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MÉMOIRE
P O U R M e.
P ierre-A lexis
-Louis B R U , Avocat et
premier Suppléant de Juge à S t, F lour, départe
ment du Cantal ;
C O N T R E les sieurs Jean M E Y R E , Greffier au tribunal
de commerce de St.
F l o u r , et F r a n ç o i s
D A U B U SSO N ,
de Clermont,
J e suis forcé de réclamer auprès des tribunaux une
justice vainement tentée auprès de mes adversaires ;
ma patience et les voies amiables n’ont produit aucun
effet. Accoutumés à faire des profits énormes par l’usure
et par l’agiotage les plus effrénés, ils ont ri de la bonne
foi de mes démarches , tant la corruption devient une
seconde nature par l’habitude de s’y livrer.
Depuis environ cinq ans ma fortune est menacée
Par cette espèce d’hommes inconnus jusqu’à nos jours,
et des sommes empruntées à diverses époques, dont
le total ne s’élève pas à vingt mille francs, réellement
�c o
reçus, sur lesquelles j’en ai déjà donné plus de vïngt-un
mille , laisseroient aux sieurs M eyre et Daubusson, un
produit en interets , et inteicts d interets de.plus de
25000 fr. dans moins de cinq ans, si les lois n’étoient
là pour réprimer leur cupidité , et si je n’avois en mon
pouvoir les preuves écrites de leur usure infâme.
Je le rép ète, c’est à regret que j’entreprends une
affaire qui auroit pu être assoupie , et dont le ré
sultat ne peut qu’être funeste à mes adversaires ; mais
ma réputation de solvabilité et de probité attaquée
a u d a c i e u s e m e n t de Jeurpart, des poursuites'vexatoires
commencées, une masse d’intérêts qu’ils réclam ent,
après avoir reçu plus que le capital ; le soin naturel de
défendre pour ma fam ille, contre des voleurs publics t
une fortune honnêtement acquise ; enfin un jugement
rendu pour et par des gens qui ont à démêler des af
faires majeures avec m o i, tout cela me force à parler
haut le langage de la justice. Je suis bien favorable , si
j’avois besoin de faveur , car je dois au sort de mes enfans les efforts que je vais faire. Je serai vrai dans l’ex
posé des faits ^ et les principes immuables du tien et
du m ien, trouveront leur application à mes intérêts
méconnus impunément jusques à ce jour.
FAITS.
Je possède au Village de Pierrefite, près de St. Flom y
département du C an tal, un domaine au milieu du
quel sont enclavés des héritages que Guillaume Amat
laissoit dans sa succession, et auxquels étoient dues des
servitudes de passage, prise d e a u , etc. etc.
�( 3 )
Moins par ambition que par nécessité je me vois
forcé de les acquérir. Je devois à cette époque en petits
capitaux exigibles environ 8000 fr. Lorsqu’au commen
cement de l’an dix je iis cette acquisition , j’ignorois
que les capitalistes coniioient leurs capitaux à des gens
la plupart sans a v e u , sans garantie, sans bonne fo i,
sans loi ; pouvois-je présumer qu’ils seroient aussi cu
pides , aussi imprudents qu’ils l’ont été. Car enfin ,
quelle garantie présentent des agioteurs en général.
L ’impérieuse nécessité de solder pour huit ou neuf
mille fr. de capitaux que je devois alors , ainsi que le
prix de mon acquisition, me fait découvrir Jean M eyre,
qui me procure, d’accord avec le sieur Daubusson,
les sommes dont j’ai besoin; le taux de 24 pour ojo est
le taux absolu exigé de leur part et accordé. L a re
construction d’une façade à ce d om ain e , la réparation
des grange et écurie , nécessitent encore un emprunt
dans les années onze, douze et treize, d’environ cinq
ou six mille livres , et il faut toujours recourir aux ad
versaires , tant les capitalistes semblent resserrer leur
argent, pour........
Les sommes que j’ai empruntées à ces diverses épo
ques ne s’élèvent pas à vingt-un mille l iv ., et s’il pouvoit y avoir de l’erreur nous la rectifierons par les
registres des adversaires , dont infailliblement le rap
port sera ordonné. Je désire ne pas en imposer.
^L e sieur M eyre ne manquoit pas d’empirer ma situa
tio n ; il faisoit ses comptes à discrétion; tantôt il fixoifc
pour six mois , tantôt pour trois m ois, 1 intérêt q u i,
quoique de 24 pour o¡o par an , se portoit à 28 ou à 5o
�(4)
pour o/o, selon les époques plus ou moins rapprochées
du renouvellement. Je vivois dans une inquiétude dont
personne que moi ne pourra se faire une idée. Les ex
trémités les plus malheureuses m’auroient paru quelque
fois' un bien infini. Je me rends inutilement chez le
sieur Daubusson , duquel je reçois pour toute réponse »
le c a p it a l ou Yagiot ; j’insiste, et il me réplique : arran
gez-vous avec M eyre , tandis que Meyre m’a dit : arran
gez-vous avec Daubusson.
Deux ou trois personnes qu’il ne convient pas de
nommer ici m’avoient bien promis de me prêter une
somme de 20000 liv. ( cette espérance cause en partie
mes malheurs ) •, ces fonds manquent, et cependant
la crainte des poursuites inouies que les agioteurs
étoient dans l’usage d’exercer, des ménagements pour
mon père et pour ma famille, la considération que j’ai
tant souhaité de me conserver, et que ces misérables
ont tenté de mo faire perdre, me forcent de renouveller de six en six , et de trois en trois mois ; mon
épouse qui partage mes sentiments , mon épouse qui
se flatte d’une espérance aussi vaine que m oi, m’engage
aussi à ce fatal et continuel renouvellement ; elle et moi
passons sous silence les chagrins que nous avons dé
vorés à ce sujet. Puissent les âmes honnêtes être saisies
d’horreur à l’aspect de pareils hommes, et de leurs as
sociés bien connus*
C e p e n d a n t j’avois déjà payé au sieur Meyre environ
six mille liv. à la fin de l’an dix; postérieurement je lui
ai donné quelques à compte , en le conjurant toujours
'de réduire cet intérêt qui alloit infailliblement dévorer
�ma fortune. Je l’ai pressé plusieurs fois de me laisser
connoitre par ses registres l’état des effets qu’il régloit
à son g ré, et il ne m’a donné qu’une fois cette satisfac
tion ; c’étoit en l’an onze, j’avoue même que je n’ai
pas été satisfait. On va voir qu’il ne falloit pas s’en
rapporter uniquement à lui.
En l’an treize , il me dit qu’il faut des fonds, il me
promet astucieusement une réduction considérable à
condition que je lui payerai une forte somme, j’y sous
cris , mais comment ferai-je ? je ne peux vendre sans
diminuer hors de toute proportion les revenus d’une
propriété considérable que je possède à Pierrefort, et
dont onconnoît aujourd’hui la valeur par l’afiiche que
j’en ai fait. L e sieuv Meyre est de mon a vis, il m’en
gage à faire une vente de 4oo septiers de bled , délivrablc en quatre ans , à quatorze francs le septier, me
sure de IVlurat, il retient les cinq mille six cents liv. que
produit cette ven te, il garde l’acte de vente entre ses
mains , et au lieu de diminuer le taux de l’usure , il me
répond que je n’ai pas fait un remboursement suffisant.
Je dévore ce trait inoui de perfidie, et je me tais.
Ce dernier procédé m’assure qu’il faut par la suite
retirer moi-même les lambeaux des lettres de change
lacérées, si je ne veux laisser périr totalement ma for
tune par la dévorante activité à renouveller, qu’em
ploient les sieurs Meyre et Daubusson.
J avois déjà tenté plusieurs fois de vendre tout ou
partie des biens dont je viens de parler ; mais comme
les agioteurs accaparent plus que jamais les fonds des
capitalistes, je ne peux vendi'e^ je tente de me faire
�d’autres ressources pour payer au moins partie aux
adversaires ; je suis forcé de contracter d’autres enga
gements qui, quoique onéreux, ne seront pas contestés
de ma p a rt, tant ils sont éloignés du taux énorme que
les sieurs M cyre et Daubusson ont adopté. Je rem
bourse donc plus de vingt-un mille liv., ce qui excède
de beaucoup le capital ; ensorte que ce qui est dû au
jourd’hui ne présente que des intérêts, cl intérêts des
intérêts.
Je tente in u tile m e n t à plusieurs reprises d’obtenir
une diminution auprès .du sieur Daubusson. Je me dé
te r m in e à revenir à Clerm ont, en foire de mai 1806 ;
tout ce que je peux obtenir est une diminution qui
porte à 18 pour ojo l’intérêt, en payant cet intérêt
dans deux m ois, et le capital en novembre suivant.
Il ne sortira jamais de ma mémoire que le 9 mai 1806,
jour où en présence du sieur Meyre je renouvellai les
effets éch u s, chez ledit D aubusson, un commis à fi
gure basse épioit mes moindres mouvements \ que les
sieurs M eyre et Daubusson n’avoient pas meilleure
m in e} que lorsque je pris et déchirai les effets précé
dents , un sourire pénible, mais dur, dérida un moment
leurs traits qu’avoit sans doute altérés une conscience
coupable, et que sortant de ce gouffre, je me dis tris
tement , le& yeux presque gros de larmes, où suis-je ?
que deviendrai-je ?
Q u o iq u ’ il en so it, à l’échéance des effets, même
embarras de ma p a rt, même rigueur , même dureté de
la le u r, menaces d’emprisonnement, de saisie, d’ex
propriation \ ei>iin, renouvellement forcé de mes effets
�( 7 )
le i 5 mai dernier, toujours à 18 pour o/o, sans éclater
contre les propos menaçants du sieur Meyre.
L ’échéance de ces derniers effets n’étoit pas encore
arrivée, lorsqu’il s’est fait une levée de boucliers parmi
les agioteurs, et qu’au lieu de céder aux sollicitations
portées par deux lettres au sieur Daubusson, mais qu’il
a laissées sans réponse, ils ont eu l’impudeur pour
20000 liv. d’intérêts usuraires et accumulés, d’àffecter
et de répandre une crainte d’insolvabilité, de grossir
des inscriptions, et d’allarmer des créanciers heureu
sement peu nom breux, tandis qu’ils n’ignoroient pas
que je possédois une fortune de plus de 200000 l i v .,
suivant l’évaluation ordinaire de notre département.
Ils font plus, me voyant afficher la majeure partie de
ines biens, ils ont répandu qu’à mon tour je voulois
imiter leur agiotage : les misérables !
Disposé a faire dés sacrifices qu’une faute produite
par la nécessité avoit rendus inévitables, en méprisant
leurs calomnies, j’ai cru ne pas devoir franchir les
bornes de la modération et de la loyauté ; je leur ai
dit que je payerois, mais qu’il falloit un peu de temps j
que ces intérêts étoient trop forts, que quelques re
mises seroient justes , etc. etc.
Ma patience a doublé leur ardeur, et soit qu’ils
1 attribuassent à la crainte , soit que par des procédés
violents et des menaces affreuses, ils aient cm m’emnieuer à détruire jusqu’aux traces de leur infâme agiotae>e > ils ont montré la même audace. L e sieur M eyre,
en présence de personnes dignes de f o i, a osé me
pioposer d attendre trois mois seulement, sous la condi-
�c, 8 ? . ,
tion de lui payer encore l’intérêt à 18 pour o/o, de lui
donner une caution, de lui remettre les effets qui font
ma preuve , ou de lui déclarer qu’il n’a voit perçu que
le taux légal. J’ai contenu mon indignation en repous
sant sa proposition; il a osé me proposer un jugement
auquel j’acquiescerois , ou dans lequel je déclarerois
que la créance:est bien et légitimement due au sieur
Daubusson ; même refus de ma part. Enfin , il a osé
me dire et répandre en public qu il ne m’avoit prêté
qu’à i5 pour o/o, tandis que la notoriété publique
l’écrase, tandis'que ses propres écrits à la m ain, et ses
lettres de change endossées par lui ou par le sieur
Daubusson, établissent d’une manière invincible qu’ils
ont porté le taux de l’usure jusques à 33 pour o/o, et
qu’ils ont accumulé intérêts sur intérêts.
Cependant ils viennent d’obtenir le 24 août dernier,
sous le nom du «sieur Daubusson, un jugement par dé
faut , qui me condamne au payement de vingt mille
deux cents liv ., montant de cinq lettres de change ; et
ce jugement est rendu dans la propre cause du greffier
M eyre , par le sieur Béraud, son cousin germain allié,
par le président, qui doit savoir que des affaires ma
jeures sont à démêler entre lui et moi. Le sieur M eyre
fait plus, il répand que nous sommes convenus d’un
jugement auquel j’acquiescerai, tandis qu’il l’a fait
rendre parce que je n’ai pas voulu y acquiescer de la
manière proposée, et que je lui ai laissé la faculté de
prendre scs avantages ; tandis que de suite il me l’a fait
signifier, et qu’il s’est inscrit, le tout contre une parole
donnée, comme ces sortes de gens la donnent.
�C9>
Si j’écrivois pour le tribunal de commerce de St.
F lo u r, je lui dirois que ce jugement est nul, parce qu’il
est rendu pour des personnes qui ont contre moi des
engagements de la nature de ceux que j’attaque, et par
des personnes qui ont aussi à régler des intérêts ma
jeurs avec moi.
Je leur dirois que le sieur Meyre est souvent partie
dans les affaires de commerce de ce tribunal ; que lui
greffier écrâse en frais une foule de propriétaires, qu’en
un mot il est du nombre de ceux qui agiotent au sein
même du tribunal.
Sans doute, Son Excellence le G ran d- Juge, informé
des abus qui se sont glissés dans les tribunaux, et de
ceux qui se commettent journellement au tribunal de
commerce de St. F lo u r, y mettra un ordre salutaire.
Les bons esprits n’cn doutent pas.
Je leur prouvcrois encore que cette espèce de tri
bunal est incompétente.
Mais comme j’écris pour le p u b lic, comme j’écris
principalement pour les juges qui connoîtront de l’u
sure et de l’agiotage dont je me plains, je vais rappeler
tes principes immuables qui doivent faire annuller les
actes de prêt à usure, en forme de lettres de change,
qui m ont rendu débiteur des sieurs M eyre et Daubuss° n , et qui doivent me faire restituer les produits
énormes de leur usure.
Il est de principe chez toutes les nations, et princi
palement en France que l’usure est un délit puni par
les lois, et que l’usurier est tenu à la restitution des
sommes qu’il aperçues de trop, qu’il est même soumis
2
�C 10 )
à des peines capitales. Je ne leur rappellerai pas les
principes du droit divin, ni môme la religion naturelle-*
la charité, Ici fraternelle charité ; leur cœur pourri est
fermé pour jamais à ce sentiment, et avertit la société
d’ètre en garde contr’eux ; je leur rappellerai les lois
qui les atteignent, en attendant que la Providence en
fasse justice.
Un capitulaire de Charlemagne, de 789, dressé à
A ix-la-C h ap elle, un de Louis le débonnaire, son fils r
de 8 1 3 , l’ordonnance de Louis I X , de 1254, celles de
Philippe le h ard i, de 12 74 , de Philippe I V , de i 3 i i*
de Philippe de V alo is, de i 34<), de Louis X I I , de
i 5 i o , de François Ier. , de i 535 , de Charles I X , de
i 56o , l’art. 147 de celle d’Orléans, de Henri III,
de 1576, celle de B lo is, de *1579 >art- 202, celles de
fleu ri IV , de i 594 > de Louis X III, de 1629, art. i 5 r,
celle de Louis X IV , de i 6j 5 , tit. 6 , portant défenses
aux marchands et à tous autres d’englober les intérêts
dans les lettres de change , et de prendre intérêts sur
intérêts, Toutes ces lois punissent de l’amende hono
rable ,, du bannissement et même de galère , au cas de
jé c id iv e , tous les usuriers connus aujourd’hui, tant sous
ce n o m , que sous celui d’escrocs et d’agioteurs.
' Divers arrêts rendus en 1699, en 1736, en 1745»
en 1752, ont,Consacré ces principes.
- Il n’est qu’à voir si ces principes s’appliquent à mon
espèce ; l’affirmative ne sauroit laisser de doute.
En effe t, les sieurs Meyre et Daubusson ont entre
tenu pendant cinq ans avec moi une relation de prêi
à usure, à 3 o , à 2 8 , à 24, à 18 , sous les couleurs de
�C rO
lettres de cl lange, portant la contrainte par corps.
Mais ces lettres de change sont des titres faits eh
fraude du code c iv il, qui défend à tout T rançais qui
n’est pas commerçant, ou qui n’est pas dans les cas
prévus aux art. 2o 5c) et suivants, de consentir à la con
trainte par corps. O r, je n’ai jamais fait de commerce
avec qui que ce soit ; les adversaires n’en ont fait ni
avec moi ni à mon occasion ; mes effets n’ont jamais
passé dans le com merce, ils se les sont réciproquement
endossés , et les ont gardés daris leur cabinet ; ce n’est
donc qu’à l’aide d’une fausse terreur de la prison, et
d’une exécution prompte et violente , qu’ils ont voulu
se procurer des lettres simulées , en fraude de la lo i,
tandis qu’ils dévoient se contenter d’une simple obli
gation de prêt; ils ont donc doublement violé la loi à
mon égard, i°. en ce qu’ils ont abusé de ma position
pour dénaturer un simple prêt ; 2 °. en ce qu’en le dé
naturant , ils ont exigé un intérêt usuraire et prohibé.
Ils diroient vainement que la simple lettre de change
me rend justiciable du tribunal de commerce ; je letir
réponds que des lettres qui sont nulles, qui contiennent
cumulativement capital et intérêts usuraires , et qui
sont un simple prêt déguisé, ne sauraient être de 1 at
tribution de ce tribunal.
, Il ne faut pas sans doute des preuves plus évidentes
que celles rapportées de ma p art, pour établir que ces
lettres n’ont pour objet qu’un prêt usuraire déguisé.
Les lettres que je tiens dans mes m ains, les comptes
et notes écrits par le sieur M eyre lui-même, ses propres
registres qu’il tient cachés, et ceux du sieur Daubusson ,
�c 12 y
la notoriété publique qui les flétrit, tout dépose hau
tement que les sieurs Daubusson et lui ont prêté à une
usure énorme , quoi qu’ils n’aient fait aucun, commerce'
avec moi.
Diront-ils que j’étois- majeur et homme d’affairesr
que dès lors je savois ce que je faisois? diront-ils qu’ilsne sont pas venu&me chercher pour, prêter ces fonds ?
Qu’un pareil raisonnement est puéril et de mauvaise
foi ! Et q u o i, l’homme d’affaire et le majeur ont-ils pu.
se mettre à l’abri de la nécessite ? Est-il une puissance
qui puisse les y soustraire ? Non. Eh bien, vous, M eyre,
vo u s, Daubusson et vos pareils, vous avez introduit
cette affreuse nécessité , vous êtes alléf accaparer tous
les fonds que vous avez pu découvrir, il n’est pas jus
qu’au salaire des gens à gages que vous n’ayez pris pour
en retirer l’usure, au moyen de laquelle vous avez mis
et vous réduisez une foule de familles à la misère ; et
vous avez le front de dire que vous n’allez pas cher
cher les emprunteurs, et vous leur dites que les ma
jeurs et les hommes éclairés doivent savoir, ce qu’ils
fo n t, vous osez, le d ire, et la société ne vous vomit pas
hors de son sein !
Dites-le m oi, quel droit avez-vous eu d’élever l’ar
gent que vous prêtez, à un taux au-dessus de celui fixé
par la lo i, à un taux inoui? aucun, si ce n’est celui du
voleur qui enlève la bourse‘ du passant, aucun., si ce .
n’est celui de la dure nécessité où vous avez mis ceux
que vous deviez regarder comme vos frères et vos amis»
et qui ne devoient bientôt devenir que des esclaves que
vous jeteriez dans des cachots.
�( . 3 )
Vous direz peut-être que l’argent est une marchan
dise ; autre misérable absurdité ! D ’abord il n entre
point dans une tête bien organisée , que 1argent inonnoyé, qui est le signe représentatif des marchandises,
de tous les autres objets quelconques , puisse etie une
marchandise lui-même ; d’autre part, cette marchan
dise ayant un taux de produit fixé par la lo i, celui
qui l’a prêté n’a pu lui donner, sans se révolter contre
la lo i, ùn taux usuraire de 25 et 3 3 pour o j o .■
On,dira peut-être encore qu’on ne connoît pas d usure en France.
Mais nous n’avons besoin
pour
répondre a cette autre
ineptie , que d’ouvrir le code civil.
„ L ’in térêt, est-il dit art. 1907> est légal ou conven„ tionel. L ’intérêt légal est fixé par la lo i, l’intérêt con„ ventionnel peut excéder le taux fi;xé par la loi toutes
„ les fois que la loi ne le prohibe} as ; le taux de l’inté„ rêt conventionnel doit être fixé par écrit. „
L ’article 1 3 y 8 ordonne la restitution des sommes et
intérêts perçus de mauvaise foL
Je conclus de là que le taux excessif est prohibé par
la lo i, et qu’il est usure comme dans l’espèce ; je con
clus encore que l’intérêt exigé de moi par les sieurs
Meyre et Daubusson , est usure, parce qu’ils ont évite
1 I j
•
de le stipuler par écrit, c’est-à-dire par convention cer
taine et dénommée. Je conclus donc que le Législateur
reconnoît qu’il peut y avoir usure, et qu’il entend la
punir.
Cela est d’autant plus vrai que j’ai en mes ma^ns
une lettre certifiée, en bonne forme, de son Excellence
«
�C *4 )
Monseigneur le Grand Juge, datée du 7 prairial an xiii,
qui porte que l ’on doit agir en restitution devant les
tribunaux civils contre les usuriers ; et que le journal
des débats du 3 floréal an x i , en rapporte une pareille
de s o n Excellence au Procureur impérial de Montreuilsur-mer ; cela est d’autant plus vrai encore , c’est que
les diverses Cours et Tribunaux ont condamné cer
tains usuriers à cinq ans d'emprisonnement, à vingt,,
à trente , à deux cents mille liv. d’amende, et que dans
l ’universalité des départements le taux de l’argent a
été remis à cinq pour cent ’, par suite de ces divers ju
gements , et des principes que les agioteurs avoient
cherché à dénaturer.
Il
est donc bien vrai que j’ai été victime d’une usure
immodérée ; il est vrai que les lettres de change simu
lées dont on a obtenu la condamnation, ne sont que
des prêts déguisés faits en fraude de la lo i, pour avoir
la contrainte par corps , qu’elles ont été exigées de
moi pour me contenir par une crainte chimérique, que
cet intérêt usuraire est le fruit d’une escroquerie pra
tiquée sous ces titres colorés ; que ces titres sont nuls
dès qu’ils supposent un négoce qui n’a jamais existé y
qu’il doit m’être rendu compte des intérêts usuraires
perçus au de-la du taux légal.
Je termine une lliscussion dont l’objet m’a causé et
me cause bien des chagrins. Je pourrais appeller plus
particulièrement l’attention du public sur ces hommes,
q u i, non contents d’usurper ma fortune , ont osé atta
quer mon crédit et mon honneur, qui me déchirent
sourdement encore ; mais me bornant à mon affaire,
�( 15)
j’aurai le courage de les combattre avec .l’opinion des
personnes estim ables, desquelles seules je désire le
suffrage ; une famille honnête et nombreuse inspirera
sans douté quelqu’intérêt à la justice, et quoique les
mœurs soient perdues , il est aussi quelques âmes rares
qui auront résisté à la corruption, et qui sentiront vi
v ement ma position ; qu’elles reçoivent ici mes remercîments sur cette sensibilité qui est le partage des bons
cœurs, et qui m’a souvent soutenu. J’avoue que j’ai
résisté long-temps á former une action qui me répugnoit; mais j’en suivrai la chance avec une constance
que rien n’ébranlera.
J’ai informé leurs Excellences Messeigneurs le Grand
Juge et Ministres de l’intérieur et de la police générale
des exactions de mes adversaires; je ne sais si mes ré
clamations leur sont parvenues ; je les réitérerai, et si
quelques-unes des entraves que j’ai vu plus d’une fois
mettre à mes démarches se renouvellent, les auteurs
seront connus, et je les suivrai par-tout. L a France ne
doit pousser qu’un cri pour signaler une espèce
d hommes dont les annales des peuples ne fournissent
pas d’exemple-
�
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Factums Marie
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[Factum. Bru, Pierre-Alexis-Louis. 1808?]
Creator
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Bru
Subject
The topic of the resource
usure
agiotage
créances
abus
tribunal de commerce
libelle
Description
An account of the resource
Mémoire pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, avocat et premier suppléant de Juge à Saint-Flour, département du Cantal ; contre les sieurs Jean Meyre, greffier au tribunal de commerce de Saint Flour, et François Daubusson, de Clermont.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
Circa 1806-Circa 1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0505
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0506
BCU_Factums_M0509
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Talizat (15231)
Pierrefite-sur-Loire (03207)
Saint-Flour (15187)
Rights
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Domaine public
abus
agiotage
Créances
libelle
tribunal de commerce
Usure