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MÉMOIRE
P O U R M e.
P ierre-A lexis
-Louis B R U , Avocat et
premier Suppléant de Juge à S t, F lour, départe
ment du Cantal ;
C O N T R E les sieurs Jean M E Y R E , Greffier au tribunal
de commerce de St.
F l o u r , et F r a n ç o i s
D A U B U SSO N ,
de Clermont,
J e suis forcé de réclamer auprès des tribunaux une
justice vainement tentée auprès de mes adversaires ;
ma patience et les voies amiables n’ont produit aucun
effet. Accoutumés à faire des profits énormes par l’usure
et par l’agiotage les plus effrénés, ils ont ri de la bonne
foi de mes démarches , tant la corruption devient une
seconde nature par l’habitude de s’y livrer.
Depuis environ cinq ans ma fortune est menacée
Par cette espèce d’hommes inconnus jusqu’à nos jours,
et des sommes empruntées à diverses époques, dont
le total ne s’élève pas à vingt mille francs, réellement
�c o
reçus, sur lesquelles j’en ai déjà donné plus de vïngt-un
mille , laisseroient aux sieurs M eyre et Daubusson, un
produit en interets , et inteicts d interets de.plus de
25000 fr. dans moins de cinq ans, si les lois n’étoient
là pour réprimer leur cupidité , et si je n’avois en mon
pouvoir les preuves écrites de leur usure infâme.
Je le rép ète, c’est à regret que j’entreprends une
affaire qui auroit pu être assoupie , et dont le ré
sultat ne peut qu’être funeste à mes adversaires ; mais
ma réputation de solvabilité et de probité attaquée
a u d a c i e u s e m e n t de Jeurpart, des poursuites'vexatoires
commencées, une masse d’intérêts qu’ils réclam ent,
après avoir reçu plus que le capital ; le soin naturel de
défendre pour ma fam ille, contre des voleurs publics t
une fortune honnêtement acquise ; enfin un jugement
rendu pour et par des gens qui ont à démêler des af
faires majeures avec m o i, tout cela me force à parler
haut le langage de la justice. Je suis bien favorable , si
j’avois besoin de faveur , car je dois au sort de mes enfans les efforts que je vais faire. Je serai vrai dans l’ex
posé des faits ^ et les principes immuables du tien et
du m ien, trouveront leur application à mes intérêts
méconnus impunément jusques à ce jour.
FAITS.
Je possède au Village de Pierrefite, près de St. Flom y
département du C an tal, un domaine au milieu du
quel sont enclavés des héritages que Guillaume Amat
laissoit dans sa succession, et auxquels étoient dues des
servitudes de passage, prise d e a u , etc. etc.
�( 3 )
Moins par ambition que par nécessité je me vois
forcé de les acquérir. Je devois à cette époque en petits
capitaux exigibles environ 8000 fr. Lorsqu’au commen
cement de l’an dix je iis cette acquisition , j’ignorois
que les capitalistes coniioient leurs capitaux à des gens
la plupart sans a v e u , sans garantie, sans bonne fo i,
sans loi ; pouvois-je présumer qu’ils seroient aussi cu
pides , aussi imprudents qu’ils l’ont été. Car enfin ,
quelle garantie présentent des agioteurs en général.
L ’impérieuse nécessité de solder pour huit ou neuf
mille fr. de capitaux que je devois alors , ainsi que le
prix de mon acquisition, me fait découvrir Jean M eyre,
qui me procure, d’accord avec le sieur Daubusson,
les sommes dont j’ai besoin; le taux de 24 pour ojo est
le taux absolu exigé de leur part et accordé. L a re
construction d’une façade à ce d om ain e , la réparation
des grange et écurie , nécessitent encore un emprunt
dans les années onze, douze et treize, d’environ cinq
ou six mille livres , et il faut toujours recourir aux ad
versaires , tant les capitalistes semblent resserrer leur
argent, pour........
Les sommes que j’ai empruntées à ces diverses épo
ques ne s’élèvent pas à vingt-un mille l iv ., et s’il pouvoit y avoir de l’erreur nous la rectifierons par les
registres des adversaires , dont infailliblement le rap
port sera ordonné. Je désire ne pas en imposer.
^L e sieur M eyre ne manquoit pas d’empirer ma situa
tio n ; il faisoit ses comptes à discrétion; tantôt il fixoifc
pour six mois , tantôt pour trois m ois, 1 intérêt q u i,
quoique de 24 pour o¡o par an , se portoit à 28 ou à 5o
�(4)
pour o/o, selon les époques plus ou moins rapprochées
du renouvellement. Je vivois dans une inquiétude dont
personne que moi ne pourra se faire une idée. Les ex
trémités les plus malheureuses m’auroient paru quelque
fois' un bien infini. Je me rends inutilement chez le
sieur Daubusson , duquel je reçois pour toute réponse »
le c a p it a l ou Yagiot ; j’insiste, et il me réplique : arran
gez-vous avec M eyre , tandis que Meyre m’a dit : arran
gez-vous avec Daubusson.
Deux ou trois personnes qu’il ne convient pas de
nommer ici m’avoient bien promis de me prêter une
somme de 20000 liv. ( cette espérance cause en partie
mes malheurs ) •, ces fonds manquent, et cependant
la crainte des poursuites inouies que les agioteurs
étoient dans l’usage d’exercer, des ménagements pour
mon père et pour ma famille, la considération que j’ai
tant souhaité de me conserver, et que ces misérables
ont tenté de mo faire perdre, me forcent de renouveller de six en six , et de trois en trois mois ; mon
épouse qui partage mes sentiments , mon épouse qui
se flatte d’une espérance aussi vaine que m oi, m’engage
aussi à ce fatal et continuel renouvellement ; elle et moi
passons sous silence les chagrins que nous avons dé
vorés à ce sujet. Puissent les âmes honnêtes être saisies
d’horreur à l’aspect de pareils hommes, et de leurs as
sociés bien connus*
C e p e n d a n t j’avois déjà payé au sieur Meyre environ
six mille liv. à la fin de l’an dix; postérieurement je lui
ai donné quelques à compte , en le conjurant toujours
'de réduire cet intérêt qui alloit infailliblement dévorer
�ma fortune. Je l’ai pressé plusieurs fois de me laisser
connoitre par ses registres l’état des effets qu’il régloit
à son g ré, et il ne m’a donné qu’une fois cette satisfac
tion ; c’étoit en l’an onze, j’avoue même que je n’ai
pas été satisfait. On va voir qu’il ne falloit pas s’en
rapporter uniquement à lui.
En l’an treize , il me dit qu’il faut des fonds, il me
promet astucieusement une réduction considérable à
condition que je lui payerai une forte somme, j’y sous
cris , mais comment ferai-je ? je ne peux vendre sans
diminuer hors de toute proportion les revenus d’une
propriété considérable que je possède à Pierrefort, et
dont onconnoît aujourd’hui la valeur par l’afiiche que
j’en ai fait. L e sieuv Meyre est de mon a vis, il m’en
gage à faire une vente de 4oo septiers de bled , délivrablc en quatre ans , à quatorze francs le septier, me
sure de IVlurat, il retient les cinq mille six cents liv. que
produit cette ven te, il garde l’acte de vente entre ses
mains , et au lieu de diminuer le taux de l’usure , il me
répond que je n’ai pas fait un remboursement suffisant.
Je dévore ce trait inoui de perfidie, et je me tais.
Ce dernier procédé m’assure qu’il faut par la suite
retirer moi-même les lambeaux des lettres de change
lacérées, si je ne veux laisser périr totalement ma for
tune par la dévorante activité à renouveller, qu’em
ploient les sieurs Meyre et Daubusson.
J avois déjà tenté plusieurs fois de vendre tout ou
partie des biens dont je viens de parler ; mais comme
les agioteurs accaparent plus que jamais les fonds des
capitalistes, je ne peux vendi'e^ je tente de me faire
�d’autres ressources pour payer au moins partie aux
adversaires ; je suis forcé de contracter d’autres enga
gements qui, quoique onéreux, ne seront pas contestés
de ma p a rt, tant ils sont éloignés du taux énorme que
les sieurs M cyre et Daubusson ont adopté. Je rem
bourse donc plus de vingt-un mille liv., ce qui excède
de beaucoup le capital ; ensorte que ce qui est dû au
jourd’hui ne présente que des intérêts, cl intérêts des
intérêts.
Je tente in u tile m e n t à plusieurs reprises d’obtenir
une diminution auprès .du sieur Daubusson. Je me dé
te r m in e à revenir à Clerm ont, en foire de mai 1806 ;
tout ce que je peux obtenir est une diminution qui
porte à 18 pour ojo l’intérêt, en payant cet intérêt
dans deux m ois, et le capital en novembre suivant.
Il ne sortira jamais de ma mémoire que le 9 mai 1806,
jour où en présence du sieur Meyre je renouvellai les
effets éch u s, chez ledit D aubusson, un commis à fi
gure basse épioit mes moindres mouvements \ que les
sieurs M eyre et Daubusson n’avoient pas meilleure
m in e} que lorsque je pris et déchirai les effets précé
dents , un sourire pénible, mais dur, dérida un moment
leurs traits qu’avoit sans doute altérés une conscience
coupable, et que sortant de ce gouffre, je me dis tris
tement , le& yeux presque gros de larmes, où suis-je ?
que deviendrai-je ?
Q u o iq u ’ il en so it, à l’échéance des effets, même
embarras de ma p a rt, même rigueur , même dureté de
la le u r, menaces d’emprisonnement, de saisie, d’ex
propriation \ ei>iin, renouvellement forcé de mes effets
�( 7 )
le i 5 mai dernier, toujours à 18 pour o/o, sans éclater
contre les propos menaçants du sieur Meyre.
L ’échéance de ces derniers effets n’étoit pas encore
arrivée, lorsqu’il s’est fait une levée de boucliers parmi
les agioteurs, et qu’au lieu de céder aux sollicitations
portées par deux lettres au sieur Daubusson, mais qu’il
a laissées sans réponse, ils ont eu l’impudeur pour
20000 liv. d’intérêts usuraires et accumulés, d’àffecter
et de répandre une crainte d’insolvabilité, de grossir
des inscriptions, et d’allarmer des créanciers heureu
sement peu nom breux, tandis qu’ils n’ignoroient pas
que je possédois une fortune de plus de 200000 l i v .,
suivant l’évaluation ordinaire de notre département.
Ils font plus, me voyant afficher la majeure partie de
ines biens, ils ont répandu qu’à mon tour je voulois
imiter leur agiotage : les misérables !
Disposé a faire dés sacrifices qu’une faute produite
par la nécessité avoit rendus inévitables, en méprisant
leurs calomnies, j’ai cru ne pas devoir franchir les
bornes de la modération et de la loyauté ; je leur ai
dit que je payerois, mais qu’il falloit un peu de temps j
que ces intérêts étoient trop forts, que quelques re
mises seroient justes , etc. etc.
Ma patience a doublé leur ardeur, et soit qu’ils
1 attribuassent à la crainte , soit que par des procédés
violents et des menaces affreuses, ils aient cm m’emnieuer à détruire jusqu’aux traces de leur infâme agiotae>e > ils ont montré la même audace. L e sieur M eyre,
en présence de personnes dignes de f o i, a osé me
pioposer d attendre trois mois seulement, sous la condi-
�c, 8 ? . ,
tion de lui payer encore l’intérêt à 18 pour o/o, de lui
donner une caution, de lui remettre les effets qui font
ma preuve , ou de lui déclarer qu’il n’a voit perçu que
le taux légal. J’ai contenu mon indignation en repous
sant sa proposition; il a osé me proposer un jugement
auquel j’acquiescerois , ou dans lequel je déclarerois
que la créance:est bien et légitimement due au sieur
Daubusson ; même refus de ma part. Enfin , il a osé
me dire et répandre en public qu il ne m’avoit prêté
qu’à i5 pour o/o, tandis que la notoriété publique
l’écrase, tandis'que ses propres écrits à la m ain, et ses
lettres de change endossées par lui ou par le sieur
Daubusson, établissent d’une manière invincible qu’ils
ont porté le taux de l’usure jusques à 33 pour o/o, et
qu’ils ont accumulé intérêts sur intérêts.
Cependant ils viennent d’obtenir le 24 août dernier,
sous le nom du «sieur Daubusson, un jugement par dé
faut , qui me condamne au payement de vingt mille
deux cents liv ., montant de cinq lettres de change ; et
ce jugement est rendu dans la propre cause du greffier
M eyre , par le sieur Béraud, son cousin germain allié,
par le président, qui doit savoir que des affaires ma
jeures sont à démêler entre lui et moi. Le sieur M eyre
fait plus, il répand que nous sommes convenus d’un
jugement auquel j’acquiescerai, tandis qu’il l’a fait
rendre parce que je n’ai pas voulu y acquiescer de la
manière proposée, et que je lui ai laissé la faculté de
prendre scs avantages ; tandis que de suite il me l’a fait
signifier, et qu’il s’est inscrit, le tout contre une parole
donnée, comme ces sortes de gens la donnent.
�C9>
Si j’écrivois pour le tribunal de commerce de St.
F lo u r, je lui dirois que ce jugement est nul, parce qu’il
est rendu pour des personnes qui ont contre moi des
engagements de la nature de ceux que j’attaque, et par
des personnes qui ont aussi à régler des intérêts ma
jeurs avec moi.
Je leur dirois que le sieur Meyre est souvent partie
dans les affaires de commerce de ce tribunal ; que lui
greffier écrâse en frais une foule de propriétaires, qu’en
un mot il est du nombre de ceux qui agiotent au sein
même du tribunal.
Sans doute, Son Excellence le G ran d- Juge, informé
des abus qui se sont glissés dans les tribunaux, et de
ceux qui se commettent journellement au tribunal de
commerce de St. F lo u r, y mettra un ordre salutaire.
Les bons esprits n’cn doutent pas.
Je leur prouvcrois encore que cette espèce de tri
bunal est incompétente.
Mais comme j’écris pour le p u b lic, comme j’écris
principalement pour les juges qui connoîtront de l’u
sure et de l’agiotage dont je me plains, je vais rappeler
tes principes immuables qui doivent faire annuller les
actes de prêt à usure, en forme de lettres de change,
qui m ont rendu débiteur des sieurs M eyre et Daubuss° n , et qui doivent me faire restituer les produits
énormes de leur usure.
Il est de principe chez toutes les nations, et princi
palement en France que l’usure est un délit puni par
les lois, et que l’usurier est tenu à la restitution des
sommes qu’il aperçues de trop, qu’il est même soumis
2
�C 10 )
à des peines capitales. Je ne leur rappellerai pas les
principes du droit divin, ni môme la religion naturelle-*
la charité, Ici fraternelle charité ; leur cœur pourri est
fermé pour jamais à ce sentiment, et avertit la société
d’ètre en garde contr’eux ; je leur rappellerai les lois
qui les atteignent, en attendant que la Providence en
fasse justice.
Un capitulaire de Charlemagne, de 789, dressé à
A ix-la-C h ap elle, un de Louis le débonnaire, son fils r
de 8 1 3 , l’ordonnance de Louis I X , de 1254, celles de
Philippe le h ard i, de 12 74 , de Philippe I V , de i 3 i i*
de Philippe de V alo is, de i 34<), de Louis X I I , de
i 5 i o , de François Ier. , de i 535 , de Charles I X , de
i 56o , l’art. 147 de celle d’Orléans, de Henri III,
de 1576, celle de B lo is, de *1579 >art- 202, celles de
fleu ri IV , de i 594 > de Louis X III, de 1629, art. i 5 r,
celle de Louis X IV , de i 6j 5 , tit. 6 , portant défenses
aux marchands et à tous autres d’englober les intérêts
dans les lettres de change , et de prendre intérêts sur
intérêts, Toutes ces lois punissent de l’amende hono
rable ,, du bannissement et même de galère , au cas de
jé c id iv e , tous les usuriers connus aujourd’hui, tant sous
ce n o m , que sous celui d’escrocs et d’agioteurs.
' Divers arrêts rendus en 1699, en 1736, en 1745»
en 1752, ont,Consacré ces principes.
- Il n’est qu’à voir si ces principes s’appliquent à mon
espèce ; l’affirmative ne sauroit laisser de doute.
En effe t, les sieurs Meyre et Daubusson ont entre
tenu pendant cinq ans avec moi une relation de prêi
à usure, à 3 o , à 2 8 , à 24, à 18 , sous les couleurs de
�C rO
lettres de cl lange, portant la contrainte par corps.
Mais ces lettres de change sont des titres faits eh
fraude du code c iv il, qui défend à tout T rançais qui
n’est pas commerçant, ou qui n’est pas dans les cas
prévus aux art. 2o 5c) et suivants, de consentir à la con
trainte par corps. O r, je n’ai jamais fait de commerce
avec qui que ce soit ; les adversaires n’en ont fait ni
avec moi ni à mon occasion ; mes effets n’ont jamais
passé dans le com merce, ils se les sont réciproquement
endossés , et les ont gardés daris leur cabinet ; ce n’est
donc qu’à l’aide d’une fausse terreur de la prison, et
d’une exécution prompte et violente , qu’ils ont voulu
se procurer des lettres simulées , en fraude de la lo i,
tandis qu’ils dévoient se contenter d’une simple obli
gation de prêt; ils ont donc doublement violé la loi à
mon égard, i°. en ce qu’ils ont abusé de ma position
pour dénaturer un simple prêt ; 2 °. en ce qu’en le dé
naturant , ils ont exigé un intérêt usuraire et prohibé.
Ils diroient vainement que la simple lettre de change
me rend justiciable du tribunal de commerce ; je letir
réponds que des lettres qui sont nulles, qui contiennent
cumulativement capital et intérêts usuraires , et qui
sont un simple prêt déguisé, ne sauraient être de 1 at
tribution de ce tribunal.
, Il ne faut pas sans doute des preuves plus évidentes
que celles rapportées de ma p art, pour établir que ces
lettres n’ont pour objet qu’un prêt usuraire déguisé.
Les lettres que je tiens dans mes m ains, les comptes
et notes écrits par le sieur M eyre lui-même, ses propres
registres qu’il tient cachés, et ceux du sieur Daubusson ,
�c 12 y
la notoriété publique qui les flétrit, tout dépose hau
tement que les sieurs Daubusson et lui ont prêté à une
usure énorme , quoi qu’ils n’aient fait aucun, commerce'
avec moi.
Diront-ils que j’étois- majeur et homme d’affairesr
que dès lors je savois ce que je faisois? diront-ils qu’ilsne sont pas venu&me chercher pour, prêter ces fonds ?
Qu’un pareil raisonnement est puéril et de mauvaise
foi ! Et q u o i, l’homme d’affaire et le majeur ont-ils pu.
se mettre à l’abri de la nécessite ? Est-il une puissance
qui puisse les y soustraire ? Non. Eh bien, vous, M eyre,
vo u s, Daubusson et vos pareils, vous avez introduit
cette affreuse nécessité , vous êtes alléf accaparer tous
les fonds que vous avez pu découvrir, il n’est pas jus
qu’au salaire des gens à gages que vous n’ayez pris pour
en retirer l’usure, au moyen de laquelle vous avez mis
et vous réduisez une foule de familles à la misère ; et
vous avez le front de dire que vous n’allez pas cher
cher les emprunteurs, et vous leur dites que les ma
jeurs et les hommes éclairés doivent savoir, ce qu’ils
fo n t, vous osez, le d ire, et la société ne vous vomit pas
hors de son sein !
Dites-le m oi, quel droit avez-vous eu d’élever l’ar
gent que vous prêtez, à un taux au-dessus de celui fixé
par la lo i, à un taux inoui? aucun, si ce n’est celui du
voleur qui enlève la bourse‘ du passant, aucun., si ce .
n’est celui de la dure nécessité où vous avez mis ceux
que vous deviez regarder comme vos frères et vos amis»
et qui ne devoient bientôt devenir que des esclaves que
vous jeteriez dans des cachots.
�( . 3 )
Vous direz peut-être que l’argent est une marchan
dise ; autre misérable absurdité ! D ’abord il n entre
point dans une tête bien organisée , que 1argent inonnoyé, qui est le signe représentatif des marchandises,
de tous les autres objets quelconques , puisse etie une
marchandise lui-même ; d’autre part, cette marchan
dise ayant un taux de produit fixé par la lo i, celui
qui l’a prêté n’a pu lui donner, sans se révolter contre
la lo i, ùn taux usuraire de 25 et 3 3 pour o j o .■
On,dira peut-être encore qu’on ne connoît pas d usure en France.
Mais nous n’avons besoin
pour
répondre a cette autre
ineptie , que d’ouvrir le code civil.
„ L ’in térêt, est-il dit art. 1907> est légal ou conven„ tionel. L ’intérêt légal est fixé par la lo i, l’intérêt con„ ventionnel peut excéder le taux fi;xé par la loi toutes
„ les fois que la loi ne le prohibe} as ; le taux de l’inté„ rêt conventionnel doit être fixé par écrit. „
L ’article 1 3 y 8 ordonne la restitution des sommes et
intérêts perçus de mauvaise foL
Je conclus de là que le taux excessif est prohibé par
la lo i, et qu’il est usure comme dans l’espèce ; je con
clus encore que l’intérêt exigé de moi par les sieurs
Meyre et Daubusson , est usure, parce qu’ils ont évite
1 I j
•
de le stipuler par écrit, c’est-à-dire par convention cer
taine et dénommée. Je conclus donc que le Législateur
reconnoît qu’il peut y avoir usure, et qu’il entend la
punir.
Cela est d’autant plus vrai que j’ai en mes ma^ns
une lettre certifiée, en bonne forme, de son Excellence
«
�C *4 )
Monseigneur le Grand Juge, datée du 7 prairial an xiii,
qui porte que l ’on doit agir en restitution devant les
tribunaux civils contre les usuriers ; et que le journal
des débats du 3 floréal an x i , en rapporte une pareille
de s o n Excellence au Procureur impérial de Montreuilsur-mer ; cela est d’autant plus vrai encore , c’est que
les diverses Cours et Tribunaux ont condamné cer
tains usuriers à cinq ans d'emprisonnement, à vingt,,
à trente , à deux cents mille liv. d’amende, et que dans
l ’universalité des départements le taux de l’argent a
été remis à cinq pour cent ’, par suite de ces divers ju
gements , et des principes que les agioteurs avoient
cherché à dénaturer.
Il
est donc bien vrai que j’ai été victime d’une usure
immodérée ; il est vrai que les lettres de change simu
lées dont on a obtenu la condamnation, ne sont que
des prêts déguisés faits en fraude de la lo i, pour avoir
la contrainte par corps , qu’elles ont été exigées de
moi pour me contenir par une crainte chimérique, que
cet intérêt usuraire est le fruit d’une escroquerie pra
tiquée sous ces titres colorés ; que ces titres sont nuls
dès qu’ils supposent un négoce qui n’a jamais existé y
qu’il doit m’être rendu compte des intérêts usuraires
perçus au de-la du taux légal.
Je termine une lliscussion dont l’objet m’a causé et
me cause bien des chagrins. Je pourrais appeller plus
particulièrement l’attention du public sur ces hommes,
q u i, non contents d’usurper ma fortune , ont osé atta
quer mon crédit et mon honneur, qui me déchirent
sourdement encore ; mais me bornant à mon affaire,
�( 15)
j’aurai le courage de les combattre avec .l’opinion des
personnes estim ables, desquelles seules je désire le
suffrage ; une famille honnête et nombreuse inspirera
sans douté quelqu’intérêt à la justice, et quoique les
mœurs soient perdues , il est aussi quelques âmes rares
qui auront résisté à la corruption, et qui sentiront vi
v ement ma position ; qu’elles reçoivent ici mes remercîments sur cette sensibilité qui est le partage des bons
cœurs, et qui m’a souvent soutenu. J’avoue que j’ai
résisté long-temps á former une action qui me répugnoit; mais j’en suivrai la chance avec une constance
que rien n’ébranlera.
J’ai informé leurs Excellences Messeigneurs le Grand
Juge et Ministres de l’intérieur et de la police générale
des exactions de mes adversaires; je ne sais si mes ré
clamations leur sont parvenues ; je les réitérerai, et si
quelques-unes des entraves que j’ai vu plus d’une fois
mettre à mes démarches se renouvellent, les auteurs
seront connus, et je les suivrai par-tout. L a France ne
doit pousser qu’un cri pour signaler une espèce
d hommes dont les annales des peuples ne fournissent
pas d’exemple-
�
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[Factum. Bru, Pierre-Alexis-Louis. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bru
Subject
The topic of the resource
usure
agiotage
créances
abus
tribunal de commerce
libelle
Description
An account of the resource
Mémoire pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, avocat et premier suppléant de Juge à Saint-Flour, département du Cantal ; contre les sieurs Jean Meyre, greffier au tribunal de commerce de Saint Flour, et François Daubusson, de Clermont.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
Circa 1806-Circa 1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0505
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0506
BCU_Factums_M0509
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Talizat (15231)
Pierrefite-sur-Loire (03207)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus
agiotage
Créances
libelle
tribunal de commerce
Usure
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e18b9a6f4eb144599b8d091f5701f222
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Text
PREMIER MEMOIRE,
DU
7 SEPTEMBRE
1807,
ET SUPPLEMENT EN CAUSE D’APPEL,
DU
26 N O V E M B R E
1808,
P o u rM .e P i e r r e - A l e x i s - L o u i s B R U , Avocat, et premier
Suppléant de Juge à St.-Flour, département du Cantal;
Contre les sieurs J e a n M E Y R E , Greffier du Tribunal
de commerce de St.-Flour, et F r a n ç o i s D A U B U SSO N f
de C 1ermont.
E
J suis force de réclam er auprès des tribunaux une justice v a i
nement tentée auprès de mes adversaires; ma patience et les voies
amiables n’ont produit aucun effet. Accoutum és à faire des profits
énormes par l ’usure et par l ’agiotage les plus effrénés , ils ont ri
ed la bonne foi de mes démarches, tant la corruption devient une
seconde nature par l’habitude de s’y livrer.
Depuis environ cinq ans ma fortune est menacée par cette espèce
d hommes inconnus ju s q u ’à nos jo u rs; et des sommes empruntées
a diverses e po qu es, dont le total ne s’élève pas à vingt mille f r . ,
r éellement reçus, sur lesquelles j’en ai déjà donné plus de vingt-un
mille , laisseraient aux sieurs M eyre et Daubusson , un produit en
interets, et interets d’intérêts, de plus de 25,000 fr. dans moins de
cinq ans , si les lois n ’étaient là pour réprim er leur c u p i d i t é , et
si je n avais en mon pouvoir les preuves écrites de leur usure infâme.
e le répéte , c’est à regret que j ’entreprends une affaire qui
J
aurait pu être assoupie , et dont le résultat ne peut qu’être funeste à
mes adversaires ; mais ma réputation de solvabilité et de probité ,
a ta
q uee audacieusement de leur part , des poursuites vexatoires
commencées , une masse d ’intérêts qu’ils ré cla m e n t, après avoir
recu plus que le capital; le soin naturel de défendre , pour m a
famille , contre des voleurs publics, une fortune honnêtement acq u i s e jugement rendu pour et par des gens qui ont à
déméler des
affaires majeures avec moi , tout cela me fo r ce a parler
haut le langage de la justice. J e suis bien favorable, si j avais besoin
defaveur , car je dois au sort de mes enfans ( au nom bre de
o n z e , les efforts que je vais faire. Je serai vrai dans l’exposé des
faits et les principes immuables du tien et du m ie n , trouveront
�(a )
leur application à mes intérêts, méconnus impunément jusques à
J e possède au v illa g e de Pierrefite , pre» de St.-FIour, dépar
tement du C antal, un domaine au milieu duquel sont enclavés des
h é r i t a i s que Guillaum e A m a t laissait dans sa succession, et auxquels
¿taien? dues des servitudes de p a ss a g e, prise d eau , etc., etc.
Moins par ambition que par nécessité, je me vois forcé de les ac
quérir. J e devais à cette époque en petits capitaux exigibles environ
8 co o fr. Lorsqu’au commencement de l’an dix; je fis cette acquisition ,
j ’ignorais que les capitalistes confiaient leurs capitaux à des gens la
plu part sans aveu , sans garantie, sans bonne foi, sans loi; pouvais-je
présumer qu’ils seraient aussi cupides, aussi îrnprudens qù ils l’ont été !
C a r enfin, quelle garantie présentent des agioteurs en général ?
L ’impérieuse nécessité de solder pour huit ou neuf mille francs de
capitaux que je devais alors, ainsi que le prix de mon acquisition , me
fait découvrir Jean M e y r e , qui m e procure, d’accord avec le sieur
D a u b u sso n , les sommes dont j’ai besoin; le taux de 24 pour cent est
le taux absolu exigé de leur part et accordé. L a reconstruction d ’une
façade à ce dom aine, la réparation des grange et écurie, nécessitent
encore un emprunt dans les années onze , douze et treize, d’environ
cin q ou six mille fr., et il faut toujours recourir aux adversaires, tant
les capitalistes semblent resserrer leur argent, pour........
L e s sommes que j'ai empruntées à ces diverses époques ne s’élèvent
pas à vingt-un mille f r . , et s’il pouvait y avoir de l’e rre u r, nous la
rectifierons par les registres des adversaires , dont infailliblement le
rapport sera ordonné. J e désire de ne pas en imposer.
L e sieur M eyre ne manquait pas d’empirer ma situation; il faisait
ses comptes à discrétion; tantôt il fixait pour six m ois, tantôt pour trois
m o is, l’intérêt q u i, quoique de 24 pour cent par an , se portait à 28
ou à 3o pour cent, selon les époques plus ou moins rapprochées du
r e n o u v e l l e m e n t . J e vivais dans une inquiétude dont personne que
m oi ne pourra se faire une idée. L es extrémités les plus malheureuses
m ’auraient paru quelquefois un bien infini. J e me rends inutilement
chez le sieur Daubusson , duquel je reçois pour toute réponse, le ca
p it a l ou l'a g io ; j’insiste, et il me réplique : arrangez-vous avec M eyre,
tandis que M eyre m ’a dit : arrangez-vous avec Daubusson.
D eu x 011 trois personnes , qu’il ne convient pas de nom m er ici ,
m ’avaient bien promis de me prêter une somme de 20,000 fr. (cette
espérance cause en partie mes m a lh eu rs); ces fonds manquent , et
cependant la crainte des poursuites inouies que les agioteurs étaient
dans l’usage d’exercer, des ménagemens pour mon père et pour ma
fam ille, la considération que j ’ai tant souhaité de me conserver, et
que ces misérables ont tenté de me faire p e rd re , me forcent de renou
veler de six en six, de trois en trois mois. M on épouse qui partage
�mes sentimens, mon épouse qui se flatte d ’une espérance aussi vaine
que m o i, m ’engage aussi à ce fatal et continuel renouvellement; elle
et moi passons sous silence les chagrins que nous avons dévorés à ce
sujet. Puissent les âmes honnêtes être saisies d’horreur à l’aspect de
pareils hommes , et de leurs associés bien connus !
Cependant j ’avais déjà payé au sieur M eyre environ six mille fr.
à la fin de l’an dix ; postérieurement je lui ai donné quelques à-comptes,
en le conjurant toujours de réduire cet intérêt qui allait infailliblement
dévorer ma fortune. J e l’ai pressé plusieurs Ibis de me laisser connaître
par ses registres l’état des effets q u ’il réglait à son g r é , et il ne m’a
donné qu’une fois cette satisfaction ; c’était en l’an onze , j ’avoue même
que je n’ai pas été satisfait. On va voir q u ’il ne fallait pas s’en rap
porter uniquement à lui.
, E n l’an treize, il me dit qu’il faut des fonds; il me promet astu
cieusement une réduction considérable a condition que je lui payerai
une forte somme; j’y souscris; mais comment lera i-je? Je ne peux
vendre sans diminuer hors de toute proportion les revenus d’une pro
priété considérable que je possède à Pierrefort, et dont on connaît a u
jo urd ’hui la valeur par l'affiche que j ’en ai faite. L e sieur M eyre est
de mon avis; il m ’engage à faire une vente de quatre cents setiers de
b l é , délivrables en quatre an s, à 14 fr. le setier, mesure de M urât;
il retient les cinq mille six cents fr. que produit cette vente, il garde
1 acte de vente entre ses mains, et au lieu de diminuer le taux de l’ usure,
il me repond que je n’ai pas fait un remboursement suffisant. J e dévore
ce trait inoui de perfidie, et je me tais.
Ce dernier procédé m ’assure q u ’il faut par la suite retirer moimeme les lambeaux des lettres de change lacérées, si je ne veux laisser
périr totalement ma fortune par la dévorante activité à re n o u ve le r,
q u ’emploient les sieurs M e y re et Daubusson.
J avais deja tenté plusieurs fois de vendre tout ou partie des biens
dont je viens de parler; mais comme les agioteurs accaparent plus que
jamais les fonds des capitalistes, je ne p e u x vendre ; je tente de me faire
d autres ressources pour payer au moins partie aux adversaires; je suis
iorce de contracter d ’autres engagemens q u i , quoique o n é re u x , ne
seront pas contestés de ma p a r t , tant ils sont éloignés du taux énorme
que les sieurs Meyre et D aubusson ont adopté. Je rembourse donc
plus de vingt-un mille f r . , ce qui excède de beaucoup le capital ; en
sorte que ce qui est dû aujourd’hui ne présente que des intérêts, et
inteiets cles intérêts.
J e tente inutilement à plusieurs reprises d ’obtenir une diminution
auprès du sieur Daubusson. J e m e détermine à revenir à C le rm o n t,
en . °ire de mai 1806; tout ce que je peux obtenir est une diminution
q iu porte a 18 pour 100 l’intérêt, en payant cet intérêt dans deux
mois , et le capital en novem bre suivant.
ne sortira jamais de ma mémoire que le g mai 1806 , jour où ,
en presence du sieur M e y r e , je renouvelai les effets é c h u s , chez
2
�( 4 )
ledit Daubusson , un commis à figure b a ss e , épiait mes moindres
mouvemens; queles sieurs M e y re e t Daubusson n’avaientpasm eilleure
mine ; que lorsque je pris et déchirai les effets précéd ens, un sou
rire p énible, mais d u r , dérida lin moment leur traits qu’avait sans
doule altérés une conscience coupable ; et que sortant de ce gouffre,
je me dis tristement , les j e u x presque gros de larmes : où suis-je?
que deviendrai-je ?
Q u o iq u ’il en so it, à l’échéance des effets , même embarras de ma
p a r t , même rigu e u r, m êm e dureté de la leur, menaces d ’ em prison
n e m e n t, de saisie, d ’expropriation; enfin renouvellement forcé de
mes effets , le i 5 mai dernier , toujours à 18 pour 100, sans éclater
contre les propos menaçans du sieur Meyre.
L ’échéance de ces derniers effets n ’était pas encore arrivée , lors
q u ’ il s’est fait une levée de boucliers parmi les agioteurs, et q u ’au
lieu de céder aux sollicitations portées par deux lettres au sieur D a u
busson, mais q u ’il a laissées sans reponse, ils ont eu l’impudeur, pour
20,000 fr. d ’ intérêts usuraires et a c c u m u lé s , d’affecter et de répandre
une crainte d’insolvabilité , de grossir des inscriptions , et d ’allarmec
des créanciers heureusement peu nom breux, tandis qu’ils n ’ ignoraient
pas que j ’avais une fortune de plus de 200,000 f r ., suivant l’évaluation
ordinairs de notre département. Ils font plus , me voyant aflicher la
m ajeure partie de mes b ie n s , ils ont répandu q u ’à mon tour je voulais
imiter leur agiotage : les misérables !
Disposé à faire des sacrifices qu’ une faute, produite par la nécessité,,
avait rendus inévitables , en méprisant leurs calom nies, j ’ai cru ne
jas devoir franchir les bornes de la modération et de la loyauté ; je
eur ai dit que je payerais, mais qu’il fallait un peu de tems; que ces
intérêts étaient trop forts, que quelques remises seraient justes, etc. etc.
M a patience a doublé leur ardeur , et soit q u ’ils l’attribuassent à
la crainte, soit que par des procédés violens et des menaces affreuses,
ils aient cru m’emmener à détruire jusqu’aux traces de leur infâm e
a g io ta g e, ils ont montré la m ême audace. L e sieur M e y r e , en p ré
sence de personnes dignes de f o i , a osé me proposer d’attendre trois
mois seulement, sous la condition de lui payer encore l ’intérêt à 18
p o u r 100, de lui donner une caution, de lui remettre les effets qui
font ma p r e u v e , ou de lui déclarer qu’il n ’avait perçu que le taux
légal. J ’ai contenu mon indignation en^repoussant sa proposition; il
a osé me proposer un jugement auquel j’acquiescerais , ou dans lequel
je déclarerais que la créance est bien et légitimement due au sieur
D aub usson ; même relus de ma part. E nfin , il a osé me dire et ré
pandre en public q u ’il ne m ’avait prêté qu’à i pour 100, tandis que
la notoriété p u b liq i,e l’écrase , tandis que ses propres écrits à la main ,
et ses lettres de ch a n g e, endossées par lui ou par le sieur Daubusson ,
établissent d’une manière invincible qu’ils ont porté le taux de l’usure
jusqu’ù 33 pour 100 , et qu ils ont accum ule interets sur interels.
Cependant ils viennent d’obtenir, le 24 août dernier, sous le nom.
f
5
�du sieur D aubusson, un jugem ent par d é f a u t , qui me condamne au
paiement de 20,200 fr ., montant de cinq lettres de change; et ce j u
gement est rendu dans la propre cause du greilier M e y r e , p a r l e
sieur B éraud, son cousin germain allié, par le présid en t, qui doit
savoir que des affaires majeures sont à démêler entre lui et moi. L e
sieur M eyre fait plu s, il répand que nous sommes convenus d ’un j u
ment auquel j ’acquiescerai , tandis qu’il l ’a fait rendre parce qne je
n ’ai pas voulu y acquiescer de la manière p ro p o s é e , et que je lui ai
laissé la faculté de prendre ses avantages ; tandis que de suite il m e
l ’a fait signifier, et qu ’il s’est inscrit, le tout contre une parole donnée,
com m e ces sortes de gens la donnent.
Si j ’écrivais pour le tribunal de com m erce de S a in t-F lo u r, je lui
dirais que ce jugement est n u l, parce qu ’il est rendu pour des per
sonnes qui ont contre moi des engagemens de la nature de ceux que
j ’attaque, et par des personnes qui ont aussi à régler des intérêts
majeurs avec moi.
J e leur dirais que le sieur M e y re est souvent partie dans les
affaires de commerce de ce tribunal ; que lui greffier écrase en
frais une foule de propriétaires; qu’ en un m o t , il est du nombre
de ceux qui agiotent au sein même du tribunal.
Sans d o u te. Son E xcellence le G r a n d - J uge , informé des abus
qui se sont glissés dans les tribunaux, et de ceux qui se commettent
journellement au tribunal de com m erce de S t .- F lo u r , y mettra un
ordre salutaire. L e s bons esprits n 'en dou tent p as.
Je leur prouverais que cette espèce de tribunal est incom pétente.
Mais comme j écris pour le p u b lic , com m e j’écris principalement
pour les juges qui connaîtront de l’usure et de l’agiotage dont je
me plains , je vais rappeler les principes immuables qui doivent
iaire annuller les actes de prêts à usure , en forme de lettres de
change, qui m ’ont rendu débiteur des sieurs M eyre et Daubusson ,
et qui doivent me iaire restituer les produits énormes de leur usure.
Il est de principe chez toutes les nations , et principalement en
i r a n c e , que l’usure est un délit puni par les lo is, et que l’usurier
est tenu à la restitution des sommes qu ’il a perçues de trop, qu’il
est même soumis à des peines capitales. J e 11e leur rappellerai pas
es principes du droit divin, ni m êm e la religion naturelle, la c h a r ité }
a J ra tern elle ch a rité ; leur cœur est fermé pour jamais à ce
sentlment , et avertit la société d’être en garde contr’eux; je leur
rappellerai les lois qui les atteignent , en attendant que la provi
dence eu fasse justice.
de
PI ... —* »
*<5^4 ; ceues cie rnuippe-ie-ixaj u* , uc » 2 74: de.
(le.
,
PPe Ï V , de i 3 i I ; de Philippe de V a l o i s , de 1849; de L o u is X I [
üe i io ; de Francois I.” , de i 5 3 5 ; de Charles I X , de i o art. 14-7 d e ceu e O rléans; de H enri I I I , de 1 5 7 6 ; celle de jBlois*
5
56
�( 6 )
de 15 79, art. 202; celles de H en ri I V , de 1694; de L o u i s I I I , de 1629,
art. i 5 i ; celle de L o u is X I V , de 1 6 7 3 , tit. 6 , portant défenses,
a ux marchands et à tous autres d ’englober les intérêts dans les
lettres de c h a n g e , et de prendre intérêts sur intérêts. Toutes ces
lois punissent de l’amende h o n o rable, du bannissement et même de
c a ière, au cas de récidive , tous les usuriers connus aujourd’ hui , tant
sous ce nom , que sous celui d’escrocs et d agioteurs.
D ivers arrêts rendus en 1699, en 1756 , en 1745 , en i 7 z ; ont
consacré ces principes.
_
Il n ’est qu’à voir si ces principes s appliquent a mon espece ; a f
firmative 11e saurait laisser de doute.
E n e f f e t , les sieurs M e y re et Danbusson ont entretenu pendant
cinq ans avec moi une relation de prêt à usure, a o , à 28, à 24, à
1 8 , sous les couleurs de lettres de c h a n g e , portant la contrainte par
5
1
3
^ ï & a ’is ces lettres de change sont des titres faits en fraude du code
c iv il, qui défend à tout Français qui n’est pas com m erçant , ou qui
n’ est'pas dans les cas prévus aux art. 2059 et suivans, de consentir à
la contrainte par corps. O r , je n’ai jamais fait de commerce avec qui
aue ie soit; les adversaires n’en on fait ni avec moi ni à mon occasion;
mes effets n’ont jamais passé dans le commerce , ils se les sont réci•nroquement endossés, et les ont gardés dans leur cabinet; ce n’est donc
ciu’à l’aide d’une fausse terreur de la prison , et d ’une exécution
prompte et violente , qu ’ils ont voulu se procurer des lettres sim ulées,
en fraude de la lo i, tandis qu’ils devaient se contenter d ’une simple
obligation de prêt ; ils ont donc doublement violé la loi à mon é g a r d ,
j.o en ce qu’ils ont abusé de ma position pour dénaturer un simple
prêt; 2.0 en ce qu’en le dénaturant, ils ont exigé un intérêt usuraire
et prohibé.
Ils diraient vainement que la simple lettre de change me rend jus
ticiable du tribunal de com m erce; je leur réponds que des lettres qui
it n u l l e s , q ui contiennent cumulativement capital et intérêts usur m i sont un simple prêt déguisé, ne sauraient être de l’atraires, et qui
i
1
°
tribution de ce tribunal.
,
, .,
.
Il ne faut pas sans doute des preuves plus évidentes que celles rap
portées de ma p a r t , pour établir que ces lettres n’ont pour objet q u ’ un
prêt usuraire déguisé. L e s lettres que je tiens dans mes m a in s, les
com ptes et notes écrits par le sieur M eyre l u i - m ê m e , ses propres
registres qu ’il tient cachés, et ceux du sieur D a u b u sso n , la notoriété
üubliciue qui Ies flé tr it, tout dépose hautement que les sieurs D a u
busson et lui ont prêté à une usure énorm e, quoiqu’ils n’aient fait
aucun commerce av«c moi.
„
.
,, ,
Diront-ils que j’étais majeur et homme d’afïaires, que dès-lors je
savais ce que je faisais ? diront-ils qu’ ils ne sont pas venus me cher
cher pour prêter ces fonds? Q u’un pareil raisonnement est puenl et
de mauvaise foi! E h q u o i , l’homme d ’aflaire et le m ajeur ont-ils pu
�se mettre à l’abri de la nécessité? Est-il une puissance qui puisse les
y soustraire? non. E h b ie n , vous, M e y r e , v o u s, D aubusson et vos
p areils, vous avez introduit cette affreuse nécessite; vous etes aile
accaparer tous les fonds que vous avez pu découvrir , il 11 est pas jus
qu’au salaire des gens à gages q ue vous n ay’ez pris pour en retirer
l’usure, au moyen de laquelle vous avez mis et vous reduisez une
foule de familles à la misère; et vous avez le front de dire que vous
n’allez pas chercher les em p ru n te u rs, et vous leur dites que les m a
jeurs et les hommes éclairés doivent savoir ce qu ils foiit ; vous osez le
d ire, et la société ne vous vomit pas hors de son sein.
Dites-le m o i, quel droit avez-vous eu d’ enlever l’argent que vous
prêtez, à un taux au-dessus de celui fixé par la l o i , à un taux inouï,
au cu n , si ce 11’est celui du voleur qui enlève la bourse du passant;
aucun , si ce n’est celui de la dure nécessité où vous avez mis ceux que
vous deviez regarder comme vos frères et vos am is, et qui 11e devaient
bientôt deveuir que des esclaves que vous jetterez dans des cac ots.^
V o u s direz peut-être que l’argent est u n e marchandise; autie misé
rable absurdité! D ’abord il n’entre point dans une tête bien organis e,
que l’argent m onnoyé, qui est le signe représentatif des marchandises
et de tous les autres objets quelconques, puisse être une marchandise
lui-m ê m e; d ’autre p a r t , cette marchandise ayant un taux de produit
fixé par la lo i, celui qui l’a prêté, n’a pu lui donner, sans se révolter
contre la loi, un taux usuraire de
et
pour 100.
O n dira peut-être encore qu’on ne connaît pas cl’usure en France.
M ais nous n ’avons besoin pour répondre à celte autre ineptie,
que d’ouvrir le Gode c iv il:
« L ’intérêt, est-il dit , article 19 0 7, est légal ou conventionnel.
« L ’intérêt légal est fixé par la l o i , l’ intérét conventionnel peut
« excéder le taux fixé par la loi toutes les fois que la loi ne le prohibe
« pas ; le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit».
L ’article i y ordonne la restitution des sommes et intérêts perçus
25 33
38
de mauvaise fo i.
Je conclus de là que le taux excessif est prohibé par la l o i , et qu il
est usure comme dans l’espèce; je conclus encore que l’intérêt exige
de moi par les sieurs M eyre et D aubusson , est usure, parce qu ils
°nt évité de le stipuler par écrit, c’est-à-dire, par convention certaine
et dénommée. J e conclus donc que le l é g i s l a t e u r reconnaît qu il peut
y avoir usure , et qu’il entend la punir.
Cela est d ’autant plus v r a i , que j ’ai en mes mains une lettre cer
tifiée, en bonne form e, de Son E x . Monseigneur le G r a n d - J u g e ,
atée du 7 prairial an i 3 , qui porte que l’on doit agir en îestitntion
,^vant les tribunaux civils contre les usuriers; et que le Journal des
ebats, du
floréal an 11 , en rapporte une pareille de oOn E x . au
ocureur impérial de M ontreuil-sur-M er ; cela est d autant plus
vrai encore, c’est que les diverses cours et tribunaux ont condamne
certains usuriers à 5 ans d ’emprisonnement, a 20, à o, à 200,000 f.
3
3
�( 8 )
d’am ende, et que dans l’ universalité des départemens, le taux de l ’a r
gent a été remis à cinq pour 100, par suite de ces divers jugem ens,
et des principes que les agioteurs avaient cherché à dénaturer.
Il est donc bien vrai que j ’ai été victime d’une usure immodérée;
il est vrai que les lettres de change sim ulées, dont on a obtenu la
condam nation, ne sont que des prêts déguisés, faits en fraude de la
lo i, pour avoir la contrainte par corps; q u ’elles ont été exigées de
moi pour m e contenir par une crainte chim érique, que cet intérêt
usuraire est le fruit d ’une escroquerie pratiquée sous ces titres colorés;
que ces titres sont nuls dès qu’ils supposent un négoce qui n ’a jamais
existé ; qu’il doit in’être rendu compte des intérêts usuraires perçus
au-delà du taux légal.
Je termine une discussion dont l ’objet m ’a causé et me cause bien
des chagrins. Je pourrais appeler plus particulièrement l’attention
du public sur ces hommes qui , non contens d’usurper m a fortune,
ont osé attaquer mon crédit et inon honneur, et qui me déchirent
sourdement encore; mais me bornant à mon affaire, j’aurai le courage
de les combattre avec l’opinion des personnes estimables , desquelles
seules je désire le suffrage. U ne famille honnête et nombreuse inspi
rera sans doute quelqu’intérêt à la justice; et quoique les mœurs
soient perdues, il est aussi quelques âmes rares qui auront résisté à
la corruption , et qui sentiront vivement ma position ; qu’elles-reçoi
vent ici nies remercîmens sur cette sensibilité qui est le partage'des
b o n s cœ urs, et qui m ’a souvent soutenu. J ’avoue que j ’ai résisté longtems à former une action qui me répugnait; mais j ’en suivrai la chance
avec une constance que rien n’ébranlera.
J ’ai informé leurs Excellences Messeigneurs le G r a n d - J u g e et
JVlinistres de l’intérieur et de la police générale des exactions de mes
adversaires; je ne sais si mes réclamations leur sont parvenues; je
les ré ité re ra i, et si quelques-unes des entraves que j ’ai vu plus d’ une
fois mettre à mes démarches, se renouvellent, les auteurs seront con
n u s, je les suivrai par-tout. L a France ne doit pousser qu’ un cri pour
signaler une espèce d’hommes dont les annales des peuples ne four
nissent pas d’exemple.
1
BRU.
« y , m
J .1'1 — w m a - . .
S u p p l é m e n t
tfl
. a iu h u m i
cle Mémoire sur appel.
J E vais continuer le récit des faits de cette cause, justifier des motifs
qui ont fait infirmer le jugement du tribunal de commerce , qui rejeta
mon opposition, de ceux qui ont dicté celui rendu le g août dernier
eu ma faveur, et exposer rapidement mes moyens d’a p p e l, quant aux
chefs
�'(
9
)
chefs cjui me font préjudice. L a conduite de mes adversaires paraîtra
ju sq u ’a la fin sous le jour odieux qui l’a caractérisée depuis le com
mencement.
C O N T IN U A T IO N
DES
F A IT S .
Lorsque le jugem ent du 24 août m ’eut été signifie, toujours déter
miné à épuiser les voies amiables', je fis proposer au sieur M eyre de
traiter, puisque cela se pouvait encore, et que j ’attendrais 1 expira
tion de la huitaine sans former mon opposition ; sa reponse fut que
je ferais bien de ne pas la laisser écouler. E n conséquence , j e 2 sep
tembre 1 8 0 7 , je m ’occupai de la rédaction du mémoire qu’on vient
de lire.
On ne saurait se faire une idée de la célérité q u ’on mit alors à me
poursuivre. M e y re , qui venait de faire incarcérer avec tout appareil
de là force p u b liq u e , un nom m é Louis R o u d i l, propriétaire, qu il a.
ruiné dans trois an s, répandit que je subirais le même soj-t. O n anti
cipa les délais portés par mon opposition; pour en obtenir le débouté,
on me cita à l’audience du y , et à cette audience, dont je supprimerai
les débats scandaleux, m algré mon déclinatoire : « A tten d u , est-il dit,
« que j ’ai signé des lettres de change, avec remise de place eu place ,
K qu au fond il n ’est pas constant que M eyre ait un intérêt dans la
« cause; » je fus débouté de mon opposition, mon mémoire fut dçlionce à M . le Procureur-général de la C o u r criminelle , avec priere
de l’adresser à Monseigneur le G r a n d -J u g e , q u ia fait de cette dénon
ciation le cas q u e lle méxûtait: on demanda des dommages-intérêtS au
pront de l’hosp ic e , a cause des prétendues calomnies que le mémoire
renferm ait, tandis que je l ’avais consacré à la vérité.
Cependant, qu on ju g e par la position où j’étais , des diverses inquié
tudes que je devais eprouver. On m e citait les 7 et 8 pour contester
tiois cautions q u ’offrait le sieur Daubusson. M on épouse était accouc iee le 2 septembre ; le moindre acte de violence exercé sur moi ou
ans ma maison, pouvait priver mes enfans et m o i , eux d’une mère,
et moi d une épouse à laquelle nous tenons par des liens bien chers.
appelai le sieur B eau fils, officier de santé, q u i, le même j o u r ,
a esta que la dame B r u , accouchée depuis le 2 , avait le genre
nerveux extrêmement d élicat, au point de s’affecter aisément. L e
raetne Jour j e notifiai son certificat au s.r Daubusson, avec protestation
^ue je le rendais responsable de tout événem en t, et j’allai réclamer
u pi es de la cour d’a p p e l, une justice que je ne pouvais plus espérer
de trouver dans mes foyers.
Si e. Ptlr*a*s dans les plus vives allarmes. Violera-t-on mon asile.?
s i rn U est. » cl ue deviendra mon épouse; et si à mon retour j ’apprends
011 , je demande à ceux nui sont époux et pères , dans quel état
je me trouverai ?
J e demandai des défenses à la cour; je pouvais en obtenir, parce
que d après les dispositions des articles a o
et 2070 du code c iv il,
1
63
3
�( 1° )
il est défendu de stipuler la contrainte par co rp s, hors les cas prévus
audit code: on l’avait exigé de moi pour sim ple prêt usuraire. M ais
Daubusson lit plaider qu’on n’avait pas les pièces, quoique je les aie
vues entre les mains de son avoué , qui ne le dénia pas à la cour.
L a cause Fut renvoyée à la première audience d’après les vacations,
toutes choses demeurant en état.
L e projet de mes adversaires était, en demandant le renvoi, de pou
voir mettre le jugement du 7 septembre a executiun sur moi ; ils pré
tendaient le pouvoir m algré l’arrêt : ils s’en flattaient ; un conseil per
fide les entretenait dans cette erreur.
L e sieur Daubusson lit plaider le bien juge de la condamnation
prononcée au tribunal de com m erce de S t.-F lo u r; mais pressé par
les moyens puissans qui établissaient la négociation pour simple prêt
déguisé sous les couleurs de lettres de change , avec usure énorme et
anatocism e, depuis plus de cinq a n s , il finit par déclarer q u ’il ne
m ’avait jamais vu , qu’il était étranger à 1 affaire , et qu’ il ne me con
naissait pas , moi qui soutenais avec vérité être allé chez lui à trois
diverses fois. Rien ne fut plus surprenant que cette assertion démentie
de ma p a rt, en sorte que par arrêt du 20 novembre , la cour d’a p p e l,
séant à R io m « attendu que la sérielles lettres de change fournies par
« n i o i à M e y r e , et endossées au profit de Daubusson, lesquelles lettres
« n ’étaient même pas protestées aux échéances; attendu qu’il y a sup« position de lieu , et nulle remise de place en p la c e , que Meyre et
« Daubusson sont communs , que cette négociation n ’a eu pour objet
« que de simples prêts , déclare cju’il avait été nullement et incompé« temment jugé , et pour être fait droit aux parties , elle renvoie la
« cause au tribunal civil de S t.-F lo u r, et condam ne Daubusson aux
« dépens. »
J ’avais formé contre M eyre et Daubusson ma demande au tribunal
de St-.Flour, a fin de nullité des lettres de change souscrites et exigées
contre les dispositions de l’art. o
et su iva n s, et colorant des prêts
, nsuraires depuis plus de cinq a n s , avec intérêt de 24 à 33 pour 100,
anatocism e et renouvellement de trois en trois , ou six mois ; j ’avais
dem andé la restitution jusques à due concurrence de la somme de
douze mille fr. sur celle de 2 0 ,2 4 0 ^ ., a la quelle je voulais bien me
restreindre, si mieux mes adversaires n ’aimaient un compte , sur le
rapport de mes lettres cjui portaient leurs noms respectifs , et de leurs
registres depuis l’an dix. J ’avais aussi demandé la décharge de la
contrainte par corps.
_
T o u t - à - c o u p les adversaires réalisent le projet de se séparer, qui
avait pris naissance en cour d’a p p e l , au sujet de l’incompétence.
M e y re me fait citer au tribunal civil où nous étions en instance sur
m a demande en restitution de 12,000 fr., pour voir dire , q u ’attendu
q u ’à diverses époques il m ’a prêté ladite somme de 20,240 f r . , je sois
condamné à lui en payer le montant ; il poursuit en son nom la recon
naissance des cinq, lettres de changes 7 fait inscrire le jugem ent q u i
2 63
�( 11 )
les tient pour reconnues pour la somme de 22,364 f i . , tan
Daubusson avait pris une inscription cle 22,620 rancs pou
objet. L es deux inscriptions existent encore. ( Que jeu u cre
la solvabilité des débiteurs ! )
,
Indigné de ce système soutenu d’arbitraire et c e rauc ,
y
r)aubiens frappés d’inscriptions exagérées , niiustemen îai ^ J ‘
;’aj
busson , qu ’on prétendait ne pas avoir d intere
a
pourcru devoir à mes intérêts , à mon honneur et a
m-onortionnée
suivre une demande en dom mages-interets, qui u P P ^
^
aux torts qu ’ils m ’ont fait éprouver. Je me suis on
1 ^ ¿ es
Daubusson m ’a poursuivi avec un acharnement sans^
n iniurié*
audiences extraordinaires du tribunal de com m eice , ou 1
tu c r è s
qu’il a , par ses vexations, jeté l ’allarme dans ma
de mes autres créanciers ; qu’ il m a attaqu t ans
[ortune.
d ’honneur et de probité, qui me sont bien p us
q h isse ra i
L a cause a été plaidée au tribunal civil de S t
l° u i - Je
D es
sur les outrages dont on a cherché impunément a m
pssaver d e
hommes qui n’ont pas de famille ni ¿ h o n n e u r , on
J
porter le trouble dans la mienne. C ’était vraiment une
S me
demander justice contre des usuriers est une crise). M ais sur
mme
suis soulevé d’ indignation, lorsqu’on a prétendu me présen er
ossjr
un mauvais administrateur , et que pour le prouver ou pour 8 .
les capitaux , on a osé déclarer que M e y re m ’avait fo u rn i, dans
sucre
de deux ans , pour 3,800 fr. de vins étran gers, d’eau-de-vie, u
nu rln pnfp • i’/ivnis dans ma main sa nronre note et mon billet
blll qui
4
.-1
j y o o , les lois romaines ne permettaient pas de repeler - - „jjgj.
payés ; que prenant des fonds à 18 pour 100 , il pouvait bien S'1».
quatre ou c in q ; enfin, il a mis ainsi le vol et l’exaction en P11’ r
L e tribunal a ordonné le
m a rs, avant faire droit , (^-iep an IO
et Daubusson rapporteraient leurs registres respectifs t epuis
jusques en mai 1806, si non qu’ il serait fait droit.
.nrlnirf»
Daubusson a refusé de produire les siens ; M e y re n a vou u P1
que ceux tenus par lui depuis l’an 12 , quoique j’en aie vu en
de bien fournis en lettres de change.
.
. •
;n Rm
------------- .•
0
__„
î ncrri pti ons m uni-
23
r ----»
icî) iiunieuJJies
qiu; 1
^
a
vable , j ’ai demandé un d é la i, fondé snr les cuconstances ou les
usuriers ont placé leurs débiteurs ; je me suis fonde sur le décret des
4
�( 12}
J u ifs , plus applicable peut-être à M eyre et à Daubusson q u ’à tous
aUEnS'cet é t a t , le tribunal a examiné mes lettres de change et les
notes écrites de la main de M eyre, qui établissent les renouvellemens
rapprochés , l’anatocisme et le taux énorme de 1 intérêt ; la m auvaise
foi de mes adversaires l ’a frappé. E n conséquence, il a rendu le 9 août
d e rn ie r, le jugem ent dont les principales dispositions portent en
substance
devait être s t i p u l é ; qu'il n 'y a ci autre
.u. u c 1789 c .
en l’art. IQ 0 7 , s i ce n’ est q u e d ’après cette d ernière l o i , l e t a u x g u i aurait e x c é d é
l ’intérêt l é g a l , devait non seu lem ent être stipulé par é c r i t , mais ind iq u er le taux ;
tandis que d’après celle de 1789 et d e 179 0, il suffisait de s obliger par é c r i t , a v e c ou
sans re ten u e : q u e sans c ela la loi d e 1789 >dunt 1 obJet éta.t sans doute de restreindre
la ru u id ité d u p rê te u r, d ev en ait inutile , q u e tout intérêt excessif ou non , qui 11 est
nas stioulé est par cela m ê m e illégitim e , qu e x c ip er des négociations publiques oîj
l’ intérêt s e r a i t a u - d e l à de c i n q , c’ est présenter c o m m e loi la cou traveution à la loi
iviême q u e l’ anatocism e fut toujours sé v è r e m e n t r é p r i m é , q u ’ il n’ est pas autorisé
jgs’ ait. i i 54 et i i 5 5 , q u i ne pe u ve n t s’ appliquer à des intérêts illé g itim e m e n t
nerçus et confondus ; q ue l’ art. 1906 ne peut a vo ir trait q u ’ à des intérêts lé g itim e s;
O u ’alteudu en f a i t , q u e les effets dont il s’a g it, ne sont q u ’ une suite de négociations
c o m m u n e s auxdits M e y r e et D aubusson a v e c le sieur B ru , ainsi que cela est tenu
u o u r c o n s t a n t par l’arrêt d e la cour du 20 n o ve in b ré d e r n i e r ; ce qui laisse d’autant
m o in s de d o u t e , si l’on considère le refus d e D aubusson de présenter ses r egistre s,
et l’affectation de M e y r e de ne produire que ceu x tenus depuis l’an 12 ; et q u e dire
de la part de M e y r e n’a voir été q u e l’agent de D a u b u s s o n , ne se con cilie pas a v e c
les poursuites de c e l u i - c i , sans a v o ir a p p e lé M e y r e en garantie ; que M e y r e n a pas
d é n i é a vo ir rem is à B ru les notes écrites d e sa m a i n , qui établissent et l’ intérêt à
, p 0Ur 100 , et les r e n o u v e lle m e n s ; que la noie 3 én on ce de n ou ve au les 3 lettres
d e ch a n g e d e S o o o , 3o o o e t l 3o o f r . , q u e la note 4.® et 5.« c o ntienn en t le m êm e
Câîclll » ClC» y CtC*
i
O u e dès lors M e y r e et D au bu sso n d o ive n t faire raison audit B ru de 12,000 francs,
m es nui paraît être bien au - dessous de la restitution à laquelle il s’ est restreint ;
S° I,n
ste s’ ils veulent y r e m é d i e r , il l e u r a été laissé la faculté de v e n ir h com pte.
qu a u , e
>D a u b Uss0n sont con d a m n é s à faire raison audit B ru de la so m m e de
^ f6 pour restitution des intérêts excessifs et usuraires par eux perçus, si m ie u x
ïhiïument ve n ir au com pte p r o p o s é , sur la représentation de leurs regislres de l’an
nui seront abutés a v e c les pièces dudit B r u , à la déduction en leur faveur do
l ’intérêt d e c haq ue c a p i t a l , q u e ledit B ru a offert d’ allouer. C e jugem ent c o n d a m n e
B ru du consentem ent dudit D au busson, à p a y e r audit M e y r e la so m m e de 8,240 f . ,
ou t e l l e autre so m m e qu i résultera du c o m p t e , a v e c intérêts depuis le 3o j a n v i e r ,
énonue de la d em a n d e de M e y r e , ordonne la.rad iation de l’ inscription de D a u
busson la réduction d e c e l l e d e M ^ y r e a la som m e de 8,000 f.,et attendu que q u oique
B ru soit d é b i t e u r , et q u ’ il n ’ait pas fait des o ffr e s, il a soutenu une conteslalion
l é g it i m e , c o n d a m n e M e y r e et D aubusson en vers l u i , pour tout d o m m a ges et
in té r ê ts, a u x d é p e n s , hors le cout du ] u g e m e n t , ordonne q u e c e ju gem ent sera
ex é c u té par p r o v isio n , et sur les autres dem a n d e s des p a r ties,les met hors d instance.
C e jngement vient de m ’être notifié par M e y r e , sans nullement
l’approuver de sa part, et sous reserves au contraires de appel. J en
1
�—
I,
1.1
J-------------------- -----------------------
suis moi-même a ppelant, en ce q u ’il ne m ’accorde ni d élai, ni dom
mages et intérêts, et en ce q u ’il ordonne l’exécution provisoire.
Je vais parcourir rapidement les moyens qui doivent faire con
firmer le jugement en ce qui concerne la réduction ordonnée à la
somme de 8,000 f r . , si M eyre l’attaque form ellem ent, ainsi q u ’il
paraît se le proposer. J ’espèreaussi, en peu de mots , faire ressortir ceux
qui établissent Ja nécessité d ’en faire infirmer certaines dispositions.
i.° L e jugem ent du 9 août a bien jugé en réduisant à 8240 fr. les
20,240 fr. demandés par mes adversaires. _
2 -° Il a m al jugé en me refusant le délai demandé.
..° Il a aussi mal jugé en me refusant des dommages et in térê ts,
ou en les réduisant aux dépens.
4.0 L a disposition qui en ordonne l’exécution provisoire , autorise
une action irréparable en définitif.
D ’a b o r d , les motifs du jugement justifient assez la réduction
prononcée ; je ne m ’étendrai même pas beaucoup sur les moyens qui
doivent le faire accueillir, ce serait surabondant, d’après mes premiers
moyens.
J e m e contenterai de dire à son a p p u i, q u ’à commencer de l’ori
gine des sociétés ju sq u ’à nos jours , l’usure.a été un fléau que tous les
législateurs ont cherché à extirper, par des lois fréquentes et sévères.
Un lit dans le D euléronom e, dans le L é v itiq u e et dans une foule
dautres passages, rapportés par M . D o m n t , pag. 72 et suivantes,
les defenses les plus expresses de se livrer à l ’usure.
L e s lois d’A th èn es, la loi des douze tables à R o m e , l ’ont mise au.
nom bre des d é lits, puisqu’à R o m e , l ’usurier était puni du quadruple
de la somme prêtée, tandis que le voleur ne fut puni que du double.
L a raison en était qu’on est plus porté à se livrer à l’usure et q u ’il
est moins aisé de la découvrir que le vol.
E lle était tellement en horreur à R o m e , que quelqu’un faisant à
Caton cette question-ci : Q u ’est-ce q u ’un usurier? Il répondit froide
ment par cette autre : Q u ’est-ce q u ’un a ssa ssin ? Oflic. de Cic. J e
me tairai sur les désastres qui affligèrent R o m e , lorsque l’usure y fut
a son comble.
1
^ ^ . raPPort® p lus haut les lois connues depuis l’origine de la mo
narchie irançaise.
L es nouvelles lois , depuis celle du
octobre 1789 , n’ont jamais
a nus d’autre taux que celui de 5 pour 100 , fixé par édit de 1 7 7 ° e *
autres lois précédentes.
L art. 1907 du Code civil porte les mêmes dispositions : en déclaant que le taux conventionnel peut excéder le taux lé g a l, il ajoute
j outes les fois que Ja loi ne le prohibe pas). O r , des lois prohibies existaient, principalement la loi du
prairial an , qui remet
en vigueur toutes les lois prohibitives du commerce de la m onnaie
m étallique; d’autre p artj ]iavis Ju conseil d’état, qui est l’esprit de
ta loi, t u t , lors de sa rédaction, qu'à défaut de stipuler l ’intérêt p a r
écrit, il serait réduit au taux de cinq.
3
3
3
3
�--
r
Q ue les adversaires cessent donc d ’associer le législateur et le go u
à leurs crimes , quand il est prouvé que leur pensée a été
de réprimer et de contenir l’usure.
Q u ’ils n’invoquent sur l’anatocisme et sur l ’intérêt volontairement
p a v é , ni l’art. i i 5 4 , ni l’art. **
, ni l’art, 1906, q u ’on ne peut
sans rougir appliquer à d ’autres interets q u ’aux intérêts légitimes.
E n fin , deux arrêts des Cours d ’appel de D ijon et de Besançon,
de l’an 11, rapportésau journal du palais; deux de laCour de Bourges,
deux de la Cour de T u rin de 1807 et 1808 ( c e dernier rapporté par
Sirey ); un de la Cour de L i m o g e s , du 12 mars; arrêt de la Cour de
R i o m , du 20 n o vem bre, qui préjuge dans mon affaire qu’il n’y a eu
que négociations de prêts usuraiies. Ces arrêts, dont nous appli->
querions les principes sages qui les ont dictés, si l’appel de M e y re
était connu , attestent que l’ usure a été prohibée de tout teins.
A i n s i , de tous les coins de l’e m p ire, des magistrats probes et éclairés,
dont le choix honorera à jamais fa F ra n c e , ont consacré les principes.
A in s i, plus de cent vingt opinions des plus respectables, attestent la
nécessité urgente de punir et de réprimei 1 usure.
P o u r 'établir qu ’en fait le tribunal a bien jugé en appliquant ces
principes à m a ca u se , je me contenterai de renvoyer à la lecture du
jugem ent du g août.
J e vais donc m ’occuper de prouver que le tribunal a dû m ’accorder
le délai que je demandais.
L e jugem ent du 9 août porte que la somme réclamée par moi est
au-dessous de celle que j ’aurais pu demander. L es adversaires sont
donc à peu près désintéressés; et pour payer le restant d ’une créance
provenue d ’intérêts illégitimement stipulés, il était juste que le délai
nie fût accordé.
J e devais encore d’autant plus l ’obtenir, que les doubles inscrip
tions de 45,000 f. que se sont permises les adversaires, ont éloigné
les acquéreurs , auxquels des affiches avaient fait connaître mon
d e s s e i n de vendre; et que les inscriptions, quoiqu’injustes, ne peuvent
être rayées que sur un jugement en dernier ressort, s’ ils ne les rayent
eux-mêmes.
.
O ui ce délai devait d’autant plus m être accorde, que l’esprit du
décret relatif aux Juifs , du 17 mars 1808 , devait déterminer les
ju^es en ma faveur ; car si ce décret a eu pour objet de soustraire à
la'cupidité des usuriers les departemens malheureux compris dans le
sursis porté par décret du o mai 1806, Sa Majesté a bien entendu
sans doute protéger ses sujets de l'intérieur de la F rance, contre des
usuriers non moins furieux que les Juifs. O r , l’art. porte, que toute
créance portant cumulation d’intérêts, à plus de
pour 100, sera
réduite par les tribunaux , et que si cet intérêt réuni au c a p it a l,
excède 10 pour 100, lü crcanco sera annulleej enfin, l’art. 6 porte,
q u e , pour les créances légitimes et non usuraires, les tribunaux sont
autorisés à accorder aux débiteurs des délais conformes à l ’équité.
vernem ent
55
1
3
5
5
�( i5 )
D ans l ’espèce où je me trouve, je dois le restant d'une créance énor
mément usuraire réduite; je devais donc à plus forte raison avoir le
délai demandé.
Je devais aussi l ’obtenir suivant nos anciennes lois, puisque les
édits de Henri I V , du 17 février i 6 o 5 , et 14 mars 1606 , que les parlemens enregistrèrent seulement en faveur des veuves et mineurs des
usuriers, portent que les intérêts usuraires seront convertis en c o n
trats de r e n te , ce qui suppose un délai indéfini. V o y e z Pothicr sur
l ’ usure. E n f in , ce délai était d’autant plus nécessaire, que les ad
versaires ont répandu qu’ ils me mèneraient de telle manière que je
ne trouverais pas à ven d re , et cependant il faudrait les payer de suite.
D o n c ce délai était de la plus rigoureuse équité.
Il
a été mal iu e é quant aux dommages et intérêts. E n ettet , les
dépens ont-ils pu suffire, dans une affaire où ma réputation et mon
crédit ont été a lté rés, ainsi que ma tranquillité et celle de ma fa m ille ,
puisque nous ne vivons plus que dans les amertumes et les c î a g u n s ,
qui ne devraient être le supplice que du méchant?
Non , ils n ’ont pu me suffire , dès qu ’on a dit publiquement a J au
dience, q u ’avec mes propriétés je ne trouverais pas un sou , tandis
que M e y re , sans billet et sans im m eubles, trouverait 3oo,ooo f r . , lui
qui n’a qu’ une maison , et....... mais je m ’arrête.
Ont-ils pu me suffire, lorsque j’ai été représenté comme un mau
vais administrateur , qui ai pris pour 3,800 fr. d ’objets de consom
mation superflus, tandis que , l’écrit à la main , je lui ai prouvé 11 en
avoir pas pris pour plus de oo fr. dans trois ans?
A i- je été un mauvais administrateur, moi qui établis avoir p a yé ,
suivant un état signé en famille , le
germ inal an 9 , un'passif'de
,ooo f r . , en légitimes ou dettes de mon p è r e , que je remercie de
ses bienfaits et d’une administration bien plus heureuse que la mienne»
mais qui rend hommage à la vérité; moi qui ai acquis ou répare a
Pieriefite plusieurs domaines pour 47,000 fr. numéraire , ou d’après
l ’échelle de dépréciation; .qui ai acquis ou réparé à Saint-F lour une
maison pour 10,000 fr. ; moi qui ai éprouvé en trois ans le m axim um
®t des réquisitions sans n o m b re ; q u i , emprisonné en I79^ i su.r un®
liste de suspects, dont l ’auteur est trop célèbre dans notre cité, ai payé
une taxe révolutionnaire de valeur alors de 8,000 fr. num éraire, et
ensuite 4,000 fr. d’un emprunt forcé de 120,000 f r . , le tout réduit sur
l ’echelle de dépréciation ; 4,000 fr. de réparations dans mes biens de
Pierrefort ; enfin 5,3oo fr. pour la famille Fontes. T o t a l . . . • 101,0001.
Moi qui n’ai eu pour payer ces objets en total que 8 2 ,0 0 0 . sa v o ir ,
4^,000 fr. à des termes reculés, de la dot de mon épouse, dont cerm’ont été payés en assignats ; 14,000 fr. du remboursement d ’ on
office; 13,000 fr. de retour sur les biens cédés à mes lreres et sœursj
et 12,000 fr. prix d ’un petit domaine.
M o i enfin qui n’ai causé l'infortune d’aucun de mes créanciers, que
j ’ai payés en num éraire, sauf très - peu de chose en assignats qui avaient
presque leur valeur.
5
83
25
�(
)
J e défie ici qui que ce soit de contester ce que j’avance.
C epend ant, sur soixante-quinze mille francs qui pourraient rester,
je n ’en dois pas
,ooo fr. exigibles.^
Que ces détails sont fastidieux, mais la calomnie de mes adversaires
les rend indispensables; si tant y a , c[ue celui qu’on a si audacieuse
ment e x p o lié ,a it besoin de justification. J e 11 ai donc pas mal a d m i
nistré; j ’ai donc été calom nié; j ’ai donc droit à desdommages-intérêts
plus considérables , pour avoir été blesse dans mon honneur et dans
la profession honorable que j ’exerce. ^
■
Enfin, je prouve que l’exécution provisoiren a pas dû être ordonnée,
du moins sans caution, parce que M e y re n’a qu une maison et peu d’hé
ritages, hypothéqués à la dot de son épouse, et que quoiqu’ il ait vendu
le p e u q u ’ilavait pour se livrer à l’usure, il doit la plus grande quantité
des fonds qu’il a accaparés ; et que les victimes de son usure deman
dent de vant les tri bunaux la restitution des sommes qu’il leur a expoliées.
A p rè s avoir établi les moyens qui repousseraient l’appel de M e y r e ,
et ceux qui fondent le m ie n , qu’il me soit permis quelques réflexions
bien tristes, mais bien nécessaires, ce semble , dans les circonstances
critiques où les usuriers ont mis, en F r a n c e , les propriétaires et les
familles.
Ils répandent que les propriétés vont incessamment changer de main;
les mêmes continuent leur trafic. Il y a mieux , depuis la loi du sep
tem bre, il s’ est établi encore des compagnies d’argen t, qui courent à
la découverte des effets de tous les particuliers, qui inventorient et
font le bilan des diverses fortunes; ces compagnies ont leurs livres ;
l’éducation m ême semble s’être tournée vers ces spéculations désas
treuses. P a r leur monopole, le produit des biens du C a n ta l, qui n’est
que deux et demi pour cent, est à l’argent comme un est à cinq.
Us ont profité et ils profitent des ravages de la guerre pour assouvir
leur cupidité insatiable. E n un m o t , la loi du septembre n ’est pour
eux q u ’un avertissement d’être plus circonspects ( i ) .
Si donc toutes les lois ne sont remises en v ig u e u r , si incessamment
le décret relatif aux Juifs, n'est appliqué en entier aux usuriers connus,
sur-tout les articles , 6 et 16 ; si les créances qu’ils se forment ne sont
annullées ; si ce trafic ne leur est prohibé sous les peines les plus sé
vères, notamment celles du bannissement et des grosses am endes, ou
si un délai, au moins de deux ans, n’est accordé à leurs débiteurs, pour
les créances réduites; a moins que les usuriers ne préfèrent d’être payés
en biens fonds, sur estimation; si on ne les force à acquérir; si les
magistrats ne sont point assez courageux pour les poursuivre , nous ne
voyons devant nous que la misère, le désespoir et la m ort; et que
d’exemples il en existe !
36
3
3
5
( i ) L ’ iin p u n ilé les en hard it. L e s registres du greffe que lient M e y r e , sont c o u
verts de ses d é b i t e u r s , et les tribunaux correctionnels du Cantal ont beau s é v i r ,
leurs j u g e m e n s , q u ’a basés la c o n v i c t i o n , n ée d es d é b a t s , sont réform és par un
m o in d re u om b re d e juges et sur les sim ples notes du greffe.
�( 17 )
ï ï semble indispensable que S a M a j e s t é daigne Fortifier l’ouvrage
sorti de son cœur paternel le 3 septembre 1807; qu’elle songe à ces
peres de familles qui sont la ressource la plus sure de ses états.
O ui, Sire, songez que les propriétaires et les pères de famille sont
vos plus fidèles sujets , qu’ils tiennent essentiellement au sol et à la
patrie, plus que ces vampires, ces égoïstes, qui rapportent tout à eux
comme à un centre unique. F e rm e z , fermez ces gouffres où vont
s engloutir toutes les fortunes particulières.........
Puissent ces malheureux pères de famille, répandre des larmes de
reconnaissance autant qu’ils sont pénétrés de sentimens d’admiration
et d amour ! L a fin de leurs malheurs intéresse votre gloire. Sire, votre
cœur magnanime nous préservera de tous les genres d’a n a rch ie , et
cette gloire s’élévera au plus haut période.
S ig n é , B R U .
DEMANDE,
D U 12 J A N V I E R 1809,
en
SUPPRESSION D'UN LIBELLE,
Pour M.e P i e r r e - A l e x is - L o u i s B R U , A vo cat, et Sup
p lé a n t à S t . - F l o u r ;
Contre M E Y R E , habitant de Ladite Ville (1).
U n libelle commençant par ces mots : B r u a f a i t im prim er, etc . ,
® nnissant par ceux-ci : D e s n ég o cia tio n s dont j ' a i é té chargé par
ru ; libelle qu’a conçu une imagination d éréglée, mais féconde en
3 \ocl,é s , est l’unique moyen opposé à ceux que contiennent mes
ftiemoires des 7 septembre 1807 et 26 septembre 1808.
n style grossier, ignoble et c y n iq u e , caractérise l’âme et le cœur
e .ceux ^I11* ont travaillé à la rédaction de cet écrit diffamatoire. ^On.
voit que non contens d ’avoir corrompu les m œ u r s , ils voudraient
encore corrompre la langue ; aussi me serais-je borné à le jeter dans
es egouts, si mon honneur et ma réputation , attaqués si audacieuseent, ne m imposaient le devoir d ’en obtenir justice , de le faire supjrntner, et de poursuivre les réparations auxquelles les preuves que
ej r e m a fournies par écrit, me donnent droit.
Darce n?ionîe m p ' ° !e P as cians m on supplém en t ni dans cet é c r i t , le mot d e sieur,
avait comm
r S pr,.is“ C,Pes
e* l ’ asocial.
s a & ref“ sent ce titre à CeIui auclueI 0« a prouvé
yquu uil avait
un délit
5
�t I» )
Quant aux m o y e n s, M eyre prétend n ’avoir été que mon manda
ta ire, m a caution, mon ami; et pour tout cela n’avoir pris que demi
pour io o par mois. ( L a singulière et gratuite amitié que celle d’un
usurier! )
M a réponse est fort simple ; je ne lui ai jamais donné de pouvoir
c o m in ea mon mandataire; je lui ai demandé de l’argent, Daubusson
et lui m ’en ont fourni ; tout établit qu’ils sont unis d’intérêt, l’arrêt
de la C o u r, du 20 novem bre, ne laisse aucun doute à ce sujet, et le
jugement dont est appel constate ces faits pour ceux qui ont le c o u
rage de déposer tout esprit de passion ou d interet.
J e passe donc aux faits calomnieux et injurieux qui paraissent avoir
été le seul objet du libelle de Meyre.
D ’abord, aux pag. 2 et 2 1 , Meyre est sans expérience, et se dit
rédacteur de son libelle.
Réponse. A va n t l’an 1 0 , au moyen d ’un emprunt forcé, valeur
m étallique, sur son père, il se mit à même d’agioter sur les mandats.
D ep u is, 011 sait avec quelle rapidité il a m arché, et en combien de
manières.
A la pag. 14 , lig- et en marge , on lit que j ’ai rédigé un mé
moire infâm e, etc.
R ép . Il n’a jamais existé un pareil mémoire fait par moi, je défie
d ’e n
trouver un indice.
J ’ajoute, que lorsqu’après le p thermidor je fus appelé à l’adminis
tration de département, pour aider à réparer les ravages de l’anarchie
révolutionnaire, je fus chargé par mes collègues d’appeler auprès d ’elle
les prêtres détenus à l’abbaye du B uis, et que je rendis peut-être moi
s e u l,. à ces respectables citoyens, le témoignage des espérances qu’elle
fondait sur l’exercice de leur ministère.
J ’ajoute encore à cela une maxime vraie, qu’il est impossible q u ’un
homme de bien soit sans religion. J ’aurais autre c liose à dire ; mais il
n e faut pas être long.
A la même page ligne 9. - O n ne rapporte qu’ un arrêt de la Cour
de L im o g e s, tandis q u e , dans mon m é m o ire , pag. 2 4 , j ’en ai rap
porté huit de diverses Cours d ’appel.
A lam énte p a g ', li£- 2°- - 0 n es.1 soulevé d’indignation parce que
j ’ose demander un délai, après avoir obtenu une réduction des deux
tiers.
.
.
,
Rép- J ’ai obtenu justice et non une grâce. J ai offert plus que le
taux légal.
_
J ’ajoute que , libéré envers le sieur B asset, je ne dois pas 20,000 f.;
q u ’il me reste plus de 160,000 f. de propriétés, à dires d’experts; que
je n ’ai pas de bilan à déposer, et que je dois compter plus q u e M e y re ,
sur le silence de M . ls Magistrat de surete.
Même pag., lig. 27 et suivantes. — Je renvoie à mon supplément
de m ém oire, pag. 2 4 , liget suivantes.
J ’ajoute toujours que si les articles , 6 et 16 du décret du 3o mai
5
,
5
�c 19 ;
désignent seulement les J u ifs , c’est qu’on a supposé qu’ il n’existait
f ias en France d'autres maltotiers , usuriers , escros et agioteurs, que
es Juifs.
Pag- i , lig. 11 et suivantes du lib elle. -- J e réponds que j ’ai en
mes mains un état de M . R iv e t , du 17 décembre dernier, qui cons
tate la double inscription; je n’ai connu ni la procuration de M urât,
ni la radiation qui devaient m ’êlre notifiée par Daubusson. Gela
s’expliquera devant la Cour.
M êm e p a g ., lig. 17 et suivantes. — C ’est ici qne M eyre commence
à développer tout l’affreux du complot de diffamation, de ses consorts
et de lui.
D ’abord , il est notoire que lors de l’établissement du tribunal’civil
à St. F lo ur , un ê t r e , malheureusement trop in ih ia n t, au lieu de dé
terminer le choix pour l ’alternat de l’administration départementale,
que son incurie avait f;fit perdre à la ville en 1791 , fut pousse' par le
désir de faire sa fortune et celle d’un collaborateur du lib e lle , qu’il
ecarta, sous divers prétextes plus ridicules les uns que les autres, des
avocats qui lui reprochaient une honnête banqueroute de 10,000 f r .,
en prairial an trois, à la famille B a d u e l, et que par cette influence,
il fallut s’ad ressërà son cousin , qui recevait et répétait assez bien ses
conseils à l’audience; q u ’ ainsi des jeunes g e n s , (c o m m e on d it, a
peine sortis des bancs) firent promptement une fortune scandaleuse.
Mais arrêtons-nous là pour un moment.
P o g . 16, lig. 1.re et suivantes. — P our les raisons ci-dessus don
nées , il fallut crue les beaux-frères s’adressassent à la véritable source
pour faire plaider leurs causes avec succès.
M êm e p a g ., li g , 10. ~ J e viens de donner plus haut les raisons qui
expliquent les causes inexplicables.
M êm e p a g . , lig. i . — L e fait est faux; je défie qu’on administre
un adminicule de preuve.
On sait que M . Spy-Desternes ne cachait pas une opinion qui 11’était
alors un crim e, que parce que ce n’était pas celle de l’intrigant en
c h e f, a cette époque; lequel intrigant doit se rappeler l ’avoir échappé
belle à cause de ses intrigues, dit-on. A u reste, on connaît l ’auteur
de la mise hors de la loi de cet honnête citoyen; cet auteur est un
digne compagnon d’un des collaborateurs du libelle.
M êm e pag. h g . i{j. — J e n’ai scandalisé personne en exerçant les
lonciions d’a v o c a t , pour un accusé.
,1 a * demandé toute la latitude de le défendre; elle m ’a été refusée.
honneur et l ’indépendance de mon état me faisaient une loi de de
mander'respectueusement cette latitude. Les avocats doivent respect
aux tribunaux ; a leur to u r , ceux-ci leur doivent la considération
<lu us n’ont pas droit de leur enlever. O11 sait à quel degré d’honneur
tu t portée cette profession chez tous les peuples; et il faut esp érer
mess,eurs ^es avocats se pénétrant bien du droit q u ’ils on t de le
réclam er , cet honneur reviendra.
5
5
�\
20
)
A u reste, exerçant cette fonction pénible mais honorable, je n’ai
point exigé douze cents francs, ni d e u x , ni trois, ni quatre mille
francs pour une seule c a u s e , dans un département où les fortunes
sont très-bornées , et où les véritables talens ne le sont pas moins.
M êm e pag. ligne. 24 avec une note. — Cette note est ma justifica
tion. On sait que ce qui n’est pas établi paraphernal est dotal ; le pé
cule et les droits successifs m o b ilie rs , échus pendant son mariage à
la fem m e B e r l h u , ne pouvaient sans injustice passer à des parens
qui n’étaient pas les siens.
P a g .'i ’j ,I ig i re et suivantes avec note en marge. L e sieur Basset
est payé : il m e tint un propos que M eyre et ses consorts peuvent
seuls entendre de sang lroid ; pour m o i , je ne conseille à âme qui
viv e de m ’en tenir de pareils. L e sieur Basset ne fut vigoureusement
repoussé du poingt qu’une fois. M . Loussert , mon a m i, qui m ’estime
depuis
ans autant qu ’il est lui-même estimable, me fit vivement
retirer ; il n’a pas depuis cessé de me donner des preuves de son at
tachement. V o ilà le fait.
M ême pag. lig. 4 et suivantes avec la note. — L e fait est puéril ;
fût-il v r a i , est-ce notre faute si nous recevons de faux renseignemens?
M ême pag. lig • 9 d note. — L a circonstance à laquelle on a donné
une tournure maligne est controuvée. Je n’elais pas et je n’aurais-pas
été le juge de Roussille pour une somme quelconque.
J ’a jo u te , que je suis destiné à être honnête homme toute ma vie;
q u e d ’autres sont décidés à être fripons toute la leur. J ’espère que la
cour fera justice de la noirceur de cette imputation.
M ême pag. lig. 1 r. — Jam ais ma société n ’a été fort étendue. Celle
que je hante est estimable ; des j u g e s , des beaux-frères estimés , un«
maison vo isin e , un ami intime ; jamais cela ne m ’a abandonné : je
verrais encore une autre maison , si d ’une part la m é ch a n ce té , de
l ’autre, la présence de ces êtres corrompus n’étaient venues la souiller.
Quand a l’homme dont on a parlé , il n’a reçu de moi d ’autre ac
cueil que consolation dans son malheur.
M ême pag. lig • 18 et suivantes. -- L es faits dont il s’agissait étaient
vrais. M- le Sous-Préfet n ’ignore pas, et je sais comme.lui de quelle
manière cela s’est terminé. J ’ai copie de la lettre de M . le Ministre
de l’intérieur , du 19 fruct. an 10 , qui se borne à dire que les faits ne
lu i paraissent pas prouvés. Si j eusse calomnié!..... Mais alors je me
tus pour un bten cle p a i x , comme je me tais aujourd’hui j et c ’est à
regret que je réponds.
P a g . 18 , i re ligne. — L e fait est faux ; a l’exception du s.r DnudeCissac , tous les autres ont plaidé ; quels motifs ont-ils eu pour le con
traire? je serais lâché de leur en avoir donné de fondés.
M êm e pag. lig • 9 . ^ suivantes. — J ’ai dit que M . Devillas était
incapable de tronquer des dépositions ; mais que son greffier, am i
de C h anso n, p o u va it, par un penchant naturel à excuser son ami ,
avoir affaibli fa rédaction. Misérables calomniateurs l
,
23
,
�( 2ï )
M êm e p a g .lig . i — L e cadastre parcellaire de la commune de
Paulhenc avait été fait avec une imperfection sensible. Plusieurs
liabitans, M . le Maire et moi présentâmes notre pétition à M . le
Préfet : elle porte, que si cet ouvrage n’ est pas le fruit de la partialité ,
I n e x p é r ie n c e , puisqu’on n’a pas sondé les terreins; de la
précipitation puisque dans v in g t- n e u f jo u r s , le cadastre d’une
commune qui a deux lieues de rayon a été opéré; et de l’ erreu r,
parce qu’on a ajouté des héritages qui n’existaient pas. Sur celte
pétition , M. le Préfet écrit, d il-on, au Maire dans le sens rapporté ;
il envoie les experts, l’opération est réformée. O ù est le forfait ?
M êm e p ag. lig . zB et su iva n tes. — U n des rédacteurs du libelle
sait que les siens déchirent les billets avec les dents. Quant à moi, je
vais expliquer mon fait. L e sieur Beaufils - Mentieres , qui a fait des
progrès en alliance , était mon créancier par billet à ordre, de créances
que je n’ai pas voulu lui rembourser en assignats ; ces effets avaient
porté depuis des intérêts qui ne sont connus que de nous deux ; il me
cita au tribunal de co m m erce, il prit d éfaut; ma servante porta les
fonds chez M. G a u ta r d , je les com ptai, je pris d’après cela mon
b ille t, que je déchirai ; je refusai de payer le montant des frais et le
ard pour fra n c, non stipulé; je lui évitai les frais d’une opposition,
pour cause d’incompétence. V o ilà le fait. A h , M . Mentieres ! mais il
sera encore question de vous par la suite; malheureusement trop pour
cette affaire.
pag. lig. o et suivantes. — Il ne peut exister d’autre
o servation de ma p a rt, à nies héritiers, que celle de se défendre
une action injuste que pourraient intenter des créanciers avec
lesquels j ’avais traité en nu m é ra ire , sur l’échelle de dépréciation
existant alors, pour des assignats qu’ils m ’avaient prêtés. Ceci concerne
probablement le sieur Mentieres.
. ^ l*8 - T > 1*8 . " E t malheureusement ceci le regarde : eu 1 7 9 2 ,
(je m en rapporte à lui sur l’année) le sieur Mentieres me prêta, an mois
de m a rs, 6,000 fr. en assignats, remboursables dans 6 ans , avec oo f.
«intérêts. ( I l ne tenait pas tant aux intérêts alors. ) J e lui en avais
payé deux années; je ne l’aflligeai pas d ’assignats en l’an
et 4. L es
mandats circulaient ; M . Mentieres répandait qu’il aurait de l’argent ;
je prends 1 échelle imprimée de la trésorerie, par Bailleul > laquelle
) ai encore, je lui dis : le louis, en mars 1 7 9 2 , valait’43 fr. ; il est juste
que vous ayez l’équivalent de vos assignats , ou bien des mandats;
j étais bien éloigné de les lui donner. Nous traitons pour 4,000 fr.;
’ flue vous avez été im p ru d en t, M . Mentieres !
M êm e p a g e , ligne 7. — A n n et R odier n’a jamais été mon b o u ici ; je ne lui dois que 180 f r . , à ce que je crois. Celui qui a fourni
s m atériaux, ainsi que ceux du sieur Roussille pour ce libelle, donne
Une opinion que je n ’aggraverai pas.
M êm e p ag ,
j — Et c’est Je N e c p lu s utlrà de la turpitude.
Comment 1 M e y re m ’a fourni dans un a n , à moi s e a ï, autant de
5
3
9
3
3
3
�(
22
)
vins étrangers et d’eau-de-vie, que peut en consommer la moitié des
trente meilleures maisons de S t .- F lo u r , qui font à peu près la con
sommation. ( O n sait que quelques-unes de ces maisons, présentant
bien moins d’hypothèques, sablent plus que moi de ces sortes de vjns ).
Mais en leur passant vingt bouteilles à chacune annuellement, plus ou
moins, nous aurons oo bouteilles qui, à o sous, donneront 450 fr.
C e p e n d a n t, en 1801 j’a i , en tâtonnant commencé par 5j z francs de
consommation; mais en l’an 1 2 , j’ai dépensé en toute livraison, plus
de i , i 3 o fr. ; a h , cette année, j ’ai surpassé les trente maisons. E n
l ’an i 3 , je me suis arrêté à 806 fr.; je n’avais pu sans doute digérer
celui de l ’année précédente. En 1806, j ’en ai aussi consommé pour
8 i 5 fr. ; je me suis aussi infailliblement ressenti de l’indigestion de
l ’an 12. E nfin , en 1807, j ’ en ai consommé seulement pour 484 f r . ,
j ’imagine qu’ il a été fatigué de fournir; sa cave seserait épuisée. Faut-il
encore que je lui observe q u ’il y a erreur de 100 fr. à son préjudice?
Mais M e y r e , que fîtes-vo u s, lorsqu’au tribunal je vous déclarai
fripon, lorsque je fixai sur vous les regards du tribunal , et que vous
n ’osâtes pas même lever, cette tête qui n’a plus rien de la dignité de
l ’homme. J ’ai vos notes, mes écrits, l’état de livraison de ceux qui
m ’ont fourni après fructidor an 12 ; la cour appréciera tout.
Pages 20 et 21.
J e renvoie,u mon mémoire, page 2 7 , dans
lequel j’explique les faits que M eyre paraît ne pas avoir lus.
Quant à l’ironie relative à l’emprunt de 120,000 f r . , il n’y a que des
têtes semblables à celle d’un des rédacteurs du libelle qui aient pu
l ’imaginer. Dans certaines familles il y a des lubies; je sais que les
cousins se sont forgé celle-là ; mais quelle apparence que je veuille
devenir pauvre par orgueil : les tems ne sont point assez bons pour cela.
M êm e p a g e , lig . 14. — J e n’entends rien à cela. On cpnnaît les
démarches que je faisais pour mon malheureux père, infirme et sexa
génaire, lorsqu’un des rédacteurs du libelle et son cousin s’amusaient
à le traduire dans la maison de réclusion, on sait avec quelle énergie
je me présentai devant un représentant.
Page 22, ligne 11. — L ’im punité, je le répète, a doublé l’audace
de cet usurier; je le ferai sentir plus clairement à la page suivante.
rage
, lig n e 7. — Q u o i , M e y re , on délibère sur une innocence
aussi prouvée que la votre! U n entortillement pour caractériser l’es
pèce tle d o l , tandis qu’il était plus clair que le jour cjue vous en étiez
incapable! et aussi de l ’avis de M. le Suppléant qui faisait les fonc
tions de M . le Pro cureur-gén éral, et à l’unanimité après le délibéré!
la prononciation paraît insolite! T o u t cela me passe, en vérité.
3
3
23
.................................... ... . . . C et esprit m e c o n fo n d ;
J e ne p e u x co n c ev o ir com m eutc.es M essieurs font.
M
étromanie.
A u reste, vous avez un bon arrêt qui vous blanchira s’il se peut.
A propos d’unanim ité, la délicatesse et la sévérité des principes de
�\
J
M M . les juges du tribunal de première instance q u i, selon M e y r e ,
page i du libelle, n’ont pas été unanimes, sont trop certaines, pour
q u ’on doute de l’unanimité de leur opinion ; ils ont la réputation d'hon
nêtes gens, et ne l ’a pas qui veut.
Page
, lig. a . —- M eyre ose parler de Roudil. M alheureux,
taisez-vous; s’il mourait de chagrin , comme bien d ’autres, son spectre
vous serait épouvantable.
P a g e 26 , ligne 4. — O u i, ce registre est couvert de vos victimes ;
qu’ on le compulse. E t ajoutons-y que vous étiez greffier et partie , et
que vous ruiniez vos victimes en irais.
Quant à m o i , M . Douet m’a appris qu’il ne voulait que sûreté , et
qu’il n’avait pas voulu céder 111a créance pour m ’éviter vos poursuites.
M êm e page, lig. xi et suivantes. M o i, dem andera Son Excellence
là place de greffier au tribunal de commerce de St.-Flour ! et après
Meyre ! ! ! ............
Ë t'm o n b e a u -frè re , avocat estim é, écrire contre le sieur F a h y ?
Cette lettre existe sans doute comme celle que me prêta M . le SousPréfet , en l’an 10 , et qu’il ne put trouver dans sa poche.
M êm e p a g e, lig n e 17. — Faits fa u x, que je délie de prouver.
L ig n e 20. Fait faux. Jamais je n’ai paru à Murât les jours où votre
affaire a été discutée; j ’y suis allé au sujet du blé dont la vente vous
est connue, j’y ai pris sur votre compte des renseignemens dont je
ferai usage.
M êm e p a g e , ligne 23. — Si j ’ai dit à un magistrat que notre
3
25
3
escroc était condam né, je d éclare, pour sou honneur, qu’il ne in’a
pas fait Ja réponse que vous m ellez clans sa bouche.
1
J ai fini. J e crois avoir mis a nu usure au désespoir; mais cela
ne me suffit pas. Ma réputation, mon état et mon honneur ont reçu
1 outrage le plus sanglant qui puisse leur être porté.
S il existait une société dans laquelle une poignée d ’hommes eût
le droit de nous expolier, de nous enlever ensuite notre honneur, la
seu e îessource de 1 homme dans le malheur ; si des pervers pou
vaient le faire im puném ent, si la justice était impuissante pour nous
en ve n g e r, 011 n’aurait d ’autre parti à prendre que de défendre à main
armée sa fortune, sa famille et cet honneur. Q u o i, Meyre et D a ubus
son seraient aujourd’h u i , dans l’espace de sept ans , mes créanciers
de plus de cent mille francs, pour environ vingt mille fr. de fournis,
si je ne m ’étais épuisé en tout sens pour des remboursemens fréquens.
■keschevçux se dvéssem !
1
,n.’ j eJ a* dit, la société de ces vampires doit être anéantie avec
.atraPj, ®
* eclair , si l’on ne veut voir périr les ressources de I’é>si on ne vmit voir se briser la pierre fondamentale de ces ressources.
cultn*-’
S° nt c^evenues nos manufactures, le com m erce, l ’agriu ture, depuis que ces misérables font accumuler les banqueroutes,
epuis que la plupart d’entr’eux ont quitté même leur commerce pour
se livrer a l’usure.
F
�( 2
4
)
Ils sont furieux d’être découverts. Cependant, je n ’avais pas dit que
dans l’arrondissement de M u r â t , le boiteux Dauzolle , était mort de
chagrin , de voir en trois ans ooo fr. s’é le ve r, par l’usure, à 1 1 ooo f. ;
que Sarraille a éprouvé pendant deux ans les rigueurs de l'emprison
n em ent, pour des créances non dues, et que pour paralyser l’action
publique , on l’a dédom m agé; je n ’avais pas dit qu’aux prisons de
St.-Flour, deux détenus , victimes de l’usure, sont morts de chagrin;
que Gueffier d’A lo z ie r, et celui de R u in e s, forts propriétaires , sont
en fu ite , etc. etc. etc. et qui en est la cause ?
Je n’avais pas dit que les cam pagnes, à l ’exemple des villes, étaient
infestées du poison de l’usure; quel remède y apportera-t-on ? quelle
est la peine qui vengera la société de cet état de corruption, que
M eyre et consorts y ont introduit.
Que le crim e v e ille , qu ’il soit même im p u n i, je ne m ’en défendrai
pas moins contre lui, j’a ttends justice et réparation, et j ’espère fer
m em ent que je l’obtiendrai.
S ig n é B R U .
3
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bru, Pierre-Alexis-Louis. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bru
Subject
The topic of the resource
usure
agiotage
créances
abus
tribunal de commerce
libelle
Description
An account of the resource
Premier mémoire du 7 septembre 1807, et supplément en cause d'appel, du 26 novembre 1808, pour maître Pierre-Alexis-Louis Bru, Avocat et premier suppléant du Juge à Saint-Flour, département du Cantal ; contre les sieurs Jean Meyre, greffier du Tribunal de commerce de Saint-Flour, et François Daubusson, de Clermont [suivi de] Demande du 12 janvier 1809, en suppression d'un libelle, pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, Avocat et Suppléant à Saint-Flour ; contre Meyre, habitant de ladite Ville.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
Circa 1806-Circa 1809
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0505
BCU_Factums_M0509
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53817/BCU_Factums_M0506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Talizat (15231)
Pierrefite-sur-Loire (03207)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus
agiotage
Créances
libelle
tribunal de commerce
Usure
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16dd140a2c6e434710bf3c535bda3c9e
PDF Text
Text
M
É
M
O
P
M a g d e la in e
O
I
U
CH A B R I L L A T
R
E
R
,
m archande , habitante à
C lerm o n t-F errand , défenderesse et intim ée ;
C O N T R E
M i c h e l- A m a b l e U R I O N , propriétaire , habitant à Riom , plaintif
et appelant d’ un jugement rendu près le tribunal de police cor
rectionnelle
do l ’arrondissement de Clermont , du 3 fructidor
au 1 0 ,
E n présence du Commissaire du Gouvernem ent.
M i c h e l -A m a b le U R IO N occupa en fructidor dernier, plusieurs
audiences
du tribunal de police correctionnelle de Clermont ; il
n ’y parut point en p e r so n n e , pour se soustraire sans doute aux
regards , i n t e r r o g at s et à la confusion inévitable de la part de son
accusée. Ayant éprouvé auprès de
ce tribunal tout le
sort qu’il
m é rita it, dans l’espérance d ’un meilleur succès auprès du tribunal
d appel o ù il l ’a conduite , il a eu p r é a l a b l e m e n t la bassesse et
l'impu leur de faire So l l i c i t er par le moyen de ses parens et
amis près le tribunal spécial de la S e in e ,
un mandat d'am ener
qui a été décerné contre la citoyenne Chabrillat , sous prétexte
de distribution de faux Bons , auquel elle s ’est empressée d’obéir
espérant sans doute avoir plus beau jeu en la sachant privée du
droit de se faire représenter pour défendra sa cause [ 1].
( 1) L e citoyen U rion et sa fam ille ayan t appris que la citoyenne C h ab rillat
ava it é té obligée de dénoncer en floréal et therm idor derniers , tant au ma
gistrat de sureté de Paris qu’à celui de Clerm ont , le nommé M aillo t , mar
ch an d d e roaennerie , p our lui a v o ir donné a u tour de 3 o,ooo f r . de fau x
bons à négocier , à raison de d eu x pour cent de commission , l ’ont dénoncée
elle-m êm e, sur le fa u x m otif qu'elle en a va it v e n d u , les sachant faux.
,
�f
( 2 )
.
*
Mais heureusement , pour le triomphe de l ’innocence , cette
affaire est soumise à la décision de magistrats intègres, éclairés
et consommés dans l’art de développer et découvrir toute la
malignité de
l’intrigue en
sans s’arrêter aux
pareilles affaires ; qui par conséquent,
traits d e là calomnie la plus n o ir e , renfermée
dans un mémoire que le citoyen Urion a fait distribuer pour pré
parer l’opinion publique , sauront rendre justice à qui elle appartient.
A u ssi, est-ce moins pour éclairer ses juges , que la citojenno
Chabrillat se propose de répondre à ce m é m o ire , puisque la loi
la prive de ce bénéfice , que pour édilier ses concitoyens et s’ac
quitter envers eux d 'u n devoir essentiel, qui est celui de sa ju s
tification.
E lle s’estimerait seulement trop heureuse ,, si , avant le jugement
de celui dont est appel , et du fond de la retraite où elle a été
obligée de se rendre pour obéir à ce mandat que le crédit et la
malignité ont fait surprendre , elle pouvait espérer qu’il en parvînt
quelques exemplaires à ses magistrats , pour les mettre mieux à
même d’apprécier les calomnies et les fausses inculpations que le
citoyen Urion n ’a pas rougi de se permettre dans le sien.
Nous allons donc répondre à ce grand ouvrage construit à l’aide
de l’injustice la
mieux caractérisée , insérée dans une plainte
inconséquente dans tous ses points.
Quoique l’audace et l’impudeur y président
tête le v é e , la ci
toyenne Chabrillat ose se llatter qu’il ne restera dans l’esprit de ses
lecteurs aucune empreinte désavantageuse sur son com pte; et que
quoique de simple fruitière elle soit parvenue à
s’assurer la con
fiance de ce qu’il y a de plus marquant dans la classe des p ro
priétaires , banquiers et négocians de ce département et autres
circonvoisins , elle doit moins celte conquête à ses lalens et à sa
naissance qu’à la franchise , la délicatesse et la probité avec les
quelles elle s’est comportée dans
Devait-il
toutes ses négociations.
«loue être réservé à un homme jadis assis sur les iicu rs
de l y s , de venir s’élever contre une confiance si co n n u e , et par
desvoies indignes de son ancien r a n g , ch erch era flétrir celte même
fruitière [ qui ne
se trouve pas
à beaucoup près lézée de cette
qualité, quoique le citoyen Urion , dans son mémoire , en
l’ application
en termes
de mépris
fasse
] ; mais qu’il traitait bien
�différemment à l'époque sur-tout où il s'estimait trop h eu reu x
lorsqu’elle voulait se prêter à ses négociations , éj-oque où ladite
fruitière ne cessait
de lui faire entrevoir que celte manière d 'e m
prunter était un chancre qui
tôt ou tard lui donnerait la mort ,
qui même , pour la lui prévenir, s’était intriguée dans le tems pour
lui procurer des acquéreurs, et
en exprès
monsieur Boirot
et
monsieur G u y o t , qui s’étaient présentés ?
Aussi la citoyenne Chabrillat, forte
de sa conscience, ose se
flatter que tous les efforts du citoyen Urion deviendront infruc
tu e u x ^ !: qu’elle demeurera
toujours en possession de la même
confiance.
Faits.
Il faut convenir que le citoyen Urion tenait de ses aufeurs una
espèce de fortune bien inférieure cependant à celle dont il a
Voulu se parer dans son mémoire ; il est même do notoriété pu
blique que la portion héréditaire qui lui était échue , ou dilférena
autres arrangemens ou affaires qu’il avait pu traiter avec ses co
héritiers
ou
autres , assuraient sur sa tête plus de 60,000 fr. de
dettes hypothécaires ou chirographaires.
C ’est dans celte position où cet liotnme si rangé et si prévoyant , guidé par je ne sais quel motif de spéculation , acquit le
25 messidor an G du citoyen Chalier , sa belle terre de Périg n a t , sur le prix de 190,000 fr. payables dans l’année de l’acqui
sition. Qui croira qu il ne put réaliser les piemicrs cent louis d’or
«l’épingle* promis au citoyen Châtier , sans le secours de Magdelaine Chabrillat , qui les lui fit prêter ? Il fut poursuivi par
le citoyen l â c h e , notaire, pour les droits d’enregistrement et
de réception , se laissa même sergenter par ce dernier , tant ses
coffres étaient pleins !
C ’est à celle belle acquisition que Magdelaine Chabrillat doit
la connaissance et l’emplette du citoyen U rion, ainsi que iestra
casseries qui s’en sont suivies. Dès cet instant il la pressa do vou
lo ir bien ce p icte r à toutes ses négociations , qu’elle continua
ju sq u a u
a pluviôse
nu 9 , époque
oùj, après
tout
A
arrêté do
Z
�compte avec elle , il se trouva
son reKqtiafaire d’nne somme de
5 oo fr. qu'il lui reconnut par un f f Y t d e paieille lenenr (1).
L a citoyenne Chabrillat ne taira pas q u e , le même jour de cette
reconnaissance , il lui demanda, îous prétexte d’é d ife r fa finn'illr qui
était déjà imbue de ses mauvaises affaires , une espèce d’élat sur
l ’argent qu’il avait reçu , et les pertes qu’il avait éprouvées. L a
Chabrillat s’v refusa d ’a b o rd , en lui obseivant qu’il lui était de
toute
impossibilité de se rappeler depuis si longtems toutes les
négociations qu’elle
ne
avait faites pour son c o m p te , attendu qu’elle
tenait et n ’avait jamais tenu état } raison, ni registre de tou
tes les opérations qu’elle faisait journellement ; que sa premiere
éducation ne l’avait pas mise à même de se satisfaire à cet égard ;
que , quoiqu’elle fît ordinairement beaucoup d’afiaires , ce n’était
que par la grande confiance qu’on avait en e lle , et rien de plus.
Cependant sur ses itéi’atives sollicitations, d’après lesquelles
lui fit entrevoir qu'elle n’aurait
pas grand’ peine à Tobliger
il
en
cela , parce qu’il avait conservé par devers lui des notes à ce su je t,
elle y accéda.
L u i a ya n t de plus fait observer que cet état écrit
de sa propre main , ferait moins d’impression à sa fam ille, ils se
rendirent tous les deux dans l’appartement du citoyen D u p i c , qui
complaisamment l’écrivit sous la dictée du citoyen Urion.
Quelle ne fût pas le surlendemain la surprise de la citoyenne
Chabrillat, lorsqu’il lui parvint que le citoyen Urion promenait
dans Clermont
cette pièce , son seul ouvrage , et qu’il lui faisait
demander le compte exact des opérations qu’elle avait fuites pour
lui !
La
citoyenne
C h a b rilla t, entourée jusqu'alors de la confiance
p u b liq u e , crut devoir faire cesser toutes ces réclamations , en s ’en
rapportant pour
crédit. L e citoyen
la décision de cette affaire, à une personne de
Domergue qu’Urion proposa et devant lequel il
eut l’impudeur de réclamer 12,000 fr. , à la faveur de ce compte, son
propre ouvrage , que le citoyen Domergue sut app réciera sa valeur,
puisque , observations fuites , il répondit au citoyen Urion : que
malgré ses instructions, il ne sauiait y rien comprendre ; que cepen( 1 ) Je p ay e rai dans trois m ois à 1 o rd re du la citoyenne C h a b rilla t, la somm e
¿ e 5 o o ir . Yttlcur reçue. F a it ce a pluviôse a n jj.
�(5 )
'¿ " ï
d a n t , toutes réflexions à part , pour acheter la paix et mettre fui
à toute espèce de contestation , il conseillait à la Chabrillat de
faire le sacrifice (le ce qui lui était dû par son effet.
L ’affaire en resta là jusqu’au commencement de germinal sui
va n t, époque où le citoyçn Urion se vit assailli par un essaim de
créanciers qui s’empressèrent à le poursuivre , d’après lu, bruit
sur-tout qui avait couru , qu’il s/était transporté chez le c i t o y e n
Nicolas , présent monsieur M o r i n , pour le consulter à l’effet de
savoir si la demoiselle Arnoux, sa
belle-soeur et sa caution dans
presque tous ses effets, ne pouvait pas s’inscrire en faux , en dé
niant sa signature , parce que , ceLte tournure une fois p ossible,
il consommait le délicat moyen de la misérable cession. L e con
seil du citoyen Nicolas ne lui fut pas propice.
Ces bruits une fois accrédités, tous
ses effets furent protestés,
faute d’acceptation. A i n s i , poursuivi de toute part
il ne songea
plus qu’à réunir tons ses créanciers. C ’est le citoyen Dar.tis qui
fut chargé de cette grande affaire qui so traita avec l,a dame
A r n o u x , sa belle-mère, en vertu de sa procuration du lü germinal.
C e fut le 19 du même mois que la majeure partie de ses créan
ciers s’assembla et accéda au traité d ’u n io n ,p a r lequel la Dame
A rn oux t’ obligea et donna s û re té , pour qu’en six termes égaux
d ’année en an n ée, le montant
de toutes les créances fût acquitté.
L a dame A rn oux , à la vérité, réserva tous les droits et
actions
du citoyen Urion , son gendre , contre la Chabrillat.
Mais tous les créanciers n ’ayant pas voulu accéder au contrat
d ’union , il fut obligé de les citer en conciliation et de prendre
des défenses provisoires pour se mettre à l ’abri des poursuites dont
i l était menacé de leur p a r t , et de les assigner en homologation
dudit contrat d’union.
L a citoyenne Chabrillat fut même comprise dans ce travail. Mais
p ar suite de sa malignité ordinaire , lui suspectant d’autres créan
ces que celle do 5 oo fr. , seul objet qu’elle avait réclamé par ex
ploit du trois ventôse p ré céd e n t, il se réserva, dans cette sup
position, le droit de les contester et de prendre contr’elle tel parti
qu’il aviserait , même la voie criminelle.
Ç e fut le a 5 messidor suivant que le citoyen
Urion
obtint
�V .-.
(6 ,
contre tons les récaicitrans ail contrat d ’union, y comprise la Chalirillat, un jugement d’homologation. Ce jugement qui contient la
lalifieation et la reconnaissance tant de ceux qui avaient accédé,
que des opposans audit contrat d’u n io n , fut signifié , sans aucune
espèce de réserve, à la Chabrillat
le
*5 fructidor
suivant, avec
sommation de s’y conformer.
Mais bien s’en faut qu’il fût dû aux créanciers auprès desquels
la citoyenne Chabrillat avait servi d'intermédiaire pour le citoyen
Urion ,une somme de 5 oo,ooo fr. , comme il a bien voulu le préten
d r e . Car tout calcul fait, y compris capitaux , intérêt , surintérêt,
frais de protêt , jugement et autres poursuites pendant l’iutervalle
de l’an 6 , 7 , 8 et 9 , qu’il se laissait habituellement faire , soit par
sa négligence à renou veler, soit p a r la difficulté qu’il éprouvait à
faire cautionner ; le t o u t , en un mot , ne présente qu’uu'total de
R 8 ,i'O f r . , y compris même les 10,000 fr. dûs au citoyen Germ ai*,
propriétaire en la commune d'Auzance , département de la Creuse.
De façon que, soit pour justifier ce f a it , soit pour édifier d e l à
qualité des prêteurs que l’imposteur Urion a regardés comme gens
vendus à son accusée, en les qualifiant impudemment de person
nages sans aveu et dans 1111 état de détresse et d ’indigen ce, par
ces motifs et autres , la citoyenne Chabrillat va se permettre de
les nommer.
D 'a b o r d les créanciers reconnus a u contrat d'un ion ,
sont le s citoyens
j.
G u y o t - G a u t ie r j de V ic - s u r - A llie r , propriétaire. . .
26,000 *
2. Alleirat , orfévro â Clermont ........................................ 5 ,000
3 . 'Bonbon , propriétaire à idem , ...................................... 5 ,ooo
4 . T,a veuve Chicot dame Chinon , propriétaire à id . , . . . 1,000’
5 . D u p ic, Antoine , négociant à id. ................................. 7->5° °
, 6. R o la n d , négociant, beaufrèreù Collangette, cadet,
à id.
................................... ... v ..................... * * 3 >2 i o
7. Tantillon , médecin et propriétaire à i d . ................... 4 ,000
8. Mademoiselle Roux^, propriétaire à id. . . . . . . . 2,000
g. Foureau , propriétaire à i d . .............................................. 5 ,qqo
»
�( 7)
1 o . Boussel , propriétaire à i d . , .............................. ...
n .O g ie r
,
5,000 '
propriétaire à A r t o n n e . , .......................................
T
o t a l
.
6,710
Z/ es Créanciers indiqués dans le ju g e m e n t d'hom ologation,
sont les citoyens
1. M a r y , négociant, à C l e r m o n t , ...................................... 7,000 /
52. Beisseyre , riche propriétaire à Mende , département
de la Lozère ...................................................................................
5, 000
5 . Ravel , propriétaire à Clermont ................................... 2,000
4 . Foedide , officier de santé à S*. Aniant-R oclie-Savine, . 2,900
5 . L a susdite Chabrillat ........................................................... 5 oo
T o
t
a
il..................... 88,110
Il est vrai qu’au même contrat d’ union et jugement d ’homologation
ont figuré une légende d ’autres créanciers de toute tribu , qui sont:
1.
de
La
veuve
Cliamalière ,
de Lavilaine
Pianne ,
dite Chérie , serrurière , 2. Cohendi
3 . Taillardat de
Clermont ,
serrurier , 4.
, 5 . Dom ergue , comme porteur d’effets sur P a r i s ,
6. Desseigne , p er r u q u ie r , 7. Bourguinion , de Riom , vo itu rie r,
8. Perard , tailleur, g. D é a t , veuve M o rg e t,
maîtresse d’école,.
10. Vallet , u . G rasset, 12. Massis , voiturier. i 5 . D equ aire, i 4 .
Cliaverros , veuve D om as, voiluriére, i 5 . Caille; 1G. I lé b ra r d ,
1 7 . D um ay-D om ergue , porteur d ’effets sur L y o n , 18. B e n o ît, voi
turier, ig . Mandet , 2 o .G o sse t, 21. Soulier , 22. Berthon.
A u tr e s
créanciers désignés au ju g em en t d'hom ologation.
T. Chassaing , 2. Garnaud, de C le r m o n t, cafetier,
5. Bâtisse, d e
Riom , et Astre-Chassaigne , veuve.En un m o t, il n ’est pas de
petites poches dans lesquelles le citoyen Urion ne se soit permis
d ’aller fouiller par l’intermédiaire de Poiret , Berlliiot , T rébuchet,
Garnot cl C h ab o t, que le citoyen Urion aurait dû faire connaître
et qualifier plus particulièrement d ’agens de change , puisque
ce u x -c i, outre l ’agiot d’usage , lui faisaient tirer de place à place ;
parce que connaissant son e x a c t i t u d e ordinaire , ils étaient bien
aises d’avoir à lu i répéter les petits frais de change et rechange,
et compte de retour $ et cependant le citoyen U rion } par un rafi-
�V'
*
CS)
rem ent de m échanceté, a voulu présenter ces derniers comme lui
a y a n t 'é té procurés par la Chabrillat.
L e s efTets de G e rm a ix étant venus à protêt en nivôse
&n
io
,
il fut obligé de poursuivre au frjlninal de commerce de Clermont, le
citoyen Urion , ensemble la demoiselle Arnoux ,et le citoyen L a b a tisse , fes fautions. Ces derniers firent dénoncer ces poursuites à la
citoyenne C h a b rilla t, fondés sur ce que Urion lui ayant confié ces
effets avec beaucoup d’autres pour lui procurer des fonds,il n’en avait,
jamais rien reçu , et conclurent à ce qu’elle les garantit et indemnisât,]
Mais
la citoyenne Chabrillat
que cette
même somme
ayant démontré
au
liihnnal ,
avait été employée à l ’acquittement de
pareille envers lé citoyen C h â tie r , qui lui en avait fourni quit
tance sous seing privé ; quittance qui avait é'é ainsi donnée du con
sentement dudit Urion et
du citoyen Germ aix , pour tenir lieu
de cautionnement des io ,o o o f r . , que ce dernier aurait voulue pardevant notaire , si Urion y eût consenti. Il intervint le 8 pluviôse sui
vant un jugement en faveur du citoyen G erm aix , qui débouta ies de
mandeurs en recours, jugement qui fut confirmé au tribunal d'appel.
Ce fut dans l’occurrence de ce p ro cès, et le 22 frimaire an 10,
que le citoyen U rion, oubliant lo u t-à-la -fjis , et la dette de 5 oo fr.
q u ’il avait contractée pour solde de compte le 2 pluviôse an 10 ,
et l’aveu public qu’il en avait fait pnr le jugement du 25 thermidor
signifié a ladite Chabrillat , avec sommation de se conformer
aux fermes stipulés au susdit contrat d’union , imagina de porter
plainte au magistrat de sûreté de C le r m o n t, contre ladite C 'i a brillat , en la qu a lifia n t de courtière in jid elle ,
c o n n u ", môme
fa m e u s e p a r ses escroqueries et ses vols 5 lui prêtant
d’avoir
abusé de sa crédulité pour lui escroquer, soit îles eflets de com
merce qu’il lui avait confiés, soit le montant de ses propres effets ,
conclut de plus qu’il en fût informé et que la citoyenne C h abrillal. fût tenue de rapporter scs livres journaux pour établir
l ’état
des négociations qu’elle avait faites pour l u i , et ce d’après l ’article
X de la loi du 8 tnii . 1 7 9 1 ; faute de ce, qu’elle fût
condamnée
envers lui à une somme de 20,000 ti'.
Le magistrat de sûreté lui ayant demandé s’il voulait faire partie
civilo eu la plainte , sur sa réponse négative , la plainte f u t ie c o * -
?
�(9 )
piée , et les conclusions restraintes à la dénonciation ; ces
pièces sont au dossier (ij.
deux
Les moyens que le citoyen Urion a mis en usage pour soute
nir sa plainte, sont:
1.° Que , quand il remettait à la Chabrillat des effets à négo
cier , celle-ci, au lieu de lui en remettre le montant , s’en retenait
des sommes exorbitantes.
2.“ Quand il lui en donnait
pour renouveler, elle
gardait et
les anciens et les nouveaux , qui se sont trouvés dans la suite faire
un double emploi.
5 ." Que la susdite avait souvent em ployé ses fonds en achat de
«ucre, de bons et autres marchandises.
4 ." D ’avoir fait
usage de faux nom s, en supposant des créan
ciers dont plusieurs n ’existaient pas , et d’autres dans l’impuissance
de prêter la plus légère somme.
5 .* Que la même lui avait fait espérer un crédit, en lui assurant
qu’elle ferait face à tons ses besoins, tandis qu’à peine lui a-t-elle
remis le cinquième de ce qui devait lui revenir, et encore ne s’effectuait-ce que par de petits paieniens de i , o o o à 1,200 ^ dont il
ne pouvait tirer aucun parti.
6.’ Enfin , que tantôt elle lui
persuadait qu’il
serait à l’abri
de toute poursuite , et tantô! elle l’en menaçait.
L e citoyen Urion accompagna sa plainte d'une liste de 19
témoins, avec des observations sur ce que chacun d ’eux devait être
interrogé. Us fu rent donc ouïs en déposition le 25 pluviôse suivant;
mais leurs dépositions , toutes étrangères à la plainte, furent si favo
rables à li citoy î i \s C!nb rillât , que, sans la perte du procès qu’il
lui avait injustement intenté au sujet des 10,000 fr. relatifs à G e r niaix, il n'aurait plus pensé de revenir à la charge.
Cette affaire n ’ayant point eu le
succès q u ’ il en espérait , le
citoyen 'Jri 0,1, ou , à dire plus v r a i, toute sa famille se rattachèrent
à lapremièro plainte qui avait été abandonnée à défaut de preuves;
(1) Depuis l’interrogatoire de la citoyenne Clinbrillat , l’on a substitut)
ilam lu première plamle , 171, 000 fr. de doromagcs-mtcrêls , à 30,000 fr.
auxquels Urion s’uluit liié.
B
�(1 °)
ce fui le 2 4 messidor,et après s’être assuré fie quelques témoins qu’il
pèüha , pour laplûpart , dans la classe do tout ce qu’il y a de plus
ignoble , de
plus
méprisable et déplus vermoulu à C le r m o n t, qu’il
resollicita auprès du tn'in? nrigis r i t de sûreté la continuation, de
la première information Miis il fut obligé cette fuis ci d’y
entrer comme partie c iv ile . parce que le m gistrat qui ne voulut
point compromettre
line seconde fois les intérêts du Gouverne
m e n t , n’accéda ni à sa demande , ni aux sollicitations des person
nes qu’il avait intéressées à cette fin.
Ce fut donc dès l ’instant de son intervention comme partie civile,
que l’information fut continuée , et l'affaire ayant été réglée en police
correctionnelle, il fut rendu un jugement le 5 fructidor dernier, après
une audition de 52 tém oin s, et de très-longs débats, suite n é
cessaire d’une pareille plainte , ainsi que des prétentions du citoyen
Urion , qu’ il fit modestement élever à une somme de
au lieu de celle de y g ,1 96^"^ àlaquelleil s’était précédemment restraint
p ar une lettre du 17 n ivô se , cotte 8 du dossier , qui faisait ce
pendant un ensus de 59,196^ sur la demande qu’il en avait formée
p ar sa première plainte qui se portait à 20,000^, et qui surpassait
encore celle de i2,ooot t , à laquelle le citoyen Urion s’était fixé
au prem ier moment devant le citoyen Domergue , arbilre commun,
qui essaya de vouloir mettre fin à tous ces mécomptes, moyennant 25
louis d’oi'j ou plutôt par la remise de la créance d e ’5 oo francs ,
qu'il avait souscrite en faveur de son accusée.
C ’est d ’après tous ces débats qu’il lut rendu le 5 fructidor un
jugement qui
déclara qu’il 11’était pas constant que la citoyenne
Chabrillat fût coupablé d’escroquerie envers le citoyen U rion, la
renvoya en conséquence de la plainte , et condamna le citoyen
Urion en une somme de 5 oo francs de donunages-intérêts appli
cables , du consentement de ladite C h ab rilla t, à l’atelier de charité,
et aux dépens.
1 æ citoyen Urion s’est rendu appelant de ce ju g em e n t, et a
même cherché à intimider par cet appel ladite Chabrillat qui ,
dans l ’inccrtitu'le que cette affaire ne portât atteinte à son crédit,
pourrait se prêter à quelques sacrifices. Il a effectivement emplo
yé à cette fia tout ce qu’il a cru nécessaire 5 il l ’a fait solliciter
V
�3 cj»
( >i )•
do se rendre chez le citoyen Rousseau , son défenseur. L a citoyenne
Chabrillat
n’a jamais voulu y prêter l'oreille , à celte d if f é r e n c e
cependant qu’ayant o c c a s io n de passer quelques jours après devant
le domicile du citoyen Rousseau, elle se p e r m it , guidée par je ne
sais
quel
m otif
de
curiosité , de monter dans son cabinet.-
L à le citoyen Rousssau
lui dit. qu'elle était dans son tort de ne
s’être pas rendue dans le tenis aux désirs du citoyen Urion ; que
leur affaire était susceptible d ’arrangement; que tout en aurait mieux
é t é ; qu’il s’était volontiers chargé de le lui proposer ; que c ’était
fortement son avis , et en même tems
le seul moyen de mettra
fin â toute espèce de désagrément. L a citoyenne Chabrillat n’ayant
rien répondu de satisfaisant aux représentations -du citoyen Rous
seau , celui-ci termina par lui dire : eh bien! nous plaiderons. L e
citoyen Urion peut-il en rester là } après avoir été si maltraité
par celle condam nation de 5 oojt q u 'il lu i est essen tiel de f a ir e
'réform er ?
D ’ap rès toutes ces tentatives , le citoyen LJrion s’étant apperçu
qu'il n 'y avait pas lieu à pouvoir r é u ssir, eut recours à d’autres
moyens assez délicats. Car mettant de colé toutes les règles de
la pudeur, ainsi que lés qualités qui constituent l ’homfne de bien
et le vrai citoyen , il a employé pour'.priver la citoyenne Chabrillat
du droit de se faire défendre , un stratagème inoui ; c ’est celui
d ’avoir interpose la protection de scs parènset amis, pour sollici
ter auprès du tribunal spécial de la S e i n e ,'u n mandat d’amener
contre la citoyenne Chabrillat , sous l’impntal on d’avoir distribué
sciemment de fa u x b e n s , que celle-ci avait cependant dénonc és ellemême en floréal et thermidor derniers , artx magistrats de sûrelé
tant de Paris que de Clerniont , ainsi que lé fripon qui les lui avait
r e m is a raison de deux p ourcent de commission , et qui a disparu
depuis , étan-t poursuivi en vertu de mandats d’amener et d’arrêt.
L ’obstination que le citoyen Urion mit au renvoi de sa cause
jusqu’à l’époque où la citoyenne Chabrillat serait libre de se faire
défendre, servira de conviction au lecteur ; car l'homme le moins
délicat,en pareille occurrence,se serait fuit un vrai point d’honneur
de consentir à celte remise , pour ne pas tirer avantage d’un
obstacle qui lient à une force majeure.
E a
�i
■
»
•s.
( 12)
Urion en a ogî bien
différemment ;
depuis il a redoublé de
zèle et n ’a pas perdu un seul instant pour faire imprimer et
distribuer un mémoire dont le
mérite consiste à avoir dénaturé
jusqu’aux faits contenus en la plainte , en leur en substituant de
nouveaux qu’i l a cru lui être plus avantageux pour préparer et s’as
surer l’opinion publique.
E t en e f le t , au lieu de se renfermer dans le contenu en sa plainte,
pour tirer sans doute quelqu’avantage de son ouvrage du 2 pluviôse,
de cet état inintelligible , il a dit parune version faite pour la cause
prétendue , « que la Cliabrillat l’avait déterminé à lui remettre des
1) effets de différentes valeurs et à diverses dates , et qu’à fur et
» mesure qu’elle les négocierait, elle lui ferait raison du montant,
» déduction faite de l’agiot et de son droit de commission ; qu'au
i) reste il pourrait très-fortement se tranquilliser , parce qu’en défin itif elle lui en rendrait un très-fidèle compte ; mais que cette
» citoyenne trouvant un peu trop longuecette opération,l’avait décidé
)) à lui confier sur des feuilles de différens timbres , de simples appro*
)) bâtions de la valeur, que pour le su rp lu s, elle ferait écrire et
)> remplir les effets au profit de ceux qui fourniraient les fonds ; que
W ne lui en ayant rendu aucune espèce de compte et s’étant v u , au
)) commencement de l’an 9 , poursuivi de toute p a r t , il rompit dés); lors ses relations aveu la citoyenne Cliabrillat, en réclamant d’elle
» un compte ou un état définitif de ses négociations ; mais qu’il
)> ne put en obtenir qu’un simple bordereau qu’elle dicta au citoyen
» D u p i c , qui loge et vit avec elle depuis plusieurs années comme
» un vrai associé; que d’après ce compte, elle s’était vue sa reliquataire
» de 86, 562 * ; à quoi il fallait ajouter , comme n ’ayant pas eu pince
ü au bordereau, les 10,000^ dûs au citoyen G erm aix , q u ’i l a été
» obligé de solder en vertu du jugement d ’appel du 2 messidor
)) d ern ier, plus les 26,000^ pour l ’effet du citoyen Guiot j plus
» i 5 , 654 ^ d'agiot à retrancher de la dépense, comme ne les ayant
V jamais payés aux préteurs , vu que l’agiot se prend toujours en
5) dedans.
T otal i 3 G, îyG^. »
D ’après des prétentions si extravagantes , l’on pourrait se dis-
»
�( l 5)
penspr d’y répondre; mais comme le prem ier et le ,plus essentiel
devoir d’un accusé est de se justifier , la citoyenne Chabrillat va
étab lir, que les motifs de plainte
1.° sont inconcevables et tout-
à -la -fo is mal fondés; 2 ." Que la citoyenne Chabrillat n ’a promis
en définitif aucune espèce de compte au citoyen Urion ; 5 .° Que le
bordereau dont il argumente , est son propre ouvrage et ne mérite
aucune confiance ; 4 .° Enfin , qu’il n ’est pas établi par la déposition
des témoins , que la citoyenne Chabrillat ait abusé de la confiance
du citoyen U rion , soit par dol , fraude ou autrement.
P rem ière proposition.
Pour établir que la plainte présente en elle-même tousles ca
ractères de l’invraisemblance, il suffit de faire la transcription lit
térale des faits qui y sont consignés ( i ).
( i ) E n fru ctid o r an 7 , il lu i liv r a 8,000 liv res d'effets, sur lesquels il a
touché 7,200 liv . , de sorte que M agdclaine C h ab rilla t garda 780 liv./iuzir quatr*
m ois d ’ échéance.
E n brum aire an 8, il retira a,ooo liv res d’effets de renou vellem ent.
E n n ivôse,il liv r a i 5 , 6 oo liv r e s , su r lesquelles il ne lu i a été rem isque8,000
liv ré s d'effets, et 2/100 livres a rg e n t, M agdelaine C h ab rilla t s’est retenu 5,200 1.
• E n pluviôse , l ’exposant a donné 2,000 liv res d’effets à la C h ab rilla t qu’elle a
XCtenus en entier.
E n ventôse, liv r é pour 5 , 55 o liv res d’elFets, sur lesquels elle n’a rem is qu’ une
somme de 600 liv res au citoyen R o c h c tlc , à la décharge de l’exposant,et a gardé
Je surplus.
E n ventôse an 8, l’exposant v e n d itu n im m euble au citoyen Eespi nasse, d’A igueperse ; l ’acquéreur lui fou rnit G,5 oo livres d’effets qu’il rem it à ladit'e C hab r illa t , e t sur lesquels il n’a touché que ), 3 i 5 livres.
E n germ inal suivan t, elle a reçu fi,000livres d’effets,sur quoi elle a renouvelé
des anciens pour 3,000 liv r e s , donné 1 / i 4 o livres , et reten u i , 5 Go livres.
E11 lloréal suivan t, rem is a 3 /ioo livres d’effets, sur quoi il y a eu pour i 4 , 6 oo
Iv re s de renouvelé ; l ’exposant a reçu 1,920 liv r e s; pài‘ conséquentla C habrillat
la retenu fi,880 livres.
E n m essidor, liv r é pour 1 4 ,000 livres d’effets , 9,000 livres em ployées pour
ren o uveler , 4 ,110 livres reçues , i,6 g o livres retenues.
E ex p o sa n t ou b liait d éd ire qu’en p ra iria l il uvait liv r é pour 4/100 livres,
�( 14)
En
.
..
.
« ...
e f f e t , à q u i p e r s u a d e r a - t - o n q u e d è s la n é g o c ia t io n d u 7 f r u c
t i d o r a n 7 , d if e p r e m i è r e , l e 'c i t o y e n
U r io n s e . n r o y a n t d u p e d ’ u n e
s o m m e d ç 7 8 9 * s y s p ii e ffe t d e 8 ,0 0 0 * ', à q u a t r e 111 o is d Y v h é a m e , i l
n ’a it d i s c c i i t ï i ï ù e d é s ’a d r e s s e r à la m ê m e s o iir c e d e p u is c e t t e é p o n u o j ils q u ’ a c e lle ' d e 's a r u in e fo lîiÎe
en y
la is s a n t à c h a q u e
m o is ,
t o u jo u r s d ’ a p r è s s o n 'p r ô p r è ¿ v e ii,lu m a je u r e p a r t i e e t s o u v e n t l e l o t a l
d u m o n t a n t d e to u s c e s e i ï e ls ? p u is q u ’e n n iv o s è s u i v a n t , s u r u n e i l e t
don!. l,2 0 0 liv re s de ren o u velées., 2,280 l i v r e s , reçues , 920 livres retenues.
E11 therm id or , liv r e 5 ,890 d’effels , sur quoi touché 2,620 liv r e s , retenu
0,370 livres.
■
E n fru ctid o r , livréi i 3 ,810 liv res d’effets , dont en, .ren o u vellem en t 4 , 60a
liv res , reten u 9,308 livre.?.
E n vendém iaire su ivan t.,
.
elle a reçu une somme de 1,000 liv r e s , dont
elle n’?. p o iiifc o m p té .
E n brum aire an g , liv r é le i 5 n , 5 oo l iv r e s , le i?J ponr-26,000 liv r e s , le
20i8,f>00 livres, et en nivôse i(>,6oo livres,tou s effets fournis qui font en tout la
somme de 178,850 livres ; sur quoi il n’a été em p lo jé en renouvellem ent que
y 'i, 55n liv .e t ¡i:iyé sciilomenL a 3 , 8 o 5 liv . ; il y a donc escroquerie sur ces premiers
ctriicUs de la somme d i §0*195 /ivres..
L a C lia b ril'a t a touché
du citoyen A le ira t , m archand à C lcrm on t , Z, 5oo
liv r e s , st.r un effet de 3 ,000 livres fourni par l ’exposant. E lle reconnaît, avoir
reçu 1,200 liv res d’ une part , et 1,920 livres qui fu ren t remises à la sœ ur de.
ladite
C b a b n lla t , dans l ’auhcrgc de Sim on , total 5 ,G2 o livres.
lin frimaire an 9 , ,1’pxposant avaiL vendu un hien au citoyen Maignal ,
qui lui avait fourni pour i'i,ooo livres d’effets ; l’exposant les remit il la
ClphrUUt jiyiir l p m^-oper, et payer, sur les sommes qui rentreraient , celle
d- 1(^000 iiv. nu ci t^'cn Çbalicr.LaditcChabnllat a eu effet payé ce Lie somme,
et en a retiré quittance en son nom •, et quoique ceLtu somme n’ait clé payéo
qu’aveu ks olïqtS;de Tifaignal», elle prétend pouvoir se reLcnir pour 10,000 liv.
1/e.xposant qui craignait u n e escroquerie de ce genre, après en a v o ire p ro u v o
tiint d’aulrps, s’était ^dressé au citoyen I J u l h c i t , p o u r négocier les effets do
Maignal. ï<a Cliabi-illat in stru ite.d o cette précaution , contraig nit l’exposant
p a r scs menaces , de r e tire r les effets qu’elle voulait s'app rop rier..T outes ces
Fournir* form ent u n tulal de 2o,\ao livres que l’a^ciite du change a encore
,
,
e n tre ses mains.
Cent ainsi qu’une fortune, & c\.\
•
�¿
( ■i 5 )
y
■
de i 5 J6 oO'livrps , il lui futtretenu . . t .
. . . . . .
.
.5 ,2 0 0 *
t E n pluviôse, la totalité d ’un effet d e ......................................s,oco
E n ventôse, il'lu i fut reténu sur un effet de 5 , 55 o. . . 4 ,g 5 o
En
ventôse an 8 , ‘ sur un effet de 6 , 5 oo , il lui fut
retenu . ................................... ; y .......................... f
...................... 5 , i 85
E n germinal suivant , sur un effet de 6,000 * . . . .
J, 5 ç,o
E n floréal , sur un effet de 25 , 4 o o ................... ....
6,880
E n prairial, sur un effet de 4 , 4 oo
. . . ...............................920
E n m essidor, sur un effet de i 4, 4 o o ................................. ï ^ i ) 0
E n therm idor, sur un effet de 5 , 8 9 0 ................................. 0,070
' E n fructidor, sur i 5 , 8 i o ........................................................ 9 >3°8
E n vendémiaire , brumaire et n iv ô s e , la totalité de ceux qu’il
lui avait donnés à négocier.
a;
*
S
E n vendémiaire
L e j 5 brumaire
.
.
:
a v o i r
1
s
.
. ’ ...............................................1,000^
.
.........................................
L e 1 8 .................................................................' . J .
.
.
n , 5 oo
.
¡26,090
L e 2 0 ................................................................ .............................18,000
E n n i v ô s e ................................................................................. 16,600
-> Enfin celle de
pour
.
des effets actifs ou argent
.............................
q u e -le 1'citoyen Urion
20,000
lui avait
re m is; en un1 m o t - - / d ’âpres dès détails si absurdes , l ’on serait
tente île croire1 qbe le Citoyéri1 Urion’” ne" ‘f aisait à chaque fois le
voyage de Riorii à C le r m o n t , qué pour*déposer aux pieds Ué celte
belle fruitière
tout l ’ensemble de sa b n lh n t é fortune.
Effectivement' ^étudieï à é ta b lir p a r d ’aulres réflexions l’absur
dité et l'invraisemblance de tous - ces "détails insérés dans sa plainte }
co serait abuser du teins et faire tpiit-à-la-fois trop d’honneur
�(l6)
à un roman qui ne peu-t être que le prdduît1d^un cerve'au aliéné.
Abandonnons donc. à .n o s lecteurs
le mérite de toutes auüea
îétlexions $ occupons - nous seulement a leur en ouvrir une car
rière encore plus ample par la discussion de chaque moyen en.
particulier.
Le- citoyen Urion se plaint dte la dureté avec'laquelle il a été
traité dans l'agiotage, et pour s’en venger , invôqtfe'à son secours
la, sévér.ité des- lois .anciennes, pour la restitution de ce que l’on
lui avait dévoré au-dessus de l ’intérêt légal. Mais à .quoi servent
de pareilles doléances , d ’après son. p r o p r e aveu
que l ’argent a
été décrété marchandise ( 1 ) ?
S ’il f a lla it apprécier celte lo i, la citoyenne Chabrillat serait ellôinême la première à Faccui'ër d ’être un obstacle à la prospérité
nationale ; elle l'accuserait du dérangement de beaucoup fie mé
nages , de la ruine de plusieurs familles ; elle l ’accuserait de pro-i
téger le vice et la débauche, en ouviant aux enfans de famille la
porte des emprunts à 1111 taux si excessif $ elle l ’accuserait au surplus
d'immoralité et d’impolilique.
Mais ce qui est du ressort et qui appartient exclusivement à une
assemblée législative , n’est point fait pour cire mis en délibération
dans le sanctuaire de la justice et auprès des organes de la loi.
L ’argent étant donc réputé marchandise, c ’était au citoyen U rion
d’y mettre un prix plus modéré , èt quoiqu’il prétende qu’il ait
été dupe, en s'adressant à la citoyenne Chabi illtit
il ne doit s’en
prendre qu’à lu i-m ê u ie, parce que la Chabrillat n ’a jamais négo
cié aucun de ses çfFels : sans préalablement l’avoijr: prévenu du taux
d ’aprcs lequel on le6 acceptait : dès-Jois* c ’était- donc à lui
de
refuser , au lieu d’a ccep ter, comme il 1’^ fait 4 ( chaque f o i s q u ’ il a eu
besoin de faire renouveler ou accuçillir ses effets. E st;il à sa placo
et peut-il être raisonnablement reçu à s ’en plaindre aUjOurd’ huy^
et cx.igvr que Magdelaine Chabrillat qui dan», toutes ses affaires,
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. ( i-i)•'Pifais il p araît qn’ellc-FiJl toujours entttrÎéhucMtlaAs l'JtMe qüc lit lô f
qui <1¿ d u ra it l’or et l ’argent m archaudiso , autorisait im p lic ilc ja c u t les U aüss
iwui'aircs.
�(.17) ■
ne lui a servi que d'intermédiaire auprès de ses prêteurs
-lui
restitue un argent qu’elle n ’a pas re çu ? Combien ne peini! pas (!c'_
pluiT.bie sa position , si son extravagant système était nccneiili ? il
recevrait en total de Magdelainc Chabrillut , ce qu'il a fuit semer
dans le tems c h tz tous ses prêteurs , sans que celle-ci pût en esp ir e r aucune espèce de rentrée.
11 n ’est pus d’honune sensé' qui ne
soit révolté à de pareilles
conséquences , et qui sur-tout pleinement convaincu que Magde1 aine Cliabriliat n ’ayant été que la simple intermédiaire dudit Urion,
d ’après son propre aveu consigné en plus d ’un endroit de sa plainte,
d ’une manière bien précise dans sa.lettre du iS -nivôse an 10 ?
coito 8 (i ) des dossiers, et encore dans les pages 4 , i i ) , 17 et
s4 de son mémoire, puisse , d’après tous ces témoignages, la rendre
responsable de ses réclamr.t:ons.
I,e-citoyen Urion se plaint en second l i e u , d ’avoir été trompé
et volé p a r l a C h a b r illa t, « p a r c e qu’en lui remettant. , d i t - i l, des
» effets pour renouveler , elle feignait d’aller chez les banquiers,
)> négocians et autres , pour leur remettre les nouveaux , et y
prendre les anciens 5 que de retour elle avait toujours
quelques
•)) prétextes ù sa main ; les uns étaient en campagne,les autres sortis,
)> et enfin ceux qu’elle avaittrouvés étaient si affairés qu’ils n’avaient
î) point eu le tems de s’occuper à chercher ses effets, et qu’ils
» l ’avaient priée de rep a sser; qu’après toutes ces allégations, h •>
)) U rio n s’en allait sans les avoir. El quel était le résultat de tout
)> cela ? c ’est que Magdelainc Chabrillat les retirait , ensuite les
)) g ardait, et en faisait un double emploi avec, les nouveaux.
D 'une p a r t , cette imputation est sans aucune espèce de fonde—
m p n t, et to u t-à -la -fo is frappée au coin de l’imposture la plus dé
goûtante j puisque , soit au contrat d’union, comme au jugement d ’JloJnologation, nul 11e s’est présenté porteur d ’anciens effets,tous étaient
encore à échoir , et s’ils furent p rotestes, ce 11e fut qu’à défaut d’ac
ceptation.
( 1 ) Com m e il ecrait essentiel pou r moi , qu’il lu t lanc (5 1111 m andai d’ame
n er contre la C h ab rilla t , et qu’il teraiL Irfcs-jiossiblc que des usuriers cruv.cnt
sf lib tre r ci» la liv r a n t.
�\
V .
.
( 18 )
D e •»■
’autre p a r t , quel avantage aurait-elle pu tirer de ces mê
mes eiFeis, étant remplis du nom des prêteurs , et tous ordinaire
ment protestes?
Son troisième m otif de plainte , qui consiste dans un point de
fait j n ’est pas mieux établi Aucun des témoins n ’avance que la
citoyenne Chabrillat eût employé en achat de marchandises,les fonds
du citoyen Urion. À supposer même que le fait fût v ra i, il est
hors de doute que la citoyenne Chabrillat en aurait tenu compte
au
citoyen U r io n ; puisqu’au 2 pluviôse an 9 , époque où elle a
cessé d’être son intermédiaire dans ses négociations , celui-ci, en
finalité pour reliquat , lui consentit un effet d’ une somme de 5 oo^,
qui »est rapporté au procès , et qu’il a de plus ratifié par le jugement
du s 5 thermidor an g.
*
L e citoyen Urion se plaint encore que la citoyenne Chabrillat
s’était seivie de faux noms , enlui prêtant des créanciers qui n ’exis
taient pas , et qui pour le grand nombre étaient dans l'impossibi
lité de lui prêter la moindre des choses.
En s’arrêtant à la première partie de cette pitoyable imputation,
je demande!ai pour toute satisfaction au citoyen Urion , de m ’in
diquer au moins les noms empruntés dont la Chabrillat a fait usage,
et quels sont les créanciers qu’elle a supposés , et qui n ’existent
pas.
L e ciloyen Urion
rapporte-t-il des preuves de poursuites qui
lui ayent été faites sous des noms étrangers ? Il est dans ¡’impossi
bilité d ’en administrer la plus légère.
Bien plus , il a reconnu lui-m ême au contrat d’union tous ceux
que la Chabrillat lui avait procurés , à l’exception des citoyens
ÎMary , fières , Iîejsseire , R a v e l , Fédide et G erm aix ; et encore les
quatre premiers sont- ils reconnus par le citoyen Urion, puisqu’ils sont
compris dans le jugement d ’homologation; qui plus e s t , les citoyens
Mai y et Beysseire ont été p a y é s , et le dernier doit l’être depuis
le jugement en dernier ressort du 2 messidor dernier.
Je vous demande d’après cela,si l’on peut regarder comme gens sans
aveu ces mêmes créanciers qui sont tous gens très-connus : l ’on
peut s’en convaincre; et pour c e , je renvoie les lecteurs ù la page
du mémoire où se trouve lu uomeoclftturc de leurs noms,
�( 19 )
Il s’est élevé, j« le sais, quelque doute fu r les citoyens Bou
t o n et Foureau. Eh bien ! le premier fut choisi pour être le syndic de
tous les créanciers ; et tous les deux depuis ont élé pavés par
ledit Urion , malgré les conditions renfermées audit contrat d’union.
T o u s , en un m ot, sont des chefs de famille bien connus; tous à la
tête de leur négoce ou de leurs propriétés , e l y vivant tiès-honorablement.
Il ne doit pas s’attendre à un meilleur succès
m o tif ; car
dans le cinquième
indépendamment qu’ il soit établi , le serait-il qu’ l
n ’en tirerait pas un meilleur
avantage, à moins de prouver qu’il
fût sous la tutelle absolue de la C h a b r illa t, ou quTe!le eût pris avec
lui des arrangemens en conséquence. E n effet ne pourrait-il pas
arriver que , sans abuser de la confiance de ses prêteurs ,e t dans la
ferm e croyance que le citoyen U rion n'avait d ’autres detles que
celles qui lui étaient connues , ladite Chabrillat lui eut promis
de le sortir d’embarras ? 3\Iais n ’était et ne fut-elle pasautoriscea
changer de langage, lorsqu’elle vit éclore cet essaim de créanciers qui
lui étaient inconnus jusqu’alors , ainsi que les inscriptions h y p o
thécaires? Ceci se conçoit de soi-même ; ce serait mal employer son
tems , que d’insister davantage sur de pareilles puérilités.
Quel sera donc enfin le mérite du sixième ? F ût il vrai que la
citoyenne Chabrillat lui eût fait espérer par fois qu ’il serait à l ’a
bri de tontes poursuites , et que d ’après elle l’en eût menacé ;
qu’en conclure ? Rien absolument contre la Chabrillat. D ’un c ô té ,
ces espérances , comme ces menaces , n ’étaient pas le produit du
même instant ; et de l’autre , ceci ne devait s’entendre qu’autant
que ç'eût été à sa disposition , et comme elle n’a pas été libre d ’em
pêcher les créanciers de poursuivre le citoyen Urion , pour l ’avoir
trop justement mérité de leur p art, sur-tout à partir de l’époque
où il visait et travaillait à les faire perdre ; il doit donc s’imputer
à lui-m êm e ces désagrémens , et s’il y a dans tous ces procédés
quelque chose qui doive l’étonner , c’est de n ’en avoir pas éprouvé
davantage.
Indépendamment de toutes ces raisons, il faut convenir que la
citoyenne Chabrillat n ’était que aimplo intermédiaire ; et sous ce
point de y u c , peut-on et doit-on être surpris que des créanciers
C 3
�' ( »<>}
intéressés à le -poursuivre pour s’assurer de leur d û , lui-eussent
confié ce soin , l’en eussent même ch a rg é e , et que d’après pareille
confiance, elle y eût ré p o n d u , et qu’elle s’en lût acquittée ? O u
ne
trouvera
dans toute celte conduite
lien que de n a tu re l, et
rieü pur conséquent qui dût lui attirer de pareils reproches.
Seconde proposition.
I>n citoyenne Chabnllat s’eit-ellc'. ob lig ée , ou a-t-elle promis au
citoyen U iio n , de lui rendie en définitif un compte de toutes les
opération;; qu ’elle avait faites pour 1 ui ?
Pour mettre les lecteurs qui ne sont pas au courant de ces sorles
de négociation!*, à même d apprécier cette objection, nous leur dirons
que tout ce qu’avait fait la Ch ibrillat pour Urion , c ’était de lui avoir
procuré de l’argent à diJferens taux , et que pour réussir, elle était
obligée de s’adresser £i diflerens prêteurs; que , quand les uns avaient
besoin de leurs fo n d s, elle était forcée de s'adressera d’autres ,
qui prenaient en quelque façon la place des premiers , et dont, les
fonds étaient employés à les rembourser ; que ce circuit d'opérations
a duré pendant le courant de l’an 6 , 7 , 8 et 9 ; que ce tableau
présenle c-onséquemment que les ronouvellemcns du jour n’avaient
aucune espèce de rapport avec ceux du lendem ain; que chaque
opération présentait nécessairement un objet fin i, et ne dépendait
d’aucune subséquente ; en un m ot, que les relation* qui avaient en
heu entre le prêteur et l’e m p r u n te u r , par l’intermédiaire de leur
confidente,cessaient dès l’instant que l’un avait troqué son argent pour
des effets , et l’autre ses effets pour de l’argent.
D ’après cette instruction, nous dirons que 4>i Urion rapportait
de la citoyenne Cliabrillat , un récépissé des effets qu’il lui avait
confn-s, sous l’obligation de lui en rendre com p te, il faudrait y défé- .
rer. Mais ce n’aurait pas été en justice correctionnelle que celte
demande aurait dû être form é e ; car n ’étant qir'unc simple action
civile , c c.st- à-dii c , une demande en reddition de com pte, elle 110
«levait dès-lors être portée quo devant les tribunaux ordinaires.
T roisièm e p rop osition .
J,c bordereau, dil l ’ouvrage «le la Chi'.urillat, l’est-il crt effet ,
et m oiite-t-il quelque considération?
1
�/
(' 21 )
Avant «Tenlrer en discussion , il est bon tTobserver qu’il-y a {rois
Fails constans au procès , d’où il faut partir , et qui nous faciliteront
le moyeu de combattre plus solidement toutes les folles prétentions
du citoyen Urion.
i.° Que tous les effets qui avaient été négociés par la citoyenne
Cliabrillat pour le compte d’ Urion , ne s’élevèient lors du contrat
d'union et jugement d’homologation d’ieelui , qu'à une sommede
8 9 , 1 1 0 * , y compris encore les 10,000# dûs à G erm aix , avec tous
les capitaux intérêts, sur intérêts, frais de protêts et jugemens, signi
fication , & c . , tkc. , et tout ce qui s’ensuit depuis le prem ier moment
q u ’ello comtnonça do négocier pour son c o m p te , jusqu au 2 plu—
vjuoe an 10.
a.0 Q ue d ’après les calculs du citoyen U r io n , et l’évidence des
fa its, il y a eu plus de i 5 o,ooo* de renouvellement.
o." Q ue le citoyen Urion a reconnu dans sa plainte , »voir reçu
2 5 ,8 0 5 * , et d ’après son m é m o ire , et sur son bordereau dont il
a rg u m e n te , »4 , 486 * , qui ne font pas un double emploi avec les
sommes reconnues dans la plainte. T o t a l .............................. 48^291*
Ceci posé, que présente doiic ce bo rd ereau , d ’après le système
du citoyen Urion lui-m èm e?
Il piésenie que la citoyenne Chahrillat aurait négocié d’après la
première s é r i e ............................................................................. 78,060*
E t r e n o u v e l é ..................................................... ...... .
. 5 ,goo
Q u V lle a reçu d’après la troisième série . . . .
5 a,598
• 'l o l a l . ................................................................................... i n , o 48
E t que n’en ayant employé q u e ....................................24,486
1511e so trouve reliquataire d e ......................................... 86,562
0 5 t)'o44r
Mais en comparant ce tableau avec celui que nous avons trans
crit de la plainte , il n’est pas possible de les abuter ememble ,
puisque le citoyen Urion y a déclaré qu’il avait donné ù la citoyenne
Cliabrillat
198,000*, dont elle a
employé plus de iod,ooo* en
renouvellement , tandis que le bordereau 11e le porte qu’à 78,060*.
en effets, et 5,900* en renouvellement.
�( 22 )
D ’un autre co té , Urion rend la Chabrillat sa reliquataire, i.°
d ’une somme de 86,562^ , 2.“ de celle de 49 , 634 ^", total 15 6 ,19 6 ^ ,
tandis que toutes ses dettes pendant l ’espace consécutif de p rès
de 5 ans , ensemblecapiLaux, a g io t , suragio t, frais de p r o tê t , juge
ment,en un mot, toute la garniture ne se soit élevée qu’à 8g, 1 1 o^, sur
lesquels
il convient de déduire les 48,291^ qu’il déclare
avoir
reçus.
E t n ’eût-il emprunté que cette dernière somme , en cumulant
sur icelle pendant l'intervalle de près de trois ans,et à chaque trimestre,
agiot , s u ra g io t, frais et autre séquelle
qu’il voyait arriver sans
‘ s’en mettre beaucoup en p e i n e , que cette somme , d is-je, ainsi
nourrie
aurait élé suffisante pour completter
celle dont il s’est
trouvé reliquataire au contrat d ’union et jugement d’homologation
et de G erm aix.
Si l ’on passe à la troisième série, el que l ’on en fasse un état
comparatif avec colui qu’il a présenté dans sa plainte , l’on verra
que cette prétendue recette de^ bordereau dont il a r g u m e n te , se
trouve excéder de 10,098 francs l’argent et le montant des effets
actifs qu 'il dit avoir donnés ; puisque le total de cette série s’é
lève à 52,398 fr. , tandis que d’après sa plainte , il a déclaré n ’en avoir
donné que pour 19,620 francs , et encore y compte- t-il les effets de
Maignal eu leur e n tie r ,e t .sans la déduction de l ’agiot.
E n l i n , un autre m otif bien décisif , qui détruit sans retour ce
bordereau , c ’est qu’il en résulterait qu’ Urion n ’aurait
souffert
pendant 5 ans de négociations que pour 1 5,654 frimes d’agiot sur
tous les effets qu’il a fait circuler.
Concluons donc et convenons que ce bordereau , d’o,près sa p ro
pre explication , n’a aucune espèce de rapport avec les étals que
Urion ¡1 donnés dans sa plainte , et moins encore avec ce qu’il s’est
trouvé devoir à tous ses créanciers compris au contrat d ’union et
ju g em en t d'homologation el de Germaix.
S ’il éta;t permis d’en raisonner différemment, il en ré sulterait,
*
'
I
d’après Urion lui-même, qu’ayant emprunté pendant l’espace de plus
¿9 o ans , au taux de la place , sans avoir payé aucun agiot ni frais do
p r o lê l , ainsi que toute la s u it e ,
et ce à l’échéance do chaque
Irimeslrn, il se trouverait en bénéfice une somme de 47,086 francs ,
�4
« ^
( a3 )
indépendamment des 48 , a g i f r . , qu’il areconn u avoir reçue; puisque
par s o n , mémoire il réclame 156 ,19 6 francs , et qu’il ne sest trou
vé d e v o ir , d’après le contrat d’u n io n , jugement d’homologation
et de G erm aix , que 8g, 1 1 0 fr.
Il
faut convenir que , si ces calculs étaient réalisés en espèces , ils
seraient préférables à toutes ses spéculations en loterie, agricul
ture , plantation d’arbres en terrains arides , élèves de moutons ,
prés artificiels, machine hidraulique ou de M a r l i , & c . & c .
E ffe ctive m en t, nous sommes forcés par circonstance, de lui met
tre devant les yeux qu’il doit encore l’écroulement de sa fortune à ses
faux et réitérés calculs en loterie, a son inexpérience dans ses innova
tions rurales. Car à le suivre de près depuis son acquisition de
la belle terre de Férignat , sans avoir le premier sol dans safiloclie,
l ’ on serait tenté
de croire qu’il s’attendait à y trouver la pierre
philosophale.
Supposons même pour un in sta n t, que ce compte eût présenté
nn pareil r e liq u a t, convenons que le citoyen U rio n qu i est peutêtre de son siecle l’homme le plus la d r e , eût été bien dupe de
s’être obligé envers la C h a b r illa t , le même jour 2 pluviôse, d’une
somme de 5 oo francs , tandis qu’alors il devait se retrouver , comtne
aujourd’hui, son créancier d ’une somme de i 56 ,j gG francs , et ce <Ju’il.
y a de plus encore, fut d’avoir ratifié en thermidor suivant , cette
même reconnaissance de 5 oo francs, en forçant par un jugement
la citoyenne Chabrillat ùaccéder au contrat d’u n io n , pour en être
payée.
Si do n c, le 2 pluviôse an i o , il se reconnaît débiteur de la
Chabrillat d ’une somme de 5 oo francs, il a bien annoncé par cette
dém arche, que ladite Chabrillat ne lui devait rien.
Cette même déclaration se trouve expressément renfermée dans
le jugement du 25 thermidor an 1 0 , qui fait d é f e n s e à l a Chabrillat
de poursuivre le paiement de sa créance de Soo
fran cs,
envers le
dit Urion ; qu’à d é f a u t de paiement et après s’être conformé à la
teneur du contrat d’union et jugement d ’homologation d ’icclui ù
elle signifié par ledit Urion.
�( 24 )
D ’où il faut naturellement conclure quo le citoyen Urion , en cg
qui regarde laChabrilrut, est en tous sens non-recevable dans ses ré
clamations.
I n d é p en da m me n t de tout c e c i , les créanciers qu’il a reconnus ,
tant au contrat d ’union qu’au jugement d ’homologation , ne lui oj'.
posent-ils pas une autre fin de non-recevoir ? E n elFet, reconnaî
tre des créanciers qu’une intermédiaire nousa donnés en négociant
nos effets , c ’est évidemment reconnaître que nous en avions reçu le
montant.
D ’a ille u rs, de quel oeil doit-on rega rd er, et quelle confiance
d oit-on avoir à celui qui a commencé par demander en arbitrage
1 2.000 francs que l’arbitre lui-même voulait réduire à Goo francs,
( i ) qui réclame d’après en portant plainte, 20,000 francs ; ensuite
79.1 ÿG francs par sa lettre du 18 nivôse ; plus 1 1 1, 5 1 5 francs dans
ses conclusions d ’atidiance, et enfin i 5 G; icj 6 f ranc s, par la distri
but i on d ’ un m é m o i r e ?
D ’après toutes ces réflexions, il est visible que ce bordereau fait
à plaisir ,;a élé totalement dicté par le citoyen Urion , présente la
Chabril lat. , mais que les motifs des deux étaient bien differens.
Celui de la Chabrillat consistait uniquement à obliger le citoyen
Urion à raison de sa famille qui, suivant lui,le harcelait ; qu’à celte
fin ']ft citoyenne Chabrillat pria lé citoyen D upic , de lui rendre
ce peMii F'efvicfl en l’écrivant de sa main, pour qu'il fût mieux acctfeilli , tandis que celui d ’ Urion quidicla lui-même le m é m o ire , vu
que la citoyenne Chabrillat n ’avait jamais tenu aucun état , note ni
livre journal de toutes les négociations qu’elle a faites , et fait jo u r
nellement ,'éliiit de la surpren dre, tromper et v o l e r , s’il eût pu.
••Jiy.aininous maintenant si les principes el les lois invoqués par
Urion pouvaient Contraindre la Cliabrillal. ù faire ce qu’elle n’a
vait jatuuis lait , ni su faire , c ’est-à dire , à tenir un registre.
T ou s lés banquiers et négocians de Ciermont attestent tous en
sa faveur , et disent qu’elle n ’a jamais clé courtière ni .agente de
change , u ayant jajnais pris cetle qualité.
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J
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( t ) IX’poslli-ii il u vl:i::t-cm<luiomc témoin.
�(*5)
Il
est vraî qn’Urîon et Girard-La-Bâtisse , son b eau-ficre , l'ont
qualifiée telle dans l’affaire de G erm aix : mais de pareilles quali
fications lie sont que passives à la Chabrillat ; et quoique son avoué,
dans la signification du dernier jugement dont argumente Urion»
lui ait répété ces
qualités , c’est le fruit de
l ’erreur et par suite
de ce qu’il a vu qu’Urion l’avait nommée telle dans la copie d’e x
ploit.
En outre ces qualifications qui n ’ont été données que pour
la cause , ne seraient survenues qu’après la cessation des négocia
tions d’ Urion. En 5 .m‘ lieu , la ville de Clerm ont n ’a j amais eu ni
courtiers, ni agens de change ; et à coup s û r , si elle en avait eu ,
soit que ce fût le corps municipal , ou le G ouvernem ent
les eussent nommés , ce n’est point à une femme
qui
illitérée à qui
ils se fussent adressés pour confier un si important emploi.
Ainsi l ’ordonnance de 1 (ï7 3 et la loi du 8 ma‘1 1791 , q u 'in v o
que Urion , n’ont ici aucune espèce d’appl.calion , dès
p art, ces places 11’ont jamais été confiées à des femmes ,
l ’autre , la citoyenne Chabrillat n’a jamais pris patente
s e r m e n t, conformément aux articles III et V I de la loi
que d’une
et que de
, n ip rê lô
du 8 mai
179 »Il
serait donc inutile de nous reporter sur les lois
du
1 1 avril
179a , 2 prairial an III et i 3 fructidor su iva n t, rendues dans le
tenis de nos folies et de ños erreurs , et qui avaient prohibé la vente
du numéraire, sous peine des fers ou de la détention , dès que ces
décrets n ’avaient d'application qu’à la vente du numéraire métalli
que contre assignats ou denrées du pays , et que postérieurement
l ’argent a été décrété marchandise.
Mais il est un point dans cette aiTaire dont on n ’aurait jamais
dû s’écarter , c’est que la plainte n’a été conçue que pour se dis
penser de p ayer les 10,000 fr. de G erm aix , Urion ayant reconnu
au contrat
d ’ union et jugement d ’homologation
tous ses autres
créanciers jusqu’à la Cli abrillat.
L ’ad’uire do G e rm a ix ayant donc été décidée au tribunal d’appel,
la plai lit* dès-lors est devenue sans o b j e t , soit parce que l’affaire
ayant été jugée avec toutes les parties , soit parce que Urion a y a n t
pris la voie ordinaire pour ces 10,000 fr. de G erm aix , *1 n était
des-lors plus recevablo à poursuivre par la voie cxtiaordinaire.
D
�(26)
Les
ronnasisances que nous avons acquises datts la conirrmm-
calion de quelques pièces du docsier , nous ont pém'trc's de l ’impos
ture du ciicnen Urion dans l’affuire des 10,000 fr. dûs à 'G e r m a ix .
« Il prétendit que celui-ci n’élait qu’un prête-nom de la Chabrillat.
» De plus il prétendait que les
v Chalier , ne provenaient
10 ,0 0 0
fr. payés au
citoyen
pas des effets de G erniaix , comme
» celui-ci l’avait prétendu de concert avec la Chabrillat ; quoique
» ledit Gerniaix eût exigé que la Chabrillat prît du citoyen Chalier
» u n e quittance en son nom , sous signature p riv é e , et qu’il avait
)> même exigée par-devant n o ta ir e , mais qu’Urion ne voulut point
» y acquiescer, soit à raison des droits d ’enregistrement, soit parce
» qu’il lui en aurait fallu une autre de la citoyenne Chabrillat.; tandis
)> que celle sous signature privée serait gratuitement remise au
« c ito y e n Urion aussitôt que Gerniaix serait payé ; niais que cette
)) somme n’avait été payée qu’aux
dépens de certains ellets
de
); ¡\Iaignal dûs à Urion , et que la Chabrillat avait reçus ».
E h bien! la dixième pièce du
à la C h a b r illa t,
dossier intitulée q u estion à f a ir e
au milieu du premier
rôle ,
verso
, prouve
irrévocablement qn’Urion en a im posé, et qu’il voulait fripponner
Gerniaix ou la citoyenne Chabrillat qui lui avait fait procurer les
fonds pour le paiement du citoyen Chalier(i).
U ne pareille conduite et telles expressions établissent incontes
tablement que Magdelaine Chabrillat prendrait une quittance sous
seing p riv é , pour demeurer en ses mains et servir de plus grande
sûreté jusqu’à l’acquittement des effets de G erm aix.
somme payée à Chalier
eût été payée
aux
Car 6i cette
dépens
des effets
d’U iion sur M aign al, comment concevoir que Magdelaine Chabrillat
eût ou l ’a ulace et l ’impudeur eu
payant des
fonds d ’ Lrion ,
d ’exiger de lui que le citoyen Chalier donnât une
quittance au
nom de celui qu’elle indiquerait, et qu’Urion lui-même eût eu la
bonhommie , pour ne dire rien de plus , à ce que la citoyenne Cliabrillat prit la quittance en son nom i
(1) Pourquoi
Mapclclaine C liubrillut n-t-cllc Tait son possible dans le tems
p ou r que moi U rion eomenlis.ie:\ ce que le citoyen C h alier donnât , par-d evant
notaire , q u ill.n c c des 10,000 fr. :i celui qu’elle indiquerait ? et quel
vo u la it-elle
insérer
Tendisse d i .a
dans la quittance ?
pourquoi vo u lait-elle
le citoyen L eb lan c à cctte fui ?
nom
que je rua
�4 C’ Y
(
Cette découverte bat
27)
réellement
de front l ’imposture
fripponnerie d’ Urion.
• Nous étant donc acquittés en tout sens à
et la
l ’égard d e là partie
civile ; ayant entièrement déroulé et l’iniquité des projets et l ’im inoralité sans exemple du citoyen Urion , il ne nous reste qu’à
jetter un coup-d’œil sur l'information pour recevoir de la partie
publique notre quittance absolue.
Notre tâche serait aisée à remplir , puisque d’une part les objets
de plainte du citoyen Urion ne présentent que des mots et des ch i
mères , et ne donnent ouverture à aucun corps de délit ; ( i ) et que
de l’autreUrion lui même nous rassure en annonçant, pages 10 et i 4
de son m ém oire, qu’aucune déposition ne favorisait sa plainte ; mais
il a prétendu en même teins qu’il devait encore ce revers d’ infor
tune à une circonstance qui avait obligé les témoins à composer
leur déposition à l ’avantage de la citoyenne C liabrilîat, de crainte
d ’être insultés et maltraités.
A une imposture aussi révoltante , nous ne nous permettrons
d ’autres observations que celle-ci qui ressort naturellement des
faits consignés
en la cause. Que le citoyen Urion prenne , qu’il
lise les dépositions é c r ite s , qu’il les compare avec les notes prises
à l’audiance : dans toutes , il jugera de la même uniformité , et
abandonnera de suite l'indécent prétexte du citoyen J e u d i, insultant
ou même insulté , si on le v e u t , dans l’enclos ou passage du Palais,
et non dans la salle d’atidiance.
Quoi qu’il en soit, revenône à cette information et aux témoins qui
la com posent, nous 11e tairons pas que si le citoyen U iion eût voulu
se présenter en homme probe et do
confiance , il aurait dû faire
assigner en déposition tous les témoins nécessaires, c ’e s t - à - d ir e ,
tous ses créanciers , tant ceux portés au contrat d’union , que ceux
qui avaient été remboursés aux dépens de ceux-ci. Mais s’il l ’e û t
fuit , il
courait à sa condamnation , parce que la majeure partie
d ’entr’eux avait traité avec lui lors des premiers prêts. L e citoyen
G u y o t , son créancier de 2Ü,ooo fr. , l’a fait presqu’a chaque
fois
dans son uuberge de chez Lancau.l-e premier piêt fut de 10,000 fr.
( 1 ) Com m e ce la it conduit à un autre goure tic discussion de principes et de
nature , i l fera l ’objet d’ une consultation particulière.
�(28)
qui furent portés, ainsi que l e s subséquens, de ch e z Lanean à l ’au
berge de Simon où logeait Urion ; et cependant le même
Urion
a osé réclamer dans son mémoire ces 26,000 f r . , comme ne les
ayant pas reçus.
Quels sont donc les tém oins, à l’ex ception
de cette Brunelle
qui à l’exemple d ’U r i o n , e t infailliblement conseillée et subornée
p ar lui , ait eu l’impudeur de faire assigner
dans le même tems
la Chabrillat, à cette fin de lui remettre un effet de 860 f r ., comme
solu et acquitté, que dès le lendemain la citoyenne Chabrillat la
fit elle-m ême assigner , et qui plus e s t , co ndam ner, au point qu’à
l ’audiance elle fut obligée de convenir qu’elle n ’en avait agi ainsi
que pour gagner du tems , et que soit à raison de la honte dont
elle dut se c o u v r ir , soit à raison de ce que la Chabrillat ne voulut
point lui accorder de délais , elle jura de s’en venger. Aisém ent
cela se peut croire. L ’historique de sa déposition qui
assez qu’elle était réfléchie
annonce
et méditée par la maniére fidelle et
exacte avec laquelle elle fut rendue , se trouve cependant en oppo
sition à celle du citoyen Daubusson , et quelques autres compris
dans l’information qu’elle a eu l’indiscrétion de mettre gratuite
ment en jeu. Il est même établi par la même information qu’elle
a joué un rôle très-actif avec certains autres , comme la Fournier ,
la Belard , ainsi de suite
de ce même a c a b it, pour tâcher do
procurer des témoins favorables à Urion.
Mais , si de cette classe ignoble et corrompue , qui d’ailleurs n ’ont
même déposé d’aucun fait dont se plaint Urion, nous nous arrêtons et
jettons un c o u p - d ’ œ i l sur les autres, pour le coup le triomphe de
la Chabrillat ne sera pas à demi
S a satisfaction ira jusqu’à la
sensibilité, en voyant sur-tout que tout ce qu’il y a d'honnête
et de marquant dans la classe des banquiers , négocians et pro
priétaires
de la ville de Clermont , sa patrie , n ’ont pas hésité
un seul instant à rendre hommage a la vérité , en appréciant à
un taux peu ordinaire sa fran chise, sa loyauté et sa probité qui lui
ont toujours assuré et lui assurent encore leur confiance
ré s e rv e , en toute occasion.
C H A B R IL L A T .
A n t o i n e D U P I C , a î n é , ju risco n su lte .
sans
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrillat, Magdelaine. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chabrillat
Antoine Dupic
Subject
The topic of the resource
femme courtière et agente de change
agiotage
usure
assemblées de créanciers
femme commerçante
contravention aux règles de la profession
créanciers
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Magdelaine Chabrillat, marchande, habitant à Clermont-Ferrand, défenderesse et intimée ; Contre Michel-Amable Urion, propriétaire, habitant à Riom, plaintif et appelant d'un jugement rendu près le tribunal de police correctionnelle de l'arrondissement de Clermont, du 3 fructidor an 10, en présence du Commissaire du Gouvernement.
liste de créanciers
livre de comptes.
Table Godemel : agents de change : agiotage et trafic usuraire contre les dispositions contre les dispositions des lois prohibant la vente du numéraire et prescrivant les obligations que doivent remplir les agents de change et courtiers.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1798-Circa 1803
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0922
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0920
BCU_Factums_G0921
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53083/BCU_Factums_G0922.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agiotage
assemblées de créanciers
commerçants
contravention aux règles de la profession
créanciers
femme commerçante
Femme courtière et agente de change
Usure
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53938/BCU_Factums_M0743.pdf
71c8e7e89f71f4491425ed5edc8d4e18
PDF Text
Text
CONSULTATION.
L
E C O N S E I L S O U S S I G N E , qui a v u le mémoire imprimé
,
répandu par M ich el-A m able U rio n , ancien magistrat, demeu
rant à R i o m , appelant d ’un jugement rendu par le tribunal de
police correctionnelle de C le r m o n t, le 3 fructidor an 10 ;
Contre M agdelaine C h a b r illa t, m archande de la ville de
Clerm ont-F e r ra n d , intimée ;
E t les pièces relatives à cette affaire, qui lui ont été com m u
niquées;
que la plainte rendue par le citoyen U r i o n ,
contre M agdelaine C h a b rilla t, est une algarade qui ne serait
E st
d
’AVIS
que ridicule, si elle n’était pas une diffamation atroce. L e tribunal
correctionnel de Clerm ont en a fait ju s tic e , et elle n ’aura pas
un meilleur sort au tribunal d’a p p e l, quand même la fatalité
des circonstances réduirait ladite Chabrillat à l ’impossibilité de
faire entendre sa défense : car l’absence évidente de tout d é lit,
dans les négociations q u ’elle a exécutées par commission pour
le plaignant, lui garantissent la confirmation du jugement qui
l ' a acquittée, avec
3oo
francs de dommages-intérêts. Les trib u -
naux ne s’arment pas contre des chim ères, lors même q u ’ils
prononcent par contumace.
A
�(O
A P E R Ç* U
SO M M A IR E
DES
F0A I T S .
D e quoi s’a g i t - i l dans cette affaire? U n ancien m agistrat,
ruiné par des spéculations m al c o n ç u es, sans être guéri de sa
m anie, spécule aujourd’hui sur les tracasseries judiciaires et les
procès, pour réparer sa fortune délabrée. E n essayant de vendre
le repos de ceux que leur malheureuse étoile a mis en relations
d ’intérêts avec l u i , le citoyen Urion a marché d ’un pas rapide
vers sa ruine, par des spéculations.
Sur le commerce des immeubles , par lequel il espérait arriver
à la fortune sans a v a n c e s , il spéculait sur les rêveries acadé
miques des agriculteurs de ca b in ets, qui l ’ont souvent laissé à
découvert de ses mises de fonds , loin de tripler ses r e v e n u s ,
com m e il s’en était flatté ; il spéculait sur la lo te rie , qui lu i
promettait des m illio n s , et ne lui a valu que des regrets,
Sa seule ressource, pour alipienfer des spéculations si rui
neuses , a été celle des emprunts.
'*
A in s i, il emprunte jusqu’aux frais de contrats pour ses acqui
sitions; il emprunte pour les premiers paiemens à courts délais;
il emprunte pour cultiver dans le genre systématique ; ij em
prunte enfin pour se mettre à la poursuite des ternes et des quaternes,
E t comment emprunte-t-il? Il n ’y a pas deux manières aujour
d ’hui : lettres de change à trois ou quatre mois de date; signa
tures multipliées; agiot immodéré.
II jetait d o n c , sur la p l a c e , des lettres de change à courte
échéance , endossées, tantôt par la demoiselle A r n o u x , sa bellesœ ur, tantôt par le citoyen Girard - Labatisse , son be au -frè re ;
o u , dans les premiers teins, avec sa simple signature : toujours
le nom du porteur en blanc. T r o u v e z - m o i de l ’argent à tout
prix sur ces effets, d is a it-il à la Ch abrillat, lorsqu’il voulait
les négocier i'i Clerinonf.
L a Clmbrillat remplissait ses v u e s , moyennant un droit de
�(3 )
commission convenu, et souvent elle donnait sa signature, pour
la tranquillité des prêteurs : à l ’é c h é a n c e i l fallait, ou p a y e r,
ou renouveler, ou faire des revireinens avec de nouveaux prê
teurs, et rassasier l ’agiot. Rarem ent le citoyen Urion avait des
fonds à sa disposition pour ses opérations ; et d ’ailleurs des
besoins renaissans commandaient de nouveaux emprunts : nou
velle émission d’effets négociables , nouvel agiot , nouveaux
frais de commission. L a boule grossissait à mesure, ainsi qu’elle
roulait sur l’agiot ; et en deux années et quelques mois de tem s,
depuis vendémiaire an 7 jusqu’en pluviôse an 9 , elle fut si
c h a r g é e , q u ’elle s’arrêta dans sa course.
L a catastrophe approche ; l’embarras des affaires de l ’em
prunteur Urion s’a nnonce; les protêts, faute de paiement ou
d ’acceptation, se multiplient : alors il faut en venir aux remèdes
extrêmes. L e s créanciers sont assemblés ; le bilan est déroulé :
le dénouement fut un traité d’aterm oiement, ’s igné avec le plus
grand nombre des créanciers, le 19 germinal an 9 , et homo
logué avec les refusans, le
suivant.
L à nous voyons le tableau de la situation du citoyen Urion :
la masse de ses dettes est grave ; mais il s’ en faut bien qu’elles
aient toutes été créées par l’entremise de la Ghabrillat. On n ’en
trouve
dans cette origine que pour 98,110 livres en capital, inté
rêts et frais. Urion les a toutes reconnues légitimes; et il est re
marquable que la Ghabrillat ne figure dans l’état que pour une
niodique somme de
5oo
liv re s, résultat d’un arrêté général de
c o m p te , par lequel il lui fut souscrit un effet au terme de sa
mission , le 2 pluviôse an 9. T out paraissait terminé entr’elle
et le citoyen U rio n , par le jugement d’homologation du traité
d ’atermoiement que provoqua contr’elle ce débiteur , pour la
forcer à s’y soumettre; cependant son esprit inquiet ne la laissa
pas long-tems en repos. L e
25
frimaire an 10 , il imagina de se
présenter à la justice, comme une victime de l’escroquerie la plus
effrénée de cette commissionnaire, et rendit plainte contr’elle :
mais l’impossibilité de donner du corps à des fantômes de délits
A z
�(O
que son imagination avait créés, fit bientôt abandonner cetfepremière attaque; et il essaya de se venger de ses échecs, en faisant
un procès civil à la G habrillat, au sujet de deux lettres de change,
montant ensemble à 10,000 livres, dont il voulut la rendre ga
rante envers le cit. G e r m a ix , prêteur; il succomba au tribunal
de commerce, il succomba encore au tribunal d ’appel.
L a défaite l’irrita : il jura de nouveau la perte de la Ghabrillat,
et il revient à sa plainte du mois de frim aire, q u ’il renouvelle
l e *24 messidor. L ’instruction criminelle est faite; l ’affaire est ré
glée et renvoyée à la police correctionnelle ; on en vient à l’au
dience; une nuée de témoins paraît sur l’ horison ; mais point de
charges : en conséquence un jugement du
de la plainte avec
3 oo
3
fructidor la renvoie
livres de dommages-intérêts applicables
aux pauvres, de son consentement. T e l est le jugement dont la
révision est soumise au tribunal crim inel, com m e juge d’appel
des tribunaux correctionnels; mais quelle sera l’issue des nou
veaux efforts de l’appelant ? la honte d’une nouvelle défaite.
Nous avons d i t , que dans cette bruyante affaire, il 11’y a que
de vaines déclamations , et point de délits : nous allons le
prouver.
:
§• T.”
P oin t d'escroqucric.
L a loi du 7 frimaire an 2 , qui contient une rédaction nouvelle
de l’article 3 5 , section 4 de celle du 22 juillet 1 7 9 1 , définit
l ’escroquerie, et nous y voyons qu’elle est le crime de ceux qui
• par dol , et à l’aide de faux noms, pris verbalement et sans
» signature ;
« Ou de fausses entreprises,
» Ou d’ 1111 crédit imaginaire ;
» Ou d’espérances ou de craintes chimériques ;
* » auraient abusé de la crédulité de quelques personnes, et eacroquü tout ou partie de leur fortune ».
�( s ;
O r , qu’ont de commun de pareilles manœuvres de la ruse,’
de la duplicité et de la charlatanerie, avec Magdelaine Chabrillat ? Elle a été l'intermédiaire entre les prêteurs d’argent et
l’emprunteur Urion , pour lui procurer des fonds; et elle n’a été
que, cela. Ce n’ est pas à l ’aide d’un faux nom qu’elle a surpris la
confiance; ce n’est pas non plus en alléguant de fausses entre
p r is e s ,n i un crédit imaginaire. Quel crédit faut-il pour trouver
de l’argent avec de bonnes signalures, et un intérêt au cours de
la place? Il ne s’agit pas de remuer des puissances; et certes,
si le crédit qui procure de l’argent n’avait été qu’ une jactance
imaginaire dans la bouche de la C habrillat, elle n’aurait pas à
se justifier aujourd’ hui; car elle n’aurait pas placé les effets de
l ’emprunteur Urion.
Est-elle allée le chercher à R iom , pour lui soutirer ses effets
à l’aide d’espérances ou de craintes chimériques? Non; c’est lui
qui est venu la c h e r c h e r à Clermont, pour employer son active
entremise auprès des prêteurs d ’argent. Il n’y a v a i t d a n s u n e
négociation de ce genre, ni espérances, ni craintes chimériques
à mettre en jeu.
O u me faisait espérer , dit-il , qu’en échange de mes effets ,
j ’obtiendrais de l’argent. Cette espérance n’était pas chimérique ,
et n’a pas été trompée.
On me faisait craindre , lorsque mes effets étaient échus, que
j’allais être vivement poursuivi, si je ne me pressais pas de renou
veler ou de couvrir la même dette par un nouvel emprunt. Certes,
ces craintes n’étaient pas une chimère non plus , car les porteurs
de lettres de change ne s’endorment pas au terme.
Concluons donc, que rien ne ressemble moins à /’escroquerie
que les relations de la Chabrillat avec A niable Urion.
A
3
�C 6 )
§ H.
P oin t de vol ni d'infidélité.
Des vols ! L a Chabrillat aurait-elle donc enlevé -furtivement
la bourse d’A m a b le Urion , ou son porte-feuille? N o n , on n’a
garde de lui imputer de telles bassesses. Mais A m a b le Urion lui
dit : L o rs du renouvellem ent, c’est-à-dire, lors de l’échange des
anciens effets que j ’avais souscrits, contre de nouveaux, vous avez
retiré les anciens, vous les avez gardés , vous vous les êtes ap
propriés sous des noms empruntés; double emploi de ci’éance
pour le même prêt, vol manifeste: V o ilà une imputation atroce
par sa fausseté , et par la mauvaise foi avec laquelle elle est faite.
1.° L es anciens effets , tirés par le cit. U rio n , n’ont pas été
retenus par la Chabrillat , puisque Urion a déclaré lui-même,
dans les mémoires manuscrits joints à sa production, q u ’il est
porteur de 74,55o liv. de ces elfets anciens, retirés en payant
ou en renouvelant; et que dans le nombre il y en a poui’ 40,35o
liv. endossés, et conséquemment officieusement cautionnés par
D u p ic et par la Chabrillat ;
2.° L a Chabrillat n’aurait pas p u , quand elle l’aurait v o u l u ,
faire tourner les effets anciens à son profit , en les reten ant ,
puisqu’ils étaient remplis des noms des prêteurs;
3 .°
Elle n’ en a pas profité de fa it , ni directement, ni indi
rectem ent, puisque de tous les créanciers qui ont pa ru , soit au
traité d’atermoiement, soit dans le jugement d’hom ologation, il
n ’en est aucun qui soit porteur d ’aucun effet, et qu’ils fondaient
tous leurs créances sur des lettres de change ou récemment échues,
ou qui nu l’étaient pas e n c o re , et n’avaient été protestées q u ’à
défaut d’acceptation. Comment retenir son indignation à la vue
d’une imputation , dont la calomnie artificieuse et réfléchie , est
si victorieusement démentie par le fait et par le témoignage
propre de celui qui se l’est permise ?
�(7)
Ce n’ est pas avec plus de réflexion ni de fondement , qu’on
reproche à la Chabrillat un second genre d’infidélité. A entendre
A m a b le U r io n , il délivrait des effets par torrens pour se pro
curer du numéraire ; et il ne relirait de l’argent en retour que
goutte à goutte. A peine a-t-il touché 24 à 26 milles fr. effectifs,
sur le produit de n o ou 112 milles fr. d’effets actifs ou passifs,
qu’il a négociés par l’entremise de la C h a b rilla t, dans le courant
des années 7 et 8. L a Chabrillat a retenu le reste, c’est-à-dire,
qu’elle a retenu plus des trois quarts de la recette.
On ne veut pas être cru quand on exagère de cette force ; mais
aussi A m a b le Urion ne prétend-il pas qu’on ajoute foi à ses fables,
lorsqu’il dément son mémoire public par ses mémoires manuscrits
joints au procès. T ous les effets qu’il avait mis en circulation,
en l’an 7 et en l’an 8 , avaient du être renouvelés et même plu?
sieurs fois pour la plupart ; aussi il nous apprend qu’il en a en
ses mains p o u r 74,550 liv. ; qu’il en a égaré pour 6,000 livres
retirés de Guiot - Gauthier ; et il eu r é c l a m e p o u r 1 0 , 0 0 0 livres,
encore que la Chabrillat était, dit-il, en retard de lui remettre.
O r , qui croira qu’il eût retiré ou renouvelé cett.e masse d’effets,
sans demander compte à la Chabrillat de leur produit , s’il ne
l’avait pas reçu à mesure q u ’ils avaient été négociés? Qui croiia
qu’il eût fourni de nouveaux effets pour renouveler les anciens,
ou des fonds pour les retirer , si la Chabrillat avait retenu les
trois quarts et davantage , des sommes dont les effets anciens le
constituaient débiteur? N ’aurait-il pas rompu avec elle, et jeté
les hauts cris ? Bien loin de là , le 2 pluviôse an 9 , au terme
de toutes les négociations, il compte avec elle ; il se reconnaît
débiteur de
5oo
fr. pour solde , et il souscrit un effet de cette
somme, et il fait déclarer l’atermoiemept général fait avec les
trois quarts des créanciers, commun ave c elle pour cette créance
par le jugement d’homologation.
E n voilà trop pour confondre la calomnie et pour détruire
jusqu’au soupçon des infidélités absurdes, dont elle a tissu son
roman injurieux.
�C « )
§.
III.
Usure.
•Apparemment qu’A m a lîle U rio n , quand il parle d’ usure, vent
parler de l'intérêt excessif que les prêteurs exigent des emprun
te u r s , depuis la disparution du papier-monnaie, et le retour du
n um éraire; mais sur ce point-là, qu’il s’en prenne donc aux
créanciers avec lesquels il a atermoyé , ave c lesquels il a fait
homologuer le contrat d’atermoiement ; car ce sont eux qui ont
exigé et reçu l’intérêt exorbitant qui excite sa vocifération. Quant
à la C h a b rilla t, elle n’a été que l’agent intermédiaire des négo
ciations. A propos de quoi la punirait-on de la cupidité des prê
teurs , si elle était criminelle; mais d ’ailleurs les prêteurs ne sont
pas plus à punir que la commissionnaire, quoique puisse dire
A rnable Urion. L ’argent est toujours marc handise en ce sens que
le taux de l’intérêt est absolument librej et dépend uniquement
des conventions. C ’est un malheur p u b lic , sans doute, que la
cupidité en abuse , mais la loi permet et ne punit point.
On cite à pure perle au reste, et d ’.iilleurs à contre-sens, les
décrets du 11 avril 1793, 2 prairial an 3 , et i 3 fructidor suivant.
Ces lois 11’ont d ’application qu’à la vente du numéraire m étal
lique contre assignats, qui étaient tombés alors dans un discrédit
total; et elles n’ont aucune sorte de rapport à l’intérêt ni de l’ar
gent , ni des assignats.
D ’ailleurs, ce fut la loi du 2I) vendémiaire an 4 , qui finit In
dernier étal del à législation commerciale, sur la vente du num é
raire contre assignats , et ce commerce 11e fut pas prohibé , il
fut seulement régularisé.
A u resle, ce sont là des recherches et des souvenirs purement
cpisowiquo.s, et totalement étrangers an W.nx de l’intérêl. Oublions
donc encore l'accusation d’usuro que l’on cherche à clayer sur
du» lois , et passons au dernier chef d’inculpation.
�(
9 .),
)
i :!
i
V
'
)
D éjaut de registres des négociations. Contravention aux lois
sur tâchât et la vente du numéraire.
V o u s avez exercé les fonctions d’agent de change , puisque
vous avez négocié des effets de co m m e rce , dit-on, encore à la
Chabrillat: vous deviez donc en remjjlir les obligations-, et tenir
.registre de toutes les négociations qui s’opèrent par leur entre
mise: vous n’en avez tenu a u c u n , de votre propre a v e u , vous
voilà donc coupable.
1
i’
i
.. *
Plusieurs Réponses:
y' ' ' .
i
i.° C e ne sont point des fonctions d’agent de change que la
Chabrillat a faites, car les fonctions des a^ens de change ne
sont pas de procurer des prêteurs sur lettres de change à un
intérêt convenu ; elles consistent uniquement dans les places de
co m m erce, où il y en a d’établis, ainsi qu’à des bourses, comme
à Paris , L y o n , Bordeaux, Marseille , ;etc., à faire les négocia
tions des lettres de change sur l’étranger. On peut s’en convaincre
en lisant la loi du 28 vendémiaire an 4 , invoquée par A m able
Urion. Ce n ’est que par extensionqu’o n y ajoute les négociationsdes leltres de change de place en place, dans l’intérieur, sur
les villes de commerce où il y a bourse. L e but de ce règlement
de police commerciale est de iixer le cours du change pour
chaque pays et pour chaque place , mais sans aucun rapport
quelconqueanx prêts d’argent, qui se font sur leltres de change,
tirées par remprunteur. Or , c’est uniquement de ce dernier
genre de négociation que la Chabrillat s’est mêlée; d’où il suit
que les réglemens relatifs aux agens de change, lui sont com
plètement étrangers.
a .0 Q u’011 lise et qu’on relise la loi cité e , on 11e verra dans
�aucun de ses articles, l ’obligation imposée aux agens de change
qu’elle c r é a , en supprimant leurs prédécesseurs, de tenir in
dividuellement aucun registre des négociations qui s’opéraient
par leur entrem ise, sous aucune peine quelconque; la loi avait
pourvu par d’autres m o y e n s , à la sûreté des négociations.
E n fin le citoyen Urion ne s’entend pas lui-même lorsqu’ il
reproche à la C h a b rilla t, com m e un d é l i t , de l’avoir s e r v i,
dans l ’échangé de ses effets contre du numéraire : et c’est un
c r im e , à ses y e u x , qui mérite la peine des fers. P our toute
r é p o n s e , nous le renverrons au x lois q u ’il invoque , et nottam m ent à celle du 28 vendémiaire an 4 , qui est la dernière
de toutes. Q u ’il les lise et les relise, il y verra que la vente
de l ’argent contre des assignats était réputée a g io ta g e , lors
q u ’elle se faisait à terme ou à 'prime. Il y verra q u ’aucune
,
vente de ce genre ne pourrait avoir lieu qu'au c o m p ta n t
sou s les peines les plus sévères. M ais q u ’a cette sévérité de
com m un , encore une fo is , avec les emprunts faits par la
C habrillat, sur lettres de c h a n g e , pour le compte du citoyen
U rion ?
,v n
'
x
A in si s’évanouissent tous les délits imaginaires dont A m able
r
Urion a vo u lu noircir la réputation de la Chabrillat. Son in
nocence de tout crime caractérisé tel par la l oi , reste; et par
conséquent la confirmation du jugem ent du
3
fru c tid o r, qui
l ’a p ro c la m é e , ne saurait faire la matière d’un doute.
D élibéré à C lerm ont-F erran d , par les jurisconsultes sous
signés, le premier nivôse , an onze.
BERGIER,
A
ABRAHAM.
RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrillat, Magdelaine. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Abraham
Subject
The topic of the resource
diffamation
créances
agiotage
escroqueries
usure
lettres de change
Description
An account of the resource
Consultation [Michel-Amable Urion contre Magdelaine Chabrillat]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
Circa An 9-An 11
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0743
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
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diffamation
escroqueries
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Usure
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6962fd3dae5abaeb6ac63aad3ed3383c
PDF Text
Text
MÉ M O I R E
POUR
M i c h e l - A m a b l e U R I O N , demeurant à R io m ,
plaintif, et appelant d’un jugem ent rendu par
le tribunal de la police correctionnelle de l'ar
rondissement de Clerm ont, le
3 fructidor an
10
C O N T R E
C H A B R I L L A T , courtière et
agente de change , habitant a Clermont-Ferrand, prévenue d’escroquerie , de dol, d'infidé
lité , de vol et d’usure 3 défenderesse et intimée.
M a g d e le in e
E n présence du commissaire du gouvernement
E
N l’an 7 , M
ich el-
A
mable
.
U r i o n étoit un des
plus considérables propriétaires de la ville de Riom.
Sa fortune n’etoit pas nouvelle
il
avoit hé rité d e n -
�ΠO
viron 300,000 fr. de ses ancêtres. Père d’ une nombreuse
fam ille, son désir étoit d’accroître ses biens par des
acquisitions et par des améliorations. Il est de notoriété
publique que l ’ordre et l’économie ont de tout temps
régné dans sa maison ; et personne ne peut dire , et
encore moins p ro u v e r, qu’il ait été dominé par aucune
de ces passions secrètes qui opèrent quelquefois la ruine
des personnes les plus riclies. L a révolution sembloit
avoir respecté ses propriétés, et la prospéi’ité paroissoit
s’attacher à ses entreprises , lorsque tout à c o u p , et dans
le milieu de l’an 9 , il s’est v u assailli par un essaim de
créanciers, qui ne lui ont laissé sa liberté qu’au moyen
du sacrifice de ses biens, et du cautionnement de la dame
A r n o u x , sa b e lle -m è r e , q u i, dans cette circonstance, a
manifesté une grandeur d’âme et des sentimens dignes
de l’estime dont elle jouit.
On
prévoit facilement qu’un revers de fortune si
prom pt tient à une cause extraordinaire.
Le
récit des malheurs du citoyen U rion peut ne
paroîti’e à quelques égoïstes qu’un objet de curiosité ; ou
.l’un de ces jeux du hasard q u i, suivant les caprices du
s o r t, tantôt é lè v e , tantôt ¿ibaisse les familles : mais il
est pourtant vrai de dire que les circonstances de son
infortune sont intimément liées ù l ’ordre et à l’intérêt
doivent exciter
le m ouvement des cœurs généreux, provoquer l’indigna
tion des gens de b ien , mais surtout fixer l’attention de
publics-, et que sous ce ra p p o rt, elles
la justice, et enflammer le zèle des magistrats intègres
et éclairés qui vo n t statuer sur ses plaintes.
�24*
(3)
F A I T S .
r
' L e 2.5 messidor an 6 , le citoyen U rion avoit aclieté
du citoyen de Chalier , demeurant à C le rm o n t, un bien
assez considérable appelé de Pérignat. Q uoiqu’ il n’eût
pas alors les fonds suflisans pour payer celte te r r e , il
crut qu’il lui seroit facile de se les procurer par la vente
de quelques-uns de ses domaines ; et dans cette confiance,
il s’obligea de payer au citoyen de Chalier , dans le cou
rant de l’an 7 , de fortes sommes sur le prix de son acqui
pour vendre
ses propriétés à des conditions avantageuses, il ne fulloit
sition. L e citoyen U rion s’aperçut bientôt que
pas se presser. Il se persuada qu’il valoit m ieux emprun
ter, à certains délais, l ’argent nécessaire pour remplir ses
engagements envers le citoyen de C h alier; il étoit loin
de prévoir le résultat d’une pareille spéculation.
L ’époque des payemens étant p roch e, et n’ayant pu
trouver parmi ses connoissances tout l’argent nécessaire
pour s’acquitter, le citoyen Urion fut dans la nécessité
d ’avoir recours à M agdeleine Cliabrillat, dite la M agdelon.
T o u t le monde sait que cette M agdelon a éprouvé les
faveurs les plus constantes de la fortune , et qu’après
avoir été quelque temps marchande de fru its, au milieu
de la rue des G ras, à Clerm ont, elle s’est élevée pendant
la révolution , au point de concentrer dans ses mains
toutes les opérations de l’agiotage. D ouée d’une activité
peu com m une, d’une adresse singulière, propre à tous
les genres d’intrigues et de ruses, cette femme s’est acquise
une réputation extraordinaire dans les négociations des
A 2
�(4)
-effets de commerce. Il est vrai que les circonstances l’ont
servie à merveille ; c a r , du moment que l’argent a été
déclaré marchandise par un décret form el, il est notoire
que l’usure s’est pratiquée ouvertement avec un scandale
et une impudeur dont il n’y avoit jamais eu d’exemple.
L a ville de Clcrm ont n’avoit point d’agens de change
ni de courtiers en titre-, la M agdelon a cumulé ces deux
professions, avec le plus grand avantage. D ’une p a rt,
elle procuroit aux gens que le besoin entraînoit vers
elle, des fonds que lui confioient des particuliers riches,
dont la cupidité
alloit jusqu’à retirer de leur argent
des intérêts excessifs, mais q u i, par un reste de respect
hu m ain , n’osoient ostensiblement se livrer à ces infâmes
spéculations. D ’autre p a r t , elle alimentoit les passions
les plus dangereuses, en procurant aux pères de fam ille,
et môme à la jeunesse, les moyens de se ruiner et de se
perdre par le jeu, et autres plaisirs funestes. E n outre, les
assignats, les mandats , les rescriptions, les bon s, e t, en un
m ot, toutes les espèces depapier-m onnoie, ont singulière
ment favorisé sa fatale industrie. Dans les commencemens,
on prétend qu’elle étoit infiniment modérée dans le p rix
de scs services : mais quand une fois son crédit a été
é ta b li, que scs opérations sont devenues conséquentes,
elle a insensiblement augmenté la valeur de'ses négocia
tions , travaillé pour son compte personnel, et est par
venue à se créer une existence et une fortune inobiliaire
également remarquables. Son grand talent a consiste à bien
saisir les caractères et la position de ceux qui s’adressoient
à e lle, afin de traiter avec eux sous les conditions les
plus convenables à ses desseins.
�C5 )
T e lle est la personne à. qui le citoyen U rion a eu le
malheur
sources
d e s’a d r e s s e r ,
clans l’espoir d’y trouver des res
m om entanées , et dont la connoissance a opéré
sa m ine en très-peu de temps.
Ce fut à la fin du mois de fructidor an 7 , que le
citoyen U rion commença ses relations avec elle *, et voici
comme elle l’a placé dans une situation à se r u in e r,
sans presque pouvoir s’en défendre. L e citoyen U rion
est naturellement confiant; et la M agdelon est extrême
ment adroite pour inspirer ce sentiment. Environnée d’un
grand crédit pécuniaire, elle persuada facilement au citoyen
U r io n , qu’il p ouvoit s’en reposer sur elle du soin de lui
procurer tout ce qu’il lui faudrait, et qu’il n’auroit lieu
que d’en être satisfait. E lle lui fit entendre qu’il d e v o it,
pour faciliter ses opérations, lui remettre des effets de
diverses valeurs, et h. des dates différentes, et qu’à fur
et mesure qu’elle trouveroit à les n égo cier, elle lui en
remettroit à son tour le p ro d u it, déduction faite de l’agu t et de son droit de commission.
D ’abord, la-M agdelon lui envoyoit quelques secours
d’argent, ou payoit en son acquit quelques créanciers,
sans indiquer de quels effets ces fonds provenoient, l’as
surant qu’en définitif elle lui rendrait un fidèle compte.
M ais cette manière d’opérer lui parut trop lente; elle,
voulut se garnir les mains d’effets considérables dont
elle fut maîtresse, et pour ce la , elle parvint a décider
le citoyen Urion à lui confier, sur des feuilles de divers
timbres, de simples approbations de la valeur des billets
qu’elle se réservoit ensuite de faire écrire et remplir
au profit de ceux qui dévoient fournir les fonds ; de
�,
(
6
}
sorte qu’elle restoit maîtresse des dates , des termes et
de l’indication des préteurs et des banquiers.
A u x échéances des billets , le citoyen U rion n’ayant
p:is de quoi les solder, se vo yoit obligé de proposer
des renouvellemens : la M agdelon lui représentoit la
difficulté de rechei’cher tous ses effets qui étoient dans
les mains des gens d’affaires chargés d’en poursuivre le
payem ent; elle l’invitoit à en faire de n ou veau x, et lui
prom ettoit de retirer les anciens et de les lui rendre.
L e citoyen U rion ne venoit à Clerm ont que par in
tervalles; il ne pouvoit y faire un lon g séjour h cause
de ses travaux d’agriculture, et dans la crainte que sa
famille
ne conçût des inquiétudes sur l’objet de
ses
voyages : la M agdelon en profitoit pour lui faire en
tendre les difficultés de rechercher ses effets, et le renvo yo it toujours avec de
belles promesses qu’elle n’a
jamais effectuées. Lorsque le citoyen U rion témoignoit
du mécontentement, et se plaignoit avec aigreur de ses'
retards dans la remise de ses effets, la M agdelon l’appaisoit à force de protestations ,
ou le
menaçoit de
poursuites violentes pour le payement des billets échus
ou prêts à échoir : elle savoit combien le citoyen U rion
redoutoit un éclat capable de jeter l ’alarme dans sa fa
m ille , et de mettre son épouse au désespoir. E lle pro
fitoit si bien de toutes les circonstances, que le citoyen
U rion a été précipité dans le
gouffre de l’agiotage.
Non-seulement la M agdelon mettoit en circulation les
effets anciens et nouveaux du citoyen U rion ; mais quand
elle rccevoit de lu i, ou pour lu i, diverses sommes pour
éteindre quelques créances, ou pour retirer quelques
�m
3
(7 )
billets, elle n’employoit que peu de chose à cette des
tination, et détournoit le surplus à son profit, ou faisoit
des spéculations sur des marchandises de toutes espèces.
E lle ne fournissoit ' au citoyen U rion ni compte ni ré
cépissé ; et c’est ainsi qu’en d ix - huit mois il s’est v u
écrasé par une nuée de créanciers, dont la plupart n’é toient que des prête-noms de cette habile agioteuse.
A u commencement de l ’an 9 , menacé de toutes parts,
le cit. U rion rom pit‘toutes ses relations avec la M agdelon,
et réclama un compte ou un état définitif de ses négo
ciations; niais il ne put obtenir d’élle autre chose qu’un
bordereau qu’elle dicta au citoyen D u p ic , qui loge et
v it avec elle depuis plusieurs années, comme un véri
table associé.
Cette pièce est" trop importante d ans‘la cause, pour
n’en pas donner à la justice et au public une entière
connoissance.” ' * ...............
.............
E t a t des négociations fa ite s pour M . U rio n , à compter
des 2 vendémiaire an 7 , an 8 , an 9.
U n effet de douze cents liv re s , à six mois
de d ate, pour a g io t ........................................
288 1.
U n effet de deux mille livi’es, à six mois de
d a te ............... .......................................................
( 480
U n effet de seize cents liv r e s , à six mois
de date . . . . . . . . . ..v v . v
Un
...................
384
effet de quatre mille $ à six mois de
d a te ........................................ .............................
720
1,872
�t- y*
D 'a u tr e -part........................
1.
1,872
U n effet de douze cents , à sept mois de
d a te .................................................................... »
336
U n effet de douze cents, à cinq mois de
d a te ......................................................................
240
U n effet de mille livres, à six mois de date.
240
U n effet de deux mille livres, à six mois
de d a t e ................................................................
48°
U n effet de deux mille quatre cents livres,
à six m o is ............................................................
5j 6
U n effet de trois mille , à trois mois de
d a te .......................................................................
270
U n effet de deux mille six cents, à six mois
de d a t e ................................................................
624
U n effet de treize cents , à six mois de
d a te ......................7 ..............................................
312
U n effet de mille livres , à cinq mois de
d a t e . . . . .............................................................
200
U n effet de treize cent cinquante, à six
m o i s ...........................................................................
324
U n effet de mille livres, pour trois mois.
120
U n effet de deux mille livres, pour un an.
720
U n effet de trois mille neuf cents, à six
mois de date....................... .......... .....................
9 °°
U n effet de quatre m ille , à six mois de
d a te ...................................... ...............................
7 2Q
Reçu à Pérignat dix m ille livres en un eflet
payable à quatre m o i s .............................. ........
1,200
9^34
C i-
�3/1
(9)
C i-c o n tr e
...............
.
9,134 1
Reçu dix-liu it mille six cents livres effets,
en foire de S a in t-M a r tin , dont d ix mille
pour trois m ois.................................. , ■900
E t les autres huit mille six cents à six mois
de date. . . ........................................... . . . . . . . . .
1,548
Cet état a été
A v o ir renouvelé deux lettres de change de
\
mille livres chaque, pour trois m ois.............
240
mot sur l’origi
A v o ir reçu
* dans le courant de frimaire seize
nal; et il y »er
m ille six cents livres en effets, dont d ix mille
reur, en plus,
livres à quatre mois d’échéance pour six m ille ,
960
A v o ir renouvelé sur les six m ille six cents
livres qui restent, trois mille neuf cents livres
85 o
à six m ois............................................................
13^34
E
tat
des som m es données -pour votre co m p te , sa v o ir ,
ou à r o u s : .
copié mot pour
j ,
A u citoyen D ardoulier, boulanger, le vingtdeux b ru m aire.................................................... 1,218 1.
A u citoyen C o lla n g e tte -V im a l...................
1,018
A vo u s-m ê m e, cinq mille livres. . .............
5 ,000
E u bons de l’an s e p t, quatre cents liv r e s ..
400
D on n é au domestique, le premier prairial.
1,200
L e sept therm idor, id em ..............................
1,200
A vous-m êm e , m ille livres........................
1,000
11,036
B
dans le total.
�(
IO
D'autre part
.........
.
)
**>036 1
E n voyé à M . M a z in , de R io m .................
1,200
D ro it jusqu’à ce jour de com m ission.........
1,200
Papier à timbre de ch a n g e , ou port de
5o
lettres................................................................
A M . C h alier,
d ix mille l i v r e s ...............
10,000
A u citoyen R o n gier, banquier, m ille livr.
1,000
24,486
D ’autre p art, agio t..............................
1 35634
S o m m e t o t a l e .....................
38,120
A v o ir reçu les som m es ci-après ; savoir :
R eçu onze cent so ix an te-h u it livres........... 1,168 1.
P lu s , neuf cent q u atre-vin g t-q u atre ...........
984
P lu s , quatorze cents livres..........................
1,400
Reçu le jour que nous fûmes à P é r ig n a t..
1,200
V ous avez donné chez la S im o n ...........
1,920
A v o ir x’eçu d’A le r a t......................................
2 , 5 oo
A v o ir d’un ’effet de neuf mille , pour' un
m o i s ...........‘........... V ........... ........................... *
8,760
A v o ir d’un effet de cinq m ille , pour un a n .
3,800
A v o ir reçu'douze cent soixante-six livres.
1,266
A v o i r reçu six m ille liv r e s ..........................
6,000
P lu s , quatre m ille liv r e s .................................
4 )°°o
32,998
'
�C 11 )
O n peut apprécier, par cette p iè ce, le mérite des opé
rations
de M agdeleine
Chabrillat; et l’on
en sentira
encore plus les conséquences, lorsque nous aurons fait sur
cette pièce les remarques convenables.
_
P o u r continuer le récit des faits , le citoyen U rion , se
voyant forcé de proclamer sa ruine, fit assembler ses
créanciers le 8 ventôse an 9 , et consentit avec eux un
traité, le 19 germinal suivant, portant un délai de six
ans pour les payer à raison d’un sixième par chacun an ,
avec intérêts des capitaux entiers, à raison de
5
pour 100,
sans retenue, le tout sous le cautionnement de la dame
A rn o u x
sa b e lle -m è r e , qui fit toutes
les
réserves,
nécessaires.
C e traité fut passé devant notaire , dans le cabinet du
citoyen d’A r tis , où se présentèrent, soit par eux-m êm es,
soit par fondés de p o u v o ir, les créanciers les plus conséquens. Il y en avoit plusieurs dont les créances n’étoient
pas contestables ; mais il y en
avoit aussi
beaucoup
d ’autres dont les titres , quoiqu’apparens , n’étoient pas
à l’abri de la suspicion et de la critique : néanmoins le
danger des poursuites violentes , prise de corps et expro
priation fo rcé e , détermina l’arrangement avec tous.
A
la première assemblée des créanciers, M agdeleine
Chabrillat se présenta, et fut interpellée par quelques
fondés de pouvoir de certains créanciers, de déclai-er
si tous les effets que le citoyen U rion lui avoit confiés,
avoient p a ru , et si elle n’en avoit plus aucun
autre entre
les mains. E lle assura bien positivement n’en avoir plus, et
que tous les billets du citoyen U rion avoient p a ru , sauf
qu’il lui de voit encore 5oo francs, sur quoi il y avoit à
B z
�( 12 )
distraire environ 200 francs -, néanm oins, et m algré cette
déclaration, elle en a mis en circulation postérieurement
entre les mains de plusieurs prête-noms qui en ont exigé
le payement.
Il paroît que dans l’assemblée des créanciers, elle avoit
grand’peur que
toutes ses manœuvres ne fussent dé
couvertes ; car elle employa toutes sortes de ruses et de
promesses pour détourner les créanciers d’accéder à aucun
arrangement ; et de f a it , plusieurs s’étant refusés
au
traité, il a fallu les traduire au tribunal civil de Clerm ont,
et obtenir contre e u x , le
25
thermidor an 9 , un juge
ment contradictoire, qui a déclaré ledit traité commun
avec eux , et quoiqu’ils en aient interjeté a p p e l, ils gar
dent le silence pour plus d’une raison.
Q uoi qu’il en s o it, le citoyen Ui'ion dont la cruelle
position avoit affecté le m o ral, n’a été capable de réflé
chir sur toutes les circonstances de son infortune, qu’après
avoir eu l’esprit dégagé de la crainte de l’emprisonnement
et de l’expropriation forcée. C ’est alors qu’il a senti com
bien son aveugle confiance, et les promesses insidieuses
de M agdeleine Cliabrillat, avoient fini par l’écraser sans
ressource, ainsi que sa malheureuse épouse et ses sept
enfans ; combien ils sont tous devenus victimes du dol
manifeste dont celte femme trop fameuse a usé envers
lui dans toutes ses négociations : et dans l’excès dé sa
d o u leu r, au milieu des chagrins de tous ses parens, il n’a
vu d’autre consolation , d’autres ressources h attendre que
des tribunaux.
Dans cet espoir, le citoyen U rion a rendu plainte ; il
a dénoncé au magistrat de sûreté M agdeleine Chabrillat,
�( 13 )
dite la M agd elo n , courtière et agente de change, comme
coupable envers lui de d o l , escroquerie, infidélité , vo l
et usure; a demandé qu’il fût informé des faits contenus
en sa plainte ; que la prévenue fût condamnée à repré
senter ses livres-journaux ou registres, à rendre compte
de toutes ses opérations relatives aux négociations qu’elle
avoit faites pour lui , conformément à l ’article X de la
loi du 8 mai 17 9 1.
L ’instruction a été faite sur cette plainte , et l ’affaire a
été réglée en police correctionnelle.
Lorsque la cause a été portée à l’audience , plusieurs
tém o in s, appelés pour dire sous le sceau du serment la
vérité tout entière , ont manifesté un esprit fort éloigne
de cette impartialité qui caractérise toute personne qui
aime la justice, et il en est résulté une scène vraiment
scandaleuse. L e citoyen Jeudy du M o n te t, défenseur du
citoyen U r io n , crut qu’il étoit de son ministère de prier
le tribunal de faire expliquer quelques témoins porteurs
d’effets du citoyen U rion , sur le fait de savoir si comme
négocians ils avoient des registres et livres-journaux en
règle, où l’on pût s’assurer de la vérité de la négociation
desdits effets, et fortifier par ce moyen la croyance re
quise dans leurs témoignages. Cette demande n’étoit point
hors les termes d’une défense raisonnable ; cependant elle
irrita tellement le témoin et ses .amis, qu’ils se répandi
rent en propos outrageons contre le citoyen Jeudy ,
occa
sionnèrent un murmure dans la salle d’audience, et mirent
les autres témoins qui restoient à entendre, dans le cas
de c mposer leurs déclarations , . et de ne point parler
avec cette abondance du cœur qui appelle la confiance»
�r
*
( 14 )
Pour comble d’indignités, le citoyen Jeudy étant sorti
un instant de l’audience, trouva dans les corridors les
mêmes individus qui l’insultèrent au point d’en venir aux
m ain s, et d’être forcé de porter aussitôt sa plainte en
séance publique ; ce qui a formé la matière d’une affaire
de police correctionnelle, dont on attend incessamment
le résultat.
Ije citoyen U rion se vo it dans la nécessité de relever
cette circonstance, qui prête beaucoup aux réflexions,
et qui peut conduire le citoyen commissaire du gouver
nement à exam iner, dans sa sagesse, ce que le bien de
la justice semble indiquer pour la perfection de l’instruc
tion et de la discussion de l’affaire, suivant la faculté
que la loi lui a accordée.
C ’est à la suite de ces débats que le tribunal de la police
coi’rectionnelle de Clerinont a ju g é , le 3 fructidor an 10 ,
q u ’il n’étoit pas constant que M agdeleine Chabrillat eût
escroqué le cit. U rion ; en conséquence elle a été ren
voyée de la plainte, et le cit. U rion a été condamné,
envers elle, en 300 fr. de dom m ages-intérêts et en tous
les dépens. C ’est de ce jugement dont il
s’est rendu
appelant.
M agdeleine Cliabrillatpeut-elle se flatter qu’un triomphe
si complet sera de quelque durée, lorsque sa conscience
lui reproche sans cesse le dol manifeste qu’elle a commis
dans toutes ses négociations pour le cit. U rio n , au point
de le ruiner de fond en
com ble, et d’élever sa fortune,
ainsi que celle de ses adhérans, sur les débris de celle
d’un malheureux père de fam ille, dont la femme et les
sept enfans sont au désespoir? L a v e r r a - t - o n encore
�( i
5
)
long-temps se promener dans un w iski élégant, et écla
bousser insolemment les victimes de son infáme agio
tage ? A D ieu ne plaise que toutes ses manœuvres restent
im punies, et que devant des juges sur qui la société se
repose du soin de sa conservation, elle soit reconnue
in n ocen te, quand ses actions criminelles sont marquées
au coin de l’évidence !
M O Y E N S .
Exam inons d’abord ce qu’étoit M agdeleine Chabrillat
à l’époque où le cit. U rion a commencé ses relations
d’affaires avec e lle , et quelles étoient les dispositions
législatives et les règles qu’elle de voit observer dans sa
profession ,
sous
les
diverses
peines
indiquées
pour
chaque espèce de contravention.
Il est de notoriété publique que depuis l’émission du
papier-m onnoie, M agdeleine Chabrillat a fait publique
ment l’état de courtière et d ’agente de change dans la
ville de C lei'm ont, avec d’autant plus de facilité, q u e ,
suivant l’ancien usage, les courtiers des villes où il n’y
a point d’agens de change et de courtiers
cumulent
en
titre,
ordinairement ces deux professions, et que
positivement la ville de C lerm ont, quoique très-com
merçante, n’avoit ni bourse, ni agent de ch a n g e, ni
courtiers en titre de
charges ou
de commissions. Sa
réputation, en ce gen re, étoit telle qu’il n’étoit ques
tion que de la M a g d e lo n , pour toute espèce de négo
ciation , et qu’elle avoit éclipsé tous ceux et celles qui
l’avoient précédée -, elle avoit tellement réussi dans cette
�( 16 )
partie, qu’elle seule avoit fait poser sur sa porte un tableau,
où 011 lisoit en gros caractères :
M agdeleine
C h a b r illa t,
courtière
et m archande
publique.
Cette qualité lui étoit si précieuse, qu’elle la prenoit
même dans ses procès ; et nous en trouvons la preuve
dans un jugement du tribunal de commerce de C lerin o n t, en date du 8 pluviôse an 10 , où elle plaidoit
par le ministère du cito yen . Leblanc fils , son avoué ,
contre
le
citoyen
C liâteau n eu f,
U rion
et dans la
et
le
citoyen
Girard-
signification faite en
cause
d ’appel par son avoué, le 26 prairial an 1 0 , ainsi que
dans tous les autres actes de la procédure et jugemens
du tribunal d’appel, des 13 floréal et a messidor an 10 ,
où elle se,qualifie de courtière et même d’agente de
ch a n g e, ainsi qu’on peut le vérifier dans le jugement
du commerce.
Il ne peut donc y avoir aucune difficulté sur la pro
fession qu’a exercée M agdeleine Chabrillat. Si elle eût
observé les règlemens relatifs à son é ta t, elle ne seroit
point
blâmable d’avoir
donné l ’essor
à
son
activité
industrieuse : mais il paroît qu’elle s’est toujours entre
tenue dans l ’idée que la loi qui déclaroit l’or et l’argent
marchandise, autorisoit implicitement les trafics usuraires,
et rendoit sans effet toute plainte de ce genre ; car elle
s’est livrée aux opérations de l’agiotage avec une licence
effrénée qui a dégénéré en véritable brigandage. Il est
vrai qu’elle n’a été bien souvent que le v il instrument
de gens plus méprisables encore; mais elle 11’cn est que
plus condam nable, parce que sans son m inistère, ils
n’aur oient
�( 17 )
n’auroient pu mettre à profit leurs infâmes spéculations.
Quiconque exerce une profession, doit en connoître et
en remplir
les devoirs, surtout quand le public y est
singulièrement intéressé : et cevn’est pas en vain qu’on
m épi’ise et qu’on viole
les lois qu’il importe
le plus
d’observer.
M agdeleine
Cliabrillat
p o u v o it-e lle ignorer que la
convention nationale avoit prohibé la vente du numé
raire, sous peine de six ans de fers, par son décret
du 11 avril 1 793 ; que s i, par un autre décret du 6 floréal
an 3 , l ’or et l ’argent furent encore déclarés marchan
dises, ce décret fut rapporté dès le 2 prairial
suivant;
que la loi du *13 fructidor, mêm e a n n ée , prononça
contre les agioteurs la peine de deux ans de détention,
avec exposition p u b liq u e, et l’écriteau d’agioteur sur
la poitrine, et encore avec confiscation des biens au
profit de la république ; que l ’article III de cette loi
veut que celui qui sera convaincu
d’avoir vendu des
effets et marchandises, dont, au moment de la vente, il
11e
seroit pas propriétaire, soit aussi déclaré agioteur et
puni comme tel ; qu’enfin si la loi du 3 octobre 1789 a
permis de prêter, h l’aven ir, l’argent à terme fixe, avec
stipulation d’in té rê t, suivant le taux déterminé par la
lo i, sans entendre rien innover aux usages du commerce,
jamais il 11’a pu être permis d’excéder l’usage d’un com
merce honnête,
et d’y substituer le trafic honteux de
l ’usure, que tous les auteurs regardent, avec raison,comme
un v o l, qui ¿(oit puni dans l’ancien régim e plus sévè
rement que le vo l sim ple, et qui se trouve
G
toujours
�(
1
8
}
,
punissable comme v o l, soit à l’égard des auteurs, soit à
l’égard des complices de ce d élit?
M agdeleine Chabrillat p ouvoit-elle ignorer que l’articîe I er. du titre II de l’ordonnance de 1 6 7 3 , défend
aux agens de change de faire le change ou tenir banque
pour leur compte particulier, sous leur nom , ou sous
des noms interposés, directement ou indirectem ent, à
peine d’être privés de leurs charges, et de i , 5 oo francs
d ’amende ; que l’article II défend aussi aux courtiers de
marchandises , de signer des lettres de change par a v a l,
leur permettant seulement de certifier que la signature
des lettres de change est véritable ; que les courtiers,
outre la probité et rhonneur dont ils doivent faire pro
fession avant to u t, doivent aussi avoir attention de ne
prendre pour leur droit de cou rtage, que ce qui leur
appartient légitim em ent,
prendre
et
ce
qu’on
a coutume de
dans l’endi'oit où ils négocient ;
qu’ils sont
sujets, tout comme les agens do change, à la contrainte
par corps pour la restitution des lettres de change, billets
et autres choses qui leur ont été confiées, ou
du prix
qu’ils en ont touché pour le compte de ceux qui les
ont employés ; q u e , suivant l’article II du titre I I I , les
agens de change doivent tenir un livre-journal dans lequel
seront insérées toutes les parties par eux négociées, pour
y avoir recours en cas de contestations ; que les art. I V
et V en prescrivent la forme et
l ’ordre ; que l ’art. X
v e u t , qu’au cas que la partie offrît d’ajouter foi à ces
livres-journaux, la représentation puisse en être ordonnée
pour en extraire ce qui concernera le différent ;
q u e,
�( 19 )
s’ils refusent de les représenter, le juge doit alors déférer
le serment à l’autre partie , suivant M .
Jousse ; que
l ’article X L de l’arrêt du conseil, du 24 septembre 17 2 4 ,
défend aux agens de change, sous peine de concussion,
d ’exiger plus de
5o
sous par m ille livres pour les négo
ciations en ai’gent com ptan t, lettres de ch a n g e , billets au
porteur ou à o rd re, et autres papiei-s commerçables,
savoir, 25 sous payables par l ’acheteur, et les
25
autres par
le vendeur ; que lesdits agens de change et courtiers peuvent
même être poursuivis extraordinairement, dans le cas de
divertissement des deniers ou effets ?
O n en trouve la preuve dans un arrêtdu io fé v r ie r iy 56 ,
cité dans le répertoire de jurispimdence, au m ot agent de
change, qui condamne un agent de change de L y o n à
faire amende honorable, et ensuite à être pendu, pour
avoir médité et exécuté une banqueroute frauduleuse,
en emportant avec l u i , de la ville de L y o n , dont il
s’étoit
absenté, non-seulem ent les papiers, bijoux et
effets qui lui appartenoient, mais encore ceux qu’on lui
avoit remis pour être négociés ; pour avoir prêvariqué
dans lesfo n c tio n s cCagent de change, en détournant à
son profit les sommes q iio n lui avoit confiées ; pour
ria vo ir tenu aucun livre n i règle des opérations q i i i l
J'a i s o it, et avoir fa b r iq u é de fa u s s e s lettres de change.
M agdeleine Chabrillat s’excusera-t-elle sur l’ignorance
où elle étoit des lois anciennes, des règlemens et de la
jurisprudence ? du moins elle devoit connoître les lois
nouvelles; et de fait, quand elle poursuivoit quelqu’ un
en justice, elle faisoit bien voir qu’elle n’ ignoroit rien
G 2
�do cc que les lois anciennes et nouvelles portaient en
faveur de ses prétentions.
Certainement elle ne pou voit ignorer que la loi du 8 mai
1791
, ayant permis à toutes personnes d’exercer la pro
fession de courtier et agent de change, àcertainescondilions,
elle avoit surtout prescrit par l ’article X , auxdits courtiers
et agens de change, de tenir des livres ou registres journaux
en papier tim b ré , cotés et paraphés par un juge de com
merce , écrits par ordre de dates sans aucun blanc et
par articles séparés, contenant toutes les négociations et
opéx*ations de commerce pour lesquelles lesdits courtiers,
agens de change, auront été em ployés, le nom des par
ties contractantes, ainsi que les différentes conditions
convenues entr’elles; et qu’enfin, lesdits courtiers seroient
tenus de d o n n e r, aux parties intéressées, un extrait
signé d’eux desdites négociations et opérations, dans le
même jour où elles auront été arrêtées ; que c’étoit lu
véritablem ent le renouvellement des anciens règlem ens,
q u i, loin d’avoir cessé d’être obligatoires et exécutoires,
ont été continués en vigueur par le décret du 27 juillet
17 9 2 , qui porte même que les règlem ens, quoique non
enregistrés aux ci-devant parlem eus, auront leur plein
et entier eifet pour tous les engagemens et négociations
qui ont eu lieu sur la foi de leur exécution ; que l’art. V ,
titre II de la loi du 28 vendémiaire an 4 , porte qu’il
ne
pourra
être négocié
aucun papier sur la place ,
qu’entre négocians patentés et ayant maison de com
merce et domicile fixe ; qu’il est défendu à tout agent
de ch an ge, sous peine de destitution, de faire aucune
�C 21 )
opération de banque avec toute personne qui ne réu
nirait pas ces conditions ; que l ’article V I porte , que
tout agent de change sera tenu, au moment même où
il
aura arrêté
la négociation de lettres de
change ,
billets à ordre ou autres effets de commerce, de donner
sur le cham p, au vendeur et au preneu r, une double
note signée de l u i , dans laquelle il spécifiera le nom
de la personne de qui il a pris le p a p ie r ,'le nom de
celle pour qui il l ’a engagé , le p rix auquel il a été
ve n d u , et la quotité de la somme négociée; cette note
sera admise en
justice comme pièce au procès ; que
l ’article V I I punit l’agent de change de la destitution,
pour con travention à-la disposition précédente, et charge
les tribunaux de commerce de pourvoir de suite à son
remplacement.
M agdeleine
Chabrillat
ne
s’est
vo ulu
conformer
à aucun règlem ent, soit ancien soit moderne ; elle n’a
rien fait de ce qui étoit prescrit aux gens de sa profes
sion, et n’a mis aucun frein à son ambition: elle a méprisé
toutes les lo is, violé toutes les règ les, et cependant est
parvenue à sortir du tribunal de Clermont avec 300 fr.
de dommages-intérêts
contre le citoyen U r io n , pour
avoir osé, dans son infortune, lui imputer sa ruine et
lui reprocher sa conduite. L a personne la plus honnête,
la moins susceptible de reproches, n’auroit pas été traitée
avec plus de faveur.
Il est difficile de comprendre comment
cette
femme
seroit innocente, lorsqu’il est évident qu’elle a encouru
p o u r. ses contraventions
multipliées aux diverses dispositions des lois et regle-
des peines de plusieurs espèces,
mens relatifs h sa profession.
�D ’abord elle a déclaré n’avoir jamais tenu de livres
ni de registres de ses négociations, quoiqu’elle soit con
venue d’avoir fait des opérations pour des sommes im
menses et pour des milliers de personnes. Cette seule
contravention à l’article I I , tit. III de l’ordonnance de
I ^73? ‘l l’article X
de la loi du 8 mai 1 7 9 1 , l ’expo-
soit à la poursuite extraordinaire; et suivant M . Jousse
sur l’article X
du titre III de l’ordonnance du com
merce , le citoyen U rion devoit au moins être pris à son
serment sur les sommes qu’il répétoit, du moment qu’il
offroit d’ajouter foi ù ses livres jou rn aux, et que pour se
dispenser de les représenter, ellesoutenoit n’en avoir ja
mais eu ; d’autant qu’une pareille déclaration indique
un dol manifeste, et mérite p u n ition , comme nous l’a
vons remarqué dans l ’arrêt de
précité.
M agdeleine Chabrillat pouvoit-elle donc en être quitte
pour dire qu’elle n’avoit point tenu de livres ni de re
gistres ? L e citoyen U rion n’avoit-il pas entre les mains
une pièce im portante, capable de la condamner?
Etoit-ce vainement qu’elle lui avoit donné un bor
dereau de ses négociations, dçpuis le 2 vendémiaire an 7 ,
temps auquel leurs relations ont commencé, jusqu’en l’an 9 ,
époque de leur rupture ? N ’a-t-elle pas reconnu que ce
bordereau avoit été écrit par le citoyen D u p ic , sous sa
dictée, et dans sa cham bre, pour faire connoîtrc au
citoyen U rion et à sa fam ille, sa véritable situation?
A
défaut de représentation de ses liv re s , n’est-il pas
naturel de se fixer sur la seule pièce qui peut éclairer
la justice sur la légitim ité des plaintes du citoyenU i’ion,
cl qui sert de pièce de conviction au procès?
�'¿ 6 $
( 23 )
E n se fixant sur ce bord ereau, l’on vo it dans la pre
mière série, que M agdeleine Chabrillat a négocié pour
83,950 francs d’effets du citoyenU rion, depuis trois jusqu’à
six moisjde d ate, avec un agiot de 13,634 francs ; qu’elle n’a
p orté en renouvellement que 5,900 fr. de billets, et qu’ainsi
elle reste comptable et rétentionnaire d e .........
78,060 f.
Q u e , dans la troisième série , elle reconnoît
avoir reçu en valeur réelle d’argent, o u p ro venans d’effets non compris dans la première
série............................................................. ..
T o t a l................................................................
3 2)99 ^
111,048 f.
Q u e , dans la seconde série, elle ne justifie
avoir employé pour le citoyen U rion que la
somme de 24,486 francs, y compris encore
1,200 francs pour son droit de commission sur
les effets par elle négociés, et
5o
francs pour
le papier timbré des billets, et pour ports de
lettres, c i ............................................................
24,486
Q u i, déduits des sommes précédentes, p ré
sentent un reliquat d e ......................................
A
86,562
quoi il faut nécessairement ajouter les
effets du cit. G e rm a in x , que le cit. U rion a
été contraint de p ayer, en vertu du juge
m ent du tribunal d’appel, rendu en messidor
an 10 , et qu’elle n’a point portés dans son
bordereau, quoique montant à .....................
10,000
P lu s , les effets du citoyen G u y o t, qu’elle
,n’a pas non plus portés dans son bordereau,
quoique montant à ..........................................
E t alors la M agdelon red oit,.....................
26,000
122,562 f.
�r*
i H )
E t comme on doit bien être convaincu que mal à
propos elle porte en dépense 13,634 fr. d’agiot, qu’elle
n’a jamais payé aux prêteurs de fonds, attendu que l’agiot
se prend toujours en dedans, et sur la valeur des effets,
il est juste de retrancher cct article de faux emploi dans
la dépense, et même de réduire l’article de sa commis
sion, qui présente une concussion révoltante.
P ou r mettre de côté ce bordereau, la M agdelon a dit
qui ne contenoit point
toutes ses négociations, et qu’elle ne l’avoit donnée au
que c’étoit une pièce informe
citoyen U rion.que pour se justifier envers sa famille. L a
justice ne peut se contenter de pareilles raisons; et de
deux choses l’u n e , ou la M agdelon doit représenter des
livres en règle, ou son bordereau doit en tenir lieu.
C ’est une chose bien étrange, que cette femme ait per
suadé aux premiers juges qu’elle n’étoit tenue d’avoir
ni de représenter aucun livre de ses négociations , et
qu’encore elle soit parvenue à écarter son bordereau et
toutes les conséquences qui en dérivent.
Sa défense a consisté à soutenir qu’elle n’avoit point
été agente de change; que cette fonction étant p ubliqu e,
n’appartient point à son sexe; qu’elle n’étoit que simple
commissionnaire, nullement soumise aux lois et règlemens relatifs aux agens de change et courtiers. Il est facile
de répondre h ce moyen.
O ïl ne peut se jouer des qualités qui ont mis le public
i\ même de contracter avec nous; et si quelque citoyen,
se disant publiquement notaire, ou chirurgien, ou huis
sier, inetloit sur sa porte une
pareille indication, il
seroit responsable du tort qu’il auroit lait aux particuliers
qui
�, / 25 )
qui se seroient adressés à l u i , dans la croyance qu’il étoifc
ce qu’il paroissoit être. L e dol n’est supportable en au
cune matière, et mérite toujours punition. M ais ici la
M agdelon a pris et a travaillé en une qualité qu’elle
p ouvoit avoir; car dans les villes où il n’y a pas de cour*
tiers et d’agens de change en titre ni commission, chacun
peut cumuler ces fonctions, h la charge d’en remplir les
devoirs. D ’ailleurs, quand elle ne seroit considérée que
comme simple commissionnaire ou m andataire, elle ne
seroit pas moins dans le cas d’être traitée comme cour
tière faisant aussi le ch a n g e, puisque M . Jousse, sur
l ’article II du titre II de Fordonnance de 1 6 7 3 , dit que
les courtiers ne sont autre chose que des mandataires
q u i, moyennant un certain profit, facilitent les échanges
du commerce.
Il est véritablement étonnant qu’avec des distinctions
illusoires , l ’intimée ait pu échapper à l’action
d’une
victim e de son trafic ; car il y a lieu de lui faire ce
dilemme : O u vous étiez coui'tière et agente de change,
et dès-lors soumise aux obligations de cette profession ;
ou si vous n’étiez ni l’une ni l’au tre, vous avez trom pé
les citoyens par une fausse qualité, et dès-lors vous restez
soumise aux peines portées par l’article X X X V
de la
loi du 22 juillet 1791 , sur la police correctionnelle. Il
y a p lu s , c’est qu’alors elle seroit de même dans le cas
de l’application des peines décernées contre les agioteurs,
par la loi du 13 fructidor an 3 ; car l’article X V I I du
chapitre 1er. d e là loi du 28 vendémiaire an 4 , ordonne
que ceux q u i } sans être agens de ch an ge, préteroieut
D
�r
\
(
leur m inistère, et contreviendraient à un article quel
2
6
}
conque du présent d écre t, seront punis de toutes les
peines décernées contre les agioteurs : or , il est certain
qu’elle seroit contrevenue aux articles I I , V , Y I du
chapitre II de cette loi. A in si l’intimée n’a aucun bénéfice
à donner le change sur sa véritable qualité.
Les courtiers et agens de change sont, à la v é r ité ,
considérés comme personnes p u bliqu es, et les hommes
seuls sont pourvus des charges et commissions de cette
profession, dans les villes où le gouvernement croit devoir
les placer ; mais dans les villes où il 11’y en avoit p a s ,
comme à Clerm ont, les femmes ont toujours fait le cour
tage , et la M agdelon y a joint l ’agence du ch an ge, avec
une vogue et un crédit qui ne lui permettent pas de se
jouer de ses qualités.
E lle a soutenu qu’au reste, quand elle seroit comptable
envers le citoyen U r io n , il n’auroit contr’elle qu’ une action
civile, et n’auroit point été autorisé à la traduire dans un
tribunal de police correctionnelle.
C ’est encore une erreur facile à réfuter.
M agdeleine Chabrillat pourrait tenir ce langage, si sa
conduite n’étoit pas pleine d ’artifice, si le dol n’eût pas
accompagné toutes ses opérations; mais outre que sa
déclaration de n’avoir pas tenu des liv r e s , son refus de
les représenter, son bordereau et sa manière de négo
cier pour le citoyen U rio n , sont des preuves frappantes
de ses
d élits, ils deviendront
encore
plus sensibles,
lo rsq u e, par la discussion des tém oignages, nous éta
blirons, i ° . qu’elle a abusé indignement de la confiance
�C 27 )
du citoyen U rio n ; 2°. qu’elle a détourné ¿1 son profit les
sommes provenantes de ses effets, et l’argent qu’il lui
adressoit pour éteindre scs premiers b ille ts ;-3 0. qu’elle
a commis des infidélités notables dans ses négociations;
4*. qu’elle a commis l’agiotage avec une licence effrénée,
qu’011 peut appeler un brigandage et un vo l des plus
odieux ;
5*. qu’elle
est rétentionnaire par
fraude
et
mauvaise foi des sommes considérables qu’il r é p è te , et
que , sous tous les rapports, 'elle ne peut échapper à une
condamnation que l ’intérêt public et particulier nécessi
tent deluiS lo n g t e m p s . >
*■*AWv.*-'
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- o ^ -le citoyen HDnon ne sait piis 'ôrPcttn?- st~les t tp i oms
^seront ^enteYiÏÏus clë îïôiWëait;, ‘o^î M^les*
envD^ées
aift^üwMpaî c^iûoin(¿^g^n^s^il ^ ^ b j e t d e l’^exajnen ¿ fitique des opérations de la partie adverse. |?ans fous les cas,
il espère détruire pour jamais la prêtention‘^ ?a^ a j^fagàeI011 de se faire réputer innocente par les tribunaux, et
que bientôt il n’y aura qu’ une v o ix sur son com pte, malgré
le trop fatal préjugé du jugement dont est appel.
U R I O N .
P . S. A l’instant on apprend qu’ un mandat d’amener a
été décerné par le directeur du jury- du tribunal spé
cial du département de la Seine , contre Magdeleine C lia-
�J •
( 28 )
b rillâ t, com m e p réven u e de distribution de fau x b o n s,
à ..........et qu ’en ayant été avertie d’avan ce, elle a pris
un passe-port p ou r s’é v a d e r, qu oique certaines personnes
la croient cach ée dans C lerm ont.
U R I O N .
\
C. L . R o u s s e a u , ju risco n su lte.
M a l l e t , avoué.
frffliHÎm t «U {{f HMfPbw*. éu£tm+dt
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R I O M ,
De l'imprimerie de L A N D R IO T , seul imprimeur du tribunal
d'appel;
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Urion, Michel-Amable. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Urion
C.L. Rousseau
Mallet
Subject
The topic of the resource
femme courtière et agente de change
agiotage
usure
assemblées de créanciers
femme commerçante
contravention aux règles de la profession
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Michel-Amable Urion, demeurant à Riom, plaintif, et appelant d'un jugement rendu par le tribunal de la police correctionnelle de l'arrondissement de Clermont, le 3 fructidor an 10 ; Contre Magdeleine Chabrillat, courtière et agente de change, habitant à Clermont-Ferrand, prévenue d'escroquerie, de dol, d'infidélité, de vol et d'usure, défenderesse et intimée. En présence du commissaire du gouvernement.
Annotations manuscrites qui rejette la requête d'appel et déclare qu'il y a lieu d'accorder des dommages et intérêts à Madeleine Chabrillat.
Livre de comptes.
Table Godemel : agents de change : agiotage et trafic usuraire contre les dispositions contre les dispositions des lois prohibant la vente du numéraire et prescrivant les obligations que doivent remplir les agents de change et courtiers.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1798-Circa 1803
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0920
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0921
BCU_Factums_G0922
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53081/BCU_Factums_G0920.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agiotage
assemblées de créanciers
commerçants
contravention aux règles de la profession
femme commerçante
Femme courtière et agente de change
Usure
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53082/BCU_Factums_G0921.pdf
891b1eddeed148997823979f56122bbb
PDF Text
Text
CONSULTATION.
L e C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a v u le m ém oire im prim é , ,
répandu par M ich el-A m a b le U r io n , ancien m a g istra t, dem eu
rant à R io m , appelant d’un jugem ent rendu par le tribunal de
police correctionnelle de C le rm o n t, le 3 fructidor an 10 ,
Contre M agdelaine C h abrillat , m archande de la v ille de
C lerm o n t-F erran d , intim ée ;
E t les pièces relatives à cette affaire, qui lu i ont été com m u
niquées ;
que la plainte rendue par le citoyen U rio n ,
contre M agdelaine C h abrillat , est une algarade qui ne serait
que rid ic u le , si elle n’était pas une diffam ation atroce. L e tribunal
E s t
d’ a v i s
correctionnel de Clerm ont en a fait justice , et elle n’aura pas
un m eilleur sort au tribunal d’a p p e l, quand m êm e la fatalité
des circonstances réduirait ladite C h abrillat à l ’im possibilité de
faire entendre sa défense : car l’absence évidente de tout d é lit,
dans les négociations q u ’elle a exécutées par com m ission pour
le p la ig n a n t, lu i garantissent la confirm alion du jugem ent qui
l ' a acquittée, avec 3 oo francs de dom m ages-intérêts. L es tribu
naux ne s’arm ent pas contre des chim ères , lors m êm e qu'ils
prononcent par contumace.
A
�co
A P E R Ça U
S O M M A IR E
DES
FAITS.
D e quoi s’a g i r - i l clans cette alïairc? U n ancien m agistrat,
ruiné par des spéculations m al conçues, sans être gue'ri de sa
m anie, spécule aujourd’hui sur les tracasseries judiciaires et les
procès, pour réparer sa Fortune délabrée. E n essayant de vendre
le repos de ceux que leur malheureuse étoile a mis en relations
d ’intérêts avec l u i , le citoyen Urion a marché d’un pas rapide
vers sa ruine, par des spéculations.
Sur le commerce des immeubles , par lequel il espérait arriver
à la fortune sans avances , il spéculait sur les rêveries acadé
miques des agriculteurs de c a b in e ts, qui l’ont souvent laissé à
découvert de ses mises de fonds , loin de tripler scs revenus ,
comme il s’en était llatté; il spéculait sur la loterie, qui lu i
promettait des m illio n s, et ne lui a valu que des regrets.
Sa seule ressource, pour alimenter des spéculations si rui
neuses , a été celle des emprunts.
A in s i, il emprunte jusqu’aux irais de contrats pour ses acqui
sitions; il emprunte pour les premiers paieincns ù courts délais;
il emprunte pour cultiver dans le genre systématique; il em
prunte enfin pour se mettre à la poursuite des ternes et des quaternes.
E t comment emprunte-t-il ? II n ’y a pas deux manières aujour
d’hui : lettres de change à trois ou quatre mois de daLe; signa
tures m ultipliées; agiot immodéré.
Il jetait donc , sur la place , des lettres de change à courte
échéance, endossées, tantôt par la demoiselle A r n o u x , sa bellesœ ur, tantôt par le citoyen G i r a r d - Laba tisse , son 'beau-frère ;
o u , dans les premiers teins, avec sa simple signature : toujours
le nom du porteur en blanc. T r o u v e z - moi de l ’argent à tout
p rix sur ces ellets , d is a it- il à la Glnibrillat, lorsqu’il voulait
les négocier à G e rm o n t.
|La L h a b n lla l remplissait ses v u e s , moyennant un droit de
�O te
°
- C 3 )
commission convenu, et souvent elle donnait sa signature, pour
la tranquillité des prêteurs : à l ’échénnoe, il fallait , ou p a y e r ,
ou renouveler, ou faire des revircmens avec de nouveaux prê
teurs, et rassasier l ’agiot. Rarement le citoyen Urion avait des
fonds à sa disposition pour ses opérations ; et d’ailleurs des
besoins renaissans commandaient de nouveaux emprunts : nou
velle émission d ’effets négociables , nouvel agiot , nouveaux
frais de commissiôn. L a houle grossissait à mesure, ainsi qu’elle
roulait sur l’agiot; et en deux années et quelques mois de tems,
depuis vendémiaire' an 7 jusqu’en pluviôse an 9 , elle fut si
c h a r g é e , q u ’elle s’arrêta dans sa course.
L a catastrophe approche ; l’embarras des a flaires de l’em
prunteur U rion s’an n o n ce; les protêts, faute de paiement ou
d ’acceptation, se multiplient : alors il faut en venir aux remèdes
extrêmes. L es créanciers sont assemblés ; le bilan est déroulé :
le dénouement fut un traité d ’atermoiement, signé avec le plus
grand nombre des créanciers, le 19 germinal an 9 , et hom o
logué avec les refusans, le
suivant.
L à nous voyons le tableau de la situation du citoyen Urion :
la masse de ses dettes est g ra ve; mais il s’ en faut bien qu’elles
aient toutes été créées par l’entremise de la Ghabrillat. On 11’en
trouve dans cette origine que pour 98,110 livres en capital, inté
rêts et frais. Urion les a toutes reconnues légi'im es; et il est r&m arquable que la Ghabrillat ne figure dans l’état que pour une
modique somme de 5 co livres, résultat d’un arrêté général de
com pte, par lequel il lui fut souscrit un effet au terme de sa
mission , le 2 pluviôse an 9. T out paraissait terminé enlr’elle
et le citoyen U rio n , par le jugement d’homologation du traité
d'atermoiement que provoqua contr’elie ce débiteur , pour la
forcer à s’y soumettre; cependant son esprit inquiet ne la bissa
pas long-teins en repos. L e 25 lrimaire an 10 , il imagina de se
présenter à la justice, comme une victime de Vescroquerie la plus
tilié n é e de cette commissionnaire, et rendit plainte contr’elle :
.mais l’impossibilité de donner du corps à des fantômes de délits,
A 2
fï
�(4)
que son imagination avait créés, fit bientôt abandonner cettepreinière attaque; et il essaya de se ven ger de ses échecs, en faisant
lin procès civil à la C h a b rilla t, au sujet de deux lettres de change,
montant ensemble à 10,000 livres, dont il voulut la rendre ga
rante envers le cit. G erm aix , prêteur ; il succomba au tribunal
de com m erce, il succomba encore au tribunal d ’appel.
L a défaite l ’irrita : il jura de nouveau la perte de la Chabrillat,
et il revient à sa plainte du mois de frimaire , q u ’il renouvelle
le 24 messidor. L ’instruction criminelle est faite ; l ’aiFaire est ré
glée et renvoyée à la police correctionnelle ; on en vient à l’au
dience; une nuée de témoins paraît sur l’ horison ; mais point de
charges : en conséquence un jugement du 3 fructidor la renvoie
de la plainte avec 3 oo livres de doramages-intérêts applicables
aux pauvres, de son consentement. T e l est le jugement dont la
révision est soumise au tribunal crim inel, comme juge d’appel
des tribunaux correctionnels; mais quelle sera l’issue des nou
veaux efforts de l’appelant ? la honte d’une nouvelle défaite.
Nous avons d i t , que dans cette bruyante affaire, il 11’y a que
de vaines déclamations , et point de délits ; nous allons le
prouver.
§• T-er
P oin t d'escroquerie.
L a loi du 7 frimaire an 2 , qui contient une rédaction nouvelle
de l’article 3 5 , section 4 de celle du 22 juillet 1 7 9 1 , définit
l ’escroquerie, et nous y voyons qu’elle est le crime de ceux qui
«pa r d o l , et à l’aide t!e faux noms, pr i s v e r b a l e m e n t et sans
» signature ;
« Ou de fausses entreprises,
>1 Ou d’un crédit Imaginaire ;
» Ou d’espérances ou de craintes chimériques ;
» auraient abusé de la crédulité de quelques personnes, et es
croqué luut ou partie de leur fortune ».
�C S ;
O r , qu’ont de commun de pareilles manœuvres de la ruse,
de la duplicité et de la chavlatanerie, avec M agdelaine Chabrillat ? E lle a été l’intermédiaire entre les prêteurs d’argent et
l’emprunteur Uüion , pour lui- procurer des fonds; et elle n ’a été
que cela. Ce n ’ est pas à l ’aide d’un faux nom qu’elle a surpris la
confiance; ce n’est pas non plus en alléguant de fausses entre
prises, ni un crédit imaginaire. Quel crédit faut-il pour trouver
de l’argent avec de bonnes signatures, et un intérêt au cours de
la place? Il ne s’agit pas de remuer des puissances; et certes,
si le crédit qui procure de l’argent n’avait été qu’ une jactance
imaginaire dans la bouche de la Ch abrillat, elle n’aurait pas à
se justifier aujourd’hui; car elle n’aurait pas placé les effets de
l ’emprunteur Urion.
Est-elle allée le chercher à R io m , pour lui soutirer ses effets
à l’aide d’espérances ou de craintes chimériques? Non; c ’e s t lui
qui est venu Ja chercher à Clerm ont, pour employer son active
entremise auprès des prêteurs d ’argent. Il n y avait dans une
négociation de ce genre, ni espérances, ni craintes chimériques
à mettre en jeu.
On me faisait espérer , dit-il , qu’en échange de mes effets ,
j ’obtiendrais de l’argent. Cette espérance n’était pas chimérique ,
et n’a pas été trompée.
On me faisait craindre , lorsque mes effets étaient échus, que
j ’allais être vivement poursuivi, si je ne me pressais pas de renou
ve le r ou de couvrir la m êm edettepar un nouvel emprunt. Certes,
ces craintes n’étaient pas une chimère non p lu s, c a rie s porteurs
de lettres de change ne s’endorment pas au terme.
- Concluons donc, que rien ne ressemble moins à /’escroquerie
que les relations de la Chabrillat avec A m u b le Urion.
A 3
�(6)
§ IL
•
’
♦
t
P o in t de vol n i d'infidélité.
Des vols ! L a Chabrillat aurait-elle donc enlevé furtivement
la bourse d’A m a b le Urion , 011 son porte-feuille ? N o n , on n’a
garde de lui imputer de telles bassesses. Mais A m a b le Urion lui
dit : Lors du renouvellement, c’est-à-dire, lors de l’échange des
anciens effets que j ’avais souscrits, contre de nouveaux, vous avez
retiré les anciens, vous les avez gardés , vous vous les êtes ap
propriés sous des noms empruntés; double emploi de créance
pour le même prêt, vol manifeste: V o ilà une imputation atroce
p a r sa fausseté, et p a r l a mauvaise foi avec laquelle elle est faite.
1.° L e s anciens effets , tirés par le cit. U rio n , n’ont pas été
retenus par la Chabrillat , puisque Urion a déclaré lui-même,
dans les mémoires manuscrits joints à sa production , q u ’il est
p o rte u r de 74,55o-liv. de ces effets anciens, retirés en payant
ou en renouvelant ; et que dans le nombre il y en a pour 40,3^0
liv. endossés, et conséquemment ojjicieuscmcnt cautionnés par
D u p ic et par la Chabrillat ;
2.° L a Chabrillat n’aurait pas pu , quand elle l’aurait voulu ,
faire tourner les effets anciens à son profit , en les retenant,
puisqu’ils étaient remplis des noms des prêteurs;
3 .° Elle n’en a pas profilé de fa it , ni directement, ni indi
rectement, puisque de tous les créanciers qui ont p a ru , soit au
traité d’atermoiement, soit dans le jugement d’homologation, i l
n ’en est aucun qui soit porteur d ’aucun e ffet, et qu’ils fondaient
tous leurs créances sur des lettres de change ou r é c e m m e n t échues,
ou qui ne Fêlaient pas e n c o re , et n ’a v a i e n t été protestées qu’à
défaut d’acceptation. Com m ent retenir sou indignation a la vue
d ’une imputation , dont la calomnie artificieuse et réfléchie, est
si victorieusement démentie par le fait et par le témoiguage
propre de celui qui se l’est permise ?
�(7 )
- w
C e n’ est pas avec plus de réflexion ni de fondement , qu’oïl
reproche à la Chabrillat un second genre d’infidélité. A entendre
A ra a b le U r io n , il délivrait des effets par ton-ens pour se pro
curer du numéraire ; et il ne retirait de l’argent en retour que
goutte à goutte. A peine a-t-il touché 24 à 25 milles fr. effectifs,
sur le produit de 110 ou 112 milles fr. d’effets actifs ou passifs,
qu’il a négociés par l’entremise de la C h a b rilla t, dans le courant
des années 7 et 8. L a Chabrillat a retenu le reste, c’est-à-dire,
qu’elle a retenu plus des trois quarts de la recette.
O11 ne veut pas être cru quand on exagère de cette force ; mais
aussi A m a b le Urion 11e prétend-il pas qu’on ajoute foi à ses fables,
lorsqu’il dément son mémoire public par ses mémoires manuscrits
joints au procès. T o u s les effets qu’il avait mis en circulation,
en l’an 7 et en l’an 8, avaient dû être renouvelés et même plu
sieurs fois pour la plupart ; aussi il nous apprend qu’il eu a en
ses mains pour 74,550 liv. ; qu’il en a égaré pour 6,000 livres
retirés de Guiot - Gauthier ; et il en réclame pour 10,000 livres >
encore que la Chabrillat était, dit-il, en retard de lui remettre.
O r , qui croira qu’il eût relire ou renouvelé cette masse d’effets,
sans demander compte à la Chabrillat de leur p r o d u it, s’il ne
l ’avait pas reçu à mesure qu’ils avaient été négociés? Qui croiia
q u ’il eût fourni de nouveaux effets pour renouveler les anciens,
ou des fonds pour les retirer , si la Chabrillat avait retenu les
trois quarts et davantage , des sommes dont les effets anciens le
constituaient débiteur? N ’aurait-il pas rompu avec elle, et jeté
les hauts cris ? Bien loin de là , le 2 pluviôse an g , au terme
de toutes les négociations, il compte avec elle ; il se reconnaît
débiteur de 5 oo fr. pour so ld e , et il souscrit un effet de cette
somme, et il fait déclarer l’atermoiement général fait avec les
trois quarts des créanciers, commun a v e c elle pour cette c r é a n c e ,
par le jugement d’homologation.
E n voilà trop pour confondre la calomnie et pour détruire
jusqu’au soupçon des infidélités absurdes, dont elle a tissu son
roman injurieux.
*
�%v' »
(8)
§. I I I .
Usure.
A p p are m m e n t qu’ A m a b le U rio n , quanti il parle d’usure, veut
pai-ler de l ’intérêt excessif que les préteurs exigent des emprun
teurs , depuis la dispnrution du papier-monnaie, et le retour du
n um éraire; mais sur ce point-là, qu’il s’en prenne donc aux
créanciers avec lesquels il a atermoyé , a v e c lesquels il a fait
homologuer le contrat d’aterm oiement; car ce sont eux qui ont
exigé et reçu l’intérêt exorbitant qui excite sa vocifération. Quant
à la ChabriJlat, elle n’a été que l’agent intermédiaire des négo
ciations. A propos de quoi la punirait-on de la cupidité des prê
teurs , si elle était criminelle; mais d ’ailleurs les prêteurs ne sont
pas plus à punir que la commissionnaire, quoique puisse dire
A m a b le U r io n . L ’argent est toujours marchandise en ce sens que
le taux de l’intérêt est absolument libre, et dépend uniquement
tles conventions. C ’est un malheur p u b lic , sans doute, que la
cupidité en abuse , mais la loi permet et ne punit point.
On cite à pure perte au reste, et d ’iiilleurs à contre-sens, les
décrets du n avril 1793, 2 prairial an 3 , et i 3 fructidor suivant.
Ces lois n’ont d’application qu’à- la vente du numéraire m étal
lique contre assignats, qui étaient tombés alors dans un discrédit
total ; et elles n’ont aucune sorte de rapport à l’intérêt ni de l ’ar
gent , ni des assignats.
D ’ailleurs, ce fut la loi du 2Ü vendémiaire an 4 , qui finit le
dernier état de la législation commerc iale, sur la vente du num é
raire contre assignats, et ce commerce 11e fut pas p ro h ib é , il
«fut seulement régularisé.
A u reste, ce sont là des recherches et des souvenirs purement
épisodiques, et totalement étrangers au taux de l'intérêt. Oublions
donc encore l’accusation d’usure que l’on cherche à étayei- sili
ces lo is , el passons au dernier chef d'inculpation.-■
�D éfaut de registres des négociations. Contravention aux lois
sur l'achat et la vente du numéraire.
V o u s avez exercé les fonctions d’agent de change , puisque
vous avez négocié des effets de commerce , dit-on , encore à la
Chabrillat: vous deviez donc en remplir les obligations , et tenir
registre de toutes les négociations qui s’opèrent par leur entre
mise: vous n ’en avez tenu a u cu n , de votre propre a v e u , vous
voilà donc coupable,
Plusieurs Réponses.
1.° C e ne sont point des fonctions d ’agent de change, que la
Chabrillat a faites, car les fonctions des agens de change ne
sont pas de procurer des prêteurs sur lettres de change à un
intérêt convenu; elles consistent uniquement dans les places de
co m m e rce , où il y en a d’établis, ainsi qu’à des bourses, comme
à Paris , L y o n , B ordeaux, M arseille, e tc., ù faire les négocia
tions des lettres de change sur l’étranger. On peut s’en convaincre
en lisant la loi du 28 vendémiaire an 4 , invoquée par A m a b le
Urion. Ce n ’est que par extension qu’on y ajoute les négociations
des lettres de change de place en place, dans l’intérieur, sur
les villes de com m erce où il y a boui-sc. L e but de ce règlement
de police commerciale est de fixer le cours du change pour
chaque pays et pour chaque place , mais sans aucun rapport
quelconqueaux prêts d’argent, qui se font sur lettres de c h a n g e ,
tirées par l’emprunteur. O r , c’est uniquement de ce dernier
genre de négociation que la Chabrillat s’est mêlée; d’où il suit
que les régletnens relatifs aux agens de chan ge, lui ¿ont com
plètement étrangers.
2.° Q u ’on lise et qu’on relise la loi citée, on ne verra dans
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(10 )
aucun de ses articles, l’obligation imposée aux agens de change
qu ’elle c r é a , en supprimant leurs prédécesseurs, de tenir in
dividuellement aucun registre des négociations qui s’opéraient
par leur entrem ise, sous aucune peine quelconque; la loi avait
pourvu par d’autres m o y e n s , à la sûreté des négociations.
E n fin le citoyen Urion ne s’entend pas lui-même lorsqu’il
reproche à la C h a b rilla t, comme un d é l i t , de l ’avoir se rv i,
dans l ’échange de ses effets contre du numéraire : et c’est un
c r im e , à ses y e u x , qui mérite la peine des fers. P our toute
réponse , nous le renverrons aux lois qu ’il invoque , et nottamment à celle du 28 vendémiaire an 4 , qui est la dernière
de toutes. Q u ’il les lise et les relise, il y verra que la vente
de l ’argent contre des assignats était réputée agiotage , lors
q u ’elle se faisait à terme ou à prime. Il y verra qu’aucune
vente de ce genre ne pourrait avoir lieu qu au com ptant ,
sous les peines les plus sévères. Mais q u ’a cette sévérité de
commun , encore une f o i s , avec les emprunts faits par la
C h a b rillat,'su r lettres de c h a n g e , pour le compte du citoyen
Urion ?
A in si s’évanouissent tous les délits imaginaires dont A m able
U rion a vo u lu noircir la réputation de la Chabrillat. Son in
nocence de tout crime caractérisé tel par la l o i , reste; et par
conséquent la confirmation du jugem ent du 3 fructidor, qui
l ’a p ro cla m é e , ne saurait faire la matière d ’un doute.
Délibéré à C lerm ont-Ferrand , par les jurisconsultes sous
signés , le premier nivôse , an onze. ,
BERGIER , ABRAHAM.
1
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU P A L A IS , CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Urion, Michel-Amable. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Abraham
Subject
The topic of the resource
femme courtière et agente de change
agiotage
usure
assemblées de créanciers
femme commerçante
contravention aux règles de la profession
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation. Le conseil soussigné, qui a vu le mémoire imprimé, répandu par Michel-Amable Urion, ancien magistrat, demeurant à Riom, appelant d'un jugement rendu par le tribunal de police correctionnelle de Clermont, le 3 fructidor an 10 ; Contre Magdelaine Chabrillat, marchande de la ville de Clermont-Ferrand, intimée ; Et les pièces relatives à cette affaire, qui lui ont été communiquées ; Est d'avis que la plainte rendue par le citoyen Urion, contre Magdelaine Chabrillat, est une algarade qui ne serait que ridicule, si elle n'était pas une diffamation atroce. Le tribunal correctionnel de Clermont en a fait justice, et elle n'aura pas un meilleur sort au tribunal d'appel, quand même la fatalité des circonstances réduirait ladite Chabrillat à l'impossibilité de faire entendre sa défense : car l'absence évidente de tout délit, dans les négociations qu'elle a exécutées par commission pour le plaignant, lui garantissent la confirmation du jugement qui l'a acquittée, avec 300 francs de dommages-intérêts. Les tribunaux ne s'arment pas contre les chimères, lors même qu'ils prononcent par contumace.
Table Godemel : agents de change : agiotage et trafic usuraire contre les dispositions contre les dispositions des lois prohibant la vente du numéraire et prescrivant les obligations que doivent remplir les agents de change et courtiers.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1798-Circa 1803
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0921
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0920
BCU_Factums_G0922
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53082/BCU_Factums_G0921.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
agiotage
assemblées de créanciers
commerçants
contravention aux règles de la profession
femme commerçante
Femme courtière et agente de change
Usure