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TRIBUNAL
P O U R
F
D ’A P P E L ,
B A R B A T et H u g u e s M A Z E Y R A T , son m a ri, de lui a u to ris é e , in tim és .
r a n ç o is e
C O N T R E
B A R B A T , A n t o i n e CO U RB E Y R E , son mari, de lui autorisée; J e a n n e
B A R B A T et C l a u d e T R IO Z O N , son
mari, de lui autorisée ; et M a r i e B A R B A T ,
fille majeure, appelans d’un jugement rendu au
ci-devant tribunal civil du Puy-de-Dôme, le
1 6 frimaire an 5 .
M a r ie -R o s e
q
u
e
s
t
i
o
n
s
.
l ' appel d’ un jugement portant débouté d'opposition
est-il recevable, lorsqu’il n
'a été interjeté que plus de
trois ans après la signification ?
Une cession de droits successifs, consentie a u
profit d 'une tutrice et de son h éritier, q u i ont traité
solidairem ent, sans reddition de compte, peut-elle être
attaquée p a r la voie de la restitution dans les d ix ans.
Lo u i s B a r b a t et M a r i e F u m a t , a u te u r s c o m m u n s des
p a r t i e s ? é to ie n t d o m ic ilié s d a n s le r e s s o r t d e la c i- d e v a n t
A
Séant à Riom.
�,
. ( 2 }
.
coutume d’A u v e rg n e ; ils ont eu neuf enfans, parmi
le q rels Françoise Barbat, femme M azeyrat, intimés, et
Jacq re; B u bat, représenté par les appelans.
L j 29 décembre 17 4 4 , Louis Barbat fit son testament,
par ’equel il institua Jacques Barbat, son fils, son héritier
général et universel de tous les biens dont il mourroit
vêtu et saisi, sans aucune réserve , à la charge de payer à
chacun des autres enfans une légitime conventionnelle ,
qui fut réglée, pour les filles, à une somme de mille fiv
en deniers, quelques bestiaux et un mobilier détaillé autestament.
Il est ajouté, que dans le cas où les autres enfans voudroient se servir de la laveur de la coutume , le testateur
donne et lègue a Jacques B a rb a t, en préciput et avantage r s
îe quart et quatrième portion de ses biens.
L a fortune de Louis BarbaL étoit considérable ; il possédoit de vastes bâtirnensen fort bon état, qui ont été portés
par aperçu , suivant l’estimation ordinaire entre cohéri
t i e r s ; c’est-à-dire , au-dessous de leur valeur, à la somme
de treize mille quatre-vingt-quinze francs ; un mobilier
é v a l u é , à l’époque du décès du père, à six mille six cent
francs; trois cent quatre-vingt-six journaux de présoubois,
qui sont la nature de biens la plus précieuse, n’ont étéportés qu’à cent vingt francs le journal, et donnent un
t jtal de quarante-six mille trois cent vingt francs.
, Soixante-seize têtes d’herbage , à trois journaux par
tête, font la quantité de deux cent vingt-huit journaux,
et donnent, suivant la même estimation , une somme de
vingt-sept mille trois cent soixante francs.
‘ L a niasse de la succession paternelle, évaluée à vil p r i x ,
�.
( 3 }
comme on le volt par cet aperçu, présente un actif de
quatre-vingt-treize mille trois cent soixante-quinze francs.
Si 011 en distrait, au profit de Jacques Barbât, le quart
qui lui a été légué par le testament de son père , cette
portion se porte à vingt-trois mille trois cent quarantetrois francs, reste soixante-dix mille trente-deux francs,
dont le neuvième revenant i\ Françoise Barbai , femme
M azeyrat, est de sept mille sept cent quatre-vingt-un fr.
indépendamment des jouissances qu’elle a le droit de
répéter, à compter de l’ouverture de la succession du
p ère, mort le 1 3 janvier 1746.
Il a paru nécessaire de présenter ce tableau des forces
de la succession paternelle, pour donner une idée du dol
et de la fraude qu’a éprouvés Françoise B a rb at, par les
actes dont on va faire l’analyse.
L e 1 3 janvier 1746 , époque du décès du père, Jacques
Barbat, son fils, étoit âgé de près de vingt-quatre ans;
son acte de naissance est du 2 mai 17 2 2 ; Françoise Barbat,
sa sœur, n’étoit âgée que de six ans.
Marie F u m â t, mère commune, avoit cinquante ans
lorsqu’elle devint veuve; elle étoit impotente et hors
d état d agir 5 elle fut cependant nommée tutrice de ses
enfans, mais elle ne le fut que de nom ; Jacques Barbat,
son fils, faisoit seul les affaires de la maison ; il géroit et
administroit tous les biens, alloit en foires et marchés,
recevoit 1 argent et les revenus, et en faisoit son profit
particulier ; il les a meme employés fort utilement, puis
qu'il a fait des acquisitions considérables en son nom per
sonnel, aux dépens de ses frères et sœurs , aeqûisitions
qu’on n’a pas portées dans la masse des biens paternels,
A 2
3
�. „
C4)
.
.
,
et qui s’étendent à plus de cent journaux de terrain, à
raison de mille toises le journal.
Bientôt après la mort de sou p è re , Jacques Barbat
épousa Jeanne Bonnet ; sa mère l’institua son héritier
universel, lui abandonna tout ce qu’elle possédoit, et lui
înil entre les mains tous les titres et papiers de la maison.
Cette institution n’étoit pas un vain titre. Les biens de
Marie Fumât étoient considérables. Oa v o it, par son
contrat de m ariage, du ïer. juillet 1 7 1 8 , quelle se cons
titua toüs les biens qui lui étoient échus par les décès de
Michel et Antoine Fum ât, ses père et aïeul; que les effets
mobiliers de ces successions se portaient à une somme
de vingt-deux mille six cent trente francs , dont il lui
r e v e n o i t un quart; qu’en outre elle recevoit une somme
de deux mille francs de Jeanne E stiv a l, sa mère.
; JjQ 3 décembre 1 7 7 1 , Françoise Barbat contracta ma
riage avec Hugues Mazeyrat. Comme ce sont les clausesde ce contrat qui font naître la contestation, il est à propos
de les transcrire littéralement.
• « L a demoiselle F u m â t , veuve ■B a rb a t, et Jacques
a Barbat, son iils aîné, solidairement l’un pour l’autre,.
« ont constitué et constituent à la demoiselle future épouse,
« leur fille et sœur, 'la somme de deux mille cent francs en
« deniers et en meubles, etc. ( suit le détail du mobilier
cc mort et vif ) ; le tout évalué par les parties à deux cent
« c i n q u a n t e francs, pour tenir lieu, est-il dit, à la demoi« selle future épouse, tant de sa portion héréditaire dans
« la succession de feu Louis B a rb at, son père ,, que des
« revenus, jouissances ou intérêts qu’elle auroit pu espérer
« et prétendre pour tout le temps de sa minorité, distrac-
�( 5 )
* (ion faite de sa nourriture et entretien ; au moyen de
* quoi la future épouse subroge Jacques Barbât, son frère
« tant à ses droits successifs qui\ son action en reddition.
* de compte contre Marie Fum ât, leur mère , pour par
« lui les faire valoir comme il avisera bon cire , et h la
« charge par lui de garantir ladite future de toutes les
a dettes et charges prév ues et à prévoir do la succession.
« de l'eu Louis Barbat père.
a Jacques Barba t constitue en outre de son chef, à
te ladite ïrançoise Barba t , sa sœ ur, la somme de trois
« cents fr, moyennant laquelle elle renonce à son profit
« et de ses descendans, î\ toutes les successions à échoir
« de l’estoc paternel.
« Marie Fumât constitue à sa fille, de son chef, la
* somme de six cent francs , moyennant laquelle la future
* ('Pouse renonce , au profit de Ja c q u e s B a rd o t, son
* f r è r e aîné , tant à la succession à échoir de Marie
« Fu m ât, leur m è re , qu’à toutes les successions à échoir
a de son estoc.
« Il est ajouté en ce qui touche le payement des trois
«constitutions ci-dessus, que tous les meubles morts et
« vifs, ensemble la somme de six cents francs seront
« censés reçus par le sieur Alexis M azeyrat, père du futur, ‘
« à la célébration du mariage , et que cette somme de
« six cents francs, qui est payée par Jacques B a rb at,
r sera imputée sur les consti tutions paternelles de la future;
r à l'égard de la somme de deux mille quatre cents francs,
«restante, elfe sera payable p a r la demoiselle Fum ât
« et ledit B a r b a i , son f i l s , auxdits M azeyrat, père et
« fu tur, en düféreus payemens, l’un de quatre cents francs,
^3
�( 6 )
« et les autres de trois cents fran cs, d’année en année,
« à l’exceplion du dernier te rm e , qui ne sera que de
« deux cents francs, sans intérêt qu’à l’échéance des
te termes, avec convention entre les parties , que les
te premiers payemens seront faits et imputes sui le restant
te. de ,1a constitution paternelle , et que les autres termes
« s ’imputeront au prorata et au marc la livre, sur les
ce constitutions faites par Marie Fumât et Jacques Barba t.
« de leur chef particulier. »
Il est essentiel d’observer que dans les qualités du con
trat, on y voit figurer Marie F u m â t, comme tutrice;.
Jacques Barbat, comme héritier institué de défunt Louis,
père commun, quoiqu’ il ne fût que légataire du quart ÿ
q,ue nulle part il n’est question du testament du père ,
et que la légitime constituée à Françoise Barbat n’est pas
la même que celle qui avoit été réglée par le testament
de 1744*
Françoise B a rb a t, et son mari , ne tardèrent pas à
s’ a p e r c e v o i r que leurs intérêts étoient blessés, et leursdroits méconnus ; on leur avoit caché le .testament d u
père; ils n’avoient eu aucune connoissance des forces de'
la succession ; ils se pourvurent en lettres de restitution,
contre la renonciation et cession portées en leur contrat
de mariage. Ces lettres de rescision sont du 20 juin 17 8 1;.
ils en demandèrent 1 entérinement le 20 novembre suivant y
c ’ e s t - à - d i r e , dans un temps utile, parce que les dix ans
ne devoient expirer que le 3 décembre de la même
année.
Il s’éleva une contestation assez considérable sur cettedemande, en la ci-devant sénéchaussée d’Auvergne : les.
�, .
^ 7 )
choses étoient encore indécises lors du nouvel ordre
judiciaire ; la cause fut portée au ci-devant district de
R io m , qui remplaçoit la sénéchaussée.
Un premier jugement par défaut, du 1 6 nivôse,an 3 ,
entérina les lettres de rescision obtenues le 20 juin 1 7 8 1 ;
remit les parties au même et semblable état qu'elles étoient
avant la renonciation portée au contrat de mariage du 3
décembre 17 7 1 ; condamna Jeanne B o n n e t, veuve de
Jacques Barbat, tutrice de leurs enfans, à venir à division
et partage avec Françoise Barbat, des biens meubles et
immeubles délaissés par Louis Barbat, auteur commun;
savoir, du mobilier, suivant l’inventaire, sinon suivant
la preuve par commune renommée ; aux intérêts du
montant du mobilier depuis la demande, et des immeu
bles, avec restitution des jouissances, depuis l’ouverture
de la succession , et la valeur des dégradations commises,
avec les intérêts des dégradations et des jouissances , ainsi
que de droit, à la charge par Franç. Barbat de rapporter
ce qu’elle a reçu; il est ordonné , pour parvenir au par
tage, que les parties conviendront d’experts, sinon qu’il
en sera pris et nommé d’office, pour du tout en être
délaissé h Françoise B arb at, sa portion afférente; la tutrice
est condamnée aux dépens.
Ce jugement a été signifié aux héritiers de Jacques
B arbat, le 1 e1. prairial an 4 ; [\s y formèrent opposition
le 12 du même m o is; mais le 16 frimaire an 5 , il fut
rendu un second jugement au ci-devant tribunal civil du
P uy-d e-D om e, qui débouta les héritiers Barbat de leur
opposition formée au jugement du 16 nivôse an 3 , par
acte du 12 prairial an 4.
\
�.
i 8
)
.
.
L e 19 pluviôse an 5 , le jugement du 16 frimaire qui
déboute de l’opposition , fut signifie au domicile des héri
tiers de Jacques Barbat.
L e 2 nivôse an 7 , les héritiers Barbat interjetèrent
appel, non pas du jugement du 16 frimaire an 5 , qui les
déboutoit de leur opposition , mais nominativement du
jugement rendu au ci-devant district de Riom , le 16
nivôse an 3? cIni ^es condamnoit à venir à partage de»
biens délaissés par Louis Barbat, père commun.
Cet a p p e l, au moyen des exclusions légales , fut porté
au c:.-devant tribunal civil du département de la Loire,,
séant â Montbrison ; et le 28 pluviôse an 7 , il y inter
vint un jugement également par défaut , qui, attendu
l’opposition formée au jugement du 16 nivôse an 3., déclare
]cs héritiers Barbat non recevables dans leur appel , sauf
à faire statuer sur l’opposition par eux formée.
Les appelans formèrent opposition ;\ ce jugement ;
mais ce ne fut pas sans peine que les intimés découvrirent
cette opposition; la copie leur en avoit été soufflée; il
fallut obtenir des compulsoires pour fouiller dans les
bureaux d’enregistrement du ressort; ces recherches ont
c o u lé aux intimés des frais considérables en pure perte j.
puisque les héritiers B arbat, s’apercevant de leur erreur
et mettant de côté cette opposition, ont interjeté appel,
par acte du 21 pluviôse an 8 , du jugement du 16 fri
maire an 5 , qui les déboute de leur opposition , et qui
avoit été signifié à leur domicile le 18 pluviôse an 5 .
Cet appel se trouve aujourd’ hui dévolu au tribunal,,
et c’est en cet état qu’il s’agit de faire droit aux parties.
Les intimés ont à établir, i 0.' que l'appel des héritiers
Barbat est tardif 7 et ne peut être reçu
�.
C9
2°. Ils démontreront au
Françoise Barbat est infectée
que' le jugement dont est appel
le partage.
P
r e m i è r e
P
)
fond , que la cession de
d’une nullité radicale , et
a bien ju g é , en ordonnant
r o p o s i t i o n
.
L ’appel des héritiers de.Jacques Barbatest non roccvable. Dans l’ancien ordre de choses , un jugement rendu
en premier ressort, pouvoit être attaqué par la voie de
l’appel pendant trente ans ; l’article 17 du titre 27 de
l’ordonnance de 1667 , avoit bien restreint les appels à
dix années ; mais cette ordonnance étoit tombée en
désuetude , et quoique les termes de la loi fussent trop
précis pour en changer la disposition , la jurisprudence
avoit étendu jusqu'à trente ans la faculté d'appeler. D e
là des inconvéniens sans nom bre; les procès devenoient
éternels et portaient la ruine et la désolation dans les
.iaini lies.
Les nouvelles lois ont fait cesser cet usage abusif. L ’ar
ticle 1 4 du titre 5 de la loi du 24 août 17 9 0 , relative à
l’organisation judiciaire, porte : « que nul appel d’un juge« ment conti adictoiie ne pourra etre signifié ni avant le
« délai de huitaine, à dater du jour du jugement, ni
.c a p r è s 1 expiration de trois rnoîs, à dater du jour delà
« signification du jugem ent, lait à personne ou domicile :
« ces deux termes sont de rigueur , et leur inobservation
« emportera la déchéance de-l’appel j».
Les termes de la lo i'n e sauroient être plus clairs; il
est impossible de les interpréter ou de les étendre : si
i
I
�,
,
.
. , ( 10 }
.
.
.
.
l’appel n’est pas interjeté dans les trois mois de la signi
fication , il ne peut plus être reçu.
O r, le jugement du 1 6 frimaire an 5 , qui déboute les
héritiers Barbat de leur opposition , a été signifié à leur
domicile le 19 pluviôse de la même année 3 ils n’en ont
interjeté appel que le 21 pluviôse an 8 , c’est - à - dire ,
plus de trois ans après la signification ; par conséquent
ils sont déchus de cet appel , et le jugement a passé en
force de chose jugée.
.
On s’attend que les héritiers Barba t opposeront que
l’article 14 de la loi précitée , ne parle que des jugemens
contradictoires; qu’ici il s’agit d’un jugement par défaut,
qui n’étant pas compris dans la disposition de la l o i ,
doit se régler d’après l’ancienne jurisprudence, et par
conséquent peut être attaqué pendant trente ans.
Ce raisonnement est une erreur : un jugement qui
déboute d’une opposition , est réputé contradictoire ; il
n’est pas réparable en premier ressort ; opposition sur
opposition n’a lieu , c’est une maxime triviale au palais ;
un second jwgement, quoique par défaut, qui déboute
de l’opposition , a la même force , les mêmes effets qu’un
jugement contradictoire; il doit donc avoir les mêmes
règles ; il doit donc etre nécessairement compris dans les
dispositions de l’article 14 de la loi.
S’il en étoit autrement, le législateur auroit absolu.men-fc manqué son b u t; il n’y auroit plus d’intérêt de
plaider devant les tribunaux de premier d e g r é , et un
plaideur de mauvaise foi pourroit éterniser un procès
pendant trente ans , lorsque la loi désire et commande
une prompte expédition des affaires. Le plaideur négli-
�( 11 )
gent auroifc plus davantage que celui qui obéit à la jus
tice, ce qui seroit absurde en législation.
~
On a dit de tout temps qu un second jugement qui
déboute de l’opposition, étoit un jugement contradic
toire et définitif ; c est la dénomination qu’on lui donne
au palais: on la trouve également dans les dictionnaires
de pratique; et puisqu’on le répute contradictoire, puis
que les praticiens lui donnent cette dénomination, il
est textuellement et nécessairement compris dans les
termes génériques de l’article 14 de la loi précitée.
On fera sans doute usage d’un arrêté du ci-devant
directoire , en date du 9 messidor an 4 , qui a refusé
de référer au corps législatif sur un jugement du tri
bunal du C her, par le motif que }es 10¡S nouvelles
n’avoient pas prononcé sur l’appel des jugemens par
défaut, et qu’il résultoit nécessairement de leur silence
"qu’on devoit recourir à cet égard aux lois anciennes. *
Mais indépendamment de ce que cet arrêté du direc
toire n’a pas force de lo i, il est encore évident qu’il ne
s’applique point à l’espèce, et ne concerne qjae les premiers
jugemens par défaut qui sont susceptibles d’opposition
On sait que depuis une lettre du ministre de la justice ’
plusieurs tribunaux civils faisoient difficulté de recevoir
après huitaine de la signification, une opposition à un
jugement par déiau t, même en premier degré ; il n’y
avoit d’autre ressource alors que d’interjeter appel, et il
's’agissoit de savoir si même cet appel pouvoit être reçu
après les trois mois de la signification, d’après l’article
1 4 de la loi du 24 août 1790. C’est à une difficulté de
ce genre qu’a répondu le directoire, par son arrêté du
�( 12 )
9 messidor. On voit en eiîot dans le préambule de cet
arrêté, qu’il étoit q u e^ im d’uu jugement du tribunal
civil du département du Cher , du 27 prairial au 4 ,
portant qu'ii s. mit référé au ministre de la justice, pour
inviter le directoire exécutif, à proposerai! corps légis
latif, une loi q ui déclare si l’article 14 du titre 5 de la
loi du 24 ar’ ftt 1790 , est applicable aux jugeinens p a r
d éfa u t , auxquels il n’a pas été fo rm é opposition dans
la huitaine de leur signification. L e directoire pense
que cette question n’exige pas une interprétation de la
lo i ; q u e l’article 14 ne parle que des jugemens contra
dictoires, et que ses dispositions ne peuvent être appli
cables aux jugemens par défaut.
Il est aisé d’expliquer cet arrêté , fondé en raison; tant
qu’un jugement est susceptible d ’ o p p o s i t i on , le délai de
l’appel ne peut courir ; un premier jugement par défaut,
rendu en première instance, peut être attaqué par l’op
position pendant trente ans; on a donc aussi la faculté
d’en interjeter appel pendant ]e même délai ; mais un
second jugement qui déboute de l’opposition , n’est pas
réparable en premier degré ; il termine l’instance et
l’attribution des premiers juges ; il doit donc être assi
milé en tout p o in t, sous tous les rapports, à un jugement
contradictoire , et 1 arrêté du directoire que l’on cite n’a
pas même effleuré la question.
l i e n est d’un jugement qui prononce un débouté
d’opposition , comme il en étoit autrefois d’un jugement
par forclusion, faute de produire. O r , on a toujours re
gardé u n jugement par forclusion comme contradictoire ;
il n étoit pas susceptible d’opposition ; il ne pouvoit être
�( *3 )
attaqué que par la vole de l’appel ; il étoit soumis à toutes
îes règles des jugemens contradictoires, ainsi que le juge
ment en débouté d’opposition , et il est impossible de
faire aucune différence entre eux.
A in si, le jugement du 1 6 frimaire an 5 , a acquis
force de chose jugée; il'est devenu irrévocable par le
silence quont garde les héritiers Barbat pendant plus de
trois ans ; la fin de non recevoir est textuellement pro
noncée par la lo i , et les intimés pourroient se dispenser
d entrer dans 1 examen du fond de la contestation.
Mais devant un tribunal d’appel , on doit plaider à
toutes fins, et les intimés vont démontrer qu’indépeni
damment de la défaveur qui résulte contre les appelans
de leur long silence , e t des frais considérables qu’ils ont
occasionnés, la demande des intimés est fondée sur des
principes certains , appuyés des textes du droit et de
l’autorité des arrêts.
,
S- E
G O N D E
P
R O P O S l ï j
O JS/*
L a cession consentie par Françoise B a rb a t, femme
M azeyrat, est radicalement nulle , et le partage doit être
ordonné.
Il est certain en point de d r o it , que le m i neu r, môme
devenu majeur , ne peut traiter valablement avec son tu
teur ou protuteur, qu'après une reddition de compte.
On ne peut juger de la bonne foi dé l'administrateur
et de la lésion que le mineur a pu souffrir, que par le
détail des articles rapportés dans le compte avec exacti
tude ; jusques-là, tout traité, tout acte est inutile et re~
�( *4 )
.
.
gardé comme frauduleux ; le tuteur qui traite sans ren
dre de compte , est présumé de droit avoir commis un
d o l, re ipsâj le mineur est regardé comme une victime
toutes les fois qu’ il a truité sans connoissance de cause,
qu'il n’a pas été éclairé sur la force de la succession dans
laquelle il amende des droits.
L a p r e m i è r e règle pour que les engagemens soient
valables, cVst qu’ils soient librement contractés ; où
peut-être la liberté de v o u lo ir, lorsqu’il n y a pas la liberté
de connoitre ?
Il n’y a pas de moyen dont la loi soit plus touchée ,
que cet état d’iguorauce absolue et invincible qui détruit
la volonté : quee J a c it omninb involontariurn , comme
le dit Dumoulin. A u ssi, M . Jo ly -d e -F le u ry , lors d’un
arrêt du 17 décembre 1 7 0 6 , disoit-il , que ni la lin de
non recevoir tirée de l’ordonnance de 153 9 , pour le
temps de dix ans après la majorité , ni celle tirée de l’or
donnance de i 56 o pour les transactions, n’avoient d’ap
plication pour un traité fait avec un tuteur sans reddi
tion de compte. L a justice ne peut sanctionner un acte
¡dans lequel l’un est toujours victime de la surprise de
Vautre , où 7 comme le dit la lo i, non tam paciscitur
quàm decipiturIl n’est sans doute pas besoin de s’appesantir sur un
principe aussi universellement reconnu; personne n’ignore
que le m in eu r, même devenu m ajeur, ne peut vala
blement traiter avec son tuteur, sans un compte préala
ble : inter tutorem et pupilium , non aliter liberatio
consistere potest , quàm s i is rationes reddat.
L a nouvelle jurisprudence a consacré cette m axim e,
�■
.
( i 5 )
par une foule de décisions ; elle s’est écartée, il est v r a i,
des anciens arrêts, qui prorogeoient l’action contre les
tuteurs jusqu’i\ trente ans 5 on l’a souvent restreinte à dix
ans , d’après l’article 13 4 de l’ordonnance de 15 3 9 ; mais
il est assez inutile d’examiner ici si cette modification est
fondée sur la loi , puisque les intimés se sont pourvus
dans les dix ans du traité ; il n’est question que d’établir ,
que Françoise Barbat a transigé avec sa tutrice et son
protuteur ; qu’elle a cédé ses droits sans connoissance de
cause, et sans avoir été éclairée, ni sur les règlemens
de famille, ni sur les lorces de la succession qu’on lui a
fait céder.
lies circonstances se reunissent en faveur de Françoise
Bai’bat.
Lors de la mort de Louis Barbat son p è r e , elle n’avoit
que six ansj son frère en avoit vingt-quatre. Sa m è re ,
liors d'état de ré g ir, en laissoit le soin à son fils, qui
administroit les biens, percevoit tous les revenus de la?
maison , sans compte comme sans m esure, et les faisoit
tourner à son profit.
'
" On se persuadera sans peine que Jacques Barbat devoit
seul administrer , si on se fait une idée de la manutention
des biens, de la maniéré d etre et du commerce de ceux
qui habitent le haut pays d Auvergne. L a principale x
l’unique branche de commerce , est celle des bestiaux ;
leur fortune consiste en prairies et en montagnes ■ c’est
en nourrissant et élevant des bestiaux qu’on peut trou
ver des moyens de subsistances ou d’accroissement de
fortune ; ce genre de vie et de commerce nécessite des
voyages continuels} ime fréquentation habituelle des
�.
C^ )
foires et marches ; toutes ces. courses sont au-dessus des
forces et delà capacité d’une femme; elle est nécessaire
ment obligée de confier ce soin à autrui.
Si la tutelle est de droit, la protutelle est défait. O r ,
il est notoire, il est avo u é, que Jacques Barbat, père
des nppelans , géroit , administroit, et faisoit toutes les
affaires de la maison. Par cette gestion exclusive , il est
devenu la protuteur de sa sœur; il a contracté une obli
gation personnelle de lui rendre compte , avant de pou
voir transiger valablement avec elle.
Cette obligation devient encore plus étroite , lorsqu’on,
voit qu'avant le mariage de sa sœur, il étoit institué hé
ritier universel de la mère tutrice ; lorsqu’on voit qu’ il
est inscrit dans les qualités du contrat de mariage de sa
sœur ; qu’ il se dit héritier institué de son père , quoiqu’ il
ne fut que légataire du quart ; qu’il constitue solidaire
ment avec sa mère une dot à sa sœur, pour le prix
dune renonciation1 sans laquelle la mère n’auroit pas
consenti au mariage.
Lorsqu’on voit qu’ il a poussé l’ambition jusqu’à faire
renoncer sa sœur à son profit, a toutes successions échoir
de l’ estoc paternel ; qu’il lui a fait céder son action en
reddition de compte de tutelle contre sa mère; lorsqu’enfin
la mère a encore e x ig e , de la part de sa fille , une renon
ciation à sa succession future, toujours au profit de son
fils, son héritier institué.
‘
Françoise Barbat a été réduite dans un état d’incapacité
absolue par le fait personnel de son frè re , q ui, seul, a
commis le dol re ipsâ.
.
Tous les titres étoient dans ses mains; il s’est bien gardé
de les communiquer.
�C l7 )
Il a caché le testament du père; il a trompé sa sœur on
prenant la qualité d’ héritier institué du père, tandis qu’il
n ’avoit que le quart à prélever. On ne voit que surprises
et infidélités ; il étoit impossible que Françoise Barba t
eût la moindre connoissrmce des règlemens de famille ,
puisqu elle navoit que six ans lors de la mort de son
père, et que son frère a, dès ce moment, joui et disposé
de tout. E t vouloir pretendre qu'un traité aussi fraudu
leux doit etie sanctionne par la justice, ce seroit n’avoir
aucune idée des principes du droit et de l’équité.
Les appelans opposent que Françoise Barba t étoit
majeure, lorsqu’elle a cédé ses droits’successifs. Suivant
e u x , Jacques Barbai n’a,pu être tuteur ni protuteur de
sa sœur, puisque la mère a été nommée tutrice, et ils en
concluent que la cession portée par Ie contrat de mariage
du 3 décembre 1 7 7 1 , ne peut être attaquée par la vole
de la restitution.
On croit avoir prouvé que Jacques Barba t a été véri
tablement protuteur de sa sœur; que la mère n’a été
tutrice que de nom ; mais en admettant même pour un
moment J’assertiou des appelans, la cession consentie par
Françoise Barba t 11 en seroit pas moins absolument nulleE n effet , si la mère seule a été tutrice, la cession de
•Françoise Barba t profite à la tutrice.
;
Elle constitue solidaire,naît avec soh fils, la dot qui a
fait le prix d e cçtte cession ; si c l l e ' p r e o d des engSgemcns
solidaires , elle acquiert donc conjointement avec son (ils ;
elle doit doue profiter du bénéfice de cette cession.
, Cette solidarité se continue toujours lorsqu'il s’agit des
payemens ; elle prend des termes conjointement avec son
�,
.
( 18 }
,,
fils ; die s’oblige à acquitter les sommes à l'échéance', elle
fait céder h fa fille l’action en reddition de compte contre
elle; elle profite par conséquent de cette cession, puis
qu’elle est déchargée du compte de tutelle, qui tourne
au profit de son héritier institué.
L ’institution qu’elle avoit faite au profit de son fils,
n ’étoit pas un vain titre,- ce n’étoit pas une simple dot
pécuniaire qu'elle avoit à répéter; elle étoit elle-même
héritière; elle possédoit des fonds précieux; elle avoit
porté un mobilier considérable en effets ou obligations ;
son fils, son héritier institué, étoit donc tenu de ses faits ,
et comme tel, ne pouvoit accepter la cession de sa sœur.
E n un m o t , c’est la mère tutrice qui a dirigé, commandé
la renonciation ; son consentement au mariage étoit à ce
p r ix ; elle en profitoit personnellement, et en faisoit pro
fiter son héritier: ainsi, que ce soit la mère qui ait été
tutrice, ou le frère protuteur, la cession n’en est pas moins
une monstruosité arrachee par l’autorité et la crainte, et
sans aucune connoissance.
E n vain opposeroit-on encore que Françoise Barbat,
en acceptant la somme qui lui a été constituée en majorité,
a approuvé le testament de son père.
On ne peut accepter un testament tacitement. P ou r qu’il
y ait approbation , il faut que le testament soit connu, lu et
énoncé dans lacté, Larticle 5o du titre 12 de la coutume
porte : « celui qui accepte sciemment , etc. ».
Françoise Barbat peut-elle l’avoir accepté sciemment ,
lorsqu’elle la ign oré; lorsque son contrat de mariage
n’en fait aucune mention ; lorsqu’au lieu d’ énoncer le
legs porté par ce testament, on la i donne une somme
�( 19 )
toute différente-, lorsqu’enfin on lui fait croire que son
frère avoit une institution universelle, tandis qu’il ne
pouvoit prélever que le quart des biens , en vertu de
ce même titre qu’on
avec tant de soin
1 ' a caché
.
a ?
E n résumant, le jugement qu’on attaque est conforme
à tous les principes reçus. 1 ° . Cession faite au profit
d’un p r o t u t e u r qui réunit à cette qualité celle d’héritier
universel de la tutrice. 2°. Cession dirigée et commandée
par la tutrice , qui s’engage solidairement à en payer le
p rix , et en profite personnellement. 3 0. Lésion énorm issim e, mathématiquement prouvée par le calcul le plus
modique et le moins exagéré des forces de la succession.
40. Demande en restitution formée dans un temps utile
c’est-à-d ire, dans les dix années de l'acte : que fau t-il
de plus pour établir le fondement de la demande en
partage, et le bien-jugé du jugement dont est appel?
Par conseil, P A G E S .
1
A
RIOM,
DE
L ’I M P R I M E R I E
D E
LANDRIOT,
Imprimeur du Tribunal d’appel.
�I
' A^r?/>/v/ y y p i p ■Kû’v?
\ 4 V J ^ v^^ rttiXfhlT ^
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Barbat, Françoise. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
successions
partage
droit d'aînesse
Description
An account of the resource
Mémoire pour Françoise Barbat et Hugues Mazeyrat, son mari, de lui autorisée, intimés ; contre Marie-Rose Barbat, Antoine Courbeyre, son mari, de lui autorisée ; Jeanne Barbat et Claude Triozon, son mari, de lui autorisée ; et Marie Barbat, fille majeure, appelans d'un jugement rendu au ci-devant tribunal civil du Puy-de-Dôme, le 16 frimaire an 5.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1744-Circa An 5
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0140
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0202
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53681/BCU_Factums_M0140.jpg
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Egliseneuve-d'Entraigues (63144)
Rights
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Domaine public
droit d'aînesse
partage
Successions
-
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e349cb39684d0ddc6a14222bb9dfa837
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Text
MÉMOIRE
POUR
B A R B A T et H u g u e s M A Z E Y R A T , son mari, de lui autorisée, intimes
F r a n ç o is e
C ONT R E
M
B A R B A T , A n t o in e C O U R B E Y R E , son m ari, de lui autorisée; J e a n n e
B A R B A T et C l a u d e T R I O Z O N , son,
mari, de lui autorisée ; et M a r i e B A R B A T ,
fille majeure, appelans d’un jugement rendu au
ci-devant tribunal civil du Puy-de-Dôme le
16 frimaire an 5.
a r ie
- R
o se
Q U E S T I O N S .
L'appel d!un jugement portant débouté d'opposition,
est-il recevable , lorsqu'il n'a été interjeté que plus de
trois ans après la signification?
2° . Une cession de droits successifs, consentie au
profit d’une tutrice et de son héritier, qui ont traité
solidairement, sans reddition de compte, peut-elle être
attaquée par la voie de la restitution dans les dix ans.
L o u i s Barbat et Marie F u m ât, auteurs communs des
parties, étoient domiciliés dans le ressort de la cidevant
A
TRIBUNAL
D ’A P P E L ,
Séant k Riom.
�coutume d ' A u v e r g n e i l s ont eu neuf enfans, parmi
lesquels Françoise B arbat, femme M azeyrat, intimés, et
Jacques Barbat, représenté par les appelans.
L e 29 décembre 1744'> Louis Barbat iit son testament,
par lequel il institua Jacques Barbat, son fils, son héritier
général et universel de tous, les biens dont il .mourroit
vêtu et saisi, sans aucune réserve , à la charge de payer à
chacun des autres enfans. une légitime conventionnelle,
qui fut réglée, pour les filles, à une somme de mille fr.
en deniers, quelques bestiaux et un mobilier détaillé au
testament.
* II-est ajouté, que dans le cas où les autres enfans votidroient se servir de la faveur de la coutume , le-testateur
donne et lègue à Jacques B a rb a t, en préciput et avantage ,
le-quart et quatrième portion de ses biens.
L a fortune de Louis Barbat étoit considérable ; il possédoit de vastes bâtimens en fort bon état, qui ont été portés
par aperçu, suivant l’estimation ordinaire entre cohéri
tiers; c’ est-à-dire,. au-dessous de leur valeur, à la somme
de treize mille quatre-vingt-quinze francs ; un mobilier
é v a lu é , à l’époque du décès du père, à six mille six cent
francs; trois cent quatrc-vingt-six.journaux de présouboisr
qui sont la nature de biens la plus précieuse, n’ont été
portés qurà cent vingt francs le jou rn al, et donnent un
total de quarante-six mille trois cent vingt Iran es.
Soixante-seize têtes d’ herbage , ù trois journaux par
téte, font la quantité de deux cent vingt-huit journaux,
et donnent, suivant la même estimation , une somme de
vingt-sept mille trois cent soixante francs.
L a masse de la succession paternelle,évaluée à vil p r i x ,
�(3)
.
comme on le volt par èet aperçu, présente un actif de
quatre-vingt-treize mille trois cent soixante-quinze francs.
Si on en distrait, au profit de Jacques Barbat, le quart
qui lui a été légué par le testament de son père , cette
portion se porte à,vingt-trois mille trois cent quarantetrois francs, reste soixante-dix mille trente-deux francs,
dont le neuvième revenant à Françoise B a r b a t , femme
M azeyrat, est de sept mille sept cent quatre-vingt-un fr.
indépendamment des jouissances qu’elle a le droit de
répéter, à compter de l’ouverture de la succession du
pere , mort le 1 3 janvier 1745.
Il a paru nécessaire de présenter ce tableau des forces
de la succession paternelle, pour donner une idée du dol
et de la fraude qu’a éprouvés Françoise B a rb a t, par les
actes dont on va faire l’analyse.
L e 1 3 janvier 17 4 5 , époque’du décès du père, Jacques
Barbat, son fils, étoit âgé de près de vingt-quatre ans ;
son acte de naissance est du 2 mai 17 2 2 ; Françoise Barbat,
sa sœur, n’étoit âgée que de six ans.
Marie F u m â t , mère com m une, avoit cinquante ans
lorsqu’elle devint v e u ve ; elle étoit impotente et liors
d état d agir *, elle fut cependant nommée tutrice de ses
enfans, mais elle ne le fut que de n om ' Jacques B a rb at,
son fils, faisoit seul les affaires de la maison ; il géroit et
administroit tous les b ien s, alloit en foires et marchés,
recevoit l’argent et les reven us, et en faisoit son profit
particulier; il les a même employés fort utilement, puisqu d a fait des-acquisitions considérables en son nom per
sonnel, aux dépens de ses frères et sœ urs, acquisitions
q u o n n’a pas portées dans la masse des biens paternels,
A 2
�.
(
4
3
.
et qui s’étendent à plus de cent journaux de terrain, à
raison de mille toises le journal.
Bientôt après la mort de son père , Jacques Barbat
épousa Jeanne Bonnet ; sa mère l’institua son héritier
universel, lui abandonna tout ce qu’elle possédoit, et lui
mit entre les mains tous les titres et papiers de la maison.
Cette institution n'étoit pas un vain titre. Les biens de
Marie Fumât étoient considérables. On v o it, par son
contrat de m ariage, du I er. juillet 1 7 1 8 , qu’elle se cons
titua tous les biens qui lui étoient échus par les décès de
Michel et Antoine Fu m ât, ses père et aïeul ; que les effets
mobiliers de ces successions se portoient à une somme
de vingt-deux mille six cent trente francs , dont il lui
revenoit un quart; qu’en outre elle recevoit une somme
de deux mille francs, de Jeanne E stiv a l, sa mère.
L e 3 décembre 1 7 7 1 , Françoise Barbat contracta ma
riage avec Hugues Mazeyrat. Comme ce sont les clauses
de ce contrat qui font naître la contestation, il est ¿1 propos
de les transcrire littéralement.
« L a demoiselle F u m â t , veuve B a r b a t , et Jacques
et B a rb at, son fils aîn é, solidairement l'un pour l’a u tre ,
« ont constitué et constituent à la demoiselle future épouse,
« leuriîlle et sœur, la somme de deux mille cent francs en
« deniers et en meubles, etc. ( suit le détail du mobilier
« mort et vif ) ; le tout évalué par les parties à deux cent
« cinquante francs, pour tenir lieu, est-il dit, à la demoi« selle future épouse, tant de sa portion héréditaire dans
« la succession de feu Louis B a r b a t, son père , que des
« revenus, jouissances ou intérêts qu’elle nuroitpu espérer
h et prétendre pour tout le temps de sa minorité, distrac-
�« tîon faite de sa nourriture et entretien ; au moyen de
«• quoi la future épouse subroge Jacques Barbât, son frè r e ,
« tant scs droits successifs qu'à son action en reddition
»de compte contre Marie Fu m ât, leur mère , pour par
« lui les faire valoir comme il avisera bon être , et.a la
ft charge par lui de garantir ladite future de tuuUs les
« dettes et charges prévues et à prévoir de la succession
« de leu Louis Barbat père.
te Jacques Barbat constitue en outre de son clief, à
»ladite Françoise
B a rb a t,* sa sœ ur,' la somme de trois
»
« cents fr. moyennant laquelle elle renonce à son profit
« e t de ses descendans, à toutes les successions à échoir
« de l'estoc paternel.
« M a rie Fumât constitue à sa fille, de son chef, la
* somme de six cent francs , moyennant laquelle la future
cr l'pouse renonce y au projit de Jacques B a i bat, son
*frè re ainé , tant à la succession à échoir de Marie
« Fu m ât, leur mere , qu à l ou les les successions à échoir
u. de son estoc.
« Il est ajouté en ce qui touche le payement des trois
« constitutions ci-dessus , que tous les ineuUcs morts et
« v if s , ensemble la somme de six cents francs, seront
a censés reçus par le sieur Alexis Mazeyrat, père du futur,
« à la célébration du mariage , et que cette somme de
* six cents francs, qui est. payée par Jacques B a rb at,
«■ sera imputée sur les constitutions paternelles de la future ;
» à l’égard de la somme de deux mille quatre cents francs,
«restante, elle sera payable par la demoiselle Fumât
« et ledit B a rb a t , son fils , auxdits M azeyrat, père et
«iu tu r, en différons payemens, l’un de quatre cents francs,
A3
�(6 )
^
« et les autres de trois cents irancs, (Tannée en année,
« à l’exception du dernier te rm e , qui ne sera que de
« deux cents fran cs, sans intérêt qu’à l’échéance des
« term es , avec convention entre les parties , que les
« premiers payemens seront faits et imputés sur le restant
« de la constitution paternelle , et que les autres termes« s ’imputeront au prorata et au marc la livre, sur les.
« constitutions faites par Marie Fumât et Jacques Barbat
a de leur chef particulier. »
•
Il est essentiel d’observer que dans les qualités du con
trat, on y voit figurer Marie F u m ât, comme tutrice 'r
Jacques Barbat, comme héritier institué de défunt L o u is,
père commun, quoiqu'il ne fût que légataire du quart j
que nulle part il n’est question du testament du p è r e ,
et que la légitime constituée à Françoise Barbat n’est pas
la même que celle qui avoit été réglée par le testament
de 1744.
Fra nçoise B arbat, et son m a r i, ne tardèrent pas 1Y
s’apercevoir que leurs intérêts étoient blessés , et leur9
droits méconnus ; on leur avoit caché le testament du
pe re j ils n’avoient eu aucune connoissance de3 forces de
là succession ; ils se pourvurent en lettres de restitution y
contre la renonciation et cession portées en-leur contrat
de mariage. Ces lettres de rescision sont du 20 juin 17 8 1 •
ils en demandèrent l’entérinement le 20 novembre suivant*
c’est-à-dire, dans un temps utile, parce que les dix ans
ne dévoient expirer que le 3 décembre de la même
année.
. Il s’éleva une contestation.assez considéiable sur celle
d e m a n d e , en la ci-devant sénéchaussée d ’A u v e r g n e : les
�.
. ^7 )
"
choses étoient encore indécises lors du nouvel ordre
judiciaire; la cause fut portée au ci -(devant district de
R io m , qui remplaçoit la sénéchaussée.
Un premier jugement par défaut, du 1 6 n i v ô s e , an 3 ,
entérina les lettres de rescision-obtenues le 20 juin 1 7 8 1 »
remit les parties au même et semblable état qu'elles étoient
avant la renonciation portée au contrat de mariage du 3
décembre 1 7 7 1 ; condamna Jeanne B o n n e t, veuve de
Jacques Barbat, tutrice de leurs enfans, à venir à division
et partage avec Françoise Barbat, des biens meubles et
immeubles délaissés par Louis B a rb a t, auteur commun ;
savoir, du mobilier, suivant l'inventaire, sinon suivant
la preuve par commune renommée ; aux intérêts du
montant du mobilier depuis la demande, et des immeu
bles, avec restitution des jouissances, depuis l’ ouverture
de la succession , et la valeur des dégradations commises,
avec les intérêts des dégradations et des jouissances , ainsi
que de droit, à la charge par Franç. Barbat de rapporter
ce qu'elle a reçu; il eat ordonné , pour parvenir au par
tage, que les parties conviendront d'experts, sinon qu’il
en sera pris et nommé d’office, pour du tout en être
délaissé à Françoise B a rb a t, sa portion afférente; la tutrice
est condamnée aux dépens.
Ce jugement a été signifié aux héritiers de Jacques
B arbat, le i e r. prairial an 4 ; ils y formèrent opposition
le 12 du même m o is ; mais le 16 frimaire an 5 , il fut
rendu un second jugement au ci-devant tribunal civil du
P u y-d e-D ôm e, qui débouta les héritiers Barbat de leur
opposition formée au jugement du 16 nivôse an 3 , par
acte du 1 2 prairial an 4.
�( 8 )
L e ip pluviôse an 5 , le jugement du 1 6 frimaire qui
déboute de l’opposition , fut signifié au domicile des héri
tiers de Jacqu es Bai’bat.
^^
L e 2 nivôse an 7 , les héritiers Barbat interjetèrent
appel, non pas du jugement du 16 frimaire an 5 , qui les'
déboutoit de leur opposition , mais nominativement du
jugement rendu au ci-devant district de Riom , le 1 6
nivôse an 3 > cjui les condamnoit à venir à partage des
biens délaissés par Louis Barbat, père commun.
Cet a p p e l, au moyen des exclusions légales, fut porté
au ci-devant tribunal civil du département de la Loire r
séant à Montbrison ; et le 28 pluviôse an 7 , il y inter
vint un jugement également par défaut , q u i, attendu
l’opposition formée au jugement du 16 nivôse an 3, déclare
les héritiers Barbat non recevables dans leur appel , sauf
à faire statuer sur Topposition par eux formée.
Les appelans formèrent opposition à ce jugement;
mais ce ne fut passons peine que les intimés découvrirent
cette opposition", la copie leur en avoit été soufflée; il
fallut obtenir des coinpulsoires po u r fouiller dans les
b ureaux d’enregistrement du ressort; ces recherches ont
coûté aux intimés des frais considérables en pure p e rte ,
puisque les héritiers B a r b a t, s’apercevant de leur erreur,,
et mettant de côté cette opposition, ont interjeté appel r
par acte du 2 1 pluviôse an 8 , du jugement du 16 fr i
maire an 5 , qui les déboute de leur opposition } et qui
avoit été signifié à leur domicile le 18 pluviôse an 5.
Cet appel se trouve aujourd’ hui dévolu au tribunal ,
et c’est en cet état qu’il s’agit de faire droit aux parties.
Les intimés ont ;\ établir, i°. qu.e l’appel des héritiers
Barbat est tard if, et 11e peut être reçu;
�(9 )
#
2°. Ils démontreront au fond , que la cession de
Françoise Barbat est infectée d’une nullité radicale, et
que le jugement dont est appel a bien jugé , en ordonnant
le partage.
P
r
e
m
i
è
r
e
P
r
o
p
o
s
i
t
i
o
n
.
L ’appel des héritiers de Jacques Barbat est non recevable. Dans l’ancien ordre de choses , un jugement rendu
en premier ressort, pouvoit être attaqué par la voie de
l’appel pendant trente ans ; l’article 1 7 du titre 27 de
1 ordonnance de 1667 , avoit bien restreint les appels à
dix annees ; mais cette ordonnance étoit tombée en
desuetude , et quoique les termes de la loi fussent trop
précis pour en changer la disposition , la jurisprudence
avoit étendu jusqu'à trente ans la faculté d'appeler. D e
la des inconvéniens sans nom bre; les procès devenoient
éternels et portoient la ruine et la désolation dans les
familles.
Les nouvelles lois ont fait cesser cet usage abusif. L ’ar
ticle 14 du titre 5 de la loi du 24 août 17 9 0 , relative à
101 ganisation judiciaire, porte : « que nul appel d’ un juge« ment contradictoire ne pourra être signifié ni avant le
«délai de huitaine, à dater du jour du jugem ent, ni
« après l’expiration de trois mois, à dater du jour delà
« signification du jugem en t, fait à personne ou domicile:
« ces deux termes sont de rigueur , et leur inobservation
«emportera la déchéance de l’appel-«.
Les termes de la loi ne sauroient être plus clairs; il
est impossible de les interpréter ou de les étendre : si
�l’appel n’est pas interjeté dans les trois mois de la signi
fication , il ne peut plus être reçu.
• O r , le jugement du 1 6 frimaire an 5 , qui déboute les
héritiers Barbat de leur opposition , a été signifié à leur
domicile le 19 pluviôse de la même année - ils n’en ont
interjeté appel que le 21 pluviôse an 8 , c’est - à - dire ,
plus de trois ans après la signification ; par conséquent
ils sont déchus de cet appel , et le jugement a; passé en
force de chose jugée.
On s’attend que les héritiers Barba t opposeront que
l’article 14 de la loi précitée , ne parle que des jugemens
contradictoires; qu’ici il s’agit d’un jugement par défaut,
qui n’étant pas compris dans la disposition de la loi ,
•doit se régler d’après l’ancienne jurisprudence, et par
conséquent peut être attaqué pendant trente ans.
Ce raisonnement est une erreur : un jugement qui
déboute d'une opposition , est réputé contradictoire ; il
n’est pas réparable en premier ressort ; opposition sur
opposition n’a lieu , c’est une maxime triviale au palais ;
un second jugem ent, quoique pur dcfaut, qui déboute
de l’opposition , a la même force , les mêmes effets qu’un
jugement contradictoire; il doit donc avoir les mêmes
règles; il doit donc être nécessairement compris dans les
dispositions de l’article 14 de
1°'*
S’ il en étoit autrem ent, le législateur auroit absolu•ment manqué son b u t; il n’y auroit plus d’intérêt de
plaider devant les tribunaux de premier degré, et un
plaideur de mauvaise loi pourroit éterniser un procès
pendant trente ans , lorsque la loi désire et commando
une prompte expédition des affaires. L e plaideur négli-
�.
^ 11 ^
.
.
gent auroit plus d’avantage que celui qui obéit à la jus
tice, ce qui seroit absurde eu législation.
1 On a dit de tuut temps qu’un second jugement qui
déboute de l’opposition, étoit un jugement contradic
toire et définitif:'} c’est la dénomination qu’on lui donne
au palais : on la trouve égaler.ent dans les dictionnaires
de pratique; et puisqu’on le réputé contradictoire, puis
que les praticiens lui donnent cette dénomination, il
est textuellement et nécessairement compris dans les
termes génériques de l’article 1 4 de la loi précitée.
On fera sans doute usage d’un arrêté du ci-devant
directoire , en date du 9 messidor an 4 , qui a refusé
de référer au corps législatif sur un jugement du tri
bunal du C h e r, par le motif que les lois nouvelles
n avoient pas prononcé sur l’appel des jugemens par
défaut, et qu’il résultoit nécessairement de leur silence,
qu on devoit recourir à cet égard aux lois anciennes.
Mais indépendamment de ce que cet arrêté du direc
toire n’a pas force de l o i , il est encore évident qu’il ne
s’applique point à l’espèce, et ne concerne que les premiers
jugemens par défaut qui sont susceptibles d’opposition.
On sait que depuis une lettre du ministre de la justice ,
plusieurs tribunaux civils faisoientdifficulté de recevoir
après huitaine de la signification , une opposition à un
jugement par défaut, même en premier d e g ré ; il n’y
avoit d’autre ressource alors que d’interjeter appel, et il
sngissoitde savoir si même cet appel pouvoit être reçu
après les trois mois de la signification, d’après l’article
14 de la loi du 24 août 1790. C’est à une difficulté de
ce genre qu’a répondu le directoire, par son arrêté du
�( 12 )
9 messidor. On voit en effet dans le préambule de cet
arrêté , qu’il étoit question, d un jugement du tribunal
civil du département du C h e r , du 27 prairial an 4 ,
portant qu'il seroit référé au ministre de h justice, pour
inviter le directoire exécutif, à proposer au corps légis
latif, une loi qui déclare si 1 article 14 du titre 5 de la
loi du 24 août 1 7 9 ° > ^
applicable aux jugemens p a r
d éfa u t , auxquels il 71 a pas été fo rm é opposition dans
la huitaine de leur signification. L e directoire pense
que cette question n'exige pas une interprétation de la
l o i ; que l’article 14 ne parle que des jugemens contra
dictoires, et que ses dispositions ne peuvent être appli
cables aux jugemens par défaut.
Il est aisé d’expliquer cet arrêté , fondé en raison; tant
qu’un jugement est susceptible d’opposition , le délai de
l'appel ne peut co u rir; un premier jugement par défaut,
rendu en première instance, peut être attaqué par l'op
position pendant trente ans ; on a donc aussi la faculté
d’en interjeter appel pendant le même délai ; mais un
second jugement qui déboute de l'opposition , n’est pas
réparable en premier degré ; il termine l'instance et
l’attribution des premiers juges ; il doit donc être assi
milé en tout p o in t, sous tous les rapports, à un jugement
contradictoire , et l’arrêté du directoire que l ’on cite 11’a
pas même effleuré la question.
Il en est d’un jugement qui prononce un débouté
d’opposition , comme il en étoit autrefois d'un jugement
par forclusion, faute de produire. O r , 011 a toujours re
gardé un jugement par forclusion comme contradictoire ;
il n’étoit pas susceptible d’opposition ; il ne pouvoit être
�attaqué que par la voie de l’appel ; il etoit soumis a toutes
les règles des jugemens contradictoires , ainsi que le juge
ment en débouté d’opposition , et il est impossible de
faire aucune différence entre eux4
¿3•
** *
i?
*
A in si, le jugement du 1 6 frimaire an 5 , a acquis
force de chose jugée \ il est devenu irrévocable par le
silence qu’ont gardé les héritiers Barbat pendant plus de
trois ans ; la fin de non recevoir est textuellement pro
noncée par la l o i , et les intimés pourroient se dispenser
d’entrer dans l’examen du fond de la contestation.
Mais devant un tribunal d’appel , on doit plaider à
toutes fin s, et les intimés vont démontrer qu’indépen
damment de la défaveur qui résulte contre les appelans ,
de leur long silence , et des frais considérables qu’ils ont
occasionnés , la- demande des intimés est fondée sur des
principes certains , appuyés des textes du droit et de
l’autorité des arrêtsS
e c o n d e
P
r o p o s i t i o n
.
L a cession consentie par Françoise Barbat , femme
M azeyrat, est radicalement n u lle , et le partage doit être
ordonné.
Il
est certain en point de droit , que le m ineur, même
devenu majeur , ne peut traiter valablement avec son tu
teur ou protuteur , qu’après une reddition de compte.
On ne peut juger de la bonne foi de l'administrateur
et de la lésion que le mineur a pu souffrir, que par le
détail des articles rapportés dans le compte avec exacti
tude*, ju sq u e s-là to u t traité, tout acte est inutile et re-
�( *4 )
.
garde comme frauduleux ; le tuteur qui traite sans ren
dre de compte > est présumé de droit avoir commis un
d o l , /'6 ipsâj le mineur est regardé comme une victime
toutes les fois qu’il a traité sans connoissance de cause,
qu’il n’a pas été éclairé sur la foree de la succession dans
laquelle il amende des droits.
L a première règle pour que les engagemens soient
valables, c’est qu’ils soient librement contractés ; où
peut-être la liberté de vouloir lo r s q u ’il n y a pas la liberté
de connoître ?
'
.
'
• Il n y a pas de moyen dont la loi soit plus touchée ,
que cet état d’ignorance absolue et invincible qui détruit
la volonté : quœ Ja c it omnino involontarium , comme
le dit Dumoulin. A u ssi, M . Jo ly -d e -F le u ry , lors d’un
arrêt du 17 décembre 1 7 0 6 , d iso it-il, que ni la fin de
non recevoir tirée de l’ordonnance de 1639 > pour le
temps de dix ans après la majorité , ni celle tirée de l’or
donnance de i 56o p o u r les transactions, navoient d’ap
plication pour un traité fait avec un tuteur sans reddi
tion de compte. L a justice ne peut sanctionner un acte
dans lequel l’un est toujours victime de la surprise de
l’a u tre, o ù , comme le dit la lo i, non tam paciscitur
qitàm decipitur.
Il
n’est sans doute pas besoin de s’appesantir sur un
principe aussi universellement reconnu; personne n’ignore
que le m ineur, même devenu m ajeur, ne peut vala
blement traiter avec son tu teu r, sans un compte préala
ble : inter tutorem et pupillam , non aliter liberatio
consistere potest, quiun si is rationes reddat.
La nouvelle jurisprudence a consacré cette maxime,
�par une foule de décisions ; elle s’est écartée, il est vrai ,
des anciens arrêts, qui prorogeoient l’action contre les
tuteurs jusqu’à trente ans; on l’a souvent restreinte à dix
ans, d’après l’article 1 3 4 de l’ordonnance de 1 6 3 9 ; mais
il est assez inutile d’examiner ici 3i cette modification esÉ
fondée sur la loi , puisque les intimés se sont pourvus
dans les dix ans du tx-aité ; il n’est question que d’établir ?
que Françoise Barbat a transigé avec sa tutrice et sort
protuteur ; qu’elle a cédé ses droits sans connoissance de
cause, et sans avoir été éclairée, ni sur les règlement
de famille, ni sur les forces de la succession qu’on lui a
fait céder.
Les circonstances se réunissent en faveur de Françoise
Barbat.
’
Lors de la mort de Louis Barbat son. père , elle n’avoit
que six ans; son irère en avoit vingt-quatre. Sa m è r e ,
hors d'état de ré g ir , en laissoit le soin à son fils, qui
administrait les biens, percevait tous les revenus de ]a
maison , sans compte comme sans mesure r et les faisoit
tourner
6011 profit.
On se persuadera san9 peine que Jacques Barbat devoit
seul administrer , si on se fait une idée de la manutention
des biens, delà manière d’être et du* commerce de ceux
qui habitent le haut pays d’Auvergne. L a principaler
1 unique branche de commerce , est celle des bestiaux
leur fortune consiste en prairies et en montagnes ; c’est
en nourrissant et élevant des bestiaux qu7on peut trou
ver des moyens de subsistances ou d’accroissement do
fortune; ce genre de vie et de commerce nécessite des
voyages continuels ; une fréquentation habituelle des
�( ï'î )
fo ir e s
et marchés ; foutes ces courses sont au-dessus des
forces et delà capacité d’ une femme ; elle est nécessaire
ment obligée de confier ce soin à autrui.
. Si la tutelle est de droit, la prolutelie est défait. O r ,
il est notoire, il est avo u é , que Jacques B a rb a t, père
¿les appelons , géroit , adminislroit, et faisoit toutes les
affaires de la maison. P ar cette gestion exclusive , il est
devenu le protuleur de sa sœur; il a contracté une obli
gation personnelle de lui rendre com pte, avant de pou
voir transiger valablement avec elle.
Celte obligation devient encore plus étroite, lorsqu’on
voit qu'avant le mariage de sa sœur, il etoit institué hé
ritier universel de la mère tutrice ; lorsqu’on voit qu’il
est inscrit dans les qualités du contrat de mariage de sa
sœur ; qu’il se dit héritier institué de son père , quoiqu’il
ne fût que légataire du quart ; qu’il constitue solidaire
ment avec sa mère une dot à sa sœur, pour le prix
d'une renonciation sans laquelle la mere n auroit pas
consenti au mariage.
■
L o r s q u ’ on voit qu’ il a poussé, l’ambition jusqu’à faire
renoncer sa sœur à son p rofit, à toutes successions ¡\ échoir
de l’ estoc paternel ; qu’il lui a lait céder son action, en
reddition de compte de tutelle contre sa mère; lorsqu’enfin
la mère a encore e x ig é , de la part de sa fille , une renon*
dation à sa succession future, toujours au profit de son
fils, son héritier institué.
Françoise Barba t a été réduite dans un état d’incapacité
absolue par le fait personnel de son frè re , q u i, seul, a
commis le dol ra ipsâ .
,
Tous les litres étoient dans ses mains; il s’est bien garde
de les communiquer.
�( *7 ) .
Il a caché le testament du père*, il a trompe sa sœur, en
prenant la qualité d’héritier institué du p è re , tandis qu’il
n’avoit que le quart à prélever. On ne voit que surpiises
et infidélités ; il étoit impossible que Françoise Barbat
eût la moindre connoissance des règlemens de fam ille,
puisqu’elle n'avoit que six ans lors de la mort de son
père, et que son frère a, dès ce moment, joui et dispose
de tout. E t vouloir prétendre qu’ un traité aussi fraudu
leux doit être sanctionné par la justice, ce seroit n’avoir
aucune idée des principes du droit et de l’équité.
Les appelans opposent que Françoise Barbat étoit
majeure, lorsqu’elle a cédé ses droits successifs. Suivant
eu x, Jacques Barbat n’a pu être tuteur ni protuteur de
sa sœur, puisque la mère a été nommée tutrice, et ils en
concluent que la cession portée par le contrat de mariage
du 3 décembre 1 7 7 1 , ne peut être attaquée par la voie
de la restitution.
On croit avoir prouvé que Jacq u es Barbat a été véri
tablement protuteur de sa sœ ur; que la mère n’a été
tutrice que de nom ; mais en admettant même pour un
moment l’assertion des appelans, la cession consentie par
Françoise Barbat n’en seroit pas moins absolument nulle*
E n efiet , si la mère seule a été tutrice, la cession de
Françoise Barbat profite à la tutrice.
Elle constitue solidairement avec son fils, la dot qui a
fait le prix de cette cession ; si elle, prend des engagemens
solidaires, elle acquiert donc conjointement avec son fils ;
elle doit donc profiler du bénéfice de celte cession.
Cette solidarité se continue toujours lorsqu il s’agit des
payemens; elle prend des termes conjointement avec son
,
�C 18 )
fils . enc s’ oblipe à acquitter los.somtnes à l W a n c e ; elle
f a t V ’der à ^ fille l’action en reddilion de compte contre
elU- elle profite par conséquent de cette cession, puisC u’eHe est déchargée du compte de tutelle, qui tourne
a U profit de son héritier institut*.
1 L ’institution q u elle avoit faite au profit de son fils,
n ’ étoit pas un vain titre ; ce n’ étoit pas une simple dot
pécuniaire qu’elle avoit à répéter ; elle étoit elle-même
h é ritiè re ; elle possédoit des fonds p réc ieu x j elle avoit
porté un mobilier considérable en effets ou obligations,;
son fils, son héritier institué,, étoit donc tenu de ses faits ,
et comme tel, ne pouvoit accepter la cession de sa sœur.
* E n un m o t ,c ’est la mère tutrice qui a dirigé, commandé
la renonciation ; son consentement au mariage étoit a ce
p rix ; elle en profitoit personnellement, et en faisoit p r o
fiter son héritier: ainsi, que ce soit la fmère qui ait été
tutrice, ou le frère p ro tu te u r, la cession n’en est pas moins
une monstruosité arrachee par l’autorité et la crainte, et
sans aucune connoissanee.
E n vain opposeroit-on encore que Françoise Barbat,,
en acceptant la somme qui lui a été constituée en majorité,
a ap p rou vé le testament de son perc.
On ne peut accepter un testament tacitement. Pou i qu il
y ait approbation , il faut que le testament soit connu , lu et
énoncé dans l’acte. L ’article 5o du titre 1 2 de la coutume
porte : « celui qui accepte sciemment, etc. ».
Françoise B arbat peilt-elle l’avo ir accepté sciem m ent,
lorsqu’elle Ta ig n o r é ; lorsque -son contrat de mariage
n en fait aucune mention ; lorsqu’au lieu d’ énoncer le
lecrs porté par ce testament, on lui donne une somme
�C 19 )
toute différente; lorsqu enfin on lui fait croire que son
frere avoit une institution universelle, tandis qu’il ne
pouvoit prélever que le quart des b ien s, en vertu de
ce même titre qu’on a caché avec tant de soin ?
E n résumant, le jugement qu’on attaque est conforme
a tous les principes reçus. 1 °. Cession faite au profit
d un protuteur qui réunit à cette qualité celle d’héritier
universel de la tutrice. 2 0. Cession dirigée et commandée
par la tutrice , qui s’engage solidairement à en payer le
prix, et en profite personnellement. 3 0. Lésion énormissime, mathématiquement prouvée par le calcul le plus
modique et le moins exagéré des forces de la succession.
4 °- Demande en restitution formée dans un temps utile;
c 'e st-a-d ire, dans les dix années de l’acte : que fau t-il
de plus pour établir le fondement de la demande en
partage, et le bien-jugé du jugement dont est appel?
P a r conseil, P A G E S .
A RIOM, DE
L’I M P R I M E R I E
DE
LANDRIOT,
Imprimeur du Tribunal d’appel.
�
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Barbat, Françoise. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
partage
successions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Françoise Barbat et Hugues Mazeyrat, son mari, de lui autorisée, intimés ; contre Marie-Rose Barbat, Antoine Courbeyre, son mari, de lui autorisée ; Jeanne Barbat et Claude Triozon, son mari, de lui autorisée ; et Marie Barbat, fille majeure, appelans d'un jugement rendu au ci-devant tribunal civil du Puy-de-Dôme, le 16 frimaire an 5.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1744-Circa An 5
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0202
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0140
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Coverage
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Egliseneuve-d'Entraigues (63144)
Rights
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Domaine public
partage
Successions
-
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PDF Text
Text
PRÉCIS
P o u r J e a n D R I V O N , défenseur officieux, habi-
tant de la commune de R io m , appelant d’un
jugement rendu au tribunal civil du département
du Puy-de-Dôme, le 14 messidor, an
5;
D R IV O N , son frère, cidevant notaire public , propriétaire, habitant de
la commune de Charbonnières-les-Vieilles, intimé.
C o n tre
A n to in e
U N frère avide et ambitieux veut dépouiller l’appelant
de la portion d’un immeuble qui est le fruit de ses travaux
et de ses peines.
C ’est après un partage qui rem onte à trente-six ans , que
l'intimé a im aginé de form er cette demande, lorsqu’il n’avoit
plus rien à craindre des créanciers de son aïeu le, et après
que son frère a été seul en butte à toutes leurs recherches.
Les principes, la raison, la justice et les circonstances
particulières de la cause, se réunissent pour prouver le mal,
jugé du jugement dont est appel.
tri b u n al
civ i l
�( 2 )
Les parties qui plaident avoient p o u r aïeule maternelle r.
M arie M o rei. Cette femme disparut subitement de son
domicile y et n’a donné aucune de ses nouvelles,, depuis son
départ, qui remonte à plus de quatre-vingts ans. On ne lui
connoissoit aucune espèce de biens ; elle n'avoit laissé, en
partant, que des dettes.
Louise P o u le t, m ère des parties, étant d écéd ée, les
deux frères partagèrent sa succession : cet acte de partage
n o t a r i é , est du n février 1762. Les parties avoient alors
atteint leur majorité.
P a rc e partage, il échut au lot de l’appelant, une directe
de vingt-deux setiers de blé , et une rente de 225
sur
l’é ta t, au principal de 9,000 fj~.
Antoine D r iv o n , in tim é , fut plus heureux ; son lot fu t
composé d’un domaine assez considérable > situé dans le:
village des Forges.
, Il fut ajouté dans ce partage, qu’au cas où il se trouveroit
d’autres bien s, ils seraient partagés par moitié entre les
parties : clause d’usage> en A u v e rg n e , dans les partages.
Jean D rivon apprit, quelques années ap rès, que Marie
M o r e l, son aïeule étoit propriétaire d’une vigne située
dans les appartenances de R io m , terroir de Chalusset, de la
contenue d’entour quatre oeuvres • c’est-à-dire >de six cents
toises. Il fit part à son frère de cette découverte,etl’engagea
à se réunir à lui Tpour la recherche de cette propriété. Il
étoit d’abord essentiel de n’accepter , que par bénéfice
d’in ven taire, une succession qui pouvoit devenir onéreuse..
Antoine D rivo n refusa obstinément de sé mettre eh qualité*
et ne voulut participer î\ aucun frais-, il se départit m êm e
£ar é c rit, de tous droits qu’il pouvoit amender -, et malheu
reusement son frère a égaré le billet qui lui fut donné dans
le tempsi
�(3)
Jean D rivon , ne pouvant déterm iner l'in tim é , obtint,
en son nom, des lettres de bénéfice d’inventaire, le 7 février
I 7 7 ° j et se porta héritier bénéficiaire de M arie M o r e l,
son aïeule.
En cette qualité, il fit assigner en désistement les tiers
détenteurs de la vigne \ et ce u x -ci, ayant reconnu la légi
timité de ses droits, s’en départirent par transaction du 4
mars 1770. Q uoique ce département paroisse gratu it, il
n’en est pas moins vrai que Jean D riv o n fut obligé de
faire des sacrifices, pour parvenir au traité , et éviter un
procès qui pouvoit devenir long et dispendieux.
L ’héritage dont il devenoit propriétaire, étoit inculte
depuis longues années. Il a fallu le faire défricher, le niveler,
le planter en v ig n e , et y faire de grosses dépenses , pour le
mettre en état de production : le frère a vu chaque année
ces améliorations , et a gardé le silence. C’est après plus de
vingt-cinq ans d’une jouissance paisible, qu’Antoine D rivon ,
âgé de plus de soixante-trois ans, instruit qu’il n’existoitplus
de traces du billet, par lequel il s’étoit dépai’ti de tous droits
sur la succession de M arie M o r e l, a form é contre son frère
la demande en partage de cette vigne. Il a pris la qualité
d ’héritier pur et simple de son aïeule : sa demande est du 18
nivôse an 4.II sembla d’abord se repentir de sa dém arche, et
se laissa condamner par défaut. Sur l’opposition, le partage
de la vigne a été ord on n é, avec restitution des jouissances,
par le jugem ent dont est appel : il est essentiel d'en connoître les motifs et les dispositions.
« A tten du, est-il d it, que l’époque du décès de M arie
« M o re l n’a jamais été con n u ; qu’ainsi, Antoine D rivo n
,« est encore à temps de5e déclarer héritier de son aïeule j
«A ttendu q u e , par le partage de 17 6 2 , les parties ont
�",
(4 )
,
«partagé , non seulement les biens de Ta mère commune r
«mais encore tous les autres biens provenus de l’estoc ma
te ternel ; qu’ainsi, les biens de M arie M o re l, aïeule, étoient
« partagés au moins provisoirem ent entre les parties;
« Attendu que l'action exercée en 1770 , contre l'e tiers
« détenteur de la vigne , ainsi que le traité portant désiste
ra m ent, ont profité à tous les cohéritiers"; —
« Attendu que depuis 1 7 7 0 , il n e s’est pas écoulé-trente
« ans ;
« Attendu néanmoins qu’il est juste de faire'raison ¿1Jean
« D riv o n , de toutes les avances qu’il a faites, pour faire
« rentrer dans la succession la vign e dont il s’agit, ainsi q u e
« des impenses et améliorations ;
« L e tribunal ordonne que lesparties viendront à‘ division,
■
ret partage de la vign e dont est question, à l’effet d’en;
« être attribué la moitié à Antoine D rivon ; lors duquel
« partage , Jean D rivo n rapportera toutes les jouissances
« par lui faites, depuis sa mise en possession , à la charge par
« A n toine D r iv o n , de restituer à son frè re , moitié des
- « sommes que ce dernier établira avoir avancées pour faire
« rentrer la vigne dans la succession ; et outre ce, moitié des
« impenses et améliorations qui se trouveront avoir été
«faites dans la v ig n e , par le défendeur:1e tout quoi sera
a com pensé, jusqu.à due concurrence, avec les jouissances ;
« condamne celle des parties, q u i, par l'événem ent de lii
« compensation , se trouvera débitrice de l’autre , aux
« intérêts de la somme restante, à com pter delà demande;
« et pour parvenir aux opérations du partage , ordonne
« que les parties conviendront d’exp erts, sinon qu’il en
« sera pris et nommés d’o ilice, même un tiers, s’ily échoit,
« et compense les dépens, qui seront employés en irais
« de partage ».
�(5)
_
Jean D rivon a interjeté appel de ce jugem ent; une foule
de moyens se présentent , pour en dém ontrer l’injustice.
Ilestcertain,en point dedroit,que l’ héritier qui refuse de
prendre part aux recherches de son cohéritier, qui ne vent
courir aucun risque, ni s’exposer au payement des dettes ,
lorsqu’il peu ty avoir du danger n le faire, nepeutpltrs, dans la
suite, participer au bénéfice qu’a pu faire son cohéritier ,
dans un temps d ep éril, lorsqu’il couroit les hasards d accep
ter une succession onéreuse. Ces héritiers avid es, que
M ornac appelle pessim os et m a leço lo s, doivent etre
repoussés avec indignation. U ne loi du droit rom ain le
décide en termes formels. C’est la loi 2 4 ,^ de m m oribusr,
' § 2. Si quis ju v en ili levitate duc t u s , dit cette lo i, orniserit, vel rép u d ia ien t hœ reditatem j siquidem om nia
integra s u n t, om ninb audiejidus est : s i vero distractâ
hcereditate , et negotiis fv n itis, ad paratarn peciuiiarn
laboribus substituti veniat; repellendus.
M ornac s’est exprim é sur ce paragraphe , avec son
énergie ordinaire ■
, il compare ces sortes d héritiers , à
des lâches corsaires , qui se cachent dans les roch ers, pour
attendre l’événement. P a ra g rap h es h i c , d it-il, de quotid ia n is,est in personatos q u i , q u a si in scena rquasique
è spécula prospiciunt q uid a g a tu r, et quo res évadant.
S i quid pejus, veluti inter co rsici rupes latent ; quod a it
Humérus
Gaudentque ............................................
JNeptunum procul à terra spectare fu re n te m .
'
S i quid m elius : tune a çced u n t, personis positis , et
iauto convivioyparatisque epulis,unà cu m p a n cratiastis
victoribus assident. T^ulgus pragrnaticorum dictum h o cy
« ad parafas epulas, usurpare so le t, ex hoc textu , ad
» sexcentos casus s imites ».
�T e le s tle c a s ou se trouve A ntoine D r iv o n , intimé. II
refusa d’accepter la succession de son aïeule, lorsq u il
pouvoit y avoir du danger à le taire ; il ne voulut prendre
'aucune part aux démarches de son frère ; il donna m ême
fpar écrit, son département de tous droits : et aujourd’hui,,
que toutes les dettes de M arie M o re l, sont éteintes par la
prescription ; qu’il n’y a plus de péril; qu’il sait que le billet
est é g a ré , il vient , ad -parafas ep u la s, enlever à son
-cohéritier , le fruit’ de ses travaux et de ses peines ; c’est
l'espèce de la loi : sa prétention doit être rejetée,repellendus.
D ’un autre côté, sa demande ne vient pas dans un temps
.utile; il étoit âgé de plus de soixante ans; il y a plus de quatrevingts ans que la succession de son aïeule est ouverte : les
choses ne sont plus entières ; il ne peut plus être reçu à se
porter héritier, dès qu’il a négligé de le faire, pendant plus
'de trente ans. Les tiers détenteurs de la vigne dont il s’agit,
auroient prescrit contre lui 5 il n’auroit pas le droit de les
-déposséder aujourd’hui. Jean D rivo n à présent représente
ces tiers'détenteurs ; il est subrogé à. leur, lieu et place:
l’intimé n’a donc pas plus de droit, contre son frère, qu’il
n’en a u ro it1contre les tiers détenteurs eux - m êm es, si
l’appelant ne les avoit pas dépossédés.
O B J E G T I o N S.
L e jugem ent dont est appel a.adopté pour motifs , les
objections proposées par l’intimé. Elles consistent à d ire ,
1 ° . que Tépoque du décès de M arie M o r e l, n’a jamais été
bien connu; 2°. que le partage de 1762 , contient réserve
.expresse de partager les biens qui pourraient se découvrir
dans la suite 3 et.dans ce partage., les biens de. M arie M orel
�#
( 7 5
étoient provisoirem ent co m p ris, puisqu’on a divisé tous
les biens qui provenoient de l'estoc maternel ; 30. le traité
de 1770, portant désistement, a profité à tous les cohéritiers;
4 • depuis 17 7 0 , jusqu’à la dem ande, il ne s'est pas écoulé
. trente ans.
R É P - O N S L
• L e prem ier m otif est contraire aux principes du droit. Il
est avoué et reconnu par les parties, que l’absence de M arie
M orel remonte à plus de quatre-vingts ans, sans nouvelles d e
sa part* elle est donc réputée m orte du jour de son absence :
sa succession est ouverte à com pter de son départ. T elle est la
règle et la doctrine des auteurs r on peut consulter H enrys
et L ebrun qui ont traité la matière. V o y e z le dictionnaire
des arrêts, au m ot a b sen t, et tous les recueils de jurispru
dence moderne : rien n’étoit donc plus connu que l’époque
de la succession de M arie M orel. Antoine D riv o n a donc
dû exercer son action dans les trente ans de sa majorité.
Secondement,le partage de 176 2 ,estabsolument étranger
à la succession de Mai* ie M o rel1, aïeule ; on n y traite que de
la succession de Louise P o u le t, m ère com m une, d’A m able
P o u le t, gran d -on cle des parties. L a réserve contenue au
partage n’avoit donc rapport qu’à ces deux successions, et
n epouvoit regarder, en aucune m anière , celle de M arie
M o re l, dont on ne s’occupoit p as, et dont on ne vouloit ni
ne devoit s’occuper, puisqu’aucune des parties n’avoit
encore osé prendre la qualité d’ héritier.
,
3°. C ’est mal à propos qu’on a prétendu que le traité
de 1770 , devoit profiter à tous les ayans droit à cette
succession. E n matière de choses indivises, l’héritier qui
•traite d u n droit incertain, ne traite que pour lui. S’il est
�obligé de com m uniquer le bénéfice qu’il peut faire à
ses cohéritiers, ce n’est que dans le cas où il p ayero it des
dettes de la succession , et qu’il auroit obtenu des remises
de la part des créanciers, il fait alors le bien de la chose
com m un e, et il doit en faire part à ses cohéritiers qui ,
comme lu i, ont accepté la succession, et ont couru les
mêmes hasards. Mais lorsqu’un héritier prend seul sur son
com pte tous les risques ; lorsqu’il accepte une qualité oné
reuse , et que les autres se tiennent à l’éca rt, alors il ne
traite que pour lu i, et doit seul profiter du bénéfice.
Ce n’étoit donc pas du traité de 1770 , qu’il falloit partir,
mais bien de la majorité d’Antoine D riv o n ; e t , dès qu’il
étoit plus que sexagénaire, lorsqu’il a form é sa demande, il
est sans droit comme sans qualité, puisque la succession étoit
ouverte avant qu’il devînt majeur.
E n fin , si l’on considère que Jean D rivon a perdu , sans
ressource, tout ce qu’il avoit obtenu du patrimoine de sa
mère ; que sa directe,comme sa rente, ont été su p p rim ées,
tandis que son frère a conservé son domaine en entier , on
ne pourra voir sans indignation ce frère avide et dénaturé,
qui ose encore envier à l’appelant, trois cents toises de
terrain, dont il a souvent été dédommagé par les libéralités
de son frère,
Signé , D R I V O N ,
* L'intimé , le jour du partage, lui fit encore une promesse de douze chars
de gros bois , dont l' appelant lui a. fait remise , suivant le billet qu'il rapporte.
Ce bois équivaloit alors à la valeur du terrain contentieux.
A RIOM, DE L'IMPRIMERIE DE L A N D R IOT, ruedes Taules
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Drivon, Jean. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Drivon
Subject
The topic of the resource
partage
successions
vin
Description
An account of the resource
Précis pour Jean Drivon, défendeur officieux, habitant de la commune de Riom, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil du département du Puy-de-Dôme, le 14 messidor, an 5 ; contre Antoine Drivon, son frère, ci-devant notaire public, propriétaire, habitant de la commune de Charbonnières-les-Vieilles, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1762-Circa An 5
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0113
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Charbonnières-les-Vieilles (63093)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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partage
Successions
vin
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M É M O I R E
A CONSULTER,
ET C O N S UL TA T I O N ,
POUR
le citoyen
diction
lant
F
a y e t
,
curateur à l ’inter
d ’Antoine F a y et son père , appe
d’un jugement
du
tribunal civil
du
département du C a n t a l , du 25 Messidor ,
an I V
C O N T R E
naud ,
J e a n S a v ig n a t
,
Jean R ey -
A n to in e B o y e r , J ea n B ru g e
-
rolesIn timés.
U
n hom m e dont la folie fut un fujet d’étonnement &
d ’effroi pour la ville d’Allanche ; un homme qui , après
avoir adminiftré fes biens pendant trente a n s, fe dépouille
tout-à-coup de cette adminiftration , pour en revêtir un jeune
m ilitaire fans expérience ; un hom m e dont toutes les actio n s
portent l’empreinte de la démence la plus caractérifée , a-t-il
pu tranfmettre à fon fils, non-feulement le droit de régir fes
biens prefens & à venir , mais encore le pouvoir de les
vendre , en s 'interdifa n t la faculté de révoquer fo n procureur
conf t itué pour quelque caufe & m otif que ce pût être ? U ne
procuration auff i extraordinaire dans fes m o tifs, qu’illim itée
dans fes pouvoirs, a-t elle été l’ouvrage d’une volonté libre
& réfléch ie, ou plutôt ne préfente-t-elle pas les caractères
d’une interdiction extrajudiciaire ? L cs ventes faites deux
A
�ans nprès cette procuration font - elles revêtues de la pre
mière condition néccllàire à leur va lid ité, du confentement
du vendeur fans lequel il ne fauroit exifter de con
vention ?
T elles font les importantes queftions fur lefquelles le récit
des faits va jeter un nouveau jour.
F A I T S .
A ntoine F a y e t, marié en i j 56 , fe mit à la tête de fes
affaires, & fe livra à un commerce aiïèz confidérable ; foit
que la fortune ne répondit pas à fes efpérances, foit que la
raifon s’éteignit par degrés , il ne fit que de faufles fpéculations \ fon comm erce , au lieu de profpérer , eiTuya des
revers irréparables ; il fe vit bientôt en butte aux pourfuites de fes créanciers , & menacé de l’expropriation de fes
biens par une faiiie-réelle.
Q uelqu’aftligeant que fut le dérangement de fa fortune, il
avoit à craindre un malheur bien plus fenfible dans la perte
abfolue de fa raifon. Vainem ent la fam ille prit toutes les
précautions que pouvoir fuggérer la prudence, pour cacher
au public le déplorable état d’Antoine Fayet ; fes foins furent
infru&ueux ; fa démence fe m anifefta, tantôt par des traits
de violence Si d’em portem ent, tantôt par des fcènes d’ex
travagance ; les places publiques, les é g life s, les maifons
particulières devinrent le thcatlre d’incidens répétés chaque
jo u r, i k ce malheureux père de famille fut pour fes conci
toyens un objet d’épouvante 8c de pitié.
O n n’auroit pas dû balancer fur le feul remède convenable
dans ces trilles circonftances ; mais la fam ille fe flatta que
cet orage produit par le dérangement de fes affaires ferait
p aflager, que le calm e fuccederoit à cette efpècc de frénéfie,
& qu’ il ne falloir avoir recours à l ’interdittion que lorfque
tout efpoir feroit perdu.
Des petfonnes intérefTées à ce qu’Antoine Fayet ne fût
pas interdit, imaginèrent de lui faire figner une procuration
�3
q u i , en le dépouillant de l’adminiftration de fes biens,
équivaudrait à une véritable interdi& ion, & faciliteroit la
vente de Tes propriétés.
Cette p ro cu ra tio n elt du 5 novembre 178 5. Il y avoir
alors près de deux ans qu’Antoine Fayet étoit dans un état
de démence habituel, & qu’étranger à toute efpèce d’affaires,
il n’avoit pas donné une se u l e iïgnature ( 1). A ud i les termes
de la procuration en décèlent-ils facilem ent le m o tif A n
toine Fayet donne pouvoir à fon fils a in e , jeune militaire
fans expérience, non-feulement de régir 6c adminiftrer fes
biens , recevoir fes revenus, payer fes créanciers, pourfuivre
toutes inftances, traiter , tranfiger , mais encore de vendre
tous fe s biens-fonds , excepté la maifon qu’il h a b ite , fubftituer un ou pluiieurs procureurs en tout ou partie , de fes
pouvoirs, avec claufe expreffe que le conflituant ne pourroit
révoquer le procureur conjlitué, pour quelque caufe & m ^tif
que ce -pût être j icelui Je démettant dès-à-prêtent defdits
pouvoirs j & fans que ces préfentes fufjent fujettes à furannatïon.
Antoine Fayet fils, muni de pouvoirs auifi illim ités, ne
jugea pas à propos d’en faire ufage ; il partit quelques mois
après pour Ion régim ent, & lailTâ. fa famille dans la plus
cruelle détrefTe. oi le père eût joui de la pénitude de fa
raifon , auroit-il confenti à fe lier les m a in s, non-feulem ent
iour le préfent, mais encore pour l’avenir ? Se feroit-il mis
bus la tutèle de fon fils ? N e fe feroii-il pas réfervé le droit
de révoquer cette procuration ? D e quelque nom que l’on
veuille la colorer , ne trouve-t-on pas, foit dans les motifs
qui l'ont di£tée , foit dans les termes & l’étendue des pouvoirs
qu’elle contient, foitdans les effets qu’elle a produits, la preuve
évidente de la démence du père , & de l’inexpérience du fils ?
C e ne fut que deux ans après, & à fon retour du régim ent,
Î
( 1 ) O n doit obferver que la fignature mife au bas de la proen»
rationeft ii pênie , fi inform e, qu elle ne rcflemble point aux anciennes
fignaturej d’ Antoine F ayet.
A 2
�4
qu’ Antoine Fayet fils, trompé par les craintes qu’on cherche
à lui infpirer, vendit en 178 7 & 1788 la preCque totalité des
biens de fon père , moyennant une Comme modique de
34,000 üv. - Les acquéreurs 11e manquèrent pas de circon
venir ce jeune militaire , de profiter de Ca loyauté & de Con
inexpérience pour lui faire faire tout ce qu’ ils crurent con
venable à leurs intérêts -, ne pouvant Ce diilïm uler que l’état
de démence de leur vendeur étoit public ; inftruits même que
quelques perfonnes d’Allanche qui auroient voulu pouvoir
acheter, en avoient été empêchées par les Cages conCeils d ’un
jurifconfulte de R ioni , ces acquéreurs exigèrent que les
ventes fuiîent Cecrètes , & plufieurs Ce paiTèrent très-myCtérieufement dans un lieu peu éloigné d’Allanche : ils prirent
des précautions qui décéloient leurs mauvaife foi & leur
crainte Cur la validité de ces- ventes ; au lieu de payer les
créanciers d élégu és, ils dépofèrent leurs contrats au bureau
des hypothèques , feignirent une confignation , & ne de
meurèrent pas moins nantis de la chofe & du prix.
Ces ventes dont l’objet devoit être d ’allurer la libération
d’Antoine F a y e t, n’ont fait qu’accroître la 111a (Te de Ces dettes
par lesfraisqu’a entraînéscetteprétendueconfignation. Q u’elle
foit ou non réelle, cela devient indifférent pour la caufe.
E n effet, fi le prix des ventes a été réellement coniïgné , il a
demeuré iutadl dans les mains du receveur des confignations ; perfonne n’en a retiré un (fou. Si au contraire la
confignation n’a éré que fi& iv e , les acquéreurs Ce trouvent
faifis de ce prix. A i n i i , dans tous les cas, ils n ’ont rien à
craindre pour leurs deniers.
Q u ’importe d ’après ce réfultat, que des a&es auifi déCaftreux aient été partes par le notaire Saintherand, beau-frère
d ’Antoine Fayet ; que Con frère Guillaume Fayet ait donné
Con conlentement à la vente du domaine de Pradier ; qu ’il
Ce foit départi au profit de Savignac, acquéreur, de tous
droits Sc prétentions Cur le domaine vendu ? ' Ces circonCtances neCauroient couvrir l’incapacité du vendeur, nifuppléer
fon défaut de conCentemait.
�5
Depuis cetce époque, le dérangement des affaires, les
malheurs de la famille , le déplorable état d’Antoine Fayec
ont été fans remède j il ne reftoit plus aucun efpoir aux
créanciers pour être p ayés, ni aux enfàns pour fauver les
débris de leur fortune : trois des enfans , fur h u it, étoienc
au ft-rvice de la République ; un quatrième é to it, par fon
état, condamné à l ’exil ; un cin quièm e.setoit établi à la
R och elle; la mère & fes filles prôdiguoient à leur m alheu
reux père leurs foins impuiiïàns.
Jean Fayet , inftruit des malheurs de fa fam ille, vole
à fon fecours ; il voit avec douleur que l'état de fon p è re,
aggravé par le dérangement de fes affaires, eft fans remède ;
il reconnoît que des confeils perfides, de concert avec des,
acquéreurs avides, ont abufé de l’inexpérience & d e la facilité
de fon frère pour lui extorquer un confentement illufoire
a des ventes ruineufes. Il eut recours au feul moyen propre
a remédier aux malheurs de fa famille ; il fe détermine ,
quoiqu’avec la plus grande amertume , d provoquer l’interdi&ion de fon père. L'interrogatoire, l’avis des Pparens,
les certificats des médecins mettent" dans le plus grand
jour fon état habituel de démence ; tous attellent que cec
état remonte à une époque beaucoup plus ancienne ; ils
s’accordent tous à en fixer les premiers fymptômes àdix ou douze
ans : ils ajoutent que la démence d'A ntoine F a y e t, caractérifée par des accès de frénéiie, avoit publiquement éclate
avant 17 8 5 ; qu’elle setoit accrue chaque année davantage,
& qu’elle étoit parvenue à fon dernier période. L ’unanimité
de ces témoignages ne permet pas au tribunal de M urât de
fufpendre l’interdiftion : elle fut prononcée le premier therm i
dor an 3 \ 6c Jean Fayet fut nommé curateur à la perfonne
& aux biens de fon père.
L e premier ufage qu’il fit des fondions de curateur, fut
de demander la nullité de la procuration du 5 novembre
1 7 8 5 , & le défiftement des objets vendus avec reftitution
des jouiilances. Com m ent regarder cette procuration comm e
l’ouvrage d’une volonté libre Sc réfléchie ? Si Antoine Fayac
a a
t
�6
eût joui de la plénitude de fa raifo n , auroit-il foufcrit à fa
propre interdidion ? fe feroit-il mis volontairement en tutèle ?
auroit-il ratifié d’avance & aveuglément tous les ades de
fon procureur conftitué ?
U n e telle dépendance, une abnégation auffi formelle de
fes droits , fuppofe la privation totale de la raifon. Jamais
un père de fa m ille , accoutumé à gérer fes affaires, &
jaloux de fon autorité, n’auroit porté l’oubli de fes devoirs
jufques à fe condamner à la plus abfolue n u llité, & jufqu’à
devenir étranger dans fa propre maifon.
.Ainfi , cette procuration eu une preuve irrécufable de la
démence de fon auteur, ou au moins formoit une pré
e m p tio n fuffifante pour faire admettre la preuve teftimoniale.
Jean Fayet a demandé à faire preuve de la démence habituelle
de fon père depuis 1 7 8 3 , & notamment à l’époque de la pro
curation de 17 8 5 , & des ventes qui l’ont fuiviel Cette preuve
a été ordonnée par jugement interlocutoire du tribunal du
d iflrid de M u râ t, du 9 frudidor an 3 . Une enquête compofée de 5 5 témoins préfente la démonftration la plus
complète de l’état d’ Antoine F a ye t, foit à l’époque de la
procuration , foit à l’époque des ventes de 17 8 7 ic 1788.
Sa conduite n’a été depuis 1 7 8 3 , qu’un long enchaînement
de faits bien propres à prouver fa démence. Tantôt il m al
traite ceux qui lui refufent du tabac, tantôt il fe livre à des
accès de fureur & attaque les pailàns ; quelquefois il eiliie de
faire des miracles , & de changer l’eau en v in , ou il ne fep réiente à l’églife que pour troubler le fervice divin par des fcênes
aufli ridicules que fcandaleufes ; plus fouvent encore il court
les rues comme un furieux, & effraie, par fes vociférations ou
fes tuenaces , ceux qu’il trouve fur fon paflage. Ses difeours
répondent à fes adions; ils n’ont aucune fuite; & s’il tient
quelques propos raifonnables , cette lueur de raifon difparoît
nuflitôt, & jamais il ne fort de fon état de démence.
C e concours unanime de témoins fur le fait habituel de fx
dém ence, les circonihnces qui la caradérifent, la continuité
�7
de cet état, fans aucun intervalle lucide, forment la preuve la
plus concluante qu’Antoine F a yet ne jouiflbit plus de fa raifon
depuis i 783 .
Le vœu du jugement interlocutoire étoit donc rem pli, Sc
Ia démence de F a y e t , une fois confiante, il en réfultoit la
conféquence néceifaire de la nullité des ailes non-revêtus de
fon confentement. Q ue l’interdiftion judiciaire n’ait été pro
noncée que le premier thermidor an 3 , étoit-il moins cer
tain que Fayet étoit privé de fa raifon , foit à l’époque de la
procuration , foit à l’époque des ventes j que dans cet état
il étoit incapable de volonté , & que par conféquent ces
aétes ne pouvoient être confidérés comme fon ouvrage ?
C ’eft néanm oins, au mépris de ce principe fondamental des
conventions, & contre le témoignage concordant de cinquantecinq tém oins, que le tribunal civil du département du C a n ta l,
q u i , par la fuppreffion des tribunaux de diítriófc, remplaçait
le tribunal du ci-devant diftritt de M urât , & fe trouvoit par
conféquent lié par l’admi ilion de la preuve , a déclaré Jean
Fayet , curateur à l’interdi&ion de fon p è re , purement &
Jimplement non-recevable dans fe s demandes.
L e curateur à l’intcrdiâion s’eft empreiTc d’interjeter
appel de ce jugement , auflî extraordinaire dans íes m o tifs,
qu’injufte dans fes difpofitions : il demande au Confeil
quels font les moyens qu ’il doit faire valoir pour en faire
prononcer l’infirmation ?
F
a y e t
, fils.
C O N S U L T A T I O N .
L« C o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lefture de la procura
tion du 5 novembre 1 7 8 5 , des ventes qui l’ont fuivie le 14
novembre 17 8 7 , i 5 & 23 juillet 1788 , 29 août 1788 ; du
jugement d’interdiftion du premier thermidor an 3-, de l’avis
de parens du 4 therm idor, pour la nomination d’un curateur
à Antoine F a y e t} des pourfuites dirigées par ce curateur
contre les acquéreurs dudit Antoine F ayet j du jugement in-
�8
terlocutoirc du tribunal du diftri<5t de M u r â t, du 9 fruûidoc
an 3 y des enquêtes & contre-enquêtes faites en exécution de
ce jugement ; du jugement en premier reilort du tribunal
civil du département du C an tal, du 2.5 meffidor an 4 j en*
fem ble du mémoire à confulter :
E s t i m e , que les lois o n t diftingué deux caufes d ’in te rd iflio n , la p rodigalité & la d é m e n c e , d o n t les effets ne
d oiven t pas être confondus.
U n prodigue ne peut être privé de l’admimftration de fes
biens, qu’après avoir donné des preuves multipliées de fes
diiîîpations ; tant qu’il n’eft point dans les liens d ’une inter
diction légale , il jouit du droit de difpofer par quelque afte
que ce foit j fon incapacité eft fubordonnée au jugement
qui prononce fon interdiftion , & ce n’eft qu’après un exa
m en approfondi de fa conduite , que la juftice fe détermine
à la proclamer.
U n infenfé eft incapable de difpofer auflîtôt que la d é
mence fe manifefte par des aitions éclatantes j la nature
prévient l ’office du ju g e , en lui raviifant la plus précieufe
de toutes les facultés, la raifon qui diftingué l’homme de
tous les animaux. Dans cet état d ’anéantiiïement 3 comment
pourroit-il juger du mérite d’un a f t e , en pefer les avan
tages ou les inconvéniens , ne confulter que fon intérêt en
le fignant ? Com m ent pourrait - il le revêtir du confentement néceiîàire à fa validité ? N e deviendrait - il pas
l ’inftrument aveugle de fa ruine ? N e tomberoit-il pas dans
tous les pièges que lui tendraient à Penvi la cupidité & la
mauvaife foi ? L a loi exige , pour une convention , le con
cours du confentement de deux ou plufieurs perfonnes ; fi
l ’un des contradtans eft privé des lumières de la raifon , il eft
incapable de vo lo n té , & par conféquent la con ven tion ,
qui devrait être fondée fur le confentement réciproque des
parties , n’eft plus l’ouvrage que d’un feul con traâan t, & #
peche dans fon principe conftitutif! Furïoji vcl ejus eux bonis
interdiclum fie , nullci voluntas eft.
�itf
9
D e ce principe naît une différence dans tes effets de ces
deux forces d’interdi&ions ; l’une n’enchaîne l'interdit qu’au
moment même où elle eft prononcée ; l’autre , purement
déclarative , remonte au temps où la démence eft prouvée:
ficLtim aivmïente furore j furiofo interdiclum ejt. Les aûes
du p rod igu e, avant fon interdid'1011 , font confirmés par la
loi ; ceux de l’infenfé , quoiqu’antérieurs à l’interdidlion ,
peuvent être attaqués j lorfque la démence précède l’époque
de ces aétes.
L a démence eft un fait dont la preuve dépend , com m e
celle des autres faits, d e là dépofition des témoins. O n ne
peut fe procurer une preuve écrite des actions qui la caractérifen t, ni faire conftater par un officier public les accès
de frenéfie , les adtes d ’em portem ent, les traits d ’extrava
gance qui en nuancent ou diverfifient le caractère. C o m
ment faiiir tant de circonftances auffi bizarres que fugitives ,
& les configner dans un infinim ent authentique ? Les té
moins feuls peuvent expliquer la variété infinie d’attions
dont ils font les fpe&ateurs habituels ; ils font libres de les
choifir & de les propofer com m e une preuve irrécufable
de la vérité du tait principal : qu’ils différent dans les dé
tails , peu importe , pourvu qu’ils s’accordent fur les motifs
de leur jugement , 3c qu’ils dépofent unanimement de la
démence de celui dont l ’état eft conftaté.
Les dépofitions des témoins acquièrent encore un nouveau
degré de force 3 quand l’aéte dont la validité elt mife en
doute , porte l’empreinte du dérèglem ent d ’elprit de fon
auteur. Q u ’un père de fam ille , habitué à gérer les affaires ,
fe dépouille tout-à-coup de l’adminiflration de fes biens ;
qu’il en confie le foin à un jeune militaire ; qu’il l’autorife
non-feulement à régir, mais encore à vendre tous fes fonds j
qu’il s’interdife le pouvoir de révoquer fa procuration ; que
le procureur conftitué , au lieu d’ufer de fes pouvoirs , aban
donne fa famille aux pourfuites des créanciers ; que deux ans
après, & au retour de fou régim ent, il vende la prefque
totalité de fes biens , fous les yeux de fon p è re , &. fans fa
Mémoire à Confultcr3 & c .
A 5
�IO
participation, pour un prix fort au-defTous de leur valeur; on
chercherait en vain les motifs d’une conduite aulii extraor
dinaire on n’en peut trouver d’autres qu’une précaution
commandée par l’état de ce père de famille ; on doute de
la fageile d’un afte que réprouvent les règles ordinaires
de la raifon humaine -, & en approfondiiTant les circonftances
& les termes de cette procuration , on ne balance plus à la
regarder comm e l’ouvrage d ’un infenfé.
C es deux fortes de preuves concourent donc légalement
à démontrer la démence. D ’un côté, les difpofitions que ren
ferme un a f t e , accufent quelquefois la fageifè du fignataire ÿ
de l ’autre, la préfomption de la démence fe convertit en
certitude , fi les témoins depofent qu’à l’époque de cet afte
l ’aureur ne jouiiToit plus de fa raifon.
Vainem ent voudroit-on équivoquer fur la nature des
aftes , & établir une diftinftion entre les aftes à titre oné
reux, & les aftes à titre lucratif; vainement prétendrait- on
ét3y cr cette diftinftion de la jurifprudence des arrêts , &
foutenir qu’ils n’ont admis la preuve de la démence contre
des aftes o n éreu x, qu’avec une extrême difficulté.
Les principes ne peuvent varier au gré de ceux qui les
in voq u en t; & fans fe jeter dans le labyrinthe inexplicable
d e l’efpèce de chaque a rrê t, il faut s’attacher à cette maxime
de d r o it, que les contrats comme les teftamens Si les d o
nations ne font fondés que fur la volonté libre des parties.
U n infenfé eft incapable de difpofer , foit par donations
entre-vifs , foit par ccftam ent, parce qu’il eft privé de toute
cfpèce de volonté. Pourquoi le même m o tif ne s’appliqueroit-il pas aux difpoütions onéreufes ? Faut-il une moindre
liberté d ’efprit pour défendre fes intérêts contre un acqué
reur avide , que pour exercer des aûes de libéralité ? L e
confentement des parties n eft-il pas la condition ellèntielle
des conventions ? £ ft-on moins expofé aux fupnfes de la
mauvaife foi dans le cas d’une vente , qu’aux fuggeftions
de la famille dans les cas d’une donation ? & fur quel
fondement accorderoit-on à un infenfé la faculté de vendre,
�TI
tandis qu’on lui interdirent le pouvoir de donner ? L a raifon
»’admet pas un pareil fophifm e , & la loi le proferit. In
negotiis contrahendis alia catija habita ejl. Furioforum, alia
eorum qui fari pojfunt j quamvis actïum rei non intelligerent ;
nam furiojus nullum negotium contraherc potejl. Pupillus
onrnia tutore autore agere potejl. L . 5 . de reg. jur.
L a loi ailimile le furieux au pupille; l’un & l’autre font
hors d ’état de régler leurs affaires, & de contraéter : mais
la volonté du tuteur fupplée celle de fon pupille ; tandis que le
furieux, dépourvu d ’un curateur, eft dans l’impuilTance abfolue de contraéter. L a loi ne diftingue pas les aétes onéreux
des adtes à titre gratuit ; elle incerdit à l’infenfé , au furieux ,
le pouvoir de difpofer par quelque a£le que ce foit. Nullum
negotium contrahere potejl.
L ’autorité des jorifconfultes vient à l’appui d’une décifion
auiïï précile. D ’A rgen rré, fur l’article 2.66 de la Coutume
de Bretagne examine la queftion de lavoir fi un contrat
qui eft l'ouvrage d’un infenfé peut fervir d i fondem ent à la
prefeription. Il ne balance pas à décider qu’un pareil con
trat eft abfolument n u l, & 11e doit produire aucun effet. Il
en donne pour m o tif, que les inlenfés font incapables de
s’obliger en contrariant ; leur confentement ne fauroit les
lie r , puifqu’ils n’ont aucune efpèce de volonté, & qu’ainiï
le premier cara& ère, ou plutôt le principe fondamental de
la convention n’exifte pas. Proptcrea quoi furiojï & taies
confenfum non habent idontum ad obligandum, in quo ejl
fubflantiale fubjeclum contrahendi & fine quo contraclus non
confifiunt ■neque enim vel \elle3 vel nollç pojfunt.
Ricard rend hommage au même principe. « Il y a toutefois
»> cette différence à faire entre l’infenfé 8c le prodigue _, que
” le premier, dès le moment que fon efprit commence à
» être troublé, eft rendu de plein-droit incapable de dif—
» pofer, fans aucune interdiction p r é c ife ,n i prononciation
” du juge ^ parce que fon inhabilité eft rendue notoire &
” publique par les premières attions de dérèglement qu’il
» fa it, Sc 411e d’ailleurs il manque au poijit eiïcntiel *
I
�v
iî
»
»
»
»
n Jétant point 'capable de faire un afte d’une volonté
lib re , ni même de prêter ion ■
confencem cnt, puifqu’il
manque de raifon , qui eft le principe de l’un & de
l’aun e ;
quoique, les parens ne f e [oient pas mis en devoir
de faire créer un curateur à l'imb¿cille 3 ils fo n t reçus à
vérifier le défaut de jugement. »
■
Loin que la jurifprudence aie contrarié ces principes,
plufieurs arrêts ont accueilli la preuve teftimoniale du fait
d e démence contre des a£tes onéreux : parmi ceux que l’on
pourroit invoquer , il fuffic Je citer avec d ’AgueiIeau les
arrêts de P a y e t, du 2.5 février 1 6 8 1 ; d e B o iïii, du 21 juin
i6 75-, de Joyeufe, du 5 mars 1681 : un plus récent encore
rapporté par l'éditeur du répertoire de jurifprudence, du 21
juillet 1 7 7 9 , a déclaré nulle la vente d’une maifon faite
par Bertin avant fon interdi& ion, pour caufe de démence.
Quelle que foit d’ailleurs la .diverfité des arrêts fur ce point
de jurifprurience , la l o i , les auteurs , la raifon s’accordentils moins à proferire , fans diftinftion, tous les a & e s , de
quelque nature qu’ils fo ie n t, s’ils ne font pas l’ouvrage d’une
volonté libre & réfléchie ? le défaut de confentement ne
fuffir-il pas pour en faire prononcer la nullité ? & comme
l’obferve le judicieux R icard , quoique les parens ne fe foient
pas mis en devoir de faire créer 1111 curateur à l’inienfé, la
preuve de la clémence n’eu eft pas moins admife.
L e fort de ces aftes eft donc fubordonné au réfultat de la
reuve teftimoniale. Si les témoins s’accordent à dépofer que
auteur d’une procuration leur a paru dans 1111 état abfolu
de démence à l’époque où il l’a fign ée, s’ils appuient leurs
dépolirions fur des circonftances qui en garantirent la vérité,
alors les doutes difparoillent, & les préfomptions fe convertiilent en certitude} on ne balance plus à regarder com m e
infenlé celui que la notoriété publique accufe de folie j l’évi
dence des preuves fert de guide à la juftice, & fon premier
devoir eft de proferire des a£tes furpris à la trop facile im
prudence d’un homme privé de fa raifon.
E n appliquant ces principes à i’efpèee, il fera facile de
f
�i3
prouver qu Antoine Fayet cil devenu l’inftrument avêugle
rie la raine fie fa fam ille , par cela feul qu’il étoic tom bé
dans la clémence la plus cara&érifée depuis 178 3 j & que
depuis cette époque il n’a plus recouvré l’ufage de fa raifon.
Sa procuration de 17 8 5 n’en fournit-elle pas, finon une
démonftration complète , au moins une violente préfomption? C oncevra-t-on en effet qu’un père de fam ille jouiflant
de la plénitude de fa raifon, & jaloux de fon autorité, fe
défaifill'e, le dépouille de toute adminiftration , même du
pouvoir de vendre fes b:ens, en faveur d’un jeune homme
fans expérience & prêt à rejoindre fon régiment ? A qui perfuadera-r-on que cette abdication de fes droits n’eût d ’autre
m otif que la facilité de traiter avec fes créanciers ? Ses créan
ciers fe feroient-ils montrés plus inexorables envers le père
qu ’envers le fils? Antoine Fayet n’auroit-il pas pu vendre
lui-même line partie de fes biens? qu’avoit-il befoin de char
ger un procureur du foin de fes affaires ? Le notaire Saintherand auroit-il eu le front de le condamner à une véritable
m ort c iv ile , s’il n’eût compté fur l’apathie naturelle de fon
beau-frère, & s’il n’eût voulu éviter l’éclat d ’une inrerdidtion ?
A-t-011 jamais vu un homme raifonnable fe mettre volon
tairement en tutèle, & devenir étranger à toutes les affaires
com m e à l’adminiftration de fes biens ? L a néceflité feule a pu
fuggérer un a&e de cette nature à Saintherand , & la claufe
de non-révocation des pouvoirs qu’il contient, révèle les motifs
de ce nouveau genre d ’interdi&ion. I le il prouvé, i.° qu’an
térieurement à cette procuration , Antoine Fayet avoir cefle
de faire le com m erce, de vaquer à fes affaires, & de donner
même fa fignature pour la plus petite chofe ; 2.0 que fon état
de dém ence étoit fi public , que nul individu n’auroic
voulu abufer de fa fituation , ni lui furprendre un confentement illufoire j 3 .° que depuis cetce procuration il a vécu
dans l’indifférence la plus profonde fur les malheurs de fa
fam ille j qu’il n’a pris aucun intérêt foit à l’éducation de fes
enfans, foit a la confervation de fes biens; qu’en un mot fa
vie n’a plus été qu’un long fommeil troublé tour-à-tour pat
des accès de fureur ou d’cxtravagance.
�. 1/f
L ’objet de cette procuration é to it , d it-o n , de traiter avec
les créanciers à des conditions plus avantageiifes, & d’aiTurer la libération d’Antoine F ayet; & cependant le procureur
conftitué part deux mois après pour fon régim e n t, fans s’oc
cuper ni de l’intérêt de fes créanciers, ni du fort de fon père !
C e n’eft qu’à fon retour & deux ans après , que l’on parvient
à lui arracher un confenrement illufoire à des ventes évidem
ment ruineufes pour fa famille. O n multiplie les précautions
pour en couvrir la nullité \ on en parte une fous les yeux
d ’Antoine F ayet, &c dans la ville d’A llan che; on craint que
Fayet ne forte de fon apachie naturelle , ou qu’il ne s’élève
un cri ge'néral d’improbation contre ces aâes ! Les acquéreurs
exigent non-feulement que les autres ventes ne foient point
palîées à A llan ch e, mais encore que Guillaum e F a y e t, frère
du vendeur, renonce à tous droits & prétentions fur le d o
maine de Pradier. L es acquéreurs n’ ignoroient pas l’état
habituel de démence d’Antoine Fayet \ ils ne pouvoient fe
diflimuler que le fils n’avoit plus, par ce feul f a it, aucun
pouvoir pour vendre les biens d ’un homme notoirement
connu pour infenfé; ils favoient même que par ce m otif le
citoyen Lapeyre de R iom avoit confeillé au citoyen Bonnet
aîné , d’A lla n ch e , de ne point acheter d’un pareil frondé de
pouvoir : de là les précautions infpirées par la crainte, l e loignement d ’Allanche , l’intervention de G uillaum e F a y e t,
le dépôt des contrats au bureau des hypothèques , le nonpaiement des créanciers, la confignation feinte ou réelle du
prix ! Vain efpoir qui ne fauroit les raiTurer! L a démence
d ’Anto'ne Fayet étoit trop publique à A llan ch e, pour faire
illufion à la bonne-foi d ’un acquéreur \ pas un individu n’auroit ofé traiter avec Antoine F ayet, les créanciers eux-mêmeS
avoient fufp.-ndu leurs pourfuites \ tous les habitans d’A lla iu lu le regardoient .comme un objet d ’épouvante & de
pitié ,
qu >iqu il ne fut point encore dans les liens d ’une
'interdiction légale , on défie de rapporter , foit avant foit
après ces ventes, un adte quelconque émané de lui & revêtu
de fon confentement.
�15
Com m ent en effet pourroit-on donner un démenti à
cette maiTe impofante de tém oins, qui attellent unanimement
que la démence d’Antoine Fayet remonte à une époque
antérieure à la procuration de i y S 5 ? Com m ent contefterks
faits q u i la caraâérifent ? Com m ent oppofer des p ré e m p
tions incertaines à des preuves irrécufables ? Parm i ces faits ,
il en eft qui ont pre'cédé la procuration , d’autres qui l’ont
fuivie ; on peut donc les divifer en deux clalfes qui fe rap•ortent aux deux époques marquées par le jugement interocmoire.
L a folie d’ Antoine Fayet s’eft m anifeftée nu comm en
cement de 1 7 8 3 ; les q u in ze, feize & dix-feptième témoins
dépofent que depuis environ douze ans ils ont reconnu
F ayet en dém ence, qu’ils ont été appelés par fon frère &
par fon fils pour l’enfermer dans une petite chambre à côté
du cim etière , & pour l’attacher dans fon lit ; que depuis
cette époque , ils ont vu Fayet courir les rues, crier, parler
& rire fans fujet.
L es mêmes fcènes fe font répétées avec plus de violence
encore en 1785. L a fureur d’Antoine Fayet étoit devenue
un fujet d’effroi pour la ville entière d’AHanche; les fuites
ne lui furent pas moins funeftes : dans le courant de mai
1 7 8 5 , Fayet échappe à la furveillance de fa fam ille ; il court
dans.les rues comme un furieux, entrechez le nommé Com bes,
ferru rier, s’arme d’un gros marteau, & menace de frapper
ceux qu’il trouve fur fon partage. Com bes Sc fes deux fils
ertaient en vain de le défarmer ; leurs efforts font inutiles ;
ils appellent aufecours. D ezieux , onzième tém oin, accourt ;
mais à fon approche , Fayet lui préfente un couteau , Sc
menace de l’éventrer s’il avance. D ezieux oppofe alors l’a drerte à la fo rce, &c l’ayant fai fi par une jam b e, il le renverfe fur l’efcalier ; mais la chute fut fi violente que Fayet
en eut la cuille cartee , & n’a pu marcher depuis qu’avec des
potences ; les témoins craignant encore les effets de fa fu
re u r, l’emportent chez lui 5c l’attachent fur fon lit.
L es circonftances de ce fait font à recueillir ; l’attion de
{
�16
Fayet marque le dernier degré de la fureur, & les craintes
qu ’il inlpiroit à fes concitoyens ; le marteau pouvoir deve
nir dans fes mains une arme meurtrière ; ©n ellaie de le
lui arracher } íes emportemens & fes menaces intimident les
témoins accourus au bruit du ferrurier Com bes ; ils font
réduits à ufer du moyen le plus violent pour le défarm er;
ils n’ofent l’approcher, & c’eft par la chute la plus funefte
que Dezieux parvient à lui arracher le marteau.
L ’époque de ce fait n’eft pas moins digne d’attention : c’eil
quelques mois avant de foufcrire la procuration de 1 7 8 5 ,
en faveur de fon fils , qu’il donne à fes concitoyens le fpectad e de la fureur la plus caradbérifée. Pourra-t-on douter
de l’aliénation de fon efprit, quand toutes les circonftances
concourent à l’attefter ? i° . Les témoins entrent dans le dé
tail le plus circonftancié de ce f a i t , & ne diffèrent point *
dans leurs dépofuions. 20. Il en eft une preuve encore plus
convaincante dans les fuites qu’a produites cette chute :
voudroit-on nier un fait auffi p o fitif, quand il en porte
des marques auifi frappantes ? 3 °. Le certificat du chirur
gien qui l’a foigné , en fixe l’époque au mois de mai 17 8 5 ,
& declare qu’à caufe de fa grande folie il lui a été im poffible de le guérir ( 1 ) ; & c’eft un homme fujet à une dé
mence de cette nature, que l’on fuppofe capable d’adminiftrer
fes b iens, ou d’en confier le foin à fon fils, en l’autorifant
à vendre la totalité , &: en s’interdifant le droit de révoquer
( 1 ) Je foufligné Jean S c lig n ia c , officier de fanté de la commune &
canton d’A lk n c h e , départemenr du Cantal , certifie, à qui de d r o it,
avoir été appelé par la femme du citoyen F a y e t, pour panier Antoine
F ayet fon m ari, aaiTi domicilié d’ A Hanche, d'une luxation à la partie fu périeure du fémur de la cuilTe d ro ite , & qu'il m’a été impoifible de la
lu i remettre à caufe de fa grande fo lie ; malgré que j ’aie fait mon pofiible de m’en approcher pour la Ihí remettre j ’ai été obligé de l’aban
donner a Ton malheureux fo r t , G1 cela dans le courant de tuai 1785*
E n fo i de quoi j ai deiivre le préfent certificat pour valoir ce que de
r a ifo n , & que j ’affirme fincère & véritable. A A llanche , ce premier
v e n to fe , 1an 5 de la République frsnçaife, Signé Soli^niac , ofliciic
Je fanté.
�17
fa procuration. C e n’eft pas le feul trait de ce genre que les
témoins rapportent avec des circonftances auffi précifes que
l ’on ouvre l’enquête compofée de cinquante-cinq témoins ;
que l’on analyfe leurs dépofitions ; que l’on rapproche tes
faits les plus m arquant} on verra Antoine Fayet palier tourà-tour de la plus fombre apathie à des accès de fureur, ôc
de la fureur retomber dans l’apathie ! Courir dans les rues,
crier ou rire fans fu je t, maltraiter les palTans fur les plus lé
gers prétextes , n’entrer dans l’églife que pour y caufer du
fcandale , outrager les objets du culte , fe permettre des ac
tions indécentes , effrayer enfin par fes vociférations ou par
fes menaces ; tels font les traits principaux de fa conduite
depuis 1 7 8 5 , jufqu’à l’époque de fon interdidUon ; le même
défordre règne également dans íes difeours & dans toute
fa conduite.
•Auilî les témoins ne balancent-ils pas fur le jugement
qu ’ils doivent porter de l’état habituel de démence d’Antoine
f a y e t ; ils s’accordent unanimement à le préfenter comm e
un homme entièrement privé de fa raifon, fans aucun in
tervalle lucide, & fans aucun efpoir de rétablifTement. Leur
tém oignage, fondé fur des faits pofitifs, ne fauroit être con
tredit par le filence des témoins de la contre-enquête. C o m
ment oppofer quelques dépofitions vagues ou infignifiantes à
cette mailè de faits qui démontrent la démence d’Antoine
F a y e t, en 1 7 8 5 , 17 8 7 8 c 17 8 8 ? Com m ent placer, dans la
même balance, cette fétie non-interrom pue de faits pofi
tifs , & des préem ptions prétendues de fagefTe évidemment
démenties? Com m ent fe refufer à cet enfemble de preuves,
qui forme le premier caradfère de la vérité ? Soit que l’on
calcule le nombre des témoins , foit que l’on s’arrête aux faits
dépofés , il en réfulte la démonftration la plus complète ,
qu’Antoine Fayet 11e jouiiToit plus de fa raifon en 1 7 8 6 ,
époque de la procuration, & qu’il ne l’avoit pas recouvrée,
ni en 1 7 0 7 , ni en 1 7 8 8 , époque des ventes. L e vœu du
jugement interlocutoire a donc été parfaitement rempli ; la
démence ne peut' plus être douteufe ; & la conféquence qui
en réfulte , n’cft-elle pas la nullité des adles qui furent l’ou
�i8
vrage d’un infenfé ? N ec dubium, dit d’Argentré j contractus
qui cum talibus fiunt j ex toto nullos tjfe.
Par quelle fatalité le tribunal civil du Cantal a-t-il rejeté
cette preuve, 8c fur quels prétextes a-t-il fondé un jugement
auffi contraire aux règles les plus communes de l’ordre judi
ciaire ? Com m ent a -t-il pu , fur-tout , déclarer le curateur
non-recevable dans f a demande? Pouvoit-il ignorer qu’il étoit
lié par un premier jugement interlocutoire , puifqu’il rem plaçoit le tribunal du ci-devant diftrift de M u râ t, qui lavoir
ren du , mais qui n’avoit pu prononcer fur le fond de la conteftation avant la fuppreffion des tribunaux de d iftrid ? Les
juges du Cantal devoient donc ftatuer, com m e l’auroient
fait ceux de M u râ t, fur le mérite des enquêtes refpedtives.
L à fe bornoient leurs pouvoirs : ils n’ont donc pu réformer
le jugement inattàqué du tribunal de M u râ t, fans com
mettre une violation d’ordre , judiciaire qui vicie radicale
m ent leur jugement.
E n vain ont-ils cherché à s’appefantir fur les dangers de
la preuve teftimoniale en cette partie, & fu rlefilen ce de là
fam ille.
C e n’eft jamais qu’avec une extrême répugnance, que des
enfanj fe déterminent à provoquer l’interdi&ion de leur
père ; ils fe flatent que fon état fera p ailàger, & ne veulent
avoir recours au remède néceflaire , mais affligeant, de l’interdidtion , que dans le cas où il ne reftc plus aucun efpoir.
P eut-on conclure de ces ménagemens fi naturels, qu A n
toine Fayet n étoit pas tombé en démence avant fon inter
diction? A vec cette maniéré de raifonner, la preuve de la
démence feroit inadm iilible, & les faits les plus avérés ne
paroîtroient pas fuffifans pour la faire admettre. Q ui peut
douter néanmoins que la preuve teftimoniale ne foit U voie
h plus ordinaire pour arriver à la découverte de la vérité? Il
faut d iftin gu er, avec l ’immortel d’AgueiTeau , les difpofitions d’ un aCte, de la capacité ou de l’incapacité de fon au
teur : les unes fe prouvent par l’afte m ê m e, & c'eft en ce
ftn s que les loix ont interdit la preuve teftimoniale , contre
& outre le contenu aux aûes j l’autre au contraire eft un fait
�19
qui dép en d, comme les autres faits , des dépofitions des
témoins. L a folie , continue d’A guefleau, eft un délit inno
cent , un dérèglement im puni, un défordre purement phyiique; & comme dans les crimes véritables qui bleflent les
loix de la m orale, & troublent l’ordre de la fociété c iv ile , on
ne cherche point d’autre preuve que le témoignage des autres
h om m es, il femble aulÏÏ que dans ce renverfement de l’e fp rit, qui viole les droits de la nature & déshonore la raifon ,
on ne puiiTe defirer de preuve plus naturelle & plus convain
cante, que celle qui réiulte du iuffrage unanime des témoins ,
premiers juges de ces fortes de concertations.
2 0. L a nature d ecesa& e sn e peut être d’une grande confidération, puifque un infenfé n’eft pas moins incapable des a&es
onéreux quedesa& esàtitregratuit; les u n s& les autres exigent
la capacité de celui qui les pafle 3 & cette capacité dérive
d ’une volonté libre & réfléchie. La diftin&ion fophiftique
des premiers ju g e s , entre ces deux fortes d ’a & e s, eft réprou
vée par la loi qui déclare un infenfé dans Pimpuiilance
abfolue de contrafter. Nullum negotium contrahcrt potejl.
3 °. Si le dérangement des affaires d’Antoine F ayet néceflitoit la vente d ’une partie de fes b ien s, il falloit qu ’elle
fût précédée d’une interdi£tion 5c des formalités ufitées en
pareil c a s ; il auroit au moins fa llu , par cette opération,
afTurer la libération du débiteur, & ne pas confommer le
prix de ces ventes en frais inutiles j il auroit fallu vendre
ces fonds à leur véritable valeur , & ne pas donner pour
une modique fom m e de 34 ,o o o livres, des héritages d ’un
prix bien fupérieur ; il auroit fallu fur-tout ne pas confom
mer la ruine d ’une famille entière , en feignant de la libérer.
4 *. La procuration ne peut être confidérée comm e un
a&e de fageiTè : il eft fans exemple qu’un père de fam ille
fe dépouille de l’adminiftration de fes biens j en faveur d’un
jeune homme fans expérience ; qu’il l’autorife à les vendre;
qu’il s’ interdife le droit de révoquer fon procureur conftitué ;
en un m o t, qu’il fe mette volontairement en tutèle, fi fon
état ne commandoit pas cette abdication entière des droits
t a plus- précieux.
�20
5 °. L a qualité du notaire & le filence de la famille ne
forment pas des induâions plus concluantes. L a loi n’ad
m et pas dans un adle un confentement par équipollent ;
l ’incapacité d’Antoine Fayet étant dém ontrée, foit à l’époque
de la procuration , foit à l’époque des ventes ; la préfence
d ’un notaire, beau-frère du ven deu r, ni l’intervention de
quelques parens n’ont pu fuppléer ce défaut de confen
tement.
6°. Les termes de la procuration en décèlent facilement
le m otif. S ’eft-on jamais interdit le droit de révoquer un
procureur conftitué ? des pouvoirs illim ités irrévocables, mettoient le conftituant dans une véritable interdi&ion , fans
avoir l’inconvénient de la provoquer en juftice.
7°. Les pourfuites faites , foit par la femme F a y e t, foie
par les créanciers, prouvent bien qu’Antoine Fayet n’étoit
pas encore interdit en 1 7 8 5 , 17 8 7 & 1 7 8 8 ; mais non
q u ’il jouiiToir de fa raifon aux mêmes époques. O r , la
démence d ’Antoine Fayet étoit l’objet des recherches de la
ju ftic e , & la démonftration de ce fait en a été le réfultat.
8°. Les précautions prifes par les acquéreurs, d ’exiger
le confentement de G uillaum e F a y e t, & de s’éloigner
d ’ AUanche pour la paflTation des contrats, indiquent aiTez
leurs craintes fur la validité de£ aftes: auroient-ils traité avec
le fils d'A ntoine F a yet, Ci le p ère, préfent, & fain d’efp rit,
eût été capable de vendre ? fe fcroient-ils éloignés d’AHanche»
s’ils n’euiTent craint un cti général d’improbation contre ces
actes ?
Les motifs du jugement du 2.5 m eilidor, an 4 , ne
>ê.hent donc pas moins dans le fait que dans le droit. Dans
e d r o it, la preuve teftimoniale de la démence doit être
adm ife , puifqu’il s’agit moins d’attaquer les difpofitions de
l'acte , que la capacité de fon auteur. Dans le fait , un
concours irréfiftible de circonftances & de fuffrages unanimes
des té noins prouvent que la démence d’ Antoine Fayet a
commencé en 1788 , qu’elle avoit fait les plus grands pro
grès en 1 7 8 5 , & q u ’elle étoit parvenue à fon dernier
période en x 787 & 1788.
Î
�1üf1
I
21
Lespremiers juges n’ont pas pu , fans m anquera la juftice
& à la vérité , préfumer qu’Antoine Fayet jouiiToit de fa
raifon aux époques de la procuration & des ventes , &
fur cette prélom ption, démentie par les fa its , déclarer le
curateur à l’interdi& ion, non-recevable dans fa derm nde.
L e s principes, les auteurs , la jurifprudence , la raifon
s’élèvent contre une décifion aulli arbitraire ; & en revenant
au jugement interlocutoire dont le tribunal civ il du Cantal
s’eft écarté fans aucun prétexte , il reftera pour démontré ,
1 °. que la preuve teftimoniale de la démence eft admillible
contre des a&es palfés avant l’interdi£tion ; 2°. que la dé
mence une fois prouvée , la profcription des aétes qui furent
l ’ouvrage d ’un in fe n fé , en eft la conféquence néceiTaire.
A in li la reftitution des objets aliénés peut d’autant moins
fouffrir de difficulté, que le prix des ventes eft intact, ou
dans les mains des acquéreurs, ou dans celles du receveur
des confignations. Par conféquent les intérêts de ces acqué
reurs feront pleinement confervés.
Délibéré à Clerm ont-Ferrand, ce z o v e n tô fe, an
la République françaife.
Signé j
M
a u g u e
5 de
.
L e s s o u s s i g n é s font pleinement de l ’avis ci-deiTus , &c
par les mêmes raifons, ils ne font pas la confultaticn par
ticulière qu’on leur a dem andée, parce qu’après avoir bien
m édité les q ueftion s, ils fe font convaincus de l’inutilité
d’un travail qui n’o ffriro it, fur le fo n d , d’autres raifons de
d écid er, que celles qui font iumineufement développées tant
dans la confultation du citoyen M augue , que dans celle
qui avoit précédé l’interlocutoire.
Paris , le 18 germinal 3 an 5.
Signé
B
i t o u z Îî
db L
ignieres
, C
ournol.
V u u n m é m o i r e pour le citoyen Fayet , curateur à
l’interdiftion d’ Antoine Fayet fo n p è re , enfemble les confultations qui y font jointes ;
L ’ a v i s d e s î o u s s i g n És e ft , que Jean Fayet ayant été reçu
¿/¡I
�t
22
à faire preuve de la démence habituelle de fon p è r e , il
n’étoit pas permis au tribunal civil du département du
C a n ta l, de le déclarer non-recevable en fa demande.
C ’eft une règle certaine, que les juges font liés par les
interlocutoires qu’ils prononcent.
L e feul cas d’exception eft celui dans lequel les fins de
non-recevoir & les droits des parties ont été cxpreflement
réfervés.
T e lle étoit fur ce point la j u r i (prudence du ci-devanc
parlement de Paris.
Quelques autres tribunaux l’avoient adoptée.
Plufieurs la rejetoient.
L a légiilation nouvelle ne la confacre point.
O n pourroit donc élever des doutes fur la régularité de
ce genre de prononciation , s’il n’étoit pas établi que cette
réferve n’a point eu lieu dans le jugement interlocutoire
du 9 fruilidor de l’an 3 .
Les juges ayant reconnu que les faits étoient concluans, il ne reftoit plus qu’à décider fi la preuve en étoit
faite.
En fuivant une autre route , le tribunal du Cantal a
évidemm ent enfreint les règles de l’ordre judiciaire.
Il a , dans fon fyftêm e, multiplié fans nécefiîté les aftes
du procès, & a expofé ainfi les parties à des frais inutiles;
fon jugement doit donc être réformé.
L e moyen d ’appel fera p ris , de ce que le tribunal qui
remplace celui de M u râ t, a été contraire à lui-m êm e, en
n’ayant pis d’égard à une preuve qu’il avoit précédemment
ordonnée.
A u fo n d , comment faut-il confidérer l’a&ion intentée
par Antoine Fayet ?
Quel fera le fort de la procuration d o n n é e , le 5 no
vembre 1 7 8 5 , par Fayet p ère, & celui des ventes confenties en vertu de cette procuration?
L a folution de ces queftions dépend de la jtifte applica
tion des principes de la m atière, aux faits de la caufe.
Les principes ont été parfaitement développés dans la con-
�fo f)
7.3
fultacion du citoyen M augue. Les fouflignés les adoptent;
ils reconnoiiïenc , avec ce jurifconfulte Sc avec tous les
hommes éclairés, que l’interdi&ion de l’infenfé doit avoir
fon effet du jour où la folie s’eft manifeftée.
L a démence , difoit l’avocat général Scguier dans un
plaidoyer rapporté au tome 6 e. de la nouvelle colleétion
de jurifprudence verbo dém ence, § 3 ; « la démence ne
» fe form ant, pour l’ordinaire 3 que par des déclins plus
»* ou moins fenfibles , il eft certain qu’elle a exifté avant
» la fentence d’interdi& ion, & dès-lors il feroic dangereux
» de confirmer tous les aétes qui ont précédé ce juge» ment. »
L ’infenfé eft donc interdit par la nature avant de l’être
>ar le juge : fon incapacité réelle précède fon incapacité
égale. L a loi doit lui prêter fecours depuis le moment où
fa raifon a été obfcurcie ou égarée.
S ’il étoit befoin de citer des autorités à l’appui de cette
dodtrine , on diroit : O uvrez Bourjon , livre premier ,
tom . 6 , chap. 4 >
prem ière, diftinftion 2 , § 70 -,
voy. A ugeard , confulcez ce répertoire, & vous y trouverez
une foule d ’arrêts qui ont établi que la fentence d’interdi& ion d’un infenfé n’étoit que déclarative des erreurs ou
des injures de la nature.
Plusieurs de ces arrêts ont été rendus fur ce réfultat d’une
preuve teftimoniale ; preuve qu’il ne faut pas facilement
admettre quand il s’agit d’une convention, mais qu’il feroit
dangereux de rejeter dans tout ce qui tient à l’état des
perfonnes.
Les préjugés que l’on c ite , ont d’ailleurs banni la diTtinftion que le tribunal a voulu admettre entre les afies
onéreux & ceux à titre gratuit ; ils ont anéanti tout ce
qui avoit été fait par l’infenfé depuis le moment que fon
efprit avoit commencé à être troublé.
Les principes font donc bien connus.
Conviennent-ils aux circonftances du fait?
Sont-ils applicables à l’efpèce ?
D e cette application } de cette concordance entre le droit
Î
,
'
�& le f a it , dépend le fuccès de toutes les conteftations qui
divifent les hommes. E x facto jus oritur.
D écider une affaire par les règles qui lui font propres ,
voilà le grand art du ju g e , le premier de fes devoirs , &
la plus importante de fes fonctions.
Les fouff ignés n’ayant fous les yeu x, ni l’enquête, ni la
contraire - enquête, ne fauroient émettre leur opinion fur
le mérite des preuves.
IL leur eft fur-tout impoff ible de juger s’il eft fuffifamment établi que Fayet père étoit en état de démence avant
la procuration, & à des époques approximatives du temps
où cette procuration fut donnée ; s’il en a entendu la force
& la conféquence , ou fi cet acte eft l’ouvrage de la fuggeftion.
O n ne doit pas fe diffimuler que ces diverfes circonftances
peuvent jeter une grande lumière dans la caufe ; car s’il
eft reconnu q ue Fayet n’avoit plus l’ufage de fa raifon au
m om ent où la procuration & les actes furent confentis, on
ne fauroit tirer aucun avantage de la conduite perfonnelle
de fa famille. L e m ém oire, l’avis du jurifconfulte qui a vu
les pièces, les renfeignemens donnés aux fouffignés , tendent
à établir l’affirmative. Si la preuve ordonnée eft telle qu’on
l ’annonce , la nullité de la procuration & des actes qui
l’ont fuivie , eft une conféquence néceffaire des principes qui
viennent d’être rappelés.
C elui quia perdu en entier l’ufage de fa raifon , n’eft plus
rien dans le monde -, & , félon l’expreff ion d’un ancien ju
rifconfulte , il eft réduit à vivre, pour ainfi dire avec les
hommes dans un tombeau animé.
D élibéré à P aris, le 24 germinal de l’an
S ig n é T
ro n ch et
5.
, P o r t a l is & C a m b a c é r é s .
A P aris, chez B a u d o u in , Imprimeur du C orps légiflatif,
place du Carroufel , n°. 662.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Fayet. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Maugue
Bitouzé de Lignières
Cournol
Tronchet
Portalis
Cambacérès
Subject
The topic of the resource
démence
abus de faiblesse
nullité
procuration
interdiction judiciaire
témoins
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour le citoyen Fayet, curateur à l'interdiction d'Antoine Fayet son père, appelant d'un jugement du tribunal civil du département du Cantal, du 25 messidor, an IV ; Contre Jean Savignat, Jean Reynaud, Antoine Boyer, Jean Brugeroles, intimés.
Annotations manuscrites siégé le 8 Messidor an 5, « jugement confirmé, les motifs sont très développés».
Table Godemel : Démence – voir testament : 1. la procuration d’un homme en démence donnant les pouvoirs les plus étendus et les plus extraordinaires, s’interdisant la faculté de révoquer ces pouvoirs, est-elle valable ? les ventes faites en vertu de ce mandat, trois ans après la date, doivent-elles être exécutées, surtout si elles creusent une lésion énorme ? le curateur à l’interdiction qui en a demandé la nullité, est-il recevable à établir, par témoins, que la démence existait avant la procuration ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
chez Baudouin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1785-Circa An 5
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1107
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1108
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abus de faiblesse
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démence
interdiction judiciaire
nullité
procuration
témoins
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PDF Text
Text
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P
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É
C
I
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P O U R
J
e a n
G
&
i l b e r t
J
a c q u e s
GARACHON,
cu ltiv a te u rs, habitants de la com m une de SaintG e rv a is, appellants ;
;
C O N T R E
v
G E R V A I SE A L L È G R E , veu ve de B enoît M artin ,
tutrice de leurs en fan ts;
fille dudit B enoît
L
J
e a n n e
M ARTIN,
& autres intimés.
e s motifs du jugement du tribunal de Montaigut fuffifent
pour faire voir qu’il ne peut pas fubfifter; ce font prefqu’autant
d'erreurs, ainfi qu’on efpère de l'établir.
Antoinette Laguet époufa en premières noces Jean Bathias
dont elle eut deux enfans ; en fécondes noces Pierre Martin ,
& il provint de leur mariage quatre enfans, G erva is, Jean ,
M ichelle & Françoife.
Par fon contrat de mariage avec Pierre M artin, du 3 août
1702 , Antoinette Laguet inftitua héritiers Jean Bathias, aîné
A
�Ides enfans de Ton premier_mariage, & le premier à naître, cîu
fécond ; la légitime des autres enfants fut fixée à trois cents
livres.
I/inftitution pouvoit être conteftée en ce qui concernoic
l ’enfant du premier l i t , mais Jean Bathias ayant été marié en
11723, avec Marie D u f a il , cette difpofition fut renouvellée
en fa faveur ; ainfî ces deux enfans furent faifis valablement
de la qualité d’héritiers de leur mère.
Antoinette Laguet décéda en 1728.’
Gervais M a rtin , aîné des enfans du fécond l i t , époufa ett
'1730 Anne V iv ie r; ils eurent cinq enfans, favoir, J e a n n e ,
P é tro n ille, G ilb ert, Marie & autre Marie.
Pétronille Martin contra&a mariage, le 21 juin 176 0 , avec.
A nnet Garachon. E lle fut inftituée héritière par fon p è re , qui
fe départit de la propriété de fes biens.
Il eft néceflaire de tranfcrire fidèlement les claufes du con*trat de m ariage, c’eft delà que dépend le jugement qui doit:
intervenir.
En f a v e u r duquel m a ria ge , y eft-il d it, les p ère & mère de la
fu t u r e ont f a i t , crée'e & injîituée ladite Pétronille Martin , leur
f i l l e j leur fe u le & unique héritière de tous les'b ien s , tant meu ~
h les , e ffe ts , quim m eubles dont ils mourront vêtus & fa ifis; fanS:
p ou voir fra u d er ladite injlitution , direâem ent ni in d ireâ em en t ,
par quelque forte d'acle & nature de contrats que c e puifje ê t r e ,
pas même par donation ni tejla m en t , & fans pouvoir , p ar l e d i t 1
Gervais M artin, vendre ni aliéner aucuns f o n d s , b âtim en ts , ni
h é r ita g e s , en quelque fo r te & manière que c e puifje être >fans
le confentem ent de l'héritière injîituée & du fu tu r é p o u x , & au
j>rcju<iicc de l'injlitution d'héritier ; le tout à p ein e de n u llité} &■
�U )
fans laquelle claufe exprej/e} ledit fu t u r époux n a u roit confetiti
au fu t u r m ariage .
'D ans ‘une autre partie du c o n t r â t , on voit qu’Annet
Garachon devoit réfider dans la maifon de fon b e a u -p è re ;
qu'ils feroient aiïbciés en tous meubles, acquêts & conquêts ;
il eit ajouté , que l ’un ne pourroit faire fans l ’a u tre ,
aucune
fo r t e ¿affaire excédant la valeur de cinq fols ; qu’ Annet Gara
chon ne feroit pas tenu des engagements que Gervais Martin
auroit contractés fa n s
f o n conjentem ent & f a participation,
L ’efprit qui di£ta ces conventions n’eft pas difficile à con
cevoir.
M
Gervais Martin avoit déjà aliéné une partie de fes biens*
Son gendre futur en étoit inftruit ; & juftement prévenu contre
Gervais M artin, qui pouvoit diiliper le refte de fa fortune, il
ne confentit au mariage que fous la condition formelle que
Gervais Martin ne pourroit difpofer à l’avenir d’aucun iim
meuble fans fon confentement & celui de fa fille.
A n net Garachon n’accepta aufll la fociété qu’avec les môme*
précautions, & après avoir ilipulé que Gervais Martin ne
pourroit rien faire fans fa participation.
L ’inftitution d’héritier pure & fimple , n’eût pas aiïuré un
'droit infaillible fur les biens de Gervais Martin ; on favoit
qu’elle n’empêchoit pas de vendre ; on voulut prévenir les
abus auxquels le cara£tère de diffipation ou de foibleife de
Gervais Martin pouvoit donner lieu : il fut dit en conféquence
fa n s
le confentem ent de f o n gendre & de f a f i l l e , à p ein e de nullité .
dans le contrat, qu’il ne pourroit vendre aucun immeuble
L a fociété pouvoit aufli offrir des dangers ; on les arrêta
A 2
�(4 )
.
avec le même foin ; les claufes du contrât de mâriage nçf
laiiToient rien à délirer à cet égard.
L e 6 oftobre de la même année., ce contrat de mariage fut
fuivi d’un acte, par lequel Gervais Martin abandonna à Année
Garachon la jouiflfance de fes biens, à la charge de le loger ,
nourrir, entretenir, ainfi que fa femme; de leur délivrer quatre
chars de bois par année, & de leur payer douze liv res, par,
forme de penfion.
.
Il y eft dit en co re,q u e Gervais Martin ne pourroit vendre nî
aliéner aucun de fes biens, tant que cet aûe exifteroit, fa n s
le confentement précis de fort gendre. Enfin on y rappella l’inC
titution d’héritier faite dans le contrat de mariage, qu’on dit
qui feroit exécutée fuivant fa force & vigueur.
Gervais Martin ne pouvoit donc faire aucune aliénation.
I l exiftoit à cet égard une double prohibition dans le contrat
de mariage & l’a£le du 6 o&obre 1760. Ces d e u x a & e s, qui '
fe réunifient, fe fortifient réciproquem ent, fie chacun d’eux
contient une preuve littérale de ce qu’on avance. A la v é r it é ,
le dernier pouvoit être révoqué ; mais jufqu’à ce qu’il fût
anéanti par une déclaration contraire, il dëVdit avoir fon
e ffe t, & ne permettoit pas à Gervais Martin de vendre,*
fuivant la do&rine de tous les auteurs.
Il en refte un troifième, qu’il eft encore indifpenfable de
connoître.
O n a vu qu’Antoinette Laguet avoit înftitué deux enfans
héritiers, à la charge de payer à chacun des autres trois cents
livres pour leur légitime.
En 174.1, Jean Martin, un des enfants du fécond lit , exigea
le paiement des trois cents livres.
�241
-«Vf '
Xs).
L a moitié fut acquittée par Jean Bathias/fuivant un afte
î3u 22 mai de cette même année.
"
.
L e i cr. août fuivan t, il en fut pafTé un autre , en forme
'de tranfaáion, éntre Gervais & ’ Jean M a rtin , par lequel il
fut délaiflfé en paiement à ce dernier un héritage eftimé cent
trente livres; & Jean Martin réduifit à foixante-cinq livres
le furplus de ce qui pouvoit lui être dû. Il n’eft pas inutile
de rapporter lés t*ermes de l’a£le.
• E t parce que la terre ría été efilmée que cent trente livres, ô*
qu elle ne remplit pas la moitié de la légitime en principal f
intérêts ou jouifjances, ledit Jean Martin, eft-il d it, pour faire
plaifir àfon fr è re , faciliter fe s affaires, & à la prière S* requifition dudit'Gervais-M artin t s’ efl bien voulu contenter de la
fomme de foixante-cinq livres pour le rejlant de ladite légitime.
i° . O n ne peut pas douter que Jean Martin approuva 1^
légitime conventionnelle, puifqu’on voit dans l’a& e, qu'il vouloit faire aiïigner pour en obtenir le paiement, & q u il en
reçut en effet le montant.
2°. Q u ’il renonça à toute aftion en fupplément, puifqu’il
confentit
ce il u^ av°it été promis fut modéré. Il
feroit abfurde de fuppofer, qu’ayant voulu faire remife d’une
partie de la légitime conventionnelle, il eût prétendu enfuitc
qu’elle n’étoit pas fuflifante, & réclamer des droits plus confidérables.
Enfin , on
doit obferver que Jean Martin flipula que
la fomme de cent cinquante
livres feroit payée exempte
des dettes de la fucceilion d ’Antoinette L a g u e t , qui rederoient à la charge des héritiers ; cette convention devenoit une
yente de droits fucceififs, contre laquelle la reftitution, pour
^
�.
taufer de léfion, ne pouvoit 'pas a v o ir lie u } & qui éteïgnoîc
toute efpèce d’a&ion de la parc de Jean Martin.
,
L a fomme de foixante-cinq livres , dont Gervais Martirï
£voit demeuré d é b ite u r/ fu t payée , ainfi qu’il, réfulte d’une
quittance du 6 o£tobre 1743.
, ,,
r \
Il eft donc évident que Jean Martin n’avoit plus de droit fur
les biens d’Antoinette Laguet. ,
Cependant le 28 juillet 1 7 7 0 , Tes repréfentans formèrent une
’d emande en partage au ci-devant baillage.de Saint Gervais ;
& le 16 avril 1 7 7 2 , il fut rendu une fentence qui ordonna
le partage, à la charge par eux de rapporter ce qui avoit
été reçu par Jean Martin.
1
L ’a&ion fut dirigée contre Gervais Martin & les enfans de
Jean Bathias.
En exécution de ce jugem ent, Gervais Martin convint de
choifir des experts; & il en fut nommé par défaut pour les
enfants de Jean Bathias.
Ces experts firent un rapport, le 2.6 mars 1773 , qui mit le
comble aux injuftices.
Jean Bathias & Gervais Martin avoient alién<|gg0partie des
biens : ces objets furent portés à un prix excefiif dans l’eftimation ; ceux qui avoient demeuré dans leurs mains, au contraire,
furent évalués beaucoup au-deflus de ce qu’ils devoient l’être.
O n ne comprit pas dans ce rapport la moitié de la légitime
conventionnelle qui avoit été payée par Jean Bathias ; les
jouiflances furent exagérées, & c . O n fixa en conféquence à
quatre mille trois cents une livre huit fols ce qui paroiiToic
du aux repréfentants de Jean Martin ; & on dépouilla les
enfants d’Annet Garachon de
tous les biens
qui avoienc
�¿u s
X'7)
Appartenu à Gervais Martin f ô c qui âvolent paiTé fur leur
t ê t e , pour les attribuer aux héritiers de Jean Martin.
A n n et Garachori étoît privé de la v u e ; il décéda peu de
temps après; Ton afte mortuaire eft de 1 7 7 6. Ses enfants
étoient dans l ’âge le plus tendre. O n ne trouva aucune réfiCtance de leur part. T o u t fembla favorifer les projets des héri
tiers de Jean Martin : ceux d’Annet Garachon fe trouvèrent
fans défenfes, à caufe de leur minorité, ou de l ’état auquel étoit
réduit leur père.
Gervais Martin parut enfin fe prêter aux vues injuftes des
héritiers de Jean Martin , pour confommer, fans retour, la ruine
dés enfants d’Annet Garachon. L e 1 6 juillet 1 7 7 2 , il futpaiTé
un a£te entre lui & les repréfentants de Jean Martin , par
lequel on faifoic approuver à Gervais Martin la fentence du \S
avril précédent , & le rapport des experts, dans lequel on
fuppofoit qu’il avoit été délaiiTé des biens aux héritiers de
Jean M a rtin , en paiement des jouiflances qui leur étoient
d u es, & des frais de l ’inihnce..
O n faifoit auiïi déclarer à Gervais Martin , qu'il confentoît
a ce que le ?apport des experts fût exécuté , fans qu’il fut
befoin d’homologation.
O r ce rapport n’exiftoit pas, puifqu’il n'eit que du 26 mars
177 5 ■
e ft une furprife évidente, ou Gervais Martin *
par une fatalité déplorable ôc un concert f r a u d u l e u x , travailloit contre les intérêts des enfants d’Annet Gar ach on.
Q u e lle qu’ait été la caufe de tant d’injuftices , les héritiers
«de Jean Martin s’emparèrent de tous les biens de G ervais
M a r tin , & des enfans d’Annet Garachon en 1772. Us en ont
joui depuis : Gervais Martin & les enfans d’Annet Garachon.
,ont été réduits à l ’indigence la plus extrême..
�8 )'
C e n’a ’¿té qu’en 1794 que ces enfans ont eu eonnoiflance du
'(
.
préjudice qu’ils avoient éprouvé, & des titres qu’ils pouvoient
faire valoir. Ils ont formé tierce oppoficion à la Sentence du
ci-devant Baillage de Saint-Gervais, & à tout ce qui avait fuivi.
Ils ont invoqué le contrat de mariage de leur m ère , du 21
juillet 176 0 , & l’a&e du 6 o&obre fuivant: ils ont demandé
la nullité de la Sentence, ainfi que du rapport des E x p e rts,
le défiftement des biens & la reftitution des jouiffances.
O n devoit croire que cette réclamation feroit accueillie ; le
droit <ies héritiers d’Annet Garachon n’était pas équivoque :
mais la bonté d'une c a u fe , n’en aiTure pas toujours le fuccès.
Par jugement du tribunal de M o n taig u t, du premier fru&idor,
an 3 , les enfans d’Annet Garachon ont été déclarés non-rece-'
vables. Ils ont déféré cette décifion aux lumières du tribunal,
& ils efpèrent avec confiance qu’elle fera réformée.
L e contrat de mariage de Pétronnille M artin, du 21 janvier
1 7 6 0 , ne permet pas de douter que Gervais Martin ne pou
voit plus difpofer de fes biens après cet a&e ; que toutes fortes
d ’aliénations lui furent interdites. L a ledure-dff contrat de
niariage fufiit pour établir cette vérité. La diipofition faite par
Gervais Martin fut qualifiée d’inftitution; mais elle eut un effet
préfent ; Gervais Martin fe départit de la propriété de fes
biens: il eft dit qu’il ne pourroit vendre aucun bâtiment, ou
immeuble, fans le confentement de fa Jîlle & de fon gendre, à
peine de nullité. Il faut confidérer cette difpofition comme une
donation entre-vif; parce que les effets quelle devoit a v o ir ,
en font connoître la véritable n ature, fuivant toutes les loix
anciennes & nouvelles ; & particulièrement fuivant la réponfe
à la première des queftions contenues dans la loi du p fru&idor
�ZxJ
(9 )'
an s., faite en interprétation de celle ..du 17 nivôfe précédent;.
L a difpoficion du contrat de mariage eft d’autant
plu3
claire, d’àutant plus décifive, qu e, relativement à la fociétc
établie entre Gervais Martin & fon gendre, lé premier ne
pouvoit former aucun engagement fans le confentement de.
liàutre ; qu’il fut ftipulé que le gendre ne feroit pas tenu dés
obligations contra&ées fans fa participation & à fon infir.
iToutes les clauiès, toutes les conventions, toutes les parties
'de ce c o n trat, prouvent, de la manière là plus évidente,-que
Gervais Martin ne pouvait aliéner directement ni indirectement
íes biens qui lui appartenaient, & que la propriété en paila à
Pétroniilè Martin & à . fes defcendâns ; qu’ils eurent un droit
acquis fie irrévocable au moment du contrat de mariage.
L ’a&e du 6 o£tobre de la même année ajoute à cette p r e u v e ,.
f& contient une double prohibition de vendre ôc d’aliéner de
la part de .Gervais Martin. Il fit l ’abandon de l’ufufruit de fes
biens, avec convention exprefie qu’il ne pourrait vendre tant
que cet a&e fubïifterait. A la v é r ité , une démiffion de biens •
n’eft pas irrévocable ; mais jufqu’ à ce
qu’elle foit détruite
par une révocation exprefie , il eft certain que celui qui en eft
l ’auteur ne peut pas difpofer des biens qu’elle comprend ; tous
les Jurifconfultes ont tenu à cet égard le même langage. O n
peut voir le Brun des Succédions, liv. premier, ch. 1 , fe£t. $
n. 23. Ricard des D onations, partie première, n. 1 i j ’o.
O n ne peut pas oppofer qu’il eft dit dans cet a£té, que G er
vais Martin ne pouvait vendre tant que /’actefubfijleroit ; qu’il,
femble que fiT a& e eût été révoqué, les ventes eufient été per-znifes , & qu’on avoit donné atteinte au contrat de mariage.
,1?. L ’a&e du C octobre 1760 , ne dérogeoit pas au contraer
v..
E*
�'(to)
6c mariage ; on y rappela, au contraire , rinftitution d’héritlei
faite en faveur de Pétronille Martin , qu’on dit qui demeure roit en f a fo r ce & vigueur. 2 0. C ’était Pétronille Martin ou
fes defeendans qui devaient être iaifis de i’inilitution d’ héritier .;
£c Pétronille Martin ne fut pas préfente a cet a&e ; ainfi il ne
pouvoit pas lui nuire. .
Enfin on ne peut pas douter que le contrat de mariage de
Pétronille Martin devait être exécuté dans tout ce quil ren
fermait. O n fait la faveur qui était accordée à ces aûes paries
lois anciennes, & que toutes les conventions faites en faveuc
des mariées ôc de leurs defeendans étaient valables, fuivanc
une foule d’article3 de notre Coutum e, ôc notamment les 25 ,
a 6 , 27 & 40 du titre 14.
O r , fi Gervais Martin ne pouvait pas difpofer de fes biens;
fi le contrat de mariage de Pétronille Martin devoit avoir fon
effet, comme perfonne n’oferoit le contefter, il eft fenfible que
l ’a&ion dirigée contre Gervais Martin , ôc les confentemens
qu'on fuppoferoit qu ’il auroic donnés, ne font d'aucune conféquence. L a raifon en eil fimple ; les a&es faits en l’abfence
d’Annet Garachon & fa femme euiTentété nuls : il falloit donc
qu’i s fuflent appelés dans l’inftance :
C àm àpari f i t , Jlare in
ju d icio & contra here. Gervais Martin ne pouvant pas aliéner
fans l’approbation de fon gendre & de fa fille, on ne devoit
pas avoir égard aux confentemens qu’il auroit accordés. Orc
contrarie en jugement comme par devant notaire; fîc fi la
volonté de Gervais Martin était inutile dans un c a s , elle étoic
auili défe&ueufe dans l’autre.
O n peut ajouter que ce moyen eft d’autant plus puifiant-,
qu’il s'agic d'une difpofition en ligne d irc & e, faite parcontrac
�( -I 1 )
'dé mariage; q u e lle étaitcenfée connue & difpenfée de l ’infinuation , fuivant l’odonnance de 1731.
Sous tous, les points
de vue
t
poffibles, il ne peut refter
de difficultés fur la nullité des confentemens que Gervais
Martin pourroit avoir prêtés.
j
Les motifs du jugement du Tribunal de Montaigut font des
erreurs fi frappantes, qu’il fuffic prefque de les expofer pour
Iss avoir réfuté.
Il y eft dit i p. que Jean . Martin avoit droit de fe tenir à
la légitime conventionnelle., ou à celle qui étoit déterminée
par la loi.
2 0. Q ue dans l’a£te du premier août 1 7 4 1 , Jean Martin
convint qu’Antoinette Laguet n’ayant laiflfé que des immeu
bles, il ne pouvoit pas payer différemment la légitime.
3°. Q u ’on ne pouvoit pas induire de cet a£te que Jean
Martin eut approuvé le règlement qui avait été fait par fa m ère,
& qu’il .eut renoncé au fupplément de fes droits. 4.0.
Q u e le fupplément de la légitime eft de même nature ••
que la légitim e, ôc qu’ il eft dû en corps héréditaires.
Q u ’enfin les enfans d’Annet Garachon ne pouvoient pas
revenir contre les confentemens émanés de Gervais Martin ,
parce qu’ ils étoient fes héritiers, & que Gervais Martin n’auroit .pas pu revenir lui-même.
Il
eft vrai que Jean Martin pouvoit exiger , dans l ori- -
gin e, la légitime légale
& refufer celle qui avoit été fixée
à 300 livres; mais Ta&e du premier août »741 > prouve fan 3
réplique qu’il accepta la dernière; puifqu’on y voit qu’il vou
loir faire aifigner Gervais Martin pour en être p a yé, ôc qu’i l Ta reçue en effet.
B 2 !
�l
)’
'a0. Gervais Martin oppofa dnns le préambule de I’a£îé^
•qu’il ne s’étoit trouve que des immeubles dans la fucceiîiort
d’Antoinette L a g u e t, & qu’il n’étoit pas obligé d'acquitter la
légitime en argent : mais il falloit recourir aux diipofitions,
& on auroit appris que Jean Martin ‘fut payé en deniers:
l’héritage qui fut cédé fut pris pour 130 livres, & Gervais
Martin promis de payer 6$ Iiv. pour le furplus de 150 livres t
•en principal ou intérêts dont il étoit chargé.
30. 11 réfulte de l’a£te dont il s’a g it , une approbation évH
•dente de la légitime conventionnelle, & une renonciation au
fupplément ; car il eft dit que Jean M artin, pou r fa ir e p la ifîr
h fo n f r è r e , le fa c ilite r dans fes affaires ., &à fa prière &réquïjî îioti, avoit bien voulu f e contenter de la fom m e de 65 liv. p ou r le
refiant de Ja légitime. Lorfque Jean Martin confentit à faire
des facrifices fur ce qui avait été promis, il eft évident qu’il
tfentendoit pas réclamer un fupplément. Il feroit abfurds
& contradiüoire qu'ayant renoncé à une partie de la légitime
conventionnelle, on fupposât qu’il vouloic exercer des droits
plus
confidérables, & prétendre que la fomme de 300 livres
n‘ ëtoit pas fuffifante. L ’a&e emportait avec lui-même une abdi
cation définitive de tous les droits de Jean Martin dans les biens
d’Antoinette Laguet.
En un m o t, Jean M artin, qui ne voulut pas même exiger
la totalité de la légitime conventionnelle, & qui fit remife
d’une partie , n’entendoit pas fe réierver la faculté de foutenir
un jour que la fomme de 500 liv. ne remplifloit pas fes droit*
dans la fucceffion d'Antoinette Laguet. L a modération qu’il fie
volontairement ne permettait pas de dire, que la légitime ré
g lé e par la mère étoic infuffifante : cette conféquencc, qu»
�X 1? J
p rod u it la convî&ion la plus entière, ne peut pas Être contri*
dite.
La claufe où il fut ftipulé par Jean Martin que les 300 liv,
feroient acquittées fans qu’il fut obligé de contribuer aux dettes
d’Antoinette Laguet, opéroit encore une fin de non-recevoir
invincible. Cette convention doit être regardée comme une
vente de droits fucceiïïfs, qu'on ne pouvait jamais attaquée
pour caufe de léfion.
4.0.
C ’étoit une erreur groiTière de fuppofer que le fupplé.
ment de la légitime eft toujours dû en corps héréditaires. Lorfau’après la mort des père & mère l ’enfant a reçu une partie
de la légitime_qui lui avoit été promife en argent, s’il peuc
exiger un fiipplément, il nJeft payable qu’en deniers ; tous les
auteurs ont été d’accord fur ce principe, & le Tribunal de
Montaigut auroit à combattre fur ce point l’opinion générale
& unanime .* il fuffit de renvoyer à le B ru n , üv. 2 , ch. 3 ,
fe£t. 10 , n. 6 ; DepeiiTes, c.
page 3 2 8 , n. 12 ; Lacombe,
* u mot L é g i t i m e , seûion 10, n. 3
Enfin on a dit que les enfans d’ Annet Garachon ne pouvoient
pas revenir contre les confentemens donnés par Gervais Mar
tin , parce qu’ils font fes héritiers.
O n convient que l’héritier inftitué qui eft mis à la place de
l’héritier
a i intejlat , eft obligé de payer les dettes de l’infli-.
tuant ; & que lorfqu’il s’agit d’une inilitution pure & fimple-y
qui ne .priveras fon auteur de la faculté de vendre & de difp o fe r , l’inftitué eft fournis à tous les engagements formés
par .l’inftituant.
M ais le tribunal de M ontaigut s eft fait illufion fur
1appli
cation de cette règle. L a queftion qui s’ofTroic à décider j
�1 1 »*
< \ lü
l 'i 5
¿toit de fa v o ir, fi Pétronille Martin-, ayant été inftituêe >
héritière avec la clàufe expreiTe que fon père ne pourroic
vendra fans fon confentement & celui de jo n mari, à peine de .
nullité des ventes , les enfants de Pétronille Martin étoient
obligés d’exécuter les a£tes faits par Gervais Martin ou les
confentements émanés de lui f O r , comment pouvoit-onfaire un problème de cette queftion ? elle eft réiolue en la
propofant, & on n’eût pas trouvé deux tribunaux dans toute
l ’étendue de la république, qui n’euffent prononcé la nullité :
de ces aftes.
E n attaquant celui du 1 6 juillet 1 7 7 2, confenti par Gervais'
M a r t in , les enfants d’Annet Garachon demandent feulement1
l'exécution du contrat de mariage de leur mère ; & fi cette
réclamation étoit rejetée, il ne feroit plus vrai de dire, qu’en
1 741 toutes les conventions faites par contrat de mariage
’¿ toient valables; que Gervais Martin avoit contra£lé des enga- .
gements irrévocables; il faudroit convenir quJil pouvoic pu ,
contraire changer de volonté., & les anéantir à fon gré.
E n fin , il ne faut pas perdre de vue ce qu’on a obfervé déjà 't
fur le rapport du 26 mars 1773 , qui ajoute à l’injuflice de la t
fentence qui l ’avoit précédé : que les biens aliénés par Jean
Bathias 6c Gervais Martin y furent portés à un prix exceifif
tandis que ceux qui étoient encore dans leurs mains, & qu’on ’
voulcit attribuer aux defeendants de Je a n- Ma r t i n, furent
eftimés à vil prix : que ce rapport ne comprit pas la fomme
. dq cent cinquante livres qui avoit été reçue de Jean Bathias,
& les intérêt? dont les héritiers de Jean Martin devoient fai;ei ■
raifpn . ,
1
�SL& \
1
i
s
1
L e Jugement du tribunal réparera infailliblement toutes ces
‘înjuftices fes lumières en font un fur garant, & on attend fa
décifion avec confiance. Celle du tribunal de Montaigut eft
en oppofition avec tous les principes ; elle n’eft qu’ une preuve
‘ du tribut funefte attaché à l’humanité. Tous les titres font en
faveur des enfans d’Annet Garachon ; ceux de Jean Martin
n’ont aucun droit aux biens dont ils jouiff ent depuis vingtcinq ans. Il eft temps que cet abus ceff e , que la fentence
qui ordonna le partage & tout ce qui a fu iv i, foit détruit
' que. le règne de l’équité commence.
Au furplus, les repréfentants d’Annet Garachon ne veulent
rien obtenir qui ne foit conforme aux loix : ils favent que Jean
Martin avoit droit à l’accroiffement qui provenoit du mariage
d e M ichelle Martin , & ils ne fe plaignent pas à cet égard.
S ign é B O R Y E , homme de lois.
À
R I O M J de l ’Imprimerie de M a r t i n D É G O U T T E
vis-à-vis la Fontaine des Lignes.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Garachon, Jean. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Borye
Subject
The topic of the resource
héritier universel
contrats de mariage
obligation alimentaire
légitime
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jean, Gilbert et Jacques Garachon, cultivateurs, habitants de la commune de Saint-Gervais, appellants ; Contre Gervaise Allègre, veuve de Benoît Martin, tutrice de leurs enfans ; Jeanne Martin, fille dudit Benoît, et autres intimés.
Annotations manuscrites jugement de Floréal an 5 confirmant le jugement du tribunal de Montaigut qui reconnaît valable l'institution d'héritage universel.
Table Godemel : Institution d'héritier : 5. après une institution d’héritière universelle, par contrat de mariage, en faveur d’une fille, avec abandon des biens, et clause que l’instituant ne pourrait vendre sans le consentement de sa fille et de son gendre, celui-ci, a-t-il pû, pour payer la légitime conventionnelle d’un autre enfant, lui transmettre des immeubles ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1702-Circa An 5
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Gervais d'Auvergne (63354)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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A related resource
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contrats de mariage
héritier universel
légitime
obligation alimentaire
-
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9884c9595dd5a4c61f8ad5eacb2ecde7
PDF Text
Text
M
.
E
M
O
I
R
E Tribunal D'appel
Séant à R iom .
P O U R
.
François
I T I E R , p ro p riétaire, habitant de
1a com m une du B o u c h e t-S t.-N ic o la s,A p p e la n t.
C O N T R E
J
o s e p h
S O L V I G N Ô N , p r o p rié ta ire
h abitan t au P u y ,In tim é.
arrérages, de cens sont-ils.exigibles, lorsqu’il n’y
a aucune obligation libre qui fasse novation au profit
du fermier qui les demande, lorsque ce fermier n’a pour
titre que des condamnations Judiciaires condamnées aux
flammes et brûlées réellement? Telle est la seule question
D
es
que présente cette cause.
F
a
i
t
s
Il paroit que le citoyen Solvignon, en Qualité de ferm ier
A
�cle la cathédrale du P u y , fit assigner, le 23 février 17 9 0 ,
François Itier, Pierre Vigouroux et Jacques Sallegrette,
en qualité de principaux habitans de la commune duBouchet, pour lui payer solidairement, et en pagésie, un
cens de quatre-vingt seize setiers de seigle et vingt-quatre
raz d’avoine, mesure du Puy, en deniers ou quittances,
pour chacune des années 1783 et suivantes , jusqu’en
17 8 8 ; il obtint sentence par défaut, le 20 juillet 179 0,
adjudicative de ses conclusions.
Il paroît encore qu’en vertu de cette sentence, le cit.
Solvignon fit faire des saisies - exécutions chez les trois
condamnés. On rie sait pas quelle procédure fut tenueà .cet égard., dès qu’aucune ne subsiste \ mais sans
doute les meubles ne lurent pas déplacés , parce qu’il
paroît que l’huissier vint faire une sommation de les
représenter : sur cela, les condamnés formèrent opposi
tion à la sentence par défaut, et assignèrent en garantie'
de la pagésie les nommés Antoine Surrel, Jean Blanc,
Jean-Pierre Lac, Jean-Pierre Blanc et_Louis Portalier,
autres principaux habitans du Bouchet, pour se joindre
à eux, et supporter, en cas d’événement, leur part des
condamnations à venir, aux(offres d"en^supporter eux_
memes leur portion.
.
‘ L a cause fut portée à l’audience du tribunal "du ci7
devant district du P u y , et plaidée le 20 avril 1792 :
il intervint jugement qui décida que l’opposition étant
venue après la huitaine, n’étoit pas récevable ; en consé
quence, en prem ier ressort il fut dit que les opposans
étoient déboutés de leùr opposition, et que la sentence de
x 790 seroit exécutée. Ils furent condamnés par corps à repréA
!
I
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�. .
^3 )
senter les objets saisis; et faisant droit sur la demande en
garantie, il fut donné défaut contre les défendeurs et
pour le profit, ils furent condamnés à garantir les opposans, du montant des condamnations, sauf à ceux-ci à
en supporter leur portion, suivant leurs offres.
Peu de temps après ce jugement, les droits féodaux
furent supprimés; les titres furent brûlés, et il paroît que
le citoyen Solvignon a exécuté la loi qui l’ordonnoit ainsi;
de sorte qu’il n’a plus été question de poursuivre la pagésie
des habitans du Boucliet.
, Depuis peu cependant, il a cru les circonstances plus
favorables pour tenter de faire renaître cette pagésie de
ses cendres. II a retire une seconde expédition des deux
jugemens dont on vient de parler, et il les a signifiés ù
Itier, avec itératif commandement de payer le montant
des condamnations.
Itier a interjeté appel des deux jugemens de 1790 et
de 1792.
M
O Y E N S .
'
<
Il est malheureux, sans doute, pour le citoyen Solvignon
de perdre des cens, si tant est que ce soit lui qui les
perde ; mais il seroit plus malheureux encore pour le
citoyen Itier, de payer à lui seul tout le cens dû ou non
dû par tous les habitans de la commune, pendant six ans,
et cela sans avoir aucun recours contre eux. Cet inconvéf
* a' éviter,
^ *19
• de
nient, plus nécessaire
qu1il* nest
nécessaire
ressusciter pour le citoyen Solvignon des droits féodaux
abolis, à engagé le citoyen Itier à se pourvoir; il justifiera
son droit en établissant, 1? . que l’opposition au juge
A 2.
■
�.
.
(4 )
.
ment de l'fgo étoit recevable ; 2°. qu’il ne doit pas de cens.
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
‘
En la form e, en effet, il est difficile de savoir en vertu
de quelle loi le tribunal du Puy n’a pas voulu admettre
une opposition après la huitaine; car la sentence de 17 9 0 ,
étoit en premier ressort. Outre qu’il s’agissoit d’un cens
et d’une valeur considérable, on sait qu’alors tous les
jugemens des sénéchaussées étoient susceptibles d’appel ;
que les seules affaires au-dessous de 2,000 fr. étoient sus
ceptibles d’un règlement de compétence au présidial; mais
qu’il falloit ce règlement de compétence préalable, pour
rendre le jugement en dernier ressort. Alors la sentence
n’étoit plus rendue par la sénéchaussée , mais par le
présidial. Ici la sentence de 1790 a été rendue par la séné
chaussée ; ainsi pas de doute qu’elle étoit en premier ressort.
O r, l’ordonnance de 1667, en exigeant qu’il soit formé
opposition dans la huitaine, ne parle que des arrêts ou
jugemens en dernier ressorte Alors même les tribunaux
étendoient ce délai, lorsque, comme dans l’espèce, les
arrêts même étoient par défaut. Peut-être dira-t-on que
le parlement de Toulouze, d’où ressortissoit le P u y , suivoit sur ce point l’ordonnance à la rigueur. Mais suivre
l’ordonnance n’est pas la dépasser ; et, lorsqu'elle ne porte
la prescription de huitaine que contre les oppositions aux
jugemens en dernier ressort, il ne faut pas étendre cettç
peine aux jugemens en premier ressort, sur-tout rendus
par défaut; car les lois pénales ou de rigueur peuvent se
restreindre, mais jamais s’étendre au delà des cas qu’elles
prescrivent littéralement.
�.
( 5 \
L ’arrêté du 9 messidor an 4, inséré au bulletin des lois,
dit que les appels des jugernens par défaut, rendus en
première instance, sont recevables après les trois mois*
Si donc l’appel est possible, l’opposition l’est encore plus;
si le délai peut être de trois mois pour se pourvoir, à
plus forte raison doit-il être de plus de huit jours.
L e jugement du 20 avril 17 9 2 , a donc mal jugé, en
refusant d’admettre une opposition à une sentence en
premier ressort, après la huitaine. A in si, il y a lieu de
rechercher d’abord si le cens peut aujourd’hui être de
mandé , et en quelle forme pourraient être exécutées des
condamnations solidaires.
D
e u x i è m e
q u e s t i o n
.
*
»
Cette question doit se traiter par un examen rapide des
lois rendues dans la révolution sur les droits féodaux. L e
silence du législateur et des tribunaux sur celte matière,
depuis plus de sept ans, devroit être le seul moyen à em
ployer, pour faire taire des réclamations, quiont toutàla
fois à triompher des lois, du préjugé, de l’habitude et des
flammes; mais le citoyen Solvignon, paraît croire que le
préjugé déjà vaincu, lui permettra de rechercher dans la
rigueur des lois quelque fragment de disposition quiluisoit
favorable ; il tachera d appeler à son secours la jurispru-*
dence du tribunal civil, dans une espèce qu’il dira sem
blable \ mais il n’est pas difficile de lui démontrer que la
législation en cette matiere est très-éloignée d’étayer ses
prétentions, et ne permet pas d’hésiter à les proscrire.
L e premier coup porté à la féodalité, par la loi du
�. ,(6)
4 août 1789, sembloit d'abord n’atteindre que les privi
lèges et les servitudes personnelles. La loi du 7 mai 17 9 0 ,
permit le rachat des droitsjréels; mais le peuple sembloit
vouloir davantage, et l’assemblée constituante promulgua,
le i 5 juin 1 7 9 1 , une instruction qui marquoit ses inten
tions et ses principes.
Ce résultat tardif de son expérience , n’avoit plus le
pouvoir de détruire l’effet produit par son enthousiasme :
l’assemblée législative , en lui succédant, montra, par ses
premiers travaux, qu’elle alloit déclarer une guerre plus
directe, et à la monarchie, et à la féodalité qui en étoit
l’enceinte.
}
Par la loi du 20 août 1792, elle supprima les pagésies
ou la solidarité des redevances, même pour les arrérages ‘
échus : cinq jours après, elle abolit tous les droits féodaux
qui ne seroient pas établis par des titres primitifs, en
ordonnant que les procès non décidés par un jugement
en dernier ressort, demeureroient éteints, tous dépens,
compensés.
’ .
L a convention nationale ensuite .voulut se hatei de
finir la guerre monarchique et feodale. Après la chute
du trône, elle décréta, le 17 juillet 179 3, l’abolition géné
rale de toutes redevances seigneuriales fixes ou casuelles,
même de celles conservées par la loi précédente. Elle
ajouta que tous les procès intentés, soit sur le fonds, soit
sur les arrérages dësdits droits supprimés, étoient éteints
sans répétition des trais de la part d’aucune des parties.
Pour ne pas laisser de vestiges des droits féodaux sup
primés, elle ordonna h tous dépositaires de titres consti
tutifs o u récognitifs desdits droits, de les,déposer dans
trois mois, pour être brûlés, ù peine de cinq années de
a
�( 7 )
fers. Enfin elle déclara comprendre dans les' titres dont
elle ordonnoit le brûlement, les jugemens o u ‘arrêts qui
porteroient reconnoissance des droits féodaux, ou môme
qui les renseigneroient.
• Cependant plusieurs tribunaux saisissant mal le sens de
cette lo i, croyoient devoir l’appliquer aux procès de cette
nature, pendans devant eu x, en prononçant des fins de
non recevoir. Cette application même parut un attentat;
et une loi du 9 brumaire an 2 , déclara que tous jugemèns postérieurs à l’abolition, étoient nuls; que les frais
de l’instruction étoient à la charge des avoués qui les
avoient faits, et défendit aux juges, à peine de forfai
ture, de prononcer sur les instances indécises.
- Jusque-là la rigueur de cette extinction n’exceptoit
personne, et les tribunaux n’avoient garde d’accueillir
des demandes qui traitassent directement ni indirectement
de redevances féodales. Cependant les censitaires qui
avoient payé en pagésie pour leurs codébiteurs, avoient
un droit bien juste de réclamer le recouvrement du
payement forcé de la dette d’autrui: la loi du 9 frimaire
an 2, leur permit de réclamer ce payement; mais ajouta
qu’ils n’auroient ce droit que dans le cas où ils auroient
été obligés de payer par autorité de justice.
Il ne semble donc pas devoir être en question sérieuse
si un fermier non plus que son seigneur, a le droit de
faire vivre aujourd’hui des procès ou jugemens relatifs
à des droits féodaux. N’étant pas compris dans l’exception
de la loi du 9 frimaire, il reste toujours constant, par
la loi du 28 août 1792) que les jugemens que produit le
citoyen Solvignon, n’étant pas en dernier ressort, sont
�.
(
«
)
.
.
.
sans effet, même pour les dépens ; par la loi du 17 juillet
17 9 3 , que ces jugemens étant récognitifs de cens , sont
spécialement dans la classe des actes qui ont dû être brûlés,
comme ils l’ont été en effet; parce que cette loi, bien
loin d’excepter les fermiers qui avoient une action au
nom du seigneur, saisissoit même les titres renseignant
la féodalité entre les mains de tous dépositaires. Enfin ,
il reste toujours prohibé parla loi du 9 brumaire, à peine
de forfaiture, de s’occuper de procès féodaux.
Mais, dira le citoyen Solvignon, cependant le comité
législation, consulté en l’an 2 par le tribunal du district
de R iom , a répondu que l’action d’un fermier pour une
rente provenant de cens, n’étoit point éteinte , parce
qu’il avoit payé le seigneur, et s’étoit fait un titre par
ticulier pour lui-même. Il ajoutera que l’année dernière
le tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé que les héritiers
d’ un fermier pouvoient se faire payer du montant d’une
obligation dérivée de cens, comme ayant de même payé
au seigneur, de ses deniers, et n’ayant de recours contre,
lui que pour les cens .postérieurs à 1789. Enfin, il ajoutera
que ces préjugemens sont.fortifiés parla loi du 9 frimaire,,
rendue en faveur des, copaginaires, parce que, comme
eux il a payé la dette'd’aütrui > et «loit comme eux en.
obtenir le recouvrement.
•
’
Ces trois objections'n’ôtent- rien à l’application deslois,
précitées.
•
'
.! ït seroit peut-être suffisant de: répondre la première,,
que la réponse iVun. comité n’est pas une loi,, et a encore*
nioms la: puissante d’y être contraire-; mois qu’on transe
îonne,,.si on teiveat, la lettre du comité, de législation
on
d e
�'
( 9 )
gn une loi positive, elle ne prouve rien pour le citoyen.
Solvignon ; il ne s’agit que d’en rappeler la cause.
Un ancien fermier de seigneur, créancier d’arrérages
de cens, au lieu de poursuivre son débiteur en justice,
avoit consenti de lui aliéner le capital de sa créance
.en un contrat de rente constituée. Cette rente avoit été
servie pendant longues années ; et le débiteur, profitant
de ce que l’origine de la créance étoit énoncée au contrat
de rente, crut pouvoir s’affranchir du payement, en vertu
de la loi du 17 juillet 1793. Le tribunal du district de
Riom hésita même à prononcer sur le genre de cette
affaire, et s’adressa au comité de législation. Le comité
répondit que le contrat de rente ayant été dénaturé,
n’avoit plus rien de féodal; parce que le fermier, en con
sentant d’échanger son action, en aliénant volontairement
son capital, avoit payé de mcme volontairement la dette
du censitairé, et que le contrat de rente devoit avoir son
exécution.
Aucune comparaison ne peut être faite entre ce fermier
et le citoyén Solvignon ; il a, lu i, poursuivi en justice et
faitexécuter des censitaires pour tout le cens de la commune.
L o i n d’aliéner son capital, loin de consentir à aucun acte
volontaire, il n’a pas même voulu dans le temps, et lorsque
la division de cens etoit aisee A faire, accepter divisement
la portion de chaque copaginaii’e. Son ti.tre n’a point changé
de nature; ilestune condamnation judiciaire d’arrérages de
cens, dans la'même forme qù elles ont été rendues de tout
temps. Une peut user de sa qualité de fermier; car toujours
les condamnations d’arrérages ont été aunom dès fermiers,
et il‘ est impossible d?appliqucr autrement .¡’article III de
‘
'
B
�( 10 )
la loi du 17 juillet 17 9 3 , en ce qu’ il supprime les procès
rendus sur les arrérages des droits supprimés; ni l’ar
ticle V III, en ce qu’il comprend les jugemens ou arrêts
qui porteroientreconnoissance des droits supprimés, ou qui
l es renseigneroient. Il faut donc dire que cette loi a éteint
les arrérages de c^is, au moins non dénaturés par no
vation, ou qu’elle n’en supprime aucun; ce qu’il seroit
bizarre de penser.
L a seconde objection n’a absolument rien de différent de
la première ; car le jugement rendu par le tribunal civil
du Puy-de-Dôm e, étoit dans une espèce à peu près sem
blable à celle décidée par le comité de législation.
Les sieurs Bravard et Vachier, fermiers d’Arlanc,
créanciers de cens échus même en partie sous le bail des
fermiers leurs prédécesseurs, acceptèrent du débiteur une
obligation ; quelques années après ils acquirent des im
meubles, dont le prix fut en partie compensé avec le prix .
de cette obligation. On obtint en la sénéchaussée d’Auver
gne , le désistement de ces immeubles, et le citoyen Bravard
conclut depuis au payement de l’obligation. Le tribunal
civil pensa qu’il y avoit doublement novation de la créance,
l’une des précédens ferm iers, l’autre du ci-devan t sei
gneur , et que le citoyen Bravard , en acceptant volon
tairement la délégation de la dette d’autrui, s’étoit fait
un titre particulier, et n’avoit pas d’action en répétition
contre le ci-devant seigneur.
Ici encore le citoyen Solvignon ne peut s'adjuger cette
jurisprudence-, car il n’y a dans ce qu’il demande au.
cune novation. Il n’avoit pas, lui, été payé en immeubles,
et on ne lui doit pas un remplacement d’éviction 5 il ne
�C ii )
K
s’est pas fait un titre particulier et.non féodal en acceptant
volontairement une obligation ; son titre est autant féodal
que semblables titres le furent jamais; ce sont des arré
rages de cens.qu’il demande, non pas en vertu de titres
à lui, mais en vertu des titres du seigneur. Si le cens étoit
contesté, il falloit que le seigneur fût mis en cause, et
dès-lors ce n’étoit plus au citoyen Solvignon qu’on avoit
affaire ; il a fait plus ; il a usé du privilège de son com
mettant , en voulant contraindre de payer en pagésie ;
il a donc l’enoncé au droit de dire qu’il ne réclamoit
qu’une créance particulière due à lui-même 5 et non féo
dale; ce seroit donc un pas bien rétrograde, que d’oser
dire aujourd’hui que les sentences de pagésie ne sont point
un titre féodal.
L a troisième objection n’est pas plus spécieuse ; car
vouloir assimiler celui qui contraint à la pagésie à celui
qui a été contraint, ce seroit comparer le créancier au
débiteur ; ce qui n’est pas très-aisé à persuader. Mais y
eût7Ü plus d’analogie entre ces contraires, un seul mot
.doit y répondre; c’est que 1 article Ier. de la loi du 9
frimaire an 2, permet au censitaire de réclamer la portion
.du cens qu’il a payé pour son copaginaire ; l’article II
explique qu’ il n’a ce droit que lorsqu’il a payé par auto
rité de justice. Le citoyen Solvignon n’est point dans ce
ras; et sans doute comme ferm ier, comme poursuivant
et vexant les censitaires par des exécutions, et des réqui
sitions de contrainte par- corps, il ne croira pas ces titres
plus recommandables que ceux des,copaginaires vexés,
qui auroient été contraints par ses pareils, à payer seuls
■la dette de toute une enclave.
'
‘
"
B a
�( 12 )
'
Disons donc que ïe citoyen Solvîgnon n’a pas pu
recréer des titres féodaux, pour en demander l’exécution,
ou mépris des nombreuses lois qui les proscrivent. Plus
hardi même dans ses prétentions, pourroit-il bien faire
valoir ses jugemens de 1790 et 1792 , qui condamnent
trois individus solidairement à payer en pagésie le cens
dû par toute la commune, et arrérages pendant six ans.
Supposons, s’il se peut, que la loi du 17 juillet 1793 ,
n’atteigne pas les fermiers ; qu’elle protège en leurs mains
toutes les sentences de censive, pour conserver ce dépôt
intact aux ci-devant seigneurs, et que le brulement or
d o n n é , même des simples renseignemens, n’ait été qu’un
leurre pour tromper la crédulité nationale; au moins,
faudra-t-il executer la loi bien claire du 2.0 août 1792.
L ’article Ier. , comme on l’a déjà dit, abolit la solida
rité des cens et redevances seigneuriales quelconques,
même y ourles arrérages échus ,• en conséquence, est-il
ajouté, chacun des redevables sera libre de servir sa portion
sans être contraint à payer celle de ses co-débileurs.
Si donc il falloit exécuter, au profit'du citoyen Solvignon, les jugemens de 1790 et 17 9 2 , comment en proposeroit-il l’exécution ? quelle partie des cens demanderoit-il à Itier ? comment se feroit la division des arrérages
portés par ces jugemens, entre tous les copaginaires du
Bouchet-St.-Nicolas ? A-t-il les reconnoissances particu
lières de chaque héritage du ténement? a-t-il ses cueilloirs
ou reçus affirmés, dont la loi o r d o n n o i t aussi le brulement
spécial ? mais n’y aura-t-il pas contestation entre les cen
sitaires , pour la quotité de chacun ? alors il faudra re
mettre ces titres à des commissaires à terriers, et procéder
à un également du cens.
�,
...
^ 13 ^
Voilà où conduiroient naturellement les prétentions
du citoyen Solvignon ; et sans doute il n’a pas dû croire
sérieusement que les tribunaux s’aveugleroient au point
d'oublier les lois pour son profit, et de partager ses
erreurs.
‘
1
Il n’a pu avoir qu’un but, et ce but étoit une subtilité;
c’étoit de dire : je signifierai mes sentences avec comman
dement , et alors j’obligerai Itier de se pourvoir. S’il s’a
dresse au tribunal de première instance, je dirai que ce
tribunal, substitué à celui qui a rendu les jugemens, ne
peut se réformer lui-m êm e, et n’a à juger que les vices
du commandement. S’il s’adresse au tribunal d’appel, je
dirai qu’il n’y avoit pas lieu à appel, dès que le cens étoit
reconnu ; mais qu’il falloit former opposition au com
mandement.
‘
1
Ce cercle vicieux se détruit par lui-même. L'une des deux
objections sert de réponse à l’autre; et en effet], c’est
précisément parce que le cens n’avoit pas été contesté,
qu’il n’y avoit pas lieu de provoquer une décision du tri
bunal depremière instance. Ce tribunal ne pouvoit rejuger
une question sur laquelle il avoit épuisé son droit ; et le
but d’une opposition au commandement-, n?auroit été
cependant que de remettre en jugement la question du
cens. Si ensuite pendant cette discussion le délai d’appel
se fût écoulé, le citoyen Solvignon n’eut' pas perdu l’a
vantage de cette prescription : il a donc fallu recourir à
l’autorité supérieure.
L e tribunal d’appel seroit d’ailleurs compétent, par
cela seul que le jugement du 20 avril 1792 a refusé d’ad
mettre après la huitaine l’opposition à une sentence par
�( 14 )
.
.
défaut, par cela seul que l’appel à été interjeté dans les
trois mois de la signification du jugement.
.
N ’y eût-il que cette seule voie d’appel, les autres points
delà cause.jétant connexes, l’intérêt des parties étant d’a-r
bréger leur procès, le tribunal d’appal évoqueroitle prin
cipal., et juger'oit dès-lors toutes les difficultés.
* Cette évocation, loin d’être une usurpation de com
pétence , loin d’être même facultative, seroit indispensable
dans la circonstance5 car il n y a que deux degrés de juri
diction suivre,, et le premier est rempli. L e tribunal du
]?uy a tout jugé. I/opposition au commandement, dans
le sens quelle tendroit a réformer ses jugemens, ne peut
donc êti-e de son attribution.
.
Sans doute le tribunal d’appel est compétent- pour ré
former un jugement dit en premier ressort, attaqué dans
le délai de la l o i , pour décider sur cet appel toutes les
questions déjà agitées en première instance, et même pour
statuer par-évocation sur toutes celles qui seroient connexes
ou accessoires..
r
i:.Màis le citoyen Solvignon)est-il assez en règle pour
demander des arrérages de cens, quand la loi les lui auroit
conservés.?. art-il des titres, a-t-il des procédui’e s, ,a-t-il
dés .jugemens réguliers? 'Il n’a rien moins que tout cela;
il ne--peut‘établir-ce. qu’il demande, que par de secondes
expéditions retiréés du .greffe.,, et enregistrées en l’an 9;
il ne '.peuti pas dire que ce sonfdé premières expéditions ,
des qu
lui-même avoir
le jugement de 1790.
O r, n’est-il pas à, présumer qu’une;, grande partie- des
h a b i t a n S i d u Bouchet ont payé au moins des ¿\-compte sur
leurs arrérages ■de ' cejis? alors ces payemens ont dû être
il
d i t
s i g n i f i é ,
�C 15 )
'
endosses sur l’expédition originale. Il a pu encore y avoir
des vices dans la procédure, une quotité de cens à con
tester ; l’appelant seroit donc privé de présenter tous ces
moyens d’appel. Mais un demandeur doit justifier de sa
demande ; car le plus grand vice d’une action, est qu’elle
ne soit pas établie ; il ne peut pas ôter au défendeur le
droit de présenter des moyens en la forme et au fonds.
Ainsi le citoyen Solvigon n’a pas d'action, s’il ne représente
sa procédure; il n’en a pas, s’il ne représente les titres qui
servent de fondement à sa demande; car l’ordonnance de
16 6 7, le commande impérieusement, et la sentence de
1790 ni celle de 17 9 2 , n’énoncent pas même ces titres
qui cependant devoient y être visés.
En vain argumentera-t-il de ce que le cens a été reconnu;
mais la quotité ne l’a pas été ; et s’il veut s’en prévaloir,
s’il veut accepter l’offre subsidiaire qui fut faite par Itier,
de payer sa portion du cens, alors il ne peut diviser cette
déclaration. Il faut donc qu’il établisse quelle est la portion
due par Itier, et qu’il l’établisse non pas par conjectures ;
car il n’est pas en son pouvoir de faire une fixation
arbitraire.
^
Mais ce procédé seroit inexécutable, de même que de
faire droit sur le recours adjugé par le jugement de 179 2:
il seroit donc chimérique de proposer des conditions au cit.
Solvignon; car il ne pourroit en tenir aucune; il seroit
même illégal de consentir judiciairement une transaction
de cette espèce.
’
L e citoyen Solvignon a voulu essayer sur un censitaire,
«’il pourroit obtenir les arrérages de cens que la loi a
éteints. Une multitude de fermiers, ou les ci-devant
�(
)
16
seigneurs sous ce nom
- , attendent le résultat de cette ten
tative : auroit-elle un succès quelconque, alors, encore
quelques décades, et les rénovations d e s terriers.de ce
ressort se compléteroient insensiblement.
Cette mesure auroit-elle un effet louable en ce qu’elle
répareroit des injustices ? Il ne nous appartient pas de
le préjuger, L es tribunaux et les légistes ouvrent le code,
l’appliquent, et ne le corrigent pas.
. Concluons donc avec la loi, qui n’est pas obscure, que
le citoyen Solvignon ne peut demander des arrérages
de cen s, sur tout en pagésie , parce que les arrérages
de cens sont supprimés ; parce que ses titres sont brûlés,
et parce que les arrérages qu’il demande ne sont dénaturés
par aucune novation.
D E L A P C H I E R , homme de L o i .
'
D E M A Y , Avoué.
A RlOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Itier, François. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Demay
Subject
The topic of the resource
cens
arrérage
fermier de la cathédrale
ferme
Description
An account of the resource
Mémoire pour François Itier, propriétaire, habitant de la commune du Bouchet-St.-Nicolas, Appelant. Contre Joseph Solvignon, propriétaire, habitant au Puy, Intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1790-Circa An 5
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0126
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0320
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Le Puy-en-Velay (43157)
Le Bouchet-Saint-Nicolas (43037)
Rights
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arrérage
cens
ferme
fermier de la cathédrale
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MEMOIRE
Séant à Riom.
P O U R
F r a n ç o i s
p ro p riéta ire, h abitant de
I T I E R ,
la com m u n e du B o u c h e t-S t.-N ic o la s , A p p e la n t.
C O N T R E
J o s e p h
SO L V I G N O N , propriétaire,
habitant au P u y , Intimé.
seD arrérages de cens sont-ils exigibles, lorsqu’il n y
a aucune obligation libre qui fasse novation au profit
du ferm ier qui les dem ande, lorsque ce ferm ier n’a pour
titre que des condamnations judiciaires condamnées aux
flammes et brûlées réellem ent?.Telle est la seule question
que présente, cette cause.
t
f
a
i
t
s
TR IB U N A L
.
I l paroît que le citoyen Solvignon en qualité de fermier
A
�( o
de la cathédrale du P u y , fit assigner, le 23 février 179 0 ,
François Itie r, Pierre V igou rou x et Jacques Sallegrette,
en qualité de principaux liabitans de la commune d u B o u ch e t, pour lui payer solidairem ent, et en pagésie, un
cens de quatre-vingt seize setiers de seigle et vin gt-qu atre
raz d’a vo in e, mesure du P u y , en deniers ou quittances,
pour chacune des années 1783 et suivantes , jusqu’en
178 8 ; il obtint sentence par défaut, le 20 juillet 1790,
adjudicative de ses conclusions.
Il pavoît encore qu’en vertu de cette sentence, le cit.
Solvignon fit faire des saisies - exécutions cliez les trois
condamnés. O n ne sait pas quelle procédure fut tenue
à cet égard , dès qu’aucune ne subsiste ; mais sans
doute les meubles ne furent pas déplacés , parce q u’il
paroît que l’huissier vint faire une sommation de les
représenter : sur c e la , les condamnés form èrent opposi
tion à la sentence par d éfaut, et assignèrent en garantie
de la pagésie les nommés Antoine S u rre l, Jean B lan c,
Jean-Pierre L a c , Jean-Pierre Blanc et Louis P o rtalier,
autres principaux liabitans du B o u ch et, pour se joindre
à e u x , et supporter, en cas d’evénem ent, leur part des
condamnations à v en ir, aux offres d e n supporter euxtnémes leur portion.
L a cause fut portée à l’audience du tribunal du cidevant district du P u y , et plaidée le 20 avril 1792 :
il intervint jugement qui décida que l’opposition étant
venue après la huitaine, n’étoit pas rccevable; en consé
quence , en ’p rem ier ressort il fut dit que les opposans
étoient déboutés de leur opposition, et que la sentence de
1790 seroit exécutée. Ils furent condamnés par corps à repi;é-
�Ç3 )
senter les objets saisis; et faisant droit sur la demande en
garantie, il fut donné défaut contre les défendeurs, et
pour le p ro fit, ils furent condamnés à garantir les opposans, du montant des condamnations, sauf à c e u x -c i à
en supporter.leur portion, suivant leurs offres.
Peu de temps après ce jugem ent, les droits féodaux
furent supprimés; les titres furent briilés, et il paroît que
le citoyen Solvignon a exécuté la loi qui l’ordonnoit ainsi;
de sorte qu’il n’a plus été question de poursuivre la pagésie
des habitans du JBouchet.
D epuis peu cependant, il a cru les circonstances plus
favorables pour tenter de faire renaître cette pagésie de
ses cendres. Il a retiré une seconde expédition des deux
jugemens dont on vient de p arler, et il les a signifiés ù
Itier, avec itératif commandement de payer le montant
des condamnations.
Itier a interjeté appel des deux jugemens de 1790 et
de 1792.
M O
Y E N S.
Il est m alheureux, sans doute, pour le citoyen Solvignon
de perdre des cens , si tant est que ce soit lui qui les
perde ; mais il scroit plus m alheureux encore pour le
citoyen Itier, de payer à lui seul tout le cens du ou non
dû par tous les habitans de la commune /pendant six ans,
et cela sans avoir aucun recours contre eux. Cet inconvé
nient , plus nécessaire à éviter , qu’il n’est nécessaire de
r e s s u s c i t e r pour le citoyen Solvignon des droits léodaux
a b o l i s , a en gagé le citoyen Itier à se p o u rvo ir; il justifiera
son droit eu établissant, i ° . que l’opposition au juge
�t4 )
ment de 1790 ¿toit recevable ; 2°. qu’il ne doit pas de cens.
P B. E 31 I Ê R E
Q U E S T I O N .
E n la fo rm e, en effet, il est difficile de savoir en vertu
de quelle loi le tribunal du P u y n’a pas voulu admettre
une opposition après la huitaine; car la sentence de 1790,
¿toit en premier ressort. Outre qu’il s’agissoit d’un cens
et d’une valeur considérable, on sait qu’alors tous les
jugemens des sénéchaussées étoient susceptibles d’appel;
que les seules affaires au-dessous de 2,000 fr. étoient sus
ceptibles d’uu règlem ent de compétence au présidial; mais
qu’il falloit ce règlement de compétence p réa lab le , pour
rendre le jugement en dernier ressort. A lo rs la sentence
n ’étoit plus rendue par la sénéchaussée , mais par le
présidial. Ici la sentence de 1790 a été rendue par la séné-«
chaussée ; ainsi pas de doute qu’elle étoit en prem ier ressort.
- O r , l'ordonnance de 1667, en exigeant qu’il soit form é
opposition dans la h uitaine, ne parle que des arrêts ou
jugemens en dernier rassort. A lors m êm e les tribunaux
étendoient ce d élai, lorsque, comme dans l’espèce, les
arrêts m êm e étoient .par défaut. Peut-être dira-t-on que
le parlement de T o u lo u zc, d’où ressortissoit le P u y , suivoit sur ce point l’ordonnance ¿\ la rigueur. Mais suivre
l ’ordonnance n’est pas la dépasser ; et, lorsqu’elle ne porte
la prescription de huitaine que contre les oppositions aux
jugemens en dernier ressort, il ne faut pas étendre cette
peine aux jugemens en prem ier ressort, sur-tout rendus
par défaut; car les lois pénales ou de rigueur peuvent se
restreindre, mais jamais s’étendre au delà des cas qu’elles
prescrivent littéralement.
�(5)
L ’arrêté du 9 messidor an 4 , inséré au bulletin des lois,
dit que les appels des jugemens par défaut, rendus en
première instance , sont recevables après les trois mois*
Si donc l’appel est possible, l’opposition l’est encore plus;
si le délai peut être de trois mois pour se p o u rv o ir, à
plus forte raison doit-il être de plus de huit jours.
L e ju gem en t du 20 avril 17925 a donc mal j u g é , en
refusant d’admettre une opposition à une sentence en
prem ier ressort, après la h u ita in e/A in si, il y a lieu de
rechercher d’abord si le cens peut aujourd’hui être de
m andé, et en quelle form e pourroient être exécutées des
condamnations solidaires.
D
e u x i è m e
q u e s t i o n
.
Cette question doit se traiter par un exam en rapide des
lois rendues dans la révolution sur les droits féodaux. L e
silence du législateur et des tribunaux sur celte m atière,
depuis plus de sept an s, devroit être le seul moyen <\ em-?
p lo yer, pour faire taire des réclamations, qui ont to u tà la
fois à triom pher des lois, du p ré ju g é , de l’habitude et des
flammes ; mais le citoyen S o lvign on , paroît croire que le
préjugé déjà vaincu, lui permettra de rechercher dans la
rigueur des lois quelque fragm ent de disposition quiluisoit
favorable ; il tachera d’appeler ¿1 son secours la jurispru
dence du tribunal c iv il, dans une espèce qu ’il dira sem
blable } mais il n’est pas difficile de lui démontrer que la
législation en cette matière est très-éloignée d’élayer ses
prétentions, et ne permet pas d’hésiter ¿1 les proscrire.
Le premier coup porté à la féodalité, par la loi du
�,C6)
4 août 178 9 , sembïoit d'abord n’atteindre que les privi
lèges et les servitudes personnelles. La loi du 7 mai 179 0 ,
perm it le rachat des droits réels; mais le peuple sembloit
vouloir davantage, et l’assemblée constituante prom ulgua,
le i 5 juin 1 7 9 1 , une instruction qui marquoit ses inten
tions et ses principes.
Ce l'ésultat tardif de son exp érien ce, n’avoit plus le
pouvoir de détruire l’eiFet produit par son enthousiasme:
l’assemblée législative , en lui succédant, m on tra, par ses
premiers travau x, qu’elle alloit déclarer une guerre plus
directe, et à la m onarchie, et à la féodalité qui en étoit
l’enceinte.
Par la loi du 20 août 1792, elle supprima les pagésies
ou la solidarité des redevances, même pour les arrérages
échus : cinq jours après, elle abolit tous les droits féodaux
qui ne seroient pas établis par des titres prim itifs, en
ordonnant que les procès non décidés par un jugement
en dernier ressort, demeureroient éteints, tous dépens
compensés.
1 L a convention nationale ensuite voulut se hâter de
finir la guerre monarchique et féodale. A p r è s ja chute
dti trône, elle décréta, le 17 juillet I 7 9 3 >labolition géné
rale de toutes redevances seigneuriales fixes ou casueJles,
m ême de celles conservées par la loi précédente. Elle
ajouta que tous les procès intentés, soit sur le fon d s, soit
sur les arrérages desdits droits supprimés, étoient éteints
sans répétition des frais de la part d’aucune des parties.
P ou r ne pas laisser de vestiges des droits féodaux sup
prim és, elle ordonna ù tous dépositaires de tities constit-uiiis ou! réeç^iülîis.. desdils droits, de les déposer dans
trois m ois, pour être brûlés, à. peine de cinq années de
�( 7 )‘
fers. Enfin elle déclara com prendre dans les titres dont
elle ordonnoit le b rû lem en t, les jugemens ou arrêts qui
porteroient reconnoissance des droits féodaux, ou m ême
qui les renseigneroient.
Cependant plusieurs tribunaux saisissant mal le sens de
cette l o i , croyoicnt devoir l’appliquer aux procès de cette
nature, pendans devant e u x , en prononçant des fins de
non recevoir. Celte application même parut un attentat;
et une loi du 9 brum aire an 2 , déclara que tous juge
mens postérieurs à l’abolition, étoient nuls; que les frais
de l’instruction étoient à la charge des avoués qui les
avoient faits, et défendit aux ju g es, à peine de forfai
tu re, de prononcer sur les instances indécises.
• Jusque-là la rigueur de cette extinction n’exceptoit
personne, et les tribunaux n’avoient garde d’accueillir
des demandes qui traitassent directement ni indirectement
de redevances féodales. Cependant les censitaires qui
avoient payé en pagésie pour leurs codébiteurs, avoient
un droit bien juste de réclamer le recouvrement du
payement forcé de la dette d’autrui: la loi du 9 frim aire
an 2, leur perm it de réclamer ce payem ent; mais ajouta
qu’ils n’auroient ce droit que dans le cas où ils auroient
été obligés de payer par autorité de justice.
Il 11e semble donc pas devoir être en question sérieuse
si un fermier non plus que son seigneur, a le droit de
faire vivre aujourd’hui des procès ou jugemens relatifs
à des droits féodaux. N ’étant pas compris dans l’exception
de la loi du 9 frim aire, il reste toujours constant, par
la loi du 28 août 179 2, que les jugemens que produit le
citoyen. Solvignon , n’étant pas en dernier ressort, sont
�(S)sans effet, même pour les dépens; par la loi du 17 juillet
1 7 9 3 , que ces jugemens étant récognitifs de cens, sont
spécialement dans la classe des actes qui ont dû être brûlés,
comme ils l’ont été en effet; parce que cette lo i, bien
loin d’excepter les fermiers qui avoient une action au
nom du seigneur, saisissoit même les titres renseignant
la féodalité entre les mains de tous dépositaires. Enfin ,
il reste toujours prohibé par la loi du 9 brum aire, à peine
de forfaiture, de s’occuper de procès féodaux.
M ais, dira le citoyen S o lvig n o n , cependant le com ité
de législation, consulté en l’an 2. par le tribunal du district
de R io in , a repondu que l’action d’un fermier po ur une
rente provenant de: cen s, n’étoit point étein te, parce
qu’il avoifc payé le seigneur, et setoit fait un titre par
ticulier pour lui-même. Il ajoutera que l’année dernière
le tribunal civil du Puy-de-D ôm e a jugé que les héritiers
d’ un fermier pouvoient se faire payer du montant d’une
obligation dérivée de cens, com m e ayant de m ême payé
nu seigneur, de ses deniers, et n’ayant de recours'contre
lui que pour les cens postérieurs à 1789. Enfin, il ajoutera
que ces préjugemens sont fortiiiés>par la loi du 9 frim aire,
rendue en faveur dés-copaginaires, parce q u e , comme
eux il a payé la dette d’au tru i, et doit comme eux en
obtenir le recouvrement.
Ces trois objections n’ôtent rien, à l’application des loi»
précitées.
Il seroit peut-être suffisant de répondre à la prem ière,
que la réponse d?um com ité n’est pas une loi, et a encore
moins la puissance d’y être contraire; mais qu’on trans
form e, si ou le v e u t,.la lettre du comité de législation
mi
�(9 )
en une loi positive, elle ne prouve rien pour le citoyen
Solvignon ; il ne s’agit que d’en rappeler la cause.
U n ancien ferm ier de seigneur, créancier d’arrérages
de cens, au lieu de poursuivre son débiteur en justice,
avoit consenti de lui aliéner le capital de sa créance
•en un contrat de rente constituée. Cette rente avoit été
servie pendant longues années; et le débiteur, profitant
<3g ce que l’origine de la créance étoit énoncée au contrat
•de ren te, crut pouvoir s’affranchir du payement, en vertu
de la loi du 17 juillet 1793. L e tribunal du district de
R io m hésita m ême à prononcer sur le genre de cette
affaire, et s’adressa au com ité de législation. L e comité
répondit que le con trat.d e rente ayant été dénaturé,
n’avoit plus rien de féodal; parce que le ferm ier, en con
sentant d’échanger son action, en aliénant volontairem ent
son capital, avoit payé de m êm e volontairem ent la dette
du censitaire, et que le contrat de rente devoit avoir son
exécution.
Aucune comparaison ne peut être faite entre ce ferm ier
et le citoyen Solvignon ; il a , lu i, poursuivi en justice et
fait exécuter des censitaires pour tout le cens de la commune.
L oin d’aliéner son capital, loin de consentir 5 aucun acte
volontaire, il n’a pas m êm e voulu dans le temps, et lorsque
la division de cens etoit aisée fa ire, accepter divisément
la portion de chaque copaginaire. Son titre n’a point changé
de nature; il est une condamnation judiciaire d’arréragesde
cens, dans la même forme qu’elles ont été rendues de tout
temps. Il ne peut user de sa qualité de ferm ier; car toujours
les condamnations d’arrérages ont été aunom des ferm iers,
et il est impossible d’appliquer autrement l’article III de
B
�( 10')
la loi du 17 juillet 17 9 3 , en ce qu’il supprime les procfo
rendus sur les arrérages des droits supprimés; ni l’ar
ticle V I I I , en ce qu’il comprend les jugemens ou arrêts
quiporteroientreconnoissancedesdroitssupprim és, ou qui
les renseigneroient. Il faut donc dire que cette loi a éteint
les arrérages de cens, au moins non dénaturés par no
vation , ou qu’elle n’en supprime aucun; ce qu’il seroit
bizarre de penser.
L a seconde objection n’a absolument rien de différent de
la première ; car le jugem ent rendu par le tribunal civil
du P u y-d e-D ô m e, étoit dans une espèce à peu près sem
blable à celle décidée par le comité de législation.
Les sieurs B ravard et V a c h ie r, fermiers d’A r ia n e ,
créanciers de cens échus m ême en partie sous le bail des
fermiers leurs prédécesseurs, acceptèrent du débiteur une
obligation ; quelques années après ils acquirent des im
m eubles, dont le p rix fut en partie compensé avec le prix
de cette obligation. On obtint en la sénéchaussée d’A u v e r
g n e, le désistement de ces immeubles, et le citoyen Bravard
conclut depuis au payement de l’obligation. L e tribunal
civil pensa qu’il y avoit doublement novation de la créance,
l’une des précédens ferm iers, l’autre du ci - devant sei
gneur , et que le citoyen B ra v a rd , en acceptant volon
tairement la délégation de la dette d’autrui, s’étoit fait
un titre particulier, et n’avoit pas d’action en répétition
contre le ci-devant seigneur.
Ici encore le citoyen Solvignon ne peut s'adjuger cetto
jurisprudence; car il n y a dans ce qu’il demande au:
cune novation. Il n’avoit pas, lu i, été payé en im m eubles,
et on ne lui doit pas ua remplacement d’éviction j il ne
�( 11 J
s’est pas Tait un titre particulier et non.féodal en acceptant
volontairement une obligation ; son titre est autant féodal
que semblables titres le furent jamais ; ce sont des arrérages de cens qu’il demande, non pas en vertu de titres
à lu i,*mais en vertu des titres du seigneur. Si le cens étoit
contesté, il falloit que le- seigneiii* fût mis en cause, et
dès-lors ce n’étoit plus au citoyen’ Solvignon qu’ôn avoit
affaire 5 il a fait plus; il a usé du privilège de son com
mettant , en voulant contraindre de payer en pagésie ;
il a donc renoncé au droit de dire qu’il ne réclamoit
qu’une créance particulière due à lui-m êm e, et non féo
dale; ce seroit donc un pas bien rétrograde, que d'oser
dire aujourd’ hui que les sentences de pagésie ne sont point
un titre féodal.
- L a troisième objection n’est pas plus spécieuse; car
vouloir assimiler celui qui contraint ù la pagésie à celui
qui a été contraint, ce seroit comparer le créancier au
débiteur ; ce qui n’est pas très-aisé à persuader. Mais y
eût-il plus d’analogie entre ces contraires, un seul mot
doit y répondre ; c’est que l’article Ier. de la loi du 9
frimaire an 2, permet au censitaire de réclamer la portion
du cens qu’il a payé pour son copaginaire ; l’article II
explique qu’il n’a ce droit que lorsqu’il a payé par auto
rité do justice. L e citoyen Solvignon n’est point dans ce
cas; et sans doute comme ferm ier,.comme poursuivant
et vexant les censitaires par des exécutions et des réqui
sitions de contrainte par corps, il ne croira pas ces titres
plus recommandables que ceux des copaginaires ve x é s,
qui auroient été contraints par ses pareils, à payer seuls
la dette de toute une enclave.
B v
�Disons donc que le citoyen Solvignon n'a pas pu
recrcer des titres féodaux, pour en demander l’exécution,
au m épris des nombreuses lois qui les proscrivent. Plus
hardi m ême dans ses prétentions, pourroit-il bien faire
valoir ses jugemens de 1790 et 1792 , qui condamnent
trois individus solidairem ent à payer en pagésie le cens
dû par toute la com m une, et arrérages pendant six ans.
Supposons, s’il se peut, que la loi du 17 juillet 1 7 9 3 ,
n’atteigne pas les fermiers ; qu’elle protège en leurs mains
toutes les sentences de censive, pour conserver ce dépôt
intact aux ci-devant seigneurs, et que le brûlem ent or
donné, m ême des simples renseignemens, n’ait été qu’un
leurre pour trom per la crédulité nationale; au m oins,
faudra-t-il exécuter la loi bien claire du 20 août 1792.
L ’article Ier. , comme on l’a déjà d it, abolit la solida
rité des cens et redevances seigneuriales quelconques,
m ême pour les arrérages échus; en conséquence, est-il
ajouté, chacun des redevables sera libre de servir sa portion
sans être contraint à payer celle de ses co-débiteurs.
Si donc il falloit ex écu ter, au profit du citoyen Solvi
gn on , les jugemens de 1790 et 17 9 2 , comment en proposeroit-il l’exécution ? quelle partie des cens demandcroit-il à Itier ? com m ent se feroit la division des arrérages
portés par ces jugem ens, entre tous les copaginaires du
Bouchet-St.-N icolas? A -t-il les reconnoissances particu
lières de chaque héritage du ténement? a-t-il ses cueilloirs
ou reçus affirmés, dont la loi ordonnoit aussi le brûlement
spécial ? mais n’y aùra-t-ilpas contestation entre les cen
sitaires, pour la quotité de chacun ? alors il faudra re
mettre ces titres h des commissaires à terriers, et procéder
à un également du cens,
I
�( 13 )
V o ilà où conduiroient naturellement les prétentions
du citoyen S olvignon ; et sans doute il n a pas dû croire
sérieusement que les tribunaux s’aveugleroient au point
d’oublier les lois pour son p ro fit, et de partager ses
erreurs.
Il
n’a pu avoir qu’un b u t, et ce but étoit une subtilité;
c’étoit de dire : je signifierai mes sentences avec comman
dem ent, et alors j’obligerai Itier de se pourvoir. S’il s’a
dresse au tribunal de prem ière instance, je dirai que ce
trib un al, substitué à celui qui a rendu les jugem ens, ne
peut se réform er lu i-m êm e, et n'a à juger que les vices
du commandement. S’il s’adresse au tribunal d’a p p el, je
dirai qu’il n’y avoit pas lieu à appel, dès que le cens étoit
reconnu ; mais qu’il falloit form er opposition au com
mandement.
Ce cercle vicieux se détruit par lui-même. L ’ une des deux
objections sert de réponse à l’autre; et en effet], c’est
précisément parce que le cens n’avoit pas été contesté,
qu’il n’y avoit pas lieu de provoquer une décision du tri
bunal deprem ière instance. Ce tribunal ne pouvoit rejuger
une question sur laquelle il avoit épuisé son droifc ; et le
but d’ une opposition au com m andem ent, n’auroit été
cependant que de remettre en jugement la question du
cens. Si ensuite pendant cette discussion le délai d’appel
se fût écoulé, le citoyen Solvignon n’eut pas perdu l’a
vantage de cette prescription : il a donc fallu recourir à
l’autorité supérieure.
L e tribunal d’appel seroit d’ailleurs com pétent, par
cela seul que le jugement du 20 avril 1792 a refusé d’ad
mettre après la huitaine l’opposition à une sentence par
�.
( 14 )
défaut, par cela seul'que l’appel a été interjeté dans les
trois mois de lai signification du jugement.
N y eût-il que cette seule voie d’appel, les autres points
d e là cause étant connexes^ l’intérêt d,ës parties étant d’a
bréger leur procès, le tribunal d’appsl évoqueroit le p riii-1
cipàl , et jugeroit' dès-tors'toütfes les’ difficultés/! k' h il
-fiCette >évocation',’ loin 'd ?être- une usurpation de -corn-1
p é te n c e lo in d ’êti’e même facultative, seroit indispensable
dans.la cii’constance ; car il n’y a q u ed eu x degrés de ju ri
diction à suivre, et le prem ier est rempli. L e tribunal du
P u y a tout jugé. I/opposition au com m andem ent, dans
le sens q u elle tendroit à réform er ses jugemens', ne peut?
donc être de son attribution.
,
• /• ! \
■,'r>
Sans doute le tribunal d’appel est com pétent‘pour ré
form er un jugement dit en prem ier ressort, attaqué dans
le délai de la >loi, pour décider sur cet appel toutes" les
questions déjàiagitées eriipremière instance, et m êm e pour
statuer par évocationsur toutes celles qurseroient connexes
ou accessoires.
Mais le citoyen Solvignon e s t-il assez en règle pour
demander des arréragps de cens, quand la- loi les lui auroit
conservés ? a-t-il des! titres, a-t-il des procédures, a-t-il
des jugemens réguliers ? Il n’a rien moins que tout cela;
il ne peut établir ce qu’il dem ande, que par de secondes
expéditions retirées du greffe, et enregistrées en l’an 9;
il ne peut pas dire que ce sont de premières expéditions ,
dès qu’il dit lui-m êm e avoir signifié le jugement de 1790.
O r , n’est-il pas A présumer qu’une grande partie des
liabitans du Bouchot ont payé au moins des à-compte sur
leurs arrérages de cens? alors ces payemens ont dû être
�T Ï 5 ',)
Endossés sur l’expédition originale. Il a pu encore y avoir
des vices dans la procédure, une quotité de cens à con
tester ; l’appelant seroit donc privé de présenter tous ces
moyens d’appel. Mais un dem andeur;doitJustifier de sa
dem ande; car le plus grand’vice d’une action, est qu’elle
ne soit pas établie; il ne peut pas ôter au défendeur le
droit de présenter des moyens en la form e et au fonds.
Ainsi le citoyen Solvigon n’a pas d’action, s’il ne représente
sa procédure; il n e n a pas, s il ne représente lestitres qui
servent de fondement à sa demande ; car l’ordonnance de
16 6 7 , le commande im périeusem ent, et la sentence de
1790 ni celle de 1792 , n’énoncent pas même ces titres
qui cependant devoient y être visés.
E n vain argumentera-t-il de ce que le cens a été reconnu*
mais la quotité ne l’a pas été ; et s’il veut s’en prévaloir
s’il veut accepter l’offre subsidiaire qui fut faite par Itier*
de payer sa portion du cen s, alors il ne peut diviser cette
déclaration. Il faut donc qu’il établisse quelle est la portion
due par Itie r, et qu il l’établisse non pas par conjectures ;
car il n’est pas en' son pouvoir de faire une fixation
arbitraire.
Mais ce procédé seroit inexécutable, de m ême que de
faire droit sur le recours adjugé par le jugement de 1792:
il seroit donc chim érique de proposer des conditions au cit.
Solvignon ; car il ne pourroit en tenir aucune ; il seroit
m ême illégal de consentir judiciairement une transaction
de cette espèce. *
_
L e citoyen Solvignon a voulu essayer sur un censitaire,
s’il pourroit obtenir les arrérages deicens que la loi a
éteints. Une multitude de ferm iers, ou les ci-d ev a n t
�( 16 ) .
seigneurs sous ce n o m , attendent le résultat de cette tentative : auroit-elle un succès quelconque, alors, encore
quelques décades, et les rénovations des terriers de ce
ressort se ,com pléteroient insensiblement.
Cette mesure auroit-elle un effet louable en ce qu’elle
répareroit des injustices ? Il ne nous appartient pas de
le préjuger. Les tribunaux et les légistes ouvrent le code,
l’appliquent, et ne le corrigent pas.
Concluons donc avec la lo i, qui n’est pas obscure, que
le citoyen Solvignon. ne peut demander des arrérages
de c e n s , sur - tout en pagésie , parce que les arrérages
de cens sont supprim és; parce que ses titres sont b rû lés,
et parce que les arrérages qu’il demande ne sont dénaturés
par aucune novation.
i
D E L A P C H I E R , hom m e de L o i.
D E M A Y , A v o u é.
A R io m , de l'im prim erie de L a n d r i o t , im prim eur du
Tribunal d’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Itier, François. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Demay
Subject
The topic of the resource
cens
arrérage
fermier de la cathédrale
cathédrale
ferme
Description
An account of the resource
Mémoire pour François Itier, propriétaire, habitant de la commune du Bouchet-Saint-Nicolas, Appelant. Contre Joseph Solvignon, propriétaire, habitant au Puy, Intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1790-Circa An 5
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0320
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0126
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Coverage
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Le Puy-en-Velay (43157)
Le Bouchet-Saint-Nicolas (43037)
Rights
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arrérage
cathédrale
cens
ferme
fermier de la cathédrale
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MÉMOIRE
EN
R É P O N S E ,
POUR
Le Sieur J U S S E R A U D , intimé ;
CONTRE
La Dame DECHAZERO N et le S. A L B E R T
de B R A N C A S - D E - V I L L A R S , son mari,
appelans.
h
-
S
u.
/
A RIOM,
De l’imprimerie du Palais, chez J. - C. S a l l e s .
�MÉMOIRE
t o u r
L e Sieur J U S S E R A U D , intimé ;
CONTRE
La Dame d e C H A Z E R O N et Le S. d e B R A N CASD E - V I L L A R S , son m ari, appelans.
MADAME D e Brancas se plaint vivement de n’avoir pu faire
accueillir des demandes exagérées et extraordinaires qu’elle per
siste plus que jamais à reproduire ; le succès du sieur Jusseraud
l ’irrite, et les premiers juges eux-mêmes ne sont pas exempts de
l'humeur qu’elle lui témoigne. Mais le ton d’aigreur exige au
m oins.de la véracité, et madame de Brancas tire fréquemment
des inductions de faits peu exacts. L e sieur Jusseraud qui n’a
varié ni dans sa défense, ni dans s e s prétentions, répondra à
l ’humeur par de la modération, et à l’inexactitude par la sim
plicité des faits. Il établira sans peine que la réclamation bizarre
de 22,000 francs, dont madame de Brancas a paru concevoir l ’idée
par occasion, après plusieurs années de procès , n’est pas même
A
�( O
proposable, parce qu’elle ne peut s’en prendre au sieur Jusseraud
des accidens de la révolution : il établira aussi que la demande
en indemnité formée par lu i, ne peut être susceptible d’une
contradiction sérieuse, parce quelapremière règle en bail à Ferme
est de mettre le fermier en possession de toute la chose louée et de
le faire jouir.
»
F A I T S .
L e sieur Jusseraud prit à titre de ferme , en 17 8 1, la terre de
Chazeron de la mère de madame de Brancas, pour neuf ans qui
devaient expirer le 24 juin 1790.
L e bail lui fut consenti pour jouir de ladite terre et dépen
dances , ainsi que les précédons fermiers avaient joui ou dû
jo u ir , et par exprès le sieur Jusseraud, son père, moyennant
7 ,3 oo francs par an.
Parmi les conditions de ce bail on remarque, art. i 3 , que le
sieur Jusseraud fut chargé de faire renouveler les terriers à ses
frais par un bon féodiste, et d’en fournir une liève m odée,
dans huit a n s, sous les conditionsà ré g le ra v e cle S .1 Auzaneau
régisseur, ¿drt. 14 , que le S .r Jusseraud ne pourra prétendre
aucune diminution sur le prix de son b ail, pour inondation,
grêle, gelée, et autres cas fortuits prévus ouà prévoir, ni pour
les contestations qui pourraient etre faites par les emphjtéotes
et redevables des terres.
Cette dernière clause que madame de Brancas annonce comme
une convention n o u velle, avait toujours été de style dans les
précédens baux, et la Cour en aura la preuve : cependant le
dernier bail était à 6,000 fr. , et le précédent à 4,700 f r . , . tandis
que le sieur Jusseraud affermait à 7 ,3 oo francs , en se chargeant
encore de faire renouveler le terrier.
L'article des percières était de la plus grande conséquence :
il allait à 110 setiers de b lé , tandis que la directe 11e consistait
qu’en i 5o francs argent, 20 setiers de from ent, 3 o setiers de
seigle et 60 d’avoine.
�(3 )
Ces percières étaient en contestation avec tous les redevables’ ,
en 1781. La dame de Chazeron avait été obligée d’indemniser
les précédens fermiers qui n’en avaient pu jouir; mais elle an
nonçait que le procès était à sa Î111.
L e sieur Jnsscraud chargea le sieur Boitelet d e là rénovation
du terrier, et la première opération fut de lever des plans relatifs
a u x -percières, afin de hâter la fin des contestations. Elles n’en
t raî nèrent pas moins en longueur, et le sieur Jusseraud, ennuyé
de ne pas jouir, demanda une indemnité au tuteur de madame
de Iî rancas , qui lui répondit que jusqu’à la fin de son bail iL
n ’a v a i t
pas d’action. Les choses en ont resté là depuis, et à l’ex
ception d’un très-petit nombre d’articles, le sieur Jusseraud n’a
joui d ’aucune des percières.
A l ’égard du travail de la directe , il fallait, quoiqu’en dise
madame de Iîrancas des lettres à terrier : madame de Chazeron
ne les obtint que le 23 avril 1782, et 11e jugea à propos de les
faire entériner que le 17 avril 1783. Le travail de la rénovation
ne put commencer qu’après celte époque , et le féodiste avait
huit ans.
C epen d an t le sieur Boitelet 11e perdit pas de tems ; car il est
constaté qu’en 1788 il avait déjà reçu et fait contrôler 407 recon
naissances, ( l e précédent terrier n’en contenait que
385 ). L e
travail fut parachevé en 1 7 9 0 , et il y eutalorsoSi art. reconnus.
Suivant la police arrêtée entre les sieurs Jusseraud et Auzaneau , le féodiste devait remettre ses plans, les nouvelles recon
naissances , lièves et tables, reliées, et se soumettre à la vérifica
tion d'un nuire féodiste.
Pour cctlc vérification les parties Tirent choix du sieur Legp.y
de Fontgibaud , par aclc du 9 mars 1791- Les titres furent remis
à cet elfet au sieur Auzancau, qui les transmit hii-n icm c au
sieur L eg a y , comme on le voit par une citation dont excipe
madame de Iîrancas.
Le sieur Legay ne s’occupa point de cette vérification en 1791 ;
il fut emprisonné le 27 avril 17ÎÎ2 > e *- c es^ dans les loisirs
A a
�( 4 )
de sa prison que s’étant fait porter l'expédition du terrier
Boitelet, et celle du précédent terrier seulement, il s’occupa de
vérifier l’exactitude de l’opération du sieur Boitelet. L à il décou
vrit, dit-il, 352 articles défectueux sur 55 i.
A la vérité il finit par avouer qu’il n’a fait qu’ un travail con
ditionnel et hypothétique , parce qu’il n’a comparé le terrier
Boitelet qu’avec un seul des précédens, et qu’il n’est pas encore
a llé vérifier les plans. Il est même obligé de convenir que si les
3d2 erreurs se trouvent relevées sur les terriers antérieurs , l’ou
vrage de Boitelet vaudra mieux que le sien.
Quoiqu’il en soit de ce travail de prison, Je sieur Legay ne se
mit pas en peine d’aller le compléter, en vérifiant les plans quand
il fut lib re , ni même en se* référant aux anciens terriers qu’il
n ’avait pas vus : cependant en l’an 3 il assigna la dame de
Brancas en paiement de 800 francs pour ses honoraires; cette
demande fut dénoncée au sieur Jusseraud , et on.^ae voit pas
qu’elle ait été suivie.
L e sieur Jusseraud avait cessé d’être fermier, avons-nous dit,
en 1790 ; et il avait exactement payé ses fermages , sauf environ
2,000 fr. ; madame de Brancas n’avait eu garde de lui demander
ce reliquat , puisqu’elle l’avait renvoyé , pour l’indemnité des
percières , à la fin de son b a i l , et que le procès de ces percières
n’éLait pas encore jugé en 179°*
Cependant se croyant plus favorable en ce que la suspension
de ce procès paraissait venir de la force majeure , madame de
Brancas fit faire au sieur Jusseraud, le 24 frimaire an 7 ,1 m
commandement de payer la derniere annee de sa ferme en
deniers ou quittances ; sans réserver aucune autre action.
L e sieur Jusseraud y forma opposition, parle motif qu’il élait
créancier lui-mâme de plusieurs indemnités de non jouissances.
L e tribunal civil, sur cette opposition, accorda une surséance
provisoire.
Ces deux réclamations furent soumises à des arbitres ; le sieur
Jusseraud les récusa, et n’a nulle envie de s’en défendre ; il n’a
�(5 )
pas cru manquer à son devoir , en se conformant strictement à
la loi, et en faisant ce que lui semblaient exiger les circons
tances. Il savait d’ailleurs que si déjà un jugement arbitral eût
été rendu , il était plus fort que sa récusation. L ’événement a
justifié sa démarche : il paraît qu’il n’y a eu aucun jugement.
L a procédure fut reprise en brumaire an 10 , devant le trib u
nal de R io m ; le sieur J u sserau d réclama l’indemnité de non
jo uissance, i.° des percières de Gouzet et Roche-Touzet ; 2.° des
eaux m inérales de Chatelguyon , faute d’un bâtiment que la
daine de Chazeron devait y faire tenir en état ; 3 .° de la glandée
dans les bois; 4.0 d’un bâtiment et trois septerées de terre laissés
à un garde forestier, quoique ces objets ne fussent pas réservés
au propriétaire; 5 .° du four bannal supprimé par la loi du 4
août I7^9> 6.° de 389 fr. pour cens qu’il n’avait pu percevoir.
Après cette demande, madame de Brancas conclut à l’exécution
provisoire de son b a il, toujours sans réserve: elle poursuivit
l’audience, plaida sur cet incident', et par jugement du 4 ger
minal an 10 , le provisoire fut joint au fond, surséance tenant.
C e p e n d an t madame de Brancas, peu de jours après sa d e
m a n d e p r o v is o ir e , avait cru pouvoir neutraliser lfâ^ustes indem-
nités requises par le sieur Jusseraud , en en réclamant de sa part,
et revenant sur le procès du sieur L e g a y , oublié par elle depuis
l ’an 3 .
Ce n’était plus une simple demande en garantie des 800 liv.
à laquelle madame de Brancas entendait se borner. L e
17
ventôse an 10 , elle exposa que le sieur Jusseraud, s’étant chargé
de laire renouveler son terrier, et ne l’ayant fait que d’une ma
nière ju g é e défectueuse , il devait non-seulement lui payer les
irais de rénovation présumés déduits sur sa ferme, mais encore
l’indemniser de ses cens des années 1790» 1791 et x792 >qu’elle
n’avait pu percevoir, n ’ayant pas de titres; en conséquence,
elleconclut contre le sieur Jusseraud au paiement i.° de 10,000 1.
pour les frais de rénovation; 2.0 de 12,000 liv. pour l'indem
nité de trois aimées de cens.
�(6 )
Les parties en vin'rerit à l’audience le 14 prairial an n . L à ,
madame de Braneas eut encore quelque chose à ajouter : Crescit
eiindo. Elle réclama de plus l ’ancienne garantie des 800 liv.
demandées, en l’an 3 , par le sieur Legnv.
L e jugement dont est appel déboute madame de Braneas de
ces trois derniers articles de demande, adjuge celle de l’an 7 ,
et condamne le sieur Jusseraud ù payer 2,57") liv., pour reli
quat de sa ferme; et faisant droit sur ses demandes en indem
nité, condamne madame de llrancas à lui payer, 1 0 3 oo liv.
pour la non-jouissance du four banal ; 2.0 2,270 liv. pour la
nbn-jouissante des percières : sur le surplus de ses demandes,
il est mis hors de cam e, et tous les d.’pens sont compensés.
L e sieur Jusseraud pouvait justement se plaindre de ces der
nières dispositions, parce qu’indépendamment des non-jouis
sances de cens non perçus et d’objets distrails de sa ferme sans
être compris dans les réserves, il avait droit de regarder comme
très-inférieure à leur valeur une fixation à 2,27.) I. pour les pereiire-i qui cependant montaient à 110 setiers de blé pendant
chriciine dé.< ùcnf années de sa ferme.
Cependant, malgré ces griefs, le sieur Jusseraud ennuyé de
procès , a exécuté ce jugement ; mais madame de Braneas en a
interjeté appel, et ne veut faire grâce d’aucune de ses réclama
tions incidentes ; elle les prétend toutes londée.s, modérées même,
el de la plus exacte justice.
M O Y E N S.
Madame de Braneas s'oppose de toutes ses forces à une dispo
sition du jugement dont est appel, qu’on a passée sous silence,
parce qu’elle est absolument étrangère au sieur Jusseraud.
Les titres féodaux produits par elle ont paru aux premiers
ju g es, cempris dans la proscription de la loi du 17 juillet •7<;3)
fct ils ont cru devoir faire exécuter celle loi, comme toujours
en vigueur d’après le rcscrit du Conseil d’état. L e sieur Ju;seraud ne s’occupera nullement des moyens que madame de
�(7 )
Brancas emploie pour faire considérer cette disposition comme
monstrueuse et révolutionnaire , non nostrûm ---- tantas com ponere liles. L a Cour statuera, comme il lui paraîtra con
venable sur ce chef particulier, q u i , on le soupçonne, pourrait
bien avoir été le principal mobile de l’appel de madame de Brancas. Quoiqu’il en soit, cet appel est divisé en quatre griefs, que
le sieur Jusseraud va parcourir dans le même ordre que madame
de Brancas les a proposés.
PREMIER
GRIEF.
t: •
Y a-t-il lieu de payer 10,000 livres à madame de Brancas ,
pour vice de rénovation de son terriert
y
Pour trouver quelque chose de supportable à cette prétention,
il faut franchir une difficulté beaucoup plus ardue que la ques
tion elle-même. L e terrier renouvelé est-il vraiment défectueux,
et comment s’y prendra-t-011 pour juger sa défectuosité?
Tout cela est déjà f a i t , dira madame de Brancas ; le sieur
L eg a y a ju g é qu’il contenait trois cent cinquante-deux erreurs.
A la vérité , il d e v a it, suivant la convention arrêtée avec Boitelet, remonter aux anciens terriers. Il n’a vu que le plus
récen t, parce qu’en prison peut-être il n’avait pas l ’aisance
nécessaire pour un travail de ce genre. A la vérité encore ,
il fallait vérifier les plans , et chercher l ’application des titres
sur le local , mais le sieur Legay a déclaré, dans son procèsverbal , qu’il n’était pas encore a llé vérilier le local ; et à l ’im
possible nul n’est tenu.
Si le sieur Jusseraud trouve étrange cette maniéré commode
de vérifier le travail d’un féodiste , s’il observe que Boitelet
devait naturellement s’écarter du dernier terrier, dès qu’il y avait
eu nécessité de le refaire, on lui répondra qu’il s’est permis des
personnalités sur le sieur L e g a y , par cela seul que cet expert
avait reconnu des erreurs au travail de Boitelet.
Ce n’est vraiment qu’une réllexion ab iralo , de trouver le
�(S )
sieur L egay offensé de ce que le sieur Jus'seratuî a rappelé
qu’il était en prison , quand il s'occupa de la vérification du
terrier Boitelet. Ce fait était absolument nécessaire à sa cause;
et en se dépouillant de sa prévention , "madame de .Brancas
trouverait très-bizarre elle-m êm e, qu’un travail de géométrie;
locale, et une division de terrain en cinq cent cinquanle-im
immeubles distincts , fussent vérifiés dans les limites d’une
prison.
Pourquoi avait-on choisi un géomètre, si ce n’est pour voir
les 1¡eux, el chercher les inexactitudes sur le terrain même? A la
yerité , on ne prévoyait pas en 1791 , qu’il ne s’en occuperait
pas en 1791 , et ne pourrait jjas s’en occuper en 1792On ne doutera pas que le sieur Legay n’ait tout vérifié en.
prison. Il dit lui-mêine, dans son exploit du u brumaire an 3 ,
avoir employé à ce travail les mois de ju in , ju ille t , partie
d'août et d'octobre 1793. O r, le sieur L egay a été écroué dans
les prisons de Biom , le 27 avril 1702 ; il y a été jugé le i 3
août 1792. L e tribunal de cassation l’a renvoyé à Gueret, où
il a été traduit au mois d’octobre, et n’a été jugé qu’au milieu
de novembre de la même année 1792.
Son p r o c è s v e r b a l , clos le
septembre 1792 > n’est dono
qu’ un travail de prison , 011 plulôl qu’ une ébauche de travail ,
que le sieur L ega y lui-même a positivement déclaré n’êlre que
préparatoire , puisqu’il avoue i.° n’avoir fait sa comparaison
que sur 1111 terrier de 1686, tandis que Boitelel avait été as
treint à remonter aux p lus anciens, et qu’il y en avait deux autres
de 1488 et de 1090; z.° il avoue n’avoir pas encore été vérifier
les plans, ce qui montre clairement q u ’il regardait celle opéra
tion locale comme indispensable; 3 .° il avoue enfin que l'exac
titude de la vérification dépendait dé la comparaison avec les
terriers de 1488 et de laoo ; (pie celte vérification restait A
faire comme complément; et qu’il en pouvait résulter que les
trois cent cinquanle-deux erreurs se réduiraient à rien, et que
le sieur Boitelet aurait luit un bon ouvrage.
A in si
�C r9 )
Ainsi madame de Brancas veut trouver dans le travail du
sieur Legay une perfection qu’il n’y trouye pas lui-même. Par
cela seul, qu’elle a ce travail, elle veut y voir une vérification
de terrier, u n jugem ent qui annulle toute l ’opération du sieur
Boitelet.
Disons plutôt que le sieur Legay se promettait lui-m êm e
de voir les lieux ; que la loi du 28 août rendait son travail
inutile; q u ’ainsi il n’avait aucun motif pour aller après 1792,
s’occuper d’une opération sans but ; et qu’en l’an 3 , il essaya de
former une demande en indemnité du tems par lui em p lo yé ,
quoique la loi du 9 septembre lui refusât toute action par une
disposition expresse.
Il n’y a donc pas lieu de dire que le terrier du sieur Boi
telet soit défectueux , mais quand il serait vrai que le sieur
Legay a entendu le dire a in s i, cela est-il bien démontré aux
yeux de la Cour? Quand le sieur L egay aurait tout vu , le
sieur Boitelet, passible des vices de son trav ail, ne serait-il pas*
fondé à lui d ire , que c’est lui-même qui est dans l’erreur. IL
faudrait donc savoir qui des deux a raison.
On avait prévu dans la police de 1791 > que le sieur L eg a y
pouvait n’être pas infaillible , et loin de le prendre pour ar*
bitre en dernier ressort, il y était dit que celui qui ne vou
drait pas se tenir à sa vérification , payerait ses vacations.
Rien ne s’opposerait donc à ce que le travail du sieur Boi
telet ne fût soumis à une seconde vérification ; mais madame
de Brancas n’indique pas comment elle pourrait se faire ? si la
Cour trouve cet expédient praticable, et sur-tout nécessaire , si
elle pense que la loi du 9 septembre 1792 permet d’y recourir ,
il ne s’agira que de faire remettrè à un nouveau fé o d is te , les
terriers, les liéves , les plans et les titres de la terre de Chazeron.
Mais dit, madame de Brancas (page 16 et page 1 8 ) , les
titres et terriers n’étaient pas livres en 179 ° * sieur Jusseraud
se défendait, dans des requêtes de 1789 et 1790, en disant qu’il
n'était pas tenu de la négligence de Boitelet.
B
�( 10 )
Que signifie ce qu’on écrivait en 1789 et 1790 > si la remise
a eu lieu en 1791. Boilelet avait huit ans pour son travail ;
on ne lui remit des lettres à terrier qu’en 1783 , donc il avait
jusqu’à 1791 ; et madame de Brancas avait formé trop tôt cette
demande en remise, aussi ne l’a-t-elle pas suivie ; et son procès
actuel est à cet égard , bis in idem.
Il est très-vrai qu’en 1790, le sieur Boitelet n’avait pas fait
relier et timbrer la seconde copie de son terrier ; mais comme
le sienr Jusseraud refusa de le recevoir , alors tout fut mis
en règle et remis à A u za n ea u qui, lui-m êm e, le donna à Legay.
L a preuve que le sieur Jusseraud a remis les titres à A u zan eau ,
et non à Legay , se trouve dans l’exploit du 11 brumairje an 3 ,
où le sieur L egay expose que le cit. uduzaneau remit au requé
rant un ancien terrier sign é Besson , ensemble une expédition
de celu i, sig n é B o ite le t, et le plan sur lequel Vapplication avait
é té fa it e , avec les liéves et reçus et quelques autres documens.
Comment donc madame de Brancas qui a notifié cet exploit,
et qui en excipe, peut-elle dire de bonne foi que le sieur Jus
seraud a tout retenu, et n’a remis qu’une copie inform e du
nouveau terrier en 17 9 1, tandis que le sieur Auzaneau a porté
chez le sieur L e g a y une expédition notariée de ce nouveau ter
rier, les plans , les lié v e s , etc.
Mais dit-elle encore ce n’était pas la tout, il fallait aussi re
mettre Vinventaire des titres de la terre et les titres eux-méines,
qui assuraient la perception.
Pour montrer encore à la Cour, combien madame de Brancas
se pique de véracité malgré son ton d ’aigreur,Ue sieur Jusseraud
exhibera à la Cour le récépissé de ces titres au nombre de trois
cent soixante-dix-huit ; il lui a été fourni le 6 janvier 1792 , et
comme alors existait le procès, dont madame de Bancas excipe
encore (pages 1 5 et 18 de son mémoire) , le récépissé termine
par ces m ots, et nie départs de toutes demandes qui peuvent
avoir été formées pour la remise desdits titres.
Donc madame de Brancas redemande ce qu’elle a reçu , donc
�( ” •)
elle fait considérer comme en vigueur un procès qui n’existe plus,
Doqc encore quand madame de Brancas fonde sa demande en
paiement de 10,00© liv. sur ce que le terrier est inform e , et sur
ce que c’est la seule chose qui lui ait été remise pour la vérifi
cation , madame de Brancas dit ce qu’elle sait ne pas être.
M a is, au reste, madame de Brancas a-t-elle bien calculé le
but de sa demande sur cet article ? Par quel motif lui devrait-on
cette som m e arbilraire de 10,000 liv.? des dommages-intérêts
sont définis par la loi l’indemnité de la perte qu’on éprouve.
Si elle avait un nouveau terrier, vaudrait-il donc 'pour elle
10,000 liv. ? Mais quand il faudrait encore l’indemniser d’ une
perte arrivée par la force majeure, à qui madame de Brancas
pourrait - elle persuader, que pour refaire le terrier d’une di
recte de cent dix setiers de tous grains, et de i5o liv. a rg e n t,
il faut payer 10,000 liv. a un féodiste, indemnisé déjà par deux
ou trois cents reconnaissances à recevoir comme notaire.
Mais s’il fallait 10,000 livres, le féodisle est payé, et il n’en
coulerait donc que les frais de rectification des articles recon
nus défectueux. Les trois cent cinquante-deux articles con
damnés rappellent les cent une propositions, et prouvent que
celui, qui veut épiloguer un ouvrage quelconque, a toujours un
vaste champ pour la critique , sauf à la vérité à être redressé
lui-même. Ce serait donc se jouer de la Cour, que de sup
poser sérieusement qu’elle adoptera l’ébauche du sieur L e g a y ,
et ses trois cent cinquante-deux erreurs provisoires.
t
DEÜ XIÈME GRIEF.
E s t-il dû 12,000 liv. à madame de Brancas pour non-per
ception de ses oens, pendant 1790, 1791 et 1792 ?
10,000
liv. pour un terrier mal-fait, et 12,000 liv. pour trois
ans de cens , feraient précisément le capital de la directe de
madame de Brancas ; et ainsi les lois suppressives 11’auràient
atteint que le fermier.
B a
�( 12 )
. Ces lois ne calculent pas comme madame de Brancas ; au
contraire, elles accordent une indemnité au fermier qui n’a
pas joui de tous les cens de 1789 ; et c’est encore la position du
sieur Jusseraud.
Mais ne voyons que madame de Brancas , et écoutons-là se
fonder toujours , pour ce chef de demande comme pour le pré
cédent , sur ce que le sieur Jusseraud , en retenant ses litres ,
l ’a mise , par son fa it, hors d ’état de pouvoir se faire payer.
Toute la page 24 de son mémoire est encore consacrée à ré
péter qu’i l n’est pas douteux que le sieur Jusseraud a retenu
les titres et les terriers.
L ’éclaircissement de ce fait appartenait plutôt , à la vérité,
à la discussion de ce deuxième grief qu’au précédent, mais
le sieur Jusseraud s’est fait un devoir de suivre madame de
Brancas dans l ’ordre de ses moyens. I c i , pour ne pas se ré
péter , il se référera à ce qu’il a dit aux deux pages précédentes ,
où il se flatte avoir prouvé jusqu’à l ’évidence qu’il a remis les
terriers anciens et n ou veaux, plans , liéves et titres depuis le
commencement de l ’année 17 9 1 , puisque le sieur Legay a été
choisi par acte du 9 mars 1791 ; que cet acte suppose un rap
prochement certain et l’existence certaine et en forme du terrier
B oitelet, enfin que le sieur Legay reconnaît avoir tout reçu du
sieur Auzaneau en 1791*
Madame de Brancas voudrait-elle revenir sur ses p a s , et pré
tendre que cette remise de terriers et titres a été faite trop tard ?
Mais c’était lors du procès de 1789 qu’il fallait s’en apercevoir,
et madame de Brancas s’est départie de ce procès ; donc subla tâ causâ lo llitu r effectus.
Remarquons encore l’époque de ce département d’instance.
C ’est en janvier 1792, après que madame de Brancas avait été,
suivant scs expressions , hors d’ état de pouvoir se faire payer
pendant les années 1790 et 1791.
Si c'eût été par la faute du sieur Jusseraud, c’était le cas
au contraire d’ajouter à son procès les conclusions en indein-
�( 13 )
nité qu’elle prend aujourd’hui. Madame de Brancas, en renon
çant à ce procès, a donc reconnu en 1792 , que toutes ses pré
tentions se bornaient à la remise des titres , et qu’il lui suffisait
les avoir reçus.
Si nous trouvons dans ce récépissé une fin de non recevoir
pour les années 179° 6t I 7 9 I > ^ lie noils res^era a vaincre que
l ’année 1792 ; e t , à cet égard , la réponse est plus facile encore.
L a suppression des cens a eu lieu par la loi du 25 août 1792,
à la seule e xception de ceux fondés sur titres primitifs, et la terre
de Chazeron n’avait que des reconnaissances terrières.L’échéance.
des cens était à la St.-Julien, ou au 28 août; donc, en supposant
même toute la bonne volonté possible aux censitaires de s’ac
quitter , ils n’ont au moins pas été tenus de payer des cens, sup
primés avant l ’échéance de 1792.
Laissons encore cette suppression , il résultera au moins du
récépissé de 1792 , que le sieur Auzaneau avait tous les titres ,
et de l’exploit de l ’an 3 ; qu’il avait les terriers, liéves et plans.
Il a donc pu percevoir.
Il est, d’après cela, parfaitement inutile d’examiner si le dé
fenseur de madame de Brancas est convenu ou n o n , qu’il fallait
des lettres à terrier, et qu’elles avaient été remises au sieur
Boitelet seulement en 1783. Si ce fait était un peu plus impor
tant ,1e sieur Jusseraud rappellerait à madame de Brancas qu’elle
avait avancé (p a ge 2 de son premier m émoire) , quç lors du
bail de 179 1 , elle avait déjà obtenu des lettres à terrier, sui
vant l ’usage ; et il résulterait peut-être de cette commémoration,
que c’est mal à propos qu’elle a démenti le fait avancé à cet
égard par les premiers juges (page 26 du 2.e mémoire).
Ces lettres à terrier n’étaient point aussi inutiles que veut le
dire madame de Brancas, puisque sans elles, il n’y aurait eu
de ressource que d’obtenir un ¡jugement contre les censitaires.
L es anciennes ordonnances exigeaient cette formalité. Celle de
Blois, art. &4, et l’ordonnance de Melun , art. 26 n’en exemp
taient que les seuls seigneurs ecclésiastiques , et on lit dans le
�C h )
Dictionnaire des fiefs, v.° lettres à terrier : « Tous les seigneurs
« laïques, qui veulent faire , ou renouveler un terrier, doivent
« absolument prendre des lettres. Il n’y a que les seigneurs
« ecclésiastiques qui en soient exempts par les ordonnances ».
Madame de Brancas 's’élève avec force contre cette nécessité,
cependant elle a pris des lettres, mais en 1782 seulement. Elle
ne les a fait enregistrer qu’en 1783, donc elle a retardé les huit
ans donnés pour délai au féodiste. On n’a donc du lui remettre
ses terriers qu’en 1791 , et dès-lors si madame de Brancas n’a
pas perçu les cens de 1790 et de 1791 , elle ne peut s’en prendre
qu’à elle-même, ainsi qu’elle l ’a très-bien préjugé elle-même, eu
se départant de son procès prématuré de 1789.
Mais serait-il bien vrai que madame de Brancas a été hors
d 'état de percevoir ses cens de 1791 , faute du terrier Boitelet ? il
faut répondre négativement sur ce point comme sur tant d’autres.
Car i.° le sieur Auzaneau a donné des quittances en 1790; il en
a donné en 1791 , et ce ne sont pas des à-comptes ; 2.0 avant la
rénovation Boitelet, on n’était pas privé de poursuivre le paie
ment des cens: donc on pouvait se passer de son terrier ; 3 .° il
n’était aisé à personne de percevoir des cens après le 4 août
1789 , et la loi a prévu cette difficulté , en accordant des indem
nités aux fermiers pour les années postérieures. Madame de
Chazeron habitant alors son château , bien loin d être pressec de
se faire payer , engageait au contraire le sieur Jusseraud à no
pas poursuivre ses propres arrérages.
Comment donc, sachant ces faits , madame de Brancas a-t-elle
prétendu que c’était par le fa it seul du sieur Jusseraud qu’elle
avait été hors d’état de percevoir ses cens? Comment n’n-t-clle
pas trouvé (pie 12,000 livres et 10,000 liv. au sujet d'une directe
de 1,100 liv. de revenu étaient une demande d’une exagéra
tion singulière ? Comment enfin m ulame de Brancas a-t-elle
dit que ces sommes lui étaient dues, faute de remise <1« ses ter
riers cl du ses titres , lorsqu’elle est nantie des uns et des autres ?
�C iS )
)
TROISIEME GRIEF.
JEst-il du une indem nité au sieur Jusseraud pour la nonjou issa nce des percières ?
f ■
!
Maintenant que madame de Brancas conteste une demande ,
elle la trouve ridicule et exliorbitante. D ’abord il n’est pas établi,
dit-elle , que les redevables aient refusé le,paiement, à l ’excep
du plus petit nombre.
t . H;.
IC'
C ’est un système général adopté par madame de Brancas, de,
t i o n
tout nier; elle n’avoue pas même ce qui est de notoriété, et de
sa connaissance très-personnelle.
Il est positif, en eil'et, que la presque totalité des redevables
de percières refusait de payer depuis long tems^qu’il existait un.
procès avec eux tous ; que quelques particuliers seulement, qui
n’avaient pas voulu suivre ce procès, passèrent un jugement
volontaire en 1789 ; que tous les autres plaidaient encore en
1790 ; et le sieur Jusseraud se procurera les sentences interlocu
toires qui les concernent, pour convaincre la Cour qu’il n’en
impose pas.
Ces percières n’étaient pas un objet peu important ; elles
étaient plus considérables que la directe ; et les précédens fer
miers qui avaient aussi été empeches de jouir a cause de ces
mêmes procès , obtinrent 3,000 trancs d indemnités.
A cela madame de Brancas fait une objection qui aurait
quelque poids , si elle était applicable, mais qui peche toujours
par l’inexactitude.
C’est précisément, dit-elle; au sieur Jusseraud , pour ne pas
vous donner aussi des indemnités, que par votre bail il fu t
stipulé que vous renonciez à toute diminution pour cause de
grêle, gelée, cas fortuits prévus et à prévoir, et même pour les
contestations qui pourraient être formées par les redevables. O r ,
les procès des percières existaient avant votre b a i l, donc ils ont
¿té l’objet de cet article, et
particulière.
l’obje^ de cette convention
�( .6 )
Tout cela serait proposable si le bail de 1781 contenait
pour la première fois cette clause de précaution. Mais qu’on
lise les précédens baux de la terre de Chazerûn , on la reverra
copiée mot pour m ol : et cependant elle n’a pas empêché les
précédens fermiers d’obtenir une indemnité de 3 ,000 francs.
Rien en effet n’était plus juste , parce qu’une clause semblable
ne doit s’entendre que civ ilem en t, comme l’ont très-bien remar
qué les premiers juges , comme l’avaient aussi préjugé M M .
Verny et Touttée arbitres , en accordaht aux précédens fermiers
une indemnité pour la même cause.
Il est en-effet de principe que dans une renonciation générale,
il ne faut pas vaguement comprendre ce que le renonçant n’a pas
naturellement voulu abandonner. In generali renuntiatione
von veniunt eâ , quœ ijuis in specie non esset verisim ililet
consecuturuS.
A in s i, quand le fermier se serait chargé de tous les accidens de grêle, neiges, etc., la ldi toujours juste et prudente
distingue ce qu’il n’a pas distingué, et lui accorde d’elle-memé
une indemnité, si les dccidens de la saison ont été immodérés ,
si immoderatœ fu e r u n t, et contra consueludinem tempestaies.
L . 78. ff. de contr. empt.
Mais la position du sieur Jusseraud est plus favorable encore \
car ce ne sont pas les intempéries de l’air qu’il doit accuser de sa
non jouissance, niais madame de Brancas elle-même qui lui a
donné à bail ce qui sans doute ne lui appartenait pas.
Celui qui vend a beau stipuler qu’il ne sera garant de rie n 1:
s’il a vendu la chose d’autrui , il doit au moins rendre le prix
qu’il a reçu. De même que celui qui cède une créance sans
garantie, n’en est pas moins tenu de la garantie débitant suhcssé.
Il y aurait même quelque chose d’immoral de favoriser des
conventions contraires.
Dan-; un bail à ferme de biens ru ra u x , comprenant une sur
face connue, <nns doute on peut stipuler que la perte, même
totale, de* rcvchtl*' par 'cds fortuits sera pour le compte dn
p re n eu r,
�C
*7 )
preueur, parce que le bailleur est étranger à ces événemens. Il
a fait ce qui était en l u i , en mettant le preneur à même de jouir
de toute la chose louée.
Mais si l’étendue donnée n’est pas mise au pouvoir du pre^
neur , il en résulte que le bailleur n a pas satisfait a son obliga
tion en livrant la chose louée. Car la première obligation du
locateurest prccstandi conductori fin i h c c r c • elle est de 1 essence
du contrat de louage. C ’est par suite de ces priucipes que la loi
de 1789, ôtant aux fermiers une portion de la chose louée,
leur a accordé des indemnités , et personne n’a imaginé de
dire qu’elles n’eussent pas lieu dans les cas où le fermier s’était
chargé du risque des événemens.
On ne peut pas douter que madame de Brancas n’ait donné
a ferme les percièi’es de Gouzel et Roche-Touzet. Car, i . f elle a
afferm é au sieur Jusseraud la terre de Chazeron, ainsi que les
précédens fermiers, et notamment le sieur Jusseraud père, avaient
j o u i ou dû jo u ir . Précisément le procès avait commencé sous
leur ferme , et ils avaient été indemnisés, parce q u ’ils n’avaient
pas joui comme ils avaient dû jouir; 2.0 madame de Brancas
avait affermé toutes les perceptions de sa terre, suivant les titres
qu’elle remettait au sieur Jusseraud, portés par un inventaire;
et ces titres mentionnent expressément les percières, pour une
quantité de cent dix setiers.
Sera-t-il proposable d’oljjecter que la clause du bail porte qu’il
n’y aura pas de diminution pour les contestations qui pour
raient être faites par les redevables ?
S ’il fallait interpréter cette clause aussi littéralement que
l ’exige madame de Brancas , on n’y verrait d’abord rien qui
eut trait à un procès déjà existant, car il n’est prévu que dts
contestations futures.
:
Mais de bonne foi, avec urre telle cause, faudrait-il aller jus
qu'à dire qu’un fermier à qui on remet les titres d’une terre pour
percevoir un revenu sur quatre cents septerées de terre, est tenu
C
�( *8 )
de se contenter de cent cinquante, si le surplus lui est contesté.
Quelle raison y aurait-il pour ne pas le forcer à payer aussi
toute sa ferme, sans diminution, dans le cas où les redevables se
réuniraient pour contester le droit. L e contrat de louage pour
rait donc subsister sans l ’existence de la chose louée ; ce qui
choque les principes les plus élémentaires.
L e tuteur de madame de Brancas, procureur au châtelet, ne
prétendait pas donner un tel sens à cette clause, lorsqu’il écri
vait en 1786, dans un style simplement dilatoire, en renvoyant
l ’indemnité à la fin du bail et au jugem ent de l'arbitrage. Une
autre preuve aussi que madame de Brancas entendait bien n’en
être pas quitte pour renvoyer le sieur Jusseraud à une clause
générale et copiée sur les anciens baux , c’est qu’en se char
geant seule du procès des percières , qui autrement eut aussi
intéressé le sieur Jusseraud, elle lui notifia en septembre 1790,
q u’elle avait obtenu trois sentences contre certains des emphytéotes , pour qu’il eût à s’en faire payer. Ce sont ces jugemens
rendus de concert, déjà cités.
Madame de Brancas veut encore réduire à rien cet article
de percières ; elle a produit en première instance, dit-elle, des
baux y relatifs qui les réduisent à treize ou quatorze setiers.
II est difficile de répondre à une telle inexactitude, sans ou
blier la modération que le sieur Jusseraud s est imposée. Car
madame de Brancas sait bien que ces baux n ont de rapport
q u ’aux percières de Gouzet qui ne portent que sur quarante
septerées de terre, tandis que les percières de R o che-T ou zet
portent sur plus de quatre, cents septerées. Mais que madame
de Brancas veuille bien produire à la Cour l ’aveu et dénombre
ment dont elle a donné récépissé : c’est un acte bien antérieur au
bail du sieur Jusseraud qui s'en trouve une copie ; elle y lira :
« Plus quarante septerées de terres, ou entour, pcrcidrales,
« dans lesdites appartenances de G o u z e t ; ............ plus jouit et
« possède ledit seigneur de Cliozcron la terre de lloche*Touzet,
�C 19 )
c< dans laquelle se perçoit, commune année, q u a tre -v in g t-d ix
« seliers seigle en percières. . . lesdites percières confinées, etc.
D e tout cela le sieur Jusseraud n’a lien perçu que du trèspetit nombre de ceux qui ne voulurent pas plaider.
Cependant ces percières étaient comprises dans son bail», et
puisque madame de Brancas ne le faisait pas jouir de cette partie
de la chose louée , elle lui devait, suivant les principes, quantum
ei abest, et quantum hicrari potuit.
Ce n ’est donc qu’au sieur Jusseraud que les premiers juges
ont fait tort, en modérant à 2,275 liv. cè qui valait six fois cette
somme ; et si madame de Brancas la trouve arbitraire, il consent
très-volontiers à une estimation.
QUATRIÈME
GRIEF.
Est-il dû 3 oo liv . au sieur Jusseraud pour non-jouissance
du fo u r banal en 1790 ?
L e sieur Jusseraud a été obligé de payer cette indemnité à
ses souSTÎermiei’S par jugement du tribunal civil de l ’an 6 ; il ne
demande que la somme qu’il a payée : rien ne semble plus juste.
Cependant madame de Brancas veut encore contester cette
faible somme, et trois moyens lui sem blent la débarasser de cette
réclamation ; i.° dit-elle , c’est le sieur Jusseraud qui a été con
damné personnellement ; 2 .0 il faudrait qu’il y eût six mois de
non-jouissance, et il n’y en a que d eu x, parce que la loi de
suppression est du 24 mars 1790, et le bail finissait au 24 ju in
suivant ; 3 .° dans les 800 livres se trouvent confondues 75 livres,
allouées déjà par madame de Chazeron , et si le sieur Jusse
raud les a payées pour elle , il ferait un double emploi en les
reprenant.
Sur le premier moyen, comment concevoir que le sieur Jus
seraud ait été tenu en son nom d’une suppression féodale, tandis
C 2
�C 20 )
que la loi du i 5 mars 1790 accorde aux fermiers des indemnités,
que la loi du 28 août 1792 les leur conserve, et dit que « les fer« miers pourront se fa ir e restituer les sommes qu’ils auront
t payées aux ci-devant seigneurs, pour raison des mêmes droits
« échus depuis le 4 août 1789, et ce, au prorata desdits droits ».
Mais dit , madame de Brancas (p a ge 39) , le jugement de
l ’an 6 prononce hors de cour sur la demande en assistance de
cause contre m oi, ce qui prouve que vous êtes condamné per
sonnellement.
Toujours oubli des faits dans les choses les mieux constatées.
Si c’était le sieur Jusseraud qui eût été mis hors de cour sur une
demande en garantie formée par l u i , alors certes il ne pourrait la
renouveler ; mais c’étaient: les sous-fermiers qui avaient appelé
madame de Chazeron en assistance de cause; ils sont mis hors
de cour, donc la question reste entière pour le sieur Jusse
rau d, et le débouté ne le concerne pas.
Sur le second m oyen, les premiers juges ont constaté par l’aveu
des parties, qu’il y avait six mois de non jouissance. D ’ailleurs
le jugement de l ’an 6 rapporte aussi que les sous-fermiers n’avaient
pas joui dès avant la loi du i!> mars 1790*
Cette loi, comme on sait, n’était que le complément de celle
du 4 août 1789 , portant abolition en principe du régime féodal
et de ses effets, à la seule exception des droits fonciers. II était
naturel que les bannalités , les retraits féodaux, les droits de
chasse exclusive , et autres privilèges semblables fussent réputés
abolis, par le seul effet de la loi du 4 août 1789. Celle du i 5
mars 1790 en fut la loi organique, et ne fit que se référer a la
première. Aussi est-il de notoriété que les bannalités cessèrent
dès 1789, et madame de Brancas ne pouvait ignorer l’époque
des premiers effets d’une suppression à laquelle elle était si peu
étrangère.
D ’ailleurs calculons même comme madame de B ran cas, et ne
partons que de la loi du i 5 mars 1790 : de là au 24 juin , il n’y
�( « )
a pas deux mois, comme elle le prétend. Il y en a trois bien
comptés.
O r , la bannalité du four était sous-affermée 1,200 fr. par an ;
ce fait n’est pas contesté : c’était donc pour trois mois 3 oo fr. ,
et le tribunal civil avait supputé juste.
Enfin si par le fait le sieur Jusseraud a payé 3 o o f r ., pourquoi
les perdrait-il ?
L e troisième moyen, qui n’est plus qu’ un subsidiaire, ne
devait être proposé par madame de Brancas, que si elle avait en
main le mandement de
fr. donné par madame sa m ère, et si
elle prouvait que le sieur Jusseraud l ’a porté en compte dans
ses paiemens.
Car il importe peu que madame de Chazeron ait prom is 75 fr.
à ces sous-fermiers, si elle ne les a pas payés. Il a été dit déjà
pourquoi ces 75 fr. avaient été promis. Madame de Chazeron se
fit garder plusieurs nuits par les sous-fermiers , dans sa terre ,
lors des premières terreurs de la révolution, et leur donna en
récompense un bon de 75 francs. L e tribunal c i v i l , à qui on fit
plaider que ces rj'o fr. avaient eu aussi pour objet la non jouis
sance du four, déduisit cette somme sur les 3oo fr. d’indemnité
q u’il accorda à ces sous-fermiers.
Maintenant soit que le sieur Jusseraud ait payé cette somme
en vertu du m andem ent, ou en vertu du ju gem ent, il l ’a tou
jours payée de ses deniers , si on ne voit pas qu il a employé
le mandement dans ses comptes. Si madame de Chazeron ne le
prouve pas , il n’y a donc, dans sa derniere objaction, qu’un
double emploi imaginaire.
L e sieur Jusseraud a parcouru tous les griefs du mémoire de
madame de Brancas, qui le concernent, et il n’a eu besoin que
de développer les motifs de la décision des premiers juges, qui
porte avec elle sa pleine justification. Si la cause a été pour l’une
des parties, comme on le d i t , un objet de spéculation , le sieur
Jusseraud a l ’ayantage au moins de n’avoir spéculé que sur la
�vérité des faits et sur une constante exactitude. Ainsi madame
de Brancas n’a été victim e que de sa propre obstination; et si
ses intérêts ont été blessés , elle ne peut en accuser que l'injus
tice de ses demandes et la faiblesse de ses moyens.
M .e D E L A P CH I E R , A v o c a t.
M .e V E R N I È R E , A v o u é .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jusseraud. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernières
Subject
The topic of the resource
ferme
percière
terriers
féodiste
four banal
experts
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour le Sieur Jusseraud, intimé ; contre la Dame de Chazeron et le Sieur Albert de Brancas-de-Villars, son mari, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1781-An 5
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0321
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0727
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53769/BCU_Factums_M0321.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chazeron (terre de)
Châtel-Guyon (63103)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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Percière
terriers