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REPONSE
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A OBSERVATIONS!,
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POUR
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de C h an ze lles e t Ousclaux
com m une de la R o d d e , M
et J a c q u e s
intimés
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Jeanne
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JU L IA R D ,
leurs
C O N T R E
■
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i
M A B R U et J a c q u e s
,
G E N E I X ,« ^ .L ls iT
syndics > ¡ ^ ^ 2 ^ fyX^ / J ^ ,
A R F E U IL ,
son mari appelans.
I L est dans cette affaire, plusieurs faits constans qu’il ne
faut pas perdre de vue.
Le premier, c’est que les moulins de Gay sont situés
sur les communaux de Chanzelles, et que non-seulement
A
�( 2 )
Antoine Mabru l’a reconnu en première instance, par ses
défenses , comme par sa requête, cotes 6 et 10 de la pro
duction principale des intimés; mais qu’encore, pour le
prouver, et par là même écarter la demande des liabitans
d’Ousclaux, il a justifié de la reconnoissance du lieu de
Çhanzelles de l’année 1494.
Cet.âveu est extrêmement précieux, et les appelons ne
ÇeuYçnt.pasle révoquer en doute; encore moins prétendre
•^u&. c’est une erreur : ils ne peuvent pas détruire les
coméquences qui en. résultent, par une -plaisanterie , et
ën disant q u il est tout naturel qu'un moulin soit conjiné
* paY ttrî ruisseau.
'O u il le ruisseau qui procure le jeu des roues, peut
•êouler sur partie comme sur l’extrémité des communaux
* de Çhanzelles j mais il est positif que les moulins sont
entièrement placés sur ces communaux; qu’ils en forment
dès-lors une dépendance; que cette circonstance, qui
pourroit être justifiée dans tous les cas par une vérifi*cation d’experts, établit une présomption de droit en
faveur des intimés : car tout de même que les appelans
n’auroient pu acquérir par la prescription aucune partie
de ces communaux , tout de même ils n’ont pu devenir,
par cette v o ie , propriétaires des moulins de Gay.
Les appelans répondent que les biens des villes et
communautés peuvent être prescrits; et ils invoquent
l ’opinion de M e. Dunod, png. 74.
Mais l’erreur seroit évidente, si l’auteur avoit entendu
dire ce qu’il plaît aux appelans de lui prêter, puisque
Dunod lui-même convient que l’aliénation de ces biens
ne peut avoir lieu que pour causes, et avec des formalités;
�(3)
et qu’ainsi, c’est en reconnoître l’imprescribilité , toutes
les fois que la nécessité de l’aliénation n’a pas été recon
nue, ni les formalités remplies. D ’ailleurs il est impos
sible de posséder, animo dom ini, des biens d’une com
mune , toujours en état de minorité ; des biens qu’on
n’auroit pu acquérir qu’en observant des formes rigou
reusement exigées.
Les appelans invoquent encore l’art. 9 de la section 4
de la loi du 10 juin 1793 : mais les intimés ont prouvé
dans leur mémoire que cette loi ne pouvoit recevoir
d’application à l’espèce; ils n’y reviendront pas.
Quant à l’article 2227 du Code c iv i l, les dispositions
qu’il contient forment un droit nouveau, et ne peuvent
dès-lors avoir d’effet que pour l’avenir.
Point de titres, ni de possession utile, de la part des
M abru : donc la présomption de propriété résultante de
la situation des moulins, reste dans toute sa force.
Un second fait, c’est que les intimés rapportent des
titres précis pour justifier leur propriété ; e t , à cet égard ,
la vente et le bail à’ferme des 11 juin et 17 novembre 1664,
la demande de 1 7 5 5 ,les quittances des30 novembre 1766 ,
et 21 novembre 1769, la déclaration même'donnée par
Meschin le i 5 juillet 1782 , ne laissent rien à désirer.
Les appellans prétendent qué le premier de ces actes
indiqueroit plutôt une propriété particulière, qu’un objet
commun.
Mais indépendamment de ce que la vente n’offre pas
le premier résultat, c’est que le bail justifie le second,
puisque ce sont les seuls liabitans de Chanzelles et Ousclaux qui afferment de leur chef les moulins, comme à
A 2
�( 4 )
'
eux appartenans,et moyennant une redevancequi doit être
payéeà un'des habitans pour employer à l’utilité commune.
- Ce bail 3 loin de prouver que les moulins avaient été
incendiés, prévoit seulement que cet événement pourroit arriver, et les parties arrêtent dès-lors ce qui sera
fait par chacune d’elles pour le rétablissement de ces
moulins : il ne peut donc pas exister de titre plus positif.
L a demande de 1755 n’est sûrement pas contradic
toire avec celle de 1779, quoique l’une ait pour objet
du blé, et l’autre de l’argent *, puisque toutes deux tendent
au désistement des moulins en question, de même qu’au
payement de la ferme desdits moulins.
J Les habitans, en formant la dernière, n’ont pas dû
reprendre l’effet de la prem ière, puisque tout avoit été
consommé, respectivement à celle-ci, par les nouveaux
arrangemens que les parties prirent ensemble.
Les quittances de 1766 et de 1769 , sufliroient sans
doute pour établir le droit des habitans , puisqu’Antoine
M abru, en payant à Meschin la ferme des moulins de
G a y , reconnut forcément qu’il ne jouissoit de ces mou
lins qu’à titre de fermier, et pour le c o m p t e exclusif de
ceux dont Meschin stipuloit les intérêts : ce n’est pas la
faute des habitans si le bail énoncé dans ces quittances
n’a pu être rapporté ; mais les parties n’en n’ont pas moins
attesté de bonne foi l’existence de ce bail, et Mabru n’a
pas moins souffert qu’il fût rappelé dans les deux quit
tances , et à des époques différentes. D ’ailleurs les oppelans
ont prouvé que les deux payemens avoient entr’eux une
corrélation parfaite, et se rapporloient également au prix
de la ferme des' moulins tfc Gay.
�Jo> y
( 5)
Dans la déclaration même de 1782 , quoiqu’elle soit
une précaution maladroite , Meschin et Mabru qonvinrent que ces deux quittances avoient pour cause le prix*
de la même ferme : il est donc impossible de rétrograder
sur la certitude d’un fait établi par tant de preuves.
En troisième lieu , les. appelans n’avoient fondé leur
possessiou des moulins de G a y , que-sur des circonstances
particulières : ils prétendoient qu’Antoine M abru, leur
aïeul, y étoit né ; que Pierre , père de ce dèrnier, y étoit
décéd é, et* qu’après l’incendie des moulins, ce même
Antoine Mabru les avoit rétablis.
O r , il est p rouvé, i°. par le conti’at de mariage de
Pierre M abru, du 2 février 1695 , qu’il liabitoit au lieu
du Ley rit, et non pas dans les moulins de G a y : il n’en
étoit donc pas propriétaire; 20. par l’acte de naissance
d’ Antoine M abru, de l’année 1697 , qu’il étoit né au
même lieu du Leyrit, et non pas dans les moulins de G ay;
30. par le contrat de mariage de ce même Antoine M abru,
du 28 octobre 1726 , qu’alors encore il étoit originaire
du lieu du L e y rit,e t valqt domestique en celui de V e iv
nines: donc il n’a pu entrer, qu’après celte époque, en
jouissance des moulins de Gay. A u s s i, et par l’exploit
de 17 5 5 , les habitons ne demandoient-ils ¿1 Mabru que
vingt-huit années d’arrérages de la ferm e, ce q u i rap<*
portail précisément à 1727 le commencement de la
possession de Mabru.
Les appclans ont produit l’acte mortuaire d’un Pierre
M abru, decedé, à ce qu’il paroît, au moulin de Gay*
en 1708.
Mais cet acte n’indique pas autrement le défunt*, et
�( 6 )
c’est bien aux appelans à prouver que c’étoit leur bis
aïeul, puisqu’en i 6 g 5 , Pierre M abru, représenté par les
appelans, étoit habitant du village du L eyrit, et qu’en
1726, surtout, Antoine M abru, fils de Pierre, se qualifia
originaire du même village, ce qui n’auroit pu arriver,
si Antoine Mabru et son père avoient jamais habité dans
les moulins de.Gay.
Les intimés ont donc eu raison de dire que si Pierre
M ab ru , mort en 1708, dans les moulins de G a y, étoit .
le bisaïeul des appelans, ce décès n’avoit pu arriver que
par accident ; et soit attaque d’apoplexie , soit toute
autre cause, ces événemens, ne sont malheureusement
que trop fréquens.
Il est vrai encore qu’Antoine M abru, père de Jeanne,
paroît être né dans les mêmes moulins, le 23 décembre
1727. Mais lu plaisanterie des couches anticipées est
absolument de l’invention des appelans.; car les intimés
ne l’ont dit, ni supposé, et môme l’intervalle de quatorze
mois, qui s’écoula entre le mariage du père et la nais
sance du fils, ne permettoit, ni de le dire, ni de le
supposer.
'
Ce que les intimés ont dit, et avec raison, c’est qu’en
1726 Antoine Mabru se qunlifioit originaire du Heu du
L e y r it , et valet domestique en celui de Vernines ;
qu’ainsi il n’avoit pu entrer dans les moulins qu’après
cettte époque : et les intimes ont fait remarquer, encoro
une fois, la concordance qui existoit entre ce fait et l’objet
delà demande formée par l’exploit de i 755
La trace de la jouissance des Mabru 11e se perd donc
pas dans la nuit des temps, comme ils osent le prétendre',
.
�(7 )
puisque les intimés démontrent que l’originé n’en re
monte pas au delà de 1726.
Cela étant, la demande formée en 17 55 , auroit'inter
rompu la prescription , s’il n’étoit pas d’ailleurs prouvé ,
par la nature de cette demande, qu’Antoine JVlabru
n’avoit joui qu’à titre de fermier, et par conséquent pour
les demandeurs.
•
.
Les appelans viennent de produire deux moyens nou
veaux , l’un en la form e, et l’autre au fond.
En la form e, ils opposent que les habitans en noms
collectifs n’étant intervenus que sur l’a p p el, les deux
degrés de juridictions n’ont pas été épuisés à leur égard,
et qu’ainsi c’est le cas de renvoyer la cause en première
instance, pour être jugée avec eux.
Mais les appelans n’ont pas voulu faire attention que
les syndics ont été reçus parties intervenantes, en la
sénéchaussée de Glermont, qui, quoique saisie de l’appel
ne pouvoit cependant pas juger en dernier ressort.
L ’on sait en effet que dans les anciens tribunaux on
recevoit habituellement, et môme dans les causes d’appel,
des interventions comme des demandes incidentes ; que
le toutétoit joint, et qu’on y statuoit parla même sentence.
O r , l'affaire actuelle, ayant été dévolue en la cour,
doit être jugée en l’état où elle se trouve. La cour
l’a décidé plusieurs fois de cetle manière : aussi la re
prise des poursuites, de la part des nouveaux syndics,
' a-t-elle été-ordonnée sans difficulté par la cour, et du
consentement même des appelans, porte l’arrêt du 14
messidor an 12. Voilà donc un point jugé d’une manière
irrévocable et sans retour.
�( 8)
- A u fond, les nppelans ont découvert et produit un
bail emphitéotiquedes moulins de G ay, consenti parles
habitâns de sept villages voisins, en faveur d’Antoine
M eallet, par acte du i 5 mai 1711,; ils concluent du rap
port de cet acte , ou qu’ils sont présumés représenter le
preneur à rente, ou que du moins ils ont pu prescrire
utilement contre l u i , puisque par ce même acte les intimés
avoient cessé d’être propriétaires des mêmes moulins.
Mais la première réflexion qui se présente, c’est que
le bail de 1711 étoit absolument nul, comme renfermant
line aliénation de biens communaux, sans l’observation
des formes prescrites par les lois du temps.
En effet, cette nullité étoit littéralement prononcée
par les édits de février i 55 $, mars 1600, avril 1667, et
même mois 1683. L ’avant dernier, après avoir autorisé
les communautés d’habitans à rentrer, sans aucune forma
lité , dans les fonds et biens communs par elles aliénés,
leur f it défense d'aliéner à Cavenir leurs usages et biens
com m unaux, sans quelque cause ,1011 pour quelque pré
texte que ce pût être, nonobstant les permissions quelles
pourroient obtenir à cet effet, à peine de nullité des
contrats , de perte du prix contre les acquéreurs. . . .
L ’ordonnance des eaux et forêts défend encore l’aliéuation des biens c o m m u n au x ; elle ne’perrnet pas même
aux habitans de faire aucune coupe dans leurs bois, le
cas d’incendie excepté.
A u s s i, le commentateur de cette ordonnance nous d it ,
sur l’article 8 du titre 26 : L es habitans des paroisses
ne peuvent vendre leurs biens com m unaux; et il cite
L o i s c a u , truité des seigneuries,cliap. 12, n°. i 5 ,« m oins,
continue-t-il,
�( 9)
continue-t-il, qu'ils ri obtiennent du roi une permission
de les aliéner, e t , à î appui, il rappelle une déclaration
du 22 ju in i 65 c).
Et non-seulement les communes ne pouvoient pas
aliéner leurs biens communaux, mais elles n’avoient pas
même la liberté de les cultiver; encore moins de les par
tager. Voici ce que nous enseigne R icard , sur l’article g6
de la Coutume de Senlis : L ic e t judicium commune di~
çidendo, n’ait pas lieu, in rebus univers itatis ; néan
moins le seigneur peut demander le tiers des pâturages
communs ; mais les tenanciers ne peuvejit pas
en ti’ eux partager les deux autres tiers : c'est la con
solation de celui qu i n'a plus de biens, d'avoir sa part
dans les communes q u on ne peut lui ôter. S'il falloit de
nouvelles preuves , on les trouveroit surtout dans l’arrêt
duconseil du mois d’avril 17 74 , rendu pourlepartage des
communaux en Alsace ; on les trouveroit dans la loi du
10 juin 1793 , sans laquelle nous n’aurions pas été les
témoins de tant de partages de biens communaux , dont
au reste l’abus n’a pas tardé à se faire sentir : et encore
cette loi n’avoit-elle admis ces partages qu’avec des for
malités rigoureuses, et sans l’observation desquelles les
biens communaux partagés doivent être restitués à leur
première destination. Aujourd’hui même les communes
ne peuvent aliéner1, ni autrement disposer de leurs biens,
pour aucune cause, sans un décret im p éria l-, et dèslors, la législation ancienne et moderne étant uniformes
sur ce point, il en jésuite la conséquence forcée que le
bail de 1 7 1 1 , nul dans son principe, n’a pu produire
d’effet réel dans son exécution ? vis-à-vis d’habitans touB
�0%
( io )
jours incapables d’acquérir comme de perdre ; et que
dans tous les temps les La illeurs ont été en droit, comme
ils le seroient encore, de révoquer leurs-engagemens.
Un autre principe non moins certain, c’est que les
communaux n’appartiennent à aucun habitant, ut singuli,
mais à tous, ut univers'. O r , -e bail de 1 7 1 1 ne fut
consenti que par quelques habitans particuliers des vil
lages de Chanzelles, Ouseclaux, etc.; donc nouveaux mo
tifs pour que la commune intimée n’ait jamais dû res
pecter un acte qui n’émanoit pas de son fait.
2°. Quoique les habitans de plusieurs villages aient
figurés dans le bail de 1711 , cet acte ne prouve pas moins
que ceux de Chanzelles et Ousclaux faisoient la loi >
puisqu’ils s’opposèrent au délaissement du pré dépendant
des m o u l i n s e t qu’en effet le délaissement n’eut pas lieu ;
circonstance que les appelans ont pris le soin de taire
dans leurs obsejvatio?is.
Une autre omission, peut-être plus importante, c’est
que l’acte en question renferme la clause qui suit : A la
charge par le preneur de jo u ir et exploiter ledit moulin
avec toute Texactitude et fidélité possibles , autrement
icelui se trouverait convaincu d'infidélité, les bailleurs
se réservent la liberté de Vexpulser dudit moulin sans
a ucun dédo m m agewen t.
Voilà donc, indépendamment de la nullité du bail,
une clause résolutoire, dont l’exécution est présumée de
droit avoir eu lieu par la cessation de la jouissance du
preneur.
3°. Les appelans, fol. 6 de leurs observations, préten
dent avoir vu y dans Cacte de 1711 , que les habitans ■
�bailleurs , se dispvtoient la propriété du moult n ; mai s
précisément l’acte ne dit rien de semblable, et cela prouve
que les appelans ne voient guère avec les yeux de la
bonne foi.
Ils disent, môme folio, que le moulin étoit assujéti à un
cens, en faveur du seigneur delà Rodde, et que dès-lors
il ne faisoit pas partie des communaux; mais les bailleurs
s’obligèrent , en deux endroits différons, à garantir le
preneur de tous cens , renies, taille et hypothèques, tant
envers le seigneur de la R o d d e , que tous autres qu’il
appartiendrait; d’ailleurs, un cens dû sur les com m unaux
il auroit été qu une preuve efficace pour les habitons ,
contre le seigneur, s'il avoit demandé le triage de ces
mêmes communaux.
Les appelans ajoutent, fol. 7 , que le bail annonce que les
moulins auraient eu bien des maîtres dans l’origine; mais la
vente et le bail de 1664 prouvent précisément que leshabitansde Chanzelleset Ousclaux étoient exclusivement propriétaires de ces moulins, comme situés sur les dépendances
de leurs villages, ainsi qu’Antoine Mabru le reconnut en
première instance , et le prouva même par le rapport de
la reconnoissance de Chanzelles, de l’année 1494 : donc
les liabitans des autres villages ne purent figui’er dans le
bail de 1711 , que par un abus du droit des intimés.
4°. L e bail de 1711 au moins prouve la fausseté des
faits articulés par les appelans, relativement au rétablis
sement du moulin après son incendie ; et dès-lors ils
ne peuvent plus fonder sur ce fait' la preuve de leur
propriété : c’est ainsi que leur défense n’a eu pour base
que des allégations, toutes maintenant démenties.
B a
�( 12 )
5°. On doit s'étonner de voir que l’expédition de Pacte
de 1 7 1 1 ait été délivrée à Jacques A r j e u i l, m ari de
Jeanne M a b r u , comme représentant A n toin e M eallet,
preneur à bail - car c’est une nouvelle fausseté , et les
appelans ont évidemment trompé le notaire , en obte
nant, de son imprudence, une mention qu’on les délie
d’établir.
Mais quand les Mabru représenteroient M eallet, ils
n’en seraient pas plus avancés , car ils ne pourraient pas
avoir plus de droits que lui ; et s’il est certain que l’acte
étoit n u l, et que Meallet aurait pu être eu tout temps
dépossédé, la condition des Mabru ne pourrait pas être
plus favorable.
C’est donc envain que les appelans prétendent faire
présumer en leur faveur un titre de propriété par l’an
cienneté de leur possession , puisque la possession ne peut
avoir ce caractère qu’autant qu’elle a été utile. O r , on
yient de prouver que celle de Meallet lui-mème étoit
vicieuse, d’après son titre : donc les Mabru , qui n’ont
jamais eu de titra, n’ont pas pu posséder légitimement ce
qu’ils n’auroient pas pu acquérir ni prescrire.
Les intim és, au contraire, dont la propriété a com
mencé avec l’établissement des moulins; les intimés, qui
ne l’ont jamaiscédée ni pu perdre, sont,à plus jllS(0 titre,
présumésdedroit a voir repris la jouissance de lours moulins
au moment où Meallet les abandonna. Il ne faut pas oublier
que l’acte de 1 7 1 1 , nuldans son essence, renfermait encore
une clause résolutoire, et. des-lors les propriétaires avoient
deux raisons air .lieu d’uno pour chasser Meallet. Iliil'ectivemerçt* ce particulier ce&ia d’exploiter les moulins; le
�.4.
( i3 )
fait est certain, par la jouissance même des Mabru : donc
ceux-là seuls, qui étoient propriétaires, furent autorisés
à disposer de la chose à eux appartenante.
Il n’est donc pas douteux que toutes les présomptions
ne soient du côté des intimés ; et s’il est vrai que Pacte
même de 1711 n aurait pas pu leur nuire comme illégal,
et leur étant cCailleurs étranger, il f e s t , à p lu sjb r te
raison , qu à Vinstant même où M eallet cessa de jo u ir ,
les habitans rentrèrent dans la plénitude de leurs droits
sur les moulins de Gay.
Les Mabru , de leur p a r t , n’avoient pas de droit
préexistant à ces moulins : ils ne peuvent donc pas invo
quer les mêmes présomptions; il leur faudroit un titre,
et ils n’en ont aucun.
<
•
Mais il y a plus , et les intimés ont établi dans leur
m ém oire, que les Mabru n’avoient joui que comme fer
miers, preuve la demande du 12 avril 17 5 5 , qu’on ne
s’avisa pas de contester ; preuve , les quittances de 1766
et de 1769 , d’après lesquelles Mabru 11e paya qu’en cette
qualité ; preuve encore, la déclaration donnée par Meschiu le i 5 juillet 1782 , qui offre les mêmes résultats.
Les appelans ont beau dire, avec D um oulin, que l’erreur
de celui qui reçoit sa chose ne lui préjudicie pas. On ai
déjà répondu , d’un côté, que chacun est libre de renoncer
a un droit acquis; de l’autre , qu’ une erreur gém inée,
comme IViuroit été celle d’ Antoine M ab ru , ne se présume
pas; mais que ce,qui exclut foute idée d’erreur, c’est que
les quittances se r. ttachent , tant à la demande de 17^5
qu à la déclara (uni de 1782, et que ces pièces, par leur
ensemble , démontrent qu’Antoine Mabru ne fut autre
chose que le fermier des habitans.
�C m -)
' A In vérité, les appelans, dons leur mémoire, comme
dans les observations , n'ont pas craint ù'avancer que ,
par le contrat de mariage d’A ntoine M a bru , du 10
¿février i y 5 i , ses père et mère Va voient institué leur
héritier universel, et lu i avoient délaissé en avancement
d’hoirie la, jouissance des moulins.
Mais outre que ce fait auroit été très-insignifiant,puisque
Antoine Mabru n’auroit pas pu , de son propre m otif,
changer la nature de sa possession , ni devenir proprié
taire, deiermier qu’il éloit, c'est que le contrat de ma
riage ne contient p a s'd e clauses semblable. On y voit
bien une institution générale, mais rien de plus; on y
voit une pareille institution en faveur de la future, avec
un avancement d’hoirie de la somme de 400 francs, paya
bles à termes : on y voit bien que les père et mère de la
future promettent de venir habiter avec les Mabru , et
qu’en cas d’incompatibilité ces derniers s’obligent de leur
fournir un logement dans une autre maison ; mais voilà
tout , et les moulins de G a j ne.furent l’objet d’aucune
clause de cet acte.
K
Ainsi les habitans avoient eu raison de soutenir que
le fils Mabru avoit été, pendant plusieurs années, fermier
des moulins de G a y , et qu’après son décès seulement,
le père en avoit repris la jouissance.
,
O r , étant démontré que 'Mabru ne jouissoit des mou
lins que comme fermier, et que celle qualité n’avoit pu
lui être attribuée que par le fait des demandeurs, qu’ainsi
il n’avoit possédé que pour eux , il faut convenir que la
découverte des appelans n’est pas heureuse, et que ce qui
est le mieux prouvé par l’acte de 1711 , c'est que les
�( i5 )
M abru en ont imposé, lorsqu’ ils ont soutenu, dans tous
les actes de la procédure , que les moulins avoient été
rétablis par leurs soins et à leurs frais.
A u surplus, il seroit bien extraordinaire que les appelans , qui ne prétendent avoir possédé utilement qu’en
vertu de l’acte de 17 x 1, puissent cependant se placer dans
une position plus avantageuse que n’étoit celle de Meallet.
En effet, ce dernier ne jouissoit pas du pré dépendant
des moulins , et les Mabru- en jouissent. Meallet payoit
une redevance, et faisoit moudre gratuitement les grains
des liabitans, tandis que Mabru refuse l’une et l’autre :
fut-il jamais de prétention plus injuste, et même plus
ridicule !
Mais, quoi qu’en disent les appelans , ils o n t , comme
M eallet, payé la redevance, tantôt d’un setier blé, d’après
la demande de 1755, tantôt de 10 francs argent, suivant
les quittances de 1766 et de 1769. Ils ont aussi fait moudre
gratuitement les grains des habitans, comme cela résulte
de la déclaration de 1782, par laquelle Meschin se réserva
le droit de mouture pour l’avenir ; et d’ailleurs les intimés
sont en état de prouver ce fait, si la déclaration de 1782
ne paroît pas suffisante.
Voilà donc de nouvelles preuves que les Mabru n’ont
joui des moulins de Gay que pour les habitans, et comme
leurs colons.
.
Suivant les appelans, la ferm e des m oulins se diviseroit
en douze cents parties.
Mais l’objection s’écarte par les dispositions de la Cou
tume , qui limite les communaux par tenemens , et qui
ne permet pas aux habitans d’un mas de faire pacager
�( i 6 )
leurs 'bestiaux , et encore moins d'exercer des droits de
propriété sur Jes biens communs d’un village voisin ; aussi,
soit avant, soit après le bail de 1 7 1 1 , les hnbitans de
Chanzelles et Ousclaux ont-ils seuls exercé des droits de
propriété sur les moulins de Gay.
En résumant ces observations, il n’est vraiment pas de
cause plus claire, puisque les adversaires , malgré tous
leurs efforts, n’ont encore découvert que des titres étran
gers à eux. A in s i, les voilà réduits à exciper de la pos
session , puisqu’ils n’ont pas d’acles de propriété.
O r , leur possession n’est pas de nature à opérer la pres
cription , eussent-ils joui per mille annos , comme dit
Dumoulin. En effet, il suffit qu’ils aient joui comme fer
miers à une époque quelconque, pour qu’ils soient réputés
avoir un titre vicieux qui n’a pu changer par leur fait ;
car nemo potest sibi mutare causant possessionis.
Celui qui a été fermier n’a jamais joui pour son compte;
c’est, au contraire, celui à qui il a payé la fernîe qui a
possédé d’après les principes: V er colonum et inquilitium
possidemus nique usu capimus.
A in s i, c’est là où est toute la cause; les liabitans prou
vent que le moulin provient d’e u x, soit par les actes de
1664, soit même par l’acte de 1711 qu’on leur oppose.
L ’exploit de i j 55 prouve que les Mabru étoient fer
miers depuis 1727 ; ce qui s’adapte sans peine à l’acte de
1 7 1 1 , et aux actes de mariage et de décès de 17 26 et 1727.
Les.quittances de 1766 et 1769 impriment à Antoine
Mabru la qualité de fermier du moulin de Gay par son
propre fait; il ne peut donc la détruire que par un acte qui
l’ait rendu propriétaire : on n’en rapporte aucun.
A in s i,
�A in s i, il est évident que Mabru n’a voulu qu’abuser
de sa longue résidence au moulin de Gay ,pour se l’appro
prier ; et qu’au fait il est si loin d’être propriétaire, qu’il
n’a ni titre ni possession, tandis qu’il ose lutter contre de
vrais propriétaires, qui ont des titres et une possession
continuée depuis 1664 , tant par eux que par les fermiers
par lesquels ils possédoient.
Faut-il maintenant s’appitoyer sur le sort des appelans,
q u i , s’il faut les en cro ire, ne possèdent pas autre chose
, dans le monde ? Mais ne sont - ils pas propriétaires,
dans le village de la R o d d e, d’une maison en valeur au
moins de 300 francs? N ’est-il pas justifié, par le contrat
de mariage de
1751que la mère de Jeanne Mabru étoit
riche dans sa condition ? Sa fille ne peut donc pas être
si malheureuse : tant d’autres avant elle ont tenu le même
langage, et n’ont pas réussi ! les appelans, sans doute,
éprouveront le même s o rt, et la justice ne tolérera pas
plus long-temps leur injuste détention.
M. C O I N C H O N - L A F O N T , rapporteur.
M e. D E V È Z E , avoué.
A RIOM, de l’imprimerie de L andriot, seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Fructidor an 13.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Michel. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafont
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à observations pour les habitants de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, Michel Geneix, et Jacques Juliard, leurs syndics, intimés ; contre Jeanne Mabru et Jacques Arfeuil, son mari, appelans.
Annotation manuscrite: « Le 4 fructidor an 13, 2éme section. Jugement déclare non avenue les dispositions interlocutoires de la sentence du 20 octobre 1781, et confirme quant au surplus, mais à la charge de rembourser aux appelants les montants des constructions et réparations faites au moulin depuis 1727 suivant estimations. »
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
17 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1524
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
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A related resource
BCU_Factums_G1521
BCU_Factums_G1522
BCU_Factums_G1523
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Larrode (63190)
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Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53263/BCU_Factums_G1523.pdf
ddcd8ade1b7e1b6d3363656cf537b5f5
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
EN
RÉPO N SE
Au mémoire signifié le I er. therm idor,
POUR
Jeanne
MABRU e t J a c q u e s ARFEUIL,
mari, appelans;
son
f■
'
;
CONTRE
I
L e s H a b i t a n s e t C o r p s c o m m u n des lieux de
,
,
Chanzelles et Ousclaux commune de la Rodde
M i c h e l G E N E I X et J a c q u e s J U L I A R D ,
se disant leurs syndics , intimés.
L
moulin
E
de Gay ,dont les habitans de deux villages
veulent être propriétaires, ut universi, est possédé de
temps immémorial par les appelans ou leurs auteurs.
�C2 )
Si on en croit les intimés, cette longue possession n’est
qu’une chimère : les ancêtres des appelans sont nés ou
morts dans ce moulin par accident ; c’est-à-dire, que les
intimés, pour écarter les inductions d’une jouissance qui
se perd dans la nuit des temps, n’ont d’autre ressource
que de supposer des couches précipitées ou des attaques
d’apoplexie.
Est-ce bien sérieusement qu’ils ont eu le courage de
proposer de semblables moyens ? Quel est donc leur
intérêt ? D eux villages en corps commun veulent arra
cher à un individu la seule p ro p riété, le seul bien qu’il
ait sur la terre , l’unique ressource d’une .nombreuse
famille. L e plus haut prix de la prétendue ferm e, ou
location de ce m oulin, ne sejporte qu’à une somme de
dix fr a n c s par année , divisible entre environ douze
cents personnes.
>, i >
Suivant les intimés, ils sont propriétaires, et les appe
lans ne sont que des usurpateurs. Ils prétendent, i°. que
le moulin est bâti dansrles communaux de Chanzelles,
et que ce fait est reconnu entre les parties. C’est ici une
première erreur : le moulin est confiné par un ruisseau
( chose assez naturelle ). Il est limité d autre part par
les communaux; et il faut bien être confiné par un point
t
*
plus ou moins reculé. Mais de ce que les communaux
de Chanzelles servent de confin , la seule conséquence
raisonnable qu’on puisse-tiren de cette circonstance, c’est
qu’il ne fait pas partie des communaux ; parce que les
confins ne peuvent faire partie de la chose confinée.
Les habitans croient encore établir leur propriété par
plusieurs titres dont ils-argumentent.
�f c i ) .............................
L e prem ier1est un acte du n juin 1664 j p 3** lequel
Antoine Gaÿ^'fils à fe u ’Etienne1, du villageide Chanzelles, vendit à Joseph 1Bonhomme , du villagé de V e rnines1, tous les droits , part et portion qui *pôuvoient
lui compéter au moulin appelé de'. G a y , ¿ifcue dans les
appartenances de Chanzelles, avec promesse de garantir
de tous troubles , etc. '*> •'•••
‘r
Il semble qu’on doit plutôt conclure de cette vente,
que le moulinf contentieux;étoit une propriété particuculière, et non une propriété appartenante au corps
commun.
i°. L e nom- du vendeur ,:q u i-s’appelle G a y , déno
mination qui est celléi d u 'm o u lin , et qui n’a d’autre
origine que le nom du premier propriétaire, comme
011 en voit tant d’exemples.
■
> 1 > -,
(2°. L ’aliénation d’une part indivise dans ce m oulin ,
annonce le-droit d’un cohéritier, et jamais celui d’un
habitant, q u i, dans aucun cas, ne peut aliéner une pro
priété publique, encore moins avec garantie ; bien moins
encore à un étranger.
11 faut donc en conclure que cet immeuble appartenoit
à la famille Gay; plutôt qu’aux habitons de Chanzelles.
Le second acte dont justifient les ‘intimés, est un bail
de ferme de ce même objet, consenti par les liabitans
de Chanzelles et d’Ousclaux, le 17 novembre 1664, au
profit de Claude D elcros, moyennant un setier de blé
seigle, payable pendant sept années au profit d’un nommé
François Baudevoix, qui promet d’en rendre compte au
surplus de la commune, pour l’employer aux répara
tions du moulin.
2
�( 4 )
Ce b a il, si rapproché de la vente particulière d’A n
toine G a y , fait supposer que cette famille avoit aban- donné le m oulin, et que les liabitans à qui il pouvoit
11 être utile s’en étoient emparés : cela est d’autant plus
%vraisem blable, qu’il paroît résulter de ce titre que le
■^moulin avoit été incendié et détruit; car les bailleurs y
prévoient le cas d’incendie, et en même temps s’obli
gent d’y conduire des meules pour faciliter la jouissance
du preneur, qui doit moudre leurs grains gratuitement.
Mais bientôt la trace se perd, et on voit une jouissance
continuelle de la part des M ab ru , auteurs des appelans :
- l ’un y est mort le 1 7 'avril 1708; l’autre y est né le 23
septembre 1727; et depuis, jusqu’à ce jour, les Mabru y ont
vécu , s’y sont m ariés, et y sont m orts; ils en ont disposé
comme de leur chose propre : on voit même qu’Antoine
M ab ru , aïeul de Jeanne, appelante, a donné ce moulin en
avancement d’hoirie à son fils, par contrat de mariage du
10 février 1761.
;. .
Ce n’est pas là le caractère d’une jouissance précaire:
leshabitans, sans doute, auroient réclamé contre une dis
position qu’ils ne pouvoient ignorer, puisqu’elle étoit
contenue en un contrat de mariage publiquement fait
sous les yeux de tous les liabitans.
C’est alors que les intimés disent que si Pierre Mabru
est mort dans c e moulin, c’est qu’il y a péri par accident.
Ils auroient pu dire aussi que la mère d’Antoine Mabru
y est accouchée par hasard, et qu’Antoine M abru a
aussi e m p r u n t é le moulin, comme l’endroit le plus com
m ode, pour y célébrer les noces de sou fils.
Dans tous les cas, disent les intimés, si les auteurs
�( 5 )
des appelans sont entrés dans ce m oulin, ils n’y ont
demeuré que comme fermiers : n’ont-ils pas- été assignés
par exploit du 12 avril i y 5 5 ? et si cet exploit n’a pas
eu de suite, c’est que M abru s’est rendu justice. D eux
quittances, des 30 novembre 1766, et 21 novembre 1769,
prouvent que le prix de la ferme fut payé par A ntoine
M abru à François M escliin, l’un des liabitans, pour les
années 1763 et suivantes , jusques et compris 1768.
Ces deux quittances ne sont pas une production nou-.
velle ; elles ont toujours été la base du procès depuis sa
naissance ; et les appelans les ont discutées avec assez
d’étendue, soit dans leurs écritures, soit dans leur mé
moire. Ils ont dit qu’on ne voyoit rien dans la première
qui eût le plus léger rapport avec le moulin de G a y ,
dont elle ne fait aucune mentio'n.
Pour la seconde, ils s’étonnent que François M escliin,
habitant du village de P érïgnat , puisse avoir quelque
chose de commun avec les habitans de Chanzelles et
d’O usclaux, dont il ne pouvoit ê tr e , ni l’agent, ni le
Syndic.
D ’ailleurs, les quittances de François Mescliin rappel
lent un bail notarié, reçu M oulin , notaire; et les habitans de Chanzelles et d’Ousclaux ne parlent que d’un
bail verbal.
E n fin , Meschin lui-m ôm e a donné une déclaration
qui constate que ces quittances ne se rapportent pas au
moulin de Gay 7 mais bien à des héritages contigus, que
M abru avoit afiermés de lu i, pour la facilité de son ex
ploitation*; de sorte qu’il étoit impossible que les intimés
pussent tirer une induction favorable de ces quittances.
3
�Sm
( 6 )
Les appelons d’ailleurs ont prouvé en point cïe fait qu’ils
a voient un titre certain au moulin avant 1766, date de
la première quittance.
En point de droit, qu’ils n’avoient pu déroger à leur
propriété acquise, par une reconnoissance postérieure,
d’après la disposition des lois et la doctrine des auteurs.
Depuis, les appelansont x'ecouvré un titre ancien qui
établit que ce moulin est devenu une propriété particu
liè re , et que les intimés n’ont rien à y prétendre.
Ce titre est un acte du i 5 mai 1711 : on y voit que
sept villages se disputoient la propriété de ce moulin 7
et que ces sept villages se réunissent pour le concéder,
en toute propriété, à Antoine M eallet, habitant du bourg
de la Rodde.
lies premiers en qualité, sont lesliabitans de P érignat ;
viennent après lesliabitans d’Ousclaux ; ensuite les habi
tons de ChanzeUes , ceux du village de T c rrif, ceux du
village de V ern in es , du village de P r u n s , et enfin du
village de Chaux.
Ces sept villages vàums conjointement et solidairement
fo u r chacuns leurs villages , c o n c è d e n t à titre d’emphitéose, à Antoine M eallet, pour le temps de sa vie et
des siens , la propriété et jouissance d’un moulin farinier,
appelé moulin de G a y , avec 1111 jardin et un pré en
dépendaris, joignant de toutes parties leurs, communs
et propriété d e s d i t s , et la rivière de Burande.
• Ce moulin étoit assujéti à un cens envers le seigneur
de la llodde (il ne faisoit donc pas partie des communaux ).
M eallet, pren eur, est chargé de faire reconstruire et
relever le moulin de la chute causée par Vincendie arrivé
�\
( 1 )
sz/r icelui , d’y faire poser une meule : les bailleurs doi
vent fournir l’autre.
*
Après trois ans de jouissance, le preneur doit payer
chaque année une éminée de blé.seigle, etc. Ou donne
au preneur le pouvoir et liberté de bâtir et construire,
si bon lui semble, d’autres moulins à côté de celui emphitéosé. Les bailleurs se réservent le droit de moudre gra
tuitement; mais il est permis au preneur de racheter ce
droit. E nfin, ilp e u t céder son droit et mettre en sa
-place les personnes qu’il lui plaira.
Les bailleurs s’obligent d’âider le preneur pour la cons
truction du moulin concédé, et de ceux qu’il voudroit
édifier; de contribuer à l’achat des ferremens ou des
meules; et dans le cas où ils refuseroient, ils seront déchus
de tout droit de mouture.
Ce titre annonce que le moulin de G ay auroit eu bien
des maîtres dans l’origine : sept villages y a voient des
droits, mais ils les ont vendus, et cette aliénation remonte
à quatre-vingt-quatorze ans.
D u moment que le moulin a été vendu, les acquéreurs
ou possesseurs ont cessé de jouir à titre précaire, ils ont
possédé animo dom ini , et par conséquent ont pu pres
crire la propriété.
On ne peut pas même expliquer comment les villages
de Ghanzelles et d’Ousclaux voudroient avoir aujour
d’hui un droit exclusif au moulin , lorsqu’on voit que
dans l’origine il appartenoit à sept villages.
Que deviennent «lors les quittances de 1768 et 17^9*
Llles paroissent cinquante-huit ans après la vente authen-
�C8 }
tique de 1 7 1 1 ; et en supposant qu’elles s'appliquent à
l’objet en litige, elles ne pourvoient déroger à un droit
acquis , ni changer la nature de la possession : telle est la
doctrine de Dumoulin , qu’on a rappellée dans le précé
dent m ém oire, errordom ini recipientis rem suarn quam
putat aliejiam jhcit actum ipso jure nulium , et nuïlum
dominium , nullam possessionem perdit.
Les intimés , qui ne s’attendoient pas à la découverte
de l’acte de 1711 ,>proposeront des objections qu’il est aisé
de prévoir. Ils ne manqueront pas de reprocher auxappelans cle varier dans leur défense ; ils diront qu’on avoit
soutenu jusqu’ici que Pierre M abru avoit reconstruit
le m oulin, après l’incendie de 1709 , et que, d’après cette,
vente de 1 7 1 1 , il paroît que M eallet, pren eur, a seul fait
ces reconstructions,
Ils opposeront aux appellans qu’il n’est pas prouvé
qu’ils représentent le preneur de 17 11.
La réponse à ces objections est facile. i ° . Il n’est pas
étonnant que dans une vieille recherche de ce genre , on
fasse des découvertes qui obligent à des variations sur ce
qu’on a dit précédemment,
Cependant on ne peut pas dire que les appellans aient
jamais changé de langage; ils o n t argumenté de leur pos
session immémoriale, et, pour l’établir, ont justifié des actes
de naissance et de décès de leurs auteurs, q u i, depuis
près d’un siècle, habitoient le moulin dont il s’agit.
Ils ont soutenu avoir joui, anuno dornini, depuis plus
d’un siècle ; ils sont convenus que ce moulin fut aban
donné momentanément par Antoine M a b ru , q u i, mi-
�.
( 9 )
neur en 1709 , fuit ruiné par l’incendie du moulin , mais
y rentra quelques années après.
O r , c’est précisément dans cette intervalle, et lorsque
le moulin étoit encore dans cet état de destruction, que
les habitans le vendii'ent à Antoine Meallet en 1711.
T o u t annonce et tout prouve que M abru, revenu à
meilleure fortune , se fit subroger par Antoine M e allet,
et fit alors les réparations nécessaires. Cela est d’autant
plus vraisemblable que la concession faite à Meallet l’au
torise à céder cette propriété, et à mettre à sa place telle
personne qu’il lui plaira.
Mabru n’a pas besoin de prouver par des actes qu’il
a été subrogé à M eallet, ses titres ont sans doute été la
, proie du temps; il lui suffit d’établir qu’il a pu posséder
anitno domini. Dès que les habitans ont cessé d’être pro
priétaires, ce seroit aux intimés à prouver qu’ils ont dé
possédé M eallet, leur acquereur, et sont rentrés dans leur
droit ; parce que tout demandeur doit établir sa demande.
Les intimés répéteront-ils que les communes ne peuvent
aliéner ni prescrire ? L ’acte qu’on leur oppose est une
vente faite par chaque individu, conjointement et soli
dairement ; elle est consentie avec promesse de garantir
et faire valoir de tous troubles et hypothèques. L ’an
cienneté du titre fait présumer une concession légitime.
Mais il n’est pas vrai en principe que les biens des
villes et communautés sont imprescriptibles. D u n o d ,
dans son Traité des prescriptions , partie i re. , chapitre
12 , examine cette question, page 74 et suivantes. I-es
biens des villes et communautés, d it - il, sont de deux
3
�' '
( ïo )
espèces. Les uns produisent du revenir, et comme ils
peuvent être aliénés pour cause, et avec de certaines
formalités, ils sont prescriptibles par le temps ordinaire.
Les autres sont destinés à l’usage des personnes de la ville
ou de la communauté dont ils dépendent -, ils sont publics
à leur égard. Tels sont les rues, les places, les marchés,
les cours, les fontaines, les édifices publics, etc. : les biens
de cette nature ne sont pas dans le commerce, c’est pour
quoi ils ne peuvent être prescrits par le temps ordinaire;
mais ils le seroient par une jouissance immémoriale.
En appliquant ce principe à l’espèce particulière , de
quoi s’agit-il ici? d’un m oulin, objet modique , et qui ne
peut fructifier entre les mains d’une commune : elle doit
' l’aliéner, pour son avantage, et lorsqu’elle a cessé de jouir
pendant trente ans, la prescription est acquise au tiers
détenteur.
Les appelans ont encore invoqué la disposition de l’ar• ticle 9 de la section 4 de la loi du 10 juin 1793? qui
maintient en propriété celui qui a possédé pendant qua
rante ans avant la loi du 28 août 1792, même lorsqu’il
s’agit de communaux.
Enfin, ils rappelleront l’article 222 7 du Code civil q u i,
porte que la nation, les établissemens publics et les com• mimes sont soumis aux mêmes prescriptions que les par
ticuliers , et peuvent également les opposer.
Les intimés voudroient encore faire usage de leur
exploit de i j 55 ; mais, d’abord, depuis 1 7 1 1 , date de la
vente du m oulin, jusqu’en 1765, il s’est écoulé quarantequatre ans, laps plus que suffisant pour prescrire; en
�( 11 )
second lie u , cet exploit est en contradiction avec celui
de 177g. Dans le prem ier, les habitans supposent une
convention verbale faite entr’eux et M ab ru , et demandent
vingt-huit setiers blé seigle, pour vingt-huit ans d’arré
rages. Dans le second exploit, ils supposent un bail no
tarié , et demandent dix francs par année ; de sorte qu’on
ne voit que confusion et contradiction ¿ans leurs de
mandes. L a première doit détruire la seconde ; on ne
pourroit revenir par nouvelle action, il falloit reprendre
la première.
A u surplus, tout ce qui a été fait jusqu’ici de la part
des habitans est absolument irrégulier et nul. O u il s’agit,
dans la cause, d’une propriété particulière, alors les appelans ont évidemment prescrit, et le corps commun des
habitans est sans qualité pour réclamer.
Ou le moulin est une propriété commune à to u s, alors
la demande n’a pu être formée par des particuliers, nullis
ut singuiis , pluribus ut universis.
Cependant la demande n’a été formée que par des par
ticuliers; c’est contre eu x , ut singuli y que la cause a été
jugée en première instance : le corps commun n’est in
tervenu que sur l’appel, et contre le gré du conseil mu
nicipal. Cette intervention choque toutes les règles con
nues, et viole ouvertement la loi qui accorde deux degrés
de juridiction. Ce seroit priver les appelans du second
d e g ré,si la cause pouvoit être jugée en la cour d’appel,
avec la généralité des habitans. Les appelans ont l’avan
tage de pouvoir invoquer^ur ce point la jurisprudence
constante ; et quoiqu’ils n’aient point à redouter l’évé-
�>5
( 1 2 )
nement sur le fond du d roit, ils ont cependant intérêt
de procéder régulièrement, et avec des parties légitimes.
M . C O I N C H O N - L A F O N T , rapporteur.
t
y
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
A
*
~
;
O;-
M e. B R U N , avoué.
\ ■ »
I
—
—
f
. . . .
i
^
A R IO M , de l ’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d'appel. — T herm id or an 13.
�
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[Factum. Mabru, Jeanne. An 13]
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Coinchon-Lafont
Pagès
Brun
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The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
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An account of the resource
Titre complet : Observations en réponse au mémoire signifié le 1er thermidor, pour Jeanne Mabru et Jacques Arfeuil, son mari, appelans ; contre les habitants et corps commun des lieux de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, Michel Geneix et Jacques Juliard, se disant leurs syndics, intimés.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
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An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
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1804-1814 : 1er Empire
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BCU_Factums_G1523
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Text
COUR
REPONSE A MEMOIRE
D ’A P P E L
POUR
A RIOM.
SÉANT
du lieu de
C h a n z e l l e s et Ousclaux, commune de la R odde,
poursuites et diligences de M i c h e l G E N E IX
et J a c q u e s J U L I A R D , leurs s yn d ic s, intimés
et demandeurs;
Les
H ab itan s
et
Corps comm un
C O N T R E
J e a n n e M A B R U , fille et héritière d’A n t o i n e
,
,
,
et J a c q u e s A R F E U I L son mari appelant
et défendeurs.
Le s moulins dont les parties se prétendent respective
ment propriétaires , sont établis sur les communaux du
village habité par les intimés, et en forment par là même
une dépendance. Des titres précis, du fait même d’Antoine
Mabru , p ère de Jeanne, et surtout la manière dont les
A
�appelans et leurs auteurs ont joui , ont déterminé une
première décision en faveur des intimés. Les appelans
n’ont invoqué et n’invoquent encore que la prescription :
mais ce moyen peut-il être employé par ceux-là qui n’ont
possédé qu’à titre de colons et pour les propriétaires ?
D ’ailleurs les iutimés rapportent aujourd’hui de nouveaux
titres qui démentent une partie des faits principaux , arti
culés par les. appelans , et ne laissent plus rien à désirer
sur l’existence du droit des intimés et la justice de leur
réclamation.
F A I T S .
Les habitans de Chanzelles et Ousclaux sont proprié
taires , depuis des siècles , d’ un moulin ù blé , d’ un à
faire l’huile et mailler le chanvre. Ces moulins sont connus
sous le nom de G a y : il en dépend un petit jardin , et un
pré contenant environ deux chars de foin. T ou s ces objets
sont placés sur les communaux de Chanzelles : les appelans,
ainsi qu’Antoine M a b ru , leur a ïeu l, en sont également
convenus.
Ces mômes habitans ont toujours joui de leur propriété
en l’aflerm ant, et chargeant le fermier de faire moudre
gratuitement tous les grains nécessaires a leur consom
mation.
Quelques-uns même se sont permis de vendre leurs
droits à ces m oulins, soit ¡\ d’autres habitans du villa ge ,
soit à des étrangers ; en voici un exemple :
I,e 11 juin 1664 , Antoine G a y , fils à feu Etienne, du
village de Chanzelles , vendit à Joseph Bonhomme , du
village de V crn in cs, même paroisse, tous les d ro its, part
�( 3)
et portion q u i pouvoient lu i com péter au m oulin appelé
de G a y . . . situ é dans les appartenances de Chanzetles ,
avec promesse de garantie de tous tro u b les, et m oyen
n ant la som m e de i z fra n cs.
Cette vente prouve donc que les moulins de G ay exis
taient bien a v a n t , et que les habitans de Chanzelles en
étoient propriétaires.
A u s s i , par un autre acte du 17 novembre de la m ême
année , les habitans de Chanzelles et O uscla u x affermè
rent ci Claude D elcroSjde C hanzelles, les m oulins de G a y ,
p our les jo u ir pendant d ix ans ci v en ir, à la charge pa r
JJelcros de les tenir en bon état. L e s habitans p rom irent
de f a i r e conduire deux m eules dans un m ois • et s i
d'autres devenoient nécessaires pendant la durée de la
fe r m e , le fe r m ie r demeura tenu de les acheter. O n pré
voit le cas d’incendie^ e t î on convient de ce q u i sera f a i t
par chacune des parties pour le rétablissem ent des
m oulins. O n suppose encore que le m eunier pourroit ne
pas ten ir toujours les m oulins en état de m oudre, et que
les habitans seroient contraints d'aller moudre ailleurs :
alors le fe r m ie r s’oblige ci leur rem bourser le droit de
mouture. Ce fe r m ie r s'oblige également de payer ci
Me. F ra n çois B a u d e v e ix , de C hanzelles , durant sept
a n n ées, un setier de blé ¿1 N o tre-D am e d'août de chacune
d 'icelle, et B a u d ev eix prom et ci son tour d'en rendre
compte au surplus de la co m m u n e} pour l'em ployer a u x
réparations des m oulins.
Il eut été difficile aux intimés d’établir d’ une m anijre
plus authentique leurs droits aux moulins de G ay; car, en
les aliermant exclusivement ; et pour l’intérêt de leur seule
A 2
�'( 4 )
com m une, c’étoit annoncer suffisamment qu’aucuns autres
pou voient y rien prétendre. Ce bail suppose aussi néces
sairement l’existence de bien d’autres qui sont devenus la
proie du temps : il apprénd en un mot que l’un des habitans a toujours été chargé des affaires de la com m un e, et
de veiller à ses intérêts.
S ’il falloit en croire les appelans, ils auroien t, à la suite
de leurs auteurs, possédé de tout temps les moulins en
• question. Mais l’inexactitude de cette assertion est établie
par le contrat de mariage de Pierre M a b r u , bisaïeul des
appelans , sous la date du 2 février 1 6 9 5 , puisqu’on y voit
que P ie r r e M a b ru , j i l s à défunt autre P ie rre et à
M ich e lle M cg em o n d , se dit laboureur et habitant du
village de L t y r i t , paroisse de T a u ves ; q u 'il se m arie
avec J ea n n e R o u g et, du même village ; que celle-ci se
constitue en une dot purem ent m obilière , et q u elle
donne à son fu t u r le pouvoir de s'en f a i r e p a y e r , pour
lu i so rtir nature de bien dotal.
Pierre M abru n’étoit donc pas alors m eunier, puisqu’il
prenoit la qualité de cultivateur; il ne jouissoit donc pas
des moulins de G a y , puisqu’il habitoit un village, et dans
une paroisse différente.
Il est vrai que les appelans ont justifié, sous la cote 16 de
la procédure principale, de l’acte mortuaire d’un Pierre
M ab ru , à la date du 17 avril 1708; et il sembleroit résulter
de la note du curé que ce particulier étoit mort au moulin
de Gay.
Mais ce fait ne suffiroit pas pour établir l’ habitation ;
car il est tant de personnes qui ont le malheur de mourir
hors de leurs domiciles ! et supposé qu’on regardât comme
�•
.
œ
■ ( 5 )
possible l’entrée en jouissance de Pierre M a b ru , du moulin
dont il s’agit, soit à titre de fermier, soit autrement, il est
certain que cette jouissance auroit été de bien courte durée ;
puisque, d’un cô té , les moulins furent incendiés dans le
même temps, et q u e, de l’autre, A n toin e M abru , fils de
P ie rre , n’y habitoit pas au 28 octobre 1 7 2 6 , époque de
son contrat de marige avec Jeanne B a b u t, puisque dans
ce contrat Antoine M abru s’y dit originaire du village
de h c r r i t , et dem eurant alors en q u a lité de valet-do
m estique au village de V ern in es.
O r , l a naissance d’ Antoine M abru au lieu de L e y r it ,
où Pierre habitoit, et où il s’étoit m arié, fait justement
présumer qu’ils avoient .toujours habité le lieu de L e y r it,
et que le décès de Pierre M abru n’arriva au moulin de
Gay que par l’effet d’un accident.
Toutefois l’incendie de ces moulins n’est pas une chi
mère ; mais ce qui en est véritablement une , c’est la
reconstruction de ces mêmes moulins de la part^d’A ntoine
Mabru ; car , au contraire, il est certain ( et les intimés ne
perdent pas encore l’espoir de l’établir) que cette recons
truction eut lieu parles soins et aux frais des habitons de
Ghanzellcs. O n sait aussi, par tradition, qu’après leur réta
blissement ces moulins furent possédés pendant un assez
grand nombre d’années par un nommé Antoine Meallet.
Il paroît cependant qu’Antoine M a b r u , père de Jeanne,
naquit aux moulins de Gay le 23 décembre 1 7 2 7 ; et ce
fait donncroit lieu de croire qu’Antoine M a b r u , son père,
seroit entré en jouissance de ces moulins dans l’intervalle
de son mnrmge à la n a i s s a n c e de son fils ; mais il est cer
tain qu’il n’y étoil entré que comme fermier, parce qu’ il
�*»<
( 6 )
fut assigné en cette qualité de la part des in tim és, par
exploit du 12 avril 1 7 6 5 ,pour être condamné à se désister
des m o u lin s, les rendre en bon état, et payer vingt-liuit
setiers b lé , ou la valeur d’ic e u x , d’après les pancartes du
marché de la T o u r , pour la jouissance de v i n g t - l m i t
années des mêmes moulins, non compris le droit qu’avoient
eu les habitons de faire moudre gratuitement leurs grains.
Sans doute qu’ Antoine Mabru rendit justice aux habitans, et que ces derniers alors firent avec lui de nouvelles
conventions pour la jouissance de ces moulins \ au lieu
d’un setier b lé , le prix de la ferme fut fixé dix francs
par an , avec la môme condition de faire moudre gra
tuitement les grains des habitans.
Il résulte de deux quittances des 30 novembre 1766
et 21 novembre 1769, reçues Julhiard, notaire, et dûment
enregistrées, que ce prix de ferme fut payé par Antoine
M abru à François Mescliin , l’un des habitans , pour les
années 1763 et suivantes , jusques et compris 1768 ; et
comme ces deux pièces sont très-intéressantes, on va les
transcrire.
«
«
v
«
«
«
«
« Par-devant,etc. a été présent François M cschin , marchand , habitant du village de Pérignat, paroisse de la
Rodde , ci-présent, lequel a reconnu et confessé avoir
reçu avant ces présentes, ainsi q u’il l’a déclaré, d’A n toine M abr u , meunier au moulin de G a y ? susdite pnroissc, ci-présent et acceptant, la somme de quarante
livres , et ce , pour les quatre années dernières qu’ il lui
doit , suivant le bail de ferme c|u’ils avoient passé
« entr’eux , rapporte cire reçu par Moulin , notaire royal
« à la T o u r ; de laquelle somme de quarante livres ledit
�( 7 )
« confessant a quitté et quitte ledit acceptant, et promet
« de le faire tenir quitte envers et contre tous. »
« Par-devant, etc. a été présent François Meschin fils,
« m archand, habitant du village de P é r ig n a t , paroisse
« de la R od d e, lequel a volontairement reconnu et con« fessé avoir ci-devant reçu d’A n to in e M a b ru , meunier,
« habitant au moulin de G a y , ci-présent et acceptant, la
« somme de vingt liv r e s, pour le m ontant de la f e r m e
« dudit m o u lin , et c e , pour les années 1767 et 1 7 6 8 ,
« dont quitte sans préjudice de la courante et autres à
« éch o ir, le tout porté par bail à fe rm e , rapporté être
« reçu par feu M o u lin , notaire royal; de laquelle somme
« de vingt l i v r e s ledit Meschin tient quitte ledit M a b r u ,
« et promet le faire tenir envers et contre tous,à peine,etc. «
On ne se seroit pas d o u té , d’après ces quittances, que
Mabru se fût de nouveau refusé à payer le prix de la
ferme , quoiqu’il n’eût pas cessé de faire moudre les
grains des habitons sans retirer aucune rétribution.
Ces habitans furent donc forcés d’assigner A ntoine
M a b r u , aïeul de Jeanne ( son père étoit décédé le. 23
avril 1759 ) , devant le bailli de la Rodde , par exploit
du 3 novembre 1 7 7 9 , pour vo ir déclarer le bail verbal
des moulins et dépendances fini et résolu -, voir dire qu’il
seroit tenu de vider les lieux dans trois jours , et à eux
permis d’en jouir comme ils aviseroient ; et pour être con
damné à payer les dégradations qui auroient été com
mises, de même que la valeur des ustensiles qui se trouveioient m anquer, le tout à dire d’experts convenus ou
pris d’ollice. O n observe que cette demande avoit été
dirigée par les habitans en nom singulier.
�( 8 }
Dans clé premières défenses, M abru crut devoir remar
quer que l’action étoit mal d irigée, avec u’auiûnt plus de
raison , ajouta-t-il, que les demandeursne sauroient établir
le bail verb:il qu’il leur plaisoit d’énoncer.
Les habitans ayant alors découvert la quittance du
21 novembre 1769 , s’empressèrent d’en justifier ; et
comme cette pièce leur apprit que M ab ru devoit une
somme de 10 fr. par chaque année pour le prix de sa
ferme , ils fo r c è r e n t la demande de cette somme pour les
années q u iavoien t couru depuis la quittance, par requête
du 18 avril 178 0 , et l’affaire fut appointée en droit par
jugemeut du 20 du môme mois.
Dans la suite , Antoine M abru , donnant plus de déve
loppement à sa défense, prétendit qu’il étoit âgé de plus
de quatre-vingts ans; qu’il étoit né dans les m oulins;
qu’il les lenoit de la succession de son père , qui en étoit
en possession, laquelle lui tenoit lieu de titres authenti
ques; que lesdits moulins furent incendiés en 1709; qu’il
étoit alors m in e u r , et sa mère dans un âge avancé ; que
tous leurs titres et effets avoient été consumés par les
flammes; que ces moulins avoient resté dix-hmt ans en
chezal; qu’ il avoit été d’abord forcé de m en d ier, niais
qu’ensuito il s’étoit loué chez différons maîtres; et qu’après
avoir ramassé quoiqu'argent, il avoit fait reconstruire les
moulins, desquels il s’étoit depuis maintenu en jouissance
paisible juseju’à la demande. P o u r justifier sa possession ,
A n t o i n e Miibru rapporta l’acte mortuaire de son p è re , les
actes de naissance et de décès de son fils, et l’acte de célé
bration d’uu second mariage par lui contracté le 31 jan
vier 1763.
A ntoine
�j e
A n toin e M ab ru convint que les moulins étoient
situés sur les com m un aux, et clans les dépendances du
village de Chanzelles : ce fait lui parut même si impor
tant, qu’il lit servir copie de la i’econnoissance du lieu de
Chanzelles, pour établir que ce lieu ne rappeloit point
celui d’O u s c l a u x e t conclure d e là que les habitons de
ce dernier lieu n’auroient au moins rien à prétendre dans
les moulins en question.
Quant à la quittance de 1769, M abru remarqua d’abord
que l’énoncé n’en étoit pas exact, puisque les habitans
ne pouvoient pas rapporter le bail qu’on y trouvoit rap
pelé ; il ajouta que cette pièce étant étrangère aux ha
bitans ne pouvoit leur être d’aucune utilité ; que cette
quittance pourroit servir tout au plus à M esch in, qui
l’avoit consentie; mais qu’indépendamment de ce que ce
particulier ne lui demandoit r i e n , c’est que la somme
payée portoit sur tous autres objets indifférons aux de
mandeurs.
Relativement au droit gratuit de mouture, invoqué par
les demandeurs , M abru n’osa pas le désavouer entière
ment -, mais il prélendit que les demandeurs avoienl tou
jours payé ce qu’ il avoit exigé , et que s’ il avoit modéré
ce droit à leur égard , c’étoit afin de conserver leurs
pratiques.
D e leur part, les demandeurs rép o n diren t, i° . qu’ ils
avoient pu diriger en nom singulier une action com
mune et p op ulaire, dont l’exercice appnrtenoit à chacun
d e u x ; 2,0. que Mabru n’établissoit pas sa naissance dans
les moulins de Gay , et que la reconstruction de ces
moulins après l’incendie avoit été l’ouvrage de la com-
�<*k
( 10 )
m u n e , et non pas le sien; 30. que la situation des moulins
formoit en leur faveur une présomption de propriété ,
présomption qui devenoit certitude, d’après lu quittance
de 1769, puisqu’il résultait de cette pièce que M abru avoit
payé sciemment la ferme des moulins pour deux ans , et
avoit ainsi reconnu n’en avoir joui qu’à titre de ferm ier;
que Mescliin, habitant de Pérignat, l’avoit été précédem
ment de Ghanzelles; qu’il avoit conservé ses propriétés dans
ce dernier v illa g e , et que c’étoit à ce titre de principal
propriétaire , et comme le plus versé dans les affaires,
q u’il avoit reçu la ferme due à la commune de Ghanzelles.
Enfin les demandeurs rapportèrent la quittance de 1766,
et offrirent de prouver que M abru avoit constamment
fait moudre leurs grains sans en retirer aucune rétribution.
D ’après cette discussion , le bailli de la H o d d e, après
avoir pris l’avis de jurisconsultes éclairés, rendit le 20
avril 1 7 8 1 , la sentence qui suit :
« N ous, ayant égard à ce qui résulte des deux quit« tances des 30 novembre 1766 et 21 novem bre 17 6 9 ,
«
«
«
et
«
«
«
avons le bail à ferme des moulins de Gay continué
verbalement ou par tacite réconduction , déclaré fini et
résolu; en conséquence, ordonnons que dans trois jours,
à compter de la signification denotre présente sentence,
le défendeur sera tenu de vider les lieux et sortir
desdits m oulin s, pour par les demandeurs en jouir
ainsi qu’ ils aviseront ; si non , et faute de ce faire
« dans ledit d éla i, permettons aux demandeurs de l’en
« expulser et mettre scs meubles sur le carreau ; le con« damnons à remettre lesdits moulins en état de répa« rations locatives, garnis de leurs meules et ustensiles
�( ir )
« nécessaires à l’exploitation d’ic e u x , et à compter d e %
« valeur de ceux desdits meubles qui se trouveront man« quer, ainsi que des dégradations qu’il pourroit avoir
« commises dans lesdits m oulins, à dire d’experts con« venus ou pris d’office, avec intéi'êts à compter du jour
« de la demande \ comme aussi à payer les ancrages de la
« . ferme desdits moulins, à l’aison de 10 francs par année,
« depuis et y compris 1769, avec les intérêts ; le condam« nons en outre aux dépens, si mieux toutes fois n’aime
« le défendeur faire p r e u v e , tant par titres que par té« m oins, qu’après l ’incendie des moulins de G a y , arrivée
« en 1709 , il a fait rétablir lui-même , et à ses frais ,
« lesdits moulins ; que depuis ledit rétablissement il en a
« joui paisiblement comme propriétaire jusqu’au jour
« de la demande contre lui formée; et notamment que,
« pendant cette jouissance, il a constamment perçu sur
« les codétenteurs des ténemens de Chanzelles et Ous
te claux le droit de mouture en usage dans le pays ;
« sauf aux demandeurs la preuve contraire. »
Sur l’appel de cette sentence interjeté par A ntoine
M a b ru , en la Sénéchaussée de Clerm ont, M abru fit no
tifier, le i5 juillet 17 8 2 , une déclaration que lui avoit
donnée François Meschin, devant B ru giè re, notaire, le
20 janvier précédent : celte pièce est trop intéressante
pour ne pas la faire connoître en son entier.
«
«
«
. «
•'
« P a r -d e v a n t...........a été présent François M eschin,
marchand , habitant du village de Pérignat , paroisse
de la R o d d e , lequel a volontairement reconnu, confessé et déclaré, au profit d’A ntoine M a b ru , m eunier,
habitant en ses moulius de G-ay, paroisse de la R o d d e,
B a
■
�\ o V . /
.
( 12 )
« ci-présent et acceptant, que c’est par eçrcur que les deux
«
a
te
a
«
«
«
«
«
«
«
quittances par lui consenties, au profit dudit M a b ru ,
devant M e. Ju lh ia rd , notaire à la R o d d e ,le s 30 no
vem bre 1766 et 2 in o v e m b r e 1769, ont pour cause, la
première de la somme de 40 francs,pour quatre années
alors échues, pour le p rix du bail de ferme desdits m oulins appelés de G a y , et la seconde delà somme de 20 fr.
pour le même bail des apnées 1767 et 1768 , puisqu’aucontraire ces deux quittances ne doivent avoir pour
objet que la ferme verbale de deux terres, l’une appelée
la Pièce-d u-M eu n ier, et l’autre la T â c h e , situées dans
les appartenances du village de Pérignat, delà contenue
« toutes çleux d’environ trois septerées; attendu même
«
«
et
et
qu’il n’y a jamaiseu de bail à ferme desdits moulins, entre
lui Meschin et ledit M a b ru ; et que lu i M esch in lî’a
d’autre droit su r lesdits m oulins apparten ais audit
M a bru , que celu i d’y f a i r e moudre ses g r a in s ,
a
«
«
«
«
<t
«
fo u le r son chanvre et y f a i r e son hu ile sans aucune
rétribu tion , en y conduisant son grain , tant pour
sa, m aison du lieu de C h a n z e lle s, que pour celle
dudit P é r ig n a ty q u i l u i a toujours été fo u r n ie et à
scs auteurs par ledit M a bru , a in si que ce dernier Va
a u ssi reconnu et co n fessé, et qiCil y demeure tenu
et obligé p our V a v en ir, etc. »
Les habitans de Chanzelles et Ousclaux intervinrent
collectivement sous le nom de deux syndics; et, pour
écarter sans retour lu déclaration qu’on vient de trans
crire, ils justifièrent de l'exploit du 12 avril 1 7 5 5 , conte
nant demande contre M abru , afin de désistement des
moulins de G ay et payem en t des arrérages de la ferme :
�( 13 )
exploit dans lequel François Mescliin se trouve précisé
ment le premier en qualité.
M abru étant alors décédé , les poursuites furent tenues
pour reprises par défaut avec Jeanne M abru , partie
adverse, par sentence du aoiaoût 1789. Jeanne M a b r u ,
sans daigner former opposition à cette sentence, justifia
bien de lettres de bénéfice d’inventaire et du procès verbal
d’entérinement d’icelles;mais.elle n’a rapporté dans aucun
temps l’inventaire qu’elle étoit tenue de faire dresser : de
manière que sa qualité d’héritière bénéficiaire n’étant point
suffisamment étab lie, elle doit être considérée comme
héritière pure et simple de son aïeul.
Quoi qu’il en soit, l'affaire n’ayant pas été terminée eu
la sénéchaussée d eC lerm o n t, a été reprise en la co u r, du
consentement des parties adverses, par arrêt contradic
toire du 14 messidor an 12. A i n s i , il sied mal à Jeanne
M abru de revenir sur les moyens qu’elle avoit proposés
avant cet a rrê t, qui a réglé les qualités et la procédure;
il lui sied plus mal encore d’accuser les liabitans de s’être
assemblés tumultueusement, puisque leur délibération ,
du 18 nivôse an 11 , atteste qu’elle fut prise sous la pré
sidence du plus ancien d’â g e , et la surveillance de Jean
L a c o u r , maire de la commune.
T e l est l’état exact des faits et de la procédure.
M O Y E N S .
Si 1 on se fixe d’abord sur la situation des moulins dont
il s’a g i t , il est certain q ue, placés sur les communaux de
Chanzelles ( et ce fait est reconnu au p r o c è s ), jls en for-
�(
)
ment nécessairement une dépendance, et sont présumés
par là même , et de droit co m m u n , appartenir aux propi’iétaires de ces communaux.
E n effet, les habitans de Chanzelles eurent seuls droit
et qualité pour établir ces moulins ; sans doute ils n’en
exécutèrent la construction que pour leurs commodités
et leurs intérêts : il n’est donc pas permis de penser qu’ils
aient jamais aliéné une propriété aussi précieuse pour eux.
Il n’est pas permis de penser non plus qu’ un particulier
étranger à leur commune soit venu faire, sur leurs biens
communaux , un établissement aussi considérable ; cela
n’auroit pu arriver qu’en vertu d’une concession valable
de la part des habitans , et M abru n ’en rapporte pas. Ce
pendant le droit et la faveur étant du côté des intim és,
c’est bien aux appelans à établir leur exception ; et s’ils
sont réduits à l’impossible de le fa ir e , on doit forcément
les considérer comme usurpateui’s , et les faire désister.
Dons leur m ém o ire, page 20, les appelans ont invoqué
l’article 9 de la section 4 de la loi du 10 juin i-793Mais la première ligne de cet article rappelle des pos
sessions particulières et paisibles ; e t , dans la cause, il s’agit
de moulins établis sur un com m un al, et en formant une
dépendance; de moulins dont lit jouissance n’a pas été
paisible, puisque les habitans demandèrent le désistement
par l’exploit de 1755 ; de m o ulin s, en un m o t , dont
A n to in e M abru paya la ierm e, suivant les quittances de
1766 et de 1769.
Quelques lignes plus bas, le législateur n’a excepté des
dispositions générales, que toutes co n cessio n s, v en tes,
(¡allocations fo r c é e s } partages} ou autres possessions
�\•
.
sv
( 15 )
depuis et au delci de quarante ans. O r , ici point de
titres; M a b r u , comme on l’a déjà dit, n’en rappoi’te aucun;
et quant à la possession , l’on verra bientôt qu’il ne peut
pas s’en prévaloir ; qu’ainsi cette disposition de la l o i ,
purem ent relative au partage des co m m u n a u x } ne reçoit
aucune application à l’espèce.
f
L es appelans s’étonnent de voir figurer parmi les de
mandeurs des particuliers étrangers au village de C h a n zelles, et ils invoquent à cet égard les dispositions du
titre 28 de la Coutume d’Auvergne.
M a is , i°. les particuliers qui se dirent liabitans de la
R o d d e , ou de tout autre lieu , étoient véritablement de
Clianzelles, et n’avoient ailleurs qu’une résidence momen
tanée à titre de fermiers ou métayers. O n trouve m ême
la preuve de ce fait dans la délibération de 1 7 8 3 , cote 19
de la procédure d’appel; on voit également, dans l’exploit
de dem ande, que tous les particuliers en qualité se qua
lifièrent de propriétaires et possesseurs du ténement de
Clianzelles.
20. Clianzelles et Ousclaux ne forment réellement que
le même villn ge, quoique divisé en deux parties , l’une
au m id i, et l’autre au nord , à tel point qu’il n’y eut jamais
de division entre ces deux parties, et qu’elles curent dans
tous les temps mêmes com m unaux, même fontaine, mêmes
habitudes.
3 °* S ’il est évident que les appelans ne peuvent pas se
maintenir dans la jouissance des moulins de G n y , il doit
peu leur importer qu’elle soit attribuée à tel plutôt qu’à
tel autre. Les appelans ne sont pas chargés de stipuler les
intérêts des habitans de Clianzelles; les appelans ne peu-
�i> n
•'<
.
( 16 )
vent rapporter de titres de la part d’aucune com m u n e,
conséquèmment il doit leur être indifférent que les mou
lins restent en entier aux habitons de Chanzelles , ou que
ces dèrniers en jouissent communément avec d’autres.
A i n s i , la. situation des moulins suffiroit seule pour établir
le droit des intimés à la propriété de ces mêmes moulins.
Mais les intimés n’en sont pas réduits à de simples
présomptions de propriété ; ils rapportent en core, pour
r é t a b l i r , des titres infiniment précis.
E n effet, les actes des >11 juin et 17 novembre 1664
démontrent invinciblement le droit des intimés, puisque,
par le p re m ie r, un habitant de Chanzelles vendit à un
étranger les droits qui lui compétoient dans les moulins,
et que , par le second, tous les liabitans de Chanzelles en
affermèrent l’intégralité.
D ’un autre côté , la demande du 12 avril 1755 , et les
quittances des 30 novembre 1766 et 21 novembre 1769,
offrent en faveur des intimés des conséquences également
puissantes, puisque la demande eut pour objet la propriété
des moulins , et que par les quittances Mnbru lui-même
la reconnut de la manière la plus formelle.
A i n s i , les derniers actes étant une suite toute naturelle,
et même l’exécution immédiate des premiers ; ain si, les
uns se rattachant aux autres, tous forment par leur en
semble un corps de preuve auquel il est impossible de
résister.
L es appelans conviennent bien que celui qui n’a joui
qu’à titre de fermier ne peut pas opposer la prescrip
tion au propriétaire ; mais ils prétendent qu’Antoine
Mubru ayant possédé les moulins en question pendant
plus
�i
/3
'( *7 )
plus de trente années antérieures aux quittances, ces quit
tances ne pourroient pas leur être opposées, paTce que
leur aïeul ne seroit pas présumé avoir entendu renoncer
a un droit acquis ; e t , à ce sujet, ils répètent qu’Antoine
M abru étoit né dans les m o u lin s, que son père y étoit
décédé , qu’ il les avoit trouvés dans la succession de ce
dernier, et les avoit fait rétablir après leur incendie.
M ais, si les intimés en avoient besoin, ils prouveroient
facilement que le principe invoqué par les appelans est
une erreur*, car on a toujours tenu pour constant que
celui qui avoit un droit acquis pouvoit y renoncer ; et
cette renonciation se présume encore davantage, quand
le renonçant n’a fait que rendre hommage à la vérité.
L e principe fût-il vrai ne recevroit aucune application
à l’espèce , puisqu’Antoine M abru n’avoit pas possédé
utilement un seul’ jour.
Déjà la situation des moulins sur les communaux de
Chanzelles a toujours formé un obstacle invincible à la
possession des M abru ; c a r, tout! de même qu’ils n’auroient pas pu acquérir, p a rla prescription la plus longue,
les biens communaux de Chanzelles , tout de même ils
n’ont pas pu posséder cinimo dom ini les-moulins de G a y ,
qui forment une dépendance de ces mêmes communaux.
2°. Les titres rapportés par les intimés établissent en
leur faveur le droit de propriété le plus évident : les'Mabru
n ont pu jouir et n’ont joui véritablement que comme
fermiers; par conséquent ils n’ont'possédé que pour les
habitans, seuls propriétaires.
3 °- Antoine Mabru n’étoit pas né dans les moulins ;
ut indépendamment de ce qu’il n’a pasi établi ce fait
im portant, c’est qu’il est formellement démenti par les
C
�rS L
(
1
8
)
contrats de mariage des 2 février 1695 et 28 octobre 1726,
puisque le premier apprend que Pierre M a b ru , père
d’A n t o in e , s’étoit marié au lieu du L e y r i t , paroisse de
Tauves ; et que, dans le second, A ntoine M abru déclara
qu’il étoit originaire du môme lieu de L e y r it, lieu qu’il
n ’avoit quitté que pour aller servir difîérens maîtres ;
dès-lors A ntoine M abru n’avoit eu de domicile légal
qu’au lieu de Leyrit.
4 0. Si le Pierre M abru qui décéda aux moulins de G a y ,
en 1708 , étoit le même que Pierre M a b ru , bisaïeul des
appelons, ce qui n’est pas à beaucoup près établi par
l’acte mortuaire rapporté , il est certain que ce décès ne
put arriver au moulin de G ay que par l’effet d’un acci
dent, puisque, encore une fois, le contrat de 1695 établit
que Pierre M abru étoit M arié au lieu du L e y rit; et que
dans le sien A ntoine M abru se déclara originaire du
même lieu : or , si cet Antoine M abru avoit eu pris
naissance dans les moulins de G a y ; si P ierre, son père, y
fût décédé , le premier auroit été originaire des moulins
de G a y , paroisse de la R o d d e, et non pas du lieu du
L e y r i t , paroisse de Tauves : donc les contrats produits
écartent absolument l’allégation des appelans.
5°. S’il est vrai qu’A ntoine M a b ru , père de Jeanne,
naquit dans les moulins en question, le 23 décembre Ï 7 2 7 ,
il est au moins certain qu’autre A n toin e, son p ère, n’avoit
pu entrer en jouissance do ces moulins qu’après le mois
d’octobre de l’année précédente, puisqu’alors il étoit
valet-domestique 'au village de Vernines , preuve son
contrat do mariage.
O r , de cette époque à celle de la demande du 12 avril
17 5 5 , on 11e trouve qu’une espace de vingt-huit aimées ;
�Sri
( '9 )
et supposant dès-lors avec A ntoine M abru qu’ il possédoit avec l ’intention de prescrire, au moins n’auroit-il
pas eu le temps d’atteindre ce but odieux.
6°. A ntoine Mabru ne pouvoit pas non plus avoir
fait rétablir les moulins après leur incendie, puisqu’au
mois d’octobre 1726 , il se disoit lui-même o r ig in a le du
lieu du L e y rit, et valet au village de V e rn in e s, étrangers
l’un et l’autre aux moulins de G a y ; d’ailleurs, leshabitans n’ont cessé d’articuler q u e , lors de l’ incendie, les
moulins étoient jouis par une famille différente de celle des
M abru; et l’on tient sur les lieux, comme fait constant
transmis par les anciens, que les moulins furent recons
truits aux frais de la com m une, représentée par les inti
m és; que même les liabitans de cette commune avoient
délaissé ces moulins à un nommé Antoine Meallet : on
est à la recherche de ce f a it , tout inutile qu’il est aux in
timés ; mais ils seroient infiniment jaloux de pouvoir
donner aux appelans un nouveau démenti.
Pourquoi au reste les appelans n’o n t-ils pas exécuté
la disposition de la sentence dont est a p p e l, par laquelle
ils étoient autorisés à prouver ces faits, au lieu d’attaquer
cette même sentence dans son intégralité. A les entendre,
cette disposition étoit ridicule, absurde, et les chargeoit
d’une preuve négative : mais l’erreur des appelans est
évidente; car la preuve étoit réellement directe ,e td e v o it
l ’etre par une raison qu’011 a déjà rappelée; c’est que
les intimés ayant en leur faveur la situation des moulins
et les titres produits, les appelans se trouvoient dans un
cas d’exception dont la preuve étoit indubitablement à
leur charge.
Ainsi l’objet, soit de la demande formée en 176 5, soit
C a
�CSC
C 20 )
des quittances fournies en 1766 et 17 6 9 , étant essentiel
lement v r a i , il en résulte que les appelons et leur aïeul
n ’ont joui des moulins de Gay que pour les intimés, et
doivent enfin leur restituer des objets dans lesquels ils
se sont trop long-temps maintenus.
Cependant les appelans, feignant de ne pas se tenir
pour battus, contestent, à l’exemple d’Antoine Mabru
leur aïeul, les conséquences qui Résultent en faveur des
intimés des quittances par eux produites; ils répètent que
Meschin 11’avoit pas le droit de les donner; que la cause
exprimée en ces quittances est une erreur, et que cette
cause encore ne se trouve pas rappelée dans la première:
les appelans finissent par invoquer la déclaration donnée
par JNJescliin , le 20 janvier 1782.
!
Mais les appelans savent bien que Meschin, quoique
habitant du lieu dé P é rig n a t, à l’époque des quittances,
l ’avoit été précédemment du lieu de Chanzelles; ils savent
bien que Meschin s’étoit marié à Chanzelles avec une
Défarges, qui étoit foncière; que Meschin s’ é t o i t retiré
sur les biens de sa femme , mais qu’il f a i s o i t cultiver en
même temps, et par une seule administration , tant les
biens de la Défarges que les siens propres. Les appelans
savent aussi que cette D éfarges, veuve Meschin, en use
de même aujourd’hui.
Aussi les habitans de Chanzelles avoient toujours con
sidéré Meschin comme leur concitoyen ; et, parce qu’il
«voit plus d’aptitude aux affaires, ils lui avoient confié
ln surveillance de leurs intérêts et la perception de lourt
revenus. Voil'i pourquoi il consentit et put consentir A
M abru les quittances de 1766 et de 1769 , tout comme
François Baudeveix avoit pu quittancer le prix du bail
de 1664.
�Sri
s
nr
2°. Si la première de ces quittances n’énonce pas la
cause du payem ent, la seconde la rappèlle; on
lit que
la som m e de 20 fr a n cs reçue a voit pour objet deux
armées de f e r m e dés m oulins en question, voilà, qui est
positif, et qui suifiroit, indépendamment'de la première.
Mais ce sont les mêmes p(aftiës qui figurent dans toutes
deux. Mais en 1766 , Mescliin reçoit 40 francs pour quatre
anrlées de ferme, comme ilrèçôit en 1769 moitié pour deux
années seulebieht; mais dans Tune comme dans l’autre on
rappelle un bail reÇû M o u lin ,. notaire à la T o u r : donc
il n’est pas perrins de douter que l’objet de la première ne
soit le même que celui de la seconde ; et d’ailleurs Mescliin
en convient dans sa déclaration de 1782.
j rr
■
}
O r , il ne pént pas exister pour les intimés de preuve
plus forte que celle qui résulte de ces quittances , puis
que cette preuve émane du fait même de M a b r u , et que
celui-ci en payant, comme fermier, a bien reconnu tout
à la fois qu’il n’a voit joui des moulins qu’à ce titre, et
que ceux à qui il en payoit la ferme étoient les vrais
propriétaires.
30. Il n’y a pas d’erreur dans la cause de ces quittances
les intimés viennent de le prouver par la situation des
lieux et par la production de plusieurs titres; d’ailleurs,
y
*
*
^
1
*
T i
1^
si deux personnes peuvent’ d é ro g e r, par un acte posté
rieur j à des conventions précédentes, cela leur est in
terdit toutes les fois qu’un tiers se trouve intéressé, car
alors le droit lui étant acquis 011 ne peut plus l’eu priver
hors sa présence et sans son consentement.
4°. La déclaration de Meschin, toute mensongère qu’elle
»est , prouve elle-même en faveur des intimés , surtout en
la rapprochant de la demande du 12 avril 1755.
�il»
u t
( 22 )
E n effet, si lors de la déclaration Mescliin habitoit le
lieu de P érign a t, l’exploit atteste qu’en i y 55 ce même
Meschin étoit habitant du lieu de Chanzelles.
Dans la déclai'ation, Meschin prétendoit que la cause
des quittances n’étoit pas exacte, et qu’il n’y avoit jamais
çu de sa part de bail à ferme des moulins de Gay.
Cependant en i y 55 il demandoit précisément , avec les
autres habitans de Chanzelles , à Antoine M a b r u , aïeul
de Jeanne, les arrérages de ferme des mêmes moulins,
pour vingt-huit années de jouissance.
•
Selon la déclaration, Meschin n’auroit eu sur les mou
lins d’autres droits que ceux par lui réservés, et dont on
.parlera bientôt; mais l’exploit atteste que Meschin se pré
tendoit copropriétaire des moulins, puisqu’il en réclamoit
le désistement.
D ’après la déclaration, la ferme auroit eu pour cause
la jouissance de deux terres situées à P é r ig n a t, appelées,
l’une la P i è c ç - d u - M e u n ie r , et l’autre la T â c h e ; mais
Meschin n’avoit jamais possédé, ni de son c h e f, ni de
celui de sa fem m e, aucunes terres qui p o r t a s s e n t ces noms ;
et les intimés défient même Jeanne M a b r u et son mari
de prouver qu’A ntoine M abru eût joui dans aucun temps,
à titre de ferme ou autrement, ni à Pérignat, ni à Chan
zelles , de propriétés appartenantes à Meschin : ainsi cette
déclaration n’est en général qu’un tissu de mensonge; et
loin de pouvoir profiter aux appelons, elle n’en démontre
que mieux leur mauvaise foi.
Les intimes ont tire un autre moyen de la manière dont
M abru avoit jôui des moulins dont il s’agit. Ils ont articulé
que Mabru avoit constamment fait moudre les grains né
cessaires à leur consommation; sans en retirer aucune rétri-
�(
23 )
bution ; et les intimés ont comparé ce mode de jouissance
à un véritable colonage.
M abru n’a pas osé désavouer ce fa it, mais il a cherché
à l’atténuer en prétendant que les intimés avoient payé
ce qu’ il avoit exigé ; et que s’il lui étoit arrivé de faire
des remises sur son droit , c’étoit pour conserver leurs
pratiques. Cette remise prétendue n’est ni vraie ni vrai
semblable ; et d’ailleurs les intimés ont oifert la preuve
du fait par eux articulé : ils l’offriroient même e n c o re ,
si elle pouvoit être de quelque nécessité.
Mais cette preuve est faite; elle résulte de la demande
du 12 avril i j 55 ; car loin par M abru de contester alors
aux habitans le droit de mouture gratuite, il s’empressa de
pi'endrcavec eux de nouveaux arrangemens. Cette preuve
résulte plus sûrement encore de la déclaration donnée par
Meschin, le 20 janvier 1782, puisque Meschin s’y réserva,
sur les moulins de Gay , son droit de m o u tu re, en même
temps que celui de faire son huile et fouler son chanvre ,
tant pour sa m aison de P érig n a t que pour celle de
Chanzelles. O r , il résulte de cette réserve , i ° . que
Meschin étoit propriétaire dans les deux endroits ; 20. que
Meschin n’avoit pu la faire que comme propriétaire à
Chanzelles; 3°. que M abru , en la souffrant et promettant
de l’exécuter à l’a ven ir, ne pouvoit pas avoir de raisons
pour refu ser, comme il a f a it , le même droit à chacun
des intimés.
C est en vain que les appelans prétendent que Meschin
pouvoit avoir un droit de servitude sur les moulins, et
qu’un pareil d ro it, en faveur des intimés, cxcluroit celui
de propriété.
D ’un côté / cette servitude, personnelle à M eschin, ne
�ft*
»
(2 4 )
seroit p as présumable, et l ’on défieroit les appelans comme
la famille Meschin , d’en établir les moindres traces.
Mais, l’idée même d ’une pareille, servitude,, exclusiv e à
M e s c h in , est formellement écartée par la demande de
1755 , où l ’on voit Meschin figurer le premier dans les
qualités, et par laquelle, il ne réclamoit ce droit de mouture
que confusément a v e c les autres h abitans de Chanzelles ,
et comme membre particulier de cette commune.
D e l’autre, ce droit de mouture n’est pas , dans l’espèce,
exclusif de la propriété, puisque les intimés ne le réclament
que contre un fermier infidèle , et comme partage en
quelque sorte du produit des moulins , ou , si l’on v e u t ,
comme réserve . ou bien augmentation du prix de la
ferme.
Ainsi la cause des intimés est extrêmement claire, et
n’offre l’aspect, ni de l’injustice, ni de la confusion. On ne
peut pas les taxer d’ usurpateurs ni d’ambitieux , puisqu’ils
ne réclament qu’une chose qui leur appartient évidem
ment par la situation des lie u x , par les titres produits, et
par la manière dont les appelans en ont joui. Les défen
deurs seuls sont donc inexcusables de vouloir s’arroger un
droit qu’ ils n’ont jamais, eu , un bien qui ne leur a jamais
appartenu ; et. dès-lors la sentence qui les a condamnés à
s’en désister est trop sage pour ne pas obtenir la sanction
de la cour.
M . CO I N C H O N - L A F ON T , rapporteur.
Me. D E V È Z E ,
A R IO M , de l ’imprimerie de Landrio t , seul im primeur de la ,
Cour d ’appel. — Messidor a n , 13.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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A name given to the resource
[Factum. Geneix, Michel. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafont
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à mémoire pour les habitants et corps commun du lieu de Chanzelles et Ousclaux, commune de la Rodde, poursuites et diligences de Michel Geneix et Jacques Juliard, leurs syndics, intimés et demandeurs ; contre Jeanne Mabru, fille et héritière d'Antoine, et Jacques Arfeuil, son mari, appelans et défendeurs.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1522
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1521
BCU_Factums_G1523
BCU_Factums_G1524
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
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Rights
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Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics
-
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a2194b78cc0aa4e1efdc1445178aa758
PDF Text
Text
J2>S
M E M O I R E
POUR
COUR
J E A N N E M A B R U , fille et héritière, par béné D ’A PPEL
fice d’inventaire, d ’ A n t o i n e , et J a c q u e s
A R F E U I L , son mari, appelans de sen tence
rendue en la c i - d e v a n t justice de la R o d d e ,
le 20 décembre 1 7 8 1 ;
C O N T R E
Les habitans et corps commun d 'Ousclaux et
Chanzelles, commune de la Rodde ,poursuites
et diligences de M i c h e l G E N E I X et de
J a c q u e s J U L I A R D , se disant leurs
syndics , intimés et demandeurs en reprise
d ’instance.
L
ES appelans jouissent depuis un temps im m ém o rial,
et a la suite de leurs ancêtres, d ’ un m oulin appelé du
G ay , situé dans la commune de la Rodde,
A
SÉANT
A RIOM.
�i<
.
»
( a )
Les habitans de Chanzelles, d’Ousclaux et de la R o d d e,
prétendent que ce moulin leur appartient et fait partie
de leurs communaux ; ils en demandent le désistement;
e t, ce qui est assez extraordinairey trois villages veulent
avoir droit aux mêmes com m un aux, dans un pays o ù
les biens de cette nature se divisent par mas et tén em e n t, sans qu’on puisse déroger à cette loi de policegénérale.
U n e prétention aussi choquante n’auroit eu rien d’e x
traordinaire en 17 9 3 , où les habitans ne rôvoient qu’usur
pation , et vouloient que toute la France ne fût qu’un
communal.
Mais aujourd’hui que chacun doit régler ses sensations
et ses idées., que tout rentre dans l’ordre n atu rel, que
les propriétés surtout sont essentiellement respectées et
protégées, il est au moins certain que deux villages ont
to rt; et il s’agit également de démontrer que le moulin
du Gay est une propriété particulière, que les appelans.
doivent être maintenus dans un héritage qui a été suc
cessivement transmis à, titre de succession à cinq ou. six.
générations..
F A I T S .
L e 3 novembre 1779? difierens particuliers, habitons
du village de Chanzelles, de l’ Ousclaux et de la R od d e,
firent assigner Antoine M abru au bailliage de la R od d e,
en désistement du moulin appelé du G ay. Ils exposèrent
que ce moulin appartenoit à la communauté des villages de
Chanzelles et d’Ousclaux; et, quoiqu’ils ne rapportassent
xjj n’iodiquiisseut aujçuo titre de p r o p rié té , ils pcétcn^
�(3 )
.•
dirent qu’Antoine M abru avoit pris ce mouliu à titre
de ferme verbale, depuis environ vingt ans; qu’il avoit
été chargé de l’entretenir et de faire moudre gratuite
ment leurs grains ; ils demandèrent que ce prétendu bail
verbal fût déclaré nul et résolu , et qu’il leur fût permis
de jouir du moulin 011 de l’affermer à d’au tres, ainsi
qu’iis aviseroient.
Cette dem ande, form ée par des habitans ut singuà' ,
ne paroissoit pas présenter des difficultés sérieuses. Ces
particuliers, qui étoient de trois villages différens, étoicnt
absolument sans qualité; aussi on t-ils pris dans la suite
la précaution de faire intervenir sur l’appel le corps com
mun des habitans des villages de Chancelles et l’O usclaux,
qui nommèrent pour leurs syndics A n n e t A rfe ü il et
Jacques Geneix: mais cette intervention tardive ne peut
avoir réparé le vice de la dem ande, ainsi qu’on l’éta
blira bientôt.
A près les défenses d’Antoine M ab rit, l'instance fut
appointée en droit; la discussion s’ établit d’une manière
plus sérieuse; les demandeurs produisirent une quittance
du 21 novembre 1769, fournie par A n toin e M eschin,
habitant du villnge de P é rig n a t, en faveur d’A ntoine
M abru , et causée pour le fermage du moulin dont le
b a il , est-il d it, avoit été consenti devant M o u lin , notaire
à la T o u r.
A n to in e M abru nia l’existence de cc prétendu bail
consenti devant M oulin ; il soutint que la quittance de
Meschin s’appliquoit à des objets tout différons et à des
affaires qu’ ils avoienteues entr'eux; il exposa que le moulin
lui avoit appartenu de toute ancienneté; qu’ûgé de plus
A 2
�(
4)
de quatre-vingts ans, il y étoit cependant ni'*; que e’ étoit
l’habitation de ses pères. Il ajouta que ce moulin avoit
essuyé un incendie en 1709, pendant sa minorité ; que ses
titres de propriété furent consumés par les flammes ;
qu’ayant été privé de toute sa fortune par. cet incendie,,
il avoit été obligé de mendier dans sa jeunesse; mais,
qu’enfin il étoit parvenu à rétablir les bâtimens, et en
avoit toujours demeuré en possession.
Il défia les demandeurs d’établir qu’il y eût aucun
bail verbal, ni par écrit, d u m o u lin dont il s’agit; et la
demande en désistement lui paroissoit d’autant pl us étrange,,
qu’elle étoit formée' par des habitans de trois villages,
différens , quoique ce moulin fût dans les appartenances
du village de Chanzelles; enfin, plusieurs des demandeurs
n'agissoient que comme maris, et ne pou voient être écou.-'
tés pour une action réelle qui auroit dû être form ée par
leurs femmes..
Les habitans fùrent obligés de convenir que le bail
prétendu consenti devant M oulin n’existoit pas; mais,
suivant e u x , Meschin faisoit les affaires d elà commune,,
et avoit affermé ce moulin au nom de la communauté
entière : l’appelant avoit payé le prix de la ferme par
deux quittances successives; enfin il n étoit qu’un étran
g e r , et non pas né, comme-il le disoit, dans le moulin ;
eux seuls l’avoient rétabli après l’incendie, et en avoient
disposé.. Mécontens d ’A ntoine iVJabru
ils avoient mis
son fils a sa place; ili> pretendoient même avoir afferméce moulin h un nommé jVlarquelles.
A ntoine M abru répondit ù toutes ces allégations d’ une
wqoière bien précise j il rapporta le contrat de m ariage
�(5)
-d e M a b ru , son fils, du 10 février 1761 , par lequel il
Puvoit institué son héritier universel, et lui avoit délaissé
en avancement d’hoirie la jouissance du moulin. C ’étoit
donc de lui seul q u e1son fils tenoit cette jouissance, et le
père-ne s’en étoit remis en possession q u ’après la m o r t du
fils. Il désavoua avoir jamais consenti aucun bail pour le
; m ou lin , ni qu’il eut été affermé à- d’autres, et n’oublia
pas de relever la contradiction des hahitaus'qui s u p p o soicnt, par leur exp loit, un bail v e r b a l, tandis qu’ils p ré-tendoient qu’A ntoine M abru avoit accepté deux quit
tances d’un bail reçu
devant notaire.
>
Xiesdemandeurs a voient également insinué qu’ils avoient
-usé g ra tu ite m e n t du droit de mouture. A n toin e M ab ru
nia le fait. Jam ais launouture 11’avoit été gratuite; et si
-par fois il lui étoit arrivé de réduire ses droits, il n’a voit
fait à cet égard que co q u e -fo n t tous les meuniers pour
conserver des pratiques.
Antoine M abru rapporta une reconnoissance de 1494,
pour établir que les habitans de l’Ousclaux et de la
Rodde ne pou voient avoir aucun intérêt dans la contes
tation, puisque leurs villages n’étoientpas même contigus
h celui de Chanzelles, d’après les confins de cette reconnoissanee.
Enfin , pour prouver que-ses auteurs avoient toujours
résidé au moulin dont il s’agit, il produisit les actes baptistaires et mortuaires de sa fnrrtille , et par exprès l’actc
mortuaire de Pierre M a b ru , son père, du 14 avril 1708;
la cté baptistairo d’ Antoine M abru , son fils , du 23 dé
cembre 1727 • l’acte mortuaire de ce même fils, du 25
avril 1759; l’acte de célébration de son second mariage;
�( 6 )
du 31 janvier 1763 : tous ces actes faisoient foi du do
micile d’Antoine M a b ru et de ses ancêtres, au moulin
de Gay.
M algré ces actes et ces m o yen s, il fut rendu le 20 avril
1 7 8 1 , au bailliage de la R o d d e , une sentence q u i , ayant
. égard à ce qui résulte des deux quittances des 30 novem
bre 1766 et 21 novembre 17 6 9 , déclara le bail à ferme
du moulin de G ay continué verbalem ent, et par tacite
réconduction, fini et résolu; ordonna que dans trois jours
A n to in e M abru seroit obligé de quitter les lieu x; auto
rise les particuliers habitans des trois villages, à jouir du
moulin comme ils aviseront ; en cas de relus de la part
d’Antoin e M a b r u , ces particuliers sont autorisés à l’expul
ser , et à mettre ses meubles sur le carreau ; il est con
damné à remettre le moulin en état de réparations locatives, garni de tous meubles et ustensiles nécessaires à
son exploitation ; à payer la valeur des ustensiles qui se
trouveront m anquer, de même que les dégradations qu’il
peut avoir commises, à dire d’experts, avec intérêts depuis
la demande.
An toine M abru est condamné à payer les arrérages
de la ferme prétendue du moulin , à raison de 10 livres
par an , depuis et compris 1769 , jusqu’a sa sortie, et les
intérêts depuis la demande , et en tous les dépens.
11 est cependant ajouté dans cette sentence une option
singulière. Il y est dit : « Si mieux toutefois A ntoine
a M abru n’aime faire p r e u v e , tant par titres que par
« tém oins, dans les délais de l’ordonnance , q u’après l’ in« cendie du moulin dont il s’a g it, arrivé en 1709, il a
« fait rétablir lu i-m ê m e , à ses fra is, le moulin en ques-
�(7 )
«
«
*
«
«
«
«
tion ; que depuis ce rétablissement il en a joui paisiblement, comme propriétaire, jusqu’à la demande contre
lui fo rm é e , et notamment q u e , pendant cette jouissance , il a constamment et continuellement perçu sur
tous les co-détenteurs des ténemens de Chanzelles et
l’Ousclaux le droit de- m outure en usage dans le pays,
sauf la preuve contraire. »
An toin e M abru se pourvut par appel contre celte
sentence, et l’appel fut porté en la sénéchaussée d e C le r m o n t, qui étoit alors juge naturel des parties. M eschi»
s’empressa de donner à An toine M abru une déclaration
devant notaire, le 20 janvier 178 2, par laquelle il attesta
que les deux quittances ne portoient pas sur le moulin
en question , qu’elles s’appliquoient seulement à deux terres
appelées , l’une le P u y -d u -M e u n ie r, et l’autre la T a c h e ,
situées aux appartenances de P a u g n a c, de la contenue de
trois septerées mais qu’il n’y avoit jamais eu de bail de
ferme du moulin de Gay passé entre lui et Antoine M abru.
Les particuliers qui avoient assigné An toin e M a b ru
s’aperçurent alors qu’on pouvoit leur opposer le défaut
de qualité ; ils sollicitèrent et obtinrent l’intervention des
lvabitans de Chanzelles et do l’O usclaux, qui présentèrent
leur requête le 24 novembre 178 4 , et prirent le fait et
cause des intim és, en vertu d’un délibéraloire du. premier
septembre 1783.
M algré cette in tervention, le procès fut abandonné ;
il ne reçut aucune décision en la sénéchaussée de Clermont;
il ne fut pas même repris devant le tribunal de district,
qui remplaça momentanément la sénéchaussée : ce n’est
qu’en l’an 11 que ces habitans ont fait de nouvelles ten-
�. C 8 ) .......................
tatives. L ’ un des premiers syndics étoit décédé, et l’autre
refusoit son ministère, à raison de son grand âge et de
ses infirmités : ces habitans se réunirent tumultuairement
et sans autorisation, pour nommer de nouveaux syndics.
I,e conseil de préfecture les avoit d’abord renvoyés devant
le conseil municipal qui seul avoit le droit de délibérer
sur cette matière, d’après la loi du 28 pluviôse an 8.
Mais b ientôt, sous le prétexte frivole que le conseil
municipal s’étoit assemblé vainement, sans donner d’avis,
ces habitans se réunirent de nouveau en l’étude de G u il
laum e, notaire public à la résidence de T a u v c s , et se
permirent de nommer deux syndics, ainsi qu’il résulte
d’un délibératoire du 2 nivôse an 11.
Ils ont eu le crédit de faire homologuer cet acte in
form e, par arrêté du conseil de préfecture, du 24 bru
maire an 1 2 , et ont en conséquence assigné en reprise
en la cour Jeanne M a b r u , fille d’A n to in e , et Jacques
A r fe n il, son m ari, pour voir statuer sur l'appel pendant
en la sénéchaussée de Clermont.
Il s’éleva un incident sur cette reprise : les appelans
sont porteurs d’une délibération du conseil municipal,
en date du 21 germinal an 11 , qui refuse 1 autorisation
par la raison que les habitons d Ousclaux et Ghanzellcs
n’avoient aucun intérêt A reprendre le procès qui exisloit
entr’eux et le meunier de Gay. Les appelans soutinrent
donc que les habitans n’étoient pas en règle : ce n’étoit
pas le cas, dans l’espèce ou se trouvoient les parties, de
nommer des syndics; le maire de la commune peut seul,
d’après la l o i , représenter le corps com m un, lorsqu’ il
s’agit des intérêts d’une section de commune contre un
particulier :
�(9 )
particulier : la nommination d’un syndic ne peut avoir,
lieu que lorsqu’une section de commune plaide contre,
une autre section.
,,
D ’un autre c ô t é ,‘il étoit évident que l’arrêté du con
seil de préfecture avoit ¿té surpris à sa religion , puis
qu’on lui avoit caché l’arrêté du conseil m u n icip a l, du
21 germinal an n , qui porte expressément que les ha
bitons sont sans intérêt. L e conseil de préfecture luimême n’avoit homologué le délibératoire informe des,
habitans, qu’à raison de ce qu’ils alléguoient que le con
seil municipal n’avoit pas voulu s’expliquer : dès-lois cet
arrêté étoit subreptice, et ne pouvoit subsister.
L a cause portée en la cour sur cet incid en t, il inter
vint arrêt le 29 germinal an 1 2 , qui sursit d’un mois
sur la demande en reprise, pendant lequel temps les
appelans se retireroient par-devant le conseil de préfec7
ture du département du P u y - d e - D ô m e , à M e t de se
p o u r v o ir , ainsi que de d r o it, contre l’homologation du
24 brumaire précédent.
Les parties se sont retirées de nouveau devant le con
seil de préfecture qui a persisté dans son a rrê té, sans
qu’on puisse approuver les m o tifs, puisqu’il avoit déj;i
reconnu qu’au seul conseil municipal il appartenoit do
pro n o n cer, et la reprise a ele ordonnée.
Mais au moins , indépendamment de l’irrégularité de
la procédure, le délibératoire du conseil municipal, du
21 germinal an 11 , est un m otif de considération bien
puissant pour les appelans , et il en résulte la plus grande
délaveur contre les intimés.
Q u ’est-ce que la sentence dpnt est appel ? elle pro-
B
�( IO )
nonce le désistement d’un moulin au profit des habitans
de trois villages. Cette disposition viole ouvertement les
principes, et la loi municipale : elle est nécessairement
injuste au moins pour deux villages.
E n effet, ces particuliers réclam en t, ut singuli , la
propriété du moulin , comme faisant partie de leurs ap
partenances, et même de leurs communaux.
O r , les communaux se limitent par mas et village ; et
si le moulin dont il s’agit dépendoit d’un com m un al, il
est impossible qu’il puisse appartenir à la fois à trois
villages : il y en auroit nécessairement deux qui n’auroient rien à y prétendre.
11 est vrai q u e , sur l’a p p e l, le corps commun des
habitans de la Rodde n’est pas intervenu ; on n’y voit
que les habitans de Chamelles et de l’Ousclaux : dès-lors
il faut écarter sans retour le village de la Rodde. Les
habitans de l’Ousclaux ne seroient pas mieux fondés ,
puisqu’on s’accorde à penser que le moulin dont il s’agit
est situé dans les appartenances de Chanzelles.
Il faut donc s’attacher principalement à combattre la
prétention des habitans de Chanzelles , et il est facile
d’établir qu’ils doivent être déclarés non-recevables.
Les appelans sont en possession de ce moulin de leinps
im m émorial; ils en ont joui par eux ou leurs auteurs de
tout temps et ancienneté , anirno du/nini. Cette preuve
littérale d’une possession de plus de quatre-vingts ans se
tire des registres de la païoissede la Rodde, qui prou
vent que les auteurs des appelans etoient habitans dans
le m oulin, lorsqu’ ils y sont décédés ; que d’autres y sont
nés et s’y sont mariés : ces actes remontent à. 1708.. L a
�première demande .n’a été form ée qu’en 1 7 7 9 : il y avoit
donc soixante-douze ans lors de l’assigmtion , et il en
faut bien moins pour acquérir la propriété.
Les intimés proposent plusieurs objections ; ils préten
dent d’abord que la jouissance des auteurs des appelans
n’est que précaire; qu’ils jouissoient ù titre de ferm e, et
q u ’un fermier 11e prescrit point.
P o u r établir cette jouissance p ré ca ire , ils justifient de
d eu x quittances, l’une du 30 novembre 176 6 , et l’autre
du 21 novembre 1769. Ces quittances émanent de Fran
çois M eschin, du village de P érig n a t, étranger par con
séquent au village de Chanzelles.
O11 va d’abord examiner si ces deux objections prin
cipales peuvent être de quelque poids dans la contes
tation.
Il est certain en p rin cip e , et on en conviendra avec
les intimés , que celui qui 11e jouit qu’à titre de fermier
ne sa uro it jamais acquérir la prescription. Mais la pos
session précaire 11e se présume poin t, et celui qui jouit
de fait est présumé posséder anim o d o m in i, à moins
que le contraire 11e soit prouvé.
U ne longue possession , dit Potliier dans son Traité
de la possession, chap. i ur. , art. 2 , est censée procéder
d ’un juste titre , sinon p r o d u it, au moins présumé par
le long-temps qu’elle a duré : elle est en conséquence ré
putée possession civile , possessio anim o dom inantis.
L a possession même sans titre acquiert toujours une
nouvelle fo rce , au lieu que le titre dépouillé de sa pos*
session perd insensiblement tous ses avantages.
Vainement diroit-on alors que les appelans ne rapB 2
�il*
( 12 )
portent 'point de fitre de propriété. Cette proposition
s’écarte dans les principes généraux et dans les circons
tances particulières :
E n point de d r o it , parce qu’une longue possession
suffit pour faire présumer une jouissance à titre de pro
priétaire ; dans les circonstances particulières , parce qûe
les papiers et les titres furent la proie des flammes, lors
de l’incendie de 1709.
M a is , après l’incendie, c’est le père des appelans qui
a ré ta b li les bâtimens et le moulin. Les auroit-il réta
blis , s’ il n’avoit eu qu’un titre précaire ? Il est vrai que
les habitans ont prétendu que la reconstruction avoit été
faite par eux ; mais ce n’est ici qu’une allégation dénuée
de toute vraisemblance et de preuves. Si ces trois vil
lages a voient contribué à la reconstruction du m o u lin ,
ils n’auroient pas laissé jouir aussi long-temps les appelans et leurs auteurs*, et cette longue jouissance, plus que
trentenaire y rejetôit toute espèce de preuve sur les in
timés : c’étoit h eux à tout prouver et à tout établir.
Ainsi ,• tant que les habitans ne rapportent point de
bail de ferm e, tant qu’ils n’établissent pas que la jouis
sance des appelans, ou de leurs auteurs , n’a ete que pré
caire, qu’ ils n’ont possédé que com m e fermiers, ils sont
réputés avoir joui anim a dom ini ; et il n’est plus ques
tion (pie d’examiner si les quittances dont argumentent
les intimés peuvent avoir quelque influence sur la dé
cision de la cause.
La première quittance , qui est de 1766 , est conçue
i*n ces termes: « François Meschin } m archand, habitant
* du'biUage de P é r ig n a t, paroisse de la R o d d e , a r e -
�M h
( 13 )
« connu avoir reçu avant ces présentes d’Antoine M a b r u ,
« m eun ier, habitant au moulin de G a y , même paroisse,
« la somme de 40 ***, et ce , pour les quatre armées der« nières qu’il lui doit, suivant le bail de ferme qu’ils ont
« passé entr’e u x , rapporté être reçu par M o u liu , notaire
« royal à la T o u r. »
O n ne voit rien dans cette quittance qui puisse avo ir
le moindre rapport avec le moulin de Gay.
. L a seconde quittance, du 21 novembre 176 9 , est en
termes plus précis. Ce François M e s cliin , de P érig n a t,
reconnoît avoir reçu d’Antoine M a b r u , m eunier, habi
tant au moulin de G a y , la somme de 2 0 ^ , et ce, pour
le montant de la ferme dudit moulin , pour les années
1767 et 176 8 ; le tout porté par bail à ferm e, rapporté
être reçu par feu M o u li n ,. notaire royal.
• L ’équivoque qui se trouve dans cette dernière quittin c e , est le seul argument que les parties adverses aient
en leur faveur. Mais comment François M escliin, habi
tant du village de P é r ig n a t, peut-il avoir quelque chose
de commun avec les habitons de Chanzelles et de l’Ousclaux ? Si cette quittance pouvoit fournir quelques in
ductions contre les appelans, ce scroit tout au plus en
faveur de François Mescliin , et non en faveur des habi
tons do deux villages qui lui sont étrangers. Il ne pou
voit être le syndic d’aucun de ces villages , puisqu’il
n’en étoit pas habitant ; il n’a point donné quittance
comme sy n d ic, il l’a donnée en son nom. A u profit
duquel des trois villages auroit-il donné cette quittance?
1 ourquoi a-t-il parlé d’ un bail de ferme reçu M oulin }
notaire à la T o u r , lorqite les intimés ont prétendu q u e
�c 14 )
le bail de ce moulin étoit verbal ? Il faudroit au moins
que les intimés rapportassent ce bail pour expliquer et
apprécier ces quittances. Ce n’est que par l’exhibition de
ce titre qu’on pourroit juger si le bail avoit effectivement
pour objet le moulin de G a y , si Meschin d’ailleurs l’avoit
affermé comme administrateur d’un des trois villa ges,
ou en son n o m , ou en toute autre qualité ; et tant que
ce bail ne paroit p a s, il n’est pas permis de supposer ni
que ce bail ait eu pour objet le moulin , et encore moins
que la propriété de ce moulin appartînt aux habitans de
Chanzelles, la Rodde ou l’Ousclaux.
Dans tous les cas , cette équivoque qui se trouve dans
la quittance de 1769, seroit détruite par une déclaration
que François Meschin a donnée devant n o ta ire, le 20
janvier 1782.
Par celte déclaration, François Meschin , toujours ha
bitant de P é rig n a t, a dit que c’étoit par erreur qu’il étoit
fait mention dans ces quittances du moulin de G a y ; que
ces deux quittances ne devoient avoir pour o b jet que la
ferme verbale de deux terres, l’une appelée la P iè c e
du M e u n ie r , et l’autre ht Tacha , situées dans les appar
tenances du village de P é r ig n a t, de la contenue toutes
deux d’environ trois septerées; qu’ il n’y a jamais eu de
bail de ferme du moulin de Gay entre lui Meschin et
ledit A ntoine M abni.
Celte déclaration est appuyée sur la vérité des faits qui
V sont énoncés. A ntoine M ab ru , pere et beau-père des
appelions , a joui long-temps, a titre de fermier, des deux
pièces de terre appartenantes a Meschin , énoncées clans
lu déclaration; il en jouissoit encore au inerne titre en
�S m
( iS )
1787 : ainsi ces quittances ne peuvent être d’aucune con
sidération. 11 répugne à la raison que M escliin, étranger
aux ti’ois villages , eût consenti un bail de ferme d’un
moulin qu’ils disent leur appartenir. Ils ne rapportent
point ce prétendu bail ; Mescliin n’a pu être ni le syndic,
ni l’administrateur de trois villages qu’il n’a jamais ha
bités. Sa déclaration de 1782 détruit l’énonciation des
quittances. L a longue possession des appelans et de leurs
auteurs ne peut s’accorder avec le titre précaire qu’on
suppose : dès-lors il est évidemment démontré que la
prétention des liabitans est déplorable.
Mais A ntoine M abru étoit allé plus loin lors de ses
contredits signifiés en 1787 ; il supposoit que quand il auroit reconnu en 1766 et en 1769 avoir joui pendant quatre
ou cinq ans en qualité de fermier ou de locataire du
m o u lin , il n’auroit pour cela perdu ni la p ro p rié té , ni
la possession qui lui étoient acquises. En 1 7 6 6 , lors de
la première quittance, A n toin e M abru avoit déjà soixante
ans de possession : son père en jouissoit, comme on l’a
v u , en 1708. lia possession de trente ans est un titre dans
la Coutume d’ A u v e rg n e ; elle en tient lie u ; elle y sup
plée ; elle détruit tout titre contraire , et s’élève à sa
place; elle a , dit l’article 4 du titre 17 de la C o u tu m e,
vigueur de temps immémorial en même temps que la
force de titre.
A n toin e M abru avoit donc un titre certain en 17 6 6 ,
lors de la première quittance, et 011 a déjà remarqué que
cette quittance ne s’appliquoit nullement au moulin :
1 énonciation ne s’en trouve que dans la quittance de
1769.
�( i6 ) ^
O r, c’est un principe certain, disoit A ntoine M ab ru , que
celui h qui unecliose appartient ne déroge en aucune ma
nière à sa pro p riété, pas même usa possession, en la prenant
à cens ou rente emphytéotique , encore moins en reconnoissant qu'il la possède à un de ces titres, s’il est établi
d’ailleurs qu’il a un titre de propriété ou une jouissance
de trente ans qui n’a point commencé par un titre p ié caire.
A n to in e M abru citoit la disposition expresse des lois,
l ’opinion de D um oulin , de M a z u e r , et de tous les juris
consultes. L a loi 20 , au Code L o c a ti et con d u cti, s’ex
prim e ainsi : Q u i rem propriam co iu lu xit existim ans
aliénant, dom inium non transfort, sed inejjicacem con
duct io?i is contractum J a c it.
L a loi 45 , au ff. D e reg. j u r i s , porte : N eque p i gnu s ,
veque d ep ositio n , neque precarium , neque emptio ,
neque locntio , rei suce consistera potest.
L e §. 1 0 , inst. D e kg. , en donne la raison en ces
termes : Q uod m eum e s t , am pliàs meuni f ie r i non
potest.
A ntoine M abru invoquoit également l’opinion de D u
moulin sur la Coutume de Paris , ait* 10 •> glose 5 ,
vevbo le fief, nombres 22 , 26 et suivans, qui dit: Tlœc
est concors om nium glosarum et doclorum sen ten tu i,
qitod error dom in i con ducen tts, rel precario , o u t in
ftiudum , censutn , r e l em phiteusim , recipientis rem
sunm quant putat aliénant , J a c it actum ipso jt/te nul
lum et nullum dom inium , nullam possessionem perdit.
Antoine M abru en tiroit la conséquence, que ces pré
tendues quittances étant contraires au titre qui naissoit
de
�J Îl .
(^ 7 y
de sa longue possession , n’auroient porté aucun, chan
gement à son droit. 11 éto it, après 1766 , le même qu’il
étoit la veille; et comme en i y 65 les habitons n’auroient
pu soutenir leur entreprise , ils n ’avoient pas plus de
moyens depuis les deux quittances, dans le sens même
qu’ ils vouloient leur donner.
Mais pourquoi raisonner par hypothèse , lorsqu’il est
certain , dans le fait comme dans le d r o i t , que les appelans sont propriétaires du moulin de G ay r et n’en ont
jamais joui à d’autre titre que celui de propriétaires.
O n peut d’autant moins tirer d’inductions contr’eux
des quittances de Meschin , que cet individu est habitant
de P érig n a t, qu’il l’habitoit en 17 6 6 , commc au moment
où il a donné sa déclaration. Il ne pou voit donc être ni
administrateur, ni syndic du village de Chanzelles , dès
qu’il n’en étoit pas habitant.
Les intimés ont proposé d’autres moyens subsidiaires,
dont on ne s’occupera que pour 11e rien laisser à négliger.
Ils soutiennent d’abord que le moulin dont il s’agit est
situé dans les appartenances de Chanzelles; qu’il joint un
ruisseau d’un côté , et un communal aux trois autres
aspects; que dès-lors il est à présumer qu’ il fait partie
du communal; d’où ils en tirent la conséquence que la
possession des appelans scroit inutile, et ne pourroit leur
acquérir aucun droit. O n lie prescrit pas ce qu’on ne
peut pas posséder.
O u ne doit p ns trouvcr étonnant qu'un moulin joigne
un ruisseau; s’il joint aussi un c o m m u n a l , il n'y auroit
que le village i\ qui appartient ce c o m m u n a l qui pour
voit réclamer. A l’égard des habitans de Chanzelles , à
c
*e< J
�-
(•'iS V
qui ce communal appartient, on pourrait demander s?
la bienséance est un titre de propriété : il faut bien
d’ailleurs que les propriétés particulières soient confinées
par un point plus ou moins reculé. A i n s i , quand bien
même le moulin joindrait le communal do Clianzelles
aux trois aspects, il en résulterait qu’il est confiné par
le com m unal, mais non qu’il en fait p a r tie , tant que ce
point n’est établi par aucune preuve.
D ’un autre cô té, les appelans pourraient aujourd’ hui
i n v o q u e r avec succès l’article 9 de la section 4 de la loi
du 10 juin 1 7 9 3 , qui veut q u ’on respecte les propriétés
paisibles et particulières, et que tout particulier qui pos
sède à autre titre qu’un seigneur de fief, puisse prescrire
la propriété par quarante ans de possession , antérieure
au 28 août 1 7 9 2 , même lorsqu’il s’agit de communaux.
Les intimés ont bien senti que la déclaration donnée
par Mescliin pouvoit nuire à leur prétention , puisque
la principale base de leur défense reposoit sur les deux
quittances qu’il a fournies; ils attaquent cette déclaration
de plusieurs manières, et i°. ils argumentent d ’1111 exploit
du 12 avril 1 7 5 5 , qui a été produit en cause d’appel sous
la cote 20 , par lequel il paraît que François Mescliin ,
et plusieurs autres particuliers , ont fait assigner A n to in e
Mnbru pour être condamné à se désister du m oulin , et
à payer v in g t-h u it setiers de b lé -se ig le avec intérêts
depuis la demande.
Cet exploit est assez inintelligible : ces particuliers y
exposent que M abru 11e peut ignorer que ce moulin 11’app'irtienne de droit à tous les demandeurs; que par co n
vention faite entr’eux verbalement, M abru a été chargé
�ss$
( 19 )
de leur payer chaque année un setier de blé-seigle, et
de moudre les grains de chacun des tenanciers ; ce qu’il
n ’a voulu faire pour la plupart d’enlr’e u x , ni même leur
payer le setier seigle tous les ans. En conséquence , ils
demandent le désistement du m oulin, et vingt-huit se tiers
seigle. O11 ne peut co n cilier, disent-ils , cet exploit avec
la déclaration faite par Meschin , puisque lui-m êm e est
en qualité dans la demande.
Que résultera - t - il de cet exp loit? il ne peut avoir
d’autre effet que d’augmenter la confusion ; et la demande
de 1755 est contradictoire avec celle de 177g.
E n 1755 , on demandoit un setier de seigle par année,
et un droit gratuit de mouture ; en 1779 , on a prétendu
qu’il existoit un bail verbal du m o u lin , moyennant 10
par année.
Mais déjà, en 1755 , ces particuliers se plaignent de ce
q u ’ Antoine M abru refusoit de payer le setier de b l é , et
de moudre les grains gratuitement ; et dès qu’ils deman
dent vingt-huit seliers de grains, il s’ensuivroit q u e , de
leur a v e u , A ntoine M abru n’avoit pas payé de vingthuit ans. Ce n’étoit plus alors un bail de ferme consenti
par Meschin ; il existoit, suivant e u x , des conventions
verbales entre le meunier et les demandeurs : dès-lors la
seule conséquence qu’on puisse tirer de cet exploit de
1 7 5 5 , c’est que la demande de 1779 avoit été précédée
d’ une; autre toutedilférenle; qu’en 1779 , au lieu de former
une nouvelle demande , il eût fallu reprendre celle qui
existoit déjà; et qu’enfin il faudroit juger l’une ou l ’autre
par les mêmes principes; e t , comme en 17^5, de même
q u ’en I 7 7 9 j
prescription étoit déjà acquise en fayeur
C a
�(
20
)
de M a b r u , qu’on ne peut même élever de doutes que
M abi’U alors ne prétendît jouir à titre de propriétaire,
puisqu’il refusoit la redevance du setîer et la mouture
gratuite : comme enfin les demandeurs n’avoient pas plus
de titres en i'jô o qu’en 1 7 7 9 , ils seroient également nonrecevables.
En effet, tout ce qu’ils peuvent espérer de plus heu
reux , c’est qu’on se place en 1^55 pour juger la contes
tation. O r , la possession des appelans remonte au moins
ù 170 8, d’après les titres qu’il a produits; et de 1708 à
1 7 5 5 il se seroit écoulé quai’ante-trois ans utiles pour la
prescription.
E11 second lie u , les intimés disent que Meschin a donné
une déclaration frauduleuse et intéressée, puisqu’il s’est
réservé par cette déclaration un droit de mouture gra
tuit. Mais s’il s’est réservé un droit de mouture gratuit ,
est-ce donc qu’il ne pourvoit pas avoir cette servitude sur
le moulin , sans que ce moulin appartînt aux intimés?
Un droit de mouture d’ailleurs exeluroit tout droit de
p ro p riété, puisque ce n’est qu’une servitude, et qu’on
ne peut imposer de servitude sur sa chose , d’après la
m a x im e , n em in i res sua servit. Le droit de Meschin
d’ailleurs ne peut pas déterminer un droit gén éra l; et
enfin Meschin n’étant nas même habitant du village de
.
**
Chanzclles, son exemption n’auroil rien de commun avec
celle des habitans.
Les habitans soutiendroient vainement que les appelans
ne sont pas propriétaires du m oulin; qu’ils n’en ont joui
qu’à litre précaire , et qu’on ne peut pas supposer d’erreur
iliuib deux ciuiUances consécutives.
�/*C
C 21 )
O n a déjà v u que la première quittance de 1766 ne
contenoit aucune énonciation qui eût trait au moulin ;
c’est une quittance pure et simple d’une somme de 40
qui n’explique pas mémo à quel objet s’applique la dette.
Il n’y a que celle de 1769 qui parle du m oulin , et l’équi
voque s’explique aisément par la déclaration. O11 voit
q u ’il s’agissoit de deux héritages contigus, dont l’un s’appeloit la Pièce du M eunier , et qui peut être regardé
comme une chose utile à l’exploitation du moulin , comme
un objet pris à titre de ferme en considération et à cause
du moulin , que M abru n’auroit pas pris s’il n’eût été
propriétaire du m oulin;et dès-lors on ne sera plus étonné
de cette énonciation vague et insignifiante à laquelle les
parties n’ont mis aucune im portance, et qui 11e pourra
jamais fonder un titre de propriété.
Un particulier paisible, qui depuis des siècles est en
possession d’un moulin dans lequel ses ancêtres ont pris
naissance, qui y a toujours résidé, y a marié ses enfans,
qui a disposé de ce moulin au profit de l’un d’eux par
son contrat de m ariage, pourroit-il être inquiété dans
sa possession ? Et n’y auroit-il donc jamais rien de certain
p.'inni les hommes ?
Quelle est donc la qualité et le titre de ceux qui veu
lent lui enlever le patrimoine de scs pères? Des parti
culiers, ut xitig n li, habitans de trois villages, viennent
réclamer ce moulin comme faisant partie d’ un communal.
Us sont absolument sans action pour une propriété com
m une, q u i , en principe, n’appartient à personne en par
ticulier. Plui'ibus ut u/tivers is , nullis ut singulis.
S i , en cause d’appel, ils ont fait intervenir les habitans,
�Ut
(
22
)
cette intervention tardive seroit aussi irrégulière qu’inutile : c’est le corps commun de deux villages différens ,
lorsque d’après la loi municipale un seul village pourroit
y avoir droit. Bientôt ces deux villages abandonnent leurs
prétentions; elle est ensuite reprise dans un moment d’ef
fervescence, malgré l’opposition du conseil m unicipal,
qui seul pouvoit autoriser la demande. On ne voit figurer
dans la cause que des syndics nommés dans une assemblée
tumultueuse et illicite. E h ! quel est donc leur in térêt?
Ces deux villages en seroient-ils plus riches ou plus heu
reux , quand ils auro ient dépouillé un père de famille
d’une propriété légitime qu’une si longue jouissance devoit assurer à sa postérité ? Ou ne craint pas de dire que
la raison s'offense d’ un pareil système; qu’ une réclamation
de ce genre doit être proscrite avec indignation par tous
ceux à qui il reste quelque principe de justice et d’équité;
que les propriétés sont aujourd’hui sous l’égide de la l o i ,
les tribunaux institués pour la faire respecter, comme le
seul moyen qui puisse attacher les citoyens à leur patrie,
et leur faire chérir le gouvernement qui les protège.
M . C O I N C H O N - L A F O N D , rapporteur.
M e. P A G È S ( de Riom ) , ancien avocat,
M e. B R U N , avoué.
A Riom de l'imprimerie de Landriot seul imprimeur de la cour d'appel
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mabru, Jeanne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafond
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
communaux
preuves de possession sans titre et avec titre
moulins
bail verbal
droit de mouture
quittances
syndics
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jeanne Mabru, fille et héritière, par bénéfice d'inventaire, d'Antoine, et Jacques Arfeuil, son mari, appelans de sentence rendue en la ci-devant justice de la Rodde, le 20 décembre 1781 ; Contre les habitans et corps commun d'Ousclaux et Chanzelles, commune de la Rodde, poursuites et diligences de Michel Geneix, et de Jacques Juliard, se disant, leurs syndics, intimé et demandeurs en reprise d'instance.
Table Godemel : Désistement - Commune : 2. dans une instance en désistement, formée par les habitants d’une commune ut singuli, qui ont obtenu gain de cause devant les premiers juges, le corps commun des habitants a-t-il pu intervenir régulièrement après l’appel, pour soutenir le bien-jugé, lorsque la reprise d’instance avait été ordonnée du consentements des appelants, par un arrêt contradictoire ? le possesseur, obligé de se désister, a-t-il droit à être indemnisé des réparations et constructions par lui faites ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
Circa 1708-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1521
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1522
BCU_Factums_G1523
BCU_Factums_G1524
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53261/BCU_Factums_G1521.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Larrode (63190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail verbal
communaux
droit de mouture
moulins
preuves de possession sans titre et avec titre
quittances
syndics