : la
seule circonstance qu’il y payoit l’impôt chaque année
avoit dû suffisamment l’en instruire.
Aussi ne l’ignora-t-il pas : il va nous le prouver luimême.
Il s’éleva, en l’an 9 , entre la mairie de Clermont et
lui, quelques contestations au sujet d’une prise d’eau : le
sieur Geneix présenta requête au tribunal de Clermont,
le 3 thermidor ; et son premier mot fut de dire qu’il
étoit propriétaire d’un bien appelé les R oches du Sémi
naire , situé dans les appartenances de Chanialière.
Une ordonnance fut rendue ; e t , le lendemain 4 ,
M c. T a ch é, notaire à Clermont, indiqué pour dresser
un procès ve rb a l, et remplissant cette mission à la re
quête du sieur G e n e ix , déclare s’être transporté dans
le bien des Roches , situé commune de Chamahère.
L e 24 prairial an i o j Ie sieur Geneix subrogea Fran
çois Debens à l’adjudication de 17 9 1, et à la subrogation
qu’il tenoit lu i-m ê m e de Marlet. L e prix fut fixé à
36,697 francs; 10,000 francs furent stipulés payables à
terme; le reste fut payé comptant.
Le sieur Geneix, tout instruit qu’il étoit de la véri
table situation de son bien, le vendit encore comme
situé dans les dépendances de Clermont.
Cette vente fut transcrite le 30 du même mois; et, sous
la même date, le conservateur fit une inscription d’oflice,
•pour les 10,000 francs dûs au sieur Geneix.
A 2
�(
4
)
L e i l vendémiaire an n , Debens vendit au sieur
Joba , général de brigade, et à la dame Bâtisse, son
épouse, l’usufruit et jouissance du domaine des Roches,
à la charge, entr’autres conditions, de payer les 10,000 fr.
restés dûs au sieur Geneix. Joba hypothéqua sa maison
de Clermont h la garantie de celte obligation.
L e 5 pluviôse de la même année, Geneix 'prit une
inscription contre Joba et sa femme, en vertu de cet
acte, qu’il data du 21 vendémiaire précédent.
L e 8 frimaire an 1 3 , le sieur Debens et la dame
Bâtisse , femme Joba , tant en leur nom personnel
qu’agissant en vertu d’une procuration authentique du
général Joba , vendirent au sieur Guillemin la propriété
et jouissance du bien des Roches, et l’indiquèrent comme
situé dans les dépendances de Chamalière.
Cette vente fut faite moyennant un prix apparent de
25.000 irancs, dont 10,000 fr. furent payés comptant;
5.000 francs furent stipulés payables dans deux ans, et
10.000 francs dans trois ans, le tout entre les mains de
Debens. Il ne fut pas dit dans cet acte un seul mot qui
eût trait aux 10,000 francs restés dûs ¡1 G e n e ix , et dé
légués à Joba par l’acte du 11 vendémiaire an 11. On
y lit néanmoins une clause assez singulière, et relative
au sieur Geneix : la dame Joba donne la mainlevée
d’une inscription prise en son nom et en celui de Joba,
contre Debens; elle et Debens réunis donnent ensuite
mainlevée de toutes inscriptions qu’ils auroient pu
prendre, à Clermont ou à Thiers, contre le sieur Geneix.
Mais le 7 nivôse an 13, la dame Bâtisse, toujours en
vertu de la procuration de son m a r i, vendit ù Debens
�( 5 )
la maison appartenante îi J o b a , et située place de Jaude.
•Pa rrni les.conditions de cette vente, dont le prix éloit
de 20,000 francs , on remarque celle de payer au sieur
'Geneix les 10,000 francs qui lui étoient encore dûs, et
auxquels cette maison avoit été hypothéquée par l’acte
du 11 vendémiaire an 1 1 , et les autres 10,000 francs
aux créanciers inscrits qui seroient indiqués par la dame
Bâtisse, et ce, dans le délai de six mois.
Les choses étoient en cet état lorsque, le 10 fructidor
an 13 , Guillemin, acquéreur des Roches depuis le 8 fri
maire précédent, les revendit au sieur Besseyre. Ce der
nier, originaire de la L ozère, et ayant habité jusque-là
M arvejols, ne connoissoit ni les Roches de Chamalière,
ni les Roches situées dans la commune ou les dépendances
de Clermont. On lui vendit le bien des R o ch es, sis dans
les dépendances de Cham alièrej et ne trouvant pas d’ins
cription sur la propriété ainsi indiquée, il ne fit pas
difliculté de payer la somme de 40,000 francs, qui étoit
le prix de son acquisition : bientôt après il fit transcrire
son contrat.
Une contestation considérable s’éleva, en 1807, entre
le sieur Joba , la dame Bâtisse et le sieur Debens. Joba
demandoit la nullité des ventes consenties par la dame
Bâtisse, en vertu de sa procuration, soit de l’usufruit
des R oches, soit de la maison de Clermont. L e sieur
Besseyre, détenteur des Roches, fut appelé en cause,
pour être condamné au désistement : il demanda sa ga
rantie contre ses vendeurs.
D ebens, comme acquéreur de la maison de la place
de Jaude, se défendit vivement; il soutint qu’il avoit
�..
( 6 )
rempli toutes les conditions de sa vente, parmi lesquelles
étoit la délégation de 10,000 francs à Geneix. Il est utile
de connoître les conclusions qu’il prit devant le tribunal
de Clermont : nous les trouvons dans une copie signifiée
du jugement contradictoire, que rendit ce tribunal le
4 juillet 1807.
Il demandoit que Joba fût déclaré non recevable dans
sa demande en nullité de la vente du 7 nivôse an 13 ; et
soutenant qu’il en avoit rempli toutes les conditions, il
demandoit acte de sa demande incidente, « à ce que ledit
« Joba soit condamné à lui remettre et rembourser les
« différentes sommes, formant celle de treize cents francs,
« qu’il a payées pour ledit général J o b a , au delà de ce
« dont il étoit chargé par' Vacle de vente du 7 ifivôse
« an 13. »
Examinant subsidiairement le surplus de la cause, pour
le cas où la vente seroit annullée, il concluoit « à ce
« que ledit Joba fût condamné à lui payer la somme de
« 21,300 francs, dont il resteroit débiteur envers l u i ,
a au moyen de la résolution d e la v e n ta , aux intérêts
« de droit, frais et loyaux coûts des q u it t a n c e s , et aux
« dépens ; et cependant à ce qu’il fût ordonné que jus
te qu’à parfaite libération, de la part du général Joba,
« des sommes ci-dessus, lui Debens resteroit en posses« sion de la maison vendue, comme ayant spécialement
» libéré ladite maison des charges dont elle était grevée,
« et auxquelles il a été subrogé. »
Sur cette demande, le tribunal prononça en ces termes :
« Attendu que tout ce q u a payé la partie de Biozat
« n’est pas suffisamment établi; que la partie de Joudy
�G
«
«
«
«
1 )
se prétend aussi créancière de différentes sommes
qu’elle a payées pour Debens, et que ces différens
objets de répétitions respectives ne peuvent se régler
que par un compte juridique;
« L e tribunal annulle la vente ; ................et faisant
« droit sur la demande formée par la partie de Biozat,
« à raison de ce qu’elle a payé pour la partie de Jeudy,
« ordonne que les parties viendront à compte devant
c< Chassaigne, notaire, lequel fera mention des déduc« tions et compensations, ainsi que de droit. »
Nous avons observé que la principale créance dé
léguée par l’acte du 7 nivôse an 13 , étoit celle du sieur
Geneix; elle faisoit, à elle seule, la moitié du prix de
la vente.
L e sieur Debens, en défendant à la nullité, prétend
avoir rempli toutes ses obligations, et payé 1,300 francs
de plus.
Il en demande incidemment la restitution.
Il rapporte des quittances, et en demande les frais et
loyaux coûts.
Joba se borne à opposer des compensations.
L e tribunal considère que tout ce qu’ a payé Debens
n’est pas suffisamment établi, et qu’il y a des répéti*
tions respectives ,• il ordonne le compte de ce que Debens
a payé.
Concevroit-on que Debens eût eu l’audace de former
cette demande incidente, de prétendre qu’il avoit outx*cpassé de i , 3 ° ° francs le payement du p r ix , d’en récla
mer la restitution , même les fr a is et loyaux coûts des
quittances, si la créance Geueix n’eût pas été payée?
�( 8’)
Le jugement n’auroit-il rien appris de cette circons
tance importante ? N ’eût-ce pas été le meilleur moyen
de Joba , soit pour prouver la fraude qu’il articuloit,
soit pour faire rejeter la réclamation de Debens, d’une
somme aussi considérable, qu’il n’auroit jamais payée?
Et si nous ajoutons à cela qu’alors le sieur Geneix ,
dont la créance étoit échue, et qui ne pouvoit pas ignorer
cette instance, ne demandoit rien à personne, n’intervenoit pas au procès pour empêcher Debens de prendre
ce qui n’appartenoit qu’à lui ; que même depuis il n’a
réclamé contre le tiers détenteur qu’après l’époque où
Debens, officier de cavalerie , et son débiteur personnel,
a été obligé de s’éloigner pour le service de l’état, on
ne peut s’empêcher de s’étonner que le sieur G en eix,
capitaliste, dont la grande exactitude est connue, ait
gardé un aussi long silence envers des débiteurs dont
la solvabilité étoit fort douteuse.
Ce silence, cette inaction absolue a continué jusques
au 17 octobre 1810. L e sieur Geneix a pris ù cette date
une inscription contre les sieurs Debens et Besseyre}
pour une somme de 13,700 francs.
Elle est faite sur le bien des R ocJies, appelé les
R o c h e s d u Séminaire de Clerm ont, sans autrement in
diquer la commune où il est situé.
Enfin, elle est faite en renouvellement d’une précé
dente inscription du I er. messidor an 1 0 , qui n’a jamais
existé.
Cette démarche n’avoit pas frappé l’oreille du sieur
Besseyrc, qui jouissoit tranquillement de sa propriété;
jnais-, le 26 août 18 11, après dix autres mois de silepce,
lo
/
�C 9 )
le sieur Geneix fit à Debens ua commandement de payer
la somme de i3,5oo francs, dont 3,5oo francs pour le*
intérêts de sept ans.
Ce commandement fut fait à Clermont, à l’ancien
domicile de Debens, officier de cavalerie, parlant à
une fem m e, qu i a dit n'avoir aucune connoissance
dudit Debens. La copie est laissée à un adjoint de la
mairie.
L a dénonciation en fut faite au sieur Besseyre, le 10
septembre. Une seconde sommation la suivit de p rès,
avec protestation de saisir l’immeuble.
L e sieur Besseyre forma opposition à ces poursuites,
par requête du 24 décembre. Une ordonnance de référé
renvoya les parties à l’audience, en autorisant néan*moins la continuation des poursuites. L e sieur Besseyre
appela en cause les sieurs Debens et G uillem in, ses
garans, et ensuite le général T e rreyre, comme héritier
du général Joba.
C ’est ainsi que l’instance s’est engagée.
1/e sieur Geneix, ecntuiit bien que le renouvellement
d’inscription qu’il a voit fait le 11 octobre 1810 , ne
pouvoit être considéré comme valable, en fit une autre,
le 11 mars 18 12 , toujours contre Debens et Besseyre t
en vertu de l’acte du 24 prairial an 10.
Elle est prise par renouvellement de l’inscription
d’oiïice, du 30 prairial an 10, sur le domaine des Roches,
situé dans les dépendances de Chamalière.
Ainsi le sieur Geneix avoit pour but de réparer deux
fautes; i°. de suppléer à l’inscription du 11 octobre 1810;
B
�( 10 )
2°. de réparer l'indication de celle du 30 prairial an 10,
d’un domaine des Roches, situé dans les dépendances
• de Clermont.
Mais ce qu’il y a de remarquable, c’est que l’ins
cription de 1812 ne peut exister, contre le sieur Besseyre,
que comme renouvellement de la première, faite en
l’an 10, parce que le sieur Besseyre a transcrit dans l’in
tervalle , et qu’ainsi la différence notable dans une partie
substantielle de ces deux inscriptions, dont l’une a voulu
corriger l’autre, ne peut être qu’un vice essentiel qui
détruit l’eifet de l’une et de l’autre.
Après cette démarche, le sieur Geneix recommença
ses poursuites; un commandement tendant à expropria
tion fut fait tant à Debens qu’à Besseyre, le 19 mars
1812.
Besseyre y forma encore opposition par requête du
I er. avril.
v
L e 8 juin , le sieur Geneix fit procéder à la saisie
immobilière des Roches : elle fut attaquée de nullité.
En cet état, le sieur Besseyre fit signifier ses con
clusions sur tous les chefs ; il demanda ,
10. La nullité de l’inscription et de toutes les pour
suites ;
20. Il observa que le sieur Debens étant militaire en
activité de service, il ne pouvoit y avoir lieu, d’après
la loi, à une saisie immobilière qui le concernoit direc
tement ;
30. E t , subsidiairement, soutenant que dans aucun
cas le sieur Geneix n’avoit droit de réclamer des inté-
%
�( ” )
rets, il hû offrit son capital de 10,000 francs, â la
charge de le subroger à ses privilèges et hypothèques.
Enfin il conclut à la garantie contre Debens, Guillemin et Terreyre.
C’est sur tous ces points qu’a été rendu le jugement
dont est appel. Il seroit assez difficile de l’analiser ; il
est plus simple, vu sa brièveté, de le mettre textuelle
ment sous les yeux de la Cour.
« En ce qui touche les présomptions du payement de
« la créance G e n e ix ,
« Attendu que des présomptions sont insuffisantes pour
« détruire un titre;
« Mais attendu que ces présomptions doivent être jusif tifiées par Debens, contre qui réfléchit l’action en ga« rantie, et que Debens est en activité de service.
« En ce qui est relatif au renouvellement de l’inscrip» tion d’office, du 30 prairial an 10,
« Attendu que si l’inscription du 11 décembre 1810
« est nulle, comme ne rappelant pas la vraie date de la
K première , il en esisto ««c seconde plus régulière , *
« celle du 11 mars dernier, prise dans les délais voulus
« par la l o i , et contre laquelle on n’a opposé aucun vice
« de forme.
« En ce qui regarde la nullité résultante de ce que*
« dans l’inscription d’office et dans celle en renouvel« lement, la situation est dite dans les dépendances de
« Clermont, tandis qu’elle est dans celle de Chamalière,
et Attendu que l’inscription d’office désigne la situation
* telle qu’elle est indiquée dans le contrat môme’, que
B a
�«
«
«
«
«
«
( 12 )
l’inscription en renouvellement a dû être conforme;
que, s’il y a erreur, c’est aux parties à se l’imputer*,
et comme le sieur Debens, premier acheteur, n’auroit
pas eu le droit de se prévaloir d’une inexactitude de
son fait, le sieur Besseyre, qui le représente, ne peut
en avoir de son chef.
« En ce qui est relatif aux offres,
« Attendu que n’étant pas réalisées, elles ne peuvent
c< arrêter l’exécution du titre»
« En ce qui touche la demande en garantie du sieur
« Besseyre, contre les sieurs Guillemin et Debens ;
« Attendu que ces garanties sont fondées, etc. ;
- « I^e tribunal, sans s’arrêter aux moyens de nullité
« proposés par le sieur Besseyre, dont il est débouté,
« ni aux offres qui ne sont pas réalisées, ordonne que
« les poursuites commencées seront continuées, etc. »
L e sieur Besseyre a interjeté appel en la Cour, contre
Geneix ; et c’est en cet état qu’il s’agit de statuer.
D eux questions principales se présentent : nous allons
les examiner séparément.
i°. L e sieur G eneix a - t - i l conservé ses droits contre
B essey re, tiers acquéreur, malgré la transcription
de la vente fa ite à ce dernier ?
Celte question nous conduit naturellement à examiner,
et la législation qui régissoit le contrat du sieur Geneix,
et la forme de son inscription*
�( 13 )
La loi du i l brumaire an 7 , tout en reconnoissant
le privilège du vendeur, comme celui des ouvriers et
autres semblables, ne leur donnoit d’effet que par l’ins
cription : son esprit se découvre dans plusieurs articles
non équivoques.
D ’abord, par l’article 2, où elle s’explique nettement :
« L ’hypotlièque ne prend x'ang, et les privilèges sur
« les immeubles rfont cPeffet que par leur inscription. »
Par l’article 3, où, ne parlant que de la simple hypo
thèque , elle reconnoît qu’elle e x iste , mais à la charge
de Vinscription.
En l’article 11 , où elle énonce certains privilèges
qu’elle dispense d’inscription, et qui dérivent de la na
ture de la créance, comme les frais funéraires et autres
de ce g e n re , pour lesquels il ne peut pas y avoir de
titres :
« Il y a privilège sur les immeubles, sans qu’il soit
« besoin d’inscription p ou r, etc. »
D o n c , dans tous les autres cas3 il n’y a pas privilège
sans inscription : exceptio r#gc<?arii fîrm at.
Aussi par les articles 12 et 13, établissant un privi
lège pour les entrepreneurs et architectes, elle exige que
« le procès verbal qui constate les ouvrages à faire soit
« inscrit avant le commencement des réparations; et le
« privilège n'a d'effet que par cette inscription. »
Par l’article 29, elle veut que « la ti’anscription cona serve au vendeur son droit de préférence sur les biens
« aliénés, à Veffet de q u o i, ajoufe-t-elle, le conserva« teur fera inscription sur ses registres, des créances
« non encore inscrites qui eu résulteroient. »
�( *4 )
Enfin, l’article 1 4 , en établissant le rang des créanciers
entr’e u x , comprend « les précédens propriétaires dont les
« droits auront été maintenus selon les Jorm es indi« quées par la présente. »
Ainsi point de privilège sans inscription.
Prévoyons cependant deux objections.
La première, que si l’on réduit les privilèges à la
nécessité d’une inscription dont la loi ne fixe pas le délai,
on les réduit à une simple hypothèque, puisque, pour
le conserver, il faut l ’inscrire avant toute autre créance
simplement hypothécaire.
Cet argument a été souvent fait sur l’article 2106 du
Code, qui contient la même imperfection. Tous les au
teurs qui ont écrit sur cette matière, et tous les juris
consultes l’ont résolue par une distinction de fait.
Ou elle s’élève entre les créanciers privilégiés et
hypothécaires du propriétaire actuel, et alors il faut reconnoitre que tant que l’immeuble est dans ses mains ,
le vendeur peut conserver son privilège par une ins
cription, et q u e, dans quelque temps qu’il la fasse, il
prime les créanciers hypothécaires de son acquéreur.
V oilà la conséquence qu’il faut tirer de ce que la loi
n’indique point de délai pour l’inscription du privilège;
et cette conséquence, vraie en elle-même sous le Code
Napoléon , seroit plus que sujette à examen sous l’em
pire de la loi de brumaire an 7.
Mais si l’acquéreur l’eve n d , celui qui achète n’a
qu’une chose à consulter, le registre des hypothèques;
s’il n’y aperçoit pas d’inscription, qu’il transcrive, et
jjue, pendant la quinzaine de 3a transcription, le ven-
�( iS )
deur originaire ne prenne pas d’inscription, aux ternies
de l’article 834 du Code de procédure, il a purgé tous
les droits qui frappoient sur l’immeuble, autres que les
droits réels et immobiliers, et le privilège s’évanouit,
respectivement à cet acquéreur, qui ne doit autre chose
que le rapport du p r ix , sauf le droit de surenchère,
accordé aux créanciei’s inscrits seulement.
Ces principes sont constans ; ils ont été publiquement
professés par M . M erlin , et les tribunaux les ont cons
tamment adoptés.
Diroit-on , en second lieu, que la transcription seule
a tout l’eiiet de l’inscription, et que l’irrégularité de
l’inscription seroit alors sans conséquence ?
Cet argument, très-vrai en lui-même sous l’empire
du C o d e, ne seroit qu’une pure illusion sous la loi du
11 brumaire an 7.
On a décidé en effet ( et c’est toujours d’après M . M er
lin que nous parlon s), que la simple transcription du
contrat suffisoit pour conserver le privilège du premier
vendeur, même après la transcription d’une seconde
vente ; mais pourquoi cela ?
Parce que l’article 2108 du Code Napoléon, ne laisse
pas le moindre do.ute sur sa volonté absolue ; il est ainsi
conçu :
« L e vendeur privilégié conserve son privilège par
« la transcription du titre qui a transféré la propriété
« à l’acquéreur, et qui constate que la totalité ou partie
« du prix lui est d u e , ¿1 l'effet de quoi la transcription
« vaudra inscription pour le vendeur, et le prêteur qui
« aura fourni les_ deniers payés........ Sera néanmoins le
�(i6)
«
«
«
te
conservateur des hypothèques, tenu, sous -peine de
tous dommages-intéréts envers les tiers , de faire d’ofCce l’inscription sur son registre en faveur du ven
deur, etc. »
Rien de plus clair.
t La loi donne au privilège du vendeur une faveur si
grande, qu’elle imprime à l’acte même qui consolide
la propriété sur la tête de l’acquéreur, la force de con
server tous les droits de ce vendeur ; en sorte que, même
sans sa participation, il est impo'ssible que sa créance
lui échappe.
Mais aussi elle considère comme tellement sacrée
l’obligation d’instruire les tiers de tout ce qu’ils peuvent
risquer en contractant avec l’acquéreur, et elle regarde
si peu comme un moyen suffisant de publicité pour les
tiers, la simple transcription du contrat, qu’elle exige
du conservateur qu’il fasse une inscription d’office, faute
de quoi elle le soumet aux dommages-intérôts des tiers,
c’est-à-dire, de tous ceux qui contracteront avec l’ac
quéreur , faute d’une inscription qui leur ait montré le
danger.
Ainsi le vendeur et les tiers sont également à l’abri
de toute crainte; le vendeur, puisqu’il ne peut rien
perdre; les tiers, parce que la transcription, tout en
conservant le privilège, ne sera pas fatale pour e u x , et
que présumant leur ignorance, malgré l’accomplissement
de cette formalité, la loi leur accorde une garantie.
Et voilà pourquoi le Code, s’expliquant disertement,
dit que la transcription vaudra inscription pour le ven
deur.
Il
�( *7 ) '
Il n’en étoit pas de même sous la loi de brumaire an 7.
Comment s’exprimoit-elle ? Nous l’avons déjà remarqué.
• « Lorsque le titre de mutation constate qu’il est dû
« au précédent propriétaire, ........ soit la totalité, soit
« partie du prix , la transcription conserve à ceux-ci le
« droit de préférence sur les biens aliénés, à Teffet de
« quoi le conservateur fera inscription sur ses registres,
« des créances non encore inscrites qui en résulté
es roient. »
La loi reconnoît de même que la transcription n’a pas
pour les tiers un degré suffisant de publicité; aussi exiget-elle du conservateur qu’il fasse inscription............. des
créances non encore inscrites : mais comme elle ne re
jette sur lui aucune responsabilité personnelle envers les
tiers, elle ne dit pas, à Teffet de quoi la transcrip
tion vaudra inscription , mais seulement, à t effet de
quoi le conservateur f a i t inscription.
A in si, pour que la transcription ait cet effet, pour
qu’elle le produise envers des tiers, il faut que le con, servateur inscrive.
Et voilà pourquoi, dans tous les autres articles que nous
avons cités, elle ne donne effet au privilège qu’au
moyen de l’inscription, qui est un élément nécessaire
à sa conservation vis-à-vis les tiers.
Et comment cela ne seroit-il pas? A vant la loi du 11
brum aire, les privilèges n’étoient pas assujétis à l’ins
cription, puisque cette formalité n’étoit pas établie;
cependant l’article 39 de cette loi exige que les anciens
privilèges soient inscrits dans les trois m o is, faute de
quoi, dit-elle, ils dégénéreront en simple hypothèque}
c
�( i
8)
et n*auront rang que du jo u r de leur inscription. Et otî
voudroit que les privilèges nouvellement acquis eussent
une plus grande faveur, et de plus grandes prérogatives !
A in s i, il faut eu revenir à l’examen de l’inscription,
et savoir si elle est valable ou irrégulière.
Sous ce rapport il n’y a pas de question.
En effet, la qualité la plus essentielle d’une inscrip
tion est de désigner, d’une manière certaine et indu
bitable, les personnes contre qui elle est prise, et les
biens qu’elle frappe.
Voilà pourquoi la loi exige que les immeubles hypo
théqués soient indiqués par leur nature et leur situation»
Et voilà pourquoi encore, malgré que la loi n’ajoute
pas la peine de n ullité, les tribunaux n’ont pas hésité
de la prononcer toutes les fois qu’à défaut d’expression
de la nature ou de la véritable situation des biens, il
y a eu absence de spécialité ou de publicité suffisante,
parce que ces deux caractères étant substantiels , l’ins
cription ne peut ôtre parfaite sans leur accomplissement
absolu. 11 existe sur cela plusieurs arrêts de cassation.
O r , celle qui fonde les poursuites du sieur Geneix
porte sur le bien des Roches, s itu é d a n s les d ép en d a n ces
de Clerrnont, tandis que le bien vendu est situé à
Chamalière.
E t le sieur Besseyre, en achetant ce bien des Roches,
situé à Cham alière, et en faisant transcrire son acte,
a dû fort peu s’inquiéter des inscriptions qui étoient
prises sur les propriétés situées dans les dépendances
de Clermont.
S’il y eût eu plus de trois créanciers inscrits, il eût
�( r9 )
été obligé de leur notifier sou contrat, e t 'd e ‘requérir
pour cela, du conservateur, un état des inscriptions
existantes, et un certificat de non-excédant.
Si le conservateur eût omis, dans l’état, l’inscription
du sieur Geneix, l’immeuble n’eût pas moins été af
franchi de l’hypothèque, d’après l’article 2198.
JVIais, d’après l’article 219 7, le conservateur eût été,
garant de cette omission, à moins qu’elle ne fût pro
venue de désignation insuffisante.
,
\ ‘ On le demande, la responsabilité du receveur n’eût*?
elle pas été parfaitement à l’abri ?
O r , s’ il y a insuffisance telle que le conservateur eût
pu s’y méprendre, il y a nullité dans l’inscription.
Ici il y a plus qu’insuffisance; il y a une omission,
une erreur qui tend à appliquer l’inscriptionc sur une
autre propriété.
Rien de plus évident.
« Mais, ont dit les premiers juges, cette déclaration
« est conforme à celle de la vente ; et comme elle est
« du fait de D eb en a , premier acheteur, il n?eût pas eu
« le droit de s’en p laindre, et Besseyre, qui le repré«c sente, n’a pas d’autres droits que les siens. »
Ce motif fourmille d’erreurs.
i°. Si , sous certains rapports-, èt vis-à-vis des tiers,,
les acquéreurs successifs d’une môme propriété sont
censés les représentans les uns des autres, ce ne peut
être dans notre cas, o ù , bien au contraire, ils sont tous
des tiers, et usent; de leurs droits personnels les uns
envers les autres;
î
2°, Si la vente faite à Debens indique le bien.vendu
C a
�comme situé à Clermont, ce ne peut être la faute de
celui qui achète, qui a le droit d’examiner la propriétéy
son étendue, sa désignation, mais qui n’est pas obligé
à tout cela, et q u i, s’il trouve assez de sûreté dans la
solvabilité de son vendeur, peut abandonner tous les
événemens à sa bonne foi, et se reposer exclusivement
sur sa garantie.
3°. La faute ne peut être imputée,dans l’espèce, qu’au
sieur Geneix, vendeur, qui connoissoit parfaitement la
situation de l ’immeuble vendu, soit parce qu’il avoit payé
pendant dix ans l’impôt à Ghamalière, soit par tous autres
moyens qui étoient en son pou voir; et c’est ce que
témoignent sa requête de l’an 9 , et le procès verbal
qui la suivit.
;
O n concevroit le sens de ce m otif, si la désignation
de la vente faite par Geneix étant exacte, Debens avoit
revendu sous une fausse dénomination, parce que
Geneix, vendeur primitif y ne pourroit pas être dupe
de la fraude pratiquée, ou de l’erreur commise par son
acquéreur et les subséq.uens, qui, en ce sens, seroient
les ayans-cause les uns des autres.
Mais l’erreur est émanée de lui-même; donc lui seul
en seroit garant vis-à-vis,tout le monde: et, par exemple,
si Debens, après lui en avoir payé le prix, eût été
poursuivi en vertu d’une inscription prise sur les Roches
situées à Ghamalière, Geneix eût bien été garant de sa
fausse énonciation, quoique la dette ne lui eût pas été
personnelle ; encore il doit supporter le dommage qui
lui arrive à lui-même, pour une faute commise par lui
seul, et dont les tiers ne peuvent être victimes.
�( 21 )
Ici, le sieur Besseyre prouve, par la matrice des rôles ,
les états de sections, et le certificat du maire de Chamalière, que la propriété dont il s’agit a toujours fait
partie de son territoire.
L e sieur Besseyre, venant de Marvejols dans un pays
qui lui étoit inconnu, ne peut pas être soupçonné avoir
médité une fraude; et quand il auroit connu l’état des
choses, le sieur Geneix ne seroit pas plus en règle, et
c’est tout ce que considère la loi.
L ’inscription de l ’an 10 est donc sans force vis-à-vis
lui.
Et celles de 1810 et 1812, qui n’en sont que des renouvellemens , n’ont aucune valeur, isolément prises,
puisque le sieur Besseyre a transcrit dans l’intervalle. *D ’ailleurs, celle de 1810 n’énonce aucune situation,
puisqu’elle indique seulement les R oches du Séminaire
de Clerrnont, sans dire dans quelle commune.
Celle de 1812 ne peut valoir comme renouvellement
de celle de l’an 10 , puisqu’elle est prise sur une pro
priété située à Chanialière., tandis que la pi'emière frappoit sur les Roches situées dans les dépendances de
Clerrnont.
La sévérité des principes sur cette matière ne permet
aucune hésitation ; les exemples en sont trop multipliés
pour qu’on ait besoin de s’en entourer. On ne s’en per
mettra qu’un seul, émané de la Cour elle-même.
Aim ée Béai avoit fait une inscription sur M arie-M atthieu Santon , veuve (fA ntoin e A u b ert...... Un acqué
reur de M arie San ton , veuve d'Antoine A ubert ( mêmeç
profession et habitation) avoit payé le prix de sa vente;
�( 22 )
il fut attaque par Aimée Béai; et, par arrêt du 16 février
1 8 1 1 , la Cour annulla l’inscription.
La seconde chambre de la Cour n’a-t-elle pas annullé
une autre inscription , parce qu e, dans un nom propre,
on lisoit un A pour un e ? Si ces exemples pouvoient
être taxés d’une trop grande sévérité, au moins ce dé
faut n’atteindroit pas la cause actuelle.
D onc, sous aucun rapport, le sieur Geneix n’a de droits
Sur l’immeuble.
L e sieur Besseyre avoit observé subsidiairement que
son adversaire n’avoit pas droit aux intérêts, puisque son
inscription de l’an 10 ne les conserve pas, qu’elle n’ap
prend pas même si la créance en rapportoit; il se borne
en ce moment à cette remarque, qui nécessiteroit, dans
tous les cas, l’infirmation du jugement.
Mais on observera en outre combien il est étrange
que le sieur Geneix ait poursuivi aussi rigoureusement
un tiers détenteur de bonne f o i , qui lui avoit oifert de
lui payer le capital de sa créance , sous la seule condi
tion de lui céder ses privilèges et hypothèques. Cette
conduite a certainement de la dureté vis-à-vis un p r o
priétaire honnête, un possesseur paisible, envex-s qui le
sieur Geneix auroit quelque chose à se reprocher, quand
bien même la rigueur de la loi seroit pour lui. C’étoit
assez, sans doute, pour le sieur Besseyre, qui a acheté
de bonne foi, qui a payé de même, de payer une seconde
fois un capital de 10,000 francs; cette offre témoignoit
î\ son adversaire, et sa bonne fo i, et sa haine pour le
procès : mais ce n’est pas ainsi que calcule un capitaliste,
«
�C 23 )
2 °. L es circonstances de la cause -permettent-elles en ce
moment la mise à exécution du titre sur les im ineubes q u i appartiennent ou qu i ont appartenu à
D e b e n s, et qu'on poursuit de son c h e f ?
Ce moyen est tiré de ce que le sieur Debens, seul dé
biteur direct, et cause première des poursuites, est mili
taire en activité de service.
Il est fondé sur une loi positive, celle du 6 brumaire
an 5.
L e motif porte « -qu’il est aussi instant que juste de
« prendre des mesures qui mettent les propriétés des
« défenseurs de la partie, et des autres citoyens attachés
« aux armées, à l’abri des atteintes que la cupidité et
« la mauvaise foi pourroient y porter pendant leur ab« sence. »
L ’article 2 déclare qu’il n’y a aucune prescription, ex
piration de délai, ou péremption contrejles défenseurs
de la patrie. • .__------- ——— '
L ’article 4 défend de les exproprier de leurs immeubles
pendant qu’ils sont dans les armées.
On avoit élevé la question de savoir si cette loi devoit être exécutée depuis la promulgation du Code Na
poléon ;
*
Mais un décret de Sa Majesté l’Empereur et R o i,
du 16 mars 1807, en a ordonné la publication dans
les départemens ultramoutains ; ce qui prouve qu’elle
' est encore en vigueur.
L a Cour de cassation a jugé d’ailleurs qu’elle doit
�,
'
c
2
4
)
'
être exécutée jusqu’à la paix générale ; ainsi pas de dif
ficulté sur ce point de droit.
Si donc l’immeuble dont il s’agit étoit encore la pro
priété de Debens, il n’y auroit pas de question.
Mais on a objecté qu’il ne s’agissoit pas d’exproprier
D ebens, mais bien le sieur Besseyre ; et quoique les
premiers juges aient omis de statuer expressément sur
ce c h e f, il n’en faut pas moins prévoir l’objection.
Sous ce rapport, il suffit d’un instant de réflexion
pour se convaincre qu’elle n’est qu’une futilité.
Qu’importe que le sieur Debens ne soit, pas en ce mo
ment détenteur de l’immeuble? n’est-il pas le débiteur
direct et personnel de Geneix ? n’est-ce pas sa créance
qui occasionne les poursuites? et, bien mieux encore,
n’est-ce pas parce que l’immeuble a été sa propriété, que
cette tache l’a suivi partout, même dans les mains de
Besseyre, qu’il est affecté à la créance de Geneix? n’estce pas, en un mot, comme propriété de Debens, quoique
détenue par Besseyre, qu’on l’a frappée d’une saisie?
Si Debens avoit encore la propriété de la maison ,
ou de tout autre immeuble, le sieur Besseyre, en vertu
de sa garantie, auroit le droit d’en poursuivre la vente
pour être remboursé des sommes qu’il auroit payées
pour le compte de Debens.
Néanmoins la loi du 6 brumaire an 5 6eroit un obs
tacle à l’exercice actuel de son droit, et s’opposeroit à
la vente.
v Et on voudroit que cet obstacle fut restreint à la
personne du garant, et que le garanti n’y trouvât pas
|es mêmes moyens!
En
�( 25.)
En sorte que celui qui ne doit rien seroît obligé de
payer, pendant que sa garantie contre celui qui doit
tout seroit suspendue par le fait de la loi !
Ce système est tellement monstrueux qu’on ne sauroit
craindre son influence.
Nous l’avons dit : c’est parce que la terre des Roches
a été la propriété de Debens, qu’elle est frappée de
l’hypothèque de Geneix.
C ’est comme propriété actuelle ou passée de Debens,
quoique sur le tiers détenteur, qu’on en poursuit la
vente.
La loi ordonne contre lui directement les premières
poursuites, et c’est en eiFet contre lui/et contre Besseyre,
cumulativement, qu’elles ont été dirigées.
Cette mesure ne peut nuire au sieur Besseyre, sans
lui profiter.
Il est vrai qu’en général la caution qui peut opposer
toutes les exceptions du débiteur, lorsqu’elles sont in
hérentes à la dette, n’a pas le même droit pour les excep
tions p u rem ejit p e r s o n n e l l e s mais pourquoi cela? et
qu’est-ce que la loi entend par exceptions personnelles?
Ce sont uniquement et exclusivement celles q u i , ap
partenant à la personne au moment de l’obligation,
ont été tellement connues de la caution , qu’elles ont
été la cause du cautionnement; par exemple, la minorité
du principal obligé.
Mais on ne peut pas appliquer ce principe à une
exception purement accidentelle, et seulement dilatoire,
qui dérive du fait même de la loi, et q u i, nuisant à 1«
V
.
.
.
.
�(-a*>
caution sans qu’il ait été en son pouvoir de l'empechcr,
doit également lui profiter.
I c i , d’ailleurs, il ne s’agit pas d’un cautionnementj
promis par la p erso n n em ais d’ une garantie hypothé
caire , indépendante de sa volonté.
Aussi la Cour de cassation a-t-elle toujours appliqué
la loi de l ’an 5 à tous les cas où des militaires en ac
tivité de service ont eu un intérêt direct ou indirect;,
témoin un arrêt du 29 janvier 1811 ( Denev. p. t 5 i ).
E n vertu d’un acte du 11 nivôse an 6 , un créancier
avoit fait saisir des biens immeubles, propres à lafemmp.
d’un militaire en activité.
L ’un et l’autre se pourvurent en nullité.
Par arrêt du 26 mai 1808, la Cour impériale de Douai
rejeta leur demande.
,
Pourvoi en cassation ; arrêt qui casse.
« Attendu que la loi du 6 brumaire an 5 a eu essen
ce tiellement pour objet la. conservation des propriétés
« des défenseurs de la patri.e, en activité de service;
« qu’elle a établi des' mesures particulières pour pré« venir les atteintes qui pourroient être portées à leurs
« droits; que toute action dirigée contra e u x y et dont
«. le résultat peut leur préjudicier, a donc été soumise
« à ces mesures. »
Pas de doute que l’action ne soit dirigée directement
contre D ebens, puisque la première démarche a été„,
et a dû être une sommation faite à lui-même.
Pas de doute qu’elle ne réfléchisse contre l u i , puis
que son effet a été une condamnation de garantie.
�( â7 )
Pas de doute que, revenant des armées, il n’ait le droit
d’attaquer toutes ces poursuites , sans qu’on puisse même
lui opposer ni prescription, ni fin de non-recevoix*.
Pas de doute, enfin, que la mise à exécution de la ga
rantie ne soit en cet instant suspendue en sa faveur, et
ne paralyse les poursuites que pourroit entamer Besseyre,
E t il faudroit en attendant vendre le bien de Besseyre!
E t r encore une fois, il ne profiteroit pas de cette excep
tion! Gela est impossible.
> j.
Et dans quelles circonstances se présente cette ques
tion? Nous l’avons vu : tant que Debens a été sur les
lie u x , Geneix a gardé le plus profond silence ; il n’a
agi ni contre l u i , ni contre les tiers ; il s’est tu pendant
dix années entières, quoiqu’il ait vu sous ses yeux agiterdes questions relatives à sa créance, quoiqu’il n’ait pas
pu ignorer que D eben s, plaidant publiquement et à
gi’and b r u it, dans une cause qui intéressoit le public et
excitoit sa curiosité, réclamoit de Joba la restitution des
sommes qu’il soutenoit avoir payées en exécution de sa
v e n t e , et parmi lesquelles se trouvoit la créance du sieur
Geneix.
A peine Debens s’est-il éloigné , que Geneix rompt
son silence, et lui fait des sommations à un domicile où
il n’étoit p lu s, et où il ne pouvoit plus être. S’il a été
payé, les preuves de libération sont entre les mains de
Debens; lui seul peut répondre à ses poursuites d’une
manière non équivoque. Gomment donc le sieur Geneix
auroit-il l’espérance d’obtenir de lf’ v .itice la permission
d’exproprier le sieur IJesseyre pour la créance de Debens,
lorsque, par son propre fuit, Debens ne peut plus se
�( 28 )
défendre; q u e , par la même raison, Besseyre est dé
pouillé de ses moyens, et voit paralyser dans ses mains
une action de garantie qui doit être aussi prompte que
la poursuite exercée contre lui ? Y eût-il jamais plus de
motifs à la fois d’appliquer les dispositions de la loi de
brumaire an 5 ?
L e sieur Besseyre se borne en ce moment à ces ré
flexions; elles suffisent pour faire connoître sa cause. Il
n’a parlé qu’en passant de la demande en nullité qu’il
avoit dirigée contre la forme de la procédure; il s’est
même dispensé d’en indiquer les moyens : ce détail eût
été superflu dans un précis qui n’a d’autre objet que
d'asseoir les idées de la Cour sur une cause aussi favo
rable que juste.
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M e V ISSAC.
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M». G O U R B E Y R E ,
A R IO M , de l’imp. d e T H IB A U D , i mprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue d es Taules, maison L a n d r io t . — Janvier 1813
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Besseyre, Joseph. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
subrogation
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Joseph Besseyre, propriétaire, habitant à Clermont, appelant ; contre sieur Blaise Geneix, aussi propriétaire, habitant la même ville, intimé.
note manuscrite : « arrêt du 23 juillet 1813, à la page 85 ».
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2101
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2107
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53397/BCU_Factums_G2101.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
subrogation
-
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Text
3 ,/ a a M
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MÉMOIRE
TRIBUNAI]
d
’
.
S É A N T A R IO M ]
POUR
F
a p p e i
et L é g e r T O U R R E S , propriétaires, habitans
de la commune de St. Sandoux; C L A U D E T O U R R E S ,
habitant du lieu d’E l i a t , commune de Ludès; autre
C l a u d e et M a r i e T O U R R E S , habitans de la com_m une de Plauzat; appelans d’un jugement rendu au
tribunal d’arrondissement de C lerm ont, le 22 floréal
r a n ç o is
an 1 1 :
CONTRE
M i c h e l G A U T H I E R , o fficier de sa n t é , habitant
à St. S a n d o u x ; A n t o i n e G A U T H I E R , cultiva
te u r, habitant du même lieu autre A n t o i n e G A U
T H I E R , C O T H O N et A n n e G A U T H I E R son .. >
épou se, P i e r r e M O R E L et M a r g u e r i t e G A U T H I E R , J e a n J U L I A R D et A n n e G A U T H I E R
sa f em m e, A n t o i n e R I V E , R O D I E R et M a r i e
�G A U T H I E R sa fe m m e , F r a n ç o i s B E S S 01S et
M a r i e G A U T H I E R safem m e j tous intimés :
EN
P R É S E N C E
,
G A U T H I E R père, dit L a b o r i e u x
cultivateur, habitant de la commune de St. Sandoux ,
aussi appelant du même jugement.
D ’A n t o i n e
Q U E S T I O N S .
i *. Un prêtre déporté étoit-ilfrappé de mort civile ?
2". Sa succession est-elle réputée ouverte à compter de la mort
civile, ou seulement de la mort naturelle?
5*. Les frères du défunt, qui ont reconnu leur père héritier des
acquêts de sonfils , et ont traité avec lui dans cette qualité , sontils recevables h lui contester aujourd’hui cette même qualité?
4*. Ont - ils pu actionner en désistement des tiers qui avoient
traité avec le père, dans cette confiance?
5*. Les immeubles cédés à Pierre Tourres étoient-ils propres
ou acquêts dans la personne du défunt ?
A
a ¿té marié deux
fois ; il a eu huit enfans de son premier mariage , et de ce
nombre étoit Didier Gauthier, prêtre , vicaire et communaliste de la paroisse de St. Sandoux.
L e 8 novembre 1788 , Anne L ab o rieu x, tante de D idicr Gauthier p rê tre , lui fit une donation de plusieurs
immeubles, avec réserve d'usufruit.
La révolution arrive j Gauthier, prêtre, est d abord conn t o in e
G
a u t h ie r
-L a b o r ie u x
�77
( 3 )
du.it dans la maison de réclusion , et ensuite transféré à
Bordeaux, ou il avoit été embarqué sur les vaisseaux des
tinés au transport des prêtres déportés. C’est en 1793
qu’il fut transféré à Bordeaux; il y est décédé le 10 ni
vôse an 3 , sur les vaisseaux de la république.
D u moment de sa réclusion, Gauthier, prêtre, avoit
été considéré comme mort civilement; il fut fait inven
taire de son mobilier les 20 brum aire, 4 et 5 frimaire
an 2 ; tous ses meubles furent vendus par le district, et
le prix versé dans la caisse du receveur de l'enregistre
m ent, suivant sa quittance du 7 prairial an 2.
Ses immeubles furent affermés, le 8 germinal an 3 , par
l’administration du district : de sorte qu’il n’y avoit aucun
doute sur la déportation comme sur la mort civile en
courue par Didier G authier, prêtre.
Antoine Gauthier père étoit donc appelé, du moment
de la déportation, à succéder à son fils, du moins pour les
meubles et acquêts, en vertu de l’article 3 du titre 1 2
de la Coutume d’Auvergne. Les frères du défunt recon
nurent les droits et la qualité du père. On voit par leur
réponse à un procès verbal du bureau de p a ix , du 5 flo
réal an 4 , que le p è r e , comme successeur des acquêts
de son fils, demandoit son m obilier, et que les enfans
répondoient qu’après la déportation de Jeur frère ce mo
bilier avoit été vendu par le district, et qu’ils n’en avoient
profité directement ni indirectement.
Par un acte authentique, du 2 1 fructidor an 5 , A n
toine Gauthier traite avec M ichel, un de ses fils ; il y prend
la qualité d'héritier des acquêts defeu D id ier G authier,
2
*
�(. 4 )
.son fils , et se départ d’un immeuble qui faisoit partie de
-cette succession, moyennant la somme de 100 francs. .
Par autre acte du 17 frimaire an 6 , Antoine Gauthier,
•toujours en qualité d’héritier quant aux acquêts de son
fils prêtre,, fait échange d’une rente foncière de i 5 francs,
qui avoit appartenu au défunt, avec l’un de ses fils, et
prend en retour la propriété d’une voûte, en forme de
cuisine, situee près de sa maison.
On voit par un procès verbal, fait au bureau de paix
•le 1 1 frimaire an 7 , qu’Antoine Gauthier-Laborieux est
assigné, en qualité c£héritier des acquêts de son Jils
pour le payement d’une somme de 17 4 francs que ce
dernier devoit au cit. Ligier-Rochette.
- Antoine Gauthier, en mariant Anne Gauthier, l'une
de ses filles, avec Jean Ju liard , lui avoit promis la
douzième portion des successions qui lui écherroient.
Anne Gauthier , femme Ju liard , l’a fait assigner pour
obtenir ce douzième dans les meubles et acquêts de son
Jils , et en inain-levée d’une saisie-arrêt que son père
avoit fait faire entre les mains de Mazoire , notaire,
comme se prétendant créancier de sa fille ; l’exploit est
du 4 frimaire an 9.
P ar un traité du 2 1 nivôse an 8 , Antoine Gauthier
père cède ï\ autre Antoine Gauthicr-Gothon, son gendre,
et à Anne G au thier, sa fille, la propriété d’un contrat de
rente foncière de 3 francs 5o centimes, à lui due comme
héritier des acquêts de je u D idier G authier , sou fils,
qui avoit acquis cette rente du cit. Cohade.
L e 14 fructidor an 9 , Antoine Gauthier, héritier des
�( 5 )
acquêts de son fils, donne à titre de ferm e, à Antoine
V o l p è t e , une terre et trois pièces de vigne désignées au
b a il, et qui avoient été acquises par défunt Didier Gau
thier , du cit. Bonfils.
Antoine Gauthier a payé à l’enregistrement les dro.ts
d’ouverture de la succession de son fils, ainsi qu’il résulte
de la quittance donnée par le receveur le 2 1 fructidor
an 6.
’ Par jugement rendu au tribunal civil du P uy-de-D ôm e, 1
le 14 frimaire an y , Antoine Gauthier , héritier des
acquêts de son fils, a été condamné à payer à Anne
Laborieux , tante du défunt, i° . une somme de n 8 5 fr.
en assignats; 20. 265 fr. en num éraire, pour argent prêté
à défunt Didier Gauthier pendant sa réclusion à Clermont
et sa déportation
Bordeaux; 3 0. celle de 12 0 francs,
à laquelle Anne Laborieux s’étoit restreinte pour la nour
riture qu’elle avoit fournie pendaut cinq mois A défunt
Gauthier, à l’époque de sa réclusion à Clermont : enfin ,
le même jugement condamne le père à la remise d’une
couverture en laine, de deux draps d é lit , trois serviettes,
trois chemises, et huit livres d’ huile,qu'Anne Laborieux
avoit fournis à défunt Didier Gauthier, lors de son départ
pour Bordeaux,
'
Antoine Gauthier - Laborieux , étant en possession de
tous les acquêts de son fils , passa un contrat d’échange
avec Pierre T o u rre s, représenté par les appelans; cet
acte est du 20 germinal an 4.
Antoine Gauthier, héritier des meubles et acqu êts de
son fils aîné, délaisse et garantit à Pierre Tourres les héritages, rentes, meubles et autres choses, objet de la dona-
3
�( 6 )
' tion faite à défunt Didier Gauthier par Anne Laborieux,
sa tante, ?e 8 novembre 1 7 8 8 , sous la condition que
Pierre Tourres remplira les charges de cette donation ,
et qu’il ne pourra en jouir qu’au décès de la donatrice quis’en est réservé l’usufruit.
Pierre Tourres lui délaisse et garantit en contre-échange,
i ° . entour vingt quartonnées de terrein, dont partie en
verger et ensaulée, et plusieurs autres champs désignés et
confinés dans cet acte; 20. il lui délaisse la jouissance, pour
sa vie, d’ un pré et saulée. et une pension viagère de
quarante pots de vin et cinq setiers conseigle ; il lui
fournit encore quittance d’ une somme de 9 5 francs qui
lui étoit due par défunt Didier Gauthier; au moyen de
quoi Pierre Tourres devient propriétaire des immeubles
compris en la donation de 1788.
Lorsque le cit. Tourres voulut se mettre en possession
de ces objets, après le décès d’Anne Laborieux donatrice ,
les enfans Gauthier s y opposèrent; et on voit , par le
procès verbal du 1 3 frimaire an 1 0 , que les enfans Gau
thier rcconnoissoient que leur père étoit héritier des
acquêts de son fils , puisque le motif de leur opposition
fut uniquement fondé sur ce qu’ ils prétendoient que
l'objet de la donation étoit un propre au défunt, d’après
l’article 8 du titre 12 de la Coutume, que dès-lors leur
père , ni son acquéreur, n’avoient rien à y prétendre.
Sur cette opposition, et le 16 du même mois de fri
maire an 1 0 , Pierre Tourres prit le parti de citer Pierre
Gauthier au bureau de paix, pour prendre son fait et
(ou^e. Il cita pareillement les enfans Gauthier pour voir
ordonner l’cxécution de son contrat d’échange, avec res-
�< l\
( 7 )
. . . .
titution'de jouissances, payement des dégradations, et
dommages - intérêts.
Mais, au bureau de paix , les enfans Gauthier changè
rent de langage. Lors de leur opposition, ils ne réclamoient
les objets compris en la donation que comme étant un
propre à défunt Didier Gauthier ; mais, lors du procès
verbal fait au bureau de paix le 21 frimaire, ils déclarèrent
qu’ils étoient seuls héritiers de leur défunt frère ,* d’après
la loi du 17 nivôse an 2 , et que leur p è r e , ou son acqué
r e u r , étoit sans qualité. L e père, à son tour, soutint qu’il
étoit seul héritier des meubles et acquêts de son fils; il
prit le fait et cause du cit. Pierre Tourres. Ce dernier est
décédé dans le cours de l’instance j ses enfans ont repris à
son lieu et place.
Bientôt il s’éleva de vives discussions au tribunal de
Clermont, sur la demande du cit. Tourres. Cette qua
lité d'héritier des acquêts, si souvent reconnue par les en
fans Gauthier, fut contestée avec acharnement.
• Les héritiers Tourres soutinrent au contraire que le
contrat d’échange devoit avoir son entière exécution.
Iæs héritages qui en faisoient l’objet avoient été donnés
à l’abbé G au th ier, par Anne Laborieux sa tante ; ils
avoient formé pour lui des acquêts; et sa succession , en
cette partie, lors de sa mort civile, avoit été dévolue
de droit à Antoine Gauthier p è re , en vertu de l’art. 3
du titre 12 de la Coutume d’Auvergne.
L ’époque de la mort civile de D idier Gauthier ne
pouvoit être douteuse. Vicaire et communaliste à SaintSandoux , il étoit tenu de prêter les sermens prescrits aux
fonctionnaires public6json refus avoit entraîné sa dépor-
4
�toi
,v
c 8 )
tntion , 'conformément à la loi du 26 août 1 7 9 2 , et il
avoit été conduit à Bordeaux pour être déporté.
1
L e décret du 17 septembre 17 9 3 assiiniloit en tous points
les prêtres déportés aux émigrés. La loi du 22 ventosean 3
étoit également rigoureuse, et faisoit remonter la mort
civile des prêtres à celle du 17 septembre 1793.
Les héritiers Tou rres, ainsi qu’Antoine Gauthier père,
se trouvoient dans cette position heureuse, qu’ ils pouvoient invoquer avec faveur la disposition de ces lois ré
volutionnaires , qu’ ort rappelle souvent -avec regret. Ils
opposoient également avec succès les fins de non-recevoir
invincibles résultantes de tous les actes authentiques et
judiciaires où les enfans Gauthier àvoient reconnu si disertement et si expressément les droits et la qualité de
leur père.
La cause , portée à l’audience du tribunal d’arrondisse
ment de C lerm on t, fut plaidée avec solennité pendant
deux audiences des 24 et 28 ventôse an 1 1 . Il fut or
donné un délibéré ; mais les juges, se trouvant au nombre
de quatre, furent divisés, et il s’ensuivit partage dans
les opinions.
L e tribunal, en déclarant le partage, ordonna que la
cause scroit plaidée de nouveau ù l’audience du 21 floréal
nn i i , en présence des mêmes juges et du cit. Bartsup
pléant, qui fut appelé pour lever le partage. Mais le 21
floréal il intervint un jugement contradictoire, qui dé
bouta les héritiers Tourres et Gauthier père de leur de
mande envers les enfans Gauthier, et les condamna aux
dépens.
Faisant droit sur la demande en recours et garantie, for-
�« 2>
niée parles héritiers T o u rres, contre Antoine Gauthier,
ce dernier est condamné à les garantir et indemniser de
l’inexécution du contrat d’échange du 20 germinal an 4i
en conséquence , il est tenu de restituer aux héritiers
Tourres les objets donnés en contre-échange : il est or
donné qu’il sera procédé à l’estimation des dommagesintérêts dûs aux héritiers T o u rre s, ainsi que des restitu
tions de jouissances faites par Antoine Gauthier; il est
condamné à leur payer le montant de toutes les estima
tions, ensemble les intérêts depuis la demande.
■ E t pour faire apprécier la solvabilité d’Antoine Gau
thier pour ce recours, le tribunal, à raison du grand âge
d’Antoine Gauthier, parce qu’il est sans ressourcés, con
damne les cnfans Gauthier à lui payer une pension ali
mentaire de 800 francs, qui est déclarée insaisissable, et
ordonne que sur la pension alimentaire que le père demandoit à ses enfans, les parties contesteront plus am
plement.
<
Ce jugement est fondé sur plusieurs motifs ; on ne
rappellera que ceux qui sont particuliers aux héritiers
Tourres.
ü n exp.ose , i ° . qu’il n’est pas prouvé que Didier
Gauthier fût fonctionnaire public en 17 9 0 , ni même sa
larié par la nation.
20. Que rien n’ établit que Didier Gauthier ait été dé
porté par aucun jugement des tribunaux ou arrêté d’ad
ministration ; qu’ il n’est pas prouvé qu’ il se soit déporté
Volontairement avec passe-port.
*
On ajoute, qu’ il est constaté par un arrêté du dircc-
5
�toire du département du Puy-de-Dôme , qui ordonne la
vente du mobilier de Gauthier p rê tre , qu’il est décédé
le 10 nivôse an 3 à Bordeaux , et que Bordeaux fait partie
du territoire français ; tandis que d’après les lo is , notam
ment celle du 22 ventôse an 2 , la confiscation des biens
des déportés de cette classe n’avoit lieu qu’à compter de
la sortie du territoire français.
On dit encore que rien n’établit l’époque à laquelle
Gauthier prêtre s’étoit rendu à Bordeaux ; si c’est posté
rieurement ou antérieurement à la loi du 17 nivôse an 2 ;
qu’il est même notoire que dans le département du Puyde - Dôme les déportations de fait n’ont eu lieu qu’en
avril et mai 1794 On en tire la conséquence, que Didier Gauthier n’ayant
pas encouru la mort civile par la déportation , et sa mort
naturelle n’étant arrivée que le 10 nivôse an 3 , sa
Buccession s'est ouverte sous l’empire de la loi du 17 nivôse
an 2 , qui la défère à ses frères et sœurs, à l’exclusion
de son père.
Parla même raison, Gauthier père n’a pu vendre ni
échanger les objets compris dans la succession de son fils,
puisque ces objets ne lui appartenoient pas.
Mais l’échangiste, comme le vendeur, est tenu de garantir
l’arquéreur de l’éviction de la chose vendue ou échangée.
Tels sont les motifs qui ont déterminé le jugement;
et on remarque que les premiers juges n’ont pas même
abordé la question résultante des fins do non-recevoir,
et la reconnoissance par les en fans de la qualité du père.
• Les héritiers Tourres et Antoine Gauthier ont inter-
�( 11 )
jeté appel de ce jugem ent, en ce tribunal: il s’agit d exa
miner le mérite des moyens des appelans, et de discuter
les objections proposées par les intimés.
: L ’ordre de la matière conduirait naturellement à dis
cuter, avant tout, la fin de non-recevoir qui s’élève contre
les intimés. Mais on croit devoir établir d’abord que
Didier Gauthier prêtre étoit mort civilement, antérieure
ment à la loi du 17 nivôse an 2. Cette première propo
sition justifie le droit et la qualité du père pour succéder
aux acquêts de son fils.
Les frères du défunt ayant reconnu la qualité du père
par des actes multipliés, leveroient tous les doutes sur la
mort civile, s’il pouvoit en exister.
On discutera, en troisième ordre, les objections pro
posées p a r les intimés, sur la question de savoir si les
biens donnés au défunt, par Anne Laborieux sa tante,
doivent être considérés comme acquêts. C’est en effet à
ces trois questions que sc réduit toute la cause.
P R E M I È R E
PROPOSITION.
Didier Gauthier prêtre étoit mort civilement avant
la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
: Les lois promulguées dans ces temps de persécutions
et de troubles , étoient infiniment rigoureuses. On ne
fera pas la nomenclature de tous les décrets qui ont été
lancés contre cette classe de citoyens*, ou ne les cite
jamais qu’avec dégoût : on doit donc se contenter de rap
porter les lois principales. Celles du 26 décembre 1 7 9 0 et
1 7 avril 1 7 9 1 , avoient assujéti tous les prêtres, lonclion6
�tv
( 12 )
naires publics ou pensionnés de la nation } au serment
de la Constitution civile du clergé.
L ’article I er. de la loi du 26 août 1 7 9 2 , ordonne à
tous les ecclésiastiques q u i , assujétis à ce serment, ne
l’auroicnt pas prêté, ou qui, après l’avoir prêté, l’auroient
rétracté, de sortir, sous huitaine, hors des limites du dé
partement de leur résidence, et dans quinzaine, hors du
territoire français.
Passé ce délai, les ecclésiastiques non-sermentés devoient
être déportés à la Guiane française, ainsi qu’il résulte de
l’article 3 de la même loi.
L ’article 6 condamne aux mêmes peines tous autres
ecclésiastiques non-sermentés, quoique n’étant point assu
jétis au serment, lorsque par quelques actes extérieurs
ils auront occasioné des troubles , ou lorsque leur éloi
gnement sera demandé par six citoyens domiciliés dans
le même département.
Il n’est personne qui ne se rappelle combien cette dis
position a été funeste pour les ecclésiastiques réfractaires,
non-fonctionnaires publics. Il n’en est pas un seul dans
ce département qui ait échappé à la proscription ; les
listes en furent faites avec la plus cruelle exactitude, et
signées par six citoyens.
L e décret du 17'septembre 1 7 9 3 , par une disposition
unique, déclare applicables, en tous points , aux prêtres
déportés, les dispositions des lois contre les émigrés ; et
on sait que la loi du 28 mars 17 9 3 1 pin* sa première dispo
sition, a déclaré que les émigrésétoient mortscivilement.
lia loi du 22 ventôse an 2 a complété ce code, si on
peut appeler ainsi le recueil de ces lois révolutionnaires.
�s jr
( 13 )
L ’article i cr. de cette loi ne fait aucune distinction. Les
biens de tous les ecclésiastiques, fonctionnaires publics
ou non , salariés ou non , qui ont été déportés ou reclus,
sont confisqués et acquis à la république. L ’article 4 de
la même loi fait remonter l’effet de la confiscation , à
compter du décret du 1 7 septembre 1793»
* En s’arrêtant sur ces dispositions, comment pourroit-il
y avoir du doute sur la mort civile de Didier Gauthier?
Il a été reclus en octobre 17 9 3 , et il fut fait inven
taire de son mobilier par le commissaire du district, au
mois de brumaire an 2 , qui répond précisément au mois
d’octobre 1 7 9 3 , c’est-à-dire, au premier jour de la ré
clusion de Didier Gauthier. Ses meubles ont été vendus
par l’administration , et le prix vei’sé dans la caisse du re
ceveur de l’e n r e g is tr e m e n t , qui en a donné quittance le
7 prairial an 2 -, tous ses immeubles ont été séquestrés
et affermés par le district. Gomment l’administration
auroit-elle pu prendre ces mesures, si l’infortuné Gau1 thier n’avoit pas été considéré comme compris dans les
dispositions des lois des 1 7 septembre 17 9 3 et 22 ventôse
an 2 ? L a vente de son mobilier, le séquestre et la ferme
de ses biens immeubles sont postérieurs à cette loi ; toutes
ces mesures ont été prises en exécution d’icelles : Didier
Gauthier étoit donc considéré comme mort civilement
depuis la loi du 17 septembre 1 7 9 3 ; dès-lors sa succes
sion a été ouverte à compter de sa mort civile.
Mais comment Didier Gauthier d’ailleurs auroit-il pu
échappera la déportation? il étoit vicaire et communaassujéti au serment prescrit par les lois des 26 décembre
�M
V '
( 14 )
1790 et 17 avril 17 9 1 : comme vicaire, il étoit fonction
naire public; comme communaliste, il étoit bénéficier, et
par conséquent avoit droit à une pension de l’état : enfin,
il a été reclus et déporté. D e sorte que s’il est fonction
naire public ou pensionnaire de l’état, il se trouve frappé
par la loi du 26 août 1 7 9 2 , article I er. ; s’ il n'éloit pas
fonctionnaire public ou pensionnaire de l’état, il seroit
dans l’espèce de l’article 6 de la même loi.
* Les intimés , en réponse à ces m oyens, opposent,
i ° . que les héritiers Tourres n’établissent pas que Didier
Gauthier fût vicaire à St. Sandoux. Mais les héritiers
Tourresont-ilsbesoin derecourir àcettepreuve? ilsseroient
d'abord dans l’impossibilité de rapporter les lettres de
vicaire, qui ne portent pas minute, et dont il n’existe pas
de traces. La notoriété seule les a instruits de cette circons
tance , et cette notoriété est suffisante. On ne conteste pas
que le défunt fût communaliste, que dès-lors il avoit droit
h une pension ; mais on prétend que les héritiers Tourres
ne prouvent pas encore que Didier Gauthier fût salarié
par la nation. Ces objections ne sont que des prétextes
futiles. II seroit bien difficile d’établir qu’un prêtre a été
salarié par la nation , si on exigeoit le rapport des quit
tances. Ne sait - on pas que les réfractnires n’ont jamais
rien reçu sur la pension qui leur étoit accordée?
On dit encore qu'on ne rapporte pas d’arrêté des corps
administratifs, qui ait prononcé nominativement la dépor
tation de Didier Gauthier. Il est vrai qu’on n fait des
recherches vaines sur ce point; m ais, parce qu’on nuroit
perdu ou soupirait un arrêté de ce genre, que la plupart
des administrations ont enlevés de leurs cartons, n’existe-
�t-il pas des moyens pour y suppléér? L ’inventaire, et la
vente des meubles faite par le district ; la quittance du
receveur, du prix provenu de la vente de ces meubles ;
le séquestre et la ferme de ses biens immeubles ; la réclu
sion de l’individu, sa déportation sur les vaisseaiix de la
république ; toutes ces mesures de rigueur ne peuvent
avoir été faites qu’en vertu d’un arrêté, et en prouvent
l’existence,quand on seroit dans l’impossibilité de rap
porter l’arrêté nominatif.
> Qu'on ne dise pas que Didier Gauthier n’a pas quitté
le territoire français, qu’ainsi il ne doit pas être consi
déré comme déporté : ce n’est là qu’une équivoque. Il
subissoit au contraire une déportation plus rigoureuse,
puisqu’il étoit embarqué sur les vaisseaux de la répu
blique , ce qui n’avoit lieu qu’en vertu d’une condamna
tion; et d’ailleurs, la loi ne fait aucune distinction entre
les déportés et les reclus. O r , 011 ne pourroit pas contester
que Didier étoit au moins reclus, puisque son père, en
qualité d’héritier des acquêts de son fils, a été condamné
par jugement à payer le montant des fournitures qui
avoient été faites à son fils pendant sa réclusion.
‘ L a mort civile de Didier Gauthier est donc une cer
titude. Elle remonte au 17 septembre 179 3. C’est de cette
époque, et d’après les lois qui étoient alors en vigueur,
que sa succession a été ouverte. Antoine Gauthier, père,
0 succédé aux meubles et acquêts de son iils , d'après
1article 3 du titre 1 2 de la Coutume d’A u v e rg n e , qui
régissoit la personne et les biens, et qui n’a voit alors
été abrogée par aucune loi.
Ce père octogénaire peut donc invoquer la l o i , 1équité
�(
1
6
}
et la faveur. Cette foible portion des Liens de son fils étoit
la seule consolation qu’ il pût espérer dans son infortune.
L a succession des ascendans, établie par le droit rom ain,
étoit singulièrement restreinte et modifiée par la Coutume
d'Auvergne. L ’article 3 du titre 12 a tempéré la rigueur
de l'ancienne Coutume, qui excluoit les ascendans de toutes
successions, ce qui répugnoit à tous les principes du droit
naturel. La loi du 17 nivôse elle-même appeloit les ascen
dans à succéder, lorsque le défunt n’avoit laissé ni frère,
ni sœur ; et le Code civil, qui ramène tout aux véritables
principes, fait aujourd’ hui succéder les ascendans concur"remment avec les frères et sœurs du défunt.
Il est donc vrai que les lois rigoureuses peuvent être
quelquefois utiles, et qu’il peut par fois résulter quelque
bien d’un grand mal, puisqu’un père trouve l’occasion
de les invoquer pour obtenir une foible portion des
biens de son enfant. Si on doit être ingénieux dans pluisieurs circonstances pour en écarter l’application; si on doit
rechercher strictement l’observation des formes; ce n’est
que quand ces mêmes lois tendroient à dépouiller une
famille , ou l’individu qui en a été frappé, des biens qu’il
possédoit : mais lorsqu’il s’agit de porter des secours à un
père octogénaire et dans le besoin, on doit appliquer ces
mêmes lois sans répugnance , puisqu’enfin elles ont un
heureux effet.
Antoine Gauthier, garant formel de toutes les pourr
suites qu’éprouvent les héritiers Tourres , ne doit - il pas
être aujourd'hui à l’abri de toutes recherches ? Il a disposé
d'une portion d’immeubles, qui lui étoit légitimement
acquise; et quand on voudroit, contre l’évidence, contre
�9
( i7 )
toute raison, supposer l’omission de quelque vaine for
malité, équivoquer sur des mots, les cnfans Gauthier,
intimés, seroient sans droit comme sans action, comme
on va le démontrer.
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
Les intimés ont reconnu le droit et la qualité du père^
et sont non-recevables dans leur demande en désistement.
L e jugement dont est appel, dans ses motifs, ne s’est
pas occupé des fins de non - recevoir. On a mis de côté
tous les actes dont il avoit été justifié pour prouver que
les enfans Gauthier avoient reconnu que le père étoit
héritier des acquêts de son fils.
C’est en cette qualité q u e , le 5 floréal an 4 , il a demandé
à ses enfans la restitution du mobilier du défunt,qu’ils
avoient en leur p o u vo ir, parce q u e , sans doute, ils se
l’étoient fait adjuger lors de la vente publique qui eut
lieu. Ils opposent en réponse cette'vente publique, à leur
p è r e , et soutiennent qu’ils n’ont profité de ce mobilier
ni directement ni indirectement. Ils reconnoissoient donc
par là que le père auroit eu droit à ce mobilier, s’il eftt
existé en nature, ou s’ils en avoient profité.
L e 21 fructidor an 5 , le père traite avec M ic h e l, un de
fies fils; e t , en sa qualité d’héritier des acquêts du défunt,
il se départ, au profit de Michel, d’un immeuble qui
faisoit partie de cette succession, moyennant la somme
de 100 francs.
I jt‘ 17 (rimaire nn 6 , il donne en échange h un autre
de ses fils un contrat de rente de i 5 francs, qui avoit
�( >8 )
appartenu au défunt, toujours en qualité d’héritier des
acquêts de Didier Gauthier, et reçoit en contre-échange
la propriété d'une cuisine voûtée, contiguë à sa maison.
E n fin , dans tous les actes qu’il a passés avec ses enfans, ou en leur présence avec des tiers, ils ont toujours
reconnu cette qualité.
Il
a subi des condamnations, comme tel, soit à la re
quête de Ligier - Rochette , soit â la requête d’Anne
Laborieux , et ses fils lui en ont laissé payer le montant,
n’ont pas imaginé de venir i\ son secours, ni de récla
mer contre le défaut de qualité.
Antoine Gauthier a donné, à titre de ferme, des héri
tages provenus des acquêts de son fils; et les autres enfans
ont laissé jouir paisiblement le ferm ier, qui a versé le
montant de la ferme dans les mains du père, sans récla
mation de la part des intimés. Il résulte, sans doute, de
ces actes multipliés , une fin de non-recevoir insurmon
table et invincible, qui arrête toutes réclamations de la
part des enfans. Ils ont reconnu que leur frère étoit mort
civilement : si c’est une e rreu r, ce seroit une erreur
de d ro it, contre laquelle on ne peut être relevé, et dèslors leur demande doit être écartée sans retour.
Vainement les intimés opposeroient-ils, comme ils l’ont
dit en cause principale, que l’acte d'échange passé avec
Pierre T o u r r e s , dont ils demandent la nullité, est anté
rieur aux actes qu’on présente comme des fins de nonrecei/oir. Que cet échange soit antérieur ou postérieur
aux actes émanés des enfans Gauthier, cette circonstance
est indiffère nie. Ils n’ont pas ignoré l’acte d’échange du
29 germinal an 4 ; ils ont vu leur père jouir constamment
�. ( 19 ^
des héritages qui lui avoient été donnés en contre-échange ;
ils lui ont vu recevoir la rente qui lui étoit donnée en
retour; ils ont gardé le silence pendant plus de six ans
sur ce traité, et ce n’est qu’après la mort d’Anne L a b o
rieux , qui s’étoit réservé l’usufruit des objets donnés à
son neveu, qu’ils ont imaginé d’attaquer l’échange de
nullité.
Mais ils ne peuvent espérer aucun succès, de cette récla
mation tardive et ambitieuse , qui tendroit à opérer la
ruine absolue de leur p è re , et à le dépouiller entière
ment de ce qu’il possède.
L a défense des intimés en cause principale dénote assez
qu’ils n’espéroient pas priver leur père des meubles et
acquêts du défunt; car ils ont principalement insisté sur
un moyen de droit qui pouvoit changer l’ état de la
question. Tout en accordant au père la qualité d’héritier
des meubles et acquêts, ils ont fait de grands efforts pour
soutenir que les biens donnés par Anne Laborieu x, à
défunt Didier Gauthier son neveu, étoient un propre dans
la personne du défunt, et par conséquent ne pouvoient
appartenir à l’héritier des acquêts. Cette discussion plus
sérieuse mérite un examen particulier.
T R O I S I È M E
PROPOSITION.
Les biens donnés par donation en tre-vifs, ¿\ défunt
D id ie r Gauthier, sont acquêts en sa personne.
L article 3 du titre 1 2 de la Coutume , accorde aux
ascendans un droit de successibilité, « quant aux meubles
�c 20 )
» et «’cquêts autrement faits et advenus aux descendans,
» que par hoirie et succession ab intestat. »
Ces derniers termes de la Coutume, succession ab
intestat , semblent lever toutes les difficultés. Ils ne peu
vent signifier autre chose, sinon que les ascendans sont
privés de tous les biens auxquels les enfans succèdent
comme héritiers du sang, mais qu’ils doivent recueillir
tous ceux qui adviennent aux descendans par donation
entre-vifs ou à cause de mort. L a Coutume , en défé
rant aux ascendans les meubles qui ne viennent pas de
succession ab intestat , ne leur a-t^elle pas conféré tous
les meubles provenus des successions conventionnelles?
c’est ce qui sort naturellement des expressions de l’article.
Si la loi n’eut pas entendu faire de limitation, elle se seroit
arrêté à ces mots, p ar hoirie ou succession , sans ajouter
ces derniers, ab intestat , qui alors seroient devenus
inutiles. Tout ce qu’on pourroit dire en c o m m e n ta n t et
expliquant le texte de la Coutume, seroit contraire aux
termes de l’article et à l’esprit de la loi.
Si le fils a succédé ab intestat , il ne transmet pas cette
portion de biens à ses ascendans ; s’il les a recueillis par
une donation ou un legs , ses ascendans lui succèdent.
Voilà la seule manière d’entendre et d’expliquer l'article.
Mais l'article 8 du même titre a fait naître de grandes
discussions. L e dernier commentateur lui-même ne peut
s'empêcher de remarquer qun la décision est obscure, le
style singulier , et la rédaction bizarre. En effet, en voici
Je texte littéral:
« E t à cette cause, pour ne frustrer les collatéraux
�y
(21 )
.».qui par. ci-devant succédoient aux Liens de l’estoc d’où
» étoient provenus les biens donnés à celui ou ceux qui
» les devront avoir ab intestat, ne se peuvent direac» quêts, et ne changeront la nature du côté dont ils sont
•» provenus , combien que par çi-devant entre les coutumiers y ,eut sur ce grande altercation. »
Comment expliquer cet article d’une manière satisfai
sante? L e dernier commentateur ne se flatte pas d’y avoir
xéussi. Il n’adopte pas même l’avis de Basmaison , qui
pense que la Coutume en ce point n’a eu pour objet que
•de limiter l’article 6 , qui donne aux parens paternels
les meubles et acquêts ; mais il est bien éloigné de çroirp
•que cette décision ait voulu restreindre les droits, suc■cessifs des ascendans, et il leur défère tous les biens donnés
à un enfant par les ascendans eux-mêmes , ou par d’au
tres parens, parce qu’il regarde ces biens comme des
acquêts, en vertu de l’article 3 ; et Basmaison entendoit bien la Coutume.
L e dernier commentateur, après avoir successivement
rapporté les opinions de ceux qui l’ont précédé, se trouve
fort embarrassé , et ne porte aucune décision. A u milieu
de cette obscurité., les idéejs les plus simples sont les meil
leures; il faut remonter au principe, pour fixer la nature
des biens, distinguer les donations faites en ligne directe
ou en ligne collatérale.
Pour celles faites en ligne directe, on peut soutenir
avec fondement qu’elles sont propres à la personne de
1 enfant, puisque les donations de ce genre ne tombent pas
dans la comnnijinuté. conjugale ; mais pour celles faites en
ligne collatérale, 011 ne peut les considérer que comme
�%
C 22 )
des acquêts, puisqu'elles font partie de la communauté,
lorsqu’elles sont faites pendant le mariage , à moins qu’il
n’y ait une stipulation contraire. L e dernier commentateur
convient de ce principe; il rappelle la disposition de
l'article 246 de la Coutume de P a ris, qui le dit expressé
ment, et plusieurs arrêts recueillis par Louet et Brodeau,
ainsi que par H enrys, qui tous ont jugé conformément.
M ais, quoique le dernier commentateur reconnoisse
que les donations faites en ligne collatérale sont de v é r i
tables acquêts dans la personne de celui qui en est
l’objet, voulant concilier le texte de l’article 8 avec le prin
cipe , il se demande à lui-même , si au moins on ne doit
pas considérer comme propre la portion qui seroit reve
nue ab intestat au donataire, s’il n’y avoit pas eu de do
nation ; et il incline à penser que cette portion doit être
retranchée des acquêts, et appartenir aux héritiers des
propres , au préjudice des ascendans.
Cette question secondaire seroit absolument oiseuse
dans l'espèce ; parce qu?il faudroit au m oins, pour ad
mettre cette espèce d’accommodement, que le donataire
eût pu succéder comme héritier ab intestat au donateur,
et on 11e peut succéder qu’autant que l’on survit au do
nateur; le dernier commentateur est obligé d’en convenir.
O r , Didier Gauthier a prédécédé Anne Laborieux sa
tante donatrice, par sa mort civile comme par sa mort
naturelle: de sorte qu’en mettant de côté cette distinc
tion , qui paroît plus subtile que solide; en partant de la
disposition de l’article3 , et du principe certain et reconnu ,
que tout ce qui est donné en ligne collatérale est réputé
acquêts , c;n doit conclure que tout ce qui fait partie do
�-<VJ
( 23 ) A .
la donation d’Anne Laborieux a dû appartenir à Antoine
Gauthier p ère , à titre de successibilité.
Il
n’y a point ici de succession ab intestat pour Gau
thier fils. Anne Laborieux étoit sa tante maternelle; elle
pouvoit avoir d’autres frères ou sœurs, et sa succession se
diviser à l’infini. N ’y eût —il que les enfans du premier
lit d’Antoine Gauthier, ils étoient au nombre de huit.
La portion ab intestat seroit donc infiniment modique
sous ce rapport. Mais Didier Gauthier a prédécédé sa
tante, et par conséquent ne peut, être compté parmi ceux
qui étoient habiles à lui succéder. Il n’y auroit donc
aucun retranchement à faire, même dans le système du
dernier commentateur, et tout est acquêts pour Didier
Gauthier.
- Après trois siècles de la rédaction de la Coutum e, les
praticiens n’ont pu s’accorder entr’eux sur le sens de
l ’article 8. Cette question dorénavant ne naîtra plus d’après
le nouvel ordre des successions ; mais il n’y a jamais eu
de difficulté sur l’article 3 , et lorsqu’il s’agit d’un droit de
successibilité pour un ascendant on doit plutôt l’étendre
que le restreindre.
Il
faut donc d ire , avec la Coutume, que tout ce que le
fils possède par acquisition ou par donation, en un mot
toute succession conventionnelle, est réputé acquêt en sa
personne, puisque la Coutume n’excepte que les succes
sions ab intestat - qu’ainsi Antoine Gauthier a dû recueillir
tout ce qui avoit été donné à son fils par Anne L a b o
rieux 5 que dès-lors il a valablement transmis aux héritiers
lo u rre s les immeubles qui donnent lieu à la contestation.
L e s prem iers juges n’ ont pas daigné jeter leurs regards
�(
2
4
}
sur cette difficulté; il n’en est fait aucune mention dans leurs
motifs : elle méritoit cependant leur attention aussi-bien
que la fin de non-recevoir qu’opposoient les appelans. Ils
se sont arrêtés à de vaines formalités, lorsqu’il s’agissoit,
de dépouiller des tiers qui avoient traité de bonne foi;
lorsqu’il s’agissoit de priver, un.père du droit de succéder
à son fils, pour une portion fort exigue, et dans un temps
où le C ode civil établit la succession des ascendans comme
un droit naturel et reconnu par les législateurs les plus
célèbres dont les décisions font encore la règle parmi
nous.
Les appelans se flattent d’avoir prouvé que Didier
Gauthier étoit mort civilement avant la loi du 17 nivôse
an 2. Ils n’ont fait que se réunir aux intimés eux-mêmes,
qui l’avoient reconnu de la manière la plus expresse et
la plus formelle, en accordant à leur père le droit de suc
céder à son fils, quant aux meubles et acquêts. Les appe
lans ont donc établi le mal-jugé du jugement dont est
ap p e l, et la nécessité de le réformer.
Par conseil ; P A G E S ( d eR iom ), ancien avocat,
B R U N , avoué.
À R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d ’appel.— A n 12.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Tourres, François. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
successions
mort civile
mort naturelle
officier de santé
donations
prêtres déportés
prêtres
coutume d'Auvergne
successions des ascendants aux acquêts
conflit de lois
prêtres réfractaires
biens nationaux
ventes
reclus
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour François et Léger Tourres, propriétaires, habitans de la commune de Saint Sandoux ; Claude Tourres, habitant du lieu d'Eliat, commune de Ludès ; autre Claude et Marie Tourres, habitant de la commune de Plauzat ; appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Clermont, le 22 floréal an II ; Contre Michel Gauthier, officier de santé, habitant à Saint-Sandoux ; Antoine Gauthier, cultivateur, habitant du même lieu ; autre Antoine Gauthier, Cothon et Anne Gauthier son épouse, Pierre Morel et Marguerite Gauthier, Jean Juliard et Anne Gauthier sa femme, Antoine Rive, Rodier et Marie Gauthier sa femme, François Besson et Marie Gauthier sa femme, tous intimés : En présence d'Antoine Gauthier père, dit laborieux, cultivateur, habitant de la commune de Saint-Sandoux, aussi appelant du même jugement.
notation manuscrite : texte complet du jugement du 2 frimaire an 13, 1ére section. La cour dit mal jugé et ordonne que l'acte d'échange du 20 germinal an 4 sera exécuté.
Particularités : notation manuscrite : texte complet du jugement du 2 frimaire an 13, 1ére section. La cour dit mal jugé et ordonne que l'acte d'échange du 20 germinal an 4 sera exécuté.
Table Godemel : Mort civile : un prêtre déporté est-il frappé de mort civile ? sa succession est-elle réputée ouverte à compter de la mort civile, ou seulement de la mort naturelle ? les frères du défunt, qui ont reconnu leur père héritier des acquêts de son fils, et ont traité avec lui en cette qualité, sont-ils recevables à lui contester postérieurement cette qualité ? ont-ils pu actionner en désistement, des tiers qui avaient traité avec leur père, dans cette confiance ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1788-An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1504
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Sandoux (63395)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53244/BCU_Factums_G1504.jpg
biens nationaux
conflit de lois
coutume d'Auvergne
donations
mort civile
mort naturelle
officier de santé
prêtres
prêtres déportés
prêtres réfractaires
reclus
Successions
successions des ascendants aux acquêts
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53236/BCU_Factums_G1422.pdf
11edef42e51a61367d29f4fea8131f6b
PDF Text
Text
Sts
CONCLUSIONS
PRISES
A
L ’AUDIENCE,
LORS D E L A P L A ID O IR IE D E L A CAUSE,
POUR
L e citoyen B R U N intimé et appelant;
C O N T R E
L e citoyen V E R N I È R E , appelant et intimé.
�TRIBUNAL
CONCLUSIONS
Prises à L'Audience lors de La plaidoirie de la cause,
POUR
L e c i t o y e n B R U N , in ti m é et a p p e l a n t ;
C O N T R E
L e citoyen V E R N I E R E , appelant et intimé.
EN ce qui touche la demande judiciairement formée
à l’au d ien ce, en nullité de l’enquête ;
Attendu que c e tte demande n ’a point été form ée,
ni mêm e la nullité proposée devant le Tribunal de
première instance;
Attendu la disposition précise de l’article 4 de loi du
4 germinal an 2 , et l’art. 7 de celle du
3 brumaire
an 2 ,
déclarer le citoyen Vernière non recevable dans cette
demande en nullité ; et dans le cas où le Tribunal y
ferait quelque difficulté , ordonner
conformément à
A
d
’
appel
DE R I O M.
�W
t
«A
l ’article
36
( ^ )
du titre 22 de l’ordonnance de 1 6 6 7 , que
les enquêtes dont il s'agit, seront refaites (a);
E t dans le cas encore où le Tribunal croirait devoir
passer au jugement du fond et subsidiairement seule
ment , le citoyen Brun conclut audit cas :
En ce qui touche le fossé qui sépare le pré B lic li,
ou Assolent., de celui du cit. Brun., venu de F a y d it,
attendu que d’après l’usage coutumier, reconnu par
les experts et avoué par les parties, ce fossé étant à
l ’aspect de nuit du pré du cil. Brun, en est une dépen
dance nécessaire ;
Attendu en second lieu que ce fossé a toujours élé
recuré de la part du cit. F a y d i t , et que le terrain en
provenant a toujours été répandu dans le pré F ayd it,
ainsi que cela est prouvé par l’élévation qui se trouve
sur le pré Faydit dans toute la longueur de ce fossé,
dans la largeur d’environ douze pieds;
Atlendu que rien ne prouve que le cil. Vernière ait
jamais eu la propriété de ce fossé, et que l’agage en
maçonnerie qu’il y a fait construire postérieurement à
1792 ou 17 9 3 , n’est qu’une entreprise de sa part sur
le pré Faydit ;
(a) L e citoyen Brun 11e demande pas q u ’elles soient refaites
aux dépens du T ribunal de première in stan ce, mais bien aux
dépens de qui il appartiendra ; parce que à l’époque où ces enqu ¡tes ont été faites, les Tribunaux étaient divisés sur la question
de savoir, si les enquêtes devaient être laites publiquement et à
l’aud ience, ou secrètement par-devant l’un des juges ; cl que par
cette raison , il paraîtrait injuste de faire supporter au T ribunal
de première instance , les frais des nouvelles enquêtes.
�(
3
)
» Attendu que dans le procès-verbal d’adjudication doB ru n , son pré est confiné, sans aucun intermédiaire,
par celui du cit. Vernière, et que le droit de prise d ’eau
par ce fossé, lui est nommément v e n d u , qu’ainsi le
iossé se trouve renfermé dans l’objet confiné, et fait
partie du pré vendu ;
Attendu que mal à propos le citoyen Vernière se fait
un moyen de ce que l’art. 7 des charges de l’adjudica
tion porte , que l’adjudicataire prendra le bien dans
l ’état où il se trouvera à l’époque de son adjudication,
sans espoir d’indemnité ni dommages-intérêts, parce
qu’il ne résulte autre chose de l à , si ce n’est que la
nation ne voulait pas garantir les dégradations qui au
raient pu exister lors de l ’adjudication, dans les biens
nationaux, et non pas comme prétend le cit. Vernière,
que les adjudicataires ne peuvent pas exercer les droits
de l’ancien propriétaire, parce que si un voisin avait
commis une usurpation, la nation n ’a pas entendu cano
niser celle usurpation, elle s’est dépouillée en faveur
de l’adjudicataire, et lui a transmis tous les droits qu’a
vait l’ancien propriétaire ;
Sans avoir égard au rapport d’experts, dire qu’il a
•été bien jugé par le jugement dont est ap p el, mal et
sans cause appelé , ordonner que ce jugement sortira
son plein et entier efïet ;
Et faisant droit sur l’appel interjeté du même juge
m e n t, par le cit. B ru n , en ce qu e les parties ont été
mises hors de procès, sur la demande en dommagesintérêts du cit. B run , résultans de ce que le citoyen
A 2
�I^ L
( 4 ) >
Vernièrea nettoyé h son préjudice le fossé dont il s’agit,
et a profité du terrain qui en est provenu, dire qu’il
a été mal jugé quant à c e , émendant, condamner le
cit. Vernière aux dommages-intérêts du citoyen B run ,
pour lui tenir lieu de restitution de jouissances depuis
son adjudication jusqu’au désistement dudit fossé.
En ce qui touche les conclusions subsidiaires que le
cit. Vernière a prises pour la première fois sur l’appel,
tendantes à être auto’ isé à prendre, exclusivement au
cit. B ru n , l’eau du fossé dont il s’agit , pour Parrosement de son pré Blich;
Attendu à c e t ég a rd que c e t l e d e m a n d e n ’a pas été
formée en cause principale, et qu’en cause d’appel il
ne peut etre prononcé que par bien ou mal j u g é , et
jamais sur de nouvelles demandes, suivant l ’art. 7 de la
loi du
3 brumaire
an 2 ;
<
Attendu d’ailleurs que l’adjudication du cit. Brun lui
donne expressément le droit de prise d’eau dans ce fossé
pour l ’arrosement de son pré ;
Déclarer le cit. Vernière non recevable dans cette
demande.
'
E n ce qui concerne le chemin réclamé par le cit.
Vernière sur le pré du cit. Brun, venu du cit. F a y d i t ,
pour l’exploitation de son pré Boudanson, marqué au
plan, lettre D ;
Attendu i.° que le cit. Vernière ne rapporte aucuns
titres en f o r m e , qui établissent l’existence ancienne d’un
chemin public entre les prés Blich et F a y d it , et qu’au
contraire il résulte des contrats de i7&4> I 7 7 2 et
�(5)
S&\
par lui rapportés, qu’il n’existait pas alors de chemin
sur le pré Fayd.it, puisque par ces contrats le pré Blich
est co n fin é , sans m o y e n s, par le pré Faydit ; que la
même chose résulte encore de 1 adjudication du citoyen
B ru n , puisque le pré Faydit y est également confiné
de n u it, par le pré Blich, sans aucun interm édiaire,
ni mention de chemin ; qu’ainsi ces actes étant en forme
authentique , et formant mêm e le titre de propriété
du cit. Vernière et du cit. Brun, méritent la préférence
sur des copies informes de prétendues reconnaissances ,
qui n ’ont peut-être jamais existé, et qui d’ailleurs ne
peuvent pas être produites en cette forme (a) ;
2.° Que jamais le citoyen Vernière ni les anciens pro
priétaires de son pré , ne se sont servis de ce chemin ;
Attendu que le passage qui a existé dans celte partie
du pré F ayd it, était à l’usage des Hospitalières seules,
pour l ’exploitation de leur pré Cliapet, que ce passage
a été détruit depuis plus de cinquante à soixante ans
et réuni au surplus du pré F a y d it, et a été donné aux
Hospitalières dans un autre endroit du pré indiqué au
plan par les lettres A . B. C.
(a) L e cit. V ern ière a fait plaider que les contrats de 175 4,
1772 el 1 7 8 3 , n ’ ont pas été passés sur les lieux contentieux, et
qu’il a pu échopper aux parties de rappeler le chem in, qu’il sup
pose avoir e xisté, entre son pré Blich et le pré F a yd it; mais il
rapporte un acte de prise de possession de son pré 33lieh, de
l’année 1754; cet acte a bien nécessairement été fait sur son pré
Blich , et cependant il 11e rappelle pas plus que les contrats le
prétendu chemin ; donc il n’existait pas.
iV.
Le cit. Faydit n’aurait pas donné un nouveau chemin de
�Attendu que ce prétendu chemin n ’aurait même pas
d’issue , qu’ainsi il deviendrait inutile au cit. Vernière;
Attendu que le cit. Vernière lui-mêm e a déclaré dans
le rapport d ’experts, qu’il exploitait son pré, lettre D ,
par le p o rta il, lettre
q u 'il n’avait aucun intérêt à
réclamer un chemin sur le pré F a y d it, n i l ’envie d ’in
quiéter ses voisins; qu’ainsi, d’après son propre a veu,
il aurait abandonné son droit, si jamais il en eût e x isté ,
et queles servitudes ne doivent exister qu’autant qu’elles
sont nécessaires;
Attendu que quoique les experts aient dit que l’ou
verture du p r é , lettre D , est suffisante p o u r l ’e xp l o i t a
tion de ce p ré, néanmoins l’inspection des lieux prouve
que ce passage est absolument insuffisant pour un char
chargé de foin ; et qu’il est gêné par le dernier arbre
qui existe dans le pré du cit. B ru n , et par celui qui
existe sur le bord du fossé du pré lettre D , âgés au
moins de cinquanle ans ; qu’ainsi depuis leur existence
il est impossible que le p ré , lettre D , ait élé exploité
par cet endroit, et qu ’en cas de difficulté le rapport
d ’experts devrait être amendé ;
Attendu en lin que le terrain sur lequel le citoyen
Vernière réclame mi-chemin, fait partie du pré Faydit,
et se trouve compris dans les coniins donnés à ce pré,
dans le procès-verbal d’adjudication faite au cit. B run ,
puisque ce pré est confiné sans moyen par celui du cit.
servilucle au milieu de son p r é , si le prem ier eût dû continuer
d ’exister sur le bord du même p ré , pour celui du cit. V e r n iè r e ,
lettre D ,
�( 7 )
7
Vernière; qu’ainsi, en supposant que cettç porlion de
terrain n ’appartînt pas anciennement au cit. F a y d it ,
elle ne ferait pas moins partie aujourd’hui de ce p ré ;
Attendu que si c ’est à titre de servitude que le cit.
Vernière réclame un passage sur le pré F a yd it, il de
vrait rapporter un titre ou une possession trentenaire,
pour établir cette servitude;
Attendu que non seulement le cit. Vernière ne rap-^
porte aucun titre à cet égard , mais encore que loin
d’avoir la moindre possession, il est certain que jamais
son p ré , lettre D , n’a été exploité par cet endroit, et
que depuis plus de soixante ans le passage que les Hospi
talières y pratiquaient Irès-anciennement, a été réuni
au pré Faydit depuis plus de trente ans avant la de
m a n d e , qu’ainsi l’action du citoyen Vernière serait
même prescrite ;
Dire qu’il a été bien jugé par le jugement dont est
a p p e l, mal et sans cause appelé , et en cas de difficulté
et très-subsidiairement seulem ent, ordonner que par
de nouveaux experts les lieux seront encore vérifiés,
à l’effet de savoir si depuis l’existence des deux arbres
dont il s’agit , il a été possible d’exploiter le pré , lettre
D j par cet endroit.
En ce qui touclie la demande du cit. V ern ière, ten
dante à l ’enlèvement du portail du cit. Brun;
Attendu que lors du rapport d ’experts, le citoyen
Vernière n’a pas osé prétendre qu e le chemin dont 011
vient de parler, dut se continuer jusqu’à ce portail,
mais qu’il a prétendu au contraire que le chemin faisait
�(8 )
suite h celui venant de Planche-paleuille, et marqué
au plan, le lire G ;
Attendu encore l'impossibilité de faire passer un char
de loin dans la saulée qui existe à l ’aspect méridional
du pré Faydit (a) ;
D ire également qu’il a été bien jugé parle jugement
donl est a p p e l, mal et sans cause appelé.
En ce qui touche le fossé qui sépare lepréG renouillet
du cit. Vernière d'avec le pré du cit. B run, venu de
D ubois;
Attendu que les experts ont décidé que ce fossé dé
pend et fait parlie du pré de Brun;
Attendu que le cit. Vernière a lu i- m ê m e demandé
l ’homologation de ce rapp ort, qu’ainsi il l’a approuvé;
Attendu d’ailleurs qu’il appartient de droit au cit.
Brun par l’aspect et d’après l ’usage coutumier, reconnu
par les experts et avoué par le cit. V ernière, dans le
rapport d’experts ;
Attendu encore que le nettoyement de ce fossé a
toujours été fait par le cit. D ubois, et que la preuve
en résulte évidemment de l’élévation qui se trouve le
long de ce fossé sur le pré Dubois, lettre O ;
Attendu enfin quelecit. Vernière n’a pas établi l’exis
tence de la borne par lui prétendue, ni une possession
trentenaire et paisible de nettoyer ce fossé, et qu’il ne
(«) Il existe à l’extrémité clc cette sa u lé e , près du portail du
cit. B run, un arbre vis-à-vis le milieu d e l à saulée, qui prouve
l ’impossibilité physique d ’y passer un c h a r , ni môme une harcelle.
rapporte
�(9)
rapporte aucun litre de propriété qui puisse détruire le
droit que l'aspect et l’usage coutumier donnent au
citoyen Brun ;
A yant égard à ce qui résulte du rapport d’experts, et
icelui homologant en cette partie, dire qu’il a été mal
jugé p a r le jugement dont est appel, bien appelé, émendant, garder et maintenir le cit. Brun dans la possession
et jouissance de son pré venu de Dubois et dudit fossé
en dépendant ; faire défense au citoyen Vernière de l’y
troubler à l’avenir, le condamner aux dommages-intérêts du cit. B r u n , résultant de ce que le cit.Vernière
a fait nettoyer ce fossé au préjudice du citoyen B r u n ,
m ê me depuis la contestation e n t a m é e ju di cia ire me nt ;
Et attendu que le Tribunal d’appel ne peut pronon
cer que par bien ou mal ju g é , et jamais sur de nouvelles
demandes, déclarer le cit. Vernière non recevable dans
sa demande, tendante à être autorisé à prendre exclu
sivement l’eau par le fossé du pré D ubois, pour l’arrosement de son p ré , lettre N ;
El en ce qui concerne l’agage construit dans ce fossé
par le cil. Vernière, au moment même du jugement
dont est appel;
Dire qu’il a été bien jugé par ledit jugem ent, mal et
sans cause appelé, condamner enfin le cit. Vernière en
tous les dépens des causes principale et d’appel.
Par conseil, G R A N E T .
V A Z E IL L E ,
avoué.
A R IOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PA L A IS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Brun. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Granet
Vazeille
Subject
The topic of the resource
chemins vicinaux
jouissance des eaux
biens nationaux
émigrés
agage
bornage
experts
irrigation
témoins
prescription acquisitive
vie monastique
Description
An account of the resource
Titre complet : Conclusions prises à l'audience, lors de la plaidoirie de la cause, pour le citoyen Brun, intimé et appelant ; contre le citoyen Vernière, appelant et intimé.
Table Godemel : Litige sur la propriété et possession de deux fossés et d 'un chemin qui sont intermédiaires aux héritages respectifs des deux parties
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1783-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1422
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1421
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53236/BCU_Factums_G1422.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agage
biens nationaux
bornage
chemins vicinaux
émigrés
experts
irrigation
Jouissance des eaux
prescription acquisitive
témoins
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53235/BCU_Factums_G1421.pdf
c15c16d429917747a6f586ad14462f86
PDF Text
Text
TRIBUNAL D’APPEL
D E
M
E
M
O
I
R
E
POUR
L
e
C i t o y e n
V E R N I È R E , appelant et in tim é;
CO N T R E
Le
L
Citoyen
B R U N , intimé et appelant.
’ o b j e t de la contestation est. la propriété de deux
fossés , la destruction de deux agages et d ’une b o n d e ,
et le rétablissement d ’ un chem in vicinal.
L e cit. V ern ière est propriétaire d ’ un pré à Planchepaleuille: il l’a acquis en 178 3 , des citoyens Assolent.
C e pré provenait du sieur Blich , et il en porte le nom.
E n touré de fossés à tous les aspects, il était arrosé prin
cipalem ent par une prise d ’eau du ruisseau de Ponturin ,
que les fermiers conduisaient par les fossés environnans,
dans toutes les parties du pré.
L e cito ye n Brun
est propriétaire d ’un pré appelé
clos M e r c ie r, à l ’aspect de jour du pré Blich. L e pré
M ercie r provient du sieur F aidit père.
E n tre ces deux prés était un chem in vicin a l, bordé
de saules, servant à l ’exp loitation, tant d ’un autre pré
du cit. V ern ière , appelé Boudanson, que d ’un pré des
religieuses de N o tr e -D a m e , joui à présent par le cit.
A u b ert. C ette double destination est tellem ent évidente,
que le fossé séparatif de ces deux prés vient se diriger
A
R I O M .
�( 3 )
en ligne perpendiculaire , sur le milieu du chem in vi
cin a l, et lui présente ainsi deu x aboulissans égaux et
parallèles.
D epuis long-tem s ce chem in vicinal était devenu à
peu,près inutile au cito yen Vern ière , q u i, acquéreur
des prés Boudanson , a réuni une suite de proprié
t é s , pour lesquelles il s’est fait deux sorties, et q u ’il
lui est plus com m ode d’exploiter l ’une par l’autre ;
mais il n ’en a pas moins toujours surveillé la m aintenue
de ce' ch em in ; ce q u ’il prouve par des diligences, et
un traité de 1788.
X-orsque le cit.V ern ière acquit le pré B licli, en 178 3,
il trouva dans le fossé qui longe ce chem in v icin a l, 1111
établissement d ’agage en pieux et branchages, et il le
rem plaça par un agage en maçonerie. l . e sieur F a id it,
alors propriétaire du pré M e r c i e r , ne crut avoir ni
droit , ni intérêt de s’y opposer. L es reconnaissances
respectives annonçaient un chem in entre deux , et de
plus la prise d ’eau lui était inutile , car le sol de son pré
est beaucoup plus haut que celui du cit. Vernière. lies
deu x voisins ont donc vécu en très-bonne intelligence,
tant que M .r Faidit a été propriétaire; il n’est m ort
q u ’en 1794.
D e u x de ses fils étaient sur la liste des é m ig r é s , et
le pré M ercier a été ven d u , co m m e bien n a tio n a l, au
cit. B r u n , le 4 thermidor an 2.
C e nouveau possesseur n’a pas eu assez du b énéfice
de-son acquisition , il a voulu l’accroître en s u r fa c e ;
deux rangs de saules marquaient trop l’existence d ’ un
chem in ; il en a fait supprim er u n , et a réuni le ch em in
à son pré.
�(
3
)
S’étant donné alors pour b o rn e le fossé oriental du
pré Blich , il a convoité encore ce fossé , non pas pour
l ’arroseraent de son p r é , car cela est physiquem ent
impossible , mais pour l’ôter au citoyen V e r n iè r e , dont
cependant il avait vu l’agage en m a ç o n e rie , lorsqu’il
était d evenu adjudicataire, en l ’an 2.
I l fit assigner le cit. V e r n iè r e , le 2 5 nivôse an 6 , pour
vo ir dire q u ’il serait m aintenu au droit et possession do
ce fossé.
L e cit. Brun a a c h e t é , en l ’an 6 f un autre pré du
cit. D u b o is, et pour celui-là e n c o r e , il est borné à l’oc
cid e n t, par les prés Boudanson du cit. V e r n iè r e , et au
nord/-par un pré appelé G r e n o u ille t, que le cit. V e r nière avait acquis du cil; iBJelferie, en 1789.
C e pré Grenouillet avait été acquis par le citoyen
Bletterie , du dom aine du R o i , et la propriété du fossé
séparatif du pré D ubois était m arqu ée alors par deux
bornes à quatre fa ces, saillantes, portant une inscrip
tio n , et placées aux deux extrém ités du fossé du côté
du pré Dubois. 11 y avait eu m ô m e , en 1 7 7 5 , une dif
ficulté entre les fermiers du dom aine et les sous-fer
miers, pour le net toiem ent de ces f -s é s ; et par transac
tion du 4 fé v r ie r , 1<J sous-ferm ier du pré Grenouillet
p aya des dom m ages-in térôts, co m m e n ’ayant pas fait
ce n etto iem en t, dont il était chargé par son bail du
27 décem bre 1764.
L e cit. Bletterie étant devenu acquéreur, avait fait
assigner Dubois p è re , en 1 7 8 3 , pour la propriété du
fossé a u j o u r d ’ h u i c o n t e n tie u x , et le rétablissement
d ’ une borne qui venait d’être arrachée ; mais com m e
A 2
�•
; <r-«
.
( 4V ,
on ne lui disputa pas la propriété du fossé, il ne 1int
pas au replacem ent de la b o rn e , et ne fit plus de pour
suites.
~
D ubois fils avait bien te n té, en l ’an 4 , de faire citer
le cit. V e r n iè r e , q u’il crut n ’être pas inform é de l ’an
cien état des choses; niais au bureau de paix il se con
vainquit de la nullité de son droit, et ne donna aucune
assignation.
L e cit. Brun deven u p ro p riéta ire, osa davantage:
il assigna le cit. V ern ière , le 21 frim aire an 8, et conclut
èi la maintenue- du droit et possession de ce fossé.
D e son côté , le cil. Vernière fit assigner le cit. B ru n ,
le 9 nivôse an 8 , pour rétablir le chem in vicinal men
tionné ci-dessus, et q u ’il avait supprimé en coupant l ’un
des rangs de s a u le s , pour s’em parer du local.
V o ilà donc trois chefs de d em a n d es, dans lesquels
le citoyen Brun est dem andeur pour la propriété de
deux fossés, et le cit. V ern ière est dem andeur pour le
rétablissement d ’un chem in.
L e tribunal civil du P u y - d e - D ô m e rendit un juge
m ent interlocutoire, le 9 nivôse an 8 ; il ordonna que
les contestations s é r i e n t soumises à une expertise;
Que les experts diraient, quant aux fossés, s'il existe
quelque indice, agage, 011 au Ire œ uvre de main d 'hom m e,
•tendant à attribuer la propriété desdits fossés à l ’une ou
à l'autre des parties ;
Q u ’ils diraient, quant au ch em in , s’il avait été autre
fois chem in pu b lic, s'il subsiste en c o ie des traces de sou
existence a n cie n n e , et de 1’usurpatiou.
C e lle expertise con ven ait à toutes les parties, et eut
�lieu sans la m oindre réclamai ion. L es experts donnèrenl leur ra p p o r t, le 23 prairial an 8.
I l leur avait été produit des copies de reconnaissances,
qui donnaient au pré Blicli un chem in pour confin
d ’ orient ; ce qui prouvait loul à la fois pour le chem in
et pour le fossé qui était en deçà. Mais quant au fossé,
les experts les trouvèrent m êm e surabondantes.
Ils pensen t, i.° relativem ent au fossé du pré B l i c l i,
que d’après l ’inspection des lie u x , les ponts, l ’agage re
construit par le citoyen V e r n iè re , et qui ne peut servir
q u ’à l’irrigation de son p r é , ledit fossé, indépendam
m ent des reconnaissances, appartient au cit. Vernière.
2,° Quant au ch e m in , q u ’il a existé dans le pré du
cit. Brun , q u ’il avait douze pieds, q u ’à la vérité ils n ’ont
pas trouvé de titres prouvant q u ’il fût destiné à l ’e x
ploitation du premier pré Boudanson, mais que cepen
dant sa direction et l ’ouverture étaient suffisantes pour
c e lle ex p lo ita tio n , d’autant mieux que la reconnais
sance de Colas M o r e l, qui s’y a p p liq u e, réclam e pour
confin de jo u r, un chem in commun.
3 .° Quant au fossé du pré G renouillet, les experts
disent que d’après l ’ usage de donner le fossé aux prés
de m id i, il appartiendrait au citoyen B r u n , mais que
n ’aya n t trouvé ni indices ni titres, et n’étant pas au
torisés a e n q u êter, ils s’en réfèrent au tribunal.
C e tribunal n'était plus celui qui avait rendu le ju g e
m ent in leilo cu to ire; le tribunal d ’arrondissement était '
en activité , et il ne crut pas devoir hom ologuer un
rapport fait en exécution d ’un jugem ent q u ’il n ’avait
pas rendu.
�I
t
•
(6 )
L e cit. B r u n , quoique nouveau possesseur, offrit de
faire les preuves les plus difficiles. L ’agage établi sur le
pré B l i c l i , exigeait celle d ’ une possession de près de
5 o ans; le traité du 4 février 1 7 7 5 , rappelant encore
un bail de 1 7 6 4 , demandait pour le pré Grenouillet un©
p reuve de possession, à peu près im m ém oriale. L e cit.
B run ne fut rebuté par rien : il ofïrit tout ce q u ’on v o u
lut ; et le tribunal d’arrondissement rendit un n ouveau
jugem ent in terlocu toire, le 6 fructidor an 8.
C e jugem ent ordonna que le cit. Brun ferai! p r e u v e ,
i.° que lui ou ses prédécesseurs, propriétaires du pré
F a id it, avaient possédé exclusivem ent le fossé con ten
t i e u x , l'avaient recuré et profité seuls de la jetée p e n
dant 3 o ans utiles avant Cexistence de t a gage.
2,0
Q u ’il prouverait aussi une possession exclusive du
terrain , sur lequel élait le chem in longeant lesdils fos
sés , sans que le citoyen Verniere ij eût ja m a is passe.
3 .° Q u ’il prouverait enfin la jouissance exclusive du
fossé du pré Grenouillet pendant 3 o ans utiles avant Le
'
traité d u 4 février 1 7 7 5 .
E n exécution de ce ju g e m e n t, les parties ont fait
respectivem ent des enquêtes;
11 ne faut pas dissimuler que la m ajeure partie des
tém oins, amenés par le cil. B r u n , oui déposé Irèsfavorablcm enl pour lui.
Presque tous ont fait ou vu faire le nettoiem ent du
iossé du pré Blich pour le cit. F a id it, depuis 17 ans',
2 5 an s, 29 ans, 3 o a n s, 32 ans , 36 a n s, 4 0 ans, et l’un
d ’eux va m êm e jusqu'il 5 o an?. Mais il fallait (ixer l ’é
poque de l’agag e, cl quelques-uns des témoins le disent
�J G ï
( 7 )
fait depuis 12 à i 3 ans. U n autre plus indulgent pour
le cit. Brun , ne le fait pas rem onter au-delà de 7 à 8
ans. Cependant ils conviennent q u’avant cet agage en
m a ç o n e rie , il y avait une digue faile en pieux et en
b ran ch ages, pour faire ¿Hier l’eau dans le pré Blich.
-Ainsi le disent les témoins C arto n , Versepuy et Q u in ty ,
lérnoins du cit. Brun ; les deux derniers ont vu celte
digue de bois exister il y a ¿5 ans.
L e s témoins du cit. V.ernière disent avoir fait aussi le
nettoiem ent du m êm e fossé depuis 8 ans, depuis 12
ans, depuis 14 ou i 5 ans.
Quant à l'existence du ch e m in , les témoins de Brun
l ’ont bien tous vu ; ils l’ont v u m arqué par deux rangs
d ’arb res; les uns en font un se n tie r, et les autres un
chem in à chars. M ais ils prétendent n ’y avo ir vu passer
person n e, et sur-tout le cit. V e r n iè re ; ils disent presque
tous que ce chem in n’était que pour l ’usage des reli
gieuses de N o t ie - D a m e , propriétaires du pré joui ù
présent par le cit. A u b ert ; mais que depuis long-tems,
M . r Faidit s’étant arrangé avec e lle s , ce chem in ne
subsiste plus. U n témoin dit c e p e n d a n t, que ce chem in
était à l’ usage des religieuses et du nom m é Bachot.
L e s témoins du cil. Vernière onl vu ce ch em in pra
tiq u é; l ’un d ’eux l ’a vu il y a 3 o ans, et il lui paraissait
un chem in d ’exploilalion ; un autre y a gardé les cochons
dans le m êm e lem s; un aulre y a conduit des fumier9
po u r les jardiniers v o is in -, il y a 34 ou 35 ans , et il
distingue bien que c ’était un chem in d ’en viron cent
toises, entre les prés Faidit et Assolent.
A l ’égard du ibtsé du pré G re n o u ille t, les témoins
j
�.'/
'
< ( 8 )
du cit. Brun disent q u’il a été n etto yé par D u b o is , son
prédécesseur, depuis 2 4 , 28, 3 2 , 3 4 , 4 0 , et m êm e l’un
d ’e u x , 55 ans. A u c u n d ’eu x n ’y a v u de bornes, mais
seulement des pierres de taille pour arrêter l ’eau. L ’ une
de ces pierres étant à la vérité plus g ran d e, mais ne
paraissant, dit un tém oin , q u ’ une pierre de croisée.
D ans l’enquête du cit. V e rn iè re , les témoins disent,
que ce fossé avait été n e tt o y é , et le jet répandu sur le
pré G ren ouillet, il y a i 5 , 17 , ¿ 5 , 3 o et 40 ans. L ’ un
d ’e u x , ferm ier il y a 42 an s, dit l ’avoir fait ainsi p e n
dant tout Le tems de son bail. L e cit. Jusseraud dit avoir
été ferm ier depuis 1 7 7 2 , et avoir toujours fait faire ce
recurem ent.
L ’ancienne existen ce, au moins d ’ une b o r n e , paraît
assez constatée dans cette enquête. C e u x qui en parlent
expliquent que c ’était une pierre taillée à quatre faces,
sans feliure, en saillie, paraissant bien une b o rn e , et
donnant le fossé au pré Grenouillet. U n tém oin y a
m êm e vu
deux bornes au lieu d ’u n e , un autre y a
rem arq ué com m e de récriture.
Enfin le tribunal d ’arrondissement a prononcé en
défin itif, sur les trois chefs contentieux , le 11 fructidor
a n g.
A tte n d u sur le prem ier c h e f, que le cit. Brun a prouvé
une possession du fossé du pré B lic b , pendant 3 o ans
avant l’existence de l’agage établi p a r le cit. V e r n iè r e ,
et que cette possession lui sert de titre;
A tte n d u sur le second c h e f, que le cit. Brun est en
possession du chem in depuis 3 o ans avant la d em a n d e;
que ce chem in ne servait que pour l ’usage des religieuses
do
�C 9)
de N o t r e - D a m e , représentées par A u b e r t , et q u’il leur
en a été donné un autre en rem p la cem en t; que le cit.
V e rn iè re n’y a plus dé droit de tems im m é m o ria l, et
que les servitudes se prescrivent par 3 o ans ;
A tte n d u sur le troisième c h e f, q u ’aucune des parties
n e rapporte de titres qui lui donnent la propriété du
fossé du pré G r e n o u ille t, q u ’il n ’y a ni bornes ni jets
de part ni d ’au tre , et q u’il résulte des enquêtes que les
d eu x parties ont fait des actes de propriété à diverses
époques.
Sans s’arrêter au rapport d ’experts, le cit. B ru n est
gardé au droit et possession du fossé Blich. I l est o r
don n é la démolition de l ’agage établi sur ce fossé par
le cit. Vernière. Il est ordonné encore la destruction
d ’une bonde placée au bout du m êm e fossé.
L e cit. V ern ière est débouté de sa dem ande en réta
blissement du chem in.
L e fossé du pré G renouillet est déclaré com m un au x
p a rties, et il est dit q u’elles s’en partageront le jet. L a
destruction de l’a ga ge , établi sur çe fossé par le cito y e n
V e r n iè r e , est de m ê m e ordonnée.
L es deux parties ont interjeté appel de ce jugement.
M O Y E N S .
L e but de ce M é m o ir e a été plutôt de rendre com pte
de la cause que de la discuter. M algré la sécheresse de
son o b je t , le d éveloppem ent de plusieurs demandes et
le débat d’ une expertise et d’ une e n q u ê te , com porte
raient un ordre et une étendue de discussion p lu s fa liB
�gan te que nécessaire ; mais ce n ’était ici q u’ une cause
d ’exp ertise, car tout ce qui tient au b o rn a g e, peut-il
bien être fo u rn is à des e n q u êtes? qui ne sait que des
fermiers s’enIre-dispute n t , pied à p ie d , les limites, les
engrais, et les prises d ’e a u ; et sans doute l ’historique
de leurs débals ne doit être q u ’ une voie d ’éclaircissemens très-secondaire.
; :
*
L e tribunal civil l’avait' pensé ainsi; et certes s’il eût
cru q u ’ une enquête fût le seul m ode préparatoire de
sa décision , il n’eût pas fait passer les parties par un
prélim inaire dispendieux, et cependant inutile. Mais il
avait cru , avec raison , que des experis habitués à l’exa
m en des lo c a lité s, distingueraient aisément la vraie
dém arcation des héritages des parties , laquelle fixée
dans le tirs plans, resterait im m uable , et les mettrait pour
toujours à l’abri des procès.
T e l était aussi le vœu des citoyens Brun et V e r n iè r e ,
tous deux présens à l’expertise, el al tendant de ce tra
vail la fin de leurs conleslalions. Elles devaient donc
en effet ne pas être soumises à d ’au 1res épreuves , au
m oins pour les chefs de demandes que les experts ré
glaient positivem ent.
lis avaient re n v o y é au tribunal civil pour le fossé
du pré G renouille!', parce q u ’en effet ils 11’avaienl pas
tro u vé de bornes ni
reconnaissances; mais le tri
bunal avait assez a un exploit de 1 7 8 3 , et d ’un traité
de 1 7 7 5 , qui rappelait nu acte de 1 7 6 4 , et dès-lors la
p reu ve de possession était faite contre un dem andeur
qui de sa part ne rapportait aucuns titres ni docum ens.
L e pis aller au reste p o u va it être d ’o rd o n n er
uno
�( 11 )
p reu ve pour le c h e f se u le m e n t, et déjà*il est difficile
de ne pas trouver le jugem ent dont est ap p el v ic ie u x ,
par cela seul q u’il a refusé d ’hom ologuer le rapport
sage e t lum in eux ordonné par le tribunal civil, contre
leq uel m êm e il est très-rem arquable que le cito ye n
B run n’â proposé aucuns m o y e n s, soit de n u llité, soit
d ’erreu rs, soit d ’am endem ent.
_ L e cito yen V ern ière doit donc croire que le rapport
sera hom ologué sur l ’app el; néam oins et fallût-il entrer
dans lé m érite des enquêtes , et dans le fond de la
cau se, il doit croire encore que leur résultat serait tout
contraire au x inductions q u ’en a tirées le tribunal de
prem ière instance.
■
. C et exam en subsidiaire com porte que les. trois chefs
de dem andeisoient distingués, en com m ençant ce p en
dant par celui du ch em in v ic in a l, dont l’existence
im porte au fossé auquel il est adjacent.
' i .
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'
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I.-■: T
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•
§. I.er
L ’existence et La prescription d u chem in vicinal.
- C e ch em in a-t-il e x is té ? C e lte question n’est plus
contentieuse. L e s e x p e r t s , les témoins , le ju g em en t
dont est a p p e l, le cito ye n B run lui-m êm e en convien
nent. L e ch em in a existé.
o M ais q u ’était ce c h e m in ? et quand a-t-il é lé réu n i
w la propriété. ; d u 'c ito y e n Brun ?
: Ici diversité d ’opinions.
- ¡Les témoins Brun veulent qu’il ne fût destiné qu’à
i
«a. --i; 1 î
iv . -i:'
'
’
B 2
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V
( 12 )
l ’exploitation du pré des religieuses de N o t r e - D a m e ,
joui aujourd'hui par le cito yen A u b e r t , sau f un tém o in
qui le m eltait aussi à l ’ usage du citoyen Bachot. Us
disent q u ’il avait cessé depuis lo n g -te m s d’être un
c h e m in , par un arran gem en t que fit le sieur Faidit.
L e s exp erts, qui en ont vu la trace et la destination,
disent que c ’était un chem in d ’ex p lo ita tio n , et ils rap
porten t à l ’appui de leur opinion d eu x copies de recon n jissan ces, qui bornent le pré B run par un chem in
entre d e u x , de n u it; et une copie d’autre reconnaissance
qui borne le pré V ern ière par un chem in com m un 3
de jour.
L e s tém oins V e rn iè re avaient passé dans ce ch em in
il y avait trente ans : il n’ était donc pas réuni alors
par le sieur Faidit. Si ce chem in co m m u n était pres
criptible , la prescription n ’était donc pas acquise en
l ’an 8.
A insi il y avait pour le cito yen V e r n i è r e , titre s,
lo ca lité, expertise et en q u ête; le citoyen Brun n ’avait
q u ’une p reuve négative à opposer. N e faut-il
pas
s’étonner q u ’il ail eu la p référen ce de voir , sur-tout
dans le jugem ent dont est a p p e l , que ce chem in ne
servant q u ’aux religieuses, a été rem placé ancienne
ment par un a u t r e , et que depuis ce t e m s - là , le cit.*
Brun ou ses auteurs ont possédé exclusivem ent le terrain
dudit chem in pendant tren te ans avant la demande.
P o u r juger a in s i, le tribunal de prem ière instance
s’est fondé sur les e n q u ê te s ; mais il était un tém oin
plus fort et moins suspect que tous le s a u tre s ,q u i n’avait
pas fait rem on ter à 3 o ans la destruction du c h e m in ,
et ce té m o in , c ’est le cito ye n B run lu i-m êm e!
�( i3 )
^
Il a dit p a r é c r it , au p r o c è s , que c ’est lui ( B r u n )
qui a arraché les arbres qui bordaient le c h e m in 'd e
son côlé ; que c ’est lui ( B ru n ) qui a d étru it le c h e m in ,
mais q u ’ il ne devait q u’ un passage au cito yen A u b e r f;
que c ’est lui ( B r u n ) qui a chan gé cette servitude d u
consentement d u citoyen A u b ert , en lui ouvrant un
autre chemin.
Il est donc indubitable que le chem in contentieux
n ’a pas été d étruit, et le terrain possédé exclusivem ent
par les citoyens Faidit et B run pendant trente ans
avant la demande. Il est donc bien certain que ce n ’est
pas le cito ye n Faidit qui changea anciennem ent cette
servitude pour s’em parer du terrain , puisque c ’est le
citoyen Brun lui-m êm e qui l ’a changée d u consentement
du citoyen A u b er t ; et le citoyen B run n ’est acquéreur
que depuis 1794L e chem in n’était donc pas détruit en 1794. Il n ’y
avait pas de changem ent alors, et sa bordure d ’arbres
n ’était pas arrachée. lia question de propriété est donc
toute nue : ce n’est plus une prescription im aginaire qui
en disposera.
Q u e le cito ye n V e rn iè re ait ou non passé sur ce
c h e m in , ce fait est indifférent ; car le genre de ce lle
possession ne laisse aucunes traces.
C ’est d ’ailleurs un droit de pure faculté , et la pres
cription dès-lors n ’a p u
courir suivant les principes
que a die cotitradiclionis. ( V. D en i% a rt, C oquille
Henri/s ).
L e chem in n ’a été d étru it, d ’après le cito yen B r u n ,
q u ’en 1 7 9 4 .1 1 étail libre au cito ye n V ern ière d ’y passer
�. ( r4 )
ou de n ’y pas passer ; car rien ne pro u ve q u ’on l ’en
ail jamais em pêché. Il préférait ¿ ’exploiter 'ses prés l’un
par l ’a u lr e ; mais il avait toujours intérêt à la conservalion du chem in. Il a su que le cito yen B run l ’avait
d é t r u it, et il s’est pou rvu en rétablissement dans les
six années de la destruction.
>
Si la p reu ve négative que le citoyen V e rn iè re n ’a
pas usé du ch em in était une voie de prescription contre
lui > il relèverait cette prescription par un fait consigné
dans les enquêtes m ê m e ; car 011 y voit q u e ce ch em in
est d evenu depuis long-tem s im praticable par une m arre
d ’eau qui en occupe encore une partie.
O r , il est encore de principe q u ’on ne perd pas la
possession d ’ un héritage ou d ’un chem in qui se tro u ve
obstrué, par des eaux , 'demersœ rei, ou autrem ent im
praticable , et que le droit de passer n ’est perdu en ce
cas par aucun laps de lem s, quanw is id tempus prœterier it, ut servit us itineris am ittatur. ( L. i 3 . cod.> deaq. '
poss. L 7. et làf. JJ'. quem ad. servit, a m itt.). L e cito yen V ern ière d ’ailleurs, co m m e propriétaire
riverain d ’un chem in d ég ra d é, se fût dû lu i- m ê m e un
chem in sur son héritage jusqu’à une réparation ; il n ’a
donc dans aucun cas ¿perdu le droit d ’en user à son
loisir.
•
1-
.:
L e cito yen Brun cite son adjudication dé l ?an>2 ,
qui 11e confine pas un chem in. Il faudrait lui dem ander
au contraire s’ il a bien acquis le droit de fa ire détruim
un agnge qui était bâti sous les y e u x du propriétaire
et sans contradiction. .Au reste', la nalion s?cm paran t
des biens d’ém igrés à litre de con q uête ou de déshér1
�rence , .a -t- e lle pu m eltre un grand soin h rechercher
les litres vicin a u x ; elle savait si bien que ses agens agi
raient avec précipitation , q u ’elle ne garantissait pas la
co n te n u e ; mais celte objection du citoyen Brun m èn e
à une découverte de plus. L e cito yen C orn udet, son
voisin , a acquis un pré confinant le pré Blich au m êm e
asp ect, provenant des H o s p ita liè re s.O r, l ’adjudication
qui est du 2 venlôse an 2 , porle pour confin un chem in
de service entre d e u x d u pré verger du citoyen Vernière.
O r , les prés Brun et C ornudet étant sur la m êm e lign er
peut-il y avoir 1111. chem in de service po u r l ’ un sans
q u ’il soit pour l ’autre.
A ce tilre s’en joint un a u lre du 27 janvier 1 7 8 8 ,
par lequel 011 voil que les nom m és Bachot ayant voulu
em piéter ce chem in , le cito yen V ern ière les força à
le laisser libre.
M a is , dit-on , cette servitude n’est pas nécessaire,
et la faveur de l’agriculture ne veut pas q u ’on en laisse
subsister d'inutiles.
Il 11’y a dans ce lte objection à répondre q u ’à un m o t,
c ’est à celui de servitude ; car ce n ’en est pas une que
réclam e le cito yen V e r n iè re , ce 11’esl pas sur le pré du
citoyen B run q u ’il veut passer, c ’est dans un chem in
com m un qui est entre les deux p r é s , et qui ne fait partie
ni de l ’ un , ni de l’autre.
C ’esl ainsi que les experts ont reconnu ce c h e m in ;
c ’est ainsi q u ’il était tracé entre deux rangs de v ie u x
saules jusqu’après 17 9 4 ; c ’est ainsi encore que l ’ont
désigné les témoins en l e ■
disant, un chem in à chars.
Ce 11’est donc pas une simple servitude sur le fonds
�( 16 )
d ’a u tru i; ce n ’est pas non plus un sentier iter\ ce n ’est
pas m êm e actus , c ’est bien distinctement ce que les
lois appellent v ia , un vrai ch em in vicinal destiné a u x
hom m es, aux bêtes et au x voitures. J u s agencli, vehendi
et am bulandi. ( 1. i . er^
de Serv. prœd. rust. )
L e citoyen V ern ière n ’a-l-il pas intérêt d ’ailleurs de
n e pas laisser perdre un ch em in qui lui deviendra trèsutile dans plusieurs hypolhèses. Il peut ven dre le petit
pré Boudanson qui est au m ilieu des autres; ce pré
peut faire partie du lot d ’ un de ses enfans ; il peut
l ’affermer particulièrem ent lu i-m ê m e : il a donc eu
raison de d em ander le rétablissement de ce chem in.
L e cito yen Brun ne l ?a détruit q u ’après 17 9 4 ; il ne
l ’a donc pas acquis par la prescription. S’il n ’est pas
acquis par le cito yen Brun , il n’est pas perdu pour le
c ito y e n V e r n iè re ; ainsi sa dem ande doit être accueillie.
§•2,
'
*
L a propriété d u fo s s é oriental d u pré B h ch .
Si le précédent paragraphe p ro u ve l ’existence d ’ un
chem in entre les deux prés des parties, com m ent sera-t-il
con cevab le que le citoyen Brun puisse le traverser, pour
se trouver propriétaire d ’ un fossé au-delà du chem in.
R em arq uon s d ’abord à cet égard la différence des
motifs qui ont d éterm in é le tribunal dont est appel.
Q u a n d , relativem en t au ch e m in , il a cru plutôt les
tém oins que le cito yen Brun lui-m êm e , il a dit que la
destruction du ch em in était faite auciennêinent p a r l e
c ito ye n
�( 17 ) t
cito ye n Faidit ; mais com m e d ’autres témoins disaient
y avoir passé il a trente a n s 3 il a bien expliqué qu’il
ne trouvait la preuve faite que d ’une possession de trente
ans avant L’exp lo it cle demande.
R ela tivem en t au fossé Blich , il a déclaré q u ’il y
avait preuve de possession dé ce fossé pendant trente
ans avant Cexistence de L’a gage fait par le cito yen
Vernière.
O r , il est constant que l ’agage a été bâti depuis quinze
ans au moins.
,
!
! J,
•>') " ir.
M ainten an t l’inconséquencélest paljpablé.Leitribundl
de prem ière instance a jugé qu’ il y. avait possession du
fossé pendant quarante-cinq ans, et possession du chem in
pend ant tren te ans.
~>i .!).■. ■
■
■
's w«?,
I l a donc jugé q u ’un propriétaire '3 en >nettqyariii un
fossé au-delà d ’ un c h e m in , peut>fairé acte de possession
utile , et prescrire le fossé par celte possession.
L a raison y résiste, et la loi dit que les propriétaires
d ’héritages séparés, par un chem in , n ’ont jaimais do
bornes à régler entre eu x j ,si' via 'p u b lica intervenit,
fin iu m regundorum a g i non polest. ( 1. 4* -iïi.fin. reg. ).
V eut-on dire que le tribunal n ’a pas entendu juger
( üne cliosç aussi extraordinaire
niiais »alors il faudra
4 dire que le sieur ^Faidit n ’a pu faire- des açtds dè p ro
priétaire sur le fossé , qu’après en-avoir fa it sur le ch e
min. Or,,, il est impossible; d’établir que le chem in soit
. détruit et possédé depuis quarante-rcinq ans. Il est donc
tout aussi impossible d ’établir la possession du fossé pour
le citoyen, B ru n ; car elle cloit avoiu.éfé-acquiselors'de la
construction de l ’agage,.sinon il n’^ a -p a s prescription.
C
�C e p en d a n t.vo yo n s encore si la possession du cito yen
B r u n , telle q u ’elle e s t, aurait été , in dépend am m en t
de cet interm édiaire , suffisante pour lui acquérir la
prescription.
N on seulem ent il faut que les trente ans nécessaires
pou r prescrire soient utiles et co n tin u s; mais il faut
en core q u ’ils se soient passés sans le m oindre trouble
et sansle m oindre acte de promiscuité qui portât atteinte
à une possession exclusive,*
'
C a r sur ce point la loi est bien claire. E lle exige
l ’im m obilité la plus p a r fa ite , le silence le plus absolu de
la part de ce u x qui ont.un intérêt contraire. Possessio
lég itim a e s t , cum omnium, adversanorum silentio et
tacU urrutaleJirm atur. (1. 10 de aquir possèss.)
O r , pou vons-n ous trouver cette abstention entière
v o u lu e par'la loi dans ce qui s’est passé , m êm e d ’après
les témoignages.
N e cherchons m ê m e que dans l ’enquête du cito yen
Brun. Gailori , f e r m ie r 'e n : 178 4 , dit que l ’agage du
^citoyen Vernière^fut fait pendant sa fe rm e , et q u 'a u p a r a fa n t'il y avait une digue en mottes pour mener
■/’eau 'au pré B lic h .
. V e r s e p u y o t Q u in ty déposent tous deux de 25 a n s ,
- e t ;disent \qu alors>\üs> fermiers du pré Blicli faisaient
-nhp- digue avec des'm ot les-pour prendre l ’eau.
V o ilà donc tout le contraire de silen tio , taciturnitate.
V o ilà au contraire des actes très-interruptifs de pos
session. !
:j!)
1
A Pons m ê m e jusqu’au témoin du cito ye n Brun , qui
idépose do 5 o an s, et disons que s’il y a eu des inter»-
�ruplions.qui rem ontent à s 5 a n s, il n ’en restera pas 3 o
utiles. 1 :.
L e cito ye n B run s’était cependant chargé de prou ver
u n e possession paisible et e x clu siv e , il ne l ’a pas faite.
I l était donc m al fondé de vouloir priver le cito yen
Vern ière:d u fossé, et sur-tout de conclure incidem m ent
ii- l a destruction de l ’agage.
.
Car cet agage ne lui nuit pas. O utre q u’il n ’est pas*
bâti ch ez l u i , il lui serait physiquem en t impossible de
profiter de l ’e a u , co m m e l ’ont, dit les experts. Sa de
m an d e est donc m é ch a n te , car elle n ’a pas d in térêt réel,
f L e cito ye n B ra n , au m om en t de l ’audience définitive,
a m ê m e 'fo rm é e x abrupto une dem an de en destruction
d ’une bonde q u ’i l a prétendu être sur le fossé du pré
B licli, et il a oblenu ce q u ’il dem andait sansile m oindre
exam en .
... I i
.
i:
.: >
S’il en eût été question lors de l ’e x p e rtis e , le plan
dém ontrerait que celte b o n d e , placée pour form er un
amas d ’eau entre le pré.B lich et le petit pré Boudanson,
est e n tiè r e m e n t , de m êm e que ce ré s e rv o ir, hors la
ligne angulaire du pré du cito yen Brun. Il était donc
encore mal fondé dans cet incident.
!
L e cito yen Y ern ière n’y insiste pas davantage, parce
que son drgit1évident à la propriélé du fossé Blich rendra
cet autre exam en inutile. C ette propriété n ’avait pas
.besoin {Fénquêtes ; car le citoyen Brun avouait n’avoir
•détruit lc.ch em in interm édiaire que depuis 1 7 9 4 } et
<ce chemin' était sans, contredit un\obstacle ins.unuon-r
vtnble pnur q u ’i l p û t Ê tre'allé posséder animQ dom ini
•mnifosséi situai au-delà.1' M
<y<o;."r'r
C a
�( 20 )
Y eû(-il ëu du doute* il .fallait, 'co m m e le dit D o m a t , *
se décider en faveur de celui qui avait le titre le plus
apparent. (/. 3 . de La Possess. )
N ’é lait-ce donc pas le cit. V e r n iè r e , déjà proprié
taire sans contradiction de tous les autres fossés de son
p r é , dont la propriété était entourée d ’eau et d ’ou
vrages de m a ç o n erie, et auquel seul la prise d ’eau po u
va it être utile.
Il a en sa faveur des reconnaissances. A la vérité elles
n e sont pas copiées d ’une m anière auth e n tiq u e; mais la
loi du 17 juillet 179 3 a disposé des originaux! Ces c o
pies anciennes ne p euven t pas être dites faites pour la
cau se, et de telles pièces fugitives sont devenues trop
précieuses au x propriétés, pour q u ’on doive les rebuter
sans de grandes raisons.
x '
'
En fin le cit. V ern ière a en sa faveur Ta vis très-positif
des experts , et certes cela seul devait décider de la con
te sta tio n ; car si on prescrit un ch am p e n t i e r , on n e
prescrit pas un bornage , et il est de principe ¡que toutes
lés questions de cet le nature doivent être soumiseâ.à un©
vérification.
1
Il n’y a lieu à exa m in er la possession, q u e si l’ une de9
parties prétend avoir celle de 1 héritage q u ’il faut borner.
S i super iocis prior detuLcrit q iierim on ia n t.\i.' 3 . c .J i n .
R ég i )
»:
<
•
M ais s’il n’ est question que du bornage en lu i-m ê m e ,
le juge doit re n v o y e r à des experts d e fin ib u s cogriosccndis pcrtinet a d mensores nüttercy e i il ne .doit p a s ,
co m m e le tribunal do prem ière instance y répudier leur
ra p p o rt, sans des causes d ’am endem ent^iniais a iic o n -
�( 21 )
J
traire ju g er par leur avis. E t per eos dirimere ipsam
fin iu m quœstiotiem. (/. 8. eod. tit. )
§. 3 .
L a propriété d u fo s s é d u pré Grenouillet.
C
e
q u ’à jugé à cet égard le tribunal dont est ap p el,
n ’est point du tout ce que les deux parties demandaient.
L e cit. Brun avait form é une dem ande pétitoire , et le
cit. V ern ière avait conclu à ce q u ’il en fût débouté. L e
tribunal n’a ni adjugé la d e m a n d e , ni débouté de la
dem ande.
I l a ordonné une prom iscuité, à laquelle personne
n ’avait conclu , pas m êm e subsidiairement.
E t com m e personne n’est obligé de v iv re dans l ’in
division, c ’est avoir ordonné im plicitem ent un partage
de terrain; mais un partage ne s’ordonne pas d ’office.
A in si, contravention au principe que sententia debet
ésselibel/o con /orm is, contravention à l’ordonnance qui
adm et à req uête civile, quand il a été jugé autre chose
que ce qui était demandé.
Peut-être bien est-il fondé en raison que le juge qui
n e voit pas clairem ent à qui appartient une propriété,
ordonne que les conlendans en feront le partage. C ’est
le jugem ent de Salomon ; mais le jugem ent de Salomon
n e serait pas autorisé par l'ordonnance de 1667.
A u fait q u ’y avait-il a ju g er? la dem ande pétitoire
du cit. B run q u ’il s’ était soumis a a p p u yer d ’une p reuve
de possession exclusive de 3 o ans utiles avant le 4 février
>
�.
( 22 )
i 7 7 5 , kc ’e s tr à -d îr e , de plus de 55 a n s ,.t a n t p a r tifres
que par témoins.
........... , .
L e cit. B run n ’a rien pro u vé par titres, et certes il
n e peut pas dire non plus ayoir rien p ro u vé par témoins.
I l était d em an d eu r, il n’établissait pas sa dem ande ,
il devait donc être débouté.
S i , ne pouvant obtenir le fossé en tier, il cro yait pou
voir prétendre à une m oitié, c ’était à lui à la demander.
Jusques là le cit. V ern ière n ’avait à défendre q u’à ladem ande de la propriété du fossé, et pour établir q u’e l l e .
n ’était pas fo n d é e , il a peu djefforts à faire ; car le jugery
m ent m êm e dont est a p p e l, constate dans ses motifs,}
q u ’il résulte des enquêtes que les deux parties ont f a i t
des actes de propriété à diverses époques.
L e cit. Brun n ’a donc pas fait la p re u v e à laquelle,Ü.
s’était soumis d’une possession exclusive.de 3 o ans utiles
avant 1 7 7 5 , et peu im portait que le cit. V ern ière eût
p ro u vé de sa part une possession e x c lu siv e ; il ne s’y
était pas o b lig é, et il était défendeur.
.
U n autre vice du ju gem en t dont est ap p el, est d ’avoin
Ordonné la destruction de l ’agyge établi sur ce fossé,
qui n’avail été d em an dée aussi q u ’en fin de cause.
;
S ’il en eût été question avant le jugem ent définitif,
Je cit. V ern ière aurait fuit constater qu^ 'cet agage ne
î u À tp a s a u cit. B r u n , q u ’il ne Umcbe pas m ê m e .a u terx u i ii .d e 'sou pré , et que l’eau ne peilt pas rem o n ter
au niveau dé ce pré. Ainsi encore il a été statué sur
une chose inconnue.
Y/r.
1
M ais fallûtril discuter sur le droit à la prom iscu itéd u
iüssé, il est de la plus grande évidèndo/que le cit.; B n in
n’ en a aucun.
�’
( 23 )
Q u e le cÎt.D u b o îs, précédent propriétaire de son pré,
ail fait n etto yer le fossé par échappée, m êm e à plusieurs
rep rises, cela s’exp liq u e; le pré Grenouillet était au
dom aine du R o i , il avait été déguerpi pendant lo n g te m s , co m m e les titres l’in d iq u e n t, et c ’en était assez
p o u r autoriser les voisins à ne pas respecter infiniment
cette propriété.
M ais tout prouve q u e depuis que le cit. Jusseraud
fu t ferm ier du dom aine , et encore plus quand le pré
Grenouille! fut ven d u au citoyen Bletterie, l’ un et l’autre
surveillèrent davantage , el alors le cit. D ubois ne net
toya plus le fossé.
11 est rem arquable q u ’aucun des lém oins du cil.B ru n
n e parle d ’un seul n e llo y em en l pendant les vingt dernièresannées, et encore on sait com bien le tems s’abrège
quand il faut se rappeler du passé. U n seul m ê m e , et
très-suspect, parle de 20 ans. Mais fallût-il se fixer à
cette é p o q u e , qui croira q u e , si le cit. D ubois était pro
p riétaire, il cessa tout d ’un coup sa prétendue posses
sion, quand le pré Grenouillet n ’était plus domanial et
déguerpi. Ou plutôt qui ne croira pas que jusqu’à la
v e n te du pré G re n o u ille t, il usurpait fu rtivem en t, et
n e possédait pas.
L e s conjonctures sont fortes , et cependant les titres
produits les rendent surabond antes, ou au moins les
fortifient.
L o rsq u ’on voit par un traité de 1 7 7 $ , qui est basé sur
un bail de 1 7 6 4 , un sous-lerm ier du pré Grenouillet
p a y e r un dédom m agem ent pour le fossé q u’il n ’a pas
fa it; lorsque le cit. B le tte r ie , assigne le cit. D u b o is, en
�rétablissement d ’ une born e qui lui donnait le fossé 5 ar
rachée depuis quelques jours; q u ’un tém o in explique
que le résultat de cette discussion fut que le cit. Bletterie
n etto ya le fossé, il est aussi clair q u’il puisse l ’être en sem
blable m atière, que la propriété était au cit. Bletterie.
L e tribunal de prem ière instance a adopté le traité
de 1 7 7 5 , co m m e un titre en faveur du cit. V e r n iè re ,
puisqu’il a exigé une p reuve de 3 o
ans a n térieu rs;
cependant ce titre était basé sur un autre de 1764. Alors
par une conséquence nécessaire, il fallait partir de cette
prem ière é p o q u e , et le cito ye n V ern iè re avait 36 ans
en sa faveur.
E u un m ot le cito yen V ern ière a pour lui titres et
possession; mais sur-tout le dernier état bien exclusi
v e m e n t établi. L e citoyen B run 11’a pas le m oindre
titre , et il n ’a établi que quelques anciens actes de
possession é p a r s , q u ’encore rien ne p ro u ve avoir été
anim a dom iai.
L e cilo yen V ern ière a établi de plus une ancienne
existence de bornes qui lui donnaient le fossé en lier :
c e lle preu ve 110 peut êlre détruite p a rle s tém oignages
négalifs q u ’il n’y en avait pas. L ’exploit donné en 1783
par le cito yen B lelterie , a ch ève la dém onstration; car
il parle d ’ une borne arrachée depuis quelques j o u r s .
Si ce n’est pas là une preuve co m p lè te , les déposilions
qui y sont relatives achèvent de la rendre suffisante.
L e cito yen Brun a certainem ent senti la force de ces
preuves ; mais pour faire bonne contenance , il a cru
q u ’il so rendrait plus intéressant en se p la ig n a n t,lu im ê m e de n ’avoir pas assez o b t e n u , et il a aussi inter
jeté appel.
11
�Jg&
( 25 )
I l est lésé d i t - i l , 1 .° pour n ’avoir pas obtenu de
do m m a ges-in térêts relativem ent au fossé Blich . S’il avait
p rou vé que ce fossé est à lu i, on lui rappellerait q u ’il
n ’a détruit le chem in q u’après 1 7 9 4 , et q u’ainsi jusques
là , si le citoyen V ern ière a eu droit d’après les experts
et les tit r e s , il a été en bonne foi depuis cette époque ;
2.0 P o u r n ’en avoir pas obtenu pour le fossé G renouillet ; mais il serait singulier de lui en avoir a c c o rd é ,
lorsqu’il n ’était pas établi propriétaire;
. 3 .° Parce que ce fossé a été déclaré com m un. L e cit.
V ern ière ne s’occupera pas de ce ch ef d’appel, les m oyens
précédens y rép o n d en t;
4 .0 Enfin parce q u ’ un tiers des dépens a été com pensé;
mais c ’était une conséquence du jugem ent q u i, sur trois
ch efs en faisait gagner deux au cito yen Brun.
Si
le citoyen V ernière avait besoin de m oyen s de
considération, c ’en serait un bien grand sans doute que
l ’exagération ridicule des prétentions toujours croissantes
du cito yen Brun. A v e c son voisinage sont arrivés l ’agi
tat ion et les procès; mais le cito ye n V ern ière se félicite
de ce que le jugem ent qui va se rendre en sera le t e r m e ,
et réprim era l ’avidité usurpatrice d ’un voisin aussi tracassier.
/ «
/V ~ A * :
P ar conseil, DE L A P C H IE R.
VERNIÈRE,
av o u é
A RIO M DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
\
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Vernière. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernière
Subject
The topic of the resource
chemins vicinaux
jouissance des eaux
biens nationaux
émigrés
agage
bornage
experts
irrigation
témoins
prescription acquisitive
vie monastique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le Citoyen Vernière, appelant et intimé ; contre le Citoyen Brun, intimé et appelant.
Notation manuscrite : « 18 thermidor an 10, 1ére section. Jugement : annule les enquêtes respectives faites en 1ére instance et sans s'arrêter au jugement du 1er juge, homologue le rapport d'experts et fixe les droits de chaque partie ».
Table Godemel : Litige sur la propriété et possession de deux fossés et d 'un chemin qui sont intermédiaires aux héritages respectifs des deux parties
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1783-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1421
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1422
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53235/BCU_Factums_G1421.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agage
biens nationaux
bornage
chemins vicinaux
émigrés
experts
irrigation
Jouissance des eaux
prescription acquisitive
témoins
vie monastique
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53207/BCU_Factums_G1318.pdf
9533e67a00a318053f967cfb0a81ef4f
PDF Text
Text
7T 7)
es
QUELQUES
MOTS
Sur le dernier état du litige fpour le C.e
B e i l l e , appelant,
Contre le C.en A R M A N D , intimé.
Q U E L LE est la somme de numéraire q u e doit payer le citoyen
B e ille , pour s’acquitter envers le citoyen Armand , de
de 27, 5oo livres d ’assignats y dont il est débiteur pour
moitié du prix d’un immeuble acquis par contrat du
an 2 ? T el est le point de contestation à régler.
L ’effet nécessaire du retirement du papier-monnaie
la somme
la seconde
5 frimaire
ayant été
d ’obliger à solder en num éraire les obligations contractées en
monnaie nominale pendant le prestige des assignats , il fallut en
réduire le montant à la valeur réelle en n u m éraire des objets
que le débiteur avait reçus. Les lois de l’an 5 et de l ’an 6 réglè
rent le mode de réduction suivant la nature de chaque obligation.
P our déterminer la réduction des prix des ventes d’immeubles ,
lorsque l’acquéreur ou le vendeur ne voudraient pas s’en tenir aux
clauses du contrat (a), l’article I I I de la loi du 16 nivôse an 6 ,
( a ) lL es articles I et II de la loi du 2 7 thermidor an 6 , nous donnent l’ex plication de ces expressions s’ en tenir a u x clauses du con trat, en ces termes :
« L ’option faite par l’acquéreur , ou exécution de l'art. II de la loi d u 16 nivôse
dernier, de s ’en tenir aux clauses du çontrat de v e n te , en renonçant à l'exp er» tise , l’oblige à payer le p rix on restant du p r i x , a u x termes convenus , en
numéraire métallique et sans réduction.
» Quant à l'option faite par le vendeur , en conformité de l’article IV de la
loi additionnelle d u susdit jour 16 nivôse, n.1 65 o, elle le soumet à recevoir
» les p rix ou restant du p rix réduit ; d’après l'échelle de dépréciation du lieu
» de la situation de l'immeuble» .
D ans l'espèce,c e tte option n’a été faite ni par l'acquereur , ni par l e Vendeur ;
au contraire, le citoyen B eille , acquéreur, a notifié dam le d élai, l'option expresse
de l ’expertise.
�•;
(*
établit en règle générale , que « les parties seront , en cas de
)> non-conciliation , renvoyées à des experts , qui vérifieront et
)) estimeront la valeur réelle que l’immeuble vendu pouvait avoir
)) en numéraire m étallique, au teins du contrat , eu égard à son
» état à la même époque , et d’après la valeur ordinaire des
» immeubles de même nature dans la contrée ».
Appliquant cette rè g le , le tribunal a ordonné par jugement
contradictoire passé en force de chose ju g ée, que ^immeuble vendu
le 5 frimaire an 2 , serait estimé par experts , au pied de sa valeur
réelle en 1 7 9 0 , qui était la valeur ordinaire des immeubles dans
la con trée, et en même tems la plus haute que pût avoir cet
immeuble en numéraire métallique au mois de novembre 1793 ,
époque où il ne se faisait point de ventes en monnaie métallique.
L ’un des deux premiers experts a estimé la totalité du Bien
dont il s’a g i t ............................................................................ i 5564 fr.
L ’autre l’a évalué à ........................ ... .............................. 5444 o
L e tiers-expert nommé par jugement contradictoire ,
en a fixé la valeur réelle à ; ................................................ 24 o 6 o
A laquelle de ces trois opérations discordanles s’arrêtera le tri
bunal ? La raison d it ,à celle qui s’éloigne le plus, des deux extrê
mes , c’est-à-dire , à celle du tiers-expert ; et deux considérations
décisives se réunissent pour lui assurer la préférence.
L a première considération est que l’évaluation du tiers-expert
se trouve, à très-peu de chose près , le prix convenu entre les
parties , converti en numéraire métallique sur l’échelle du teins.
E n effet, le contrat de vente est du 36 novembre 1795 ( 5 frimaire
an 2). L a valeur do Passignat contre numéraire était alors de 45
fr. le 100, d’après l’échelle du département du Puy-de-Dôme. Lo
prix de la vente fut de 55 ooo fr. assignats , conséquemment do
34750 francs en numéraire au pied de l’échelle , et le liera expert
l’a estimé 24,060 fr. Quand on 'Yoit une estimation si rapprochée de
la convention des p arties, peut-on balancer à s’y fixer?
L a seconde considération
n’est pas moins frappante : elle se
tire de ce que 1e citoyen Beille a constamment offert la résiliation
du contrat même pendant la dernière hausse qu’ont eue les biens ,
�(3 )
et que le citoyen Armand l’a constamment refusée : preuve évi
d e n te de la conviction intime ou il est que les tableaux d’éva
luation forcée , auxquels il s’efforce de donner du ciédit dans son
troisième m ém oire, ne sont que des exagérations hasardées contre
le témoignage de sa propre conscience et qu’il n ’a jamais trouvé
dans ses greniers le produit qu’il trouve dans ses calculs spéculatifs.
D e ces deux circonstances réunies sort la démonstration irrésis
tible qu’en fixant la créance du citoyen Armand pour solde de la
moitié qui reste à payer du prix de l’immeuble par lui vendu en
Ï793 ,à I2o3o f r . , qui joints à i 255 o fr. valeur à l’échelle, de 27500
fr. assignats qu’il reçut comptant le jour de la vente
il aura
obtenu la plus haute valeur vénale de cet immeuble, quand on
oublierait que c’est un bien dotal; que le^inari n’a point d’enfans ;
que sa garantie n’inspire pas une sécurité im perturbable; et que
cette circonstance , qui n'a pas été pesée par les exp erts, déprécie
ce bien du quart au moins,
■OBJECTI ON.
Mauvaises raisons que tout ce la , nous répond le citoyen Armand !
Il n’est pas question de savoir si vous aurez fait une bonne ou
une mauvaise aflaire, en achetant de moi en 1793 le bien dotal
do ma femme } à un prix devenu exagéré par la nécessité où vous
mettent les événemens d’en payer la seconde moitié en numéraire
sans réduction ; il ne doit par conséquent pas être question d’esti
mation. Vous avez joué un jeu de hasard , la chance a tourné contre
v o u s, vous devez subir votre sort : c’est là tout ce qu’il faut savoir.
Je vous ai interdit la faculté de vous libérer de la seconde partie
du prix avant cinq an9, dans la confiance que les assignats n au
raient pas une si longue d urée, et que vous seriez forcé de me
payer en écus au terme convenu : de votre cô té, vous avez souscrit
à côtte condition , dans la confiance que les assignats se soutien
draient plus de cinq ans. l i é bien ! voilà un contrat aléatoire ; la
chance a tourné contre vous , p o u v e z - vous vous en plaindre ,
lorsque vous en ayez volontairement couru le risque? Lu loi du
16 nivôse an 6 ne reçoit point d’application à de pareils contrats
L
�t ~ sj
C4 )
aléatoires. L a stipulation d’un délai à long terme , avec prohibition
d’anticiper le paiement, équivaut à la stipulation expresse du paiement en numéraire , et met le vendeur à l’abri de réduction : et
puis le citoyen Armand nous renvoie à tout ce qu’il a dit dans
ses précédens mémoires.
R É P O N S E
.
E t nous aussi nous renverrions aux réponses que nous avons faites
dans nos précédens mémoires, à voire système emprunté des agio
teurs du perron, si la question était encore à décider.
Nous répéterions ce qui a déjà été dit dans la consultation im pri
m ée, signée F e rrey , F a v a rd , Pigeau et autres Jurisconsultes,
que l’application de la loi du 16 nirôse an 6 , est si peu étrangère
aux contrats qui contiennent des stipulations de .paiement à longs
term es , que l ’article VI de cette loi est spécial pour ce genre de
contrats. « L ’acquéreur , y est-il d it , ne pourra au surplus d e* mander la réduction , qu’à condition i . ° .............. 3 ,° de renoncer y
» le cas échéant, aux termes stipulés p a r le contrat de vente ,
» ■qui auraient été portés à plus de trois ans au-delà de la p u » blication de la loi du 29 messidor an 4 ( ju ille t 1796) ». Voilà
le cas de la stipulation d’un délai au-delà du mois de juillet 1799»
expressément p ré vu , ot la réduction appliquée à ce cas , à la charge
de renoncer au bénéfice du délai. L e délai de cinq ans , stipulé
dans le contrat du 5 frimaire an 2 ( 26 novembre i7{)5) , était
moins lo n g, puisqu’il fut révolu le 26 novembre 1798 : donc la
réduction à l’estimation prononcée par l'article V I , s’appliquait
littéralement à ce contrat, et il s’y appliquait sans même exiger
l ’anticipation du paiement j car le terme n ’excédait pas le mctximuni du délai auquel elle dispensait de renoncer.
Dans l’impuissance de répondre rien de raisonnable à un text»
ai pressant, le citoyen Armand a toujours prudemment pris le
parti de l’oublier, dans l^espoir que les juges l’oublieraient aussi $.
mais son attente sera trompée.
Noua répéterions aussi co que disait Je commissaire Lamarque ,
en portant la parole lors d’un jugemeut rendu au tribunul de
�'
,
( 5 }
cassation , conformément à ses conclusions, Te g thermidor an 10 ,
au sujet de la clause prohibitive du paiement avant cinq ans , dans
laquelle le citoyen Armand place tout son espoir.
« Une clause par laquelle il est dit que l’acquéreur ne pourra
»> payer qu’à une époque déterminée, peut-elle équivaloir à Vex» pression d’une intention formelle de la part des vendeurs de n’èlre
» payés qu’en numéraire? Non sans doute.
» Disons donc que la loi du 16 nivôse a proclamé le principe
» de la réduction ( meme dans le cas où les paieinens auraient été
» stipulés à longs termes) ; que cette disposition n ’a pas été modified
» par l’article X I V de celle du 27 thermidor 5
)> Que ce dernier article n ’a pu être re la tif qu’aux époques.
)) de p a iem en t , et non à la quotité : d’où il suit que la réduction.
» du prix , la fixation de la véritable valeur de l’objet vendu ,
par des exp erts , devra être admise.
Nous remarquerions enfin que le principe rappelé par le com
missaire Lamarque de la réductibilité des prix de vente, dans tous
les cas où le changement des espèces n ’a pas été expressément
p ré v u , et où il n’a pas été formellement stipulé qu e, ce cas arri
va n t, le paiement serait fait sans réduction , a été consacré par
un si grand "nomlire de ^ùgenfeh'S du- tribunal de cassation , qu’il
n ’est plus permis maintenant de le mettrS en doute ; 'pt.npus
invoquerions les jugemens du tribunal de cassation des 7 floréal an
1 1 , 5 prairial même année*', ^
comacré ces maximes (a).
fg* vëndériiidiïé *ail 12 , qui ont
Mais à quoi bon revenir sur la discussion de ce point de droit,
W sque tout est décidé à cet égard par le jugement du tribunal qui
(a) Ceux des 7 floréal an n et îa vendém iaire an 1 2 , sont rapportés avec
dctuil > dans le
3.
cahier du journal des audiences du
tribunal do cassation ,
par le citoyen D rncvcrs , qui fait rem arquer que ce tribunal avait rendu des
jugemens contraires en l ’an 10 , mais qu’il est revenu de cette jurisprudence
erronnée.
X r jugement du 19 vendém iaire an la so trouve dans le 12.® cahier an 11
de la jurisprudence d u tribunal de cassation, par lo citoyen Siroy.
�a ordonné l'estimation
( 6 )
de l’immeuble vendu par
le citoyen
Armand au citoyen Beille ?
L e citoyen Armand insinue vainement que les tribunaux peuvent
revenir contre un jugement préparatoire, d’après la maxime j u d e x
ab interlocutorio retrocedere potest cette maxime n’est applicable
qu’à quelques cas très-rares, où les tribunaux ont ordonné des
interlocutoires dont l'inutilité leur est démontrée après l’opération,
par de nouveaux éclaircissemens sur le point de droit à décider.
Mais ici rien de nouveau sur le point de droit qui rende inutile
l’estimation ordonnée en grande connaissance de cause ; par con
séquent rien ne pourrait justifier la versatilité dans laquelle, le citoyen
A r m a n d voudrait entraîner le tribunal, et c’est l'outrager que de
l’inviter , comme le fait le citoyen A rm an d , à déclarer par son
jugement définitif, qu’il n’avait su ce qu’il faisait en ordonnant
par son jugement préparatoire , l’estimation à gros frais du bien
dont il s’agit de fixer le p rix par la voie que la loi du 16 nivôse
an 6 avait indiquée.
B E I L L E .
(M IA V A 4J
A Clermont-Ferrand , chez J. V e y s s e t , Imprimeur de la Préfecture
du Puy-de-Dôm e , rue de la Treille.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beille. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Beille
Subject
The topic of the resource
experts
biens nationaux
ventes
créances
assignats
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
Description
An account of the resource
Titre complet : Quelques mots sur le dernier état du litige pour le Citoyen Beille, appelant, contre le Citoyen Armand, intimé.
notation manuscrite : 30 nivôse an 12, jugement définitif, infirme et ordonne que le prix sera payé, valeur réduite. Journal des audiences an 12, p. 121.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
méthode de travail des experts
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1318
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1315
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1317
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Clémensat (63111)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
ventes
vin
-
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4bf104b0d5a233503ff25a68b91d2cf6
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TROISIÈME MÉMOIRE
POUR
L e Citoyen A R M A N D , Juge au Tribunal d’Appel,
Intimé
CONTRE
L e Citoyen B A I L L E , M arch an d, A ppelant.
L E S observations que j'ai cru devoir me perm ettre, citoyens
j u g e s , lorsque vous avez prononcé un interlocutoire , et lorsque
vous avez ordonné la tierce expérience, ne m ’ont pas empêché
d ’exécuter vos jugemens avec le respect dont je dois donner
l ’exemple : mais je vous l ’a v o u e , les trois rapports , q u e ces j ug em ens ont produits , n ’ont fait que m e convaincre q u ’il n ’en
jaillirait aucune lumière dans la cause.
Celui du citoyen C onchon a pleinement justifié tout ce que
j' avais prédit ; au to n de suffisance près qui y règne d ’un bout à
l'a u tr e , et qui y tient la p lace des preuves et de l'im partialité,
qu'offre -t -il, qu' un tissu d ’erreurs et d ’inconséquences ?
L a , il compose le territoire de Clémensat de tout ce qui est
au-dessus des murs de R o m a g nat.
O
I c i , il place les vignes a la proxim ité des montagnes:
A
�L à , il voit dans les terres des rocs immobiles, qui n’ont pas été
aperçus par L e g a y , pas même par Perrin.
I c i . il proclame le danger des ra v in e s, pour des terres situées
en pente d o uce, qui ne pourraient même que g a g n e r, et le dan ger du dommage pour des vergers qui ne sont pas clos de murs.
L à , il suppose que les parties se sont accordées sur les conte
n u e s, et assure que l ’arpentement fait p a r les premiers experts,
était exact, u n iq u e m e n t, parce q u ’on l’a dispensé d ’en vérifier
l'exactitude.
Ici , il réduit la contenue d ’un verger.
L à , il altère le véritable prix des b au x qui lui ont été co m
muniqués.
Non moins physicien q u ’agronome , il trouve ici des pierres
basaltiques parmi les pierres et les molécules volcaniques.
L à , il suppose que les terres de première qualité ne peuvent
produire le grain sept et huit.
I c i , il suppose que Perrin a évalué l’œuvre de vigne 1 3o liv.
quoiqu’il ne l ’ait portée q u ’à 112 liv.
L à , il place la progression toujours croissante de la valeur
vénale des fonds , à l ’époque de la cessation du signe monétaire,
.quoique sa disparution dût opérer un effet contraire.
I c i, il critique l ’estimation article par article, sur le prétexte
que la vente ayant été faite en masse , l’estimation a dû se faire
dans le même sens.
L à , sans q u ’il y lut autorisé par vos ju g emens , il énonce les
avantages de l’abolition des cens, des dîmes, des douanes , pour
avoir occasion de vous dire q u ’on ne pouvait alor s compter sur
la stabilité des lois qui les avaient abolis; q u ’aucun acquéreur
n ’a acheté ave c cette confiance absolue, ou du moins a balancé
ces avantages avec la crainte de les voir disparaître.
Cette crainte , déjà dissipée par le brûlement des titres féo
daux gênait-elle encore la conscience de cet expert, lors de sou
opération ?
I c i , il applique aux estimations ordinaires, les lois relatives
�6 o&
( 3 )
à l ’estimation des biens nationaux , ou au rachat des rentes féo~
dales et foncières.
N u lle p a rt, il ne prend en considération les extraits des ventes
des biens nationaux situés clans les mêmes territoires de Clémensat et R om agnat, pendant les années 1 7 9 0 a 1791 , n i l ’extrait
du rôle matrice de cette c o m m u n e, où les fonds vendus sont ins
crits dans les premières classes, n i les documens sur les ventes de
fonds de pareille nature q u ’on lui a administrés.
N u lle p a r t , il ne fait le rapprochement des b au x consentis en
1 7 7 4 , qui ont été remis en ses mains.
A cette première esquisse de son tra va il, que voit-on , qui ne
présente le caractère de la prévention ?
N o u s allons reprendre ses raisonnemens.
L e tribunal se rappelle que j ’ai vendu en l'an 2 , en stipulant
que ce qui restait dû ne serait payable que cin q a p r è s , c’est-àd ir e , en 1799 ; q u ’en ordonnant une estimation valeu r de 1790*
il a placé les experts à une époque qui n’est pas celle de ma
vente ; q u ’entr’elle et celle de ma venlc , il y a eu évidem m ent
une transition d’ une valeur moindre à une plus haute v a l e u r ,
opérée par l’effet du tems et des nouvelles l o i s , ce qui les a jetés
dans un embarras q u ’il leur était presque impossible de sur
monter. A u ssi n ’o n t-ils donné dans trois avis , énormément
discordant , aucun résultat certain , si com m e cela devrait être
n aturellem ent, l’on accorde une égale confiance à. chacun des
trois.
Si vous avez voulu connaître, citoyens j u g e s , com m e je dois
le p ré su m er, de quelle valeur était le bien vendu à l’époque de
la vente , l’estimation ordonnée n’ayant 'p:n été exsuutéu dans
ce sens; aucun de ces expert; n’a atteint votre but.
11 me
semble néanmoins (pie si L e g a y ne l’a pas a tte in t, c ’est
parce q u ’ il <1 voulu se renfermer dans les expression{ de votre
jugement qui lui demandait une valeur de 1792; et q u ’en pre
nant en considération la hausse d e j fo n d s , résultant de l ’ubull-
A 2
�C4 )
tion des droits féodaux, des dîmes , des douanes , à l'estimation
de L e g a y , la valeur réelle des objets vendus en 17 9 4 , époque
de la vente , dépasserait sensiblement le prix convenu.
Je quitte le rapport de L e g a y , pour revenir à celui du citoyen
Conch on.
î
A l ’exemple du citoyen Perrin , il a entrepris d ’analyser la
nature du sol ; l ’un a dit qu’il s’imprégnait des molécules de
la montagne ; l ’autre vous dit que c’est un am algam e d’argile
et d ’une décomposition de substance volcanique ; un autre
pourrait vous d ire , avec plus de v é rité , que c ’est un composé
d ’argile , et d ’une fusion considérable de pierre calcaire. E t
m o i, sans craindre de m e . tromper, et sans entrer dans des dis
sertations g éologiques, je vous dis tout bonnement, que c ’est de
la terre végétale qui produit du from ent, et dont on reconnaît la
fertilité , soit aux récoltes, soit aux arbres de toute espèce dont
elle; est couverte.
, L e citoyen Conchon reconnaît la justesse et la vérité des prin
cipes exposés dans le rapport de L e g a y ; il avoue notamment,
que c ’est toujours sur le produit réel de la terre q u ’il faut '
en fixer la valeur capitale, mais il s’en écarte totalement dans
l ’application, et se contente d’opposer aux raisonnemens du cit. 1
L e g a y , sa propre opinion , voulant q u ’on l ’en croie sur sa p a r o le .
11 prétend que pour que ces terres produisent le revenu net
de six cartes , que le cit. L e g a y leur attribue, il faudrait q u ’elles
fussent de la première qualité.
Il dit d'ailleurs q u ’il y en a peu et peut-être po int, qui soient
propres à produire chaque année , et il est c o n d u it , d i t - i l , à
c o t t e a s s e r t i o n , par le coup d’œil q u ’il a jeté sur le territoire, dans
lequel il « aperçu beaucoup de jachères , ce qui indique que
cette pratique est en usage et même nécessaire pour amender
les terres qui n’y s o n t , ni d ’assez bonne qualité , ni d ’un sol ass«z
précieux pour porter deux récoltés de suite.
L E n admettant une assertion d émentie par la notoriété, le cit.
�(5)
6
#
Conchon aurait dix ajouter que les prés sont rares ; q u ’il y a
peu de bestiaux, et par conséquent très-peu d’engrais dans les
terres ; que néanmoins le sol produit du blé fro m e n t, et sans con
tredit le plus beau du département ; q u ’il est très-peuplé ; que
les h a b ita n sy sont presque tous dans l ’aisance, et plusieurs dans
l ’opulence.
L a fertilité de la terre est une conséquence et une suite de ces
vérités , puisque c’est à elle se u le , sans autre secours que celui des
bras qui la cultivent, qu ’on doit les récoltes les plus abondantes.
Exam inons maintenant, si ce n’est pas avec légèreté , que le
cit. Conchon nous assure que les terres ne produisent pas le grain
sept et huit.
O n ne contestera pas, sans doute , que toute terre en culture
doit produire, ou parle secours des engrais, ou par le croît et pro
fit des bestiaux, ou par la main d’œ u v re, à défaut des bestiaux,
une portion de revenu quelconque pour le propriétaire, et une
portion égale au tra v a il, aux avances et dépenses du colon qui
l ’exploite; ou en d ’autres termes, que si celui qui cultive la terre
d ’a u tr u i, ne trouvait pas dans sa portion de récolte de quoi s’indemniser des frais de cu ltu re, du tems qu’il y e m p lo ie , qui sont
sa véritable propriété, il s’adonnerait à toute autre occupation ,
ou passerait dans une contrée plus fertile. O r , il est certain que
les territoires de Cléinensat et R o m a g n a t sont cultivés , et des
m ieux cultivés de la L im a g n e , par des indigènes; que personne
n ’étnigre. L e cultivateur y trouve donc l’avantage attaché à la
culture de la terre, c’est-à-dire , sa subsistance , et le salaire de
son travail. Ce premier raisonnement nous conduit ¡1 la consé
quence ultérieure que le sol qui produit avec peu ou sans le
secours des engrais, donne, quoiqu’en dise le cit. C o n c h o n , un
revenu net de six cartes au moins par septerée, pour le pro
priétaire.
Car d’après l ’allégation du citoyen C o n c h o n , que ces terres
qui ne reçoivent pas ou très-peu d ’engrais , ne produisent que
d ’anuée à a u tre , et que lu moitié reste en ja c h è re , celui q u i ,
�com m e le citoyen B a i l l e , sera propriétaire de v in g t septerées
de terre, n’en aura , à la vérité, que dix en production ; ces dix
septerées p ro d u iro n t, au grain sept et demi , soixante - quinze
setiers de blé ; il faut en déduire dix pour la semence , reste
soixante-cinq setiers, dont trente-deux et demi pour le c o lo n , ce
q u i lui donne un peu plus de six cartes par septerées , pour les
v in g t septerées*
Sur ces six cartes par septerée, il doit payer les contributions ,
trouver sa subsistance , son v ê te m e n t, les g a g e s , et la nourriture
des b e stia u x , ou le prix des journées des. bestiaux q u ’il lo u e ,
et le prix des journées d ’ouvriers employés à sarcler,.recueillir ,
ecosser ou. battre les grains.
O r , je demande à tout cultiva
teur , si les six cartes de blé , au prix de vingt-quatre livres le
setier, valant trente-six livres, ne sont pas rigoureusement né
cessaires pour les avances q u ’exige la culture de deux sopîerées
de terre, dans le cours d'une année, l ’une en production , et
l'autre en jachère , q u ’il, faut préparera recevoir-la semence pour
l ’année d ’après.
Si ce produit est strictement nécessaire pour le colon , il faut
en conclure q u ’il le relire de la terre q u ’il prend la peine de
cultiver , et que le propriétaire en relire autant.
E t si, comme le citoyen Gonchon en convien t, q u e l q u e s - u n e s
de ces terres sont susceptibles de porter deux ou p l u s i e u r s ré
coltes de s u i t e , au moyen de quelques engrais , ou par le secours
de la bêche q u ’on emploie oll’c ctiveincnt dan*» ce* village , parce
(pic la couche de terre végétale est considérable, on cultive plus
de d ix septerées sur les v i n g t , on aura plus de six cartes do
revenu ; et il faudra en conclure que le citoyen L e g u y n ’a fait
q u ’approcher de la vérité.
Est-il bien vrai d ’ailleurs, q u ’il faut des terres de la première
qualité pour rapporter le grain sept et huit. L e cit. Gonchon
ignore-t-il donc que les terres d e l à première qualité produisent
au moins jusqu’au grain q u in z e , et ju sq u ’à quatre seticrj d ’assenco pour le propriétaire?
�A l’égard des vig n es, le citoyen Conchon convient que le sol
est le même que celui des terres; que leur exposition est au midi ,
et que si ces vignes étaient moins vieilles , il aurait embrassé
l ’avis du citoyen L e g a y ; q u ’il suppose les avoir estimées sui
te pied de deux cents trente livres l’œ uvre, quoique dans la v é
r i t é , celui-ci ne la porte qu’à un prix com m un de deux cents
douze livres.
Mais le citoyen L e g a y ne les a réduites à un revenu net de
trois pots par œ u v r e , comme il le dit dans son rapport , que
parce que quelques-unes étaient vieilles, il n’a eu garde de dissi
m uler qu ’une jeune vigne produit davantage ; et nous le deman
derons au citoyen Conchon , donnerait-il en f e r m e , à trois pots
p a r œ u v re, les vignes q u ’il possède à V o l y i c , bonnes ou m au
vaises , bien ou mal exposées; et tout en convenant que celles
dont il s’agit sont en bon sol et en bon aspect, comment a-t-il
pu s’écarter de l’estimation du citoyen L e g a y , si évidemment
au-dessous des b au x qu’on lui a communiqués , dans lesquels la
septerée de terre était affermée en 1 7 7 4 , sur le pied de u c a r
tons de froment , ou de 36 liv. en a rg e n t, et les vignes à raison
de 10 livres par œ u v r e , en y comprenant des réserves de pa
niers de raisins , de grains, et des journées à b ra s, ainsi que de
la valeur commerciale des fonds de pareille nature, dans le lieu
de R o m a g n a t , où l’œ uvre de vigne contiguë à celles du citoyen
Baille , a été vendue cinq cents liv re s , peu de jours avant les
rapports.
L e citoyen Conchon soutient que le citoyen L e g a y a eu fort
de fixer le prix des grains et du v in , eu égard à la valeur qu’ils
avaient en 1789 et 1 7 9 0 , et décide d ’ un ton tranchant q u ’il
s’est éearlo, tant de lu règle qui fut toujours observée par les
experts , de former l’année commune sur 10 , que de l’article 14.
de la loi du 9 mai 1790, qui a tracé leur conduite dans ce cas.
M a is, i.° le jugem ent interlocutoire , dans le sens qu’il pré
sente, assujétit les experts à estim er, valeur de 1790.
2.0 Où le citoyen Conchon a-t-il donc pnisé cette prétendue
�rè g le? O ù ont-elles existé, m ême depuis la révolution , les. cir
constances *où le jugement interlocutoire a placé les experts?
On peut co nvenir, sans danger, que dans les tems ordinaires ,
et abstraction faite de toute variation subite, de toute secousse
imprévue , un spéculateur, soit acheteur , soit vendeur de fonds
ne pouvant pénétrer dans l’avenir qui n’appartient pas à la con
naissance de l’homme, n’a , pour se régler sur des valeurs futures,
que le tems présent et l’expériencedu passé; que les experts, qui
ne lisent pas plus dans l’avenir que les autres hommes , n’ont pu
que se reporter au tems de la vente, en considérant ce qui avait
précédé celte époque, et ce que les circonstances pouvaient pré
sager pour l’avenir. Car ils ne devaient pas peidre de v u e , que
ce ne sont jamais des jouissances passées que l’on vend, mais
bien des valeurs futures: que dès-lors, les considérations du passé
ne peuvent seules servir de base, même dans un tems ordinaire,
pu isqu e, en opérant ainsi , les estimations ne se ressentiraient
presque pas de la videur progressive des fonds qui a élé perpé
tuellement croissante en F r a n c e , abstraction faited e toute autre
cause , que celle de l’augmentation du numéraire en circulation.
3 °.
Quel rapport peut avoir à la contestation, la loi du 9 mai
1790, dont parle le citoyen C onch on , et qui était relative au
rachat des rentes féodales, dont le capital devait être iixé sur un
prix commun de quatorze années précédentes , en retranchant
les deux plus tories et les deux plus faibles? C ’était une loi do
circonstance. I.es biens de pareille nature perdaient .alors do
le u r faveur; les biens fonds s’élevaient en sens contraire. l Tne
pareille confusion d’idées pouvait-elle échapper à un expert aussi
versé que lui dans le. régime administratif?
Je possédais mon bien en 1790; je l’ai vendu en l’an 2 , dans
un tems où la loi de 1790 n était susceptible d’aucune appli
cation, où les cens étaient abolis , el je n’ai vraiment entendu en
consommer la vente qu’en l’an 7 ( en 179 9); puisque j ’ai renvoyé
à cette époque le paiement du prix. O r , le citoyen C o n ch on , tout
çn disant luusscment qu’il u eu égard à lu suppression des cens,
�¿3 0 0 )
J
C9 )
des dîmes et des douanes, tout en reconnaissant que c’est le pro
duit seul de la terre qui doit régler sa valeur capitale , ne vous
a présenté q u ’une estimation moyenne proportionnelle de 1780
à 1790, c’est-à-dire de 1785 ; s’il avait fait attention, com m e l ’a
fait le citoyen Legay\, que j ’avais vendu, en 1793, des valeurs
futures, que le prix du blé s’est soutenu au prix de vingt-quatre
livres le setier, et celui du vin au prix de trois livres le pot, depuis
1790 jusqu’à présent, et se sont élevés bien a u -d e là , il n’aurait
pas plus trouvé d ’exagération dans cette évalution , qu’il y en a
eu dans la fixation des produits, p a r le même e x p e r t, à soixantesept livres par septerée.
C e tiers expert trouve également à redire à ce que L e g a y ait
ajouté à son estimation , sur un produit aussi médiocre , un cin
quièm e, soit à cause des noyers , arbres à fruit ou saules qui bor
dent les héritages, et qu’il n’a pas comptés dans les revenus, soit
pour la valeur des arbres en eux-m êm es, soit enfin pour l’attache
ment que l’on porte généralement à la propriété, sur-tout dans un
pays où la nature du s o l, et les différentes espèces de production
retiennent les habilans , comme s’il ignorait que plus les pays sont
populeux, plus les fonds y ont de valeur; plus ils sont morcelés,
et plus il y a de concurrence.
Conchon a semblé applaudir en théorie aux considérations de
L e g a y ; il ajoute même que les biens se vendaient en 1790 audessus du denier 20, mais il s’est accroché à la loi du 6 floréal
an 4 , contenant instruction pour l’exécution de celle du 28 ven
tôse précédent, relative à l’estimation des biens nationaux, et a
cru ne devoir ajouter qu’un dixième , en sus de son estimation.
L e citoyen Conchon aurait dû reconnaître que l’esprit de
cette loi, n'était pas d ’atteindre la véritable valeur des biens na
tionaux, par une sage politique, celle de 11e pas éloigner la con
currence.
Aussi a-1-011 généralement observé que les enchères qui for
ment une des règles les plus suies des valeurs foncières ont porté
B
to ü
�1)0
( 10 )
les biens de celle espèce à des prix bien supérieurs aux estima
tions fuites en vertu de la loi du 6 floréal.
V o u s ve rre z, citoyens juges, que le rapport du cit. C o n ch on ,
n’ est, à le bien prendre, qu’une critique des deux prem iers, qu’il
n négligé les preuves qui étaient sous ses yeux , et qu’il n’oppose
à celui de L eg a y que des assertions fugitives.
On doit présumer qu’il ne se serait pas autant écarté de la
v é n l é , s’il avait fait le raisonnement du citoyen L e g a y , duquel
il résulte clairement, que le territoire de Clémensat doit produire
le 7-c ou S.e g r a i n , et que le propriétaire doit retirer au moins
six cartes froment par septerée.
Si donc, le citoyen L eg a y n’a fait qu’ une estimation m o d é ré e ,
le citoyen Baille a eu tort, de lui faire partager a vec moi , dans
son dernier m ém o ire, des injures qu’il ne mérite pas plus que
moi. L e citoyen B a ille , et l’auteur de son m é m o ire , savent l’ un
et l’autre, que le citoyen Legny marche depuis long-lems sur les
traces d ’ un p è r e qui s’est distingué dans la profession d’ex pet l .p e n
dant plus de cinquante ans,et qui l’avait, j’ose te d ir e , honorée; et
ils sont bien convaincus , que si j’avais été capable d’influencer
un e x p e r t , ce n’eut pas été le cit. L eg a y que j ’aurais choisi.
Ce rapport de L e g a y , justifié par les baux de 177 4 , commu
niqués au citoyen C o n ch on , et qui étaient inconnus au citoyen
L e g n y , n’excède pas le produit connu de 1 7 7 4 , malgré l’inter
valle de seize ans, qui s’était écoulé jusqu’en 179° » c t >S1 l)i,r 11,1
contraste frappant, Conchon est resté si fort au-dessous de l’éva
luation de L e g a y , où doit-on en chercher le motil. J e m'arrête :
quand on a tant à dire contre 1111 ra p p o rt, ne convient-il pas
d’ user d’indulgence pour l’expert?
O ucl usa^c a-t-il fait de l’extrait du rôle matrice de la comïmme de R o m a g n a t , où mes biens sont compris dans les pre
mières classes, de l’extrait des ventes de biens nationaux de cette
commune, portées en 1790et 1791 , à deux 011 trois fois au-dessus
de son estimation , maigre la laveur due aux biens patrim oniaux,
des notes de ventes particulières, laites d ansccttc connu une? quels
�C *1)
égards a-t-il eus pour la suppression des cens , des dîmes , des
percières féodales , des douanes, etc.?
Fallait-il reprendre une carrière abandonnée depuis d ix ans ,
pour se mettre en opposition avec les faits, les écrits , la noto
riété , et la saine raison?
E n condamnant ce ra p p o rt, à l ’o u b li , comme celui de Perrin ,
le tribunal ne pourrait puiser quelques lumières que dans le ra p
port de L eg a y.
J ’o b se rv e , en p a ss a n t, que la légère différence que l ’on re
m arque entre les contenues énoncées dans le contrat de vente ,
et celles vérifiées par Perrin et L e g a y , n’existe pas. Je d o is , à
ce su je t, des renseignemens au cit. Baille , que je n’ai pu four
nir aux experts.
S ’il m ’est permis de rapprocher , du rapport de L e g a y , le
fruit de mes nouvelles recherches, je dirai qu ’il est p ro u vé , par
des baux authentiques , que la septerée de terre, ni de la meil
le u re , ni de la moindre q ualité, était affermée en 1 7 7 4 et 177 5 ,
en a r g e n t, sur le pied de
33
et
36
livres, et en grains, à raison
de 11 cartons froment.
Q ue l ’œuvre de vigne était affermée à raison de 8 Iiv. 10 sous
et 9 livres.
Que l’œuvre ou journal de pré-verger l’était à raison de 40 liv.
Q u ’indépendamment de l’argent et des grains ci-dessus, les
fermiers étaient chargés de délivrer chaqu’anuée des paniers de
.raisin , de fruits , des grains et des journées d’hommes et de bes
tiaux ; que les baux contenaient la réserve des noyers , arbres à
fruit, à m ayère, qui bordaient les héritages, du bois mort et mort
b o is, et de la résolution des baux, en cas de vente, sans dédom
magement.
D ’après ces baux , la valeur capitale de vingt septerées de terre
s’élevait à 14,000 livres.
Celle de trente œuvres de vigne , à 5,400 livres.
Celle de cin q œuvres de pré-verger à 4,000 livres , outre les
réserves précitées.
�Q u ’en ne portant la valeur capitale du jardin , des bâtimens
et enclo s, et des arbres qui en faisaient partie, q u ’à
3 ,ooo liv r e s ,
et eu laissant le produit et la valeur des arbres enradiqués autour
des possessions, pour faire face aux contributions, on a v a i t , en
1774 , une valeur capitale de 26,400 livres.
Si l ’on ajoute à ce capital un cinquième en sus, à cause d e l à
progression vénale des fonds depuis 1774 jusqu’à 1793 époque
de la vente , on aura un capital de 31,640 livres.
II convient d’ajouter, même d’après l ’avis des experts, un autre
cinquième en sus , soit parce que les fonds se vendent au-dessus
du denier 20, quitte de contributions, soit à cause de l ’assiette
de ces fonds , à proximité des communes de C e j r a t , de Beaum o n t, de R o m a g n a t , d ’Obière et D o p m e , et dans la banlieue
deClerinont. Conchon n ’accorde qu ’un dixième; m ais, outre que
cet expert est seul de cet avis, il est notyire que les receveurs de
l ’enregistrement, dans la perception des droits de mutation ou
d ’insinuation, augmentent d ’un cinquième l’évaluation des biens,
à cause des impositions, soit q u ’elles restent à la charge des pro
priétaires ou des fermiers, ce sont là leurs instructions conformes
aux lois.
O n aura donc un capital de
38,016
livres.
Enfin , ajoutant un autre cinquième en sus, à cause de l'abo
lition des cens et redevances de toute espèce, revêtues de féoda
l i t é , dîm es, et des autres franchises opérées par la révolution,
on aura, à l’époque de la vente, un capital de 45,619 liv. 4 sous.
J e pourrais, sans exagération, a v a n c e r, qu ’abstraction faite
de la suppression des cens, des dîmes et des douanes , etc. la
v a l e u r des f o n d s situés dans les banlieues de Clermont et de lli o m ,
a plus que doublé depuis 1774 jusqu’en 1794.
C ’est, au reste, donner trop d’elfet à des calculs , que la vérité
seule a pu me dicter , et qui ne doivent pas faire la base de votre
décision. J e ne dissimulerai pas cependant, que tout étranger
que me paraît ce tableau , j ’ai quelque satisfaction de vous dé
montrer , combien le prix promis par le citoyen Baille } est iu-
�( 13 )
férieur à la véritable valeur des fonds en question, combien peu
les rapports de Perrin et de Conchon mériteraient de co n fia n ce,
.si des estimations pouvaient influer dans la cause , et combien
il serait dangereux de faire dépendre le sort des conventions
d ’une expertise?
J ’ai dit que ces calculs ne doivent pas faire la base de votre
décision, car il s’a g itd e j u g e r , s’il y a lieu ou n o n , à une réduc
tion; or, cette question , purement de droit, ne peut pas dépen
dre d’une estimation , mais bien de la convention des parties et
des lois relatives.
Ce tableau est en m ême tems bien propre à calmer la con
science des magistrats , et à éclairer leur justice; e t, puisque le
tribunal n ’a rien voulu préjuger, c ’est toujours, et c’est unique
ment dans les termes d e là convention', et dans les lois, comme
à sa véritable source, q u ’il doit puiser sa décision.
Il e s t , d’après les clauses de la v e n t e , d’ une évidence lé g a le ,
que ce qui reste dû par le citoyen Baille , n ’est pas sujet à ré
duction.
C ’est une vérité avouée même par lu i, ou q u ’il n ’oserait pas
n ier, que la vente tient du pacte aléatoire, par suite de la stipu
lation du paiement à long terme.
C a r , dans l ’intention même du citoyen B a ille , il avait l’espoir
de se libérer en papier m onnaie, si cette valeur se trouvait e x i
lante au jour convenu , comme le vendeur avait l’espoir de rece
voir en numéraire le paiement de cette partie du prix ; le risque
était égal; la chance pouvait tourner contre l’ un et contre l ’autre.
L ’événement était hors de la prévoyance et de la puissance des
parties.
O r , toute convention qui repose sur des risques indépendans
de la volonté et de la puissance des parties, est une convention
aléatoire , et doit suivre les règles particulières aux actes de cette
n a tu re , qui n ’admettent ni réduction ni restitution.
M ais je ne cesserai de le d ir e , la convention, sous ce rap
p o rt, serait absolument dénaturée.
�( 14 )
E lle est expresse pour le paiement en num éraire, et si le;
termes n ’y sont pas, c ’est parce q u ’ils ire pouvaient pas y être ,
la loi les a suppléés; et c’est ici le véritable état de la cause.
L ’erreur où le citoyen Baille a cherché à nous entraîner, ne sau
rait prendre la place de la vérité; et le retour aux principes im immuables fut toujours l ’appanage de la justice.
L a loi du 16 nivôse an 6, invoquée par le citoyen B a ille , est,
com m e je crois l ’avoir démontré dans les précédens m ém oires,
sans application.
Inpépendamment de ce que sa disposition, au lieu d’être gé
nérale , est littéralement restreinte aux cas , où la réduction
devra avoir lie u ; une loi postérieure en a textuellement excepté
les ventes contenant les clauses résolutoires ou prohibitives.
Il est superflu de rappeler, q u ’à l’époque d e là v e n te ,il n'exis
ta it, comme avant et depuis , aucune autorité pour dépouiller
■
un propriétaire, d ’nprôs une expertise à laquelle il n ’eût pas con
senti; si ce n’est pour une destination pu bliqu e, c’est là un des
points fondamentaux de nos lois anciennes , et de la constitution
sous laquelle nous vivons aujourd’hui.
Aussi cette loi du 16 nivôse , est-elle regardée com m e une loi
exorbitante , de circonstance, et q u ’il ne faut pas étendre audelà de ses bornes ; elle n ’a point en vue les ventes dans lesquelles
les parties ont prévu le changement des espèces , et le retour du
numéraire.
L a loi du 27 thermidor qui en est l’ interprétation , décide for
mellement que la première n’a point dérogé aux clauses résolu
toires ou prohibitives, expressément apposées dans les contrats
d ’aliénalion d ’immeubles , pendant la dépréciation du papier
monnaie. L es lois des i 5 fructidor an
5,
i 3 pluviôse au 6 , les
rapports du citoyen L assée, sür lesquels celle du 27 thermidoi4a
été rendue, sont décisifs; celui du citoyen G renier, concernant
des réclamations postérieures , a fixé la j u r i s p r u d e n c e .
11 n’existe pas un seul jugem ent des t r i b u n a u x de P a n s , plus
�particulièrement imbus des maximes de la nouvelle lég islatio n ,
qui n’y soit conforme.
A défaut de moyens , le citoyeu Baille s’est retranche' dans des
considérations q u ’il appelle d’équité.
O ù serait-elle donc blessée l’équitc?
L a lésion, ( et l ’on a vu q u ’il n ’en existe p o i n t , ) ne fut jamais ’
un moyen pour l ’acquéreur ; aujourd’hui m êm e, le vendeur pour
lequel elle avait été introduite, ne pourrait pas l ’invoquer.
M a is, citoyens juges, l’équité peut-elle se trouver en opposi
tion avec la loi ; qui mieux que l’illustre chancelier Daguesseau
pouvait démêler ses véritables caractères; ce que ce magistrat
immortel en a dit dans ses i 3 .* et 14 .' mercuriales, est gravé dans
vos coeurs.
Ce serait d’ailleurs une marche bien fausse ou bien d a no^ o
reuse que déplacer la mesure de l’équité dans une expertise , et
de prétendre que tous les intérêts y sont ménagés.
D ’abord , il n ’existe point de base certaine pour déterminer la
valeur des im m eubles, comme on l ’a observe ailleurs.
O n veut bien supposer que les experts 11c seront pas intéressés
au résultat de leur opération; qu’elle sera étrangère à leurs p.ixeus , à leurs vo isin s, à leurs amis ; on veut bien mettre à l’écart
le danger de la corruption : où sera la garantie d’une bonne esti
mation ? Le prix des fonds varie d ’une commune à l’autre, d ’un
territoire, d ’un héritage à l’a utre, dans la même commune.
L a qualité du sol trompe les plus habiles. L ’expert d ’une com
mune asseoit son éval nation d’après celle du territoire q u ’il habite;
il n’envisage qu'avec incertitude et dans le v a g u e , les lieux et les
tems qui onl vu consommer une aliénation.
P rend ra-t-il pour basj? les ventes de biens n a tio n au x, v lmi
Jes reventes? les unes e t ÿ a u lie r o n t élé généralement 1111 objet
d ’agiotage, de dilapidation ou de fraude ?
Se (ixera-t-il sur le cours des ventes des biens patrimonnu'ç ,
elles ont clé eu bien petit nombre pendant le courô du papier ;
�s 'v '
,
( .‘ 6 )
celles qui existen t ont été nécessitées par le beso in, par le malheur,.
peut-être par des motifs moins naturels encore ?
O u ne peut faire ces rapprocheinens sans les connaissances
lo cales, celles, surtout, de l’influence des moùvemens révolu
tionnaires sur la population , sur le c o m m e r c e , et sur les pro
priétés territoriales.
Il n ’est d’ailleurs que trop malheureusement confirmé par
l ’expérience que dans la réunion de deux experts , ils se préoccu
pent de l’intérêt de ceux qui les ont nommés.
L ’intervention d’un tiers ne saurait être plus rassurante.
Cette cause où les mêmes objets soumis à l’estimation de trois
experts, ont été portés par l’un à quinze , par l ’autre à trentequatre, et par le tiers à vingt-quati'e mille francs, n ’en est -elle
pas une preuve effrayante ?
O n demande s’il eût été de la sagesse des contractans, de courir
ces chances, et d ’asseoir les bases de cette équité sur des avis de
Perrin et de Conchon.
L a prudence ne commandait-elle p a s , au contraire, de pré
voir et d ’éviter les dangers d ’une estimation; et n ’est-il pas évi
dent que le paiement à long terme , et la clause pro h ibitive, n ’ont
été stipulés que pour ce but essentiel.
On demande enfin , s’il serait du devoir , on a presque d i t ,
du pouvoir des tribunaux d’enlever aux parties l’efïet des pré
cautions aussi salutaires , et dictées à la fois par l’équilé même ,
et par la raison.
Il existe, je ne saurais trop le répéter , une stipulation en nu
m é ra ire , elle est indépendante de l’aveu ou du désaveu du cit.
B a ille , heureusement pour m o i; elle est expresse, d ’après l’ar
ticle 14 île
27 therm id or, toutes les objections seront
écartées par cet te l oi , par l’iiiterprctation q u ’en donnent les rap- ,
ports de Lassée et de Grenier.
L a loi du 16 nivôse et celle du 27 therm idor, ont des dispo
sitions entièrement, opposées.
L es
�¿ ti
.................................... *7 ) _
L e s clausès résolutoires et prohibitives , dont la loi du 27 ther
m idor consacre.l’exception , tendent à maintenir intégralement
la convention, ou à la résoudre entièrement.
L a loi du 16 nivôse tend , au contraire , à la dénaturer , à la
*
1
#
m o difier en substituant un prix arbitraire au prix convenu. Si
le législateur avait entendu que la clause prohibitive ou la clause
résolutoire, n ’étaient pas incompatibles a v e c l ’estimation, il les
aurait annullées, au lieu de les maintenir.
L e citoyen Baille a joui pleinement des termes et de l ’effet de
la clause prohibitive ; non seulement il n’a ni payé , ni fait offre du
prix principal qui reste à p a y e r , il n’a même pas payé les revenus.
Fussions-nous dans le cas de la loi du 16 nivôse , pourrait-il,
sans im pudeur, p ro p o ser, en 1804, une estimation , valeur de
1793 ou 1794; et le tribunal croirait-t-il faire un acte de justice
en l ’ordonnant?
Ces réflexions seraient affligeantes pour tout autre que le cit.
B a ille; quoiqu’il en so it, la loi du 27 thermidor a mis un obstacle
invincible à cette estimation; elle nous ramène aux termes des
lois anciennes.
Il n’y a que des considérations supérieures qui aient pu faire
concevoir au tribunal l’idée de son jugement préparatoire, pour
l ’honneur de la m agistrature, pour celui d’ un de ses membres ,
contre lequel on s’est permis , dans deux différens mémoires, les
qualifications les plus injurieuses, qualifications dont le public
fera justice. A u m oins, j ’ose me flatter qu’elle n’apercevra de
mon côté , que la droiture et l’honnêteté ; et du côté de mon ad
versaire , que la violation de ses engagemens , et l’intrigue.
Jaloux de l’estime de mes collègues, je ne puis négliger aucun
des moyens de la justifier, en me renfermant dans la loi qui doit
n o u s juger; j insiste à demander que l’officier public qui a rédigé
la vente, et qui est le dépositaire de nos intentions, soit appelé
pour faire sa déclaration sur la convention de paiement en numé
raire, que les circonstances nous ont forcé d’ém ettre, et qui sera
prouvée avoir été la base de notre contrat.
�( 1 8 )
C e tte déclaration n e fera q u ’ajouter à la conviction du tribu
n a l , que le jugem ent dont est a p p e l, s’accorde avec les principes
a l’intention des parties.
A R M A ND .
M
A
R IE , avoué.
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Armand. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
experts
biens nationaux
ventes
créances
assignats
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
tiers-expert
Description
An account of the resource
Titre complet : Troisième mémoire pour le Citoyen Armand, Juge au Tribunal d'Appel, intimé ; contre le Citoyen Baille, marchand, appelant.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
méthode de travail des experts
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1317
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1315
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1318
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Coverage
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Romagnat (63307)
Clémensat (63111)
Rights
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Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
tiers-expert
ventes
vin
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Text
■RÉPONSE S O M M A I R E
Du Citoyen B E I L L E , appelant,
A u second Mémoire du C.en A R M A N D
juge au tribunal d’ appel, intimé,
U
N E diatribe virulente contre l’expert Perrin , parce qu’il a
eu le courage d’être ju s te , impartial et vrai ;
U ne apologie pompeuse de l’expert Legay , parce qu’il a eu
la faiblesse de cé d e r, contre l'évidence des faits et le témoignage
intime de sa conscience, aux sollicitations importunes d’un magis
trat de qui il dépend ;
Des personnalités qui seraient offensantes, si elles n’étaient pas
ridicules , contre le citoyen B eille ;
U n oubli continuel de la loi et des principes sur les points
de d ro it, de la justice et de la vérité sur les points de fait ;
Voilà tout le mémoire auquel on répond. Si le Cen Armand a
voulu prouver qu’un magistrat intègre est quelquefois un plaideur
déraisonnable , insidieux , tracassier et déloyal, il a parfaitement
réussi.
S ’il a prétendu égarer le tribunal par la. feinte et la dissimu
lation , ou le séduire par des déclamations et des paradoxes, il
se sera abusé.
D e quoi s’agit-il en effet? De prendre un parti sur les rapports
discordans de deux experts nommés en exécution d'un jugement
du tribunal d’a p p e l, pour estimer un bien article par article,
valeur de 1790.
L ' expert P errin a pris pour base d’évaluation, 3 4 contrats de
vente d’héritages de même nature et q u a lité situés dans le ter
ritoire de C lé men sat, où le bien q u i donne lieu au litige est
situé, et d a n s les territoires voisins , pendant le cours de 179 0 , et
a partir du 27 janvier jusqu’au 3o décembre suivant. Il a élevé le
�taux comparatT (Te ces ventes par (Tes rpn:.:.<'?r.l;ons .de. ror.ve,n ance, en l’appliquant au bien qu'il était chargé (J’»*.•-L i m i , et il
n ’a cependant eu pour résultat qu'une estimation totale de i55(;4f.
L ’expert Legay a pris pour régulateur l’évaluation arbitraire
du revenu au pied du produit le plus haut de l ’année commune,
et an prix extraordinaire de*la seule année \'jo)o{a).
Partant de ces données, il a calculé la valeur en capital à rai
son de 25 fois ce revenu exagéré , et il a obtenu pour résuljut
une estimation totale de 5 4 3 3 o fr.
Entré deux estimations s éloignées , quelle est celle à laquelle
doit »’arrêter le tribunal ? ni à l’une ni à l’autre quant à-présent.
L a règle et l’usage veulent qu’il nomme d'office un tiers expert’
C ’est là ce que demande le citoyen B e ille , et c’efct ù quoi
s’oppose le citoyen Armand. Il veut que le tribunal abandonne
]’expërîénce qu’il a ordonnée 3 qu’il décide l’alFaire
sans autre
éclaircissement.
Ce système supposerait que le tribunal est le jouet de la versa
tilité; il est une insulte ù sa sagesse, et un outrage à la loi.
'
L ’estimation que le tribunal a ordonnée par jugement passé en
force de chose jugée, ne peut pos rester imparfaite. L e jugement
qui l’ordonne, a acquis aux parties le droit irrévocable de faire
connaître au tribunal la véritable valeur en J790, du bien dont
( a ) T^. p ro d u it do Ta atptérdo do te rre do 800 toi*es de superficie , a été
évalué p ar cet e x p e r t , & s ix quartes ih fro m en t par année , p o u r p r ix
de
fe n n e , q u itte do tou te dépense et d 'iin p it. L ’e ia g t'r a tio a de cetlo ¿va lu a tio n
pour dç3 terres de m é d io c re , et môm e p o u r la p lu p a r t, de basse q u a lité , q u i ne
prod uisen t que d’a n n é e « o u tre , saute a u x y e u x .
Q u a n t au p r ix du b le d , l ’ex p ert L e g a y le porte de 24 à 28 fran cs Te « r p tie r ,
c t l e v in i 3 fran cs le pot.
O r il
de
n otoriété
que lo p r ix
m oyen , calcu lé s u r Ica pcn cartcs
d^s l'i dernières a n n ées, conform ém ent à Ja lo i des 18 - 29 d écem bre 1 7 9 0 ,
re la tiv e au rachat des redevan ces en d e n ré e s, en écartan t le3 d e u x plu s hautes
e t les d eu x plus basses , n ’était en 179 0 , que de l 'i h i 5 francs le sep tier , et
le p rix m oyen du v i n , q«o de 37 *ols G deniers : d’oft il su it q u e les bases des
calculs de <et expcTt »ont cxagrTcus de plus de m oitié m it le prodvtit net d f 9
»«•rrc*, et de plus dft tiers Sur lo p ro d u it net des vignes.
�5
la fixation du prix est le sujet du litige au fond ; rien ne saurait
donc arrêter la recherche de la vérité sur ce po;nt de fa it,
quand il no serait pas un éclaircissement absolument dccisif; u
plus forte raison, rien ne peut l’arrêter quand cet éclaircissement
doit décider du sort de la contestation au fo n d , d’après le voeu
impérieux et formel de la loi du 16 nivôse an V I , qui porte
q u e , p ou r déterminer la réduction du p rix des ventes d ’immeubles
faites en assignats,
» Les parties se ro n t, en cas de non conciliation, renvoyées à
» des experts qui vérifieront et estimeront la valeur réelle, que
» l’immeuble vendu pouvait avoir en numéraire métallique , au
» temps du contrat, eu égard à son état t s la mémo epoque et
)) d'après Ici valeur ordinaire des immeubles de même nature
» dans la contrée (a ).
Après cela , tout ce que dit le C*“. Armand pour éluder l’exécu
tion entière de ce jugement, et faire revivre la question do
d r o it, de savoir s'il y a lieu ou hon d’appliquer la réduction pres
crite par la loi du »6 nivôse an 6 , au prix de la vente qu’il con
sentit au C . Beille , en décembre 1792, si elle n’est pas uu retour
évident contre la chose jugée, elle est au moins une discussion préma
turée. On reviendra, s’il le f a u t , sur cette question, quand on
plaidera sur le fond; maintenant il n’est question que d’exécuter
un jugement préparatoire de la décision du fond , et il faut
s’y
borner. Deux experts nommés pour une estimation, valeur do
179 0 , 6ont d’opinion différente; nommer un tiera expert pour
donner ton avis, est tout ce que la règle et la loi autorisent.
( a ) Ce n ’est pas h la v a le u r d î 1790, q u e la lo i n o u s v e n v o io , d ir a - t - o n
p e u t - ê t r e , m a is ù la v a le u r d u m o is d e d é c e m b re 179^ , q u i est le ten is de la
v e n te . I^a ré p o n se sc p ré se n te d Y lle -m ê in o . E n d é ce m b re 179 ^ » i l 110 8C fa is a it
gu eu n o v e n te en num tra ira ; d t s - lo r s la v a le u r dc3 im m e u b le s en n u n r .r a :r c à
C ette cq o q u o , 110 p o u r r a it s ftd é le r x n in e r q u o do l ’ un e d e ces deux, lîia ii.è r c i ? o u
p a r la co m p araiso n a v e c le» p r ix en 1 7 9 0 , é p o q u e q u i p ré c é d a it im tn é d ia lc in :n t
l ’é m issio n d u p a p ie r - m o n n a ie ,o u p a r la ré d u c tio n dos p r ix s tip u lé * en a ssign ats
e n 17 9 3 , a u p ie d du n u m é ra ire , s u r l'é c h c lle de d / p r é c ia tiu u . L e t r ib u n a l a.
p r é lc r J le p re m ie r r é g u la t e u r , co m m e é ta n t le p lu s «ûr } îuuia t e u’c^l ¿>43
m o in s l'e s tim a tio n v o u lu e p a r la lo i q u ’i l a o rd o n n ée .
�L e Cen. Armand prévoyant qu’il ne ferait que des efforts impuissons
po ir ¿carier la nominalion d'un tiers e x p e r t, demande subsidiairemeut , que le tribunal
impose au tiers expert qu’il nommera ,
l'obl galion de se ranger à l ’avis de l’un ou de l’autre des deux
experts , sans qu’il lui soit permis de prendre un terme moyen.
Quand ce système serait adopté, l e C e°. Eeille n ’aurait pas à en
redouter les suiles ; car il n’y a pas d’expert au monde qu i, livré
à la seule impulsion de sa conscience, pût balancer à donner la
préférence, à l’avis de l’expert Perrin , basé sur le tarif des
valeurs en 1790 » résultant des prix comparés de 54 ventes de
biens de même nature et de même qualité, qui ont eu lieu dans
les mêmes territoires, pendant le cours de 1790; car c’est Jà le'
thermomètre que l’article III de la loi du 16 nivôse an 6 , enjoint
aux experts de consulter.
Ils estimeront, y
est-il d i t , d’après
]a valeur ordinaire des immeubles de même nature ,
dans
la
contrée.
Aroilà qui vuide la question tant agitée entre les experts Perrin
et Legay.
Perrin a prétendu qu’il devait évaluer sur le pied proportion
nel de la valeur commerciale ordinaire des immeubles dans le
lieu de la situation, en 1790 , vérifiée sur l’ensemblo des ventes
faites dans le même temps; la loi du 16 nivôse an 6 , qu’il était
chargé d’appliquor, justifie son opinion ; car elle lui donnait ce
xégulatour p o sitif.
’
L ’expert L eg a y , au contraire , a cru qu’il pourrait sc creerluiinéme 1111 régulateur substituer ses visions ù la volonté de la loi et
se livrer à l'arbitraire des calculs spéculatifs pour découvrir
n o n ’ quelle était réellem ent, mais quelle aurait du être en 1790,
la valeur commerciale des im meubles dans le village de Clém ens a t , aux yeux des spéculateurs. S abandonnant énsuite auv écarts
de son imagination, il a reyé des produits de ferme en denrées,
qui no se réalisèrent jamais y il a calculé les valeurs de ces den
rées au prix extraordinaire d’une seule année de cherté , tandis
que le hou sens lui prescrivait de 110 les
calculer qu’aux prix
moyens do dix années précédentes. Il a prononcé arbitrairement j
cn liii, que les immeubles devaient fie vendre au pied de 20 fois
�5
le revenu sp écu la tif, 'augmenté cVun cinquièm e, ce qnî revient
au même que s’il les avait évalués à 25 fois ce revenu im a g i
naire , plus que triple du revenu réel indiqué par la matrice
du rôle.
Entre deux opérations, dont l ’une est basée sur des faits positifs
qui donnent la connaissance cçrtaine de la valeur vénale des immeu
bles au cours de 1790, que les experts étaient chargés de recon
naître , conformément au jugement préparatoire qui ordonnait
l ’expérience, et au texte de la lo i, et dont l’aulre ne présente
que le résultat arbitraire de spéculations chimériques ; nu litrs
expert, obligé d’opter , pourrait-il hésiler à se déclarer pour l’o
pération de Perrin , basée sur des faits positifs ( a )? n o n , sans
doute ; ainsi, le C ea. I 3eil!e aurait tout à gagner dans le système
du C cn. Armand.
( a ) E t le rapport de l ’expert L cga y est appuyé aussi sur des faits positifs,
nous dira le citoyen Arm and ; car les p rix des ventes de domaines nationaux ,
dont je produis des extraits , o n tv érifié la justesse des spéculations de cet
e x p ert, et prouvent même qu’il est resté beaucoup en arrière de la réalité ,
puisque la valeur du bien vendu au citoyen B e ille , portée au pied des ventes
des domaines nation au x, auroit dû s’élever à plus de soixante-dix-sept m ille
francs, au lieu de trente-quatre m ille , à quoi il l ’a fixée.
Sayezsincère et de bonne fo i, citoyen Arm and , et vous avouerez que votre
tableau des ventes de domaines nationaux n’est qu’un prestige.
1 “ Vous dites dans le corps de votre m ém oire, que ces ventes sont desannées
1790 et 17 9 1, et quand on jette les y e u x sur le tableau imprim é h la suite du
m ém oire, non seulement on n’y apperçoit aucune vente de 1790, mais 011 n’y en
Irouve m im e nucuac des premiers mois de 1791 : les plus anciennes sont du
3 2 novembre 1791 , et les autres du i5 décembre suivant.
O r , qutl parallèle peut - on établir entre le cours des ventes faites
de
particulier à pa» ticulier en 179 0 , pour Cire payées en numéraire m étallique,
et le cours en assignats dos ventes des domaines nati o ra u x faites pondant les der
niers mois de 1791,011 le papier-monnaie avait doublé la masse des valeurs re
présentatives en circu lation , où les assignats per.daient déjà 20 pour cent con
tre le m im eraiie, ou lcin p loi en acquisitions de domaines nationaux était le
scur moyen d’écoulement qui leur fût o u v e r t, où enfin leur discrédit allait
toujours croissant de mois en m o is, et promettait aux
adjudicataires qu’il*
payeraient infailliblem ent leurs annuités avec le tiers ou le quart de leur
"valeur nom inale?
�6
Mais si le C “ . Beilfc ne doit pas résister à cette nouveauté pour
son intérêt, il doit y résister pour l’Iionncur des règles qui ont
toujours voulu et qui voudront toujours qu’un tiers ex p e it n’a i t ,
connue ceux qui l’ont précédé, d’autre régulateur de son opinion ,
que ses lumières et sa conscience.
Le C e*. Armand est forcé d'avouer que de tous les livres qu’il a
compulsés sur la question, le dictionnaire de Ferrière est le seul où
l ’on trouve quelque chose de favorable à son système ; et ce quelque
c h o se, quand on le lit sans prévention , se réduit à rien y car que dit
Ferrière ? » Que le tiers expert est celui qui est préposé pour
» décider lequel rapport des experts nommés par les parties,doit
» prévaloir, lorqu’ils sont d’avis contraire »>. Pas un mot de plus.
O r , quoi de plus insignifiant que ccLle définition vague, sans dé
veloppement et sans m otif? Mais ce que les livres ne disent pas t
la laison (qui de toutes les autorilcs est la plus imposante après
la l o i ) , la raison le prescrirait-elle ? bien loin de-là , elle recom
mande au contraire
l’indépendance d’opinion du tiers e x p e rt,
àuisi fortement que celle des premiers expert*.
L e C ' n. Armand est tombé en contradicfion avec lui-même, lors*
qu’ il a comparé les experts aux juges, pages 17
mémoire, après avoir d it, page g ,
et 18 de son
que l’avis des experts n'est
l ï „ second lie u , le citoyen Arm and sait bien que ce n’étaient pas seulement
j toises de terrain que les adjudicataires de domaines n a t i o n a u x a ch etaien t,
quaud 011 leu r adjugeait un objet sous la dénomination d’une septéréc de terre ,
8o
ou de Luit œ uvres de vigne ; la contenue réelle ¿tait ordinairem ent de i 5
&
itioo toises au moins.
J'nfîii le citoyen Arm and sait aussi combien il y a loin des valeurs et des
produits de Rem ngnat, dont il parle toujours, aux valeurs et aux produits do
C'Jcinciiiat, oit sont «itués les biens vendus au C cn. U eillc, dont il ne parle
jumais. Rotnagnat et Cléniensat so n t, A la vérité , deux villages de la inÊmo
commune , mais ¿ans de» s ile s , des territoires très-difFérrm pour la qu alité,
le p r o d u it, la déjiensc de la cu ltu re, lafacililé d u débit. L ’ un est dons le mcil"
[cur s it e , et l’au tic
a'1* approche» des montagnes; en 1111 m o t,
leu r trouver «lu» pendans qui sont nous les y eu x du
j>lc , lu village de
011 peut
trib u n al, par cx çm -
Mattzal et celui d<‘ Si.-J«or-d’J'n-IIuut.
1./cjcj>ciI J’crrin évulue la différence de valeur qui en résulte , à contenue
¿¿aie , au m olus ou tiers , c l il est resté au-dessous de la vérité su r ce point.
�7
J tA ty
pan autorité , » et que les tribunaux peuvent s’en ¿carter» qnaml
)) ils le jugent à propos». Nous rendons hommage à celle «leruièi e
vérité, et nous en concluerons que, dans le concours de trois
•experts chargés de vérifier un fait., les opinions ne doivent pas
se compter pour former une décision,
comme lorsqu’il s’agit de
former un jugem ent, elles ?e pèsent, non num eranlnr s e ilp o n
de rantur. A in si, lorsque le tiers expert et les deux premiers sorrt
d’avis discordans , le tribunal préfère dans sa sagesse , le mieux
appuyé et 'le . plus judicieux des trois , celui où il trquve les
lumières qu’il cherche: s’il ne les trouve dans aucun 3 il les rejl.te
tous et ordonne une nouvelle opération.
Raisonnons d’après ces p r i n c i p e s , dont le C*"'. Armand est d ’ac
cord , et soyons conséquens y noua reconnaîtrons que les experts
ne s u b ju g u a n t jamais les suffrages des juges par autorité, et no
p o u v a n t obtenir leur assentiment que par la puissance de la rai
so n , il .est de l’essence de la mission du tiers e x p e rt, qu’il jouisse
d’une entière indépendance d’opinion j qu’il recherche la vérité
de bonne fo i, et qu’il puisse la peindre sans contrainte, telle qu’il
l ’aura reconnue; qu’il puisse émettre librement son avis p r o p r e ,
en un m o t, et le motiver sainement. Quel parti prendra donc
le tribunal dans cette occurrence ? il enverra nn tiers expert incor>
ruptible et sa g e , et ne lui prescrira rien j m itte sapientein et
n ih il dicas.
L a discussion de l’incident e6t term inée, que nous reste-t-il
à faire ? L e C e“. Armand s’est donné le plaisir des injures , de3
jactances, des fables mensongères: les relèverons-nous ?
Il parle de perfidies découvertes à chaque p a s , et ne cite que
des faits indifférens ou controuvés (a).
I l est f a u x que IeC*“. Beille ait fait aucune «Icmarciie indiscrète
auprès de qui que co s o i t , pour scruter par malignité et sans
intérêt, les affaires domestiques du C 11*. Armand.
J l est f a u x qu’il ait sollicité aucuno aflairo contre lui.
J l est f a u x qu’il ait fait aucune tentative auprès du C cn. Cassière ,
beaufrère du C cn. A rm an d , pour arracher le secret do leujs arran*
gemens domestique*.
. <«) Pog<s «6 tic aoa mémoire.
OGÇ.
�3
I l est f a u x qu’il ait préparé aucun triage des 34 ventes qui
éclairent les experts. Ce sont les experts eux-mêmes qui les ont
recherchées ; et ils n ’en ont pas fait un triage , car toutes celles
du temps ont été recueillies sans choix.
I l est f a u x que les traités de famille et autres pièces relatives
à la succession des beau père et belle mère du C en. Armand , aient
jamais été et soient encore dans le cabinet du C en. Bergier , qui
autorise le C en. Beille à démentir hautement ce fait.
Tout est f a u x dans la description pompeuse qu’il fait du chétif
domaine qu’il voudrait faire payer plus du double de sa valeur ,
notamment l’irrigation du pré le plus étendu et le plus p ré
cieux du bien ; et en cela il est en contradiction avec son propre
e x p e r t , p age 2 de son rapport.
Tout est f a u x dans l'épisode
relatif au notaire Chassagne ,
qui a reçu l'acte de vente. D ’ailleurs, qu’il soit entendu, le Cen.
Beille y consent. Après ce la , il sied bien au C en. Armand de par
ler de perfidie I
Signé B E IL L E .
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
Chez V e y s s e t, Imprimeur de la Préfecture du Pui-de-D ôm e.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beille. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Beille
Subject
The topic of the resource
experts
biens nationaux
ventes
créances
assignats
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse sommaire du Citoyen Beille, appelant, au second Mémoire du Citoyen Armand, juge au tribunal d'appel, intimé.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
méthode de travail des experts
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1316
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1315
BCU_Factums_G1317
BCU_Factums_G1318
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53205/BCU_Factums_G1316.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Clémensat (63111)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
ventes
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53204/BCU_Factums_G1315.pdf
bb84c3c0213d07b07c6874ffe729317c
PDF Text
Text
SECOND MÉMOIRE
‘
P O U R
L e citoyen A R M A N D , Juge au Tribunal d ’appel ,
in tim é
CONTRE
L e citoyen B A I L L E ,E
n marchand, appelant
ordonnant, par son jugement préparatoire du 28 nivôse
dernier, avant faire droit sur l’appel, et sans préjudice des fins,
une convention d’experts à l'effet d’estimer, article par article,
valeur de 1790 , les différens objets compris au contrat de vente
du 5 frimaire an 2, le tribunal a moins cédé au besoin de la
cause, qu’à celui de mettre de l’austérité dans une affaire qui
intéresse un de ses membres : cette circonspection ne peut
paraître que louable.
Des rapports séparés existent, malgré mes invitations pres
santes aux experts de s’accorder.
Ils ont vérifié que les contenues, exprimées dans la vente,
sont remplies ; c’est là leur unique point de ralliement.
C es experts, que l’on suppose en état de juger de la valeur
A
�C O
des fonds qui dès-lors devaient opérer avec des légères diffé
rences, ont présenté des évolutions distantes de quinze à trentequatre mille francs.
Il a plu à Perrin de faire une estimation inférieure d’un tiei'S
à celle de l’appeldnt lui-même.
On ne peut l’expliquer , qiie par le souvenir de ce que, obligé
de conclure , comme commissaire, dans la cause des citoyens
Ricard et Mallet de Clermont, j’ai relevé des écarts révoltons,
entassés clans son rapport : cette circonstance eut été pour tout
autre1expert une invitation, si non de s’abstenir de la commis
sion, du moins de la remplir avec droiture et sagesse.
Quoiqu’il en soit, son rapport est en opposition avec le rôle
matrice^ avec les ventes des biens nationaux, faites en 1791 ,
èt avec le cours notoire des fonds de la commune de Romagnat ;
toutes les bases y sont violées.
Il invoque la matrice du rôle,,pour fixer le produit de ces
biens à 493 francs, compris ce qui dépend de la commune de
Cédrat , quoique la matrice porte ce produit à 62B franos
pour lis seuls fonds situés à llomagnat.
Il me fa it, à la vérité , la faveur d’ajouter une moitié en sus,
présumant que l’évaluation du rôle n’est pas rigoureuse : je m’in
terdirai de faire à son imitation dfes conjectures sur le rapport
du produiHadopté par la matrice, avec le produit e f f e c t i f ;
chacun peut se faire une idéo de la sollicitude des administra
tions nutnieipales ¿1 cet égard.
11 a , dit-il, recueilli le prix de trente-quatre ventes qui em
brassent toutes les espèces de biens qu’il vient d’esfimer, passées
depuis le ^ ja n v ie r jusqu’au 3 i décembre 1790, devjint Goughou,
notaire à Beaumont, et T aché, notaire ù llo m a g n a t, et y a puisé
des résultats semblables.
On observe , i.° que ces ventes, triées à l’avance par les soins
du citoyen Baille, comprennent des fonds d'Optne, de S au lzet,
de Coyrot, de Boissejoux; il était réservé à cct expert de coniondrô les fonds de ces diilérentés commuues, avec ceux de
Romagnat •
�(3 )
2,° Il s’est bien gardé de dire que les dépositaires dé ces ventes
l’ont prévenu q u e celles qui concernaient R o m ag n a t, né pou
vaient donner aucune lumière sur le cours des fonds, les objets
vendus consistant en petits lopins de terre, que quelques indigens, dévorés de dettes et de besoins, hors d’état d'offrir une
garantie, étaient forcés de vendre pour la subsistance de leur
famillè; parcelles assises dans des 'réduits isolés, et grevées,
pour la plupart, de cens, de percières.
Et en effet ces 34 ventes n’offrent pas 25 quartelées de terre, et les
contrats énoncent dans plusieurs la charge des redevances fon
cières dont 011 vient de parler ; chaque article ne forme qu’un,
point inaccessible à la concurrence. Quel parallèle entre ces
langues de terre et un domaine propre à former une exploita
tion, à doter une famille nombreuse, des denrées de toute espèce?
L ’allégation que ce sol tient de celui de la montagne, n’a
d’autre fondement que la prétention de placer assez mal-adroiteinent dans son rapport le terme de m olécules. Les fonds en
question sont avantageusement distribués autour de Romagnat
et dans les meilleurs territoires.
*
3 .° Quel ca? peut-on faire de l’assertion, qu’il a consulté deux
propriétaires, cultivateurs, et les seuls estimateurs du p a y s ,'
qui l’ont assuré qu’aucune des terres ne pouvait être placée
dans les première et deuxième classe ; qu’il n’y avait pas une
vigne de bonne qualités; que les ayant aussi consultés sur les prix,
ils lui ont attesté qu’en «790, les trois ares et 79 centiares, ou
la quarlonnée de terre, première classe, se vendaient 60 fr. ; •
deuxième classe, 55 fr. ; et troisième classe, 40 francs ; que la
même superficie en pré, première classe, se payait 120 francs;
et deuxième classe, 80 francs. Il a , à la vérité, la prudence
de ne pas nommer ces estimateurs; et si l’on pouvait l’en croire
sur sa parole, la scfule conséquence qui jeu'naîtrait , serait la :
nullité de son rapport, pour n’avoir pas pris ces renseignemens
en présence du citoyen L e g a y , investi d e là mime mission! Je
lui opposerai des témoignages plus certains et plus respectables :
A 2
�( 4 )
l ’extrait de la matrice du rôle, certifié par le maire dé Romagnat, duquel il résulte que tous les fonds vendus, appartiennent!
aux premières classes ; et l ’extrait des adjudications de biens"
nationaux situés à R o m agn a t, faites en 1790 et 1791 ,■de l’a i w
torité de l’administration de district, dont je parlerai dans un;
moment.
'
m
!
L e sol de Romagnat est connu de nombre dé'ceux qui nous*
écoutent , la valeur des fonds dans la banlieue de Clermout
l ’est aussi ; deux des vergers vendus sont , quoiqu’il en dise ,
l’un complètement et l’autre suffisamment arrosés ; l’un et l’autre
produisant des regains; le troisième est siiué au bord du ruis-1
seau et dans un bas-fond.
1.
.
?
. Quant à la qualité du vin, on pourrait la ranger parmi les
vins grecs, depuis qu’elle est devenue la propriété de l’appelant.>
■
L e zèle de cet expert l’a emporté jusqu’au point de glisser
que les ventes qui lui ont été 1communiquées, et qu’il date»
de 1790, ont calculé l’accroissement,' résultant de la suppres*
sion de la dîme des percières et des cens; cependant les dîmes
ont été perçues jusqu’en 1791 ,.e t devaient l’être jusqu’à ce
que les ancien^ ¡possesseurs seraient entrés en jouissance de
leur remplacement,
j .
.1
,
L es percières imprégnées de féodalité , ainsi que les droits
féodaux et casuels, n’étaient déclarés que rachetables, et n ont
été abolis, sans indemnité, que par le décret du 22 juillet
Ï793 ; il’irilleurs, on répète q.,,e
plupart de ces ventes sont
grévées de cens et de percières;comment donccet exjiert a-t-il pu
prostituer aiqsi son opinion et son talent ? tout ce qui est purement
arbitraire, çst:,ou doit être .suspect à la justice.
1
On ne s’appesentiru pas sur l ’induction qu’il a voulu tirer
d’une vente du 3 fructidor an 2 , consentie au citoyen Baille
par la citoyenne (Richard ; ou n’eu connaît pas l’objet , il y
a d’ailleurs trop de danger de raisonner sur íes négociations.
Il n’en est pas de même du rapport de L eg a y ; il la uaolivé
sur des bajes éternelles, co.mue lu justice.
�a r. )
* Aprfeiavoir reconnu que la loi du 19 flaréaban 6,.relative à ï®»
restitution pourlésioiï d’autre mûitié ,i était inapplicable paprès»
avoir pris en considération les avantages de'la>suppressibn;ide la»
dîme.et des douanes, jjéfùlé: l’objection dejyaeraoisse:meTit;des va-j
leurs
en
des immeubles
mis:dcHis^e
I' U I O V
U tc lir
l lc u
MlIat
U I iI o
U n,
K J p a r *l’augmentation
D
--- ------' ----------- -------------7 ¿
o m m e r ç e , çt prpuv.é qu,^ l ’a ugiT>ej>.l ^ *i
corn
d U. ; p r b } dg$.f d e n ré e s
lait le th e r m o m è tr e sû r d e l ’a u g m e n ta tio n du prix,'cl^ sLf o n d s ,,
éla
que les valeurs Requises en 1790, n’étaient (que. des .valeurs^
naissantes; ¡1 rapporte :
1 « j;°- 'Que les itères sont par lèùr'riaturé’ , léur position et la
«’■qualité du-Sol, toutes s'iïscéptiblés1 de produire du irbrhènVjrrét*
«• même!,sbnt, ce qu’on -pëuf '¡appeler' généralement, dé lionnes”
« terres à Froment, toutes situées en pente douce, et non sujettes8
r. . t
•
' 'J '
i
* aux necidens de la plaine.
’ '
« « Elles peuvent être afïermées depuis la *suppression cde la°
« dîme, six q’uartès Froment, quitte d’impôt, pàr S e p t e r é è ', c’est-a«?dîre , cinq niyriàgtammés par décare ; le blé valait ’, coninui-*
«•îvément, en 1789* et 1790, de 24 à 28 f r . W s 1le seller, ou*
« c!e 48 à 56 sous le myriagramme. En ne le mettant qu’à 24
«ifrancs-leselier, ou 48-sous le myriagramme, cela donnera un
«revenu de 36 francs par chaque!septeréè, m esure'du pays,
« qui est de 800 toises qunrrées en superficie, ou ce qui est
« la même chose ,1 environ trois ’décarts, et représenle un ca« pital au denier vingt, de 720 -francs par septerée, ou par
« trois décares.
v
>■
■
i
« Les vignes sont également situées en très-bon sol, excepté
« uneseu!q (la vigne de Javaude ou du R o c , article 18), qui est
« en pente qs^cz rapide, et qui perd de sa terre végétale^
a mais elle doit produire dYxcullent vin, à raison de son ex« position u 1 aspect d e . midi ; cl la vigne elle-môme relient lo
a. terrain, de manière qu’il ne peut £-ire dégradé par les eaux,
« c o m m e s’il ét ait nu.
« Elles sont toutes susceptibles de rapporter l’une dans l’uulre,
« en les considérant comme elles étaient lors de la vcnle, c ’est-à-
�C6 )
«■dire, quelques-unes vieilles, et ne pouvant plus produire que
« de minces récoltes, trois pots, quittes de toutes dépenses et
k d’impôts , par œuvre , qui est de 100 toises de superG* cie, suivant la mesure du pays, c’est-à-dire, de 57 litres pour
« quatre ares.
« L e pot de v in , ou quatorze livres un quart, valaient,
a communément, trois francs, ce qui fait neuf francs par œuvre,
a et représente un capital au denier vingt, de 180 francs.
Pr^.s fit-prés-vergers, entpurés .d ’arbres . à
it.mayère, et plantés d’arbres fruitiers, on sent qu’ils sont encore,
«..plus précieux que toute, autre, espèce d ’immeuble^, puisqu’ils.
« ne peuvent exister que dans un excellent s o l, et qu’ils pro« duisent plus; et ils le deviennent d’autant plus dans le pays,
« (gu’ils .¿ont .plus rares-, et dispensent cqlui ,qui en possède,
« d’aller" chercher au loin des fourrages çt des échalas pour lesf>
« vignes; ajissi vç rra t-o n les héritages de cette nature, portés,
k dans les estimations ci-après, à un prix bien supérieur aux
« autres, à surfaces égales.
« Les capitaux, ainsi fixés d’après les revenus, nous avons
« pensé qu’il était dq toute justice de les augmenter d’un tin
te quièmeen sus, soit à cause des noyers qui sont sur les bords des
«.terres,soit parce ([lie je revenu ci-dessus est quitte d’impositions,
« soit à raison de l'abondance du numéraire dans le pays, et de
« la localité des h ér it ag es qui sont à la convenance des villages
a.de Ccyrat, Clémunsut, llom ngnat, et même lieu u m ont, tous
« villages riches et peuplés »*
'■ '
C ’est d’après toutes ces considérations que cet export a attri
bué à chaque héritage, sa valeur particulière, et porté la
valeur totale des biens vendus, à ........................... ... 3 ^ 3 0 l'r.
S a v o t n :
20 Septci’des moins deux quartonnées cl demie,
�(7 )
£
ou ;sîx hectares moins deux ares , à 900 francs la
, ;j
>
septerée. . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1771O' fr.
29 œuvres un guart.de v ig n e ,o u un hectare lin vt..
>_■
décare un are, ¡1 2 12(francs l’œuvre...........................
672o4
œuvres et demie de près-vergers e{(s^ulée.,pu ; .... * iuyf
n oy éré e , i(ou un hectare cinq ares,,0à 5oo francsJ[t.<
jj3;j
l ’œ u v re .................... ..........................
...' l .lM. .. .il
. i-H,:
C 6800Bûlimens et 'j a r d i n ................................................ .I . J?J . . U 3 io o
- • •
Somme ¿gale . ..................'3433b fr
L e seul reproche’ qu’on puisse faire à ' cet('expèr,fl,nnest'’de
n’aVoir pas osé atteindre la juste valeur de ces taie11s'a l’époque
1 '
- • 1
1
'
1
'> r )W il" ’ .
de i y g o , sans doute par honneur pour la profession’, et pour
saüver à son adjoint unir partie dû ïidiciilë dont" il n’a” pas craint
de se couvrir.
Je 11e me dissimule pasles difficultés d’une semblableopération.
L a valeur intrinsèque des fonds qui présenie elle-même des
combinaisons infinies, n’entre pas>seule dans leur appréèiâtion.
Leur nature, leur position, la 'commodité et la facilité-dd
l ’exploitation , des communications , la concurrence des biens à
vendre, celle des acquéreurs, la proximité des grandes com
munes, l’abondance ou la rareté du numéraire1, :)e tatr* des
denrées, la solidité de la ven te, le prix d’aiïection'cle convènance., et une foule d’autres considérations, servent à en dé*
terminer le prix.
L eg a y n’a pas apprécié toutes ces considérations , il a ’, arithmé
tiquement analysé ld produit du sol, il a interrogé la nature^
inaccessible aux efforts do ltf séductioii. M ■
fIt»'
-! L es résultats do l’experti L e g a y , sont fortifiés par le rôlo
matrice de la commune de I\omagnat , et plus: que doublas
par les extraits des adjudications de biens nationaux , dépen
dant de la incuie commune , faites en >79®
*79* > certi
fiés par le receveur des domaines ; car les ventes des biens
nationaux de l ’annéo 17 9 1, ofïVout lo tableau suivant :
�( 8 )
X.’œuvre de vigne
V- . . .*•; V v ' l ¿'‘l ' W V“'7.131 • 2701 liv/
.•ilLa~£$pterée de terre . . .
.• . .• •• . . .• 2662 . :
L ’œuvre .de pré ,'L '•.
. . .v. . . : :T : . . K''1 2400' "
On n’exige pas que l’appelant attribue plus de faveur’ 'aux
ventes de biens'patrimoniaux, qu’à celles des biens nationaux;
cette distinction ihéîÇique a'¿té condamnée par'une'loi formelle,
D ’après ce premier tableau 'd’évaluation','nous aurons le
^
tableau suivant : •
• ........................* ’ ri‘*'J *. * '
..¡2o septerées de le r r e , à 2652 francs. . . . 53o4Q fr.
»
*. 3o œuvres de vigne , à 270 fr. . . . .
.
8100... ■
,
o h j i o ,“ n, .
■
> °.
" -1*
5 journaux de pre-verger ,.a 2400 tr. . . . . 12000
~
on-.Ju ) <a àtni ■ ,
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4 nuartonnees el demie de jardin ou saussaies
1491
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B âtim ens. . ......................... ,.................................. 0000 ,
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Ces extraits seront imprimés à-ila suite du mémoire. . r r
?*)»1
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r
L e ttybumil n?a pasîperdu de vue que la vente a été consentie
le 26 novembre 1793 (i5 friuuiïre!nrt!2 ) , après laisuppression
des droits féodaux, des percières , des .douanes ou droit de traites
dans l’intérieur f/des droits exclusifs de chasse j de colombit rs et
de gore«nes: ,01111e croint pasjde direlque depuis c-es franchises
et après.ll’époqiie assignée -aux experts, l’œuvre de v i g n e a été
portée) à ,5oo IV. , la quartonné.e de terre à plus <1° 4 ° °
> «-elle
de pré à plus de 5oo fr., qu’ il s’est opère un accroissement de
plusj du quart ■0111‘,11 trouve la preuve dans les ventes faites dans
dçsLAnu^ft ;5 ,y* 6, p;tr(l,e citoyen Dlesers ; dunfj une adjudication faite en l’an.10 , de l’üu{onté,du tribunal d’arrondissomenf de Clertt)pnt, pare^pcoprialion forcée, sur le cit..J.ertinM ontigni; dons une autre vente par expvopriation, sur les héri
tiers Lacço/a.» et dans le refus du ei'.|Guerier de H om agnat, de
vendre s*qs tprrtvs ¡\ raison de 2400.fr,. la.:ieptercc. . 1
i> :
L e jv in c ip e .n ’eiV tfsljpus; nioinfvcprU>iu que.TeHiimétion, doit
se rapporter (1 l’époque do lu ¡vente >des aines timoirées croiraient
peut-être
•
�< S ?&
C9 )
' _ .
peut-être devoir là rapporter à celle du paièmerit, par ce motif
de justice rigoureuse, que le prix devant représenter la chose,'
le vendeur doit avoir l’équivalant.
'" S i'Ie dernier r a p p o r t a laissé les biens en question au-dessous
de leur valeur en 1790, un tiers expert ne pouvant dépasser son
estimation , ne pourrait promettre un travail satisfaisant pour
le tribunal; il ne pourrait pas en fournir non plus sur la diffé
rence des valeurs de 1790 , avec celles de 1793 ou 1794.
L e tribunal^qui s’était promis plus d’impartialité et de lu
mières de ces rapports, en est dédommagé par les autres renseignemens dont on vient de parler.
11 en puisera , sans doute , dans la décision des premiers
juges imbus de la connaissance personnelle des fonds dans la
banlieue de Clermont ; dans la demande de 10000 fr. de dommages-intérêts , faite par Baille dans le cours de la coneiliatioü.
entamée en /an 10 , et répétée dans son inscription hypothé
caire.
A u surplus le magistrat, que la loi seule doit gu id er, élevé par
elle au dessus des vues qui conviennent aux experts, tirera des rap
ports qui existent, les motifs capables de l’éclairer; il combinera ce
qu’ils ont de favorable dans une partie, avec la défiance qu’ils
inspirent dans une autre ; destinés à lui communiquer leurs
lumières, les experts ne peuvent jamais asservir les siennes. Ce
serait un paradoxe injurieux à la magistrature que de faire dé
pendre les droits les plus légitimes du hasard des conjectures,
des contradictions, des erreurs et de la corruption de la plupart
des experts.
L eu r avis est raison, non autorité, et raison sujet le ’îson exa
men; il peut, quand il le juge à propos , s’en é c a r t e r , mfme dans
les cas où l’expérience est jugée n é c e s s a i r e pour fixer une vérité
intéressante. Ici l’opération la plus exacte , n’aurait d’autre avan
tage que de justifier les tableaux que j ’ai offerts , que de mettre
en opposition la défection du cit. Baille avec le caractère qui doit
ïnc lirer de la classe des vendeurs ordinaires.
B
.M L
�tâ
V *v
.
C*o)
Que reste-t-il donc? si ce n’est d’abandonner une voie qui au
lieu de calmer la c o n s c i e n c e du juge, d’éclairer sa justice, no
sert qu’à démontrer qu’après le rapport de Perrin, on serait un
peu plus incertain sur la valeur du bien, qu’on ne l ’était au
paravant.
L e contrat de vente forme une preuve si décisive de l’en
gagement du citoyen Baille, qu’il n’est pas besoin d’en puiser
ailleurs. Pouquoi, en e ffe t, multiplier les rapports , s’ils ne
ne peuvent changer l’état de la question ?
Par respect pour l ’attention du tribunal, je ne répéterai pas .
les moyens développés ailleurs; on n’a pas entrepris de les com
battre : les clauses de la vente, inconciliables avec le système
de la réduction, des lois précises, des rapports qui en expliquent
les motifs , qui ont interprété les doutes que l’intérêt paiticulier
avait fuit naître, la jurisprudence constcnle des tribunaux, celle
rnême du tribunal de cassation, ne laissent à l’appelant que le
désespoir d’avoir épuisé les lenteurs et l’art de l ’intrigue.
C ’est à ceux qui vendent et qui achètent , à se consulter sur
le prix qu’ils veulent ou donner ou recevoir.
Pourvu que le dol et la fraude ne soient pas mis en usage, il
est libre au vendeur de vendre au prix le plus cher qu’il peut
obtenir, et à l’acquéreur d’acheter au meilleur marché. Lu loi
va m im e plus loin , in pretio em tionis et venditiom s naturaHier licerc conlrahcntibus se circumvenire. L . 16 . f f . de Min or.
C ’est une aulre règle aussi certaine, que 1ai quercur n’est pus
restitué pour acheter trop cher, car pci sonne n’ist forcé d’ac
quérir ; ce n’est qu’au vendeur seul que cette grâce était accor
dée , dans le cas d’ une lésion d’oulre-iuoilié, sur la présomption
qu’il avait cédé à une dure nécessité.
L a nouvelle législation la refuse au vendeur tomme à l ’a c
quéreur.
L ’estimation n’a pas été ordonnée pour fixer le pri.\ de la
vente, car il ne s’agit pas de savoir si le citoyen Baille a été
lésé; et d’aillcuis les parties n’ont pas entendu veudre et ache-
�ter suivant que les fonds en question seraient estimés; c’est uni-«
quement pour vous entourer de toutes les connaissances , pour
tentourer de l’opinion publique un engagement souscrit en faveuç
d’un de vos membres ; rien n’a été préjugé sur l’effet du long
terme et de la clause prohibitive : cetle clause , contre laquelle
vont se briser les erreurs accumulées contre une loi qui est peutêtre la plus juste et la plus nécessaire de toutes celles qui ont
été rendues sur l’importante et difficile matière des transactions,
pendant la dépréciation du papier-monnaie, cette clause est,
dis-je, une partie indivisible et essentielle, sans laquelle la
vente n’aurait pas été consentie, ou le prix eût été plus consi
dérable.
*
II y aurait de l ’ineptie à supposer que , frappé comme le cit.
Baille de la baisse progressive du papier-monnaie , je n’ai dicté
la clause prohibitive que pour recevoir des valeurs illusoires. >
Assurément personne ne partageait, à l ’époque de la vente;
l’opinion que Baille dit avoir eue, que les assignats reprendraient
leur valeur primitive ; la baisse qu’ils avaient éprouvée, et les
lois sévères prononcées peu de terus avant la vente contre ceux
q u i mettraient de la différence entre les assignats et le numé
raire, étaient des pronostics infaillibles de leur chute prochaine.
Si l’on pouvait d’ailleurs en croire le citoyen Baille, lorqu’il
assure qu’il n’a jamais eu l’intention de payer en valeurs métal
liques, mais bien en papier, et qu’il avait l’espoir qu’il serait
maintenu jusqu’à l’échéance du terme, elle entraînerait la mémo
conséquence; car s’il a pu se persuader en l’an 2, qu’il existerait
du papier en l’an 7 et qu’il pourrait payer dans cette monnaie ,
il s est nécessairement soumis à la chance de payer en valeurs
métalliques si leur cours était rétabli à l’époque du paiement 1
les risques devant être réciproques; et la vente, sous ce rapport,
dégénérant en contrat aléatoire, est devenue exclusive de toute
ïéduction.
»
J ’ui louché fort rapidement les conséquences d’un pacte aléa
toire , parce qu’elles se présentent naturellement à tous les esprits^
B 2
�(
)
j*ai oru*devoir;;m’otendfe davantange sur la promesse de-paye#
le reliquat en numéraire , dérivant du long terme et de la clause
prohibitive, qui étaient les seules précautions admissibles dans les
ventes d’alors , et je crois en avoir assez dit pour ramener le cit,
Baille à la foi promise. Quoiqu’il en soit, si le cit. Baille a en
tendu s'eli affranchir à la faveur d’une restriction mentale , ou si
l ’on veut, d’une erreur, sur la durée du p a p ie r , restera-t-il
toujours constant, d’une part, qu’il ne devait pas compter sur
J’existence du papier pour s’acquitter d’une somme qui n’est pas
Stipulée payable dans cette monnaie, et de l’autre qu’il a en
tendu courir la chance de payer en numéraire, si cette valeur
était en circulation à l’échéance du terme.
. Citoyens J u g es, l’on a cherché à dénaturer cette cause.
Dois-je être payé du reliquat en num éraire, sans réduction
ou avec réduction ? c’est purement une question de droit,
elle naît d’un fait qui est la convention; celle-là ne peut pas se
nier.
Il existe une stipulation de paiement à long terme , avec
prohibition de l’anticiper comme clause expresse et substan
tielle de la yente.
. Les lois relatives a la matière , veulent qu’elle éqnipolle
li une stipulation en numéraire, sans réduction; tel est l'effet
de l’article 14 de la loi précitée, du 27 t h e r m i d o r , d o n t le
sens a été reconnu dans le rapport fait au c o ns e i l des anciens sur
cette l o i , par le c i t o y e n L a s s é e , et par le citoyen Grenier, au
conseil des cinq-cens, lors du décret d’ordre du jo u r , du 7
floréal an 7.
C ’est, comme juges, que vous devez fixer le sens et l’effet
de nptre convention ; c’est à vous seuls que la loi a confié
cette importante fonction : vous renonceriez à votre plus belle
prérogative, si vous formiez votre décision sur des résultats
étrangers.
- Certes, s’il s’agiss:ùt de régler une réduction établie p a r la
loi,, il faudrait, sans doule, consulter les experts ; mais s’agit-il
�( >3 )
de juger ce qu’ un acquéreur s’est obligé de payer ? leurs opi
nions ne peuvent pas vous conduire à ce but : que ces biens
fussent de plus grande ou de moindre valeur, il n’en résul,.
tera pas que Baille n’a pas promis, que ce qui reste à payer,
le sera en numéraire.
L ’idée d’une estimation proposée en désespoir de cause,
par B a ille , tendait à anéantir ou éluder l ’effet de la loi du 27
thermidor, et de la convention, à faire adopter par le tribu
nal un autre mode de juger^ l’intention des parties, que celui
de consulter ses lumières et sa conscience.
L a présomption de la lo i, est plus puissante que celle qui
peut résulter d’une estima lion.
Toutes les c o m m i s s i o n s chargées de préparer les lois rela
tives aux transactions consenties durant le cours du papier
m onnaie, ont avoué que la chance du retour et du paiement
en numéraire était p ré v u e , lorsque le prix était payable à
termes l'eculés.
D ’autre p a rt, toutes les lois relatives déclarent qu’elles ont
voulu venir au secours de ceux qui avaient suivi la foi de
la garantie promise à la durée du papier; et que ceux qui,
prévoyant le changement des espèces , se sont obligés pour
ce cas, n’ont aucun motif pour qu’on modifie leurs engagemens.
Les clauses prohibitives, maintenues par la loi du 27 ther
midor , sont évidemment inconciliables avec la réduction du
prix de la vente et l'estimation que les articles 2 et .3 de la
loi du 16 nivôse, autorisent. L e citoyen Bergier lui-même a
rendu hommage a celte vérité, dans un tems d’autant moins
suspect, qu’il concourait avec plus de zèle à la perfection de
ces lois , et des décrets des 27 thermidor an six, cl 7 floréal
an sept, qui ont fixé la jurisprudence des tribunaux, et décidé
pour toujours, que lorsqu’il existe des clauses prohibitives,
le législateur a entendu interdire la réduction.
Il
n’est pas nécessaire que le paiement en argent ait été
formellement écrit dans l’acte; alors il ne pouvait pas l’être,
il suffit qu’il soit une conséquence des clauses de l’acte.
�■VV'<»
. ,
y
( *4 *)
Quant à la jurisprudence, je me suis borné à trois espèces,
deux jugées par les tribunaux de première instance, et d appel
de Pàris, la troisième par le tribunal d’appel de Loir et C her;
ces trois jugemens ont été maintenus par le tribunal de cas
sation. Il en est intervenu nombre d’autres, et notamment du
tribunal d’appel de Rouen.
E h ! que l’on ne dise pas qu’ils ont été rendus pour des
circonstances plus favorables; la clause écrite dans la vente
qui vous est soumise, les réunit toutes.
Ces principes sont éternels; l’apparence d’équité qu’on cher
che à leur substituer, n’en serait que la violation.
On entend paV équité , cette lueur de raison que la nature
a imprimée à tous hommes, et qui est, en effet, le fonds de
la saine jurisprudence; mais comme cette lueur pourrait dé
générer en illusion, et souvent même devenir arbitraire, sui
vant le caprice ou l’intérêt des hommes , les sages en ont
prudemment fixé les règles par des décisions réfléchies et
modérées , et ce sont ces règles qu’ils, ont appelées , équité
civ ile .
Les docteurs nous donnent pour règle, que celui qui a droit
de juger selon sa conscience, est astreint à juger secundùm
conscienliam ju r iu m .— Non licet ju d icib u s de legibus ju d ica r e , sed secundùm ipsas.
Heureux le peuple qui vit sous un gouvernement ou il ne
saurait se présenter d’.-iHiiirc qui ne soit réglée par quelque
loi. En suivant ces codes, où les cas seront prévus, ou des
conséquences naturelles des principes, on ne courra aucun
risque de s’égarer: je poursuis.
Si le tribunal pouvait se décider pour lu nomination d’ un
tiers expert, il ne l’exposera pas sans doute à être entraîné
par le caprice, ou d’autres motifs moins excusables. L e moyen
de l’en garantir, est d’ordonner qu’il sera tenu de départager
les premiers, et de se réunir à l’un ou à l’autre avis.
Userait à souhaiter que les tiers experts fussent toujours asservie
�( , 5 )
J
à. cette règle ; elle peut seule remédier à la frivolité de leurs
opérations, elle influerait même sur l’exactitude et la fidélité
des premiers experts ; assurés qu’en étajant leurs opinions de
motifs sages et réfléchis, en cas de p artage, le tiers chargé de
départager, serait retenu par l’autorité imposante de la sa
gesse et de la raison , par le soin de sa réputation , et que
le meilleur avis ne manquerait pas d’obtenir la sanction du
tribunal ; les premiers ne hazarderaient pas des écarts et des
systèmes qui ne peuvent que les compromettre; tous seraient
en garde contre les préventions, la séduction, la corruption;
nous aurions de meilleurs experts, ou de moins mauvais rapports.
V ou s les avez vus , ces hommes dont les connaissances et
la moralité, bien plus e n c o r e , sont souvent très-bornées, dont
les jugemens vous ont paru si outrés, s’ériger en tribunal,
pour juger , à leur gré, les actes fondamentaux de la société,
et la loi même.
Cette cause vous offre elle-même, citoyens juges, un exem
ple de l'égarement où peut les jeter un dévouement aveugle,
pour ne rien dire de plus.
L ’expert Perrin convaincu , plus que tout autre de l’indé
cente réclamation du citoyen B aille, et de l’impuissance d’as
socier sou aJjoint à une mauvaise opération, n’a rien négligé
pour entrevoir les bases de celui-ci, et pour lui déguiser les
siennes; il n’y a eu entr’eux rien de commun que le toise
ment; il a pris, s’il faut l’en croire, des renseignemens hors
la présence cl à l’insçu de Legny ; il a divagué et entassé im
posture sur imposture, pour déprécier et avilir les biens en
question; sa conclusion a néanmoins été bien simple. Legay,
s est-il dit , ne peut évaluer ce bien au - dessous de 34000
francs, valeur de 1790, tout me le fait p r e s s e n t i r ; je n’a i,
pour servir le citoyen Baille, d’uutre parti que d’abaisser mon
estimation au-dessous de i 5 ou 16000 francs; la vérité, mon
amour-propre, en seront blessés, d’autant plus que le citoyen
Baille a évalué ce bien à 24000 francs; n’importe, le montant
�( 1 6 )
des deux évaluations, sera de 48000 francs. Uu tiers expert,
également fragile et commode, prendra un terme moyen; le
résultat soumis au tribunal, sera donc de 24000 francs. O r , le
citoyen Arm and a déjà r e ç u , en assignats, réduits d’après
Fechelle, i3o62 francs 5o centimes; Baille ne devrait donc,
dans son système, que 10987 francs cinquante centimes, au
Keu de 27500 francs, exigé d’après la convention.
Ainsi, Perrin et le citoyen Baille, ont cru voir dans leur ré
sultat, la possibilité de me réduire à 10000, ou si l’on veut,
à 28000 francs, en comptant pour i 3ooo francs d’assignats,
suivant l’échelle du Puy-de-Dôme, pour un bien en valeur de
Soooo.
Ces idées ne paraîtront pas exagérées, lorsqu’on saura que je
n’ai pas fait un pas dans cette a ffa ire, sans découvrir une
perfidie de l’adversaire.
Puis-je qualifier autrement celle d’avoir fait dresser un pro
cès-verbal de l’état des bâtimens et des murs de l’enclos au
quel je n’ai été ni présent ni appelé?
Celle d’avoir scruté mes affaires domestiques ; celle d’avoir
a rra ch é , soit de mes parties, soit de leurs avoués ou des
m iens, des copies des jugernens rendus par le tribunal du
C an ta l, de la Lozère et de cassation ;
Celle d’avoir sollicité contre m o i, des aiTnircs absolument
ét rangères à celle qui nous divise ;
D ’avoir persécuté le citoyen Cassière, mon beau-frère, pour
lui arracher des déclarations sur les arrangeinens de famille;
D'avoir publié et fait publier à Clertnont, après le juge
ment interlocutoire , que j’avais succombé, et que le jugement
de première instance avait soulevé l’indignation;
D ’avoir préparé un triage de ventes au nombre de trentequatre, pour égarer les experts;
D'avoir dit à plusieurs des magistrats qui nous écoutent,
que le bien vendu n’était entré dans le partage de mon épouse
que pour Cooo francs, contre sa propre connaissance ; car le
traité
�c y y
traité, ainsi que nombre de quittances et autres pièces relatives*
aux successions de mes beau-père et belle-mère, sont encore
dans le cabinet du citoyen Bergier.
Je ne chargerai pas davantage ce tableau, qui peut être toute!
fois de quelque considération pour écarter la demande d’un tiers
expert , sur laqu elle, à toutes fin s , je me permettrai ‘encore
quelques réflexions.
L a question de savoir si le tiers expert est obligé d’adopter
l ’avis d’un des premiers experts , n’a été problématique que
pour les experts ou les praticiens.
G o u p y, dans ses .notes sur Desgodets, a pensé de plein vol
que le tiers expert peut mettre le prix qu’il juge à propos entre
les deux estimations ou confirmer l’une ou l’autre: il était assez
naturel qu’il cherchât à agrandir son domaine, celui de l’ar
bitraire.
Jousse prétend qu’il ne peut estimer plus haut que le plus
haut prix, ni plus bas que le plus bas prix de la première esti
mation; il ajoute que plusieurs arrêts ont annuité des rapports
de tiers experts qui avaient contrevenu à celte règle ; on ignore
où il les a puisés.
Denizart pense que le tiers n’est pas tenu d’embrasser l’avis
de r un des premiers experts, mais de donner le sien propre.
Pigeau hésite entre ces deux derniers avis, et ne prononce pas.
Tous ceux que nous avons nommés ont donc une propension
vers 1 arbilraire ; ils étaient orfèvres, lleste le dernier avis dont
je crois avoir déjà lait sentir plus haut tout l’avantage.
L e tieis e x p eit, dit le r r iù r c , est celui qui est proposé pour
décider, lequel rapport des experts, nommés par les parties ,
doit prévaloir, lorsqu’ils sont d’avis contraire.
L article 5 du litre i . er de la coutume de Bayonhe , qualifie
leui-s rapports de jugeuiens.
I
En comparant les experts aux juges, l’on a cru avec r a i s o n ,
C
�Ci»)
que tout ainsi que lorsque les juges sont partagés, la chambre ou
le juge qui est chargé de les départager, doit embrasser l’une
des deux opinions , le tiers expert doit, par parité, se réunir à
l ’avis de l’un des deux premiers experts. J e pourrais citer, pour
cet avis, Dum oulin, qu’on ne cessera jamais d’appeler l’oracle
de la raison judiciaire et de la jurisprudence.
Pigeau, qui semble incliner à croire qu’il n’est tenu que de
donner son propre avis, cite pourtant.en note un arrêt de i 5o 8 ,
raporlé par Fontanon, que M .r d’Aguesseau assure tenir lieu
d’ancien règlement sur cette matière.
On assure que Fréminville cite un arrêt du 8 juin 1763 , qui
a jugé que le tiers doit embrasser l’avis d’un des premiers experts;
et qu’il en existe un autre du parlement de Rouen , du 17 février
3777, recueilli dans la Gazette des Tribunaux ; il ne m’a pas été
possible de les vérifier.
,
D ’a p rè s ces dernières autorités, s i, ce que je 11’ai garde de
penser, le tribunal se déterminait pour la nomination d’un tiers,
il jugera peut-être dans sa sagesse devoir l ’asservir à ce dernier
mode.
Mais je persiste à soutenir qu’après avoir cédé d’abord à ces
considérations, que, d’un côté, l’aflaire intéresse l’un de ses m e m
bres , et de l ’autre, qu’un citoyen recommandable y prend une
part très-active, le tribunal doit se hâter d e r e n d r e hommage
aux saines maximes, desquelles seules découlent les saines lu
mières.
E nfin, puisque le tribunal a accordé au citoyen Baille la
faveur d’ordonner une estimation, il croira peut-être devoir à
l ’un de scs membres, et on ose le dire, se devoir à lui-même,
d’entendre le notaire qui a rédigé la vente.
C e notaire a été le dépositaire des intentions des parties , le
ministre de leur convention : il ne s’agit pas de dévoiler des
faits particuliers; aujourd’hui que nous sommes libres, que la
clause, de l’expression en numéraire, pourrait être écrite, rien ne
�C
*9
)
j'& b
s’oppose à ce que ce notaire, qui en a connaissance; soif en
tendu.
Outre que le principe que l’on ne doit point recevoir da
témoignage contre, ni outre le contenu aux actes, ni sur ce qui
serait allégué avoir été dit avant, lors, ou depuis, étant fondé sur
la possibilité où l’on a été de faire insérer dans l’acte tout ce qui
s’est fait lors de sa confection, et de faire un écrit de tout ce
qui s’est passé d ep u is, il faut en conclure qu’il souffre excep
tion , toutes les fois que l’on n’a pas eu cette possibilité ; il ne
s’agit pas ici de témoignage, mais d’un moyeu de connaître l ’in
tention des parties.
' L e citoyen Baille n’a pas osé démentir en cause principale
l ’assertion du refus fait par le citoyen Chassaigne, d’insérer dans
l ’acte la clause du paiement en numéraire. Ce n’est pas sans
raison qu’il a évité de s’expliquer devant des juges, qui pouvaient
profiter des raprochemens, que les relations sociales offrent pour
¿claircir des faits que l’on a intérêt de cacher.
En dernière analyse, la cause se réduit à l’interprétation de la
convention , et à l ’application de la loi du 27 thermidor, loi
équitable qui a pris sa source dans la défense de stipuler en
argent, loi qui a voulu sauver le seul moyen de conserver aux
vendeurs le prix de leur propriété.
E n résumant une cause déjà décidée par les principes, dont j’ai
bien l’assurance, que jamais mes juges n’ont eu ni n’auront l ’in
tention de s’écarter; j ’ai démontré que la cause prohibitive
de mon contrat, emportait nécessairement entre nous la sti
pulation q u e le re li qua t serait acquitté en n u m é r a i r e , et dans
le nouveau systeme de mon adversaire, la c o n v e n t i o n qu i l
serait forcé de me payer, ou que je serais moi-même forcé
de recevoir ce reliquat en la monnaie qui a u r a i t cours à l’expira
tion du long terme que nous avions capté; qu’alors nous avions
l’un et l’autre la prévoyance quVi cette époque le papier au
rait fait place au numéraire ; que nous aurions certainement
�Ç*>)
exprimé ,1’acquit en numéraire de la somme dont nous avions
reculé le paiement, si nous avions eu la liberté de le faire;
que nous nous en expliquâmes positivement, devant l’oflicier,
rédacteur de l’acte, que nous rendions dépositaire et témoin
oral de l ’esprit de notre contrat; que ce témoin important
se ressouviendrait sans doute, et ne se refuserait certaine
ment pas à déclarer un fait qui avait été lam e de la rédaction
de son contrat, et le principe de la pi'ohibition.
r P a r surabondance de preuves, j ’ai demandé que ce notaire
Soit entendu; non que son aveu soit nécessaire à ma cause,
puisqu’elle est indubitable en droit, mais parce que d’une
p a r t'u n magistrat, qui a le malheur de plaider, semble de
voir éclairer la justice de sa cause au delà de ce qu’on a
droit d’exiger de tout autre citoyen; et parce que de l’autre
je dois cet hommage à un ofli.cier public , qu’il ne trahira
pas la vérité; et que lors même que sa mémoire ne lui re
tracerait plus le fait que j ’avance, je ne dois pas craindre.,
du m o in s, qu’il le démente.
Ce fut le même esprit qui dicta votre jugement interlocu
toire ; -et sans rien préjuger sur le fonds de ma cause, vous
crûtes devoir à votre délicatesse et à la mienne, de c o n f o n
dre l’injustice de mon adversaire; et vous p e n s A i c s , qu une
cstirnntlbn do la valeur des choses v e n d u e s , vous conduirait
à ce b ut .
vT’ai respecté votre jugement, comme je le devais, sans en
espérer le même avantage; je connais trop le danger des opi
nions d’experts souvent pris nu linzard, plus souvent à mau
vais dessein, et dont rien ne garantit la moralité ou les lu
mières, pour avoir espéré que celui de mon adversaire se ren
contrerait avec le mien dans le chemin de la vérité. Si le
rapport de L eg a y pouvait vous laisser de l’incertitude sur ce
que vous désiriez savoir, l’événement a justilie ma deii:ince.
L e g a y , mon expert, n’a pas, je crois, mieux atteint le but,
�( 21 ')
an ne portant cette valeur qu’à 34,3?o;francs , valeur.de 1790 j
m a is d u m o in s .il a opéré sur des bases , il a raisonné.
Ces rapports vous sont soumis. Il est impossible que vous
ne voyez dans celui de L e g a y , des çaratères de sagesse, qui
le .rapprochent de la vérité, s’il 11e la pas découverte toute
entière.
_ Il est impossible, au contraire, que vous ne remarquiez
pas dans celui de P errin , tous les caractères du mensonge,
çt que vous ne soyez pas révoltés de son opinion; les base?
de l’un sont de notoriété publique; elles sont telles que les
connaissances communes suffisent pour juger qu’elles sont in
failliblement sures, qu’on ne peut lui reprocher, que de ne les
$voir pas assez élevées; l’autre n’a ni bases, ni principes.
. Si le rapport de L egay pouvait vous laisser de l’incertitude
sur ce que vous désiriez savoir, je la crois victorieusement
dissipée pgr les documens que je me suis procurés; je v e u x
dire, l ’extrait du rôle matrice de la commune de Romagnat,
çt celui des ventes des domaines nationaux de la même com
mune , faites en 1791 ; l ’un et l’autre sont authentiques.
Dans des circonstances plus impérieuses , vous hésiterez,
peut-être, si vous ne devez pas suivre la règle o rd inaire,
en nommant un tiers expert pour départager les deux autres.
J ’ai dit pour départager; d’abord, parce qu’ en matière d’estimalion, où il ne s’agit pas d’un fait qui tombe sous les sens,
mais d’un fuit sujet à l’opinion, le tiers expert, comme le juge
comparateur, doit adopter l ’une ou l’autre opinion des deux
premiers, sans dépasser l’une, ni estimer au-dessous de l’uulre,
tt a plus iorte raison sans pouvoir donner u n e opinion moyenne,
qui ne serait ni l’une ni l’autre, et qui , v o u s donnant trois avis
diiïerens , ne vous laisserait aucune rai son de préférence, ou
Vous offrant trois témoins discordons, sur le même fait, vous
mettrait dans le même élat que si vous n’en aviez aucun; car
.s’il est interdit au tiers experts d’estimer plue haut ou plus bas,
�^22)
îl est évident que ce n’est plus son opinion personnelle qu’il
est chargé de donner , puisqu’il pourrait aussi bien penser que
le plus haut a trop peu estim é, que penser que les deux ont
estimé trop d’une part, et trop peu de l*autre. Donc son devoir
strict est dedire exclusivement laquelle des deux opinions il croit
la plus vraie, ou la plus approchante de la vérité.
J ’ai cru néanmoins devoir vous soumettre ces deux observa
tions essentielles ; l’une que d éjà , et par la connaissance que
y o u s avez des rapports , vous connaissez aussi ce que devrait
vous dire le tiers que vous nommeriez; et si, comme je dois
le croire, vous êtes convaincu de la fausseté, je puis dire du men
songe du rapport de Perrin, il ne peut vous resler aucun doute
que le tiers se rangerait, ou devrait se ranger, à celui de Legay.
L ’autre, que, dans aucun cas, il ne saurait être utile de nommer
un tiers expert, soit parce que vous ne pourriez lui donner aucune
confiance s’il adoptait l’avis de Perrin, soit parce que, quand même
j ’aurais les deux experts unanimes en ma faveur, je ne pourrais
pas me permettre , pour cela, et je me garderais bien de vous
demander l’iiomologation de leurs rapports, comme certainement
vous ne les prendriez pas pour motif de votre jugement. Ma
cause gît en droit, et non en fuit, ou plutôt le fait est c o n s t a n t
par le droit. Si j’ai vendu à haut p rix, l’acquércurn’a pas droit
de s’ en plaindre.
Si j’ai vendu à bas prix, je n’ai pas non plus a m ’en plaindre,'
parce que je ne serais pas fondé à répéter la plus value.
,
Et enfin, si nous avons fait un conlrat aléatoire, il a dû dé
pendre, et doit être jugé selon l’événement, auquel chacun do
nous s’est soumis.
En un m o t, nous avons un contrat, et dans ce contrat une
clause expressément prohibitive, et qui ne permet pas de dou
ter de nos intenlions. Ce contrat , cette clause sont nos lois.
Coutractus sunt leges. Et comme vous vous laites gloire de ne
juger que selon les lois , j ’ai la certitude que vous jugerez selon
�J t ï
• ( • 23 . )
notre contrat , et indépendamment de toute valeur réelle .ou
arbitraire, parce qu’en jugeant hors de notre contrat, vous
jugeriez contre notre contrat et contre notre loi ; ce que vous
vous interdirez toujours de fa ire , et ce qu’il m’est impossible
de craindre ; sur-tout dans une cause où j ’ai l’assurance que ma
demande est parfaitement honnête, autant qu’elle est légitime,
impossible même que l’honnêteté ne soit pas toute entière , et
é’xclusivement de mon côté , sur-tout encore après avoir tenté
une première épreuve, pour vous assurer, si elle est aussi stric
tement juste en elle-même, qu’elle est fondée et incontestable
en droit ; surtout enfin, après qu’éclairés par un rapport d’ une
sagesse évidente, et par des preuves au-dessus de toute critique
qui complètent les éclaircissemens que le tribunal a paru dési
re r, vous savez à quoi vous en tenir, sur l’opinion qu’on doit
prendre de la conduite de mon adversaire.
Mais si dans cet état des choses vous désirez une convic
tion de plus, ou du moins épuiser le moyen de vous la procu
rer , celui d interroger le notaire ; a X)tcu ne plaise que je vous
en détourne, je le demanderai même. Loin de me plaindre
du retard, je vous en remercierai; parce qu’en négligeant, de
mon consentement, ce que vous devez à la justice, vous aurez
tout fait pour l’honneur de la magistrature.
Quant à cet interrogatoire du notaire , il arrivera de trois
choses l’une , ou il niera ce que j’avance (je ne le croirai jamais
jusqu’à l’événement ); j’aurai alors droit d’opposer mon témoi
gnage au sien, vu que ma cause n’en dépend pas.
Ou il dira qu’il ne s’en ressouvient point, et moi qui m’en
souviens très-bien, qui le déclare, j’ai titre pour être cru.
Ou il en conviendra, et alors vous aurez le jugement d’une
cause, écrit dans sa déclaration, comme il l’est dans le contrat;
vous aurez le contrat tout entier qui vous attestera littérale
ment notre convention; car il sera vrai, par le témoignage ir
réfragable de l’officier public dépositaire de nos intentions,
�( 24)
qu’il faut imputer écrit, ce
que des circonstances nous ont
forcé d’omettre, et qui Sera prouvé avoir été la base de nos
conventions.
Citoyens juges , si je n’ai tiré aucun parti du papier que j ’ai
reçu, je ne dois m’en prendre qu’à moi ; mais rien ne peut
justifier le refus de l’appelant, d’acquitter, sans réduction, ce
qui reste a payer: ce reliquat qui représente le patrimoine de
mon épouse, est sous la sauvegarde de ces conventions et de
la loi. Quel titre de recommandation auprès d’un tribunal connu
par son attachement inviolable pour elles?
ARMAND.
M A R I E , avoué.
E jr r R jn '
�.
( 25 )
’S X T R d i T de La Matrice du Rôle foncier de La
Commune de Ho magnat.
A r t ..
-
Produit net.
liv.
s.
. .
3 i5
»
16
»
Trois quartonnées au m ê m e .................................
52
Deux septerées trois coupées au Teitaux . . . . .
Trois quartelées verger à Glémensat................. . .
Une quartonnée saulée à P r é n e u f .................... . .
19
8
»
3
4
»
. .
19
»
»
»
Trois septerées au m êm e........................................
Deux quartelées au pré B a r a ..............................
Trois quartelées aux B u g e s ................. ... . . . .
Trois quartelées à L u c .................................
Une quartelée v e rg e r...............................................
»
»
»
Six œuvres de vigne à L a g a r d e ........................
Tr,ois œuvres au m ê m e ......................................... . .
Six œuvres à Ghampoumey.................................
i5
i5
»
»
»
Six coupées vigne au même..................................
i5
Une septerée terre à J a v a u d e ..............................
i5
»
. .
Six œuvres au R o c. . . ........................................ . .
48
24
Bûtiinens et j a r d i n .................................................. . .
45
»
10
»
l7
Je, soussigné,certifie l’extrait ci-contre sincère et conforme au
rôle , observant que les terres et vergers oui été divisés en cinq
dusses, el les vignes en six classes. Fuit en Mairie , à llo magnat,
le z j messidor an 11 > signé B ru n , Maire.
;
•
d
�tyù
E x t r a i t
B U R E A U
du Som m ier.— ■ Compte ouvert avec
les acquéreurs.
Dk C lir sio h t,
V
en tes
des Biens nationaux, situés dans la commune
de Romagnat.
âa novem bre 1791.
M
« »
M a r a d i i x , acquéreur de 7 œuvres de v i g n e , terroir des GateauXj
provenant des prêtres F ille u ls, de R o m a g n a t , moyennant
22 novem bre 1791.
P au l M a r a d e i x , de B e a u m o n t, acquéreur d’ une vigne d’ une œ uvre et
d e m i e , terroir Descheix , provenant des niêmi'S , moyennant
%2 novem bre 1791.
600 fr«
Jean A r n a u d , de B e a u m o n t, acquéreur d’ une vigne de (rois œuvres»
terroir des C h eix , provenant des m ê m e s , m oyennant
l 5 décem bre 1791.
385 fr*
L ig ie r M e ss e ix , de B ea u m o n t, acqnéreur d’une vigne de trois œ u vres,
provenant des m ê m e s , moyennant
22 novem bre 1791.
1600 fr.
490 fr*
Pierre Tach<5 , notaire à R o m a g n a t , acquéreur d ’une terre de deux quar*
te lé e s , au terroir de Soutras, provenant des m ê m e s , moyennant 12/îo fr#
dudit.
Pierre T a c h é fils , notaire à R o m ag n a t, nquéreur d ’ une terre d’une quartonnée , terroir de L a u b i z e , provenant des prêtres F i ll e u l s , de Romagnat»
dudit.
m oyennaut
4 00 ^r'
Guillau m e A rnau d , d ’ A u b i è r e , acquéreur d’une terre d ’une quartonnée/
terroir de Soutras, provenant des m ê m e s , moyennant
dudit.
720 fr*
A nto ine P osan t, cultivateur h R o m a g n a t, acquéreur d’une terre de ciu i
quartonnées, terroirde la Postias, provenant des mûines^ moyennant 2000 fr*
dudit.
Jean Courtial , de R o m a g n a t , acquéreur d’ une terre de trois quarteléei»
terroir do Saindoux , provenant des mêmes , moyenant
dudit.
terroir des P ré s - d e - R o c lio , provenant des m ê m e s, moyennant
dudit.
2î5o
'
Rouchand , d’A u b i è i e , acquéreur d’ uue terre d ’uno qu artelée, terr<j|
do la R a s e , provenant des m êm es, moyennant
dudit.
3 ooofr*
Pierre T aclié fils , d c R o m a g n n t , acquéreur d’ uno terre d ’ une éminé®»
terroir des Palis , provenant des m ê m e s , inoyennai t
dudit,
1950 fr*
Anto ine T a c b é fils , de Romagnat, acquéreur d ’uue terre do 3 quarteléc*»
terroir des Pré»-de-Uoclie, provenant d is mêmes } moyennant
dudit.
2700 fr*
François B a y l e , d’ Aubifcre, acquéreur d’ une terre de sept quartonnées»
2^°
Autoino Bellard , de C lerin o n t, acquéreur d ’uno terre d’ une quai*«'
terroir d e l à li'oisse} provenant des m ûm es, moyennant
*
38 °
L
�—
dud't.
4
(2 7 )
Sû)\
P ierre T a c h e f i l s , de R o m a g n a t , acquéreur d’ une terre d’ une é m i n é e ,
terroir des p a l e s , provenant des m ê m e s , moyennant
Jea n Bourché ,
dudit.
1700 fr.
cultivateur à A u b i è r e , acquéreur d’une terre de six
c o u p ées , terroir des T e y ta u x , provenant des m ê m e s , moyennant 410 fr.
dudit.
An to i n e J a n o u x , d’A u b iè r e , a cq ué re u r d’une terre d’une é m i n é e , ter
dudit.
roir de J a v aud e , provenant des m ê m e s , moy e nn an t
625 fr.
Demoiselle A m e i l , de C lém en sat, acquéreuse d ’une terre de cinq quart o n n é e s , terroir de J o u v e t , provenant des m ê m e s, moyennant
M artin C e l é r i e r , de R o m a g n a t,
dudit.
9 6 0 fr.
acquéreur d’ une terre de trois quar-
tonnées , terroir de C o m b a t , moyennant
695 fr.
Pierre T a c h é fi l s , de R o m a g n a t , acquéreur d’une terre de trois quarlelées,
dudit.
terroir de L afo n t-S a u zet, provenant des m ê m e s, moyennant
dudit.
1 3 oo fr.
Austrem oine D o m at , de R o m a g n a t, acquéreur d ’ une vigne de quatre
œuvres et d em ie , terroir de la S a ig n e , provenant des mêmes , m oyen nant
1425 fr.
N o ë l V a s s o n , de R o m a g n a t, acquéreur d’ une vigne de quatre œuvres ,
dudit.
terroir des V iguaux sive de las S a u ch a s, provenant des m ê m e s , m o y e n
nant
dudit.
~
1 5 oo fr.
Gilbert M a z i n , d’A u b i è r e , acquéreur d ’une vigne de trois œ u vres, située
terroir des A n t e s , provenant de la cure de R o m ag n a t, moyennant 10 5o fr.
*
Certifié véritable , à Clerm ont-Ferrand , le 6 messidor an I I de la,
R épublique. L e receveur des dom aines , sigué T a b a r i e z .
A R I O M , D E L ’I M P R I M E E
IR
D U P A L A I S , C H E Z J .-C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Armand. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
biens nationaux
ventes
créances
assignats
experts
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
Description
An account of the resource
Titre complet : Second mémoire pour le citoyen Armand, juge au tribunal d'appel, intimé ; Contre le citoyen Baille, marchand, appelant.
Publication d'un extrait de la matrice du Rôle foncier de la Commune de Romagnat. Suivi de « Extrait du sommier. Ventes des Biens nationaux, situés dans la commune de Romagnat ».
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1315
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1317
BCU_Factums_G1318
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53204/BCU_Factums_G1315.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
ventes
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53201/BCU_Factums_G1312.pdf
7e43d4f6015970ff64e8733a1d15c044
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4»
MÉMOIRE A CONSULTER
E T
CONSULTATION
PO UR dame F l e u r i e t t e - L o u i s e - F r a n ç o i s e
D ’A R G O U G E S , veuve d’Antoine-Philippe
de la Tremouille-Talmond;
CONTRE le Directeur de la Régie de l’Enregistrement et des Domaines.
M a r i e - S uzan n e - F rançoise d 'A rgou ges mourut à Paris le
9 brum aire an 2.
Son héritière fut madame de Talm ond , qui accepta la suc
cession , prit qualité dans l’inventaire fait à sa requête, et se
trouva dès lors en possession, de droit, des biens héréditaires.
'
�[
( 2 )'
Elle acquit également la possession de fait de ces b iens, nonobs
tant son inscription sur la liste des émigrés.
Madame de Talm ond avait en effet réclamé contre cette ins
cription aussitôt qu’elle en avait eu connaissance. Les motifs
qu’elle fit valoir furent d ’une évidence si frappante , qu’elle ob
tint sa radiation provisoire dans le mois de vendémiaire an 4Mais l ’injustice de son inscription était tellement notoire,
que l ’on n’avait mis aucun séquestre sur les biens de madame
d ’Argouges.
Sa radiation provisoire confirma sa possession de fait -, elle
continua sa jouissance.
L a loi du 19 fructidor an 5 l ’obligea de sortir de F ran ce,
'p a r suite de la mesure générale qui'atteignit tous les prévenus
d’émigration sans distinction.
L e séquestre fut alors apposé sur tous ses biens , en con‘ formité de la circulaire du ministre des finances, du 27 fruc
tidor ; alors seulement les immeubles de la succession de ma
dame d ’Argouges furent frappés du séquestre.
»
Parmi ces immeubles se trouve la terre de Mézières , située
dans l’arrondissement de Blanc, département de l ’Indre.
L e fondé de pouvoir de madame de Talm ond n’avait point
fa it, dans le tem s, la déclaration prescrite pour le paiement
des droits de mutation -, et les orages révolutionnaires , h la
suite desquels il p érit, l ’en empêchèrent vraisemblablement.
Madame de Talm ond ignorait cette omission , e t , pendant tout
le teins qu’elle a joui de ses b ien s, la régie des domaines
n ’a fait aucune démarche pour l ’en avertir.
Par l’effet du séquestre , le préposé de la régie a administré
ses propriétés , pendant environ trois ans, sans faire lui-même
cette déclaration.
L a radiation définitive de madame de Talm ond ayaut enfin
�•***
(3)
été prononcée, elle'est rentrée en possession le premier flo
réal an 8.
C'est depuis, après sept années d ’un silence absolu, et sous
la date du g frimaire an g , que la régie des domaines a dé
cerné contre madame de Talm ond une contrainte de ig , 4 i 9
fr. , pour le droit simple résultant de la déclaration à fournir
pour les biens de la succession de mademoiselle d’A rgouges,
situés dans l’arrondissement de Mézières.
Cette contrainte a été visée par le juge de paix de M ézières,
le x x frimaire an g.
L e même jour , elle a élé signifiée au domicile de madame
de Talm ond à C orbançon, avec commandement.
Le
du même m o is, nouvelle contrainte pour la même
somme et le mèjne objet.
L e x4 , visa du juge de paix de Mézières.
L e 3 nivôse suivant, signification au domicile de madame
de Talm ond à Paris.
L e 6 germ inal, elle a formé son opposition motivée. Toutes
poursuites de la part de la régie ont resté suspendues jus
qu’au 2 germinal an io.
A celte époqu e, madame de Talm ond a été cités devant le
tribunal de première instance de Blanc / en déboutement de
son opposition.
La régie a même , par son exploit, amplié sa demande
primitive ; elle préleud aujourd’hui faire condamner madame
de Talm ond au paiement du demi-droit en su s, et en con
séquence, au liou de i g ,4.19 fr. , elle réclame la somme de
a 7 ,186 fr.
Jugement par défaut , ajljudicatif des conclusions prises par
la régie, sous la date du iG lloréul an xo.
�( 4 )
Opposition à ce jugement d e l a rpart de madame d e-T a lmond.
L ’instance est liée , et il s’agit de faire prononcer.
Madame de X’alinond oppose à la demande de la régie deux
fins de non-recevoir établies sur la prescription que la loi pro
nonce , et quo la régie a encourue.
L a loi du 22 frimaire an 7 contient sur ce point des dispo
sitions précises. L ’article 6 est conçu en ces termes :
« Il y a prescription pour la demande des droits, après cinq
années , ¿1 compter du jou r du décès pour les successions nondëclarëes.
« Les prescriptions ci-dessus seront suspendues par des de« mandes signifiées et enregistrées avant l ’expiration des délais.
< Mais elles seront acquises irrévocablem ent, si les poursuites
« com mencées sont interrompues pendant une a n n é e , sans
«. f/u’il y ait d'instance devant les ju g es com pétèns , quand
« môine le premier délai pour la prescription ne serait pas ex« pire. »
On soutient que la régie a encouru la déchéance de son
action sous ce double l’apport.
D ’une p a r t, le droit de mutation était ac juis à compter du
jour du décès de mademoiselle d ’A rgou ges, époque de l ’ou
verture de la succession.
O r , du 9 brumaire an 3 , au 9 frimaire an 9 , il s'est écoulé
s ix ans et onze mois. La prescription de cinq ans était donc
acquise..
D ’autre part , la régie a même encouru la déchéance irré
vocable de son action, en ne faisant aucunes poursuites sur
�4 V
(3)
son commandement du 12 frimaire an g , et en laissant éconlev ,
depuis cette cpocjue jusques au 2 germinal an 1 0 , date de sa
demande ju d iciaire, un délai de quinze mois et vingt jours ,
c’est à dire trois mois et vingt jours au-delà du terme ilxé
par la loi.
Les dispositions de la loi sont trop précises pour étrç mé
connues.
Les faits sont certains, et ne peuvent ctre désavoués.
L ’exception proposée mérite toute la faveur duc à un moyen
légal , qui tend à repousser une action rigoureuse , et en faveur
d ’une mère de fam ille, déjà trop infortunée, à qui, les évène*
mens de la révolution ont enlevé les objets les plus chers, à
son cœ u r, une fortune considérable, le repos qui la fuit de
puis dix a n s, l ’espoir même d ’une existence conforme à scs
habitudes et à ses. besoins.
A ces principes , à ces faits et à ces considérations , la régie
oppose , pour toute défense , que la prescription a été inter
rompue par le séquestre apposé sur les biens de madame de
Talm ond, Supposant que ce séquestre aurait opéré la confis
cation des b ien s, elle soutient que le receveur du domaine
n’a pu faire une déclai'ation sur des biens acquis à la nation
et qui n’ont appartenu à madame de Talm ond que depuis sa
radiation définitive.
L a régie n’a proposé encoi’e aucun moyeu de défense sur la
déchéance qu'on lui oppose.
C ’est en cet état de choses, d ’après les faits et les moyens
réciproquement allégués, que madame de Talm ond dçmaude
l’avis de ses Conseils.
�I
( 6)
CONSULTATION.
\
V u ' le mémoire ci-dessus et les pièces y jointes,
L E COIS S El L SOU SSIG N É estime que la résistance de madame
de Talm ond aux prétentions de la régie est fondée sur des moyens
de droit et sur des considérations extrêmement favorables. L e
texte précis de la loi du 22 frimaire an 7 justifie les fins de
non-recevoir qu’elle oppose , et ne peut être éludé par les faits
dont on cherche à so prévaloir.
Discutons séparément les deux moyens.
Quant au premier , il est incontestable ,
En principe , que la régie encourt la déchéance pour le
paiement des droits de m utation, après cinq ans , à compter,
du jour du décès.
En fa it, qu’il s’est écoulé plus de cinq ans depuis le décès
de mademoiselle d ’Argouges jusqu'à l ’époque du premier
commandement.
La ré"k‘ ne peut nier le principe.
Elle n’échapperait à son application qu’en prouvant qu’il
11e s’est pas écoulé cinq ans depuis le moment où il y a eu
ouverture au paiement des droits.
C ’est ausii là le but de scs efforts.
�4**
(7)
Son système se réduit à confondre l'époque à laquelle il y
eut ouverture au paiement des droits par le décès de made
moiselle d ’ A rgougcs, et par la translation de la propi’iété sur
la tête de l ’iiéritière , avec l ’époque où madame de Talm ond
a été irrévocablement maintenue dans son titre de propriété.
Suivant ce système , le paiement des droits a dû avoir lieu
non à l ’époque du décès , mais à l’époque où H iérilier a été
définitivement rayé de la liste des émigrés.
L a régie le prétend a in si, parce qu’elle suppose que l ’ins
cription sur la liste a dépouillé madame de Talm ond de ses
biens pour en investir la nation.
D ’où l ’on conclut que les droits n’ont pu cire payés à la na
tion par ses propres agens, et qu’il n’a été, dès lors , nécessaire
de faire des poursuites qu’au moment où la nation s’est désinvestie de ces propriétés pour les céder à madame de T a l
m ond, réintégrée dans ses droits politiques et civils.
L e résultat de cette prétention est de faire établir
Que la prévention seule d ’émigration a opéré la confisca
tion •,
Q u’elle a dépouillé de leurs biens les propriétaires l’éputés
émigrés , malgré leurs réclamations solem uelles, leur radiation
provisoire , et l’adoption définitive de leurs réclamations.
Que la restitution des biens aux prévenus d ’émigration étant
un acte spontanée de bienfaisance, non un acte rigoureux et
indispensable de justice, les droits de l'émigré ne peuvent
commencer qu’à l'époque où la restitution a été consentie par
un acte public et irrévocable.
T o u t est erroné dans ce système , et principalement dans
l ’application que l'on veut en faire à la consultante.
Les faits particuliers de la cause la repoussent.
Les principes s’élèvent contre une prétention opposée aux
�(8 )
premières règles de la m orale, de l'équité , d ’une sage poli
tiq u e, et. aux dispositions littérales de toutes les lois rendues
sur la matière.
i°. Et , d’abord , il n’est point exact de dire en fait que
madame de Talm ond n’a été investie de ses droits et de sa
propriété q u ’à l ’époque de sa radiation définitive.
Il est certain , au contraire , que la propriété des biens lui
a été transférée par tous les moyens qui pouvaient en opérer
la transmission et la consolider.
A u jnoment di,i décès , elle appréhende la succession par
les actes q u i, suivant l’usage, investissent l ’héritier , constituent
son acceptation , consomment la m utation, et rendent le suc
cesseur passible de toutes les charges d ’une hérédité , eu même
tems q u ’ils lui en acquièrent tous les avantages.
Ces actes sont la réquisition du scellé, la confection de l ’in
ventaire, l ’acceptation expresse de la qualité d 'h éritière, la
prise de possession des biens de la succession.
Ces actes sont de telle, nature, ils sont si bien constitutifs
du droit de propriété, ils sont tellement irrévocables , indépendans des évènemens u ltérieurs, personnels à l’héritier, et
favorables aux tiers, que , dans aucun tems , madame de Tâlmond ne serait admise à répudier l ’hoirie qu’elle a ainsi ac
ceptée •, qu’elle est pour toujours tenue des dettes •, qu’elle n’eût
pas été admise à délibérer à l ’époque de sa radiation défini
tive -, qu’elle ne pourrait argumenter de l'interruption qu’elle
a éprouvée dans sa possession; en un m ot, que ses.droits et
ses obligations prennent leur source dans la transmission pri
mitive et réelle qui s’opéra à son égard au moment du décès
de mademoiselle d ’Argouges.
T o u t a concouru d ’ailleurs à confirmer cette investiture de
propriété.
�(9 )
Depuis le 9 brumaire an a , jusqu’en l ’an 6 , la terre Je
Mézières n’est point mise sous le séquestre^ quatre ans s’écou
lent sans que la possession de la consultante soit troublée.
Sa radiation provisoire , prononcée au mois de vendémiaire
an 4 , consolidé sa jouissance.
Dès 1793 , le ministre des finances avait défendu l’aliénation
de ses biens séquestrés. Cette m esure, que l ’on a malheureuse
ment meconuue pour ses biens propres , dont une grande.partie
a etc aliénée, nonobstant les défenses/indique assez l'opinion
q u ’avait l’autorité de l ’injuste prévention d ’émigration qui
pesait sur sa tête.
Cette mesuré m ettait, à plus forte raison, hors de la main
mise nationale les biens qui n’ avaient pas même été frappés
du séquestre.
'
jt.
El s i, en l ’an 6 , par suite de la mesure générale prise envers
tous les prévenus d ’émigration, les biens provenant de la suc
cession d ’Argouges furent compris dans le séquestre, la lettre
du ministre des finances , du 27 fructidor an 5 , qui provoqi a
cette formalité , annonça suffisamment qu’elle n’était que pro
visoire , momentanée, et à litre purement conservatoire.
Observons en passant qu’elle devait l’être , d ’autant plus que
nulle disposition de la loi du 19 fructidor an 5 ne l ’avait
ordonnée à .l’égard des prévenus porteurs de radiation provi
soire , et que cette disposition, purement ministérielle , déjà in
compétente et hors du cercle des attributions du m inistre, n’a
jaïnais pu acquérir la force et la stabilité d ’un acte législatif.
Peut-on dire , lorsque des faits de cette espèce sont constatés,
que madame de Talm ond n’a été investie de sa propriélé que le
premier floréal an 8 ? E li! comment pouvait-elle l ’être pour
que la transmission s’opérât d’une manière plus certaine, plus
solem uellc, plus légale? Eùt-elle été autrement investie de ses
a
�d ro its, et posséderait-elle à tout autre titr e , si le séquestre
n’eût jamais éié apposé sur ses biens? Lui contesterait-on au
jourd’hui sa qualité d ’h éritière, son acceptation form elle, son
investiture de d r o it, et sa possession de fait ?
Les évènemens ultérieurs ont pu troubler sa jouissance , mais
ils n’ont pu effacer un fait positif. Ce qui a existé peut cesser
d ’ètre ; mais rien ne peut ’aire que ce qui fut n ’ait pas existé.
E t , dès lors , tout ce que l ’on peut d ir e , c’est que la posses
sion de madame de Talm ond a été interrompue-, que son droit a
été suspendu ; qu’il lui a été momentanément ravi pour lui
être rendu ensuite ; qu’elle a été privée des biens de la suc
cession d’A rgouges, comme elle l’a été de ses biens personnels,
dont on ne peut pas soutenir que la propriété ne lui fût plei
nement acquise avant le séquestre.
Cela étant, le tems de la déchéance a nécessairement couru
au préjudice du fisc*, et pour le dém ontrer, il nous reste à éta
blir que l ’apposition du séquestre n'a pu suspendre la prescrip
tion. C ’est le moyen principal de la légie qu’il faut attaquer
dans sa b ase, et dans toutes ses conséquences.
2°. Dans le système de la régie , la déchéance ne serait
point encourue , parce qu’on suppose que la nation a été pro
priétaire des biens de mademoiselle d ’Argouges jusqu'au
premier lloréal an 8 , époque de la radiation do madame de
Talm ond.
Nous disons , au contraire , que la propriété et la possession
de madame de Talm ond ont pris leur date au moment du décès ;
mais ou ne peut disconvenir que cette possession a été inter
rompue de fait pendant le séquestre.
L a question se réduit alors à savoir si le délai de la dé
chéance n'a commencé qu’après la main levée du séquestre,
ou si l’apposition intermédiaire du séquestre a interrompu les
�•M l
( ” )
délais -, si madame de Talm ond n ’a jamais acquis la pro
priété , ou si elle en a clé dépouillée par l’effet de la mesure
qui lui en a enlevé momentanément la possession.
'
Sous les deux rapports , la question est la même -, il s’agit tou
jours de savoir si la main mise nationale sur les biens d ’un pré
venu d ’émigration est une véritable confiscation.
Nous sommes bien loin de le croire; et pour démontrer le con
traire , il suffit d’exposer les principes reçus de tous les tems sur
les confiscations, les dispositions des lois relatives aux émigrés ,
la jurisprudence établie sur ce point contre la régie , la propre
opinion de la régie elle-même, manifestée par la conduite de scs
agens.
D ’après les principes, il ne peut y avoir lieu à confiscation
qu’autant qu’il y a prononciation d ’une peine contre le coupable,
emportant mort civile.
O r , il est constant que la mort civile n ’a lieu qu’au moment
de la condamnation prononcée et exécutée , ou après les cinq
ans de la contumace. C ’est cc que nous attestent tous les auteurs ,
et notamment Le prêtre , cent, i , cliap. 84 ", Lacoinbe, en ses
matières crim inelles , part. 1 , n°. 24 ; et Lebrun , T ra ité des
S u ccessio n s, liv. 1 , chap. 1 , sect. 3 , qui rapporte à ce sujet un
arrêt soleinncl du parlement de Paris , du 24 mars i 6 o 3 .
)
On connaissait bien , dans la jurisprudence française, des
cas où la morl civile était encourue par le seul fa it, lorsqu’il s’a
gissait, par exemple ,.des crimes de lèse-majesté , de d u el; de
parricide , etc. On pensait, à cet é^ard, non que la conviction et
le jugement ne fussent toujours et dans toutes les circonstances
d ’absolutinécessité, mais seulement que l’accusé étant convaincu,
les effets de la mort civile remontaient au jour où le crime avait
�( 12 )
été commis, et que la mort iüême (lu coupable ne pouvail le sous
traire à un jugement.
De là , cet!e maxime établie par Loyscau , en son T raité des
O ffices , liv. i , cliap. i 3 , n°. 5 o .• qu ’en France nul n ’est in
fâm e ipso jure •, mais c ’ est une règle "endraie que tout ce
qui avait heu ipso facto , et ipso jure au droit romain , re
quiert à nous sentence de'claratoire.
D e là , les règles éïablies par l'ordonnance de 1670, titre 2 2 ,
poxir.faire le pi’ocès au cadavre ou à la mémoire de l'accusé d'un
crime capital.
Ces principes sont fondés sur les premières inspirations de l ’é
quité naturelle , consacrée par le droit positif. Une accusation
ne peut jamais opérer l’eiFet d ’une conviction légale. Le soupçon
qui peut atteindre avec une égale facilité et le criminel que la no
toriété publique accuse, et l ’innocent que la haine , la calom nie,
et des indices trompeurs peuvent injustement diffamer ; ce soup
çon , qui provoque les recherches, qui appelle la justification, qui
autorise les rigueurs , qui nécessite un jugem ent, n’est pas luimême un titre absolu de condamnation, et par conséquent un titre
de peine.
Aussi voyons-nous que toutes les lois ont protégé , avec une
égale sollicitude , le maintien de l ’ordre public et l ’élat civil des
citoyens. Elles poursuivent l’accusé , mais elles ne flétrissent que
le coupable. Elles impriment à l’opinion définitive du magistrat
le caractère d elà vérité, mais elles autorisent lon^-’. emsle doute.
L e jugement môme reste sans effet, si l ’accusé meurt avant son
exécution. L ’absence du coupable appelle aussi dos mesures d ’in
dulgence , et le tenis que la loi lui donne pour se représenter et
sc défendre appartient tout entier aux présomptions de l'inno
cence.
�, ( ,1i 3 )
Ce sont les mêmes principes de raison et d ’iiumanilé qui ont de
tous les tems ré.,i les questions relatives aux coniiscations.
L à législation romaine a'jsur ce po^nt des règles que nous
avons adoptées , comme les érhànations de la sagesse , qui fit ap
peler le droit romain la raison écrite.
Un accusé était absent : ses biens étaient annotés : mais s’il se
représentait, et était absous , ses biens lui étaient rendus. L . i ,
et 5 fTT. de requir. v e l absent. damnai. — h . i , a et 4. — Cod. de
requir. reis.
,n
1
Pendant cette main mise de l ’autorité publique, tout était en
suspens ; et bien loin de considérer cette'mesure comme une
pein e, la loi ne la présentait elle-même que comme une invitation
à l ’accusé de venir se justifier : Cu n absenti reo , nous disent les
lois, gravia crimina intentantur, sententia festin a rin o n s o lc t,
sed annotari, ut requiratur , non utique ad pœ nàhï , sed ut
potestas c i sit purgandisc', si-potuerit.'
Aussi conservait-il tous les caractères du citoyen et du père de
famille pour les biens dont le fisc ne s’était pas donné l ’adminis
tration.
Aussi, la prescription , qui ne peut jamais avoir lieu lorsqu’il
s’agit d ’une confiscation absolue , avait-elle lieu pour les biens
sujets à Y annotation, et que le fisc n'avait pas revendiqués,
ainsi qu’on le recueille de la loi 2 , § 1 , cod. de requir, reis.
Cette annotation n’était que l ’eflet de l'absence , et ne précé
dait jamais la condamnation , quand l’accusé se présentait pour
se défendre.. Dans ce cas , la loi lui laissait l’administration de
tous ses biens : ni reatu constïtutus bona sua adrninislrare po
te si' ; eique debitor rectè bond fu ie j olvit. — L. 46 , § 6 , ff. de
ju re fisci.
|
¿Tous «es actes étaient valides à l ’égard des tiers.
�( *4 )
L e débiteur se libérait valideraient en ses mains. L . 4 *, ff. de
solut.
L e créancier avait le droit de le ppursuivre. L . 4 ^ , ff. cod.
Ces maximes ont é té , comme nous l ’avons d it, adoptées par
notre jurisprudence, et appliquées surtout aux confiscations.
Il a toujours été l'eçu parmi nous que la confiscation n ’était
acquise d ’une manière définitive et irrévocable qu’en vertu d ’une
condamnation prononcée et meine exécutée , tellement que les
biens du condam né, mort dans le teins intermédiaire à Ja pro
nonciation et à l’exécution , n ’étaient point soumis à la confisca
tion. C ’est ce qu’ont jugé les arrêts rapportés par Larocheflavin ,
liv. 6 , titre a 3 , art. 5 , et par M eyn ard, ltv. 4 t cliap. 52.
L ’article 28 de l ’ordonnance de Moulins , en déçlarant le con
dam né, par jugem ent, dépouillé de ses biens, voulait cependant
que les cp\iiiscataires ne pussent en. disposer pendant les cinq ans
de îa contumace. Alors seulement, et après l ’expiration de ce délai,
la propriété était consolidée dans leurs mains.
L ’ordonnance de 1G70 a été plus loin encore :
L ’article 3o du titre 17 veut que, pendant les cinq ans de la
contumace, les.confiscataircs se bornent à percevoir les fr u it$ et
revenus des biens des condamnés, et n e puissen t s'en mettre en
possession.
Par l’article 3 i , le législateur s’interdisait à lui-même le don
de tous les biens confisqués pendant le même délai.
E t , enfin , l ’article 3 a veut qu’après le délai de la contumace
les confiscataires 11e puissent se mettre en possession effective des
biens qu*après s*être pourvus en ju stice pour en obtenir la per
mission , et après avoir fait faire un procès-verbal de l ’état de
tous les biens confisqués.
Notre législation a môme été sur ce point plus indulgente que la
loi rom aine, qui maintenait la confiscation, après l ’exp rU u m
�( 15 )
du délai d ’un an , lors même que l ’accusé parvenait à se faire
absoudre , post sententiam latam et cinnam, in pcenam contumacice.
Mais de toutes ces lo is, dont les différences sont peu impor
tantes à relever i c i , résultent ces points certains et fondamen
taux pour toutes les législations d ’un peuple sage , humain et
éclairé:
Q u ’il ne peut y avoir de mort civile sans un jugement ;
Q u’il ne peut y avoir lieu à confiscation sans qu’il existe de
mort c iv ile ,
E t , par conséquent, sans qu’il soit intervenu un jugement qui
applique celte peine.
C ’est ce que Loyseau nous atteste dans son T ra ité des Offices,
liv. 1 , chap. i 3 , n°. 92 et suivans.
1
C el auteur, examinant ’toutes les questions relatives à l ’accu
sation qu’on peut intenter contre un officier, soutient que nonseulement la confiscation de l ’oflîce 11e peut être que la suite
du jugement , mais il nous donne aussi pour maximes :
i°. Que la suspension même de l ’officiér pendant l ’accu
sation n’entraîne pas note d]infam ie, e t , à plus forte raison ,
privation des droits civ ils , dans lesquels il faut mettre au pre
mier rang le droit de propriété;
3°. Que l ’infamie résultant d’une amende 11e résulte pas de
la peine en elle-même , mais de la conviction acquise par
la condamnation : non milita , sed causd , dit la loi , ff. de
pœ nis.
Ces principes , applicables à toutes les espèces de délits , ne
Sont point étrangers à celui de l ’émigration.
M ille circonstances peuvent ¡.jouter à la sévérité des peines
contre ce délit politique. Rien ne peut en rendre l’application
arbitraire, barbare, et contraire aux premiers sentimens de la
�( '6 )
morale et de l ’humanité. L a poursuite de ce délit egt subor
d onnée, .comme celle de t us !es a u t'e s .a u x formes protectrices
de l'innocence, aux règles de prudence et de circonspection, q u i,
sans blesser, les intérêts d ’un gouvernement qui veille à sa con
servation , respectent et protègent les droits de tous les citoyens,
dont eljes sont la garautie.
Nous ne devons pas aller chercher dans les anciennes législa
tions les règles qui doiyent nous gouverner aujourd'hui sur
cette matièip ; nous les trouverons toutes dans les lois rendues
depuis 1792.
Ce n’est pas que les lois antérieures ne pussent nous offrir des
principes d'une vérité éternelle, et des exemples utiles à ap
pliquer.
Nous verrions dans les états libres des tems anciens l ’érrçigrar
tion d’un citoyen rangée au nombre des droits attachés à sa* qua
lité d ’honune libre.
Athènes donnait à ses citoyens le droit d ’examiner les lois et
les coutumes , de s’éloigner et d ’emporter leurs biens,
,
Rome république proclam ait, par l ’orgaue de C ic é ro n , ce
droit de tous les citoyens, comme la plj.is belle prérogative des
membres d ’un état conseryateur des véritables maximes de la li
berté : O Jura prœclara.... ne quis in civitate maneat invitus.
Ou sent aisément qu’à ces époques la législation ne pouvait
que marcher d'accord avec les maximes de la politique, et que
des peines telles que la mort, civile et la confiscation ne pou»
vaient être appliquées à l’usage d ’un droit naturel, respecté çt
autorisé.
M a is, lors même que les principes politiques changèrent avec
la constitution de l ’état , les peines prononcées contre l ’éipigration ne furenj; jamais étendues jusqu’à entraîner, la. mort çivile de l ’absent.
<
1
�4
<i>>
( «7 )
Même , en distinguant l’émigration p er fugam , qui n’était
autre chose qu’un changement de dom icile, de la fuite vers
l ’ennem i, qui constituait la trahison et l’état de révolte , malo
consilio et proditoris animo , les lois n’avaient prononcé, dans
l ’un et l’autre cas, que la privation des droits de cité, civitatem
etfam iliam . C ’était la peine connue, dans le d roit, sous le nom de
mediam capitis diminutionem , qui n’entrainait d ’autre consé
quence que celle de la peine connue sous le nom de aquœ. et
ignis interdictio.
Rome , maîtresse du monde par ses armes et par ses lois , ne
comptait pas le nombre de ses ennemis. Sa majesté ne pouvait
être offensée par l ’abandon de quelques individus , dont la dé
sertion lui paraissait excusable , si elle n’était pas crim inelle, peu
redoutable, si elle était le fruit de la rebellion , e t , dans tous les
cas , indifférente pour le salut du corps politique. Elle se bornait
à ne plus regarder comme citoyen celui qui voulaitcesser de l ’être,
même celui qui se présentait comme son ennemi. M ais, dans toutes
les hypothèses , la privation du droit de cité n’allait point jus
q u ’à dépouiller un particulier de la faculté d’acheter, de ven dre,
de donner et de passer tous les contrats qui dérivent du droit des
gens. C ’est ce qu’annonce clairement la loi i 5 , ff. de interdict. et
relegat ; et c'est ce que Cujas a savamment démontré dans sa dis
sertation 9 , liv. 4 >sur la loi 19 , $ 4 * ^ de Capt. etc.
Ainsi , dans le droit romain , point de mort civile dans le cas
d ’émigration reconnue et de rébellion ouverte. A.plus forte rai
son ne l’eût-il pas autorisée sur une simple accusation, sur des
soupçons vagues , et malgré les réclamations du citoyen accusé
de de ection ou de révolte contre son pays.
Notre ancienne législation française 11e contient aucune loi
précise' contre l'émigratlon. C e n’est pas que des exemples, fa
meux n’aient présenté au législateur cette importante question à
3
�résoudre , et que des circonstances difficiles , telles quo celles- qui
suivirent la révocation de l ’édit de Nantes , n ’eussent dû appeler
sa sollicitude et môme sa sévérité. «Mais , comme l’observe M. de
« Bret dans scs plaidoyers / liv . 3 , décis. 7 , il est permis aux
« Français d’aller chercher une meilleure fortune , en quoi con« siste principalement la liberté naturelle des hommes -, et de là
« vient (ajoute ce magistrat) que les anciennes formules des con« cessions qui se faisaient de la liberté, contenaient ces paroles ex« presses : eam denique pergat partent quantumque volens,
i< elcgcrit.y>
Aussi tous les auteurs nous attestent que nulle peine n’a ja
mais été portée en France contre ceux qui vont demeurer en
pays étranger. On peut consulter sur ce point B acquet, T raité
du droit d’A u b a in e, chap. 4 ° > n°. 4 > C h o p in , du D om aine
de la F r a n c e , liv. 2 , tit. 2 , n°. 29-, P ap ou , not. 3 , liv. 6-,
titre des L ettres de N atu ralitê , etc. , etc.
Cependant, lorsque, dans des cas graves , le ministère public
s*est élevé contre des Français accusés de s’être rendus coupa
bles de rebellion et de félonie , en passant à l ’ennem i, 011 a tou
jours tenu en principes que l ’accusation seule, que les jugemens
mêmes qui ordonnaient des saisies et prononçaient des décrets
de pi'isc-dc-corps, ne pouvaient entraîner ni mort civile , ni
confiscation -, c’est ce qui fut reconnu dans l'affaire célèbre du
cardinal de Bouillon, lors des arrêts rendus en 1710 et 1711.
Les biens du cardinal avaient été saisis, et tous ses revenus sé*
questrés ; mais 011 regarda ce séquestre, non comme une confis
cation absolue , qui ne pouvait être le résultat que d’un juge
ment définitif, mais comme une simple saisie-annotation , dont
reflet , suivant le droit f n’est autre que celui d'une mesure
provisionnelle, conservatoire, qui 11e dépouille pas de la pro
p riété, et ne la transporte point au saisissant) et observons ca-
�4 ^
.
( «9 )
core que , dans ce cas , il ne s’agissait pas seulement d ’un
simple abandon de domicile , d ’ une fuite momentanée que
d e malheureuses circonstances pouvaient justifier ; il s’agissait
de la prévention d ’un crime de lèse-majesté , pour lequel la
confiscation remonte au teins du délit.
Ces maximes tutélaires de l ’innocence, ces lois qui ne sont
que l ’expression de la justice naturelle, ne sont point étran
gères aux dispositions que les évènemens de la révolution out
entraînées contre les émigrés. Notre b u t, en rappelant des vé
rités reconnues par tous les gouvernemcns, des principes essen
tiellement attachés à la législation de tous les peuples civilisés, -a
été de démontrer que tel est leur em pire, q u e , malgré la sé
vérité de notre code pénal contre les ém igrés, on ne les a pas
même méconnus en France à une époque où le choc de toutes
les passions exagérées devait étouffer le langage de la raison
et de la justice.
Les lois rendues depuis 1792 contre les émigrés sont extrê
mement rigoureuses. Mais nous osons dire qu’elles le paraissent
bien davantage encore par la manière dont on a souvent voulu
les exécuter , que par leurs dispositions littérales prises dans
le sens qu’elles doivent a v o ir, et dans les conséqueuces qu’elles
doivent entraîner.
L a régie des domaines en donne dans cette cause un dé
plorable exemple : elle veut faire juger par les tribunaux que
le séquestre apposé sur les biens d ’un prévenu d ’émigralion
doit avoir le même effet qu’un jugement de confiscation ) de
telle sorte qu’en cette matière l’accusation seule doit être assi
milée à un jugement de p ein e, et devenir un titre de convic
tion.
C e système résiste, comme 011 le v o it, à toutes les lois
naturelles et positives ; mais il est diamétralement opposé aus*
�aux lois de la m atière, qui sc trouvent précisément cîdquées,
à cet égard , sur les usages de tous les lems et de tous les lieux.
L a loi du 27 septembre 1792 fut la première qui prononça
la confiscation et la vente des biens des émigrés.
L ’article 6 de celle du 38 mars 179^ définit ce que l’on
entend par émigrés : elle annonce que ce sont les Français qui
ont quitté le territoire de la république depuis le premier
juillet 1789, et ceux q u i, absens de leur domicile, ne justifie
raient pas de leur résidence en France depuis le 9 mai 1792.
L ’article premier du titre premier de la loi du a5 brumaire
an 3 contient les mêmes dispositions. Elle prononce ensuite les
mêmes peines contre les coupables.
Mais de ces dispositions générales contre les émigrés , de la
fixation des mesures répressives ou afllictives déterminées contre
•un délit caractérisé par la lo i, il ne s’ensuit pas que leur applica
tion ait dû être faite d ’une manière absolue, arbitraire, sans exa
men , et sans aucune espèce de recours de la part des individus in
justement accusés. On 11e peut pas le dire davantage des lois sur
l ’émigration , qu'on n’oserait le soutenir de toutes les lois pénales
q u i, en prononçant sur tous les crimes qui peuvent troubler
l’ordre social, n ’ont jamais entendu que leur rigueur s’éten
drait , ipso fa cto et sans conviction , sur tous les malheureux
qu’une accusation capitale menacerait de leur application.
T o u t ce qui résulte des dispositions qui ont prononcé les
peines de bannissement, de mort civile, de confiscation contre
les émigrés , c’est que ceux qui seraient reconnus coupables d ’un
délit jusqu’alors inconnu et alors caractérisé, subiraient le sort
qu’ ils auraient encouru par leur désobéissance.
C e «pie l’on peut en conclure encore, c’est que , dans la pour
suite de ce délit, la loi a manifesté une sévérité plus grande que
pour tous les autres. Notre code pénal n ’oifrait point encore
�A«) >
'( 21 )
d’exemple d ’une saisie des biens de l’accusé , à l ’instant même
de l ’accusalion , et d ’une privation de ses revenus pendaut l ’ins
truction du procès : on n'avait jamais prononcé l ’interdiction pro
visoire des actions civiles contre un prévenu constitué in rcatu.
M ais, de ce que les mesures dans la poursuite ont été plus sé
vères , on ne peut en induire que leurs effets doivent être ab
solus et assimilés à ceux d ’un jugement contradictoire, sans
lequel il ne peut y avoir de conviction légale, et de condam
nation définitive.
Les lois mêmes que l’on invoque établissent, au contraire,
comme positives ,
L a possibilité d ’uue accusation injuste ;
L a faculté de réclam er;
L a réintégration de l ’accusé dans tous ses droits politiques et
civils provisoirement suspendus.
La loi du z 5 brumaire an 3 contient un titre exp rès, re
latif a u x réclamations contre l ’ inscription sur la liste.
Les articles 17 et 18 du titre 3 fixent les délais dans les
quels les réclamations doivent être faites.
L ’article 20 porte qu’/Z ne pourra être procédé à la vente
des m eubles et immeubles d es citoyens portés sur des listes
d’ émigrés , avant le jugem ent de leurs réclamations fa ites
en terns utile.
Les articles 2 1 , 22 et 23 déterminent le mode de jugement
sur les réclamations.
«
«
«
«
L ’article 26 veut que «les décisions du comité de législation soient exécutées sans, recours , soit qu’elles prononcent
la radiation , soit qu'elles renvoient aux tribunaux criminels
pour l’application des peines , soit qu’elles l’ejelleut les demandes. »
�.W
*\
( aa )
Les articles 27 et 28 déterminent le mode de publication
des jugeinens de radiation.
L ’article 3o et autres statuent sur les réclamations formées
à l ’époque de la promulgation de la loi.
L ’article 33 ordonne la réintégration dans leurs biens de ceux
qui seront rayés.
'
Enfin , l ’article 34 assure même le remboursement du capital
des ventes faites dans l ’intervalle, à ceux qui n’auraient pas ré
clam é en teins utile , et qui n’auraient pu , par conséquent, jouir
de la suspension provisoire ordonnée par l ’article 20.
Et ce n ’est qu’après avoir ainsi réglé toutes les mesures re
latives à la défense des accusés, au jugement de leurs récla
mations , à la conservation, de leurs droits pendant l ’instruc
tion , que la loi du a 5 brumaire s’occupe du tableau des peines
dans un titre subséquent. C ’est là que } présupposant que toutes
les formes ont été remplies , elle fixe le sort des individus q u i,
par un jugement contradictoire , ou par la conviction résultante
de la contumace encourue par leur silence dans les délais pres
crits , se trouvent soumis à la peine qui devient alors l ’effet de
l ’application de la l o i , application expresse ou tacite, mais tou
jours directe , positive et individuelle.
Comment peut-on soutenir , après des dispositions aussi pré
cises , que l’ inscription seule sur la liste a opéré le même effet
que celui d’ un jugement? La loi ne s’est-elle pas expliquée assez
clairement ?
L ’inscription sur la liste n ’est par elle-même qu’une accusa
tion , d ’autant moins grave en s o i, qu’elle n ’a pas présenté au
dénonciateur les risques qu’il court dans les accusations ordi
naires ; et qu’une triste expérience nous a prouvé que les pas
sions haineuses ou spoliatrices avaient fait surgir plus de dénon-
�( *3 )
cîatîons fausses, que l ’amour de la patrie n’en a produit de
fond ées.
Mais cette accusation établie nécessite un jugem ent, d’après le
texte même de la l o i , et jusque-là le sort de l ’accusé a resté en
suspens.
O r , le confiscalaire, définitivement investi, a ie di'oit d’aliéner,
et on ne songe pas à le lui interdire.
L a loi nous a dit que l ’on jugerait les réclamations faites dans
le délai lixé , et que toutes les mesures de saisie , séquestre, etc.,
ne seraient que conservatoires , puisque l ’aliénation des biens resr
terait suspendue.
Elle a dit qu’en cas d ’absolution le citoyen absent resterait
dans la possession de ses biens. O r , une confiscation provisoire
n’est pas une véritable confiscation translative de propriété. L e
droit de propriété ne peut pas rester en suspens ; il faut qu’il se
fixe et se consolide i o r , ce n’est pas donner la propriété que de
restituer.
L a loi a annoncé que l ’autorité compétente ne condamnerait
que ceux qui seraient convaincus , ou ceux contre lesquels leur
silence ou le refus de comparaître tiendraient lieu de conviction.
N ’est-ce pas dire assez que , jusqu’au ju gem ent, tous ceux
qui ont comparu, obéi à la lo i , réclamé leurs d roits, justifié
leurs plaintes , ont pu être accusés, mais n’ont été ni convaincus ,
«i jugés?
•;
N ’est-ce pas dire assez que celui sur le sort duquel il n’a pas
été statué , ou vis-à-vis duquel il n’existe qu’une prononciation
provisoire, subordonnée à une décision définitive, n ’a pu en
courir la p ein e, qui 11e serait que le résultat de la conviction
opérée par le jugement ou par la contumace ?
N ’est-ce pas là avoir consacré tous les principes reçus en ma
tière d ’accusation ?
�*^<V'
( 24 )
N ’esl-ce pas , en fin, avoir conservé aux citoyens leur existence
civ ile , la propriété et le domaine incorporel de leurs biens , tant
qu’ils n’en ont pas été définitivement dépouillés par le voeu du
juge , ou par la présomption de la loi , présomption que ne peut
jamais suppléer celle de l’homme , et surtout de l ’homme qui ac
cuse , et qui ne peut être à-la-fois accusateur et juge?
Toutes les lois postérieures n’ont rien changé à ces principes
gravés au coeur de tous les hommes , avant que le législateur les
consacrât dans ses codes , principes inaltérables , qui traversent
les siècles et le torrent des passions humaines, et surnagent audessus d ’elles.
Il est important même de remarquer que, lorsque la loi du 19
fructidor an 5 établit, contre les émigrés rayés provisoirement,
des mesures extraordinaires, 'elle garda un silence absolu sur le
séquestre de leurs biens, dont la jouissance leur avait été rendue,
en attendant leur radiation définitive. Une secousse révolution
naire exaspéra tous les esprits, et éveilla toutes les défiances. Les
dispositions sévères contre les individus furent reproduites, mais
les principes furent respectés. ’
::
/l;
L ’opinion seule du ministre en ordonna autrement. Mais alors
même q u e , par sa circulaire du 37 fru ctid or, il alla plus loin
que la l o i , et qu’il disposa du sort et de la subsistance de tant
d ’infortunés , il sentit bien qu’il ne lui appartenait pas de pro
noncer une peine , et que sa volonté 11e pouvait s’exprimer dans
les formes législatives ou judiciaires. C ’est sous íes rapports ad
ministratifs qu’il annonça cette mesure. Alors même l ’intérêt na
tional parut moins l ’occiiper que le sort des individus que la
loi c o n d a m n a i t à une absence et enlevait au soin de leurs pro
pres affaires. C e ne fut point à titre de peine , mais comme'une
mesure d’ordre et de protection pour les prévenus, qu’il ordonna le
séquestre : il voulut faire remplacer leur gestion par celle d ’un !
�( 2 5 }
préposé du gouvernement'; nwis il se garda bien de prononcer
une saisie , moins encore une confiscation que ‘là loi ne pro
nonçait pas.
Ne jugeons pas ici la ÿégularité de cette m esure, sa justice
et ses'résultats ; ne considérons que l’opinion qui l’a dictée, et
les motifs qui1,-servirent à l ’étayer. Ils prouvent suffisamment
que le séquestre apposé en l ’an 6 , aii préjudice des émigres
en réclamation , ou-rayés provisoirement , n ’a jamais été consi
déré comme une confiscation qui dépouillât absolument le con
fisqué de sa propriété , pour en investir le confiscataire.
»
T elle est la position de la consultante , et l’application de
tous nos raisonnemens Se fait facilement à sa cause.
I
Madame de Talm ond était inscrite sur la liste des émigrés.
Cela n ’empêcha point sa mise en possession des biens de
la succession d ’Argougcs, et sa jouissance: paisible pendant quatre .
ans. •' *•* J • '
.
- ;•
i: ■
' ' •'
" ■*
Elle avait réclamé en tems utile.
i>
’■Une défense particulière d ’aliéner ses biens lui avait appliqué
honiinàtivcment la disposition générale de la loi. ' •
: iwi
Sa [radiation provisoire fut prononcée. ■-g»
»nos
Scs biens lui furent rendus.’ 1 iJ;
J/iob ;;ir- „ ; j 'if-:
“ Lorsque le séquestre ordonné par la lettre dû ministre soumit
à l'annotation ceux de ses biens qui n ’en avaient jamais été
frappés ,j : il est absurde de-soutenir que la nation s'cii em para,
et en a joui comme propriétaire jusqu’au moment de la radiatioii définitive, et qu’elle ne les’ a' rendus à cette éjioquc
que |iàr lun don dèrenu Jlé fprincipC de Jla propriété de la con
sultante. r'
¡- •_«[ *1!t'.IÎ. f’fr: : , • ,.Vi
Là' régie ne pourra jamais le soutenir d?après les lois que
nous venons d ’examiner. Elles résistent trop1à cette ùnlerprétation forcée.
Ifo J.'i'ib o t u io w i o'i'V" *„•*> i;l
�v y v -n ,
( 26 )
Mais elle cherchera â sc prévaloir sans doute d'une dispo*
sition de la loi du 22 frimaire an 7 , dont il est facile d ’écarter
l ’application.
L ’article 24 de celte loi porte que « le délai de six mois
« ne courra que du jour de ,1a mise en possession , pour la
« succession d ’un absent •, celle d ’un condamné, si ses biens sont
« séquestrés -, celle qui aurait été séquestrée pour toute autre
« cause y celle d ’un défenseur de la patrie , s’il est mort en acn tivité de service hors de son département ; ou enfin celle qui
« serait recueillie par indivis avec la nation. »
On voudra conclure de cet article que , puisque le délai
pour l ’héritier n’a couru que du jour de sa mise en posses
sion , la prescription contre la régie n ’a pu courir que de la
même époque.
Voici notre réponse:
i°. Si la régie réduit la question à ce point, elle recon
naît donc la justice de tous les principes que nous venons
d ’établir. Il est donc vrai que le séquestre ne peut être par
lui-même assimilé.à une confiscation , et que l ’on a eu tort de
soutenir que les agens de la nation n ’ont pas dû se faire payer
sur des biens dont la nation elle-même était propriétaire. L e
séquestre, d ’après cet article , lie deviendra une cause d ’in
terruption que parce que la loi du 22 frimaire l ’aura ainsi
déterm iné, et non parce qu’il a dépouillé le prévenu d’émi
gration.
.(
' . n; |
Mais alors il s’agit de savoir si cet article s’applique vérita
blement aux délais de Iti prescription j car si cela n ’est, point , la
régie , abandonnant le principe général qu’elle avait d ’abord
établi 4 ne pouvant'»plus soutenir que les mots séquestre et
confiscation sont (-synonymes , n’aura pas même à sou appui
la dci'nière ressource dont elle se prévaut.
�J
( *7 )
O r , nous pensons que les dispositions de la loi du aa fr i
maire ne s’appliquent nullement aux délais de la prescription *,
et la conséquence que la régie veut en tirer est également con
traire à la lettre et au sens de cette loi.
w
Quant au texte de la lo i , il est absolument muet sur la pres
cription que la régie peut encourir par son silence. L ’article 24
ne statue que sur lçs délais dont jouira l ’héritier séquestré •, il
détermine seulement que ces délais ne prendront cours que du
jour de sa mise en possession effective. 11 ne prononce nulle
ment sur les obligations et les droits de la régie-, rien n’indique
que la loi ait eu pour objet de statuer sur ce p o in t, et cepen
d a n t, dans le système adverse, et d ’après le principe de récU
.procité dont on veut faire une conséquence nécessaire de la lo i,
il eût été tout simple d’ajouter que les délais pour la pres
cription contre la régie ne com menceraient égalem ent à cou' rir que du jo u r de la mise en possession d e l ’h é r itier , et
seraient suspendus pendant le séquestre.
L e législateur ne l ’a pas d it, parce qu’il n’a pas voulu et n’a
pas dû le dire 5 et c’est en le démontrant ,qiie noya prouverons 5
que le raisonnement de la régie est en contradiction avec le sens
de la lo i, et le but qu’elle se propose. — Tâchons de nous expli
quer clairement.
,
A u dpçès dç chaque citoyen un droit de mutation est acquis
au trésor public.
^
,
D e l'établissement dp ce droit naissent diverses obligations
prescrites par la lo i, et qui doivent être remplies dans les formes
et sous les peines qu’elle a déterminées.
Elle impose aux héritiers l ’obligation de déclarer la valeur
des biens recueillis, d ’en payer le droit, et de faire cette dé
claration et ce paiement dans un délai de six mois^à peine de
6uppoi’ter uu double droit. !
-ny>n »; in.
j
�I '•'* w
(28 V
Elle impose à la régie l’obligation de demander le paiement
des droits dans- un délai de cinq ans , à peine cl.e déchéance.
Ces obligations sont distincles *indépendantcS'l’une de l ’autre;
elles ont également pour but d’assurer le paiement1des droits.
Mais l ’une prononce une peine contre le redevable ; l’autre lui
fournit une exception contre le lise. L a raison en est simple :
l’une est le fait du redevable lui-même , tenu de fournir la décla
ration ; l'autre est ld : fait de la ré g ie , tenue de le poursuivre.
L e redevable et l ’agent du fisc ont chacun les moyens de se
conformer à la loi :
-I;
Le prem ier, en sacrifiant une portion de la propriété qu’il
acquiert à la libération d’une charge qui la grève ;
Le,.second, en'faisant des poursuites dans le tems requis ,
et en usant de tous les moyens de contrainte que la loi met à
sa disposition.
'
".rv
.
On voit assez q u e , dans le cours ordinaire des choses, ces
deux obligations n’ont aucune dépendance/aucune liaison en-tr’elles , et qu’il est’ possible de les gouverner par des principes
qui ne soient .pas les mêmes.
> 1
;
L e cas est arrivé qiie des biens ont été momentanément en
levés à leurs propriétaires , et mis dans les mains dé la régie >'
à titre provisoire, par forme de garantie et de nantissem ent,
pour les administrer et jouir des fru its, au lieu et place des
propriétaires , et jusqu’à leur réintégration.
.
"'{ 1
n <:
■Nous avons déj'ufprouvé ([u(iccllc\saisic-anno(ation n ’a pu
dépouillerlle propriétaire pour''investir la nation : N e c aufferre
proprielatcm , nec transferre dominiutm
*>
Les individus ainsi dépossédés sont donc restés propriétaires,
mais sans jouissance de leurs biens.^ i
•>
'
'
C ’est.à foison dei;cctte circonstance extraordinaire , et dans
l'objet de venir ù leur secours, que lu loi-du 22 frimaire a.été
rendue.
�( *9 )
L e .législateur a senti qu’il n'élait pas. juste
D e . soumettre au paiement des droits des particuliers privés
de leurs biens -,
.
;
D e faire courir un délai fatal contre des citoyens dont les ac
tions civiles étaient suspendues •,
D e prononcer des peines contre celui pour lequel la privation
même provisoire de ses biens était déjà une peine assez forte.
C'est à ces propriétaires sans action , sans moyens et sans
qualité que l ’on a appliqué l’axiome de droit : Contra non
valentem agere non currit prcescriptio.
Mais* les mêmes considérations n’ont pu faire appliquer cette
exception à la régie.
L ’action de la régie a toujours été ouverte , et n ’a jamais élé
suspendue, ni de fait ni de droit.
Cette action n’est point une action directe et personnelle
contre l’heritier ; elle est réelle , hypothécaire et privilégiée j
elle s’exerce sur les biens, dans quelque mains-qu’ils viennent
à passer.- On ne peut pas dire qu’elle est vaine , parce que le re
cours contre la personne peut être illusoire ; elle est toujours
utile, parce que l ’objet sur lequel elle porte ne peut lui échapper.
Elle prend sa source dans un droit certain et incontestable.
Il est dès-lors bien évident que le séquestre, qui a pu devenir
pour le propriétaire un motif de ne pas payer , et autoriser une
exception en sa faveur, n’a'pas dù , par cela seul, introduire la
même exception au profit de la régie , qui a du et pu se faire
payer , ou du moins en former la demande.
Elle l ’a du , parce qu'il n’y avait aucun inconvénient à le
fa ire , et aucun m otif pour l ’en empêcher. La propriété était
grevée du paiement des droits : cette propriété a-t-elle dù rester
dans lçs mains de la nation ? La formalité du paiement des droits
n’était plus qu’une mesure d ’ordre et de comptabilité : devait-
�i
( 3o )
elle retourner à son premier propriétaire? Les droits se trouvaient
acquittés à sa décharge, sans dommage pour l u i , et .par le fait
du représentant que la loi lui avait d onné, et qui devait ad
ministrer en son nom , comme il aurait administré lui-même.
El , dans le fa it, la régie a tellement pu se faire payer,
qu’elle n ’a eu qu’à faire une simple application des revenus
à une charge préexistante et préférable à toute jouissance de
la part de l’héritier et de ses représentans.
Aucune raison plausible n’aurait donc pu faire suspendre
l’action de la régie pendant le séquestre, dès q u ’il est prouvé
qu’elle pouvait l ’exercer justement et utilement.
Toutes les raisons de convenance, de justice et d ’humanité
tendaient, au contraire, à faire introduire en faveur de l ’héri
tier séquestré la prorogation d ’un délai qui n’a pu raison
nablement commencer qu’avec sa jouissance.
—
T e l a donc été le but de la loi que nous discutons, q u e ,
sans arrêter l ’action de la régie qui ne pouvait pas l’ê tre ,
elle a soustrait l ’héritier à des peines qu’il n’avait pu en
courir.
L a position d ’un héritier séquestré a dès lors été celle-ci
à son entrée en jouissance:
L a régie avait-elle perçu les droits ? il s’est trouvé libéré.
N e les avait-elle pas fait percevoir? a lo rs, de deux choses
l’une :
Ou l ’action de la régie était encore ouverte, et alors l ’héri
tier a eu six mois pour faire sa déclaration;
Ou l ’action de la régie était prescrite, et alors on n’a plus
eu rien à lui demander.
1
■
T e lle est , suivant nous , la seule manière raisonnable d'in
terpréter la lo i, et l ’on voit que notre interprétation 6e con-
�Soi
( 3. )
cille parfaitement avec le silence qu’elle a gardé sur le cours
de la prescription.
A in s i, concluons, sous ce premier rap p ort, que c’est inu
tilement que la régie invoquerait une disposition qui ne la
concerne pas.
2°. Mais allons plus loin , et supposons que la fausse in
duction que l ’on veut tirer de l ’article 34 puisse être ac
cueillie.
Dans ce cas même la régie ne pourrait l’appliquer à la
cause de madame de Talinond.
L ’article 73 , titre 12 de la loi du 22 frimaire an 7 , n ’abroge
les lois alors existantes que pour l’avenir.
Ce n’est donc que pour l ’avenir que la loi du 22 frimaire
a statué. Elle n’a pu avoir d ’effet rétroactif.
L a prescription de cinq ans contre la régie était prononcée
par une loi antérieure , celle du 19 décembre 1790. L ’article
18 contient sur ce point la même disposition que l ’article 61
de la loi du 22 frimaire an 7.
Mais la loi du 19 décembre 1790 ne renferme aucune dispo
sition semblable à celle de l ’art. 24 de la loi dvi 22 frimaire.
11 est- dès lors bien évident^ que la régie ne pourrait se pré
valoir de la disposition d ’une loi qui n ’existait point encore
à l’époque où la prescription était déjà pleinement acquise
contre elle.
Le décès de mademoiselle d ’Argouges ayant eu lieu le 9
brumaire an 2 , les cinq ans ont été révolus le 9 brumaire
an 7 > deux mois environ avant la publication de la loi du
22 frimaire.
L a conséquence est inévitable.
L a régie n’a pu justifier sou inaction par une disposition
�t
( 32 )
qui n ’existait pas. Elle ne peut invoquer une exception qui
n ’a pu lui servir de règle.
C e ne sera plus , si l ’on veut , la prescription prononcée
par l ’article 61 de la loi du 22 frimaire an 7 que madame
de Talm ond lui opposera -, ce sera le môme moyen pris
dans le voeu de l ’article 18 de la loi du 19 décembre ï 7i)°Mais alors nous avons eu raison de p ro u ver, comme nous l ’a
vons fait en commençant, que le séquestre n ’était pas par luimême suspensif des droits de propriété. La cause se trouve ainsi
réduite à cette première question , sur laquelle nous pouvons in
voquer même à notre appui la jurisprudence du tribunal de cassa
tion.
tE lle résulte principalement d ’un jugement rendu le 26 frimaire
an 8 , dont nous allons rapporter les circonstances et les motifs ,
tçls qu’ils sont consignés sur les registres du tribunal.
. Jeanne-M arguerite-Charlotte Sabourin , veuve Morisseau ,,
dpcéda à Fontenay-le-Peuple le i 5 brumaire an 2 , laissant un
grand nombre d ’héritiers.
Quelques-uns de ces héritiers étant émigrés , le séquestre fut
apposé sur tous les biens de la succession , généralement et sans
distiuction.
Un arrêté du département de la* Vendée , du 24 germinal an
5 , régla enfin les droits respectifs de la nation et des co-héritiers républicoles.
Les droits d’enregistrement pour la mutation intervenue n’a•
f. /
/
f
valent pas ete payes.
Les 2.5 frimaire et 19 pluviôse an 7 , saisie et contrainte de la
part de la ré g ie , pour une sbmmc'de 2.r5,ioo livres.
Sur l’opposition des héritiers , la contestation fut-portée de
vant le tribunal civil de la Vendée. •
Les héritiers prétendirent que la demande de la régie élAit
�S a
(33)
proscrite, ait en du qu’elle avait été formée après les cinq ans de
puis le décès de la veuve Morisseau.
L e 25 germinal an 7 , jugement du tribunal civil de la V en
dée , qui rejeta la demande de la régie comme prescrite.
Ce jugement fut fondé sur l ’article 18 de la loi du ig décem
bre 1790, et sur l ’article Gi de la loi du 21 frimaire an 7.
Pourvoi en cassation d e là part de la régie.
Elle prétendait que cette prescription s’appliquait uniquement
au cas où les choses allaient suivant le cours ordinaire, et où
aucun obstacle ri’empêchait les héritiers de se mettre en posses
sion ; que c’était aussi à ce cas que s’appliquait le mode d ’in
terrompre la prescription , en signifiant une demande ; mais
q u e , lorsqu’une succession 11’était encore entre les mains de
persojine, et qu’il était incertain s’il y aurait des héritiers,
comme dans le cas d ’un séquestre, il était évident qu’aucun
droit n’était ouvert ; qu’on ne pouvait rien dem ander, rien si
gnifier à personne ; que le faire serait une témérité ; qu’il fal
lait donc attendre l ’époque de l ’ouverture des droits par la mise
en possession de fait des héritiers.
C e système , absolument conforme à celui que la régie sou
tient aujourd’h u i, fut rejeté par le tribunal de cassation.
On argumenterait inutilement de quelques décisions rendues
par le même tribunal dan6 une hypothèse qui ne ressemble nulle
ment à celle de la cause actuelle. Pour prévenir l ’abus que l’on
pourrait en fa ire , il est bon de les rappeler, et de fixer ici une
distinction importante qui consolidera même les principes que
nous invoquons.
L e tribunal de cassation a j ugé le 22 vendémiaire an 9 ,
dans la cause de la veuve Bonol , héritière du C en C u illeau,
condamné révolutionnaireinent dans le mois de prairial an 2 ,
que les délais de la prescription n’avaient commencé à courir
�( 34 )
contre la régie qu’à dater du 21 prairial an 3 , époque de la
restitution des biens des condamnés à leur famille , et non à
l ’époque de la mort du condamné.
Une semblable décision est intervenue , le 30 prairial an 10 y
dans la cause des sœurs D éfieux, héritières du C en Servanteau de
l’Échasserie , condamné en 1793 par le tribunal révolution
naire.
Il est facile- d'apercevoir tout de suite les motifs de ces jugemens.
Dans l’hypothèse où ils ont été ren d u s, il existait des jugemens de confiscation. Ces jugemens , dont il ne faut pas cher
cher à discuter la. justice et la régularité , n’étaient pas uno
am ple accusation -, ils ne constituaient pas simplement l ’accusé en
état de prévention-, ils l’avaient jugé coupable-, ils avaient laforme d ’un acte judiciaire, contradictoire , solemnel et définitif ;
ils. avaient été exécutés -, quelle que fût la nature du pouvoir ter
rible duquel ils émanaient , ils avaient dû produire tous le&
effets attachés aux actes portant le caractère d ’un jugement , et'
par conséquent investir le confiscataire des biens« déclarés con
fisqués.
A lo rs, véritablem ent, il; n'y avait eu ni héritiers , ni trans
mission do p ropriété, puisqu'il n’y avait pas de succession.
A lo r s , enfim, les agens de la nation, devenue propriétaire
ipso fa c to , n’avaient pu remplir aucune formalité vis-à-vis des
héritiers qui ne possédaient les biens du condamné ni par
le d roit, ni par le fait , et qui les reçurent véritablement des
mains du gouvernem ent, à l ’époque du 31 prairial an 3 , par
un acte spontanée de la bienfaisance* nationale, éclairée et d i
rigée par la«, justice.
Mais toutes ces considérations , rapprochées de uotro h y
p o th è s e ju s tifie n t, d’autant plus le sy6tômc que nous soute-
�( 35 )
nous -, elles prouvent que la propriété d ’un citoyen ne peut
jamais lui être ravie que par la volonté qui le dépossède, ou
par un jugement qui le dépouille.
.
.
Les conséquences de tous nos raisonnemens sont bien simples :
Si madame de Talm ond n’a jamais perdu la propriété des
biens séquestrés, si sa dépossession passagère n ’a pu avoir
l’effet d ’une confiscation absolue , la régie , qui administrait
pour elle , et provisoirem ent, aurait'dû faire ce que madame
de Talm ond eût fait elle-même si sa jouissance n ’eut pas été
interrompue.
A défaut de déclaration de la part du préposé chargé de
l ’administration des biens , l’administration générale devait*
conserver les droits de la nation par une demande.
Cette double qualité d ’administrateur redevable et d ’agent*
de la nation , chargé des recouvremens des droits b u rsau x, ne
présente aucune espèce d ’incompatibilité.
L a régie elle-même a tracé à' ses préposés , dans sa' circu
laire dü mois d ’août 1793, la marche qu’ils' devaient süivVe',
et le mbdé de- comptabilité auquel ils devaient' se cotifûnnér
dahs cé cas.
Mais dans le xiombrc dés’ pièces qui ribtis' ont été représen
tées par madame de T a lm o n d , il s’en trouve une qui nous
fournit un exemple frappant de la contradiction qui existe
entre la prétention actuelle de la ré g ie , et l ’opinion qu’elle a
solcmnellement manifestée pendant la durée môme du sé
questre.
On a mis sous nos yeux , et l ’on présentera au tribunal
un état des inscriptions que la régie a prises sur la terre môme
de M ézières, pour la conservation des droits de la nation , à
raison de diverses rentes dont çelte terre était1 grevtîd' au
profit de plusicii’rs établisseriienY ecclésiastiques stippriiilés.
�( 35 )
Ces inscriptions sont au nombre de s ix , et pour un princi
pal de 25,465 livres.
Elles ont été prises le 24 floréal an 7 , pendant la durée
du séquestre , et un an avant la radiation définitive de madame
de Talm ond.
C e fait éclaircit suffisamment tous les doutes : il range en
faveur de noti’e système l ’opinion môme de l ’adminisU'ation,
qui n’a pu cx’oire tout à la fois que les droits de la nation
devaient être conservés sur les biens, et q u e , cependant, la na
tion en était propriétaire ; qu’elle a dû agir pour la conservation
des hyp othèques, et ne pas agir pour le paiement des droits
d ’enregistrement ; enfin , qu’il y avait dépossession envers ma
dame de T a lm o n d , dans un cas, et propriété grevée des charges
constituées par les actes , dans un autre.
C ’est par-là que nous terminerons une discussion qui nous
parait portée au dernier degré d’évidence , et sur laquelle nous
n ’avons cru devoir insister que pour éta b lir, une fois pour
toutes, des principes sur lesquels les agens du gouvernem ent,
chargés de l ’exécution des lo is, ne devraient pas répandre les
incertitudes d ’un doute qu’ils ne partagent même pas.
L e second moyen de madame de Talm ond est aussi décisif
que le premier.
11 repose également sur des principes et sur des faits cer
tains.
En principe, la régie encourt la déchéance lorsqu’elle né
glige de former sa demande daqs l’année qui suit le commande-
�■Soy
( 37 )
ment : le texte de la loi est précis -, le jugement du 2G frimaire
an 8 , que nous avons cité plus hau t, l ’a formellement con
sacré.
En fa it, la demande n’a été formée que quinze mois et vingt
jours après le commandement du 12 frimaire an g.
L a conséquence est inévitable.
L a régie ne s’étant pas encore expliquée sur ce point , il se
rait difficile de prévoir comment elle pourra échapper à un
moyen aussi tranchant.
Dira-t-elle que madame de Talm ond s’est adressée au ministre
des finances, et que la régie a été tenue de s’expliquer sur scs
réclamations ?
’
On lui répondra:
i° . Que le recours de madame de T a lm o n d , à la protection
du gouvernement, contre les injustices de ses agens , n’empê
chait point lu suite de l ’action judiciaire, que rien ne pouvait
interrompre, et que la loi soumettait à un délai fatal;
20. Que les représentations de madame de Talm ond auprès
du ministre n’ont donné lieu à aucun sursis, à aucun obstacle
qui ait paralysé les poursuites de la régie ;
3 °. QuO, bien lofth de là , le rÀ nistre, reconnaissant la compé
tence et l’indépendance du pouvoir judiciaire , n’a pas voulu
prononcer lui-même , et a laissé le ' soin aux parties de faire
statuer par les' tribunaux ; 4
4 °. Et enfin, que la régie a si peu imaginé que le recours de
la consultante auprès du ministre dût arrêter l'action judiciaire ,
q u e lle s’est p ou rvu e, quoique trop tard , par devant le tribu
nal de Blanc , avant même que le ministre eût prononce.
Ces considérations 11e permettent pas de croire que la régie
puisse échapper à la déchéance qu’elle a encourue.
Le tribunal observera , d ’ailleurs , qu’il s’agit ici de protéger
�débris d’ une fortune que l ’autorité même des lois n’a pu sauve
garder. Les malheurs de madame de Talm ond sont connus •, ils
sont irréparables : mais si rien ne peut effacer ses douleurs , il
est au pouvoir des magistrats de ne pas les aggraver en core,
lo rsq u ’ un moyen légal , favorable et décisif, permet à la jus
tice de venir au secours de l’infortune. D éjà assez de sacrifi
ces ont été imposés à la consultante ; elle a payé plus que sa
dette aux besoins de la patrie. L a patrie a contracte a son tour
une dette aussi sacrée envers les victimes d ’un régime dont le
souvenir ne peut être effacé que par la loyauté , la bienfaisance,
et le désintéressement d ’un gouvernement généreux et répa
rateur.
Délibéré à Paris le 23 thermidor an I I .
M. M ÉJAN .
j
ssZ d > / z/ '/ / l^
D E L 'I M P R I M E R I E D E B R A S S E U R
N o ta .
A IN E , R U E D E L A H A R P E , N °. 477.
O n t ’ engage , dan» c ette im prim erie , à
donner , dans l e co u rt espace de
quatre h e u re s, sans frais extra ord in aires, l ’épreuve d’ une feu ille d'im pression , pourvu
que lesi feu illets de m anuscrit ne soient écrits que d’ un côté.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. D'Argouges, Fleuriette-Louise-Françoise. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Méjan
Subject
The topic of the resource
biens nationaux
régie des domaines
successions
émigrés
séquestre
prescription
droits de mutation
confiscations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter et consultation pour dame Fleuriette-Louise-Françoise d'Argouges, veuve d'Antoine-Philippe de la Trémouille-Talmond ; Contre le directeur de la régie de l'enregistrement et des domaines.
notes sur les engagements de l'imprimeur à imprimer dans des délais de 4 heures après dépôt des feuillets du manuscrit.
notes sur les engagements de l'imprimeur à imprimer dans des délais de 4 heures après dépôt des feuillets du manuscrit.
Table Godemel : Mutation (droit de) : 2. de quelle époque a lieu l’ouverture du paiement des droits de mutation pour décès, à l’égard de l’héritier inscrit sur la liste des émigrés ? est-ce du jour du décès de celui auquel il succède, ou, seulement, de celui où l’héritier a été saisi de la propriété par sa radiation définitive ?
le séquestre des biens, par la nation, a-t-il interrompu le cours de la prescription établie par l’article 6 de la loi du 22 frimaire an 7 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Brasseur aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1312
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Blanc (36018)
Mézières (terre de)
Rights
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Domaine public
Relation
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biens nationaux
confiscations
droits de mutation
émigrés
prescription
régie des domaines
séquestre
Successions
-
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MÉMOIRE
P O U R
le citoyen C
laude
A L B E R T ,
fils
aîné , demandeur en validité d’off res.
C O N T R E
les créanciers du citoyen J o s e p h
G E R L E
défendeurs.
.
E t encore contre ledit citoyen Jo s e p h G E R L E
a uf f i défendeur
J ’ a i fait des offres d’une fomme confidérable au citoyen
G e r l e & à fes créanciers,pour me libérer du prix d’une vente:
elles ont été faites en papier monnoie
parce que j ’avois
acheté a un prix plus de quinze fois fupérieur à la valeur de
l'o b jet, en numéraire métallique , & en confi deration de ce
que je me libérerois avec les fignes qui étoient alors en circu
lation m es offres ont été confignées.
J e n ignore pas que dans certains tribunaux , il s’eft formé
une prévention contre de femblables offres ; mai s , en fuppofant pour un inftant que cette prévention foi: conforme aux
vues d’une faine politique, & qu’elle puiffe entrer dans l’efprit
de la l o i , dont les juges doivent ê tre les organes, cette pré; A . . .
�<• '
ii
_J
vention ne peut fe diriger contre un acquéreur qui a été dan»
ma pcfition. J 'a i été obligé de configner , par les entraves que
mon créancier lui-même n’a ceffé de mettre à ma libération:
ne prévoyant pas le taux de l ’échelle, il a conçu l’idée qu’en
me biffant Ton débiteur, il verroit réalifer, en numéraire mé
tallique & en même valeur nominale, des fommes quJil n’a en
tendu avoir qu’en aiïïgnats ; fi Ton intention n’a pas été de me
ru in e r, il eft au moins certain que par Ton fait j ’ai été expofé
à l’être. J e n’ai jamais voulu lui nuire, j ’ai feulement agi pour
éviter la perte totale de ma fortune , dont j ’étois menacé. L e
récit des faits va juilifier la confiance avec laquelle je pourfuis la validité de mes offres 6c de ma confignation.
F A I T S.
Par a£te du 4 germ inal, an 5 , reçu M a y e t , notaire &c fon
collègue , le citoyen G erle me vendit un moulin avec des
fonds adjacensj fuués fur la commune de Mozat ; j ’obferve
que ce bien , compofé en partie de biens nationaux , étoit à
peu près en valeur de trente mille livres, valeur métallique.
L e prix de la vente fut réglé à cent mille livres, une montre
en o r, à répétition, ôc à trois mille trois cents trente livres
pour épingles. J e m'obligeai de plus à lui payer une rente
annuelle & viagère de cinq mille livres , fans retenue , donc
deux mille ltv. furent ftipulées réverfibles fur la tête du citoyen
Antoine-Criflophe G e r l e , fon frè re , dans le cas où il lui furvivroit.
Quant au prix dont je viens de p a rle r, je payai comptant
les trois mille trois cents trente liv r e s , pour é p in g le s , & la
fomme de cinquante mille livres ; le contrat en porte quittance.
Par rapport à la fomme de cinquante mille livres, parfaifanc
c :lle de cent mille liv r e s, il fut dit que je m’en retiendrois
la fomme de deux mille liv r e s , au moyen de quoi je m ’obli
geai de payer une rente annuelle & viagère de la fomme de
deux cents livres à la citoyenne Gilberte L a v i l l e , aufïi fans
retenue, & en renonçant à la faculté de rembourfer.
�611
A 1’dgard de la fomme de quarante huit mille liv. reftantc ,
je m’obligeai de la payer aux créanciers du citoyen G e rla , qui
vie feroient indiqués par l u i , & c e , dans [ix mois , à compter
ds ce jo u r , fo u s intérêts , ju fq u à ce feulem ent. J e m’obligeai à
délivrer au citoyen G erle les quittances que je retirerois des
créanciers.
L e contrat contient la quittance de la fomme de deux mille
cinq cents livres pour le premier terme de la rente viagère de
cinq mille livres, qui étoit payable par avance.
J e dois obferver, relativement à la montre qui faifoit partie
du prix de la v e n te , que quoique le contrat en porce quit
tan c e, néanmoins je ne la délivrai p a s; ce fait fut conitaté
par un écrit particulier.
Nous ne pouvions pas rapprocher les valeurs dans lefquelles
nous ftipulions, de celle du numéraire métallique. L a loi défendoit de s’expliquer fur ce numéraire ; mais il étoit dans
notre intention que la jouiiTance du bien étoit l’équivalent de
la rente viagère de cinq mille livres. C e fut pour parer aux
inconvéniens réfultans de la variation du papier monnoie ,
que nous arrêtâmes que cette jouiiTance étoit le terme de
comparaifon de la valeur de la rente , & que cette jouiiTance
que j'allois prendre , pourroit être reprife par le citoyen
Gerle , & qu’elle pourroit lui être abandonnée en remplace
ment de la rente: c ’eil ce qui donna lieu aux claufes fuivantes.
« Dans lequel bien vendu, à défaut d ’exécution de tout ou
« de partie du contenu aux* préfentes, & principalement au
«t paiement exact defdites re n te s, & penfiott viagère & alik m entaire, pendant un term e, le citoyen vendeur fe réferve
« la liberté de fe remettre en polTelIion dudit bien vendu , fans
« aucune formalité de jufUce ; ôc en cas de non paiement Je
« deux termes de la rente viagère de cinq mille livres , le ven« deur rentrera, fans formalité de jufticc, dans la pleine ôc
« entière jouiffance de la propriété v e n d u e ,pendant fa vie feu« dément, & fans être tenu à aucune reftitmion & renibour« fement des fomtnes déjà payées, ladite jouiiTance.pour lui
�U )
* tenir lieu de fa rente v iag ère, & ceflera à Ton d é c è s , & c.
Convenu en o u tre , « Que dans le cas du décès dudit acquê
ts re u r, il fera libre à fes héritiers , ou à leur tuteur, en cas
« de minorité , ou de continuer le paiement de ladite rente
« viagère ci-deffus , ou de forcer ledit vendeur , pour lui tenir
«c lieu du paiement d 'icelle} de reprendre la jouiffancc dudie
« bien.,». ( * )
Il étoit de l’intérêt du citoyen G erle de prendre inceflamment les mefures convenables pour liquider & arrêter défini
tivement fes dettes dont j ’ignorois la nature. L e délai de fis
mois qu’il avoit pris pour c e la , paroiiïoit plus que fuffifant :
ce n’étoit pas à moi à pourfuivre cette liquidation, à faire
ceiTer les conteftations du fort defquelles elle pouvoit dépen
dre , auifi n’y avo ir-il pas d’indication ; je devois feulement
tenir l.es fonds p rêts, & les porter fur table.
Dès le marnent de la v e n te , je-pris des mefures pour fatiffaire à me&engagemens; je retirai de mon commerce des fonds
qui y auroienc fructifié; j ’ai retiré des mains de mes correfpondans, des ailignats deftinés à acheter des marchandifes qui,
dans l’intervalle de cette retraite à ma libération , augmentè
rent de vingt-neuf trentièm es, cependant mes fonds relièrentoilifs. Le citoyen Gerle , ni fes créanciers, ne peuvent s’en
( * ) J e pou vois me difpenfer de tranferire ces c la u fe s , elles font étrangères à la
validité ou invalidité de mes offres , dont il doit Être ici feulement quertion. Si je
l’ai fait, c'eil pour annoncer d’avance au citoyen G e r le , que quand on pourroit fuppofer que mes offres fuflenc déclarées nulles, je ne ferois pas dans le cas de l’a rt ..
7 de la loi du 16 niv ôfe, qui fetnble foumettre les acquéreurs de biens im m eubles,
à la charge de rentes viagères, à l’acquittement de ces rentes en numéraire métalli
q u e , fans réduflion , fi mieux l’acquéreur n'aime réfilier le contrat. La loi fuppofe.
que le terme de coinparaifon de la rente ç it inconnu ; mais lorfqu’il exiite un objet
q u i , dans l’ intention des partie », eft l’équivalent de la rente , & par lequel cette
rente a pu être rem placée, l’application de la loi celie. J e ne devroii donc •
to ujo urs, dans le cas de la nullité de mes o f f r e s , qu’abandonner la jouiffance d e s .
objets vendus au citoyen G e r l e , pour fa v i e , 6c lui payer le reftant du p rix ; c’eft-ào i r e , le* quarante - huit mille liv r e s , en proportion & comparativement au prix*
to ta l, conformément aux articles & & fuivans de la loi précitée , ainfi que je l’ai
déclaré au citoyen G e r l e , dans un a£te que je lui ai iigmfié conditionnellement le
ventôfc , an 6.
�m
prendre à moi de la baiffe des affignats, elle n a pas tourné à
mon pro fit; mais je fus auiïi affligé qu’étonné, de voir ma
libération différée de jour en jo u r, par la négligence, ou par
Ja mauvaife volonté du citoyen Gerle.
Au lieu de prendre des nrrangemens avec fes créanciers, il
alla à Paris, où il garda le plus profond file n ce, quelques
réquifitions que je lui aie faites par lettres, ou que je lui aie
fait faire par différentes perfonnes , pour me mettre en état
de me libérer.
Cependant je dépofai mon. contrat d’acquifition au bureau
des hypothèques ; mais on me dit que , d après les principes ,
cette mefure m’expofoit à offrir aux créanciers oppofans la to
talité du prix de ma vente , fans égard aux paiemens que
j ’avois faits au citoyen Gerle ; que même il me falloit déter
miner un prix pour le capital de. la rente, parce que le prix
devant Être diftribué entre les créanciers oppofans, il falloir
leur offrir un prix & non une rente v ia g è r e , ou une montre
en o r , qui n’étoient pas fufceptibles d’ordre & de diftribution,
fauf aux créanciers à faire des enchères , s’ils n’euifent pas
trouvé fufïifant le prix déterminé ; que c’étoit feulement fous
cette condition que je pouvois purger les hypothèques.
J ’obtins donc des lettres de ratification, le 2 ; m eifidor,
an 3 , qui contiennent l’énumération des fommes formant le
prix de la vente ; en conféquence de la déclaration que je fis
lors du dépôt & contenue dans l’affiche du c o n tra t, « M oyen« nant , y eft-il dit, la fomme de cent mille livres, une montre
« d or h répétition , eftimée deux mille liv r e s , une rente via« gère de cinq mille liv r e s , au principal de cinquante mille
« livres, & outre ce , trois mille trois cents trente liv. pour
« épin gles, toutes lefdites fommes faifant enfemble cent cin« quante-cinq mille trois cents trente livres » ; elles furent
fcellées à la charge des oppofitions.
Ces oppofitions, fuivant l’extrait que i’en retirai, furent au
nombre de quatre. Les créanciers oppofans étoient, le citoyen
Chaifaing , les citoyens Je a n -B a p tifte & G ilb e rt-A m a b lc
�Jourd c , Françoife - Michelle G e r l e , veuve G oyon ; je m î
trouvai encore au nombre des oppofans, parce que je pris la
précaution de former oppoiition fur moi-môme pour la sûreté
de ce que j ’avois payé , ôc que je devois répéter fur le p r ix ,
dans le cas où la confignation dût avoir lieu.
J e notifiai ces oppofitions au citoyen Gerle , par exploit du
2 thermidor, an 5 , au domicile de la citoyenne G e rle , veuve
Hom , fa focur , habitante de cette commune de R io m ,a v e c
fommation de les faire ceiTer, & de me procurer les moyens
de me libérer.
L e citoyen G erle s’obftinant à garder le filence., je lui fis
notifier un ade , -le 1 1 vendémiaire, an 4 , en fon domicile à
Paris, quoique je ne fuiTe pas tenu de l’inftrumenter à ce do
micile , par lequel je lui déclarai que je voulois me libérer
de la fomme de quarante-huit mille livres reftante à payer du
prix de mon acquifition. J e le fommai de m’indiquer les créan
ciers auxquels il entendoit que cette fomme fût payée en tout
ou en partie, finon, & faute par lui de me faire préfentemenc
cette indication , & faute de me l’avoir faite dans le délai de fix
m o is , ainfi qu’ il s’y étoit obligé par mon contrat d’acquifition , je lui déclarai que j e me pourvoirais à fin de confignation
de la fomme de quarante huit mille livres ; & pour cet e ff e t , je
le fis citer à fe trouver à un jour fixe au bureau de conciliation
établi en la commune de R iom , avec déclaration que les
créanciers oppofans feroient appellés au bureau le même jo u r,
pour s ’accorder entr’eux fur l ’ordre & dijlribution de cette même
fom m e , finon , 6* fa u te de c e , que la confignation en feroit fa ite
en leur prefence.
Par un ade recordé du 1 7 du môme mois de vendémiaire ,
qui fut fait au citoyen G e r le , au domicile de la veuve H om ,
je lui réitérai le defir que j ’avois de me libérer de la fomme
de quarante - huit mille livres , en conformité de la claufe
de mon contrat, fit faute par lui d’avoir fatisfait à la fomma
tion du 1 1 , en m’indiquant le nom des créanciers à qui je
devoig payer cette fom m e, Sc voulant me mettre en r è g le , je
�■&z»
(7)
lui fis des offres réelles cîe cette fomme ; je lui en fis offrir une
entièrement diftin&e & fép arée, qui le concernoit perfonnellem ent, c’étoit celle de deux mille cinq cents livres pour le
fécond terme de la rente viagère , échu par avance le 4 du
même m ois, à la charge néanmoins de rapporter main-levée
des oppofitions à mes lettres de ratification.
Même refus de s’expliquer, proteftation de ma part de coniigner, &. affignation au bureau de conciliation à cet effet.
J e prie mes juges de remarquer q u e , malgré l ’obtention de
mes lettres de ratification, mon premier mouvement a été de
me libérer feulement de la fomme de quarante-huit mille liv.
qui étoit deftinée à l’acquittement des créanciers : je n’étois
donc pas excité par des fentimens de cupidité ; je ne voulois
pas profiter des avantages que ¿es lettres me donnoient ; d’ail
leu rs, cette obfervation trouvera fa place dans la fuite.
Par exploit du 24. du même mois de vendémiaire, je fis citer
les créanciers oppofans au bureau de conciliation , pour s’ac
corder fur l.i demande que j’entendois former contre eux , à
ce qu’ils euffent à déduire les caufes de leurs oppofitions, &
fur l ordre & dijlrlbutiori de la fomme de quarante-huit mille liv .
refiée due fur le prix de mon acquifition.
Après différentes remifes au bureau de conciliation, il y fut
enfin dreffé un procès-verbal, le 6 brumaire, an 4., entre tous
les créanciers oppofans ; le citoyen V a l l e t , ofi’icier de fa n té,
qui étoit créancier, quoique non oppofant, & qui fut appellé
a la requête des citoyens J o u r d e ; l e citoyen Mazin j neveu,
& fondé de pouvoir du citoyen Gerle & moi.
Ce proees-verbal m'apprit quelle étoit la nature des créances
dues par le citoyen G erle : il en féfulte , que le citoyen
Chaffaing réclamoit contre lui l’effet d’une promette, dont la
date & le montant ne furent point indiqués ; la dot mobiliaire
de la citoyenn eC h affain g, époufe G e r l e ; fit de plus, les reflitutions des jouiffanccs d’un pré dont il avoit obtenu le défiftement contre le citoyen V allet qui l’avoit acquis de la mère
des citoyens Jo u r d e , à laquelle le citoyen G erle l ’avoit vendu,
�■
(
8
)
ous le cautionnement de la citoyenne G o y t , fa mère. Le
citoyen V a lie t , qui avoit exercé fon recours contre les ci
toyens J o u r d e , réclamoic le montant de fes dommages-intérêts
réfultans de l’éviction ; ces dommages - intérêts avoient été
liquidés par un rapport d’ex p e rts, fur l’exécution duquel il y
avoit des conteftations entre le citoyen Valiet & le citoyen
G erle. La citoyenne Gerle , veuve G oyon , avoit formé fon
oppofition à raifon du cautionnement fourni par la citoyenne
G o y t , fa m ère, dont elle eft héritière en partie, & par ellem êm e, lors de la vente du pré , faite par le citoyen G erle à
la citoyenne Jo u rd e , ôc de plus, pour raifon de certains droits
qu’elle prétendoit exercer contre le citoyen G e r le , fon coh é
ritier, ôc pour lefquels ils étoient en conteftation devant un
tribunal de famille. D e la difcuifion qui eut lieu , il ne put
fortir la moindre idée précife fur la fixation d’aucune des
créances 6c d’aucuns des droits réclamés; les créanciers affectoient même , en entrant dans les vues du citoyen Gerle ,
d’envelopper leurs créances dans l’obfcurité, psut-être parce
qu'ils redoutoient un acquittement en ailignats.
Il eft actuellement efientiel de remarquer le langage que
tinrent les créanciers relativement à mes offres de la fomme
de quarante-huit mille livres.
Les citoyens Jourde fe contentèrent de d ire , par l’organe
de l’un d’eux , que les offres intéreifoienc principalement le
citoyen V a lie t, qui dévoie être naturellement indemnifé par
les premiers vendeurs, en leur n o m , ou comme repréfentanc
la veuve G o y t , leur m è re , dont ils étoient héritiers.
L e citoyen Gilbert G oyon , faifant pour Françoife-Michelle
G e r le , fa m ère, après avoir rappelle l’objet de fon oppofition,
dit Amplement que fa mère ne pouvoit, quant à préfent, s’e x
pliquer fur le réfultat de fes prétentions, dont une ne pouvoit
être liquidée que par un jugement d’ un tribunal de famille.
L e citoyen Antoine-Bernard Chaffaing, faifant ôc fe portant
fort pour Antoine Chaffaing , fon père , après avoir rappellé
les caufes de fon oppofition, dit; qu’ une loi nouvelle ayant fufpendu
�34 2
(9 )
;
pendu le rembourfement des dots & des droits légitimaires, il
ne pouvoit y avoir lieu , quant à préfent, à aucune diftribution , & qu’il falloit néceifairement attendre que le mode de
rembourfement des dots & droits légitimaires fût déterminé
d’une manière précife.
L e citoyen M a z in , fo n d é de pouvoir de la procuration f p é
d a le du citoyen Jofeph G e rle , reçu G uillaum e, notaire à P a ris ,
le dernier jo u r de l ’an 3 , déclara, pour fon conftituant; « Q u ’il
« confentoit à la diftribution de la fomme de quarante - huit
« mille livres, offerte par le citoyen A lb e r t , entre tous fes
« créanciers oppofans au bureau des hypothèques. Il a obfervé
« que cette fomme étoit plus que fuffifante pour les remplir
« tous du montant de leurs créances, en principal, intérêts ôc
« frais; que déjà les prétentions dirigées par le citoyen V allet
« contre les citoyens Jo u rd e , qui ont obtenu une condamna
it tion en garantie contre Jofeph G erle , étoit fixée par un
« rapport d’experts du 12 ventôfe dernier, fait en exécution
« d’un jugement du tribunal du diflritt de R i o m , du 1 1 plu« viôfe auifi d ern ier, confirmé par autre jugement du diftri£t
« d’ Iffoire , du 1 1 floréal fuivant, & qu’il fuffîfoit de prendre
« le£ture de ce même rapport, pour régler définitivement les
« réclamations du citoyen Vallet.
« Le citoyen M azin, pour le citoyen G e r l e , demande a£te
« de ce qu’il confent que fur la fomme de quarante-huit mille
« liv. offerte par le citoyen A lb e rt, le citoyen Vallet touche
« la fomme de trente-cinq mille livres, à laquelle a été portée,
« en plus haute eftimation , par le rapport du 1 2 ventôfe der« n ie r , la valeur du pré dont la dépoiTeiïion a été prononcée
a contre lui en faveur du citoyen Chaifaing ; enfemble tous
« intérêts & frais légitimement dûs , proteüant , en cas de
<r re fu s, de rendre le citoyen V allet refponfable de tous évé« nemens ».
« E n ce qui concerne les réclamations du citoyen Chaifaing
« & de la citoyenne Françoife - Michelle G erle , le citoyen
« M azin, aux qualités ci-deiTus, a déclaré qu’il confentoit que
B
.
�( 1° )
«F ex céd en t des fommes offertes par le citoyen A lb e rt, refiât
« entre fe s mains ju fq u à ce que le corps lé g ijla tif au/oit pro~
« nonce définitivement fur le mode -de rembourfement des dots &
« droits légitim aires, & jufqu’à ce que le tribunal de famille
« eût ftatué fur les prétentions de Françoife-Michelle G erle ,
« toutes exceptions & défenfes demeurant réfervées au citoyen
« Gerle ».
L e citoyen Mazin regardant la fomme de deux mille cinq
cents livres par moi offerte pour le demi - terme de la rente
v ia g è re , comme un objet difttn£t & féparé de la fomme de
quarante huit mille liv. reftée due fur le prix de la ve n te , d it,
par rapport à ce demi-terme, que mes offres de deux mille cinq
cents liv. étoient infuffifantes, fuivant l’art. 10 de la loi du athermidor dernier, qui applique aux redevances foncières les
difpofitions relatives aux fermiers des biens ruraux.
Quant au citoyen V a lle t , fes dires font importans : il dit
que mes offres ne le concernoient pas dire&ement ; que les
condamnations en recours & garantie par lui obtenues, réfléchiffoient uniquement contre les citoyens Jo u rd e , fes vendeurs,
& que ceux-ci avoient fçuls intérêt à élever des difcuffions fur
la validité ou infuffifance des offres ; qu’à toutes fin s , il les.
foutenoit infuffifantes, attendu que le p rix de la vin te confentie
par Jofeph G e rle , le 4 germ inal dernier, étant ; 1 °. D'une fomme
de cent mille liv. en capital, & d'une montre en or à répétition ;
a°. D'une rente annuelle & viagère de cinq mille liv r e s , j e devois
offrir la totalité du p rix de la ven te, refpe clive ment aux créan
ciers oppofans, quoique j'e u jje p a y é comptant une partie du p rix
au vendeur.
A u furplus, il déclara que le confentement donné par le
citoyen G e r le , de porter fes d.ommnges-imérâts à trente-cinq
mille liv. valeur nominale d’affignats, ne fuffifoit p a s , ni à
beaucoup près, pour l ’indemnifer ; que d’ailleurs les réclama-,
tions des citoyens Chaflaing & de la veuve G o y o n , s’oppofoient
à ce qu’il touchât cette fomme.
J e répliquai à tous ces dires, que mes offres avoient été uni-.
�& JIÏ
( »* )
quemettt dirigées contre U citoyen Gerle ; quelles étoient évi
demment futfifantes par rapport à lu i, dès qu’il ne reftoit dû,
aux termes de mon contrat d’acquifition , que la fomme dé
quarante-huit mille liv. en capital; que fi les créanciers oppofans à mes lettres de ratification qui ne fe font pas expliqués,
jufqu’à ce jo u r, fur leurs prétentions, réclamoient la confignation du prix total de la vente , je me conformerois à la
difpofîtion de l'édit de 1 7 7 1 , concernant les hypothèques, 6c
je me mettrois en règle à cet égard.
Ces créanciers ayant gardé le filence, je demandai a£te de
la réitération par moi faite fur le bureau , de mes offres de
quarante-huit mille livres d'une p a rt, ôc de deux mille cinq
cents livres d’a u tre , pour le demi-terme de 1a rente viagère.
Arrêtons-nous un m om ent, ôc fixons les idées qui naiflent
de tous les dires refpe£tifs que je viens de rapporter avec la plus
grande exa&itude.
i° . On voit que jufques-là il n'a été queition d’offres de ma
part que de quarante-huit mille livres que je devois payer aux
créanciers du citoyen G e r le , qu’il devoit m’indiquer dans fix
m o is , qui étoient expirés depuis le 4 vendémiaire précédent.
2 0. On voit que le citoyen G erle confentoit bien que je
payafle cette fomme à fes créanciers; mais en même temps
ceux-ci refufent, avec affe&ation, de la recevoir; la plupart
des créances reflent inconnues, ôc les créanciers font en oppofition avec le citoyen G e r l e , fur la liquidation des autres.
3
; ® ‘en loin de defirer de me libérer du prix total de mon
acquifition , conformément à mes lettres de ratification , j’en
redoutois au contraire la neceilité. Un des créanciers , à la
vérité non oppofant, mais qui parloit aux périls, rifques 6c
fortune des citoyens Jourdc , fes garans, qui étoient oppofans , m en fait Tobje&ion. J e fonde là-defius les créanciers
oppofans, ôc je n’en obtiens qu’un filence perfide.
J e me fentis dès-lors obligé d’agir dans le fens de me libérer
non feulement des quarante-huit mille livres que le citoyen
G erle m’avoit chargé de payer à fes créanciers ; mais encore
B a
�< XS*«~
(
1 2
)
de faire ceiTer l’a£tion meurtrière à laquelle j ’étois expofé à
l'égard des créanciers oppofans à mes lettres de ratification,
en rapport du prix rotai de mon acquifition.
En conféquence, par un exploit du 1 6 brumaire, an 4 , que
que je fis donner aux créanciers oppofans, au citoyen V a l l e t ,
& au citoyen G e r le , au domicile du citoyen M a zin , fon fondé
de pouvoir, après avoir rappellé les faits, je déclarai que je
me voyois forcé de fatisfaire à la demande en rapport du prix
total de mon acquifition que les créanciers avoient manifeflée
au bureau de conciliation ; je notifiai que j ’augmentois mes
offres pour parfaire ce prix total ; que je les portois à cent
cinquante - cinq mille rrois cents trente livres en capital,
conformément à l’enumération ôc fixation portées par mes
lettres de ratification , & à trois mille liv. pour l’in térêt, à
compter du 2 ; meilidor, an 3 , époque de mes lettres de rati
fication , jufqu’au jour de la confignation ; je fignifiai mon
contrat de vente, mes lettres de ratification, le procès-verbal
du bureau de conciliation, & je fis afiigner le citoyen Gerle
& les créanciers à l’audience du tribunal civil du j frimaire,
lors prochain, pour me voir provifoirement donner atte de la
réalifation de mes offres, qui feroient faites fur le bureau de
l ’audience ; i° . D e la fomme de cent cinquante-cinq mille
trois cents trente livres en capital, formant le prix total de mon
acquifition; 2 0. De celle de trois mille livres pour incerêts de
cette fom m e, à compter du
meifidor, an 3 , date des lettresj
avec proteftation de fuppléer, parfaire ou recouvrer; & faute
par les créanciers de s’accorder entr'eux fur l’ordre & diftribution defdites fom mes, je conclus à ce qu’il me fût permis
de les configner , & ce , aux périls , rifqucs & fortune du
citoyen Gerle x fayte par lui d’avoir rapporté la main-levée des
créanciers oppofans.
E t attendu que c’étoit par fon fait que j ’étois obligé de configner le prix total de mon acquifition, nonobftant le paie
ment de la fomme de cinquante-trois mille trois cents trente
livres que je lui avois fait lors de la vente j je conclus contre
�( <3 ) .
lui à ce quii fût condamné à me rendre cette foni me de cin
quante-trois mille trois cents trente liv. enfemble les intérêts.
J e réitérai cette aflignation au citoyen G e r l e , en ce qui le
concernoit, par exploit lignifié a fon domicile a Paris, du 23
brumaire , avec déclaration que ce n’étoit que par furabondance qu’il étoit affigné au lieu de fa réfidence à Paris, attendu
qu’il lui avoir été donné pareille aflignation à fon dernier
domicile à R i o m , 6c en exprès , au domicile de fon fondé de
pouvoir.
L e j frimaire an 4 , il intervint fur ma demande en réalifation d’offres, un jugement qui ne fait que confirmer l’impofifibilité où j’étois de me libérer, même de la fomme de qua
rante-huit mille livres que je devois payer aux créanciers, &
la néceflité où je me trouvois de configner.
Sur ce qu’on prétendoit que mes offres étoient infuffifantes,
fans dire poiitivement en quoi & com m en t, je pris le parti de
les augmenter encore; je demandai afte de la réitération ôc réalifation de la fomme de cent cinquante-cinq mille trois cents
trente livres pour le prix total de l ’acquifition & de l’augmen
tation que j ’en faifois de la fomme de trente mille livres ,
favoir ; cinq mille liv. pour intérêts de la fomme ci-deffus, à
compter du a j m eflidor,an 3 , date des lettres, jufqu’au jour de
la conflgnation,dont quinze cents liv. en aflignats,valeur nomi
nale , faifant moitié de l’intérêt, & trois mille cinq cents liv r e s,
repréfentatifs de l’autre moitié en nature, dans le cas feulement
où la loi du 3 brumaire, an 4., explicative de celle du 2 ther
midor , an ; , s’appliquerait au paiement de cette efpècc d inté
rêt, & celle de vingt-cinq mille livres, pour tout ce qui pouvoit
être dû au citoyen G e r le , pour arrérages de rente , intérêts
ou autrement ,lefquelles dernières offres je déclarai ne faire que
par furabondance feulement & en tant que de befoin.
L a citoyenne G e r l e , veuve G o y o n , demanda a£te de ce q u e ,
en ce qui touche les citoyens Chaffaing & J o u r d e , feuls créan
ciers oppofans avec elle à mes lettres de ratification , elle
çonfentoiç que fur U fommç de quarante-huit mille liv r e s ,
�refìée due en principal fur le prix de la ve n te, les intérêts de
cette fomme & les arrérages de la rente v ia g è r e , le citoyen
Chaflaing retirât ce qui pouvoit lui être refté dû fur la conftitution de dot de la citoyenne C h aflain g , époufe Gerle , oti
pour le montant du billet qu’il avoit réclamé au bureau de paix;
& les citoyens J o u r d e , ou pour e u x , le citoyen Vallet., duquel
ils font garans , la fomme de trente-lix mille livres, montant
de l’eftimation des dommages - intérêts adjugés aux citoyens
Jourde & V a lle t, contre le citoyen G e r le , & faute par eux de
recevoir ces fe m m e s, la citoyenne G o yon demanda que la
eonpenatton ne fû t ordonnée qua leurs périls, rifques & fortune.
E u e demanda afte de la déclaration q u elle faiioit, qu’elle
n’entendoit pas réclamer ie rem boursaient du principal des
rentes viagères créées par le contrat de ven te, & qu’elle s’oppofoit à la confignation des fommes que j ’offrois pour ce princi
pal. E lle oppofa d’ailleurs que mes offres étoient infuflifantes;
i ° . En ce que je devois offrir une montre en or à répétition,
& non une fomme de deux mille livres pour fa valeur; 2 0. En
ce que j ’offrois les intérêts de la fomme de quarante-huit mille
livres & le terme échu de la rente v iag ère, en ailignats, tandis
que je devois en offrir & configner moitié en nature. .
Les citoyens Jo u rd e déclarèrent qu’ils adhéroient aux con
clurions prifes par la citoyenne G e rle , veuve G oyon , relative
ment à la fomme offerte pour le rembourfement de la rente
viag ère, fous la réferve de tous leurs droits.
Le citoyen G e rle , par l’organe de fon defenfeur, demanda
afte de ce que, pour éviter la confignation des fommes par moi
offertes, & non autrement, il confentoit que fu r la fomme de
quarante-huit mille livres refiee entre mes mains & deflinee ait
paiement des créanciers, le citoyen Chafjaing reçut le montant
de fa créance en p rin cipal, intérêts & f r a i s , J a u f à reflitutr, s 'il
y a lieu ; il demanda auifi afte de ce que, pour éviter cette con
fignation, il confentoit que fu r ladite fomme de quarante- huit
m ille liv r e s , le citoyen Vallet reçut ia fomme de trente-cinq
mille livres, à laquelle ¿voit été portée,en plus haute eüimation,
�( 'r )
la valeur du pré dont la dépoffeifion avoit été ordonnée contre
lui en faveur du citoyeh Chaffair.g; enfemble tous les interêcs
6c frais légitimement d û s, & qu’au cas de refus de la part du
citoyen Vallet > il demandoit qu’il f û t dit qu il demeureroit ref~
ponfable de iévénem ent de la confignation.
E n fin , il demanda auiTi a£te de ce qu’il s'oppofoit formelle
ment à ce que je lïife la confignation des autres fommes par
moi offertes, comme étant infuffifantes.
Quant aux citoyens Chaflaing & V a le t , ils ne comparurent
point.
J e perfiftai dans mes offres; je demandai permiffion de configner, fa u te par les créanciers de s ’accorder e n tr e u x , & jo b fervai que les difficultés que venoient d’élever les citoyens
Jourde & la citoyenne G o y o n , iœur du citoyen G e r l e , na~
voient d ’autre but que celui dentraver ma libération.
En effet, on affeftoit de confondre ce que je pouvois devoir
au citoyen G e r le , en vertu de mon contrat d'acquifition, abftraSlion faite de mes lettres de ratification , avec ce qui pou
voir être dû aux créanciers, fous le point de vue de l ’obten
tion de mes lettres de ratification , & ces deux objets devoient
bien êtr^ liftin g u és, quant au mode de paiement, comme je le
lémontrai dang la fuite.
M a is , à travers cette confufion, le citoyen Gerle fait un artile abfolument féparé du furplus de mes offres, de la fomme de
uarante-huit mille liv. que j ’étois chargé de payer à fes créan~
,iers; il fentoit bien , & il a toujours parfaitement fe n ti, que
ï devois & pouvois me libérer de cette fom m e; 6c c ’eft fur
et article , il faut en convenir , qu’il fe fent plus embarraffé
jue moi. Il me fuflifoit de la préfenter, 6c il devoit forcer fes
rréanciers a la recevoir; o r , fes efforts pour les y forcer, pour
->pérer ma libération , deviennent évidemment impuiifans. L a
veuve G o y o n , fa focur , ainfi que les citoyens Jourde , qui
cependant dans leurs dires n’oublioient pas les intérêts du
citoyen Gerle , ne veulent point prendre part à cette fomme
quarante-huit m ille livres : ils la rejettent aux citoyens
�( lO
Chaifaing & V allet; mais c e u x -c i, au bureau de conciliation ,
n’en avoient pas v o a lu , & ils n’en veulent encore pas lors du
ju gem en t, puifqu'ils ne s’y préfentent pas. Auffi le citoyen
G e r l e , convaincu de la validité de mes o ffre s, ôc de ma con
fignation, au moins pour cette fomme de quarante-huit mille
liv. s'em preffe-t-il de rejetter l’événement de la confignation
fu r le citoyen .V a lle t , en cas de refus de f a part. On fent
d ’avance q u elle citoyen V allet avoir tort de re fu fe r, j ’avois
rai fon d’offrir & de configner.
L e citoyen G erle redoutoit enfiate, ainfi que fa fœur & les
citoyens J o u r d e , mes offres & ma confignation du furplus de
ce que j ’offrois, en conféquence de mes lettres de ratification;
mais pouvoient-ils me priver du bénéfice de ces lettres qu’ils
ne critiquèrent même pas? D ’ailleurs, ce que pouvoient dire
les citoyens Jo u rd e , la citoyenne G oyon & le citoyen G exle,
me mettoit-il à l’abri de l’action en rapport du prix de mon
acquifition, conformément à mes lettres, de la part des citoyens
Chaifaing & V a lle t, de c elu i-c i fu r - to u t q u i, au bureau de
conciliation, avoit articulé la néceflité de ce rapport, fans être
contredit par le citoyen Chaifaing.
AufTi le jugem ent, en donnant défaut contre les citoyens
Chaifaing & V a lle t , me d o n n e -t-il a£te de la réalifation de
mes offres de la fomme de cent cinquante-cinq mille trois cents
trente liv. d’une part, & de celle de trente mille liv. d’autre ,
faifant en tout cent quatre-vingt-cinq mille trois cents trente
liv. ; & attendu qu’elles n’ont point été reçues, il m’eft permis
de les configner, aux rifques, périls & fortune de qui il ap
partiendra.
J e fentis dès ce moment tous les dangers qui m’environnoient, tous les pièges qui m’étoient tendus; je pris le parti,
en fignifiant ce jugement, par un atte du 8 frimaire, an 4 , aux
créanciers oppofans, au citoyen V allet & au citoyen G e r l e ,
au domicile de fon fondé de pouvoir, d'augmenter mes offres
de cinq mille livres, pour faire cefler de plus en plus le reproche
d'infuffifance qui ni étoit fait; je. les portai à cent quatre-vingtdix
�331
( >7 )'
clix mille cinq cents trente liv. J ’étois embarraiïé pour favoir
c e que je devois offrir pour le prix de mon acquifition , en
conséquence de mes lettres de ratification. Aucun créancier,
ni même le citoyen G e rle , ne s’étoit expliqué précifément fur
ce que l’on entendoit que j ’offriffe 'pour ce prix , ôc j ’étois
cependant prêt à me rendre à leur d e fir, d’après la conduite
que j ’ avois tenue jufqu’à préfent.
Vouloit-on que le prix de mon acquifition pût demeurer fixé
comme je l’avois fait pour l’obtention de mes lettres de ratifica
tion ,alors je devois cent cinquante-cinq mille trois cents trente
livres en principal, favoir; cent trois-mille trois cents trente liv.
pour ce qui étoit porté par mon c o n tra t, deux mille liv. pour la
valeur de la m ontre, qui devoit être fixée à l’époque du
meffidor, an j , date de mes lettres, & cinquante mille liv. à
laquelle j ’avois fixé le capital de la rente viagère de cinq mille
liv. ; je devois de plus les intérêts de cette fom m e, à compter
du jour de mes lettres.
Entendoit-on que je n’euffe pas pu amortir la rente par une
fixation, pour offrir aux créanciers un prix c ertain , & q u e ,
malgré mes lettres, la rente viagère de cinq mille liv. reiïât
toujours due , alors je ne devrois rapporter pour prix de mon
acquifition, que la fomme de cent cinq mille cinq cents trente
liv. avec les intérêts j à compter du a j meflidor j an 3.
Dans l’incertitude où me laiifoient à cet égard les créanciers,
je fentis qu’il n’y avoit d’autre parti qu’à faire des offres fuffifan tes, dans ces deux c a s , & c’eft ce que je fis. J e déclarai
en conféquence que mes offres de cent quatre-vingt-dix mille
trois cents trente liv. étoient faites , tant au citoyen G a le qu’à
fes créanciers , & que la confignation en feroit faite, tant pour
lui que pour leà créanciers , f a u f à s'arranger entr’eux. E t
comme dans les fommes par moi offertes il y en avoit dont
les offres paroiffoient dirigées contre le citoyen Gerle perfonnellement, & d’autres dont les offres paroifToient dirigées
' contre les créan ciers, je déclarai q u e , dans le cas où celle#
concernant les créanciers puifent être+confidérées commé
G
�( I*)
infuffifantes, ce qui n’étoit pas ,J e confentois que le déficit qui
pourroit avoir lUu fur lefdites ornes, fû t pris par les créanciers
fur les fommes offertes & réalijees pour le citoyen Gerle. J e me
fondois à cet égard , fuivant l’obfervation que j’en f i s , fur ce
que je pouvois me difpenfer de rien offrir au citoyen G erle ;
que mes offres n’étoient de néceflité que par rapport aux créan
c iers, avec d’autant plus de raifon q u e , dans tous les c a s , je
devois être créancier du citoyen G e rle , puifque j ’étois obligé,
par fon fait réfultant du défaut d’indication & de main-levée
des oppofitions, d’offrir & de configner, à l’égard des créan
ciers, une fomme de cinquante mille trois cents trente liv. que
je lui avois payée, lors de mon contrat qui en portoit quittance.
Après cette explication, & attendu que le défaut de rapport
de la main-levée des oppofitions , & le défaut d’explication
précife de la part des créanciers, de ce que je devois configner,
moyennant quoi j ’aurois une parfaite &c définitive libération,
néceifitoit la consignation, je fis donner affignation aux créan-,
ciers ôc au citoyen G e r l e , à fe trouver le y frimaire, an 4.,
au bureau du receveur, pour être préfens, fi bon leur fembloit,
à la confignation des cent quatre-vingt-dix, mille trois cents
trente liv.
Mais ce qu’il ne faut pas perdre de v u e , c ’eft que j'entendois
toujours conferver à toutes fins , le droit d’être libéré de la
fomme de quarante-huit mille liv. que je n’avoi* pu forcer les
créanciers à recevoir. C e qui le prouve , & ce qui doit con
vaincre de la répugnance que j'avois moi-même de configner la
fomme de cent quatre-vingt-dix mille trois cents trente liv ., &
combien j ’aurois defiré de m’en tenir à ma libération de la
fomme de quarante-huit mille livres, conformément aux claufes
de mon c o n tra t, fi le citoyen Gerle eût pu m’en faciliter les
m oyens, comme il le devoit, c’eft ce qui eft ajouté dans cet
a&e. « Comme aufli leur déclarant, le citoyen A lb ert, que c’eft
« de fa part comme contraint qu’il fait ladite confignation, &
« à défaut de rapport de main-levée defdites oppofitions de la
» part de G e r l e , quoiqu’il aie ufé à fon égard, de tous le*
�3* *
(*,?).
ménagemens poffibles, & qu’il lui ait donné un temps plus
« que fuftifant pour y fatisfaire; néanmoins, le citoyen Albert
« déclare encore auxdits créanciers, qu’ils n’ont qu a fe réunir
« pour donner mairi-levée au citoyen Albert de leurs oppofi«c tions, & déclarer au ils f e contentent des engagemens qu’il a
« contractés envers\ ô e r le , audit c a s , le citoyen Albert confent
« de ne configner que la fom me de quarante - huit mille livres
« rejlée due à G erle, ainfi que le montant en nature de la moitié
« de la rente viagère de cinq mille livres, conformément a la
« loi du 3 brumaire; & fa u te p a r eu x de donner ledit confente« m ent, ainfi que la m ain-levée de leurs oppofitions jufqu’au
« moment de la conlignation, aux jour ôc heure ci-defifus indi« q u é s, je leur ai déclaré que ledit inflant procédera à la confi« gnation des fommes ci-deflus ».
A in fi, en commençant ma procédure ôc en la finiifant, mal
gré mes lettres de ratification, j ’ai principalement couru à ma
libération de la fomme de quarante-huit mille liv. que j ’étois
chargé de payer aux créanciers.
Mais ce confentement ne fut pas plus accepté qu’auparavant,
& le 9 frimaire, an 4 , je fis ma confignation de la fomme de
cent quatre-vingt-dix mille trois cents trente liv r e s , fuivant la
quittance que j'en ai du receveur.
J e fens combien eft faftidieux le détail de procédure que je
viens de préfenter; mais la défenfe de ma caufe ôc le dévelop
pement de mes moyens l’exigeoient. Lorfqu’une affaire eft com
pliquée par elle-même, je fais que c’eft une raifon de plus pour
compter fur l’attention des juges, pénétrés de l’importance de
leur devoir, ôc animés du deiir de découvrir la vérité.
M O y E N S.
J e divife mes moyens en deux parties.
Dans la prem ière,qui concerne les créanciers , j ’établirai que
mes offres font régulières ôc fuflifantes; que ma confignation me
libère de tout ce que j ’ai pu devoir rapporter aux créanciers, en
C i
�_ ( 2° )
vertu de raes lettres de ratification, de quelque manière qu’on
fixe ce que j’ai dû rapporter.
Dans la fécondé, qui eft relative au citoyen G e r l e , feu l, &
qui fera purement fubfidiaire, je prouverai, qu’à fuppofer que
mes offres fufi'ent irrégulières & infiffifantes pour me libérer
envers les créanciers des engagemens que m’impofoi: l’obten
tion de mes lettres de ratification , je fuis au moins valablement
libéré envers le citoyen G e r le , de la fomme de quarante-huit
mille liv. que j ’étois chargé , par mon contrat d’acquifition, de
paver à fes créanciers, fauf le recours du citoyen G e rle , ainfl
qu’il avifera contr’eux.
P
r e m i è r e
P
a r t i
e.
J 'a i pu obtenir des lettres de ratification. T o u t acquéreur a.
le droit de détacher les hypothèques du fond & de les convertir
en aûions. fur le prix ; j’ai pu exercer ce d ro it, fur-tout dès que
l ’interdiftion ne m’en étoit pas faite par mon contrat. V oilà
autant de propofitions inconteftables.
J ’ai obtenu des lettres de ratification; elles m’ont obligé au
rapport du prix envers les créanciers, & en faifant ce rapport,
non feulement j ’ai été libéré envers le citoyen G e r le ; mais
encore il en eft réfulté une a£Hon de ma part contre lui, en reftitution de ce que je lui avois payé fur ie prix de mon acquit
fition.
Mes lettres de ratification font donc valables; auffi perfonnc,
jufqu'ici,n’a fongé à les attaquer; cette validité fubfifte,quelque
foit le mode du rapport que j'aie dû faire aux créanciers, & on
ne peut être divifé que fur ce mode.
A cet é g a r d , je ne difTimule pas les difficultés qui s’élèvent
lorfqu’une acquifition a été faite à la charge d’une rente per
pétuelle ou viagère. L ’édit de 1 7 7 1 , concernant l’édit des hypo
thèques, ne s'eft point expliqué fur l ’obligation de l’acquéreur
à titre de rente, lorfqu’il obtenoit des lettres de ratification ;
cet édit parle Amplement du rapport ôc de la confignation du;
prix.
�( 2«
Les commentateurs de cette loi ne font point d’accord fur
ie mode du rapport du p rix , & fur la.fixation de ce prix dans
ce cas.
• « La principale condition , dit l’un d’e u x , attachée à la faveur
« accordée aux lettres de ratification , eit de configner un
« prix. Cela réfulte de la difpofirion de 1 article îp , qui fup« pofe un prix à configner de la part de l'acquéreur, & à diftri«• buer entre les créanciers. 11 eft en effet difficile de concevoir
« qu'un acquéreur acquière le droit de purger les hypothèques,
« fans être ob ligé, en remplacement, de délivrer un prix aux
« créanciers, comme en décret volontaire auquel les lettres de
« ratification ont été fubftituées. D ’ailleurs, fi l’acquéreur n’in« diquoit pas un p rix , ce feroit ouvrir la porte la plus large
« aux fraudes : les créanciers n’auroient plus la faculté d’enché« rir qui leur a été accordée pour qu ils puffent fe mettre à
« l’abri des fraudes qui pourroient fe pratiquer entre le vendeur
« & l’acquéreur ».
Il s’explique enfuite ainfi : « Par rapport aux acquéreurs à
« titre de rente foncière & de rente v ia g è re, il fe préfente un
« peu plus de difficulté. J ’ai vu foutenir que l’acquéreur ne de« voit configner que l’expédition de fon contrat, qui tenoit lieu
« de prix.
« Mais ce parti paroît impraticable. i ° . L a confignation a
« pour but l’ordre & diftribution du prix entre les créanciers.
« O r,com m ent procédera la diflribution d’un contrat de rente?
« On ne pourroit pas forcer un créancier à fe payer en une par« tie de contrat de rente, à prendre, par exem p le, cinq livres
« fur la rente , en paiement de cent livres; un créancier ne peut
« être forcé de fe payer autrement qu’ en argent, a 0. L a faculté
« d enchérir a été accordée aux créanciers oppofans, comme
a nous venons de l’ob ferv er, pour éviter les fraudes qui pour« roient fe pratiquer entre le vendeur & l’acquéreur, relati« vement au prix de la vente: o r , félon ce fyftême, les créan« ciers y remédieroient difficilement ; plufieurs ne voudroienc
« pas acquérir à titre de rente foncière , 6c faire des enchères.
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M
( aa )
« fur le taux de la rente, il paroît donc q u e , dans ce cas, Tac« quéreur doit égalem ent, en foumettant fon contrat, mettre un
« p rix à l’héritage acquis à titre de rente foncière, ou moyen« nant une rente viagère , fauf fon recours à fon vendeur, à l’effet
c de faire cefler les oppoficions qui pourroient furvenir».
Cela étan t, j ’ai d û , comme j'ai fa it, fixer un prix pour
la montre , 6c un autre pour le capital de la rente viagère
de cinq mille livres; fi je n'avois pas pris cette précaution ,
les créanciers auroient pu s’en faire un moyen pour attaquer
. mes offres d’irrégularité. Cette fixation une fois faite, le prix
a été irrévocablement déterminé ; il ne peut plus varier; s’il
eut été trop bas, il ne dépendoic que des créanciers de faire
des enchères. L e défaut d enchères 6c l’obtention des lettres
de ratification forment une fin de non recevoir contre toute
réclamation fur la fixation.
D ’après c e la , qu’a i - j e dû configner? i.* La fomme de
cent trois mille trois cents trente livres, à laquelle a été fixée
le prix de mon acquifition. Il étoit indifférent qu’il eut été ftipuié que je me retiendrois deux mille livres pour le paiement
d’une rente viagère envers la citoyenne Laville. A u x yeux
des créanciers, les ftipulations particulières fur le prix d’entre
le vendeur 6c l ’acquéreur difparoiffetit ; l’acquéreur qui obtient
des lettre* chargées d’oppofition , cefTe d'ôcre le débiteur d’un
fe u l, il efl déchargé de toute délégation ; il doit le prix inté
gral à tous les créanciers oppofans. C ’efl ce que perfonne
n ’ig n o r e , 6c cela doit d'autant plus avoir lieu q u e , dans
l’efpèce, je n’ai contra&é aucun engagement avec la citoyenne
L a v ille , qui n’eft point partie dans mon contrat, 6c qu’elle n’a
point formé oppofition à mes lettres.
2.° J ’ai dû configner un capital pour la rente v ia g è re , je
l’ai fixé à cinquante mille livres.
3°. La fomme de deux mille liv r e s , à laquelle j ’ai fixé la
valeur de la montre à l'époque des lettres , valeur qui n’a
plus dû varier, malgré la baiffe fucceffive des aifignatt. Cette
�33/
{ »3 )
variation n’a pu en introduire dans les prix une fois déter
minés,
T o t a l , cent cinquante-cinq mille trois cents trente livres.
4 °. Les intérêts de cette fomme à compter du a j m eflidor,
an j , date de mes lettres de ratification.
O r 4 ma confignation qui eft de. cent q u a t r e - v i n g t - d i x
mille trois cents trente livres, eft plus que fuffifante pour faire
face à la fomme capitale & aux intérêts, même en comptant
ces intérêts pour moitié, fur le pied de la valeur des ç rain *,
d’aprè« la iuppofition qu’on peut leur appliquer la loi du a
therm idor, an 3. J e me difpenfe d’entrer dans des c a lc u ls,
à cet ég a rd , qui ne feroient propres qu’à laffer encore plus
In te n tio n , qui l’eft déjà aflez par l’examen d’une affaire de
cette nature ; je le ferois d’ailleurs inutilement, parce que je
ne dois pas craindre que cette fuffifance foit attaquée, & que
je ferai toujours à. temps de rétablir. J e prie feulement de ne
pas oublier que par l'à&e du 8 frimaire , an 4., j ’ai déclaré que
j’offrois & que je confignerois la fomme de cent quatre-vingtdix mille trois cents trente livres, tant pour le citoyen G e r le ,
cjue pour les créanciers , pour tout ce qu’il feroit décidé que
je devrois, fauf à s’arranger entr’eux ; 6c que je confentois
qu’ elle fut affe&ée en entier aux créanciers, attendu que je
n’étois pas obligé de faire des offres direftement au citoyen
G e r l e , & que je ne lui en avois fait que furabondamment.
» T o u t fe réduit d o n c , fous ce premier point de vue., à
favoir fi mes offres de cent quatre-vingt-dix.mille trois cents
trente-trois livres font fuffifantes ou non.
Suppofons actuellement que le mode de fixation du prix de
mon acquifition ne.dût pas être adopté; fuppofons que je n’aie
pas pu rembourfer le capital de. la,.rente viagère de cinq mille
livres , & que le. tribunal le décide ain fi, eh bien ! dans ce
cas même j il n'en réfultera autre ch o fe, fi ce n’eft que je ne
ferois pas libéré de cette rente, & que j ’aurois dû en conti
nuer le paiement ( iauf néanmoins les droits que me donnent
le» claufes de mon co n trat, de la remplacer par la jouiffance
�(
)
du bien). Mais je foutiens que je ferai toujours libéré du prix
que j’aurois dû rapporter dans cette dernière hypothèfe; ôc
encore à plus forte raifon , puifque le prix devra être moindre
de cinquante mille livres.
En e ffe t, je n’aurois dû que la fomme de cent trois mille
trois cents trente-trois livres pour le prix de mon acquifition,
ôc la fomme de deux mille livres pour la valeur de la montre ,
dont la fixation doit toujours fufofifter, ce qui fait en tout
cent cinquante-cinq mille trois cents trente livres, avec les
intérêts à compter du 2$ meflidor , an 3 ; o r , tout cela eft
plus que couvert par ma confignation de cent quatre-vingt-dix
mille trois cents trente livres.
Ain fi, fous quelque point de vue qu’ on envifage la fixa
tion du p r i x , je foutiens mes offres fuffifantes, ôc par conféquent la confignation opère ma libérarion.
Suppofons encore que , fous ce fécond rapport, je n’euffe
pas pu fixer moi-même la montre à deux mille liv re s, il ne
s’agiroit que d’en ordonner i’eftimation par des perfonnes de
l ’a rt, à l’effet de juger la fuffifanCe de mes offres, ôc l’on
fent que cette valeur eftimative devroit être fixée à l’époque
de mes lettres, époque à laquelle le prix de mon acquifition
a du prendre une fixité , puifque c ’eft à cette époque que j ’ai
contra£té avec les créanciers.
J ’ai entendu o ffrir, ôc j ’ai offert en effet, tout ce que
je pourrois d e v o ir, en vertu de mes lettres de ratification ,
fur le filence des créanciers qui ont toujours refufé de s’expli
quer à ce fu je t , qui par conféquent n’ont mis aucune condi
tion à mes offres, ôc fur le fimple refus de certains d’e u x , à
ce que je confignaffe, fans en donner d’autre raifon. N on feu
lement mes offres font fuffïfantes, mais elles pourroient encore
contenir un excès ati-deffus de ce que je devois rigour.eufem e n t , & on fe fera , p eu t-être, contre moi , un moyen de
cet excès que je dois prévoir.
O r , il eft impoffible d’attaquer férieufement des offres,
fous le prétexte quelles font plus que fufftfantes. J e fais bien
que
�33 °)
( ' 21')
que D e n iz art, au mot offres, n°. 3 , dit: « Q u e des offres réelles
« doivent être faites au jufte de ce qui eft d û ; elles ne doivent
« être ni de plu s, ni de m oins; elles doivent défintéreffer le
« créan cier, & ne pas ‘ rexp ofer , s’il les a cc ep te, à une
« demande en reftitution pour le trop p a y é , ni demander un
« fupplément, parce qu’étant faites pour tirer les parties d’af« faire, elles ne doivent point contenir matière à de nou« velles demandes».
Mais l’opinion de cet auteur eft ifolée ; elle n’eft fondée ni fur
aucune loi ou règlement, ni fur les lumières de la raifon ;
toutes les l o i s , en effe t, difent feulement que les offres doi
vent être fuffifantes. O n ne trouve nulle part qu’elles doivent
ne pas contenir d’excès à peine de nullité ; or-, peut-on pro
noncer une nullité qui n'eft ordonnée par aucune loi ? 11 n’y
avoit p a s, fous l ’ancien ré g im e , de matière où l’on dût obferver plus rigoureufement les formes que celle du retrait. Cepen
dant on n’a jamais fongé à déclarer un retrait n u l, par la raifon
quJon auroit offert plus qu’il n’auroit été réellement dû. Aufli
'dans tous les formulaires anciens & modernes, voit-on dan*
les ades relatifs aux offres, cette claufe qui eft devenue de
flyle général > f a u f à fu p p le e r, parfaire ou recou vrer, & il
n’eft jamais venu en idée que fi le cas de recouvrer arrivo it,
il en réfultât une nullité. En un m o t , c ’eft un principe que
c e qui abonde ne vicie point. Utile per inutile non viciatur.
Mais quand on pourroit trouver quelque apparence de fon
dement à l’opinion de Denizart qui a décidé ainfi , de fa
propre a u torité, elle ne recevroit aucune application au cas
dont il s’agit.
E n effet, -mes offres ont été dirigées fous le rapport de mes
lettres de ratification, à des créanciers oppofans entre lefquels
il devoit être fait un ordre & diftribution. O r , des créanciers
qui ne s’accordent point, fur le champ, pour recevoir des fommes offertes, ne peuvent jamais être expofés à une a£lion en
reftitution ou recouvrement. L ’ordre fe fait entr’eux par la
juftice, & chacun va toucher le montant de fa collocation.
D
�{2d >
S ’il y a un refte, c’eft à celui qui a configné à le retirer, fi
bon lui fem b le, du bureau de ia recette. Oti ne voit donc
pas quel inconvénient il peut réfulter d’un excès dans les offres.
j e dois encore m'attendre, d'après ce qui a été dit par
quelques créanciers affiliés du citoyen G e rle , à voir oppofer
que. mes offres font irrégulières, en ce que j ’aurois dû offrir
les intérêts du prix en grains en nature , & non pas feulement
leur équivalent.
Mais ce moyen eft une chicane qui fe réfute aifément.
Encore une fois , quand j ’ai offert fous le point de vue de
mes lettres de ratification , c ’eil à des créanciers oppofans que
j ’ai offert ; ce n'eft pas au citoyen Gerle.
G r , ce fereit pour la première fois qu’on prétendroit que
l’on a du offrir à des créanciers oppofans des grains en nature;
on auroit pu au contraire arguer de nullité mes offres, fi elles
avoient été telles. On ne peut offrir à des créanciers oppo
fans que du iigne monnétaire , parce que c ’eft la feule choie
qui puiffe fe diftribuer entr’eux. Ce feroit une idée vraiment
ridicule qu’une diftribution d’ordre de grains ou de farine;
elle eft combattue, cette id é e , par les principes développés
par le commentateur de l’édir des hypothèques , déjà cité ;
elle eft démentie par la pratique confiante des tribunaux.
D ’ailleurs, il eft de rè gle , qu’au défaut de la chofe , le débi
teur ne peut être condamné qu’à en payer l’équivalent. On
ne faurait im aginer, en droit, un autre genre de condamna
tion. C'eft ce qui réfulte de la loi du ? brumaire, an 4 ,
& autres fuivantes qui ont modifié la loi du 2 thermidor ,
an 3 ; c ’eft ce qui s’eft toujours pratiqué à l’égard des fermiers
mêmes qui refufoient de délivrer des grains en nature.
Il y a plus encore , c ’ eft qu’en fuppofant qu’on puiffe m’ap
pliquer toutes ces lo is, je prouverois s’il en étoit befoin ,
que je me trouvois placé dans les cas d’exception qu’elles
établiffoient relativement à la nécefficé de payer la moitié des
revenus en denrées. J ’établirois que pendant deux a n s , je n’ai
reçu ni grains ni aflignats du fermier du m oulin, qui a fait
faillite ; & que je n ’avois pu toucher pour le furplus que de9
�w
( 37 )
afïîgnats , Jenforte que je faifois prendre carton par carton ,
au marché au b lé , ce qui étoit néceflaire pour ma fubfsftance
6c celle de ma famille.
S
e c o n d e
P
a r t i e
.
J e me flatte d’avoir établi la validité de mes offres faites
refpe&ivement aux créanciers, d'où il réfultera que je fuis plei
nement libéré de tout ce que j ’ai pu devoir à raifon des engagemens que j'ai contra£tés par mon a£te d acquifition.
C e p e n d a n t , fubfidiairement & dans le cas feulement où les
oifres faites aux créanciers en conféquence de mes lettres de
ratification , feroient rejetcées, ce qu’il n’eft pas permis de pré
fum er, j ’établirai que ma confignation devoit toujours fubfifter
& opérer ma libération , quant à la fomme de quarante-huit
mille livres que j ’ai été chargé par le contrat de vente de payer
aux créanciers que le citoyen G erle devoit m’indiquer dans le
délai de fix mois.
On fe rappelle que mes offres ont toujours eu deux objets ;
celui de me libérer d’abord de cette fomme de quarante-huit
mille livres, 6c enfuite de ce que je pourrois devoir aux créan
ciers ©ppofans en conféquence de mes lettres de ratification.
J ’étois expofé à deux a&ions, l’une de la part du citoyen G e r ïe ,
en verfement de la fomme de quarante-huit mille livres, l’autre
de la part des créanciers, en rapport du prix entier de mon
acquifition. O r , dans toutes les conteftations qui fe font élevées,
au milieu des difficultés dont j’ai été entravé à chaque pas, j'ai
toujours voulu me libérer de la fomme de quarante-huit mille
liv. On a même vu que c’eft principalement cette fomme dont
j ai voulu vider mes mains en celles des créanciers. Il faut donc
diftinguer deux chofes abfolument différentes; la fomme de qua
rante-huit mille livres due au citoyen Gerle , pour fes créan
ciers, & le furplus de ce que je pçuvois devoir aux créanciers,
pour purger leurs hypothèques, en vertu de mes lettres.
J e fuppofe que mes offres fuifent infuffifantes ou irrégulières
par rapport aux créanciers, comme créanciers oppofans, il eil
au moins impoffible qu’il en foit de môme de celle de quarante-
s»
�( 28 >.
huit mille Iiv. refpe£livement au citoyen G e r le ; les offres de
cette fomme reftent toujours: elles ont été le commencement
de ma procédure; elles en ont été conftamment le but & la fin.
J ’étois dans tous les cas obligé de payer cette fomme, j ’ai voulu
le faire. L e citoyen Gerle n’a jamais pu m’en faciliter la libé
ration. S ’il eft v r a i, comme je vais le démontrer , que j ’aie
toujours dû la configner, il eft impoifible de concevoir comment
cette confignation feroit fans effet.
Cette fomme de quarante-huit mille livres eft abfolument in
dépendante & féparée de toutes les autres; elle forme un article
diftinû d’après les claufes de mon contrat, dans l’idée même du
citoyen Gerle. J ’ai dû la p ayer aux créanciers qui me feraient
indiqués dans f î x mois : voilà donc ce dont j ’ai pu me libérer
après l’expiration des fix mois. L e citoyen G erle a dû faire
toucher cette fomme par les créanciers, & fon impuiifance à
ce fujet a dû donner lieu à la confignation : je pouvois même me
difpenfer de faire des offres à des créanciers, & configner fur le
défaut d’indication de la part du citoyen G e rle : j ’étois dans la
pofition du débiteur de billets à ordre, qui pouvoit en configner
le montant chez le receveur, trois jours après l’échéance, fuivant la loi du 6 thermidor, an
Aufii le citoyen Gerle a-t-il toujours reconnu, par l’organe de
fon fondé de pouvoir, qu’il ne pouvoit empêcher ma libération
de cette fomme. Au bureau de conciliation , ce fondé de pouvoir
déclara : « Q u ’il confentoit à la diftribution de la fomme de
« quarante-huit mille livres, offerte par le citoyen A lbert, entre
« tous fes créanciers oppofans au bureau des hypothèques ; il a
« obfervé que cette fomme étoit plus que fuffifante pour les
« remplir du montant de leurs créances ».
Lors du jugement du j frimaire, an 4., il a tenu le même lan
g a g e ; il a confentique « S u r la fomme de quarante-huit mille
« livres reftée entre mes m ains, ôc deftinée au paiement des
« créanciers , le citoyen Chaflaing reçut le montant de fa
« créance; il a confenti que fur cette même fomme de qua« rante- huit mille livres, le citoyen V allet reçut celle de trente« cinq mille livres, & c . ».
�3 **
( 29 )
L e citoyen Gerle a donc'reconnu que j ’étois en droit de melibérer de cette fomme de quarante-huit mille livres. A la v é
rité , ion fondé de p o u v oir, au bureau de conciliation, avoit
déclaré qu’il confentoit que l ’excédent de ce qui reviendroic au
citoyen V a l l e t , & qu’il fixoit à trente-cinq mille liv r e s , rejlât
en mes m ains y jufqu’à ce que le corps légiflatif auroit pro
noncé définitivement fur le mode de rembourfement des dots
& droits légitimâmes réclamés par le citoyen Chaflaing. Mais
cette propofition étoit ridicule; on ne pouvoit ni empêcher
ma libération, ni me forcer à être moi-même plus long-temps
dépofitaire de ce que je devois. D ’ailleurs le réfultat de ce
d é p ô t , s’ il eût pu êtne -continué , feroit le même que celui
de la confignation ; auiîi ce fyilême fut-il abandonné , lors
du jugement du j frimaire , an 4. L e citoyen Gerle confentit
alors à ce que je vidaffe mes mains de cette fom m e; il prévit
la confignation par le refus de recevoir de la part des créanciers,
& notamment de la part de V a lle t , avec lequel il étoit en difculfion fur la fixation de fa créance. Mais il reconnut que les
fuites de ce refus ne pouvoient m’être imputées , puifqu'en
répétant ce qu’il avoit encore dit au bureau de conciliation ,
il dit qu'au cas de refus de la part du citoyen V a lle t , il deman
dait qutvcelui-ci demeurât refponfable de l événement de la con
fignation;
Il n y a donc nulle difficulté pour la confignation de la
fomme de quarante-huit mille livres; fi les créanciers l’ont
refufée mal-à-propos, je ne fuis pas moins lib é ré , fauf feu
lement le recours du citoyen G erle contr’eux ÿ le citoyen
ainfi reconnu, & il ne peut revenir contre un contrat
judiciaire.
Linfuffifance ou l’irrégularité qu’on pourroit fuppofer dans
mes offres refpe&ivement aux créanciers, comme créanciers
oppofans aux lettres, ne peut, dans aucun c a s, influer fur
mes offres & ma confignation de la fomme de quarante-huic
mille livres. Malgré l ’obtention de mes lettres d e n tific a tio n ,
j ’ai offert d’entrée d e c a u fe , au citoyen Gerle quarante-huit
�(3 ° )
mille liv r e s , feulement pour fes créanciers. Au bureau de
conciliation , j ’ai offert feulement quarante-huit mille livres.
L e citoyen Gerie admet la validité de mes offres & charge
fes créanciers de l’événement de la jconfignation ; les obfervations des créanciers me portent à augmenter mes offres, en
ce qui peut les concerner feulem ent, pour parer à une action
en rapport du prix total de mon acquifition ; n’im porte, le
citoyen Gerle diftingue toujours dans mes offres la fomme de
quarante-huit mille livres; il tient, lors du jugement du f
frimaire an 4 , la même conduite qu’au bureau de conciliation;
il reconnoît que mes offres à tout événem ent, me libéreront
toujours de quarante-huit mille livres. Lorfque je fignifie le
jugem ent, par l ’a£le du 8 frimaire., an 4 , je déclare que je
configne les cent quatre-vingt-dix mille trois cents trente livres,
tant pour le citoyen Gerle que pour les créanciers; je finis par
en revenir aux quarante-huit mille livres, et je déclare que
fi l’on veut s’a cco rd er, je ne confignerai que cette fomme.
11 eft donc vrai que j ’ai configné pour le citoyen Gerle quarantehuit mille livres; cela efl aufîi certain qu’il l’efl que la fomme
de quarante-huit mille livres efl contenue dans celle de cent
quatre-vingt-dix mille trois cents trente livres. S ’il y a une
infuffifar.ee ou une irrégularité dans mes offres, elle ne pourra
jamais être relative qu’à l’excédent des quarante-huit mille
livres ; c ’eft-à-dire , relativement aux créanciers , fous le point
de vue de mes lettres de ratification ; mais il ne peut jamais
y en avoir par rapport aux quarante-huit mille livres que j'ai
toujours voulu payer au citoyen Gerle pour fes créanciers,
& il a à s'imputer de n’avoir pu les forcer à la recevoir. En
la confignant, j ’ai dû être libéré de la même manière que
s’ils l’avoient reçue volontairement, fauf le recours du citoyen
G erle c o n t r e u x , ainfi qu'il l’a reconnu lui-même.
J e ne parle pas des intérêts de cetre fomme de quarante-huit
milles liv r e s , qui ne feroient dûs qu’à compter du 4 vendé
miaire an 4 , époque de l’expiration des fix m ois, après Iefquels
je devois feulement la payer. Cette fomme doit être confidérée
�2M
(3 0
féparément & par abfira&ion de toutes les autres, même de
fes intérêts. -C'eit cette fomme feule que je devois payer aux
créanciers} ou au citoyen G erle pour eux. L e citoyen Gerle
l ’a t o u j o u r s reconnu ainfi, foit au bureau de conciliation, foit
dans fes dires, inférés au jugement du f frimaire an 4 ; par
tout il n’a demandé la diftribution à fes créanciers , d’autre
fomme que de celle de quarante-huit mille livres.
J e pourrois d’ailleurs foutenir que je n’ai jamais dû d’intérêts
de cette f o m m e , abftraâion faite de mes lettres de ratification,
parce"que, même avant l’expiration des fix m ois, j ’ai mis le
citoyen Gerle en demeure de me faire l ’indication à laquelle
il étoit tenu;, en fin , s’il étoit décidé que je du (Te les intérêts
de cette fomme de quarante-huit mille liv r e s , qui feroient
très-modiques, ils feroient contenus , & bien au-delà dans
ce que j ’ai con fign é, tant pour le citoyen Gerle que pour les
créanciers, outre la fomme de quarante-huit mille livres.
Il ne me refte qu’à dire un mot fur cette prévention qu’011
cherchera à infpirer contre mes offres, parce qu’elles ont été
faites en papier-monnoie.
Mais d’abord cette prévention qui doit toujours être bannie
des tribunaux, feroit-elle en elle-même fage et jufte ? Entreroitil dans nos principes républicains de s’ingénier, pour ainfi dire ,
pour trouver des moyens d’irrégularité contre des offres, par
cela feul qu’elles auroientété faites en papier-monnoie, pour
adopter des objections enfantées par l’efprit de chicane , et
qui , fi les offres étoient en numéraire m étallique, feroient
rejettées avec indignation, ou pour mieux dire , ne feroient
point faites? J e fais que les tribunanx ont manifefté la plus
grande prévention contre des offres faites, avec affectation ,
dans le temps du diferédit d'un papier-monnoie propofé , il
y a environ foixante a n s , par un étranger intrigant qui
cherchoit à établir fa fortune fur les débris de celle de l’état,
& qui fut accueilli avec légereté par un ci-devant prince qui
fejouoit du bonheur des Français; mais ces idées peuvent-elles
convenir à des offres faites en un papier-monnoie, auquel nous
�(
)
fommes redevables du fuccès de notre révolution ? Ce feroic une
erreur bien dangereufe que de fe laiffer entraîner par les irnpreflions qui peuvent réfuiter de la chute de ce figne. Il faut fe
reporter au temps de fa circulation , à l’époque où les offres ont
été faites. O r, il étoit alors de l’intérêt national qu'il fut maintenu
dans la plus grande a£Hvicé. On fe Iibéroit de la même manière
qu’on étoit payé. Le légiflateur ne doit voir dans ces opérations
qu’ une grande compenfation, & il ne peut être touché de quel
ques froiffemens d’intérêts particuliers qui s’anéantiffent devant
J ’intérêt général. O r , les organes de la loi peuvent-ils prendre
un efprit différent de celui de la loi même? Si on abandonnoic
czs idées; fi on y-fubftituoit des motifs étrangers à la lo i, on
rifqueroit d’exciter des regrès dans l’efprit des bons citoyens
qui s’y font fournis, & de paroître récompenfer l’égoïfme de
ceux qui l’ont éludée, ce qui feroit l’exemple le plus funefte
pour l’ordre focial.
J e fais que l ’on ne manque guère de fonder la défaveur
qu’on veut jetter fur des offres faites en papier-monnoie fur le
confiderant de la loi du 12 frimaire, an 4 , qui porte; « L e con« feil des cinq cents, confidérant qu’il eft de ion devoir d’arrê« ter le cours des vols que font journellement à leurs créan« ciers des débiteurs de mauvaife foi ». Avec quelle complaifancc ne relève-t-on pas le mot vols ? Mais on fait auffi que
c ’eft très-fouvent par un abus de raifonnement. En prenant le
mot vols ifolém ent, on lui donne une idée générale que le
légiflateur n’a certainement pas voulu lui attribuer, puifque
c ’eût été avilir la monnoie nationale. Il ne faut pas le détacher
des termes qui fuivent, des débiteurs de mauvaife f o i , qui parcicularifent la première exprelfion de vols.
O r , fuis-je un débiteur de mauvaife fo i? M o i qui ai acheté
un bien à un prix exorbitant fit effrayant, par la feule raifon que
je devois payer en afiignats dans fix mois ; qui ai eu à lutter con
tre des chicanes fans fin , inventées de la part des créanciers du
citoyen G e r le , qui ont été pour moi des ombres continuellement fugitives, 6c qui, ainfi que le citoyen G e r l e , ont fait tous
leur«
�leurs efforts pour Iaiffer oififs entre mes mains des fonds que j’a
vois préparés pour ma libération dès l’inftant de mon acquifition.
I l eft de toute évidence que cette acquifition a été pour moi
une fource d’embarras, de foucis & de m a u x ; cependant mes
propres malheurs ne m’ont pas rendu infenfible à la perte dont
le citoyen G erle a été menacé par l’événem ent, quoiqu'o n ne;
puiffe l’imputer qu’ à lui feul.
M algré la validité de mes offres & de ma confignation , j ai
fait o ffrir, pendant le cours de l ’inftance, au citoyen G erle
une fomme de dix mille livres, payable à termes avec intérêts ,
en me donnant toute fureté à l’égard de fes créanciers; }’ai de
plus offert de payer la rente viagère de deux cents livres à la
citoyenne L a v ille , & une rente viagère de treize cents livres
au citoyen G e r le , dont un tiers feroit reverfible fur la tête du
citoyen Chriftophe-Antoine G erle , fon frère; je me foumettois
encore de payer les arrérages de la rente viagère pendant ma
jouiffance, au même tau x; enfin, je lui abandonnois la moitié
de l’effet de la confignation. Cette propofition a été refufée.
S u i s - j e donc un de ces débiteurs auxquels on puiffe appli
quer les expreff ions de la loi du 1 2 frimaire ? L ’aveu que je viens
de faire de ce procédé, ne me nuira fans doute pas dans l'efprit
de mes juges. J e joins l'honnêteté au bon d ro it, & je n’en fuis
pas moins bien fondé à foutenir la validité de ma confignation,
ce qui eft la feule queftion qui leur foit foumife. J ’ai tout lieu
d ’efpérer qu’elle fera prononcée, parce qu’il n'eft pas poffible
que le citoyen G erle foit récompenfé d’avoir éludé fes engagem ens, & que je fois puni de mon empreffement, je dis plus
en c o re , de la néceffité où j ’étois d’exécuter les miens, au mo
ment où ils l ’ont été
Signe A L B E R T
A
R I O M , de l’imprimerie de M
artin
DÉGOUTTE ,
Im prim eur-Libraire, vis-à-vis la fontaine des Lignes. A n V I
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Albert, Claude. An 6]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Albert
Subject
The topic of the resource
assignats
créances
biens nationaux
ventes
moulins
rentes viagères
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le citoyen Claude Albert, fils aîné, demandeur en validité d'offres. Contre les créanciers du citoyen Joseph Gerle, défendeurs. Et encore contre ledit citoyen Joseph Gerle, aussi défendeur.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 3. comment un acquéreur qui a acheté en l’an 3 des immeubles dont le prix consistait en une somme déterminée, et, de plus, en une rente viagère, peut-il, après obtention de lettres de ratification, se libérer, par des offres et une consignation, envers les créanciers opposants ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 6
1795-An 6
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
33 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1215
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Mozac (63245)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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assignats
biens nationaux
Créances
moulins
rentes viagères
ventes
-
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Text
PRÉCIS EN RÉPONSE,
POUR J
acques
C H O U S S Y , Géomètre, demeurant
à Cusset, Intimé ;
C O N T R E Jean-Claude P L A N T A D E R A B A N O N , propriétaire , demeurant au lieu
de C h itain , commune de Saint-Christophe , dépar
tement de l 'A llie r , Appelant.
C e t t e cause offre le h ideux spectacle d'un débiteur
de mauvaise fo i, q u i, pour se soustraire au payement d’une
dette constante et avérée, épuise d’abord les subterfuges
ordinaires de la chicane; et se ro idissant contre l’autorité
de la chose ju gée, cherche enfin par d’odieux détours et
d’affreuses calomnies, à rendre illusoires des condamna
tions bien motivées, prononcées en dernier ressort, aux
quelles il a formellement acquiescé et à remettre en question, dans un nouveau tribunal, sur un autre territoire où
il est moins connu,ce qui a été irrévocablement décidé par
ses juges naturels et compétens.
A
�Telle est l’idée sommaire de ce procès vraiment scan
daleux : les détails en sont révoltans. Hatons-nous de les
retracer , pour détruire les effets de la perfidie avec la
quelle ils ont été tronqués dans le précis im prim é de Plan»,
tade-Rabanon.
F A I T S .
Claude Busseuil, fermier de la terre de C liitain, subroge,,
le 4 avril 1 7 8 1 , Pierre Choussy, père de l’intim é, à l'effet
de son bail ; il le charge de rendre, à sa sortie, au proprié
taire ( Laqueuilhe ) un cheptel montant à 3^894 f r .,
et lu i v e n d e n o u tre tous les b estia u x q u i e x c é d o ie n t ce
cheptel, avec quelques autres objets, moyennant 3 ^ 9 6 fr.
L e 27 mai 1783., Pierre Choussy renouvelle sa ferme
avec le propriétaire (Laqueuilhe ) pour neuf ans, finissant
au 24 juin 17 9 2 , et se charge de laisser , à la fin de son
b a il, pour 3,894 fr. de bestiaux, comme en étoit tenu Bùsseu il, précédent ferm ier : le p rix de la ferme étoit de
8,000 fr.
L e 12 janvier 179 2 , Pierre Choussy afferme encore
cette même tei*re p o u r trois ans , finissant au 24 juin 179 5
(an 3 ) , aux mômes clauses et conditions ; mais le fermage
est réduit à 4,300 fr. à cause de la suppression des droits
féodaux, avec convention que le p rix sera augm enté, si
ces droits féodaux sont rétablis avant la fin du bail.
Au. mois de juin de la même année ( 1 7 9 2 ) , Jacques
Chousjy- fils prend desarrangemens avec Pierre son père,
qui le subroge à la ferme dé Chitain. Choussy fils, intim e,
y va résid er,et en prend ^administration.
Laqueuilhe est porté sur la liste defi émigrés.} ses biens.
�C3 )
\
sont confisqués et mis en vente; la terre de Çhitain est
vendue par lots séparés : Plantade-Rabanon achète la ré
serve et les domaines de Chitain et de Jon in ain , le 2. bru
maire an 2.
Un arrêté de l’administration centrale du département
de l’A llie r, du 2 1 ventôse an '2, > pris sur l’avis de celle
du district de Cusset, annulle le dernier bail de ferme de
la terre de Chitain , et le condamne aux flammes , à raison
de la clause d’augmentation du prix stipulée en cas du réta
blissement des droits féodaux supprimés. Jacques Choussy est dépossédé de. sa ferme au 24 juin
l794(m essidoran 2) ; Plantade-Rabanon et lesautres acqué
reurs en tren t en jouissance des lots par e u x achetés , et font
procéder par deux experts, le 14 du même m ois, à l'es
timation des bestiaux ; et comme le nombre étoit supé
rieur à celui qui avoit été l’objet du cheptel, l'estimation
dut par là même excéder de beaucoup le montant de ce
cheptel.
Choussy, qui avoit quitté la ferm e, et qui laissoit ses
bestiaux, désiroit en recevoir le prix ; il presse Plantade
de te rm in e r avec lu i, comme avoient fait les outres acquér
,1‘curs. Plantade di/Fèrc, lui d e m a n d e divers délais, et
l’oblige à faire des voyages inutiles et fatigans.
Choussy va trouver le représentant Forestier, alors en
séjour ù Cusset, avec qui Plantade étoit intiméinent lié ;
il le prie de le concilier avec son ami. Forestier lui dit
qu’il peut écrire i\ Planlade, et l’inviter desa part h terminer
•cette affaire. Choussy écrit la lettre du 29 messidor an 2 ,
im prim ée à la suite du précis de P lantade ; celui-ci garde
A z
�>4 }
le silence pendant quinze jou rs; enfin, le 14 therm idor,
il écrit à Choussy la lettre suivante :
« J e vous p rie , mon cher citoyen, de venir ici après
« demain 16 du couran t, et d’apporter, comme nous en
« sommes convenus , les baux des métayers de Chitain et
<r Jo n in a in , et votre b a il, ainsi que les papiers que vous
« croirez nécessaires. Tous mes hommages à votre ci
te toyenne. Salut et fraternité, et signé P lan tad e . »
Choussy ne manque pas au rendez-vous, et le 17 mes
sidor an 2 ,les parties règlent définitivement leur compte.
Choussy modère même l’estimation des bestiaux; Plantade lui paye une somme de 2 r5 oo fr. assignats, et lui sous
crit u n billet de 2,892 fx*. 80 cent, /payable le prem ier ger
minal an 3. Choussy lui remet les baux à cheptel des mé
tayers, et les autres papiers relatifs à la ferme de Chitain.
L e lendemain de l’échéance ( 2 germinal an 3 ) , Plantade fait à Choussy fils, absent, un acte d’offre du montant
du billet de 2,892 fr. 80 cent., ù condition , r .° qu*il éta
blira sa qualité de ferm ier; 2.0 que dans la quittance qu’il
fou rn ira, il sera tenu de réserver au citoyen Plantade le
bénéfice de toutes lois qui pourroient in te r v e n ir su r les
ch e p te ls. C et ncto étoit n u l p ar vice de forme , et ridicule
dans son contenu. Choussy le regarde comme non avenu ,
et cite Plantade, le 6 germinal an 3 , devant le bureau de
p a ix , pour se concilier sur la demande eu payement du
billet et de quelques autres objets.
Plantade persiste dans son acte d’offre, et la conciliation
n’a pas lieu.
1 3 germinal an 3 , demande en condamnation du mon
tant du billet..
�( 5)
25 du même m ois, jugement par défaut du tribunal de
C u sse t, qui condamne Plantade à le payer.
L e 28 du même mois Plantade y forme opposition.
L e 22 floréal an 3 , il intervient un second jugement par
défaut, qui déboute Plantade de son opposition, et donne
acte à Pierre Choussy père de la déclaration par lui faite,
que la ferme de Chitain appartenoit, depuis 1 7 9 2 , à
Choussy fils, intim é, et qu’à son égard il n’avoit rien à
prétendre.
Plantade appelle de ces deux jugemens. L a cause est por
tée au tribunal de district de Gannat, où il intervient, le 1 1
"vendémiaire an 4 , un troisième jugement par défaut, qui
confirme les deux premiers.
Plantade y forme encore opposition devant le tribunal
civil du département de l’A llie r, qui venoit alors d’être
installé.
L a cause se plaide contradictoirement. Plantade répète
que Choussy père étoit seul fermier ; qu'il n’a pu traiter va
lablement avec le fils; qu’il s’étoit glissé des erreurs consi
dérables dans l’arrangement par lui fait avec Choussy fils j
que cet arrangement,et le billet de 2,892 francs 80 centimes
qui l’a s u i v i , so n t le fruit de l’e rreu r, dé la surprise, etc.
Et le 3 pluviôse an 4 , Je tribu nal civil de TAllier rend un
quatrième jugement, en dern ier ressort, par lequel, sta
tuant sur l’appel interjeté par Plantade, il confirme défini
tivement les deux jugemens du tribunal de Cusset, des 25
germinal et 22 floréal an 3 , prononçant la condamnation
du montant du billet.
f
Ce jugement est signifié ù Plantade. Deux ans s’écoulent^
il ne paye pas. L e 8 floréal an 6 , une saisie-exécution est
H
�lïi\
t.\K
(6)
assise sur quelques bestiaux : Plan ta de, sous la réserve de
tous ses d ro its, fournit un gardien volontaire ; bientôt il
forme opposition aux poursuites. Les parties retournent au
tribunal civil sur ce nouvel incident : la cause se plaide le 14
prairial an 6. Plantade conclut en ces ternies: « O uï Ga y ,
» pour l’opposant (Plantade) qui a conclu ù ce qu’il plaisç
» au tribunal accorder à sa p artie, en vertu de la loi du i 5
» fructidor dernier ( an 5t) terme et délai pqur tout le temps
» que cette loi permet aux tribunaux d’accorder aux débi» teurs de créances antérieures au 5 thermidor an 4 ; lui
» donner en conséquence main-levée de la saisie faite à son
x préjudice, ù la requête du citoyen Çhoussy, aux offres
jj que fait le citoyen Plantade-Rabanon de payer en même
» temps la créance principale, ainsi que les intérêts et frais
» légitimes ».
Choussy conteste le délai demandé* et il intervient un
cinquième jugement contradictoire, qui accorde à Plantade
terme et délai jusqu’au premier vendémiaire an 7 , la saisie
.tenant jusqu’ù l’entier payement.
Lorsque Plantade voit approcher le terme fixé , il élève
de nouvelles chicanes; il form e , le 5 fru c tid o r nn 6 , une de
m a n d e en d o u z e chefs , o ù il a n n o n c e qu’ily a eu des erreurs
et une lésion considérable dans les arrangenions faits entre
lui et Choussy , le 17 thermidor an 2 ; mais il ne se plaint
pas d’avoir souscrit le billet par l’effet d’une prétendue ter
reur. Cette demande est déclarée nulle paru ii sixième jugojn e n t, du 14 du même mois.
Plantade forme lui-même une saisie-arrêt, entrôses pro
pres m ains, sur Choussy , quoiqu'il n’ait ni créance, ni
titre,
‘
r
r ' ’.
. .
�C7 )
' Choüssy reprend ses poursuites. Plantade imagine alors
un nouveau système de défense ; il forme , par citation et
exploit des 17 vendémiaire et 9pluviôse an 7 , une demande
tendant à obtenir la rescision des arrangemens faits entre
lui et Choussy , ïe 17 thermidor an 2 ; i° . comme étant le
fruit de l’erreur , du d o l, des menaces , violences et dénon
ciations résultant d’une lettre du 29 messidor ( celle impri
mée à la suite du précis); 20. comme étant contraires aux
arrêtés du comité de salut public, des 2 thermidor et 1 7
fructidor an 2 , et aux lois des 15 germinal an 3 et 2 thermi
dor an 6. Il conclut à ce que les parties fassent un nouveau
compte, basé sur lés lois et arrêtés précités. P ar cette de
mande , Plantade se départ de toutes autres demandes
antérieures.
L e 24 ventôse suivant, il v a , seul et sans'citation , chez
iin notaire, pour y déposer, dit-il, une somme de i , 5oo f .,
pour payement de ce qu’il peut devoir à Choussy ; il en fait
dresser acte , et retire de suite le prétendu dépôt.
L e 19 germinal an 7 , Plantade assigne Choussy devant
le tribunal civil de FA llier, pour faire accueillir sa saisiearrêt faite sur lui-m êm c, son opposition aux(poursuites, et
faire prononcer la validité du dépôt (_iionja.it ou retiré de
suite') de i , 5oo francs, et conclut encore à l’adjudication,
des conclusions portées en ses exploits, du 5 fructidor an6 ( déclarénul')i 17 vendémiaire an 7 ,et autres postérieurs..
L a cause appelée à l’audience du 17 floréal an 7 , sur l’as
signation du 9 pluviôse seulement, Plantade ne se présentepas. Choussy demande acte du départ des autres demandes „
donné par cet exp lo it, et congé-défaut*
�( 8 )
Un septième jugement homologue ce départ, et rejette
la demande en restitution de Plantade.
Celui-ci y forme opposition. Un huitième jugem ent,
sous la date du 1 1 messidor an y , fondé sur le règlement du
tribunal c iv il, et.sur ce que la cause avoit été appelée à.tour
de rô le, déclare Plantade non recevable dans son oppo
sition.
Plantade a interjeté appel de ces deux derniers jugemens.
C’est sur cet appel qu’il s’agit de prononcer.
Plantade, qui jusqu’alors avoit presque toujours affecté
dese laisser condamner par défaut sur toutes ses demandes,
a enfin rompu le silence et publié u n mémoire im prim é,
o ù , tro n q u a n t et dissimulant tous les faits essentiels du
procès, il ne parle que de son assignation du 9 pluviôse an
7 , et des deux jugemens des 17 floréal et 1 1 messidor suivans ; il suppose qu’il n’a souscrit le billet du 17 thermidor
an 2 , que pour éviter la mort dont le menaçoient Choussy
et le représentant du peuple Forestier; et pour colorer sa
lâche im posture, il s’est livré aux diatribes les plus viru
lentes et les plus calomnieuses.
Ce simple récit des faits a déjà mis à nu la m auvaise foi de
ce d éb ite u r d é h o n te . L a ré p o n se de Choussy va faire éclater
toute sa turpitude.
L e citoyen Plantade parle ironiquement de l'épithète de
notre brave représentant , que Choussy donne dans sa
lettre au citoyen Forestier----I£h ! mais n’eSt-il pas notoire
que c’est lui-même , Plantade , qui l’a ainsi qualifié dans
ses discours et dans ses lettres aux sociétés populaires de
Ciisset et de V ichy ? Il l’appeloit avec complaisance son
doux atni\ se glorifioit d’avoir été constamment son ami
depuis
�(9)
depuis sa jeunesse , et long-temps avant la révolution; il
annonçoit par-tout qu’il étoit son conseil dans toutes ses
affaires contentieuses ; et le citoyen Plantade sait bien que
ce fut là le motif qui détermina le citoyen Choussy àparler
au citoyen Forestier des lenteurs qu'il .éprou voit dé la part
du citoyen Plantade.
L e citoyen Choussy livre la lettre qu’il a écrite à ce sujet
le 29 messidor an 2 , à la critique la plus sévère , et défie
qu’on y trouve aucune expression qui puisse servir de
prétexte aux viles calomnies du citoyen Plantade : ce der
nier fait lin rapprochement perfide de cette lettre et d’un
arrêté du représentant Forestier du 22 therm idor.. . . E t
qu’y a-t-il donc de commun entre la lettre et l’arrêté pos
térieur de près d’un mois ? Cet arrêté n’a pu effrayer PJantade , puisqu’il n’existoit pas à l’époque des arrangeinens.
L e 9 thermidor 'avoit lui sur la France et fait cesser
alors le régim e des triumvirs dont Plantade parle dans
son mémoire. Il cherche à insinuer qu’il ig n o ro it, le 17
thermidor , les événemens du 9 , tandis que l’alégresse
universelle agitoit alors tous les F ran çais, dans les départemens mêmè les plus éloignés. Si le citoyen Plantade au reste
a des reproches à faire aucitoyen Forestier,il peut s’adresser
directement à lui j il saura bien répondre, et peut-être at-il encore dans son porte-feuille des pièces capables de con
fondre le citoyen Plantade.
• '
1
Quelle, crainte'Forestier pouVoit-il inspirer au citoyen
Plantade qui lui étoit attaché par les nœuds de la plus
étroite amitié,) avec qui il mangeoit fréquem m ent, qu’il
accompagnoit au comité de salut public), à la commission
dys/subiiisUinces > et rà qui il prodiguoit les noms les plus
chers?
.! d 'j ; J •
B
’
�( 10 )
Planlade dit que le cordonnier B ou rgeois, de V ich y
étoit l’émissaire de Forestier; on ignore s’il a des preuves
de cette assertion , mais on doit s’étonner que Bourgeois
ait été dans le cas d’inspirer de la frayeur au citoyen Plantade qui étoit avec lui membre du comité de surveillance
de V ic h y ; à Plantade qui a été constamment fonctionnaire
public pendant le gouvernement révolutionnaire ; à lui
qui étoit un des plus grands orateurs des clubs ; à lui dont
les collègues Bourgeois et Bonnefont ont attesté le civisme
et l’ardeur à exécuter les lois d’alors et les arrêtés des re
p ré se n ta i en m issio n ....
Ne seroit-ce pas p o u r e f f a c e r ces impressions après le 9;
therm idor , que Plantade auroit imaginé de mettre en
scène le dénonciateur Arm illon ,u n journalier qui ne sait
n i lire ni écrire, pour faire croire que Plantade étoit sus
pecté d’incivisme et menacé comme G ravier, R aynaud,
Sau ret, de . . . Mais la fable a été mal ourdie ; on place les.
propos de Bourgeois aux premiei’s jours de germinal an s#
et c’est le 23 du même mois de germ inal, que lç représen
tant du peuple Vernerey proclamoit le citoyen Plantade
administrateur du district de Cussel ; que la société popu
laire de cette c o m m u n e upprouvoit avec transport sa no
mination , tandis qu’elle déclaroit que G ra v ie r, Raynaud
n’avoient pas assez d 'én ergie.. . . Planlade avoit donc assez
d’én ergie; il étoit donc ce qu'on appeloit à la h au teur,
puisqu’il sortoit triomphantde toutes les épreuvos.
Plantade qualifie le citoyen Choussy de neveu deFores-tier ; mais il sait bien que ce fait est fa u x , et que Choussy a
seulement épousé une femme qui est la cousine de Forestier
à un degré fort éloigné; il sait bien aussi que Choussy at
eu très-peu de rapport avec lui..
�(
)
Si Choussy avoit eu autant de crédit que Plantade lui
en suppose auprès de Forestier, n’auroit-il pas alors obtenu
quelque em ploi? se seroit-il laissé dépouiller de sa ferme ?
n’auroit-il pas fait maintenir son bail qu'un arrêté émané
<lu corps adm inistratif, dont Plantade a ¿té m em bre, a
condamné à être lacéré et b rûlé? Cette décision n’a-.t*elle
pas dû donner à’Ghoussy de justes inquiétudes, tandis que
Plantade triomphoit d evo ir le bail anéanti, et sa mise en
possession rapprochée ?
‘
Pourquoi le citoyen Plantade a-t-il laissé ignorer dans
son p récis, que les deux domaines et la réserve par lui
acquis provenoient de Laqueuilhe inscrit sur laliste des ém ig r é s ? a u r o it-il craint q u ’ o n fît la r é fle x io n bien juste que
l’acquéreur d’un tel bien devoit avoir moins d’e ffro i, que
le ferm ier de l’émigré dont le bail ¿toit condamné aux
flammes.
' Vous aviez dpnc cru , citoyen Plantade, qu’on avoit
perdu la m ém oire, et qu'il vous sufïisoit d’avoir agi et
réagi en sens contraire, selon le temps et les lie u x , pour
-vous soustraire au payement de vos dettes légitimes.. . . Si
-v o u s aviez voulu inspirer plus de confiance aux juges
d a p p e l, vous auriez clu développer tous vos m oyens,
tous vos prétendus faits devant vos juges naturels, devant
-le tribunal de Cusset, devant celui de Gannat, devant celui
de Moulins........ Quoi ! vous laissez prendre contre vous
■huit jugeniens successifs, les uns par défaut, les autres
contradictoires, sans révéler £i vos.juges que la crainte de
la mort vous a arraché le billet contre lequel vous plaidez
depuis sept ans.
Vous avez vu Forestier incarcéré, et vous n’avez pas
�/
7A0
î,- .x
( 12 )
songe à parler des événemens relatifs au billet î convenez
que votre mémoire a été bien ingrate. Qui vous a donc
empêché de protester , de réclam er devant tous les juges
qui se sont succédés depuis thermidor an 2 , et qui sont
certainement à l’abri du soupçon d’avoir favorisé les agens
de la terreur ?
Comment se fait-il qu’un homme dont la finesse a passé
en proverbe dans le district de Cusset, qu’un homme qui
rédige lui-meme ses citations, ses exploits, ses m ém oires,
qui étoit le patron et le solliciteur au parlement, des procès
de ses compatriotes, et quia été constamment fonctionnaire
public , ait re c o n n u la dette , ait acquiescé au ju g e m e n t de
condamnation, ait demandé termes et délai, ait offert de
p ayer, et même ait fait semblant de consigner, lorsqu’il
avoit un m o yen , qu’il croit si sur* de faire ajinuller le
billet ?
L e citoyen Plantade a-t-il pu espérer de rendre sa cause
plus intéressante, en remuant la fange des passions, en
nous ramenant aux temps malheureux des excès, lorsque
le gouvernement s'efforce de les faire oublier, et que l’oli
vier delà paix rallie tous les Français sous son ombre tulélaire? En v ain le citoyen Plantade a voulu parler n la haine,
au ressentiment des hommes passionnés..........L e citoyen
Choussy ne veut parler qu’à l’in tégrité, à la raison, à l’im
partialité de ses juges.
L ’engagement arraché par violence à un homme que
Von tient enfermé , à qui on tient le pistolet sous la gorge,
et qui est menacé de perdre la vie s’ il n’obéit, est justement
proscrit par les lois; mais on n’annulle pas légèrement les.
conventions: il faut établir clairement ses faits, et no pas.
�//p
C 13 }
se contenter de verbiager et de vom ir des calomnies. O r
Plantade n’a rien prouvé , ni même allégué de précis q u i
puisse justifier sa nouvelle manière de payer ses dettes.
C’est Plantade lui-même qui a écrit à Choussy,le 1 4 ther
midor an 2 , de venir à Chitain terminer leurs comptes :
tout a été consommé dans le domicile de Plantade luim êm e; il a été l’arbitre et le régulateur de l’arrêté de
compte. Toutes les circonstances sont donc contre lui ;
toutes sont en faveur de Choussy, comme on vient de l’éta
blir. Aucune menace ne lui a été faite; il étoit en grande
faveur sous le régime du trium virat, et Choussy, comme
ferm ier d’ém igré , avoit de justes inquiétudes ; il n’étoit
pas m ê m e membre des sociétés p o p u la ir e s , o ù Plantade
triomphait comme orateur.
Si son engagement n’étoit que le fruit de la crainte de la
m o rt, le citoyen Plantade pou vo it, il de voit même exciper
de ce moyen péremptoire chaque fois qu’il a été appelé
devant les tribunaux 5 et cependant, loin d’articuler ce vice
radical, il a approuvé le billet, il a fait des offres réitérées
de le payer ; et d’après les lois civiles, cette approbation le
rendroit non recevable à attaquer la convention si formel- .
leinent sanctionnée, dans un montent où sa prétendue
terreur étoit évanouie.
' ;
Mais qu’e st-il besoin d’entrer dans tous ces détails,
quand il existe desjugernens définitifs non attaqués ni attn*quables, qui ont prononcé la condamnation du billet ,
m a lg r é les reproches d’erreur et de surprise allégués par
Plantade? Tout est jugé par les jugemens des tribunaux de
Cusset, Gannat et M oulins, des 2 5 genninal et 22 floréal
an d eu x, 1 1 vendémiaire et $ pluviôse an 4 , et 14. prairial
�(
1 4
)
an 6. Plantade a acquiescé formellement a tous ces jugem en s;i!s sont passés en force de cliose ju gée; il n’est pas
même au pouvoir du tribunal d’appel d’y porter atteinte:
tout jugement en sens contraire donneroit infailliblement
ouverture à la cassation.
Plantade parle dans son précis des lois des i 5 germinal
an 3 , et 2 thermidor an 6 , sur les cheptels. Quelle influence
ces lois pourroient-elles avoir dans l’espèce ? D e quel droit
auroit-on voulu forcer Choussy à laisser ses bestiaux à Plan
tade sans en recevoir le p rix ? N e doit-on pas traiter confor
mément aux lois qui existent au moment où l’on entre en
p o u r -p a r le r ? L'art. V I de la loi d u 2. th e r m id o r an 6 , dit
expressément : et que les comptes et partages des cheptels
« entièrement consommés , soit qu’ils l’aient été par suite
« de jugeniens,soit qu’ils l’aient été en vertu d’arrangemens
« définitifs faits de gré à g ré , sont maintenus et sortiront
« leur plein et entier effet, à quelqu’époque, et dans quel« que proportion qu’aient été faits lesdits comptes et par
te tages. »
O r , Plantade et Choussy ont fait des arrangemens de
.gré à g r é ; ils ont réglé leur c o m p te de cheptel ; les bes
tiaux ont été estimés et rendus au propriétaire, 6ans
réserve ; le reliquat a été payé, partie en inonnoic cou
rante , partie en un billet ; tout est consommé. Peu importe
que Plantade ait voulu revenir après coup sur scs engagem ens; qu’il ait plaidé et chicané sur leur exécution; cette
•circonstance ne détruit pas le fait matériel du compte ar
rê té , de l’arrangement terminé. Un acte n’est pas moins
¡consommé, quoique la somme promise ne soit pas encore
piiyée, I/m gagcm cnt de payer existe ; il suilrt à la perfeo*
�C * 5. )
tîon de la convention. Un plaideur n’est pas moins obligé
d’exécuter une transaction , quoiqu’il lui plaise de chica
ner sur les payemens. L a remise d’un billet pour achever
de solder le prix des bestiaux a d’ailleurs opéré une nova
tion , et changé la nature et l’espèce de la dette. C’est un
effet pur et simple qui a remplacé l’obligation de cheptel
et qui en a détruit les effets. L a créance de Choussy est une
créance nouvelle, une sorte de prêt, dont le sort ne peut
plus être lié aux contestations qu’il a plu à Plantade d’a
monceler sur la tête de Choussy. L ’arrangement est en
core consommé par le jugement en dernier ressort, du 14.
pluviôse an 6 , qui a approuvé le compte de cheptel et le
billet, qui l’a s u i v i , et rejeté le p o u v o i r de Plantade.
Ainsi les parties sont doublement dans le cas de l’art. V I
de la loi d u s thermidor an 6 , soit à raison des arnrngemens>
consommés à l’amiable, soit à raison de la sanction judi
ciaire et définitive qui leur a été donnée.
Choussy n’auroit pas lieu de craindre le résultat d’un
nouveau compte avec un homme honnête et délicat; mais
Plantade est tellement connu par sa mauvaise fo i, sa du
plicité, son esprit intrigant et chicanier; il en a donné dans
cette affaire des preuves si frappantes , qu’il faudroit con
sentir à plaider toute sa v ie , et à manger dix fois Je billet*,
pour arriver à un résultat d éfin itif.... Voile» le véritable
m otif qui détermine Choussy à ne plus entrer en lice, sur
tout aujourd’hui que les bestiaux n’existent plus, et que les
baux et les pièces ont été remis A Plantade. Comment ose-til tracasser ù ce point l’ex-fermier de Laqueulhe, lorsque
tous les coacquéreurs de Chitain, le citoyen RuetLam otte
particulièrement ^ancien fermier, du même bien, a traité*
�*
( ï 6 )
avec Choussy sur les mêmes bases, et d’après la même esti
mation que celles arrêtées avec Plantade? Aucun de ces
acquéreurs ne s’est plaint; tous ont payé l’excédant du
cheptel. Il étoit réservé à Plantade de plaider sept ans
contre son b illet, et d’employer les moyens les plus faux
et les plus viles.
>
Ün dernier trait achève de le peindre.. . . Désespérant
d’arrêter les poursuites avec sa propre saisie-arrêt, il est
allé en mendier une d’un métayer illitéré, nommé Marie
B a rg e , à qui Choussy n’a jamais rien dû. Depuis plus d’un
an , Choussy plaide contre le prête-nom de Plantade,pour
le forcer à faire connoître les motifs de cette saisie-arrêt,
faite sans titres et sans autorisation de justice.. . . Ce pré
tendu saisissant , fertile en moyens de nullité contre la
procédure, fait constamment défaut quand il s’agit de
m otiver sa saisie.. . . A peine un jugement du tribunal de
la Palisse en a-t-il prononcé la main-levée , que le prêtenom en a appelé. Intimé devant le tribunal supérieur,
cette rnarionette de Plantade refuse de déduire ses moyens.
Mais Choussy ne cessera de le rép éter, tout est jugé défi
nitivement entre lui et IMantado par les cin q premiers
jugetnens q u i o n t ,p r o n o n c é la condamnation du billet,
qui sont passés en force de chose jugée, et auxquels il
a formellement acquiescé. L e tribunal ne peut -, ni ne doit,
entrer dans aucune autre discussion ; 011 ne peut faire juger
cent fois la même chose. C'est faire injure aux tribunaux,
c'est renverser toutes les idées reçues en jurispruderice, que
de présenter des chicanes si ridicules, si injustes et si mé
prisables. L a fin de non recevoir doit seule faire justice
d >1 la fourberie de ce débiteur infidèle et-perfide.» Choussy
�( *7 )
a une trop haute idée cles/taie ns étde la probitedpstrofg.
ju r is c o n s u lte s , d o n t les noms figurent aü bas du précis
de Plantâde, pourm ’être pas convaincu qu’ils auroient
rougi de dOnrier une sorte d’approbation à ce libelle dif
famatoire 3 -s’ils eussent connu lès véritables circonstances
çt lés faits de la' cause , dont Plantade a affecté de ne pas
dire un seul ràot.
• ,• si - ! .
' ' ;.
C H O U SSY .
D E V E Z E , avoué.
N o u s soussigné, GeofïroiBonnefont l’aîné, perruquier^
et Claude Bourgeois, cordonnier, demeurant tous deux en
là commune de V ichy , certifions à tous qu’il appartiendra,
que le citoyen P la n ta d e -R a b a n o n , demeurant ci-devant en
la commune de V ich y , et actuellement en celle de SaintChristophe, a été nom m é, conjointement avec nous, miembre du comité de surveillance de V ic h y , par le citoyen
M ativet, alors membre duicomité de survéilldnce de Cusset, et ensuite délégué tant de ce comité que des représen
t a i du peuple en mission dans le département de l’A llier,
siu cornmencèmÊnt de l’an deux de la république, et qu’il
en a exercé les fonctions conjointement avec nous, et qu’il
a montré le plus grand zèle pour l’exécution des lois et
arrêtés des représentans du peuple. En foi de quoi nous
avons délivré le présent certificat. A V ich y, le 29 ventôse
an 9 de la république française. — Bon pour ce que dessus,
quoique non écrit de ma main. Sign é , B o n n e f o n t . —
J ’approuve ce que dessus, quoique non écrit de ma main..
S ign é, B o u r g e o i s .
V u bon pour la signature ci-dessus des citoyens Bonncfont et Bourgeois-
�'
Ci8)
Fait en bureau m unicipal, à V ic h y , le 29 ventôse an 9 de
la république. S ig n é, S a u r e t , maire.
J e soussigné , Germain M ativet, atteste et certifie la vé
rité des faits énoncés au présent certificat. A Cusset, ce 30
ventôse a n .9.de là république. S ig n é, M a t i v e t .
’
1
V u.bon pour la.signature ci-dessus du citoyen Mativet.
E n m airie, à Cusset, le 2 germinal an 9.de la république _
française. S ign é, B o u q u e t .
Enregistré le 9 germinal à R io m , par Poughon.
’
E x tr a it des registres de la société populaire de la com mime de Cusset, départem ent de V A llier, séance du 23
g erm in a l, deuxièm e année républicaine.
L e représentant du peuple Vernerey est entré dans la
salle des séances , au son d’une musique , etc.
L e représentant du peuple a pris la parole et a annoncé
à l’assemblée que l’objet de sa mission étoit d’organiser le
gouvernement révolutionnaire, et d’épurer les autorités
constituées, etc.
L e secrétaire du représentant est monté à la tribune; il
a exposé les principes d’après lesquels l’assem blée de v o it se
c o n d u ire p o u r a d m e ttre o u rejeter ceux qui alloient lui etre
proposés pour rem plir les places publiques, etc. Il a com
mencé par les membres du directoire du district.
D istrict.
Christophe Frcm invillc, président.
François G ivo is, agent n a tio n a l, etc.
L e secrétaire a passé aux membres du conseil du district.
�Conseil de D istrict.
Gouthier de Busset.
Plantade-Rabanon, etc.
L ’assemblée a également approuvé le choix de ces mem
bres du conseil de district, à l’exception de G ravier-R aynaud, à q u i elle n 'a pas trouvé assez d'énergie pour rem
p lir une place d' adm inistrateur, etc.
P ou r extrait conforme. L . F o r i s s i e r , secrétaire.
J e soussigné, maire de la ville de Cusset, département
d e l’A llie r, certifie que la signature ci-dessus est celle véri
table du citoyen L u c F o rissier, secrétaire de l a m airie, et
que foi doit être ajoutée aux actes qu’il signe en cette
qualité.
E n m airie, à Cusset, le 26 ventôse an 9 de la répu
blique française. S ig n é, D u s a r a y - V i g n o l l e s .
Enregistré à Riom , le 1 2 germinal an 9 , par Poughon.
A R
io m ,
de l'im prim erie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy, Jacques. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Choussy
Devéze
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé ; Contre Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire, demeurant au lieu de Chitain, commune de Saint-Christophe, département de l'Allier, appelant.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1129
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53157/BCU_Factums_G1129.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53156/BCU_Factums_G1128.pdf
e3cc567cd0cc31ddecdcce675e61d05a
PDF Text
Text
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1
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MÉMOIRE EN RÉPONSE T“
-"N
P O U R
J ean - C
laude
de
I'"‘* «ectîon.
PLANTADE - RABAN ON ,
p ro priétaire d e m e u r a n t
à
C h ita in , com m une
S a i n t - C h r i s t o p h e , a p p e la n t '
C O N T R E
J
acques
c
C H O U S S Y , géomètre, demeurant a
Cusset, intimé.
L e citoyen Rabanon, dans son précis du 14 ventôse
dernier , avoit cru devoir ne pas donner le récit tou
jours dégoûtant de la procédure immense faite contre
lui. Jacques Choussy l'accuse d’avoir dissimulé les faits
essentiels de la cause. Il faut donc en fatiguer et le tribunal
et le public. L e citoyen R abanon n’y avancera rien sans
preuve, et par la comparaison, il sera facile de découvrir
l’imposture, la perfidie, la calomnie.
L e citoyen Rabanon est bieu éloigné de plaider contre
A
�I I*.
C 2)
son b ille t, comme Jacques Choussy lui en fait le reproche
grossier. Il reconnoît et il a toujours reconnu ce b ille t,
puisqu’il a fait non seulement des offres réelles du mon
tant de ce même b ille t, mais le dépôt de somme bien
plus considérable pour se garantir des poursuites vexatoires de Jacques Choussy. Mais il réclajue contre les
causes de ce billet : mais il réclame contre une espèce
darrangement qu’on lui a arraché dans ces temps de
calamité ou le citoyen honnête étoit forcé de tout sacri
fier au sentiment de sa pi'opre conservation.
F A I T S .
L e 30 septembre 1 7 9 3 , le citoyen Rabanon devint
adjudicataire au directoire de district à Cusset, de deux
domaines appelés Joninain et Chitain , et situés dans les
environs de Cusset.
Ces deux domaines avoient été affermés au citoyen
Choussy p è r e , commissaire à te rrier,.p ar bail de 1783.
Ils étoient garnis de bestiaux à cornes et de brebis. L a
preuve en est consignée dans la lettre du citoyen Busseuil
ancien fermier (1).
( 1 ) C om m une de G en e la rd , le «a v en dém iaire , ^me. année rép u b licain e.
L e cito y e n
B
u s s e u il
,
c i-devan t ferm ier de C h it a in ,
A u citoyen P l a h t a d e -R a b a n o n , propriétaire de la maison
et domaines de Chitain et Joninain.
1
J ’ AI laissé, c i t o y e n , deux années de jouissance de m on bail,
nu c ito y e n C h o u ss y le p è r e , qui a été m o n su c ce sse u r, npre»
“avo ir renouvelé la ferme de Chitain. J ’ ai pareillement laissé les
domaines garnis de bons et beaux bestiaux ; je me rappelle trèsbien que les domaines de C lütaio et Joninain étoient com posés
�¿75*-/
C3 )
I/adversaire, fils du Fermier, éleva au citoyen Rabanon
des difficultés sans fin. Sous le règne des lois elles auroient
été bientôt écartées ; mais en l'an 2 , mais avant le g ther
m idor, elles étoient très-graves, insurmontables.
L ’une de ces difficultés avoit pour objet l’exigue des
de six paires de b œ u fs , ch a cu n d’une quantité de v a ch e s, garnis
dans la p roportion que six paires de bœufs c o m p o r te n t, les autres
bestiaux dans les mêmes proportions. Les brebis léle pour tête ;
ie3 truies ou c o ch o n s comme j e les ai reçus pour chaque domaine.
E n un m o t , j ’ai rendu à Pierre C h o u ss y la m êm e quautité, qualité
e t espèce que j’avois reçues des citoyen s L a m o tte s et D e s p e u x , et
que je devois la isse r , au term e de m on bail verbal entre le c ito y e n
Lacjueuille et m o i, plus l’excédant dont C h o u ssy le père in’a fait
raison. J e m e rappelle très-bien, c i t o y e n , qu’à l’époque de m a
so rtie , j’ai laissé tous les bestiaux en bon é t a t , et que Choussy a
eu pour moi de fort mauvais procédés. 11 a dû vo us rendre la m êm e
b r a n c h e , qualité et quantité de gros et menus b e stia u x , qu’il
avoit reçus de moi, c l tels que je les avois reçus m o i-m êm e de m on
prédécesseur, et que ce dernier fes avoit reçus des siens, et ainsi
des autres. Quant aux brebis , je les ai rendues tete pour tète, tel
que je Ie3 ai reçues. Quant aux réparations lo ca tù es , je les ai
toutes payées au citoyen Pierre Choussy, en présence des citoyens
Charles d e là Coste, et Souciions de Lalouette, et l'arrangeaient
«’ en fit à G o u g e . D ’après toutes les règles de justice et de ra iso n ,
il me paroît bien naturel qu’ il doit être obligé de vous laisser la
m ê m e quantité, espèce et qualité de tons bestiaux quM a reçus de
jnoi,et que je luiai abandonnés tels que je les avois reçus m oi-m êm e.
J ’ai laissé les étangs en bon état et bien empoissonnés ; et tout ce
qui était à ma charge, Choussy a bien su me le faire payer. Il en
a été de mêm e des prés et de lotit ce qui (.'toit à ma charge. 11
ne m’a fa it, en v é rité , a u cu n e espèce de grâce. J e l ’ ai comblé
A 2
�i v.
U )
bestiaux. L e citoyen Rabanon ne faisoit que des demandes
justes. Par cela seul, elles ne convenoient pas à Jacques
Choussy. L e citoyen Rabanon étoit déjà menacé en ger
minal an 2. Claude Bourgeois disoit à Paris : ce ,}’en ai
« encore quatre en vue. J ’ai Dumonsseau, j’ai G r a v ie r ,
de bons procédés , et lu i rûen a eu que de mauvais pour m o i,
après avoir couru ma ferm e et fo r c é à lu i céder les deux années
de mon bail. Il a gardé tous mes to n n ea u x de p ê c li e , m algré
i n o i , sous prétexte qu’ ils lui étoient nécessaires p o u r celle qu’il
avo it à f a i r e , ainsi qu’ une très-grande c u v e à recevo ir de la v e n
d a n g e , que j’avois établie dans la chapelle de Chitain , par ordre
d u c it o y e n L a q u e u ille , et que j’ai p a y é e a ux cit oyens de Creusier.
T o u s ces objets ont dû v o u s ê tre délaissés, c o m m e je les avois
r e ç u s. J e vo u s observe seulem ent que j’avois renou velé les vieux,
selon l’ usage. J ’ai laissé des volets a u x croisées donnant sur les
fossés, ferm ant et en bon é t a t , a u x croisées qui en avoient ou
a v a n t m o i ; pareillement la co rd e de la c l o c h e , le b o u c h e -fo u r .
J ’ai pareillem ent laissé un va let en fer à la p orte du m a g a sin ,
donnant vis-à-vis le ch â tea u . J ’ai pareillement laissé Je magasin
garni de crèch es et râ te lie rs, en bon état. J ’ a i pareillement laissé
dans la p ê c h e r ie , qui est-sous le g r a n d j a r d i n du ch âteau , et que
v o u s avez a c h e té e , un très-grand et beau c o f f r e , cil c h ê n e , fort,,
a v e c ses garnitures et cadenas de fer. En un m o t , c i t o y e n , j’ai
e xécuté toutes les clauses de m o n bail v e r b a l, envers le c it o y e n
L a q u c u iltc , et j’ai bien p ayé au c ito y e n Pierre C h o u ss y le p è r e ,
t o u t ce qui étoit à m a c h a rg e , c o m m e fermier. C ’est le c ito ye n
D u ro se t qui avoit fait faire le coffre de la pêcherie du ch â te a u .
Q u a n t a la cu v e que j ’ai faite et laissée, e l l e fait partie du cliâ le a u
qui vo us a été vendu. T o u t ce que je vous écris, e s t de la plus
grande e x a c titu d e , et C h o u ss y le sait aussi-bien que m oi. S a lu l
et fraternité. S ig n é, B u s s e u i l .
�( 5 )
Reynaud - Sauret et R aban on . » Déjà l’une des maisons
du citoyen Rabanon sise à Paris, avoit été comprise dans
la liste des biens d’é m ig rés, une seconde maison alloit
y être inscrite , etc. etc.
L e 29 messidor an 2 , l’adversaire écrivoit au citoyen
Rabanon : « toutes ces tracasseries ni ont rnis dans le
« cas (feu parler à notre brave représentant F o restier,
<c qui n’a pas été content de votre façon d agir, et r?i a,
« dit de vous écrire de sa p a r t, et vous invite de vous
« montrer plus accommodant; que nous n étions plus
« dans ces temps où les tracasseries étoient à to rd re
« du jo u r , etc ». ( V o y e z page 18 et 19 du précis du
citoyen Rabanon. )
L ’on c o n ç o i t combien une invitation de la p a rt à'un
représentant redouté avec raison, étoit puissante: c’étoit
un ordre absolu ; il falloit obéir, ou la réclusion et la mort.
Aussi le citoyen Rabanon ne balança-t-il plus ; il se
sentit forcé à écrire à Jacques Choussy, le 14 thermidor
an 2 , la lettre transcrite dans le précis de Jacques
Choussy, page 4. Il invita Choussy à venir ù Chitain ;
Choussy parut, et le citoyen Rabanon se soumit à ses
volontés.
Jacques Choussy faisant tant pour lui que pour son
p è re , présenta au citoyen Rabanon , un état de compte
des bestiaux, (é ta t heureusement co n servé); l’adver
saire lui remit un écrit daté du 17 ,thermidor an 2 ,
duquel il résulte, i ° . que tous les bestiau^c avoient été
estimés à 9,960 fr. assignats, prix de foire; 20. que
pour la moitié du bénéfice revenant à l’adversaire, le ci
toyen Rabanon lui compta 2; 5oo IV. en argent, (dans un
�(S)
tettips où il n y avoît que certains êtres privilégiés , et déjà
accoutumés à satisfaire leur passion, qui pussent im puné
ment parler écus et en exiger). Jacques Clioussy , dans son
précis, page 4 , dit que cette somme lui fut payée en
assignats. Mais son écrit le dém ent; son écrit dit argent.
L e citoyen llabanon fît en outre à l’adversaire un billet de
2.892 fr. 16 sous, payable en germinal an 3 , total 5,392 fr.
16 sous. Dans la discussion des moyens nous tirerons un
grand parti de ces deux pièces , (ellessont transcrites mot
pour mot à la suite du précis du citoyen Rabanon , pages
1 9 , 20 et 21 ) , nous prouverons que ce billet est le fruit
de la terreur. Noüs disons de la terreur, parce que même
après les 1 7 , 22 et 28 thermidor an 2, le représentant
F o r e s tie r è toit encore l’effroi du département de f A l l ie r ,
dont il devoit être par état, et le patron, et l’a m i, parce
qu’encore la consolante influence du 9 thermidor ne s'éloit
pas étendue jusqu’au district de Gusset, parce que le 22
thermidor an 27 Forestier rendit un arrêté , et fit partir,
le 28 du même mois , douze victimes de tout â g e , de tout
sexe, pour le tribunal de Fouquet-Thinville. Nous rap
portons l’arrêté de Forestier ; nous l’avons fait imprimer,
( pag. 22 et 23 du précis).
L e district de Gusset est celui de la république où la
tourmente révolutionnaire a régné le plus long-temps.
En l’an 3 , en l’an 4 , en l’an 5 , etc. tous les gens de bien y
étoient comprimés presque autant qu’avant le 9 thermi
dor. lie citoyen Rabanon étoit en apparence débiteur en
vers l'adversaire. Il l’éloit ostensibleirent de la somme de
2.892 fr. 16 sous, montant de son billet. Il étoil exposé
des poursuites rigoureuses. Pour les p réven ir, il lit à l ad-
�(7)
v e r s a i rn
, le 2 germinal an 3 , époque de l'échéance du
billet, un acte d’offres réelles, qui se ressent encore de
la contrainte, mais qui en dit assez , mais qui .exprime et
rappelle assez les griefs du citoyen Rabanon.
P ar cet acte, le citoyen llabanon offrit réellement
l’adversaire la somme de 2,892 fr. 16 sous, montant du
billet; il offrit de la lui p a ye r, mais ù condition, i°. que
Vadversaire lu i ju sh fiero it de sa qualité d eferm ier des
dom aines de C/iitain et de J o n m a in ; 20. que le citoyen
R a ba n on profilera il des lois annoncées su r les cheptels,
atten du, est-il dit dans cet a c te , que des circonstances
particulières Vont contraint a u x engagemens q ù il a
contractés. L e citoyen Rabanon ajouta, que le véritable
f e r m i e r , le citoyen Choussy p è r e , lu i étoit redevable de
sommes considérables sur les clauses du ba il ¿1ferm e.
Ces offres et ces conditions ne furent pas acceptées. L ’ad
versaire poursuivit le payement du montant du billet et
de quelques autres objets inutiles à détailler ici. L e 12
germinal an 3 , les parties étant au bureau de paix, le
citoyen R abanon s'en référa ¿1 son acte d’offres, du 2.
lie 22 floréal suivant, l’adversaire prit au tribunal de
Cusset, jugement par défaut contre le citoyen Rabanon.
Pierre Choussy p è re , parut ¿\ l’audience pour déclarer
qu il jia v o it aucun droit ¿1 exercer sur le cheptel des
bestiaux des dom aines C hitain et J o n in a in , dont
J a cq u es C houssy étoit le seul fe r m ie r .
t
L e citoyen Rabanon appela de ce jugement. Cet appel
fut porté au tribunal de Gannat, où l’adversaire obtint
encore défaut. L e 11 vendémiaire au 4 , lo citoyen R a-
�(8 )
fcanon y forma opposition. II y fut statué par le tribunal
civil d’A H ier, le 3 pluviôse suivant.
V o ic i ce jugement. Il importe que le tribunal prenne
la peine de le lire en son entier; parce que c'est de cette
pièce que Choussy tire une fin de non recevoir, et cria
pour prouver q u ’il est de bonne fo i, qu’il veut éclairer
la religion de ses juges (1).
(1) E n tre Jea n -C Ia u d c P la n ta d e -R a b a n o n ;
Contre Jacques Choussy , fils.
O u i , G o n t ie r , R a b a u o n conrine sou fondé de p o u v o i r , p ou r
leq uel il a c o n c lu en ce qu e son opposition sus la tte , fût reçue
a u ju gem ent aussi susdaté ; qu ’en co nséqu en ce il seroit déchargé
d e reflet d’ic e lu i, statuant au principal que la promesse du 1 7
thermidor dernier, qui est causée valeur reçue comptant, tandis
(¡ue les causes d’ icelle sont pour bénéjice de cheptel, sera déclarée
nulle et de nid effet, comme étant le fruit de l ’ erreur et de la.
surprise et consentie par ledit Rabanon à Choussy , Jils , qui
n’ auoit ni droit , ni qualité ; et à c e qu’ il s o it, en co n s é q u e n c e ,
r e n v o y é de la dem ande dudit C h o u ss y a v e c depen s, le to u t par
ju g em e n t qui sera e x é cu té en dernier r e s s o r t , suivant le consen
tem e n t prêté par ledit R abanon , p ar le jugem ent du tribunal
du 26 pluviôse dernier, et qu’ il a n'itéré à la barre. Oui Jaudart t
aussi défense r officieux et fo n d é de pouvoir dudit Choussy ,
par lequel il a co n clu à c e que ledit Habanoti lût déclaté p ure
m ent et simplement non recevable dans son opposition du 14
frim aire dernier , au jugem ent du tribunal de G a u n a t , d u 11 ven
démiaire prteedent , ce faisant que ledit jugement seroit exécuté
selon sa form e et te n e u r , et (¡ne les poursuites en eom m eucées
^croient continuées ; que ledit Hab,mon seroit co n d a m n é en tous
les d é p e n s, le to u t par ju gem ent en dernier ressort, suivant son
La
�<
( 9 )»
Ln cause du citoyen Rabanon fut mal présentée ; on lui
fit demander la nullité du billet de 2,892 fï\ 16 sous, su r
-consentement piété par le ju gem ent dudit jo u r 26 pluviôse der
n ier, et qu’ il r. itère à la barre.
L a cause plaidée par les défenseurs des p a r t ie s , Rabanon a
soutenu par l ’ organe de son défenseur, qu1étant certain qt.e la
ferm e des domaines Chitain et Joninain, desquels il était devez u
adjudicutiire de la nation , comme confisqués sur l ’ émigré
LaqucttHhe, était au nom de Choussy , père, il n’ avait pu traiter
qu’ avec l u i , et que l'euigue des bestiaux desdits biens qu’ il avait
J a it y. a erreur avic Jacques Choussy , ji/s, ainsi c^te le Li.ltl eu
promesse qui en était résu lté, devaient être annuités et regardés
comme non avenus; que (¡liant aux mitres chefs de la demande
prim livr de h partie de .la n d a r d , il 11e les contestoit pas.
J a u d a r d , pour sa p artie, a demandé ac te de l’aveu cjne f.isoit
R abanon de d e v o i r les autres chefs d e l à d e m a n d e , et a souten u
que Rabanon l ’avoit. reconnu p our fermier dudit lieu , puisque
c ’est C lio u s s v , iüs, (jui l’en a mis eu possession , que c'est a v e c
lui qu’il est venu à l’exigue des bestia ux ; (ju’il a fait ;in c o m p te
g é r e r a i ; qu’ il a a c h e t é , dudit C h o u s s y , fils, une partie de la
récolte de !a réserve de C h ita in , et diiïérens autres actes d’ un
propriétaire et d’ un fe rm ie r ; que d’ ailleurs il ne pouvoit plus
m éco u n o ître la qualité dudit C h o u s s y , fils, de fermier dndil lieu ,
puisque Pierre C h o u s s y , père , a d é cla r é , pan le jugement diid-t 8
floréal dernier , (pi’il 11’ avoit plus a u cu n s droits sur la ferme ni
les bestiaux desdits lieux, et que J a cq u e s C h o u s s y , son fils, en
¿tuil le seul fe rm ie r , lequel ju gem ent lui avoit été signifié.
Oui
le commissaire du directoire e x é cu tif en ses conclusions;
si Rabanon
pouvait ou non méconnaître la qualité de fermier de la partie de
Jaudard , des lieux dont il s’ agit; et s i , par une suite le billet
ou promesse du 18 thermidor était ou non nul j et
si Je juJa cause a présenté à juger les questions de savoir, 1
JB
�( 6 ^
Y ;'* .
( t° )
le fondem ent seulement qu il y avoit erreur et surprisse
s u r le f o n d e m e n t s e u l e m e n t , que cette erreur et cette sur\
g e m e n t rendu sur a p p e l, par le tribunal de G a n n a t, le n ven
démiaire dernier, seroit e x é c u t é , ou si au contraire / R a b a n o n
seroit déchargé de l’ effet d’ic e lu i, ainsi que de l’effet du ju ge
m e n t du 18 floréal d e r n ie r, rendu par le tribunal de C u s s e t ,
en première instance.
L e trib u n a l, considérant qu’il est co nstan t entre les parties,
que c ’est la partie de Ja udard qui a mis celle de G o n tie r en
possession des lieux d o n t il s’ a g it; co n sid éran t, que c ’est ave c la
partie de J a u d a r d , que celle de G o n t ie r est venu e à l’exigue des
bestiaux desdits lieux; considéran t, que le 1 7 therm idor der
nier ,
la partie de G o n tie r a fait un co m p te ave c celle de
Jaudard,
du
profit desdits bestiaux et d’autres objets ; que
R a b a n o n a reçu la qu itta n ce des profits des bestiaux dudit
C h o u s s y fils, c o m m e fermier dudit lie u , et qu’il a donné le
billet dont il s’a g it, audit C h o u s s y , aussi c o m m e ferm ier; c o n
sidérant, que la partie de G o n tie r a m êm e ach eté d e celle de
J a u d a r d , la m oitié de la récolte qui lui revenoit c o m m e fer
m ier de la réserve dudit lieu de Chitain ; et qu’il a
d ’ailleurs
r e ç u différentes choses dudit C h o u ss y fils, venant de la ferme
desdits biens; considéran t, que la partie de G o n tie r a reçu de
celle de J a u d a r d , les baux et obligations de cheptel desdits
biens, en s’ obligeant d’en aider la partie de Ja u d a rd , lorsqu’elle
en auroit besoin; considérant, que la partie de Confier n’ a pas
f a i t tous ccs actes par erreur et surprise, puisque c'est elle qui
a provoqué le compte général et les arrangemens dont il s’ a g it ,
par une missive adressée à Choussy Jils.
Considérant, que Pierre Choussy père , a déclaré par ju ge
ment du iB floréal dernier , n’ avoir aucun droit à exercer sur
la ferme ni les bestiaux desdits lie u x , el que son fils Ja cq u e s
C h o u s s y , eu étoit seul fe rm ie r , et que d'après cette déclaration
i
�( ”
)
prise dérivaient de ce que Tadversaire ii étoit pas le f e r .
jif’er de C hitain et Jo n in a in . Aussi le citoyen Rabanon
succomba dans son opposition.
que la partie de Confier ne peut pas méconnaître, puisque le
jugement lu i a été signifié le 4 prairial aussi dernier, et se pouvo it co n va in cre qu’il avo it valablement traité a v e c la partie de
J a u d a r d , et qu’ elle ne p o u v o it plus être inquiétée par le père
C h o u s s y ; considérant, que d’après tous ces actes la partie de
G o n lic r ne peu t et 11e p o u v o it m é co n n o ître la qualité de fer
mier de la partie de J a u d a r d , desdits li e u x , et que par c o n
séquent le billet ou promesse dont il s’agit , ne peut être argué
de nullité, ni c o m m e étant fait par erreur et surprise; consi
dérant enlin , que la p arue de G o n t i e r ' a déclaré 11e pas c o n
tester les autres chefs de demande , conten an t les prétentions
de la partie de J a u d a r d , et que les parties ont consenti à t i r e
jugées en dernier ressort par le tribunal.
L e tribnual jugeant en dernier res ort, sans s'arrêter ni avoir
égard aux moyens de nullité, opposés par ta partie de Gantier,
contre le billet ou promesse du \~j thermidor dernier, et contre
les opérations qui ont précédé, déclare la partie de G o n t i e r ,
p urem ent et simplement non recevable dans son opposition du
14
iiiuiriire d e r n ie r , au jugem ent rendu par le tribunal de
G a n n a t , Je 11 vendémiaire p récéden t, sur l’appel d ’un juge
m ent du tribunal de C u s s e t , du 18 floréal dernier; o r d o n n e ,
quCT lesdils jugem ens seront exécutés selon leur for/ne et teneur,
et que les poursuites en co n sé q u en ce , seront co n tin u é es , c o n
dam ne la partie de G o n tie r aux dépens, l'a it et jugé à M o u lin s ,
l’audience du tribunal civil du département de l’ Allicr tenante,
pardevant nous Joseph P ir o n , D u llo q u e t, D e l a r e , C oinclion et
V ille m o in c ,
juges audit
tribnual, le 3 p lu v iô se , f a n 4 de la
république une et indivisible.
B a
�( 12 )
Depuis, vexation sur vexation de la part de l’adversaire
contre le citoyen Rahanon ; depuis, résistance égale, résis
tance constante de Ja part du citoyen Rabanon. Tel est le
déplorable effet de l’injustice ; celui qui en profite, est
très-ardent dans l’attaque; celui qui en est victime, est
aussi très-ferme dans sa défense. Beaucoup de temps a été
employé par les deux parties à se regarder, à incidenter.
Enfin a paru la lumière ; le citoyen Rabanon a été éclairé.
En l’an 6 , le citoyen Rabanon avoit dem andé, contre
l’adversaire , raison des bcvtiaux : sa demande étoit du
5 fructidor an 6 ; elle embrassoit encore d'autres objets.
P o u r qu'on ne la défigure plus, nous la mettons sous les
yeu x du tribunal (i).
(i) L 'a n six de la république fran çaise, et le cinq f r u c t i d o r , a
là requête de Je a n -C Ia u d e R a b a n o n , soussigné, m e suis trans
porté au dom icile du c it o y e n J a c q u e s C h o u s s y , etc.
7°. l a somme de six cent soixante-dix-huit fran cs , pour cent
treize brebis ou moutons , que ledit Choussy a fa it payer injus
tement audit Plantade-Rabanon , et qu'il dei'oit lu i remettre par
la fo rce de l'usage et de la ju stic e , tête pour tête, sans les argen
ter , comme il les a reçus de son prëaécesseur, sans les payer ,
comme son devancier les avoit aussi reçus de Laqueuille , tête pour
tête, et sans p a y e m e n t , c o m m e C h o u ssy les a donnés aux m ét a y e r s d e C h ita in , ainsi qu’il résulte de leurs b a u x , passés d evant
C a q u e t , n o ta iie , c o m m e lesdits m é ta ye rs les lui auroient ren
dus et me les re m e ttro n t; et tels enfin qu’il a dû et doit nie les
laisser tete p our t ê t e , sauf la valeur supplémentaire du n o m b r e ,
s’j! en existoil à sa sortie prétendue de fe rm e , et qui lui est offerte.
8°. Pour avoir dudit Jacques Choussy non seulement les actes
d’appréciation d* s gros bestiaux, mais encore les états des brebis
ou moutons qui lu i ont été remis par son prédécesseur , afin
�C 13 )
Choussy fut déconcerté ; cette demande l ’éiourdit : l'ac
tion de la justice le pressoit. Pour s y soustraire momen
tanément, il se réfugia dans un moyen de nullité de forme.
Cette nullité lui réussit; elle emporta l’exploit du 5 fruc
tidor an 6 , mais elle n’emporta pas le fond. Nous prions le
tribunal de lire le jugement rendu sur ce point au tri
bunal de Moulins, le 14 fructidor an 6 (1).
d’ éclairer la religion des juges sur les doubles emplois et les injus
tices consacrées par ledit Choussy, lors de notre arrêté de compte
du 1 7 thermidor an 2 , qui sera mis sous les yeux du magistrat,
et desquelles pièces il doit me justijier et m’ aider pour me con
vaincre qu’ il m’ a remis, au terme de son bail, le même nombre
et la même espèce de chose dont il étoit chargé , pour les laisser
à sa sortie, comme il les a reçus du précédent fermier. P age 4 ,
fo l. verso.
90. Pour que ledit Jacques Choussy fa sse raison audit Plan fadeRabanon, des fa u x calculs et erreurs matérielles commis dans
le bordereau qu’ il lu i a présenté, et sur lequel il a été fa it le
compte du 1 7 thermidor an 2 , et le billet de 2,892 fr. 16 sousÿ
attenduqu’ il est démontré par une opération simple et méthodique,
qu’ il y a une erreur grossière de 2,027 f r'
io°. Sous toutes les réserves de droit, dom m ages-intérêts, répé
tition de réparations lo c a tiv e s , d é g r a d a t io n , d é té r io r a tio n ,
prévues et signalées par son bail p r é c it é , remise de bestiaux , con
formément aux clauses de ce même acte, et aux airêtés du comité
de salut public, lois relatives aux délaissemens de cheptel, de
ferm ier à propriétaire, et sous les conditions apposées à l'exploit
d’ (ffres ci-devant rappelé.
(1) E n tre Jean-Claude l ’ Iantade-Rahanon :
Contre Jacques Choussy.
O u i G a y , p our le demandeur , et Jaudard p o u r le défen-
�V
r
( *4 )
Enfin après avoir passé au bureau de p aix, le 9 p lu
viôse an 7 , le citoyen Rabanon fit assigner l’adversaire
d e u r , présent à l’audience; ensemble le cito y e n M ic h e l, ju g e ,
faisant fon ction p our le substitut du commissaire du directoire
e xécu tif en ses conclusions-.
11 s’agit avant tout de statuer sur la nullité opposée par le
d é f e n ie u r , e on tre l’assignation à lui donnée , sur le fondem ent
que la copie qui lui a été donnée à son d o m ic ile , ne co ntient
a u c u n e mention de la personne à laquelle elle a élé laissée.
L a question est de savoir si ce défaut de mention opère la
nullité de la demande.
Con sid érant qu’aux term es de l’article trois du titre deux de
l’ ordonnance de mil sept cen t s o ix a n t e - s e p l, d o n t leslites dis
positions n’ ont point été a b r o g é e s, il doit être fait m e n tio n , en
l’ original et en la copie , de l’exploit d’ajournem ent des personnes
auxquelles ils a u ro n t été laissés, à peine de nullité et d’am ende
de vingt fr. co n tre l’huistier, attendu (pie dans la copie donnée
à C h o u ss y de l’assgnation du 5 de ce m o is , 011 ne tro uve a u cu n e
m ention de la personne à qui elle a été laissée.
L e tribunal jugeant en premier r e s s o r t , déclare l’assignation
donnée à la requête du d e m a n d e u r , au d é fe n d e u r, par Biesse ,
ln iissie r , le 5 de ce m o is , n u lle , co n dam n e Plantade-Ilahanon
a u x dépens liquidés à vingt-deux f r . , ensemble au c o û t et lev».c
du présent jugem ent.
Et. statuant sur le réquisitoire* du substitut du commissaire du
directoire exécu tif, condîimtie l ’huissier B ie s s e , qui a posé lad.te
assign ation, à l’am ende de vingt Ir.
J'ait et jugé à ÎMoulin-î, l’an lietice du tribunal <¡vil t e r r n t c ,
j n relevai H n o m . 1; cqties Baudinot , Pelaire . llossigneil, N u fo u r,
.Armet et T i b a i r l , juges c l pivsi lent dudit tribunal, le 14 fr u c
tidor an six de la république lraneaû>c, une c l indivisible.
�( 16 )
J
au tribunal d’allier. i° . L e citoyen Rabanon conclut à
être restitué contre son l)illet du 17 thermidor an 2 , et
contre le simulacre d'arrangement du même jo u r, remis
y.ar l’adversaire au citoyen Rabanon. 20. L e citoyen R a
banon demanda aussi la restitution de' la somme de
2.500 fr. payée à l’adversaire par le citoyen Rabanon le
17 thermidor an 2 , avec intérêts. 30. L e cit. Rabanon
demanda encore compte des bestiaux, suivant les bases
déterminées par la loi du 2 thermidor an 6 , et autres,
sur cette matière. L e citoyen Rabanon déclara qu’il se
désistoit de toutes demandes q u 'il a u ra itform ées contre
ledit Ja cq u es C h o u ssy , en ce q u elles seroient contraires
a u x différât/s chefs de celles q u i l vient de motiver et
f o r m e r : ce sont les termes de sou exploit.
Comme l’adversaire pouvoit reprocher au cit. Rabanon
de plaider pour éloigner le payement, s’il pouvoit devoir,
le citoyen Rabanon déposa, le 24 ventôse suivant, ès
mains du citoyen Gontier , notaire à M olle, la somme de
1. 5 00 fr. é c u s, et aux conditions apposées en l’acte du
2 germinal an 3. Il en fut dressé acte, qui fut signifié le
lendemain à l’adversaire.
L e 17 iloréal an 7 , l’adversaire a obtenu contre le
citoyen Rabanon sentence par défaut, par laquelle le dé
part du citoyen Rabanon, quant à ses demandes précé
dentes, a été homologué , et le citoyen Rabanon a été
déclaré non recevable en celles du 9 pluviôse an 7.
Sur son opposition à cette sentence, le cit. Rabanon y
a été déclaré non recevable p a r a u t r e sentence du u mes
sidor su ivan t, par le motif bien étrange que celle du
17 iloréal précédent ayant été rendue à tour de r ô le , il
n’y avoit pas lieu
opposition.
�(
1
6
)
Les 24 vendémiaire et 9 brumaire an 9 , le citoyen
Rabanon a appelé des deux sentences.
L e 2Ô germ inal, Choussy a pris défaut contre le citoyen
Rabanon : celui-ci y a formé opposition le 6 iloréal ; il a
demandé en même temps la suppression du précis signifié
par Choussy. Ce précis est un libelle.
M O Y E N S .
L a sentence du n messidor an 7 ne doit pas nous oc
cuper beaucoup. Il seroit ici bien ridicule do prétendre
encore qu’en l’an 7 un jugement par d éfa u t, rendu à tour
de rôle par un tribunal jugeant à la charge de l’appel ,
ne fût pas susceptible d’opposition. Venons-en donc à la
sentence par défaut du 17 floréal précédent-: cette partie
de la cause donne lieu aux questions suivantes :
, ’
i°. L e citoyen Rabanon est-il recevable en ses de
mandes ?
20. L e citoyen Rabanon est-il dans le cas de la resti
tution , contre l’espèce d’arrangement fait entre lui et
l’adversaire le 17 thermidor an z ?
30. L e citoyen R a b a n o n est-il aujourd’hui en droit de
poursuivre la restitution de la sonunc de 2,5oo francs,
payée A l’adversaire le 17 thermidor an 2 , avec intérêts,
à compter du même jo u r?
4°. L e citoyen Rabanon est-il recevable et fondé à de
mander raison des bestiaux des domaines de Chitain et
Joninain ?
Nous allons tru"terc«iLquestionsséparément; mais aupa
ravant, il faut proposer quelques explications contre la
première
�C r7 )
p re m iè re disposition de la sentence d u 17 floréal an 7 /
P a r cette p r e m iè r e d is p o s itio n , les p rem iers juges o n t
adm is les conclusions judiciaires de l’adversaire ; ils o n t
h o m o lo g u é le dép art d u citoyen R a b a n o n , quant à ses
dem andes précédentes.
.
•
M ais ceci est tr o p v a g u e ; l’on p o u rro it en in d u ire q u e
le d ép art du cito y e n R a b a n o n est absolu , tandis q u ’ il est
p u re m e n t re latif: voici p o u rq u o i. L ’on dit que le désis
tem ent du citoyen R a b a n o n est p u re m e n t r e la t if , p arce
q u ’il n’a entendu le ra p p o rte r q u ’au x conclusions q u ’il
a v o it prises p o u r le m ê m e objet dans des actes antérieurs
à celui du 9 p lu viôse an 7 : aussi a -t-il d i t , en ce quelles
seraient contraires a u x différens chefs de celles q u i l
vient de form er. P a r là , le citoyen R a b a n o n a v o u lu dire
q u 'il n’insistoit plus sur ce q u i , dans scs dem andes p r é
c é d e n te s , seroit contraire à ses nouvelles conclusions.
M ais il n’a jamais eu la pensée de re n o n ce r a u x autres
chefs de d e m a n d e , tels q u e ce u x de la p ortion de fe r
m a g e à lui r e v e n a n t , etc. A
cet é g a r d , il y a instance
p articu lière q u ’il v a p o u rs u iv re incessamment.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il recevable en ses demandes
du 9 pluviôse an 7 ?
Ici l’adversaire op pose au citoyen R a b a n o n , la chose
j u g é e , les ju gem en s rendu s à C u sset, à Gannnt et à
M o u lin s , les 22 floréal an 3 , 11 ve n d é m ia ire et 3 p lu
viôse au 4 ; il s’appuie p rin cip a le m en t sur le ju g e m e n t
G
�( 18 )
du 3 pluviôse an 4 ; il invoque la maxime non 1rs in
idem.
P o u r juger du mérite de l’objection, il faut se r a p - .
peler l’objet de la contestation d’alors; il faut se rappeler
encore le système de défense adopté pour le compte
du citoyen Rabanon.
L ’adversaire demandoit le payement de la somme de
2,892 fr. 16 sous, montant du billet du cit. Rabanon.
Quant à la défense du citoyen R a b a n o n , il faut ne
pas s’arrêter à ce qui a été fait à Cusset et à G a n n a t,
puisque les jugem ens q u i y ont été rendus , Vont été
p a r d éfa u t, il faut se porter au jugement rendu i\
M oulins, le 3 pluviôse an 4. O r , au tribunal de M oulins,
au nom du citoyen R abanon, on demanda la nullité
du b ille t, par le motif seul que l’adversaire n’étoit pas
le vrai fermier de C h itain, et qu’ainsi il y avoit eu er
reur et surprise : cette demande en nullité fut rejetée.
Voilà ce qui a été jugé le 3 pluviôse an 4 ; il a été jugé
qu’il n’y avoit ni erreur ni surprise, quoique dans le
principe Pierre Choussy père seul fût fermier.
3VIais alors, il n’étoit pas question c o m m e aujourd’hui,
de la validité de toutes les parties de l'arrangement}
mais alors, il n’étoit pas question comme aujourd’ h u i,
d’une demande; en restitution contre l’intégralité de cet
arrangement pour cause de fo rce et crainte grave,
pour cause de dot personnel de la part de ¿’ adversaire,
p o u r cause d'erreur de com pte, double et f a u x emploi.
P a r le jugem ent du 3 pluviôse an 4 , le tribunal
d 'A llie r n a. pas statué n i pu statuer sur ces difficultés
infinim ent lég itim es, p u is q ii elles ne lu i ont pas été
�/o(
C T9 )
-présentées : ce n e s t donc pas le lieu de la jn a xim e
non nobis in idem.
L ’adversaire, dans son précis (p a g e i 5 ) , excipe
d’un jugement du 14 pluviôse an 6 , q u i, dit-il, a ap~
prouvé le compte de cheptels , et le billet. Mais l’on ne
connoît aucun jugement à cette date : Choussy ne l a
point signifié. Il y a probablement méprise sur ce
point; il est vraisemblable que l’on a voulu parler de
celui du 3 pluviôse an 4.
L ’adversaire ne peut pas se prévaloir des actes subséquens.
L e citoyen Rabanon s’est toujours récrié contre là
contrainte violente, exercée contre lu i; il n’a pas signifié
un acte, où il n’ait protesté de toutes ses forces, et au
tant que les circonstances fâcheuses dans lesquelles nous
nous sommes trouvés, le lui ont permis. Ses réclama
tions ont été graduées sur le plus ou le moins de liberté
civile adont il a 'joui.
Jacques Choussy appelle en vain à son secours, le
jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4 , et la
sentence du 14 prairial an 6 , par laquelle il est
prouvé que le citoyen Rabanon avoit demandé et obtenu
un délai pour payer le montant du billet du 17 ther
midor an 2 , en vertu des lois nouvelles sur les h’ansactions.
i°. L e jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4,
n'a pas jugé la question ; nous venons de le prouver.
20.
La sentence du 14 prairial an 6 , ne signifie rien
dans les circonstances. Personne n’a encore oublié qu’en
l’an 6 , l’oppression directoriale pesoit principalement
C 2
*t'\
�76%
y \
C 20 )
dans l’arrondisscmcnt de Cusset. L à , comme aupara
v a n t, les personnes honnêtes étoient froissées, terrorifiées : d’ailleurs, en donnant aujourd’hui à l’arrangement
fait par Choussy lui-m êm e, le 17 thermidor an 2 , la
f o r c e (Tune transaction , il y auroit également lieu à
réclam ation , parce que Tordonnance de i 56 o, ne m ain
tient que les transactions f a it e s sans dol et sans con
trainte , et q u ic i il y a eu contrainte et dol.
S e c o n d e
q
u
e
s
t
i
o
n
.
L e citoyen R a b a n o n est-il dans le cas de la restitu
tion contre Tespèce d'arrangement f a i t entre lu i et
Tadversaire, le 17 therm idor an 2 ?
C ’est ici le lieu d’analiser les principes les plus certains
en restitution, et d’en faire de suite l’application dans le
môme ordre.
L ’on est restitué contre tout engagement o \ il y a eu
crainte : ait p r œ to r , quod metûs causa gvztum e n t
ration non habebo. L . 1. il’, quod met. caus.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
force : S i quis v i compulsus aliquid f e c i t , per hoc ediction restituitur. L. 3. cod.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
dol.
Nos ordonnances ( 1 ) , en particulier celle de François
(1) C e l l e parlic est tirée m ot p ou r m ot du précis du cito ye n
R a b a n o n , pag. y et 10. N ous l’avons fait ainsi, p our cjue l’attentiou du lecteur ne soit pus détournée.
�( ' 21.)
1er. de l'année i5,39 , ont adopté les principes du droit
romain et admis la restitution pour cause d'erreur de fait,
de d o l , de violence et de.crainte; et non seulement notre
jurisprudence s y est conformée, et nos livres sont pleins
d’arrêts qui ont détruit les engagemens que la crainte et
la violence ont fait contracter; mais cette même juris
prudence avoit été plus loin ; elle a voit consacré les prin
cipes d’un titre du code théodosien intitulé: D e infirm andis lus quœ sub tirannide acta sant. Nous trouvons
dans les réponses de Charondas , un arrêt du mois de
janvier 1 6 9 7 , par lequel il fut jugé que des ventes d’hé
ritages faites durant les troubles des guerres civiles et temps
de calamité, étoient sujettes à rescision, sans même s’en
quérir de la vilité du prix. L . 9 , rép. 25 . Nous trouvons
dans Mornac un arrêt par lequel un débiteur qui s’ étoit
fait faire remise de sa dette , pendant le temps de la ligue,
par son créancier , lorsque les troubles furent appaisés,
fut néanmoins condamné à payer la dette, ad. le g .z .ff.
de calum niatoribus ; et c’est à l’occasion de cet arrêt que
Mornac cite le titre du code théodosien intitulé : D e la,
nécessité de détruire les actes passés dans les temps de
tyrannie ; mais quels temps furent plus calamiteux ! quels
temps furent plus tyranniques, plus meurtriers que ceux
de l’an 2 dans le district de Cusset ?
Un autre principe écrit dans l'ordonnance de 1667 9
s e m b l e fait pour la cause : l'art. 21 du tit. 29 d it, en
parlant des redditions de compte: s'il y a des ei'reuis ,
des om issions de recette ou f a u x em p loi, les parties
pourront en J o r m er demande.
Tous ces vices 11e se couvrent point par le silence de
�( zz )
*a partie ldsde , à moins que les parties n’aient ensuite
traité expressément sur ces mêmes vices.
Quant à la crainte , il faut q u ’elle soit grave. Il faut
metus instantis vel J 'u tu ri p ericu li causa m entis trepidatione. L . i . ff. quod inet. caus. D om at, liv. i , titre 18 ,
section 2, n.° 3 , dit : « Si 011 la met (la personne effrayée)
« en péril de quelque mal dont la juste crainte l’oblige
« à un consentement forcé ; ce consentement sera sans
« effet. »
A u 17 thermidor an 2 , il y avoit contre le citoyen
Rabanon, metus instantes, ou tout au m oins, f u t u r i
p ericu li causa. Il y avoit m entis trepidatio. L e citoyen
Rabanon étoit dénoncé dès le mois de germinal an 2 ;
B o u rg eo is, l’un des principaux ennemis du citoyen Raba
n o n , disoit à Paris qu’ il seroit encore l’un de ceux des
tinés à appaiser la soif ardente des persécuteurs. La
preuve en est écrite dans une information faite à la
société épuratoire de V ich y , le seize brumaire an 3.
( Voyez page 17 du précis du citoyen Rabanon. ) L e
29 messidor an 2, l’adversaire écrivoit au citoyen Rabiiuon
qu’il avoit parlé de sa résista n ce, des difficultés q u 'il opposoit ; que le représentant F orestier 11’étoit pas content
de sa façon d’agir ; que ce brave représentant l’invitoit
à se montrer plus accommodant, et que ce n éloit plus la
temps où les tracasseries étaient à f ordre du jour. ( V o y.
page 18 du précis du citoyen Rabanon ). Déjà une des
maisons que le citoyen Rabanon avoit î\ P aris, avoit été
comprise dan-» la liste des biens des émigrés.
L e sens naturel du langage de Clioussy saute aux yeux.
Il signifie, que si le citoyen Rabanon 11e se rondoit pas
�/ o J '
( 23 )
tiux vues de Fadversaire, tout iniques qu’elles étoîent,
le sort commun d’alors attendoit le citoyen Rabanon ;
d’abord visites, menaces, nouvelle dénonciation , réclu
sion , d puis la mort. Il y avoit dès lors , le metus
p ericu liin sta n tis v e lfu tu r i, mentis trepidatio.T^c citoyen.
Rabanon n’avoit pas à s’y méprendre, puisqu'il y avoit
une dénonciation form elle, à raison de la résistance qu’il
opposoit i\ Choussy, et de sa confiance dans l’attente de
la loi du 17 fructidor, en faveur des propriétaires contre
les fermiers.
Aussi le citoyen Rabanon souscrivit-il le 17 thermidor
an 2 , à tout ce que l’adversaire exigea de lui. L e citoyen
Rabanon n’examina rien. La m entis trepidatio étoit si
grande en lui, qu’il en fait l’aveu : l’entendement l’aban
donna. Il fit et paya tout ce que l’on voulut; trop heu
reux en lo u vo ya n t, de gagner quelques instans de plus.
L ’adversaire répond en vain qu’au 2 thermidor an 2 ,
( page 9 de son p ré cis), l’alégresse universelle agitoit tous
les Français; que la tète du premier tyran de la France
étoit tom bée, et qu’ainsi le citoyen Rabanon n’avoit plus
de sujets de crainte.
A u 17 thermidor an 2 , et long-temps après, la terreur
régnoit àC usset, comme avant le 9 thermidor; eh bien,
la stupeur, le deuil, y planoient sur toutes les têtes. Rien
ne le prouvoit plus que l’arrêté de Forestier du 22. Par
cet arrêté , ce représenta?it envoyoit encore au tribunal
révolutionnaire, douze citoyens honnêtes de tout âge , de
tout sexe , qui partirent des prisons de Cusset et Moulins,
le 28 thermidor, et ne sont revenus de celles de Paris,
que le i . cr brumaire an 3 , après avoir justifié de leur
�(H )
innocence. L e s Dussaray-Vignoles, les B o u q u e t - D e s c li a u x ,
les Charles, les Combes et autres, ne sont sortis cles
prisons de C u sset, q u ’à la fin de brumaire et frimaire
an 3. Les vertus étoient alors des crimes. Ce même
arrêté réservoit pour un autre e n vo i, deux magistrats du
bailliage de Cusset, dont l’un honore le tribunal d’appel
par des qualités bien estimables , et trois autres victimes
signalées par le même arrêté. L e 9 thermidor et autres
jours mémorables , n’avoient fait qu'augmenter, l’au
dace et la fureur des illuminés. La pièce imprimée
ci - dessous ( 1 ) , et plusieurs autres , le prouvent.
(1) Extrait d'une adresse présentée à rassemblée nationale , en
Van 3 , par les citoyens de Cusset et de Vichy.
L e sage et vertueux Vernerey , e n v o y é en mission dans le dé
p arte m e n t de l’A Hier, clans le mois de germ inal dernier, versoit le heaum e de la consolation dans les cœ urs des m alheureux
liabitans de ce district ; les principes de justice et d’hum anité ,
m é co n n u s depuis lo n g -te m p s, étoient rappelés; des cito ye n s inn o c e n s , entassés en foule dans les prisons, r e c o u v r o i e n t la l i b e r t é :
ch a cu n c r u t ê t r e à l’époque du bonlicur. V ain e illusion! Vernerey
quitte le département, laissant après lu i Forestier, pour le mal
heur de ses concitoyens, et de ceux à qui il en voulait. Bientôt
la terreur ressuscita; ceux qui avaient recouvré leur liberté , f u
rent traînés de nouveau dans les maisons d'arrêt. Dans l ’espace
d ’un mois toutes les traces du bien que le vertueux Vernerey
avoit laissées , furent entièrement effacées, e t notre district se
vit plus q u e jamais l e théâtre de mille ve x a tio n s; tout se passoit. sous les y e u x de F o r e stie r , à ijni il an ro it été si facile de
maintenir le bien (ju’avoit lait son collègue. Mois <juel co n C 'v ’ t
�ÏO V
(
)
Ces pièces ne sont malheureusement que trop ex
pressives. D ’ailleurs Choussy , qui a tant de m ém oire,
traste dans la co n d u ite de ces deux
représentais ! l ’un avait
passé comme une divinité bienfaisante , pour réparer les maux
que la tyrannie nous avoit causés: Vautre comme le démon des
tructeur, ne paroît que pour jeter la désolation dans nos âmes t
et préparer de nouvelles victimes à la mort. Vernerey avant le
9 thermidor, ne voit dans le district, que des innocens persé
cutés ,* il les rend à la liberté. Forestier, après le 9 thermidor, ne
voit dans la plupart de ces mêmes citoyens , que des conspira
teurs, des contre-révolutionnaires: il les envoie chargés de fers ,
au tribunal révolutionnaire, et ils obtiennent tous , quelque
temps après, leur liberté du comité de sûreté générale. Vernerey,
sous le règne de Robespierre, préchoit la justice et l ’ humanité ;
il exhortait à ne pas fa ir e par des vexations injustes, des en
nemis à la chose publique. Forestier ranimait la terreur: il di
soit qu’ il fa lla it encore se défaire de six têtes à Cusset; que rien
n’ étoit plus beau, plus m ajestueux , que le tribunal révolution
naire : qu'on y passoit en revue la fou le immense des accusés,
avec une rapidité incroyable, et que les jurés faisoient / e u de
file ; enjin, que le tribunal révolutionnaire lui paroissoit au-des~
sus de la convention. I l se plaignoit vivement, de ce que deux
citoyens qui depuis ont obtenu leur liberté du comité de sûreté
générale , avoient échappé à la guillotine de Lyon; m ais , disoiti l } Us n'échapperont pas à celle de Paris . A v e c des principes si
o p p o s é s , des mesures si co n tra ires, eût-on dit que ces deux rcprésentans siégeoient dans le m êm e s é n a t, aspiroieut au m ê m e
b u t.
C ito y e n s représentans, pourrons-nous nous e m p ê ch e r de nous
livrer à de justes plaint es co n tre F o re stie r, el le regarder c o m m e
le prem ier m o t e u r de tou s les m aux qui nous ont affligés pen-
D
f-
�c
2
6
}
n’a pas oublié, ( mais il ne voudra pas le dire ) qu’en
l’an 5 , il y .eut à Gusset un mouvement violent, tel que
dant un a n , « lorsque nous savons qu’ il s’ est vanté d’ avoir
« f a i t guillotiner Dujfort ; lorsque nous savons qu’ après le 9
« thermidor, il a cherché à ranimer le courage de nos terro« ristes, et les entretenir de l ’ espoir de voir bientôt reparoître
« le règne de la tyrannie, soit en écrivant à la société populaire.
« de Cusset, le 18 fructidor dernier : « Croyez que l ’ esprit public
« va reprendre son énergie première » , soit en écrivant que la
convention nationale alloit fa ir e poursuivre les individus qu’ il
avoit renvoyés, au tribunal révolutionnaire, et q u e le co m ité de
s u « t é générale venoit de m e ttre en liberté; a j o u t a n t , que la
convention nationale alloit reprendre une attitude capable d’ en
imposer à Varistocratie.
L e s mânes d’ une foule de victim es in n o ce n tes, d o n t le sang
crie encore ven g ea n ce, s’ élèveront dans tou s les tem ps p ou r co n
dam ner c e tte assertion aussi fausse que révo lta n te : suivent centsoixante-quinze signatures, etc.
J e soussigné, ancien adm inistrateur au directoire du district
de Cusset, certifieàqui il appartiendra, avoir été envoyé au tribunal
révolutionnaire de Paris , le 28 thermidor an 2 , en v e r tu d’un
arrêté de F o r e s t ie r , représentant du peuple alors , en date du 22
du même mois, et n’ être sorti des prisons de Paris que le i er. bru
maire an^, après avoir été interrogé et avoir justifié de mon inno
cence , ainsi que les onze autres victimes dénommées par Varrêté
précité, qui étaient parties le même jour que moi, soit des prisons
de Cusset, soit de celles de Moulins. E n foi de quoi j’ai signé le
présent p ou r servir et valoir c e que de raison. F a it à M a g n ct ,
le 29 germ inal an 9 de la république française. Signé P . A .
M e i l i i e u v a t , adjoint.
V u bon p our la signature ci-dessus du c it o y e n M e iliie u v a t,
�( 27 )
les deux partis étoient armés et en présence ; et une
-personne prudente ayant fa it rem arquer à c e r ta in jiîs ,
que J a cq u es C houssy connoit b ie n , qii il était en opposition avec son p è r e , lu i dit : vous voulez donc tirer
su r votre père ,* l e j î l s répondit, mon père est à son
p o s te , je suis au m ien.
Choussy dit lui-m em e, page 3 de son précis, et dans
sa lettre, que le citoyen R a ba n on differoit, q u i l lu i avoit
demandé divers d é la is , q u i l Vavoit obligé à f a i r e des
voyages inutiles et fa tig a n s , et qu’après la lettre du 29
messidor, le citoyen R a ba n on garda le silence pendant
encore qu in ze jo u rs.
T o u t ce ci sig n ijie, caractérise une obsession cons
tante de la part de C houssy contre le citoyen R a b a
non , et une résistance opiniâtre de ce de} nier à une
oppression raisonnée et soutenue. L a vérité déchire
donc le voile astucieux dont Jacques Choussy voudroit
se couvrir. Toutes ces démonstrations , qui lui échappent
forcément, démontrent la nécessité d e là réponse du cit.
Rabanon , du 14 thermidor.
Jacques Choussy en impose encore, en disant ( pag. 10
de son précis ) q u e F o r e s t ie r n e st que s o j i a llié à un
adjoint à la mairie de c e t te c o m m u n e . A M a g n e t , le 29 germinal
an 9. Signé, C
haules
L acoste.
V isé p o u r légalisation de la signature du citoyen C h arlesL a co ste ,
m aire d e là co m m u n e de M a g n e t , par le sous-préfet du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’AIlicr, à la Palisse, le 3 floréal
a n p d e la république française. S ig n é , C
à la Palisse, le 9 floréal an 9. Signé V
ossonn ier
alleto n
. . . Enregistré
.
D
î
�C z* )
degré f o r t éloigné. Jacques Ckoussy sent ici le besoin d’un
mensonge grossier , et la nécessité d'en imposer aux juges
et aux lecteurs : m ais Ja cq u es C houssy en est le neveu
à la mode de Bretagne ; ce fait est prouvé par la pièce
matérielle ci-jointe ( i ). Quelle croyance donner à un
hom m e q u i m ent a u ssi effrontém ent , et à toutes les
-pages ! __
Que malgré cette parenté, le bail de Choussy père ait
été condamné aux flammes ; que cette condamnation ait
été prononcée par le département d’A l l ie r , il n’en résulte
qu’une conséquence de justice forcée en f a v e u r du citoyen
Rabanon , et que les juges saisiront bien en repoussant la
fausseté de cette autre assertion de Jacques Choussy.
(i)
J e soussigné, m aire de la c o m m u n e de C u s s e t, certifie à
qui i! ap p a rtien d ra, que la citoyenne A n n e Touset, née le 28
lévrier 1 7 6 0 , sur c e tte c o m m u n e , et mariée a u c ito y e n Ja cq u e s
C h o u s s y , d e l à m êm e c o m m u n e , est nièce, à la mode de Bretagne,
du citcycruForestier, ci-devant représentant du peuple, en l'an 2,
par L o u ise D esbrest, sa m è r e , mariée en 1^66, a F r a n ç o i s T o u s e t ;
laquelle L ouise Desbrest étoit cousine-germ aine dudit Forestier,
c o m m e enfant l’un et l’autre de frère et sœur.
E n foi de q u o i , j’ai délivré le présent p o u r servir et yaluir
c e que de raison. A C u s s e t, ce 2 floréal an 9.
Signé,
D u ssa r a y- V ig n o les,
maire.
V u bon p o u r îïi signature du c it o y e n D u s s a r a y - V i g n o l e s ,
maire de la ville de C u s s e t , par le sous*préfct du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’ A l l i e r , a la Palisse. L e 9
floréal an y de la république française. S ig n é , C
ossonn ieii.
Enregistré à la Palisse, le 9 floréal an 9 >Signét V a l l e t o u .
�...............................................................
(
2
9
)
'
1°. L ’avis du district de Gusset, sut lequel il est inter
venu , est du z 5 brumaire an 2 , et ce n’est q ne le 1 ^ p lu
viôse suivant que le citoyen Rabanon a été nommé membre
du conseil du district de Cusset, ainsi qu’il est démontré
par la lettre suivante (1). 20. Ce bail a été anéanti, d’une
part , parce qu’il étoit postérieur au mois de février
179 2 , et de l’autre parce qu’il rappeloit des qualifications,
des énonciations qui faisoient ombrage. N o u s nous sommes
-procuré cet arrêté; a in s i, Fannullation du bail en ques
tio n , est absolum ent étrangère au citoyen R a b a n o n ,
q u i n a été nom m é membre du conseil du district, que
longtem ps a p rès, et lorsq u 'il étoit en m ission dans
le département du C h e r , où i l a séjourné ju sq u 'à la
J in de p ra irial an 2 (2).
(1) C u s s e t , le 16 p lu viô se , l ’an a de la république une e t in d iv isib le.
L'agent national provisoire près le district de Cusset , au.
républicain Plantade-Rabanon, à Vichy.
J e te donne avis q u e , par l’arrêté du représentant du peuple
Vernerey, du 13 de ce mois, tu as été nommé administrateur au
conseil du district de Cusset, J e t’invite à te rendre à tou poste.
S alut et fraternité,
P o n c e t.
(2 )
E
xtrait
de l’un des registres des délibérations et arrêtés du
directoire du district de Cusset.
Séance publ i que et permanent e du 9 p l u v i ô s e , an 2 de la républ i que une 1
et indivisible.
Nous administrateurs composant le directoire du district de
Cusset ;
�C 3° )
L e citoyen Rabanon n’a jamais dissimulé l’origine
des domaines de Chitainet de Joninain; ils proviennent
du sieur de Laqueuille, ém igré; et son mémoire au
conseil le dit formellement; mais il en a joui en bon
père de famille; mais il les a administrés plus soigneu
sement que les siens, que ne le faisoit Jacques Choussy;
mais il n'a jamais permis que l’on détachât la plus petite
branche des bois des deux domaines en question ; mais
il y a au contraire, procès verbal régulier des dégrada
tions commises dans tous les genres par Choussy , et dont
l’effet sera poursuivi à propos. Mais cette a c q u i s i t i o n n e
garantissoit pas; elle ne pouvoit pas garantir le citoyen
Rabanon , des traits meurtriers dont ses ennemis vouloient l’accabler.
L e surplus des épisodes du précis de Jacques Choussy ,
n’est qu’une lâche récrimination : le citoyen Rabanon y
a répondu par des réflexions, à la suite de son mémoire
au conseil. Revenons à la cause, et dévoilons le dol per
sonnel commis par Jacques Choussy.
P o u r le d o l p e r s o n n e l , il faut le d e s s e in de l’un des
contractans de surprendre l’autre, et l’événement effectif
de la trom perie, dit Dornat, liv. i , titre 18 , section 3 ,
A p r è s avoir consulté et entendu l’agent national p ro viso ire ,
A r r ê to n s les dispositions suivantes :
A n T . I er. L es c ito y e n s P lanta.de-Rabanon , habitant de la c o m
m u n e de V i c h y , et a u tre s, sont nom m és co m m issa ires,à l’effet
de se transporter sur le ch a m p au départem ent du C h er.
P a r les administrateurs ; signé, F o u i i n j e r , P. L. R. P . ,
et O l i v i e r , secrétaire adjoint,
�( 3i )
n°. 4. F ra udis interpretatio semper in ju r e c iv ili non
e x eventu d u n ta xà t, sed e x con cilio quoque desideratur.
L . 79 ff. de reg. jur.
Dans l’espèce, le concilium est dans la lettre de l’ad
versaire au citoyen R ab an on , du 29 messidor an 2 , où
le citoyen Rabanon étoit menacé de la disgrâce du brave
représentant F orestier ; l’adversaire menaçoit de cette
autorité terrible, pour réduire le citoyen Rabanon à l’im
puissance de se défendre, et pour le tromper.
U cçeiitu s est dans le simulacre d’arrangement même.
Dans la reconnoissance du 17 thermidor an 2 , on lit que
le citoyen Rabanon a donné au citoyen Choussy, 2,5oo
francs argent ; c’est-û-dire, z 5oo francs écus. Cette circons
tance est marquante ; 2,5oo francs écus, dans un temps
où il ne se faisoit aucune affaire en argent, annonce
combien alors le citoyen Rabanon étoit comprimé. D ’ail
leurs il y a erreur de com pte, double em ploi, faux em
p lo i, dans ce prétendu arrangement.
En effet, à en juger par les propres écrits de l’adver
saire , par l’état et par l’écrit qu’il remit au citoyen R a
b an on, le 17 thermidor an 2 , il y a sûrement erreur de
com pte, double e m p lo i, faux em ploi; nous allons le
démontrer.
Mais auparavant, il est b o n d e prévenir le tribunal,
que l’adversaire a fait l’opération, comme si le citoyen
Rabanon eut été tout ¿1 la fois, et le propriétaire, et le
métayer des deux domaines. L e citoyen Rabanon est
chargé de tou t, sauf à lui i\ s’entendre avec les métayers.
Suivant l’écrit de l’aiiversaire ? sous la date du 17 ther-
�( 3* )
m idor an 2 , et l’état y jo i n t , les bestiaux auroient été
estimés à la somme de neuf mille neuf cent
cinquante francs, ci . . , .............................. 9 j 9§0 fr* 0 s>
Suivant lu i,l’ancien prix
des bestiaux pour le do
maine de Chitain , étoit de
neuf cent cinquante-deux
francs seize sous, ci . . . . 952 fr. 16 s. I
Suivant l’adversaire,l'an.
cien prix des bestiaux pour
?
le domaine de J o n in a in ,
étoit de neuf cent soixante
francs , c i ............................
g6o
Ces deux sommes don
nent un total d e ................. 1,912 fr. 16 s.
Cette dernière somme déduite de celle
de 99Ôo fr. ci-dessus, montant de l'estima
tion des bestiaux, au 17 thermidor an 2 , il
r e s te ................. .................................................. 8;037
Cette somme seroit partageable par moitié
entre l'adversaire, comme Fermier, et les
m étayers; la moitié de l’adversaire seroit
d e ......................................................................... 4,018
Suivant l'écrit du 17 thermidor an 2, l’ad
versaire auroit r e ç u , i ° . en argent comp
tant 2 , 5 o o fr. ; 2°* en-un billot de 2,892 fr.
16 s. T o t a l, ci . . . . . ................. ... . . . . 5,392
La diflerenceau préjudiceducit.Rabanon
seroit d e ................................................................. I >374
4
12
16
4
Preuve d’erreur bien marquée.
M a is ,
�( 33 )
Mais , dira l’adversaire, le prix du cheptel entre L aqueuillie et moi n’étoit pas le même qu’entre les mé
tayers et moi ; mon prix avec lei métayers étoit plus con
sidérable.
E h bien ! comptons encore dans ce sens. Mais pour fa:re
bien sentir la démonstration, commençons par une expli
cation essentielle.
L ’adversaire nous dit lu i-m êm e, qu’au 17 thermidor
an 2 , l’estimation totale des bestiaux étoit de 9,960 francs.
Dans cette som m e, est comprise la valeur originaire des
bestiaux , la valeur de 1783 ( date du bail à ferme par le
susdit Laqueuilhe à Choussy. )
Dans cette somme est aussi comprise la valeur progres
sive , à partir du bail de 1783 , jusqu’au bail à métairie
consenti par Choussy ; dans cette somme est aussi comprise
la valeur progressive depuis ce bail à m étairie, ju?qu à l’es
timation de l’an 2. Toutes ces valeurs sont réunies dans la
somme de 9,960 f r . , puisqu’en l’an 2 les bestiaux, suivant
l’adversaire, n’auroient pas été appréciés à plus de 9,960 fr.,
ensorte qu’à en juger par Choussy lui-même en 1 an 2 , les
bestiaux ne valoient que 9,960 fr.
Ceci p o sé , si l’adversaire veut faire deux opérations de
com pte, s’il veut établir une distinction entre le bail à
ferme et le bail à métairie , il ne peut pas prendre d’abord
la moitié de toute la différence qu’il y auroit entre le prix
exprim é au bail de 1783 et l’estimation de l’an 2.
Il ne peut pas prendre ensuite, sur la moitié revenant
aux métayers, dans cette même différence, toute la somme
en plus entre lè prix énoncé au bail à ferme et le prix
énoncé
bail à métairie.
�( 34 )
En effet, entre Choussy, ferm ier, et les rti&aÿers, le bail
à cheptel opéroit une société. O r , il est de principe que
lorsqu’il s’agit d’ un partage de société, l’on commence
par en former l’actif.
'
Sur toute la niasse de cet a c t if , chacun des sociétaires
prélève les fonds qu’il a mis dans la société, et ce qui reste
est partagé entre les sociétaires.
Entre Choussy et les m étayers, la valeur des bestiaux en
l ’an 2 , la somme de 9,960 fr. auroit été la masse de l’actif
de la société ; les fonds mis par Choussy dans la société
auroient été la plus-value des b e s t i a u x d e p u i s 1783 , ju s
qu’aux baux à métairie faits entre Choussy et les m é
tayers.
Sur la valeur de l’an 2, Choussy de voit prélever le mon
tant de cette plus-value; mais il devoit faire ce prélève
ment avant tout partage, afin que ce prélèvement portât
également sur tous les sociétaires.
A u lieu de cela, Choussy a commencé par
porter en lign e, c i ...........................................9,960 fr. o s.
D e cette som m e, il a soustrait celle de
1,912 fr. 16 s.
Pou r le prix des bestiaux en 1783 , il a
p r i s ..................................................................... 1*912
Il en est r e s t é .............................................. 8*037
16
4 s*
. D e cette somme, il a pris pour lui moitié,
q u ia é t u d e ..............................................
4,018 fr. 12 s.
Il a attribué au citoyen Rabanon , comme, | (
1
représentant les métayers, une somme de . 4,018
12
�7t r
r s 5 )
Sur cette moitié, il a été retenu la somme
d e ........................................................................ 1,218
4
pour la plus-value des bestiaux entre 1783 _______ _
et 1792.
D e cette manière il s’est donné . . . . 5,23$
Dans cette opération il y a erreur de
compte , double emploi et faux emploi.
Il y a double em ploi, en ce qu’il reçoit
deux fois la mcme somme ; il reçoit deux
fois la même som m e, en ce que les 1,218 fr.
16
4 s. devant être seulement un prélèvement
sur la somme totale, par la forme du prélè
vem ent, il en auroit lui-mêmc supporté la
moitié.
Il y a faux em ploi, en ce qu’en opérant
de cette manière il a mis sur le compte des
métayers,et dès-lors sur le citoyen Rabanon,
la totalité d e .....................................................1,218 fr. 4 s.
montant de la plus-value, tandis que lui •
Clioussy devoit en supporter la moitié.
En cet état, voici le vrai calcul qui auroit dû être fait par
Jacques C h o u s s y , même .daus son système. L e citoyen
Rabanon n’entend pas approuver les bases que Choussy
a posées. E n temps et lie u , le citoyen Rabanon en pro
posera d’autres qui sont très-justes; mais en ce moment,
et sans tirer à conséquence, nous comptons d’après Choussy
lui-m êm e, et nous montrons l’erreur, le double em ploi,
le fux emploi.
Ainsi, suivant Choussy en l’an 2 , p rix de
�fo ire , les bestiaux v a lo i e n t ............................ 9>95o fr. o s.
A in si, suivant Choussy, les bestiaux en .............
1783 valo ien t, prix de f o i r e ....................... 1,912 fr. 16 s.
q u ’il falloit déduire.
________
R e s t o i t .................................
Suivant C h o u ssy, la plus-value depuis
1783 jusqu’en 1 7 9 2 , avec les
métayers, étoit pour Joninain
888 fr. 4 s.
P o u r C h ita in .......................
330
1,218
4
A d é d u i r e ................. ...
R e s t o i t ............................................................6,819
L a moitié revenant à Choussy, étoit de . 3,409 • 10
Il lui reviendroit encore pour la plusvalue entre 1783 et 1792 ci-dessus, ci . . . 1,218
4
L e total du contingent de Choussy seroit
d e .........................................................................4*627
Il a reçu en a rg e n t. . . 2,5oo fr. os. 1
Il lui seroit encore dû
> 5,392
par billet . • . ................. 2,892 •» 16
)
‘
14
16
Il y auroit donc une première erreur contre le citoyen
Rabanon de 765 fr. 2 s ., non compris les valeurs des chep
tels des brebis , qui appartiennent aussi essentiellement au
citoyen Rabanon que les cheptels des gros bestiaux , et que
Jac ques Choussy, par le compte que Ton vient de discuter,
fait payer au nombre de cent vin gt, à raison de 6 J'r.p ar
brebis • tandis qu'il doit les rendre tête pour tê te, comme
�( 37 )
son père les a reçues du citoyen Busseuil, précédent fer
mier, ainsi que l’explique la lettre imprimée de ce dernier,
page 2.
D e tout ceci, il résulte matériellement qu’il y auroit
preuve bien positive d’erreur de com pte, double em
p lo i, faux emploi ; et comme erreur n’est pas compte ,
tout est à refaire.
Ce n’est pas que le citoyen Rabanon en soit réduif à
ce moyen ; il en a plusieurs autres qu’il développera ; mais
il a cru devoir se borner en ce moment à celui-ci,
comme l’un des plussaillans. Lorsque le simulacre d’arran
gement du 17 thermidor an 2 sera effacé, lorsque le
compte se f e r a de n o u v e a u , i l s t i p u l e r a scs intérêts avec'
plus de t r a n q u i l l i t é d’esprit; il jouira de toute sa lib erté• ^
alors, il aura sûrement justice.
Nous avons démontré qu’il y a eu erreur même dans
le com pte, dans l’opération de Choussy. Mais nous n’en
avions pas besoin ; la vérification ne doit s’en faire, que
lorsqu’il s’agira de l’exécution du jugement que le tri
bunal va rendre ; en ce m o m en t, il suffit d’avoir bien
p r o u v é que le citoyen Rabanon a été terrorifié par
Choussy et par t o u t e s les horreurs des circonstances des
temps, et par celles des 17 , 22, 28 thermidor, pour que
le citoyen Rabanon doive être restitué, contre des actes
produits par la tyrannie.
�7^°
(38)
T
r o i s i è m e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on -p eu t-il dem ander la restitution
de la som m e de 235 oq J r a n c s en a rg en t, p a r lu i payée
le 17 therm idor an 2 , avec intérêts ?
Cette proposition n’est pas une question 5 elle est seu
lement une conséquence de la précédente.
E n effet, nous venons de démontrer que l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 , doit être annullé :
cette a n n u l a t i o n r a m è n e r a t o u t e s les p a r t ie s e n l’état
d’avant le 17 thermidor an 2 ; les écrits du 17 thermidor
an 2 et tout ce q u ia suivi, seront considérés comme non
avenus ; il faudra que chacune des parties reprenne le sien.
Ce qu’a fait l’adversaire, ne présentera plus q u’une expoliation , et spoliatus antè om nia restituendus. L ’adver
saire rendra la somme de 2,5oo francs ; il la rendra avec
les intérêts, à compter du payement. Ces intérêts seront
la réparation du dommage causé au citoyen Rabanon. Z/. 2.
cond. ind.
Q
u a t r i è m
e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il a u jo u rd 'h u i, recevable et
J b n d é à demander raison du cheptel ?
Celle proposition ne présente pas de difficulté ; elle
est encore une conséquence forcée de la seconde. L ’es
pèce d’arran^cinent du 17 thermidor an 2 , écartée, les
V
�ïz \
( 39 )
droits du citoyen Rabànon sont rétablis en leur intégralité.
" Ce sont le s;nouvelles-lois sur le9 cheptels, qu'il faut
'consulter; en voici la série et les dispositions propres à
la contestation d'entre les parties.
Un arrêté du comité de salut public, du 2 thermidor
an 2, article 3 , porte : « Lorsque le bail du métayer sera
et J î n i , il sera obligé de rendre en nature au proprié
té taire, Je mérrtè nombre de bestiaux et la même branche,
« tels enfin qu’il les avoit reçus, sans pouvoir se servir
« de la clause de son b a il, pour en fournir la valeur. »
U n arrêté du même com ité, en date du 17 fructidor
an 2 , dit en l’article premier : « Les fermiers qui ont reçu
« du propriétaire des bestiaux en entrant dans leurs fer« m es, sont tenus comme les métayers, d’exécuter l’ar« rêté du 2 thermidor dernier. »
Ces deux arrêtés furent rapportés par un troisième
de ce com ité, en date du 16 pluviôse an 3 ; par l’ar
ticle 2 , les comités de législation et de com m erce, furent
invités à présenter sans délais un projet de lo i, su r les
difficultés qu occasionneraient alors les ba u x à cheptel.
Parut ensuite la loi du i 5 germinal an 3. L ’art. Ier.
obligea les1fermiers ou métayers à rendre les bestiaux
à la jin du ba il ou lors de Vexig u e, compte ou partage,
en même nombre , espèce et q u a lité qu'ils les aboient
reçus.
~ T/article 4 , dans le cas d’une simple énonciation de
prix dans les b a u x, et sans désignation du nombre des
espèces et des qualités ; dans ces deux cas, cet article
veut qu’il y soit suppléé par enquête ou par experts.
L ’article 5 recommande aux experts de prendre toutes
�(40).
les informations, tous les éclaircissemens nécessaires pour
découvrir la vérité ; il les charge de s’arrêter au mon
tant de l’estimation exprimé au bail, et d'apprécier com
bien au temps de cette estimation, moyennant la somme
de cette estimation, l’on pouvoit avoir de bestiaux. 11
les charge de consulter le nombre de bestiaux conve
nable pour l’exploitation du bien.
Enfin l’article n parle ainsi : « toutes les difficultés
« qui ont pu s’élever dâns le courant de ta n n ée d ern ière,
« sur les baux à cheptel expirés ou r é silié s, et qui sont
« indécises ; toutes celles a ussi q u i se sont élevées rela»
c tivement à l’exécution des arrêtés du comité de salut pu
is blic des 2 thermidor et 17 fructidor, jusqu’à ce j o u r , et
« q u i ne sontp a s non plus entièrem ent term inées, seront
cc définitivement réglées d après les dispositions dex
articles précédens. » G est ici une restitution que la loi
accorde aux propriétaires, contre la sorte de brigandage
des métayers et des fermiers , contre les propriétaires.
L e papier-monnoie a b o l i, le législateur rendit la loi
du 2 thermidor an 6.
P a r l'article 6 de cette loi , les m étayers o u ferm iers
fu re n t ob ligés à re n d re les bestiaux ou tête p o u r tête ,
ou le p r ix su ivant l’estimation.
L ’article 6 dit : « Les comptes et partages de cheptel
« entièrement consommés, soit qu’ ils l’aient été par suite
« de jugement, soit qu’ ils l’aient été par suite d'nrran» gemens définitifs faits de gré à g r é , sont maintenus,
« et sortiront leur plein et entier effet, à quelque épo« que et dans quelque proportion qu’aient été faits le^d.
«.comptes et partages, »
Mais
�t e s
c 4* )
Mai? ¡’article 7 po¡rte :« A l’égard' des comptes et par« tnges .écjius, ¡niais non définitivement consommés, ils
seront ,r<é.glés suivant les conventions et les lo is , ou
-« usfiges antérieurs ,î\ la loi du i 5 germinal an 3. .»
... «, Ü estim a tio n à faire, s'il y a lieu , dit l’article 8 ,
* pqur la rendre des bestiaux, dans le cas de l’article
« précédent , sera faite en valeur métallique, au prix
<« rnçyen de 1790, ,ç\ ucmobstaut toute estim ation déjà
m J a iie j p en da n t la dépréciation du papier-m onnoie :
hu cette estimatiqn sera faite à raison de l’état du b é ta il
.« reiidu,, s’il est ençorfi sur les lie u x j dans le cas con« traire, les e x p e r ts q u i a u r o ie n t opéré la remise ., et
k<;j à Jqur dt^ant y \tçvis autres \ççcpfirts tém o in s, seront
je appelés,
procéderont de n ouveau, d'après laurm é
ta m oire , ■
leurs connaissances particulières , ou tous
■
ft autres dpeumens, conformément aux règles prescrites
,« par la présente. »
. ,j >
I/artiçle 11 de 1? loi du i,5 gprminal an 3 , parle en
général .de ¡toutes difficultés élevées dans le courant de
J’^njiée précédente, de .toutes les difficultés .encore indé
cises ; elle ne distingue pas,:, il suivit qu’il y ait difficulté,
pour qu’il y ait lieu à 1’applicatio.n de cette loi.
ï $ e parle no# seulement dpsj^aux expirés, mais encore
¡des Jjapx r,ésilié$;; pias .de .distinction ;ent¡r’eux.
^llçis’iipp.roprie à tpus les cns.ou Je propriétaire auroit
réclamé le bénéfice des arrêtés des z thermidor .et 17 fruc
tidor an 2;.elje dit qü’alorp si JesidifficuHés qui s’ensuivent
7ie s.oiit pas etttièrcmçjit term in ées, -elles seront défini
tivement réglées ¿suivant les .dépositions de cette loi ( d u
i 5 germinal. )
F
�C 42 )
Celle du 2 thermidor an 6 va plus loin. S i , en l’ar
ticle 6 , elle maintient les comptes et partages faits, elle
veut qu’ils soient entièrem ent consom m és; elle exige qu’il
11 y ait plus rien.à faire; elle exige que les parties se
trouvent en position telle qu’elles n’aient plus rien à se
dem ander, -parce que sans cela la chose ne seroit pas
entièrem ent consom m ée.
Dans ce sens, pour une consom m ation en tière, il n&
su ffit pas d'une estim ation des bestiaux pendant le
papier - jnonnoic , puisque ta rticle 8 dit nonobstant
toute estim ation d éjà j'a ite p e n d a n t la d é p r é cia tio n dtù
papïer-m onnoie.
P o u r une consommation e n tiè re , il ne suffit pas de
la reddition des bestiaux par le fermier au proprié
taire, puisque le même article 8 d it: Cette estim ation
sera f a it e ¿1 raison de Vétat du bétail ren d u , s’il est
encore su r les lieu x ( ce qui suppose la reddition déjà
faite au p ro p riéta ire), puisque le môme Article, dans
l'hypothèse où ces bestiaux ne seroient plus sur les lieu x ,
charge les e x p e r t s q u i en a u r o ie n t o p éré la rem ise} d’en
faire l’appréciation, d’après leur m ém oire et leurs con
naissances particulières.
O r , ici il 11 y a rien eu de définitif; il ne peut pas y
avoir encore rien de définitif aujourd’hui entre le citoyen
Rabanon et l'adversaire, puisque le citoyen Rabanon n’a
rien p a y é , et que c’est le payement définitif ou le dépôt
qui opère la consommation : tout le prouve.
i°. Dans le sens de la loi du i 5 germinal an 3 , des
difficultés1se sont élevtfçs entre le citoyen Rabanon et
l'adversaire.
�ÏX J
(A 3 ) .
L e citoyen R abanon, en l’an 3, par ses offres cTu 2 ger
minal et par nombre d'autres actes subséquens, a réclamé’
toujours le bénéfice des arrêtés des 2•thermidor et 17 fruc
tidor an 2; de là des difficultés non entièrement terminées
lors de la publication de la loi du i 5 germinal an 3.
2°. Dans le sens de la loi du 2 thermidor an 6 , d’une
part il n’a été rien fait de gré à g r é , puisque le citoyen'
Rabanon a élo ig n é, résisté autant qu’il a été en son’
pouvoir, au prétendu arrangement du 17 thermidor an 2;
puisque, s’il n’a voit pas obéi aux réquisitions, aux injustes"
prétentions de l’adversaire, les visites, les menaces, les
dénonciations auroient recommencé , jusqu’à ce que’
J a c q u e s Ghoussy e u t o b t e n u cc q u ’ il désiroit ou dans li n
sens ou dans l’autre; d’un autre c ô t é , il n’ÿ a encorer
rien de définitivement consom m é>puisqu’il fau t'y revenir,
puisque dans l’opération il y a eu crainte grave, force
dol personnel., erreur de com pte, double em ploi, faux'
emploi.
N ’importe qu’ i l 'y ait e u , en l’an 2 , estimation des
bestiaux; mais cela ne suffit pas. ( Y . art. 8 de cette lo i,,
première partie. )
N ’importe qu’il y ait eu remise des bestiaux, par lracl-versaire, au citoyen Rabanon; mais cela ne suffit pas
encore. ( V ‘. art. 8 de cette l o i , deuxième partie. )
- En ce cas, la loi en appelle, i°. aux experts qui au
r o ie n t déjà opéré cette remise; 2 0. à tous autres experts
témoins; 3°. à le u r m é m o ir e , à leurs connoissances
■particulières, et à tous autres dücumens. Et certes, il'
existe encore beaucoup de témoins de l’injustice criantefaite par Choussy au citoyen Rabanon.
F 2-
�t A4 )
Un. autre moyen, puissant se présente contre l’adver
saire; il ne sauroit y répondre convenablement.
E n p o m t.d e d r o it, un acte synallagmatique est celui
qui est obligatoire de part et d’autre; toutes les fois q u’il
y a obligation réciproque, il en est résulté un.engagement
synallagmatique; et l'acte contenant cet engagem ent, s’il
est sous seing p r iv é , doit, être fait d oub le, à peine de
nullité.
Dans l’espèce, il s’agissoit de la résiliation d’un cheptel
de fer. L e propriétaire pouvoit réclamer le montant de
l’estimation de 1783 ;;le fermier étoit en droit de retenir
l ’excédant.
Il y avoit nécessairement obligation réciproque entre
le citoyen Rabanon et l’adver.saire.. Suivant le calcul de
l’adversaire, le citoyen Rabanon lui devoit-raison de la
plus-value des bestiaux; de .son côté, l’adversaire devoit
lui rendre les bestiaux. Il y. a de part et d'autre 'des engagemens i\ remplir : ceci posé, il devoit y a vo ir, de la
part du citoyen Rabanon , décharge des bestiaux du
cheptel; il devoit y a v o ir, au profit du citoyen R aban on ,
quittance de la p l u s - v a l u e . P a r c e s d e u x motifs, il devoit
y avoir un acte fait double; il n’y.en a point. L e citoyen
Rabanon pourroit demander h Choussy raison des bes-r
tia u x , parce que Choussy n’en a point de décharge.
Choussy ne pourroit pas dire qu’il 11’en avoit pas besoin,
et qu’il lui suflisoit de la simple remise des bestiaux,
parce que quand on est engagé par écrit, il faut établir
sa libération par écrit.
Choussy ne pourroit pas plus offrir utilement une preuve
testimoniale, parce que l’objet cxcéderoit 100 fr.
�(■4 5 )
D e tout ceci^ il suit que tout n’est donc pas définiti
vement consom m é, et dûs lors c’cst le cas de la loi du 2
therm idor, an 6.
L a lo i du prem ier.fructid or an 3 , a prévu fesp èce;
elle rappelle , relle consacre tous les principes de ju r is
prudence-sur des doutes ¡q u i s 1étoient élevés. L e légis
*
lateur passe à Vordre du j o u r ,fo n d é sur ce q u u n remboursem ent n e s t consom m é que lorsque le débiteur
s’est dessaisi p a r la consignation.
En cet état de choses, il faut mettre à l’écart l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 ; alors demeure dans
toute sa fo rc e , l’obligation de l’adversaire de compter des
bestiaux du cheptel, en conformité des lois d e s 'i 5 ger
minal an 3, et 2 thermidor an 6.
l ia loi de thermidor an 6 présente au tribunal le moyen
de rendre justice à qui elle appartient. Des experts témoins
montreront au doigt le véritable débiteur : ce sera alor*
que l’on- pourra , en très-grande connoissance de cause,
juger laquelle des deux parties est à condamner, ou le cit.
R ab an on , pour avoir lutté contre une injustice criante, ou
Jacques Choussy, pour vouloir en abuser.
Après avoir analisé le précis, les moyens de Jacques
Choussy, ses apostrophes, ses personnalités,que restc-t-il
dans son m émoire? des injures, des calomnies, des perfidies,
pas une vérité.
Mais ce n’est point assez que les moyens de droit du cit.
Rabanon obtiennent un succès complet. Il doit cire vengé
de toutes les expressions diffamatoires du précis de Jacques
Choussy. L e cit. R abanon, dans le sien, a été grandement
modéré sur le coinpte de Jacques Choussy. Les pièces qu’il
�71 t
(4 6 )
a produites sont dans les mains de tous les administrés du
district de Cusset qui les lui ont confiées.
II a dû les présenter à la justice : sa cause l’exigeoit.
Elles sont l’expression des sentimens de tous ceux qui les
ont signées : rien ne lui est personnel. Jacques Choussy,
au contraire, a dit tout ce qu’il falloit pour fatiguer ungalant homme , pour attaquer sa délicatesse. Mais le sanc
tuaire de la justice ne doit jamais être souillé par des com
bats d’injures, d’impostures, de calomnies; les tribunaux
doivent empêcher- et réprimer ces scènes scandaleuses. L e
meilleur moyen , en pareil cas, est celui employé lors d’un
arrêt du c i - d e v a n t p a r l e m e n t de P a r i s , du 7 f é v r i e r 1 7 6 7 ,
rendu sur les conclusions du cit. Seguier. Ce moyen est
d’ordonner la suppression du précis épisodique de Choussy..
L e cit. Rabanon y a conclu : le tribunal consacrera sans
doute cet acte de justice.
GOURBEYRE,
A R
io m
,
avoués
de l'imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire demeurant à Chitain, commune de Saint-Christophe, appelant ; Contre Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1128
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53156/BCU_Factums_G1128.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53155/BCU_Factums_G1127.pdf
3d0b5ad92ced2ae9d206c6dcea2a5f8b
PDF Text
Text
_________ ____________________ ________ _ _ _ ___ .
ir^ .[TrTllMl^_—.----- :----^ _
M É M O I R E A U C O N S E I L , ° (V ^
P O U R J e a n - C l a u d e P L A N T A D E - R A B A N O N , pro
priétaire des maison , domaines de Chitain , Joninain ;
C ON T R E
J a c q u e s
!
C H O U SSY.
L
E 27 mai 1 7 8 3 , le citoyen Charles L a c o t e , fondé de pouvoirs du citoyen
L a q u e u ille , a passé bail pour n e u f a n n é e s , qui ont fini le 24 juin 1 7 9 2 ,
au citoyen Pierre Choussy et à sa f e m m e , par acte reçu L o u h er , notaire à SaintG éra n d -le-P u y . L es devoirs du ferm ier envers le propriétaire y sont signalés
et circonscrits d ’une manière particulière. Je vais rappeler les articles qui ont
trait à la contestation du m om ent.
« Laissera ledit Pierre C h o u s s y , en fin de ferm e dans ladite terre, pour la
somme de 5 8 9 4 l i v de gros bestiaux, com m e il le s a reçus du fe r m ie r a ctuel. »
L e 9 brumaire an 2 , j’ai acquis de la nation, et com m e créancier, la maison
et les deux domaines de Chitain et Joninain , garnis de leurs b e stiau x, des
cinq domaines dont étoit composée la terre de Chitain.
L ’article 6 du procès verbal d ’adjudication veut que j ’aie contre le fermier
l ’action en résiliation que la loi donne aux acquéreurs.... Pierre C houssy a joui
jusqu’au 6 messidor an 2...... L ’estimation des cheptels de mes deux domaines
n ’eut lieu que le 14 du m êm e mois.
L es experts furent singulièrement divisés sur la prisée des bestiaux. C e tte
disparité fit que les arbitres se séparèrent sans pouvoir se concilier et se réunir.
T o u s les propriétaires lésés étoient instruits alors que le gouvernement s ’occ u poit des moyens de réparer les injustices criantes des colons et fe r m ie r s ,
relativement à la remise des cheptels ; et com m e il importoit au consultant
d'attendre la d écisio n d’ état du co m ité d e sa lu t pu b lic sur des intére ts a u ssi
p r e s s a n s , il ne donna aucune suite à l’opération d es experts.
U ne foule d ’actes authentiques, un arrêté du département de l'A l l i e r , du
21 ventóse an 2 , qui sanctionne les comptes de Pierre C h o u s s y , une pétition
de la m ê me d a te , justifient mathém atiquem ent q u ’il a été seul ferm ier jusqu’au
24 juin 179 4 que je suis entré en jouissance de mes deux domaines ; que Jacques
C houssy ne l ’a jamais été q u ’en vertu d ’un acte in fo r m e , imaginé dans les
temps pour la c a u se , et qui ne peut supporter les regards de la ju stice, par
son illégalité radicale. A u mépris de ces actes so len n els, tous l’ouvrage de
Pierre C h o u s s y , Jacques Choussy fils m ’é crivit, le 29 messidor an 2 , cette
lettre alté ra n te , qui est la deuxième p ièce justificative.
Je ne ferai point l’analyse de cette le t t r e , qui fatigue encore et la justice et
l'hum anité. Il entroit dans le principe raisonné de Jacques Choussy , de transf ormer son intérêt personnel en un intérêt d ’état. J’observe seulement que c ’est
Jacques Choussy qui me recherche et me provoque, pour terminer, sans le concours
et le rappel des premiers arbitres, l'exigue des bestiau x; q u ’il ne parle que
d e la prisée de son expert ; que c ’est lui qui tient la plum e pour faire les
calculs et me dicter des lois ; que la somme qu ’il lui a plu de déterminer si
arbitrairement est la mêm e que celle qu ’ il réclame si injustement.
O n voit encore que Jacques C h o u s s y , toujours attentif sur cet intérêt qui le
;
h
�tourmente si Fort, invoque le témoignage dos frères Croisior , pour Justifier q u ’il
a voulu me remettre les clefs de la maison de Cliitain et bâtimens en dépend a n s, sans y avoir fait la plus petite réparation locative, sans me permettre
de lé faire constater partiellement et authentiquem ent, pour en récla m er,
au nom de la l o i , l’ in d em n ité q u 'elle com m a n d e, com m e je réclame par elle,
et en son n o m , l’exécution littérale de ses dispositions justes et bienfaisantes
sur la remise des cheptels.
E t ce sont ces traits de lu m iè re , cette attente , cette confiance dans la justice
du gouvernem ent, cette résistance à des volontés si repoussantes, si extraordi
naires , que Jacques C houssy appelle des tra casseries.... qu’ i l dénonce com m e
d es tracasseries q u i ne so n t p lu s à l’ ordre du jou r ( e t ¿¡uel j o u r , que le 29
m essidor an 2 / ) e t pour le sq u e lle s tracasseries i l inte'resse , i l ap p elle toute
la p u issa n ce d’ un d é p u té , son parent.
P ou r réussir avec plus d ’im p un ité, Jacques C houssy s'adressa au cit. Forestier,
représentant dans le département de l’A l l i e r , et oncle, à la inode de B re ta g n e ,
de sa fem m e. N os malheurs étoient à leur com ble; la mesure étoit telle qu ’il n’y
avoit point de propriétaires menacé qui n ’eut offert la dernière colonne de son lit,,
pour se dérober à la pensée et à la honte d ’un genre de m ort qui ne devoit frap
per que les grands crimes et les scélérats prono îcés. J’arrîvois du département du *
C h e r , où une mission importante de grains m ’avoit tenu éloigné pendant près de
c in q mois ; je l ’avois remplie avec tout le zèle et le succès dont les âmes dévouées;
au bonheur de leurs semblables sont seules susceptibles ; je connoisssois la
confidence perfide faite par Bourgeois à C laude A r m illio n , à P a ris, où mes
confrères, commissaires dés subsistances, m ’avoient député pour activer la
prompte exécution de la réquisition que le département du C h er avoit à effec
tuer pour le très-nécessiteux district de Cusset. L e prix de tant de froissem ent,
d ’attachement à mes devoirs ,.de pertes pécuniaires, devoit être payé par la mort
j ’en étois p r é v e n u . . ; et le sacrifice que j ’avois Fait de mon existence, ne me
rendoit que plus chers les soins affectueux que je devois aux habitans de mon
d istrict, qu e je considérai toujours com m e mes premiers amis. Cependant nous
n ’avions, mes trois collègues et m o i, ni abordé les caisses publ iques, ni assassiné,
ni incendié, ni dépassé la Ii^ne de nos c o m m u n e s, ni entretenu de corres
pondance sur les affaires d ’é ta t, et avec qui que ce soit au monde. J’obéissois
aux lois ; j ’etois ce que je serai tou jou rs, o ffic ie u x , bienveillant, ami de
l ’ordre et adorateur de mon p a y s . . . . Ces affections sont aussi celles de mes
trois compagnons d ’infortune : 011 tro u v e r a i la suite de ce mémoire l ’historique
repoussant de Bourgeois, tel q u ’il m ’a été remis et aux autres victimes désignées
pour former avec moi le complément de la fatale charrette.
Je ne me permettrai aucune réflexion sur la confidence de Bourgeois ; je lui ai
donné? du blé com m e à tous les habitans nécessiteux de V i c h y , qui m ’aimoient e t
m e protégeoiont, et h un prix bien inférieur à celui des marchés environnans; c ’est
en nous vengeant de nos ennemis par des b ie n fa its , que nous acquérons le droit
d ’arracher quelques remords à nos persécuteurs, et la jouissancederécompenser par
la pratique des vertus sociales, ceux (pii ont fait cesser tous les genres de tyrannie.
C ’est donc en germinal au 2 , que ces aveux se faisoient à P a ris; c ’est en mes
sidor an 2, que Jacques Choussy me dénonçoit pour me force ra lui payer c e
que je n '‘ lu i devais pas , c e que la lo i m r défendait de lu i d on n er, ce que le
légitim e ferm ier de Cliitain me devoit. « C ’est quelque temps auparavant que mes
••nnemis a voient écrit à Paris pour faire porter sur la liste des biens de« émigrés les
deux maisons que j ’y ai; que l ’une y a été inscrite, et que j ’ai empêché l ’autre
�( 3 )
d ’être mise au nombre ries propriétés nationales, en justifiant matériellemeni que
je n ’avois pas abandonné d ’une minute le territoire de mon district ; c ’esL à ces
mêmes époques que la porte d ’une maison de Cusset m ’a été fermée, parce que j e
devois èlre arrêté prochainement ; que mes fidèles domestiques ont été sollicités ,
pressés pour sortir leur mobilier de chez moi, dans la crainte qu’il ne f û t confondu
avec le m ien, comme national ; que la clameur publique vouloit que j ’eusse é t é
c o n d u i t au tribun.nl révolutionnaire du chef-lieu de ma mission pour les grain s;
q u ’une aubergiste de Cusset a dit à mes métayers, à ceux de la dame B o u q u e t-L a g r y e , m a nièce, que j ’allois être conduit en prison; q u ’une citoyenne de V ic h y
g é n é r a l e m e n t respectée (la dame Gravier R e y n a u d ) , étonnée de me trouver chez
le citoyen Fouet où je devois dîner, m ’assura que toute la ville me croyoit en ar
restation depuis quelques heures, et que pour ne point fatiguer par ma présence
un vieillard vénérable, je me retirai chez moi pour y attendre avec résignation
la vengeance de mes ennemis; qu’enfin , etc. etc. etc. »
T o u te s ces choses, je les eusse gardées profondément dans m a m é m o ire , si
la violence des procédés de Jacques C h o u s s y , la p u b lic ité , l’abus q u ’il a fait
de ma lettre, et qui a été provoquée, commandée par la s ie n n e , ne m ’eussent
arraché des vérités, des souvenirs amers que j’ai dévorés se u l, et que j ’aurois
oubliés avec plaisir, sous notre gouvernement sauveur et protecteur.
M e n a c é , tou rm en té , accablé de toutes parts , je fus forcé d ’écrire celte le t tr e ,
que Jacques Choussy a eu l’astucieuse effronterie de présenter au tribunal ,
pour justifier que je l’avois provoqué à un compte et reconnu pour fermier.
M ais Jacques Choussy peut-il oublier, et sa d én on cia tion , e t sa lettre du 29 mes
sid or, q u i caractérise , d e la manière la p lu s fo r m e lle , et mon éloignem ent e t ma
tén a cité à ne p a s terminer nos affaires concernant V acquisition de C h ita in ; et
sa méchanceté-à vouloir transformer en intérêt d ’état, par 1 autorité accablante d ’un
représentant, l’intérêt le plus solitaire ; et cette cupidité raisonnée qui lui la it
apporter un bordereau de compte tout préparé, tout in e x a c t, tout faux , d ’après
lequel il me c o n tra in t, le 17 thermidor an 2 , de lu i p a yer sur le cham p une
som m e d e 2,5oo livres a rg en t, e t de souscrire un b ille t à son nom de 2,892
livres 16 sous , p o u r p r ê t de p a reille som m e ( y e s t-il d it ) , tandis qu’au même
m om ent il m e donne , au nom de son père et du s i e n , un reçu motivé de.
5,092 livres 16 sous , pour sa part e t portion de l ’excédant de bestiaux qu ’il
a à m e livrer ; quittance qui comprend des cheptels de brebis que C h o u ssy
n’ a ja m a is a ch etés , n i p a y é s , n i p u vendre par-là m ê m e , puisque les anciens
propriétaires ne les ont pas plus vendus que les cheptels des gros bestiaux, puisqu’ils
sont ma propre chose, com m e propriétaire, et que son père les avoient reçus du
citoyen liusseu il, précédent f e r m ie r , pour les rendre tête pour tête au citoyen
L aq u e u ille, ainsi que l ’explique la lettre de B u sseuil, du 12 vendémaire an /(.
11 est de notoriété p u b liq u e , m alheureusem ent, que le 9 th erm id or, q u i ,
dans la plupart des départemens , avoit réconcilié le ciel avec la te r r e , n ’avoit
encore p ro cu ré, dans notre trop infortuné d istr ict, ni espérance , ni consolation ,
ni amendement dans les caractères. Il est d é m o n tré , par un arrêté du représen
tant du peuple Forestier, du 22 thermidor an 2 , et qui est dans les mains de
tous les administrés , que douze individus de tout â g e , d e tout s e x e , partoient
de tous les p oints q u i m’ environnoient, pour le tribunal révolutionnaire, le 28
therm idor. E t que d ’autres victimes éloient destinées pour leur succéder ! C es
vérités, écrites en caractères de f e u , soulèvent encore toutes les conceptions,
<*t sont placées à la suite de ce m é m o ire , cote 4.
Depuis cet acte arbitraire de C h o u ss y , du 17 thermidor an 2 , l'arrêté salutaire
A 2
CV r
�du 17 fructidor suivant, fut décrété. L/article premier ordonne* que le s ferm iersq u i ont reçu du propriétaire dns b e stia u x en entrant dans leurs fe r m es , seront
tenus com m e le s m étayers d ’ e x é c u te r Varrêté du 2 thermidor.
L ’arrêté du 2 thermidor s ’explique a in si, art. 3 ... L o rsq u e le ba il du m étayer
sera f i n i , i l sera o b lig é de rendre e n nature au propriétaire le m êm e nombre
a’>‘ b e stia u x e t la m êm e branche , tels enfin qu’ i l le s avait reçu s , sans pouvoir
s e s e n ’ir de la cla u se de son b a il p our en p a r e r la 'valeur. L e bail de Pierre
C h o u s s y , du 17 mai 1785 consacre la m êm e mesure de justice, p u isq u ’ i l doit
rendre le s bestia ux., com m e il le s a reçu s du p récéden tferm ier. Je n ’ai r é cla m é ,
et je n ’ai jamais dû réclamer que la stricte exécution de ces deux lois et de celles
qui leur sont relatives. L e s propriétaires qui ont eu des fermiers justes et sen
s ib le s , n ’ont pas même eu cíe vœux à former. Ils ont été prévenus et comblés
par ces mêmes hommes précieux q u i , en remplissant la sainteté de leurs d e v o ir s,
ont encore eu le mérite apparent de la générosité, tandis qu’ils n ’étoient que les
fidèles agens de la loi...... L a conduite de Pierre et de Jacques Choussy à m on
égard est donc le scandale de la raison et de l’équité.
L e s lois des i 5 germinal an 5 , et 2 thermidor an 6 , rendues, com m e lés d e u x
prem ières, sur les différentes réclamations des propriétaires de tous les points,
du •'ouverneinent, sont encore bien plus impératives ; elles ajoutent à la justice
et à la fixité de leurs principes le mérite d ’éclairer les intérêts du propriétaire
et du f e rm ie r ; de prévenir et de confondre tous les raisonnemens de l’a s tu c e ,
en traçant un mode de choses que toutes les passions humaines ne peuvent
mécoinioitre. C es lois me rappellent, m ’a d m e tte n t, me confirment dans toute
l ’intégrité des droits qui m ’étoient acquis par l ’arrêté du 2 thermidor an 2 ,
puisque celui du 17 fructidor en reporte les effets à cette première époque;
que j ’avois traité fo r c é m e n t, dans l ’intervalle de c e s d e u x lois ; que le bordereau
de compte et d e calculs, présenté si arbitrairement par Jacques C h o u s s y , four
m illent «Terreurs, de doubles, de faux emplois, et de faux matériels...... que les loisréprimantes sur les cheptels n ’ont voulu d ’autre ca u se , d ’'autre m o t i f , qu’ une
s i m p l e prétention élev ée ou d e la part du f e r m i e r , ou d e c e lle du propriétaire f ,
et qu ’eíles écartent par là mémo toutes les fins de non recevoir.
L a loi du 1 5 germ inal, art. X I , ordonne que toutes le s d ifficu ltés élev és d a n s
le c o u r a n t de l ’ an 2 , sur le s b a u x à ch ep tels e x p ir é s ou r é s ilié s , e t q u i so n t
in d é c is e s , toutes c e lle s aussi q u i se son t élev ées relativem ent à l ’ e x é c u tio n
d es arrêtés du co m ité de sa lu t p u b lic , des 2 therm idor et 17 fructidor ju s q u 'à
c e j o u r , e t q u i ne so n t pas entièrem ent term in ées, seront définitivem ent réglées'
d'après la disp osition des articles p r écé d e n s.... Ainsi cette loi est encore conçuepour mon espèce, puisque dès le 2 germinal an 3 , époque de l’échéance de mon
b ille t, j’avois mis en demeure Jacques C h o u ss y , jiar un exploit «l'offres réelles
d»; la somme de 2,892 liv. ifi s. assignats...... que j avois réclamé le bénéfice des
lois existantes et à créer sur la remise des bestiaux.... pareillement les nayemens
considérables des sommes qui m ’étoient et me sont encore dues par Jacques et
Pierre C h ou ssy ...... et protesté enfin contre la violence des procédés et des cir
constances du 17 thermidor an 3 .... Ainsi mes réclamations, mes protestations,
(fuites voulu es, toutes commandées par les lois sur les ch ep tels, remontent à
lu première origine de ces mêmes lois.
Celle «lu 3 thermidor an G , émise sur les nouvelles plaintes «les propriétaires,
victimes de la fausse application ou «le la violation de ces mêmes lois, consacre
de nouveau la sollicitude éclairée «lu gouverneme t. Elle ord o n n e , art. 7 , Q un
les comptas c l partages éch u s , et non définitivem ent consom m és , seron t réglés
�\
/
\y • ^ ¿ suivant le s conventions et le s lo is ou usages antérieurs a la lo i'd u 1 5 germ inal
^ A x ï . 8. « L ’estimation à faire , s’il y a l i e u , pour la rendue dos b estiau x , sera
faite en valeur m étalliqu e, au prix m oyen de 1790, nonobstant toute estimation
déjà faite pendant la dépréciât 011 du papier-monnoie. C e t t e estimation sera fa ite
à raison de l'état du bétail rendu , s il est encore dans les lieux. D a n s le cas
contraire, les experts nui auront opéré la remise, eL à leur d é fa u t, tous autivsr
experts témoins procéderont de n o uvea u , d ’après leur m ém oire, leurs connoiss a n c e s particulières, ou tous autres docutuens, conform ém ent aux règles prescrites
par la présente. »
. .
.
,,
,
Je suis donc Lien encore dans l’exception et la justice decretees par cette lo i,
puisque je me trouve toujours à l’égard de Jacques C h o u s s y , au rrietne état q u ’au
1 7 thermidor an 2 ; que depuis cette éj>oque je n ’ai rien p a y é , rien e x é c u té ,
rien co n so m m é , que j’ai ré cla m é , au co n traire, daus tous les temps utiles,
et par actes judiciaires, le bénéfice de ces mêmes lo is; que. Choussy s'est refusé
constam ment à celte mesure de ju stice, de rendre c e que son père a reçu ,
m êm e nombre , q u a lité e t nature de p r ix , après le nouveau com pte v o u lu par
la lo i , e n va leu r m é ta lliq u e , au p r ix m oyen de 179° > Ilon°bsta n t toute esti~
W allon déjà fa it e pendant la dépréciation du papier-m onnoie;
A in si Jacques Choussy plaide depuis sept ans pour un complément de bénéfice
Tepoussant; moi pour obtenir ou donner, après le nouveau compte voulu par la
lo i, tout ce qu’elle m ’ordonne de recevoir ou de payer. Jacques Choussy plaide
de lucro captando , et moi de damno vila n d o .
Jacques C h o u s s y , en me rem ettant malgré moi" pour i , 5q 4 francs assignats
de bestiaux qu ’il avoit reçus en 1785,. valeur numérique , ne m ’a rien d o n n é ,
puisqu’il est démontré par le procès verbal des experts, du 14 messidor an 2 ,
que le prix de quatre bœ ufs me r e m p lit, selon lui , de toute la valeur de mes
a e u x ch eptels; que Choussy a pour bénéfice net plus de q u a r a n te -six grosses
bêtes arables, e t c e p e n d a n t mes deux domaines comportent un labours habituel
de dix paires de b œ u f s , des vaches et élèves dans la mêm e proportion , ainsi
q u ’il résulte du bail authentique des métayers de Chitain , du 12 août 1 79 0 ,
à qui Pierre Choussy impose la condition de labourer et fa ir e v a lo ir à cinq
paires de bœ u fs , e t d ’ avoir au m oins , pendant toute Vannee r cin q hommes,
p our l ’ exp lo ita tio n dudit dom a in e, non com pris l/‘S bergers et domestiques.On voit d ’un côté, que je 11e suis p o i n t r e m p li, à beaucoup près, de la quotité
<îcs bestiaux nécessaires pour la cu ltu r e , tels que je le s ai donnés en 178"), v a le u r
m étallique ; q u ’ils me sont r e m is , m algré m o i, en l ’an 2 , va leu r a ssig n a ts,
franc pour fr a n c ; c ’est-à-dire, valeur n o m in a le ; c e qui est contre l ’esprit des
lois des 2 thermidor et 17 fructidor an 2 ; et (pie de l’autre , j ’a i p a y é à Ja cq u es
C h o u ssy pour sa sim ple m o itié , non com pris ce lle des métayers , une. som m e
d e a,5oo liv. argent, et q u ’ il répète encore ce lle de 1,070 hv. aussi argent, com m e
valeur représentative des 2,892 liv. assignats, montant de mon billet.
J’observerai encore qu ’il falloit être accablé par le tourment des circons
tances , pour laisser dire à Jacques C h o u s s y , q u ’il trailoit avec moi le 17
therm idor an a , pour lui et son p è r e , tandis q u ’il avoit traité la veille avec,
les trois frères R u et-L a m o lle , acquéreurs comme moi des mêmes b ie n s , au nomSeul de son père ; que l ’appréciation des bestiaux s’est montée à QiQSo livres,,
brebis comprises, et q u ’elle a été faite à l ’amiable par nos deux experts, ainsi
qu’il a eu l ’audace de le déclarer par sa quittance (lu 17 thermidor : ce qui est
t a u x , et démontré matériellement f a u x , par la lettre aussi imprimée dudit
�C h o u s s y , du 39 messidor an 2 , qui parle seulement de l’estimation de S a u la ie?,
son e x p e r t } e t non de ce lle au m ien. C ’est donc Jacques Choussy qui par
l'empire des circonstances, a f i x é se u l le p r ix d es ch ep tels ; car si les deux
experts eussent été d ’a cco rd , ou appelés une seconde fois pour rapprocher les
intérêts respectifs, Jacques C houssy ne m ’aurait pas dénoncé au représentant
F orestier, oncle de sa f e m m e ; il ne se plaindrait pas de ma résistance opi
niâtre , de m es tracasseries , q u ’ i l d it n’ étre p lu s il l’ ordre du jo u r ; il n ’écriroit pas qu ’il est venu chez inoi pour terminer ; il ne parlerait pas de la seule
estimation de Saulnier ; il existerait un procès verbal commun des experts ,
qui serait signé par eux et les parties intéressées présentes ; chacune aurait
son double : au lieu q u ’il n ’existe que la narration de cette prétendue estima
tion , toute p en sée, toute écrite de la main de Jacques C h o u s s y , et signée
de lui s e u l , quoique ce soit une transaction qui , pour être régulière, veut
£tre signée du fermier légitime et du propriétaire , parce que cet acte de rigueur
est la reconnoissance de la remise des bestiaux et la quittance de leur prix.
Je ne m ’occuperai point ici d ’aucune observation sur la procédure. L es pièces
s o n t s o u s les y eu x de m on défenseur officieux; il en fera l ’analise , pour éclairer
la religion des magistrats du tribunal d ’appel. Je rappellerai seulement que ,
le premier germinal an 3 , Jacques Choussy n ’osa ni me p résen ter, ni former la
demande en payem ent du billet de 2,892 liv. 16 sous assignats ; il étoit instruit
que les trois frères L am o tte avoient éclairé ma religion, pai la communication
de leur traité avec lui.
D ébiteur app aren t, j’ai dû faire, par délicatesse, et j’ai fait à Jacques C h o u s s y ,
le lendemain de l’échéance du b ille t, des offres réelles de la somme intégrale,
par D u c h o n , huissier à C u sse t, avec les conditions motivées pour la conserva
tion de mes droits. J’ai fait plus , et pour me mettre à l’abri des vexations
journalières de Jacques C h o u s s y , mon débiteur , et de ses trois saisies-arrêtsexécutions, j’ai déposé volontairem ent, le 24 ventôse an 7 , d ’après le vœu de
la loi d u .......................... et sous les réserves apposées audit acte , une somme de
i , 5 oo livres n u m éraire, bien supérieure à celle de 1,070 liv. réclamée injuste
m ent par Jacques Choussy.
Je n ’ai pu invoquer le bénéfice de l’arrêté du 2 thermidor an 2 , et des autres
lois sur les ch ep tels, qu ’à l’échéance de mon b i ll e t , et par l’exploit d ’offres
réelles, parce que j’ignorois dans quelle main étoit mon effet que Jacques C houssy
pouvoit avoir commercé par la voie du transport.
Je suis instruit que des hommes sans m oralité, d ’autres fo ib le s , plusieurs de
bonne f o i , mais trop près de cet excès de confiance qui trompe t o u jo u r s, ont
pensé sur les versions journalières de Pierre et Jacques C h o u s s y , que la valeur
de mon billet de 2,893 liv. 16 sous assignats, avoit pour principe un procédé
généreux; c ’est-ii-dire, un prêt de semblable somme. Je dois déclarer à la répu
blique entière, que Jacques et Pierre C h o u s s y , qui ont imaginé et colporté cet
absurde mensonge , sont les derniers individus du g o u v e r n e m e n t, dont je
voudrais intéresser la sensibilité et l'obligeance.
J’ai senti dès le commencement de ce p rocès, que mon intérêt ne pouvoit
«'•Ire mis en opposition avec celui de Jacques C h o u s s y , sans blesser sa cupidité,
et exciter son irascibilité nnturelle.
M ais Pierre Choussy , n>'a-t-on d i t , ne peut pas oublier q u ’il m ’a d e m a n d é ,
par sa lettre du 5 o juin 1783 , la forme de mes propriétés paternelles, et que
je lui ai p ré fé ré , par raiso n, mes m é ta ye rs, cultivateurs. Il se souvient encore
q u ’il m ’u persécuté lo n g - te m p s pour me faire payer des cens et devoirs aussi
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7 )
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.
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injustes nu’imaginaires ; que j ’ai éclairé la rehg.on et les intérêts des anciens*-*
redevables de la prétendue directe de C liita in , dont d elo.t f e r m ie r , et que sur
u n e
ordonnance du tribunal de M o u lin s, j ai lait consacrer, après l’avoir mis
en demeure par un procès verbal du 20 avril I 79 2 > rédige par un notaire de
Cnsset nui avoit de son état toutes les vertus et les lurmeres ( le cit. D e v a u x ) ;
nue d'après la déclaration dud. Clioussy , d paroissoit constant q u ’il n ’existoit
noint de terriers de Fretay , Bressolles, R o s ie r , A l le m a n d , en vertu desquels
il exi"eoit des redevances accablantes par leurs quotités, leurs genres de féodalité
et de'servitude personnelle, que la prétendue reconnoissance de C laude R e g n a u d ,
l ’un de mes auteurs, étoit n u lle , de toute n u llité, puisqu’elle n ’étoit signée
d ’aucun notaire.... Ces vérités étoient tellement démonstratives, que dès le 10
octobre 178 2 , ce mêm e Pierre Clioussy m ’écrivoit com m e fermier de Cliitain ,
qu ’il y avoit une instance à M oulins contre différons particuliers , au sujet
u'une transaction entre le seigneur de Cliitain et ses justiciables.... et il ajoutoit :
C e n’ e s t pas que j ’ entends fa ir e usage pour le m om ent de cette transaction contre
v o u s e t v o s fe r m ie r s.... J ’ a i des raisons p articulières pour n e p o in t m e se n 'ir d e
c e titre à l’ égard de v o s o b jets.... j e vou s en dirai le s raisons en temps e t lieu ; et
com m e en matière d ’ intérêt Pierre Clioussy est très-m ém oratif, il me demande
six charrois par d o m a in e , pareil nom bre de journées à bras par locataire, et le
prom pt payem ent de ce qui lui est d û .... sans se souvenir qu ’il vient de me faire
l ’a v e u , qu ’ il a des raisons particulières pour ne pas se servir de la transaction,
dont est question, ni contre moi, ni contre mes fermiers; ce qui est bien contraire
avec sa prétention. M ais le procès verbal du 20 avril 1792 , explique toutes ces rai
sons ; il ajoute enfin, qu ’il espère qu’ ayant affaire à la p lu s équita ble e t la p lu s
ju d ic ie u s e p erso n n e, i l n ’ éprouvera aucune d ifficu lté sur sa prétention. A u jo u r
d'hui il a une idée bien différente de mon équité et de ma justice ; c'est q u ’il fait
marcher so înteret avant tout autre considération*
Il
en falloit moins en l ’an 2 , pour réveiller toutes les passions de la cupidité
et de la vengeance ; Pierre Clioussy ne m 'a prié , pressé de le continuer
ferm ier depuis le 9 brumaire an 2 , époque de mon adjudication jusqu'au 6 mes
sidor su iv a n t , que pour dégrader avec p lus d’ im p u n ité, aij\si qu'il est constaté
par le procès verbal authentique de l’état des lie u x , l'intérieur de mes maisons
et bàtim ens de C liita in , m e refuser avec acharnem ent et depuis sept a n s , non
seu lem en t m es loyers e t ferm ages , m ais le p r ix des différentes livraisons de
p o isso n s te lle s que je le s lu i a i v e n d u e s , e t la ju s te in dem nité des réparations
loca tives e t abus d e tous genres signalés audit acte.
Je n ’opposerai à ces deux h om m es, qui sont bien constamment mes ennemis
p ronon cés, que des actes de ju stice, des bienfaits. D è s l ’origine de notre di
vision et dans tous les t e m p s , j'ai offert et fait offrir sans s u c c è s , à Jacques
Clioussy, par le citoyen G u a y , mon avoué à M oulins, tous les moyens amiables
qui pouvoient rapprocher nos intérêts respectifs; je tenois singulièrement à ce
genre de procédé. . . . U11 magistrat de ce tribunal connu par ses m alheurs, ses
lu m iè re s, sa noble franchise , et qui connolt aussi mes principes concilians
a proposé, il y a deux m o is , sa médiation à Jacques C lio u s s y , et il l ’a rejetée
avec une aigreur repoussante.
L a justice (pie Jacques Clioussy m'a refusée si négativem en t, je l ’obtiendrai
sans doute , de ces magistrats supérieurs, que toutes les affections, tous les
hommages publics environnent.
J’ai dit en commençant ces réflexions que Jacques Clioussy m'avoit apporté le
17 thermidor an 2 , un compte tout apprêté, tout inexact... Parm i une foule d ’er-
�Tours , je. Tais en préciser quelques-unes : Pierre C houssy a reçu en 178." les
cheptels d is bestiaux en estimation ordinaire; c ’est-à-dire, le cinquième déduit.
I ,e fa it est constant et avoue par l’ élat iibprim é cotte 3 . Jacques Choussy a senti
q u ’il éloit de son intérêt de porter par sa si'ule volonté les cheptels à prix do
lo ir e , parce q u ’en grossissant la so m m e, le résultat en devenoil plus avantageux
pour lui. 11 falloit au contraire, et suivant l ’usage constant des lieux, estimer
com m e en 1783; c ’est-à-d ire, com m e sou p ire avoit reçu, ou diminuer le cin
quième de la prisée de foire ; et le cin qu ièm e de la som m e de 9,960 liv re s, fixée
arbitrairement par Jacques Choussy , pour la masse des deux ch e p te ls, ceux
des brebis compris, est de. 1,990 livres : ainsi, première erreur importante. Il cil
existe deux autres aussi grossières ; le cheptel des métayers du domaine Joninain,
par a ctereçu D eb rest, notaire, le 21 août 1782, est de 1,075 liv r e s , brebis com
p r is e s , et Choussy le porte dans son bordereau im prim é, pour la som m e de
1,290 livres : il y a donc une erreur de 220 liv. et non de 55 o Iiv. que C houssy me
fait payer de trop, quand bien m êm e j ’aurois voulu avoir le mêm e cheptel que les
métayers dévoient lui laisser, parce q u ’il ne peut rien changer au mode de son bail>
et qu ’il doit céder les cheptels pour le même prix qu ’il les a donnés auxdils métayère
et que ceux-ci doivent les rendre. L e cheptel des métayers du domaine de Chitain
par acte reçu C a q u e t , notaire, le 12 novembre 1 7 9 2 , est en estimation ordi
naire de i)545 liv r e s , non com pris le s brebis q u i doivent être rendues tdtc.
p o u r te t e , ou p a y é es 2 livres, et C houssy le porte à 1 ,8 4 1 , non com pris le s bre
b is q u ’ i l f a i t p a yer G livres la p iè c e : il y a donc encore une erreur matérielle
de 276 livres, parce que Choussy 11’a pu porter atteinte aux conditions des mé
tayers avec l u i , ni les changer envers moi pour grossir son intérêt ; je n’ai connu
et"dû étu dier, analiser, comparer toutes ces erreurs m athématiques, qu'après la
remise de ces b a u x , et cette remise 11e s’est effectuée que le 17 thermidor an »,
et après que Jacques Choussy m ’eut fait compter les 2,5oo liv. argent, et souscrire
le billet de 2,892 liv. iG s.
IMais tous les comptes faux et tortueux de Jacques Choussy disparoissent
devant les lois réprimantes que j ’ai invoquées'tour à tour. C es lois ont dos rapports
si purs, si directs, si successifs, q u ’elles se réunissent toutes par les mêmes prin
cipes pour opérer les mêmes résultats , ( justice , égalité d'intérêts ). rJ’outes ont
été rendues et renouvelées à mesure que les réclamations sur l’abus de leur exé
cution se sont multipliées; toutes ces lois ont v o u lu , com m andé le retour et
rafferm issem ent (le l’intérêt s o c ia l, sans blesser l’intérêt individuel; toutes ont
é t é p en sées pour secourir le s propriétaires fr o is s é s , v ictim e s ou par la cu p id ité
île leurs ferm iers , ou la tourmente des circonstances ; toutes ont ordonné
la rem ise des b estia u x et effets aratoires d e la part des colon s et. ferm iers en
m êm e nombre et qu a lité'qu’ ils le s ont reçu s ; toutes ces lois enfin, me rappellent,
m 'adm etten t, me confirment dans toute l’intégralité de mes d r o i t s , et elles
écartent et proscrivent toutes les fins de non recevoir astucieuses , que Jacques
Choussy voudroit opposer , parce que je me trouve au mêm e et semblable état
qu'au 17 thermidor an 3 , et que je suis dans le sens, l'exception, la f a v e u r , la
justice voulus par le législateur ; soit encore à raison des erreurs monstrueuses
dont fourmille le compte de Jacques C h o u s s y , soit à raison de sa dénonciation
e| de cette tourmente uni a existé si long-temps dans le district fie Cusset.
Le conseil voudra m éclairer après l’examen de la procédure et des pièces justificnliv.s.
Jarijims Chou.s.sy dit , page 17 île son mémoire , que le conseil qui a rédigé;
mon premier p récis, n a u r o it p as'd o n n é son app rob ation, s'il eut <•0111111 les
circonstances
�circonstances et les faits d e là cause. Je suis obligé de faire imprimer le mémoire
à consulter, qui lui a été remis par le citoyen G ourbeyre, mon défenseur offi
c ie u x , pour justifier que toutes les pièces des procédures de Cusset, G annat et
M o u lin s , ont resté devant m on conseil pendant plus de quinze jo u rs, et q u ’il
en a fait 1extrait, l’usage, que sa prudence lui a dicté.
Je vais répondre à quelques objections du mémoire de C h o u s s y , absolument
étrangères à la cause et à la discussion des moyens. M ais comme elles forment
une masse de choses controuvées, je dois rétablir la vérité.
Choussy d it, page 3 de son m ém oire, q u ’il a été dépossédé de sa ferm e, le 24
juin 1794» m a*s a-t-il jamais éLé fermier de Chitain en nom seul ou co llectif, et
voudroit-il inspirer de l ’intérêt par cela mêm e q u ’il se dit ferm ier d ’émigré ?
Choussy parle de sa lettre du 29 messidor an 2 ; il dit que je garde le silence
tendant quinze jours; c’est-à-dire, jusqu’ au 14 thermidor que je lui écris celte
eltre, commandée par les circonstances.
Choussy convient donc d ’ un silen ce de quinze jo u r s , (Fun éloig n em en t, d ’ une
résistance par la m êm e à sa v o lo n té trop m écham m ent exp rim ée. M ais la
phrase précédente explique des choses bien plus fortes . . . . elle dit qu e j e dif
f è r e . . . que j e dem ande des d é la is * . , que j e l’oblig e à fa ir e des voyages inu
tile s e t fa tig a n s.
Ch oussy confesse donc bien mon éloignement p a r le s déla is que j e d em a n de....
il avoue donc son im porlunitépar se s différens v o y a g e s .. . O u i , ma résistance
é to it co n sta n te .. . . O u i , ce s voy ag es n ’étaient p a s in u tiles pour l u i , m ais
tvès-fatigans ]X)ur m o i .. . I l vou toit pa r leu r fr é q u e n ce , son obsession , ses
m enaces réitérées , m e conduire à se s f i n s . . . Il fallut donc é c r i r e . ... T o u t le
district de Cusset étoit dans le deuil et dans une stupeur m o rte lle .. . . Quand
Choussy parle plus loin de ces atrocités, il a l’air de raconter une fable ; et ce
r.eveu si com p rim é, si intéressant, si affectueux (le citoyen Dussaray-Vignoles
fils), que l ’on force à voter la mort de son oncle Rougane-Prinsat, (page 8 d ’un
mémoire signé par 170 citoye n s), et ces nombreuses victimes qui n existent plu#
autour <le nous, et dont le sang bouillonnoit encore le 17 thermidor an 2 . . . et los
douze individus envoyés le 28 du mêm e mois au tribunal ré v o lu t io n n a ir e ....
et tous ceux qui étoient encore désignés pour les remplacer ) ; toutes ces calamités
publiques, citoyen C h o u ss y , étoient-elles donc des suppositions... des j e u x . . .
des effets d ’une imagination tranquille?
P a g c 4 » Choussy dit que je paye une somme d e 3,5oo fr a n c s a ssigna ts, et ce
pendant c ’est une somme d e 2 , 5oo f r . a rg e n t, dont i l m e donne une quittance
m otivée. . . V o u d m it-il être cru sur parole , lu i q u i é to it s i p a isib le , lorsqu’ i l
tenôit la p lu m e .. . lu i q u i sa it s i bien m en a cer, tourm enter, d én o n cer, cal~
ctder. . . .
Choussy n ’est pas plus exact dans la narration de l ’acte d ’offres de payement
de mon billet du a germinal an 3 . . . . N o n seulem ent i l en défigure le s condi
tions a p p osées, m ais i l e s t s ile n c ie u x sur l ’ objet e s s e n tie l, sur ma réclam a
tion form elle e t contre le s circonstances p articulières q u i m ’ ont contraint à
souscrire l ’engagement dont est question, et sur nies répétitions de som m es consi
dérables , dues par le fe rm ie r de C h ita in , en vertu de mon titre d ’ adjudication.
Page G , Choussy veut encore que je n ’aie contre lui n i créance n i titre.
M a is il a jo u i de m a fe rm e pendant n e u f m o is , et sans m ’ avoir p a y é ; m ais
i l d it avoir un acte q u i le subroge dès 1 7 9 2 , à la fe r m e d e C h ita in . D o n c il
doil. Quand me p ay e ra -t-il? quand en aura-l-il ou le temps ou le moyen ? M e
JVra-t-il uu crime dy 111» patience?
H
Î
�( 10 )
Page 8. L a qualité de b ra ve représentant est encore [ouvrage de Ch oussV ,
puisqu'il l’a employée dans sa lettre. J’ai dû la présenter com m e i! a voulu qu'elle
lu t lue. Il est des affections, que le temps ou les circonstances détruisent pour
toujours. A v a n t la révolution j’ai eu pour régulateurs dans mes affaires contentituises les citoyens Grangeon , T o u r e t , M allet et T o u t té e p ère ; et depuis la
révolutio n , les citoyens Jieraud, D u r y , A n drau d , G ren ier, V e r n y , T o u t t é e
fils et Pages. Je présente leurs consultations pour démontrer la fausseté dé
l ’allégation de C h o u ss y , en indiquant avec respect les noms de ces jurisconsultes;
éclairés et vertueux.
Page 9. O u i , j’ai accompagné Forestier à la commission des subsistances et
an comité de salut p u b lic , parce q u ’il falloit y être présenté par le député de sondistrict , pour poursuivre la réquisition des grains que j’avois à prerdre dans le
département du C h e r , qui se refusoit à l’exécution de l’arrêté de la commission
des subsistances. :\I us ces promenades dont parle C h o u s s y , sont aussi étrangères
à la cause, que les injures q u ’il m é d i t si gratuitement.
Page 10. Je n ’ai été que très-momentanément du comité de surveillance de’
V ic h y , et après la démission du citoyen C o r n i l ,. notaire. Je reçus ;’i cette époque
les félicitations des citoyens de la com m une : je 11’ai été en activité que pour
dix-huit séances; j ’en ai donné quittance; je fus éloigné après.
Je n ’ai point été fonctionnaire public depuis le commencement de la révolution,
co nu e Choussy se permet de l’avancer à dessein : j’étois en mission pour les
subsistances dans le département du C h e r , quand V ern erey me n om m a membre
du conseil île district, le i 5 pluviôse an 2 ; je le justifie par la lettre imprimée de
l'agent national. O11 sait que ces administrateurs étoient sans fo n ctio n , et q u ’ils
n ’avoient d ’activité, q u ’autant q u ’ils étoient appelés de leurs différentes co m m u
nes. C houssy dit encore une fausseté, en p la ça n t, page 10, ma nomination au
y 5 prairial. Son m o t if est pénétrant. M ais quand cette nomination eut été du
prairial , je ne pouvois coopérer à aucun acte a d m in istra tif, puisque j’étois
dans le département du C h e r ; qu ’après mon retour en prairial, le district me
nom m a aussitôt pour une levée de quinze cents quintaux de grains sur celui de
G a n n a t , et que je ne suis rentré chez moi qu’entour le 10 messidor, après cinq
mois d ’absence. iNIa commission imprimée fixe mon départ, ici encore Jacques
Ch oussy sue et aspire tous les genres de passions , en déclamant contre C laude
A r m illio n ; en prenant le fait et cause de Bo urgeo is, avec une chaleur qui décèle
l ’intérêt q u ’il donne à ce dernier, et en suspectant les citoyens Gravier-Dum onc e a u , G r a v ie r -R e y n a u d , Sauret et moi , d ’intelligence avec A r m illio n , q u i ,
quoique voilurier par eau , force à l’estime ses amis et ses ennemis.- Mais la
déclaration d ’A rm d lio n lui appartient tout entière; elle est le cri de Son intérieur
seul.
.
O u i , Jacques C h o u s s y , mon conseil vous a qualifié avec raison de neveu du
citoyen Forestier; et je suis aussi étonné de vous voir nier avec effronterie celte
alliance rapprochée , que vos rapports habituels avec cet oncle. Fia pièce
imprimée à la page 20 justifie mathématiquement que vous êtes son neveu
i\ la mode de Bretagne. Ouand j’avouerai que Forestier est venu souvent chez
nfoi , sur-tout avant la révolution , com m e il alloit chez tous les citoyens des
communes environnantes , je dirai une vérité d ém o n strative; mais je n ’aurai
pas votre foi blesse pour démentir des faits (»ositifs.
Pages 11 et 12, vous dites e n c o r e , Jacques C h o u s s y , que j ’aurois dfi parler
des événeniens rclatils à mou b ille t, quand Forestier éloit incarcéré. Y o l r ç
�(ii)
Cj
^b’cction pi-cuvr assez ce quo vous aurirz i a i t , si toîis eussiez ¿lé à ma place :
je me tais, p:irce que je respecte le malheur clans lsf personne de mes ennemis.
Pa^e i3» Jacques Choussy veut me rappeler sans doute, qu’à l’exemple des
citoyens les plus énergiques et les plus bienveillans, j’ai p u , j’ai dii ¿ire utile
à mes c o n c ito y e n s .... et quand la com m une de V ic h y m ’a prié dans les temps
de lui donner un intérêt e lfe c t if contre le syndic du diocèse de C l e r m o n t , qui
réclamoit l’universalité des biens des célestins de V ic h y ; que ce z è le , cette sur
veillance se sont continués pendant plus de cinq ans ; q u ’ils ont été couronnés
du succès le plus complet ; (pie la ville de V ic h y a obtenu de riches dotations
S ou i ses églises , ses pauvres , son h ô p ita l , son officier de sa n té , un collège, des
istributions abondantes d ’argent ; que tous ces so in s, ces m o u v e m e n s, cette
correspondance journalière, les honoraires , les frais d ’avocats, de procureurs t
huissiers, secrétaire de rapporteur , mémoires im prim és, frais d ’impression , de
distribution ; en un m o t , tout ce qui constitue une masse énorme de déboursés...
Éh bien ! que Jacques Choussy compulse les registres, q u ’il soulève toutes les
consciences, q u ’il demande à ces bons habitans de V ic h y , aux trésoriers, aux
dépositaires de leurs comptes , c e qu’ il en a co û té h la co m m u n e, ils répon
dront par ju s tic e e t a ccla m a tivem en t, r ie n , absolum ent r ie n . . . p a s une obole.
E t quand la commune de Cusset me fit p r i e r , l’année dernière , de la sup
pléer à Paris [>endaiit l’absence du citoyen A m e lo t , ex-législateur, de lui donner
des soins empressés , de rédiger ses mémoires manuscrits, les distribuer , les faire
imprimer , payer les frais d ’impression , les présenter aux consuls, aux conseillers
cj’état et autres autorités , ai-je dû être le p a tro n , le so lliciteu r des habitans de.
C u s s e t ? O u i , sans doute , e t d ’ une manière tellem en t a ffe c tu e u s e , désinté
ressée , que Ja cq ues C h o u ssy ne trouvera n u lle part le s traces qu ’il en a coûté
à la commune de Cusset le plus léger d é b o u r s é ; .......... et si ces missions d ’hon
neur ces actes de devoirs et de dévouem ent, et qui ont été pour moi autant de
jouissances et d ’occasions de m ’acquitter et de mériter de nouveaux bienfaits de
mes concitoyens , doivent m ’attirer de Jacques Choussy une critique a m ère, des
sottises, des in ju res, des calo m n ies, les magistrats mettront un grand prix sans
doute h la pureté de mes procédés, et ine vengeront de la lâcheté de mon en
nemi ; et si toutes les âmes des communes du district de Cusset étoient encore
de la trempe de celle de Jacques Choussy , faudroit-il briser sa plume , toutes
ses affections, et fermer son cœur et sa bourse aux accens du malheur , dé
l ’a m itié , <le la reconnoissance ? non sans doute..........
Pour édifier Jacques C h o u s s y , et lui donner le goût de l ’im itatio n, je vais
transcrire quelques parties des lettres que j’ai reçues, dans les temps , des citoyens
de V ic h y . Je me tairai sur celles des citoyens G ravier et C h o clie p ra t, écrites au
nom de la ville et de l’hôpital de V ic h y , et sur celle du citoyen L u c Forissier ,
commissaire du gouvernement près la municipalité de C u sse t; elles sont trop
flatteuses pour m o i , et faligueroient par là mêm e l’humeur de Jacques Choussy,
J e me borne ù ces deux actes publics.
«
«
«(
«
«
a V o s compatriotes n ’avoient pas besoin de ce dernier trait de bienfaisance,
pour connoître toute la générosité de votre c œ u r , mille autres de ce genre
les avoient pleinement convaincus de tout ce que vous pouviez, faire et entre-.
prendre pour e u x ; le soin que vous avez pris au sort des malheureux pour
qui vous vous occupe/, le p lus, est un acte pour vous de triom phe, qui se
transmettra à la postérité la plus reculée; et par surcroît de bunté et dç zèle,
�«
«
«
«
«
«
¡1 faut que je me ressente de vos bienfaits; ce travail qui vous est ordinaire,
vient assurer à une petite famille encore au berceau un père et un bienfaiteur;
mais ils le sentent, et ie dois être leur garant auprès de vous. C e titre m ’est
d ’autant plus c lic r , q u ’il me rapproche de votre souvenir, et q u ’ils y ont autant
de droit que moi. S i g n é , J N o v i . i t s , officier de sauté, v i c h y , ce 6 août
1787..
E x tr a it d e la lettre de la sœ ur supérieure de l ’ h ôp ital de V ic h y , 9 a oût 1787.
« J’ai reçu l'honneur de la vô tre, avec la plus grande satisfaction et la plus
vive et sincère retonnoissance : nos devoirs sont trop multipliés à votre égard,
pour vous offrir des remercîmens ; je puis vous assurer que nous graverons
votre n o m , et que votre mémoire sera en bénédiction dans notre maison ;
un million d ’actions de grâces de tant de jxùnes et de soins pour nous procurer tant de bienfaits. V en e z d o n c , m onsieur, afin que chacun puisse.vous
téoioigiier ses sentimens; comme vous entendrez le jargon de nos petits enfans»
chacun à sa m anière, que vous êtes son bienfaiteur \ S ig n é , 6. Fiiançoisk
V a lle t.
Page 12 , Choussy dit que pour rendre m a cause intéressante, j ’ai remué la
fange des p assions.. . . C e soulèvement n ’est ni de ma cause, ni dans mon carac
tère ; j ’ai produit les pièces qu ’il m ’a rem ises, celles qui se lient aux circons
tances , que l’on a placées, par la voie de l’impression, dans la m ain des admi
nistrés , et que tout le district m ’a apportées.
Je n ’ai jamais été membre de société populaire que de celle de V i c h y , que
j ’ai très-peu fréquentée, parce que j ’ai été en mission pour des grains depuis le
mois de pluviôse an 2 , jusqu’au 10 messidor suivant. J ’ai donné quelques dis
cours de morale dans le sens dt*s citoyens paisibles et vertueux. Je n ’ai paru que
très-rarement à la tribune de la société de V i c h y , et toujours pour proposer à
mes corn iloyens des actes d ’humanité. Je me rappelle e n lr ’autres qu ’ils m 'ont
nom m é commissaire pour solliciter les libertés des citoyens Cailliaud, et Fouger o lle s, mort depuis aux armées de la république, et que j ’ai été assez heureux
jx>ur obtenir sur le champ leur mise en liberté.
Page i/f, Choussy demande de quel droit auroit-on voulu le forcer à me
laisser des l>estiaux sans en recevoir le prix / , , . et il ajoute . . , ne doit-on p a s
traiter conform ém ent a u x lo is q u i e x iste n t au moment oit l ’on entre en pourp a rler? . . . . Eh bien! Jacques C h ou ssy, vous venez de décider la question qui
nous divise; et en objectant comme v o u s, je dirai de quel droit voulez-vous me
payer un cheptel de 1,594 fr. écus de 1 7 8 3 , avec une monnoie idéale? Pour
quoi prétendez-vous que le p rix, le se u l p r ix assignats d e quatre bœ u fs , com
p lém en ts la va leu r de p lu s de cinquante grosses bétes a ra b les, qui formoient
en 1780 les cheptels de m es d e u x d o m a in es, que votre père , par une cla u se
p articulière de son b a il, doit m e rendre com m e i l le s a reçus du ferm ier p révéilent. , . . E t p uisque vou s vou lez traiter conform ém ent a u x lo is q u i e x is te n t
e u moment oti l ’ on entre en poun-parler , pourquoi depuis sept ans vou s jo u e z vou s du v œ u im péra tif de l ’arrêté du 17 fru ctid o r an a , qui reporte le s ch o se s
et l e s parties au mente état ou c/fes étaient avant l e 2 th erm id or? O r , vous
m ’avez forcé de traiter dans l’intervalle de ces deux lois : donc je suis , de votre
propre a v e u, d.ms l ’exception voulue par elles.
Page iü* Chi»ussy n ’est ¡»as plus exact pour les noms de personnes que pour
«
«
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«
«
�(1 3 )
les citations de choses; il parle d ’un m éta yer illitéré, no m m é M a rie B a r g e ,
qui a formé une saisie-arrêt entre mes mains. Je déclare q u ’il n ’en existe point
au nom de M arie Barge.
S i j ' avois é t é c e que Jacques C h o u ssy s ’efforce s i p é n ib le m e n t, s i m é
c h a m m e n t d 'écrire , nous n ’ aurions ja m a is é t é d ivisés n i d ’ in tér êt, n i de
p e n s é e , n i d 'a c tio n ; ses so ciétés , ses g oûts , se s am is seraient le s m ien s •
i l n’ auroit p a s f a i t des voy ages in u tiles e t fa tig a n s , ni éprouvé des délais
et une résistance forte et constante de ma part ; il ne m ’auroit pas dénoncé p ou r
des tracasseries qui n ’étoient plus à l’ordre du j o u r , e t c . , e t c .; enfin, et il fa u t
encore l’ajouter i c i , je n ’aurois pas été m a n d é , six jours après mon retour d e
la mission des g r a in s , pour rendre compte de l’intérêt naturel que je devois à
l ’abbé A u f a u v r e , petit neveu de m a m è r e ...........justifier matériellement q u ’il
étoit dans le sens voulu par la loi ; je n ’aurois pas été nécessité d ’envoyer , en
trente-six heures, à V o selle , à G a n n a t , à M o u lin s , pour avoir la sanction des
différentes autorités de ces trois c o m m u n e s, sous peine d ’arrestation , co m m e
si je pouvois répondre des procédés d ’un tiers demeurant à P a r is , et que j ’avois
perdu de vue.... L es signatures de ces différentes administrations, des 16 , 7
1
18 m essidor, sont devant le tribunal d ’appel. O n n ’auroit pas essayé de faire
r e v i v r e , contre m o i , la fable du loup et cîe l’a g n e a u , et Jacques Choussy n e
m ’auroit pas repris, m enacé, tourm enté, dénoncé onze jours après, c ’est-à-dire,
le 29 messidor, époque de sa lettre.
P L A N T A D E - R A B A N O N .
A R iom , de l'imprîm. de L ANDRIOT, imprimeur du T ribunal d’appel. — A n 9 .
�
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Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
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Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Plantade-Rabanon
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire au conseil, pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire de la maison, domaine de Chitain, Joninain ; contre Jacques Choussy.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
13 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1127
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1128
BCU_Factums_G1129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53155/BCU_Factums_G1127.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
-
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dec7efdb90345419376081f70bdb851a
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Text
PRECIS
•
i
POUR
F
r a n ço is
B O N N A M O U R , propriétaire, demeu-
reant à S t.-G ilb e rt, commune de S t.-D id ier
’
CONTRE
-F r a n ç o i s
O R A N D , propriétaire, demeurant
en la commune de Jenzat.
M
L E citoyen François Morand est. débiteur de Bonnam our d’une somme de 19 ,500 francs; elle représente la
valeur de plusieurs immeubles. L e créancier en réclame
le payement. Il invoque, pour y parvenir, la loi du 16
I
�nivôse an 6 , sur la vente des immeubles pendant la.
dépréciation du papier-monnoie. François Morand no
conteste pas la validité de cette demande ; il déclare, au
contraire, qu’elle est juste; mais il prétend qu’Aunet
M orand, son frère, s’est chargé, par un arrangement
particulier entr’e u x, d’acquitter ses obligations. Annet
Morand lutte vainement contre la garantie qu’il a pro
mise , et contre la force de la lo i, avec une foiblesse '
que son texte seul combat. L ’on pourroit se dispenser
de répondre à cet adversaire mal conseillé; c’est afin de
ne rien négliger, que l’on réfutera ses principales objec
tions: le temps et la raison ne permettent pas de s’arrêter
à celles qui ne sont que frivoles et captieuses.
F A I T S t•
,
............... .
Ç . -
t
â
.
*.
François Bonnamour se rendit adjudicataire, Ies I er et
2 prairial an 2 , de plusiers héiñtages nationaux, moyen
nant 23,160 francs.
L e premier messidor an 3 , il subrogea à son adjudica
tion François M orand, à la charge de lui rembourser
les sommes données, et d’un bénéfice de 23,800 francs»
L ’acte annonce que François Morand s’étoit libéré en
assignats et en effets commerciaux. Pour réaliser le
montant de cette dernière stipulation, il souscrivit plu
sieurs promesses; il y en avoit quatre de 5,000 francs
chacune. Un payement; de 5oo francs, endossé sur ces
effets, réduit h créance de Bonnamour à la somme de
19,500 francs en principal.
�C'3 ) '
Par acte du sixième jour complémentaire de la même
année, François Morand vendit à Annet M orand, sans
garantie , la majeure partie des immeubles cédés par
Bonnamour. La condition la plus importante de l’acte,
fut celle de payer tous les effets dûs au premier cédant,
et de les rapporter soldés à François Morand.
Acquéreur d’un bien qui produit annuellement, au
moins 1,200 francs, Annet Morand voulut que les
quatre billets fussent soumis au tableau de dépréciation
du papier-monnoie. Il cita Bonnamour en conciliation
sur la manière d’acquitter ce qu’il devoit. François
Morand fut appelé comme essentiellement intéressé à la
discussion. La conciliation échoua : Bonnamour dit sim
plement qu’il étoit disposé à recevoir.
L a loi du 1 6 nivôse an 6, a été promulguée depuis
cette dém arche; Bonnam our, en l’in v o q u a n t, a cité
François M o ra n d au bureau de paix de son canton ,
pour se concilier sur le payement de 10,000 francs pour
les termes échus de deux promesses. François Morand
a répondu, que d’après ses arrangemens avec Annet
M orand, il demandoit un. délai, pour exercer contre
lui une action en garantie.
Annet M orand, cité par son frère, s’est présenté,
le 26 du même mois, devant le juge de paix. En con
venant qu’il s’est chargé d’acquitter les quatre billets,
il a soutenu qu’il avoit déclaré , par acte du 19 plu
viôse j qu il entendoit se conformer aux articles 5 et 7
de la loi du 1 1 frimaire précédent, et payer tout ce
qu’il devoit, dans le cours de l’année, après une réduc
tion faite sur les bases de la dépréciation du papiermonnoie.
A 3
�Il a offert de remplir scs 'obligations , suivant cette
intention ainsi manifestée.
Les aveux de François’ Morand sont précieux. Il a'
dit qu’ Annet Morand étoit son garant, parce qu’il l’ayoit promis 3
.1
Que les- quatre billets devoient etre acquittés sans
réduction , parce qu’ils formoient une partie du prix des
immeubles que Bonnamour lui avoit cédés; qu’Annet
M orand'ne sauroit éluder cet engagement, et les suites
de la garantie.
François Morand enfin a été assigné, pour se voir^
condamner à payer les i o ;ooo francs échus, ou 6,000
francs par forme de provision.
Annet Morand a été mis en cause. II s’agit de dé
montrer que Bonnamour est réellement créancier de
la somme de ig,boo francs en numéraire , avec les1
intérêts.
"
..
'
i
’ 1
�P I È C E S
J U S T I F I C A T I V E S .
L e C O N SE IL SO U S SIG N É , qui a pris lecture du
contrat portant subrogation, consenti par François Bonnamour, au profit de François M orand, le premier
messidor an 3 ; de la notification faite par Annet Morand
à François Bonnamour, le 19 pluviôse an 6,|et sur ce
qui a été exposé;
E s t i m e que les sommes restées dues à François
Bonnam our, pour le prix de la subrogation par lui
consentie, doivent être payées conformément au mode
décrété par la loi du 16 nivôse dernier, et non par la loi
du 1 1 frimaire, ainsi que voudroit le prétendre Annet
M orand, auquel François Morand paroît avoir rétro
cédé les objets auxquels il avoit été subrogé par Bonnaniour.
François Bonnamour s’étoit rendu adjudicataire par
différens procès verbaux du directoire du ci-devant
district de Gannat, de plusieurs immeubles nationaux.
Par acte du premier messidor an 3 , ü a subrogé
purement et simplement à ces adjudications, François
Morand. Cette subrogation a été, faite aux mêmes p rix ,
�/t>t>
( .'A
(6 )
charges et conditions portées par les adjudications, et en
outre, moyennant la somme de 23,800, tant pour bé
néfice que pour épingles; il est dit par le contrat, que
. cette somme a été payée comptant, tant en papiermonnoie ayant cours, qu’en effets commerçables.
Maintenant les effets donnés en payement n’ont point
été acquittés, ou du moins ne l’ont été qu’en partie.
François Morand a lui-même rétrocédé les objets acquits
à Annet Morand, son frère, à la charge par ce dernier,
de payer en son acquit, le montant des effets énoncés
en la subrogation , et Annet Morand a cru pouvoir s’ac
quitter envers Bonnamour , en lui notifiant qu’il entend
renoncer aux termes portés par les effets, et en payant
suivant l’échelle de dépréciation.
Mais Annet Morand est bien loin de son compte , et
ce n’est pas ainsi qu’il devoit s’y prendre pour s’ac
quitter envers Bonnamour. Les effets qui restent dûs,
représentent le prix d’un immeuble vendu , et d’après
cela , ils sont payables conformément au mode décrété
par les articles 2 , 3 , 4 et 5 du titre I er. de la loi du 16
nivôse; c’est-à-dire, qu’il faut faire estimer les immeu
bles vendus, suivant la valeur réelle qu’ils avoient en
numéraire métallique au temps du contrat, et en l’état
où ils étoient alors, et d’après cette estimation , qui est
aux frais du débiteur, il doit payer la quotité propor
tionnelle qu’il reste encore devoir sur le prix de la vente;
c’est-à-dire, que s’il est valablement acquitté d’une por
tion, en valeur nominale, il est quitte de cette portion,
et doit payer l’autre proportionnellement au prix réduit.
Ainsi, par exem ple, on suppose qu’un particulier ait
�C7 )
acquis- un immeuble pendant le cours du papier-monn oie, moyennant la somme de 30,000 ^ ; qu’il en ait payé
1 5,ooo , lors du contrat, conformément aux lois alors
existantes; il sera quitte de la moitié du p rix, et si l’hé
ritage n’est estimé valeur réelle qu’à la somme de 1 5,000
l’acquéreur alors, pour être libéré, devra celle de 7 , 5oo
Ceci s’applique à toutes les portions que l’acquéreur
pourroit avoir acquittées ; comme s’ il a payé les trois
quarts ou les quatre cinquièmes, il ne devroit plus que
le quart, ou le cinquième du prix ainsi réduit à la valeur
réelle.
Il ne peut s’élever de difficulté sérieuse sur ce mode
de payement. En vain voudroit-on opposer , par exemple,
que la créance a été dénaturée; qu’il n’existe plus que
•des billets qui ne doivent être considérés que comme de
simples prêts; ce ne seroit là qu’une erreur, i ° . parce
qu’il est prouvé par le contrat, que les billets représen
tent le prix de la vente ; 20. parce qu’il est de principe
que les actes faits le même jour entre les mêmes parties,
ne sont censés faire qu’un seul et même acte, ainsi que
l’enseignent Mornac , Ilenrys et D uperrier; de sorte que
les billets commerçables , étant évidemment le prix d’un
immeuble, ne peuvent et ne doivent être payés que de
la même manière, que toutes les sommes qui resteroient
dues pour une vente de même nature.
Délibéré à Riom , le n ventôse an 6.
GRENIER, P A G E S, A N D RA U D ,
TO U TTÉE,
VERNY.
�l l <3
<>t
( 8 )
L e s o u s s i g n é est du même avis. R O L L A N D .
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu la subrogation dont
il s’agit, est du même a vis, et par les mêmes motifs. A
Clerm ont-Ferrand, ce 1 2 ventôse, an 6 de la république
- française. D A R T IS -M A R S IL L A C .
est du même avis, et par les mêmes
motifs. A M oulins, le 2 brumaire an 7 , S A U R E T .
Le
so u ssig n é
est du même avis et par les mêmes
motifs. A Moulins le 16 ventôse, an 6 de la république
française. D U R IN .
L
e
so u ssig n é
Le
so u ssig n é
est entièrem ent de l’avis des délibé-
M IZO N.
rans.
Le
so u ssig n é
est du même avis. P IN O T .
qui a vu la consultation
ci-contre et la subrogation qui y est énoncée, est du même
avis, et par les mêmes raisons. L a notification dii 19
pluviôse, est irrégulière ot nulle. T^a loi du 1 1 frimaire
11e reçoit aucune application ; il faut se référer à celle
du 16 nivôse, relative à la vente des immeubles’, et le
délai fixé par cette lo i, ou l’option que doivent faire
les acquéreurs t qui sont encore redevables du prix des
ventes, étant écoulé, Morand est obligé d’acquitter en
• numéraire le montant du prix de la vente, sans réduc
tion, et sans qu’il soitnécessaire de recourir aux experL
e
c o n se il
so u ssig n é ,
�( 9 )
,
tises ; il faut simplement conclure au payement en numé
raire de ce qui reste dû. Délibéré à R io m , ce i 5 messid. .
an 6. B O R Y E .
L e SO U SSIG N É , qui a pris lecture d’un précis imprimé
pour François Bonnamour , contre François Moiand et
Annet Morand, frères, ainsi que de différentes consultations
qui sont à la suite , délibérées à Riom , à. Clerrnont et à
Moulins, les n , 12 et 16 ventôse an 6 , et i 5 messidor
même année, 26 vendémiaire et 2 brumaire an 7 ,
Se réunit à l'opinion unanime des jurisconsultes qui ont
signé les consultations précitées , et pense avec eu x, que
la somme de 19,500 francs restée due àFrançoisBonnainour,
en vertu de quatre effets ou billets de François M orand,
pour prix d’une revente de domaines nationaux qu’il fit
c\ ce citoyen, le I er. messidor an 3 , doit lui être payée
par cet acquéreur, suivant le mode décrété par la loi du
16 nivôse an 6 , pour l’acquittement des prix de ventes
d’immeubles faites pendant le cours du papier monnoie.
E t d’abord, remarquons que Bonnamour ne reconnoît
et ne doit rcconnoître que François M orand, pour débi
teur direct et immédiat ; que c’est avec lui seul qu’il a.
contracté; a lui seul qu’il a revendu, en l’an 3 , le domaine
national qu il avoit acquis en l’an 2; qu’il n’est point partie
dans la rétrocession faite par François Morand à Annet,
le 6me. jour complémentaire an 3 ; que par conséquent
les clauses et conditions de cet acte ne p e u v e n t pas lui
�'-»l1
( 10 )
être opposées ; res inter àlios acta , tertio nec nocet, nec
prodest.
Pour savoir ce qu’il peut exiger de ce débiteur, et
quelles règles de réductions sont applicables à sa créance,
il suffit donc qu’ils soient d'accord ensemble sur sou
origine.
O r, il est reconnu et constant entr’e u x , que la créance
de 19,500 francs, dont Bonnamour réclame le payement,
quoiqu’elle 11e soit établie que par des billets causés pour
prêts , n’en est pas moins un. reste à payer du prix de la
revente des biens-immeubles qu’il fit à François Morand,
le i er. messidor an 3.
Les obligations causées pour simple prêt, pendant la
dépréciation du papier-monnoie, ne sont censées con
senties valeur nominale du papier-monnoie, et sujettes,
par cette raison, à la réduction au pied de l’échelle de
dépréciation, du jour de leur date, d’après l’article 2 de
la loi du 1 1 frimaire an 6 , « que lorsque le contraire n’est
« pas prouvé par le titre même ; et à son défaut, par des
« écrits émanés des débiteurs, ou par leur interrogatoire
« sur faits et articles ».
Dans l’espèce, les billets qui sont le titre, au lieu d'ex
primer la véritable origine de la dette, l’ont déguisée;
mais elle est prouvée d’ailleurs par un autre écrit émané
du débiteur ; savoir, par le contrat de revente, du I er.
messidor an 3 , ou il est expressément déclaré que François
Morand se libéra du p r ix , en assignats et en effets comynerciaux \ quatre promesses de même date que le con
trat qu’il souscrivit en le signant, réalisèrent ce payement
annoncé fait en ejjets commerciaux .
�Ilà
C” )
Voilà Jonc l’origine de la créance irrésistiblement
prouvée par l’une des voies que la loi a indiquées ; savoir,
par un écrit émané du débiteur.
Elle l’est aussi sur l’aveu qu’il en fit loyalement au
bureau de conciliation, lorsqu’il fut interrogé sur le
fait : le procès verbal de non-conciliation du mois de
pluviôse an 6 , en fait foi ; or , c’est là encore un autre
genre de preuves admis par la loi précitée du 1 1 fri
maire an 6.
Ajoutons que cette dernière preuve répond à l’induc
tion qu’on a voulu tirer contre Videntité des billets repré
sentés, avec ceux dont parle le contrat du I er. messidor
an 3 , de la circonstance, que les billets rapportés sont
des billets ordinaires , tandis que l’acte de subrogation
énonçoit des effets commerciaux. I/idcntitc de date et
l’absence de tout indice de négociations multiples entre
François Morand et Bormamour , dans le même temps,
suffiraient seules pour lever l’équivoque ; car il est de
principe que tous les actes passés le môme jo u r, entre
les mêmes parties, sont présumées se rapporter au même
objet; mais l’aveu précis de François M orand, que les
billets représentés sont précisément et identiquement les
mêmes qu’il souscrivit pour solder le prix de la subroga
tion du i er. messidor an 3 , ne laisse aucune place au doute
sur ce point de fait.
Cependant, s’il est constant que les ig , 5oo francs restés
dûs à Bonnamour sont dus pour solde du prix d’une
revente d’immeubles, la conséquence que le payement
doit en être fait suivant le mode établi pour la liquida-
Ai
�( 1 2)
tion des prix de vente d’immeubles , par la loi du 16 —
nivôse an 6 , devient irrésistible et forcée.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 5 frimaire an 8.
BERGI ER.
'
;
C ETTE affaire a été portée en première instance devant
le tribunal civil du département de l'Allier.
La question étoit simple: la loi du 16 nivôse an 6. la
décidoit en faveur de Bonnamour. L 'attente générale étoit
qu’il alloit gagner son procès ; il l’a perdu contre tous les
principes; et malgré le vœu impératif de -la lo i , il a été
débouté de sa demande.
Ce jugement foible et irrégulier dans ses motifs est
attaqué par la voie de l’appel.
Bonnamour a pour moyens la loi, les principes constans
du tribunal d’appel, pour le maintien de son exécution
littérale, et enfin les avis d’une très grande partie des
jurisconsultes les plus célèbres des départemens de l’Allier
et du Puy-de-Dôrnc.
A
R I O M , D E , L’I M P R I M E R I E
DE
LANDRIOT,
Imprimeur du Tribunal d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnamour, François. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Pagès
Andraud
Toutée
Verny
Rolland
Dartis-Marsillac
Sauret
Durin
Mizon
Pinot
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
ventes
immeubles
biens nationaux
abbayes
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour François Bonnamour, propriétaire, demeurant à Saint-Gilbert, commune de Saint-Didier ; Contre François Morand, propriétaire, demaurant en la commune de Jenzat.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 1. des effets souscrits pendant le cours des assignats, représentant le prix d’un immeuble vendu, ne peuvent être soumis à l’échelle de dépréciation du papier monnaie, mais sont payables, en conformité de la loi du 16 nivôse an 6, d’après l’estimation des immeubles au temps du contrat.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1793-Circa An 8
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1103
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Didier-la-Forêt (03227)
Jenzat (03133)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53131/BCU_Factums_G1103.jpg
abbayes
assignats
biens nationaux
Créances
immeubles
ventes
-
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2a4bd2cea3c9a934372a090d099eff25
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6â,
/
y
K v
;
s
CONSULTATION
P
L e citoyen B
enoit
O
U
R
C H A M E R L A T
de C le r m ont-Ferrand , A
. habitant de la ville
p p e l a n t
;
C O N T R E
i
Les C R É A N C I E R S
hypothécaires inscrits du citoyen
Pierre R e y n a u d , , I n t i m é s .
L
e C o n s e i l soussigné , qui a vu le jugement du tribunal civil
de première instance de R i o m du 11 germinal an 1 0 ,
contenant
l ’ordre et distribution du p rix de la vente faite par adjudication
forcée , de l’autorité du ci-devant tribunal civil du département
du Puy-de-Dôme , le
23 prairial an
8 , au citoyen Benoit C h a m e rla t,
du domaine d e l’A b b a y e provenu de P ierre R e y n a u d ; l’acte d'appel
de ce jugement interjeté par le citoyen C h am erlat, adjudicataire
et poursuivant l’ordre ; et toute la procédure jointe ;
E st d’avis que l'a p p e l du citoyen Chamerlat est légitime et bien
fondé sur tous les chefs.
Exposé préliminaire.
P ar jugement du ci-devant tribunal civil du département du P u y de -D ô m e du
25
prairial a n 8 , le bien appelé de l'A b h aye , com
posé de batimens et de trois corps de domaines, dont la veille par e x
propriation forcée était poursuivie sur Pierre R c y n aud , fut adjugé
au citoyen Benoit C h a m e r la t , moyennant la somme de quatre-vingtn e u f mille francs.
I.e 28 frimaire an 9 , le citoyen C h amerlat a provoqué la dis
tribution de cette somme entre les différens créanciers inscrits ou
privilé g ié s, et la distribution a été faite par jugement contradic
toire du 10 germinal an 10.
L e s collocations utiles sont de trois espèces }
�c o
Collocations de créances certaines et exigibles ;
Collocations des fonds de diverses rentes ou pensions certaines
et acquises , mais simplement viagères y
Collocations de créances incertaines et év e n tu e lle s , tant
en
capitaux qu’en prestations viagères non ouvertes.
L a somme à distribuer a été
liquidée en capital ou
à quatre-vingt-quinze mille deux cent quatre-
intérêts
^r-
Tingt-dix-neuf fr. vingt-un c e n t i m e s ..............
Cl
9^,299
21
64,200
68
L e s collocations antérieures à celle du citoyen
Cham erlat ( l’un des principaux cré a n c ie r s), qui
est la septièm e, s’élèvent à soixante-quatre mille
deux cents fr. soixante-huit c . , y compris les
frais ' d ’ordre , ci...........................................................
P ar conséquent , il n 'a resté en fonds libres
p our être employés aux collocations ultérieures,
que t r e n t e - un mille quatre-vingt-dix-huit francs
3 i,of )8 53
cinquante-trois ce n tim e s.......................................
Mais la somme de
64 ,200
fr. 68 c . , à quoi
————— — ——
montent les collocations antérieures à celle du
citoyen Chamerlat, se compose de trois élémens,
J
.
et comprend ,
i.° E n collocations de sommes fixes et exigi
\
bles dès-à-présent, soit pour capitaux , soit pour
intérêts,arrérages de rente et frais, 2 i ,a 57 fr. 18c.
24,207
18
40. i 5 5
5o
**2.° L n collocations pour fonds de rentes via
gères ou douaires ouverts. . . i 5 , 8 (j8 fr. '¡S c
1
5.’ lin collocations pour fonds de gains éventuel.-1
de douaires non ou verts, et de garanties d’é-J
vid ion s également éventuelles.. .24,267 fr- 7^ *■•/ -
64 , 2oo
L o citoyen
tu
C h am erlat,est ensuite colloque
septième rang et ordre , pour la somino
d e ...................... ................................ 5 o,.*)6o fr.
Sous la déduction d o .............. i , y "j5
68
�Ce
qui
réduit sa collocation
48,585
effective à ..................... ...
fr.
c.
E t attendu qu’il ne restait de
fonds libres q u e .........................
o t,o g 8
55
L es fonds ont manqué sur sa
collocation jusqu’à concurrence de 17,486
47
E n conséquence , il a été autorisé à retenir cette dernière sommo
de 17,486 fr. 47 c. , niais rien de p lu s, sur celle de
5 o c. ci-dessus
tuelles. A u
22,671
4o, i 55
francs
, formant le fonds des collocations viagères et éven
m oyen de
quoi , il a resté à faire l’application de
fr. du même fonds. C e résidu a été appliqué aux colloca
tions des citoyens Faure et V iolier qui suivent
celle du citoyen
C lia m e rla t, et ils ont été autorisés à l’exiger , à la charge de p a y e r ,
tant que la somme de 22,671 fr. dont il s’a g it, restera en leurs
mains , au citoyen S aint-G iron, créancier antérieur à e u x , la somme
do 296 fr.
25 c.
, pour faire faco à l’intérêt du capital de
5, g 25
fr. a
quoi a été réglé le fonds de la rente viagère qui lui est due , et encore
à la charge de donner caution avec hypothèque spéciale, A qui et
p ou rq u oi? c’est ce que le jugement laisse à deviner.
On doit remarquer ici q u e, dansla somme de
4 o, 1 55
fr.
5 o c.
dis
tribuée de la sorte entre le citoyen Cham erlat et les citoysns Faure
et V iolier , il y a i 5, 8 q 8 fr. 75 c. qui forment le fonds de rentes
viagères qui ont actuellement c o u r s , et pour lesquelles il est dû
a n n u elle m e n t,
A G ilberte L abatisse( 2.m< collocation ) , une rente de 00 liv. ;
A la dame Cournon, v.' Reynaud ( 5 .™' collocation , ) une rente de
y 5o l i v . }
A Julien Joyant ( 5.“ ' collocation ) , une rente de s 5 liv. ;
En tout
8o5
liv. tou rn o is, représentatives de 794 fr. 17 c. de
rente.
L e surplus d e 4 o , i 55 fr.
5o
c . , qui est a 4,257 fr. 7 5 c. est un
fonds m o r t , destiné à répondre de gains et créances éventuels , qui
ne se réaliseront ja m a is, si la dame F o u r n ie r , épouse d Pierre
A a
�fjS ià
Reynaud , meurt avant
(4)
lu i, et dont elle n ’a droit de retirer au
cun intérêt jusqu’à l’événement de sa survie à son époux.
L e jugement d’ordre ne s’est pas expliqué sur le point de savoir
si ce sera le citoyen Cliamerlat qui payera sur les 17,486 fr. 47 c . ,
qui lui ont été attribués à p re n d re sur les fonds des viagers et des
créances éventuelles , si ce sera l u i , dison s-n ou s, qui payera les
So 5 livres tournois de renies annuelles qui sont à p a je r à Lahalisse ,
n la daine C o u r n o n , veuve K e y n a u d , et à Jo3'ant , ou si ces rentes
seront payées par les citoyens Faure et V i o li e r , sur les 22,671 fr.
qui leur sont
départis
du
même fonds réservé pour le viager
et l ’éventuel ; et ils n’en sont
ch a rg és, ni les uns , ni les autres.
L 'o b j e t valait cependant la peine d’y songer ; mais legreflier G aubert
a suppléé d’oifice à cet oubli des ju g e s , dans le bordereau qu’il a
dressé de la collocation du citoyen Chamerlat ; car il a eu
soin
d ’appliquer , de son autorité privée , la charge des intérêts v ia g e r s,
montant à 8o 5 liv. tournois , valant 794 fr. dont il 6’a g i t , sur les
J 7, 486 fr. , que le jugement avait assignés au citoyen Chamerlat dans
les fonds de réserve indéfinim ent,
L e résultat de celte ingénieuse combinaison serait heureux pour les
citoyens Faure et Violier ; car ils jo u ira ie n t, eux qui sont créanciers
postérieurs au citoyen C h a m e r la t , de ¡22,671 fr- du fonds de réserve ,
sans être tenus d ’en p a y e r d'autre intérêt que la rente Yiag' rc
de
296 fr.
due
au
citoyen Saint-Giron ; tandis que le citoyen
Chamerlat , m algré son antériorité d 'h y p o th èq u e , serait obligé de
paver l’entiur intérêt lé g a l du capital , qu'il retiendrait en paie
m ent , et nitm e a u -d e là . L ’intérêt, lé g a l de 1 7,686 fr. , déduction
laite
du cinquième pour contribution foncière ( dont la retenue
ne lui est pas interdite par les conditions de l’adjudication ) , n ’est
en efiet, que de 700 fr. moins
5 o c.
à p a y e r, montent à 794 fr.
Un renversement si bizarre de l’ordre
; et les rentes viagères qu’il aurait
des cré a n ce s, exécuté d ’offiee par un simple greffier , pour attri
buer au créancier le moins ancien,lapurliedu fonds de réserve la plus
libre et la moins grévéo , au préjudice du créancier le plus ancien ,
fst une chose incroyable : le fait 11'en est pas moins réel.
Ht ce greffier ne s ’est même pas borné à ce lle seule absurdité;
il y a ajouté encore celle d ’obliger lo citoyen Cliamerlat à donner
�¿3^
(s)
caution avec hypothèque spéciale, comme si 1’hyp olh èque spéciale
de l’immeuble par lui acquis , n ’était pas la plus sûre de toutes; et
comme si un adjudicataire , qui retient une partie du p rix de son
acquisition pour satisfaire à des rentes tem po raires, devait d’autre
caution
que la responsabilité de l*im m euble deyenu le gage spé
cial et privilégié des créanciers.
Ce tableau raccourci était nécessaire p our apprécier les griefs
qui ont déterminé l’appel interjeté par le citoyen Chamerlat du
jugement qu’on vient d ’analyser.Examinons maintenant ces griefs en
détail.
P r e m ie r G r ie f.
L e citoyen Chamerlat ré cla m e , et avec r a is o n , contre le juge
ment dont il s’agit, en ce qu’il lui a refusé la collocation qu’il avait
demandée pour la somme de 1,029 fr. , à laquelle s’élèvent en numé
raire
les frais
et loyaux coûts de la vente consentie par Pierre
R e y n a u d et Marguerite F o u rn ie r -la -E r u g iè r e , son épouse, le 19
juin 1792 , dont l’éviction a produit la créance principale
pour
laquelle il a été colloqué au septième rang et ordre.
L ’éviction q u ’il éprouva fût prononcée par jugement du tri
bunal civil du département du 9 floréal an 8. L e même jugement
fit droit sur le recours en garantie exercé contre l ’iei re Reynaud ,
v e n d e u r ,e t le condamna à payer et rembourser au citoyen C h am e r la t ,
1.° L a somme de 46,780 fr. , à laquelle se trouvait réduite , a
l ’échelle de dépréciation du tems , celle do 75,000 fr. assignais,
p rix stipulé au contrat de vente du
19
juin
l y g a , pour le corps principal du bien vendu , ci.
2.” L a somme de 0,280 f r . , laquelle, avec celle
de 1,300 fr. à déduire pour la valeur des cuves
et futailles comprises
duns la vente ,
forme
celle de 4,180 f r . , à laquelle se trouvait réduite,
d’après le même tableau , celle de 7,000 fr. a s
sig n a ts , p rix etipulù par le contrut pourdivers
*,'>
46,780
�r
♦<?*«>
. (
6)
fr.
Z)<? Vautre p a rt . . . . . . . . .
46,780
immeubles p artk u lie rso u pour le mobilier corn*
pris en la v e n t e , ci...................................................
3,280
ôo,o6o
S . ' I æ somme de
i,i
og fr. 1 o * , à laquelle se
trouva réduite,à l'échelle de dépréciation, celle de
1,608 fr. p ayée pour frais et loyaux coûts du
contrat de
v e n t e ....................................................
4.° Celle de
125
f r . , montant du
î ï j OS
cours des
inscriptions faites en divers bureaux des h y p o
thèques...........................................................................
5 .“ Celle
de i , g 56 fr. , à laquelle se Irouvaient
également réduites les sommes payées- par le
citoyen C h am erlat, tant pour droit de lots que
p ou r rachat de cens , c i.........................................
ï>f)56
Ces différentes sommes m o n ten t, réunies, à
5o,25o f r .......................................................................
Et
53, 25o
ce fut exactement celle pour laquelle le citoyen Chamerlat
demanda d V lre colloque en principal , par le procès-verbal d ’ordre,
ouvert le 28 frimaire au 9 , T\°
5 , V."
de l’expédition. A u F.° 10, V .°
du même p ro cè s-ve rb al, se trouve rapportée l ’analyse de l’ins
cription hypothécaire prise par le citoyen Clianierlat au bureau
de Itiom , pour sa créance, en ces termes : « L e citoyen Chamerlat
» a fait inscription pour une créance montant à 81,608 fr. , savoir ,
» celle de 80,000 fr. pour prix pi in cip a l, et 1,608 fr.
pour frais
» d’actect mise à exécution, sauf réduction en numéraire ».
Enfin nu folio 5 o,le citoyen Mioche, avoué, conteste,au nom des créonciers, la collocation demandéepar le citoyen Chamerlat de 1,956'fr.,
pour remboursement de lots et_ rachat do cens ; mais il n’élùve au
�(7 )
cune rïifHculté sur Te remboursement des lo yaux coûts de la y e n t e ,
portes à 1,109 fr., au lieu de 1,0:29 fr, à quoi on s’est reslraint depuis.
A la vue de ces détails , toua tirés du procès-verbal d’o r d r e , com
m ent concevoir que le tribunal dont est a p p e l , ait rejeté l’article des
loyaux c o û t s , sous le m o tif exprim é à la page i i du jugement im
prim é y « q u e , lors du procès-verbal d’o r d r e , le citoyen Chamerlat
» n ’a pas réclamé cet article de créance , mais seulement celle de
»
52,455
liv. à laquelle il a prétendu que s’élevait, d’après l’échelle
)) de dépréciation , celle de 80,000 liv. a ssig n a ts, prix de la vente du
» 19 juin 1792 j q u Jainsi , d'après les articles XX.X. 1I 1 et X X X I V
» de la loi du 11 brumaire an 7 , ne s’agissant que de statuer sur
)) les contestations élevées lors du p ro cè s-v e rb a l, le citoyen C h a » merlat est non-recevable dans sa demande en collocation de la
» somme de 1,029 livres.
Il faut ne pas vouloir li r e , pour tomber dans de semblables bévues.
Quoi ! le citoyen Chamerlat n ’a pas réclamé par le procès-verbal
d ’ordre , la somme de 1,029 fr. nu m é raire , valeur de 1,608 fr. assi
gnats , pour frais et loyaux coûts , tandis que cet article de créance
est porté dans son inscription, laquelle est relatée et analysée dans
le procès-verbal , folio 1 0 ; tandis qu'il est le troisième des cinq
articles de remboursement montant ensemble à
53, 25o
fr. adjugés
par le jugement du 9 floréal an 8 , dont la collocation intégrale a
été expressément demandée au folio
5
du procès verbal , recta et
verso; enfin , tandis que l ’allocalion de cet article 11Ja éprouvé aucune
contradiction au folio 29 , où le dernier des cinq articles qui com
posent la somme totale d e 55 , 25o fr. demandée,a seuleété contestée?
Certes s’il est vrai que le tribunal ne dût prononcer que sur les
contestations élevées lors du procès-verbal d’ordre , ce n ’était pas
Je rejet de l’article des loyaux coûts dont il s’a g it, que devait en
traîner l’application de cette règle; c ’était au :ontraiie son adoption,
puisqu’il est plus clair que le jour , non-seulement qu il avait
été
demandé , mais encore qu’il n'avait pas été contesté. Après cela,
pourrait-on balancer à réformer une méprise aussi frappant« des
juges dont est a p p e l?
�• V '-r j
(8 )
Secon d G r ie f.
L e cifoyen Cliamerlat est appelant en ce que le tribunal civil
de Hiom lie l’a pas colloque pour deux années d’intéréts du p rix
principal e t des lo y a u x coûts de son acquisition ,
52 , 22 g
montant à
fr. en numéraire , quoique ces inléiêts lui eussent
adjugés par le jugement du tribunal civil ,
an 8 , à com pter depuis le 29
été
en date du 9 floréal
messidor an 7 ,
époque depuis
laquelle il a rendu compte des jouissances des biens évincés.
L e s motifs sur lesquels la collocation des intérêts en question
formellement demandée au l*'.* ô , V.° du p rorès-verbal d ’o r d r e , a
été r e je t é e , sont encore une bévue choquante.
On jep roch e au citoyen Cliamerlat d e v o i r omis dans son bor
dereau d ’inscription, de parler des intérêts dont il demande au
jo u rd ’hui la collocalion. L ’article X V I I 11.0 4 de laloi du 11 brumaire
an 7 , exige que le créancier énonce dans son bordereau , le m on
tant des ca p ita u x etaccessu ires poiir lesquels il s’inscrit. D ’après un
texte ausii fo r m e l, nous dit-on , le silence du citoyen Cliamerlat sur
les intérêts de sa crér.nce qui en sont les accessoires , ne saurait
être sans conséquence ; et i l le ren d absolum ent non-recevable
à demander aujourd’hui d ’être co llo q u é p o u r des intérêts.
Voilà un misérable é q u iv o q u e ,e t rien de plus.
Distinguons deux classes d ’intérêts j ceux déjà éch us lors de l ’ins
cription , et ceu x à échoir.
V eu t-o n conserver indéfiniment l’hypothèque des intérêts é c h u s ,
q u e lq u e soit le n o jn b ie des années qui en soit accumulé ?/7y««/ en
énoncer le m ontant dans le bordereau. C ’est là le cas auquel s’ap
plique le n.°
4
de l’article X V I I de lu loi citée dans les motifs du
ju g e m e n t , page i 4 .
Mais , s’ il n’est question que des intérêts des tems à v e n ir , qui
pourront être dûs lorsqu’il arrivera une distiibution de p rix d ’im
meubles grévés ii faire ontie les créanciers du débiteur , ce 110
sera plus par l’article X V I 1 de la loi citée , qu’il fuudra se r é g l e r ; ce
scia uniquement par l’article X I X , qui porte : « le créancier inscrit
)> pour 1111 capital produisant des intéi êts , a droit de venir pour
a deux années d’a r ié iâ g e s , au même ja n g d ’hypothèque que pour
1» son capital ».
�6
& S
ry*'>
( O )
Ici la loi n'exige pas , comme à l’a r l H e X V I I , que le bordereau
énoncé le m oulant de ces deux années d’inlérôl à ven ir, ni m ê m e
qu il parle d ’in térê t; elle conserve de p le in droit le r a n g d ’h y p o llicquc du capital ¿ aux deux dernières années d ’intérêts
q u ’aur®
produits ce capital , a l ’epoque incertaine où il sera procédé à la dis
tribution du prix de l’immeuble qui en est le g a ge , et cela parle
simple fait de l’insci iplion du capital.Au reste ceserait sans fruit qu’il
énoncerait le montant d ’un plus grand nom ine d’années ; la co llo c -t¡on au rang du principal n ’en serait pas moins restrai nie à d eux
années d'a rrérage ?.
Il fallait cette mesure préservatrice et d ’équité pour la sûreté
du créancier , afin qu’il ne fût pas réduit à perdre désintérêts fu tu r s
et éventuels, pour lesquels il eût été inconvenant qu ’il s’inscrivît
d 'a v a n c e , et qu’il pou\ait cependant être forcé à laisser arriérer
sans négligence.
Mais il fallait aussi limiter le privilège de ces intérêts futurs à un
petit nombre d ’années , pour mettre les créanciers postérieurs à
l ’abri des suites de la négligence ou de la collusion qui aurait pu
a b s o r b e r le gage commun par l’accumulation , sans mesure , des in
térêts de créances plus anciennes que les leurs. L e législateur a
donc fait tout ce qu’il deva t , et pour le premier créancier et pour
les créanciers postérieurs,par le sage lempéiumciit qu’il a pris ; el les
tribunaux d o iv en t, sans doute , être fidèles à ces vues de justice.
Mais ce n ’est pas le citoyen Charnerlat qui a été l’objet de la sol
licitude du législateur , nous ont encore dit les premiers juges.
L ’article X I X de la loi du 1 1 b iuii'aiie qu’il invoque en 6a faveur ,
lui est étranger ; il ne s’applique qu’aux c i iww'vs produisant intérêt,
et celle du citoyen Chame! lut n ’en produisait point
lorsqu il fit
son inscription. Voici comment s’exprim e à ce sujet le ju g e m e n t,
page i ■
i de l’imprimé, i ." * colonne.
« L n ce
qui touche
les intérêts de ladite somme principale
» ( de 52,2Îjo fr. réclamée pour remboursement
<hi prix et des
» loyaux coûts de la vente unnullée ) dont le citoyen Charnerlat
» réclame la collocation, tels qu’ils *.ont adjuges par le jugement
» du 9 lloréal an 8 , attendu q u e , lors de l’inscription faite par le
» citoyen C h au icilal au buieau des hypothèque» , contre l ’ierre
>
�(10)
» Reynaud , le jugement du g floréal an 8 n’exisfait pas ; que y
)> conséqu em m ent. ladite somme principale ne portait point inté—
)) r è t s , et que d ’après la disposition de l’article X I X de la loi du
« i l brumaire an 7 , le créancier n ’a droit de venir pour deux
»
années
d’arrérages, au même rang d’hypothèque que pour son
» capital , qu’autant que ce créancier est inscrit pour un capital
» produisant des intérêts; qu’ainsi le capital pour lequel le citoyen
» Cliamerlat est in s c r it, ne produisant point, d’intérêts lors de son
» inscription , il n ’est pas fondé à en réclamer ».
E h ! qui ne voit que tout ce raisonnement porte
à
faux ? L ’ins
cription du citoyen C liam erlat, faite le 10 nivôse an 7 , eut pour
ohjet de conserver l’hypothèque de l’action év en tu elle en garantie
q u ’il aurait à exercer contre Pierre Reynaud , dans le cas où il
éprouverait l’éviction d ’un domaine dotal à l’épouse de ce citoyen ,
qui le lui avait vendu par contrat du 19 juin 1792 , avec pleine
garantie. L ’éviction 11’était point arrivée e n c o r e , et ne fut pronon
cée que le g floréal an 8. L a créance qui devait résulter de l’éviction
qu’011 prévoyait
lors de l’inscription et qui ne tarda pas à se
r é a lis e r , ne produisait certainement pas des intérêts actuels , puis
qu ’elle n’existait même pas encore ; mais elle était de nature à en
produiro de p le in droit >du jour où le citoyen C h a m e rla t, évincé ,
serait
comptable des jouissances du fonds dotal qu’il avait acquis
d ’un mauvais vendeur. C ’est ce qu’a décidé le jugement du g floréal
an 8 , qui adjuge les intérêts du prix de la vente dont il ordonne
le re m bo u rsem en t, non pas seulement à compter de la demande
en éviction et en g a ra n tie , qui n ’était que du mois de germinal
an 8 , mais à compter du
5
messidor an 7 , date de la séparation
de biens de la dame R eynaud , époque depuis laquelle le citoyen
Cliamerlat fut condamné à lui restituer les jouissances de son bien
d o ta l, quoiqu’elle n’en eût obtenu
l’éviction contre lui quo dix
mois après. O r , si la créance éven tu elle pour laquelle le citoyen
Cliamerlat s’inscrivit utilement en
nivôse an 7 , était de nature
ù produiro des intérêts de p le in d r o it, aussi-tôt que l'événement
de l’éviction redoutée se réaliserait, peut-on sérieusement lui dis
puter la qualité de créance p roduisan t intérêts , qu’exige l’article
X I X de lu loi du 11 brumaire , pour donner à l’inscription laite
�( 11 )
pour 1c p rin c ip a l, l ’eflet de conserver à deux années d’intérêts ( si
tant il s’en trouve dû lors de la distribution du p iix
de
l'im
meuble hypothéqué ) le rang d'hypothèque du principal ? L ’article
cité ne dit pas : le créancier d ’un capital pioduisant intérêts le
jo u r de l’inscription
; il dit sim p lem ent, le créancier d’un capital
p ro d u isa n t intérêts : et cela ne signifie rien autre chose aux y e u x
de la raison et dans l'intention de la loi , si ce n ’est que quand
une créance pour laquelle il y a inscription , se trouvera avoir produit
des intérêts encore dûs lors «le la distribution du prix de l’immeu
ble qui en est le g a g e , la simple inscription du capital emportera
la collocation des deux dernières années échues de ces intérêts , an.
môme rang que lq capital. C ’est donc sans raison , et contre toute
raison , que les premiers juges ont refusé au citoyen Cliamerlat
d eux années d’intérêts de sa créance inscrite. L a loi les lui attri
buait comme accessoire de sa créance , et il est d ’autant plus injuste
de les lui faire percire , qu’on lui fait supporter dans le même temps
les intérêts de la partie du prix de
l’adjudication du
bien de
l ’A bbaye qu’il est autorisé par le jugement d ’ordie à retenir en
paiement et compensation de sa créance. Il
n 'a pas à redouter
qu ’une pareille injustice soit consacrée par le tribunal d ’appel ;
d ’autant mieux que les premiers juges sont allés contre leurs prin
cipes en la commettant. Ils d é cla re n t, en efleL, qu’ils n’avaient à
prononcer que sur les points
contestés dans le procès-verbal
d ’ordre : or la collocation des intérêts qu’ils ont r e je té e , n ’avait
été contestée par aucun créancier dans ce procès-verbal.
T roisièm e G ' ief.
C e troisième g rie f est d ’une haute importance : on a vu dans
l ’antilysedu jugenient,qu’une somme de 4 o, 155 fr. demeure en réserve
pour former le fonds soit des rentes , pensions et prestations via
gères
ouvertes
et
qui ont actuellement c o u r s , soit des droits
éventuels de Marguerite Fournier , épouse de J\eynaud , e x p r o
prié. On u vu aussi q u e , sur ce fonds de réserve, 1 7,4 8t3fr. 17.0. ont
¿té altribnés provisoirement nu citoyen C h u m o la t pour.compléter
sa créance ai .¿r eure à celle des citoyens F a u r e et V iolirr , à la
charge tic le» 1 a p p o rte r, eu cas d’exigibilité des capitaux dont ils
m
�*< •« )
( ' 2 )>
s o if le g a g e , et
que W
22,6-m fr. d ’excédant sont attribués aussi
provisoirement aux citoyens Faure et V i o l i e r , à la même charge.
L e citoyen
Chamerlat léclame à juste titie
contre ces dispo
sitions du ju gem ent, sous divers points de vue.
E n premier lieu , quand on adopterait le système des premiers
juges, quand on ne laisserait entre les mains du riloyen Cham erlat
sur les 4 «, 155 fr. demeurés en r é s e r v e , que l e , montant e ffe ctif
de la partie de sa collocation pour laquelle les fonds entièrement
libres
ont manqué , il faudrait toujours réformer le jugement en
ce qu’il n ’accorde pas assez à ce créancier. En e f fe t , on vient de
prouver en discutant les deux premiers griel’s , que sa collocation
doit etre augmentée de plus de 5 , ooo fr pour remboursement de
lo c a u x
fonds
coûts et in téiê ts; conséquemment son attribution sur les
de réserve doit être augmentée dans la même proportion ,
et portée de 17,406 fr.à près de 20,000 fr. au moins, .
En second lieu , la créance exigible du citoyen Chamerlat. de
vant être entièrement remplie avant celle dos citoyens Fuure et
Y iolier , il est conséquent
qu’il faut lui attiibuer
en paiement
provisoire , par préférence à eux , la paitie des fonds de réserve
qui est
la moiii6
grévée ; celle qui n’oblige point ix p a y e r des
inteiêts annu els; celle qui ne répond
tu elles y lesquelles peuvent
ne jamais
que des
créances éven
se réaliser ; celle qui
le
laisse moins en souffrance et moins e x p o s é ; en un mot ,1a partie
du fonds de réserve qui n'est destinée à répondre que des gains et
du douaire éven tuels
de Marguerite Fournier , épouse à l ’e x
p roprié ; créance qui ne se réalisera jamais , si l’exproprié survit
à son épouse. Les premiers juges ont négligé de
s’expliquer sur
ce point important , et le greffier s’en est prévalu pour appliquer
ou citoyen Chamerlat
la partie du fonds de réserve qui est gre
vée (Finté rôt s a ctuels.
Réparer
l’omission dans le jugement et
rectifier la bévue du bordereau qui en a été la suito , sont deux
actes de justice qu’il 11’est pas possible de refuser.
Mais le citoyen Chamerlat demande et il a droit d■
’exiger plus
que tout cela ; car il a droit de retenir la 6omme totale de 4 o, 1/Ï7 fr.
do réserva en ses mains jusqu’aux
évènemens
qui la
rendront
ou exigible do la p a ît des créanciers éventuels , ou entièrement
�( iS )
libre et applicable aux
créanciers colloques après ce n s - c i , à la
charge par l u i , ! . " de payer annuellement les renies et prestations
viagères dues à G ilberte Labatis.-e , à la dame C ournon, veuve de
François Reynaud et à Joyaut ; 2.° de payer aussi la rente via
gère d ’Antoine Saint-Giron colloqué au 8.“,e rang , si les fonds
réservés suffisent pour remplir
et
la créance du citoyen Chamerlaf,
pour subvenir encore à cette dernière charge ; 5.° enfin , d’ac
quitter les ga ns exigibles
de Marguerite Fournier-la-Brugière ,
épouse de l’e x p io p r ié , et son douaire et logement pendant tout le
cours de sa vie , à compter du
décès de son époux , si elle lui
survit.
Son titre pour retenir/« totalité du fonds de réserve à ces con
ditions, et sans partage avec les citoyens Fuure et Y iolier , dérive
de sa
double qualité
d ’a cqu éreur et de p rem ier créancier ,
sur lequel manquent les fonds entièrement libres : deux qualités
q u i, com binées e n sem b le , rendent son
droit de préférence pour
rester n a n ti, absolument indubitable.
E t d ’abord , la qualité d ’acquéreur suffirait seule pour le cons*
tit 11er dépositaire lé g a l de tous les capitaux
non e xig ib les qui
sont utilement colloques sur le p rix de son acquisition , aux ter
mes de l’article X V de la loi du 11 brumaire an 7 , relative
au
régime h yp othécaire , qui porte :
» L a v e n te , soit vo lo n ta ire, soit fo r c é e , de l’immeuble grève ,
» ne rend point exigible les capitaux aliénés , n i les autres créan» ces non échues.
» E n conséquence , l’acquéreur et l ’adjudicataire jouiront des
» m îm es termes et délais qu ’avaient les précédons
propriétaires
)> de l'immeuble pour acquitter les charges et dettes iiypo lh écai» res inscrites ».
L e s premiers juges , dans les motifs de leur décision exprimés
à la page i 5 de l’imprimé , première co lon n e, ont prétendu que
l ’article de la loi dont on vient de rapporter les expressions , n ’a
aucune application
aux créances viagères et éventuelles dont
s ’agit au procès , et qu’il 11’a eu uniquement en
vue qi e des
créances certaines , dont les termes ne sont pas encore
M ai6 cette
il
échus.
iÜ6tinction arbitraire^ entre les créance» certaines ,
�o
el
les créances év en tu elles , n ’est même pas spacieuse. L a loi est
générale; or où la loi ne distingue pas , les tribunaux ne sauraient
distinguer non plus ; ubi le x non d is tin g u il, nec nos distinguere
debe mus.
D ’un autre côté , les motifs d elà loi qu’il est aisé de p é n é tr e r ,
s'appliquent également à tous les genres de créances non
gibles indistinctement.
e xi
Ce n ’ e s t p is seulement pour la facilité de
l'acquéreur qu ’elle a dû l’au'oiiser à lí lenir les fonds non e x ig i
bles ; c'est aus^i pour sa sûreté ; car lorsqu’ ils
sont
destinés
à des créances tem poraires ou év en tu elles , la sûreté de l’acqué
reur
exige
qu’il ne s'en rapporte qu’à lui-m êm e de conserver
intacts des fonds dont
il est responsable par la force de l’ins
cription qui a im prim é 6ur l’immeuble
dont il est l ’acquéreur ,
une h yp othèqu e indélébile par tout autre moyen que par l’extinc
tion de la dette. Vainem ent les créanciers en ordre de recevoir
après l^extinction de la dette tem poraire ou éventuelle,\u\ otiYiraient
caution : il y a plus de sûreté dans un nantissem ent que dans une
caution ; m inus e sth a b e r e actionem quarn rem. loi. 2o+. de regulis
juris ; m eliits est occurrere in tempore quant p ost exitu in vin d i
care. L . i / ' a u code quib. licet unie, sine j u d . vind.
L ’intérêt des ciéanciers tem poraires ou éven tu els s’y rencontre
également ; car ils ne peuvent pas avoir un gage plus assuré que
l ’immeuble vendu à la charge de leur hypothèque , puisqu'ils sont
privilégiés. Si la loi qui accorde la retenue du fonds des créances
non exig ibles à l’acquéreur jusqu’aux évènemens, n’existait p a s ,
il faudrait donc la suppléer par les principes généraux ; encore
m oins
peut-on so n g era en éca ile r l’application quand elle existe.
■ U ’nilleurs , s’il pouvait rester des doutes, ils ne porteraient cer
tainement pas sur la partie du fonds de téservo qui est destinée à
l'acquittement d is rentes et autres prestations viagères, moulant à
8o5
liv. tournois, annuellement ducs à G dberte Labatisse , à la
dame Cournon , veuve lîe yn au d , et autres ;e a r cosont-ludes créan
ces certaines et a c tu e lle s , dont le capital n ’est point exigible. O r
un ne doute pus que la faculté donnée à l’ocquéreur^ soit volqutuiro , soit f o i c é ,
pur l’article X V de la loi du 11 brumaire an 7 ,
de retenir en scs mains les capitaux non exigibles , ne s’appliquo
ù toutes
soi
tes de créances certaines c i actuelles. Le doute ne por
terait donc que sur la p ailie du m im e fonds de îéscrvc c¿ui efct des.
�( t5 )
tinée à répondre
des droits éventuel* de
Marguerite
F ou rn ier—.
la- Brugière : or cette partie du fonds de réserve montant à a 1,849 frt
sera absorbée
et
beaucoup
au delà , soit pour lo
com plém en
de la collocation du citoyen C h am erlal, à laquelle on ne dispute pas
la préférence sur les citoyens Fauro et V io lie r , soit pour former
le fonds de la rente viagère due à Antoine S a in t -G ir o n , colloquée
au 8 . rang , avant les citoyens Faure et Violier
qui ne sont co l-
loqués qu’au g.1”".
E n f in , considérons que l’incertitude des chances à courir rela
tivement aux droits éventuels de la dame Reynaud , est une rai
son impérieuse de plus pour le citoyen C lia m e rla t, de ne se dé
saisir d’aucune portion d ’un gage qui est nécessaire en totalité , et
qui pourrait même devenir insuffisant pour le désintéresser completteinent.
P ar e x em p le, supposons, ce qui n ’aurait rien de bien extraor
d in aire, que Pierre Reynaud meure avant les créanciers des 79 t
fr. de rentes viagères , et que Marguerite Fournier , son épouse ,
lui survive : il arrivera alors que Marguerite F o u r n ie r , devenue
veuve, aura à réclamer sur le fonds de réserve, un capital de
6,483
fr.
45 c. pour ses gains et créances dotales exig ibles , comme on peut
le voir par les détails de sa collocation ; et il faudra
lui p ay er
de plus une rente viagère de 888 fr. 76 centimes pour douaire ou
logement. Dès ce moment , le citoyen Cliamerlat
éprouvera t.*
un déficit de fiüo fr. au moins en capital , sur ce qui restera en
ses mains du la partie des fonds de réserve destinée à faire face
aux droits éventuels de la dame F o u rn ie r-R e y n a u d , pour remplir
sa collocation principale.
3.0 U ne absence totale de fonds pour le couvrir des interets
annuels des
25, 5 o 5. fr.
dont les fonds entièrement libres se trouvent
courts pour complet ter sa collocation principale.
Il faudra donc qu’il se récupère et de ce déficit en capital
e*
«les intérêts de sa créance entière dont il restera en soulfrance ,
sur le fonds des rentes viagères,« mesure qu’elles »’éteindront j e 1
il ubsorbera ce fonds entier en moins de huit
Comment serait-il possible de le contraindre
ans de sou fi rance.
à se désaisir , dans
une perspective aussi chanceuse } d ’aucune partie d’un gage (l ui
�( i.G J .
peut êtro tout entier nécessaire à son itvlemnîtü ? Vnjsi l e s parties
du fonds de réserve dont on pourrait , peut-être,
disputer la rete
nue au citoyen Chamerlat comme a cq u éreu r %on ne peut pas la
lui refuser comme p rem ier créa n cier su r le q u e l les
fon-U m a n
qu en t. Nous avons donc eu raison de dire que sa qualité d ’acqu éle u r , combinée avec celle de prem ier créancier s'ir qui les fonds
manquent , rend incontestable le succès de sa réclamation contro
le c h e f du jugement dont est a p p e l, qui partage entre lui e ll e s
citoyens Faure et V io lie r , le fonds de réserve qu’il a évidemment
droit de retenir en tota lité pour sou nantissement complet.
E x a m e n d u quatrièm e et dern ier G rief.
Ce grie f n’est pas suffisamment développé dans l’exploit d’appel,
l i e ch e f du jugement auquel il se r é f è r e , est celui par lequel le3
prem iers juges ont ordonné que , sur la liquidation du prix d e là
vente de
1792
dont le remboursement est ordonné , il serail fait
déduction de la somme de 2,000 l i v . , à quoi le tribunal a réglé
d ’office la valeur des cuves et futailles comprises dans la vente
( a u beu de 1,200 liv. seulement que M .r Chamerlat avait déduites
pour cet objet dans la liquidation
de sa créance portée
par
le
jugement du 9 floréal an 8 ) , néanmoins avec cette alternative :
«
si mieux n ’aime le citoyen Cham erlat déduire la valeur de cette
» futaille,suivant l'estimation qui en
sera faite par
experts , à la
)> charge qu’il y fera procéder définitivement dans deux décadesà
» compter du jour du jugement». M .' Chamerlat sc plaint de
1in
suffisance du délai ; et il a grandement raison ; car le jugement
d ’ordre n ’a pu être expédié et par conséquent
après sa prononciation. Mais le
plus
loin , et soutenir que
citoyen
exécuté
qu’un mois
Chamerlat
peut aller
les premiers juges ont excédé leurs
pouvoirs en élevant d ’officc l’évaluation de ce mobilier à
3,030
liv.
inému avec la fuculté d’opler 1 estimation , tandis que la liqui
dation de cet objet do déduction avait été fixée à 1,203 liv. seule
ment
par le jugem ent du 9 floréal
an 7 ,
le q u e l a p a ssé en
fo r c e du chose j u g é e , * t n’est ni attaqué. , ni attaquable ; d ’où il
huit que les
premiers juges ont
oublié la règlo qu'ils so sont
faite dans lea autres parties de leur ju g e m e n t , d u p u s les articles
�( *7 )
X X X I T ï et X X X I V de h loi du 1 1 brum iire^an
7 , lorsqu’ils ont
rejeté une liquidation non contestée entre les parties.
L a réclamation du citoyen Cliainerlat est donc tout aussi évi
demment légitime sur ce dernier p o in t , comme sur tous les autres.
Délibéré à,C lerm o üt-F errand , 1e 1 3 frimaire an i u
�C O N C L U S I O N S
\
'
M O T i r t E S
D U C I T O Y E N CTIAMERLAT.
A ce qu’i l - plaise au tribunal d ' a p p e l , 1.* dire qu’il a été m al
jugé par le jugement du tribunal civil d’auondisÊcnieiit de p jcn n ére
instance séant à Bioin ;
E u ce que le citoyen Cliamerlat a été débouté de sa demande
à fin d e t r e colloqtié p our fa somme de 1,029 f r - » montant des
frais et loyaux coûls de la vente consentie à son profit par le
citoyen Reynaud le 9 juin 1 7 9 2 , d'un domaine à C e b a z a t, dont
l'éviction a été prononcée par jugem ent
du tribunal civil du 9
floréal an 8 ;
É m e n d a n t , attendu que le remboursement des loyaux coûts de
la vente est toujours dû à l ’acquéreur évincé ;
Atten d u que ces loyaux coûts 01U été adjugés par le jugem ent
du 9 floréal an 8 ;
Attendu que le citoyen Cliamerlat en avait déclaré le m ontant
par son bordereau d ’inscriplion du xiï nivôse an 7 ;
Attendu qu’il avait requis d ’êlre
colloqué pour cet article de
créance par le procès-verbal d ’ordre , et que ce c h e f de sa de
mande n’avait pas été contesté ;
Faisant ce que les premiers juges auraient dû faire , ordonner
que la somme de 1,029 I»’. dont il s ’a g it, sera ajoutée à la collo
cation faite à son profit par le jugement dont est a p p e l, en sep
tième rang et ordre ;
2.° Dire qu’il a pareillement été mal j u g é , en ce qne l’exposant
n ’a point été colloque pour deux années à lui dues à l’époque du
jugem ent , des intérêts de sa collocation principale et des lo ya u x
coûts qui en sont des accessoires ;
É m e n d a n t , attendu que ces intérêts échus postérieurement à son
inscription h y p o t h é c a ir e , couraient de plein d r o it , p a r la nature
tlo. sa créance / qu’ils avaient été adjugés par le jugement du 9
floréal an 8 ; qu’il avait requis d ’êlre colloqué pour leur montant
par le procès-verbal d ’ordre ; que cet article de collocation n ’avuit
pas été co ntesté; q u e , d ’après l’article X I X de la loi du 11 brumaire
an 7 , le créancier « inscrit pour un capital produisant dea intérêts,
�( 19 )
•
•
» a droit de venir p o u r deux années d 'a rréra g es-an m êm e rang
» ^ ’h ypothèque que pour son capital « , sans qu’il soit nécessaire
que le montant en ait été énoncé dans le bordereau d’inscription;
çt que «elle forme conservatrice n ’est exigée que p o u r le sin té ie ts
échus ayant l’inscription ;
s.
•
■
O rd o n n er q u ’il sera aussi ajouté à la collocation principale de
l ’exposant la somme de quatre mille trente-un fr. pour deux années
d ’intérêts des sommes principales et loyaux cou's.
.5 .“ Dire aussi qu’il a été mal jugé au ch e f par lequel le jugemeitt
-dont est appel a ordonné la déduction de
2,000 fr. sur le prix
principal de la vente de 1 7 9 2 à rembourser à l ’e x p o sa n t, et ce
p our valeur réglée d ’office des cuves et futailles comprises dans
ladite vente , si m ieux n ’aimait l’exposant faire procéder à une
estimation par experts dans deux décades;
É m e n d a n t , attendu que la valeur de la futaille dont il s’a g i t ,
n ’a été réglée qu’à 1,200 fr. par le jugement du () floréal an 8 , p a ssé
en fu r c e de chose ju g é s ; qu’il n ’y a lieu n i a augmenter d ’o ffice ,
ni à faire régler par estimation , une déduction ainsi fixée irré
vocablement par un jugem ent passé en force de chose jugée ,• que
d ’ailleurs il n a été élevé aucune contestation sur cet objet dans le
proccs-vei bal d ’ordre ; enfin «pie s’il y avait eu lieu à une esti
mation , le délai de deux décades à compter de la date du jugement
qui n’a pu être expédié qu’au bout d’ un m ois, aurait été évidem
ment insuffisant y
O rdonner que l’évaluation de la futaille en question demeurera
irrévocablement fixée et réduite à la somme de 1,200 fr. ;
Hiibsidiaircment et da n s le
cas où le tribunal o t i m e i n it qu’il
peut encore y avoir lieu à une estim ation, ordonner que le délai
de deux décades, accordé pour y faire p r o c é d e r , sera prorogé à
deux m o is , et q u ’il ne courra qu’à compter de la signification du
ju gem ent à intervenir ;
lin conséquence des rectifications ci-dessus , dire et ordonner
que la collocation accordée à l'exposant en septième rang et ordre
par le jugement dont ebt appel , dem eiuera définitivement réglée
et fixée ,
C a
�( 20 )
j.'
A la somme de
5 o, 56 o
fr. pour remboursement du p rix
principal «le la vente de 1 7 9 2 ;
Sur laquelle il sera déduit 1,200 fr. pour la valeur des cuves
et futailles comprises dans ladite vente ;
fr.
C e qui réduira la prem ière somme à
2.* A la somme
49 , 56 o fr.
c.
4 g, 56 a
de 1,029 fr. pour loyaux
eouts de ladite v e n t e .............................................
5.° A la somme de 4 ,o 5 i fr. 20 centimes pour
1,029
intérêts de deux années des deux i . e,,s som m es..
4 ,o 3 i
20
L e s trois sommes formant celle totale d e . . .
54,420
20
4 .* D ir e
enfin q u Jil a été mal jugé p a r le même jugement, en ce
que l’exposant a été débouté de sa demande tendante à retenir en
ses m a in s , soit le montant des capitaux des renies v ia g è r e s , soit
le montant des capitaux des créances éventuelles , colloquées en 2.“ ',
5 ."'% 5 .me et
6.“ ' langs , qui s’élèvent a une somme capitale de 40,167
francs.
E n ce qu’il a seulement été autorisé à se retenir surlndite somme,
celle de 17,48b fr. 47 c . , pour complément de sa collocation princi
pale ;
E n ce que celte dernière somme a été donnée à prendre par le
bordereau
qu’en
a délivré le greffier sur les fonds des rentes via-
gères actuellement ouvertes , et à la charge
tement.
E
d ’en faire l'acquit
mkndant,
Attendu que l ’article X V de la loi du 11 brumaire nn 7 , sur le
régim e hypothécaire , accordant à l’adjudicataire ‘a faculté (indé
fini«*) de jo u ir des m êm est d é la is 'q u 'a v a ie n t h s précédons p r o
p r ié ta ir e s de l ’ im m e u b le , p o u r a cq u itter les char,»es et dettes
hyp othécaires inscrites , sans distinction et sans e x ce p tio n , il en
icsulte ioi 1 c’ nicnt que tout udjudicataiie «‘ht atiîoi .séà 1etenir en tes
mains tous les capituux n on-exigibles qui sont colloques utilem ent,
sui le 1 i ¡x de 6011 acquisition, quelle que soit la nature des n é a n re s
à l'acquiUt-iiicnt desquelles ces capitaux sont destinés, ù la tliaige
�<%'-3
(2 1)
d’en payer les intérêts à qui de d r o i t , sans bail de raution , et sous
la seule hypothèque privilégiée de l ’immeuble par lui acquis;
Que cette retenue est également nécessaire pour la sûreté de l'ad
judicataire , et pour celle des créanciers colloques avec privilège
spécial sur Pimmeuble ;
Q ue d’ailleurs , à sa qualité d’adjudicataire, le cito3'en Cham erlal
joint celle de premier créancier sur lequel les fends entièrement
libres manquent pour compléter sa collocation; qu’à ce t i t r e ,i l
est le prem ier en ordre pour recevoir les fonds réversibles , à mesure
que les créances et charges temporaires ou éventuelles
dont ils
ré p o n d e n t, viendront à s’eteindrc ; qu’à ce même titre , il a droit de
retenir , préféiablem ent à tout autre créancier postérieur à lui }
la partie des fonds réversibles qui n ’est grévée d ’aucune charge
actuelle , et ne répond que de droits purement éven tuels ; que le
vuide de sa collocation emporte la totalité de cette partie de fond*
ré v e rsib le s, à y 54 fr. p r è s , qui seront e u x-m êm es absorbés par les
frais de réformation de l’o i d r e j q u e la conservation en ses mains,
soit de ce foible e x cé d a n t, soit du fonds des viagers actuellement
ou verts, est nécessaire pour sa garai lie des suites de la collocation
év en tu elle
de M arguerite Foui n i e r , épouse à l ’exproprié.
Ordonner i . ° , q u e lasomme de 1 5,892 f r . , composant le fonds des
rentes , douaires et prestations viagères , pour lesquelles ont été colloqués G ib erte Labatisse ( a / “ * collocation ) , Marie Cournon , veuve
de François Reynaud ( ‘i .tm* collocation /, et Julien Joyant (6.rm*
collocation ) , restera entre les mains du citoyen Charnel lat en sa
qualité d'adjudicataire , à la charge par lui de payer annuellement,
jusqu’à l'extinction , les rentes et prestations viagères à l'acquitte
ment desquelles ce fonds est deatiné par le jugement dont est appel;
2.‘ Que, sur la somme de 24,259 f r . , composant le fonds des créan
ces et droits éventuels, pour lesquels a été colloquée Marguerite
F ourn ier , épouse à
1’exproprié
(
4 .,mf
collocation ) , le citoyen
Chamcrlat retiendra en ses mains , en sa qualité de créancier , la
somme de
fr. , pour , avec la somme de 51,098 fr.
5 «)
c. de
fonds entièrement lib r e s, qu’il a élé autorisé à retenir par le juge
ment dont est appel , on déduction de la créance pour laquelle il
est colloque en septième rang et ordre, compléter le m onlaulde
;
�>.
( 33 )
fadite collocation et des additions et augmentation* à W l l c c ï - d e s *UÎ requises ; en conséquence,que l'intérêt dudit capital de
23, 3 o 5
fr. par lui retenu p rovisoirem en t en p aiem en t, demeurera /-teint
ju s q u ’à l’ouverture deâ droits éventuels de ladite Marguerite Four-1
n i e r , femme K eynaud; •
.
.
.
5 .“ L ’autoriser aussi à retenir également en ses mains la somme
de f)54 fr , restante des 4o, i 5 y fr. y 5 c. de fonds réversibles , après
déduction des deux prccédens articles de retenue ;
l . ’autovi&cr enfin à continuer de retenir de même les fonds qui
deviendront libres par l ’extinction des renies et prestations viagères
ci-dessus désignées ; le tout pour sû ie lé et nantissement
du rem
ploi et indemnité é v en tu elle , qui lui seront dûs en capitaux et
intérêts , par l'événem ent qui doit ouvrir les droits pour lesquels
M arguerite F ou rn ier est colloquée au quatrième rang et o r d r e ;
4 .°
Dans le cas où la somme de g 5 i f r . , restant en excédant de la
collocation du citoyen Cham crlatm entionnée au n.* p ré c éd e n t, ne
serait pas entièrement absorbée par les frais qui seront employés
en frais d ’o r d r e , ordonner que pendant tout le temps que ce qui
en demeurera net sera libre de toute charge actuelle , l ’intérêt de
la somme ainsi restée libre seia payé à Antoine Saint-Giron , en
diminution de la prestation viagère de
5 oo
liv, tourn o is, pour la
quelle il est colloqué en exp ecta tive , par le jugement dont est
appel , à l’ordre d 'h yp o th è q u e du 12 nivôse an ».
O rdonner aussi qu ’en cas d ’extinction
charges viagères
de tout ou partie
dos
a ctu ellem en t ouvertes , auxquelles est uileclé le
fonds de i5,8c)2 fr. que le citoyen Cham crlat sera autorisé à retenir ;
le montant de la prestation annuelle
éteinte
sera p a y é à com pter
du jour de chaque exécution , d ’abord audit Antoino Saint-Giron ,
ju squ’au peu fuit
complément
de
l’arriéré do
sa collocation
fécond rang des créanciers pour lesquels les fonds
au
actuellement
jib ics ont manqué , et que lu surplus du montant desdites charges
annuelles éteintes sera pnyé aux citoyens I ’anro et V io lie r , en
diminution des inlerets de leur collocation au troisième rang des—
dils créanciers pour lesquels
ont manqué ;
les fonda actuellement
disponibles
�¿
(
23)
4
u)
y
L e tout Jusqu’à l'ouverture des droits é ven tu els de M arguerite
F o u r n i e r , épous e au citoyen Reynaud , exproprié,
5 .“ O rdonner
enfin qu*à l'évenement du d é cé s d u p r e m ie r m o u
r a n t , soit de Pierre R e y n a u d , soit d e Marguerite F o u r n ie r , son
é p o u s e , le citoyen C h amerlat et les citoyens F a u re et V i o l i e r
procéderont ensemble au compte et règlement auquel ces é vene~
mens donneront li e u , afin de reconnaître et. fixer les fonds qui
resteront disponibles à cette é p o q u e , e t d ’en faire l’application et
le versement ainsi que de droit, pour l ' entière exécution de leurs
collocations respectives.
6.°. O rdonner la réformation de toutes les dispositions secon»
daires du jugement dont est appel qui sont des suites des dispo
sitions principales qui auront été réformées.
'¡.° Enfin , condamner les intimés aux
dépens de cause princi
pale et d’app el, lesquels , dans tous les cas , l’exposant pourra em
p lo y e r comme
accessoires de sa collocation et au même rang et
ordre d ’hypothèque.
P o u r a v is , B E R G I E R,
90 p
w
A Clermont- F e r r a n d , chez J. V E Y S S E T , Im p rim e u r de
la Préfecture du P u y d e - D ô m e , rue de la Treille.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chamerlat, Benoit. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
ventes par adjudication forcée
biens nationaux
ventes
abbayes
hypothèques
créanciers privilégiés
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour le Citoyen Benoit Chamerlat. Habitant de la ville de Clermont-Ferrand, appelant ; Contre les créanciers hypothécaires inscrits du citoyen Pierre Reynaud, intimés.
Table Godemel : Ordre : 2. lorsque sur le prix à distribuer il arrive que des créanciers sont colloqués pour des rentes viagères, pour des droits ou actions éventuels, et pour toutes autres créances non exigibles, entre les mains de qui doivent rester les capitaux de ces collocations ? Le simple titre d’acquéreur de l’immeuble dont le prix est en distribution, donne-t-il, sur ce point, la préférence ? ou bien ces capitaux doivent-ils passer dans les mains des créanciers postérieurs ? si l’acquéreur, ou adjudicataire, est en même temps créancier privilégié, et que sa collocation, portant sur des capitaux sujets au payement de rentes et droits éventuels, ne lui assure pas son paiement et la garantie de son hypothèque, peut-il, à ce double titre, retenir entre ses mains tous les capitaux non éxigibles de quelque nature qu’ils soient, à la charge du service annuel, et de transmettre après son paiement complet. Intérêt : 1. quelles sont les créances qui produisent intérêts de leur nature ? 2. le créancier d’un capital produisant intérêt, doit-il être colloqué pour deux années d’arrérages, lors même qu’il n’a fait inscription que pour le capital ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1792-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1028
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Cébazat (63063)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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abbayes
biens nationaux
créanciers privilégiés
hypothèques
ventes
ventes par adjudication forcée
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53093/BCU_Factums_G0932.pdf
b8dec1dffd266e36187183d1139588b7
PDF Text
Text
IJ b t)
---- ------
�u r.
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!J4
GENEALOGIE
DES PARTIES.
Pierre D ejar,
marié à
Jacqueline Chassaing.
Julien,
décédé sans
postérité.
s.
V ital,
décédé sans
postérité.
Antoine Ier.
décédé sans
postérité.
ont donné tous leurs biens
à Julien Dejax.
4
Antoine II,
marié â
Marie-Thérèse
Delchier.
Anne-Marie,
mariée au cit.
T artel,
de cujus.
I
S
3
4
Vital.
Julien,
AnneA gnès,
François, appelant. Marie , mariée à
Pierre
mariée à
décédé
Peyronnet. Dalbine ,
sans poster.
intimés.
i
2
Joseph,
AnneMarie ,
intimé.
mariée à
Robert
Gizaguct >
intimée.
3t
3
M arie,
intimée.
�MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame A g n è s D E JA X , et le citoyen P i e r r e
D A L B IN E , son mari, juge au tribunal d’ar
rondissement de Brioude;
J o s e p h D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E , et
A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert
C r o z e - M o n t b r i z e t - G i z a g u e t , tant en
son nom que comme tutrice de ses enfans,
tous intimés :
CONTRE
J
D E J A X , homme de loi, habitant de la,
ville de Brioude, appelant d’un jugement rendu
au tribunal de cette même ville, le 6 messidor
an 10.
u l ie n
S o u s l’empire des lois prohibitives, les transactions
les plus ordinaires étoient toujours suspectées de fraude
l’injustice, la cupidité, l’ambition, avoient u n champ
vaste pour leurs spéculations ou leurs calculs. Quelle jouis
sance pour le cit. D e ja x , connu pour avoir la passion
A a
�<1« procès! Il doit sans doute regretter le temps où la
loi du 17 nivôse étoit en vigueur. II paroît que la loi du
4 germinal an 8 lui a singulièrement déplu; il sera bien
plus irrité contre le code civil, qui permet des dispositions
universelles en ligne collatérale; et son moment n’est pas
bien choisi pour attaquer des règlemens de famille dictés
par la reconnoissance, ou des ventes aussi sincères que
légitimes.
Ce n’est pas assez pour le cit. Dejax d’avoir obtenu,
par importunité ou par lassitude, la majeure partie de
la succession de l’un de ses oncles, d’avoir été donataire
universel de deux autres, il est jaloux de la plus légère
préférence de la tante qui lui restoit. Il l’a négligée dans
sa vieillesse; l’auroit abandonnée à des soins mercenaires,
sans la généreuse bienfaisance de la dame Dalbine : mais
aujourd’hui il en veut à sa succession; et tous les actes
qu’a faits la dame Tartel sont à ses yeux des libéralités
frauduleuses et déguisées, que la loi proscrit et lui réservoit exclusivement.
Ses prétentions sont défavorables et odieuses, sa récla
mation impolitique et injuste, attentatoire au droit sacré
de propriété : en l’adoptant, ce seroit récompenser l’in
gratitude, blesser la reconnoissance, et proscrire les con
ventions les plus légitimes.
( 4 )
F A I T S .
La dame D ejax, veuve Tartel, de la succession de la
quelle il s’agit, a été la bienfaitrice de toute sa famille.
Elle donna une somme de 3,000 fr. à Anne-Marie Dejax,
femme Peyronnet, lors de son contrat de mariage.
�( 5 )
¿ tff
Elle fit également un don de 6,000 fr. à Julien D ejax,
son neveu, appelant, lors de son mariage avec la demoi
selle Croze, du 20 novembre 1771. Ce sacrifice fut absolu
de sa part, et sans aucune réserve d’usufruit.
Le 9 décembre 1 7 7 1 , Agnes Dejax épousa le citoyen
Dalbine, et la dame Tartel lui fit donation de quelques
immeubles situés àFontanes, évalués à 5 ,000 francs, et
non d’un domaine, comme le prétend Dejax,- plus, d’une
somme de 2,000 fr. ; mais elle se réserva, pendant sa vie,
l’usufruit des objets donnés.
L e 19 juin 1778, la dame veuve Tartel fit donation à
Anne-Marie D albin e, sa petite-nièce, de six parties de
rente au principal de 4,000 fr.
L e 17 germinal an 2, elle fit donation du sixième de
ses biens à A n n e -M a rie , Joseph et Marie Dalbine, ses
petits neveu et nièces.
Le 6 messidor an 8, elle a fait un testament par lequel
elle a institué pour son héritière de la moitié de tous ses
biens, par préciput et avantage à ses autres héritiers de
droit, Agnès D ejax, femme Dalbine.
Telles sont les libéralités qu’a exercées cette femme
bienfaisante. Mais le citoyen Dejax conviendra lui-mème
qu’Agnès, sa sœur, méritoit quelque préférence, et devoit
obtenir la première place dans l'affection de sa tante.
Depuis longues années la dame Dalbine lui a rendu les
services les plus empressés et les plus généreux. La dame
Tartel, indépendamment des infirmités qui accompagnent
la vieillesse, étoit atteinte d’une cécité complète; sa nièce
ne l’a pas quittée, lui a prodigué ces tendres soins qui con
solent les malheureux et les dédommagent des privations.
Julien Dejax , au contraire, s’occupoit peu de sa tante
�(6)
pendant qu’elle a vécu ; il n y pense que depuis qu'elle
est morte ? parce qu’il est très-habile à succéder. Il lui
sera sans doute difficile d’attaquer des libéralités que les
lois autorisent : mais il fait l’énumération des ventes que
la dame Tartel a consenties 5 il est donc essentiel de les
rappeler.
L e 31 août 1791, le cit. Dalbine se rendit adjudicataire,
au ci-devant district de Brioude, de deux maisons natio
nales, moyennant la somme de 2,960 fr.; et l’adjudication
lui fut faite au nom de Marie Dejax, veuve Tartel.
L e 26 floréal an 2 , cette dernière subrogea Agnès
D e ja x , autorisée de son m a ri, à l'effet de ces deux adju
dications, à la charge par elle de payer 1,950 francs qui
étoient encore dûs à la nation ; de payer le montant d’un
devis qui avoit été donné pour quelques réparations; et
moyennant le remboursement qui fut fait de deux sommes
qui avoient déjà été payées par la dame Tartel; savoir,
celle de 1,221 fr. d’une part, versée à compte du prin
cipal ou intérêts dans la caisse du receveur, et celle de
1,200 fr. pour les réparations déjà faites.
L e 24 v e n d é m i a i r e an 5 , la dame veuve Tartel a vendu
à Robert Croze-Gizaguet, époux d’Anne-Marie Dalbine,
sa pciitc-nièee, un domaine appelé de Vazeliettes, l’a su
brogé à une vente nationale de partie d’un domaine appelé
le Poux, et lui a également cédé les meubles qui garnissoient ce domaine de Vazeliettes, dont l’inventaire est
annexé au contrat.
Cette vente est faite sous la réserve de l ’u sufruit de tous
les objets vendus et des bestiaux du domaine, moyennant
la somme de 25,000 fr. qu’elle reconnoît avoir reçue
comptant lors de lu vente,
�La dame veuve Tartel est décédée le i^r. vendémiaire
an 9 , c’est-à-dire, qu’elle a survécu quatre ans à la vente
par elle consentie au profit de Robert Crozc de Gizaguet.
Après son décès, les intimés espérèrent, pendant quel
que temps, que le cit. Dejax n’éleveroit aucune contesta
tion ; il sembloit se rendre justice : il nomma son arbitre,
fit estimer les fonds, et on procéda à l’inventaire du mobi
lier; cet inventaire fut écrit par son fils en sa présence.
Mais bientôt il changea d’opinion. Il éludoit toujours
les propositions qui lui étoient faites : la dame Dalbine
se vit contrainte de le faire citer pour procéder au par
tage des biens délaissés par la dame veuve Tartel.
C ’est alors que le cit. Dejax manifesta ses intentions
hostiles. Il demanda d’abord la nullité de la donation faite
par la tante commune, le 17 germinal an 2, du sixième
de tous ses biens au profit des enfans de la dame Dalbine,
sa nièce ; 20. il attaqua l’acte de subrogation de floréal
an 2 , au profit de la dame Dalbine ; 30. il conclut à la
nullité de la vente faite au profit du cit. Robert CrozeGizaguet, le 24 vendémiaire an 5 ; 40. il soutint la nul
lité du testament du 9 messidor an 8 , qui attribuoit â la
dame Dalbine la moitié des biens de sa tante, en prdeiput;
5 °. il prétendit que la dame Dalbine, épouse M ontbrizet,
devoit lui faire raison des arrérages d’une rente d’un setier
seigle, faisant moitié d’une rente de deux setiers par elle
perçue d’un nommé Poughon de Reillac, tant avant
qu’après le décès de la dame Tartel; 6°. il conclut h ce que
la dame Dalbine fût tenue de déposer, entre les mains de
tel notaire qui seroit commis, tous les titres, papiers et
docuinens de la succession, pour que chacune des parties
pût en prendre communication, ainsi qu’elle aviseroit.
�m
Il prétendit que la dame Dalbine devoit demeurer cau
tion de toute prescription qui auroit pu s’opérer depuis
le décès de la tante commune jusqu’au dépôt des titres
de créance ; il demanda qu'elle fût tenue de faire raison
de tous les arrérages de rente , baux à ferme, et géné
ralement de tout ce qu’elle peut avoir perçu des créances
dépendantes de la succession ; que tous les biens meubles
et immeubles , effets , créances , composant cette succes
sion , même ceux dont la dame Tartel avoit disposé
entre-vifs, en faveur de ses héritiers de d ro it, fussent
rapportés à la masse commune par les détenteurs, avec
restitution de jouissances et intérêts, depuis le décès de
la dame T a r te l, jusqu’au partage effectif.
Enfin il conclut subsidiairementdans le cas où tout
ou partie des actes attaqués ne seroit pas annullé, et que,
par l’effet de ceux conservés, ou de tout autre disposi
tion non contestée, plus de la moitié des biens de la
dame Tartel se trouveroit absorbée , il fût ordonné que
les dernières dispositions de la dame Tartel seroient re
tranchées jusqu’à due concurrence , de m a n iè re qu’il
restât toujours à diviser la moitié des biens meubles et
ijnmeubles composant cette succession.
Le eit, D e ja x , en expliquant ses prétentions, se fond o it , pour la nullité de la donation de germinal an 2 ,
du sixième des biens, i°. quant aux meubles, sur ce
que cette donation n’en contenoit pas l’é la t, quoiqu’il
11 y eût qu’une tradition feinte. Par rapport aux im
meubles , il prétendoit que la loi du 17 nivôse ne permeltoit pas la forme des donations entre-vils; et que la
dame Tartel ne pouvoit disposer du sixième de ses biens,
que
�(9)
que par donation pour cause de m ort, ou par testament.
La subrogation de floréal an 2, étoit suivant lui une
libéralité déguisée , faite au profit d’une successible. La
dame Tartel avoit éprouvé une lésion énorme, en ce qu’elle
avoit acquis dans un temps où les assignats perdoient peu
de leur valeur 5 tandis qu’ils étoient discrédités à l’époque
de la subrogation, en supposant même qu’elle en eût
reçu le remboursement, ainsi que cela a été dit dans l’acte.
Il prétendoit encore que cette maison avoit acquis une
grande valeur dans l’intervalle, par la démolition de plu
sieurs biltimeùs nationaux , qui auparavant embarrassoient ou obscurcissoient les avenues de la maison.
La vente du domaine de Vazeliettes étoit aussi une
donation déguisée, faite à vil prix au gendre d’une successible, à un homme dont la fortune ne lui permettoit
pas de payer 25 ,ooo fr. comptant. A l’entendre, cette
vente étoit faite sans nécessité, sans cause, sans emploi
du p rix , qui auroit dû se trouver dans sa succession ,
quatre ans après son décès.
Le testament du 6 messidor an 8 étoit encore n u l ,
parce que le notaire n’avoit pas indiqué pour quel dé
partement il étoit établi ; l’un des témoins n’avoit pas
signé son vrai nom ; ce même témoin étoit parent avec le
gendre de celle au profit de laquelle les dispositions étoient
faites ; enfin , on n’avoit pas suffisamment désigné le
huitième témoin , qui avoit été appelé à raison de la
cécité de la testatrice.
Le cit. Dejax, dans toutes ses demandes, a eu le désa
grément de ne pas trouver de son avis des cohéritiers qui
avoient le même intérêt. La dame veuve Pcyronnet a
B
�demandé acte de ce qu’elle consentoit au partage de ïa
succession de la dame veuve T arte!, conformément à son
testament ; 2°. de ce qu’elle n’entendoit point contester
la vente du domaine de Vazeliettes et dépendances, faite
au profit de Robert Croze-Gizaguet, ni aucune des do
nations partielles faites par la dame veuve Tartel.
Les petits-neveux, donataires du sixième, ont consenti
que la donation demeurât sans effet quant au mobilier ;
mais ont demandé son exécution, par rapport aux im
meubles.
L a dame Dalbine, de sa p a r t , a soutenu que la subro
gation faite à son p ro fit, le 27 floréal an 2 , n’étoit pas
du nombre des actes prohibés par la loi ; que toutes les
circonstances en prouvoient la sincérité ; que la loi ne
défendoit pas de ve n d re , et qu’elle validoit ce qu’elle
n’annulloit pas.
A l’égard du testament, le notaire avoit désigné le lieu
de sa résidence, qui est la ville de Brioude, et cette dé
signation étoit suffisante. 20. Les noms et prénoms de
Montbrizet-d’A uvernat, un des témoins, étoient expli
qués dans le testament. Dans tous les actes publics et
p riv é s, jamais ce témoin n’avoit signé d’autre nom que
celui de d’Auvernat. Ce témoin n’est pas parent de l’hé
ritière instituée. La parenté n’est pas une cause de prohi
bition. Et l’ordonnance de 1735 ne dit pas qu’on désignera
nominativement le huitième témoin, qui doit être appelé
pour cause de cécité.
La dame veuve Montbrizet , comme tutrice de ses
enfans, a observé, relativement à la vente du domaine
de Vazeliettes, qu’elle étoit consentie en faveur du mari
�d’une personne non successible. Elle a prouvé que la
prohibition rigoureuse de la loi ne s’étendo-it qu'à ceux
qui étoient appelés au partage de la succession. Son mari,
acquéreur , étoit d’ailleurs étranger à la dame Tartel :
les biens, quelle lui transmettoit, à titre de vente, passoient à tout autre famille que la sienne. Il est invrai
sem blable qu’elle l’eût préféré, si elle avoit eu des in
tentions libérales. Croze-Gizaguet trouvoit, dans sa for
tune , et dans son emploi de capitaine de gendarmerie,
des ressources suffisantes pour payer le montant de cette
acquisition: la dame Tartel avoit survécu quatre ans à
cette vente , et devoit naturellement en avoir employé
le prix à ses affaires ou à ses besoins, dans un age sur
tout où ils se font plus impérieusement sentir, et où les
infirmités augmentent nécessairement les dépenses.
Ces défenses si simples devoient faire présager à Julien
D ejax, quelle seroit l'issue des prétentions de ce collatéral
avide. L e jugement dont est appel « l’a débouté de
» sa demande en nullité, tant contre la subrogation à la
vente des deux maisons nationales, consentie par la
» dame Dejax, veuve Tartel, au profit de la dameDalbine,
» par acte du 26 iloréal an 2 , que de la demande en
» nullité de la vente du domaine de Vazeliettes, au profit
» de Robert Croze-Montbrizet, du 21 vendémiaire an 5 ,
i, et encore de celle intentée contre le testament de la
» dame Tartel, en date du 6 messidor an 8.
» Il est ordonné que les vente, subrogation et testa•» rnent sortiront leur plein et entier effet; il est donné
» acte aux parties de ce qu’elles s’en réfèrent A leur
» qualité d'héritiers, et offrent de rapporter tout ce qu’elles
B 2
�%j
( 12 )
,» tiennent à titre de libéralité particulière, et ce, de la
» môme manière qu’elles l’ont pris ou dû le recevoir. En
» conséquence il est dit que , par experts nommés par les
« parties ou pris et nommés d’office, il sera procédé au
» partage des biens meubles et immeubles provenans
» de la succession de la dame Tartel , pour en être
» délaissé à la dame Dalbine, héritière testamentaire,
» une moitié en cette qualité, et un tiers dans l’autre
» moitié comme successible ; le second tiers au cit. Dejax ;
>? et le dernier i\ la dame Dejax , veuve Pcyronnet ;
>) auquel partage chaque partie rapportera les jouissances
» perçues dans les immeubles, suivant l’estimation qui
» en sera faite par les experts, et les intérêts, revenus
» et autres objets dépendans de la succession, sauf tous
» les prélèveinens de droit que chacune d’elles aura droit
» de faire.
3) Il est ajouté que dans la moitié pour l’institution
» de la dame Dalbine, sont comprises toutes les facultés
» de disposer de la dame Tartel, faites depuis la publi» cation de la loi du 17 nivôse an 2 : en conséquence
« la disposition du sixième en faveur des enfans Dalbine
» demeure sans effet quant à présent; ils sont mis de
» leur consentement hors d’instance pour ce chef, sauf
» i\ se pourvoir contre leur mère ainsi qu’ils aviseront.
3) Il est ordonné q u e , dans le délai d’un mois à compter
» de la signification du jugement, le cit. Dejax sera tenu
» de faire faire inventaire du mobilier, papiers et titres
3) de créances laissés par la dame Tartel à l’époque de
t> son décès, si mieux il n’airue s’en rapporter h l’élat
3) qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera
3) censée faite le délai passé.
�éii&
( 13 )
» Il est encore ordonné que la dame Gizaguet sera
» tenue de rapporter le contrat de rente annuelle d’un
» septier seigle, qui fait partie intégrante de la succession
» de la dame T a rte l, et à en rendre compte suivant le
» prix des pancartes des années par elle perçues depuis
» l’ouverture de la succession , sauf au cit. Dejax de
» faire raison de ce qu’il a touché de la même rente.
» Sur le surplus des demandes respectives, les parties
» sont mises hors de jugement; e t, en cas d’appel, il est
» ordonné que tous les papiers et titres de créances
» dépendans de la succession de la dame Tartel, seront
» déposés ès mains du cit. Bellemont, notaire public de
» B rioude, désigné par les parties, et commis par le
» tribunal ; et le cit. Dejax est condamné aux dépens
» envers toutes les parties. »
Il est bon de connoître les motifs qui ont déterminé
ce jugement ; on verra qu’ils sont tous marqués au coin
de la sagesse, de l’équité et de la raison.
Eu ce qui touche la subrogation faite au profit de la
dame Dalbine , « il est dit que cette forme d’acte n’a
» point été interdite par la loi du 17 nivôse an 2 ; que
» le législateur , en interprétant dans ses décisions sur
» diverses questions relatives à ses efFets, a décidé que
j) ce qui n’étoit pas annullé par la loi étoit validé par
» elle.
» Qu’en anéantissant les ventes à fonds perdu entre
» successibles, la loi n’y a pas compris les autres transac» tions commerciales, contre lesquelles on n’invoque ni
» lésion ni défaut de payement ; que l’acte prouve que
» le prix dont il porte quittance a été compté, et que
�r' * ,
(
1 4 ) ......................................
» le surplus Ta également été, ainsi qu’il résulte des quit» tances rapportées. »
En ce qui concerne la vente du domaine de Vazeliettes,
faite au profit de Robert Groze de Gizaguet, on remarque
« que Robert Gizaguet n’étoit point dans la ligne de
» ceux sur qui frappe la prohibition des nouvelles lois,
» qu’il n’étoit ni successible ni me me époux de succcssible.
» On observe que la jurisprudence constante du tri» bunal de cassation, est de ne point ajouter à la rigueur
» des prohibitions des lois, mais au contraire de se ren» fermer dans le texte précis de ces prohibitions, sans
» les étendre.
» Les ventes pures et simples et a prix fixe ne sont
» pas interdites en faveur des successibles ; et quand
» bien même Robert Croze-Gizaguet eût été successible
» de la dame Tartel, la vente n’en seroit pas moins valide
» et inattaquable, tant qu’aux termes précis des lois on
» ne l’argueroit pas de fraude ou de lésion. Enfin il
» est d it, dans cet acte, que le prix en a été compté
» présentement i\ la dame Tartel ; et dès-lors on ne peut
élever aucun doute sur ce point de fait. »
Eu ce qui touche les nullités résultantes contre le tes
tament, « Attendu que la loi, sur l’organisation du nota» ria t, astreignant les notaires à indiquer le lieu de
» leur résidence et du département, n’a eu en vue que
» d’empêcher les fraudes qui pourroient être commises
» par des hommes qui usurperoient faussement la qua» lité de notaire, ou par des notaires même, recevant
» des actes hors de l’arrondissement pour lequel ils sont
» institués ; mais qu’un notaire, en indiquant le Heu de
�C 15 )
» sa résidence, fait connoître assez qu’il ne sort point
» des limites qui lui sont fixées, et satisfait suffisamment
» à ce que la loi lui impose; que s’il falloit annuller les
y> actes dans lesquels la désignation du département est
33 omise, ce seroit porter le trouble et la confusion dans
» la société.
» Attendu que d’Auvernat , l ’un des témoins, a été
» désigné par le notaire sous les noms et prénoms portés
>3 en son acte de naissance, de Jean-Baptiste Croze-Mont>3 brizet-d’A uvcrnat, et que par sa signature d’Auvernat
>3 il a suffisamment attesté sa présence audit acte.
33 Attendu que dans tous les actes généralement quel33 conques il ne signe que d’A u vern at, et qu’il n’est connu
33 dans le public que sous ce nom.
33 Attendu que sa pai-enté avec la fille et les petits33 enfans de l’héritière testamentaire ne dérive que du
33 lien d’affinité , ne suffit point pour annuller un acte
33 auquel il n’est appelé que comme témoin.
33 Attendu que la loi n’impose point aux notaires l’obli33 gation de désigner nominativement lequel des témoins
33 a été appelé en huitième par le motif de la cécité de la
33 testatrice, et qu’il suffit, aux termes de l’ordonnance
33 sur les testamens , que le nombre des témoins requis
3î soit constaté.
33 Attendu que le cit. Dejax ne demande point à être
33 admis à prouver le dol et la fraude dans les actes qu’il
33 attaque, ni que ces actes aient été l’effet de la sng» gestion ou de la violence.
» Attendu que les successibles ne peuvent cumuler
» les qualités de donataire et d’héritier.
�(
1
6
3
» Attendu que la faculté de disposer étant bornée à
» la moitié, par la loi de germinal an 8 , toutes les dis—
» positions qui excéderoient cette quotité doivent y être
» restreintes. »
Tels sont les motifs qui ont déterminé la décision des
premiers juges j ils sont certainement très-judicieux. Il
s’agit d’examiner si les objections du cit. Dejax, qui a eu
le courage d’interjeter appel de ce jugem ent, peuvent
balancer ces motifs , et faii’e annuller des conventions
légitimes.
1
D onation du 17 germinal an 2.
Le cit. Dejax d’abord pouvoit s’épargner une discus
sion oiseuse sur la validité ou la nullité de cette dona
tion du sixième, faite au profit des petits-neveux de la
dame Tartel. Le jugement dont est appel ordonne que
cette disposition demeurera sans effet, et la réunit à la
disposition de moitié, faite au profit de la dame Dalbine.
Mais s i , en thèse générale, on devoit examiner le
mérite de cette donation , il seroit aisé d’établir qu’elle
doit avoir son exécution, puisque les donataires ne sont
point successibles de la donatrice.
En effet, l’article X V I de la loi du 17 nivôse permet
de disposer du dixième de son bien en ligne directe, ou
du sixième en ligne collatérale, au profit d’autres que
des personnes appelées par la loi au partage des successio?is : donc, on ne peut tirer''cl’autre conséquence de
cet article, sinon que tous ceux qui ne sont point appelés
au partage sont susceptibles de recevoir la disposition de
cette quotité. Les argumens les plus simples sont les
meilleurs;
�*
é& r
C 17 )
meilleurs ; toutes les subtilités , tous' les raisonnemens
captieux disparoissent devant les termes de la l o i , qui n’a
exclu que ceux qui sont appelés directement au partage,
et ou ne doit point étendre les prohibitions.
On trouveroit encore la preuve, que le descendant du
successible, loin d’être exclu par la loi, est au contraire
capable de l’ecevoir. L ’article X X II lui permet de profiter
de la retenue, quoique son ascendant prenne part à la
même succession.
Loin de nous ces discussions inutiles sur l’incapacité
des enfans! Pourquoi rappeler cette maxime ancienne:
P a te r et filiu s un a eademque p eisona ? V o u d ro it-o n
faire concourir l’ancienne législation avec la nouvelle?
lorsque la loi veut qu’elles n’aient plus rien de commun
par la suite, ainsi que cela est dit textuellement par la
réponse à la question 47 de la loi du 22 ventôse an 2.
Si l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse a compris les
descendans du successible dans la prohibition des ventes
à fonds perdu , le motif en est assez expliqué dans la loi
du 22 ventôse. Ces ventes à fonds perdu , dit-on, sont
une source trop fréquente de libéralités indirectes. C’est
une exception qui confirme la règle. Ces sortes de vente
même ne sont annullées q u ’autant q u ’elles seroient sus
pectes ; elles peuvent être validées par le concours ou
le consentement des autres successibles. Mais précisément,
parce que la loi a compris dans cet article les descendans
du successible , qu’elle ne les a point nommés dans les précédens, on ne doit pas raisonner d’un cas ¡\ un autre ,
ni exclure d'oflice ceux que la loi n’a pas déclarés inca*
pables.
C
�.
c
i
8
)
Il
faut au surplus laisser au cit. Dejax le plaisir de
dire que cette donation est nulle pour le mobilier. L ’ar
ticle X V de l’ordonnance de 1731 le veut ainsi; les intimés
y ont consenti ; enfin cette donation n’a aucun effet par
rapport au cit. Dejax: pourquoi donc a-t-il pris tant de
peine, pour discuter un point qui n’est pas contesté,
et pour lequel il n’éprouve aucune perle ?
Subrogation du 17 Jloréal an 2.
Par cet acte, la dame veuve Tartel a subrogé la dame Dalbine sa nièce à une acquisition nationale. Le prix étoit
encore dû en majeure partie ; cette subrogation n’est faite
qu’à la cliarge de verser dans la caisse du district tout
ce qui n’a pas été payé; elle est faite sans aucune garantie ;
les sommes que la dame veuve Tartel avoit payées sont
infiniment modiques; et il faut avoir une grande manie
du procès pour attaquer une subrogation qui présente
aussi peu d’importance. Cependant, le cit. Dejax épuise
les autorités , se livre à une intempérie de citations pour
prouver la simulation de cet acte; il met à contribution
les lois et les auteurs , dans une matière où il y a peu
de décisions certaines, et où tout dépend des circons
tances ou des présomptions.
L e savant Ricard , dans son traité des donations, pre
mière partie, cliap. III, sect. X V I , nomb. 767, dit bien
qu’une vente étant passée entre personnes qui sont prohi
bées de se d onner, peut être prise pour un avantage
indirect, et que des présomptions violentes pourroient
quelquefois suffire : comme si le donateur venoit à décéder
�C *9 )
bienfôt après une semblable vente simulée , et que le
prix fût considérable , sans qu’il se trouvât dans sa mai
son aucune somme proportionnée aux deniers qu’il dé
tro it avoir reçus, et que d’ailleurs il ne parût pas qu’il
en eût fait aucun emploi dans ses affaires; avec quoi
qu’autre conjecture résultante du fait particulier. Ricard,
comme on le voit, ne se décide pas légèrement à prononcer
la nullité d’un contrat de vente. La présomption la plus
forte suivant lu i, c’est lorsque le vendeur décède bien
tôt après : on peut alors supposer aisément que ce ven
deur , mortellement atteint, cherche à transmettre ses
propriétés , à titre gratuit, à celui qu’il préfère ou qu’il
affectionne le plus. Tel est le malheureux effet des lois
prohibitives, qu’on cherche toujours à les éluder, surtout
dans ces derniers momens. M ais, il n’est pas dans la na
ture qu’on cherche à se dépouiller , lorsqu’on a l’es
poir de jouir encore : on préfère souvent un héritier à
tout autre, rarement on le préfère à soi-même; et, parmi
nous, les donations entre-vifs deviennent infiniment rares.
Et peut-on ici argumenter de présomptions, de fraude
ou de simulation , lorsqu’on voit que la dame veuve
Tartel a subrogé en l’an a , et n’est décédée qu’en l’an 95
lorsqu’il est établi, que le prix, ou au moins la majeure
partie de la subrogation, étoit encore dû par l’adjudica
taire; qu’il a été payé à la caisse nationale par la subro
gée? Alors, sans doute, doivent disparoître toutes ces
conjectures , tous ces moyens banaux de simulation ,
qu’on voudroit faire résulter de la loi N u d a , ou de l’au
torité de Papon , q u i , même sur la loi Sulpicius , nç
passe pas pour avoir toujours dit la vérité.
G a
�L e célèbre Gochin plaidoit sans doute pour un homme
qui comme Dejax ne revoit que simulations; et le plai
doyer d’un orateur fameux peut donner de grandes leçons,
et apprendi’e à bien discuter; mais on ne doit pas le citer
comme un ouvrage doctrinal.
D ’ailleurs si la loi du 17 nivôse a défendu de donner,
elle n’a point défendu de vendre; et le législateur veut
bien nous apprendre lui-même que la loi valide ce qu’elle
n'annulle pas.
Vente du 24 vendémiaire an
5 , au profit du cit. Gizoguet.
Cette vente est faite en l’an 5 au profit d’un étranger
à la venderesse ; mais cet acquéreur étoit le gendre de
la dame Dalbine \ et comme il est dans le système de
Dejax d’étendre les prohibitions, il veut les porter à
l’infini : quoique l’objet vendu passât à une famille étran
gère à la dame Tartel, qu’il appartînt aux héritiers Montbrizet plutôt qu’aux héritiers Dalbine, cependant Dejax
veut encore que cette vente soit simulée.
L e tribunal de cassation n’a pas pensé comme le cit.
D ejax, lors d’un jugement du 6 prairial an 10, qui a
confirmé une vente à fonds perdu , faite à l’ascendant
d’un successible. Samuel Dalau avoit vendu tous ses biens
à Marie Bonnau, veuve Dalau, sa belle-sœur, moyennant
une rente viagère. Samuel Dalau n’avoit point d’enfant,
et les cnfans de Marie Bonnau, ses neveux, étoient du
nombre de ses successibles. Les autres héritiers attaquoient
cette vente de nullité; ils se fondoient sur la disposition
de l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse; ils rappeloient
�¿ iï/
( 2ï )
toutes les autorités qu’invoque le cit. Dejax, et ne inanquoient pas de dire que les arrêts avoient toujours confondu
le père avec le fils, d’après la maxime : P a ter et filiu s
una eademque persona. Le tribunal d’appel de Poitiers,
sans égard pour cette maxime , avoit validé la vente :
pourvoi en cassation; et, comme le tribunal de cassation
apprend qu’on doit restreindre les lois prohibitives, il
est à propos de rappeler les motifs qui l’ont déterminé
à l’ejeter le pourvoi.
« Considérant que l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse
» an 2 , est prohibitif, et ne peut par conséquent s’éten» dre d’un cas à un autre.
» Considérant qu’il ne comprend que les successibles
» et leurs descendans, et que s’il y a quelques inconvé.» niens de ne l’avoir pas étendu, soit aux descendans,
» soit à l’époux en communauté avec le successible, ou
» avec les descendans du successible, il y en auroit encore
» davantage, à créer, sous le prétexte d’analogie, des
» prohibitions que la loi n’a pas établies.
» Considérant que créer ces nouvelles prohibitions, ce
» seroit ( quelque justes qu’elles puissent être ) entre» prendre sur l’autorité législative ; ce qui, dans l’espèce,
.» seroit d’autant moins pardonnable, qu’il n y avoit pas
» de question plus controversée avant la loi du 17 nivôse,
» que celle de l’étendue des prohibitions : d’où il suit que
» c’est en connoissance de cause que les législateurs l’ont
» restreinte expressément aux successibles et à leurs des-•» ccndans.
*■ » Considérant enfin qu’il ne peut pas y avoir ouverture
■
x> à cassation d’un jugement auquel on ne peut faire d’autre
�( 22 )
» reproche que d’être conforme à la lettre de la lo i, etc.
Tels sont les véritables principes en matière de prohi
bition. Cette décision de l’autorité normale doit servir
de règle invariable en cette matière. Il en résulte que
Robert Croze- Gizaguet n'étoit pas personne prohibée,
quoiqu'il fût l’époux de la descendante du successible;
qu’il pouvoit traiter, acquérir delà dame veuve Tartel:
e t , en écartant aussi victorieusement la prohibition , on
fait disparoître toute idée de simulation ou de déguise
ment du contrat.
Les conventions doivent être généralement exécutées:
tous les efforts des tribunaux doivent tendre à valider
les actes plutôt qu’à les annuller, Ut potiùs actus valeat,
quàm ut pereat. Nulle présomption de fraude dans la
vente dont il s’agit: celle qui a si fortement touché Ricard,
la mort prochaine du vendeur, ne se rencontre pas dans
l’espèce particulière , puisque la dame Tartel a survécu
quatre ans à cette vente. Et s’il falloit annuller tous les
contrats qui portent quittance, il faut convenir qu’il n y
auroit plus rien de solide ni de certain parmi les hommes.
Dans les mutations actuelles, presque toujours les con
trats portent quittance, quand bien même le prix ne
seroit pas entièrement payé. On y supplée par des effets
ou des reconnoissauces particulières, pour éviter de plus
grands droits.
Ici le prix principal n’est pas exorbitant, et ne choque
en aucune manière la vraisemblance. D e quel droit le
cit. D ij ax voudroit-il scruter la solvabilité ou les res
sources du cit. Gizaguet ? JN'est-il pas notoire cp.i'il apparterioit à une famille riche, qu'il avoit uti patrimoine con-
�e*s)
sidérable, un emploi dont les appointemens étaient de
3,000 francs par année? ne sont-ce pas là des ressources
suffisantes pour payer une somme de 2Ô,ooo francs? pourroit-on , sur des prétextes aussi légers, dépouiller une
famille , des orphelins, d’un bien légitimement acquis ?
quiconque oseroit le penser , n’auroit aucune idée des
principes du droit et de l’équité.
L e cit. Dejax , dans son aveuglement, va jusqu’à cri
tiquer les intentions libérales et bienfaisantes de la dame
Tartel; il rappelle avec affectation ses dispositions anté
rieures et subséquentes : pourquoi a - t - i l oublié celles
dont il a été l’objet, et dont il étoit si peu d ig n e, puis
qu’il attaque la mémoire de sa bienfaitrice ? N ’a-t-il pas
reçu d’e lle , en se mariant, une somme de 6,000 francs,
avec tradition réelle ? tandis que les libéralités faites aux
autres ont toujours été grevées de l’usufruit envers la
donatrice.
Pourquoi n’a-t-il pas dit qu’il étoit donataire universel
de deux de ses oncles, qu’il a profité exclusivement de
leui’s dépouilles, et que la dame Dalbine , sa sœ ur, en
a été privée ; que par ces donations il a trouvé le moyen
de réunir, en majeure partie , les biens de Julien, son
oncle, premier du nom? Il a craint sans doute de justes
reproches d’avidité, lorsqu’il se montre aussi jaloux de
ce que sa sœur a reçu la récompense des soins les plus
tendres et les pins assidus. Dans son humeur inquiète,
il va jusqu’à reprocher les quittances et la décharge que
la dame veuve Tartel a données à sa nièce pour la gestion
de ses biens ou la perception de ses revenus. Mais la darne
Tartel devoit-elle quelque chose sur ses revenus au cit.
�(*4 )
Dejax ? n’étoit-elle pas au moins la maîtresse d’en dis-’
poser à son gré? Si la dame Dalbine a pris la précau
tion de se faire donner une décharge, c’est qu’elle avoit
la procuration de sa tante, et qu’elle devoit craindre ,
avec raison, que son frère lui demandât compte de son!
mandat ; mais on ne voit rien là que de très-ordinaire.
La dame Tarte! a pu dissiper ses revenus comme ses capi
taux , sans que personne eût le droit de critiquer sa con
duite; elle en a fait tel emploi que bon lui a semblé; et*
ce n’est pas la première fois que des collatéraux avides
ont été trompés dans l’espoir qu’ils avoient de trouver
des capitaux ou des deniers à la mort de celui dont ils
convoitoient la succession.
La coutume de Normandie ne les leur a pas fait rendre;
et l’article C C C C X X X IV , qui a servi de base à un jugement
du tribunal d’appel de R o u e n , rapporté au mémoire
du cit. Dejax , ne reçoit aucune application à une suc
cession ouverte en droit écrit.
Testament du
6
messidor an 8.
Le notaire qui a reçu ce testament , en désignant la.
ville de Brioude, a-t-il dû désigner le département dans
lequel il étoit domicilié? A-t-il dû faire mention du nu
méro de sa patente? Ou défie le cit. Dejax de citer
aucune loi qui oblige, à peine de nullité, les notaires
d j désigner leur département ou le numéro de la pa
tente: ils n'ont même jamais pratiqué cet usage, lorsqu’ils
reçoivent dans les villes de leur résidence, et pour des
personnes qui y sont domiciliées. La désignation du dé
partement
�c »5 r
partement ne seroit utile qu’autant qu’on recevroit un
acte pour un tiers étranger au département .dans lequel
il transige ou fait un te s ta m e n t, parce qu’il peut y .avoir
des formes ou des règles différentes de tester d’un dé
partement à l’autre : mais, dans ¡l’espèce, cette mention
n ’avoit aucun but; et, comme l’ont observé les premiers
juges, la désignation de la résidence á Brioude étoit sans
contredit suffisante. Les huissiers seuls saut astreints par
les lois à rappeler le numéro de leur patente : les no
taires auro'ent dû être dispensés d’en prendre ; et la
nouvelle loi qui organise Je notariat, les en dispense
expressément
L e témoin jMontbrizet d’A uvernat, en signant sim
plement siuvem aty ne i ’a iait que d*après l’usage cons
tant où il est de signer ainsi ; c’est .ainsi iqu’il a signé le
contrat de mariage de son frère; c’est ainsi qu'il a signétous les actes publics ou iprivés, depuis iqu’il a ^exercice
de ses droits ; et îles 'intimés rapportent un acte de no
toriété qui le constate,»etiqui apprend même qu’il n’est
pas connu ni ¡désigné sous d’autre nom.
O n a satisfait à tout ce qu’exige la loi qui veut qu’on
prenne le nom de sa famille, en rappelant dans les qua
lités 'des témoins le prénom »et 'le noni de la famille du
témoin d'Auvernat.
La parenté de ce témoin avec Robert Groze-Gizaguet,
époux de la petite-nièce délia testatrice, n’ast point une
incapacité:'Fur-gtile, des=testamens, chapitre III, section;
I I, nombre <10,' nous'donne^en/pvincipe jque les parons
collatéraux'peuvent être-témoins aux teslamens'de leurs
parens,*et qu'on'doit dirç la même>chose d(;s parens de
D
�( 2 6 )
l’héritier ; car le paragraphe X , aux instituts, de tcstam.
ordin. n’exclut du témoignage le père et les frères de l’hé
ritier, qu’autant qu’il est en la puissance de son père,
et que ses frères sont aussi en la puissance de leur père
commun; à plus forte raison le parent du parent de l’hé
ritière peut-il être témoin dans un testament.
L e cit. Dejax n’insiste pas fortement sur ces singuliers
moyens de nullité ; mais il se plaint de ce qu’en sup
posant ce testament valable, les premiers juges n’ont pas
compris dans la disposition de moitié toutes les dispo
sitions faites antérieurement à la loi du 17 nivôse. C’est
une erreur de sa part; et les premiers juges ont sage
ment restreint cette confusion aux dispositions faites de
puis la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
Point de doute d’abord pour les objets vendus, qui
sont hors de la succession du testateur; et il doit en être
de même pour les donations entre-vifs faites dans un
temps utile , parce qu’une donation a le même effet
qu’une vente ; elle dépouille le donateur, dès l’instant
même : les objets anciennement donnés ne peuvent faire
partie d’une succession ouverte sous l’empire des lois
nouvelles.
L e cit. Dejax a la prétention d’intéresser le public dans
la décision de cette cause. On ne voit pas trop comment
l’ordre public seroit troublé, parce que le cit. Dejax
n’auroit pas une portion égale dans la succession de sa
tante. Mais la société seroit bouleversée, si les 'conven
tions des hommes pouvoient être anéanties sous des
prétextes futiles; si des ventes ou des mutations qu’il im
porte de faciliter et d’assurer, pouvoient être annullées
�6r S
(2 7 )
par des chimères ou des allégations de fraude. Ce seroit
porter atteinte au droit de propriété, au droit le plus cher
à l’homme, de dispenser ses bienfaits, de récompenser le
mérite ou de protéger la foiblesse, si on s’écartoit jamais
du respect qu’on doit avoir pour les volontés du défunt.
L e code civil nous rappelle sagement à des idées plus
saines, à des principes plus sages, en rendant aux testa
mens toute leur ancienne faveur. Aujourd’hui nous pou
vons répéter cette maxime des Romains : Quidquid legass i t ita lex esto !
P A G E S ( de Riom ) anc. jurisc.
V A Z E I L L E , avoué,
Ç & ÏU ,U. &
J i
^
V
^
A*
n
‘------- ~ * '
<U ~»
A RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — An 11.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Agnès. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès (de Riom)
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Dame Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal d'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, tant en son nom que comme tutrice de ses enfans tous intimés : Contre Julien Dejax, homme de loi, habitant de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au tribunal de cette même ville, le 6 messidor an 10.
Annotations manuscrites : « 8 prairial an 11, jugement du tribunal d'appel, déclare la vente du 24 vendémiaire an 5, nulle, en l'assimilant aux ventes à fond perdus, prohibés par l'article 26 de la loi du 17 nivôse an 2. recueil manuscrit, page 738. »
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1771-An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0932
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0716
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53093/BCU_Factums_G0932.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53092/BCU_Factums_G0931.pdf
07705c8bb6750aa819b06d59728dd19e
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Text
MÉMOIRE
P O U R
J u l ie n D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
C O N T R E
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son m a ri, juge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de B riou d e;
D A L B IN E , M a r i e D A L B I N E , fille majeure
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-G izaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit PlERRE D A L B IN E , et de ladite
D E J A X , son épouse ;
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans m ineurs, et dudit
Montbrizet-Gi zaguet ;
Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la l o i , pour éluder la
prohibition de la lo i, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lo is, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? T elle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�C2 )
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame D albine, tous l’effet d’un plan cons
tamment su iv i, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfuns; savoir, Ju lien , V ita lt
Antoine prem ier, Antoine second du n om , et A n n eM aric D ejax, première du nom.
Julien , V ita l, et Antoine prem ier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
A nne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
T a rtel; elle a survécu à son m ari, et vient elle-m êm e
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
Antoine D ejax, second du nom , s’est marié avec M arieThérèse Delchier.
D e ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
^
Julien D ejax, appelant;
Anne-Marie D ejax, seconde du nom , veuve Peyronnet ;
E t Agnès D e ja x , épouse du citoyen D albine, juge.
Celle-ci a e u , de son mariage avec ledit D albine, trois
enfans; A n n e -M a rie , qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et M arie Dalbine.,
Telle est la généalogie des parties.
�(3)
Anne-M arie D ejax, première du nom , veuve T artel,
n’avoit point eu d’cnfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien , V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom , l’avoient prédécédéc. Antoine, second du
nom , laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les hé
ritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’A ntoine, second du nom, il n’en
restoit que tro is, par le décès de Vital-François.
Anne - Marie Dejax , seconde du n o m , s’est mariée
en 1770 , avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
m ariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien D ejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de 'sa p a rt, même de ses f a i t s et pro
m esses, et entièrement aux risques, périls et fo rtu n e
du donataire.
Là s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
Il n’en a pas été de même pour la dame Dalbine.
Par son contrat de mariage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit -, elle lui a donné, en o u tre , une
somme de 2,000 f r . , payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
L e 19 novembre 1 7 7 8 , elle dispose en faveur de
A 2
�(
4
)
Anne-M arie D alb in e, sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. L a donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à. portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géra et administra à son gré -, elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
O n va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit.
Les actes vont se succéder.
i r novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
q u e , si les quittances en avoient été fournies par la dame
D a lb in e, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-m êm e, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vu e; de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novem bre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame D albine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée de
Yusage de la vue ; se réservant, est-il ajouté, la constituante, de toucher et recevoir elle-même les sommes qu i
seront payées par ses débiteurs, de manière que la darne
�ékf
(
5 )
D albine sera censée rî’avoir absolument rien reçu on
vertu des présentes j et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 ; la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixièm e,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
L e 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. L a donation fut évaluée à
une somme de 11,600 f r ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la m inute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
L e 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lu i aboient été. adjugées moyennant
�(
6
)
la somme de 2,950 J r . , mais auxquelles elle avait fa it
des réparations considérables, pour, par la dame JDalb in e, jo u ir d'¿celles dajis l’état où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,22 i f .
par elle déjà payée à la nation, et à la charge de payer à
la nation le restant de Vadjudication. L e contrat ne man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r . ,
qui de voit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220f r .
Ce 11’étoit point assez. 21 vendém aireancinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-M ontbrizet-G izaguet, mari d’AnneMarie Dalbino.
Par cet acte, il est dit que la dam eD ejax, veuve Tartet,
a fait vente à M ontbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-d evan t religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé par la nation; 30. de
tous les meubles, outils aratoires, et généralement de tous'
les meubles étant au pouvoir du m étayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître du
domaine de Vazeliettes , sous la réserve de Iusufruit
de tous les objets vendus. L a vente est faite moyennant la
somme de 25 ,000 francs , dont le con trat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et lus capitaux des remboursernens qui étoient
faits par les débiteurs.
�ÙJ.Y
(7)
6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la nièce, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c ’est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so m m es, tant en p rin cip a u x,
intérêts que f r a i s , ain si, e st-il ajouté , que le montant
du p rix de la vente de azehettes par elle consentie au
profit de défunt G iza g u et, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé ¿1 son gré, soit à payer partie de ses
dettes contractées, ou à Ventretien de sa maison ou
autrem ent, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insujfisans pour fo u r n ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
E nfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8 , par
lequ el, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame D albine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
»
Elle est décédée le 4 vendémiaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-diie, dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. E lle a
fait citer à ces fins le cit. D ejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
L e cit. D ejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
+»t)
�( 8 ) '
i g messidor de la même année, la dame Dalbine et son
m ari, les enfans D albine, c’est-à-dire, Marie D alb in e,
Pierre Dalbine et A n n e-M arie D alb in e, veuve M ontbrizet-Gizaguet;
Savoir : la dame Dalbine et son m ari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
'lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, P ie rre , et Anne-M arie D albine, veuve Gizagu e t, enfans dudit D albin e, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
E t encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germinal an 5, du domaine et métairie de Vazeliettes
et du P o u x, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été statué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�( 9 )
Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D e ja x , et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Vazeliettes et le P o u x , et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en Être délaissé à
la dame D albine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D e ja x , veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, x’evenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : D a n s la
m o i t i é your Îinstitution de la dame D a lb in e , sont com
prises toutes les facultés de disposer de la défunte,fa ite s
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2 ; en con
séquence la disposition du sixièm e, en fa v eu r des enfans
D a lb in e, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( 10 )
consentement les avons m is, sur ce c h e f , hors d'instance,
s a u f ii se pourvoir contre leur m ère, ainsi q u ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’ un m ois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du m obilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. L e jugement ordonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante de la succession de la défunte, et de rendre compte,
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belm ont, notaire.
Condamne le citoyen Dejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
L e citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes r
i° . L a donation faite, en faveur des enfans D albine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation, du 17 floréal an 2, à l’acqui
sition des deux maisons nationales ;
30. L a vente du 21 vendémiaii*c an 5 , consentie aij
citoyen Montbrizct-Gizaguet ;
�C ^ }
E t enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte de démontrer la négative.
D onation du 17 germinal an 2.
- Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d’état. Les enfans D albinel’ont reconnu eux-mêmes;
ils ont déclaré qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an -2, qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
O n a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine ; mais
on s’est abusé.
- L ’art. X V I p orte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l ’avenir à la faculté de
disposer, au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage des successions; savoir, du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux; et du d ixièm e,
-si l’on a des 'héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendre la lo i, que de penser
qu’elle a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu?après avoir défendu d’avantager directement les suctessibles, elle a permis de îles avantager indirectement.
Ce seroit prêter u n e ‘absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que le successible v it , ses en
fans ne sont point en ordre ide >succéder ; il leur fait
B a
�(12) t
obstacle. Mais il est-certain aussi, que le père et le fils
ne sont censés, en droit, faire qu’une seule et même per
sonne. P a te r et filius una eademque persona.
L a lo i, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. O r , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
renfermer un avantage indirect?
L a coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens parapliernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres et q u i le m ari puisse ou doiçe
succéder ; parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donner indirectement ce qu’on ne
peut directement.
E t, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit com mun, et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rappoi’ter à la succession ce qui avoit été donné au petitfils-, et, respectivement, le petit-fils ce qui avoit été donné
au père?
L a loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
aulorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite h retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixièm e, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�( i3 )
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
L ’article X X I porte que si le donataire ou héritier
institué est en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
E t l’article X X II porte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r , auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaii’e?
L ’article X X V I défend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif; et
il est ajouté, ou à ses descendans. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
Dira-t-on que la loi ayant pai*lé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant riz pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( 14 )
sion. Enfin, la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre scs puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 1 7 'nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’un des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition,
comme faite indirectement au profit de l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée n u lle , d’abord ren
première instance, au tribunal d’arrondissement'de cette
com mune, et ensuite sur l’appel'en ce tribunal.
Subrogation <du i j jîo r c a l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na
tionales, n’est évidemment qu’une donation déguisée sous
le nom de vente.
Ce^n’est pas sans doute jpar la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger'de la nature de l’acte., mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être'contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, 'et consacré par les lois.
Parmi les diilerens textes de lois, on'peut citer'la-loi
Sufpitius , au digeste, D e dohationibus inter virum et
ujcorem, et'la loi Nudâ>, au cod. <De mntrahenda emptione.
�¿i/
( i5 )
P a p ó n , sur la loi S ulp itius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à cliose que la loi ne perm et, l’on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et jugé
a qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’uñ de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner, fa it, par testament ou contrat entre-vifs,
« confession que l’autre lui a p rê té , ou employé à ses
« affaires, ou d é liv ré , ou remis en ses mains certaine
.« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
k fait tel p rê t, ou remis, employé, ou délivré la somme.
« L a simulation, dit le même auteur dans un autre
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat , chose dont
«x. néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap« parence pour le contrat passé entre les parties. U n
v homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r i x , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
«f si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera n u lle , comme le dit Ulpien. »
E t Papon cite ladite loi Nudâ.
« ’ Quoique les parties, dit R icard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 1 5 }
cc un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
ea provoquent la nullité.
A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer :Dans un acte
devant notaires il faut, d it-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
p u b lic, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport ;'i l’officier public.
E t de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, P lu s valcre quod agitur, quiim quod simulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’en
détermine pas toujours la nature; si, malgré la dénomina
tion
�6o ï
C 17 ) f
tion que les parties lui ont donnée, on peut l’arguer de
simulation et de fraud e, comment s’établit maintenant
cette simulation et cette fraude ?
Par les circonstances.
Fraus ex circonstantiis probari potest, dit Dumoulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F r a u s , dit énergiquement d’A rgentré, sur l’article
C C X G V I de la coutume de Bretagne , probatur conjectu ris antecedentibus , consequentibus et adjimctis.
F a lsissim u m , ajoute-t-il ,q u o d quidam putaverunt non
n isi instrumentis probari posse ’ fa c ta enim extrinsecùs
fra u d em potiüs probant, quia nemo tam supinus e s t ,
ut scT'ibi patiatur quœ fra u d u len terfa cit.
L a fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. D e là vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
. Citerons-nous encore Denizard. Les donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 1 7 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile : aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect; au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mêmes auteurs, les principales
cii’constances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La prem ière, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas persoîiasfacile prœsumitur.
C
�(
18)
■La seconde , la non-nécessité de ven d re, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
L a troisième, si les actes sont gém inés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
cei'titude.
En un m ot, comme dit d’A rg en tré , dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les cii'constances antécédentes et
subséquentes.
L a parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r i x , tout se rencontre ici. L e notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
nantes , on ajoute les circonstances cmtécédentes et subsé
quentes ; si l’on ju g e , pour rappeler les expressions de
d’A rgen tré, ex adjim ctù, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
L a dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et dè l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
pt interdit toutes donations, à charge de rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou à ses descen-
�( *9 )
dans; et de ce que cet article neparle que des ventes à fonds
perdu , la dame Dalbine et son mari n’ont pas manqué
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire, autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la m axim e, Inclusio unius est exclusio alterius.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55 e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’annulle pas ; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55 e. question :
« À ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion , et
« sans aucun des vices q u i pourroient amiullcr le
« contrat. »
Fixons-nous,sur,ces dernières expressions.
O n voit qu’on n’a pas même osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes sim u
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. L e doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
.des ventes faites de bonne f o i, et non en fraude ; des
•ventes sincères, et non des ventes simulées. O n voit
m êm e, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
a Sur la cinquante-cinquième question, ÎJue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
C 2
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commer
ce ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion , ni
« défaut de payement. »
Q u’induire de là ? L a question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
a un héritier présom ptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom ,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée?
Cette question est sans doute bien différente.
,
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeliettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de a 5 ,ooo francs,
numéraire m étallique, laquelle som m e, e s t- il dit, la
vendercsse reconnoît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 2Ô,ooo francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? E t si cette somme avoit été
payée com ptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves
tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son arm oire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
Memqfcirconslances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix ; point d’attestation de
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
M ais, de plus, réserve de la part delà venderesse de l’usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, trèsordinaire'au contraii’e dans les donations; réserve qui
seule s u f f i r o i t pour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l ’article X X V I de la loi du 17 nivôse. .
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds p erd u , pi’ohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement des
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame D albine, du domaine de Fontanes, domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-M arie D alb in e,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2 , procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
L a loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? E lle inter
pose ses enfans.
D onation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�alors disponible, envers les non successibles, c’est-à-dire,
du sixième.
L a quotité disponible, o u , pour mieux d ire, qu’elle
croyoit disponible , étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveu gle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été p ayée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seraient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendémiaire an 5 .
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame D albine ait fo u r n i quittance au x
débiteurs, c'est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes som m es, tant en p rincipaux, in
térêts que fr a is .
E t il est ajouté, ainsi que le montant du p rix de la
vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x .
Pourquoi cette dernière mention ? Q u’étoit-il besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la ven te? N ’étoit-ce pas elle-m êm e
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�C 23 )
Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre com ptable, des sommes par elle reçues et quit
tancées; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’a ch è v e-t-il pas de décéler
la fraude ?
.. Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa m aison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa v ie , même du
domaine vendu; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
E n fin , testament du 9 messidor an 8 , qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
. O n a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
L a l o i , a-t-on d it , ne défend que les ventes à fonds
perdu, faites à des successibles. O r, i c i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu; e t, d’un autre c ô té , n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger à la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa,
succession.
L a donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme ? Ne profite-t-elle pas aux enfans communs ? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner1ù la femme et aux enfans ? L a
�(H )
loi ne défen d-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement, et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la cii'constance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au m ari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
A utre jugement du tribunal d’appel séant à R ouen ,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
V oici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« D eux questions ont été posées :
«
«
«
«
te
te
te
« La première consistoit à savoir quelles sont les conditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
fait par un père, à l’un de scs enfans ou de ses gendres.
« L a seconde avoit pour objet de reconnoitre si L e inonnier, acquéreur, avoit rempli les conditions nécessaires pour la validité de son acquisition.
« L e tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la prê
mière de ces questions , que les principes et la juris
prudence, fondés sur l’art. C C C G X X X IV de la coû
tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( 25 3
r ticle IX de la loi du 17 nivôse an 2, se réunissent pour
« établix* qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
« père à l’un de ses 'enfans, n’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le juste prix de
« la chose acquise, et qu’il justiiioit de l’emploi des dea niers de la vente, au profit du vendeur.
« E t sur la seconde question, il lui a paru que L e « monnier n’avoit point rempli les conditions requises
c< pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
« sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point une preuve
« de l’emploi des deniers, en faveur du ven d eu r, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par D um oulin , en ces tex-mes :
ce Conclusum quod in venditionefactâ filio velgenero,
« conjessio patris non valet de recepto , etiam si nota« rius dicat pretium receptum coram se*
cc D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’E u re, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réformé ; et le contrat de v en te , passé par le défunt
« Hermier à Lem onnier, son gendx’e , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testam ent du 9 messidor an 8.
U n premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour que^ département il étoit
établi! Titre I er. sect. I I , art. X II de la loi de 1771.
U,ne seconde nullité, de,ce qu’il n’a pas désigné le ü °.
dç la patente. L o i sur les patentes.
D
�(26)
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse , c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surn om , et non par son vrai nom.
“ L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r ,
celui qui ne signe pas son vi’ai nom ne signe véritable
ment pas!
j
L e nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement A uvernat ■il
devoit signer Croze.
^ Un décret de l’assômblée constituante, du 19 juin 1790,
art. I l , porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille,
t A utre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X V I I I ,
p o rte , qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera quedeur nom patronimique, c’està-d ire, ' de baptêm e, et celui de la fam ille, et leui's fonc
tions ou professions.
-* 6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter dç nom ni de prénom , que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécu tif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�C 27 )
'
On citera l’ordonnancé de Henri I I , de 1 5 5 5 , q u i a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à -peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citei’a l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article C G X I, qui porte les mêmes dispositions.
E t, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
m êm e, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de fam ille, après avoir déclaré son prénom '.Ego
J o a n n es.................... testamentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. S in gulos testes, dit cette lo i, q u i testarnento adhibenturproprio chirographo annotare con çen it, quis, et cujus testamentum signaçerit. Il faut que, par Vacte m êm e, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le tém oin, quel
est ce témoin. U n surnom peut être commun h plusieurs.
L e nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne. signe pas par son n o m , est comme s’il ne
signoit pas.
L e testament est donc nul; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
Dans tous les cas, le testament ne. pourroit ' avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( 2 8 ) .................................
seulement qu’elle n’en auroit pas "disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D a n s la m oitié, est-il d it,
pour Vinstitution de la dame D a lb in e , sont comprises
toutes les fa cu ltés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ite s depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. O n ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2 ,
ou, pour mieux dire, à celle dü 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible; et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi ilfau d roit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible , et la donation du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à Anne-M arie Dalbine; en tant du moins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyronnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
L e jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
O n voit combien cette cause est importante. Elle n ’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt Îe
succès qu’elle attend ,'il n’y aüroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. Les fraudes, déjà trop
communes, se multi£lieroient; la loi seroit sans objet; la
�. ( 29 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a -t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreraient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G È S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L A N D R I O T , seul imprimeur du
T ribun al d’appel. — A n 11.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; Contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; Et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1770-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0931
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0716
BCU_Factums_G0932
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53092/BCU_Factums_G0931.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53090/BCU_Factums_G0929.pdf
6bab344525622622d6ab028929bd090d
PDF Text
Text
M E M O I R E
e n r é p o n s e
POUR
<
B O Y E R , Juge au Tribunal civil de
l'arrondissement de Clermont - Ferrand , chef - lieu du
département du Puy-de-Dôme , demandeur en cassation ;
P i e r r e
C o n tre
Jean - B a p tiste - C e z a r
CHAMPFLOUR-
D’ALAGNAT.
Q u o i q u e l ’ingratitude soit un vice monstrueux et détestable
et qu'il passe pour un crime qui porte en soi l ’opprobre de tous les
crimes } elle était néanmoins impunie parmi les anciens 3 qui estimaient
que la haine et la malédiction publique que les ingrats attiraient sur
eux
était une peine suffisante pour leurs punitions
et que ce crime
é tait de la condition de ceux dont la vengeance particulière devait être
réservée à Dieu.
Ainsi s’explique Dolive , le savant Dolive , chap. 5 , liv. 4
pag335
'
T “
de
’
�J ’ai dit et prouvé par
m on
premier mémoire que Cîiampflom
était dans la classe des plus insignes ingrats. M es preuves sont sou
tenues d’une multitude d’écrits qui ém anuit de lu i-m êm e, et qu’il
n’a pu démentir. Sa réponse n’efface aucun des traits marquans de
son ingratitude , de sa méchanceté , de sa mauvaise foi et de
sa.
perfide marche dans cette affaira y- elle n’est basée cette réponse que
sur ce qui peut sortir de labouche du vice , et du crime monstrueux
de l’ingratituue j m ensonges, im postures,
méchanceté ^ impudente
calomnie ; c’est tout ce que contient votre libelle.
Ç i n'a pas été assez a ’assouvîr votre rage contre ma réputation j
d’aborJ par votre plaidoirie , puis par
vos bravades , non seule
ment dans l’auditoire du tribunal de C le rm o n t, mais
encore dans
les tavernes et dans les cafés , bravades qui ont dû me faire un
devoir de publier m o n m é m o i r e , vous avez osé ajouter , par votre
réponse , les sarcasmes les plus
empoisonnés sur la confiance que
le Gouvernem ent actuel a bien voulu me continuer 3 par suite de
celle que je me flatte d’avoir méritée dans tous les
états que j ’ai
parcourus.
C ’e s t , personne n’en d o u te, afin de me
m o r t, que vous avez
porter le
employé cet amâ» d’outrages
des regrets à tous ceux qui ont attesté
l ’autorité suprême.
le
coup de la
pour
donner
vœu public auprès de
Tém éraire / vous n’avez pas pressenti les conséquences où va
tous
entraîner la lutte humiliante dans laquelle vous me forcez
de descendre
par votre
abnégation
de toute p u d u ir,
abandon inconsidéré à une plume prostituée
n’avez pas calculé
dans
votre
sotte fatuité
par votre
à la calomnie ; vous
sur
mon
origine ,
que la d iffir nce que vous me forcez d’écablir , ne pourrait qu’a
jouter au mépris et au discrédit donc vous êtes déjà trop couvert!
que votre vol reste à votre cupidité , peu m'importe ; c’esr moins
pour moi et pour ma famille que je reprends la plume , que pour
apprendre à ceux qni ne
yo us
Vmgrat qui me déchire.
r
connaissent pas t quel est l’ennemi,
�s n
i
Q u’ai-je été et
qui
suis-je ?
honoré de compter parmi mes
31'eux un Lieutenant général de la principauté dauphine d’A u v e rg n e ,
illustré par une Chartre donnée en 16 0 6 par l’oncle de H enry I V ,
à raison des actions d’éclat au-siège de Vodable , je n’ai cessé de
nie rendre digne d’une origine aussi flatteuse. Com m e procureur
dans les cour et tribunaux à C lcrm onr, une diantelie nombreuse
er d’élite , a plus marqué pour ma délicatesse que pour ma fortune.
D ans quarante années de travail, j’ai à peine
mille francs
à mon patrimoine. J'étais
ajouté
trente-quatre
sévère sur le choix des
plaideurs j je n’ai jamais occupé pour vbus ; j ’ai sur-tout
à
me
féliciter de n'avoir pas coopéré aux cent et une tracasseries que vous
avez suscitées aux pauvres gens de Eeaum ont , et à la faveur
quelles vous avez ajouté
beaucoup
de petits
des
héritages à votre
domaine ; trente familles au moins en gémissent depuis long-tem ps;
vous étiez un habitué du citoyen
dn tribunal d ’Issoire.
T riozon ,
aujourd’hui
greffier
A u x témoignages particuliers de confiance et de désintéressement
ont toujours été joints , et sans interruption , les
marques de la
considération de mes confrères et du public. J ’ai été successivement
syn d ic, procureur de communauté , membre de l’assemblée d’élec
tion d’Isso ire , administrateur de l’hôtel-dieu ,
B e rg ie r,
le
collègue du cit.
depuis plusieurs années législateur, comme
membre du
bureau de conciliation , officier municipal , procureur de la com
m une.
A la première révision du tribunal de district de C lerm o n t, le
vœ u de la municipalité et du conseil général me plaça pu m ier
juge.
X la secon de, le répsésentanr M usset se détermina par l'accla
m ation générale, à m e maintenir dans cette place.
E n l’an 4 , j ’étais à ma cam pagne,
lorsque l’assemblée
électo
rale me nomma juge au tribunal civil t
et je ne dois la place
<jue j ’occupe au tribunal
du Département qu’à la
du
chef-lieu
A i
�connaissance qui a étiS donnée au G ouvernem ent t et 1 mon însçn ;
par tous ses ri présent m s , du zèle et de la candeur avec
lesquels
j ’ai exercé mej fonctions.
Bien loin d î devoir aucun emploi à Couthon , il me destitua B’
à son retour du siè je de Lyon , de la place
C o m m u n e: il était mon em em i s s n s
de
procureur de
la
d o u te, parce que je ne me
servais ni pour moi ni pour mes cliens , de ses talens. L es registres
des audiences et la notoriété s'accordent sur cette vérité.
Généralem ent
pour un
reconnu . même par ceux
qui
ont été
réclu s,
bon, loyal et compacissant Citoyen \ ma femme
et mes
en fans n’ont qu’à se louer de ma conduite domestique , sur-tout j
je n'ai porté au c.n trouble dans aucune famille ;
m ;s enfans
et
mes gendres n’ont jamais eu à se plaindre de ma loyauté.
M a is} quel est donc ce personnage,
naissance ou par
sdiî
sinon aussi illustré par
mérite personael , au
moins
avili
par
sa
son
insolence, par son immoralité , par son audace à faire des dupes.
C ’est Jean-Biptistc-C ezar Caam pflour j le dernier des Cham pflour , ce voltigeur , tau ment sans péris.
Son b isaïeu l, marchand à C 'erm ont , acheki, en 1 7 1 0 ,
le do
maine d’Alagnat , à Beaumont , si vanté par son petit-fils pour »es
©rgies.
Son aïoul était juge ,
Lam oignon. C e
et de plus , homme d’affaire de
m agistrat, par son crédic ,
fie , de
cet
M . de
homme
¿ ’affaires un en n o b li, en 1 7 4 } .
I l n’y a pas long-temps qu’il
existait, à R io m ,
deux procu
re u rs , cousins de ce C e^ar, genrilhomme , qui se divertit à ravaler
l ’ctat de procureur ; comme si le petit-fils d'un marchand pouvait
ignorer qu’il est bien peu de procureurs qui ne ¡»\vonorent de cette
origine.
Com m ent cet homme û hautain s’était-il abaissé à devenir l ’ami
de Couthon ? à all«c se jewer à ses p ie d s, à P a r is , et à en ob-
�J
tenir une lettre pour la Municipalité de C lerm on r, le 7 juillet 17 5 5 ,
lettre qui préserva cet ingrat , et fournit à moi les moyens de lui
rendre les services détaillés dans mon précédent mémoire , et connus
4 e toute la V ille.
C ’est cependant ce
Totre
sau veu r,
même
Coutlion
qui fut
votre protecteur ,
dont l’oubli du bienfait vous a fait fabriquer cette
épigrame ingénieuse , moins pour moi que pour le G ouvernem ent,
et ceux qui l’ont éclairé sur le choix des juges............. Quod genu^
hoc hominum !
I l serait sans, doute merveilleux qu’ un tel Citoyen ne fut le fléau
de sa fam ille, de la société entière.
Sur le premier article 3 ne soulevons par ce voile qui cause encore
tant de désolations , et qui fait l’illusttation de votre femme.
Quant à l’autre, il m’est indispensable d’établir que si la fatalité
me rend victim e, j ’augmenterai la série de tant d ’autres. Semper
malus in eod:rn ginerc mali 3 par-tout astuce , im pudence, mépris
des règles des ob ijacions , comme de celles de l'honneur.
Mcrtons en premier ordre la violation des dépôts qu’avait faits entre
vos mains votre ancien
domestique. L e
fidèle Foureau entrant à
vou e service vous remit 25 louis. I l a l’imprudence de vous confier
q u i! a pour 15 0 0 francs de patrimoine dans le lieu de sa naissance j
vous le sollicitez de le vendre j il a la faiblesse de vous en remettre
le p rix , et ce fut lorsqu’il vous parut aisé de
vous libérer de ces
dépôts et des gages de nombreuses années , que vous prîtes un léger
prétexte pour le congédier, et par ce moyeu l e p a y e r en assignats
presque sans valeur : il est ruiné , et ses lamentations n’ont produit
sur votre cœur d’autres effets, que de le calomnier , sans réfléchir que
yous aviez abusé de l’empire de m aî:re pour violer la loi sacrée du
dépôt.
Appelez en témoignage M . Rechignat-D ém arant sur votre loyauré ,
relativement à votre billet d’honneur, et M . Rochefort , ne R ic m ,
ancien capitaine tl’ir.fauteiie, « m i s qui j ’eus la facilité c ’etre votre
�caution ? combien valaient
les 10 4 0 0 liv.
que vous
aviez promis
sur votre honneur, de rendre en espèces comme vous les aviez reçues ?
vous êtes-vous conduit autrement envers le citoyen B r u n e i, ancien
juge au présidial de C lerm on r, pour 12 6 0 0 francs ; envers le citoyen
G u y o t, de Vie sur-Allier , pour 6000 liv. j envers défunt Charbon
n ie r , bourgeois,
de Clerm ont ,
pour 424 0 liv. 5 envers la dame
veuve L a m o c h e jd e C lerm o n t, pour 4405 francs 12 s. 6 d .; envers
le citoyen Astier cadet, pour 24000 francs ; envers le citoyen Bonnec
officier de santé à C lerm o n t, pour
7
011 8000 francs. Il en sera
encore question.
Sont-ce là des traits d’honneur , de cet honneur qui distinguait les
preux chevaliers , comme ces respectables négocians que votre bisaïeul
eût sans doute imité ? ai-je calculé juste en vous plaçant ledernier
de votre race ?
Sans doute avec de pareilles ressources vous eussiez été ou plutôt
vous eussiez dû être au-dessus des besoins ; mais pourquoi , vous
sur-tout si grand en m unificence, avez-vous récemment ajouté à Pénormité de vos dettes un emprunt de
20000 francs à 18 pourcent
avec double doublure ? espereriez-vous au retour de moyens aussi
prom pts, aussi faciles pour votre libération ?
N e semblerait-il pas entendre le Cardinal de R ohan , à votre fa
tuité de rehausser la maniéré dont vous avez soutenu avec dignité
le rang où votre nom et votre condition vous ont placé ?
D ’après ce tableau fidèle connu de tous
nos concitoyens, qui ^
Cezar Champflour convaincra-t-il par son impudence sur le genre
de nos relations, par le ridicule de ses calomnies , par l’exagération
de sa prétendue générosité ? E t d’ab o rd , comment faire coïncider le
paiement dei vacations dues à un Procureur qui ne l’a jamais été pour
Champflour , ou les appointemens d’un homme d’affaire affidé tej
que Costes et L o u ïre tte , avec les marques d'une
reconnaissance
pour des services d’ami , de con seil, de guide j de cautionnement.
C est sous ces rapports que
yo uî
prépariez perfidemment vos leures »,
�i
en disant à
vos
SU
,
enfans arec transport apparent > avec jo i e , que
j'étais leur second père.
Quel «finem en t d'invention , de supposer d'avoir donné 25 louis i
ma domestique pour se donner le plaini: d’ajoucer que j’ai partagé ce
prétendu don ! Quelle corruption dans L s habitudes pour im aginer
un pareil moyen de calomnier ! ausii semble-t-il
qu’on ait
fouillé
tout son répertoire de sottises et de grossiéreté, pour me les appliquer !
Quod genus hoc hominum !
Une telle imposture qui n’est étayée
nécessairement enhardir à
saisir les
que
par l’audace, devait
lieux communs d’invectives.
L es larmes du pauvre arrosent les champs
que B o yer a acquis ou
usurpé pendant quarante années de vertus. Quel boursouflage ! qu’elle
attroce supposition ! Je n’ai rien acquis , encore moins usurpé de ce
qui a appartenu à des particuliers peu fortunés.
L ’acquisition que j ’ai faite à So lign at, au prix de î j o o o fr.
l ’a été de M . de Brion-de-Laizer.
I l ne s ’ agit, continue Cfaampflour , que de consulter les habitant
de la commune de Solignat 3 et le délibératoire du conseil, du 9 frim aire
an <) , qui autorise le M aire à poursuivre B o y e r en désistement des
Rutoirs et Communaux dont il s'étalt emparé j
pour
aggrandir son
p r é de Pragrand.
A qui Champflour a-t-il recouru pour un mensonge si mal conçu ?
L a commune de Solignat est composée d’environ mille habitan^
ou forains propriétaires j il leur a pris fantaisie , après l’an 4 , de
se diviser les communaux j je ne m’y o p p o s a i point. L es citoyens
Courbeyre , l’un ancitt» adm inistrateur, a u j o u r a ’ J iu i du conseil de
Préfecture , l’autre juge de p a i x , et le citoyen Duclauzel avaient
pris leur part : le citoyen Courbeyre avait fait extraire de son pré
environ mille chards de pierres qui furent déposées sur
la portion
¿ c com m unal, portion que j ’ai prise comme les autres , en suite de
la destination qui en avait été faite
pour moi.
C e n ’a jamais été
l ’emplacement des rutoirs. Il a plu à neuf particuliers sm m ille, de
■-*<
�s
me faire un procès ; il y a des Champilour et des brouillons par-tout:
Aussi ne voit-on figurer dans les n euf qu’un
M erle courroucé de
ce que j’ai réclam é, par la voie de la justice , l’abandon d’un chemin
qu’il a usurpé; le juge de p a ix , par ressentiment d'avoir succombé
à raison d’une prise d’eau donc il s’écaic emparé.
Les
sept -autres
ne
sont
que
des instrumens passifs
de la
méchanceté.
Quant aux dons : l’étalage mensonger que vous en faites, forme
un contraste bien frappant dans vos assertions ; les services que je
vous ai rendus , étrangers à ceux d’un procureur et
d’un homme
d*afïaire j les prêts immenses sans intérêts , les cautionnemens dan
gereux pour moi sous
divers rapports ; tels sont les motifs qui ont
eu , à vos yeux d’alo rs, un tel prix 3 . que
vous
avez cru en té
moigner une reconnaissance assez coûteuse. Répondez à ce dilemme ;
ou le présent a été alors proportionné aux
bienfaits j ou il a été
aussi peu réfléchi, que l'est aujourd’hui votre reproche ?
Dans le premier c a s , vous êtes un hardi et lâche menteur j dans
le secon d , ce serait de votre part l’aveu d’une dissipation aussi
irréfléchie que la vente de tous les biens de votre fem m e, et toutes
les espiègleries , à la
faveur desquelles
vous
ave^
soutenu
avec
dignité le rang ou votre nom et votre condition vous ont placé.
Dans le vrai , j ’ai reçu de vous deux boîtes d’o r , une plus petite
pour ma fem m e, une écuelle d’argent avec son couvercle et son
assiette, un porte-huilier à bâteau, douze couverts d’argent, dont
six à file ts, quatre cuillers à ragoûts , dont deux de moindre gran
deur , deux flam beaux, quatre douzaines de
planches , bois dur ,
et deux chards de bois à brûler. J ’ai évalué le tout à 3000 francs j
et j ’ai certainement porté chaque objet au-delà de sa vraie valeur.
Ju sq u 'ici , j ’ai établi que vous
étiez un inventeur eflronté :
je
pourrais vous appliquer cet ad ag e, semel m endax, semper mendax.
M ais , en s’écartant des
principes qui prescrivent l’indivisibilité
des a v e u x , il fauc au m o in s, à défaut de preuves, édifier par les
présomptions qui résultent de la moralité reconnue des parties,
�5»
Sur-tout par les preuves que
vous fournissez
vous-même de
votre
mauvaise for.
Vous n’avez jamais été dans le cas de prêter, mais toujours dans
celui des emprunts.
A l ’époque même où par l’effet d’un travail de plus de huit m o is ,
je vous fis toucher 3 10 0 0 francs par celui qui vous en demandait
60000 , vous articulez m’avoir remboursé les 7 7 5 0 francs que je vous
prêtai en 17 8 9 et 1 7 9 0 , vous n égligeâtes, d ites-vou s, de retirer
votre billet de 250 0 fr.
Que le citoyen Bourdier se plaint de n’avoir pas de quitance de
douze louis en or qu’il me remit pour votre beau-père Beraud.
Que vous étiez créancier au lieu detre débiteur de yotte frère
D esm oulin.
Que quoique je n’eusse pas compté les 12 0 0 0 fr. à Desm oulin ;
j ’avais spéculé de faire rapporter à ce principal n eu f et demi pour
cenc d’intérêt par an sur celui de 15 0 0 fr. qui étoit perçu sur le
capital de 16 0 0 0 fr. dû par les Viry.
Que j ’étais tenu de me faire donner une reconnaissance par celui
pour qui je faisais les emprunts.
Q u’il n’y avait aucune note probante de ces emprunts.
Que celle que je rapporte écrite devotre main , n’était pas en tière;
!
qu’elle avait été coupée avec des ciseaux.
t.
Que votre frère m 'avait remis des papiers de fa m ille , et parmi
ceux-ci la lettre de change de Lahousse.
v
Q u’il est tellement faux que j ’ai payé des créanciers en vertu de
l ’obligation de 12 0 0 0 f r . ; que sur mon refus de les p a y e r, vous ,
Champflour , les avez acquittés, notamment D ufraisse pour
18 0 ®
fr. afin d ’ honorer la m émoire de votre frère dont vous répétez sans
cesse que vous êtes le créancier.
Que ce n’est pas vo u s, mais bien moi qui ai sousttait, à l’audience
l ’écrit de votre frère dont je vous accuse d’avoir falsifié ou raturé
les dates.
B
i
�Que vous m’avez remboursé en mars 17 9 $ , au lieu de messîdot
an 5.
Que la detre envers Bugîion m ’était personelle.
Q ae je dénature les faics sur mon cautionnement envers Bonner.’
Reprenons chacun de ces treize articles.
i . ° D ’un côté , payer par Champflour
une somme de 15 0 0 fr.
sans retirer le titre de son engageaitnr ou une quittance j c'est
incroyable à quiconque l’appréciera par tous k s procédés , par les
contradictions , par les jongleries qu’il n’a cessé d ’entâsser dans cette
affaire , par le traité de l’an 7 , rédigé et écrit en deux doubles ,
par Champflour qui a laissé mon prénom en blanc. Champflour ne
s’est-il pas non seulement constitué mon débiteur de ces Z500 f r . , mais
encore ne m’a-t-il pas promis de m’indemniser à raison de l’époque
du remboursement ? or se fut-il rendu à cet acte de justice pour une
somme qu’il au ra it, selon l u i , payée deux fois j d’un autre c ô té ,
com parant, pages 7 , 25 , 24 , 5 1 de sa réponse avec cet acte du
ij
fructidor an 7 , on rétorque sans possibilité de reto u r, Cham -
flour ! mentiris iuipudentissime.
Page 7 , il prétend avoir payé 15 0 0 .
Pages 13 et 1 4 , il a p a y é deux fo is partie de ces sommes dans le
courant ds mars 17 9 5 . I l retira les effets qu’ il déchira comme inutilest
et il ne restait plus de trace de remboursement.
Page 3 1 , il s’ est entièrement acquitté en fonds et en numéraire j
soit envers le citoyen Bonnet j soit envers la demoiselle B om part} de
notre billet d’ honneur. I l en a les acquits des 2 1 messidor t 1 1 et 1 J
thermidor an 6 3 ainsi que le billet d’honneur.
P ar notre traité de l’an 7 , il se reconnoît mon débiteur de la
somme de 7 7 5 0 fr. et des 800 francs empruntés de M artine D e larbre , lequel emprunt il avait d ésavou é, page 8.
I l s’obligea par ce même traité de. rapporter Us effets et k s acquits,
des sommes dont il étoit débiteur.
�/ s /
11
Quelles sont donc , Champflour , les pièces que vous avez déchi
rées comme inutiles ? pourquoi vous êtes-vous obligé en l’an
7 de
rapporter des pièces que vous avez déchirées en 17 9 3 , tandis que
vous convenez d’être nanti des effets et quittances concernant Bonnet ?
pourquoi êtes-vous convenu , en l’an 7
que vous n’aviez remboursé
les 77 jo h . qu’au moment ou les assignats éprouvaient une perte con
sidérable ? assurément ce n’était pas en mars 17 9 3 .
Se joue-t-on aussi impunément des premières règles de la justice?
obligé par acte de rapporter des pièces dont vous convenez d’être
nanti , vous croyez être quitte de cette obligation en alléguant de
les avoir déchirées. Vous devez rapporter les pièces ou je dois être
cru. Vous êtes d’autanc plus indigne de confiance sur votre alléguation de paiement en mars 17 9 3
j
qu’encore une fois vous êtes ex*
pressément convenu dans notre traité de l’an 7 que vous n ave\ rem
boursé qu’au moment oà les assignats éprouvaient une perte consi
dérable.
E n ce qui touche 1s citoyen B o n n e t, vous abusez en vérité de
l ’art de mentir. Vous le forçâtes , malgré le billet d’honneur d’un
homme de votre nom et de votre rang } d’accepter les immeubles aux
prix que
voulûtes y m ettre, en le menaçant de le rembourser en
papier. Si vous avez donné du num éraire, c'est d’après l’échelle de
proportion. I l vous est si aisé d’obtenir des déclarations ! mais le
citoyen Bonnet et la demoiselle Bampart ne sont pas des Lahousse.
J e vous mets au défi de me contredire par le rapport de ces dé
clarations.
I
2-° C ’est à sa seule négligence que le citoyen Bourdier a dû
attribuer son défaut de quittance. L es douze louis n ’étaient qu’ un
à-compte. I l est
faux que les sieur et
dame
Beraud m ’eussenc
chargé de ce recouvrement ; je ne fus qu’ un commissionnaire offi
cieux. Bourdier encore débiteur, esperait, sans d o u te, de prendre
une quittance finale j le fait remonte à i i ou 15 ans. Il est notoire,
a C leim o n t, que ces époux ne laissaient pas séjourner leurs fonds
B x
s
�eu main-tierce : Champflour souille tout ce
reservé à lui
qu’ il touche j il est
seul de multiplier les in ju re s, mais
heureusement,'
il esc connu.
j . ° C ’est outrager la mémoire de D esm oulin
de soutenir qu’il
était débiteur de son frère, si celui-ci avait la bonnefoi de com m u
niquer tout ce qui peut
établir
la vérité , notament
l’écrit
m o n tr a i l’audiance, et q u 'il fit disparaîcre, la honte de ce
songe serait le seul résultat de cette vérification.
qu’il
men
4 .0 L a notre écrite de votre main , «elle de votre frère me. con
cernant j dont je suis porteur ; celle relative à v o u s , que vous avez
soustraite à l’audiance; le traité du
15 fructidor an 7 ,
l’acte de
dépôt entre les mains du notaire C h e v a lie r, de tout ce qui
a rap
port à la créance V iry donc je n’ai pas touché un sou j toutes ces
pièces combinées ensem ble, démasquent! votre imposture sur l’odieuse
invention que vous avez osé hasarder contre la preuve écrite, que
j ’eusse voulu recevoir des intérêts à 9 et demi pour cent , puisqu’il
est démontré par l’obligation même contenant procuration ,
que je
m’étais chargé d’en compter. C es intérêts sont encore Ju s. T o u t *
été gratuit.
5.0 Il éraic inutile,
il aurait
été
dangereux et mal-honête de
prendre des reconnaissances de celui pour qui les emprunts étaient
faits ; in u tile, parce que tout était de confiance ; cette confiance
m'établissait maître de ma cause , par la nature même de l'acte ;
dangereux et mal-honêce dans le cas de l'anéantissement de l’obli
gation de 110 0 0 fr. j obligation qui n’était en effet qu’en brevet
que je vous ai remise
dans
la même
fo rm e , depuis le jugement
que j ’attaque. Ces reconnaissances n’auraient-elles pas form é autant
de doubles emplois , autant de créances particulières, exigibles encore
si on eut déjruit l’obligation de iz o o ® fr. qui le* comprenait.
6 ° L a note des emprunts n ’était-elle pas suffisamenr établie pat
votre écrit et par le traité de l’an 7 ?
S 'il eut resté quelque douce, y aurait-il à hésiter dans la préfé-
�>3
fenee à d onn er, pour le serment, à l’obligeant officieux, sur l'ingrat,
sur le perfide jongleur,
7 .0
L a prétendue coupure de la note écrite par Champflour , n*a
i l é imaginé par lui que pour le seul besoin de son iniquité.
8.° Desmoulin ne m’a jamais remis aucun papier. C e fait
rrouvé a paru nécessaire pour donner
quelques
roman sur la lettre dechange de Lahousse. Si
con-
consistances au
cet
effet eut été
acquitté par Desmoulin ou par C ham pflour, le premier ne l’aurait-il pas
anéanti; en aurait-il fait mention dans ses écrits à moi et à son frère j
l'autre avair-il quelques raisons ou prétextes de me le[ remettre ? tout
ce que débite , à cet égard , Champflour , à l’aide de cet autre flibustier,
est absolument fa u x , et semble avoir un but plus criminel encore.
Cette lettre d ech an ge est du j i
mai
17 8 8 j
fixée au i . cr janvier 17 8 9 . Que penser de vos
son échéance étaic
extravagances,
en
supposant une prétendue maladie à Desm oulin , ses alarmes sur
un effet qui n’érait pas encore é c h u , ec qu’il a v a it, indiqué
dans ses n otes, devoir être p a y é , et l'avo ir été par moi ? de
quel
œ il,
sur-tout , envisager cette
rapportée sous la date du 8 juillet
quittance
que
vous
avez
17 8 8 , cinq mois avant l’c-
chéance y et que vous n’avez pas osé faire im prim er , comme étant
détruite par les notes et écrits des deux frères 3 par ceux de Louïrette
et C oste. C elui de ces écrits que vous eûtes l’adresse de soustraire
à la connaissancs de la ju stice, en prouvant que
vous
étiez son
débiteur de 6000 francs , faisait mention du paiement par n^oi, du
montant de cet effets j il rappelait en outre que l’objet principal
de la lettre de change n’était que de 18 0 0 francs ; l’intérêt était donc
de i j pour io o pour six mois. Quod genus hoc hominum !
9.
L 'écrit que vous avez soustrait à l’audience , vous constituait
'débiteur de votre frè re , de 6000 francs. J ’ai acquitté , selon
yo us-
m êm e par votre é c rit, et comme Coste l'atteste, d’après le traité de
l ’an 7 y les sommes dont il s’agit j si v o u s , C ham pflour, en avez
payé d'autres , sans doute vous ne pouviez vous en dispenser, s'il étaiç
�dans vos principes
d’honnorer
*4
la mémoire de votre frè re , von*-
cuss’rez rendu plus de justice d celui q u i, à sa considération , ec
sur sa fatale présentation, vous
avait tiré du
bourbier
où
vous
étiez plongé.
10 .° C ’est ajouter une rare impudence à une profonde déprava
tion , de m’imputer l’enlèvement de l’écrit de Desmoulin , "qui eut
opéré le gain de ma cause , en dévoilant vos infidélités sur l’état et
sur le contenu de cette pièce.
n . " Com m ent présumer que Cham pflour occupé, en mars 1 7 9 J ,
de préserver sa personne, eut imaginé de payer des créanciers dont
il eut encore emprunté pour se prémunir contre les malheureuses
conjonctures d’alors ?
L e traité de l’an 7 ne détruic-il pas ses mensonges et ses contra
dictions à cet égard ? ne vous êtes-vous pas obligé j C liam pflour,
par cet ac te, de rapporter les effets et les acquits des sommes dont
vous êtie% débiteur ?
1 1 . ° L a dette de Bughon est portée par votre é c r it, et dans
celui de C o ste , votre homme d’affaire, pour être personnelle à
Desm oulin. L e rapport d’une attestation de ce Citoyen honète , serait
trop humiliant pour lui et pour m o iy pour lui , de
se
mettre en
parallèle avec l’amendé Lahousse \ pour moi , d’imiter en rien un
ennemi aussi inimitable. M ais cette attestation a été rapportée à
l ’audience du tribunal d ’ a p p e l , par C h a m p f l o u r j son défenseur la
tenant "en
m a in ,
l’a n n o n ç a ,
sans la lire,
com m e
applicable â D es
m oulin. Plusieurs Citoyens de C le rm o n t, présens à l’audiance, er
ceux qui composaient le barreau, s’en rappellent. Quel voile a donc
pu dérober la vérité de ce fait à la justice ? pourquoi Cham pflour
a-t-il excepté de faire imprimer ce
m ém oire, avec les autres pièces ?
ctrtificat
à
la suite de son
.° Je crois en avoir dit assez sur le remboursement fait au
citoyen Bonnet j dans le premier article de cette discussion.
i j
O u i, sans doute , ma défense fut interceptée par vos
yocifé-
�"
.
.
rationsi par un débordement de calomnies grossières. M es m oyens;
dans le d ro it, furent étouffés 3 et le tribunal
fut surpris.
Quelle
méprise de qualifier une obligation dictée par une volonté déter
minée , ,ec par une confiance libre sur des objets secrets d’obliga
tion ) pour cause fausse ou sans cause pré-existante.
Quel autre sens peut-on , sous l’accepration naturelle ,
donner à
ces expressions, si ce n’est que le débiteur n’a pas reçu à la minute
m ôm e, m atériellem em ent, l’objet du prêt. M ais de qui est provenue
cette certitude ? de la seule loyauté de ce créancier qui pouvait pré
venir par un seul mot toute dénégation, toute supercherie.La cause
de cette obligation est-elle pour cela fausse ? exclut-elle la certitude
d’une cause préexistante ? non , sans doute.
Cham pflour-Desmoulin , dans une position fâcheuse , a besoin,
dans cet instant , d’autant de crédit que d’espèces. L a nature
nombre de ses dettes lui présentent des embarras dont
et le
il ne peut
sortir que par un acte de confiance , tel qu’il ne puisse recevoir
aucunes entraves. I l épanche sa douleur dans le sein de son ami j
il se fait un titre envers cet a m i, de cette habitude de bienfaisance
dont cet ami commun de la fam ille a donné
des preuves si écla
tantes à son frère.
N e sont-ce
pas là antant de causes m orales, pré-existantes, de
l'acte du 28 mai 17 8 9 ?
C et acte , dans son essence , et par ses expressions, n’est-il
autant un mandat qu’ une obligation? que d is-je, ne
pas
renferme-t-il
pas indivisiblement ce double carectère ?
M ais ces causes pré-existantes ne sont
elles sont encore matérielles.
pas seulement
morales i
Desmoulin avait , dans ce moment même , à acquitter des dettes
¿ ’honneur pour le jeu j il en avait d'autres par lettres de change
dont le terme était éch u , ou était sur le point d’échoir.
C ’est dans la journée m ê m e , après la confection de cet acte, du
>8 mai 1 7 8 ? , que je tire en votre faveur une
lettre de change;
�vous en passez l’ordre à Bughon et le m ontant, distraction faite
de l’in térêt, est touché par Desmoulins.
À-c-il pu échapper
à quiconque
counaissait votre
position
de
fortune et nos relations, que vous m’eussiez prêté vous-même ou
fait prêter par Bughon , et par l’entremise de votre sœur madame
B lo c , une somme pour mon compte ?
C ’est dans les premiers jours de juillet suivant que , presqu’à la
fois , je m’oblige envers Lescurier, de qui Desm oulin reçoit 5000 fr.
et que j ’acquitte pour lui les «ffers de Caze et de Blatin.
Sont-ce donc là des causes fausses, et s’il y a fausseté , n’y at-il pas contradiction dans le jugem ent?
M ais Champflour
aventure )> et on soutient pour lui que par
notre traité je me suis soumis de rapporter des resonnaissances de
D esm oulin sur ces deux objets , et que je n ’en rapporte aucune.
Ç ’a été le] prétexte de diviser mon aveu loyal , et d’an éan tir, à mon
é gard , l ’acte syllanagmatique du 18 mai 17 8 9 .
Diverses inconséquences. D ’abord erreurr de n’avoir pas reconnu
son indivisibilité , sa cohérence nécessaire avec les écrits de vous et
de votre frère , avec ceux de vos serviteurs Coste et Louïretre , que
j ’avais eu la bonne foi et le malheur de
vous laisser nommer nos
calculateurs.
Ces derniers écrits dont vous rapporrate* un bouble à Taudiance,
et dont je suis Hanti de l’autre, transcrit page 15 de mon m é
moire , ne sont-ils pas conformes aux notes de Desm oulin et à la
v o tre , n’ajoutent-ils pas à ce qui manque dans l’acte du
ij
fruc
tidor an 7.
M ais entraîné malgré moi
par une erreur que je dois respecter;
que dis-je , cet acte du 1 j fructidor an 7 , est le complément des autres.
I l fallait distinguer les sommes payées en numéraire d'avec celles
acquittées en papier. E h bien , dan»
cet a c te , il
ne
peut
être
question pour les paiemens en papiers suc lesquels je ne voulais pas
bénéficier
�> 7
-bénéficier que des objets Eughon
Coste et Louïrette
contient
t
et
y
Lescurier. L e Bordereau ¿ s
évaluation
de ces
sommes
d’après
-l'échelle de dépréciation j n’est-il pas l’exécution du traité
et
des
notes de vous et de votre frère ?
C e que vous avez imprimé sur celle de votre frère, pag. 1 2 , à
la n o te , 1 9 ,
que
j ’ai
10 et 2 1 de votre mémoire } comparé
rapportée ,
et
telle
qu’elle est
qui contient le bordereau de C oste , page
va mettre au plus grand jour
sur
avec
celle
la même feuille
14 de mon m ém o ire,
votre turpitude. M alheureux ! vous
vous êtes rendu coupable d’ un faux
matériel.
L ’écrit
que
vous
prêtez à votre frère, page 1 2 de votre mémoire , n ’est pas de lu i ,
et il ne peut être de la fabrication que de vous s e u l, oui de vous
s e u l, même sans l’aide de Coste et de Louïrette.
E n même temps , dites-vous } que mon frère souscrivit cette obli
gation ^ il avait donné à B o yer l'état de ses dettes.
C ’est donc d’après vous que cet état m e fut remis le
17 8 9 , jour de cette obligation.
x S mai
M ais l’état que vous décrivez est tout différent du m ie n , cepen
dant celui-ci a été la base du calcul et du bordereau de Coste et
de Louïrette.
Ces deux états , tous deux sans date , ne s’accordent point sur
la nomenclature des sommes j celui que j ’ai ,l* s exprime par louis ,
le vôtre les décrit par francs , quoi que , à cette époque ,
on
se
servit plus communément du mot livres.
Ils sont encore discordans sur le «om bre des articles } le mien
■en renferme onze , et celui que vous produisez n’en contient que dix.
Ils différent sur l’ordre dans lequel les créanciers sont inscrits.
M ais ces états sont absolument opposés sur les noms des créan
ciers et sur les sommes.
C elu i dont je suis po rteu r, qui
est encote Hne f o i s ,
saurais trop le rép éter, conforme aux écricsde
yos agens,
car je ne
est ainsi conçu :
C
M
, , i
�13
à Lahousst , io o louis j i * m’ envoyer au régiment pour le jeu 3 50
louis ; $.° par obligation cautionnée p a r M . B oyer , 1 1 1 louis ; 4.0 ¿
Lapierre , mon ancien domestique , 30
35
; 6 .“ , d
; 5.° <z Monestier , tailleur ,
j perruquier 1 3 / . ; 7 .0 ,
Flageac 2 5 /. j S .°, <è l ’abbé
Aubier 6 l. j 9 * , à mon tailleur 15 /. ; 1 o.° , ^ B latin 6 1 l. ; j 1 .° , pa r
contrat dora B lot est caution 3 6 1 l.
’
Celui que vous avez imaginé et fabriqué , destine i .° à M . L a ville j
M . B lot caution y 15 0 0 fr. \ 2.° à la Nanon 3 cuisinière de
men frère , 600 j j . ° à
Flageac ,
i i o 3 j 4.0 M .
Dufraisse-Lapierre , domestique de AI. de
B o yer ma caution 3 2 8 0 8 ;
S aubade 2900 j 6 ° à C a\: perruquier 3 15 ;
7 .0 'à
5.0 à A P .
Fabre
confiseur
1 2 1 8 j 8.p à l'abbé A ubier 12 0 0 ; 9 ,° à B latin 16 0 j io .u à Brochet ,
tailleur 360.
D e cette comparaison il résulte ,
i . ° Que dans les deux états
sont
compris
seulement
B l o t , ici
pour 15 0 0 fr. ,là pour 6 1 1. j Lapierre, ici pour 12 0 0 f r . , là pour 30 1. j
moi Boyer comme caution , ici pour 2800 f r ., là pour 1 2 1 lo u is ;
Caze , ici pour 3 15 fr. , là pour 13 louis ÿ un tailleu r, ici pour 3 i o f . ,
là pour i j louis ; l’abbé A u b ie r, ici pour 12 9 0 f r . , là pour 6 louis ;
et B la tin , ici pour
2 60 fr. , là pour 1 1 louis, O n apperçoit môme
qu’il y a assez d’uniformité ppur cinq de ces créanciers, mais qu’il
y a contrariété de 44 louis pour A u b ie r, et de 2 0 p o u r Lapierre ;
2 .0
Que Lahousse , Monestier , Flageac , et la destination de
1 2 0 ® fr. pour le je u , rappelés dans mon état 3 11e sont point cou
chés sur le vôtre. E n revanche, ce dernier comprend votre cuisi
nière , madams Saiizade et Fabre. Cette contradiction prouve que
la destination des 12 0 0 0 fr. était indé terminée j elle démontre sur
tout que devant varier selon les changemens éventuels du
d’autres causes, Cham pflour-D esm oulin
jeu , ou
se reposait sur l’acte
de
confiance q u 'il n’avait consenti que pour lui faciliter ces variations.
E n e ffe t, au lieu
de 50
louis pour le
jeu a v e n ir, au lieu de
payer la plupart des créanciers indiqués , il toucha les 800c fr. pro
venus de Bughon et de Lescurier pour faire face à la partie de jeu ,
qui l’avait fait recourir 4 cet expédient j conséquemment il me restait
�'*5>
à employer pour remplir les 12 0 0 0 fr. ; que 4000 francs qui l’ont
été en effet par m o i, et bien au-delà par les paiemens que j ’ai faits
de Z400 fr. à Lahousse j de 1 6 7 / r . à Blatin ; de 3 15 fr. à Caze , et
de 1 1 1 8 fr. à Fabre.
3 .° ( V o ic i, Champflour , le coup de massue qui va faire ressortir
ton
infâme
impossible
le
complot
que
avec Lahousse ) } qu’il est
Fabre
besoin de ta cause ,
compris
put
dans
êcre
ton
état
indiqué
le
phisiquement
fabriqué
18 mai
pour
17 8 9 ,
pour être acquitté, puisque F a b r e , alors , n’était point créancier de
Cham pflour-D esm oulin, et qu’il ne le devint qu’environ huit mois
ap rès, le 14 janvier 17 9 0 avec échéance au 1 4 avril suivant préfixe.
M ain tenan t, auquel des deux états faut-il ajouter foi ? à celui que
je rapporte l ’écrit de la main de ton frè re , confirmé par celui de
tes ag en s} rappelé dans l’écrit que vous
avez
eu la
subtilité de
soustraire à la ju stice, ou à celui dont je viens de prouver la faus
seté ? L e trait de lumière devient électrique pour porter la même
évidence , et mettre au plus grand jour le concert abominable avec
Lahousse.
L a lettre de change de cet estafier est du
ji
mai 17 8 8 ; l’échéance
était au premier janvier 17 8 9 ; Champflour a articulé l’avoir payée
le 8 juillet 17 8 8 , et la
déclaration
de ce
complice est du
19
nivôse an 9.
M a i s , le 8 juillet 17 8 8 3 l’écrit de Desnnoulin que je rapporte,
et dont vous placez la date au 28 mai
17 8 9 ,
n’était
même pas
fait le 8 juillet 17 8 8 , puisqu’il y rappelle la date de C a z e ,
qui n’a été cou tractée que le 2 juillet 1 7 8 8 , et n’était payable que
le 1 juillet 17 8 9 .
E h bîen ! C ham pflour, répliquez ; imaginez quelqu'autre moyen
pour consommer votre trame infâme avec votre digne ami Lahousse.
N o s concitoyens, la postérité et la ju stic e , je l’espère, jugeront la
question qui du gentilhomme
C
ham pflour
ou de l’ancien procureur
peut se promettre que l’honneur lui survive.
�» :■
10
Donc la cause de cet acte du
18
mai
17 8 9 }
fausse qu’est certaine au moral et au phisique ,
est aussi
peii
la cause pré-exis
tante.
C ela posé et démontré jusqu’à l’éviden ce, n’y a-t-il pas eu une
nouvelle erreur d’avoir prétendu que l’on devait diviser ma décla
ration émise de bonne f o i , et loyalement dans l’acte du 1 j fructidor
an 7 , transcrit page i j
et 16 de mon m ém oire?
Ces inconséquences en ont produit d’autres.
x ,° D ’avoir considéré mon aveu
2 ° D ’en avoir induit
comme contre-lettre.
la présomption d’une
autre
contre-lettre
pré-existante.
3.® D ’avoir confirmé mon aveu qui a été divisé quoiqu’indivi
sible , et de vous avoir déchargé du votre , sous prétexte d’une
prétendue révocation qui n’exista ja m a is, de l’acte du 15 fructidor
an 7.
En fin quelle a pu être l’opinion publique sur vos
fanfaronades
de vous être vanté de m’avoir fait perdre 12 0 0 0 fr. ;
n’est-il pas
notoire que vous m 'avez offert 14 0 0 0 fr. avant le litige que je ne
me déterminai à introduire
que
iTaprès les calomnies
que vous
vous étiez déjà permises ?
Term inons ce combat polémique , pat vous d e m a n d e r quel est
jusqu’ici le résultat d e tout.ee qui en est l’objet : l’entière créance
V i r y , qui était ma garantie, ne
vous reste-t-elle pas en
ne me volez-vous p a s , d'un côté , plus de 8000 fr. ,
entier ?
distraction
faite des assignats que vous m ’avez remis en l’an 5 , et que m échament
yous
me prêtez soutenir en l’an
4 ;
e t , d ’ un autre cô té,'
la valeur réelle des objets Bughon et Lescurier ? eh ! vous êtes assez
dissolu pour ajouter à ces vols la plus attroce diffamation / ô tempora ! ô mores !
Je
ne répéterai aucun moyen de mon pourvoi; je renvoie
X.
pion mémoire. Je ne prendrai pas la peine de refuter la réponse:
V
�quelque soit l’évènem e n t , ma conscience est pure j ma sécurité esc
parfaite.
I l me
reste encore le dégoût , mais la nécessité Impérieuse de
balayer les autres ordures
parsemées à chaque instant dans votre
libelle.
J e ne reviendrai pas sur vos caquets touchant
les
besoins dont
vous avez perdu le so u ven ir, lorsque j ’ai exposé ma fortune , mon
honneur et ma v i e , dans le temps où vous n’auriez pas
emprunter un lo u is, lorsque je
trouvé i
vous cautionnai pour plus de 1 1 0
niille francs 3 je courus tous les dangers , le plus pénible de tous ceux
que j’é p ro u ve, a été celui de l’ingratitude; j’ai agi en ami ch au d ,
sans un sou d’in té rê t, sans attacher aucun prix à mes veilles j à.
mes sollicitudes. Ingrat ! la présence
de
mes
enfans
semblait re
procher à ma m unificence, et vous les abreuvez du fiel le plus
amer que puisse éprouver un vieillard ! vous n ’avez répondu aux
faits que contient mon mémoire que par des sottises , des ironies !
injurier n’est pas répondre. L a notoriété vo u s, accable............. E h !
cependant ma fam ille et moi devons glaces à D ieu de votre noire
ingratitude. Si je vous eusse continué mes b o n tés, à quels ma
lheurs j’exposais ma fem m e, mes
enfans , m oi-m êm e. L e temps
n’est peut-être pas élo ign é, pensez-y bien , de vos regrets plus que
de vos remords.
V ous êtes insatiable sur le souvenir de Couthon ; vous ne vous
rappelez plus que vous n’obtîntes la lettre dont j’ai parlé j et que
je ferai imprimer à la suite de cette réponse, que parce que vous
Ütes abnégation de votre naissance et de votre rang j que vous rap
pelâtes à propos l’origine du marchand Champflour , sur-tout vos
acquisitions de biens nationaux à Beaum ont j aussi ce despote écrivit,
dit-il ,
AVEC rLAISIR
,
P A R C E QUE j ’ A I M E A
M E F R A P P E N T , E T QUE ,
m arq u é
que
d ’u n
CHAMPFLOUR
Champflour n>5t pas
AUTRE
fu t
seulement
D IR E
COTE , J E
l'e n n e m i
ami
du
LES V É R I t Î
n ’a i
s
QUI
JAMAIS
RE*
p e u p le .
du peuple,
mais
de la
�9
11
populace la plus effrénée , puisqu’il sait si bien la singer. Cepen
dant ,
toujours versatile , sa
naissance et son
rang lui font dé
daigner aujourd’hui d’être l’ami d’un ancien procureur, et il saisit
avidem nient ce mot pour s’égayer dans sa diffamation/
B o yer 'dit qu’il est mon ami 3 il m’a dénoncé comme émigré.
M isérable ! je n'ai
dénoncé personne ;
vous
eusse-je dénoncé ,
vous qui croyez me flatter en me nommant votre second père ; mais
vous seriez-vous conduit alors comme aujourd’hui ? d’abord je n’é
prouve pas le sentiment aussi fâcheux que pénible de la vengeance.
M ais me serais-je précipité dans tous les ab îm es,
suite funeste de
votre ém igration , moi qui étais à découvert pour vous , pour plus
que la valeur de ma fortune que vous exagerez des deux tiers.
D e votre aveu s page 7 de votre réponse , parti au commence
ment de juillec 1 7 9 } j vous fûtes inscrit sur la liste , le 14 pluviôse
suivant. V ous et vos agens affectés de confondre un simple acte
conservatoire qu’exigeait la l o i , avec
une dénonciation. J e différai
cet acte jusqu’au 5 décembre 1 7 9 1 ; je me suis bien gardé de vous
y présenter comme émigré. C et acte avait été précédé de huit autres;
31 a été suivi de
plus
de
quatre-vin gt-dix; ce sont d o n c, selon
v o u s, autant de dénonciateurs, et dam une colère digne de votre
rang et de votre naissance t
L ou ïrette 3 votre femme ,
vous
n’exceptez
vos gendres ,
pas
même le fidele
tous ceux qui vous ont
marqué intérêt. Quod genus hoc hominum !
B o yer se dit mon ami } et il m’a fa it rembourser en assignats tous
les anciens capitaux qui m’ étaient dus.
G rand D ie u ! quel affronteur/ quelle est donc une seule créance
dont j ’ai- coopéré au remboursement ? M ais avant to u t, vous toujours
o b éré, quelles créances autres que celles
provenant des ventes des
biens de votre femm e , dont la valeur équivaut au
vous été dans le cas de toucher ? je 11e suis entré
vôtre , avezpour rien dans
le s tripotages que vous avez faits à ce s u je t , et lorsque vous avez
eu la facilité de recevo ir, yous yqus êtes passé de tous bons offices
même de c m
de Louïrette.
I
�B o yer se dit mon ami 3 il fu t cause de ma. réclusion ; i l eut l'attrocitc d’insulter à mes malheurs.
Ir>tensé ! quel
l’autre
;
eh !
a c te ,
vols
quel m otif aventurez - vous ? ni l’un ni
affectez d’oublier tout
ce
que
je
fis pour
vous à cette triste époque ! n'est-il pas fâcheux que vous me for
ciez à vous savoir gré de cet impudent mensonge , la défiance
et l’indignation publiques à ce s u je t, s’étendront bienrôt sur votre
libelle comme sur votre personne.
Je ne fus pas chargé par Couthon de
la mission
douloureuse:
que me donna la Municipalité d’enrrer dans cet endroit de malheur
où vous étiez.
Lorsqu’il
s’agit de
faire exécuter la séparation
du s e x e , des
hom m es, j ’en appelle à tous les reclus et aux demoiselles de l’E ta n g j
leur position m’arracha des larmes , j’obtins à leurs désirs t qu'elles
restassent. Je vous n om m ai, il est v r a i, sœur Ce^ar, vous rites de
cette allusion sut l’opposé à cette vocation. Je n’eus aucune intention
de vous fâcher. C ’était dans cet instant fatalj une expression frater
nelle , par le plaisir que j ’avais que vous eussiez échappé à de plus
grands maux.
Quelle est donc la trempe de votre poignard pour ouvrir déjà ma
tombe ! il vous reste encore i empoisonner l'action dont je viens
de goûter les délices. Compatissant aux malheurs de la dame
Der
fargues comme je le fus aux v ô tres, je v ie n s , par acte p u b lic , de
lui remettre des biens que j’avais achetés plus de 80000 francs en
assignats. M on intention était connue depuis long-temps de M rs.
de Vcrniere > de Fougères , L e v é , Asticr , juge du tribunal <1’ar
rondissement à R iom . Chacun de nous a cherché à l’em porar suc
l’autre, en délicatesse dans les procédés.
J ’ai reconnu dans cette dame cette véritable illustration de nais~
sance et de rang. Vous êtes bien loin d’en approcher , Champflour !
;votre m alig nité était p eu t-être nécessaire p o u t
mous
faire connaître
�elle ne setvira qu’à faire plus honeur à ma mémoire. J e désire un
retour sur vous-même , mais vous, me rappelez ce que j’ai lu quel
que part
peut-être dans l’allmanach ou dans le praticien Lange , qu’il
est des h o m m es,
m enso nge.
tout glacés pour
la
v é r it é
to u t feu
,
p o u r le
L e Public va juger que nous différons encore
point.
sur ce
'
,
B O Y E R.
L E T T R E
DE
COUTHON.
Paris, le 7 Juillet 1 7 9 3 l’an 2
République française.
G E O R G E
de la
C O U T H O N ,
A u x Offic ie rs Municipaux de Clermont.
M
ES
CHERS .CO N CIT O Y E N S;
J ’ai vu chez moi avec.............. CHampflour-Beaumont ; il m’a communiqué
tous ses certificats et passe-ports ; il m'a apparu ainsi qu’à............. légalement
en règle. Il a désiré que je vous en écrivisse ; je le fais avec plaisir, parce '
que j’aime à dire les vérités qui me frappent , et que d’un autre côté, je
n’ai jamais remarqué que Champflour fut un ennemi 'du Peuple.
A CLERMONT-FERRAND
,
D E L’IM PRIMERIE DE GRANI ER E T F R OIN?
rue Balainvilliers.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
émigrés
Couthon
notables
faux
communaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Pui-De-Dôme, demandeur en cassation ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat.
suivi de « Lettre de Couthon ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0929
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0928
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53090/BCU_Factums_G0929.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Solignat (63422)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
communaux
Couthon
Créances
émigrés
Faux
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53089/BCU_Factums_G0928.pdf
55bd2cb0170fb20e9893ed4723d022e4
PDF Text
Text
MEMOIRE
EN
RÉ P O N S E ,
POUR
J
CHAMPFLOURD ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
e a n
- B
a p t i s t e
Puy-de-D ôm e,
- Cesa r
défendeur j
CONTRE
\
P i e r r e B O Y E R , juge au tribunal civil de
l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Q u o d genus h oc hom inum !
V irg.
B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de C lerm ont, a été long-lemps mon procureur et mon
A
P IE R R E
t r ib u n a l
de
CASSATION.
�( s )
Iioinmc d’affaires ; il me scrvoit avec exactitude, je le
récompensois avec généi-osité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières ,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
Il devoit à l’une, de scs filles une dot de 20,000 francs ;
il ex p o se, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
dot.
U n jugement solennel du tribunal d’a p p e l, séant à
R io in , a réduit les prétentions de B o yer, i° . à une
somme de 1,800 francs 13 centim es,.qtii étoit due par
feu mon frè re , et que je ne contestois pas; 20. à une
somme de 2,400 fi’ancs que je paye deux fo is , parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
.Boyer m’a fait signifier le jugem ent, avec som m ation
de Vexécuter. J ’ai* payé ; il a reçu. A u jo u rd ’hui il se
pourvoit en cassation.
O n sent que-cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugcniènt du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homm e aussi peu délicat, Siégeai parmi
les magistrats du département.
Il a cru détruire cette prem ière impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore; je m ’éfois
contenté de faire valoir mes moyens ù l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intéi’êts. Je croyois devoir cette con
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que th o n n eu r lu i survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance ; il a soixantesept ans : il pourroit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. Il affecte de rappeler souvent qu’il est juge :
nn plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nom m é parce q u i l le co n n o isso it, et que le gouverne
m ent ïa v o it conservé parce q u i l ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon am i; il m ’a dénoncé comme
émigré ! Boyer se dit mon a m i, et il m ’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m ’étoient dûs!
(i) U n citoyen de Clermont réclame contre l’assertion de Boyer,
et lui fait au contraire de grands reproches : c’est le cil. Bourdier.
Il devoil à défunt Beraud , mon beau-père, une rente annuelle de
5o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années' d’airérages : le
citoyen Boyer éloit chargé d’en poursuivre le recouvrement. Bour
dier lui donna douze louis en or à compte ; mais il n’eut pas la
précaution de retirer de quittance, parce que Boyer prom eüoil de
la lui faire donner par la dame Beraud. Boyer a oublié celte cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la montre, a toujours dit le
délicalBoyer : etles douze louis seroient perdus pour le cil. Bourdier,
si je n’avois eu connoissance du fait. Je les alloue au ciloyen Bour
dier : c’esl encore une somme ii ajouter à toutes celles que j ’ai
données ù B o y e r, qui voudra bien la regarder comme une nou
velle marque (le reconnaissance.
A 2
�Boyer se dit mon ami ; il fut causes de ma réclusion f
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jo u r , en sa qualité de
com m issaire de Couthon , il se rendit ù la maison des
U rsulines, où on avoit entassé une foule c^e victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les fàm m es, et de
les conduire dans un autre cachot. N on seulement il se
perm it de les traiter avec une rigueur digne de «es temps
affreux, qui lui convenoient si L ien , mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœ ur César.
M o i Cham pflour, ami de Boyer! mais l’âge,'la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations , les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. Il convient lui-m êm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des m arques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B o y e r, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
E n fin , cette amitié ne remonte pas bien loin , puisque
au rapport de B o y e r, ce n’est qu’en 1783 ou en 17 8 4 ,
que je lu i a i été -présenté. Q uel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérém onie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et au mois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoîfre. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à Ilio m , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
?
�(
5
)
J}c> \
M a famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite; mes ancetres se sont illustrés dans la magis
trature, et l ’un d’eux fut annobli pour services rendus à
l ’état. C ’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
un citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. L a propriété principale
que je possède est située près de G lerm ont, dans un
des plus beaux cantons de la Lim agne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p la c é , dans un temps où il
existoit des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit fo rcé, dans la v i e , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m ’étoit ouverte de toute
p art, et q u o iq u ’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
B o y e r, qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un rom an, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m ’appliquer •, mais personne ne m ’a reconnu à ce portrait
louchant.
L a charge de receveur des décimes du clergé, appartenoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exercée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par B oyer, que j’avois chargé
de mes affaires ; le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer lit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai scs soins et son zèle; je lui iis
�•
f
(G )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleux, et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu , il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de là charge de receveur
des ta illes, qui venoit également de ma famille. Il est
connu de tout le départem ent, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l ’en ai jamais occupé.
•
E n 17 8 9 , j’eus besoin de quelques fonds; Boyer me
p r ê ta , le prem ier novem bre de cette même an n ée, une
(1)
Il n’est pas inutile de détailler ici les différons cadeaux que
j ’ai faits à B o yer; vingt couverts d’argent, dont huit à filets; huit
cueillers à ragoût, douze cueillers à c a fé , six salières d’argent,
une écuelle d’argent, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d’argen t, à h ateau , trèsbien ornés ; six flambeaux d’argent , deux cueillers à sucre , à
jour ; deux tabatières d’or pour le mari et la fem m e; une montre
d ’or à répétition, deux moutardiers et deux cafetières d’argent ; un
cab rio let, un fusil à deux coups, deux pistolets et une selle, cin
quante cordes de bois ù b rû ler, une feuillette de B ordeaux, tout
le bois nécessaire pour parqueter sa m aison, faire ses alcôves et
séparations, le tout en planches de noyer et poirier, et tant d’au
tres choses qui ne reviennent pas ù ma mémoire.
En argent , soixante-dix louis , qu’on lui fit accepter comme
bénéfice du je u , quoiqu’il n ’eût rien avancé.
l ’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis; jo
ne parle de cette largesse , que parce que je sais qu’ il monsieur
çlle en rendoit quelque chose.
�QU
(7 )
somme Je 5,ooo francs, avec intérêts à cinq pour cent,
sans retenue. L ’année suivante 1790, je renouvelai mon
Juillet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novem bre 179 0 , il me prêta encore une somme
de 2 , 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. J e voulus retirer m on billet ; il n’eut pas
le temps de le chercher au même m om ent; je négligeai
de le redem ander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792 ', je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois ém igré; il me dénonça comme
tel, le 27 octobi-e 179 2; sa déclaration (x)contient rén u
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son proiit les 1 * et 11
novem bre 179 0 , quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
....... ■
I
........ .
— ■!■■■■■— I
■■
. ■
(1) V oyez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o y e r, que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1793, il me faisoit
rembourser deux fois la somme de 2,5oo francs. Que vous ai-je
répondu, me d it-il? — Q u'il1falloit vous payer encore une fois!
A lors m ’adressant au juge de paix et ù scs assesseurs, je m'écriai :
Quelle opinion devez-vous avoir d'un homme qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà reçu ? L e juge de paix et ses asses
seurs soiït très-mémoratifs de ce f a i t , et peuvent l'attester.
�* -r
( 8 ) .....................
mars 179 3; Boycr ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. O11 sent que ce 11’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit;
je crus ne pouvoir m ieux faire que de le mettre hors
d’in térêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Couthon.
Mais Boyer s’étoit encore fait un autre titre de créance;
il me dit avoir emprunté d’une nommée M artine D elarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pou voit-il qu’il
eût fait cet em prunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dam es, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retiré d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune m ém oire : point de recon-»
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut paÿer ( 1 ).
(1) A propos de Martine D elarb re, Boyer lui avoit emprunté
cette somme de 800 fr. le i 5 avril 1790. C ’est le
25
du m êm e
m o is, huit jours après ce billet , qu’il fit le compte des dames
Beraud et Chajmpflour , et il ne fait nulle mention de cet em
prunt pour leur compte. Je me suis procuré ce billet des mains
des héritiers de Martine Delarbre. J’ai remarqué qu’il étoit de la
6ormne de 840 fr. payable dans un an ; la somme de /¡o fr. éloit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossernens en
m arge, de la somme de /(.o l’r. chaque; l'un , du ia septembre
1792 ; l’autre, du 27 mai
On y voit encore , que sur la date
çlu
avili 1790» Boyer a cflacé le ipot d ix de la fin de }a date,
Mes
r
�( 9 )
M es rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme juge , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendém iaire; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les regards ; il ne lut pas même
fort en crédit jusqu’au 18 fructidor' an 5 ; mais à celte
ép oqu e, il reparut avec audace: il étoit cependant hu
m ilié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
fit parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro
chement. L e prétexte fut un aiTangem ent par lui fait
avec feu Cliampflour-Desmoulins, mon fr è r e , en 1789.
Suivant B oyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement com ptée, et ce qui avoit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le mot onze ; ce qui donne au billet la date de
4791 au lieu de 1790. L ’encre qui a tracé le trait sur le mot d ix t
et écrit le mot on ze, l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infiniment plus noire que celle du corps du billet et
de la signature qui le termine. Ces cliangemons ne paroissent
avoir été faits que lors de l'endossement de la somme de 40 fr.
du 27 mai 1795 : cet endossement est postérieur au rembourse
ment que je lui ai fait. Il voulut alors rembourser Martine Del arbre
en assignats, sur le prétexte que je I’avois remboursé de même.
Cette fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et qu’elle ne lui avoit pas prêté pour mou compte;
alors il effaça le mot d ix pour y substituer le mot onse. 11 avoit
deux objels ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l’autre, de rendre plus probable l’emprunt qu’il
disoit avoir lait pour ces dam es, en lui donnant une date posté
rieure au compte qu’il avoit fait avec elles , et qui se Irouvoit
trop rapproché de la date du billet pour qu’on ne soupçonnât {»as
sa délicatesse.
B
�( ÎO )
.aucun bénéfice sur ces payemens; mais comme je lui avois
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790, il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte que je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un com prom is, pour nous en
rapporter définitivement à deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i , et que Boyer ne clierchoit
qu7un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m ’avoit prêtées en 179 0 ? Il crut s’être
fait un titre pour me forcer A lui donner une indemnité ;
et bientôt, révoquant le com prom is, il me traduisit au
tribunal civil du P u y-d e-D ô m e, où il étoit juge.
M ais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’éti'ange marché que B oyer
avoit fait avec mon frè re , le 2,8 mai 1789.
Cham pilour-Desm oulins, mon frère , étoit un jeune
m ilitaire, gén éreu x, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et m e devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les mains une quittance de mon frè re , de la tota
lité de sa légitim e, en date du 1 " avril 1784; un billet de lui ,
du 1" mars 17 8 9 , par lequel il se reconnolt mon débiteur de
4,600 francs; et un second, du 25 août 1791 , par lequel il reconnoit me devoir la somme de 16,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n'ai cessé de venir au secours de mon frère dans.
tous les temps ; j’ai une foule de lettres de lu i, par lesquelles il
m ’exprime sa reconnoissancc.
?
�Il lui restoit pour toute ressource une créance de
16.000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cen t,
sur le p rix de la charge de receveur des tailles de
l ’élection de Clerm ont, dont le tiers appartenoit à notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V i r y , notre
o n cle , titulaire de cette charge.
M on frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude ; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les m ojens de le tranquilliser. Il proposa à mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V i r y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se chargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Desmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
M ais un acte .de ce genre seroit bien coûteux-, entraîneroit des droits d’enregistrement considérables ; il faut
éviter cette dépense, et il y a un moyen tout simple.
D on n ez-m oi, d i t - i l à D esm ou lins, une procuration
notariée, pour m ’autoriser î\ recevoir les 16,000 francs
et les intéi'êts que vous doit votre oncle ; vous reconn o îtrez, par cette procuration, que f a i déjà payé les
12.000 fra n cs à vos créa n ciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne celte somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans, avoir donné un sou; et ce n’est point
B 2
�ici une assertion aventurée ; B oj’er l ’a reconnu clans lo
compromis du i 5 fVusador an 7 ; il a renouvelé cet aveu
devant le juge de p a ix , devant les premiers ju ges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
p o u r cause f a u s s e , ou sans cause préexistante ( 1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi im portante, sans bourse délier! et Boyer
veu t-il que l'honneur lu i survive, lorsqu’il est condamné
à remettre une obligation consentie pour cause fa u s s e !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) En même temps que mon frère souscrivoit cette obligation,
jl avoit donné à Boyer l’état de ses dettes. C et état étoit ainsi
conçu:
i°. A M . L aville, M . B lau d cau tio n ............................... i , 5oo fr.
A la Nanon , cuisinière de mon f r è r e ......................
Goo
A Dufraisse-Lapierre, domestique de M . de Flagheac,
1,200
c i ...................................................................... ... . :'V . . .
M . Boyer , ma c a u tio n ...................................................
2,800
A madame S a u z a d e .......................................................
2,900
A Caze , p e rru q u ie r........................................... ...
3i 5
A F a b r e , c o n fis e u r .......................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r ..............................................................
1,200
A B l a t i n ............................................................................
A B ra cb e t, t a i l l e u r ............................. ........................
260
5Go
T o t a l . . . ............................. ...
12,353 fi .
Voilà les dettes que devoil payer Boyer ; il n ’en a acquitté
d'autres que celles de C aze, Fabre et Blalin , que je lui ai allouées.
( E xtra it du livre journal de mon frl're, dans letjuel il avoit ins
crit les dettes dont B o y e r éto it chargé).
!
�an 8, Boyer obtient une cédule du juge de paix du
la section de l’Ouest de Clerm ont - F erra n d , où je
suis dom icilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m ’a rendu des services nota
bles ; q u i! a reçu d’abord de m oi des m arques de re
connaissance ,- il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 179 0 ; que l’époque des-remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’éclielle de
dépréciation, suivant les conventions des parties ; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et L o u yrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les a veu x; e t , comme les ni-bitres n’avoient autre
chose à faire qu’ un calcul qui seroit p én ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
„11 ine demande au prin cipal, i° . la somme de 8, 55o fr.
pour les causes énoncées au com prom is; 20. les intérêts .
de celte som m e, à com pter depuis l’échéance des effets;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen L e scu rie r, pour le compte do mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; p lu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l'obligation de 12,000 fr. 4 0 . la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen B u gh eon ,
le 28 niai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 179 2 , avec 136 fr. pour intérêts ou frais.
. Boyer demande encore une somme de 2^7 fr. 20. cent.
�( H )
payée à B la tin , négociant, le 8 juillet 178 9; celle de
3 1 5 fr. payée au nommé Caze, coiffeur, le 10 du m ême
m o is; celle de 1,218 fr. donnée à F a b r e , m archand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desm oulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclam oit aussi une somme de 2,400 fr,
qu’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un effet souscrit par mon frè re , et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B o y e r, par une suite de confiance ; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , B oyer. demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr- qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en fa v e u r de qui.
Telles étoient les demandes prin cipales, et comme
Boyer se trouvoit dans le b e so in , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
b ref d é la i, pour être condamné à lui p a y e r, par pro»
vision et à bon com pte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il donc dans le délire ? à qui persuadera-t-il
qu’il a em prunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
d’une p a rt, .et 3,180 fr. d’au tre, sans se faire donner
aucune reconnoissance par celui pour lequel il faisoit
les emprunts? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas môme
déclaré aux créanciers ? Pourquoi , quand Bughcon a
obtenu contre lui une sentence de condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi 11’a-t-il pas fait dénoncer les poursuites de
Uuglieoa ù mon frère ou à ses héritiers ?
I
�C 15 )
•Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l'obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’être créancier?
M ais cette obligation est contenue dans une procura
tion qui l’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo francs par annee ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il étoit
donc tenu de rendi’e compte de sa pi’ocuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescurier
et de Bughcon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient tourné à son profit. Reçues par mon
frère ! mais cela étoit im possible, Boyer ne devoit lui
rien com pter; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu , il n’a rien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets m inutieux de
B latin , Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs:
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de L escurier, Desmouliiis étoit
à son régim ent ; j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-m oi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m ’a fait assigner.
N o n , ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l ’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789 > ei1^ l’a(lresse de tirer sur
moi la lettre de change de B u gh eo n , et c’est avec ce
�(i6 )
même argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus délié , il reliroit deux fois son argen t,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai rem boursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frèi’e : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adroit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argum ens, qui
étaient sim ples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m o i, et que cet écrit étoit accablant.
M ais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoître
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et d em ’attérer par cette preuve que j’avois m oi-m ême donnée.
C e fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A v a n t d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît con
noître le montant des sommes qu’il disoit avoir em prun
tées pour mon frère.
Boyer me présente une feuille de papier, et rne prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Bo}rer a emprunté
« pour mon frère ,
« i°. A M . Buglicon 3,000 francs.
« 2°. A M . l'abbé A u b ie r 1,800 francs.
« 30. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres ; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je denuiXHÎois,
�c 17 )
^
^
J*
mnndois comment ces prétendues créances étoient étaLLies. Boyer prend de l’hum eur, et retire le p ap ier:
ce st cette inéme note qu’il a eu l’indignité de p ro d u ire,
et qu’il aimonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il ? 11 ne produisit qu’un papier
c o u p é , de la longueur de quatre lign es, dont il vouioit
se servir; il avoit supprimé le reste, et l’avoit coupé
avec des ciseaux ( i ).
P our le co u p , ce fut B oyer qui fut altéré, et publi
quement couvert de lionte. Malheureusement pour l u i ,
la créance de Yabbé A u b ie r se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de Yabbé A u b ier. S’il avoit supprimé les
'autres qu’il ne demandoit plus ; il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A u b ie r; cependant il convenoit qu’elle
DC lui étoit pas due. O r , il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Buglieon et L escu rier, quecelle
d’A u bier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou celte préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables ?
Q u'on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Buglieon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
m ’a voit prêtées en 1790! et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'audience, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des ciseaux , ils
firent éclater un mouvement d’indignation contre l'infidélité du
citoyen Boyer. Plusieurs citoyens de C lerm o n t, qui étoient éga
lement à l’audience, s’en aperçurent, et ont publié que les rieurs
n ’etoient pas du côté.du citoyen Boyer.
�Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m ’avoit fait
écrire sous sa dictée , et sur le même p a p ier, il avoit
porté entre autres , une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen Lenorm andFlaglieac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dire si mon frère avoit été son d éb iteu r,. et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
L e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
cîcvoit rien , et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
J e présentai cette lettre à l’audience, et iis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé diiïérens créanciers! Quand
on connoît B o y e r , il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B o y e r , procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l'audience sur l’interpellation du président!!!
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon frère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu'il me demande, et celles qu’il ne m’a pas
(1) TCoyrr a ajouté tf'» sa main son prénom , <jui avoit été laissé
rn blanc dans le double du compromis <jue j’ai en mon pouvoir.
�Jss
( *9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent à
178 9, et qu’il est établi que mon frère a resté à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 17 9 1, sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C ’est ici le cas de parler de la lettre de change de
.Lahousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 francs , au profit du
citoyen Lahousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788; il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de pai'ler principalement de la créance de Lahousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrais
à diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Lahousse; je n’avois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la detle; je priai le
citoyen Lahousse de vouloir bien inc remettre la lettre
de change de mon frère, et j’offris de souscrire à son
prolit un effet de pareille somme.
L e citoyen 1 -ahousse s’empressa d’accéder à ces arrangeinens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’effet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
fam ille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ign o roit les arrangeinens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dern ier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le m ontant, et l’engage
à mettre son acquit au Las de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’éloit des deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien con n u e, m algré la m alignité
de B o y e r , refusa de signer l’acquit , en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature; il a osé depuis form er
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payem ent, sur le fondement
que Boyer étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a entraîné les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme ju g e, sans le juger comme hom m e; mais
cet homme est im juge!!!
Mais je demanderai à B o y e r, comment et à quelle
époque il a payé ccltc somme à Lahousse ?
Boyer a d it , en plaidant, qu’il l’a voit acquittée à
l’échéance : on se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 178 9; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de celle obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
nanti avant d’etre créancier; il eu convient lui-incm e.
�Il ne l’a pas payée depuis, puisque la lettre de-change
étoit sortie d’entre les mains de Lahousse, lo n g-tem p s
avant son échéance. Tous les faits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Lahousse’; déclaration que j’ai produite à
l’audience (r) : aussi,loi’sque j’ai satisfait auxeondamnations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre celte lettre de change, afin d'en
poursuivre le recouvrement contx-e Lahousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à celte rem ise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel, de Riom .
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l'im
pudeur de xvclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C ’est ainsi que j’ai payé i,8oo francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 178 6, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C ’est ainsi que j’en ai payé bien d'autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en noie, à Per
ception de celles de F a b rc, Caze et Blatin.
Je pou vois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Lalioussc est imprimée à la suite du mé
moire.
�( 22 ^
J ’avois présenté un autre état qui m’avoit été donné
par mon frè re , et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cette
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M o n frère avoit fait la note des sommes que j’avois pré
cédemment payées pour lu i, et m’avoit remis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une dem i-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa main , et que
mon frère n’existoit p lu s , cet état étoit une pièce pro
bante qu’on ne pouvoit contester : je m ’en fis un grand
m oyen , lors de la p laid oirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. B oyer, qui ne connois^
soit pas cette p iè ce , en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de ‘
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoienL avec
intérêt la discussion de cette cause. L a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est m em bre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
I/O défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit à la m ain;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates,
lia cause est continuée à une autre audience ; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit il mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
ijous demandons tous deux avec confiance, soit à B oyer,
V
�i
c 23 )
soit à son défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouvé.
A lo rs Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou raturé
les dates. O n voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, u ’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la p a rtie , lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la'p ièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté cette créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en c o n v in t, et Boyer fut
jugé par le public. A u jourd ’h u i , Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son m ém oire,/ lui Boyer,7 le seul en
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blAmera-t-on maintenant de m’être refusé à payer
une indemnité à Boyer, à. raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
20. .T’ai rem boursé,danslecourant de mars i793,dan su n
temps où les papiers avoient encore une grande valeur ( j ).
(1) Boyer ne peut pas équivoquer sur lVporjuc de ce rembour-
�C m )
Il est vrai qu’en m ’acquittant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il ne restoit plus de traces
du remboursement.
Q u’a fait l ’ingénieux B o yer, pour me donner plus de
défaveur sur ce rem boursem ent? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
O n lui observe que cela est impossible ; qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation ; alors il
répond que c’est au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut m ériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et L ou yrelte,
par nous réciproquem ent choisis : Boyer a révoqué lo
compromis.
4°. E n fin , je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit réciproque, et que Boyer in’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payomens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé ; il n’y a donc pas de réciprocité.
sèment. J’en al fait un , dans le même tem ps, au cit. L o u y re lte ,
l’un des arbitres, que Boyer lui-même pressoit d’exiger son paye
ment et d ’imiter son exemple , sur-tout à raison de ma prétendue
émigration.
Depuis le com prom is, il eut la mauvaise foi de prétendre que
le remboursement avoit été fait beaucoup plus lard ( en messidor
cm 4. ) L ’arbitre Louyrettc le releva sur cette assertion. L e dé
licat Boyer se hâta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire comme m o i, puisque nous avons été remboursés dans le même
temps. On conçoit actuellement le m otif de la grande colère de
Boyer contre Louyrelte.
Tels
�(25)
T els furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
m on défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les propos de taverne
et de café , qui fui*ent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pas été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut co u vert, d it-il, par mes vociféra
tions , et le trib u n al, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un d élib éré, et n’a prononcé qu’après
le plus m ûr examen.
Enfin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9 , qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clerm ont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m o i, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 178 9 , et de celle de 3,180 francs d’au tre,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même a im ée, intérêts et frais qui leur sont acces
soires;
-2°. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement do la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obliga
t i o n de 2,804 francs, prétendue contractée par Cham pllour-Desmoulins , au profit d'une personne inconnue ;
30. En ce que les intérêts ont é.é adjugés à B o y e r,
à compter des époques des payemens ; 40. E n fin , en ce
que j’ai été condamné aux dépens; ém endant, Boyer est
D
�'♦
.
(* o
débouté de toutes ses demandes relatives à ces différens
chefs, sauf à lui à agir en garantie, le cas échéant; (c’estù-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de 1,800 fr. 13 cen.
montant des sommes payées à B latin, Fabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné àpayerles 2,400f.
montant de la lettre de change de Laliousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour h me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
f r è r e , comme faite pour cause fa u s s e ou sans cause
■préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugem ent auquel
je suis condamné.
Ce jugem ent, dont Boyer a pris la peine de faire im
prim er les motifs et les dispositifs , est principalement
m o tivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à B oyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champilour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de B oyer, dans le compromis
devant le juge de p a ix , devant le tribunal d’appel, qu’au
pioment de celle obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère;
L e tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
»
�C*7)
iicatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et documens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement dç
la somme de 8, 55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i que cette somme a été par moi payée à Boyer*
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquem ent Boyer se soumettoit à ne ré
péter les sommes q u ’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon fr è r e , que suivant la môme propor
tion , et d’après l’éclielle ;
4 0. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. L e tribunal d écid e, quant h l’indemnité du caution
n em ent, qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet prescrit, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne pas.
L a condamnation des sommes ducs à B latin , Caze et
la b r e , est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change deLahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
V 2
J
�(a 8 )
.
A l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depuis
l ’époque de ses prétendus payemens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
con ven tion , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
la demande.
B o y e r, présent à la prononciation de ce jugem ent,
croit avoir fait un assez grand p ro fit; il p art, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content , qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement a mon avou é,
le 5 iloréal an 9 , sans approbation préjudiciable , pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon dom icile,
sous les mêmes réserves; mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugem ent, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire urt acte d’oifre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal cl intérêts; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage an procès, notamment la lettre de
(1) Ces réserves et protestations de Boyer me rappellent I’anecdote d’un vieux praticien, qui voyageant dans les ténèbres, fut
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à se reconnoîlre dans l’obscurité. II s’écrioit üt chacun : J e t’ ac
cepte en tant que tu me sers, ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
Comme lu i, Boyer ne marche jamais sans protestations.
�/
(
29
A
)
change souscrite par feu mon frère au profit de Lahousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient insci’its les noms de L escurier, 1abhe yliibier
et B ugheon, comme créanciers de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendrait, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Lahousse.
Boyer ne laisse pas échapper l ’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. (c e lle fa ite pour' cause
fa u s s e ) \ mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, d it-il, la lettre de change et la n o te, sous le
vain prétexte qu’ il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’a p p e l, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
11 me parut d’autant plus extraordinaire , que B o y e r,
qui m’avoit fait, sommation d’exécuter le jugem ent, qui
rccevoit le montant des condamnations qu’il prononce en
sa laveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
J e pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d’une rébellion à justice; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugem ent, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je préseulai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
nie permet de l’assigner à jour fixe sur celle demande.
L e i 5 du même m ois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à cc jugement dans le
d é la i, et a fait paraître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité , également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m ’apprend, par
ce lib e lle , qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
T elle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-etre été
m inutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire ; je laisserai ensuite ;V
mon' conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la p lu m e, le fait bon et
com patissant ! R isu m teneatis. B o y er com patissant! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les habitans de la commune
de Solignac , que Boyer habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des rutoirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand. ’ ~
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu'il in’a rendu s, Boyer a mal ch o isi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Q u’on examine celte ven te, du 16 janvier 1786 (x); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avoia pas encore été présenté au citoyen Boyer £1 celte
¿poejue.
�(3 0
l'acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 fr. au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi form el.,.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de .mes filles. J ’en ai trois , toutes établies; elles ont porté
a leurs mai'is une fortune au moins égale, et j’estime assez
mes gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m ’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (i),,
(1) Boyer dénature les fa its, relativement au citoyen Bonnet.
C e n ’est pas lu i , comme il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointement et cumulativement
le 9 août 1790. J’ai heureusement conservé le b illet; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m ontant, partie en im
meubles , partie en numéraire. J’ai donné en im m eubles, au mois
de juillet 1792, douze journaux de terre, situés dans les appar
tenances de C lerm o n t, dans le meilleur canton, près les jardins
des Salles ; p lu s, une grange située à Clerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai compté en o u tre , en numéraire , la somme
de 8,400 fra n c s, intérêts com pris, à la demoiselle B om part, à
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. Ces payemens
«nt été faits les 21 messidor, 21 et a5 thermidor an G: j’en rap
porte les acquits de la demoiselle Bompart.
�w><.
( 32 )
et quelques autres créanciers dont il Fciit rém unération.
M ais B oyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Q u’il
le dise , s’il l’ose. M ais de ce que Boyer a été ma caution,
tous ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’aventuroit rien lorsqu’il se prêtoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
sur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre m o i, comme ém igré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il pcrsécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit à R io m , chez le citoyen
G ren ier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de R io m ; et m algré sa m oralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterm iner ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E s t-il bien étonnant, d’après ces services sign alés,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon ém igration? Il n’en falloit pas tant en 179 3 ; et
j’aurois eu moins d'inquiétude, si j’avois été daiis cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
O n sait qu’il falloit être propriétaire pour être inscrit
sur la liste fatale.
B oyer,
I
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sur
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût interpellée.
A ccoutum ée à vivre dans la retraite, loin du tumulte de
la société, elle fit avec effort le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti'; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la fis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus*
qu’à m o i, cette imposture m ’affeeteroit plus vivem ent.
Lorsque vous dites que j’ai connu f’obligatiôn consentie
par mon frère , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai en-
( i) Boyer prétendit en plaidant, que les sommes empruntées
de Buglieon avoient été versées dans le tablier de ma sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm oulins, mon frère : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressémeut mon défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-même pour lui
donner un dém enti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de ma sœ ur, étoit
celle de 3,900 fr. prêtée par la dame Sauzade, que j ’ai acquittée,
Boyer ne l’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-même de cette manière
au citoyen B o ye r, lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dame Sauzade répondit à Boyer , que la somme
prêtée par le citoyen Buglieon son frè re , n ’avoit pas été compte«
à Desmoulins : elle est toujours prête à attester ce que j ’avance.
E
�e 34 )
core par le m entiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur m oi la lettre de ch ange, que j’en passai l’ordre à
Bugheon; mais je ne le iis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
n eu r, qu’il ne fut point question de mon frère :.vou s
saviez trop bien que ¡dans.ee moment je ne me serois pas
engagé pour lui. ¡. .
Un des grands argumens de B o y e r, pour prouver que
l’emprunt fait à Lçscuriçr n’étoit pas pour son com pte,
est de dire qu’il a pris de B aptiste, n otaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être; mais celle
quittance est pour le droit de contrôle : o r, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs ; e t ,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en retirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution no devoit pas échapper
i\ Boyer.
M a is, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère , puisqu’elle est
comprise clans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez C h evalier, notaire, le prem ier com plé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur celle pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avec m oi, et. nous avons été divisés, lorsque je
I
�( 35 )
^
en ai ' demandé le compte. V ou s prétendiez en
avoir fourni le m ontant, à la vérité en assignats; vous
m ’oifriez de me faire raison du bénéfice, à condition que
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez; e t, lorsqu’après plusieurs années de discussion j
j’ai voulu éclaircir ce fait, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m ’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usnge à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent que j’avois toujours refuse d’allouer de
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation :
en changeant le lieu de la scène, il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion; c’est le billet sans date, où j’ai prostitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus aj-îprendre au pu blic, lorsqu’il en fit parade,
les motifs qui l’avoient dicté. C ’est après la journée du
18 fructidor. J ’appartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme émigré ; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoil fait des menaces; il
disoit à tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu'il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma fam ille, mes amis, étoicnl alarmés; on m’engagei
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
tous
�C 36 J
code. Boyer étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
Iréquens de cette ville à celle de Clerm ont ; il cherchoit
surtout à épargner les voitures; j’envoyois la mienne à
R io m , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta Lien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste •
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calom nies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? 11 me semble
entendre ce voleur qui crioit bien haut de peur qu’on
l ’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore rid icu le, lorsqu’il prétend que j’écarlois
l ’afllucnce des honnêtes gens qui accouroicnt chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la foule , et qui n’a jamais personne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
destituer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernem ent
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il o b tin t, par importu n ité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si sou vent manqué
de m émoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut plus
s’étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres, quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrclte. Mais tous
deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
l’estime p u b liqu e, et tous les deux connoissent trop bien
B o y er, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( 37
) _
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
tx-iomplie.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; fa i le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugem ent, je.donnai à d în er, à Beaum ont, à plusieurs
citoyens , pai’mi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœ ux pour le gouvernem ent, pour le premier
magistrat de la rép u b liq u e, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion p u b liqu e, à lui-m êm e , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C ’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent sou volum ineux et insignifiant mémoire.
S ig n é, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examine la
procédure et le jugement rendu contradictoirem ent,
entre les citoyens Champflour et B o y e r , le 27 germinal
an 9 ; le m émoire en cassation du citoyen B o y e r , et
celui en réponse du citoyen Cham pflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen B o yer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du p ro cès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les difïérens chefs de créances réclamées par le citoyen
B oyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaires, si foibles, qu’on scroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen C liam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un m émoire contre lui.
En effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen B o y er, une fin de non recevoir invincible. Il a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l'exé
cuter, en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
sans se fa ir e aucun préjudice.
1.1 est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête prs
�(
39
)
.
l'exécution d’ un jugement en dernier ressort. M a is, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles être
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
q u i a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement; alors, s’il croit avoir ép rouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p o u rv o ir, il ne doit payer
que comme contraint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention, sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescemen t préjudiciable.
M ais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; d;ins ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l ’acceptation.
O r , le citoyen B oyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Cham pflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Cham pflour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc term iné, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrem ent, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Cham pflour scroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condam né, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugem ent, et don
nerait à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudrait syncoper le jugem ent, le casser dans
�une p a rtie , et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugem ent, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chefs
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i , dans l’état où
en sont les parties : les choses ne sont plus entières, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
• Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
B o y e r, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus m ûr examen ?
Il oppose, i° , que la cause a été plaidée pendant deux
audiences; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ. Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7, sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui , suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , q u i, dans ce ca s, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
A v an t de proposer un pareil m oyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il allaq u c,
et qu’ il a lui-m êm e fait signifier. Il y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été prononcé. Boyer devroil surtout §e rappeler, puisqu’il
éLoit
�C41 )
¿toit présent à l’audience-; qu’il assistait son avoué pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut prononcé.
Ce fa it, au surplus, est constaté par le jugement q u i ,
sans d o u te, mérite plus de confiance que l’assertion de
Boyer. 11 porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant deux précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i , après en avoir d é lib é ré , etc ». V oilà
qui répond , sans d o u te , à l’objection d’une manière
pérem ptoii’e.
D ’ailleurs , un délibéré n’oblige point à un rapport.
Jôusse, sur l’article H t du titre V I de l’ordonnance de
1667 , explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu ,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des p ro« cureurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience ; auquel ca s, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur le registre,
« sans mémoires ni-écritures. L e greffier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : on en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« l ’audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
c< plus prochain , et le jugement sc prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sortes de délibérés sont autorisés par l’article 111
du titre V I , et par l’article X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rap port, écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugem ent, qu’il
a été ordonné un délibéré ès mains de l’un des juges,
F
�»fe
.
.
^42 )
ce seroit la stricte exécution de l ’ordonnance, loin d’être
nne infraction à la loi.
Il est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brumaire , d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l ’exécution de l ’oi’donnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure , et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute pi'océdure ; l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
abroge donc nécessairement la loi du 3 b ru m aire, si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’exp liq u er, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boy.er pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
pspèce de rapport à la cause ; il p o r te , « que si les parties
« com paroissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
a de demande et le jugement définitif ; si l’une d’elles ne
« comparoît poin t, il lui sera notifié de plus le jugement
« préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« ccdure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
O11 11e voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’arlicle X n’est pas plus déterminant:
« Les juges des tribun aux, porte cet article, p ou rron t,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet examen , ils rentreront à l’audience pour y déli
ée bérer en p u b lic, y opiner à haute v o i x , et prononcer
« Je jugement. Ils pourront en core, si l’objet paroît
« l’e x ig e r , nommer un rapporteur, qui fera son rapport
I
�( 43)
« le jour indiqué dans le jugement de nom ination, lequel
k rapport devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétendra pas que le
'jugem ent est n u l, parce que les juges n’ont pas opiné
à haute voix. Ce m ode, qui a entraîné tant de dénon
ciations, n’est plus usité. L ’objet de la caiise n’exigeoit
'pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de soin
les différons chefs de demandes, et le citoyen Boyer doit
'se féliciter de cette précaution; elle lui a valu lu con
damnation du billet de Lahousse, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
Ainsi , ce premier moyen de cassation est absurde et
inadm issible, d’après la teneur du jugem ent, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second l i eu, que le ju
gement viole la disposition de l’article 1 du titre III do
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le ciloyen Champflour
est condamné ; il se fonde sur ce que le citoyen Cham p
flour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il 11’avoit point fait d é lire s; d'où il lire la consé
quence que tous les dépens éloient à la charge du citoyen
■•Champflour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses applicaeations : il est vrai que lïarticle qu'il invoque veut que
toute partie q u i s u c c o m b e soit condamnée aux dépens
F a
�■
•
-
(44)
indéfinim ent, sans que pour quelque cause que ce soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Ghampflour a -t-il succombe? L e citoyen
B oyer a form é contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient à une som m ede23,3i7f.
i o cent. Il n’a réussi que sur deux ch efs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r , il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
g a g n e , surtout lorsque ces chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des dépens. C ’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyei'. V o ici com
ment il s’exp liq u e, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l ’assignation, et que le deman« deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les com penser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagn e, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
u sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Cham pflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le prem ier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoieut
contenus dans le même exp loit, et ont bien évidemment
occasionne autant de frais les uns que les autres. L e
�(45)
citoyen Cham pflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens; cependant ils ont été com pensés,
et le coût du jugem ent a été entièrement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en p lain d re, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-même dans
son troisième moyen. Sans doute on doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairem ent contractées.
M ais lorsque les conventions ou les obligations sont
purem ent conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accom plies, avant que la
convention soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention ; l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur uue vérité aussi certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être conlroverséi
O r , quelles sont donc les conventions des parties? E n
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Cham pflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qu’il lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fait
Un compte entre les parties, et que Boyer l’indeinniseroit
h son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’éloit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Cham pflour
n’éloit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-même. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties; Boyer n’a fuit aucun payement pour le compte
�( 4 <5 )
du citoyen C h am pflour-D esm oulins, o u , ce qui est la
même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il li’y à donc plus de consentement, dès
que Boycr révoque le Compromis •, il n’y a donc plus do
récip rocité, dès que Boycr n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir e n compensation aucune indem nité,
et cependant la compensation avoit été la cause prem ière
et essentielle du contrat ; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
co n d itio n , la convention est demeurée imparfaite. C ’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce q u ia été parfaitement
développé dans les m otifs; et si Boyer prétend que daus
un contrat synallagmatique et récip ro q u e, le citoyen
Cham pflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-m êm e;
qu’il pouvoit se jouer de scs engagem ens, tandis que le
citoyen Cham pflour étoit obligé d’exécuter les siens ,
cette prétention paraîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation , parce qu’il n’y a ni v io
lation de fo rm e , ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frim aire, 5 therm idor an 4, i 5 fruc
tidor an 5 , sont également mal appliquées.
1
P rem ièrem ent, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le discrédit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frim aire : Boyer avoit reçu volontaire
m ent, et ralenti n o n jit injuria.
Les lois des 9 therm idor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nç se sont occupées que des obligations pures et simples,
I
�et non des contrats conditionnels; il étoit donc inutile
de grossir un m ém oire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut exam iner le fond du
pi’ocès.
L e quatrièm e m oyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
g rief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Buglieon et Lescurier ; il va jusqu’il
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de i2 ,co o f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend quç cette n o te , qui émane
du citoyen Cham pflour., prouve que D ësm oulins, son
frère, a touclié les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l ’emploi
de 12,000 francs; mais il prétend avoir p r o u v é , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
C ham pflour, que D esm oulins, son fr è r e , avoit touché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rem pli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugem ent; la confession de celui qui est muni d’un
pai'«il titre , ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
T o u t est erreur et confusion dans ce g rie f, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
11 se plaint de ce que cette obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Q u’on lise son exploit introductif. de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; on verra que
�(48)
loin de conclure au maintien de celte obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
Cham pflour a.demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l?a ordonné en m otivan t, sur les aveux de B o yer,
qu& robligatipn étoit consentie p o u r cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
«
»
__
A l ’égard des lettres de change souscrites par B oyer,
au profit des citoyens Bugheon et L escu rier, rien n’établissoit que l’em prunt eût tourné au profit du citoyen
Cliam pflour-Desm oulins; il n’en a pas reçu le m ontant;
il ne devoit pas même le to u ch er, d’après les conven
tions , puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Cham pflour-Desm oulins;
et B oyer n’a payé aucune de ces dettes.
P o u r l’écrit prétendu émané du citoyen Cham pflour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. L a forme de cet é c r it, la
créance de îa b b é A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de B u gh eo n , et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payem ent, dénotent assez le cas qu’on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroit dû
précédemm ent supprim er; mais le jugement ne pouvoit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas form é la demande : le tri
bunal ne pouvoit condamner le citoyen Cham pflour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen B o y er; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celte p a rtie , ce scroit un grief d’ap p el, et non
un moyen de cassation.
Dans
?
�(
49)
Dans son cinquièm e et dernier m oyen , le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 1789, qui permet à Favenir
de prêter de l’argent à termes fixes, avec stipulation
d’in térêts, suivant le taux déterminé par la loi , sans
entendre rien innover aux usages du commerce.
L e citoyen Boyer argumente de cette lo i, pour prouver
que le jugement dont il se plaint auroit dû lui adjuger
les intérêts de la somme de 4,200 francs qui lui a été
al l ouée, à com pter du payement qu’il dit en avoir fait.
L e jugement ne lui adjuge cet intérêt qu’à com pter de
la dem ande; d on c, suivant le citoyen B o y e r, il y a in
fraction à la loi du 3 octobre 1789, par conséquent ou
verture à cassation.
Etrange conséquence ! Suivant les anciens principes,
l ’argent étoit stérile de sa nature, et ne pouvoit produire
d’in térêt, lorsqu’il s’agissoit de p rêt, qu’autant que le prin
cipal étoit aliéné entre les mains du d ébiteu r, ou qu’il
existoit une demande judiciaire en payement.
L a loi citée n’a pas dérogé à ce p rin cip e; elle a seu
lement laissé la faculté, pour l ’avenir, de stipuler l'intérêt
au taux o rd in aire , par l’obligation ou le b ille t; c’est-àdire , que lorsque cet intérêt est stipulé par l’écrit émané
du débiteur, les tribunaux doivent l'adjuger , conform é
ment à la convention ; mais s’il n’existe aucune stipula
tion , l’intérêt n’est d û , comme autrefois, que du jour
de la demande.
O r , il 11’y a aucune convention de cette nature entre
les parties, puisqu’aucontraire les sommes réclamées par
le citoyen Boyer étoient contestées ; que d’ailleurs le
prétendu prêt étoit antérieur à la lo i; il y a plus, c’est que
G
�<<•
( 5o )
dans les emprunts prétendus faits par B oyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l ’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payem ent, et que cet intérêt
■avoit été confondu avec le principal. C ’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier ei B u gh eo n , et pour les
soijimes adjugées à B oyer; tel est d ’ailleux’S l’usage abusif
et usuraire qui s’est introduit dans le commerce.
A in si les prétentions du citoyen Boyer ne tendroient
à rien moins qu’à se faire adjuger l ’intérêt des in térêts,
et à faire admettre l ’anatocisme dans les tribunaux.
XI invoque une clause du com prom is, où il est dit que
les citoyens L ouyrette et Costes, arbiti-es, feront aussi le
compte des in térêts, conform ém ent à la loi. M ais cette
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1 789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à com pter
les intérêtslégitim em ent d û s , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créance L ah ousse, auroient
au contraire x-ejeté le principal.
M ais le citoyen B oyer a révoqué le com promis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-m êm e détruit.
L e citoyen B oyer, en terminant son m ém oire, annonce
que ses moyens sont encore m ieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est com m uni
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cbam pflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R io m , par les anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendém iaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrarid, le 30 vendém iaire
an dix.
D A R T I S - M A R C 1L L A C .
qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. D élibéré à R io m , le 3 brum aire
an 10.
Xi
e
c o n s e i l
s o u s s i g n é
,
ANDRAUD.
�VJI,
PIECES
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C IA T IO N
DE
PIERRE
B O Y E R ,
Antérieure à l’inscription du cit. Champflour, sur la liste des émigrés.
E x tr a it des registres, contenant lés déclarations des créanciers
sur ém igrés, tenus au ci-devant district de Clerm ont, n°. 74.
A u j o u r d ’ iiu i
IS
!»
vingt-sept octobre mil sept cent quatre-vmgt«douze, a été déclaré par le procureur syndic du district, qu’il lui
avoit été signifié un a cte, en sadite qualité , par le ministère de
W e lla y , huissier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette com m une,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit Boyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisleCésar Champflour-d’Alagnat ; pour lequel il avoit fait des affaires
im portantes, et s’étoit prêté, à son égard, à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’avoit fait de la ma
nière la plus généreuse, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , ne
s’attendant â d’autre reconnoissance qu’à celle que se doivent des
ümis ; qu’il l’avoit principalement obligé , en souscrivant diffé
rons emprunts faits par ledit Cham pflour, notamment un billet de
la sommé de 17,000 francs au profit du sieur R och efo rt, et autres
quatre de 85o francs chacun, le 3 mars 1791 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d’indemnité : 20. d’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur Champilour par le citoyen B ru n e i, pour lequel il y
avoit également indemnité ; qu’il avoit en outre passé l’ordre de dif
férentes lettres de change tirées sur lui par ledit sieur Chamjtflour, dont il étoit dans l’impossibilité de donner le d é tail,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notamment celles
�jé r
(. 5 5 )
•
• ^
tics sieurs B o n n e t chirurgien, G uyot de Vic-le-Com le, et autres ; qu’il
lui étoit du à lui-même par billet 7,95o iîancs : p lu s , q u ’il lui
étoit dû par ledit Champjlour-Desmoulins la somme de 12,000
francs par acte devant notaire , lesquels l'ifo o o fr . (1) lui B oyer
avoit empruntés pour les compter audit Champjlour ou ci ses créan
ciers, et fou rn i de ses deniers ce qu i n’avoit pas été emprunte ;
mais que cette somme lu i avoit é té déléguée à prendre sur les
sieurs de V i r j père et f i l s , p a r le même acte du 28 mai 1789 ,
lesquels devoient audit Champjlour la somme de 16,000 francs
portant quinze cents francs d’ intérêts ; qu’il étoit même porteur
du titre obligatoire qui étoit commun avep le sieur Champjlour
a îné et la dame B l o t , auxquels il éloit dû pareille somme.
Q u’il avoil été instruit par bruit public que ledit sieur César
Champilour étoit ém igré; qu’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts, et de faire en conséquence la pré
sente déclaration , avec protesta Lion de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte étoit signé dudit sieur Boyer et de l'huissier.
Que M . le procureur-syndic croyoit 11e devoir être tenu ¿1 autre
chose sur cette signification, que de la déposer au secrétariat du
d istrict, pour valoir et servir audit Boyer ce que de raison ;
que les lois, soit du 8 avril, soit du 2 septembre dernier, ne le
rendoient en aucune manière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d’émigrés ; que l ’article V I de la loi du a
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce qu’ils avoient
à l’a ire, pour être conservés dans leurs d roits, privilèges et hypo
thèques , et être colloques utilement sur les deniers provenais de la
vente des biens des ém igrés; que par conséquent l ’acte du sieur
B oyer, qui, sans être un acte inutile, ne remplissoit pas néanmoins
(1) On voit que Boyer ne comptoit pas sur mon retour , lorsqu’il vouloit
s’approprier les 12,000 Francs énoncés en l’obligation de mon Irèie; quoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , pour ca u se fa u sse. , il ne la portoit pas moins comme une créance légitime qu ’il vouloit s’approprier, sans
doute pour V intérêt d e la nation. Yoilà_cet homme qui veut que l'honn eu r
lu i survive !
�( 54 ) _
le Lut de la loi sur ses intérêts ; et qu’il ne ponvoit sans autrement
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
(aire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
au secrétariat ; ce qui a été fa it, sauf audit B o y e r, s’il le juge à
propos, à parer aux inconveniens qui résulteraient de cette décla
ration imparfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé B e r n a r d ,
procureur-syndic. N°. 406.
Ledit jour 5 décembre 179 2 , est comparu au même directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r, avoué au tribunal du district
de C lerm ont, y h abitan t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment^ rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen B ern ard, procureur-syndic de ce district, le 27 octobre
d ern ier, a déclaré qu’ il croyait devoir la réitérer, et Vétendre
notamment sur des objets q u i d o i v e n t p r o f i t e r a l a r é p u b l i q u e ,
dans la supposition que Jean-Baptiste- César Champflour-Beaum ont, dom icilié en cette 'ville jusqu’ au 14 ou i 5 ju ille t dernier ,
so it ém igré, ce que le requérant ignore absolum ent, le sieur
Champjlour ne lu i ayant annoncé son voyage que pour la villa
de L y o n , n e s e t r o u v a n t p a s s u r l a l i s t e d e s é m i g r é s , dans la -*
quelle Joseph Champjlour son frère est inscrit. E n conséquence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d*affirmer s’ il en est
requis, ou s i cela peut être nécessaire ( 1 ) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Champflour , pour
lequel il a fait des affaires importantes et heureuses également
notoirement connues; que par suite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu’on peut faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’a
fait de la manière la*plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fam ille, ne s’attendant à d’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalement obligé en souscrivant
( i j Ma femme et l’ un de mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la démarche Je B o ye r; ils offrirent de le rassurer, par des engagemens soli
daires sur leur fortune personnelle, de lout ce q u ’il pourroit perdre : mais
Boyer oyoit d ’qutres vues; il comptoit se faire adjuger mon bien de Beaiw
»PQIltf
�( 55 )
différons emprunts faits par ledit sieur Cham pilour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient communs , notamment cinq billets à ordre.
L e Ier. de 17,000 francs en principal, au profil du sieur R o chefort de R io m , et les autres quatre de 85o lrancs chacun, le
3 mai 17 9 1, pour lesquels ledit sieur Champilour a fourni le
même jour une indemnité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
2°. Q u’il a souscrit avec ledit Champilour un autre billet de
la somme de 12,600 francs prêtée à ce dernier par le citoyen
B ru n ei, habitant de cette v ille , du 5 mars 1 7 9 1 , payable au
5 mars de la présente année, ignorant le requérant, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indemnité du même jour, et qu’il
a également déposé.
3°. Q u’il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur Cham pilour, el dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des prêteurs , desquels il est dans l'impos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n’en
ayant pas gardé des notes, comptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur Champilour ; mais qu’il en connolt plusieurs, notamment
celle du sieur B onnet, chirurgien de celte v ille, de 8,\ 00 francs ,
et qui étoit auparavant de 27,300 francs.
4*. Q u’il a souscrit et accepté deux lettres de change de
3,000
F.
chacune, en faveur du citoyen G u yo t, [de V ic -le -C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le x"* février 1795, pour
lesquels il y a indemnité du i or. février 1789, de la part du sieur
Cham pilour, en faveur dudit instant, laquelle le requérant a éga
lement déposée.
5*. Qu’il a passé l’ordre en faveur du citoyen Charbonnier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24° fra n cs, tirée par le
sieur Cham pilour, en faveur du requérant, le i 5 mars 1791 ;
6°. Q u’il est dû au requérant, i°. la somme de 5,260 fr. suivant
le billet consenti par le sieur Cham pilour, le 1". octobre 1790 ;
20. autre somme de 3,5oo f. portée par billet du 11 novembre 1790;
�(56)
S', enfin d’une somme de 4oo f. payée en son acquit au citoyen
Dessaignes, pour le montant d’un billet de pareille somme , du 23
août. 1790 , suivant sa q u ittan ce, au dos du 17 janvier 1791«
T o u s lesquels billets le requérant a déposé à l’in sta n t, en exé
cution de l’art. Y I de la loi du 2 septembre dernier, sauf à les
retirer, s’il est nécessaire, lesquels ainsi que les indemnités sont
timbrés et non contrôlés.
l i a déclaré d é p lu s , e t ce rouR l ’ i n t é k k t nE l a n a t i o n , sa u f
à réaliser sa déclaration a la m unicipalité de celte 'ville , con
form ém ent à la l o i , qu’ il a en ses mains les objets suivans , con
cernant le sieur Champjlour et son frère : i°. un double de
Im ité p a ssé sous seing privé entre les sieurs A rta u d -d e -V irj ,
père et fils, et les sieurs Jean-César Cbam pilour, Josepli Cham pilour, officier, et Claudine Champflour et Jean Gérard B lo t, son
m a ri, du 14 octobre 1782, par lequel les sieurs de V iry se sont
obligés à leur payer la somme de 48,000 fr. pour leur p o rtion ,
dans la charge que possedoit le sieur de V i r y , el l’intérêt de celte
som m e, sans pouvoir la rembourser de dix années , à compter de
l’époque du tra ité, sur le pied de 4>5oo francs par année, c’està-dire, i , 5oo francs chacun , en intérêts, et 16,000 en principal,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette ville,
du 29 janvier 17 8 4 , portant condamnation de ladite somme et
des intérêts, sur laquelle somme de iG,ooo fr. revenant au sieur
C h a m p f l o u r , officier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 mai 178 9 , en sorle qu’il n ’est plus dû au sieur
Champflour cadet que 4,000 fran cs, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ il a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Champflour et B lo t, au sujet de la comptabilité des béné
fices de la même charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V ir y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mémoires
et relevés pris sur les registres-journaux el sommiers pris par le cit.
Louyrette
I
�5 7 }
Louyrette qui y a , de sa p a r t, employé au moins trois m ois, sans
désemparer^, et qu'il sem ble, d’après le compte de clerc à m aître,
que le sieur de V ir y est débiteur d’environ 120,000 fr. envers les
sieurs Champflour et B lo t, le sieur Champflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, comme héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dame Espinasse, sa Jcmme, et les
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliampilour père, époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie rs, entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
(
sont com m unes, tant avec ledit. Blot et le déclarant qu’avec les
frères Cham pflour, et qu’il en est de même de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offrant cependant de communiquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , même avec déplacement.
5°. E n fin , qu’ il a en ses mains trois contrats de 'vente sons
seing privé , de deux parties de maison située en cette v ille ,
v i s - à - v i s les c i-d e v a n t A ugustins, et d’ un m oulin sur le
chemin de Clermonl , allant à Chaînaii<)vas ; les deux pre
miers , du a 5 septembre 1790 , l’un consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat aîné , et l’autre en faveur de Magdelaine
Charles , veuve de Claude D onces, sellier ; et le troisièm e, du 1 " .
avril 1791 , en faveur d ’Herm ent Jacob, traiteur, habitant de
cette ville, moyennant les prix y énoncés, desquels il a pareille
ment fuit le dépôt présentement, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B craud , épouse du sieur Cliampilour aîn é,
comme faisant partie de la succession du sieur Bcraud, son père.
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposés, sans préjudice à lui de tous scs droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
Copie certifiée conforme :
L À B R Y ,
secrétaire.
II
oyeu.
�DÉ C LARA T IO N DU CITOYEN LAROUSSE.
J e soussigné reconnois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Champflour - Desm oulins, la somme de
2,400 fra n c s, de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
payable au commencement du mois de janvier 1789; que long
temps avant l’échéance, le citoyen Champflour aîné me dit que
son frère Desmoulins étoit inquiet à raison du payement de cette
lettre de change, et me proposa, pour le tranquilliser, de me
faire lui-même un effet de pareille som m e, payable à ma volonté ;
ayant accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frère,
je lui remis ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
som m e, qu’il me paya ensuite.
D éclare et confesse, en outre, que long-tem ps après avoir été
payé du montant du billet représentant ladite lettre de change,
le citoyen Boyer me présenta la même lettre de change, en me
disant : V oilà un effet dont vous avez été payé; il faut y mettre
votre acquit; lequel il me dicta : et comme il m ’avoit fait écrire
que c ’étoit des deniers de lui B oyer, je refusai de le signer; dé
clarant en outre que le citoyen Boyer ne m ’a jamais rien p a y é ,
ni pour les citoyens Cham pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolument pourquoi cette lettre de change s’est trouvée entre les
mains de B o y e r, de laquelle je n’avois plus entendu p arler, que
depuis l’année dernière que le citoyen Champilour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et me dirent que le citoyen Boyer prétendoit s’en faire payer par le citoyen Champilour aîné.
Ce 29 n ivôse, an 9 de la république.
Déclaration de ce que dessus.
L AIIO U SSE.
Enregistré à R io m , le d ix - s e p t germinal an n e u f, fo lio
recto e t verso. R eçu un fr a n c , p lus d ix centim es.
r O U G I I O N.
48
�(59 )
Saint - Amand, le 7 frimaire an 8.
J 'a i reçu ta lettre, mon cher Cham pflour, par laquelle tu me
demandes un éclaircissement sur une créance de 600 francs que
le citoyen Boyer réclame de la succession de ton frè re , qu’ il d it
m’ avoir payée au nom de ton frère je ne puis te dire que ce que
j’ai répondu au citoyen B oyer, qui est venu me voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à me rap
p eler, et depuis j’ai encore tâché de me ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur cette affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’ il m ’a toujours parfaitement payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclamer : mais je ne me rappelle pas que
jamais il ne m’ ait rien été payé , au nom de D esm oulins, par
le citoyen B oyer; je le lui ai déclaré comme je te le mande ici,
parce que j e n ’en ai pas la moindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire tort, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B oyer, à qui j’ai fait la même déclaration que
je te fais là. M ille respects à madame de Cham pflour; et reçois,
mon cher a m i, l'assurance de mon bien sincère attachement.
LENORMAND.
À R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribun al d ’appel. — An 10,
J ï'ô
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour-D'Alagnat, Jean-Baptiste-César. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Champflour
Touttée
Pagès
Dartis-Marcillac
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
Couthon
notables
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-De-Dôme, défendeur ; Contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Annotations manuscrites : « 11 frimaire an 11 de la section civile de la cour de cassation qui rejette la fin de non recevoir. Sirey tome 3, page 101 »
pièces justificatives « déclaration des créanciers sur émigrés ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0928
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53089/BCU_Factums_G0928.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Couthon
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53088/BCU_Factums_G0927.pdf
ab1ccfd7925d3be5178e59090a162e4f
PDF Text
Text
T R IB U N A L D E C A SSA T IO N .
P O U R V O I R A U CIVIL.
m
é
m
o
i
r
.
e
P o u r P i e r r e BOYER, juge au Tribunal civil
de l 'arrondissement de Clermont-Ferrand , chef-lieu du
département du - P u y-de-Dôme , demandeur ;
Jean-Baptiste-César CHAMPFLOURD’ALAGNAT , propriétaire , habitant de Clermont 3
Contre
défendeur.
A
l'âge de 67 ans il me
que je dois employer à faire
reste encore un moment
disparaître les calomnies
d’existence
que m on
adversaire ne cesse de répandre contre moi. Je veux que l ’honneur
me survive , et que l’opprobre couvre à jamais le cruel ennemi qui
m e déchire
les lois viennent à mon secours, et me fournissent
l'occasion de dévoiler toute la noirceur de son procédé.
I l est inutile de débuter par le tableau toujours révoltant de
la plus insigne ingratitude, de la perfide calom n ie, de la surprise
et de la mauvaise foi
les faits présentés , soutenus de preuves
écrites , en feront bien mieux ressortir les différentes nuances, que
tout ce que je pourrai dire dans un prélude.
C 'est sur la fin de 17 8 3 ,
ou au commencement de 17 8 4 que
mon adversaire me fut présenté par son frère Champflour-Desmoulin ,
dont la mémoire me sera toujours chère , et avec lequel il avait
été pendant plusieurs années en délicatesse. L e premier me peignit
la situation de ses affaires j son discrédit qui était tel qu!il n'aurait
A
�par trouvé un L ouis à emprunter y ni à vendre la moindre partie
de son b ie n , par la crainte des prêteurs de p erd re, et par celle des
acquéreurs d’écre de suite évincés. Sa détresse
était
au point qu’il
était obligé de rester chez lui pendant le jo u r , et de ne sortir que
la nuit pour ses affaires , à raison d’un jugement consulaire qui avait
été rendu contre lui en
faveur
d’un particulier de R iom , qui le
condamnait par corps à. lui payer une modique somme de n o a f r .
pour le m ontant d’une lettre de change. Des huissiers avaient été
mis depuis plusieurs jours en surveillance, et il était sans argent
pour la faire cesser.
J e l’invitai à me déclarer franchement ses dettes , son avoir et
ses ressources. L ’énumération des dettes , à ce m o m en t, était
effrayante ; mais il me parut que son avoir était plus que suffisant
pour y faire face , et qu’il était possible de lui conserver au moins
une partie de son bien : au récit de ses malheurs , il joignit ainsi
que son frère des suplications et les invitations les plus pressantes,
pour m’engager à venir à son secours , soit par
mon argen t, soit
par mon c ré d it, et par mes talens dans les différentes affaifçs dont
il était alors assiégé.
D es larmes arrachées par l’infortune et l’état de sa position furent
la suite de cette première entrevue. J e suis né bon et compatissant;
je fus touché ; je mêlai mes larmes à celles des deux frères , et dès
ce moment , bien fatal pour la tranquillité dont je n’avais cessé de
jouir jusque l à , je lui livrai généreusement
tout ce
que j ’avais
d’argent ; je lui promis ma signature j il usa de l’un et de l’autre
sur-le-cham p, et dans l’heure il jouit de 5a liberté et d’un repos
qu’il avait perdu depuis long-tems.
M on procédé fut regardé par les deux frères comme un effet de
la providence. Ces fières qui ne s’étaient vus depuis long-sems ,
redevinrent frères ; mon adyersaire
ne
savait
comment remercier
celui qui lui avait procuré ma connaissance, et dans
sa première
expension ¡’étais l’homme unique.
Peu dç tems après je fus encore bien plus grand à
ses yeux :
�?
un particulier fui demandait plus de soixante mille fran cs, cette
demande indépendante de la première énumération des dettes , fut
allarmante pour m oi qui m’étais déjà livré } il m’apporta une multi
tude de registres, des com ptes, un tas de petits papiers particuliers,
et une infinité de chiffons qu’il avait retiré de ce particulier , à toutes
les époques •, je m’en occupe pendant plus de huit mois j je fais un
travail pénible mais tranchant, et tel que sur le vil et l’examen de
mon opération, et au moment où mon ouvrage était sous presse ,
l'individu fut forcé par vo ie amiable de renoncer aux soixante mille
fran cs, et de lui
compter lui-même
rrente-un
m ille
n eu f cents
francs.
J'avo u e j et je ne l’ai jamais dissim ulé, qu’à cette époque v o u s'
m 'àvez fait un cadeau d ’environ mille écus en bijoux et argenterie j
vous crûtes le devoir à mon désintéressement j j re ne vous prenais
aucun intérêt pour l’argent que je vous avais piété ; je n'avais rien
exigé pour les honoraires de mon travail qui avait duré plus de
huit mois j c’est tour ce que j ’ai reçu de vous ; mais mon ardeur
pour vous sortir du bourbier de vos affaires ne se borna point li.
I l existait un commencement de
procès
de comptabilité
entre
route la famille Champflour et les citoyens V iry , pète et f i ls , au
sujet de la charge de Receveur des tailles à
Clerm ont : j ’ai em
ployé encore pour cette affaire plus de six, mois. J ’ai fait de plus
un travail dans le mâïne genre du prem ier, quoique pour une
recette différente , à raison de laquelle on vous demandait quatorze
m ille francs que vous ne payerez jamais. Je me suis occupé d’une
multitude d’amres ; en un m o t, le fardeau de vos affaires a été écrasant
pour moi pendant nombre d’années ; je ne pouvais
pas
me flatec
d’avoir une heure de libre chaque jour , à moins que vous ne fussiez
en voyage.
L ’opération principale concernant les citoyens V iry
ment heureuse, mais elle ne procura pas de suite
parut égale
le montant de
son résultat; il y avait des lettres de change que j’avais endossées.
I l fut arrêté entre vous et moi de faire la yente de votre maisoni
A i
�<vy.
4
de C lerm o n t, comme l’objet le moins one'reux pour va» intérêts ;
elle est affichée ; des acquéreurs se présen ten t, niais pleins de la
même frayeur des prêteurs d ’arg e n t, sans aucune confiance pour
votre garantie , tous veulent une caution pour la sûreté de leurs
deniers.
II était naturel que cette caution fut prise dans la
famille , ec
il n’y avait que le citoyen B u ra u d , votre beau-père , qui avait con
servé son bien et celui de sa fe m m e , in tact,
qui pût s’y prêter j
niais il existait depuis plusieurs années une séparation de fait entre
vous et votre fem m e; vous ne voyez ni elle ni sa fam ille ; je me
chargeai de vaincre cet obstacle. Votre beau-père m’avait des obli
gations notables qui sont encore connues ; il adhéra à ma demande ,
et pouvait-il s’y refuser sachant tout ce que j ’avais fait pour v o u s ,
qui rejaillissait nécessairement sur ses petits enfans qu’il eût toujours
chez lui ! la ven te, par ce moyen , eût lieu le 1 6 janvier 1 7 8 6 ;
vous en touchâtes 15 ,6 0 0 francs qui étaient sa vraie v aleu r,
sans
néanmoins que j ’eusse pu opérer votre réunion.
L a maison ven d u e, vous répandîtes généralement dans la V ille
que je vous avais tiré d’affaire , que vous ne deviez plus
rien , et
qu’il vous restait votre bien de Beaumont , objet conséquent , que
vous avez augmenté encore par des acquisitions de biens nationaux.
Vous a v a l’abord séduisant; au premier aperçu il semble que vous
êtes incapable de trahir la vérité ; vous fûtes cru sur ce bruit que
vous aviez pris soin ■ d’accréilitcr. Des partis se présentent pour
l'établissement de vos
filles ; l’aînée et
la
cadette furent mariées
très-avantageusement.
M ais il s ’en fallait bien que la nouvelle du jour que vous aviez
répandue, celle d’avoir payé vos dettes , eut de la réalité ; il en
existait encore de très-pressantes , fondées sur des lettres de change
que j ’avais endossées.
Une découverte heureuse se présente ; un Officier de santé de la
commune de Clerm ont avait 17 ,3 0 0 francs à placer, vous allez à
Jui pour les obtenir, il vous répondit qu’il voulait une caution j
V
�j
vous m’ofFrez, H m’accepte : m a is, comme nous étions à l’époque
du 9 août 17 9 ° » 1 Officier de santé qui donnait cette somme en
num éraire,
voulait en
être remboursé de
m êm e,
et il
exigea
pour cela un billet d’honneur ; vous lui offrîtes le vôtre , il n'en
veut pas.; j'offre le mien , il l’accepte sans hésiter ; vous m’en donntz
un pour ma garanrie, où'votfe honneur ne fut pas inséré (i) ; vou s,
prites l’argent toujours pour éteindre des lettres de change.
D es emprunts et des paiemens se répètent encore ; le courant de
vos affaires était à-peu-près de cent mille francs par a n n ée; j’étais
le banquier et l’endosseur toujours généreusem ent, et sans aucune
sorte de bénéfice.
A l’époque de 1 7 9 1 , voici
quelle était ma situation avec vous.-
outre la lettre de change de 1 7 ,5 0 0 fr. de l’Officier de santé, assurée
par mon billet d’honneur , il existait de ma p a rt, solidairement avec
v o u s , nombre d’effets souscrits par nous d eu x, indépendament des
lettres de change que j ’avais endossées ; le tout était pour votre
compte ; j ’avais , et j ’ai encore vos indemnités pour ceux qui sont
contractés par sim p le billets ; en voici le détail :
i .° J e m 'étais obligé pour 20^400 francs
en
R ochefort de R iom , capitaine d’infanterie ; ce
faveur du
billec
citoyen
portait que
c’était de l’argent qu’on vous avait prêté ;
2 .0 Pour 11 ,6 0 0 francs au citoyen
Brunei , juge
au ci-devant
présidial de Clerm ont ;
3.0 Pour 6000 francs en faveur du citoyen G uyot 3 homme de
loi à Vic-sur-Allier ;
4 .0 Pour 4240
mont ;
francs à défunt Charbonnier , bourgeois à C ler-
( 1 ) Je reconnais que monsieur B oyer n’a consenti un
billet d’ honneur de
1 7 ,3 0 0 francs en faveur de monsieur B o n n e t, pour lui payer en argent pareille
somme , montant d’une lettre de c l:an g e , titie au profit dudit sieur Bonet par
moi , et endossée par ledit monsieur Boyer j je
leconnais , cîis-ji , qu'il n’a
fait le tout que pour me faire plaisir ; je promets
en
conséquence l'indem
niser dudit billet fait ce 5 août 1 7 * 0 . Signé CIiampflour-d’Alagnar.
�6
5 .® Pour 4 , 4 0 j francs 1 1 sous 6 den. à la dame veuve LamotKe.
de Clermonc ;
6 ° Pour 16 0 0 0 francs
au
citoyen A s tie r , cadet,
somme quo
vous avez touchée en numéraire j7 .0
E n fin vous me deviez personnellement pour argent prêté',',
suivant deux billets des i . er octobre et m novembre 17 9 0 , 7 7 5 0 6 :.,
outre un autre billet de 800 francs que j ’avais
consenti
en faveur
d’une nommée Martine D elarb re, et dont le montant avait été.,
touché, par votre femme et sa mère..
Champflour ! obliger pour vous mon honneur ! exposer ma personne
ft tous les instans à.la contrainte par corps / plus que \x valeur de mes pro
priétés! (i)vou s prêter mon argent sans intérêt ! ne rien prendre pour les
honoraires de mon travail qui vous a été si utile dans les différentes
affaires que j ’ai traitées pour vos intérêts ! qu’aurai-je pu faire dé
plus pour un p ère, pour un enfant, pour un vrai ami de tous les
rems ! et pour qui l’ai-je fait *
Il vous plaît de faire un voyage de long cou rs, à la même époque
de 1 7 9 1 . O h ! j ’avoue que ce départ qui ne m’affecta pas dans les
premiers mois de votre absence, me- tourmenta
cruellement après
une année révolue. L a disposition rigoureuse des lois sur- l’émigration présumée , votre
inscription comme
émigré
sur
la liste de.
l’administrâtion du district de C lerm on t, la crainte fondée d’être en
bute à tous vos créanciers porteurs de mes engagemens qui auraient
absorbé tour ce que je possédais, la triste perspective d’être obligé
de vendre généralement tout mon bien , et de manquer aux enga
gemens que j-’avais contractés en établissant mes enfans ; ce tableau,
était déchirant pour moi.
C ’est dans ces circonstances pressantes que , ne recevant aucune
nouvelle de votre p a rt, et votre famille n’en recevant pas non plus ,
je me conformai à la loi : .je fis enregistrer au
(0
Pendant quarante
ans d’un travail
opiniâtre ,
je
district
n'ai
J }OOQ fn a c s d’ac<jai';iùon , itidépenJuaent. de jnon fMiimoMKi.
vos enga?
fait «juc pour
�genacns et les miens. M a démarche a été précédée de celle de huit
autres de vos créanciers , et suivie d’un nombre qui s’élève à quatrevingt-onze parmi lesquels on y trouve votre femme et vos gendres
qui ont agi d ’après le conseil du citoyen
Grenier } jurisconsulte
■célèbre j actuellement Tribun.
Vous revenez enfin en 1 7 9 3 , j ’étais alors membre de la munici
palité de Clermonr. Votre retour au lieu de dissuader le public du
■fait de votre émigration
qui au vrai n’existait pas , opéra un effet
-contraire. A u moment de votre arrivée vous vîntes m ’accabler d’ami
tié , vous me fîtes voir vos papiers a je les trouvai bons. Vous
êtes appelé à la municipalité , vous n’osiez pas y paraître , je vous
rassurai. N ous y arrivons ensemble. Je m’abstiens de mes fonctions
municipales pour devenir votre défenseur, vos certificats sont pré
sentés , on élève des soupçons, vous m’aviez si fort convaincu de la
sincérité de vospièces que je les écartais avec fermeté,et vous-même pour
Faire disparaître tout d oute, offrîtes et demandâtes à la commune de
nommer deux commissaires pris dans le conseil général qui iraient
avec vous à Boulogne , où vous aviez resté , pour vérifier le faux
ou le vrai de vos papiers} ceci fut arrêté sur la fin de l’hiver 17 9 j .
J ’allai avec votre femme prier les commissaires d’avoir pour vous
les égards que se doivent de vrais citoyens j ils le promirent et au
total le voyage n'eut pas lieu.
D es lois sont émises pour l’incarcération des personnes dites sus
pectes en maison de réclusion. Vous vous cachiez tantôt à Pérignat»
outre-ailier , chez votre gendre , tantôt à B eaum on t, chez un cul
tivateur. Vous voulez absolument me voir A Pérignat pour vous
con soler, je ne pouvais pas y aller pendant le jo u r , crainte que
ma démarche vous
fit découvrir j je
pars accompagné du citoyen
C h a lie r, oncle de votre gendre , au milieu de la nuit. J e passe deux
jours avec vous ; je reparts ensuite la nuit toujours avec
la même
compagnie.
V ous me faites encore sa v o ir, et au citoyen Boirot , juriscon
sulte connu, votre retraite cachée à Beaumont j vous demandez abso-
�s
lument à nous voir et à, eonferer ensemble ; nous partîmes le même
s o ir , toujours la nuit} et après avoir passé trois heures avec v o u s,
nous ne nous retirâmes pas sans éprouver les plus grands dangers
avant de retrouver nos paisibles habitations.
H élas! pourquoi mon
dévouement pour vous ,
a-t-il
été sani
borne ? fallait-il après avoir engagé pour vous mon honneur, et
hazardé ma fortune, exposer encore ma vie? quel était donc le ban
deau fatal qui me couvrait les yeux.
Ici se présente un autre ordre de fait.
J ’ai agi envers votre frère D esm oulin comme
avec vous , et s’il
v iv a it , ce que je désirerais , je serais sans repentir à son égard} il
serait incapable de m’en donner.
E n 17 8 9 , votre frère eût le malheur de faire une partie de jeu
chez la dame F .......... ; partie
funeste ; il y perdit beaucoup : lé
fait est notoire. Il n'avait pas , dans le jeu , l’argent nécessaire pour
faire face à sa perte; il trouva du crédit. Ces sortes de dettes sonc
d’honneur, et votre fière n’en manqua jamais j on comptait sur lé
sien.
Il vint chez moi déposer sôn repentir et sa douleur. Il m ’annonce
q u ’il est sans ressource de votre cô té, quoique son débiteur. Il me
dir en même temps avoir trouvé 110 0 0 francs , mais à cette con
dition que l’individu qui les offrait , exigeait de sa part la cession
de 16 0 00 francs en principal qui lui étaient dûs par les citoyens
V iry , produisant par année 15 0 0 francs de revenu , revenu autorisé
par les lois d’a lo rs, s’agissant
de la vente d’une partie d’un office
de receveur des tailles.
Je fus révolté contre l’usurier bien connu de v o u s , et sans autre
examen j ’assurai à votre frère q u ’ il trouverait de l'argent sur ma
signature , et qu’elle était à sa disposition. Toujours plein d’honneur,,
il ne voulut en user qu’en me donnant des sûretés. Il me propose
daccepter une obligation de 110 0 0 francs à prendre sur celle de i t f
qui lui ¿tait due par les V iry , et en même temps une procuration
pour toucher les i j o o francs d’intérêts par année jusqu’au rembour
sement
�A °)S
■
r
9
seraient du principal dont le terme était Rx( par un traité, duquel intérêt
je devais lui faire raison sous la déduction de celui que je serais dans
le cas de payer moi-même pour lui aux prêteurs : car pour tout ce
que j ’ai fourni de mon c h e f, il ne fut jamais question entre nous
d’intérêt.
J ’acceptai cette obligation j 1 * délégation et la procuration, sa date
est du 28 mai 17 8 9 .
L e même jo u r , la dame Blaud , votre sœ ur, ayant des relations
avec la citoyenne Bughon , veuve Sauzade , celle-ci lui assura qu’elle lui
fera prêter mille écus par son frère Bughon , marchand , à six pour
cent. Votre frère vous en prévint ; vous vîntes chez moi tous les
deux , et comme l’obligation était déjà faite , et que pour en remplir
le montant il était naturel que je dusse m’obliger ; je souscrivis en
mon nom une lettre de change de 3 18 0 francs, en faveur de vous
Champflour aîné , q u i, à l’instant même en passâtes l’ordre à Bughon
qui en avait compté le montant. Cette lettre de change et l ’ordre sont
du même jour de l’obligation de votre frère ; tous ces faits voiis
sont connus , ainsi qu’à la dame Blaud votre soeur.
Cham pflour-D esm oulin, au moyen de cette so m m e, éteignit ses
dettes du jeu les plits pressées.
J ’avais déjà découvert 5000 francs du citoyen L escu rier, de Salers
pour lequel j ’étais chargé d’une affaire à
la cour des Aides ; j’en
instruisis les deux frères , le prêt fut fait le 3 juillet 17 8 9 un mois
et cinq jours après l’obligation de iz o o o francs. Desmoulin prit
l’argent en votre présence et en celle du notaire , du prêteur et de
moi-même. Lescurier exige six pour cent d’intérêt et donne quatre
années de terme. L ’obligation fut en conséquence portée à 6 10 0 francs ;
l’intérêt qui étoit de 300 francs fut stipulé payable chacune des quatre
an nées; il l’a été par m o i, ainsi que le principal précisément au
terme d’ab ord , à L escu rier, et après son décès à son frère comme
héritier.
C'est le citoyen B ap tiste, notaire à C le rm o n t, qui jouissait d’une
réputation méritée , qui reçut l’obligation que je consentis à Lescuritr.
B
�0
C ’e'tait lui-même qui avait i£çu celle que m'avait consînri Desmoulirt
un mois auparavant. C ’était lui qui était votre notaire affidé, il avait
reçu la vente de votre maison le 1 6 janvier 1 7 8 6 , il savait tout ce
que j ’avais fait pour les deux frètes C ham pflour, et que tout n’était
de ma part qu’office d’ami. M oins généreux
que moi envers les
Champflour , il se fit payer du coût de l’obligation ÿ ce qu’il n’aurait
pas exigé de moi dans aucun cas , et sur-tout existant alors un concor
dat entre les notaires et les ci-devant procureurs 3 à C lerm o n t, d’a
près lequel au:un ne devoir prendre d’argent pour les' affa'res qu’ils
pouvaient avoir les uns en
contractant, les autres en plaidant \
il me fournit sa quittance , (i) elle est de 7 1 fr ., et datée [du 10 ju il
let 17 8 9 , sept jours après l’époque de l’obligation. E lle est écrite de
sa main , et Baptiste est mort depuis plus de huit ans.
Ces trois premiers objets se montent à 9 4 5 1 francs> j ’ai payé de
plus d’après une note écrite, de la main de votre frère,
sa v o ir, i
1 3 !atin , m archand, le 8 juillet 1 7 8 9 , cinq jours après l’obligation ,
Î.6-; francs z s. 6 den. Dans le même temps à Case , perruquier ,
3 15
francs pour le montant d’ une lettre de change j à Lahousse ,
billardier-pautnier , ¿400 francs, montant d’ une autre lettre de change
qui était échue au premier janvier 1 7 8 9 ; il me remit la lettre de
change après avoir mis son acquit de mes mains et deniers ; il oublia
de le sign er, et moi-mème je n’y fis pas attention , la remise de la
lettre de change me suffisait. J e payai encore à F a b re , m archand,
m 8 fran cs, montant d’ une lettre de change souscrite par D esm oulin,
le 14 janvier 17 9 0 . Tous ces objets se portent à la somme de
francs i s. 6 den.
C ’est ainsi que j ’ai rempli l’obligation de iz o o o francj que m’avait
( 1 ) Je sous'iijné , notaire en cette ville , reconnais avoir reçu de M . Boyer ,
procureur en h cour des aides de cette V ille , la
somme de soixante-douze
livre» pour contrôle et réception d’ une obligation de
la somme de
six mille
¿eux cents livrer , consentie par ledit Boyer au profit du sieur Charles Lescufie r , le )
du p résen t, dont quitte. A Clerm ont-Ferrand , le 10 juillet 1 7 8 ? .
Quittance de 7 1
francs.
Baptiste,
�*
consentie votre frère, et vous voyez que j ’étais en avance de i < îji
francs z s. 6 den. 3 er ce n’est pas étonnant, outre le pouvoir que
j ’avais de toucher les 1 1 0 0 0 francs en principal , j ’avais celui de
to u ch er,
sauf
à
en faire
com pte,
les
ijoo
francs d'intérêt que
produisait chaque année le principal des 16 0 0 francs.
i Vous avez été présent à to u s, notamment aux emprunts d eB u gh o n
et Lescurier ; il vous a même p lu , sans que je l’eusse
m’en fournir de votre main la preuve écrite, (i)
ex ig é ,
de
C e billet n’a ni date ni signature , mais sa composition annonce
suffisamment son époque. J ’y suis qualifié de m on sieur, Bughon et
Lescurier le sont aussi, et ce mode était d'usage à la date des em prunts,
il n 'a cessé qu a l’explosion de la révolution. Vous m’avez écrit une
lettre en l’an 4 qui sera insérée en son lieu dans ce mémoire pour
prouver votre p erfid ie, où vous m ’avez donné la qualité de citoyen t
et sur-tout celle d ’ami.
. D e ces faits résulte cette réflexion qui porte la vérité à l'évidence,
vous qui me deviez ; moi q u i, notoirement n’empruntai jamais que
pour vous et votre frère, peut-il tomber sous les sens qu'ayant le
droit d’exiger de vous q u i, depuis que j ’ai eu la fatalité de vous
connaître , n’avez cessé de me
des effets de Buglion
devoir bien au-de-là du montant
et L escu rier; j ’ai emprunté pour moi sans
besoin personnel, sans prétexte pour aucune affaire ni pour moi ni
pour mes a m is, à un intérêt de six pour cent ; non , la raison
rejette à jamais une' pareille idée.
J ’ai f a i t , pour m’assurer le remboursement de cette obligation
toutes les poursuites auxquelles les lois m ’ont forcé. Diligence inu
tile contre les Viry qui alors avaient perdu, la charge
de receveur
des tailles ; tentatives infructueuses d’exécution mobiliaire ;
tion au bureau des hypothèques. J e
(0
inscrip
11’ai rien touché des V iry , ni
Monsieur Boyer a emprunté pour mon fr è r e ,
x .* A monsieur B u g h o n ..................................................... jo o o fr.
» •° A monsieur l’Abbé A u b i e r ....................................... 1* 0 0
A monsieur Lescurier........................................... jooo
B 1
�♦
'
Yl
principal ni intérêts ; v o u s v o t r e
frère et le citoyen Blaud n ’avea
rien touché non plus. L es poursuites contre les V iry nous ont été
communes. M ais j ’étais nanti du traité passé entre les V iry et vous
tous , et c’est ici le premier aperçu de votre conduite astucieuse i
mon égard. V o u s seul essayâtes inutilement que je vous en fisse la
remise , et je ne le tenais que du citoyen Blaud qui avait avancé
les frais d’enregistrement ; je m ’y refusai : cet acte m’était devenu
commun. Je vous en offris le dépôt. Il a eu lieu le premier jour
complémentaire de l’an 4 dans l’étude du citoyen Chevalier t notaire
i Clerm ont. (1)
( 1 ) Par-devant les notaires à Clerm ont-ferrand , soussign és, sont comparus
les citoyens Je m -B ip tiste -C e z a r Cham pflour , et Pierre B o y e r , juge au tribunal
civil du département du Pai-de-D 6m e ,
Lesquels ont remis et déposé en nos mains ,
pour être placé
au
rang de
nos minutes ,
1 .® U n traité sans signatures p rivées, passé entre
Jean
et André Artaud-
D evivy , Jean -C ezar C h am pflour, Josephe Champflour , M trie-C lau d ine Champ
flour , et Jean Giraud-Blaud , par lequel lesdjts V ir y , pire et fils ,
obligés à payer quatre mille cinq cents francs tous les ans , pour
se
la propriété des deux tiers du prir d« la charge de receveur des tailles
ci-devant élection de Clerm ont , avec convention que la
sont
raison de
de la
rente de quatre mille
cinq cents francs ne pourra être rachetée que dans dix ans , moyennant le
capital de quarar. te-hui: mille francs. Ledit acte fait quintuple , le 14 décembre
1 7 8 1 , et a éti enregistré à Clerm ont le 1 7 janvier , 1 7 8 4 par G iron qui a reçu
cent cinquante-une livre dix sous. Ledit acte étant sur une feuille grand papier
com m un; commençant par cet mots ;
nous soussigné
A n d ré
A rtaud-D eviry ,
et finissant par la date déjà énoncée en les signatures suivantes j D eviry . p i r e ,
C h aaipflou t-J’A la g n a t, C h am p flo u r, capitaine, D eviry , fils , B lau d , avec cette
note ; cet acte a été passé dans le cabinet de monsieur C hazerat , intendant
d'Auvergne , ensuite de laquelle est sa sign atu re, scellé le 30 ja n v ie r;
1°
L ’expédition d’ un jugement contradictoire, rendu entre les mêmes parties
en la sénéchaussée de C le rm o n t, le 19 janvier 1 7 8 4 , portant
condamnation
du paiement de ladite rente ;
3.0 Autre expédition de jugem ent rendu
entre
Iesdites
parties
devant électian de Clerm ont , le 3 avril de ladite année 17 8 4 ,
ladite rente , scellé* le 7 avril même mois 3
ju
en la tisujet de
�4#
: ; ............. .
, . . . . ■
.
: .r
“ C et acte authentique ajouté à votre écrit annonce bien certainement
la parfaite connaissance que vous aviez du composé de l’obligation
de iz o o o francs que m 'avait consenti votre frère, puisque vous en
reconnaissiez vous-même la sincérité.
Il existe encore d'autres preuves écrites , dont l’une est authentique
par la production que vous en avez faite vous-même à l’audience du
tribunal d’appel.
■ Vous aviez tenu note de tous les objets qui avaient rempli l’obli
gation de iio o o francs , vous les aviez fait transcrire par votre aflidé
Louirette , ainsi que vos moyens de résistance suggérés par votre dis
position ordinaire de non payer, et vous n'avez contredit dans cet
écrit, en aucune manière , les articles de Bughon et Lescurier.
L a finale de cet état , dont il est fait mention dans le jugenienc
du tribunal d'appel j porte à la troisième page recto une invitation que
vous m’adressez pour nommer des arbitres. C et écrit sans date est nécessairement antérieur au traité qui a
eu lieu dans la suite entre n o u s, et dès qu’il contient les emprunts
faits à Bughon et Lescurier que vous n’avez pas contesté, il prouve
de nouveau que vous aviez la
connaissance parfaite de ces deux
articles, et forment l'aveu le plus formel que vous me les deviez
d’après notre traité.
Coste , également votre aflidé , a fait par votre impulsion quelque
chose de p l u s , et qui se rapporte toujours à votre procédé d'alors.
4 • n Enfin
,
un commandement de p a y e r , avec signification desdits
deux jv g e -
tnens , ainsi que d'une cession fa ite au citoyen B o y e r ,
ain si que
ledit exploit en date du 6 mars
dudit 'm ois. Desquelles
1 79 f , enregistré le 7
du
traité ,
pièces qui ont été paraphées par nous notaire , le dépôt en a cté requis par les
comparans , comme commun entre eux , à l'effet d'en retirer des expeditions pour
la poursuite de leurs; droits.
D e quoi nous avons
dressé le présent acte en
l’ étude , le 1 . “ jour complémentaire de l’an 4 de la République , une et indi
visible. Les parties ont signé* la minute demeurée
à C h e v a lie r , n o ta ir e , a
¿té enregistrée audit C le rm o n t, le 3 complémentaire de
B iy le qui a reçu une livre en numéraire.
la
même
arrufe par
�%
< V v
*4
J V i un. état écrit de sa mnirç (i) qui contient n o n
seulement le
détail des objets qui remplissaient ec au-delà l’obligation de iz o o o fr»
mais encore la réduction en numéraire d’après l’échelle du rembourlem ent que j ’avais faite en assignats des effets de Bughon et Lesçuriert
car se ?ont les seuls qui ont
été remboursés en papiers, n’ est-ce
pas encore un, nouveau surcroîc de preuve ?
E n résumant cet article. Ecrits formels avoués de votre part. Acte
notarié où vous avez concouru , écrit de vos deux serviteurs Louirette
Sommes payées p a r
le
citoyen B o yer
en
l ’acquit du
citoyen Desmoulin.
_
Lettre de ch an ge, 18 mai 17 8 9 au citoyen Bughon ,
Remboursement 3^180 fra n c s, acquittée le 1 7 décembre 1 7 9 1 ,
en assignats. c i .......................... ............................................. 3 ,18 0 f r .
Plus pour intérêts et frais . . . .
ijj
de
E n tout.................................3 ,3 15
Réduction à l'échelle
de dépréciation.......................... 1 3 5 3 1 . u s
3 juillet 1 7 8 9 , obligation du cit. Boyer en faveur
du citoyen Lescurier , de 6 , 1 0 0 fran cs, p ayab le,
savoir 300 fr. au 18 mai 17 9 0 , pareille somme de
300 fr. au 3 juillet 1 7 9 1 , encore 300 fr . le 3 juillet
1 7 5 1 , et les 5,30 0 fr. restans au 1 juillet 17 9 3 .
Quittances des sommes ci-dessus.
4 Juillet 179 0 . . .
13
13
J ui l l et 1 7 9 1
Jui l l et I 7 ÿ i
. . .
. . .
300 fr. réduits à
300
3 00
300 f .'
réduits à
réduits à
170
107
3 Juillet 17 9 3 . . . Î 3 ° °
réduits à
Coût de l'o b li g a t io n ................................
1908
71
\
m
fixoo f r . réduits à 4 757 fr !
; 110
31 M ai 17 S 8 , à Lahouîse 1,4 0 0 fr. échéans au
Remboursement i / 'j a n v i e r 1 7 8 9 , « ............................................................ 14 0 0
en numéraiie.
8 Juillet 1789 , au cit. Blatin 16 7 liv. 1 s. , ci. . 16 7
10 Juillet 178 8 , au cit. C ase 3 1 J liv. payables
au 10 juillet 17 8 9 , ci.................................... ............... ... • 3 1 J
1 4 J a n v i î r 1 7 9 0 , au cit. F a b r e j n 8 liv. payables
le 1 4 avril > 7 ?o , ci,
• .............................. ....
9} » 0
1
ii
»
1
m
*4
�»s
et C oîte. II est donc démontré matériellement que les emprunts que
j'ai fait de Bughon et Ltscurier étaient pour votre frère. Cependant
je les ai payés , j ’en rapporte les quittances et les effets j c’est donc
encore une fois la dette de votre frère que j ’ai payée et non la m ienne.
E t vous vous êtes obligé de m’en faire raison ; vous savez encore
qu’avec des assignats qui valaient cent ¿eus vous m 'avez remboursé
85 5 0 francs prêtés en num éraire,
et vous savez aussi la promesse
verbale que vous m’aviez faite lors de ce remboursement de m’in
demniser. Vo.us étiez instruit comme moi que j’avais payé Bughon
et Lescurier en même espèce, après des poursuites du premier au tri
bunal de com m erce, c’est d’après cela que vous avez formé vousmême le traité qui contient nos obligations. L es deux doubles sont
écrits de votre m ain, mon prénom est laissé en blanc dans celui qui
m ’est destiné ; cet acte se présente sous l’aspect du sentiment et de
délicatesse. M ais on verra bientôc la vôtre disparaître. (1)
( 1 ) Nous soussignés Jean Baptiste et C ezar Chatnpflour , propriétaire , habi
tant de la ville de C lerm otu -ferran d , d'unt p a r t ;
Et
B o y e r , juge au tribunal civil du département du Pui-de-
D ôm e , d'autre part -,
Désirons terminer amiablement entre nous le compte que nous croyon <nou*
devoir respectivem ent, mettre à l'abri notre délicatesse de
l’ égard l’un de l’autre , et maintenir de cette manière les
toute suspicion à
sentimens
d’estime
et d’amitié réciproque qui ont régné depuis lang-tem s entre nous , avons fait
cjioix des citoyens Louirette et Cosre , nos amis com m uns, à l'effet de pro
céder audit compte , lequel est relatif aux objets dont le détail suit :
i . ° Suivant une procuration passée devant Baptiste , notaire , le 1 juillet 17 8 5 ,
Je citoyen Champflour-Desm oulin s'esr reconnu débiteur envers moi Boyer ,
d’une somme en principal de douze mille francs , et m’a autorisé à me retenir
cette somme sur la créance à lui due par les citoyens V iry .
Quoiqu’il paraisse par cet acte que moi B oyer étais alors créancier de cette
Jomme , la vérité est cependant que je devais en faire l’ emploi à l'acquitterrçent
«les différentes dettes du citoyen
D esm oulin, et
que ce n’était que par
ce
m oyen que j’ en devenais véritablement créancier. Cette condition de ma parc
n’était point écrite, elle était simplement Une suite de la confiance qu'avait ca
Rio! le citoyen Desmoulin , itère du citoyen Champflour.
�\ r
'i<S
D e ce que j'ai dit jusqu'à ce m o m en t, il résulte, i . ° que je vous ai
rendu de ^om breux et d’importans services , 2.0 que je vous ai prêté
en numéraire 8550 francs, en 1 7 9 0 , que vous m’avez remboursé en
assignats , moyennant cent écus , à la fin de messidor an j ; 30.
que
j ’ai emprunté et remboursé pour votre frère 9452 francs à Bughon
et à. L escu rier, indépendamment des autres objets que le jugement
du tribunal d'appel vous a condamné à me rembourser j des écrits
assurent la véracité de tous ces faits.
Il est inutile de parler de la reconnaissance que vous me deviez , et
qui aurait dû suivre votre existence. Plein d’indignation je passe au
i . ° Les 1 . "
octobre et n
novembre 1 7 9 0 , il fut
prêté
par
B oyer à moi Champflour , une somme de 7 7 5 0 francs. V ers
m oi Boyer
le
citoyen
le même tems ,
«mpruntii une somme de 800 francs pour le compte des citoyenne*
Buraud et Chîm pflour. L ’une et l’autre
de
ces
sommes ne m'ont été rem
boursées qu'au moment oa les assignats éprouvaient une perte considérable.
Dans ces circonstances , pour nous indemniser réciproquement de
la perte
q u ’ont éprouvé les assignats aux époques des paiemens que ftioi Boyer ai dû
faire sur le prix de la
cession Je
nooo
francs ci-dessus
énoncée ,
et moi
Champflowr , des remboursemens aussi ci-dessus énoncés.
Nous consentons à être réglés par les citoyens Coste et Louirette , et nous
leur donnons pouvoir de procéder et arrêter les comptes dont il s’agit • et ce
d’après et sut le taux de l'échelle de dépréciation du papier monnaie , aux diffé
rentes époques des paiemens et remboursemens par nous faits ; en conséquence
nous fournirons tous renseignemens nécessaires,
et
remettrons aux
C o ste et Louirette ; s a v o ir , moi Boyer les quittances justificatives
citoyens
de l'emploi
des 11.0 0 0 fra n c s , ain<i que les notes , titres et docuinens relatifs audit compte .
et moi Chamj.flour les effets et les acquits des sommes dont j ’étais débiteur ;
et de tout quoi il sera dressé un é t a t ,
au bas duquel
sera le récépissé des
citoyens Coste et Louirette» lesquels compteront aussi les intérêts conformé
ment à la loi.
Promettons souscrire audit compte , et de l’exécuter suivant s* teneur , sans
appel de notre part. A cet effet , celui de nous qui se t r o u v e r a
réliquataire ,
ptdmet de satisfaire l’autre du montant dudit réliquat.
Fait double sous r.os signatures p rivé e s, à Clermont-ferrand , le 15
fructidor
an 7 de la République française, Signé Cliam pflour et Boyer.
développement
r
�développement de votre perfide calomnie et de votre mauvaise foi ;
à laquelle j ’ajouterai la marche astucieuse dont vous avez usé dans
votre défense pour tromper la religion des juges du tribunal d’appel ,
et me surprendre moi-même.
Cro;rait-on que ce traité qui semble n’avoir été dicté que par des
intentions pures , amicales , par le sentiment et la délicatesse entre
un bienfaiteur et celui qui jouit de ses bienfaits ? croirait-on , d is-je3
que l'ingrat à qui j’ai affaire , aidé de Louirette , à qui il ouvre et
ferme la bouche à volonté, ait osé répandre dans le public qu’il
m 'avait trompé dans ce traité., et de s’en faire un trophée ? le fait
est cependant vrai. J ’en fus instruit pat une personne dont la véracité
n’est point suspecte , en présence de Coste qui alors étoit à lui-m êm e,
et je d ois, à la v érité, qu’en ce moment il me sembla n’être pour rien
dans le concert entre vous et Louirette.
Cette annonce à laquelle je ne crus que par la confiance que j ’a
vais dans celui qui m’en fie p art, m ’étourdit à tel p o in t, que je la
lui fis répéter plut d’une fois.
J ’examine , je réfléchis sur le piège j j ’y apperçois bien de l’astuce,
mais en me référant à la chose } je crois pouvoir me rassurer.
E ffectivem en t, quel est le résultat de ce traité, on y voit autre
chose si ce n’est, i . ° que vous vous obligez à me rembourser principal
et intérêt des 8550 francs prêtés en num éraire, sous la déduction â
l’échelle des assignats que vous m’aviez donnés , à la fin de messidor
an j , qui ne valaient pas cent écus. Vous ne pouvez contrarier cette
date qu’en rapportant les effets et les acquits, ainsi que vous vous
y êtes expressément obligé par le traité dont vous êtes l’auteur. E t
moi Champflour m ’oblige de rapporter les effets ' et les acquits dont
j ’étuis débiteur.
i.°
Q u e , de ma part , je ne devais vous compter qu’à l’échelle les
remboursemens que j’avais faits en assignats à Bughon et Lescurier;
vous les connaissiez, il existe des preuves écrites du fait , tux seuls
ont été payés en papier, tous les
autres l’ont
été
en numéraire,
le substantiel du traité 11e contient rien de p lu s, vous et moi étions
C
�$oo
r
/»h -
'is
V
obligés très-form ellem ent, il n’érait besoin que de calculateur pout
compter
et régler le compte qui était aisé. Vous fites choix do
Louirette et Coste pour faire ce compte , j ’y consentis. Pouvais-je
être en «iéfiance contre de simples calculateurs ? Il ne pouvait même
pas me venir à l’idée de les prendre pour juges arbitres, nous avions
tout jugé nous-mêmes. N o s opérations étaient absolument indépen
dantes des calculateurs. _
1
D ’après ce traité, je croyais que le compte serait fait le même
jour , vous aviez d’autre vue. C e traité ne contenait point de terme
pour l’opération des calculateurs , c'est ici le commencement de votre
m anœ uvre, vous deviez et il n'est pas dans votre goût de
paytr.
Vous ne remettez aucunes pièces aux calculateurs. Votre affidé Louirette
que je pressai pour vous les demander, ne me montra que des dis
positions semblables aux vôtres ; c’est vous qui le faisiez mouvoir ;
vous crûtes l’un et l’autre que ce calcul était à votre v o lo n té, et par
conséquent à jamais interminable.
C e procédé augmenta mon indignation. J e vous en témoignai mon
m écontentem ent, je fus berné plusieurs jours par vous et L o u irette,
et ce ne fut qu’à ce moment que
je fus convaincu de votre but
insidieux. Je vous écris une lettre très-explicative sur tous les objets
que vous me deviez ( vous l’avez produite à R iom ) je vous fixai
le ternie de votre réponse. V ous ne m’en fites aucune , en consé
quence je vous fis citer en conciliation devant le juge de paix.
L à , plusieurs interpellations vous furent faites , vous résistâtes à
toute explication, vous vous référâtes à notre traité que vous qua
lifiâtes di compromis. L a conciliation n’ayant pas eu lieu 3 je vous
citai au tribunal civil du département du Pui-de-Dôm e , je conclus
contre vo u s, conformément à
nos obligations, je vous demandai
les 8550 francs , sauf la déduction du montant des assignats, et tous
les objets qui avaient servi à
remplir l’obligation de votre frère.'
S o u s nies offres de ne vous compter qu’à l’échelle
de dépréciation
les remboursemens que j ’avais faits à Bughon et Lescurier. Je révoquai
Louirette et C o ste , la loi
m’en donnait le d ro itj mais
loin
de
�■*?
révoquer vos obligations et les m ien n es, j ’en demandons au con~
traire l’exécution ; je vous citai en justice , et enfin l'affaire fut portée
par suite de la nouvelle organisation judiciaire au tribunal de C lerm o n t, lieu de votre dom icile, où je remplis la place de premier
juge.
.
; D ès la première citation vous aviez annoncé très-publiquement
que votre défense allait paraître dans un mémoire imprimé que vous
supposâtes être déjà fait. Ce projet me faisait plaisir , mais la réfle
xion vous fie craindre ma réponse
elle
aurait démonté la trame
calomnieuse sur laquelle vous aviez fondé toutes vos espérances. Pour
avoir toute liberté de me calom nier, vous avez préféré de ne point
écrire , système affreux qui vous a réussi pour le moment. Vous vous
laissez condamner par défaut à .C lerm ont,
lieu de votre d om icile,
où vous étiez connu. Vous interjetez appel à Riorn , même silence
de votre part, et ce n’est qu’à l’audience
sans que je ptisse ni dusse m’y
attendre , que vous étalez tout le fiel de la calomnie et toute la noir
ceur de l’ingratitude , après avoir eu soin de faire circuler sourdement
par quelques émissaires les fausses impressions que vous vouliez semer.
Quelle différence de ce langage à celui que vous m’avez tenu ,
en l’an 4 , dans une lettre que vous m’avez écrite à R io m (1 ).
Il est aisé de répandre toutes sortes de calomnies qui ne vien
nent que trop naturellement à
une
imagination malfaisante. Vous
u ’aviez rien écrit. J ’étais nanti de titres et de bonne foi ; ma sécu(1)
C h er citoyen et ami ,
V ous êtes attendu chez vous aujourd'hui à ce que m’a dit votre voisin lie
boulanger. Comme j'ertvoie à Ilium pour conduire les acquéreurs de mon vin ,
il vous sera peut-être commode de vous servir de la voiture qui doit re v en ir
ce soir ; c’ est ce qui m’ engage à vous écrire deux mots. M on domestique vous
remettra ma lettre , et vous conduira si vous ctes
dans
l’intention
à Clermont.
Salut et fraternité ,
et sur-tout votre a m i,
C H A M P F L O U R .
de venir
�‘i *
fîrs er celle de mou défenseur étaient parfaites; lui et moi ne.poa**
vions nous attendre qu’à un succès complet ; cependant vos voci
férations j les menées qui les avaient précédées et le peu de prix
que mon défenseur et moi y mîmes } ont fait que je n’ai été qu’im
parfaitement défendu et que vous avez recueillis en partie le fruit de
votre surprise qu’on va bientôt voir suivie d'une scarfdaleuse mauvaise
foi.
“
J ’ai exposé
yos
r>
obligations et les miennes ; vous-même sembliez
les avoir basées sur la bonne foi et la délicatesse j pouvais-je m ’at
tendre que vous y manquassiez ? je n’avais d’autre préjugé
contra
vous sur l’honneur que celui qui paraissait naître de votre affaire
a v e ; l’officier de santé } et vraiment je n’étais pas encore convaincu.
L es moyens sourds dont vous aviez frapé l ’oreille de nos juges
et des personnes marquantes i R iom , furent que ¡’étais terroriste,
et cette expression annonce la férocité.
A l’audience, et d’après le caractère sous
lequel vous
m’aviez
peint j votre venin y ajouta celui de dénonciateur effréné.
M o i terroriste ? raportez-en le moindre trait ; je souscrirai à tout
ce vous voudrez. Il existe dans l’affaire , et envers v o u s, des preuves
d’humanité et de bienfaisance de ma
p a rt, qui
sont
absolument
éloignes de ce caractère , et je n'ai été remarqué 3 djns tout le courant
de la révolution que par les mêmes traits.
M oi dénonciateur !. je vous donne le m im e d é fi^
J e ne1 dois cependant pas oublier qtte votre noirceur m’a présenté
comme tel à l’audience, et comme vous ayant dénoncé vous-même j
votre supercherie , ou pour mieux dire votre cruelle méchanceté vous
porta à dire que moi seul avais fait une déclaration au district d’adminis
tration de Clerm ont , do différons engagemens qui existaient entré
nous. J e vais au départem ent, dépositaire de ces registres ; je ne me
trouve que le huitième sur la liste , et je vois le nombre de vos
dénonciateurs ( si c'est l’être que de conserver ses droits d après une
loi impérative ) s’élever à 91 j votre femme et vos gendres sont de
lu partit ) au n.° jit f .
�S o 'S
i r
Ces premières imputations ne frapaieric que sur l’opmion \ I*
mienne a été et sera toujours pour l’humanité , l’honn eur, la déli
catesse et la bonne foi.
M ais vous m ’aviez préparé quelque chose de bien plus amer , tou
jours puisé dans le même fonds.
J ’ai dit que j'avais remboursé
pour
D esm o u lin ,
votre frère ,
¿,4 0 0 francs à L ah o u sse, paumier-BilIardier à Clerm ont } étranger
d'abord à cette com m une; vous imaginez er suggerez à Lahousse
que c’était
vous qui aviez
fait ce
remboursement. O n connaîc
aujourd’hui assez généralement les moyens donc vous êtes
capable
d ’user. Lahousse n’est pas ignoré non plus.
Lors de ce remboursement, Lahousse reverse entre vos mains la
somme q t ’il avait reçue de m o i; vous
vous arrangez sur l'article
de l’intérêr. L a finale est que Lahousse a éprouvé même
perte. J e
lui avais donné du numéraire , ec il n’a reçu de vous que des
assignats dans le tems de leur baisse. J e tiens ce faic de Lahousse
lu i-m êm e, à la seconde entrevue que j ’ai eue avec lui depuis plus
de cinquante ans que j'habite Clerm onr.
C epen dant, à la veille de l’audience , vous obtîntes de lui une
déclaration contraire , vous la fîtes valoir méchament , autant dans
le public qu’à l’audience, toujours
dans
la
vue de
rendre nia
probité équivoque.
Pour donner l'air de la vérité à cette déclaration ,' vous im asinez
O
une nouvelle im posture, vous faites plaider que votre frère était
malade , er qu'il avait de l’inquiétude sur l’échéance de cette lettre
de change, et pour marquer votre disposition à l’obliger , vous
faites paraître une quittance de Lahousse 3 datée du 8 juillet 1 7 88.
Cette quittance toute fraiche quoique écrite sur
un vieux chiffen ,
ne pouvait d'aucune manière quadrer à vos vues'; ec d’abord , il
n’y •était pas dit que c’était pour votre frère que vous aviez p a yé;
elle vous est donnée pour
votre
d’usage de prendre une quittance
propre
dette ;
particulière
d’ailleurs
est-il
lorsqu’on acquitte
une lettre de change , la remise qui en est faite par le créancier no
6uffit-elle pas ? ■
�11
A u fa it, la lettre de change est datée du 3 1 mai 1 7 8 8 , et n’était
payable qu’au i . er janvier 1 7 8 9 ; quelles pouvaient être les inquié
tudes de votre frère au 8 juillet
1 7 88.
Il
n'y avait qu’un mois
et huit jours qu’il avait emprunté , et il avait terme jusqu’au i . er
janvier 17 S 9 . Finissez
par rougir de
votre concert odieux avec
Lahousse.
A ussi le tribunal d’appel ne s’est point arrêté à cette trame ; il
serait en eâF;t bien dangereux et bien inconséquent de faire dépendre
le sort de celui qui a payé , et auquel le titre de la créance a été
rem is,
d’ une
déclaration
quelconque
provoquée et
surprise par
l'homme qui cherche sans regarder au prix , à en perdre un autre y
quel fléau ne serait-ce pas pour la société ?
Vous allez plus loin. Oubliant avec délice la délicatesse et les
sentimens qui paraissaient vous avoir conduit lorsque vous conçûtes
notre traité , vous avez l’impudeur de retracter vos engagemens sur
l ’indemnité des 85 50 francs, pour lesquels, en me remboursant en
assignats 3 vous ne m ’avez pas donné cent écus..
Conduit pat le même sentim ent,, vous vous rejettes
gation de iio o o francs que m’avait consentie
voulez que ce soit pour moi
votre
que j ’aie emprunté
sur l’obli
frère; vous
de Bughon et
Lescurier.
Vous produisez à la première audience un état écrit de la main
de votre frère , vous en aviez déchiré ou couvert d ’encre les dates ,
vous le fires disparaître aussi-tôt , et
pour
toujours
sans doute:,
parce que votre conduite y était dévoilée.
A la première audience j ’avais articulé que c’était1 la dame B la u d ,
votre sœur , qui avait procuré à votre frère Desmoulin les milite
écus empruntés de Bughon , et j ’avais dit la v é rité ; vous la fires
paraître à la seconde audience ; mais au moment
me fit des questions, et où
où
le président
j’allais le requérir d’en faire a votre
sccur, vous avez soin de la faire disparaîrre ;
vous craignîtes que
sa candeur ne lui permit pas de déguiser la véritc.
�Vous ne pouvez pas contredire les faits que je viens de p o se r, le
tribunal d’appel et tout le bareau en sont témoins.
Enfin , par la ruse , la surprise , la calomnie et la mauvaise foi
vous êtes parvenu à me tromper et tromper la justice. L e jugement
que j ’attaque, rendu entre vous et moi le 27 germinal dernier au
tribunal d’appel séant
i
R iom sur délibéré , au rapport du citoyen
C a th o l, a rejeté vos obligations, soit sur l’indemnité relative aux
■8550 francs prêtés en num éraire, soit les emprunts que j'avais fait*
pour votre frère de Bughon et Lescurier. I l vous a condamné à me
rembourser l ’efFet de Lahousse et ceux de Blatin , Case et F a b r e , à
compenser les d épen s, excepté le coûc du jugement auquel vous êtes
condamné.
Vous allez célébrer à votre maison de cam pagn e, à Beaum ont,
avec toute la pompe possible, le triomphe de vos ruses j vous fûtes
généreux 3 parce que vous étiez persuadé que c’était moi qui payais.
Hélas ! parce que je vous avais démandé ce qui m ’était si légiîimem enr dû , fallait-il après ce jugement qui me l’avait refusé vous
mépriser assez vous-même pour donner une fête ?
-
L a fête ne vous satisfit pas, vous fûtes le seul qui y savourâtes
le fruit de vos intrigues. Vous imaginâtes d’autres moyens pour donner
de l’aliment à votre calomnie. M ais très-inconsidérément , vous pu
bliez et faites publier par Louirette que les chefs dans lesquels j ’avais
succom bé m’étaient bien dûs , mais que vous vouliez que je ne pro
fita pas du cadeau que vous m ’aviez fait. Ingrat / un présent n’est
jamais fo rc é , et si j ’eusse pu prévoir ton ingratirude, ma porte
aurait été fermée pour jamais à toi et à ton présent. T u ne m ’as
pas payé un centime par heure pour le temps que tu m’as fait perdre»
et dont j’ai privé la foule d’honnêtes gens qui affluaient chez moi.
Toujours furieux dans votre haine qui n’avait d’autre but que de
vous dispenser de me payer, goûtant le plaisir de m’avoir fait perdre
quinze ou seize mille francs que vous avez reconnu me devoir après
le jugement. Vous heurtez à toutes les portes pour me faire destituer
de ma place de prem itr juge au tribunal civil de l’arrondissement de
�*+
C le rm o a t, •chef-lieu-du département du Pui-de-D om e. Ÿ ou s répandes
impudemment que ce jugement me déshonore : comme s’il éta^t
possible d’être déshonoré en demandant son bien à celui qui , par sa
mauvaise foi , cherche à vous le faire perdre. Vous avez la bassesse
de chercher à en persuader les défenseurs au tribunal civil qui n’a
joutent aucune f j i à votre délation. Vous me forcez par-là de faire
imprimer et les motifs et lts dispositions de ce jugement. Vous
espérez par suite de votre calomnie de trouver les moyens de frapper
l’oreille du gouvernem ent, et vous n’avez rien négligé pour y par
venir ; mais quoique je sois demeuré calme et tranquille , il m’esc
revenu qu’il ne vous était resté de toutes ces démarches que le cruel
désir de me faire plus de mal encore.
Vous affectez d’oublier ce qui est connu de tout le département.
D ans aucun temps je n’ai demandé de places. J ’étais content de
m on premier état dont j ’ai toujours joui avec agrément. Celles dont
j ’ai
été honoré ne m ’ont pas été données par l’effet de l’intrigue,
mais de la confiance et de ma soumission aux lois. J ’appelle sur la
véracité de ce fait tous mes concitoyens , la députation passée et
présente du département du Puy-de-Dôm e et le gouvernement luimême. Je n’ai jamais dit ni écrit à aucune personne en place un
mot qui tint à la sollicitation.
J e ne m’abaisserai pas jusqu’à demander à mes collègues dans les
différentes fonctions que j ’ai remplies des attestations de ma conduite ;
mais ne me donnez pas un défi à cet égard , vous seriez couvert
de confusion par le démenti quelles vous donneraient de toutes vos
calomnies.
Il
est malheureux pour moi que je ne puisse pas m’occuper dans
ce moment des moyens accablans que j’ai à présenter, et qui n’on;
pas été plaidés au tribunal d’appel. L a loi me force à me restreindre aux
infractions qu’elle a soufferte par le jugement dont je poursuis 1*
cassation , et je passe aux moyens.
Premier moyen de cassation.
L a cause a été plaidée pendant deux audience* \ à la seconde et
le
�fc i j
germinal il fut ordonné tm délibéré au rapport jldu ciroyen
C ach o t, à qui les pièces furent remises sur-le-champ ; ce délibéré ne
fut prononcé que le 27 , et l’a été sans rapport préalable ni plai_
doirie de la part des défenseurs. J ’étais à l'audience , et je n’ eus
q u ’à entendre le jugement q"ue j ’ attaque , ce qui est une contraven
tion aux articles I I I et X de la loi du 3 brumaire an z , qui dans
ce cas exige un rapporc à l’audience , publiquement.
Second moyen.
C e ju gem ent, en vous condamnant à me payer 4200 francs dont
vous ne m’aviez pas fait des offres , compense les dépens, excepté
le coût du jugem ent auquel vous êtis condamné. Autre violation
des dispositions de l’article premier du titre X X X I de l’ordonnance
de 16 6 7 ainsi conçu:
« T oute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens
» indéfiniment j sans que , pour quelque cause que ce s o it, elle en
» puisse être déchargée. «
Troisième moyen.
L a première et la plus sacrée de toutes les lois pour la société
et pour les individus qui la com pose, est celle qui maintient les
conventions et les obligations contractées volontairement \ les liens
qui les soumettent à leur exécution 11e peuvent être brisés que dans le seul cas où leurs engagemens auraient pour base une cause illicite
et prohibée.
C ’est pour le maintien de cette loi précieuse que nos législa
teurs ont assujetti les juges de ne porter leurs décisions q u ’en les
motivant et en annonçant publiquement la loi qu’ils ont appliquée,
afin que les particuliers qui ont le malheur djavoir des procès , ne
puissent pas ignorer que c’est la loi qui les a jngés plutôt que les
juges qui doivent en être les esclaves. On va
voir à quel point la
première section du tribunal d’appel séant à R iom s’est écartée de
ce principe.
Une loi du î x frim aire an 4 s’exprime ainsi : « considérant que
D'
�pour arrêter les vols que font à leurs créanciers les débiteurs dô
» mauvaise foi en les remboursant en assignats au moment où ils
» n’ont aucune v a le u r, etc. etc. »
U ne autre loi du 5 thermidor an 4 a été rendue d'après les mêmes
principes à l’article premier : il est dit qu’à dater de la publication
de la présente loi , chaque citoyen sera, libre de contracter
comme
bon lui semblera ; les obligations qu’il aura souscrites , seront exe'cuy
te'es dans les termes et valeurs stipulés.
E n f in , l’article V de la loi du 15 fructidor an 5 s’exprime ainsi:
"
« Tout
traité ,
accords ou transaction faits depuis
le premier
» janvier 1 7 9 1 , contenant fixation en numéraire m étallique, réduc» tion ou arermoiment d’une créance résultante d’un autre titre, quel» qu’en fut la date ou la valeur exprimée dans ces nouveaux actes,
» auront leur pleine et entière exécution. »
J ’ai rapporté dans tout son contexte votre obligation., et vous
convenez dans cet acte me devoir 8550' francs que je vous avais
prêtés en numéraire. Vous rapportez même la date des effets. Vous
êtes
l’auteur, le rédacteur et l’écrivain des
deux doubles , vous
laissez en blanc mon prénom dans celui qui m ’est destiné. Vous
convenez aussi ne m’avoir remboursé cette somme lorsque les assignat»
éprouvaient une perte considérable^ousvous obligez de rapporter/« effets
q-is vous m’ ave-[ consentis et les acquits que j e vous ai fournis qui
fixaient l’époque certaine du remboursement que j ’assure être dans le
courant de messidor an 3 , presque sur la fin , moment auquel ce que
vous me donnâtes en assignats ne valait pas cent écus. Vous promettez
de m ’ indemniser d’après le taux de l’échelle du département du Pu ide-D.ôme , de la perte que vous m 'aviez faite éprouver. T elles so n t
vos obligations qui avaient pour cause , d’après la loi , la restitution
d ’ un vol bitn connu de nous deux. Vous faites intervenir à cet enga
gement la délicatesse 3 vous vouleç que je n’aie aucun reproche à vous
faire. Cette obligation était irréfragable ; ses causes étaient puisée*
dans la plus seine moralité et dans les lois précitées.
Cependant le jugtm eiic dont je demande la cassation, l’a annulé
�*7
dans cette partie, et a ordonné son exécution dans un autre. L ’at-il pu ? et ses dispositions ne sont-elles pas évidemment une infrac
tion i toutes les lois ?
L es motifs de ce jugement ne peuvent l'excuser dans cette p a rtie ,
ses motifs sont évidemment éronés ou au moins
inapplicables à
l’espèce.
,
L e premier est calqué sur la loi du 1 1 frimaire an 6 qui déclare
définitif les paiemens accepcéi en assignats , et qu’ayant reconnu moiinéme avoir écé remboursé en assignats, je n’avais pas le droit de
réclamer l’ effet de l’obligation que vous m’avez consentie.
M ais la loi de l’an 6 prohibe-t-elle les restitutions de la part de
celui qui veut les faire volontairem ent, et par délicatesse à celui qui
a été
victime de la crainte ou de la complaisance ? n’y aviez-vous
pas renoncé par notre traité ? d ’ailleurs , cette loi annulle-t-elle les
obligations ayant une cause aussi conforme aux dispositions de celles
que je viens de citer ? et n’est-ce pas une infraction absolue à ces
lois et à la raison que présente le premier et le principal m otif de
ce jugement ?
L e second , le troisième et dernier m o tif n’ont rien de commun
à la contravention à la loi j ils sont purement idéals et facultatifs.
Dans le second , on cherche à excuser la contravention à la loi ,
sous prétexté que ce jugement avait fait disparaître l’indemnité que
j ’avais promise à Champflour sur les remboursemens que j ’avais faits
en assignats A Lesci rier et à Bughon pour le compte de D esm oulin ,
deux articles que le jugement rejette , et dont je parlerai dans mon
quatrième moyen de cassation.
M ais faut-il de réciprocité pour rembourser à quelqu’ un ce qu’on
a reconnu véritablement lui devoir , et ce que la loi caractérise de
vol. Où en trouvera-t-on une qui dispense de payer une dette avouée
et reconnue? d’ailleurs il aurait fallu
une
condition irès-expresse
dans notre traité qui eût prévu et bien expliqué
et il n’en existe pas.
cette con dition ,
Quant au dernier il est détruit pat le fait même et par les piècea
D i
�■19
de' la procédure 5 il
compromis 3 les
parte 'q u ’ en tout cas
B o yer ayant révoqué h
engagement de Champflour ont cessé p a r son propre;
fait.
M ais il 11’exisre point de compromis
entre
les
parties, ce sont
des obligations très-formelles et irrévocables : en voici la preuve.
U n jugem ent contradictoire , du 19 brumaire an 8 , rendu entré
Champflour présent j et moi au ci-devànt tribunal civil séant à 'R io m .
est ainsi conçu :
» Attendu que le citoyen Champflour a déclaré , par l’organe de
« son défenseur, avoir signé l’acte dont il s'agir.
■ » L e tribunal ordonne qu’au principal les parties procéderont en
» la manière ordinaire, et cependant donne acte au demandeur de
j> ce que le citoyen Champflour reconnaît avoir signé l’acte du 15
» fructidor an 7 ; eh conséquence ordonne que ledit acte portera
» hypothèque sur les biens dudit C ham pflour, à compter de ce jo u r».
L a même expression a été répétée datis vos moyens rapportés pat
le jugement du tribunal d’ap p el, où il y est dit par vous-m êm e,.
p a r l ’acte du 15 fructidor an 7 : la même expression y est répétée
plusieurs fois ; ainsi d& votre aveu , notre traité est un acte et non
un compromis.
.
Q a’est-ce effectivement qu’un compromis ? . c'est une convention
faite entre deux particuliers qui ont des contestations, et sur les
quelles ils ne sont point d’accord, i Ils nomment
deux arbitres,
et
leur donnent pouvoir de juger leurs diffôréns ou en dernitr ressort
ou sauf l’appel.
Or le traité en question n’a aucun
de ces caractères 5 vous et
moi décidons tour. Chacun contracte les obligations qui lui sont rela
tives. Louirette et Coste ne sont choisis que pour être de simples,
calculateurs } la qualification de compromis donnée à cet acte n'est
donc que pure fantaisie. L oin par moi d'avoir révoqué les engagemens que nous avions contractés , j'en ai demandé expressément
l’exécution par mes citations, et ce n’est pas révoquer un acte que
4 ’eu réclamer l'cfLc. L a révocation qui existe esc restraiute au seul
�su
ï?
choix qu’ avait fait Champflour de LouVettS et Coste qui n’ont 'p„iî
quitté ses poches pendant qu’a duré notre discussion soit à Clerm ont
jo it à R iom . L e tribunal d’appel en a été témoin ; et pour mou
compte je me suis félicité de les avoir révoqués.
Quatrième moyen.
>
r J ’avois une obligation de 1 1 0 0 0 francs qui m’avait été consentie
pat Desmoulin ; le même acte portait délégation sur les Vi ry qui
lui en devaient 16000 3 et procuration pour coucher l’intérêt de
cette so m m e, portée à 1 5 00 fr. par année , s agissant de la vente
d’une partie de l ’office de receveur des tailles , où Desm oulin avait
part ; je devais faire
compte à
Desm oulin de
cet intérêt. Il
ne
dépendait que de moi de me faire payer du montant de cette obli
gation par les V iry
à l’échéance du terme qu’il avait pris par le
traité passé avec les Cham pflour et JBlaud 3 ce dernier en qualité de
m a ri, traité déposé en l ’étude de Chevalier , notaire à Clerm ont ,
par Champflour et m o i , plusieurs années après la date de l’obligation.
Si j ’ai fait l’aveu que lors de cette obligation, j ’en avais pas de suite
compté le m ontant, c’est parce que je l’ai v o u l u , c’est que la vérité
■fut toujours ma boussole , et que mon h onn eur, depuis mon exis
tence , n’a jamais reçu d ’atteinte. Champflour a été témoin r e tous
les actes d’après lesquels j ’ai rempli et au-de-là le montant de cette
.obligation. I l a lui-même passé l’ordre de la
lettre
de change
de
j , i 80 francs 3 empruntés à Bughon ; il 3, été également présent de
l ’emprunt de 6 1 0 0 francs de Lescurier qui sont les deux objets rejettés par le jugement. Sa connaissance sur ces deux objets est
assurée par un écrit de sa main , d ’autant plus avoué par lui 3 que
(omme je l ’ai observé dans les fa its , i l a osé m’en, dîmander la remise
p a r une demande judiciaire qu’ il a formée au tribunal d ’appel séant
à Riom j et qui y
est encore pendante.
L e s lois et les principes que j ’ai mis en avant mettent les écrits
^ous leur sauve-garde comme chose sacrée} cependant le jugement
que j ’attaque ne s’y est point arrêté 3 et son m otif à çtt
égard est
de dire que la dette de Bughon et de Lcscuriet m 'é lit pçrsçnnelle.
�Sans doute que c'est moi qui m’écais o b lig é , je devais le fairi
pour remplir l’obligation de 12 0 0 0
fr. qui
m’avait été consentie.
M.iis il est écabli par preuves écrites , émanant de vous-même , que
c’est D :sm oulin qui a tou-hé ces deux emprunts. N otre traité porte
obligation de ma part de rapporter les quittances justificatives de
l’emploi de 12 0 0 0 fr. , montant de l'obligation , ainsi que les notes ,
titres et riocumens relatifs audit compte. O r , ayant prouvé par vos
écrits que Desmoulin , votre frè re , avait touché les deux emprunts
rejetés par le ju gem ent, et ayant établi par quittance, et rapporté
les cff.-ts que j ’ai acquittés à Bughon et à Lescurier , n’était-ce pas
la dette de Desmoulin que j’avais payée? et ayant ainsi rempli les
obligations que j ’avais contractées dans notre traité , n’est-il pas contre
toutes les lois que l’obligation que Desmoulin m’avait consentie,
n’aie pas été maintenue ? la confession de celui qui est muni d’ un
pareil titre peut-elle être divisée en matière civile ?
Cinquième moyen.
Une loi du 3 octobre 1 7 8 9 3 sanctionnée te 1 2 } s ’ exprime ainsi ',
tout particulier, corps et communauté pourront à l ’avenir prêter l'argent
à terme fix e , avec stipulation d ’intérêt suivant le taux déterminé pa r
la l o i , sans entendre rien innover aux usages du commerce.
Par notre convention il est expressément dit que Louirette et
Costc compteront aussi les intérêts conformément à la lo i , et alors il
n ’y avait point de demande.
'
L e jugement vous condamne à me rembourser 4200 fr. que j ’ai
payés pour votre frère pour des dettes onéreuses > et où toujours
l'intérêt est au grand mo i n s , au taux du commerce. M es paiemens
remontent au tems du numéraire 3 et où il
n’était pas question
d’assignats.
L e ju gem ent, d’après la
lo i , pouvait-il me refuser cet
intérêt
conventionnel , autorisé et permis , lorsque , dans cette partie , il
consacre votre obligation , quoiqu’il la rejette dans l’autre. Cependant
les intérêts ne me sont adjugés que du jour de
la demande. Ce
jugem ent présente donc encore une nouvelle infraction à la loi.
�Avec cette m ultitude de m oyen s, tous tirés d e s lo is
moyens
qui sont encore plus dévélopés dans m a requête en cassation. Je
dois en attendre avec sécurité l’admission.
B O Y E R ,
A
c l e r m o n t
D E L ’IM P R IM E R I E
DE
-f
e r r a n d
GRANIER
ET
,
F R O IN ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1801?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Puy-De-Dôme, demandeur ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat, propriétaire, habitant de Clermont, défendeur.
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1801
Circa 1786-Circa 1801
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0927
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0928
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53088/BCU_Factums_G0927.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Beaumont (63032)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
prison