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MÉMOIRE
POUR
Sieur
A n to in e
C H A L I E R , propriétaire, habi
tant du lieu de Brassac, appelant et intimé ;
CONTRE
S ie u r J e a
n
F E U I L L A N T
a î n é , n é g o c ia n t ,
h a b ita n t du lieu de B r a s s a g e t , in tim é et appe
la n t.
L E sieur Chalier a été employé par le sieur Feuillant
pendant six années, en qualité de ch ef-d irecteur des
mines de h ouille ou charbon de terre; il a veillé exclu
sivement à l’exploitation de ces m ines, depuis le 16 plu
viôse an 2 jusqu’au 7 fructidor an 7 : il a employé toute
sa jeunesse ù ce travail pénible ; et consultant plus son
zele que ses fo rce s, il ne s’occupoit que des i n t é r ê t s de
son commettant, qu’il rcgardoit comme son a mi , e t qui
A
%
�lui témoignoit la plus intime confiance. Chargé de tous
les détails , il faisoit de continuelles avances ; et aujour
d’hui que les affaires du sieur Feuillant ont cessé de pros
pérer , qu’il n’a plus besoin de directeur , puisqu’il n ’a
plus de mines à exploiter , il oublie les services, et ne
témoigne que de l’ingratitude à celui qui l’a si généreu
sement obligé.
L e sieur Chalier est contraint de plaider pour le paye
ment de ses'gages. L e sieur Feuillant, après avoir reconnu
sa dette , après avoir présenté à ses créanciers l’état de
ses affaires, porte lui-même la créance du sieur Chalier
à la somme de 14000 francs, dans un état où on ne doit
point grossir les objets. Il ose prétendre aujourd’hui que
ce n’est qu’un jeu , qu’il ne doit rien au sieur Chalier;
ou du m o in s, s’il est obligé de convenir qu’il a employé
le sieur Chalier
la direction de ses m in es, il voudroit
le réduire au-dessous de ses derniei's ouvriers.
Il ne s’agit que de savoir si le sieur Chalier doit être
convenablement payé de ses peines et de ses soins, quels
seront ses appointem ens, et si le sieur Chalier sera rem
boursé de ses avances. Une question aussi simple a donné
lieu ù une longue discussion. Des arbitres ont été nom
més ; quatre jugemens ou arrêts sont in terven u s, et
n’ont rien terminé : à la suite, une procédure énorme
qu’ il est indispensable d’exam in er, el qui d o n n e r a lieu
à d’assez grands détails; mais on sera au moins convaincu
que la demande du sieur Chalier est juste, que le sieur
Feuillant 11’a opposé jusqu’ici rien de plausible, et qu’il
a souvent substitué le mensonge à la vérité.
L e sieur F euillan t, fort connu dans ce département,
�( 3 },
possédoit des mines de liouille très-considérables, à. Brassac.
Ne pouvant suffii’e aux travaux immenses qu’exigeoit
l’exploitation de ses mines , il fît choix du sieur C h a lie r,
pour l’employer comme chef-directeur. Les appointemens
du sieur Chalier furent fixés à une somme de 2000 fr.
par an : ces appointemens ne paraîtront pas considérables
à ceux qui connoissent les difficultés, le danger, et 1 éten
due des travaux du chef-directeur.
Ils ne paroîtront point exagérés , lorsqu’on saura qu’en
1763 et 1764 , la compagnie qui exploitoit alors , et
q u’on connoissoit sous le nom de compagnie de P a r i s ,
«voit fixé les appointemens du sieur R o u x , directeur,
à une somme de 800 francs par année ; plus , 72 francs
pour son lo yer, 3 francs par jour en voyage , et en outre
les frais de bureau. Cependant alors les mines n’étoient
pas en pleine activité ; et indépendamment du directeur
il y avoit encore à résidence sur les lieux un associé de
la com pagnie, qui veilloit à l’exploitalion.
I/exactitude et l’intelligence du sieur Chalier lui m é
ritèrent la plus intime confiance du sieur Feuillant. Il
s’ identifia tellement avec son commettant, qu’il se chargea
de toutes les affaires : l’exploitation des mines , les biens
ruraux, les commissions, les voj'ages, la discussion des affai
res contenticuscs , rien ne fut étranger au sieur Chalier. Il
poussa la complaisance jusqu’à compromettre sa personne,
emprunta ou cautionna sous lettre de change , et fut
souvent poursuivi dans les tribunaux de com m erce, pour
le compte du sieur Feuillant.
C ’est depuis le 16 pluviôse an 2 que le sieur Chalier
a commencé son exploitation ; il l’a continuée jusqu’en
A a
�V
fructidor an 7 , et n’a rien touché sur ses appointe
nt ens.
Les affaires du sieur Feuillant se dérangèrent bientôt ;
et quoiqu’il eût de grands moyens pour les faire pros
p é r e r , il se vit cependant obligé de prendre des arrangeniens avec ses créanciers. Il convoqua une assemblée,
gén érale, et présenta l’état de son actif et de son passif,
le 10 messidor an 7 ; suivant cet état, le passif excédoit
l’actif d’ une somme de 98711 francs 75 centimes.
L e sieur Chalier figure dans cet état ; il est porté par le
sieur Feuillant au rang des dettes chirograpliaires éclmcs,
comme créancier d’ une somme de 14000 francs.
Il paroît cependant qu’ il fut proposé des nrrangemens
avec les créanciers. L e sieur Feuillant fils aîné vint au
secours de son père ; on ne donna alors aucunes suites
au contrat d’union qui étoit proposé : de sorte que l’état
des biens, présenté par le sieur Feuillant, fut mis à l’écart,
et déposé secrètement entre les mains d’un tiers, fondé
de pouvoir du sieur Etienne Feuillant fils.
L e sieur C halier, dans ces circonstances, voyant qu’on
ne s'occupoit pas de l u i , mais ayant grand besoin des som
mes qui lui étoient dues, épuisa sans succès tous les procé
dés pourles obtenir, lise vit dans la nécessité de traduire le
sieur Feuillant devant les tribunaux; et s'il a voit eu dans les
m ain s, ou s’il avoit pu découvrir le bilan du sieur
Feuilkml père , il auroit eu 1111 litre qui constituoit sa
créance, et n’avoit pns besoin d’autre explication. Mais
dépourvu de ce m o y e n , le sieur Chalier fit assigner, par
exploit du 26 ventôse an 10 , le sieur Feuillant devant
le tribunal de commerce d’Issoirc : il conclut à ce que
�41
(5),
îe sieur Feuillant fût condam né, par prise de sa personne
et biens, à lui p a y e r, i ° . la somme de m i 6 francs
65 centimes, pour les appôintemens qui lui étoient dûs
en qualité de ch ef-d irecteu r des m in es, depuis le 16
pluviôse an 2 jusqu’au 7 fructidor an 7 , à raison de
2000 francs par a n , ainsi qu’ il en étoit convenu.
2°. A lui rembourser la somme de 1284 fr.
cent.,
pour avances par lui faites en numéraire, depuis le mois
de nivôse an 4 jusqu’au 1e1'. irucLidor an 7 , déduction
faite des sommes reçues pour cet emploi du sieur Feuillant,
ainsi q u ’il étoit contenu aux registres qui sont au pouvoir
du sieur Feuillant, et qu’il seroit tenu de représenter en
cas de désaveu de ces avances.
30. A u payement de la somme de 300 fr. que le sieur
Clialier a voit acquittée, au mois de germinal an 8 , à la
dame G renier, veuve V issac, de Brioude, en déduction
de plus forte somme due par le sieur Feuillant.
4°. A u remboursement de 2 fr. 5o cent., pour la valeur
d’ un livre journal servant à transcrire les ventes sur le
carreau de la m in e, pendant l’an 7.
5°. A u payement de 407 fr. 90 cent, avancés par le
sicnr C lia lier, pour le compte deF eu illan t, dans l’exploi
tation de la mine de la Pénidrc.
6°. L e sieur Clialier conclut encore au remboursement
d’ une somme de 302 fr. 36 cent, qu’ il avoit été contraint
de payer pour Feuillant à la dame T h o n a t , de Brioude,
pour vente et délivrance d’avoine qu’ il avoit reçue pour
le compte du sieur F euillan t, et qu’ il avoit fait consommer
p<>r les chevaux de la mine des Barthes , depuis le mois
de nivôse an 7 } y compris les frais de poursuites de la
dame Tlionat.
°*-
�m
L e sieur Chalier demanda les intérêts de toutes ces
sommes réunies, à compter du jour de la demande; il
conclut aussi à ce que le sieur Feuillant fût tenu de le
garantir et indemniser des poursuites dirigées contre lui
par Pierre P o u g e o n , ainsi que par différens autres crénnciers. Mais ce chef de conclusions n’a plus d’objet ; le sieur
Feuillant s’est rendu justice , et a payé les créanciers. L e
sieur Chalier a obtenu sa décharge; et le sieur Feuillant,
en acquittant ces différentes som m es, a déjà reconnu la
légitimité des demandes du sieur Chalier.
U n premier jugement par d éfau t, du 2 germinal an 10,
adjugea les conclusions du sieur Chalier. Sur l’opposition,
le sieur Feuillant déclina la juridiction des juges du tri
bunal de commerce ; mais ne comptant pas infiniment sur
ce déclinatoire, il soutint au fond qu’il n’avoit été rien
réglé relativement au traitement du sieur Chalier , tout
en reconnoissant que ce lu i-ci avait eu la direction de
ces m ines. Il prétendit que le traitement ne pourroit pas
aller au quart de la somme demandée. Il ajouta que le
sieur Chalier avoit reçu différentes sommes à compte de
ses appointemens ; que celui-ci lui devoit compte de sa
régie et administration des mines; qu’il avoit été fait des
ventes et délivrances de charbon , dont le sieur Chalier
avoit touché le prix sans en avoir compté ; et alors le sieur
Feuillant conclut à ce qu’il fût procédé à u n compte
entre les parties, devant les arbitres qui scroient nommes
par elles 11 cet effet.
11 conclut encore à ce qu’ il fût nommé d’autres arbi
tres , pour régler les appointemens du sieur Chalier pen
dant son administration.
�(7 )
L e sieur Feuillant déclare en même temps qu’il nomm o it, sa v o ir, pour la fixation du traitement, le sieur
B u rea u , instituteur à Nonette ; et pour le compte de la
régie, le sieur L o u y r e tte , propriétaire , de Clermont.
Si le sieur Chalier avoit eu dans les mains le bilan p ré
senté par le sieur F e u illa n t, il auroit eu un titre qui
iixoit sa créance, sans qu’il fût besoin d’autre examen. Mais
ne pouvant se le procurer, et d’ailleurs ne l’edoutant point
un co m p te, il déclara qu’il nommoit pour son arbitre ,
sur le premier objet, le sieur J u g e , aujourd’hui maire
de Clerm ont; et pour recevoir le com pte, le sieur Jansenet, notaire, de Brassac.
U n jugement du 27 floréal an 10 donna acte aux par
ties de ces nominations ; ordonna qu’il seroit procédé au
compte au plus tard dans le courant du mois de prairial
suivant, et qu’à cet effet tous livres journaux , registres
et documens, seroient remis aux arbitres, p o u r, le compte
présenté, rapporté , être fait droit aux parties à la pre
mière audience du mois de messidor.
L es sieurs Louyrette et Juge refusèrent la commission.
U n nouveau jugement du 23 thermidor an 10 confirma
la nomination faite par le sieur Chalier du sieur R eynard,
et celle du sieur B orel-Y ern iè re, faite par lesieur Feuillant.
Ces arbitres réunis, le sie u r Feuillant leur remit différens journaux et registres de dépense et de recette ; p lu s ,
deux tableaux de com pte, avec les pièces justificatives,
lequel compte embrassoit jusqu’à l’époque du 5 com plé
mentaire an 6. Les arbitres constatent, par leur procès
v e r b a l, que ce premier compte fut approuvé par toutes
les parties. Suivant ce compte , le sieur Chalier devoit
�(
8)
faire raison de 2000 fr. assignats, q u i, réduits à l’éclielle,
présentent la somme de 108 fr.
Mais pour les opérations subséquentes, depuis le 5 com
plémentaire an 6 , les arbitres, qui n’étoient chargés que
du compte de la régie et de l’administration des m ines,
s’expriment ain si, pages 98 et suivantes de leur rapport:
k Dépouillem ent fait des registres, soit de recette, soit
« de dépense, énoncés dans le compte du sieur Chalier,
« lions en avons trouvé le résultat ex a ct , quant au
« ca lc u l, et avons paraphé ledit compte 11e v a rietu r, pour
cc demeurer joint à la minute du présent ra p p o rt, y avoir
« recours au besoin, et être mis sous les yeux du tribunal.
« Il résulte de cc compte, que le sieur Chalier se p ré« tend créancier du sieur Feuillant d’une somme de 1661.
cc 18 s. 8 d. assignats ; et pour avances en a r g e n t, d’une
cc somme de 1995 1. 2 s. 11 d . , sous la réserve des I10110cc raires qui peuvent lui être dûs, et que le sieur Feuillant
cc lui conteste. »
Il paroît bien extraordinaire que les arbitres , après
avoir reconnu l’exactitude des calculs et du résultat, et
l'avoir vérifié sur les livres de l’ccctlc et de dépense , se
contentent de dire que lesieur Chalier se prétend créancier.
C ’étoit un f a it , et non une question ; mais ce 11’est pas
la première preuve de partialité des arbitres envers le sieur
Feuillant; et leur manière de s’exprimer 11’est pas cc qui
établit le doute , dès que l'exactitude du résultat est re
connue et appro uvée; , et 11’a pas été contredite par le
sieur Feuillant. V o ilà le sieur Chalier établi créancier
d’une somme de 199^ ^ 2 s* 11
>110,1 compris la somme
de 300 fr. à lui due pour le payement fait ù l ’acquit du
sieur
�(?)
sieui’ Feuillant h. la clame Vissac , de B r io u d c , et que le
sieur Chalier a également réclamée lors du compte.
L e rapport des arbitres fut déposé au greffe; mais ceux
nommés pour fixer le traitement du sieur Glialier n’ayant
pas voulu s’occuper de leur mission, le sieur Chalier fut assez
heureux pour découvrir dans cet intervalle le bilan que le
sieur Feuillant avoit présenté à ses créanciei*s. Il apprit
que ce bilan étoit entre les mains du sieur Etienne B ayle,
marchand orfèvre de Clermont, et en requit le dépôt chez
Chassaigne, notaire.
L ’acte de dépôt est du 14 nivôse an 12. C ’est alors que
le sieur Chalier vit de nouveau qu’il étoit porté au rang
des dettes chirographaires échues, comme créancier de
la somme de 14000 francs, et c e , sans observations, ni
aucune note qui donnât lieu à des doutes ou à une dis
cussion. Cette somme cadroit parfaitement avec celle due
au sieur Chalier pour ses appoinlemens, d’après la con
ven tio n , ainsi que pour les avances par lui réclamées,
sauf quelque petite différence qui sera bientôt expliquée.
E n conséquence, et par nouvel exploit du 19 floréal
an 1 2 , le sieur Chalier fit assigner le sieur Feuillant
devant le tribunal de commerce. Il exposa qu’au moyen
de sa découverte , le jugement préparatoire du tribunal
devenoit inutile; q u’il n’auroit même jamais été rendu
si le sieur Chalier eût pu mettre sous les yeux du tri
bunal , lors de la plaidoirie , la reconnoissance formelle
de la dette, faite par le sieur Feuillant lui-m em e, dans
un état où on ne pouvoit rien dissimuler ; et que la plus
légère omission, ou la plus petite augmentation du passif,
�,
►
V .
( IO )
feroit déclarer frauduleux. 11 renouvela ses conclusions
au p rin cip a l, et en demanda l’adjudication,
v L e sieur Feuillant, fort embarrassé de répondre, sou
tint que le bilan du 10 messidor an 7 n’avoit été suivi
d’aucun acte avec Chalier ; il prétendit qu’il ne pouvoit
en exeiper; que rien ne pouvoit arrêter l’exécution d’ un
jugement préparatoire auquel les parties avoient ac
quiescé ; et que dès qu’il avoit été jugé que le sieur
Chalier devoit un c o m p te , il étoit toujours tenu de le
rendre.
C ’étoit assez mal raisonner de la part du sieur Feuillant.
D ’après la loi du 3 brumaire an 2 , aucune des parties
ne pouvoit se pourvoir contre un jugement préparatoire;
il falloit nécessairement l’exécuter. Mais aussi il ne pouvo it en résulter aucun acquiescement ni approbation
préjudiciables.
Sur ces moyens respectifs, in tervin t, le 13 messidor
an 12 , un jugement qui condamne Jean Feuillant à payer
au sieur Chalier la somme de 2297 francs 5o centimes,
pour le remboursement des avances, et celle de i 65o fr.,
pour le montant des gages de cinq années six m ois, à
raison de 300 francs par années ; aux intérêts de ces
sommes depuis la demande, et en tous les dépens. Les
juges de commerce ont pensé , i°. qu’il ne résultoit du
rapport des arbitres aucun renseignement satisfaisant;
2°. que le traité ou bilan , du 10 thermidor an 7 f donnoit au moins ¿1 Chalier la qualité de créancier, et que
cette qualité ne pouvoit pas être méconnue. Cependant,
suivant e u x , ce traité ne forme pas titre, parce que
�( 11 )
Feuillant ne l’a signe que sauf erreur ou omission; d’ail
leurs Je dépôt de cet acte a été fait à l’insçu de Feuillant,
et sans son aveu.
A in si les juges de commerce reconnoissent bien que la
qualité de créancier est certaine, mais ils disent que la
qualité de sa créance est incertaine. Ils trouvent que le
sieur Chalier exagère sa prétention sur sou traitement;
mais ils sont convaincus que les avances réclamees sont
suffisamment justifiées par le relevé des livres journaux
produits aux arbitres. T elle est l’analise des motifs qui ont
déterminé les premiers juges.
Mais vouloir fixer les appointemens d’ un directeur des
mines ù une modique somme de 300 francs par année,
sans nourriture ni logem en t, c’est avilir des fonctions aussi
utiles que pénibles, et qui exigent des soins continuels et
exclusifs ; c’est enfin rabaisser le directeur au-dessous des
derniers ouvriers, puisque le maître m in e u r a v o it7 2 0 fr.
d’appointemens par année, et le maître charbonnier une
somme de 600 francs aussi par année.
L e sieur Chalier ne balança donc pas à se pourvoir par
appel contre ce jugem ent, en ce qu’il fixoit scs appointe
mens à cette modique somme de 300 francs. D e son côté ,
le sieur Feuillant se rendit appelant du même jugement;
et sur ces appels respectifs intervint, le 29 frimaire an 14 ,
arrêt contradictoire en la cou r, dont il est important de
connoître les motifs et le dispositif.
« E11 ce qui touche- le com pte, attendu que de son aveu
« le sieur Chalier doit compte de sa régie nu sicui*
« Feuillant, et que pour les opérations de ce compte
« les parLies ont été renvoyées, de leur consentement-,
13 2
�sur la demande expresse de C h alier, p a r-d e v a n t des
arbitres, par le jugement du 4 prairial an 10 ;
« Attendu qu’en exécution de ce jugement les parties
ont en effet nommé des arbitres à qui les comptes ont
été présentés ; que les arbitres ont vérifié, sur les pièces
justificatives, le compte de l’an 2 , jusques et compris
le 5 complémentaire an 6; que ce compte a même été
reconnu et accordé par les parties, en présence des
arbitres; mais qu’il a été impossible à ces derniers de
procéder de môme à la vérification du co m p te, depuis
le 5 jour complémentaire an 6 , jusqu’à la cessation de
la régie de C h alier, à défaut de représentation des
pièces justificatives ;
« Attendu cependant que les pièces justificatives doivent
etre entre les mains de Chalier, à l’exception des regis
tres représentés par Feuillant, qui déclare n’avoir reçu de
Chalier que les registres dont son fils a donné récépissé ;
« Attendu q u’il est avoué par Chalier qu’il a effecti
vement pris un x*écépissé des pièces remises aux sieurs
Feuillant père et fils, et qu’il ne rapporte ni n’offre
aucunes preuves de son allégation, que ce récépissé lui
a été retenu par les Feuillant, lorsqu’il est venu leur en
demander un plus régulier, sans qu’ ils aient voulu ni
le lui rendre, ni lui en donner un autre ;
« Attendu que s'il en cuL été ain si, il est peu vraisem
blable que Chalier n’en eut pas rendu plainte, ou encore
mieux lait dresser procès verbal d’ un lait de cette
nature , qu’ il dit s’être passé en présence de plusieurs
personnes, et du juge de paix de Brassac, que luimème a voit fait appeler ;
�( ï3 )
« Attendu cependant qu’ il n’est pas possible d’apurer
« le compte, jusqu’à la production des pièces justificatives ;
» « Attendu aussi que tout comptable étant présumé
« débiteur-jusqu’à la présentation de son com pte, et le
« rapport des pièces justificatives, il y a lieu de suspendre
« la liquidation des créances personnelles du sieur Chalier;
« Attendu enfin qu’il est articulé par Chalier, que
« Feuillant tenoit un livre de raison qui pourroit ser« vir à l’éclaircissement du com pte, et tenir lieu des
« pièces justificatives ; ce qui a été désavoué par Feuil« faut, q u i a déclaré 11 avoir tenu en son p articulier
« d'autres livres que celu i des ventes et recettes q u i l
« fa is a it lu i-m êm e, des charbons conduits au port, et
« em barqués su r la rivière.
« En ce qui touche la demande en fixation des gages
« ou salaires;
« Attendu que par le jugement du 4 p ram al an 10,
0 les parties avoient été, de leur consentement, renvoyées
« par-devant des arbitres;
« Attendu qu’en exécution de ce jugement, les parties
« ont fait choix de ces arbitres;
« Attendu que ce jugement n’a pas été exécuté d’après
« l’idée que s’étoit formée Chalier, de trouver dans l’état
« des dettes de Feuillant la fixation d’une somme déter« minée qui le constituoit créancier;
« E t attendu que le jugement du 4 prairial an 10 sub« siste dans toute sa force,
« La cour ordonne avant faire droit, et sans préju« dice des fin s, qui demeurent respectivement réservées,
« que dans le délai d’ un m ois, à compter de cc jo u r,
« les parties se retireront par-devant Janseuet et Borel-
�( 14)
« V ernière, arbitres par elles précédemment choisis pour
«
cc
«
«
«
«
«
le com pte, à l’elïct d’y faire procéder à lu vérification
et ù l’apurement du compte de la régie de Clu lier,
depuis le 5 complémentaire an 6 jusqu’à la fin de sa
r é g ie ; lors duquel com pte, Feuillant rapportera les
registres qu’il a reçus de Chalier, et ce dernier rapportera aux arbitres toutes autres pièces justificatives de
son compte. Ordonne aussi que Feuillant rapportera le
« livre journal q u i l a avoué avoir tenu pour les ventes
« et recettes des charbons conduits au port.
« La cour ordonne également que par Bureau et Rey«
«
«
«
«
«
nard, arbitres choisis par les parties, il sera procédé dans les mêmes délais d’un mois, à compter de ce jour,
à la fixation et règlement des gages et salaires revenant
à Chalier , dans la proportion de ses services, de sa
capacité, et de l'usage pratiqué p a r rapport à ce genre
de-tra va il; p o u r, après le compte et fixation de sa-
« laircs, ou faute de ce faire, être fait droit aux parties,
« ainsi qu’ il appartiendra , dépens réservés. »
Cet a rrê t, comme on le v o it, est rendu sans préju
dice des f in s ; mais il faisoit une grande leçon aux ar
bitres, et leur recommandoit surtout d’être justes.
E t comment espérer un examen im partial, lorsqu’il
est notoire que le sieur Borel est le conseil habituel du
sieur Feuillant ; lorsqu’ il est prouvé que Borel a été le
défenseur de Feuillant, devant le tribunal de première
instance de B rioude, dans une demande formée par ce
dernier, contre le sieur Chalier, à l’eliet d’obtenir la main
levée des inscriptions de celui-ci?
L e sieur Chalier l’observa au sieur B o r e l; il lui re
présenta qu’il étoit le conseil habituel du sieur Feuillure,
.
�( *5 )
qu’il y avoit intimité et fréquentation continuelle entre
eux. Feuillant ne logeoit point ailleui’s que chez B o r e l,
lorsqu’il alloit i\ Brioude. Enfin l’indiscret Feuillant s’étoit
vanté q u 'il auroit toujours raison avec B o r e l, et q u 'il
était sûr d'une décision fa v o ra b le.
L ors même de la discussion, et du procès verbal fait
en exécution de l’arrêt de la cou r, le 23 janvier 1806,
Borel avoit eu assez peu de pudeur pour rédiger ou
corriger les dires et réponses de Feuillant.
L e sieur Chalier fit ses représentations; et il en avoit
le droit. Malheureusement il arrive tons les jours que
les arbitres sont plutôt des défenseurs que des juges. Il
y a tant d’exemples funestes d’intérêts sacrifiés par l’igno
rance ou la prévention , qu’on doit espérer qu’une loi
bienfaisante, ou supprimera les arbitrages, ou au moins
les assujétira ù une révision rigoureuse des juges supé
rieurs. Une clameur universelle réclame ce grand acte
de justice, depuis que tant de gens se croient faits pour
être arbitres.
Quoi qu’il en soit, les remontrances du sieur Chalier
furent accueillies avec la plus cruelle animosité. Borel
se permit de consigner dans son procès verbal que la
sieur C ha lier avoit m is tant de grossièreté dans ses
in ju re s, tant d'absurdités dans ses im putation s, tant
à'indécence dans sa co n d u ite, qu’il se récusoit.
Est-ce là le langage de l’ impartialité; ou plutôt n’estce pas l’expression de la colère et de la passion ?
Son exemple entraîne son collègue Janscnet : au moins
ce dernier n’iiüribue pas tous les torts à Chalier; il s’en
nuie des inc idc ns perpétuels q u i s'élèvent dans la cause f
�i , 6 )
des longueurs et des inutilités des titres anciens et nou
veaux des p a r tie s, des vociférations et des injures ca
pitales et de tout genre qu'elfes débitent. Il voit que cette
opération ne pourra se traiter que dans le tumulte des
passions; il renvoie les parties à des experts désœuvrés,
et déclare qu’il est dans l'intention de s’abstenir.
Ce procès verbal si singulier est sous la date du 23
janvier 1806; il suspendoit, comme on v o it, toutes les
opérations : et Chalier se pourvoit en la cour, pour de
mander qu’il fût nommé de nouveaux arbitres. Feuillant
s’y refuse'; il insiste pour que les mêmes individus qui
avoient reconnu eux-mêmes qu’ il leur étoit impossible
d’être juges, continuassent cependant de prononcer sur
leurs intérêts.
Cette prétention paroissoit inconvenante. Comment
laisser à des hommes qui s’expriment avec tant de véh é
m ence, qui ont donné de si fortes preuves de préven
tio n , le droit de remplir le premier comme le plus beau
ministère? U ne jurisprudence constante a voit appris que
les plus légers motifs suflisoient pour faire admettre la
récusation des experts ou des arbitres : ce ne sont jamais
que des juges volontaires, qui 11e tiennent leur mission
que de la confiance des parties.
Cependant la co u r, par son arrêt du 3 février 1806,
n’a eu aucun égard à la récusation du sieur C halier, et
a ordonné l’exécution de son premier arrêt du -2g fri
maire an 14.
Il faut avoir le courage d’en convenir. Quelque défé
rence q u ’on doive aux arrêts de la co u r, celle dernière
décision auroit alarmé le sieur Chalier, s’ il n’avoit autant
de
�4
^
. C 17 )
de respect et de confiance dans l’intégrité et les lumières
des magistrats de la cour.
E n exécution de cet a ri'ê t, Borel et Jansenet ont été
assignés pour procéder à leur opération , et se sont réunis
le 20 février 1806 au lieu de Brassac. Les sieurs Feuillant
et Chalier se sont rendus auprès d’e u x , et Feuillant a
représenté, i° . un registre intitulé de dépense, com
mençant le 4 vendémiaire an 7 , et finissant au mois de
fructidor de la même année : les experts vérifient que
cent dix pages de ce registre sont écrites de la main du
sieur Chalier.
2°. Feuillant a exhibé d’un autre registre intitulé des
voituriers , commençant à la page 5 , mois de vendé
miaire an 7 , contenant vingt-trois pages écrites aussi de
la main de Chalier.
1
3 0. U n autre registre intitulé des journ ées e t p r i x ja it s ,
commençant aussi en vendémiaire an 7 , et contenant
cinquante-une pages.
4 0. A u tre registre intitulé recette des charbons vendus
su r le carreau de la m ine , commençant en vendé
miaire an 7 , et contenant trente-un feuillets.
5 °. A u tre journal de recette, commençant en l’an 3 ,
et finissant en thermidor an 7 , sans aucune désignation
de numéro sur les pages.
Borel-Vernière ne manque pas de remarquer que cc
journal est le même sur lequel à lui tout seul il avoit cru
trouver de l’altération , à partir du feuillet où l’on trouve
m ois de pluviôse ail 7.
Feuillant au surplus déclare que ces registres sont
les seuls qu’il a en son p o u v o i r , et qu’ils lui ont été remis
C
�( , 18
?
par le sieur'Chalier sur récépissé, lors de la présenta
tion de son compte.
L es arbitres demandent ¿1 Feuillant la remise du livre
des ventes et recettes des charbons provenus de la mine
des Barthes , et conduits sur le port pour être embarqués
sur la rivière d’A llier.
Feuillant est obligé de convenir qu’il a tenu cc regis
tre en son particulier ; qu’il croyoitm êm e en être encore
nanti lors de l'arrêt de la co u r, du 29 frimaire an 14.
D e retour chez lui , il s’empressa d’en faire la recherche,
mais il ne l’a point t r o u v é e t il est très-probable qu’il
lui a été en levé; d’ailleurs, il ajoute que ce registre no
pouvoit donner aucuns renseignemens sur la régie du
sieur Chalier , parce que la vente des chai'bons sur le
port étoit indépendante des travaux de ceux q u i , ainsi
que le sieur C h alier, étoient chargés de l’exploitation
et extraction de la mine.
P o u r appuyer cette observation , Feuillant justifie de
pareils livres par lui tenus pour les charbons venant des
mines de la Taup e et Combelle. Les arbitres s’empres
sent de parcourir ces livres, et s’aperçoivent que toutes
les ventes y indiquées ont été faites par le sieur Feuil
lant , et non par ses commis.
Mais si les arbitres s’aperçoivent si vile de ces détails,
Fouillant ne s’aperçoit pas q u’il est en contradiction avec
lui-même ■
, car si ce registre étoit aussi indiderent qu’il
veut bien le d i r e , il étoit fort inutile de l’enlever, quelle
que soit la personne qu’ il soupçonne de cet enlèvement.
V ien t le tour du sieur Chalier ; et les arbitres lui
demandent la représentation de toutes les pièces justili-
�4 M
( *9 )
calîves qu’ !l peut avoir à l’appui du compte qu’il a pré
senté au sieur Feuillan t, depuis le premier vendémiaire
an 7. lies arbitres disent que lors de leur premier rapport,
ils avoient déjà sous les yeux les registres qu’ ils viennent
d’énoncer, et que cependant ils n’avoient pas pu procéder
à l’apurement, attendu qu’aucun article de la l’ecette et
de la dépense n’étoit établi ni justifié.
C h alier, à cette époque, étoit à peine convalescent d’ une
maladie grave qu’il venoit d’essuyer. Il déclare aux arbi
tres qu’il a été hors d’état de se rendre à Riom chez son
a vou é, où étoient déposées les pièces de son procès avec
le sieur Feuillant, ainsi que la correspondance de ce der
nier , qui étoit d’ une grande im portance, et prouveroit la
fidélité de son- compte.
lies arbitres ne manquent pas de remontrer qu’une cor
respondance ne peut suppléer à des pièces justificatives.
Ils ne pouvoient pas supposer d’ailleurs raisonnable
ment que le sieur Chalier se trouvant à Riom lors de
l ’arrêt de la co u r, eut quitte cette ville sans prendre avec
lui les pièces qui pouvoient lui être nécessaires.
I.es arbitres prennent ensuite la peine de démontrer
quelles sont les pièces justificatives, ce qu’011 entend par
pièces justificatives; et après quelques démonstrations assez
inutiles , et qu’on savoit bien sans e u x , ils passent au re
gistre de la vente des charbons de province. Ils observent
ou sieur Chalier que pendant sa régie il avoit sous ses
ordres un commis nommé Louis A r v e u f, qui étoit chargé
de la vente de ces charbons, en tenoit un état journalier,
et en coinpioil toutes les sommes au sieur C h a l i e r ; de
sorte que pour justifier son compte dans cette partie,
C 2
�( 20 )
Chalier devoit rapporter les registres tenus par Louis
A r v e u f , à l’eflet d’examiner si ses ventes et leur prix
étoient concoi’d an s, et s’il n’y avoit dans le c.omple du
sieur Chalier aucune e r r e u r , omission ou double emploi.
Dans tous les articles, est-il d it , Chalier relate les états
de Louis A r v e u f ; ce qui prouve infailliblement que le
registre à eux présenté n’est qu’un registre de r e p o r t , et
qu’on ne peut y ajoute*’ foi sans voir et examiner les pièces
qu’il mentionne, et qui lui servent de contrôle.
Les arbitres trouvent convenable et juste , intéressant
pour les parties, et utile pour éclairer la religion de la
cour, de faire appeler et d’entendre Louis A r v e u f, dont en
effet ils ont inséré la déclaration à la suite de leur rapport.
P ar cette déclaration , A r v e u f dit avoir été employé
par les. sieurs Feuillant père et fils , pour surveiller à la
vente de province des cliax-bons existans sur le carreau ,
et extraits de la mine des Barthes. Ses fonctions consistoient à tenir registre de toutes les ventes qui s’opéraient
journellement des charbons des Barthes.
Pendant tout le temps qu’A r v e u f a eu la confiance des
F euillant, il a tenu un compte exact de ses ventes, et les
inscrivoit journellement sur un registre destiné à cet effet,
où il inentionnoit le nom des acquéreurs , leur domicile,
la quantité de charbon qui leur étoit délivrée , le prix
qu’ils payoient en solde ou en i\-coinpte des livraisons.
Indépendamment du registre qu’il tenoit, il rendoit compte
au sieur C h alier, com m is principal de Feuillant, à chaque
vente qui avoit lieu ; celui-ci les inscrivoit ;\ son tour, ou
devoit les inscrire pour en rendre compte ¿\ Feuillant. A
l’époque où les affaires de Feuillant se trouvèrent dénar-
�433 ( 21 )
g é e s , Chàlier proposa un jour au déclarant de monter h
la machine d’extraction, où il avoit quelque chose d’es
sentiel à lui proposer : il se rendit à son invitation, et ils
montèi’ent ensemble. A peine y furent-ils rendus et assis,
que Chalier le quitta sous quelque prétexte*, et ne le voyantpas reven ir, lui A r v e u f , se rendit à l’habitation des B artlies, où son registre sus-cité, ensemble les états de vo i
tures , étoient déposés et rassemblés sous une ficelle. Il
s’empressa de demander où étoient des pièces si im por
tantes; et sur l’inquiétude qu’il manifesta au sieur R ou gier
de C o u h ad e, autre employé aux gages du sieur Feuillant,
celui-ci lui fit l’aveu que Chalier venoit de sortir de l ’ha
bitation, emportant avec lui les pièces et registres attachés
ensemble.
A r v e u f déclare en outre qu’à compter de cette époque
il ne travailla plus à la mine des Barthes, dont l ’exploi
tation fut confiée au sieur Lesecq ; et c’est la seule raison
pour laquelle il n’a pu remettre au sieur Feuillant le re
gistre dont il s’agit, qui devoit servir de contrôle à la ges
tion du sieur Chalier dans cette partie.
Il est assez extraordinaire que des arbitres , uniquement
chargés de procéder au co m p te, se soient permis de faire
entendre un individu aux gages du sieur F eu illa n t, et sur
un fait étranger à leur mission ; c’est procéder à une en
quête à fu tu r, ce qui est prohibé par l’ordonnance; c’est
enfin excéder les pouvoirs que la cour et les parties leur
avoient donnés.
Mais au m o i n s , dès que ces arbitres étoient si soigneux
po u r éclairer la religion de la cou r , lui apprendre ce
qu’elle ne leur demandait pas, et ne lui rien dire sur ce
�i 'b k
(
22
)
qu’elle leur ‘d emandent, ils auroierit dû au moins avoir
le soin de faire appeler ce R ougier de C o u h a d e , qui
avoit appris tant de choses à A rveu f. L e sieur Chalier
réclama en vain; on ne lui a pns même fait la faveur de
consigner dans le procès verbal cette réclamation : on
savoit que R ougier de Couhade démentiroit ce qu’a voit
dit A r v e u f , et ce n’étoit pas le compte des arbitres.
A u surplus, C halier, pour répondre à l’interpellation
qui lui étoit faite, déclara qu’à la vérité il avoit été nanti des.
pièces justificatives de son compte, et notamment de celles,
qu’on venoit d’indiquer; mais qu’il avoit remis le tout
au sieur Feuillant ; ce que Feuillant a expressément désa
voué , en faisant remarquer qu’il n’étoit pas présumable
qu’ un comptable pût se défaire, sans décharge ou récé
pissé , de pièces aussi essentielles pour lui.
Chalier vouloit rép ondre que Feuillant étant nanti de
ccs registres , il étoit bien moins présumable qu’il n’eut
pas reçu tonies les pièces, qu’il eût voulu se contenter de
prendre les registres en cet é t a t , et qu’il n’eût pas fait
constater que le sieur Chalier 71e lui avoit pas remis autre
chose, qu’il 11’ait pas même fait dresser procès verbal de
l ’état des registres. C ’étoitune marche assez simple, comme
il étoit juste d’insérer les observations du sieur Chalier;
mais les arbitres ne jugèrent pns à propos de lui donner
cette satisfaction.
Les arbitres seulement nous apprennent que le sieur
B o r c l , l’un d’eux , avoit a flaire à Jssoire ; en conséquence,
ils remettent leur séance au 22 février, et invitent le sieur
CI) a lier à faire de nouvelles recherches pendant /es vingt?
quatre heures qu’on lui donnoit de répit.
i
�( 23 )
A u jour ind iqu é, ils se plaignent de ce que Chalier
les a fait attendre jusqu’à six heures ; ils apprennent que
Chalier s’est présenté assisté d’un con seil, et a remis les
observations écrites de lui.
Ces observations consistent à dire que le compte du
sieur Chalier a été rendu; que toutes les pièces justifi
catives ont été remises entre les mains des sieurs Feuillant
père et fils; qu’ils lui en avoiunt d’abord remis un récé
pissé , le 5 prairial an 9 , mais qu’ils l’ont ensuite retenu,
le 16 du même mois de prairial, sous prétexte d’en don
ner un plus régulier au sieur Chalier; ce qui n’a point
eu lieu.
Chalier observe qu’ il pourroit être facilement suppléé
à ce récépissé, 011 aux pièces justificatives elles-mêmes,
par le rapport des registres de v e n t e , d’achats , de dé
pense et de recette de l’administration de la m in e , néces
sairement tenus, d’après la loi et l’ordonnance du com
merce , par le sieur Feuillant, pendant l ’espace de temps
dont le nouveau compte est ordonne.
Si le sieur Feuillant refuse de représenter ces registres ,
il ne peut avoir d'autre but, i ° . que de rendre impossible
le nouveau compte ordonné entre les parties, et qui déjà
est sullisarnmcnt suppléé par le bilan du sieur Feuillant,
en date du 10 messidor au 7 ; 20. de se mettre à l’abri de
la demande du sieur C h a lie r, relative à ses avances et à
scs appointemens.
L e sieur Chalier ajoute que dans cet état de choses, 011
no peut pas se dissimuler que le nouveau compte d e m a n d é
par le sieur Feuillant est une sorte de récrimination, ou
d exception dilatoire contre celle demande.
�C 24 )
L e sieur Clialier consent volontiers à établir de nou
veau son compte, comme il a déjà été fait entre les parties;
mais le sieur Feuillant doit nécessairement pour c e la , ou
rapporter les pièces justificatives qu’on lui a remises, ou
les registres qui s’y réfèrent évidemment.
A u défaut de ce r a p p o r t, Chalier soutient que le
compte demandé de rechef étant rendu impossible par
le fait du sieur Feuillant, ce dernier ne peut s’en préva
loir contre lui. L e compte de Chalier est réputé rendu
par le rapport du bilan de Feuillant , dans lequel il
reconnoît Chalier pour son créancier de la somme de
14000 francs.
Cette créance insérée au bilan , sans modification , sans
réflexions , ne peut être que le résultat d’un compte
rendu sur pièces justificatives.
Il est si vrai que Chalier a r e n d u son com pte, et re
mis toutes pièces qui l’établissent, qu’après le premier
compte fait entre les p arties, de la gestion du sieur
C h alier, jusques et compris le 5 complémentaire an 6 ,
les scellés furent apposés par le juge de paix de G im eaux,
sur la liasse contenant les pièces justificatives du compte;
elles devoient être déposées au grelï’e du tribunal de com
merce d’Issoirc, jusqu’au moment où l’on auroit besoin
d’y avoir recours. Ce dépôt n’a sans doute p o i n t eu lieu,
puisque les scellés apposés sur cette liasse o n t été brises,
probablement p a r le sieur F e u i l l a n t , ent re les mains
duquel ont resté déposées les pièces, au lieu de l’être au
g relie du tribunal de commerce.
Ces scellés, continue C h alier, ont ete brisés sans procès
v e r b a l, ni inventaire contenant l’état, le nombre et la
nature
�l 25 )
nature des p iè ce s, dont le sieur Feuillant a pu facile
ment faire disparoître toutes celles qui pourroient servir
aujourd’hui à établir le compte»
-i
L e sieur Chalier fait ensuite la nomenclature des pièces
et registres que Feuillant ne peut se refuser de rap
porter pour suppléer aux pièces qui manquent. Ces re
gistres consistent, i° . en un journal tenu jour par jo u r ;
2°. en un journal de raison ; 30. en un livre de caisse ;
4 0. en une liasse des lettres écrites par Chalier à Feuillant;
h°. en un registre de copies de lettres du sieur Feuillant :
le tout d’après l’ordonnance de 1673.
j
6°. Dans les bulletins remis ou envoyés chaque jour
par Chalier à F euillant, et .qui rendoient compte de la
recette et de la dépense faites dans la m in e , de l’extrac
tion des charbons, et de la voiture.
L a cour se rappellera qu’à une de ses audiences, il
fut représenté quelques-uns de ces b ulletin s, jour par
j o u r ; que Feuillant n’en désavoue pas l’usage constant:
ce qui étoit en efl'et le meilleur ordre qu’on pût mettre
dans les détails d’une vente de cette nature.
7 0. Dans les états remis chaque mois à Feuillan t, et
contenant le résultat de tous les bulletins et des journaux.
8°. L ’état particulier, portant compte rendu au sieur
Feuillant dans les premiers jours de messidor an 7 , peu
de jours avant son bilan ; lequel compte fut transcrit sur
le journal tenu jour par jour par Feuillant.
9°. Les journaux de recette et dépense, tenus par la
dame F eu illan t, et le sieur Feuillant fils jeu n e , lorsque
son père étoit en voyage.
D
1
�...................... ( * 6 ')
io ° . Les livres et pièces qui ont basé le bilan pré
senté par le sieur Feuillant le 10 messidor an 7.
ï i °. L es livres te n u s. par B u re a u , commis en sousordre pour la mine de la C o m b elle, en l’an 5.
12°. Les livres de recette et dépense, tenus en l’an 8
par Chalier pour Etienne Feuillant \ lesquels livres ont
commencé le 8 fructidor an 7.
Ces observations furent communiquées de suite au sieur
Feuillant : fort embarrassé de rép o n d re, il se contente de
dire que toutes ces allégations ne pouvoient équivaloir
aux pièces demandées au sieur Chalier pour la vérification
de son compte , telles que les différens marchés ,. p rix
faits, polices, conventions, quittances, billets ou lettres de
change acquittés, registres de Louis A i'v e u f, etc. *, qu’au
surplus il se réservoit tous ses droits et protestations contre
cet écrit, lors de la plaidoirie dèvant la cour d’appel.
L es arbitres, à leur to u r , croient devoir rappeler que
lorsque dans leur premier rapport ils ont parlé de pièces
justificatives produites par C h a lie r, ces pièces avoient
trait seulement au compte antérieur au premier vendé
m iaire an 7 , rédigé par le sieur Bureau , approuvé et
apuré par toutes les parties*, mais en ce qui concerne
le compte postérieur à cette é p o q u e , et dont il s’agit
aujourd’h u i , il est très-certain q u e , soit à Tépo que du
premier fructidor an 1 0 , date du rapport , soit aujour
d’hui , le sieur Chal ie r n’en a prod ui t d’aucune espèce,
et que le sieur Feuillant a représenté les mêmes regis
tres qui avoient été inventoriés, sans aucune espèce d’al
tération , qui d’ailleurs auroit été impossible de sa p a rt,
�c 27 )
« y
t
puisque toutes les écritures «ont de la m a in vdu sieur
Chalier , et q u e lle s arbitres les avoient paraphées et
signées.
O n voit avec quel soin les arbitres cherchent à favo
riser le sieur Feuillant. Ils terminent par dire que du
défaut absolu de titre justificatif, de renseignemens qui
•
puissent y su p p lé e r, il ¡résulte que malgré l’importance
du com pte, tel : que la recette se porte à 14 1916 francs,
et la dépense à 143201 francs, il n ’existe pas un seul
•article qui soit établi ou ne soit contesté ; en consé
quence , il leur est impossible de remplir le vœ u de la cour
■d’appel , et de s’occuper de la vérification et apurement
d’un compte qui n’en est pas un dans l’état où il a été
présenté , et n’est, à proprement parler, qu’um sim plebor
dereau , dont rien n’annonce et ne p r o u v e la justesse et
la fidélité.
T e l est le procès v e r b a l, ctb ircito., q u’ont lancé les
arbitres.
Restoit encore une opération. D e u x autres arbitres, les
sieurs Reynard et Bureau, devoient fixer et régler les aprpointemens du sieur C h a lie r, pour chacune des années
-qu’il a été em ployé par le sieur Feuillant.
. L ’ un de ces arbitres, le sieur Bureau,, ;avoit été récusé
par le 'sieur Chalier : ce sieur Bureau avoit été sous les
•ordres de C h a lier, ce qui est établi par la correspon
dance, et ne sera sûrement pas désavoué. L e sieur Bureau
•étoit entièrement dévoué au sieur F e u illa n t, et l’a même
manifesté de telle m an ière, que le sieur Chalier se crût
bien fondé à le récuser. L e sieur B u reau, qui s’étoitluîr
même départi de la connoissance 'de cette affaire , ainsi
V 2
�( 28')
' q u’il résulte d’un procès verbal du 24 janvier dernier , a
-cru que d’après l’arrêt de la co u r, du;3 février suivant,
il étoit obligé d’en connoître; et cependant on doit re
m arquer que l’arrêt de la cour n’avoit prononcé que
sur la récusation des pi’emiers arbitres, respectivement
,
au compte.
Q uoi qu’il en s o i t , Bureau et Reynard se réunissent.
Un premier procès verbal, du 20 février d ern ier, ap
prend que le sieur Reynard vouloit allouer au sieur
Chalier une'som m e de 900 francs pour chaque année;
mais Bureau représente que cette somme de 900 francs
est exorbitante, et qu’il ne doit être alloué que celle
de 55o francs pour chaque année. Reynard dit que cette
somme est trop m o d iq u e, non-seulement par rapport aux
embarras qu’avoit eus Chalier dans les derniers temps,
7?iais encore p a r rapport à î im portance de la place q u i î
o ccu p o it, et de Rentière coiifiance que F eu illa n t avoit
alors en lui.
Les arbitres sont donc divisés, et donnent leur avis
séparément. Bureau persiste dans son opinion , et donne
po u r m otif que lorsque Chalier est entré chez Feuillant,
il n’avoit aucune connoissance de l’état de commis aux
mines , où il fut placé à la sollicitation de la dame Seguin,
pour surveiller aux ouvriers. Il faut au moins deux
années pour acquérir le talent d’être commis h une ex
ploitation d’aussi grande importance.
D ’ailleurs le sieur C h a l i e r , ajoute B u r e a u , etoit la ma
jeure partie du temps n o u r r i , soit dans la maison , soit
en campagne. Il étoit chauffé , dans son m énage, du
charbon des mines du sieur Feuillant.
�G29 )
' Il termine par dire : Les sieurs F lo ry et A rn a u d , commis
instruits dans cette p a r tie , qui avoient précédé le sieur
Chalier dans les mêmes exploitations, n’étoient payés les
premières années ; savoir, le premier, qu’à raison de trois
à quatre cents francs, et le second, à raison de 4Ô0 fr. ?
et ce, sans nourriture ni l’un ni l’autre.
Il semble que Feuillant est le rédacteur de cet avis; car
c’est précisément le langage qu’il a tenu lors de sa défense
en la cour. O n voit cependant que Bureau n’étoit pas bien
sûr de la somme à laquelle s’élevoient les traitemens des
sieurs F lo ry et A rnau d ; mais au moins il devoit être sûr
de celui q u ’il avoit lu i-m êm e, lorsqu’il étoit employé par
le sieur Feuillant sous les ordres du sieur Clialier ; et s’il
a bonne m é m o ire , il se rappellera que son traitement
s’élevoit à 1400 fr. par année. Pourquoi donc voudroit-il
réduire le sieur Chalier à la modique somme de 55o fr. ?
Cependant le sieur Bureau , indépendamment de son trai
tement , avoit encore son appartement meublé ; il étoit
chauffé et éclairé, et par fois invité à manger chez le sieur
F euillan t, comme cela est arrive aussi au sieur Chalier ; et
si parce qu’il étoit invité quelquefois à manger chez le sieur
Feuillan t, on croit devoir réduire ses appointemens à
55o f r . , il faut convenir que c’est lui faire payer fort cher
son écot.
L e sieur Reynard a donné son avis séparém ent,le 18
mars 1806. O n a vu que par le premier procès verbal il
vouloit porter le traitement à 900 fr. par année, à raison
de î im portance de la p la c e , et surtout de rentière con~
fiance qu’avoit le sieur Feuillant en Chalier.
Maintenant ce 11’est plus la même chose. Reynard a
�( 3° )
connu Chalier dès son enfance ; il l’a suivi dans sa m arche
p o litiqu e, et ses progrès. Il assure avec confiance qu’avant
d’avoir été chargé des intérêts de Jean Feuillant dans ses
m in es, Chalier étoit absolument nouveau dans ce genre
de travail ; il n’avoit que l’écriture d’un écolier ; et les
salaires qu’ il pouvoit exiger alors devoient se borner à
peu de ch o se, jusqu’à ce qu’il eût acquis de l’expérience.
Chalier avoit cependant vingt-trois ans lorsqu’il est
entré chez le sieur Feuillant. Il est de Brassac ; il avoifc
toute sa vie v u exploiter des in in es, et par conséquent
devoit avoir des connoissances suffisantes pour être utile
ment em ployé dans ce genre de travail. L 'en tière con
fia n c e que lui accordoit le sieur Feuillant en seroit déjà
une preuve.
Reynard , bientôt a p rè s, dit que l’âge et Thabitude du
travail ont fait acquérir des connoissances à Chalier. Jean
Feuillant lui a donné sa confiance p o u r toutes les affaires
extérieures ; il le chargeoit des achats, des payemens des
ouvriers 5 il a voyagé souvent dans des places de com
merce p o u r l’échange des papiers et effets de son commet
tant; ce qui a dû lui procurer un salaii’e plus considérable,
mais toujours dans la proportion de ceux que donnoient
les autres exploitans pour de pareils travaux.
Par une transition singulière, Reynard invite la cour à
ne pas se laisser séduire p a r le titre fastueux de directeur
général, dont Chalier rapporte la note. C ’est un titre illu
soire qui n’a été do nn é à aucun commis dans les mines du
p a y s , et qui a eu pour m o ti f des considérations particu
lières qui paraissent avoir leur source dans la conscrip
tion militaire dont Chalier faisoit partie, et qui-lui eu a
�44">
( 31 )
procuré l’exemption. (N otez bien que la conscription mi-,
litaire n’a été décrétée que bien postérieurement à cette
époque, et que Chalier n’en a jamais fait partie. ) L a co u r,
ajoute R e y n a rd , doit le considérer, pendant les trois der
nières années de sa r é g i e , comme premier commis de
confiance , ou autre titre à peu près semblable, et laisser
dorm ir celu i de d irecteu r, qui n’a été créé que pour lui
seul.
Chalier a e u , pendant tout le temps de sa régie , le
chauffage en charbon pour la maison de sa mère , ainsi
qu’il a toujours été d’usage. 11 a été d é fra y é , dans tous,
ses voyages, pour sa dépense de bouche; ce qui lui procuroit une occasion de ménager ses salaires dans les dif
férentes opérations qu’il a faites pour Jean F eu illa n t, et
surtout dans les temps du papier-monnoie.
Il a travaillé pour son compte particulier, ainsi qu’il
en est co n v en u , et Feuillant ne s’en est pas plaint; il a
fait quelques commerces particuliers, tels que de grains
avec T r io lie r , de Brioude , de savon à Issoire : il a pu,
en faire d’autres que Feuillant ne lui a pas interdits. Cette,
considération, et l’agrément de faire des affaires à lui.
p ro p res, doivent être calculés dans la fixation de ses gages,
quelque succès qu’aient pu avoir pour lui ses négociations.
Reynard certifie avoir été associé à l ’exploitation de la,
mine de la T a u p e , qui est la meilleure du pays. Il étoit
en même temps c h a r g é , avec son père , de la régie d u
dehors et du dedans; et la société ne leur passoit qu’ un
prélèvement de 5oq fr. entr’eux deux par année. G uil
laume Grimnrdias, commis comptable de Feuillant, avoit
par an 300 f r . , la table et le logement. Plusieurs commis
�( 32 )
se sont succédés dans les mines de F e u illa n t, sans qu’ils
aient eu des appointemens de 2000 fr. ; il n’y a que le
sieur Ramel dont le traitement ait été porté à ce taux.
Mais ce sieur Ramel étoit favorisé par le conseil des
mines, et avoit fait ses preuves dans les mines de Bretagne;
et encore le sieur Lamotlie s’est-il lassé d’un pareil trai
tement, et l’a renvoyé. Reynard nous apprend encore qu’il
y a actuellement un sieur Richard à la tête de l’exploi
tation de la mine du G ro sm en il, dont on ne connoît pas
le traitement : on le croit associé pour une partie. Mais
ses opérations et ses connoissances sont d’un autre genre,
et 11e peuvent recevoir d’application avec les affaires dont
a été chargé le sieur Chalier. Richard est maître absolu
au Grosm enil, dirige le dehors et le dedans, fait toutes
les ven tes, au lieu que Chalier ne faisoit rien dans l’inté
r ie u r ; il rendait journellem ent compte de scs opérations
extérieures à son com m ettan t, et ne faisoit aucune vente.
Si Feuillant avoit eu un commis à 2000 fr. pour l’inté
rieur , un autre de pareille somme pour l’extérieur r et
un autre pour les ventes sur le p o r t, il n’auroit pas assez
gagné pour payer ses commis ou les autres dépenses.
Il reste encore à observer, ajoute Reynard , que le temps
du pnpier-monnoie a fait éprouver tant de variations dans
ses valeurs, qu’il faudrait chaque mois une évaluation
nouvelle pour ne léser aucune partie; et comme il fau
drait une seconde opération pour convertir le tout en
num éraire, il a supputé qu’à compter du jour que Chalier
a commencé à travailler aux mines de Feuillant, jusqu’au
7 thermidor an 4 , 01.1 20 juillet 179^5 époque de la ces
sation du pap ier-m on n oic, ses salaires doivent être fixés
«
u
�4AS
( 33 )
l la somme de 5oo fr. en numéraire po u r chacun an , et
que cette somme est suffisante pour tout ce qu’a fait ou
pu faire Chalier pour le compte de Feuillant; qu’ensuite,
à compter du 25 juillet 1 7 9 6 , jusqu’au jour où il a cessé
ses travaux à la m in e , ses salaires doivent être portés à
la somme de 900 fr. par année.
.C om b ien de contradictions n’a - t - i l pas échappé k
Reynard dans ce singulier avis ? D éjà il est constate
par un procès verbal juridique que Reynard allouoit
à Chalier sans distinction une somme de 900 francs par
an n ée; mais dans l’intervalle, sans doute, le sieur Feuil
lant ou ses agens ont su lui faire changer d’opinion. On.
sait que c’est chez Jansenet qu’il s’est rendu pour donner
son avis ; que ce dernier en a été le rédacteur ; et
Reynard , dont la profession est d’être tailleur d’habits
pour les charbonniers, avoit besoin d’un secours étran
ger pour rédiger une opinion. Les expressions dont ii
s’est servi ne sont pas même à sa portée ; il n’a jamais
su ce que c’étoit q u 'u n titre ¿ fa stu e u x , et on ne pouvoit pas trop l’appliquer à un directeur des mines , dont
les fonctions ont plus de péril que de gloire , et plus
de peine que de bénéfice. A u surplus , ce titre n’est
pas étranger à ceux qui exercent le même emploi que
lo sieur C h alier, puisqu’on le donne à tou s, et qu’on
voit traiter ainsi un sieur B a illy, dans un exploit du 14
floréal an 10 , quoique ce sieur Bailly fût d’abord aux
ordres du sieur Chalier , et l’a ensuite remplacé lors
que le sieur Lesecq est devenu acquéreur de la mine
des Barthes.
A u surplus , le sieur Etienne Feuillant avoit lu iE
�(.3 4 ) , ,
inême donné une procuration générale au sieur Clialier ,
.soit pour toutes^affaires civiles, soit pour toutes celles
relatives à l’exploitation des mines. Cette procuration gé
nérale est en date du 2 complémentaire an 7 , et a été
reçue par Jansenet, notaire , qui auroit dû s’en souvenir
lorsqu’il a rédigé l’avis de Reynard. Jansenet a bien reçu
d’autres actes de cette nature ; car en l’an 5 , il donnoit
au sieur Chalier le titre de préposé et de fondé de po u
v o ir général du sieur Feuillant fils.
O n sera encore étonné que Jansenet n’ait pas été plus
juste lorsqu’il a été question des com ptes, puisqu’il fait
dire à Reynard que C ha lier rendoit journellem ent compte
de ses opérations à F eu illa n t.
*■- E n fin , comment se fait-il qu’on ne se soit pas aperçu que
Reynard , dans un .premier avis , avoit porté les appoin•temens de Chalier à 9 0 0 'francs par ann ée , sans distinc
tion , et q u’ensuite on lui fasse diminuer les premières
•années de 400 francs chacune?
-
Il est impossible d’être ballotté d’une manière plus
cruelle. Il faut que Feuillant ait encore bien de la pré
pondérance, pour qu’il soit parvenu à écraser d’une ma
nière aussi criante celui dont il a reçu des services aussi
'longs et aussi signalés.
M ais ces petites intrigues locales , ces petites rivalités,
vont disparoître en la c o u r, maintenant q u ’elle a counoissnnce de tous les détails.
L o i’sqii’elle a prononcé , jusqu’ici c’est toujours sans
(préjudice des f m s et m oyens des parties. Si la cour
a pensé que dans la rigueur des principes on ne pouvoft
révoqu er les arbitres qu’on avoit nommés ? ou
qui
�( s s . ) ;■
aboient commencé l e u r opération , la co u r n’en a pasr
moins été pénétrée des motifs qu’on avoit fuit valoir r
et s’est réservé de prononcer, dans sa sagesse-, nonobs
tant toute décision , ou sauf ù y avoir tel égard que de
raison.
.}
,
Comme il est surtout urgent de tirer les parties d af
faire , que jusqu’ici les arbitres n’ont fait que donner des
preuves de partialité ou de prévention, sans rien detei’’m iu e r , le sieur Chalier çonserye la plénitude de ses
m oyens, et va les développer. / ; 's ■
t.
IL établira, i° . qu’il ne doit pas de compte au sieur
Feuillant; que sa qualité de créancier n’est pas douteuse,
et a été reconnue par Feuillant lui-même.
2°. Q u ’en supposant qu’il fût astreint à un co m p te,
cette reddition de compte est devenue impossibiç-'par le
fait du sieur Feuillant.
3°. Que sa demande n’a rien d’exagéré relativement
à ses appointemenç, et que l’avis des arbitres en ce point
est absolument injuste, ou n’est que le résultat de la plus
basse jalousie.
1
,
t
,
...
§• Ier.
L e sieur C k a lier est créancier de F e u illa n t, et ne doit
pas de compte.
L e sieur Feuillant a termoyé avec ses créanciers; il a
présenté son bilan le 10 messidor an 7 : le passif excédoit
l’aclif d’une somme de 9 8 71 1 fr. 7 5 cent. Dans ce bilan,
le sieur Chalier y est porté par Feuillant au rang des dettes
^ cliirograpliaires échues; il est reconnu créancier pour
E 2
�I k
Ï 3« ' ) '
une somme de 14000 fr. L a déclaration de Feuillant à:
cet égard est faite sans lim itation, sans m odification, et
sans aucune observation, tandis que sur beaucoup d’autres
créances il fait des observations particulières, pour cause
d’omission , ou d’erreurs de calculs, ou de payemens
dont il n’h pas la certitude.
U ne déclaration dans un acte de cette nature est le
titre le plus certain en faveur du créancier. L e débiteur ,
en effet, doit présenter un état exact de sa situation tant
active que passive; s’il déguise la v é r ité , s’il met au rang
des créanciers des gens qui ne le sont pas, il est réputébanqueroutier frauduleux : telle est la disposition del’article 10 du titre r i de l’ordonnance de 1673. Si eneffet il étoit permis de présenter des créanciers simulésou exagérés, il seroit facile de réunir les trois quarts en:
som m es, d’obtenir toutes les remises ou les termes q u ’ oni
désirerait.
O n est bien éloigné de faire ces imputations au sieur
Feuillant ; on pense au contraire qu’il a fait tout ce qufc
dépendoit de lui pour être exa ct, qu’il n’a rien exagéré,,
et qu’ il a surtout voulu être juste. Il n’a pas songé com
bien il s’avilirait en changeant de langage ; quels soupçons'
il ferait naître contre sa conduite, s’il avoit porté dans son
bilan des créances fictives. E s t- i l possible de présumer
q u ’il eût porté Chalier comme son créancier d ’une somme*
de 14000 francs, si Chalier eût été sron comptable et son
débiteur? A i n s i , par cela seul que le sieur Chalier est
aujourd’hui porteur du bilan qui le constitue créancier,,
il a en sa faveur un titre qui ne peut etre critiqué,- el>
q u i termine toutes discussions..
�4 Aô\
C 37 D
'
L e sieur F eu illa n t, pour répondre à un moyen aussipuissant, a divagué dans sa défense, et a proposé plu
sieurs objections. Il a dit en premier lieu que ce bilan
n ’a voit pas eu de suites; qu’il avoit arrangé ses affaires,
terminé avec ses créanciers, que dès-lors le sieur Chalier
ne pouvoit plus se prévaloir de ce même bilan.
Cette objection est frivole. Ce n’est pas lui qui a ter
miné avec ses créanciers, c’est le sieur Etienne Feuillant,
son fils; c’est ce dernier qui a pris des termes. Mais le
bilan n’a point été rendu ; à la vérité les créanciers,,
par condescendance, permirent que le bilan ne fût pas
déposé au greffe du tribunal de commerce, suivant l’usage;
mais il fut convenu qu’il resteroit, par forme de dépôt,
entre les mains d’un tiers , pour y avoir recours dansle cas où les engagemens ne seroient pas remplis.
Feuillant oppose en second lieu q u e , nonobstant ce
b ilan , Chalier s’est néanmoins reconnu comptable, puis
qu’il a nommé des arbitres,, en exécution d’un premier
jugement du 27 du floréal an 10.
M ais ce bilan avoit été fait et présenté hors la pré
sence de Chalier.. Lorsque ce dernier a consenti à nom
mer des arbitres, il ignoroit l’existence du bilan. Si
Chalier l’eût eu alors- dans les mains, il n’y auroit pas.
eu de procès : Feuillant eût été dans l’impossibilité de
réc rim in e r, de revenir contre son propre fait; il n’eût
pas évité la condamnation des sommes qu’il reconnoissoit
devoir. Ce n’est que le 14 nivôse an 12 que ce bilan a*
été déposé chez Chassaigne, notaire; jusque-là, F e u i l l a n t
avoit étrangement abusé de l’état d’ignox*ance dans lrquelse tvouvoit Chalier. Mais lorsque ce dernier se fut p r o -
�*" \
( 3 8 )
curé une expédition de cet a c tc , alors, prenant de nou
velles conclusions, il demanda le payement des sommes
reconnues. O n ne voit pas comment il pourvoit résulter
des faits antérieurs une dérogation à un droit qui émane
d’un titre nouvellement d é c o u v e rt, qui jusque-là avoit
été retenu par le fait de F eu illan t, et qu’il îi’avoit pas
été au pouvoir de Chalier de produire.
A insi disparoissent les moyens de Feuillant ; il ne peut
plus désavouer une créance légitime, reconnue par un
titre formel dont l’exactitude est la base, dont l’exagé
ration auroit compromis son auteur.
L e sieur Feuillant veut encore se faire un moyen de
ce que les objets compris dans la demande du sieur
Ghalier, par exploit du 26 ventôse an 10 , ne s’élèvent
pas à la somme de 14000 francs : comment se fait-il dèslors, ajoute le sieur Feuillaut-, que le sieur Chalier puisse
se prévaloir du bilan , dès qu’avant de le connoître ses
prétentions n’alloient pas jusqu’à cette somme contenue
au bilan?
L e sieur Chalier a donné sur ce point une réponse bien
simple. T o u s scs chefs de demande réunis se portent à
la somme de 13413 livres 12 sous 1 denier; ils auroient
excédé la somme de 14000 fr., si le sieur Chalier n’avoit
déduit une somme de i 65 o liv. 19 sous , que le sieur
Feuillant lui devoit à cette époque, mais qui ne lui ap
partient plus depuis. Ceci a besoin d’une explication par
ticulière.
L e sieur Chalier avoit acquis de la dame Seguin ,
le 6 thermidor an 4 , un pré appelé de R a va li-fe-H a u t,
et une grange située à Brussoget : ces objets étaient af-
�■
4s î
( 39 )
fermés au sieur Feuillant ; le prix de la ferme du pré
étoit de 421 liv. 14 sous p a r 'a n n é e , et le loyer de la
grange étoit de 5o francs. La dame Seguin, lors de la
v e n te , se réserva la moitié des fermages pour l ’an 4:
de sorte que Feuillant n’a dû au sieur Chalier que la
moitié des fermages de cette année 4 >
l es fermages
entiers des années 5 , 6 et 7 ; ce qui fait en tout, pour
le pré et la gran ge, la somme de i 65 o liv. 19 sous.
- L e sieur R o c h e f o r t , gendre de la dame Segu in , ayant
désiré r e nt re r dans cette propriété aliénée par sa bellem ère, le sieur Chalier a rétrocédé le tout au sieur Roche,fort, par acte du 25 nivôse an 9 , reçu Jansenet, notaire,
et l’a subrogé aux arrérages de ferme qui lui étoient dûs
par le sieur Feuillant. E t quoique le sieur Feuillant, dans
la déclaration portée en son b ila n , eût compris ces arré
rages, le sieur Chalier devoit en faire la distraction : et
il en a résulté alors que ses créances ne se sont pas portées
à la somme de 14000 francs , tandis qu’elles l’auroient
excédée, s’ il n ’a v o i t fait cette déduction.
Cette explication porte sur un fait qu’il est impossi
ble de révoquer en doute, et qui n’a pas même été dé
savoué par le sieur Feuillant, lors de la plaidoirie de la
cause.
Il eât donc démontré que le sieur Chalier a cessé
d’être comptable envers F eu illa n t, et que sa qualité de
créancier est établie d’ une manière incontestable.
�D a n s le cas où le sieu r C h a lier p o u rro 't être assujéti
à un co m p te, cette reddition de compte est aujour
d 'hu i devenue impossible p a r le f a i t du sieur Feuillant.
L e sieur Ghalier a rendu un compte qui embrassoit
depuis le commencement de sa régie jusqu’au 5 complé
mentaire an 4. Il résulte du premier procès verbal des
arbitres B orel-V ernière et Jansenet, que le compte .avoit
été approuvé par toutes les parties, et que les arbitres en
ont trouvé le calcul exact. L e sieur Chalier étoit créan
cier de Feuillant d’une somme de 166 liv. 18 sous 8 d e n .,
d’une part ; et de 1995 liv. 2, sous 11 d e n ., d’autre , non
compris la somme de 30 0 francs p o u r payement fait à la
dame V is s a c , et sous la réserve de tous les appointemens qui lui étoient dûs.
;
Restoit le compte de la gestion depuis le I er. ven
démiaire an 7 jusqu’au 30 prairial de la même aimée -;
c’est-à-dire, neuf mois.
L e sieur Chalier avoit rapporté toutes les pièces jus
tificatives , ainsi que les registres nécessaires pour l’apu
rement. Il en avoit pris un récépissé du sieur Feuillant
iils; mais ce récépissé fut remis par le sieur C h a lie r, qui
en vouloit un plus régulier, et qui n’a pu l’obtenir. L e
sieur Feuillant voudroit étrangement abuser de ce défaut
de récépissé , et de l’impossibilité où se trouve Chalier de
rapporter aujourd’hui des pièces justificatives qui sont
entre les mains de Feuillant. Comm ent présum er, dit
Feuillant,
�4 s$
f 4' )
Feuillant, si j’avois refusé de donner ce récépissé, que
Chalier n ’en eût pas rendu plainte , ou n’eût pas fait
dresser procès verbal d’un fait de cette nature ?
O n ne doit pas môme dissimuler que cette observation de¡
Feuillant a été mise au nombre des motifs de l’arret de la
cour, du 29 février dernier ; mais cet arrêt est rendu sans
préjudice des fa is, et n’est que provisoire; et le sieur Chalier
a droit de faire valoir tous ses moyens. O r , comment
seroit-il possible d’exiger que le sieur C h alier, dans un
temps où il n’étoit point en procès, où les parties n’avoient
point manifesté d’intentions hostiles , dût prendre des
voiesaussi rigoureuses contre un négociant dont il avoit eu
toute la confiance ? Ne devoit-il pas espérer que le sieur
Feuillant q u i, dans un moment d’hum eur, et parce qu’il
éto ita igrip a rl’état de ses affaires, lui refusoit un récépissé,
seroit bientôt ramené à des sentimens plus h onnêtes, et
rendroit justice à un homme dont il s’étoit reconnu le
débiteur ? Quel intérêt auroit donc le sieur Chalier de
garder ces pièces justificatives , s’il en etoit n a n ti, s’il ne
les avoit pas remises au sieur Feuillant ? Comment les
registres seroient-ils au pouvoir de Feuillant, si on ne
lui avoit pas remis en même temps les pièces justificati
ves ? Croira-t-on que Feuillant, tr è s-e x e rcé dans celte
m a tiè r e , se fût contenté de la simple remise des regis
tres; qu’il n’auroit pas exigé les pièces justificatives ? C om
ment auroit-il reçu les pièces justificatives, jusqu’au der
nier complémentaire an 6 , sans exiger toutes celles qui
dévoient établir l’entière comptabilité ? et si Chalier
eut refusé de les rem ettre, Feuillant n’eut - il p«s fait
F
�( 42 )
dresser procès verbal de ce refus? n’au roi t-il pns fait cons
tater l’état de tout ce que lui remeltoit C h a lie r?
Il est prouvé par le premier procès verbal des arbitres 7
que Feuillant a eu toutes les pièces justificatives, jusqu’au
I er. vendémiaire an 7. L e compte en cette partie est re
connu ex-ict et apuré; dès-lors toutes les présomptions
sont en faveur de Chalier. D ’un autre c ô t é , l’arrêt de la
cour ordonne que Feuillant rapportera aux arbitres le
livre journal qu’ il a avoué avoir tenu pour les ventes et
recettes de charbon conduit au port. O r , Feuillant ne
rapporte pas ce registre. Cependant l’article I er, du tit. 3
de l’ordonnance de 1673 astreint les négocians et mar
chands, tant en gros qu’en d é t a il, à avoir un livre qui
contienne tout leur négoce, leurs lettres de change, leurs
dettes actives et passives , et les deniers employés à la dé
pense de leur maison. L ’article 3 du titre r i de la même
ordonnance veut aussi que les marchanda, lors de leuir
b ila n , soient tenus de représenter tous leurs livres et
registres cotés et paraphés en la forme prescrite au tit. 3,
L ’article 11 du même titre exige cette représentation, sous
peine d’être réputé banqueroutier frauduleux. Feuillant
a donc dû avoir ces registres, et il avoue les avoir tenus.
A v e c ces registres, 011 nuroit eu toutes les instructions
nécessaires pour le compte ; pu y auroit trouvé toutes les
négociations, toutes les recettes comme les dépenses du
sieur Chalier ; toutes les ventes qui étoient inscrites joui'
par jour sur un bulletin envoyé à Feuillant chaque jo u r ,
et avec lequel il connoissoit sans cesse son état de situa
tion : ordre nécessaire et bien entendu pour simplifier les
détails.
�( 43 )
Feuillant a été obligé de reconnoître devant les arbi
tres qu’il n’avoit point ce livre de raison ; il n’a voulu
donner aucun renseignement; il a *abusé de la situation
de Chalier par des refus injustes; il n’a point satisfait à
l’arret de la c o u r, qui ordonnoit ce rapport; il ne peut
donc se plaindre d’ un obstacle qu’il pouvoit faire disparoître , et il est démontre que c’est par son fait que le
compte n’a pas été rendu.
Il semble que les arbitres se sont réunis avec le sieur
Feuillant pour accabler le sieur Chalier; ils ont demandé
à ce dernier le rapport d’une police passée entre lui et le
sieur V illa re t, pour vente de foin faite par le sieur V i llaret au compte du sieur Feuillant. Cette police éloit une
pièce de l’an 6; le sieur Chalier l’avoit remise , comme
toutes les autres, au sieur Feuillant. P o u r prouver cette
remise, il rapporloit une note sans date du sieur Feuillant
jeune , qui lui demande cette police. Les arbitres n’ont
voulu avoir aucun égai’d à cette note.
L e sieur Chalier portoit dans son compte une somme
de 617 fr. payée par lui pour le compte du sieur Feuillant.
Celte créance dérivoit d’une lettre de change qu’avoit t :rée
Feuillant père au profit du sieur M a ig n e , marchand de
fer à B riou d e, sur le sieur Feuillant fils , à Paris , d’une
somme de 600 fr. La lettre de change fut protestée à son
échéance, faute de payem en t, et le sieur M aigne pou rsnivoit Feuillant père. L e sieur Chalier , toujours empressé
de Venir au secours de son commettant, souscrit au profit
de Maigne une lettre de change de la somme de 617 f r . ,
pour k; montant, est-il d i t , d’ une lettre de change de la
somme de 600 f r . , et celle de 17 fr. pour frais , qui est
F a
�( '44. >
due à Maigne,par le sieur Jean Feuillant aîné. Cette lettre
de change est en date du 28 floréal an 7. L ’acquit mis au
dos par M aigne , et comme des deniers de Chalier , est du
7 prairial môme année. Chalier a porté ce payement en
son registre , pag. 93 recto , art. 7 , et avoit remis la lettre
de change de Feuillant père ; mais il est nanti de celle par
lui souscrite et acquittée au profit de Maigne. Les arbitres
ont encore prétendu que ce rapport n’étoit pas suffisant,
et que Chalier devroit avoir la lettre de change de Feuillant
père.
O n pourroit citer une foule d’autres exemples de
leur partialité ; mais ces détails deviendroient fasti
dieux , avec d’autant plus de raison que le rapport des
arbitres a déjà été analisé dans la discussion , et qu’il est
facile de l’apprécier. Il suffit de dire que Feuillant ne
fait ici que récriminer-, que c’est par son fait seul que
le compte n’est pas rendu -, mais qu’ il ne peut plus abuser
de l’état du sieur C h alier, et que le moment d e là jus
tice est enfin arrivé.
§. I I I .
L e s appointemens du sieur C ha lier doivent être f i x é s
au m oins à 2000 f r a n c s par année.
Il
est avoué et reconnu par les arbitres, et notamment
par Roy n ard , que le sieur Chalier a eu , pendant sa gestion,
la plus entière confiance du sieur Feuillant; que nonseulement il dirigeoit les travaux des mines, avoit les
>lvtails de tous les ouvriers, mais qu’il étoit aussi cm-
�( 45)
ployé à toutes les autres affaires -, qu’ il étoit sans cesse en
vo yag e ; qu’en un mot il étoit chargé des soins les plus
importans.
Il
est bien extraordinaire qu’on ne vante les soin s im+
portans que po.ur les avilir , et qu’on veuille réduire le
sieur Chalier à des appointemens aussi médiocres. L ’es
prit de rivalité et de jalousie peut seul avoir dicté cette
décision. P o u r donner a la cour la facilite d a p p ie c ie r
des services de ce g e n r e , on ne peut s’appuyer que sur
des exemples.
S u i v a n t les journaux de 1763 et de 1 7 6 4 , le sieur
R o u x , directeur de la compagnie de Paris , avoit à cette
époque 800 fr. fixes par année ; p l u s , 72 fr. pour son
loyer , 3 fr. par jour lorsqu’il étoit en v o y a g e , et ses
frais de bureau. Si on juge par comparaison, ces appoin
temens , il y a quarante an s, valoient mieux que 2400 fr.
aujourd’hui ; et cependant le sieur R o u x n’étoit qu’en
sous-ordre. Il y avoit un associé de la compagnie qui
résidoit sur les lie u x , et faisoit toutes les recettes.
Grim ardias, qui étoit employé en 1781 , ne peut pas
etre pris pour exemple. Il étoit associé à l’exploitation
de la mine des Barthes, dans la commune de SainteFleurine : il avoit aussi le logement et la table; il étoit
éclairé , chauffé et blanchi.
Bureau , l’un des arbitres, commis inférieur à C halier,
avoit en l’an 5 , 1400 fr. par année; il étoit l o g é , éclairé
et chauffé , et avoit encore l’avantage d’avoir auprès de
lui son fils, employé comme charpentier de la mine.
E u l’an 8 , le sieur Bailly , aux ordres de C h a l i e r pour
le compte d’Élieune F e u illa n t, avoit 1200 fr. par année;
�( 46 )
de plus son lo gem en t, celui de sa femme et de sa n iè c e ,
son chauffage et sa lumière.
L e même Bailly , en l’an 9 devenu directeur de la
mine des Barthes , pour le compte du sieur L e s e c q ,
acquéreur de cette mine , avoit 2400 fr. d’nppointemens;
p lu s, 400 fr. pour ses voyages à Brioudc ; ainsi que son
logement pour lu i, sa femme et sa nièce j plus, son feu
et sa lumière.
L e sieur V a lb le t, commis en l’an 1 1 ,
aux ordres
du sieur Lesecq fils, avoit 1200 fr. et la table : il étoit
logé à la m ine; il avoit à Frugère , près de la mine des
B arth es, un logement aux frais du sieur Lesecq , pour
sa fem m e, sa cousine et quatre enfans , ainsi que le chauf
fage de sa famille. L e sieur Chalier rapporte à cet égard
le certificat du sieur V a l b l e t , et ne craint pas d’être
démenti pour les autres.
«■
P o u r donner une idée des travaux de la direction ,
qu’on se figure un directeur occupé sans cesse à l’examen
des mines , à régler et vérifier le mode d’exploitation,
visiter les dégradations, soigner les réparations, veiller
sans cesse pour empêcher les inondations ou les incen
dies , descendre chaque jour à soixante brasses ou trois
cents pieds de profon deur, au péril de sa v ie , sacrifier
sa santé, craindre î\ chaque instant l’asphyxie-: telles sont
les fonctions pour lesquelles on voudroit donner un mo
dique salaire de 5oo ou 900 f r . , lorsque le maître mineur,
accoutumé depuis l’enfance à ce genre de travail à
exister pour ainsi dire dans les entrailles de la terre ,
enfin un simple o u v r ie r , avoit 720 fr. d’appointemens
par année j lorsque le maître charbonnier gagnoit un
�( 47 )
salaire de 600 fr. aussi par année. La proposition révolte
par son injustice. Il seroit bien cruel pour le sieur C h alier qui est sans fortune , qui a contracté des dettes pour
obliger son commettant, d’avoir aussi mal employé les
plus belles années de sa vie. La cour ne verra pas sans
indignation la partialité des arbitres, la parcimonie et l’in
gratitude du sieur F eu illa n t, qui revient contre son
propre fait ; et le sieur Chalier met toute sa confiance
dans l ’équité des magistrats.
Signé C H A L I E R .
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
,
M e. V E R N I È R E , avoué licencié.
/
u À a/\c*jiA -*- o m
/ tA iK fA A Jiuub*.
a xK t-A
<*** a i w j r f r ' ^ ia ( u J r
^ufc:
%
-A. R lO M , de l'im prim erie de L
a n d rio t
, seul imprimeur de la
C our d ’appel, — Juin 1 8 0 6
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[Factum. Chalier, Antoine. 1806]
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exploitation du sol
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créanciers chirographaires
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Description
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Titre complet : Mémoire pour sieur Antoine Chalier, propriétaire, habitant du lieu de Brassac, appelant et intimé ; contre sieur Jean Feuillant aîné, négociant, habitant du lieu de Brassaget, intimé et appelant.
Annotation manuscrite: « 29 frimaire an 14, arrêt de la 1ére section. Ordonne qu'il sera procédé aux comptes devant les arbitres nommés et que toute pièces seront rapportées à cet effet. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1794-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1613
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brassac-les-Mines (63050)
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Domaine public
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charbon
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tribunal de commerce
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6b915c9f1f330aac5d58db562c587f46
PDF Text
Text
C
A
U
S
E
A JUGER,
r
Pour le citoyen
Feuilland ,
appelant
;
Contre les citoyens P aulet et sa femme s intimés.
LE C onseil soussigné qui a pris lectu re de la requête du
sieur F e u illa n t , où est exposée la demande de Jacq u es Poulet
et M arie M aurat , sa fem m e , est d’avis de ce qui suit :
C ’est pour l ’intérêt de la société que les m ines doivent être
exploitées. L e prem ier a rtic le de la lo i du mois de ju illet 1 7 9 1
consacre cette vérité , et tous les autres articles qui n ’en sont
que les corrolaires , l ’attestentr égalem ent.
A in si l ’A ssem blée constituante a décrété que les m ines sont
à
la disposition de la nation ;
dans ce sens qu’elles ne peuvent
être exploitées que de son consentem ent, et sous sa su rveillan ce.
A in si l ’A ssem blée constituante a décrété que les anciens con
cessionnaires seraient m aintenus j mais que la cessation de l ’ex
ploitation pendant un certain tem ps, serait un m oyen de d éch éan ce;
que les nouvelles concessions ne seraient faites qu’à ceu x
qui
justifieraient de leurs talens et de leurs facultés pour bien diriger
l ’exploitation d’une m ine.
T o u s ces articles de la loi attestent sans doute que l ’A ssem b lée
‘ constituante a considéré les mines comme des richesses natio
nales , dont l ’extraction ne devrait être
confiée q u 'a des mains
capables de les faire fructifier.
L e prem ier soin des juges qui ont à prononcer sur des contes
tations qui s’élèvent entre des concessionnaires et des proprié
taires de la super f i c i e , est donc de considérer ce que dem ande
A
�l ’intérêt social.; il doit être leu r régulateur ;'c a r l ’intérêt des
individus n’est et n e ' peut (être que secondaire.
D ’après te s principes , la dem ande des sieur ét dame Paul et
devrait être rejettée , quand même le sieu r. F eu illan t n ’aurait
pas en sa faveur des loix positives à opposer à ses adversaire*
qui paraissent n’avoir consulté dans leu r dém arche qu’une avidité
m al entendue , si même ils • n e( se sont pas abaissés jusqu’à
servir ‘ des intérêts étrangers.
N ous disons que l’intérêt social suffirait pour écarter la dem ande
des sieur et dame P au let ; et en e f f e t , quel est l ’intérêt de la
société dans l ’exploitation d’une m ine ? c’est que le concession
naire en tire tout l ’avantage possible. O r , le
résultat,de l ’opé
ration ordonnée dans la cause , par les juges qui en sont saisis,
prouve que le sieur F eu illan t rem plit parfaitem ent cet o b jet,
puisqu’il es coastaté que son exploitation est en pleine activité.
Q ue pourraient faire de plus les sieur et dame P au let ? rien assu
r é m e n t . D è s-lo rs, pourquoi les juges dépossèderaient-ils le sieur
F eu ilan t? co n’est pas l ’intérêt p u b lic qui les y .déterm inerait ,
puisque la bonne ^exploitation de ce concessionnaire rem plit les
vœux de la société à cet égard.
M ais il faut aller plus loin. L e sieur F eu illan t prouve par le
fait de son exploitation bien réglée , qu’il, a les talens et les
facultés que ce genre d’industrie exige.
L e s sieur et dame Paulet n’ ont pas fourni les m êmes p reu v e s;
il cas au contraire prouvé qu’ils seraient dans l ’impossibilité
d ’exploiter la mine partielle sur laquelle ils réclam ent la réintégrande.
A in s i, ;sous ce , nouveau rap p o rt, l ’intérêt social s’élèverait
contre
eux , et dem anderait la maintenue du sieur F e u ilian t.
M aintenant examinons les. loix positives qui ont ré g lé ’l'adm i
nistration de ces richesses souterraines et nationales.
L a cause des propriétaires et des concessionnaires a été débat
t u e contradictoirement à (’A ssem blée constituante.
,
Lçs
propriétaires de
la superficie se .sont
efforcés de faire
�3
décréter que les m ines étaient une dépendance de leu r s o l , que
par co n séq u en t, elles leur appartenaient comme la superficie.
L ’A ssem blée nationale sentit les conséquences funestes qui
résulteraient d’une pareille loi. E lle fut sur-tout frappée de ces
dèux-ci ; i . ° Q ue si les mines étaient une
dépendance de la
superficie , chaque propriétaire aurait le droit d’exiger une portion
de la valeur du m inéral qui serait sous son champ , ce q u i ,
d’un côté entraverait l ’exploitation , et de l ’autre , la rendrait
impossible ; car nulle compagnie ne voudrait bazarder «ne fo u ille ,
si , aux dépenses nécessaires à l ’exploitation , il fallait encore
joindre une portion du prix du m inéral.
z .° Q ue si les mines étaient une dépendance de la propriété
du sol qui les1 couvre , chacun aurait le droit d’exploiter sous la
superficie de son cham p , et de s’opposer par une exploitation,
partielle et jam ais fructueuse , à une exploitation en grand , la
seu le qui puisse être utile à la société.
L ’A ssem blée vit donc que si e lle adoptait le système d e £
propriétaires , e lle anéantirait les m in e s, et nous rendrait tribu«
taires des richesses m é talliq u es, et de l ’industrie d es
nations
étrangères.
E lle consulta l ’intérêt de la France , et rejetta la rédaction
proposée par les propriétaires
égarés
par la cupidité la plus
aveugle.
* Cependant e lle sut concilier l ’intérêt particulier avec l ’intérêt
général. E lle refusa aux propriétaires ce qui pouvait nuire à la
ïo c ié t é , et leu r accorda ce
qui pouvait leur être u t i le , snn#
inconvénient pour l ’intérêt public.
C ’est d’après ces principes qui marquent le plus haut dégré
de sagesse où puissent atteindre les législateurs , que l'A ssem blée
constituante , en mettant les mines à la dispositiçn de la N ation,'
confirma les concessions qui n ’avaient point été obtenues p a i
spoliation sur les propriétaires , et perm it a ceux-ci de rentre!
tlans les m ines qu’ils avaient d é c o u ve rte , et qu’ils exploitaient
flvant la concession qui les avait dépouillés.
^
�c
? S i là' déniandû des sieur et dartie P au let était dans ces prin
cipes ; c’est-à-dire , s’ils avaient été dépouillés de la m ine q u ’ils
ré c la m e n t, les juges ayant à punir une spoliation , devraient
déposséder le sieur Feuillant.
r
M ais dans ce système , les sieur et dame P au let auraient à
prouve* ;
. i . ° Q u ’ils ont découvert la mine .dont il s’agit ; c a r ia qualité
de propriétaire du champ qui la Couvre , ne leu r donne aucun
droit dont ils puissent user pour déposséder le con cessionnaire,
puisque nous avons vu que les mines ne sont point une dépen
dance de la propriété de la superficie»
2 .° Q u’ils exploitaient cette mine avant la
C ’est la disposition tex tu elle
concession.
de l ’article V I de la loi du mois
de ju illet I 7 9 1 *
- » L e s concessionnaires dont la concession a eu pour objet des
v mines découvertes et exploitées' par des propriétaires , seront
ü déchus de leurs concessions , à moins qu’il n ’y ait eu de la
» part desdits propriétaires , consentem ent libre , lé g a l , et par
' » écrit , form ellem ent confirm arif de la concession ; sans quoi
» lesdites mines retou rn eront aux propriétaires qùi les exploitaient
» avant lesdites concessions , à la charge par ces derniers , de
» rem bourser , de gré à gre ou à diye d experts , aux conces»
j» sionnaires actuels , la valeur des ouvrages et travaux dont ils
j> profiteront. Q uand le concessionnaire aura rétrocédé au pro5* priétaire , le propriétaire ne sera tenu envers lu concession-i
* naire qu ’aux rem boursemens des travaux
faits par le cession?-
y naire , desquels le propriétaire pourra profiter. »
,
L e s sieur et dame Paulet font-ils la preuve .de ces deux faits !
prouvent-ils qu ’il aient découvert la mine ?
Il paraît qu’en 17 3 9 , leurs auteurs afferm èrent leur champ
a u x sieurs Desroy , M orel et F o iir e t , pour faire
exploiter la
îuine qu’il renferm ait.
- M ais ce n ’est pas là , ce que la Loi appelle : découvrir une
jainc :
�3 >r '
5
■*
L e hazârd fait voir ou soupçonner Inexistence d’une m in e ;
ainsi la mine connue sous le nom de la T au pe , dans J e
voisi
nage de celle dont il s’a g it , fut apperçue par la sortie
d\ine
taupe qui poussa au dehors du m inéral de charbon.
M ais assurément le prem ier qui vit l ’e ffet de la sortie de
cette taupe , ne fut pas censé avoir découvert la m ine.
Q u’entend donc la loi par découvrir une mine l e lle l ’a expliqué :
c ’est l ’avoir mise en état d ’exploitation. E lle le dit d’une ma
nière assez
exige
claire > en réunissant les deux conditions qu’elle
du propriétaire , pour lu i donner le droit d ’expulser le
concessionnaire J il ne peut avoir ce
droit qu’autant qu’il aura,
découvert et exploité la m ine,
V oyons donc si les sieur et dam e P au let prouvent qu’ils ont
exploité la m ine ; car c’est par l ’exploitation seu le qu’on peut
en prouver la découverte.
L e prem ier acte qu’ils rapportent , est ce bail de 178 9 : mais
ce bail est l ’arme la plus forte qu’on puisse leu r opposer; il
prouve en effet , qu ’ils n’ont pas exploité la m ine , qu’ils l ’avaient
au contraire cédée pour qu 'elle fût exploitée
par d ’autres que
p ar eux.
P ar-la leurs auteurs ont m anifesté qu’ils n ’avaient pas exploité
la mine , et même qu’ils étaient hors d ’état de l ’exploiter.
Dès-lors
leS sieur et dame P au let ne sont pas dans l’espèce
de l ’article V I de
la loi du mois de ju ille t 1 7 9 1 , puisqu’ils
avaient à prouver qu’ils avaient découvert et exploité la m in e ,
qu ’ils ne le prouvent pas , et que le contraire est prouvé par l’acte
même qu’ils rapportent.
M ais quand ce bail , contre tous les principes du raisonnement,
Serait considéré pour un moment , comme une preuve que les
auteurs des sieur et dame Pau let ont découvert la mine , et l’ont
exploitée , sinon par eux , au moins par des ferm iers , le systèm e
d es adversaires du sieur F eu illan t n’en serait pas plus adm issible.
L a loi n ’exige pas seulem ent la preuve que les propriétaires
de la superficie ont découvert la m ine couverte par leur s o l ,
et qu’ils l ’ont exploitée un moment.
,
�6
E lle est plus sage , plus conforme aux principes qui ont guidé
le
législateur. U n e m ine découverte et exploitée un instant,
et abandonnée après de vaines tentatives et des efforts au-dessus
des facultés du propriétaire , doit être considérée comme une
m ine vierge qui attend un homme industrieux , assez riche et
assez courageux pour en entreprendre l ’exploitation.
L a loi nous m ène elle-m êm e à cette vérité par deux articles ;
d ’abord l ’article V f et ensuite l ’article X V .
L ’article V I veut en effet que le propriétaire qui veut expul
ser le concessionnaire , justifie que la mine qu’il réclam e , a été
découverte par l u i , et exploitée avant la concession ; c est-àdire , qu’elle veut que le propriétaire justifie que c ’est par une
véritable spoliation, par une surprise évidente , par l ’effet de
l ’intrigue auprès du m inistère , que le concessionnaire l ’a dépos
sédé de son exploitation.
Et pour quil ne restât aucun doute sur sa véritable intention,
elle a consacré par son article X V , le principe que toute con
cession est annullée par une cessation de travaux pendant un an.
S i l ’on cherche l ’esprit de ces deux loix qui s'expliquent ,
qui se corroborent m u tu ellem e n t, on le trouve dans la m axim e
que nous avons posée en commençant , et qui a dirigé l’Assem blée constituante dans le décret sur les mines ; c’est qu’elle a
considéré les m ines comme des richesses nationales dont l’extrac
tion devait toujours être a c t iv e , comme les besoins auxquels
elles sont destinées , sont toujours renaissans ; c’est qu'elle a
pensé que celui qui avait le plus de droit à leur exploitation ,
était celui qui en tirait le plus grand p a r t i, parce que celu i-là
seul rem plissait le vœu de la société.
A insi quand on admettrait que les auteurs des sieur et dame
J ’ aulet ont découvert la mine , qu ’ils l ’ont exploitée par des fer-^
miers , que cette exploitation peut leur être appliquée , il y
aurait toujours à leur faire cette grande objection ; cette obj'co*
lion qui n’admet pas de réponse , parce qu elle est prise dans
la loi meme : qu’iis n '00t pas continué cette exp lo itatio n , qu ’ils
�7
n ’exploitaient pas^ lors de la
concession , qu’ils avaient cessé
d ’exploiter plus d ’un an avant la concession, et plus dé 40 ans.
D e ce qu’ils n ’exploitaient pas avant [la concession, il suit qu ’ils
n ’ont pas été dépossédés, que dès-lors ils ne peuvent pas être
réintégrés , qu ’enfin ils ne sont pas dans l ’espèce de l’article
V I qui n ’a voulu punir que les concessionnaires usu rpateu rs,
et venger les propriétaires victim es de l ’intrigue et des erreurs
d ’une administration qui a été livrée dans cette partie , comme
dans les autres , à un arbitraire toujours funeste.
D e ce que les sieur et dame P a u le t , ou leurs ferm iers ,
avaient abandonné l ’exploitation de la m ine depuis plus d ’un
an avant la concession , ils étaient censés avoir abandonné cette
m ine , et dès-lors e lle devait être considérée comme vierge :
e lle a pu être c o n c é d é e ; elle a dû l ’ê tre ,* p a rc e
q u ’il est de
l ’intérêt de la société qu’une m ine soit toujours en état d’exp leitation active ; et l ’homme industrieux qui en
sionnaire ,
Pour se
pouillé un
à l’époque
devient conces
est considéré comme ayant découvert
convaincre que, le concessionnaire qui
propriétaire qui tenait la mine en état
de la concession , est considéré comme
vert la miñe , il ne faut que rapprocher
les
la mine.
n ’a pas dé
d ’exploitation
ayant décou
articles IV , V I
et X V .
L ’artîcle I V porte :
» L e s concessionnaires actuels ou leurs cessionnaires qui ont
» découvert les mines qu’ils exploitent > seront m aintenus jus» qu’au term e de leur concession. »
» En conséquence , les propriétaires de la superficie ne pour» ront troubler les concessionnaires actu els dans la jouissance
» des concessions. »
<
L ’article V I ordonne la réintégrande du propriétaire qui a dé
c o u v e rt, et qui exploitait lors de l a f concession la mine cknt
il a été dépossédé.
Enfin l ’article X V regarde comme abandonnée une m ine dont
l ’exploitation a cessé pendant un an.
�V
s
L a loi
a donc regardé , par
l ’article X V , une m ine dans
l ’inertie , comme une m ine dont la N ation pouvait disposer.
E lle a donc regardé dans l ’article IV , ce concessionnaire
d’une m ine abandonnée , et rem ise par lui en état d’exploitation,
comme l ’ayan t découverte , et exploitée.
Enfin la loi n ’ayant voulu par l ’article V I , réintégrer que lepropriétaire qui avait été expulsé par la force ou l ’aveugle autorite ; si le propriétaire qui réclam e la réintégrande , ne prouve
pas qu’à l'époque de la con cession, il tenait la mine en étaï
d ’exploitation , il n ’est pas dans l ’espèce de la loi ; ce n’est pas
lui qui est censé avoir découvert et exploité la mine , c’est le
concessionnaire, qui a cette
qualité aux yeu x de la loi,
) S i la loi eût voulu favoriser tous les propriétaires , et les réin
tégrer par ce la seul qu’ils sont propriétaires, e lle se fût contentée
de dire : U s propriétaires seront réintégrés ; elle n’aurait pas
ajouté
au mot p ro p riéta ires, ceu x-ci
qui auront découvert et
exploité les mines,
En ajoutant ces mots , e lle à donc marqué son intention do
conserver les principes de droit public qui veulent que les actes
d’administration reçoivent leu r exécution lorsqu’ils n ’ont rien de
contraire à la loi , et sur-tout quand ils serven t l ’in térêt social.
Quü serait-cc en effet qu’une préférence donnée au proprié
taire de la superficie , sur un concessionnaire qui fait bien valoir
la chose publique dont l ’exploitation lui a été confiée ? C e sçrait
une m anière sûre de paralyser ce genre d’industrie , l ’un des
plus e s s e n t ie ls p u is q u e , outre qu'il fournit à des besoins do
prem ière n é ce ssité ,
il nous affranchit de la dépendance où nous
serions sans l u i , des richesses industrielles des nations rivales
de la France.
O n doit sentir par ce pou de m ots, com bien serait impoli^
tique une loi qui aurait voulu et ordonné la
dépossession des
con cessionnaires, en faveur des propriétaires qui « au raien t à
faire valoir que cette vîÿjie qualité.
,'t
,(,
t
On doit sentir en même temps com bien est sage la loi qui
existe
�9'
existe , com bien e lle est conforme au prem ier a r t ic le , dont les
autres n ’ont dû être que des corrolaires,
L e prem ier article déclare
lesr mines à la disposition de la
N a tio n , dans ce sens qu ’elles ne pourront être exploitées
que
de son consentem ent et sous sa surveillance.
L a prem ière conséquence de cet article est la
confirmation'
des concessions qui ont été et qui sero n t.faites ou confirmées
par l ’adm inistration.
M ais cette l o i , .pour être d ’acord avec elle m ê m e , devait aussi
déclarer nulles les concessions qui auraient été accordées peur
des m ines découvertes et exploitées par des propriétaires , parce
que dans ce cas la concession serait une spoliation : l ’arrêt qui
l ’aurait accordée , contiendrait une surprise^ faite aux
adm in is
trations ; il est juste que dans ce cas là la loi rétablisse celu i qu i
a été expulsé par l e dol e t la surprise.
M ais hors ce cas , quand un propriétaire de la superficie n e
peut invoquer que cette qualité , sans prouver qu ’il a découvert
e t exploité une mine avant la concession , la loi ne lui doit
rien , et doit tout à l ’homme industrieux et u tile
qui a tiré
du sein de la terre , des m atières nécessaires
aux besoins de
la société.
Enfin il est frappant que les sieur et dam e Paulet qui n o n t
pu exploiter la m ine dont il s’a g it, ne veulent aujourd’hui s’en
em parer , que parce que les frais sont faits , qu’e lle est en état
de produit ? M ais q u ’ils n e s’aveuglent pas , pour la m aintenir
dans cet é t a t , il faut des fonds et des talens qu'ils n ’av a ie n t
pas avant la loi du mois de ju ille t 1 7 9 1 , et qu ’ils ne peu ven t
pas avoir acquis depuis.
A insi , ou ils ne cherchent qu'à rançonner le sieu r F e u illa n t,
ou ils servent des intérêts étrangers j et sous ces deux rapports,
ils sont infinim ent défavorables. Sous tous les rapports possibles i
ils doivent succom ber dans le u r dem ande.
D é lib é ré à .Paris , k
i 3 ju ille t 17 9 a .
CO U RN O L*
B
�ie
X _/E conseil soussigné qui a lu la prem ière consultation qu’il
avait faite le i 3 ju illet 17 9 2 , le b ail des mines de C o m b elle,
du 22 octobre 178 9 , le jugem ent rendu contre lé citoyen F e u il
lant Faîne , au tribunal de district d’Issoire , le
d e rn ie r, le
décem bre
procès - verbal
d f& sé
sur
ladite
mine le
12
17 9 1 ; enfin les observations qui étaient jointes à ces
différentes pièces , est d’avis de ce qui suit :
L e jugem ent rendu
contre le
citoyen F e u illa n t , est aussi
contraire aux principes qu’à la loi du 28
ju illet 17 9 1 , qui les
a consacrés.
L e tribunal dont il ém ane , n ’a pas eu présent à l ’esprit l’en
sem ble de cette loi , et il s’est attaché judaïquem ent à la lettre
d ’un article seul qui ne devait pas être appliqué à l ’espèce.
Suivant lui , l ’article I V de la loi du
28 ju ille t 1 7 9 1 , ne
porte m aintenue qu’en faveur des concessionnaires qui ont dé
couvert les m ines qu ’ils exploitent ; où , a-t-il d i t , il est prouvé
par la sentence
de 17 4 0 , que la m ine
dont il
s’agit ,
était
découverte , à cette époque , par les ferm iers des auteurs des
adversaires du citoyen F eu illan t ; et de-là il a tiré la conséquence
q u ’ils devaient être réintégrés dans cette m ine.
C e n’était pas l ’article I V de la loi, qui devait décider le tri
bunal. Pour s’en convaincre , il faüt se rappeler les objets qui
étaien t en discussion à l ’A ssem blée constituante ; et à cet égard,
i l suffit de bien se pénétrer de la loi.
, ■
O n discuta
deux objets principaux ; l ’intérêt de la N ation
<*t l ’intérêt des propriétaires.
O n exam ina la grande question’ de savoir s i'le s mines étaient
des propriétés nationales , ou des dépendances des propriétés
in d ivid u elles.
O11 reconnut et on consacra en p rin cip e, que les mines étaient
des propriétés nationales ; dans ce sens ,, qu’e lle s ne pouvaient
etrfc exploitées que du consentem ent
la N atio h .
et s ° uS
surveillance de
�ri
C e principe une fois co n sacré, on
se
dem anda si les conces
sions faites par le gouvernem ent , étaient valables , s’il fa lla it
les m aintenir.
A près une
discussion très-lum ineuse , il fu t décidé que les
concessions anciennes auraient leu r exécution : A rtic le IV de
la loi
Il ne fut pas d ’abord conçu dans les term es qu’on lit aujour
d’hui ; il portait confirmation pure et sim ple de toutes les con
cessions.
Il passa : mais à la lecture du
procès-verbal , et
l ’on
croit
m êm e dans la séance , les députés qui défendaient les intérêts
des propriétaires , firent sentir que , par un article aussi géné
rique , l ’assem blée courait les risques de consacrer des spolia
tions , des usurpations , des concessions enfin extorquées du gou
ve rn e m e n t, au p ré ju d ic e 'd u propriétaire qui avait découvert et
qui exploitait la m ine dans le temps même de la concession.
C es réflexions am enèrent quelques cliangem ens dans l ’article.
Il fut rédigé tel qu’on le lit aujourd’hui ; et elles firent décréter
l ’article V I dont nous parlerons dans un moment.
C e t article IV ne règle que les droits de la N ation et ceux
des concessionnaires ; il est étranger aux propriétaires ; il déter
m ine quels sont les concessionnaires qui doivent être m ainte
nus ; quels sont ceux à l ’égard desquels la nation peut repren
dre ses droits.
Q uand les intérêts respectifs de la N ation , et
des conces
sionnaires furent réglés par cet article j on fit l ’article V I pour
ic g le r les droits des propriétaires à l ’égard des concessionnaires,
et il fut décidé que les propriétaires qni avaient découvert un«
mine , qui l ’exploitaient lors de la concession faite à des étran~
gers , seraient réintégrés : article V l l l de la meme loi.
C et article contient des dispositions infiniment sages. L ’esprit
de la loi est de favoriser l'explojtatiou des m in e s, de les ¿ te l
à ceux qui ne rem plissent pas les vues de la Nation , et de
les confier à l’homme hardi , autant
en tirer le m eilleur parti possible.
qu’indusirieua , qui p e u t
B a
�L e propriétaire a le droit le plus favorable , s’il peut attein
dre p a i ses facu ltés et son industrie , le but que la N ation se
propose.
S i ce droit a
été violé par des concessions arrachées
au gouvern em ent , le propriétaire doit être réintégré.
M ais que fau tril que le propriétaire
qui allègue l ’usurpation,
prouve contre le concessionnaire qu’il veut déposséder ?
Il faut qu ’il prouve d eu x choses : qu’il a découvert la m in e ,
et qu’il l ’exploitait lors de la concession. C e n’est que par là
q u ’il peut se présenter
avec
avantage
dans
les
tribunaux
chargés de m aintenir l ’exécution des loix.
L e s adversaires du citoyen Feu illan t présentaient-ils la preuve
de ces deux faits que la loi a réunis
dans sa disposition pour
fa ire voir qu ’ils doivent concourir , et qu’ils ne peuvent pas
être divisés ? P iou ven t-ils q u ’ils ont découvert la m ine dont il
s’a g i t , e t qu’ils l ’exploitaient lors de la concession qui en a été
faite au citoyen F eu illan t ?
N ous ne pouvons consulter que le jugem ent pour nous éclairer
à .c e t égard. Q u’y voyons-nous ? qu’une sentence de 17 4 0 prouve
que la mine était découverte et exploitée , à cetle époque , par
les ferm iers des auteurs des adversaires du citoyen F eu illan t.
~ V o ilà tout ce que le tribunal a vu : les motifs qui l ’ont déter
m iné démontrent qu ’il n ’a pas du tout saisi la loi.
Q u ’importe en effet , d ’après cette loi , que cette m ine ait
¿té découverte
et exploitée
en
17 4 0 ? C e qu’il im portait de
savoir , c’était si la m ine était exploitée lors de la concession
qui en a été faite au citoyen Feuillan t.
S i elle 1 était à cette ep oq u e, le citoyen F eu illan t est un usur
pateu r ; il a dépouillé le propriétaire , en trompant le
gouver
nem ent. L ’a rlic le V I de la loi veut qu’à son tour il soit dépos
sédé. R ie n n ’est plus juste.
M ais si le propriétaire n ’exploitait pas à l ’époque de la con
cession , si
depuis long-temps il avait abandonné ses travaux
ou ses ten tatives, alors la mine est retombée dans les mains
de la N ation qui a
eu intérêt Ue la confier
à
un homm e
�i3
industrieux. C ’est de son droit qu’elle a usé en la concédant
« t elle n’est que ju s t e , en maintenant le concessionna.re à q u i
ella a promis garantie et protection.
E lle ne doit rien au
propriétaire qui a cessé ses travaux :
e lle doit tout au concessionnaire qui a rem is la m ine en état
¿exp loitatio n . Dans
cette lutte , toute la
défaveur
est
du
côté du propriétaire que l ’avidité arme contre le concessionnaire.
T o u te
la faveur
est du côté du
concessionnaire
com bat:ant pour ses in té rê ts, défend égalem ent
qui , en
ceux
de
la
N ation.
D ans l’espèce , il n ’y a ra it aucune trace d ’exploitation de la
part des adversaires du citoyen F e u illa n t, depuis 1 7 4 0 ; il était
donc dém ontré que depuis très-longtemps cette mine était aban
donnée; il était égalem ent dém ontré d’après la loi que le gouverne
m ent avait le droit de la concéder ; que dès-lors le citoyen F e u il
lan t devait être m aintenu dans ses droits , résultans d’un titre légal.
S i le tribunal qui a rendu le jugem ent dont il s'agit , eût
pesé ces réflexions ; s’il eût été bien pénétré de l ’esprit et des
dispositions littérales de
la loi , il n'eût point consacré le sys.
têm e étrange qui l ’a déterm iné.
S i , à cet exam en , il eût ajouté la lecture de l ’article X V ,
il se fût convaincu que la loi , pour l ’intérêt g é n é ra l, regarde
une m ine comme
abandonnée , quand les travaux sont
cessés
depuis »n an. •
Et pourquoi
a-t-elle prononcé cette pein e l c ’est parce qu ’il
est de nécessité que les m ines soient toujours en état 3 ’exploitation. D u moment q’elles cessent d’y être , il en résulte
des pertes pour la société , et notre dépendance de l ’indHSlrie
étrangère s’accroît.
U ne' autre considération aurait du faire sentir à ce trib u n al,
l ’erreur et l ’inconvénient du systèm e qu’il a embrassé.
I l n e suffit pas dans cette m atière de rendre une justice dis
tributive , rigoureuse ; il faut encore que la justice qu ’en rend à
l'individu , ne tourne pas au préjudice de la chose publique.
�\ * V ':
*4
Dans une m atière
où tout est d’intérêt national ; c'est sur-tout
cet intérêt qu’il faut considérer.
D ans l ’espèce , il existait un procès-verbal ordonné par un ju ge
m ent. C e procès-verbal constate une vérité qui était du plus
grand poids j c’est qu’en rendant
adversaires du
l ’exploitation des mines aux
citoyen F e u illa n t , elle
était infructueuse dans
leurs mains , puisque leu r exploitation dépend des puits qui sont
dans lés usines du citoyen F eu illan t ; usines qui sont établies
sur ses propriétés. Il ne paraît pas que le tribunal ait seulem ent
fÊjetté les ye u x sur ce procès-verbal qu’il avait ordonné , et qu ’il
• n ’est
pas
à présum er
avoir
considéré com m e une opération
inutile.
C e procès-verbal qui sera m is sous les ye u x du tribunal d ’appel,
fera im p ression , d au tan t q u ’il est fait con tradictoirem ent, et
qxie par conséquent il doit faire foi en justice.
Q ue
lit-on dans ce procès - verbal ? O n y lit
laits , qu’il n’y
susceptible
entr’autres
a dans cette m in e , aucune p artie q u i soit
d’être
exploitée ; qu ’il
faudrait pour rencontrer
les filons , creuser encore à plus ce cinq brasses ; ( et déjà le
puit est de la profondeur de
brasses ; ) et que dans ce cas,"
on serait em barrassé par les eaux qui ne peuvent se x tra ire
qu’à l ’a id e 'd e s puits que le citoyen Feu illan t a o u v m sur son
terrein , inférieur* à celui d e la dame de M oran.
L ’ofîicier chargé de dresser ce procès-verbal a été frappé sur
tout de cettte vérité , car
il termine ce procès-verbal en ces
term es :
» E t nous nous sommes rendus certains que ce n ’est uniquey ment qu’à l ’aide des trois puits dont on tire l ’eau habituel» lem ejit , sans interruption , avec les plus
gros frais , puis-»
» que plus de vingt chevaux sont em ployés à ce service ', que
» le sieur F eu illan t peut parvenir à dessécher sa mine , qui ^
» comme on vient de le dire , est dans un plan plus élevé que
y cerîl*
ÿ terrein
cie la dame de M oran qui aurait à pratiquer sur son
des puits de m êm e nature qui , mis
« pourraient rem plif le même objet. »
en . activité
�1
5
On aurait pu ajouter que cette dépense s e r a i t é n o r m e
q u e l'e xtrac tio n des eaux d a n s c e t t e p a r t ie p lu s in fe r ie u r n e
s e s e r a i t j a m a i s b i e n q u e l a r i e n n 'o f f r i r a i t j a m i s q u 'u n e
e x p lo ita tio n m a ig r e e t p r e s q u e n u lle
C e s c o n s id é r a t io n s a u r a ie n t é t é d u p lu s g r a n d p o id s d a n s la
d é t e r m i n a t i o n d u t r i b u n a l dont le prem ier coup d'œil d o i t ê t r e
p o r t é s u r l e q u i d u t i l u s d a n s u n e a f f a i r e o u l 'i n t e r ê t n a t i o n a l
est tout.
Il est à présum er q u ’elles n’é c h a p p e r a p a s a u tribunal d’app e l e lle s lu i s e r o n t p r é s e n t é s e t e lle s s e r o n t s a is ie s L e
jugem ent sera i n f i r m é s 'i l n e l 'é t a i t p a s c o m m e l a l o i s e r a i t
v io lé e le c it o y e n F e u illa n t s e r a it s u r d e fa ir e c a s s e r le ju g e
m
entenledénoncantautribunalchargédeconserverlesloix
dans toute leu r pureté.
C e t t e p é r s u a t io n n e p e r m e t p a s d e c o n s e ille r c itoyen Fe uill a n t . de deamnder lasubrogation lë g a le sur le citoyen S adourny
q u i a acheté les droits litigieu x de l a dame de M aurat ,r e l a t i
.
v e m e n t à c e tte m in e
Il n'yauraitqu'uncasouilpouraitsedéterm
iner
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c e l u
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p o u r r a it
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d é c id e r
y e n
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lé g e r
s a c r i
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fice pour fa ire cesser toute discussion : m a is q u 'il n e d e m a n d e • <**v
c e t t e subrogation, que très-subsidiairem ent et co m m e s o n s a c r i
f i c e
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D é lib é ré a P a r i s ,
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Feuilland. 1793?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cournol
Subject
The topic of the resource
mines
concession d'exploitation
intérêt général
propriété du sol
Description
An account of the resource
Titre complet : Cause à juger, pour le citoyen Feuilland, appelant ; contre les citoyens Paulet et sa femme, intimés.
Annotations manuscrites: détail du jugement.
Table Godemel : Mines : 1. les mines sont exploitées dans l’intérêt général plutôt que dans l’intérêt privé. Le propriétaire du sol peut obtenir préférence pour la concession, s’il peut atteindre, par ses facultés et son industrie, au but que la loi lui propose. que doit-il prouver, s’il veut déposséder le concessionnaire ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1793
1739-Circa 1793
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1016
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Eloy-les-Mines (63338)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53114/BCU_Factums_G1016.jpg
concession d'exploitation
intérêt général
Mines
propriété du sol
-
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8ae621e63165b2db9c1d009dd11366a9
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MEMOIRE
P O U R Le fieur F E U I L L A N T , Défendeur &
Demandeur.
CONTRE
G
.
e r v a i s
S A U R E T
,
Défendeur & Demandeur
L
E fieur Feuillant convient qu’un créancier ne doit
imputer fur fa créance , d ’autres objets que ce u x que
le débiteur prouve qu’il a payés. M ais auffi penfe-t-il que
tout hom m e raifonnable trouvera qu’il e f t injufte qu’un créanc i e r q u i a c e f f é d e l ' ê t r e , e x ig e que celui qui par
paiement a ce ffé d'être fon débiteur» foit encore f orcé à
payer fes dettes , fous le p rétexte qu’il a été fon débiteur.
O r telle e ft la prétention de Sauret. D ans le même temps
où le fieur Feuillant étoit fon d é b ite u r, il a été fa caution.
Sauret à la vérité prétend que le fieur Feu illant n’a pas été
f a caution , mais qu'il a fait fon affaire perfonnelle de fa dette.
L e fieur Feuillant a rempli fes engagements envers S a u r e t ,
dans le m ême temps où celui-ci prétend que le fieur F e u il
lant s eft rendu débiteur à fa décharge. S i le fieur F eu illant
A
�V
2
prouve qu’il s’eft libéré de fes engagem ents perfonnels envers
Sauret , ne paroîc-il pas jufte que les choies rentrent dans
l’ordre naturel , 6c que Sauret paye une dette qui a tourné
à ion profit ? O r le fieur Feuillant prouve non feulement que
Sauret a été pave en entier de fa créance contre l u i , mais
e ncore que Sauret eft fon débiteur de deux v o y es de
'•'T ïïa r b o n T ^,
O T p re m iè re aflignation dans cette affaire a é té donnée
en mars 178 7 à Sauret , par le fieur S é v e , qui l ’a toujours
regardé com m e fon unique débiteur } fous le cautionnement 'du fieur Feuillant. Sauret , dans les commencements
] d c c e t te ajïaire , a fait naître une foule d'incidents , qui
[ e n ont d ifféré le jugem ent , & dans lefquels il a toujours
p é t é convaincu ou de fe tromper ou d’avoir voulu tromper.
Sur la fin de juin , le fieur Feuillant a fait un v o y a g e à
P a r i s , où il a été retenu pendant trois mois pour affaires
im po rtantes, ou pour raifon de maladie. Sauret pendant ce
temps n ’a ceifé de folliciter un jugem ent ; la préfence du
fieur Feuillant ayant été regardée com m e néceflaire, le ju
g em en t a été différé jufqu’à fon arrivée. M ais S a u r e t, crai
gnant alors la préfence du fieur Feuillant & fes défenfes , a
eu recours à un A v o c a t , qui lui a donné une confultation
en fa faveur. L e fieur Feuillant , inftruit que cet A v o c a t
s’étoit porté pour défenfeur de S a u r e t , le pria de mettre
l ’affaire en arbitrage. L e fieur Sauret , l ’on ne fait fou3
quel prétexte , mais vraifemblablement fondé dans fes efpér a n c e s , nJen a montré que plu* de chaleur dans cette af
fa ir e , & a refufé abfolument de fe rendre à la propofition
du fieur Feuillant. C elu i-ci a , de fon cô té , mis fous les
y e u x de quatre célébrés A vocats de cette V ilie , un m é
moire déraillé des faits & de fes moyens de défenfe ; & tous
ont été d'avis que la co n te ih tio n de Sauret é toit des plus
mal fondée.
T o u t alors étoit égal entre les p a rties, lorfque le défen
feur de Sauret a demandé communication du njémoire du
licur F e u illa n t , & de la confultation qui a fuivi. Il a ré
�pondu à l’un & à l’autre par un m ém oire que Sauret a fait
im prim er, dans l’efpérance fans cloute d’en impofer au public «
par l’éclat donne à cette allaire.
'
'
L e T ribunal auquel l ’affaire eft p o r t é e , peu accoutum é à
voir imprimer dans les affaires de fa com pétence , gémic
fans doute des frais qu’occafionnent les chicanes du fieur
Sauret. Mais ce dernier aura peut-être à fe repentir dJavoir
donné à cette conteftacion une publicité qui pourroit nuire
à la réputation de probité , dont il fait parade avec trop de
chaleur.
Q u o iq u ’il en f o i t , le fieur Feuillant a dû à lui-m êm e , au
public & aux Jurifconfultes qu’il a c o n f u lt é s , de fe juftifier
authentiquement du reproche de fuppofitions & d June foule
d 'in e xa & itu d e s, au m oyen defquelles il auroit furpris la re
ligion de fes Avocats. I l va tâcher de fuivre pied à pied le
défenfeur de S a u r e t , fans efpérer cependant de captiver les
le£teurs amateurs de l ’art oratoire. Us feront peut - être
curieux de favoir lequel du fieur F eu illa n t ou de S a u r e t ,
9 débité des inexactitudes.
F
A
I
T
S
.
L e fieur F e u illa n t , N é g o c ia n t de B ra fia g e t, acheta dans
les premiers mois de 1785: , de G ervais S a u r e t , dit le G r e
nadier , M a rchand ^ R io m , un cheval m oyennant dix-huit
v o y e s de charbon , qu’il s’engagea , par une lettre du 20
février , à lui faire conduire au P o n t-d u -C h â te a u , chez le
nom m é G i r a r d , A ubergifte de cette V i l l e , le déchargem ent
a la charge de Sauret. C e fut fur cette lettre que Sauret re
m it au domeftique qui en étoit porteur , le ch e v a l qu'il
avoit vendu au fieur Feuillant. C e cheval fut donc livré en
conféquence des conventions inférées dans la le t t r e , qui eft
le titre de Sauret contre Feuillant.
Sauret prétend dans fon mémoire que n ’ayant point l ’ufage de lire & d’é c r i r e , il ne fe fit donner q u ’une c o n noiffance très - fuperficielle d e l à le ttre du fieur Feuillant
A a
'
�4
dans l ’infiant où elle lui fut re m lfe , &: que ce ne fut que
lo n g - temps après qu’il apprit que les frais de décharge des
d i x - h u i t voyes feroient à fa c h a r g e , d’après cette lettre.
C eci eft une aflertion que rien ne prouve que le fieur
Feuillant d é m e n t, mais qu’il étoit utile à Sauret de mettre
en a v a n t , pour donner à la conduite du fieur Feuillant une
couleur de mauvaife foi. Les frais de ce déchargement étoient
un trop petit o b j e t , pour occuper le fieur F e u i l l a n t , de ma
nière à le porter à une furprife envers Sauret ; le comm erce
du fieur Feuillant le m et au - deiTus de pareilles petiteiTes.
I l étoit de plus eiTentiel pour Sauret de prévenir ,
par cette réflexion , les indu£tions qui fuivent de ces
expreilions de la lettre de F e u illa n t, le déchargement à votre
charge. Elles font voir que c’eft à Sauret à veiller à ce d é
chargement. L e fieur Feuillant n’a dû répondre du char
bon que jufqu’au Pont - du - Château ; c ’eft là que Sauret
eft convenu de le prendre , le déchargement à fa charge.;
TLe charbon une fois arrivé au P o n t , eft fur le lieu choifi
par Sauret ; l’arrivée de l’expédition prouvée , Sauret feul
eft chargé du charbon ; c ’eft à lui à le faire décharger ; &
fi Feuilîant a fi expreffément recommandé à Girard , dans
fa lettre du 5; août , de tenir le charbon déchargé , 6c prêt
à être enlevé par Sauret : c ’eft que c e l u i - c i étoit extrê
mement preifé de le retirer ; que Girard ayant été co m m is
par les deux parties , de la part de F e u illant à la rccep~
tion , d e"la part de Sauret au déchargement ; le meilleur“
moyen ,, pour "confiatef~i’âFnvlSe du charbon , étoit que
Sauret le. trouvât tout prêt à être enlevé. Il importoit peu
dans le fait que la recommandation fut faite par Feuillant
ou par S a u re t; mais il étoit intéreflant pour Feuillant de
fixer l ’époque où il ceifoit d’en être garant. E t quelle fejroit en effet la condition du vendeur , fi , après avoir fait
’• conduire la marchandife vendue nu lieu indiqué Ôc a c c e p té ,
-1, il en rcftoit refponfable jufqu a fon enlèvement complet ?
Q u e l feroit donc le lieu où le vendeur ceiferoit d ’en être
garant ? D ’après ces ré flexio n s, on fent toute la confé-
�f
-,
quence de ces expreiïions , le déchargement à votre charge.^
Ces autres expreiïions de la même lettre , j e vous fe r a i con- (
dnire au p lu tô t, prouvent encore que le Commiifionnaire \
Girard a été choifi par les deux parties. A u plutôt fignifie )
prom p tem en t, mais ne fixe point de jour. Il falloit donc /
que quelqu’un fût commis d’accord pour le recevoir , avec /
connoiffance réciproque de la fidélité du Commiifionnaire i /
d e l à part de F e u illa n t, pour attefter l’a r r iv é e , de la parcj
de S au ret, pour veiller au déchargement.
L e fieur Feuillant convient d’avoir été en re ta rd , quant
à l’envoi de ce charbon. D ’abord le grand nombre d ’e x p é
ditions qu’il avoit à faire dans ce m ême te m p s , le rend excufable : enfuite il furvint une fécherefle extraordinaire ,
qui fut un obilacle infurmontable.
Sauret cependant
avoit revendu au nommé G arde , le charbon
que
le fieur Feuillant lui devoit : il reçut en conféquence de
Garde une aflignation qu’il dénonça au fieur F e u i lla n t , &
obtint contre lui , le 30 juillet 1 7 8 ; , une fentence qui le
condamnoit à délivrer ce charbon dans trois jours
à
compter de la.lignification, & faute de ce faire dans ledit
'temps , aux dommages & intérêts de Sauret , ainfi
qu’aux frais fouiferts ou à foufïrir de la part de Garde.
C e fut alors que le fieur Feuillant pria V ig ie r du Pont-duChatcau , de vendre à Sauret & lui délivrer la quantité
de charbon qui lui feroit néceflaire, ajoutant quJil en répondoit. Je dis que 1s fieur Feuillant pria , follicita V i g i e r , parce
que V ig ier qui connoiffoit déjà S a u r e t , ne vouloir abfolument
faire aucune affaire avec lui ; fie il ne fallut rien moins que le
plaifir d’obliger le fieur F e u illa n t, pour déterminer Vigier.
I l fembleroit par la manière dont ce fait eft racon
té par .Sauret , que Feuillant a dit , en préfence de
V i g i e r , que le charbon qui feroit délivré à Sauret , feroit .
imputé fur la quantité qu’il devoit perfonnellement. C e fait /
eft démenti par i’afiignation des héritiers V ig ie r à S a u r e t , ôc 1
par la conduite du fieur F e u illa n t, qui dans le même temps [
6 eft libéré envers S a u r e t , en lui faifant conduire au Pont- I
�s
du-Château v in g t voyes de charbon en deux e n v o is , l'un de
fix v o y e s , du $ août 1 7 8 ^ , l’autre de quatorze voyes., du
mois de feptembre fuivant.
L es chofes étant en c e t é t a t , le fieur S év e , gendre du
iieur V i g i e r , fait aflîgner Sauret à lui payer quatre voyes
& demie de c h a r b o n , qui lui avoient été vendues par fon
beau-père. Sauret répond en défendant qu’il ne doit rien,
& par une afTercion auiïi vague , auili hafardée , force les
Juges à ordonner la comparution du fieur S é v e , gendre de
V ig ie r , qui, en fon abfence, fut repréfenté par la dame S é v e ,
fon époufe. Sauret conferve à cette fécondé audience le mê
me air d’aiTurance , fe tient f j r la négative. Sauret prétend
que la dame S év e lui fait demande d’une certaine quantité
de charbon , qu’il affure avoir payée , en fatisfaifant, à la dé
charge du fieur V i g i e r , à la demande de quelques ouvriers.
L a dame S é v e lui dit alors qu’ elle veu t bien le croire fur
fa parole , quant à cet article; & ajoute que ce n’eil point
de cet objet dorrt elle forme demande , mais de quatre voyes
& d e m ie q u e fon père lui a vendues , à la follicitation du
fieur F e u i lla n t , qui avoit promis de payer lui-même le char
bon que Sauret p re n d ro it, dans le cas où celui-ci ne payeroit point. Sauret s’é lève alors avec chaleur fur la quantité
demandée par la dame S év e > rend cette quantité problé
matique , prétend tantôt qu’il n’en a pris que trois v o y e s ,
tantôt trois & dem ie; & enfin la dame S é v e demande que
la fervante qui demeuroit ch ez fon p è r e , lors de l'en lève
m ent de ce c h a r b o n , foit entendue fur cette conteflation :
Sauret reprenant la parole , dit alors q u e , dans tous les ca s,
c ’efl au fieur Feuillant à payer ce charbon ; de-là une fentence préparatoire , qui ordonne que cette fervante fera
ouie , & le fieur Feuillant mis en caufe.
Q u ’eft-il réfulté de la dépofition de cette fervante? i° . q u e ,
d ’après le com pte des v o itu re s , fait fur la déclaration de cette
f i l l e , & contradi&oirem ent avec S a u r e t , la quantité du
charbon a été fixée à quatre voye* & demie. 2 0. L e s Ju
ges ont appris de cette fervante , qu’elle avoit vu mefurer
/
�7
le tombereau de Sauret , qu’il contenoit vingt*une r a fs s ,
& Sauret cependant prétendoit que ce tombereau n’en
contenoit que «iix-huit. Auifi cette fervante ajouta - 1 - elle
que Saurat cliargeoit au t a s , fans avertir perfonne de la
maifon ; ce qui m écontentoit fort Ton maître.
L e fieur Feuillant en caufe , a foutenu n’avoir été
que fimplement la caution de S a u r e t , & a formé con
tre lui demande de deux v o y e 3 de charbon , attendu
qu’il lui en avoit fait conduire v in g t au P o n t - du Château , & qu’il ne lui en devoit que dix-huit. Sauret
a , de fon cô té , formé demande d’une v o y e & demie
au fieur Feuillant , attendu que quatre v o y e s & demie
qu’il venoit d’être convaincu d’avoir retiré , & douze
qu’il prétend uniquement avoir reçues au P ont-du-C hâteau,
fon t feize voyes & d em ie; & pour prouver qu’il n’en avoit
reçu que douze , il demanda le rapport du livre de G ira rd ,
commis à la réception du charbon. L e rapport de ce livre ne
le fatisfaifant p a s, il demanda la déclaration de Girard & celle
de fon époufe. Girard vint dépofer ici. S on époufe fit fa dé
claration devant le Bailli du Pont-du-C hâteau , où elle
étoit retenue , pour raifon de groflefle avancée. E t c ’eit
dans le livre de Girard , fa déclaration & celle de fon épou
fe , que Sauret puife fes moyens de défenfe. O r , on fe flatte
d'établir que ces dépofitions ne peuvent être concluantes
en faveur de Sauret; qu’elles font au contraire des moyens
de défenfe effentiels dans la caufe du fieur Feuillant.
M O Y E N S .
Sauret d i t , dans fon m é m o ire , q u e le fieur Feuillant ne
peut prouver fa libération envers lui , qu’en prouvant
qu il a reçu dix - huit voyes de charbon , que cette
preuve n’étant point f a i t e , & Sauret fàifant la preuve con
traire , le fieur Feuillant eft redevable à Sauret du m on
tant de fa demande. O n obferve qu’un fait entre mar
chands 3 fe prouve ou par le s 7livres journaux 3 ou par la voie
\
�s
teftim oniale, quelquefois m ême par des circonilances q u i ,
réunies, ont force de preuve. E t il eft d’un ufage très-ordi
naire d e ’ fe déterminer dans Jes Jurifditlions C on fu laires,
d’après ces circonilances probantes ; ces fortes de Jurifdiâions
n’étant p o i n t , pour l ’avantage du commerce , aflervies aux
formalités^ rigoureufes des procédures ufitées dans les autres
C o u r s , ainfi que le porte l’Ordonnance de 1667 , art. I I du
ritre X X (a). O r
le fleur Feuillant prouve par ces divers
moyens , non feulement qu’il s’eft libéré envers S a u r e t ,
mais encore que celui-ci eft fon débiteur.
E n effet, fuivant l ’article I I du titre I I I de ¡’Ordonnan
ce de 16 7 5 , les agents de change & de banque doivent te
nir un livre jo u r n a l, dans lequel fo n t inférées toutes les Par
ties par eu x négociées, pour y avoir reçours, en cas de co/ztejlation. Girard dans l’affaire préfente , eft est agent inter
médiaire. Pour que fon livre f î t f o i , & que l’on pût y avoir
r e c o u r s , il faudrait qu’il fût d’une même fuite , par ordre
de date , fans aucun b la n c, fuivant l ’article V du titre I I I
de la même Ordonnance ; & encore dans ce c a s , n’en tireroit-on des induirions , qu’en le conciliant avec le livre
des deux conteftants, comme l ’obferve M . J o u fle , C om m en
tateur de cette Ordonnance. Mais le livre de Girard n’eft
point en règle , c Jeft plutôt un chiffon qu’un livre , il eft
en trois ou quatre feuilles volantes , mal t e n u , écrit fans
f u i t e , ayant des vuides intermédiaires ; & il faut que ce fait
foit bien vrai , pour que Sauret ne l'ait pas relevé dans__
fon m ém oire.^Aufli t r o u v e - t - i l plus fimplc , page 7 ,
d écarter les liv r e s journaux ,
fous un prétexte fri
vole , fans faire réflexion qu’il entend tirer grand parti de
celui de Girard , qui par là-même q u ’il n ’eft pas en rè g le , ne
mérite aucune foi ; ce livre eft de plus démenti par la dépo( a ) L e J u g e , dans les affaires de com m erce , ne m arche pas to u jo u rs h la lu eu r
d’un io leil éclatant : fi , d’une part , la loi I'éclaire fur les règles a u ftères d e I*
p ro b ité , d’autre part , \et circo n ila n ce s lu i fourniH ent un e lu m iire sû re , q u o i
qu e m oins v i v e , à l’aide d e laquelle il p erce l’épaifleur des tén èbres , où la
m auvaife fo i s’e n fo n ce p our cacher Ces o p ératio n s,
fitioo
�9
ficion de Girard & celle de fon époufe. Sauret n’en peut
donc rien induire contre Feuillant , de même auili que le
fieur Feuillant n’en peut rien conclure contre Sauret. A u x
termes de l’ordonnance , ce livre doit être de peu de
confidération. Il refte donc à recourir dans cette partie à
la voie teftimoniale. O r Girard Ôc fa femme , feuls tém oins,
& ouïs à la requête de Sauret
difent qu’ils ne fe rappel
lent pas la quantité de charbon qu’ils ont reçu , qu’ils cro yen t
que c ’eit douze voyes qu’ils ont délivrées à Sauret. G irard
^déclaré en outre avoir reçu deux envois diitintts , quoique
fon livre ne faiTe mention que d’un l e u l , de douze voyes.
I l répréfente en outre une lettre d’avis de lix voyes ,
parties le j août de BraiTac , & arrivées le 8 au P o n tdu-Château.
Il y a de l'incertitude , quant à la quantité , dans la
déclaration de la fe m m e , mais elle porte douze voyes , ÔC
la lettre repréfentée n’en annonce que fix ; cette déclara
tion , toute incertaine qu’elle eft , ôc qui , de l ’aveu de
Sauret , ne va pas jufqu’au doute , fait donc voir clairement
q u’il y a plus de fix voyes envoyées. C e tte déclaration ,
loin d o n c de détruire l ’énoncé du livre du fieur Feuillant ,
vient à l ’appui de ce livre qui annonce deux envois. O r l ’on
apprend par le livre du fieur F eu illa n t, que la rivière à la
fin de feptembre charrioit à fept voyes j & que Girard reçut
le même jour un envoi d’un bateau à fept v o y e s , expédié pour
un autre particulier. L a dépofttion du mari eft plus précife ,
elle attelle la vérité de deux envois , & ne laiiTe de l ’in
certitude que fur la quantité , elle force donc à avoir re
cours au livre du fieur F e u illa n t, par lequel feul cette quan
tité peut être connue. O r ce livre doit faire f o i , quoi
qu’en dife Sauret dans fon mémoire, où , pour appuyer la pré
tention étonnante que les livres journaux ne font foi qu’en
tre marchands entre lefquels il y a une correfpondance de
com m erce bien établie , il dit : cela ejl f i vrai , que les li
vres des Marchands ne fo n t point f o i contre les bourgeois ,
& il cite Lacom be. L ’autorité de L acom be eft refpe£table ,
�Io
mais elle eft au moins déplacée , dans une conteftation en
tre marchands.
i ° . L ’article I du titre I I I de l ’Ordonnance , porte : les
Négociants & M archands, tant en gros qu’ en a é ta il, auront
un livre qui contiendra tout leur négoce : autrement , dit
Joufle , les autres Marchands qui Jeroient \en contejlatioti
avec eu x , & qui auroient des livres en règle 3 pourraient être
écoutés dans leurs demandes, par cela f e u l que leurs livres f e roient en règle , ces derniers étant alors préfumés être dans
la bonne f o i. Bornier dit auiü que , f i l e Marchand n'a point
tenu de liv r e, bien que fa demande f o it fondée fu r une promeffe écrite , & fignée de la main de celui à qui les marchaitdifes ont été délivrées ; en ce cas le livre journal du débiteur
doit fa ire f o i , pour prouver qu’i l a p a y é , parce q uun M ar
chand qui tient des livre? , eft réputé de meilleure f o i .
2°. Q u a n t à ce que porte le mémoire de S au ret, que les
livres journaux ne font foi qu’entre les marchands entre lefquels il y a une correfpondance de commerce bien établie:
cette réflexion ne fe trouve nulle part que dans ce mémoire :
l ’ordonnance & l’ufage n'ont donné nulle part l ’exclufion à 1 a
foi que méritent les livres journaux, dans la premiere affaire
que fait un marchand en gros avec celui en détail. Sauret eft
marchand de charbon en d é ta il, puifqu’il avoit revendu partie
de ce charbon à un nommé Garde. Il en confomme beaucoup
pour l’entretien de fes fours à c h a u x , & peut & doit donc
è re confidéré com me commençant par cette première affaire,
u ie correfpondance avec le fieur Feuillant. Un livre en règle
doit, fuivant l ’ordonnance, faire foi môme contre le créancier
qui ne préfente point de liv r e , tant dans le gros que dans le
détail. O r Sauret ns tient point de livres, quoiqu’il fâche
écrire, com m e il en eft convenu lui-mêm e, en réclamant de la
part de Girard un livre autre que celui qu’il rep réfen to it, &
& dans lequel Sauret difoit avoir écrit une promefle en faveur
de Girard. Sauret n’eft donc point en règle , & aux termes de
l ’ordonnance , le livre de Feuillant fait foi contre lui. O r ce
livre fait foi qu'il a été expédié à Sauret vingt voyes de char-
�bon au Pont-du-Château ; c’eft-là que Sâuret a dû le recevoir.
U ne fois le charbon arrivé au Pont-du-Château , il a été à la
charge de Sauret ; il a pu en difpofer fuivant fon bon plaifir.
Sauret cependant prétend n’avoir reçu que douze v o y e s , invo
que en témoignage le livre de G i r a r d , fa déclaration & celle
de fon épo ufe, & enfin il d it, page 1 3 de fon mémoire , que
fi les expéditions ont été faites, il n’en a jamais été prévenu
par lettres d’avis, ou autrement.
i° . Q u e l fi grand parti Sauret peut-il tirer de la déclaration
du livre de Girard , qui porte au
août une feule délivrance
de douze voyes de charbon faite à Sauret, en vertu d’un envoi
du fieur Feuillant ? L ’on ne voit rien de fi convainquant contre
S a u re t, que l’énoncé de ce livre; la date f e u le , qui n’eil
conform e à aucun des envois du fieur F e u illa n t, prouve que
cet envoi a été porté fur le liv r e , abfolument fans aucun fouvenir tant des époques que d e là quantité. Girard & fa fe m m e,
jdont les dépofitions ont été requifes par S a u r e t, ont dû d épofer d’une manière moins affirmative. L a dépofition de la
femme G ira rd , porte qu’elle ne fe rappelle pas précilëment le
nombre de v o y e s , qu’elle croit que c ’eft douze qui onr ¿rA
déçhargées & remîtes à S auret. G irard ignore ainfi que fa
fe m m e îa quantité de v o y e s , mais convient de deux envois
cliftin£ts, quoique fon livre ne faiTe foi que d’un feul e n v o i,
d ’une feule délivrance. I l rapporte au procès une lettre en \
date du j août 1 7 8 ; , par laquelle le fieur Grimardias, commis '
du fieur F eu illa n t, lui donne avis qu’il lui e xp éd ie , ce même
jo u r , fix voyes de charbon en deux b a te a u x , pour le compte
de Sauret. Pourquoi n’eft-il point fait mention de cet envoi
fur le livre de G ira rd , & qu’au contraire il y eft fait note d’un
de douze voyes le 27 a o û t , tandisque le dernier envoi n’a été
fait qu'à la fin de feptembre ? C ’eft que Girard ne s’eft rappcllé que très-long-temps après leur arrivée , qu il avoit
oublié de les infcrire fur fon livre; qu’il ne s’eft pas plus rappellé la quantité que contenoient les feconas b a t e a u x ,
que la date de l’expédition. Les deux premiers bateaux
contenant fix voies, il a conclu de la contenue des premiers à
B 2
�12
celle des féconds. I l a penfé que le premier envoi ayânt été
fait précipitamment en vertu de fe n te n c e , le y a o û t, le fé
cond avoit dû fuivre de près, ôc en co n féq u en ce, il a cru
pouvoir les rapporter fous une feule d a te , celle du 2 j août.
Son incertitude fur la quantité eft fi fo r m e lle , que Girard
conclut à la fuite de fa déclaration en ju ftic e , au rembourfement d’une fomme plus confidérable que celle de fix liv r e s ,
dans le cas où il feroit prouvé au procès qu’il eût reçu une
plus grande quantité de charbon. Sauret ne peut donc rien
conclure en fa faveur du livre journal de Girard ; livre qu’il
a rejetté lui-m êm e, en prétendant qu’il y en avoit un autre
dans lequel il avoit vu qu’il n’y avoit que fix livres endoifées
pour être répétées pour le déchargement. Sauret a donc eu
connoiflance de ce que contenoit ce livre , & en a tiré parti
à fon ava n ta ge , foit parce qu’il avoit oublié lui - même la
quantité, foit parce qu’il a cru qu’elle ne pourroit être connue.
Il eft d’autre part très-probable que c ’eft Sauret lui-même qui,
abufant de l’oubli de G i r a r d , l’a induit en erreur fur la quan
t i t é , & que fort de ce tém oignage qu’il s’efl procuré en fa
f V3 ur,il a pour lors conçu ia hardieiTe d’élever cette conteftation. Auili le fieur Feuil'ant aflure-t-il , qu'ayant rencontré
S a u re t, fur le chemin de C i e r m o n t , il lui dit: Mais S a u re t,
vous me redevrez deux voyes de charbon ; à quoi celui-ci
répondit: O h ! nous arrangerons cela dans une bouteille de
vin , & puis il ajouta : Mais vous me devez les frais de cette
f ) fentence , nous ferons TTri compte. C ette converfation fut
C répétée à 1 audience par le fieur F eu illa n t, à qui Sauret ré/ pondit leftement que c ’étoit autant de menfonges. C ette ré( ponfe n’eft point verte, mais effron tée, in décen te, vis-à-vis"
/ d’un homme reconnu pour lo y al, en préfence de Juges q u i,
S p'uir découvrir de quel cô té eft la v é r ité , fe font un devoir
\ d'entendre les parties elles mêmes.
(
2°' Sauret fe plaint de n avoir été prévenu d’aucun des en
vois. Sauret d i t , page 2 de fon mémoire , qu’il n’a point
l ’ufage de lire ni d ’écrire , 6c qu il ne fe fit donner qu’une
connoiflance très-fuperfïcielle de la lettre du fieur F eu illa n t,
�1 3’
.
.
.
.
en date du 20 février. O r il eft fort inutile d’écrire une lettre
d ’avis à un homme qui n’a l’ufage ni de lire ni d’é c r ir e , vu S
fur-tout q u e , dans le premier moment d’une affaire, m om ent ?
eifentiel pour les co n ven tio n s, la lettre contenant ces co n - \
vendons, l’affeSte allez peu pour n’en prendre qu’une connoif- C
fance fuperficielle. I l étoit plus fimple d’avertir Sauret de
vive vo ix ; ce qui a été fait. L a lettre d'avis écrite Je 3 août
1 7 85 à G ira rd , porte que Sauret fera le lundi., qui étoit le
8 , au Pont-du-Château , avec des voitures pour enlever ce
charbon. Je vous ferai o b l i g é dit le fieur Grimardias dans cette
lettre , de faire toute la diligence poffible lundi matin , pour
le déchargement de ces deux bateaux , & éviter par ce moyen
à M . Feuillant des fr a is que Sauret ejl dans l'intention de
lui f a i r e , f i le charbon n étoit pas déchargé à l ’ arrivée de fe s
voitures. E t efFeâivem ent, Sauret prefToit vivem ent le fieur
F e u illa n t, puifqu au terme de la fentence qu’il avoic obtenue
contre l u i , dix-huit voyes de charbon devoient lui être dé
livrées dans trois jours. O n ne peut dire que le commis
du fieur Feuillant ait avancé fans fon d em en t, dans fa lettre
que Sauret feroit le lundi au Pont pour enlever ce premier
envoi. Il avoit certainement été convenu entre les p arties,
que ce charbon feroit délivré ce lu nd i, à moins de fuppofer
que les expreifions de la lettre du fieur G rim ardias, ne fuiTent
dès ce temps difpofées de telle f o r t e , qu’il en pût tirer
a v a n ta g e , pour une coquinerie. qu’il méditoit ; ce qu’il eft
abfurde de cro ire-q u and on confidérera , fu r-tou t, que le
fieur Grimardias ayant atteilé la vérité des expéditions, ainfi
que celle des dates, fon affirmation porte auffi nécefiairement
fur la fincérité du contenu en fa lettre d’avis à Girard. D e
plus , l’expédition a été fa ite , puifque Girard l’a v o u e ; l’e x
pédition a été enlevée dans le temps , puifque la fentence
obtenue par S a u r e t, & fixant dans un temps de fécherefle,
trois jours feulem ent, pour la délivrance de dix-huit v o y e s ,
démontre clairement que Sauret avoit repréfenté avec cha
leur aux Juges, le befoin qu’il a v o i t de ce charbon, qu il les
en avoit convaincus en leur repréfentant l ’aiTignation qu’il
�*4
avoit reçue d’un nommé G a r d e , à qui il avoit revendu ce
charbon. S a u r e t , d’après une fentence p a reille , eft-il recevable à dire qu’il n’en a pas pourfuivi l’exécution & que
prévenu de cet envoi , com m e il ne peut le nier d’après
la lettre du fieur G rim ardias, il n’a pas enlevé ce char
bon fur le champ , (a) mais qu’il l ’a laifTéfur le p o r t , ôc que
ces fix voyes font partie des douze qui y étoient fur la fin
de feptembre. Il auroit donc ainfi laiiTé écouler deux mois
entiers fans enlever du charbon qu’ila v o it v o u lu , le 30 juillet,
lui être délivré dans trois jours. C ette prétention eft de toute
abfurdité , ÔC d ém o n tre, tout à-la-fois, la pétulance de Sauret
rlnns tes folliritations auprès de fes Juges, 6c ladreffe la plus~
"mal conçprrée pour les induire aujourd'hui en erreur.
C e tte abfurdité fera au moins aulli frappante, quant à' ce
qui concerne le fécond envoi. Page 3 de fon m ém o ire, Sauret
déclare que fur la fin du mois de fep tem bre, ou e n viro n , il
demanda au fieur Girard fi le fieur Feuillant ne lui avoit pas
adreifé du charbon qui devoit lui être remis. Girard répondit
qu’il en avoit reçu en plufieurs fois douze voyes. Sauret con
v ie n t , dans la même p age, d’avoir retiré le charbon à cette
époque. Q u e lle époque le fieur Feuillant fixe-t-il pour le fé
cond envoi de quatorze voyes? L a fin de feptem bre;( le char
bon eftparti de BrafTac le 22 de ce m ois, ) & Sauret ofera dire
qu’il n’a pas eu avis de cet envoi ! Q u e l étoit donc le charbon
qui étoit fur le port? Etoit-ce celui du premier envoi? Il eft
démontré qu’il étoit impoflible qu’il n'eut pas été enlevé par
Sauret. C ’eft donc celui du deuxieme envoi 3 6c fi Girard ne
l'a porté fur fon livre que pour douze voyes , c ’eft qu’il ne Ta
infcricquetrès-long-tem ps après la délivrance ; c'eft qu’ayant
perdu la lettre d’avis de ce fécond e n v o i, il a oublié la quantité
de voyes. I l avoit confervé la lettre d’avis du premier e n v o i ,
( a ) Il e ft à o b ferve r qu e Sauret n’a jamais^ n ié le p rem ier e n v o i , quand l ’on a
repréfen té la lettre d’avis é crite à G irard } mais qu ’il s’e il to u jo u rs retranché à dire
u’il n’a v o it re ç u qu e d o u z e v o y e s , com m e il o ffro it d e le p ro u v er par le livre
e G ira rd .
a
�& a crû inutile de l ’enrégiitrer 3 la repréfentation de cette
lettre étant fon titre pour fe faire rembourfer de fes avances
pour le déchargement. Q u and Sauret lui demanda s’il n’avoit f
jjas reçu du charbon pour l u i , Girard ne pouvoit croire que \
Sauret e ntendit parTëF de cëlui du premier envoi ; il avoit ¿té }
^ Ï ^ T l ü ë T u i ^ p o n d i t donc que relativement à u n ie c o n d . j
■ ^ ïirè ra meilleure mémoire que G ir a r d , quant à la q uantité, \
puifque Girard ne dit autre c h o f e , finon q u i l croit. L orfq u e *
Girard l ’â infcrit fur fon liv r e , ayant totalement perdu cette
affaire de v u e , il a ¿'té induit en e rreu r, foit par S au ret, foit
par la contenue des premiers bateaux ; de-là auifi, fon incerti
tude dans fa dépofition,qui ne contient d’autre vérité q u e c e l - 7
le-ci, que Sauret a retiré ce que Girard a reçu , fur-tout quand (
on la rapproche des expreifions de la page 3 du m ém oire, où|
Sauret déclare avoir enlevé ce que Girard lui a dit avoir reçu.)
A la vérité , par la réponfe de Girard , il femble que
c’eft en plufieurs fo is que ce charbon eft arrivé ; mais qui ne
vo it que ces mots en plufieurs f o i s , font à defTein ajoutés
à cette réponfe? Q u ’importoit-il dans ce temps-là à S a u r e t,
que ce fût en une ou plufieurs fois ?_ Q u e lle raifon avoic G i
rard de lui dire que c’étoit en plufieurs f o i s f c e n ’eft que depuis
que la conteftation eft élevée, que ces mots font devenus de
quelqu’importance. Aufïi Girard , en écrivant fur fon livre ,
m et fimplement douze voyes : dans fa d éclaration, il dit qu’il
croit n’avoir reçu que douze voyes en un ou plufieurs bateaux :
il convient uniquement de deux envois diftin&s, & ne parle
pas d’un troifieme. O r , il faudroit qu’il y eût eu trois envois,
pour que Girard fe fut réellement fervi de cette maniéré de
p arler, en plufieurs fois.: un premier de fix voyes , le %a o û t, }
qui néceffairement a été enlevé dans le temps , & deux pour
les douze voyes que l’on convient avoir été retirées depuis la
fin de feptembre;ces mots en plufieurs fo is font donc ajoutés. E t
Sauret fe plaindra d’inexa&itudes dans le mémoire deFeuillant! j
L es deux envois ont donc été connus ôc enlevés par Sauret.
I l ne peut être recevable à dire que le charbon peut être
arrivé an Pont fans qu’il ait reçu la quantité qui lui étoit due.
�16
Il fuffit qu’il foît prouvé que le charbon eft arrivé, & qu’il en *
eti connoiflance , pour qu’il en foit feul refponfable.
L e charbon n’eft jamais contremefuréau Pont. Il eft reçu fur
la foi des lettres de voiture. Girard & tous les autres marchands
le reçoivent ainfi. L a condition de Sauret doit être la même.
L e charbon mis à tas fur le port, eft livréà la foi publique.Girard
a averti Sauret de ce quJil avoit r e ç u , il a dû lui dire : voici
votre tas; il eft de telle quantité. Si Sauret avoit voulu connoître par lui-même la q uantité, il falloit qu’il le fît mefurer
fur le champ. Il prétend s’être afluré de cette quantité par le
nombre de voitures qu’ila faites du Pont-du-Château à R io m .
D e -là fuit que Sauret ne s’en eft crû certain qu’à l ’inftant de
la ceflfation des tranfports ; & de fon aveu, ce charbon eft refté
fur le port, livré à la foi publique, pendant l’efpace de deux
mois ou environ. Mais ne feroit-ce pas plutôt ce nombre de voi
tures qui auroit induit Girard enerreur?(a) A y a n t oublié de por
ter dans le temps les envois fur fon livre, il aura demandé à Sau
ret combien il avoit enlevé de charbon. Sauret lui aura dit que
d'après le nombre de voitures qu’il avoit chargées, il n’y en
avoit eu que d ou ze; alors, Girard fe fera contenté de cette
réponfe , & aura mis douze voyes fur fon livre. Mais le tom
bereau de Sauret contenoit 21 rafes., & il lefaifoit paifer pour
n ’en contenir que 18. O r , le même nombre de voitures qui
ont conduit
12 voyes félon Sauret , en ont dans le fait
conduit
14.
L a voie eft compofée de trente rafes. 12 voyes font par
conféquent
3^0 rafes.
Et
14 voyes
420 rafes.
Il a fallu
20 voitures, chacune de
18 rafes, pour
conduire
360 rafes, ou 12 voyes.
Et
20 vo itu re s, chacune de
21 r a fe s ,
c n tc o n d u it 420 ra fe s, ou 14 voyes.
(a )U n e «Îémonitration m athém atique m o n trero it la vérité dans to u t fon jo u r ; elle
con fon d , terrafle le m en fo n ge : la probabilité fo u rn it des arm es con tre lu i ; elle
le v é fuivan t fes d ivers d e g ré s , p lu s o u m o in s du v o ile don t il s’e n velo p p e.
Qui
�17
Q u i ne voit dans cette opération de calcul la fource de l’er
reur de Girard, fur le nombre des voyes enlevées depuis la fia
de Septembre ? ce calcul eft d’une exa&itude fi frappante, qu’il
prouve tout à-la-fois, & la vérité de la dépofition de ln fervante
de V i g i e r , ôc la fincérité de l ’énoncé du livre de F e u illa n t,
qui porte ce fécond envoi pour quatorze voyes.
Il eft de plus à obferver que Girard n’eft pas ici dans la
claiïe des commilTionnaires qui reçoivent des émolumens. C euxci non-feulement veillent au déchargement des v o itu re s , &
en payent le montant. N o n feulement ils font tenus d’avertir ~
ceu x pour qui il ont reçu ; mais encore ils emmagafinent la
marchandife en lieu fain & c lo s , de manière q u e , par c et
a£te, ils deviennent refponfabTes de cette marchandife : auïïî
leur eft-il payé une ibmme qui tourne à leur p r o f i t , & ne
diminue en rien le rembourfement qui doit leur être fait pour
raifon des voitures; au lieu que les 10 fols pour le décharge
ment de chaque voye de charbon, forment uniquement le paie
ment-des déchargeurs, de même qu’il eft payé une certaine
fomme au porte-faix ou crocheteur qui aide à décharger les
balles de deflus les voitures , ou à les tranfporter de la voiture
au magafin. E t en e ffe t, la v o y e contient 30 grandes bacholées , qui font tranfportées des bateaux fur le p o r t , & mifes à
tas. I l n’eft paffé que 10 fols par voye à G i r a r d , ce qui fait 4.
deniers par rafe ou bacholée. L a modicité de ce prix prouve
qu’il eft uniquement deftiné au paiement des déchargeurs, &
que Girard n’a , dans ce d éch argem en t, d’autre intérêt que ce
lui d’o b lig e r, & jamais l’on n'a dit que ces 10 fols tour
n a ie n t à fon profit. Girard ne tient regiftre du déchar
gem ent , qu’afin de fe faire rembourfer de fes avances.
S o n inexa&itude ne peut lui être préjudiciable que pour ce
rembourfement. I l a d’ailleurs averti Sauret à la fin de feptembre , qu’il avoit reçu pour lui du charbon » & lelon Sauret
~lui-mëme, douze voyes. (Jette date elt celle de l'envoi de quatorze v o y e s , puifque la date de l ’expédition eft du 22 feptembre.
O n ne peut préfum er raifonnablem ent, d’après la lettre du
<ieur Grim ardias à G irard, en date du j ao û t, que Sauret ait
C
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[J
�18
ign oré le premier e n v o i, encore moins qu’en étant àverti, il
ait négligé de l ’en leve r, lui qui avoit demandé & obtenu que
Feuillant fût condamné à délivrer dix huit voyes dans 3 jours.
D ’un autre cô té , il convient d’avoir enlevé douze v o y e s .
'"depuis le mois ~HêT~~feptëmbn^ ÎT a donc connu & enlevé
les deux- envois de charbon , chacun dans leur temps. Saurec
a donc reçu vin g t voyes de charbon du fieur Feuillant. L e
fieur Feuillant eft donc n o n -fe u lem e n t libéré envers lui >
mais encore Sauret lui eft redevable de deux voyes , fous
la dédu£tion des frais de la fentence qu’il avoit obtenue con
tre l u i , le 30 juillet 178^.
Sauret , pour s’étayer de to u t, prétend qu’on ne prend
pas ordinairement plus qu’on ne doit j & qu’on ne paye pas
ordinairement plus qu'il n’eft dû. V o ic i ce fe m b le , comme il
falloir raifonner : O n ne paye pas fouvent plus qu’on ne doit/
& on prend fouvent plus qu’il n’eft dû. Il eft d’ufage & d’é co
nomie de charger les bateaux à la tenue de l’e a u , fur-tout
quand l’objet eft d’une petite conféquence. L ariviere charrioit
à fept voyes , & le fieur Feuillant a profité de cet avantage ,
attendu qu’il étoit convenu avec Sauret que s’il lui envoyoic
quelques voyes d ép lu s, ils feroient bien d’accord. Il n’eft de ne
p is étonnant qu’il en ait envoyé vingt au lieu de dix-huit.
Maintenant qu’il eft prouvé que Sauret a reçu vingt voyes
du fieur F e u i lla n t , il eft facile d’établir que les quatre voyes
ôc demie qui lui ont été vendues par V ig ie r , père de la dame
S é v e , font à fa charge. L e fieur Feuillant avoit dit indéfinim en tà V ig ie r , qu’il le nrioit de vendre à Sauret la quantité de
cln rbon dont il auroit b ^ V in , & s’étoit engagé verbalement à
être fa caution ; & ce ne fut qu’en confédération du fieur
Feuillant que V ig ier confentit à cette vente. L e fieur
Feuillant ne pouvoit penfer que ce charbon fut un à
compte fur ce qu’il devoit , lui qui a toujours ignoré la
quantité qui avoit été délivrée à Sauret ; & il a fi peu re-'
gardé cette dette comme perfonnelle à lui , qu’il a expédié
a Sauret vingt voyes de charbon , o m m e il a été prouvé ,
& cela à comm encer du 3 août , dans les mûmes temps
�19
où Sauret retîroit les quatre voy es 6c demie du fieur V ig ïe r . ]
Il eft étonnant que Sauret , rempli de fa c r é a n c e , V
ait ofé foutenir que ces quatre voyes & demie fuflent à
compte d e .c e que lui dévoie le fieur Feuillant. C om ptoitil en impofer davantage à fes Juges , en feignant d'avoir
oublié cette quantité ? mais il a fait plus , il a nié cette
quantité , a foutenu qu’elle étoit moindre , & la diffé
rence n’étoit pas de demi - v o y e , comme il le prétend
dans fon mémoire , mais d'abord d’une v o y e & demie ,
& puis d’une voye. Il a fallu enfin le convaincre qu’il avoic
retiré quatre voyes & demie , comm e aujourd’hui il faut
le convaincre que c eft vingt voyes qu’il a reçues du fieur
Feuillant. •
L e fieur Feuillant a prouvé qu’il avoit fatisfait en entier
à fa dette envers Sauret. Les quatre v o y es & demie y
dues au fieur S é v e , 6c qui ont tourné au profit de S a u r e t ,
font donc à la charge de ce dernier.
1Répliqué
à
.
la prétendue réfutation des objections d u
mémoire du Jieur Feuillant
C ’eft avec raifon que le fieur Feuillant attaque les dé
clarations de Girard & de fa femme , fur le fondement
qu’elles ne font point précifes , & ne préfentent que de
l ’incertitude.
i° . L e fécond membre de la déclaration de Girard a une
liaifon intime avec le premier. S i Girard dit vrai , en décla
rant qu’il n’a reçu que douze v o y e s , Sauret eft cenfé par
le fécond membre , n’en avoir enlevé que douze. Mais il
G irard ne fait que croire que c ’eft douze voyes f qu il ne
foit pas certain de cette quantité , il eft vrai aufii de dire
que ces mots , 6» qui ont été effectivement remifes à Sau ret,
ne fignifient autre chofe , finon : Sauret a reçu ce que
j e crois avoir reçu.
2°. C e n’eft pas parce que Girard n’a donné que fix liv»
G
3
�20
pour le d é ch a rg e m e n t, qu’il ne doit y avoir eu que douze
v o y es; mais c ’eft parce qu’il a cru qu’il n’y avoit eu que
douze voyes
qu’il ne réclame que fix liv r e s , & vingt fols
pour buvette. E t il eft bon de favoir que Girard ne dit pas
dans fa déclaration., qu’il n’a payé que 6 livres, mais qu’il
croit n ’avoir payé que 6 liv.
Dans la Consultation donnée en faveur de Sauret , par
fon d éfe n fe u r, le i er. o & o b r e , il eft dit q u i l n’y a plus de
doute, même pour la quantité reçue au Potit-du-Château, dès
que Girard & fa fem m e ont fo n d é leur déclaration fu r un f a it
efje n tie l, qu’il eji marqué dans leur livre , fo u s la date du 2.5
août t y 85 y qu’ils ont payé & hv. pour le déchargement. L a
même réflexion fe retrouve dans le mémoire imprimé , mais
avec une petite différence. Pourquoi n y lit-on pas que ces
6 liv. données pour le déchargement , font portées dans ce
livre , fous la date du 25 août ? C ’eft que le défenfeur de
Sauret a bien fenti que le livre de G ir a r d , informe & c o n
tredit par fes dépofitions , ne pouvant faire foi contradi£toirement à celui du fieur Feuillant , qui eft en r è g l e , & donc
les dates font réiatives à celles fixées avant le rapport de ce
l i v r e , il étoit aifé de voir que les 6 liv. pour le décharge
m e n t , n’ont pas été données le 2Ç a o û t , puifque dans ce
mois il n’eft arrivé que fix voyes. Com m ent faire décharger
en août ce qui n’eft arrivé qu'en feptembre ? 11 faut conve
nir auifi que Girard a mis Sauret dans un furieux embarras,
en convenant de deux envois , rapportant une lettre d’avis
de fix voyes , & écrivant cependant fur fon livre douze
voyes , fous une feule date de délivrance, date qui ne fe rap-porte à aucun des envois.
Réplique relative à ta fecon.de objection,
i° . O n convient q u e , de ce que Girard & fa femme nuroient reçu vingt v o y e s , il n’en réfulteroit autre c h o fe , finon que ceux-ci doivent compte de vingt voyes au fieur
�Feuillant. M ais comme il eft prouvé que Sauret a été averti
de l’arrivée du ch arb o n , dans le temps même de cêtre~arri-~
v é e , ce n’eft plus Girard qui en eft refponfable , mais Sauret. C ’eft au Pont-du-Château que le charbon a dû lui être
conduit ; il a été inftruit de fon arrivée ; de ce moment il
eft à 'fa charge.
2°. C e n’ eft point après coup que Girard a réclamé le
prix du déchargement d’un plus grand nombre de voyes ,
s’il étoit prouvé au procès qu’il en eût reçu davantage. C ’eft
lors de la déclaration qu’il a faite en juftice , c ’eft à la fuite
de cette déclaration , avant qu’il fût en caufe ; & cela eft
aifé à juftifier par les dates. V o i c i , ce femble , com m e il
faut raifonner dans cette conteftation : Girard a reçu une
certaine quantité de charbon pour Sauret , & l’a dans le
temps prévenu de l ’arrivée de ce charbon. Girard a oublié
la quantité des v o y e s ; Sauret ne l ’a point fa itm e fu r e r , &
n’en peut énoncer la quantité, que d’après le nombre de fes
-voitures ; mais il n’a retiré ce charbon de deflus le p o r t ,
que dans l’efpace de deux m o is , il ne peut donc en fixer la
q uantité: à qui donc s’adreflfer pour la connoître? aux livres
journaux refpe£tifs. Sauret n’en tient point. L e journal du
fieur Feuillant eft en règle , p ro p re , écrit dans toute la con
tenue de chaque page , tenu par un commis qui n’a d ’autre
occupation que celle d’y porter les expéditions jour par jour ,
. qui n’a eu nul intérêt à faire un faux dans ce l i v r e , & qui en
a affirmé la fincérité. Si cette affirmation n’a pas été fuivie
d’un ju g e m e n t, c ’eft qu’il reftoit à prouver que Sauret avoit
é té prévenu du fécond envoi; le fieur Grimardias ayant affiiré
qu'il avoit été prévenu du premier, comme il eft démontré par
fa lettre du j août 1785: , à Girard. O r il n’eft pas poiïïble de
confondre le premier envoi avec le charbon qui s’eft trouvé à
la fin de feptembre au P o n t-d u -C h â tea u , & que S a u r e t , fur
l ’indication de Girard , convient d’avoir retiré , à com m en
cer de la fin de ce m o is , ou du commencement d’o£tobre.
Sauret a donc connu ce fécond e n v o i } lors de ion arrivée
�au Pont-du-Château. Sauret eft donc refponfable des deux
e n vois, c ’eft-à-dire , de vin g t voyes.
Réplique rclaùve a la trolfième objection.
L e fieur Feuillant n’a point dit dans fon mémoire , ni
prétendu q u i , dans le cas où Girard n’auroit délivré que
douze voyes à Sauret , quoiqu’il en eût reçu v i n g t , Sauret
fût refponfable de vingt voyes envers lui; il a dit que Girard
avoit été commis à la réception par F e u illa n t , & au déchar
gem ent par S a u r e t , & que dans le cas où^ Sauret n’auroit
retiré que douze v o y e s , au lieu de v in g t, l ’arrivée des vin g t
voyes prouvée , & les deux expéditions connues dans le
temps par Sauret , ce dernier feul en étoit refponfable. E t
i ° . Sauret a remis le c h e v a l, prix des dix-huit voyes , fur la
lettre du fieur Feuillant ; Feuillant ne propofe pas à Sauret
.V^-Td’aller le recevoir chez G i r a r d , mais ait qu’il le fera c o n - 7
'B uire ch ez Girard les conventions de la lettre ne font que
la” répétition des conventions verbales. I l avoit donc é t é _
convenu que Girard feroit le commiflio'nnaire des deux ;
"mais fuppofons que Girard ne fût point le commiilionnaire~
réciproque , qu’il fût uniquement celui du fieur Feuillant.
A quoi dans cette fuppofition étoit ob ligé Girard ? à avertir
S a u r e t , aufli-tôt après l’arrivée des bateaux. Girard a rem
pli fa miflion. Si Sauret ne convient pas d’avoir été averti par
G irard du premier e n v o i , il ne peut nier qu’il a connu cet
e n v o i, & qu’il en étoit même inftruit avant Girard , puifqu’il
dû être le lendemain matin de l’arrivée de ces pre
m i e r s bateaux au Pont-du-Château, pour enlever ce charbon.
I l convient qu’il a été averti à la fin de feptembre de l ’arrivée
d e douze voyes , & qu’il les a retirées. E t la fécondé expé
dition eft du 22 feptembre. Il a donc été prévenu des deux
envois. O n a prouvé que le fieur Feuillant cefToit, après ces
prélim inaires, d’en être garant. L e fieur Sauret doit donc
compte de vin g t voyes au fieur Feuillant
�23
f
.
Réplique relative à la quatrième objeâion
L e défenfeur de Sauret prétend que la vérité & la réflexion '
il ont point préfidé à la défetife du Jleur F eu illa n t, & croit le
prouver en difant qu’il étoit aifé de faire attention qu’on ne
peut payer dix fols par v o y e , fans favoir combien il y en a.
L a prétention du défenfeur de Sauret feroit v r a i e , fi celui de
Feuillant difoit que le charbon eft déchargé , fans que la
quantité foit connue des déchargeurs. Ils la connoiffent fur
le rapport qui leur eft fait de la contenue des bateaux. Ils
ne le contremefurent point. Ils fe fient à la foi des lettres de
voiture : en for:e qu’il n’eft point vrai de dire que l’on n 'ap
prend le nombre de voyes , que par le déchargement des
bateaux. L e fait eft que jamais le charbon n'eft contre-m efuré au Pon t du-Château ; & jamais on n’a mis des raifonnements en oppofition a v e c des faits.
.
Répliqué relative à la cinquième objection
Sauret a ignoré ou feint d’ignorer la quantité de charbon
qu’il avoit retiré de chez V ig ier. Il a d’abord dit qu’il n’en
avoit retiré que trois voyes , pour trois & demie ; & enfin
la dame S é v e , fille de V ig ie r , a , pour le convaincre, fait
entendre la fervante qui demeuroit pour lors chez fon p è re ,
& c'eft le tém oignage de cette fille , réuni au compte
des voitures qu’il avoit enlevées , qui a convaincu Sauret
qu’il avoit reçu quatre voyes & demie. D e - là fuit qu’il
n’eft pas exa£t de dire que Sauret s’en eft rapporté au livre
de V i g i e r ; il a fallu le convaincre. La déclaration de cette
fille eft de plus venue à l’appui de ce quJavoit dit le Procureur
du fieur Feuillant ; que le Heur Sauret s’étoit fervi dans fes
enlèvemens de charbon , d’un tombereau frauduleux. E t ef
fectivement cette fervante a dit & affirmé que le tombereau de
Sauret contenoit vingt-une rafes^ qu’elle l ’avoit vu m efu rer,
�& q u e Ton M aître avoït fait des reproches à Sauret de ce qu’il
avoit chargé à ion tas fans avertir perfonne de la maifon. O r
Sauret prétendoit q u e c e tombereau n econ ten o it que dix-huit
r a fe s ,& il n’a fait d’autre réponfe au reproche qui lui a été fait
fur cette contenue , finon que ce tombereau s’étoit élargi par
l ’u fa g e .T o u t homme raifonnable fentira le ridicule de cette
défenfe de Sauret dans une accufation d’une telle importan
ce. L£contenju^_de__çe__tombereaufera3^
ouvrir Tes yeux fur le point eifentiel de la conteftation.
C O N C L U S I O N.
,
J
-1
4" 7
'
f
V
L e livre de Girard , agent intermédiaire , ne peut faire
foi. Son tém oignage verbale , réclamé par S a u r e t , à la
requête duquel il a été o u ï , vient à l ’appui du livre du
fieur Feuillant. Celui - ci eft en r è g l e , & attefte deux en
vois. Girard rapporte une lettre d ’avis de fix voyes , du
y août 178^ , par laquelle il appert que Sauret a été
prévenu de cet e n v o i , & a dû fe trouver le lundi au
r o n t - du - Château , pour le recevoir. I l a été prouvé ,
foit par les expreilions de cette l e t t r e , foit par l ’obtention de la fentence rendue en faveur de Sauret , contre
le fieur Feuillant ; fentence qui montre le befoin le plus
preffant de charbon , de la part de Sauret ; qu’il a néceffairement enlevé ces fix voyes , dans le temps de l’arri
v é e , ( le 8 août 1785: , ) que ce charbon ne peut par c o n féquent faire partie de celui que Sauret a appris de Girard 9
être fur le port , à la fin de de feptembre , & qu’il con
vient d’avoir retiré dans le temps ; cette date eft celle de l ’expé
dition des quatorze v o y e s , parties de Brafiac le 22 feptembre.
_
S a uret a donc retiré fix voyes le 8 août , & quatorze
— ^ c o m m e n c e r de la fin (Je feptembre.
^
D e p lu s , le charbon n’eft jamais contremefuré au P o n t-C h âtea u ; Girard par là même s’en eft rapporté à la
bonne foi des lettres d’avis qui annonçoient la contenue
bateaux. L a condition de Sauret a dû être la même.
�II n’a fait efFe&ivement fon com pte j félon Iuï - m êm e
que fur le nombre de voitures qu’il a
fait conduire
du Pont - du - Château à R io m . O r la contenue de fon
tombereau a certainement induit Girard en erreur fur
le nombre fixe des voyes du fécond envoi , attendu ,
i° . que celui - ci a perdu la lettre d’avis de cet envoi.
2°. Q u e , la différence de douze voyes avouées , à qua
torze voyes expédiées , s’explique par la contenue de ce
tombereau , qui eft d’un feptième en fus de ce que Sauret
déclare qu’il contenoit ; ce qui opère précifément , a ve c
même nombre de voitures , la conduite de deux voyes
de plus.
- Sauret en outre ne tient point de livre journal ; Feuillant
feul eft en règle à cet é g a r d , & fon commis, teneur de ce livre,,
en a attefté la fincérité. C e livre feul doit donc faire foi.
Sauret eft donc refponfable de vingt voyes envers le fieur
Feuillant. L e s quatre voyes & d em ie, dues au fieur S é v e ,
on t tourné uniquement au profit de Sauret ; elles font
donc à fa charge. Sauret doit donc être débouté de fa
demande incidente contre le fieur Feuillant , condam né au
paiement de quatre voyes & demie envers le fieur S év e ,
& à celui de deux voyes envers le fieur Feuillant , fous
la dédu&ion de ce qui peut être dû à Sauret pour le
montant des frais de la fentence du 30 juillet 1 7 8 ; , & à
tous les dépens.
M onjieur B O I S S O N ,
-
Juge
F l o u r i t
en chargé.
,
Procureur.
�CONSULTATIONS.
E C onfeil foufligné , qui a vu les mémoires , les pièces
y mentionnées , &, la C o n fu lta tio n , délibérée à R io m
le 6 du préfent mois :
E S T D ’A V I S que la prétention du fieur Sauret n’eft
point fondée , & que la demande incidente de deux voyes
a e charbon , qu’a formée contre lui le fieur F e u illa n t , paroît
abfolument inconteftable.
L e livre journal qu’ a rapporté le fieur Feuillant , eft des
plus réguliers, & il prouve clairement que le fieur Feuillant
a fait deux envois de charbon pour le com pte du fieur
Sauret , l ’u n , de fix v o y e s , en deux bateaux, le f août
17$$ ; le f é c o n d , de quatorze voyes y aufli en deux ba
teaux , le 22 feptembrc fuivant.
C es deux envois ne peuvent être conteftés ; ils font
avoués par Sauret ; & G i r a r d , fa&eur commun des deux
parties, les a atteftés dans fa dépofition juridique.
I l ne refte donc plus qu’à favoir fi ces deux envois ont
été réellement reçus par S a u r e t , à leur arrivée au P o n t du - Château , & c ’eft de quoi il n’eft pas permis de dou
ter , d’après le livre journal du fieur F e u illa n t} q u i paroît
être à l'abri de tout foupçon.
Sauret ne défavoue pas ces deux envois ; il ie. retranche
à dire qu il n a pas reçu la quantité exprimée ; qu’il peut
fe faire que Girard en ait retenu une partie , & que dans
ce c a s , c’eft au fieur Feuillant à exercer fon recours contre
Girard. V o ilà quel eft le feul argument que propofe le fieur
Sauret ; argument qu’il eft facile de réfoudre.
i ° . L e fieur Sauret eft convaincu de mauvaife foi dans
la c a u fe , rélativement à la manière dont il s’eft défendu
vis - à - vis la dame Séve , au fujet des quatre voyes & de
mie de chajbon , dont elle lui a demandé le p a ie m en t,
L
�27
¿c au fujet auflî de l’abus de confiahce qu’il a commis lors
de la délivrance de ces quatre voyes & demie de charbon.
O r ) il eft de principe qu’en fait de c o m m e r c e , celui qui
eft convaincu de mauvaife foi fur un article , laiiTe fur fon
com pte de bien violents foupçons fur les autres articles
de délivrances qui lui ont été faites } quoique par d’autres
Marchands.
20. Girard a dépofé dans la caufe , & il a d'ailleurs tenu
un livre journal.
Sa dépofition conftate les deux envois faits par le fieur
F e u i l la n t , & elle laiffe de l’incertitude fur la quantité de
ces deux envois : il ne dit pas qu’il eft afluré qu’ il n’y a
eu dans ces deux envois que douze voy es de charbon ; il
dit qu’il ne s’en rappelle p o i n t , mais qu’il n’a payé que
pour douze voyes , & que s’il y en avoit davantage , le
prix de déchargement du furplus étoit dû.
C ette dépofition n’attelle donc rien de certain ; elle
laifle fur la quantité des deux envois la plus grande in
certitude , & le livre journal du fieur Feuillant n’en laiiTe
aucune.
3°. L e livre journal de Girard n’eft qu’un vrai c h iffo n ,
& d’ailleurs très - infidèle : il donne le 2^ août pour é p o
que de la délivrance faite à Sauret des deux envois du
fieur Feuillant ; tandis que le premier eft du j août s
& le fécond n’eft que du 22 feptembre.
C om m ent concevoir que Girard a pu délivrer à S a u r e t ,
au 2 ; août , le fécond envoi du fieur Feuillant , qui
étoit de quatorze voyes ; tandis que ce fécond envoi
n ’eft parti de BrafTaget que le 22 feptembre fuivant ?
V o ilà donc l’infidélité du livre journal de Girard bien
prouvée , & le livre journal du fieur Feuillant n’eft pas
môme taxé d’inexa&itude.
Q u on rapproche ces deux livres journaux , on verra
aifément que celui de Girard n’a été fait qu’après coup ,
& fur la rélation de Sauret lui - même , qui , pour
diminuer les frais du déchargement qui étoient pour fon
�Compte , lui a déclaré qu’il n’y avoit que douze v o y e s ;
ôc c ’eft fur cette déclaration que Girard , qui étoit de
bonne foi , a mentionné fur fon livre qu’il n 'a v o it été
payé que fix livres pour les frais du déchargement.
Qu*on rapproche encore le livre journal de Girard de
fa dépofirion juridique ; on voit que l’un & l ’autre font
en contradiction. L e livre journal ne parle que d’un feul
envoi fait par le fieur Feuillant ; la dépofition fait men
tion de deux expéditions. D ans le livre journal il paroît
qu’il n’a été payé que pour douze voyes de déchargement ;
dans la dépofition , Girard dit qu’il ne fe rappelle pas
qu’elle étoit la quantité de charbon , quJil n’a été payé que
pour douze voyes de déchargement , & que s’il y avoit
une plus grande quantité de ch a rb o n , les frais du déchar
gem ent lui font dûs.
L e fieur Feuillant n’a point de recours à exercer contre
le fieur Girard ; il a vraiment e n v o y é , en deux fois , les
vin g t voyes de charbon , mentionnées en fon livre journal f
& ce l i v r e , non fufpe£t, en fait foi.
'
Girard convient avoir reçu les deux envois ; il a donc
reçu les vingt voyes. Il a délivré à Sauret les deux envois.,
à mefure qu’ils lui font parvenus , & celui-ci eft forcé de
convenir que la délivrance lui a été faite en deux fois ; c ’eft
donc vingt voyes que Girard lui a délivrées au Pon t - du Château. C eft pour le compte de Sauret que le charbon a été
déchargé fur le p o r t , 6c dès ce m om ent la perte fortuite
eft retombée fur lui.
O n ne préfume point qu’il en ait é té fouftrait fur le
p o r t , & il y a tout lieu de c r o i r e , d’après les circonftances , que Sauret a réellement voituré ch ez lui la totalité
des v in g t voyes , m a is , dans le cas co n tra ire , ce feroit ü.
faute , s’il étoit furvenu du déchet fur le port.
Il faut donc tenir pour certain que Girard a délivré à
Sauret toute la quantité de charbon qui lui a été adreiTée
par le fieur Feuillant. L e livre journal du fieur Feuillant
prouve qu’il y en a voit v in g t voyes. O n a rapporté une
lettre
�' #
t
a i > .
lettre de l u i o u d e f o n co m m is , qui fait foi que le premier
envoi étoit de fix voyes ; pourquoi ne rapporte - t - o n pas
auffi la féconde lettre , pour le fécond envoi du mois de
feptembre ? C ’eft parce que cette féconde lettre prouveroit
démonftrativement que le fécond envoi é toit de quatorze
voyes. T o u t porte à croire qu’elle eft entre les mains de
Sauret , foit qu’elle lui ait été adreffée directement , foit
qu’elle lui ait été enfuite com m uniquée par Girard.
O n ne peut pas préfumer que le commis du fieur
F e u illa n t, qui avoit eu attention de donner avis du premier
envoi , quoiqu’il ne contînt que fix v o y e s , ait n égligé de
donner avis du f é c o n d , qui en contenoit quatorze.
Pourquoi ne rapporte - t - o n que la lettre du premier
envoi ? C ’eft pour faire croire que le fécond n’a pas é té
plus confidérable que le prem ier, & c ’eft en quoi la bonne
fo i de Sauret doit être fufpectée.
Enfin , fa mauvaife foi eft prouvée au p r o c è s , com m e
o n l 'a déjà obfervé , foit par la manière dont il s’eft co m
p o rté dans le principe de la conteftation , vis - à - vis la
dame S év e , foit en retirant le charbon que le fieur V ig ie r
lui avoit vendu ; foit enfin par la circonftance que ce n’eft
qu’incidemment que Sauret a imaginé de fe replier fur le
fieur Feuillant ; & il eft plus que vraifemblable qu’il n’auroit jamais formé contre lui la demande incidente d’une
v o y e & demie de charbon , fi la dame S éve ne l’eût ja
mais recherché pour la valeur de quatre voyes & d em ie,
dont Sauret eft encore fon débiteur.
D é lib é ré à R io m , le 24 O ctobre 178 7. T O U T T É E t
L A P E Y R E , A N D R A U D
& M A N D E T .
A
R I O M , de l’imprimerie de M a r t i n D É G O U T T E ,
Im prim eur-Libraire, prcs la F ontaine des Lignes. 17 8 7,
�
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Factums Baron Grenier
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A name given to the resource
[Factum. Feuillant. 1787]
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Boisson
Flourit
Toutté
Lapeyre
Andraud
Mandet
Subject
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marchandises
troc
charbon
créances
transport fluvial
livres-journaux
mines
poids et mesures
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Feuillant, défendeur et demandeur. Contre Gervais Sauret, défendeur et demandeur. [suivi de]Consultations.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1785-1787
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
BCU_Factums_B0123
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
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BCU_Factums_B0125
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pont-du-Château (63284)
Brassac-les-Mines (63050)
Riom (63300)
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Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
Créances
livres-journaux
marchandises
Mines
poids et mesures
transport fluvial
troc
-
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m M
REPLIQUE
POUR
le fieur F E U I L L A N T .
CONTRE
L
G e r v ais
SAURET.
E Défenfeur du fieur Feuillant , dans fon mémoire en
réponfe à celui de Sauret , cherchoit uniquement à éclai
rer la religion de fes J u g e s , convaincu que la vérité ne s'ac
c o m m o d e d’autre o r n e m e n t, que de celui d’une noble fïmpli-
cité , relevée par la folidité des preuves, & foutenue par la
force des raifonnements. L e Défenfeur de Sauret a cru mal à
propos y reconnoître de l’a r t , & a voulu prouver par fa réponf e , que ce n'eft point dans une difcuffion telle que celle dont
il s’agit , que l ’on doit chercher à briller. L ’on convient qu’il
a fait fa preuve , & que fes lecteurs doivent ê tre enchantés
d e l a répétition ingénieufe d e cette partie de phrafe choquante ,
les Lecteurs amateurs de l'art oratoire. L e ton plaifant qui règne
dans cette répon f e , d’un bout à l’autre , eft bien fait pour
A
Ju r i s d i c t i o n
Confulaire.
�faire regarcl«r com m e autant de fe n te n c e s , les a lertio n s fans
nombre que l'on y tro u ve, & le D éfenfeur du fieur Feuillant
fe gardera bien d’envier le plaiiir que ce perfifflage char
mant doit avoir caufé aux le&eurs de fon adverfaire ; il ne
relèvera pas même certaines réricences du Ddfenfeur de Sauret , au jugem ent duquel cependant le fieur Feuillant auroit
remis la décifion de l ’affaire dont il eft quefticn ^ s’il eût voulu
e’en ch a rg e r, quoique le fieur Feuillant n'ignorât point que
Sauret eût pris les devants , en lui donnant fa confiance.
Il faut convenir que le Le& eur qui détefte l’a r t , aime allez
ordinairement le piquant du farcafme. A u d i le Défenfeur
de Sauret a - t - il préféré à certaines d é c e n c e s , le fel de ce
genre de plaifanterie.
Il eil fâcheux que le fieur Sauret ait cru trouver des pro
pos injurieux dans le mémoire pour le fieur F eu illa n t, & que
ïan indignation a itété excitée. L e D é fe n fe u r du fieurFeuillant
Croit ce reproche mal fondé. Il ne tient jamais de propos in
ju rieu x; il f« contente feulement quelquefois defaire c o m m e
la lime de l ’H o rlo g er de la Fontaine qui émouifoit les dents
qui s’efiayoiènt à la mordre.
Il refpe£te trop la religion des Juges du fieur F e u illa n t,
pour eflayer de la furprendre par des foliicitations ; il n’ap
partient qu’à Sauret de folliciter avec vivacité.
L e D éfenfeur de Sauret trouvera bon que le fieur F eu il
lant obferve qu’il cro yo it que Sauret étoit feni capable de
fuupçonner un livre d’infidélité, parce qu’il eil en bon é t a t ,
& paroît neuf. Il ne peut
difconvenir d ’avoir lu
dans un premier m é m o ire , q u e ce liv rea vo it été paraphé par les
Juges-Confuls de B r io u d e , au bas des pages écrites dans
le temps même des expéditions faites à Sauret , & cela à
raifon d’une affaire pendante à ce T ribunal entre le fieur
�3
F eu illant & un autre particu lier, a£te judiciaire , propre à
faire impreiïion fur l'efprit des Juges. L a poiïïbilité d’une
tranfcription infidelle peut tout au plus donner lieu à la,
foupçonner. Pou r hazarder de rendre public un foupçon
injurieux, il faut des preuves qui approchent de la conviction.
L e Défenfeur de Sauret prétend peut - être qu'il,
faut mordre , quand on a les dents agacées. Q u ’il jouifTe
de ce plaifir à fon aife ; mais que du moins il nous
permette une réflexion au fu jet de ce qu’on l i t , page 4 de
fa réponfe : de ce qu’ un homme dirait fauffem ent n avoir reçu
d'un particulier que dou7te voyes de charbon , au lieu de vin g t,
l'on ne pourroit pas en conclure rai/onnablement qu ii en im pofè,
lorfqu’ild it q u ii n a donné à un autre que dou^e voyes. C e tte ma
nière de raifonnereft toute neuve. L ’on avoit cru jufqu’àpréfent
que d’une première infidélité , l’on pouvoir conclure une fecon
de. L ’on ne pourra donc plus maintenant conclure raifonnablementque de la bouche d’un menteur, il forte des menfonges.
M ais abandonnons la difcuifion de cet axiome infidieux ,
ne nous appéfantiffons point à en faire fentir le vice.
L e fieur Feuillant s’eft difpenfé de rappeller en entier îa '
déclaration de la femme Girard , qu’il avoit lue dans le m é
moire pour Sauret. Il n’eft point néceifaire de répéter ce
que l’on n’entend pas contredire. N e nous plaignons pas
cependant du reproche du Défenfeur de Sauret ; il avoit des
raifons fi folides à donner ,
qu’il s’eft hâté de les jeter fur
le p a p ie r, fans fe donner 1a peine de lire le mémoire de
fon adverfaire ; il y auroit vu que le fieur Feuillant a avoué
que le fieur Grimardias , fon commis * avoit prié Girard
de faire décharger les flx premières voyes ; qu’il s’eft fervi
ailleurs de ces expreflions ,
6" qui ont été effectivement reA 2
�4
. *.
mîfes à Sauret. E t celui-ci fe plaint d'affectation à a i i c i c r i a
déclaration de cette femme ! Q u e ne fe plaint-il plutôt de
l'infidélité de F e u i lla n t , dans la citation du paiïbge de Born i e r , fur l’article X du titre I I I de l ’O rdonnance , où il dit:
exprefTément, que celui qui ne tient point de livres > ejl ré-'
pute de mauvaife f o i ?
PaiTons à une infidélité plus apparente. Sauret fe plaine
de ce qu’il eft dit faufTement dans le m ém oire de fon ad"
verfaire , que la lettre que le fieur Feuillant lui a écrite ,
annonce qu’il fera conduire ce charbon cher^ Girard. L e D é fenfeur de Feuillant n’a point cette lettre fous les y e u x ,
il convient qu^il a fait une e rre u r; mais il obferve que le
fait de l’expédition che\ Girard , n’eft dans fon m émoire
qu’un fait ifolé , dont il n’a tiré aucun parti dans les m oyens
de défenfe. T o u te s les circonftances font fi concluantes ,
pour prouver que Girard étoit le commiilionnaire des deux
Parties , qu’il a conclu à l ’affirmative j pour un fait que riea
ne dément , & que tout tend à prouver , que le fieur
Feuillant a toujours attefté. Les moyens effentiels dans la
c a u f e , f o n t , î 0. cette claufe expreiTe de la lettre du fieur
F euillant à Sauret , la décharge à votre charge.
a 0. L e contenu au livre du fieur Feuillant , tenu par fon
C om m is , qui a fait les envois, & le feul en règle à cet é g a rd ,
aux termes de l’O rdonnance.
30. L ’énoncé de la lettre du fieur Griinardias à G i r a r d ,
par laquelle il eft indubitable que Sauret a connu le préjnier envoi , en fon temps.
4°. L ’abfurdité qu’il y auroit à
penfer que Sauret n’eût
pas fuivi l ’exécution d’une fentence qui prononçoit la dé
livrance du charbon dans trois jours.
�L ’aveu de S a u r e t , d’avoir enlevé douze v o y es , d e
puis la fin de fe p te m b re , date de l ’expédition de quatorze
voyes.
6 °. L a foibleilb des m oyens de défenfe de Sauret , qui
s’appuye fur des déclarations t où l’on ne vo it que de
l ’incertitude , quant à la quantité de voyes ; tandis que ,
d’autre p a r t , elles attellent deux envois , & dém ontrent par
la la faufleté du contenu au livre des dépofants^ qui p o r t e ,
ou deux envois diftin&s , fous une m êm e date 3 ou un
feul envoi , un mois avant l’époque de fon arrivée.
T o u s ces moyens font fuffifamment difcutés dans le pre
mier mémoire auquel Sauret vient de répondre , de la ma
nière la plus commode & la plus plaifante. I l efpère que fes
ju g e s prendront fes aflertions pour autant de vérités.
feint , par exemple , d ignorer que Grimardias , co m
mis du fieur Feuillant ait dit expreüem ent que Sauret feroit le lundi , 8 août , au Pont-du-Château , pour enlever la
première expédition. Il fait au fieur Feuillant la grâce de le
fuppofer , &: dit que ce commis ne parloit que par l'effet d’u
ne préfom ption; voici les termes de cette lettre. J 'a i ¿’hon
neur de vous adrejfer >fo u s la conduite de M artiaux , préfent
porteur, deux bateaux de charbon , de la mine de Barathe ,
11
à h tenue de. trois voyes chacun, pour le compte de M . Sauret,
de Riom , qui enverra des voitures lundi pour en chercher.
E n conféquence j e vous fera i infiniment obligé de fa ire fa ir e
toute la diligence pofiible lundi matin , pour le déchargement
de ces deux bateaux , & éviter par ce moyen des fr a is à
M . F e i.i’lant , que le fieur Sauret ejl dans l'intention de lui
fa ire , f i le charbon n était pas déchargé à l ’arrivée de Jes
voitures. C ette lettre eit-elie é q u iv oq u e? efl-elle faite avec
�£
art ? n’eft - elle pas fim p le , & par cela môme vraie ? ne
prouve - 1 - elie pas fans répliqué que le commis du fieur
F e u illa n t parloit avec certitude de l ’arrivée de Sauret au
P o n t - du - Château , le lundi qui devoit fuivre le f a o û t ,
date de cette lettre ? ne prouve - 1 - elle pas d’autre parc
que le commis favoit que Girard étoit le commiiïionnaire
convenu , puifque c ’eft à lui qu’il adreiïe l’expédition , avec
inftance de prefTer le déchargem ent ? Il f a v o i t , à n’en pas
douter , que Sauret feroit ce jour - là au Pont. Sauret a
d on c tort de fe plaindre de n’avoir pas été prévenu de
l ’arrivée du charbon.
M ais avoit-il befoin de l'être ? la fe n ten ce qu’il avoit
obtenue le 50 ju ille t , n’é t o i t - elle pas elle feul le meilleur
avertiiTement poflible
pour tous les d e u x ;
pour le fieur
F e u i l l a n t , en lui déclarant qu’il falloit que le charbon ÿ
fû t dans trois jours ; pour Sauret , en le mettant dans le
cas de fe rendre ?u Pont-du-Château , avec fes v o itu re s ,
trois jours après la lignification de la fentence. L e commis
du fieur F e u illa n t, averti par la fentence obtenue contre l u i ,
a expédié fix voyes fur le champ. Si Sauret veut dire
q u ’il a ignoré que ce charbon fut au Pont-du-Château le jour
indigué par le fieur Grim ardias, & avoué par Girard , qu’il
repréfente donc un a£te qui conftate que le fieur Feuillant
n ’a point obtempéré à la fentence , & qu’il n’a pas effe£Hvem en t trouvé du charbon pour lui au Port le jour fixé par la
fentence. Il ne fait point cette preuve , & le (ieur Feuillant
prouve par fon livre quJil a expédié le charbon ; il prouve par
G irard, que ce charbon eit arrivé au P o r t , & d’abondance par
la lettre de fon commis que Sauret a dû fe trouver le lundi ,
Z a o û t , au P o n t-d u -C h â tea u , pour enlever les fix premières
�?
voÿes. Sauret a donc été fuffifamment inftruit de l ’envoi fait
en août. O r cet envoi n’eft que de fix v o y e s , 6c Sauret con
vient d’en avoir reçu douze , & quJil les a retirées depuis la
fin de feptembre , date du fécond envoi. Il a donc été inf
truit de ce fécond envoi. S ’il n ’a pas retiré ces fix premières
v o y e s , eft-ce au fieur Feuillant à lui en faire compte ? Il
fuflit qu’il ait été inftruit de cet envoi , pour qu’il foit à fa
charge. L e charbon étoit fur le lieu convenu. Mais Girard
qui repréfente la lettre d’avis du fieur Grimardias , déclare
que Sauret a retiré ce qu’il a reçu. O r Girard a reçu ce pre
mier envoi. Sauret Ta donc retiré.
O n ne peut rien conclure contre le fieur Feu illant
de la recommandation' de fon commis à Girard , au
iujet du déchargement ; il ign oroit la claufe de la
lettre du fieur F eu illant à Sauret ; c ’eft cetce recom
mandation qui fait un des titres de Sauret , qui a donné
lieu à cette partie de la déclaration d e là femme Sairarcl ,
que le fieur Feuillant l ’a chargée de fa ir e décharger. O r la fupprellion de ces expreffions dans le mémoire de Feuillant
eit accufée d’infidélité par le D éfenfeur de Sauret ; ce
reproche tombe de lui - même , puifque ce n’eft pas le
fieur F eu illan t, mais feulement fon co m m is qui a prié Girard
de faire décharg«r ce charbon.
Mais qui eft le porteur de cette lettre de Grimardias
?
Girard , le tém oin appellé par Sauret. Si Sauret veut tirer
avantage de cette lettre d’a v i s , il eft forcé de conven ir
qu'elle eft vraie en fon entier ; s’il p r é t e n d , d’après elle ,
que le charbon qu’il a retiré , eft arrivé en août , il eft
donc forcé suffi de co n ven ir qu’il a dû fe trouver , ôc q u ’il
s’eft effe&ivem ent trouvé le lundi 8 aoû t au P o n t-d u -C h â -
�8
teau , pour enlever ce premier envoi. S ’il veu t tirer avan
tage du livre de' Girard , il eft encore forcé de con
venir qu’il a retiré ce qui eft arrivé en août. O r Girard a
écrit fur fon livre qu’il eft arrivé du charbon en août , &
q u ’il a été remis à Sauret. Celui - ci a donc retiré la pre
m ière expédition , qui eft de fix voyes. Selon Girard il a
reçu du charbon arrivé en deux expéditions diñantes l’une
de l’autre. Girard ignore la quantité de voyes de cette fé
condé expédition. Sauret convient d’en avoir retiré douze
depuis la fin de fe p te m b re , & cette date eft celle de l’e n
v o i de quatorze voyes. I l a donc reçu le charbon des deux
envois.
I l dit cependant qu'il n’a reçu que douze v o y e s , & ne
iîxoit d’autre temps , pour cette r é c e p t io n , que celle du
m ois d ’août , & ce n’eft que depuis quJil a été aidé dans
fes réflexions , qu’ il a prétendu ne les avoir enlevées que
depuis la fin de feptembre ; il confond par cette adreife
d e u x envois en un
M a is i ° . à queile fin Sauret auroit - il repréfenté
fi vivem ent le befoin qu'il avoit de ce charbon en
ju illet 178 j , fi fon intention é t o i t d e laifier écouler deux
mois , fans fuivre l ’eflfet de la fentence qu’il follicitoit fie
q u ’il obtint. Q u ’on ne dife point que le charbon délivré
par V ig ie r l’avoit appaifé ; il en avoit reçu au moins gran
d e partie avant la fe n te n ce , comme le Défenfeur de F e u il
lant l ’a appris depuis peu.
20. A quelle fin les Juges ont - ils pris l ’aiTirmation du
fieur Grim ardias, commis du fieur Feuillant ? n’eft - ce point
afin d’éclairer leur réligion ? C e tte affirmation ne l’éclai r e - t - elle que f u r i a fmcéricé des expéditions & des d ates,
fans
�/*
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9
fans 1’' éclairer fur la fincérité du contenu entier en la lettre
d avis de la première de ces expéditions , lettre d’avis qui
donne l’arrivée de S a u r e tle lundi , pour m o tif de la prompte
expédition , ainfi que de la néceilité de faire décharger le
charbon fur le champ. Grimardins mériteroit d'être cru
dans ce qu'il a infcrit fur fon regiftre , qui refte entre fes
mains , & il ne mériteroit aucune foi fur le contenu eti
une lettre qu’il écrit à un tiers , en conféquence de cette
tranfcription , à un tiers qui a cru la confervation de cette
lettre-d’avis fi peu effentielle , qu’il a eu de la peine à la
retrouver , & qu’il a négligé de conferver celle du fécond
envoi.
Sauret eft donc co n va in cu , même par fes propres moyens
'de défenfe , d ’avoir eu avis du premier envoi. Il n'eft pas
poflible que ce premier envoi faflfe p a rtie . du fécond. I l a.
donc retiré en août fix voyes , & à la fin de feptembre
douze , félon lui - même. Mais pourquoi n’en au ro it- il pas
enlevé quatorze , comme le prétend le fieur Feuillant ,
com m e le fait croire la contenue du tombereau de Sauret ,
qui étoit d’un feptième en fus de ce qu’il déclaroit que ce
tombereau contenoit.
I l eft bien fâcheux que l ’évidence du c a lc u l, inféré dans le
mémoire pour le fieur F e u illa n t, ait tellement frappé le D é »
fenfeur de S a u r e t , qu’il ait fait de vains efforts pour le tourner
en ridicule. Ce c a lc u l, dit-il , production précieufe de l ’ima
gination de nos adverfaires
ejl annoncée d’une manière,
vraiment fublim e , & q u o n ne peut fuivre. Au(Ti fe c o n
tente-t-il dans fon d é p it, de lui décocher un traitfatyriq u ç.
C e c a lc u l, dit-il ^ page 8 , ejl un effort pcnible de l imagination
�10
'
de ce B é f e n f e u r , à qui il plaît de Vappeller une dem onf
tration mathématique. M ais il ne falloit pas un effort pé
nible pour comprendre la note dont il s’agit. Pourquoi le
D é fe n feu r de Sauret ne. s*eft-il pas donné la peine de la lire
avec plus de réflexion ? E lle n’eft point louche. L a voici pour
qu’il la m éd ite , puifque, par m alheur, il en a pris, ou ce qui
feroit pire , voulu prendre le fens totalement à gauche. Q u e
n ’eft-elle du moins vraiment abfurde ; elle mériteroit la cri
tique des Lecteurs amateurs de l ’art oratoire. Une démonflration mathématique montreroit la vérité dans tout fo n jo u r ;
elle co n fo n d , terraffe le menfonge. La probabilité fo u rn it des
armes contre lui\ elle lè v e , fuivant f e s divers d:grés , plu s ou
moins du voile dont il s ’enveloppe. O n ne lit point m ontre,
mais montreroit. O n lit fo u r n it, ôcnon fourniroit. L e D éfenfeur de Feuillant a donc donné fon c a lc u l , non pour une
démonjlration mathématique, mais pour ce qu’il e f t , une pro•
habilité.
Il eft pénible fans doute , de voir retomber fur foimême fa propre plaifanterie. Mais auiTi 3 qu’il feroit fatiguant
pour l ’amour propre du calculateur perfifflé , de s’être trompé
fi lo u rd e m e n t, que de prétendre démontrer ce qui n’eft que
probable. Ses connoiiîances, fans être g ra n d e s , le font ailez
pour lui faire appercevoir qu’il n’y a point de degrés, qu’il
n 'y a point de plus ni de moins , dans une démonftration
mathématique , qu’elle prouve évidemment que fon cara&ère
eifentiel eft de forcer la conviction, prérogative à laquelle ne
fauroit atteindre la probabilité.
Eft-il é to n n a n t, d’après une erreur pareille, que le D é fe n feur de Sauret ait mal pris le fens des pages «4 ,
17 ôc 18
�ïî
du mémoire pour F e u i lla n t } & qu’il ait prétendu dans fa
réponfe que celui-ci a v o u lu , page 18 , infmuer que Sauret
avoit lui-même avoué q u i l avoit pris les J îx premières voy es.
L e Heur Feuillant fe contentera de dire q u e , dans les pages
c i t é e s , il n’a pas iuppofé que .Sauret eût reçu les fix pre
mières voyes ; mais qu’il a conclu des divers genres de preuves
qu’il adminiftroit, que Sauret les avoit reçues. O r , une conclufion n'eft point une fuppofidon. E lle peut porter fur une
,
,fupjfí)fition, »mais elle nJen eft pas une elle-même.
Sauret défire que la vérification de fon tombereau foit
ordonnée. Sa
demande eft - elle admiilible ? Il a déjà fait
voir à l ’audience qu’il n’ofoit donner un démenti à une f e r vante de cabaret ; ( que cette expreffion va-bien à S a u r e t, )
I l a été co n va in cu , par la déposition de cette fille , que fon
tombereau contenoit vingt-une rafes, puifqu’il n ’a fait à ce
fujet d’autre réflexion , d ’autre réponfe, finon, que fon tom
bereau s’étoit élargi par l’ufage. Mais fi ce tombereau s’étoit
déjà fi fort élargi en 178J , qu’il avoit augmenté de trois
rafes, à quel taux la contenue en feroit-elle portée mainte
nant? O h ! S a u r e t , cet Homme fim ple , n’auroit pas la m aladreife de préfenter un tombereau qui fe feroit fi fort élargi.
L es meubles d’un ufage journalier changent confidérablement
dans deux ans, & quand ils font fujets à s’é la r g i r , ils ne
font plus reconnoiflables au bout d’un certain temps.
Q u ant au contre-mefurage du charbon , quelques convaincans que fo ie n t, au gré du D éfenfeur de S a u r e t, fes raifonnemens pour prouver qu’il a lieu , le (leur Feuillant déclare
qu’il ne craint point l ’information la plus rigoureufe^ &
qu’il offre d’en faire dépendre le fuccès de fa caufe.
�12
N o u s trouvons bon que le D éfenfeur de Sauret plaifante
tout à fon aife fur les fobriquets ; cette partie ne conviendroit point à un amateur de l'art oratoire. N o u s ne lui en
vierons point cette g l o i r e , non plus que l ’ardeur qui empêcheroit Sauret de faire un troc de fobriquets. Il eft de ces
idées charmantes qu’ il faut laiffer au le cteur le plaifir d’ap
précier.
«
A
Signé F E U I L L A N T .
Monf i eur B O I S S O N > Juge en charge. ^
*
F l o u r i t t Procureur.
R I O M , de l’im prim erie de M a r t i n D É G O U T T E ,
Im p rim eu r-L ibraire, près la F ontaine des Lignes. 1787.
�
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[Factum. Feuillant. 1787]
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Flourit
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mines
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Réplique pour le sieur Feuillant. Contre Gervais Sauret.
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1787
1785-1787
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pont-du-Château (63284)
Brassac-les-Mines (63050)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
auberges
charbon
Créances
Faux
livres-journaux
marchandises
Mines
poids et mesures
témoins
transport fluvial
troc
-
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MÉMOIRE
POUR
M. G1ROUD, propriétaire, tant en son nom personnel qu’en
qualité de gérant de la Société Giroud et Cie;
CONTRE
MM. JO Z IA N et S A U R E T , associés en participation, pour
l'exploitation des droits cédés au sieur JO Z IA N par le sieur
PEZERAT.
Quoique les détails d’un procès soient toujours arides, la lecture de ce Mémoire
offrira peut-être quelqu’intérêt : on y verra les aberrations étranges de la
juridiction arbitrale, cette institution si vantée en théorie, mais quelquefois
si défectueuse en pratique.
F A IT S .
En 1838, les progrès de l’ industrie houillère décidèrent M. Giroud à entre
prendre l’exploitation de la mine des Barthes située dans l’arrondissement de
Brioude, département de la Haute-Loire. La concession de cette mine avait été
faite à M. Sadourny, par ordonnance royale du 11 février 1829 : M. Giroud, réun
à un autre capitaliste, acheta cette concession, reprit les travaux, ouvrit des
puits et organisa l’extraction de la houille sur une grande échelle : plus tard, les
besoins toujours croissants de l’exploitation l’obligèrent d’appeler à lui de nouveaux
�capitaux. II fonda alors une société qui, restreinte à. un très petit nombre d’ac
tionnaires, fut moins une commandite qu’une famille dont il était le représentant
et le mandataire.
Vers le môme temps, une autre Société se formait à Paris, sous les auspices
d’ un sieur Pézerat ingénieur, pour la fabrication de l’asphalte granitique, sub
stance qui s’extrait de la houille, et qui s’emploie au dallage des rez-de-chaussées.
M. Pezerat, voulant s’approvisionner de houille, s’adressa aux copropriétaires de
la mÿie des Barthes, et fit avec eux, le 30 novembre 1838, un marché qui devait
*
être le texte d’ une multitude de chicanes.
Ce marché portait que MM. Giroud et Chevalier, copropriétaires de la mine ,
s’engageaient à livrer par chaque mois à M. Pezerat la quantité de 10,000 hecto
litres de houille; que la livraison serait faite quotidiennement dans une quantité
proportionnelle ; qu’une partie de cette houille était destinée à fabriquer du gou
dron; qu’une autre partie devait être transformée en co k e ; que MM. Giroud et
Chevalier fourniraient le terrain et l’eau nécessaires pour cette manipulation ;
qu’ils s’obligeaient également à faire transporter au bord de l’A llier, à leurs frais
et sur le terrain qu’ils fourniraient, tous les produits do la compagnie Pezerat, et
même les charbons en nature, s’il lui convenait de ne pas les manipuler; que ce
marché durerait quinze ans, à partir du 1*' mars 1839 ; qu’il pourrait être porté
jusqu’à 600,000 hectolitres par an; que les charbons houillers seraient fournis dans
une proportion de moitié gros, moitié menu, au prix de 90 centimes l’hectolitre;
qu’enfin, en cas de contestations, elles seraient jugées à Paris et non ailleurs { ex
cepté celles qui par leur nature ne pourraient se décider que dans la localité ) par
un tribunal arbitral composé de trois membres, dont deux seraient choisis par les
parties, ou , à leur défaut, par le président du tribunal de commerce, et le troi
sième par les deux arbitres désignés, sinon par le tribunal de commerce du lieu
où serait portée la contestation ; que la décision serait en dernier ressort ; enfin,
les parties déclaraient faire élection de domicile à Paris, savoir : M. Pezerat au
siège de la Compagnie, quai de Jemmapes, 190, et MM. Chevalier et Giroud, dans
la demeure de ce dernier.
Les livraisons do houille devaient commencer au mois de mars 1839; mais la
Compagnie Pezerat n’avait pu parvenir à accréditer l’asphalte granitique; elle
manquait d’argent; elle ne payait pas même le loyer des lieux qu’elle occupait.
Comment aurait-elle payé l’énorme quantité de houille qui devait lui être livrée ?
I.'exécution du marché lui était évidemment impossible; d’ailleurs, ne fabriquant
pas d’asphalte, elle n’avait plus besoin de houille. Les propriétaires de la mine
considérèrent donc ce marché comme non avenu.
Mais M. Peierat avait pour conseil un praticien consommé qui vit une affaire i»
exploiter dans ce marché que la compagnie Pezerat ne pouvait pas exécuter.
�M. Pezerat renonçait à faire de l’asphalte, mais qu’importe? Ne pouvait-il pa
spéculer sur la houille ? l’argent lui manquait pour payer les livraisons ; ne pou
vait-il pas revendre la marchandise, avant môme qu’elle ne lui fût livrée? 11
résolut donc de céder son marché, et il traita d’abord avec un sieur Bravard, à
qui il donna une procuration pour se faire livrer la houille. Mais, le 29 mai
1830, il révoqua cette procuration et signifia la révocation à MM. Giroud et
Chevalier en leur déclarant que son nouveau mandataire était un sieur Jozian,
demeurant à Pont-du-Château, prés Clermont (Puy-de-Dôme.)
M. Jozian, quoiqu’il fût maire de sa commune, n’était guère plus solvable
que M. Pezerat D’ailleurs, ce titre de mandataire déguisait celui de cessionnaire.
Or, MM. Giroud et Chevalier ne voulaient pas avoir affaire à des agioteurs.
Ils avaient traité avec la Compagnie d’asphalte granitique, qui achetait des
houilles, non pour les revendre, mais pour les convertir, soit en goudron,
soit en coke ; ils crurent avoir droit d’exiger ou que cette Compagnie exécutât
elle-même ses engagements, ou que, si elle tombait en déconfiture, le marché
tombât avec elle. Cette déconfiture n’étant pas encore publique, il fallait la
constater. A cet effet, MM. Giroud et Chevalier firent sommation à M. Pezerat,
le 5 juillet 1839, de prendre livraison de 10,000 hectolitres do charbon, et de
fournir, en môme temps, une traite de 9,000 fr. acceptées par son banquier.
Le premier point n’aurait pas été difficile, mais, le second était impossible.
M. Pezerat ne répondit pas. MM. Giroud et Chevalier l’assignèrent alors en paie
ment des 9,000 fr., moins pour obtenir une condamnation illusoire que pour
constater, par cette condamnation même, l’insolvabilité de M. Pezerat, et la
nécessité de résilier le marché.
Cette condamnation, qui paraissait inévitable, fut cependant éludée par l’ha
bileté du praticien qui dirigeait M. Pezerat. Il demanda d’abord une remise,
puis le renvoi devant des arbitres-juges; MM. Giroud et Chevalier consentirent
à ce renvoi et nommèrent pour arbitres, d’abord M. Ilobert, avoué, et ensuite
M. Venant, ancien agrée près le tribunal de commerce.
Ainsi M. Pezerat avait gagné du temps. Mais que dirait-il pour sa defense devant
les arbitres? Il avait acheté la houille, pouvait-il la payer? Pouvait-il tirer de
sa caisse 9,000 fr. par mois pendant quinze ans? Ni M. Pezerat, ni M. Jozian
n’étaient capables d’exécuter cette condition. Cependant leur conseil ne voulait pas
que le marché fût annullé. Il imagina donc un système fort commode pour un
acheteur qui ne peut pas payer. C’était de dire que le vendeur ne voulait pas
livrer, d’accuser au lieu de se défendre, et de demander, au lieu do houille, des
doinmages-intérôts. Pour marcher dans cette carrière nouvelle il fallait beaucoup
d’audace et d’astuce, MM. Pezerat et Jozian ne furent pas au-dessous du rôle qu’on
leur faisait jouer.
houille devait être livrée sur le carreau de la mine et transportée ensuite
�sur les bords de l’ Allier. MM. Pezerat et Jozian prétendirent qu’elle devait être
livrée au bord de l’Allier, et dans le cas seulement où cette rivière serait navi
gable. C’était une invention gratuite, car rien de semblable n’avait été convenu.
Ils ajoutèrent que les 10,000 hectolitres qu’on les sommait de recevoir n’existaient
pas sur la houillère. A l’appui de ces allégations mensongères, ils présentèrent
requête à M. le président du tribunal de Brioude, et lui demandèrent une exper
tise. Si jamais demande dut être contradictoire, c ’était celle-là, mais les demandeurs
ne voulaient pas être contredits, et le juge qui répondit à la requête ne s’aperçut
pas qu’ on surprenait sa religion en lui faisant faire, par ordonnance ce qu’il ne
pouvait faire que par jugement. Ce fut un notaire qui reçut la mission de vérifier
l’état de la rivière et les produits de la mine. Mais, comme cela entrait fort peu
dans les fonctions du notariat, il s’adjoignit des experts et des témoins, ou plutôt
il accepta le cortège qui lui avait été préparé d’avance. Tous ces individus, arri
vant aux Barthes, déclarèrent qu’ils venaient inspecter la mine et sonder la
rivière. M. Chevalier, qui se trouvait sur les lieux, répondit qu'il s’opposait à
cette visite domiciliaire, qu’il défendait à ses employés do s’y prêter, qu’il offrait
de livrer tout ce qu’il devait, mais qu’il repoussait l’inquisition qu’on voulait
faire, comme une mesure illégale et odieuse. Cependant le notaire dressa un
procès-verbal, dans lequel il déclara que la rivière n’était pas navigable, et que,
s’étant promené sur la houillère avec sa compagnie et un marinier, qui avait bien
voulu remplir le rôle honorable d’indicateur, ils n’avaient trouvé en évidence
qu’une quantité de 4,090 hectolitre 50 litres de houille (1).
MM. Pezerat et Jozian cherchaient ainsi à dissimuler la véritable question que
soulevait la déconfiture de la Société d’asphalte granitique. Cette déconfiture était
devenue flagrante. Le matériel de cette Société avait été saisi pour les loyers. II
avait été vendu publiquement les 7 novembre 1839 et jours suivants, parM. David,
commissaire-priseur. La dissolution de cette Société avait été prononcée par déli
bération de l’assemblée générale, en date du 16 janvier 1840, et des liquidateurs
avaient été nommés. Dans ces circonstances, la question n’était pas de savoir si
l’Allier était navigable, ou s’il y avait du charbon dans la mine des Barthes, mais
do savoir s’il y avait des fonds dans la caisse de cette Société dissoute, et s i, par
elle-même ou par son cessionnaire, elle serait en mesure de réaliser, dans les ter
mes du marché, une acquisition qui n’allait pas à moins de 1,800,000 hectolitres
de houille, moyennant 1,620,000 fr. La négative était évidente. En conséquence,
un tribunal arbitral ayant été nommé,MM. Giroud et Chevalier demandèrent la ré
siliation du marché, faute par l’acheteur de pouvoir l’exécuter.
Tandis que cette grave question s’agitait à Paris devant les arbitres que les par
( I ) A la suite do c e p ro c è s-v e rb a l, ¡1 p a ra ît q u e M . Jozian lit som m ation d e liv rer les ch arb o n s.
On offrit la livraison, m ais, a lo rs, il p ré te n d it qtfe le ch arb o n n 'é ta it p as rc c c v a b le . Avec celto
som m ation il av ait offert une tra ite do 9 ,0 0 0 fr. qui n'é ta it p a s & o rd re .
�ties avaient choisis, M. Jozian continuait ses ruses de praticien. Il emprunta
9,000 fr. pour faire des ofïres réelles, et il réclama la livraison de 10,000 hectolitres
de charbon. Il savait bien que ses offres seraient refusées et qu’aucune livraison
ne pouvait être faite quand l’existence du marché était mise en question, mais il
cherchait un prétexte pour demander des dommages-intérêts ; et il commença dès
lors à dire assez ouvertement que ce qu’il voulait qu’on lui livrât, ce n’était pas de
de la houille, mais de l’argent. Il forma don c, devant le tribunal de commerce de
llrioude, au nom de M. Pézerat une demande en paiement de 50,000 fr. d’indem
nité. Il obtint môme, par défaut, des jugements qui paraissaient lui donner gain
de cause ; mais, sur l’appel, la cour royale de Riom décida que les parties ayant
soumis leur différend à des arbitres qu’elles avaient choisis et qui avaient accepté
leur mission, tout autre tribunal était incompétent.
Les arbitres nommés étaient MM. Gibert, Venant et Girard, anciens agréés près
le tribunal de commerce de Paris. La principale question posée devant eux consis
tait à savoir si le marché serait résolu, soit pour inexécution, soit pour incapacité
résultant de la déconfiture de l’acheteur. Les arbitres reconnurent que la Société
d’asphalte granitique étant dissoute, et représentée par des liquidateurs, la décon
fiture était complète ; cependant ils voulurent bien admettre les procédures faites
à Brioude, au nom de M. I’ezerat, comme témoignage de son désir d’exécuter le
marché ; mais ils décidèrent que dans l’état d’insolvabilité où il se trouvait, il de
vait une garantie spéciale aux propriétaires de la mine, pour que ce u x -ci, obligés
de donner plus d’activité à l’extraction, ne fussent pas exposés à perdre le fruit
de leurs travaux. En conséquence, ils ordonnèrent que le marché serait exécuté,
mais à deux conditions : la première, que les charbons livrés seraient payés comp
tant et en espèces, au lieu d’être réglés par une traite ; la seconde, que M. Pezerat
et ses liquidateurs seraient tenus de fournir caution pour le paiement des livrai
sons à faire, jusqu’à concurrence de 54,000 fr. Cette sentence, rendue le 17 juin
1840 , fut déposée le 18, et toutes les parties consentirent à son exécution.
Jusqu’alors, M. Jozian n’avait agi que comme mandataire de M. Pezerat. Il était
cependant cessionnaire ; mais le droit cédé étant litigieux, l’ habile conseil de
M. Jozian l’avait empêché de signifier la cession. Quand on vit le procès jugé, on
devint plus hardi, on signifia le transport ; mais on eut soin que l’acte n’énonçât
aucun prix. C’était une dernière précaution contre le retrait litigieux. En même
temps, M. Jozian fit signifier un acte par lequel deux négociants se portaient cau
tions dans les termes de la sentence arbitrale.
C’était le 22 février 1841 que cette dernière formalité était accomplie. MM. Giroud et Chevalier étaient dès longtemps en mesure de faire les livraisons de
houille, et si M. Jozian eut été un acheteur de bonne foi, désireux d’avoir la mar
chandise, et capable de la payer, aucune difficulté ne pouvait plus s’élever. Mais
M. Jozian, guidé par le praticien dont on a parlé, voulait toute autre chose que de
�la houille; il spéculait sur l’importunité d’un procès pour des hommes occupés
d’ une grande entreprise ; il était témoin de l’industrie déployée à la mine des liartlies et de la prospérité naissante de cet établissement; il médita de lever un im
pôt sur cette prospérité ou de la troubler par un nouveau débat. En conséquence,
il se mit à relire le marché ; il y trouva cette phrase : Que le charbon serait fourni
dans une proportion de moitié gros, moitié menu. Il déclara aussitôt qu’il ne rece
vrait comme gros charbon que celui dont les morceaux auraient un diamètre de
p lusse 20 centimètres. Et dès le 21 février 1841, il demanda des arbitres pour vi
der cette nouvelle contestation.
Les précédents arbitres furent donc constitués de nouveau, et M. Giroud se pré
senta devant eu x , tant en son nom que comme représentant désormais M. Cheva
lier, qui lui avait cédé son droit dans la mine. M. Jozian parut, de son côté, assisté
de son conseil, et armé de conclusions par lesquels il réclamait, à son ordinaire,
u n e énorme quantité de dommages-intérêts. Ce n’était pas sérieux, mais plusieurs
questions plus graves furent soulevées dans cet arbitrage. On examina notamment
si un marché contenant des obligations respectives pouvait être cédé. L'affirma
tive fut jugée en faveur de M. Jozian. Il faut respecter cette décision. Mais la ques
tion la plus importante était de savoir comment devait s’interpréter l’obligation de
livrer moitié gros, moitié menu.
Sur ce point, les arbitres, ainsi qu’ils l’ont reconnu depuis, s’égarèrent complè
tement. Ils créèrent cinq catégories de charbon : le perat, dont les morceaux de
vaient avoir 32 centimètres au moins de diamètre, en tous sens ; le rondelet, de
16 centimètres ; le grenat ou gaillette, de 10 centimètres; la petite gaillette, audessous de 10 centimètres ; et le poussier. Ils prirent les trois premières catégories
pour en composer le gros charbon, et formèrent le menu avec les deux autres.
Cela posé, ils décidèrent que la moitié livrable en gros charbon devrait compren
dre un tiers de perat, un tiers de rondelet, et un tiers de grenat ou gaillette ; et
que l’autre moitié, faisant le menu, comprendrait, deux dixièmes de petite gail
lette, et huit dixièmes de poussier. Enfin, ayant remarqué que chaque catégorie
pouvait se subdiviser en diverses grosseurs, ils imposèrent au vendeur l’obligation
de livrer non-seulement toutes les catégories, mais encore toutes les grosseurs
possibles de chaque catégorie. Telle fut la sentence qui fut rendue le 24 mai 18 4 1 ,
et déposée le lendemain.
Or, cette sentence était inexécutable; les arbitres avaient indiqué des grosseurs
de charbon qui ne se trouvaient, ni dans la mine des Barthes, ni dans aucune mine
de charbon. Aussi M. Jozian triomphait, car avec la meilleure volonté de livrer
sa marchandise, M. Giroud ne ¡pouvait livrer ni des grosseurs que la mine ne
produisait pas, ni cet assortiment complet qui aurait exigé que chaque morceau
de charbon fut choisi à la main. M. Jozian put donc se flatter d’avoir son adver
saire à sa merci ; et ce fût alors qu’il se vanta que cette mino de houille serait pour
�lui une mine d’or. M. Giroud chercha dans la loi un remède à l’erreur des arbitres;
il forma opposition à l’ordonnance d’exequatur. Cette opposition fut soumise au
tribunal civil de Paris, puis à la Cour royale; mais quelque injuste que fut la sen- •
ten ce, le fond ne pouvait pas ôtre révisé, et il fut décidé que la forme était
régulière.
M. Jozian et son conseil se hâtèrent d'exploiter cette sentence dont ils savaient
bien que l’exécution était impossible. En conséquence et par acte des 14 octobre
et 17 novembre 1842, il provoquèrent un nouvel arbitrage pour faire condamner
M. Giroud à lui payer ces dommages-intérêts qui étaient lebut do tous leurs désirs,
ils ne parlaient môme plus de houille, c’était de l’argent qu’ils réclamaient sans
mise en demeure préalable, tant l’impossibilité de livrer, d’après la sentence,
était évidente à leur yeux. Cependant, ils se ravisèrent et comprirent que pour
la form e, ils devaient avoir l’air de demander de la houille. En conséquence, ils
firent dresser, le 5 décem bre, un procès-verbal qui avait pour but de constater
quô M. Giroud ne pouvait pas livrer. Mais ce procès-verbal servit au contraire à
démontrer qu’il pouvait livrer, si ses adversaires voulaient être de bonne foi. En
effet, M. Giroud offrit de mettre à leur disposition tout le charbon extrait, s’élevant
à 30,000 hectolitres et tout celui qu’on allait extraire, tel qu’il sortirait de la
mine. On ne pouvait pas exiger plus. Mais M. Jozian se retrancha dans la
sentence, et déclara qu’il exigeait les grosseurs et les catégories qu’elle indi
quait. On retourna donc devant les arbitres, et M. Jozian demanda modestement
20,000 francs de dommages-intérêts parce que M. Giroud n’avait pas liv ré ,
et 500 francs par jour s’il ne livrait pas à l’avenir.
Cependant, les arbitres avaient reconnu l’erreur dans laquelle ils étaient tombés,
ils désiraient la réparer, mais ils étaient retenus par la crainte de se déjuger.
M. Giroud démontrait qu’on l’avait condamné à l’impossible ; il soutenait qu’ une
telle condamnation ne pouvait avoir l’autorité de chose ju gée, surtout devant un
taibunal revêtu des pouvoirs d’amiable compositeur ; M. Jozian soutenait au
contraire qu’ il y avait chose jugée, et que possible ou non la condamnation devait
être maintenue. Les arbitres voyaient avec douleur qu’ils avaient donné des armes
à la mauvaise foi; ils résolurent de les lui oter, mais n’osant pas détruire euxmêmes leur sentence, ils imaginèrent d’obtenir de M. Jozian qu’il y renonçât. Ils
l’appelèrent auprès d’eux avec son conseil; ce qui fut arrêté dans cette conférence
intime, M. Giroud l’ ignore; mais le 2 juin 1843, M. Jozian lui fit signifier des
conclusions par lesquelles se désistant tout à coup des demandes qu’il avait
soutenues jusqu’alors avoc une infiéxiblo opiniâtreté, il réduisait à plus de moitié
le diamètre du gros charbon et consentait à le recevoir tel qu’il serait extrait et
sans catégorie.
Quatre jours après cette signification, le 6 juin 1843, les arbitres rendirent leur
nouvelle sentence. Elle était conform e, comme on le pense b ie n , aux dernières
�conclusions de M. Jozian. Les arbitres fesaient disparaître les grosseurs surna
turelles et les catégories qu’ils avaient imposées; ils accordèrent même ù
ML Giroud la faculté de livrer au-dessous des grosseurs convenues en diminuant
le prix. Ils décidèrent que les livraisons de 10,000 hectolitres par mois seraient
faites jour par jo u r, à raison de 333 hectolitres chaque jo u r ; ils déclarèrent
que jusqu’alors M. Giroud n’ayant pas été en retard de livrer, ne devait aucune
indemnité ; ils firent défense à M. Jozian de vendre du charbon sur le terrain
de M. Giroud. Enfin, cette nouvelle sentence était favorable à Si. Giroud sur
toutes les questions principales ; elle ne lui fut contraire que sur la question des
dépens. M. Giroud gagnant son procès fut néanmoins condamné aux frais de
l’arbitrage. C’était une injustice d’autant plus révoltante que les frais étaient
considérables; mais il fallait sans doute que M. Giroud expiât l’erreur de la
sentence précédente, et M. Jozian avait probablement mis cette condition au
désistement que les arbitres lui avaient demandé.
Cette dernière sentence aurait dû terminer toutes les difficultés. Si M. Jozian
voulait de la_houille, M. Giroud était en mesure de le satisfaire, car ce n’était plus
l’impossible qui lui était prescrit Mais la mauvaise foi du prétendu acheteur de
charbon allait reparaître plus éclatante que jamais : à peine les livraisons étaient
commencées quo M. Jozian annonça un quatrième procès. Il avait prétendu,
en 1840, que l’Aliier n’était pas navigable : en 1841, que le charbon n’était pas
moitié gros, moitié menu; en 1842, que l’impossible était passé en force de chose
jugée; en 1843, il revient &l’Allier et critique non plus la rivière, mais le port qu’il
prétend n’ôtre pas assez élevé ni assez sûr pour y déposer son charbon. C’était
une contestation pitoyable, comme on va le voir.
MM. Giroud et Chevalier étaient propriétaires d’un terrain de 5 3 ares 20 cent.,
situé sur le bord de l’Allier. Ils avaient acheté ce terrain pour s’assurer un
débouché sur la rivière, qui malgré les inégalités de son cou rs, était cependant
l’unique véhicule à l’aide duquel les marchandises pouvaient sortir du pays. Le
terrain avait été choisi dans lo lieu le plus avantageux, c’est-à-dire, le pins
voisin de la mino et en môme temps le plus élevé au-dessus du niveau ordinaire
des eaux do la rivière. Tel était le port des Barthes lorsque M. Pézerat fit avec
MM. Giroud et Chevalier lo marché du 20 novembre 1838. L’article 3 de ce marché
était ainsi conçu : MM. Chevalier et Giroud s’obligent à faire transporter à leurs
frais au bord de l’AUier à leur port et sur le terrain qu’ils fourniront tous les
produits de la compagnie I’ézerat et môme les charbons on nature, s’il lui
convient de ne pas les manipuler.
Ainsi doux choses étaient promises à M. Pézerat : 1° le transport de ses produits
ou de ses charbons en nature, depuis le carreau de la mine jusqu’au bord de
l’ Allier; 2” l’abandon d’une place dans les 53 ares 20 centiares formant le port des
Barthcs. Cette place devait ótre donné dans le port ; elle ne devait donc pas êtro
�plus élevée ni plus sûre que le port lui-même; le terrain serait livré tel qu’il était,
avec ses inconvénients et ses avantages que M. I'ézerat connaissait mieux que
personne, car il était ingénieur civil, il avait vu les lieux, et il en avait dressé le
plan.
Mais aucun port n’est l’abri des inondations,, surtout sur les bords de l’Allier
que,la voisinage des montagnes expose à des crues extraordinaires. M. Jozian s’est
donc avisé de prétendre que le port des Barthes n’était pas convenable, parce qu’il
pouvait être atteint par les grosses eaux; il a allégué, comme un second grief,
que le terrain était, un gravier couvert de sable et de cailloux. Sous ses deux
prétextes, il a refusé de recevoir le charbon,qui lui était offert et dont une partie
lui était déjà livrée.
Ces prétextes n’avaient rien de sérieux. Ce n’étaient ni les grosses eaux, ni le
gravier qui effrayaient M. Jozian ; mais pour prendre livraison, il lui fallait de
de l’argent; or, il n’en avait pas, et il était aux expédients pour s’en procurer.
Après avoir emprunté à la maison Marche et Comitis, de Clermont, il s’était adressé
ùM. Sauret, banquier à Riom ; celui-ci n’avait voulu lui ouvrir sa bourse qu’à
condition de toucher, outre l’intérêt de ses avances, la moitié des bénéfices qui
seraient faits sur la revente du charbon ; mais le prix d’achat étant assez élevé, ces
bénéfices réduits à moitié n’avaient plus-d’attrait pour M. Jozian, et il préférait
de beaucoup ce qui était d’ailleurs son idée fixe, continuer une guerre de chicanes,
pour obtenir ou de l’erreur des juges, ou de la fatigue de ses adversaires, les dommages-intérêts qu’il rêvait depuis si longtemps.
Il faut avouer que ce goût de M. Jozian pour la procédure était justifié par
l’adresse merveilleuse qu’il y déployait. On a déjà vu comment il savait se procu
rer des expertises favorables, en les faisant ordonner sur requête et sans contra
diction. Il employa ici le même procédé en l’assaisonnant d’un mensonge. 11 ex
posa à M. le, président du. tribunal civil d’ Issoire que M. Giroud avait été condamné,
pas sentence arbitrale à. lui livrer une quantité considérable de charbon, et que ta
sentence portait, cntr’aulres dispositions, que la houille ou le charbon de. terre
serait déposé sur un port convenable; en conséquence, il priait M. le président de
commettre son notaire pour constater que le port des Barthes n’était pas conve
nable.
Or, cette disposition ne se trouvait pas dans la sentence; elle ne pouvait même
pas s’y trouver, car la convention du 30 novembre 1838, désignait le port des
llarthes comme celui dans lequel les marchandises devaient être déposés. Telle
était la loi des parties; le port des.Barthes était accepté tel qu’il était; sa conve
nance ne pouvait donc plus être discutée.
Mais M. Jozian ayant fait cette addition à la sentence arbitrale, surprit à la reli
gion du magistrat une ordonnance par laquelle Gourcy, notaire à Jumeaux, était
�commis pour vérifier si le port des Barthes était convenable. Le notaire-expert sç
rendit sur les lieux le 29 août 1843, avec trois individus auxquels il donna la qua
lité de témoins indicateurs. Il aurait été plus exact de dire que c’étaient des
témoins indiqués par M. Jozian. Il fit la description du port des Barthes , et cons
tata notamment que la partie livrée àM. Jozian était élevée de 1 mètre 433 milli
mètres au-dessus du niveau des eaux de l’Allier. Une autre partie était élevée de
1 mètre 973 millimètres ; mais le notaire reconnut que c’était au moyen d’ un
remblar exécuté par la Société Giroud et Cie pour y déposer son propre charbon.
Or, ce que la Société faisait pour abriter ses marchandises, M. Jozian pouvait le
faire pour les siennes; personne ne l’en empêchait; mais M. Giroud n’était pas
tenu de lui construire un terrain artificiel, quand il n’avait promis qu’ un empla
cement sur le sol naturel. Le notaire-expert ajouta que le sol était un gravier
couvert dp Sable et de cailloux ; c’est assez l’ordinaire au bord des rivières ; ce
pendant les témoins indicateurs prétendirent qu’il n’en était pas de même dans
les autres ports, comme si la nature eût réservé le sable et le gravier pour le seul
port des Barthes. Quoi qu’il en soit, M. Jozian devait prendre ce port tel qu’il
était, et s’en accommoder, car M. Giroud ne lui devait pas un pouce de terre
ailleurs.
M. Giroud voulut toutefois prouver sa bonne volonté, et éviter, s’il était possible,
une nouvelle discussion. Il avait des ouvriers occupés à niveler le terrain du port ;
il offrit de faire niveler et même remblayer, par eux, l’emplacement que M. Jozian
choisirait ; il déclara, de plus, qu’il mettait tout le port à la disposition de
M. Jozian, pour que celui-ci indiquât lui-même l’emplacement qui lui convenait.
Enfin il réitéra l’offre de livrer tout le charbon qu’il pouvait devoir d’après les
termes de la dernière sentence arbitrale.
Mais M. Jozian voulait plaider, c ’était un parti pris; en conséquence, il repoussa
toutes les offres qui lui étaient faites, et fit déclarer par le notaire-expert et les
témoins indicateurs que le port des Barthes n’était pas convenable, parce que la
rivière était torrentueuse, et qu’en 1837 ou 1838, s’étant élevée très haut, elle avait
emporté quelques charbons déposés sur ses bords. Le procès-verbal contenant
cette prétendue expertise fut signifié àM. Giroud le 5 septembre 1843, avec assi
gnation devant le tribunal do commerce d’Issoire pour se voir condamner : 1 “ à
10,000 fr. de dommages-intérêts, faute do fournir un port convenable; 2" à payer
500 fr. par jo u r , faute do livrer les charbons qu’il avait constamment offerts ;
3° à faire cette livraison sur le port, prétention injuste et nouvelle qui avait pour
objet de rendre la livraison impossible.
A peine cette demande fut formée que M. Jozian déclara s’en désister, pour
substituer à la juridiction du tribunal de commerce un arbitrage local. Jusqu’alors
les arbitres des parties avaient été d’anciens agréés près le tribunal de commerce
de Paris, car c’était à Paris que tous les procès devaient être jugés; les parties
�n’avaient excepté de ce principe général que les contestations q u i, par leur
nature, ne pourraient se décider que dans la localité. Cette exception fut une
bonne fortune pour M. Jozian ; il résolut d’en faire la règle, et d’appliquer la ju
ridiction locale à toutes les contestations quelconques entre lui et M. Giroud. Il
crut que, dans son propre pays, l’esprit de coterie soutiendrait le compatriote,
et proscrirait l’étranger. Il savait que certains habitants n’avaient pas vu sans
envie un homme venu de Paris pour exploiter leurs mines. Avec des arbitres im
bus de tels sentiments, il pourrait tout oser, tout demander, tout obtenir. L’ar' bitrage local était donc l’instrument le plus favorable à ses projets. On va voir
quel usage il en sut faire.
Il commença par déclarer qu’ il choisissait pour son arbitre M. Gourcy, notaire ¡1
Jumeaux. M. Gourcy était le rédacteur do la prétendue expertise du 29 août;
M. Gourcy avait déclaré comme expert que le port des Barthes n’était pas conve
nable, et M. Gourcy était nommé arbitre pour décider comme juge si le port des
Barthes était convenable. Certes, l’opinion d’un tel juge n’était pas douteuse, et
si jamais un arbitre dut se récuser, c’était M. Gourcy. Il ne se récusa pas ; il
accepta la nomination, et donna ainsi la mesure de son impartialité, soit comme
expert, soit comme juge. On put dès-lors pressentir le caractère de cet arbitrage
local que M. Jozian cherchait à constituer.
M. Giroud cependant ne voulait pas de nouveau procès ; il écrivit de Paris- à son
mandataire, que pour rassurer M. Jozian sur la sécurité du port des Barthes, il
offrait de placer les charbons de M. Jozian derrière ceux de la Société Giroud et Cie;
ainsi les eaux de l’Allier atteindraient ceux-ci avant d’arriver à ceux-là ; j e re
pète. dit-il dans sa lettre du 15 septembre 1843, ce que j'ai eu l'honneur de vous
dire et de dire à M. Jozian lui-même: que j e placerais nos charbons devant les
siens; je suis toujours prêt à le livrer quand il voudra, et à lui donner la place la
plus sûre et la plus convenable de notre port.
Mais M. Jozian tenait à plaider devant ces juges-experts dont la décision était
connue d’avance; il fit adjoindre deux collègues à M. Gourcy, et M. Giroud fut
sommé de comparaître devant ce tribunal arbitral. Quelque simple que dut être
le débat, M. Giroud ne crut pas devoir accepter de tels juges; il soutint que le
tribunal d’Issoirc, qui les avait nommés, n’était compétent ni à raison du domicile
du défendeur, puisque M. Giroud était domicilié à Paris, ni à raison de la situation
des biens, puisque la mine des Barthes appartenait à l’arrondissement do Brioude.
cependant le tribunal d’Issoire se déclara compétent ; mais la décision fut réformée
par arrêt de la cour royale do lliom du 21 février 1844 .
Cet échec aurait découragé tout autre que M. Jozian. Car enfin pourquoi plai
der? que voulait-il? du charbon? tout celui de la mine lui était offert. Un port?
celui des Barthes était le seul qu’on lui eut promis. Une place convenable dans ce
�port? on lui offrait celle qu’il choisirait, fût-elle la meilleure, fût-elle occupée
déjà par d’autres charbons. Quel était donc son intérêt à guerroyer? que deman
dait-il encore, s’il était de bonne foi? Son intérêt, il faut le dire, était le même
qu i, depuis 1840, lui faisait entasser procès sur procès. En achetant les droits
de M. l’ezerat, il avait cru prendre M. Giroud au dépourvu, il s’était flatté
que la mine ne produirait pas 10,000 hectolitres par m ois, et qu’une in
demnité lui serait offerte à la place du charbon qu’on ne pourrait pas lui
livrer. Mais il s’était trompé ; M. Giroud prenant le marché au sérieux avait
fait percer un nouveau puits qui avait doublé le produit de la mine, et ce n’était
pas seulement 10,000 hectolitres, mais 30 à 40,000, qui étaient extraits chaque
mois. M. Jozian se voyait donc obligé d’exécuter lui-même ce marché qu’il avait
cru inexécutable. Mais 10,000 hectolitres de charbon par mois étaient une charge
beaucoup trop lourde pour lui ; il lui était aussi difficile de les payer que de les
placer. En conséquence, il ne craignait rien tant que d’être forcé de prendre
livraison, et il plaidait, comme on l’a vu, sur la grosseur des charbons, sur la
convenance du p o rt, sur l’état de la rivière, sur tout enfin. Il recommença donc à
ürioude la procédure annullée à Issoire ; mais ce ne fut plus M. Gourcy qu’il
choisit pour son arbitre ; il lui préféra M. Dorival, géomètre et épicier à Souxillanges ; et pourtant M. Gourcy lui avait montré assez de dévouement ; mais il crut
que M. Dorival ferait encore mieux. Il fit nommer un second arbitre par le tribu
nal daBrioude; et il allait faire nommer le troisième, lorsque M. Giroud, impa
tienté de toutes ces procédures, fatigué des assignations qu’on ne cessait de lui
adresser aux Barthes, quoique son domicile fut à Paris, invoqua de nouveau l’au
torité de la cour royale pour faire cesser ces procédures et annuller ces assigna
tions. Mais la cour décida que les assignations étaient valables, et M. Giroud,
voyant qu’il ne pouvait éviter un nouveau procès, se résigna à le subir.
La jurisprudence qui annulle les clauses compromissoires était déjà établie par
de nombreux arrêts. M. Giroud aurait pu s’en emparer, et demander que le procès
qui lui était fait fût porté devant ses juges naturels. Mais ce procès n’en était pas
un. M. Giroud offrait à M. Jozian tel emplacement que celui-ci voudrait choisir
dans tout le port des Barthes ; aucune difficulté ne semblait possible. M. Giroud
consentit donc à un arbitrage, sur la demande de M. Jozian, mais il mit pour
condition que l’un des arbitres serait M. Auguste Lamothe, ancien exploitant de
charbons et propriétaire très honorable, membre du conseil général do la HauteIvoire , demeurant à son château do Frugères, aussi indépendant par son carac
tère que par sa fortune.
Un tel arbitre ne convenait pas à M. Jozian; mais l’ éconduire n’était pas chose
facile. M. Jozian y parvint cependant, à l’aide de procédés qui méritent d’être si
gnalés.
M. Lamothe ayant accepté sa mission, devait so réunir avec M. Dorival pour
�nommer un troisième arbitre. Il sollicita plusieurs rendez-vous à cet effet, mais
on lui répondit que M. Dorival était malade. Un mois s’écoula ainsi, et M. Lamothe
se trouvait obligé de faire une absence de dix jours pour un voyage à Paris, lorsqu’ il
reçut une sommation de comparaître, le 18 octobre, dans une auberge ou caba
ret de la commune de Jumeaux, à l’effet d’y procéder avec M. Dorival à la nomi
nation du troisième arbitre, ce qui était la première opération de l’arbitrage.
Quoique surpris du lieu choisi pour cette réunion, et de la forme dans laquelle ce
rendez-vous était donné, M. Lamothe s’empressa'd’écrire à M. Veyrincs, agréé de
M. Jozian, pour faire connaître son empêchement, mais on n’en tint compte ; et
M. Lamothe n’ayant pas comparu dans le cabaret de Jumeaux, AI. Jozian fit dres
ser procès-verbal contre lu i, non par le maître du cabaret, mais par M. Gourcy
notaire, qui se trouvait toujours prêt à verbaliser en faveur de M. Jozian, quoiqu’ il
n’eût aucune qualité, n’étant plus arbitre, pour se mêler do l’arbitrage.
M. Giroud protesta contre ce procès-verbal et invita les arbitres à se rendre, le
U novembre, à la mine des Barthes, où ils trouveraient un lieu de réunion conve
nable et à portée des objets litigieux. M. Jozian répondit que son arbitre, M. Do
rival, entendait élire domicile dans le cabaret de Jumeaux, et qu’il n’irait pas
ailleurs. En effet, M. Jozian fit dresser par le même M. Gourcy un second procèsverbal constatant que, le U novembre, M. Dorival, au lieu de se rendre aux Bar
thes, était venu à Jumeaux ; et de suite il présenta une requête pour faire nommer
un autre arbitre à la place de M. Lamothe qu’il fallait, disait-il considérer comme
démissionnaire, puisqu’ il n’avait pas paru au cabaret où l’attendait son collègue.
Cette ridicule requête fat rejettée, et les deux arbitres trouvèrent enfin le moyen
de se réunir, mais ils ne purent tomber d ’accord sur le choix d’un troisième ar
bitre , et ce fut le tribunal de commerce qui nomma d’abord M. Denis Bertrand,
et à son refus, M. Couguet avocat à Brioude. M. Couguet passait pour l’un des
conseils de M. Jozian M. Giroud attaqua sa nomination, mais elle fut confirmée
par la cour royale de Riom , et le tribunal arbitral se trouva composé de MM. Lamotho, Dorival et Couguet.
Quand des arbitres sont constitués, il est d’usage qu’ils s’entendent entre eux
pour fixer le jou ret le lieu de leurs séances : s’ilsne parviennent pas à s’entendre,
on se réunit chez le plus âgé. Ces règles de la politesse la plus vulgaire ne furent
pas observées vis à vis de M. Lamothe, arbitro nommé par M. Giroud. Les deux
autres arbitres décidèrent entre eux que le tribunal arbitral se réunirait dans
l’étude do M. Veyrines agréé de M. Jozian. C’était un lieu plus décent que le caba
ret de Jumeaux, mais peut-être n’était-il pas plus convenable, car M. Veyrines
était le mandataire de l’ une des parties. Dans tous les ca s , M. Lamothe aurait dû
être consulté ; mais scs collègues, se voyant deux contre u n , crurent appa
remment que tout leur était permis, et, oubliant que M. Lamothe était leur ég a l,
lui firent signifier par huissier l ’ o r d r e qu’ils lui donnaient de se trouver, le
'5 mai 18Zi5, dans l’étude do M. Veyrines. M. Lamothe s’y rendit, mais ce fut pour
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se démettre de ses fonctions d'arbitre. Pouvait-il en effet les exercer avec indépen
dance et dignité en présence de la coalition de ses deux collègues qui, par le lieu
et la forme brutale de leur convocation n’indiquaient que trop que leur parti était
pris d’avance? MM. Dorival et Couguet comprirent le sens de cette démission, et
ils prièrent M. Lamothe de vouloir bien, en les quittant, leur signer un certificat
de probité. M. Lamothe n’eut garde de leur refuser cette satisfaction, et sa démis
sion fut rédigée en ces termes par ses deux collègues : Purdevant nous ( Dorival et
Couguet ) est comparu M. Auguste Lamotlie, lequel nous a dit qu’il lui était impos
sible d’accepter la mission d'arbitre qui lui avait été conférée, se trouvant en cc
moment fortement engagé dans des opérations très conséquentes ; qu'il en était
d'autant plus fdclié qu’on lui avait donné pour collègues deux messieurs qu'il esti
mait beaucoup, et dont il connaissait l'honneur et la probité, et a signé. M. Lamothe signa et se retira. Le tribunal arbitral se trouva donc réduit à ces deux
messieurs que M. Lamothe eslimait beaucoup.
Cependant M. Giroud n’avait consenti à ce dernier arbitrage qu’à condition que
M. Lamothe serait arbitre, et M. Lamothe était éconduit; les deux messieurs aux
quels il avait légué son estime pouvaient en être dignes, mais leurs débuts dans
l’exercice de leurs fonctions n’inspiraient aucune confiance à M. Giroud. Quelque
mince que fût la contestation, M. Giroud craignait de se voir jugé par des hommes
qui n’avaient respecté ni leur collègue, ni leur propre caractère; il n’avait jamais vu
deux arbitres faire sommation à un troisième, et lui demander ensuite une attesta
tion de probité ! 11 se rappelait le lieu étrange que ces deux arbitres avaient choisi
pour y placer leur siège d é ju g é , et il n'attendait rien de bon d’une sentence qui
serait rendue ou dans une taverne, ou dans le cabinet de ses adversaires. Il con
sulta ses amis; leur avis fut qu’ il devait user du droit que la loi lui donnait de
récuser cette juridiction suspecte, et de réclamer la protection de ses j uges natu
rels. D’ailleurs c’était le moyen de mettre un terme à toutes les chicanes du sieur
Jozian. Audacieuses devant des arbitres, elles seraient timides en présence des
magistrats. M. Giroud forma donc une demande en nullité de la clause compromissoire contenue dans le marché du 30 novembre 1838. Cette demande, pour
être régulière, dut être intentée non seulement contre MM. Jozian et Sauret, mais
encore contre M. Pezerat avec qui le marché avait été fait. Elle fut portée devant
le tribunal civil de Paris, lieu du domicile contractuel de toutes les parties, et du
domicile réel de l’un des défendeurs.
MM. Jozian et Sauret avaient pour conseil à Paris cet habile praticien dont on a
déjà parlé. Aussi toutes les ressources de la chicane furent employées par eux pour
empêcher le jugement de cette demande. Ils prétendirent d’abord que l’assignation
qu'ils avaient reçue était nulle pour vice de forme. Ils attaquèrent ensuite la com
pétence du tribunal. Un jugement rendu par la 5* chambre du tribunal de la Seine,
le 2 décembre 18/i 5 , déclara l’assignation régulière et le tribunal compétent.
MM. Jozian et Sauret interjetèrent appel, et par cette tactique, ils sont parvenus à
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suspendre jusqu’à présent l’annulation de la clause compromissoire qui, d’après |
la loi et la jurisprudence, ne peut souffrir aucune difficulté sérieuse.
Mais si la nullité de cette clause est évidente, on demandera peut-être quel
avantage il peut y avoir pour MM. Jozian et Sauret à différer un jugement qu’ils
ne peuvent pas éviter. C’est ici le dernier trait de cette affaire. On ne connaîtrait
pas les adversaires de M. Glroud sans ce qui reste à raconter.
La demande en nullité de la clause compromissoire avait été signifiée à MM. Jo- »
zian et Sauret le 29 mai 1845. Le même jour, MM. Jozian et Sauret se présentent \
devant le président du tribunal de commerce de Brioude, et lui demandent la no
mination d’ un arbitre pour remplacer M. Lamothe. Le président qui ignore que
la clause compromissoire est attaquée, nomme M. Sabattier-Gasquet, charpentier
en bateaux. MM. Jozian et Sauret signifient cette nomination à M. Giroud, mais au
lieu de faire cette signification à son domicile, ils la font aux Barthes, en parlant
à son préposé, pour qu’elle lui reste inconnue pendant quelques jours. Cette
signification est suivie de deux autres au même lieu ; mais celles-ci méritent une
attention particulière. Ce ne sont plus MM. Jozian et Sauret, les adversaires de
M. Giroud, qui lui adressent un huissier, ce sont MM. Dorival, Couguet et SabattierGasquet, qui se posent comme ses juges, et qui, à l’exemple des prêteurs romains,
lui envoient l’appariteur pour le traîner à leur tribunal.
Quand la copie de ces exploits parvint àM. Giroud, il croyait rêver en les lisant,
tant il lui semblait singulier de se voir interpellé, provoqué et saisi pour ainsi dire
corps à corps par des gens qui avaient la prétention de le juger. Était-ce donc
avec M. Dorival qu’il avait un procès? Devait-il quelque chose à M. Couguet?
Avait-il jamais vu M. Sabattier-Gasquet? De quel droit ces messieurs le pour
suivaient-ils? Eussent-ils été ses juges, qu’une justice aussi acharnée aurait eu
quelque chose d’effrayant Cependant, comme ils pouvaient ignorer que M. Giroud
avait demandé la nullité de la clause compromissoire, sur laquelle reposait leur
prétendu pouvoir, il leur fit dénoncer cette demande en leur rendant, comme cela
était naturel, exploit pour exploit. Il leur déclara en même temps qu’il protestait
contre leur qualité d’arbitres et contre toute opération d’arbitrage ; puisque le
compromis était attaqué, c’était une question préjudiciellequi devait être examinée
avant tout. Cetto protestation fut signifiée à chacun des arbitres les 11, 12 et 15
juillet 1845.
Nonobstant cette protestation, les prétendus arbitres se réunissent le 18 juillet,
et décident que M. Giroud serait sommé de se présenter devant eux. Qu’ils aient
pouvoir ou non, ils jugeront. M. Jozian triomphait. Qu’avait-il à désirer de mieux
qu’ un adversaire qui no pouvait pas se défendre et un tribunal qui voulait absolu
ment juger 1 C’était le cas de demander tout, puisqu’on no serait contredit sur
r>cn. m . Jozian était trop habile pour ne pas profiter de cette circonstance. Jus-
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qu’alors il n’avait demandé qu’ une place pour déposer ses charbons, il prétendait
que celle qu’ on lui offrait n’était pas convenable, la question était donc réduite â
quelques mètres de terrain, et en supposant que M. Jozian fut fondé à refuser la
place qui lui était offerte, tout ce qu’ il pouvait réclamer était une indemnité
égale à la location d’une place meilleure. Le procès en lui-même était donc
chétif et misérable, mais M. Jozian va lui donner tout à coup des proportions
irigantesques. Ce ne sont plus quelques mètres de terrain qu’il lui faut, c’est la
fortune entière de M. Giroud qu’il va demander, c ’est sa personne, c’est toute la
raine des Barthes qu’il faut lui livrer. Il se présente,, en effet, devant les trois
hommes, qu’il a érigés en juges, et voici la série des nouvelles demandes qu’il a le
courage de leur adresser: Il veut d’abord 30,0Q0 fr., une fois payés; c ’est, d it-il,
pour l’indemniser notamment du cautionnement d e 54,000 fr., que M; Pezerata
été condamné à fournir par la sentence arbitrale du 17 juin 1840; mais ces 30,000 fr.
ne lui suffisent paa^ il: veut de plus une rentq de 48,000 fr. par an, qui lui sera
servie pendant quinze ans, ce qui donnerait un chiffre de 720,000 fr. Ces préten
tions insensées sont déguisées, il est vrai, sous des.formes hypocrites; ce n’est pas
une rente pure et simple que JU. Jozian demande, c ’est l’exécution du marché,
pourvu qu’on l’exicute à sa manière ; il veut bien prendre les charbons, pourvu
que la livraison soit faite sur le bord de l’Allier( à deux kilomètres du lieu convenu,
Sinon le marché sera résolu , et on-lui paiera autant de fois 40 cen t qu’on aurait
dû lui livrer d’hectolitres de charbon, ce qui veut dire qu’au lieu de vendre à
M. Jozian 120,000 hectolitres de charbon, moyennant 108,000 fr., qu’il n’aurait pas
pu payer, on lui servira tous les ans une rente de 4,800.000 cen t ou 48,000 fr.,
ce qui lui sera beaucoup plus agréable.
Quand M, Giroud apprit que les prétendus arbitres s’étaient constitués en
tribunal, il crut devoir leur signifier uno nouvelle protostation par exploit d’huis
sier du 19 août 1845. II leur disait dans cet: acte que- s'il pouvait convenir «
M. Jozian de plaider sans adversaire, il ne pouvait convenir à■des hommes hono
rables de s’associer à cette tactique, et de condamner aveuglement celui qui, con
testant leur compétente devant: un autre tribunal, ne pouvait pas- se défendre
devant eux.
Ce langage ne fut pas compris, et, malgré l’appel fait à leur honneur,, les trow
prétendus arbitres se réunirent le 29 août, pour procédera un simulacre de juge
ment. La protestation de M. Giroud fut réitérée devant eux par son avocat, et
inscrite en ces termes dans le procès-verbal : loquet a dit qu'il se présente unique
ment pour réitérer les protestations qu’il nous a fait signifier; qu'il persiste il sou
tenir que la clause compromissoire étant par lui arguée de nullité, et l'a/fairc étant
indiquée devant la cinquitme chambre du tribunal de la Seine au samedi, 30 du
courant, nous n’aoions, quant à présent, ni caractère ni pouvoir pour te juger.
Toutes ces protestations furent inutiles; MM. Jozian et Sauret voulaient une sen
�tence, ils en obtinrent deux, l’une sur la question de sursis, l’autre sur la question
de fonds.
Ces deux sentences méditent d’être lues. La première porte la date du 29 août
1845. Elle décide que M. Giroud n’a pas droit d’attaquer la clause compromissoire,
qu’en conséquence, la demande en nullité qu’il a formée devant le tribunal de la
Seine doit être rejetée. Ainsi, cette demande qui est soumise aux magistrats de
Paris, la voilà jugée à Brioude par MM. Dorival, Côuguet et Sabatticr-Gasquet. Et
par quels motifs est-elle rejetée ? M. Dorival et ses collègues prétendent-ils ap
prouver les clauses compromissiores, malgré l’unanimité des arrêts qui les pros
crivent? Non, ils les condamnent en principe, mais ils refusent à M. Giroud le
bénéfice de ce principe, et ils déclarent qu’il doit avoir pour juges MM. Dorival,
Couguet et Sabattier-Gasquet, par la raison notamment qu’il n’a pas voulu d’eux
pour juges, et qu’il a contesté leur nomination devant la Cour royale de lliom.
« Attendu, dit la sentence, qu’il a appelé des ordonnances qui ont nommé
» MM. Sabattier-Gasquet et Couguet. » Ce qu’il y a de plus étrange, c’est que le
fait était complètement faux en ce qui concernait M. Sabattier-Gasquet, qui n’était
pas même ¡nommé lorsque M. Giroud avait demandé la nullité de la clause com
promissoire; mais le fait fut-il vrai, il serait assez bizarre qu’ un juge devint
compétent par cela seul qu’on a contesté sa compétence.
Mais si cette première sentence est bizarre, la seconde, il faut bien le dire, est
révoltante. M. Jozian demandait, comme on l’a v u , 750,000 francs d’indemnités,
c était un rêve, une dérision, une extravagance. M. Dorival et ses collègues
prennent cette demande au sérieux , mais ils la trouvent pourtant un peu exagérée,
et dans leur équité profonde, iis arbitrent l’indemnité à la somme modeste de
066,000 francs, payable dans les termes de la demande, savoir : 26,000 francs de
suite et le surplus en cas de résolution du marché, et par annuités de 36,000 francs
pendant quinze ans.:1Après cette décision, il ne leur restait plus qu’à prononcer
la résolution du marché; ils la prononcent, et ils déclarent le marché résolu de
plein droit si les livraisons de charbon sont interrompues pendant quinze jours ,
soit par suite de refus de Giroud et consorts, soit à raison de difficultés nouvelles ,
provenant de leur fait. Enfin, ils év.'tcnt de dire si les livraisons doivent se faire
sur le carreau do la m ine, comme le voulait le m arché, ou sur le bord de la
rivière, comme le demandaient MM. Jozian et consorts; ils se contentent d’ordonner
qu elles auront lieu dans les conditions de ta sentence arbitrale du 6 juin 1843 et
du marché verbal du 30 nobembre 1838. Par cette réticence, ils laissent subsister
la difficulté; et commô on doit s’attendre que MM. Giroud et Consorts ne voudront
pas livrer sur le bord de l’Alliér, à deux kilomètres de leur mine, Cette combi
naison perfide réserve à MM. Jozian et Sauret un prétexte tout prêt pour dire que
la résolution est opérée par le fait de M. Giroud et que l’indemnité de 566,000 fr.
leur est acquise. Telle est cette sentence, qu’on pourrait traduire par ces mots:
a m' ne tlcs Uarthes est adjugée à MM. Jozian et Sauret.
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Une circonstance particulière augmentait l’audace de cette décision. Pendant
qu'elle s’élaborait à Brioude, M. Giroud pressait l’audience à Paris pour plaider
sur la nullité de la clause compromissolre. La cause fut retenue aux audiences
des 17 et 24 septembre, mais n’ayant pu venir en ordre utile, elle fut remise par
le tribunal avec injonction que toutes choses demeureraient en état. Cette injonction
prononcée contradictoirement avec MM. Jozian et Sauret ne fut pas attaquée par eux;
Elle les obligeait donc de cesser toute poursuite devant les prétendus arbitres. Elle
obligeait les arbitres eux-mêmes dont elle suspendait le mandat, mais ceux-ci
n’en tinrent pas compte, quoique M. Giroud leur eut fait notifier par deux fois
la décision du tribunal. Ils cherchèrent seulement à l’éluder en donnant à leur
sentence la date du 15 septembre quoiqu’elle n’ait été déposée que le 8 octobre
suivant.
M. Giroud se pourvut immédiatement devant le tribunal civil de Brioude par
voie d’opposition à l’ordonnance d’exéquatur. Le fonds de la prétendue sentence
n e pouvait pas être révisé, mais la forme était aussi vicieuse que le fonds. Plusieurs
moyens de nullité se présentaient ; le premier résultait de la nullité de la clause
compromissoire qui était la base du prétendu arbitrage. Mais cette nullité était
demandée devant le tribunal de la Seine, et la même question entre les mêmes
parties ne pouvait pas être soumise à deux tribunaux différents. Il fallait donc
que le tribunal de Brioude suspendit son jugement jusqu’à ce que le tribunal do
la Seine, saisi avant lu i, eut prononcé. M. Giroud avait conclu dans ce sens, et il
fut fort étonné d’apprendre que le tribunal de Brioude , mal informé des faits,
ou cédant à quelque prévention involontaire, avait prononcé sur le fonds et
décidé non seulement que la prétendue sentence arbitrale était régulière, mais
encore qu’il y avait lieu à l’exécution provisoire du jugem ent
Ainsi, la main qui dirigeait M. Jozian avait si bien conduit les procédures,
qu’ une contestation insignifiante sur la convenance d’ un coin de terre aurait fini
par produire une créance de 566,000 fr. payable par provision 1
Appel de ce jugement est interjetté devant la Cour royale de Biom, et avant
tout, des défenses d’exécuter sont réclamés de sa justice.
D ISC U S SIO N .
Quand on a parcouru les actes de cette cause, on est étonné de toutes les
procédures qui ont eu lieu et on se demande ce que cela signifie. Est-il vrai,
comme le dit M. Jozian, quo M. Giroud ait vendu ce qu’ il no peut pas livrer?
Est-il vrai, comme le dit M. Giroud, que M. Jozian ait acheté ce qu’il ne peut
pas payer?
La mine des Barthes produit chaque annéo 300,000 hectolitres do charbon. Elle
pourrait produire beaucoup plus, mais on no parle que de son état actuel.
�li’extraction se fait par trois puits. I/un de ces puits a été percé par les ordres
de M. Giroud, et n’a pas coûté moins de 150,000 fr. M. Giroud a fait cette
dépense en vue du marché qu’il venait de conclure avec M. Pezerat et pour mettre
la production au niveau de tous les besoins. Ce marché lui assurait un débouché
de 120,000 hectolitres par année ; chaque jour amenait de nouveaux consomma
teurs; il n’a donc pas hésité à faire des frais qui étaient couverts d’avance par la
certitude des bénéfices.
Il pouvait donc livrer. Dira-t-on qu’il n’a pas voulu ? mais pourquoi donc extraitil du charbon? n’est-ce pas pour le vendre ? n’est-co pas là son industrie, sa
profession, son occupation, son existence ? à qui persuadera-t-on qu’ un marchand
refuse de vendre sa marchandise?
On alléguera peut-être que le prix de 90 cent, par hectolitre ne lui parait pas
assez avantageux, mais il déclare au contraire que ce prix est excellent ; il offre
de prouver que ce prix lui assure un bénéfice très raisonnable. Si donc il peut
livrer, s’ il a intérêt à livrer, on ne peut pas supposer qu’il refuse de livrer.
Dira-t-on qu’il a refusé en 1840 et en 1841 ? mais son refus avait un motif
légitime que la justice a reconnu. En 1840, M. Pezerat était tombé en déconfiture.
M. Giroud devait-il livrer son charbon quand il courait le risque de n’être pas
payé? Les arbitres, auxquels cette question a été soumise, l’ont résolue en sa
faveur par leur sentence du 17 juin 1840 ; ils ont astreint M. Pezerat à donner
caution. Cette caution s’est fait attendre longtemps. Est-ce la faute de M. Giroud,
et peut-on lui reprocher de n’avoir pas livré sans caution quand les arbitres ont
jugé qu’il ne devait livrer que sur caution?
Mais pourquoi n’a-t’ il pas livré en 1841? parce que M. Jozian, interprétant le
marché à sa guise, ne voulait accepter comme gros charbon que celui qui ne
passerait pas dans un anneau de 20 centimètres de diamètre. Cette prétention
de M. Jozian était-elle fondée ? il faut bien reconnaître qu’elle ne l’était pas,
quoiqu’elle ait été accueillie d’abord et môme dépassée par la sentence arbitrale
du 24 mai 1841 ; mais cette sentence a été rétractée par celle du 6 juin 1843Les arbitres ont reconnu l’erreur dans laquelle ils étaient tombés ; ils ont réduit
eux-mêmes les grosseurs impossibles qu’ils avaient d abord adoptées; ils ont forcé
M. Jozian à abandonner et l’exception de chose jugée dans laquelle il se retran
chait, et la grosseur de 20 centimètros qu’il réclamait. Cependant M. Giroud
avait refusé de livrer le gros charbon tel que M. Jozian l’exigeait. Avait-il tort
de repousser une exigence qui a été proclamé injuste ?
On arrive ainsi jusqu’au milieu do l'année 1843. Demandera-t-on pourquoi
M. Giroud n’a pas livré depuis cette époque? mais c ’est alors que M. Jozian s aviso
de vouloir changer le lieu de la livraison. Elle devait se faire sur le carreau de
la mine ; M. Jozian veut qu’elle se fasse à deux kilomètres plus lo in , sur le bord
�— 'JO —
de l’ Allier ; il prétend en outre que le port des Barthes ne lui convient pas, et
que si M. Giroud ne lui en donne pas un autre, il a droit, non pas de s’en procurer
un aux frais de M. Giroud, mais de refuser les livraisons qu’on lui offre et
d’accuser M. Giroud de ne pas vouloir livrer.
Or, ces nouvelles prétentions de M. Jozian sont-elles plus raisonnables que les
anciennes? Où doit-on lui livrer le charbon ? sur le carreau de la mine. La loi et la
convention sont d’accord à cet égard. La loi veut que la marchandise se livre au
lieu où elle était au moment de la vente. (Art. 1600 du Code civil.) Tout corps cer
tain doitêtre livré au lieu où il se trouve. (Art. 1247 et 1264.) La convention main
tient cette disposition de la loi ; voici en effet comment les parties se sont expri
mées : « Comme cette houille est destinée en partie à fabriquer du goudron, à
• extraire d’autres produits, et à être aussi, en partie, transformée en cok e,
» MM. Chevalier et Giroud seront tenus de fournir à M. Pezerat, d’après la dési» gnation qu’il en fera, le terrain nécessaire pour la construction des appareils ;
» et ce, sur L’emplacement même de l'exploitation, dans la partie la plus voisine
» de l’extraction, sans toutefois que cela puisse entraver ladite exploitation. Ils
» fourniront aussi l’eau nécessaire à la condensation des produits bitumineux
» prise à l’orifice du puits, plus le terrain pour l’établissement des magasins dont
» M. Pezerat aurait besoin. MM. Chevalier et Giroud s’obligent à faire,transporter
» à leurs frais, au bord de l’Allier, à leur port et sur le terrain qu’ils fourniront,
» tous les produits de la compagnie (Pezerat), et même les charbons en nature,
» s’il lui convenait de ne pas les manipuler. »
Cette convention impose aux vendeurs l’obligation de fournir aux acheteurs
deux terrains ; l’u n , sur l’emplacement même de l’exploitation ; l’autre, sur le
bord de l’Allier. Pourquoi ces deux terrains ? Le premier est destiné à la manipu
lation du charbon, l’autre à son exportation. Sur le premier, le charbon sera tra
vaillé pour être converti en coke ; sur le second, il sera déposé pour être embar
qué. Mais avant que l’acheteur s’empare de la marchandise pour la travailler, il
faut qu’il en prenne livraison. Où donc lui sera-t-elle livrée? où recevra-t-il les
333 hectolitres qui doivent lui être mesurés chaque jou r? il no peut les recevoir
que sur le carreau de la mine, puisque c’est là qu’il doit les manipuler. Dira-t-on
que le vendeur est tenu de transporter les charbons manipulés ou non sur les
bords do l’Allier? c’est une obligation particulière distincte de la livraison. 11 ré
sulte des termes mêmes de la convention, que lorsque la marchandise sera ainsi
transportée, elle appartiendra déjà à l’acheteur, elle sera devenue sa chose,
elle aura pu être transformée par son travail, elle lui aura donc été livrée aupa
ravant. Où donc aura-t-elle été livrée, si ce n’ost sur le carreau de la mine?
La livraison et le transport des marchandises sont deux opérations fort diffé
rentes. Qu’ une marchandise livrée soit transportée ensuite aux frais du vendeur,
qui prête à l’acquéreur ses voitures ou ses wagons, cela est tout simplo; mais .quo
�— 21 —
la livraison d’ une forte partie de charbon puisse se faire ailleurs que sur le lieu
môme de l’extraction, c’est ce que personne ne pourrait comprendre. Pour livrer
tous les jours 333 hectolitres de charbon, moitié gros, moitié menu, il faut tomber
d’accord sur la qualité et sur la mesure. Peut-on choisir la qualité ailleurs que sur
la mine? peut-on faire voyager 333 hectolitres sans:les avoir mesurés? ou bien
faudra-t-il les mesurer deux fois, d’abord à la mine et ensuite au port? faudra-t-il
faire cette double opération tous les jours, et cela pendant quinze années de suite?
Telle n’a pu être l’intention des parties ; il faut donc reconnaître que soit que l’on
consulte la l o i , la convention ou le bon sens, c ’est sur la mine que les charbons
doivent être livrés. Aussi, dans une lettre écrite huit jours avant la conclusion du
marché, M. Pezerat s’exprimait ainsi : « J’ai l’honneur de vous envoyer l’indica» tion du terrain choisi par moi aux m in a des Darlhes; je n’ai pas jugé conve» nable do changer la première indication que je vous avais adressée. » Et cette
lettre était accompagnée d’un plan descriptif où le terrain se trouvait en effet
choisi et marqué par M. Pezerat sur le carreau de la mine.
' ’
Mais comment M. Jozian a-t-il pu prétendre que le. charbon devait être livré
ailleurs? ne se souvient-il plus de l’usage qu’il voulait faire lui-même du terrain
choisi par M. Pezerat? il voulait en faire non-seulement:un atelier pour y mani
puler son charbon, mais encore une boutique pour l’y vendre.> M. Giroud s’est
plaint de cet abus, qui a été réprimé, par la sentence arbitrale du G juin 1863,
dont voici la disposition : Faisons défense au sieur Jozian de vendre et débiter sur
le carreau de la mine, ou sur les terrains qui lui seront fournis "par tes sieitrs
Giroud et Chevalier, en exécution de la convention, les charbons que ces derniers
devront lui livrer. Pour vendre sa marchandise, il fallait d’abord qu’elle lui eut été
livrée. Or, dans quel endroit voulait-il la vendre? sur le carreau de la mine. C’était
donc là qu’il l’avait reçue.
Pour terminer sur ce point, on ajoutera que plusieurs livraisons ont été faites ii
M. Jozian sur le carreau de la mine, notamment le 11 et 12 août 1843. Il les a
acceptées; et s’ il a changé tout-à-coup d’idée, que ce soit caprice, ou spéculation,
ou besoin de chicaner, ou impuissance de payer, lo fait n’en subsiste pas moins.
C’est donc à la mine que le charbon devait être livré. La convention est évi»
dente, et M. Jozian lui-même l’a reconnu. M. Giroud a donc raison de vouloir
livrer sur le carreau de la mine ; 11 est dans son droit ; et si M. Jozian ne prend
pas livraison, ce n’est pas la faute de M. Giroud.
Mais, dit-on, M. Giroud doit fournir un emplacement sur les bords de l’Allier
pour y déposer les marchandises do M. Jozian. Or, la livraison de cet emplacement
sur le bord de l’Allier, et la livraison du charbon sur lo carreau de la mino', sont
une seule et même chose. Si donc M. Giroud n’a pas fourni un terrain sur le bord
de 1 eau, on aura droit de dire qu’il refuse de livrer à la mine.
�— 22 —
Cela n’est pas sérieux. L’obligation do livrer le charbon et l’obligation de fournir
u n l i e u d’embarquement, sont deux choses distinctes et Indépendantes l’une de
l’autre. Lors môme que M. Giroud n’aurait pas pu fournir à M. Jozian un terrain
sur les bords de l’Allier, cela n’empêchait pasM. Jozian de prendre livraison, et
même d’embarquer sa marchandise. La place ne manque pas le long de la rivière,
et rien n’était plus facile que d’y obtenir la jouissance de quelques mètres de
terrain aux frais do M. Giroud. Cette jouissance aurait coûté peut-être 1 fr. le
mètre (ou 10,000 fr. l’hectare) ; c ’était une centaine de francs au plus que M. Jo
zian aurait pu réclamer à titre d’indemnité.
Mais est-il vrai quo M. Giroud ait refusé lo terrain qu’il devait fournir au bord
de l’ Allier ? Lo 29 août 1843, M. Jozian a fait dresser un procès-verbal par
M. Gourcy, notaire, hommo qui lui a montré un dévouement sans bornes. Voici la
déclaration do M. Giroud , constatée par M. Gourcy : « Qu’il Ignoro le motif pour
« lequel M. Jozian n’a pas continué à prendre les livraisons qu’ il avait cornmen» céos lo 11 de ce m ois....; qu'il offre do lui livrer dès demain la quantité de chari» bon qu’il peut lui devoir...; que quant il l’emplacement nécessaire pour placer
»
»
«
»
»
«
n
»
les charbons dont M. Jozian doit prendre livraison, M. Giroud lui offre la partie
du port qui appartient à la Société des llarthes, qu'il voudra choisir, à côté des
charbons qui ont déjà été déposés par ladito Société... ; quo M. Giroud no peut lui
fournir d’autro emplacement que celui dont 11 sa sert pour lo dépôt du charlion
des Barthes ; que do l’avis do tous les exploitants du bassin, lo port actuel est le
plus élevé de tous les terrains qui se trouvent lo long de l’AllIer; qu’il réitère
l’offre qu’il a faite au sieur Jozian de recommencer les livraisons des domain, et
rie lui fournir lu partie du )>ort la plus convenable pour y déposer les char-
» bons..,. »
Ainsi M. Giroud mettait lo port des llarthes à la disposition de M. Jozian ; il lui
donnait à choisir dans touto l’enceinte du port la place qui lui conviendrait le
plus. Devait-Il autro chose7 était II obligé de fournir une place ailleurs que sur
son propre terrain? Voici les termes de la convention: VW. Giroud et Chevalitr
s'obligent à faire transjiorter à leur port et sur te terrain qu'ils fourniront tous les
vroiluits de ta comjxignie l'ezerat. C’est donc au port des llarthes que les produits
doivent être transportés : c’est là que le terrain doit Ctre fourni.
il plaît aujourd’hui à M. Jozian de prétendre que le port des llarthes n’est pa*
«'ontenable. Mais il est tel qu’ il était au moment de cette convention. Si le fond
du »ol se compose de u tile ou de gravier, cela n’est pas nouveau ; si la rive n'est
élevée que d'un métro et demi au-desmis du Ilot, l'élévation était la mémo quand
les partira ont traités. On fournit à M. Joilan ce qu'on a promu & M. P w era t.
ul plus ni moin». Il est vrai que M. Jozian a m i d'un cnil jaloux certains tra\aiix rxécuU-i par ta Société dos Marthe*, pour ethauw er le terrain où elle dépow
«4 charbons: mal* qui cm pM iall M. Jojian de faire rem blayer. de ton c ô t* .
�1’emplaccinent qu’il choisirait? On lui fournit le terrain, c’est à lui (le s’y installer
et d’y protéger sa marchandise. Une rivière est un voisin toujours dangereux. Le
port des Barthcs n’est pas plus que tout autre à l’abri des inondations (1 ). M. l’ezerat le savait, et cependant il n’a demandé qu’ une place dans ce port. Cette place
a été constamment offerte, M. Jozian ne peut exiger davantage.
Cependant M. Giroud a fait offrir à M. Jozian, et lui offre encoro de placer ses
charbons sur la partie remblayée, et derrière les charbons de la Société des Jlartlies. Ainsi los marchandises do la Société serviraient do rempart aux marchandi
ses de M. Jozian, et celles-ci no seraient atteintes par les eaux que lorsque celleslà auraient disparu. Certes, il était impossible do montrer plus do complaisance,
plus do bonno fol, plus do bonno volonté.
Comment donc M. Giroud peut-il ôtro accusé do no pas vouloir livrer les char
bons qu’il a vendus? 11 n’exploite quo pour vendre et livrer; il trouve un notable
bénéficodanslo prix do 90 centimes par hectolitre ; ce n’est qu’en livrant qu’il peut
réaliser ce bénéfice ; il a d’ailleurs dépensé 150,000 francs pour augmenter l’ex
traction et satisfalro à toutes los exigences do la consommation, comment refuse
rait-il do livrer? S’il a refusé en 1840, c'est quo l’achotour était en déconfiture ;
s’ il a refusé en 1841-1843 c’est quo M. Jozian exigeait dos grosseurs exhorbltantes
et impossibles, enfin s’ il n’a pas livré dopuis 1843, c ’est que M. Jozian prétendait
d’un côté quo la livraison devait étro faito au port, ot d’ un autro côté qu’ollo 110
pouvait pas y ôtro falto parco quo lo port n’était pas convenable ; ainsi M. Giroud
pouvant et voulant livrer, M. Jozian l’on a constamment empôché.
' M. Giroud aurait pu, à l'exemple do son adversaire, accumuler les procèsverbaux pour constater ses offres do livrer ; mais la quantité do charton produite
par la mlno était un Tait do notoriété publlquo; Les sentences arbitrales do 1840,
1841 et 1843, décidaient quo M. Giroud n’avait jamais été on retard do livrer, ot
M. Jozian était forcé do reconnaître quo depuis 1843, les livraisons lui auraient
été faites s’ il avait voulu les recevoir. M. Giroud peut cependant invoquer deux
procès-verbaux, l’un du 29 août 1843, dressé à la requéto de M. Jozian ; l'autre du
20 novembre 1845, dressé à la requéto do M. Giroud lul-méme. Lo premier dont
on a déjà parlé constate quo les livraisons avalent été commencées sur lo carreau
do la mlno, et quo M. Joxlan les ayant interrompues sous prétexte qu’elles devaient
ôtro faites sur lo port, M. Giroud a déclaré être prêt à livrer à la mlno lorsque
'I. Joxlan so présenterait pour recevoir. Lo second procès-verbal constate qu’ il
existait, tant sur la mlno qu'au port des liarthes, la quanti té do 50,000 hectolitres
(I , Il (virJ), en »Un, <pM le 4 ao«tabre 1813, un* cru* Mtraonfcuiir« a tu l»eu. C««l u»
luqtHl Irt mrUWurtpofli toc* n p o ih . TwWfo«« il o'y • p*« «u d* perte*. Ton! *•
d*» drui
Uiirt I M. Joiùo » M *jxrj»4.
�—
m
—
de houilles; qu’en outre, l’extraction quotidienne produisait 1000 hectolitres;que
la totalité de ces houilles a été m ise, par M. Giroud, à la disposition de Al. Jozian,
que-M. Giroud a offert de lui livrer, jou r par jo u r , 333 hectolitres, ou s’il l’aimait
m ieux, de livrer r sans désemparer et en travaillant jour et nuit, la quantité de
10,000 hectolitres, ou même une quantité supérieure; mais que M. Jozian n’a ré
pondu à ces offres que par de nouvelles chicanes, qu’il a prétendu notamment que
le notaire, rédacteur du procès-verbal, n’avait pas qualité parce qu’il était en
présence d’un notaire plus ancien !que M. Jozian avait amené ; qu’il a ajouté
qu’ayant apporté de l’argent pour payer 10,000 hectolitres, il voulait que cette
quantité lui fut mesurée dans une journée, ce qui était physiquement impossi
ble. Ainsi toutes les fois que M. Giroud a voulu livrer, M. Jozian a inventé des pré
t e x t e s pour ne pas recevoir.
!
La mauvaise volonté n’est donc pas du côté de M. Giroud. Cependant depuis six
ans on ne peut parvenir à exécuter le marché. Quelle en est la cause ? Comment
M. Jozian a-t-il toujours un prétexté tout prêt pour refuser les charbons qui lui
sont offerts? Il les refuse en 1840 parce'que l’Allier n’est pas navigable, il les re
fuse en 1841 parce que le gros charbon n’a pas 20 centimètres de diamètre, il les
refuse en 1843 parce qu’ils lui sont livrés sur la m ine, il les refuse en 1845 parce
qu’il veut 10,000 hectolitres en un instant. Chacun de ces refus est accompagné
d’une ou de plusieurs assignations dont la conclusion est qu’au lieu de charbon,
c’est de l’argent qu’ il faut lui donner. Qu^est-ce que cela signifie ? C’est que
M. Jozian n’est pas un acheteur sérieux, mais un spéculateur qui achète du char
bon pour avoir des dommages intérêts’, "et qui fait des procès pour extorquer des
sacrifices. Le marché même que M. Jozian s’est fait céder constate ce calcul se
cre t Ce marché comprend une énorme quantité de houille. Il CQnvenait à la
Société Pezerat, qui ayant entrepris de convertir la houille en asphalte, avait
intérêtà assurer son approvisionnement. Mais M. Jozian ne fabrique pas l’asphalte.
Que ferait-il donc de 10,000 hectolitres de houille qui lui seraient livrés tous le?
mois pendant quinze ans? 11 revendra en détail, dit-on. Mais quel est le détaillant
qui s’approvisionne quinze ans d’avance? D’ailleurs cette revente est-elle bien as
surée ? Quand on a demandé au sieur Jozian quels ôtaient ses acheteurs, il n’a
pas pu en nommer un seul. Enfin, il ne suffit pas d’acheter, il faut payer. Or pour
payer 9,000 francs par m ois, pendant quinze ans, même avec la chance de reven
dre, 11 faut avoir des capitaux disponibles. La fortune de M. Jozian est nulle ; au
lieu de capitaux, il a des dettes, et s’il exhibe quelquefois de l’argent dans les
procès-verbaux qu’il fait dresser, c’est l’argent d’autrui qui lui a été prêté à gros
in térêts soitpar MM. Marche et Comitis, de Clermont, soit par M. Sauret, de Uioni.
Ainsi M. Jozian est accablé par le marché Pezerat. Il ne peut ni payer, ni placer
la marchandise. Faut-il s’étonner qu’il refuse de la recevoir. ? Faut-il demander
par le fait de qui les livraisons n’ont pas lieu ? Ne faut-il pas au contraire admirer
les ressources prodigieuses de M. Jozian et de sesconseils, no doit-on pas envier
/
�leur imagination si habile, à trouver des motifs pour ne pas accepter le charbon,
aujourd’hui parce que la rivière est haute, demain parce que le port est bas,
ensuite parce que le charbon est petit, puis parce que la journée n’est pas assez
grande pour livrer 10,000 hectolitres à la fois? Ne doit-on pas enfin s’étonner de
l’audace avec laquelle ils accusent M. Giroud de ne pas vouloir livrer, eux qui ont
épuisé tous les prétextes pour éluder les livraisons?
Les positions sont donc rétablies, et désormais on ne parviendra plus à induiro
la justice en erreur sur le caractère général de cette affaire. Ii y a d’un côté une
mine de houille, largement exploitée, fécondée par des capitaux importants, et
versant chaque année, sur le sol, 300,000 hectolitres de marchandises. A la tète
de l’exploitation est un homme laborieux, loyal, intelligent, qui ne demande qu’à
vendre les produite que l’extraction accumule. Cet homme a promis de livrer une
partie considérable de houille. 11 s’est mis en mesure d’exécuter son engagement,
il offre, depuis plusieurs années, délivrer ce qu’il a promis. Mais de l’autre côté
se trouve une spéculation organisée entre un homme d’affaires, un industriel et
un banquier. Ces trois individus ont racheté le marché Pezerat, non pour l’exé
cuter, mais pour l’exploiter. Ils ne veulent pas de houille, et toutes les fois qu’on
leur en offre, ils ont des motif particuliers pour la refuser, mais ces refus qui ex
poseraient des acheteurs vulgaires à payer des dommages-intérêts, leur servent
de prétexte pour en demander. Ils veulent de l’argent et ils prétendent qu’on les
indemnise, parce qu’on ne leur livre pas ce qu’ils refusent de recevoir.
Les intentions des deux parties étant bien connues, on comprend parfaitement
que le marché Pezerat soit resté jusqu’à présent sans exécution, et, qu’au lieu
d’échanger de la houille contre de l’argent, les parties n’aient échangé que des
procès. Mais on comprend aussi que ces procès aient dû fatiguer M. Giroud, et
qu’il ait voulu y mettre un terme. C’est pour en tarir la source qu’il a demandé la
nullité de la clause compromissoire contenue dans le marché du 30 novembre 1838.
Il lui a semblé qu’un tribunal composé de magistrats imposerait plus à M. Jozian
qu’ un tribunal composé de trois arbitres, dans lesquels AI. Joziàn'croirait posséuer une voix, deux voix, et quelquefois trois voix.
Hr
Or M. (¡iroud va établir 1“, qu’en attaquant cette clause, il ne peut être accusé ni
de légèreté, ni d’infidélité à ses engagements; T que cetteclause estnulle aux yeux
de la loi ; 3° que lanullité n’a pas été couverte par l’exécution antérieure; h° quela
demande en nullité a dû être portée devant lé tribunal de laSeine; 5°qu’en présence
de cette demande les prétendus arbitres devaient surseoir à ^arbitrage ; 6° que >
dans tous les cas, le tribunal de Brioude devait surseoir à statuer sur l’opposition
à l’ordonnance d’exequatur; 7" qu’en supposant même cetto clause légitim e, les
arbitres ont excédé leurs pouvoirs en prononçant sur des questions qui ne leur
étaient pas valablement soumises; 8” qu'ils ont prononcé après que les délais de
�Tarbitrage étaient expirés; 9° qu’il n’y avait pas lieu d’ordonner l’exécution pro
visoire du jugement qui a été rendu.
i"
P r o p o s itio n .
M. Giroud, en attaquant la clause compromissoire, ne peut être accusé , ni de
légèreté, ni d'infidélité à ses engagements.
Un honnête homme n’use pas toujours de son droit. M. Giroud le sait et il l’a
prouvé par sa conduite. Il voyait la jurisprudence proscrire unanimement les
clauses compromissoires ; le signal avait été donné par la Cour suprême, et toutes
les Cours du royaume y avaient répondu : il pouvait donc dès le principe, refuser
de compromettre et forcer M. Jozian à plaider devant leurs juges naturels. Mais il
n’a pas voulu invoquer le droit que la jurisprudence lui donnait, il a accepté des
arbitres ; et en vertu des pouvoirs qu’il leur a conférés, MM. Venant, Gibert et
Girard, anciens agréés prèsletribunal de commerce de Paris, ont statué trois fois
sur ses discussions avec M. Jozian. Cependant, lorsqu’ il leur conférait pour la
troisième fois la mission de le ju g er, il n’ avait pas lieu d'être satisfait de leur pré
cédente décision, car ils l’avaient condamné à livrer des grosseurs impossibles, et
M. Jozian, armé de cette sentence, réclamait déjà des indemnités énormes. M. Gi
roud , victime de cette erreur, ne réclama pourtant pas d’autres ju ges, et il com
promit de nouveau devant eux, persuadé que s’ils n’étaient pas infaillibles, ils n’en
étaient pas moins honorables et consciencieux.
Ces trois compromis prouvent assez que M. Giroud voulait rester fidèle à la con
vention qu’ il avait faite, quoique cette convention fût illégale. Mais ce n'est pas
tout. Après avoir plaidé à Paris, M. Jozian veut plaider à lirioude. 11 chicane sur
la convenance du port des Barthes, et il propose un arbitrage local. M. Giroud ne
voulait pas de procès, et il ne comprenait pas qu’ un procès fût possible, quand il
disait à M. Jozian : Choisissez dans le port des Barthes la meilleure place et prenezla. Cependant M. Jozian voulait un arbitrage local, et il proposa d’abord M. Gourcy
son notaire, et ensuite M. Dorival son géométre. Que fait M. Giroud? Il nomme
M. I.amothe de Frugières , homme honorable et indépendant. U respectait donc
toujours sa convention.
Mais s’il s’est à la fin adressé ii la lo i, s’ il a voulu revenir à ses juges naturels ,
est-ce par caprice, par légèreté, ou, comme on le dit, pour éviter une juste Con
damnation? Il suffît de rappeler les faits pour absoudre M. Giroud de tous ces re
proches. Quel a donc été le caractère de cet arbitrage local sollicité par M. Jozian?
Dès le début il s’est annoncé par la nomination de M. Gourcy. M. Gourcy avait
déclaré comme expert que le port dos Barthes n’était pas convenable; c’ e~t
M. Gourcy que M. Jozian chois/t pour prononcer comme arbitre .sur la même ques
�— 27 —
tion. Kt M. Gourcy ne se récuse pas; au contraire, il accepte. Voilà donc les
arbitres que !\I. Jozian va choisir. Voilà la délicatesse qui existe dans celui qui
nomme et dans ceux qui sont nommés. Il faut à M. Jozian des juges dont l’opi
nion soit connue d’avance. A défaut de M. Gourcy, M. Jozian nomme M. Dorival,
épicier-géomètre. Il va sans dire que M. Dorival pense comme M. Gourcy. Aussi,
de quelle manière commence-t-il ses fonctions? Il devait s’entendre avec M. Lamothe pour nommer un troisième arbitre ; mais M. Lamothe ayant été choisi par
M. Giroud, M. Dorival voit en lui non pas un collègue, mais un adversaire, et il le
fait sommer par huissier de se trouver dans une auberge de la commune de Ju
meaux pour s’entendre avec lui. Pourquoi à Jumeaux ? M. Lamothe demeure au
château de Frugières, M. Dorival demeure à Souxillanges (1) ; n’était-il pas plus
convenable que l’ un des arbitres se rendît chez l’autre, pour conférer sur le choix
du troisième ? ¡Mais Jumeaux est la résidence de M. Gourcy ; M. Gourcy sera dans
l’auberge, il s’imposera comme troisième arbitre, si M. Lamothe vient ; et s'il ne
vient pas, M. Gourcy dressera procès-verbal. M. Lamothe a été absent ; d’ailleurs
il n’aurait pas voulu faire descendre la justice arbitrale dans une auberge :
M. Gourcy dresse donc son procès-verbal. Plus tard, M. Dorival et M. Lamothe se
réunissent. Ils ne s’accordent pas, ce qui n’a rien d’étonnant d’après la manière
dont M. Dorival avait entamé la correspondance. Le troisième arbitre est donc
nommé par le président du tribunal de comm erce, sur la présentation de M. Jo
zian. Quel est-il ? C'est d’abord un négociant qui ne croit pas devoir accepter.
C’est ensuite M. Couguet, jeune avocat qui accepte. La profession de M. Couguet
semblait être une garantie de son impartialité, sa nomination même était une rai
son de plus pour y croire ; M. Giroud fut donc péniblement affecté de voir qu’a
vant l’ouverture des débats, la division existait dans le tribunal arbitral, et y
formait d’avance une majorité composée de MM. Dorival et Couguet, et une mino
rité composée de M. Lamothe. Cette majorité ne cherchait pas même à se dissi
muler , elle débutait de la façon la plus brutale. MM. Dorival et Couguet faisaient
sommation à leur collègue et aux parties de se trouver devant leur tribunal; et ce
tribunal, ils déclaraient l’établir non plus dans une auberge, mais dans le cabinet
de M. Veyrines, agréé à Brioude et conseil de M. Jozian. Était-ce là de l’impartia
lité? était-ce môme de la convenance? Depuis quand avait-on vu des juges envoyer
des huissiers à leurs collègues? des juges assigner à leur requête? des juges
s’asseoir au foyer d’ une des parties ? Cette attitude prise par MM. Couguet et Do
rival effraya M. Lamothe et lui fit donner sa démission. C’est alors que M. Giroud,
usant d’un droit que la loi lui donnait, déclara que, puisque M. Lamothe se reti
rait, il demandait à êtrejugé par des magistrats, juges naturels de toutes contes
tations. fttait-ce légèreté, ca p rice, ou mauvaise foi de sa part? Non certes ; mais
I
(I) Soiiùllangt's «si h 8 lieues de la mine des lUrllws M. Jozian allait l>icn loin pour cherclior un arbitre.
�il voulait des ju g es, et il ne pouvait voir que des adversaires dans ces deux
arbitres qui, avant tout débat, se constituaient en m ajorité, proclamant leur
opinion par leur conduite hostile et partiale. La suite a prouvé que ces deux ar
bitres n’étaient en effet que les instruments aveugles des volontés de M. Jozian. On
les a vus, bravant tous les principes et toutes les considérations, se faire
juges de leurs propres pouvoirs, déclarer valable la clause illégale dont la nullité
était demandée devant un autre tribunal, s’imposer à M. Giroud, l’assigner eu xmêmes pour comparaître devant eux, le juger par défaut malgré ses protetations ,
et le condamner sans l’entendre à 566,000 fr. de dommages-intérêts ! Une sentence
aussi scandaleuse justifie assez'la répugnance que ses auteurs avaient inspirée à
M. Giroud. Une juridiction qui porte do tels fruits est elle-même ju gée; et désor
mais personne né peut blâmer M. Giroud de n’avoir pas voulu livrer sa fortune à
l ’omnipotence de MAI. Dorival et Couguet.
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P r o p o s it io n .
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M.
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La clause compromissoire est illégale et nulle.
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Cette question a été si souvent jugée depuis dix ans que, c’est perdre le temps
que la discuter encore. Ilsufütde lire les arrêts qui ont été rendus, et d’entendre
ceux qui se rendent chaque jour. Quand la jurisprudence est aussi complette, aussi
unanime,' aussi persévérante, son autorité vaut celle de la loi.
Kaut-il citer les arrêts ? Tout le monde les connaît, et leur nombre s’accroît
incessamment On rappélera seulement, par leur date, trois décisions rendues ii
la Cour de cassation, les 10 juillet 1843, 21 février 1844 et 2 décembre 1844. (Jour
nal du Palais, tome II, 1843, page 235, tome I, 1844, page 596 et tome II, 1844,
page 567). Le dernier de ces arrêts ayant, après cassation, renvoyé la question
devant la Cour royale d’Orléans, cette cour s’est réunie en audience solennelle ;
la question a été de nouveau considérée sous toutes ses faces, et la clause com pro
missoire s’est vue définitivement condamner par arrêt du 5 avril 1845. (Journal du
Palais, tome I, 1845, page 536).
Cette jurisprudence est fondée sur le texte et sur l’esprit de l’art. 1006 du Code
de procédure civile. Cet article veut que le compromis désigne les objets en litige
et le nom des arbitres à peine de nullité. Pourquoi ces énonciations? Est-ce pour
la forme qu’elles sont imposées à peine do nullité? Cette peine serait bien sévère
si le législateur n’avait en vue que la perfection de l’acte et sa régularité exté
rieure; mais il se propose un but plus important, c’est une garantie qu’il veut
établir contre la légèreté et l’ irréflexion. On renonce volontiers à ses juges natu
rels quand on n’a j^as de procès; on ne sait pas alors combien la position élevée
du magistrat, son institution publique, son impartialité notoire, son habitude à
�— 29 —
distribuer la justice, inspirent de confiance au plaideur honnête et opprimé ; on
ne sait pas combien il y a de sécurité pour le bon droit dans les formes mêmes de
là justice ordinaire, dans la publicité des plaidoiries, dans la signification des
conclusions, dans la solennité des jugements; on ne comprend tout cela que lors
qu’on a le malheur d’être appelé sur le terrain funeste des procès; mais tant que
cet accident n’est pas arrivé, la justice magistrale et publique apparaît de loin
comme une importune, à laquelle il faut se soustraire, et substituer, le cas
échéant, une justice domestique et bourgeoise. C’est ainsi que les clauses com promissoires se glissent dans les actes, et que les parties abandonnent d’avance
une institution dont elles ne comprennent pas l’utilité. Et, pourtant, quoi déplus
nécessaire qu’un bon juge ? quoi de plus rare, en dehors de la magistrature? où
trouver des hommes qui réunissent l’ indépendance du caractère au sentiment du
devoir, la science du droit au tact des affaires, le respect des principes aux tolé
rances de l’équité? où trouver des hommes qui soient dignes de prononcer sur le
sort de toutes les familles, de toutes les propriétés, de toutes les existences? Ces
hommes siègent dans les tribunaux ; une longue et religieuse éducation les a pré
parés à ce grand ministère ; et la justice qu’ils rendent chaque jour complette leur
initiation, et achève de les former à son image: C’est ainsi que la société pourvoit
à l’établissement de cette institution sur laquelle tout repose, et sans laquelle la
société elle-même ne subsisterait pas. Mais pour que cette institution ne fut pas
un vain nom, il fallait empêcher que, par des clauses irréfléchies et des formules
de style, on ne lui en substituât une autre. L’art. 1006 du Code de procédure a été
fait dans ce but. Il ne prohibe pas la juridiction arbitrale, il permet, au contraire,
de l’établir en désertant la justice ordinaire, mais il veut qu’une détermination
aussi grave ne soit prise qu’avec prudence et réflexion. Il ne suffira donc pas de
convenir que, le cas échéant, on sera jugé par des arbitres ; cette promesse vague
et banale n’obligera pas, il faudra nommer les arbitres, et désigner le point liti
gieux qui leur sera soumis. Alors, la liberté d’abandonner ses juges naturels ne
sera exercée qu’en connaissance de cause. On saura quels hommes on leur préfère,
et quels intérêts on soustrait à leur vigilance. Le compromis désignera les objets
en litige et le nom des arbitres, à peine de nullité.
Pour éluder cette loi salutaire, on a imaginé de dire qu’une clause compromissoire n’était pas un compromis; mais où donc est la différence? Un compromis est
un contrat par lequel on renonce à la justice publique pour lui substituer une
justice privée. Qu’est-ce qu’ une clause compromissoire? c’est la même chose, ou
ce n’est rien. C’est, dit-on, la promesse de faire un compromis ; mais si cette pro
messe a pour effet d’intervertir la juridiction, c ’est un compromis ; si non, quel
sera son effet? d’obliger à des dommages-intérêts? mais des dommages-intérêts
supposent un préjudice, et il serait assez difficile de prouver qu’ il y a préjudice
dans la préférence donnée aux juges publics sur des juges privés.
D'ailleurs, ki loi ne veut pas être éludée. Si la clause compromissoire énonce le
4I
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nom des arbitres et les objets en litige, elle est légale et obligatoire quelque nom
qu'on lui donne. Si elle ne contient pas ces énonciations, elle est illégale et nulle.
Or, une stipulation nulle ne produit pas d’action en dommages-intérêts, car ce
serait un moyen de la rendre valable. La loi ne veut pas qu’on renonce indéfini
ment à ses juges naturels. Elle ne permet la juridiction arbitrale que par exception
et dans de certaines limites ; ou ces limites sont observées, et dans ce cas la stipu
lation subsiste, et le tribunal arbitral s’élève sur les ruines de la juridiction 01 dinaire, ou elles ne sont pas observées, et alors il n’y a rien, pas même une action
en dommages-intérêts.
On dit qu’une clause compromissoire qui ne contient pas le nom des arbitres
n'est pas contraires, aux bonnes mœurs. Peut-être n’est-elle pas immorale, mais
il suffit qu’elle soit illégale. Les prohibitions de la loi n’ont pas seulement les
bonnes mœurs pour objet ; elles s’occupent aussi de prévenir les dangers résul
tants des actes irréfléchis. C’est ainsi que la loi défend les donations sous signa
ture privée, les procurations générales d’aliéner, les clauses de voie parée; la
convention par laquelle un débiteur dispense son créancier des formes de la procé
dure en cas d’expropriation, n’est pas non plus contraire aux bonnes mœurs, elle
paraît même favorable au premier aspect, car elle a pour objet d’éviter des frais
au créancier et du scandale au débiteur ; mais la loi la défend, car, sous cette
apparence, elle voit le suicide de la propriété. Il en est de même des clauses compromissoires qui ne contiennent pas les énonciations que la loi exige.
On objecte enfin que ces clauses vagues et indéterminées sont permises dans le
contrat d’assurance et dans le contrat de société ; mais s’agit-il ici d’un de ces
contrats? non; il s’agit d'une vente. Les contrats d’assurance et de société ont
leurs lois particulières et leurs tribunaux exceptionnels ; mais tout ce qui n’est pan
dans l’exception reste dans le droit commun.
Or, le droit commun, c’est la juridiction publique à laquelle on ne peut se sous
traire qu'aux conditions prescrites par l’art. 1006 du Code de procédure. Ces con
ditions sont la sauve-garde des droits les plus sacrés qui, sans cette précaution de
la loi, se trouveraient, par imprévoyance, livrés à tous les dangers d’ une juridic
tion privée, souvent aveugle, quelquefois partiale, et soumise aux plus fâcheuses
influences. La cause de M. Giroud en offre un exemple frappant. Il est condamné
par des arbitres à 566,000 fr. de dommages-intérêts, pour n’avoir pas livré à son
adversaire un emplacement de quelques mètres qu’il ne lui devait pas, et que
celui-ci pouvait dans tous les cas se procurer ailleurs à très peu de frais. Cette
décision monstrueuse est accompagnée des formes les plus étranges, usurpation
de pouvoirs, coalition de deux arbitres contre le troisième, sommations faites aux
parties par le juge lui-même, désignation d’ un lieu inconvenant ou suspect, enfin,
précipitation et acharnement tels, que, malgré la demande en nullité de la clause
compromissoire, ces juges sans qualité, condamnent sans entendre, tant ils sont
�— 31 —
impatients d’accomplir leur tâche. De tels abus justifient assez les précautions dé
la loi et les décisions do la jurisprudence. Si cette jurisprudence n’existait pas, il
faudrait l’inventer pour le procès actuel.
:i'
p r o p o s itio n .
Im nullité de la clause compromissoire n'a pas été couverte par l’éxécution
antérieure.
La nullité d’une clause compromissoire qui ne désigne ni le litige ni les arbitres,
n’empêche pas les parties de faire un compromis contenant cette désignation ;
alors le compromis est valable, quoique la clause compromissoire soit nulle. La
juridiction arbitrale est alors établie pour l’objet et devant les juges désignés au
compromis ; mais pour tout autre litige qui pourrait exister dans l’avenir, la
juridiction ordinaire conserve son empire. C’est ainsi, que par trois fois, la
juridiction arbitrale a été acceptée par MM. Giroud et Jozian. Les arbitres étaient
désignés, les parties ont consenti ù plaider devant eux. C’était un consentement
libre et réfléchi ; la loi était satisfaite.
Mais ce qu’on ¡.fait spontanément une ou plusieurs fois, est-on obligé de le
faire toujours? non; car la liberté consiste précisément à pouvoir faire ou ne pas
faire. On comprend d'ailleurs que la volonté change quand les circonstances sont
changées. M. Giroud a pu compromettre pour plaider à Paris devant des hommes
qu'il savait être honorables quoiqu’ils ne fussent pas infaillibles, mais quand il s’est
agi de plaider ailleurs et devant d’autres hommes, il a pu sans inconséquence,
préférer ses juges naturels.
On prétend que toutes les nullités des actes sont couvertes par 1exécution. C’est
dire en d’autres termes que tous les actes vicieux peuvent être ratifies. Or, cette
proposition n’est pas vraie. Il y a des actes qu'on ne peut pas ratifier; il y a des
nullités qu’on ne peut pas couvrir; l'art. 1339 du Code civil en donne un exemple,
line donation sous seing privé ne peut pas être ratifiée; une clause compromissoire
peut-elle l'être si elle ne remplit pas les conditions vwilus par l’art. 100G du
Code de procédure ? C’est ce qu’il faut examiner.
On a déjà dit qu’elle pouvait être convertie en un compromis qui désignant le
litige et nommant les arbitres constitue un arbitrage régulier. En ce cas la clause
sera ratifiée et deviendra obligatoire pour la contestation particulière qui est
soumise aux arbitres désignés. Mais sera-t’elle ratifiée pour l’avenir en ce sens
que désormais les parties soient obligées de plaider devant un tribunal arbitral
quoiqu’il n’y ait ni arbitres ni litige désignés? non, certes, car la prohibition de
loi subsiste. Si la loi défend de faire un pareil contrat, elle defend évidemment
�V*
-
32 -
de le ratifier, la ratification équivaut à la convention, l’ une n’est pas pluspermise
que l’autre.
Il ne suffit pas qu’une obligation soit exécutée volontairement pour être ratifiée;
il faut, d’après l’art. 1,338, que l’exécution volontaire intervienne après l’époque
à laquelle l'otiligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. Il y a donc
une époque où la ratification est impossible. Et en effet, tant qu’une incapacité
subsiste, l’incapable de contracter est incapable de ratifier : une femme m ariée,
un mineur ne peuvent, pendant le mariage ou la minorité, ratifier ies obligations
nulles qu’ils ont contractées. O r, l’incapacité de faire un acte que la loi défend,
estune incapacité perpétuelle. Ainsi la prohibition établie par l’art. 100G s’oppose
perpétuellement à la ratification d’une clause compromissoire qui ne contient pas
le nom des arbitres et l’objet en litige ; car les parties étant toujours incapables
de faire cette convention sont toujours incapable de la ratifier. La ratification
se trouverait infectée du même vice que la convention elle-même.
Mais, dira-t-on, si la clause compromissoire n’a pas pu être ratifiée pour l’avenir,
elle a pu être convertie en un compromis valable. O r, ce compromis existe.
M. Giroud l’a consenti et il ne peut s’en départir. C’est ce qu’ il faut examiner.
Est-il vrai qu’il existe un compromis, en vertu duquel JIM. Dorival, Couguet,
et Sabattier-C.asquet avaient été constitués arbitres-juges entre MM. Jozian et
Giroud? non, ce compromis n’existe pas; M. Giroud n’a jamais consenti it être
jugé par MM. Dorival, Couguet, et Sabattier-Gasquet. Il avait consenti à être
jugé par MM. Dorival, Couguet et Lamothe. Cela est vrai, mais M. Lamothe s’étant
retiré, ce consentement est devenu inutile. Dira-t-on que si M. Giroud avait
consenti à être jugé par M. Lamothe, il avait consenti à être jugé par tout autre?
non sans doute, car la confiance qu’ un arbitre inspire est toute personnelle.
Dira-t-on que lorsqu’ un arbitre désigné par le compromis n’accepte pas ses
fonctions, on peut s’adresser au j uge pour en faire nommer un autre ? cela est vrai
quand l’arbitrage est forcé; cela est faux quand l’arbitrage est volontaire. L’arbi
trage cesserait d’être volontaire si le choix des arbitres ne l’étaitpas. Dira-t-on enfin,
que M. Giroud était forcé de se soumettre à un arbitrage en vertu de la clause
compromissoire? ce serait supposer que cette clause était légale et obligatoire,
tandis que le contraire est démontré.
line dernière objection, à laquelle M. Giroud ne s’attendait guères, est celle de
la chose jugée. M. Jozian prétend que la clause compromissoire a été déclarée
valable, si non par un j u g e m e n t spécial, au moins par l’ensemble des jugement«
et arrêts intervenus entre les parties. Ces jugements et arrêts ne sont quo trop
nombreux, grâce à M. Jozian; mais dans le nombre, il no s’en trouve pas un seul
qui ait statué sur cette question, car cette question n’avait jamais été posée.
Or, une question qui n’a pas été posée peut-elle avoir été jugée? Une question
�qui n'est jugée par aucune décision qui lui soit spéciale peut-elle être jugée par
un ensemble de décisions qui lui sont étrangères? on parle cependant de chose
jugée. La chose jugée n’a lieu, dit l’art. 1351, qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet
du jugement ; il faut que la chose demandée soit la mêm e, et que la demande soit
fondée sur la même cause. Il faut donc, à plus forte raison, que la question ait été
posée; il n’y a donc pas de chose jugée sur une contestation qui n’a jamais été
soulevée.
Tout ce qu’on peut dire , c’est que pendant un certain temps les deux parties
ont été d’accord pour soumettre leurs différends à des arbitres. Des compromis
ont été faits et des jugements et arrêts ont été rendus soit pour nommer les
arbitres du consentement des parties, soit pour renvoyer devant les arbitres déjà
nommés. C'est ainsi par exemple que pendant la durée du premier arbitrage,
M. Jozian ayant formé devant le tribunal de commerce de Brioude une demande
en paiement de 50,000 fr. de dommages-intérêts, la cour royale de Riom décida
que cette demande devait être renvoyée devant le tribunal arbitral que les parties
avaient constitué et qui était actuellement saisi de leur différend. Mais la cour
royale de Riom n’a pas statué sur la nullité de la clause compromissoire, car
cette nullité n’avait pas été demandée.
«•
Plus tard, M. Giroud fut assigné en nommination d’arbitres devant le tribunal;
d’ Issoire. Il déclina la compétence de ce tribunal ; la cour royale de Riom
accueillit ce déclinatoire et renvoya la cause devant les juges qui devaient en
connaître. En résultait-il que la clause compromissoire était déclarée valable?
Enfin M. Giroud attaqua la nomination de deux arbitres, savoir : d’un M. Allézard
qui depuis a refusé sa mission, et deM. Couguet. Etait-ce pour nullité de la clause
compromissoire? non; c’était pour des motifs tout différents, que l a cour de Riom
a rejettes. Rien n’a donc été jugé sur la nullité de l a clause compromissoire.
Dira-t-on que la nomination de ces deux arbitres a été reconnue valable? cela est
vrai, mais deux arbitres ne suffisaient pas pour composer le tribunal arbitral ; o r ,
la troisième place ayant été donnée à M. Lamothe, M. Lamothe s est retiré; le
tribunal n’était donc pas complet, il n ’ e x i s t a i t donc pas de compromis désignant
trois arbitres qui acceptassent leur mission ; la clause compromissoire n’était
donc pas encore convertie en compromis, elle pouvait donc être attaquée.
Qu’on reproche à M. Giroud d’avoir critiqué à tort la nomination de M. Allezard
et de M. Couguet, ce reproche est juste, puisque M. Giroud a succombé; qu’on
l’accuse d'avoir voulu traîner l’arbitrage en longueur, ce reproche, quoique in
juste, a pu lui être adressé dans l’ignorance des faits ; mais qu’on prétende que
cas contestations incidentes ont eu la vertu de consacrer la validité d’une clause
dont la nullité n’était pas demandée, c’est ce qu’ il est impossible d’admettre.
•I est très vrai que M. Giroud ne s’est décidé que fort tard à invoquer la loi qui
5
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lui permettait de redemander ses juges naturels. Il est très vrai qu’il a respecté sa
convention, quoique illégale, jusqu’à la dernière extrémité. Il est très vrai qu’il
ne l’a contestée que lorsqu’il l’a vue devenir, dans les mains de M. Jozian, un ins
trument de fraude et d’iniquité; qu’en résulte-t-il? que cette clause a subsisté du
consentement des parties, tant qu’elle n’a pas été attaquée ; mais l’adhésion qu’elle
a reçue pour le passé, l’a-t-elle rendue valable pour l’avenir? non, car cette clause
contraire aux prohibitions de la loi n’était pas susceptible de ratification.
H faut donc reconnaître que la nullité n’a pas été couverte.
4 e P r o p o s it io n .
La demande en nullité a dû ftre portée devant le tribunal de la Seine.
L e tribunal de la Seine saisi de cette demande, s’est déclaré compétent par ju
gement du 2 décembre 18/|5. M. Jozian a interjetté appel, mais cet appel n’a pour
objet que de gagner du temps. M. Jozian voudrait que la justice prit pour le servir
deux allures différentes, qu’elle fut lente à Paris et précipitée à niom. Il sait bien
que la clause compromissoire doit être annullée, la jurisprudence ne lui laisse pas
le moindre doute., mais il retarde autant que possible cette décision inévitable, qui
sapera par sa base l’œuvre laborieuse de MM. üorival, Couguet et Sabattier-Gasquet! il voudrait que cette œuvre, amnistiée parle tribunal de lirioude, fut con
sacrée par la Cour royale de Kiom, avant de tomber à Paris sous le marteau de la
jurisprudence. En attendant sa chute, il posséderait un titre provisoire qu’il exé
cuterait, certes, sans rémission et sans quartier ; et quand il aurait encaissé,
M. G i r o u d pourrait obtenir des arrêts, mais non des restitutions.
En conséquence, M. Jozian décline la compétence du tribunal de la Seine ; mais
cette exception est repoussée par la loi, par la convention et par les conclusions
même de M. Jozian.
La loi veut que, lorsqu’il y a plusieurs défendeurs, la demande soit portée de
vant le tribunal du domicile de l’un d’eux, au choix du demandeur. (Art. 59 du
Code de procédure civile).
Il y a plusieurs défendeurs; car le marché du 30 novembre 1838 ayant été fait
avec M. Pezerat, il a fallu assigner M. Pezerat avec M. Jozian, son cessionnaire, pour
faire prononcer contre l’un et l’autre la nullité de la clause contenue dans
ce marché. lia môme fallu assigner les liquidateurs de M. Pezerat, pour procéder
régulièrement. Or, M. Pezerat et scs liquidateurs sont domiciliés à Paris. C’était un
premier motif pour saisir le tribunal de la Seine.
M. Jozian prétend quo M. Pezerat ne devrait pas être assigné parce qu’ il a cédé
son marché ; mais M. Jozian sc figure apparemment qu’ un marché qui contient des
�engagements réciproques peut se transmettre de main en main, sans laisser trace
de son passage. C’est manquer à la fois de mémoire et de réflexion. M. Jozian
devrait se souvenir que cette question a été agitée en 1840, et résolue par la sen
tence arbitrale du 17 ju in , qui a décidé que M. Pezerat devrait fournir un caution
nement de 54,000 fr. pour garantie du paiement de la houille, quoiqu’il déclarât
avoir cédé son marché. II. Jozian ne devrait pas oublier que cette décision a été
confirmée par la sentence arbitrale du 24 mai 1841, qui prononce queM. Pezerat
avait pu céder son marché, sauf l’accomplissement de la condition qui lui était
imposée par la sentence précédente, c ’est-à-dire en restant garant et en donnant
caution. D’ailleurs, si M. Jozian avait pris la peine de réfléchir sur la nature du
droit qu’il avait acheté, il aurait compris que M. Pezerat, étant obligé envers
M. Giroud, comme M. Giroud envers M. Pezerat, la cession faite par l’ un ne pou
vait pas le dégager envers l’autre, car si un créancier peut cédër sa créance, un
débiteur ne peut pas céder son obligation. Ainsi le marché' du 30 novembre 183!)
continue d’être obligatoire pour M. Pezerat. Il fallait donc appeler ,M. Pezerat
quand on demandait la nullité d’une des clauses de ce marché.
Quand même.M. Pezerat n’aurait pas été mis en cause, M. Jozian, son cessionnaire, n’aurait pu récuser la juridiction du tribunal de la Seine. Un cessionnaire
est tenu de toutes les obligations de son cédant ; il n’a pas plus de droit que lui.
Or, si le marché n’eut pas été cédé, le tribunal de la Seine était seul compétent.
Les deux parties contractantes étaient domiciliées à Paris, elles y avaient fait
élection de domicile, elles devaient y plaider en ,cas de contestation. Cette cir
constance avait pu n’être pas étrangère à la conclusion du marché. MM. Giroud
et Chevalier, domiciliés à Paris, avaient pu traiter plus volontiers avec M. Pezerat,
parce qu’il habitait la même ville, et qu’en cas de difficulté, c ’était à Paris qu’elle
se viderait. M. Pezerat a cédé son droit, mais a-t-il pu diminuer le droit de
.M. Giroud? a-t-il pu, par cette cession, obliger M. Giroud ù quitter son domicile
pour aller plaider devant un tribunal éloigné ? Le cessionnaire demeure à Brioude ;
il pouvait demeurer à Brest ou à Perpignan, M. Giroud sera-t-il obligé de l’y sui
vre? non, assurément; la convention n’est pas changée par la cession. Il n’y a
qu’ un nom mis à la place d’ un autre nom ; mais le contrat subsiste d’ailleurs dans
toutes ses dispositions.
M. Jozian l’a bien compris, car il a consenti à plaider devant le tribunal de la
Seine. Avant d’opposer le déclinatoire, il a prétendu que l’assignation qu’il avait
reçue était nulle pour n’avoir pas été remise à son domicile réel. C’était même le
chef principal de ses conclusions ; le déclinatoire ne venait qu’après, et comme
moyen subsidiaire. Il consentait donc à plaider sur la nullité de l’exploit devant le
tribunal de la Seine, et par là même, il reconnaissait la compétence de ce tri
bunal.
***! déclinatoire, qui n’a pas même été proposé in limine litin, n'est donc qu’ une1
�chicane imaginée pour retarder l’annullation de la clause compromissoire.
M. Jozian agit en tacticien. Il a surpris une condamnation inique ; il voudrait
qu’elle devint définitive à Riom, avant d’être renversée à Paris.
)
.»* P r o p o s it io n .
Il y avait lieu de surseoir à l'arbitrage, tant que la clause compromissoire n’avait
pas été jugée.
Aussitôt que la demande en nullité de cette clause eut été formée, M. Giroud la
aux prétendus arbitres. Que devaienWls faire? Cette clause était la base
de leurs pouvoirs. Si elle était nulle, ils n’étaient pas juges. Devaient-ils néanmoins
juger avant que cette clause fut reconnue valable? le pouvaient-ils?
d én on ça
En droit, ils ne le pouvaient pas, et en conscience, ils ne le devaient pas. Ils ne
pouvaient pas juger sans compromis. Or, la clause compromissoire était attaquée,
non-seulement au moment où ils se réunissaient pour juger, mais encore au mo
ment où l’ un d’eux, M. Sabattier-Gasquet, était nommé. Cette clause attaquée
était-elle cependant exécutoire par provision? Elle ne l’était pas entre les parties,
car l’exécution provisoire est un droit exceptionnel, c ’est le privilège de l’acte
authentique. Il ne s’agissait que d’une convention verbale. Or, une convention
verbale ne peut pas être exécutée lorsqu’elle est attaquée, à moins que le tribunal
saisi de la demande en nullité n’en ait ordonné l’exécution en cas d’urgence. Hors
ce cas la demande en nullité suspend l’exécution de l’acte; la raison en est simple.
li’exécutioQ des conventions ne peut être que volontaire ou forcée. L’exécution
volontaire n’a lieu que par la volonté de celui qui exécute; l’exécution forcée n'a
lieu que par le mandat de justice. Or, ce mandat n’est accordé qu’aux actes no
tariés ou aux jugements. Ainsi, la clause compromissoire n’étant pas notariée, il
suffisait qu’elle fut attaquée, pour que son exécution fut suspendue entre les par
ties ; mais à plus forte raison était-elle suspendue à l’égard des tiers. M. Jozian ne
pouvait pas déléguer à des tiers des pouvoirs qu’il n’avait pas. Les jugements euxmêmes ne sont exécutoires à l’égard des tiers que lorsqu’ils sont passés en force de
chose jugée. Les conventions n’existent pour les tiers que lorsqu’elles sont recon
nues par les deux parties; mais s’il y a contestation, il y a doute pour les tiers,
et quels que soient les droits réciproques des parties, les tiers ne peuvent que
s’abstenir.
Il fallait un compromis pour conférer à des tiers la qualité d’arbitres. Cet acte
indispensable existait-t-il? L'une des parties disait oui, Tautre disait non. Le procès
était pendant, et la nullité du prétendu compromis était prononcée d’ avance par
la jurisprudence. En cet état, ce qui apparaissait aux tiers c’étaient deux préten
tions contraires dont le jugement n’appartenait qu'au tribunal qui en était saisi.
�— 37 —
C’ était un débat dans lequel les tiers devaient rester neutres et attendre la décision
de la justice.
On remarquera d’ailleurs que la demande en nullité de la clause compromissoire
avait précédé la constitution du prétendu tribunal arbitral. C’est le 29 mai 1845
que cette demande fut signifiée à M. Jozian. Or le troisième arbitre a été nommé
le môme jo u r, sur la requête de M. Jozian , deux heures après cette significatidn.
Cet arbitre n’a accepté sa nomination que le 13 juin 1845. Les trois prétendus
arbitres n’avaient pas encore siégé, lorsque M. Giroud leur a fait dénoncer la
demande en nullité de la clause compromissoire, par exploit du 15 juillet 1845.
Enfin M. Giroud a constamment protesté contre ces hommes qui voulaient juger
quand leur qualité de juges était contestée.
il est de principe que les questions de compétence et de juridiction doivent être
résolues avant toutes les autres. Chaque procès a son juge qui lui est donné
par la loi; il faut savoir si on est devant ce juge avant d’exposer le procès. Quel
était le tribunal compétent entre M. Giroud et M. Jozian? Suivant M. Giroud c’é
tait la magistrature ordinaire ; suivant M. Jozian, c’étaient des arbitres. Il fallait
que cette question fut décidée avant tout autre débat. Or cette question était sou
mise au tribunal de Paris, et ne pouvait être soumise qu’à lui. Les prétendus
arbitres ne pouvaient prononcer sur leur propre compétence. Ils ne pouvaient pas
être juges de la clause compromissoire, car cette clause étant la source de leurs
pouvoirs, si elle n’était pas valable, ils n’avaient pas de pouvoirs. Ils se trouvaient
dans la même position que des arbitres forcés, en matière de société, lorsque
l’ une des parties demande non pas la dissolution de lasociété, mais la nullité même
de l’acte social. Dans ce cas, la jurisprudence a constamment décidé que les ar
bitres sont incompétents, ca r, dit M. Pardessus : il ne s'agit plus de l’exécution de
l’acte de société, mais bien de son existence. (Cours de dr. comm., tom. 4, pag. 70.)
Cette jurisprudence a été consacrée par de nombreux arrêts. On citera notam
ment un arrôt de la cour de Trêves, du 5 février 1810. (Joum , du Palais, 1" tom.
de 1811, pag. 46.) Et un arrêt de la Cour de cassation du 30 novembre 1821
( môme recueil, tom. 2 de 1826. pag. 20 ). En un mot, des arbitres ne peuvent
prononcer sur la nullité du compromis ; car pour prononcer, il faut d’abord qu’ils
soient arbitres, et pour qu’ ils soient arbitres, 11 faut que le compromis soit valable.
Mais d’un autre côté, ils ne peuvent juger quand leur compétence est contestée,
car le déclinatoire est essentiellement préjudiciel. Or il n’y a pas de déclinatoire
plus absolu que celui qui consiste à nier la juridiction. Les arbitres dont la juri
diction était niée devaient donc s’arrêter, et attendre que la question eût été réso
lue par le tribunal qui en était saisi.
Ces vérités ne sont pas seulement des maximes de procédure ; ce sont des ga
ranties nécessaires au droit de défense ; ce sont des institutions fondamentales
sans lesquelles l’autorité judiciaire, et tous les intérêts qu’elle abrite seraient
�exposés à de continuelles surprises. Que peut faire un citoyen appelé devant un
juge dont il conteste le caractère? Il oppose l’ incompétence. Toute autre défense
lui est impossible. Plaidera-t-il sa cause ? mais ce serait accepter la juridiction !
Se laisserait-il juger par défaut? mais ce serait donner raison à son adversaire !
Il n’a donc que le déclinatoire à opposer. Mais comme sa position lui interdit
toute autre défense, elle interdit aussi tout autre jugement. Le juge dont la com
pétence est attaquée ne peut pas juger le fonds. Comment le connaîtrait-il? par
les déclarations seules du demandeur, car le défendeur est réduit au silence. La
fortune d’une partie serait donc à la merci de l’autre, et la justice , frappant en
aveugle, ne serait plus qu’un instrument d’intrigue et de spoliation. Il faut donc
qu’elle s’arrête, quand son pouvoir est contesté. Il faut que la juridiction soit cer
taine pour que le débat puisse être contradictoire.
Il n’est pas nécessaire d’être jurisconsulte pour comprendre ces vérités. On voit
tous les jours des arbitres étrangers à la science du droit, porter à cet égard la
susceptibilité beaucoup plus loin. Par cela seul qu’ils ne sont pas acceptés par
toutes les parties, ils refusent de siéger. Un homme délicat n’ambitionne pas la
redoutable fonction de juger ses semblables ; mais quand elle lui est déférée, il ne
se contente pas d’examiner si son mandat est conforme aux lois de la procédure ;
il veut quelque chose de plus, il a besoin pour sa propre dignité de la confiance
de tous ceux qu’il doit ju g er, et si l’un d’eux la lui refuse, il se retire. Mais on
voit rarement des arbitres qui s’imposent, qui citent les parties devant leur propre
tribunal, et qui les jugent, malgré les protestations qui leur sont signifiées.
MM. Dorival, Couguet et Sabattier-Gasquet étaient décidés à juger M. Giroud. A
la bonne heure ! mais au moins devaient-ils attendre que leur compétence fût re
connue. Ce n’était pas seulement la delicatesse qui le voulait ainsi, c’était la loi.
ils n’étaient pas juges de la clause compromissoire, car ayant besoin d’un com
promis pour ju ger, ils ne pouvaient pas créer eux-mêmes la source de leur pou
voir. C’est pourtant ce qu’ils ont fait. Ils n’ont pas voulu attendre ; ils étaient
pressés. Ils ont donc rendu, le 29 août 18/i5, une sentence qui a déclaré que la
clause compromissoire était valable ; et quinze jours après, sans débat, sans con
tradiction , M. Giroud protestant qu’il ne pouvait se défendre, ils l’ont condamné
à 506,000 fr. de dommages-intérêts.
Pour excuser leur précipitation, on dit que leurs pouvoirs étaient près d’expi
rer , parce qu’il y avait bientôt trois mois qu’ils étaient nommés. Singulière excuse
pour des arbitres consciencieux l N’était-il pas mieux de ne pas ju g er, que de ju
ger sans entendre ? Mais s’ils tenaient à juger, ils pouvaient être tranquilles. Leur
caractère étant contesté, leurs pouvoirs étaient suspendus ; le délai de l’arbi
trage ne courait pas, quand les fonctions de l’arbitrage étaient paralysées. Dans
tous les cas, leur nomination eût été renouvelée. Mais quels juges que ceux qui
renversent l’ordre des juridictions, qui décident les questions qui ne leur sont pas
�— 39 —
soumises, qui condamnent les .absents à des dommages énormes, sur la foi d’ un
adversaire, le tout parce qu’ils veulent ju ger, et que leurs pouvoirs sont prè*
d’expirer !
Ils devaient donc surseoir. Ils le devaient en droit et en conscience.
P r o p o s itio n .
Dans tous les cas le tribunal <le Brioude devait surseoir à statuer sur l'opposition
à l'ordonnance iCexquatur.
Il est de principe que la même contestation entre les mêmes parties ne peut pas
être portée devant deux tribunaux différents. Ce principe est établi dans l ’intérêt
des parties qui ont assez d’un seul procès, et dans l’intérêt de la justice elle-même
qui pourrait se trouver compromise par deux décisions opposées. Si donc il arrive
que deux tribunaux soient saisis du même procès, la loi donne la préférence à ce
lui qui a été saisi le premier, le second est obligé de renvoyer la cause; et s’il
voulait la retenir, il y aurait conflit et nécessité d’un règlement de juges.
Il y a procès entre MM. Giroud et Jozian sur la validité de la clause compromis
soire. Ce procès a été porté devant le tribunal de la Seine, le 29 mai 1845. Ce tri
bunal s’est déclaré compétent par jugement du 2 décembre suivant; et malgré
l’appel interjeté pour gagner du tem ps, la compétence est évidente. Or la même
question se présente devant le tribunal de Brioude, sur l’opposition à l’ordonnance
d’exequatur. Il s’agit encore de la validité de la clause compromissoire. C’est
le même procès, entre les mêmes parties : une seule différence existe. A Paris, la
nullité de la clause est demandée par action principale. A Brioude, elle est de
mandée par voie incidente et avec d’autres moyens, pour arriver à l’annulation
de la sentence arbitrale.
Cette différence doit-elle faire fléchir le principe? Le procès sur la clause
compromissoire n’est-il pas exactement le même? Qu’importe que l’action soit
principale ou incidente? Le point litigieux n'est-il pas identique? Peut-il être
discuté autrement à liriotide qu’à Paris ? Qu’importe que la cause de Brioude pré
sente d’autres objets à juger? Cet entourage de questions différentes empêche-t-il
que la question particulière de la clause compromissoire ne soit la même à Paris
et à Brioude? Et si cette question était jugée parles deux tribunaux, n’y auraitil pas lieu de craindre l’inconvénient que la loi a voulu éviter? Il suffit d’indiquer
ces considérations : elles démontrent assez que les deux tribunaux ne peuvent
pas rester concurremment saisis du différend relatif à la validité de la clause
compromissoire.
Le tribunal de la Seine ayant été saisi le premier, il est évident que la compé-
�' *
— 40 —
f]0
^ i
tence lui appartient Mais elle ne lui appartient que sur cette question, la seule
qui soit portée devant lui. Le tribunal de Brioude était juge de l’opposition à
l'ordonnance d’exequatur, c ’était une contestation spéciale qui ne devait pas lui
être enlevée. Que devait-il donc faire? Renvoyer le jugement de la clause com promissoire, mais garder le jugement de la sentence arbitrale, etcomme|le sort de
la première pouvait influer sur le sort de la seconde, il devait surseoir à statuer.
Le tribunal de Brioude a rejeté le sursis. On cherche dans son jugement le motif
de ce rejet et on n’en trouve d’autre que cette, phrase étrange : « Attendu que tes
» parties de Vemieres (M. Giroud) ne produisent aucun acte, aucun exploit, ni
» procédure qui justifient celte articulation (l’existence du procès devant le tri» bunal de la Seine). » Ainsi le principe n’est pas méconnu, mais le fait a été nié;
M. Jozian a nié l’existence du procès pendant à Paris, et cette dénégation a déter
m i n é le tribunal de Brioude ii rejeter le sursis, et à passer outre.
M. Giroud devait sans doute justifier l’existence de la demande formée par lui
à Paris. Mais cette demande n’avait-elle pas été d’abord signifiée à M. Jozian ?
M. Jozian n’avait-il pas constitué avoué et plaidé sur cette demande? N’avait-il
pas même perdu son procès sur la compétence et interjeté appel devant la Cour
royale de Paris? De plus, cette demande avait été dénoncée aux arbitres. Elle
était rappelée dans le dire fait devant eux le 29 août 1845. On indiquait même
dans ce dire le jour et la chambre où cette demande devait être ju g é e , et
M. Jozian, dans sa réponse, n’avait pas contesté le fait. Comment donc a-t-il pu
le nier devant le tribunal de Brioude ? Et quelle est la moralité d’un homme qui se
permet de pareilles dénégations?
Dans tous les ca s, le fait de la litispendance est aujourd’hui constant, et l'excep
tion que le tribunal de Brioude a rejetée se reproduit devant la Cour royale deKiom. Il s’agit toujours de savoir si la demande en nullité de la clause compromissoire peut être jugée à la fois par deux tribunaux différents. La loi s’y oppose ;
elle veut que le premier tribunal reste saisi, et que le second se déssaisisse; en
cas de conflit, elle ordonne qu’ une juridiction supérieure interpose son autorité
pour statuer sur la compétence et pour prévenir la contrariété d’arrêts. Mais ce
cas ne se présentera pas. La Cour de Itiom reconnaîtra qu’elle doit surseoir à statuer
sur la sentence arbitrale, jusqu’à ce que la Cour de Paris ait statué sur la clause
compromissoire.
9* H ropoM ition.
En supposant que ta clause compromissoire fût valable, les arbitres ont excédé
leur pouvoir en prononçant sur des questions qui ne pouvaient pas leur être
ioumises.
Cette clause porte : « Qu’en cas de difficultés ou contestations au sujet des pré-
�» sentes conventions (le marché du 30 novembre 1838), elles seront jugées à Pa»ris et non ailleurs, à l’exception cependant de celles qui, par leur nature, ne
» pourraient se décider que dans la localité, par un tribunal arbitral, etc. »
Ainsi, c’est à Paris et non ailleurs, que toutes les contestations doivent être
jugées. Sont exceptées seulement les contestations qui ne pourraient se décider que
sur les lieux. Telle est la loi que les contractants se sont imposée.
Si cette clause ôtait obligatoire, si elle établissait un arbitrage forcé, cet arbi
trage ne pourrait avoir lieu que dans les termes où il est stipulé. C’est donc à Pa
ris et non ailleurs que devrait être établi le tribunal arbitral pour toutes les con
testations en général, et ce ne serait que par exception, et pour des questions
de localité que des arbitres pourraient être nommés à Brioude.
M. .Tozian demeure aux environs de Brioude; il aime les procès, et trouve fort
commode de plaider chez lui ; mais ses convenances ne peuvent nuire aux droits
de ses adversaires. Il voudrait faire croire que toutes les contestations quelcon
ques entre M. Giroud et lui sont des questions de localité. Il s’efforce de substituer
l ’exception à la règle et de transporter toute la juridiction à Brioude. Mais cette
tentative ne peut pas réussir. La convention est précise. On sait bien ce qu’il faut
entendre par des questions de localité. Ce sont les questions qui ne peuvent être
jugées que par l’inspection des lieux. Que M. Jozian fasse nommer des arbitres
à Brioude pour cette nature de questions, c ’est son droit ; mais toutes les ques
tions qui peuvent être jugées sans voir les lieux, et notamment toutes celles quj
tiennent à l’interprétation du contrat, à son étendue, à ses limites, à sa
résiliation, doivent être jugées à Paris et non ailleurs. Les arbitres de Brioude
n'ont aucun caractère, aucune qualité, aucun mandat pour s’en mêler.
Par exemple, si M. Giroud avait promis à M. Jozian de lui procurer un port con
venable pour déposer ses charbons, la question de savoir si le port est convenable
serait une de ces questions réservées à l’arbitrage exceptionnel de Brioude; car,
pour la décider, il faudrait voir les lieux. Mais si M. Giroud n’a promis qu’ un ter
rain tel quel, dans le port des Barthes, la question de savoir s’il doit un terrain
hors de ce port est une question d’interprétation qui ne peut être jugée qu’àParis.
Il en est de même de la question de savoir si M. Giroud doit livrer sur le carreau
de la mine ou sur le port. C’est encore l’interprétation du contrat II en est de
même, à plus forte raison, de la question de savoir si le refus de livrer sur le port
peut être assimilé à un refus absolu de livrer, et s’ il peut en résulter, soit la rési
liation du contrat, soit les monstrueuses condamnations prononcées par MM. Dorival et consorts.
Ceci entendu, quelles sont donc les questions que M. Jozian a soumises à ses arbi
tres de Brioude? on va les examiner suivant l’ordre et dans les termes où elles sont
posées par le point de droit de la sentence arbitrale.
�I ” Q u e stio n .
« üoit-on allouer des dommages-intérêts à Jozian et Sauret pour réparation du
> » préjudice à eux causé par le refus d’exécuter ta convention du 30 novembre
» 1838, depuis le jou r fixé par la sentence arbitrale du 6 juin 1843, pour la
» première livraison de charb on jusqu'au jou r que fixera ta présente sentence? »
Est-ce là une question locale? o u i, dira-t-on, car le refus d’exécuter la con
vention consiste à n’avoir pas fourni un port convenable. Or, la convenance du
port est une question qui ne peut se décider que par la vue des lieux. Mais avant
cette question, il y en aune autre, qui est celle de savoir si la convention oblige
M. Giroud à fournir un port convenable. M. Giroud soutient qu’il n’a pas fait cette
promesse vague et générale d’un port convenable, mais qu’il a promis un empla
cement dans le port qui lui appartient. Or, ayant mis la totalité de ce port à la
disposition de M. Jozian, il prétend qu’il a exécuté la convention. M. Jozian pré
tend le contraire; à la bonne heure; mais quel sera leur j'uge? c ’est une question
d’interprétation du contrat : c’est donc à Paris seulement qu’elle peut être j'ugée;
M. Jozian devait donc provoquer l’arbitrage à Paris, sauf à renvoyer devant le
tribunal exceptionnel de Brioude s’il s’élevait une question locale, comme celle de
la convenance du port, en supposant que les arbitres de Paris, interprètes de la
convention, lui eussent donné gain de cause.
V Q u e s tio n .
» Doit-on ordonner ijue dans te délai de quinzaine tes défendeurs seront tenus de
• commencer les livraisons ordonnées par la sentence du 6 juin 1843? »
C’est là, sans contredit, une question générale et non une question locale.
:t' Q u e s t i o n .
« Doit-on accorder des dommages-intéréts pour chaque jou r de retard? »
Même observation.
4 * Q u e stio n .
« Doit-on ordonner que le temps fixé pour ta durée du marché ne commencera
» à courir que du jou r de la première livraison ? »
Cette question est une des plus graves quiaiont pu être soulevées touchant l’in
terprétation de la convention. La durée du marché est fixée à 15 années à partir
�— 43 —
du 1" mars 1839. M. Jozian a demandé que le point de départ des 16 années fut
reporté à la première livraison qui suivrait la sentence. Ainsi au lieu d’expirer
en 1854, le marché devrait subsister jusqu’en 1860 environ. Que cette prétention
fut ou non fondée, il n’importe ; mais était-ce là une question'locale? Fallait-il
examiner les lieux pour la résoudre? Au contraire, n’était-ce pas essentiellement
une de ces contestations générales qui, d’après la convention, devraient-être jugées
à Paris et non ailleurs?
»* Q u e stio n .
a Doit-on, à défaut par les défendeurs, d'avoir commencé les livraisons dans un délai
n de quinzaine, comme aussi, dans te cas où, après avoir été commencées, elles
»
»
«
»
»
n
»
seraient interrompues pendant cinq jours consécutifs, après quinze jours d'interruption arrivée, soit par suite du refus des défendeurs, soit à cause de
difficultés provenant de leur fa it, ordonner la résolution de la convention du
30 novembre 1838, sans qu'il soit besoin d'autre jugement, et condamner tes défendeurs à des dommages-intéréts égaux en somme au chiffre d'iceux, calculés
à raison de 30 centimes par hectolitre pendant le temps restant à courir du
traité, à partir du refus de livraison ou de Cinterruption. »
Cette longue question n’est assurément pas de celles qui ne peuvent se décider
que dans la localité. Il s’agit d’ajouter à la convention une clause pénale en vertu
de laquelle M. Jozian, sous prétexte qu’on ne lui livre pas ce qu’ il refuse de rece
voir, pourra un jour exiger, au lieu de charbon, 540,000 francs de dommagesintérêts. Il s’agit de rendre M. Jozian maître de prononcer lui-même la résolution
du marché, quand il voudra, sans jugement, et sur la simple allégation d’une de
ces difficultés qu’il est si habile à faire naître. Il s’agit enfin de créer une disposi
tion réglementaire qui mette M. Giroud à la discrétion de M. Jozian. Mais quelques
iniquités que cette question renferme, pouvait-elle être soumise aux arbitres de
Hrioude? S’il y avait lieu d’introduire dans la convention une clause exhorbitante
qui n’y était pas, pouvait-on dire que c’était là une question de localité? NOn cer
tes. C’était donc à Paris qu’il fallait chercher les juges de cette question.
D’autres questions du môme genre avaient été soulevées par les conclusions de
M. Jozian. Il demandait par exemple une indemnité pour le cautionnement de
54,000 francs que M. Pezerat avait été obligé de fournir. Cette prétention dérai
sonnable n’a été ni admise ni rejetée par les arbitres de Brioude, mais elle n’en
était pas moins soumise à leur examen , quoiqu’elle fut évidemment du nombre
de celles qui d’après la convention devaient être jugées à Paris et non ailleurs.
Une sentence arbitrale est nulle quand les arbitres ont jugé sans compromis ou
hors des termes du compromis. Us n’apparait ici d’autro compromis que la clause
�— 44
—
compromissoire stipulée dans la convention du 20 novembre 1838. Ou cette clause
est nulle, et alors il n’y a pas de compromis, ou elle est valable, et alors il y a un
compromis qui établit deux arbitrages, l’ un à Paris pour toutes les questions gé
nérales, l’autre à Brioude pour les questions de localité. Le premier sera le tribunal
ordinaire et commun des parties, le second sera le tribunal d’exception. L’un de ces
tribunaux ne peut pas juger las questions attribuées à l’autre ; le juge d’exception
surtout doit s’abstenir des cas réservés aux juges ordinaires. Qu’ont fait les arbi
tres de Brioude? Ils ont jugé des questions générales. Y étaient-ils autorisés par
le compromis ? Non. Ils ont donc jugé hors des termes du compromis.
On prétend qu’ils y étaient autorisés par la sentence arbitrale du 6 juin 1843.
Il est vrai que les arbitres qui ont rendu cette sentence y ont inséré une dispo
sition ainsi conçue : Disons qu'à défaut, par Giroud et Cie, de livrer dans le délai
ci-dessus ("de quinzaine), les charbotis dont il s'agit dans les term es, facultatifs de
la présente sentence (relativement aux grosseurs), ils seront tenus, envers le sieur
Jozian, à des dommages-intéréts sur la quotité desquels nous renvoyons tes parties
à se faire juger dans la localité ; les renvoyons également à se faire juger dans la
localité sur les autres chefs de conclusions dépendant de ces dommages-intéréts. »
Cette disposition assez étrange a-t-elle pour effet de détruire l’économie de la
clause compromissoire, et de conférer aux arbitres de Brioude des pouvoirs que les
parties ne leur avaient pas donnés ? Ce serait un compromis d’un nouveau genre;
Mais il faut réduire cette disposition à sa juste valeur, c’est-à-dire à une déclara
tion d’incompétence. Un juge peut se déclarer incompétent, mais il ne peut pas
déclarer la compétence d’un autre ju g e , il renvoie la cause devant qui de droit
devant les juges qui doivent en connaître ; mais il ne l’attribue pas à tel ou tel
tribunal. La cour de cassation est la seule qui délégué la juridiction, mais c ’est
une prérogative qui n'appartient qu’à elle. Un juge ordinaire prononce sur les
demandes qui lui sont soumises, mais il ne donne pas de consultations, et il ne fait
pas de règlements. Lorsque la sentence du 6 juin 1845 a été rendue, ni M. Jozian,
ni M. Giroud n’avaient demandé le renvoi devant les juges de la localité. M. Giroud
offrait de livrer le charbon que la mine produirait, M. Jozian demandait des gros
seurs impossibles,sinon des dommages-interêts. Les arbitres ont fixé les grosseurs;
ils ont dit que M. Giroud serait tenu de livrer à peine de dommages-intérôts; et
s’ils ont ajouté que la quotité de ces dommages, et les questions qui s’y ratta
chaient, devaient être Jugées dans la localité, c ’est une opinion qu’ ils ont expri
mée, mais ce n’est pas un jugement qu’ ils ont rendu, car ils ne pouvaient pas,
d’oflice, transporter ainsi la juridiction.
Au surplus, de quelles questions leur sentence parle-t-elle? Des questions rela
tives à la quotité des dommages-intéréts et des questions qui s'y rattachent. Mais
les arbitres do Brioude ont statué sur des questions beaucoup plus graves. La
question de prolongation du marché jusqu’en 1800, ne touche ni de près, ni do loin,
�h la quotité des dommagcs-intéréts. La question de résiliation faute d’interruption
des livraisons pendant cinq ou quinze jours, est une question fondamentale, qui
n’a pas p u , sous prétexte de son peu d’importance, être enlevée aux arbitres de
Paris pour être attribuée aux juges exceptionnels de la localité. U est évident que
M. Jozian veut attirer toutes les questions dans son pays pour les faire juger par
ces arbitres qui lui montrent tant de dévouement. Mais il ne peut pas diviser la
clause compromissoire : l’invoquer pour établir un arbitrage , et la méconnaître
quand il s’agit du lieu de l’arbitrage et de la compétence des arbitres.
S' P r o p o s it io n .
Les arbitres ont prononcé après que les délais de l'arbitrage étaient expirés.
L’art. 1007 du code de procédure porte que si le compromis ne fixe pas de délai,
ia mission des arbitres ne dure que trois mois du jour du compromis.
11 s’agit de savoir ce qu’on doit entendre par ces mots : du jou r du compromis.
Quand 11 existe un compromis régulier, désignant les arbitres et le litige, la date
est fixée par l’acte ; mais quand il n’existe qu’un compromis irrégulier, en vertu
duquel des arbitres sont nommés plus tard, cette nomination formant le complé
ment du compromis, c’est du jour de cette nomination que le compromis existe,
si toutefois sa nullité n’est pas prononcée.
C’est le 29 mai 1845 qu’a été nommé M. Sabattier-Gasquet. MM. Dorival et Couguet avaient été nommés beaucoup plutôt. C’est le 13 juin suivant qu’il a déclaré
accepter sa nomination. Ainsi le compromis, en le supposant valable, a existé dès
le 29 mai 1845, ou au plus tard le 13 juin. La mission des arbitres ne durant que
trois mois du jour du compromis, elle devait expirer soit le 29 août, soit le 13 sep
tembre au plus tard.
La sentence arbitrale porte la date du 15 septembre 1845, et encore les arbitres
l’ont-ils antidatée, car ils ne l’ont déposée que le 8 octobre ; mais en admettant
cette date du 15 septembre, elle serait tardive, les pouvoirs étaient expirés depuis
deux jours, la qualité des arbitres s’était évanouie, ils n’étaient plus que de sim
ples particuliers, avocats, épiciers ou charpentiers. La sentence serait donc ren
due sans compromis, elle serait radicalement nulle.
Mais à plus forte raison faut-il la déclarer nulle, si elle n’a été rendue qu’au
mois d’octobre. Or, c ’est ce qui résulte d’abord de la date de l’enregistrement et
du dépôt C’est le 8 octobre qu’elle a été déposée ; mais si elle était rendue depuis
•e 15 septembre, pourquoi donc les arbitres auraient-ils tardé pendant vingt-trois
jours à )a déposer? Le délai pour l’enregistrement n’était que do vingt jours, com
�ment croire que les arbitres aient ainsi voulu exposer les parties à payer un double
droit, s’ils avaientpu déposer plus tôt? Ce n’est pas tout, tandis que M. Jozian pres
sait la décision des arbitres, M. Giroud suivait à Paris, sur la demande en nullité
delà clause compromissoire, et le 17 septembre, ce tribunalayant remis la cause,
M. Giroud demanda et obtint qu’il fut dit par le jugement de remise que toutes
choses demeureraient en état, c’est-à-dire, que l’instance arbitrale serait suspen
due. Huit jours plus tard une nouvelle remise fut prononcée avec la même injonc
tion. M. Giroud s’empressa de notifier aux arbitres ces deux décisions qui arrê
taient l’ardeur de leur zèle. Quelle fut leur réponse ? aucune. Mais si la sentence
avait été rendue le 15 septembre, il était tout simple de répondre à M. Giroud que
la sentence étant rendue, il n’y avait plus rien à suspendre. Il était naturel au moins
de déposer immédiatement cette sentence qui, après avoir été sjgnée, ne devait
pas rester plus de trois jours entre les mains des arbitres; mais elle n’était pas
rendue le 15 septembre, elle ne pouvait donc pas être déposée.
On dira peut-être que, si les arbitres avaient antidaté leur sentence, ils lui
auraient donné la date du 13 septembre, qui rentrait dans le délai du compromis,
et non celle du 15 septembre, qui excédait ce délai. Mais la fraude est presque
toujours accompagnée de désordre et de précipitation ; elle ne pense pas à. tout.
Il est probable qu’en datant leur sentence du 15 septembre, les arbitres n’ont
songé qu’aux sommations de suspendre qui leur avaient été signifiées les 19 et 2G
septembre; Us ont voulu seulement que leur sentence parut antérieure ù. ces som
mations. Ils n’auront pas pensé au délai de trois mois qui mettait fin à leurs pou
voirs. Ils ont commis un autre oubli fort grave. La loi veut qu’en matière d’arbi
trage, la partie défaillante ait un délai de dix jou rs, pour remettre ses mémoires
et pièces; ce délai doit être augmenté d’ un jour par trois myriamètres, quand le
défaillant ne demeure pas sur les lieux, il était donc de vingt-sopt jours pour
M. Giroud, domicilié à Paris. Une sommation lui avait été faite le 1 " septembre
18i5 pour faire courir ce délai; c’était donc le 28 septembre seulement que les ar
bitres pouvaient juger ; mais d’un autre côté, leurs pouvoirs expiraient le 13. Us
étaient donc dans une impasse, obligés de juger avant le 13, et ne pouvant juger
avant le 28. La difficulté était sérieuse; mais qu’importait à M. Dorival et à ses
collègues? les impossibilités légales ne les arrêtent pas; ils ne s’occupent ni do
leurs pouvoirs, ni de leurs devoirs; ilsjugent quand ils veulent, ils donnent à leur
sentence la date qu’il leur platt, et Ils la déposent quand il leur convient. Il
était juste quedans une œuvre aussi monstrueuse, le vice de la forme égalât l’ ini
quité du fonds.
Objectera-t-on que les pouvoirs des arbitres étaient suspendus par la demande*
en nullité de la clause compromissoire, et que le délai de l’arbitrage avait cessé
de courir? Mais alors les arbitres ne devaient pas ju ger; leur sentence est donc
nulle ou comme prématurée, si les délais étaient suspendus, ou comme tardive
si les délais avaient continué à courir.
�«• P r o p o s itio n .
i:
II n’y avait pas lieu à exécution provisoire du jugement.
Si l’on est étonné que le tribunal de Brioude ait consacré une pareille sentence
on est stupéfait qu’il ait ordonné l’exécution provisoire nonobstant appel. En
principe général, l’appel est suspensif ; l’exécution nonobstant appel est donc
une exception qui n’existe que dans certains cas dont l’art. 135 du Code de pro
cédure contient l'énumération. On cherche parmi les dispositions de cet article
quelle est celle que le tribunal de Brioude a voulu appliquer ; mais il est impos
sible de la découvrir; le jugement ne l’indique pas; il donne seulement pour
motif les nombreux procès qui ont existé entre les parties, ce qui démontre, sui
vant le tribunal, la mauvaise volonté de Giroud, son désir de dénier toute juridic
tion, et d'éloigner l'exécution du marché du 30 novembre 1838. Ces,motifs sont
aussi dénués de vérité que de légalité. Ce n’est pas M. Giroud qui a cherché cons
tamment à éluder l’exécution du marché. Au contraire il a intérêt a ce que ce mar
ché s’exécute, il y trouve un bénéfice important, et il a fait des dépenses considé
rables pour réaliser ce bénéfice. On ne veut pas apparemment lui reprocher d’avoir
exigé une caution quand l’acheteur était tombé en déconfiture; c’était son droit, et
ce droit a été reconnu d’abord par les juges que les parties ont choisi, et ensuite
par les adversaires eux-mêmes. Mais aussitôt que cette caution lui a été fournie, il
a offert de livrer, et il a réclamé constamment et avec instance l’éxécution du mar
ché. Pourquoi donc le marché n’a-t-il pas’été exécuté? Parce que M. Jozian ne vou
lait pas de charbon ; parce qu’il avait voulu faire une spéculation aux dépens de
M. Giroud parce qu’en achetant les droits de M. Pezerat; il s’était flatté que
M. Giroud, pris au dépourvu, serait embarrassé pour livrer l’énorme quantité
de houille qu’il avait vendue; mais quand il a vu que la livraison était offerte, il
s’est jeté dans des chicanes sans fin , et c’est alors qu’il a voulu exiger d’abord que
l’Allier fut navigable, ensuite que le charbon eut une certaine grosseur, puis qu’il
fut livré au port, puis que le port atteignit une certaine élévation, et enfin que
10,000 hectolitres lui fussent mesurés en un jo u r; et mille autres prétextes à
l’aide desquels il s’est toujours dispensé de recevoir la marchandise et de la
payer. Et c’est M. Jozian qui accuse M. Giroud de ne pas vouloir exécuter le mar
ché du 30 novembre 1838 ! Un seul article de ce marché a été contesté par
M. Giroud : c’est la clause compromissoire. Mais quoique cette clause fut illégale
et nulle, M. Giroud l’a respectée tant qu’il a cru qu’elle serait observée loyale
ment Mais quand il a vu qu’on voulait abuser de cette clause, et (pie sous pré
texte d’instituer un arbitrage local, on entreprenait de le livrer au jugement de
trois hommes empreints do toutes les passions de ses adversaires, il s’y est
refusé, il a invoqué la loi, il a demandé des juges naturels, il s’est réfugié aux
�pieds de la magistrature. C’est là cette mauvaise volonté qu’on lui reproche et ce
désir de dénier toute juridiction. Mais pouvait-il accepter la juridiction de
M. Gourcy qui avant d’être nommé arbitre avait émis son opinion comme expert
choisi par M. Jozian? Pouvait-il accepter la juridiction de MM. Dorival et Couguet
qui s’étaient séparés de leur coarbitre M. Lamothe, parce que celui-ci n’avait
voulu siéger ni dans une taverne, ni dans le cabinet de l’agréé de M. Jozian?
Pouvait-il accepter la juridiction de M. Sabattier-Gasquet que M. Jozian avait fait
nommer arbitre, le jour même où il avait reçu la demande en nullité de la
clause compromissoire? M. Giroud pouvait-il avoir confiance dans ces trois
hommes qui avant de le juger le faisaient sommer par huissier! qui ne com
prenaient pas qu’un arbitre dont on conteste la qualité, doit avoir la pudeur de
s’abstenir provisoirement! qui décidés à tout, obéissant à toutes les injonctions
d’ uno partie, et bravant toutes les protestations de l’autre, ne se sont inquiétés ni
de la validité du compromis, ni de sa durée, ni de la lo i, ni des form es, ni de
la ju stice, ni de l’équité, pour passer outre au jugement d’un absent qu’ils
ont condamné sans qu’il pût se défendre, à un chiffre fabuleux de dommagesintérêts! Non, M. Giroud n’a pas voulu accepter leur juridiction. Et ce n’est n
par caprice, ni parlégéreté qu’à l’aspect de cette commission menaçante, il a
demandé à être conduit devant ses juges naturels.
Il y est aujourd’hui, et ses regards s’élèvent avec confiance et bonheur vers
cette magistrature noble et calme, instituée par la loi et environnée de la vénéra
tion du pays. Là se trouvent des hommes dignes en effet de juger les autres hom
mes. Là régnent l’impartialité, la prudence, l’amour de la justice, le respect de la
lo i, la conscience du devoir. Là sont réunis l'élévation du cœur, la supériorité des
études et la hauteur de la position sociale. Là se rencontre enfin la sauvegarde de
tous les droits, la publicité. Quel est le tribunal arbitral qui puisse se comparer,
pour les garanties, au moindre des tribunaux civils? quel est l’arbitre qui oublie
en jugeant, le nom de la partie qui l’a nommé? quel est le plaideur qui ne tremble
pas quand il songe que sa fortune dépend d’ un débat obscur entre trois hommes,
dont l’un est presque toujours son adversaire secret? Cependant la juridiction ar
bitrale fait illusion. On l’aime de loin, on la stipule d’avance, et on exclut
la magistrature quand on n’en a pas besoin. Mais qu’un procès éclate, et on ne
tarde pas à se repentir. Alors apparaissent les inconvénients de cette justice privée
qu’on a préférée sans la connaître. Cependant tous les arbitrages n’offrent pas les
mêmes abus, toutes les sentences ne ressemblent pas à celles qui a condamné
M. Giroijd.
M. Giroud supplie les magfstrats, dont il veut restef le justiciable, d’annuler et
cette clause compromissoire, dont en a fait un si déplorable usage, et cette sen
tence, dont sa ruine serait la conséquence. Il les supplie de remettre les parties
dans le même état qu’avant ce funeste arbitrage, et do ramener le débat à sa sim
�— 49 —
plicité originaire. Alors il s’agira seulement de juger si quelques mètres de terrain
que M. Giroud doit fournir à M. Jozian, pour déposer ses charbons, doivent être
pris dans le port des Barthes ou dans un autre port. Voilà, en effet, tout le pro
cès; voilà la source du demi-million octroyé à M. Jozian !
PIJON,
AVOCAT.
P A RI S IM P D E E M A RC A UG ET R UE B IC H ER 1 2
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Giroud. 1846?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pijon
Subject
The topic of the resource
transport fluvial
charbon
arbitrages
mines
asphalte
banqueroute
tribunal de commerce
ports
banquiers
génie civil
experts
jugement arbitral
marchandises
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour monsieur Giroud, propriétaire, tant en son nom personnel qu'en qualité de gérant de la société Giroud et Compagnie ; contre messieurs Jozian et Sauret, associés en participation, pour l'exploitation des droits cédés au sieur Jozian par le sieur Pezerat.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de E. Marc-Aurel (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1846
1838-1846
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
49 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3005
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3006
BCU_Factums_G3007
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sainte-Florine (43185)
Pont-du-Château (63284)
Jumeaux (63182)
Rights
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Domaine public
arbitrages
asphalte
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banquiers
charbon
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Mines
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transport fluvial
tribunal de commerce
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PDF Text
Text
tr ib u n a l
première
PRECIS
IN ST A N C E
dela S e in e .
POUR
5' CHAMBRE.
M DURANTIS,
MM. JOZIAN et SAURE T , défendeurs,
P ré s i d e n t .
CONTRE
M. GIROUD, demandeur.
------ —■ •'¡■T
"
--.
Le 21 novem bre 1 8 3 8 , par acte devant Casati , notaire à Lyon ,
MM. Chevalier et Giroud achètent de M. Corcelette, au prix de 140,000 fr.,
la moitié indivise, avec M. Julien Sadourny, de la m ine de houille des
Barthes, concédée p a r ordonnance royale du 11 février 1829.
Le 30 du m êm e m o i s , ils passent u n marché avec M. Pezerat, gérant
d e ‘la société d ’asphalte granitique établie à P a r i s , d ’après lequel ils
s ’obligent à livrer à cette Société, à partir du 1er mars 1839, 10,000 hec
tolitres de charbon par m o is , au prix de 90 c. l’hectolitre.
Le traité comporte u n e clause compromissoire conçue en ces termes :
« A r t . 9. — En cas de contestations au sujet des présentes ' conventions,
» elles seront jugées à P a r is ,
et non ailleurs à l’exception cependant de
» celles q u i,p a r leur nature, ne pourraient se décider que dans la localité, par
» un tribunal arbitral composé de trois membres, dont deux seront respecti» vement choisis par les parties, et, à leur défaut, p a r le président du tribunal
» de commerce
le troisième sera nommé par les deux arbitres désignés ,•
» et, faute p a r eux de s’entendre sur cette nomination, elle sera faite égale» ment par le tribunal de commerce du lieu où sera portée la contestation ;
» le tout à la requête de la partie la plus diligente. »
Le 1er décembre 1 838, par acte devant F o u r c h y , notaire à P a r is ,
MM. Chevalier et Giroud forment une Société en commandite pour l’ex
�ploitation de la mine des Barthes, au capital de 1,200,000 fr., représenté
par douze cents actions de 1,000 fr. chacune.
La mine est comprise dans l'apport social de ces messieurs p o u r une
valeur de 800,000 fr.
M. Giroud est nommé gérant provisoire de l’entreprise.
Le 3 avril 1839, la Société Pezerat e tC o m p 1“. cède à M. Jozian tous les
droits acquis à cette Société par la convention du 30 novembre 1 8 3 8 ,
à la charge , par le cessionnaire, de rem plir tous les engagemens imposés
à la société cédante.
.M. Pezerat fait déclaration de la cession à MM. Chevalier et Giroud,
par un exploit du 29 mai suivant.
M. Jozian se m et en devoir d ’exiger les livraisons de charbon promises
à la Société Pezerat et Compie.
Un débat s’engage s ur le carreau de la mine au m om ent de la première
livraison.
M. Jozian se pourvoit devant le tribunal de commerce de Brioude, pour
faire ordonner l ’exécution du marché du 30 novembre 1838.
Un jugem ent par défaut, du 8 novembre 1839, fait droit à sa dem ande.
Mais, dans l’intervalle, une autre procédure avait été engagée à Paris
contre la Société Pezerat et Compie, à la diligence de MM. Chevalier et
Giroud : ils l ’avaient actionnée devant le tribunal de com m ercede la Seine
en résolution de la convention du 30 novembre 1838, et un ju gem ent du
26 juillet 1839 avait renvoyé les parties devant arbitres juges, en confor
mité de la clause compromissoire ci-dessus relatée.
Il y avait ainsi deux instances simultanées s u r le même o b j e t , l ’une
engagée ù Brioude, l’autre à Paris.
Dans le cours de l ’instance a rb itra le , la Société Pezerat et Com p1* est
mise en liq u idation, et la procédure est reprise contre les liquidateurs
choisis par les actionnaires en assemblée générale.
Le tribunal arbitral est composé de MM. Gibert, Girard et Venant, an
ciens agréés^ et régulièrem ent constitué.
D'un autre côté, MM. Chevalier et Giroud se rendent opposans au
�jugem ent par défaut du tribunal de commerce de Brioude du 8 novembre
1839. Ils contestent la compétence du tribunal par un moyen tiré de la
clause comproinissoire portée en la convention du 30 m ars 1838.'
II est statué su r les deux instances.
A Brioude , l’opposition est rejetée par un jugem ent du 3 avril 1 840, et
le tribunal ordonne que son jugem ent du 8 novembre précédent sortira
effet.
A P a r is , les a rb itre s , par une sentence du 17 juin J 8 4 0 , déclarent
MM. Chevalier et G iroud non recevables et mal fondés dans leur demande
en résolution de la convention du 30 novembre 1838, ils ordonnent néan
moins que, po u r garantie de son exécution, les liquidateurs de la Société
Pezerat et Compie fourniront un cautionnem ent de 54,000 fr.
La sentence est rendue exécutoire sans contestation de la p art d ’aucune
des parties; mais le ju gem ent de Brioude est frappé d'appel devant la
cour de Biom par MM. Chevalier et Giroud.
S ur cet appel, la cour infirme ce jugem ent par un arrêt du 24 novembre
1840, dont u n des motifs est formulé comme suit :
» Considérant que tontes les contestations ci naître entre les parties devaient}
» a u x termes de la convention du 30 novembre 1838, être jugées p a r des a r» bitres, que, dbs-lors, le tribunal de Commerce de Brioude s’est attribué
» contre la volonté des parties une juridiction qui ne lui appartenait pas, et,
» qu'en procédant ainsi il a ju g é incompétemment. »
Pour régulariser la convention intervenue entre la Société Pezerat et
Com pie. et le sieur Jozian, les liquidateurs cèdent à ce dernier, par un
acte du 2 février 1841, le bénéfice et les effets de la sentence arbitrale
rendue à leur profit le 17 ju in précédent. Cet acte est enregistré et signi
fié à MM. Chevalier et Giroud.
M. Jozian fournit le cautionnem ent de 54,000 francs à la charge des
liquidateurs, dans les formes prescrites p a r l a loi, ainsi q u ’il résulte d ’un
acte au greffe du tribunal civil de la Seine, on date du 12 février 1841,
V
.
�sans q u ’il y ait contestation de la p art de MM. Chevalier et Giroud.
M. Jozian, obéissant à l’arrêt de Riom, fait ses diligences po u r soumettre
à des arbitres juges la contestation dont le tribunal de commerce de
Brioude avait été indûm ent saisi. Les arbitres qui ont rendu la sentence
du 17 juin 1840 sont de nouveau constitués en tribunal arbitral du con
sentement des parties.
'
L’instance est engagée entre M. Jozian, cessionnaire de la Société lJezerat et Com pagnie d ’une part, et MM. Chevalier et Gj^toud d ’autre part.
Le 2 V mai 18VI, une nouvelle sentence arbitrale ordonne que les li
vraisons de charbon à faire, en exécutionde la convention du 30 m ars 1838,
auront lieu dans des proportions q u ’il est sans intérêt d ’indiquer ici, et
dispose q u ’à défaut p a r MM. Chevalier et Giroud d ’effectuer lesdites li
vraisons aux époques fixées par la sentence et sans q u ’il soit besoin de
mise en demeure, il sera fait droit a u x conclusions du sieur Jozian tendant à
la fixation d'une peine contre eu x pour ce défaut d’exécution.
La sentence ordonne en outre que MM. Chevalier et Giroud rapporte
ront à M. Jozian, dans le mois de la signification, l’adhésion de la So
ciété de la m ine des Barthes à l’exécution de toutes les conditions portées
au traité du 30 novembre 1830, sinon <[U il sera fait droit sur la fixation des
dommages-intérèts réclamés par le sieur Jozian.
Cette sentence est frappée d ’opposition à l’ordonnance d'exei/uatur et
vivement attaquée par MM. Chevalier et Giroud. L ’opposition donne lieu
à une série d ’instances, en première instance et en appel, et il ne faut rien
moins que trois juge me iis et quatre arrêts pour donner passage au ju g e
ment arbitral du 2 h mai 1841.
Néanmoins, M M .Chevalier et Giroud résistent à son exécution, e t c ’est
le cas, alors, de revenir devant les arbitres pour q u ’il soit statué sur les
points réservés par leur sentence.
Les arbitres sont donc une troisième fois saisis, à la diligence du sieur
Jozian du litige né du traité du 30 novembre 1838, et, le ü juin I8'i3, ils
rendent une nouvelle sentence qui porte en substance ce qui suit :
�MM. Chevalier et G iroud sont tenus de comm encer les livraisons de
charbon dans la quinzaine de la signification de la sentence.
A défaut de ce faire ils sont condamnés à des dommages-intérêts sur la quo
tité desquels les parties sont renvoyées à se faire ju g er dans la localité.
Kt ce dernier chef d e là sentence est motivé en ces termes.
» Attendu que la quotité de ces dom m ages-intérêts ne peut être bien a p » préciée que dans la localité elle-m êm e, parce q u ’elle doit résulter d ’un
» concours de faits et de circonstances qui ne peuvent être bien connus
» que dans cette localité.
» Que c’est donc le cas de renvoyer les parties à se faire ju g e r dans le
» pays sur la quotité des dom m ages-intérêts ainsi que le réserve la c o n » veution p o u r ce genre de question.»’
E n ce qui touche l ’adhésion de la Société de la mine des Barthes, non
produite encore, les arbitres déclarent surseoir à prononcer su r les domm ages-intérêts j u s q u ’après le mois de janvier de l ’année 1844.
MM. Chevalier et Giroud satisfont en tem ps utile à cette disposition do
la sentence, mais ils se refusent aux livraisons de charbon dans les condi
tions prescrites p a r cette sentence.
De là, nécessité de soum ettre le débat et l’appréciation des dom m agesinlérêts, à des arbitresde la localité, dans les termes de ladite sentence.
A ce moment, M. Chevalier se tient à l ’écart et M. Giroud agit en son
nom dans tous les actes de la procédure qui précèdent la constitution du
tribunal arbitral.
Cette procédure atteste des
efforts inouis de M. G iroud p o u r empê
cher laréunion des arbitres, et c ’est encore là u n des curieux épisodes de
cette longue lutte judiciaire qui date de 1839.
Dès le 9 août 1843 et par un acte du même jo u r enregistré à IJrioude le
24 du môme mois, M. Jozian avait cédé à M. Sauret, b a n q u ie r à Riom, la
moitié des droits résultant, au profit de lui c é d a n t, tan t de la convention
du 30 novembre 1838 que des sentences arbitrales sus-relatées.
Alors, MM. Jozian et Sauret se pourvoient en nom ination d ’arbitres de
vant le président du tribunal de commerce d ’Issoire. Deux ordonnance»
�sont rendues p a r ce m agistrat les 9 et 18 novembre 1843; mais M. Giroud
interjette appel de ces ordonnances.
L ’appel est fondé su r ce que l a m in e d e sB arthes se trouvant dans la cir
conscription territoriale du ressort de B r io u d e , les ordonnances ont été
incoinpéleinment rendues par le juge d ’Issoire.
Ce système est accueilli par un arrêt de la cour de Riom du 21 février
1844,
MM. Jozian et Sauret recom mencent leur procédure s u r nouveaux frais
ù Brioude.
tE n voici seulem ent les principaux incidens :
Le 4 m ars 1844, MM. Jozian et Sauret notifient par exploit, à MM. Che
valier et Giroud q u ’ils font choix p o u r arbitre de la personne de M. D orival, et leur font somm ation d ’en désigner un. S ur le refus de satisfaire
à cette som m ation, le même exploit contient assignation à comparaître, le
('), devant le président du tribunal de commerce de Brioude, en nom ination
d ’arbitre.
Le G m ars, MM. Chevalier et Giroud ne se présentent pas au désir de
l’ajournem ent; mais M. le président de lîrioude juge q u ’on ne leur a pas
donné un délai suffisant et surseoit à statuer ju s q u ’au 14 m ars, jo u r auquel
MM. Chevalier et Giroud seront intimés de nouveau de se présenter à son
hôtel.
Le 14 m ars, MM. Chevalier et Giroud font encore défaut; néanm oins,
M. le président leur accorde un nouveau délai de huitaine, et, faute par eux
de se prononcer dans ce délai, il désigne d ’office po u r arbitre, Me Bardy ,
notaire à Angers, et commet Vallat, huissier à Brioude,
po u r la signi
fication de l’ordonnance.
Mais les exploits ayant été signifiés à MM. Chevalier et Giroud aux
Barthes, siège de l’exploitation de la mine, et non à leurs domiciles réels
respectifs, c’est là un prétexte pour M. Giroud de se pourvoir par appel
contre les ordonnances des G et 14 mars.
Mais, par un arrêt du 5 août 1844, la cour de lliom déboute M. Giroud
de son appel et dit que ces ordonnances sortiront effet.
�L ’arrêt est signifié à M. G iroud le 24 août, et le 30 il se décide enfin à
nom m er un arbitre, il déclare choisir M. Lam otlie; toutefois, l’exploit
m entionne que M. G iroud ne fait celte désignation que comme contraint,
et forcé, et sous la réserve de demander lanullité de la signification du 24 aoiît
et de se •pourvoir en cassation contre l’arrêt du 5.
Il ne s ’agit plus que de compléter le tribunal arbitral par la nomination
d 'u n troisième arbitre; mais cette nom ination doit être faite p a r les deux
arbitres déjà désignés, MM. Dorival et Lam othc , et des difficultés sans
nom bre surgissent p o u r l’entraver.
Plusieurs mois s’écoulent, et MM. Jozian et Sauret s’épuisent en vains
efforts po u r am ener une réunion des arbitres : tantôt les absences réitérées
de M. Lamotlie em pêchent la réunion, tantôt il y a désaccord su r le lieu
de cette réunion; et ce n ’est que le 11 novembre 1844 que MM. Dorival
et Lamotlie se trouvent en présence po u r nom m er le troisième arbitre.
Un procès-verbal de ce jo u r constate q u ’ils n ’ont pu s ’entendre sur cette
nom ination et q u ’ils l ’ont renvoyée au tribunal de commerce de lîrioude.
P a r u n ju gem ent du 13 novembre, le tribunal désigne M. Desniez pour
troisième arbitre, et, su r son refus, un nouveau ju gem ent du
17 nom me à
son lieu et place M. Amable Cougnet, avocat à Prioudo.
M. Giroud fait appel du jugem ent du 17 décembre, mais la cour le con
firme par un arrêt du 24 février 1845, et le tribunal arbitral se trouve ainsi
au complet.
M. Lamotlie se rend à Paris po u r y passer l’hiver, de telle sorte que
malgré les diligences de MM. Jozian et Sauret les arbitres ne se réunissent
que le 15 mai.
Dans cette réunion, M. Lamotlie déclare se déporter, les deux autres
arbitres dressent procès-verbal de déport et, renvoient les parties à se
pourvoir po u r faire rem placer M. Lamotlie.
Le 19 mai, somm ation est faite à MM. Chevalier et Giroud d ’avoir à se
présenter, le 2 3 , devant M. le président du tribunal de commerce de
lîrioude, à l’clfet d ’être présens à la nomination d ’un arbitre au lieu et place
de M. Lamolhc.
�Le 23 mai, M. le président rend une ordonnance portant ajournem ent
en son hôtel po n r le 29.
L ’ordonnance est signifiée le Vv à MM. Chevalier et Giroud, avec som
mation d ’v%
t obéir.
Le 29 m a i , M. le président rend une ordonnance par défaut contre
MAI. Chevalier et Giroud, p ortant nom ination de M. Sabatier Gasquet.
Mais, par u n exploit du même jo u r, 29 mai, M. G iroud, procédant seul,
en son nom personnel, et comme gérant de la société de la m ne des Barthes,
assigne MM. Jozian et Sauret devant le tribunal civil de la Seine , en nul
lité de la clause comprom issoire portée au traité du 30 novembre 1838, par
ce motif que les nom s des arbitres n ’ont pas été désignés dans le compro
mis selon le vœu de l’art. 1000 du Code de procédure civile.
Les conclusions de l ’exploit sont formulées ainsi : « V o ir ie s sieurs J o » zian et S auret, etc., déclarer nulle et de nul effet la clause com prom is» soire dont il s ’agit, laquelle sera considérée comme non avenue, voir dire
» en conséquence que pour toutes les contestations qui existeront à l’avenir con» tre les parties, elles procéderont devant leurs juges naturels, etc. »
L a coïncidence de la date de cet exploit avec celle du jo u r assigné p a r le
président de lîrioude dans son ordonnance du 23 mai explique que M. Gi
roud voulait s ’en faire un moyen d ’émpêcher la nom ination d ’un arbitre en
rem placement de M. Lainotlic et la constitution du tribunal arbitral,
M. Giroud a été trom pé dans ses prévisions.
Kn effet, l'ordonnance du 29 mai, p a r la nom ination de M. S a b a
tier G a sq u e t,
complète le tribunal a r b i t r a l , e t, après une instruction
dont il est inutile de relater les incidens et les actes, les arbitres rendent, le
15 septembre 1845, une quatrièm e sentence arbitrale qui contient on subs
tance les dispositions suivantes :
MM. Chevalier et Giroud sont condamnés à 20,000 fr. de dommagesintérêts pour réparation du préjudice causé p a r l e u r refus d ’effectuer les li
vraisons de charbon dans les délais prescrits par la sentence arbitrale du
(’» juin I B M ;
Us sont condam nés à commencer les livraisons dans la quinzaine de la
l
�signification de la sentence, sous peine de .‘50 c. de dom m ages-intérêts par
hectolitre de charbon par chaque jo u r de retard.
A défaut de comm encer leadites livraisons da n s les vingt jours de la s ignilicalion . ou, en cas d ’interruption dans ces livraisons, après avoir été
commencées, pendant le tem ps spécifié en ladite sentence, la résolution du
marché du 30 novembre 1838 est prononcée , et MM. Chevalier et Giroud
sont condamnés au p a ie m en t, à titre de dom m ages intérêts, d ’une somme
égale au m ontant desdits dom m ages-intérêts calculés à raison de 30 c. par
hectolitre, pour tout le tem ps restant à courir de la durée du traité, à
compter du jo u r de la résolution.
Sur la signification de cette sentence, M. G iroud se pourvoit contre elle
devant le tribunal do prem ière instance d e B r io u d e , p a r voie d ’opposition
à l’ordonnance d ’exequatur, suivant exploit du 22 octobre 1845.
11 est rem arquable que le texte des conclusions de la dem ande porte ce
qui suit :
« Voir déclarer nulle et de nul effet toute clause comprom issoire r é s u l » tant de conventions verbales ou écrites « défaut de désignation du nom des
» arbitres et de l’objet de l’arbitrage; en conséquence, voir déclarer nul et
» de nul effet l’acte qualifié ju g em e n t arbitral, etc. »
Le tribunal d e B rioude, saisi du litige a ren d u , le 16 décem bre 1 8 4 4 , un
ju gem ent qui rejette l’opposition à l’ordonnance d ’exequatur et les moyens
de nullité proposés et ordonne que la sentence arbitrale du 15 septem bre
précédent sortira effet.
Le jugem ent, en ce qui touche la nullité de la clause comprom issoire, est
motivé en ces termes :
« Attendu que !e pacte comprom issoire sous lequel les parties se sont
» placées ne doit pas être soum is aux conditions irritantes portées par
>> l ’art. 1006 du Code de procédure civile, et q u ’il prescrit po u r la validité
» d ’un compromis, en ce que cette convention , sous le rapport, du pacte
» comprom issoire, n ’est pas sim plem ent un com prom is à fin de n o m ina» tion d ’a rb itre s , mais un mode que les parties on t v o l o n t a i r e m e n t adopté
�» pour arriver au ju gem ent des contestations qui pourraient les intéresser
'<*> et se créer u n trib u n a l exceptionnel ;
» Que, dès lors, il n ’y a point eu nécessité, ni m ême possibilité de dési» g n e r des objets dont le litige n ’existait pas encore, et qui n ’étaient
» q u ’une prévision éventuelle; que, de môme, elles n ’ont point à s ’occuper
» de la désignation des nom s des arbitres.
» Que, conséquem m ent, ce pacte comprom issoire, fort ordinaire dans
» les transactions commerciales, n’a pu être vicié de nullité prononcée
» par l ’art. 100G. »
M. Giroud fait appel du jugem ent, et ¡VI. Chevalier, étranger au procès
depuis la sentence du 0 ju in 1843, est partie dans cet appel dont la solution
est prochaine.
Tels sont les laits qu'il était nécessaire de relater ici, pour l’intelligence
du débat soumis à la 5e chambre du tribunal de la Seine.
11 est clair que ce d éb at, apprécié sous l’influence de ces faits, doit être
dégagé des théories de droit puisées dans l’art. 1006 du Code de procé
dure, et de leur application à la clause insérée dans la convention du
30 novembre 1838, et que la défense de MM. Jozian et Sauret se réduit
nécessairement à deux fins de non-recevoir q u ’ils font résulter de la
chose jugée et de l’exécution de cette clause.
P rem ière (iu «le n on -recevoir.
<
A U T O niT IÎ
DE
LA
CHOSE
JUGÉE.
Il est de principe que ce qui a fait l'objet d ’un prem ier ju gem ent ne
saurait être l’objet d ’un second, et ce respect de la chose jugée a p o u r but
de prévenir la contrariété des jugem ens, et de sauvegarder ainsi la dignité
de la justice.
Dés le début du procès, la validité de la clause comprom issoire a été
mise en question devant la cour de lliom. M. Jozian, ne la regardant pas.
I
�— il —
comme un lien de droit, prétendait être jugé par la justice ordinaire.
M. Giroud soutenait la thèse contraire, et la Cour a adm is cette thèse par
son a rrêt du 24 novembre 1840. Il y a donc eu ju gem ent su r la validité
de la clause compromissoire.
Or, que dem ande a ujourd’hui M. G iroud? Il dem ande que le T rib u n a l
déclare nulle la clause compromissoire. M. Jozian, au contraire, soutient
q u ’elle doit être déclarée valable. Il est donc évident que l’objet du ju g e
m ent à rendre par les juges de Paris est exactement le même que celui
du ju gem ent rendu p a r les juges de Riom, si ce n ’est que les rôles des
parties en cause sont intervertis.
L ’a rrê t de Riom fait donc obstacle à la dem ande de M. Giroud devant
le tribunal de la Seine.
Ce n ’est pas tout : on a vu que cette demande en nullité de la clause
compromissoire était fondée su r le défaut de désignation du nom des
arbitres, conform ém ent à l ’art. lOOGdu Code de procédure.
Mais, par sou exploit du 22 octobre 1845, M. Giroud, de son plein
gré, a porté la même dem ande, dans les mêmes termes, devant le tribunal
de lirioude, et le ju gem ent du 1G décembre suivant, rép o n d an t, p a r un
de ses motifs, aux moyens de nullité argués dans la dem ande, a rejeté ces
moyens, et la clause compromissoire est encore sortie victorieuse de cette
seconde épreuve judiciaire.
M. G iroud a saisi à la fois de la même question deux trib u n a u x dif
férons, et l’un des deux ayant statué, l ’autre se trouve dessaisi p a r la
présomption de droit tirée de la chose jugée.
Deuxièm e fln de non-recevolr.
EX ÉCU TIO N
DE
LA
CLAUSE
CO M PR O M ISSOIU E.
U est admis en principe que la confirmation ou la ratification d ’un«
convention couvre les vices de cette convention quand ils ne procèdent pas
�d ’une cause qui lient à l ’ordre public ou aux bonnes m œ urs, c’est dans ce cas
seulement que l’action en nullité survit à l ’exécution volontaire du contrat.
Or, il s’agit ici d ’un contrat parfaitem ent licite, et M. Giroud argile
seulem ent d ’une irrégularité de forme, du défaut de désignation des noms
des arbitres dans le comprom is. Il esL donc incontestable que si ce compro
mis a été exécuté par M. G iroud, il n ’est plus recevable à le critiquer?
Mais cette question n’est-elle pas résolue de la façon la plus énergique
par le simple récit des faits du procès ?
E n effet, l’exécution de la clause comprom issoire insérée au traité du
30 novembre 1838 résulte :
■1° Du ju g em e n t ren d u le 20 juillet 1839 par le tribunal de commerce
de la Seine, à la diligence de MM. Chevalier et G'iroud, et portant renvoi
devant arbitres pour le ju g em e n t de leur demande en résolution de la
convention ;
2° Des conclusions prises par eux au tribunal de Brioude, dans l’iris—
taucc su r leur opposition au ju gem ent par défaut du 8 novembre 1839,
conclusions d ’après lesquelles ils proposent l’incompétence de ce tribunal
su r le fondement de la clause comprom issoire dont il s ’a g it;
3° Des mêmes conclusions prises devant la cour de Biom, sur l’appel du
jugem ent de Brioude du 3 avril 1840, et accueillies par l’arrêt du 24
novembre 1840;
4° De la sentence arbitrale du 17 juin 1840 à laquelle ont concouru
MM. Chevalier et Giroud ;
5* Do celle du 17 ju in 1840;
()° De celle du G juin 1833.
11 est à rem a rq u e r que ces trois sentences ont statué successivement
su r tous les points de difficultés qui pouvaient naître de l’interprétation
dos clauses de la convention du 30 m ars 1838 ou de son exécution, de
telle sorte que ce ne serait plus cette convention qui serait a u jo u rd ’hui la
loi des parties, mais bien les sentences arbitrales dont il s agit, et q u ’alors
la clause comprom issoire aurait produit tous ses effets. Ce qui dém ontre
j u s q u ’au dernier degré d ’évidence que l’exécution a été complète.
�Mais il y a lieu de rem arquer encore que, dans l’état des choses, et, po u r
le débat qui resterait à ju g er entre les parties, en adm ettant que la sen
tence arbitrale du 15 septembre 1845 tombe, sur l’appel, devant l’opposi
tion à l’ordonnance d’excquatur, ce serait la sentence a rbitrale, du 6
juin 1843 qui serait attributive de juridiction et non plus seulem ent la
clause compromissoire. Cette sentence renferm e, en effet, tous les clé—
mens d ’un compromis que la force du contrat judiciaire r protège contre
toute attaque.
r
L ’exécution résulte enfin de divers actes de procédure, sig n ifié sp a r M.
(iiroud avant la constitution du dernier tribunal arbitral, à Brioude;T et
notam m ent : l°D e l’exploit du 30 août 1844 po rta n t nom ination de M.
Lamothe pourj arbitre sans que la réserve m entionnée en l’exploit frappe
su r le droit d ’attaquer la clause com prom issoire,
‘2° E t d ’un autre exploit du 2 novembre 1844 contenant des protesta
tions sur le lieu de la réunion des arbitres avec ajournem ent dans un autre
lieu pour le 15 du même mois.
C ’en est assez po u r convaincre les juges que la dem ande de M. G iroud
en nullité de la clause compromissoire q u ’il a volontairement et librem ent
exécutée pendant une période de cinq années est u n de ces expédiens as
tucieux q u ’imagine un plaideur aux abois po u r conjurer le péril d ’une
position désespérée.
¡Mais la justice prononcera bientôt entre M. Giroud et ses adversaires,
H lorsqu’elle au ra dit son dernier mot, il sera bien prouvé que la vérité et
le bon droit o n t t o u j o u r s été du côté de MM. Jozian e tS a u re t.
'11
fév rie r 1814.
JOZIAN, propriétaire, au P on t-C h â te a u ,
SA U R E T, banquier, à Riom.
Ou nous com m unique à l’instant un volum ineux factum signé l’ijon,
avocat, publié dans l’intérêt de M. Giroud. S ’il fallait suivre l’auteur de ce
factum dans le récit des faits, imaginaires pour la plupart, q u ’il s ’est plu
�— 14 —
à y entasser, il serait facile de le prendre à chaque pas en flagrant délit de
m ensonge. Il est impossible, en effet, de travestir avec plus d ’audace les
faits et les actes les plus authentiques. E t, comme si ce n ’était pas assez
d’u n pareil scandale, Fauteur du m ém oire ne se fait pas faute d’insinua
tions injurieuses et diffamatoires contre nous : nos conseils même ne trou
vent pas grâce devant lui. Nous ne voulons pas plus répondre aux injures
q u ’aux assertions m ensongères, nous dirons seulem ent que la perfidie ou
la violence des formes employées dans la défense d ’une cause, ne sont
pas les auxiliaires d u bon dro it et de la raison, et trahissent au contraire
l’im puissance de l’astuce et de la mauvaise foi. Nous ajouterons que c’est
chose fâcheuse de voir un avocat s’associer aux passions de son client au
point de lui faire oublier les règles de convenance et de modération qui
sont un des devoirs de sa profession.
IMPR I MERIE
LANGE LÉVY
E T C O MP A G N I E , R U E DU C R O I S S A N T ,
16.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jozian. 1844?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jozian
Sauret
Subject
The topic of the resource
transport fluvial
charbon
arbitrages
mines
asphalte
banqueroute
tribunal de commerce
ports
banquiers
génie civil
experts
jugement arbitral
marchandises
diffamation
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour messieurs Jozian et Sauret, défendeurs, contre monsieur Giroud, demandeur.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie Lange Lévy et Compagnie (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1844
1838-1846
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3006
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3005
BCU_Factums_G3007
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Pont-du-Château (63284)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
asphalte
banqueroute
banquiers
charbon
diffamation
experts
génie civil
jugement arbitral
marchandises
Mines
ports
transport fluvial
tribunal de commerce
-
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a4795c13ab8f2caafb405fb68bdcd361
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OBSERVATIONS
I>E
SOUM ISES
\ )\)l LES P R É S I D E N T ET C O N S E I L L E R S
COMPOSANT
LA PREMIERE CHAMBRE DE LA COUR ROYALE DE RIOM.
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�DE
M. L E D R U , A R C H IT E C T E A CL E R M O N T ,
SOUM ISES
A MM. LES PRÉSIDENT ET CONSEILLERS
COMPOSANT
LA PREMIÈRE CH AMRRE DE LA COUR ROYALE DE RIOM.
In omnibus quidem , maxime tamen in ju r e ,
»•quitus spectanda est.
M e s s ie u r s ,
Engagé dans un procès avec MM. Béthune, Goyon (Victor) et Guyonic, mes
anciens associés, il m ’a paru que s’il s’agissait uniquement de décider, selon les
lumières du droit, et d’après votre haute expérience, les questions débattues devant
vous, il y avait à la lois pour moi, comme pour mes adversaires, ces garanties de
science et d’impartialité qui n’ont jamais failli à vos justiciables.
Mais il est, dans certains débats judiciaires, des laits préliminaires à signaler,
importants à apprécier, et que les exigences de l’audience ne permettent pus toujours
de révéler complètement. Le magistrat a cependant besoin de les connaître, nonseulement pour juger la moralité du client, mais aussi celle de sa cause.
A ces considérations premières, il faut rattacher celles qui appartiennent au fonc
tionnaire public , honoré jusqu’à ce jour de l ’estime de ses concitoyens , et (pii veut
la conserver; au père de famille (pii doit tenir à cœur de laisser intact le seul patri
moine qu on ne saurait lui enlever, son honneur, sa probité.
�C ’est sous l’influence de ces déterminations que j’ai pris la plume, non pour dis
cuter le droit, non pour rechercher ce que j’ai entendu appeler au palais des fins de
non-recevoir, ou des moyens de nullité, mais pour raconter avec simplicité com
ment j’ai été conduit, par suite de mes études sur les bitumes d ’Auvergne, à con
tracter une société avec mes adversaires, quelles circonstances l ’ont préparée, et quels
actes y ont mis fin.
En pareil cas, le langage d ’une partie qui expose sa propre cause, doit paraître
intéressé; je l’ai compris, et voulant éviter ce reproche, je m ’efforcerai de repro
duire principalement toute la correspondance qui s’est établie à ce sujet.
Je ferai, avant tout, parler MM. Béthune et consorts avec leurs propres écrits.
Les pièces relatives aux projets et propositions de traité passeront successivement
sous les yeux de la Cour.
Depuis 1810, je me suis occupé des bitumes d’Auvergne; le 7 mai de cette
année, j’achetai, par acte notarié, le droit d’exploiter le gisement de la montagne
dite de l’Ecourchade.
Le 4 mars 1829, j’ai obtenu la concession de cette mine qui était comprise dans
une demande générale de tous les gisements de la Limagne.
Le 30 janvier 1837, après de grands travaux de recherches et de nombreuses
découvertes, j ’ai renouvelé ma demande.
Toutefois, je n’ai jamais envisagé cette entreprise que comme industrie, et suis
resté constamment étranger aux spéculations de bourse, auxquelles les matières
bitumineuses ont donné lieu.
En 1838 , ma position se résumait en ces termes : J ’étais demandeur en conces
sion des gîtes bitumineux de la Limagne;
Propriétaire d ’un tiers de celui de Chamalières dont la concession était obtenue.
J ’avais fait conduire à Paris vingt-six bateaux de nîatières bitumineuses.
J ’avais fait des dépenses considérables en travaux de recherches et d’expériences.
J ’avais enfin acquis pour une vingtaine de mille francs de terrains bitumineux.
Aussi des propositions m ’avaient été adressées par des personnes des plus hono
rables, lorsque j ’appris que MM. Béthune et consorts, pour se présenter comme
opposants à ma demande, venaient d’acquérir à un prix exorbitant le tiers de la mine
de Chamalières.
A cette époque, ces messieurs ont-ils été circonvenus par moi, entourés de mes
obsessions,
pour arriver <\une association?
Leur correspondance va nous faire connaître de quel côté a été l’initiative.
M. Jean-Baptiste Goyon m ’écrivait le 15 août 1838 :
�Je désire traiter avec vous de tous yos droits
à
l’Ecourchade et aux concessions que vous
avez demandées.
Au mois de septembre suivant, il n’y avait encore rien d ’arrêté, et M. Guyonie,
écrivant à M. Goyon-Pératy, lui recommandait expressément de hAter le résultat.
Vous voyez, disait-il dans sa lettre de septembre 1838, que nous sommes débordés
de toutes parts, et dites-le bien à M . Ledru; il ne s’agit plus de discuter entre nous
quelques points de détail, il faut courir rapidement ensemble vers un avenir qui puisse
nous dédommager.
Souvenons-nous bien seulement que notre p a ri sera bien peu de chose, si nous n’ab
sorbons pas M . Ledru dans notre sp/icre.
M. Guyonie s’adressant à son tour directement à moi, m ’écrivait, le 19 septembre
1838, dans ces termes :
Réunis à quelques amis, nous avons désiré nous intéresser dans l’exploitation des bi
tumes d’Auvergne. Notre correspondant àClerm ont a dû vous en entretenir.
Nous sommes étrangers à tous démêlés qui auraient pu s’agiter antérieurement. Nous
venons loyalement et ouvertement à un homme loyal. Notre concours dans le présent et
dans l’avenir fécondera notre entreprisc commune. Pour le présent vous avez toute sécu
rité ; pour l’avenir vous devez concevoir de larges espérances. Nous avons intérêt à marcher
d’accord.
À un pareil langage, dont la franchise et la loyauté se retrouvaient au moins
dans les expressions, que devais-je répondre ?
Il était donc naturel de me confier à ce présent, pour lequel on me promettait
toute sécurité, et de me laisser aller à de larges espérances , que j ’étais d ’ailleurs
très-disposé à concevoir, au souvenir de mes longues études et d ’une expérience qui
m’avait été déjà si coûteuse.
J ’envoyai à Paris, et sur la demande qui m’en était faite, la copie d’un traité passé
avecM. Barbereux , dont on sollicitait le lieu et place. On me répondit par l’envoi
d’un contre-projet.
M. Guyonie m ’écrivait le 19 septembre 1838 :
Nous avons reçu communication , par votre frère, de votre projet de traité; nous l ’a
vons examiné, et tout en admettant les bases principales, nous avons cru devoir y ap
porter quelques modifications dans la forme et dans le fond. Nous avons, en conséquence,
dressé un contre-projet, appuyé de réflexions sérieuses et rationnelles. Nous avons chargé
notre correspondant de vous en donner connaissance et de recueillir votre réponse. Nous
étions dans cette attente, lorsque nous apprenons l’absence de Clermont du correspon
dant; alors nous prenons le p a rti, voulant vous donner une preuve de la sincérité de nos
intentions, de vous adresser sous ce pli copie entière de nos résolutions.
�Les principaux articles de leur contre-projet étaient ainsi conçus :
A rt . 2. M M ......mettent en Société et apportent :
1°. Les deux tiers de la mine de l ’Ecourchade, tels q u’ils appartenaient à Mme veuve
Nicolas ou à M. Jusseraud ;
2°. Tous les terrains bitum ineux acquis par M. Goyon , ainsi que les matières extraites,
outils et ustensiles y attachés ;
3°. Tous les droits que Mme veuve Nicolas peut avoir à l’obtention dos concessions de
mandées par M. Ledru le 2 février 1837 et par elle-même en mai 1838, ainsi que les
droits et réclamations que ladite dame peut avoir à exercer contre M. Ledru, soit pour
non jouissance , indem nité ou autrement.
A rt . 8. L ’actif de la Société serait destiné , d’abord à rembourser les mises de fonds de
M M ......... avec l’intérêt à 6 0/0.
A rt . 13. Toutes contestations relatives à l’Ecourchade sont éteintes.
E x lrait des réflexions sérieuses et rationnelles.
Nous ajouterons que déjà une première garantie existe dans l ’apport de M M ....... qui ne
peut être évalué à moins de 60,000 fr.
Enfin , après beaucoup de pourparlers , après des explications que je devais croire
franches, on tomba d ’accord sur les bases d’un traité.
Il fut passé, le 6 octobre 1838, « entre 1°. M. Agis Ledru, élève architecte,
» demeurant à Paris, rue Sainte-Marguerite, faubourg Saint-Germain, n° 1 0 ,
» agissant comme mandataire de M. Louis-Charles-François Ledru, architecte, «Je—
» mourant à Clermont-Ferrand , suivant sa procuration sous seing privé, en date du
» 20 septembre 1838, d ’une part;
» 2°. 31. Auguste Valeau, négociant, demeurant à Paris, rue Richer, n° 10 ,
» agissant tant en son nom que comme se portant fort de M. Jean-Baptiste Goyon» Pératy, demeurant à Bordeaux ;
» 3°. M. Maximilien Béthune, imprimeur, demeurant à Paris, rue de Vaugirard,
» n° 30, tant en son nom que comme se portant fort, conjointement avec M. Guyo» nie, de .M. François Boucaumont, géomètre, demeurant <\Clermont-Ferrand;
» 4 °.
M. Antoine-Blaise-Léonard Guyonie, propriétaire, d e m e u ra n t à Paris, rue
» de la Bourse, n °2 , tant en son nom que comme se portant fort, 1°- de 31. Pierre» \ictor Goyon, propriétaire à Clermont-Ferrand ; 2°. et de 31. Boucaumont, çon» jointement avec 31. Béthune, d ’autre part (1). »
.1 avais envoyé (h; confiance ma procuration , ne pouvant prévoir que les conven
tions primitivement arrêtées, recevraient sur les lieux d'importantes modifications.
(1) V o ir les articles <1n traité à la lin du M é m oire .
�Aussi, grand fut mon étonnement, lorsque je reconnus que les conventions les plus
sérieuses, les plus utiles à conserver dans mes intérêts, étaient dénaturées ou sup
primées. Par exemple , il n’était plus question de l’apport des deux tiers de la mine
de Chamalières que devaient faire ces messieurs , d ’après le projet même qu'ils m ’a
vaient envoyé, en m ’annonçant qu’ainsi serait détruite toute concurrence.
D'autre part, je vis pour la première fois ces mots : Chacun pour sa p a r t , écrits
à la suite d ’un renvoi, au moment de la signature, qui venaient détruire le principe
de solidarité établi par l’acte.
Je fis aussitôt mes observations, principalement sur l’omission des apports qui
m’avaient été promis; M. Bétliune répondit qu’on pouvait, il est u a i , établir
une concurrence à ma porte, mais qu’il n ’y avait pas d’intérêt à le faire, et que mon
inquiétude devait cesser.
Aucune de mes réclamations, quelque juste quelle pût être, ne fut admise.
Je craignais alors un procès que je ne devais pas éviter plus tard , et acceptai ces
clauses telles (ju’ellcs étaient rédigées, dans la double pensée que ces messieurs les
exécuteraient fidèlement, et que l’opération en elle-même promettait de l ’avenir.
Par les principales clauses de ce traité, je cédais les trois cinquièmes de tout ce qué
je possédais concernant les bitumes d ’Auvergne.
On devait me rembourser toutes mes dépenses réglées à 92,555 fr. ; mais on alté
rait cette clause en stipulant qu’une partie, 10,000 fr. seulement, serait en argent,
et le reste en papier. On m’imposait contre mon aveu une garantie de 50,000 lr.
pour les marchandises que je livrais, et pour plus grande sûreté on me retenait
30,000 fr.
Pour tous les délais que prenaient ces messieurs, ils ne me tenaient compte d ’au
cun intérêt, tandis que leurs mises de fonds devaient leur rapporter dix pour cent,
quoique dans leur projet ils n’eussent demandé que six.
Comme indemnité des sacrifices que m ’avaient occasionnés les soins donnés à l’af
faire , on me reconnaissait une mise de fonds de 100,000 f r ., mais l’on établissait
qu’elle ne serait payée qu’en actions de la Société à former.
On s’engageait à faire toutes les mises de fonds nécessaires au développement de
l’entreprise, et j ’en étais exempt.
Un fonds de roulement devait être formé immédiatement.
J étais directeur des travaux en Auvergne conjointement avec MM. Victor Goyon
et Goyon-Pératy. Le gérant, à Paris, était M. Guyonie sous la direction de
\1M. Bétliune et Valeau.
Ainsi, par toutes ces restrictions apportées aux premières conventions, moyen-*
nant le déboursement de 10,000 fr. et des traites dont les échéances tenaient toute
�une année, ces messieurs se rendaient les maîtres des trois cinquièmes de mon
affaire.
La seule chose en ma faveur était celle qui m ’exemptait de contribuer aux mises
de fonds, car je livrais en marchandises une valeur plus considérable que le chiffre
des remboursements à opérer, et que, sans une gestion déplorable, on aurait pu réa
liser avant les échéances.
Enfin, comme je l’ai dit, n’ayant pu faire revenir sur les omissions et infidélités
commises dans la rédaction définitive du traité, j ’en demandai au moins la stricte
exécution...........................................................................................................................
.........................Là commencèrent les difficultés.
Très-grande fut ma surprise à la nouvelle que la Société, qui continuait toujours
à subsister entre ces messieurs pour le tiers de la mine de l’Écourchade, puisqu'ils
refusèrent de la confondre avec mes apports, était pleine de discorde et de méfiance.
Il fallut plus de six semaines de réclamations de tous genres pour obtenir le règle
ment et la remise des valeurs qui m ’étaient dues.
Les trois associés de Paris, MM. Béthune, Guyonie et Valeau, s’étaient portés forts
pour ceux de Clermont, et ceux-ci, pour se décider suivant l’issue de l’affaire, diffé
raient leur ratification. L ’un d’eux fut exclu pour motif de tardivité.
M. Guyonie me faisait encore connaître cette circonstance par une lettre du G no
vembre 1838 :
Je me suis porté fort envers vous de l’exécution de notre traité du 6 octobre en ce
qui concerne M. Houcaumont.
M. Boucaumont n’a pas payé le premier terme ni souscrit les acceptations dans le délai
fixé par ledit traité.
C onséqucm m ént, M . Boucaumont eut hors de notre Société. Il ne doit ni ne peut en
faire partie. S’il vous faisait un acte d ’offre quelconque , vous le refuseriez , par le m otif
de tardivité et de l’exécution personnelle quç j ’ai remplie envers vous.
Un autre associé ne se décida à remplir les engagements pris pour lui que pour
éviter l’exclusion dont il fut menacé.
C ’est ce qui a motivé la lettre de M. Guyonie, du 14 du même mois de no
vembre :
l)’apn>s ce que m ’annonce votre lettre du 11 Courant sur le retard de M. Victor G o y o n ,
je vais lui écrire par le courrier ou celui de demain pourqu il remplisse son engagement,
sans quoi j’y satisferai immédiatement.
De son côté, M. Goyon, inquiet sur la direction qui m ’était accordée, avait déjà
écrit à M. Guyonie le 10 octobre 1838 :
Relativement à la direction de Clermont par tiers, il me semble q u’il n ’est pas suffi
�samment expliqué que les droits des uns et des autres sont égaux en tout et partout.
M. Ledru seul a le titre de gérant, et si par hasard la direction q u ’il voudra donner aux
travaux 11e convenait pas , nous n’aurions pas le môme pouvoir que lui pour la
changer.
Bientôt M. Guyonie me témoignait (ce qui était plus sérieux) les craintes que lui
faisaient concevoir les dépenses de M. Goyon.
Il m ’écrivait le 24 décembre 1838 :
Ma lettre de hier vous a fait pressentir une dissidence avec M. Goyon. Celte dissidence
vient d’éclater manifestement par des traites queM . Goyon oncle vient de tirer sur nous,
jusqu’à concurrence de 14,400 fr. pour l’affaire Boucaumont. Comme nous ne voulons
pas rester sous le coup des traites de M. Goyon , nous lui révoquons nos pouvoirs. Cet acte
tempérera un peu l’ardeur des dépenses de M. Goyon.
Vous voyez là une scission véritable que MM. Goyon ont provoquée ; mais vous ne de
vez pas vous en émouvoir : elle est étrangère à la Société qui nous lie à vous.
Vinrent ensuite les questions d’amour-propre, les titres à donner ou à recevoir,
et alors qu’il s’agissait de choses bien plus graves, on discutait sur la qualification
honorifique qu’il convenait d ’accorder à chacun.
M. Guyonie me disait, en effet, ce qui se passait à ce sujet, par sa lettre du
13 janvier 1839 :
M. Goyon oncle a manifesté, dans notre dernière assemblée, le dessein de marcher
d’accord et de concourir au développement et au succès de l’affaire. Nous ne demandons
pas m ieux , et depuis trois mois notre correspondance n ’a pas d ’autre but; il serait bien
désirable d ’y arriver. Que faut-il faire pour cela? O11 propose de leur accorder, à
M. Goyon-Pératy le litre à'inspecteur, et à M. Victor Goyon celui de contrôleur, en
ajoutant à l’un et à l ’autre le mot général. A mon sens, c’est une superfétation que de
dire inspecteur-général quand il n ’y en a q u ’un seid inspecteur; mais si l ’union et la
concorde sont à ce p r ix , je ne verrai aucun inconvénient « satisfaire à ce petit grain
d'amour-propre.
Si nous nous arrêtons un instant sur cette correspondance, et réunissons en peu
de mots les résultats qu’elle apporte naturellement, nous serons amenés à recon
naître qu’il ne peut se présenter <\l’idée de personne que les fautes de la gestion
me fussent personnelles , et que, seul , j ’aie jeté mes associés dans de folles
dépenses.
Comment admettre ces reproches, si l’on se souvient que M. Guyonie était gênant,
que MM. Béthune et Valeau formaient un conseil souverain d ’où partaient des actes
irrévocables; que MM. Goyon, inspecteur et contrôleur général, étaient chargés de
surveiller chaque opération, et qu’ils avaient demandé ces titres précisément pour
changer la direction que je voudrais donner, si elle ne convenait pas.
�Toutefois, à Paris, on n ’avait rien su organiser.
Pas un client, pas un travail utile aux concessions. Ce n ’est pas tout: nous al
lons bientôt voir qu’on refuse à une maison solvable, une vente de quatorze ba
teaux , qui faisait entrer dans la caisse de la Société plus de 60,000 fr ., dont au
moins 24,000 fr. de bénéfices.
Malgré cet étal de sommeil et d’encombrement, on décidera ainsi qu’on va le dé
montrer par la correspondance , qu’il sera extrait et expédié trente nouveaux bateaux.
On chargera la Société de cette énorme dépense, sur la vague espérance d ’un mar
ché à conclure avec un sieur Pezerat qui avait conçu le singulier projet de remplacer
par du bitume, les rails des voies à vapeur, et qui se berçait de la pensée que FAca
démie des sciences décréterait, sur sa demande, que le bitume serait dorénavant
plus dur que le fer.
Continuons à présenter les détails offerts par la correspondance.
Je recevais les h novembre et 26 décembre 18.38, deux lettres de Paris, relatives
à la vente Adrien; elles s’exprimaient ainsi :
La Société dite du M ilie u , sous le nom d’Adrien aîné , comme je te l ’ai m a rq u é , nous
prend des marchandises; ils veulent faire u n marché à 60 francs les 1,000 kil. pour les
Lussat, Chamalières et Croix-des-Rameaux que nous avons à Paris. Je vais demain présenter
cotte demande à ces messieurs , q u i, je pense, sera acceptée d’eux.
4 novembre 1838.
L edru , de Paris.
Il est bien vrai cependant que la maison Adrien aîné avait proposé de prendre de suite
les matières de quatorze bateaux, mais à u n prix qui n’était pas acceptable; que d ’autres
propositions dans le même genre ont été faites, mais que l ’on n ’a rien terminé par deux
raisons : la première, parce que les prix n ’étaient pas assez avantageux ; la deuxième,
parce q ü e , si nous avions tout vendu, notre établissement, q u’il est si nécessaire de tenir
en pleine activité, aurait langui.
26 décembre 1838.
L ed ru , de Paris.
Le gérant me pressait aussi pour lui faire expédier des marchandises et accélérer
les travaux.
C'est ce qu’il m ’écrivait d'abord,
Le 11 novembre 18.38, lorsqu’il me disait:
Veuillez ne pas ralentir les travaux et profiter des premières eaux pour nous expédier
des marchandises. Veuillez me dire , par le retour du courrier, si nous pourrions con
tracter l’engagement d’une fourniture qui pourrait dépasser un m illion de kilogrammes.
Le 14 du même mois, il me disait:
Vous faites bien de continuer les travaux d’extraction, mais vous devez leur donner
plus d ’extension. Nous attendons non-seulement \otre excellent bateau de D allet, mais
�dix et vingt autres s’il était possible. Aux autres renseignements demandés par ma der
nière, je vous prie de joindre celui de savoir quelle quantité nous pourrions en fournir
chaque année, trois cents par exemple. Vos autres travaux en architecture ne doivent
être pour vous que secondaires ; en ce moment vous avez dans les bitumes une source de
fortune que mes amis et moi mettrons tous nos moyens (pour vous et pour nous ) à déve
lopper d’une manière aussi prompte qu’assurée. Soyez donc explicite envers nous et exclu
s if pour l ’affaire.
Cette dernière lettre, comme on le voit, semblait annoncer que les éléments de
fortune étaient entre nos mains, et que le succès serait aussi grand qu’il serait prompt.
Le lendemain, 15 novembre, M. Guyonie examinant l’entreprise en elle-même
et dans tous ses moyens, annonçait qu’il serait possible de livrer annuellement trois
à quatre cents bateaux, et promettait de faire honneur à toutes les traites qui seraient
tirées sur lui.
Il importait peu d ’ailleurs, à ses yeux, que la maison Adrien n’eût pas pris ces
quatorze bateaux , car il y avait lieu de s’attacher à de plus grandes, à de plus belles
opérations.
Aussi l’avenir se parait-il pour lui des plus brillantes couleurs, et il laissait glisser
sur sa plume, l ’un de ses rêves qu’il avait faits pour moi, c’est que dans son opinion
je devais avoir nécessairement 80,000 fr. de rentes.
Voici sa lettre du 15 novembre 1838 :
Quand bien même la maison Adrien ne prendrait pas les quatorze bateaux, nous n’au
rons pas à nous en préoccuper, j’ai mis notre Société en rapport avec une autre maison
qui prendrait tous nos produits; voilà pourquoi je vous ai demandé hier s i , ayant les
concessions, nous pourrons livrer annuellement de trois à quatre cents bateaux.
Tous vos regards doivent se porter sur l’avenir, qui sera magnifique, si nous avons les
concessions : 80,OUI) francs de rentes pour vous ; n’en dites r ie n , mais c'est mon opi
nion.
Le même espoir de succès, la même confiance préoccupait M. Guyonie, lorsqu’il
m ’écrivait.
Le 28 novembre 1838:
Ici nous n ’avons pas encore commencé les travaux d’application, quoiqu’il nous en soit
demandé souvent; les essais ont pris beaucoup de temps, mais ils touchent à leur terme,
et nous allons nous mettre à l’œuvre.
Le 1er décembre 1838 :
Achetez, d’un commun accord avec M. Goyon , les terrains que vous croirez utiles à la
Société, laites charger et expédier les bateaux ; que pour le tout on tire sur no us, comme
il a été d it, il y sera fait honneur.
2
�Le 2y janvier 1839 :
Nous attendons le complément des quatorze bateaux , et si je pouvais prendre les cho
ses sur m o i, je vous dirais de nous envoyer les trente demandés.
Le 3 0 mars suivant, il m ’envoyait la copie de son projet de traité avec le sieur
Pezerat.
Sa lettre, à ce jour, était ainsi conçue :
Je joins ici copie de mon projet, vous priant de m ’en dire immédiatement votre opi
nion, alin de convoquer les administrations des deux Sociétésà une conférence définitive
qui sera StlMc de la signature du traité.
A r t . l or de ce traite. — M. Pezerat, ès-dites qualités, s’oblige à prendre , soit poul
ies employer, soit pour les revendre , tous les bitumes asphaltes à provenir des mines de
la Compagnie d’Auvergne, dont est directeur NI. G uyonie, et dont le m inim um annuel
serait de deux cents bateaux pesant l’un de 50 à 60,000 kilogrammes.
Le 1er avril 1 8 3 9 , j ’apprenais par une lettre de M . Guyonie que la réalisation de
son projet avec Pezerat éprouvait des difficultés. Cependant il ordonnait toujours de
nouveaux travaux
La réalisation de mon traité avec la Compagnie, Pezerat éprouve quelque difficulté par
suite d’un incident qui ne provient ni de vous ni de m o i, et dont je vous rendrai compte
s’il est nécessaire. — Toutefois , j ’espère que nous en terminerons. — Sous cette persua
sion, je vous prie de nous expédier immédiatement le bateau de bitume préparé en pains
qui esta votre disposition, et d’en faire préparer continuellement par AI. Gallice.
1er avril.
Si vous avez des matières pulvérisées en excédant de la fabrication, joignez-les à l’en
voi du bateau.
2 avril.
Ainsi, dès le mois de novembre 1 8 3 8 , voilà une opération annoncée à grand fracas,
le traité Pezerat: on presse les extractions, les chargements de bateaux; on ne veut
pas être pris au dépourvu devant cette immense consom m ation; ce n est que quatre
mois après, le 30 mars, qu'il est question de prendre des arrangements réciproques.
M a is, remarquez-le b ie n , on n ’avait de renseignements ni sur la solidarité de l’a
cheteur, ni sur la position de la Société, et tout d ’un coup l ’un disparaît, l ’autre se
disperse.
Quel a été le directeur de cette opération, qui l’a créée en quelque sorte, l’a dé
veloppée et constamment dirigée?
Nous le savons, ce n’est pas moi.
Quel est celui qui doit en avoir la responsabilité ?
Ce n’est pas encore moi; je suis en droit de le soutenir hautement.
�Mais il faut aller plus en avant; il faut, en présence de ces faits, reconnaître nonseulement que les travaux effectués ne l’ont pas été par moi uniquement et d’après
ma pensée, mais d’après les indications, les demandes incessantes du gérant. Il faut
encore reconnaître que si la volonté de féconder une industrie avait réellement existé,
si l’espérance de gros bénéfices trop tôt réclamés, n’avait pas été le premier mobile,
une toute autre direction aurait été suivie, et l’entreprise eut conquis le succès qui
lui était presque assuré.
Voyez, en effet, ce qui m’avait été promis, et rappelons, en peu de mots, ce qui
a été fait.
Dès le début, MM. Guyonie et consorts ont été arrêtés par l’obligation de faire
des fonds de roulement; et moi qui ne les avais admis que pour imprimer, à l’aide de
leurs capitaux, un développement à mon affaire, moi qui ne devais contribuer en rien
aux dépenses, je suis forcé de me constituer caution , en remettant à des tiers,
sur les instances de mes associés, des traites qu’ils refusèrent de payer après les avoir
acceptées.
Avant de traiter, vous écriviez :
E xtrait des réflexions sérieuses et rationnelles.
Les associés désirent, aussi vivement que M. Ledru lui-même, le succès de l’entre
prise; ils y apporteront tous les soins et tous les capitaux nécessaires, mais ils doivent
rester juges de la quantité et de l’opportunité des mises de fonds. L ’entreprise ne faillira,
pan à défaut de ressources. Ainsi donc, inutile de créer à l’avance un fonds de 50,000/)-.
L ’article du traité était ainsi conçu :
Anr. G du traité. — MM. Valeau , Béthune, Goyon et autres prendront les moyens de
donner à l’entreprise tous les développements dont elle est susceptible. A cet effet, ils
feront un capital proportionné aux acquisitions, exploitations de la Société, et établisse
ment d’usines reconnues nécessaires.
Au moment de l’exécution, le 10 novembre 1838, M.
Béthune écrivait à
M. Guyonie :
Je crois que nous ferons bien de suite d’écrire au banquier de Clennont que désigne
M. Ledru, de lui demander s’il lui convient de faire les fonds fixés à environ tant par
mois, en le couvrant en traites acceptables à quatre-vingt-dix jours sur vous. Tout serait
ainsi central, et nous verserions chez vous notre quote-part à mesure des payements, et
huit jours ii t’avance, et au surplus il arrivera que, p ar la suite, les rentrées des marchan
dises serviront à cela.
lâchons de taire chacun pour le mieux, et je crois que nous avons une belle balle en main.
�Le 28 novembre 1838, M. Guyonie me mandait :
Dans notre réponse à M. C ariol, nous l’avons autorisé à mettre à votre disposition
2.000 fr. pour vos dépenses de détail; ainsi, chaque fois que' vous emploierez tout ou par
tie de la somme, vous fournirez une truite sur moi à quarante-cinq jours , que j'accepter a i ,
en sorte que les 2,000 fr. restent toujours à votre disposition; mais ceci ne s’applique
q u’aux dépenses de détail. Vous aurez l ’obligeance, pour les autres dépenses, de m ’en
adresser un état ou aperçu à l’avance, afin que je le soumette à l’approbation du conseil,
et par le courrier suivant que je vous adresse l’autorisation d ’y pourvoir. Rien ne vous
manquera.
Cette correspondance démontre bien que j ’étais en réalité caution de mes asso
ciés ; car, s’ils ne payaient pas, à qui devait-on demander le remboursement? Et
quoiqu’il me fût promis que rien ne me manquerait, on sait déjà que tout m ’a man
qué.
Sur ces entrefaites, la Société avait à peine trois mois d’existence que M. Valeau
suspend ses payements.
Il s’était porté fort pour M. Goyon-Pératy, qui, du même coup, s’arrêta aussi
vis-à-vis la Société, quoiqu’il fût l’agent le plus actif de l’affaire, qu’il partageât la
direction en Auvergne, et eût demandé avec le plus grand sang-froid le titre d'ins
pecteur général. Il avait jugé à propos de rester caché derrière M. Valeau , sans
adhérer ni résilier.
Une terreur panique s’empare aussitôt de M. Béthune ; il m ’écrit qu’il ne peut
plus payer, qu’il a besoin de ses fonds pour ses affaires personnelles, comme si
celle-là lui était étrangère.
M. Guyonie, tout en ne remboursant pas les effets Valeau, endossés par lui,
l’attaque pour s’emparer de ses cinq douzièmes, n’hésitant pas à se charger des deux
tiers des dépenses de l’affaire, lorsque sa signature était en soulfrance pour
4.000 ir.
Une circonstance grave se présente aujourd’hui. M. V ale au n’a pas payé les 4,106 fr.
70 c. formant sa quote-part, et celle de M. Goyon-Pératy, dans les 10,000 fr. d’acceptations
à l’échéance de ce jo u r, et du 20 courant, M. Valeau ne se montre pas, et il fait dire
q u’il est dans l’impossibilité de payer. — M. Goyon, à qui je viens de parler moi-même
pour ses douzièmes, déclare q u ’il ne paye pas non plus ; que d’ailleurs il ne fait pas partie,
d it- il, de la Société Ledru.
Cependant ces messieurs ne donnent pas leur désistement, car il nous serait facile de
les faire remplacer par des hommes plus solvables.
L ’engagement deM . Valeau, dans celte occasion, était sacré : c’était une dette d’hon
neur, et je ne trouve pas d’expression pour qualifier son procédé à mon égard. — Je me
�suis présenté chez lui sans pouvoir le rencontrer, ni lui exprimer toute l’indignation dont
je suis saisi.
Ma signature qui était intacte , qui n ’a jamais souffert, va se trouver atteinte par la
déloyauté d’un homme q u’on disait millionnaire.
Revenant au contre-temps qui nous afflige, vous pouvez changer la tempête en bonace,
par la mise hors de Société de M. Valeau, tant pour lui que pour M. Goyon , oncle.
18 janvier 1839.
G uyonie .
Pour le cas où vous obtiendrez la résiliation du traité à l’égard des sieurs Valeau et
Goyon-Pératy, je me trouve tout naturellement substitué à leur lieu et place.
Veuillez bien en conséquence, Monsieur, me donner une déclaration spéciale d’aban
don desdits douzièmes.
21 janvier 18.19.
G uyon ie .
M. votre frère paraîtrait vouloir en prendre u n , j ’en suis charmé et je le lui réserve ;
quant aux autres, je les retiens pour moi ou pour mes am is, q u i, sur ma parole et sans
aucun exam en, en prendront chacun un. Ceux-là du moins y viendront franchement, et
y apporteront leurs concours et leurs capitaux dans la proportion de leur émolument. Ils
consentiront comme moi à donner à notre entreprise l’extension nécessaire. L ’un d ’eux
vient à l’instant de retenir un de ces douzièmes aux conditions premières; je le lu i ai
prom is, et je voudrais déjà pouvoir le compter au nombre de nos associés.
Je me chargerai de diriger l ’instance contre les sieurs Valeau et Goyon; elle commen
cera aujourd’hui et a besoin de soins. Veuillez prier M. Cariol de ne donner aucun ordre
à cet égard, et do révoquer ceux q u ’il aurait donnés.
22 ja n v ie r 1839.
G u y o n ie .
E^a défection Valeau et Goyon nous tient toujours en suspens; le jugement a été rendu
par défaut le 25 courant. Je hâte l’expédition.
S’ils renonçaient ils seraient im médiatem ent remplacés par des hommes solides, dont je
répondrais comme de inoi.
*
29 janvier 1839.
G uyonie .
J ’éprouve le besoin de vous dire en même temps q u ’il m ’est impossible, complètement
impossible de garder mes trois douzièmes. J ’ai besoin de mes fonds pour désengagements
propres à mes affaires, et je ne puis en disposer pour d’autres. Des exigences instantes,
violentes, me nuiraient sans cloute, mais vous auriez à voir si elles ne nuiraient pas bien
plus à vos intérêts, et surtout à la marche de l ’affaire.
Mais je tiens surtout à être dispensé de payer la traite, au 14 mars, de 2,500 fr.
20 février 1839.
M a x . Bèthune .
Ce funeste contre-temps (les troubles de P aris), me met dans l’impossibilité d’acquitter
demain vos 2,500 fr. de traite. Veuillez, pour vous couvrir, tirer im médiatement sur moi
une nouvelle traite de 2,500 fr., à échéance du 10 août.
13 mai 1839.
G uyonie .
Jusqu’à ce qu’il ait été fait et réalisé un fonds de roulem ent, il a été délibéré que los
payements de dépenses seront faits comme les payements du traité, selon l'émolument
de chacun de nous , et je ne conçois pas que ce mode ait éprouvé quelque résistance do
�—
u
—
\otre part ; vous êtes plus que tout autre intéressé à son adoption: quatre signatures
valent mieux qu’une. A in s i, pour clore le passé , nous vous prions :
1°. De réunir toutes vos dépenses personnelles jusqu’au trente-un mars, et de tirer
sur nous i\trois et six mois;
2°. De réunir également toutes les dépenses des mariniers, et de tirer sur nous pour
leur m o nta nt, à s ix , neuf et douze mois.
Vous me comprendrez dans chaque payement pour, c i.........................................1/3
M . Béthune pour......................................................................................................... ... 1/6
M. votre frère p o u r .................................................................................................... ... 1/12
Et M. Valeau p ou r....................................................................................................... ...5/12
12/12
Vos traites ainsi faites seront acceptées par chacun de nous, et payées pour sa part.
8 avril 1839.
G üyonie .
Q uel soin ne prend-on pas de ma sécurité ? « Q uatre signatures valent mieux q u ’une,
» et vous tirerez sur chacun de nous pour son ém olum ent. »
Mais aussi quel ingénieux moyen de se débarrasser à mon profit de la solidarité
envers les tiers en cas de faillite de l’un des bailleurs de fo n d s , et de me forcer au
remboursement des traites tirées personnellement sur l u i , moi qui ne devais pas
contribuer aux dépenses ?
Le cas était probable ; les affaires de M . V aleau ne se relevaient p a s , ces mes
sieurs voulaient se débarrasser de l ’éventualité.
L ’événement si habilement prévu se réalise; la faillite Valeau est déclarée le
11 juillet
1839.
Déroute générale. A ucune des traites acceptées par le gérant
n ’est payée, et les tiers me poursuivent avec vigueur.
Messieurs Sainbucy et C a rio l, banquiers.
M. Valeau a déposé aujourd’hui son b ila n , qui présente un déficit de 75 pour 0/0 et quj
rejaillit gravement sur m o i, je suis donc dans l’impossibilité actuelle de payer; mais avec
moi, ce lient qu’une question de temps, il n’y aura rien à perdre : seulement il faut que je
trouve des facilités chez mes créanciers; vous êtes en ce m om ent, Messieurs, les plus ri
goureux.
Notre établissement et nos marchandises sont intacts; ils ont une valeur quintuple du
montant des dettes; il nous faut seulement pouvoir attendre l’obtention des concessions,
la vente des matières ou leur application.
A cet effet, nous aurions besoin d ’un crédit successif, chez vous, Messieurs, d environ
30,000 fr., qui vous serait garanti d’abord par nos engagements individuels; ensuite par
un privilège sur notre établissement matériel et marchandises dans telle forme que vous
|e désireriez.
U juillet 1839.
G u y o n ie .
�À Messieurs Cariai et Sambùcy , banquiers.
Pour ce qui est de me poursuivre à outrance, ce serait à votre détriment et au mien.
Je ne crains pas de vous dire q u e, dans l ’état extrême de gêne où je suis, toutes les ri
gueurs possibles n'obtiendraient pas la moindre somme, mes ressources entières sont pa
ralysées.
12 août 1839.
G uyonie .
J ’en reviens à vous dire que mon actif est plus que suffisant pour éteindre mon passif,
mais à la condition q u’on me donnera du temps pour réaliser.
Que s i , au contraire, ou me met dans la position de M. Valeau, on ne retirera pas le
dixième de ce qui est dû.
Quant à donner une hypothèque, elle serait tardive aujourd’hui, et l’on n’en retirerait
aucun fruit.
17 août 1839.
G uyonie .
Les poursuites de rigueurs de MM. Cariol vont me forcer, après le second jugement, îi
déposer mon bilan. Cette mesure réagira sur mes coassociés eu nom collectif, e t , aux
termes de l’article 458 du Code de commerce, les scellés seront immédiatement apposés
chez vous.
‘22 août 1839.
G uyonie .
Tel était le résultat qui m ’était promis, après maints efforts, maintes concessions
de ma part, et des dépenses multipliées que je n’étais pas tenu de faire. M. Guyo
nie, qui avait voulu la haute main et envahir toute l’affaire, qui, à volonté, tantôt
refusait l’occasion d ’un marché avantageux , tantôt pressait avec ardeur l’envoi de
marchandises restées sans emploi, M. Guyonie recule devant les conséquences de ses
engagements personnels; il se laisse poursuivre à outrance; il sollicite des délais , et
en désespoir de cause menace de son bilan ses créanciers , s’ils sont trop exigeants.
En résumé, il ne paye plus.
Peut-être avait-il oublié, dans ce moment, que, pour faire face aux sommes qu'on
lui réclamait, il avait encaissé, comme nous le démontrerons ¡»lus tard , les accepta
tions personnelles à ses coassociés.
Les tiers porteurs poursuivirent. Une proposition qui pouvait tout sauver, avait
été faite, celle d ’un emprunt. On dressa, à Paris, procès-verbal de la résolution
prise et un état des dettes portées à 33,000 fr.
Je donnai une nouvelle preuve de modération en consentant à suspendre mon pri
vilège sur l’affaire pour faciliter leur emprunt, à eux qui devaient pourvoir à toutes
les dépenses, et me devaient encore une soixantaine de mille francs. M. (ioyon refusa obstinément son adhésion. Il pensait pouvoir ne pas payer les dépenses ordon
nées , dirigées, surveillées par lui-même. Il fit partager son avis à M. Béthune ; mais
le tribunal de commerce n’apprécia pas le moyen, qualifia leurs prétentions île sou
�verainement injustes, el les condamna solidairement dans l’action de garantie inten
tée par moi.
S i, arrivé à cette phase de ma position, nous avions besoin de connaître de quelle
manière ces messieurs se jugeaient entre eux , il serait facile de placer en regard du
tableau que la correspondance vient de dessiner, celui qui dépeignait chacun des
associés.
C ’est encore la correspondance qui fournira les couleurs.
Je ne comprends pas la marche actuelle de notre Société; les dépenses sont faites , elles
doivent être payées. Les sociétaires ne le pouvant pas en ce m om ent, la maison Cariol
consent à nous faire un prêt de 33,000 fr. J ’en préviens M. Goyon qui ne me répond pas,
et au moment de signer, il s’y refuse, et nous signifie un acte insolite.
Paris, 26 août 1839.
G uyon ie .
Ma chute entraînera infailliblement celle de mes coassociés ; celui qui l’aura provoquée,
M. Goyon lui-même, n ’en sera pas à l’abri......
La résistance de M. Goyon aura constitué la Société en une masse de fraisqui s’élèvera
au moins à 3,000 fr.; elle lu i aura enlevé tout crédit pour l’avenir, et cela par pur entê
tement et par mauvais vouloir; car, en laissant de côté la question de solidarité, il est
évident que l’actif de la Société sera plus que suffisant pour couvrir l’em prunt de 33,000 fr.
Paris, 19 septembre 1839.
G u y o n ie .
Je réponds à la lettre par laquelle vous me dites :......Que Al. B ia u z h t a cru devoir re
fuser le titre d ’arbitre.
L ’extrême délicatesse de AI. Biauzat est digne «l’éloge et de respect. ÀŸec toute l’im
partialité possible, il n’est guère de la nature humaine de pouvoir déposer à l’instant
même la conviction de l ’avocat, pour prendre la conviction contraire de l’arbitre; et il
est à regretter q u ’un scrupule aussi honorable ne soit pas venu, etc......
Avant tout, et sans préjuger aucune question, il fallait me sortir de l’abîme où m ’a
jeté mon dévouement pour la Société. Il eût été temps après cela de recourir à l’arbitrage.
C’est une fatalité qui entraînera la ruine, non-seulement de la Société, mais je le
crains,' la ruine de chacun des associés.
Nos concurrents exploitent le scandale de tous ces procès et de tous ces refus de paye
ments. Ils vous ont présenté au ministère comme étant sur le point de faire faillite.
Paris, 24 octobre 1839,
G uyon ie .
Ge que je conçois moins encore , c’est que MAL Goyon et Béthune puissent prétendre
que les dépenses ont été faites sans leur consentement.
Une telle assertion dans la bouche de M. Bétliune, me semble si extraordinaire que je
ne saurais croire à sa réalité.
S’il a été articulé quelque chose de semblable, ce no peut être que l’effet de l’imagi
nation délirante d ’un avocat bel esprit que je vous ai déjà signalé, q u i , ayant donné à
AL Goyon le conseil intempestif de plaider, voudrait, au prix même de la vérité, faire
triompher son déplorable avis.
Il n’en sera point ainsi....
�J ’ai fait hier prendre copie de douze lettres de M. Béthune, qui toutes attestent:
1°. q u’il y avait des réunions sociales fréquentes ; 2°. que toutes les dépenses leur étaient
communiquées à l’avance; 3°. que lesdites dépenses étaient souvent provoquées par euxmêmes; 4°. que ce sont eux qui ont demandé le mode de traites tirées par vous, et ac
ceptées par inoi pour raison desdites dépenses. M. Goyon recevait de fréquentes commu
nication#, il participait à votre gestion et aux émoluments, etc.
Paris, le 9 novembre 1839.
G uyonie .
J ’ai reçu hier soir la visite de M. Béthune; il m ’a communiqué le prononcé du jugement
de Clermont; m ais, malgré ce jugem ent, et lorsque je lui ai proposé de terminer l’af
faire à l ’amiable par un emprunt solidaire, il in’a répondu que quand bien même il y
entendrait, M. Goyon n ’y consentirait pas, ainsi q u’il s’en était formellement expliqué
à Clermont.
A insi, il est bien certain que si, comme vous le dites, AI.......... sollicite des délais
fondés sur un projet d’arrangement, il induit la justice en erreur.
Mais dans quel but agit-il ainsi ; je n ’en sais rien.
Serait-ce pour aggraver le malheur de la position des gérants, et perdre entièrement
la Société? Je n’ose le penser. Vous qui êtes sur les lie u x , dites-moi votre opinion.
Paris, 22 novembre 1839.
G uyonie .
Notte considération commerciale est étrangement compromise ; l’obtention des concessions
reculée, te s frais énormes de comptes de retour, protêts et frais judiciaires, tout ce dé
sastre est l’œuvre d ’abord de M. Goyon e t d e .. . . , adopté par M. Béthune. Ils en seront
punis, mais vous et moi avons été les premières victimes. En définitif, tout le mondi*
perdra dans cette fâcheuse affaire, et ces pertes nous auront été occasionnées par le dé
faut de concours des dissidents, au moment où il était le plus nécessaire. On a voulu
nous sacrifier, croyant surnager au-dessus de nos débris. Cet espoir a été trompé.
Paris, 18 décembre 1839.
#
G uyonie .
11 paraît que les jugements des tribunaux de commerce de Clermont et de Paris n’ont
pas convaincu M. Goyoïi.
En effet, M. Béthune m ’a donné hier soir communication d’une lettre dudit sieur
G oyon, où il déclare q u’il ne reconnaît pas la solidarité, et q u ’en conséquence il a formé
appel «le votre jugem ent....
On paraît compter beaucoup sur des influences de position et de localité à la Cour royale
de Iliorn , comme si la Cour rendait des services et non pas des arrêts.
Paris, 2 \janvier 1840.
Quoi qu’il
cm)
G uyonie .
soit de ce tableau que je ne crée pas, et que M. Guyonie a seul tracé,
le procès fut perdu, et les événements, qui changent ordinairement les hommes, pro
duisirent leur effet accoutumé. I\1. Béthune, (pii avait déjà fait un voyagé au mo
ment des plaidoiries, accourut de nouveau , et \int à moi me communiquer, disait-il,
le résultat de ses récentes observations.
Il m exposait que nos discussions perdraient l’affaire, et qu’il était urgent pour
son avenir de rétablir la concorde.
�Là ne s’arrêtèrent pas les obsessions.
Des démarches de toute espèce furent aussitôt mises en œuvre ; mes amis tour
mentés pour me faire accueillir des paroles de paix et de conciliation.
Au milieu de ces sollicitations qui m ’arrivaient de toutes parts, je cédai et con
sentis à une transaction , dont je ne prévoyais pas alors pour moi les tristes consé
quences.
Et cependant, à cette époque, ma position avait quelque importance;
J ’étais maître des deux cinquièmes de l’affaire,
Créancier de ces messieurs pour une somme de lG 0 ,0 0 0 fr ., avec privilège sur
l’actif social.
Il y avait donc de ma part quelque bon vouloir à ne pas insister sur le maintien in
tégral et actuel de tous ces avantages, et à les livrer à des chances plus ou moins incer
taines d’un arbitrage que ma position ne réclamait pas.
Cela posé, pourra-t-on croire à ces bruits colportés dans le public que j ’étais un
homme processif et un coureur d’audience?
Les arbitres sont convoqués; la réunion se composa de M. Cariol, de MM. Goyon
et lié thune, Bay le et Conchon, leurs défenseurs. Je n’y parus pas. On rédigea une
transaction. Quelques jours avant, M. Cariol m ’avait demandé mon adhésion à un
projet beaucouj) plus simple, dont il me reste une copie de sa main.
La rédaction définitive voulut devenir plus claire et plus explicite. Elle enfanta la
transaction du 25 février 1840 :
Entre les soussignés
Louis-Charles-François L e d ru , architecte, demeurant à Clermont-Ferrand, d’une
part, et Maximilien B éthune, im primeur, demeurant à Paris, rue Vaugirard, 30 ; PierreVictor (ioyon, propriétaire à Clermont-Ferrand, d ’autre part;
A été exposé ce qui suit :
MM. L edru, Béthune, Auguste Valeau et Antoine-Blaise-Léonard Guyonio o n t, par
conventions verbales, en date du 6 octobre 18:58, formé une Société pour l ’exploitation
des bitumes d’Auvergne. Cette Société n’a duré que neuf mois. Elle a été dissoute par
suite de la faillite Valeau , déclarée par jugement du tribunal de commerce de la Seine ,
<‘n date du 11 juillet 183!).
A celte époque, les parties ne purent s’entendre sur le mode à suivre pour la liquida
tion de la Société. Des difficultés s’élevèrent entre les associés, soit sur le sens de la con
vention du 6 octobre 1838, soit sur la part contributive de chacun dans les dépenses et
les dettes de la Société. Des traites furent protestées , et par suite plusieurs instances ont
été portées devant les tribunaux de la Seine et du Puy-de-Dôme, où elles sont encore
pendantes.
Dans cette situation, les soussignés, voulant épargner à la Société des frais qui ne fe-
�raient, qu’aggraver la position de chacun des associés, désirant en même temps mettre
un terme à des contestations, q u i, si elles se prolongeaient, compromettraient sérieuse
ment l’actif social, o n t , par l’intermédiaire d’amis com m uns, arrêté les conventions
suivantes , qu’ils ‘promettent d'exécuter de bonne fo i, à titre de transaction pur procès.
A rt . 1er. La Société formée pour l’exploitation des bitumes d ’Auvergne, par conven
tions verbales du 6 octobre 1838, demeure dissoute à dater du 11 juillet 1839.
M . Ledru est seul chargé de la liquidation.
A rt . 2. Les comptes des gérants et directeur , ainsi que les dettes de la Société, dans
lesquelles seront compris les frais des instances actuellement pendantes, seront réglées
et liquidées conformément aux livres et pièces justificatives , par MM. Chanson et Cariol,
que les parties désignent comme arbitres souverains et amiables compositeurs. A cet ef
fet , les comptes et pièces à l’appui leur seront remis avant le 15 du mois prochain.
A rt . 3. Les parties estiment que , d’après les notes fournies par M. Ledru et les ren
seignements émanés deM . G u y o n ie ,.ces dettes s'élèveront approximativement à la somme
de 4-0,000 fr., savoir : pour les dépenses faites en Auvergne 30,000 f r . , pour celles laites
à Paris 10,000 fr.
A rt . 4. M.M. Béthune et Goyon s’engagent, solidairement, à avancer immédiatement
tous les fonds nécessaires pour solder le montant des dettes liquidées , et garantissent
M . Ledru de toute poursuite à ce sujet de la part des tiers.
A rt . 5. M.VI. Béthune et Goyon, payant tous les créanciers et ayant privilège sur les
marchandises et le matériel mobilier de la Société qui ont été saisis à Paris, vendent à
M. L edru, à forfait et à ses risques et périls, toutes les marchandises et tout le matériel
mobilier de la Société, soit à Paris, soit en Auvergne, tels qu’ils résultent de l’inven
taire et des livres de ladite Société. Il est convenu que , dans l ’état ou récolement des
marchandises qui sera dressé lors de la livraison que le sieur Ledru sera tenu de prendre
dans le délai d’un mois ou plus tôt s’il le peut, il -sera fait distinction de la quantité des
bitumes qui restent en magasin sur les vingt-six bateaux que M. Ledru a apportés à la
Société , et dont il a lixé la valeur à 50,000 francs qu’il a garantie, et dans le cas où les
sieurs Guyonie, Valeau ou tout autre mettraient obstacle à cette livraison, le sieur
Ledru et les sieurs Béthune et Goyon s’engagent respectivement à agir en commun pour
le faire cesser.
Il est bien entendu que, la livraison faite, M. Ledru remettra à MM. liéllnme et
Goyon leurs promesses, qui sont, de la part de M. Béthune ensemble 7,500 fr., et de
celle de M. Goyon ensemble 2,500 fr.
A rt . 6. Cette vente est faite moyennant une somme qui ne peut être définitivement
arbitrée en ce m om ent, mais qui sera équivalente à celle que MM. Béthune et Goyon
auront déboursée conformément à l'article 4 ci-dessus; elle sera payée aux sieurs Béthune
et Goyon dans deux ans, par moitié , à dater du jour où M. Ledru aura reçu livraison du
matériel et des marchandises; elle produira intérêts à 5 0/0 l’an , qui seront payés en
même temps que le capital.
A rt . 7. MM. Béthune et Goyon vendent de plus à M. Ledru, qui pourra en jouir dès à
présent :
1°. Leur part dans les terrains bitumineux qui appartiennent à la Société ; 2°. leurs
�droits et parts dans les concessions obtenues ou demandées par M. ILedru, et qu’il a ap
portées à la Société, suivant le traité verbal du 6 octobre 1838; 3°. tous les droits que
Boucaumont tient de la veuve Nicolas, au lieu et place de laquelle M. Ledru sera
subrogé.
A rt . 8. Cette vente est faite moyennant la somme de.... Elle sera payée en deux ter
mes égaux, d’année en année, dont le premier écherra un an après que l’ordonnance
royale relative aux concessions demandées aura été rendue.
Elle ne sera pas productive d’intérêt; elle sera payée à MM. Béthune et Goyon divisément et dans les proportions suivantes :
A. M. Béthune..........................................
A M. Goyon................................................
Elle leur vaudra remboursement des sommes qu’ils ont versées dans la Société à litre
de mise de fonds.
A rt . 9. Il est expressément convenu que la vente faite par les art. 7 et 8 ne deviendra
définitive à son égard qu’autant que, dans l’année qui suivra l ’obtention des concessions,
ou s’il n ’y a pas de concession dans le cours de 1 8 il , il n’aura pas manifesté l’intention
de se désister de son acquisition.
S’il use de cette faculté , la vente sera résiliée de plein droit , et les objets vendus seront
remis en vente par adjudication volontaire; le prix qui en proviendra sera distribué
entre les soussignés au marc le franc de leur mise sociale; dans ce cas seulement le marc
le franc de MM. Béthune et Goyon s’accroîtra de 9,000, différence de 27,000 à 36,000 fr.,
prix réel des droits de M me veuve Nicolas, vendus au sieur Ledru par les sieurs Béthune
et Goyon.
A rt . 10. MM. Béthune et Goyon subrogent M. Ledru à tous leurs droits et actions
contre MM. Guyonie et Valeau, de qui il pourra, à ses risques et périls, répéter la part
contributive dans les dettes sociales dont ils ont eux-mêmes fait les avances, conformé
ment à l’art, 4.
A cet effet, il sera remis à M. Ledru une procuration que MM. Béthune et Goyon
s’obligent à ne pas révoquer; il est bien entendu que les frais auxquels (jette réclamation
pourra donner lieu , seront à la charge de M. Ledru, qui devra garantir ses mandants
des conséquences de leur mandat. MM. Béthune et Goyon consentent également à ce que
M. Ledru soit subrogé ii tous les droits auxquels MM. Guyonie et Valeau pourraient pré
tendre dans l’actif de l’ancienne Société.
A rt. 11. E nfin, il est expliqué que si, par suite des contestations qui pourraient
s’élever avec MM. Guyonie et Valeau, il était décidé par arrêt, ayant acquis la force de la
chose jugée, que l’actif social serait licite et M. Ledru condamné à rapporter ce qu’il au
rait touché; dans ce cas le présent traité sera considéré comme non avenu, et les par
ties seront remises dans leurs droits et actions, tels qu’ils existaient avant le présent
traité.
A rt . 12. Au moyen des présentes conventions, et soirs la foi dk leiju complète exé
cution
, tout procès entre les soussignés, et toutes contestations avec les créanciers de la
Société, cesseront immédiatement ; chacune des parties promettent de donner des ordres
pour que les poursuites soient arrêtées. — 1°. Il est convenu que M. Ledru versera à 1«
�caisse de MM. Sambucy et Cariol,'ct au compte de MM. Bétlmne et Goyon, eu déduction
des sommes qu’il aura à leur payer , conformément à l’art. 6 , la moitié du prix net des
marchandises livrées, au fur et à mesure des ventes q u’il opérera ; — 2°. toutes les
sommes q u’il pourra recouvrer de MM. Guyonie et Valeau, ainsi qu’il est dit ci-dessus.
A rt . 13. Toutes les difficultés qui pourraient s’élever sur l’exécution des présentes, se
ront jugées par MM.\ Baijle, Conchon et Verdier-Latour, avocats, et C ariât, lesquels de
vront s’adjoindre un cinquième arbitre de leur choix ; et, à leur défaut, par trois arbitres dé
signés par le président du. tribunal de commerce de Clerihont-Ferrand.
Les arbitres procéderont comme amiables compositeurs, en dernier ressort, sans recours
en cassation, et seront dispensés de toute formalité de justice.
A » t . 14. M. Bétlmne déclare qu’il a vendu à M. Ledru, entrepreneur, habitant à
l’aris, rue de Vaugirard, 120, un des trois douzièmes auxquels il avait droit, par suite
des conventions verbales, du 6 octobre 1838; que le prix: n’en ayant pas été payé, le
sieur Bétlmne a l ’intention d’exercer contre lui une action en résiliation; que toutefois,
il n ’entend recourir à ce moyen de rigueur q u’autant q u e l’inlluence de M. Ledru frère,
de Clermont, serait impuissante pour obtenir de M. Ledru une résiliation volontaire.
A rt . 15. Dans le cas où l’enregistrement du présent traité'deviendra nécessaire, les
frais seront à la charge de la partie qui y aura donné lieu.
Fait en autant d’originaux que de parties intéressées.
A Clermont-Ferrand.................
Cet acte si clair, si lucide que, jusqu’à présent, il a arrête tout le monde et brouillé
toute l’affaire, ne contient pas les chiffres de vente laissés en blanc. La date ellemême n’est pas marquée, parce qu’on ne voulait faire commencer, sans doute, l’exé
cution que lorsqu’on connaîtrait définitivement les sommes à fixer par le règlement
des comptes.
Ne résulte-t-il pas d’abord de la lecture de cette transaction que je n ’envisage pas
ici nu point de vue du droil, que j’étais <\la fois liquidateur et acheteur? Comment
faire concorder ces deux qualités, si ce n’est en établissant ce principe, que les rem
boursements seront faits en valeurs de la chose sauf complément de ma part, s’il est
nécessaire.
Aujourd’hui on frappe ¡i ma porte à grands coups d’assignations, et on crie : Vous
êtes acheteur ; payez vite, et en argent. Ne puis-je pas répondre qu’une moitié de la
position emporte l’autre; que si je n'étais pas liquidateur, je ne pourrais rien être du
tout, qu’il n’y a pas de raison pour m ’ôter plutôt la première des qualités que la se
conde.
Vous appuyez vos réclamations sur ce quevoüs avez payé les dettes de la Soéieté.
Mais, par votre fait, elles ne sont pas encore liquidées, comme le prescrit l’acte luimême q u i, à cause de cela, n’est pas complété.
C’était cependant une opération préalable et toute à votre diligence que cette liqui*
�dation ; vous ne deviez payer que les dettes liquidées, et vous devie? immédiatement
les payer toutes, me garantissant des p’oursuitesdes tiers.
La transaction est explicite ¡\cet égard ; elle nomme le tribunal arbitral qui réglera
le* comptes, et fixe les délais pour la remise des pièces de la comptabilité.
Je me suis empressé de déposer entre les mains des deux arbitres tout ce qui concer
nait la comptabilité en Auvergne. Ce compte a été réglé, mais rien n’a été produit
des comptes de Paris q u i, aux termes des transactions faites avec Goyon , Béthune et
Guyonie, devaient être aussi réglés par arbitres; en conséquence, des arbitres avaient
été nommés; mais, au bout de six mois, un second tribunal a été substitué au premier
par l’adhésion Guyonie. Là encore, même silence, 011 laisse expirer les pouvoirs.
Ainsi, vous qui deviez payer les dettes liquidées, vous rendez impossible cette liqui
dation.
Vous aviez perdu de vue que, d’après les termes et l’esprit de la transaction, votre
créance devait se former d’une somme complexe, dont la fixation devait être immé
diate et invariable, pour que la transaction pût être complétée, datée et rendue
exécutable.
Sans l’exécution rigoureuse de cette clause, comment expliqueriez-vous l’art, 0 ,
portant que cette somme sera payée par moitié? Chercher une pareille solution , ne
serait-ce (tas chercher la moitié d’une quantité indéterminée?
Vous n’avez donc pas le droit do réclamer la moindre partie des dettes, tant qu elles
ne seront pas complètement liquidées, et que le chiffre total de votre créance ne sera
pas fixé irrévocablement.
Ce n’est qu’en 1843 , après avoir obtenu des ordonnances de saisies pour plus de
200,000 l'r., que vous avez cru avoir besoin de faire régler les comptes des dépenses
faites cinq ans auparavant; et aujourd’hui qu’il 11’y a encore de réglé que les comptes
de Clermont, vous ne in’avez justifié que le payement d ’une somme de 2,000 fr. à la
commune de Chamalièrcs ; vous, ne produisez pas les lettres de change remises à la
maison Cariol et aux mariniers.
A Paris, je suis poursuivi par vos créanciers, contre lesquels vous m ’avez garanti ;
il en résulte que, d’un côté, vous ne faites pus liquider, vous ne payez pas; et de
l’autre, vous ne justifiez pas les payements de celles des dettes qui sont liquidées, et
vous voulez.le remboursement du tout , en l’exagérant.
Pensez-vous appeler cela l’exécution de bonne foi des conventions qui nous
lient ?
Vous arguez de ce que j ’ai pris possession. L h ! Messieurs, ne vous rappelez-vous
pas qu’il y avait péril en la demeure, à cause de l’affaire des concessions? Pouvais-je
�alors prévoir que vous élèveriez jusqu’à 70,000 fr. vos dettes évaluées approximati
vement à 40,000 f r ., et (pii réellement n’atteignent pas ce chiffre. Je vous ai fait
signifier de reprendre l’affaire, vous n ’avez pas paru ; était-elle donc plus mauvaise
que quand vous me l’avez livrée? N ’ai-je pas le droit.de répéter ce que vous savez
bien , et ce que les lettres de chacun apprennent suffisamment, que vous avez pré
cipité l’entreprise dans des embarras inextricables et ruineux, tandis que, dans mes
mains, elle était devenue riche de quatre concessions, de 45,000 fr. de ventes, et
d’un marché qui assurait par an 18,000 fr. de recette sans débourser un centime?
Ne me sera-t-il pas permis de dire encore que ses produits étaient admis dans les
travaux publics par le cahier des charges de la ville de Paris, et par les rapports les
plus favorables des ingénieurs et du conseil des bâtiments civils, que tous les travaux
du Jardin des Plantes et du collège Sainte-Barbe étaient donnés à l’entreprise des
bitumes d ’Auvergne, et qu’une solide clientelle se formait?
Tout cela, vous le savez, n ’avait pas été obtenu sans de lourds sacrifices.
Mes dernières ressources s’étaient, il est vrai, épuisées pour relever l'affaire; mais
avec des fonds elle pouvait marcher l’égale des Sociétés rivales : des propositions
étaient faites de plusieurs côtés, et nous pouvions eu tirer parti d 'u n com m un accord ;
c’est ce (pie vous annonciez quand je travaillais dans l’intérêt de tous ; il y avait alors
paroles de paix , éloges sur la conduite de l ’entreprise, encouragements à persévérer
ju sq u ’à l’obtention des concessions; on devait alors se réunir, traiter l’affaire en fa
m ille; on parlait de reprendre l ’industrie; on s’inquiétait déjà d ’un g é rant; on m ’é
crivait pour me tenir au courant de ce qui se passait et exciter mon zèle par de bonnes
dispositions.
Je recevais, dans ces bons moments, les lettres suivantes :
Le Conseil des mines a entendu le rapport de AI. Migneron pour les concessions ; la
discussion et le vote doivent avoir lieu prochainement, et on croit que la décision ne
tardera pas à être rendue; je vous en préviens, afin que vous écriviez à vos amis cl
aux membres du Conseil des mines que vous avez vus à P aris, et particulièrement de
faire agir auprès de M. Teste et de M. Legrand, qui assistaient à lu lecture du rapport et
qui doivent assister aux délibérations. Vous savez que AL Teste est mal disposé...........
.............................................. . . . . . ' ........................ Ne j>crdez donc pas de temps, la chose est
urgente et importante.
l»aris, 15 ju in 1842.
M a x . Bétiiuive.
Je vous serai bien reconnaissant si vous vouliez avoir la bonté de venir me voir diman
che prochain , avant m id i, j ’aurai à causer avec vous de nos intérêts communs.
Votre tout dévoué serviteur, M a x . B ethune.
16 ju in 1843.
A Monsieur Ledru fils.
�Dès que les ordonnances furent à la signature du Iio i, avant inème leur renvoi
au ministère, ces messieurs émirent les prétentions les plus exorbitantes : des oppo
sitions sur les sommes que j ’offrais (le déléguer répondirent.à ma demande de for
mer le tribunal institué par la transaction elle-même, bien d’autres les suivirent.
Sans aucun égard pour la position que j ’avais faite à l’affaire, pour mes offres con
formes à nos conventions, sans considérer les conséquences finales de leur conduite
pour eux-mêmes, ils me poursuivirent avec acharnement, et veulent m ’enlever jus
qu’aux moyens d’existence.
Je ne pouvais plus rien, mes ressources étaient paralysées; je sommai ces mes
sieurs de tout reprendre ; je voulais les forcer à ne pas annihiler encore une fois une
entreprise dans laquelle j ’ai mis toute ma fortune, et q u i, après tout, est leur seule
garantie.
Aujourd’h u i, je ne peux plus tenter une troisième fois de la faire réussir, mou
Age, ma santé, mes malheurs, sont des obstacles insurmontables. Les matières dé
posées à Paris ne sont pas d ’une vente facile sans leur transformation en mastic;
elles nécessitent des préparations spéciales que ne peuvent pas opérer des usines
ordinaires; il faudrait reformer une clientelle, renouer des relations interrompues
depuis deux ans : cette tâche serait trop lourde pour moi, mes forces n’y suffiraient
plus.
é
La transaction a été faite pour arrêter les procès, consentie sous la foi de sa com
plète exécution; vous ne l’exécutez pas, et vous recommencez les procès. Elle con
tient une clause compromissoire, faite pour que l’interprétation de l’une quelconque
des parties ne puisse pas nuire à l’autre, et soit immédiatement réglée par des arbitres
amiables compositeurs et jugeant eu dernier ressort. Dès l’origine des discussions,
je l’invoque, vous la repoussez; je vous cite, aux termes de l’acte , devant le [»ré
sident du tribunal de commerce, et vous répondez que vous n’avez pas connaissance
de l’article, mais que s’il existe, vous en demandez la nullité. Vous répétez cette
énormité devant le tribunal de commerce de Paris.
Qui l’a.faite, Messieurs, cette transaction? Quels en sont les rédacteurs? Je m’en
rapporte à M. Guvonie. Voici ce qu’il m’écrivait à ce sujet :
J ’ai lu ce projet de compromis; au premier exam en, j ’ai reconnu ne pouvoir y donner
mon adhésion, et si quelque chose m ’étonne, c’est q u’il ait reçu la vôtre. Deux motifs
principaux semblaient devoir s’y opposer.................................................................................
Le second tient à ce que l'on propose pour arbitres les deux avocats qui ont défendu le
système des adversaires. En matière ordinaire , un juge se récuse s’il a connu de l’affaire
en tout autre qualité. Ici c’était, il me semble, un devoir d’en agir ainsi.
Paris, 4 février 18W).
O üvonie .
�C ’est après une observation si complète et si loyale de l’acte émané d’eux-mêmes,
que ces messieurs prétendent en exagérer les charges pour les rejeter toutes sur moi.
Quels moyens emploient-ils pour y arriver? Ils interprètent contre m oi, qui suis
l’acheteur, toutes les obscurités qu’ils y ont introduites.
Je me suis désisté dans les délais de la seconde vente qui était conditionnelle; ils
plaident contre le désistement.
Ils portent ¡\70,000 fr. le chiffre de leurs dettes, et une inspection sévère de la
comptabilité, une comparaison rigoureuse des actes antérieurs avec les chiffres qu’elle
contient, prouvent qu’il n ’y a véritablement que les dettes provenant des dépenses
de Clermont, qu’il ne peut pas y en avoir sur celles de Paris, et encore que les
dettes sur les dépenses de Clermont ont été occasionnées par la disparition de
¿6,840 fr. 69 c. encaissés par le gérant.
Encore une démonstration à faire ! Elle sera facile en la divisant par proposi
tions, afin d ’apporter plus de clarté dans la discussion des chiffres.
P R E M IÈ R E PRO PO SIT IO N .
Ayant pour but de démontrer, par la lettre de M. Guyonie à M . Goyon, en date
du 7 mai 1839 :
1°. Qu’au 31 mars 1839, il y avait balance entre les dépenses et les sommes encaissées;
2H. Que la balance n’existant plus, pour les dépenses avant le 31 mars, dans le
compte de ces messieurs, il y a eu disparition d ’une somme de .......... 26,846f 69e
Lettres de M. Guyonie à M. Goyon.
M onsieur,
J ’avais instamment prié M. Ledru, de Clerm ont, et nos cointéressés s’étaient joints à
moi, de fournir ses traites personnelles et celles des mariniers sur chacun de nous pour
son émolument. Il s’y est refusé, ne voulant pas compromettre l’avenir de l’entreprise
dans un moment aussi décisif; j ai accepté.
M M . Valeau cl Bélhune m’on t, par contre, fourni leurs acceptations individuelles et je
viens réclamer les vôtres. Voici le relevé succinct et exact des comptes, depuis le 1vv octobre
jusqu'au 31 mars.
1". Dépenses de M. Ledru, de Clerm ont...................................... 19,078f 10e
2°.
—
de M. L e d ru , de P aris.............................................. 12,629 87
3°*
—
de M. Guyonie............................................................. 12,814 85
T o t a l ................................................... 44,522 82
Reçu pour vente de marchandises...................................................
15este .
44,522'82'
7,0(54 38
............................................. 37,458 44
4
�Dont à votre charge......................................................
Sur quoi vous avez p a y é .............................................
3,121 53
2,070 »
R este ..............................
1,051 53
J ’ai fourni sur vous mandat au 5 ju in .. - 500' » ' ¡ 1 000 ,
—
—
au 3 ju ille t.. . 500 » j _______
R este d û ............................
51 53
4°. Dépenses, des mariniers, non compris le sondage.......................................
19,818
Dont à votre charge........................................................ 1,650 85
A quoi ajouter le restant d û .........................................
51 53
T ot a l ................................
1,702 38
Laquelle somme est payable les 31 juillet et 30 septembre , selon les deux traites ciincluses, une de 900 fr., l’autre de 802 fr. 38 c., que je vous prie de me renvoyer revêtues
de votre acceptation.
7 mars 1839.
G uyonie .
D ’après cette lettre, la situation de la Société se dessine nettement :
Dépenses générales au 31 mars 1839............................................... 64,332f 82e
Ventes de marchandises..............
7,064 38
Mise de fonds des coassociés fourRecettes générales.)
"¡e e„ acceptations individuelles ( dont une partie ne
£ 64>332 82
se trouvé pas sur les comptes
présentés aujourd’hui ) .........
57,208 44
Les comptes se balançaient, et il n’était rien d û: voilà un fait acquis, et auquel
rien ne peut être enlevé.
Il ne pouvait plus exister de dettes que pour des dépenses du 31 mars au 1 " juillet.
Cependant les traites des mariniers d ’ensemble.................................
19,810'
»c
n’ont pas été payées à échéances, quoique les dépenses aient été faites
avant le 31 mars et les valeurs correspondantes encaissées.
Surlesdépenscsd’Auvergne, dont le chiffre est porté à. 19,078’ 10e
il n’a été payé que...........................................................
12,000
»
quoique la somme entière ait été aussi dépensée avant
le 3 1 mars. Il est resté dû à la maison Cariol, qui avait
ouvert
crédit à ces messieurs.........................................
7,078 10
7,078 10
Donc il n’a pas été payé sur les dépenses laites antérieurement au
31 mars une somme de...........................................................................
20,888 10
�D ’un autre côté , l’encaissement des mises de fonds au 31 mars
s’élevait
toujours d ’après la lettre ii la somme de.................................
57,268 44
Tandis que le chiffre total des mises de fonds d ’après le compte re
mis aux arbitres de Paris n ’est plus que de................................... ..
Dont la différence...................................
30,421 75
26,846 69
est égale , à quelques francs près, au montant des dépenses impayées.
Q u’est devenue cette somme de 26,846 fr. 69 c .?— Commenta-t-elle disparu
de la caisse? C ’est un problème que je ne cherche pas à résoudre; il me suffit de
prouver que rien ne constate son emploi.
Donc il est démontré qu’il y a eu disparition de cette somme de. . . . 26,846f 69e
COROLLAIRE.
Il résulte de cette proposition que la dette de 26,846 fr. 69 c. occasionnée par
a disparition, a pesé entièrement sur les dépenses d’Auvergne, et qu’il n’y avait pas
de dettes pour les dépenses faites à Paris jusqu’au 31 mars; car la somme due aux
mariniers et à la maison Cariol provenait des dépenses d ’Auvergne.
D E U X IÈ M E
PROPO SITIO N .
Les dettes, au 31 ju ille t, portaient toutes sur les dépenses d ’A uvergne, et il n ’v
en avait aucune sur les dépenses de Paris.
En effet, le 31 juillet, ces messieurs se réunissent, et délibèrent sur l’opportunité
d’un emprunt; ils fixent le chiffre à 33,000 fr.; après un court exposé, ils disent :
Que néanmoins les premières dépenses ont été payées, mais q u ’il en reste à payer
pour une somme d ’environ trente-trois mille francs.
A iit . 1er. MM. L edru, do Clerm ont, et Guyonie sont autorisés, chacun en ce qui le
concerne, ensemble ou séparément, de régler, avec la maison de banque Sambucy et
Cariol, de Clermont-Ferrand , l’ouverture d ’un crédit, en faveur de la Société, d ’une
somme de 33,000 fr.
A rt . 2. Les fonds provenant de l ’em prunt resteront, ju sq u ’à l'em ploi, entre les mains
de MM. Sambucy et Cariol; ils seront, sur l ’autorisation de M. G uyonie, appliqués aux
remboursements des deux acceptations d ’ensemble7,000 fr. de M. Guyonie pour dépenses,
l’une de 3,000 f r ., échue le 15 ju in , l’autre de 4,000 fr ., échue le 15 juillet courant.
Ensuite au payement des traites délivrées aux mariniers Portepain, Josian, Gannat et Gros,
à échéances de fin courant, de fin septembre et 15 décembre, lesdites traites s’élevant :
‘
La l r« échéance à .............................................
La 2»
—
à .............................................
La 3^
_
à .............................................
9,543f
10,003
1,693
T o t a l . . . .....................
21,239
�28
—
—
Le surplus sera employé à payer les autres dettes de la Société, s’il y a lie u , et après
délibération spéciale sur chaque dépense.
Il serait absurde de supposer que ne procès-verbal ne contient pas toutes les dettes
de la Société au 31 juillet; il est explicite à cet égard.
Une des conséquences de la première proposition est que les 26,888 fr. 10 c.
en déficit sur les comptes antérieurs au 31 mars, ne pouvaient intéresser que les
comptes d’Auvergne.
On obtient une preuve directe de ce fait, si on compare les chiffres de la lettre du
7 mai avec ceux du procès-verbal de la délibération sur l’emprunt.
LETTRE.
1°. Dépenses de M. Ledru, de Clermont-Ferrrand. . 19,078f 10e
Elles se décomposent par
Une somme remboursée à la maison Cariol avant le
31 m ars........................................................................
1 2 ,0 0 0
»
7,000
»
Deux acceptations Guyonie aux 15 juin et 15 juil
let, remises à la maison Cariol, et proteslées.
Un reliquat.. . . .......................................................
78 10
V'. Mariniers réglés avant le 31 m a js.............. ................................
7 ,0 0 0 f
»c
78 10
19,810
»
Totai..................................... ....................... 26,888 10
PROCÈS-VERBAL.
Deux acceptations Guyonie aux 15 juin et 15 juillet,
et protestées...............................................................
7 ,0 0 0 f
Mariniers................................................. 21,239' »‘
qui se décomposent par............................................ 19,810
Les frais d ’un dernier envoi, réglés après le 31 mars.
A divers....................................................
4,761'
»c
»
7 ,0 0 0 f
19,810
»c
»
1,429
»c
qui se décomposent par,
Un reliquat......................................................................
78 10
A divers............. ............................................................
4 ,682 90
T otal..........................................
33,000
»
78 10
26,888
10
On voit par ce tableau que les sommes dépensées avant le31 mars, qui n’ont pas
�été payées, et qui sont imputables sur les comptes d ’Auvergne, se reproduisent dans
le détail des dettes comprises <iu procès-verbal du 31 juillet.
En retranchant du chiffre de l’emprunt........................................... 33 ,0 0 0 f 00
le chillre des sommes dépensées avant le 31 mars et non payées. . . 26,888 10
On a une différence de.....................................
6,111 90
qni provient encore des dépenses d ’Auvergne, car elle se décompose
par une lettre de change pour envoi de matières, réglé après le 31 mars.
1,429
»
1,089
»
L ’indemnité à la commune de Chamalières, réglée par M. Goyon, à
2,000
»
Mes avances à la Société portées trop bas au chiffre d e ..................
1,593 90
Par les frais de location des instruments de sondage réglé par
M. Goyon à ............................................................................................
Ces messieurs devaient le'savoir puisqu’ils recevaient mes états tous
les mois.
Somme égale...............................................
6,111
90
La somme totale de l’emprunt pour couvrir les dettes de la Société, avait donc
rapport aux dépenses d’Auvergne.
Donc, le 3 1 juillet 1839, il n'y avait pas de dettes sur les dépenses de Paris.
Ce fait ressort encore de la nature même des choses.
Il est bien avéré qu’il n’y avait pas de dettes à Paris sur les dépenses avant le 31 mars.
S ’il y en a eu au 31 juillet, elles ne peuvent provenir que des dépenses faites dans
le laps de temps compris entre ces deux époques.
Or, toute la correspondance prouve qu’à partir du 31 mars, les dépenses ont
toujours été en diminuant, et que le 16 juin elles ont été tout à fait arrêtées.
M. Guyonie écrit :
16 avril. — Pour l’avenir, renfermons-nous dans le strict nécessaire...........
3
mai. — Au point où en sont les choses, nous vous réitérons nos instances de lie faire
aucune dépense...............
22 mai. — Nous ne pouvons faire aucune vente, môme en baissant les p rix .............
—
— Vous savez que, jusq u ’à nouvelle déterm ination, il ne faut faire aucuns
travaux en Auvergne.................
3 j u i n . — Généralement les entreprises de bitume ne sont pas en faveur; pour se
soutenir et attendre des temps meilleurs, elles ont besoin de marcher petitement et avec
beaucoup d’économie, (-’est le seul moyen d’éviter des désastres.
16 ju in . — Toutes nos dépenses sont arrêtées, sauf celles de conservation.
�Les dépenses n’ont donc pu être que fort peu élevées pendant ce laps de temps
de deux mois et demi.
Pour les couvrir, ces messieurs ont eu :
La différence du chiffre des rentrées, pour vente et travaux, au 31 mars, au
chiffre total des mêmes rentrées portées dans leur compte.
Chiffre total des rentrées portées au compte. . . . 10,747' 73e
Chiffre des rentrées au 31 m ars............................
Différence................... ..................
7,064 38
3,G83f 35e
3 ,683f 35e
somme plus que suffisante pour l’entretien, pendant deux mois et demi.
Il est donc démontré, d’après les documents fournis par ces messieurs eux-mêmes,
que le 31 juillet il n’y avait pas de dettes sur les dépenses de Paris.
T RO ISIÈM E PROPOSITION .
Je dis que la somme de 40,000 fr., à laquelle est évaluée la dette totale , s’ap
pliquait, au moment de la transaction, aux dettes provenant des dépenses en A u
vergne.
Que la distinction faite dans la transaction entre les sommes 30,000 fr. et
10,000 fr., ne signifie pas qu’il y eût une dette de 10,000 fr., provenant des dé
penses occasionnées par les travaux de Paris.
Que, par conséquent, on ne peut pas s’appuyer sur cet acte pour défendre ce
principe, qu’il y avait dette à Paris, et dire qu’il a été reconnu.
La preuve de celte assertion ressort des chiffres mêmes , indépendamment des con
séquences des propositions déjà démontrées.
Ces messieurs ne peuvent nier avoir connu tous les articles des dépenses de Clermont et les chiffres exacts de chacune, car elles n’avaient été entreprises que d ’après
leurs décisions. M. Goyon traitait directement les marchés, et en surveillait l’exécu
tion dans les plus grands détails.
Tous les mois un état circonstancié des dépenses était adressé au siège de la So
ciété.
Le 9 août 1839 , je leur avais fait signifier le détail suivant des dépenses cons
tituant dettes en Auvergne, les sommant de déposer la somme de 37,295 Ir. 05 c.
pour les couvrir.
1°. T rois lettres de change acceptées par le directeur, pour acquisition et exploi
tation, dont deux montant à 7,000 fr., sont revenues protestées, faute d’avoir été
�acquittées à l’échéance, et dont la troisième de 3,000 fr. n’est pas encore échue,
ensemble..................................................................................................
2°. Pour dépenses diverses pendant les mois de juin etde juillet 1839.
10,000f
»c
2,482 05
3°. Pour frais de conduite, faite par les sieurs Gros frères, Portepain frères, Josian fils, et Gannat, réglés en huit lettres de change,
acceptées par le directeur, dont quatre montant à 9,543 fr., sont re
venues protestées faute d’avoir été payées, formant ensemble...........
18,720
»
4°. Pour frais de conduite par les sieurs Portepain frères, suivant
la lettre de voiture, dont le directeur a refusé règlement..................
1,693
»
5°. Pour redevance d ’un brevet d’invention...................................
400
»
0°. Pour indemnité à la commune de Chamalières..........................
2,000
»
2,000
»
7°. Pour intérêt des capitaux et frais de poursuites pour le paye
ment des traites échues, environ..........................................................
37,295 05
Dans l’action en garantie intentée par moi contre eux, à cause des poursuites
j ’étais l’objet, le tribunal de commerce a été saisi de cette demande.
M. Guyonie lui-même a fait faire la même signification, avec les mêmes chiffres
pour son propre compte.
dont
Il est donc bien démontré que ces messieurs savaient que le 9 août il était dû
37,295 fr. 05 sur les dépenses d’Auvergne.
Au moment de la transaction, mon Irrre journal a été remis chez M. Cariol, où
se réunissait la commission chargée de rédiger la transaction, et l’on y a trouvé :
Que les dépenses générales s’élevaient à ........................................ 29,265' 79''
Sur lesquelles il avait été payé avec les fonds provenant de la maison
Cariol...............................' ...........................................
Avec le produit des ventes de marchandises.. . .
18,569
» )
’
,
1 20,145 95
1,566 96 )
Q u ’il restait dû à divers............................................
9,119 84
Le compte des mariniers, moins la lettre de change aux mains de
Gannat-Mestre (comme il est expliqué), constituait une dette de. . .
19,739 88
T ô t a i ............................
28,859 72
1
ouïes ces sommes-ci étaient payables à Clermont, soit à la commune de Cha-
inalières, soit à l’entrepreneur du sondage , au conducteur des travaux , el surtout aux
mariniers et aux tiers porteurs de lettres de change.
On en <i constitué un ensemble de 30,000 fr., en y comprenant les frais y relatifs.
�—
32
—
Mais dans ce chiffre n’étaient pas comprises les deux acceptations Guyonie au
profit du la maison Cariol, qui avait avancé............
18,569r
»c
et n’avait reçu que.........................................................
12,000
»
Différence...................................
0,569
»
réglées par deux lettres de change d’ensemble.................................
7,000
»
1,840
»
8,840
»
attendu qu’on était en compte courant avec elle ;
ni la lettre de change à Gannat-Mestre...............................................
T ô t a i .................................................., .
Ce total était payable à Paris, et on l’a représenté approximativement par le
chiffre 10,000 francs.
Cela posé, il est faux aujourd’hui de prétendre que les dettes occasionnées par
les dépenses de Clermont ne s’élevaient qu'à 30,000 fr., et de vouloir imputer les
autres 10,000 fr. sur les dettes occasionnées par les dépenses des travaux de Paris.
Le 31 juillet, ces messieurs estimaient eux-mêmes les dettes générales de la So
ciété à 33,000 fr. Il a été démontré (pie la somme, résultant de l’emprunt, ne de
vait être appliquée qu’aux dépenses d ’Auvergne, et que les principales dettes étaient
antérieures au 31 mars. Le 9 août 1839 , le chiffre total des dettes, 37,295 fr. 05,
provenant des dépenses d ’Auvergne, leur a été signifié. Leur demande pour cet
article est plus élevée ; et ils voudraient cependant que ce chiffre , au moment de la
transaction, se fût trouvé réduit à 30,000 f r ., tandis qu’il s’était accru des arré
rages, des intérêts, et d’environ 4,000 fr. de frais de procédure.
Donc, la somme de 40,000 fr. ne s’appliquait qu’aux dettes provenant des dé
penses en Auvergne.
QU A T RIÈM E P R O P O SIT IO N .
On ne peut arguer, pour soutenir le contraire, de ce que les 7,000 fr. d’accep
tation Guyonie aux mains de la maison Cariol ont été portés au compte de Clermont.
Car, s’il n’en avait pas fait partie , il aurait fallu qu’il y eût dette sur les dépenses
provenant des travaux de Paris, et le contraire a été prouvé.
Comment, d ’ailleurs, expliquer qu’en 1840, j ’aie présenté ce chiffre de 30,000 fr.
c »mine le total des dettes provenant des dépenses de Clermont, lorsque, quelques
mois auparavant, le 9 août, j ’avais annoncé par une assignation, qu’elle s’élevait à
37,295 fr. 05 , lorsqu’antérieurement ces messieurs avaient reconnu par un acte ,
qu’elles montaient à 33,000 fr.
Si l’on compare l’assignation donnée à la lettre du 7 mai et à l’acte d’emprunt,
�s
on retrouve les mômes éléments. La différence est occasionnée par les irais énormes
des procès et les comptes courants.
Ce transport s’explique par les faits eux-mêmes ; la transaction ne recevait pas son
exécution, les livres et comptes de Paris n’étaient pas envoyés aux arbitres, et les
délais étaient passés; MM. Guyonie et Valeau refusaient leurs adhésions, et M. Cariol, ne voulant pas laisser plus longtemps sa maison à découvert, comprit les deux
traites dans le reste de son compte qui faisait partie des sommes à régler à Clermont.
CIN QUIÈM E PROPOSITION.
La dette de 31,082 fr. 60 c. sur les dépenses de Paris, portée au compte pré
senté en 1843, par ces messieurs, devant le tribunal arbitral, est fausse et sans
fondement, et les livres qui l’établissent sont irréguliers.
'
En effet, les dépenses correspondantes à cette dette n’ont pu être faites que du
1er octobre 1838 au 31 mars 1839, ou du 31 mars au 31 juillet de la même année,
ou du 31 juillet à l’époque de la signature delà transaction.
Mais il a été démontré qu’au 31 mars il n’y avait pas de dette à Paris, et qu’il n’v
en avait à Clermont que par suite d ’une soustraction faite à la caisse.
Il
a été démontré qu’au 31 juillet 1839 il n’y avait pas de dette à Paris, et qu'à
partir du 21 ju ille t, personne dans la Société ne pouvait ordonner une nouvelle dé
pense; cette dette n ’a donc pu être contractée à aucune de ces trois époques : donc
elle n’existe pas.
La démonstration se tire encore d ’un ordre de faits.
Supposons pour un moment que cette dépense ait pu être faite à l’une de ces trois
époques.
Evidemment cette supposition ne sera pas admissible pour la première, puisque
l’état de la comptabilité est parfaitement constaté; elle ne peut pas l’être non plus
pour la troisième, car personne n’avait plus le droit de rien faire, et la comptabilité
n’indique plus que des sommes très-minimes à partir du 31 juillet 1839. On ne peut
donc supposer la possibilité de ces dépensés que du 31 mars au 31 juillet, en ad
mettant pour un moment (pie le procès-verbal du 31 juillet puisse ne pas contenir
toutes les dépenses de la Société, quoique le contraire ait été démontré.
O r , il a été établi par la correspondance que toutes les dépenses à cette époque
étaient restreintes au plus absolu nécessaire, et qu’il fallait aller petitement pour enter
les désastres; et aujourd’hui on présente un cliiffre de 35,327 fr. 34 c. de dépenses
faites à cette époque , quand la caisse était arriérée déjà de plus de 20,888 Ir. 10 c.
Si l’on compare ce chiffre de 00,772 fr. 08 c. avec les dépenses de Paris du
5
�—
u
—
I er octobre au 31 mars, on trouve que, pendant ces six premiers mois, il a été dé
pensé par ]\i. Ledru, de Paris..............................................................
12,629' 87e
Par M. Guyonie.......................................... . ..................
12,814 85
T o t a l ,..........................................
25,444 72
Pendant ce laps de temps ont été élevées des constructions et faits tous les achats
.de première organisation. Tandis que pendant les deux mois et demi qui ont suivi,
on n’avait plus qu’à subvenir aux dépenses courantes, dépenses fort restreintes, d ’a
près la correspondance, d ’abord à cause de l’état de misère des bailleurs de fonds, et
ensuite à cause de l’exiguité des opérations faites; et on se trouverait cependant
avoir dépensé 35,327 fr. 36 c . , ce qui est contradictoire. Bien plus, si l’on compare
encore le chiffre total des dépenses de Paris, suivant ces messieurs, avec le chiffre
des dépenses en Auvergne :
Pour Paris avant le 31 mars, M. Ledru, de Paris..........................
M. Guyonie.........................................
12,629' 87‘
12,814 85
Ueste , selon ces messieurs................................. 35,327 36
T o t a l ..............................................
60,772 08
c •
, , , ^
( Dépenses de Clermont.....................
Suivant la lettre du 7 mai 1839,
1. .
1Mariniers.........................................
19,078 10
Ân
19,818
»
A divers................................................................
11,962 44
T o t a l ..............................
50,858 54
On trouve qu’il aurait été dépensé à Paris 9,913 fr. 54 c. de plus qu’en Au
vergne , et cependant sur ces dernières dépenses ont porté les frais des principales
opérations de la Société, l’extraction et la conduite de quinze bateaux de matières,
un soudage poussé à plus de 40 mètres de profondeur, divers travaux de recherches
et des acquisitions de terrain.
La fausseté de ce chiffre de 31,682 fr. 60 c. annoncé comme dette, est encore
démontrée, si l’on fait une juste appréciation des travaux exécutés à Paris, tels qu’ils
figurent dans l’état compris à l'inventaire dressé au moment de la prise de possession
de février 1841.
Un architecte expert, très-employé par les tribunaux de la Seine, sur mon invita
tion, a fait une*évaluation très-large des constructions, qu’il a fixée à .
Et si l’on y ajoute l’évaluation du matériel et des travaux, ou
aura pour le résultat :
7 ,1 28f
»c
�—
35
—
lieport.......................................................... 7 ,1 2 8 f »c
Un manège de hasard............................ .............................. .............
500
»
Tant pour Paris que pour Clermont cinq grandes chaudières, en fonte.
1,000
»
Deux cercles en fer...........................................................................
60
»
Onze petites chaudières d’application, pesant ensemble 1,567 kil.
50 centig., à 1 fr...........................................................................
1,567 50
l ne grande chaudière en tôle, pesant 950 kil., à 1 h ...................
950
»
Outils de bitumiers à P aris.. ..........................................................
750
»
à Clermont............................................ .. • • •
T o t a l .....................................
36 50
11,992
»
DÉPENSES ACCESSOIRES.
15f
Frais de manège, graisse et huile
Cheval de manège........................
150
Nourriture du cheval, pendant 150 jours, ù2r25cpar jour.
337
Harnais du manège
10
Faux frais pour le cheval.................................................
30
Location d’une écurie......................................................
30
Articles d’écurie...............................................................
25
Emmagasinage des marchandises, transport de la rue
597
» /
\
\
Poliveau au chantier de la Gare d ’Ivry, n° 3 6 , de
dix-huit bateaux représentant 9,000 mètres cubes de
matière, à l f 50e , valant..........................................
1,350
»>2,100
»
Déchargement et rentrée des quinze bateaux expédiés pen
dant la durée de la Société, représentant 750 mètres
cubes, ¡\ l f......................
. . . . . ............................ «
750
» I
Fabrication et exécution de travaux , pulvérisation de
35.000 kilogr. de roches bitumineuses, à 6 Ir. les
1.000..kilogr. , valant..........................................
210
»
Fabrication de mastic, 52,000 kilogrammes:
—
Main-d’œuvre..........................
—
Combustible............................
—
Brai de gaz..............................
5f
»c
3
»
'• 2,700 05
22 50
l’rix de revient des 1,000 kilogr.. 30 50
Les 5 2 ,0 0 0 , ¡\ce prix, valant..................... 7~. 1,586
>
Application et fondation pour 287 mètres de superficie,
à 3r 15e, compris les transports, valant...................
T o t a l ..........................................
904 05
17,389 05
�Report.............. •............................. 17,389f 05c
Frais de gestion pendant neuf m ois...............................
—
1,350
»
de location pendant dix-huitmois, à 1,800r, valant 2,700
»
Pour faux frais et cas imprévus, 1/10° des dépenses communes........
Total
général
4,050
»
2,143 95
des Dépenses................... 23,583
»
Différence entre cette évaluation, qui est calculée assez largement pour
que le résultat soit plutôt au-dessus qu’au-dessous de la réalité,
et les 60,766r 88e portés à leur comptabilité...............................
37,403 08
A la logique de ces raisonnements, ces messieurs opposent leur compte et leurs
livres.
Aux termes de la transaction, j ’étais seul liquidateur, et ces messieurs devaient
payer les dettes liquidées.
O r, aucun des articles de cette dette de 31,682 fr. 60 c. n’a été liquidé. Ces
messieurs ne se sont même pas soumis aux deux arbitrages consécutifs constitués par
eux pour faire apurer leur compte, et ce n’est que quatre ans après les prétendus
payements de cette prétendue dette, qu'ils pensent à en faire établir le chiffre, lorsque
la vérification s’est compliquée d ’un aussi long espace de temps.
Les arbitres nommés à leur requête sont forcés de déclarer que la confusion qui
règne dans leur compte ne permet pas de le suivre.
Les livres, présentés à l’appui de cette prétention devant les arbitres de Paris,
portent en eux-mêmes des marques évidentes de désordre et d’irrégularité.
On n’y trouve d’abord pas les 26,888 fr. 10 c. qui manquent aux recettes, et dont
l’emploi n’est justifié par rien.
Les recettes sont diminuées et les dépenses augmentées.
En effet :
1°. Le 26 décembre 1838 , M. Ledru, de Paris, agent de la Société, m’écrivait :.
Voilà la véritable position des choses. Il n ’a été vendu que 15 à 16,000 fr. (lo matières
bitumineuses, en y comprenant même ce que nous avons employé pour la fabrique.
Et cependant, sans qu’on justifie d ’aucune non-valeur, les rentrées pour ventes
et travaux ne figurent au compte que pour........................................
2°. Les constructions sont portées pour une somme de...................
9 ,4 12f 73K
14,334
»
Et le 4 février 1840, M. Guyonie écrivait :
Notre actif se p e rd , nous devons 1,050 fr. de loyer de la Gare. Le propriétaire est en
droit de nous faire un commandement, et d ’obtenir, dans les trois jours,, la résiliation
�du bail, en se faisant attribuer les constructions que nous y avons faites et qui ne peuvent
être évaluées à moins de 8,000 francs.
Ces m êm es constructions, évaluées par un architecte-expert près les tribunaux, ont
été portées au chiffre de 7,128 jv.
On trouve , dans les livres, quarante erreurs grossières signalées par un teneur de
livres chargé de la vérification , des articles au grand-livre, non portés au journal et
réciproquement, des grattages en grand nombre, et enfin un mois de novembre placé
avant le mois d’octobre précédent.
L ’écriture, quoique variée avec exagération , est encore une preuve; elle se repro
duit la même de distance en distance. On reconnaît la même plume.
De toutes ceâ considérations, il résulte nécessairement que la dette de 31,682 lr.
est supposée, qu’elle doit se réduire à deux articles : loyers à Paris à partir de la dis
solution , lettre de change du marinier Gannat, poursuivis à Paris.
----- ---------------
RÉSUMÉ.
Il
résulte de l'ensemble de ces propositions que s’il y a eu dettes, elles n'ont été
amenées que par la disparition de 26,846 fr. 49 c. faite à la caisse.
Que cette dette n’a jamais porté que sur les dépenses d’Auvergne, et qu’au mo
ment de la transaction , il n ’était rien du à Paris.
Q ue, par conséquent, le chiffre de 40,000 fr. indiqué dans la transaction était,
d’après toutes les pièces et tous les actes qui l’ont précédés, le chiffre maximum des
dettes de la Société.
Q u’il était véritablement le prix de la première vente.
Aujourd hui on veut ajouter 31,682 fr. à ce chiffre de 40,000 fr.
De deux choses 1une, ou le chiffre de 40,000 fr. qui s’appuyait sur tous les
éléments de l’affaire, est vrai ou faux.
Dans le premier cas, la transaction n’a pas été observée par mes adversaires qui
veulent élever ce chillre a 70,000 lr. ; qui m ’ont poursuivi avec rigueur pour me
l’imposer; qui ont anéanti pour la seconde fois l’affaire, sur le produit de laquelle
je devais leur rembourser, comme liquidateur, les valeurs qui seraient fixées par
arbitres :
Ou le chiffre de 40,000 fr. est faux; et ces messieurs pourront prouver, contrai
�rement h tous leurs actes antérieurs, qu’ils ont réellement 31,682 fr. de dettes à
Paris ; que les dépenses ont été véritablement laites et les dettes payées ;
Dans ce câs, n’aurais-je pas été induit en erreur, puisqu’on m’a présenté le
chiffre de 40,000 fr. comme le maximum de pri», et qu’aujourd’hui on veut le
porter’ à 70,000 fr. ?......
Par leur requête au président de Paris, MM. Guyonie, Goyon et Béthune ont
demandé à saisir jusqu’à 70,000 fr.
pour les dettes seulement, et jusqu’à
145,183 fr. 26 c. par celle qu’ils ont présentée au président de Clermont : Somme
totale 215,183 fr. 26 c.
Cependant ils ne comprenaient pas la part de M. Valeau, ni cette liste fertile
d ’accessoires ou d'évaluations approximatives qui permet toujours une grande élas
ticité.
Déjà aujourd’hui ils se réduisent à 117,000 fr. : c’est un premier pas en arrière
qui en promet d ’autres.
En résumé, si nous revenions rur le passé, et rappelions à grands traits tout ce
qui me concerne , nous verrions que j ’avais apporté à ces messieurs une affaire dans
une belle position; que pour en acheter les trois cinquièmes, ils devaient me rem
bourser mes dépenses évaluées à 92,000 fr. ; que sur cette somme, ils n’ont payé
(pie 30,000 fr. ; que dans mon apport figuraient des terrains bitumineux pour une
vingtaine de mille francs, vingt-six bateaux de matières dont le seul transport à
Paris avait coûté 42,000 f r ., et desquels M. Adrien offrait d ’acheter la moitié
pour 60,000 fr. ; que mes apports avaient donc une valeur réelle.
Comment ces messieurs m ’ont-ils rendu l’entreprise?
Dans un état de ruine difficile à dépeindre.
Malgré ces fâcheux résultats, je ne me suis pas découragé. Je l’ai relevée par les
plus grands efforts; j ’ai obtenu quatre concessions; j ’apportais des ventes pour
45,000 fr.
On s'est refusé à toutes mes demandes d'arrangement amiable; on a nié l’ar
ticle de la transaction qui pouvait y amener; on m ’a traité sans pitié, sans égard ;
on a saisi jusqu’à mes honoraires, mes seuls moyens d ’existence , et on veut encore
m’écraser sous une dette-imaginaire de 200,000 fr.
Ces messieurs, comme on le voit, veulent me faire payer cher l’honneur de leur
Société, leur loyal concours et la bonne direction de leurs entreprises.
Vous vous plaignez d’avoir dépensé de l’arpent ; je ne le nie pas ; mais il s’agit
de fixer la somme. Je soutiens et crois prouver que les chiffres posés par ces mes
sieurs sont d’uno exagération monstrueuse.
�J ’ai essayé également de démontrer que si ces dépenses n ont pas apporté des bé
néfices, il faut en attribuer la cause à mes adversaires, qui, n’organisant rien de sé
rieux , se ballottaient d’une entreprise à l’autre, sans mieux connaître ce qu'ils
abandonnaient que ce qu’ils recherchaient.
On ne saurait d ’ailleurs oublier qu'au moment de faire face à leurs dépense*,
si mal calculées, une somme de 26,000 fr. avait disparu de la caisse, et qu’enfin
une faillite, dont je n’ai pas à rechercher les motifs, est venue jeter ses désastres
au milieu d’éléments déjà si contraires.
Ici doivent s’arrêter mes observations.
Peut-être ont-elles été trop longues ! Elles restent actuellement soumises à une
appréciation éclairée, celle de la Cour. C’est là ma sauvegarde ; c’est là une garan
tie qui n’a jamais failli à l’honnête homme, et, à ce titre, j’ai le droit de la récla
mer hautement; car elle appartient à mon nom, à ma vie remplie par quarante ans
de travaux utiles, à mon honneur resté intact jusqu’à ce jour, à ma famille dépouil
lée si durement de ses moyens d’existence!
Si
mes prétentions’ m ’ont égaré, j ’ai fourni, pour les juger, toutes les pièces du
procès.
J ’ai dit aux magistrats :
Voilà la correspondance, interrogez-la.
Ne vous apprendra-t-elle pas (pie , loin d’avoir recherché la Société de mes
adversaires, j’ai été circonvenu pour la créer dans leur intérêt?
Que si leur intelligence et leur capacité sont grandes, elles n’étaient pas au moins
appropriées à une entreprise (pie leur gestion imprudente et leurs nombreuses dis
sensions ont rendue mauvaise?
Que loin d ’avoir payé pour moi, ils n’ont acquitté que les dépenses qu’ils avaient
ordonnées, et qu’il a fallu les y contraindre par un jugement, alors qu’ils m ’avaient
entraîné à les soutenir de mon argent, de mon crédit et de ma signature.
Cette correspondance n’a-t—éile pas établi encore quelles étaient mes dispositions
« accepter une transaction, et dans quel moment?
Lorsque ma position et mes droits me défendaient de l’accepter.
Depuis cette transaction quelles dettes ont été payées?
Quelles preuves à l’appui?
Les dettes de Clermont? Mais elles ne peuvent provenir que d ’un déficit de
26,000 fr.
Les dettes de Paris? Mais elles n’existent pas,
�N’en est-ce pas assez pour justifier le reproche qu’il me sera permis, en ter
minant, d ’adresser à mes adversaires?
C ’est que, par leur propre fait, ils ont anéanti pour la seconde fois l’entre
prise qui devait être la garantie des droits de chacun ; c’est qu’au moment où
mes efforts lui venaient en aide pour la relever, ils en ont anéanti la valeur qui
devait les payer.
A vous, Messieurs de la Cour, de statuer sur toutes les questions qui vous sont
présentées.
Plein de respect pour votre décision, je m’y soumets par avance ; car s’il arrivait
que le droit, dont je n’ai pas appris à connaître l’application , pût m ’être défavo
rable, il y aurait, je dois le croire, pour mes juges si haut placés et dont l’opinion
est si grave pour moi, l’intime conviction que dans toutes les périodes de mes rela
tions avec mes adversaires, je n’ai jamais manqué à l’honneur ni à la bonne foi.
Clermont-Ferrand, 3 février 1846.
LliD RU .
------------ ---------------A RTICLES DU TRAITÉ DU 6 OCTOBRE 1838.
A kt. l ,r M. Ledru inet en Société :
1°. Les droits résultant des recherches et expériences auxquelles il s’est livré pour
faire déclarer concessihles les gîtes bitumineux désignés dans sa pétition du 8 fé
vrier 1837 ;
■2°. Les droits résultant de l’ordonnance royale du \ mars 1829 , qui lui a concédé la
mine do l’£courcliade. Toutefois, MM. Valeau, Béthuneet autres, ayant pris connaissance des
prétentions de la daine veuve Nicolas et du sieur Jusseraud, déclarent accepter toutes les
conséquences des instances entamées et à entamer à ce s u je t, et à accepter les apports de
M. Ledru, avec toutes leurs éventualités. Il est convenu que, dans le cas où les contesta
tions entre le sieur Ledru et les deux anciens coassociés amèneraient la nécessité de faire
la vente de cette m ine, il s’en rendrait adjudicataire au mieux des intérêts de la Société,
et à ses frais, si scs associés le jugent utile à leurs intérêts ;
3°. Toutes les acquisitions de terrains bitumineux q u ’il a faites depuis sa demande en
concession ;
4°. Les matières bitumineuses actuellement en magasin dans le département ou en dé
pôt à Paris, ainsi que toutes celles extraites. Enfin le matériel de l ’entreprise, tel qu il se
compose en ce moment.
�©
—
A\ —
A rt . 2. MM. Goyon, V aleau, Bé thune et autres, prendront le lieu et place de M. Ledru
pour toutes les dépenses généralement quelconques laites jusqu’au l pr octobre courant,
au sujet des bitumes d ’Auvergne, lesquels consistent :
'i 1°. Dans le prix d’achat des terrains bitum ineux , s’élevant à la somme de vingt-un
mille quatre cent quatre francs.............................................................................. 21,404f »c
2°. Dans la valeur des objets mobiliers, consistant en outils, ustensiles,
chevaux, chaudières, meubles en granit, etc., qui sont, d’après l’état cijoint au présent, de trois mille six cent cinquante francs................................
3,650
»
qui sont réglés à la somme de vingt-cinq mille francs........................................ 25,000
»
3°. Dans tous les frais de recherches, expériences, exploitations, honorai
res au géomètre en chef du cadastre, pour le plan annexé à la p étition, etc.,
4°. Dans tous les frais occasionnés par le transport à Paris de vingt-six ba
teaux de matières bitumineuses, conduites par eau, frais de canaux, déchar
gem ent, emmagasinage, et qui ont été réglés , par le frère de M. Ledru , à
la somme de quarante-deux mille cinq cents francs.......................................... 42,500
»
Lesquelles sommes forment le total de quatre-vingt-douze mille cinq ceut _________
cinquante-quatre francs........................................................................................... 92,554 »
définitivement réglé ainsi, qui sera remboursé ;ï M. Ledru immédiatement après l’adop
tion du présent tra ité , partie en argent com ptant, partie en valeurs sur Paris , savoir :
Dix mille francs en espèces, h u it jours après la signature do l ’acte........... 10,000* »•'
Dix mille francs en lettres do change, acceptées à trois m ois’ ................... 10,000
Dix mille francs à cinq mois................................................................................ 10,000
»
»
Dix mille à sept m ois............................................................................................
Dix mille à neuf m ois..........................................................................................
.
Douze mille cinq cent cinquante-quatre a onze m ois.....................................
10,000
10,000
»
Quinze mille à douze m ois.................................................................................
15,000
»
Quinze mille à quinze mois.................................................................................. 15,000
»
...
,
.
.
Anr -t
12,5;i4
»
»
’ Parchacun de nous,
Pour sa Purl '• MM- Valeau 3/12, Bclhune 3/12,
Guyonie 1/12, B. Goyon
2/12, P.-V»rGoyonl/12,
Boueauœont 2^12.
Somme égale, quatre-vingt-douze mille cinq cent cinquante- ___________
quatre francs............................................................................... 92,554
Il
»
est expressément convenu que les dernières traites des derniers trente mille francs
ne pourront être négociées par M. Ledru q u’après le délai accordé pour la vente des bi
tumes actuellement à Paris; et pour atteindre te bu t, lesdits trente mille francs seront
réglés en simples obligations, sans être à ordre.
A rt . 3. Pour les soins q u cM . Ledru a donnés à cette entreprise, pour les sacrifices et
pertes q u’elle lui a occasionnés, ainsi que pour l’abandon q u ’il fait à MM. Valeau,
Béthune, Goyon et autres, des 3/5cs de l’affaire, M. Ledru recevra une indemnité de
cent mille Irancs, qui lui est assurée par privilège, en actions de la Société à former , et
qu’il ne touchera q u ’après que les fondateurs auront retiré dix p. 0/0 de leur mise de
fonds.
A kt .
M. Ledru sera propriétaire des 2/5, s de tous les objets mobiliers ou immobiliers
dont se composera l’actif, et participera , dans la proportion des 2/50S, dans les bénéfices
nets de toutes les entreprises de la Société. I! est entendu que ce droit à la propriété des
5
�2/5es de l’actif de la Société et des 2/5es dans les bénéfices ne s’exercera que sur la portion
des bénéfices restant après le prélèvement 1°. des Irais d’administration; 2U. du montant
des dépenses de toutes natures laites par la Société, et des sommes à payer à M. Le dru à
divers titres.
A rt . 5. A commencer du 1er octobre de l’année courante, toutes les dépenses seront
à la charge de la Société, les dépenses antérieures restant toutes au compte de M. Ledru,
au moyen du règlement fait en l’art. 2. —-A l’avenir, M. Ledru ne sera tenu à aucune
mise de fonds. A partir de la même époque, les marchandises seront au compte de la So
ciété , et M. Ledru déclare que la valeur des vingt-six bateaux de bitume, qui sont en
dépôt à Paris, est de, au m oins, 50,000 fr. ; en conséquence, il garantit formellement le
produit de ladite somme de cinquante mille francs par la vente desdits bitumes, dans le
délai d’un an ; il consent que les sommes qui pourraient être en déficit sur ce p rix, lui
soient imputées sur les derniers trente mille francs qui lui sont dus par MAI. V aleau,
Béthune, Goyon et autres.
A rt . C. MM. V aleau, Béthune, Goyon et autres, prendront les moyens de donner à
l ’entreprise tous les développements dont elle est susceptible; à cet effet, ils feront un
capital proportionné aux. acquisitions, exploitations de la Société et établissements d’usines
reconnus nécessaires.
A rt . 7. M. Ledru sera gérant des exploitations de la Société en Auvergne; il recevra
son traitement annuel, fixé à la somme de 3,000 fr., qui sera porté à 6,000 fr. trois mois
après f’obtenlion des concessions. Ce traitement et les travaux seront partagés par tiers
avec AIM. G oyon, oncle et neveu.
A rt . 8. Il ne devra que sa coopération personnelle à la Société; tous les frais d’admi
nistration, ainsi que les traitements d’agents, dont la nomination sera jugée utile, seront
aux frais de la Société, qui s’entendra pour le choix avec le directeur gérant. En Au
vergne , M. L edru, en cette qualité, portera tous ses soins et tout son zèle aux intérêts
de la Société, et s’engage à ne s’occuper dans aucune société de même nature , ni direc
tement ni indirectement. Il s’oblige d’apporter à la Société toutes autres concessions q u ’il
pourrait o btenir, ainsi que les brevets d’invention et de perfectionnement qu’il obtien
drait.
A rt . 9. La survivance dans la direction des exploitations sera réservée à l’un des en
fants de M. Ledru , qui pourra se l ’adjoindre à titre gratuit, et le désigner à la Société
pour son successeur en cas de mort, ou de démission de' sa part. E n cas q u ’il ne l’ait pas
lait de son vivant, elle sera désignée par celui qui serait nommé par la fam ille, pourvu
toutefois qu’il réunisse toutes les qualités propres à cette mission. Cependant M. Ledru, à
moins de maladie ou d ’impossibilité, ne pourra se démettre de ses fonctions avant un délai
de cinq ans.
A r t . 10. La direction ii Paris, sera représentée, pour l’administration , par AL Guyonie, en qualité de directeur, et par un conseil de quatre membres dont feront nécessai
rement partie, AIM. Valeau et Béthune.— AL Ledru pourra assister, chaque1 fois qu’il le
jugera utile, au conseil, et il y aura voix délihérative. Cette direction sera souveraine,
ef l’acte de Société, qui sera publié immédiatement après l’obtention de* concessions,
respectera cette stipulation. M. Guyonic recevra un traitement annuel de dix-huit cents
�francs, y compris les frais de loyer du siège social, lequel traitement sera porté à quatre
mille francs trois mois après l ’obtention des concessions, toujours y compris le loyer so
cial. Il ne pourra s’intéresser directement ni indirectement dans aucune opération de
même nature.
A rt . 11. Dans le cas où il ne serait accordé aucune autre concession àM . Ledru, ou que la
concession obtenue n ’équivaudrait pas au quart de la demande, tout l’actif de la Société,
dans lequel entrerait nécessairement les indemnités qui seraient allouées, à M. Ledru , en
vertu de la loi du 21 avril 1810 , serait destiné à rembourser d’abord les mises de fonds?
et l ’excédant seul, s’il y en avait, serait partagé dans les proportions ci-dessus indiquées.
A rt . 12. Immédiatem ent après les concessions obtenues, il sera passé un acte authen
tiq u e , lequel devra être revêtu de toutes les signatures et formalités voulues par la loi.
A rt . 13. Les difficultés qui pourraient s’élever au sujet du présent traité , seront sou
mises à la décision de trois arbitres, dont deux seraient nommés par les parties, et le
troisième par les deux prem iers, ou par le président du tribunal de commerce de la
Seine. Le jugement de ces arbitres, qui seront dispensés de la prestation du serment et
de toutes autres formalités voulues par la l o i, sera sans appel ni recours en cassation.
Fait sextuple, à Paris, le (i octobre 1838.
Ont signé :
A. L e dru , As,‘. V a l e a u , M a x . Bethune , (ü jyonie .
Toutes les pièces et lettres annoncées dans ce Mémoire sont dans les mains de
M. Ledru.
Clermont , lmp. de 'Jnmaiid-Lakdmot frère».
�
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ledru. 1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ledru
Subject
The topic of the resource
bitumes d'Auvergne
transport fluvial
sociétés
arbitrages
industrie
ventes
créances
architectes
mines
Description
An account of the resource
Observations de M. Ledru, Architecte à Clermont, soumises a MM. Les présidents et conseillers composant la première chambre de la cour royale de Riom.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud-Landriot frères (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1846
1810-1846
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV05
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Lussat (63200)
Chamalières (63075)
Paris (75056)
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Domaine public
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arbitrages
architectes
bitumes d'Auvergne
Créances
industrie
Mines
sociétés
transport fluvial
ventes
-
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dd06f0a5de6050f08ffb222b263667b7
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MEMOIRE
S I G N I F I É
E N
R É P O N S E ,
P O U R
L e c i t oye n M A I G N E , n é g o c i a n t , h a bi t a n t de la v i l le
de B r i o u d e , i n t i m é ;
C O N T R E
L e cit.
J
e a n
- J
o s e p h
C H O U S S Y - D UP I N ,
ex négociant, habitant actuellement la ville du P u y ,
appelant.
L E citoyen Maigne défend sa fortune. Si des faits indispensables
à rapporter m ontrent son adversaire subtil, indélicat et avide, ce
sera la fatalité de tonies ses causes. L e citoyen Maigne déclare
qu' il n’en veut ni à la réputation, ni à l’honneur du cit. C houssy.
A
�#-¿1
( 2 )
L a principale question de la cause est de savoir quelle a é té ,
quelle a pu être l’intention des parties, l’un faisant et l’autre
acceptant une obligation conditionnelle.
F A I T S .
sieur Ducros d eB rassac, tuteur de ses neveu et nièce, avoit
vendu au sieur Fournier de T o u n y la charge de conseiller au grand
conseil, dont étoit décédé pourvu le sieur de Bouchaud ; il donna,
le i g décembre 1 7 8 4 , sa procuration au citoyen Maigne pour tou
cher à Paris la somme de 25,000 fran cs, prix de cet office.
L e 23 février 1785, le citoyen Maigne reçut ce prix ; il en fournit
Le
quittance au sieur de T o u n y , en vertu de la procuration dont il étoit
porteur, et avec l’obligation personnelle de faire emploi des deniers,
pour la sûreté d’iceux, envers les mineurs.
L e çiloyen Maigne ne reversa pas l’entière somme dans les mains
du chevalier de Brassac; il en paya seulement 18,657 francs.
L e chevalier de B rassac, et le citoyen Maigne associé avec son
frè re , étoient en affaires de commerce. L e 21 avril 1785, Maigne
c a d e t, débiteur du sieur de B rassac, lui donna en nantissement
sept effets se montant à 11,260 fra n cs, et payables à des échéances
reculées. Plusieurs n ’étoient pas des effets de commerce. Ce nan
tissement fut couché par écrit dans le livre de négociations des cit.
Maigne.
L e citoyen Choussy faisoit aussi des affaires de commerce avec
le sieur de Brassac. L e 8 mars 1786, il fit entre les mains des cit.
Maigne une saisie-arrêt, comme des biens du sieur de Brassac, en
vertu de simple ordonnance, et à faute de payement de charbons
'vendus. D es événemens avoient altéré la fortune du sieur de
Brassac et celle des cit. Maigne. Les créanciers des cit. Maigne
prirent connoissance de leurs affaires, et se constituèrent en union
pour la simple surveillance; ils laissèrent toujours le cit. Maigne
aîné à son magasin , son commerce et ses bien s, ct^îTcrm oyèrent
avec lui. L e sieur de Brassac avoit été l’un des syndics des créanciers :
�¡¿i
( 5 )
scs variations , ou l’exagération de scs créances , obligèrent les
autres syndics d’imposer à Maigne la condition de ne pas régler sa
dette envers le sieur de Brassac , liors de leur présence.
L e 29 décembre 1786, le cit. Maigne et le sieur Ducros traitèrent
en présence des créanciers : la dette des cit. Maigne fut fixée à
5 o,ooo fr ., intérêts et frais com pris; et cette somme fut stipulée
payable en annuités pendant d ix-h u it ans. — L e premier article
du bordereau de compte comprend 6,345 fr. restés dûs de la somme
de 25,ooo fr. provenans du prix de l’office Bouchaud, et touchés
par le citoyen M aigne, du sieur de T o u n y ; et il étoit ainsi réduit,
parce que le sieur de Brassac avoit réellement reçu du cit. Maigne
18,657 fr- en déduction des 25,000 fr. ; fait qui est bien prouvé,
et a été tenu pour constant, lors d’un jugement du 19 août 179 1,
rendu avec le cit. Choussy ; nous aurons occasion d’en parler.
Cependant comme cette créance, provenue de l’olfice Bouchaud,
étoit hypothécaire ; que le sieur de Brassac vouloit conserver une
hypothéqué sur les Liens du cit. M aigne, jusqu’à concurrence de
cette somme, et bien assurer le p a ye m e n t de sa créance totale; il
exigea qu'il fû t souffert dans le traité la réserve de son hypothè
que; et les contractans ne conçurent d’autres moyens pour cela,
que de faire dire par le sieur de Brassac, qu’il faisoit remise de
l ’excédant des 6,343 francs , complétant a 5 ,ooo francs avec ré
serve de faire valoir la quittance du citoyen Maigne pour le
to u t, à faute de payement des 5 o,ooo francs , aux termes énon
cés. Ce fait est prouvé par certificats, enquête et jugemens. Et
une observation ne permet pas de doute sur le m otif de cette stipu
lation énonçant une remise. L e sieur de Brassac étoit comptable
envers ses mineurs de la somme entière de 25,000 francs ; il
n’éloit pas le maître de faire une remise ¿1 leur préjudice ; et s’il
eut eu envie de faire une remise aux cit. M aigne, autant qu’il
s’en d éfen d it, il l’eût faite sur ce qui lui étoit dû de son chef.
L e cit. Choussy orbtint contre le sieur de Brassac une sentence
au trihural de Brioude, le 5 i juillet 1787, portant condamnation
au payement de la somme de aG,y44 fr* pour indemnité dè la
A 2
�C4 )
vente de charbons que lui avoit faite le sieur de Brassac, et qu'il
prétendoit ne lui avoir pas été délivrés. — En vertu de cette sen
ten ce, il fit faire une nouvelle saisie-arrêt entre les mains du cit.
M a i g n e , sur le prix de l'obligation portée par le traite du 29 décemb.
178 6, passé entre M aigne et le sieur Ducros de Brassac.
Mais le citoyen Choussy et le sieur D ucros n’en vivoient pas
moins en bonne intelligence. L e citoyen Choussy avoit su s’em
parer de la confiance du sieur de Brassac, et Favoit engagé à
faire cause com m une, sous l’appùt de quelques bénéfices dans les
procès qu’ils entamèrent, et contre les citoyens Maigne-, et contre
des tiers qui lui avoient fourni des effets.
Ici se place une observation : le traité entre les cit. M aigne
et Ducros de Brassac ne portoit pas, en déduction de la dette
M aigne, les sept effets de 11,260 fr. donnés en nantissement au
sieur Ducros le 21 avril 178 6, nantissement constaté par les
livres sous les yeux des contractans. L e cit. Maigne les réclama
en présence des syndics de ses créanciers : le sieur Ducros ne les
avoit pas sur lu i; il promit verbalement de les rendre; on l’en
crut sur parole. Dirigé par le cit. C h o u ssy, il a voulu l’enfreindre;
niais des jugemens lui ont ordonné de satisfaire à l’honneur, et
ces jugemens frappent aussi le citoyen Choussy. L a condamna
tion ne vaut pas p a y e m e n t , et elle n ’est pas exécutée encore.
Pendant les procès , Choussy sollicitoit le sieur Ducros ù lui
donner en payement d autres effets ; il en savoit dans les mains
du citoyen Lam otte , négociant à Clerm ont , se portant à plus
de 5G,ooo francs ; il demandoil que le sieur Ducros lui donna 1111
consentement pour les retirer, et les prendre eu payement. Pour
obtenir ce qu’il demandoit, il ilattoit et mçnacoit tour à tour le
sieur Ducros : il lui promeltoit notamment de mener rondement
INIonlbrizet; et M ontbrizet l’a lait succomber.
11 paroit que le sieur de Brassac fit ce que vouloit le citoyen
Choussy; et les procès contre le citoyen Maigne commencèrent.
Choussy le lit d^abord condam ner, par jugement par défaut du 7
mars 1788, ii acquitter un ellet Campigni de 5j 5 fr. ; et il en a reçu
�/6 i
( 5 )
le montant le 12 dudit mois. Il demanda aussi le payement d’un
autre effet de la dame Dugard de Clieminade de 1,690 ir. , sur
lequel il s’étoit. permis une petite addition pour le rendre négociable.
L e citoyen Maigne connut ce jugem ent, par la saisie-exécution
que le cit. Choussy fit faire sur les marchandises de son magasin :
il y form a opposition ; se fit décharger de la condamnation
prononcée contre lui ; fit condamner Choussy et Ducros de Brassac
à lui remettre ces effets , et Choussy en 5 oo fr. de dommagesîntérèts. L e jugem ent, en date du 12 novembre 1788, porte, qu’au
dit billet a été ajouté le mot ordre après le dernier inot de la
seconde ligne ; que l’ordre mis au dos dudit billet est écrit
de la main de Choussy, n’y ayant en principe que la signature
de M aigne sans ordre.
L e citoyen Maigne , averti, par les poursuites du cit. Choussy ,
de l’abus qu’avoit fait le chevalier de Brassac du simple nantis
sement des sept effets dont nous avons p arlé, form a contre lui
la demande en remise desdits sept e ffe ts, se portant à 11,260 fr .;
e t , après interlocutoire et enquête, le chevalier de Brassac fut
condamné à les rem ettre, par sentence du 6 juin 178 8, rendue
contradictoirement.
L e chevalier de Brassac n ’étoit pas l’adversaire de M aigne dans
ce procès ; c ’étoit Choussy nanti des billets, et qui abusoit de
son nom.
L a sentence du G juin 178 8 , celle qui avoit précédé et dont
nous avons parlé , n’étoient pas suffisantes pour déconcerter le
citoyen Choussy. Homme à mauvaises ressources, il interjeta appel
de la sentence du G ju in , au nom du chevalier de Brassac , et
négocia encore au cit. L em crle , son neveu, deux autres billets
Dugard de Clieminade de la somme de 3,000 fr. chacun, dont la
remise avoit été ordonnée contre le chevalier Ducros. Lem erle
en demanda le payement à M aigne, çt ilfutdébout'é de sa demande,
par sentence du 21 juillet 1790; C houssy, partie dansce jugement,
fut condamné à garantir Lem erle, et à rendre à Maigne les billets,
pour, par lu i, s’en iaire payer par le débiteur.
�( 6 )
Choussy seul interjeta appel de ce jugement.
En cet état , le sieur Ducros de Brassac ém igra, et il n’a plus
reparu.
Les i 5 janvier et 12 mars 1791 , les sieur et demoiselle Ducros
de Brassac formèrent contre le cit. Maigne la demande en rem
boursement de la somme de 25,000 fr. qu’il avoit reçue du sieur
de T o u n y. Dans le même tem ps, le citoyen Clioussy reprit la pour
suite de l’instance sur sa saisie-arrêt; les citoyens Maigne lui
opposèrent la demande des sieur et demoiselle D u cro s, et sou
tinrent que le cit. Choussy devoit la faire cesser.
Sentence intervint le ig août 17 9 1, rendue bien contradictoire
m e n t, sur le rapport du citoyen Cathol du D é fia n t, qui p o rte,
attendu qu’avant de statuer sur la demande du cit. C h oussy, il
importe de savoir quel sera l’événement de la demande qui a été
formée contre Maigne , de la part des sieur et demoiselle Ducros ,
en restitution de la somme de 25 ,000 f r . , surseoit de six mois sur
la demande en saisie - a rrêt, pendant lequel temps les parties
fero n t respectivement diligence, pour faire statuer sur la de
mande des sieur et demoiselle Ducros.
L es choses en restèrent là quelque temps. L e 27 thermidor
an 3 , Maigne et Choussy se rapprochèrent. L e cit. Choussy, seul
créancier saisissant, avoit besoin de fonds pour rembourser la
constitution de sa ci-devant épouse; les parties traitèrent.
Choussy se disoit créancier du sieur Ducros de Brassac, de
44,554 francs en principaux, et, pour se montrer généreux envers
u n e succession abandonnée, il se restreignoit à T>6,ooo francs.
On se rappelle que, suivant le traité entre les cit. Maigne et le
sieur Ducros de Brassac, Maigne etoit constitué débiteur d’une
Êomme de 5 o,ooo francs, dans laquelle il y a v o it 6 , 5/|5 francs en
reste de 25 ,000 francs provenus de l’ofiiee Bouchaud. Maigne ,
saisi d elà part de Choussy, n’avoit pas pu se libérer; il ne rapportoit d’acquils que jusqu’à concurrence de la somme de 5,024 francs,
' en sorte qu’il avoit dans ses mains 20,000 francs du ch ef du
chevalier de Brassac, et a 5,ooo francs que réclainoienl les sieur et
demoiselle Ducros.
�(i)
Il paya au citoyen Clioussy les 20,000 francs revenans à la suc
cession de Bi’assac, et stipula qu’il payeroit les 16,000 irancs par
faisant la créance du citoyen Choussy, aussitôt qu’il auroit obtenu
un jugement contre les héritiers Bouchaud sur la demande qu’ils
avoient formée. Cette stipulation sage, bien raisonnable, et con
forme à l’esprit et à la disposition de la sentence rendue entre les
parties le 19 août 179 1, fut^dénaturée par le citoyen Choussy, qui,
dans son mémoire, s'avoue le rédacteur du traité.
L e citoyen Choussy commit une erreur à laquelle le citoyen
Maigne ne fit pas attention. A u lieu d’énoncer que le payement
de la somme de 16,000 francs seroit fait après un jugement rendu
contre les héritiers Bouchaud, il dit contre les héritiers de Brassac ;
et le citoyen Maigne fut d’autant plus aisément trom pé, qu'il
considéroit les enfans Ducros de Brassac comme héritiers du
chevalier de Brassac leur oncle, sans enfans.
C'est celte erreur affectée du citoyen Choussy, qui lui fournit
aujourd hui matière à exiger que le citoyen Maigne lui paye la
somme de 16,000 fra n cs, quoique la demoiselle Ducros de Brassac
ait fait condamner le citoyen Maigne à la lui p a y e r, à elle.
L a mauvaise foi que manifeste le citoyen C h o u s s y , ne laisse
pas douter qu’il prépara sa prétention actuelle, en désignant dans
son traité les héritiers de Brassac pour les héritiers Bouchaud ;
mais reprenons les faits.
L e 29 vendémiaire an 7 , la demoiselle D ucros, aujourd’hui
épouse d’A pchier, reprenant la demande qu’elle avoit formée en
179 1, conjointement avec son frè re , assigne de nouveau le citoyen
M a ig n e , et réclame , en vertu d’un legs à elle fait par le sieur
Bouchaud, la somme de 22,5oo fr. sur celle de 25,000 francs qui
faisoit l’objet de la première demande. L e citoyen Maigne notifie
au citoyen Choussy cette nouvelle assignation, et l’appelle en assis
tance de cause, pour défendre ù la demande de la demoiselle Ducros,
et s’accorder avec elle.
L e citoyen Choussy ne fuit aucun cas de l’assignation en assis
tance de cause; Maigne l’oppose à mademoiselle D ucros, et en
�W vl
}
demande la jonction à l’instance pendante avec elle; une première
sentence du G messidor an 7 rejette la jonction.
(
8
A utre sentence du 22 frimaire an 8 , qui fait provision à la
Ducros de 10,000 fra n cs, attendu la contestation du
citoyen Maigne.
demoiselle
Clioussy est légalement averti des poursuites de la demoiselle
D ucros : il demeure dans l’inaction à son égard; fait donner une
nouvelle assignation au citoyen Maigne pour procéder dans l’ins
tance sur sa saisie-arrêt, et conclut à ce q u e , sans s’arrêter a la
demande en assistance de cause du citoyen M aigne, les conclu
sions qu’il a prises, par exploit du 5 thermidor an 5 , lui soient
adjugées.
Les* deux procès étoient pendans devant le tribunal d’arrondis
sement de B rioude, et s’instruisoient séparément.
L a dame Ducros d ’Apchier a fait prononcer sur sa dem ande,
e t, par sentence du 5 prairial an 1 0 , Maigne a été condamné à
lui payer la somme de 22, 5 oo francs, avec intérêt depuis 1785.
Clioussy a aussi fait statuer sur ses assignations; et une sentence du
27 dudit mois de prairial l’a déboulé de la demande en payement
de la somme de iG,ooo francs, qui devoit lui être payée après un
jugement en faveur de Maigne contre les héritiers Bouchaud ,
aussi héritiers présomptifs de Ducros de prassac.
L e tribunal de Brioude a reconnu (pie la stipulation faite au
traité de thermidor an ù , entre Clioussy et M aigne, et qui renvoie
le payement des ifi,000 francs à l’époque d ’un jugement en faveur
de M aigne, ne pouvoit frapper que sur un jugement entre lui et
les sieur et demoiselle Ducros.
L e citoyen Clioussy est appelant de cette sentence. Bravant
l’opinion publique et celle de ses juges, il soutient que sa turpitude,
quoiqu’évidente, a lié le citoyen M aigne; que c ’est par les expres
sions du traité, et non parce que les parties ont entendu, que la
cause doit être jugée. Mais comme les lois ont pour objet principal
la distribution tic la justice d’après l’équité; comme les juges 11c
" sont
�( 9 )
sont pas astreints à s’en tenir aux termes plutôt qu’au sens de la
convention ; qu’en principes il faut rejeter les expressions qui
n ’ont pas de sens, suivre l’intention plutôt que les term es; que
c’est un caractère essentiel à la validité de toute convention, qu’elle
soit faite avec sincérité et fid é lité ; comme les magistrats ont l’in
terprétation des lois et des clauses exprimant les conventions , qui
sont aussi des lo is, par voie de doctrine et par voie d ’autorité, le
citoyen Choussy n’a dû se promettre aucun succès de son témé
raire appel.
L a discussion portera sur plusieurs questions, qui naissent de
trois propositions principales. Ce seroit allonger que d’en donner
une idée substantielle et le développement. Nous tâcherons d etre
m éth o d iqu e^ sans division de notre plan.
L e citoyen Choussy prétend que la réserve de ne payer
iG,ooo francs, qu’après un jugement en faveur diicitoyen M aigne,
contre la succession de B rassac, ne peut pas frapper sur la de
mande formée en 1791 par les sieur et demoiselle Ducros. Et
sur quelle demande frappera-t-clle donc; puisqu’il faut lui donner
une application, la diriger vers un effet réel ?
Quelle peut être la valeur d ’un jugement en faveur du citoyen
M aigne, contre la succession du chevalier de Brassac? Q u’eut-il
porté, et quel pouvoitêtre l'intérêt du citoyen Maigne à en avoir un?
Le citoyen Choussy , traitant en qualité de créancier d’une suc
cession vacante, et que faussement il dit répudiée , puisqu’il n’y a
jamais eu de répudiation , ni de curateur nommé à llio irie , prenoit la place de 1 homme de la succession , stipuloit les intérêts
de la succession envers le citoyen M aigne, régloil et fixoit, en
cette qualité, la dette de Maigne. Les condamnations que le citoyen
Maigne avoit fait prononcer en remise des effets D ugard, frappoient directement contre le sieur de Brassac; elles n ’atteignoient
le citoyen Choussy que secondairement. — C ’est dortc au nom do
la succession de Brassac, que le citoyen Choussy stipuloit que
Ma igne relireroit les effets Dugard et M ontbrizet-M ontfleury,
B
�( 10)
ensemble toutes les procédures, et autres pièces se trouvant entre
les mains des défenseurs dans divers tribunaux ?
L,e citoyen Choussy, qui invoque l’ordonnance de i 56 o , contre
]a défense du citoyen M aigne, qui , page 7 de son m ém oire,
s'exprime en ces termes : « A u ssi, par le traité du 27 thermidor
« an 3 , il est convenu que pour terminer définitivement tout
u procès entre les parties, dont l’un au tribunal de T h ie rs , pour
« les trois billets à ordre de la dame Dugard de Cherninade;
« l ’autre au district de C lerm ont, pour raison de quatre billets à
« ordre, de Croze-M ontbrizet ; le troisième au district de R io m ,
i< pour les saisies-arrêts faites à la requête du citoyen C h oussy, etc. »
nous dit donc que le traité étoit fait sur les trois procès existans
alors, et pour les éteindre; dès-lors point de jugement h obtenir
contre les héritiers de Brassac, ou le curateur à son hoirie.
E t sur quoi eùt-il frappé ce jugement ? qu’eût-il prononcé ?
L ’homologation du traité pour le rendre commun avec le curateur.
M ais quelle en étoit l’utilité? Ce jugement eût-il mieux assuré
le payement qu’auroit fait le citoyen Maigne au citoyen Choussy,
au préjudice de l’action des héritiers Bouchaud? E ût-il rempli
l’objet de la sentence du 19 août 1791 ?
Il ne peut pas être permis de le prétendre. Il faut donc reconnoltre qu’un jugement d ’homologation du traité n’étoit pas dans la
convention des parties.
E ût-ce été pour faire dire que la somme de 25 ,000 fran cs,
prix de l’office Bouchaud , appartenoit aux sieur et demoiselle
D ucros , et que cette somme devoit être retranchée de celle de
5o,000 francs, pour laquelle le citoyen Maigne s’étoit obligé par
le traité du 29 décembre 1786, envers le chevalier de Brassac?
Un jugement en faveur de M aigne, contre les héritiers de Brassac,
ne pouvoit être que cela , s’il n ’étoit pas pour l’homologation du
traité du 27 thermidor an 3 ; et il ne remplissolt pas les vues du
citoyen Choussy , il s'en éloignoit au contraire.
, Etoit-il beso in , y avoit-il lieu à faire d ire , par un jugement
�IV
( 11 )
rendu contre la succession de Brassac, que Maîgne avoit valable
ment payé' audit de Brassac la jçpéance propre aux sieur et de
moiselle D ucros? C e rte s, ni la. votive de Brassac, ni ses héritiers,
ni un curateur à l’ hoirie, n ’eussent contesté cela.
Mais la justice, si elle n ’eût été surprise, eût reconnu que le
jugement étranger aux sieur et demoiselle D u cro s, ne pouvoit pas
leur nuire, qu’il seroit frustratoire, insignifiant, et eût refusé
d’admettre la demande.
Tenons donc pour bien certain , bien dém ontré, que ce n ’étoit
pas d’un jugement en faveur de M aigne, contre les héritiers de
B rassac, que les parties entendoient parler, en renvoyant à un
jugement le payement de la somme de 16,000 francs.
A vant encore d'obtenir un jugem ent, il eût fallu diriger une
action ; et ce n’est pas une action que le citoyen Maigne doit
form er, c’est un procès pendant qu’il doit faire juger en sa faveur.
Remarquons que la clause par laquelle Maigne se charge , à la
fin du tra ité, de garantir le citoyen Choussy des frais auxquels
il a été condamné envers le citoyen M ontbrizet, et stipule de plus
que tous les frais qui seront faits par la suite, pour l’obtention des
jugemens qu’il se propose d’obtenir contre qui bon lui semblera ,
seront à sa charge, ne vient pas à l’appui de la prétention du
citoyen C h o u ssy, mais au contraire rectifie la subtilité dont il veut
abuser. Ici il est question de remise de billets et e ffe ts, d’action
contre les débiteurs de ces effets ; c’est une réserve particulière ,
une convention indépendante, et sans rapport à celle qui con
ditionne l’obligation du payement des 16,000 fr.
Examinons la même question sous une autre face.
L e payement de la somme de iG,ooo fr. renvoyé à l’époque d ’un
jugem ent, frappoi t-il sur la demande des sieur et demoiselle D ucros ,
héritiers Bouchaud?
O h ! très - certainement o u i, parce qu’il y avoit action d’une
part, et action qui subsistoit; que de l’autre , il étoit indispensable
de faire cesser la réclamation des héritiers Bouchaud.
11 s’agissoit de faire dire, envers les héritiers Bouchaud, et sur
B 2
�( 12 )
leur demande, que leur tuteur avoit pu recevoir 18,667 fr. sur la
créance mobiliaire de 25 ,ooo fra n c s , prix d’un office ; que consé q u e m m e n t Maigne, ayant payé à Ducros de Brassac, avoit bien
payé; que la reconnoissance du tuteur valoit envers les niineurs.
C ’étoit alors, et avec ce jugement, que le citoyen M aigne, ne devant
aux héritiers Bouchayd que la somme de 6,543 fran cs, formant
le premier article de son arrêté de compte avec le sieur D uçros
de Brassac, ayant encore dans les mains 16,000 fr. com plétant,
avec ce qu’il avoit p a y é , ou au chevalier de Brassac, ou à Choussy,
les 4 -3,657 francs dûs au sieur de Brassac, de son c h e f, pouvoit
délivrer la somme de 16,000 francs à C h oussy, et être pleinement
et entièrement libéré.
C ’étoit pour avoir cette assurance, pour savoir à qui il payeroit,
et ne payer qu’une fois, que le cit. Maigne avoit plaid«* contre le cit.
Choussy. L a sentence du 19. août 1791 avoit réglé les parties à cet
égard; et, par le traité du 27 thermidor an 3 , Maigne n’y renonce
pas ; le traité n’est qu’une exécution de cette sentence, et s’y réfère.
Ainsi que l’avoue le citoyen Choussy en en détournant la vraie
ca u se, le citoyen Maigne eût eu Ja volonté comme la possibi
lité de p a yer, au 27 thermidor an 3 , 56 ,000 francs au citoyen
Choussy ; et il est de fait que Choussy vouloit les toucher alors,
parce qu’il avoit à faire le remboursement de la constitution de
dot de son épouse, remboursement auquel il employa les 20,000 fr.
qu’il re ç u t, ce qui fait qu’il n’a rien perdu sur ce payem ent.
C e peu de m ots, sur la seconde question , prouve démonstra
tivement , et sensiblem ent, que le payement de la somme dç
16,000 francs ne devoit être fait à Choussy, dans l’intention des
parties , et dans leur convention , qu’autant que Maigne seroit
déclaré, par jugement ( avec les vraies parties ) , bien libéré de
18,667 francs sur le prix de l’office Bouchaud : car il répugne au
sens, à la raison , que M aigne ait voulu payer deux lois la même
6onime ; qu’il ait entendu contracter envers Choussy une obligation
nouvelle, sans cause, sans prix. — 11 ne devoit rien personnellement
au citoyen Choussy, le citoyen M aigne; il 11e lui avoit rien dû ;
�H *
(■s)
il ne pouvoit être tenu de lui payer, par l’effet de la saisie-arrêt,
(]ue ce qu’il devoit au sieur de B rassac, et ce qu’aucun autre
n ’avoit droit de toucher.
O r , il étoit dans l’intention des parties, et ce fut leur conven
tion, que la somme de 16,000 francs ne seroit payée que dans le
cas où le cit. Maigne feroit ju g er, contre les héritiers Bouchaud,
qu’il avoit bien payé 18 ,6 57 francs sur le prix de l’office, en payant
au tuteur desdits héritiers.
L e citoyen C h o u ssy, rédacteur du traité, rendit parfaitement
la convention, mais en détourna l’application ; il ayoit ses raisons :
Maigne ne s’en défia p a s, et n’y prit pas garde. — Inexercé dans
les tournures qu’on peut donner à une clause, un négociant probe,
et de bonne f o i , ne voit que le fait ; et ce qui a été convenu,
ce qui a été expliqué et arrêté , lui paroit é c rit, en quelques
termes que la convention soit exprimée. M aigne vit et lut la con
dition imposée à son obligation de payer 16,000 francs; il ne fit
pas attention que Choussy désignoit les héritiers de la succession
de Brassac , pour les sieur et demoiselle de Brassac : un nom
donne pour un autre échappe aisément à la confiance. Il n ’eût pas
conçu même ce que Choussy pouvoit avoir en v u e , en désignant
les héritiers de Brassac pour les héritiers Bouchaud , ou les enfans
de Brassac; et d'ailleurs il ne pouvoit pas être fait d'erreur, dès
qu’il n 'y avoit qu'un procès à faire ju g e r, qu'une réclamation
fo rm ée, et qui fit obstacle au citoyen Choussy pour le payement
de 16, 000 francs.
L e citoyen Choussy dit qu’il y a ambiguïté dans la clause, et
qu’elle doit s’interpréter contre le citoyen M aigne. Cette opinion
n est pas la doctrine des auteurs : nous nous en tiendrons à ce que
dit le célèbre et judicieux Domas.
Dans sa dissertation préliminaire sur les règles d ’interprétation
des lois, il s exprime ainsi : « Il est nécessaire d’interpréter les lois,
« lorsqu’il arrive que le sens d’une loi, tout évident qu’il parolt dans
« les term es, conduiroit à de fausses conséquences et à des décisions
« qui seroient injustes, s'il étoit indistinctement appliqué à tout
�(i4)
« ce qui semble compris dans l’expression ; car alors l’évidence de
« l'injustice qui suivroit de ce sens apparent , oblige à découvrir,
« par une espèce d’interprétation , non ce que dit la loi , mais ce
« qu’elle veut, et à jugerparson intention quelle est son étendue. »
Sur le chapitre des conventions, analisant les dispositions des lois
d e là m atière, il enseigne, article VIII, que « c’est par l’intention
« des parties qu’on explique ce que la convention peut avoir
« d’obscur ou de douteux. » L . 3g , ff. de pactis.
A rticle X I. « Si les termes d’une convention paroissent contraires
« à l’intention des contractans, d'ailleurs évidente, il faut suivre
« cette intention plutôt que les termes. » L oi 219, ff. de verb. sign.
A rticle XIII. (( Les obscurités et les incertitudes des clauses qui
« obligent, s’interprètent en faveur de l’obligé; et il faut restreindre
« l’obligation au sens qui la diminue ; car celui qui s’oblige ne veut
« que le moins , et l’autre a dù faire expliquer plus clairement ce
» qu’il prétendoit. » L , 10 9, ff. de verb. obli.
A rticle X IV . « Si l’obscurité, l’am biguïté, ou tout autre vice
« d ’une expression , est un effet de la mauvaise f o i , ou de la faute
« de celui qui doit expliquer son intention, l’interprétation s’en fait
u contre lui. A in s i, lorsqu’un vendeur se sert d’une expression
« équivoque sur les qualités de la chose vendue , l’explication s’en.
« fait contre lui. »
T o u t s’applique à la cause présente , et frappe le cit. Choussy.
C ’est de sa part qu’a été la mauvaise foi ; l’infidélité est de son fa it ,
puisqu’il est le rédacteur du traité : il manque de sincérité ; il est le
créancier, et doit souffrir l’interprétation en faveur de la libération.
Son système blesse la raison , offense la probité.
Il faut donc, d’après les préceptes et les lois précités, chercher
à connoître qui l’on a v o u lu , qui l’on a pu désigner comme devant
souffrir un jugement en faveur du citoyen M aigne, déclarant le
payement de 18,657 francs , fait au sieur Dupros de Brassac , bien
fait et imputable sur la créance propre aux héritiers Bouchaud ; et
autorisant encore le citoyen Maigne îx payer 16,000 fr. au citoyen
Choussy , au préjudice de la réclamation de la dame Ducros
�ly j
( «5 )
d’Apchier : et cette recherche n’est pas pénible; le résultat n ’ën est
pasdouteux. Il est dém ontré, il est fortement sen ti, qu’il n’y avoit
de jugement à obtenir, pour légitimer le payement des 16,000 fr.
laissés en réserve, que contre les sieur et demoiselle Ducros de
Brassac.
L e citoyen Choussy prétend que l ’obligation du citoyen M aigne
est purement absolue et sans condition ; en sorte que, dans ce sys
tème], il étoit surperflu de s’occuper de savoir quelle a été l’intention
des parties, le vrai sens de leur convention.
Il d it, page 20 de son mémoire : « L e citoyen Choussy, créancier
« du chevalier de Brassac, avoit fait saisir entre ses mains : Maigne
« paye en vertu de cette saisie; d è s-lo rs, nécessairement et évi« dem m ent, il devoit obtenir une compensation sur la succession
« du chevalier de Brassac. C ’est là ce qu’il a entendu ; c’est ce qui
« lui a fait obtenir une suspension de payement pour la somme
« de 16,000 francs : son obligation est donc absolue, et sans con« dition. »
L e plus grand talent ne peut pas même colorer une mauvaise
assertion. L e citoyen Choussy n ’a pu poser sa thèse, qu’en avouant
toujours une condition qu’il veut ne pas exister; e t, dans la consé
quence de sa proposition , il dit une erreur.
Q uoi! 1<^tiers-saisi, qui paye au saisissant, a besoin d’obteni^de
faire prononcer une compensation envers le débiteur saisi! et avec
quoi compense-t-il? la compensation se fait d ’une dette à une autre.
L e chevalier de Brassac ne devoit pas au citoyen Maigne ; il n’y
avoit pas de compensation à obtenir.
Mais si la nécessité de la compensation, ainsi que l’entend le
citoyen C h o u ssy, faisoit accorder une suspension de payement
pour les 16,000 fr. il y avoit même raison pour les 20,000 francs ;
et cependant Maigne en iaisoitle payement. Les parties ne sentoient
donc pas l’évidente nécessité que le citoyen Maigne obtint une com
pensation; et, puisqu’il y avoit une cause de suspension, il falloit
nécessairement une condition. Si Maigne exposant 20,000 francs
n ’en vouloit pas exposer 56,o o o , et sc réservoit un jugement
�( 16 )
en sa faveur, avant d’être tenu de payer les 16,000 francs, il imposoit
à son engagem ent la condition de ne pas payer, si le jugement
étoit contre lui. Le citoyen Choussy n ’a donc pas prouvé que l’obli
gation du citoyen Maigne soit absolue et sans condition. Il y a
m ieu x, il ne le pense pas.
M ême page du m ém oire, le citoyen Choussy dit que le citoyen
Maigne devoit personnellement au chevalier de Brassac plus que la
somme de 56,000 francs , pour laquelle il s’obligeoit, et que cette
circonstance justifie l'obligation absolue et sans condition de
Maigne envers Choussy.
Mais si nous établissons qu’il ne pouvoit pas , en vertu de sa
saisie-arrêt, toucher sur la dette du citoyen Maigne envers le sieur
Ducros au delà des 20,000 francs qui lui furent payés com ptant,
nous aurons écarte l'induction du citoyen Choussy, tirée du fait qu’il
avance, et nous aurons prouvé encore que l’obligation n ’a pas été
absolue.
>■
O r , un calcul simple détruit et le fait et l’induction du citoyen
Choussy.
Par le traité du 2<)décembre 1786, le citoyen Maigné sereoonnoît
débiteur du sieur Ducros de 5 o,ooo francs: dans cette som m e, n'y
entre la créance des héritiers Bouchaud que pour 6,545 francs, parce
que le citoyen Maigne avoit payé sur cette créance 18,667 francs,
antérieurement au traité : reste bien pour la créance personnelle du
sieur de Brassac 45,667 fran cs; nous sommes d ’accord ju sq u e-là .
Mais le chevalier de Brassac , ou M aigne, doivent rembourser
2 6 , 0 0 0 fr. aux héritiers Bouchaud ; et si Maigne est Condamné, par
l’effet de l’engagement contracté par la quittance qu’il a fournie de
celte somme au sieur Fôurnier de T o u n y , de la payera la demoi
selle D u cro s, il est de toute évidence que le chevalier de B rassic,
qui a reçu de Maigne 18,667 francs , doit lui en faire raison , et
les imputer sur sa créance personnelle, qui , d è s-lo rs, diminue
d ’autant, et se réduit à 25,000 francs. — Le citoyen Maigne justifie
avoir payé 6,024 fr* au sieur Brassac après le compte réglé en 1786;
rt, avant la saisie'du 6 août 1787, il ne devoit en l’an 5 , età l’époque
du
�fïï
( 17 )
du traité avec Choussy , que 20,000 francs au sieur de Brassac
personnellement. Son obligation absolue , et sans condition ,
pour 36 ,ooo francs envers le citoyen Choussy , n’est donc pa&
justifiée.
Elle est donc sans cause cette obligation que le citoyen Choussy
veut n ’être pas conditionnelle, et elle est nulle. L a nullité ne
sauroit être méconnue : on ne peut ouvrir un livre de droit sans
y trouver le principe consigné.
Comm ent justifie—t-il maintenant le défaut de cause dans l’obli
gation absolue ? Il ne s’est pas donné la peine de l’entreprendre.
Il a dit ( hors celte thèse ) qu’il avoit fait des remises considé
rables à la succession de Brassac : mais ces prétendues rem ises, ne
profitant pas au citoyen Maigne , ne donnent pas une cause à son
obligation ; et nous établirons, dans un m om en t, qu’au lieu de
faire des remises sur sa créance, Choussy l ’a augmentée bien
indélicatement.
Il a dit encore que Maigne avoit obtenu des remises du che
valier de Brassac, qui n avoit pas pu en faire à son préjudice.
L e traité passé avec le sieur de Brassac porte bien , h la vérilé,
l’énonciation d’une remise de 18,657 francs ; mais nous avons déjà
remarqué que cette somme avoit été payée avec imputation sur
la créance propre aux héritiers Boucliaud , et que l’énoricialion
insignifiante d’une remise étoit une couleur à l’hypothèque que le
chevalier Ducros vouloit se conserver pour sa créance personnelle.
11 a été établi bien conIradictoirement a\ec le- citoyen C houssy,
dans l’instance au tribunal du district iVtsGoM><f sur la saisie-arrêt,
que les 18,657
avoient été reçus par le sieur de Brassac. C e
fa it, certifié par des hommes honnêtes et consideres dans Brioude,
témoins oculaires du compte fait avec le chevalier de Brassac , est
d’ailleurs justifié par le rapport de plusieurs pièces. Ces preuves
ont paru suffisantes aux citoyens V e r n y , T o u ttée , Favard et
Pagès , qui ont consigné dans une consultation donnée au citoyen
M aigne, le 28 thermidor an 7 , qU’à moins de se refuser à l’éviC
�( i8 )
dence, la certitude des payemens de 18,657 ^r* ne sauroit être
mieux démontrée.
N e parlez donc plu s, citoyen Choussy, de remises faites: vous
ayez tant besoin de vous taire à cet égard.
Revenant sur l’étendue et la validité de l’obligation du citoyen
M aigne, il n’y a pas de parti moyen pour Choussy.
L ’obligation est conditionnelle, au cas où le citoyen Maigne
feroit juger qu’il a bien payé au sieur Ducros la somme de 18,657 &•
sur celle de 25,000 fr. prix de l’office Bouchaud ; et dès qu’il a ,
au contraire , été jugé que Maigne avoit mal payé au tuteur ; qu’il
étoit personnellement tenu de faire valoir la quittance qu’il a
donnée ; et qu’il a été condamné à payer 22,5oo fr. à la dame
Ducros-d’A p ch ie r, le surplus demeurant au sieur Ducros son
fr è r e , il est de toute évidence que Maigne ne peut pas p a y e r, et
que Choussy ne peut pas réclamer la somme de 16,000 fr.
Si l’obligation ne contient pas la condition , elle est nulle à
défaut de cause, et le payement n ’en peut pas être demandé.
Il fa u t, à la validité d ’un engagement , une cause. Pour con
sentir une obligation , il faut en avoir reçu le montant ; sans cela,
point d’engagement valable.
C ’est ce qu’ont entendu les premiers juges, quand ils ont d it ,
dans un des motifs de la sentence dont est appel, que « l’acte du
« 27 thermidor an 3 ne contient aucune cession de droit de la
« part de Choussy en faveur de Maigne ; que Choussy n ’a pas
« renoncé, au surplus de ses droits contre le chevalier de Brassac;
« qu’il n ’y en est pas djt.un mot ; qu’il a encore moins subrogé
« Maigne à ses dpoi&T et qu’ainsi celui-ci n ’auroit ni d roits, ni
« qualités pour les exercer. »
Que répond le citoyen Choussy , page 26 de son mémoire ?
«
«
«
«
«
Lorsque le citoyen Maigne se reconnolt débiteur, sauf son
recours contre qui bon lui semblera , ne résulte-t-il pas de ces
expressions un transport ou une cession en faveur de Maigne ?
le tiers saisi qui paye au créancier saisissant n’est-il pas subrogé de plein droit au créancier qu ’il a payé ? »
�( *9 )
Peut on reconnoltre de l’identité de la subrogation légale, qui
s'acquiert par le fait du payement de la dette d’autrui, au trans
port de droits qui exige les conditions de la vente ?
L e payement fait à un saisissant, en déduction ou en extinction
de sa propre d ette, peut-il faire un transport de créance ? Le
tiers saisi n ’achète pas ; il se libère : il n’y a donc pas de subro
gation légale.
A u reste, la subrogation de droit n ’étant pas du fait du créan
cier qui reçoit tout ou partie de sa créan ce, et dans les limites
dans lesquelles elle a lie u , ne dépendant pas de la volonté du créan
cier , ne donne pas une cause valable à une obligation qui n ’en a
pas d’autre : ainsi point de prix , point de cause à l’obligation
absolue du citoyen Maigne.
N ’auroit-il pas pressenti un jugement conforme aux principes
invoqués , le citoyen C h oussy, quand il a voulu se placer dans
une situation de perte évidente, en se refusant à lui-même la res->
source de la tierce opposition à la sentence rendue au profit de la
dame Ducros , dont il critique la décision , en reprochant au
citoyen Maigne de ne s’être pas défendu?
Les divers jugemens rendus en faveur de la dame D u cro s, les
consultations dont le citoyen Maigne a fait les faux frais, prouvent
sa résistance à souffrir la condamnation prononcée contre lui en
faveur de la dame Ducros-d’Apchier. L es longs plaidoyers dont il
est porteur, l’appel en cause du citoyen C h o u ssy, prouvent qu’il
s’est défendu, et laissent au citoyen Choussy tout le tort de son
traltro et coupable silence.
Q u’il ne fasse donc de reproche qu’à lui-même ; et qu'il se con-»
duise franchement une fois.
Nous ne sommes pas chargés de sa défense ; mais nous soute'«
nons qu’il a d ro it, et qu’il est encore recevable à se pourvoir par
tierce opposition contre la sentence rendue au profit de la damo
Ducros-d’Apchier.
Pour être fondé dans une tierce opposition, il faut avoir intérêt
de faire réformer des condamnations qui rejaillissent contre nous.
C 2
�D e cet’ intérêt sorterit le droit et la qualité. E t puisque le citoyen
Choussy pense qué, pour être recevable dans une tierce opposition
à un jugem ent, il faut avoir eu, lors de ce jugem ent, une qualité
qui aie obligé de nous y ' appeler, il peut soutenir qu’il avoit
cette qualité , puisque, d’une p a r t, il a été appelé par le citoyen
M aigne, et par exploit; q u e , d’autre part, il avoit intérêt de faire
■dire que le citoyen de Brassac , son débiteur, avoit eu le droit
de recevoir du citoyen M aigné la créance mobiliaire des sieur""
et demoiselle Ducros , ses pupilles, et que le citoyen Maigne avoit
bien payé.
A u re ste , que le citoyen Choussy se conduise comme il lui
plaira à l’égard de la dame D ucros-d’A pchier: nous n ’avons d’objet
que celui de réfuter ses assertions, et de le montrer en guerre
perpétuelle avec la raison et les principes de loyauté et de justice.
Ici se borneroit la défense du citoyen Maigne , déjà assez éten
due ; mais il faut forcer le citoyen Choussy sur tous les points.
II pense qu’il n ’y a plus de délais pour le citoyen M aigne,
pour remplir la condition de son obligation ; et il le prouve par
un mauvais sophisme : voici son langage*, page 20 deson mémoire.
« Le citoyen Maigne pourroit-il penser que, parce qu’il s’est
« obligé de payer cette som m e, après avoir obtenu un jugement
« en sa faveur contre cette succession répudiée, il pouvoit se
<c jouer de ses engagemens, éviter ou reculera son gré le paye« m ent, jusqu’à ce qu’il lui plairoit d’obtenir un jugement contre
« le curateur à la succession vacante?
« Peut-il croire qu’après sept années de silence , il éludera une
« obligation formelle et absolue? Il n ’a pas dit qu’il ne payerait:
« qu’à condition qu’il obtiendroit un jugement en sa faveur ; il
w s'est obligé de payer, après l’avoir obtenu. »
• Nous adoptons la conséquence de l’argument du citoyen
Choussy. Maigne n’ayant pas dit qu’il ne payeroit qu’à condi
tion qu’il obtiendroit un jugem ent, s’est obligé de payer, après
avoir obtenu un jugement.
Eh bien! il n ’est pas obtenu ce jugem ent, ni contre le cura-
�( 31 )
leur , ni contre les héritiers Boucliaud. L e terme de la condition ,•
ou du payement si l’on v e u t, n’est donc pas arrivé; la condition
est à remplir.
Est-il certain que le citoyen Maigne n'eut pas encore le droit
d ’invoquer la clause de réserve, dans le cas où il seroit décidé
que c^st contre le curateur à la succession Ducros de Brassac,
qu’il a obtenu*le jugement convenu par le traité?
Il n’y avoit pas de terme lim ité; s'il ne doit pas être perpé
t u e l, il souffre néanmoins un long cours de temps, et sept
années ne sont pas le long temps défini par la lo i, il en faut dix
au moins.
O r , le citoyen Maigne fait ce dilemme. D e l'aveu du citoyen
C lioussy, je ne me suis obligé de payer qu'après avoir obtenu un
jugement contre le curateur du chevalier de Brassac; la consé
quence est que vous ne pouvez agir que quand le cas de la condition
exprimée sera arrivé. Votre demande est donc prématurée.
Si je me suis trompé , en pensant que c’étoit avec la dame
Ducros que je devois faire rendre un jugem ent, c’est bien parce
que vous, Choussy, m ’avez trompé aussi, et vous devez m e donner
le temps de réparer l’erreur. V otre action est encore prématurée.
Dans la situation des parties , l’homme et le juge sentent la
nécessité de surseoir encore à la demande du cit. Clioussy.
L a somme de 16,000 fr. qu’il demande à loucher, ne lui est
pas d ue, c’est ce qui sera établi. L e cit. M aign e, qui ne doit qu’une
lois sansdoute, l’a déjà payéeà ladame D ucros-d’Apchier, en vertu
de la sentence contre lui rendue depuis un an : il a quittance de
31,000 francs. L 'é q u ité , la rigoureuse justice, ne commandentelles pas la surséance? Choussy retient tous les effets se portant
à*i 1,260 fran cs, que le chevalier de Brassac et lui ont été con
damnés à rendre au citoyen Maigne. Choussy a même touché le
montant de plusieurs ; il est responsable des autres , s'ils ont péré■clité dans ses mains : est-il en souffrance?
M a is, peut-on nous d ire, la surséance n’est qu’un délai nouveau,
dont le terme laissera toujours le citoyen Maigne dans la même
�T
( 22
situation, puisque d’après lui tout jugement qu'il obtiendra contre
le curateur à l’hoirie du chevalier de Brassac, sera insignifiant à
l ’égard de la dame Ducros-d'Apchier.
C ette objection ne peut pas être faite par le citoyen C h o u ssy,
qui a écrit, et dans le traité et dans son m ém oire, que ce seroit
contre le curateur à l’hoirie répudiée que Maigne obtiendroit un
jugement en sa faveur. Il faut que la conventionr-soit exécutée
dans un sens ou dans un autre.
E t d’ailleurs ne s e r o it-il pas permis au citoyen Maigne de
prendre, à l’égard du citoyen Choussy, la place du chevalier de
B rassa c, son garant , et de compter avec le citoyen Choussy ?
Cela parolt incontestable : le garanti peut exercer les droits de
son garan t, et faire ce qu'il feroit lui-même. O r , avant que
Choussy puisse, en vertu de l’obligation conditionnelle du citoyen
M aigne, exiger le payement de la somme de 16,000 francs qui
appartient aux sieur et dame D u cro s, il doit justifier de la légi
tim ité de sa créance , établir par un compte contradictoire que
cette somme lui est encore due.
Choussy doit bien faire confirmer sa saisie , vis-à-vis le débiteur
principal; et M aigne, exerçant les droits de son garan t, peut bien
Requérir la liquidation de la créance de Choussy saisissant, et
demander un compte. ..
E n vain Choussy opposera le traité du 27 thermidor an 3 , pour
fin de non recevoir. Ce m o ye n , presque toujours en opposition à
bonne f o i , n ’est pas admis quand il parolt de l’erreur et de
l ’ignorance de fait.
O r , Maigne ignoroit, au 27 thermidor an 3 , que les effet»
M onlbrizct , de 10,000 francs , n'étoient pas la propriété de
C h o u ssy, mais seulement le gage saisi de sa créance. 11 pensoit*,
comme Choussy l'articu lo it, que les fonds en avoient été faits au
chevalier de Brassac.
Il ignoroit que le citoyen Choussy eût touché 5,75a liv. 18 sous
en vertu de ses saisies, et Choussy n’en parla pas : il ne les porta
pas eu déduction,
�( 25}
11 ignoroit que le cit. Choussy avoit vendu les Lois , les grains,
les charbons du chevalier de Brassac, et touché ses fermages du
domaine de D u rb iat, en vertu d ’autorisation sollicitée et obtenue
sous une reconnoissance que Choussy a toujours dissimulée.
C e n’est pas l’ignorance de d roit, dont personne n ’est excusé ,
que nous invoquons. C ’est l’ignorance de fa it, qui ne se couvre
pas mieux que Perreur de calcul : c’est le dol personnel du citoyen
Choussy.
A in si, point de fin de non recevoir contre le compte demandé au
citoyen Choussy.
En vain ilopposeroit que ce n’est pas par la preuve testimo
niale que l’on peut établir les recouvremens et les perceptions
articulés.
Dans l'état des choses et la situation des p arties, la preuve
testimoniale est admissible.
Premièrement, parce que le citoyen M aigne, étranger aux affaires
de Choussy et du chevalier de B ra ssac, n'a pas pu faire assurer,
par des écrits , l’usage et l'abus que le citoyen Choussy a fait des
mandats et des pouvoirs qu'il a reçus du chevalier de Brassac.
Secondement, la perception n’est pas une convention, mais un
fait personnel q u i, par sa publicité, constitue une comptabilité.
A u surplus, le cit. Maigne s’est procuré des pièces form ant des
preuves sur certains recouvrem ens, et des commencemens de
preuves sur une perception. E t peut-être en a-t-il assez pour la
preuve que Choussy a reconnu qu’il ne lui étoit rien dù par le che
valier de Brassac.
Il est sans contredit que le cit. Maigne est fondé à demander
la déduction des sommes qu’il établit ou établira avoir été reçues
par le cit. Choussy, en déduction de sa créance, contre la succes
sion du chevalier de Brassac, quoiqu’antérieurement au traité de
l’an 3 , dès que les pnycmens ne sont pas du fait du cit. M aigne,
et que le cit. Choussy les lui a laissé ignorer.
Mais y auroit-il quelques difficultés à ordonner le compte entre
Maigne et C h o u ssy, sans l’assistance du curateur à l’hoirie du
�VJ*
i l l
(=4)
chevalier Je Brassac ? C'est alors 1« cas d ’accorder au cit. Maigne
1111 délai, pour agir contre ce curateur. Ce sera laisser au citoyen
M aigne, et la faculté convenue, et le temps de satisfaire à la clause
du traité de l'an 3 , sous tous les rapports et dans tous les sens. C e
sera le relever de l’erreur dans laquelle il a été, si vraiment il a
erré.
Ce délai demandé et l'action à diriger contre le curateur serontils sans fruit pour le cit. M aigne? Ici s’expliquent les motifs et
l ’intérêt qui justifient et démontrent l'absolue nécessité de surseoir
à statuer sur l'appel, jusqu'à ce que le cit. Maigne aura, confor
mément à l'expression de la clause du traité de l'an 3 , fait pro
noncer Contre le curateur à l’hoirie du chevalier de Brassac.
Cette explication toutefois n'est «ordonnée, il faut que le cit.
Choussy le sache b ien , que parce que le cit. Maigne n ’entend pas
taire ce qu'il se propose. Il ne connoît pas la dissimulation : il
s’irrite de la fourberie, et ne ruse jamais; car il suffiroit au cit.
M aigne de dire : Je n ’ai pas, dites-vous, satisfait aux expressions
de la clause de notre traité, énonciative de la condition sous laquelle
j’ai promis payer iG,ooo francs; ce n’éloit pas contre les héritiers
Bouchaud que je devois obtenir un jugement, c'étoit contre les hé
ritiers du chevalier do B rassac, ou le curateur à son hoirie. Eh
bien , n’y ayant pas eu de délai lim ité, il ne peut pas y en avoir de
fatal ; je suis toujours à temps, et je me soumets à satisfaire à la
clause, autant qu’il sera en mon pouvoir. E t certes, la faveur
méritée au cit. Choussy ne fera pas fléchir la rigueur des prin
cipes en ce point.
L e cit. Maigne se propose donc, si la justice le met dans cette
nécessité, de faire nommer un curateur à l’hoirie abandonnée et
non répudiée du chevalier de Brassac; de form er contre lui une
action en recours des condamnations prononcées en faveur de la
dame D ucros-d'Apchier, ou de la demande du cit. Choussy.— Pouf
p'irer à l’action du cit. M aigne, le curateur n’aura de ressources,
que de faire cesser la prétention du cit. Choussy contre le cil*
M aigne, en faisant dire avec lui q u ’il n ’est pas créancier.
�W
'
(25)
A lo rs, par le secours des âmes b ien nées, se débrouillera la con
duite tortueuse du cit. Choussy. L à se découvrira l’abus d’une con
fiance demandée par écrit, et qui devoit rassurer le chevalier de
Brassac. L à reparoîtra peut-être l’écrit fait double entre Choussy
et le chevalier de Brassac, contenant reconnoissance d e s nantissem e n s, des mandats dont Choussy a voulu se faire des titres de
créance. L à enfin s’établira, nous en avons la certitude, puisque
déjà nous en avons de si fortes preuves, que Choussy n ’est pas
créancier.
E t alors le curateur se fera renvoyer de la demande récursoire
du cit. M aigne; et le cit. Choussy déclaré non créancier aura ce
qu’il exige, le jugement en faveur du curateur contre M a ign e, et
le cas de la condition exprimée dans le traité du 27 thermidor an 3 ,
arrivera en sens contraire, au cas dans lequel M aigne pouvoit seu
lement payer , ( un jugement en sa faveur ) ; et tout rentrera dans
l'ordre et dans les principes d’équité. L a dame Ducros aura sa
chose propre. Maigne ne payera pas deux fois. Choussy ne
touchera pas injustement.
Nous terminons par un voeu bien sincère. L e citoyen M aigne
donne au citoyen Choussy un bel exemple d ’une grande franchise,
même en procès, en lui révélant le secret m o tif du subsidiaire.
Puisse cet exemple fructifier dans l’àme des plaideurs, et rappeler
le citoyen Choussy au sentiment de la considération nécessaire
à un magistrat !
A.
M A I G N E .
V A Z E I L L E , défenseur avoué
A R IO M
, de
l' imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du Tribunal
d’appel. _ An XI.
^
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Maigne. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vazeille
Subject
The topic of the resource
créances
saisie
actes de notoriété
offices
commerce
mines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié en réponse, pour le citoyen Maigne, négociant, habitant de la ville de Brioude, intimé ; Contre le citoyen Jean-Joseph Choussy-Dupin, ex-négociant, habitant actuellement la ville du ¨Puy, appelant.
Table Godemel : Transaction : 2. la transaction sur procès convenue entre les parties, le 27 thermidor an 3, par laquelle Maigne resta débiteur de 16000 livres, constitue-t-elle, de sa part, une obligation absolue, ou conditionnelle ? s’il y a erreur, doute ou obscurité dans la rédaction, contre qui doivent-ils être interprétés ?
affaire jugée par juridictions successives
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1784-An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1305
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1304
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de notoriété
commerce
Créances
Mines
offices
saisie
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86ae1a8dfe93d713c0867841ab49e2e1
PDF Text
Text
MÉMOIRE
COUR ROYAL/
DE RIOM.
< W W % i H » W W W |> W
PO U R
Le sieur M O SSIER , In tim é S
I » m
CH AM BRE
c o rre c tio n ^
CO NTRE
L e s sieurs B L A N C et G U I L L A U M O N T } gérans
,
de la Compagnie de M ena t , p o u r l ' exploitation
du schiste carbo-bitum ineux , A p p e la ns.
i
i
L a découverte du schiste carbo - bitumineux de
Menât fît naître en Auvergne une nouvelle branche
d ’industrie. On pensa que ce schiste pourrait rem
placer avantageusement le noir animal dont le prix
était alors assez élevé. Pour l ’exploiter, des spécula
teurs se réunirent en compagnie. Divers essais eurent
lieu. Ils réussirent. Alors l ’exploitation s’organisa plus
en grand et sur des bases plus fixes. Le sieur Mossier
en fut long-tems le directeur provisoire.
Sa gestion avait été approuvée, et les produits
qu’elle avait fournis avaient paru suffisans, lorsque,
la compagnie voulant convertir la régie en entreprise,
le sieur Mossier fut invité à s’en charger.
Il accepta cette offre et se soumit, d ’abord se u l,
ensuite avec un associé, à livrer des noirs semblables
à ceux dont une assez longue gestion avait pu faire
connaître les propriétés.
�(
2 )
Pouvait-il craindre que plus tard on lui élèverait
des difficultés sur la nature, sur lesqualités des produits
vérifiés déjà par l ’expérience de plusieurs années ?
C ’est, cependant, ce que l ’esprit de tracasserie de
quelques personnes lui a fait éprouver.
E n vain le sens des conventions faites avec le sieur
Mossier avait-il été fixé par une longue exécution.
E n vain ces conventions avaient - elles été même
interprétées judiciairement après un soigneux examen
par des arbitres du choix des parties.
Une semblable difficulté a été de nouveau soulevée
par les gérans de la compagnie, et il a fallu soumettre
encore aux décisions plus lentes des tribunaux., la
question de savoir si l ’on pouvait refuser une partie
des noirs fabriqués, sous prétexte que le grain en était
trop fin; c’est-à-dire, une question identique à celle
sur laquelle ces g é r a n s d i i f i c u l t n e u x venaient d e suc
comber.
Un jugement du tribunal de commerce a fait justice
de cette seconde contestation.
Assigné devant la C o u r , sur l ’appel de ce juge
ment, le sieur Mossier n’a pas à redouter l ’examen
éclairé des magistrats supérieurs.
Mais s’ils ne peuvent espérer de succès, ses adversaires
auront au moins le triste avantage de lui causer un
grand préjudice en paralysant toutes ses ressources, cri
retenant dans leur caisse les fonds qui lui sont dus; des
fonds pour lui considérables, et qui devaient lui cire
payés dans le mois même d’ une livraison que, depuis
pr ès de deux ans, ils refusent de recevoir.
�( 3 )
FAITS.
' v
On sait que la commune de Menât a clans son terri
toire des mines d’un schiste carbo-bitumineux dont
l ’industrie a su tirer parti en le calcinant, le carboni
sant, et le réduisant en poudre granuleuse propre à
divers usages.
•;
*
Ces mines, concédées d ’a b o r d ’à M. Bergougnoux
par ordonnance du 2o'avril 1825, devinrent, en 1827,
la propriété d’une société qui: se forma pour leur ex
ploitation. Le fonds social se composait de cent actions
de 2000 francs chacune.Le sieur Mossier était au nom
bre’ des actionnaires.
Par délibération du 5 mai 1827 , les.membres de la
société établirent un conseil d ’administration , firent
choix de deux gérans, et nommèrent le sieur Mossier
directeur provisoire de la fabrication du noir, objet de
l ’industrie.
Les gérans étaient les sieurs Blanc et Guillaumont,
ceux là même qui ont intenté le procès actuel.
L a direction provisoire de M. Mossier a duré seize
mois. Pendant cet intervalle,‘»‘les essais se sont multi
pliés-, des envois considérables oitt été faits , et la société a
prospéré de manière à lui faire espérer un brillant avenir.
M. Mossier était celui dont leS Soins’ avaient le plus
contribué à cette prospérité. 'A ussi les membres de la
société avaient-ils, dans plusieurs c i r c o n s t a n c e s , fait
l ’éloge de sa direction.
L ’ un des membres du conseil d’administration, le
sieur Bardonnet, lui écrivait, le 12 avril 1 8 2 8 :
f
« Les échantillons que vous m’avez fait passer sont
�«
«
«
«
superbes, sur-tout ceux que vous avez fait filtrer
de nouveau. Ne vous découragez pas*, fa iso n s du
noir comme cela , et ne craignons pas de çancurrence.
« Ces expressions, ne vous découragez p a s , avaient
« trait au mécontentement que faisaient éprouver au
« sieur Mossier les procédés de certains des sociétaires.
D ’autres membres du conseil d’administration ex
primaient aussi leur satisfaction dans une lettre qu’ils
adressaient aux gérans (les sieurs Blanc et Guillaumont), le 12 juillet 1828.
Après avoir parlé de divers essais faits sur la matière
première, pendant les seize mois précédons, ils ajoutent :
« Il parait qu’enfin 011 est satisfait des résultats
« obtenus, et. q u ’il y a certitude de faire admettre
« par le commerce les produits semblables aux der« niers é c h a n t i l l o n s envoyés à Paris. Dans.cette posi« tion, messieurs, qu’avons-nous k faire? fabriquer
« et vendre. Déjà vous avez conclu un m arché assez
« considérable. Il est donc essentiel de nous mettre
« à même de remplir les engagemens que vous avex
»< pu contracter, quoiqu’ils ne soient que conditionnels
« de votre part. Mais il est évident que ne pas profiter
« du premier débouché considérable q u i s ’oifre à nous,
« serait une faute capitale.
Ces membres du conseil d ’administration émetlent
aussi l ’avis de donner la fabrication à prix fait, et de
comparer les propositions de M. Mossier avec toutes
autres qui auraient pu être faites.
Enfin ils rappellent aux gérans les réclamations de
�(
5 )
M. Mossier, q u i, depuis long-tems sollicite de v o u s ,
disent-ils, un règlement de compte qui lu i fa sse
connaître la somme qui doit lu i être allouée p o u r les
seize mois q u i l est resté à M e n â t o h i l a reçu les
membres de la société, nourri les domestiques de
Vétablissement, et souvent cinq à s ix ouvriers p a r
jo u r .
Cette lettre annonce clairement que, dès cette
époque, le sieur Mossier avait à se plaindre des gérans.
Quant aux propositions qu’il avait faites, elles
avaient été provoquées par une lettre de M. Blanc,
l ’un des gérans, q u i, le 25 avril précédent, lui écrivait
en ces termes :
« L ’intention de la compagnie est de donner la
« calcination , par entreprise, à tant le quintal. Cette
« opération exige deux personnes; je pense qu’il vous
« conviendra de vous en charger, etc.
Telle est la demande qui avait précédé la proposition
que fit le sieur Mossier à la compagnie ou à ses gérans.
Ce fut dans ces circonstances, que de premières
conventions fuient passées entre les gérans de la com
pagnie et le sieur Mossier.
Ces conventions furent signées le
11 est utile de les analyser.
2
août 18 2 8 .
Par l ’article i*r, le sieur Mossier s’engage à livrer à
la compagnie, chaque mois, une quantité de 3 o à 5 o
milliers de noir, pour clarifier et pour couleurs, par
faitement calcinés, blutés et emballés, et de les faire
conduire h Vichi ou à Clermont, moyennant le prix
de 9 francs les cent kilogrammes.
�D ’après l ’article 2, chaque livraison doit être vérifiée
par un agent de la Compagnie, chargé d’en examiner
l ’état et le conditionnement, et d’en constater le poids/
L ’article 3 soumet le sieur Mossier à faire construire,
à ses frais, tous les fours nécessaires à Inexécution et
aux commandes de la société, et à fournir les mar
mites et les combustibles.
Par les articles 6 et 7 , les sieurs Blanc et Guillaumont s’obligèrent, au nom de la compagnie, à faire
réparer les moulins , à faire construire un ou deux
blutoirs par e a u , à faire couvrir les fours par des
liangards, à provoquer, dans l ’année, la construction
d’ une écurie pouvant contenir trois chevaux.
D ’après l ’article 8, le montant du noir livré par
l ’entrepreneur à la compagnie devait lui être payé
chaque mois.
D a p r è s l ’ a r t i c l e 10 , l e b a i l d ’ e n t r e p r i s e devait durer
deux, quatre, ou six années, sans qu ’il put être
interrompu à l ’expiration des deux premières périodes,
si ce n’est en se prévenant respectivement six mois à
l ’avance.
Telles étaient les principales clauses de c e s conven
tions , faites après plus de seize mois d’épreuves sur les
produits, et à une époque oii la qualité des noirs
fabriqués était parfaitement connue de toutes les
parties. Leurs conventions ne pouvaient évidemment
s’entendre que de noirs tels qu ’ils avaient été fournis
jusqu’alors par le sieur Mossier5 et lorsque c e l u i - c i
s’engageait il fournir, chaque mois, 3 o à 5o milliers
métriques de noir p o u r cla rifier ai p o u r co u leu rs, il
�(
7 )
est clair qu’il n’avait pu avoir l ’intenlion de promettre,
qu ’on n’avait pas eu aussi celle d’exiger de lui du noir
d’ une autre qualité, d’ une autre espèce que celui qu ’il
avait jusqu’alors fourni, que celui dont les échantillons
avaient paru superbes aux sociétaires eux-mêmes.
Aussi, pendant toute la durée de ce bail, la com
pagnie, et ces mêmes gérans qui contestent aujourd’hui
reçurent-ils sans difficulté tous les noirs, gros grain ou
fin grain , que produisaient les opérations de l ’entre
preneur 5 opérations coniformes a celles qui avaient été
suivies pendant la direction provisoire.
Il ne s’était pas encore écoulé un an de ce bail .
lorsque, le 7 avril 18 2 9 , le sieur Mossicr s’associa le
sieur Daubrée; et un nouveau bail d'entreprise fut
passé entr’eux et les gérans de la compagnie.
Ce nouveau bail comparé au précédent ne présente
de différence que relativement aux prix, et à. la charge
que prennent les entrepreneurs de vendre des noirs
pour le compte de la compagnie.
Les sieurs Mossier et Daubrée doivent fabriquer du
noir moyennant 9 fr. 5o c. par cent kilogrammes de
noir propre au rafinage,et 20 fr. par cent kilogrammes
de noir propre aux couleurs (art. I er du bail.)
L e noir à raffinerie devait être parfaitement ca lcin é,
b lu tlé et em balle j et le noir de couleur é g a l e m e n t
c a lc in é , broyé , et en tout conform e a u x échantillons
cachetés, déposés entre les mains des gérans.
Il devait être conduit, aux frais, aux risques et
périls des entrepreneurs, soit à Vichi, soit à Clennont
(art. a . )
Les fours nécessaires et les marmites devaient être aux
�frais des entrepreneurs, les bâtimens et les machines
fournis par la société (art 3 .)
Chaque livraison devait être soumise à l'inspection
et à l ’essai d’ un délégué de la compagnie (art. 4 -)
Les entrepreneurs se Soumettaient à fournir à la
société telle quantité de noir qu’elle demanderait,
pourvu qu’ils fussent prévenus six mois à l’avance
(art. 5 .)
Le montant du noir livré devait être payé chaque
mois (art. 8 . )
Il était alloué aux entrepreneurs un droit de com
mission pour les ventes qu’ils feraient (art. 14 .)
Le décès de l ’un des entrepreneurs devait entraîner
la nullité du traité, en sorte que le sieur Daubrée
décédant, le sieur Mossier ne pouvait continuer seul
l ’entreprise sans le consentement de la compagnie; et,
réciproquement, s i le sieur M o s s i e r décédait, le sieui*
Daubrée ne pouvait aussi la continuer qu’en s’ad
joignant un de ses frères; sinon, il lui faudrait le
consentement de la compagnie.
On remarquera que l ’adjonction de M. Daubrée à
l ’entreprise eut lieu principalement pour l ’employer à.
des voyages dans 1’ intérêt de la société; q u ’aussi, dès
l ’origine, il s’est peu occupé de-la fabrication qui est
toujours restée confiée à M. Mossier; le sieur Daubrée
voyageant, soit en France, soit à l ’étranger, pour le
placement des noirs.
Le noir propre aux couleurs était évalué beaucoup
plus que l ’autre, parce que, après avoir passé sous Us
meules des moulins ordinaires, il devait être encore
�(
9 )
broyé et bluté de manière à être converti en poussière
très-fine qui pût se fondre dans Fliuile avec les cou
leurs. Mais pour acquérir ce degré de finesse, d’autres
meules, d ’autres blutoirs eussent été nécessaires; et
la compagnie n’en a pas fourni quoiqu’elle se fut.sou
mise par le bail a faire à ses frais toutes les construc
tions, toutes les machines nécessaires à l ’entreprise.
Il est à remarquer que tout le noir gros ou fin
était alors considéré comme également propre k la
raffinerie. A cette époque même on employait plus gé
néralement à cet usage du noir fin grain. Mais depuis,
l ’on a découvert que le noir gros grain, d ’un certain
numéro, était plus propre à raffiner, parce qu’ il se
combinait moins facilement avec la liqueur, et que ses
molécules restaient plus séparées et clarifiaient par
suite beaucoup mieux.
Aussi voit-on qu’il n’est question, ni dans le premier
ni dans le second bail, de la distinction que l ’on a
voulu faire depuis entre le noir gros grain et le noir fin
grain. E t si l ’on considère que, dans le fa i t , l’ un
comme l’autre peuvent servir à clarifier; qu’en août
1828 et en avril 1 8 2 9 , époque des deux baux, les
railneurs ne faisaient pas de distinction; qu’aujour
d ’hui même encore beaucoup de rafineurs se servent
du noir fin grain , particulièrement du noir animal
de cette qualité, l’on reconnaîtra que, lorsque les
conventions qui nous occupent furent faites entre les
gérans de la compagnie et les entrepreneurs, il était
entendu par toutes les parties que la totalité des noirs
fabriqués, quel q u ’en fut le grain , serait prise par la
•x
�compagnie, sauf à ne payer que 9 fr. 5o c. ceux qui
ne seraient pas propres aux couleurs.
C ’est aussi clans ce sens que le second bail, comme
le premier, a reçu son exécution.
Ou a vu qu’aux termes du bail, des échantillons
cachetés devaient rester entre les mains des gérans. On
en parle même comme si le dépôt en avait été fait. Il
parait cependant que ce dépôt n’eut pas lieu , sans
doute parce qu’il fut jugé inutile; les noirs qui avaient
été livrés jusqu’alorsnevariant paset ne pouvant même
guère varier, puisque c ’était toujours à, l ’aide des
mêmes machines fournies par la compagnie qu'ils
étaient fabriqués.
Il est fâcheux pour le sieur Mossier que ces échan
tillons n’existent pas. Car, à leur inspection, on aurait
reconnu q u e les n o i r s q u ’ o n lui refuse aujourd’ hui sont
absolument semblables à ceux que les é c h a n t i l l o n s
auraient présentés, à ces noirs qu ’on a reçus sans récla
mation pendant plusieurs années, soit comme noirs
à rafinerie, soit comme noirs à couleurs.
Le 6 mai suivant les gérans de la compagnie traitè
r e n t, pour la vente des noirs, avec M. Dum ont, ma
nufacturier à Paris. Yoici les principales clauses de
l ’acte :
Les gérans promettent de livrer h. M. Dumont,
jusqu’au 1 " septembre, tout le noir provenant de la
fabrique de Menât, moyennant 18 fr. les cent kilo
grammes (Art. I e r ) .
Il est convenu qu ’à compter du premier septembre
�( 11 )
et pendant cinq années consécutives on livrerait par
mois au sieur Dumont 35 .,ooo kilogrammes du noir,
dit noir en g ra in , p ro p re , est-il dit, à Vem ploi du
p ro céd é du sieur D u m on t, ne devant pas excéder en
grosseur la toile n° 3 o, ni dépasser en finesse la toile
n° 100, et 5 ,ooo kilogrammes de noir, dit fin à raffi
n erie, propre à la décoloration des sirops (art. 2).
Ces deux espèces de noirs devront être conformes
aux échantillons déposés entre les mains des parties.
Il est dit, dans l ’article l\, que le noir désigné dans
l ’article 2 , sous le nom de noir à raffinerie, serait livré
h M. Dumont, dans la proportion seulement de 1 375
le surplus, est-il ajouté, sera vendu p a r le s gérans.
On voit qu ’il est parlé dans cet acte d’un procédé
de H. Dumont, à l ’emploi duquel était seulement
propre du noir en grain d’ une grosseur déterminée.
Ce procédé était tout à fait nouveau. Le sieur
Dumont, qui l ’avait découvert, l'employait seul alors.
C ’était celui dont nous avons parlé plus haut, et
d'après lequel il faisait seulement usage, pour la déco
loration ^ d’un noir en grain placé par sa grosseur
entre les toiles n°s 3 o et 100.
Ou y voit aussi que le sieur Dumont consentait
cependant à. prendre du noir plus lin pour la raffi
nerie , mais seulement dans la proportion d’un septième,
ce qui prouve que cette espèce (le noir était propre à
cet usage.
On y voit enfin que les gérans s’engagent à livrer
jusqu’au i er septembre tout le noir indistinctement,
et que pour le teins postérieur, si le sieur Dumont
�^
( )
12
n'en prend qu ’une partie, les gérans se- réservent de
vendre le surplus.
Donc ils reconnaissent que tous les noirs indistinc
te ment devaient être reçus par la compagnie.
Le 8 septembre 1 8 2 9 , un nouveau traité eut lieu
entre les gérans et le sieur Dumont.
Les gérans affermèrent à celui-ci l ’établissemeut
de Menât, l’exploitation du schiste, et tout ce que
comprenait la concession du 20 avril 1825.
M. Dumont déclara connaître l ’acte de société, les
conventions faites avec MM. Mossier et Daubrée, celles
pour les transports, qui avaient eu lieu avec an voiturier
nommé Veysset.
Il fut sublitué à la compagnie, à l ’égard de ceux-ci
comme envers le gouvernement.
Le h ail fut fait pour quinze années à commencer
au I er novembre suivant.
Il fut stipulé que, la première année, il ne pourrait
être fabriqué plus de 1200,000 kilogrammes, que, les
autres
années, on pourrait en fabriquer 2,/|00,000*,
et que si la quantité était plus grande, le sieurDumont
paierait à la compagnie, en sus du prix, un franc par
cent kilogrammes de tout noir, quel (juc fû t son em ploi.
Le prix du bail fut fixé à 12,000 francs pour la
première année, à 2/1,000 francs pour chacune des
autres.
Tous les frais de construction et de placement d’agrès
(rétablissement furent mis à la charge de M. D u m o n t .
Le si< ur Dumont promit de fournir une caution de
/|o,ooo francs.
�Les gérans de la compagnie s’engagèrent, de leur
coté, à rapporter la ratification de tous les actionnaires.
Les deux traités qu’on vient d’analyser offraient à
la compagnie d’assez grands avantages :
Par le premier, elle vendaità la compagnie 18 francs
les cents kilogrammes de tout noir indistinctement,
qu ’elle n’a été condamnée elle-même à payer que
9 francs 5o centimes, comme on le verra bientôt. .
Par le second, quoique moins heureux, elle obte
nait cependant sur chaque cent kilogrammes un
bénéfice d’ un franc sans aucuns frais, sans aucune
•
L e second traité a été approuvé parle sieur Mossier,
mais seulement en sa qualité d’actionnaire.
Dans l ’intervalle des deux traités, le sieur Mossier
et le sieur Daubrée avaient passé entr’eux, le iG juillet
1829, un acte par lequel, sans entendre nullement rien
changer a u x conventions du 7 a v ril précédent en ce
(¡u’elles ont d ’obligatoire de leu r part envers les
gérans , voulant prévenir toutes contestations dans
leurs attributions, est-il dit, ils divisèrent entr’eux
les fonctions dont ils s'étaient chargés par l'acte du
7 a v r il, et l ’indemnité qui leur était accordée.
Le sieur Mossier se chargea ^de la fabrication du
noir, du matériel de l ’établissement et de tout ce qui
y était relatif.
Le sieur Daubrée se soumit à faire toute tournée
ayant p o u r objet la vente ou le placem ent du noir
de M enât.
Les indemnités furent divisées comme les travaux,
�et
«
u
«
«
il fut stipulé dans l’article 8 « qu’il serait écrit
aux gérans une lettre signée des deux contracians,
ayant pour objet de les engager à s’y conformer
pour ce qui était des paiemens à faire à l ’ un et à
l ’autre. »
Que cette lettre ait été écrite ou non, il est certain
que les gérans n’ont pas ignoré ces conventions particu
lières aux deux entrepreneurs ; antérieurement même,
le sieur Mossier leur avait écrit pour leur annoncer
qu’à raison de quelques difficultés qui s’étaient élevées
entre lui et le sieur Daubrée, il renouvelait l ’engage
ment de rem plir à lu i seul les obligations contractées.
Cependant le bail fait avec les entrepreneurs conti
nuait à être exécuté de bonne foi jusqu’au i"septembre,
et les gérans, ou le sieur Dumont qui s’ était chargé de
tout p r e n d r e jusqu’à cette époque, n’élevaient pas de
difficulté sur les noirs. Ils les r e c e v a i e n t tous p r i n c i p a
lement comme propres à la raffinerie, mais en partie
aussi comme propres aux couleurs; car les plus fins,
n o t a m m e n t ceux qui étaient en poudre impalpable,
pouvaient servir à ce dernier usage.
Mais lorsque, au i er septembre 1 8 2 9 , en execution
de la convention faite avec les gérans le 6 mai précé
dent, le sieur D im ^n t n’eut plus à recevoir qu’ un
septième des noirs, en noirs fins. Alors se forma un
germe de discussion , les gérans 11e retirant pas le sur
plus de ces noirs fins qu’ils s’étaient cependant réservé
de vendre dans l’acte même du 6 mai.
Cette espèce de noirs s’accumula en p r o p o r t i o n de la
fabrication que dut faire le sieur Mossier pour remplir
�les engagemens des gérans envers le sieur Dumont.
Ceux-ci, en effet, par deux lettres des 3 août et
8 octobre 1 8 2 9 , prévinient le sieur Mossier qu’ il eût
à livrer au sieur Dumont 80,000 kilogrammes, chaque
mois, de noir propre à la décoloration, et dont la
grosseur, sans excéder celle de la toile n° 3 o, ne fût
pas au-dessous de la toile n° 100.
Le sieur Mossier leur répondit,le 12 octobre, qu’il
était en mesure de fournir le noir demandé, pourvu
qu’on le mît en possession d’ un hang'ard indispensable
pour abriter le schiste, le noir et les ouvriers. L e
retard de cette construction } disait-il, est le seul
obstacle à Vexécution actuelle de votre dem ande.
Au lieu de satisfaire à cette juste réclamation qui
avait déjà été plusieurs fois faite verbalement, les
gérans firent notifier le 12 octobre aux sieurs Mossier
et Daubrée une sommation de livrer le noir promis
au sieur Dumont.
Alors le sieur Mossier présenta, le i 4 ? au tribunal
de commerce, une requête dans laquelle il se plaignit
du retard des constructions nécessaires pour l ’établis
sement, et notamment de celle d’ un hangard;
il
demanda à être autorisé à assigner les gérans en nomi
nation d’arbitres.
Des arbitres sont nommés, une instance s’engage
sur divers points de difficultés.
Bientôt les gérans n’obtempérant pas à une somma
tion que leur fit le sieur Mossier de retirer tout le noir
fin qui avait été extrait de la fabrique, les arbitres
sont aussi saisis de ce chef de contestation.
�( «6 )
Devant les arbitres, les -gérans persistèrent clans
leur refus de recevoir ces noirs fins, prétendant qu’ils
ne remplissaient pas les conditions prescrites.
L e sieur Mossier concluait à ce qu ’on lût tenu de
retirer, comme noirs fins, tous les noirs existant en
magasins, au 3 novembre, et à ce qu’on lui en payât
le prix.
Les arbitres, par décision du 17 février i 83 o, or
donnèrent que les sieurs Blanc et Guillaumont, en
leur qualité de gérans, recevraient tous les noirs qui
étaient en magasins} quelle que fu t leu r qu a lité 3 s a u f
néanmoins ce qui aurait été mis de coté comme noir
d ’engrais, au p r ix de 9 fra n c s 5o centimes les cent
kilogram m es sans commission.
Comme ce jugement prononce sur une question
absolument semblable a celle qui est soumise au
jourd’hui il la Cour, il peut être utile d’en faire
connaître les motifs.
« Attendu qu’aux termes des conventions du 7 avril
« 1 8 2 9 , les noirs doivent ótre préparés à l ’aide d’us« tensiles et de travaux fournis et dirigés par les sieurs
« Mossier et Daubrée, et des machines livrées par la
« compagnie;
« Attendu qu’ il résulte de là , que les noirs sont à
« la charge de la compagnie s’ils sont préparés au
« mieux des travaux et des machines à fournir par
« chacun des intéressés;
« Attendu qu’il n’est pas contesté que les noirs
t< offerts par M. Mossier soient bien calcinés et blutés;
P Attendu, néanmoins, qu’il a été reconnu par los
�« pariies qu’il n’avait pas été déposé d’échantillon
a pour les noirs propres aux couleurs.*»
« Attendu qu'en l ’absence de tout échantillon,
« Mossier ne saurait contraindre les gérans à recevoir
« le noir qu ’il oflfre comme propre aux couleurs, qu’au« tant qu’il serait justifié qu’il est en tout propre à la
« destination qu’il lui indique.
« Attendu qu’il résulte des lettres produites par
« les gérans que ce noir n’a pas encore atteint un
« degré parfait de perfection.
« Attendu que dans le doute de l ’emploi auquel il
« pourra être destiné, et à défaut d’échantillon qui
« puisse servir de base fixe, il est de justice, en altri« buant le noir à la compagnie, de le lui faire payer
u au plus bas prix. »
Ainsi fut terminée cette première contestation. Ou
n’alloua au sieur Mossier que 9 fr. 5 o c. par cent kilog rammes pour ce noir qui était en grande partie
semblable à celui que l ’on avait reçu comme noir à
couleurs depuis l’origine de la gestion et de l ’entreprise
du sieur Mossier. Mais on obligea les gérans de le retirer,
parce que si ce noir n’avait pas atteint toute sa per
fection , c’est-à-dire toute la finesse possible comme
noir à couleurs , cela venait de l ’imperfection îles
machines , moulins ou blutoirs fournisO Apar la coinpagnie.
La difficulté dont nous venons d'indiquer le sort et
quelques autres résolues par le même jugement 11e
furent pas les seules tracasseries que dut subir le sieur
Mossier de la part des gérans. Le sieur Blanc , l ’ un
�d’eux sur-tout, employait toutes sortes de moyens pour
lui faire abandonner l ’entreprise. Pendant le procès
même dont nous venons de parler, il lui en intenta
plusieurs autres dont il fut aussi fait justice.
Comme trésorier de la compagnie, et conformément
à l ’article 8 du bail à entreprise, le sieur Blanc avait
fait au sieur Mossier quelques avances qu ’il devait
imputer sur le prix des noirs. O r, tandis que, comme
gérant, il refusait de recevoir les noirs et d’en acquitter
le prix, comme banquier et sous le nom de la maison
Blanc et Bonfils, il exerçait des poursuites multi
pliées contre le sieur Mossier en paiement des sommes
avancées.
Le sieur Mossier s’en plaignit vainement à cette
maison par une lettre du 18 novembre, dans laquelle
il soutenait n’avoir pris aucun fonds à leur banque; il
fallut en venir en justice.
Mais le tribunal de commerce reconnut la vérité de
la défense; et, par jugement du 18 décembre 1 8 2 9 ,
considérant que les sommes réclamées devaient figurer
en tout ou en partie dans le compte dont la décision
avait été soumise à des arbitres, et que le sieur Blanc
ne pourrait agir qu’en qualité de trésorier, il renvoya
les parties devant les mêmes arbitres qui,
l ’avons déjà vu , avaient à prononcer sur
relative aux noirs, et qui la jugèrent en
D ’auti •es réclamations semblables 11e
alors poursuivies par le sieur Blanc.
comme nous
la difficulté
même tems.
furent plus
L e jugement arbitral semblait devoir mettre fin aux
�( *9 )
^ 5
discussions; mais bientôt elles ont été renouvelées par
les gérans.
Nous avons analisé ci-dessus le bail que ces gérans
avaient consenti, le 8 septembre, à ¡VI. Dumont qu’ils
avaient subrogé à tous leurs droits. Nous avons dit que
ce bail devait prendre cours au i er novembre.
A compter de ce jour, et conformément au bail,
le sieur Mossier, sur l’invitation des gérans, fit des
t
livraisons de noir au sieur Dumont et au sieur Desrones qui devint tout à-la-fois son associé et sa caution.
Pendant plusieurs mois, les sieurs Dumont et Desrones reçurent tous les noirs indistinctement.
Mais ensuite, prévenus parles gérans eux-mêmes,
ils refusèrent les noirs fins. Ce refus fut occasionné par
une déclaration écrite, donnée le 9 décembre 1829 au
sieur Dumont, par le sienr Guillaumont qui certifia
que l ’échantillon de noir fin énoncé dans l ’acte passé
avec les entrepreneurs le 7 avril, n’avait réellement
pas été déposé, et que la compagnie n’étant pas d’accord
avec les sieurs Mossier et Daubrée relativement au noir
fin à couleurs, la question avait été soumise à des*
arbitres.
Le jugement arbitral qui est du. 7 février i 83 o e st,
en effet, postérieur de plus de deux mois.
Forts de cette déclaration, les sieurs D u m o n t et
Desroncs écrivent au sieur Mossier, le 2G janvier i 83 o,
que l ’échantillon des noirs propres à la fabrication dr§
couleurs n’ayant pas été déposé, ils ne recevront, jus
qu ’à nouvel ordre, que du noir gros grain. Ils ajoutent
que si, dans la suite, ils ont besoin de noir fin, soit
�■* *»-iX
fc*
( )
20
pour la fabrication des couleurs, soit pour remplacer
le noir animal dans les raffineries, ce sera l ’objet de
nouvelles conventions. Ils reconnaissent, d’ailleurs,
qu'il leur a déjà été expédié beaucoup de noir fin et
ils consentent à le payer.
L ’ensemble de cette lettre démontre que le noir fin
pouvait réellement servir à un double usage, à la
fabrication des couleurs comme aux raffineries. Mais
il ne pouvait, disait-on, supporter la concurrence avec
le noir animal.
Les sieurs Desrones et Dumont renouvelèrent leur
refus par des lettres des 19 mars et i 3 avril i 83 o.
Dans la dernière ils s’appuient sur la déclaration du
9 décembre. « Vous connaissez, disent-ils, la déclara« tion qui nous a été remise par la compagnie. Nous
« ne p o u v o n s a g i r que d’après cette déclaration. Si la
« compagnie s’est trompée, ce n’est pas à nous à en
« subir les conséquences; vous avez toujours vos droits
« contre elle. »
La première lettre avait été écrite de Clermont,
par M. Desrones qui s’ y trouvait.
Le sieur Mossier en prévient, le même jour, les
gérans, demande que la compagnie fasse retirer tous
les noirs, et déclare qu’il a fait connaître au sieur
Desrones, sa résolution de suspendre toute livraison
jusqu’à ce qu 011 soit réglé avec lui. 11 les invite, en
conséquence, a laire peser les noirs qui étaient en
m agasin.
(.elle lettre étant restée sans réponse, le sieur
Mossier fit notifier le même avis aux gérans, par ex-
�ploit du 24 mars, et il leur fit sommation de faire
peser, de retirer et de lui payer les noirs qui étaient
en magasin. Le sieur Blanc répond d’ une manière
évasive, et dit qu’ il n’a pas d’explication à donner au
sieur Mossier seul, la compagnie ayant traité aussi
avec le sieur Daubréej que d’ailleurs le sieur Dumont
est subrogé aux droits de la société.
Une nouvelle sommation est faite par Mossier, le
12 avril i 83 o. Il argumente du jugement arbitral du
19 février; il pose en fait, d’ailleurs, qu’il n’a jamais
livré le noir gros sans le noir fin ; il somme de retirer
et de payer la totalité des noirs, sinon il proteste de
suspendre, le i 5 du courant, toute fabrication.
Cependant, sur la demande des sieurs Desrones et
Dumont, le sieur Mossier leur livre pour 3 ooo francs
de noir gros grain qu’il leur avait promis, sous la
réserve de tous ses droits, et dont il avait reçu le prix.
Le 17 mai i 83 o, il assigne les gérans, pour les faire
condamner à retirer tous les noirs.
L e 21 , il assigne en cause les sieurs Desrones et
Dumont.
Le procès s’engage, et le sieur Daubrée y est égale
ment appelé par les gérans.
Pendant son cours, on eut un instant l ’espoir de
1 arranger par la médiation d'un juge-commissaire.
Tout était mèine convenu ; mais les gérans se rétrac
tèrent , et la justice dut prononcer.
Le 3 septembre, le tribunal nomma des experts
pour vérifier, « si les entrepreneurs avaient pu, par
« le passé, et pouvaient présentement fabriquer une
�«
«
«
«
quantité de noirs fins, moindre que celle qu ’ils ont
confectionnée, et ce en employant les machines,
ustensiles et moulins qui leur avaient été fournis
par la société.
Cette vérification fut ordonnée, parce que les sieurs
Blanc et Guillaumont soutenaient q u ’avec des soins,,
les entrepreneurs pourraient ne fabriquer qu’environ
vingt pour cent de noir fin.
Le tribunal en chargea le sieur Domas, mécanicien,
les sieurs Morateur et Géret, meuniers à Clermont.
Ces experts se transportèrent à Menât, y firent
quelques observations, et proposèrent aux parties,
pour éviter des frais, d’opérer à Clermont dans le mou
lin des Carmes d éch a u x attaché à l ’établissement.
On se rendit à cette usine, le 4 novembre; là les
experts mirent à faire leur expérience le plus grand
soin et tout le tems qui leur parut nécessaire. C ’est ce
q u ’ils nous apprennent eux-mêmes, page 19 de leur
rapport.
« Après avoir piqué les meules, disent-ils, et les
« avoir placées bien d’à plomb, nous avons commencé
« par trier le schiste , le concasser en morceaux autant
« que possible, et le passer au travers d ’ une grille en
«
«
«
«
«
fer ; n o u s ' l ’avons ensuite fait moudre au petit
moulin. Il tombait de lui-même de l ’auget ’ dans
l ’œil de la meule, parce qu’ il avait’ été préparé
avec soin, et que le mouvement du frayon suffisait
à l’auget.
Le lendemain, pour opérer sur une plus grande
masse, ils firent moudre six sacs de schiste.
�Ils firent ensuite broyer le son produit par le schiste,
en employant, comme plus avantageux dans leur
opinion, un autre procédé que celui indiqué par
M. Mossier.
La journée du 6 novembre fut consacrée à la pré
paration des soies et des mécaniques, et à commencer
à faire passer le schiste moulu.
Les experts ne terminèrent leur première opération
que le 8 ; et quel en fut le résultat?
•
•
Ils l ’énoncent ainsi à la page 26 :
k il o .
V ilo .
Noir fin, dit impalpable. . . . 3 i 81 pour 100
N° 2 , fin palpable............................*7 27 pour 100
N° 2 , gros....................................... ....G .72
N° 5 ................... , ........................... .... 32 55
N° 6 .................................................... ....12 33
Son dont les deux tiers, disentils, peuvent être considérés comme
bons et x*angés dans la classe des
numéros 5 et G................................. .... 3 G/j.
Troisième tiers.............................. .....1 8 1
Déchet.....................................................3 87
100
»
« Ainsi, ajoutent-ils, nous'avons obtenu soixante« deux kilogrammes cinquante-un centièmes pourcent
« de noir gros, en considérant comme tel le numéro
« d eu x fin . Messieurs les gérans ou M.
« leur représentant, prétendent que ce noir est bon
�^6
(
24 )
« comme gros grain; MM. Mossier et Desrones pré« tendent le contraire. »
E n retranchant les 7 , 27 pour 070 du n° 2 fin,
comme cela se devait, ainsi qu’il a été reconnu plus
tard, les experts n’avaient obtenu que 55 , 24 pour 0/0
de noir gros, quotité qui est en rapport avec la décla
ration que leur avait faite le sieur Mossier qui, par une
lettre du 12 novembre, leur disait que les noirs fins
s’élevaient de 43 à 4^ pour 0/0.
L ’opération de la mouture et du blutage avait été
faite sur 22 quintaux et avait duré plusieurs jours, et
l ’on avait employé les plus minutieuses précautions.
Cependant les experts crurent devoir en faire une
seconde, que le sieur Mossier regardait comme inutile.
Ils y procédèrent d’abord sur dix quintaux de schiste.
Lors de cette seconde opération eut lieu un accident
aussi étrange que fâcheux.
Les experts, après avoir fait moudre les dix quintaux
de schiste moins une quarte, les avaient laissées dans
l ’établissement pour continuer le lendemain leurs opé
rations.
Cet établissement restait ouvert, parce que les ou
vriers y c o u c h a i e n t , et il était facile à tout le monde
de s’y introduire. Aussi le soir même, à 8 heures, en
vit-on sortir avec quelque surprise plusieurs personnes
qui n’avaient rien à y faire.
Le lendemain, 10 novembre, les experts ne trou
vèrent plus les choses dans l’état où ils les avaient
laissées la veille. Ils remarquèrent notamment que la
quarte de schiste laissée à l’écart manquait; cela éveilla
�( =5 )
Jeurs soupçons. Ils pesèrent le sac qui contenait la
mouture. Ce sac devait peser moins de dix quin taux,
puisque sur cette quantité il fallait distraire le poids
de la quarte de schiste et celui du déchet. O r , l ’on
trouva qu’il pesait 1900 kilogrammes, c’est-à-dire près
du double. Ce poids provenait de ce qu ’on avait in
troduit dans le sac par le fond une grande quantité de
noir fin.
•«
Le sieur Mossier fut alors appelé; il partagea l ’indi
gnation générale et crut d’abord que c’était l ’œuvre de
certains de ses ouvriers. Mais depuis il a vainement
cherché à s’en assurer. Il n’a pu découvrir l’auteur de
cette fraude.
Elle était, au reste, si grossière, si frappante, si
facile à reconnaître, qu’elle ne pouvait avoir pour but
que de nuire au sieur Mossier.
Celui-ci • pressa les experts de recommencer leur
opération. Ils y consentirent et opérèrent sur six quin
taux de schiste.
Ils obtinrent le résultat suivant :
Noir fin impalpable.................... 33 83 pour 100
N° 1 , fin........................................
N° 2 , gros.......................................
N° 5 ..................................................
N° 6 ..................................................
S u r les deux tiers........................
L ’autre tiers....................................
Déchet..............................................
T otal.
4
........................ 1 0 0
8
8
28
10
5
2
2
83
83 •
..
83
5o
5o
G8
»
�( )
26
« A in s i , disaient les experts lors cette seconde^
« opération, nous avons obtenu soixante-un pour cent
« de noir gros. »
. i
■
•,
r
V Ils a j o u t e n t que la différence du premier au second
résultat provient de la rencontre d ’une pyritequi s’était
trouvée dans le schiste, etrqui avaiti dérangé pendant
4 ou *5 minutes le jeu du moulin.
’
Dans les 61 pour 0/0 étaient aussi compris les 8, 83
centièmes pour cent du noir n°! a fin, que les exp.erts
classaient par erreur dans le noir gros grain. E n dédui
sant ce noir n° 2 fin , le résultat se restreindrait à 5 i ,
17 pour 0/0:1
Les experts terminent par dire qu ’ils pensent que
l ’on pourrait obtenir en plus grande quantité'du noir
gros en employant les moyens suivans :. h* .
« Tenir toujours les meules bien d’à-plomb;
«
Les
r e p i q u e r , l o r s q u ’ elles en o n t b e s o i n ; , : , :
« Faire une extraction soigneuse des pyrites qui se
« -trouvent mêlées au schiste;
« Concasser le schiste en morceaux égaux autant
« que possible avant que le moulage ait lieu;
« Avoir soin de remplacer le C r a y o n lorsqu’il est usé;
h Moudre le schiste avant de le soumettre à la cal« cination;
« Remplacer les toiles mécaniques et les soies des
« cylindres lorsqu'elles sont usées;
« Exercer enfin une surveillance très-active et très« journalière.sur toutes les parties du moulin, a v a n t
« de mettre l'eau.
Il est à remarquer que tous ces moyens, à l ’cxcep-
�( 27 )
tion de la mouture, avant la calcination, ont été em
ployés par les experts avant d’opérer (voir la page 19
de leur rapport); et cependant ils n’ont pas obtenu en
noir gros grain une quantité plus grande que celle an
noncée par le sieur Mossier, ou indiquée par les livrai
sons qu’il avait faites.
Quanta la mouture avant la calcination , les experts
n’ont pas réfléchi que ce procédé est impraticable
sur-tout en opérant en grand ; car pour calciner le
schiste il faut le placer sur des grilles de fer à travers
lesquelles la flamme d’un feu ardent mis au-dessous,
pénétrant de toute part, puisse envelopper et carboni
ser la pierre schisteuse. Or, comment pourrait-on
opérer ainsi sur du schiste réduit en poussière ?
Tel est, en analyse, le rapport des experts. Le sieur
Mossier avait de justes motifs de le critiquer, sur-tout
sur la forme de sa rédaction. On assure, il est vrai,
que ces experts peu exercés à rédiger, avaient confié
cette rédaction à un tiers. Aussi fait-on faire au sieur
M ossier des réponses d’ une naïveté qui va jusqu’au
ridicule. Le langage qu’on lui- prèle, les observations
qu ’on met dans sa bouche sont si étranges, si peu con
formes, à ses intérêts, qu’on pourrait les croire dictées
par ses propres adversaires. On n’y parle même pas
d ’ une lettre qu’il avait écrite aux' experts, le 12
novembre, pour un document qu’ils avaient demandé
sur la quantité proportionnelle de noir fin qu ’il reti
rait de la fabrication.
Cependant l ’affaire portée de nouveau ïi l ’audience,
le tribunal de commerce, par jugement du i er février
�( ^
)
1 83 i , a condamné les gérans à retirer les noirs fins
fabriqués par le sieur Mossier depuis le commencement
de l ’exécution du bail consenti par MM. Desrones et
Damont, à la date du 8 septembre 1 8 2 9 , et ce dans
la proportion de 4.0 kilogrammes pour 100 kilogrammes
de noirs gros grain fabriqués et livrés aux sieurs Desrones et Duinont, et à en payer le prix à raison de
9 fr. 5o cent, les cent kilogrammes.
Il les a condamnés de plus à payer au sieur Mossier,
à titre de dommages et intérêts la somme de deux
mille francs.
Il condamne aussi les sieurs Dumont et Desrones a
retirer des mains des gérans tous les noirs que ceux-ci
retireront du sieur Mossier; mais il ne les soumet à en
payer que i 5 kilogrammes sur 4o, et ce au même prix
auquel les laissent les gérans;
Il leur attribue les autres 25 kilogrammes à titre
d ’indemnité, à raison de la perte qu’ils ont éprouvée
pendant l ’interruption de la fabrication;
Il condamne le sieur Daubrée à 5 oo fr. de dommages
et intérêts envers la compagnie de Menât;
^ Il condamne enfin toute la compagnie à tous les dé
pens, moins ceux faits à l ’occasion du sieur Daubr éc.
Tel est ce jugement dont le sieur Mossier avait beau
coup à se plaindre, et notamment sur la quotité à
laquelle le tribunal réduit les noirs fins, sur la faiblesse
des dommages et intérêts qu’il lui accorde pour une
longue suspension de l ’entreprise, sur le défaut de
condamnation aux intérêts des sommes qui lui sont
dues.
�( 29 )
Ce sont cependant les gérans qui les premiers en ont
interjeté appel contre lui, sans doute dans le but prin
cipal de retarder encore leur libération, et de le fati
guer par des délais et par les embarras pécuniaires
qu ’ils lui causent-.
Le sieur Daubrée s’est aussi pourvu par appel h leur
égard.
Les gérans élèvent diverses sortes de difficultés :
L ’action du sieur Mossier est non recevable, disentils, parce que ce n’était pas contre la compagnie, mais
contre les sieurs Dumont et Desrones qu’elle devait
être dirigée ;
Le sieur Mossier, d ’ailleurs, s’était engagé à leur
fournir des noirs à couleurs, et ceux qu’il leur présente
n’y sont pas propres;
- T1 pouvait fabriquer une plus grande quantité de
noir gros grain ;
Enfin il ne lui était pas permis de se séparer du sieur
Daubrée sans le consentement de la compagnie;
L ’examen de ces objections les réduira à leur juste
valeur.
§ I".
Le sieur Mossier a-t-il pu exercer son action contre
la compagnie?
Cette première question a déjà été résolue par le
jugement interlocutoire du 3 septembre i 83 o.
E n effet ce jugement a ordonné entre les gérans et
le sieur Mossier, une opération par experts pour véri
fier si, comme l ’alléguaient les gérans seuls, le sieur
�Mossier aurait pu fabriquer uue plus grande quantité
de noir gros grain.
Le jugement a été exécuté par les gérans, qui ont
fait aux experts toutes les observations qu ’ils ont jugées
utiles à leurs intérêts.
Comment pourraient-ils prétendre aujourd’ hui que
l ’action leur est étrangère?
S'il en était ainsi, ou si telle eût pu être l ’opinion,
du tribunal, pourquoi n’aurait-il pas rejeté sur-lechamp l ’action du sieur Mossier? Pourquoi n’aurait-il
pas affranchi, dès le moment même de sa réclamation,
la compagnie et ses gérans? De quelle utilité eût pu
être une vérification coûteuse ?
Si les gérans eux-mêmes avaient persisté à croire que
le fonds du procès ne les concernait p a s , pourquoi ne
se seraient-ils pas pourvus contre le jugement interlo
cutoire? pourquoi l’ont-ils, au contraire, pleinement
exécuté? pourquoi ont-ils assisté à toutes les opérations?
pourquoi, en un mot, ont-ils agi comme si l ’action
exercée devait les frapper seuls?
Dans de telles circonstances, ils sont évidemment
non recevables à prétendre que c’était contre d’autres
et non contr’eux qu’on devait agir. Cette question est
jugée par le jugement interlocutoire, par un juge
ment auquel les gérans ont librement acquiescé.
D i r a i e n t - i l s qu’ un interlocutoire ne lie pas le juge,
que d’ailleurs le jugement réserve les moyens des
parties ?
On leur répondrait que la maxime est controversée;
qu ’au reste, elle n’est pas applicable au cas ou une fin
�•
( 3i )
.
de non recevoir est opposée, ni à celui où une qualité
est contestée. Si le juge ne s’arrête pas à la fin de non
recevoir, si, reconnaissant implicitement la qualité,
il ordonne une instruction sur le fond, il y a par cela
même chose jugée, et jugée définitivement sur cette
fin de non recevoir et sur la qualité ; ce n’est que
pour le surplus que le jugement a le caractère d’inter
locutoire*, et l ’instruction laite, il ne doit plus être
permis de soulever encore des difficultés qu i, dès la
naissance du procès, y auraient-mis fin, et que le juge
a: repoussées par cela même qu’il ne les a pas admises.
Telle e^t la distinction que l ’on doit faire pour
appliquer sainement cette maxime vague , et dont
on abuse : J u d e x ab interlocutorio discedere palesi.
Telle est la distinction nécessaire pour concilier cette
maxime avec l ’irrévocabilité de la chose jugée, avec
la dignité même de la justice.
Telle est aussi la distinction admise par divers arrêts.
On peut citer notamment un arrêt de la cour de
cassation du G juillet i 8 t g , rapporté par Sirey,
tome 2 0 , page 7 8 , et un arrêt de la cour de Rioni,
du 3 février 1 8 2 5 .
Cette doctrine dispenserait le sieur Mossier d’exa
miner si son action contre les gérans était bien dirigée.
Mais le sieur Mossier ne craindra pas d’aborder ,
sur ce point même, le fond de la discussion.
Les gérans prétendent que la contestation doit leur
être étrangère, qu’elle concerne seulement les sieurs
Desrones et Dumont qui ont été substitués aux droits
de la compagnie, par des conventions du 8 septembre
�1829 , que le sieur Mossier a approuvé ces conventions,
que même il a délivré des noirs aux sieurs Desrones et
Dumont, que par conséquent c’était à eux qu’il devait
s’adresser.
Ces objections, déjà écartées par le jugement inter
locutoire, ne devraient pas être admises, lors même
q u ’on les examinerait pour la première fois.
Il est vrai que les gérans de la compagnie ont
affermé pour i 5 ans, par acte du 8 septembre 1 8 2 9 ,
l ’établissement de Menât, et que, par l’article 3 de
ce bail, les sieurs Dumont et Desrones se sous substi
tués à la compagnie, envers les entrepreneurs Mossier
et Daubrée comme envers les autres personnes qui
avaient fait avec la compagnie des conventions anté
rieures.
Il e s t vrai, aussi, que, par l’article 10 de ce bail,
les gérans se soumettent à r a p p o r t e r la ratification des
actionnaires, et que le sieur Mossier, qui avait quatre
actions, a concouru , comme actionnaire, à l’appro
bation du bail fait par les gérans, qu’il a même
renoncé, par suite, à une portion des bénéfices de la
gestion qui lui avait été attribuée par la compagnie.
Mais c o n c l u r e d e l à , qu’en sa qualité d’entrepreneur,
qualité essentiellement distincte de celle d’actionnaire,
il n’avait aucun droit particulier à exercer contre la
c o m p a g n i e , c’est une erreur que signalent, et les faits,
et les actes, et les simples notions de raisonnement.
Que s’est-il passé après ce bail du 8 septembre 1829 ?
Le sieur Mossier délivra aux sieurs Desrones et
Dumont, à compter du i er novembre, époque fixée par
�C 33 )
ce bail même, pour le commencement de son cours,de
sieur Mossier leur délivra d’abord tout le noir qu’il
fabriquait, et ceux-ci le reçurent indistinctement.
Peut-être même auraient-ils continué de le recevoir
ainsi, ce qui aurait évité le procès actuel, si le sieur
Guillaumont, un de ces gérans avec lesquels le sieur
Mossier était encore en procès devant les arbitres dont
nous avons déjà fait connaître la décision, si le sieur
Guillaumont ne s’était plu à leur donner une décla
ration qui a été la principale , on pourrait dire,
même, l ’unique cause de la longue et coûteuse contes
tation soumise aujourd’hui à la cour. Le sieur G uil
laumont leur donna par écrite le 10 décembre 1 8 2 9 ,
une déclaration ainsi conçue:
«
«
«
«
«
«
« Je soussigné, gérant de la compagnie, certifie que
l ’ échantillon de noir fin à couleurs, qui devait être
déposé cacheté, conformément au traité fait entre
ladite compagnie et MM. Mossier et Daubrée, le 7
avril 18 29 , n ’a pas encore été déposé, et qu ’il n’a
été déposé que l ’échantillon de noir en grain^ propre
à la décoloration des sirops, et pareil à celui cacheté,
i« étant entre les mains de M. Dumont. (1)
«
«
«
«
« Je déclare, en outre, que la compagnie n’est pas
d’accord avec MM. Mossier et Daubrée, relativement
au noir fin à couleurs qui ne lui a pas paru propre
à remplir cette destination^ et que cette question
est actuellement soumise à des .arbitres. »
( i ) N o ta . Il ne paraît pas m êm e q u ’ il ail etc d ép o sé, lors d u bail
d ’c n tr c p iis o , .me une espace d ’ccliantillons.
�( 34)
Le sieur Guillaumont voulait parler d’ une des
difficultés soumises a lors à ces arbitres, qui, par leur
décision du dix-sept février i 83 o, ont condamné la
compagnie à retirer tous les noirs fins qui s’étaient
accumulés jusqu’au i cr novembre précédent.
unis de cette déclaration du sieur Guillaumont,
et ¡s’appuyant sur ses termes, les sieurs Desrones et
Dumont ont refusé les noirs fins, et ont prévenu de
leur refus, le sieur Mossier, par des lettres des 26
janvier et 19 mars i 83 o. Dans la dernière, en lui
annonçant qu’ils persistaient dans leur résolution , ils
ajoutent que la discussion de la difficulté ne peut les
regarder, et que c’est au sieur Mossier à traiter cette
affaire avec les gérans.
Que devait donc faire le sieur Mossier? il devait
d’abord prévenir les gérans; et c’est ce qu’il fit par une
lettre qui 11e produisit a u c u n effet. Il devait ensuite
les assigner pour les contraindre à retirer, comme ils
l ’avaient toujours fait, tous les noirs produits de la
fabrique. II devait aussi appeler en cause les sieurs
Desrones et D um on t, et les mettre en présence avec les
gérans, pour qu’ ils "eussent à s’entendre entre eifx et à
exécuter les conventions de l’entreprise, de la même
manière qu ’elles l’avaient toujours été jusqu’alors.
Or c’est précisément tout ce qu ’a fait le sieur Mossier.
C ’était, sur-tout, contre les gérans que celui-ci
devait agir, puisquec’étaient les gérans eux-mêmes qui,
par leur déclaration officieuse ou tracassière , avaient
donné lieu à la difficulté; puisque, d’ailleurs, c’était
avec eux seuls que le sieur Mossier avait traiLe.
�.
( 35 )
kk*
J•«, fr
**
Mais, dira-t-on, il avait ratifié lé bail du 8 septem
bre 1 8 2 9 , consenti par les gérans aux sieurs Dumont
et Desrones.
11 r avait ratifié! oui. Mais en quelle qualité?
Etait-ce comme entrepreneu°r ? non. A ce dernier
titre le sieur Mossier n’avait pas h ratifier. Aussi la
ratification ne lui fut-elle pas demandée comme entre•
«
preneur. Aussi ne fut-il pas même dit dans le bail clu
8 septembre qu’elle serait rapportée.
S ’il approuva ou ratifia ce bail, ce fut comme
actionnaire seulement. C ’est ce que démontre la déli
bération prise, le o.l\ septembre 1 8 2 9 , dans une assem
blée des actionnaires convoqués à cet effet. L ’on y
énonce q u ’il fut fait lecture du traité du 8 septembre,
et que l'es voix furent unanimes pour l ’adopter.
De quelle influence pourrait donc être cette appro
bation , sur les droits personnels et distincts du sieur
Mossier, comme enlrcpx*cneur, contre la compagnie
qui lui avait confié l’entreprise?
D ’aucune, évidemment. Le sieur Mossier, à cette
époque, ne traite comme entrepreneur, ni avec la
compagnie ni avec scs gérans; il ne détruit pas, il ne
modifie pas les conventions précédemment faites entre
eux; il ne renonce pas aux droits qu’il avait contre la
compagnie, ni aux obligations qu’elle avait contractées
h son égard; il ne se départ pas de ses actions contre
elle, et ne déclare pas que désormais il n’en exercera
que contre les sieurs Desrones et Dumont ; en un mot,
il n’abandonne aucun de ses droits contre la compa
gnie avec laquelle même il ne contracte pas dans ce
'
�moment l à comme entrepreneur. Comment pourrait-on
prétendre qu’il a perdu toute action contr’elle? comme
si l ’ a b a n d o n d’ un droit se présumait; comme si l ’on
ne savait pas, au contraire, qu’ un tel abandon ne
peut résulter que d'uife renonciation expresse.
Mais, dit-on, par cette délibération même des ac
tionnaires, le sieur Mossier s’est départi de sa portion
des bénéfices de la ges’tion. Or, cette portion, ajoutet-on, lui appartenait comme entrepreneur.
On répondra que c’est moins comme entrepreneur
de la fabrication du schiste, que comme concourant à
la gestion avec MM. Blanc et Guillaumont, q u ’une
partie-du bénéfice de cette gestion lui était attribuée.
Il en était de lui à cet égard comme des sieurs Blanc et
Guillaumont, qui cependant n’étaient pas entrepre
neurs. Comme le bail fait avec les sieurs Du n$) nt et
Desrones faisait cesser toute gestion, les fermiers devant
seuls gérer à l ’avenir, il était naturel que le sieur
Mossier renonçât avec les autres gérans à sa part dans
les bénéfices d’une gestion qui n’avait plus lieu.
Mais on entendait si peu traiter sous ce rapport
avec Ini, comme entrepreneur, que le sieur Daubrée
qui était associé dans l’entreprise ne fut pas appelé
dans la délibération , et ne renonça pas lui-même à sa
part dans les bénéfices de la gestion.
Au reste ce département même qu’on obtint du
sieur Mossier sur cet objet spécial, ce département,
restreint à cet objet unique, est une preuve déplus que
tous scs autres droits, toutes ses actions, c o m m e entre-
�( 37 )
preneur, subsistaient à l ’égard de la compagnie. Car si
l ’on avait, de part et d’autre, voulu faire cesser tous
rapports, toutes obligations, on n’eut pas manqué de
le faire dire ainsi par le sieur Mossier, et de le faire
renoncer à toutes actions , comme entrepreneur ,
contre la compagnie. L a concession qu’on lui a de
mandée et qu’ il a faite sur un point, le silence gardé
sur tous les autres, démontrent que dans l ’intention de
toutes les parties, les droits, et les devoirs réciproques
sont restés dans toute leur force entre la compagnie et
les entrepreneurs, et que, par conséquent, c’est contre
la compagnie seule que ceux-ci ont dû agir dès qu ’ils
ont eu à se plaindre de l ’ inexécution de leur marché.
C ’est ainsi qu’en avaient jugé les gérans eux-mêmes,
puisque, par acte extrajudiciairc du 12 octobre 182g,
ils avaient sommé les sieurs Mossier et Daubrée de
fo u r n ir , tous les mois, aux sieurs Dumont et Desrones,
à pa rtir du 3 novembre suivan t, quatre-vingt mille
kilogrammes de noir.
A par tir. du 3 novem bre, c’est-à-dire, de l ’époque
même à laquelle le traité fait avec les sieurs Dumont
et Desrones devait commencer à être exécuté. Les gérans
considérèrent donc, comme encore obligatoires entr’eux
et les entrepreneurs, les conventions d’entreprise qu ils
avaient faites avec ceux-ci; ils considérèrent évidem
ment ces conventions comme pouvant être invoquées
par eux-mêmes; ils ne pensèrent pas que c’était aux
sieurs Dumont et Desrones seuls à agir comme leur
étant substitués. Ils crurent pouvoir réclamer directe
ment, contre les entrepreneurs, l'exécution des enga-
�gcmens que ceux-ci avaient contractés envers la com
pagnie.
Comment se ferait-il que les entrepreneurs n’eussent
pas, de leur coté, une action réciproque contre la
compagnie, en exécution des mêmes conventions?
Ajoutons une dernière observation. Quelque géné
rale même qu'on supposât l ’approbation donnée par le
sieur Mossier aux conventions faites entre la compagnie
et les sieurs Desrones et Dumont, au moins est-il cer
tain qu’il n’a ni entendu ni pu entendre que ces con
ventions apporteraient aucunes modifications aux stipu
lations du bail à entreprise et à l ’exécution que ce bail
avait reçue. Aussi ces conventions ne disaient-elles rien
k cet égard. Aussi les sieurs Desrones et Dumont ontils exécuté d’abord l ’entreprise comme elle avait été
exécutée auparavant par les gérans. Us n’ont voulu
modifier le mode d’exécution qu’après la déclaration
qui leur fut donnée en décem'bre 1829 par le sieur Guillaumont. Or, quelqu’étendue que l ’on donnât à l ’ap
probation du sieur Mossier, n ’est-il pas évident que
s’il a pu ou s’il a dù ne s’adresser qu’aux sieurs Des
rones et Dumont, tant que ceux-ci agissaient à son
égard comme agissait antérieurement la compagnie
elle-même ou ses gérans, au moins a-t-il dù actionner
celle-ci dès l’instant où les sieurs Desrones et Dumont
lui ont élevé des difficultés; dès l ’instant où ils ont
prétendu donner aux conventions qu ’ils avaient faites
avec la compagnie un sens qui était contraire au mode
d’exécution antérieur de l’entreprise; dès l ’inslant où
ils ont argumenté, ù l ’appui de leur interprétation 3
�(
39 )
de la déclaration même de l ’ un des gérans. Le sieur
Mossier a du alors s’adresser à ces gérans pour qu’ils
eussent ou à exécuter eux-mêmes le bail à entreprise de
la même manière qu’ils l ’avaient exécuté jusqu’alors, ou
à le faire exécuter ainsi par les sieurs Desroneset Dumont.
Reconnaissons donc que cette action appartenait au
sieur Mossier contre la compagnie;
Reconnaissons qu’elle lui avait été assurée par le bail
d ’entreprise du 7 avril 1829 j et qiie depuis il n’a pu
la perdre, sans y avoir expressément renoncé; car la
renonciation à un droit ne se présume pas. Or, jamais
il n’a renoncé à cette action. Loin même d’ y renoncer,
il 1 a exercée contre les gérans, comme aussi il s’est
soumis aux actions que la compagnie exerçait contre
lui-même. Donc son action'a été dirigée contre les
vraies parties qu'elle devait frapper.
§ II.
•
1
f
L e noir emm agasiné pen t-il être refu sé p a r la com
pagnie ?
,
Ce noir, disent les gérans y; n’est pas propre aux
couleurs. Faites qu’il ait cette propriété, ou gardez-le
pour votre compte.
f
1
■ Cette difficulté n’est pas l’œuvre de la franchise.
Il sera facile de s’en convaincre, si l’on considère les
circonstances dans lesquelles l ’entreprise a été donnée
par les gérans et acceptée par le sieur Mossier, l ’exécu
tion q u ’elle a reçue, les termes même des conventions
sainement entendus.
Nous l’avons dit déjà dans le narré des faits : ce 11e
�fut qu’après une épreuve de plusieurs annéeg et après
que les propriétés du noir de Menât eussent été parfai
tement connues par la compagnie et sur-tout par ses
gérans, qu’ un bail à entreprise fut consenti, d’abord
au sieur Mossier s e u l , ensuite aux sieurs Mossier et
Daubrée.
On s’était alors assuré que tout le noir, quels que
fussent son grain et sa finesse, était propre à la décolo
ration des sirops et à leur clarification; mais on savait
aussi que le noir le plus fin , celui connu sous le nom
d ’impalpable, pouvait servir aux couleurs. Seulement
pour obtenir cette dernière espèce de noir, il fallait
plus de travaux et d’autres meules, d’autres blutoirs
que ceux que la compagnie avait possédés jusqu’alors;
en sorte que le noir obtenu avec les machines dont l ’on
u s a it, ne fournissait que très-peu de noir propre aux
couleurs , et p e u t - ê t r e e n c o r e l ’ i m p e r f e c t i o n de ces ma
chines ne permettait-elle pas que ce noir fut assez
parfaitement broyé et bluté.
C ’est daus ces circonstances que le sieur Mossier
traite avec la compagnie et se soumet à fabriquer du
noir pour elle avec les moulins, avec les blutoirs, en
un mot a v e c l e s m a c h i n e s qu’ elle devait lui fournir.
Certes alors, ni la compagnie ou ses gérans, ni le
sieur Mossier ne pouvaient entendre que celui-ci four
nirait du noir autre que celui qui avait déjà été
produit par le schiste carbonisé, que celui q u ’il avait
préparé jusqu’alors avec les machines que fournissait
la compagnie.
Certes, aussi, lors des conventions, il ne vint à
�( 4r )
l ’esprit de personne de soumettre le sieur Mossier à
rester chargé d’une partie des noirs, s’ils ne paraissaient
pas dans la suite propres aux couleurs. Si on avait en
tendu lui imposer cette obligation, on lui aurait né
cessairement permis de vendre à d’autres qu’à la com
pagnie ce noir imparfait; et cependant non seulement
une telle permission ne lui est pas donnée dans le bail,
mais même l ’ensemble de l ’acte repousse une telle
faculté pour lui.
Pourquoi cela? c’est qu’on savait que tout le noir
fabriqué pouvait être propre aux couleurs ou propre à
clarifier les sirops, et que ce qui serait impropre à un
usage servirait au moins à l ’autre.
Aussi comment fut exécuté le bail d’entreprise?
Tous les noirs, sans exception , furent retirés par les
gérans, d ’abord, par le sieur Dumont, ensuite jus
qu’au I er septembre 1829.
Par les gérans depuis le 2 août, date du i er bail
d ’entreprise, jusqu’au i crmai 1829, époque à laquelle
ils convinrent avec le sieur Dumont qu’il retirerait
tout le noir qui serait fabriqué jusqu’au i er septembre
suivant;
Par le sieur Dumont depuis et pendant le tems
convenu*,
Cela est prouvé pour la compagnie, notamment par
des comptes courans des 2 mai 1829 et i 5 mars i 83 o.
Or, comment concevoir que pendant un an et plus
la compagnie et le sieur Dumont, qui Ja représentait,
se fussent fait délivrer les noirs de toutes espèces, sans
G
�distinction, si l ’esprit comme les termes des baux à en
treprise ne l’eussent pas ainsi voulu.
Il faut reconnaître cependant qu’il fut livré une bien
plus faible quantité de noir fin ou propre aux couleurs,
que de noir à raffinerie ou à clarification.
Pourquoi? parce que l ’imperfection et l ’insuffisance
des machines fournies par la compagnie ne permettaient
pas d’obtenir un noir à couleurs aussi parfait q u ’il eût
été à désirer.
Il eût fallu livrer le premier noir'obtenu à un nou
veau broiement, à l ’aide de meules fines, et le bluter
avec des machines qui manquaient.
Quoi qu’ il en soit, s’ il fut fourni une moindre quan
tité de ce noir à couleurs, c’était par la faute des gé
rans, qui ne fournissaient pas eux-mêmes les machines
nécessaires-, et c’était une perte pour le sieur Mossier
à qui ces noirs étaient plus chèrement payés.
Mais il en fut livré et reçu pendant long-lcms; on
n’en saurait douter. Les comptes courans ci-dessus
datés en font foi, et le jugement arbitral du 17 février
le prouve. Car la dix-septième question que l ’on y
juge est r e l a t i v e a 1111 règlement de compte sur le noir
lin. Il en fut livré, il en fut reçu; le commerce ache
tait, employait toutes les espèces de noir.
Si la compagnie éprouva des pertes, ce fut par sa
faute ou par celle de scs agens qui n e surent pas expé
dier les noirs ou les vendre à propos.
Depuis, le débit a été moins facile, soit pour le noir
fin à couleurs, soit pour le noir à décolorcretaclarifier.
Mais pourquoi? par des événemens récens et étran
gers) à l'entrepreneur.
�(
43
)
D ’un côté 011 a remarqué que le noir fin provenu du
schiste de Menât était tout à-la-fois et plus pesant et
plus absorbant d’ huile que le noir de fumée ou le noir
animal. Alors sa valeur a diminué; non qu’il ne fut
toujours propre aux couleurs; mais il a eu moins d’a
vantage pour soutenir la concurrence.
D ’ un autre côté, 011 a découvert un procédé h l ’aide
duquel on revivifie'le noir animal qui déjà a été em
ployé une première fois. Nouvelle cause de diminution
du prix du noir minéral de Menât, soit qu’on le des
tine aux couleurs, soit qu’on l ’emploie aux raffineries.
Enfin le sieur üumont a reconnu , après de nom
breuses expériences , que le noir d’ un certain grain,
entre les toiles n° 3 o fet 1 0 0 , décolorait mieux et plus
promptement que du noir plus fin ou plus gros. Alors
dans ses traités avec la compagnie de Menât, il a
demandé du grain qui lui convenait le plus, en ne
s’obligeant à prendre qu ’ une faible partie, quinze pour
cent, de noir plus fin; et la compagnie, sans s’inquié
ter des engagemens qu’elle avait pris avec le sieur
Mossier, de ces engagemens dans lesquels il n’était pas
question de noir gros grain, de noir d’ un grain propre
au procédé de M. üu m on t, la compagnie lui a promis
tout ce qu’ il a voulu et s’est efforcée de rejeter sur lu
sieur Mossier les suites de ses propres imprudences.
E t remarquons que ces imprudences ne se sont pas
arrêtées au traité qu ’elle avait fait, le 6 mai 1829, avec
le sieur Duniont, à ce traité qui est le premier acte de
la cause où l’on voit paraître celte distinction, dont la
compagnie a si souvent parlé depuis, entre le noir gros
/
�*?0
(44 )
grain et le noir fin. Ce traite, dont l ’eiFet était seule
ment temporaire, n’aurait eu que des suites limitées.
Mais le 8 septembre, elle subroge à tous ses droits les
sieurs Desrones et Dumont; et bientôt elle excite
ceux-ci à refuser du sieur Mossier le noir fin qui se
trouvait dans la fabrique, en leur déclarant le 8 dé
cembre 1829 q u ’aucun échantillon du noir fin n’avait
été déposé lors de l ’entreprise , et qu’elle n’était pas
d’accord avec le sieur Mossier sur la qualité de ce noir.
Jusque-là, le noir fin, comme le noir gros grain,
toute espèce de noir avait été reçu par les sieurs
Dumont et Desrones, qui même ont continué de tout
recevoir jusqu’au 26 janvier ; mais depuis ils l’ont refusé
en se fondant précisément surcetle déclaration donnée
dans le but unique de nuire au sieur Mossier, et dont
les conséquences frappent aujourd’hui avec beaucoup
de justice la compagnie elle-même.
Ainsi c’est la compagnie elle-même qui a donné lieu
au procès actuel-, la compagnie qui élevait au sieur
Mossier, en décembre 1 8 2 9 , une difficulté semblable,
relativement aux noirs fins qui, du 1 " septembre au
i*r n o v e m b r e 1 8 2 9 , n’avaient pas été pris par le sieur
Dumont, celui-ci ne s’eu étant pas chargé; la compa
gnie qui a été condamnée à recevoir ces noirs et à les
payer nu prix de 9 fr. 5 o c., par le jugement arbitral
du 17 février i 83 o; la compagnie qui doit, il semble,
éprouver une condamnation semblable, relativement
aux noirs fins qui se sont accumulés dans les magasins
depuis le 26 janvier; car il y a chose formellement
jugée sur la même question pour des noirs de la même
�qualité,par ce jugement du 17 février, qu’ont rendu,
avec la plus grande maturité, après l ’examen le plus
scrupuleux , des arbitres du choix même des parties.
E t n’y eût-il pas chose jugée, ne serait-il pas évident
que la compagnie qui a traité avec le sieur Mossier,
après une langue expérience; que la compagnie q u i,
en exécution de ce traité, a pris ou fait prendre par
le sieur Dumont les noirs de toute espèce sans distinc
tion jusqu’au 26 janvier i 83 o; que la compagnie qui
a fixé elle-même le sens des conventions faites avec le
sieur Mossier, par le mode d’exécution qu’elle leur a
appliqué; que la compagnie qui seule a fourni, qui
seule était chargée de fournir toutes les machines né
cessaires à la fabrication; que la compagnie qui n’a
jamais autorisé le sieur Mossier à vendre, pour son
propre compte, la moindre partie du noir fabriqué;
que la compagnie enfin à qui seule ce noir appartient,
doit le recevoir en totalité ou le faire recevoir par
ceux qu’elle a subrogés à scs droits.
Quelargument pourrait-elle tirer du défaut d’échan
tillon? ]N’est-il pas évident que s’il n’eu a pas été déposé,
c’est que la compagnie l’a jugé inutile; c’est qu’elle
connaissait la qualité des noirs; c’est que ces noirs fa
briqués toujours avec les mêmes machines, et produits
par la même matière, devaient être toujours aussi
propres a leur destination. Le sieur Mossier seul aurait
à regretter l’absence de ces échantillons. Carils auraient
démontré que le noir que l ’on refuse aujourd’hui est
précisément le même que celui qu’auraient présenté
les échantillons, et le procès actuel 11’aurait pas eu
�(
40
)
lieu. Leur absence est un motif de plus pour obliger
la compagnie à recevoir aujourd’ hui comme autrefois
tous les noirs sans distinction.
,
Insister plus long-tems sur les preuves de cette
v é r i t é , ce serait prolonger vainement une discussion
déjà complète.
Cette vérité, les gérans n’ont pu se la dissimuler k
eux-mêmes. Aussi pour y échapper et pour rendre un
chétif entrepreneur victime de leurs puissantes atta
ques, ont-ils voulu former un concert d'hostilités, eu
proposant aux sieurs Desrones et Dumont de s unir
à eux pour faire retomber tout le poids du procès sur
cet entrepreneur qui osait se débattre contre la
ruine dans laquelle on voulait le plonger. C ’est ce
qu’attestent deux lettres de M. Desrones, des 12 août
et 25 septembre i 83 o. Mais celui-ci avait trop de
loyauté pour accepter une telle coalition. Il la refusa,
et le tribunal rendit bientôt après justice aux parties.
Cette justice, le sieur Mossier doit espérer qu’elle
sera reconnue et consacrée par la Cour , et que ,de
vaines subtilités de fausses allégations ne feront pas
triompher le puissant contre le faible, le riche banquier
contre un entrepreneur peu fortuné, dans une cause
commerciale, ou les règles de bonne foi et d ’équité
doivent sur-tout dicter les décisions des tribunaux.
§
IH .
E st-il dém ontré que le sieur M ossier pouvait fa b r i
quer une plus grande quantité de noir gros grain que
celle f ix é e p a r le ju g em en t?
�(
47 )
Le jugement dont est appel a fixé à 4 o kilogrammes
pour cent la quantité de noir fin que devait produire
la fabrication; il l’a fixée ainsi, en reconnaissant même,
dans ses motifs, que, d’après la vérification faite par
les experts, les noirs fins, résultat de la fabrication,
étaient dans la proportion de 44 kilogrammes 7 1 cen
tièmes pour cent. Mais prenant en considération quel
ques observations des experts, il a réduit cette quan
tité proportionnelle à 4^ kilogrammes pour cent, et
a soumis le sieur Mossier à fournir le surplus en noir
gros grain.
i
Le sieur Mossier aurait été très-fondé à se plaindre
de la proportion qu’à fixée le tribunal • proportion qui
lui est d’autant plus préjudiciable q u ’il lui sera im
possible d’atteindre à une réduction aussi fortô des
noirs fins, à une réduction que n’ont pu obtenir les
experts eux-mêmes, qnoiqu’ ils n’aient pas opéré eu
grand, qu ’ils aient mis beaucoup plus de tems et de
soins minutieux que n’en peut comporter une fabrica
tion considérable et journalière , et qu’ils aient em
ployé eux-mêmes , pour leurs opérations , tous les
moyens d’amélioration qu ’ils indiquent dans leur rap
port, si l’on en excepte cependant celui de faire précéder
la carbonisation par la mouture, ce qui serait impra
ticable. Car comment placer dans les fourneaux sur
des claies, et carboniser suffisamment du schiste déjà
réduit en poussière?
L e sieur Mossier s’est cependant résigné à subir ce
jugement 5 il lui tardait d ’en finir sur tous ces
débats*
•
�Moins ennemis des discussions, les gérans qui n’a
vaient, il semble, qu’à s’applaudir et du rapport des
experts, et du jugement, prétendent cependant encore
que la quantité de noir gros grain pourrait être pro
portionnellement plus considérable.
Mais comment prouvent-ils leur assertion?
Ce n’est pas dans le rapport des experts , quelque
f a v o r a b l e qu’il leur soit, qu’ ils trouveront un appui.
E n effet, les deux opérations successives des experts
ont donné un résultat beaucoup moins favorable à la
compagnie.
Par la première opération , ils trouvent, il est vrai,
62* kilogrammes 5 i centièmes sur 100 de noir gros
grain; mais en considérant comme tel le noir fin n° 2,
dont la proportion est de 7 kilogrammes 27 centièmes
pour cent. Or cette espèce de noir fin est refusée par
les sieurs Desrones et Dumont ; et il a été reconnu,
lors du jugement dont est appel, qu ’il 11e pouvait être
rangé dans aucune des espèces des noirs gros grain. Si
donc on retranche la dernière quantité de la première,
il ne restera que 55 kilogrammes 2/j centièmes sur cent
de noir gros grain; en sorte qve le résultat de la fa
brication produirait 44 kilogrammes 76 centièmes de
noir fin.
L a seconde opération des experts présente encore
moins d ’avantage à la compagnie , puisqu’on faisant
distraction du noir fin n° 2 , l’opération n’a produit
q u e 5 i kilogrammes 17 centièmes de noir gros grain
sur cent; en sorte que le noir fin et le déchet s’élève
raient à 48 kilogrammes 83 cculièmés pour cent.
�On ne conçoit donc pas sur quel motif les gérans
pourraient fonder le grief qu’ils ont annoncé quant à
la proportion fixée par le jugement.
Se plaindraient-ils de ce que le sieur Mossier avait
d’abord refusé, dit-on, de faire connaître aux experts
le résultat de ses propres opérations ?
Mais ce refus n’aurait pas été long, puisque dès le
12 novembre et avant la rédaction du rapport, il eu
instruisit les experts par une lettre qu’il leur adressa.
D ’ailleurs cette indication était inutile; car c’était
dans leurs opérations même , et non dans les décla
rations du sieur Mossier que les experts , comme le
tribunal, avaient à rechercher des élémens d’opinion.
Ainsi rien n'autorise le grief articulé sur ce point par
les gérans, et la confirmation du jugement dont est
appel ne peut présenter à cet égard l’apparence même
d’une difficulté.
Seulement il sera nécessaire d’expliquer le jugement,
parce que le dispositif présente dans sa rédaction quel
que équivoque. Les gérans sont condamnés à prendre
des noirs fins dans la proportion de l\o kilogram m es
p o u r ioo kilogram m es de noir gros g ra in , est-il dit.
Cela pourrait s’entendre en ce sens, que sur i 4 o kilo
grammes le sieur Mossier serait tenu d’en fournir 100
de noir gros grain, et 4 ° seulement de noir fin. Or,
s’ il en était ainsi, il aurait été commis, au préjudice
du sieur Mossier, une erreur grave; une erreur qui
serait signalée, il est vrai, par le rap^brt des experts;
une erreur qui serait aussi démontree par les motifs
du jugement où il est dit textuellement : « qu’il y a
7
�( 5o )
lien de réduire la quantité de noir fin dont les gérans
ou leurs ayant droit sont tenus de prendre livraison
ci 4o kilogram m es p a r 100 de noir fa b riq u é en gros
grain ou en Jin .
M a i s enfin cette erreur ou cette équivoque ne doit
pas subsister, et la Cour la corrigera , dût le sieur
Mossier interjeter, s’il le fallait, un appel incident
pour la faire rectifier et pour faire dire que sur 100 ki
logrammes de toute espèce de noir fabriqué, il ne sera
tenu de fournir que 60 kilogrammes de noir gros grain
en demeurant autorisé à en livrer 4° en noir fin.
§ IV.
G r ie f tiré de la séparation des d eu x associés
M ossier et D aubrée.
Un quatrième grief est proposé par les gérans de la
compagnie. Ils le font résulter de ce que le sr Mossier
s est séparé du sr D a u b r é e avec l e q u e l il s’était associe
pour la fabrication du noir, tandis que selon les gérans
ce concours du sieur Daubrée avait été la principale
cause, la condition déterminante de la confiance qu’ils
ont accordée au sieur Mossier, en le chargeant de
l ’entreprise.
La compagnie, ajoutent les gérans, a droit, à raison
de ce, à des dommages-intérêts.
Ce grief n’est qu ’une illusion, s’il n’est pas un pré
texte pour détourner l’attention.
La rupture de la société qui existait entre le sieur
Desrones et le sifcur Mossier, cette rupture seulement
partielle, serait, la considérât-011 même comme géné
rale, absolument étrangère à la compagnie; car, h son
égard, le sieur Daubrée reste toujours obligé; toujours
�(
5 0
.
.
il demeure responsable des vices de fabrication et de
la mauvaise gestion de l ’entreprise; seulement il a son
recours contre le sieur Mossier. C ’est ce qui résulte de
l ’acte du 16 juillet 1829 par lequel la société est dis
soute. Ainsi les droits de*la compagnie restent intacts.
Dirait-on qu’elle ne profite pas des avantages que lui
présentait la participation du sieur Daubrée à l ’en
treprise ?
On répondrait que le sieur Daubrée s’occupait peu
ou même ne s’occupait pas de la fabrication du noir.
C ’était au sieur Mossier, presque exclusivement, que
ce soin était confié. Le sieur Daubrée était principale
ment chargé de placer les produits; et il était, pour
cela, presque continuellement en voyage. Or, d’après
l ’article 2 du traité, cette partie de l’entreprise resta à
la charge du sieur Daubrée, même après la dissolution
de son association avec le sieur Mossier; en sorte qu’il
continua de. faire ce qu’il faisait auparavant, et que
la distribution des travaux de l ’entreprise ne fut pas
changée.
Au reste, pour être admise à se plaindre de cette
séparation des deux entrepreneurs, il faudrait que la
compagnie prouvât clairement qu’elle en a éprouvé
quelque préjudice, notamment par les vices de la fa
brication du noir.
Or, quel préjudice a-t-elle éprouvé?le noir a-t-il été
plus mal fabriqué? l ’a-t-il été par des procédés diffé
rons et moins avantageux que ceux précédemment
employés? les résultats obtenus ont-ils présenté moins
de noir gros grain ou n’ont-ils produit que du noir
d’ une moins bonne qualité? enfin quels sont les vices
6 ? °t
'
' ;: ? i
v7 /
�( 5s )
de fabrication ou de gestion qui ont été remarqués
depuis la séparation du sieur Daubrée?
On ferait de vains efforts pour en indiquer de réels.
Qu’importe donc, encore une fois, cette séparation
à là compagnie?
Les gérans prétendraient-ils qu ’on aurait dû les pré
venir?
On leur ferait observer qu’il pouvait y avoir conve
nance, mais qu ’il n’y avait pas obligation.
On leur dirait aussi que les sieurs Mossier et Dau
brée avaient si bien l ’intention de les prévenir qu’ils
en étaient convenus expressément par l ’article 8 de
leur traité.
On ajouterait, au reste, que cette omission ne pour
rait donner lieu à des dommages et intérêts, qu’au
tant qu ’elle aurait occasionné une perte réelle à la
compagnie.
Enfin on serait autorisé à soutenir que la compagnie
n’a pas ignoré cette séparation; et ce qui le prouve,
entre autres faits, c’est le jugement arbitral du 7 fé
vrier i 83 o et l’instance qui l ’a précédée, instance et
jugement dans lesquels le sieur Mossier figure seul
contre la compagnie, sans que celle-ci 011 ses gérans
aient appelé en cause le sieur Daubrée; ce qu’ils n’au
raient certainement pas manqué de faire s’ils n’avaient
pas su qu’entre les sieurs Mossier et Daubrée il n’exis
tait plus de société.
. Ainsi s’évanouissent les prétendus griefs des gérans
contre un jugement qui a plutôt favorisé que blessé
les droits de la compagnie.
�( 53 )
S V
E T D ERN IER.
D om m ages-intérêts acco rd és, et griefs du sieur
Mossier.
La compagnie se plaindrait-elle des dommages et
intérêts alloués au sieur Mossier? celui-ci serait luimême beaucoup plus fondé à se plaindre de la faiblesse
de cette indemnité. Obligé, soit par le refus du noir,
soit par l’encombrement de ses magasins et par le dé
faut de fonds, de suspendre, depuis le mois d ’avril
i S 3 o , les travaux de l ’entreprise; privé du prix des
noirs que les gérans ne retiraient pas; chargé cependant
de l’entretien de nombreux bâtimens et des machines
qui servaient à la fabrication; dans la nécessité même
de payer encore certains ouvriers pour ne pas en être
absolument dépourvu, lorsqu’il faudrait reprendre les
travaux, le sieur Mossier a éprouvé des pertes considé
rables par le fait des gérans. Une indemnité de 2,000 f.
seulement est presque illusoire, si on la compare au
préjudice souffert. Cependant le sieur Mossier s’est
résigné et 11e s’est pas plaint de cette disposition du
jugement.
Il est vrai que, pour diminuer ses pertes, il a traité
avec les sieurs Dumont et Desrones, le ¿4 janvier 1 83 1,
avant le jugement dont est appel, qui est du 7 février
suivant. Par ce traité, le prix des noirs en grain avait
été fixé provisoirement à. 10 fr. 28 cent, les 100 kilo
grammes; et le sieur Mossier abandonnait les noirs fins
sans aucun prix, si ce 11’est le remboursement des frais
d ’emballage et de transport.
�Mais cet arrangement, qui n’était, au reste, que
provisoire, lui était trop onéreux; c’est ce qu’ont
reconnu depuis les sieurs Desrones et Dumont euxmèmes, q u i, par une lettre du 26 mars 1 83 1 , se sont '
soumis à recevoir au même prix de 10 fr. 28 cent. i 5
pour 100 de noirs iins. Encore sera-t-il difficile au
sieur Mossier d’exécuter, sans perte, ce second marché
qui n’est anssi que provisoire comme l’était le premier .
Plus heureux que le sieur Mossier, les gérans de la
compagnie ont fait, le 9 février suivant, avec les sieurs
Dumont et Desrones, de nouvelles conventions qui
leur offrent d’assez grands avantages. Ils ont renouvelé
ou ratifié le bail du 8 septembre 1829 et la subrogation
générale qu’il contenait*, seulement ils ont réduit à un
million de kilogrammes de noirs en gros grain la quan
tité de deux millions quatre cents kilogrammes que
les preneurs étaient auparavant autorisé? à faire fabri
quer; et par une conséquence nécessaire de cette ré
duction dans la quantité, ils ont aussi diminué pro
portionnellement le prix annuel du bail qui n’est
aujourd’hui que de 10,000 fr.
On remarque , au reste , dans ce traité , que les pre
neurs doivent payer 1 fr. 5 o cent, de plus par chaque
centaine de kilogrammes, qu’ils prendraient au-delà
du nombre convenu. E n sorte qu ’en faisant fabriquer
un million de plus par an, ils devraient payer à la
compagnie if),ooo fr. de plus; ce qui produirait à
celle-ci un bénéfice annuel de i5,ooo fr., quitte de
toutes charges, au lieu de 2/1,000 fr. qui étaient le prix
du I er bail, pour une quantité cependant plus consi-
�(
55
)
dérable de noirs, puisqu’elle devait être de 2,4°°>ooo
Kilogrammes. Cela prouve que ce dernier traité offre
plus de bénéfice proportionnel à la compagnie que les
précédons.
On y parle aussi des noirs fins, qne l ’on dit ne
pouvoir actuellem ent avoir d’emploi avantageux 3 et
pour lesquels un prix est fixé dans le cas où l ’on trou
verait dans la suite à les placer.
Ce dernier traité de la compagnie avec les sieurs
Desrones et Dumont fournit une nouvelle preuve que
les noirs fins comme les noirs gros grain recevaient
autrefois un emploi utile, er que s’ ils n’en ont pas
a c t u e l l e m e n t , l’on espère qu’ils en obtiendront à l’ave
nir. Ce traité prouve donc que ce n’est pas l'imperfec
tion dés noirs, et sur-tout une imperfection qui serait
l ’effet de la négligence ou de l’impérilie du sieur Moss i ’r , qui s’oppose actuellement à un placement avan
tageux ; il fait reconnaître la vérité que nous avons
déjà indiquée, savoir que la baisse du prix de cette
espèce de noirs a une cause absolument étrangère aux
faitsdu sieur Mossier; que cette baisse provient, soit de
la diminution du commerce en général et de la diffi
culté que l’on éprouve aujourd'hui à faire des envois à
l ’étranger, soit du procédé qui a été récemment dé
couvert pour revivifier le noir animal, après un pre
mier usage, pour lui rendre sa propriété première, et
par suite pour l’employer de nouveau à la raffinerie.
Il est évident que sieur Mossier ne peut être res
ponsable de ces événemeus.
Il est évident encore que si les noirs fins ou autres
�<f'o6
*
( 56 )
eussent augmenté de valeur, si les frais de fabrication
fussent’-devenus plus coûteux, la compaguie seule eîft
proüté de l'augmentation des prix, et le sieur Mossier
aurait seul aussi supporté la perle. Comment se feraitil , parce que nous nous trouvons dans l ’hypothèse
contraire, que ce fût sur le sieur Mossier encore que
pesât la perte, tandis que la compagnie obtiendrait,
même aujourd’ hui, de forts grands bénéfices, sans
aucune charge.
L a justice de la Cour n’admettra pas de telles prér
tenlions.
Elle s’empressera d’autant plus à les repousser,
qu’elle reconnaîtra facilement que si quelqu’ un avait
à critiquer le jugement et le rapport d ’experts qui
l ’avait préparé, c’était le sieur Mossier à qui l ’on
n ’ a l l o u e que /jo kilogrammes de noirs fins sur 100,
quoique les soins les plus m i n u t i e u x de la part des
experts n’aient pu arriver à cette réduction, même en
n’opérant pas en grand; le srMossier qui pourrait signa
ler 1’ influence qui a présidé à l ’étrange rédaction de ce
rapport, qui pourrait se plaindre aussi de l ’imprudente
faiblesse de deux des experts que l’on vit, conduits
par l’ un des gérans, le sieur Blanc, pénétrer dans la
chambre du conseil au moment où le tribunal déli
bérait sur la cause et sur leur rapport, dans le but de
présenter aux magistrats pour la compagnie, des obser
vations qu ’on ne leur demandait pas et que repoussa
l’impartialité du tribunal.
Le sieur Mossier, pressé d’en finir, renonçant à des
griefs dout la vérification entraînerait de nouvelles
�( s7 )
66J o
lenteurs, se bornera 'a deux chefs d’appel incident ,
qu’il suffit , il semble , d’indiquer pour les faire
admettre.
L ’un qui a déjà été annoncé, est relatif à l ’amphi
bologie que présente le dispositif du jugement, quant
à la proportion qu’il fixe entre les noirs fins et les noirs
gros grain.
Les motifs du jugement sont clairs; ils allouent au
sieur Mossier l\.o kilogrammes de noir fin sur ioo kilo
grammes de noirs de toute espèce gros ou fin; et ces
motifs sont en harmonie avec le rapport des experts,
sauf une différence de cinq ou six pour cent, dont le
tribunal grève en plus le sieur Mossier.
Le jugement, dans son dispositif, lui passe aussi les
4o kilogrammes de noir fin, mais en ajoutant sur cent
kilogram m es de noir gros grain.
Ces dernières expressions de noir gros g r a in , ne
sont sans doute qu’ une erreur de rédaction échappée à
la plume. Car prise à la lettre, la disposition serait en
contradiction avec les motifs qui l ’ont dictée et avec
le rapport qui l ’a préparée.
Il
fallait dire, sur cent kilogram m es de noirs de
toute espèce, gros ou f i n , comme il est dit dans les
motifs , de manière à exprimer bien clairement que sur
ioo kilogrammes, le sieur Mossier ne devra fournir
que Go kilogrammes en noir gros grain, et les quarante
autres en noir fin.
L a Cour rectifiera cette partie du jugement, ou par
une explication q u i suffira peut-être, ou par un mal
jugé, si elle le croit nécessaire.
�Un second chef de réclamation, delà part du sieur
Mossier, est relatif aux intérêts des sommes qui lui
sont dues pour le prix des noirs. Le tribunal, en
condamnant la compagnie à retirer les noirs et à en
payer le prix, ne l ’a pas condamnée au paiement des
intérêts. Cependant il est juste qu’il en soit alloué au
sieur Mossier à compter de la sommation qu’il a faite
aux gérans de retirer les noirs. Celte sommation est
du 24 mars i 83 o. Déjà deux ans se sont écoulés depuis
celte mise en demeure, le procès s’étant prolongé.par
les difficultés qu’ont élevées les gérans, el par l ’appel
q u ’ils ont interjeté. Pendant ce long espace de tems, le
sieur Mossier, privé de ses capitaux, grévé des charges
de l ’entreprise, obligé d’emprunter pour y satisfaire
et pour fournir à ses besoins personnels, a été placé
dans la plus fâcheuse position; et pour tous dommages
et intérêts, on ne lui a accordé qu’une somme de
deux mille francs. N ’est-il pas juste que, comme
supplément de dommages et intérêts, on' lui alloue
l ’intérêt, au taux du commerce, des sommes qui luisont
dues; de ces sommes qu’il aurait touchées, et dont il
aurait fait ses affaires depuis le mois de mars i 83 o,
¿>i la compagnie avait retiré les noirs, comme elle s’y
était soumise par le bail à entreprise, dès l ’époque où
ils ont été fabriqués, et si elle en avait payé le
prix dans le mois comme il avait été expressément
stipulé ?
L ’équité de la Cour n’hésilera pas, sans doute, à
accorder au sieur Mossier ces intérêts : indemnité
bien faible pour toutes les perles, pour louies le$
�.
(.59?
tracasseries que lui a fait éprouver un procès que
plus de réflexion, plus de justice n’auraient pas permis
aux gérans de lui intenter.
MOSSIE R .
Me A L L E M A N D , ancien A vocat.
Me G R A N E T , avoué-licencié.
rt
RIOM
,
IM P RIMERIE
DE
S ALLES
FILS ,
P RES L E
PALAIS
DE
JUSTICE.
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
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An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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[Factum. Mossier. 1832?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Granet
Subject
The topic of the resource
mines
exploitation du sol
schiste
sociétés par actions
noir animal
commerce
industrie
moulins
bail d'entreprises
procédés de fabrication
Daubrée (Edouard)
voyageurs de commerce
exportations
tribunal de commerce
arbitrages
experts
dissolution de sociétés
sociétés
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Mossier, intimé ; contre les sieurs Blanc et Guillaumont, gérans de la compagnie de Menat, pour l'exploitation du schiste carbo-bitumineux, appelant.
Table Godemel : Cession : 7. les cédataires ou subrogés aux droits d’une compagnie de mines, peuvent-ils soutenir, que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession ou transport à l’entrepreneur, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à cause des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement le traité relatif à l’exploitation, avec l’entrepreneur, ils avaient en eux même la faculté de faire cette signification, s’ils la jugeait utile ? Qualité : 7. un individu, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la compagnie, ayant comparu à un acte de subrogation fait au nom de la compagnie, qu’il a signé, sans déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, et n’avoir en rien fait novation à ses droits, résultant de son autre qualité, celle d’entrepreneur ? Mines : 4. actionnaire de la compagnie des mines de Menat exploitant une fabrique de noirs de deux espèces, l’une dite noir gros grain, et l’autre dite noir fin, le sieur mossier, qui avait traité avec elle le 7 avril 1829 pour la fabrication de ces deux espèces de noir, a-t-il pu assigner les gérants pour les faire condamner, avec dommages intérêts, à retirer tous les noirs fabriqués ou, n’a-t-il eu d’action directe que contre les sieurs Dumont et Derosne, subrogés aux droits de la Compagnie par traité du 8 septembre, même année ?
Mossier, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la Compagnie, ayant comparu à l’acte de subrogation du 8 septembre, qu’il a signé, sans toutefois déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, celle d’actionnaire, et n’avoir en rien fait novation à ses droits résultants de son autre qualité, celle d’entrepreneur ?
Le noir en magasin a-t-il pu être refusé par la Compagnie, ou par ses cédataires ? Le refus de renvoi a-t-il causé préjudice à l’entrepreneur Mossier et donné lieu à des dommages intérêts ? Contre qui, des gérants ou de la Compagnie, ou des subrogés, ces dommages intérêts doivent-ils être prononcés ?
Les sieurs Dumont et Derosne devenus cédataires ou subrogés aux droits de la Compagnie par l’effet du traité du 8 7bre 1829, peuvent-ils soutenir que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession à l’entrepreneur, Mossier, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à raison des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement l’acte du 7 avril précédent, ils avaient eu eux même la faculté de faire cette notification, s’ils la jugeaient utile ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1832
1825-1832
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2715
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2716
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53552/BCU_Factums_G2715.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Menat (63223)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bail
bail d'entreprises
commerce
Daubrée (Edouard)
dissolution de sociétés
experts
exploitation du sol
exportations
industrie
Mines
moulins
noir animal
procédés de fabrication
schiste
sociétés
sociétés par actions
tribunal de commerce
voyageurs de commerce
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53553/BCU_Factums_G2716.pdf
57969f4bf7b038a325c938a0c3848278
PDF Text
Text
MEMOIRE
EN RÉPONSE,
COUR ROYALE
DE RIOM.
CHAMBRE
Des Appels de Police
Correctionnelle.
COMPAGNIE DE MENAT,
En la personne des Gérans, appelans et
intimés ;
P our
la
CONTRE
"*Les Sieurs M O SSIE R et D A U B R Ê E , intimés et appelans;
ET ENCORE CONTRE
Les Sieurs DUMONT et DEROSNE, intimés;
N o u s publions notre défense, puisque le sieur Mossier le
veut. Nous eussions désiré l’éviter, dans le pays, même, où
réside la famille honorable à laquelle il appartient, et que nous
ne voudrions pas blesser ; mais il faut se défendre, alors qu’il
ne craint pas d’accuser avec une témérité sans exemple. Il taxe
ses adversaires d’un esprit de tracasserie ; il les montre comme
savourant le triste avantage de lui causer un grand préjudice,
paralysant toutes ses ressources, et retenant dans leur caisse, les
fonds qui lui sont dûs. Il semblerait à l’entendre qu’ils ne sau
raient goûter de plus grand plaisir que celui de lui faire du
mal. Il est impossible d’être plus inattentif dans scs paroles,
plus irréfléchi dans scs accusations.
Ces êtres haineux que le sieur Mossier désigne , sont deux
négocians recommandables de la ville de Clerm ont, dont la
�( 2 >
vie est publique, dont aucun précédent n’a fait suspecter là
plus rigoureuse délicatesse.
Ce sont deux hommes qui gèrent l’affaire d ’une Compagnie
de laquelle ils sont simples actionnaires, de même que le sieur
Mossier; qui avaient, conséquemment, le plus grand inte'rêt
à favoriser les opérations de Mossier , au lieu de les traverser ;
qui avaient un intérêt personnel à faire circuler des fonds, au
lieu de les retenir ; et q u i, aujourd’h u i , ne sont que les organes
de la Compagnie toute entière.
Ce sont deux hommes q u i, par bienveillance pour le sieur
Mossier, l’ont soutenu contre la masse des actionnaires, et lui
ont fait conserver, imprudemment sans doute, un titre que la
Compagnie voulait lui retirer ; deux hommes, enfin, qui n’ont
d ’autre reproche à se faire que d’avoir eu trop de confiance en
lui ;d ’avoir cru qu’il mettrait un vifintérêt à faire prospérer une
entreprise qui présentait à leur société des avantages immenses,
e t , par conséquent, à l’industrie une spéculation licite autant
que fructueuse, si elle eût etc bien dirigée.
Cet espoir s’est évanoui ; cette entreprise a etc étouffée dans
songerme; des fonds considerables y ont été perdus ; les ac
tionnaires ont vu disparaître tout cela. Pourquoi ?
Parce que le sieur M ossier, au lieu de ces connaissances qu’il
se targuait d’a vo ir, et qu’on lui supposait, n’y a porté qu’une
funeste et trop notable incapacité; au lieu de zèle , que de l’in
curie ; et qu’enfin , voyant, par expérience , que ni scs moyens
personnels, ni ses goûts, ni ses habitudes ne pouvaient s’ap
proprier à cette situation nouvelle, il cru pouvoir séparer ses
intérêts de ceux des actionnaires , et qu’après avoir manqué à
tous ses engagemens , et ne pouvant douter qu’il ne fût repro
chable , il a cru trouver une porte de salut, en faisant un procès
à la Compagnie dont il devait soigner les intérêts.
Ils s’était engagé à fabriquer et à livrer, h 9 fr. 5o cent., le
noir propre au raffinage, et à 20 fr. le noir propre aux couleurs ;
�( 3 )
;
il lui offre comme matière de choix, et il a voulu la contraindre
à recevoir, au plus haut prix convenu, tous les déchets de sa
fabrication ; des noirs fins, de la poussière, qu’il convient luimême n’être bonne à aucun usage, et qu’il a long-temps ven
due comme engrais. Il faut lui prendre et .lui payer 20 f r ., ou
tout au moins9 fr. o c. le quintal, cette matière inutile , pré
cisément parce qu’elle n’est bonne à rien. Telle est la préten
tion du sieur Mossier ; semblable à ce fondeur inhabile autant
qu’audacieux, qui, après s’être engagé à livrer du métal pur
et dégagé de tout alliage , venait en requérir le prix en offrant
des scories.
O ui, certes, il y a préjudice, et un grand préjudice ; mais
il est pour la Compagnie. La plus belle et la plus facile entre
prise a été p a r a l y s é e ; deux cent mille francs y ont été jetés
sans le moindre fruit, par des industriels, des ne'gocians, des
propriétaires, qui y avaient vu des avantagés publics et parti
culiers; et tout cela, nous ne craignons pas de le dire, p arla
faute du sieur Mossier, par une continuité de fautes lourdes,
grossières, par un manque total de volonté ; et il accuse ! et il
demande des dommages-intérêts !.... Il faut donc dérouler les
faits assez nombreux de ce procès, dont il oublie les uns , et
dénature les autres ; ils sont établis par des actes clairs et précis
par une correspondance qu’il ne peut pas récuser ; ce sont là
les sources où nous allons puiser. S i , comme nous le pensons,
les conséquences en deviennent accusatrices contre l u i , il ne
pourra s’en prendre qu’à lui-même et à son imprudence.
5
�(4)
FAITS.
Il y a quelques années qu’on découvrit à Menai un banc de
schiste bitumineux, que les chimistes crurent pouvoir appro
prier à la décoloration des sucres et sirops. L ’industrie s’en
empara; c’était une belle spéculation que celle de créer, en
concurrence du noir animal, une préparation meilleure, peutêtre , et à un prix de beaucoup inférieur.
L ’entreprise paraissait devoir réussir sans être sujette à
beaucoup de chances. Le banc était situé à dix minutes d’une,
roule royale, et il suffisait de le couper devant s o i, au niveau
de terre , sans avoir besoin de faire de travaux au-dessous du
s o l , ni de grands frais d’extraction. E nfin, la matière ne sem
blait pas exiger des préparations longues et hasardeuses. Il fal
lait seulement du soin et de l’attention pour la trier, la dégager
des pyrites, la faire calciner, et la réduire en poudre , soit
avant, soit après la calcination.
Le brevet d’inveiition fut obtenu, et la concession faite au
sieur Bergounhoux, pharmacien, puis elle passa dans les mains
des sieurs Chevarrier, Comitis et Cournon. Les concession
naires firent quelques essais sous la direction du sieur Mossier;
ils réussirent mal, et reconnaissant d’ailleurs qu’à eux seuls
ils ne pouvaient pas soutenir le poids d’une entreprise aussi
vaste, et qui ne pouvait être quelque chose qu’en la sortant
des bornes étroites où ils étaient obligés de l’enfermer , ils
pensèrent à la céder à une Compagnie, seul moyen de la faire
prospérer.
Une procuration fut donnée au sieur Mossier pour vendre
J’iinmeuble el leur privilège, au prix de n o ,o o o fr. Cette cessoin fut faite par Mossier aux sieurs Blanc et Guillaumon ; et
le i avril 1827, ceux-ci admirent le sieur Mossier, person-,
ncllcment, pour un tiers dans leur acquisition.
Les sieurs Blanc et Guillaumon établirent immédiatement
5
®
�( 5)
leur société en nom collectif sous la raison sociale, P. Blanc et
Guillaumon ; puis ils appelèrent des associés en commandite,
en émettant cent actions de 2,000 fr. chacune. Ces cent actions
furent remplies en très-peu de temps. Les sieurs Blanc et
Guillaumon en conservèrent vingt pour leur compte person
nel, et formant, d’ailleurs, le noyau derassociationenleurnom
collectif, ils en demeurèrent gérans. Le sieur Mossier abuse de
cette qualité pour les faire considérer comme de simples agens
d ’un caractère inquiet ettracassier, tandis qu’ils étaient et sont
encore les véritables propriétaires, intéressés plus que per
sonne à protéger tous les élémens , tous les moyens de pros
périté qu’on pouvait mettre en jeu pour faire réussir cette en
treprise.
Le mai, la société des actionnaires se constitua. Elle nomma
cinq de ses membres pour former le conseil d’administration.
Dans dette première réunion générale , on s’occupa du choix
du Directeur. MM Blanc et Guillaumont présentèrent le sieur
Mossier, qu’ils avaient déjà associé, pour un tiers, sinon à la
société en nom collectif, au moins à la concession. Ils doivent
dire ici qu’ils éprouvèrent beaucoup de contradictions de la
part de quelques actionnaires , spécialement des précédons
propriétaires, qui prétendaient avoir eu à se plaindre de son
peu d aptitude et de la mauvaise direction qu’il avait donnée
à l’entreprise. Les gérans objectèrent qu’il avait abandonné
une bonne pharmacie poür s’y livrer ; que lui ou les siens
avaient assez d’actions pour y être fort intéressés , etc.... ; on
transigea. Cela fut le principe delà détermination qui fut prise
le lendemain par le conseil d’administration, auquel était ré
servée la nomination des employés.
En effet, le ïo mai, le conseil, après s’élrc constitué, dé
clara inviter le docteur Bardonnet « à surveiller les diverses
» opérations chimiques que nécessiterait la préparation du
» schiste , en qualité de Directeur honoraire. »
arrêta que M. Mossier remplirait provisoirement les fonc
5
11
�(6 )
tions de Directeur , restant à M enât, se réservant de fixer les
appoinlemens, lorsqu'il nommera définitivement le titulaire.
E n fin , il créa deux emplois subalternes aux appointemens
de 1,200 fr. chacun.
est facile de voir pourquoi le Directeur ne fut nommé que
provisoirement; p ou rqu oi, à côté d’un pharmacien chargé de
cette direction, un médecin fut nommé Directeur honoraire
pour surveiller les opérations chimiques. C ’était évidemment
le résultat de quelques incertitudes sur l’admission du Direc
teur et sur la capacité du sieur Mossier. Les sieurs Blanc et
Guillaumon ne craignent pas qu’on leur objecte que les diffi
cultés étaient émanées d’eux.
Bientôt après, le sieur Mossier se rendit à Lyon pour y faire
confectionner un appareil en fonte, indiqué par M. B arruel,
pour diminuer la dépense du combustible, et séparer le corps
gras de la poudre décolorante, de manière à en faire de l’huile
à brûler.
A son retour, il fit construire douze fours à la fois, sans con
sulter personne, croyant sans doute au-dessous de lui de s’as
sujettir à un essai. Aucun d’eux ne put servir à rien ; et la
Compagnie perdit ,ooo fr. qu’ils avaient coûté. Il en fut de
même de l’appareil que le sieur Mossier ne put ni employer,
ni monter ; et ce fut encore une dépense inutile de 2,800 fr.
Enfin, les résultats furent tellement à l’inverse de ce qu’on en
avait espéré, qu’un grand nombre d’actionnaires demandèrent
la révocation du sieur M ossier, ou, pour mieux dire , la ces
sation d’un provisoire adopté par considération pour l u i , et
à la demande des gérans. On transigea encore ; on arrêta, sans
en faire registre, qu’on lui donnerait un Adjoint. On lui pro
posa l’un des actionnaires, recommandable à tous égards ; il le
refusa, sous prétexte que le caractère de cet Adjoint serait in
compatible avec le s ie n , et que ce serait une dépense inutile.
On attendit.
Quelque temps après, le mal empirant encore, on fit venir
11
3
�'^
de Lyon un homme intelligent et habitué à la préparation
du noir animal, un fabriquant dont 1’établissement avait été
incendié. Le sieur Mossier le reçut mal, et ne tarda pas à le
molester. Le second jour, il déclara aux gérans qu’il ne pou
vait pas rester. « Malgré le besoin que j’ai, leur dit-il, de ré
cupérer ce que j’ai perdu, je préfère retourner à L y o n , plutôt
que de vivre avec un homme à qui je déplais.» C ’est ainsi que
le sieur Mossier, méconnaissant les devoirs de sa position,
faisait prévaloir son esprit d’absolutisme , et un amour-propre
mal entendu. Les gérans s’en sont aperçus beaucoup trop tard,
et lorsque le mal s’était aggravé.
Pendant tout ce tem ps, des essais avaient été faits , le sieur
Mossier s ’en étant mis en peine, avait fabriqué des noirs de
belle qualité; des échantillons q u ’on trouva superbes, avaient
été obtenus et envoyés en divers lieux. C ’est à cette époque
-que se rapporte la lettre du sieur Bardonnel, dont on cite un
fragment à la page du Mémoire ; mais on ne montre pas ce
qu’ajoutait le sieur Bardonnet, comme moyen de réussir et
d’éviter la concurrence. Il disait :
« Il ne s ’agit plus que de suivre le procédé que j e vous aiin» d iqu é, et que je crois le plus sûr et le plus économique. Ne
» vous en écartez p a s, et soyez certain de voir bientôt notre
» noir convenablement placé dans le co m m erce.....................
3
» J’attends très-prochainement les échantillons que je vous ai
» demandés ; soignez-les bien, faites éventer la jleur, pour qu’il
» n ’y ait pas de gomme qui s’opose à la filtration de la clairce.
» I l ne faut ni trop fin , ni trop gros ; mais des grains bien
» égaux. » Saisissons bien ces dei'niers mots, nous aurons
les appliquer lorsque les faits seront un peu plus connus. C ’est
le sieur Mossier lu i-m êm e qui produit celte lettre, et en ar
gumente. Elle est d’ailleurs en harmonie avec les réflexions de
M. Barruel, qui avait fait une vérification attentive des lieux,
et fourni un rapport fort détaillé :
5
�(8).
« La mine est inépuisable , disait-il ; elle peut fournir jà
» toutes les parties du monde , quelque consommation qu’on
» en fasse. »
Mais il ajoutait : « Le procédé suivi jusqu’à ce jour pour
» la calcination est vicieux sous plusieurs rapports, tel que la
» construction des fours, etc.... Je ne balance point à conseiller
» de changer totalement le mode de fabrication.
» S i on exécute fidèlement le mode de préparation que j e vois
» indiquer pour le noir minéral, j’ose garantir que très-pro» chainement il jouira d ’uneréputation supérieure au meilleur
» noir d’os; de plus, on peut compter sur un placement im» mense.
» Le genre d’appareil que je propose, et dont je fais passer
» le plan, aura l’avantage d’être moins coûteux, etc., etc.»
Nous avons déjà parlé de cet appareil et du résultat.
Telles étaient les garauties et les heureux auspices sous les
quels on ouvrait cette branche d’industrie.
Bientôt des commandes furent faites aux gérans. La lettre du
sieur Bardonnet en a n n o n c e une considérable. Leur corres
pondant de Nantes vint à Clermont ; et sur le témoignage avan
tageux qu’il rendit de ces échantillons, ils firent fabriquer une
plus grande quantité. Plus tard, ils expédièrent sur les pre
mières places; Paris, Marseille, Lyon, Nantes, Londres , etc.
La suite des temps leur a prouvé combien ils avaient été induits
en erreur.
Toutefois , la Compagnie sentit qu’elle ne pouvait pas tenir
cet établissement en ré g ie , et malgré les espérances qu’elle
concevait, et la confiance excessive des gérans dans les soins
et l’habileté du sieur Mossier, elle prit le parti de se décharger,
moyennant un prix fixe , de fous les soins d’une régie et de
tous les hasards de la fabrication. Les gérans, en l’apprenant
au sieur Mossier, l’engagèrent à la prendre pour son compte.
Celte négociation fut préparée par une correspondance.
Dans une première lettre , du 1" juillet 1828 , le sieur
�( 9
M ossier, s’excuse sur les mauvais résultats obtenus dans le
principe. Ce n’était point sa faute, dit-il ; puis entrant dans le
désir de la Compagnie, il indique la possibilité de traiter avec
.elle. Les gérans lui avaient répondu et demandé qu’il fit des
propositions formelles. Nous devons avouer qu ’ils désiraient
de le voir charge de la fabrication ; ils étaient aveugles sur son
com pte, et ne pouvaient se rendre aux objections de plusieurs
actionnaires.
°
Il leur écrit, le juillet 1828 :
«Je m ’empresse de vous présenter les propositions que vous
m ’avez demandées :
» i° Je prends l’engagement de livrera la Compagnie, cha
que mois, une quantité de 60 à 200 milliers de noir pour
clarifier et pour couleurs, fabriqué, blutté, emballé et conduit
à Clermont et Vichy, moyennant 9 fr. les 100 kilogrammes ;
» 2° Chaque livraison sera soumise à l'essai de la personne
commise à cet effet par la Société. »
Nous ne copierons pas toute cette lettre, qui indique
d ’autres conditions , parce qu’elles se retrouvent dans le traité
dont nous allons rendre compte. Nous en parlons seulement
pour faire voir que les propositions ont élc bien entendues
par lui, puisqu’il les a méditées et les a faites lui-incine ; la
Compagnie s’élant bornée à les accepter. On y remarque, pour
la première fois, l’indication du noir pour couleur. C ’est que
le sieur Mossier avait cru pouvoir approprier à cet usage la
matière calcinée, et spécialement la partie la plus iinc, qui
était, par cela seu l, impropre au raffinage. N i trop gros, ni trop
f u i , avait dit le sieur Bardonnct. On verra comment le sieur
Mossier a réussi dans celtespéculalion. Elle est l’e point de dé
part et la cause principale du procès actuel. Au reste, nous
devons dire qu’en finissant, le sieur M o s s i e r repousse le désir
de quelques sociétaires, de lui donner un associé pour la f a
brication ; il se fonde sur la modicité des bénéfices. Toujours
est-il que scs propositions ayant élé acceptées , il fut passé
2
5
�( 1° )
cnlre les gérans et l u i , à la date du 7 août, le traité qu’il a
analysé dans son Mémoire. Avant d’y arriver, disons un mot
d’une déclaration par lui donnée dans l’intervalle. Elle répondra
peut-être aux reproches si vifs qu’il fait aujourd’hui aux gé
rans, en les accusant de ne lui avoir rien fourni de ce qu’ils
devaient fournir; elle est du i juillet 1828.
«Je soussigné, François Mossier, Actionnaire et Directeur
» provisoire de la Compagnie de Menât, promets de justifier
» de l’emploi de toutes les sommes que j’ai reçues jusqu’à ce
» jour pour le service de la Compagnie, et déclare que si,
» contre toute attente, lors.de la reddition des com ptes,il
» survenait quelques difficultés, je m’oblige à en garantir les
» gérans. » Au surplus, voyons le traité.
i° II s ’engage, moyennant g fr. par 100kilogrammes, de livrer
chaque mois à la Compagnie une quantité de trente à cent
milliers métriques de noir, pour clarifier et pour couleurs,
parfaitement calciné, bluüé, emballé, etc^
20 Chaque livraison sera soumise à l ’inspection et Fessaid'un
agent de la Compagnie, qui ên vérifiera Tétat ou le condition
nement.
3
Les autres conditions sont transcrites ou analysées au Mé
moire Mossier, sauf l’art. 11 , p a rleq u clil donne, en garantie
ses quatre actions qui seront inaliénables jusqu’à l’entier ac
complissement des conditions stipulées ; il est donc inutile de
les répéter.
Sans examiner autre chose en ce m om ent, retenons bien, de
ce traité , que les noirs devaient être propres pour clarifier et
pour couleurs; que lui, Mossier, chargé.dc les fabriquer,de
vait les livrer parfaitement calcinés etbluttés, et qu’avant de
les recevoir, la Compagnie avait droit de les soumettre à l ’essai
d un agent, nommé par elle.il serait difficile, dès lors, dépenser
que la Compagnie dût prendre tout ce qu’il plairait à M o s s i e r
de fabriquer , n’importe que la matière offerte ne pût s e r v i r
ni à clarifier, ni à faire des couleurs. On voit bien q u ’ e l le avait
�voulu sc décharger de tous les risques de la fabrication ; de
tous les inconvénierfk'de la régie ; el que livrant la matière
• prem ière, et payantTe noir fabriqué suivant le prix convenu,
elle avait le droit d’exiger du noir parfaitement propre à rem
plir son objet, sans avoir à se mêler désormais de la fabrication,
si cen csl pour en faire l'essai et en vérifier îe conditionnement. Il
est clair, enfin , que si le conditionnement n ’était pas*conforftie
à l’usage auquel le noir était destiné par l’acte même ; si Pessai
n’était pas satisfaisant, elle ne serait pas obligée de le recevoir.
Il est im p o s s ib l e s reculer devant cette proposition, à moins
qu’on ne soit résolu à nier l’évidence.
Remarquons, toutefois, que ce traité fut passé immédiate
ment après l’époque où des-échantillons satisfaisans (superbes
disait-on), avaient été fournis par le sieur Mossier, et où les
gérans avaient raison suffisante d’espérer quelque chose de
lui. C ’est ce que nous confirme la délibération du conseil
d ’administration, qui approuve le traité fait par les gérans. On
y lit ce préambule :
« Un grand nombre d’essais ayant été faits, soit sur latnanière
» la plus économique de fabriquer le noir de schiste, soit sur
» les résultats que devait donner ce noir , convenablementfa» brique, on a acquis la certitude que les obstacles qui s’op» posaient à l’admission de la matière dans les rafineries ,
» étaient vaincus, et que, dès lors , il ne restait plus qu’à se
» livrer à une fabrication étendue.
» Divers marçhés à livrer ont été conclus sur les échantil» Ions envoyés par les gérans.
» Pour satisfaire aux demandes faites et à celles qui pour» ront survenir, M. Mossier, Directeur provisoire, a fait di» verses propositions ; elles ont été débattues en conseil d ad» ministration. Des bases ont été arrêtées; et, d’apres ces
« bases, les gérans ont conclu, avec M. Mossier, le traité
» suivant, qui a été pleinement approuvé par MM les Admi» nislrateurs, comme le moyen le plus propre d’atteindre le
2.
�(
1 2
} -
» buFproposé. » Le traité est ensuite trjyjscrit littéralement.Par suite de ces espérances , conçues’iwr tout le monde , à
la suite des échantillons q u ’avait fournis îe sieur Mossier, et •
des succès qu’ils avaient e u s , la Compagnie voulut étendre les.
élémcns de préparation. Elle acheta, près de Clerm ont, un
moulin pour faciliter à la fois les moyens de moudre, blullcr et
emballer , £t, aussi, la surveillance et le droit de vérification
réservé par le traité aux agens de la Compagnie. Elle livra'
cette usine au sieur Mossier, chargé de toutes ces opérations
par l ’arL i er. Une autre délibération approuv^^ette opération,.
à la date du i " septembre 1828.
Nous avons vu, dans le traité , que le sieur Mossier pro
mettait livrer du noir propre aux rafineries et aux. couleursi
Quelles pouvaient être la force et les conséquences de cfette
promesse? Il est facile de les déterminer, 'et il est utile de les.
envisager, dès à présent, pour bien comprendre ce qui va
suivre..
•
La Compagnie n’avait d’abord supposé à la matière d’autre pro
priété qüc celle du r a f f i n a g e , c o m m e l e t é m o i g n e n t s o n prospec
tus et Ses délibérations précédentes ; mais, appropriera la fabri
cation des couleurs.cc qui ne serait pas bon pour les rafineries,
c’était un moyen de tout utiliser; et, sous ce rapport, un avan
tage pour la société. Le sieur Mossier en ‘offrit la promesse ,
et 011 en accepta l’engagement. Toutefois, cela ne pouvait pro
duire qu’un seul résultat. Si après avoir fourni du noir propreau raffinage et r e c o n n u , tel /îprès l'essai , le sieur Mossier
fournissait encore du noir propre aux couleurs, et qui fut re
connu bon , la société devait les recevoir. S’il ne pouvait en
fournir de cette dernière espèce, mais seulement de la pre
m ière, elle devait s’en contenter. Enfin, s’il ne fournissait
rien du tout, il s’élevait une autre question. Cela pouvait
naître des défauts de la matière ou de ceux de la fabrica
tion.
Le premier cas était peu probable : on ne pouvait même
�(i3)
pas le supposer. Les résultats avantageux, obtenus en dernier
lieu et agréés par les propriétaires des raffineries, avaient dû
rassurer la Compagnie et lui donner la plus grande confiance.
Toutefois , supposé que cela arrivât, et que le sieur Mossier,
sans une faute grave, ne pût pas obtenir de produits con
formes à son engagement, c’était un malheur commun , une
fausse spéculation établie sur des bases erronées, où la Com
pagnie devait perdre ses frais d’achat, de construction , tout
son matériel et ses dépenses, et le sieur Mossier ses frais de
fabrication. C ’était lui, après to u t, qui pouvait le moins s’en
plaindre, car, pharmacien par état, choisi, par cette raison ,
comme Directeur provisoire dès le principe , il avait tout
connu, tout calculé, et s’était chargé, en pleine connaissance
de cause , de fabriquer et fournir à un prix convenu. C ’était
donc son avis, e t , par-dessus to u t, sa promesse écrite qui en
gageait la Compagnie dans des dépenses énormes, pour réa
liser une espérance qu’elle avait pu concevoir , qu’il avait
confirmée après ses expériences, et qu’il s’était engagé à réa
liser. Certes, il n’aurait pas pu se plaindre s i , dans une pareille
position , la Compagnie s ’était résignée à perdre tout ce
qu’elle avait jeté dans cette entreprise, en se réduisant à re
fuser à Mossier le prix d’une matière qu’il ne pouvait pas lui
fournir comme il s’y était engagé ; car elle ne lui doit que le
prix de celte matière, et elle ne peut le devoir que lorsque
Mossier Ja livrera parfaitement propre ou à clarifier, ou aux
couleurs, et lorsque scs propriétés auront été constatées par
la vérification et l'essai des agens de la Compagnie.
Dans h; second cas , et supposé que la faute provint du
sieur Mossier, ou de son inconduite, ou de son défaut de
soin, ou d’une mauvaise fabrication, la Compagnie, qui lui
avait tout livré, moyennant promesse de fournir de'la matière
parfaitement fabriquée , avait le droit de le rendre responsable
du dommage qu’il causait par une faute grave.
Enfin, si la Compagnie, manquant à scs engagemens, et à
�( 14 ]
fournir ce qu’elle avait promis, oubliait ses propres intérêts
jusqu’à entraver la fabrication et à la rendre impossible ; sup
position tellement ridicule que l’esprit la repousse tout natu
rellement , il y aurait eu à voir si Mossier, à son tour, ne pou
vait pas réclamer indemnité.
Voilà, indubitablement, le résultat immédiat de la conven
tion faite entre les parties. Nous aurons donc à faire , d’après
les faits matériels du procès , l’application de l’une ou l ’autre
des règles que nous venons de reconnaître. C ’est pour cela
q u ’il faut porter une grande attention sur des faits que le sieur
Mossier s’efforce de travestir.
Nous pouvons, dès à présent, remarquer que le noir propre
à clarifier devant être ni trop gros, ni trop fin , comme le porte
la lettre du sieur Bardonnet, il restait après le moulage ,
bluttage, etc, une plus ou moins grande quantité de matière
ou trop fine , ou trop grosse, et plus spécialement trop fine
pour y être employée. C ’était un véritable déchet, comme il
en résulte d e toutes e s p è c e s de préparation des matières
brutes. O r, ce déchet était plus ou moins f o r t , suivant que la
fabrication était plus ou moins soignée ; et nous verrons plus
tard, que le sieur Mossier , qui s’en plaint, y a pris si peu
de soin , y a mis si peu d’attention , que par son propre fait,
ce déchet est devenu fort considérable, proportionnellement
aux résultats obtenus. Les expériences faites pendant que la
fabrication était en régie , jointes aux avis de MM. "Bergounh o ux, Lecocq et Darcet, avaient convaincu les gérans que le
noir fin se dissolvait dans le sirop , et qu’au lieu de clarifier
il noircissait ; ce noir fin devait donc être rejeté. Cela seul pro
duisait habituellement un déchet de plus de trente pour c e n t ,
qui devient plus considérable lorsqu’on fabrique mal.
Le rapport de M. Barruel apprenait qu’une expérience
faite d'après son procédé, lui avait produit sur. cent parties de
schiste :
�Noir mineral
58
H u ile ............................................................................
7
Sulfate d’ammoniac....................................................
i 1/2
66 1/2
Le déchet était donc d e ............................................
33
ip
Encore fallait-il des préparations chimiques; fort soignées.
C ’est précisément ce déchet que Mossier avait espéré rendre
propre aux couleurs. Il en avait communiqué l’espérance à la
Compagnie ; elle avait agrée sa proposition de le livrer pour
cet usage, et avait contracté l’engagement de le lui payer au
même prix que le noir à clarifier, lorsqu’il le livrerait parfai
tement fabriqué; mais là s’arrêtaient les obligations de la Com
pagnie; et c’était, à coup $ûr, l’affaire du sieur Mossier, d’exé
cuter ce qui était convenable pour approprier aux couleurs ce
qui ne serait pas bon pour clarifier. Jusques-là on ne lui devait
rien pour cette matière inutile; c’était à lui à s’en défaire, et
à la placer à son grc, comme il l’a fait long-temps, en la ven
dant pour engrais; il est vrai qu’alors on ne la lui payait pas
g fr. le quintal métrique.
Toutefois, remarquons encore que le sieur Mossier avait
conçu fort légèrement cette espérance. Il avait cru qu’il suffi
sait que le noir fut beau, et que la poudre fût fine. Cela aurait
été fort commode et très-p'eu couteux pour lui : ses bénéfices
eussent été énormes, car, sans rien ajouter à ses frais de fa
brication , les déchets eussent autant valu que la matière choi
sie ; mais il était dans l’erreur. Il fallait pour cela quelques
préparations chimiques, quelques précautions qu’il 11c prît
pas, que vraisemblablement il ne connaissait pas ou ne savait
pas employer. Huit mois se passèrent, pendant lesquels, tou
jours présomptueux par suite de sa confiance en lu i-m ê m e ,
toujours négligent et peu soigneux, il n’obtint que des résu!-
�(
1
6
}
.
tats fort au-dessous de ce qu’il avait fait espérer ; des noirs
imparfaits, dont le prix et les frais de transport, payés par la
Compagnie , sont restés en pure perle pour elle.
Une correspondance assez suivie, sur les principales villes
manufacturières de France, témoigne de l’aclivité des gérans
et de l’inutilité de leurs efforts pour placer ces noirs livrés
par le sieur Mossier, et expédiés sur tous les points.
A Bordeaux , après avoir fail Fexamen , on a reconnu , diton , (jue cette qualité de noir ne pouvait réellement convenir.
A Marseille, il est infiniment au-dessous de ceux qu’on em« ploie. Six persones différentes l’ont employé en regard d’ un
j> essai de leurmatière accoutumée. Le résultats été, chez tous,
y> que leur noir a la propriété de dessécher plus promptement
» l’huile, et de faire un plus beau.vernis, tandis que celui-là
j> produit un noir mat.... Vous nous obligerez, ajoute la lettre,
» de nous autoriser, de manière ou d’autre, à nous débarrasser
» de celte matière, ainsi que de celle de voire envoi .précé» dent, qui est pire , et dont nous ne pouvons rien tirer. »
A Lyon , des caisses d'échantillons de noir ont été remises
à huit maisonfc différentes. « Tous les ont fait essayer........
» Aucun n’en a été content. Tous ont tenu le même langage ;
»> qu’il était trop lourd ; que la qualité leur importait moins
» que la légèreté..... Les dilficullés sont insurmontables, etc.»
E videm m ent, le noir mat et la pesanteur ne pouvaient venir
que d’un défaut de fabrication ; de ce que l’huile n’était pas
bien extraite; et de ce qu’on ne suivait pas les procédés de
M. Barruel ; mais le sieur Mossier a-t-il jamais écouté per
sonne ?
Partout ailleurs il en fut de même. Cependant, la Compagnie
avait reçu., depuis le 2 août 1828 jusqu’au mois d’avril 1821),
29,708 kilogrammes de noir à clarifier, et 9,061 kilogrammes
de noir fin , donné par Mossier comme noir à couleur. Enfin ,
il lui en avait vendu 4
kilogrammes pour engrais, non
compris celui livré à des tiers ; et il a tellement raison d’ac
,^ 3
�17 )
cuser les gérans de malveillance, q u e , d’une p a r t , ils lui
passèrent plus de trois mille francs pour les frais de nourri
ture q u ’il avait faits pendant sa régie; et qu’au 2 mai 1829, ils
étaient en avance à son égard de 6,600 fr., comme le témoi
gnent ses comptes courans chez M. Blanc.
Quoiqu’il en soit, on sentit le besoin de prendre des pré
cautions d’une autre nature ; car le traité passé avec Mossier
n’empêchait pas la surveillance ; au contraire, elle devenait
plus impérieuse , par la force même du traite. Or, il était de
venu nécessaire, pour qu’il fût exécuté convenablement,
qu’un homme habile fût adjoint au sieur Mossier. Le sieur
Daubrée se présenta; le sieur Daubrée, industriel de profes
sion , et apportant avec lui la réputation d ’un homme instruit
dans ces matières. U n trailé fut fait avec Mossier et l u i , le
7 avril 1829. Il faut encore le bien connaître. Le sieur Mossier
en a rendu compte aux pages 7 et 8 de son Mémoire. On peut
s’y reporter, on peut même s’arrêter un instant sur les préeau lions qu’il prend, avant tout, pour montrer le but et l’esprit,
soit de ce traité, soit de celui qui l’avait précédé, conventions,
d it-il, qui ne pouvaient s'entendre que de noirs tels qu'ils avaient
été fournis ju sq u ’alors par le sieur Mossier..... Tels que celui
dont les échantillons avaient paru superbes.
Il est facile de réduire cette augmentation à sa véritable va
leur.
O u i , si les noirs étaient bons et de recette ;
N o n , s’ils ne l’étaient pas.
O u i, s’ils étaient conformes aux échantillons trouvés sui*îon, s’ils ne l’étaient pas.
Observons d ’ailleurs que, d’une part, les noirs reçus pré
cédemment par la Compagnie, mais rejetés du commerce, ne
pouvaient être un engagernenl pour l ’avenir ; et qu’il suffisait
au sieur Mossier qu’elle ne prétendît pas répéter le prix de
celte matière inutile, qu’elle avait reçue et payée avec trop de
3
�(
»8
)
confiance; sans que cela pût l’obliger à subir à jamais de pa
reilles deceptions.
E t en second lie u , la réception faite par les gérans dans un!
temps où il n ’y avait qu'une régie, sous la direction provisoire
du sieur Mossier, ne pouvait plus être un exemple, après
des traités faits pour éviter les inconvéniens graves dont on
avait fait l’expérience.
Le sieur Mossier ajoute quYZ s ’associa le sieur Daubrée.
Est-ce qu’il nierait que cette association fut exigée par la
société, dans l’intérêt de tous? Cette mesure, il faut le dire,
était devenue nécessaire pour soutenir une entreprise qui
tendait à se perdre, isolée dans ses mains; et qui s’est à peu
près perdue, parce que cette condition a été violée.
Quoiqu’il en s o it , et malgré la mésaventure du noir à cou
leurs , il fut encore la première stipulation du traité. Les gé
rans eussent été imprudens , sans doute, d’en favoriser encore
la spécvdation, si elle eut été faite par régie, aux frais de la
Compagnie. L ' é p r e u v e paraissait suffisante; mais ils ne cou
raient aucun risque à promettre de l’accepter lorsque les en
trepreneurs le leur livreraient propre à l’usage auquel on le
destinait, et il était parfaitement libre à ceux-ci d’en courir la.
chance.
Toutefois, il fallut faire entendre que les pertes précédentes
étaient provenues d ’un défaut de prévision ; que la préparation
de ce n o i r e x i g e a i t des procédés chimiques, des frais qu’on
n ’avait pas pu faire jusqucs-là , par la fixation d’un prix trop*
rabaissé ; les entrepreneurs s’engagèrent à le fabriquer au prix
de 20 fr. les 100 kilogrammes ‘r et ils demandèrent une augmen
tation o c. sur le noir à clarifier. Ces propositions furent ac
ceptées , quoique beaucoup plus onéreuses, et quoique le
bail de Mossier eût long-temps à courir.
5
Le traité fut rédigé fort clairement L ’art. 1" fixe, comme
nous l’avons d i t , les prix, de la marchandise fabriquée aux
�(
>9
)
frais des entrepreneurs, et qu’ils devront fournir, t e s expres=
sions dont on se sert sont remarquables :
• g fr. o c. pour noir propre au raffinage ;
20 fr. pour le noir propre aux couleurs.
L ’art. 2 porte qu’ils seront conformes aux échantillons ca
chetés , déposés entre les mains des gérans ; et on se récrie ,
en disant que l’échantillon du noir propre aux couleurs n’a ja
mais été déposé. Qu’importe ? ce n’était pas sans doute la
Compagnie, ni les gérans , qui devaient confectionner cet
échantillon , et eux seuls pouvaient se plaindre de ce que les
entrepreneurs ne les avaient pas fournis. A u surplus, on en
voit facilement la raison. On n’était pas du tout fixé sur la cer
titude de cette fabrication pour les couleurs. Si elle ne réussissait
pas, comme nous l’avons dit, les entrepreneurs et la Com
pagnie se trouvaient quittes là-dessus, et personne n’eut pu
penser, en lisant ce traité, que les entrepreneurs y trouveraient
un prétexte de faire prendre à la Compagnie tous les noirs
qu’ils n’auraient pas pu rendre propres au raffinage , quoi
qu’ils ne fussent pas propres aux couleurs. Telle est pourtant
l ’absurdité que le sieur Mossier avait conçue, et avec laquelle
il lui eut été facile de s’enrichir, au détriment de la société ;
car il eut eu intérêt à ne fabriquer que très-peu de noir gros,'
qui ne lui était payé que g fr. o c . , et à faire beaucoup de fin ,
à augmenter les rebuts, q u ’il eût fait payer 20 fr ., précisément
pareequ ’ils n’eussent été bons à rien. C ’est ce q u ’il osa pré
tendre durant un arbitrage, dont nous parlerons plus tard ; et
s’il ne l’ose plus aujourd’h u i, il demande encore qu’on lui paye
tout au même prix , soit le bon , soit le mauvais ; en sorte qu’il
serait de nul intérêt qu’il fournît de bonne ou mauvaise ma
tière ; qu’il serait inutile à la Compagnie d’avoir fait un traité,
de faire une vérification, et de soumettre les produits à l'essai.
Autant vaudrait pour elle , en séparant le bon et le mauvais ,
tout pèsera la fois, sans distinction; expédier lebon, et garder
le mauvais pour en faire du fumier, en payant l’un et l’autre.
5
5
�(' 20 )
Nous ne transcrirons pas ce traité ; mais nous sommes obligés
de relever les clauses essentielles.
Les art. 2,
déterminent plus spécialement les qua
lités du n o ir , la vérification , l'essai, les qualités à fournir.
L ’art. 8 porte que le noir livré sera livré payé chaque mois ;
que s’il reste incomplet, par faute de constructions, il pourra
être fait aux entrepreneurs, sur l’avis du conseil d’administra
tion , telles avances, qui seront évidemment couvertes par la va
leur des noirs aliénés. Nous aurons à appliquer cet article à un
moyen qu’invoque le sieur Mossier, qui s’est plaint du défaut
de construction d’un hangard.
Les art. 9 et 10 doivent fixer l’attention:
« Tous ics engagemens contractés par les entrepreneurs ,
» concernant l’exploitation , leur seront personnels , et rien ne
» pourra être réclamé par des tiers à la Compagnie. »
Pour la garantie du présent bail, ils laisseront en dépôt,
chez M. blanc, quatre actions inaliénables ju sq u ’à fin de bail
cl reddition de compte.
Pourquoi toutes ces précautions ajoutées à la faculté de vé
rifier et d’essayer, si on devait tout prendre sans choix?
Par l ’art. 1 1 , Mossier et Daubrée s’engagent à payer la
ferme du moulin, les contributions de Clermont et Menât;
Par l’art. 12, les gérans leur abandonnent un sixième des
bénéfices de gérance, qui leur étaient passés par la Compagnie,
outre le tiers déjà cédé à Mossier. Ils font donc un sacrifice
personnel pour obtenir l’adjonction du sieur Daubrée.
Par l’art, i/f, on accorde aux entrepreneurs un droit de com
mission sur les ventes.
Trois pour cen t, pour les noirs à raffiner ;
Six pourcent, sur les noirs à couleurs;
On voit que des avantages beaucoup plus grands étaient faits
aux entrepreneurs par ce nouveau traité , et il est évident que
la Compagnie qui aurait pu exiger l’accomplissement des con
ditions beaucoup plus douces, stipulées p a r l e b a i l d e M ossier,
4
5
�( 21 )
ne consentit à en accepter de nouvelles qu’à raison de l’asso
ciation du sieur Daubrée, qui seul, pouvait les exiger; elle
avait donc intérêt à la présence de cet associé ; au moins est-il
évident qu’elle croyait en avoir un fort grand , et qu’elle mettait
plus de prix à sa participation qu’à toutes les promesses’ du
sieur Mossier. Aussi, en trouve-t-on des traces dans l’art. 16,
où, après ^avoir dit que le décès de l ’un des deux entrepre
neurs entraînerait la nullité des traités, on ajoute:
« Si M. Daubrée prédécède, M. Mossier ne pourra continuer
» lentreprise que du consentement des gérans et adminisira» teurs. Le cas arrivant de M. M ossier, Usera loisible à M. Dau» brée de continuer, en s ’adjoignant un de ses frères, ou, àdé» faut, il sera tenu , comme dessus, d’obtenir le consentement
» des gérans et des administrateurs. »
Pourquoi ces précautions absolues à l’égard de Mossier , si
on avait confiance en lui? Serait-ce, comme il l’a dit, par la
seule raison qu’il n’avait pas de frère? Mais alors, pourquoi
annuler un traité suffisant avec lui, et accepter des conditions
plus onéreuses, à raison de l’appel d’un tiers ?
Le sieur Mossier répète ici, page 10, ce qu’il a dit sur la
qualité des noirs , à l’occasion du premier traite ; il le déve
loppe davantage, en disant qu’il n’y avait eu jusque-là aucune
distinction entre le noir gros et le noir fin , que l’un et l’autre
sont propres aux raffineries, et qu’on les a reçus pendant plu
sieurs années. Nous ne répéterons pas ce que nous avons dit ;
et nous observerons seulement que la Compagnie n’a jainâis
refusé de recevoir les noirs propres au raffinage, et qu’elle n ’est
pas obligée à les recevoir autrement*. Nous ne devons pas
omettre de rappeler la délibération du conseil d’administra
tio n , qui approuve ce traité; elle démontrera mieux encore
l’esprit dans lequel il avait été fait.
« Les gérans de la Compagnie de Menât, ayant pensé que
» l'adjonction et. la j>arùcipation d'un Jiornrne expérimenté dans
» le genre d ’affaires que nécessite l’établissement de l ’usine
�■'C: 0
( 22 )
» de M enât, ne pourrait être qu’extrêmement utile à eux ci
» aux actionnaires, se sont mis en rapport avec M. Daubrée,
» ancien raffineur de sucres , chez lequel diverses expériences
» avaient été faites sur la puissance décolorante des noirs, et la
» manière dont ils devaient êtrefabriqués. Il en est résulté le traité
suivant, auquel MM. Besse, Prévost, Bardonnet, Roddeet
» Cournon, ont donné leur approbation, comme membres du
» Conseil d ’administration. »
Ces signatures, en effet , terminent la délibération. Cela ne
laisse aucun doute sur le but et la cause de ce traité, qui n’avait
pour objet que le noir propre à la décoloration ou raffinage.
Après ce traité, le sieur Daubrée fit Un voyage à Lyon pour
tacher de donner du crédit aux noirs à couleurs. Par une lettre
du io avril, il rend compte des objections qu’on lui a faites
et qu’il a vérifiées : Ce noir est trop lourd, on le regarde comme
supérieur pour les peintures à fresque ; mais *il faut employer
quelques moyens chimiques pour lui enlever de son poids; enfin,
il est intimement convaincu qu’on doit réussir en changeant le
mode de fabrication,
Dans une seconde lettre du i avril, il parle des essais qu’il
a faits avec des négocians pour obtenir plus de légèreté ; ils
ont parfaitement réussi ; il ne s'agit plus que de les répéter en
grand pour établir le coût de l'opération. Il va se rendre le plus
tôt possible à Clermont.
Il est donc évident qu’il y avait à améliorer la fabrication
par des moyens chimiques ; qu'il fallait en changer le mode ;
qu’il l’àvait essayé; qu’il allait revenir à Clermont pour cela ;
que , dès lors , il n’était*plus un simple voyageur, comme le
dit M ossicr, mais la cheville ouvrière de la fabrication.
Peu nprès , il fut passé, le i" mai 1829, un traité pour la
vente, avec un sieur Dumont. Il en a été rendu compte aux
pages iü et 11 du Mémoire M ossicr.Dum ont, dit-il, avait in
venté un procédé qui rendait le noir gros préférable au noir
fin ; mais il prenait une partie de noir fin ( un septième). Les
3
�(a3)
gérans se réservaient de prendre le surplus. Donc, dit-il encore,
le noir fin était propre à cet usage ; donc, tous les noirs, indis
tinctement,, devaient être reçus par la Compagnie.
Belle conséquence! Le sieur Mossier n’a-t-il donc pas lu
dans ce traite que si Dumont s’obligeait à prendre un septième
du n o ir, dit noirfin, il ajoutait : à raffinerie, parjaitementpurgé
de la poussière impalpable, propre à la décoloration des sirops P
N ’a-t-il pas compris que si les gérans se réservaient de vendre
le surplus, c’était toujours du noir propre à la décoloration,
et dans l’esprit de leur traité avec Mossier , qui les obligeait
à prendre, à g fr. o cent., les noirs propres à rafinerie? Cela
voulait-il dire : tous les produits, tous les noirs indistinctement ;
soit qu'ils fussent ou non propres au raffinage?
Au reste, remarquons que les gérans vendaient seulement
18 fr. les cent kilogrammes de noir rendus à Paris. On voit que
jusque-Jà les bénéfices n’étaient pas considérables, en dédui
sant d e s i 8 f r ., i° 9 fr. ocent.; 2°les frais de port ; °l'intérêt
de la mise de fonds.
5
5
3
Au reste, un fait se place à cette époque, et n’est'pas du tout
indifférent.
C ’est le lendemain, 2 mai, que Mossier régla son compte
avec le trésorier de la Compagnie, et que le trésorier se trouva
en avance à son égard de 6,600 fr. A cette époque il existait dans
le magasin plus de 800 quintaux métriques de l’espèce de noir
qui fait aujourd’hui l’objet du procès. On le demande: si celte
matière, qui eût été en valeur de 7,600 fr., eût dû être à la
charge de la Compagnie, Mossier se fût-il reconnu débiteur
de 6,600 fr ., sans réclamer qu’on le reçut en payement? Ce
n ’est pas seulement de son silence que nous tirons cet argu
ment , car le même jour il donna une déclaration qu’il a reti
rée depuis, et qui est encore attachée à son dossier ; elle est
ainsi conçue :
« Je déclaré devoir à M. P. Blanc, trésorier de la Coinpa» gnic de Menai, la somme de 6,600 f r ., qu’il m'a avancéc
�.
(
2
4
}
yy sur les livraisons de noir que je dois faire à la Compagnie
» toutes les livraisons faites ju sq u ’à ce jo u r , ayant été réglées et
» payées par le trésorier. »
A u reste, c’est un fait utile à constater, que le 2 mai 1829 ,
les gérans étaient en avance de 6,600 f r ., par suite de la faci
lité que le sieur Blanc avait donnée au sieur Mossier de
prendre des fonds dans sa maison sur sa seule signature. En
rapprochant cette circonstance de l’art. 8 du traité du 7 avril,
où, dans le cas d’insuffisance de construction, les gérans ne
s’obligeaient qu’à des avances de fonds, et encore à condition
qu elles seraient évidemment couvertes par la valeur des noirs
calcinés , on pourra apprécier les diverses déclamations du
sieur Mossier. D ’ailleurs, une assemblée générale, du 8 juin,
approuva tous les actes passés , soit avec D um ont, soit avec
Daubrée et M ossier, et fixa les dépenses faites jusqu’alors à
192,596 fr. On voit que la Compagnie n’avait pas craint de
faire des frais pour son entreprise. O r , une partie notable de
celte somme avait clé employée par le sieur Mossier ; il n’a
vait donc pas été en souffrance, comme il le prétend ; e t ,
d ’ailleurs, il ne s’en était jamais plaint; il n’avait rien réclamé
qu’o n n ’eûtfaitou qu’on ne l’eût autorisé à faire à l’instant même.
Ici se place un acte fort extraordinaire, que les gérans et la
Compagnie ont ignoré long-tem ps, et qu’on avait pris grand
soin de dissimuler. Le sieur Mossier le dissimule encore en
quelque sorte ; il le j elle hors de sa date, et se borne à en
dire un mot à la page i , comme d’un acte indifférent dont il
avait oublié de parler.
Il y avait à peine trois mois que les gérans avaient passé le
traite du 7 avril 1829, qu’ils avaient fait des sacrifices consi
dérables pour obtenir l’association du sieur D aubrée, et sou
obligation de concourir à la fabrication , lorsque les deux en
trepreneurs détruisirent , à part eux, cette convention, qui
était principale pour la Compagnie. Ils le firent par un acte du
16 juillet 1829.
3
�( a5 )
L ’harmonie n’avait pas régné long-temps. Le sieur Mossier,
toujours absolu , toujours entiché de lui-même, voulait, à tout
p rix, faire prévaloir des idées que le sieur Daubrée n’adop
tait pas. Sa prétention à tout diriger pouvait devenir dange
reuse pour le sieur Daubrée. L ’expérience de celui-ci, sa pré
sence , sa participation , étaient fort incommodes au sieur
Mossier, qui ne voulait pas qu’on changeât le mode de fahrica
tion , car il n’y a jamais de bien fait que ce qu’il fait. Aussi, ne
tarda-t-il pas à prétendre que leurs caractères ne pouvaient
sympathiser (c’est ce q u ’il avait dit et prouvé à tout venant) ;
e t , cTailleurs, la manière d ’opérer de M. Daubrée , ses plans ,
ses projets, ne s ’accordent pas avec les miens, disait le sieur
Mossier , s’il faut s ’en rapporter à une copie de lettre qui est
jointe à son dossier, comme ayant été écrite aux gérans, le
28 juin 182g. Il résulterait aussi de cette lettre , que M. Dau
brée proposait de se charger seul de la fabrication, en don
nant une indemnité à Mossier ; que les gérans favorisaient
cette proposition , qui entrait dans les vues de la Compagnie,
puisque croyant ne pouvoir réussir avec Mossier tout seul, elle
avait acheté, par des sacrifices, l’adjonction du sieur Daubrée ;
puisqu’elle regardait avec lui comme convenable de changer le
mode de fabrication ; mais comment faire admettre cette con
cession à la vanité et à l ’entêtement ? Le sieur Mossier préféra
sacrifier ses intérêts à son amour-propre; et sentant bien que,
ni les gérans, ni la Compagnie, ne consentiraient à l’accepter
une troisième fois comme Directeur ou Fabricant unique , il
dégoûta tellement le sieur Daubrée; que celui-ci ayant trouvé
à faire une autre spéculation qui lui souriait davantage , ils
rompirent ensemble toute association. Il f a u t voir encore celte
nouvelle convention.
Le préambule est une précaution oratoire , une simple fic
tion.
Les deux entrepreneurs n'entendent nullement rien changer
aux conditions du traité du 7 avril, en ce qu'elles ont d ’obliga-
4
�( *6 )
lion de leur part envers les gérans, mais prévenir des contestalions dans leurs attributions.
i
Suivent les conditions privées de ces Messieurs :
Toutes les conventions relatives à la fabrication du noir, au
matériel de l’établissement, restent personnelles à M. Mossier,
qui promet renvoyer indemne M. Daubrée de toutes pour
suites intentées , à défaut, par M ossier, de livrer les quantités
de noir demandées , ou des marchandises mal fabriquées. Yoilà
l ’art. i". C ’est ce qu’on appelle ne rien changer aux conven
tions faites à Fégard de la Compagnie, alors qu’elle avait fait
tant de sacrifices pour appeler Daubrée à la fabrication, et ne
pas avoir, comme précédemment, des marchandises mal f a
briquées.
Par l’art. 2 , Daubrée se charge de faire toutes les tournées
pour le compte de la Société : donc, ce n’était pas là l’unique,
ni le principal objet des gérans en l’appelant à Menât. C a r , en
ce cas, il n ’y avait pas besoin d’un nouveau traité pour l’y ré-,
duirc.
Daubrée se réserve, par les articles suivans , l’indemnité
de o
et de irancs, sur les ventes de chaque espèce de noir ;
les droits de commission, accordés par l’art. 14, sauf 2 francs,
qui sont laissés à Mossier; on lui laisse enfin l’avantage de
toutes les autres stipulations du traité du 7 avril, spécialement
la moitié des bénéfices de gérans, qui lui restent en totalité.
Enfin, par l’art. , pour se mettre d’accord avec le préam
bule, on stipule qu’on écrira aux gérans une lettre qui n’a
jamais été écrite, et qu i, vraisemblablement, ne devait pas
l ’être.
,25
3
8
On voit que chacun fit sa part sans s’inquiéter des intérêts
de la Compagnie. La répartition des bénéfices lui eût été fort
indifférente, si le sieur Daubrée fut resté chargé de la fabri
cation ; mais il l’abandonna immédiatement. Le sieur Mossier
sc débarrassa d ’un homme qui l’incommodait, pour lequel il
avait de l’anthipathic; et le sieur Daubrée porta son industrie
�*7
, (
)'
dans la nouvelle fabrique de sucre de la plaine de la Vaure i
sauf à laisser la Compagnie et la fabrication du noir embarras
sées de la présence du sieur Mossier , livré à lui-m êm e et à
l ’orgueil insupportablè de ses prétentions.
Le sieur Dumont avait fait des demandes de noir assez
fortes ; les gérans l’annoncèrent aux entrepreneurs par lettre
du août. Ne s’occupant que des noirs à clarifier, seul et pri
mitif objet de la spéculation, ils leur demandent de fournir
une quantité déterminée de noir à clarifier. Tout est à remar
quer dans cette lettre , d’ailleurs fort courte.
Elle est écrite à MM. Mossier et Daubree: « Conformément.
» à Fart. de notre traité du 7 avril dernier, nous avons l’hon» neur de v o u s prévenir que nous avons besoin de 80,000 kilo» grammes, chaque mois, de noir propre à la décoloration des
» sucres, dont la grosseur ne devra pas excéder la toile n° o ,
» ni dépasser, pour la finesse, la toile n° 100, c’est-à-dire,
» conforme à l'échantillon cacheté avec M . D um ont, et dont
» vous avez connaissance. Veuillez prendre vos mesures........
»> Nous vous prions ne nous accuser réception de la pré» sente. »
*
Ainsi on s’adressait, comme on en avait le droit, à M M . Mos
sier et Daubree.
A in si, ces Messieurs connaissaient la convention faite avcc
Dumont.
A in s i, il avait été déposé un échantillon de n o ir , qui ne'
devait pas excéder la toile n° o , ni dépasser celle n° 100 ;
et ils le connaissaient , et cela était conforme au traité du
7 avril.
Ainsi, ce noir était celui qu’on avait admis comme propre à
la décoloration des sucres.
Voilà des faits conslans, posés par cette lettre. Ont-ils été
contestés ? Jamais. Le sieur Mossier ne l’eût pas osé. Ils
étaient vrais , positifs. Il crut être quille en ne faisant pas de
réponse.
■
'
3
3
3
3
4<
�( 28 y, ''
«Une lettre de rappel lu i'fu t écrite lé 8 octobre; elle est
courte et expressive :
« Nous vous confirmons notre lettre du
août dernier, qui
» est restée sans réponse, malgré notre invitation de nous en
» accuser réception.
' » Nous vous prions , pour le bon ordre, de vouloir bien ré» parer cette omission. »
' On voit que les gérans ne demandaient cela que pour le bon
ordre dans’üne opération commerciale. Ils ne mettaient pas.
en doute que les entrepreneurs ne se fussent mis en mesure
de fournir , alors , surtout, qu’ils n’avaient rien dit ni écrit de
contraire.
n
Voyons la réponse; elle a bien son mérite :
3
i a Octobre. _
3
« J ’ai l’honneur de répondre à votre lettre du août......;
» que je suis en mesure de fournir et même de dépasser la
» quantité de noir qui m ’est demandée, pourvu que la Com» pagnie, de son côté, et aux termes de l’art. i de notre con» vention , qui l’oblige à faire toutes les constructions néces» saires à la fabrication du noir, me mette en possession d ’un
» hangard indispensable pour abriter le schiste, le noir et les
» ouvriers. Le retard de cette construction est le seul obstacle
» à l’exécution actuelle de votre demande. »
A in s i, il ne se plaint pas de ce qu’on écrit ¿Daubrée comme
à lui ; il n’avertit pas qu’ il est resté seul chargé de la fabrica
tion ; il était convenu qu’il écrirait une lettre; une occasion
se présente où il ne pouvait pas garder le silence sans une
coupable dissimulation, et il ne la saisit pas. La convention
qu’une lettre serait écrite était donc aussi une fiction.
Il ne désavoue pas connaître la convention de Duinont, l'é
chantillon déposé; il ne se plaint pas de la qualité du noir de
mandée ; il ne nie p a s , enfin, que cette commande ne soit con
forme au trailé.du 7 avril ; au contraire , il y consent, il est en
mesure de fournir et même de dépasser la quantité demandée.
3
�( 29 )
'E n f in , tout en représentant à la Compagnie qu’elle doit
faire toutes les constructions nécessaires à la fabrication , il ne
réclame qu’une seule chose, un hangard.... . qui encore n’est
nécessaire que pour abriter. C’est là le seul obstacle , dit-il, à
l ’exécution actuelle de la demande.
Tout cela est fort clair, et n’a pas besoin d’autres comment
tàires.
-L e même jour, 12 octobre , les gérans faisaient signifier à
Mossier une sommation de fournir la quantité de noir demandé,
déclarant qu’ils le font pour établir leurs diligences aux yeux
du sieur Dumont et des actionnaires.
Nous avons dû placer immédiatement, tout ce qui était re
latif à la lettre du août, pour ne pas rompre l’harmonie des
faits. Nous devons revenir maintenant sur un acte intermé
diaire , qui se lie aux faits ultérieurs, et qui est, dans la cause,
de la plus haute importance.
L ’association du sieur Daubrée à la fabrication, semblait
accroître et assurer les espérances. Le sieur Dumont crut pou
voir s’approprier cette spéculation par un acte d’une autre
nature ; et les gérans, en accédant à la demande qu’il en f i t ,
et en acceptant une somme fix e , par année , déchargée de
toute chance, crurent avoir mené à bien cette entreprise,
qu’ils avaient considérée , des le principe , comme sûre et
d ’une facile exécution.
Le 8 septembre , ils passèrent un bail au profit du sieur
Dumont; nous sommes obligés de nous réduire à l’analiscr ;
nous le ferons avec exactitude ; mais cela est nécessaire, puisque
le sieur Mossicr s’en est à peine occupé. Il faut en bien saisir
les clauses et le caractère, soit entre les parties qui l’ont con
senti, soit à l’égard de Mossier, qui l’a accepté plus tard.
Les gérans afferment au sieur Dumont, pour quinze années,
l’entier établissement, le moulin de Clermont, et le privilège
exclusif des‘brevets obtenus par M. Bergounhoux pour la car
bonisation du schiste, et son application à la décoloration des
3
�( 5° )
sucres et sirops. On voit que la Compagnie ne s’occupe tou*
jours que de cet objet p rin cipal, et qu’elle ne regarde pas
l ’application aux couleurs, comme chose obligée, ni sur la
quelle elle compte.
« M. Dumont déclare avoir parfaite connaissance : i° de
» l ’acte de société ; 2° Des conventions verbales, faites avec
31 Mossier et Daubrée; 3° De celles faites pour le transport, avec
» Thomas Yeysset; il se substitue au lieu et place de la Com» pagnie de Menât, tant envers le gouvernem ent, qu’envers
» MM. Mossier et Daubrée, et M. Thomas Y eysset, avec les—
» quels la Compagnie a déjà traité. »
A près l’expiration des arrangemens pris avec Mossier et
Daubrée , Dumont continuera les engagemens de ces derniers
vis-à-vis la société.
L ’art. 4 fixe les quantités de noir que Dumont pourra faire
fabriquer, et stipule un supplément de p rix, s’il l’excède.
L ’art. 5 fixe le prix du bail à 12,000 fr. la première année ,
et 24,000 fr. pour chacune des quatorze autres.... sans diminu
tion pour les cas fortuits ou imprévus.
Les constructions sont à la charge de Dumont. Il fournira
un cautionnement de 40,000 fr. en immeubles, et les construc4 ions seront acquises à la Société.
Il pourra céder en tout ou partie , à qui bon lui semblera.
E n fin , l ’acte sera n u l, s’il n’est ratifié par la Compagnie,
d’ici au 3o septembre.
Cet acte, signé à C lcrm ont, par Guillaum on, le 8 septembre,
et à Paris, le ao, par le sieur D um on t, fut soumis, le 24, à l ’as
semblée des actionnaires. II présentait des avantages tellement
positifs, qu’il était impossible de ne pas l’approuver. Avoir un
produit annuel de 24,000 fr. quitte et net, avec décharge complelte de tous soins de fabrication, de toute responsabilité;
laisser en présence, Dumont d’une part, Mossier et Daubrée
de l’autre; rester tout à fait en dehors des périls et des inquié
tudes; n’avoir plus à se mêler de rien , si ce n’est d’assurer le
�( 3i )
payement des 24,000 fr. ; tels étaient les avantages que les gé
rans eurent à présenter à la Compagnie. Sur trente-un action
naires , vingt-huit ont paru à la délibération. Nous avons be
soin de nous y arrêter un peu.
Il est dit, d’abord , qu’il a etc donné lecture du traité conclu,
sauf Fapprobation individuelle de tous les actionnaires, et dont
l ’objet est de substituer M. Dumont à tous les droits de la Com
pagnie , sous des conditions dont on rend compte successive
ment.
« Un membre demande si dans la nouvelle position où les
» gérans se trouvaient placés, l ’acte de société ne serait pas
» susceptible de quelques modifications? » Nous devons re
marquer cette phrase, qui avait trait à l’indemnité accordée
aux gérans, pour les peines qu’ils avaient à se donner. On se
rappelle que cette indemnité, consistant dans une part des
bénéfices, avait été cédée, pour moitié, à Mossier et à Daubrée, par le traité du 7 avril 1829. Il est question de la supr
p rim er, puisque la gérance change tout à fait de nature.
Voyons ce qui se passe :
« M. Blanc a aussitôt "déclaré qu’ils se départaient, pendant
» la durée du bail avec Dum ont, de leur portion, au bénéfice
» des actionnaires. M. Guillaumon a fait instantanément la
» même déclaration ; mais ces messieurs avaient précédemment
» concédé moitié de leurs parts à M , Mossier, qui, de son côté,
» en avait rétrocédé moitié au sieur Daubrée.
Après cette déclaration publique, faite par les gérans sur la
provocation d’un actionnaire, lesieurMossierétait dans l’obli
gation de s’expliquer. En cédant, à lui ou à Daubrée, pour
l ’avantage de la société, la moitié de leurs bénéfices person
nels , les gérans avaient montré du désintéressement elle désir
bien v if de faire prospérer l’entreprise. Mais Daubrée, qui en
avait un q u a rt, d ’après le traité du 7 avril, n’était pas présent ;
c’était donc le cas, ou jamais, pour le sieur Mossier, de dé
clarer que la moitié entière avait passé dans'scs mains, par une
�( 32 •)
convention postérieure au 7 avril ; et de dire s’il entendait,
ou non , y renoncer. Que répondit-il?
« M. Mossier s’est départi de sa portion, se réservant de
» conférer avec M. Daubrée, absent pour le moment, pour
» obtenir son désistement, »
Voilà de la bonne f o i, sans doute. Dirait-on , par hasard ,
que c’était sérieusement qu’il était dit dans l’acte du 16 juillet
qu’on écrirait une lettre aux gérans, pour leur faire connaître
la retraite du sieur Daubrée? N ’est-il pas évident qu’ils n’en
savaient rien , le 24 septem bre, plus de deux mois après, et
que ce jour-là on le leur dissimulait encore? On avait donc
intérêt à le leur laisser ignorer; ils avaient donc intérêt à le
savoir, et cet intérêt naissait de celui qu’ils avaient eu à associer
le sieur Daubrée à \afabrication , et des sacrifices qu’ils avaient
faits pour l’obtenir.
Quoiqu’il en soit, la délibération continue:
« D ’après ces assurances , données par les divers intéressés,
» on a mis aux voix l’approbation ou le rejet du marché conclu.
» Les voix ont été unanimes pour Tadoption. Tous les action
na naires étaient présens en personne ou par procuration , à
» l’exception de MM. B esse, Cavy, Chevarrier et mademoiselle
» Engelvin, qui seront ultérieurement priés d’accéder à la
» présente délibération, ainsi que MM. L ccoq, de Paris , et
»> Fauquc, de Saint-Étienne. » Cette dernière condition a été
remplie par l’adhésion ultérieure des six actionnaires absens.
A in s i, la convention qui substitue Dumont à la Compagnie,
soit à l’égard du gouvernement, soit à Tégard de Mossier et
Daubréey soit enfin envers Thomas Veysset, a été agréée et
acceptée par tous les intéressés.
Le sieur Mossier dit qu’ il ne l’a acceptée que comme ac
tionnaire, et non comme entrepreneur. Cette explication
évasive fera-t-elle fortune? Passe encore, s’il n’avail figuré dans
Ja délibération qup par cette expression générale : Tous les
�:
( 35 1
actionnaires ont adopté. Toutefois, il lui serait difficile , dans
les circonstances, de scinder son acceptation , à moins qu’il
veuille nous donner la parodie d’une scène de Molière; mais
n ’y a-t-il que cela? Est-ce que, par hasard, ce n’était pas
comme, entrepreneur, que les gérans lui avaient cédé une part
de leurs benefices personnels? Est-ce que ce n’est pas l’entre
preneur qui a pris la parole pour dire qu’il se départait de sa,
portion?Serait-ce encore comme actionnaire qu’il se serait ré
servé d’en conférer avec M. Daubrée? Mais Daubrée n’était
même pas actionnaire.
Au reste, il faudrait aller plus loin, pour pouvoir contester
les conséquences de ce fait, il faudrait nier le fait lui-même.
Le sieur Mossier l’a essayé assez publiquement, pour que
nous puissions retracer ici une scène d’audience, qui n’aura
pas sans doute échappé à la mémoire des magistrats.
En plaidant la cause devant la Cour, sur la fin de l’année
dernière, l’avocat des gérans disait que cette acceptation,
signée du sieur Mossier, l ’avait dépouillé de toute action
contre e u x , et qu’il était réduit à agir contre les sieurs Dumont
et Derosne (ce dernier devenu associé de Dumont). Pour dé
tourner l’effet de cette argumentation , le défenseur de Mossier
dit qu’il n’avait pas signé la délibération. On croyait être cer
tain du contraire , et on le soutenait ; on lisait en effet ces mots
parmi les autres signatures.
Mossier, tant pour lui que pour M. Breschet.
M. Brcsclict est le beau-père du sieur M ossier,'et action
naire comme lui. A in s i, ces mots: Pour lui, signifiaient que la
signature était celle du sieur Mossier, qui avait signé pour soi
et pour son beau-père.
On nous apprit alors que cettesignature était celle de la dame
Mossier, qui avait, toutefois, bien évidemment signé et parlé au
nom de son mari. II fallut bien le croire; c a r, lorsque nous pro
duisîmes des lettres, quittancesot effets, pour justifier quec’était
l’écriture de M ossier, on nous fit apercevoir que quelques-unes
�(
3 4
)
......................................................................................................................
'étaient de la main- de la femme, et qu’aussi l’écriture différait
de celle du mari. 11 fallut reconnaître le fait; mais il fut facile
de démontrer que si la signature avait élé donnée à domicile;
il importait très-peu que la fem m e, sans aucune indication
qui pût le faire soupçonner, eût signé pour son m ari, puisque
le mari n’avait ni rétracté son acceptation , ni retiré son con
sentement d’abandonner sa part des bénéfices; que le sieur
Breschct n’avait pas plus que l u i , contesté la sincérité de son
approbation , et q u e , ni l’un , ni l’autre, ne le contestaient au
moment de la plaidoirie. Le sieur Mossier aperçut qu’il se
fourvoyait, et n’insista pas sur ce fait, qui ne pouvait produire
aucun résultat qui lui fût favorable. Aujourd’hui, il se réduit
à parler de sa qualité intentionnelle. Nous n’en disons pas
davantage , et nous reprenons notre narration
Nous omettons pour le moment quelques actes judiciaires,
qui commencèrent, entre les gérans et les entrepreneurs, le
procès qui fut jugé par des arbitres. Nous les reprendrons
plus t ard. Il nous semble plus opportun d ’achever de faire
connaître les faits relatifs au t r a i t e , p a r c e que l’incident d’ar
bitrage s’en détache tout à fait. Ce sera soulager l’attention et la
m ém oire, que de ne pas croiser des faits , dont chacun dépend
de plusieurs actes éloignés les uns des autres.
Comme le traité du 8 septembre ne devait être définitif
qu’après avoir été approuvé par tous'les actionnaires, il fut
délivré, par les membres du conseil d’administration, un cer
tificat ainsi conçu :
« Nous, soussignés, membre du conseil d’administration
» de la Compagnie de M enât, certifions que tous nos cointé/> ressés ont donné leur assentiment aux accords faits pour
» l’espace de quinze années entre les gérans de la Compagnie ,
» d’une p art, et M. Julien D um ont, de Paris, d’autre part ; et
» que la caution de M. Derosnc , pour l’exécution des enga» gemens dudit D um ont, est a gréée, à la charge par le s u s d i t
�»
(
55
)
1
s> de la faire régulariser. À Clermont , e deux de'cembre 182g.
» Signé, Besse, H. Cournon, Prévost. »
Cet acte apprend que le sieur Derosne s’était présenté
pour fournir le cautionnement de 40,000 fr. Il avait, en effet,
dès le 27 septembre, écrit aux gérans pour leur annoncer qu’au
moyen de son association au bail de Dumont, il leur offrait
une hypothèque de 40,000 f r ., qu’il autorisait à prendre sur
ses biens.
Le 2 octobre, les gérans avaient accepté cette proposition.
Enfin , comme la conclusion de cette affaire importante ne
pouvait s’opérer par une simple correspondance , le sieur
Guillaumon, l’un des gérans, prit le parti de se rendre à Paris,
où il s’aboucha avec les sieurs Dumont et Derosne. Eloigné
de toute dissimulation , il parla du procès déjà existant sur la
prétention de Mossier, de faire recevoir comme propres aux
couleurs des noirs qui n’avaient pas cette qualité, et qui pou
vaient n’être considérés que comme des rebuts. Derosne, qui ne
connaissait que Dumont et son traité, et qui voyait pour la
première fois le sieur Guillaumon, conçut quelques inquié
tudes ; il craignit qu’on ne f î t , plus tard, le dépôt d ’un échan
tillon au préjudice de Dumont et lui; et, dans le but unique
de s’en préserver, il demanda à Guillaumon une déclaration
du fait, qui lui fut remise, sans la moindre difficulté. Elle est
conçue en ces termes :
« Je soussigné, gérant de la Compagnie de Menât, certifie
» que l’échantillon de noir fin à couleur, qui devait être dé» posé cacheté, conformément au traité fait entre ladite Com» pagnic cl MM. Daubrée et Mossier, le 7 mai 1829, n’a pas
» encore été déposé, et qu’il n’a été déposé que Véchantillon
» de noir en grain, propre à la décoloration des sirops , et pa» reil à celui cacheté étant entre les mains du sieur Dumont.
» Je déclare, en outre, que la Compagnie n’est pas d’accord
» avec les sieurs Mossier et Daubrée, relativement au noir fin
j> à couleur, qui ne lui a pas paru propre à remplir cette destir
.
5
�( 30 )
» nation, et que cette question est actuellement soumise a des
» arbitres. »
Le sieur Mossier prétend nous faire accroire qu’il compte
beaucoup sur cette p ièce, et qu’il y trouve un moyen saillant ;
c’ est de la jactance. On voit qu’elle renferme seulement la dé
claration d’un fait qui a été avoué dans tous les tem p s, par
toutes les parties, et qui demeure tout à fait sans influence,
comme nous le verrons plus tard. Ne nous écartons pas des
termes de celte déclaration , pour y chercher autre chose que
ce qu’elle dit, et l’appliquer à un objet auquel elle demeure
tout à fait étrangère et reconnaissons qu’il n ’est pas étonnant
q u ’on ne trouve pas dans la main des gérans l’échantillon du
noir propre aux couleurs, puisqu’on n’a pas pu fabriquer
ce noir ni en masse , ni en échantillon.
La négociation de Guiljaumon à Paris, fut d’ailleurs prom p
tement terminée. De concert avec Dum ont, il déposa, dans
l’élude de M* F évrier, notaire, le bail du 8 septembre, et le
certificat du Conseil d’Administralion. Le sieur Derosne in
tervint pour fournir son hypothèque, et tout fut irrévocable
ment consommé quant au bail de Dumont. Il fut , avec De
rosne , mis en possession de tout le matériel ; et cet acte , après
avoir etc approuvé par tous les intéressés, fut exécuté par la
Compagnie, par les Entrepreneurs ; et, enfin , par Dumont et
Derosne. Nous ferons connaître les faits d’une exécution vo
lontaire et continue, émanés de toutes les parties; mais il ne
faut pas laisser aussi loin derrière nous ceux qui sont relatifs
à la contestation qui eut lieu devant les arbitres, et qui, d’ail
leurs , se lient avec les faits d’exécution.
I c i , le sieur Mossicr veut imputer au sieur B lan c, une sorte
de mauvaise f o i , pour avoir réclame personnellement le rem
boursement des G,600 fr. d’avances par lui faites, d’après l’ar
rêté du 2 mai 18x9, tandis que la Compagnie en avait fait
compte au sieur Blanc, comme gérant. II faut expliquer ce
�( 57 )
fait : Le sieur,Blanc ayant fait cette avance, sans approbation
et contre le désir exprimé par les actionnaires , par. conse'quent avec ses deniers personnels , en avait réclamé la répé
tition contre Mossier. Celui-ci objecta qu’il ne la devait qu’à
la Société, qui en avait fait compte à la caisse du sieur Blanc.
Certain de n’en avoir rien reçu , le sieur Blanc persista. Le tri
bunal de commerce, sans désemparer, ^envoya chercher le re
gistre des délibérations de la Compagnie , qui était déposé
chez le Secrétaire,: il se trouva q u e , par un renvoi mis après
coup, et hors la présence du sicuç Blanc, en marge de la dé
libération du 8 juin , la Compagnie avait compris cette avance
dans le règlement, sans cependant qu’elle y soit nominative
ment désignée. Le sieur Blanc l’ignorait; il n’avait rien reçu. Le
iribunal de commerce crut alors devoir renvoyer la décision
aux comptes à faire avec la Compagnie. Le sieur Blanc n’était
pas moins créancier fort légitime de cette somme de 6,600 fiNous avons vu, ci-dessus, que le 12 octobre 1829 , les gé
rans avaient fait à Mossier une sommation de fournir la quan
tité de noir demandé par Dumont. Le 14 du même m o is,
Mossier leur donna une assignation tendante à nomination
d ’arbitres, pour statuer, soit sur la mise en demeure , résul
tante de l’acte du 12, soit sur les suites du défaut de construc
tion d’un hangard. Les arbitres furent nommés , et devant eux
s’élevèrent des difficultés plus considérables. Le sieur. Mossier
prétendit que les gérans devaient accepter indistinctement
tout le noir fin provenu de la fabrication.
Nous avons besoin d’éclairer à fonds cette partie des faits
de la cause , pour détruire une allégation qui est la cheville
ouvrière du sieur Mossier. Il prétend, page i et suivantes,
que jusqu'au 1" septembre .1829, les gérans d’abord, et Du,inont ensuite , « qui s'était chargé de tout prendre jusqu'à ccttp
» ép o que, n’élcvaicnt pas de difficulté sur les noirs. Ils les
» recevaient tous , principalement conifnc propres a la raffine» rie ; mais en partie, aussi, comme propre aux couleurs, car les
4
�( 3« )
'» plus fins, notamment ceux qui étaient en poudre impalpabie}
» pouvaient servir à cet usage. »
« Mais, continue-t-il, au i cr septembre, Dumont ne dut plus
recevoir qu’un septième de noir fin, et les gérans ne retirant
pas le surplus qu’ils s'étaient cependant réservé de vendre, il se
form a un germe de discussion. Alors furent signifies les actes
des 12 et 14 octobre, et le procès commença. » N ’oublions pas
cela. Pas de grief au sujet des noirs fins fabriqués avant le
i " septembre ; mais, depuis cette époque, on n’a plus voulu
les recevoir comme par le passé, et ils se sont amoncelés.
Voilà le point de départ du sieur M ossier, qui consiste,
après t o u t , dans une allégation tellement vagu e, qu’il est im
possible d’y saisir un fait précis.
En la prenant telle qu’elle est, on pourrait demander au
sieur Mossier quel jour les gérans ou Dumont ont r e ç u , en
partie, des noirs comme propres aux couleurs ; en quelle quan
tité ils les ont reçus; comment ils les ont vérifiés, essayés; s’ils
les ont payes, 20 fr. depuis le traité du 7 avril, ou seulement 9 fr.
o cent., ou seulement 2 fr., en les considérant comme engrais?
Nous demanderions comment il a fait passer de la poudre im
palpable, alors que, pour le noir à couleurs, elle n’aurait pas été
complètement triée et séparée de tout autre noir fin ; et que,
comme noir fin à raffinerie, le traité du 1" mai, entre les gé
rans et'Dumont, démontre que pour être de recette , il devait
être parfaitement purgé de la poussière impalpable; or, cela devan t
être vrai, avant comme après , il est de toute impossibilité que
Dumont ait reçu les noirs fins, sans qu’ils eussent les condi
tions prescrites, pas plus avant qu’après le 1" septembre 1829.
Aussi, voyons-nous que le sieur Mossierne présente là-dessus
que des allégations vagues, et qu’il serait plus qu’embarrassé
de préciser.
Mais il y a plus : Celte allégation est de toute inexactitude.
Nous allons le prouver, pièces en m ain, et avec le jugement
arbitral lui-môine.
5
�{, 3° ] .
Rappelons d ’abord que l'échantillon des noirs à raffinerie
avait été déposé, et q u ’il faisait la règle des parties.
Rappelons qu’on n’avait pas pu faire de noir à couleur, car
il ne suffisait pas, pour cela, d’oblenir de la poussière impal
pable, surtout si elle était mélangée , et si la matière, non suf
fisamment dégagée des pyrites , était composée de parties
hétérogènes.
E t comme on ne refusait pas de recevoir ce qui e’tait con
form e à Féchantillon, nous pourrions dès lors demander ou
peut être le principe d’une action, et à quoi pourrait servir
l ’exemple d’un précédent supposé vrai.
Mais n’oublions pas ce que nous venons de dire. Ce précé
dent n’existait pas. Ouvrons le jugement arbitral: il men
tionne des faits qui sont d’ailleurs établis par les pièces du
p rocès, spécialement l’état des livraisons faites par Mossier à
Dumont depuis le 2 mai 1829; c ’est là certainement ce qui
doit prouver le vrai ou le faux de l’allégation du sieur Mos
sier, sur les réceptions faites par Dum ont, de tous les noirs
indistinctement jusqu’au
septembre 1829, et en quantité
plus grande qu’on ne l’a fait depuis.
L e jugement nous apprend d’abord que Mossier n’invoquait
pas alors ce précédent; il n’y a pensé que depuis le procès
actuel. Il ne produisait l’état des livraisons faites depuis le
2 m a i, que pour en faire entrer le prix dans son compte. On
rappelle qu’il y avait eu règlement le i w mai. O r , le jugement
les fixe comme il suit :
Noir à raffinerie,
5 ,654 k.
Depuis le 14 mai............................... o
Du 2 au 1 4 ........................................
7,861
i
5X5 ^¡1,
^
Noir à couleurs........................................................
Noir d’en g ra is............................. ’ .........................
4
2®9
2 2
T o t a l .............................^9,046.
�( 4o )
On voit que la proportion est bien moindre q u ’un septième;
et, qu’en som m e, la livraison , qui devait être de
,ooo kilo
grammes par mois, était réduite à c),o kilogrammes pour
cinq mois et plus ; et le sieur Mossier ne s’en plaint pas ; donc,
il n’est pas vrai, comme il le prétend aujourd’hui, qu’avant le
i cr septembre, on eût pris tous ses.noirs indistinctement ; ou
si on avait tout pris, on avait reçu en noirs fins, qu’il disait à
couleurs, beaucoup moitié d’un septième, et il n’y avait pas
feu de diminution de recette au i cr septembre.
A u reste , le sieiir' Mossier n’ayant livré que g,o
kilo
grammes de noirs, du 2 mai au i cr septembre, n’avait pas tout
livré ; il était resté dànfc les magasins une quantité assez con
sidérable de ces noirs fins, quoiqu’il en eût vendu beaucoup
pour engrais à pleins tombereaux. Quoiqu’il en dise aujour
d ’hui, c’était cet approvisionnement que, devant les abilres, il
voulait forcer la Compagnie à recevoir pour du noir à couleur.
On ne peut donc pas trouver, dans les faits antérieurs au juge
ment arbitral un précédent qui serait, d ’ailleurs , complète
ment inutile; voyons si le jugement arbitral peut en établir
un autre, qui serve de pre'jugé pour la prétention actuelle du
sieur Mossier.
5 46
35
5 /(.6
Avant d’examiner cc point par l’exposé des faits qui le con
cernent , relevons encore un fragment de cette décision.
Le prétexte du procès alors intenté était pris du défaut
de construction d’un hangard ; le sieur Mossier demandait
20,000 fr. de dommages-intérêts pour cela et pour le refus des
noirs en contestation.
Les arbitres disent:
.
.
« Que les parties sont.censées js’cfrp réciproquement satis» faites de l’exécution donnée aux conventions du 7 ‘ avril,
» dès qu elles ne se sont pas adressées des demandes d’exécuj> tion plus strictes;
» Que les gérans se sont mis en mesure de faire construire
* des hangards, dès Tinstant que le sieur Mossier les a réclamés. »
�(40
E t ils rejettent cette demande.
En effet, immédiatement après l’acte du 14 octobre t le
liangard avait été construit par Dumont et Derosne, à la charge
de qui étaient toutes les constructions.
En ce qui concerne les noirs en magasin, amoncelés, dit'
Mossier , par le refus de Dumont de les recevoir, depuis le
i er septembre, le jugement arbitral nous apprend qu’il n’en
avait formé la demande qu’après l’acceptation du compromis
par les arbitres, et seulement par acte du n novembre.
»
»
»
»
»
« Que , le lendemain, les gérans leur présentèrent une requête, dans laquelle , croyant qu’il s ’agissait, dans la sommalion d elà veille, de noirs propres à la décoloration des sucres,
ils demandaient qu’il fût ordonné une expérience pour reconnaître si ces marchandises étaient, ou non, propres à la
décoloration des sirops. »
A insi, on voit que les gérans offraient de recevoir tout ce
qui serait noir propre à raffiner, suivant les termes de la con
vention, et qu’ils ne songeaient pas au noir à couleur, parce
que , après une foule d ’essais , d’envois sur tous les points , et
de pertes considérables, il était avéré qu’on n’avait pas pu
l ’obtenir, et qu’on y avait renoncé.
Mais, comme le sieur Mossier n’avait pas l’espérance de
faire passer pour noir à raffiner tous les déchets qui n’étaient
pas conformes à l’échantillon déposé, et que d’ailleurs il y avait
beaucoup plus de profit à les faire passer comme noirs à cou
leurs , alors qu’on devait les payer 20 fr., et qu’il n’y avait pas
d ’échantillon pour les comparer, il demanda qu’il fussent reçus
comme noirs à couleurs.
Nous l’avons déjà dit , s’ils étaient propres aux couleurs, il
fallait les accepter comme tels.
S’ils ne l’étaient pas, il fallait rejeter la demande, car ils
n’étaient ni recevables ni offerts comme noirs à raffinerie.
Il est donc évident que si les choses fussent restées dans cet
6
�( 42 )
état, les arbitres ne pouvaient pas condamner la Compagnie à
les p rendre, ni sous l’un , ni sous l’autre rapport.
C ’est cependant ce qu’ils ont la it, comme on le voit à la
page 16 du Mémoire Mossier. Quelque fait spécial, non encore
connu, a donc amené ce jugement, ou bien il serait de l’espèce
de ceux dont on dit quelquefois qu’ils sont bons pour ceux
qui les ont obtenus, ctpourla chose à laquelle ils s ’appliquent.
Examinons bien celui-ci, et ne faisons pas le procès des arbi
tres avant d ’en savoir un peu plus.
Ils commencent par dire que les parties se méprennent sur
les qualités des noirs, l ’un les offrant comme noirs à couleur,’
et l ’autre demandant qu’il soit vérifié s’ils sont propres à la
décoloration; ils provoquent une réunion et des explications,
puis ils jugent, lis disent que ce noir a été bien calciné et blutté.
Ils reconnaissent qu ’il ne peut pas être reçu comme noir
à couleur.
E t ils ajoutent, que dans le doute de Vemploi au<\x\c\ il pourra
être destiné, et à défaut d 1échantillon qui puisse serçir de base
f ix e , il est de justice, en attribuant le noir à la Compagnie, de
le lui faire payer au plus bas prix.
En sorte qu e, ne le recevant pas comme noir à couleur ; ne
pouvant pas dire qu’il est recevable comme noir à raffiner,
puisqu’il n’était pas conforme à l'échantillon , ils l’adjugent à
la Compagnie , dans le doute de son emploi.
Ne voit-on pas clairement que cette décision fut le produit
naturel de la réunion que les arbitres avaient p rovoqu ée, et
des explications qu’elle produisit? disons tout ce qui se passa.
Pour être mieux instruits des détails relatifs à cette question}
les arbitres avaient appelé le sieur Daubrée; celui-ci était peu
intéresse à la question; car, quoiqu’en dise M ossier, ces noirs
dataient, au moins en partie, d’une époque antérieure au
traité du 7 avril.
Le sieur Daubrée, interrogé par les arbitres sur le point de
savoir s’ils étaient propres aux couleurs, répondit que non,
�au moins en les prenant tels qu’ils étaient ; mais qu’ils pour
raient le devenir avec d’autres préparations ; que dans l’état
actuel ils pouvaient se mélanger utilement avec le noir animal.
Pour prouver qu’il en a la conviction, ( très-hasardée pourtant
comme on le verra) , il offrit d’en prendre mille quintaux mé
triques, à 9 fr. Lesgérans consultèrent les administrateurs. La
majorité décida que la différence du prix n’étant que de o c.
par quintal métrique, ce n’était pas la peine de soutenir plus
long-temps le procès. Ils donnèrent un consentement tacite ,
et voilà comment fut rendue cette décision, qui serait si sinr
gulière, cette circonstance à part.
L e sieur Daubrée est en cause ; il plaide contre les gérans ,'
qui réclamaient et ont obtenu contre lui des dommages-intérêts.
Or , les gérans ne redoutent pas qu’il les démente sur ce
point. Il a , à son tour, spéculé faussement, et fait en cela un
assez mauvais marché pour ne pas l’avoir oublié. Ces noirs, que
dans l ’origine tout le monde avait regardé comme un véritable
rebut, sont demeurés au Havre, repoussés p arle commerce,
perdus pour le sieur Daubrée, qui n’a pas pu les payer au terme;
et un jugement du tribunal de commerce du 2S février i i ,•>
constate la condamnation qu’ont obtenus les gérans contre lui
à ce sujet.
A in si, point de précédent qu’on puisse invoquer, point de
chose jugée, q u ’on puisse tirer de ce jugement arbitral. La
question qui se présente aujourd’hui, quelle qu’elle soit, sera
toute neuve , et il faudra que le sieur Mossier la soutienne par
les moyens qui lui sont propres , et qu’il cesse de l’envelopper
de toutes ces chimères avec lesquelles il veut essayer de faire
illusion, s’il ne se fait pas illusion à lui-même
Nous voudrions être plus courts, et nous voyons avec peine
que de simples allégations nous mènent aussi loin ; mais il ne
faut qu’un mot pour alléguer un fait, et lorsqu’il n’est pas
exact, il faut expliquer toute la vérité pour s’en défendre.
Nous arrivons à ce qui concerne les actes nombreux d’exé-
5
85
(i.
�( 44 )
cution da bail fait à Dumont et Dcrosne; l ’acceptation que
Mossier et Daubrée en ont faite, et d’où nous tirons la consé
quence que Mossier n’a d’action que contre eux, et non plus
contre la Com pagnie, depuis le bail déposé chez F é v rie r,
notaire.
Avant tout, et pour bien saisir les conséquences de ces faits
d’exécution, rappelons que Dumont avait contracté l’obliga
tion expresse de se substituer à> la Confyagnie de Menât,
i° Envers le gouvernement; 2° Envers les sieurs Daubrée et
Mossier; ° Envers le sieur V eysset, entrepreneur des trans
ports. Ils devaient donc mettre la Compagnie à l’écart, en se
mettant en relation avec ces trois sortes d’intéressés. Rappelons
aussi que ce traité soumis à l’assemblée générale des action
naires , avait été accepté et approuvé par Mossier , soit comme
actionnaire, soit comme entrepreneur. Celte acceptation réa
lisait donc à son égard la stipulation que nous venons de signa
ler, et entraînait la c o n s é q u e n c e q u ’ il devait traiter directement
avec ceux qui s’étaient substitués à la Compagnie, et qu’il venait
d’accepter comme tels. Nous apprécierons maintenant, avec
plus de facilité, les faits ultérieurs d’exécution.
Il y eut d’abord approbation complette, par Dumont et Derosne, du traité du i6 juillet, qui dispensait Daubrée de la
fabrication. Ils firent plus, ils l’établirent leur agent; en sorte
qu’il y eut , par le fait , novation complette de qualités dans
les relations qu’ils ont eu avec la Compagnie. O r , ce change
ment de qualités fut nécessairement opéré par le concours de
Mossier, Daubrée, Dumont et Derosne, qui ont tous procédé
ensemble dans ces qualités nouvelles ; et, à coup s û r , la Com
pagnie ne pourrait pas voir retomber sur elle les actes qui en
sont résultés.
A u ssi, voyons-nous que le bail du 8 septembre est exécuté
entre e u x , sans que les gérans soient appelés ni considérés,
par eux, comme parties nécessaires, et cela par une continuité
d’actcs remarquables.
3
�v *
(45)
C ’est la société Dumont et Derosne, qui fait exécuter les
constructions réclamées par Mossier.
Elle passe seule un traité avec Veysset, entrepreneur des
conduites, et en change les conditions.
C’est elle seule qui reçoit la livraison du noir.
C ’est elle seule qui en paye le prix.
Le 8 décembre 1829 , Mossier reconnaît avoir reçu de Daubrée, pour le compte de Dum ont, 742 fr. 60 cent , en deux
traites sur Paris , pour solde de 8,088 kilogrammes de schiste,
que f a i livrés dans le mois de novembre ; plus, 1,000 f r ., en
une traite sur Paris, à compte sur les livraisons de décembre.
A i n s i , il livrait directement, recevait directement de D u
mont, par les mains Ae Daubrée, son agent, des traites sur
Paris ; et enfin, reconnaissait, en l ’absence de la Compagnie/
et sans réserve , avoir reçu le solde des livraisons de dé
cembre.
5
Le i décembre, reconnaissance de 2,000 fr.; absolument
semblable, sur les livraisons à faire en décembre.
L e mêtne jour, autre de 200 fr.
Le 8 janvier,reffctde 800 fr ., tiré par Mossier, mais écrit et
signé par sa fem m e, sur Daubrée.
Le 26, Derosne lui écrit:
V ous avez été informé par M M . les Gérans de la Compagnie
de M enât, qu’ils avaient cédé cette exploitation à M. Dumont ;
vous avez, été également instruit, par ces Messsieurs etM . Daubrée , que je m’étais associé à M. Dumont.
L ’acte de ma Société a été enregistré au tribunal de com
merce et déposé.
J’ai l’honneur de vous confirmer cette association, et de vous
transmettre la signature sociale.
Voilà bien, de la part de Derosne, l ’exccution à l’égard de
Mossier. Celui-ci a-l-il reculé ? Voyons encore.
Le fe'vrier, lettre de Derosne et Dumont à la maison Blanc;
qui n’est là que comme banquier ; cart sous les rapports de
4
�( 46 )
la gérance , le sieur Blanc devient tout à fait étranger : « Pro» fitant de vos offres de service, nous venons vous prier de
» remettre à M. Daubrée , notre agent, pour l ’opération de
» Menât, la somme de >ooo f r . , destinée à solder à M. Mos» sier une partie de la fabrication.
» Vous voudrez bien demander à M. Daubrée un reçu, qui
'» portera qu’il a reçu de vous cette somme, pour acquitter ,
» en notre nom , les dépenses de l’établissement de Menât.
» Nous attendons de M. Daubrée le compte de fabrication
» du mois de janvier; aussi-tôt que nous l’aurons reçu , nous
» vous prierons de faire, à M. Daubrée, l’avance du montant
» de la somme que nous aurons à solder. »
Ce payement a été fait, car, le 9 février, quittance par Mossier de 3,228 f r ., reçus de Daubrée, pour solde des livraisons
'jailes en décembre etjanvier. E t le compte est tellement exact
pour solde, qu’il est ajouté :
4
P lu s , 20 fr. pour intérêts desdits payémens.
5
L e , Derosne et Dumont tirent, sur Blanc, un effet de
i,o
fr. au profit de Mossier, valeur en compte.
Le 6 mars, quittance de 245 f r . , reçus de Daubrée , pour
solde de 5,98g kilogrammes de noir, livré dans le mois de fé
vrier. Il faut bien remarquer cette époque. Tout ce qui devait
être livré et r e ç u , l’avait donc été avec arrêté pour solde jus
qu’au i ,r mars.
Le 10 mars, un reçu est plus remarquable: il est donné au
sieur Blanc; et au lieu de dire qu'il paye comme gérant et
pour la Com pagnie, on dit qu’il paye pour le compte de
MM. Ch. Derosne et D um ont, de Paris. On reconnaît donc
que les gérans n’y avaient que faire.
A la vérité, ce reçu est signé seulement du sieur Daubrée;
mais cctlc circonstance ne fait qu’ajouter à la force du fait, car
Daubrée a versé dans les mains de Mossier; nous le prouvons.
Derosne était Clcrinont, Mossier lui a v a i t demandé une
nvance, car il faut bien observer que toujours, et dans tous
34
5
�(47
)
les tem ps, les actes du procès constatent, que soit les gérans;
soit, après eux Derosne et Dumont, ont tou jours versé à Mos
sier des sommes qu’il demandait et acceptait comme avances,
tandis qu’il prétend qu’on lui a retenu ses fonds. Sur cette
demande de Mossier , Derosne écrivit à la maison Blanc la
lettre suivante, à la même date, 10 mars:
« Je reçois la visite de M. M ossier, qui m ’expose que se
» trouvant avoir besoin de fonds pour le payement de ses ou» vriers,il désirerait que je le misse à même des’en procurer en
» compte sur la livraison de noir qu’il doit effectuer demain,
» entre les mains de M. Daubrée. Je ne vois aucun inconvénient
» à faire celte avance à M. Mossier , et je viens vous prier de
» lui remettre ,ooo fr. contre la quittance de M . Daubrée , et
» vous voudrez bien créditer le compte social de cette somme,
5
3
» Pour la régularité des choses, je crois devoir signer au nom
» de notre Société.
« Ch. D e r o s n e e t D u m o n t . »
Le sieur Mossier ne désavouera vraisemblablement pas ce fait;
ni son acceptation de ,ooo fr. à lui remis, et qui doivent être
portés dans son compte avec Derosne. Or, qu’en résultc-t-il ?
Ce n ’est pas aux gérans qu’il demande le prix de ses livrai
sons, mais à Derosne. C’est Derosne qui demande à la maison
Blanc ,ooo fr., pour lui faire une avance d’un jour.
C ’est à Mossier qu’on la prie de remettre ces ,ooo fr.
Ce sera à compte de la livraison de noir que Mossier doit
faire le lendemain à Daubrée.
Et voilà ce que Mossier accepte, ce qu’il reçoit des mains
de Blanc, non plus pour les gérans, mais pour le compte de
Derosne et Dumont, à qui seul il l’avait demande.
Le 11 mars, quittance par Mossier de oof. reçus de Daubrée,
à compte sur la toiture du hangard que j 'a i entrepris à Menât.
Ainsi, comme par le passé, c’était lui qui faisait construire,
et on ne lui faisait jamais attendre les fonds nécessaires.
3
3
3
3
�( 48 )
Nous observons, d’ailleurs, pour qu’on sache bien qu’il n’y a
aucune différence à faire entre la signature deMossier et de sa
femme, que la plupart de ces quittances et même des effets sont
écrits et signés par la fem m e, comme s’ils émanaient du mari.
Nous ne finirions p a s, si nous voulions étaler ici tous les
actes d’exécution , et développer leurs conséquences.
Nous passons sans intermédiaire à un acte de beaucoup
postérieur, mais qui est venu consommer l’acceptation de
l ’acte du 8 décembre, et les preuves que lajustice pouvait en
exiger.Nous le montrons immédiatement, par cette cause. Jus
qu’aux dernières audiences de la Cour, il était demeuré in
connu aux gérans, qui n’avaient pas, en effet, grand besoin
de le connaître, puisque, de fait , on les avait mis hors d’in
térêt et laissé tout à fait hors ligne, après le traité du 8 sep
tembre. Pendant les plaidoiries et pour se défendre d’un
moyen qu’opposait le défenseur des gérans, le sieur Breschet,
beau-père de Mossier, sortit ce traité de sa poche en en argu
menta. 11 ne fallait qu’un coup-d’ccil pour en saisir la portée,
alors que le sieur Mossier avait nié son acceptation du bail du
8 septembre 1827; et aussi f u t - i l , dès ce moment , retenu
comme pièce essentielle au procès. La Cour va juger si nous?
nous trompons ; elle y trouvera des aveux qui lui paraîtront
bien étranges à côté du plan de défense du sieur Mossier. Il
porte avec lui, ce nous semble, la confirmation de tout ce que
nous avons dit jusqu’à présent.
Nous croyons devoir continuer de rappeler les points capi-î
ta u x , avant d ’exposer un acte qui s’y rapporte : c’est le inoyen!
de ne pas se méprendre sur les résultats. Rappelons donc
qu’avant de céder le privilège à Dumont, pour le temps de sa
durée , les gérans avaient leur situation fixée à l’égard de Mos
sier et Daubrée, par le traité du 6 avril 1829, et que cette
convention était faite pour toute la durée du privilégç.
.Que, sans la participation de la Com pagnie, Mossier avait
�C 49 )
4
'
rompu son association avec Daubrée, quoique le s gérans eus
sent fait des sacrifices pour l’obtenir.
Et n’oublions pas q u ’après le traité du 8 septembre avec
Derosne, ceu x7 ci avaient approuvé la retraite de Daubrée t
l’avaient pris pour leur agent, et avaient consenti à ce que
Mossier demeurât seul chargé de la .fabrication. Enfin , que
Mossier avait accepté tout cela ; et., qu’après tout, il lui deve
nait , sous ce rapport, beaucoup plus avantageux d’avoir af
faire à Dumont et Derosne qu’aux gérans ; e t , aussi, avait-il
fait, avec eux seuls , tous les actes d exécution de son marché*
O r, le 24 janvier i i, il juge convenable, par une conven
tion particulière avec e u x , de faire de nouvellçs conventions *
et d’annuler complètement celles du 7 avril 1829 , auxquelles
il avait porté secrètement un premier coup par la convention
particulière avec Daubrée. Voyons cet acte; il exigera quelques
explications un peu longues, mais tout y est précis : tout y est
décisif, sur les détails comme sur la question.
- Par l’art. i eI M . Mossier se charge de la fabrication des noirs
de Menât, pour tout le tem p s, jusqu’à l’expiration du brevet
d ’invention, aujourd'hui la propriété de MM. Dèrosne et Dumont,
qui s’y trouvent subrogés par suite de la cession que leur en
a faite la compagnie de Menai.
1
Le prix est fixé à 10 fr. 28 cent, par 100 kilogrammes, pour
les 45o,ooo kilogrammes qui seront les premiers livrés pendant
Je cours de chaque année; et à 10 fr. pour l'excédant.
On ne parle pas encore de noirs à raffiner, ni de noirs à
couleurs; mais on va voir quel cas on fait du noir fin, que Mossicr a voulu forcer à prendre, d’abord comme noir à couleur,
et ensuite comme noir à raffiner.:Nous copions:
« Les noirs fin s provenant du bluttage, c ’est-à-dire, qui pasn seront à travers la toile n° 100 , resteront la propriété de
» MM. Derosne et Dumont, qui, s’ils jugentià propos d’en
» faire des expéditions, n’auronl à rembourser à M. Mossier,
» que scs frais d’emballage et de transport. »
83
�'i "
'
•
5
( o)
II y a une explication toute entière clans ce paragraphe.
»
On voit que les noirs fins , provenant du blultage, sont ceux
qui passent à travers la toile n* 100. Or, ce sont les résidus du
bluttage, que les arbitres ont déclaré parfaitement bien bluttes.
On voit que cette fixation, au-dessus du n® 100 , adoptée
par le traité de Dumont, du i er mai 182g , était la seule qu’on
pût adopter ; comme de fait, elle avait toujours été exécutée
d ’après l’échantillon déposé suivant le traité du 7 avril.
'
On voit enfin, que si on pouvait essayer encore d’en faire
des expéditions , ce serait sans aucun espoir actuel d’en tirer
du profit ; et, qu’aussi, Mossier convient de les livrer comme
des déchefs sans aucun prix.
Mossier avait encore fait des calculs, et il les montrait comme
moyen d’une spéculation grande et avantageuse.
'
« I l se prêtera,dit-on, à toutes modifications.... dans le mode
» de fabrication, dont le coût ou revient se trouve consigné
» dans un état annexé aux présentes, et certifié par lui ; lequel
» état a servi de base aux prix ci-dessus fixés. » II est dit en
suite, q u e s’il e n r é s u l t e é c o n o m i e , e l le p r o f i t e r a à M M.Derosne et D u m o n t, mais de manière à ce qu’il obtienne tou
jours 1 fr. o cent, de bénéfice par kilogramme sur les
o,ooo
premiers livrés, et 1 fr. 20 cent, sur les autres. A in s i, n’y eûtil de livré que les 4^0,000 kilogrammes, il aurait une remise
annuelle de 6,750 f r ., ce qui ne serait pas d é j à trop m a l, sans
parler de sa part dans les bénéfices de société. O r, il y aurait
eu certainement b é n é f i c e p a r la fidèle e x é c u t i o n de ce traité,'
et de ceux qui l’avaient précédé. Poursuivons.
Après avoir parlé du dépôt de trois échantillons pareils de
noirs à raffinerie, on ajoute :
« S i , par suite, MM. Derosne et Dumont venaient à utiliser
» les noirs fins, il en serait également fait trois échantillons
» pour servir de type. »
Preuve évidente, fournie par le sieur Mossier, que jusqueslà les noirs fins n’avaient pas été utilisés.
5
45
�( 5i )
Preuve évidente que l’échantillon ne devait être déposé?
dans tous les temps possibles , que lorsqu’on aurait obtenu ;
par la fabrication, le moyen de le faire et d’utiliser le noir fin.
Cela seul repond a beaucoup d’argumens du Mémoire du
sieur Mossier.
Les art. et suivans , jusques et compris le 12', répètent
avec quelques changemens , les conventions de l ’acte du
7 avril 182g.
L ’art. 12 stipule la résolution pour toute infraction essen
tielle, et la faculté à Dumont et Derosne, de placer un agent à la
tête de Fentreprise, tout cela bien entendu, sans s’inquiéter des
droits de la Compagnie, q u ’on ne reconnaissait plus, et à la
quelle on n’avait plus eu affaire pour l’exploitation, depuis le
traité avec Dumont, du 8 septembre 182g.
Aussi, l’art. i ajoute:
« Les présentes régleront désormais les rapports de MM. Dau» bree et Dumont avec M. Mossier , sans aucun égard au traité
» passé avec MM. Daubrée et Mossier, et la Compagnie, le
» 70(77’/ 182g; lequel, en ce qui concerne MM. Derosne,
» Dumont et Mossier, demeure, à partir de ce jour, pleine» ment anéanti. »
On le demande, si Mossier n’eût pas accepté la substitution
de Dumont et Derosne, depuis le traité du 8 septembre 182g,
pour le compte de Derosne et Dumont', s ’il n’eût pas fait la ré
ception de toutes les sommes qui lui ont été payées par le
sieur B lan c, depuis le traité du 8 septembre, et qu’il eût voulu
exécuter son traité, vis-à-vis la Compagnie, eût-il pu faire
un acte de cette nature ? et lorsqu’il a dit que le traité du 7 avril
182g était annulé, seulement à partir de ce jo u r , n’est-ce pas
parce que, jusques-là, il l’avait exécuté (tant bien que m a l , il
est vrai), d ’a b o r d avec les gérans, puis avec Derosne et Dumont?
N ’cst-il pas évident, en effet, q u e , depuis le 8 décembre,
l ’exécution avait eu lieu directement et exclusivement avec ces
derniers? Cet acte n’est doric que la consommation de celte ac-
4
4
7-
�( ?a )
çeptation, sa réalisation par écrit, alors que, des le principe,
/ elle avait existe pleinement par la mutation des personnes, et
le changement des qualités.
Après avoir présenté ensemble tout ce qui est relatif à ces
faits d’exécution et d’acceptation de la cession du septembre,
il faut revenir sur nos pas , et faire connaître la demande qui
a commencé le procès. Une première sommation fut faite le
24 mars i o, c’est-à-dire, peu de jours après le dernier paye
ment du 10 mars, sur la livraison à faire , le lendemain, àu sieur
Daubrée. Nous ne perdrons pas de vue que les livraisons anté
rieures avaient été réglées le six du même mois, jusques et
compris le mois de février, au moyen d’une quittance pour
so ld e, donnée sans la moindre réserve.
>
Par cette sommation , Mossier expose ce qui résulte des con
ventions passées entre la compagnie et le requérant, en qua
lité d'entrepreneur de la fabrication des noirs..... I l parait, ditil, que la Compagnie a fait des conventions avec Dumont et
Derosne, qui les autorisaient à r é c l a m e r la livraison des noirs ;...
que plusieurs livraisons ont été effectuées ; mais que depuis
peu de jo u rs, ces messieurs ont élevé la prétention de ne re
cevoir qu’une partie des noirs fabriqués, annonçant hautement
qu’ils n’étaient pas tenus de recevoir indistinctement tous les
produits.
Assurément, tout n’est pas franchise dans cet exposé, sur
tout dans ces mois : Il parait, si singulièrement dubitatifs ;
mais il est bon de remarquer que ce n ’est que depuis peu de
jours , qu’il a à se plaindre , et que sa plainte porte sur ce que
Derosne ne veut plus rcccxoiv indistinctement lous les produits,
fut-ce les rebuts.
Il ajoute qu’il n’a lait aucune convention avec Dumont et
Derosne , qu’il n’entend point nuire à scs conditions avec les
gérans, et il leur fait sommation de déclarer : « S’ils consen» tent qu’il divise les produits de la fabrication , a u q u e l cas ils
» seront tenus de retirer et p a y e r, dans les vingl-quatrc
8
83
�53
( (
-y.
» heures, la totalité des noirs qui sont en magasin. » Il faut con
venir que l'approvisionnement ne pouvait pas être considéra
ble, s’il ne datait que du 10 mars. Toutefois , Mossicr déclare,
qu’il persiste à refuser toutes livraisons à Durnont et Derosne.
Pourquoi donc cette volonté nouvelle, après avoir livré exacte
ment jusques et compris Iô 11 mars ? Nous ne transcrirons pas la
réponse des gérans, nous dirons seulement qu’ils déclarent
n ’avoir aucune explication à donner à Mo ssicr, agissant indi
viduellement , la société ayant traité avec lui et Daubrée ; qu’au
surplus, M. Dumont lui a été subrogé, etc.... Ils rappellent
l ’acte de cession du 8 septembre, l’approhalion de Mossicr ,
du 24 septembre , et l’exécution que Mossier lui a donnée , en
faisant des livraisons et recevant des payemens. Il protestent
de leurs dommages.
Le sieur Mossier, page 19, veut référer cette sommation à
une lettre de Derosrie, du 26 janvier i o, laquelle aurait été
provoquée par la déclaration de Guillaumon , au sujet de la
non-existence de l’échantillon du noir fin. Il rend compte de
cette lettre , qui démontre, suivant lui: i° que le noir fin pou
vait servir à un double usage, aux couleurs comme à la raffi
nerie ; 20 que Derosne et Durnont avaient déjà reçu beaucoup
de noir fin. II nous suffira d’ajouter ce qui .manque de cette
lettre , pour qu?on puisse juger de la justesse des argumens du
sieur Mossier.
Remarquons qu’elle était écrite par Derosne , immédiate
ment après la consommation de son traité avec la Compagnie ,
mais bien après celui du i ermaii829, qui fixait la qualité du noir
àraffinerie, conformément à l’échantillon. O r,iId ità Mossicr:
« Comme vôtre traité avec la Compagnie parle d’un autre
» échantillon qui doit être propre à la fabrication des couleurs,
» nous désirons que vous fassiez le dépôt de cet éclianhllon , afin
»> que nous puissions nous assurer de sa qualité auprès des
» marchands de couleurs, et que nous arrêtions ensemble dé» finiüvement quelle devra être la qualité de ce noir. »
83
�54
•(
î
A in si, d’après Derosne lui-m êm e, comme d’après la simple
raison, c’était Mossier, chargé de la fabrication, qui devait
fabriquer et déposer l’échantillon.
Il était toujours temps de le faire , et on ne le refusait pas, on
le lui demandait, au contraire.
Et c’est après avoir répété cette faculté, l ’avoir sommé de
remplir cette obligation, que Derosne ajoute que jusques-là ,
jusques à nouvel ordre, se tenant au sens littéral du traité du
7 avril, il ne prendra que du noir gros grain, conforme à l'échan
tillon déposé. Remarquons bien que Dumont n’invoque pas
pour cela son traité particulier du i 'r m a i, mais bien celui du
7 avril, que Mossier ne pouvait récuser, et que Dumont offrait
d’exécuter. Ainsi, la Compagnie devait demeurer en dehors;
car on ne pouvait lui demander que cela. Elle en avait chargé
Dumont; Mossier l ’avait accepté ; celui-ci se soumettait à l’exé
cuter ; où était donc la question et l’intérêt d’un procès ? Il ne
dépendait que de Mossier de faire prendre du noir fin, en dé
posant l’échantillon. Que ne le faisait-il? La déclaration de
G u i l l a u m o n n ’ y apportait pas d’obstacle ; elle prouvait seule
ment qu’on avait eu trop de confiance au sieur Mossier, en re
connaissant , le 7 avril 1829, que l’échantillon avait été déposé;
tandis qu’il ne l’était p as, et qu’on s’en rapportait à lui pour le
faire. Il ne peut pas aujourd’hui tirer avantage de ce qu’il ne l’a
pas fait, ni se plaindre de ce que Guillaumon l’a reconnu, alors
qu ’il était obligé de l’avouer lui-même. Cette déclaration ne
p o u r r a i t lu i avoir été préjudiciable qu’autant qu’il soutiendrait
avoir déposé l ’ é c h a n t i l l o n , c o m m e le portait son traité; mais
il reconnaît le contraire, il ne peut donc pas exiger, et ne
pouvait pas forcer Derosne à recevoir des noirs non encore
admis par sont traité du 7 avril, puisqu’il n’y avait pas d’échan
tillon de noir fin, ni pour couleur, ni pour clarifier.
Il argumente encore de ce que Derosne lui dit: qui si dans la
suite ils ont besoin de noirf i n , soit pour la fabrication des cou
leurs , soit pour remplacer le noir animal dans les raffineries,
�t 55 )
ce sera Tobjet de nouvelles conventions {p. 20). Au moins fallaitil copier la phrase tout entière. La voici :
« Si par la suite nous croyons devoir vous demander du
» noir fin , soit propre à la fabrication des couleurs, soit pour
» remplacer le noir animal dans les raffineries, le premier
» devra être conforme à \'échantillon que nous avons encore à
» reconnaître y et le second sera l’objet de nouvelles conven» tions entre nous, puisqu'il n ’en est pas question dans le traité
» passé. » A in s i, tout se bornait à dire : Déposez l ’échantillon
du noir à couleur ; jusque-là nous ne recevons rien. Quand au
noir fin à raffiner , nous verrons ; mais il n’en est pas question
dans votre traité avec la Compagnie ; exécutons ce traité. C’est
ce que la Compagnie lui a répété sans cesse, et ce que nous
avons expliqué dans ce Mémoire ; aussi a-t-il invoqué des
exemples et non des conventions. Nous avons démontré que
ces précédens n ’existaient pas.
L e (’i2 avril, autre sommation. Mossier se plaint de ce que
« les magasins qui lui ont été livrés, sont tellement encombrés
' » par les noirs, que la Compagnie a refusé de retirer depuis le
» 24 mars dernier, que ceux provenus de la fabrication jour» nalière ne peuvent pas y être abrités.» II invoque l ’exemple
du jugement arbitral, et déclare qu’il suspendra la fabrication
le 1 , et réserve ses dommages-intérêts pour le tort qu’il en
éprouvera.
L e 14, les gérans dénoncent ces sommations à Daubrce ; et
le 12 , aux sieurs Dumont et Derosne. C ’était la seule marche
qu’ils eussent à tenir; car, subrogés qu’étaient ces derniers
aux obligations de la Compagnie envers Mossier, ils devaient
faire cesser la demande, si Mossier leur offrait des noirs de'
recette , ou prouver qu’ils n’étaient pas obligés de les re
cevoir.
Mais alors, comment les auraient-ils reçus jusqu’au 24 mars,
et comment, cejour-là, était née une difficulté?Si ce fait était
v ra i, et qu’il dût entraîner des conséquences, c ’était b»'1"
5
�( 56 }
affaire dè le supporter, car il était en dehors du traité du
7 avril 1829.
Le
avril, Mossier déclara cesser toute fabrication, et ne
vouloir livrer de noirs que jusqu’à concurrence dé ,000 f r . ,
qu 'il avait reçus cTavance.
Le 17 m a i, Mossier donna une assignation devant le tribu.nal de commerce. C ’est là que commence le procès.
Après avoir dclayé dans son exposé des injures personnelles
,contre les gérans , il les assigne : « pour se voir condamner à
» prendre, retirer et payer la totalité des noirs gisans dans les
» magasins ou dans la cour du moulin de Clermont, confor
m
a mément aux dispositions de la sentence arbitrale du 17 fé» vrier i o; être condamnés par corps en 40,000 francs de
» dommages-intérêts, et oo fr .p a r chaque jo u r de retard, à
» partir de ce jour. »
;
A travers tous les moyens de faire fortune, dont le sieur
Mossier avait pu se bercer, celui-ci aurait été, sans doute, le
meilleur et le plus facile; 40,000 fr. pour commencer, ’puis
• oo fr. par jour! Quelle mine à exploiter, sans autre peine que
celle qu’il aurait fallu prendre pour prolonger un procès!
Toutefois, pourquoi tant de noirs amoncelés dans une cour,
si ce n’était des rebuts? Lui avait-on jamais refusé les fonds
nécessaires pour abriter le noir de recette?. Il n’avait demandé
que deshangards, et la société Derosne l’avait immédiatement
mis en mesure de les faire. Il les avait construits. Lui avait-on
refusé la livraison des noirs conformes à l’éçhanlillon déposé,
et au traité du 7 avril? Jamais. O r, nous répétons sans cesse
que c’est là toute la question.
• Devant le tribunal de commerce, le sieur Mossier répéta les
-mêmes conclusions.
Nous devons ajouter que, par acte du 21 m a i , et ne pou
vant pas se dissimuler sa situation vis-à-visDumont et Derosne,'
il les assigna pour voir déclarer le jugement commun avec
23
3
83
5
eux.
5
�7 V
( 57 )
Les gerans demandèrent que Mossier fût déclaré non recevable, en tant que sa demande élait dirigée contre la Compa
gnie, laquelle serait mise hors d’instance. En cas d’interlocu
toire, ils requéraient des mesures dans l ’intérêt de l’exploita
tion.
Le sieur Daubrée conclut à être mis hors de cause, en pro
duisant le traité par leq u el, dit-il, son association avec Mos
sier , avait été' rompue sans la participation de la Compagnie.
La Compagnie conclut alors à ce que Mossier et Daubrée
fussent tenus de diriger l’exploitation de concert ; et, pour ne
l ’avoir pas fait, condamnés à 4,000 fr. de dommages-intérêtsQuant à Dumont et à Derosne , ils'se retranchèrent dans
l’exécution de leur traité du 8 septem bre, 6t persistèrent à
soutenir qu’ils ne devaient recevoir que le noir conforme à
l ’échantillon déposé; que les noirs fins devaient rester pour
le compte de l ’Entreprcneur ou de la Compagnie, si , par
suite des discussions élevées , l’engagement de la Compagnie
n était pas rempli. Ils conclurent à 20,000 fr. de dommagesintérêts.
Ces dernières conclusions conduisaient tout naturellement
à rechercher si le traité fait avec Dumont, par la Compagnie ,
était ou non conforme à celui du 7 avril, qu’elle avait fait avec
Mossier et Daubrée. S’il l’était, la Compagnie pouvait laisser
le combat entre eux ; o r , nous prouverons qu’ils étaient con
formes.
En cet état, le tribunal renvoya les parties devant un de scs
membres pour tenter une conciliation.
I c i , deux lignes du sieur Mossier exigent encore une ex
plication.
II dit, page 2 1, que « tout était convenu, mais les gérans
» se rétractèrent et la justice dût prononcer. »
Tout était convenu , en effe t, devant lejugc - commis
saire. La Compagnie y faisait en faveur de Derosne et Du
mont , des concessions que lui arrachait la nature de l’en8
�(58)
treprise et la crainte de la détruire ; par conséquent, de tout
p e rd r e , si la mésintelligence continuait. Peut-être e û t -il
été désirable que, dans cet intérêt même , on eût mis de
côté quelques mouvemens d’un juste a m o u r-p ro p re , mé
prisé quelques injures et le ton que le sieur Mossier mettait
à ses exigences; mais on ne peut blâmer la sensibilité d’hommes
Jionnêtes, qui, après avoir éprouvé une injure, n e peuvent
pas se résigner à la p a y e r , si modique que soit la somme
qu’on leur demande. A u surplus, comme il s’agit d’un fait qui
n’est écrit nulle part, le rédacteur de ce Mémoire va laisser
parler les gérans eux-m êm es, en transcrivant une note qu’ils
lui ont remise :
« Le juge-commissaire, magistrat probe et pacifique, avait
?> eu plusieurs entrevues avec M- Derosne ; il se plaignait que
» le prix du bail était trop élevé ; que s’il n’obtenait une di» minution , il prendrait des mesures pour se retirer de cette
» affaire ; qu’alors la Compagnie n’aurait plus d’autre recours
» que contre Dumont, qui est un honnête h o m m e, mais sans
* fortune ; ce motif, et autres moyens que l’on fit valoir , dé» cidèrent la Compagnie d’accepter les conditions suivantes :
« i° Le prix du bail, qui était de 24,000 fr., devait être réduit à
i7,5oo fr. ; 2°L cs sieurs Derosne et Dumont reprenaient à la
» Compagnie, au prix d’achat, le restant des noirs provenant
» du premier arrangement fait avec Mossier ; ° Ils se char» geaient également de celui que le sieur Mossier veut impo« ser à la Compagnie ( nous ignorons à quelles conditions ) ;
» ° Toutes les parties renonçaient à leur demande en indem» nité; ° Chacun devait payer scs frais; (ceux de la Compagnie
» s’élevaient alors à 8 ou g fr., pour deux significations.) »
Telles étaient étaient les bases de cet arrangement, bien ar
rêté et convenu entre toutes les parties, en présence du jugecommissaire.
« L ’on se donna rendez-vous pour le matin, chez M. Jouvet,
» avocat, pour en faire la rédaction ; cettcréunion eut eifec-.
3
4
5
�7»?
( 50 )
25
î> tivemcnf lieu dans la soirée du i[\ au
juillet, où furent
» présens MM. Jo u v e t, M ichel, avocat, Bayle-M oulliard,
» Dessaigne, Derosne, Mossier, Brcchet et les deux Gérans ;
» le traité étant terminé, l’avocat du sieur Mossier prend la
» parole et dit : que sa partie se faisait toute réserve en dom» mages et intérêts envers la Compagnie. Celte demande inat» tendue , qui était contraire à ce qui avait été arrêté chez le
» juge-commissaire, fit croire aux gérans que le sieur Mossier
» cherchait un prétexte pour se rétracter; ils quittèrent l’as» semblée avec humeur;de se voir jouer de la sorte.
» Le lendemain, le sieur Breschet, beau-père du sieur Mos» s i e r , se rendit chez M. Bardonnet, l’un des administra» tcurs , pour l’engager de faire allouer à son gendre, par la
» Com*pagnie , une somme de cinq cents francs , pour payer
» les frais. Cette proposition fut repoussée par tous les action» naires présens à Clerm ont, ne voulant pas sanctionner une
» injustice par une récompense réclamée avec des formes et
5» un caractère injurieux.
» Cependant, M. Derosne partit le lendemain pour Paris.
» Il y arriva précisément au moment des événemens de juil» let , qui ont contribué d’aggraver la posilion des action» naires. L ’un des Gérans , accompagné d’un de MM les Ad» ministrateurs, se rendit, quelques temps après, auprès de
» l u i , pour voir s’il serait possible de terminer sur les derj> nières bases arrêtées, et que le sieur Mossier avait seul
» suspendues; il nous répondit que d’après l’inccrlitudc de la
» guerre ou du maintien de la paix, il ne voulait plus sous» crire aux dernières conventions; qu’en outre, l’on s’occupait
» d’un moyen pour revivifier le noir animal, et que si l ’on
» parvenait à réussir, cette matière éprouverait une si forte
» diminution, qu’il aurait plus d’avanlage , en faisant des sa» crificcs, de demander la résiliation du bail, que de conti» nuer l’exploitation.»
fallut donc se résigner à venir devant le tribunal. Il
11
8.
'
�(. 6 0 ) .
ordonna une expertise, qui devait durer quatre jours, pour
vérifier si les entrepreneurs auraient pu par le passé , et
peuvent présentement, avec les machines fournies par la so
ciété, fabriquer une moindre quantité de noir fin. Le juge
ment porte qu’il est rendu, sans rien préjuger sur lesjins de
non-recevoir , moyens et conclusions des parties, m a is unique
ment dans le but (Téclairer la religion du tribunal.
Ici nous laissons encore les gérans eux-mêmes rapporter ce
qui résulte de celte vérification.
Les experts commencent par rendre compte de leur voyage
à Menât, d’où ils se rendirent, avec M. Mossier , au moulin
appartenant à la Compagnie ; ils trouvèrent dans celte usine
deux ouvriers occupés à travailler; ils remarquèrent, i° que la
manière d’engrainer était mal conçue : l’on appuyé les sacs sur
les trémies, ce qui dérange le moulin ; un ouvrier était assis sur
le tambour, pour faire tomber le schiste avec la main dans
l ’œil de la meule ; il en résulte qu’il est physiquement impos
sible que cet ouvrier puisse résister long-tem ps, et qu’il serait bientôt étouffé par la poussière occasionnée par la chute
et le broiement du schiste ; aussi , en l’absence du maître,
l ’ouvrier doit-il abandonner son poste. Le sieur Mossier répond
qu ’il reconnaît la justesse de ces observations, et que lorsqu’il
quitte pour aller diner, et qu'il revient, il ne retrouve que du fin.
( Le sieur Mossier ne reste pas une heure par semaine au
moulin. )
Les experts indiquent qu’il serait facile de parer à cet in
convénient , avec un frayon qui ne coûte que à G fr. Ils re
marquent que le noir, après avoir été broyé par les meules
tombe dans une caisse, au lieu d’être conduit par un tuyau en
fer bl inc dans une poche, ce qui incommoderait moins les ou
vriers, et permettrait de survcillerlcurtravaü; IesieurMossier
répond qu’il a renoncé à y mettre des poches, parce qu'on les lui
volait. Bonne raison , sans doute , mais que n’en prend-il soin.
Les experts disent au sieur Mossier : Vous devriez opérer
5
�( GI ) .
dans le sens contraire; vous devriez faire moudre le schiste
avant de le calciner; vous auriez économie dans le combus
tible , le travail serait moins pénible, et les frais de transport
moins considérables, pour celui qui est impropre à la clari
fication. Le sieur Mossier répond: « Je le sais, puisque, l année
» passée, nous en avons fa it l'essai avec M. Derosne ; quoique
maintenant il dise le contraire dans son Mémoire, (page 27.)
C ’est une méthode q u ’il n’a jamais voulu mettre en usage, et
qui serait cependant la plus économique.
Le schiste ne se carbonise point sur des grilles de fer, comme
il l’avance encore dans son Mémoire ; mais bien dans des vases
en fonte ou en terre cuite ; dans des creusets. Les experts
ajoutent : qu’ils n’ont pu faire aucune opération avec les fours
destinés à la calcination , attendu que les briques tombaient.
Voilà bien assurément tous les indices d’une fabrication
mauvaise et mal soignée.
Au reste, il fut convenu, pour la commodité de tous, entre
le sieur Mossier et les experts, que l’opération aurait lieu à
C lerm ont, et que le sieur Mossier y ferait conduire une cer
taine quantité de schiste calciné. « Le 8 octobre, continuent
» les experts, nous nous sommes rendus au moulin des Carmes,
» appartenant à la Compagnie; nous y avons trouvé M. Mossier,
» l ’un des entrepreneurs , et M. Chennat, régisseur de la
» Compagnie de Menât, lequel nous a dit : que sans aucune
» approbation ni improbation du jugement rendu par le tri» bunal de commerce de cette ville , le
septembre der» n ie r , m ais, au contraire , sous toutes réserves des droits
» et actions de la Compagnie, il comparaissait uniquement
» tant pour veiller à scs droits contre les sieurs Mossier et
» Daubrée , entrepreneurs , que contre les sieurs Derosne et
» Dumont; il nous a requis de consigner sa déclaration dans
» notre procès verbal. »
Les experts commencent leur opération par former trois
lots des dix-huit boges de noir calciné, pesant :,io o demi kilo-
3
�■
.
(
6
2
1
grammes chacun, que le sieur Mossier avait fait conduire de
Menât : ils les tirent au sort ; le n° tombe au sieur Mossier
il est prie' de commencer le travail, comme il opère ordinai
rement, afin de servir de marche aux experts ; ils observent,
d’abord, que le sieur Mossier fait moudre son schiste sans, au
pre'alable, l’avoir fait trier; son opération terminée, on lui de
mande quels sont les résultats ; il répond que cela est inutile.
A lo rs, les experts trient le leur, le concassent convenablement
en morceaux égaux autant que possible. Ayant remarqué que
les boges contenaient beaucoup de poussière, ils le passent à
travers une grille en fer , maillée ; après l’avoir ainsi préparé ,
ils l’ont fait moudre dans le petit moulin ; ensuite, ils l’ont
mis dans des sacs auxquels ils ont apposé le cachet de M. Gér e s t, l’un d’eux. Le lendemain , les experts ont repris leur
travail. « Nous avons pensé, disent-ils, qu’il vallait mieux faire
» moudre de suite le schiste contenu dans les six sacs, for« mant le dernier l o t , afin d’arriver à des résultats plus posi» tifs, en faisant passer dans les cylindres une plus grande
» quantité de marchandise , et en opérant sur une masse plus
» forte. Nous avons remarqué , en vuidani les six derniers
» sacs, que le schiste n'était pas semblable à celui que nous avions
» fait moudre la veille, et quyil y avait une plus grande quan» tité de noir fin ; nous avons cependant continué notre opé« ration. »
Les experts rendent compte que lorsqu’ils ont voulu faire
repasser le son de la même manière qu’ils avaient fait pour le
schiste entier, le sieur Mossier s ’y est opposé en disant que
ce n’était pas ainsi qu’il opérait lui-même; les experts lui ont
observé que, dès qu’il y avait deux méthodes, il fallait em
ployer la meilleure ; e t , malgré cette opposition , ils ont con
tinué comme ils l’avaient décide.
Cette première épreuve ayant paru insuffisante aux experts,’
pour connaître d’une manière précise le résultat, ils décidèrent
d ’en faire une seconde; mais ils trouvèrent encore de l’oppo-
3
�sition de la part du sieur Mossier, qui prétendait qu’ayant
travaillé le temps indiqué par le tribunal, ils n’étaient plus
en droit de continuer; cependant , après lui avoir observé
qu’ils avaient employé beaucoup de temps à piquer les meules,
les mettre d ’aplomb, trier, casser et passer le schiste, il con
sentit à leur accorder encore le temps nécessaire pour faire
une expérience sur dix quintaux seulement , qu’ils firent
moudre presque en totalité au même instant.
- L e lendemain , g novem bre, à huit heures et demie du ma
tin , ils se rendirent à l’usine de l’établissement, dont les clefs,
disent-ils, restaient chaque soir entre les mains de M. Mossier;
nous açorjf remarqué que toute chose n'était pas dans le même
état que la veille.
« A u moment où nous voulions nous mettre à l’ouvrage, en
» présence de M. Foureau, employé de M. Mossier, et de
» M. Chennat, régisseur de la Compagnie, nous nous aper« çûmes que l’on avait enlevé environ une quarte de schiste ,
» que nous avions laissé la veille, dans la trémie; nous inter» rogeons M. Foureau , et les ouvriers , on nous répond
» que personne n’est monté au moulin, que l’on n’a rien tou» clié. Celte circonstance éveille nos soupçons, e t , après nous
» être concertés, nous pesons de nouveau les sacs contenant
» le noir b r u t , moulu la veille, et cacheté par nous ; cette nou» vclle pesée nous donne un poid de mille neuf demi kilogram» mes ; et cependant, nous n’en avions mis que dix quintaux,
» dont il aurait fallut déduire le déchet nécessaire pour la mou» t u r c , et que l’on peut évaluer à kilogrammes, et la quarte
» du schiste, laissée par nous dans le moulin. »
Ici, faisons remarquer à la Cour une erreur grave, qui se
trouve dans le Mémoire du sieur Mossier (page
.)
Les experts disent qu’ils ne pesèrent la veille que dix quin.
taux de schiste, et que le lendemain ils trouvèrent mille neuf
demi kilogrammes, ce qui fait n euf livres de p lu s, et non pas
neuf cent livres, comme le sieur Mossier l’a fait imprimer.
5
25
�( 64)
Continuons à copier le rapport des experts : « Nous ne pou» vions nous expliquer cette différence; nous aimions à croire
» que nous n’avions pas été trom pés, et que celte différence
» pouvait provenir d’une erreur; dans cette persuasion, nous
» vuidons un premier sac, désirant continuer nos travaux;
« mais nous voyons que ce sac renferme une quantité plus
» considérable de noir fin, qu’il n’aurait dû en contenir ;
» étonnés, de plus en p lu s, nous examinons avec soin les
>> autres sacs : le cachet existait, les sacs n’avaient pâs été dé» cousus; M, Morateur, l ’un de nous, coupe le fil; il était
» intact, et, cependant, le sac renfermait du noir fin impal» pable, en grande quantité. Sur cette entrefaite, arrivent suc» cessivement MM. Blanc et Guillaumon, gérans ; MM. Roux» Laval, Roux-Jourdain et Goyon, actionnaires; nous leur
» faisons part de ce qui arrive.
» M. Goyon, l’un des actionnaires, nous invite à mention-;
» ner, dans notre rapport, que, le lundi matin, la croisée du
« p r e m i e r étage du côté droit de la pièce où est le ventilla» te u r, et d o n n a n t s u r la c o u r , q u i av a it d û être f e r m é e le
» samedi, avait été trouvée ouverte ; et que cinq à six car» rcaux avaient été brisés ; nous lui avons répondu, avec le
» commis de M . Mossier, que le vent seul avait occasionné co
3> dégât; et que, d ’ailleurs, celte circonstance était insigni'
» fiante, puisque les clefs restaient, chaque soir entre les mains
» de l'entrepreneur, M. Mossier.
» E n f i n , pour arrivera la découverte de la vérité, M. Gé» rest, l’un de nous , est d’avis de tourner, sans dessus des» sous, la balle déjà décousue par M. Morateur, ce qui est
» fait à l’instant; nous reconnaissons alors, q u ’une incision;
3> d'environ un pied de longueur, a etc faite à la toile, un peu en
3> biaisant; que c ’est par cette ouverture que la substitution du
» noir fin au noir gros a dû être fa it e , et que cette opération a
P été faite très-récemment.
)>A ussitôt, nous faisons appeler M. Mossier, qui était dans
�( 6 5 ) ,
.
» une autre pièce de l’usine, en présence de MM. Guillaumon,'
» Roux-Laval et Foureau; nous lui adressons de vifs re» proches s^ir une manoeuvre aussi déloyale, qui tendait à
» ruiner notre opération; M. Mossicr répond d’abord, que
» c’est peut-être le résultat d’une erreur de ses ouvriers, qui
» auraient échangé une balle de noir gros ; mais nous faisons
» remarquer àM. Mossier que le sac a été coupé avec un cou» teau et recousu, et que l’on a substitué du noir fin à du noir
» gros ; M. Mossier nous répond que c ’est sans doute un de ses
» ouvriers, q u i, croyant lui rendre service, aurait fait cette sub» stiiution ; q u ille connaît bien, et que lui, ainsi que son épouse
» lui avaient bien défendu de le faire; qu'il ne voudrait p a s,
» pour dix mille francs , que cela fû t arrivé; cependant nous
» devons déclarer, continuent les experts, que M. Mossier n'a
» ni réprimandé, n i renvoyé aucun de ses ouvriers. Le premier
» sacvidé, pouvait contenir environ i à 20 demi kilogrammes
» de noir fin ; le second sac pouvait en contenir de l\o à o , le
» tout provenant de la substitution.»
5
5
L ’on se demande, quels éclaircissemens les juges ont-ils pu
recueillir d’une semblable épreuve, faite sous l’influence d’une
fraude aussi honteuse? Enumérons tout ce qui a été fait pour
'tromper les experts, et nous verrons que l’expression est
applicable.
r L ’on conduit du noir schiste de Menât, dans lequel il y
avait déjà de douze à quinze pour cent de poussière; le sieur
Mossier répond, quand on lui en fait l’observation, que ce sont
les cordes qui l’ont moulu; sans doute, sur les voitures.
a0 L ’on remarque que les six boges qui ne purent pas se
moudre le même jour, et qui furent laissées au moulin jus
qu’au lendemain, contiennent plus de noirfin que celles de la
veille ;
3
° Une pyrite, de la grosseur d’un œuf, est introduite avec
le schiste, pour détourner les meules de leur aplom b, les faire
9
�( 66
)
tourner plus long-temps , et obtenir une plus grande quantité
de noir fin ;
4° L ’on veut
passer le son dans le moulin quff l’on croit le
plus favorable , le sieur Mossier veut s’y opposer.
5°
E n fin , les experts prennent la précaution de peser le
sebiste, de cacheter les sacs ; e t , pendant la nuit, au moyen
d ’une large incision pratiquée au fond desboges, l’on substitue
au noir qu’ils avaient moulu la veille, du noir fin, et le tout
pour tromper la religion du tribunal.
Malgré sa déclaration, le sieur Mossier eut la hardiesse de
faire plaider, devant le tribunal de commerce, que l’on avait
vusortirles gérans de la cour, nuitamment. Nous n’entrepren
drons pas de nous justifier d’une aussi plate calomnie ; nous
dirons seulement que, désirant connaître le résultat de l’opé
ration , nous nous rendîmes au moulin, par la petite barrière ,
à six heures et demie du soir ; arrivés au m oulin, nous trou
vâmes un ouvrier du sieur Mossier dans la cour, qui nous dit
que les experts venaient de sortir, et q u ’ils avaiqfat passé par
la barrière de Montferrand , de crainte que la petite fût
fermée.
Toutes les fenêtres en dehors sont grillées ; la cour est close
par un mur de io pieds de hauteur ; le sieur Mossier couchait
dans l’appartement occupé jadis par l’agent de la Compagnie ,
qui n ’est pas éloigné de quatre toises des meules; les clefs
étaient dans sa chambre ; les trois ou quatre ouvriers, qui cou
chaient au moulin, étaient à son service.'llA in s i, pour que la
fraude eût été commise par tout autre que1les personnes qui
habitaient le moulin , il faudrait supposer que les fraudeurs
eussent passé par le trou de la serrure, et qu’ils n’eussent ré
veille aucun des habitans de la maison.
En rendant compte du résultat de leurs opérations, les ex
perts déclarent que sur cent kilogrammes de schiste calciné ,
ils ont obtenu;
�/
7
0
0
3i
00
C 67 )
E n noir fin im palpable .............................
N ° 2 , fin p alp ab le.....................................
Noirs gro s, de trois numéros , ensemble
Son, dont deux tiers bons.......................
L ’autre tiers m auvais...............................
Déchet sur le p oids, par l ’évaporation .
27
5 i 6° ) 5
3 64 {
1 81
3 87
1
T otal
. . .
100
00.
Ainsi, le noir bon est obtenu dans la proportion de 55,24/000
sur 100.
• N ’examinons pas même s’il faudrait y ajouter le noir fin
n° 2, qui porterait cette quantité à 62,5i/ioo ; nous n’avons
pas besoin d’éclaircir ce fait pour lequel il suffirait aie savoir
si ce noir fin passe ou non dans la toile n° 100 ; car c’gst là le
caractère de l’échantillon déposé et accepté par Mossier comme
par tous ; mais tenons-le pour noir fin , et voyons ce qui de
vrait en résulter ; il faut tirer à l’instant les conséquences du
fait :
L e traité du 7 a v ril, entre la Compagnie , d ’une p a rt, Mos
s i e r et D ’aubrée, de l’autre*, constate que l’échantillon du noir
fin avait été déposé, cacheté, entre les mains des gérans. C ’est
un fait qui n’a jamais été contesté par aucune des parties.
L e traité fait entre la Compagnie et Dumont, le i"m a i sui
vant, c’est-à-dire trois semaines après, constate encore que la
livraison devra être faite, conformément aux échantillons ca
chetés et déposés entre les mains des parties.
Ils doivent prendre proportionnellement:
i° 3o kilogrammes de noir en grain ;
2° 5 kilogrammes de noir, dit noirfin à raffiner.
Mais ce noir fin , pour être propre à*la décoloration, doit
être purgé de la poussière impalpable.
E t , en effe t, comme nous l’avons vu plus h au t, la poudre
impalpable se mêle ayec le sirop , et ne fait que le noircir,
9-
�( 68- )i
effet physique, que tout le monde peut comprendre. D ’ailleurs,
dans son dernier traité avec Derosne, du 24 janvier t i ,
Mossier, qui avait voulu le rendre propre aux couleurs, pré
cisément, suivant lu i, parce qu’il serait impalpable ( v. son
M ém oire, p. 14 ) , et qui n’avait pas pu y parvenir, reconnaît
si clairement qu’on n’a jamais pu le rendre u tile, et qu’il est
obligé de le céder sans p rix , que nous n’avons plus aucune
preuve à faire là-dessus.
Il résulte donc nettement de ce travail des experts, que
,. /100 pour cen t, se réduisant en poiidre im p a lp a b le so n t
un véritable déchet; et que, si le noir fin, n° 2 , ne peut pas
ètte-feçu'domme noir'gros ou eii grain, e t doit; passer comme
fin., il’ne se trouve plus que'pour 8 ,
/100 pour cen t..O r,
Derosne^getDumont n'ont jamais refuséde recevoir quinze pour
cent, ce qui est la proportion.de sur
;- et souvent ils ont
reçu davantage. Nous ne faisons que tracer ici le résultat d’actes
non contestés.
De quoi donc le sieur Mossier a-t-il le droit de se plaindrë ?
Au reste,les experts font une dernière observation; ilsdissnt :
Nous avons obtenu 62, i/ioo pourcent. Il est à remarquer
que nous avons opéré sur du schiste calcine'.
On pourrait, nous le pensons, obtenir du noir gros en plus
grande proportion, en employant les moyens suivons :
Le sieur Mossier les copie, page 26: il dit que les experts
les ont employés; mais on voit le contraire, d’après cette ma
nière de s’exprimer des experts eux-memes ; cela est d’ailleurs
prouvé par le rapport, où ils montrent qu’une pyrite a dérangé
leur seconde opération. Donc, le triage des pyrites n’était pas
bien fait. D ’ailleurs, ils n’avaient pas pu remplacer le frayon, etc.
Remarquons que cela ne change pas les machines avec les
quelles Mossier avait*opéré jusques-là; qu’ainsi, tout consis
tait de sa part dans un mode meilleur de s’en servir.
C’est après ce rapport que les premiers juges ont rendu le
jugement dont est appel. Le président était décédé dans l’in-
83
33 83
83
5
5
35
�( 6 9 ) ..........................................................................
fërvallci Le sieur Mossier avait fait dire à trois des juges des’abstenir; deux autres se récusaient. Le tribunal ne se trouva
plus composé. Il fallut appeler un notable. Le sort tomba sur
un pharmacien.
II faut retracer les singulières dispositions de ce jugement :
Il condamne les gérans ;
i° A prendre livraison des noirs fins, fabriqués depuis le
lîail du 18 décembre 1829, et ce, dans la proportion de 40 ki
logrammes, sur 100 kilogrammes de noir en grains, et à les
payer 9 fr. 5o c . , c’est-à -d irele prix des noirs à raffinerie;
A payer à Mossier 2,000 fr. de dommages-inférets.
II condamne Derosne et Dumont à prendre et retirer ces
noirs des mains des gérans, mais à en payer seulement i ki
logrammes sur 4o; les
autres leur demeureront comme in-,
demnité de la suspension de la fabrication ;
5
25
5
' II condamne Daubrée à oo fr. de dommages-intérêts ;
Et enfin , condamne la Compagnie à tous les dépens.
Il est assez difficile de s’expliquer'comment le tribunal a fait
remonter la livraison de ces noirs au 18 décembre, lorsque les
pièces du procès constataient que tout avait été livré, retiré;
et réglé, pour solde , jusques au i er mars , et que les somma
tions faites par Mossier, les 24 mars et jours suivans, et enfin,
l’exploit de demande, lui-même, constataient qu’ilscplaignait
seulement du refus, depuis peu de jo u rs, depuis le mois de
mars, et q u ’il n ’avait pas saisi le tribunal d ’autre chose.
;
A la vérité, sa demande portait sur tous les noirs1, gisans
dans les magasins ou dans la cour ; mais , de deux choses
l une ;
Ou l’allégation qu’on avait tout re ç u , indistinctement, jus
ques et compris février, était vraie, cl alors il ne pouvait
pas y avoir encombrement ;
Ou elle n’eiait pas vraie ( et il faut bien le reconnaître) , et
alors son moyen principal, unique , était complètement de-
�( 7° ) ’
tru it, et cependant c’est encore le pivot du jugem ent, qui se
fond sur les re'ceplions faites antérieurement.
E n fin , le jugement n’adopte pas cette demande intégrale
ment; il l’applique seulement aux noirs qui ont étéfabriqués
depuis le 18 décembre. Mais quels seront-ils? Sera-ce ceux qui
sont dans la cour ou dans les magasins? Enfin, que deviendra
le surplus? J\este-t-il pour le compte du sieur Mossier? Et
pourquoi donc, s’il a raison ?La Compagnie sera donc con
damnée à prendre, à jamais, tous les rebuts pour des produits ?
Quant à Dumont et Derosne, le tribunal dit qu’ils se sont
engagés à se subroger à la Compagnie , et à remplir ses obli-,
gâtions envers les entrepreneurs ;
Quela déclaration de Guillaumon, qu’il n'y avaitpas d ’éckan-f
tillon, n ’est qu'un hommage rendu à la vérité; quelle ne contient
aucune dérogation au bail; qu’au contraire, il résulte des termes
de l’acte, qu ’ils sontpropriétaires de tous les noirsfabriqués, quelle
que soit leur propriété.
Il semblait résulter de là que Dumont et Derosne devaient
se subroger, pour le tout, à la Compagnie; que c ’était à eux à
recevoir les noirs, comme la Compagnie qu’on y condamnait;
et qu’enfin, s’il y avait dommage pour quelqu’u n , pour ne
l ’avoir pas fait, c’était à eux qu’était la faute, et à eux qu’il
fallait imputer la suspension provenue de ce fait. Cependant,
c’est la Compagnie qui est condamnée à leur laisser , sans
aucun p r ix ,
kilogrammes sur 100, à titre de dommages-intéréts ; mais puisque le tribunal décide , en principe , que
Dumont et Derosne sont obligés de les recevoir , comme la
Compagnie les reçoit elle-même ; et que c’est pour celte fois,;
seulement, qu’il les dispense de les payer, par ce quela sus
pension leur a fait dommage , la Compagnie sera-t-elle obli
gée, à l’avenir, de les leur livrer gratis? Il est bien assez logique
de dire qu’ils devront les payer, car, le principe qui l e s force
à rpcevoir restera, tandis que l’ejcception passagère, qui pro-
25
�( 71 ) .
duit les dommages-inlérêts, aura disparu.Toutefois , c’est une
position qui n ’est pas ncltemcnt exprime'e par le jugement.
Nous n’appelons pas l’attenlion de la Cour, sur les autres
motifs de ce jugement. Nous n’entreprendrons pas non plus
•une discussion raisonne'e des griefs d’appel. La Compagnie,
■
en répondant au M ém oire, a eu pour objet principal de faire
connaître les actes et les faits ; et nous avons eu so in , en les
exposant, d’en montrer les conséquences. Il nous suffira donc
•de résumer quelques réflexions pour faire ressortir nettement
les moyens de la Compagnie.
Peu de jours après le jugement, la Compagnie fut obligée
de passer elle-même un nouveau bail avec Dumont et Derosne.
L ’état où avait été mise cette exploitation, si belle dans le prin. c ip e , la força à subir des modifications considérables.
Au lieu de 24,000 fr., prix du bail du 8 septembre 1829,
la Société ne recevra plus que 10,000 fr., à titre de forfait.
i
La quantité de noir à fabriquer est réduite dans la même
proportion ; l’excédent au delà du taux fixé, sera payé sur le
pied de un franc cinquante centimes.
L ’art. 8 porte :
»
»
»
»
»
»
«Les noirs fins ne pouvant actuellement avoir d ’emploi avantageux, MM. Derosne et Dumont seront libres de les anéantir. Cependant, s’ils trouvaient à en placer, ils payeraient à
la Compagnie une somme de vingt centimes par chaque
quintal métrique, vendu dans le Puy-de-Dôme et départemens limitrophes; et cinquante centimes, pour chaque quintal
métrique , expédié pour toute autre destination.
A r t. q.
.
•J
J iJfilip :
c-i '
« Si Dumont et Derosne pouvaient trouver le moyen de rendre
les noirspns propres aux couleurs, un nouveau supplément
de p r ix , pour la Compagnie, serait réglé amiablement, sinon
à dire d’experts.»
�(
72 )
•A ut .
io .
«Les modifications et changemens nécessaires pour diminuer
la quantité de noir fin actuellement produite dans la fabrication,
exigeant une dépense d’environ 6,000 fr., MM. Derosneet Duruont pourront s’en indemniser, en prenant chaqueannée. pendantsixans, .100,000 kilogrammes de noir gros grains, en susde
la quantité convenue, sans payer la redevance d?un franc cin
quante centimes par 100 kilogrammes.»
Ces trois articles nous démontrent ces vérités d’ailleurs si
palpables, qui résultent de tout l’ensemble des faits.
i° Les noirs fins ne peuvent trouver d’emploi avantageux.
Si on trouve à en placer, Derosne et Dumont payeront 20 c.
dans'un ca s, et o c. dans l’autre. Terme m oyen ,
c. Cette
proportion est remarquable avec le prix auquel la Compagnie
est condamnée à recevoir actuellement, du sieur Mossler ;
tout; celui qui a piu. résulter de sa fabrication. N ’est-ce pas
9 fr. 60 c. ? Et Mossier, dans son traité du 24 janvier
, les
a abandonnés tout à fait. Dans tous les cas , si on le? expédie ,
il n’aura droit qu 'aux frais & emballage et de transport.
5
35
i83i
20 Comme noirs à couleur, on ne leur reconnaît aucune
propriété. , .
3° Quelques changemens
ou modifications peuvent amener
une diminution dans la quantité de cç n o i r , actuellement
produite par la fabrication.
RÉSUME.
I
»
Pour discuter plus à son aise, le sieur Mossier nous a sup
posé un système en quatre propositions, qu’il discute succes
sivement :
mcvV
L ’action deTVIossier est non recevablc; il ne pouvait la
diriger que contre Decosne et Dumont ;
f
�:;/ j
-< 2° Il s ’était engagé à fournir des noirs à couleur , et ceux
qu’il présente n’y sont pas propres ;
° Il pouvait fabriquer une plus grande quantité de noir gros
-grain;
t
” Il ne hù était pas permis de se séparer de Daubrée sans
le consentement de la Compagnie.
Tout ce que nous avons posé en point de fait, tout ce que
'nous avons tiré de conséquences, démontre que quoiqu’on
lui dise tout cela, la défense des gérans ne consiste pas dans
ce plan fait àplaisir. Nous pouvons résumer, en peu de mots,
le résultat de tout ce que nous avons dit, et c’est là qu’on ap
préciera les vrais moyens de la Compagnie.
La difficulté s’élève à raison des noirs sortis de la fabrica
tion , et q u i, n’étant pas conformes à l’échantillon déposé pour
noir à raffinerie , n’ont pas pu être appropriés aux couleurs.
Les sieurs Dumont et Derosne disent qu’ils ne sont pas
tenus de les recevoir, parce qu’ils ne sont pas dans la con
vention , pas conformes à l’échantillon ; qu’en ce qui les con
cerne, ils ne doivent recevoir que du noir en grain, qui ne
passe pas à travers la toile n° ioo; qu’enfin, si Mossier a fait,
avec la Compagnie, des conventions qui l ’autorisent à en dé’
livrer d’autres, moyennant un prix convenu, c’est à la Com
pagnie de les prendre et d’en payer le prix.
Il n’y a pas le moindre doute , qu’à considérer la question
sous ce point de vue , Derosne et Dumont auraient complète
ment raison. Ils l’ont certainement à l’égard de Mossier, car,
il'n e peut pas les forcer à recevoir ce qu’ils ne se sont pas
obligés à prendre; et, alors, il ne resterait plus qu’à decider
s’il peut en imposer la condition à la Compagnie.
Pour cela , il lui faudrait prouver que la Compagnie s’y était
obligée à son égard ;
,
Ou par des actes formels ,
Ou par quelque chose qui pul en tenir lieu.
Voyons s’il remplit cette condition.
io
3
4
�7
'( " -V)
Il n’invoque pas , d’une manière bien précisé , sïi ¿ônvention du 27 janvier 182g avec les gérans ; mais il en résulte,
suivant lui, qu’on devait prendre, indistinctement, tout ce qui
serait fabriqué ; et que le type de Dumont, du noir qui n’exédera pas la toile n° 100 , n’a jamais été sa règle avec la
Compagnie.
La Compagnie répond :
Que les actes sont formels; qu’ils ont été tous acceptés et
exécutés par Mossier pendant long-temps, et qu’il n’a plus
rien à demander à la Compagnie.
Nous avons montré ci-dessus, pages
et suivantes» tous
les faits d’exécution; il nous reste à démontrer, nettement, le
but dans lequel nous entendons les invoquer ; à en faire l’ap
plication à ce que nous venons de dire ; éprouver, en Un mot,
que Dumont et Derosne, étant obligés, par leur traité du
8 septem bre, à se substituer à la Compagnie de M enât, à
l’égard de Mossier, Mossier est également obligé à rèm plir,
envers Dumont et Derosne, toutes les conditions stipulées
entre eux et la Compagnie.
Il n’y aurait pas le moindre d o u te à cela, et personne ne
pourrait élever la plus petite difficulté, si on était bien con
vaincu que le traité du 7 avril, avec Mossier , est entière
ment conforme à la convention faite avec D um ont, le i er m a i,
et au bail définitif du 8 septembre suivant. O r, nous allons le
prouver.
L ’art. i er du traité 7 du avril, entre les gérans, d’une part ;
Mossier et Daubrée, de l’autre , porte nettement que les en
trepreneurs fourniront :
Moyennant 9 fr. o cent., du noir propre au raffinage;
Moyennant 20 f r . ,
du noir propre aux couleurs.
Ce noir devait être vérifié, essayé, et conforme aux échan
tillons cachetés, déposés entre les mains des gérans.
Qui avait confectionné ces échantillons ? Sans nul doute , les
entrepreneurs.
45
5
�Qui les avait cachetés et déposés entre les mains des gérans ?
Eux , sans doute ; eux seuls, car eux seuls pouvaient les con
fectionner; eux seuls avaient droit et intérêt de le faire.
Jamais on n’a prétendu que cet échantillon eût été dénaturé,
et il ne pouvait pas l’être sans le consentement des entrepre
neurs, à moins qu’il ne le fût frauduleusement. O r, c’est une
accusation qu’on n’a jamais hasardée.
Trois semaines étaient à peine écoulées, que les gérans ,
à qui il ne suffisait pas de payer le noir, et qui devaient
aussi le faire écouler, passèrent avec Dumont le traité du i eI
mai (i).
'
Par l’art. i M, ils s’engagent à lui livrer, jusqu’au i e,septembre
tous les noirs provenant de lafabrication, c’est-à-dire, tous ceux
qu’ils devaient recevoir de Mossier , suivant le traité du
7 avril.
'
A partir du i" septembre, ils s’engagent à lui livrer ,ooo ki
logrammes par mois.
Ces conventions étaient tout à fait étrangères à M ossier, et
il est évident que la fixation des quantités, au i" septembre
seulement, provenaient de ce que la fabrication n’étant pas
encore en parfaite activité, Dumont devait se contenter, jusques-là , de ce qu’on pourrait faire.
Tout serait hors de contestation, s’il n’y avait que cela1;
mais le traité s’explique davantage.
Dumont était l’inventeur d’un procédé spécial applicable au
noir en grain , d’une certaine grosseur, et il stipule que sur
les
,ooo kilogrammes, o,ooo, ne devront pas excéder la
grosseur de la toile , n°3o, ni dépasser, pour la finesse, la toile
n° 100. Puis, il applique les ,000 kilogrammes restans, au
noir dit fin à raffiner, qu’il s’oblige de prendre, pourvu
qu’il soit parfaitement purgé de la poussière impalpable ,
35
35
3
5
( 1) Vuir cl-dcssui, page 3 o.
ÎO.
�*
.
( 7 ?’J
propre à la décoloration des sirops, et conforme aux'échan
tillons déposés.
Avanl de rechercher si Mossier a accepté ces conditions pour
lui même, reconnaissons qu’il est impossible qu’elles aient
été faites sans lui ; car les gérans traitaient pour faire écouler
les noirs qu’ils devaient prendre. C ’était là toute leur spécula
tion , et on ne concevrait pas qu’ils se fussent obligés envers
les acheteurs, autrement que les entrepreneurs ne s’étaient
obligés vis-à-vis eux.
D'ailleurs, Daubrée était le seul fabricant qui connût le pro
cédé du sieur Dumont, et il ne pouvait pas s ’y tromper.
Il est vrai q u ’au traité du 1" mai on remarque deux sortes
de noir, le noir en grain , dont la dimension était déterminée;
et le noir, ditfin , q u i, devant être purgé de la poussière impal
pable , était encore en grain, mais plus petit, comme qui
dirait de la poudre à canon, d’un côté , et de la poudre de
chasse, de l’autre.
Mais ces deux noirs devaient être conformes à des échan
tillons déposés.
L ’ont-ils été ? Qu’on fournisse du noir qui y soit conforme.
Un d ’eux ne l ’est-il pas? Que le sieur Mossier ne s’en prenne
qu’à lui-mêine ; car , le 7 a vril, comme le 1" m ai, on ne doit
recevoir que du noir conforme à l’échantillon.
Enfin, offre-t-on des noirs purgés de la poussière impalpable ?
Non. C ’est la poussière elle-même, cette poussière qu’on vou
lait rendre propre aux couleurs, pour lesquelles il la faut impal
pable, et qu’on offre pour raffiner, parce qu’on ne peut pas y
réussir.
Si cela pouvait être , si la Compagnie était obligée à re
cevoir la totalité des matières fabriquées , savoir : Go pour
cent de noir en grain , 4o pour cent de noir fin, c’est-à-dire ,
cent pour cent, cette matière aurait, pour le fabricant , le
rare privilège de ne laisser aucun rebut ni déchet ; et on
se demanderait pourquoi et dans quel intérêt la Compagnie
�77
C
)
1
a inséré dans son traité toutes ces sottises d’échantillons,
d’essais, de vérifications, qui dégénéraient en ridicule?
- Allons plus loin :
L’acte du i er mai constate aussi le dépôt d’un échantillon.
C ’est un fait certain, sur lequel jamais il ne s’est élevé la
moindre contestation. Or„ de deux choses l’une :
v> Ou cet échantillon était celui-là même quiavait été déposé, le
7 avril, et alors les entrepreneurs doivent livrer, et Duinont
et Derosne doivent recevoir le noir qui y est conforme.
Ou il a été changé, et il n’a pu l’être qu’avec la participa
tion de Mossier et Daubrée, et il les engage encore à le suivre
pour la fabrication.
E t, dans l’un et l’autre cas, s’ils n’ont pas déposé le second
échantillon du noir dit fin , ils n e peuvent forcer à recevoir du
noir qui n’a point de matrice.
Allons plus loin encore.
Le
août, les gérans demandent à Mossier et Daubrée,
80,000 kilogrammes par mois; et ils n’omettent pas de dire que
ce noir doit être propre à la décoloration des sucres; qu’il ne
devra excéder, ni la ioile n° o , ni celle n° ioo, c'est-à-dire ,
conforme à Féchantillon déposé avec M. Dumont, dont vous
avez connaissance; ils ne laissent donc rien ignorer. II y a plus,1
ils ajoutent qu’ils font cette demande, conformément au traité
du 7 avril. Si elle s ’en écartait, c’était bien le cas de s’en
plaindre. Si le noir que Mossier et Daubrée devaient fournir;
conformément au traité du 7 avril n’était pas celui qui était
fixé entre les toiles n° o et n° 100, c’était bien le cas de le
dire et de se récrier ; si , enfin , l’échantillon, déposé avec
Dumont, n’était pas celui du 7 a v r i l , s’il ne devait pas faire la rè
gle, s’il n’était pas vrai que Mossier en eût connaissance, il de
venait nécessaire de réclamer; ou bien, il faut le dire, il
reconnaissait que les conventions faites avec Dumont étaient,
en tout, conformes aux obligations contractées par lui-même;
et, alors, il fallait les exécuter.
3
3
3
�V-"
Que dil Mossier, sep are de Daubrée sans la participation
des gérans, comme l’a écrit Daubrée luirmême ?
Il garde trois mois le silence; puis, sur une lettre de rap
pel, il répond le 12 octobre :
Je suis en mesure de fournir et même de dépasser la quantité
de noir qui m'est demandée, pourvu ,que la Compagnie..... me
inctle en possession d’un hangard.... C'est le seul obstacle à
l'exécution actuelle de votre demande. Il reconnaît donc que
l’échantillon déposé avec Dumont était le sien , et qu’il était
obligé de livrer du noir conformé à cet échantillon. Or, cela
nous suffit.
Remarquons que la demande n’était pas faite pour un jour,
pour un mois , mais potjr tout l’avenir, jusqu’à révocation ou
nouvel ordrç\ 80,000 kilogrammes par mois, suivant la con
vention faite avec Dum ont! Or., pas la moindre réclamation
sur les ,ooo kilogrammes de noir fin à prendre contre o,000
de noir en grain, ce qui aurait fait près de 12,000 kilogrammes
par mojs contre 80,000 kilogrammes. Pourquoi ? Parce que
Mossier n’en avait pas déposé d’échantillon ; que ce noir ,
cpmmo nous l’avons dit et prouvé , n’était pas propre à la
décoloration, et qu’à supposer même que Dumont voulût
en recevoir de bonne volonté, Mossier n’avait pas le droit
de l’y contraindre.
Et cependant, q u ’arriv<?~t-il-? Des livraisons considérables
s.çnt faites, dirccteinent de Mossier à Dumont et Derosne, sans
que les gérans y soient appelés. Les comptes sont arrêtés , le
prix des noirs payés sans leur participation ; e t , cependant ,
ç’es.t le $ieur Blanc qui paye, non sous la raison sociale P. Blane
cl Gqillaunion, mais sous la raison de banque Bonfils,P. Blanc
et Fils, Or,cette distinction de qualités, est précieuse; elle est
faite, d’une part, par Dumont et Derosne; et, en même-temps,
par Daubrée , devenu leur agçnt, d’entreprcnpur qu’il était ;
ut, enfin 1 par ÎNIossier > qui exécute avec ces nouveaux pro
priétaires du privilège, les cugogemens contractés par lui avec
5
3
�Í7&)
Itï Corripàgrtié,' l'è 7 avril, et pair la Compagnie dvec Dumont,
lés i " mai et 8 Septembre. Oh peuf së repôrtër aux pagës 4
et suivantes, O11 nous avons ànalisé ces faits d’èxéculioti.
Et ces faits Sont d’autant plus expressifs * d’autant plus forbièls -, qu’ils sont tous là conséquence de l’offre que Dürnont
hvàit faitë à MóSsier cTeácdcuter le traité du 7 avril, et de i’avis
q'U’il lui avdit donné de son propre traité.
Les faits qui ont suivi portëht plus lbiri énCdré Ià: démons
tration. Si notiS ouvrons un compte coiirant, produit au pro
cès et arrêté pour solde, à la dale du i riiarS i$ o, nous y
lisons au prëmiër article :
í<Pour 28,217 kilogrammes de noir de tôiifé espèce , foUr-i
iiis depuis le 2 mai jusqu'à la mise en possession de M M . D e
rosne et Diimont. »
D onc, cette mise en possession , qui a été constatée par un
recoleirtertt d'inventaire et des actes authentiques , a été un
point de séparation adopté quant aux qualités et aux droits des
parties.
Donc, cette séparation, la substitution de Dumont et Derosne
a été acceptée par Mossier ; et quand il n’y aurait pas eu sépa
ration complète ¿ quand la Compagnie n’aurait pas été écartée
par Dumont et Derosne, qui pourtant, comme propriétaires du
privilège, devaient se substituer, Mossier n’aurait pas moins été
tenu d’exécuter, a l’égard de tous , la convention du 1" mai *
qui ne s’écartait pas de celle du 7 a v ril, qu’il avait d’aillcurà
formellement acceptée; et la Compagnie y restant en causé ,
aurait le droit de l ’y contraindre.
Enfin, si on jette un regard sur le trailé qu’il a passé avec
Dumont et Derosne, le 24 janvier i i , on s’étonne de tant
d’insistance, soit sur les faits, soit sur Ici droit.
Est-ce que Mossier n’y constate pas ouvertement le droit
qu’il avait, p a r la substitution de Dumont et Dèrosnë, de rom
pre toute relation avec la Compagnie? de jeter loin de lu i, de'
concert avec les substitués, le traité qu’ils avaient fait avec le¿
5
5
83
3
�( 8o )
gérans le 8 septembre? de faire avec eux des conventions nou
velles? Est-ce qu’il n’avait pas, jusque-là, exécuté, de fait, ce
dont il constatait le droit par cet acte ignoré de la Compagnie?
Est-ce qu’il n’est pas évident, par cela s e u l, que l’échantillon
déposé, soit le 7 avril, soit le 1" mai 182g, est constamment
celui qui l’est encore aujourd’hui, et qui a été continuellement
le type des livraisons antérieures? L ’action du sieur Mossier,
si elle se trouvait fondée, ne peut donc être supportée que par
Dumont et Derosne, qui avaient promis de se substituer?
Cela paraît fort clair.
M a is, dit-on , ce n’est ni de cet échantillon, ni du noir en
grain qu’il s’agit; c’est du noir fin, que Derosne et Dumont re
fusent, précisément parce qu’il n’y avait pas d’échantillon , en
se fondant sur la déclaration donnée par Guillaumon, le 18 dé
cembre. ;
Très-bien : que Dùmont et Derosne aient raison , nous ne le
contestons p a s, mais il faut prouver que la Compagnie , en ce
cas, est obligée.
Elle aussi répondra : précisément parce qu’il n’y avait pas
d’échantillon, je ne suis pas obligée ; car cela seul est un
indice que M ossier,'qui devait , avant tout, le fabriquer,
n ’a pas pu obtenir du noir fin propre à la décoloration ; il n’a
pas pu faire la matrice”, et , par conséquent , ne peut pas
exiger qu’on réçoivc du noir qui n’a pas d ’étalon, et q u ’on ne
peut pas comparer (quoique la condition fut expresse), avec
un échantillon qui n ’existe pas.
On conçoit très-bien que si, avant le traité du 8 novembre,
il avait existé un échantillon du noir fin , cela pourrait servir
de motif pour forcer la Compagnie à le recevoir, sauf, cepen
dant , la vérification et l’essai, qui lui sont toujours réservés,
afin'de'savoir s’il est propre à raffiner , comme le portait le
traité du 7 avril; et alors, la déclaration'dc Guillaumon de
viendrait'utile, à Dumont et Derosne; ce serait leur b o u c l i e r
pour se défendre; mais que signifie-t-elle, dès qu’il n’y a pas
�.‘
c «* )
plus d’échantillon pour la Compagnie P. Blanc et Guillaumont, que pour la Compagnie Ch. Derosne et Dumont ? dès
que la déclaration ne fait que reconnaître un fait vrai pour
tout le monde , et dont les conséquences profitent à tout le
monde , puisqu’elles sont écrites dans le traité du 7 a v ril,
aussi bien que dans celui du 1" mai? Il est donc évident, sous
ce rapport, que la condition delà Compagnie est et doit être la
même que celle des sieurs Derosne et Dumont ; ou, pour mieux
dire, que le procès, si réellement on peut y voir une ques
tion, ne peut exister qu’entre Mossier et eux.
Voilà le résultat évident des traités passés entre toutes les
parties ; e t , m êm e, nous ne craignons pas de le d ire , de l’exé
cution qu’ils ont reçue. Le sieur Mossier ne justifie donc pas
sa demande avec les actes.
Il veut la justifier par les faits. On a toujours reçu, dit-il,
d’abord, les gérans ( et le jugement arbitral les y condamne };
ensuite, Dumont et Derosne ont continué de recevoir.
La réponse sera simple.
Si le fait était v r a i, l’encombrement, prétendu immense,
dont on se plain t, n’existerait pas.
En ce qui concerne la réception par les gérans, antérieure
ment au jugement arbitral, nous avons démontré ci-dessus,
page 37 et suivantes, que ce précédent n’existait pas, et que
quand ils auraient fait quelques réceptions partielles , elles se
raient sans conséquence, puisque les envois avaient prouvé
qu’ils n’étaient pas conformes au traité fait avec M ossier, et
qu’ils avaient occasionné à la Compagnie des frais énormes
en pure perte.
Quant au jugement arbitral, nous avons encore démontré ,
page 40 et suivantes, qu’il était sans influence sur le procès
actuel.
En ce qui concerne les réceptions faites par Dumont et De
rosne, s i e l l e s étaient vraies, et qu’elles dussent établir un
droit pour Mossier, ce serait à eux à en supporter les effets.
U
�{ *2 )
■
Ils ont reçu partiellement, à ce qu’il paraît, mais sansla par
ticipation de la Compagnie , hors la présence de laquelle a été
exécuté le traité du septembre.
Us auraient reçu bénévolement avant le 24 janvier 1 17
car leur traité ne les y obligeait pas , à défaut d’échantillon.
S i , d’ailleurs, ces noirs étaient propres à leur industrie , si
ceux qu’on offre le s o n t, ils doivent les recevoir, si Mossier a
le droit d’exiger qu’on les prenne.
S’ils n’y sont pas propres, Mossier ne peut pas obliger, ni
eux , ni la Compagnie, à les prendre, et ils ont eu droit de
cesser la réception le jour qu’il leur est devenu impossible
de les écouler utilement pour eux. O r, cette impossibilité,
la complète inutilité de ces noirs, est reconnue par Mossier
lui-m êm e, au traité du 24 janvier i i.
Voilà toutes les conséquences que pourrait avoir le fait de
réception. Jamais il ne pourrait se refouler contre la Compa
gnie.
En présence de ces faits, de ces conséquences, si inévitables,
le sieur Mossier appelle à son secours les moyens de consi
dération. Il se présente comme une victime; l u i , père de fa
mille , contre une Compagnie, plus riche et plus puissante,
et beaucoup plus capable de supporter une perte de cette
nature.
Celte position ne changerait, ni le fait, ni le d r o it, ni leurs
conséquences inévitables.
M. Mossier n’est pas seulement un individu , un père de
famille, il est membre de cette Compagnie ; il y a p lu s, il est,
vis-à-vis elle, ¿’entrepreneur de la fabrication, obligé, à ses ris
ques et périls, défaire du noir parfaitement propre aux usages
déterminés par écrit.
Il a fait du noir bon, on l’a reçu et payé.
Il a fait des rebuts , chose inévitable, sauf la quantité, on
n’en veut pas.
Qui a tort ou raison?
8
83
83
�y
..................................................( « 3 ‘ )
Il pouvait faire des bénéfices considérables, s’il eut bien fa
briqué, s’il eût suivi les méthodes et les conseils qu’on lui
avait donnés par écrit ; il ne l’a pas voulu.
Il n’a voulu écouter personne.
Il a chassé tous ceux qui y apportaient leur expérience.
Il a engagé la Compagnie dans des frais considérables , qui
ont été en pure perte.
II a abusé de la confiance aveugle que les gérans avaient en
l u i , et les a exposés aux reproches des actionnaires , pour s’en
être trop rapporté à son expérience , qu’il faisait sonner si
haut.
Enfin, il a paralysé , par son incapacité et son incurie, une
entreprise qu’on croyait sûre, et dont les résultats pouvaient
être immenses. Que veut-il donc à la Compagnie, lorsqu’elle
y perd 200,000 fr. et plus? Et qu’y perd-il, si ce n’est le bé
néfice de ses spéculations personnelles?
Au surplus, les faits avec lesquels il veut faire cette illusion,
ne sont pas vrais.
- Dans ses sommations du mois de mars , et son exploit de
demande , il reconnaît que Derosnc et Dumont n’ont refusé
de recevoir que depuis quelques jours; et il avait réglé, avec
eux , ses comptes de février pour solde et sans réserve.
Il dit avoir cessé la fabrication , et il l’a continuée ; les états
de la maison Derosne le constatent.
Depuis le mois de mars, qu’a commencé le procès , et où
Mossier annonçait qu’il suspendrait la fabrication , à jour fixe,
les états de réception constatent que jusques et compris le
kil°g*
o juin , il a été liv ré , de noir en grain................ 97»
Et pour le même temps, et le mois de juillet,
Dumont et Derosne ont reçu, en noir fin. . . .77,481
L ’envoi de ces livraisons a été fait par Thomas, le ig no
vembre i i.
Il
nous importe fortpeu que Dumont et Derosne aient reçu
des noirs fins dans cette proportion ; c’est bien leur affaire, et
11.
4-77
3
83
�' 84 )
nous ne répéterons pas ce que nous avons dit là-dessus; mais
nous ajouterons qu’ils les ont reçus, en vertu du traité du
24 janvier, qui les autorisait à les prendre, sans prix, ¿'ils
ponçaient parvenir à les utiliser, ce qu’on reconnaissait à peu
près impossible.
La fabrication a cessé, il est vrai, au mois de juillet dernier.
Mais pourquoi ? Une lettre de Charles Derosne et Dumont va
nous l’apprendre.
P a r is , a5 février ï8 5 a .
• »! . I
MM. Blanc et Guillaumon aîné.
*
« Je suis honoré de votre lettre du 19 courant, par laquelle
vous d é s i r e z connaître quels sont les motifs qui nous ont fait
suspendre l’exploitation de Menât. Je vous dirai, Monsieur»
que c’est uniquement la mauvaise confection des noirs fabri
qués par M. Mossier, qui nous a mis dans l’obligation de re
noncer à son emploi, ne pouvant plus tenir aux reproches
que nous recevions journellement des consommateurs ; nous
nous sommes trouvés forcés de prendre ce parti, pour ne pas
perdre toute notre clientelle. Je suis d’accord avec vous,
Monsieur; le schiste est un excellent décolorant, et bien su
périeur au noir animal ; mais pour qu’il ait toute sa propriété,
il faut qu’il ait subi toutes les préparations , avec soin, conve
nablement; chose que M. Mossier n’a jamais faite, et dont je
le crois incapable, puisque, malgré toutes les réclamations
que nous n’avons cessé de lui faire, il ne nous a jamais envoyé
que des produits mal fabriqués sous tous les rapports.
» Nous voyons, comme vous, avec peine, les mines se dété
riorer, faute d être en activité; nous désirons, plus que per
sonne, un changement dans cet état de choses. M . Derosne,
�(S M
qui se propose de faire un voyage à Clermont, très-inccssamm en t, doit faire des tentatives pour y parvenir. »
» J ’ai l’honneur, etc.
J. D umont.
Ce résultat est Celui qu’on avait obtenu à Lyon , Marseille,
Bordeaux, dans le principe.Nous l’avons indiqué ci-dessus ,
page 16; et nous pouvons ajouter ce qui résulté de deux
lettres de Londres, des i octobre et 19 décembre i o.
On y qualifie cette entreprise : h a malheureuse affaire du
noir minéral.
Dans la première , on y demande d'être débarrassé de cette
triste minérale...... Si on n’a pas reçu réponse, d’ici au 9 no
vembre , on jettera au fumier cet article, qui est, vraiment,
pire que rien.
Dans la seconde , on annonce que tous les consommateurs ,
ayant déclaré que l'article ne vaut absolument rien, on le jette
en ce moment au fum ier, parce qu’il encombre les magasins.
Voilà un échantillon des pertes énormes de la Compagnie.
Voilà la matière que te sieur Mossier veut aujourd’hui donner
à 9 fr. o c», après avoir inutilement essayé de la faire prendre
à 20 fr.
En vérité, on s’étonne de tant d’obstination, de tant d’aveu
glement , et il ne reste qu’une chose à dire : c’est que la Com
pagnie attend la justice , et qu’elle croit avoir été juste, pour
le moins, en se résignant à souffrir, sans réclamation, les
pertes énormes qu’elle a éprouvées, par la faute des entrepre
neurs; plus spécialement par la retraite du sieur Daubrée, la
négligence et l’incapacité du sieur Mossier.
Nous ne discuterons pas plus amplement les motifs du juge
ment dont est appel, ils sont suffisamment refutes par la force
des faits et des actes produits ; mais nous ferons ressortir cette
singularité des premiers juges, qui, entre les deux entrepre
neurs, Daubrée et Mossier , ( tous deux ne faisant qu’un pour
4
5
83
�( 86 )
5
la Compagnie, ) condamnent à oo fr. de dommages-intérêts,
celui dont la faute consiste à avoir abandonné la fabrication ,
et accorde, au contraire, 2,000 fr. d’indemnité à celui qui a
ruiné l’entreprise. E n core, si on n’avait pas motivé cette in
demnité sur la suspension de la fabrication , fait complète
ment inexact, puisqu’elle a continué pendant et après le juge
ment, et n’a été suspendue, plus tard, que par la faute de
Mossier, comme le prouvent toutes les circonstances du pro->
ces, et, spécialement la lettre de Ch, Derosne et Dumont, que
nous venons de porter.
Nous terminons ces observations que nous eussions voulu
rendre plus courtes. Nous avons tâché de bien faire comprendre
les faits et leurs conséquences; c’était l’essentiel pour la Com
pagnie; c’était aussi'l’essentiel pour les gérans, que le sieur
Mossier accuse de lui avoir fait préjudice, pendant que plu
sieurs actionnaires leur reprochent de lui avoir donné trop de
confiance, et de l’avoir trop favorisé. Leur consolation est de
penser q u ’ ils sont sans reproches , et que le simple exposé des
faits suffit pour le démontrer à tous les yeux.
?
P. B LAN C et G U IL L A U M O N , Gérans.
M e d e V ISSAC , Avocat.
M. B A Y L E , Avoué.
RIOM IMPRIMERIE DE THIBAUD AVRIL 1852
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mossier. 1832]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Bayle
Subject
The topic of the resource
mines
exploitation du sol
schiste
sociétés par actions
noir animal
commerce
industrie
moulins
bail d'entreprises
procédés de fabrication
Daubrée (Edouard)
voyageurs de commerce
exportations
tribunal de commerce
arbitrages
experts
dissolution de sociétés
brevets
chimie
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour la compagnie de Menat, en la personne des gérans, appelans et intimé ; contre les sieurs Mossier et Daubrêe, intimés et appelans ; et encore contre les sieurs Dumont et Derosne, intimés.
Annotations manuscrites. « 19 juin 1832, 3éme chambre civile, ou chambre correctionnelle...1er octobre 1835, arrêt de rejet de la cour de cassation. Sirey, 1836-1-65 ».
Table Godemel : Cession : 7. les cédataires ou subrogés aux droits d’une compagnie de mines, peuvent-ils soutenir, que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession ou transport à l’entrepreneur, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à cause des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement le traité relatif à l’exploitation, avec l’entrepreneur, ils avaient en eux même la faculté de faire cette signification, s’ils la jugeait utile ? Qualité : 7. un individu, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la compagnie, ayant comparu à un acte de subrogation fait au nom de la compagnie, qu’il a signé, sans déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, et n’avoir en rien fait novation à ses droits, résultant de son autre qualité, celle d’entrepreneur ? Mines : 4. actionnaire de la compagnie des mines de Menat exploitant une fabrique de noirs de deux espèces, l’une dite noir gros grain, et l’autre dite noir fin, le sieur mossier, qui avait traité avec elle le 7 avril 1829 pour la fabrication de ces deux espèces de noir, a-t-il pu assigner les gérants pour les faire condamner, avec dommages intérêts, à retirer tous les noirs fabriqués ou, n’a-t-il eu d’action directe que contre les sieurs Dumont et Derosne, subrogés aux droits de la Compagnie par traité du 8 septembre, même année ?
Mossier, réunissant en sa personne une double qualité, celle d’actionnaire et celle d’entrepreneur de la Compagnie, ayant comparu à l’acte de subrogation du 8 septembre, qu’il a signé, sans toutefois déclarer en quelle qualité il entendait contracter, peut-il être considéré comme n’ayant agi qu’en une seule de ses qualités, celle d’actionnaire, et n’avoir en rien fait novation à ses droits résultants de son autre qualité, celle d’entrepreneur ?
Le noir en magasin a-t-il pu être refusé par la Compagnie, ou par ses cédataires ? Le refus de renvoi a-t-il causé préjudice à l’entrepreneur Mossier et donné lieu à des dommages intérêts ? Contre qui, des gérants ou de la Compagnie, ou des subrogés, ces dommages intérêts doivent-ils être prononcés ?
Les sieurs Dumont et Derosne devenus cédataires ou subrogés aux droits de la Compagnie par l’effet du traité du 8 7bre 1829, peuvent-ils soutenir que leurs cédants, faute d’avoir notifié la cession à l’entrepreneur, Mossier, et de l’avoir fait ratifier par lui, sont passibles de dommages intérêts envers eux, à raison des retards dommageables que ce défaut de notification aurait pu occasionner ; lorsque connaissant parfaitement l’acte du 7 avril précédent, ils avaient eu eux même la faculté de faire cette notification, s’ils la jugeaient utile ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1832
1825-1832
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
86 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2715
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53553/BCU_Factums_G2716.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Menat (63223)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bail
bail d'entreprises
brevets
chimie
commerce
Daubrée (Edouard)
dissolution de sociétés
experts
exploitation du sol
exportations
industrie
Mines
moulins
noir animal
procédés de fabrication
schiste
sociétés par actions
tribunal de commerce
voyageurs de commerce
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53961/BCU_Factums_B0122.pdf
8288a613b0efed88b7aeb3540887a05f
PDF Text
Text
J u r isdiction
C onfulairç.
POUR G e r v a
& Demandeur.
i s
SAURET,
Défendeur
C O N T R E G i l b e r t S É V E en qualité
de M ari de M a r t in e V I G I E R Demandeur
,
.
E T encore contre le fieur F E U L H A N T ,
Défendeur & Demandeur, & autres Défendeurs.
Feulhant élève dans cette affaire la c o n t e n
L Etionfieurla plus
déplacée ; elle fe réduit à la queftion de
favoir fi un créancier doit imputer fur fa créance d’autres
objets que ceux que le débiteur prouve que ce créancier a
reçus. Le fieur Feulhant devroit prouver que Sauret a reçu
au-delà de dix-huit voyes de charbon qu’il lui devoit : non
feulement il n’a pas fait cette preuve , mais encore Sauret
prouve lui-même qu il n’a reçu que douze voyes d’un co té,
& quatre voyes & demie de l’autre ; en forte qu’il lui eft refté
du une voye & demie , dont il a formé demande. Com
ment , dans de pareilles circonftances , le fieur Feulhant
A
�« r
a
peut - ïl foutenir que Sauret a reçu vingt-quatre voyes
demie ? P e u t - il raifonnablement prétendre qu’une fimple allégation de fa parc doive l’emporter f non feule
ment fur celle de fon créancier } mais encore fur deux
déclarations , l’une du fieur Girard , l’autre de fa
femme , qui s’élèven t, avec la plus grande force , en faveur
de Sauret ; déclarations qui font au furplus furabondant e s , puifque Sauret n'avoit rien à prouver , & que Îa
déclaration ne pouvoir être combattue que par une preu
ve que le fieur Feulhant nJa point faite.
F A I T S .
E n l’année 1 7 8 ; , le fieur Feulhant & Sauret firent un
troc d’une jument appartenante à Sauret, contre dix-huic
voyes de charbon, que le fieur Feulhant devoit faire con
duire au Pont-du-Château , où elles devoient être délivrée*
à Sauret. Lors du marché ce dernier reçut des arrhes.
■ Il nJeft pas inutile de remarquer que le fieur Feulhant a
toujours montré la plus mauvaife volonté , lorfqu’il a été
queftion d’exécuter ce marché : d’abord il manifefta
qu’il fe répentoit de l’avoir fait. Sauret eut l’honnê
teté de lui rendre fa liberté , en annullant la convention;
il remit les arrhes. Quelques jours après le fieur Feulhant
revint fur fes pas : il adrefla une lettre à Sauret , le 20
février > 7 8 ? , par laquelle il annonça l’intention où il étoit
d’exécuter le marché ; il y dit qu’il feroit conduire ail
plutôt au Pont- du - Château les dix-huit voyes de char
bon. Alors Sauret donna la jument au domeftique du fieur
Feulhant , qui étoit porteur de la lettre.
Il faut obferver que Sauret , qui ^ n’a point Tufage de
lire & d écrire , ne fe fit donner qu’une connoiflance trèsfuperficielle de la lettre , dans l'inftant où elle lui fut remife. Ce ne fut que long - temps après que l’on fit re
marquer à Sauret que le fieur Feulhant y annonçoit que
les frais de décharge des dix - huit voyes , au Pont - d u -
�Château, feroientfupportés par Sauret. Il eft pourtant vrai quô
lors du marché , cela n’avoit été ni d it, ni entendu ainfi.
Cependant le iieur Feulhant étoit toujours en retard de
faire faire à Sau ret, au Pont - du - Château , la délivrance
des dix - huit voyes de charbon : il fallut que Sauret eûc
recours aux voies judiciaires. E n cet é ta t, ôc un jour que
le fieur Feulhant rencontra Sauret au Pont - du - Château ,
il donna ordre au fieur Vigier , beau - pere du fieur Séve ,
de donner du charbon à Sauret ; il en fit fon affaire, en
difant que ce qui lui feroit délivré par V ig ie r , feroit im
puté fur la quantité qu’il devoit lu i-m êm e à Sauret. E n
conféquence de cet o rd re, Sauret fit prendre chez le fieur
V igier jufques & à concurrence de quatre v o y e s, ou qua
tre voyes & demie de charbon. L a vérité eft cependant que
Sauret ne croyoit en avoir fait tranfporter que quatre
voyes.
Sauret demeuroit créancier de quatorze v o y e s , ou au
moins de treize & demie. Sur la fin du mois de feptembre
1 7 8 5 ', 0« environ, il demanda au fieur Girard, aubergifte
au Pont - du - Château , chez lequel le fieur Feulhant loge ,
& qui eft fon correfpondant, fi le fieur Feulhant ne lui
avoit pas adreiTi du charbon qui devoit être remis à lui
Sauret. Girard lui répondit qu’il avoir reçu , en plufieurs
fo is , douze voyes de charbon qui devoient lui être déli
vrées. Sauret le fit retirer & tranfporter à Riom. Ce char
bon fut pris fur l’indication de G irard , de fon confentement , & toujours en fa prdfence , ou de perfonnes
de fa maifon. D ’après le nombre de voitures qui en
furent faites en cette Ville , à différentes époques , &
qu'il étoit bien aifé de marquer , Sauret s’aflura , & fut cer
tain à l ’inftant de la ceffation des tranfports , qu’il n’avoit
reçu que douze voyes : en forte q u e , diftra£lion faite des
quatre voyes ou quatre voyes & demie qu’il avoit fait re
tirer chez V ig ie r , il lui étoit refté du par le fieur Feulhant
deux voyes , ou au moins une & demie.
En cet é ta t, le fieur Séve y mari de la demoifelle Vigier 4
A a
�*
croynnt que ta quantité de charbon qui avoit été délivrés
par le (leur Vigier à Sauret , étoit due par celui - ci , le
iît afllgner pour le paiement de quatre voyes & demie.
D ’Abord Sauret crut que le fieur Séve réclamoit le paie
ment , non des quatre voyes & demie dont il s’agit actuel
lement ; mais bien de quatre voyes, qui , long-temps auîaravant lui avoient été vendues par le fieur Vigier & par
e nommé M a c é , fon aiTocié. La mdprife ¿toit d’autant plus
facile, que Sauret croyoit alors qu en 1 7 8 j le fieur Vigier
ne lui avoit délivré que quatre voyes , pour le compte du
iieur Feulhand , & non quatre voyes & demie. En conféquence de cette m éprife, Sauret dit qu’il avoit payé ce
qu’on lui demandoit 9 foit à Vigier Toit à Macé , & il ex
pliqua comment.
Dans la fuite, le fieur Séve ayant fait entendre qu’il ré
clamoit le paiement de la quantité de quatre voyes & de
mie , à laquelle il faifoit monter le charbon qui avoit été
donné à Sauret pour le compte du fieur Feulhant ; Saurec
fe défendit, en difant que cette délivrance , quoiqu’elle
lui eût été faite, concernoit le fieur Feulhant , parce que
Sauret n’avoit reçu ce charbon , qu’à compte de celui qui
lui étoit dû par le fieur Feulhant , & d’après l’ordre don
né par celui - ci au fieur Vigier.
Cette manière de fe défendre a donné lieu à la mife en
caufe du fieur Feulhant ; Sauret a formé demande inci
dente contre lui du paiement d'une voye & demie, reftante
pour fatisfaire les d ix-hu it.
L e fieur Feulhant a prétendu que Sauret avoit acheté
pour fon compte particulier les quatre voyes ôc demie
qu’il avoit reçues du fieur Vigier , que par conféquent il
devoir les payer ; qu’au lieu de dix - huit voyes de char
bon qu’il a reconnu devoir à Sauret , il en a fait pafler
vingt voyes au Pont * du - Château , à Girard ; qujl a dit
que Sauret avoit reçues. Il en a conclu qu’il ¿toi fier,éancier de Sauret de la valeur de deux voyes3 dont iia formé
•
f
demande incidente.
�,r
Sauret ayant foutenu qu’il ne lui avoit été délivré au
Pont - du - Château que douze voyes de charbon de la part
de Girard , pour le compte du fieur Feulhant j Girard & fa
fem m e ont étéouïs; ils ont enfuiteété mis en caufe; les déclara
tions de ces particuliers confirment ce qui a été avancé par
Sauret ; néanmoins par une obftination inconcevable , le
lieur Feulhant entreprend de foutenir que Sauret doit être
confidéré comme ayant reçu vingt voyes de charbon , au lieu
de douze. On démontrera aifément le ridicule de cette pré
tention.
M O Y E N S .
C ’eil un principe que , lorfqu’une créance eft reconnue *
fur-tout par un titre , le débiteur doit prouver fa libération.
Par conféquent Sauret étant devenu créancier du fieur
Feulhant de dix-huit voyes de charbon, celui-ci l’ayant recon
nu par une lettre , c’eft à lui à établir que Sauret a réelle
ment reçu cette quantité ou plus, comme il le prétend. L e
fieur Feulhant a-t-il fait cette preuve ? O r , non feulement
il ne l'a point faite, mais même on peut dire que Sauret a
iui-même fait la preuve contraire.
D ’abord il n’y a pas de difficulté fur quatre voyes & demie
que Sauret a reconnu avoir reçu du fieur Vigier , par l’or
dre du fieur Feulhant, à compte des dix-huit voyes.
Il eft vrai que le fieur Feulhant, dans un mémoire con
tenant fes moyens de défenfe , qui a été donné en commu
nication au Défenfeur de Sauret , prétend que ce n’ell point
à compte des dix-huit voyes, que ce charbon a été déli
vré ; que Sauret l’a acheté feulement fous le cautionnement
du fieur Feulhant; que par conféquent c ’eft à Sauret à le
payer.
Mais d’abord , cette aifertion peu vraifemblable en
elle-même , eft démentie par la manière dont le fait
eft raconté , au commencement du mémoire , avant qu’or»
fongeat fans doute à i’objettion qu’on a faite enfuite. Voici
�6
les termes du mémoire : le fieur Feulhant ne pouvant falrt
conduire ce. charbon, (les dix-huit voyes) parce que les eaux
étaient trop baffes , fu t ajjigné par Sauret qui obtint Sen
tence contre lui en la Jurifdiction Confulaire de cette Taille de
Riom , & la lui fit fignifier. Ce dernier, pour arrêter les pourfuites de Sauret , pria , en fa préfence , le fieur V ig ier, Mar
chand au Pont-du-Château , de vendre à Sauret , & lui déli
vrer la quantité de charbon qui lui feroit néceffaire , » ajoutant
a qu’il en répondoit » : qui ne v o it, d’après ces expreifions*
que le charbon délivré par Vigier , l ’a été par Tordre du
fieur Feulhant, à imputer fur ce qu’il devoit , pour arrêter
les poursuites de Sauret ?
D ’ailleurs , Sauret prouveroit ce qu’il a avancé à cet égard*
s’il en étoit befoin , par la déclaration de la veuve V ig ie r,
belle-mère du fieur S é v e , & par celle d’Antoine Rouillon ,
en préfence defquels le iieur Feulhant s'expliqua, lorfqu’il
donna ordre de délivrer du charbon à Sauret ; ils feront
fans doute en état de déclarer que le fieur Feulhant les de
manda non comme caution de Sauret, mais pour fon comp*
te j afin d’acquitter une dette perfonnelle.
Mais toutes les réflexions qu'on vient de faire fur cet
objet, font purement fubfidiaires; il n’y a pas de difficulté
fur ces quatre voyes & demie , dès que Sauret a offert d’en
faire raifon. Il eft indifférent pour le fieur Séve d’être
payé de ces quatre voyes & demie ou par le fieur Feulhant,
ou par Sauret.
L a principale difficulté efl: donc de favoir fi , indépen
damment de cette première quantité de charbon , Sauret t
reçu douze voyes , ou au contraire vingt voyes.
Sauret déclare, ôc offre affirmer qu’il n’a pris au Pont-du-Châ
teau , à compter delà fin de feptembre ou d’o&obre 1 7 8 ; , jufques à la N oël fuivante, que la quantité de douze voyes ; ( a )
( a ) Le fieur Feulhant a dit dans fon mémoire <jue Sauret convenoit avoir retiré
le charbon au mois d’août 1 I l n’a jamais fait cet aveu, On ne finiroit pi*
fi l’on vouloit relever toutes les inexaititudes de ce mémoire.
»
�•
*
7
aufli Gîrard , mandataire & correfpondant du fieuf
Feulhant, lui déclara qu’il n’avoit reçu que cette quantité de
douze voyes , de la part du fieur Feulhant.
Cette déclaration ne peut être détruite que par une
preuve contraire. O r , non feulement le fieur Feulhant n ’a
pas fait cette preuve, comme on le dira bientôt, mais en
core Sauret a prouvé lui-même fon aflertion.
En effet, Girard & fa femme ont déclaré qu’autant qu’ils
puiiTent fe rappeller , ils ont reçu la quantité de douze
voyes de la part du fieur Feulhant , pour être remifes à
Sauret.
^
L e fieur Feulhant croit pouvoir combattre cette preuve,
par le rapport de fon livre journal , tenu p?r fon commis ,
fur lequel il eft fait mention d’un envoi de vingt voyes , ôc
parla déclaration de ce commis.
Les réponfes à ce moyen fe préfentent en foule.
i°. Il eft impofiible , dans les principes, de foutenir que
le livre journal du fieur Feulhant doive faire foi contre Sau
ret , dans l’efpèce qui fe préfente * les livres journaux ne
font foi qu’entre marchands, entre lefquels il y a une correfpondance de commerce bien établie, comme d’ un mar
chand en gros à un marchand en détail , dont il eftlefourniifeur. La raifon en eft que la fréquence des envois & dis
marchés refpe&ifs ne permet pas d’arrêter à chaque fois des
comptes, & de retirer des billets ; que d’ailleurs la correfpondanceétablie entre ces deux marchands, fait fuppofer que
l’un a entendu fuivre la foi de l’autre. On croiroit faire in
jure aux lumières des Juges à la décifion defque’s la conteftation eft foumife, que de paroître faire des efforts pour
établir une vérité aufli certaine , en invoquant des autori
tés. Tout cela eft fi vrai, que les livres des marchands ne
font point foi conrre les bourgeois. Voyc £ Lacombe, au
mot prefeription , fe£>. %, n. =}.
On comprend donc que le fieur Feulhant ne peut exiger
qu’on ajoute une foi religieufeau livre tenu par fon commis,
dès qu’il s’agit d’un marché particulier entre lui & Sauret,
çutre lefquels il n'y a point de correfpondance.
�8
2°. L a mention écrite fur le livre, & la déclaration du com
mis, font combattues dire&ement par la déclaration de Girard
& de fa femme , mandataires & correfpondants du iieut
Feulhant.
'
Suppcfons encore, pour un moment, que la mention furie
livre, ô: la déclaration du commis duflent obtenir la préférence
fur laflertion de Girard & de fa f e m m e i l n’en réfulteroic
autre chofe, fi ce n’eft que le iieur Feulhant auroit droit de de
mander que Girard lui rendît compte de vingt voyes qu’il dit
lui avoir adreiTées, ôc qu’il lui fît raifon du reftant, diftra&ion
faite de douze voyes, reçues feulement parSauret. Mais celui-ci
ne peut jamais être tenu d’imputer que ce qu’il dit j & ce qu’il
eft prouvé qu’il a reçu.
5°. La mention écrite fur le livre journal, & la déclaration
du commis, en les fuppofant fmcères, necontiendroientpasde
preuves décifives contre Sauret. (flj.
En effet, il en réfulteroit feulement que le fieur Feulhant
a envoyé vingt voyes de Braflagec au Pont-du-Château , mais
il y a loin de-là à la preuve que ces vingt voyes foient parve
nues au Pont-du-Châtead, quelles y aient été déchargées paf
Girard, & encore plus, qu’elles aient été reçues en totalité par
Sauret. II peut fe faire que foit chemin faifant, foitau Pont-duChâteau, il y ait eu une perte ou une diftra£tion ; en un m ot,
ce qui eft décifif pour Sauret, c ’eft qu’il prouve qu’il n’a reçu
que douze voyes, & que ce fait n’eft contrarié par aucune
preuve de la part du Heur Feulhant.
4°. On peut dire qu’il ne paroît pas vraifemblable que le fieur
Feulhant., faifant un envoi pour Sauret, l’ait fait de vingt voyes
de charbon, & que Sauret eut reçu cette quantité, dès qu’il ne
lui en étoit dû que dix-huit. On ne paye pas ordinairement
( a ) On a dit plufieurs fois dans le mémoire du fieur Feulhant, que Sauret n’avoit nas défavoué l’envoi de vingt voyes de charbon ; mais \iu r c t n’a jamais avoué
ni dtfavoué que l’envoi eût été fait; il n’a pu s'expliquer fur ce qu’il ignore. Ce
mémoire contient une foule d’inexaétitudes, & il n cil pas étonnant qu’on foit par
venu à o b ten ir, en faveur du fieur Feuillant, la confulution de quelques Jurifcon*
fuit Cf.
plus
�9
plus qu’on ne doit, ni on ne prend pas ordinairement plus
qu’il n’eft dû. D ’ailleurs, le fieur Feulhant auroit-il gardé le
fiience depuis 1 7 8 7 , fi Sauret lui eût dû deux voyes , comme
il le prétend ? Il n’en a formé la demande que lorfqu’il a été
traduit en juftice.
Le fiefar Feulhant qui a fenti la force de cette obfervation ,
a dit qu’il avoir prévenu Sauret que peut-être il lui enverroit
quelque chofe déplus que ce qui lui revenoit, qu’auiTi il lui
demanda un jour le paiement de ces deux voyes, que Sauret
ne s’y refufoit pas. Il ajoute qu’ayant rappellé ces faits à Sauret,
en préfence de M M . les Juges , Sauret les contcfta fi foiblem e n t , qu’il parut les avouer.
L e fieur Feulhant eft toujours réduit malheureufement à de
fimples allégations,- lorfqu’il en fit ufage à l’audience, Sauret
lui repondit q u il ne /avoir dire que des menfonges. On ne fe
feroit jamais douté qu’une réponfe auiTi verte dût être inter
prétée comme un aveu.
Pour ne rien négliger, nous allons réfuter quelques objec
tions faites par le fieur Feulhant.
P R E M I E R E
O B J E C T I O N .
L e lieur Feulhant attaque les déclarations de Girard 6c de
fa femme, fur le fondement qu’elles ne font pas précifes, ôc
qu’elles ne préfentent que de l’incertitude.
R É P O N S E .
1 1 eft vrai que la femme Girard s’eft expliquée ainfi: quelle
ne fe rappelloit pas précifément le nombre de voyes de charbon
que le Jieur Feulhant l'avoit chargée de faire décharger, vour
être remifes à Gervais Sauret, mais quelle croit que c e fl doi^e
voyes qui ont été ainfi déchargées vour être remifes, & qui l ont
¿té effectivement. On ne c o n n o i t pas la déclaration de Girard,
mais on préfume qu’elle eft à peu-près conforme.
D e cette manière des’énoncer, il ne réfulte pasune incer
titude qui foit telle qu’elle doive faire rejeter ces déclarations.
<0n peut n’avoir pas une certitude auifi précife d’un fait paflé
�IÔ
depuis deux ou trois ans, qu’on l'auroit d'un fait beaucoup
plus récent. On croit devoir prendre la précaution de dire:
autant quon puiffe f e rappeller, qu’on ne fe rappelle pas précifément, mais quon croit cependant, &c. Cette maniéré de
s’exprimer ne va pas jufqu’au doute, elle eft le réfultat d’une
idée qui s’eft gravée depuis long-temps, & dont l’inlpreilion
eft reftée.
Mais il y a plus, il eft aifé de démontrer que les déclarations
de Girard & de fa femme font tout-à-la-fois précifes & con
vaincantes.
i° .I l s difent qu’il n’a été remis à Sauret, pour le compte du
fieur Feulhant, que douze voyes. Cela réfulte de ces termes,
& qui ont été effectivement remifes audit Sauret. Ainfi, fous ce
premier point de vue , le doute ne porteroit que fur ce qui auroit été déchargé au Pont-du-Château , & non fur ce qui auroit été reçu par Sauret.
a 0. Il n'y a plus de doute , même pour la quantité reçue au
Pont-du-Château , dès que Girard & fa femme ont fondé leurs
déclarations fur un fait eiïentiel, c’eft qu’ils ont payé 6 liv.
pour le déchargement des bateaux que le fieur Feulhant avoit
fait conduire pour Sauret. Il réfulte de là qu’il n’y a eu que
douze voyes de déchargées , parce que , comme l’ont obfervé
Girard & fa femme, les frais de déchargement font conftammentde 10 fous par voye. Ils ont encore ajouté qu'ils avoient
payé 20 fous pour frais de buvette , & cette dépenfe eft
encore proportionnelle à la quantité de douze voyes.
S E C O N D E
O B J E C T I O N .
L e fieur Feulhant eft allé plus loin ; il impute de la
mauvaife foi à Girard & à fa femme ; il dit que le livre
journal fur lequel ils ont écrit qu’ils avoient payé 6 livres
pour frais de déchargement , & 20 fous pour frais de bu
vette , n’eft point en règle ; qu’ils n’ont écrit cette men
tion qu’après coup. Que ce qui le prouve , c’eft qu’ils ont
porté le déchargement des douze voyes fous la date du 2f
août 1 7 8 ; j que cependant il eft établi par le livre du
�fieur Feulhant qu’il a été fait un envoi de douze voyes
en août , & un autre envoi de quatorze voyes au mois
de feptembre feulement ; que Girard & fa femme n’ont
pas pu écrire au mois d’août qu’ils avoient reçu des objets
qui ne leur ont été envoyés qu’au mois de feptembre.
L e fieur Feulhant ajoute que , ce qui prouve la fincérité de
ce qu’il avance , c’eft que Girard a juftifîé de la première
lettre d’envoi de fix voyes de charbon , &c qu’il refufe de
montrer la fécondé.
R É P O N S E
.
i° . L e fieur Feulhant ne comb?.t & les déclarations de
Girard & de fa femme , & leur livre journal , que _ par
celui qui a été tenu par fon commis. Mais auquel doit-oa
plutôt ajouter foi ? L e fieur Feulhant ne cherche donc à
réfoudre une difficulté que par une autre.
a 0. Il lui plaît de dire que Girard ôc fa femme ont
écrit la mention , contenue dans leur livre , après coup ,
& fur la déclaration de Sauret. Mais le fieur Feulhant
hafarde tout & ne prouve rien. Sauret laiifera à Girard
ôc à fa femme le foin de fe juftifier fur toutes ces imputa
tions ; elles font abfolumçnt indifférentes à Sauret ; on ne
ceifera de dire qu’en fuppofant que Girard & fa femme
euifent reçu vingt v o y es, il n ’en réfulteroit autre c h o fe ,
fi ce n’eft qu’ils devroient en faire raifon au fieur Feulhand ;
mais il ne s’enfuivra certainement pas que Sauret ait reçu
ces vingt voyes.
Girard & fa femme , au fecours defquels le fieur Feulhant
femble enfuite v e n ir, effrayés fans doute de la vérité de
cette obfervation, ont déclaré, dit - o n , après cou p , qu’au
furplus fi 011 jugeoit que Sauret eût reçu vingt voyes , ils
entendoient avoir l’excédent des frais de déchargement 3 eu
fus de 6 livres, à raifon de 10 fous par voye.
Mais cette tournure ne peut nuire à Sauret. Girard &
fa femme n’ont pu rien ajouter à leurs déclarations , à fon
préjudice.. D ’ailleurs , il faut faire attention qu’en fuppoB 2
�I2
Tant du doute dans les déclarations de Girard & de fa
femme , ce doute ne fauroit fe tourner en certitude de
tout ce qu’avance le fieur Feulhant ( a ). V o i c i , ce femble , comme il faudroit raifonner. L e fieur Feulhant ne rap
porte pas de preuve que Sauret ait reçu, au Pont - du - Châ
teau , vingt voyes. Sauret dit n’y avoir reçu que douze
voyes ; Girard & fa fem m e, qui avoient intérêt à ne pas
diminuer le nombre de voyes reçues par Sauret , pour ne
pas perdre les frais de déchargement qu’ils ont avancés , ont
dit tout ce qu’il étoit poffible de dire pour montrer qu’ils
étoient dans la perfuafion que Sauret n’avoit reçu que douze
voyes de charbon ; donc on ne doit pas croire qu’il en ait
reçu une plus grande quantité, & 1 affirmation qu’il offre
devient déterminante. L ’incertitude même qu’il pourroit y
avoir dans les déclarations , deviendroit une préfomption
en faveur de l’afTertion de Sauret.
T R O I S I E M E
O B J E C T I O N .
L e fieur Feulhant n’a pas craint de dire, ( toujours dans
fon mémoire , ) qu’il eft inutile , quant à lui , d’examiner
la poiïïbilité que Girard ait reçu vingt voyes , & que ce
pendant il n en ait délivré que douze à Sauret. Il foutient
que , dans ce cas même , Sauret doit perfonnellement faire
raifon au fieur Feulhant de vingt voyes ; que Girard a été
le correfpondant de Sauret ; que conféquemment c’étoit à
lui à veiller à ce que deviendroit le charbon au P o n t-d u Château i en un mot , que Sauret eft garant des faits de
Girard.
R E P O N S E .
L e fieurFeulhant,fuivant la lettre du 20 février 1 7 8 ? , a dû
'délivrer lui*même, ou faire délivrer les dix-huit voyes àSauret,
au lieu du P o n t - du - Chateau ; c eft donc le fieur Feulhanc
{ a ) C ’eit ainii que le fieur Feulhant /aifonue dans fon nu'moire»
�1?
qui a dû les faire mettre en place ; aufli Ies^ a-t-il adrefTées
à G ira rd , qui eft fon correfpondant, & q u i n'a jamais été ce
lui de Sauret ; cela réfulte de la manière dontfe font expliqués
Girard & fa femme ; ils ont dit que le fieur Feulhant les a
chargés de faire décharger les dix-huit voyes de charbon ,
pour être remifes à Gervais Sauret. Ce qui ne permet plus encore
d’en douter , c’eft que le fieur Feulhant a envoyé le charbon
direftement à G irard, c’eft à lui qu’il a adreifé une premiers
lettre d’envoi, qu’il dit être rapportée par G irard , & encore
une fécondé lettre qu’il prétend que Girard refufe de faire paroître. Sauret n’a jamais été prévenu de ces envois par des
lettres d’avis, ni autrement; il ne pouvoir donc veiller ni au
déchargement , ni à la confervation du charbon, avant qu’il
lui eût été préfenté.
Au furplus, fuivant le fyftême du fieur Feulhant, tout le
poids de la conteftation devroit retomber fur Girard & n o n fur
Sauret.
Q U A T R I E M E
O B J E C T I O N ,
L e fieur Feulhant dit que Girard a reçu au Pont-du - Châ
teau le charbon qu’il y avoit en voyé, fans en favoir la quantité ;
attendu qu’il nJeft point d’ufage de contremefurer le charbon
au Pont-du-Château. Que Girard a préfenté le tas de charbon
e n v o y é tel qu’il é to it, abftra&ion faite de fa contenue qui
lui importoit peu , que Sauret a fait enlever ce tas de charbon
fans mefurer , & que s'il contenoit vingt voyes , il a reçu
pareille quantité.
R É P O N S E ,
Cette objeftion prouve combien peu la vérité & la réflexion
iréfident à la défenfe du fieur Feulhant. A chaque page dan3
aquelle on fait cette obfervation , on y dit qu il eft d ufage
de payer aux déchargeurs 10 fous par vo y e, il étoit aifé de
faire attention qu’on ne peut payer 10 fous par v o y e ”, fans fa
voir combien il y en a. Aufli eft-il très-vrai que l’on apprend au
jufte le nombre de voyes, parle déchargement des bateaux, Leg
Î
�, 14
ouvriers fe fervent pour cela d’un vafe d’une mefure déterminée,'
& dont un certain nombre fait la voye. Audi réfulte-t-il des
déclarations de Girard & de fa femme qu’ils ont pu connoître
le nombre de voyes déchargées, & s’ils avoient payé io l i v .
pour les frais de déchargement, il n’eft guères poffible de con
cevoir pourquoi ils n’auroient demandé que 6 liv. car les déchargeurs ont été payés dans le temps, & ils ne fe font cer
tainement pas trompés à leur défavantage.
Q U A T R I E M E
O B J E C T I O N .
L e fieur Feulhant dit que l’on doit rejeter toutes les afiertions de Sauret, parce qu’il a été conftitué en mauvaife fo i,
en ce qu’il a d’abord dit avoir payé la quantité de charbon de
mandée par Séve, 6c qu’enfuite ayant été forcé de convenir
qu’il ne l’avoit pas payée, il a élevé des c.onteftations fur la
quantité. L e fieur Feulhant dit même que Sauret paroiffoic
ignorer cette quantité , & il en conclut que Sauret a toujours'
dû prendre du charbon fans mefure & fans compte.
R É P O N S E .
On a prévenu ce moyen dans le récit des faits. L e fieur
Feulhant abufe d’une méprife de la part de Sauret: il avoit
cru d’abord que Séve demandoit quatre voyes de charbon ,
anciennement vendues par Vigier & par Macé fon aflocié.
L a preuve en réfulte des moyens de défenfe écrits par fon Pro
cureur, au dos de la copie de l’exploit de Séve. Lorfqu’enfuite
Séve a annoncé qu’il réclamoit le paiement d’autres quatre
voyes que Vigier avoit délivrées en décharge du fieur F eu
lhant, Sauret a foutenu, avec raifon , qu’il ne devoit pas cette
quantité de charbon , que le fieur S éve n'avoit d’attion à cet'
égard que contre le fieur Feulhant.
Il n’eft pas exaft, de la part du fieur F eu lh an t, de dire
que Sauret ignoroit la quantité de charbon qu’il avo’ t prife
de Vigier. Il a foutenu qu’il n’avoit retiré de Vigier que
quatre voyes pour le compte du fieur Feulhant, & il lecroyoic.
�,y
- .
aînfi (a). Séve a prétendu que cette quantité étoit de quatre
voyes & demie ; Sauret a fini par dire que fi le livre jour
nal de Vigier faifoit mention d’une délivrance de quatre
voyes & demie , il entendoit les palier en compte. Sau
ret a donc dû favoir, qu’en prenant dans la fuite les douze
voyes adreflces à Girard, le fieur Feulhant lui refteroit de
voir deux v o y e s , fuivant le compte qu’il avoit fait, ou au
moins une voye & demie, fuivant celui fait par Vigier.
L e fieur Feulhant dit encore , que Sauret eft conftitué
•en mauvaife f o i , parce qu’une ancienne fervante de Vigier
a , dit-il, déclaré que , lorfque Sauret envoyoit prendre les
quatre voyes & demie , cela fe faifoit quelquefois fans que
Vigier fût prévenu, & que d’ailleurs elle s’étoit apperçue que
-le tombereau de Sauret contenoit vingt-une rafes , tandis
qu’il prétendoit qu’il n’en contenoit que dix-huit.
E n fuppofant que cette déclaration foit ainfi conçue , on
fent aifément qu’un témoignage unique, & de cette nature,
n ’a rien d’effrayant. Où en feroit-on , fi à raifon de quelques
difficultés élevées par une fervante fur la contenue d’un tom•bereau , le maître de ce tombereau devenoit par-là indigne
de toute croyance ?
- M aisce qui tranche toute difficulté,c’eft que le fieurVigier,
qui favoit fans doute bien la quantité de charbon qui avoit
été prife par Sau ret, ne l’a portée fur fon livre journal ,
qu’à quatre voyes & dem ie; que le fieur S é v e , d’entrée
de caufe , nJa demandé que cette quantité ; & que Sauret
& le fieur Séve n’ont d’abord été divifés que fur une demiv o y e , on peut môme dire qu’il n’y a point eu de conteftation ,
dès. que Sauret s’en eft rapporté au livre journal.
L e (ieur Feulhant a bien ofé dire que Sauret n’avoit pas
pu défavouer que fon tombereau contenoit vingt-une rafes , &
q i’il l’avoit donné pour dix^huit.
Cû ) Sauret en it certain d en ’avoir pris que q>;arre voyes.
pour éviter toute
difficulté qu il ¡,’en eft rapporté au livre jo irrui de V :t'i î r . Si fur ce livre journal
a été marqué quatre voyes & dert ie , c’efl parce qu’il a été induir en erreur par
fa lervante q u i, comme on verra bientôt , pu'tendon que le tombere.iu de Sauret
avoit une plus grande contenue que celle pour laquelle il vouloir le faire palier.
,
�16
Mais Sauret n'a jamais fait cet a v e u , il eft convenu feu*
lement que fon tombereau , qu i , dans le principe , ne conte*
n o it que dix-huit rafes,pouvoit contenir aujourd’hui quelque
chofe de plus, parce qu’il s’étoit élargi par l’ufage. Mais
il a foutenu que la différence étoit très-petite , & que le
même tombereau paffe encore habituellement pour contenir
dix-huit à dix-neuf rafes tout au plus.
A in fi, quelques efforts qu’ait fait le fieur Feulhant , les
principes s’élevent contre lui , & il ne peut pas les efquiver
à la faveur des circonftances; on peut même dire qu’elles l’acca
blent. La prétendue réception de vingt voyes au Pont-du-Château , eft un fait qu’il ne peut point affurer ; il ne peut que
foutenir qu’il a envoyé cette quantité de braffaget au Pontdu-C h âteau ; mais quand ce fait feroit v r a i , il n'en réful-i
teroit pas la preuve que Sauret eût reçu cette même quanti
té au Pont-du-Château , & cette réception eft démentie par
Sauret, & par les deux feuls témoins qui aient connoiffan
ce de ce qui s’eft paffé. Il ne faut pas confondre le fait de
l ’envoi avec celui de la réception.
Les déclamations que le fieur Feulhant s’eft permifes con
tre Sauret, font donc pour le moins déplacées. Sauret fait
un commerce modefte , dans lequel il fe procure honnête-«
ment de quoi fubvenir à fa fubfiftance & à celle de fa fa
mille , fa réputation n’a fouffert aucune atteinte , & il ne
s’eft jamais élevé contre lui ni plaintes ni murmures.
Monfieur B O I S S O N , Ju ge en charge.
)
!
'
M c. G R E N I E R ,
S
A
a u v a g e o n
,
Avocat.
Procureur.
R I O M , de l’imprimerie de MARTIN D É G O U T T E
Imprimeur-Libraire, près la Fontaine des Lignes. 1787.
�
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Factums Baron Grenier
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A name given to the resource
[Factum. Sauret, Gervais. 1787]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boisson
Grenier
Sauvageon
Subject
The topic of the resource
marchandises
troc
charbon
créances
transport fluvial
livres-journaux
mines
Description
An account of the resource
Mémoire pour Gervais Sauret, défendeur et demandeur. Contre Gilbert Séve, en qualité de mari de Martine Vigier, demandeur. Et encore contre le sieur Feulhant, défendeur et demandeur, et autres défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1785-1787
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
BCU_Factums_B0122
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0123
BCU_Factums_B0124
BCU_Factums_B0125
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53961/BCU_Factums_B0122.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pont-du-Château (63284)
Brassac-les-Mines (63050)
Riom (63300)
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44
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t
4
REPONSE
POUR
&
G e r v a i s
Juridiction
confulaire
S A U R E T , Défendeur
D em an d eu r.
C O N T R E le fieur F E U I L L A N T & autres
L
E ton qui règne dans le m ém oire du fieur F e u illa n t
,
annonce que l’on s’y eft principalem ent occu p é à capti ,
ver les Lecteurs amateurs de l'art oratoire. N ous ne nous atten
dions cependant pas qu’il dût être queftion de captiver les
Lecteurs amateurs de l'art oratoire dans une difcuffion rélative à un troc d 'u ne jum ent avec dix-huit voyes de charbon.
C 'e ft fans doute , pour éloigner cette id é e , & pour don
ner l'apparence de la n é c e ffité , à ce qui n’eft que pom pe
inutile & vain é c la t , que l ’on a dit dans ce m ém oire , page
3 , que Sauret n 'avoit f a i t imprimer t que dans l'efpérance
fa n s doute d'en impofer au p u b lic , par l ’éclat donné à cette
affaire.
Sauret s’eft contenu dans les bornes d’une jufte défenfe.
S il l'a fait im prim er , c ’eft feulem ent pour en donner une
connoiff ance plus parfaite & plus exacte à fes Juges. I l y a
À
�\
2
é té e xcité par Îa crainte que doivent infpirer à un homme
iimple les précautions & les efforts d’un adverfaire expéri
menté & infinuant, par la nécefllté d’effacer des impreffions
q u ’auroit pu produire un mémoire fait avec art , de la
part du fleur F euillant, & q u ’on ne vouloit p as d ’a b o rd faire
imprimer. E n fin , il y a été excité par l'indignation qu’ont
d û faire naître en lui des propos injurieux: qu'on s’eft permis
dé tenir à fon égard«
O n fe fait e n c o r e , de la part du fleur F e u illa n t, page 14*
un précexte de la pétulance de S a u ret , dans les Joüicitations
auprès de f e s Juges.
D e v o ir - on s’attendre à l’emploi de pareilles exprefïions ,
de la part du fleur Feuillant & de fon D éfenfeur ? C ette idée
manque au moins de ré flex io n } c ’eft peut - être pour la pre
mière fois qu’on la voit hazarder dans un mémoire conte
nant une défenfe. Sauret refpe&e trop fe3*Juges , pour fe
p erm ettre, à leur égard , dés follicitations, & pour redou
ter celles qui pourroient être faites de la part de fon ad
verfaire , s'il ofoit en concevoir le projet.
O n fe gardera bien de répondre à tout ce que contient
le mémoire du fleur Feuillant ; on en eft heureufement difpenfé ; nous prenons le parti de le ré d u ir e , & il faut efpérer que les Lecleurs amateurs de l ’art oratoire, auront plus
d e plaifir en le lifant , que nous n'en avons eu en faifant
cette réduction.
L e fieur Feuillant fait valoir trois principaux moyens.
L e premier confifte à foutenir que Sauret a reçu v in g t
voyes de c h a rb o n , envoyées de BrafTaget au Pont-du-Château , parce que ce t envoi eft couché fur fon livre journal
qui doit faire foi. O n fe flatte d ’y avoir répondu dans le
m émoire de Sauret ; 011 croie devoir y perfifter, pour éviter
des répétitions.
�3
D ’un cô té , il n’eft pas vrai que les livres Journaux faiïene
toujours foi ; cela ne réfulte pas même des articles de l’O r donnance , cités par le fieur Feuillant , auxquels il fuffic
de renvoyer. Perfonne n’ignore combien les circonftances in
fluent fur cette matière ; Sauret eft d’ailleurs réduit à l'im poffibilité de critiquer la forme de ce livre journal , q u ’il
ne connoît pas plus que fon Défenfeur. Quelques perfonnes
qui l ’ont vu , lui ont obfervé qu’il étoit t r è s - b o n , à r^ifon
de ce qu’il paroiffoit neuf. Il
eft poflible que fe trouvant
dans certaines circonftances , on tranfcrive , avec des diffé
ren ces, le contenu en un jo u r n a l, fur un a u t r e , qui auroic
m êm e été cô té & paraphé en blanc par un Juge.
D ’un autre cô té , quelqu'exaSitude qu’on fuppofe dans
l e livre journal du fieur F euillant , cela importe peu à
Sauret. Il en réfulteroit la preuve que le fieur Feuillant 3.
e n voyé vingt voy es de charbon de Braifaget au P ont-d u Château ; mais il n’en réfulteroit pas la preuve que Sauret
les ait reçues au Pont-du-Château. C e m oyen , qui eft bien
fin i pie , refte dans toute fa f o r c e , malgré tous Iet efforts du
fieur Feuillant.
O n croit qu’il eft impoifible de concevoir que Sauret
'doive être confidéré comme ayant reçu vin g t v o y e s , tandis
que Girard & fa femme déclarent qu'il n'en a
reçu
que
douze , & que Sauret eft en é t a t , & offre d’affirmer ce
fait. Q u 'o n fe forme l’idée qu’on voudra du livre de G ira rd ,
que le fieur Feuillant triomphe à fon gré de fa prétendue
inexa&itude , encore une fois , qu’importe à Sauret ? L a
déclaration de Girard & de fa femme ne laiifent pas de
former fon titre , à l’effet de n’imputer que la quantité de
d ou ze voyes. L ’inexa&itude du livre journal de Girard ne
pourroit faire que fuppofer que lui 6c fa femme ont fouftrait
A 2
�4
hu it voyes de charbon au fieur Feuillant , par méprife ou
autrement j ôc qu’ils lui en doivent rendre compte ; mais
jamais elle ne peut fe rétorquer contre S a u r e t , en faveur
du fieur Feuillant. D e ce qu'un homme diroit fauflement
'n ’avoir reçu d’un particulier que douze voyes au lieu de vingt,
l ’on ne pourroit pas en conclure raifonnabletnent qu’il en
impofe , lorfqu'il dit quJil n’a donné à un autre que douze
voyes. C e moyen , qui n’échappera certainement pas à l'at
tention de nos J u g e s , eft ii d é c ifif, qu’il eft impoilible au
fieur Feuillant & à fon D éfenfeur de raffoiblir.
L e fieur Feuillant fait toujours de vains efforts pour faire
trouver de l’inexa&itude dans les déclarations de Girard &
de fa femme. O n perfide dans ce qu'on a déjà dit à ce
fujet dans le mémoire de Sauret ; on fe contentera de re
le ver une affe&ation que Je fieur Feuillant nJauroit pas dû
fe permettre dans la manière dont il a rendu la déclaration
de la femme , qui eit à-peu-près conforme à celle du mari.
L e fieur Feuillant d i t , page 11 ; » la dépofition de la femme
» Girard porte qu’elle ne fe rappelle pas précifément le
» nombre de voyes ; qu'elle croit que c ’eit douze qui ont
r> été déchargées &c remifes à Sauret. »
Mais ce ne font pas les termes de la déclaration ; le fieur
Feuillant pouvoit d ’autant moins les ignorer , que cette d é
claration a été tranfcrite très-exactement & en cara£tères
italiques , dans le mémoire de Sauret ; en voici les ter
m es ; » q u elle lie fe rappelle pas précifément le nombre
7> de voyes de charbon ,
» CHARGÉE
DE
F A I RE
» a u d it G ervais
qu e
le
DECHARGER
S au ret
sieur
POUR
F
euillant
ETRE
; mais q u elle croit
l’a
REMI SES
que c e j l
» dou\e v o y e s , qui ont été ainfi déchargées pour être remi» fes }
E T Q U I O N T ÉTÉ E F F E C T I V E M E N T
REMI SES A U D I T
�!>
»
S
auret
pour
le
compte
du
sieur
F
euillant
. »
Il y a deux infidélités dans la manière dont le iieur
Feuillant a rendu la déclaration de la femme Girard. L a pre
mière , en ce qu’on a fupprimé que cette femme avoit dit
»
que
le
sieur
F
euilland
l ’a v o i t
chargée
de
faire
» d é c h a r g e r ( le charbon ) p o u r ê t r e r e m i s a S a u r e t . »
L a fécondé , en ce qu’on a fupprimé le mot efîentiel ,
e f f e c t i v e m e n t , & qu’en réunifiant le m o t , remife s ,
à
c e l u i , déchargées, le fieur Feuillant a voulu donner à en
tendre que le doute qu’il attache au mot cro it, portoit tant
lur la remife faite à S a u r e t, par G i r a r d , que fur la récep
tion faite par celui-ci au Pont-du-Château. C e p e n d a n t, s’il
y avoit du doute dans le mot croit , il eft évident , d'a
près les termes de la déclaration , que ce doute ne porteroit que fur la quantité reçue au Pont-du-Château
& non
fur la quantité remife à Sauret. Il réfulte de ces termes ,
& qui ont été effectivement remife s , que , dans tous les cas ,
Sauret nJa que douze voyes. Si la manière dont !e fieur
Feuillant fe défend n'eft pas hon n ête, il faut convenir qu'elle
eft commode.
Son fécond moyen confiée à dire , au moins fubftantielle m e n t , pages i ? <
5c 1 6 , qu’il importe peu , pour le fieur
Feuillant , que Sauret ait reçu ou non les vingt voyes de
charbon ; que s’il ne les a pas reçues , il a dû le faire ; que
G ira rd , prétendu Correfpondant de Sauret les a au moins
r e ç u e s , & que Sauret doit lui en demander compte.
C ette objection a été parfaitement détruite dans le m é
moire de Sauret ; & fi le fieur Feuillant étoit parvenu à lui
donner quelque couleur , ce ne pourroic être , que parce
qu il n a pas craint de dénaturer les faits.
L a preuve que Girard n’étoit pas correfpondant de Sau-
�5
r e t , &: que celui-ci ne devoit pas veiller au déchargement
des bateaux , réfulte: i° . de ce que Girard & fa fem m e, ou
au moins ces derniers , ont déclaré que le Jieur Feuillant les
avoit chargés de fa ire décharger les dix-huit voyes de char
bon , pour être renüfes à Gervais Sauret. V o ilà un moyen
également iimple & d é c i i if , auquel le fieur Feuillant n’a
pas répondu.
2°. D e ce que Sauret n’a point été averti par le fieur F eu il
lant de l’envoi par lui fait au Pont-du-Château ; il en a aver
ti Girard , & c ’eft à lui qu'il a adreiTé la lettre d’avis ; on
n ’a pas ofé dire qu’on en ait adreflfé à Sauret. O n dit pour
s’en défendre , qu’il n’auroit pas fu lire la le ttre , page 13 ;
il étoit difficile de mieux montrer l ’embarras de fe juftifier.
On
d i t , pour la première f o i s , qu’il y a eu un avertiiTement
verbal avant l ’e n v o i , mais c ’eft: une faufle allégation. A u d i
n ’a-t-on fu dire en quel lieu & com m ent il avoit été fait. O n
ne voit pas même qu’il réfulte de la lettre écrite , dit-on ,
par le Com m is du fieur Feuillant à Girard , le 3 août 1785* j,
dont on rapporte les termes dans le mémoire du fieur F eu il
lant , page 13 , que Girard ait été prévenu par le C o m m i s ,
que Sauret fe trouveroit au Pont-du-Château , le lundi fuivant. A u furplus, le Com m is auroit bien pu annoncer à G i
rard , que Sauret feroit au P on t-d u rC h â t e a u , à un certain
jour , par l’effet d’une préfomption de fa p a rt, & non d’une
certitude.
3°. L a preuve que Sauret n’a pas dû veiller au décharge
ment , réfulte de ce que Girard n’a jamais appellé S auret;
c ’eft lui ôc fa femme qui y ont préiidé ; cela réfulte , com m e
on a déjà v u , de leur déclaration. C e n’eft point Sauret qui
a payé les frais du d é ch a rg e m e n t, c ’eft Girard qui les a payés ,
ni & fa femme l ’ont ainfi d é c la r é , & le fieur Feuillant n ’at
�7
taque pas cette déclaration , il la regarde au contraire c o m
me vraie.
L e fieur F e u i ll a n t , pour faire croire que Girard ¿toit le
correfpondant choifi par Sauret , n’a pas craint de dire q u e ,
dans la lettre du 20 février 178^ , adreffée à Sauret, il avoit
annoncé qu’il feroic conduire le charbon che\ Girard. V o i c i
les te rm e s, page 22 , » Feuillant ne propofe pas à Sauret
» d’aller le recevoir chez Girard , maisi/ir q u i lle fe r a con» duire cheç Girard. Les conventions de la lettre ne font
» que la répétition des conventions verbales. I l avoit donc
» été convenu que Girard [croit le Commiffionnaire des deux ».
Mais il eft faux qu’il foit parlé de Girard dans cette lettre.
E n voici les termes : » j ’e n v o ie , Moniieur , mon domefti» que , pour chercher la jument que vous m 'avez v e n d u e ,
» pour dix-huit voyes de charbon de baratre , que je vous
» conduirai au plutôt au Pont-du-Château , la décharge à
» v o tr e c h a r g e .........la préfente vous fert d'aifurance. (a ) »
C e tte lettre contient-elle la preuve que Girard dût Être
1e CommiJJionnaire des deux ? Y a-t-on entendu que Sauret
fut tenu de veiller au déchargement ; fur-tout il on fait
attention que c’eft plus de fix mois après que l’envdi a été
f a i t , fans qu’il y ait eu de lettre intermédiaire , adreflee à
Sauret ? Pourquoi a-t-on ajouté ces deux mots , che\
Girard ?
L e troifieme moyen du fieur F e u illa n t , confifte à dire
que Girard n’a pas fait contremefurer le charbon qu’il a re*
eu , qu’il l ’a remis indéfiniment comme il l ’avoit reçu ,
fans s’occuper de la quantité ; que d’ailleurs, ce qui peut
( a ) V oilà un titre de la part du fieur F euillan t, il faudroit une preu
ve bien précife pour le détruire.
�8
avoir donné lieu à la m ép rife, c ’eft la contenue du tombe
reau d eS a u ret; qu'il contenoitvingt-une rafes, quoiqu’ilprétendic qu’il n’en contenoit que dix-huit. L e fieur Feuillant préfente
à ce fujet un c a l c u l , page 16 } qui fans doute a dû captiver
les Lecteurs amateurs de l'art oratoire.
R E P O N S E . L ’on a prouvé dans Je mémoire de Saur e t , le fait confiant du contrem efurage, & la néceffité même de
ce contremefurage. L e fieur Feuillant dit a & u e lle m e n t, page
2 5 , que les déchargeurs ne contremefurent p o in t , & qu’ils
s’en rapportent à ce qu’on leur dit fur la contenue.
Mais le fait eft faux. L es déchargeurs contremefurent ,
ainfi qu’on Ta expliqué dans le mémoire de Sauret ; fans
c e l a , ils feroient trop fouvent trompés. D'ailleurs , l ’affertion du fieur Feuillant
fuppofe que
les déchargeurs
ont
pris vingt voyes pour d o u z e , & qu’ils fe font contentés de
fix liv r e s , au lieu de dix livres. Mais à qui perfuadera-t-il
une pareille méprife de leur part?
A l’égard du calcul annoncé par le fieur F e u illa n t , d’une
manière vraiment fu b lim e , ôc qu’on ne peut fuivre , (a) il
ne prouve autre ç h o f e j fi ce n’eft que fon imagination a fait
un effort pénible.
L a bafe de ce calcul e ft, malheureufement pour le fieur
F eu illa n t, un fait évidemment faux ôc fuppofé. Il calcule la
différence qu il a dû y avoir dans la quantité de charbon en
levé , d’après la différence de la contenue réelle du tom
bereau de Sauret , qui eft de dix-huit à dix-neuf rafes ,
d’ avec la contenuefuppoféequieft de vingt-une rafes. D ’après
Ion c a l c u l, qu’il lui plaît d’appel 1er une démonjlratïon mathéma
tique , il dit que la différence eft de quatorze à douze voyes t
( a } Voyez la note à la fin de la page itf.
ôc
�9
& il conclut que Sauret a emporté quatorze voyes , tan
dis qu’il pouvoit c r o ir e , ou faifoit croire à Girard qu’il n'en
tranfportoit que douze.
Mais l'opération eft déjà vicieufe , par cela feul qu’elle
ne frappe que fur une partie du charbon contentieux. Il
s’agit de vingt voyes , & l’objet du calcul n’eft que de qua
torze voyes. Les fix premières voyes auroient été tranfportées fur le même tombereau que les quatorze dernières; (en
fuppofant ces deux quantités pour un m om ent) l ’erreur auroit donc été é g a le , quant aux deux quantités. Sauret , en
fuivant le fyftême du fieur F e u illa n t, auroit donc néceflairement emporté une première fois fept voyes au lieu de f i x ,
une fécondé fois, quatorze voyes , au lieu de d ou ze, ce qui
feroit vingt-une voyes. D 'o ii il faudroit conclure que le
fieur Feuillant auroit envoyé non pas feulement vin g t voyes ,
mais bien vingt-une , 6c que Girard auroit eu la bonhommie
de faire une m é p rife , dont le coup-d'œil le moins exercé
fuffiroit feul pour s’en garantir ; c ’eft-à-dire, qu’i f auroit pris
un tas de charbon de vingt-une v o y e s , pour douze voyes
feulement.
Q u ’a fait le fieur Feuillant , pour tâcher de couvrir le
vice de fon opération? Il a fuppofé , pages 1 4 , i j , 17 &
18 , que Sauret avoit enlevé le charbon à deux reprifes ;
que d’abord , il avoit pris les fix premières v o y e s , & enfuite au mois de feptem bre, les quatorze. Il a fait plus, il a
voulu infinuer , p?ge 18 , que Sauret l ’avoit lui-même avoué.
V o i c i fes termes : » d’un autre cô té , il convient d’avoir en» levé douze v o y e s , depuis le mois de feptembre. I l a donc
» connu & enlevé les deux envois de c h a r b o n , chacun
» dans leur temps. Sauret a donc reçu vingt voyes "de char» bon du fieur Feuillant ».
B
�t»
IÔ
M ais il eft faux que Sauret ait pris du charbon en deutf
reprifes , c ’eft-à-dire, avant la fin de feptembre , ou le com
mencement d’o£tobre. i l eft également faux qu’il l ’ait avoué.
I l n’a ceiTé de d i r e , ( vo y ez la page 3 de fon mémoire , )
qu'il a com m encé de tranfporter le charbon à la fin de fep
tem bre , ou au com m encem ent d’oflobre. E n difant que ce
tas de charbon écoit de douze v o y e s , il a dit en même
temps que c ’étoit tout le charbon qui lui fut p ré fen té , com me
ayant été e n vo yé pour fon c o m p te , par le fieur Feuillant.
S ’il eût entendu dire qu’il eût reçu ces douze voyes en fep
te m b r e , & qu’il eût encore reçu auparavant les fix premières
v o y e s , prétendues envoyées pour fon compte > au mois
'd’août j il auroit lui-m êm e prononcé fa condamnation ; puifque fa prétention confifte à foutenir qu’il n’a reçu , en t o u t ,
que douze v o y e s , indépendamment des quatre voyes & de
mie qu’il avoit déjà reçues du fieur V ig ie r , par l ’ordre du
fieur Feuillant, (a)
D ’ailleurs , le fieur Feuillant fuppofe que Girard a parfai
tement fu qu’en feptembre ou octobre Sauret avoit pris qua
to rze voyes j ou au moins douze ; qu’il favoit également que
précédemment Sauret en avoit pris fix. Mais fi Girard & fa
(a) Pour abréger , on ne parlera plus de ce qui concerne les quatre
v o y e s & demie , qui ont été
co m p te
ce
qu’on
délivrées
à Sauret par V igie r ,
de ce que lui devoit le fieur Feuillant.
a dit dans le mémoire de Sauret.
dame Scve , dirigée plutôt contre
Sauret ,
La
à
O n perfide dans
demande
que contre
de la
le fieur
Feuillant , ne prouve rien. Il peut fe faire qu’alors la dame Séve
aimât mieux
avoir Sauret pour
d é b iteu r.
On
a d’ailleurs dit à
Sauret que l’on lifoit dans le livre journal du fieur V i g i e r , délivré
à Sauret , par l'ordre du fieur Feuillant.
�1T
femme favoient tout cela , comm ent en auroient-ils oublié la
moitié ? le fécond tranfport de douze ou quatorze voyes fe
feroit bien gravé dans leur tête , & le premier en feroit en
tièrem ent forti ? D e deux chofes l’une , ou le fieur Feuillant
fe trompe , lorfqu’il dit qu’il a envoyé vingt voyes de chart o n , ou Girard a retenu le premier envoi. M ais dans l’un
ou l’autre de ces deux c a s , il eft impoilible au iieur Feuillant
de prouver que Sauret ait reçu vin g t v o y e s , ôc l’on peut dire
que celui-ci a prouvé le contraire.
Mais que va devenir encore le c a l c u l , cette produ&ion
précieufe de l’imagination de nos Adverfaires ? L e tom be
reau eft dans cette V i l l e , chez Sauret. I l fera reconnu par
des témoins dignes de f o i , pour être le même dont Sauret
fe fert depuis bien avant 178^ ; il fupplie la C o u r d’en or
donner la vérification. Il allure qu’il en réfultera qu’il con
tient dix-huit à dix-neuf ra fe s , ainfi qu’il l ’a toujours dit.
C e tte opération vaudra fans doute bien la démonjîration
mathématique du fieur F e u illa n t, qui a d ’ailleurs p o u rth é o réme la dépofition d’une fervante de cabaret.
N ou s facrifierons , au defir d’abréger & de fimplifier la
conteftation, l'avantage que nous pourrions nous procurer,
en relevant certains raifonnements vraiment abfurdes , &
quelques différences qui fe trouvent entre le mémoire im
primé du fieur Feuillant , &
nuferit.
fon
premier mémoire ma-
Par exem ple , dâns le premier mémoire , on avoit prêté
à S a u r e t , une réponfe foible , fur un fait avancé par le
fieur Feuillant j & on en trio m p h o it. Sauret a rapporté dans
fon m é m o ire , page p , les termes dont il s’étoit fervi , & il
a dit que la réponfe étoit verte. L e fieur F e u illa n t, page
# 2 , eft convenu des term es 3 ou à-peu-près } & il ajoute,
�î2
que cette réponfe n'eft point verte, mais effrontée , indécente ,
vis-à-vis d’un homme reconnu pour loyal. Mais une réponfe
effrontée & indécente n’eft pas une réponfe foible , & qui
d écéle le menfonge & l ’embarras de répondre.
N ’y a-t-il pas encore une affectation puérile dans la pre
mière phrafe du récit des faits , de la part du fieur F e u il
lant ? » L e fieur F e u illa n t, N é g o cia n t de Braffa g e t , a ch e ta ,
» dans les premiers mois de 1 7 8 5 , de Gervais S a u r e t , dit
» le Grenadier » ; Sauret s’empreff e d’avouer qu’il l ’a été. Il
fe confoleroit encore , quand il feroit furnommé l ’Enfant
B leu . Un homme , pour être furnommé le Grenadier , ou
l ' Enfant B leu , n'en eft pas moins eftimable , puifque les
fobriquets font prefque toujours l'ouvrage du h a z a r d , ou
du caprice. Cependant , com m e chacun eft jaloux de la
gloire de fon n o m , Sauret defire ardemment qu’on fâche
qu’il penfe que l ’un de ces fobriquets vaut bien l ’autre ,
& qua
' ce fujet , il ne feroit pas un fécond troc, S igné
SAURET.
M onfieur B O I S S O N , Juge en charge,
Me
G R EN IER,
S a u v a g e o n
A v o c a t.
f
Procureur»
\
■ M
A
n n M
n M
n r M
M
M
M
M
'n M
M
n a m
M
M
M
B
a n n
R I O M , d e l’imprimerie de M a r t i n D É G O U T T E ,
Imprimeur-Libraire, près la Fontaine des Lignes. 1787.
�
Dublin Core
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Factums Baron Grenier
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Sauret, Gervais. 1787]
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An entity primarily responsible for making the resource
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Grenier
Sauvageon
Subject
The topic of the resource
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charbon
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transport fluvial
livres-journaux
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poids et mesures
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témoins
auberges
Description
An account of the resource
Réponse pour Gervais Sauret, défendeur et demandeur. Contre le sieur Feuillant et autres.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1785-1787
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
BCU_Factums_B0124
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_B0122
BCU_Factums_B0123
BCU_Factums_B0125
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pont-du-Château (63284)
Brassac-les-Mines (63050)
Riom (63300)
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transport fluvial
troc
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810cbd07c98a0078fd86b0cb3c26ca6c
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SUR
UNE
CONTESTATION
RELATIVE
A LA
P O S S E S S IO N
ET
P R O P R IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
A RI OM,
de
l ’im prim erie
IMPRIMEUR
de
de
l a
L A N D R IO T ,
cour
A oût 1804
d ’a p p e l .
se u l
�MEMOIRE
COUR
D ’ AP P E L
EN R É P ONS E ,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P
ierre
- J
ean
- B
aptiste
T R E IC H
LA
P L E N E , a p p e la n t;
CONTRE
.
,
T R E I C H - D E S F A R G E S veuve
Lachaud 9 Jean
COUDER , et L é o
n a r d CHA DE N I E R , intimés
M a r ie
A v e c des titres de propriété , et la garantie des lois,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
‘le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�(2)
à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i-c i trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un cahos d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
gran d e, que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la difficulté , ou fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui doit le plus éto n n er, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent, non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut, plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une inine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer uue c o p ro p riété contre un tiers déten-
�( 3
)
teur ; si encore il le* p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui' estj détruit par plusieurs
autres actes et circonstances ; l’appelant est obligé de pré
senter ces mêmes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
*
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•J ‘
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■■• F AI T S .
*: )
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„
A u village de là P le a u ’, dans le département de la>
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Je a n T re ic h ,
père de l’appelant, en étoit le p rin cip al propriétaire.
En 1747 , il'acquit de Pierre Beynes sa portion dans,
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires. '
L e 25 mars i j 5 5 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,,
est-il dit j tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon ? que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000^; Il fut1dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du,
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-même sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
�(4)
Cette terré de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , ayoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier*
sa vo ir, deux septerées avant 1736 ? par un acte que
l’on ne connoît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du I er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie,
de la même terre , ci-deçant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen
ti tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le char« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais to u t p ro u v e que cette charge fut rédim ée b ien tô t
a p rè s , in dépendam m ent encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de i j 55.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l ’appelant ), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Cliazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lè n e , etc. ,* ensemble les carrières A cliar« bon de pierre, pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein} etc. \ comme aussi a vendu à ladite*
�m
derpoisdle-la rP5lène.jla pai:tf.et-portion .appartenante
« -audit vendeur^,çsdiiesrqualités ^$ur,les*camères. situées
« dans* le;,communal, jdç.Plpau ?re t c . fsans par. Je yendeun
- « se faire, aucune réserve de.sa portionjdans leditçom « munal ;jetc. ; derneure chargée ladite ac.quéreu^e.d’exé« guter.les ^conventions portées au contrat dA29„septem« bre 1766 , )etc. ^ de jn êm e aussi sera obligée ladite ac« rquéreu?e:>de délivrer, au vendeur et^auxf siens-la quan« tité de soixante quartes de charbon annuellement,
« tant et si longuement qu’il se recueillera du charbon
« dans lesdites «carrières ci-dessus vendues , à* la charge
que le vendeur}ou
les siens
seront-tenus
de
les creuser ,
•‘
S
-'
.) \
A V« eux-mêmes; ou faire\ creuser à leurs dépens, etc. ,»r
Cet, acte de 1766 { lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler’) étoit ,un traité p a r lui fait avec B ern ard ü o d e t
pour;extraire le|charbon de ladite terre, Chazalas, con
frontant-, disoit-il lui-.m êm e haudit,acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière,
des héritiers• du J'en ysieur Treich le cadet. - •
• Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente 4e soixante 7quar tes de cjiarbon , qu’il fit. valoir,
quelque, temps ,Lsans ayoir g^rde de réclamer aucun autre
droit en yerÇu.de l’act^ de^S^.'jIlla.,vendit le 6 janvier
1771 , et Marianne la Plène latremboi^rsa par actç du 27'
du même mois.
.T o u t se..rgiinissoit donc à séparer, entièrement les in
térêts de .JViarianne la Plène d’avec ,çeux dudit Beynes,
lorsque Marie Treiçh-D ersfarges.? par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière duicommunal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps ,• après avoir
�n, ........ .,.C6)
essayé de faire à Marianne ld Plène-/en 1 7 7 5 , un pro
cès ériminel qu’elle fut forcée ¿ ’abandonner , découvrit
i’acte dé 1736, et, ne pouvant en user ellè-m êm e, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en' 1777 /avec J e a n C ouder, à la ¿faculté de creuser
dans là t e r r e d e la Charoulière eh entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
co?nmu?iah
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
riavoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha
roulière/la société ( évaluée à 4 **“) n’auroit aucun effet.
Les trois associés se mirent en œuvre âu mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
m anda le transport du juge de S ain t-A n gel, lequel fit sur
les lieu x, le 8 août 178 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’iguorer comment le
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne semb lo ien t se défendre qu’en soutenant que leur fouille
n’avoii pas pénétré sous la C h aro u lière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et d éclarèren t audit procès verbal
qu’ils pm ioient les démarches de la veuve la Plène pour
�(7)
un trouble*à leur-propriété ; que les .causes., dont se ser,voit et «y'etoit ci-devant-servie ladite demoiselle la Plène,,
pour tirer du charbon d e l à .terre de la Charonliere,
portaient.un préjudice notable audit Be'^rieç et autres^ au
droit de retirer du*charbon-de ladite terre, et que ladite
i .
'
\\ ' •> ■'
7 ‘ .1
j : , ou
demoiselle la Plène ne pou voit ^empêcher de leur faire
compte de la m oitié de.ce charbon depuis le temps qu'elle
m o ü acquis.
ui., - , I10(i,
Ils ajoutèrent la demande .qu’il leur,.fut donné-acte de
leurs .réquisitions, et réclamations , f sous, réserve. de la
restitution de la m oitié.du charbon çi-devaiit retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Vlene depuis so?i
acquisition , et autres que de d r o i t •
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
,qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
peinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,* mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application, et que, d’ailleurs il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première'diligence les intimés ne se-, liâtoient pas moins de fouiller le charbon , ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se doimoi.ent pas .la, peine de mettre des
étais. La veuve Desfarges crut faire ,une heureuse diver
sion en rendant plainte., . . # .
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit ouï, et interrogés; mais la veuve Desfarges en fut
.pour su tentative, et la procédure fut civilisée.
On continua le, procès.civil; et les intimés prirent, le
�( 8 ).
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoiént annon^
cées lors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Vavenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qtfelle a retiré et f a i t ' creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance] 40. en
¿000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre dé la Charou
lière , et de moitié de celles du communal de la Pleau
(qui n’étoient pas en litige) ; mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , \publiquement et ouvertement, en
v e rtu de son contrat de i j 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations, la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, 'Sic vos non nobrs, un nommé 'Saint-Victour
profita do ces querelles pour persuader que l’explôitation
de
�;(• 9 ).
de ces mines étoit en mauvaises mains ; il en obtint
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
«un an; puis il fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration, son utilité, etc. Il-obtint en 1783 une
concession de quinze ans..
;
i La loi du 28 juillet 1791 expulsa xe .Saint-Victour,
qui néanmoins ne fut pas décourage, et qui, dans toutes
les phases d e 'la révolution, se tint aux avenues des
administrations et des ministères, pour solliciter quelquesr
uns des arrêtés ci-après, et en venir de .longue, main à
réussir.
r
•'
‘
Les mines étant seulement sous la surveillance admi~
nistrative , les propriétaires .de Pleau obtinrent , le
6 novembre 17.91, un arrêté du département de la Goi>
rèze, q u i les remettoit en possession de leurs carrières.
Saint-Victour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit il fallut des enquêtes
pour le vaincre. E n fin, en 179 3, il parut céder, et fit
faire par Bettinger, son associé, un traité avec Pierre-;
Jean Treich appelant, lequel 'concédoit, h prix fixe,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce traité le 19 juin, 1793.
D ’autres cliangemcns.amenèrent d’autres intrigues. On
fit écrire au ministre de l’intérieur «par le ministre,de la
m arin e, pour les mines de Pleau; on eut des ¿ivis de,.la
commission des mines, d’autres de celle des travaux pu
blics. On fit ordonner quelles propriétaires exploiteroient en commun.
L e département de la Corrèze p rit, les 5 et i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il crut etre en c.onforinité
.
!
\ B
�(io)
de ces règlemens ; mais ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an , pour organiser une exploitation en com mun, sous
la direction de Mazaud. On pressent que Treich appe
lant, et principal p ro p rié ta ire , ne pouvoit y participer à
cause du traité qu’il avoit fait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
6
des 6 novembre - 1791 et I 9 j11*11 I 793 subsistoient
en core, et étoient exécutés.
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’ad
ministration de la Corrèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des considérations
particulières. L e plus difficile ne fut donc pas de vaincre
ce léger empêchement :
JDiruit, cedificat, mutât quadrata rotandis.
lie département de l’an 6 cassa , le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut hom ologuée, et il fut enjoint à Treich de déclarer
sous quinzaine s’il entendoit s’y réunir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures ; il
osa même élever sa voix jusqu’au chef de l’état; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ic h , fils et héritier
de Marie la Plène , fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu à la cour
d’appfel de Limoges.
�( ÏI )
■
Les a d v e rsa ire sfo rts d e là décision administrative,
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté auroit - il pu suspendre un appel
pendant ? .D ’ailleurs l’arrêté ne régloit rien sur la pro
priété des parties : la cour de Limoges retint donc la
contestation.
•
i Les parties plaidèrent : au fond ; et le 28 -germinal
an 9 intervint l’arrêt suivant :
■
. « Considérant qu’il résulte du contrat du i^\ dccein« bre 1736 -une vente pure , simple •et parfaite de
« l’entier fonds.de la portion de la terre la ¡Charoulière,
« qui fut vendue par cet acte ; que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su p p lé
ée ment du prix déjà stipulé ; q u ’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la »propriété de la
« moitié de la mine de charbon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur,
« qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François Beynes , auteur à!Antoine , n i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , ju sq iien
0 1780 ; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
« ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« C onsidérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treicb, père de l’appelant; et l’appelant lui-même,
B 2
�( 12 )
«- ont possédé ladite moitié de m ine, avec titre suffisant
« pour en acquérir la propriété avec bonne foi et sans
te interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription se trouve acquise en faveur de l’acqué« reur ; que dès-lors l’exâmen et la solution des autres
« questions agitées au procès deviennent inutiles, etc.
« L e tribunal dit qu’il a été mal ju g é ;.... garde et
« maintient l’appelant au droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe* de l’accusation et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre ,... depuis le trouble jus« qu’au jou r.... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et'
« 100
de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y éch et, du charbon
cc perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
Les intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité*'
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement ,
fit réussir l’admission. La section civile rejeta à son
tour ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas
sés le 14 nivôse an 1 1, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la propriété, parce q u e, dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6
et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( 13 ) '
. _,
renvoyées à faire statuer sur leur appel én cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit '
un triomphe définitif, et ils allèrent.de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposentJ
aujourd’hui en maîtres.
•
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donne
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven- ’
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 flo ré a lJ
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa p ropriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction u "
venir.
N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens adm inistratifs ,
l’appel a été suivi en la cour. Les intimés ne voudroient ‘
y plaider que sur la propriété ; ils prétendent que leur *
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de ‘
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’ une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fo n d
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fon d , soit
suspect d’aucun vice.
�( M )
A u reste, le sieur Treich se consolera aisément de
celte vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables \
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques^
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na**
turelle : car ils sont fondés, non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos
sibilité qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6,
- O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , nô
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se demanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins h être persuadés que ç’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
. D ’Argentrédéploroitla misère des plaideurs et l’éternité
des procès : M iseri litigantes ! de quitus m liil certi est
cotislitutmn , et qitôd ab arbitrio cujttsqiie et opincttione
potiàs pend e t, quàrn àcertis regulis, Mais qu’a uroit-il dit
�( i 5 .)
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir un cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le, et sans que ces administrations le-fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’hui, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroît bien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
>
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel, et par
l’appel de la veuve Treich.
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. i cr. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution , et ce
dernier arrêté ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conforineroit encore.
�( 'i 6 )
Mais elle n’a pas même l?empêcliement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui, à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste ? il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement\
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
compagnie Mazaud , qui n’existoit p as, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 5
car la com pagnie Mazaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté de
l’an 6 n’est plus. La compagnie Mazaud r d’après même
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation ? le sieur Treich l’a encore
obtenue. Ainsi reflet le plus immédiat de cotte. obtenT
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte.
A u reste , il s’agit ici de com pétence, et par consé
quent
�C *7 )
quent d’ordre public : la cour y statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses propriétés *, et:
il n’y voit d’autre ' obstacle que l’obstination de ses1
adversaires:
* ' /
• . t. '
■ * "i
* Soit que la cour juge toute la possession, ou seule
ment une partie de la possession , il est au moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.*
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour’
ce qu’il avoit compétemmènt jugé , le sieur Treich ne
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom- qu’à
Limoges qu’il est seul propriétaire* de la Charoulièreet des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
’ i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
.
f •
2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de m in es, ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
*
3°. Il a joui plus de io ans avec titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. Cette jouissance est constante au procès.
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen -, aussi' ils s'efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que M arie la P lèn c,
C
�( i8 )
veuve T reich , ait jo u i, et ils ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contraire , a toujours d it,
suivant eu x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charou
lière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Pans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it, ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler ? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
moitié du communal, et autres carrières ; ..... s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du village; ...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de moitié du communal,
et de plusieui's autres carrières particulières ; ... qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne joirssoit pas, on y voit au contraire qu’elle eu (.en
duit très-bien jouir seule doses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s'en défendoit pas.
�C *9')
* Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? Cai* il'est parlé
de dix-huit mois dans rinterrogatôire de Martin Bêynës
et dans celui de sa fem m e, qui ont rendu compte de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plaintè; Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’est qu’une continua
tion de creusement ; et plus loin! elle parle encore de
ce nouveau creusement.
Comment la veuve la Plène auroit-elle , én effèt, menti
à' la" vérité contre elle-même ,- lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de' 1781 , qu’elle a toujours1
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans là requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que là stip« pliante a eue seule des fonds ÿ mentionnés, notam« ment de la terre de1 la Charoulière , à l’exclusion dé;
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs* réquisitions au procèî
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la-requête’
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,*
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que“la coïir a dû së convaincre, par^
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
* Q u ’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
G a
�( 2° )
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence ; donc le
débouté, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su 7
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter de la possession constante
de T reicli, après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se tx*ouve au contrat de 1736. O r, avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r , cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de Lim oges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
11’éloit pas seul héritier du vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire (pag» 11 )? veulent trouver neui ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas rintervaile de 1736
à 1755.
�( 2Í )
Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée. '
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que là possession à
titre de propriétaire; neque bona fides requiritur, sed sola
possessio per tricennium. Le Gode civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1^5 5 ; et, sous
ce point de vue, il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Limousin , admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n°. 83.
A la vérité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n’admet que la prescription de (rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré, nu
cas qu’il y eût lieu d'aborder cette question secondaire.
Lapeyrère «avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’ilcqnéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
• Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
'
'
- i Q. Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique M alœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis preescriptio, si verus do m inu s ignoret ju s suum et aliénationem facta?n, Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’ Antoine Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 55 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A u th e n tiq u e Ma?ce fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que D unodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans.
O r , la réserve dé partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736? qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires ?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve D esfarges, étoientpropriétaires
�< * 3 '?
pour, m o itié, comme si après une vente le vendeur demeuroit propriétaire ;, et comme si dans un fonds il y avoit
deux propriétés, l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
cette réserve de 1736, parce que Jean Treich ayant acquis
en 1755 , sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
f o i, au vu et su du vendeur, qui connoissoit son droit ;
ainsi l’appelant a prescription suffisante.
. Les intimés répondent que la .prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce quç
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinité.
. Autant vaudroit avoir dit etia?n per jnille aniios ,
comme le dit Dumoulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en convenir, il seroit un peu dur de songer quq
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 'aucun trouble.,
L ’espèce de Cancérius,rapportée par D unod, parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’un des faits principaux de la cause; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est parce qu’il
ne l’a pas réparé sans eu x; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la c¿mse d’une
manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�( H )
' « 11 faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
c< à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune préexistence ou mélange de titre, de
« convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qu i tire son origine d'un co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gement.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres
et cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
et criptibles et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir être prescrites. » (D unod , pag. 90.)
' Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’enlredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d’attendre qu’on creusât
pour partager , mais de creuser lui-même.
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soutenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve enlin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�( *5
) ) ...............................................................
en droit; c'est qu’elle déclare les intimes propriétaires de
la moitié de la mine.
*
Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
concoit-on un propriétaire qui conserve son droit sans
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement?
.
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.
! -- --
•
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.
V
■
Mais cette jouissance, dit-on, a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un jnot à répondre ; c’est
que la; sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
<
D ’ailleurs, il est de principe que les, aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annullation , comme
l’enseigne Cochin , tome 5 , page 274, et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais rappelant 11e veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fait, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Beynes tous les tours et détours des.charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Charoulière
n’a pas eu d’excavation verticale, il sait bien qu’à la Pleau
D
*
�àn n’a'jamais.--comme en Flandre / exploité ces mines
par des puits.
X^a montagne ou est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creuser par une tranchée1 horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m oyen, qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dii’ige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure1prouve d’ailleurs que c’est dans un 'tertre
de la Charoulièrd quéi se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres*- sont au com m unal, mais au pied de la Charouliêre y et' en direction~de cette mine.
!
/ .i i
•
.
A u x termes du d ro it, une possession clandestine sup
pose le dol ; c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt'de le saVoir. Il n’est pas besoin,
pour l’étirblir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au m ém o ire des intim és :
Clàtii possidere eum die ¿m us , qui f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o queni sibi controversiam facturum s u s p ic a b a t u r j et ne facerct t im e . jja t . L. 6 , fï‘. D e acq, P o s s .
V oilà donc trois choses qu’il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Piène ait \ox\\fu rtivem en t,
2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
Bcyncs; 30. qu’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
La sentence de 1782 répond 'à tous ces faits, en disant
que Marie la Plèrie a joui publiquevidnt. La plainte de
177^ prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�C 27 ?
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
• Mais quand tout cela n’existeroit p a s, vit-on jamais
Appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par 4e seul secours de la possession , et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas,
de possession.
'
" Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il joùit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
•
i !
Dunod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
<< d’un titre ne p e u t être regardé com m e possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne; foi dans
« le commencement; ce qui suifit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
*. '
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il .y a
un titre , est toujours présumée , et que c'est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( Art. 2268. ) .•
Les intimés disent qu’on devoit avertir Bcynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’usage n’étoit pas de le fa ire 'par écrit : et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
‘ Il n’y a donc aucun obstacle à ce que la prescription
ait eu son cours; et Treich ayant un titre e t’ bonne foi
depuis 1755 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777*
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�( 28
}
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption Lien
fondée , que la reserve de 1736 a du être rachetée comme
l ’a été celle de 1768 , par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, quAntoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qni a toujours
habité le village de la P leau , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
trade du charbon dans ses propriétés, auroit-il manqué
d’y comprendre la Charoulière, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
scs droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T out prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé; c’est q ue, dans tous les cas , n’y ayant
qu'une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors vendue, ci non sur celle
qui l’avoit été depuis long-temps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il 11’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potestate f u it Jegeni apertiùs diccre. La sentence de Saint-Angcl étoit donc encoye vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich. Les
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T reich
et M arie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a -perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Cha
roulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur ; et même surabondamment, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem ment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une-tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0407
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53791/BCU_Factums_M0407.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Mines
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53935/BCU_Factums_M0740.pdf
6a026dbf1d91e84c45913b4e9d727948
PDF Text
Text
MEMOIRE
SUR
UNE
CONTESTATION
RELATIVE
A LA POSSESSION
ET
PROPRIÉTÉ
DE M I N E S A CHARBON.
A RIOM,
d e
l ’im p r im e r ie
im p rim e u r
de
de
l a
LANDRIOT,
c o u r
Août 1804.
d ’a p p e l .
s e u l
�MEMOIRE
C OUR
D ’AP P E L
EN RÉPONSE,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P i e r r e - J e a n -B a p t i s t e
TREICH
LA
P L E N E , appelant;
CONTRE
T R E I C H - D E S F A R G E S , veuve
Lachaud
Jean
C O U D E R , et L éo n a r d C H A D E N I E R , intimés.
M a rie
A V E C des titres de propriété , et la garantie des lo is,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�( 2 ^
à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i-ci trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après uncalios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
grande, que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la difficulté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui doit le plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
compétent , non pas quant au jugement de la propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar, fêtés ne peut plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une mine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer une copropriété contre un tiers déten-
�C3 )
teur ; si encore il le p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Comme cette cause est tout entière dans
les faits; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
auti-es actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter ces mornes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
A u village de la P le a u , dans le département de la
Corrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean Treicli ,
père de l’appelant, en étoit le principal propriétaire.
En 1747 ? il acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 2 5 mars 1755 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Gharoulièra
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon , que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus, moyennant 3000 th. Il fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-même sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
■
■
A 2
�C 4; )
Cette terre de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , avoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier;
savoir, deux septerées avant 1736 , par un acte qu*î
l’on ne connoîtpas; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du 1er. décembre 1736* et cette
septerée vendue y est ccmjlnée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen« tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le cliar« bon qui pourra se creuser dans ladite t e r r e appelée la
« Charoulière, u n e d e s d e u x c i-d e s s u s vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
Mais tout prouve que cette charge fut rédimée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de i j 55.
Antoine Beynes , fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme céda taire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la Plène , veuve dudit Jean Trcich (mère de
l’appelant ), par acte du 29 août 1768 , un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« dé T u lle s, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et lerrein de ladite de« moiselle la P lèn e, etc.; ensemble les carrières à char« bon de pierre, pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein, etc. ; comme aussi a vendu a ladite
�5 )
a demoiselle la Plène la part et portion appartenante
« audit vendeur, èsdites qualités ^sur les carrières situées
« dans le communal de Pleau, etc. -, sans par le vendeur
a se faire aucune réserve de sa portion dans ledit com« m unal, etc. ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exé« cuter les conventions portées au contrat du 29_septem« bre 17 66., etc.; de même aussi sera obligée ladite ac
te quéreuse, de délivrer au vendeur et aux siens la quan« tité de soixante quartes de cliai’bon annuellem ent
« tant et si longuement qu’il se recueillera du charbon
a dans lesdites camères ci-dessus vendues, à la charge
« que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
« eux-mêmes ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler) étoit un traité par lui fait.avec Bernard Dodet
pour- extiaire le chai’bon do ladite terre. Chazalas, con
frontant, disoit-il lui - même audit acte, ¡d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière
des héritiers, du J eu sieur Treich le .cadet.
Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa.
rente de :soixante quai’tes de charbon, qu’il fit valoir
quelque temps, sans avoir garde de réclamer aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 0 janvier
1771 , et Marianne la Plène la remboursa par acte du 27
du inème mois.
Tout se réunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de Marianne, la Plène d’a,vçc,’ceux dudit Beynes,:
lorsque Marie Treich-Desfarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
ayoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
(
�m
essayé de faire à Marianne la P lè n e ,c n 1 7 7 5 , un pro
cès criminel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l’acte de 1736, e t, ne pouvant en user elle-m êm e, elle
èut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1777? avec Jean Couder, à la ¿faculté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal.
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
lïa v o it pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha
roulière, la société ( évaluée à 4 ) n ’a u r o it aucun effet.
Les trois a s s o c ié s se m ir e n t e n œuvre au mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
Maiùe la Plène aussitôt présenta une requête, de
m a n d a le transport du juge de Saint-A n gel, lequel fit sur
les lieu x, le 8 août 178 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment le
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à.
présent.
__
r
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouille
n’a voit pas pénétré sous la Charoulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils prenoicnl les démarches de la veuve la Plène pour
�t 7 )
un trouble à leur propriété ; que les causes dont se servoit et «y'était ci-devant servie ladite demoiselle la Plène,
pour tirer du charbon de la terre de ïa Charouliere,
portoient un préjudice notable audit Beyrîes et autres, au
droit de retirer du cliai’bon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la moitié de ce chai'bon depuis le temps qu'elle
avoit acquis.
Ils ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve, de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on-avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
feinte adioite, dans sa charbonnière o u v e r t ,* mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application, et que d’ailleurs il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se hâtoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. La veuve Desfarges crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
La veuve la Plène et ses ouvriers furent décrétés de
soit ouï, et interrogés; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
On continua le procès civil, et les intimés prirent, le
�c8).
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoient annon
cées lors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu à Vavenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qu'elle a retiré é t j a i t creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance ,* 40. en
2.000'^ de dommages-intérets.
L e 17 mai Ï782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou
lière , et de moitié de celles du communal de la Pleau
(qui n’étoient pas en litige)-, m a is , attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yexploitation de charbon faite avant Vinstance par la demoisèlle la P lè n e , publiquement et ouvertement, en
vertu de' son contrat de i j 55 , au vu et su dudit Beyjies et
de ses associés, sans réclamations, la veuve la Plène est
r e n v o y é e de la demande en d é c h a r g e de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. Le surplus de cette sentence règle le mode
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, Sic vos non n obis, un nommé Saint-Victour
profita de ces querelles pour persuader que l’exploitation
de
�(9)
de ces mines étoit en mauvaises mains ; il en obtint
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
un an ; puis il fit valoir ses dépenses, l’excellence de son
administration, son utilité, etc. Il obtint en 1783 une
concession de quinze ans.
■
La loi du 28 juillet 1791 expulsa ce, Saint-V ictour,
qui néanmoins ne fut pas découragé j et q u i, dans touteSj
les phases de la révolution, se tint aux avenues des
administrations et des ministères, pour solliciter quelquesuns des arrêtés ci-après, et en venir de longue main à
réussir.
Les mines étant seulement sous la surveillance admi
nistrative , les propriétaires de Pleau obtinrent , le
6 novembre 17 9 1, un arrêté du département de la Corrèze, qui les remettoit en possession de leurs carrières.
Saint-Victour in tr ig u a et prétendit que lui seul a voit mis
les charbonnières en état de produit; il- fallut des enquêtes
pour le vaincre. Enfin, en 1793, il parut céder, et fit
faire par Bettinger, son associé, un traité avec PierreJean Treich appelant, lequel concédoit, à prix fixe,
a u d it Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce traité le 19 juin 1793.
D ’autres changemens amenèrent d’autres intrigues. On
fit écrire au ministre de l’intérieur par le ministre de la
marine , pour les mines de Pleau ; on eut des avis de la,
commission des mines, d’autres de celle des travaux pu
blics. On fit ordonner que les propriétaires exploiteroient en commun.
L e département de la Corrèze prit, les 5 et i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il crut être en conformité
B
�C 10 )
de ces règlemens ; mais ils furent cassés par lé ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an 6, pour organiser une exploitation en commun, sous
la direction de Mazaud. O n pressent que Treich appe
lant, et principal propriétaire, ne pouvoit y participer à
cause du traité qu’il.avoit fait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
des 6 novembre 1791 et 19 juin 1793 subsistoient
en core, et étoient exécutés.
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’ad
ministration de la Corrèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on a v o it
traité , et de se laisser m a îtr is e r p a r des considérations
particulières. L e plus difficile ne fut donc pas de vaincre
ce léger empêchement :
D iru it, œdificat, mutât quadrata rotimdis.
L e département de l’an 6 cassa, le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut homologuée, et il fut enjoint à Treich de déclarer
sous quinzaine s’il entendoit s’y réu n ir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures ; il
osa même élever sa voix jusqu’au chef de l’état ; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ic h , fils et héritier
de M a r ie la P lèn e, fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu à la cour
d’uppel de Limoges.
�( ri )
Les adversaires , forts de la décision administrative,
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté a u ro it-il pu suspendre un appel
pendant ? D ’ailleurs l’arrêté ne régloit rien sur la pro
priété des parties : la cour de Limoges retint donc la
contestation.
Les parties plaidèrent au fond ; et le 28 germinal
an 9 intervint l’arrêt suivant :
« Considérant qu’il résulte du contrat du i^r. décern-;
« bre 1736 une vente pure , simple et parfaite de
« l’entier fonds de la portion de la terre la Cliaroulière,
« qui fut vendue par cet acte ; que la réserve énoncée
a à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un supplé
er ment du prix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au v e n d e u r - la propriété de la
« moitié de la mine de charbon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur
a qu’ une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années ;
a que les intimés ont avoué et soutenu ¡ au procès, que
ce n i François B e y n e s, auteur d'Antoine , n i ledit
« Antoine lui-m ém e, n av oient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , jusqu'en
c 1780; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
a ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treich, père de l’appelant ; et l’appelant lui-même,
B 2
�( 12 )
« ont possédé ladite moitié de m ine, avec titre suffisant
« pour en acquérir la propriété avec bonne foi et sans
« interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription se trouve acquise en faveur de l’acqué« reur ; que dès-lors l’examen et la solution des autres
« questions agitées au procès deviennent inutiles, etc.
« L e tribunal dit qu’il a été mal ju g é ;.... garde et
« maintient l’appelant au droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe de l’accusation et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre ,... depuis le trouble jus
te qu’au jour.... de l’arrêté du 23 ventôse a n 6 ,... et
« 100 ^ de d o m m a g e s - in t é r ô t s ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lie u , s’il y éch et, du charbon
« perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
Les intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrem ent,
fit réussir l’admission. La section civile rejeta à son
tour ce moyen , et s’attacha a l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas
sés le 14 nivôse a n n , pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la p ropriété, parce q u e , dit
l’arrêt, la possession déi’ivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6 ;... et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
.
�C 13 )
,
renvoyées à faire statuer sur leur appel en celte cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des mines de Cliaroulière : ils y disposent
aujourd’hui en maîtres.
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donné
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 floréal
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa propriété , à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction à
venir.
N ’y aj^ant donc plus d’empêchemens administratifs,
Fappel a été suivi e n la cour. Les intimés ne voudroient
y plaider que sur la propriété ; ils p r é t e n d e n t que le u r
droit est imprescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de'
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
s o it remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort, lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais ou ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que 'l’arrêt1
d’une cour d’appel, reconnue compétente pour le fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fond, soit
suspect d’aucun vice.
f
�( 1 4 }
A u reste, le sieur T reicli se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables ;
car si son arrêt do Limoges a été cassé, il a au moins
l’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés a voient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques
tions de la propriété, et même dç la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6.
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils s o n t f o n d é s , n o n pas sur le droit qu’avoit
la c o m p a g n ie Mazaud à la possession, mais sur la pos~
sibilité qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6,
O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste,
On répondra qu’il y a chose jugée; mais 011 se <Jemanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins à être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
D ’Argentrédéploroitla misère des plaideurs et l’éternité
des procès: M iseri lit!gantes ! de quibus n ih il certi est
constitution, et qubd ab arbitrio eujusque et opinqtione
potiùs peudet, quàni àçertis regulis, Mais q u ’ a uroit-il dit
�C l5 )
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir un cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le , et sans que ces administrations le fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’hui, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroit bien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
M a is , dans tous les sens possibles, le passé étôit dans
le domaine judiciaire ; le s jo u is s a n c e s de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel, et par
l’appel de la veuve Treich.
' Les jouissances de 1791 à l ’a n 6 étoient encore l’objet
de l’appel, et on ne peut pas invoquer l ’a rt. I er. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
s u r v e illa n c e administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
s e ssio n , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution , et ce
dernier arrêté ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
' Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition h des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour ; en statuant de même ; s’y conformeroit encore.
*
�c
1
6
}
Mais elle n’a pas même l’empêchement de cet arrêté
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul chef,
comme ils le supposent. L ’arrêté ekt cassé.
-Au reste , il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins.provisoirement;
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
compagnie Mazaud , qui n’existoit pas, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la compagnie Mazaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle
yt avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté de
l’an 6 n’est plus. La compagnie Mazaud , d’après mémo
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus do
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur Treich l’a encore
obtenue. Ainsi l’efFet le plus immédiat de celte obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte»
A u reste, il s’agit ici de compétence, et par c o n s é
quent
�(> 7 )
quent d’ordre publie : la-cour y statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses propriétés; et
il n’y voit d’autre obstacle que l’obstination de ses
adversaires.
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. Soit que là cour juge toute la possession, ou seule
ment une partie de la possession, «il est aii moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour j
ce qu’il avoit compétemmènt jugé , le sieur Treich ne
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom qu’à
Limoges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
3°. Il a joui plus de io ans avec titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
4°. Cette jouissance est constante au procès.
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen ; aussi ils s’eiforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que Marie la Plène,
�C(i 8 0 '
veu veT reich , ait jou i, et ils-ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contraire, a toujours d it,
suivant e u x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charoulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? lès parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it, ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
V o u lu parler ? est-ce de celui de 1776? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce
curieuse; et, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
moitié du communal, et autres carrières ; .....s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les habitans du v illa g e ;...
s’il 11’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire^ de moitié du communal,
et de plusieurs autres carrières ’p articulières ; ...qu’elle
n’empêclie pas les particuliers de creuser ou ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne jouissoit p as, on y voit au contraire qu’elle entenr
doit très-bien jouir seule de scs carrières, envers et contre
tous ; elle ne s’en défendoit pas.
�( r9 0
Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? Car il est parlé
de dix-huit mois dans l’interrogatoire de Martin Beynes
et dans celui de sa femme, qui Ont rendu compte de la
d e r n ie r e excavation qui donnoit lieu à la plainte. Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’est -qu’une continua
tion de creusement ; et plus ¡loin elle parle encore de
ce nouveau creusement.
C o m m e n t la veuve la Plène auroit-elle, en effet, menti
à. la vérité contre elle-même , lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même pi’ocès de 1781 , qu’elle a,toujours
joui. « Les contrats de vente , dit-elle ( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d'exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des fo n d s y mentionnés, notam« ment de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
k tous autres, et sans opposition. »
;
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
s e s s i o n constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée eu première instance. Leurs réquisitions au procès
v e r b a l du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la l’eqiiête
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû se convaincre, par
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
Qu’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
G a
�(2°)
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, publi
quement et sa?is réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su,
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter de la possession constante
de T reich , après avoir vil les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt? Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 173^. O r , avec ces
points de fait, il sera aisé de prouverique l’appelant
doit être tranquille par la prescription , indépendam
ment des moyens qui i*ésultent des a c te s de 1768, 1769
et 1771.
>
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r, cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de Lim oges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
n’étoit pas seul héritier du vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire ( png. 1 1 ) , veulent trouver neuf ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas l’intervalle de 1736
i\ 1755.
�(
21
)
Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
iy55 s e u le m e n t que la cause de la possession a été changée.
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque bona fuies requiritur, sedsola
possessio per tricennium. Le Gode civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1755; et, sous
ce point de vue, il suffit de dix ans de prescription;
La loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne né doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
Le parlement de Bordeaux, d’où il paroît que l'essortissoit l’ancien Limousin , admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n». 83.
A la vérité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n’admet que la prescription de trente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré, au
cas qu’il y eût lieu d’aborder cette question secondaire.
I/npeyrère avoit d i t , au n°. 60, q u e la prescription
s’a c q u é r o it par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
i ° . Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique M alœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
pi*ésume pas conti'e le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis preescriptio, si verus dorainus ignoret ju s suum et aliénationem facta?n. Dans ce
cas il n’y a que la prescx’iption de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’Antoine Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque riiéritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de 17^5 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténementde la
Charoulièx’e.
En second lieu , l’Authentique Malos fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que D unodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans.
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736, qu’est-elle autre chose qu’une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires?
E t n’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimes,
même Couder et la veuve Dosfarges, étoient propriétaires
�( 23 )
pour moitié', comme si après une vente le vendeur demeuroit propriétaire ; et comme si dans un fonds il y avoit
deux propriétés, l’une du tréfonds et l’autre delà super
ficie.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
cette réserve de 1736, parce que Jean Treich ayant acquis
çn 1755 , sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
foi, au vu et su du vendeur, qui connoissoit son droit;
ainsi l’appelant a prescription suffisante.
.. Les intimés répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinité,
, Autant vaudroit avoir dit etiam per mille a n n o s,
comme le dit Dumoulin sur le Titre vicieux. Cependant,
il faut en convenir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà môme qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à aucun trouble.
L ’espèce de Cancérius,rapportée par D unod, parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’un des faits principaux de la cause ; c’est quo
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est parce qu’il
pe l’a pas réparé sans eux; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page su ivan te, D un oc] explique la cause d’une
manière à épargner à rappelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�( H )
a II faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
« à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune préexistence ou mélange de titre , de
« convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qu i tire son origine iVun contrat , qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju« gement.
’ « La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres« cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres« criptibles et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir être prescrites. » (D unod, pag. 90.)
Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prcsci’iptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement à?attendre qu’on creusât
pour partager, mais de creuser lui-même.
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-m ême, et plaidé pour soutenir
qu’on en avoit le droit.
L a preuve enfin, c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�25 >
cc droit; c’est qu’elle déclare les intimés propriétaires de
la moitié de la mine.
Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un propriétaire qui conserve son droit sans
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement ?
(
Mais cette jouissance, dit-on, a été clandestine.
A cela il n y auroit qu’un mot à répondre ; c’est
que la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
^ D ailleurs, il est de principe que le s aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annulation , comme
1 enseigne Cochin, tome 5 , page 274, et comme 1,’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
°
Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de Limoges
qui mentionne l’aveu de la possession.
’*
Mais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit
Dans le fait, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Beynes tous les tours et détours des charbonnières *
.et quand il se fait un moyen de ce que la, Ch.aroulière
n’a pas eu d’excavation verticale, il sait bien qu’à la Pleau
D
�(26)
'
on n’a jamais/comme* en F lan d re, exploité ces mines
par des puits.
La montagne où est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creuser par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m oyen, qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dirige la fo u ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sont au com m unal, mais au pied de la Charou
lière , et en direction de cette mine.
A u x termes du d ro it, une possession clandestine sup
pose le d o l, c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. JIl n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au mémoire des intimés :
Clàrn possidere eum dicim us, qui f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e eo quern sibi contro
versia mjactarurrt s u s p i c a b a t u r , etn éju ceret t i m è Jb a t . L . 6 , iT. D e acq. P o ss.
Voilà donc trois choses qu’il faut regarder commfc
constantes: i°. que Marie la Plène ait joui furtivem ent',
2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
Bi’yiies', 30. qu’Antoine Bey nés ^ait ignore la possession.
’ La sentence de 1782 répond à tous ces faits, ch disant
qiie Mïirifc' la Plèiie 'a j’ô i^publiquem ent. La plainte de
1775 prouve aus^i qu’elle‘ne craiguoît pas les m a u v a is e s
�( 27
)
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, côntiennent la meilleure réponse à leur moyen.
- Mais quand tout cela n’existeroit p a s, vit-on jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
Ha clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par le ,seul secours de la possession , et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas
de possession.
Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et lé vice dé clandestinité ne lui est point appli
cable.
• '-*■•* i
vi
t
Dunôd , invoqué par les intimés, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en veriu
? « d’un titre ne peut être regardé comme possesseur clan« destin , son titre le fa isa n t s u p p o s e r d e b o n n e f o i dans
cc le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
V/ t
; ’
t Le Gode civil répète que la bonne fo i, quand il y a
un titre, est toujours présum ée, et que c’est à celui qui
allègue.la mauvaise foi àila prouvçr,. ( Art. 226$,.),^.
Les intimés disent qu’on devoit avertir Beynes pour
- fouiller le charbon; m aisjls;conviennent au moins que
■
l’usage n’étoit pas de le faire par écrit : et d’ailleurs, on
- le répète , ils se sont dits copropriétaires..
Il
n’y a donc aucun obstacle à;jce; que la prescription
-ait eu son cours; et Treich ayant.un titre et bonne foi
- depuis 1755, a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777.
.
; Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�( 2 8 }
cessaire *, car, indépendamment de la présomption bien
fon d ée, que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l’a été celle de 1768, par un acte que Treich avoit dés
espéré de trouver ; il doit deineui’e r , ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qui â. toujours
habité le village de la P leau, qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preu ve) ;
Antoine Beynes, qui en 1766 faisoit un traité pour ex
traire du charbon dans ses propriétés, auroit-il manqué
d’y comprendre la- Charoulière , s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux mines, en se réservant du charbon, n’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T out prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à L im oges,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les cas , n’y ayant
qu’une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et
celte terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors vendue, et non sur celle
qui l’avoit été depuis long-temps : car les conventions ne
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il n’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se fcroit contre
le vendeur, in euju s poteslate f u i t legern apertiiis dicere. La sentence de Saint-Angel étoit donc encore vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La p r o p r i é t é
�2 9
de la Charoulière est sans difïiculté à Jean Treich. Les
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que Treich
et Marie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Châroulière, p ar la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur ; et même surabondamment, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le faire, il peut invoquer la p r e s c r ip t io n de tr e n te an s.
Conséquemment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
charbonnière communale
charbonnière privée
propriété du sol
concession d'exploitation
charbon
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Pierre-Jean-Baptiste Treich La Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0740
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
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8dd98855606fa6e158bfb1d2fbf66fa5
PDF Text
Text
sun
UNE
C O N T E S T A T I O N
R E L A T I V E
A LA
POSSESSION
ET
r_ f
PROPRIETE
DE M INES A CHARBON.
A
DE
RIOM,
l ’im p r im e r ie
im p rim e u r
de
de
l a
LA N D R IO T,
c o u r
A oût 1804.
d ’a p p e l.
s e u l
�MEMOIRE
COUR
D ’APPEL
EN RÉPONSE,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P ie r r e - Jean - B a p t i s t e
TREICH
LA
P L E N E , appelant 7
CONTRE
T R E I C H - D E S F A R G E S , veuve
L a chaud
J e a n COUDER
et L é o
n a r d C H A D E N I E R , intimés.
M arie
,
,
A VEC des titres de propriété , et la garantie des lo is,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt celu i-ci trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un calios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
grande, que le procès sur la propriété étoit encoi'e en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : mais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la diiliculté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoii’e avec le principal;
et, ce qui doit le plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
compétent , non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut-plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une mine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer une copropriété contre un tiers déten-
�•
ZS7
( 3)
teur; si encore il le p eu t, après avoir'vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
A u village de la P le a u , dans le département de la
Corrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean Treicli ,
père de l’appelant, en étoit le principal propriétaire.
En 1747 ? ü acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 2 5 mars 1755 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulièra
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon, que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000 thf II fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-meme sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
rt'-
�( 4■)
Cette terre de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , avoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier;
savoir, deux septerées avant 1736, par un acte qu*î
l’on ne connoîtpas; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du i er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen« tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le eliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon, se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. » .
Mais tout prouve que cette charge fut rédimée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de l'jôô.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l’appelant), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lèn e, etc. ; ensemble les carrières h char« l)on de pierre, pratiquées et î\ pratiquer dans ladite
« pièce de terrein, etc. j comme aussi a vendu à ladite
�)
<*
demoisélle la Plène’ la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans lé communal de Pleau, etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit comm unal, etc; ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septembre 1766,' etc. ; de même aussi sera obligée ladite acquéreuse , de délivrer au vendeur et aux siens la quantité de soixante quartes de charbon annuellement,
tant èt si longuement qu’il se l'ecueillera du charbon
dans lesdites carrières ci-dessus vendues, à la charge
que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
eux-mêmes ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler ) etoit un ti-aité par lui fait avec Bernard Dodet
pour extraire le charbon de ladite terre Cliazalas, con
frontant, dîsoit—il lui - même audit acte, d’une part la
charbonnière commune, et d’autre part la charbonnière
des héritiers du J e u sieur Treich le cadet.
Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante quartes de charbon , qu’il fit valoir
quelque temps, sans avoir garde de réclamer aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
I 7 7 I >et Marianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
c
Tout se reunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de Marianne la Plène d’avec ceux dudit Beynes,
lorsque Marie Treicli-Desiarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�(6 )
essayé de faire à Marianne la P Ièn e,en 1 7 7 5 , un pro
cès criminel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l’acte de 1736, et, ne pouvant en user elle-m ême, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1777? avec Jean Couder, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal.
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque s i ledit Beynes
ri avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha-*
roulière, la société ( évaluée à 4
n’auroit aucun effet.
Les tx-ois associés se mirent en œuvre au mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
manda le transport du juge de Saint-A ngel, lequel fit sur
les lieu*:, le 8 août 1781, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment lo
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillé'
11’avoit pas pénétré’sous la Charoulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoieut les démarches de la veuve la Plène pour
�C7 )
un trouble à leur propriété ; que les causes dont sc servoit et s ’était ci-devant servie ladite demoiselle la Plène,
pour tirer du charbon de la terre de la Charouliere,
pox-toient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retii’er du cliarbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de ce charbon depuis le temps qu'elle
avoit acquis.
Ils ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin soutei'rein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleui's il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liatoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. La veuve Desfargcs crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
La veuve la Plène et ses ouvriers furent décrétés de
soit oui, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
Ou continua le procès civil, et les intimés prirent, le
�(
8}
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoient annon-*
céeslors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Favenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qiûelle a retiré et ¿fait creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance 40. en
2000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou
lière , et de moitié-de celles du communal de la Pleau
(q ü in ’étoient pas en litige); mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yexploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , publiquement et ouvertement, en
vertu de son contrat de l'/Sô, au vu et su dudit Heynes et
de ses associés, s a n s réclamations, la veuve la Plène esÇ
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. Le surplus de cette sentence règle le modo
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement,
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de Tulle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, Sic vos 7ion 7iobis, un nommé Saint-Victour
profita de ces querelles pour persuader que l’exploitation
de
�ΠPi);
de ce3 mines étoit en. .mauvaises- mains ,^ril.* en Qj^igfc,
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
un an ; puis il fit valoir ses dépenses, l'excellence de son
administration.? .s.Qi>.fVftilité;,
en .^783 une.
concession dt?< q u ^ , a ^ V; I;0 >üfJR;.;, l£ ? b
'-r> ,{
La loi du .28 jnülçt, i 791 -ejçp^aj^ej
^ t?Hr *1
qui néanmoins ne fut pas découragé ¡| et.qui, dans toutes
les phases de la révolution, se tint aux avenues des
administrqtions et de^m^ni^ères,,
sqUicitçr quelques?,
uns des arrêtés ci-après , et.en0venir,fde longue
à,
réussir. -, • • •• • g •j 1,. . t fifr
V» •,*#ï«I «»f ni
Les mines étant squlem eqt,soi^la s^ry^illan^e.^dministrative , les propriétaires de Plenu obtinrent , le
6 novembre 179.1-, un arrêté du départeipent dela.Cor-j
rèze, qui les î-cmettoit en possession de .Jours, caijrièrçs.■
.
Saint-Victour intrigua et prétendit quqlui-seul ayçit mjs>
les charbonnières 011 état de produit; il fallut ides enquêtes
pour le vaincre. Enfin, en 1793, il parut çéder, çt.fit
faire par Beltinger, son asspciq, un .traité avec Pierre-..
Jean Treich appelant;, lequ el, eonçédoit, à prift. fyje ?)
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce tvaité le 19 juin 1793^
D ’autres changemens amenèrent d’autres intrigues; On.
fit écrire uu ministre de l’intérieur pfir le ministre de la
m arine, pour les mines de Pleau; on eut des avis de 1$,
commission des mines, d’autres de,celle des travaux pu
blics. On fit ordonner que les propriétaires exploi(,eroient en commun.
,
L e département de la> Corrèze p rit, les 5 ot i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il, crut être: en cçnformilv,
• B
.:
..
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'f
ç 10, )
.
.
de Ces' reglemëns ; niais ils furent cassés par le ministre
de’ l’intérieur,, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an 6 , 'pour 'organiser une exploitation en com m un, sous1
la direction de^Mazaud. On pressent 'que Treich appe-’
laht, et principal propriétaire, Ae poüvoit y 'participer à
cause du traité qu’il avoit lait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
des' 6 novembre ¿791 *ét •ig ^ jü ïn ' 1793 subsistoient*
énèôre1, ;,et étoient1 exécutes.0 *•
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’adrniriistrâtion de 'la Corrèzè de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité y et de se laisser maîtriser par dés considérations
particulières. L e ‘plus'difficile! rie fut donc pas de vaincre
ce' léger empêchement : !vui
•*
•“
, , r.........
”:
. . .
' 1D ir u ti t œ d ific a t, mutât quadrata rotundis.
\*
L e département de l’a n '6 cassa, le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791
I 793 * L ’union de la compagnie Mazand
fût homologuée, et il fut enjoint' à Treicli de déclarer
soiis quinzaine s’il entendoit s’y réu n ir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures; il
òsa même élevér sa! v ô ix jusqu’au chef de l’état ; et
biéntôt noiii verrons’ qu’il ii*a pas supplié en vain.
}
Cependant cet arrêté dò l’an 6 ctttit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ich , fils et héritier
de Marie la Piène-, fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : i l !fut ensuite dévolu à la cour
d’appel de Limoges.
�'
C «■ )
Les adversaires , forts de la.-décision administrative ?
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté, auroit - il pu suspendre un appel
pendant? D ’ailleurs l’arrêté ne régloit(.rien sur la pro
priété des parties : la cour de Linioges- retint donc^ la
contestation.
,
, .
■
.
.
un >:r
:••>! • t) o
Les parties plaidèrent au fond ;, et le 28 germinal
an ^
9 intervint l’arrêt suivant
1
« Considérant qu’il résulte du contrat du 1e1'. déçein« bre 1736 une vente pure , simple et parfaite de
« l’entier fonds de la portion de la terre la Çharoulière,
« qui fut vendue par cet acte ;,que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un supplé
es ment du prix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la propriété de la
« moitié de la mine de chài'bon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur
a qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François JBeynes , auteur cCAntoine , n i , ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , jusqu'en
c< 1780; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
v ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jehn Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treich, père de l’appelant, et l’appelant lui-même,
B 2
¿ i»
�* •
r . ***
*1,■
ont possédé ladite moitié clë initie, -ay.cc titre suffisant
pôui* en acquérir là propriété avec bonne foi et sans
interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi celte
prescription àe trouve acquise" èn faveur de l’acquéreur ; qué des-lors l’examen et là Solution des autres
questions agitées au procès deviennent inútiles , etc.
« L e tribunal dit-qu’il a été mal ju g é;.... garde et
« maintient l’appelant aü droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe de l’accusâtion et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre , ... depuis le trouble jus
te qu’au jour.... de 1’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« 100 ^ de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lie u , s’il y éch et, du charbon
« perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
I-es intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement,
lit réussir l’admission. La Section civile rejeta à son
tour'ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
*
«
«
«
«
«
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas-^
ses le 14 nivôse an 11, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la p ropriété, parce q u e , dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6,*.., et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( i3 )
renvoyées à faire statuer sur leur appel en cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposent
aujourd’hui en maîtres.
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donné
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 floréal
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa propriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction ¡V
venir.
N ’y ayant donc plus d’empêchemens administratifs ,
l’appel a ete suivi en la cour. Les intimés ne voudroient
y plaider que sur la propriété; ils prétendent que leur
droit est imprescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité, soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s cmpecher de s’étonner grandement que l'arrêt
d’une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fond, soit
suspect d’aucun vice.
�(
1
4
)
A u reste, le sieur Treicli se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables ;
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section .civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6.
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos~
sibililé qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dejnanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con- du ira au moins h être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
D’Argontrédéploroit la misèredesplaideurs et l’éternité
des procès: M iseri litigantes 1 de quibus nihil certi est
c o n s l i t u t u m , et quod ah arbitrio cujusqtte et opinatione
potiùs pendet, quant àccrtis regulis. Mais qu’auroit-ildit
�2.(yOÿ
( i5 )
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir lin cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le , et sans que ces administrations le fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du'
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’h u i, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroitbien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel , et par
l’appel de la veuve Treich.
—
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. I er. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 , mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrete ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conformeroit encore.
�c 1 6 }
Maïs elle n’a pas même l'empêchement de cet arrêté,
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préiet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement •,
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 \ car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien ù la
compagnie Mazaud , qui n’existoit pas, mais à T re ic h ,
qui avoit le droit de jouir. La question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la compagnie Mazaud n’a jamais Cil de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle,
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté do
l’an 6 n’est plus, La compagnie Mazaud , d’après mémo,
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur Treich l’a encore,
obtenue. Ainsi l’effet le plus, immédiat do çolte obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte,
A u reste , il s’agit ici de compétence, et par consé
quent
�z ll
( 17 )
quent d’Ordre public : la cour y statuera danà sa sagesse;:
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses 'propriétés ; et»
il n’y voit d’autre obstacle que l’obstination de ses^
adversaires.
; .
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i
;
. . > •/
• *•
j -;""
»5 C1 i. *' i
. Soit que là cour juge toute>'la ^possession, ou .seule
ment une partie de la .possession ,-il est aù moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour
ce qu’il avoit compétemment jugé’ , le sieur Treich ne,
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom qu’-ù,
Limoges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière_
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
. 2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , -ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
.•
,
.y
3°. 11 a joui plus de 10 ans avec {titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ails sans trouble ni récla
mation.
1!
40. Cette jouissance est constante au; procès* ‘ :p i
»
Les intimes ne se. sont pas dissimulés toute la puis
sance dé ce dernier moyen ; aussi ils s’efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que Marie la Plène,
.
�c iS )
vcuve T reicli, ait joui, et ris-ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contrâii'e , a toujours d it,
suivant eu x , au bui^eau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charoulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les1parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc!
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès,
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce;
curieuse; et, s’il faut juger la sentence de 1782 par les.
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire des
moitié du communal, et autres carrières ; .....s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti-,
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Ellerépond qu’elle est proprié taire: de moitié du communal,
et de plusieurs autres carrières particulières ; ...qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des*pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne jouissoit p a s, on y voit au contraire qu’elle entendoit très-bien jouir seule de ses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s’en défendoit pas.
�21
$
'( 19 ,)
' Sont-cc les interrogatoires de 1781 ? Car il est parlé
de dix-liuit mois dans l’interrogatoire de Martin Beynes
et dans celui de sa femm e, qui ont rendu compte, de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’e,st,qu’une continua
tion de creusement ,* et .plus .loin' elle parle encore de
ce nouveau creusement.
,
Comment la veuve la Plène auroit-elle, en effet, menti
à'la vérité contre elle-même, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1 7 8 1 , qu’elle,a toujours
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des fonds y mentionnés, notam« ment de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante, mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs réquisitions,au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions.dans la requête
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,
ne laissent aucun doute à cet ' égai'd. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû, se convaincre, pav
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
Qu’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la lin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
C a
�possession a eu lieu au vu et su dés adversaires, publi
q u e m e n t e t sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté -, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su ,
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter dé la possession constante
de Treich , après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 173^. O r , avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r, cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l’a jugé la cour de Limoges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
ri’étoit 'pis seul héritier dil vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tdte; et si les intimés, dans
leurTmémoire (pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas l’intervalle de 1736
à 1705.
�Z i)
( 2i )
* Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée.
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque Loua fuies requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
- « On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
t■
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1755; et, sous
ce point de vue, il suilit de dix ans de prescription.
■
> La loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin, admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n". 83.
, A la v é rité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n admet que la prescription de 1rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être p référé, au
cas qu’il y eut lieu d’aborder cette question secondaire.
, Lapeyrère avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�C 22 )
Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
. i° . Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique Malœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pr.s contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis prcescriptio, si verus domi~
nus ignoret ju s suum et aliénation em fa ctam . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’Antoine JBeynes n’est
point dans le cas de cette loi? 11 n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 5 5 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charouliere.
, En second lieu , l’Authentique M alœ fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué-d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que Dunodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans. '
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736, qu’est-elle autie chose qu’une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve Desfarges; étoient propriétaires
�X 7ï
( 23 )
pour moitié', comme si après une ventele' vendeur demeuroit propriétaire; et comme si dans un fonds il y a voie
deux p r o p r ié té s l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
çette réserve;de 173$, parce que Jeam Treich ayant acquis
£n-1755 -, sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
fo i, au vu et'su du vendeur, qui'connoissoitlson droit;
ainsi ¡l’appelant a prescription suffisante.
- Les intimés répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinitéj
? Autant vaudroit avoir dit etiam per mille a n n o s,
comme le dit Dumoulin sur le Titre vicieux. Cependant,
il'faut cm convenir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui- ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 1aucun trouble.
‘
L ’espèce de Cancérius, rapportée par D u n od , parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause; c’est quo
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est pnree qu’il'
ne l7a pas reparé sans eu x; sans quoi le dr oi t seroit pres
crit. O r , ici Beynés avoue qu’on a joui sans lui.
Mais, à la pagesuivante, Dunod explique la cause d’une
manière à épargner à l’appelant, une.discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�'^VvI*
CH )
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
« h tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune -préexistence ou mélange de litr e , de
« cojivention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qui tire son origine iVun co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gemeut.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres« cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
te criptiblcs et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir êti’e prescrites. » (D unod, pag. go.)
- Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
'
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d'attendre qu’on creusât
pour partagor , mais de creuser lui-même.
-r ' ■
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soùtenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve cn iin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�C 2 0 ) ................................
cc droit; c'est qu’elle déclare les intimés propriétaires de
la moitié de la mine.
. Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un propriétaire qui conserve son droit snns
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement ?
Mais celte jouissance, d it-on , a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un mot à répondre ; c’est
que la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Bcynes. O r, cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annulation , comme
l ’enseigne Cochin , tome 5 , page 274 , et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’ètre dit s’applique ù l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Bevnes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Chnroulière
n’a pas eu d’excavation verticale, Usait bien qu’à la Plcau
D
�(26)
on n’a jamais, comme en F lan d re, exploité ces mines
par des puits.
La montagne où est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creusir par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Pur ce moyen , qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dirige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sontiiu com m unal, mais au pied de la Charoulière, et en direction de cette mine.
A u x termes du droit, une possession clandestine sup
pose le d o l, c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. Il n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au mémoire des intimés :
C l à m p o s s i d e r e e u / n d i c i r n u s , q u i F U RTivk i n g r e s s u s
e s t p o s s e s s io n e / } / . , i g n o r a n t e e o q u e m s i h i c o n t r o p e r s ia n ifa d u ru m s u s p i c a b a t u r , e t nefa c e r c t t i m e -
L. 6 , fi'. D e a c q . P o s s .
Voilà donc trois choses qu’il faut regarder comme'
constantes: i°. que Marie la Piène ait jouifuitive/nenl2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
b a t.
Beynes; 3°* (['^’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 repond a tous ccs faits, en disant
que Marie la Piène n joui publiquement. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle 11e craignoit pas les'mauvaises
�Àï\
‘
( 27 )
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
Mais quand tout cela îvexisteroit p a s, vit-011 jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par le seul, secours de la possession, et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas
de possession.
•
■r'i ,
Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
1
•
Dunod , invoqué par les intimés, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
« d’un titre ne peut être regardé comme possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne foi dans
« le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
1
>
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il y a
un titre , est toujours présumée , et que c’est h celui qui
allègue la mauvaise foi a la prouver. ( Art. 2268. )
.
Les intimés disent qu’on devoit avertir Beynes pour,
fouiller le charbon; mais ils convierinent au nfoins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit :’ et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
Il 11 y a donc aucun obstacle cà ce que la prescription
ait eu son cours; et ÏYeich ayant un titre et bonne loi
depuis 1755, a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777.
•
1
n
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néJD 2
�m
y
(
)
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l ’a été celle de 1768, par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette l'éserve de 1736 par tous les açtes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qui a toujours
habité le village de la P leau, qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
traire du charbon dans ses propriétés , auroit-il manqué
d’y comprendre la Charouliève, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
- ;
• Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? Tout prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
1 L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les cas , n’y ayant
qu’une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et;
cette terre ayant trois septerées, la réserve no pouvoit
frapper ¿{lie sur la terre alors vendue, et non sur celle
qui l’a voit été depuis long-temps : caries conventions no
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il n’y a stipulation con-f
traire; e t , dans le doute., l'interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potcstale J u it fogem apertjùs dii
cere. La. sentence de Saint-Angel étoit donc encore vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich . I.es
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que Treich
et Marie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Charoulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur , et même surabondamment, en ajoutant sa
possession a celle de son vendeur , comme il a droit de
le faire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquemment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur,
M e. D E L A P C H
E R , avocat.
Me. M A R I E , licencié-avoué.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre-Jean-Baptiste Treich La Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1736-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1307
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1308
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
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Rights
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Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intérêt général
Mines
propriété du sol
sociétés
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PDF Text
Text
M
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M
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I
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E
AU CITOYEN B O N A P A R T E ,
PR EMIER CONSUL D E LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,
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■■ - *
j
:
la part de P i e r r e - J e a
L A P L E N E propriétaire,
de Maymac.
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C
it o y e n
p r e m ie r
C
1
r
:
»
T R E I CHdemeurant en la Ville
n -B a p tis te
onsul
,
P e n d a n t que le falut de l’É ta t, appelle toute votre furveillance y
fur les trames perfides d’ un ennemi qui médite le crime , fera-t-il
permis , à un malheureux perfécuté ,
plaintes & fes réclamations ?
de vous faire entendre fes
Propriétaire d’une mine de houille qui fefoit fa fortune , il en fut
dépouillé par un arrêt de faveur. Réintégré dans fa propriété, par
la loi du z8 juillet 1791 , on veut la lui ravir encore : des homA
�( * J
fnes envieux en convoitent la conceifioo. Ç ’eft à vous à décider fi
à ion préjudice elle peut leur être accordée.
La convoitjfe excepte de l’intérêt p u b lic , comme fi, l’exploitation
des mines p ou voit
être plqs avantageuse à la République faite par
des conceffionnqircs , que faite par l’expofant lui-m êm et II démontrera
fans peine
toute
Yhypocrijîe
de ce prèttxu : mai? lorsque tant de
foins excitent votre vigilance &
que tant de conceptions occupent votre
génie, peut-il espérer que vous pourrez prêter l ’oreille à fes obfervatiorçs ?
O u i fans doute. U n g r a n d
à la
tête d ’une
puiflance
M a g is tr a t ,
prépondérante ,
Juftice ne méritent pas moins d’attention
celui fur-tout q u i eft
fait que les lois &
la
que les armes ; que fi les
armes font respe&er le G ouvernem ent & y font fleurir la lib e r té ,
les lois & la Juftice y font aufli r e s p e c t e r les droits des Citoyens ,
en y faifant régner la paix & le bon ordre.
Aufli n’aguères a-t-on v u renaître'le fiècle de Solon , & remplacer
Yédifice informe de nos l o i s , par un code c iv il ditté par la fagelTe ,
au m ilieu même des agitations politiques.
Il ne refte d o n c , C i t o y e n p r e m ie r C o n s u l , il ne refte h TreichLaplene, qu’à vous faire connoître les faits relatifs à la queftion ,
à vous déduire fes raifons & fes motifs : il eft sûr , par votre juge
ment , de triompher des _Y^es fpéculations de la cupidité , & de
repouffer les tentatives de tous les perfonnages ré u n is, pour confom mer fa ruine.
F
L e s m in es dont
A
s’a g i t ,
village du même n o m ,
I
T
S
appelées de
commune de
.
Lapleau j
font fititéeS au
M auffac, département de
1^
Çorrcze , & renfermées dans le fem d’une montagne qui a la figure
d’un cône affez régulier.
La
majeure partie
en
appartient à Treich-Lapltnt ~
} en vertu dç
�( 3 )
plufièurs contrats en date des 14
2.5
mars
1755
&
a vril
1^97 » *5
o&obre 1 6 1 9 7
19* août 1 7 6 8 , qui conftatént'q u’elles étoient
ouvertes depuis le i5 .feme fiècle.
Ses
auteurs , les
regardant
comme
un
tréfor ,
s’appliquèrent
foigneufenient à les u tilife r , & né négligèrent ni fo in s, ni dépenfes,
ni travaux
pour
en àméliorér l’exploitation. Pour lui donner plus
ü’étendùe &
de confiftance , ils firent pratiquer dès galeries fouter-
rain es, foit
pour extraire lé
ea u x ; &
charbon ,
foit pour faire ecouler les
à 'fo r c e de fr a is , ils vinrent à bout dé retirer de ces mints
une quantité dé charbon aflez abondante pour fournir aux
publics.
befoihs
I
„
Leur exemple reveilla l’induftrie des autres particuliers qui pofledoient
des héritages de furface. C eux-ci cherchèrent auiîi à fouiller
dans
leur terrain. Mais (6it que ce terrain s’affaiiat à mefure des excava
tions &
que par mal-adreffe ils ne puffent donner à" leurs travaux
aucune folidite , foit que ious la ligne ¿ë leurs propriétés, le charbon
dts mines ne fut pas aufïi pur 8c auili abondant que dans les carrières
de Treich-Laplene ; ils s’avifèrent de pénétrer dans ces carrières par
le moyen d’un fentier
fou terrain , d’y
exploiter
même à tranchée
o u v e r te , ce qui fut caufe d’un p rocès,dont il n’a pu encore v o ir
la fin.
*
C ’étoit en 17 8 1. Son père ¿toit m ort depuis long-temps , & il Ufiirpatum
t •
,
A
_
,
, .
.
mines île la
etoxt encore en bas age. Sa mere porta plainte au Juge de St.-A n g il roulierre &
contre la veuve LACkAUD , Antoine B ey n es & Jean COUDER ( c’étôient
7
N
les ufurpateurs ) ; elle conclut à être maintenue dans fa p ro p riété,
pofleifion ôc jouiiTance &
cfes
cet °1
aveclaveim
chaud,
à ce qu’ils fiiflent condamnés à lui rèjiituer
le charbon extrait ou enhvè, avec domfnages-intcrcts & dépens. Mais
c e t o it une pauvre veu ve ifolée &
fans a p p u i, dont
le
droit fut
facrifie par le Juge de St.-Angel au crédit 5c aux protections de
fes adverfaires.
,
• '
.
.
L a carrière :>dont ils s’étoient Emparés , étoit circoriscrite dans les
limites d’une tfcrre appelée de Ja Charoulierié , qui avo it été vendue
aux ancêtres de Treich-Laplene, par ccux d’Antoine Beyne ; celui-ci
A 1
t
�( 4 )
pour légitimer fon ufurpation ' & celle de íes conforts,' prétendit que
fes auteurs s’étoient réfervés de prendre du charbon dans ladite terre.
Cette réferve étoit
effectivement flipulée par un contrat de 1 7 3 6 ;
mais elle étoit prescrite par un laps de 44 ans &
ceux qui l’avoient faite à extraire eux-m êm es,
reftre in te
au
tiers
de la
n’autorifoit pas
elle étoit d’ailleurs
terre &c vérification faite àés confins du
terrain u fu rp é, il fe trouvoit que l’exploitation n’a v o it: pas été faite
dans les parties défignées p our l’exercice de ladite réferve.
•
..
.
L a mère de Treich-Laplene fit va lo ir tous ces m oyens. Ils étoient
victorieux .& fans réplique : néanmoins ,
fes
adverfaires furent
fenttnce du
relaxés
iy mai
elle
O n verra
grâce à }a prévention ,
condamnée aux dépens par
bientôt
que iTur l’appel qu’elle
en interjetta , le Tribunal d’appel de Limoges a vo it rendu juitice
à Treich-Laplene , lorsque celui Je caflation eft venu çaffer fon juge
ment fous un faux( m otif d’incompétence ;
ce qui a ’ néceffité
íe
ren voi de la caufe au Tribunal d’appel de Riom où elle eft actuelle
ment pendante.
Mais laiiTons là ce procès pour fuivre
conteftation
Yiflour con-
préfente,
i j..„-
<.
les faits inhérents à la
/
D éjà l e s m ines de Laplèàu avoient acquis quélqùe renommée ,
n° dcs°m¡nes ^es P^re ^ mère de «Treich-Laplene en retiroient une fi grande quantité
Lapleau.
de ch a rb o n , qu’outre le débit qu’ils, en fe fo ien t, ils en ¿iv o ien c
toujours leurs magafins
garnis. C ’en fut
aiTez pour q u e ces. mines
devinflent un objet d’envie 8c d’ambition pour les fpéculateurs,..
St.-ViÙour à qui la veuve T réich a v o i t ’ f a it , pendant trois aris;
des livraifons de h o u ille , y jetta fon dévolut. ( C ’étoit le propriétaire
de la manufacture d’armes à feu de T u l l e ) ; auparavant il avo it une
autre mine
Argei\tac, d’où il (retiroit lé charbon néceiTaire à la
confommation de cette manufacture ; mais la coriceifiori lui en ayîint
4#
été enlevée ,
il brigua celle des mines dt Lapleau , &
oeuvre pour l’obtenir.
fut épargné.
La rufe ,
D ’abord, il
mit tout en
l’in trig u e , le m enfonge, rien ne
acheta à
Lapleau
un
p e t it . morceau
de
terrain , afin d’exploiter concurremment avec les autres propriétaires j
�( 5 )
& à peine eut-il com m encé, qu’ il prétendit qu’ils exploitoient d’une
manière nuiiible.
I l fit , à l ’intendant de L im oges, l’expofé le
plus infidieux ; 8c Ret{uêie p
le plus menfonger. 11 a v a n ça , que les .habitants ou propriétaires de
în^ dani.'
Lapleau n’avoient jamais fait d’exploitation en rè g le , mais feulement
niogcs.
quelques trous de fix à fept pieds , qu’ils étoient forcés d’abandonner
lorsqu’ils étoient pleins d’eau.
Q u ’ils abandonnoient aufli un filon
,
lorsqu’il fe plongeoit à une certaine profondeur pour en chercher un
autre à fleur de terre ; qu’en un mot ils s’étoient bornés à quelques
fouilles'fuperficielles.
..
'
r
Il difoit que ces mines étoient les feules capables d’alimenter la
|
manufa&ure de T u lle. Il les repréfentoit comme une reflource pré-
I
cieufe, à la confervation de,, laquelle étoit attaché le
maintien , ou
la ruine de cet établiifement. Et cependant le nouveau conceifionnaire
de la mine d’Argentac s’étoit obligé d’entretenir la manufafture de
tout le charbon ,qui lui ieroit néceflaire. Il fît v a lo ir fur -tout que
depuis la guerre d Amérique les beibins de cette manufaihire s’étoient
accrus ;
qu’il étoit forcé de m ultiplier fes travaux & de fabriquer
une plus grande quantité d’arm es, d’où
il
concluoit qu’on devoit
augmenter le produit des mines dans la môme proportion.
L ’ intendant
întereffc à ne
:
q u i , d’après cet expofé pompeux , crut v o ir l’État
pas laifler
Vexploitation
des
mines entre
des mains
ineptes, écrivit de fuite à fon fubdélégué de prendre des renfeignements fur les faits articulés & de lui en faire le rapport. Les chofes
ne pouvoient mieux aller pour St.-Viclour. Le fubdélégué étoit fon
ami intime , c’étoit le Ju^e de St.-Angel qui venoit impunément de
condamner
la mère de Treich-Laplene. Il lui fit déclarer ce qu’il
vo u lu t ; le certificat qu’il en obtint , ne
des affertions qu’il avo it inféré dans
fut qu’une
copie exafte
fa requête. Aufli pour la for
tifier eut-il foin de faire atteller par quatre individus colludants avec
lui , qu efFe&ivement . les propriétaires
excavations à ciel o u v e rt, &
n’avoient
fait que quelques
que lorsque les trous étoient pleins
t
;
�( 6 )
d’eau ,
fllon pro-
ils les abandonnoient pour en creufer d’autres ( i ) ,
C ’eft par l’effet de
un°auiime inconcevable ,
ces manœuvres &
de ce
'qui St.-ViBôiïr obtint de
com plot vraiment
l’iriteridant uné permiffion
p rovifoire d’exploiter pèndant iin an.
D urant cet i'ntervale il rédoubla d’efforts pour fe faire accorder
une conajfion de plus longue durée. Il partit pour Paris où il s’affocià
avec le C itoyen Serilly ,
dont le père étoit fecrétaire de Monfxeur
de Calone , contrôleur-général des finances : avec
il vainquit tous
cette prote&ion ,
les o b ftacles, il n’eiit befoin que d’alléguer pour
être cru , il entaffa aufii , menfonge fur menfonge.
Il eft confiant qu’il n’a vo it fait aucune innovation ] qu’ il s’étoit
;
fervi des ouvrages de la veu ve T rëich , & n’a vo it fait qüè continuer
d ’exploiter fes carrières. Cependant dans la requête qu’il préfentâ ail
confeil d’É t a t , il prétendit qu’il a vo it fait des frais immenfes, qu’il
a v o it percé dans fa b a fe , la montagrie dè L àp elau , dont les habitante
n’avoient
fait
que
grater
le
fommet.
Q u’il a vo it fait pratiquer
plufieurs g aleries, dont auparavant ces derniers ignoroiènt l’ufage.
i -85 conces-
A vec
V^flourpour
conceÏFlon P o u r l’espace de quinze ans , par arrêt du x z avril 1783,
des fuppofitions auiïi imaginaires , aufli fauffes ,
il obtint
co n feil d’E tat confidéra que durant le court espace de la con-
’annees.
ceflîon provifoire que lui a vo it accordé l’inten dan t, il n’a v o it pas
pté
poilible
à
St.-V iilour , de fe couvrir de fes dépenfes. II con-
fidéra qu’il auroit été injufte de le priver du fruit dfe fes travaux ;
tel
fut
le
m o tif
qui le
détermina à la prolonger, L ’e rre u r, la
fauffeté des faits , ne conduifent-eÎles pas toujours à l’injuiticè ?
La veu ve T reich forma oppofition à cet a r r ê t, foutint que depuis
ppnfaàl’arrèt un temps immémorial elle étoit en poiTeflion d’exploiter fes mines ;
conceflion :
r
.
ccftdéboutée qu’à raifon de c e , elle avo it toujours paye les vingticmes & împoveuve T r e i c h
inl o n
° P P o ll~
fu ions royales
,
tant pour la fuper/icie du terrain que pour la m atière,
( 1 ) C e lu t Jean D e m a t h ie u , A n t o i n e
q u i firent ce tte d é c l a r a t i o n c o j n p l a ifa a t c .
K
Bennes,
Jean
&
a u tre J e a n C o u d e r
�( 7 )
§£ conclut à être maintenue
dans
ion exploitation. Mais
le décès
de Moniteur D r o u x , ion premier a v o c a t , fuspendit pendant
deux
ans Tes pourfuites. C e ne fut qu’au bout de ce tem p s, que le confeil
d’Etat chercha à éclairer fa religion ,
encore ne laiffa-t-il pas à I3
veu ve T reich la faculté de prouver ,
par tém oin s, la fauffeté
des
faits que St.-V i£our a v o it impudemment avancé.
Il ne confulta que l ’in ten d a n t, & l ’intendant ne lui donna d’autres
informations que celles qu’il a vo it
reçu de fon fubdélégué :
ayant
été trom pé, il trompa à forç tour le confeil d’Etat. Il s’éto it bien
transporté fur les mines pour en faire l ’inspe&ion ; mais ce n’étoit
pas après un laps de quatre an n ées, que fans enquête contradiâoire
on pouvoit reconnoître l’état dans
lequel St.-Viclour a v o it pris les
mines ; St.-Fictour a v o it fait comme
les fré lo n s, il
s’étoit attribué
les travaux de l’induftrieufe a b e ille , l’intendant croyant qu’ils étoient
fon o u v ra g e , parce-que ddns le principe fon fubdélégué le lu i avo it
attefte, en donna avis au confeil d’E t a t , & fur le rapport de M r.’
de Calone, la mère de Treich-Laplene fut déboutée de fon oppofition.
Aux termes de fa concejjion , St.-Viéiour devoit l ’in d em n ifer ; mais
cette indemnité étoit
li médiocre ,
dépenfé le double de ce
qu’elle eut
que pour
retiré ,
l’obtenir elle auroit
c’eft pourquoi elle fut
forcée de tout abandonner. C ’eft ainfi que jadis U foibk étoit obligé
de courber la tête fous le joug du puijfant. C ’eft ainfi que plufieurs
fois le patrim oine du pauvre devint la proie du riche. O temps ! . .
’ô mœurs ! . ;
Il falloit une révolu tio n pour rétablir Treich-Laplene dans fes droits ;
car en vain , ¿tant
devenu
m ajeu r,
a v o it-il
réclamé à fon tour
contre les arrêts rendus à fon préjudice*? il n’a vo it pas eu même
1 avantage de faire lire fa
tificatives.
requ ête, quoique, affortie de pièces jus?
Heureufement pour lui cette révolution s’opère par fuite des défordres
oh la France ctoit plongée. Sôuvent le bien naît de l’excès du mal.
Après avo ir proclamé les droits de l ’homme ,
Jo p p reiü o n ,
en brifant
délivré
le peuple de
les chaînes de la fervitude qu’a vo it forgé
�(8 )
Yanarchïe féodale ; on s’occupe de faire cefièr les abus particuliers ;
de venger le droit facré de propriété des atteintes de l’ambition.
D éjà "une foule
de propriétaires étoient en réclamation
les injuftices qu’on leur avo it
fait ,
contre
en concédant à des étrangers
le droit d’exploiter leurs mines , l ’A s s e ^ b l é e N a t i o n a l e , ce centre
de lu m ières, dont l’œ il
déraciner les v ic e s ,
vigilan t
faififfoit toutes les
chargea fes comités
occafions
d’agriculture &
de
de com
merce d’examiner le mérité de leur demande ; & après avo ir entendu
les
divers
rapp orts,
elle rendit la lo i du
28 juillet
1791 , qui
rappelle à la vie les principes préexiftants fur la matière ; mais que
la faveur ou la vénalité avoient ^ plongé dans le fommeil.
du 58 juillet
Sachant concilier l’intérêt public avec l’intérêt p r iv é , elle annulla
ii qui annul-toutes les conceffions privilégiées , comme étant le fruit de lin ju ftic e ,
St -'viaour? &
ne laiffa fubfiiler que
confentement libre &
celles qui avoient été confirmées par le
par écrit
des propriétaires ,
ou celles
qui
avoient pour objet des mines découvertes par les concejjionnaires.
La feule obligation à laquelle elle affujettit les propriétaires réinté1
grés , envers les concejjionnaires déchus ; c’eft de leur rembourfer de
J
i
gré à gré , ou à dire d’experts , la valeur des ouvrages ou travaux
dont ils «profiteroient. Elle autorifa mêm e. tout propriétaire de furface
de jouir de celles de ces mines qui pourroient être exploitées jusqu’à
çent pieds de profondeur , ce qui doit s’entendre fans a vo ir befoin
d 'autre autorifation.
En vertu de cette l o i ,
Treich-Laplene &
les autres propriétaires
du* ténement de Lapleau , préfentèrent une pétition au D ire& oire du
département de la
Corrèze', pour fe
faire autorifer
à
rentrer en
poffeiïion de leurs mines.
',r pormiflîon J11
Le fix novembre 1791 , arrêté qui les y autorife , ‘ à la charge
^parlement île
¿ ’¡nj emnifer le conceffionnaire déchu , conformément à la
iaCorri’zo'l rcicli *
t
.
7
„
, •«•prcml la pos- loi ; le neuf du même ■
mois Treich-Laplene le fait l i g n i f i e r a i ^
!^s°,ldefCS,,U” V l^onr & fes affociés ; le 1 5 , il fe met en poffeiïion &
rédiger procès-verbal par le miniftère d’un notaire.
en fait
Enfin
�* 3 *
(9)
Enfin il
fe cro yoit tranquille déformais \ en payant à St.-Viclour
les ouvrages dont il profiteroit. Illufion ! espérance trompeufe !
St.-Ficiour refufe de traiter ;
que
jamais pour
ne. pas
loin d’y
confentir
lâcher fa proie.
il
s’agite plus
11 attaque l'arrêté qui
faifoit jouir les propriétaires de Lapleau du bénéfice
de la loi du
1 8 ju ille t , & fe pourvoit auprès d u M i n i s t r e R o l l a n d pour le faire
annuller.
Il fit dériver cette
prétendue
n u llité ,
de ce
que fuivant lui le
département de la Corrèze n’étoit pas compétent pour ordonner le
renvoi en pofleiîion des propriétaires ,
&
que cette demande ctoit
du reffort du Tribunal. I l prétendit que la lo i du i8 juillet n’annulloit
pas fa conceiîïon ; &
pour le prouver il produiiit le fyftème de
menfonge , à l’aide duquel il l ’avo it obtenue.
« La lo i
m ain tien t, dit-il , les conceiîionnaires
a&uels qui ont
» découvert les mines qu’ils exploitoient ; or , c’eft m oi qui ai fait
» .la découverte des mines de 'Lapleau & qui les ai exploitées le
» premier. A v a n t , les propriétaires de la furface n’avoient fait que
» quelques
trous &
» fuperficielles
tiré
ne peuvent
de
la
croûte de mine. Ces
être prifes pour une exploitation : dès-
» lors le département de la Corrèze a mal compris &
» l’article
6
de la
excavations
mal entendu
loi ; il en a fait une fauffe application ».
T o u s ces raifonnements étoient abfurdes , l’autorité adm iniflrative
ctoit feule compétente pour réintégrer les propriétaires du ténement
de Lapleau dans la joui fiance de leurs mines. La permiflion par eux
demandée & obten ue, ctoit d’ailleurs de furérogation ; car la Joi ne
les aftreignoit à aucune form alité ", ils .pouvoient , en vertu d i c d l e ,
fe mettre en pofleiîion, fau f à payer au conceffionnaire fon indem
n it é , d après
experts.
le règlement qui en feroit fait à l’amiable ou par
D e s -lo rs, il ne fut pas difficile à Tretch-Laplene d’écartcr la ten
tative de St.-Vïclaur. Pour prouver la fauffeté
de tout ce que ce
dernier a vo it dit fur la découverte des m ines,
il eut une cccafion
13
�H
,
( 10 )
bien favorable. C ’eft le procès qu’il fut oblige de foutenir relative
ment à
l’indemnité ,
pour
l’appréciation
de
laquelle
il
falloit
néceffairement connoître & comparer l’état dans lequel St.-Vi£tour
avoit pris les mines & l’état dans lequel il les a vo it laiffées.
Une grande conteftation s’élève à cet égard : elle eft portée au
Tribunal du diftrift d’ U ffe l, comme étant celui de
l’arrondiffement.
C ’eft alors que Treich-Laplene fait tomber toutes les déclam ations de
St.-Viclour & de fes adhérents ; c’eft alors qu’il démontre , dans toute
fon évid en ce, la furprife qui a vo it été faite en 1783
d’État du R o i , ainfi qu’à l’intendant.
au confeil
1
1
Il
demande à
être
admis à
prouver j que lorsque St.-Viclour
■
s’empara des mines de Lapleau , les fiennes étoient dans un état
d ’exploitation aufli régulière que poflîble. Et le 24 août 1792 il
J
fait une enquête compofée de dix témoins , qui dépofent tous d’une
v o ix un an im e, qu’effe£Hvement elles étoient bien
folidées ,
que dans le terrain
étayées &
con-
appelé le G enevrier il exiftoit trois
galeries de chacune 70 à 80 toifes ,
l’une fervant au découlement
des e a u x , les deux autres à l’extra&ion de la houille. Que St.-Viclour
(
n ’innova rien pendant quatre ans &
>
i
une grande quantité de charbon ,
par jour.
qu’il
fit extraire néanmoins
quelquefois
deux cent
quartes
Cette enquête clôt la bouche à St.-Viclour. Forcé de reconnoître
la vérité & de fubir la l o i , il donne ordre au C ito yen Bettinger
fon affocié , de traiter comme propriétaire gérant la manufacture d’ar
%
• "Viflour cft
mes à feu de T ulle.
Le
16
juin
1793
Bettinger &
Trcich-Lapknc traitent enfemble.
itre fa ddcîii- Treich-Laplene vend & cède aux aiTociés de la manufaûure la
c; il traite faculté d'exploiter fes mines de Lapleau pendant yingt ans ; & Bettinger,
c'I'rcicli-La,
,
,1 1
■
.ne : celui-ci outre les autres conditions du traite, s oblige , en ja qualité de propriétaire
ipÎoitcr^Hfe's £*rant *
^Ul Pay er ^ charbon à raifon • de vingt centimes la quarte,
■es pour 20 de quatre-vingt livres pefant.
[
11 s’oblige en o u tre , par claufe expreffe, de jouir des m i n e s con~
�< *D i'
(xi )
formément aux lois] & de les exploiter fuivant les règles de Part \ d'avoir
toujours fur place la. quantité de houille nécejfaire à la confommation
de la
manufacture , afin ,
Laplene
la perte de fes
efl-il dit , de ne pas occafîonner à Treichmines par la concejjîon qui pourroit en être
accordée à fon détriment.
Q uant à Yindcmnitc que
idemeure compenfée avec
Trtich-Lapltne
devoit à St.-Victour \ elle
celle que St.-Viclour lu i devoit pour le
temps qu’a v o it duré fa jouiffance. Les parties fe tiennent d’ailleurs
quittes de dépen s, dommages-intérêts , & fe mettent hors de cour
& de procès.
C e traité eft hom ologué par arrêté du département de la Corrèze
du
19
du même mois.
Il femble que d’après cet a û e St.-Viclour ne v a plus penfer à la^st-Viftonr
conceflion de
1783 9 qu’il y a
renoncé pour toujours.
Cependant j^ tnt.C|0f"tr
excite par quelques protecteurs , on le v o it bientôt fe livrer à de voit’ pour'
nouvelles démarches pour faire renverfer & le traité fouscrit par annullertn
,
A ,
,
Btttingtr S>C les deux arretes du département de la Corrèze
n o v e m b re
1791
'
tran la cu o n
du 6 fcc par fon|
6C 1 9 Ju in 1 7 9 5 .
'
cié que to»
' ‘
arrêtes qui)
voient tlécl
Il propofe un nouveau moyen de nullité contre ces deux arrêtés, fa conceüic
Il leur reproche de ne pas a vo ir été fournis à la fa n û io n , ou du ci^ devant R o i , ou du D irectoire e x é c u tif, conformément à l’article 8
de la lo i du 18 juillet 17 9 1.
I
M ais comme cette lo i ordonnoit d’accorder aux
propriétaires de
fu rface, la faculté d’exploiter les mines, de préférence aux étrangers ;
il s’attache principalement au moyen d’éluder
cette
dispofition.
Il
imagine de fe plaindre que l’exploitation des mines de Lapkau , étant
divifee
entre tous les propriétaires, & ceux-ci exploitants à volonté
chacun
dans
fon terrain , la manufaflure d’armes à feu de T u lle
manque la plupart du temps de la
houille néceffaire à fon entre
tien. Il demande qu on prenne des mefures efficaces pour qu’elle ne
fo it
pas fujette à cet inconvénient.
,
�II y
avo it bien de la perfidie dans cette taftique “ bien de l'im J
pudence dans ces allégations ,
car on a v u que Btttinger, affocié
de St.-Vïctour, s’étoit obligé par le traité pafle avec Tràch-LapUne ,
d'approvisionner la
été produit ,
j|
j!;
auroit donc dit
.
C epen dant
manufafture
il
p arvien t
G o u vern em en t une
à
de
T u lle. C e traité feul , s’il eut
faire rejetter. íes plaintes.
les
m efure du
accréditer
&
à faire
réfu ltat de laq u elle i l
prendre au
fe p rom ettoit
la concejfion.
■
iftour fait
in erla re u -
u n ^el,i homme lui fufiit pour furprendre la crédulité des autorités
des diverfes conilituees : cet homme eft
1
l,
1ingénieur
,
.
, ,
,
,
M ic h e qui a vo it ete charge
‘euîe1- ilCfe
^a*re ^a v ^ te ^es m"mes de Lapleau & de conftater les vices &
.* que les les inconvénients du genre d’exploitation dont fe plaignoit St.-Ficlour,
rié taires n e
‘ -iétT&quTl
^ et ingénieur , dont on ne peut fe difîimuler la connivence avec
‘ndralacon- S t.-V ic lo u r , fit un rapport à l ’agence des m in es, par lequel il
!n^aus°^s" propofa de contraindre les propriétaires du lieu de L ap leau , à fe
réunir en fociété
d ’entr’e u x ,
i
à
pour les
exploiter fous
défaut de quoi d’en
la
provoquer
furveillance
la
de l’un
concejfion. Cette
demande a vo it pour but de faire obtenir la concejfion à forç protège :
'
parce-que l ’un &
’
priétaires extra& eurs puffent fe c o n c ilie r.
l’autre regardoient com m e im poflible
que les pro-
L ’ingénieur fit plus pour S t.-V i& our
car comme celui-ci avo it
une forge d’acierie à Miremont près Excideuil , département de la
D o rd o g n e , il
propofa la confection d’ un canal com m unicatif à la
rivière de D ordogne , pour faciliter l’exportation de la houille , foit
Miremont , foit à Bergerac ,
:
!
i
ou
autres ateliers
établis dans les
contrées de la D ordogne ou de la Gironde.
C e plan étoit infenfé , parce-que le canal eut coûté à la République plus de fix m illions ,
c ’eft-à-dire cinq m illions de fois plus
qu’il n’eut valu ; néanmoins il ne laifia pas que de féduire l’agence
des mines qui
le propofa à Ton tour
• publics. Cette agence adopta encore ,
la commifiîon des travaux
avec une confiance a v e u g le ,
�* ÿ t
le m oyen indiqué
y ji
< ' î >.
*
par fon ingénieur pour l’exploitation des mines.
C ’efl pourquoi le 1 7 fru& idor, an h u it, dans le rapport qu’elle fit à
la commiflion des arm es, elle propofa : 1 .° d’annuller tant l’arreté
du fix novembre 17 9 1 que celui du 19 juin 1793 , portant hom o
logation du traité du
16
du même m o is;
2.® D e réunir en une feule exploitation toutes les extradions qui
fe faifoient dans les mines de Lapleau. & de Janoueix ; d’ordonner à
cet effet la réunion des extrafteurs en une
feule fociété. Et en cas
de refus de la part de ces derniers , d’annoncer par affiche la conceffion desdites mines,
à exploiter d’après les
Cet avis
dans
qui ne
& de l’accorder à ceux qui fe foumettroient
règles
doit
de l’art.
le jour qu’à l’erreur
&
à la prévention
laquelle l’agence des mines fut entraînée, flattoit les défirs de
S t.- ViUour ; il fit fon poifible pour le
faire adopter. Il
intrigua
auprès de
toutes les autorités ; il follicità chez tous les Miniftres \
&
par-tout le prétendu
défaut
de l’interruption
travaux de la manufacture.
allégua
imaginaire
des
de
houille
&
le danger,
Ses follicitations ne ceffèrent pas qu’il n’eut obtenu l’adoption
du projet. Il comptoit ii peu que les propriétaires des mines de Lapleau
s’ aflocieroient pour exploiter en commun , qu’il réclama d’avance la
concejjion au C ito ye n Benezech , Miniftre de l ’intérieur , qui ren vo ya
fa demande à l ’adm iniftration centrale du département de la Corrèze.’
Mais il fe trompa dans fes conjeûures ;
le huit floréal an 5 le St.-Viftour^ e
Miniftre adopta la propofition du confeil des mines. Et le 24 nivôfe
an 6 les propriétaires de Lapleau fe réunirent pour demander l’exploi. .
. ,
r
.
1
tation , q ui leur fut adjugée le 13 ven tô fe
c o m p a g n ie
M azau .
Treich-Lap lent fut le
an 6 ,
fon^tientc; 1<
propriéuiicsi
reunillent ex
fous le nom de CCpté Treich
feul qui refufa
d’entrer ^ n^nnent *1
dans cet a£te d’ union Sc q Uj - v o u lu t , a vec raifon , conferver le p ro - concelRon.
d u it de fes mines 6c le droit
de les exploiter.
Ladm iniftration centrale de la C orrèze ordonna qu’il feroit tenu
«le déclarer , dans qu in zain e, s’il entendoit fe
propriétaires ; à défaut de
réunir .aux autres
quoi fon filence feroit pris pour une
�.( *4 )
renonciation
à
la faculté qui lui étoit accordée par la loi. II ne
reftoit -plus qu’à faire approuver cet arrêté par le D ireftoire , pour
que Treich-Laplene fut dépouillé de l’exploitation de fes mines , & par
conféquent St.-Ficlour à qui il en a vo it
tranfaâion
concédé le droit par
la
paffée avec Bettinger.
A in fi, St,-Victour devient dupe de fa trâme artificieufe. Il tombe
lui-m êm e dans le piège qu’il a v o it vo u lu tendre à tous les pro
priétaires des mines de Lapleau ; il eft obligé de réclamer contre fon
propre f a it , tout comme Treich-Laplene à qui il cherchoit à enlever
1
le bénéfice du traité du
16 juin 1793. Q uel fatal dénouem ent!
! "Viilour &
T ous deux s’empreffent de former oppofjtion à l ’hom ologation
îich-LapIene j e l»arrêté du 23 ventôfe an 6 , rendu en faveur de la compagnie
.^poiental arJ
f
_
.l* du 23 yen- Maçau. O n verra par la fuite les nouvelles intrigues de S t.-V ictou r,
I? an
celles de la fociété Mazau , contre lesquelles Treich-Laplene eft
traint de fe défendre. Mais nous fommes forcés
\
Suite relative au procïs des mines de la
n ila n c e d u
de revenir au procès
intenté contre la Dam e veuve Lachaud & conforts.
1
> l’an 9 Treichj
con
p r o -
Charoulïère'.
Il ¿toit reité indécis au ci-devant Sénéchal de T u lle. Treich-Laplene
profite du premier moment lucide qu’on lui laide pour en reprendre
5Charoulibree ^ n^ance au Tribunal d’appel de L im oges, à qui la nouvelle organifation judiciaire en attribuoit la connoiffance.
D eu x queftions y font agitées : la compétence & la prescription.
cxceptedel’ar-
L a Dam e Lachaud &c conforts prétendoient que le Tribunal n’étoit
■
.l'c a n V & l’on pas compétent pour ftatuer fur le mérite de la fentence du Juge de
utient que 1° St.-Ancel du 17 mai 1782. Elle faifoit réfulter cette exception du
ribunal d ap°
'
.
Jîl de Ijimoges fameux arrêté de 1admimilration centrale de la Corrcze du 23
}t<!'oTentatgricv. ventôfe an fix. Treich-Laplene, en foutenant la compétence , foutenoit
au fon d s, que la réferve de prendre du charbon dans la terre de
f
la C h aroulicre, que s’étoient faite les auteurs d’Antoine Beynes ,
1
ctoit prescrite ,
d’oii il co n d u o it
qu’il avo it
été
mal jugé ,
&
�0C±
( ‘5 )
demandent que les Intimés fuiTent condamnes à lui
poflefïion & jouiflance
✓
Le
zz
delaifler la libre
de la terre & de la mine de la Charoulière.
ventôfe an n e u f , le Tribunal d’appel
de Limoges c o n - L e
Tribuj
fidérant qu’il s’agiffoit de prononcer fur le bien ou mal jugé d’une m ogeffed?
fentence antérieure à l’arrêté du xx ventôfe an 6 ; que d’ailleurs rc compote:'
J
1
t
retient la c. ,
cet arrêté n’étoit pas exécutoire , n’ayant pas été approuvé par le
premier Conful, fe déclara com pétent.
Le
2.8 germinal fuivant ,
*
ftatuant fur l’a p p e l,
i
il confidéra que Le a^germî^
la prescription ¿toit acquife\ & en réformant la fentence du Juge de
St.-Angel , il maintint Treich-Laplene dans la pofleiïion oïi il é t o it ,
c e ^ u Jugéji
S L -A n g elj
à la fuite de fes auteurs, de jouir de toutes les mines de la Charoulière ,
Treichmaii
&
“ ,!P<ïans, lapi,
icilion des «•
fit défenfe à la Dam e Lachaud & autres de l’y troubler.
J
• La Dam e Lachaud. & conforts fe pourvoient en
ces deux jugements.
caffation contre
Leur pourvoi eft m otivé fur quatre moyens :
i.° Excès de pouvoirs de la part des Juges de L im oges;
1.0 Suppofition d’un jugement
par lequel
on
prétendoit que le
Tribunal civ il de T u lle avo it reconnu l’incompétence ;
3.0 V iolation de l’ordonnance de 1667 Par la
jugement d é fin itif,
des parties ;
nonobftant la
prononciation du
notification du
décès
de l’une
4.0 Prétendue m inorité interruptive de la prescription;
Le premier m oyen eft re je tte , à l’unanim ïté, à la feâion des mé
moires. Le fécond l’eit aufli , parce qu’il n’étoit fondé que fur une
allégation dénuée de preuve. Il en eft de même du troifièm e, par la
raifon que le décès d’Antoinette Beynes , arrivé pendant la litispen
d ence,
n a v o it
été
notifié qu’après le rapport
du p ro cès, & une
ou deux heures avant la prononciation du jugement. La requête n’eft
admife que fur le dernier moyen pris de la minorité : moyen dénué
de fondement & que
Tteich-LapUne avo it complètement refuté dans
la réplique en griefs que les demandeurs avoient eu foin d’eximer
de leur doflier.
roulibrè?
�( 16 )
L’admiflion de leur requête, n’étant donc que l’effet de la furprife *
ne devoit avo ir qu’un fuccès éphém ère, & devoit écheoir au creufet
d’une discuifion contradictoire. La Dam e
Lachaud qui le p révoyoit
&
qui s’ctoit rendue à Paris à deux fin s, & pour fuivre le procès
&
pour tâcher de faire hom ologuer l ’arrêté du 23 ventôfe an fix ,
fe rabattit fur fon prétendu moyen d’incompétence , quoiqu’il eut
été généralement méprifé par tous les Juges des requêtes. Et comme
c’étoit
fa feule
œ uvre pour
la
arm e,
unique
reffource ,
elle mit
tout
en
faire accueillir. C ’eft une femme a d ro ite , qui eft
à-la-fois l’auteur &
la
fon
le ibutien
de
la conteftation fur les mines de
Charoulière , & l’ame de la fociété réunie fous le nom de com
pagnie. Ma^au. T o u t
ce que
l’intrigue peut a vo ir de plus fo u p le ,
tout ce que la fubtilité peut a vo ir de plus captieux , fut em ployé
par elle.
A v a n t de hafarder fon pourvoi en caffation, elle eut l ’adreffe de
préfenter au C ito yen CHAPTAL , Minijlre de £Intérieur , une pétition
par laquelle elle demandoit la confirmation de l’arrêté du 23 ven
tôfe an 6 , &
l’annullation provifoire
par
vo ie
adminiftrative des
fusdits jugements : elle cherchoit par là à enchaîner l’opinion du
Tribunal fuprême, & à le forcer enfuite à les caffer lui-même en
vertu de la décifion miniftérielle qu’elle auroit obtenue.
Le
Miniftre
ne put accéder à
cette
dem ande,
non - feulement
parce qu’elle étoit attentatoire à l’autorité ju d iciaire, mais encore parce
que le confeil des mines ,
dans un rapport du mois de prairial an 7 ,
s’ctoit oppofé à l’exécution de l’arrêté ; mais il fit circuler une instruftion fous la date du 18 meffidor an n e u f, dont la Dam e Lachaud
fe prévalut fortement &
qui paroît avo ir
influencé
le
Tribunal
de caffation.
Dans cette in ftruttion ,
le Miniftre
d’accord avec le
confeil des
m in e s, pofoit en p rin cip e , que depuis la loi du 28 juillet 179 1 ,
les mines font propriétés nationales , &
que
pas même les propriétaires de furface ,
nul ne peut les exploiter,
fans
s’y être fait autorifer
par les corps adminijlratifs, Le Citoyen Giraud , commiilaire du G ou
vernement
�( 17 )
vernement près la a.ème
fes co n clu fio n s,
fe âio n
civile J .adopta ce principe dans
il en tira deux conféquences :
|:
.
La première , qu’il ne pouvoit. exifter entré Treich-Laplene &. la
D am e
Lachaùd & conforts! de conteftation fu r la propriété des mines
de la Charoul'àrc.
"O
La
.
'
feçonde ,
.
. .
•
f"■
,
■
que les T rib u n au x
t
ne font pas
*| ■:
compétents pour
accorder la permilîion d’exploiter les mines.
'
D e là il conclut que le T ribu nal -dfappel a vo it commis un abus
ide p ouvoir- en maintenant
desdites
Treich-Laplene, entpoffeiïion, &
jouiffance
mines.
Il fît réfulter un autre m o tif d’incompétence de la lo i du 24 août
1790 & de l’arrêté du 23 ventôfe an 6 de l’adminiffration centrale de la
Corrèze. 11^ dit que fuivant l ’article 1 3 , titre1 2 de la lo i p ré c ité e ,
les Juges ne peuvent , à peine de
fo rfa itu re,
troubler de quelque
maniéré que ce fôit les opérations; des', corps adminiftratifs. Que
d’apres 1 arrête la veu ve Lachaud & conforts ctoient autorifés à ex
ploiter 6c jouir les mines de la Charoul'ùre , comme comprîtes dans
l ’étendue de leur cônceffion ; que le T ribu n al
contrevenu à cet a rrê té ,
d’appel éto it dès-lors
& que par conféquent il y a vo it violation
de la lo i. .
C e fyftème eut
fimple majorité :
22 ventôfe
&
plufieurs contradiûeurs , il ne fu t admis qu’àl la L<ii4myôii
mais
28
forte qu’un moyen
eut un plein fucccs
il
prévalut néanmoins ; les, jugements des
germinal
a a ç> furent caffés &
De
^ aeppelT j
unanimement, re je tté , à lu feâio n des. requêtes ,
inoges a t
à la fe&ion c iv ile ;
annullés.
de forte que l’opinion, de
fept ou huit Juges l’emporta fur celle de 22 ou. 23.
R É F U T A T I O N
«
p g
ç £
ou s’il a v o it le
e n 'lè s com m entant, d’ én changer les difpofitions &
dénaturer le fens : Si lu i &
les Juges qui
avoient reçu le don ¿infaillibilité,
les Pouvo^
|
P R É J U G É
Si lés inilrù&iôns du ■
Miniflre ctoient des lois ,
p o u v o ir ,
caffatio« '.
d’en
ont partagé fon opinion
il faudroit respecter, comme un
�¿4»
,
;
C 18 )
oracle de
'
fageiïe /:.le ' jugçment - qui a ‘cafle ceux que le T ribu n al
d’appel avo it rendus, en
faveur de Treich-Laplene.
Mais quel eft le mortel qui eft infaillible fur la terre? Ne faito n pas^ que les lumières & ¿es venus n’affranchiffent pas toujours les
'Magiflrats de l’èrrèur ? Le T ribunal de caflation nous en
offre lu i-
même la preuve par les divers exemples de variations qu’on trouve
'dans les recueils de fa Jurisprudence. Il eft donc permis à T reich Laplene de démontrer l’erreur du
fyftème qui a fait triompher la
D am e Lachaud malgré- l’autorité respeûable de ceux qui l’ont .profefle.
i
C e fera au Tribunal "d’appel de R iom ; devant qiii là caufe &
les parties ont été re n v o y é e s, a apprécier fes preuves & Tes raifon i
!
nements. La lo i fera fon guide &
|!
§.
fa bouffole,
P r e m i e r .
E J î - i l v r a i d abord qu e
.
.
.
le s m in es de h o u ille ou charbon de
terre f o n t une p ro p riété N a tio n a le ?
]
>s q u e d ’a t la lo i « o u , les m i n e s
L e M i n i s t r e & le confeil des mines nous permettront de foutenir •
le contraire.
L ’article premier de la loi du
.
« Les mines tic minières ,
îenteaPaux ” ainfi
que les b itu m e s ,
28
,
juillet 1 7 0 1
tant métalliques
charbon de
eft ainfi conçu :
>'
que
1
non métalliques ,
terre ou de pierre &
p y r it e ,
en. ce fens feulement que ces
y, fubjiances ne pourront être exploitées qiie de fon confentement & fous fa
riétaires de » font
çe"
. .
à
la dispofition
de la
N a tio n ,
» furvtillance ».
C et article ne dit pas que les mines
appartiendront à la Nation ;
mais feulement qu’elle pourra en dispofer. Il s’explique , il n’attribue
à l’État que le droit d’en permettre &
,
Cependant fi
elles
euflent été
produit , le prix ou
auroient été réfervés
d’en furveiller l’exploitation.
déclarées propriétés
la valeur des matières
au
Nationales ,
extraites ou
le
extraire
Gouvernement. C ’eft tout le contraire ÿ
l ’indemnité eft_ attribuée aux propriétaires de la furface.
�$ O Ï>
( *9 ) '
A la charge J eft-il d i t ,
d’indemnifer d’après les règles qui feront
prescrites , les propriétaires de la furface.
L ’article v a plus lo in , il ajoute : « que ces propriétaires jouiront
» de celles de ces mines qui pourront être exploitées ou à tranchée
» o u v e rte , ou avec
foile &
lumière , jusqu’à
cent pieds de pro-
» fondeur ». C ’eft-à-dire qu’il les autorife à les exploiter fans avoir,
befoin d’autre autorifation.
Ainii , ¿es mines de houille ne font donc pas propriétés Nationales ¡
mais bien propriétés particulières.
E t qu’on fuive les autres dispoiitions de la lo i , on verra que le
Légiflateur les a
confidérées par-tout comme appartenantes aux pro
priétaires de furface.
L ’article 6 décheoit tous les conceffionnaires, de celles qui étoient
exploitées par les propriétaires avant les conceiïions & ordonne que
CCS iïîiTics retourneront A ces derniers•
A u ro it-il prononcé
cette reftitu tion , s’il
eut entendu les réputer
propriétés Nationales ? Cette idée eft inconciliable avec la déchéance
des conceffionnaires , parce qu’alors il eut été faos raifon pour décheoir ceux-ci &
Ce
rétablir ceux là.
retabliffement
mines, a
des propriétaires
été déterminé par un
dans l ’exploitation
m o tif quelconque ; &
de leurs
quel autre
m o tif peut-on fuppofer que celui de redimer ces propriétaires d e l’injuftice
qu’on leur a v o it fait en les dépouillant.
O r , fi c’eft là le but du Légillateur ,
il a donc reconnu qu’ils
avoient droit à la propriété des mines. L ’article 6 n’eft donc établi
que pour faire respe&er ce droit , pour le venger des atteintes qu’il
a v o it reçu ,
à YÉtat.
L ’article
non pas pour le détruire en
10 J porte en outre
appropriant les mine^
que nulle concefiion ne pourra être
acco rd ée, qu’auparavant Je propriétaire de la furface n’ait été requis
de s’expliquer s’il entend ou non procéder à ^exploitation.
C i
�W y
( ao )
C et article reconnoît encore
quelque
droit aux propriétaires de
la furface , puisqu’il leur accorde la préférence fur les conceffionnaires»
C e droit d’où
peut-il
d é r iv e r , fi ce
n’eft pas de la
propriété
qu’ils on t fur les matières qui font enfouies dans leur terrain ?
" C ette vérité réfulte inconteftablemefit, de ce qu’on ne peut extraire
ces matières fans les
in d em n ifer, lôrfqu’ils
n’exploiferft
pas eux-
mêmes ; de ce que le produit o u la valeur n’en éft point attribué
au Gouvernement ; de ce qu’il n’a que le droit d’én pèrmettré &
d ’en furveiller l’exploitation.
•„'Si PAiTemblée conftituante
mines „■de
charbon
a v o it. entendu approprier à i ’E tat les
de. terre y elle eut
appartiendroient à la N ation &
qu’à la
charge ,
déclaré
que
ces
fubftances
qu’elles ne pourroidftt être «^traites
par les conceflionnaires , d’en payer la ,v a le u r au
Gouvernem ent. Elle eut attaché un prix au droit de conceflion : elle
ne Peut accordé qu’au plus offrant &
dernier enchérifîèur.,
-,
»
Au contraire ,
elle attribue le droit d’exploiter de préférdftcè aux
propriétaires de furface. En cas de refus de leur p a r t ,. elle fonmet.
(
le conceflionnaire à les indemrtifer.. T o u s ces privilèges font â tt ii"
jj
butifs du droit de propriété ;
priétaires des. mines.
:
r
\ts que de
¡s t e m p s les
\es d o n t s’ a o n t été p r o aes
parut“
,
n
•
i
tt
Rois de France.
.
.
L >ordonnance donnée par C h arles V I le 30
maîtres des
très-fonds
ctoient feules exceptéeSi
"
les recdnnôît donc pré^
tous temPs ies mines de charbon ont été regardées- com m e
propriétés particulières ; citait un principe confacri paie les- E d i t s
la lo i la plus ancienne
.1:
1I
airtfi elle
fur les métaux.
Aiaii 14 15 , qui eft
que nous ayons , q u alifio it I’es> propriétaires,,
&
propriétaires
des
mines.
C elles de l?<Mf
L e M onarque n’a v o ir q u ’uni-droit dé dixièrtto
*•
*
Henry IV-donn? au mois de juillet 16 0 7 un Edit qui'Affranchit de
|
ce d ix iè m e, les mines de fou fre,
falpêtrfc ,
fe r,
,
charbon de .terre , ardoife 8c autres1 fortes de pierres,
O cre, pétroil' ;
�François Premier íe b o m a ,
( «
)
par
fon ordonnance
1 5 2 0 , à faire défenfe de travailler
aux
m in e s,
du
&
17
oû obre
de les o u vrir
fans la p'ertriiflidn du Roi»
Un
cette
arrêt rendu au confeil le 19 mai
permiifion
les ^ propriétaires
1698 J dispenfa même de
des mines de charbon , &
leur
permit de les ou vrir 8c de les mettre en exploitation,
C é ne fut que par un arrêt du 14 juillet 1744 , rendu en forme
dé règlement * qu’il leur fut fait une nouvelle défenfe de les exploiter
fans en à v o it obtenu là pérmiffión du contrôleur-général des finances.
Mais toujours eft-il
que le M onarque
ne prétendoit point que
les mines lui appartinfent par droit de fouveraineté.
T oujours, eft-il
qué lés propriétaires d’heritâges renfermants des mines, n’étoient aitu-.
jèttis à la form alité des perm iffions, que pour celles non ouvertes & dont
1 exploitation n’etoit pas entamée.
Com ment concevoir dès-lors que la lo i du 28 juillet 179 1 a
dépouillé de cette propriété les particuliers pour l’approprier à la
N ation ?
Comment le concevoir fur-tout lorsqu’elle décheoit les conceflionnaires des mines ci-devant exploitées par les propriétaires , que pour
rétablir ceux-ci dans leur ancienne exploitation.
Cette prétention eft fi étrange qu’elle révolte tous les propriétaires
dont les mines de houille &c autres matières combuftibles font toute
la richeffe.
E h . la nullité prononcée
des
anciennes
convaincre que le Légiflateur n’ eut
co n cevo n s fufHt pour
en- v u e , que de rappeller
les
principes /«r le droit de propriété , que de faire ceffer les injuftices Si
les aftes arbitraires commis au préjudice des particuliers,
E t l’on veut que cette loi foit créatrice d’ une lcgiflarion nou
v e lle ? q u elle dépouille les' propriétaires fur lés réclamations de qu?
’
�( 22 )
elle fut renduç ? O n veut faire tourner à leur ruine une lo i
faite
ppur la réforme des abus ?
Le premier M agiftrat e il trop jufte pour laiffer introduire ce fyftème
fubverfif dans l’adminiftration ; il ruineroit les propriétaires qui poffèdent
des mines dans leur terrain , &
n’enrichiroit pas le G ou vern em en t,
puisque la loi* n’attribue à la République aucun droit fur le produit
Sc la fubftance des mines.
Il ne profiteroit qu’aux
conceffionnaires, aux fpéculateurs; &
à
tous ces-hommes qu’on peut appeler les vampires & les fang-fues de
I
l’E ta t; & il faut é v it e r , dit un célèbre publicifte , que la fueur du
p a u vre , le plus pur fang des peuples
I
l
I
!-•
ne deviennent pas la proie
des fa v o r is , des aigles & des vautours.
Aucune mine de charbon de terre n’eft donc propriété Nationale
pafee-que
la
loi- fe borne à faire défenfe aux particuliers de les
exploiter fans le confentement de la N a tio n ,
Mais raifonnons dans le fens du Miniftre & des Juges du Tribunal
de caflation, qui ont
pofé en principe , que
d’après la
nouvelle
légiflation on ne reconnoit plus de propriétaires de mines.
i
ji
i ,(
K
La Dam e
L achaud
&
co n fo rts
avoient
ufurpé celles
de
la Cha-
roulière ; ils s’etoient fait maintenir dans cette ufurpation par fentence
du 17 mai 1782 ; vo yo n s fi le T ribu n al de Limoges étoit incom
pétent pour - rétablir Treich-Laplene dans fa jouiffancc.
1
.(2
‘ ribu na lcl’a p de L im o g e s
1 tlcu lcom p cÎ)Our r é f o ra icn te n ce
',lL ,782 , & il ne
fi v o it le faire
’* in p r o n o n —
■t la m a in te —
[ tle T r e i c h ! len ed an sfon
icn n e poÜes-
1,
§,
I I.
O n cherche par-tout cette incompétence &
on ne la trouve nulle
part. Treich-Laplene a v o it été exproprié en vertu d’un jugement ; il
falloit bien qu’ il fut réintégré en vertu d’un jugement. Q u i pouvoit
reformer la Jentence obtenue par fes adverfaires qu’un Tribunal d’appel?
qui pouvoit le réintégrer que l’autorité judiciaire ?
P ou voit-il
s’adrefler
aux corps
adminiftratifs ?
mais
les
corps
adminiftratifs ne font pas compétents pour infirmer ou confirmer les
'
�. •
.
( 23 )
jugements*; puisque les deux autorités ne peuvent s’immiscer dans tes
opérations l’une de l ’autre. F alloit-il qu’il abandonnât fa propriété
à fes ufurpateurs ? mais nulle lo i d ivin e ni humaine ne l’y obligeoit.
Le premier devoir de tout C ito yen eft de réclamer fo n .b ien pour le
conferver à fa famille.
On a
- ,
*
coniidéré qu’aucune queftion de propriété fu r Us mines ne
peut exiiter entre particuliers ; c’eft une' erreur que nous venons
de
démontrer.
du
Mais raifonnons dans • cette
fu p p o iitio n ,
de l’aveu
Miniftre de l ’in térieu r, de l’aveu des Juges qui ont cafte les jugements
de Limoges. Ce n’eft que
depuis
la lo i du 18
juillet 1791
que ces
fortes de queftions ne peuvent être agitées.
O r , la conteftation fur laquelle le T ribunal d’appel a v o it à ftatuer
n’ étoit pas nouvelle. Elle s’étoit élevée dans l’ancien régime dans un
temps où il ¿toit reconnu que ¿es mines appartenoient aux propriétaires
de furface ; elle avo it été jugée par fentence de 1 7 8 2 , Treich-Laplene
en a vo it
interjette appel. Il falloit bien prononcer fur le bien ou
mal jugé.
Et
com m ent
re&ifier
l’injuftice de la
fentence de l ’ordinaire
de
S t.-A n gel ? com m ent faire d ro it de l ’appel de Treich-Laplene, qu’en
le m aintenant en pofleiTion des mines de la Charoul'ùre &
condam nant
la D am e Lackaud 6* conforts au défiftat.
Mal-à-propos les Juges de cafiatiôn ont-ils dit. que par cette pro
nonciation , le Tribunal d’appel de Limoges
d ’accorder la
lo i
du
28
permiflion
juillet ,
d’exploiter : droit
s’étoit arrogé le droit
q u i , aux termes de la
appartient à l’autorité adminiftrative. Les T ri
bunaux d appel font o b ligés d’examiner la caufe dans l ’état ou elle
s’eft préfentée devant les premiers Juges. D e fa ir e , en réformant ce
que ceux-ci auroient dîi fa'ire ? ieur p ron on ciation fe rapporte au
paffé, on la confidere comme lî elle étoit intervenue quelques hetires
après les jugements dont eft appel. Et com m e le Juge de St.-Angel
étoit
compétent
pour rétablir
mines de la Charoulicre , le
auffi.
Treich-Laplene dans
Tribunal
d’appel
la
pofleiTion des
de Limoges l’étoit
�( 14 )
§.
Il
y
a
plus.
Tmch-Lapltnt
J
I
pour
I.
exploiter
p’avo.it pas bçfoin
d ’obtenir la permiflion des corps adminiftratifs. Lft loi }’y, autorifoit
de droit , &c il étoit d’ailleurs autorifé par l ’arrêté du département
de la Corrèze du 6 novembre 17 9 1.
Cette propofition détruit dans fa bafe le prétendu premier moyen
d’incompétence. Il ne, s’agit que d'en, proqveç l’affirmative ; 6i cette
preuve fe puife dans* la lo i dif 2,8- juillet 17 9 1.
l'enc6r^avoit~
b e fo in p o u r
L ’article premier porte ,
/.
.
comme on
l’a obfervé : « Que les mines
>> de charbon de terre ne pourront êtrç
exploitées: quei du corçfente-
¡Hapcrini^- ” me^t de
N ation & fous fa fur vaillance., à la charge d’incjemnifer
1 de l’a u t o r it é „ içs propriétaires, de la furface ». Il ajoute : « que ceux-ci jouiront
»unifirative.
^ ^
outre de celles dç ces, mines qui peuyent être exploitées ou à
>> tranchée ouverte ,
ou ayeç foffe & lu m iè re , jusqu’à cent pieds
» de profondeur feulement ».
Cette faculté a néceflairement un but , ou celui de dispenfer les
propriétaires de furface de demander la permiflion d’expioiter jusqu’à
cent pieds de p rofondeur, ou celui de reltreindre à ce dégré l'ex
ploitation des mines.
Le but de la loi ne peut pas être de lim iter à cent, pieds, de pro
fondeur- la
auçune
faculté
raifon
d’exploiter
Us
mines ,
pour empêcher de les
parce
qu’il
n’y
avo it
exploiter plus à fonds. Cette
prohibition feroit. d’ailleurs contraire à l’économie politique & par
ticulière ,
puisque fouvent ce n’eft qu’au-deiTous de cent pieds que
fe trouvent les meilleures fubftances minérales.
•
la
C e but ne peut pas être non pli^s de reftrëindrc à cette profondeur
préférence qui eft accordée aux propriétaires de furface. fur. les
conceflionnaires , puisque l’article 10 v e u t , fans d iftin û io n , qu’aucune
conceffion ne puiiTe être accordée qu’auparavant les propriétaires de
furface n’ayent été requis de s’expliquer.
L ’intention
�L ’intention manifefte du Légiilateur n’a donc été que de permettre J
T>ar l’article premier de la l o i , aux propriétaires d’exploiter jusqu’à
cent pieds fans a vo ir befoin d’autre autorifation.
r
O r , les mines de la Charoul'ùre dans la
s’agiffoit de rétablir Treich-Lapleat
jouiffance desquelles il
n’étoient & ne font encore pas
creufées à un tel dégré. Première raifon pour laquelle Treich-Laplene
n’a vo it pas befoin de permiflion pour exploiter.
L ’article
6 en prononçant la déchéance des conceffionnaires des
mines d éco u vertes,
ordonne en outre que ces mines retourneront
aux propriétaires qui les exploitoient avant les concertions ,
O u il faut convenir que ces propriétaires jadis exploitan ts, font
encore dispenfés par cet article
ploiter , ou
il
faudroit
dire
des demandes
qu’on
peut
en permiflion d’ex
leur
refufer ce qxie la
lo i leur accorde,.
En effet, les propriétaires de furface qui font affujettis à demander
la permiflion pour exploiter peuvent être privés de ce droit fi leur
propriété feule
étendue
ou réunie à celles de leurs affociés n’eft pas d’une
propre à former
une exploitation. C ’eft la dispofition
l ’article 10.
de
i
O n ne peut concevoir l’idée qu’on
peut
priver les propriétaires
dépouillés par des concertions y de la rentrée en jouiffance des mines
qu’ils exploitoient avant. C e feroit étrangler le fens &
l’esprit de
la lo i. L’article 6 veu t que les mines foient rendues aux propriétaires
qui les exploitoient avant les
concertions.
rem pli.
propriétaires
La réintégration
des
Son but ne feroit pas
dépouillés
deviendront
illu fo ire, s il dependoit des corps adminiftratifs de la leur refufer.
S i donc la lo i les
couvertes &
rétablit dans la jouiflànce des mines jadis dé
exploitées par
eux ,
fi
on ne peut leur
bénéfice de cette lo i. Il faut c o n v e n ir , de toute
les
affranchit de l ’obligation
adminiftratifs à les
de
exploiter ,
fe
faire
puisque
enlever le
néceflité ,
qu’elle
autorifer par les corps
ceux
qui
font
D
fujets à
�( *4)
cette permiflion peuvent
en certains cas ,
être
déchus
de leur
demande.
O r,
Treich-LapUru eft du
nombre
des
propriétaires à qui des
çonceifions injuftes^ avoient enleve l’exploitation ' de leurs mines. Ses
^uteurs exploitoient celles de la terre de la Charoulière long-tejîips
avant la conceifion obtenue par St.-Viclour. Il étoit dorçc epcore
fous ce rapport dispense de la permiflion du département de l i
Corrèze pour rentrer *èn jouiffance.
A u fait , il eil deux cas oit les propriétaires de furface nè font
pas afireints à cette* permiflion : celui où leurs mines ne font pas'
creuiees à cent pieds, & celui où ils font rétablis dans celles qu’ils
exploitoient avant les conceflions annullées par la lo i.
E t ii l’on veut à toute force ,
que pour o u vrir une mine &
pour entamer une exploitation , le propriétaire de fitrface ait befoin
de fe faire autorifer ; il faut toujours avouer que celui qui exploitent
avant la l o i , fur-tout avant l’arrêt de règlement de. 1 7 4 4 , n’y eft
pas
obligé.
Cet
arrêt
respe&a
l’exploitation
des
propriétaires
qui
avoient
ouvert des mines auparavant. Il fit feulement défenfe d’en o u vrir
d’autres fans la permiflion du contrôleur-gcncral. C e feroit fuppofer
la lo i de 1791 in tro d u â ive d’un droit nouveau , &
effet in ju fte ,
que de prétendre
qy’elle afliijettit
lui donner un
ces
mêmes pro
priétaires au befoin de l’autorifation pour continuer leur jouiffance»
T e l n’eft pas le but de cette l o i , car loin d’a b ro g e r, elle •con
firme les anciens principes ; le Légiflateur a montré fa fagefle dans
l'article 6. Une preuve qu’il n’a point entendu foumettre
les- pro
priétaires qui exploitoient long-temps a v a n t , à demander une permiflion
pour continuer d’exploiter ; c’eil qu’il a déchu les conceflionnaires
qui -avoient obtenu la conceifion de celles de ces mines déjà decou-^
verte* & exploitées par les propriétaires ,
pour
y
réintégrer
ces
derniers.
11
cil
donc prouvé
que
TreithrLaplent
n’a vo it
pas
befoin
de
�¿(1
( *7 )
demander la permiffion pour exploiter les : mines de la
qui font ouvertes avant
1744 ôc que fes auteurs avoient toujours
exploitées jusqu’au moment de
Cette 'permiffion
il
Charoulière
la
l’ufurpation,'
tenoit de la
!
lo i , 'e lle
a vo it
d’ailleurs
'été accordée par l’arrêté du département de la Corrèze à qui il s’étoit
fcdrefle pour évincer St.-Vi&our. D ès-lôrs le T ribu n al d’appel n’empiétôit
pas fur l’autorité adminiftrative en le m aintenant dans la poiïeflxQn
desdites -mines de la Charoulière.
>
C ’eft en confondant la permiffion d’exploiter \ avec
la mife
en
poffeffion des mines devant être exp lo itées, que les parafants du
fyftème d’incompétence fe font fait illufion. La permiffion peut être
du domaine des Corps adm iniftratifs,
fi elle n’eft l’office de la loi.
Mais le droit de faire délaiffer la propriété &
jouiffance de l’objet fur
lequel cette permiffion doit être exercée eft du reffort des T rib u n a u x ,
parce qu’ ils font juges des différents qui s’élèvent entre les C ito y e n s ,
le Tribunal d’appel n’a v o it pas fait autre c h o fe , donc il n’a vo it pas
excédé fes pouvoirs.
Il ne refte plus qu’à examiner le fécond m o tif, par lequel on a
prétendu qu’il ctoit incompétent.
*
O n le fait réfulter de l’arrêté du 23 ventôfe an fix , qui attribue
l ’exploitation des mines de Lapleau &
Janoueix , aux propriétaires
unis fous le nom de com pagnie' Ma^au , avec qui Treich-Lapkne ne
vo u lu t pas fe joindre.
Cette conceffion, dit-on j « comprend les mines de la Charoulière ;
v &
a vo ir condamné la D am e Lachuud &
conforts ,
qui font du
»> nombre des conceffionnaires, à s’en défifter, 'c’eft a vo ir contrevenu
» à l’arrêté adm iniftratif »,
§.
1 y ,
U N E SEULE O B SE R V A T IO N détruit cet argument. C ’eft que l’arrête
n’étoit pas exécutoire , «\ défaut d’être approuve par le premier Conful j
&
qu’il n’a jamais cté exécuté,
D "
�C**)
L ’article 8 de la lo i du 28 juillet 1791 ; s’exprime àinfi : « T oute
» conceflion ou permiflion d’exploiter une mine ,
fera accordée par
» le Département , fur l’avis du D iftrift , dans l’étendue duquel elle
» fe trouvera iitu c e , 6* ladite permijjion ou concejfion ne fera exécutée
» qu'après avoir été approuvée par le R oi , conformément à l’article 5 ,
» de la feftion 3.ème y du décret du 22 décembre 1789 ,
» affemblées admiriiftratives ».
fur les
C et article feul établit que l ’arrêté dont on excepte , n’étoit pas
exécutoire jusqu’à l ’approbation du p r e m ie r C o n s u l ,, qui ne l’a pas
fanftionné &
qui ne le fan&ionnera pas.
Et la preuve qu’il n’a jamais reçu d’exécution , c’èft que nonobftant^
Treich-Laplene a toujours joui & continue encore de jouir , des autres
mines concentrées dans fon terrain , ou quoiqu’il en folt St.-ViU'our,
à qui il céda le droit de les exploiter par traité du 16 juin 1793.
>
D ans cette occu rren ce, il n’étoit donc pas poflible que le Tribunal
d ’appel de Limoges contrevint à cet a rrê té , puisqu’il étoit fans fores
& fans vigueur. Auffi , entendit-il fi peu le co n tra rier, qu’il renvoya
la D am e Lachaud &
conforts par-devers le Gouvernem ent pour le
faire hom ologuer.
Pour y porter a tte in te ; il eut fallu que les adverfaires euffent
tenus les mines de ta Charouliïre en vertu de la conceflion ; & ils
11e les tenoient que par ufurpation , & en vertu de la ièntence du
Juge de St.-Angel. Ils ne pouvoient pas les jouir en vertu de l’arrêté
puisqu’il n’étoit pas exécutoire , & puisque s’il ne fu t intervenu
qu’après
Pinfirmation de la fentence &
après que Treich-Laplene eut
cté en poiTeiTion,.on n’auroit. pas pu l ’évincer fans l’avo ir fait approuver^
Difons donc que fous ce fécond rapport, il n’ÿ avo it ni excès de
p o u v o ir, ni tro u b le , ni immixtion de la part du Tribunal d’âppel de
Limoges , dans l’autorité admi'niftrative.
Difons que tous les raifonnements contraires, ne font que paradoxes j
erreurs &c fubtilités , que la faine raifon dispenfe de rçfuter.
�3 1 3 « ’
( 29 )
En
résu m é,
Il eft prouvé
l ’incom pétence a llégu ée n’eft qu’ü n e chimère."
i .° que
dans les anciens principes , les mines de
houilles ne fefoient point partie du d o m a in e'd e la
la
n o u v e lle
couron ne;
que
. légiflation n’a rien changé à cet égard; d’oit la confé-
quence que la propriété d’une mine peut très-bien faire le fujet d’une
conteftation entre particuliers.
z.o Quand la lo i du 18 juillet 1791 j les àuroît déclarées propriétés
nationales , il fuffit que dans l’ancien régime elles fuffent propriétés
particulières , pour que les Tribunaux foient compétents pour ftatuer
fur une queftion de propriété , élevée dans ce temps-la..
C elle qui eft agitée entre Treich-Laplene &
la Dam e Lachaùd , eft
de ce nombre : elle avo it été jugée fpar fentence de 17.8a, ; il ne
s’ agit que de pronpncer fur le bien ou mal jugé ; & comme ce b ie a
ou mal jugé ne peut s’examiner que d’après les lois & la jurispru
dence d’alors , le
le premier Juge.
T rib u n al d’appel eft aufli compétent que l’étoit
Aucune a u to rité, qu'un Tribunal d’appel, n’a le droit de condamner
la D am e Lachaud & conforts , au déûftat des mines de la Charoulière.
La lo i du z8 juillet 1790 n’en a pas transmis la compétence aux
Corps adminiftratifs , & on ne peut pas l ’invoquer parce-que fe feroit
lu ï donner un effet rétroa& if.
3.0
!
Fut-elle ap p lica b le, le point de compétence feroit toujours le
même. Elle ne donne que le pouvoir aux Cérps adminiftratifs de
donner des permiifions d’exploiter ; &
il eft plufieurs mines pour
•desquelles elle n’affujettit pas les particuliers ou propriétaires de iürface,
de demander cette permiflîon. Telles ion t'celles qui étoient ouvertes
£C exploitées par ces propriétaires
avant les conceiïions qu’elle dé
clare nulles. O n peut encore ajouter celles qui’ ne font pas creufées
jusqu’à trois cent décimètres.
De
ce nombre font les mines de la .Charoulière : elles
ouvertes
&
étoient
en exploitation lors de la conceflion générale obtenue
par St.-V iilou r,
Treich-Laplene en eut repris la jouiffançe en vertu
�( 3° )
de la loi
fi‘ la Dame- Lachaud & conforts n’avoîent pas eu une
fentence qui confacroit l’ufurpation qu’ils en avoient fa it , d’oîi il fuit
que l’autorité judiciaire ctoit feule compétente pour la réprimer.
4.0
Soutenir que le rétabliflement de Treich-Laplcne, dans fon an
cienne poffeflîon, porteroit atteinte & contrarieroit l’arrêté de l’adminiftration centrale de la C o rrè ze , c’eft un paradoxe évident. Si cet
arrêté étoit exécutoire, fi la Dam e Lachaud &c conforts jouiffoient
desdites mines en vertu d’ic e lu i, il y
auroit contrariété &
attentat
aux opérations de l’autorité adminiftrative. Mais ce n’eil ni l’un ni
l ’autre ;
la compagnie Mazau n’exploite point encore , &
ne peut
exploiter ; par conféquent il faut commencer par rétablir les chofts
dans leur état prim itif.
Ainfi , le T ribu nal d’appel de Riom n’a pas d’autre prononciation
à adopter que celle du T ribunal d’appel de Lim oges. Im p a rtia l,
éclairé &
courageux dans fes princip es, comme il l ’a toujours é t é ,
il ne doit céder à aucune espèce de prévention , pas même à celle
que peuvent inspirer le m érite,
la réputation &
l’autorité des M a-
giftrats qui ont prononcé ou émis leur opinion dans cette affaire. La
loi , la raifon , la vérité : v o ilà fes régulateurs.
Et en fe prononçant fur la compétence , il doit d’autânt moins
craindre pour fon jugement le fort qu’ont éprouvé ceux du Tribunal
d’appel de Limoges ;
que ces jugements n’ont été cafles que par la
m inorité des membres du T ribunal de caffation , contre l’opinion du
plus grand nombre.
Cette discuiïïon , C ito yen p r e m ie r C o n s u l , quoique p aroiffanf
¿pifod iqu e, n’eft pas fans analogie avec celle que Trelch-LapUne doit
vous préfenter , contre les demandes en conceifion de S t,-V 7clour &
de la compagnie Maçau. En même-temps qu’elle éclaire le Tribunal
de Riom fur fa compétence , elle réfute plufîeurs erreurs de principes
dont on veut entacher la législation &
fur laquelle on fonde l’espoir
d’envahiffcment de toutes les mines de Laplau.
REPR EN O N S la fuite des faits relatifs aux manœuvres des préten
dants , ôc on fe convaincra de cette vérité.
�O n a v u St.-Viciour trompé dans ion attente par l’ unîon des proprié-
pj
taires de furface qu’il avo it lui-même provoquée , s’oppofer à l’approbation de
l’arrêté
du
23
vèntôfe
an
fix ,
qui leur conféroit
>jj;!
l’exploitation des mines. Jusqu’alors il ne s’étoit fervi que de voies
t î■
;
o b liq u es, que de moyens artificieux pour s’affranchir des engagements
il ;
qu’il a vo it contra&é avec Treich-Laplene : déformais fa cupidité fe
! fi
dévoile & il marche droit à fon but.
• Il demande l’annullation , non-feulement de l’arrêté du 23 ventófe \ Déclamation,
mais même du traité fait avec Treich-Laplene, & il réclame hautement ^¿'les^proVn
la conceffion. C e n’eft plus du prétexte de manquer de charbon > taires.
dont il fe fe r t , comme il le fefoit lorsqu’il cherehoit à faire réunir
-J-;
les diverfes extradions que chaque propriétaire fefoit dans fon terrain ;
|■!
il
attaque de front les qualités perfonnelles des propriétaires réunis
p our exploiter ;
art , &
il allègue leur ign o ra n ce, leur impéritie dans cet
leur défaut de moyens pécuniaires; il prétend que les mines
font des propriétés publiq ues, d o n t’l’exploitation p e u t, fans injuftice,
être confiée à des C itoyens qui n’ont aucune propriété de la furface.’
L ’ intérêt eft un fi grand mobile , que les intrigues & les involutions
de
conduite &
de
fyftème de St.-V iciour, pour envahir l’objet de
fa co n v o itife , ne préfentent rien d’ étrange. Mais ce qu'il y a d’étonnant , c’eft de v o ir le Confeil des mines qui a vo it propofé lui-même
de contraindre les propriétaires à fe réu n ir, pour établir une exploi
tation commune , fous la direction d’un c h e f, faire im fécond rapport
an
M in iftre, pour les écarter &
pour empêcher
l’approbation de
l ’arrêté qui leur conféroit cette exploitation.
• Ce rapport eft du mois de prairial an fept. O n y dit : «que la Le confeil des
•
w
n
,
•
. .
» compagnie M a z a u , daprès íes propres a v e u x , n a ni les moyens
» pécuniaires, ni les connoiflances théoriques ou pratiques requifes
» pour garantir au Gouvernem ent une bonne exploitation ».
» Q ue quant à Tnich-Lapàine , il s*eil fait une faufie idée de fon
» droit de propriété ; qu’on ne lui contefte pas celle de la furface ,
» qu’il peut la labourer , en récolter les f r u its , l’affermer , la vendre ,
» mais que le fonds ou l’in térieu r, la m in e , le charbon caché dans-
nes
s ’o n p o f
phomolo^atî
�( 3 0
» les entrailles de la terre ; le droit de l’en extraire, d’en dispofcr,
» de le vendre ;
que tout cela eft inconteftablement une propriété
» p u bliq u e, & que c’eft la jurisprudence de tous les pays & de tous
» les temps ».
O n obferve
« que la conceflion des mines de
Lapleau convient
» mieux aux entrepreneurs de la manufacture d’armes de T u lle qu’à
» tout autre. Mais comme le défaut de débouchés-, l’état'de langueur
» de la m anufafture, le s . reproches graves qui font faits à ces En» trepreneurs , empêchent
de
pouvoir
décemment
leur donner 1?
» conceflion ; on leur conferve le moyen &c l ’espoir d’être mieux
» accueillis dans un temps moins fâcheux ».
Le Confeil des m in es, termine par conclure à ce que tous arrêtés
de conceflion , tant
générale que p articu liè re , pris en 1791 ,
1795
& en l’an 6 , foient annullés ; que tous aûes & conventions paffées
fur le droit de propriété prétendu fur les mines & fur leur produit par
lçs propriétaires de la furface , le 1 foient égalem ent, & à ce que l’on
accorde , à chacun d’e u x } de iimples permiflions p ro vifo ires, limitées
& révocables à v o lo n t é , d’extraire du charbon jusqu’à trente mètres
de profondeur, en attendant que les Entrepreneurs de la manufacture
rétabliflent leurs affaires, leur crédit & leur bonne réputation auprès
du G ouvernem ent, pour pouvoir leur rendre la conceflion.
- T e l eft ce rapport qui donna lieu fans
miniftre du
18 meflîdor an n e u ft &
doute à l’inftruQion du
q u i fa germer dans la tête de
quelques Magiflrats l'idée que LES m i n e s fo n t des propriétés nationales.
Plus il eft défavorable à la compagnie
espère en
tirer d’avantage. D éjà
il
Ma^au, plus St.-Ficlour
le regarde
comme
un
gage
afliiré de la conceflion. Mais fa demande n’obtient pas plus de fuccès
que celle de Mazau. En vain l ’un &
l’autre dans une guerre polé
mique fe disputent-ils les dépouilles de Treich-Lapltnt ? La Juftice &
l’impartialité- voyants
&
cette lettre
fcandaleufe ,
protègent l’opprimé
le couvrent de leur égide,
O n veut parler du G é n é ra l, Préfet du département de la Corrèze :
CE M a g i s t r a t aufli louable par fon éq u ité que recom m andable par
fa
�«bd!
( 33 )
ria b ra v o u rè , InacceiTible à l’intrigue & à la
prévention
n’écoute
•que la lo i & la Juitice ; le lô p l u y iô f e an i z il rend en conféquencc
l ’arrêté
fuivant :
« V u la lettre du M IN ISTRE D E L ’IN T É R IE U R du 2.6 brumaire
» dernier , pour l’inviter à émettre /on avis fur les conteftations rela» tives aux m in es de charbon fituées à Lapleau ».
« V u a u fli,
»> les
dans le plus grand d é t a il, les pièces produites par
parties contendantes ,
» respectives
du C itoyen
» Maqau, d'autre
part ;
après un mûr examen des prétentions
Trtich-LapUnt d’une p a r t , .de la fociété
&c enfin des entrepreneurs &
propriétaires
» de la manufacture d’armes à feu de T u lle ».
« Confidérant que par l ’arrêté de ¿oncefjion du
» le
délai accordé
au
C ito yen
Trtich-LapUnt
i8 ventôfe an 6 ,
pour
déclarer s’il
» entendoit ou non faire partie de la fociété , fu t fix é a quinzaine,
>> contre les dispojîùons formelles de l’article 10 de la lo i du 18 juillet
» 1 7 9 1 , qui proroge ce délai jusqu’à iix m o is ; dispositions d’autant
33 plus favorables au C ito yen Treich-Laplene , qu’il eft un des prin«
»> cipaux propriétaires ».
« Confidérant que
le
jugement du
T ribu n al
de caflation ] "en
» annullant celui du T ribunal d’appel de la H aute-V ienne, a rendu
» indécife la propriété de la terre'd e la C h a ro u liè re ,
conteftée par
» le C ito yen Treich-LapUnc à la yeu ve Lachaud ; & qu’attendu que
»> la
lo i aflure la
préférence à
» réunie, à celle .de iès aflbciés
celui dont la propriété feule ou
eftr d’une étendue -propre à ; former
» une ¡exploitation , »il paroît convénable d ’attendre , de preffer même
» le jugement à ' intervenir ;
&
cela avec - d’autant pliis , de raifon,
» que la terre dont il s’agit éft extrêmement abondante en charbon »,
« Confidérant,-enfin que l'adm irti/lrationdela manufacture d’armes
» n’é ta b lit. fe$ droits- à ¡ l’exploitation qu’à la f a v e u r , des, arrêtés du,
» confeil d ’Etat de 1783
» ? 8 juillet
r . >
&
* 7 8 6 , renverfts entùryyefttpar la {»¿¡¡du,
iyç)i.y qui ne maintient .que .les . feuls conceilionnaires.
r: .
r "
,-
rsc
-
•:
'•
{•->
-
»> qui font ou propriétaires de lurfaçe ou auteurs de la découverte
1
.. . . . . . .
» «es mines »,
'■-1j
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1. .•!
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L e Préf
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f u r le p i l
m i n e s d<"
r o u l ic r e
�b *
¿Y*
( 34)
« Q ue
les
prétentions
de la
m anufafhire \ confédérées ious ce
» double rap p ort, paroiffent dénuées de fond em ent,
v u que d’ ua
» côté ces adminiftrateurs ne jullifient point fuffifamment être pro» priétaires de
|
furface ,
&
que de l ’autre la découverte de cette
» mine remonte à deux fiècles , c’ eft-à-dire à une époque antérieure
» à l’établiffement de la mantifa&ure , qui' ne date que de 1 6 ^ ».
'
*•
*' it ■
* ■
•. .
« Confidérant
1
d ’ailleurs
que Yadminijlratîon de la manufa&urç a
» reconnu , d’une manière bien formelle , la nullité de la conceflion
» de 1783 ,
par le traité paffé
» mois de juin
avec
le C ito ye n
1793 , c’eft-à-dire près
Treich-iaplene a;i
de deux. ans. après la . lo\
» du 28 juillet ».
1.
« Par tous ces motifs
«
eftime q iiil riy a lieu. à. délibérer fu r la
i
» demande des entrepreneurs & propriétaires d)e la. manufacture <îarmes ;
!
» que pour ftatuer- définitivement fur la. conceflion de f a n fi
il
» convient d'attendre la décijion. du Tribunal £ appel du Puy-dezDome ^
» chargé de prononcer fur la .propriété de la terre de. la C h a m a ille ,,
» afin de connoître-, avec plus de p récifion , la propriété des parties
» contendantes ».
les te n ta -
'cspropri-
jj
.
fem blé que -d’dprès
•
cet
•
arrêté
:
le s entrepreneurs de la -m a n u -
b tic la ma- fafture ainfi que la compagnie Mazau auroient dû abandonner h ura
.ure& ilela pr^tentjons oll attendre la décifion du procès f u r i e s mines dé,liai
aginc
51a
^ jîarou|j^re> Cependant les uns &
les autres
perfiitejit. dans
leilrs
demandes Si. continuent de folliciter auprès du Gouvernem ent’ pourles faire -a ccu e illir; les. premiers ,
rapport
procès
du confeil
pendant au
parce qu’ils..fo n t enhardis, par Ie<
des mines ; les derniers. ,
ftorç prétexte qusmlfl-.
T rib u n a l d’appel, de R iom
u e . regarde qpe j a ;
mine & non la furface de la terre de la. Charôulière.
'
Il s’ ag it d o n c , C ito yen 'premier Çonful\ de prononcer fur les pré
tentions des parties contentantes'y ttiais pour- cela il faut -examiner'
plufieurs queftions t
*.
i
ih ■
>
-
1
La première eft de favoir ii l’arrêté du 23 vent#fe an 6 , rendu
par l’adminiftration centrale de la
Corrèze , doit être annullé.
�( 35 )
L a fécondé î s’il y
a lieu d’ordonner la conceflion des mines de
Lapleau & Janoueix.
- —
• f
;i
—
-
La troifième , fi en ce cas les propriétaires de furfacè ne doivent
pas être préférés aux, entrepreneurs de la manufacture de T u lle.
La quatrième ,
fi celu i qui poflede le terrain le plus contigu 6c
le plus va û e ne doit pas a vo ir fur-tout la préférence«
L a cin q u ièm e, fi dans tous les cas on peut le forcer à s’unir aux
autres propriétaires,
lorsque l ’étendue de ik furface
pour Former ùné exploitation.1
' “* ' " " f '
eft allez vafte
'
.
Ji(
Treich-Laplent v a fe livrer à l'examen de toutes ces questions, &
' il en fera réfulter la preuve que ni la
entrepreneurs de la manufacture ,
compagnie M azau , ni les
ne peuvent lu i enlever l ’exploitation
des mines que renferme la furface de fon terrain.
I> *
L ’ arrêté
du
2$
v e n tô je
c e n tr a le , d e la
C e tte
Q U E S T I O N .
an
> rendu:, p a r ïa d m in ifir a d o n
C o rrect 3
d o it- il être, a n n u ité ? t
queftion peut être dépendante tout comme indépendante
des queftions fubfidiaires : elle
en dépend
fi l’arrêté n’eit infeCté
d’aucun vice intrinféque capable de le faire annuller. Elle en eit indépendante, s’ il exifte quelque nullité qui puiffe dispenfer de l ’examen
du
fonds.
'' î.
;
Il eil certain que l’arrêté en contient une radicale en ce qu’il ne
donne que quinze jours à Treich-Laplene pour déclarer s’il entendojt
fe réunir aux autres propriétaires , tandis que l’article
du 2.8 juillet 1 7 9 1 ^
Cette nullité
"arrêté du 16
la
accordoit fix mois.
*'
eft inconteftable ,
10 de la lo i
,
•
le Préfet l ’a reconnue dans fon
p luyiôfe d e rn ie r, puisqu’il a relçvé Trekh-Laplcnc de
déchéance prononcée contre lu i.
E 2
L ’a r r ê t é
radicak
nul.
�. C }6 )
M ais pour prouver que quand
eft vicieux &
l’arrêté feroit au ifi-régu lier, q u 'il
n u l, il ne pourrait être approuvé dans aucun cas ;
nous paflons aux queftions fubfidiaires,
-,
•..
i ,
I I.ème ! Q U E S T I 'O N.‘ " “ ‘
-•
iî
.
‘ '-i
'
r.t
A
Y a-t-il lieu d'ordonner la c'onceffion des mines de Lapledu.
& Janoùeix.
’• ù
, ,.nb;
qu’il n'y a
^
négative eft d ém o n trée,
elle détruit
fa n sd o u te toutes les
ià ordon-espérances de ceux qui convoitent les mines de Treich-Lapltne.
;onceifion .
•*
’
aines de
Q r ^ ja conceffion j es mines n’eft que la permiifion de les ex*
p loiter accordée à quelqu’ un par une grâce du Souverain.
.
E lle eft contraire au droit de propriété & .n e peut être accordée
qu’en vertu d’une lo i ou par quelque
m o tif d'intérêt & de befoin
public.
-
E t quelle eft la
lo i ou le m o tif d’intérêt public
celle des mines de Lapleau ?
*
D e lo i , il n’en exifte aucune;
-
C elle
du
qui
néceflite
s.
28 ju illet
179 1
porte
bien que les mines ne pourront être exploitées que du confentement
&
fous la
Surveillance de la
Nation ; mais elle permet aux pro
priétaires de furface d en jouir jusqu’à
elle leur permet encore
cent pieds de profondeur ;
de jouir fans lim itation
de
celles
qu’ils
exploitoient avant les anciennes concevions. *
Ne feroit-ce pas la vio ler que de concéder un droit d’exploitation
au
préjudice
de
ceux
q u i,
comme
Treich-Lapltne,
fe trouvent
dans ces deux cas ?
Cet argument
eft
tra n ch a n t,
on
ne
peut
fe
fouftraire
la
conféquence forcée qui en dérive.
D ira-t-o n
que cette lo i fuppofe qu’on peut
ordonner une con-
c rflio n , puisqu’elle défigne l’autorité qui doit l ’accorder 8c les formalités
à remplir ?
�,r
' ’ fj; ,
* ■
'*
' '!? •
i
i
O u i l fans' doute j il jêft . poffible qu’il y r a *t ^‘ eu à” ;|’ordonnerr
Mais ce n’eft qu’en certains cas. C e n’eil &
ce ne peut
être que
lorsque les befoins publics fe 'font’ fentir & r qtiè les propriétaires de
furface laiffent dans lési entrailles, de la terre' une; matièfe 'devenue
néceffaire à l’ufage public ou p riv é .
: l*'-
1:0 -
¡rajurj-
Voilà le feuf. caso oh l ’on- peut transférer 'à 'quelqu’un^ le clroit
d’exoloiter une mine.
Mais
'
lorsque, les ‘ propriétaires
de
furface
'
’
exploitent
' ”
H
par
eux-
mêmes , lôis qu’ils font autorifés par la lo i à exploiter. Alors point
de poifibilité d’accorder de, cdnceilion à leur détrim ent.*”
A
Ces
principes ont
été profeffés de. tous tem ps;
qu’on
parcôure
tous les brevets de conceifion accordés fous le règne de Louis X IV ,
, on
n’en trouvera, pas un feul oii l’on n’eut excepté les minés fouilléts
par les propriétaires de furface.
T e l fut celui donné le
•qui fut
' iJ~
16 Juillet
1689 au D u c de M ontauiier
confervé à la DucheiTe d’Uzés.
ploiter les mines qui feroient
Il ne perm ettoit que d’ex
découvertes
en
dédommageant les
propriétaires de gré. à g r é , & l’arrêt de confirm ation,
Madame d’Uzés ,
obtenu p a r
ne fut auffi enregiftré qu’à .condition^ de laifler
continuer aux propriétaires la- fouille dfs mines ouvertes.
i
**
.
.
Sur l’oppofition que les Religieufes de Ste. F lo rin e , en Auvergne^
formèrent à
cet
a r r ê t,
il fut même
décidé
que le privilège ne
pourroit s’exercer fur les.m ines nouvellem ent découvertes au préjudice
des propriétaires.
i0
n
C ’eft pourquoi in te r v in t, le 13- m ai 1698 , l’arrêt de règlement
qui permit à ceux qui avoient des mines de houille dans leur
terrain de les exploiter fans être tenus d’en demander la permiflion.
C e n’eft qu’à mefure que
le trône
s’approcha de la décadence ;
lorsque des abus fans nombre fe furent introduits dans le m iniflère,
&
qu’une ambition
dém éfurée, une
cupidité
ians born es, euient
tout fournis aux calculs de l’infâme agiotage ; ce n’eft qu’alors que
�1 ^ 0
w
l’on fe permit de tra fiq u e r de la fortune publique & particulière &
•’‘dé dépouiller'les pVô'priétaires par des1 côriceïTionsJ1
.
L’AiTeroblée; cohftituante vint; m ettre u n ''te rm e . à ces a b u s f a i r e
3 teiïer,. fours.ide^ fjn ju iv e s & .j-appeler ,rd^ns itoute leur pùreté les
principes dont on s’étoit écarté..; r^q .,0 ^ ,,q
/J / ...\
a
^ i ! V oyàj;pourqiu)}. çlle annulla toutesr l^S conceflions qui lavoient eu
pour objet des mines découvertes &
exploitées par des propriétaires
de furface ; ainfi il n’eft p oin t.d e lo i ^qui permette d’en accorder au
' prejudide 'des ‘ propriétaires qui font autonfés ‘à-'exploiter. !
.lolii.
*
.
t
, c. lojtjc Jri'■. f
:* .
:r
A défaut .-de - lo i. peut-on 'citer quelque 'm o tif d’intérêt p u b lic ?
j'i Jl eil certain qu’il eft des cas oit l’on p eu t'o b lig er les propriétaires
, à , fouffrir la réunion de leur
terrain ravec celui des
voifins
pour
\'A.
exploiter généralement les mines enfouies dans les divers ^héritages
limitrophes.
.■
¡..
t,
r-^ T el
eft
Celui
ou
les Extradions ? partielles ne 'donnent pas un
-produit fufïifant à l ’entretien, des befoins1publics & égal à celui qu’on
.pourroit retirer d’une exploitation générale.
*
*'
•
'
’
)j*
* Mais ce cas fe rencBhi^re-t-il^dans l ’hypothèfe ? Eft-Jl. aux environs
‘de Lapléau qiiéîques forges ou manufaûures qui foient au dépourvu
de charbon F-Exrfte-T-il quelques particuliers qui crient à la pénurie?
« ' N otl ! ^lé iêul etabliflement important qu’il y ait dens la contrée
'environnante , eft la manufacture d’armes à feu de T u lle : Et cette
m anufaSùre -e‘ft-am plem ent 'approvifionnée ; toutes les autres forgés
des m aréchaux, ferruriers, clo u tiers,
¿joflfiinabje regorge de tonte ;part. ,
11
& c . , le font’ auffi ; la matière
,
/
n’y a donc pas de raifon pour chercher i\ augmenter le produit
desdites mines par l’ctabliflement d’une feule &
unique exploitation;
car à quoi bon extraire plus de houille qu’il n’en faut pour l’ufage
lo cal }
a i'
Le moyen d’augmentation
feroit utile &
néceflaire fi la houille
p ou voit ayoïr quelques autres ¿¿bouchés &C fi l’on ïivo it des moyens
�Q>2&
( 39 )
faciles de transport; f i , par exemple , il exiftoit un canal de co m
munication “ entrel'les m im s& C la. Dordognt, tel que l’a v o it projett^
l’ingénieur
Miche.
w
.,
•
1; ( ^
iJ .
.
tJ p
* -r
„ ■^
..
•
. . . . . . . .
Mais point de débouché?, .point d ç canaux d’exportation ; le charbon
coûteroit trop de frais d e .,v o itu re , o n , eft forcé de le garder pour
• -\?:n v î n c r ^ i v n a
■
l’ n ï i . A -lin . ■
eo.i r r - . / j
la confom m ation. du pays.
- ,
.
ne, . v- Llir
•:?) r:jk; t
y
. .* o . .
D ès-lors,, p o in t.d e motifs d ’intérêt public qu i oblige d’ordonner la*
conceffion
des mines , n i d e t réunir, les diverfes extradions en. ,une
feule : chaque propriétaire doit être maintenu 4ans l’exploitation qu’il,
fa it fur fon terrain.
•
. : o r'.
.
U i: - V {
'.I
î . i v i ;
su
/
r ::'.-;n ::o
St.-rP'L(!our.i \ .convoitant . cette,; co n ceffio n ÿ , fentit. U bien
que le.
feul m oyen d’y donner lieu ..¿to it.le cas-de pénurie de charbon , occafionnée p a r la diviûon des ,ç:xtra£Uoi}s ^-qu’i^ fuppofa impudemment
que la tna.nufafture. dpnt ^l-.çtoij: le ^ifefteuf.'^pétoit expQÎee 'à çn
m anquer
&
à interrom pre fes tra v a u x dansun.lteçrvps ç ù la. Frarççe
étoit. en guerre .^vec les^ PuiiTances coalifées de l ’E u ro p e, & oîi la
fabrication des armes n’ exçitoït' pas moins l’émulation 5c. la prévoyance
dès F ra n ça is'q u e la défénfe1 de la P atrie/ ,
1
‘ 4"
.
I,
•. ;
: z Î:ôv: On quo>L-;iJGJ SIIJ.Î i: . jn>,; b .-.(
on
Il
alléguolt; fan^î c£Î&i l’infufÇfancç, div.produij jàes; j?xp]mt8tions i*sï
iL l’attribupit ifoit .à ^^négljgence jblQ ît i^-rixnpéiiÿe deSi extraâeury.'.
Ces jérémiades étoient répétées dans . toutesillesL'lettres qu’il écrivoit
aux M iniftres.
■
. ■
• ' -.Tl-'Oi
c -j
'■'IiiJO.I •_;> i . ::. n
.
-
,
i -. \n r ,■
■
■\
t C e fu t.la caufe principale*qui. détermina. Je.Gm ivem epient à dïdohnerla réunion:des propriétaire^ 4e?Iurfacbry & r<eWeycice.;dJune.exploitation.
unique & ' générale* î n'/)jp
A ;/ T il j;I îrif-/I
t
^
C e prétexte de la part d e ^ - r ô ^ K ^ n eioit ’qu’«« artifice‘dont le*
dénouement* ne ltii : f u t p a s 'fa v o rà b le i; i l.ç ft .p r o u v é que les . mines y
Aon\iTjeitli-LapUne.'îiVo\x. cédé l’fcxploitàiion^à.lafmanufeûure^ étoient^
d-’ù a produit interne' fupérieurt ;Vlfe»r: b'efoins.';; q.uc.td’ailleursi fyttiriger:
s’étoit ob lig é lu i-m êm e, par le traité, du j 646)0,ii79.3.!*i/de l’àlirnentèrt
& ; o^e tenir toujours ijur place la r c o m i t é de charbon npçeffaire, à
cet Entretien, ,
« - :
. .
~’X '/;
, • ..
îfi • ( .
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' n • :-i:
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t:r.-..n
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U M
- r ii,Il
V 3*» £•'•>
A --: t vfrjiü. i« tJ:'- r ' ;
;t; if;. •
nen fa u t, pas davantage aujbuçd hui _pour ecartér le projet de
cette exploitation générale &
poiir annulier l’arrêté du 23 ventôfe
an fix. Il ne doit fon exiftence qu’à la perfidie : cette perfidie étant
d évoilée il 71e peut ’ plus fùbfiftèr, Ceßariie c à ü jk , cejfat effecliis,
I
;
j i. -
'•
t.
, „j
r
^' r
|
''P o rtan ts nos regards fur l ’a v e n i r , envifageron s-nous q u ’elle eft la
m anière
d’exp loiter q u i peut o ffrir plus dè prospérité &
d ’avarttagé la du rée desdites mines
p rolon ger
*-r il n’eft p a s'd ifficile de fe co n
v a in c re qu ’ une ex p lo ita tio n générale feroit m oins frü Q u eu fe, fous ce
r a p p o it,q u e
1
les e x tra d io n s p a rticu lières,'
Les conceffionnaires
1
y .
ne vifent point à la confervation des mines
qu’ils'exploiten t : tra v a ille r à accroître lès produits de leur conceflion
à "e x tr a ir e 1 précipitam m ent &
en a b o n d a n c e ,
facrifier à leu r intérêt
la durée de l ’e x p lo ita tio n : tel ‘eft le plan de Ieür condu ite ; les mines
fönt des reffources qu’ils craignent d e ' rte‘ pa$Kà ÿo ir épuifées avant le
tefme de leur cçnceflion(T
'»
t*
-
: f. &
•L
• r» >’ ” ” $03 2?,onn7i; .v 1 r 3371: o r ■; :is .
Les propriétaires au contraire qui fouillent les mines que' contient
leur terrain , lés regardants comme aine riçheffe p o u r leur fam ille ,
ne s’attachent pas ta n t, à fàire'tout-à-coup de grands p ro fits, qu’à en
foigner la iource fie en piölönge'r^la duréeJ Ils extrayencMâ fùbftance
aveom én agem én t, ils exploîteWt^d’après les règles de l? a « i& ne négli
gent' lauicuh'm oyea1 d’am élioration,
!> ¿yj f ù. :
tiV ..-* '■ < ■
Audi v o it-o n
g r a n d e ' Bretagne,
que les mines de houille de Neuwcaftle & de la
.qui:font en ce: genre’ les premières, mines du.monde
font exploitées avec le plusl grand,fùccès-, parce, qu’elles lexfon t par
les propriétaires, fuivant la R E M A R Q U E qu’en fa it Mr, M oj-andj en i
fç>p O uvrage .fur l’art d’exploiter les mirçes,.
. E t s’il fallo it un
exem ple', qü’élles
^
^
^
dépériiTent ; plutôt entre
les.
mains jdes côneeflionnairesn qu’enti-ç.-les mains . des propriétaires de
furface ^ nous le trouverions dans ilia 'co n d u ite de St,-V iB ou r, h iim êm e, farts-l'aller çherchjer lailleuns, ;
’
■
t 1 ' '*• r'h »
''
- J * *
' \
;
r>
Lorsqu’il prit l’exploitation dé celles de Treich-Laplene \ cette exploi
tation étoit la mieux en o rd re ;
les mines étoient étayées *: il ÿ
a v o it
�( 41 )
a vo it des galeries fpacieuiês de 80 toifes de longueur fur 5 de la rg eu r;
des pilaftres de charbon qui foutenoient le fol. Q uatre ans après qu’il 4
fut entré en jo u iflan ce, il abattit les p ilaftres, il élargit les galeries
d’extraûion pour les faire é c ro u le r, &
com bla celles d'écoulement.
V oilà les belles règles* de l ’art qu’il em ploya. V o ilà fa noble & heureufe
exploitation.'
‘
.1
/
j
T ou s ces faits iont conftatés par l ’enquête qui fut faite au T r i
bunal du D iilr id d’Uffel , lorsqu’il fallut
eftimer l’indemnité qu’il
a v o it à prétendre comme conceflionnaire d é c h u , pour les ouvrages '
dont Trtich-Lapltne devoit profiter.
D ifons donc q u e , fous aucun ra p p o rt, il ne peut y a vo ir lieu à
accorder de co n ceiïïo n ,
ni à ordonner une feule exploitation des
mines de L ap le a u , que la lo i le défend &
qu’aucune raifon d’Êtat _
ni d’intérêt public ne le commande.
I I I« w
^
Q U E S T I O N .
JE N ca s d e co n c e jjio n } le s p ropriéta ires d e fu r f a c e n e 'doiventils pas être préférés aux Entrepreneurs de la manufacture
|
|
de ‘Tulle ?
O n eft étonné ou p lu tô t indigné de v o ir mettre en problème un Railbns q
point de droit aufli clairement &
lo i du l8 juillet I 7 9 I .
auiïï formellement réfolu par la
’
propriétaj
En effet, cette lo i attribue I dans tous les c a s , l’exploitation, de
de prefri
,c
aux
-
preterence aux propriétaires de furface.
Les propriétaires de furface , porte
la préférence &
l’article 3 ,
la liberté d’exploiter les
trouver dans leurs
fonds ;
&
la
auront toujours
mines qui
pourraient fe
permiffion ne pourra leur être
refufée , lorsqu’ils la demanderont.
N ulle conceflion
ne
pourra
cntl
«eurs de 1,
nufaüurc.-i
être a cco rd ée,
ajoute l’article
10 \
qu’auparavant le propriétaire de la furface n’ait été requis de s’exF
j
�( 41 ) )
p liq u e r, dan s.le délai de ifis mois
s’il entend b u 'n o n ,-p ro c é d e r à
l ’exploitation, z\xx mêmes clattiès & conditions que les concefliorrnaires,
'•
'
. 1^ '
r
¡j/w
^La loi; du 13. pluviôfe an, 9 n’a, rien c h a n g é à . cette dispofitipn :
elle n’a fait que reftreindre
4 deux
mois l’explication des propriétaires
ce . qui confirme la préférence qu’ils ont fur les conceflionnaires.
-t
^
IrU';
**
*
£
Auiîi S-t.-Viciour v o ya n t les propriétaires fe réunir pour accepter
l ’exploitation, générale ordonnée par le M iniitrerde l ’Intérienr ,
d’inutiles efforts pour obtenir la conceilion. à leur, préjudice
fît-il
auffi:
cette conceffion leur fut-elle accordée de préférence à lu i.
'
1
*
Q uelle eft donc
la
raifon im puliive
•
de
.
-1*1
fort infiilence a â u e lle ?
la même fans doute qui l’a toujours enhardi dans fon. entreprife 5
c’eit l’espérance qu’il a , en de puiflants protecteurs r lé rapport, fur-?
tout fait au mois de prairial an fept par le confeil des mines , où
l ’on a repréfenté.M azau 6 f compagnie com m e des gens fans moyens
pécuniaires &
fans connoiflances théoriques ou pratiques pour faire
une bonne exploitation.
Treich-Lctplent n’eft pas plus te partifan- de cette compagnie que
celui des entrepreneurs de la manufacture ; il prouvera bientôt % au
contraire , que la compagnie Ma{au n’eft pas digne de l’exploitation
dont Va chargée- l’arrêté du 23 ventôfe an 6 ; raifon pour laquelle
il1 n’a jamais v o u ly entrer dans le contrat d’union.
Mais en défendant la caufe des propriétaires , il défend la Tienne
propre ; il dit donc
conjectures &
qu e ce n’eil pas avec
des
allégation s,
des
des probabilités1 qu’Ort peut écarter lis propriétaires:
pour donner à des étrangers la. preference que la loi leur attribue.
I l d it qiiQ ft. la compagnie Mo^au ne
réunit
pas-
toute
l’aptitude
néoeffairc pour garantir au Gouvernem ent une bonne exp lo ita tio n .,
elle ne comprend pas tous les propriétaires; que lui fe préfente pour
iùpgléer. ¿\ fes défauts & qu’il tient le premier rang avant les entre
preneurs de la m anufaûure;
�Ces entrepreneurs ne peuvent pas lutter, contre les droits iàcrés de«
propriétaires. La lo i proscrit leur prétention en. termes énergiques; •
N ous
avons
combattu
vlcloricufcment le ' fyftème propofé par lfe
confeii des m in es, que les propriétaires de fùrfàcé n’ont aucun drok
de propriété fur les fubftances m inérales,'. Nous ayons- prouvé que
..de tous les temps Us mines de houille ont été reputées appartenir au*
particuliers dans les héritages desquels elles font enfouies ; que la
lo i du 28 ju illet 179 1 ne fait que confirmer ces principes d’une
manière plus folemnelle.
•
.
Suppofons néanmoins ,
. .:>
"
' ' : ?!‘ V' . .
1
contre v é r i t é , que les mines foient des
propriétés Nationales , comme le prétend le confeii des mines. Q u i
mieux que les propriétaires de furface mérite de profiter de la fubstance, de la matière & du produit de celles (que contient leur terrain î
qui
mieux qu’eu x - mérite
d’en
profiter ï
fait la découverte de ces mines ,
lorsque
fur-tout
ils ont
lorsquïils les ont mifes en exploi
tation , lorsqu’ils fe font épuifés en travaux^ &
en dépenfes pour la
confeûion des ouvrages de l’art. Ne feroit-ce pas 4une injuftice
ré
voltan te que de leur enlever tout le profit lorsqu’ils ont pris toute
la peine ?
Pourquoi d’ailleurs les fruftrer à l’avantage des entrepreneurs de
la manufa&ure ? ceux-ci offrent-ils plus de g aran tie, plus de facultés
pécuniaires, plus de talents & de connoiflances dans l’art d’exploiter f
Tout
cela n’eft
ridicules &
que
fuppofitions dénuées de fondem ent, prétextes
artificieux.
,
ip
Q ue les entrepreneurs foient plus rich e s, que les propriétaires le
foient m o in s, peu importe , p ou rvu que les propriétaires le foient
affez pour faire l’exploitation. C e n’eit qu’une raifon de plus pour
que les entrepreneurs duiTent fe
contenter . de leur fo rtu n e ,
fans
chercher à envahir celle d’autrui.
Q uant aux talents &
connoiflances dans l’art d’e x p lo ite r,
on ne
(ait qu i' en a le p lu s , ou de la compagnie Mazau , ou des entre
preneurs de la raanufafture ; toujours eft-ii vra i que ni les uns ni
les autres n’en ont fait un bon ufage,
F z '
�Les propriétaires qui compofent la compagnie
la
plupart
laifïe
écrouler leurs mines &
Ua^au “
ont pour
affaiffer leur • terrain ;
les
entrepreneurs ont auifi dégradé celles de .Treick-Laplene , lorsqu’ils les
ont jouies en vertu de la ccmceflion: obtenue par St.-Viciour en 1783.
Treich-Laplene eft le feul- q ui a it fait
preuve d’une fage & bonne
e xp lo itatio n ; tém oin l’enquête faite au T rib u n a l du diftri£t d’ Uffel.
Ses mines
■
m it en
é to ie jit1 dans le m eilleur
pofleifion
: celles des autres propriétaires
dépériffem ent c o m p le t, &
Il
St.-Viciour s’en
état lo rsq u e
étoien t dans un
ils ne les on t guère am éliorées depuis.
eit maintenant le feul propriétaire dont Us mines (oient foignées
& régulièrement exploitées : elles font riches & abondantes ;
des autres propriétaires font ftériles &
C ’eft lui ' qui poflede en outre le terrain le plus
plus contigu : ce terrain
contenant
celles
négligées.
a rro n d i. & le
64158 mètres quarrés eft aflez
étendu pour y affeoir une exploitation.
Ces
de ‘ la
deux faits font
manufa&ure ,
conftatés par la pétition
préfentée
au
Préfet
du
des
entrepreneurs
département de la
Corrèze , au mois de meflidor dernier : par l’arrêté du Préfet du 16
p luviôfe , & par un plan figuratif qui eft dépofé dans les archives
de la Préfecture.
Dès-lors s’il y a une concefïion à accorder , c’ eft lu i qui doit
l ’obtenir s’il eft vra i que la loi donne la préférence à celui dont
la propriété
eft d’ une étendue propre à une
exploitation. C ’eft ce
qu’on v a discuter dans la queftion fuivante :
IV .
L
e
propriétaire dont le terrain e jl le m ie u x arrondi ô
étendu p o u r une
ich - Laplerc
.ut le pnnciI propriétaire
Q U E S T I O N .
ex p lo ita tio n 3 ne
a jfe \
d o it- il p a s p lu tô t obtenir
la concejjion que le s autres ?
. .
1 t
L a f e i r m a t iv e eft réfolue par le fécond § . de 1 article 10 de la
du »8 ju ille tj ainft c o n ç u : « D a n s le cas d’acceptation par lç
autre*..
�C 45 )
» propriétaire de la furface , il aura la préférence pourvu toutefois
» q e fa piopriété feule ou réunie à celle de fes affociés foit d’une
» étendue propre à former une exploitation ».
A ux termes de cet article ,
il eft évident que la lo i appelle en
première lig n e , le propriétaire dont le terrain eft d’une étendue propre
à former une exploitation & q u e lle n’appelle en fécondé ligne qua
les propriétaires réunis en fociété.
C eu x -ci excluent les conceilionnaires ; mais ils font exclus à leur
tour par les propriétaires à moyens égaux d’exploitation.
C e font les principes que le M i n i s t r e lui-même a profeffés dans
fon inftruûion du 18 meifidor an neuf.
La préférence , y
d i t - i l, doit être accordée au propriétaire de
terrain à moyens égaux d’exploitation ; c’eft-à-dire fi fa propriété feule
ou réunie h celle de fon aflocié eft fuffifante pour afleoir une ex
p loitation utile.
O n v o it que quand il s’agit de délivrer un b revet de concefiîon'
on préfère toujours celui dont la propriété feule eft égale en resfources à celles des autres propriétaires réunis.
.
Le
Préfet
du
département de la
Corrèze a
auiïi partagé
cette
opinion , & appliqué la lo i dans ce fens par fon arrêté du 16 pluviôfe
an 12 ; puisqu’ avant de ftatuer définitivement fur la conceifion , il
a été d’avis d’attendre le jugement du procès rela tif aux mines de la
Charoulièré , pendant au T ribu nal de R iom .
, Il ne l’a fait que parce-que la’ propriété de ces mines peut décider
entre les propriétaires quel eft celui à qui eft due la préférence.
E t certes Treich-LapUne ne craint pas que ces mines lui foient en
levées. Ot> ne lui contefte pas la fu rface, dès-lors on ne peut lui
disputer le fonds.
D ’oîi il fuit qu’il
propriétaires.
a droit à
la conceifion
fur
tous les
autres
�' ‘ C e 1n’eft pas précifcniént lcten d u e du terrain qu’il faut confidcrer ;
c ’eftJ a.. contiguïté , c’eft l’abondance de 1a mine.
O r , parmi e u x , en’ eft-il le moindre qui ait une propriété auifi
^ tenante ,
des mines auifi fertiles S i auffi riçhçs en charbon ? Non.
T o u s leurs héritages font entrecoupés par les Viens. C e fait eft attefté
tnôtne par les Entrepreneurs de-la manufacture qui fe font ainfi exprimés
dans leur pétition,
» Trtick-Lapltnt eft le principal propriétaire , la furface de fa pro>> p riété-eft contigue & d’une vafte éten due, les mines que nous y
» exploitons régulièrement font riches & abondantes; fi les propriétaires
t> de la furfece doivent
a vo ir une conceifion : çeft à tous égards
» Treich-Laplene qui doit l’obtenir ; parce-que la furface du terrain de
» la compagnie M a z a u eft féparée & feç travaux d’exploitation ruinés ».
Demandera~t>on à Treich-Lap/w nne intelligence aCtive ? . . , il peut
rivaUfer fans yan ilé
avçc tous Je? prétendants à la conceifion.
L ui demandera-t-on une m oralité fur laquelle le*' G ouvernem ent
puiffç repofer fa confiance ? , , , qu’on l’accufç fi on a quelque fait à
Jiii rçprocher. Q u ’on intçrçoge fe rép u ta tio n , qu’on prenne des renfeignements fur fon compte.
L ui .demandera-t-on. enfin la juftification de Tes facultés pécuniaires ? . . .
Les fo lia tio n s dont il a été tour à tour la victim e lui ont fait un
tort
irréparable;
mais fa fortune im m obiliaire eft
iiiffifante p our
garantir le Gouvernem ent. Il ne faut pas ctre millionnaire pour faire
exploiter
les mines de Laphau ; douze ou
à cette çjcploitation
quinze, ouvriers fuffifent
il faut feulement avo ir de quoi faire les avances
‘de leur falaire journalier.
Une circonftance d’ailleurs qui achève de lui mériter toute confiance ,‘
c’eft que fi les m oyens lui manquent il a du crédit ; il peut appelle*
fon fecours ou s’adjoindre des hommes plus péctinieux. r
Il
a déjà traité avec les Entrepreneurs de la manufacture
pour
l ’exploitation de fes mines , il peut traiter encore fur la conceifion ;
la loi ne défend pas ces fortes de traités : ils font la prospérité du
�S& i
à&£
( 47 )
com m erce, ils ortt toujours été favorifés & perm is, ainfi que i’enfeigrié
Mr. Morand.
D ès-que Henry I V , par fon Édit de 1 6 0 7 , eut .affranchi des droits
du dixième les mines de charbon de terre , les propriétaires
traitèrent
avec des compagnies pour l’extraûion du ch arb on ; fouvent lé9 coriJ
ventions étoient renouvellées : les compagnies
'
1;.
donnoient tantôt le
quart ou le cinquième du bénéfice aux propriétaires, tantôt une fomme
an n u elle, ou tant par mefure de charbon extrait.
L \ irage de ces tranfaftions s?eft continuellem ent pratiqué depuis ;
' 4®
fe
‘¡7,
pratique e n c o re , parce qu’il n’a rien d’illic ite , &
qu’il n’y a
rien de plus naturel qu’un propriétaire puiffe céder ÔC vendre le produit
d'une mine qu’il a droit d’exploiter.
Q u e fi Treich-Laplene é p ro u v o it la m o in d re difficulté ftfr la préférence
q u i l r é c la m e ;
il foutient que d’après
refufer le d ro it d exp lo iter
d’une etendue
propre
à
fes m ines
form er une
la loi*, on ne' p eut pa1? fu i
fép'arément
dès qu’elles font
ex p lo ita tio n . •—r V o y o n s s’il- y
eft fondé.
P
Y.èm
e QUESTION.
TreicB-Lapfene
,
U T - O n forcer
a s'unir aux autres
propriétaires lorsque V¿tendue de la furface de fon terrain
efi propre a former me exploitation.
é
P o u r p rouver la
•*
t
1
e
d é g a tlv e , il né finit pas1 de tetfte plus précis Priuves que d a n
j
. 1»
^
de la loi que le § . de l a « . r0 que nous avons cite fur la queition
précédente.
a u cu n c a s T r c i c h L a p l c n e ne peu|,>
ê t r e p ri v é d e 1 ex-;.;'
p lo itatio n p arti-
U n propriétaire dont le terrain eft d’une étendue propre ;\ former ™lt\crede fes mi"
une exploitation-, obtient la corcefiîon de préférence, Pourquoi à plus
forte raifon n’obtiendroit-il pa:> la faculté d’exploiter féparément dans
fa propriété ?
Le Gouvernement cherche moins à diminuer le nombre des co n -
�( 4« )
cédions &
à les faire frapper fur une 'étendue immenfe de pays ,
qu’à établir de bonnes & fruftueufes exploitations.
C e n’eft pas lorsque la conceifion embraffe une fi grande étendue \
que les mines font mieux fouillées : il ne fe fait que des extradions
fuperficielles,
Elles1 font
beaucoup
plus
foigneufement
exploitées
concédions font reftreintes dans de juftes limites &
tations font plus
nombreufes ,
pourvu
lorsque
les
que les exploi
qu’elles ne fe nuifent pas
entr’elles & qu’elles ayen t toutes aiTez de latitude*
En ce cas chaque concelïionnaire , ou chaque chef d’exploitation ;
eft à même de porter un œ il plus attentif fur les travaux ; il y a
moins de négligence & plus d’exaâitude
dans les extradions : on
ne faute pas d’un endroit dans un autre , on fouille régulièrement
toutes les couches ou filons.
C ’eft auifi ce que le Miniftre a reconnu ; car il obferve qu’une
conceifion qui s’étendroit fur toute une co n trée, ne donneroit lieu
qu’à de mauvaifes e x tra d io n s, qu’il eft de l’intérêt de la fociété de
ne pas perm ettre, parce qu’elles font en général beaucoup plus nuiiibles Ôc dangereufes qu’utiles.
Il
ajoute encore que plufieurs concevions peuvent être lim itrophes;
qu’une même fo c ié té , un même conceifionnaire peut en avo ir plufieurs :
mais que toutes doivent être en a & iv itc ; de forte que la principale
chofe qu’il recommande eft la bonne & régulière exploitation.
A i n f i , il n’y a aucun doute que Treich-LapUne doit être affranchi
de la rçunion
les cas il
des furfaces des mines de Lapleau , &
que dans tous
doit être autorifé à continuer d’exploiter celles qui font
dans fon terrain,
Demathieu n’a qu’une petite mine dépefie dont il ne retire
que du
toit de charbon. La Dam e Lachaud & Jean Couden n’ont auifi pour
toute furface que la m oitié d’un petit champ appellé le Communal :
miférable terrier épuifé qui n’a rien produit depuis plus de vin gt ans.
S’ils exploitent aujourd’hui ainfi que Jean Chadenier, ce n’eft que les
mines
�• %»
( 49 )
'
mints de la Charoulière par eux ufurpées Bc retenues en vertu de la
Sentence du ci-devant Juge de St.-Angel.
Ma^au ri’ eft pas plus avancé ; cet homme qu’on a placé à la tête
de la compagnie ,
comme s’il eut cté un homme confommé dans
l ’art de l’e x p lo ita tio n , ne fait ni lire ni écrire ainfi que le lui ont
reproché les Entrepreneurs de la
m anufacture, & il s’eft toujours
borné à faire quelques excavations à ciel o u v e r t, qui font devenues
des réfervoirs à chaque fois qu’il a plu.
Quant à Barthélémy M a la u re n t, Pierre M onteil , François BeiTou
ils n’ont jamais eu de mines ouvertes ni connues ; la Dam e Lachaud
ne les fît intervenir dans ion Mémoire imprimé que pour rendre fa
caufe plus intéreffante &
faire approuver plus facilement l’arrêté du
13 ventôfe an 6.
En g é n é r a l, les mines de ces particuliers font n o y é e s , écroulées ;
ruinées & ne donnent que de mauvais charbon , même en très-petite
quantité : c’eft du charbon tendre , friable , fe décompofant à l ’air
ôc d o n t , pour ainfi dire , o n ne peut faire ufagc.
Tandis que les mines de. Treich-LapUne , qui font les plus fertiles
font auifi les feules qui foient en bon
état &
qui préfentent des
nffourcts , parce qu’elles ont toujours été cultivées avec foin.
D ans ces circonftances, ne feroit-ce pas lui faire un tort confidérable ;
que dit-on ! ne feroit-ce pas le ruiner que de le fprcer à s’unir à eux &
à les admettre à partager le produit de fes m in es, de fes travaux &
dè fes dépenfes ? O u i , &
cette réunion ne feroit pas moins perni-
cieufe au G ouvernem ent, car ces particuliers au lieu de travailler à
la prospérité des mines , ne feroient qu’y porter la dévaftation qu’ils
on t exercée fur leur propre terrain.
L a loi , la raifon & l’intérêt public ne permettent pas à Treichtaplene d’appréhender une injufticc fi criante. Si on accordoit une
conceffion A fon préjudice des autres mines de L a p le a u , on le main*ticndroit d’autant m ie u x , dans le droit d’exploiter les Tiennes, que
le produit de fon exploitation fuffit à l’entretien de la manufacture
d’armçs à feu de T u lle , &
qu’il a traité avec les Entrepreneurs.
G
«¿6
�( 50 )
Sur quelque point que T/eich-Laplene foit attaqué , il eft donc kl ’abri des invafions que les prétendants à la concelîîon veulent faire '
de ion terrain Sc des mines de houille qu’il renferme.
D ’abord l’arrêté du 23 ventôfe an 6 , nul en lui-même , ne fut
déterminé que par l’allégation apocriphe de St.-Viciour , que la manufaihire de T u lle étoit Couvent
en danger de manquer de charbon.
La faufteté de cette fuppofition ayant été démontrée , il fe trouve fans
caufe & dès-lors il d o it demeurer fans effet.
Il
ne peut pas être approuvé d’ailleurs , parce qu’il n’y a pas lieu
à concefïion ; la concefïion étant contraire au droit de p ro p riété, ou
de préférence , qu’a chaque propriétaire d’exploiter Us mines qui font
dans fon terrain , ne peut être accordée que par des motifs d’intérêt
public , Sc il n’en eft aucun dans l’hypothèfe ; les extradions a&uelles
des propriétaires , prodnifent aflez de houille pour la Confommation
locale ; il n’exifte aucun autre débouché.
Y
eut-il même quelque raifbn qui put déterminer le Gouvernement
à ordonner la concefïion des
m in e s
feroit pas les Entrepreneurs à qui
de Lapleau & Janoueix, ce ne
on devroit l ’accorder : la loi les
exclut en faveur des propriétaires ; & comme elle donne la préférenceà celui d’entr’e u x , dont la propriété feule eft d’ une étendue propre
à former une exploitation, c’eft Treich-Laplene qui doit l’obtenir comme
principal propriétaire.^
x
La furface de fon terrain com portant au furplus une exploitation
&
fes mines étant fertiles & en bon état ,
autres propriétaires font ftériles &
pendant que celles des
dégradées , on ne peut le forcer,
à leur en faire p a r t , ce feroit fouler aux pieds tous les principes d e ,
juftice &
d’équité.
A vec des droits ii folidement é ta b lis, quel triomphe Treich-Lapline
ne
d oit-il
pas espérer fur
ceux qui portent envie il fa fortune ?
fur-tout ayant pour Juge celui qui n’eft placé à la tête du G ouver
nement
que
pour le
bonheur des François ,
qui s’eft
fignale ,
jusqtvà préfent , autant par fa fageffe , fes talents & fes vertus , que
par .fes avions héroïques &
nouveaux
bienfaits.
qui fe fignale
tous les jours par de
�£ 5 /
(5
1
ctf*
)
r
L u i , dont le
génie pénétrant perce
tous
les
fecrets
calcule
toutes les démarches & déjoue tous les complots des nouveaux B orgia,
lui qui ne s’occupe qu’à régénérer les
fleurir
les
fciences &
démêler les
les arts
fourberies
&
mœurs & les lois ,
régner la
des fpéculateurs de
Juftice ,
à faire
faura auffi
conceffion &
garantir
l ’expofant de leurs pièges.
Treich-Laplene n’espère pas moins de fuccès auprès du M iniftre, du
Préfet & de toutts les autorités compétentes : fa caufe eft trop légitime
pour
que
tous
ces M A G IS T R A T S qui concourrent de tout leur
pouvoir à feconder les vues libérales d’un Gouvernement fa g e ,
ne
lu i rendent pas la Juftice qu’il réclame.
C ’eft
p o u rq u o i,
C ito yen
PR EM IER
CO N SUL ,
Treich-Laplene
demande qu’il vous plaife caffer & annuller l ’arrêté du 13 ventôfe
an 6 , rendu par l ’adm iniftration centrale de la Corrèze.
E t en cas de nouvelle demande en conceffi o n , de la part des
prétendants, il conclut d’hors & déjà à ce qu’il foit décidé & arrêté,
par toute autorité compétente , qu’il n’y a pas lieu à l’ordonner ;
que fi on l’accorde
c’eft lu i qui
doit l’obtenir de préférence
ou
la permiff ion de continuer d’exploiter les mines qui font dans fon
te rra in , attendu qu’il contient en fuperficie 64558
mètres quarrés.
T R E I C H - L A P L E N E .
A
De
l’imprimerie
L e
L I M O G E S ,
de
i5
F
r a n ç o i s
F l o r é a l ,
An
C
h a p o u l a u d
XI I ,
.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. An 12]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Treich-Laplène
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
manufacture d'armes
propriété nationale
industrie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire au citoyen Bonaparte, Premier consul de la République française, de la part de Pierre-Jean-Baptiste Treich-Laplene, propriétaire, demeurant en la ville de Maymac.
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
Les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de François Chapoulaud (Limoges)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1736-An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1308
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1307
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53197/BCU_Factums_G1308.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
industrie
intérêt général
manufacture d'armes
Mines
propriété du sol
propriété nationale
sociétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53748/BCU_Factums_M0249.pdf
099c59d7ddd03be2ffce190cb967941a
PDF Text
Text
MEMOIRE
t
SUR
UNE C O N T E S T A T I O N
RELATIVE
A
LA
POSSESSION
ET
PR O PR IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
i
A R I O M,
d e
l’ i m p r i m e r i e
IMPRIMEUR
d e
t)E L A
L A N D R I O T ,
COUR D ’ APPEL.
A o û t 1804.
s e u i
�MEMOIRE
COUR
EN RÉPONSE,
D’APPEL
SÉANT G
A RIOM.
POUR
P ierre - J ean - B aptiste T R E I C H L A
P L E N E , appelant
'
M a r ie
CONTRE
,
T R E IC H -D E S F A R G E S
L achaud ,
Jean
COUDER ,
veuve
et
Léo
n a r d C H A D E N I E R , in tim és.
A V E C des titres de propriété , et la garantie des lo is ,
le sieur T reich a été jusqu’à présent à la m erci de tout
•le monde. U n ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�,
.
.
( 2 \
. . .
à luî faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés , pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condam née,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i- c i trouva en son che
m in la révolution , qui lui ôta sa p r o ie , et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M a is, dans la l'apide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la v e ille ; e t, après uncalios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
g ra n d e , que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. U ne cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avdir éclairci la difficulté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui d o itle plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent', non pas quant au jugement d elà p rop riété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Q uoi qu’il en so it, cette m ultitude d’ar
rêtés ne peut plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une jn in e, qui l’a
vu exploiter pendant 46 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclam er une copropriété contre un tiers deten-
�.
( 3 \
.
tèur ; si encore il le p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire x*evivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter. ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
\ . . . i ;! »
■
• •i •
A u village de la P le a u , dans le département de la
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean T reich ,
père de l’ap p elan t, en étoit le principal propriétaire^
En 1 7 4 7 , il acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée im proprem ent le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 25 mars 1 7 55 , il acquit du même P ierre BeynesJ
tout le terrein où étaient ses-mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. L ed it héritage vendu^
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon , que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , m oyennant 3000
Il fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le m aréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur,
auroit lui-inême sa provision annuelle dans les carrières
vendues. ,
'
W
'
•
,
”
,
,
.
A a
•
’
�.
.
'( 4 )
.
Cette terre de la C h aro u lière, qui a' en surface troiâ
septerées , avoit 'été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’A n to in ette, femme Chadenier;
sa v o ir, deux septerées avant 17 3 6 , par un acte que
l ’on ne conrioît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte
du
I er, décem bre 1 7 3 6 ; et cette
septerée vendue y est conjïnée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
O n y rem arque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit v e n d e u r, du consen« tement dudit acquéreur, de la m oitié de tout le cliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« C haroulière, une des deux ci-dessus vendue, h la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrem ent du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais tout prouve que cette charge fut rédim ée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de 1755.
.
A n to in e Beynes , fils et héritier dudit F rançois, tant en
son nom que com m ecédataire de ses frères et sœurs, vendit
à M arianne la Plène , veu ve dudit Jean T reicli (m ère de
l’app elant), par acte du 29 août 176 8 , un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lle s , les carrières communes dudit village de la
« P lea u , avec autres carrières et terrein de ladite de—
« tnoiselle la P lè n e , etc. ' ensemble les carrières à
« bon de p ie rre , pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein , etc.; comme aussi a vendu à ladite
�a
«
«
a
te
«
«
«
«
«
«
.
,
( 5 }
demoiselle la rPlène la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans le communal de P leau , etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit com
m u n a l, etc. ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septem
bre 176 6 , etc.; de même aussi sera obligée ladite ac
quéreuge , de délivrer au vendeur et aux siens la quantite de soixante quartes de charbon annuellement^
tant et si l ong ue me nt qu’il se recueillera du .charbon
dans lesdites .carrières ci-dessus ven d u es, à la charge
« que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
« eux-mem es ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (leq u el seul A ntoine Beynes voulu t
rappeler) étoit un traité par lui fait avec Bernard D odet
pour extraire le charbon de ladite terre C hazalas, con
frontant,, disoit—il lui - môme audit acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière
des héritiers du fo u sieur Treich le .cadet. ,
A n toine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante -quartes de charbon , qu’il lit valoir
quelque tem ps, sans avoir garde de réclam er aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
1 7 7 1 , et M arianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
T o u t se réunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de M arianne la Plène d’avec ceux dudit Bevnes,
lorsque M arie T reicli-D esfarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�.
.
C 6 )
•
essayé de faire à M arianne la P lè n e ,e n 1 7 7 5 , un p ro
cès crim inel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l ’acte de 17 3 6 , e t, ne pouvant en user elle-m êm e, elle
eut recours à un m oyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. E lle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1 7 7 7 , avec Jean C o u d e r, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier , et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal,
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
n avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Charo u liè re , la société ( évaluée à 4 t t ) n’auroit aucun effet.
L es trois associés se m irent en œ uvre au mois d’août
1781 , furent une fouille dans le com m unal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière , qui dom ine ce
communal.
M arie la Plèn e aussitôt présenta une re q u ê te , de
manda le transport du juge de S a in t-A n g e l, lequel fit sur
les lie u x , le 8 août 1 7 8 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment le
prem ier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
'
Les Desfarges, Beynes et C ou d er, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillo
n’avoit pas pénétré sous la C haroulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoient les démarches de la veuve la Plèue poui
�,
C7 )
un trouble à leur p ro p rié té ; que les causes dont se servoit et s'êtoit ci-devant servie ladite demoiselle la P lèn e,
pour tirer du charbon de la terre de la C h a ro u liere,
portoient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retirer du charbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de. ce charbon depuis le temps qiCetle
avoit acquis.
ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
Ils
D e son cô té, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleurs il étoit doublem ent
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liâtoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidem ent, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veu ve la P lè n e ,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. L a veuve Desfarges crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit o u ï, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
O n continua le procès c iv il, et les intimés priren t, le
�c 8 }
.
•
20 novem bre 17 8 1, les conclusions qu’ils avoient annon
cées lors du procès verb al, c’est-à-dire, i° . qu à Vavenir
le charbon fût partagé par m oitié ; 2°. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qu’elle a retiré et J a it creuser
sous le champ de la Charoulière , et ce pour leur
m oitié , à quoi ils se restreignent 30. à la m oitié dudit
charbon retire de ladite terre depuis Tinstance 4°* erl
^000
de dommages-intérêts.
j
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du prem ier ju g e,
qui déclare les intimés propriétaires de m oitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou~
Hère , et de m oitié de celles du communal de la Pleau
(q u i n’étoient pas en litig e ); mais, attendu, est-il d it, que
les intimés n’ont pas réclam é dans le temps contre l’ex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la P lè n e , publiquement et ouvertement , en
vertu de son contrat de i'/ 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations , la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d ’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
L a veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M a is, Sic vos non n o b is , un nomm é Saint-Victou*’
profita do ces querelles pour persuader que l ’ e x p l o i t a t i o n
de
�.
, .
< •* > )
de ces mines étoit en m auvaises„ rnains +ril çn
d’abord de l’intendant dei.Lim oges la concession poui;
un an ; puis-il ¡fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration^ spn0i^tUit;é ,
.p ^ in t éfi. 1783 une
concession,de q^m ze.jris.
ob ar»*: ' J S 15{
L L a •loi du .28 juillpt;fi ^9.1;e ^ u ^ a < ,Sa;nt-„yiCtour4
qui néanmoins ne fut pas découragé, -et q u i, dans toutes
les phases de la ré v o lu tio n , se f.t iiït ,iu x avenues des
administrations etTdes, ministère^, ppur solliciter quelquesuns des arrêtés ci-après,
en veniir.4pr,longue mfvin à,
réussir.
, ,
r> q
^ f, s;i{
.,_T '
Les mines étant seulement sous la surveillance, admir
nistrative , les propriétaires de Pleau obtinrent , le
6 novem bre 1791^ un arrêté du département de la.Gorrè z e , qui les remettpit en possession de, leurs carrières..
Saint-Yictour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit; i l fallut .des enquêtes
pour le vaincre. E n fin , en 179 3 ,, il p aru t,céd er, et fit
faire par B ettinger, son associé ,..un,traifcé^avec Pierre-,
Jean T reich appelant , lequel, conçédoit, ¿1 p rj,x fixe ,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département hom ologua ce traité le 19 juin 1793.
D ’autres cliangemens amenèrent d’autres intrigues. O n
fit écrire au ministre de l’intérieur .par le ministre de la
m arin e, pour les mines de Pleau ; pn eut des avis de la,
leommission des m ines, d’autres de celle des travaux pu
blics. O n fit ordonner que les, propriétaires ex;ploiteroient en commun. •
L e département de la Corrèze p r it, les
viôse on
5,
5
et i5 plu
deux arrêtas qu’il crut etrje en conform ité
.j ;; illf
'
�r,
.. , . ............. C ™ / ) .
.
.
_
de ces feglemèris-, maïs ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
‘
Les propriétaires des minés se réunirent, le 24 nivôse
an 6 j poiir Organise^ une* exploitation en-commun, sous>
là direction de Mazaud. O n prëssent que T reich appe
lant, ét principal propriétaire, ne pouvoit y ! participer à
cause du traité^qü’il avoit fait avec Bettinger.
U n autre obstacle s’opposôit à cette union. Les arrêtés
des 6 n o v em b re2 1791 et 1 9 " 'juin ' 1793 subsistoient
enbdre', et élloiént exécutés.’
' Mais le ‘bien ’général ne permit pas sans doute- à l’ad
ministration dé"la C oirèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des Considérations
particulières. L e pliis difficile né fut donc pas de vaincre
te léger empêchement ':'
;
:
D ir u it , œ d ijic a t, '■m u tâ t q u a d ra ta ro tu n d is .
L e département de l ’an 6 ' cassa, le 23 ventôse, les1
arrêtés du département 611 plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut liom oiogu ée, et il f u t 1enjoint à T reich de déclarer
sous "quinzaine s’il entendoit s’y r é u n ir , sinon il étoit
censé avoir renoncé h son droit.
T reich se pourvut près des autorités supérieures; il
osa même élever sa vo ix jusqu’au chef de l’état ; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T r e ic h , fils et héritier
de Marie la P l è n e , fut porté ci T u lle s , comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu a la cour
d’appel de Limoges.
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c n,
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,; ■
Les
adversaires
,
forts
cje
la
.décision
adm
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» •j 'j \j! -.y' -;a i j i * '>1' ;um ; *¡J .- .)¿jinistrative.
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contestèrent, ^d’abord la xpm pçtence .judiciairp ; mais
comment un arrêt^. ^ r o it - i l pu suspendre un aj>pél
pendant?
D ’ailleurs„rarrêfp.pe
régloit rien.sur
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t Les parties. plai<lèreftt;(^u^fyn^0;
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k Considérant qu’il résulte du contrat.du i«”-. dccein•
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« bre 1736 ,une : y ^ t ç -¡pure tj siniple)} et parfcifeo.de
« Tentier fonds,de.la portion de la, terre la, Charoulière,
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« qui fut vendue,par cet acte,: que la réserve énoncée
• n
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; i , . ; , i ,. ‘ . [ >' r : - ■ »
cc à la suite ,de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su gplé« ment du p rix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait -retenir au vendeur; la. p r o p r ié té ( de. la
«1¡1
moitié
sous le tér. de la
1- mine- de
:'•/ charbon
il* 1. . II.èxistante.
-. ¡ :,v;
,
« rein aliéné ; qu’il n’en dériyoit contre: l’acquéreur
cc qu’une simple action en réclamation de cette m oitié
« de charbon ; que; cette action QU^soi, ^st; prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps^de rtrerite annéès;
« que les in tim és.ont avoué et soutenu, au p r o c è s. que,’
« n i François Beynes , auteur d A n to in e ' , 7 i i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
cc à ch a rb on , depuis ledit contrat d e i ^ 6 ,ju s q u e n
c* 178 0 ; ce qui embrasse un espace ^de quarante-quatre
ce ans , plus que suffisant pour prescrire ;
.
cc Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean B eyn es, prem ier a cq u é re u r,
•
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« Jean T reich , père de l’appelant, et l’appelant lui-même,
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« ÀWt |)dskecl6 ïad^c'mciîtie1cl;éJnfaiïe 3 avec titre èiiifisant
« pour eri àcqütéWi*' ïa ^ropriiké^Wee b o û W f d r e t saris
« interruption pendant plus'de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription së tro u ve acquise en faveur d e ‘ l’acqué-
« reür que dès-tors Tèxiiîioeii èï îü Solution dçÿ autres
« questions agitées au procès deviennent in u tile 1 etc.
r-. f - ...... . p „ ° „ r
. rK . f' } ....
... ' : ,r...
L e tribüntîl tfit'q u ’il a été friil ju g é;'....
et
« maintient l ’appelant aü d roit et possession de jouir 1
« d e s.m in e s a charbori existantes dans la terre la Cha« roülière [ ...' le ' ' rel'a'xô d 'e 'Î’aBcü^tioh ;et plainte;
condamne'" les intimes à-! lui Véùd'rë le ’ charbon par'
euX ^ e rç u dans ladite 'tërr'è ;./. depuis le trouble jus
te qu’au jo u r .... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« ioo'ri~ de dommqges-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y é c h e t, du charbon
'"«
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« ‘ perçu depuis ledit joür ¿ ¿ ' ventôse an 6 ,' etc. »
•
.Les intimes se pourvurent en cassation sur quatre
moyens: Celui de l’incompéteiice fut réjeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la m inorité de
B e yn esV cjù ’ il lie jirbuyoit encore pas régulièrem ent,
fit réussir Tàdriiission. L a "section civile rejeta à son
tour fce nVo'yfcn , et s’attacha à l’ incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit j tiges l’a em porté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qû’ilc n so it , Tes deu?i arrêts de Lim oges ont été cas
sés le T4'mvôsc an 1 1 , pour avoir statué sur la possession
en m êm e.tem ps ejue sur la p ro p rié té , parce q u e , dit
¿’a r r ê t, la possession dérivôit de l’arrêté du 23 ventôse
àn 6 ,\ ..e t cependant cet arrêté avoit été respecté à L im o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�. V . . . . .-C'^ )
■ .
. ...
E n voyées à ’ faire statuer sûr leur appel en (cette cour.
* Les intimes seîigurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des/m ines de Charoulière : ils y disposent
aujourd'hui 'eri'’maîtres.
,
.
’
u M ais bientôt les plaintes que T reicli avoit portées au
pieçt du trôneront été’ fructueuses. L e ministre a donné
Ordre aupréfet>Jdè la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a‘ été effectué par arrêté du 27 floréal
a n 'lV ^ q u V permet polir un an à T reich et. autres d’ex
ploiter (illacuii dans sa p ro p rié té , à la charge de s’exp li
quer dan"sJce délai pour régler le m ode d’extraction à
venir.
' N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens. administratifs ,
Fappel a été suivi en la cour. lies intimés ne voudroient
y plaider que sur la -p ro p riété; ils prétendent que leur
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pou r prescrire.
M O Y E N S .
v
Ce n’est pas un très-grand malheur' qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’une cour d’appel., reconnue com pétente pour h fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet a r r ê t, au fond , soit
suspect d’aucun vice.
�.
( .H )
#
A u re ste , le sieur T re ic li se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugem ent comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables;
car si son arrêt de Lim oges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le m oyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requetes , 'ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dan^ tous ses m otifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Lim oges dans les ques-,
tions de la p ro p rié té , et m ême de la possession antérieure,
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition,
à l’arrêté du départem ent, du 23 ventôse an 6.
, ,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie M azaud à la possession, mais sur la pos ■
*
sibilité qu’elle y eût d ro it, quand le gouvernem ent auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
.
O r , M azaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événem ent, il n’y a aucun obstacle à ce que l ’arrêt
de Lim oges subsiste.
O11 répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dem anderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins à être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parlies est remis en litige.
D’A rgen lréd ép lo ro it la inisçre des plaideurs et l’étermte
des procès: M iscri litigantes ! de quibus n ih il ccrti est
constitulum , et quo i ah arhitrio cujusque et opuiationo
putiùs pendet, quàrn àccrtis regulis, M ais q u ’ a uroit-il dit
�■V
f.
•
(
)
.?•
■ ,
si, 'ouixë les tribunaux, il eût fallu parcourir u n cercle d’admirii'strations sans etreplus certain le lendemain que la veil
le', et!sans que,ces administrations le fussent elles-mêmes?
Q uoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
p o ser, quë lés dioses sont au même état que lors de la
cassation ,'e t par conséquent qu’il existe un arrêté du
|
^I1 ' *f ! Jr' -J -| J '
>
¿3 ventôse an 6.
' Si cet arrêté subsistait aujourd’h u i, la cour auroit à exa
m iner encore la même question de compétence relative
m ent à lîr possession des m ines; et il seroit bien difficile,
o ï f oser le^dh-'e , qu’elle se conform ât m ieux que la cour
de Lim oges à la 'démarcation dès pouvoirs; car pourroitelle faire p lu s, que d’arrêter ses condamnations à l ’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
M ais , dans tous les sens possibles,, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; lés jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par?la sentence de S a in t-A n g e l, et par
l’appel dë la veuve T reich .
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p e l, et on ne peut pas inyoquer l ’art, i^r. de la
loi du'28-juillet' Í791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance adm inistrative, il n’ôte pas le fait de la posséssion", et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrêté ne les i*apporte aussi que pour l’avenir.
'A in si L im o ges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la co u r, en statuant de m êm e, s’y conform eroit encore.
�(*6)
_
M ais elle n’a pas même l’empêchement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les in tim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du p réfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
n istre, n’a pas borné cette infirmation à un seul c h e f,
comme ils- le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la com pagnie M azaud
n’a plus le p rivilège • exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirem ent;
et d’ailleurs encore il est véritablem ent oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intim és ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
com pagnie M azaud y qui n’existoit p a s, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
em porte donc avec elle la question des jouissances.
' A in s i, bien'ldin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im o g e s, il semble que la cour n’a aucun empêchement
<Y adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la com pagnie M azaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l ’ap p elan t, seulement elle
y avoit une expectative au cas que T reich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. M ais l ’arrêté do
l’an 6 n’est plus. L a com pagnie M azaud , d’après même
les intimés ( page 14 de leur m ém oire ) , n’a plus (la
droits ; et s’il est vrai que la possession ' dés mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur T reich l’a encore
obtenue. A insi l'effet le plus immédiat de cette obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés m algré lui , doivent lui rendre compte.
.
A u reste , il s’agil ici de com pétence, et par conse:
quent
�.
t ij ^
.
quent d’ordre public : la.cour y>statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer, dans ses propriétés ; et
il n’y voit d’autre obstacle ' que l’obstination de ses
adversaires.
t ■ i j •! ’ . ’
: ’t
.
• ,•
- Soit que la cou r'ju ge toute la .possession,' ou seule
ment une partie de 1la . possession / il est au moins cer
tain qu’il n’y a ' de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de-Lim oges est cassé, même pour
ce qu’il avoit com p’é temment jugé , le sieùr T reicli ne
sera pas plus embarrassé d é prouver à R iom q u’à
Lim oges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
•„
•
i ° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. E lle
est vendue sans charges.
'
2°.. Son titre est fortifié par le fait même du pre
m ier vendeur , q u i , achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , ne s’est fait aucune
espèce de réserve. •
,
, 30. Il a joui plus de 10 ans avec titre et bonne foi :
il a’ joui même plus -de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. , Cette jouissance est constante au procès,
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen ; aussi ils s'efforcent de la
dim inuer par des négations.
' Ils n’ont jamais avo u é, disent-ils, que M arie la P lè n c ,
.
/,
c
�. . .
ç la >
veuve T re ic h , ait jo u i, et ils netrôuyeh t aucunes traces de
cet a v e u ; et l ’ap p elan t, au co n tra ire, a toujours d it,
suivant e u x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charo.ulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d i t , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C ’est.donc
dans les interrogatoires? M ais de quel interrogatoire a-t-on
voulu p a rle r? est-ce de celui de 17 7 5 ? est-ce de celui de
.178 1 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
crim inels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e prem ier interrogatoire est vraim ent une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de
, la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la senténce. L e juge demande à la veuve
la Plèn e s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
m oitié du com m unal, et autres carrières ; ..... s’il n’eçt pas
vrai qu’elle tient sous son joug les habitons du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon , etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de m oitié du com m unal,
et d e plusieurs autres carrières particulières ; ...q u ’elle
n’em peche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai ; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veu ve la PJene
11e jouissoit p a s, 011 y voit au contraire qu’elle enlendoit très-bien jouir seule de scs carrières, envers etconl*c
tous ; clic ne s’en défondoit pas.
�.
f 19
-"Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? 'Car il est parle
de dix-huit mois dans l ’interrogatoire de M artin Beynes
èt dans celui de sa fem m e, qui Ont rendu compte de! la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. M ais là
veuve la Plène explique., dans son interrogatoire du
même jo u r , que cette carrière n’est .qu’une continua-,
îion 4e creusement ; et plus loin elle parle encore de
ce nouveau creusement.
'
*
Comment la veuve la P lèn e.au roît-elle, en effet, m ènti
à la vérité contre elle-m êm e, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1781 , qu’elle a »toujours
joui. « Les contrats de vente , dit-elle’( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d’exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des' fonds y m entionnés, notam
te meut de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
’
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en prem ière instancè'. Leurs réquisitions au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la reqùêté
du 20 novem bre su ivan t, qui en font le com plém ent,
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû se con vain cre, par
le seul récit des fa its, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
'
Q u’y a-t-il encore de plus .exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
Ca
�.. .
C 20 )
.
.
.
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, 'publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté, m otivé sur la jouissance exclusive à leur nu et su,
demeure inattaquable : le m otif et le dispositif n epeuven t
se séparer. E n fin , peut-on douter de la possession constante
de T re ic h , après avoir vu lés aveux faits devant la cour
de L im o g e s, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
A in si la jouissance des T reich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 1736. O r , avec ces
points de fa it, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescrip tion , indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 177 1.
'
'
V e u t- o n considérer A n toin e Beynes isolém ent, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la v é rité , il faudroit une prescriptioo de trente ans.
O r , cette prescription s’y tro u v e , car A ntoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1 7 8 1, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de L im o ges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en di s a n t
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, oulre q u ’ il
n’étoit p:is seul héritier du ven d eur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire ( pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ‘mS c^°
moins, c’est qu’ils 11e comptent pas l'intervalle de 1736
1705.
�.
( ' 2I )
#
1 P ou r justifier cette. Réduction, ils disent .que c’est en
i y 55 seulement que la cause de la possession a été changée.
M ais il n’est .pas né cessa ire‘de changer la cause d’une pos
session pour prescrire1par tyente ans; car cette pi*escription n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque bonajîdes requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On, peut prescrire contre son titi-e, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« Contractée. » ( A l ’t. 2 2 4 1 . )
’
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
ven deur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de T reich acquéreur en i y 5 5 ; e t, sous
ce point de v u e , il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
d ix ans les charges 1 auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que* dans la plupart des pays de droit
é c r it, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de B o rd eau x,¡d ’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin ,,açlmettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
L ap eyrère, lettre P , n°. 83.
? .
A la v é r ité , son'annotateur inconnu prétend que B or
deaux n’admet que la prescription de trente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré , au
cas qu’il V eût lieu d'aborder,cette question secondaire.
Lapeyrère avoit di t, au n °.5>6 o , que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur/suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
#
M a is , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
«voir lieu dans la cause.
i ° . T o u s les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de d ix ans se fondent sur l’A uthentique Malœ
j i d e i , et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présum e pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présum er qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât io/igi temporis prcüscr/ptio, si verus doniinus ignoret ju s suum et alienationem fa cta m . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
M ais comment ne pas v o ir q u’A n to in e Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lu i-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il
n’a pas même ignoré la vente de 17 5 5 , car en 1 7 66
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers T reich pour
propriétaires des catrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A uthentique Malçe fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un im m euble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de d ix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’ iminoublo lui-m êm e est g re v é , et que D u n od m et
sur la môme ligne quant à la proscription de dix ans.
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 17 3 6 , qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit à des fruits temporaires?
E t n’étoit-il pas ridicule que le juge de Sainl-Angcl
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimes,
même Couder et la veuve Desfarges, èlQiei\tpropriétaucS
�po u r moitié , comme si après une vente le vendeur dem euroit pi’opriétaire ; et comme si dans un fonds il y avoi,t
deux propriétés,, l’une du tréfonds et Fuutre de la super
ficie.
Mais.,, dans tous les cas, il est superflu de rem onter à
cette, réserve de 1736, parce que Jean T re iç li ayant acquis
en 1755 , sans, q u e lle fût m entionnée , a joui avec bonne
foi., au om et su du ven d eu r, qui connoissoit son droit
ainsi l’appelant a prescription suffisante,
.
Les intimés, répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’ab o rd , parce que
.c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la teri*e, il y a clandestinité.
. A u tan t vaudi’oit avoir dit etiam pet- mille annos ,
.comme le dit D um oulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en con ven ir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant i-éserve d’un droit peuvent tom
ber des'nues, à la vingtièm e gén ération , et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à aucun trouble.
L ’espèce de Cancérius, l'apportée par D u n o d , parm i les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause ; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les liabitans, c’est parce qu’ il
ne l’a pas réparé sans e u x ; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la cause d’une
-manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
'
( 24 5 .
,
.
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
fondem ent dans la n ature, dans le droit public commun
à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses ?
sa?is aucune ’p réexistence ou m élange de t it r e , de
convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
q u i tire son origine d'un contrat , qui est propre à
celui qui a le titre , qui résulte d’un droit fo rm é , qui
produit line action , et qui peut être déduite en jugement.
.- .
« L a prem ière de ces facultés n’est pas sujette à la pres
« cription , tant qu’elle n’est pas intervertie. M a is la se'-*
« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« riv e d’une convention et d’une action qui sont pres
« criptiblcs et dans le com m erce o rd in aire, à moins
<x qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne p o u vo ir être prescrites. » (D u n o d , pag. 90.)
Ces principes s’appliquent sons effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu. le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Lim oges.
Rem arquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le d ro it, non pas seulement d 'attendre qu’ou c r e u s â t
pour p a rta g er, mais de creuser lui-m êm e.
La p re u ve , c’est qu’il a associé pour creuser ; la p reu ve,
c’esl qu’on a creusé soi-même , et plaidé pour soutenu*
qu’on en avoit le droit.
L a preuve en fin , c’est que la sentence de 1782 ndjugc
ce
�¿■2 5 , h
'
ce droit; c’est qu’elle déclare lesj intimés propriétaires de,
la m oitié de4 la Imine.
.
,\
•* \
*
■ U ne propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un 'propriétaire qui conserve son droit sans
prescription'.quand un autre en jouit d’après lui-m êm e.
•exclusivement.or
> • : < •, . '
.
,
t
<
, / t
•'
/
.
.
•
M ais Cette jouissance', d it-o n , a été clandestine.
.
 cela il n’y auroit qu’un m ot à ré p o n d re ; c’est
qüe la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu.
au vuxet su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
jjas attaquée par les intimés. D ira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? M ais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le p ep d ., .
. ,}
^ ' '. .
.
•
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent m algré son annulation , com m e
F&nseîgne Cochin , tome 5 , page 2 7 4 , et com m e.l’a jugé
la cour de cassation’ le 29 floréal an 7.
*. Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de L im oges,
q u i . mentionne l’aveu de^la possession.
jÿlais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
. [I 1 ' " '
’■! ' ‘t ' ' 1 >■
'
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fa it ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a m ieux su
que. Beynes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se'fait un moyen de ce que la Charoulièrc
n’a pas eu d’cxcavalion verticale, il sait bien qu’à la Pleau
.
•' g V
.
' ‘
.
..
D
�26
on n’a jamais, comme en Flandre , exploité ces mines
(
par des puits.
.
) .
•
■ . •-
v
L a montagne où est la houille est,en cône ré g u lier;
p a r conséquent, pour creuser dans une surface, il fout
creuser par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m o yen , qui est le seul usité à la P leau , rien
n ’indique m ieux où se dirige la fo u ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
..
L a procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que s'e trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sont au corhm nnal, mais au pied de la Charou-r
l iè r e , et eu direction de cette mine.
.
"
. r;
A u x termes du d r o it, une possession clandestine sup
pose le d o l , c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. 11 n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes c^iie
ceux-là même consignés au mémoire des intimés
Glcim possidere eum d icim u s, q u i f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o quern sib i controv ersia m fa ctu ru m s u s p i c a b a t u r , et ne fu c e r e t t j m E b a t . L . 6 , il’. D e a cq . P u ss.
V o ilà donc trois choses qu’ il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Plène ait ]o\i\fr(7tive?nenll
2°. qu’elle ait cra in t une action de la part d’Antoine
Beynes; 30. qu’Antoine Beynes a it ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 répond à tous ces faits, en disant
que Marie la Plène a joui publiquem ent. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�( 27 )
# <
^
contestations ; èt enfin les écritures des intim és, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur m oyen.
M ais quand tout cela n’existeroit pas , vit-on jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
■ L a clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui'h
voulu prescrire par le seul secours de la possession, et
parce que sans possession publique il' n’a vraim ent pas
de possession.
'
v M ais celui qui a un titre n’a besoin d ’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lu i est‘point appli
cable.
'
'
lu i
. ■
D unod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en verlu
* d’un .'titre ne peut être regardé comme possesseur d a n
ce destin \ son titre le faisant supposer de bonne1foi dans
le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
;
:
. . .
. L e Code civil répète que la bonne f o i, quand il y a
.un titr e , est toujours présumée , et que c’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( A rt. 2268. )
'
Les intimés disent qu’on -devoit avertir Beynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit : et d’ailleurs, ori
le répète , ils se sont dits copropriétaires.
•
Il
n’y a donc aucun obstacle à ce 'que la prescription
ait eu son cours ; et T reicli ayant-un’ titre et bonne foi
depuis 17 5 5 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777. -, ■
'•
;
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�.
.
,
(
2
8
3
.
.
cessaii’e ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l’a été celle de 17 6 8 , par un acte que T reich avoit dés
espéré de trouver ; il doit d em eu rer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
•
C o m m en t, en e ffe t, Antoine B eyn es, qui a toujours
habité le village de la P le a u , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
A n to in e B e yn es, q u i en 1766 faisoit un traité pour ex-»
traire du charbon dans ses p ro p rié té s, aui’oit-il manqué
d ’y com prendre la C h aro u lière, s’il y avoit eu le même
d roit d’extraction ?
Com m ent A n toine B eynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux m ines, en se réservant du charb on , n’auro it-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T o u t prouve dono
qu’elle a ’existoit p lu s, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Lim oges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les c a s , n’y ayant
qu’une septerée de la C h arou lière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors v en d u e, e: non sur celle
qui l’a voit été depuis long-tem ps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’ il n’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se ièroit contre
le ven d eu r, in eu ju s potestnie fu it lisent, apertius di
cure. L a sentence do S a in l-A n gel étoit donc encore v i
cieuse, même sous ce rapport.
x Cette défense su résume en peu de mots. L a propriété
�( 29 )
,,
.
de la Charoulière est sans difficulté à Jean T re ic h L es
actes qu’il a passés avec les Beynes , p rouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’A n toin e Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T re ic h
et M arie la Plèn e ont joui .exclusivem ent et publique
ment , au v u et su dudit B eyn es, sans réclam ation de
charges ni de copropriété.
A in si Beynes a -perdu son d r o it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur , par une possession
de trente ans.
A in si T reich a acquis la franchise de la terre la Cha
rou lière, p a r la possession de dix ans entre présens, comme
acquére u r; et m ême surabondam m ent, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire , il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem m ent, sous tous les points de vu e possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirm ée par
la cour de Lim oges.
M . B A R B E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Plène, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
charbonnière communale
charbonnière privée
propriété du sol
concession d'exploitation
charbon
intendants
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0249
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53748/BCU_Factums_M0249.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intendants
Mines
propriété du sol
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53195/BCU_Factums_G1306.pdf
147187eed80fea81b09759740d0d1170
PDF Text
Text
PRECIS,
COUR
d
Servant de réponse à Griefs et Moyens d’appel
signifiés le 2 thermidor an 1 2
POUR
M
T R E IC H D E S F A R G E S , v e u v e L a c h a u d ;
J e a n C O U D E R T ; et L é o n a r d C H A D E NIE R , v e u f
d ’A n t o in e t t e B e y n e s , tant en son nom qu’en qua
lité de père et légitime administrateur de ses enfans ;
tous h abitans de la ville ou commune de M ay m a c ,
intim és;
a r ie
CONTRE
J e a n - B a p t i s t e T R E I C H L A P L E N E , habitant
du lieu de la P lè n e , commune de M a y m a c, appelant
de sentence rendue en la ci-devant justice de SaintA ngel le 17 m ai 1782.
D E s mines de charbon, abondantes et précieuses ? qui
devroient être p o u r les parties une source de richesses,
ont donné lieu jusqu’ici à des procès ruineux. L ’appeA
’a p p e l
SÉANTe
A RI OM.
�V&
* . V.
( O
lant, au lieu de contester un droit évident et certain,
auroit dû. se réunir aux intimés , pour obtenir du gouvei’nement l’autorisation nécessaire. Il a voulu se livrer
à une discussion qui ne peut le conduire à rien d’utile.
Il ne doit pas se flatter qu’une possession furtive et clan
destine détruise un titre authentique : ce n’est point en
cachant sa jouissance qu’on peut acquérir une prescription.
F A I T S .
L e i er. décembre 1736, François Beynes , aux droits
duquèl sont lès intim és, vendit à Jean Beynes, dit char
bonnier , deux pièces de terre , situées dans le village de
la Pleau, l’une appelée le B a sn et, et l’autre la Charouillière.
L e prix de la vente fut fixé à la somme modique de
145
16^; mais le vendeur déclara se réserver, du con
sentement de l’acquéreur, la moitié du charbon qui
pourroit se creuser ou s’cxtraire dans la pièce de terre
appelée la Charouillière. Les frais d’exploitation devoient
être supportés par moitié entre le vendeur et l’acquéreur.
L e 25 mars IJ 55 , Pierre Beynes, fils de Jean acqué
reur en 1736, vendit à Jean T r e ic li, père de l’appelant,
différens immeubles où il y avoit des mines et carrières.
La terre de la Charouillière fut comprise dans cette
vente, avec les mines et carrières; et, dans le contrat, il
ne fut fait aucune mention de la réserve exprimée en
l’acte de 1736; au profit de François Beynes, vendeur
originaire.
Le 29 août 1768 Antoine Beynes, fils de François,
�C3 )
vendit à Marie la P l è n e v e u v e Treich , mère de l’ap
pelant, tous les héritages et mines jde charbon qu’il possédoit au communal de la Pleau.
Ce même Antoine Beynes, fils de François qui s’étoit
réservé en 1736 la moitié du charbon qui pourroit s’extraire dans la terre de la Charouillière, voulut user de
cette faculté ; e t, pour y parvenir, il proposa à la daine
Marie Treich Desfarges 9 veuve Lachaud , et à Jean
C oudert, un traité d’association.
L a dame veuve Lachaud, et Jean C oudert, étoient
propriétaires, chacun d’un q u art, des mines communes
de houille ou charbon de pierre qui se trouvoient dans
le village de la Pleau. Ces mines étoient contiguës à celles
de la Charouillière, de sorte qu’on pouvoit; exploiter ces.,
dernieres par les premières ; ce qui facilitoit infiniment
l’opération d’Antoine Beynes.
En conséquence, le i 5 décembre 1 7 7 7 , il fut passé
un traité, par lequel il est convenu que la dame veuve
Lacliaud , et Coudert, demeurent associés au droit qu’a
Antoine Beynes , de creuser dans la terre de la Cha
rouillière.
Cette association est faite par tiers, en supportant dans
la même proportion les frais de fouille et creusement, qui
sont à la charge de Beynes, conformément à l’acte de
1736 , relaté au traité.
Beynes, de son côté , est associé..au droit qu’ont la
dame veuve Lachaud et Coudert, de creuser dans les
communes du village, aussi pour un tiei-s dans la pro- ,
portion du d roit, en supportant aussi un tiers des frais.
Mais il est expliqué, entre les parties, que si Beynes n’a voit
A 2
�^' 1*0
- *
( 4 )
j
i
!,
;
!
pas le droit' de creiiser et prendre la moitié du charbon
de la Charouillière, la société n’auroit aucun effet,
En exécution de ce traité de société, les parties avoient
commencé l’exploitation , lorsque le 6 août 1781 la veuve
Treich la P lë n e , représentée par l’appelant, se plaignit,
devant le juge de Saint-Augel, dès fouilles qu’elle disoit
avoir été faites à son insu dans la terre de la Charouilliir e , dont elle se regardoit comme seule propriétaire.
Elle demanda et obtint des défenses provisoires de
continuer la fouille ; mais, en attendant, elle prit un autre
moyen pour empêcher les intimés de creuser chez eu x:
elle chercha à les engloutir dans leurs mines, en prépa
rant un éboulement de tex’rein qui fut sur le point de
leur être fatal.
Les intimés rendirent plainte contre cette veuve témé
raire; elle fut décrétée de soit ouï : mais les parties furent!
ensuite renvoyées à fin civile -, les' défenses provisoires
faites aux intimés furent levées en donnant caution.
Ea discussion s’entama sur le fond ; toutes les demandes
furent jointes ; et enfin, le 17 mai 1782 , le juge de SaintA ngel rendit un jugement définitif après appointement,
par lequ el, « sans avoir égard à la demande de la dame
«> la Plëne , veuve Treich , du 6* août 1781 , tant sur le
« chef de propriété de la totalité des carrières à charbon
« par elle prétendues lui appartenir en seule dans le
« champ de la Gharouillière, que sur le chef encore de
« son a c t i o n eii trouble, à raison de l’ouverture et d e 1
«“l’exploitation des fouilles par elle prétendues avoir été
« faites par les intimés;
« Sans avoir pareillement égard à la prescription’ op- -
�te l
» posée par la dame la P lè n e , dont elle est déboutée»
« faisant droit sur les conclusions de la dame veuve.
« Lacliaud, Çoudert et Beynes, les déclare propriétaires
« chacun pour un tiers,; tant-de la moitié entr'eux trois
« dans les carrières de cliarbdn de la pièce de terre de 1
« la Charouillière ,; appartenante en superficie en son« entier à la dame la Plène,.que' de la moitié encore
«- entr’eux. trois à eux appartenante, et à chacun d’eux
«• pour un tiers, du communal de la P lea u , et des car
te riùres- en. dépendantes.; Il est fait défenses à la veuve
« la Plène de les troubler’dans leur propriété.* »
t
- M ais, « attendu que Beynes, non plus que ses associés,
k:' n’ont point réclamé dans le temps contre l’exploitation.
« et perception de charbon que la veuve la Plène a faite, .
« avant l’introduction de l’instance, dans les lieux con«- tentieuX'j publiquement et o u vertem en ten vertu de
« son Contrat du 2Ô mai 1755 , et au vu et au su tantr
« dudit Beynes que de ses associés, sans opposition ni
« réclamation , ni offres de leur part de parfournir ù la r
« moitié des, frais et-impenses de creusement , pour se
« procurer leur part revenante du charbon creusé avan t.
« l’introduction d’instance,, là veuve la Plène estj rën« voyée de cette demande, déchargée de- tout compte
« du charbon extrait, comme les associés sont renvoyés, t
« et déclxargés-de tout compte de clujrbon creusé et perçu ,
« par eux sur les lieux contentieux compensa tidn//ctr
« décharge demeurant respectivement-faite ,à ce.L égard ,
« et entre toutes parties, etc. çtc. »- . I-es autres dispositions du jugement sont inutiles à i
Appeler : on n’a môme rapporté cQtte dernière partie
° 4*
�( 6 )
qu’à raison de ce que l’appelant entend se faire un moyen
de prétendus aveux, q u i, dans son système, résultent
des expressions de cette partie du jugement.
L a dame veuve la Plène interjeta appel de cette sen
tence devant le sénéchal de Tulle ; mais, pendant que les
parties discutoient entre elles, survint un tiers qui sut
profiter de ces dissensions.
Un sieur Fénis Saint-Victour se fit concéder par l’in
tendant de Limoges l’exploitation de ces mines contentieuses; il en a joui exclusivement jusqu’en 17 9 1, et alors
la suite du procès étoit sans intérêt.
Mais une loi du 28 juillet 1791 rendit aux proprié
taires de la surface le droit d’exploiter les mines, et voulut •
qu’on leur donnât toute préférence pour l’exploitation,
lorsqu’ils la demanderoient.
Eu vertu de cette lo i, les anciens propriétaires se remi
rent en possession. Ils jouirent des mines dont il s’agit
jusqu’en l’an 6\ chacun fit son exploitation particulière;
ils y furent même autorisés par des arrêtés de l’adminis
tration centrale du département de la Corrèze , des 6
novembre 1791 , et 19 juin 1793.
En l’an 6 nouvel ordre de choses. Les propriétaires se
réunirent avec Jean Mazaud , pour l’exploitation de
la Pleau et de Janoueix. Il en fut passé acte le 24 nivôse
an 6 : Mazaud étoit le directeur. Cet acte d’union fut
homologué par arrêté de l’administration , du 23 ventôse
an 6, En conséquence, la concession des mines fut faite
à Mazaud, pour les exploiter pendant cinquante ans, con
formément à la loi.
Mai§ l’article 3 de l’arruté portoit qu’il en seroit donné
�(7)
'connbissance à l’appelant, qui avoit alors succédé à sa
mère. Il devoit déclarer, dans le délai de quinzaine, s’il
; entendoit se réunir aux propriétaires dénommés en l’acte
d’union. Ce délai passé, il étoit censé avoir renoncé à
la faculté qui lui étoit accordée par la loi.
Cette union cependant n’avoit eu lieu qu’à raison de
ce que le directoire exécutif, en confirmant un arrêté clu
ministre de l’intérieur, du 8 floréal an 5 , a vo it, par
autre arrêté du 24 du même m ois, annullé les conces
sions particulières et séparées.
L ’arrêté de l’administration, qui ljomologuoit le con
trat d’union, fut soumis à la sanction du gouvernement:
l ’appelant y forma opposition ; mais il n’a pas été statué
sui cette ;opposition.
’
■
Ce n est qu’après tous ces incidens, après avoir souf
fert la pleine jouissance des intim és, depuis 1791 jus
qu’en l’an 6 , que l’appelant imagina de donner suite à
l’appel interjeté par,sa m ère, de la sentence de SaintAngel. L ’acte de reprise est du 26 frimaire an 7.
. Cette affaire fut d’abord portée au tribunal civil de
la Correze, et ensuite au tribunal d’appel séant à Limoges.
- Alors s’éleva une question de compétence : Les tribu
naux pouvoient-ils connoître d’une matièi’e purement
administrative , sur laquelle le gouvernement exerçoit
une grande surveillance, et dont les administrations
avoient été saisies depuis 1791? Les intimés soutinrent
que le tribunal d’appel de Limoges ne pouvoit pronon
cer sur la contestation. I,’appelant prétendit, au con
traire, que la discussion qui s’élevoit entre les parties
¿toit une question de propriété , qui ne pouvoit être
�;(8)
portée que devant lès tribunaux ; et qu’à k cour d’appol
de Limoges appartenoit seule le droit de prononcer sur
le bien ou mal-jugé de la sentence de Saint-Angel.
Ce système fut adopté par le tribunal de Lim oges,
qui retint la cause, x>ar jugement du 22 ventôse an 9 ,
-sans préjudice du droit des parties pour poursuivre au
près du gouvernement l’homologation de l’arrêté du
23 nivôse an 6 , ou pour s’y opposer.
L e 28 germinal suivant, jugement définitif, qui, fai
sant droit sur l’appel interjeté par la mère de l’appelant,
« dit qu’il a été mal jugé; émendant, garde et maintient
« l’appelant dans le droit et possession où il étoit, à la
«. suite de ses auteurs , avant le 'trouble, de jouir de toutes
« les mines à charbon existantes dans la terre de la Cha-tc rouillière ; fait inhibitions et défenses aux intimés
« de l’y troubler; le relaxe, en.la qualité qu’il agit, de
« l’accusation intentée contre sa mère et ses gens et
« préposés; condamne les intimés solidairement a rendre
« et restituer à l’appelant tout le charbon par eux in« dûment perçu dans la pièce de la Charouillière, sui
te vant l’état que l’appelant cin fournira, sauf contredit,
xi et ce depuis le trouble jusqu’au jour o ù , par l’eiîet de
« la loi du 28 juillet 1791 , l’exploitation des mines
k
dont il s’agit a été concédée par arrêté de l’adminis« tration cenLrale du département de ila Corrèze, en
« date du 23 ventôse an 6; condamne aussi solidairexî ment les intimés en cent francs de ilômmnges-intérêts )
* si mieux n’aiment les parties qu?il's soient fixés par
« experts, sans préjudice à l’appelant de la restitution,
« en temps et dieu;, s’il y échct ;■du charbon que les
« intimés
�w
C9 )
....
« intimés auroient perçu dans la pièce de la Charouîl« lière, depuis l’époque de Parrêté du 23 ventôse an 6,
« et des dommages - intérêts de l’appelant ; déclare n’y
« avoir lieu à statuer sur les autres chefs de la sentence;
« ordonne la restitution de l’amende, et condamne les
« intimés en tous les dépens. »
: :
Les motifs qui ont déterminé le jugement sont intéressans à connoître. On prétend que la i'éserve énoncée en
l’acte de 1736, même du consentement de l’acquéreur,
n’y est apposée que comme un supplément du prix déjà
stipulé ;' que'cette clause n’avoit pu faire retenir au ven
deur la propriété’ de ' la moitié de là mine de charbon
existante sous le terrein aliéné ; qu’il n’en dérivoit en sa
faveur qu’une simple action conti’e l’acquéreur, en ré
clamation de cette moitié de charbon.
Mais On décide que cette action en soi est prescriptible,
comme toutes les auti’es, par le laps de trente années.
Les intimés ont avoué et soutenu que ni François Beynes,
auteur d’Antoine, ni Antoine lui-même, n’avoient jamais
joui de la mine dé charbon depuis le contrat de 1736
jusqu’en 1780, ce qui embrasse un espace de 44 ans.
Cet intervalle de temps est plus que suffisant pour
prescrire une action qui de sa nature se perd et s’éteint
faute de l’exercer dans les trente années, terme préfini
par la loi.
Cette action est prescrite par le non-usage. Jean Beynes,
premier acquéreur , et Jean T reich , père de l’nppclant,
et l’appelant lui-même, ont possédé la moitié d’une mine
avec titre suffisant pour en acquérir la propriété, avec
honnë fo i, et sans interruption, pendant plus de trente
B
�u»,
((IO )
ans., Cette prescription se trouvait „donc acquise, et dèslors l ’examen et la solution des autres questions agitées
au procès devient inutile.
Ces motifs ne sont ni raisonnables ni fondés en1point
de droit. Indépendamment de ce que le droit d’extraire
le charbon d’une mine non encore exploitée-, est une fa
culté de fait qui ne peut se prescrire, ou du moins de
ce que la prescription ne pourrait commencer à courir
que du moment où la mine seroit ouverte et exploitée^
publiquement, et sans réclamation f c’est qu’il n’y a jamais*
e u , dans le fait, aucune ouverture sur la terre de. la Charonilliere ; il n’en existe pas même encore.
S’il a été extrait du charbon dans cette terre, ce
n’est que clandestinement et furtivement, en s’entroduisant par les mines du communal de la Pleau;.
• O r , l’appelant n’a été propriétaire, des m ines,ou de
partie des mines du communal de là Pleau, que depuis^
1768.
On se rappelle que ces mines appartenoient, savoir,
moitié à Antoine Beynes, un quart-à la, dame veuve L acliaud, et un quart à Jean Coudent l’appelant et ses
auteurs étoient absolument étvangçrs. à cette propriété.
Ce ne fut que le 29 août 1768, que la mère de l’appe
lant acquit d’Antoine Beynes la moitié des mines du
communal. Ce n’est que de ce moment qu’il a pu exploi
ter du charbon : 01*,, depuis 1768 jusqu’en 1780, que le
procès a commencé* il ne pouvoit y avoir de prescrip
tion ; le fait est bien évident. -, . .
D ’un autre côté, il n’y auroit pas même de prescrip
tion quand on ivoudroit faire paxtir la possessipur; do
�( -il)
l’appelant depuis 175$. "Antoine Beynes, fils du vendeur
de 1736, ri?est né que le premier août 1733 son père
est décédé en 1745. Antoine Beynes n?est donc devenu
majeur que le premier août 1768; et dépuis cette époque
'jusqu’à la demande',-il*-ne se seroit^coiiléiqU e*vingtdeux ans utiles.
f ) j-.î o.>
L ’appelant ne peut ^prétendre un droit;exclusif Jqu’en
vertu de son contrat de i j 55 , qui ne contient point la
réservç d’exploiter. Il ri’a pü charlger'Jla nature de sa
possession que du 'jour de >sà vente, pûisqiië -Tacquéreur
dé 1736 lui a-laissé‘ignorer la réserve insérée dans son
contrat d’acquisition. Il n’y a donc pas même de pres
cription en point de fait, ‘j ' ■ "
Ces différentes propositions recevront plus de dévelop
pement dans la suite.
. r.
. y{
Sur la signification qui fut faitç aux intimés de ce
jugem ent, ils se pourvurent en-cassation.
Ce jugement a été cassé par arrêtdu 14 nivôse an 1 r , vf e _
et les parties renvoyées en la co u r pour faire statuer sur
les contestations respectives.
Y oici les motifs de l’arrêt de cassation : -■
« V u l’article 8 de la loi du 12 juillet 1791 , ainsi
« conçu :
« Toute concession ou permission d’exploiter une mine
« sera accordée par le département, sur l’avis du direc
te toire du district dans l’étendue duquel elle se trouvera
« situee.1E t ladite permission ou concession ne sera
« exécutée qu’après avoir été approuvée par le roi ,
w conformément à l’article 5 de la section 3 du décret
0 du 22 décembre 1789.
r
B 2
�« V u l’article 13 du titre i o ’de*la loi du 24 août 1790 ,
« qui veut que les fonctions judiciaires soient distinctes
« et demeurent essentiellement séparées des fonctions
« administratives.
« .Considérant que l’administration centrale du dépar« tement de la Corrèze a homologué , par un arrêté
« du' 23 ventôse an 6 , un acte d’union passé le 24
« nivôse précédent, entre les propriétaires des mines
« de la Pleau et de Janoueix ;
« Que cet acte d’union avoit pour but l’exploitation
« des mines en commun , sous la direction de Jean
« Mazaud *,
« Qu’en conséquence de cette union, la concession
_.« des mines fut faite audit Jean Mazaud par Padministra« tion centrale , pour les exploiter, conformément à la
« l o i , pendant l’espace de cinquante ans ;
« Que lorsque cet arrêté fut soumis à la sanction du
* « gouvernem ent, Treich la Plène ( l’appelant ) y forma
. « opposition , et que le gouvernement n’a point encore
« prononcé sur cette opposition.
« Considérant qu’il résulte de la requête d’appel de
; « la veuve Treich la Plène , du 23 septembi’e 1782 ,
« qu’elle concluoit à ce qu’en réformant la sentence du
« premier ju g e, le tribunal d’appel la maintînt dans le
« droit et possession où elle étoit avant le trouble de
« jouir de toutes les mines de charbon de la Charouillière,
« avec défenses de la troubler ;
’
« Que le tribunal d’appel séant h Limoges a néan« moins regardé , lors de son premier jugement du
« 22 ventôse an 9 , la contestation comme du ressort de
« l’autorité judiciaire,
�' ( i 3 ':)
« Considérant que cette contestation étoit èssentiellement administrative, puisqu’elle avoit pour but de
i-enverser la possession , la jouissance, qui dérivoient
de l’arrêté de l’administration centrale du 23 ventôse
an 6 ;
: « Que lors du jugement sur le fond , en date du
« 28 germinal an 9 , Treich la Plène a été réellement
« maintenu dans le droit et possession où il étoit avant
« le trouble de jouir de toutes les mines de la Cha« x’ouillière ;
« Q u’il a été fait défenses aux demandeurs en cassa« tion de troubler T i’eich la Plène dans cette possession;
« Qu’il est évident, sous ces rapports, que le tribunal
. « d’appel ne s’est pas borné à prononcer sur la propriété;
« Que ce tribunal a, par son premier jugement, retenu
« la cause pour prononcer sur la possession- et sur la
jouissance demandées;
.
« Que ce tribunal a ensuite adjugé cette possession
« et cette jouissance à Treich la Plène, en faisant même
« défenses à ses adversaires de le troubler ;
« Qu’il a violé par là les lois ci-dessus transcrites, et
« s’est mis en opposition avec l’arrêté de l’administra. « tion centrale, du 23 ventôse an 6 , tandis qu’il auroit dû
« se borner à se déclarer compétent sur le droit de pro• « priété , sauf aux parties à se p ou rvo ir, après que le
« droit de propriété auroit été fixé, pardevant l’adminis« tration supérieure, pour être établi ainsi qu’il appar« tiendroit.
-,
«
«
«
«
« L e tribunal casse les jugemens des 22 ventôse et 28
*■“ germinal an 9 . »
�'( 1 4 )
En exécution de cet a rrê t, les parties sont venues en
la cour , et c’est en cet état qu’il s’agit de prononcer
aux parties.
L ’appelant a proposé ses griefs contre le jugement de
Saint-Angel. Les moyens qu’il a fait valoir ne sont en
général qu’une critique de l’arrêt de la cour de cassation ;
il a passé très-légèrement sur le fond de la cause, et n’a
pas cru devoir l’examiner.
Suivant l u i , on ne doit plus examiner la question de
compétence. L ’arrêté du 23 ventôse an 6 a été rapporté,
et dès-lors tout,est du ressort des tribunaux.
La question de compétence n’est pas celle qui intéresse
le plus les intimés. Pleins de confiance dans les lumières
et la sagesse des magistrats qui doivent prononcer sûr
leur s o r t, ils n’examineront que subsidiairement ce qui
peut être dans l’attribution de la cour.
L e rapport de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ne peut
changer l’état de la cause. Si l’arrêté du 23 ventôse
an 6 est rapporté , ce n’est qu’en tant qu’il homologuôit
le contrat d’union pour l’exploitation des mines , sous
la direction de Jean Mazaud,
Cet arrêté mis à l’éca rt, il n’y a plus d’union ni de
direction ; mais cela n ’empêche pas que le mode d’exploi
tation des mines, ou la concession, n’appartienne tou
jours aux corps administratifs ; que la possession pour
l ’avenir, ou la faculté d’exploiter, ne soit une émana
tion du gouvernement , parce que les mines sont tou
jours une propriété publique , sous l’autorité immédiate
du chef de l’em pire, qui en peut disposer à son gré. Les
anciennes comme les nouvelles lois-n’ont pas varié sur
�1
**$
C
)
ce point-, et si les nouvelles ont apporté quelques modi
fications aux principes anciens, en faveur, des propriétaires-;
de 1a surface, ce n’est que pour leur accorder, une pré
férence lorsqu’ils la demandent ; mais jamais le législa
teur ne s?est départi du droit de concéder ,. ou au moins
¿ ’autoriser, l’exploitation suivant le mode qu’il prescrit. \
, En un m o t, la question de compétence:est jugée ; il
n’y a point à. revenir sur ce point : La jouissance future,
le mode d’exploitation à venir, ne peuvent émaner, que du
gouvernement. Que reste-t-il donc’ à rjuger ? La question
de la nue propriété , qui se réduit à ces termes :
. i°. La réserve portée en la vente de 1.7.36., est-elle,
une simple1 action prescriptible , à défaut de l’exercer
pendant trente ans, ou cette action ne commence-t-elle à,
courir que du jour où l’exploitation, a lieu publiquement 5
et sur le tevrein sur lequel frappe la réserve ?
-2 ? . Une jouissance clandestine et furtive, dans les en
trailles de la terre, sans que le tiers intéressé puisse en
être informé ou instruit , peut-elle acquérir un droit
quelconque à celui qui cache avec soin ses actes de pos
session , et s’empare de la chose d’autrui à l’insu du
maître ?
3°. En supposant une possession publique et utile , se
seroit-il écoulé, dans l’espèce particulière , un temps
suffisant pour prescrire ?
a
_L examen de ces différentes propositions amène néces
sairement certains details sur de px*étendusf aveux ou
déclarations, qui demanderont une discussion particulière
et qui ne tournera pas à l’avantage de l’appelant.
I-a réserve portée en l’acte de 1736 n’a pu prescrire.
�u t
C 16 )
C’est un principe certain en matière de prescription,'
qu’une faculté de fait et non de d roit, f a c t i non ju r is,
comme le disent les auteurs, est imprescriptible de sa
nature : une faculté de ce genre dépend uniquement de
la volonté de celui à qui elle appartient, si et liceat et
lubeat. Telle est la doctrine de Dumoulin sur la Cou
tume de Paris, §. I er. glos. 4 , n°. i 5. D u n o d , dans
son traité des Prescriptions, part. i ,e. , cliap. 12 , n°. 2,
est du même avis, et donne un exem ple, d’après Cancérius, de ce qu’on doit entendre par cette faculté im
prescriptible. L e propriétaire, d it-il, d’un château ruiné
depuis un temps im mém orial, pourra le faire rétablir,
et conti-aindre ses vassaux à fournir an rétablissement,
quand c’est la coutume, ou qu’il y a titre contre eux;
parce qu’encore qu’il y ait ici un droit fox-mé contre
les sujets , et une action prescriptible de sa nature,
elle dépend néanmoins d’une faculté de fait qui est im
prescriptible ; c’est de rétablir le château ou de ne pas
le faire; et cette faculté concerne l’action qui lui est
accessoire.
Ne doit-il pasen être de même du droit qu’on se réserve
d’exploiter une mine dans le champ dont on vend la
surface ? La faculté que se réserve le vendeur dépend
uniquement de sa volonté. S’il veut l’exercer, il en est
le maître ; il peut ne pas en user si cela lui plaît : mais
aussi lorsqu’il veut l’exercer la faculté conserve l’action,
quand bien même il n’auroit pas usé de son droit de
temps immémorial.
Si 011 pousse plus loin l’argument, et qu’on veuille
plier jusqu’à convenir qu’en général une action est pres
criptible ,
�•a « *
( i? )
criptible, il faudroit encoi'e distinguer l’action qui est
toujours active, d’avec celle dont l’exercice n’est pas
continuel. Cette dernière, dit Coquille sur Nivernais,
chap. 1er. art. 16 , ne pourroit se prescrire par une
simple jouissance de la part d’un tiers ; il faut encore
qu’à cette jouissance soit jointe la connoissance vi’aie ou
vraisemblable de la partie intéressée : et telle est la
r è g le , d it- il, en la prescription de tous droits dont
l’exercice n’est pas continuel, n i ordinairement appa
rent. Coquille cite à l’appui de son opinion la loi 2 au
Cod. D e Servit, et aquâ, loi Quamçis saltus, if. D e acq.
velam itt. Poss.
O r , on ne prétendra pas sans doute que le droit
d’extraire ou creuser une m ine, soit une action d’un exer
cice continuel ; on ne peut le faire qu’avec de grands
frais , et dans un temps opportun ; on peut accélérer
ou suspendre ; il peut se rencontrer des empôchemens
ou des obstacles qui gênent ou arrêtent momentanément
l’exei'cice du droit ; et celui qui a la faculté en use quand
il lui p laît, ou qu’il en a le pou voir, sans qu’on puisse
lui opposer la prescription.
S i , comme le dit Coquille , la jouissance d’un tiers
est insuffisante, à moins que la partie intéressée n’en ait
connoissance, l’appelant oseroit-il dire que les intimés ont
connu sa jouissance ou son exploitation ?
Non-seulement cette assertion seroit invraisemblable,
elle seroit encore impossible. En effet, il ne suilit pas
d’une jouissance furtive et clandestine. La clandestinité,
dit D ü n o d , chap. 6 , est un obstacle à la prescription,
parce que celui qui se cache pour jouir est présumé en
C
�( 18
mauvaise foi ; et que cachant sa jouissance,~ les intéressés
qui ne l’ont pas connue sont excusables de ne s’y être pas
opposés. Clandestinum fa c tu m semper presumitur
dolosum. L oi pen. íf. P ro suo. Cliirn possidere eum dici?nus , q u i furtivè - ingressus est possessioJietrt, igno
rante eo quem sibi controçersiani Jacturum .suspicabatur, et ne Juceret timebat. L oi 6 , fi'. D e acquir.
P oss.
' ■
,- •
En appliquant ces principes à l’espèce, si l’appelant ou
sa mère ont extrait du charbon de la terre de la Charouillière, ils l’ont fait furtivement et clandestinement. Il nepourroit y avoir de possession publique, de jouissance connue
de la partie intéressée , qu’autant qu’il y auroit eu des
ouvertures pratiquées dans la terre de la Charouilliere,
sur laquelle frappoit la réserve de 1736; ce n’est que
par cette jouissance publique, que les parties intéres
sées auraient pu être informées ou instruites , et réclamer
contre une exploitation qui blessoit leurs intérêts ou leurs
droits.
. L ’appelant osera-t-il prétendre qu’il a été fait des ouver
tures dans la terre de la Gharouillière ? Ce fait est abso
lument désavoué ; et les intimés offriraient de prouver
que toute cette surface est intacte, qu’il n’a jamais été
pratiqué, ni même fait de tentative d’ouvrir sur ce champ
contentieux.
Les intimés n’ont donc pu perdre leurs droits, puis
qu’ils n’ont pu les exercer ; on 11’a donc pu prescrire contr’e u x , puisqu’il n’y a pas eu de jouissance publique
connue on vraisemblable ; et dès - lors il faut écarter
une prescription q u i, comme le dit D upérier, est tou-
�*4 *
( i9 )
'jours odieuse, que la plus légère circonstance peut faire
disparoître.
- Si l’appelant ou sa mère ont extrait ou pr's à la
dérobée du charbon dans la partie de la Charouillière,
‘ils n’ont pu le faire qu’en s’introduisant par les mines
'du communal de la Pleau ou du bois de Maury qui
'confine cette terre, lequel bois est une propriété parti
culière à l’appelant. S’il s’est introduit par le com munal,
il n’a pu le faire que depuis 1768 , lorsqu’il a acquis la
portion d’Antoine Beynes dans ces mines communes.
;S’il l’a fait par son boisJ, cette entreprise a été occulte et
impénétrable. En un m o t, tant qu’il n’a pas fait de
fouille dans la terre sujette à la réserve, tout ce qu’il
a fait pai* d’autres voies est un acte téméraire et répré
hensible ; il n’y n'ipas d e ’bonne foi , ni de possession
utile : il l’a fait a l’insu de celui qui n’auroit pas manqué
de s’y opposer-, mais qui n’a pas pu le faire tant qu’on
ne le lui a pas dénoncé. Cliun facere videri Cas s i us
scribit eum qui celaçit adçersariurn , neque ei denun-ciavit si modo tirnuit ejus controversiam , aut imere
dcbuit. L o i 3 , §. 7 , iF. Quod vi aut clàm. '
Que l’appelant cesse donc d’invoquer la prescription
et la bonne f o i, lui qui depuis 1780 n’a cessé de vexer
les intimés et de les troubler dans leur jouissance; lui
qui vouloit exploiter exclusivem ent, et mettre à con
tribution ses voisins qu’il regardoit comme des rivaux.
L ’appelant ne paroît pas vouloir contester les prin
cipes qu’on vient d’exposer ; il en critique -seulement
l’application, e t‘ voici à cet égard son raisonnement:
François Beynes, représenté par les intimés, se réserva
C 2
;
t
�( 20 )
à la v é rité , même du consentement de Jean Beynes
acquéreur , la moitié du charbon qui pourroit se creuser
dans la terre de la Charouilliére, en supportant la moitié
des frais d’exploitation.
Il pourroit être fondé à réclamer l’exercice de cette
faculté contre son acquéreur ou ses héritiers. Mais lorsque
l’auteur de l’appelant a acquis cette terre de Charouilliere de Pierre Beynes, fils de Jean acquéreur de 1736;
Pierre Beynes vendit purement et simplement la terre
de la Charouilliére par l’acte du 2 5 mars i j 55 ; ce
contrat ne fait aucune mention de la réserve contenue
en la vente de 1736.
L ’appelant en tire la conséquence que la nature de la
possession a changé ; que lui acquéreur pur et simple,
ignorant la réserve , a été de bonne foi ; qu’il est ici
tiers-possesseur, que dès-lors il a pu prescrire contre cette
faculté par une jouissance de trente ans.
L e principe est vrai en général. L e tiers-acquéreur
qui achète purement et simplement d’un possesseur précaii-e , et qui ignore le vice de la possession, peut pres
crire par une jouissance paisible de trente ans. Mais ce
principe ne s’applique que dans le cas de l’acquisition d’un
immeuble ordinaire ; et tant pis pour le vrai propriétaire
s’il souffre la jouissance ou la possession du tiers sans
réclamer pendant trente ans ; il doit être puni de sa
négligence par la perte de ses droits. Il faut qu’il y ait
quelque chose de certain parmi les hommes ; et une
jouissance paisible anirno dom ù ii, pendant ti’ente ans ,
éteint toute action de la partie intéressée , qui s’est laissée
dépouiller sans sc plaindre.
�i **/
( 21 )
f Mais ici il s’agit d’une mine qui s’exploite dans les en
trailles de la terre. Les opérations de celui qui exploite
ne peuvent être connues qu’autant qu’il en existe des
traces, qu’autant qu’il y a ouverture sur le lieu même,
sur la propriété grevée de la réserve.
Tant que le propriétaite ignore la possession du tiers,
qu’elle ne lui a pas été dénoncée, qu’il n’a pu la con^
noître, ce tiers-acquéreur n’a pu posséder utilement:
la raison s’offenseroit d’une prétention contraire. O r, il
est impossible qu?Antoine Beynes, fils de François ven
deur en 173 6 , ait pu être instruit de l’exploitation.
Il n’étoit propriétaire d’aucun terrein dans le voisi
nage , il ne pouvoit s’introduire dans aucunes mines contiguüs, ni porter un œil scrutateur sur les usurpations
ou les manœuvres occultes de l’appelant.
’
. Il n’a pu le d écouvrir qu’en 17 7 7 , époque où il s’as
socia avec les autres in tim és, pour les mines du com
munal de la Pleau ; c’est alors seulement qu’il a décou
vert la fraude ; c’est en s’introduisant dans les mines pour
lesquelles il étoit associé, qu’il a reconnu les ouvrages,
ou les manœuvres ténébreuses de l’usurpateur , qu’il a
découvert les galeries souterreines pratiquées par l’appe
lant , et qui annonçoient une extraction considérable
commencée depuis long-temps. C’est alors que les plaintes
ont commencé , que l’action est née à die deteçtœ
J r a u d is , le seul moment où il a pu exercer ses droits
et sa faculté droits auxquels il étoit bien éloigné de
renoncer, puisqu’ils sont l’unique cause, l’objet exclu
s if, la condition de son admission il la société stipulée
en 1 777*
,
�(
22
)
Mais ,. objecte l’appelant, les intimés ont connu son
exploitation et sa jouissance : la preuve qu’ils ne l’ont
pas ignoré est consignée dans le jugement de SaintA n g e l, dont est appel: cette sentence, par une disposi
tion expresse, les déboute de la demande qu’ils avoient
formée en restitution ùe jouissances, sur le fondement
que l’appelant avoit exploité en vertu de son contrat de
17 5 5 , au vu et su des intim és; donc, dit-il , il a
prescrit.
A cet argument se présentent plusieurs réponses pércmptoires. i°. Il est difficile d’expliquer cette disposi
tion du jugement d’après la procédure et les écrits des
intimés, où non-seulement on ne trouve aucunes traces
de ces aveux , où au contraire on répète sans cesse qu’on
n’a pu connoître l’exploitation de l’appelant ou de ses
agens. D ’un autre cô té, cette relation seroit même con
tradictoire, avec les dires de l’appelant, qui ne cesse de
s’écrier, soit lors des procès verbaux du bureau de
p a ix , soit dans ses écritures , que son exploitation dans
cette partie ne remonte qu’à dix-huit mois. 30. 11 faudroit encore ici distinguer Antoine Beynes ou Chadenier qui le représente, des autres intimés. En effet, la
dame veuve Lachaud , et Jean Coudert, étoient pro
priétaires pour chacun un quart des mines communes
qui confinent la terre de la CharouiUière, et avoient
pu s’apercevoir de l’exploitation furtive de l’appelunt
ou de sa mère; mais Antoine Beynes étoit dans l'impuis
sance de la connoître avant l’acte d’association de 17 77 ,
puisque ce n’est qu’à cette époque et pour la première
fois qu’il a pu s’introduire dans les mines duconununal,
et par là s'instruire des manœuvres de l’appelant.
�( *3 \
Mais ce qui tranche toute difficulté en point de fait,
c?est qu’il n’y auroit pas même de prescription utile,
quand la relation du jugement seroit aussi vraie qu’elle
est inexacte.
En effet, François Beynes, père d’A n toin e, vendeur
en 1736 , est décédé ¡en 1745 -, son extrait, mortuaire est
produit au procès; il est m ort, comme on voit, avant
1755 , époque de la.vente de Pierre Beynes, fils de son
acquéreur.
Si l’appelant, par cette acquisition, prétend comme
tiers avoir change la, nature de la possession defson ven
deur, ce n’est que du jour de son contrat pur et simple ,
qui ne fait aucune mention de la réserve dont étoit
grevée la propriété de Pierre Beynes.
O r , Antoine Beynes n’est né qu’au mois d’août 1733;
il n’est par conséquent devenu majeur qu’au mois d’août
1758 ; et à partir de ce moment jusqu’en 1780, il ne se
seroit écoulé que vingt-deux ans utiles pour prescrire.
Cette réponse est sans réplique; elle est appuyée sur
un fait qu’il n’est pas possible de détruire ; sur l’acte de
naissance d’Antoine Beynes, qu’op ne peut révoquer en
doute.
Sans doute que l’appelant n’invoquera pas la prescrip
tion de dix ans, admise en droit écrit; cette espèce de
prescription , que les lois appellent usucapió, non-seu
lement exige titre et bonne foi, mais encore une posses
sion continuelle et non-interrompue : H is qu i bonâ Jidc
acceptant possessionern et continuât cnn, jiec interruptani inquietudinc htts tenuerunt , solct patrocinavi.
T-*oi uniq. au Cod. D e Usuc.
�.1
/
.
5 24 )
L e sieur Treich la Plène n’a jamais eu de possession
continuelle ou publique : on a mis en fait qu’il n’y avoit
jamais eu de mine ouverte dans la terre de Charouillière , pas plus dans la partie acquise en 1736 , que
dans celle que possédoit antérieurement l’appelant ou sa
mère. Les intimés ont déjà offert la preuve de ce fait
s’il étoit désavoué ; ou du m oins, d’après la dénégation
des intim és, ce seroit à l’appelant à établir qu’il y va
exploitation par la terre de Charouillère.
Voudroit-il élever quelque doute sur l’application du
titre de 17 3 6 ’, à cet égard encore les intimés n’ont à
craindre aucune vérification, et donnent les mains à toute
expertise.
E nfin, si on considère que depuis la sentence de SaintA n gel les parties ont été privées de leurs mines ; que
le sieur Fénis Saint-Victour en obtint la concession de
¿’intendant de Lim oges; qu’il en a joui jusqu’en 1791 ;
qu’à cette époque les propriétaires de la surface ayant été
réintégrés dans leurs droits par la loi du 28 juillet de la
même année , l’appelant a souffert la jouissance des in
timés sans se plaindre, depuis 1791 , jusqu’en l’an 6;
que ce n’est qu’en frimaire an 7 qu’il a imaginé de re
prendre l’ancienne instance ; on demeurera convaincu
que ses poursuites sont vexatoires, et qu’il est tout à la
fois non-recevable et mal fondé dans sa prétention.
En résumant, la question de compétence ne peut être
examinée en la cour; l’arrêt de la cour de cassation est
absolu en cette partie. Ce qui a pu se passer dans la
suite 11e change pas la nature de la cause. L e rapport de
l'arrêté de ventôse an 6 peut bien ôter à Mazaud, direc
teur ,
�z n
le u r , le droit d’exploiter, peut même anéantir , si l’on
v e u t , le contrat d’union ; mais il n’en est pas moins vrai
que la cour d’appel ne peut connoître, ni de la jouis
sance à venir, ni du mode d’exploitation. Ces objets sont
subordonnés aux règlemens administratifs et à la volonté
du gouvernement.
La seule question soumise à l’examen de la cour est
celle de savoir si Chadenier et ses associés sont ou non
co-propriétaires de la mine de la Charouilliere réservée
par le vendeur en 1736
Si cette faculté a pu se prescrire en point de droit;
si en point de fait il se seroit écoulé un temps suffisant
pour acquérir la prescription.
On croit avoir démontré que jamais l’appelant n’a eu
de possession publique et continuelle, comme le demande
la loi •, que, dans tous les cas, l’action des intimés seroit
toujours entière ; et c’est à quoi se réduit toute cette af
faire, plus effrayante par son volum e, qu’elle n’est dif
ficile dans sa décision.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
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M e. P A G E S ( de R i o m ), ancien avocat.
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la Cour d’appel.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum.Treich Desfarges, Marie. An 12?]
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An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Pagès
Vernières
Subject
The topic of the resource
mines
intérêt général
propriété du sol
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
sociétés
charbon
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis, servant de réponse à griefs et moyens d'appel signifiés le 2 thermidor an 12, pour Marie Treich Desfarges, veuve Lachaud ; Jean Coudert ; et Léonard Chadenier, veuf d'Antoinette Beynes, tant en son nom qu'en qualité de père et légitime administrateur de ses enfans ; tous habitans de la ville ou commune de Maymac, intimés ; Contre Jean-Baptiste Treich La Plene, habitant du lieu de la Plène, commune de Maymac, appelant de sentence rendue en la ci-devant justice de Saint-Angel le 17 mai 1782.
Annotation manuscrites: « 12 fructidor an 12, confirmation du jugement, journal des audiences, an 12, p. 553. »
Table Godemel : Mines : 2. peut-on prescrire contre un droit d’usage de mines, réservé par un acte, pour prouver qu’on a exploité ostensiblement, pendant le temps nécessaire à la prescription ? quel est le temps nécessaire pour opérer cette prescription entre présents et entre absents ?
les mines de houille ou de charbon sont-elles des propriétés nationales ou particulières ? Mines : 3. à quelle autorité administrative ou judiciaire, appartient-il de statuer sur les contestations relatives au droit d’exploiter telle ou telle mine, réclamé par plusieurs ?
concession d'exploitation par l'administration départementale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1736-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1306
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
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Relation
A related resource
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
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Mines
propriété du sol
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Sentence arbitrale. Giroud. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
transport fluvial
charbon
arbitrages
mines
asphalte
banqueroute
tribunal de commerce
ports
banquiers
génie civil
experts
jugement arbitral
marchandises
diffamation
Description
An account of the resource
Titre complet : 1ére affaire. 21 juillet 1847. suivi de 2éme affaire, 2 août 1848. Giroud, appelant contre Sauret et Jozian. Questions
Document manuscrit. Suivi de l'arrêt
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1838-1846
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3007
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3005
BCU_Factums_G3006
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53624/BCU_Factums_G3007.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Pont-du-Château (63284)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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marchandises
Mines
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tribunal de commerce